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Innovations en analyses
et mesures
III
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Innovations technologiques
(Réf. Internet ti958)
composé de :
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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Innovations technologiques
(Réf. Internet ti958)
Annie BAUDRANT
Ingénieur au CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies
renouvelables), LÉTI (Laboratoire d'électronique et de technologie de
l'information)-DIR
Gwenola BURGOT
Professeur à l'université de Rennes 1
Jean-Marc FRIGERIO
Professeur à l'université Pierre-et-Marie-Curie, INSP (Institut des nanosciences
de Paris)
Frédéric MAZALEYRAT
Professeur à l'ENS de Cachan, chercheur au SATIE-ENS Cachan (Systèmes et
applications des technologies de l'information et de l'énergie-École normale
supérieure de Cachan)
Pierre MONSAN
Professeur à l'INSA (Institut national des sciences appliquées) de Toulouse et
à l'École des Mines de Paris, membre de l'Institut universitaire de France et de
l'Académie des technologies
Alain THOREL
Directeur de recherche à Mines ParisTech
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V
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VI
Innovations en analyses et mesures
(Réf. Internet 42112)
SOMMAIRE
Spectroscopie de plasma induit par laser (LIBS) pour le diagnostic chimique et P151 15
biologique
Microfluidique et ADN tumoral. Apport de la PCR digitale RE241 17
Contrôle optimal : une nouvelle approche pour améliorer la qualité des images en IRM IN211 25
Détection et dosage de molécules dans les cheveux dans le domaine médicojudiciaire P158 45
Spectrométrie d'émission induite par laser appliquée à l'authentification des vins P154 53
Application des isotopes stables à l'authentification des vins au Service commun des P155 55
laboratoires
Bioessais et biocapteurs : outils d'analyse des toxines dans l'agroalimentaire RE225 57
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VII
Capteur de force innovant. Application au pesage ferroviaire et routier IN148 75
Spectromètres RMN de paillasse pour l’analyse en ligne de réactions en flux continu J8015 91
RMN large bande des noyaux quadripolaires en phase solide : exemple du IN166 99
strontium-87
AFM-IR : caractérisation chimique à l’échelle nanométrique IN224 105
Détection d’hydrates par activation neutronique dans des pipelines sous-marins IN249 113
Avancées technologiques des sources et capteurs térahertz. Vers le transfert industriel P2145 117
Le rayonnement térahertz pour l'analyse des matériaux du patrimoine culturel RE213 127
Analyse de tableaux de Léonard de Vinci par spectrométrie de fluorescence des rayons RE200 141
X
Méthodes de spectroscopie d'absorption X pour l'analyse des matériaux du RE214 145
patrimoine
Analyse non destructive des objets d'art par méthodes spectroscopiques portables RE217 151
Analyse de la perte de couleur des peintures au smalt par spectroscopie d'absorption RE211 157
X
Restauration des peintures au plomb par irradiation laser RE224 161
Imagerie par spectrométrie de masse TOF-SIMS pour l’analyse de tableaux anciens RE274 165
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Innovations en analyses et mesures
(Réf. Internet 42112)
1
1– Analyse en biologie et en médecine Réf. Internet page
Spectroscopie de plasma induit par laser (LIBS) pour le diagnostic chimique et P151 15
biologique
Microfluidique et ADN tumoral. Apport de la PCR digitale RE241 17
Contrôle optimal : une nouvelle approche pour améliorer la qualité des images en IRM IN211 25
Détection et dosage de molécules dans les cheveux dans le domaine médicojudiciaire P158 45
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Référence Internet
IN161
INNOVATION
Thérapie photodynamique :
évolution chimique 1
des photosensibilisateurs
Abstract : Photodynamic therapy has been strongly emerging within the last thirty
years, and has now become a major alternative approach in the treatment of a number
of cancers. At the origin of this emergence, progress in the comprehension of the
physico-chemical process that lead to the photodynamic effect, and a better knowledge
of the parameters that can improve a PDT treatment, led to as spectacular evolution of
the photosensitizer’s structures. In this review, we will present those evolution, along
with emerging research strategies within that framework.
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Référence Internet
IN161
INNOVATION
Points clés
Domaine : Techniques non invasives de thérapie du cancer
1. Thérapie photodynamique (PDT) : spécifique d’interagir avec la lumière pour générer l’effet
thérapeutique désiré, ne fut introduite que quelques années
contexte historique et principes plus tard, au tournant du vingtième siècle, par Raab et Van
Tappeiner [8] [9].
1.1 PDT : histoire d’une (re)découverte En 1900, Oscar Raab, étudiant au département de pharma-
cologie de l’université de Munich dans le groupe d’Hermann
1.1.1 De l’antiquité Van Tappeiner, essaie de caractériser l’influence d’un composé
chimique, l’acridine, sur le développement de Plasmodium
Les pigments extraits de végétaux sont utilisés depuis l’anti- Malariae, une paramécie responsable de la malaria. Très rapi-
quité pour le traitement d’affections de la peau, ainsi qu’en dement, Raab constate que, selon l’heure de la journée et les
attestent divers traités anciens de médecine indienne, conditions atmosphériques, l’impact de l’acridine administrée
chinoise, ou égyptienne [1]. Une forme de médecine tradi- sur la survie des micro-organismes semble extrêmement
tionnelle indienne, l’Ayuverda, utilise depuis près de 4 000 ans variable. Il parvient rapidement à démontrer que le méca-
la psoralea coryfolia, plante de la famille des papillonacées, nisme de mort cellulaire induit par l’acridine nécessite l’acti-
dans divers traitements dermatologiques. Nous savons vation par une irradiation lumineuse. Un peu plus tard, Van
aujourd’hui que cette plante contient des quantités importan- Tappeiner identifie le troisième élément (avec le photosensibi-
tes de psoralène, un photosensibilisateur absorbant dans lisateur et la source lumineuse) impliqué dans le mécanisme
l’UV [1] [2]. Ce photosensibilisateur, bien que relativement photo-induit, l’oxygène. Il propose le terme de « thérapie
éloigné en termes d’efficacité des critères en vigueur, est photodynamique » (photodynamishe wirkung dans le texte
toutefois encore utilisé, sous sa forme synthétique, pour le original) pour qualifier l’ensemble des protocoles thérapeu-
traitement d’affection bénignes du type psoriasis, eczéma, tiques impliquant ces trois éléments [10]. Cela le conduit à
vitiligo et même certains cas de lymphomes du derme, suivant établir dès 1903 le premier traitement de cancer de la peau
un protocole désigné sous la désignation générale de basé sur l’irradiation d’un photosensibilisateur, l’éosine [9].
« PUVA » (pour psoralène +UV-A) [3] [4] [5]. Une résorption totale de la tumeur est observée pour quatre
des six patients, un succès très impressionnant, si l’on tient
1.1.2 ...aux temps modernes compte des connaissances encore pour le moins rudimentaires
L’intégration des concepts de « photothérapie » puis de des processus mis en jeu.
« photosensibilisation » à la médecine moderne occidentale
est beaucoup plus récente, puisqu’elle trouve son origine dans 1.2 Processus photodynamique
les travaux de Niels Finsen, médecin danois ayant démontré
dès 1890 l’influence positive de la lumière sur les processus L’identification de l’effet photodynamique, et des trois
de cicatrisation (prix Nobel de médecine en 1903) [6] [7]. composantes essentielles à son établissement (lumière, photo-
Toutefois, la notion de photosensibilisateur exogène, sensibilisateur, oxygène moléculaire), a immédiatement
c’est-à-dire de molécule thérapeutique introduite dans le but amené un grand nombre de chercheurs issus de différents
12
Référence Internet
IN161
INNOVATION
1
S1 singulet
cytotoxique
πga πgb πga πgb T1
1Σ
g
Transfert 1∆
lumière g
d’énergie
πua πub πua πub
S0 3Σ
3σg 3σg g
Photosensibilisateur Dioxygène
2σu 2σu
c
2σg 2σg 1O
3∑ 1∆ O 2
g g O
O2 O2 OH
N OH
Histidine : N
NH2 O NH2
N N
a b H OH
H
O O
Méthionine : OH OH
S S
NH2 NH2
O
Figure 1 – Structure électronique de l’oxygène (a) à son état fondamental 3 ⌺g (b) à son état excité de plus basse énergie 1 ⌬ g . (c)
mécanisme de photosensibilisation photo-induite (d) exemple de photo-dommages occasionnés par l’oxygène sur les acides aminés
horizons scientifiques (biologie, physiologie, spectroscopie, électrons appariés et de spin opposé, résultant en une multi-
physique et chimie) à s’interroger sur les mécanismes impli- plicité de spin de type singulet, diamagnétique) [13]. Cinq ans
qués dans ce phénomène [11]. plus tard, un autre physico-chimiste américain, Robert Mulli-
Si nous évacuons immédiatement les questions ayant trait ken, dont les travaux révolutionnaires sur les orbitales électro-
aux problématiques de localisation du photosensibilisateur et niques moléculaires devaient quelques années plus tard lui
diffusion de l’oxygène au sein des cellules cancéreuses, ainsi valoir le prix Nobel, fut en mesure, grâce à l’approche théo-
que celles se rapportant aux mécanismes de mort cellulaire rique qu’il avait développée, de proposer une structure de
initiés par l’effet photodynamique [10], il convient de s’attar- l’oxygène permettant d’expliquer le spectre d’absorption élec-
der plus longuement sur l’émergence du modèle mécanistique tronique de l’oxygène atmosphérique [14]. Cette structure,
désormais admis pour la photosensibilisation de l’oxygène. décrite dans la figure 1a, faisait figurer, en plus de l’état
C’est en effet la compréhension fine de ce mécanisme qui a triplet fondamental, deux états excités singulets de spin
permis d’initier le travail de conception des premiers (figure 1b).
photosensibilisateurs [12] et d’entreprendre les optimisations En 1931, le groupe de Kautsky à Heidelberg suggéra, après
de leur formulation qui seront discutées plus tard. étude du mécanisme d’oxydation photo-induite de la leucoma-
lachite green, que la réactivité particulière observée ne
1.2.1 Histoire d’une controverse pouvait s’expliquer que par la formation intermédiaire
d’oxygène singulet. Ils démontrèrent par ailleurs que cette
Afin de comprendre la nature de la controverse mentionnée
espèce pouvait diffuser sur plusieurs mm au sein du milieu
dans le titre de cette section, il est impératif de rappeler que
cellulaire, expliquant rétrospectivement l’efficacité remar-
la structure exacte de l’oxygène était encore inconnue à l’épo-
quable du traitement [15].
que de la découverte de l’effet photodynamique. Ce n’est
qu’en 1924 que le physico-chimiste Gilbert Newton Lewis, Ce modèle eut néanmoins du mal à s’imposer auprès de la
précurseur dans l’étude de la structure électronique des ato- communauté grandissante des chercheurs travaillant sur la
mes et initiateur de la théorie qui porte son nom, proposa une compréhension du phénomène. En particulier, cette théorie fut
structure électronique de type triplet pour l’état fondamental mise à mal par les travaux de Gaffron, montrant qu’une irra-
de l’oxygène, c’est-à-dire une structure présentant deux élec- diation d’une hématoporphyrine dans sa bande d’absorption
trons des couches externes de la molécule non appariés et de infrarouge située à 820 nm (équivalent à une énergie de
même spin (ou paramagnétique ; la plupart des molécules 35 kcal/mol) conduisait à la formation d’une espèce oxydante,
organiques stables possédant, dans leur état fondamental, des bien que l’énergie fournie au système soit inférieure à celle
13
1
14
Référence Internet
P151
1. Contexte...................................................................................................... P 151 - 2
2. Principe ....................................................................................................... — 2
3. Applications de la LIBS........................................................................... — 4
3.1 Considérations sur les aspects traitement ................................................. — 4
3.2 Quelques exemples d’applications............................................................. — 4
3.2.1 Calibrage sur gaz alcanes et chlorofluorocarbones (CFC) ............... — 4
3.2.2 Analyse biologique sur boîte de Pétri ............................................... — 5
3.2.3 Aérosols biologiques .......................................................................... — 6
4. Conclusions................................................................................................ — 7
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. P 151
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Référence Internet
P151
SPECTROSCOPIE DE PLASMA INDUIT PAR LASER (LIBS) POUR LE DIAGNOSTIC CHIMIQUE ET BIOLOGIQUE ___________________________________________
Laser
Laser
Cible Laser
1 mm
Figure 1 – Schémas de principe des différentes interactions possibles entre un pulse laser focalisé et la phase physique d’un échantillon
16
Référence Internet
RE241
RECHERCHE
Abstract : Digital PCR (Polymerase Chain reaction) represents a way of crossing the
technological gap in detection and quantification of rare DNA sequences, like mutations
found in tumors. Detection of these rare sequences is of high importance to improve
cancer patient care. Indeed, their detection in tumors or in biological fluids such as
plasma or urine could allow the adaptation of treatment to the precise molecular cha-
racteristics of the tumor as well as to limit risks of recurrence, and therefore to
increase patient survival. After a rapid introduction of the described research, this
article discusses cancer and its biomarkers, and follows with the emergence of digital
PCR, and lastly explores the perspectives and potential evolutions of digital PCR.
