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Dis Tonton pourquoi tu grimaces ?

Aujourd’hui Marcel possède le rictus des grands jours ; il est en pleine ascension du Mont
Ventoux : « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à des lésions tissulaires
réelles ou potentielles » (8). Marcel souffle et souffre en repensant à cette définition de la douleur
qu’il a lue l’autre jour sur internet. L’effort physique qu’il soit court et intense ou prolongé est associé
à des douleurs musculaires. Cette douleur revêt même un caractère inévitable dans la pratique
sportive compétitive comme le signifie le fameux adage « no pain, no gain ». Certains auteurs ont
ainsi avancé l’idée selon laquelle la tolérance à la douleur est un facteur essentiel dans l’atteinte du
haut-niveau (2). Il est d’ailleurs frappant de constater l’importance que les athlètes de haut-niveau
accordent au mental dans leurs performances. Ils évoquent volontiers la capacité à « se faire mal » et
le vocabulaire sportif est assez fourni dans ce domaine : se rentrer dedans, se faire sauter le caisson
etc. Bref, que l’on soit sportif régulier, du dimanche ou de haut-niveau, nous éprouvons tous cette
sensation musculaire désagréable qui nous contraint à lever le pied ou à serrer les dents. C’est la
deuxième solution qu’a manifestement choisi Marcel. De façon générale, la douleur engendrée par
une lésion réelle comme une coupure ou par une lésion potentielle comme lorsque l’on pose la main
sur un radiateur brûlant, entraîne un mouvement de retrait qui évite ou minimise les lésions. A ce
titre elle est parfaitement utile, même si Marcel ne partage pas cet avis pour l’instant. Les
mécanismes de perception de la douleur ou nociception font l’objet de travaux de recherche de plus
en plus soutenus afin de soulager la douleur des patients. Que connaissons-nous des myalgies, c’est-
à-dire des douleurs d’origine musculaire ? Il convient d’abord de dissocier les douleurs dites
pathologiques, des douleurs physiologiques, celles que l’on rencontre à l’exercice. Concernant ces
dernières, une seconde distinction s’impose entre les douleurs ressenties au cours de l’effort et celles
retardées que l’on dénomme courbatures ou « DOMS » pour Delayed Onset Muscle Soreness. Les
courbatures, plus spécifiquement induites par des exercices excentriques, ont été bien étudiées et il
est maintenant clairement établi qu’elles sont liées à une réaction inflammatoire destinée à réparer
les microlésions causées par l’exercice (voir encadré 1). A l’inverse, les causes des myalgies d’effort
sont beaucoup moins documentées, et leurs origines pas totalement identifiées. L’occasion pour
nous de mener une enquête sur tous les suspects impliqués dans les maux dont nous souffrons à
l’exercice.

Citius, altius, doulourus

Un premier élément évident associé à la myalgie d’exercice est l’intensité de l’effort. Si je


parcours un 400 m plat en 2 min ou en 1 min, je n’aurais certainement pas la même perception de
l’existence. D’après les auteurs, un seuil de douleur musculaire apparaît à environ 50-60 % de la
puissance maximale aérobie et au-delà, l’évolution de la douleur en fonction de l’intensité irait
exponentiellement (3). Marcel, le visage déformé par l’effort, semble d’accord avec cette version. La
puissance étant le produit de la force par la vitesse, pour une intensité donnée, il existe différentes
combinaisons de niveau de force et de vitesse. Or pour une même puissance développée sur
bicyclette, les myalgies sont plus importantes à des vitesses de pédalage faibles, c’est-à-dire pour des
forces importantes (9). En définitive, plus les contraintes mécaniques imposées aux muscles sont
importantes, et plus la douleur s’impose. Marcel se résout maintenant à passer le petit plateau.
Quant à la durée de l’exercice, le deuxième facteur, le consensus s’impose de lui même. Imaginez-

