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CM- French Theory

24/09/20

Matthieu.Remy@univ-lorraine.fr
La « French Theory » existe afin de réunir un ensemble de penseurs qui ont été utilisés par le
département de lettres américain pour essayer de trancher avec le département de la
philosophie qui ne s’intéressait pas à la pensée européenne. Michel Foucault, Jacques
Derrida, Gilles Deleuze, Jean Baudrillard, Louis Althusser ou Jacques Lacan sont
importants dans la pensée européenne et cela faisait quelques décennies que certains penseurs
n’avaient pas traversés les océans.
Différents types de cultural studies existent. Tantôt anglaises, tantôt américaines. Quel Est le
discours universitaire qui peut nous faire tenir le coup dans ses études et ce domaine ? Quelle
image est véhiculée dans le milieu de la culture ?
 Saisir une démarche scientifique (Essayer de prendre à défaut ce qui existe déjà et
essayer d’aller re-tester ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas.)
Les penseurs de la French Theory, malgré cette « mise en case » des Etats-Unis sont des
penseurs qui ont tous un intérêt et réflexion qui force à se pencher sur leur époque, l’idéologie
de l’époque et de faire leur propre critique.
A travers un corpus de textes précis, nous tenterons de vérifier si cette association de penseurs
à la fois proches et distincts les uns des autres est réellement pertinente, tout en voyageant
dans la pensée française contemporaines, des années 60 jusqu’à la fin du XXème siècle.
« French Theory » est un très bon livre explique ce phénomène. Il a été écrit par François
Cusset et prend le problème depuis son origine, c’est-à-dire depuis le désir qu’ont eu certains
intellectuels américains vis-à-vis d’une pensée française anticonformiste, à la fois radicale et
exigeante, appliquée à dénoncer les méfaits des contrôles sociaux tout genre. Ce cours
regroupe un ensemble de penseurs étant marxistes et aussi regroupe de nombreux
psychanalystes. Les partisans du libéralisme économique pensent encore selon le marxisme,
en tant qu’adversaire. Ce sont deux réflexions assez récentes, le marxisme datant de 150 ans
et la psychanalyse 100 ans.
Nous nous proposerons donc de faire un panorama de cette pensée critique faite de
singularités. A travers l’exploration des concepts élaborés par Louis Althusser, Michel
Foucault, Monique Wittig, Gilles Deleuze, Helène Cixous, Jean Baudrillard, Simone de
Beauvoir, Jacques Lacan, Françoise Dolto, Jacques Derrida, Julia Kristeva, Pierre
Bourdieu, Geneviève Fraisse et Nathalie Heinich, nous aurons accès non seulement à une
certaine pensée française des années 1950-2018 mais aussi à sa perception par l’université
américaine.
L’après-guerre des intellectuels
Lors de l’après Seconde Guerre Mondiale, les concepts de société de consommation
apparaissent dans les années 50-60-70, et bouleverse notre rapport aux choses. L’œuvre La
révolution rêvée de Michel Surya invoque le problème de révolution depuis l’URSS et
invoque les problèmes de ce système. Le communisme a été bien installé en France avec le
Parti Communiste Français. Aux premières élections libres, le communisme est choisi après la
poigne de Staline lors de la 2nd Guerre Mondiale. L’armée rouge et Staline sont auréolés d’une
vague d’ondes positifs, les voyant comme libérateurs alors que les soviétiques vont imposer
une main mise politique sur les pays de l’Est. Comme les communistes en France ont joué un
rôle important pendant la Résistance, cela envoie une bonne image. Le parti communiste est
interdit dès 1940, plus précisément en août 1939, étant déclaré comme illégal. Une fois le
pacte rompu ; un parti communiste se réorganise. La résistance s’organise avec beaucoup
d’intellectuels tels que René Charles.
« Démocrature » : Aujourd’hui, Bolsonaro, Trump.. De plus en plus de pays montrent une
politique dure, et pose de nos jours la question du totalitarisme.
Henri Lefebvre = pensée de l’après-guerre, né en 1901, écrit Critique de la vie quotidienne.
Il a vu ses œuvres se faire censuré, défendant un marxisme qui n’était pas mis le plus en avant
par le parti communiste. La question de l’aliénation dans le communisme est une question
chez le jeune Marx a été de savoir ce qui, dans notre vie quotidienne prolonge l’aliénation que
le système capitaliste fait exister dans le travail.
Marx explique que dans le travail, l’ouvrier est aliéné triplement :
 on lui vole la marchandise qu’il fabrique
 son savoir-faire
 son temps libre.
Capital = On fait travailler des gens, et on récupère une toute petite part de l’objet et l’amasse
dans un capital qui va lui permettre de continuer à l’évaluer, investir dans un domaine sans
faire participer ceux qui ont donné cette petite part. Il y a fabrication d’une sorte de
patrimoine sur l’utilisation de travail d’autrui.