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Référence Internet
RE241
RECHERCHE
Points clés
Domaine : Analyse génétique
Depuis quelques années, le cancer est devenu la première Les altérations génétiques étant présentes uniquement
cause de mortalité, devançant les maladies cardiovasculaires. dans les cellules tumorales et pas dans les cellules saines,
Il est la cause d’un tiers des décès masculins et d’un quart des elles constituent des marqueurs spécifiques de cancer.
décès féminins. En 2012 en France, 355 000 nouveaux cas de
cancers ont été diagnostiqués, et 148 000 personnes en sont Par définition, les biomarqueurs sont des paramètres bio-
mortes. logiques mesurables et quantifiables, comme les mutations
présentes dans l’ADN (mais aussi les taux d’expression d’ARN
Le cancer est une maladie où certaines cellules anormales
(acide ribonucléique) messagers (ARNm) ou la présence de
se multiplient de manière anarchique et acquièrent la capacité
protéines ou de métabolites...).
d’infiltrer et de détruire les tissus sains pour former une
tumeur. Les nouvelles technologies de séquençage ont permis Les marqueurs génétiques permettent la caractérisation des
de mettre en évidence un réseau complexe d’altérations tumeurs à l’échelle moléculaire, ce qui donne la possibilité de
génétiques présentes dans les cellules cancéreuses et absen- prédire la sensibilité ou la résistance à certains traitements.
tes des cellules saines. Or, selon les altérations présentes, le Leur caractérisation permet désormais de proposer des traite-
pronostic et la réponse aux traitements pourront être diffé- ments personnalisés aux patients dans le cadre de la méde-
rents. Par conséquent, leur détection précoce permet désor- cine personnalisée ou médecine de précision, ce qui a entraîné
mais de proposer le traitement le plus adapté dans le cadre de des améliorations importantes dans la prise en charge des
thérapies dites « ciblées ». patients et dans leur survie.
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Référence Internet
RE241
RECHERCHE
Ces biomarqueurs peuvent permettre par exemple : ver les structures cellulaires et intracellulaires. Si la cryo-
– de déterminer la présence, ou le stade de la maladie conservation des échantillons garantit un rendement maximal
avant le début du traitement (biomarqueurs diagnostiques) ; et une bonne qualité des acides nucléiques, ce n’est pas le cas
1
– de prédire la réponse à certains traitements (biomar- pour les tissus fixés et conservés en paraffine. L’ADN extrait à
queurs prédictifs) ; partir de ces échantillons est souvent dégradé et son
– de suivre l’évolution de la maladie tout au long de la prise utilisation dans des techniques d’amplification par PCR peut
en charge du patient (biomarqueurs pronostiques) [6] [7]. s’avérer difficile. De plus, l’analyse de l’ADN extrait de plu-
sieurs échantillons de mêmes tumeurs a révélé une hétéro-
Idéalement pour une utilisation clinique, ces biomarqueurs
généité clonale au sein de ces différents échantillons [10].
doivent être détectables le plus tôt possible au cours de la
maladie pour permettre la prise en charge la plus efficace. Le Les échantillons d’ADN peuvent provenir d’autres sources
test de détection doit être facilement réalisable, rapide, fiable, que les tissus, notamment de fluides biologiques comme le
très sensible et spécifique et doit avoir un coût raisonnable sang. En effet, les acides nucléiques provenant de la tumeur
pour une utilisation en pratique clinique. sont trouvés dans le sang des patients en plus de l’ADN pro-
Dans le cas de la détection de mutations de séquences venant de cellules saines. Les quantités d’ADN circulant
d’ADN ou de la mesure des taux d’expression des ARNm, les varient beaucoup selon les études ; pour des patients atteints
techniques les plus utilisées sont basées sur la PCR qui, dans de cancers, ces quantités varient de 0 à plus de 1 000 ng par
sa forme traditionnelle, a un certain nombre de limitations mL de sang. En comparaison, pour les patients sains ces
techniques (voir plus bas) [8] [9]. concentrations varient de 0 à 100 ng d’ADN par mL de
sang [11]. La caractérisation des biomarqueurs tumoraux à
partir des échantillons de sang pourrait être plus représenta-
2.2 Origine biologique des échantillons tive de la tumeur du patient en tenant compte à la fois de
à tester l’hétérogénéité clonale de la tumeur, et d’éventuelles
métastases ou d’autres foyers tumoraux (figure 1) [12].
Les tests de caractérisation des altérations génétiques
somatiques sont généralement réalisés à partir de l’ADN Ainsi, l’ADN extrait à partir d’échantillons biologiques est
extrait des cellules tumorales obtenues par biopsies ou par complexe, il contient à la fois la séquence cible mais aussi tout
chirurgie au moment du diagnostic. Les techniques de conser- le génome cellulaire dont des séquences similaires à la cible
vation de ces biopsies de tumeurs solides sont diverses. Les ne différant parfois que d’un seul nucléotide. De plus, la
tissus peuvent être conservés par cryoconservation (entre séquence cible peut être très rare au sein de cet ADN, et sa
– 80 et – 196 oC) ou fixés par des réactifs chimiques avant détection nécessite des procédures présentant une forte sensi-
d’être inclus dans un bloc de paraffine permettant de préser- bilité et qui soient idéalement quantitatives.
Efficace
Caractérisation des Évolution des
altérations génétiques altérations génétiques
Traitement
Prise
Biopsie
de sang
Non efficace
Pronostic Suivi de l’efficacité du traitement
Choix du traitement Détection précoce de la récidive
La tumeur (en rouge) peut présenter des sous-clones minoritaires Les altérations génétiques présentes dans les cellules tumorales
(en jaune). De plus, le patient peut aussi présenter des métastases peuvent être utilisées en tant que biomarqueurs et leur recherche
ou des tumeurs secondaires (en orange). L’ADN extrait à partir des dans l’ADN issu des échantillons biologiques pourrait aider le
biopsies n’est généralement pas représentatif de cette clinicien à proposer le traitement le plus efficace, suivre l’efficacité
hétérogénéité intra- et inter-tumorale, alors que l’ADN extrait à du traitement au cours de la prise en charge des patients et
partir des échantillons de sang pourrait être plus représentatif de détecter de manière précoce une éventuelle récidive.
cette hétérogénéité.
a b
19
1
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Référence Internet
IN178
INNOVATION
Résumé : Les enzymes catalysent presque toutes les réactions dans les cellules. Il
est donc crucial de pouvoir les analyser dans les échantillons biologiques et d’évaluer
leurs affinités avec divers ligands. La tendance actuelle est de miniaturiser ces essais
enzymatiques au vu du prix souvent très élevé de ces réactifs. L’électrophorèse capil-
laire présente des avantages uniques dans ce domaine dont des analyses rapides, une
faible consommation et de bonnes sélectivité et sensibilité renforcées par l’emploi de
divers modes de détection.
Points clés
Domaine : Techniques d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Électrophorèse capillaire
Domaines d’application : Biologie cellulaire et moléculaire, chimie thérapeuti-
que, cosmétique
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : –
Centres de compétence : –
Industriels : –
Autres acteurs dans le monde : un certain nombre de laboratoires académi-
ques ou centres de recherche dont les travaux sont mentionnés en bibliographie.
En ce qui concerne les acteurs industriels, on peut citer Caliper Life Sciences (Per-
Parution : novembre 2014
21
Référence Internet
IN178
INNOVATION
1
de la réaction.
mettre divers signaux impliquant souvent des cascades de
signalisations enzymatiques. Toute dérégulation peut entraîner Le site actif de l’enzyme est l’endroit où se fixe le substrat
des maladies dont certaines sont très graves telles que le can- (le cas échéant le coenzyme) et où a lieu la réaction enzyma-
cer, la maladie d’Alzheimer, le diabète, la neurofibromatose. tique. Il est souvent localisé au fond d’une poche hydrophobe
de l’enzyme et comprend le(s) groupe(s) de liaison et le(s)
La quantification directe des enzymes dans les échantillons groupe(s) catalytique(s). Le groupe de liaison est formé par
biologiques est difficile car ces molécules se trouvent généra- les acides aminés qui interagissent via des liaisons non cova-
lement à de faibles concentrations dans ces milieux très lentes avec le substrat tandis que le groupe catalytique est
complexes. Ainsi, l’enzyme peut être quantifiée à partir de la formé d’acides aminés qui assurent la catalyse enzymatique,
concentration du produit de la réaction qu’elle catalyse. c'est-à-dire la rupture ou la formation des liaisons au niveau
D’autre part, une réaction enzymatique est caractérisée par du substrat.
des constantes cinétiques telles que la constante de Michaelis-
Menten (Km) qui reflète l’affinité enzyme-substrat. Mesurer
ces paramètres permettra de mieux connaître les agents res- 2.1 Cinétique enzymatique
ponsables du dysfonctionnement du processus cellulaire, de
mieux viser les cibles thérapeutiques et de dépister les mala-
dies à l’état précoce. Cette étude permet ainsi de développer La cinétique enzymatique est l’étude de la vitesse
des modulateurs importants de l’activité enzymatique notam- d’une réaction catalysée par une enzyme en fonction de la
ment dans les domaines thérapeutique et cosmétique. À ce concentration du substrat et de l’inhibiteur. Cette étude
titre, de petites molécules sont fréquemment employées afin permet de déterminer l’affinité des substrats et des inhibi-
d’inhiber la suractivation de l’enzyme. La détermination de la teurs vis-à-vis de l’enzyme, de connaître le mode d’action
constante d’inhibition à 50 % (IC50) ainsi que des constantes de l’enzyme et le type d’inhibition d’un composé donné. Il
de vitesse d’association kon et de dissociation koff serait pri- est également possible de doser l’enzyme pour une
mordiale pour l’évaluation de la liaison enzyme-inhibiteur. Les concentration donnée de substrat, à une température et à
molécules testées pourront par la suite être classées selon un pH fixés, car la vitesse d’une réaction est proportion-
leur affinité pour les cibles biologiques, ce qui permettra d’éla- nelle à la quantité d’enzyme.
borer des pharmacophores fonctionnalisés plus efficaces en se
basant sur les relations structure-activité (RSA) et la pharma-
comodulation. La première détermination d’une cinétique enzymatique a
Les techniques conventionnelles spectrophotométriques, été réalisée par Brown en 1902. Il étudia l’hydrolyse du
fluorimétriques ou radiométriques utilisées pour étudier les saccharose en glucose et fructose catalysée par une enzyme
réactions enzymatiques consomment des quantités considé- de levure, la β-fructofuranosidase (appelée à l’époque
rables d’échantillons et ont un impact environnemental sou- l’« invertase »), par spectrophotométrie UV. Depuis, l’activité
vent défavorable. Un essai enzymatique doit être économe en enzymatique a été mesurée par différentes techniques dans
réactifs, spécifique, rapide, sensible et quantitatif. L’électro- de nombreux domaines d’application.
phorèse capillaire (EC) présente de nombreux atouts pour la La vitesse initiale d’une réaction enzymatique (Vi) est géné-
détermination des constantes cinétiques de diverses familles ralement déterminée pour des concentrations données en E et
d’enzymes. Elle a ainsi émergé récemment comme outil de S, en suivant la concentration du produit formé [P] en fonc-
miniaturisation des essais biochimiques puisque la plupart des tion du temps. La courbe [P ] = f (t ) est linéaire lorsque
enzymes intéressantes, notamment d’un point de vue théra- l’enzyme est saturée par le substrat, s’infléchit ensuite puis
peutique, sont peu accessibles et très onéreuses. atteint un palier à l’équilibre. La vitesse initiale est calculée à
partir de la tangente de cette courbe au temps t = 0. En pra-
Différentes stratégies peuvent être envisagées. Cet article
tique, le temps d’incubation sera fixé de telle sorte que le pro-
décrit l’état de l’art sur l’utilisation de l’électrophorèse capil-
duit obtenu soit dans le domaine linéaire de cette courbe et
laire pour la miniaturisation des essais enzymatiques en insis-
que l’essai soit réalisé en un temps raisonnable. La vitesse ini-
tant sur les contraintes opératoires et les précautions à
tiale (Vi) est généralement déterminée avant que le taux de
prendre au cours de la manipulation des enzymes.
conversion du substrat ne dépasse 10 %. En 1913, l'Allemand
Michaelis et la Canadienne Menten ont résolu le système
réactionnel enzymatique et proposé l’équation suivante, dite
2. Enzymes « équation de Michaelis-Menten » :
22
Référence Internet
IN178
INNOVATION
correspond à la concentration du substrat pour laquelle séparation de l’EC pour ne pas engendrer une discontinuité du
l’enzyme est à demi-saturation [équation (3)] : champ électrique dans le capillaire afin de préserver l’asymé-
trie et l’efficacité des pics.
Vi =
Vmax
2
, donc [S] = Km (3)
Chaque enzyme possède une activité maximale dans une
zone de pH donnée qui dépend de la nature du substrat, de
l’origine de l’enzyme et de sa localisation dans le corps
1
Km représente l’affinité du substrat pour l’enzyme. Une fai- humain. Par exemple, le pH optimal de la β-galactosidase
ble valeur de Km indique une molécule affine pour l’enzyme. (β-Gal) d’Aspergillus orizae (champignon) est de 5,5 [3] tandis
Dans le cas où la concentration en substrat est négligeable que celui de la β-Gal d’Escherichia coli (bactérie) est de
7,3 [4].
devant la constante de Michaelis-Menten ([S] << Km ) ,
La vitesse initiale d’une réaction enzymatique croît avec la
l’équation (1) se simplifie :
température pendant une première phase dite « d’acti-
vation ». Cependant, l’activité diminue par la suite puis
Vmax[S] s’annule, ce qui correspond à une dénaturation de l’enzyme.
Vi = (4)
Km De ce fait, l’arrêt de la réaction enzymatique pourra être
aisément obtenu à des températures suffisamment élevées.