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vous dans l’exercice de la « chaise romaine » qui consiste à tenir une position assise en s’adossant à
un mur. Si les premières secondes sont facilement supportables, à l’approche de la minute (ou plus
selon votre entraînement), la douleur risque d’être insoutenable. Ainsi, lors d’une expérience
conduite à 50 % de la contraction maximale volontaire isométrique, des sujets cotaient la douleur
comme « à peine perceptible » au bout de 10 s alors qu’ils la qualifiaient d’ « intolérable » après 50 s
(13). Trois hypothèses permettent d’expliquer ce phénomène : soit une augmentation des stimuli
douloureux apparaît, soit ces signaux demeurent constants mais leur perception est accrue, soit ces
deux mécanismes se combinent. La seconde hypothèse est étayée par le fait que l’application d’une
pression constante au niveau du doigt est d’autant plus douloureuse que la pression est maintenue
longtemps (10). De plus on sait que la stimulation d’une fibre nociceptive provoque l’activation
d’autres neurones dits convergents qui entretiennent et accroissent le message douloureux. C’est
bien ma veine grogne Marcel en passant devant le panneau « sommet 5 km ». Si cette stimulation
est prolongée, alors la souffrance augmente et les tissus voisins deviennent hypersensibles à la
stimulation douloureuse. C’est ce que l’on dénomme l’hyperalgésie, phénomène que l’on peut
expérimenter quand tout un territoire cutané devient douloureux autour d’une petite coupure. Ceci
dit, cela ne nous renseigne pas sur l’origine même de la douleur. Avec le prolongement de l’effort
l’environnement à la fois physique et chimique des fibres musculaires est perturbé. Au début de
l’ascension Marcel ne pensait qu’à en découdre avec n’importe quel cycliste existant ou fantôme. A
la 10ème épingle, après 1 h 45 d’effort alors que le compteur n’indique plus que 10 km/h, le corps de
Marcel exulte mais pas exactement de la même manière que le chantait Brel. Pourtant avec la
fatigue musculaire, le recrutement des fibres d’un muscle augmente ce qui diminue la tension
exercée par chaque fibre. Cette douleur doit donc avoir pour origine l’accumulation de métabolites,
ce qui correspondrait à la première hypothèse. Pour répondre à cette question, il convient de
s’attarder brièvement sur l’anatomie du système nerveux. Les informations en provenance du
muscle squelettique et à destination du système nerveux central sont véhiculées par différents types
de fibres nerveuses. Parmi celles-ci, on dénombre les fibres de types III et IV métabosensibles c'est-à-
dire activées par les modifications chimiques, mécanosensibles donc répondant aussi aux contraintes
mécaniques et enfin thermosensibles vous l’avez compris activées également par des variations
importantes de température. Une véritable cabine de pilotage de boeing ! Ces afférences
interviennent dans de nombreuses régulations par exemple lors de l’ajustement cardio-respiratoire à
l’exercice. De plus, ces deux types de fibres sont également impliqués dans la nociception.
Concrètement, il a été rapporté que ces fibres étaient stimulées en situation d’ischémie c'est-à-dire
lorsque le sang et donc l’oxygène viennent à manquer, de fatigue musculaire ou en réponse à
l’accumulation de substances algésiques, notamment pro-inflammatoires (4). De manière
intéressante, la sensibilité mécanique des fibres de type III serait accrue au cours de la fatigue
musculaire ce qui répond en partie à notre question : à la fois une augmentation des stimuli
douloureux, mais aussi une augmentation de leur perception. Reste à déterminer les substances
responsables de l’activation des afférences que nous venons d’évoquer.

