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numéro

417
Janvier-Février 2012

Promouvoir
la santé bucco-dentaire
Enquête :
L’initiation sexuelle des jeunes,
un parcours différencié filles/garçons
La revue de la prévention
et de l’éducation pour la santé est éditée par :
L’Institut national de prévention
et d’éducation pour la santé (Inpes)
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numéro

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évaluation
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changer le regard
sur la sexualité
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de la responsabilité de la rédaction

Institut national de prévention et d’éducation pour la santé


42, bd de la Libération – 93203 Saint-Denis Cedex – France
numéro
sommaire 417
Janvier-Février 2012

Dossier Promouvoir la santé bucco-dentaire Éducation thérapeutique


des enfants en Seine-Saint-Denis en santé bucco-dentaire
Paul Bissila, Michèle Vincenti, Stéphane Tessier, Sylvie Azogui-Lévy . . . . 42
Promouvoir la santé Rafik Allal, Bassam Abo Amer,
Christophe Debeugny. . . . . . . . . . . . . . . 22
Pour en savoir plus
Sandra Kerzanet . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
bucco-dentaire
À Strasbourg, les soins dentaires
se font aussi à l’école !
Introduction Dominique Pflieger . . . . . . . . . . . . . . . 24
Stéphane Tessier, Fabien Cohen, Grenoble : un programme
Sylvie Azogui-Lévy . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 bucco-dentaire renforcé
Pourquoi s’intéresser à la santé bucco- dans les quartiers défavorisés ◗ ENQUÊTE
dentaire ? Repères épidémiologiques Simone Boussuges, Christiane Brun . . . . 26 L’initiation sexuelle des jeunes :
et économiques un parcours relationnel sexuellement
Département du Gard : information et différencié
Sylvie Azogui-Lévy, Thierry Rochereau . . . . 5 examen dentaire dans les classes de CP Florence Maillochon . . . . . . . . . . . . . . . 46
Quelle relation entre santé Marie-Hélène Ricard . . . . . . . . . . . . . . . 28
bucco-dentaire et santé générale ? ◗ LECTURES
Estime de soi et santé bucco-dentaire
Jean-Noël Vergnes, Cathy Nabet . . . . . . . . 7
Huguette Boissonnat-Pelsy, Olivier Delmer, Sandra Kerzanet . . . . . . . . . . 49
Principes généraux de prévention Isabelle Tiebot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
en santé bucco-dentaire
Évelyne Baillon-Javon, Fabien Cohen
Santé et précarité : les permanences
Carol Heiwy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
d’accès aux soins de santé bucco-
dentaire
UFSBD : développer la prévention Frédéric Rilliard, Lisa Friedlander,
bucco-dentaire sur tous les terrains Julien Descorps-Declere, Nadhia Khelifa,
Sophie Dartevelle, Patricia Vernay, Franck Moyal, Shéhérazade Saadi,
Jacques Wemaere . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Florence Schvallinger,
Christelle Naud-Llamas . . . . . . . . . . . . . 31
« Santé bucco-dentaire : une politique
d’ensemble reste à construire » La santé bucco-dentaire
Entretien avec Paul Karsenty . . . . . . . . . 15 de la personne âgée
Marysette Folliguet, Florence Schvallinger,
Prévention bucco-dentaire en crèche
Nadia Elamrani . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
et en centre de PMI : des actions
pour les tout-petits Appolline, réseau de santé bucco-
Colette Adam, Carole Adriaen, dentaire de proximité dans l’Essonne
Pascale Moulin-Birraux, Marysette Folliguet . . . . . . . . . . . . . . . . 36
Cécile Bavay-Simon . . . . . . . . . . . . . . . . 16 Promotion de la santé bucco-dentaire
en Ehpad – Assurance maladie de Paris Illustrations : Jean-Julien Roches
Promotion de la santé orale :
Marysette Folliguet . . . . . . . . . . . . . . . . 36
quelles interventions efficaces
en milieu scolaire ? Handicap et santé bucco-dentaire :
Stéphanie Tubert-Jeannin . . . . . . . . . . . 18 un exemple de programme
de prévention-intervention
Vingt ans d’action globale de santé Éric-Nicolas Bory . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
scolaire dans le Val-de-Marne Inter-relations entre activité physique
Marie Benguigui, Érick Girault, sportive et santé bucco-dentaire
Marion Morel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Philippe Poisson . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
La santé bucco-dentaire des enfants Les drogues licites ou illicites,
en nette amélioration ennemies de la santé bucco-dentaire
Ariane Éid . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Fabien Cohen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
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numéro

Janvier-Février 2012

Promouvoir la santé
bucco-dentaire
Illustrations : Jean-Julien Roches

D’une manière générale, le thème de la santé bucco- raît comme un marqueur socio-économique, un domaine
dentaire est assez peu traité sous l’angle de la prévention malheureusement symbole du renoncement aux soins,
et de la promotion de la santé, tant dans la presse grand voire du refus de soins.
public que professionnelle. Bien entendu, intervenir en santé bucco-dentaire n’est pas
Cette absence peut s’expliquer par plusieurs facteurs : nouveau en soi. Les dispositifs et les professionnels du
• l’idée reçue que la prévention dentaire est le domaine secteur, dont les libéraux, se sont mobilisés avec beau-
réservé des chirurgiens-dentistes ; coup de succès depuis de nombreuses années. Des pro-
• une prise en charge des dépenses de santé bucco- grammes de prévention bucco-dentaire collectifs, éva-
dentaire plus faible que pour les autres soins de santé en lués, existent maintenant depuis plus de vingt ans.
général, et « inversée », c’est-à-dire que les soins les plus Néanmoins, certaines situations impliquent des dimen-
complexes sont les moins bien remboursés ; sions dentaires inattendues ou qui se trouvent reléguées
• une certaine distance des professionnels de santé à au second plan du fait de la gravité de la pathologie initiale,
l’égard de tout ce qui gravite autour de la bouche ; alors même que leur prise en compte permettrait d’amé-
• la méconnaissance de l’impact des pathologies bucco- liorer la situation de santé ou de prévenir une dégradation.
dentaires sur l’état de santé général ; L’objectif du dossier est multiple :
• l’absence d’intégration de la santé bucco-dentaire dans • rendre à la santé bucco-dentaire sa place légitime dans
le concept de santé globale. les actions d’éducation pour la santé, particulièrement là
Pourtant, la prévention et la promotion de la santé bucco- où on ne l’attend pas (personnes âgées, handicap, toxico-
dentaire rentrent entièrement dans le champ de l’éduca- manie, éducation thérapeutique du patient, pathologies
tion pour la santé, en premier lieu parce qu’elles sont d’une chroniques, etc.) ;
efficacité relativement rapide et évaluable. • brosser un tableau de qui fait quoi en la matière et qui
Si la santé bucco-dentaire relève de la responsabilité indi- peut être mobilisé dans une perspective de santé globale ;
viduelle, elle inclut des dimensions socio-culturelles très • fournir des éléments de légitimation scientifique de l’in-
fortes, convoque l’estime de soi, mobilise les habiletés et tervention en prévention bucco-dentaire et montrer sa
les compétences, interagit avec l’ensemble de la santé relative simplicité comme son efficacité ;
globale de la personne. Elle devrait donc être au cœur de • enfin, inciter les éducateurs non spécialistes à associer
toute démarche éducative en santé. Par ailleurs, elle appa- systématiquement cette thématique à leurs interventions.
Souligner aussi certains besoins en formation, particuliè-
Dossier coordonné par Stéphane Tessier, médecin de santé rement initiale.
publique, membre du comité de rédaction de La Santé de Ainsi, si le professionnel lecteur, en refermant le dossier,
l’homme, Fabien Cohen, chirurgien-dentiste au centre municipal pense par exemple à la santé bucco-dentaire de ses inter-
de santé d’Ivry, secrétaire général de la société française des locuteurs pendant une action d’éducation pour la santé,
Acteurs de la santé publique bucco-dentaire (ASPBD) et chef du s’il pose la question du brossage des dents lors d’une
service de santé publique dentaire du conseil général du Val-de- action sur la nutrition ou d’une séance d’éducation théra-
Marne, et Sylvie Azogui-Lévy, chirurgien-dentiste, maître de peutique de son patient, ce dossier aura alors modeste-
conférences des universités, praticien hospitalier, Université ment contribué à faire progresser les connaissances et
Paris 7 Denis-Diderot, service d’odontologie du groupe hospitalier influer sur les pratiques.
Pitié-Salpêtrière, Paris.
Stéphane Tessier, Fabien Cohen, Sylvie Azogui-Lévy

4 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Pourquoi s’intéresser à la santé
bucco-dentaire ? Repères
épidémiologiques et économiques
Les données épidémiologiques montrent une amélioration significative de la santé bucco-
dentaire des enfants. Ainsi, en vingt-cinq ans, la proportion d’enfants de 12 ans indemnes
de carie est passée de 12 % à 56 %. Mais ces progrès considérables ne doivent pas mas-
quer les difficultés d’accès aux soins qui continuent de pénaliser les populations les plus
fragilisées. Les inégalités observées en santé bucco-dentaire sont fortes et corrélées avec
les inégalités sociales.

Force est de constater que l’impor-


tance accordée à la santé bucco-den-
taire par la population et les pouvoirs
publics a souvent été reléguée au
second plan. Pourtant, les pathologies
bucco-dentaires sont des problèmes de
santé publique qui touchent toutes les
couches de la population à des degrés
divers. Les problèmes de santé bucco-
dentaire constituent un bon exemple
d’approche multidisciplinaire d’une
pathologie chronique ayant des effets
sur la santé, mais aussi des consé-
quences sociales et psychologiques.
Les principales pathologies bucco-
dentaires sont la carie et la maladie
parodontale (qui touche le tissu de sou-
tien de la dent : os alvéolaire et gen-
cive)1. Définies comme des maladies
multifactorielles, elles sont liées à la
présence de plaque dentaire, véritable
biofilm bactérien. Elles résultent de la
colonisation et de la multiplication bac-
térienne. Elles restent actuellement une
cause de morbidité très liée aux diffi- tombé à 1,23 en 2006. La proportion On observe que cette amélioration
cultés d’accès aux soins et aux pro- d’enfants de 12 ans totalement résulte, pour l’essentiel, de facteurs
blèmes socio-économiques. indemnes de carie, qui était de 12 % en extérieurs au système de soins, agissant
La carie dentaire résulte d’un pro- 1987, atteint désormais 56 %. À l’âge de avant la survenue de la carie : la diffu-
cessus pathologique initialement réver- 6 ans, l’indice carieux baisse dans la sion des dentifrices fluorés principale-
sible, dans la mesure où l’atteinte den- même proportion et le taux d’enfants ment et du sel alimentaire, systéma-
taire débute par une déminéralisation totalement indemnes de carie est de tique à partir du milieu des années
qui peut disparaître par un apport opti- 63,4 %. Néanmoins, le besoin de soins 1980, et la diffusion croissante dans la
mal de fluor topique, chronique et qui reste important et le recours aux soins population des habitudes d’hygiène
comprend plusieurs stades d’évolution insuffisant : 30 % des enfants de 6 ans bucco-dentaire.
jusqu’à l’atteinte irréversible de la dent. et 22 % des enfants de 12 ans présen- Concernant les adultes, les données
tent au moins une dent cariée non trai- épidémiologiques, en France, montrent
Moins de carie mais un recours tée. Ainsi, si l’amélioration observée que la moitié d’entre eux, à partir de
insuffisant aux soins traduit une moindre survenue des 35 ans, présente un problème parodon-
À l’âge de 12 ans, l’indice carieux lésions, en revanche, parmi les enfants tal (une gingivite), avec des formes
(nombre moyen de dents atteintes par non indemnes, le recours aux soins est sévères (une parodontite) dans 10 %
la carie)2 qui s’élevait à 4,20 en 1987 est très insuffisant. des cas (1). Faute de recueil systéma-

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 5


tique des données épidémiologiques, bouche, traitement des maladies L’offre de soins en France
la dernière enquête nationale, réalisée parodontales. La densité de chirurgiens-dentistes
en 1993, indique notamment que 16 % est de 68/100 000 habitants. La France
des personnes âgées de plus de 65 ans La prise en charge des actes prothé- a une position moyenne par rapport
présentent une édentation totale. Les tiques et des traitements d’orthopédie aux autres pays européens (104/100 000
données plus récentes sont déclara- dento-faciale est très partielle (30 à en Suède, 73/100 000 en Allemagne,
tives, ces résultats sont présentés 50 %). La part non remboursée par la 49/100 000 en Suisse). Il existe une
ci-après. Sécurité sociale augmente à la fois avec grande disparité démographique et
D’autres problèmes sont à considé- le développement de techniques nou- géographique : la région Provence-
rer : les malocclusions (elles concer- velles, non répertoriées par la nomen- Alpes-Côte d’Azur a une densité de
nent les problèmes de position ou de clature des actes, et avec l’âge des 93/100 000, la Normandie 43/100 000
place des dents), les cancers buccaux patients et l’augmentation des besoins et l’Île-de-France (85/100 000).
et les conséquences des traumatismes prothétiques. Cela a pour effet d’ex-
dentaires (chocs). clure davantage le secteur dentaire de Sylvie Azogui-Lévy
la protection sociale. Chirurgien-dentiste, maître de conférences
Inégalités de santé bucco- des universités, Paris 7 Denis-Diderot,
dentaire corrélées avec les Financement des soins Thierry Rochereau
inégalités sociales dentaires Maître de recherche, Irdes, Paris.
Les renoncements aux soins pour Les dépenses dentaires représentent
les jeunes sont deux fois plus impor- 2,5 % des dépenses en ambulatoire de
tants dans les classes sociales défavo- l’Assurance maladie et 30 à 50 % des
1. Au niveau du sillon gingivo-dentaire et de la gen-
risées (2). Ce sont dans les catégories dépenses maladie des assureurs com- cive, l’atteinte de l’espace biologique parodontal peut
les plus fragilisées que l’on retrouve un plémentaires. Les remboursements par aboutir à différentes formes cliniques, allant de la
gingivite, forme la plus fréquente, aux parodontites
état de santé dentaire déficient et des l’Assurance maladie représentent 33 % plus complexes pouvant entraîner la mobilité puis la
personnes qui ont le plus de dents des dépenses engagées. perte des dents.
absentes. Ces différences sociales peu- 2. Les professionnels se réfèrent à différents indica-
teurs de santé bucco-dentaire pour mettre en évidence
vent s’expliquer par des différences Les tarifs des soins (traitement de le degré d’atteinte d’une population. Outre l’indice
d’exposition aux facteurs de risque caries, détartrage et extractions) sont carieux (ou indice CAO représentant le nombre
(notamment hygiène dentaire inadé- opposables (pas de dépassement pos- moyen de dents cariées, absentes ou obturées), on
distingue les indicateurs :
quate, alimentation trop riche en sible), alors que ceux des traitements – du recours aux soins : O : nombre moyen de dents
hydrates de carbone, etc.) mais aussi prothétiques sont autorisés aux dépasse- soignées ;
– de la maladie parodontale : indicateurs cliniques
par des disparités d’accès aux soins. ments. Les tarifs des soins conservateurs permettant d’estimer la perte osseuse, la mobilité des
Selon l’enquête ESPS (3), plus de la n’étant donc pas rémunérés correctement dents, l’inflammation de la gencive ;
moitié des renoncements aux soins (en fonction du temps passé et du pla- – des malocclusions : indicateurs permettant d’esti-
mer le besoin de traitement par des mesures sur le
(essentiellement faute d’argent et de teau technique), les chirurgiens-dentistes manque d’espace nécessaire pour l’évolution harmo-
temps) concernent les soins bucco- « compensent » par des tarifs plus élevés nieuse des dents.
dentaires. En même temps, le renonce- pour les prothèses. Cela a un effet pervers
ment aux soins dentaires augmente dans la mesure où les personnes ayant
considérablement le risque d’un mau- des besoins prothétiques supportent ◗ Références
vais état dentaire (4). Le recours aux davantage ces transferts de charge. Les bibliographiques
soins, mesuré par la « consommation » dépassements d’honoraires représentent
de soins dentaires, fait aussi apparaître en moyenne 47 % ; ils peuvent atteindre (1) Bourgeois D., Bouchard P., Mattout C.
des inégalités significatives : ce recours 62 % des tarifs dans des grandes villes Epidemiology of periodontal status in dentate
est fortement lié au niveau de revenu comme Paris. adults in France, 2002-2003. Journal of
et à la possibilité de couverture par Periodontal Research, 2007, vol. 42, n° 3 :
l’assurance maladie complémentaire, Si 86 % des Français possèdent une p. 219-227.
le taux de renoncement à des soins couverture maladie complémentaire, la (2) Union régionale des caisses d’assurance
bucco-dentaires étant significative- qualité des contrats s’agissant des soins maladie d’Île-de-France. La Santé bucco-den-
ment plus élevé parmi les ménages dentaires est inégale. La couverture taire des jeunes Franciliens de moins de
disposant de faibles revenus ou d’une maladie universelle complémentaire 20 ans – Arcade. Paris : Urcamif, rapport
faible couverture complémentaire. (CMU-C) couvre 9 % de la population. 2000.
Et 3 à 5 % de la population ne possè- (3) Allonier C., Dourgnon P., Rochereau T.
Caractéristiques des soins dent pas de complémentaire (dans la Enquête sur la santé et la protection sociale
dentaires mesure où elle n’est pas affiliée par un 2008. Paris : Irdes, rapport n° 1800, juin
Les fortes inégalités observées en emploi). Les bénéficiaires de la CMU 2010 : 254 p. En ligne : http://www.irdes.fr/
matière de soins sont à considérer en ont un panier de soins dentaires réduit, Publications/Rapports2010/rap1800.pdf
France, dans un contexte de faible prise regroupant les principaux traitements (4) Azogui-Lévy S., Rochereau T. Comporte-
en charge par l’Assurance maladie des prothétiques. Le bénéfice de la CMU ments de recours aux soins et santé bucco-
traitements coûteux avec dépasse- n’est pas aussi important pour les soins dentaire. Questions d’économie de la santé,
ment : prothèse, orthopédie dento- dentaires que pour les soins médicaux 2005, n° 94 : 8 p. En ligne : http://irdes.fr/
faciale, port d’appareils ou de bagues, (14 % renoncent encore à des soins Publications/Qes/Qes94.pdf
problèmes de position dentaire dans la dentaires pour raisons financières).

6 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Quelle relation entre santé
bucco-dentaire et santé générale ?
La cavité buccale joue un rôle essentiel dans la mastication, la digestion, la respiration, la
phonation, l’expression faciale et la réception sensorielle (1). Elle constitue à la fois un
miroir de la santé générale et une des premières étapes de défense de l’organisme vis-à-
vis des agressions extérieures (comme certaines bactéries par exemple). Certaines mala-
dies générales favorisent l’apparition, la progression ou la gravité de maladies bucco-
dentaires. Inversement, certaines maladies bucco-dentaires peuvent avoir des
conséquences à distance et favoriser l’apparition, la progression ou la gravité de certaines
maladies générales.

Conséquences de certaines
maladies sur la santé bucco-
dentaire
Ces conséquences sont aujourd’hui
bien connues. Les maladies entraînant
une altération de la réponse immuni-
taire, par voie directe (infection HIV,
diabète non équilibré, maladies auto-
immunes) ou indirecte (prise médica-
menteuse : chimiothérapie, corticothé-
rapie) favorisent le développement
d’infections orales, de candidoses
(infections fongiques, c’est-à-dire dues
à un champignon) (2) ou de formes
avancées de maladies parodontales
(maladies infectieuses chroniques à
composante inflammatoire) (3). En
effet, certaines formes de maladies
parodontales peuvent avoir une origine
génétique, générale (ou systémique),
ou être consécutives à la prise de subs-
tances médicamenteuses (3). Les mala-
dies entraînant une diminution de la
production salivaire par voie directe ou
indirecte1 augmentent le risque de carie
et d’infections orales (4). Enfin, de
nombreuses infections virales entraî-
nent des lésions de la muqueuse orale2.
diaque dont l’origine infectieuse pour- (hypertension particulière pendant la
Conséquences des infections rait être la cavité buccale) reçoivent une grossesse) (10), de déséquilibre du dia-
bucco-dentaires sur la santé antibioprophylaxie (traitement antibio- bète (11), d’activité de la polyarthrite
générale tique préventif) avant tout acte invasif rhumatoïde (forme de rhumatisme
Depuis le XIXe siècle, il est reconnu de chirurgie bucco-dentaire (6). Des inflammatoire chronique) (12) et d’obé-
que certaines infections bucco-dentaires recherches plus récentes ont montré sité (13). Les hypothèses avancées
ont des repercussions à distance de la que les parodontites (types de maladies reposent sur le passage dans la circula-
cavité buccale dans d’autres parties du parodontales) pourraient être associées tion sanguine de bactéries orales
corps (comme le cœur par exemple) (5). à un risque augmenté de maladies car- pathogènes et de molécules de l’inflam-
dio-vasculaires (7), de maladies mation, capables d’entretenir ou d’en-
Aujourd’hui, les sujets à risque d’en- broncho-pulmonaires (8), d’accouche- gendrer un processus inflammatoire à
docardite infectieuse (pathologie car- ments prématurés (9), de prééclampsie distance de la cavité buccale.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 7


lence en France avoisine les 50 % de la
population adulte (14). Enfin, il appa-
raît nécessaire de favoriser la coopéra-
tion active des chirurgiens-dentistes,
des médecins généralistes, des méde-
cins spécialistes et des professionnels
paramédicaux. Les décideurs de santé
publique ont un rôle majeur à jouer
dans cette démarche.

Jean-Noël Vergnes
Assistant hospitalier universitaire,
Cathy Nabet
Professeur des universités,
praticien hospitalier,
Département de Santé publique
– Épidémiologie, UFR d’Odontologie
– université Paul-Sabatier, Toulouse.

Des essais cliniques sont actuelle- parcours de soins médicaux et den-


ment en cours pour évaluer le bénéfice taires sont encore aujourd’hui en
du traitement des parodontites sur France trop indépendants les uns des
l’amélioration de l’état de santé géné- autres. Cette situation ne doit pas faire
1. Voie directe : diabète non équilibré, syndrome de
rale et la qualité de vie des individus oublier que la cavité buccale fait partie Gougerot-Sjögren. Voie indirecte : prise de médica-
atteints de pathologies chroniques. intégrante du corps humain. Au vu des ments comme certains anti-dépresseurs, anti-histami-
niques et anti-hypertenseurs, radiothérapie cervico-
données récentes de la littérature scien- faciale.
Nécessité de corréler soins tifique, il semble important d’accentuer 2. Par exemple, la primo-infection herpétique symp-
dentaires et médicaux les efforts de santé publique sur le tomatique se caractérise par une gingivo-stomatite
érythémateuse, et le syndrôme pieds-mains-bouche
Pour des raisons historiques et d’or- dépistage précoce et le traitement des par une éruption buccale vésiculeuse se transformant
ganisation des études médicales, les parodontites, maladies dont la préva- rapidement en érosions (15).

◗ Références bibliographiques
(1) Wheater P.R., Young B., Heath J.W. Histologie prevention, diagnosis, and treatment of infective Maternal periodontitis and the causes of preterm
fonctionnelle. Bruxelles : De Boeck Supérieur, endocarditis (new version 2009). European birth: the case-control Epipap study. Journal of
2004 : 424 p. Heart Journal, 2009, vol. 30, n° 19 : p. 2369- Clinical Periodontology, 2010, vol. 37, n° 1 :
(2) Akpan A., Morgan R. Oral candidiasis. Post- 2413. p. 37-45.
graduate Medical Journal, 2002, vol. 78, (8) Blaizot A., Vergnes J.N., Nuwwareh S., (12) Darré L., Vergnes J.N., Gourdy P., Sixou M.
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(3) Pihlstrom B.L., Michalowicz B.S., John- cardiovascular events: meta-analysis of observa- control in diabetic patients: a meta-analysis of
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8 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Principes généraux de prévention
en santé bucco-dentaire
Les douze premières années de vie sont la période pendant laquelle se construit la santé
bucco-dentaire des enfants et des futurs adultes. Si la situation s’est globalement amélio-
rée pour l’ensemble de la population au cours des dernières décennies, de fortes inégali-
tés subsistent et constituent un défi majeur de santé publique. La prévention doit s’orga-
niser à l’échelon territorial, au plus près des populations en fonction de leurs besoins. Elle
doit impliquer l’ensemble des professionnels et des relais.

La santé bucco-dentaire fait partie


intégrante de la santé générale et du
bien-être. Bien qu’une amélioration
globale de la santé bucco-dentaire ait
été notée dans les pays développés ces
trente dernières années grâce au bros-
sage avec un dentifrice fluoré, de pro-
fondes inégalités en matière de santé
bucco-dentaire persistent et constituent
un enjeu majeur en termes de santé
publique. Les déterminants (notam-
ment comportementaux : brossage des
dents, utilisation du fluor, habitudes
alimentaires, etc.), mais aussi les condi-
tions d’accès et de recours aux soins
posent de façon évidente des questions
d’égalité, notamment sociale, face à la
santé, soulignant l’existence de groupes
à risques : populations socio-économi- relative à la politique de santé publique En matière de santé bucco-dentaire,
quement défavorisées, personnes incluant pour la première fois un objec- comme en d’autres domaines, la mise
âgées dépendantes, personnes handi- tif de santé bucco-dentaire1. en place d’un programme de préven-
capées, etc. tion cohérent doit tenir compte de tous
Des interventions multiples les échelons existants (national, régio-
La nécessité de développer, en com- Les interventions de prévention sont nal, départemental et communal) pour
plément du système de soins, une multiples (lire l’encadré ci-dessous) s’inscrire dans une dynamique positive
approche plus collective de la santé, individuelles et collectives, elles et complémentaire.
prenant mieux en compte les détermi- concernent des acteurs et des structures
nants non médicaux de la santé et fai- nombreuses et variées (lire l’encadré Des acteurs complémentaires
sant toute sa place à la prévention a page 10). Elles nécessitent une adapta- sur une approche territoriale
conduit à une véritable avancée de la tion selon les diverses populations Au niveau national, la mesure phare
santé publique dentaire, et s’est traduite cibles, en fonction des problématiques du plan de santé publique dentaire2 (pre-
par l’adoption de la loi du 9 août 2004 et des niveaux de risque. mier plan de santé publique dans ce

Prévention bucco-dentaire : de quoi parle-t-on ?


Comme pour toutes les thématiques de santé publique, il y a trois niveaux du dépistage. Elle vise à prévenir l’aggravation de la maladie bucco-dentaire
de prévention bucco-dentaire : et sa durée d’évolution en la diagnostiquant le plus tôt possible alors qu’elle
Prévention primaire : elle vise à réduire le nombre de nouveaux cas est asymptomatique (les premiers stades de la carie se développant au
(incidence) de la maladie bucco-dentaire. Elle se situe avant l’apparition de niveau de l’émail, cela se fait sans douleur).
la maladie en identifiant tous les facteurs de risque (comportement alimen- Prévention tertiaire : elle intervient lorsque la maladie est installée, pour
taire à risque, diabète, stress, etc.). éviter sa récidive ou sa complication. Elle peut nécessiter des soins, voire
Prévention secondaire : ce type de prévention se développe par le biais une réhabilitation prothétique si besoin.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 9


domaine) est l’instauration d’un examen atteintes dentaires des enfants). Mis en santé dentaire et où l’impact des mes-
bucco-dentaire de prévention pour les place dans le cadre d’un partenariat sages sur les pratiques est maximal. Elle
enfants de 6, 9, 12, 15 et 18 ans en cabinet entre l’Assurance maladie, les collectivi- a pour objet de garantir la cohérence et
libéral ou salarié, pris en charge à 100 % tés territoriales, les professionnels de la qualité des dispositifs de prévention
sans avance de frais, de même que les santé et l’Éducation nationale. Ce pro- bucco-dentaire5. Une procédure de
soins dispensés pendant les six mois sui- gramme est construit autour d’un sys- suivi des dispositifs permet de s’assurer,
vant l’examen pour les 6 et 12 ans tème de labellisation d’actions de pré- dans la durée, de la conformité de la
(art. L. 2132-2-1 du Code de la santé vention bucco-dentaire ; les labels étant mise en œuvre de l’action labellisée au
publique). Cette mesure3 est accompa- octroyés sur avis d’un comité scienti- cahier des charges Arcade.
gnée de séances d’éducation pour la fique composé d’experts.
santé dans certaines classes de CP et de Les objectifs d’Arcade sont d’harmo- Une approche globale en santé
6e pour inciter les enfants et leur famille niser, coordonner et généraliser les La santé dentaire ne dépend pas que
à bénéficier de l’examen grâce à une actions de prévention bucco-dentaire d’une seule profession de santé mais
campagne d’information à destination du en Île-de-France, afin d’agir sur les nécessite une approche intégrée. Elle
grand public et des professionnels, comportements des jeunes en vue de ne doit pas être considérée comme dis-
autour du slogan : « M’ T dents »4. préserver leur santé bucco-dentaire. tincte de la santé générale. À ce titre, il
La labellisation Arcade est proposée est plus que souhaitable de développer
Sur le plan régional, l’Île-de-France, à tout promoteur d’action bucco-den- la transversalité professionnelle, en
par exemple, a développé le programme taire intervenant au bénéfice des enfants renforçant les connaissances des pro-
Arcade (Action régionale contre les de 0 à 12 ans, période où se construit la fessionnels de la santé dans le domaine

Assurance maladie, État, collectivités, professionnels :


les principaux intervenants en prévention bucco-dentaire
Plusieurs organismes publics, professionnels et associatifs ainsi • La société française des Acteurs de la santé publique bucco-
que les collectivités territoriales interviennent dans la prévention dentaire (ASPBD) est une association créée en 2002 qui rassemble
bucco-dentaire. Bref aperçu de leurs missions respectives. les acteurs de la santé publique dentaire dans leur diversité pour facili-
ter l’échange de savoirs et de compétences, aider à la mise en place
• L’Assurance maladie fait de la prévention bucco-dentaire : de projets ou de programmes en apportant un appui méthodologique,
– par la mise en œuvre conventionnelle de l’examen bucco-dentaire pour les en proposant des formations, en participant à la création d’outils péda-
enfants de 6, 9, 12, 15 et 18 ans et par des campagnes de promotion dans gogiques (ex : dépliants sur la dent de 6 ans, CDrom Les Kur’dents,
les écoles du programme « M’T dents » grâce à de multiples partenariats ; etc.). Elle co-organise la Journée de santé publique dentaire, qui se tient
– par des bilans bucco-dentaires pour les enfants de 4 à 12 ans et pour les chaque année début novembre.
adultes de plus de 35 ans, mis en place de 2004 à 2006 par la Caisse • Les organismes de mutuelles ont toujours fait de la promotion de
nationale du RSI. la santé une de leurs priorités, tant sur le plan local que national. Auprès
Un courrier, envoyé à date anniversaire, invite à se rendre chez le praticien des seniors ou des plus jeunes, ils interviennent au travers de leurs
de son choix. centres de santé dentaire par des programmes d’éducation pour la
• L’État est impliqué par les agences régionales de la santé (ARS), qui ont santé bucco-dentaire.
repris notamment les budgets de prévention des Drass-Ddass et d’une
partie des fonds de prévention FNPEIS (Fonds national de prévention, d’édu-
cation et d’information sanitaire) des régimes d’assurance maladie. Les
Collectivités territoriales
agences financent des actions de prévention bucco-dentaire. Au plan régio- Assurance maladie
région, département, communes
nal, les universités et services d’odontologie des hôpitaux s’impliquent ou communauté de communes Mutualité
également.
• Les collectivités territoriales, communes, département, région,
sont partenaires ou promoteurs de projets ou programmes, mais inter-
viennent aussi sur leur territoire grâce aux actions de leurs personnels
(personnels des écoles primaires, des animateurs scolaires et périsco-
laires, des centres de santé, des structures de la petite enfance, etc.)
qui sont autant de relais potentiels. Certaines de ces collectivités ont
d’ailleurs des services ou des équipes dédiées de professionnels qui Citoyen
œuvrent sur le terrain (professionnels de la santé publique, chirurgiens-
dentistes, assistantes dentaires, etc.).
• L’Union française pour la santé bucco-dentaire (UFSBD) est un
organisme créé en 1966 par la profession dentaire. Elle est organisée en
antennes départementales et régionales ; les chirurgiens-dentistes en sont
les acteurs. Ils interviennent dans des projets de prévention : séances d’édu-
cation collective, dépistages bucco-dentaires, formations de partenaires- Institutions de l’État Chirurgiens-dentistes
Universités (salariés ou libéraux)
relais, que ce soit en milieu scolaire, en établissement d’hébergement pour
personnes âgées dépendantes, etc. (lire l’article page 13).