Dans le cas où la concentration en substrat est très grande Par exemple, la réaction d’hydrolyse des glucosinolates cata-
lysée par la myrosinase est effectuée généralement à 37 oC.
devant la constante de Michaelis-Menten ([S] >> Km ) ,
En chauffant 5 min à 125 oC, l’enzyme est dénaturée et la
l’équation (1) devient : réaction est totalement arrêtée [5] [6].
23
1
24
Référence Internet
IN211
INNOVATION
Résumé : Nous présentons une approche générale basée sur les principes de la
théorie du contrôle optimal pour maximiser le contraste en imagerie par résonance
magnétique (IRM). Cet outil puissant permet d’établir le contraste maximal possible en
fournissant des séquences d’impulsions utilisables expérimentalement pour atteindre
cette borne. Après une introduction pédagogique aux techniques numériques de
contrôle optimal en résonance magnétique nucléaire (RMN), nous montrons l’efficacité
de cette approche pour une expérience de laboratoire.
Points clés
Domaine : Techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Théorie du contrôle optimal, résonance magnétique
nucléaire (RMN) et imagerie par résonance magnétique (IRM)
Domaines d’application : imagerie médicale, analyse structurelle en chimie
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : –
Centres de compétence : CREATIS, université Lyon I-INSA de Lyon ; Neurospin,
CEA Saclay
Industriels : –
Autres acteurs dans le monde : Pr. S. J. Glaser, département de chimie, université
Parution : novembre 2013
de Munich, Allemagne
Pr. N. Chr. Nielsen, département de chimie, université de Aarhus, Danemark
Pr. N. Khaneja, division de sciences appliquées, université d’Harvard, États-Unis
Contact : dominique.sugny@u-bourgogne.fr
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2. Principe de la RMN et de l’IRM h étant la constante de Planck qui joue un rôle central dans
tous les phénomènes quantiques. On peut associer à ce sys-
Dans cette partie, nous présenterons de manière succincte tème à deux niveaux quantiques une fréquence d’après la
quelques généralités sur le principe de la RMN et de l’IRM afin relation :
de mieux comprendre le cadre dans lequel est appliqué le
contrôle optimal. Pour des compléments sur la résonance ∆E = E+ − E− = hν (1)
magnétique nucléaire, le lecteur est invité à se référer aux
ouvrages [1] [2] [3] [4] [P 2 880].
avec ν fréquence de transition caractéristique du système qui
2.1 Quelques rappels de RMN correspond aussi, d’un point de vue classique, à la
fréquence de précession (ou fréquence de Larmor).
2.1.1 Généralités
Il est à noter ici que le champ B0 appliqué est le champ
La résonance magnétique nucléaire est basée sur le fait que responsable de l’effet Zeeman qui lève la dégénérescence
certains isotopes atomiques possèdent un moment magnétique des deux niveaux d’énergie des atomes possédant un spin
de spin. C’est le cas notamment de l’atome d’hydrogène 11H , demi-entier (figure 1).
très intéressant en RMN et IRM puisqu’il se retrouve en très
grande quantité dans les tissus biologiques (comme l’eau ou les
molécules organiques). En fait, tous les atomes (sauf ceux dont
E+
le numéro de masse et le numéro atomique sont pairs, comme
l’atome de carbone 12 )possèdent un moment magnétique de
6 C
spin nucléaire non nul. Ces moments magnétiques de spin, ou Effet Zeeman
spins nucléaires, peuvent interagir avec un champ magnétique,
ce qui permet de contrôler leur dynamique.
E−
Dans une interprétation issue de la mécanique classique, on
peut imaginer que les spins des noyaux atomiques sont des
toupies qui tournent sur elles-mêmes autour de leur axe. Du
fait de leur interaction avec le champ magnétique, elles
effectuent aussi des mouvements de précession rapide autour Application du →
de l’axe du champ magnétique imposé. On parle alors de champ magnétique B0
« précession de Larmor ».
La fréquence de précession est proportionnelle à l’intensité Figure 1 – Schéma de la levée de dégénérescence
du champ appliqué, comme nous allons le montrer par la des deux niveaux d’énergie par effet Zeeman
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D’après la relation 2πν = γ B0 , on constate que la fréquence équation, il est facile de montrer que la norme du vecteur
de transition ν ne dépend que de γ et de B0 . Cette fréquence aimantation est conservée. On a en effet :
est particulièrement importante lorsque l’on veut agir sur le
1
système quantique à partir d’un champ magnétique B1 , ortho- dM2 dM
= 2M = 2M ⋅ (γ M ∧ B (t )) = 0 (4)
dt dt
gonal à B0 , comme cela sera le cas en RMN. Pour obtenir une
action avec le maximum d’efficacité, il faudra que la fréquence
Étant de norme constante, le vecteur M repère donc un
de ce champ B1 soit proche de la fréquence de transition du point sur une sphère dite de « Bloch ».
spin. C’est ce que l’on appelle un « phénomène de En RMN, le champ magnétique prend la forme générale
résonance ». suivante :
En RMN, l’observable, c’est-à-dire la quantité physique défi-
nie à l’échelle microscopique, est le moment magnétique M . Il B (t ) = Bx (t ) cos(ω t ) ux + By (t ) cos(ω t + ϕ ) uy + B0uz (5)
correspond à la moyenne quantique du moment magnétique,
c’est-à-dire du spin S multiplié par le facteur avec ω porteuse du champ,
gyromagnétique :
ϕ phase entre Bx et By .
M =γ <ψ Sψ > Cette expression fait apparaître deux types de champs. Le
premier, B0uz , indépendant du temps, est un champ
= γ < ψ Sx ux + Sy uy + Sz uz ψ > (2)
statique orienté suivant l’axe Oz et le second, noté B1 , est
M = Mx ux + My uy + Mz uz
un champ tournant dans le plan (Oxy). Ces champs sont
schématiquement représentés sur la figure 2.
avec ψ> fonction d’onde du système qui est solution de
l’équation de Schrödinger [3]. Par souci de simplification, l’étude dynamique se fait usuel-
lement dans un repère tournant (OXYZ) à la fréquence ω
On se place ici dans le repère orthonormé (Oxyz) de autour de l’axe z. L’équation de Bloch dans ce repère tournant
s’écrit :
vecteurs directeurs (ux , uy , uz ) . Expérimentalement, seules
Mɺ = − ∆ω M + ω (t ) M
les composantes perpendiculaires au champ statique B0 du x y y z
moment magnétique M sont accessibles. Mɺ y = + ∆ω Mx − ω x (t ) Mz (6)
Notons ici que l’ensemble des N noyaux étudiés présente Mɺ z = −ω y (t ) Mx + ω x (t ) My
une répartition statistique en énergie satisfaisant la loi de
Boltzmann (à cause de l’agitation thermique). Cette loi indique
que cette répartition est de la forme exp(– E/kbT ) où E est où ∆ω = ω – ω0 est l’écart à la résonance, aussi appelé
l’énergie du niveau considéré, kB la constante de Boltzmann et « offset ». Les termes ωx(t) = γ Bx(t) et ωy(t) = γ By(t) sont les
T la température du système. On en déduit que le rapport composantes (au facteur gyromagnétique près) du champ
N+/N– de noyaux respectivement dans les niveaux d’énergie
magnétique B1 le long des axes x et y.
E+ et E– est égal à exp[(– E+/kBT)]/exp[(– E–/kBT))].
Le moment magnétique résultant correspond donc à la
somme des moments angulaires associés aux différents niveaux
d’énergie pondérés par leurs poids statistiques respectifs. z
Il est également important de souligner que le moment
magnétique est une donnée microscopique que l’on ne peut
pas directement mesurer. En effet, la mesure ne nous permet Z
d’accéder qu’à la valeur d’une donnée macroscopique ; dans
ce cas, le courant circulant dans les bobines de mesure. Ce
courant est induit par l’ensemble des moments magnétiques
de l’échantillon. Il est donc produit par la résultante d’une Y
B0
aimantation macroscopique.
O y
L’objectif de la RMN est de contrôler cette aimantation
macroscopique. Pour cela, il est nécessaire de connaître la B1
dynamique qui décrit l’évolution du moment magnétique. On
utilise alors l’équation de Bloch exprimant le couple créé par le
champ magnétique sur l’aimantation : x
X
ωt
ɺ
M = γ M ∧ B (t ) (3)
Figure 2 – Représentation des repères fixe (en vert) et tournant
Cette équation de Bloch peut être vue comme le pendant
macroscopique de l’équation de Schrödinger décrivant l’évolu- à la fréquence (en gris) : B0 est le champ statique et B1 est le
tion microscopique du moment magnétique. À partir de cette champ de contrôle
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IN211
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calculs, il est nécessaire de considérer une équation de Bloch
magnétiques sont à l’équilibre. qui ne soit plus conservative. Son expression devient alors :
On prépare ensuite l’échantillon en lui appliquant un champ
radiofréquence B1 résonant, d’amplitude constante, intense et 1
Mɺ x = − Mx − ∆ω My + ω y (t ) Mz
brève. B1 est la composante du champ selon X dans le repère T2
tournant dont la définition est donnée sur la figure 2. La
1
conséquence de cette impulsion est que le moment magnéti- Mɺ y = − My + ∆ω Mx − ω x (t ) Mz (7)
que, initialement orienté suivant l’axe z, bascule de l’équili- T2
bre vers le plan transverse. 1
Mɺ = − (M − M ) − ω (t ) M + ω (t ) M
z
Notons ici que le champ appliqué doit être résonant par T1 0 z y x x y
0,5
0
z
−0,5
−1
−1 −0,5 0 0,5 1 ω
y
a b
Figure 3 – (a) Trajectoire de l’aimantation lors du retour à l’équilibre. La position initiale du spin a pour coordonnées (y = 0, z = 1).
Après excitation en suivant l’arc de cercle, celles-ci deviennent (x = - 1, z = 0), (b) illustration du spectre obtenu à partir d’une trace
expérimentale simple, comme sur la figure (a). La largeur du spectre obtenu est directement reliée aux effets de relaxation
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P156
L’électrochimiluminescence :
une méthode de choix
pour la bioanalyse
1
par Laurent BOUFFIER
Institut des sciences moléculaires, groupe nanosystèmes analytiques, UMR CNRS 5255,
université de Bordeaux, Bordeaux INP, ENSCBP, France
Stéphane ARBAULT
Institut des sciences moléculaires, groupe nanosystèmes analytiques, UMR CNRS 5255,
université de Bordeaux, Bordeaux INP, ENSCBP, France
Alexander KUHN
Institut des sciences moléculaires, groupe nanosystèmes analytiques, UMR CNRS 5255,
université de Bordeaux, Bordeaux INP, ENSCBP, France
et Neso SOJIC
Institut des sciences moléculaires, groupe nanosystèmes analytiques, UMR CNRS 5255,
université de Bordeaux, Bordeaux INP, ENSCBP, France
Note de l’éditeur : cet article est adapté de la revue Annales des falsifications, de
l’expertise chimique et toxicologique (n 987) éditée par la SECF (Société des experts
chimistes de France).
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P156
1. Immunodosages basés
sur l’ECL
+
TPrA •
Des réactions très énergétiques de transfert d’électrons initiées à
la surface d’électrodes peuvent conduire à une émission lumineuse
en solution appelée l’ECL [1]. L’état excité du luminophore est pro- e–
duit suite à une cascade de réactions déclenchée par une étape ini- –H+
tiale électrochimique (figure 1). Celui-ci retourne à l’état fondamen-
tal en émettant un photon et l’intensité lumineuse résultante
constitue le signal analytique [2]. L’ECL est donc un procédé asso-
ciant efficacement les propriétés électrochimiques et spectroscopi-
TPrA •
ques d’un luminophore [1] [3]. Différents mécanismes réactionnels
TPrA
conduisant à l’émission ECL sont possibles suivant la nature de
l’électrode, les concentrations respectives des espèces en solution,
le pH et l’immobilisation ou non du luminophore. La figure 1 pré-
Ru(bpy)33+
sente un mécanisme modèle pour l’émission ECL avec le système
2+
classique Ru (bpy )3 /T Pr A .
e–
Cependant ce mécanisme modèle largement utilisé ne peut Ru(bpy)32+*
expliquer l’excellente sensibilité des immunodosages ECL de type
sandwich. Dans ce cas, des microbilles magnétiques sont utilisées
pour attacher un anticorps de capture [4]. En présence de l’anti-
gène cible, un anticorps de détection se lie alors qu’un dérivé du
complexe de ruthénium est utilisé comme marqueur (figure 2a).