Bradykinine t’es plus ma copine

Je suis bourré de lactate jusqu’aux yeux déclare solennellement Marcel maintenant allongé
les bras en croix après un ultime sprint pour atteindre le sommet. Autant tordre le cou de suite à une
idée reçue, le lactate ne semble pas impliqué directement dans la perception de la douleur (Voir
encadré 2). Une autre hypothèse pour l’origine des myalgies pourrait être le déficit en oxygène. En

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effet, au niveau cardiaque, la privation en O2 qui caractérise l’angine de poitrine est associée à une
intense douleur justement localisée dans la poitrine et qui irradie même d’autres territoires. Plus
fréquemment, lorsque l’on nous prend la tension avec un brassard bien gonflé, on ressent une
douleur sourde qui s’accentue d’autant plus que la compression est maintenue longtemps. Est-ce
que la douleur est liée directement à la privation en O2 ? Il semble que la raréfaction de l’O2 au
niveau musculaire ne représente pas en soi un stimulus douloureux. Heureusement d’ailleurs, car la
pression partielle en O2 musculaire, déjà faible au repos, diminue avec des exercices d’intensité
légère pour atteindre des niveaux très proches de 0 à l’atteinte de VO2max ! L’ischémie lors de
contractions musculaires est quant à elle associée à une libération d’une hormone particulière, la
bradykinine. Cette hormone représente un puissant vasodilatateur – logique dans un contexte de
d’augmentation des besoins en O2 – mais aussi une substance hautement algésique, deux rôles
qu’elle partage avec ses copines : l’adénosine et la prostaglandine E2. Or ces trois substances sont
libérées à l’exercice et ce de manière proportionnelle à l’intensité de l’effort (11). De manière
intéressante, lorsqu’on administre une de ces substances seule dans un muscle au repos, cela ne
suffit pas pour déclencher une sensation douloureuse. En revanche, leur présence simultanée induit
une augmentation de la fréquence de décharge des fibres nociceptives de type IV, un abaissement
du seuil douloureux à la pression et une hausse de la douleur perçue (6). C’est donc bien la
combinaison de plusieurs agents qui induit la sensation douloureuse. L’autre point commun entre
ces trois substances, c’est que leur activité ou leur expression est décuplée en réponse à une flambée
inflammatoire. C’est aussi le cas de deux cytokines : TNFα et l’interleukine (IL)-6. Toutefois, si TNFα
est augmenté après des exercices traumatisants comportant une composante excentrique telle
qu’une course en descente, ce n’est pas le cas lors d’exercices de pédalage ou d’extension du genou
(12). Marcel est rassuré, il comprend que TNFα n’est pas un bon candidat pour expliquer les myalgies
d’exercice indépendantes des mécanismes inflammatoires. Quant à l’IL-6, son rôle est assez ambiguë
et la littérature à son sujet contradictoire. Lors de l’exercice, elle est sécrétée par les cellules
musculaires et ce de manière proportionnelle à l’intensité et à la durée de l’effort (19), même sans
lésion musculaire. Au repos, l’administration intramusculaire d’IL-6 cause une hypersensibilité aux
douleurs d’origine mécanique et ceci serait lié à une activation de l’inflammation notamment par la
production de TNFα ou de la prostaglandine E2 (14). La boucle est bouclée s’exclame Marcel qui avait
fournit des efforts surhumains pour suivre le mini drame qui se déroule à l’intérieur du muscle lors
de l’exercice. Que nenni ! A l’exercice, IL-6 aurait plutôt une action anti-inflammatoire notamment
via l’inhibition de TNFα (19). De plus, il n’existe pas de différence de réponse d’IL-6 chez des patients
souffrant de myalgie chronique par rapport à des sujets sains lors de l’exercice, ni de corrélation
entre les taux d’IL-6 et la douleur perçue (21). Au final, il semblerait donc que l’IL-6 n’intervient pas
dans la douleur musculaire à l’exercice, même si Marcel demeure suspicieux à son égard.

La soupe à la douleur

Les ions, espèce chimique électriquement chargée, sont également des suspects dans notre
enquête. Le potassium, chargé positivement (K+), est associé à la douleur musculaire. Il active
notamment les afférences nociceptives de type III et IV (4). Comme il y a des trous dans la plomberie,
le K+ contenu dans les fibres musculaires s’échappe vers le milieu extracellulaire lors de l’exercice. Ce
phénomène se cumule lorsqu’on effectue une contraction intense prolongée, comme dans l’exemple
de la chaise romaine, ou lorsque l’on réalise des centaines voire des milliers de contractions
répétées. Marcel se sent alors concerné avec les 2h d’ascension qu’il vient de se taper à bicyclette.