10 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


bucco-dentaire, et particulièrement son nels de santé de ces équipes, en raison dépenses de soins dentaires. C’est lors de
lien avec la santé générale. du peu ou du manque de formation sur la petite enfance, période clé pour la
Certains professionnels de santé la nature des mesures à mettre en place santé bucco-dentaire d’un individu, que
(médecins généralistes, gériatres, pour préserver la santé bucco-dentaire, sont alors acquises les habitudes en
sages-femmes, pédiatres, infirmières, ne sont pas toujours en capacité de pro- matière d’hygiène et d’alimentation. Cette
puéricultrices, pharmaciens, médecins diguer des conseils adaptés, de surveiller acquisition de bonnes pratiques s’appuie
du travail, service de santé préventive ou de mettre en place des pratiques aussi sur les mères de famille, celles-ci se
universitaire, etc.) sont en première d’hygiène bucco-dentaire adaptées ou révélant ici de précieuses alliées.
ligne, voire les seuls à être en contact de détecter les besoins de soins.
avec des populations spécifiques dans Les centres de PMI, les crèches, etc.,
le cadre des soins de premier recours Des approches complémentaires constituent un lieu privilégié pour inté-
ou de consultations de prévention. sur les lieux de vie de l’enfant ou grer la promotion de la santé bucco-den-
du jeune taire aux actions sanitaires et sociales
Il serait souhaitable d’intégrer dans Deux types d’approche préventive d’un département. Les personnels de ces
leurs pratiques une approche de la coexistent : l’approche populationnelle structures, une fois formés par un den-
santé dentaire pour qu’ils soient en et l’approche par groupes à risques. tiste référent, constitueront un relais effi-
mesure de conseiller et d’orienter leurs Cette dernière est populaire car elle cace de prévention bucco-dentaire grâce
patients vers les chirurgiens-dentistes cadre bien avec une approche clinique à leur contact permanent avec l’enfant et
en cas de besoin. En effet, nombreux (celle du dépistage entre autres…). leur relation régulière avec les parents
sont les patients qui, consultant leur L’approche populationnelle est logique- (lire l’article page 16). Il existe des
médecin régulièrement, ne voient un ment essentiellement investie sur les moments clés (grossesse, allaitement,
chirurgien-dentiste qu’en situation d’ur- jeunes enfants ; plus les réflexes pour diversification alimentaire, examens des
gence. Dans le cadre de leur pratique une bonne santé bucco-dentaire sont 9e et 24e mois, arrivée de la dent de 6 ans
clinique préventive, les médecins pour- acquis tôt par l’éducation à la santé (pré- et celle de 12 ans, etc.) pour transmettre
raient intégrer des conseils de préven- vention primaire), plus ils ont de chance ou renouveler les messages.
tion bucco-dentaire (pour les patients de perdurer dans la vie adulte. Le prin-
atteints de diabète, de cardiopathies, cipe est que prévenir, c’est autant d’ar- De même, le milieu scolaire est favo-
pour les femmes enceintes, etc.). gent dépensé en moins plus tard. rable à la mise en place d’actions d’édu-
Une action de la Mutualité sociale agri- cation pour la santé ou de dépistage. Il
En outre, les chirurgiens-dentistes ne cole (MSA)7, évaluée par le Centre de brasse en effet tous les milieux socio-
sont que très rarement intégrés dans les recherches économiques, sociologiques économiques et permet à tous de rece-
équipes médicales des structures de la et de gestion (Cresge), montre l’impact voir les messages de prévention et/ou
petite enfance (PMI, crèches, etc.) ou économique significatif et rapide (au de bénéficier d’un examen de dépis-
des structures médico-sociales (IME, bout de trois ans) de la prévention, au- tage, idéalement à bord d’un camion de
Ehpad, IMPro, etc.)6. Or, les profession- delà de son efficacité sanitaire, sur les prévention bucco-dentaire équipé
comme un cabinet dentaire, avec une
proposition de prise en charge chez le
Formation des professionnels praticien de son choix.
Formation initiale des chirurgiens-dentistes
Aller à la rencontre de l’enfant ou du
Les étudiants, lors de leur formation initiale, ont des enseignements sur les méthodes de prévention
jeune, c’est permettre d’optimiser les
de la carie et de la maladie parodontale en direction des enfants et des adultes.
actions de prévention en les rendant
Dans le cadre des enseignements en santé publique, les étudiants en chirurgie-dentaire acquièrent
acteurs par des actions concrètes, qui
des connaissances sur la méthodologie de projet de prévention et sur les outils en éducation pour
s’inscrivent et se prolongent dans leur
la santé et en éducation thérapeutique du patient.
quotidien. Dans les messages, il s’agira
Sur le plan pratique, les universités ont conclu des conventions de stage avec des partenaires
de ne pas avoir une vision trop réduite
acteurs en prévention bucco-dentaire. Ainsi, les étudiants participent à des actions d’éducation, de
à la notion de carie, mais au contraire
formation relais et à des dépistages en milieu scolaire ou en institution pour personnes âgées
d’élargir à la prévention de la trauma-
dépendantes, par exemple.
tologie (notamment sport à risque ou
jeux dans les cours d’écoles), à la santé
Formation continue des chirurgiens-dentistes
des muqueuses ou aux anomalies
Des colloques, congrès et journées de formation sont organisés autour des thématiques de la
dento-maxillaires.
promotion de la santé bucco-dentaire dans le cadre de la formation continue.
Des diplômes universitaires en pédagogie de la santé, en éducation thérapeutique, sont ouverts
aux chirurgiens-dentistes sans être spécifiques au domaine bucco-dentaire.
Travailler avec les parents
Les actions de prévention sont essen-
Des formations diplômantes en université (master) existent également en santé publique et en
tiellement axées sur les enfants. Si cette
pédagogie de la santé, elles permettent aux chirurgiens-dentistes d’acquérir des connaissances et
stratégie est essentielle dans la mesure
des compétences applicables à leur spécialité.
où elle rend l’enfant actif et impliqué et
qu’elle s’effectue le plus généralement
Formation des autres professionnels de santé
sur un registre ludique, elle n’est pas
La promotion de la santé bucco-dentaire apparaît de façon marginale (quelques heures) dans les
pour autant suffisante. L’autre condition
formations initiales médicales et paramédicales.
de réussite est que les parents puissent

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 11


jouer un rôle de relais efficace. Une
De l’usage du fluor
étude qualitative sur l’impact des actions
de prévention bucco-dentaire réalisée Les fluorures agissent dans la phase pré-éruptive (avant l’apparition de la dent en bouche) au moment
pour le conseil général du Val-de-Marne8 de la formation de la dent, et dans la phase post-éruptive au niveau de la dent exposée au milieu
a permis de mettre en évidence trois buccal avec la salive, l’alimentation et la plaque bactérienne.
registres utilisés par les parents pour L’incorporation du fluorure au moment de la formation de la dent a un effet protecteur contre la carie
expliquer à leurs enfants la nécessité temporaire. L’apport topique (à la surface de la dent) du fluorure permet de constituer un réservoir
d’une bonne hygiène bucco-dentaire : de fluorure près de la surface dentaire. En l’état actuel des connaissances, les fluorures auraient
• le registre santé : l’hygiène bucco- une efficacité supérieure lorsqu’ils sont administrés par voie topique (dentifrice, gel, vernis, bain de
dentaire permet de protéger ses dents bouche).
contre les caries ; L’usage des fluorures doit être modulé en fonction du risque carieux qui se diagnostique au moment
• le registre beauté : l’hygiène bucco- d’une visite chez un chirurgien-dentiste ou un autre professionnel de santé.
dentaire s’inscrit dans un registre Pour les enfants à risque faible, seul l’apport topique est efficace dès l’apparition des premières
esthétique ; dents avec le brossage bi-quotidien à l’aide d’un dentifrice fluoré dosé en fonction de l’âge. Pour les
• le registre social : l’hygiène bucco- enfants à risque élevé, en plus du brossage, des thérapeutiques fluorées complémentaires peuvent
dentaire relève du respect de l’autre. être prescrites après la réalisation d’un bilan des apports en fluor (eau de boisson, comprimés, sel
Comme on peut le constater, la pré- fluoré). On choisit une seule forme d’apport par voie générale. La posologie recommandée est de
vention bucco-dentaire, pour avoir un 0,05 milligramme de fluor par jour et par kilo de poids, sans dépasser un milligramme pour toutes
effet pérenne et positif, est un travail en les sources de fluor afin d’éviter l’apparition d’une fluorose1.
réseau avec un véritable maillage territo- Sylvie Azogui-Lévy
rial, que ce soit à l’échelle d’une région,
d’un département ou d’une commune. 1. La fluorose est une atteinte de l’émail dentaire, qui devient, par excès de fluor, cassant. On la
visualise par des taches blanches sur la surface dentaire.
Évelyne Baillon-Javon
Directrice du Pôle prévention
et promotion de la santé, agence régionale 1. Objectif général 3 – Améliorer la santé bucco-den- bucco-dentaire en cabinet (et non en milieu scolaire).
de santé d’Ile-de-France, Paris, taire des enfants, particulièrement aux âges critiques 5. Arcade label I (Information 0-2 ans) – IES (Infor-
Fabien Cohen de 6 et 12 ans, dans toutes les catégories sociales. Haut mation – Éducation pour la santé 3-5 ans) – IDES
Conseil de la santé publique, avril 2010 : p. 253-254. (Information – Dépistage – Éducation pour la santé
Chirurgien-dentiste, En ligne : http://www.hcsp.fr/docspdf/avisrapports/hcs- 6-11 ans).
secrétaire général de l’ASPBD, pr20100317ObjectifsSP.pdf 6. Protection maternelle et infantile (PMI), Institut
2. En ligne : http://www.sante.gouv.fr/le-plan-de-pre- médico-éducatif (IME), Établissement d’hébergement
Carol Heiwy vention-bucco-dentaire.html pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), Institut
Chirurgien-dentiste, responsable 3. Elle est présente en 2010 dans soixante départe- médico-professionnel (IMPro).
du Pôle surveillance, service de santé ments. 7. Enfants, adolescents, futures mamans ou adultes : à
4. Il s’agit de la promotion du programme de préven- certains âges, ils bénéficient d’un examen de préven-
publique dentaire, conseil général tion bucco-dentaire de la Cnamts, inscrite dans la tion bucco-dentaire pris en charge à 100 % par la MSA.
du Val-de-Marne, Créteil. convention nationale dentaire proposant un examen 8. Réalisée par le cabinet GMV conseil.

Haute Autorité de santé : des recommandations pour la prévention de la carie dentaire


En 2010, la Haute Autorité de santé a publié ses recommandations 6 mois, et doit être réservée à ceux présentant un risque carieux2 ;
pour la prévention de la carie dentaire. • le scellement de sillon (vernis à la surface de la dent) qui a fait la preuve
de son efficacité.
La Haute Autorité de santé (HAS) a publié en octobre 20101 ses recom- La HAS définit des moments cruciaux d’intervention : chez la femme
mandations en matière de prévention de la carie dentaire, prenant appui enceinte, chez l’enfant dès 6 mois, puis à 2, 3, 6, 9, 12, 15 ans, pour les
sur le niveau de preuves relevé au plan international et l’expérience d’un 18-25 ans, pour les 25-60 ans et au-delà (période clé du passage à la
groupe d’experts. Elle met l’accent sur la prévention primaire, l’éducation retraite). Par ailleurs, la HAS identifie des populations à risque carieux
et la promotion de la santé, la formation des personnels de la santé et du élevé : personnes âgées dépendantes (à domicile et en institution) ; per-
médico-social, ainsi que celle des futurs parents et des personnels de la sonnes handicapées (à domicile et en institution) ; personnes atteintes de
petite enfance, de l’école, etc. pathologies chroniques ; population (enfant et adulte) en situation socio-
La HAS insiste sur les stratégies de prévention qui ont fait leurs preuves économique défavorisée ; population migrante ; population carcérale.
comme :
• le brossage des dents – élément important de l’hygiène bucco-dentaire –, Fabien Cohen
supervisé par les parents ou réalisé à l’école (ou en crèche pour les enfants Secrétaire général de l’ASPBD.
de moins de 3 ans) : une efficacité difficile à dissocier de l’utilisation conco-
mitante du dentifrice fluoré adapté à l’âge ;
• les topiques fluorés (fluor appliqué au contact des dents), dentifrice, bain 1. Stratégies de prévention de la carie dentaire, synthèse et recommandations,
de bouche, vernis, gel, qui sont des moyens efficaces de prévention de la rapport de la HAS, mars 2010. Téléchargeable sur www.has-sante.fr
2. Patients présentant au moins un des facteurs de risque individuels suivants :
carie avec des niveaux de preuves élevés ou moyens suivant l’âge des
absence de brossage quotidien avec du dentifrice fluoré, ingestions sucrées régu-
individus et le type d’application. À ce propos, la HAS rappelle que la sup- lières en dehors des repas ou du goûter (aliments sucrés, boissons sucrées, bon-
plémentation en fluor par voie orale (comprimé, goutte) évaluée récemment bons), prise au long cours de médicaments sucrés ou générant une hyposialie ou
par l’AFSSAPS, n’est plus recommandée pour les enfants qu’à partir de diminution du volume de la salive, etc.

12 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


UFSBD : développer la prévention
bucco-dentaire sur tous les terrains
L’Union française pour la santé bucco-dentaire constitue l’organisation de la profession
dentaire dont la mission prioritaire est d’animer et de coordonner les actions de prévention
et de promotion de la santé bucco-dentaire. Elle appuie son action sur un important réseau
de chirurgiens-dentistes organisé aux niveaux départemental et régional. Depuis plus de
quarante ans, ces professionnels interviennent en dehors de leur cabinet dentaire pour
faire de la prévention dans les écoles, les Ehpad, les crèches, les hôpitaux, les prisons,
etc. Ces actions « de terrain » permettent de mieux appréhender les besoins de santé des
populations et d’améliorer la pratique professionnelle et la prise en charge des patients
au cabinet dentaire.

Les réformes récentes en matière de madame Morano, en juillet 2010, fait pris en charge, chez le chirurgien-den-
santé publique, et notamment la loi du état d’un demi-million de personnes tiste de leur choix. Afin d’encourager les
21 juillet 2009 portant réforme de l’hô- qui n’ont pas accès à une santé bucco- enfants à réaliser cet examen et à fré-
pital et relative aux patients, à la santé dentaire satisfaisante du fait de leur quenter le cabinet dentaire, l’UFSBD est
et aux territoires, invitent les profes- handicap. Quant aux multiples expéri- mandatée et financée par l’Assurance
sionnels à passer d’une logique de mentations menées auprès des per- maladie pour intervenir en classes de CP,
soins à une logique plus préventive. sonnes âgées dépendantes, elles témoi- CE2 et 6e. Ces séances de sensibilisation
Pour ces réformes, la profession den- gnent que 35 à 50 % des résidents permettent de transmettre aux enfants
taire et les chirurgiens-dentistes étaient d’Ehpad ont des besoins importants en les messages clés en matière d’hygiène
en partie préparés et déjà « motivés » : soins bucco-dentaires faute de pouvoir et de santé bucco-dentaire. Les classes
dès les années 1960, ils ont organisé la bénéficier d’une bonne hygiène et d’un en zones sensibles et défavorisées sont
prévention bucco-dentaire en créant accès aux soins adéquat. priorisées.
l’Union française pour la santé bucco- Ces résultats contrastés montrent que : Chaque année, dans ce cadre, les
dentaire (UFSBD)1. • la prévention et les actes de prophy- chirurgiens-dentistes de l’UFSBD inter-
Au cours des dernières décennies, du laxie des chirurgiens-dentistes sont viennent dans plus de cinq mille écoles
fait, d’une part, d’une évolution favo- utiles pour la grande majorité de la primaires et sept cent cinquante collèges
rable du comportement des enfants en population ; dans soixante-cinq départements. Soit
matière d’hygiène bucco-dentaire et, • les actions menées depuis quarante environ quatre cent mille enfants sensi-
d’autre part, du travail effectué dans et ans dans les écoles ont porté leurs fruits bilisés par an. L’UFSBD a conclu un
en dehors des cabinets dentaires, la et qu’il est important de les accord de partenariat avec l’Éducation
santé bucco-dentaire générale de la pérenniser ; nationale afin de favoriser l’intégration
population s’est améliorée. Cette évolu- • il faut redoubler d’efforts auprès de des actions de prévention dans une
tion a été mise en évidence par des publics spécifiques et auprès de ceux démarche pédagogique globale, en
enquêtes épidémiologiques réalisées qui ne fréquentent pas le cabinet den- cohérence avec le programme scolaire.
par l’UFSBD2, qui montrent une baisse taire pour les aider à adopter des com- La séance d’éducation collective dans les
progressive significative de l’indice portements de santé favorables et pour classes est animée et interactive (jeux de
carieux, dit « CAO » (dent cariée, absente, leur donner accès à la prévention et aux rôles). Avec du matériel pédagogique
obturée), bon indicateur de la santé soins. simple et ludique, les chirurgiens-den-
bucco-dentaire. En 2006, en France, la tistes amorcent un dialogue qui vise à
proportion d’enfants de 12 ans totale- Agir auprès des enfants... déjouer les craintes et sensibiliser les
ment indemnes de carie était de 56 %. La loi de santé publique de 2004 a enfants à l’importance de la visite chez
Dans ce contexte positif, plusieurs fixé comme objectif de réduire de 30 % le chirurgien-dentiste. À l’issue de la
indicateurs restent cependant alar- le taux de caries des enfants de 6 ans et séance, chaque enfant se voit remettre
mants. La dernière enquête de l’UFSBD 12 ans. Dans ce contexte, la Caisse natio- un kit de brossage composé d’une
auprès des enfants de 6 et 12 ans3 nale de l’assurance maladie des tra- brosse à dents et d’un dépliant d’infor-
montre que 20 % des enfants cumulent vailleurs salariés a lancé, en 2007, la mation sur les méthodes de brossage.
72 à 80 % des pathologies dentaires. Le campagne « M’ T dents » qui invite les Les enseignants peuvent prolonger la
rapport sur la santé bucco-dentaire des jeunes de 6, 9, 12, 15 et 18 ans à un séance grâce à un guide pédagogique
personnes handicapées remis à examen bucco-dentaire, entièrement remis par le formateur. Une évaluation

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 13


du dispositif est réalisée chaque année. préparer les professionnels à ce type Les besoins des populations sont ainsi
Elle montre que l’acquisition des d’exercice. appréhendés de manière « globale »,
connaissances par les élèves – mesurée « environnementale », ce qui améliore
par des tests avant et après l’intervention Agir pour les personnes âgées ensuite la prise en charge au cabinet.
– est satisfaisante, prouvant ainsi la qua- dépendantes et les personnes Mais de quoi parle-t-on quand on parle
lité du programme proposé. handicapées de « prise en charge globale » du patient ?
L’UFSBD agit également en faveur Les chirurgiens-dentistes sont proches de
… y compris les tout-petits des publics adultes, notamment les plus leurs patients, au contact de leur intimité,
Depuis une dizaine d’années, l’UFSBD vulnérables ; personnes âgées ou han- souvent informés de leur histoire. Ils ren-
intervient également dans les écoles dicapées, personnes souffrant de mala- contrent des personnes dont l’état de
maternelles et les crèches. Parce qu’il est dies chroniques, etc. Dans les Ehpad, les santé globale les intéresse car il est lié à
nécessaire de rencontrer les enfants dès maisons d’accueil spécialisées, les foyers l’état de santé bucco-dentaire. Leur res-
leur plus jeune âge et de sensibiliser les d’accueil médicalisés, des formations ponsabilité est de prendre soin (et pas
parents et l’entourage éducatif pour que complètes à destination des personnels seulement soigner) d’une personne dans
les bonnes habitudes soient acquises le soignants sont proposées. Elles sont à la toutes ses problématiques de santé.
plus tôt possible. fois théoriques et pratiques. L’objectif est Inscrit dans une démarche de préven-
Dans les crèches, l’UFSBD sensibilise de sensibiliser les personnels à l’impor- tion, le chirurgien-dentiste parlera d’ali-
les parents et le personnel encadrant aux tance de la santé bucco-dentaire et de mentation à un enfant de 6 ans qui
pratiques d’hygiène bucco-dentaire dès favoriser la prise en charge effective de cumule plusieurs caries, il parlera de dro-
la première dent. La prévention bucco- l’hygiène bucco-dentaire des résidents gues à un adolescent qui (visiblement)
dentaire fonctionne mais demande beau- les moins autonomes afin de limiter les consomme du cannabis. Face à une
coup d’efforts. Elle est contrainte par pathologies et les risques associés. femme enceinte souffrant de parodontite,
plusieurs idées reçues qu’il faut, pas à L’UFSBD a noué plusieurs partenariats il évoquera les risques d’accouchement
pas, déconstruire. Pour de nombreux avec des syndicats, fédérations et prématuré, etc. Il s’agit, d’une part, de
parents et encore quelques profession- groupes gestionnaires d’Ehpad afin de prévenir les pathologies bucco-den-
nels de santé, les dents de lait ne néces- s’inscrire dans une politique transversale taires (et la profession a longtemps milité
siteraient pas de soins ni de brossage. Si d’amélioration des pratiques. De même, pour que les actes de prophylaxie comme
bien que certains enfants de 3 ans cumu- avec les organismes Arrco et Agirc et le scellement de sillons soit remboursés
lent jusqu’à six ou sept caries ! l’association France Alzheimer. Cette par l’Assurance maladie), et, d’autre part,
Dans les classes de maternelle, des approche collaborative permet d’ins- de remplir une fonction de prévention
ateliers très ludiques avec des aliments crire la démarche de formation dans le face à d’autres pathologies ou risques : le
factices, de la pâte à modeler, des maxi- cadre d’un projet d’établissement cohé- surpoids et l’obésité, les addictions, les
mâchoires et des maxi-brosses à dents, rent porté à la fois par la direction et les cancers buccaux, le diabète, la dénutri-
des comptines à chanter sont mis en salariés. Depuis 2010, l’UFSBD a formé tion, les troubles musculo-squelettiques,
place. Les enfants s’amusent, manipu- les personnels soignants dans près de les apnées du sommeil, etc.
lent des objets inédits pour eux, chan- cent cinquante établissements L’UFSBD a besoin d’être soutenue
tent, bougent, et toutes ces activités leur médico-sociaux. dans sa démarche vis-à-vis de la profes-
permettent de mieux appréhender et sion dentaire. Dans l’intérêt des usagers,
retenir les informations transmises. Tout Vers une prise en charge des enfants et notamment des familles les
ce travail n’est utile que si les enfants « globale » du patient plus vulnérables, il est important, d’une
dépistés, et/ou conseillés pendant des au cabinet dentaire part, que la santé bucco-dentaire soit
séances individuelles ou collectives, se Dans le domaine bucco-dentaire, la reconnue comme une priorité de santé
rendent ensuite dans un cabinet den- question de la prévention n’est pas « natu- publique et, d’autre part, que les chirur-
taire. L’intérêt de la démarche, c’est le relle » : certains chirurgiens-dentistes ne giens-dentistes soient identifiés comme
lien entre l’action de prévention sur le l’ont pas encore intégrée dans leur pra- de véritables acteurs de prévention.
terrain et les actes de prévention et de tique. D’ailleurs, l’exercice ne l’impose
soins réalisés au cabinet. La mission de pas. C’est la conscience et l’ambition Sophie Dartevelle
prévention et d’éducation doit être qu’ils ont de faire progresser cet exercice Présidente,
menée sur tous les terrains, cabinet den- qui l’imposent. L’UFSBD a contribué, Patricia Vernay
taire compris, afin d’optimiser son effet. depuis les années 1960, à faire sortir les Chef de pôle Opérations de santé publique,
Seule la répétition des messages de professionnels de santé de leur cabinet Jacques Wemaere
motivation est un gage de réussite sur le pour aller à la rencontre de ceux qui, Vice-président, UFSBD, Paris.
long terme. pour des raisons diverses, ne fréquen-
L’UFSBD assure en parallèle la forma- taient pas le cabinet dentaire. Ces actions 1. L’UFSBD, association loi 1901, a été créée en 1966 par
tion médicale continue des chirurgiens- de terrain favorisent « la rencontre » entre l’Ordre national des chirurgiens-dentistes et les princi-
paux syndicats. L’UFSBD est aujourd’hui centre colla-
dentistes de manière à faire évoluer la les chirurgiens-dentistes et les publics et borateur de l’OMS.
pratique et la qualité de la prise en charge une meilleure compréhension des 2. L’UFSBD a réalisé cinq enquêtes épidémiologiques (en
1987, 1990, 1993, 1998 et 2006) sur des échantillons
des patients. Si la sensibilisation dans les besoins des populations. Elles sont éga- représentatifs d’enfants français de 6, 9 et/ou 12 ans, à
crèches fonctionne, de plus en plus de lement l’occasion d’un dialogue avec la demande du ministère de la Santé. Ces enquêtes repré-
parents avec des enfants en bas âge vien- d’autres professionnels de santé : méde- sentent la seule référence épidémiologique en France sur
ces tranches d’âge.
dront dans les cabinets pour une consul- cins de PMI, gériatres, nutritionnistes, 3. Hescot P., Roland É. La Santé dentaire en France.
tation de prévention. Il est important de addictologues, etc. Enfants de 6 et 12 ans. Paris : UFSBD, 2006 : 84 p.

14 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Entretien avec le docteur Paul Karsenty, chargé de la santé bucco-dentaire à la direction générale de la
Santé, Paris.

« Santé bucco-dentaire : une politique


d’ensemble reste à construire »
En dépit de récentes avancées comme la prise en charge à 100 % d’un examen bucco-
dentaire et des soins courants qui en découlent, pour plusieurs tranches d’âge d’enfants
et d’adolescents, une politique de santé bucco-dentaire conjuguant prévention et amélio-
ration de l’accès aux soins reste à construire en France.

La Santé de l’homme : Vous êtes Autres illustrations de l’intérêt crois- mise en œuvre. Pour ce qui concerne le
chargé de la santé bucco-dentaire à sant pour ce secteur de la santé publique : « blanchiment dentaire » à visée esthé-
la direction générale de la Santé le rapport de la Haute Autorité de santé tique, la meilleure information du
(DGS). Quel regard portez-vous sur sur la prévention de la carie, les exper- public10, les contrôles effectués sur les
l’action des pouvoirs publics en la tises de l’Agence française de sécurité produits utilisés dans les « bars à sou-
matière ? Quels sont vos sujets de sanitaire des produits de santé (Afssaps) rire »11 et la nouvelle réglementation
satisfaction ? sur les amalgames, sur le fluor, ou encore européenne (applicable à partir du
l’important rapport de la Cour des 31 octobre 2012) permettront bientôt à
Il y a, depuis quelques années, une comptes sur les soins dentaires. cette pratique de s’effectuer dans de
meilleure prise en considération de la De même, d’autres dossiers, comme bonnes conditions de sécurité.
santé bucco-dentaire dans le champ de celui des assistants dentaires, de la pré-
la santé publique. Cela s’est traduit vention des infections liées aux soins ou S. H. : Et les difficultés ?
notamment par le Plan national de pré- – même si c’est plus anecdotique – celui
vention bucco-dentaire1 et la prise en du « blanchiment dentaire », ont sensible- Si ces avancées sont bien réelles, il est
charge à 100 % d’un examen bucco- ment progressé. L’inscription très pro- vrai qu’elles ne peuvent pas masquer un
dentaire et des soins consécutifs pour chaine des assistants dentaires au Code contexte général difficile. Comme la Cour
les enfants et les adolescents de cinq de la santé publique, et donc leur recon- des comptes l’a bien montré, il n’y a tou-
tranches d’âge2. À une échelle plus naissance en tant que professionnels de jours pas, en France, de véritable poli-
limitée, il y a eu aussi des progrès dans santé, leur permettra notamment de jouer tique d’ensemble en faveur de la santé
la détection précoce des cancers buc- un rôle accru dans les actions de préven- bucco-dentaire. Cela tient à plusieurs rai-
caux3 de même que dans les actions tion. La prévention des infections asso- sons et peut-être d’abord à la faible mobi-
spécifiques en direction de groupes ciées aux soins a progressé, elle aussi, à lisation de la société civile sur ce sujet :
fragilisés : personnes handicapées4, travers la réalisation et la diffusion à la les affections bucco-dentaires, souvent
personnes âgées dépendantes5, popu- profession dentaire – et aux agences considérées comme des troubles
lations en situation de précarité6, per- régionales de santé – d’un document9 qui mineurs, ne sont pas spectaculaires. Elles
sonnes détenues7, consommateurs de rappelle les principales recommanda- ne retiennent pas l’attention des médias,
produits psycho-actifs8. tions à ce sujet et permet d’évaluer leur des parlementaires ni des associations.
Faute d’une pression suffisante, ce sujet
est donc rarement prioritaire pour les
Le Plan national de prévention bucco-dentaire responsables politiques.
Annoncé en novembre 2005 et mis en œuvre à partir de 2007, le Plan national de prévention bucco- De plus, un véritable plan de santé
dentaire vise principalement à développer la prévention individuelle et les soins précoces chez les bucco-dentaire supposerait l’articulation
enfants et les adolescents. Ainsi, une consultation dentaire est systématiquement proposée tous de plusieurs leviers d’action : non seule-
les trois ans entre 6 et 18 ans. Elle est prise en charge à 100 %, sans avance de frais, de même ment la prévention – comme dans le plan
que les soins consécutifs éventuels (hors prothèses, orthodontie ou appareils dentaires). Cette adopté – mais aussi l’accès aux soins, la
mesure s’accompagne d’actions d’information dans les médias (campagnes « M’T dents ») et en formation, la recherche, la qualité et la
milieu scolaire. D’autres mesures, expérimentales, visent à mieux prévenir les affections bucco- diversification de l’offre de soins den-
dentaires dans des groupes sociaux vulnérables (personnes âgées dépendantes, handicapées, taires, etc. En l’absence d’une forte
etc.). Enfin, une mesure spécifique tend à améliorer la détection précoce des cancers buccaux. volonté politique capable d’imposer une
Ce plan national, même limité à la prévention, a inscrit pour la première fois la santé bucco-dentaire coordination, le nombre, la diversité et le
dans les objectifs permanents des politiques de santé des pouvoirs publics. cloisonnement des acteurs concernés
sont des obstacles considérables.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 15


Enfin, comment ignorer le contexte
actuel de la politique de santé : en matière
de soins dentaires notamment, l’exten-
sion des honoraires libres et l’augmenta-
tion du « reste à charge »12 accroissent les
Prévention bucco-dentaire
difficultés d’accès aux soins pour de
larges couches de la population, bien
au-delà des publics précaires. Quel que
en crèche et en centre
soit alors l’intérêt de certaines avancées,
leur portée reste limitée dans une poli-
tique d’ensemble qui demeure problé-
de PMI : des actions
matique pour la santé publique. pour les tout-petits
Propos recueillis par Sylvie Azogui-Lévy