Ru(bpy)32+
Les systèmes modèles ECL classiquement employés en immuno-
dosage sont constitués d’un luminophore, Ru (bpy )3 ( 2+
)
et de la
TPrA comme coréactif (figure 2). Dans cette configuration expéri-
hν
( 2+
)
mentale où le Ru (bpy )3 est greffé sur une microbille support,
l’oxydation exclusive de la TPrA induit une cascade de réactions,
électrode
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IN242
INNOVATION
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Points clés
1
Domaine : Recherche spatiale
Degré de diffusion de la technologie : Maturité
Technologies impliquées : Station spatiale, lanceurs, satellites, charges utiles,
bioréacteur
Domaines d’application : Médecine, sciences de la vie, chimie, cosmétique
Principaux acteurs français :
– Pôles de compétitivité : Aerospace Valley
– Centres nationaux : Centre national d’études spatiales (CNES)
– Industriels : Novespace, Sanofi
Autres acteurs dans le monde : Centre pour l’avancement des sciences dans
l’espace (CASIS), Agence Spatiale Européenne (ASE), Administration Nationale de
l’Espace et de l’Aéronautique (NASA), Tympanogen LLC, Angiex Inc, Space X,
LambdaVision
Contact : pascale.lefebure@sigma-vision.com
http://www.sigma-vision.com
http://www.chlorodia.fr
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IN242
INNOVATION
En 2017, en partenariat avec l’école de médecine de l’Uni- ■ Les microorganismes sont utilisés en biotechnologie comme
versité de Stanford, le CubeSat [IN 243] (cf. glossaire, § 6) usines pour fabriquer des nombreux composés. L’artémisinine,
EcAMSat 6 U (six fois le volume d’un CubeSat standardisé à la substance active de référence contre le paludisme, était à
10 cm de chaque côté) de la NASA a étudié les effets de la l’origine extraite d’une plante chinoise par des procédés indus-
micropesanteur sur la résistance aux antibiotiques de la triels insatisfaisants. En 2013, le laboratoire Sanofi a misé sur
bactérie E. coli uropathogène (UPEC), une bactérie dont une levure modifiée capable de transformer le sucre en précur-
certains variants sont pathogènes pour l’être humain et l’ani- seur d’artémisinine. Cependant, certains composés restent dif-
mal. EcAMSat est capable de fonctionner de manière auto- ficiles à produire. La micropesanteur pouvant modifier le
nome et de stocker 152 h de données. Les deux souches ont métabolisme de ces organismes, une amélioration des
présenté un métabolisme plus lent en micropesanteur. Les méthodes de production des microorganismes est une
résultats ont également montré que la micropesanteur piste à explorer. C’est dans cet espoir que le laboratoire Space
n’améliorait pas la résistance d’E. colis à l’antibiotique Life Sciences a envoyé en 2018 des microalgues en
gentamicine [3]. micropesanteur [6]. Si la micoalgue Chlamydomonas reinhardtii
est cultivée en milieu liquide dans des sacs de culture
(figure 1) placé dans le laboratoire Veggie, sa croissance en
Cependant, l’augmentation de la pathogénicité ne se résume tant qu’organisme modèle y est plus robuste que dans les
pas à l’augmentation de la résistance aux antibiotiques. L’aug- milieux agar solides souvent utilisés pour contrer les
mentation de pathogénicité souvent observée en micropesan- contraintes de la microgravité. Cette première expérience a
teur peut être expliquée pas différents phénomènes, comme la permis de valider l’utilisation de ces sacs de culture pour la
création de biofilms dont il a été démontré que leur croissance croissance de lots de microalgues en microgravité [7]. Compa-
est favorisée en micropesanteur [4] ou par exemple l’altération rativement aux microalgues de contrôle sur Terre, il a été
du fonctionnement du système immunitaire en micropesanteur observé une augmentation de la biomasse dans les cultures en
aussi démontrée dans de nombreuses études. micropesanteur. Cela est probablement dû aux phénomènes de
sédimentation dans les bioréacteurs de contrôle au sol. Les
■ Dans le même registre, il a été mis en évidence que la résultats sont encore en phase d’exploitation avant publication.
micropesanteur affecte l’expression génique des cellules
cancéreuses de la thyroïde. Les tests ont été réalisés en
conditions de micropesanteur réelle et simulée dans une 1.2 Formation de microstructures
machine de positionnement aléatoire. Après 10 jours, l’ana- en micropesanteur
lyse de l’expression des gènes avec des puces à ADN a révélé
2881 transcriptions significativement régulées. Ces gènes qui Dans l’espace, la sédimentation, la convection naturelle et la
se sont exprimés différemment sont impliqués dans plusieurs flottabilité sont minimisées, voire annulées. En revanche, des
processus biologiques, y compris l’apoptose (182), le forces telles que la tension superficielle du liquide et les forces
cytosquelette (80), l’adhésion / matrice extracellulaire (98), la capillaires deviennent plus influentes.
prolifération (184), la réponse au stress (268), la migration De petites particules solides ou des gouttelettes de liquide
(63), l’angiogenèse (9) et la transduction du signal (429). Les contenant une substance thérapeutique peuvent être encapsu-
gènes impliqués dans la régulation de la prolifération des cel- lées dans des microstructures, fournissant une libération
lules cancéreuses, tels que IL6, IL8, IL15, OPN, VEGFA, contrôlée et ciblée d’un médicament. Des expériences ont mon-
VEGFD, FGF17, MMP2, MMP3, TIMP1, PRKAA et PRKACA, tré que les nanostructures fabriquées en micropesanteur
étaient également régulés dans la machine à position aléatoire seraient plus petites et plus uniformes que celles fabriquées sur
et lors du vol spatial. Ces cellules étaient beaucoup moins sus- Terre. Leur rapport surface/volume étant plus élevé, appro-
ceptibles de proliférer. La compréhension de ce phénomène chant les dimensions moléculaires, la surface d’adsorption et de
peut avoir des impacts de grande envergure sur des thérapies délivrance de ces structures augmentent. La taille et la distribu-
anticancéreuses plus efficaces [5]. tion des particules sont essentielles pour améliorer ces
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IN242
INNOVATION
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Si la culture cellulaire à l’échelle industrielle est un processus
mentent la valeur de production en diminuant le coût par dose. largement maîtrisé, malheureusement, certains tissus cellu-
Elles donnent lieu à une nouvelle technique de fabrication pour laires ont une capacité de croissance limitée sur Terre. Pour
des systèmes de diffusion de médicaments par exemple. certaines lignées cellulaires, les scientifiques ne disposent pas
toujours de méthodes efficaces pour produire des cellules en
En 2018, la société Tympanogen LLC., spécialisée en tech- grande quantité. Heureusement, quand bien même la compré-
nologie médicale, cherche à améliorer le processus de libéra- hension de ce phénomène reste floue, certaines cellules aug-
tion d’antibiotiques à partir d’un nouveau patch qui traite les mentent leur multiplication en condition de micropesanteur et
blessures de combat militaire et réduit les risques de septi- donnent l’espoir aux scientifiques de les produire en grande
cémie. Ce nouveau patch contient un hydrogel aux proprié- quantité. Être capable de maîtriser la croissance des cellules
tés antimicrobiennes. La réduction du mouvement des est important dans le domaine médical. Les applications sont
fluides en micropesanteur a permis d’étudier en temps réel variées.
et de manière plus précise le comportement de cet hydrogel
et de sa libération contrôlée d’antibiotiques [8]. ■ Accélérer les tests de médicaments ou de cosmétiques
(par la croissance d’organes, de tissus ou de cultures cellu-
laires comme analogues du corps humain pour tester l’effica-
Les colloïdes sont des toutes petites particules solides, cité et la toxicité d’une molécule). Pour tester leurs nouveaux
liquides ou gazeuses allant du nanomètre au micromètre en dis- produits sur l’un des organes les plus simples, la peau, l’indus-
persion homogène dans un liquide. De nombreux produits de trie cosmétique est la première à bénéficier de l’amélioration
consommation comme l’encapsulation de médicaments, les de ces méthodes de production de tissu.
produits alimentaires, les peintures (pour faciliter son applica-
tion, la brillance, la résistance aux intempéries) et plus spécia- Le groupe L’Oréal teste ses produits sur des tissus humains
lement les cosmétiques, sont des mélanges colloïdaux. fabriqués en laboratoire à partir d’échantillons de peau issus de
Cependant, il arrive que ces particules s’agglutinent, coulent au la chirurgie esthétique. Avec cette technique, près de
fond et le produit est gâché. Cet effondrement du produit 130 000 fragments de peau étaient produits chaque année en
s’aggrave lorsque la taille des particules est variable. Même s’ils France mais la demande d’échantillons de peau humaine était
sont produits quotidiennement en grande quantité, il y a beau- en constante croissance et la production insuffisante à l’échelle
coup d’aspects de leur comportement qui restent mécompris du groupe. L’Oréal s’est rapproché de la start-up Organovo,
des scientifiques. La Station spatiale internationale est un spécialisée dans les technologies de bioimpression 3D afin de
endroit idéal pour étudier la physique des colloïdes en temps recréer artificiellement des tissus de peau. Des cellules diluées
réel et ainsi nous aider à fabriquer des produits plus stables dans une encre biologique sont agencées couche par couche
composés de colloïdes de haute qualité. L’expérience de phy- afin de produire un modèle au plus proche. Suite à l’impression
sique des colloïdes dans l’espace PCS (Physics of Colloids in en 3D, une phase de maturation à 37 °C laisse le temps à ces
Space) a été lancée sur la navette spatiale STS-100 en avril cellules de se différencier, se reproduire, s’auto-organiser et se
2001. Obtenues par des dispositifs optiques et deux appareils reconnecter pour construire en deux à trois semaines un tissu
de photographies, des données sur la diffusion de la lumière artificiel. Sur Terre, les cellules sédimentent à des vitesses dif-
statique et dynamique à travers l’échantillon fournissent des férentes selon leur souche, ce qui compromet dans certains cas
informations sur les tailles (jusqu’à environ 5 µm) ou les posi- la reconnexion entre les cellules et la structure même du tissu
tions des colloïdes ou des types de structures qui se sont for- final. Pour contrer ce phénomène, la viscosité de l’encre biolo-
mées dans l’échantillon tel que des cristaux ou du gel. Cette gique utilisée a été augmentée à l’aide d’agents chimiques qui
expérience a recueilli des données sur les propriétés physiques sont souvent nocifs pour les cellules. Cette contrainte limite le
de simples suspensions colloïdales en étudiant les structures qui choix des souches cellulaires utilisables et la densité de cellules
se forment. L’expérience se concentrait sur le comportement de dans l’encre biologique. Avant d’acquérir des organes imprimés
trois classes différentes de mélanges colloïdaux de minuscules à la demande, il reste encore beaucoup à faire. En microgravité,
particules artificielles de polyméthacrylate de méthyle (PMMA), les cellules ne sédimentent pas, elles sont libres de se dévelop-
de silice ou de polystyrène. L’objectif étant de laisser reposer per dans toutes les directions et bénéficient d’une diffusion uni-
pendant des jours, des semaines, ou des mois en orbite pour forme des nutriments et des gaz. La tentation est grande
observer l’auto-assemblage des particules. Le comportement d’utiliser des systèmes de culture cellulaire rotatifs sur Terre
des échantillons sous forme de polymère colloïdal a abouti à pour simuler la microgravité, mais le mouvement des fluides y
plusieurs observations intéressantes. Dans les 16 h qui ont suivi génère un effet de cisaillement sur un tissu cellulaire ayant un
le mélange initial, le polymère colloïdal biphasé a commencé à effet très délétère sur la viabilité des cellules, en général très
se séparer en deux phases – une qui ressemble à un gaz sensibles au cisaillement [11].
(pauvre en colloïde) et une qui ressemble à un liquide (riche en
colloïde). Cette séparation ne peut pas être observée sur Terre
car la sédimentation fait tomber plus vite les colloïdes au fond L’aventure de la bioimpression en micropesanteur
du conteneur [9]. Ce phénomène de séparation ou ségrégation commence en 2016 quand la NASA réalise son premier test
est considéré comme une nuisance dans de nombreux proces- en vol parabolique en partenariat avec trois entreprises
sus technologiques. Il est rendu possible par les espaces qui Techshot Inc, sNcript Inc et Bioartifical Organs Inc. Il s’agis-
s’ouvrent autour des particules quand ils sont secoués. Les sait de tester le fonctionnement de leur prototype de bioim-
grosses particules ont tendance à se déplacer vers des régions primante 3D, utilisant notamment une plus faible viscosité
moins denses de particules plus petites ; c’est pourquoi de gros d’encre qui ne contient que des matières biologiques, pour
objets lourds peuvent monter au sommet de couches verticale- imprimer une structure semblable à un cœur pendant ce vol
ment agitées de matériaux granulaires. Ces résultats soulèvent parabolique [10]. C’est en 2017 que cette même équipe
de sérieuses questions sur les processus de fabrication qui lance une étude sur la maturation d’un tissu bioimprimé de
implique des mélanges par agitation des poudres avec deux cellules musculaires. Depuis l’ASE est rentrée dans la course
composants ou plus. avec différents tests de bioimpression 3D en micropesanteur.
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IN243
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NewSpace : fonctionnement
des laboratoires en micropesanteur 1
par Pascale LEFEBURE
Ingénieur en biotechnologie, Manageure de projet aérospatial
SIGMA-VISION.COM (Targasonne, France)
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1
fera la lumière sur le cycle de vie d’une expérience en micropesanteur afin
de promouvoir une recherche en micropesanteur accessible dans une stra-
tégie coût-performance. À travers la découverte des nombreuses
infrastructures dédiées à la recherche en micropesanteur dans l’espace
(ISS, capsules automatisées, CubeSats) et dans l’atmosphère (vols para-
boliques) ou en microgravité simulée sur Terre (tours de chute libre,
machine en positionnement aléatoire…), cet article accompagne les scienti-
fiques dans l’identification de la technologie qui répond à un besoin
spécifique de recherche.
Points clés
Domaine : Recherche spatiale
Degré de diffusion de la technologie : Maturité
Technologies impliquées : Station spatiale, lanceurs, satellites, charges utiles,
bioréacteur
Domaines d’application : Médecine, sciences de la vie, chimie, cosmétique
Principaux acteurs français :
– Pôles de compétitivité : Aerospace Valley
– Centres nationaux : Centre national d’études spatiales (CNES), Medes
– Industriels : Novespace
Autres acteurs dans le monde : Centre pour l’avancement des sciences dans
l’espace (CASIS), Agence Spatiale Européenne (ASE), Administration Nationale de
l’Espace et de l’Aéronautique (NASA), Kayser Italia, Techshot, Von Karman Insti-
tute for fluid dynamics
Contact : pascale.lefebure@sigma-vision.com
http://www.sigma-vision.com
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de la NASA (NASA Extreme Environment intègre les deux motions.