 Louis Althusser
Marxiste et passeur, il a très vite compris qu’il fallait recourir à la théorie pour revitaliser
l’attrait des jeunes générations pour le marxisme.
Né en 1918 à Birmandreis, Louis Althusser entre à l’Ecole Normale Supérieure en 1939, peu
de temps avant d’être mobilisé, pris dans la débâcle et fait prisonnier. De retour de cinq
années de captivité en Allemagne, il devient agrégé-répétiteur de philosophie à l’ENS, poste
qu’il occupera jusqu’en 1980.
Il adhère au Parti Communiste Français en 1948, tout en continuant à entretenir des liens
étroits avec le catholicisme, lui qui a été membre d’organisations de jeunesse catholiques. Il
publie un premier livre sur Montesquieu en 1959 puis entame une réflexion intense sur Marx
qui va l’amener à proposer une lecture singulière de celui-ci. Il est l’une des figures les plus
marquantes du communisme.
Le premier capitalisme est très violent et réduit presque à l’esclavage. C’est de l’exploitation
de l’homme par l’homme. Pour Marx, il explique que c’est l’histoire qui crée la pensée. Les
gens établissent une continuité dans la réflexion intellectuelle. Les penseurs de la French
Theory sont des antis idéalistes, ils descendent de Marx. Marx dit que la pensée vient du « sol
de l’histoire », c’est du matérialisme dialectique. Il y a une histoire qui a toujours été celle de
l’opposition de classes dominantes et dominée, et cette pensée doivent être prise en compte et
les exploités doivent réagir contre cette exploitation et réagir car ils sont le plus nombreux.
C’est une pensée du milieu XIXème siècle.

01/10/2020 (séance en distanciel)

 Louis Althusser, Marxiste et passeur.

Le livre Pour Marx est le livre le plus connu d’Althusser.


Les écrits du jeune Marx faisant l’objet d’une relecture sociale-
démocrate qui tend à l’inscrire dans une forme d’humanisme
compatible avec la société politiquement libérale, Althusser s’en
empare pour tenter de les isoler du registre de l’œuvre marxiste, afin
qu’ils ne viennent pas entacher le pouvoir politiquement révolutionnaire
de cette pensée fondatrice
La pensée de fondatrice de Marx pour Althusser est le cœur
révolutionnaire.
Il invente donc le concept de « coupure épistémologique » pour séparer
ce qui n’est pas encore l’œuvre de Marx (le « jeune Marx ») de ce qui
est vraiment, profondément, le cœur révolutionnaire de l’auteur du
Capital.

Il écrit donc une série d’articles publiés dans des revues philosophiques communistes, qui
deviendront le recueil Pour Marx, publié en 1965 aux éditions François Maspéro. Ce recueil
obtiendra un succès très important, devenant le manuel de marxisme de toute une génération
de jeunes normaliens se destinant à la fois au militantisme et à la carrière universitaire.
La chine devient maoïste et communiste en 1949. Mao, ayant un problème de démographie
chinoise essaye de réduire considérablement le nombre d’habitants du pays. Des technocrates
viennent dicter aux villages comment faire, mais ils se retrouvent à déménager, et finalement
finiront par mourir de faim.

Parmi eux, certains fonderont des groupes politiques en marge


du PCF, lorgnant vers la Chine maoïste et ce qu’elle incarne
comme renouveau de l’espoir révolutionnaire au milieu des
années 60. La plupart d’entre eux participe aux séminaires
organisés par Althusser de 1961 à 1965, consacrés
successivement au « jeune Marx », au structuralisme, à Lacan
et la psychanalyse et à « Lire Le Capital ».
Ce séminaire de 1964-1965 donnera lieu à une publication
collective elle aussi très importante en 1965, consacrant de
jeunes philosophes comme Jacques Rancière et Etienne
Balibar.
Althusser est alors en lien avec de nombreux universitaires qui
feront la « French Theory » : Michel Foucault, Pierre
Bourdieu, Jacques Derrida.