La prévention bucco-dentaire chez l’enfant doit démar-


rer le plus tôt possible. Crèches, écoles, centres de Pro-
1. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/LDP_2011_BD.
pdf (pages 18-19).
tection maternelle et infantile sont des lieux propices à
2. Avec le programme « M’T dents », les enfants et ado-
lescents âgés de 6, 9, 12, 15 et 18 ans sont systéma-
la prévention. Cette démarche requiert toutefois un
tiquement invités, par courrier, à bénéficier, chez le
chirurgien-dentiste de leur choix, d’un examen de
cadre favorable, à commencer par une forte collabora-
prévention pris en charge à 100 % sans avance de
frais. Les soins consécutifs à cet examen (hors pro-
tion entre les différents professionnels.
thèses, orthodontie ou appareils dentaires) sont éga-
lement pris en charge à 100 %.
3. Afin d’améliorer la détection précoce des cancers
buccaux, le ministère, l’Institut national du cancer Hormis quelques conseils dans le Le brossage précoce, facteur
(INCa) et les principales organisations de chirur-
giens-dentistes ont développé, dans ce domaine, des carnet de santé, force est de constater de bonne santé bucco-dentaire
outils spécifiques et de nombreuses actions de forma- que la santé bucco-dentaire de l’enfant Les données de la littérature scienti-
tion continue. Parallèlement, des recherches et des
actions expérimentales (dépistage systématique dans
ne semble être prise en compte qu’à fique (3) concluent qu’un brossage
une population à risque) ont été entreprises. Enfin, partir de 6 ans, et ce grâce à la mise en précoce et régulier, dès l’apparition des
une campagne d’information du grand public sur place du dispositif de prévention « M’ T premières dents, est un facteur de
ces cancers méconnus est prévue. Lien : http://www.e-
cancer.fr/depistage/cancers-cavite-buccale dents ». Comme le préconise la Haute bonne santé bucco-dentaire. Au-delà
4. Mise en place du site : http://www.sante-orale-et- Autorité de santé dans son rapport de de l’aspect préventif lié à la carie, il
autonomie.fr/ et formation à la prise en charge de la mars 2010 (lire l’encadré « Haute Auto- semble important de souligner, au
santé bucco-dentaire des personnes non autonomes
dans cinquante établissements médico-sociaux. rité de santé : des recommandations regard des déterminants de santé, la
5. Prise en charge de la santé bucco-dentaire des rési- pour la prévention de la carie den- dimension de bien-être pour l’enfant :
dents de douze Ehpad. En outre, le thème « Prise en
charge de la santé bucco-dentaire des personnes fra-
taire », page 12), il existe pourtant un sentir ses dents lisses et propres, sa
gilisées ou dépendantes » a été inscrit dans les prio- véritable besoin de prévention avant bouche fraîche après le repas sont des
rités 2012 de la formation continue des personnels cet âge : 37 % des enfants de 6 ans ont sensations à développer, afin de lui
hospitaliers.
6. Ouverture d’une dizaine de PASS bucco-dentaires. déjà des caries et très peu sont soi- donner le goût de les retrouver ensuite.
Soutien au site http://www.accesauxsoinsdentaires. gnées) (1). Or, les cabinets dentaires
aoi-fr.org/ sont peu fréquentés par les très jeunes Inscrire le geste du brossage des
7. Intégration d’un volet sur la santé bucco-dentaire
dans le plan « politique de santé pour les personnes enfants. Il s’agit donc de sortir du dents très tôt dans le quotidien de l’en-
placées sous main de justice » http://www.sante.gouv. modèle bio-médical (2), où la préven- fant gardé en collectivité (crèche, gar-
fr/IMG/pdf/Plan_actions_strategiques_detenus.pdf
8. Mise en place avec la Mission interministérielle de
tion reste du domaine du chirurgien- derie, assistante maternelle), puis
lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) du dentiste dans son cabinet, et d’aller à la ensuite à l’école, permet de créer une
site d’information http://infosdentistesaddictions.org/ rencontre des familles et des jeunes habitude d’hygiène dentaire, au même
mildt.html
9. Grille technique d’évaluation des cabinets den- enfants. Tous leurs lieux de vie sont titre que le lavage des mains après les
taires pour la prévention des infections associées potentiellement des espaces d’action ; activités et le repas. Plus que la tech-
aux soins, Association dentaire française, novembre et les professionnels du champ médico- nique proprement dite, qui a peu de
2011. Ce document est téléchargeable sur le site de
l’association : http://www.adf.asso.fr social et de la petite enfance sont des sens chez un petit enfant, c’est l’habi-
10. http://www.sante.gouv.fr/blanchiment-dentaire. intervenants possibles. Encore faudrait- tude et la possibilité de réaliser ce geste
html
11. Les « bars à sourire », pensés sur le modèle du salon
il qu’ils soient investis comme tels. Une dans un lieu collectif qu’il convient de
esthétique, proposent notamment le blanchiment des formation inter-professionnelle permet développer. En outre, le brossage des
dents ainsi que d’autres prestations. en tout cas de délivrer un corpus théo- dents accompagne aussi la découverte
12. Le « reste à charge », c’est-à-dire la part de la
dépense qui reste à la charge des ménages, s’est accru rique commun. du corps et favorise l’apprentissage
sous l’effet de la hausse du montant des honoraires Le choix des équipes de travailler moteur.
(libres) de la plupart des actes dentaires : les montants sur la promotion du brossage des
pris en charge par les organismes d’assurance mala-
die ayant peu évolué, le taux réel de couverture s’est dents et du soin dentaire permet d’il- Enfin, l’intérêt d’instaurer un rituel
réduit, en particulier pour les actes de prothèse et les lustrer l’intérêt et les limites des du brossage dans ces lieux de vie per-
traitements d’orthodontie.
interventions. met soit de renforcer les bonnes habi-

16 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


connaissance de l’offre de soins de
proximité, peut aussi aider à orienter
l’enfant dans le dispositif.

Pour l’équipe travaillant en PMI, la


présence trimestrielle d’un dentiste
référent contribue à légitimer leurs
actions de prévention et les valorise.
Cette démarche est en adéquation avec
les échanges entre professionnels du
colloque « petite enfance » (5), organisé
conjointement en 2007 par le service de
la PMI du conseil général du 94 et la
société française des Acteurs de la santé
publique bucco-dentaire (ASPBD), qui
soulignaient l’importance de « faire
accompagner la mise en place des
actions du projet d’établissement (des
PMI) par un référent extérieur …».

La prévention pendant la petite


enfance suit ainsi le modèle global dans
lequel les professionnels de santé tra-
vaillent en collaboration dans un système
interdépendant avec la communauté.

Colette Adam, Carole Adriaen,


Pascale Moulin-Birraux,
Cécile Bavay-Simon
Chirurgiens-dentistes, service de santé
bucco-dentaire, conseil général
tudes acquises à la maison, soit d’initier de conforter l’équipe qui investit de du Val-de-Marne, Créteil.
l’enfant : le but étant de pouvoir repro- l’énergie dans cette action.
duire au quotidien, grâce aussi à l’im-
plication des parents, ce geste appris en Centre de PMI, un cadre
collectivité. favorable… avec des limites
Parfois, dans les centres de Protec-
Contraintes pour les équipes tion maternelle et infantile (PMI), des
La proposition de mise en place séances d’examen bucco-dentaire sont
◗ Références
d’une action de promotion en faveur proposées aux jeunes enfants, en lien
du brossage des dents se heurte le plus avec la consultation médicale. C’est en bibliographiques
souvent à un premier obstacle : la réti- réalisant la difficulté qu’éprouvent cer- (1) Hescot P., Rolland E. La Santé dentaire en
cence des équipes. Si, dans les crèches, taines familles à se rendre chez un den- France, enfants de 6 et 12 ans. Paris : UFSBD,
les conditions sont plutôt favorables, il tiste que cette consultation a été créée. 2006 : 84 p.
faut admettre que dans les écoles Ici, le dentiste n’est pas en blouse dans (2) Bury J.-A. Éducation pour la santé :
maternelles, les contraintes matérielles un lieu « technique » mais accueille la concepts, enjeux, planifications. Bruxelles : De
sont importantes. famille dans la salle d’attente, ce qui Boeck-Université, coll. Savoirs et santé,
facilite les échanges. À la demande des 1988 : 235 p.
Le second obstacle concerne l’as- parents, le praticien peut examiner la (3) Kawashita Y., Kitamura M., Saito T. Early
pect chronophage suspecté de cette bouche de l’enfant dans le cabinet childhood caries. International Journal of Den-
action. Pourtant, dans les crèches où le médical du centre de PMI, lieu familier tistry, 2011 : 725320. Epub 2011, oct. 2010.
brossage fonctionne bien et depuis et plus intime que la salle d’attente. En (4) Étude des impacts des actions de préven-
longtemps, cette action est inscrite dans allant ainsi à la rencontre des familles, tion bucco-dentaire. Rapport final, novembre
le projet pédagogique et l’ensemble de celles-ci bénéficient d’une expertise 2009. Document du conseil général du Val-de-
l’équipe y participe. Les enfants appré- dentaire sans être confrontées immé- Marne.
cient ce moment, acquièrent vite une diatement aux soins. Cet aspect rassu- (5) Colloque petite enfance et santé bucco-
certaine autonomie et le temps dévolu rant permet à certaines personnes de dentaire : « Quelles pratiques de prévention de
est finalement assez court. modifier leur a priori négatif sur les la grossesse à l’âge de 6 ans ? ». Actes plé-
dentistes (4) ; pour d’autres, l’absence nières et ateliers, Créteil, 24 mai 2007. Docu-
Il est par ailleurs important que le de possibilité de soins sur place peut ment du conseil général du Val-de-Marne/
brossage des dents en lieu collectif soit être ressentie comme une frustration. ASPBD.
mis en valeur auprès des parents, afin Le dentiste de santé publique, par sa

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 17


Promotion de la santé orale :
quelles interventions efficaces
en milieu scolaire ?
En prévention de la carie dentaire, les interventions en milieu scolaire peuvent être très
efficaces, comme le démontre la littérature scientifique internationale. Ces interventions
doivent être pluridisciplinaires, conjuguer brossage au fluor et nutrition adaptée, et tra-
vailler sur une évolution favorable des conditions de vie et de l’environnement. Les profes-
sionnels doivent travailler ensemble auprès des enfants et des parents, mais en l’absence
de coordination sur le terrain ou de planification appropriée, il a été montré que les actions
ponctuelles d’information ou d’éducation pour la santé ne permettaient pas d’améliorer la
santé bucco-dentaire des enfants à long terme.

Certains « traitements » préventifs, réa-


lisés en milieu scolaire par un chirurgien-
dentiste (applications de vernis fluorés,
scellements de sillons) peuvent aussi être
mis en œuvre. Toutefois, ils restent mar-
ginaux en France (4, 5).
Les études montrent que les enfants
dont les molaires ont bénéficié d’un scel-
lement de sillons ont, trois ans après,
30 % de caries en moins que les autres (4).
Le coût des scellements est élevé puisque
leur pose implique l’intervention de den-
tistes ; néanmoins, les expériences en
milieu scolaire donnent des résultats
positifs pour les enfants à haut risque (6).
Les résultats sont eux aussi encoura-
geants pour les vernis fluorés qui rédui-
sent de près de 40 % le risque de caries (5).
Un programme mené auprès de com-
munautés aborigènes a montré l’intérêt
des vernis fluorés chez les jeunes enfants
en association avec des actions d’éduca-
tion à la santé. Après deux ans, les enfants
En prévention de la carie dentaire, apport de fluor topique comparative- du groupe traité avaient en moyenne
les interventions efficaces applicables ment au groupe contrôle. Les pro- trois surfaces dentaires atteintes de moins
notamment en milieu scolaire sont bien grammes scolaires qui assurent un que les enfants du groupe contrôle (7).
connues. L’effet de ces interventions a apport en fluor topique (brossage ou
été évalué lors d’études cliniques com- rinçage avec des produits fluorés) sont Actions d’éducation
parant l’incidence de la carie dentaire donc efficaces à condition d’être appli- pour la santé
dans les groupes traités et contrôles. qués quotidiennement et d’être ciblés Alors que l’efficacité de certaines stra-
sur des enfants à haut risque. tégies préventives est reconnue, la majo-
Interventions de prévention Une expérience menée en Écosse rité des interventions menées en milieu
Il apparaît que les mesures basées dans des écoles socialement défavorisées scolaire consiste en des actions d’infor-
sur un apport quotidien en fluor a ainsi montré que le brossage des dents mation ou d’éducation pour la santé sou-
topique, par le biais notamment des avec dentifrice fluoré avait un effet positif vent isolées et ponctuelles. Comme le
dentifrices, sont efficaces (1, 2). Après avec un écart d’incidence de 56 % sur démontrent les revues de littérature sur
deux ans, on constate 26 % de caries en deux ans entre les enfants des classes le sujet, les séances d’information n’ont
moins chez les enfants ayant reçu un tests et témoins (3). pourtant pas d’impact direct sur l’inci-

18 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


dence des caries (8). Elles permettent au
mieux d’améliorer le niveau de connais-
sance des enfants.
L’éducation pour la santé correspond
à une démarche plus complète ayant
pour objectif de renforcer les capacités
d’action personnelles des enfants sur leur
santé. Avec un programme d’éducation à
la santé, une évolution favorable des
habitudes d’hygiène bucco-dentaire peut
être obtenue. Cependant, une améliora-
tion à long terme de l’hygiène susceptible
d’aboutir ensuite à une réduction du
risque de carie est plus difficile à démon-
trer. En effet, l’impact des interventions
éducatives en promotion de la santé orale
est complexe à évaluer notamment du
fait de l’origine multifactorielle des mala-
dies bucco-dentaires (9).
L’effet des actions d’éducation à la
santé peut être amélioré et pérennisé en
impliquant l’entourage de l’enfant. Ainsi,
la participation de la communauté édu-
cative et des parents est nécessaire pour
garantir une meilleure acceptabilité et
donc une plus grande efficacité. La mise donc être privilégiées afin d’optimiser cative, professionnels, etc., se doivent
en place de stratégies efficaces de promo- l’effet en terme de santé. Ainsi, certaines donc de travailler ensemble auprès des
tion de la santé orale implique également décisions, d’ordre politique, telles que enfants et des parents pour une promo-
de prendre en compte les déterminants l’interdiction des distributeurs de bois- tion de la santé bucco-dentaire efficace.
sociaux de la santé. En effet, les interven- sons sucrées en milieu scolaire partici- La combinaison de différentes actions,
tions visant à changer les comportements pent à la promotion de la santé orale (10). construites sur le long terme, peut alors
ne peuvent être efficaces sans une évo- donner aux populations visées les
lution favorable des conditions de vie et Combiner les approches moyens d’assurer un plus grand contrôle
de l’environnement. De même, la mala- En définitive, le recours à des straté- sur leur propre santé et d’améliorer
die carieuse partage avec d’autres mala- gies efficaces bien déterminées permet celle-ci.
dies chroniques des facteurs de risque de prévenir la carie dentaire, notamment
communs tels qu’une alimentation trop dans les groupes à risque. Toutefois, ces Stéphanie Tubert-Jeannin
riche en sucres. Les interventions pluri- stratégies doivent être intégrées dans une Professeur d’université,
disciplinaires axées sur le contrôle de ces démarche plus large de promotion de la Santé publique odontologique
facteurs de risque communs doivent santé orale. Acteurs publics, équipe édu- UFR d’Odontologie, Clermont-Ferrand.

◗ Références bibliographiques
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Art. n° CD002278. (6) Tagliaferro E.P., Pardi V., Ambrosano G.M., Caries experience before and after the imple-
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Caries Research, 2002, vol. 36, n° 4 : p. 294- (7) Slade G.D., Bailie R.S., Roberts-Thomson K., disease prevention and health promotion. Bulletin
300. Leach A.J., Raye I., Endean C., et al. Effect of of the World Health Organization, 2005, vol. 83,
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Mäkelä M., Worthington H.V. Pit and fissure caries among Australian Aboriginal children:

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 19


Vingt ans d’action globale de santé
scolaire dans le Val-de-Marne
Le département du Val-de-Marne est pionnier en matière de prévention bucco-dentaire en
milieu scolaire (écoles primaires et collèges) ainsi que dans les crèches et centres de
Protection maternelle et infantile. Ces actions de dépistage ont notamment pour objectif
de faciliter l’accès des jeunes aux soins dentaires.

Depuis le début des années 1990, le d’éventuelles caries, de possibles mal- en place du 3e programme, le dépistage
département du Val-de-Marne a déve- positions des dents, etc. dans les camions dentaires a été sup-
loppé une politique de prévention Lorsqu’il y a nécessité d’une consul- primé, la CPAM estimant qu’il faisait
bucco-dentaire et en a fait une priorité. tation chez le dentiste, les infirmières doublon avec son programme national
La Mission bucco-dentaire, devenue transmettent à la famille un document « M’T dents » mis en place quelques
aujourd’hui le service de Santé publique décrivant leurs constats et exposant années plus tôt (invitant les enfants de
dentaire, s’était lancé le défi de sensibi- leurs recommandations. Suivant les 6, 9, 12, 15 et 18 ans à une consultation).
liser chaque jeune Val-de-Marnais (de situations, elles s’appuient sur la secré- En complément, le conseil général a
0 à 18 ans) et sa famille aux bons com- taire médicale et éventuellement les conservé un dispositif de suivi (sur-
portements en matière de santé bucco- enseignants ou le directeur d’école veillance sanitaire) qui permet d’appré-
dentaire. Elle en est aujourd’hui à son pour vérifier que la famille a bien accès cier l’état de santé bucco-dentaire des
troisième programme (2011-2016). aux soins. Dans le Val-de-Marne, les enfants de CE1 sur le département. Dans
infirmières bénéficient d’une formation le même temps, depuis 2011, les jeunes
Outre les actions en direction de la initiale bucco-dentaire assurée par un Val-de-Marnais qui utilisent l’examen
petite enfance (crèches, centres de Pro- pair, construite en collaboration avec bucco-dentaire gratuit, quel que soit leur
tection maternelle infantile, etc.) pour un chirurgien-dentiste. Et leur forma- âge, sont exempts d’avance de frais pour
sensibiliser les jeunes enfants et leurs tion continue est assurée par les den- les soins qui en découlent.
parents, le service mène des actions à tistes du service de prévention bucco-
l’école primaire et dans les collèges. En dentaire du conseil général. L’école a une mission éducative,
effet, intervenir dans les lieux scolaires mais c’est aussi un lieu de vie qui peut
permet d’informer l’ensemble des Dans le cadre du programme dépar- être influent, notamment parce que
enfants de façon égalitaire. Un travail temental, la prévention primaire repose l’enfant y passe une partie non négli-
de partenariat s’est imposé avec l’ins- essentiellement sur l’éducation pour la geable de son temps. L’avantage de
pection académique pour travailler santé bucco-dentaire, avec la réalisa- l’éducation pour la santé à l’école est
conjointement avec les personnels de tion d’animations en classe (mise en d’avoir une action précoce qui est un
santé scolaire. Le programme départe- place d’ateliers « brossage des dents » à des éléments d’efficacité de l’action de
mental de santé bucco-dentaire, qui l’école maternelle, ou de bains de prévention et qui permet de sensibiliser
comprenait prioritairement un volet de bouche fluorés à l’école élémentaire…), l’ensemble des individus d’une classe
prévention primaire, s’est étoffé, en ainsi que sur la formation des per- d’âge déterminée. Le travail de partena-
1993, d’une convention avec la caisse sonnes « relais » de ce programme dont riat permet d’ajouter aux compétences
primaire d’assurance maladie (CPAM), font partie les infirmières scolaires. éducatives et pédagogiques des ensei-
et l’ajout d’un volet de prévention La prévention secondaire permet gnants celles des infirmières scolaires
secondaire auquel s’est associée, en aux dentistes de santé publique du et des chirurgiens-dentistes de santé
1996, l’inspection académique. département : publique.
• de dépister ;
La promotion de la santé en faveur • de développer une action de motiva- Marie Benguigui
des élèves fait partie des missions fixées tion pour le recours aux soins ; Docteur en chirurgie dentaire,
à l’Éducation nationale. Les infirmières • d’évaluer la prévalence carieuse des service de Santé publique bucco-dentaire,
effectuent des examens systématiques enfants examinés. conseil général du Val-de-Marne,
auprès des élèves de grande section de Pendant près de vingt ans, grâce aux Érick Girault
maternelle, de CM2, et de 5e. Elles réa- deux camions de dépistage de la CPAM, Infirmier, conseiller technique départemental,
lisent des actes de dépistage biomé- les enfants qui présentaient des lésions Inspection académique du Val-de-Marne,
trique et sensoriel dont l’examen de la carieuses bénéficiaient d’un dispositif Marion Morel
bouche fait partie. Elles ont donc la leur permettant de s’adresser au prati- Docteur en chirurgie dentaire,
possibilité d’examiner l’état de santé cien de leur choix pour la réalisation de service de Santé publique bucco-dentaire,
bucco-dentaire des enfants, de détecter soins, sans avance de frais. Avec la mise conseil général du Val-de-Marne, Créteil.

20 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


La santé bucco-dentaire des enfants
en nette amélioration
Le programme de prévention bucco- situent le département du Val-de-Marne dents définitives. En effet, à l’âge de
dentaire du Val-de-Marne évalue au niveau des pays scandinaves où des 12 ans, les deux tiers des dents cariées
régulièrement la santé bucco-den- programmes de prévention pour les sont soignées.
taire des enfants dans le départe- enfants sont mis en place et suivis depuis Pour accroître l’efficacité du pro-
ment. Après vingt ans d’existence longtemps. Cependant, l’impact direct gramme, plusieurs études sociolo-
de ce dispositif, l’atteinte carieuse à du programme sur la santé bucco-den- giques ont été menées. En 2009, une
6 ans a été divisée par trois et par taire des enfants et des adolescents est étude auprès des parents de jeunes
deux et demi à 12 ans. Mais il reste difficile à évaluer en l’absence de com- enfants a montré la diversité de leur
beaucoup à faire en direction des paraison avec d’autres départements. perception de l’hygiène bucco-den-
enfants et des adolescents, notam- Tous les milieux sociaux ont bénéfi- taire. Ils utilisent trois registres pour
ment lorsque des situations de pré- cié de l’amélioration de la santé bucco- expliquer à leurs enfants la nécessité du
carité freinent l’accès aux soins. dentaire. Pour autant, au regard des brossage : la santé, l’esthétique et le
déterminants de la santé bucco-den- social. Si, pour la majorité d’entre eux
Depuis sa mise en place en 1991, le taire, les enfants issus des milieux les l’hygiène et les soins bucco-dentaires
programme de prévention bucco-den- plus défavorisés restent les plus tou- représentent un enjeu de santé impor-
taire auprès des enfants du Val-de- chés par des problèmes dentaires non tant, d’autres parents sont en revanche
Marne a été évalué via un suivi épidé- pris en charge. prêts à transiger. Ils estiment, par
miologique régulier. Des enquêtes Les études qualitatives qui ont été exemple, que le brossage n’est pas un
portant sur des échantillons de plus de menées ont montré des profils de acte que l’on réalise pour soi, et que
mille enfants représentatifs du départe- familles avec des représentations de la l’hygiène bucco-dentaire n’est utile que
ment ont été conduites. santé bucco-dentaire et des percep- pour améliorer la relation avec les
Les résultats observés depuis vingt tions des messages de prévention très autres. Ces représentations éloignées
ans montrent une forte amélioration de différentes, qui peuvent expliquer ces obligent à adopter les stratégies de pré-
l’état de santé bucco-dentaire des jeunes résultats. Cependant, le graphique ci- vention pour délivrer des messages
Val-de-Marnais. L’atteinte carieuse des dessous montre que les écarts d’atteinte plus adaptés.
5-6 ans a ainsi été divisée par trois et par carieuse entre les enfants de milieux Une deuxième étude en 2009 a mon-
deux et demi à l’âge de 12 ans. En 2009- sociaux différents diminuent considé- tré que pratiquement tous les collégiens
2010, plus de huit enfants sur dix étaient rablement entre 1991 et 2010. et lycéens du Val-de-Marne (94 %) esti-
en bonne santé dentaire (82 % à 5-6 ans Le recours aux soins a aussi pro- ment que l’état de leurs dents est bon,
et 85 % à 12 ans). Les résultats observés gressé de manière satisfaisante sur les voire très bon, et 92 % pensent qu’il est
indispensable de faire soigner ses dents.
Grahique 1. Évolution du nombre moyen de dents définitives cariées et obturées Ils ont un bon niveau de connaissances
par enfant, à 11 et 12 ans* selon la catégorie socio-professionnelle du père sur le sujet, en dépit de quelques
lacunes. Enfin, ils ont pris conscience du
C3O rôle qu’ils ont à jouer pour préserver leur
Cadre, profession supérieure
2,5
santé bucco-dentaire. Un relâchement
Profession intermédiaire des comportements préventifs en lien
2,12 Employé avec leur autonomisation a cependant
2 Ouvrier été constaté.
1,86 1,81
Les résultats de ces études justifient
la poursuite du programme. Une aug-
1,5 1,54 1,36
1,49 mentation de son efficacité passe sans
1,15
doute par une réduction du phéno-
1,39 1,21
1 mène observé de renoncement aux
1,05 soins pour les familles en situation de
0,98 0,67 précarité et dans lesquelles l’état de
0,5 0,61
0,51
santé bucco-dentaire des enfants est le
0,61
0,44 plus préoccupant.
0
Ariane Éid
1991 1995 2000 2010 Docteur en chirurgie dentaire,
* de 1991 à 2000, les résultats portent sur les enfants de 11 ans, en 2010 sur les enfants de 12 ans.
service de Santé publique dentaire,
conseil général du Val-de-Marne, Créteil.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 21


Promouvoir la santé bucco-dentaire
des enfants en Seine-Saint-Denis
En Seine-Saint-Denis, un programme de prévention bucco-dentaire visant à l’amélioration
de la santé bucco-dentaire des enfants, piloté par le conseil général, forme les professionnels
de l’éducation, de la santé et du social. Des séances d’éducation pour la santé avec notam-
ment des séances de brossage quotidien en maternelle et cours préparatoire sont organisées
dans les lieux d’accueil des enfants. De nombreux défis sont aujourd’hui à relever et l’action
doit s’intégrer dans le schéma proposé par les instances régionales.

La promotion de la santé bucco- 90 % à 9 ans. Partant de cette situation très mation assurée par le conseil général.
dentaire des enfants en Seine-Saint-Denis alarmante, des moyens financiers, logis- En 1992, après huit ans de mise en
a été initiée il y a plus de vingt-cinq ans. tiques et humains ont été mobilisés pour œuvre du programme, une seconde
Le programme départemental de préven- faire reculer la prévalence carieuse chez étude4 a témoigné de l’amélioration de la
tion bucco-dentaire développe des les enfants. situation : près de 73 % des enfants
actions d’éducation pour la santé ; il est Les actions auprès des enfants repo- avaient un bon état bucco-dentaire ; tou-
mis en œuvre dans les crèches, centres sent depuis cette période sur les quatre tefois, les atteintes carieuses se resserrent
de protection maternelle et infantile, piliers de la prévention bucco-dentaire : sur certaines catégories d’enfants, notam-
écoles maternelles et élémentaires, hygiène bucco-dentaire, alimentation, ment dans les zones défavorisées, et près
centres de loisirs. Il est né de la volonté visite régulière chez le dentiste, fluor ; le d’un quart des enfants n’avait pas eu
du ministre de la Santé, Jack Ralite (1983), tout s’appuyant sur la stratégie d’éduca- accès aux soins.
et des élus du département (1984) quand tion pour la santé visant à rendre l’enfant Le programme est piloté et coordonné
cette problématique ne constituait pas acteur de sa propre santé bucco- au niveau du conseil général, en articula-
encore une priorité au niveau national, dentaire. Chaque fois que cela est pos- tion avec deux partenaires institutionnels
constituant ainsi un des premiers pro- sible, les parents sont impliqués afin de majeurs : la caisse primaire d’Assurance
grammes de stratégie collective à une renforcer la cohérence des messages maladie et l’inspection académique, et,
telle échelle. Il a inspiré celui du conseil éducatifs des professionnels. La déclinai- au niveau opérationnel au sein d’un par-
général du Val-de-Marne. son de ces actions est assurée par les tenariat avec les villes. Pilotage et coordi-
Initialement, ce dispositif était financé animateurs de prévention des équipes nation sont assurés par une équipe com-
en totalité par le conseil général (subven- techniques locales (ETL), formés par le posée de trois chirurgiens-dentistes et un
tion annuelle contribuant à la prise en conseil général. La formation consiste à secrétariat5. Les ETL sont constituées au
charge des personnels, matériels d’hy- leur donner un bagage minimal néces- minimum d’un responsable, d’un réfé-
giène bucco-dentaire et supports péda- saire pour assurer une animation en édu- rent administratif et d’un agent opération-
gogiques) et les villes signataires d’une cation pour la santé adaptée à l’âge de nel, tous salariés de la ville. Trente-deux
convention de partenariat (rémunération l’enfant3. des quarante villes du département par-
du personnel municipal). Aujourd’hui, il Concrètement, pour l’action d’appren- ticipent actuellement au programme : ce
est soutenu financièrement par l’Assu- tissage du brossage des dents par sont donc près de 90 % des enfants répar-
rance maladie dans le cadre de l’accom- exemple, l’animateur aide l’enfant à tis sur le territoire qui en bénéficient. Ces
pagnement au dispositif M’ T dents pour mieux connaître sa cavité buccale en villes participent également, sous le pilo-
les élèves de CP, et par l’agence régionale abordant les principales fonctions (man- tage du conseil général, à l’accueil et à
de santé dans le cadre de la labellisation ger, sourire, parler), puis le familiarise à l’encadrement des étudiants stagiaires en
Arcade1. la technique du brossage et lui donne des chirurgie dentaire (universités Paris 5 et
conseils concernant la prise d’aliments. À 7) et des élèves des instituts de formation
Un dispositif à l’échelon la suite de cette première séance, l’enfant, des infirmiers (Ifsi), avec pour objectif de
départemental lors des différentes activités scolaires ou sensibiliser ces futurs professionnels à
En 1984, les résultats d’une étude épi- de loisirs, retraduit sur différents supports l’approche santé publique bucco-den-
démiologique2 menée sur le départe- les messages de prévention qu’il a reçus. taire dans leurs pratiques.
ment de Seine-Saint-Denis montraient À partir de la grande section de mater-
que près de 73 % des enfants de 11 ans nelle (à l’âge de 5 ans), des séances de La mobilisation des partenaires :
n’étaient pas en bonne santé bucco- brossage dentaire sont organisées à la acteurs relais
dentaire (avec cinq dents cariées en pause méridienne, encadrées par les ani- L’implication d’acteurs de différents
moyenne et deux tiers des dents infectées mateurs de cantines et les enseignants, et profils et ayant bénéficié d’une formation
non soignées) ; 34 % d’entre eux étaient en centre de loisirs par les animateurs de multiprofessionnelle a été la démarche
atteints de caries dès l’âge de 3 ans et centre. Ce personnel bénéficie d’une for- « innovante » du programme. Il a fallu