Mission Operations)
La station spatiale en chute libre ou en orbite autour de la
POIC Centre d’intégration et d’exploitation de la Terre peut être en état d’impesanteur mais pas de microgravité.
charge utile (Payload Operations and Un astronaute à bord de la Station spatiale internationale ISS se
Intergration Center) trouve dans un état d’impesanteur du fait du mouvement de la
RPM Random Positionning Machine station spatiale en chute libre autour de la Terre (sa vitesse lui
permet de ne jamais percuter la Terre), mais la gravité est pra-
TRL Niveau de maturité technologique (Technology tiquement identique à celle ressentie à la surface de la
Readiness Level) Terre [1].
UE Unité expérimentale (Experimental Unit EU) La vitesse nécessaire pour que l’ISS reste en orbite dépend de
sa distance de la Terre. Pour une altitude d’environ 400 km, elle
Veggie Vegetable Production System est de 28 000 km/h. Si cette vitesse était trop lente, l’ISS
retomberait sur la Terre. Au contraire, si elle était trop rapide, la
Station serait éjectée hors de l’espace extra-atmosphérique.
1. Laboratoires en micropesanteur
Des laboratoires en micropesanteur ont été installés en
La loi de la gravitation a été énoncée pour la première fois par orbite terrestre basse OTB (Low Earth Orbit LEO), tel que
Sir Isaac Newton, physicien et astronome anglais en 1684. le laboratoire permanent de l’ISS. Certains labora-
Selon Newton, à tous les corps massifs est associé un champ de toires ne sont pas en permanence en orbite ; ils prennent
gravitation (ou champ de gravité) responsable d’une force leur envol pour la durée des expériences qu’ils
attractive sur les autres corps massiques. La force de gravité transportent : notamment les dispositifs de capsules ou
qu’un corps exerce sur un autre est proportionnelle à la masse les CubeSats. D’autres dispositifs permettent de réaliser
du corps et inversement proportionnelle au carré de la distance des expériences en micropesanteur dans
entre ces deux corps. Ce qui veut dire que plus un corps est l’atmosphère terrestre (comme les vols paraboliques),
massif, plus il exerce une gravité et plus il est loin d’un autre voire même de simuler la microgravité sur Terre avec des
corps, moins il exerce de gravité sur ce dernier. machines à positionnement aléatoire !
Sur la Terre, la direction de la gravité est constante. On
observe ainsi qu’en un lieu donné tous les corps libres tombent 1.1 ISS, emblème de l’expérimentation
en direction du sol. en micropesanteur
Pourtant son champ de gravité est sujet à des disparités dues La Station spatiale internationale (ISS) est la plus grande
aux hétérogénéités de composition et de topographies de notre structure jamais construite par l’homme dans l’espace et reste
planète. L’inégale valeur des rayons de la Terre aux pôles et à le plus ambitieux programme mondial mené en coopération
l’équateur, ainsi que le déplacement des masses d’eau dû aux dans le domaine scientifique ou technologique à ce jour. Elle
marées sont des causes de ces disparités. On peut considérer pèse 455 t et mesure 100 m de long pour 80 m de largeur. Sa
que sur Terre la gravité est proche de 1 g, avec g l’accéléra- surface est proche de celle d’un terrain de football (figure 1) !
tion due à la pesanteur.
Il n’existe pas de fusée suffisamment puissante pour lancer
Ainsi, plus on s’éloigne de la masse de la Terre, plus la force dans l’espace une telle structure. Tel un jeu de patience, la Sta-
de gravité diminue. tion, avec sa centaine de pièces, a nécessité plus de 50 lance-
ments pour être transportée dans l’espace. Pour que les pièces
L’espace est défini au-delà de l’atmosphère terrestre, il est à s’imbriquent bien les unes dans les autres, il est important que
environ 100 km au-dessus de nos têtes. Par contre, il faut les nations participant à ce projet s’accordent et utilisent les
s’éloigner de plus de 200 000 km de la Terre pour que la force mêmes normes.
de gravité de celle-ci diminue tellement que l’on appelle cet
Même si elle paraît éloignée, il est possible de la voir à l’œil nu
environnement la microgravité.
depuis la Terre, de nuit et par temps clair. Lorsqu’elle est
C’est le 19 avril 1971 que les Russes ont envoyé en orbite visible, l’ISS ressemble presque à une étoile se déplaçant dans
basse à 200 km la première station spatiale, Salouit 1 qui sera le ciel. Le meilleur moment pour l’observer est soit juste après
un laboratoire unique sans distorsion gravitationnelle pour étu- le coucher du soleil, soit juste avant son lever.
dier les processus biologiques et physiques sous-jacents dont La Station est suffisamment spacieuse pour accueillir entre 1
les effets sont masqués par la force de gravité. et 7 sept membres d’équipage et une panoplie impressionnante
d’équipements pour mener des expériences scientifiques dans
ses différents laboratoires.
L’impesanteur ou la micropesanteur dépend à la fois L’Europe, travaillant au travers de l’Agence spatiale euro-
du mouvement du corps et du point de l’espace où il se péenne ASE, a la responsabilité exclusive du laboratoire
trouve, alors que la microgravité ne dépend que du point Columbus et d’un autre élément clé de la station, le véhicule
où il se trouve par rapport à un autre corps. de transfert automatique (ATV) (figure 2) dont le pro-
À la distance où se trouve une station orbitale, il ne s’agit gramme touche à sa fin.
pas de microgravité mais de micropesanteur. Pour la Intégré à la Station spatiale internationale en février 2008, le
micropesanteur, les forces gravitationnelles et inertielles ont laboratoire Columbus est un gros cylindre d’une longueur de
une résultante nulle. Pour la microgravité, c’est la résultante 6,84 m sur 4,49 m de large pour un volume pressurisé de
des forces gravitationnelles qui est nulle. 78,5 m3. Columbus est l’un des laboratoires consacrés à la
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INNOVATION
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INNOVATION
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INNOVATION
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de retour devrait être un site européen qui n’a pas encore été
choisi mais qui sera vraisemblablement la base aérienne
d’Istres, en France. D’une longueur de 9,7 m, il a une capacité
d’emport de 600 kg de charge utile à une altitude de 400 à
450 km. Space Rider a la particularité d’avoir une soute polyva-
lente ouverte sur l’espace. L’énergie est fournie par
des panneaux solaires qui produisent entre 150 et 400 W pour
la charge utile. Ces panneaux sont largués avant la rentrée
atmosphérique. Il peut être réutilisé au moins 6 fois et le temps
de remise en état entre deux vols est d’environ 6 mois.
À la fin de la mission, la partie récupérable contenant les
expériences se détache du module de propulsion et entre dans
l’atmosphère avant d’atterrir sur Terre grâce à un parachute.
En collaboration avec BioServe Space Technologies, SNC
explore la possibilité d’utiliser son Dream Chaser® – véhicule
utilitaire spatial (SUV) capable de missions multiples – comme
plate-forme orbitale pour des expériences scientifiques en
micropesanteur et la recherche en sciences de la vie spatiale.
Figure 8 – Service de lancement multiple (doc. ASE/DUCROS D.)
La Chine n’est pas en reste avec ses capsules Shenzhou (vais-
seau divin) dédiées aux expériences en micropesanteur. Lan-
cées par une fusée Long March, elles atterrissent en Mongolie.
Cette capsule servira aussi à l’envoi de taïkonautes.
En 2016, la Chine a lancé le satellite Shinjian-10 dédié à la
recherche en micropesanteur. Après 12 jours en orbite, une
capsule de rentrée ramène des échantillons sur Terre, atterris-
sant en Mongolie intérieure. Une de ses expériences avait été
développée conjointement avec l’Agence spatiale européenne.
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+1 ~ 100 kDa
~ 1 kDa
+2
1
0 1 000 2 000 0 5 000 10 000
m/z m/z
~ 10 kDa + 10 ~ 1 MDa
Figure 1 – Schéma illustratif de l’évolution des spectres de masse en fonction de la masse moléculaire d’un analyte obtenus par source
d’ionisation electrospray
ions vers la sortie de l’entonnoir tandis que le RF (environ 600 kHz) chargés, produits par ESI, passent un par un par un petit tube
fournit un pseudopotentiel qui focalise les ions, offrent également cylindrique métallique connecté à un préamplificateur de charge
de bonnes performances en termes de transmission. Les guides qui capture leur courant d’image. Habituellement, un rapport lon-
d’ions multipolaires et les funnels ont un effet faible pour compen- gueur-diamètre (pour le tube cylindrique) de quatre ou plus est uti-
ser la grande quantité d’énergie emportée par les ions de masse lisé. Notons que la charge induite est presque indépendante de
élevée provenant du flux gazeux à travers le capillaire des sources l’emplacement des ions dans le cylindre, ce qui rend la mesure
ESI. À cet effet, le groupe de Jarrold a proposé un dispositif précise. Le tube détecteur est connecté à un transistor à effet de
hybride – le FUNPET – intégrant la diffusion, l’accélération due aux champ (JFET) puis à l’entrée du préamplificateur sensible à la
champs RF et DC et l’accélération due à l’effet du flux de gaz [8]. charge. Le signal est ensuite traité avec un différentiateur
Pour les ions plus lourds (m/z > 105), les guides ioniques RF ne gaussien : un ion entrant dans le tube produit une impulsion don-
sont plus efficaces. À cette fin, le groupe de Continetti a proposé née, et une impulsion de polarité opposée lorsqu’il sort (figure 2).
un dispositif de guidage novateur basé sur une conception de len- L’impulsion d’amplitude négative correspond à la charge imprimée
tille aérodynamique pour transmettre efficacement plus de 95 % sur le cylindre par l’ion positivement chargé qui entre dans le
des particules dans la gamme de taille de 75 à 1 200 nm [9]. cylindre ; la deuxième impulsion d’amplitude positive résulte de la
sortie de cet ion du cylindre. Le temps entre les deux impulsions
correspond au temps de vol nécessaire à l’ion pour traverser la
1.3 Détection de charge longueur du cylindre. L’amplitude du signal de charge-image est
proportionnelle à la charge totale de l’ion z. Le temps de vol per-
Basée sur la détection de la charge-image d’un ion multichargé met de calculer le rapport masse/charge (m/z) de chaque ion. La
traversant un tube conducteur, la spectrométrie de masse à détec- masse de chaque ion est obtenue comme une combinaison entre
tion de charge permet de mesurer simultanément la charge et le la valeur de m/z et de la charge. Les mesures de détection de
temps de vol (ToF) dans ce tube de chaque ion issu de l’échantil- charge sur plusieurs milliers d’ions individuels permettent de rapi-
lon. En effet, au voisinage d’un conducteur, le passage d’un ion dement construire des distributions de masse.
induit une charge-image. Par exemple, un ion positif entrant dans
un tube conducteur isolé induit une charge négative à l’intérieur
du tube et une charge positive à l’extérieur. Les charges induites
sont maintenues jusqu’à ce que l’ion sorte du tube. Dans ce cas, Un avantage primordial de la technique CDMS en mode
celles-ci se dissipent. Lorsque le tube est suffisamment long, la simple passage est la rapidité à analyser une distribution de
valeur de la charge induite approche celle de la charge de l’ion. macro-ions issus d’un échantillon en solution. Plusieurs milliers
Dans certaines conditions de géométrie, des solutions analytiques d’ions peuvent être analysés dans la minute.
permettant de calculer la charge-image sont extraites grâce au
théorème de Shockley-Ramo [10] [11]. Néanmoins, il est courant
d’utiliser ce théorème pour déterminer le courant d’image induit
avec des calculs d’éléments finis, effectués par exemple dans 1.4 Modes CDMS et performances
SIMION [12]. Notons cependant que les solutions exactes pour le
signal de charge-image dans une cellule ICR ou orbitrap sont géné- Il existe trois modes de détection CDMS (figure 3) [1] [2] :
ralement complexes et beaucoup plus difficiles à évaluer [13].
Ainsi sont simultanément mesurés la charge z et rapport masse- – le mode simple passage ;
sur-charge (m/z), données brutes desquelles peuvent être déduite – le mode détecteurs en ligne ;
la masse (m = z m/z) de chaque espèce ionisée constitutive de – le mode piège à ions.
l’échantillon étudié. La charge d’un ion résulte de l’ajout de
charges élémentaires positives (ou négatives) sur son motif struc- Le mode simple passage est le plus simple ; le rapport m/z est
turel et donc la charge z d’un ion est donnée en multiple entier de déterminé à partir du temps de vol à travers le tube (et l’énergie
la charge élémentaire (e = 1,602 × 10–19 C). Les ions fortement cinétique de l’ion).