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L’accumulation de K+ interstitiel est de surcroît corrélée à l’intensité de l’exercice (7) et serait un
mécanisme important dans le développement de la fatigue musculaire. Enfin la concentration
interstitielle en K+ est corrélée à la douleur musculaire évaluée sur une échelle visuelle ou au seuil de
douleur à la pression mécanique lors d’un exercice. En d’autres termes la douleur est d’autant plus
marquée que le potassium s’accumule et inversement (21). Un autre ion interviendrait aussi dans la
myalgie d’effort. Tout comme le lactate, on le place souvent à la barre des accusés : c’est l’ion
hydrogène (H+). L’ion H+ cause une acidification du milieu (baisse du pH). Bien que sa concentration
soit fortement corrélée à celle du lactate, l’accumulation des protons avec l’augmentation de
l’intensité de l’exercice résulte de l’hydrolyse de l’ATP et de la glycolyse (20). Cette diminution du pH
pourrait aussi jouer un rôle dans l’apparition de la fatigue musculaire, même si les avis divergent
encore à ce sujet après des décennies de controverses. Quoi qu’il en soit, les fibres nociceptives de
type III et IV sont activées par l’ion H+ (4). Ces deux ions semblent donc participer à la myalgie
d’exercice, et ce indépendamment de toute lésion musculaire et donc de tout processus
inflammatoire. Au final, la libération d’un cocktail de substances est d’autant plus importante que
l’exercice est associé à des microlésions comme dans le cas d’un marathon, ou d’un trail. L’ensemble
des acteurs forme une « soupe sensibilisatrice » qui favorise l’activation des neurones nociceptifs à
la moindre stimulation mécanique. C’est pourquoi la douleur s’estompe rapidement à l’arrêt de
l’exercice. Les contraintes mécaniques cessent et les concentrations des différents algésiques
reviennent assez vite à leur niveau de base et cela en partie grâce au débit sanguin qui demeure
transitoirement élevé dans le décours de l’exercice.

Est-ce mal d’avoir mal ?

Une dernière question est de savoir si cette douleur représente une limitation dans
l’accomplissement de la performance. En introduction, nous évoquions la faculté des champions à se
rentrer dedans. Marcel dodeline de la tête d’un air entendu, lui qui n’est pas le dernier à se faire mal.
Mais est-ce que notre performance est limitée par les signaux douloureux que nous avons évoqués ?
Les défenseurs de la théorie du « central governor » avec en tête de lice le célèbre physiologiste de
l’exercice Tim Noakes soutiendront cette thèse car l’information véhiculée par les fibres de type III et
IV intervient dans l’ajustement de la commande motrice. D’ailleurs, l’utilisation d’un morphinique
(fentanyl) qui agit au niveau périphérique en inhibant les afférences III et IV entraîne une
augmentation de la commande centrale lors de la première moitié d’un contre-la-montre en cyclisme
de 5 km (1). Tous des camés ! exulte Marcel qui relie cette explication merveilleuse au fait que des
gamins puissent le déposer dans un col. Sauf qu’au bout de 2,5 km, les cyclistes de ce contre la
montre étaient obligés de ralentir à cause d’une fatigue prématurée et réalisaient in fine un moins
bon temps qu’en situation contrôle. La preuve que tromper le système nerveux central n’est pas
nécessairement un bon calcul. On pourrait également citer le cas des amphétamines avec les
exemples plus ou moins tristes de Ghislain Lambert (le personnage interprété par Benoit Poelvoorde
dans le film éponyme) ou de Tom Simpson décédé sur les pentes du Ventoux. Du côté des
analgésiques plus légers que les morphiniques, on retrouve les essais infructueux conduits avec de
l’aspirine qui ne modifie ni la douleur à l’exercice, ni la performance. En revanche, son cousin, le
paracétamol semblerait jouer sur la douleur perçue à l’exercice. C’est le cas lors d’un temps limite en
course à pied sans toutefois impacter la performance (5). A l’inverse, lors d’un contre-la-montre de
16 km sur bicyclette, il a été rapporté qu’à douleur identique les sujets ayant absorbé du
paracétamol couvraient la distance plus rapidement (15). D’après les auteurs de cette dernière étude

