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V
oici comment se passe tradi-
tionnellement l’entrée dans
l’élite anglaise : vous avez 17 ans
et vous arborez un nouveau
costume. Vous prenez le train
en direction d’Oxford ou de Cambridge –
deux universités séculaires réunies com-
munément sous le petit nom d’« Ox-
bridge ». Vous finissez par trouver les cham-
bres où vous attendent les tutors. Au bon
vieux temps, on vous aurait servi un verre
de sherry, du vin de Xérès, boisson sans
doute inédite pour vous. C’est maintenant
le moment où vous devez parler. Les tu-
teurs, avachis sur divers sofas, vous interro-
gent d’une voix traînante, se tenant éveillés
en vous lançant sur un sujet qui les inté-
resse. Je connais un candidat à l’admission
à qui on a demandé s’il ne trouvait pas que
la piazzetta San Marco de Venise fait penser
à une succursale de la banque Barclays. Cet
entretien initial vise en fait à tester votre ca-
pacité à parler brillamment, même sans
maîtriser le sujet.
Quelques jours après cette conversation,
une enveloppe estampillée Oxford ou
Cambridge arrive sur le paillasson de votre
domicile familial. Si la lettre débute par la
formule « Nous sommes heureux de vous
informer que… », vous voilà intronisé mem-
bre à vie de l’élite britannique. Au cours de
l’histoire, seule une infime partie des 99 %
de Britanniques qui ne recevront jamais
cette lettre réussit à devenir haut JULES LE BARAZER
fonctionnaire, juge, banquier d’affaires ou