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Référence Internet
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Clara GIANFERMI
EXPERTOX Cabinet d’expertises toxicologiques & Laboratoire d’analyses industrielles,
Alfortville, France
http://www.expertox.eu
Dr Ségolène DE VAUGELADE
EXPERTOX Cabinet d’expertises toxicologiques & Laboratoire d’analyses industrielles,
Alfortville, France
http://www.expertox.eu
et Lona GUILLEMIN
EXPERTOX Cabinet d’expertises toxicologiques & Laboratoire d’analyses industrielles,
Alfortville, France
http://www.expertox.eu
e cheveu est une matrice alternative intéressante qui présente une avancée
L considérable dans l’analyse biologique, notamment en toxicologie médico-
judiciaire. En effet, a contrario des matrices classiques comme le sang et l’urine
dans lesquelles les molécules ne restent analysables que quelques jours voire
quelques heures, l’analyse des cheveux permet d’élargir la fenêtre de détection
des expositions à certains xénobiotiques de plusieurs semaines au minimum
selon la longueur du cheveu analysé. L’analyse rétrospective des cheveux per-
met d’établir le profil de consommation à long terme d’un xénobiotique et son
évolution dans le temps. Cette matrice permet donc à la fois de détecter un
usage unique antérieur, mais également une exposition répétée. De nombreu-
ses méthodes d’analyses en laboratoire se sont développées sur cette matrice,
et continuent de se développer. Cet article vise à donner une meilleure vision
d’ensemble de ces méthodes avec leurs biais, en insistant également sur la pré-
paration des échantillons jusqu’à l’extraction des substances chimiques.
Nota : cet article est issu de la revue « Annales des falsifications, de l’expertise chimique et toxicologique » éditée par la SECF
(Société des experts chimistes de France).
Parution : mai 2022
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Référence Internet
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DÉTECTION ET DOSAGE DE MOLÉCULES DANS LES CHEVEUX DANS LE DOMAINE MÉDICOJUDICIAIRE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
1. Contexte qui auraient les mêmes métabolites. De plus, les molécules incor-
porées sont très stables dans les cheveux.
La détection de substances chimiques dans les cheveux est une
technique très exigeante qui fait appel à des techniques d’analyse
L’analyse en laboratoire des cheveux a progressé de façon impor- très sensibles et sélectives dans un laboratoire bien équipé et doté
tante depuis les années 2000 [1]. En effet, les applications utilisant de personnel compétent. L’établissement d’une procédure de dépis-
l’analyse des cheveux sont de plus en plus nombreuses, y compris tage analytique sur les échantillons biologiques doit prendre en
les addictions et toxicomanies, le suivi des patients alcoolodépen- compte certains paramètres, comme le volume de l’échantillon, la
dants, l’empoisonnement chronique, le dopage, la soumission chi-
1
vitesse d’analyse, la sensibilité et la spécificité des méthodes. Cer-
mique ou encore la restitution du permis de conduire [2]. tains paramètres doivent être validés comme la sélectivité, le
En parallèle, le développement du matériel d’analyse permet modèle de calibration (linéarité), l’exactitude et la précision, la
d’obtenir des résultats de plus en plus sensibles, précis et fiables, limite de détection (LD), la limite de quantification (LQ), la stabilité
avec des niveaux de détection de concentrations très faibles (du du produit à analyser, le rendement, les effets de matrice et la
picogramme voire parfois du nanogramme) [3]. robustesse.
La matrice cheveux présente certains avantages : Les techniques recommandées pour l’analyse des cheveux sont :
– le prélèvement est simple et non invasif ; – la GC-MS, GC-MS-MS et LC-MS-MS ou LC-DAD pour tout ce qui
– la conservation est aisée, dans une enveloppe ou un kit de col- est drogues illicites, stupéfiants et médicaments délivrés sur
lecte à température ambiante, en milieu sec à l’abri de la lumière, ordonnance ;
sans limite de temps. – la LC-MS-MS (ou GC-MS-MS) ou MSn pour les hypnotiques, les
benzodiazépines et les molécules apparentées aux benzodiazépines ;
Les poils sont des structures kératinisées produites au niveau – la GC-MS-MS (ou LC-MS-MS) ou MSn pour tout ce qui
d’une invagination de l’épithélium épidermique, le follicule pilo- concerne le GHB et les cannabinoı̈des [6].
sébacé. Chacun de ces follicules représente une unité anatomique,
constituée du poil proprement dit, de son bulbe pilaire, sa racine et
À retenir
sa tige, du follicule, d’une glande sébacée et d’un muscle.
Les poils se développent puis chutent de façon individuelle et – Le cheveu est une matrice qui se prélève et se conserve
cyclique, selon trois phases : la phase de croissance (quatre à huit aisément contrairement au sang et aux urines.
ans), la phase de transition (deux semaines), et la phase de repos – Les substances chimiques peuvent être présentes à long
(trois mois). Il est généralement considéré que les cheveux pous- terme dans le cheveu.
sent d’environ 1 cm par mois, avec des variations allant de 0,7 à – Les méthodes d’analyses sont en plein essor et de plus en
1,5 cm par mois. Le mécanisme supposé pour l’incorporation des plus perfectionnées grâce aux avancées de développement du
xénobiotiques dans les cheveux consiste en une diffusion interne matériel d’analyse.
des molécules du sang vers les cellules en croissance des bulbes – Certains biais comme le traitement des cheveux avant pré-
pileux, et une diffusion externe à partir des sécrétions sudorales, lèvement, notamment cosmétique, peuvent influencer, biaiser
sébacées, ou des éventuels contaminants de l’environnement. En et rendre plus difficiles les analyses.
fusionnant pour former le cheveu, les cellules en croissance piège-
raient les molécules dans la structure kératinisée. Les cinétiques
d’incorporation sont dépendantes des liaisons de la molécule à la
mélanine, un pigment des cheveux qui présente différents degrés 2. Prélèvement
d’oxydation. Il semble qu’il existe une différence quantitative
d’incorporation des molécules selon la couleur des cheveux. En des échantillons
effet, les cheveux foncés, qui présentent un degré d’oxydation
plus important de la mélanine, concentrent ou retiennent plus for-
tement les molécules que les cheveux clairs, à doses d’exposition Le prélèvement des cheveux doit être effectué par une personne
équivalentes. Cette observation pose donc des problèmes d’équité, compétente (biologiste, policier, gendarme) qui suit avec soin les
puisqu’il est admis par la communauté scientifique qu’à dose procédures judiciaires et évite toute contamination de l’échantillon
administrée équivalente, les concentrations mesurées dans les che- et tout contact avec les substances à rechercher.
veux noirs sont plus importantes que dans les cheveux blonds [2].
Il est conseillé d’attendre au moins quatre semaines après la pos-
Les traitements cosmétiques (coloration, décoloration, perma- sible exposition à la molécule avant de prélever les échantillons de
nente, lissage) peuvent affecter les analyses en diminuant la cheveux si la personne est vivante.
concentration des molécules incorporées dans les cheveux notam-
Les cheveux sont généralement prélevés dans la région du vertex
ment par modification de la porosité des cheveux. Donc il convient
postérieur de la tête car cette région présente moins de variations
de noter lors du recueil des cheveux tout traitement cosmétique et
de croissance. La quantité de cheveux nécessaire pour les analyses
de prélever, en cas d’altération visible, d’autres poils ou phanères.
est d’une touffe de cheveux du diamètre d’un crayon (soit environ
En effet, l’incorporation se faisant dans tous les poils, si les che-
une centaine de cheveux). Il est important de collecter suffisam-
veux ne peuvent être prélevés ou sont manquants, d’autres poils
ment de cheveux afin de pouvoir effectuer les tests de routine et
conviennent également comme les poils pubiens, les poils de la
permettre également une répétition d’analyse ou une contre-exper-
poitrine ou les poils axillaires. Ces poils sont particulièrement
tise si besoin. Dans le cadre des expertises judiciaires, il convient
recommandés lorsque les cheveux sont teints ou décolorés. Cepen-
d’effectuer le prélèvement en double. En effet, lorsqu’une tech-
dant, il conviendra de faire attention aux interprétations en utilisant
nique de dépistage préliminaire est réalisée, un volume suffisant
des poils différents de ceux de la tête, puisque l’incorporation peut
d’échantillon est requis pour effectuer des analyses plus poussées
être fort variable selon la localisation anatomique [2].
et des analyses confirmatoires par la suite [7].
La fixation des molécules dans les cheveux pourrait également
Les mèches de cheveux doivent être prélevées le plus près pos-
s’effectuer par le biais de l’environnement atmosphérique [4] [5]. sible du cuir chevelu, coupées avec des ciseaux (ne surtout pas
Les substances mères sont présentes dans les cheveux ou poils à arracher) et orientées avec racine-extrémité au moyen d’une corde-
des concentrations plus élevées que celles de leurs métabolites lette, fixée 1 cm au-dessus du niveau de la racine. Le découpage de
alors que dans les urines les rapports sont généralement inversés. cheveux doit se faire d’autant plus près de la peau que la phase de
De ce fait, les cheveux permettent de discriminer deux substances pousse à explorer est proche du moment du prélèvement.
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Innovations en analyses et mesures
(Réf. Internet 42112)
Spectrométrie d'émission induite par laser appliquée à l'authentification des vins P154 53
Application des isotopes stables à l'authentification des vins au Service commun des P155 55
laboratoires
Bioessais et biocapteurs : outils d'analyse des toxines dans l'agroalimentaire RE225 57
Sur www.techniques-ingenieur.fr
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a majeure partie des produits alimentaires distribués dans les pays déve-
L loppés est emballée. Les emballages sont des barrières destinées à
prévenir la contamination chimique et microbiologique des denrées, et à pro-
longer leur durée de vie. Ils servent aussi de support d’information pour le
consommateur. Mais, à côté de leurs nombreux aspects bénéfiques, les embal-
lages introduisent un risque potentiel pour le consommateur, du fait de la
migration dans les aliments de certains constituants des matériaux.
Les autorités nationales ont donc cherché à encadrer le risque par des textes
réglementaires. En principe, la réglementation de la santé des consommateurs
repose sur une exigence élémentaire très générale, formulée dans le
règlement (CE) No 1935/2004 [1] : « les matériaux et objets au contact des
aliments ne doivent pas céder de substances en quantités susceptibles de
mettre en danger la sécurité alimentaire ».
Dans la pratique, chaque État membre, voire chaque industriel est libre
d’appliquer ses propres outils et ses méthodes d’appréciation du risque, ce qui
entraîne une confusion grandement préjudiciable aussi bien à la perception du
risque qu’à la libre circulation des marchandises. Pour remédier à cette
situation, la Commission européenne a entrepris un travail d’harmonisation
qui a conduit à la proposition et à l’adoption de directives spécifiques, définis-
sant de manière précise comment répondre aux exigences fondamentales de
la directive cadre. Toutefois, la réglementation actuelle est encore incomplète,
et ne couvre pas encore tous les domaines de l’emballage, car il subsiste des
secteurs où des connaissances scientifiques doivent encore être acquises. C’est
le cas des emballages innovants (comme les emballages actifs et intelligents),
ou de systèmes plus anciens, et dont l’évaluation du risque est complexe. C’est
notamment le cas des systèmes réactifs où les migrants potentiels ne sont pas
les molécules introduites dans la fabrication, mais des produits de réaction de
ces molécules avec leur environnement, ou de ces molécules entre elles (com-
posés dits « néoformés »). Les matériaux sont en effet soumis à des conditions
pouvant favoriser la formation de nouveaux migrants potentiels (post-traite-
ments tels que la stérilisation, la cuisson, etc.). En conséquence, le risque ne se
limite pas aux substances de départ mais à un nombre parfois important de
sous-produits dont on ignore la nature chimique et la toxicité résultante.
Parution : mai 2013
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LES SUBSTANCES PRÉOCCUPANTES PROVENANT DES MATÉRIAUX AU CONTACT DES ALIMENTS __________________________________________________
2
chimistes de France).
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SPECTROMÉTRIE D’ÉMISSION INDUITE PAR LASER APPLIQUÉE À L’AUTHENTIFICATION DES VINS __________________________________________________
électronique
virtuel Diffusion
La spectroscopie moléculaire repose sur le phénomène d’inte- Diffusion
Raman Rayleigh λ0
raction lumière-matière. Le rayonnement lumineux est porteur
État λ′ > λ0
d’énergie (l’énergie du photon est inversement proportionnelle à Niveaux
sa longueur d’onde) qui peut être absorbée par le matériau irradié. électronique
vibrationnels
fondamental
Ces mécanismes sont décrits schématiquement figure 1. Lorsque Absorption Absorption
le photon a une énergie qui correspond à la différence d’énergie UV infrarouge
2
entre l’état quantique fondamental d’une molécule et l’un de ses
états quantiques excités, un phénomène de résonance se produit De droite à gauche : l’absorption de photons dans l’infrarouge moyen
avec transition de l’état fondamental vers l’état excité. Pour des permet de sonder les états vibrationnels des molécules ; l’interaction
photons de faible énergie, c’est-à-dire pour les longueurs d’onde des photons dans le visible avec les molécules du milieu sondé va
provoquer les oscillations forcées des électrons modulées par les
micrométriques du rayonnement infrarouge, les niveaux
vibrations moléculaires et est à l’origine de la spectroscopie de
quantiques considérés correspondent aux vibrations moléculaires.
diffusion Raman (dite Stokes) ; l’absorption des photons dans le visible
Une fois que la molécule a absorbé le rayonnement, l’excès ou dans l’UV permet de sonder les états électroniques des molécules.
d’énergie est dissipé via des collisions avec les autres molécules Après absorption d’un photon, la molécule dans son état excité va
environnantes. Pour des photons ayant des longueurs d’onde plus dissiper son énergie par conversions internes puis regagner l’état
courtes (en général dans l’ultraviolet UV), les niveaux quantiques électronique fondamental en relaxant son excès d’énergie par
impliqués dans le processus d’absorption correspondent à des l’émission d’un photon.