Louis Althusser n’adhérera


jamais à l’engouement prochinois,
tout en s’intéressant fortement à la
Révolution culturelle de 1965-
1966. Il restera fidèle au PCF,
malgré une défaite stratégique au
profit d’autres philosophes
officiels moins novateurs que lui.

Althusser s’engage en outre sur un autre terrain en combattant


les revendications étudiantes « petites-bourgeoises » dans un
article intitulé « Problèmes étudiants » publié en décembre 1963.
Il y fustige alors ce que l’UNEF et les cercles communistes
hétérodoxes demandent : de meilleures conditions de travail, la
prise en compte d’un statut de l’étudiant, la mise en place d’un
salaire étudiant.

Certains de ses anciens étudiants, comme Jacques Rancière, viendront


quelques années plus tard rappeler combien les vues d’Athusser
obéissaient surtout à des impératifs stratégiques visant à éviter que le
PCF ne soit débordé sur sa droite et sa gauche par des mouvements
sociaux-démocrates ou libertaires.
Rancière explique ainsi que la pensée d’Althusser a été une pensée de
l’ordre, une pensée de l’obéissance, malgré son contenu révolutionnaire
et ses hypothèses audacieuses sur Marx.
Si Althusser a exercé une telle fascination sur une génération tout
entière, c’est surtout pour son sens de l’écoute et sa proximité avec ses
étudiants. Autre aspect de son action : Althusser a toujours gardé un œil
curieux sur toute nouveauté dans le champ intellectuel.
C’est pourquoi il a accueilli Jacques Lacan pour son séminaire à partir
de 1964, lorsque celui-ci s’est retrouvé en délicatesse avec les
institutions psychiatriques et psychanalytiques. Il a lui-même écrit un
article consacré aux rapports entre Freud et Lacan, repris dans un livre
publié au milieu des années 70. L’expérience psychanalytique
l’intéresse d’autant plus qu’il est régulièrement atteint par des épisodes
dépressifs qui le voient faire de longs séjours en maison de repos.

L’un de ces séjours aura lieu au début du mois de mai 1968. A posteriori, il verra dans les
« événements » une « révolte idéologique de masse ».
Toujours considéré comme une référence de premier ordre au début des années 70, Althusser
est aussi embarqué dans le courant structuraliste : il est associé à Lévi-Strauss, Jakobson ou
Lacan parce qu’il s’est intéressé à eux et à leurs méthodes, reprenant certaines inflexions
scientifiques autour de la question d’une structure englobante qui détermine les éléments qui
la contiennent.
En théorie politique, cela donnera son célèbre article sur les « appareils idéologiques d’état »
Ces « appareils idéologiques d’état » sont les outils utilisés par une structure politique pour
infuser partout l’idéologie qui la détermine. Althusser reprend là la distinction
infrastructure/superstructure de Marx pour essayer de distinguer les institutions qui
composent la superstructure, lieu de l’idéologie émanant de l’infrastructure. Pour Althusser,
c’est encore et toujours l’infrastructure, c’est-à-dire la composition économique d’un état
politique, qui impose l’idéologie et formule ce qui est favorable à une organisation du travail
spécifique.
08/10/20