22 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


mobiliser bien au-delà des seuls milieux vent en permanence être renforcées et • constituer un point à partir duquel peu-
de la santé afin d’aller à la rencontre des soutenues par le conseil général ; vent se construire d’autres axes de
enfants sur leurs lieux de vie, dès leur • une absence de garanties de pérenni- travail.
plus jeune âge, mais également de leurs sation compte tenu des modèles de En guise de conclusion, le caractère
parents et de l’ensemble des adultes financement des projets de prévention innovant du programme à ses débuts a
accompagnants (enseignants, éducateurs par appel à projets annuel et des largement été reconnu. Dans sa première
de jeunes enfants, assistantes maternelles, contraintes budgétaires qui pèsent sur les phase, il a contribué à l’amélioration des
etc.). Ceci afin de situer l’action en amont collectivités ; indices carieux chez les enfants du dépar-
de la maladie dentaire, d’éduquer l’enfant • un déficit de structures de soins pour tement. Aujourd’hui, il est confronté à
plutôt que de porter l’effort sur le les enfants atteints de carie dentaire, qui l’épreuve du temps avec les risques de
dépistage. fragilise les actions de prévention. Ainsi, lassitude des acteurs qui le portent. Il lui
acteurs et parents nous interrogent par- faut désormais relever de nombreux
Résultats fois sur le manque de cohérence entre le défis, notamment celui de s’intégrer dans
À titre d’exemple, nous disposons discours préventif prôné par le pro- le schéma bucco-dentaire plus large pro-
pour les actions d’animation et d’appren- gramme et le refus de certains dentistes posé par les instances régionales de l’ARS
tissage au brossage des dents de deux de soigner les dents cariées des enfants, Île-de-France.
indicateurs afin d’estimer l’impact du soit à cause de leur jeune âge, soit parce
programme : que ce sont des dents de lait appelées à Paul Bissila
• le taux de couverture (rapport entre le être remplacées. Chirurgien-dentiste, responsable
nombre d’enfants bénéficiaires de l’ac- du programme départemental
tion et le nombre total d’enfants scolari- Perspectives de prévention bucco-dentaire,
sés) qui permet d’estimer l’impact du Les défis à relever par le programme Michèle Vincenti
programme sur les enfants du départe- dans les années à venir sont nombreux : Médecin chef du Bureau santé publique,
ment. En 2010, il est de 44 % pour les • construire un cahier des charges d’éva- Rafik Allal, Bassam Abo Amer
enfants de grande section de maternelle luation du programme dans un partena- Chirurgiens-dentistes, cadres-animateurs,
et de 96 % pour les CP ; riat élargi (Association régionale de ser- Christophe Debeugny
• le taux de réalisation (rapport entre le vices Île-de-France [Arsif], CPAM, autres Médecin chef du Service de la prévention
nombre d’enfants bénéficiaires et le porteurs de programme au niveau de la et des actions sanitaires,
nombre d’enfants ciblés par la ville au région) ; conseil général de Seine-Saint-Denis, Bobigny.
début de chaque année scolaire en fonc- • développer la formation des acteurs
tion du temps prévu pour ces activités et relais : notamment des acteurs sociaux
du personnel disponible). En 2010, il est comme les conseillères en économie 1. Arcade (action régionale contre les atteintes dentaires
de 65 % pour les grandes sections de sociale, les assistantes sociales, les réfé- des enfants) définit un label « I » pour les parents d’en-
fants de 0 à 2 ans et un label « IES » pour les enfants âgés
maternelle et de 100 % pour les CP. rents familles des maisons de quartier, car de 3 à 12 ans. En partenariat avec l’Assurance maladie,
L’action de brossage des dents quoti- ils sont en première ligne dans la prise en Arcade assure le pilotage des actions d’accompagne-
dien pendant la pause méridienne est charge de populations de plus en plus ment du dispositif M’ T dents pour les enfants de 6 ans
dans trente-deux villes du département.
tout à fait intéressante du fait de sa cohé- précarisées ; 2. Conseil général de la Seine-Saint-Denis. Résultats de
rence avec les actions d’éducation à la • encourager le développement des l’enquête épidémiologique. Programme de prévention
bucco-dentaire. Département de la Seine-Saint-Denis,
santé en classe. Ces dernières, plus com- réseaux locaux ; contribuer au décloison- Bobigny, 1984.
plexes à mettre en œuvre, ont néanmoins nement à l’échelle de la ville des acteurs 3. La formation se décompose en trois parties : formation
bénéficié, en 2010, à environ un quart des du champ sanitaire, entre eux et avec les théorique (présentation du programme dans son histo-
rique, sa structuration, ses partenariats, son finance-
enfants scolarisés en maternelle et en CP, acteurs du domaine social ; ment, ses résultats, les notions d’anatomie dentaire, de
soit près de douze mille enfants. • favoriser le recours aux soins en contri- physiopathologie, des méthodes et outils de prévention) ;
buant à la promotion du dispositif M’ T mise en situation sur le terrain avec un animateur plus
expérimenté ; accompagnement de l’animateur dans les
Un bilan sans cesse fragilisé dents ; écoles de sa ville. À cela s’ajoutent les rencontres et par-
Ce bilan, certes favorable, est fragi- • développer de nouveaux supports tages d’expériences organisés par le conseil général à
partir des problématiques rencontrées par les ETL.
lisé par : d’éducation destinés aux enfants, aux 4. La santé bucco-dentaire en Seine-Saint-Denis. Évolu-
• un contexte socio-économique extrê- parents, mais également aux pro- tion en huit ans chez les enfants de 11 ans. Direction de
mement difficile pour les populations, fessionnels ; la prévention et de l’action sociale. Rapport d’études du
conseil général de Seine-Saint-Denis, 1993 : p. 1-240.
qui rend difficile leur mobilisation et leur • valoriser régulièrement les actions, à 5. Cette équipe assure également l’animation du réseau
implication dans les actions ; l’intérieur même du réseau du pro- de partenaires du programme, organise la formation
• une absence d’éléments d’évaluation gramme mais aussi au niveau régional, des professionnels, aide et accompagne les ETL dans la
réalisation des actions, participe à la validation des pro-
permettant de constituer un référentiel voire national. Partager les pratiques jets locaux avec les ETL.
pour les évolutions souhaitables et la entre les acteurs de terrain. Poursuivre la 6. Iguenane J., d’Ivernois J.-F., Gagnayre R. Évaluation
d’une formation multiprofessionnelle pour la prévention
mise en exergue des actions susceptibles mutualisation des expériences, dans le en santé bucco-dentaire en Seine-Saint-Denis. Cahiers
d’accroître les performances du pro- cadre du programme et au-delà (autres d’études et de recherches francophones/Santé, 1992,
gramme (en termes d’amélioration de collectivités territoriales). vol. 2, n° 4 : p. 260-266.
7. Multiprofessional Education of Health Personnel in
qualité des actions et donc de celle de la Pour évoluer, le programme doit donc the European Region. WHO, Regional Office for Europe,
santé bucco-dentaire des enfants) ; disposer d’un référentiel récent 1990. d’Ivernois J.-F., Vodoratski V. WHO. Learning
• un turn-over relativement important pouvant : together to work together for health. Report of WHO Study
Group on Multiprofessional Education of Health Person-
des équipes opérationnelles dont la moti- • donner un éclairage sur les résultats nel: the Team Approach. Technical Report Series, 1988,
vation et l’implication dans la durée doi- obtenus ; n° 769: p. 7.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012

23
À Strasbourg, les soins dentaires
se font aussi à l’école !
Strasbourg est l’une des seules villes de France à être dotée d’un service municipal de
santé bucco-dentaire (centre de santé dentaire) qui dépiste systématiquement les enfants
dans les écoles maternelles et primaires. Outre des cabinets dentaires installés dans les
écoles, le service dispose d’une structure mobile pour la réalisation des soins : une réelle
proximité avec les enfants et un partenariat concret avec les enseignants.

Inaugurée le 15 octobre 1902, la cli- indemne de caries dentaires (avec des pagner leur enfant au cabinet dentaire
nique dentaire scolaire de Strasbourg, écarts allant de 91 % pour les quartiers de l’école la plus proche. Cette
devenue en 1991 le centre de santé résidentiels à 64 % pour les quartiers démarche un peu plus active deman-
dentaire, est une institution municipale défavorisés), cette proportion baisse à dée aux parents, bien que très positive
originale et unique. Son promoteur, le 69 % pour les enfants des écoles pri- (les jeunes enfants sont rassurés par la
professeur Jessen, ayant constaté dès maires (avec des écarts de 81 % à 58 % présence de leurs parents, les praticiens
1897 que moins de 5 % des enfants selon les quartiers). peuvent motiver les parents à l’hygiène
d’âge scolaire possédaient une denture bucco-dentaire et à l’équilibre alimen-
saine, a réussi à attirer l’attention des Des soins et de la prévention taire), trouve aussi ses limites et le
pouvoirs publics et à réunir les fonds dans les écoles pendant nombre d’enfants soignés est bien plus
nécessaires pour l’ouverture d’un éta- le temps scolaire faible qu’en primaire. En 2010-2011,
blissement municipal qui prodiguait Les enfants des écoles primaires qui 153 enfants d’écoles maternelles (soit
des soins dentaires totalement gratuits sont porteurs de caries sont pris en 10 % des enfants de cette tranche d’âge
aux enfants des écoles. charge par le centre de santé lorsque nécessitant des soins dentaires) ont été
les parents ont signé l’autorisation de soignés au centre dentaire, certains
L’institution, que la municipalité de soins. Ils sont soignés pendant les étant âgés d’à peine deux ans !
l’époque a eu l’audace de créer et que horaires scolaires, sans la présence de
les municipalités successives ont conti- leurs parents, dans l’un des cinq cabi- Le recours au secteur libéral pour les
nué à entretenir depuis plus de cent nets dentaires installés dans les écoles soins dentaires, quel que soit l’âge de
ans, a suscité au moment de sa création ou dans le cabinet dentaire mobile du l’enfant, est difficile à mesurer mais il
un très vif mouvement de curiosité et centre de santé1. est une réalité pour de nombreuses
d’intérêt scientifique. Un siècle plus familles. Cependant, un certain nombre
tard, ses missions sont toujours d’assu- Les soins dentaires sont proposés en de freins (méconnaissance des compli-
rer une veille et de promouvoir la santé priorité aux enfants scolarisés dans les cations de la carie et de l’importance
bucco-dentaire des enfants scolarisés vingt-cinq écoles primaires des quar- des soins dentaires sur denture tempo-
dans les écoles maternelles et primaires tiers les plus défavorisés. En 2010-2011, raire, démission ou négligence vis-à-vis
publiques de la ville. 39 % des enfants porteurs de caries de soins dentaires jugés comme futiles
dentaires, soit 912 enfants, ont été soi- ou traumatisants, occultation ou déni
Dépistage pour tous gnés par les chirurgiens-dentistes du des problèmes, enfant jugé trop jeune
les enfants des écoles centre, dont l’ambition n’est pas de soi- pour des soins dentaires) limitent l’ac-
maternelles et primaires gner tous les enfants ou de se substituer cès des enfants aux soins dentaires, et
Concrètement, un dépistage bucco- au secteur libéral, mais d’offrir une ce malgré les relances et la collabora-
dentaire a lieu chaque année pour tous opportunité de soins à des enfants dont tion avec le service de santé scolaire et
les enfants, dans chaque école. les familles se trouvent en situation de le service de Protection maternelle et
Durant l’année scolaire 2010-2011, grande vulnérabilité économique et infantile. Le signalement aux services
18 818 enfants ont ainsi été examinés et, sociale. sociaux est parfois nécessaire.
globalement, tous âges confondus, 72 %
des enfants présentaient une bouche Le nombre de praticiens exerçant au Conscients de l’importance de la
saine, indemne de caries dentaires. Une sein du centre (trois chirurgiens-den- prévention bucco-dentaire et de l’école
analyse plus fine des données du dépis- tistes pour toute la ville) ne permet comme lieu d’éducation et de sensibi-
tage montre une progression de la carie malheureusement pas une prise en lisation, les praticiens et leurs assistants,
dentaire avec l’âge de l’enfant et met en charge des soins dentaires des enfants en partenariat avec la faculté de chirur-
évidence certaines inégalités de santé. Si des écoles maternelles selon le même gie-dentaire de Strasbourg (étudiants
78 % des enfants des écoles maternelles fonctionnement : les parents sont invi- de 6e année en stage de santé publique),
présentent globalement une bouche tés à prendre rendez-vous et à accom- organisent des séances de prophylaxie

24 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


(animations avec matériel pédagogique
sur le rôle et l’anatomie des dents,
l’étiologie et l’évolution de la carie den-
taire, la prévention de la carie avec des
conseils d’hygiène bucco-dentaire et
d’équilibre alimentaire notamment
concernant les boissons sucrées,
démonstration de brossage sur
mâchoire géante et séance de brossage
individuel au lavabo). Ils interviennent
prioritairement dans les classes de CE1
et CM1 des quartiers défavorisés, mais
également sur demande dans d’autres
sections et d’autres écoles. Pendant
l’année scolaire 2010-2011, ces séances
ont concerné 4 272 enfants qui ont reçu
un kit avec brosse à dents et dentifrice.
Certaines écoles maternelles et
quelques crèches ont opté pour un
brossage quotidien des dents après le
repas (490 enfants concernés), mais
cette initiative a bien du mal à se géné-
raliser : manque d’intérêt et de motiva-
tion du personnel encadrant, moyens
humains insuffisants, locaux sanitaires
mal ou peu adaptés. les inégalités sociales et économiques des dents après le repas comme une
demeurent. Les messages de préven- habitude de vie nécessaire.
Prise en charge globale tion atteignent globalement peu les
de la santé dentaire des enfants parents (les contacts avec les chirur- Une meilleure santé dentaire à Stras-
Les atouts du centre de santé den- giens-dentistes du centre sont peu fré- bourg passera, d’une part, par l’élabo-
taire résident dans sa démarche de quents puisque le dépistage dentaire, ration de programmes de prévention à
prise en charge globale de la santé den- les soins des enfants des écoles pri- destination de très jeunes enfants (pro-
taire des enfants (prévention, dépis- maires se font sans les parents, et les grammes ciblés sur la rencontre et
tage, soins), dans sa présence au sein réunions « santé » organisées à leur l’information des parents afin qu’ils
même des écoles, dans son partenariat intention par les professionnels ont peu acquièrent des compétences et des
de longue date avec le corps ensei- de succès), mais dans les familles de moyens pour un comportement favo-
gnant et dans sa volonté de réduire les faible niveau socio-économique, rable à la santé dentaire de leurs
inégalités en offrant des soins dentaires l’adoption de comportements est diffi- enfants) et, d’autre part, par la mise en
à tous les enfants et particulièrement cile à obtenir, les parents n’ayant pas œuvre de politiques de réduction des
aux enfants issus de familles de bas les moyens de devenir véritablement inégalités de santé, telles qu’elles ont
niveau socio-économique (pratique du acteurs de la santé dentaire de leurs été définies dans le contrat local de
tiers payant avec prise en charge du enfants. santé que le maire de Strasbourg a
ticket modérateur par la collectivité). La signé récemment avec ses partenaires :
compétence et la disponibilité des pra- Pour améliorer la santé bucco-den- le directeur général de l’agence régio-
ticiens suscitent une mise en confiance taire des enfants, plusieurs mesures nale de santé, le préfet, le recteur d’aca-
des enfants, même très jeunes ou peu pourraient être efficaces : la sensibilisa- démie et le président du régime local
coopérants vis-à-vis des soins den- tion des professionnels d’autres ser- d’Assurance maladie.
taires, et un encouragement pour une vices municipaux (famille et petite
prise en charge ultérieure des soins par enfance, accueil et vie scolaire) à la Dominique Pflieger
le secteur libéral. prévention de la carie dentaire ; la mise Chirurgien-dentiste,
en place de relais d’informations (assis- coordinatrice du centre de santé dentaire,
Malgré toutes les actions et toutes les tantes maternelles, personnels des Ville de Strasbourg.
stratégies mises en place depuis des crèches et des garderies) vers les
décennies, de nombreux écueils persis- parents de très jeunes enfants avec des
tent. À l’école primaire, on observe messages sur l’hygiène bucco-dentaire
depuis dix ans une faible réduction de et l’utilisation de dentifrice au fluor ;
la proportion d’enfants porteurs de l’adoption d’une alimentation plus
caries non soignées (30 %). Dans les équilibrée. Une autre piste d’action 1. L’assistante dentaire vient chercher les enfants
quartiers défavorisés, les progrès sont serait la généralisation du brossage des en classe lorsque le cabinet dentaire est dans
laborieux : les habitudes de brossage dents dans les écoles maternelles, les l’école. Si l’école est dépourvue de cabinet dentaire,
les enfants sont transportés jusqu’au cabinet den-
sont difficiles à mettre en place, l’ali- garderies, crèches et jardins d’enfants taire de l’école la plus proche en minibus par le
mentation est souvent déséquilibrée et dans le but d’appréhender le brossage chauffeur du centre.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 25


Grenoble : un programme
bucco-dentaire renforcé
dans les quartiers défavorisés
À Grenoble, un programme de dépistage et d’accès aux soins bucco-dentaires a été mis
en place dans les établissements scolaires. Depuis 2006, ce dispositif a été renforcé dans
les écoles situées dans les quartiers défavorisés. Le programme s’est notamment enrichi
d’un accompagnement individualisé des familles pour rendre effectif l’accès aux soins
dentaires de leurs enfants.

À Grenoble, l’action municipale sitif dans les écoles en Zus1 : renforce- accord, met en place un accompagne-
consacrée à la santé des enfants est ment des interventions de dépistage et ment individualisé : elle motive les
mise en place dès 1924 par la création de suivi du chirurgien-dentiste, et mise parents pour la mise en œuvre des
du service municipal de santé scolaire. en place d’actions systématiques d’édu- soins et prend éventuellement rendez-
Ce service intervient aujourd’hui auprès cation à l’hygiène bucco-dentaire. Les vous avec un chirurgien-dentiste libé-
des treize mille enfants scolarisés de la dépistages dentaires systématiques, ral. Elle fait le lien avec les assistantes
petite section de maternelle au CM2, réalisés auparavant auprès de tous les sociales scolaires et les chirurgiens-
dont 30 % dans les écoles des quartiers enfants de la ville en classe de grande dentistes pour s’assurer de l’effectivité
Zus (zone urbaine sensible). Il est section et de CM2, ont été élargis avec des soins, toujours avec l’accord de la
constitué de cinq équipes comprenant l’appui d’une assistante dentaire aux famille.
des médecins, des infirmières, des classes de CP et de CM1 des écoles
assistantes sociales et des secrétaires situées en Zus ; un suivi en CE1 est Pour les enfants dépistés avec un
médico-sociales, répartis sur cinq terri- également réalisé auprès des enfants « syndrome du biberon » (dû à une uti-
toires. Il est complété par une équipe ayant été dépistés avec des caries l’an- lisation inconsidérée de biberons
bucco-dentaire (chirurgien-dentiste et née précédente. Le recrutement de sucrés) qui se caractérise par l’appari-
assistante dentaire) et une équipe l’assistante dentaire a permis d’élaborer tion précoce de nombreuses caries et
d’éducateurs physiques spécialisés, des outils de suivi, d’assurer l’accompa- peut s’accompagner d’une destruction
agissant sur l’ensemble du territoire gnement individualisé vers les soins et dentaire majeure, l’assistante dentaire
grenoblois. Ses missions sont régies par de mettre en place des actions d’édu- soutient la famille dans les démarches
des conventions de la ville avec l’Édu- cation à l’hygiène bucco-dentaire. administratives et l’accompagne au
cation nationale et le conseil général. CHU lors des premières consultations ;
Du dépistage aux soins si nécessaire, l’enfant bénéficie d’une
Les données recueillies par le ser- effectifs : un pas vers l’accès intervention chirurgicale. Un suivi rap-
vice municipal de santé scolaire mon- aux soins proché est ensuite mis en place chez le
trent de fortes disparités entre les écoles Les parents sont informés des dépis- chirurgien-dentiste, avec une incitation
des quartiers Zus et hors Zus. L’état tages bucco-dentaires par lettre remise forte pour l’adoption d’une alimenta-
bucco-dentaire apparaît notamment via l’enseignant. Ce dépistage est réa- tion équilibrée en diminuant les sucre-
comme un marqueur social précoce et lisé au sein de l’école par le chirurgien- ries. L’assistante dentaire rencontre au
révélateur d’inégalités sociales de dentiste accompagné, dans les quar- moins à cinq reprises la famille. En
santé : 35 % des enfants de grande sec- tiers prioritaires, de l’assistante dentaire. 2010-2011, cent soixante et une familles
tion de maternelle en Zus nécessitent Le résultat est transmis aux parents. Il ont ainsi été rencontrées individuelle-
des soins dentaires (ou présentent au est aussi inséré, selon l’état dentaire, ment pour l’accès et la réalisation des
moins une carie non soignée) contre dans le dossier médical scolaire pour le soins.
15 % hors Zus (selon les derniers suivi de l’enfant de la grande section de
chiffres disponibles, concernant maternelle au CM2 en Zus. De l’éducation à la santé bucco-
2005-2006). dentaire dès la maternelle
Quand l’enfant présente une atteinte Depuis l’année scolaire 2006-2007,
Action renforcée dans les carieuse importante, les parents en sont des séances d’éducation à la santé
quartiers défavorisés avisés afin de consulter très rapidement bucco-dentaire sont préparées et mises
Face à ce constat, le service de santé un chirurgien-dentiste. Si l’entrée dans en place avec les enseignants en mater-
scolaire de la ville de Grenoble a, en les soins n’est pas effectuée, l’assistante nelle et au CP. Sont expliqués : la vie de
septembre 2006, développé son dispo- dentaire contacte la famille et, avec son la dent, l’importance d’un petit déjeu-

26 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


ner équilibré et d’un seul goûter par moitié (soit 47 %) est entrée en soins dualisé, nécessitant un investissement
jour, le rôle néfaste des sucreries. Un avant fin 2008. Par ailleurs, en 2011- important, permet à ces enfants d’accé-
brossage individuel des dents pour 2012, sur les quatre-vingt enfants pré- der aux soins. Pour ce faire, une impli-
chaque enfant est réalisé avec l’aide de sentant un syndrome du biberon, qua- cation croissante des professionnels est
quelques parents de la classe concer- rante-quatre sont rentrés en soins. nécessaire. Il s’agit de préserver ce
née. Par ailleurs, dans le cadre de ces L’accès aux soins des enfants des quar- capital santé qui « conditionne la situa-
séances, un petit déjeuner équilibré tiers prioritaires est donc effectif ; l’écart tion sanitaire, économique et sociale de
réunissant assistante dentaire, parents, se réduit entre les zones sensibles et le demain »3. Ainsi, dans le plan munici-
enfants, enseignants et agents territo- reste de la ville, mais cela nécessite un pal de santé de la ville de Grenoble,
riaux spécialisés des écoles maternelles important investissement. l’accès aux soins dentaires de tous les
(Atsem) peut également être mis en enfants est l’une des actions prioritaires
place à la demande des établissements Les actions de dépistage et de pré- mobilisant l’ensemble des profession-
scolaires ; dans ce cadre, une séance de vention au sein des écoles sont bien nels de la santé scolaire.
brossage individualisé est également perçues par les enseignants et les
organisée. parents. À la demande des enseignants, Simone Boussuges
les actions d’éducation pour la santé Médecin conseiller technique,
En 2010-2011, quarante et une inter- ont été étendues à de nouvelles classes, Christiane Brun
ventions de l’assistante dentaire ont de manière plus transversale avec la Assistante dentaire,
permis de sensibiliser environ mille participation d’autres acteurs de la service de santé scolaire,
enfants de maternelle et de CP au bros- santé et du social. Le dispositif de suivi direction Santé publique et
sage des dents et à l’hygiène bucco- s’est amélioré du fait de la mobilisation environnementale, Ville de Grenoble.
dentaire. Cent quarante parents ont été des équipes de santé scolaire. L’accès
sensibilisés lors de petits déjeuners à aux soins est devenu une priorité du
l’école, et cinquante autres rencontrés service de santé scolaire. 1. Dans le cadre du dispositif de réussite éducative du
contrat urbain de cohésion sociale (Cucs).
de manière individuelle par l’assistante 2. Crèches, école de sages-femmes, médecins et infir-
dentaire. Difficultés persistantes mières de PMI, médecins généralistes ou pédiatres,
infirmières de l’Éducation nationale.
Ce projet est financé dans le cadre 3. Bohl I. Santé de l’enfant et de l’adolescent : prises
Extension du dispositif : création du dispositif de réussite éducative, ce en charge. Rapport du Conseil national de l’Ordre des
de liens transversaux au niveau qui fragilise l’action (en effet, le finan- médecins, octobre 2011. Disponible en ligne : http://
www.conseil-national.medecin.fr
de la ville cement doit être reconduit d’année en
Des liens se sont tissés entre le ser- année).
vice municipal de santé scolaire et
d’autres acteurs locaux : un comité L’assistante dentaire connaît des dif-
technique de santé bucco-dentaire a ficultés pour obtenir l’adhésion de cer- ◗ Bibliographie
été créé dans le cadre de l’atelier tains parents à la démarche de soins.
« santé-ville » ; la prévention précoce se Par ailleurs, en matière de prévention, • La carie dentaire, symptôme des inégalités
développe, en lien avec l’Union fran- les parents éprouvent une gêne à dire sociales et territoriales. La gazette des com-
çaise pour la santé bucco-dentaire non à leur enfant, en particulier dans le munes, janvier 2012, n° 2109 : p. 27.
(UFSBD), dans le cadre de la campagne domaine de l’alimentation (sucreries). • Boussuges S., Brun C. Bilan d’une action de
« M’T dents ». Par ailleurs, les profes- Changer les habitudes alimentaires prévention et de suivi des caries dentaires
sionnels de la petite enfance2 ont été reste très complexe. dans les écoles en zone urbaine sensible à
sensibilisés et formés au syndrome du Grenoble. 11e journées de santé dentaire
biberon. L’accès aux soins s’améliore Les abandons de soins sont fré- publique du Québec.
grâce aux partenariats mis en place quents. Les difficultés d’accès aux soins • Khadra-Éid J. Élaboration d’une grille de
avec l’agence régionale de santé, la pour les bénéficiaires de la couverture dépistage des enfants à risque du syndrome
caisse primaire d’Assurance maladie, le maladie universelle (CMU) sont réelles. du biberon à disposition des médecins géné-
conseil de l’ordre des chirurgiens-den- Les soins sont parfois également admi- ralistes et des pédiatres. Thèse de médecine,
tistes, le syndicat des chirurgiens-den- nistrés avec retard, du fait de leur com- juin 2011.
tistes, l’UFSBD, le service de stomato- plexité et de la faible proportion de • Haute Autorité en santé. Recommandations
logie du CHU, le conseil général, les chirurgiens-dentistes soignant les dents en santé publique. Stratégies de prévention de
cliniques dentaires, les chirurgiens- temporaires. Aussi, il est fondamental la carie dentaire. Saint-Denis : HAS, mars
dentistes libéraux, etc. que l’accompagnement aux soins se 2010 (argumentaire : 180 p., synthèse et
poursuive dans la durée, notamment recommandations : 26 p.).
Points forts du dispositif pour les syndromes du biberon. • Perrin F., Boussuges S., Marquet M., Brun C.,
L’ensemble du dispositif mis en Patois L. Dépistage et suivi des caries den-
œuvre à Grenoble améliore l’état de Conclusion taires dans les écoles des quartiers priori-
santé bucco-dentaire des enfants en Le dépistage précoce dans les écoles taires de Grenoble. Lettre en santé publique
Zus et réduit les écarts avec les enfants grenobloises situées en Zus met en évi- bucco-dentaire, bulletin de la société française
hors Zus : ainsi, sur cent quatre-vingt- dence des situations préoccupantes qui des Acteurs de santé publique bucco-dentaire,
un enfants de CP, CE1 et CM2 porteurs ne trouvent pas toujours de réponses 2009, n° 2 : p. 2-4. En ligne : aspbd.free.fr/
de caries en 2006-2007 qui ont fait l’ob- adéquates dans le système de soins. IMG/pdf/lettrejuin20091.pdf
jet d’un suivi en 2007-2008, près de la Toutefois, un accompagnement indivi-

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 27


Département du Gard :
information et examen dentaire
dans les classes de CP
Dans le département du Gard, le taire de chaque élève. Un imprimé portant résul- enfants : la carie résultant du syndrome du bibe-
service dentaire du conseil général tat de l’examen est ensuite remis aux parents ron, les caries précoces, les malpositions den-
fait de la prévention, essentielle- pour information, par l’intermédiaire de leur taires, l’hygiène dentaire et alimentaire. Le tra-
ment dans les classes de CP. Un enfant. Même procédure pour les écoles mater- vail en réseau permet en particulier de tenir aux
chirurgien-dentiste effectue des nelles où la séance est plus courte (trente parents un même discours. Ainsi, au cours des
séances d’information puis procède minutes). En 2010-2011, deux examens den- consultations médicales et des interventions
à un examen dentaire de chaque taires ont été réalisés à trois mois d’intervalle auprès des parents, ces professionnels des PMI
enfant. Quand il détecte une néces- dans les mêmes classes, essentiellement dans relaient le message de prévention dentaire ; lors
sité de soins, il en informe les des quartiers défavorisés, pour constater dans des examens de santé (nourrissons, 3 ans,
parents. Les personnels des PMI quelle mesure les informations aux parents sur 4 ans), ils sont amenés à faire ouvrir la bouche
sont également sensibilisés à la la nécessité de soins étaient suivies d’effets. des enfants et conseillent une consultation den-
prévention. Ainsi, 2 374 enfants ont été vus deux fois. Il en taire dès le premier doute.
résulte qu’au premier dépistage, 33 % des D’une manière générale, ces dernières décen-
Le service dentaire du département du Gard a enfants avaient besoin d’au moins un soin, pour- nies, nous avons constaté – comme ailleurs sur
été créé en 1945, en même temps que la PMI, centage chutant à 25 % au second examen. le territoire -– une amélioration de la santé den-
permettant aux enfants scolarisés dans les Environ 8 % de ces enfants avaient consulté taire2, le nombre d’enfants ayant des dents tota-
écoles de Nîmes de bénéficier d’un dépistage entre temps, un chiffre faible qui montre toute la lement saines augmentant régulièrement. En
dentaire éventuellement suivi de soins en dispen- difficulté de concrétiser la prise en charge revanche, la plupart des enfants présentant une
saire. Plus de soixante ans après, le conseil (entrée dans les soins) après le dépistage. carie sont pluricariés (quatre à huit caries) et se
général du Gard a gardé un service bucco- Selon les écoles, le pourcentage d’enfants ayant trouvent dans des familles en difficulté socio-
dentaire, qui n’est pas une compétence obliga- besoin de consulter un dentiste rapidement pour économique.
toire de cette collectivité. Actuellement, un caries ou orthodontie varie de 0 à 50 %. Ainsi, Marie-Hélène Ricard
chirurgien-dentiste et une secrétaire à temps la moitié des enfants de grande section d’une Chirurgien-dentiste, service dentaire,
partiel travaillent à la mise en œuvre du disposi- école de la ZUP de Nîmes a besoin de soins, Direction de la petite enfance,
tif de prévention – couplé avec le programme dont certains en urgence. Inversement, dans de l’enfance et de la famille,
« M’T dents » de la CPAM (lire les autres articles certaines classes uniques à petit effectif, en conseil général du Gard, Nîmes.
de ce dossier pour ce dispositif). Le dentiste se zone rurale et d’un niveau socio-économique
rend dans un certain nombre d’établissements plus favorable, le pourcentage est parfois 1. Une grosse dent démontable, une grande mâchoire
scolaires pour informer les élèves de CP et pro- proche de zéro. et une grande brosse, un grand livre sur la dent, une
céder à un examen bucco-dentaire de chaque Le service bucco-dentaire du conseil général affiche, un DVD et plusieurs dépliants d’information.
2. Attribuable aux messages d’information, au fluor, à
enfant. Sur l’année scolaire 2011-2012, relève du même service que la PMI. De ce fait,
la disponibilité des dentistes pour soigner les enfants
2 500 élèves seront ainsi vus, informés et exa- les chirurgiens-dentistes ont pu sensibiliser les (et notamment au fait que les dents de lait ne sont plus
minés, dans 145 classes de 95 écoles. Le choix médecins, infirmières, puéricultrices et sages- systématiquement enlevées), à la lutte contre l’obésité
des écoles est effectué par la CPAM, en lien avec femmes aux problèmes bucco-dentaires des et à bien d’autres facteurs.
l’action « M’T dents ». Sont privilégiées les
écoles où les besoins sont les plus importants Faute de soins, un risque de handicap à l’âge adulte
(en fonction du nombre de caries, des pro-
Chez les enfants, dès le plus jeune âge, l’absence de soins bucco-dentaires peut avoir des consé-
blèmes d’orthodontie et de la nécessité de soins
quences irréparables. Illustration avec le témoignage d’un chirurgien-dentiste qui fait de la prévention
constatés dans un premier temps chez les
dans les classes : « Dans une école maternelle et primaire située dans un quartier défavorisé, j’ai
enfants). Plusieurs sections de maternelles sont
procédé à un examen bucco-dentaire de tous les enfants. Environ la moitié des quatre-vingt enfants
également incluses dans le dispositif.
ainsi examinés avait au moins une carie et donc besoin de soins. Et six d’entre eux – âgés de 3 à
Le dentiste intervient pendant une heure dans
5 ans – avaient un état bucco-dentaire dégradé pouvant hypothéquer leur dentition si des soins n’étaient
les classes de CP et axe son information sur les
pas prodigués en urgence. On touche ici les limites du dépistage sans accès systématique aux soins
messages suivants : importance de la dent à
ensuite : ces enfants risquent de se retrouver totalement édentés dès le plus jeune âge, et donc
6 ans (âge moyen des enfants de ces classes),
handicapés définitivement pour leur vie future. Les dommages que j’ai observés – tant sur leurs dents
intérêt d’une bonne alimentation, d’une bonne
de lait que sur leurs dents définitives –, auront une incidence sur la croissance de la mâchoire, la
hygiène dentaire, du fluor, de la visite chez le
position des dents, leur fonction, donc sur la santé bucco-dentaire et la santé en général. »
dentiste. Pour sensibiliser les enfants, elle dis-
pose d’une panoplie d’outils pédagogiques1. Propos recueillis par Yves Géry
Son intervention se termine par un examen den-

28 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Estime de soi et santé bucco-dentaire
Agir sur l’estime de soi et sur les facteurs qui lui sont favorables est un levier d’action majeur :
estime de soi et santé bucco-dentaire nécessitent d’être conjuguées harmonieusement pour
que les démarches de santé publique bucco-dentaire puissent être efficientes. À cet égard,
les témoignages ici présentés sont édifiants : c’est seulement quand une personne retrouve
une parcelle d’estime d’elle-même qu’elle commence à reprendre soin d’elle.