états électroniques. L’excès d’énergie sera dissipé en partie via des
collisions avec les autres molécules du milieu, ce qui va progressi- Figure 1 – Représentation schématique des différents mécanismes
d’interaction photon-molécule
vement amener la molécule irradiée dans son état électronique
excité de plus basse énergie. Pour continuer à perdre l’énergie
emmagasinée et retourner dans son état quantique fondamental, du visible, sa couleur dominante perçue par l’œil étant liée à
cette molécule devra réémettre un photon. Ce rayonnement émis l’absorption de la lumière verte (450 à 550 nm). Cette absorption
après absorption est la luminescence qui englobe la fluorescence de la lumière donnant leur couleur aux vins est liée aux transitions
si la « durée de vie » dans l’état excité est relativement brève électroniques de certaines molécules qui les composent. Ainsi, si
(< 1 µs) ou la phosphorescence si la durée de vie est longue on irradie un tel matériau coloré avec une émission laser verte ou
(> 1ms). Tant que l’énergie du photon incident provoque la transi- violette, le phénomène de luminescence (fluorescence) mentionné
tion de la molécule vers l’état électronique excité (figure 1), la lon- ci-dessus se superposera, en le masquant le plus souvent, au phé-
gueur d’onde du photon émis sera toujours la même. En d’autres nomène de diffusion Raman bien plus faible en intensité. Cette
termes, la différence des longueurs d’onde entre photons incidents spectroscopie induite par laser, d’émission de fluorescence (spec-
et émis est variable. Il y a cependant un autre mécanisme d’inte- troscopie de fluorescence induite par laser que nous noterons
raction lumière-matière, qui n’est pas un phénomène de réso- LIFS) et/ou de diffusion Raman, est riche en information sur la
nance, provoquant aussi une émission de photons dans le composition chimique de l’objet irradié.
domaine du visible. Ici l’énergie apportée par les photons aux
molécules va forcer les électrons à adopter un état d’énergie supé- Le choix de la longueur d’onde du rayonnement excitateur sera
rieur dit « virtuel » de durée de vie nulle. Le retour à l’état fonda- alors un paramètre crucial à déterminer. Si notre objectif est de
mental provoque soit la réémission d’un photon de même énergie mesurer la diffusion Raman en minimisant le phénomène d’émis-
que le photon incident (collision photon-molécule élastique) pour sion de fluorescence, alors la source lumineuse excitatrice devra
la diffusion Rayleigh, soit la réémission d’un photon d’énergie dif- avoir une longueur d’onde se situant en dehors de toute absorp-
férente (collision inélastique) pour la diffusion Raman. La longueur tion électronique. Par exemple, pour un vin rouge (qui absorbe
d’onde du photon émis dépend de la longueur d’onde du rayon- donc la lumière verte vers 500 nm), plus la longueur d’onde du
nement incident, en d’autres termes la différence des longueurs laser se situe vers le proche infrarouge (> 700 nm) moins l’émis-
d’onde entre photons incidents et photons émis est constante. sion de fluorescence masquera la diffusion Raman.
Pour distinguer ce mécanisme du phénomène de luminescence,
Le rayonnement Raman est de faible intensité et la diffusion
on parlera de diffusion de la lumière. L’intensité de la diffusion
Rayleigh, bien plus intense, doit être rejetée pour améliorer le
Rayleigh, à l’origine de la couleur bleue du ciel, est plus de un
contraste du système optique du spectromètre. Dans un spectro-
million de fois celle de la diffusion Raman. Ainsi, un matériau
mètre Raman moderne (figure 2), le rayonnement diffusé par
transparent excité par une onde lumineuse monochromatique
l’échantillon analysé est transmis par un filtre « Notch » directe-
dans le domaine du visible émettra essentiellement dans toutes les
ment vers un réseau de diffraction. Ce filtre ne transmet pas la dif-
directions de l’espace un rayonnement de même longueur d’onde
fusion Rayleigh et le rayonnement diffracté par le réseau est
que le rayonnement incident. Pour un matériau coloré, c’est-à-dire
détecté par une caméra bidimensionnelle photosensible CCD
intégrant dans sa formulation des molécules absorbant dans le
(« Charge Coupled Device »). Ce principe de fonctionnement auto-
visible, les deux phénomènes d’émission de la lumière (lumines-
rise non seulement l’utilisation de lasers de faible puissance, mais
cence et diffusion) vont coexister si le rayonnement excitateur est
également le couplage du spectromètre à des microscopes
absorbé.
optiques (figure 2). Les progrès récents réalisés sur les lasers à
Du fait de la faible intensité du rayonnement diffusé inélasti- diode, les filtres, les fibres optiques, les réseaux de diffraction
quement, la spectroscopie Raman est une technique qui pendant holographiques et les caméras CCD permettent aujourd’hui de
longtemps a été assez délicate à mettre en œuvre et est donc res- concevoir des spectromètres Raman performants, peu gourmands
tée confinée dans les laboratoires de recherche. De plus, beaucoup en énergie et surtout de petite taille. Un point sur lequel, il n’est
de matériaux ne sont pas transparents dans le visible. Par pas inutile d’insister est que le spectromètre Raman décrit ici peut
exemple, le vin blanc est jaune, c’est-à-dire qu’il absorbe la tout aussi bien être utilisé pour détecter la fluorescence induite par
lumière violette de longueur d’onde comprise dans la gamme 300 laser LIFS. Nous disposons ici, en quelque sorte, de deux outils en
à 350 nm. Le vin rouge absorbe la lumière dans une large gamme un seul.
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par François GUYON
Service commun des laboratoires, Pessac, France
Laëtitia GAILLARD
Service commun des laboratoires, Pessac, France
Nathalie SABATHIÉ
Service commun des laboratoires, Pessac, France
Bernard MÉDINA
Service commun des laboratoires, Pessac, France
François GUILLAUME
Université de Bordeaux, Talence, France
et Marie-Hélène SALAGOÏTY
Service commun des laboratoires, Pessac, France
Note de l’éditeur :
Cet article est extrait de la revue « Annales des falsifications, de l’expertise chimique et
toxicologique » no 981 éditée par la SECF (Société des experts chimistes de France).
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Référence Internet
RE225
RECHERCHE
Bioessais et biocapteurs :
outils d’analyse des toxines
dans l’agroalimentaire
2
par Audrey SASSOLAS
Chercheur
Laboratoire IMAGES, EA-4218, université de Perpignan (France)
et Jean-Louis MARTY
Enseignant-chercheur
Laboratoire IMAGES, EA-4218, université de Perpignan (France)
Abstract : Many toxins can contaminate food. The need for fast, reliable, specific
and inexpensive analytical methods is a major concern for the food industry in order to
ensure the safety of commercialized products. Among such target, okadaic acid, afla-
toxin M1 and ochratoxin A are known for their high toxicity and their omnipresence in
agrofood. Kits and biosensors have been developed for the detection of these toxins.
Points clés
Domaine : Bioanalyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Biocapteurs
Domaines d’application : Agroalimentaire
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : –
Centres de compétence : –
Industriels : R-Biopharm, Romer Labs, Neogen, Biosystems, ZEU-Immunotec
Autres acteurs dans le monde : laboratoires académiques de recherche
Contact : Jean-Louis Marty : jlmarty@univ-perp.fr
Parution : mai 2013
57
Référence Internet
RE225
RECHERCHE
Biorécepteur Transducteur
Traitement
Signal Signal
des données
physico- électrique
chimique
Substance
cible
Reconnaissance Électrochimique,
moléculaire optique...
58
Référence Internet
RE225
RECHERCHE
O H OH
H
O O Toxine
HO
OH O O O pNP
H pNPP
OH O O Puits (λ = 405 nm)
OH
Gel
Figure 2 – Structure de l’acide okadaïque (photopolymère
2
Protéine PP
phosphatase ou gel d’agarose)
immobilisée
Cette toxine est responsable non seulement de problèmes de
santé publique mais a également des répercussions PP : protéine phosphatase ; pNPP : para-nitrophénylphosphate,
économiques. En effet, la présence de cette toxine dans une pNP : para-nitrophénol
zone entraîne la fermeture des parcs à moules et à huîtres et
l’interdiction de commercialiser les coquillages. Les pertes éco-
nomiques sont alors considérables pour les professionnels de la Figure 3 – Principe du test colorimétrique [24]
conchyliculture et de l’ostréiculture.
Les kits et biocapteurs enzymatiques sont basés sur l’inhi- 2.2.2.1 Tests ELISA (Enzyme-Linked Immuno Sorbent
bition de la protéine phosphatase par l’acide okadaïque. Assay)
Ce principe a notamment permis la mise au point de tests Plusieurs tests ELISA pour la détection de l’acide okadaïque
colorimétriques pour la détection de cette toxine marine. ont été décrits dans la littérature [6] [25]. La faible masse
Dans ce cas, la protéine phosphatase catalyse la déphospho- molaire de la toxine (805 g/mol) ne permet pas d’envisager la
rylation d’un substrat non coloré, le p-nitrophényl phosphate, mise au point d’un test ELISA de type sandwich. Un test ELISA
en un composé de couleur jaune, le p-nitrophénol. L’apparition basé sur une compétition indirecte peut être utilisé. Dans ce
de ce dernier est dosée à une longueur d’onde de 405 nm cas, la toxine est immobilisée au fond d’un puits de micropla-
(figure 3). que. Un échantillon contenant la toxine est mélangé avec
La protéine phosphatase présente un inconvénient majeur : l’anticorps anti-acide okadaïque. Cette solution est ensuite
elle est peu stable en solution. Afin de résoudre ce problème, incubée dans le puits. L’acide okadaïque de l’échantillon entre
l’enzyme peut être immobilisée dans un gel ou un polymère alors en compétition avec la toxine immobilisée pour la liaison
formé sur un support. L’enzyme immobilisée peut être à l’anticorps. Plus la quantité de toxines dans l’échantillon est
conservée pendant plusieurs semaines sans perte d’activité. élevée, moins l’anticorps est capable de se fixer au fond du
Ce test a permis d’analyser des échantillons de moules puits. La détection nécessite un marquage. Classiquement, un
contaminées. anticorps secondaire marqué avec une enzyme est utilisé afin
de générer un signal qui sera mesuré. Le pNPP (para-nitro-
Un biocapteur électrochimique a également été déve-
phénylphosphate) est utilisé comme substrat de l’enzyme. La
loppé pour la détection de l’acide okadaïque. La protéine phos-
réaction enzymatique conduit à la production d’un composé
phatase a été incluse dans un photopolymère formé à la
jaune qui est dosé à une longueur d’onde de 405 nm.
surface d’une électrode sérigraphiée. L’activité de l’enzyme est
mesurée en utilisant le catéchol monophosphate comme subs-
trat de l’enzyme. La réaction enzymatique produit du catéchol 2.2.2.2 Immunocapteurs
qui est oxydé électrochimiquement lorsqu’un potentiel de Le laboratoire IMAGES a développé plusieurs immuno-
450 mV vs. Ag/AgCl est appliqué entre les électrodes capteurs électrochimiques. Différentes approches ont été
(figure 4). L’acide okadaïque inhibe l’enzyme, ce qui induit envisagées afin de développer des immunocapteurs simples à
59
2
60
Référence Internet
IN238
INNOVATION
Agriculture de précision
Étude des variabilités spatio-temporelles
des agrosystèmes 2
par Corentin LEROUX
Ingénieur-docteur en agriculture de précision,
Fondateur d’Aspexit, Montpellier, France
Points clés
Domaine : Mesures et analyses
Degré de diffusion de la technologie : Émergence
Technologies impliquées : Technologies digitales, modélisation, outil d’aide à la
décision
Domaines d’application : Gestion agricole
Principaux acteurs français :
– Centres de compétence : INRAE, Bordeaux Sciences Agro, Montpellier SupAgro, La
Salle Beauvais, AgroSup Dijon
Contact : http://www.aspexit.com
61
Référence Internet
IN238
INNOVATION
2 scientifique alors que d’autres préféreront la voir comme une stra- (t/ha)
tégie de gestion agricole en soi. C’est d’ailleurs pourquoi il est par-
fois si difficile pour certains acteurs (des scientifiques, des agricul- 10
teurs…) de se positionner clairement dans ce domaine. Certaines
questions reviennent souvent : « est ce que je peux me considé-
rer comme un agronome de précision ? », « est que ça a du sens
de dire qu’un agriculteur fait de l’agriculture de précision ? », « je
développe des capteurs optiques pour l’agriculture, je fais des sta-
tistiques appliquées sur des données agricoles, ou je travaille
dans le domaine de l’automatique appliqué à l’agriculture, pour- 1
N
quoi dit-on que je fais de l’agriculture de précision ? ». Pour tenter
de clarifier ces concepts et positionnements, il a été décidé ici
d’orienter la présentation de l’agriculture de précision sous l’angle O E
de la discipline scientifique. Et de montrer que c’est le transfert
des connaissances générées en agriculture de précision vers le S 100 m
terrain qui demande la participation de nombreuses disciplines
(mécanique, électronique, statistiques, optique, automatique, chi- Figure 1 – Variabilité spatiale du rendement dans une parcelle
miométrie [analyse de spectres]…) et qui soulève des questions de blé
opérationnelles du type : comment utiliser ces connaissances
pour améliorer la gestion des systèmes de production ? de ces facteurs agroenvironnementaux à l’échelle de l’heure,
de la journée ou encore du mois par exemple.