Althusser et le communisme : 
Althusser entre au PCF en 1948. Cette même année, malgré le pacte de Varsovie, la
Yougoslavie communiste fait sécession de l’URSS : c’est la rupture Tito-Staline. On
commence partout à se méfier du stalinisme, et la Yougoslavie préfère ne pas s’aligner dans le
bloc de l’Est pendant la Guerre Froide. Bien que Tito soit lui-même un dictateur ayant voulu
réunir de force des populations aux cultures, langues et religions très différentes, le
totalitarisme en URSS fait peur. Il n’y a en effet là-bas pas de multipartisme, aucune liberté
d’expression pour les opposants, pas de presse libre et pas de séparation des pouvoirs
exécutifs, législatifs et judiciaires.  
Le PCF reste tout de même très important dans la sphère politique. Le parti compte nombre
d’adhérents et de sympathisants après-guerre, en plus d’une grande influence dans la presse.
On compte même plusieurs victoires aux élections municipales. Dans ces villes les conditions
de vie des ouvriers s’améliorent, la solidarité entre habitants se développe et des services sont
mis en place, bien que l’idéologie communiste ait tendance à s’instiller dans la vie privée, par
la recherche et l’exclusion de tout pro-américain ou libérales. Tout cela montre que la
population française était très politisée. Bien que l’hyper-individualisme ait donné la
possibilité de penser ce que l’on veut, il a aussi mené à la déstructuration politique des
individus.  
Althusser essaie à la fin de sa vie de réconcilier communisme et catholicisme. Avant ça, il
s’adonne surtout à des réflexions sur le Marxisme et à la sensibilisation communiste auprès de
ses étudiants. Il rencontre beaucoup d’intellectuels plus jeunes ou de sa génération comme
Foucault et Lacan. A posteriori, on estime qu’il était bipolaire et gravement dépressif, ce
qu’il l’a mené à avoir des cure de sommeil à Sainte-Anne, du repos intensif et forcé jugé
inefficace aujourd’hui.  
Dans toute son œuvre, il développe une relecture de l’œuvre de Marx. Bien que la pensée
communiste ait des racines pré-marxistes, c’est Karl Marx et Friedrich Engels qui, avec Le
Manifeste du Communisme (1848), conceptualisent le terme. Ils dénoncent l’état de la société,
théorisent la lutte des classes entre dominés et dominants. Ils émettent aussi l’idée que la
bourgeoisie a remplacé l’aristocratie après avoir utilisé le peuple lors de la Révolution
Française. Ils dénoncent aussi les méfaits du libéralisme que l’économiste anglais Adam
Smith a fondé dans La Richesse des nations (1776). Selon ce dernier, le capitalisme et le
libéralisme économique recherchent l’intérêt de chacun par l’enrichissement. Cependant, le
premier capitalisme duquel Marx est contemporain est très violent et exploite la vie des
ouvriers.  
Karl Marx faisait partie de l’école matérialiste en histoire. Il pensait que l’Histoire engendre la
pensée, et non l’inverse. L’Histoire serait en fait la lutte des classes, et quand le prolétariat se
sera réapproprié les marchandises fruits de leur savoir-faire, le capitalisme s’écroulera et ce
sera la fin de l’histoire. Avec la création de la Première et de la Deuxième Internationale,
deux organisations désirant la révolution mondiale, Marx devient activiste. Beaucoup des
penseurs de la French Theory hériteront de sa philosophie.  
Avant d’établir ces théories, Marx adoptait une démarche plus idéaliste et humaniste, ce dont
la gauche démocrate non-révolutionnaire s’inspirera. De ces deux moments de la vie de Marx
naîtront deux courants de pensée de la gauche. Eduard Bernstein inventera l’orientation
social-démocrate en pensant que la révolution n’est pas nécessaire et que le capitalisme
pourrait être renversé légalement, par l’élection et les réformes. De l’autre côté, Lénine fonde
le bolchevisme et mène la révolution en Russie. Ces deux visions constituent la gauche des
années 1910 et l’influenceront pendant les années à venir, notamment lors du congrès de
Tours en 1936, où le SFIO social-démocrate et le PCF aligné sur l’URSS se séparent.  
Althusser étudiera beaucoup ces deux visions, et finira par mettre de côté le jeune Marx,
préférant le Marx idéologue, scientifique et politique. En 1965, il publie Pour Marx, un
recueil d’articles où il montre la « coupure épistémologique » dans la carrière de Marx et sa
préférence pour la seconde partie. Son ouvrage est publié chez les Éditions Maspero, connu
pour leur engagement à gauche. Ce débat sur les deux Marx est profondément ancré dans les
réflexions des intellectuels de l’époque. À l’ENS, au cours de plusieurs séminaires, il amène
ses étudiants à lire Le Capital (1867), réfléchir le communisme et s’y engager. Parmi ses
étudiants, on trouve Jacques Rancière et Étienne Balibar.  
Plusieurs de ses étudiants deviendront des militants maoïstes dans les années 60. En 1949, la
Chine, sous l’égide de Mao Zedong est devenue communiste. Dans un premier temps, elle
s’aligne sur l’URSS et le stalinisme. Après la mort de Staline en 1953, Nikita Khrouchtchev
entame un processus de déstalinisation, et Mao s’éloigne de son voisin soviétique. De son
côté, il a pour volonté de faire passer son pays de 800 millions d’habitants dans l’ère
industriel. En 1958 commence alors la politique du Grand Bon en Avant : les familles rurales
majoritaires sont forcées à se spécialiser dans un pan de l’industrie. Cependant, cette politique
est un échec total. L’agriculture est abandonnée, la campagne des quatre nuisibles est un
échec total et l’économie est durablement déstabilisée. Commence alors une famine qui fera
entre 20 et 40 millions de morts entre 1958 et 1962.  
Pour contrer la colère montante du peuple, Mao met en place la campagne des Cents Fleurs.
La liberté d’expression est rétablie et les intellectuels peuvent commencer à exprimer leur
opposition au parti. Mao profite en fait de cette expression pour débusquer ses adversaires et
les évincer, par l’emprisonnement ou l’exécution. Mao lance ensuite la Révolution Culturelle.
Il embrigade la jeunesse dans un culte de la personnalité et la manipule pour créer une armée
supplémentaire : les gardes rouges. Ces derniers deviennent rapidement une milice chargée de
punir tous ceux semblant opposés à Mao.  
Alors que l’URSS semble vouloir coexister pacifiquement avec les États-Unis capitalistes,
Mao développe un discours fondamentaliste à propos du communisme. Il prône un retour au
‘’vrai’’ communisme, que l’URSS aurait dévitalisé. Dans le monde entier se créent des
mouvements révolutionnaires comme le Weather Undergound en États-Unis.  
Althusser préfère observer de loin les agissements de Mao, mais n’empêche pas ses étudiants
de s’en revendiquer, ne connaissant pas la réalité de la dictature chinoise. Au contraire, il
s’opposera farouchement aux mouvements étudiants réclamant plus de droits comme un
salaire. En effet, il trouvait que ces demandes n’étaient pas au service de la révolution
prolétarienne en faisant des étudiants des « petits-bourgeois ». 
En outre, il s’est beaucoup intéressé à la psychanalyse, d’où sa collaboration avec Jacques
Lacan. Althusser mourra après une fin de vie chaotique et le meurtre de sa femme dans une
crise de délire.