Longtemps résumée à l’absence de


douleur, la santé bucco-dentaire est
devenue synonyme d’esthétique et sym-
bole d’intégration. Elle fait l’objet de
plans de prévention et de communica-
tion. Au-delà des problématiques fonc-
tionnelles, l’intérêt du public pour la
santé bucco-dentaire est fortement ins-
crit dans un champ psycho-social lié à
l’estime de soi. Le développement récent
d’une nouvelle offre (blanchiment,
orthodontie à tous âges, implants, bijoux
dentaires, etc.) est très emblématique de
l’image de soi, de sa situation sociale et
des représentations collectives de la
santé bucco-dentaire aujourd’hui.
Cependant, une partie de la popula-
tion, vivant majoritairement dans des
conditions précaires ou dans un grand « Les termes comme éducation à la ses origines, le rejet par le père ou la
isolement, reste à la marge de cette ten- santé sont très mal pris. Les parents se mère, les jugements de valeur disquali-
dance. Le manque de gestes d’hygiène sentent coupables, dans la santé aussi, de fiants, les violences ou l’atteinte à son
et de recours aux soins dentaires de ces ne pas savoir éduquer ! Et là encore, on intégrité physique et psychologique (2),
personnes est préoccupant. Certaines leur colle l’échec… » ils accompagnent bien sûr le quotidien
d’entre elles, interrogées sur leur rapport Pour Mme M., c’est : « On n’ose pas de la misère et ont comme conséquence
à leur corps, leur vision d’elle-même et parler, on n’ose pas sourire. Socialement, que l’estime de soi n’est pas un acquis
ce qu’elles entendent par estime de soi, on se sent écarté quand même. » facile pour les plus pauvres.
répondent : « L’apparence est une estime
de soi, ce que l’on peut penser de soi face L’estime de soi, un défi Protéger sa santé :
à un miroir mais aussi le reflet de ce que pour les plus pauvres un objectif hors d’atteinte
l’on montre aux autres. Lorsque vous ne Lorsqu’on analyse les trois compo- De même, faire respecter le droit fon-
pouvez pas sourire parce que les dents n’y santes interdépendantes qui construisent damental à la « protection de la santé3 »
sont pas, vous fermez toujours la bouche ! l’estime de soi : « l’attachement à soi » qui est un enjeu qui semble souvent hors
Les gens pensent que l’on ne se lave pas et facilite « une vision positive de soi » qui, d’atteinte pour les plus fragiles. Dans la
que l’on sent mauvais de la bouche, alors à son tour, influence favorablement « la charte d’Ottawa (3), les différents aspects
que ce n’est pas vrai. Le regard des gens confiance en soi » (1), on retient l’impor- de la santé sont abordés sous un angle
sur nous est important pour nous aider à tance des conditions de vie sociales et global : réaliser ses aspirations et satis-
retrouver l’estime de soi. »1 affectives. Si les facteurs favorables à son faire ses besoins, évoluer dans son
« Si les autres n’ont pas une bonne émergence sont un environnement milieu, s’y adapter, le modifier. Sur cette
image de toi… tu te sens coupable… Tu stable, sécurisant, réceptif aux attentes base, on ne peut que constater l’écart
dois toujours te justifier, quand tu es sans culpabilisation ou disqualification entre les textes et la réalité pour les plus
pauvre, de ta façon d’utiliser ta vie, ton ou menace, répondant aux grands pauvres.
corps, ta nourriture. Tu n’as pas d’argent besoins relationnels, on constate qu’ils Réaliser ses aspirations et satisfaire ses
alors si tu vas chez le coiffeur, l’assistante sont absents dans les situations de pré- besoins posent la question de l’adéqua-
sociale te le reproche, on compte tout et carité. Quant aux facteurs destructeurs tion entre le besoin de soins exprimé ou
on nous reproche chaque dépense qui de l’estime de soi qui sont, pour les plus latent chez l’individu, le besoin de soin
n’est pas utile… alors les dents ! »2 archaïques, principalement le doute sur analysé par le professionnel et l’offre de

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 29


soins disponible (4). C’est à l’intersection tionnelle peut engendrer un repli, une “motivation”... Souvent, j’ai remarqué
de ces facteurs que se situent la santé et désocialisation ou une violence pour que les séances de motivation au fau-
sa prise en charge. exister, ou encore un excès de consom- teuil5 étaient prétextes à culpabiliser les
En ce qui concerne les actions sur mations diverses permettant de procurer patients : dents sales, mauvais brossage,
l’environnement (espace de logement un plaisir immédiat). mauvaise technique. J’ai pris l’habitude
insuffisant, insalubrité, nuisances Les personnes en situation de préca- de convoquer les étudiants qui avaient ce
sonores, qualité de l’air, du sol, accès à rité perdent plus ou moins leur capital type d’attitude et de leur proposer
une alimentation saine, etc.), l’individu social : « Le capital social, c’est le lien d’échanger les rôles, leur indice de plaque
est bien souvent peu acteur des choix social... Les gens qui ne sont pas regardés était souvent mauvais. C’était alors l’oc-
faits pour influer sur ce paramètre, et ceci ne se regardent plus. Petit à petit, l’image casion de parler avec l’étudiant d’une
d’autant plus qu’il a peu de moyens de soi est atteinte ou amoindrie… Quand autre forme de motivation basée sur le
financiers et sociaux. on perd cette auto-séduction, on aban- respect de leur patient dans sa diversité :
donne l’idée même de sa propre représen- ne pas culpabiliser mais encourager,
Pas regardés, ils ne se regardent tation et des soins nécessaires à son donner confiance en soi. »
plus corps » (6).
L’homme « disqualifié », décrit par Avoir un avenir devant soi
Serge Paugam (5), qui, devant le regard Ne pas culpabiliser Pour beaucoup, la « motivation » res-
négatif ou le non-regard des autres, a mais encourager tera une affaire de rencontres, de com-
« intériorisé le sentiment qui lui vient de Un travail sur les représentations (7) préhension mutuelle qui devrait davan-
la société, en général, et de ses groupes s’impose dans la pratique médicale. « La tage être abordée sous l’angle de la
d’appartenance en particulier, de ne plus langue du médecin n’est pas celle qui relation à l’autre, de perspectives d’ave-
être à la hauteur de son rôle social réel ou imprègne l’expérience corporelle du nir. Autant de pièces maîtresses pour
virtuel, à partir duquel il était défini ou malade immergé dans les attitudes et les améliorer l’estime de soi. Madame Zim-
se définissait lui-même ou de celui valeurs de ses adhésions culturelles mer4 rappelait que dire à un jeune :
auquel il aspirait. » « L’homme disqualifié propres » (8). Des professionnels qui fus- « Attention, les filles, elles te regarderont
est toujours désespéré puisque son exis- tigent les mères dont les enfants sont mieux si t’as des belles dents, que si t’as
tence sociale lui semble remise en ques- polycariés ont-ils une connaissance des des grosses dents toutes noires et toutes
tion. Ce désespoir est à la fois source de conditions de vie ou de la malnutrition écaillées » est plus parlant que de lui dire
solitude et de détresse psychologique. La des enfants pauvres ? Au cours des actes « si tu ne te soignes pas, tu vas souffrir, les
perte de confiance en soi, le sentiment thérapeutiques, lorsque les milieux dents du fond vont te donner des mala-
d’être “mal dans sa peau”, les troubles sociaux ne s’interpénètrent plus, la dies graves ! » Pour qu’un engagement
psychosomatiques tels que l’anxiété, l’an- méconnaissance peut porter atteinte à dans une démarche de santé soit pos-
goisse, l’insomnie et l’incapacité à l’estime de soi du patient. Un regard sible, il faut que le patient le décide lui-
affronter les difficultés de la vie quoti- négatif, voire culpabilisant, porté par un même et qu’il ait un avenir devant lui :
dienne en sont les expressions les plus professionnel de santé en accentuera le « Quand j’ai su que je pouvais rentrer à
courantes. » déficit. Madame Souvay4 partageait avec l’armée après un an d’attente d’emploi,
Cet homme n’est souvent plus en nous cette réflexion : « On ne t’a jamais je suis allé me faire refaire les dents,
mesure d’identifier et de réaliser ses expliqué qu’il fallait te brosser les dents mettre des couronnes et depuis je fais une
ambitions, de satisfaire ses besoins. Pour ou qu’il fallait aller chez le dentiste... » vérification deux fois par an pour que
évoluer dans son milieu et s’y adapter, il Dans la même réunion, une profession- tout aille bien. J’ai du boulot et un
développe des stratégies lui permettant nelle nous confiait : « Une de nos missions avenir. »4
de rebondir (le niveau de détresse émo- est d’aider les étudiants à faire de la
Agir sur l’estime de soi,
◗ Références bibliographiques formidable levier d’action
Pour N. Cafaxe4, la démarche de
(1) André C., Lelord F. L’estime de soi. S’aimer recours aux soins des populations vulnérables. santé bucco-dentaire est liée à l’insertion
pour mieux vivre avec les autres. Paris : Odile Paris : Inserm, 2005 : p. 38-60. sociale : « Quand on boit de l’alcool, on
Jacob, coll. Bibliothèque, 2007 : 304 p. (6) Emmanuelli X. L’action du Samu social. Actes a toujours la bouche pâteuse et les dents
(2) Salomé J. À propos de l’estime de soi. CLES du colloque « Précarité et santé ». Revue Laen- collantes, on n’a pas envie de les nettoyer,
retrouver du sens, 2006. En ligne : http://www. nec Santé/Médecine/Éthique, 2007, n° 4 : pourtant on se voit bien… Moi, j’ai arrêté
cles.com/chroniques/regards/article/ p. 37-47. de boire et une des premières choses,
a-propos-de-l-estime-de-soi (7) De Goer B., Ferrand C., Hainzelin P. Croise- c’était de me refaire les dents, un nou-
(3) Organisation mondiale de la santé (OMS). ment des savoirs : une nouvelle approche pour veau dentier, des couronnes, ça vaut le
Charte d’Ottawa, 21 novembre 1986. les formations sur la santé et la lutte contre les coup, je me les brosse, je me regarde, je
(4) Relations soignants-soignés dans le cadre de exclusions. Santé publique, 2008, vol. 20, n° 2 : ne me reconnais plus. Aux alcooliques
l’accès aux soins des populations en situation de p. 163-175. anonymes, tu peux demander, c’est un
précarité. ATD Quart-Monde, Études et Dévelop- (8) Le Breton D. Médecine, corps, anthropolo- des premiers trucs avec la peau, le teint
pement, Service municipal Nancy Ville-santé, juin gie. In : Hirsch E. Éthique, médecine et société. redevient clair. »
2002 : 72 p. Comprendre, réfléchir, décider. Paris : Vuibert, Agir sur l’estime de soi et sur les fac-
(5) Paugam S. Les différents liens sociaux et coll. Espace éthique, 2007 : p. 378-383. teurs qui lui sont favorables est un formi-
leurs ruptures. In : Chauvin P., Parizot I. Santé et dable levier d’action pour permettre la
rencontre soignant et soigné et la mise

30 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


en place de la démarche active de santé.
Estime de soi et santé bucco-dentaire
nécessitent d’être conjuguées harmo-
nieusement pour que les démarches de
Santé et précarité :
santé publique bucco-dentaire puissent
atteindre leur cible et être efficientes.
Les politiques de santé peuvent amé-
les permanences d’accès
liorer l’estime de soi des individus et agir
dans la prise en charge de leur santé par
des actions qui modifient leur propre
aux soins de santé
regard sur leur corps et particulièrement
sur leur bouche. Ceci peut être mis en
bucco-dentaire
place dès le plus jeune âge : « Dans la vie
de l’enfant, le corps est important, il
découvre comment s’en servir. Il vit en En 1998, la loi contre les exclusions a créé les perma-
amitié avec lui-même. Les messages, à cet nences d’accès aux soins de santé (Pass) qui incluent les
âge, peuvent l’aider jusqu’à la fin de ses
jours. »4 soins bucco-dentaires. À titre d’exemple, la Pass de l’hô-
Si l’on considère comme l’Organisa- pital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, a soigné deux mille
tion mondiale de la santé6 que la plus
grande menace pour la santé est la pau-
deux cents patients entre 2002 et 2011. Toutefois, ce
vreté, il faut que les politiques de santé dispositif national demeure insuffisant pour procurer des
aillent à la rencontre des usagers et par-
soins dentaires aux personnes les plus démunies.
ticulièrement des plus fragiles afin que
les programmes deviennent non seule-
ment visibles, mais qu’ils rencontrent la Depuis plusieurs décennies, l’accès plémentaire, les dépenses consacrées
participation des publics. aux soins bucco-dentaires constitue, en aux soins dentaires entrent en compéti-
France, un problème récurrent pour les tion avec d’autres secteurs budgétaires
Huguette Boissonnat-Pelsy populations les plus défavorisées. For- des foyers. Et, lorsque ces derniers appa-
Chirurgien-dentiste, responsable santé, tement corrélé à l’exclusion sociale, le raissent fondamentaux (alimentation,
ATD Quart-Monde, Paris, renoncement aux soins bucco-den- logement, éducation, profession, etc.),
Isabelle Tiebot taires s’est progressivement élargi à une les dépenses relatives aux soins den-
Chirurgien-dentiste, portion croissante de la population. taires passent au second plan. Paradoxe
responsable Mission France, Près de la moitié des Français renonce- sanitaire, les soins de prévention sont les
Aide odontologique internationale, Montrouge. rait au moins une fois à consulter un premiers à être affectés par cette com-
chirurgien-dentiste pour des raisons pétition. En l’absence de protection
financières, et le rapport ESPS de 2008 maladie complémentaire, le recours aux
suggère qu’environ un Français sur dix soins bucco-dentaires n’est le plus sou-
y renonce de manière définitive (1). vent motivé que par le symptôme (3).
Alors qu’à partir des années 1990, les
1. Madame Micheline Adobati, membre du mouvement pouvoirs publics choisissent une décon- Un marqueur
ATD Quart-Monde.
2. Madame Emilienne Kaci, membre du mouvement centration des prérogatives de l’État, le et un handicap social
ATD Quart-Monde. législateur centralise les missions de La quasi-totalité des travaux consa-
3. La loi d’orientation relative à la lutte contre les exclu-
sions du 29 juillet 1998, aboutissement des préconisa-
lutte contre les exclusions, notamment crés au renoncement des soins dentaires
tions du rapport Wresinski du Conseil économique et par la loi relative à la lutte contre les souligne l’influence évidente du niveau
social de 1987, proclamait dans son article premier exclusions du 29 juillet 1998 initiatrice de ressources et de la protection sociale.
que : « La lutte contre les exclusions est un impératif
national fondé sur le respect de l’égale dignité de tous de la couverture maladie universelle Toutes ces études montrent l’impact du
les êtres humains et une priorité de l’ensemble des complémentaire (CMU-C). Parallèle- renoncement aux soins sur la santé
politiques publiques de la nation. ment, les textes régissant la socialisation orale. Elles sont, en revanche, peu nom-
La présente loi tend à garantir sur l’ensemble du terri-
toire l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux des actes dentaires, c’est-à-dire précisant breuses à avoir exploré l’influence de
dans les domaines de l’emploi, du logement, de la les actes donnant lieu à une prise en l’altération de la santé orale sur la socia-
protection de la santé, de la justice, de l’éducation, de
la formation et de la culture, de la protection de la
charge par l’Assurance maladie, n’évo- lisation des individus : M.T. Nguyen,
famille et de l’enfance (…). » luent que très faiblement. Une des prin- dans le cadre de sa thèse de doctorat de
4. Cité dans : Prévention bucco-dentaire en milieu défa- cipales conséquences de cette inertie à chirurgie dentaire, montre que les éden-
vorisé : ressenti et propositions de personnes en situa-
tion de précarité et de professionnels de terrain dans le la définition institutionnelle des soins tements antérieurs constituent des fac-
cadre d’un partenariat institution, professionnels et usa- dentaires se retrouve à la lecture des teurs d’exclusion et de dégradation
gers précaires. ATD Quart-Monde/Études et développe- comptes nationaux de la santé. En 2010, psycho-sociale évidents (4).
ment avec le concours du service municipal de Nancy
Ville-Santé, septembre 2005 : 117 p. près des deux tiers des dépenses consa-
5. Séance lors des consultations de parodontologie crées aux soins bucco-dentaires sont à La loi du 29 juillet 1998 repositionne
consistant à donner au patient les éléments de brossage
et d’entretien des dents permettant une bonne hygiène
la charge des ménages (2). Face à un également les missions hospitalières
bucco-dentaire. remboursement partiel, voire inexistant, publiques en prévoyant que « les établis-
6. Rencontre OMS. Djakarta, 21-25 juillet 1997. des honoraires par une assurance com- sements publics de santé et les établisse-

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 31


Au sortir de ces premiers contacts, le
patient obtient un rendez-vous pour la
réalisation des premiers soins. Les étu-
diants prennent en charge environ
80 % des consultants, les autres étant
confiés à des praticiens hospitaliers, du
fait notamment de difficultés psycholo-
giques ou cliniques.
Le financement de la prise en charge
des patients, en particulier prothétique,
repose sur l’arbitrage d’une commission
constituée d’experts administratif (le
directeur de l’hôpital ou l’un de ses
représentants), social (le responsable du
service social de l’hôpital ou l’un de ses
représentants) et médical (le chef du
service d’odontologie ou l’un de ses
représentants). Cette commission est
chargée de valider ou non la non-factu-
ration des actes aux patients, en fonction
de critères médicaux et sociaux rappor-
tés par le praticien hospitalier et le tra-
ments de santé privés participant au adopte, à partir de 2008, l’appellation de vailleur socio-éducatif de la Pass bd.
service public hospitalier mettent en « consultation Françoise Roth », est une Deux mille deux cents patients ont
place des permanences d’accès aux unité fonctionnelle dédiée à l’accueil des été soignés au sein de la Pass bd depuis
soins de santé (Pass), (…), adaptées aux patients renonçant aux soins dentaires l’ouverture du service. Ils sont relative-
personnes en situation de précarité, pour des raisons financières et à leur ment jeunes (l’âge moyen est de
visant à faciliter leur accès au système de prise en charge thérapeutique globale 42 ans), majoritairement de sexe mas-
santé et à les accompagner dans les intégrant dans ses missions de soins la culin (65 %). Seul un consultant sur six
démarches nécessaires à la reconnais- réhabilitation prothétique (au moyen de bénéficie d’un logement individuel per-
sance de leurs droits. Ils concluent avec pose de prothèses). Les ressources sonnel et stable, et un sur dix d’un
l’État des conventions prévoyant, en cas matérielles et humaines qui lui sont emploi rémunéré. Le niveau moyen des
de nécessité, la prise en charge des allouées sont clairement identifiées dans ressources mensuelles des consultants
consultations externes, des actes dia- le cadre du financement des missions pris en charge dans la Pass en 2008 était
gnostiques et thérapeutiques ainsi que d’intérêt général de l’hôpital public, dont de 455 euros, très en-deçà des minima
des traitements qui sont délivrés gratui- font partie celles de Pass. sociaux de l’époque (587 euros pour
tement à ces personnes » (5). La « consultation F. Roth » est placée une personne seule). Un quart des
sous la responsabilité d’un praticien primo consultants de 2008 n’avait pas
Pour l’Île-de-France, le Pass hospitalier. Les personnels qui lui sont de protection sociale à l’entrée dans le
de la Pitié-Salpêtrière spécifiquement attribués correspon- dispositif.
Mandatée par le directeur général de dent à un temps plein hospitalier et à Les consultants de la Pass se singu-
l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris douze demi-journées (NDLR : par mois) larisent par un nombre significative-
(AP-HP), Françoise Roth a été chargée de praticiens attachés, ainsi qu’une ment important de dents absentes non
en 1998 d’analyser l’accès aux soins assistante sociale à temps plein. Elle remplacées et de dents cariées. Entre le
bucco-dentaires des plus démunis en dispose de dotations spécifiques desti- tiers et la moitié d’entre eux sont en
Île-de-France. Ses conclusions suggè- nées à l’achat de prothèses dentaires. outre affectés d’un édentement anté-
rent la nécessité de création d’une struc- rieur et, pour plus d’un patient sur
ture constituant une unité d’accueil et Vaste partenariat deux, l’indication d’au moins une
de prise en charge médico-sociale clai- Un partenariat conventionnel, des- extraction dentaire est posée. Ces indi-
rement identifiée, jouant le rôle de char- tiné à faciliter l’accès au dispositif, a été cations s’expliquent pour 82,3 % d’entre
nière entre la demande de soin et l’offre souscrit entre l’AP-HP et différents par- eux par le renoncement aux soins en
de droit commun (6). La création, en tenaires de « terrain » : Médecins du amont et pour 17,4 % par un échec des
2002, de la permanence d’accès aux Monde, l’Aide odontologique interna- soins antérieurement délivrés (7).
soins de santé bucco-dentaire (Pass bd) tionale, le Bus social dentaire, Emmaüs
sur le site de la Pitié-Salpêtrière repré- et le Samu social de Paris. Bilan des Pass
sente la formalisation de ces travaux, Au terme de la première consulta- En 2009, la direction de l’hospitalisa-
l’engagement institutionnel de l’époque tion, assurée par un praticien référent, tion du ministère de la Santé et des
et la pugnacité de cette femme de un plan de traitement, intégrant le cas Sports décide la création de nouvelles
caractère. échéant des examens médicaux com- Pass bucco-dentaires et dresse un bilan
La permanence d’accès aux soins de plémentaires, est rédigé. Le patient est du fonctionnement des Pass exis-
santé bucco-dentaire du groupe hospi- ensuite adressé à l’assistante sociale de tantes1. Trois grands types de fonction-
talier Pitié-Salpêtrière–Charles-Foix, qui la consultation. nement transparaissent. Le plus fré-

32 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


pas accès aux soins auxquels ils sont en
droit de prétendre. À plus forte raison,
rien ne laisse supposer que la dégrada-
tion faciale – imputable aux affections
dentaires et à la nature des traitements
prodigués – ne cesse de constituer un
facteur de marquage d’exclusion
sociale (9).

Frédéric Rilliard
Praticien hospitalier,
consultation Françoise Roth,
Lisa Friedlander
Assistante hospitalo-universitaire,
Université Paris 7-Denis Diderot,
Julien Descorps-Declere,
Nadhia Khelifa, Franck Moyal,
Shéhérazade Saadi,
Florence Schvallinger
Praticiens attachés référents,
Christelle Naud-Llamas
quent correspond à la délivrance de • la faiblesse des effectifs médicaux de Assistante sociale,
soins au sein d’une unité d’odontologie certaines des structures dans un consultation Françoise Roth,
ou de stomatologie dans le cadre de contexte d’une odontologie hospita- Service d’odontologie
missions de Pass générale. Un autre lière quasiment inexistante (moins de de la Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Paris.
modèle, superposable à celui de la 200 praticiens hospitaliers pour plus de
« consultation Françoise Roth », intègre 40 000 praticiens libéraux) ;
les missions de Pass à celles de services • enfin, dans la quasi-totalité des cas,
pré-existants, le plus souvent hospitalo- seuls les soins primaires sont délivrés,
universitaires. Un troisième modèle, répondant à une logique purement
unique, est directement construit médicale de traitement de la douleur
autour d’une logique de réseau en par- et/ou de l’infection ; les soins non pri- 1. Voici une liste – non exhaustive – de la localisation
des Pass en France : centre hospitalier régional Metz-
tenariat avec les collectivités locales et maires de réhabilitation prothétique Thionville, centre hospitalier Saint-Denis, centre hos-
des instances ordinales (Conseil de (par des prothèses) sont absents. Ils pitalier Sud Francilien Courcouronne (Essonne),
centre hospitalier Dôle (Jura), centre hospitalier Bre-
l’ordre). sont pourtant un facteur important d’in- tagne Sud (Lorient), centre hospitalier Poitiers, centre
Plusieurs constats émergent de la sertion sociale. hospitalier Cayenne, centre hospitalier régional uni-
confrontation de l’expérience des diffé- Aujourd’hui encore, la précarité versitaire Strasbourg, centre hospitalier Calais, centre
hospitalier Douai, centre hospitalier universitaire
rents acteurs de ces structures (8) : continue d’être très fortement synonyme Nice, AP-H Marseille, centre hospitalier Le Havre,
• le manque de transparence sur l’im- de pathologies oro-faciales (bouche et centre hospitalier Montauban, centre hospitalier
putabilité des financements et de leur visage), et les quelques mesures de régional universitaire Bordeaux, centre hospitalier
Moulins, centre hospitalier régional universitaire
reconductibilité, impactant le dévelop- développement de structures de soins Toulouse, AP-HP : hôpital Corentin-Celton (Issy-les-
pement de missions structurellement ne semblent pas en capacité d’empêcher Moulineaux), groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière
(Paris).
pérennes ; que les patients les plus démunis n’aient

◗ Références bibliographiques
(1) Després C., Dourgnon P., Fantin R., Jusot F. curatifs de la population francilienne adulte. dans le cadre de la précarité. Rapport interne,
Le renoncement aux soins pour raisons finan- Paris : ORS d’Île-de-France, octobre 2008 : 6 p. Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 1999.
cières : une approche économétrique. Questions En ligne : www.ors-idf.org/dmdocuments/ (7) Rilliard F., Naud-Llamas C., Descorps-
d’économie de la santé, novembre 2011, 6pdents.pdf Declere J., Friedlander L., Javelot M.J., Khelifa
n° 170 : 6 p. En ligne : http://www.irdes.fr/Publi- (4) Nguyen M.T. Enquête de satisfaction des N., et al. Précarités, odontologie et hôpital. L’ex-
cations/2011/Qes170.pdf consultants de la Pass bucco-dentaire du Groupe périence de la consultation Françoise Roth. Infor-
(2) Direction de la recherche, des études, de hospitalier Pitié-Salpêtrière. Thèse de doctorat mation dentaire, 2009, vol. 91, n° 33 : p. 1902-
l’évaluation et des statistiques. Comptes natio- d’exercice. UFR d’odontologie de l’université 1908. En ligne : www.information-dentaire.fr/
naux de la santé 2010. Paris : Drees, coll. Études Paris 7-Denis Diderot, Paris, 2011. pdf/10867_idvol91n33p1902-1908.pdf
et statistiques, 2011 : 283 p. En ligne : www. (5) Loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation (8) Premières journées nationales des Pass
sante.gouv.fr/IMG/pdf/comptes_nationaux_ relative à la lutte contre les exclusions. Journal bucco-dentaires. Paris, juin 2010.
sante_2010.pdf officiel, n° 175, 31 juillet 1998 (titre I, chapitre 3, (9) Maisondieu J. Exclusion rime avec disparition.
(3) Vincelet C., Azogui-Lévy S., Grémy I. État article 76). Information dentaire, 2009, vol. 91, n° 33 :
bucco-dentaire et recours aux soins préventifs et (6) Roth F. L’accès aux soins bucco-dentaires p. 1815-1819.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 33


La santé bucco-dentaire
de la personne âgée
De nombreuses personnes âgées, dépendantes ou non, ont un état dentaire préoccupant,
faute de prévention et de soins adaptés. Les experts soulignent la nécessité d’intégrer la
santé bucco-dentaire à la promotion de la santé générale, et de former les professionnels
– soignants et aidants – qui côtoient les personnes âgées au quotidien. Seules des inter-
ventions pluridisciplinaires permettent d’améliorer la santé bucco-dentaire et donc la
qualité de vie de ces personnes.

caux sont importants du fait de leurs


pathologies3. Leurs besoins ont été
identifiés au cours de plusieurs
enquêtes épidémiologiques et le
constat est alarmant ; en effet, elles met-
tent en évidence le très mauvais état
dentaire des résidents et la quasi-
absence de recours aux soins (5, 6).