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ces résultats vont dans le sens d’un rôle de la douleur comme régulateur de l’intensité de l’exercice
par le système nerveux central. C'est-à-dire que la perception nociceptive serait modulée par le
« central governor » afin que l’athlète adapte une allure qui ne soit pas préjudiciable à l’organisme.
La caféine aurait également un effet analgésique à l’effort ou lors de l’ischémie, sans doute en raison
d’une action antagoniste sur les récepteurs à l’adénosine dont on a parlé plus haut. Un petit noir !
C’est Marcel qui ne perd pas une miette de la conversation et qui commande immédiatement le
breuvage miracle. Sauf qu’il ne sait pas que la caféine est aussi un diurétique et peut accentuer la
déshydratation liée à l’exercice de longue durée. Comme pour le paracétamol, on est encore loin de
connaître tous les mécanismes d’action de la caféine. Parmi les substances endogènes, le cortisol
libéré à l’exercice semble bien posséder des propriétés antalgiques sur la douleur d’origine
inflammatoire. Marcel se disait bien que même sans rien prendre d’illicite, il bénéficie d’un petit
coup de pouce à l’exercice quand il monte en température. Ainsi il lui arrive de démarrer ses
premiers tours de pédale en ressentant des douleurs résiduelles de la veille ou de l’avant veille qui
disparaissent après quelques minutes. Sacré cortisol sourit Marcel. Une autre solution consiste à
tenter le coup de Christian Clavier dans les bronzés font du ski lorsqu’il veut remettre l’épaule de
Josiane Balasko : faire mal ailleurs ! D’un point de vue neuronal, ça fonctionne car un stimulus
douloureux est capable de masquer la douleur issue d’un foyer situé sur une partie différente du
corps. Est-ce le cas pour la myalgie d’exercice ? Peut être aurons nous la réponse quand nous verrons
les cyclistes du Tour de France se mettre de grandes baffes en montant le Ventoux ! Septique
Marcel ?

François Favier, Robin Candau

Références :
1) Amann et al., 2009, J Physiol, 587(Pt 1):271-83.
2) Anshel et Russel, 1994, J Sports Sci, 12(6):535-47
3) Cook et al., 1997, Med Sci Sports Exerc, 29(8):999-1012
4) Decherchi et Dousset, 2003, Can J Neurol Sci, 30(2):91-7
5) Garcin et al., 2005, Percept Mot Skills, 101(3):675-83
6) Graven-Nielsen et Mense, 2001, Clin J Pain, 17(1): 2-10
7) Green et al., 2000, J Physiol, 529 Pt 3:849-61
8) http://www.iasp-pain.org//AM/ (voir rubrique Resources puis IASP Taxonomy)
9) Jameson et Ring, 2000, J Sports Sci, 18(4):291-8
10) Koltyn et Arbogast, 1998, Br J Sports Med, 32(1):20-4
11) Langberg et al., 2002, J Physiol, 542(Pt 3):977-83
12) Liao et al., 2010, Am J Physiol Regul Integr Comp Physiol, 298(3):R599-607
13) Llyod, 1972, Res Q, 43(1):39-46
14) Manjavachi et al., 2010, Pain, 151(2):345-55
15) Mauger et al., 2010, J Appl Physiol, 108(1):98-104
16) Mense, 1993, Pain, 54(3):241-89
17) Miles et Clarkson, 1994, J Sports Med Phys Fitness, 34(3):203-16
18) Miller et al., 2002, Am J Physiol Endocrinol Metab, 283(5):E889-98.
19) Petersen et Pedersen, 2005, J Appl Physiol, 98(4):1154-62
20) Robergs et al., 2004, Am J Physiol Regul Integr Comp Physiol, 287(3):R502-16
21) Rosendal et al., 2005, Pain, 119(1-3):201-9