 Simone de Beauvoir et Le Deuxième Sexe.


Simone de Beauvoir est née à Paris en 1908.
Issue d’une famille bourgeoise mais rapidement ruinée, elle se dirige vers la philosophie et est
reçue deuxième à l’agrégation en 1929, peu après avoir rencontré Jean-Paul Sartre, arrivé
premier au même concours (qu’il passe pour la seconde fois). Enseignante en philosophie au
lycée jusqu’au milieu de la Deuxième guerre mondiale, elle écrit un premier roman, L’Invitée,
qui jouit d’un grand succès en 1943. Elle crée avec Sartre et d’autres une revue engagée, Les
Temps Modernes, en 1945.
Cette revue se veut le lieu où l’existentialisme va pouvoir s’épanouir comme doctrine de la
liberté et du choix, considérant que l’on construit sa vie dans un projet nécessairement
collectif (Beauvoir a appris à intégrer le marxisme dans son champ intellectuel avec la
Seconde Guerre mondiale). On y trouvera quelques-uns des intellectuels les plus prestigieux
de l’après-guerre, comme Michel Leiris ou Maurice Merleau-Ponty.
Elle s’attaque ensuite à une réflexion sur la condition féminine qui va l’amener à publier Le
Deuxième sexe en 1949. Provocateur selon certains, salvateur pour les autres, Le Deuxième
sexe connaît un succès immédiat et provoque une immense polémique dans les milieux
cultivés. Il sera mis à l’index par le Vatican pour son caractère subversif. Il inspirera
beaucoup les militantes féministes américaines du Women’s Lib, et deviendra un classique
étudié dans les universités du monde entier.
Le livre est important pour la cause féministe car il insiste sur le caractère construit de
l’identité sociale féminine, à travers sa célèbre assertion : « On ne naît pas femme : on le
devient » (au début du tome II)
Il est aussi un plaidoyer pour l’entente entre les deux sexes : « Dans les deux sexes se jouent
les mêmes drames de la chair et de l’esprit, de la finitude et de la transcendance, les deux sont
rongés par le temps, guettés par la mort, ils ont un même essentiel besoin de l’autre ; ils
peuvent tirer de leur liberté la même gloire ; s’ils savaient la goûter, ils ne seraient plus tentés
de se discuter de fallacieux privilèges ; et la fraternité pourrait alors naître entre eux. »
Le Deuxième sexe a été très critiqué lors de sa sortie, notamment par les partisans d’un
essentialisme strict ou d’une mythologie du féminin. Le livre se veut à la fois un traité
encyclopédique et un ouvrage polémique, passant en revue tous les clichés liés à la femme.
On y trouve une sévère mise en cause de la psychanalyse, notamment, vue comme un lieu de
validation du patriarcat. Et elle reproche à la psychanalyse de reprendre le point de vue des
hommes, en considérant "comme féminines les conduites d'aliénation, comme viriles celles où
un sujet pose sa transcendance".
15/10/20 (distanciel)

 Jacques Lacan et le retour à Freud.