L’utilisation des services de soins


Pour en revenir à la population
générale des personnes âgées, le
recours – ou non-recours – aux services
de soins est fonction de plusieurs
facteurs :
• liés à l’état de santé des personnes :
santé générale, mobilité, état de santé
orale ;
• socio-démographiques : lieu de rési-
dence, revenus, niveau d’éducation ;
• subjectifs : croyances personnelles,
absence de besoin perçu, anxiété face
L’Organisation mondiale de la santé causes essentielles sont la carie et la aux soins, (in)satisfaction lors des soins
(OMS) recommande que les États adop- maladie parodontale2. L’état bucco- précédents ;
tent des stratégies pour améliorer la santé dentaire a été évalué chez des sujets de • géographiques : éventuelles difficul-
orale des personnes âgées (1). En effet, 65 à 74 ans. Il montre que l’indice tés de déplacement des personnes,
les tendances démographiques actuelles CAOD (nombre de dents cariées, accessibilité des structures de soins.
nécessitent que l’on porte une attention absentes ou obturées) augmente entre
particulière au phénomène du vieillisse- 65 et 74 ans : 27 % des hommes et 21 % Les études montrent que le recours
ment de la population, sur lequel la des femmes ont au moins une dent aux professionnels reste faible dans
recherche scientifique a d’ailleurs permis cariée, 13,3 % des hommes et 11,4 % cette population. Les raisons écono-
d’apporter des informations et des des femmes ont une surface mastica- miques (taux de remboursement des
connaissances nouvelles. toire insuffisante (3). Le nombre de soins, dépassements d’honoraires,
Les personnes âgées constituent dents manquantes, leur situation sur absence de complémentaire santé)
aujourd’hui une partie importante de la l’arcade sont autant de facteurs qui constituent un motif de non-recours de
population, avec des caractéristiques retentissent sur la nutrition des per- plus en plus fréquent. On constate
hétérogènes1. sonnes âgées et qui peuvent entraîner aussi une sous-déclaration de symp-
un risque de dénutrition protéino- tômes par les personnes âgées. Ainsi,
L’état bucco-dentaire énergétique. plus de la moitié des symptômes consi-
des personnes âgées dérés comme sérieux ne sont pas
Différents indices permettent de L’état de santé bucco-dentaire des déclarés aux professionnels de santé
décrire la morbidité bucco-dentaire personnes institutionnalisées doit éga- (7). Une étude, réalisée en Europe,
chez les personnes âgées, dont les lement être évalué car les risques médi- chez les plus de 50 ans montre que le

34 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


suivi dentaire et le recours aux soins personnes âgées. Plusieurs études ont appropriés en intégrant la promotion
préventifs est important en Suède, en en effet montré l’efficacité des pro- de la santé des aînés. C’est d’autant plus
Allemagne, en Suisse, au Danemark et grammes de formation des soignants essentiel dans les pays où la part de
aux Pays-Bas, mais faible en Espagne, dans l’amélioration de l’hygiène orale personnes âgées dans la population
en Italie, en France, en Grèce, en des personnes âgées (10). Plus globale- générale a considérablement augmenté
Pologne et en Irlande (8). Dans un pro- ment, des études sont nécessaires pour – en même temps que leur espérance
gramme suédois qui inclut le suivi den- évaluer l’efficience des différents pro- de vie – et continue de croître.
taire régulier, 13 % des personnes de 65 grammes de promotion de la santé orale
ans et plus ne se présentent pas à la chez les personnes âgées (11). Marysette Folliguet
consultation. Ils sont 21 % chez les 80 Professeur des universités-praticien
ans et plus (9). Les acteurs de santé doivent égale- hospitalier, chef du service d’odontologie,
ment organiser de nouvelles formes de Hôpital Louis-Mourier, AP-HP, Colombes,
La prise en charge du sujet âgé prise en charge adaptées aux personnes Florence Schvallinger
La prise en charge odontologique âgées. Les réseaux de santé, autorisés Présidente, Réseau Appolline,
nécessite une connaissance des fac- par la loi du 4 mars 2002, sont une Nadia Elamrani
teurs de risque susceptibles d’aggraver réponse possible à ce nouveau para- Coordinatrice des actions auprès
l’état de santé orale. En effet, la polypa- digme. Plusieurs réseaux existent, des personnes âgées, CPAM, Paris.
thologie, fréquente chez ces personnes, comme le Réseau santé bucco-dentaire
complique la prise en charge bucco- et handicap-Rhône-Alpes (SBDH-RA)
dentaire ; c’est pourquoi il est indispen- ou Appolline, réseau départemental
sable de proposer des mesures préven- qui facilite la prise en charge des per- 1. En Europe, le nombre de personnes de 65 ans et plus
va doubler entre 2008 et 2060 pour atteindre 151 mil-
tives en associant les équipes médicales, sonnes âgées en Essonne (lire l’enca- lions. En France, c’est la part des plus âgés qui pro-
paramédicales et les aidants. Parmi ces dré 1 page 36). D’autres initiatives exis- gresse le plus : en 2060, les 60 ans et plus seront
23,6 millions, les 75 ans et plus 11,9 millions et les
actions, citons la sensibilisation des soi- tent également, telles que l’action 85 ans et plus 5,4 millions (2). Les personnes âgées
gnants aux pathologies bucco-den- menée par la caisse primaire d’Assu- constituent un groupe très hétérogène. C’est pourquoi
taires et à leurs répercussions sur la rance maladie (CPAM) de Paris qui l’on distingue souvent les personnes de 65 à 75 ans et
les plus de 75 ans. À partir de cet âge, les paramètres
santé générale ; l’éducation conduira intervient directement dans les établis- physiologiques et les caractéristiques psychosociales
au changement d’attitude des soi- sements hébergeant des personnes sont beaucoup plus marqués.
gnants. Ils doivent aussi bénéficier de dépendantes (lire l’encadré 2 page 36). 2. Pour la carie, ce sont le CAOD (nombre de dents
cariées, absentes ou obturées), le CAOF (nombre de
formations spécifiques à la toilette faces dentaires cariées, absentes ou obturées), le RCI
buccale. Conclusion (indice de caries radiculaires : nombre de faces radi-
culaires cariées et obturées/nombre de faces radicu-
Le vieillissement accroît le risque de laires saines, cariées et obturées) mais également des
Par ailleurs, le dépistage des patholo- pathologies bucco-dentaires, aggravant indices permettant d’évaluer la perte des dents comme
gies bucco-dentaires et l’instauration de ce fait l’état de santé générale sou- le pourcentage de personnes édentées.
Pour la maladie parodontale, on peut mesurer le sai-
d’un suivi régulier, assurés par les odon- vent déjà fragilisé à ces âges avancés. gnement gingival, la présence de tartre, le degré de
tologistes (spécialistes de l’étude des Les personnes âgées ont des besoins de récession gingivale, la profondeur des poches parodon-
dents et de leurs maladies), est aussi santé orale différents de ceux de la tales et des indices d’hygiène (indice de plaque, etc.).
3. En 2007, 657 000 personnes résidaient en établis-
indispensable. Seules des interventions population générale, qui ne sont par sements hébergeant des personnes âgées (Ehpa).
ciblées pluridisciplinaires permettront ailleurs plus les mêmes que ceux des Parmi elles, 84 % sont considérées comme dépen-
dantes (GIR – degré de dépendance permettant
de réduire la morbidité bucco-dentaire générations précédentes ; il faut donc d’évaluer le besoin d’aide – 1 à 4) et 51 % (GIR 1 et 2)
et amélioreront ainsi la qualité de vie des mettre en place des programmes comme très dépendantes (4).

◗ Références bibliographiques
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LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 35


Appolline, réseau de santé bucco-dentaire de proximité dans l’Essonne
Appolline est un réseau de santé bucco-dentaire dentiste procède à un bilan de l’état buccal et, en séance théorique (connaissances générales) et
pour personnes fragiles (âgées et/ou handica- fonction de ses préconisations, des pathologies une autre plus pratique sur l’approche de la toilette
pées) résidant en Essonne. Il a été créé en 2006 générales et du handicap de la personne, oriente buccale. Les difficultés sont passées en revue un
par l’hôpital gériatrique Les Magnolias, le conseil vers la structure de soins la plus appropriée : le mois après, par l’infirmière du réseau, directement
départemental de l’ordre des chirurgiens-dentistes chirurgien-dentiste libéral, adhérent à la démarche auprès de la personne âgée et/ou handicapée et
de l’Essonne et la coordination gérontologique, la du réseau et dont le cabinet est proche et acces- de son aidant professionnel.
Harpe, centre local d’information et de coordina- sible, lequel peut aussi prodiguer les soins « pri- Le chirurgien-dentiste coordinateur peut apporter
tion (Clic) du Val-d’Yvette. Depuis, certains direc- maires » à domicile ; au personnel soignant des conseils lors des inter-
teurs d’établissements médico-sociaux (vingt-deux • si la personne présente un handicap lourd ou des ventions de dépistage ;
en 2011) et une quarantaine de praticiens libéraux polypathologies, les praticiens libéraux adhérents • formations à destination des professionnels de
ont adhéré à cette démarche de santé publique. peuvent effectuer les soins dans plusieurs plateaux santé du département à l’approche des soins
La mission du réseau Appolline est de faciliter l’ac- techniques hospitaliers ; bucco-dentaires des personnes fragiles (le juste
cès aux soins tout en formant les professionnels • un suivi des soins est exécuté par les chirurgiens- soin, le refus de soins : jusqu’où aller ?) ou sur des
soignants ou l’entourage à l’importance de la dentistes coordinateurs ; sujets beaucoup plus précis comme les soins
dimension orale dans la santé générale et aux • en cas de difficultés financières engendrant un bucco-dentaires et les bi-phosphonates, le cancer,
soins d’hygiène bucco-dentaire. renoncement aux traitements bucco-dentaires, le diabète, etc. ;
La prévention est l’axe principal du fonctionnement l’assistante sociale du réseau effectue une • sensibilisation du grand public, à savoir les per-
du réseau autour de laquelle s’articulent : recherche de financement spécifique. sonnes âgées ou handicapées et leurs aidants
Le dépistage et les soins Les formations familiaux, à la prévention de la dénutrition sous
• un chirurgien-dentiste coordinateur du réseau • formations des soignants ou des professionnels l’angle bucco-dentaire à l’occasion de forums de
reçoit la personne qui émet une demande de soins médico-sociaux à la toilette buccale : recomman- prévention.
bucco-dentaires (celle-ci peut être formulée par dées à tous les professionnels entourant les per- Appolline cherche à faciliter la démarche de soins
l’entourage professionnel ou familial) ; sonnes fragiles et au personnel soignant ou édu- et à inscrire ce public fragile dans une dynamique
• après avoir obtenu le consentement écrit de la catif des établissements accueillant les personnes de soins par un circuit bien repéré et le plus appro-
personne ou de son entourage, le chirurgien- âgées ou handicapées. La formation inclut une prié possible.

Promotion de la santé bucco-dentaire en Ehpad – Assurance maladie de Paris

En 2002, l’Assurance maladie de Paris s’est enga- Cette stratégie de prévention a pour objectif d’ob- – organisationnels : qui pratique les soins ou doit
gée dans une action de prévention bucco-dentaire tenir pour chaque résident et selon son degré de les rappeler ? Qui prend les rendez-vous ? Qui fait
dirigée vers les personnes âgées en Ehpad du dépendance un niveau d’hygiène satisfaisant, la le suivi ? Comment la santé dentaire est-elle valori-
nord-est parisien. En 2010, l’action s’est dévelop- suppression des foyers infectieux et la réhabilita- sée dans l’établissement ?
pée à l’ensemble du territoire parisien en intégrant tion de sa fonction masticatrice. – personnels : liés aux soignants eux-mêmes
des Ehpad parisiens demandeurs, notamment Un retour d’information de l’action engagée par la (propre perception de la santé dentaire, position
ceux à vocation sociale (vingt Ehpad en 2011 dont CPAM est présenté aux structures d’hébergement par rapport à l’intimité de l’autre) ;
huit Ehpad du centre d’action sociale de la ville de lors de réunions de bilan annuel. • de démontrer que le dépistage est un acte impor-
Paris). tant car sinon l’état bucco-dentaire reste dans
Une action en trois axes La CPAM de Paris a, depuis 2003, une convention l’oubli et donc l’abandon. Il est le moteur essentiel
1. Bilan bucco-dentaire de chaque pensionnaire : avec la faculté de chirurgie dentaire Paris VII per- du changement de perception des soignants pour
dépistage des entrants à l’arrivée dans l’établisse- mettant d’accueillir les étudiants de 6e année en arriver à intégrer la santé dentaire dans la santé
ment et suivi annuel ; stage de santé publique. Les étudiants intervien- globale des personnes âgées ;
2. Formation des personnels soignants : ateliers nent en binôme, sous le tutorat d’un chirurgien- • de démontrer que l’exercice d’une vigilance par-
interactifs et mise à disposition du matériel d’hy- dentiste de la CPAM, dans les Ehpad, l’objectif tagée par tous les acteurs évoluant autour de la
giène approprié, formation de relais (soignant étant de les impliquer dans la prise en charge des personne âgée permet :
référent) ; personnes âgées dépendantes. – d’amener la personne à exprimer sa gêne,
3. Rôle de coordonnateur de soins : recensement Les étudiants de 4e année sont également – d’identifier ses demandes,
de l’offre de soins puis développement de partena- accueillis lors d’un cours de sensibilisation à la – de l’orienter vers le chirurgien-dentiste,
riats en privilégiant les soins sur site : santé publique et par la participation à une journée – et d’obtenir une amélioration au quotidien,
– convention avec l’UFSBD, en Ehpad. Par ailleurs, la CPAM de Paris participe d’adapter la demande en soins qui accompagne la
– équipe mobile de l’hôpital Bretonneau, à des manifestations grand public : « La Quinzaine dégradation à mesure de la perte d’autonomie et
– projet de partenariat avec l’hôpital Rothschild du Sourire », séminaire inter-Ehpad du centre d’ac- donc des nouveaux besoins.
dont l’objectif est la création d’une unité gérodon- tion sociale de la ville de Paris. La prise en compte des conséquences de la mala-
tologique et d’une filière de soins pour les résidents Quelques chiffres en 2010-2011 die bucco-dentaire sur l’état général, la dépen-
en Ehpad, Vingt Ehpad ont une convention avec la CPAM. dance et la qualité de vie de la personne âgée doit
– collaboration avec les cabinets dentaires internes 1 300 résidents ont été dépistés et 250 soignants donc être intégrée dans la politique de santé
dans les établissements du centre d’action sociale formés. Une évaluation qualitative a été réalisée et publique tout autant que la prise en charge théra-
de la ville de Paris, de proximité dans les centres a permis : peutique.
de santé et cabinets libéraux. • d’identifier les freins : M. F.

36 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Handicap et santé bucco-dentaire :
un exemple de programme
de prévention-intervention
En Rhône-Alpes, un programme pilote de prévention et de prise en charge des soins bucco-
dentaires est destiné aux personnes en situation de handicap. Il repose sur l’information
et l’amélioration de l’accès aux soins pour ces personnes, ainsi que sur la formation des
professionnels. En 2011, grâce à ce programme, 1 800 personnes en situation de handi-
cap ont accédé à des soins adaptés.

Longtemps négligée, la probléma- de prévention. D’une durée de deux circulaire du 6 juin 2011 émanant de la
tique de l’accès à la santé et aux soins semaines, elle est destinée à sensibiliser Direction générale de l’offre de soins
bucco-dentaires des personnes en situa- et à informer les enfants, les adoles- (DGOS) qui encourage fortement l’or-
tion de handicap commence à être cents et les jeunes adultes handicapés ganisation d’un programme de forma-
reconnue et elle fait l’objet d’une prise ainsi que leur entourage par l’intermé- tion national relatif à « la prise en charge
de conscience d’un point de vue médi- diaire de sessions de sensibilisation, de bucco-dentaire des personnes fragili-
cal, médico-social et de la part des pou- tables rondes, de conférences et d’ex- sées ou dépendantes » (7).
voirs publics (1-4). En Rhône-Alpes, la positions itinérantes. L’association Sohdev organise et
principale initiative trouve son origine Le Programme autisme et santé orale assure depuis 2005 différents types de
dans l’extension progressive d’un pro- (Paso) a été développé avec des experts formation (initiale ou continue) auprès
gramme global de santé orale mis en (6) (lire l’encadré page 39). Il met en de professionnels médicaux et paramé-
place par l’équipe du service d’odonto- place des initiatives, notamment pour dicaux impliqués dans la prise en
logie du centre hospitalier Le Vinatier, la prise en charge et le suivi des soins charge des personnes en situation de
avec le soutien de l’association Sohdev1. bucco-dentaires chez les enfants handicap. Depuis 2009, elle forme
Le programme s’appuie sur trois axes autistes. parmi ces professionnels des corres-
indissociables : pondants en santé orale (CSO) chargés
• la sensibilisation des patients et/ou La formation des professionnels d’assurer la formation de leurs confrères
de leur entourage familial et profes- Les actions de formation en direc- à la prise en charge de la santé bucco-
sionnel ; tion des professionnels répondent à un dentaire. En six ans, 82 établissements
• la formation des professionnels ; besoin identifié. Elles font écho à la médico-sociaux ont signé une conven-
• l’accès à un dispositif de soins adapté
intégrant accompagnement aux soins Tableau 1. Offre de soins graduée du réseau Santé bucco-dentaire & handicap
et concertation pluriprofessionnelle. Rhône-Alpes
Le programme, initialement appli-
• dépistage annuel dans les établissements médico-
qué aux personnes hospitalisées au
sociaux
centre hospitalier Le Vinatier, a été
Équipes mobiles • soins à domicile dans une unité mobile (cabinet dentaire
étendu à partir de 1997 aux résidents itinérant)1
de dix structures médico-sociales et • soins à domicile avec des unités dentaires portatives2
concerne aujourd’hui 74 établissements
de Rhône-Alpes. • cabinet de ville
Soins de premier recours
• centre de santé orale : Aubenas (07), Echirolles (38)
Le dispositif d’information Soins de deuxième recours
• centre ressource en santé orale : Ecully (69), Givors (69)
Les actions de sensibilisation envers • centre ressource régional en santé orale : Bron (69)
les personnes en situation de handicap 1. La lettre n° 10 du réseau SBDH-RA présente un reportage sur l’unité mobile.
correspondent notamment à la mise en 2. Une unité dentaire portative correspond à l’équipement complet nécessaire à l’activité d’un chirurgien-dentiste.
œuvre de campagnes de prévention Cet équipement est décomposé en plusieurs modules : instrumentation dynamique, siège, radiographie, instru-
ments médico-chirurgicaux, compresseur, etc. Dans le cadre du réseau, une assistante dentaire est toujours
annuelles comprenant une éducation présente aux côtés du praticien. L’unité portative permet de réaliser les soins les plus courants tels que les
pour la santé orale individuelle ou détartrages, certains soins conservateurs, des extractions simples, des retouches de prothèses traumatisantes,
collective. etc. Les conditions rudimentaires et peu confortables ne permettent cependant pas un usage continu pour un
Handi’Sourire (5, 6) est une manifes- praticien. La lettre n° 8 du réseau SBDH-RA décrit en image une intervention avec une unité portative dans un
établissement médico-social. En ligne : www.reseau-sbdh-ra.org/infotelecharge/Lettre-RSBDH-RA-N°8MAIL.pdf
tation qui s’inscrit dans une démarche

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 37


tion pour l’organisation d’une forma- En quatre ans, 3 600 patients3 et partir de 2004 par l’association Sohdev,
tion au sein de leur structure. 76 établissements médico-sociaux ont et à partir de 2005 par le réseau SBDH-
adhéré au réseau (10-13). En 2010, RA. Les équipes de ces structures et les
L’accès à un dispositif 1 620 personnes en situation de handi- dispositifs mis en place essaient de
de soins adapté cap ou de dépendance ont bénéficié répondre aux besoins spécifiques d’une
Les personnes handicapées sont à d’un suivi dans le cadre du réseau. Leur population longtemps négligée et
haut risque de pathologies orales (8, 9). état bucco-dentaire s’est stabilisé et les oubliée. Les besoins sont cependant loin
Pour répondre à leurs besoins spéci- besoins en soins (essentiellement de d’être couverts. Une plus forte mobilisa-
fiques (en termes d’accès aux soins, prévention) sont moins importants. tion des acteurs médicaux, paramédi-
d’accompagnement, de prise en charge C’est aussi le constat d’une étude por- caux, éducatifs serait souhaitable.
et de suivi coordonné), une offre gra- tant sur des résidents en établissement
duée de soins est déployée par le d’hébergement pour personnes âgées Éric-Nicolas Bory
réseau SBDH-RA2 (tableau page 37). dépendantes (14). Odontologiste – épidémiologiste clinicien,
Centre hospitalier Le Vinatier, Bron,
L’accès au réseau SBDH-RA est gra- L’adhésion d’un établissement Président, Réseau Santé bucco-dentaire
tuit. Les soins courants (soins prophylac- médico-social au réseau SBDH-RA & handicap Rhône-Alpes (SBDH-RA),
tiques, conservateurs, actes de chirurgie) représente un engagement. La structure Association Sohdev, Bron.
sont intégralement pris en charge dans met en place un programme de santé
le cadre de l’équipe mobile du réseau. orale en participant à la campagne de
Pendant les soins, les personnes bénéfi- prévention Handi’Sourire et en formant
cient d’un accompagnement adapté par régulièrement son personnel. Le réseau
du personnel formé à l’approche com- SBDH-RA réalise, au moins une fois par
portementale (chirurgiens-dentistes, an et « à domicile », un examen de dépis-
assistantes dentaires, infirmières, etc.). tage des résidents, coordonne les soins
Certains soins (notamment les actes qui en sollicitant les structures les mieux
ne sont pas remboursés par l’Assurance adaptées, présente un bilan annuel met-
maladie) sont réalisés en cabinet de ville tant en avant le service médical rendu :
ou dans le cadre des soins externes de réduction de la prévalence de la carie,
structures hospitalières publiques ou évolution de l’état des gencives, etc.
privées partenaires. Plusieurs chirur-
giens-dentistes libéraux participent à la Les actions initiées en direction des 1. Association Santé orale, handicap, dépendance et
prise en charge des personnes handica- personnes handicapées en 1996 par le vulnérabilité. http://www.sohdev.org
2. Réseau Santé bucco-dentaire & handicap Rhône-
pées dans les différentes structures du service d’odontologie du centre hospi- Alpes. http://www.reseau-sbdh-ra.org
réseau ville-hôpital. talier Le Vinatier ont été démultipliées à 3. Données réseau SBDH-RA au 31/12/2011.

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38 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Focus sur le Programme autisme et santé orale
Le Programme autisme et santé orale (Paso) a pour but de modéliser une prise en charge adaptée de la santé bucco-dentaire (prévention, dépistage,
éducation pour la santé orale [Eso], soins, suivi, etc.) des enfants et adolescents présentant des troubles du spectre autistique (TSA).
Objectifs du Paso :
• prévenir l’apparition des troubles du comportement provoqués par l’environnement anxiogène du cabinet dentaire ;
• faciliter l’accès à la prévention, à l’éducation thérapeutique, aux soins, au suivi, et mettre en place un accompagnement adapté ;
• obtenir la coopération du patient et de son entourage à l’hygiène bucco-dentaire et aux soins dentaires ;
• mettre à disposition des usagers et des professionnels les outils de médiation et de communication adaptés aux enfants autistes (pictogrammes,
carnets de liaison, bandes dessinées, films, bandes-son, etc.).
Le Paso a été lancé en 2009 grâce à la complémentarité et à la synergie de l’association Sohdev, du réseau SBDH-RA et du service d’odontologie du
centre hospitalier Le Vinatier. L’implication d’un groupe d’experts et un partenariat établi avec le Centre ressource autisme Rhône-Alpes et l’association
Autisme France ont conduit à la création des outils spécifiques de communication et de médiation. Un nouveau site Internet de Sohdev a été ouvert,
début 2012, pour permettre une diffusion d’outils et de recommandations [http://www.sohdev.org].
Une étude pilote a été initiée en 2011 auprès de cinquante enfants et adolescents présentant des troubles autistiques pris en charge individuellement.
L’étude est actuellement en cours d’évaluation.
Une prise en charge collective de personnes avec autisme s’organise actuellement dans plusieurs structures médicales ou médico-sociales pour mettre
en place une prévention et un parcours de soins adapté.

Inter-relations entre activité physique


sportive et santé bucco-dentaire
En France, la pratique d’une activité bucco-dentaires sur la préparation et la L’activité intensive, liée au volume
physique sportive concerne 89 % compétition du sportif, ou encore la pré- d’entraînement ou à la compétition,
des 15-75 ans (1). Si elle participe vention des traumatismes dans les sports peut provoquer une immunodépres-
pleinement au maintien et à l’amé- à risque. Les conseils sont souvent effi- sion1 favorisant le passage à un stade
lioration de la santé de la population, cacement relayés par les éducateurs, les aigu d’affections chroniques. Cela se
certaines pratiques sportives mal entraîneurs ou les responsables sportifs. traduira, par exemple, par le développe-
adaptées ou à risque peuvent avoir Et le vécu des athlètes du groupe parti- ment d’un abcès sur une dent de sagesse
des effets négatifs sur la santé, cipe à la promotion de conduites en incluse ou sur une dent cariée (4).
notamment bucco-dentaire (2). faveur du maintien de la santé bucco-
Illustration avec le sport en club et dentaire comme, par exemple, le port Le risque de traumatismes bucco-
le sport de haut niveau. d’une protection intra-buccale (protège- dentaires (principalement représentés
dents) dans les sports à risque (rugby, par une fracture de l’incisive centrale
Le suivi longitudinal du sportif de handball, etc.) (3). du haut) est clairement identifié dans la
haut niveau impose un bilan bucco- pratique de sports de combat et de
dentaire. Ce dispositif réglementaire Effet de l’activité physique contact (boxe, arts martiaux, rugby,
permet, tout d’abord, de réinsérer dans sur l’état bucco-dentaire handball, basket-ball, etc.), mais peut
le système de santé les sportifs peu ou La prise fréquente de compléments aussi être la conséquence d’actes de
pas sensibilisés, ensuite d’instaurer une énergétiques (acides et riches en sucres, violence (bagarres et coups portés en
habitude de suivi annuel garant d’un sels minéraux et vitamines) contribue à dehors des règles imposées par la dis-
état bucco-dentaire compatible avec la majorer le risque d’atteintes bucco-den- cipline). Le risque lié à la pratique
pratique sportive de compétition. taires principalement dans la pratique apparaît majoré en fonction du poste
L’activité physique sportive (APS) de sports d’endurance tels que le mara- occupé (les avants pour le rugby), de
organisée (clubs, associations, etc.) peut thon, le triathlon ou le cyclisme, mais la période d’activité (surtout début et
faciliter la diffusion d’informations de aussi dans d’autres disciplines. Ces fin de saison), de l’intensité de la pra-
prévention, ainsi que la mise en œuvre compléments sont impliqués dans tique (principalement lors de compéti-
d’actions d’éducation à la santé. Les l’érosion des surfaces dentaires et favo- tions). De plus, l’état de santé bucco-
« thèmes-leviers » de ces actions sont risent le développement de lésions dentaire – par exemple la présence
axés sur les conséquences des affections carieuses (4). d’une dent de sagesse – peut contribuer

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 39


« K.-O. » du boxeur) et de traumatisme des
vertèbres cervicales par un meilleur
maintien de la tête et du cou (5, 6).
La posture du sportif peut être amé-
liorée par le port d’une gouttière en
résine placée entre les dents qui va repo-
sitionner les mâchoires. Cependant, son
utilisation doit-être évaluée dans le
cadre d’un suivi pluridisciplinaire
(médecin du sport, kinésithérapeute,
podologue, etc.) (7).

Effets négatifs de l’état bucco-


dentaire sur l’activité physique
Un état bucco-dentaire (hygiène, pré-
vention, protection, etc.) défavorable
peut avoir des effets négatifs.
Pour ce qui est des sportifs réguliers
et de haut niveau, les affections bucco-
dentaires, susceptibles de déclencher
douleurs et infections, sont peu compa-
tibles avec la pratique d’une APS : diffi-
cultés pour s’alimenter, troubles du som-
meil, perturbation de l’entraînement et
de la compétition (8, 9).
La pratique de l’activité physique,
qu’elle soit dans un cadre « santé-loisir »
ou dans un cadre « sport-compétition »,
présente des spécificités qui seront prises
en compte lors de la consultation du
chirurgien-dentiste afin :
à augmenter le risque de traumatisme Dispositifs de prévention pour • de traiter d’abord les problèmes den-
dans les sports de combat (boxe, etc.). préserver l’état bucco-dentaire taires sources d’infection, de risque de
Pour les sports à risque, il est recom- et la santé blessure ou de perturbation de la
mandé de porter une protection intra- Le port d’une PIB, permettant de ser- posture ;
buccale (PIB)2. Certaines fédérations rer les mâchoires dans les phases à risque • d’apporter ensuite des conseils d’hy-
sportives (boxe et football américain de la pratique sportive, va non seulement giène bucco-dentaire adaptés aux
par exemple) vont même jusqu’à protéger les dents, mais aussi limiter le apports énergétiques consommés ;
l’imposer. risque de commotion cérébrale (le • de conseiller enfin sur les moyens de
protection contre le risque de blessure.
Ces conseils seront aussi relayés par
◗ Références bibliographiques les éducateurs intervenant dans le milieu
scolaire et dans les associations afin de
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(4) Foster M., Readman P. Sports dentistry, (9) Soler Badia D., Batchelor P.A., Sheiham A. immunitaires due à la fatigue.
what’s it all about? Dental Update, 2009, The prevalence of oral health problems in par- 2. Actuellement, deux catégories de PIB sont dispo-
nibles :
vol. 36, n° 3 : p. 135-144. ticipants of 1992 Olympic Games in Barcelona. • « les PIB adaptables » achetées dans le commerce que
(5) Poisson P., Petit J., Bou C., Dupuis V., Dori- International Dental Journal, 1994, vol. 44, le sportif adaptera à sa bouche par une technique de
thermo-moulage ;
gnac G. Protection intra-buccale individuelle. Les n° 1 : p. 44-48.
• « les PIB sur mesure » réalisées, après prise d’em-
Cahiers de prothèse, 2007, n° 137 : p. 47-54. preinte par un chirurgien-dentiste, suivant des tech-
niques d’injection ou de thermoformage (5, 6).

40 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Les drogues licites ou illicites,
ennemies de la santé bucco-dentaire
La consommation intensive de certaines drogues, comme l’héroïne, a des effets fortement
délétères sur la santé bucco-dentaire. L’usage de substances licites, comme le tabac, peut
aussi avoir des effets néfastes. Toutefois, une démarche de prévention et des soins adaptés
aux patients usagers de produits psycho-actifs permet d’améliorer notablement leur situation.

L’ensemble des produits – licites ou réinsertion sociale passe aussi par une conseiller aux patients sous méthadone
illicites – auxquels les consommateurs réhabilitation buccale (prothèses, (produit de substitution à l’héroïne
ont recours : tabac, alcool, héroïne, bridges, soins divers.). commercialisé sous forme de solution
cocaïne, cannabis, etc., peuvent avoir Les toxicomanes se montrent peu de saccharose buvable, extrêmement
d’importantes conséquences sur la enclins à fréquenter le cabinet du den- cariogène) d’éviter la stagnation en
santé bucco-dentaire. tiste. Les raisons en sont multiples : bouche après la prise de ce médica-
Pour ce qui concerne l’usage de dro- • leur état de dépendance ; ment, sous peine d’aggravation des
gues illicites, le toxicomane, souvent, n’a • leur expérience passée négative lésions dues aux stupéfiants.
pas un comportement nutritionnel auprès d’un chirurgien-dentiste ; Si possible, l’équipe médicale
adapté, et présente des carences alimen- • la difficulté des chirurgiens-dentistes veillera aussi à aider le patient à arrêter
taires qui prennent une place impor- à investir des patients peu solvables ou la consommation de tabac.
tante dans les pathologies bucco-den- peu persévérants dans leurs soins, Pour favoriser une meilleure prise en
taires. Physiologiquement, il aime à quand ce ne sont pas les deux à la fois ; charge de la santé bucco-dentaire des
consommer de grandes quantité de • une anxiété exacerbée ; patients usagers de substances psycho-
sucres sous diverses formes, notamment • les difficultés économiques et parfois actives, la Mission interministérielle de
pour compenser une certaine séche- le manque de couverture sociale, ce qui lutte contre la drogue et la toxicomanie
resse buccale. Il a d’ailleurs été démon- nécessite de la part du praticien d’avoir (Mildt) en partenariat avec l’Inpes a
tré que l’injection d’héroïne entraînait des relais avec des travailleurs sociaux. conçu, en décembre 2011, deux affiches
une hyperglycémie1. Psychologique- C’est pourquoi ces patients sont (l’une pour les structures d’accueil et de
ment, le toxicomane se tourne plus généralement vus en urgence : la dou- soins des toxicomanes et l’autre pour les
volontiers vers les aliments sucrés quand leur et le préjudice esthétique étant cabinets dentaires). Un site d’informa-
il n’a pas de drogue. Or, l’excès de sucre, souvent à l’origine de la première tion et de formation destiné aux chirur-
dans le contexte de malnutrition, accen- consultation. giens-dentistes a également été mis en
tue le déficit en vitamines B1, aggravant Dans toute démarche de prévention, place avec le concours du ministère
entre autres l’acidification de la bouche. le professionnel doit travailler sur une chargé de la Santé (www.infosdentiste-
La sécrétion salivaire protège la première et difficile étape : inciter le saddictions.org).
bouche, mais sa diminution, reconnue patient à adopter une hygiène dentaire, En conclusion, les toxicomanes, de
chez les toxicomanes, peut notamment sans en faire un préalable mais en par leur pratique addictive, présentent
provoquer un délabrement dentaire expliquant que sans cela tous les soins de lourdes pathologies bucco-den-
(carie, maladies des tissus de soutien de sont voués à l’échec. taires. La prévention et la promotion de
la dent, etc.), lequel entraîne une dété- En intervenant très tôt sur les caries la santé bucco-dentaire auprès de ces
rioration esthétique et une difficulté à progression rapide des injecteurs personnes fragilisées permettraient de
d’élocution. d’héroïne, il est possible, dans certains réduire les facteurs de risque.
La souffrance dentaire et la détério- cas, d’éviter des délabrements par des
ration de l’image de soi peuvent égale- soins conservateurs appropriés. Paral- Fabien Cohen
ment accentuer des troubles psychia- lèlement, il est nécessaire que le patient Chirurgien-dentiste, secrétaire général de la
triques et anxio-dépressifs. accepte un traitement de substitution Société française des Acteurs de la santé
Par ailleurs, l’association du tabac et aux opiacés et améliore son hygiène publique bucco-dentaire
de l’alcool favorise et augmente les bucco-dentaire par un brossage den- (ASPBD), Paris.
risques de cancers buccaux. Les taire matin et soir avec une brosse à
patients, usagers de ces substances, dent souple et un dentifrice fluoré. 1. Une hyperglycémie est un taux de sucre dans le
sont donc à haut risque et doivent faire L’équipe médicale doit également sang trop élevé. Ceci correspond à une glycémie supé-
l’objet d’un dépistage systématique des être attentive à prescrire des médica- rieure à 1,26 g/L à jeun, et à 2,00 g/L le reste du temps.
Celle-ci est un des symptômes révélateurs d’un dia-
lésions précancéreuses de la bouche. ments psychotropes qui ne provoquent bète. Le contraire d’une hyperglycémie est une hypo-
On notera que toute tentative de pas de sécheresse buccale. Elle doit glycémie.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 41


Éducation thérapeutique
en santé bucco-dentaire
Le processus d’« éducation thérapeutique » est fondé sur la coopération entre le profes-
sionnel et son patient. Il vise notamment à accroître le pouvoir d’agir, l’autonomie et la
santé du patient. Dans le domaine bucco-dentaire, ce levier que représente l’éducation du
patient est peu utilisé, faute de culture, de temps, de structures et de prise en charge
adéquates.