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Les douleurs musculaires lors de l’exercice physique

Encadré 1. L’inflation par l’inflammation


La réponse inflammatoire est impliquée dans de nombreuses situations de douleurs chroniques d’où
les efforts largement déployés pour décrypter les mécanismes de la douleur. Une réaction
inflammatoire est normalement activée en réponse à une lésion tissulaire, engendrant la libération
de nombreuses substances algésiques. Dans le cas d’exercices traumatisants type course en descente
ou bonds répétés, l’inflammation est responsable des courbatures avec un pic douloureux entre 24
et 48 h après l’exercice. Néanmoins, lors d’épreuves de longue ou très longue durée, elle peut
contribuer à la douleur en cours d’exercice. Ainsi les coureurs de marathon et surtout de trail ont
certainement expérimenté des fins de course difficiles avec l’impression d’avoir des poteaux à la
place des cuisses. Ceci résulte de la combinaison d’une inflammation induite par les microlésions en
plus des mécanismes « normaux » de myalgie d’exercice. Le port de manchons de contention au
niveau des mollets lors d’épreuve d’endurance en course à pied aurait pour effet de réduire la
douleur à l’exercice. Inhibition des mécanismes inflammatoires ? Réduction de la vibration au niveau
musculaire ? Les explications sur les bienfaits de la contention à l’effort concernant les aspects
nociceptifs n’ont cependant pas encore été fournies.

Encadré 2. C’est moi que tu traites de lactate ?


Encore une fois, le lactate a été mis au banc des accusés avant d’être innocenté ! En même temps ce
n’est pas la première fois puisqu’on a eu droit au lactate comme cause de la fatigue musculaire, au
lactate comme cause de l’acidose métabolique ou au lactate comme un déchet « toxique » pour la
cellule etc… Il faut dire qu’il a le don de se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment : sa
concentration augmente avec l’intensité de l’exercice, la diminution du pH, lors de l’ischémie et de
l’hypoxie tissulaire. Bref un coupable idéal. Oui mais en science comme dans la vie, l’habit ne fait pas
le moine ! Concernant les myalgies d’effort, on a d’abord pensé que le lactate jouait un rôle dans la
genèse de la douleur. Ceci découle notamment d’études de contraction musculaire avec ou sans
garrot apposé sur le membre réalisant le travail. Avec garrot, la douleur est amplifiée et associé à un
relargage accru de lactate par les muscles ischémiés. Normal nous direz-vous puisque les cellules
doivent maintenir la production d’énergie en compensant la baisse de la pression en O2 au sein du
muscle. Oui mais il n’en fallait pas plus pour lui faire endosser le rôle du méchant. Le vent a
commencé à tourner dans les années 90 où on ne lui attribua plus qu’un rôle partiel, en association à
d’autres substances (17). S. Mense, qui a beaucoup travaillé sur cette thématique, va même plus loin
sur la base d’observations après administration de lactate « it is unlikely that lactate per se is
important for pain medication since it only activates muscle nociceptors at supraphysiological
concentrations » (16). De plus, il existe une forte variabilité du seuil de douleur en fonction de
l’intensité d’exercice, alors que la concentration en lactate est fortement corrélée à cette même
intensité suggérant un lien assez faible entre douleur et lactate. Finalement, on considère
aujourd’hui que le lactate n’est pas responsable de la stimulation des fibres nerveuses véhiculant
l’information nociceptive. Ceci est confirmé par l’étude de Miller et al. (18) qui ne montre pas de
modification de la difficulté de l’effort lors d’un exercice de pédalage avec ou sans perfusion de
lactate. Il n’en demeure pas moins qu’on risque d’entendre encore longtemps des athlètes dire qu’ils
ont du lactate « jusqu’au bout des oreilles » pour signifier qu’ils ont mal de partout après leur 400m…

François FAVIER – maître de conférences en STAPS

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