Psychiatre et psychanalyste français, Jacques Lacan est


né en 1901 à Neuilly, dans une famille de riches
vinaigriers orléanais de tradition catholique. Il est l’aîné.
Il entame ses études de médecine tout en fréquentant les
milieux d’avant-garde des années 20.
En 1932, il soutient une thèse intitulée « De la psychose
paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité », sur
un cas de paranoïa criminelle qu’il suit à Sainte Anne, le
cas Aimée (qui s’appelait en réalité Marguerite Anzieu)
Cette thèse obtient un certain retentissement, notamment auprès de Salvador Dali et de
certains surréalistes, dont certains s’intéressent de plus en plus à la psychanalyse.
Lacan est élu membre adhérent de la Société Psychanalytique de Paris en 1934.
Il commence à élaborer ses recherches sur le Moi, qui témoigne selon Lacan de cette
« furieuse passion, qui spécifie l’homme, d’imprimer dans la réalité son image ». Pour lui, il
est ce qui, loin de se former à partir de la réalité, s’oppose à elle.
Personnalité hors norme qui va dominer la psychanalyse, mais aussi la vie intellectuelle
française des années 60 à 80, Lacan se définissait comme « celui qui a lu Freud ».
Dans son séminaire donné de 1951 à 1980, il n’a cessé de réinterpréter les concepts et la
technique psychanalytiques, remettant la parole au centre de l’expérience analytique.
Lacan rappelle ainsi que, comme l’a montré Freud, les lois du langage sont organisatrices
aussi bien de la vie quotidienne que de la pathologie : les actes manqués, les rêves et les
symptômes sont des vérités déguisées.
Parfois considéré comme un imposteur ou un gourou de secte, Lacan est connu pour les
singularités qu’il a su introduire dans la cure psychanalytique.
Protestant contre le projet de réserver aux médecins la pratique de la psychanalyse, il
démissionne de la Société Psychanalytique de Paris en 1953 et prononce la même année une
conférence importante à Rome, « Fonction et champ de la parole et du langage ».
On retrouvera le texte de cette conférence dans ses Ecrits, publiés en 1966 et qui connaîtront
un très grand succès dans le monde intellectuel. Dans ce texte fondamental, emblématique de
la sinuosité que Lacan affectionne pour discourir sur la pratique analytique, une idée
principale émerge : « le symptôme se résout tout entier dans une analyse de langage, parce
qu’il est lui-même structuré comme un langage, qu’il est langage dont la parole doit être
délivrée ». Fasciné par la linguistique structurale et les principes qu’elle propose pour penser
le langage depuis le début du siècle, Lacan tente d’adapter ces principes aux maux dont
souffrent les patients, dans l’espoir de découvrir les agencements syntaxiques qui ordonnent
les désordres psychiques.
Dans un autre texte important, « Le stade du miroir comme formateur de la fonction du Je »,
Lacan évoque ce moment où le jeune enfant se saisit de sa propre image en même temps que
de sa propre individualité : « L’assomption jubilatoire de son image spéculaire par l’être
encore plongé dans l’impuissance motrice et la dépendance du nourrissage qu’est le petit
homme à ce stade infans nous paraîtra dès lors manifester en une situation exemplaire la
matrice symbolique où le Je se précipite en une forme primordiale, avant qu’il ne s’objective
dans la dialectique de l’identification à l’autre et que le langage ne lui restitue dans l’universel
sa fonction de sujet »
Lorsqu’il remarque son image dans le miroir, l’enfant qui ne parle pas encore cherche à
l’identifier. Et quand il saisit que cette image à un rapport avec lui, il se tourne vers l’adulte
pour lui en demander confirmation. La réponse de la mère ou du père est alors déterminante :
en répondant à son enfant « oui, c’est toi, Anouk, ma fille », le parent lui permet d’accéder à
l’unification de l’image de son corps jusque-là morcelée et, dans le même temps, le fait entrer
dans le symbolique, dans le monde des contraintes imposées par le fait de parler, la « matrice
symbolique où le Je se précipite ».
La mimique jubilatoire que présente alors l’enfant signe l’identification de son image à son
prénom prononcé par l’adulte. Ce tissage de l’image et de la parole ne nécessite pas un
miroir : ce qui compte, c’est le regard et la parole de l’Autre.