Les processus généraux d’éducation La maladie parodontale est une par les personnes en situation de pré-
thérapeutique du patient (ETP)1 sont complication potentielle du diabète carité, et les négligences en matière de
parfaitement applicables aux actions mal équilibré. Il existe en effet une rela- santé bucco-dentaire. L’inaccessibilité
bucco-dentaires, bien que les chirur- tion avérée entre santé bucco-dentaire, financière, incontestable, est cependant
giens-dentistes n’aient pas été cités maladie parodontale et diabète. La parfois un prétexte pour ne pas élimi-
dans la loi du 21 juillet 2009 portant maladie parodontale peut déséquilibrer ner le « signe extérieur de souffrance »
réforme de l’hôpital et relative aux un diabète lequel peut, à son tour, que représente pour une personne en
patients, à la santé et aux territoires entraîner une maladie parodontale. mal d’auto-estime une bouche mal ou
(HPST) et ses décrets de mise en œuvre. Des essais cliniques tendent, par non soignée.
Peut-être cette absence reflète-t-elle le ailleurs, à montrer qu’un traitement
fait que la profession des dentistes s’es- parodontal peut contribuer à améliorer La notion de contrat éducatif est
time habituée à expliquer aux patients l’équilibre du diabète. totalement inhérente à la démarche du
les pratiques d’hygiène bucco-dentaire. dentiste car ce dernier ne peut prati-
Elle n’en est pas moins très regrettable Il en est de même avec certaines quer certains soins que sur des bouches
dans la mesure où de nombreuses pathologies cardio-vasculaires. Deux à l’hygiène parfaite. Il s’agit donc pour
pathologies chroniques interagissent hypothèses explicatives peuvent être le patient de s’engager à maintenir ou
avec la santé bucco-dentaire et que les énoncées : d’une part, la circulation à acquérir cette hygiène, en échange de
méthodes de l’ETP sont plus sophisti- dans le sang des protéines produites quoi le dentiste pourra intervenir.
quées que la simple explication. L’inté- par les bactéries logées dans les gen-
gration de la santé bucco-dentaire dans cives inflammatoires contribue au Plus innovante sera la manière de
la démarche d’ETP est à double sens : rétrécissement des artères coronaires ; contractualiser avec le patient. Le plus
le chirurgien-dentiste doit pouvoir ins- d’autre part, la fixation des bactéries souvent, en effet, est fait appel à la
crire sa démarche éducative dans une pathogènes buccales sur les plaques coercition, symbolique ou réelle, dans
perspective globale de soin, incluant graisseuses des artères coronaires un jeu de pouvoir où la crainte de la
les autres pathologies dont souffre le contribue à former des caillots. Mais roulette joue un rôle majeur. Détacher
patient ; et, ce qui semble plus délicat, des cofacteurs existent. Ainsi, l’obésité les étudiants, futurs praticiens, de cette
les médecins engagés dans une et la mauvaise santé bucco-dentaire représentation d’un savoir scientifique
démarche éducative avec leur patient partagent les mêmes causes : un omnipotent et indiscutable auquel le
doivent y intégrer une dimension de régime trop riche en hydrates de car- patient n’a qu’à se soumettre, est un
santé bucco-dentaire. bone qui potentialisent leurs effets défi renouvelé à chaque génération
cardio-vasculaires. Il en est de même universitaire !
Principales pathologies du tabac qui retentit à la fois sur la
chroniques et interactions santé bucco-dentaire et le système Placer le patient au cœur
avec la santé bucco-dentaire cardio-vasculaire. du dispositif de soins
La santé bucco-dentaire interagit La véritable évolution que repré-
principalement avec le diabète, les Modalités de mise en œuvre sente l’ETP est de placer le patient au
maladies cardio-vasculaires et l’obé- L’ETP en santé bucco-dentaire ne centre du dispositif de soins dès l’éla-
sité, comme co-morbidité associée. diffère pas de celle appliquée aux boration d’objectifs pédagogiques. Le
Ces maladies chroniques ont des pathologies chroniques. Elle mobilise professionnel s’abstenant de fixer a
conséquences sur la santé bucco-den- le diagnostic éducatif2, insistant parti- priori ce que le patient doit apprendre,
taire, et inversement la santé bucco- culièrement sur les représentations c’est dans les échanges avec le patient
dentaire peut avoir des conséquences qu’a le patient à l’égard de sa bouche – autour de ce qu’il sait déjà, et la
sur ces pathologies. Une santé bucco- et de ses dents. On connaît en effet les confiance qu’il accorde à ses propres
dentaire altérée est donc un facteur de étroites relations entretenues entre la compétences – que sera bâti le pro-
risque. mésestime de soi, largement partagée gramme éducatif.

42 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


La mise en œuvre des actions péda- ainsi nécessaire de créer ces séances vent absente des actions éducatives
gogiques d’ETP en soins bucco-den- collectives en santé bucco-dentaire classiquement mises en œuvre pour les
taires fait aussi l’objet d’innovations. En dans toutes les démarches d’ETP de pathologies chroniques, reproduisant
s’éloignant d’une relation trop impré- pathologies chroniques concernées. la déconnexion entre santé générale et
gnée de soins craints car désagréables, santé bucco-dentaire décrite dans
si ce n’est douloureux, en instaurant Enfin, le suivi éducatif doit faire l’ob- d’autres articles de ce dossier. Une telle
donc un échange hors cabinet du jet de consultations spécifiques de la dichotomie est évidemment préjudi-
chirurgien-dentiste, on permet au part des chirurgiens-dentistes, là aussi ciable à la démarche éducative globale
patient de s’approprier les notions en détachées du soin et des actes, pour se et à la santé des patients.
les intégrant dans un univers proche de donner le temps et la disponibilité d’es-
son quotidien. Il est ainsi souhaitable prit afin de co-construire la démarche. Stéphane Tessier
d’organiser des séances collectives en Malheureusement, de telles consulta- Médecin de santé publique,
santé bucco-dentaire pour les patients tions ne sont pas encore prises en Sylvie Azogui-Lévy
atteints de maladies chroniques, au compte par la nomenclature de la Sécu- Chirurgien-dentiste, maître de conférences
même titre que celles animées par des rité sociale. des universités, Paris 7 Denis-Diderot.
diététiciennes sur la nutrition ou les
kinésithérapeutes sur l’exercice L’ETP en santé bucco-dentaire n’est
physique. entrée ni dans les mœurs, ni dans la loi,
ce qui représente une vraie lacune du
Le collectif permet de se détacher de système de santé français. De ce fait, les
la problématique de souffrance indivi- chirurgiens-dentistes ne se sentent pas
duelle, de socialiser les propos du tenus d’acquérir une méthodologie
chirurgien-dentiste, de les inscrire donc spécifique et la plupart continuent de
dans un quotidien assumé par le « bricoler au fauteuil » des explications 1. L’ETP est l’action d’accompagner les patients dans
le suivi de leur traitement en leur donnant les capa-
patient. Ceci, tout en maintenant, grâce parfois injonctives, sources de situa- cités de les gérer ainsi que leur maladie.
à la convivialité, une dédramatisation tions de grande frustration devant des 2. Première phase de l’ETP, voir d’Ivernois J.F., Gag-
nayre R. Apprendre à éduquer le patient. Approche
voire une dose d’humour, favorisant le conseils non suivis. En parallèle, la pédagogique. Paris : Maloine, coll. Éducation du
recul et la prise de distance. Il serait santé bucco-dentaire est le plus sou- patient, 2011 : 160 p.

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LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 43


Pour en savoir plus
Les sources d’information proposées dans cette rubrique s’inscrivent dans une approche globale de la santé bucco-dentaire.
La littérature généraliste francophone sur ce sujet dans le champ de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé
est à ce jour très peu fournie. Nous avons retenu quelques références anglophones et écarté celles relatives aux soins. Dans
un premier temps, les ressources proposées dressent un rapide état des lieux de la santé bucco-dentaire en France et dans
le monde, en insistant sur les inégalités de santé. Ensuite, des documents d’orientation et d’intervention pour la mise en
place d’actions sont décrits. Une brève sélection de sites Internet clôture cette rubrique. Les organismes cités sont présen-
tés dans un article du dossier. Les adresses des sites Internet ont été consultées et vérifiées le 17/02/2012.

• Petersen P. E. Rapport sur la santé bucco-


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en situation de handicap. Paris : Edilivre éditions, jets ou de programmes en apportant un appui
2009 : 131 p. méthodologique, en proposant des formations,
• Santé bucco-dentaire : où sont les jeunes ! La • Petersen P.E.,Yamamoto T. Improving the oral par la création d’outils pédagogiques. L’associa-
place de la santé bucco-dentaire chez les jeunes health of older people: the approach of the WHO tion souhaite rassembler autour de la promotion
adultes. Actes du colloque du 9 octobre 2009. Global Oral Health Programme. Community Den- de la santé publique bucco-dentaire en France
Paris : UFSBD, 2010 : 49 p. tistry and Oral Epidemiology, 2005, vol. 33, ainsi que dans les pays francophones.
En ligne : http://www.ufsbd.fr/images/stories/ n° 2 : p. 81-92. aspbd.free.fr
ufsbd_actes_colloque_jeunes_nov2009.pdf • Cohen F., Lowenstein M. Les effets délétères • Union française pour la santé bucco-den-
• Tubert-Jeannin S., Lecuyer M.-M., Manevy R., du cannabis sur la santé bucco-dentaire. Le taire (UFSBD)
Pegon-Machat E., Decroix B. Évaluation après Courrier des addictions, 2010, vol. 12, n°4 : Créée en 1966 par la profession dentaire. Orga-
un an d’un programme de promotion de la santé p. 16-17. nisée en antennes départementales et régio-
orale à l’école maternelle. Santé publique, 2008, nales, les chirurgiens-dentistes en sont les
vol. 20, n° 1 : p. 7-17. acteurs. Ils interviennent dans des projets de
• Tubert-Jeannin S., Leger S., Manevy R. Addres- prévention : séances d’éducation collective,
sing children’s oral health inequalities: Caries dépistages bucco-dentaires, formations de par-
experience before and after the implementation tenaires-relais, que ce soit en milieu scolaire,
of an oral health promotion program. Acta Odon- établissements d’hébergement pour personnes
tologica Scandinavica (In press). âgées dépendantes, etc.
• Watt R.G. Strategies and approaches in oral http://www.ufsbd.fr/
disease prevention and health promotion. Bulle-
tin of the World Health Organization, 2005, Sandra Kerzanet
vol. 83, n° 9 : p. 711-718. Documentaliste, Inpes.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 45


enquête

L’initiation sexuelle des jeunes :


un parcours relationnel sexuellement
différencié
Contrairement à certaines idées reçues, les adolescents d’aujourd’hui n’entrent pas, en
moyenne, plus tôt dans la vie sexuelle que la génération de leurs parents. Par ailleurs,
l’hypersexualisation des jeunes, parfois décrite comme un phénomène nouveau, n’est pas
corroborée par les études scientifiques. En revanche, avec l’affaiblissement du tabou de
la relation sexuelle, les adolescents d’aujourd’hui affichent sans complexe leur sexualité,
y compris grâce à de nouveaux supports offerts par Internet. La conception de la vie
affective et sexuelle demeure toutefois différente selon qu’on est garçon ou fille, comme
le souligne la sociologue Florence Maillochon.

Jusque dans les années 1970, la sexua- d’échanges amicaux ou amoureux aux confusion entre la précocité de certaines
lité prémaritale, et en particulier celle des adolescents, avec de nouveaux codes qui préoccupations sexuelles des jeunes (et
filles, était contrôlée avec attention. À une demeurent encore trop peu étudiés notamment leur engagement dans des
époque où la religion a perdu de son sociologiquement. Cette nouvelle arène relations amoureuses et affectives) et
influence et où les unions matrimoniales, semble avoir permis l’émergence d’une une véritable précocité dans les rapports
de plus en plus rares, sont conclues culture jeune, incarnée dans le dévelop- génitaux. Malgré un intérêt certain des
autour de 30 ans, il est devenu évident pement de formes de relations inédites, plus jeunes pour la sexualité, le premier
que les jeunes ont leurs premières expé- parce qu’indirectes, virtuelles. Cepen- rapport sexuel, la « première fois » (8),
riences sexuelles en dehors du mariage. dant, malgré la formidable ouverture des demeure un événement important,
À l’exception des familles les plus prati- échanges qu’Internet permet, sa pratique même si elle ne relève plus de l’interdit.
quantes1, relativement peu nombreuses, contribue davantage à renouveler les Elle intervient le plus souvent au terme
la plupart des parents ne posent plus un stéréotypes de genre, y compris sur la d’un processus d’apprentissage relative-
interdit formel sur la sexualité de leurs sexualité féminine et masculine, qu’à les ment long qui suppose plusieurs étapes.
adolescents. Ils ne renoncent pas pour abolir ou à les remodeler.
autant à un certain contrôle de leur Un premier baiser plus précoce
sexualité, notamment en diffusant des L’âge aux premiers rapports La première étape significative dans la
informations sur la contraception, occa- sexuels a peu évolué depuis découverte des personnes de l’autre
sions de rappeler ce qui leur semble être trente ans sexe4 est l’échange du premier baiser.
les « bonnes pratiques » : le bon moment, Depuis une trentaine d’années, l’âge Celui-ci constitue un marqueur fort de
le bon partenaire, etc. Les parents évo- au premier rapport sexuel n’a pas beau- l’expérience aussi bien d’un point de vue
quent davantage la sexualité avec leur coup évolué2. Les garçons et les filles individuel que collectif. Des années
fille qu’avec leur garçon. Ils cherchent sont initiés à peu près au même âge. après, la plupart des individus se sou-
aussi davantage à en contrôler les rela- L’âge médian3 est de 17,2 ans pour les viennent encore de cet événement (2).
tions, quitte à autoriser une certaine tolé- hommes et de 17,6 ans pour les femmes, Or, l’âge médian au premier baiser s’est
rance dans leur propre domicile (3, 4). d’après l’enquête CSF réalisée en 2006, considérablement abaissé au cours de la
Les filles ne sont donc toujours pas édu- contre respectivement 17,3 ans et seconde moitié du XXe siècle : de 17,5 ans
quées aux premières relations sexuelles 17,5 ans dans l’enquête ACSJ réalisée en pour les hommes de 60 à 69 ans à 14,1 ans
de la même façon que les garçons, même 1993. La plupart des enquêtes réalisées pour les hommes de 18-19 ans, et respec-
si elles partagent une condition juvénile, en France (Espad, HBSC, Baromètre tivement de 16,6 ans à 13,6 ans pour les
notamment scolaire, en de nombreux santé) confirment ces tendances. Dans femmes (2). L’échange des premiers bai-
points semblables (5). La mixité des éta- l’ensemble, les jeunes ne sont donc pas sers fait donc désormais partie des expé-
blissements scolaires permet désormais tous précoces comme le laisse penser riences importantes des années « collège »
aux adolescents de faire leurs premiers certains médias qui, depuis les années (quand elles n’ont pas eu lieu avant).
pas ensemble, dans un entre-soi adoles- 2000, tentent d’importer d’outre-Atlan- Cette pratique, qui s’affiche plus facile-
cent (6). Il est néanmoins fortement tique la crainte d’une « hypersexualisa- ment dans les espaces publics, les parcs,
concurrencé par l’espace virtuel qui tion » des jeunes. Cette hypothèse pour- les cours des établissements scolaires ou
ouvre de nouvelles possibilités rait toutefois se développer sur la leurs alentours, mais aussi l’espace virtuel

46 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


enquête

des messageries instantanées, peut laisser


penser ainsi à une sexualisation impor-
tante des adolescents, voire des pré-ado-
lescents. Pourtant, ces flirts fondés sur les
échanges de baisers ne s’accompagnent
pas nécessairement de relations intimes
plus poussées (9). La précocité au pre-
mier baiser ne conduit pas nécessaire-
ment à une plus grande précocité aux
rapports sexuels. Il existe généralement
un délai important entre l’échange du
premier baiser et le premier rapport
sexuel (de trois ans pour les hommes de
18-19 ans et de quatre ans pour les
femmes de la même tranche d’âge). La
plupart des jeunes traversent une longue
période où les jeux de séduction, de flirt,
parfois très manifestes, voire agressifs,
© Julien Abbaretz

s’exposent sans qu’une sexualité plus


génitale (rapport sexuel) s’impose effec-
tivement. Cette période d’apprentissage,
souvent d’autant plus exposée volontai-
rement aux autres que l’expérience Des relations longtemps avant d’avoir leur première
sexuelle réelle est faible (9), pourrait être qui ne sont plus cachées relation sexuelle avec lui (10). Elles se
à l’origine des craintes d’hypersexualisa- Depuis trente ans, le contexte social déclarent également beaucoup plus
tion5 des jeunes exprimées essentielle- de l’initiation sexuelle des jeunes s’est souvent amoureuses (76,3 % d’entre
ment par les médias et reprises par les complètement transformé du fait de la elles contre 56,5 % des garçons). Les
parents. plus grande visibilité et de l’audience jeunes filles s’investissent aussi plus
accordées à la sexualité en général. Néan- directement dans leurs relations que les
Un premier rapport sexuel moins, l’âge au premier rapport sexuel a jeunes hommes. Entre 18 et 24 ans, les
majoritairement dans le cadre peu évolué depuis plusieurs dizaines femmes sont plus souvent en couple
d’une relation amoureuse d’années, réfutant l’hypothèse d’une pré- avec leur premier partenaire que les
La sexualité des adolescents qui appa- cocité toujours plus importante. Une plus hommes du même âge (13 % contre
raît dans les médias, notamment dans les grande visibilité des attirances et des jeux 4 %), et elles ont plus souvent expéri-
émissions de « libre antenne » où elle de séduction des adolescents est sociale- menté la vie en couple qu’eux (50 %
s’expose sans pudeur, doit être nuan- ment davantage acceptée dans l’espace contre 30 %) ([2] p. 165). La sexualité des
cée6. À l’heure actuelle, le premier rap- public, y compris chez les plus jeunes, femmes, et en particulier leur initiation,
port sexuel s’inscrit pourtant encore sans qu’elle change radicalement se fait donc dans un cadre qui a du mal
majoritairement dans une relation lon- l’agenda de leur initiation sexuelle. C’est à s’extraire des modèles sociaux de vie
gue et amoureuse : 66 % des adolescents en revanche la mise en scène des rela- à deux, même si l’alliance matrimoniale
ont leur première expérience avec une tions qui s’est considérablement transfor- n’est plus l’horizon revendiqué.
personne dont ils sont amoureux et mée : de cachées, parce que prohibées, Les études sur les représentations de
qu’ils connaissent depuis presque un an elles peuvent désormais s’afficher large- la sexualité montrent également com-
et demi en moyenne avant de sortir avec ment. C’est aussi la nature des pratiques bien le masculin reste encore fortement
elle (c’est-à-dire avant l’échange du pre- sexuelles qui a profondément évolué : les arrimé à la performance sexuelle et l’ur-
mier baiser sur la bouche) et avec les- jeunes expérimentant d’emblée un gence du désir, quand le féminin reste
quels ils attendent ensuite un peu plus ensemble de pratiques (notamment oro- associé aux sentiments et à l’engage-
de cinq mois en moyenne avant d’avoir génitales) que leurs aînés découvraient ment conjugal. Dans ces conditions, il
un rapport sexuel. La plupart des pre- plus tardivement, voire jamais (3, 4). semble plus difficile pour les jeunes
mières relations sexuelles sont donc loin femmes de dévoiler une sexualité, voire
d’être des passades et s’inscrivent dans Le premier rapport sexuel et même de simples désirs, dissociés du
des relations assez fortement investies l’apprentissage de rôles sexués cadre classique d’une relation fortement
aussi bien sentimentalement que tempo- Même si les garçons et les filles ont investie émotionnellement (9). Sans
rellement – les deux dimensions étant désormais leur première expérience au doute est-ce l’une des raisons pour les-
souvent liées. À l’opposé, les premières même âge, le cadre et les justifications quelles le nombre de partenaires décla-
expériences sexuelles conclues le plus de leurs relations diffèrent encore forte- rés par les femmes ne correspond tou-
rapidement possible (avec une personne ment. Les filles s’inscrivent dans des jours pas au nombre déclaré par les
rencontrée le jour même) ne concernent relations toujours beaucoup plus lon- hommes (2). Les garçons semblent
qu’une très faible proportion de jeunes gues que les garçons du même âge, comptabiliser absolument toutes les par-
(moins de 2 %). Ces éléments permettent c’est-à-dire qu’elles connaissent leur par- tenaires avec lesquelles ils ont eu le
de nuancer l’hypothèse de l’hypersexua- tenaire depuis plus longtemps avant de moindre échange sexuel, tandis que les
lisation des jeunes. sortir avec eux et qu’elles attendent plus filles ne retiennent que les partenaires

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 47


enquête

« importants », c’est-à-dire qu’elles ont cadre virtuel et conduisent à des ren- demeurent encore très contraignants sur
encore quelques réticences à avouer contres en face-à-face, ils reprennent des l’affichage du désir sexuel, en particulier
leurs simples aventures (9). formes plus classiques. Les filles et les pour les jeunes femmes.
garçons déclarent en proportion équiva- Les jeunes femmes subissent encore
Les liens virtuels : lente ce moyen pour flirter (respective- l’empreinte de l’interdit de la sexualité
une nouvelle liberté contrainte ment 11,6 % et 10,1 %) mais les filles prémaritale à travers des normes qui
pour les femmes ? l’utilisent moins fréquemment pour enga- maintiennent, sous une forme recompo-
La plupart des lycéens fréquentent ger des relations sexuelles (respective- sée mais néanmoins prégnante, l’asso-
les messageries instantanées dès qu’ils ment 1,9 % et 3,4 %). Internet n’a donc ciation nécessaire pour elles entre
sont à leur domicile, prolongeant – sur que partiellement fait évoluer les stéréo- sexualité et affectivité. L’apparition de
des terrains souvent plus intimes – la types de genre sur la sexualité, ne serait- nouveaux moyens de communication
conversation engagée auparavant dans ce que parce que les filles, sur la toile offrant des espaces d’échanges plus
l’espace scolaire, ou suppléant le virtuelle comme dans la cour de l’école, diversifiés ne semble avoir modifié que
contact qui ne s’y est pas produit. En doivent encore faire attention à leur partiellement cette tendance. La diversi-
2002, 19 % des garçons et 25 % des filles « réputation », qui demeure un puissant fication des espaces de communication
de 15 ans déclaraient communiquer instrument du contrôle de la sexualité des actuelle et l’importance qu’ils prennent
quotidiennement avec leurs amis par femmes. dans la vie des jeunes participent d’une
l’intermédiaire de mobiles, textos ou nouvelle culture adolescente qui
Internet ; ils sont le double en 2006 (11) Conclusion conserve cependant une importante
et près du triple en 2009. Si l’interdit de la sexualité prémaritale différenciation sexuelle.
Les échanges par Internet permettent s’est considérablement réduit et si les
de nouer des relations en dehors des calendriers d’initiation sexuelle des filles Florence Maillochon
scènes habituelles et quotidiennes, d’af- et des garçons sont désormais compa- Sociologue, chargée de recherches au CNRS,
ficher d’autres comportements que ceux rables, l’étude des relations – réelles ou Centre Maurice Halbwachs (UMR 8097, ENS,
qui sont les plus connus de tous, de mon- virtuelles – des jeunes invite à nuancer EHESS), équipe Eris, Paris.
trer des faces cachées de soi ou de sa l’idée d’une norme d’initiation sexuelle
sexualité. Dans un espace où la sexualité qui serait équivalente pour les garçons et
peut se passer comme un jeu, sans consé- pour les filles. La découverte de la sexua- 1. En 1993, les jeunes de 15 à 18 ans se déclarant
pratiquants (quelle que soit leur religion) étaient
quence immédiate d’atteinte physique ou lité demeure profondément marquée par beaucoup plus tardifs que les autres (1). Il en est resté
morale, les filles trouvent un exutoire où des codes qui régissent les possibles et de même en 2006 : les jeunes pratiquants de 18-19
ans sont moins nombreux à avoir déjà eu des rela-
elles empruntent les codes des garçons. qui, bien que plus permissifs sur la pos- tions sexuelles que ceux qui n’ont pas de religion ou
Quand certains échanges sortent du sibilité d’exposer les relations de flirt, ne la pratiquent pas. Cette tendance est plus accen-
tuée pour les femmes que pour les hommes et davan-
tage pour les musulmanes que pour les femmes inves-
ties dans une autre religion (2).
◗ Bibliographie 2. Cet article se fonde sur l’analyse statistique de plu-
sieurs enquêtes nationales, réalisées auprès des
jeunes : l’enquête ACSJ (Analyse des comportements
(1) Lagrange H., Lhomond B. dir. Calvez M., et sociétés, 2003, n° 9 : p. 111-135. sexuels des jeunes) réalisée en 1993 auprès de
Levinson S., Maillochon F., Mogoutov A., et al. (7) Beck F., Guilbert P., Gautier A. dir. Baro- 6 182 jeunes entre 15 et 18 ans ; l’enquête Espad
(European School Survey on Alcohol and other
L’entrée dans la sexualité. Le comportement mètre Santé 2005. Saint-Denis : Inpes, coll.
Drugs) réalisée en 2003 auprès de 16 833 jeunes sco-
des jeunes dans le contexte du sida. Paris : La Baromètres santé, 2007 : 593 p. larisés dans le secondaire, l’enquête HBSC (Health
Découverte, coll. Recherche, 1997 : 464 p. (8) Le Gall D., Le Van C. La première fois. Le Behaviour in School-aged Children) effectuée en
France en 2006 et en 2009 auprès de 5 000 jeunes de
(2) Bajos N., Bozon M. dir., Beltzer N. coord. passage à la sexualité adulte. Paris : Payot, 15 et 17 ans.
Enquête sur la sexualité en France. Pratiques, coll. Essais Payot, 2007 : 304 p. Ces résultats sont complétés par des statistiques issues
genre, santé. Paris : La Découverte, coll. Hors (9) Maillochon F. Dire et faire : évolution des de l’enquête CSF (Contextes de la sexualité en France)
réalisée en 2005-2006 auprès des adultes de plus de
collection Social, 2008 : 612 p. normes de comportements sexuels des jeunes 18 ans (2) et du Baromètre Santé 2005 (7).
(3) Lagrange H. Les adolescents, le sexe, dans la seconde partie du XXe siècle. In : Pai- 3. C’est l’âge où la moitié de la population a vécu
l’événement.
l’amour. Paris : Pocket, 2003 : 317 p. cheler G., Loyola M.-A. dir. Sexualités, normes
4. Pour des raisons d’homogénéité de la population
(4) Singly (de) F. Le rôle des parents d’adoles- et contrôle social. Paris : L’Harmattan, coll. étudiée, les adolescents ayant eu des relations homo-
cents en France. In : Cavalli A., Cicchelli V., Sexualité humaine, 2003 : p. 117-132. sexuelles (1,6 % des garçons ayant déjà eu des rap-
ports et 1,7 % des filles) ont été écartés de cette analyse
Galland O. dir. Deux pays, deux jeunesses ? La (10) Maillochon F. Relations amoureuses et dans la mesure où ils présentent des profils biogra-
condition juvénile en France et en Italie. sexuelles pendant l’adolescence en France – phiques assez différents et beaucoup plus contrastés
Rennes : Presses universitaires de Rennes, entre réalité et virtualité. In : Charbonneau J., que les autres lycéens, comme l’ont aussi montré
d’autres travaux (1).
coll. Le Sens social, 2008 : p. 161-171. Bourdon S. Regard sur… les jeunes et leurs 5. Phénomène de société selon lequel les adolescents,
(5) Maillochon F. L’entrée dans la sexualité : la relations, Laval : Pul, 2011 : p. 95-111. et surtout les pré-adolescents, adoptent des attitudes et
des comportements sexuels jugés trop précoces
mise en discours sexué d’un parcours unisexe ? (11) Godeau E., Arnaud C., Navarro F. dir. La
(habillage outrancier des filles dès l’école primaire,
In : Cavalli A., Cicchelli V., Galland O. Deux pays, santé des élèves de 11 à 15 ans en explosion de la consommation de pornographie, etc.).
deux jeunesses ? La condition juvénile en France/2006. Les données françaises de l’en- Ce concept issu de la sexologie est surtout discuté au
Canada et aux États-Unis.
France et en Italie. Rennes : Presses Universi- quête internationale Health Behaviour in 6. D’après l’enquête Espad, ces émissions sont très
taires de Rennes, 2008 : p. 187-194. School-aged Children (HBSC). Saint-Denis : populaires auprès des jeunes qui contribuent à les
(6) Maillochon F. Le jeu de l’amour et de l’amitié Inpes, coll. Études et santé, 2008 : 274 p. animer : 76,1 % des filles et 83,2 % des garçons écou-
tent régulièrement à la radio des « libres antennes » où
au lycée : mélange des genres. Travail, genre il est fréquemment question de sexe ; 13,7 % des filles
et 11,8 % des garçons les suivent quotidiennement.

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lectures

Agir pour la promotion de la santé. Les inégalités de santé.