 Françoise Dolto et la question de l’enfance


Françoise Dolto est née en 1908, dans une famille de la très grande bourgeoisie.
Aux prises avec une mère contradictoire et abusive, que la perte de sa fille aînée, Jacqueline,
rend particulièrement dure avec son autre fille, Françoise Marette doit d’abord devenir
infirmière avant d’obtenir le droit de se lancer dans des études de médecine, qui l’amèneront à
une spécialisation en psychiatrie.
Eprouvée par le climat familial, Françoise Marette est parallèlement amenée à entreprendre
une analyse avec René Laforgue, qui lui ouvre la voie à sa propre carrière de psychanalyste.
Conduite à s’intéresser aux enfants à travers sa vocation première – dite dès l’enfance – de
« médecin d’éducation », Françoise Marette, devenue Dolto en 1942, va s’immerger dans la
psychanalyse pour enfants après y avoir été initiée par Sophie Morgenstern, pionnière en la
matière.
Lançant de nombreuses consultations publiques en plus de sa pratique en cabinet privé, Dolto
reçoit une multitude d’enfants issus de tous les milieux sociaux et s’avère particulièrement
pertinente dans l’interprétation des dessins que ceux-ci sont amenés à réaliser.
Françoise Dolto a notamment beaucoup milité pour que la parole des enfants soit entendue
en tant que telle.
Elle a aussi tenté d’expliquer aux parents combien certaines situations dans lesquelles l’enfant
était privé d’un savoir – verbalisé – sur le pourquoi et le comment de son existence et de son
insertion dans une communauté – famille, société, école – ne pouvait que favoriser les
situations névrotiques.
Son leitimotiv aura été de dire le plus directement possible, avec les mots les plus intelligents
et intelligibles, ce qui ne saurait être tu à l’enfant, quel que soit son âge.
« Tant de choses se jouent avant quatre ans ! Et la société ne fait rien, laissant les parents, et
les adultes en général, user d’un pouvoir discrétionnaire sur les enfants et être avec eux
comme avec des sous-développés, ou, pire, des animaux domestiques qu’il faut dresser.
L’essentiel de ce qu’on appelle l’éducation des enfants a été conçue comme un élevage de
basse-cour… » Françoise Dolto, Autoportrait d’une psychanalyste, p. 169.
Sollicitée par la radio pour devenir une interlocutrice des auditeurs pour les questions liées à
l’enfance, elle est devenue dans les années 70 une véritable star médiatique.
Elle a aussi suscité l’ouverture des « Maisons vertes », lieux d’accueil où les parents peuvent
venir avec leurs enfants échanger sur leurs difficultés, avec l’aide de psychanalystes
répondant à leurs interrogations.
Morte en 1988, Françoise Dolto a laissé un héritage essentiellement clinique.
On peut cependant lire sa thèse de médecine, soutenue en 1939 et intitulée Psychanalyse et
pédiatrie.
Ecrite deux ans après son analyse avec René Laforgue (1934-1937), elle témoigne de son
acquisition extrêmement rapide des principes de la psychanalyse, ainsi que de ses intuitions
nouvelles en matière d’application de celle-ci aux troubles psychiques ressentis par les enfants
La plupart des livres signés de sa main ont été publiés après sa mort ou dans les dernières
années de sa vie, rassemblant des entretiens, des conférences ou des articles parus dans des
revues pédagogiques comme Pratique des mots, ou dans des revues de spécialistes comme la
Revue française de psychanalyse.
L’un des cas de psychose qu’elle a eu à traiter dans son parcours a fait l’objet d’un livre à part
entière, Le Cas Dominique, paru en 1971. Elle a aussi publié une étude théorique, L’Image
inconsciente du corps, paru en 1984.
On lui a notamment reproché d’avoir engendré des « enfants Dolto » à peu près équivalents
aux fameux « enfants rois » fantasmés par des générations de parents.
On lui a aussi reproché de s’être enthousiasmée durant la guerre à propos de l’action
éducative du maréchal Pétain ou d’avoir tenu des propos ambigus sur l’avortement lors de son
passage à l’émission Apostrophes de Bernard Pivot.
Elle y proposait notamment que les femmes souhaitant une IVG paient une somme
symbolique (tout en étant remboursées) pour cet acte médical qui ne devait pas rester anodin.

 Michel Foucault, entre philosophie, psychologie et histoire


Michel Foucault, entre philosophie, psychologie et histoire. Né en 1926 à Poitiers et issu
d’une famille bourgeoise – grand-père et père médecins – il choque sa famille en annonçant
vouloir devenir « professeur d’histoire » à onze ans.
Devenu normalien, il noue de solides amitiés avec Paul Veyne, Pierre Bourdieu ou encore
Jean-Claude Passeron.
Il adhère au Parti communiste en 1950, en raison de la position anticolonialiste de ses
dirigeants et militants durant la guerre d’Indochine.
Ses premières recherches portent sur la naissance des études en psychologie chez les
philosophes cartésiens.
Michel Foucault découvre successivement Heidegger, Nietzsche, Georges Bataille,
Maurice Blanchot et René Char.
Il publie son premier livre, Maladie mentale et personnalité, par l’entremise de Louis
Althusser. « La vraie psychologie, écrit-il, comme toute science de l’homme, doit avoir pour
but de le désaliéner ». Il se met alors à travailler à ce qui va devenir Histoire de la folie à
l’âge classique, dont le premier tome est publié en 1960. Il obtient un poste d’enseignant-
chercheur à l’université de Clermont-Ferrand. Il fait la connaissance de Gilles Deleuze et de
Jacques Derrida.
 On l’assimile de plus en plus au courant « structuraliste » dans lequel il ne se reconnaît
pas entièrement, s’attachant plutôt à une « archéologie du savoir ».
Il travaille au livre qui fera sa renommée lors sa parution en 1966, Les Mots et les choses.
Ce livre est sous-titré « Une archéologie des sciences humaines » et essaie de démontrer
combien la construction scientifique du savoir sur l’homme a été modelée par une idéologie
« humaniste », qui aliène plus qu’elle n’élève l’être humain. Dans un entretien, Foucault
affirme alors : « Notre tâche est de nous affranchir définitivement de l’humanisme (…), c’est
en ce sens que mon travail est un travail politique dans la mesure où tous les régimes de l’Est
et de l’Ouest font passer leurs marchandises sous le pavillon de l’humanisme ».
La première édition des Mots et les choses est épuisée en un mois et demi et l’on présente ce
livre comme la plus grande révolution en philosophie depuis l’existentialisme de Sartre. Une
polémique suit alors entre les partisans de Foucault et les partisans de Sartre, qui voit « l’anti-
humanisme » dont on affuble Foucault comme un numéro d’illusionnisme éloignant les
savants des vrais combats politiques du moment.
Dans les pays de langue anglaise, c’est son Histoire de la folie qui est réellement prisée,
associée au mouvement de l’antipsychiatrie (une remise en cause frontale de la prise en
charge psychiatrique conventionnelle des patients atteints de troubles mentaux). Pendant Mai
68, Foucault est coincé à Tunis, où il enseigne. Il réussit seulement à assister au meeting de la
gauche politique au stade Charléty.
Il devient ensuite professeur de philosophie au Centre universitaire expérimental de
Vincennes, sur l’invitation d’Hélène Cixous. La licence de philosophie qui s’y délivre n’est
dans un premier temps pas reconnue par le ministère car trop de cours y sont consacrés à la
politique et au marxisme. Il est nommé professeur au Collège de France en 1970.
En 1971, à l’occasion d’une conférence de presse des avocats des militants maoïstes en grève
de la faim pour obtenir le statut de prisonniers politiques, il annonce la création du Groupe
d’information sur les prisons (G.I.P.) auquel il donne son domicile comme siège. A travers la
France, les militants du G.I.P. font entrer clandestinement des questionnaires dans les prisons,
que les familles ramènent au domicile de Foucault.
Foucault déclare à propos de la prison : « Cette nouvelle préoccupation s’est offerte à moi
comme véritable issue au regard de la lassitude que j’éprouvais face à a chose littéraire ». De
1970 à 1976, les cours du Collège de France vont constituer un véritable cycle sur la
formation des normes dans une société disciplinaire.
L’histoire de la psychiatrie pénale resta toujours un projet de suite à son Histoire de la folie.
Ses prises de position publiques deviennent de plus en plus radicales, allant jusqu’à choquer
certains militants de la Gauche prolétarienne, groupe politique dont il est le compagnon de
route. Le G.I.P prononcera sa dissolution en 1972.
Foucault participe aux préparatifs du journal d’information quotidien dont veulent se doter les
maoïstes et quelques personnalités gravitant autour des combats pour les droits des
homosexuels, des femmes, des prisonniers.
Ce journal deviendra Libération en avril 1973. Pendant plus de sept ans, le quotidien restera
financé uniquement par ses ventes et ses abonnements, payant chaque employé au même tarif,
qu’il soit imprimeur ou rédacteur en chef.

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