Une politique ouverte à l’innovation ? dans les territoires français
Bernard Cherubini État des lieux et voies
Cet ouvrage collectif explore les perspectives nouvelles de progrès
offertes à la promotion de la santé à travers les théma- Emmanuel Vigneron
tiques de la territorialité, du multipartenariat et de l’in-
Les inégalités territoriales de santé ont
tersectorialité. Il croise les points de vue – des cher-
toujours existé en France, mais elles s’ag-
cheurs en sciences politiques, en santé publique et en
gravent en particulier sous l’effet de la
sciences sociales, et ceux des professionnels spéciali-
crise économique qui a un impact inégal
sés sur les politiques de santé – sur les ateliers santé-
sur le territoire et l’actuelle concentration
ville, sur les réseaux de santé ou encore sur la prise en
de l’offre de soins sur certaines zones
charge des publics en difficulté. Les différentes contri-
géographiques. Le problème de l’acces-
butions situent d’abord les enjeux actuels des réformes
sibilité se révèle à la fois économique et
en cours dans le secteur de la promotion de la santé,
géographique. L’ouvrage donne une
puis ciblent les perspectives de recherche en sciences
vision des inégalités territoriales de santé,
humaines et sociales et en santé publique qui pourraient
illustrée par des exemples, et apporte des
permettre une meilleure compréhension des politiques locales de santé.
pistes de solutions. Il comprend six parties : question d’échelle,
Olivier Delmer quand les moyennes masquent l’éventail des situations ; portraits
sanitaires du XIXe siècle en France ; différenciation des territoires
Toulouse : Érès, coll. Action santé, 2011, 222 pages, 23 €.
et inégalités locales en santé ; des portes d’accès aux soins à
maintenir ouvertes ; des équipements qui s’éloignent ; enfin, une
trentaine de propositions d’actions concrètes élaborées par un
groupe d’experts, d’usagers, de praticiens, d’administrateurs,
Médecins du travail/médecins généralistes : d’élus locaux et nationaux.
regards croisés
Sandra Kerzanet
Sous la direction de Colette Ménard, Gérald Demortière, Éric Durand,
Pierre Verger, François Beck Issy-les-Moulineaux : Elsevier-Masson, 2011, 194 pages,
30,50 €.
Pratiques addictives sur le lieu de travail, mal-être asso-
cié ou « importé » au travail, déclarations de maladie
professionnelle, arrêts de travail, etc., les médecins du Les défis actuels de la santé
travail et les médecins généralistes sont de plus en plus publique
confrontés à l’impact des facteurs de risques profes-
Gilles Pialoux, Jean-Claude Ameisen, Daniel Defert,
sionnels sur la santé de leurs patients. Aujourd’hui, les
Gilles Brücker, Mélanie Heard
coopérations entre ces professionnels doivent se ren-
forcer. Dans ce contexte, l’Institut national de prévention La première partie de cet ouvrage comporte
et d’éducation pour la santé, l’Institut national de quatre communications sur la santé publique,
recherche et de sécurité et la Société de médecine du le sida et la coopération Nord-Sud. Une série
travail de l’Ouest de l’Île-de-France ont partagé leurs de textes courts rassemblés dans la partie
champs d’études afin de rendre compte, en partie, de « Contrepoints » vient ensuite apporter la
l’activité de ces professionnels autour des problématiques de santé au travail, contradiction et ouvrir des perspectives. Une
des enjeux et des difficultés. Deux enquêtes indépendantes et complémen- postface éclaire le propos de la première
taires autour de ces problématiques ont ainsi été réalisées en 2009. partie.
Se déploient ainsi dans cet ouvrage les
La première – réalisée et financée par l’Inpes, l’INRS et la SMTOIF – porte sur
grands axes d’une politique de santé
l’implication des médecins du travail dans le champ de la santé publique, et
publique. Sont interrogés la place de l’individu dans les dispo-
plus particulièrement des pratiques addictives : quel(s) rôle(s) pour les méde-
sitifs décisionnels, les évolutions du militantisme, la relation
cins du travail dans la prévention de ces pratiques en milieu professionnel ?
médicale, la question du patient/expert, la collectivisation mon-
Comment sont-ils sollicités pour mettre en œuvre des actions collectives de
diale du savoir – notamment grâce à Internet – la veille sanitaire
prévention ? Quelles sont leurs opinions sur les tests de dépistage ?
et ses limites, la portée des actions de coopération – multila-
La seconde enquête – réalisée et financée par l’Inpes – analyse les opinions térale ou bilatérale – l’emballement médiatique qu’engendre la
et pratiques des médecins généralistes en santé au travail : comment conçoi- crainte d’une catastrophe sanitaire et la gestion publique de
vent-ils leur rôle ? Quelles pathologies liées au travail rencontrent-ils ? Quelles cette peur, la capacité des explications scientifiques à
occasions ont-ils de solliciter les médecins du travail ? convaincre les individus de penser et d’agir autrement, la justice
sociale, la sécurité humaine, la notion de vulnérabilité en santé
Enfin, un volet commun aux deux enquêtes interroge les perceptions croisées
– sociale, politique, économique – et le respect de soi, l’éthique
des médecins généralistes et des médecins du travail sur leurs relations de
biomédicale et les droits de l’homme, etc.
coopération.
S. K.
Saint-Denis : Inpes, coll. Études santé, 2011, 189 pages, gratuit.
Paris : Puf, 2011, 220 pages, 21 €.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012 49


Carnet d’adresses Signalez vos changements d’adresse, de téléphone… à Saraniya Canabady
Inpes – 42, bd de la Libération – 93203 Saint-Denis Cedex – Fax : 01 49 33 23 90
Pour toute commande et abonnement, s’adresser à Manuela Teixeira – Tél. : 01 49 33 23 52

Comité régional d’éducation pour la santé (Cres)


Instances régionales d’éducation et de promotion de la santé (Ireps)
ALSACE BOURGOGNE 20090 Ajaccio LIMOUSIN Tél. : 02.40.31.16.90 RÉUNION
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Pdt Joseph Becker Pdt Dr Pierre Besse Pdt Dr Françoise Léon-Dufour Pdt Dr Benjamin Bryden
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Pdt Pr François Dabis 35000 Rennes Tél. : 03.83.47.83.10 Association Guyane Promo Santé
Dir. Vincent Van Lacken Tél. : 02.99.50.64.33 Fax : 03.83.47.83.20 4, rue Félix Eboué
HAUTE-NORMANDIE POITOU-CHARENTES
6, quai de Paludate Mél : contact@irepsbretagne.fr Mél : contact@ireps-lorraine.fr 97300 Cayenne
33800 Bordeaux www.irepsbretagne.fr Pdt Patrick Daime Pdt Eric-Pascal Satre Tél. : 0.594.30.13.64
Tél. : 05.56.33.34.10 Dir. Marion Boucher Le Bras MIDI-PYRÉNÉES Dir. Julien Tran Fax : 0.594.35.84.80
Fax : 05.56.33.34.19 CENTRE 129, avenue Jean Jaurès 9, allée Marie et Pierre Curie Mél. : contact@gps.gf
Pdt Yvon Fau
Mél : direction@ireps-aquitaine.org 76140 Petit-Quevilly 86000 Poitiers www.gps.gf
Pdt Pr Emmanuel Rusch Dir. Laurence Birelichie
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Dir. Luc Favier 77, allée de Brienne
Fax : 02.32.18.07.61 Fax : 05.49.47.33.90 MARTINIQUE
Fraps 31000 Toulouse
AUVERGNE Mél.: cres.haute.normandie@orange.fr Mél : poitiers@
54, rue Walvein Tél. : 05.61.23.44.28 Pdt Dr Didier Chatot-Henry
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Pdt Dr annie Mosser 37000 Tours Fax : 05.61.22.69.98 Dir. Karyne Pierre-Louis
www.educationsante-pch.org
Dir. : Ginette Beugnet le Roch Tél. : 02.47.37.69.85 Mél : siege@irepsmp.fr Centre d’affaires Agora
ILE-DE-FRANCE
22 bis, impasse Bonnabaud Fax : 02.47.37.28.73 http://ireps.midi-pyrenees.fnes.fr Bât. G – niveau 0 – BP 1193
Pdt Antoine Lazarus CÔTE D’AZUR
63000 Clermont-Ferrand Mél : fraps@orange.fr Étang z’abricot – Pointe des Grives
Tél. : 04.73.91.96.67 www.frapscentre.org 74, rue Marcel Cachin NORD-PAS-DE-CALAIS Pdt Pr Jean-Marc Garnier 97200 Fort-de-France
Fax : 04.73.93.42.56 93017 Bobigny Cedex Dir. Zeina Mansour Tél. : 0.596.63.82.62
Pdt Pr Jean-Marie Haguenoer
Mél : ireps.auvergne@orange.fr CHAMPAGNE-ARDENNE Tél. et Fax : 01.48.38.77.01 178, cours Lieutaud Fax : 0.596.60.59.77
Dir. Loïc Cloart
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Pdt Yvonne Logeart Parc Eurasanté
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Dir. Kévin Gouraud 235, avenue de la Recherche
BASSE-NORMANDIE Fax : 04.91.36.56.99
89, rue Étienne Oehmichen CS 50086
LANGUEDOC- Mél : cres-paca@cres-paca.org GUADELOUPE
Pdt Jean-Louis Lepée 51000 Châlons-en-Champagne 59373 Loos Cedex
ROUSSILLON www.cres-paca.org
Resp. Jean-Pierre Ollivier Tél. : 03.26.68.28.06 Tél. : 03.20.15.49.40 Pdt Roberte Hamousin-Métregiste
3, place de l’Europe Fax : 03.26.68.97.60 Pdt Dr Claude Terral Fax : 03.20.15.49.41 Dir. Pascale Melot
Dir. Evelyne Coulouma RHÔNE-ALPES
14200 Hérouville-St-Clair Mél : cres.cha@wanadoo.fr Mél : ireps-npdc@orange.fr 6, résidence Casse
Tél. : 02.31.43.83.61 http://champagne-ardenne.fnes.fr Hôpital la Colombière http://ireps.npdc.fnes.fr Pdt Jacques Fabry Rue Daniel Beauperthuy
Fax : 02.31.43.45.97 39, avenue Charles-Flahault Dir. Olivier François 97100 Basse-Terre
Mél : irepsbn@orange.fr CORSE 34295 Montpellier Cedex 5 PAYS-DE-LA-LOIRE 9, quai Jean-Moulin Tél. : 0.590.41.09.24
www.irepsbn.org Tél. : 04.67.04.88.50 69001 Lyon Fax : 0.590.81.30.04
Pdt Pierre-Jean Rubini Pdt Pr Pierre Lombrail
Fax : 04.67.52.02.57 Tél. : 04.72.00.55.70 Mél : ireps@ireps.gp
Dir. Céline Dani Dir. Dr Patrick Lamour
Mél : irepslr@orange.fr Fax : 04.72.00.07.53 http://guadeloupe.fnes.fr
Résidence Les Jardins de Hôpital Saint-Jacques
www.irepslr.org Mél : contact@education-sante-ra.org
Bodiccione - Bât. A1 85, rue Saint-Jacques
www.education-sante-ra.org
Bd Louis Campi 44093 Nantes Cedex 1

Au niveau départemental
04 PROVENCE 21, rue Irénée Carré Fax : 05.65.73.60.21 17 CHARENTE-MARITIME 22 CÔTES D’ARMOR
Fédération nationale 08000 Charleville-Mézières Mél : antenne12@irepsmp.fr
des comités d’éducation Pdt Dr Georges Guigou Ireps Poitou-Charentes Pdt Anne Galand
Tél. : 03.24.33.97.70
pour la santé (Fnes) Dir. Anne-Marie Saugeron Antenne La Rochelle 15 bis, rue des Capucins
Fax : 03.24.33.84.34 13 BOUCHES-
Centre médico-social Pdt Eric-Pascal Satre BP 521
Pdt : Pr Jean-Louis San Marco Mél : CO.DES.08@wanadoo.fr DU-RHÔNE
42, bd Victor Hugo Dir. Yann Moisan 22005 Saint-Brieuc Cedex 1
Vice Pdt : Loic Cloart http://champagne-ardenne.fnes.fr Pdt Pr Jean-Louis San Marco
04000 Digne-Les-Bains 32, avenue Albert-Einstein Tél. : 02.96.78.46.99
Délégué : Éric Bourgarel Dir. Nathalie Merle
Tél. : 04.92.32.61.69 17000 La Rochelle Fax : 02.96.78.42.30
Siège social 09 ARIÈGE 8, rue Jules Moulet
Fax : 04.92.32.61.72 Tél. et fax : 05.46.42.24.44 Mél : codes-armor@wanadoo.fr
Immeuble Etoile Pleyel Ireps Midi-Pyrénées/Antenne Ariège 13006 Marseille
Mél : codes.ahp@wanadoo.fr Mél : larochelle@
42, bd de la Libération Pdt Yvon Fau Tél. : 04.91.04.97.30 educationsante-pch.org 23 CREUSE
93200 Saint-Denis Dir. Thérèse Fruchet Fax : 04.91.04.97.25
05 HAUTES-ALPES Ireps Limousin – Délégation
Tél. : 01.42.43.77.23 6, cours Irénée Cros Mél : contact@codes13.org
Pdt Dr Gilles Lavernhe 18 CHER départementale Creuse
Fax : 01 42.43.79.41 09000 Foix www.codes13.org
Mél. : fnes@fnes.info Dir. Brigitte Nectoux Pdt Dr Michel Verdier Pdt Dr Françoise Léon-Dufour
Tél. : 05.34.09.02.82
www.fnes.info Immeuble « Les Lavandes » Dir. Marie Côte Dir. Martine Pellerin
Fax : 05.61.05.62.14 14 CALVADOS
1 Place Champsaur 4, cours Avaricum Résidence du jardin public -
Mél : antenne09@irepsmp.fr S’adresser à l’Ireps Basse-
05000 Gap 18000 Bourges Porche A1
01 AIN Normandie
Tél. : 04.92.53.58.72 Tél. : 02.48.24.38.96 27, avenue de la Sénatorerie
Pdt Jean-Claude Degout 10 AUBE Mél : irepsbn-antenne14@orange.fr
Fax : 04.92.53.36.27 Fax : 02.48.24.37.30 23000 Guéret
Dir. Juliette Fovet-Julieron Mél : codes05@codes05.org Pdt Sylvie Le Dourner Mél : codesducher@wanadoo.fr Tél. : 05.55.52.36.82
Adessa Education Santé Ain www.codes05.org Dir. Cathy Julien 15 CANTAL www.codes18.org Fax : 05.55.52.75.48
Parc Les Bruyères Mezzanine des Halles Mél : ireps23@orange.fr
Ireps Auvergne – Antenne du Cantal
293, rue Lavoisier 06 ALPES-MARITIMES Rue Claude Huez 19 CORRÈZE
Pdt Dr Danièle Souquière-Degrange
01960 Peronnas 10000 Troyes 24 DORDOGNE
Pdt Dr Claude Dreksler Bâtiment de l’Horloge Ireps Limousin – Délégation
Tél. : 04.74.23.13.14 Tél. : 03.25.41.30.30
Dir. Chantal Patuano 9, place de la Paix départementale Corrèze Ireps Aquitaine Antenne Dordogne
Fax : 04.74.50.42.98 Fax : 03.25.41.05.05
61, route de Grenoble 15012 Aurillac Cedex Pdt Dr Françoise Léon-Dufour Pdt Pr François Dabis
Mél : ades01@wanadoo.fr Mél : codes10@orange.fr
06002 Nice Tél. : 04.71.48.63.98 Dir. Martine Pellerin Dir. Dr Martine Sibert
http://ain.education-sante-ra.org http://champagne-ardenne.fnes.fr
Tél. : 04.93.18.80.78 Fax : 04.71.48.91.80 1, bd du Dr Verlhac 48 bis, rue Paul-Louis Courier
Fax : 04.93.29.81.55 Mél : ireps15@orange.fr 19100 Brive-la-Gaillarde 24016 Périgueux Cedex
02 AISNE 11 AUDE
Mél : codes.am@wanadoo.fr Tél. : 05.55.17.15.50 Tél. : 05.53.07.68.57
Pdt Gérard Dubois Pdt Dr Pierre Dufranc 16 CHARENTES Fax : 05.55.17.15.57 Fax : 05.53.06.10.60
1A, rue Émile Zola 07 ARDÈCHE 14, rue du 4 septembre Mél : ireps19@orange.fr Mél : contact24@
Ireps Poitou-Charentes
Zac Le Champ du Roy 11000 Carcassonne ireps-aquitaine.org
Pdt Dr Jean-Marie Bobillo Antenne Angoulême
02000 Chambry Tél. : 04.68.71.32.65 21 CÔTE-D’OR www.educationsante-aquitaine.fr
Dir. Gisèle Bollon Pdt Eric-Pascal Satre
Tél. : 03.23.79.90.51 Fax : 04.68.71.34.02
2, passage de l’Ancien-Théâtre Centre hospitalier d’Angoulême Ireps Bourgogne
Fax : 03.23.79.48.75 Mél : codes11@wanadoo.fr 25 DOUBS
07000 Privas 16470 Saint-Michel Antenne Côte-d’Or
Mél : aisne@crespicardie.org http://codes11.over-blog.com
Tél. : 04.75.64.46.44 Tél. : 05.45.25.30.36 Pdt Dr Pierre Besse Pdt André Grosperrin
Fax : 04.75.64.14.00 Fax : 05.45.25.30.40 Parc Tertiaire Mirande Dir. Pascale Angiolini
03 ALLIER 12 AVEYRON Mél : angouleme@
Mél : adessa-codes.07@ 14 H, rue Pierre de Coubertin 3, avenue Louise Michel
Ireps Auvergne – Antenne de l’Allier wanadoo.fr Ireps Midi-Pyrénées educationsante-pch.org 21000 Dijon 25000 Besançon
Pdt Jean-Marc Lagoutte http://perso.wanadoo.fr/adessa Antenne Aveyron www.educationsante-pch.org Tél. et fax : 03.80.66.73.48 Tél. : 03.81.82.32.79
Dir. Annick Anglarès Pdt Yvon Fau Mél : codes21@wanadoo.fr Fax : 03.81.41.93.93
2, place Maréchal de Lattre-de- 08 ARDENNES Dir. Mylène Carrère www.ireps-bourgogne.org Mél : contact@codes25.org
Tassigny – 03000 Moulins 13, bd Laromiguière www.codes25.org
Tél. : 04.70.48.44.17
Pdt Dr Catherine Juillard
12000 Rodez
Mél : ireps03@orange.fr04 DE-
Dir. Françoise Maitre
Tél. : 05.65.73.60.20

50 LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 417 - JANVIER-FÉVRIER 2012


Carnet d’adresses

26 DRÔME 39 JURA 49 MAINE-ET-LOIRE 61 ORNE Mél : codes72@ahs-sarthe.asso.fr 88 VOSGES


www.codes72.fr
Pdt Dr Luc Gabrielle Pdt Pierre Benichou Ireps Pays-de-la-Loire Pdt Pierre Chastrusse S’adresser à l’Ireps Lorraine
Dir. Laurent Lizé Dir. Agnès Borgia Pôle Maine-et-Loire 14, rue du Cygne
73 SAVOIE
Drôme Prévention Santé 35, avenue Jean-Moulin Dir. Jamy Pacaud 61000 Alençon 89 YONNE
36 B, rue de Biberach 39000 Lons-le-Saunier 15, rue de Jérusalem Tél. : 02.33.82.77.70 Pdt Gérard Vanzetto
Pdt Sylvie Pitois
26000 Valence Tél. : 03.84.47.21.75 49100 Angers Fax : 02.33.82.77.71 306, rue Jules Bocquin
56 bis, avenue Jean-Jaurès
Tél. : 04.75.78.49.00 Fax : 03.84.24.89.73 Tél. : 02.41.05.06.49 Mél : codes61@wanadoo.fr 73000 Chambéry
89000 Auxerres
Fax : 04.75.78.49.05 Fax : 02.41.05.06.45 Tél. : 04.79.69.43.46
Tél. : 03.86.18.83.83
Mél : ades26@free.fr 40 LANDES Mél : ireps49@irepspdl.org 62 PAS-DE-CALAIS Fax : 04.79.62.10.22
Fax : 03.86.51.49.89
www.sante-pays-de-la-loire.com Mél : contact@sante-savoie.org
Ireps Aquitaine Pdt Gérard Pezé Mél : codes89@orange.fr
27 EURE www.sante-savoie.org
Antenne Landes Dir. Virginie Tintinger
S’adresser à l’Ireps Pdt Pr François Dabis 50 MANCHE 3, rue des Agaches – BP 80505 90 TERRITOIRE
74 HAUTE-SAVOIE
Haute-Normandie Dir. Sylvie Ramis Ireps Basse-Normandie 62008 Arras Cedex DE BELFORT
Hôpital Sainte-Anne Antenne de la Manche Tél. : 03.21.71.34.44 Pdt Marc Rabet
Pdt Dr Albert Pontes
28 EURE-ET-LOIR Bâtiment Ritournelle Pdt Jean-Louis Lepée Fax : 03.21.51.25.73 Dir. Magali Chatelin
Dir. Valérie Berton
782, avenue de Nonères Resp. Jean-Pierre Ollivier Mél : cdes-62@nordnet.fr 14, avenue de Berthollet
Pdt Dr François Martin 22, rue Gaston-Defferre
BP 10262 3, rue du Léon 74000 Annecy
Dir. Myriam Neullas 90000 Belfort
40005 Mont-de-Marsan Cedex 50130 Cherbourg-Octeville 63 PUY-DE-DÔME Tél. : 04.50.45.20.74
CESEL – Hôtel Dieu Tél. et fax : 03.84.54.09.32
Tél. : 05.58.06.29.67 Tél. : 02.33.01.00.50 Fax : 04.50.45.34.49
34, rue du Dr Maunoury Ireps Auvergne Mél : codes-90@wanadoo.fr
Fax : 05.58.75.05.52 Fax : 02.33.01.10.98 Mél : ades74@voila.fr
BP 30407 Antenne Puy-de-Dôme
28018 Chartres Cedex Mél : contact40@ Mél : irepsbn-antenne50@orange.fr Pdt Marie-Gentile Gardies 91 ESSONNE
ireps-aquitaine.org 76 SEINE-MARITIME
Tél. : 02.37.30.32.66 Dir. Jean-Philippe Cognet Pdt Didier Hoeltgen
Fax : 02.37.30.32.64 51 MARNE 22 bis, impasse Bonnabaud S’adresser à l’Ireps Dir. Claude Giordanella
Mél : cesel@cesel.org 41 LOIR-ET-CHER Pdt Patrick Bourlon 63000 Clermont-Ferrand Haute-Normandie Immeuble Boréal
Ireps Centre Dir. Anne Patris Tél./Fax : 04.73.34.35.06 5, place Copernic
29 FINISTÈRE Antenne Loir-et-Cher Pôle Dunant Éducation Mél : ireps63documentation@ 78 YVELINES Courcouronnes
Pdt Henri Hénaff Pdt Emmanuel Rusch 1, rue du docteur Calmette orange.fr Pdt Jean-Pierre Couteron 91023 Evry Cedex
Dir. Pascale Bargain Dir. Luc Favier BP 7 Dir. Isabelle Grouas Tél. : 01.60.79.46.46
9-11 rue de l’Ile d’Houat 34, avenue Maunoury 51016 Châlons-en-Champagne 64 PYRÉNÉES- 47, rue du Maréchal-Foch Fax : 01.60.79.55.27
29000 Quimper 41000 Blois Tél. : 03.26.64.68.75 ATLANTIQUES 78000 Versailles Mél : codes91@orange.fr
Tél. : 02.98.90.05.15 Tél. : 02.54.74.31.53 Fax : 03.26.21.19.14 Ireps Aquitaine Tél. 01.39.49.58.93 www.codes91.org
Fax : 02.98.90.11.00 Fax : 02.54.56.04.30 Mél : codes.51@wanadoo.fr Antenne Pyrénées-Atlantiques Fax : 01.39.51.47.48
Mél : codes29@wanadoo.fr Mél : fraps41@orange.fr http://champagne-ardenne.fnes.fr Pdt Pr François Dabis Mél : CYES@wanadoo.fr 93 SEINE-SAINT-DENIS
www.codes29.org Dir. Mélanie Rolland www.cyes.info Pdt Antoine Lazarus
42 LOIRE 52 HAUTE-MARNE 15, allée Lamartine Dir. Laurent Bauer
30 GARD Pdt Dr Gérard Mathern Pdt Robert Mercey 64000 Pau 79 DEUX-SÈVRES UFR Médecine
Pdt Christian Polge Dir. Mohamed Boussouar Dir. Eva Bardet Tél. : 05.59.62.41.01 Ireps Poitou-Charentes 74, rue Marcel-Cachin
7, place de l’Oratoire 26, avenue de Verdun 5 bis, bd Thiers Mél : contact64@ireps-aquitaine.fr Antenne Deux-Sèvres 93017 Bobigny Cedex
30900 Nîmes 42000 Saint-Étienne 52000 Chaumont www.educationsante-aquitaine.fr Pdt Eric-Pascal Satre Tél. et fax : 01.48.38.77.01
Tél. : 04.66.21.10.11 Tél. : 04.77.32.59.48 Tél. : 03.25.32.63.28 10 bis, avenue Bujault Mél : codes93@hotmail.com
Fax : 04.66.21.69.38 Fax : 04.77.33.89.28 Mél : codes.52@wanadoo.fr 65 HAUTES-PYRÉNÉES 79000 Niort www.codes93.org
Mél : CDES30@wanadoo.fr Mél : direction@codes42.org http://champagne-ardenne.fnes.fr Ireps Midi-Pyrénées Tél. : 05.49.28.30.25
www.codes42.org Antenne Hautes-Pyrénées Fax : 05.49.24.93.66 95 VAL-D’OISE
31 HAUTE-GARONNE 53 MAYENNE Pdt Yvon Fau Mél : niort@ Pdt Hussein Mokhtari
43 HAUTE-LOIRE Ireps Pays-de-la-Loire 8, place au Bois educationsante-pch.org Dir. Isabelle Beulaigne
S’adresser à l’Ireps Midi-Pyrénées
Mél : antenne31@irepsmp.fr Ireps Auvergne Pôle Mayenne 65021 Tarbes Cedex 9 CODESS 95
Antenne de Haute-Loire Dir. Christel Fouache Tél. : 05.62.51.76.51 80 SOMME 2, avenue de la Palette
32 GERS Pdt Louis Teyssier 90, avenue Chanzy Fax : 05.62.51.76.53 s’adresser à l’Ireps Picardie BP 10215
8, rue des Capucins 53000 Laval Mél : antenne65@irepsmp.fr 95024 Cergy-Pontoise Cedex
Ireps Midi-Pyrénées 43000 Le Puy-en-Velay Tél : 02.43.53.46.73 Tél. : 01.34.25.14.45
81 TARN
Antenne Gers Tél. : 04.71.04.94.86 Fax : 02.43.49.20.72 66 PYRÉNÉES Fax : 01.34.25.14.50
Pdt Yvon Fau Ireps Midi-Pyrénées Antenne Tarn
Fax : 04.71.04.97.41 Mél : ireps53@irepspdl.org ORIENTALES Mél : codess@valdoise.fr
Dir. Pascale Femy Mél : ireps43@orange.fr 54 MEURTHE-ET- Pdt Yvon Fau www.codes95.org
80, rue Victor Hugo Pdt Dr Marie-José Raynal Dir. Meggie Daubian
www.ireps-auvergne.fr 54 MEURTHE- 12, avenue de Prades
32000 Auch 4, rue Justin-Alibert
ET-MOSELLE 66000 Perpignan MAYOTTE
Tél. : 05.62.05.47.59 81000 Albi
44 LOIRE-ATLANTIQUE s’adresser à l’Ireps Lorraine Tél. : 04.68.61.42.95 Pdt Ali Ahmed
Fax : 05.62.61.25.91 Tél. : 05.63.43.25.15
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Pôle Loire-Atlantique 55 MEUSE Mél : codes66.po@wanadoo.fr Mél : antenne81@irepsmp.fr Bâtiment du dispensaire
33 GIRONDE Mél : ireps44@irepspdl.org s’adresser à l’Ireps Lorraine De M’tsarpéré
67 BAS-RHIN 82 TARN-ET-GARONNE 97600 Mamoudzou
S’adresser à l’Ireps Aquitaine 45 LOIRET Tél. et fax : 0.269.61.36.04
Antenne Gironde 56 MORBIHAN S’adresser à l’Ireps Alsace S’adresser à l’Ireps Midi-Pyrénées
Pdt Danièle Desclerc-Dulac Pdt Marie-Odile Barbier Mél : antenne82@irepsmp.fr
Dir. Romain Laniesse 68 HAUT-RHIN SAINT-PIERRE
34 HÉRAULT Zone tertiaire de Kerfontaine ET MIQUELON
Espace Santé Rue Loïc Caradec Ireps Alsace 83 VAR
Pdt Dr Éric Perolat 5, rue Jean-Hupeau Pdt Dr Bourdeloux
Dir. René Fortes 56400 Pluneret Antenne Haut-Rhin Pdt Dr Jacques Lachamp
45000 Orléans Tél. : 02.97.29.15.15 8, avenue Robert Schuman DDASS
Résidence Don Bosco Tél. : 02.38.54.50.96
Dir. Christine Madec Rue Abbé Pierre-Gervain
54, chemin de Moularès Fax : 02.97.29.16.50 68100 Mulhouse Immeuble le Verdon
Fax : 02.38.54.58.23 Mél : codes.56@wanadoo.fr Tél. : 03.89.46.59.06 BP 4200
34000 Montpellier 82, bd Léon-Bourgeois
Mél : info@codes45.org Fax : 03.89.46.58.52 97500 Saint-Pierre et Miquelon
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www.codes45.org 57 MOSELLE Tél. : 0.508.21.93.23
Fax : 04.67.15.07.40 Tél. : 04.94.89.47.98
Mél : chesfraps@wanadoo.fr Ireps Lorraine 69 RHÔNE Fax : 04.94.92.80.98
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Ireps Midi-Pyrénées Pdt Jeanne Meyer Dir. Sylvain Jerabek Dir. Dr Bernard Rouchon
35 ILLE-ET-VILAINE Antenne Lot Dir. Olivier Aromatario 292, rue Vendôme 84 VAUCLUSE Agence sanitaire et sociale
Pdt Yvon Fau 20, rue Gambetta 69003 Lyon de la Nouvelle-Calédonie
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Dir. Pascale Canis BP 30273 Tél. : 04.72.41.66.01 Dir. Alain Douiller
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4A, rue du Bignon 13, rue de la Pépinière
(2e étage) Tél. : 03.87.68.01.02 Mél : info@adesr.asso.fr 98851 Nouméa Cedex
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46000 Cahors Fax : 03.87.68.11.89 www.adesr.asso.fr Tél. : 00.687.25.07.60
Tél. : 02.99.67.10.50 Tél. : 04.90.81.02.41
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Fax : 05.65.22.64.50 ireps-lorraine.fr 70 HAUTE-SAÔNE Mél : bernard.rouchon@ass.nc
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Pdt Dr Thierry Lemoine 4, cours François-Villon 85 VENDÉE Dir. Dr R. Wongfat
Pdt Francis Martinet Ireps Aquitaine Rue des Poilus-Tahitiens
Dir. Séverine Dropsy Résidence Blaise-Pascal 70000 Vesoul Ireps Pays-de-la-Loire
Antenne Lot-et-Garonne 3 bis, rue Lamartine Tél. : 03.84.76.16.30 BP 611 – Papeete
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Pdt Pr François Dabis 58000 Nevers Fax : 03.84.75.00.77 98601 Tahiti
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Tél. : 02.54.60.98.75 Tél. : 03.86.59.35.19 Mél : CODES-70@wanadoo.fr Maison de la santé
Lieu dit « Toucaut » Fax : 03.86.61.57.18 Fax : 00.689.43.00.74
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S’adresser à l’Ireps 71000 Mâcon Fax : 02.51.37.56.34
Ireps Centre – Antenne Indre-et-Loire Mél : contact47@
Nord-Pas-de-Calais Tél. : 03.85.39.42.75 Mél : ireps85@irepspdl.org
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