62
Référence Internet
IN238
INNOVATION
Tableau 1 – Facteurs affectant la variabilité des rendements (source : Agrinova – adapté de [6])
Sens des rangs À travers les rangs Lignes irrégulières Zones irrégulières
– Date de plantation
– Variété
– Type de sol
– Position des drains
2
– Infestation de mauvaises
– Compaction – Drainage ou irrigation – Topographie
herbes ou de maladies
– Distribution non uniforme des – Historique de l’utilisation du – Dérive d’herbicides
– Fertilisé du sol et matière
résidus de culture sol : – Ombre ou effet de bordure
organique
– Application d’engrais ou de • passage de machinerie et ajout – Infestation d’insectes
– Effet des activités associées
pesticides : d’intrants ravageurs par les bordures
au précédent cultural
• changement (dose ou produit, • ajout de fumier – Épandage de fumier non
– Chevauchement d’épandage
équipement) • limites de champs uniforme
ou dérive d’herbicide
• mauvaise application • compaction – Mauvais égouttement
– Occurrence historique
• traitement localisé
– Animaux sauvages
• bris d’équipement
– Zones humides
Parcelle 1
Pression maladie
plus importante pH du sol Rendement
Travaillé Blé Blé
historiquement Fort 2004 2007
Rendement moins intensivement
(t/ha)
10
Faible
Rangée d’arbres et S
compactage en S 100 m
Les motifs spatiaux sont très proches sur les années 2004, 2007 et
bout de rang P/K du sol faibles
2015, mais complètement renversés sur l'année 2012 du fait d'une
pluviométrie beaucoup plus importante pendant la saison qui
a saturé certains sols en eau.
Figure 2 – Exemple de sources de variabilité de rendement
sur une parcelle de blé
Figure 3 – Patrons spatiaux de rendement sur quatre ans
— les maladies et ravageurs, à l’origine d’effets structurés sur une parcelle de blé (source : [7])
dans l’espace via des mécanismes de propagation dans les par-
celles ; propagation influencée par un certain nombre de fac- Considérons par exemple une parcelle de blé dont le rende-
teurs comme la densité de la canopée, l’humidité du sol, l’expo- ment a été mesuré très finement dans l’espace avec un cap-
sition aux vents dominants, la vigueur des plantes… ; teur de rendement embarqué sur une moissonneuse-
— les opérations culturales, à l’origine d’effets plus ou moins batteuse, et ce, plusieurs années d’affilée. Faisons l’hypo-
structurés dans les parcelles (variété et date de semis, applica- thèse que la variabilité intraparcellaire du rendement est
tions non homogènes, passages répétés des machines qui pro- forte (de fortes variations de rendement sont observées sur
voquent des tassements localisés...). la parcelle) et qu’en même temps ces phénomènes spatiaux
sont stables dans le temps (c’est-à-dire que sur une zone où
Mais alors, pourquoi chercher à décrire ces variabilités spatio-
le rendement est fort sur une année n, il y sera également fort
temporelles et à comprendre leurs causes ? Dans un premier
sur les années n + 1, n + 2…). Dans ce cas-là, l’agriculteur
temps, en tant que discipline scientifique, l’agriculture de précision
pourra raisonner son itinéraire technique de manière différen-
est intéressante pour générer des connaissances sur les phénomè-
ciée sur ses différentes zones de production intraparcellaires
nes spatio-temporels à l’œuvre dans les systèmes de production.
en sachant que les décisions qu’il aura prises seront cohéren-
Dans un deuxième temps, ces connaissances peuvent permettre
tes dans le temps (figure 3).
d’améliorer la gestion des agrosystèmes (voir section 2).
63
2
64
Innovations en analyses et mesures
(Réf. Internet 42112)
Sur www.techniques-ingenieur.fr
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65
3
66
Référence Internet
P148
3
et Jean-Pierre YIM
Directeur adjoint, Service commun des laboratoires (SCL) de Lille de la direction générale
de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)
et de la direction générale des douanes et droits indirects (SGDDI) (Villeneuve d’Ascq)
Responsable de la région Nord/Belgique de la Société des experts chimistes de France
1. Contexte...................................................................................................... P 148 - 2
2. Matériel et méthode ................................................................................ — 2
2.1 Description de l’effet Raman ....................................................................... — 2
2.2 Matériel ......................................................................................................... — 2
2.3 Échantillons analysés .................................................................................. — 2
3. Résultats et discussion ........................................................................... — 2
3.1 Analyse des cristaux beiges........................................................................ — 2
3.2 Analyse Raman du comprimé C20 jaune ................................................... — 4
3.3 Analyse Raman du comprimé rose logo « Yin et Yang 19 » .................... — 6
4. Conclusion.................................................................................................. — 9
67
Référence Internet
P148
1. Contexte
Depuis maintenant quelques années, la spectroscopie Raman est
devenue une méthode incontournable permettant l’analyse rapide
dans les sciences médico-légales. Plusieurs raisons font de cette tech-
nique un outil analytique puissant et efficace : il s’agit d’une techni-
que sans contact et non destructive, ne nécessitant qu’une quantité
minime d’échantillon (résolution spatiale inférieure au micromètre) et
pas ou peu de préparation de ce dernier. Les informations obtenues
par spectroscopie Raman incluent l’identification chimique ainsi que
la structure moléculaire. Ces caractéristiques sont très utiles pour
l’étude de substances illicites car la technique permet la détection de
différences infimes pouvant provenir de la composition, de l’origine
Figure 1 – Spectromètre Raman LabRAM Aramis commercialisé
de l’échantillon ou de la méthode de synthèse. Contrairement à la par la société HORIBA Scientific
spectroscopie infrarouge, la spectroscopie Raman est compatible
avec les solutions aqueuses ; ainsi l’analyse d’échantillons liquides
3
ou humides est possible. Les analyses à travers des flacons en verre Tableau 1 – Échantillons analysés
ou des sacs plastiques sont envisageables grâce au couplage avec un par spectroscopie Raman
microscope confocal, évitant ainsi de contaminer les échantillons en
les manipulant. L’accès à une base de données spectrales permet une Échantillon Description Photo
identification rapide de l’échantillon analysé.
Comprimé rose sécable,
Afin d’évaluer le potentiel de cette technique, l’étude suivante
logo « Yin et Yang 19 » contenant
présente les résultats obtenus par spectroscopie Raman sur 1
du chlorhydrate de MDMA (1)
quelques échantillons de la section de stupéfiants et substances
sur un support de cellulose
prohibées du SCL de Lille.
68
Référence Internet
RE177
RECHERCHE
Détection neutronique de
matières illicites avec la technique
de la particule associée
3
par Bertrand PEROT
Docteur-ingénieur en physique
Expert international CEA en mesures nucléaires
CEA, DEN, Cadarache, laboratoire de mesures nucléaires, France
et Guillaume SANNIE
Ingénieur CEA, coordinateur de projets européens
CEA, DRT, LIST, Saclay, laboratoire capteurs et architectures électroniques, France
Points clés
Domaine : Mesures nucléaires
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Interrogation neutronique, spectrométrie gamma,
coïncidences neutroniques
Domaines d’application : principalement la détection des matières illicites
(explosifs, drogues, toxiques chimiques, matières nucléaires), potentiellement
l’industrie nucléaire (caractérisation des déchets radioactifs, démantèlement,
contrôle de procédé)
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : Risques
Centres de compétence : CEA DEN Cadarache, laboratoire de mesures
nucléaires ; CEALIST Saclay, laboratoire capteurs et architectures électroniques ;
CEA DAM DIF, laboratoire mesures et traitements nucléaires ; CEA DAM DSNP,
direction sécurité et non-prolifération ;
Parution : février 2015
Industriels : SODERN
Contact : bertrand.perot@cea.fr
69
Référence Internet
RE177
RECHERCHE
70
Référence Internet
RE177
RECHERCHE
Générateur de neutrons
n t2 Objet
t1
inspecté
Détecteur α D
γ
3
tα
Cible tritiée
tγ
Cône d’émission
des neutrons signés
Détecteur γ
Coups
Coups
Coups
Coups
C(37,04 ± 0,22) %
C N O Ni Cr
Coups
2 000 Si
Coups
Coups
Coups
Coups
Coups
Fe Al Pb Zn
1 000
0 0 2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV)
0 2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV)
0 2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV)
0 2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV)
0 2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV )
2 3 4 5 6 7
Énergie (MeV)
Simulant Explosifs
de TNT
Mesure Drogues
Matières bénignes
O C
Figure 1 – Principe de la méthode de la particule associée pour la caractérisation élémentaire avec des détecteurs de spectrométrie
gamma (scintillateurs inorganiques)
71
Référence Internet
RE177
RECHERCHE
Scintillateurs plastiques
4 n ou γ
d
Fission
α n n ou γ
2 t
3 1
3
n ou γ
Générateur de neutrons
à particule associée
γ prompts 10
10
de fission
102
1 1
0 50 100 150 200 250 0 50 100 150 200 250 0 50 100 150 200 250
Temps de vol (ns) Temps de vol (ns) Temps de vol (ns)
b spectres de temps de vol à différents ordres de coïncidence (i.e. nombre de particules en coïncidence
avec la détection !) montrant la discrimination entre matériaux nucléaires et bénins (voir § 3.4)
Figure 2 – Principe de la détection de matières nucléaires avec la technique de la particule associée basée sur la mesure des
coïncidences avec des détecteurs neutron-gamma (scintillateurs organiques plastiques ou liquides)
[2]), conditionne en effet la taille minimale des volumes élé- sation élémentaire par spectrométrie des rayonnements
mentaires (ou voxels ) qu’il est possible d’inspecter. L’autre gamma induits, ou dans [4] [5] pour la détection des matières
paramètre important déterminant la taille des voxels est la nucléaires par analyse des coïncidences.
résolution avec laquelle sont localisées les particules alpha sur
Comme mentionné dans le paragraphe 1, la technique de la
le détecteur YAP:Ce, sa distance par rapport à la cible impré-
particule associée est une méthode d’activation neutronique
gnée de tritium où sont produits les neutrons dans le généra-
très spécifique qui offre des capacités de localisation spatiale
teur, et l’éloignement de l’objet inspecté par rapport au
uniques la rendant extrêmement complémentaire de l’imagerie
générateur puisque le faisceau s’évase (figure 1). In fine, des
photonique. Plusieurs systèmes de mesure portables sont
volumes élémentaires typiques de l’ordre du litre sont mesu-
arrivés au stade commercial, comme le dispositif ULIS de
rables à courte distance (moins de 1 m).
SODERN en France (http://www.sodern.com/sites/docs_wsw/
En complément des paragraphes suivants consacrés aux RUB_80/ULIS.pdf) pour la détection de menaces chimiques
applications de la technique de la particule associée, on trou- notamment dans des bagages abandonnés, mais pour
vera de nombreux détails techniques et méthodologiques dans l’inspection des conteneurs maritimes ou aériens, un seul sys-
les références [IN 82] et [3] pour ce qui concerne la caractéri- tème équivalent au système EURITRACK (§ 3.1) peut être
72
Référence Internet
RE177
RECHERCHE
3
ments (accélérateur Van de Graaf de 4 MV, 200 détecteurs
gamma) et de la maintenance (accélérateur, bras articulé, fui-
tes au niveau de la cible gazeuse de deutérium sous pres-
sion). L’approche proposée avec le système EURITRACK,
basée sur un tube scellé transportable de quelques kg déli-
vrant une émission neutronique moins intense d’au moins 3
ordres de grandeur, permettant une inspection focalisée sur
un volume d’intérêt repéré par imagerie au lieu de scanner
l’intégralité du conteneur, est beaucoup moins lourde et coû-
teuse à mettre en œuvre. Le fait de pouvoir repositionner faci-
lement un système de mesure de type EURITRACK, conçu de Figure 3 – Système d’inspection neutronique EURITRACK
façon encore plus compacte, au sein d’un même site (port installé sur le port de Rijeka, en Croatie
maritime par exemple) ou bien vers un autre poste de
contrôle (aux frontières par exemple), constitue un atout
important lié à l’absence d’installation lourde autour du sys- développé le détecteur alpha YAP:Ce segmenté, implanté dans
tème de mesure, une simple zone d’exclusion permettant le générateur de neutrons, et le logiciel de traitement et de
d’assurer la protection des utilisateurs. Nous mentionnerons mise en forme des données avec CAEN (PME italienne), res-
en conclusion quelques aspects pratiques et réglementaires ponsable de l’électronique d’acquisition. L’IRB (Institut Ruder
pour la mise en œuvre de cette technologie. Boscovic, Croatie) a organisé les essais en laboratoire à
Zagreb et de démonstration sur le port de Rijeka. La société
SODERN (France) a réalisé le générateur de neutrons à parti-
3. Applications cule associée. L’institut IPJ (Andrzej Soltan Institute for
Nuclear Studies, Pologne) a participé à la sélection et au choix
Nous abordons ici les applications potentielles de la TPA étu- des détecteurs gamma avec le CEA. Enfin, JRC (Joint Research
diées par le CEA et ses partenaires au travers de projets de Center d’Ispra, Italie) a contribué au logiciel d’aide à la
R&D nationaux et européens. décision avec le CEA.
73
3
74
Référence Internet
IN148
INNOVATION
Résumé : Cette innovation est un nouveau concept de capteur de force qui favorise
la création de dispositifs de pesage particulièrement adaptés au pesage dynamique,
mais capable également de répondre à des applications de pesage statique d’objets de
grand volume. Un capteur est fabriqué avec une poutre en acier. Selon l’application, la
poutre sert directement de récepteur de charges ou constitue un capteur de grande
dimension inséré dans un système de pesage.
Abstract : This innovation is a new force sensor concept. This new force sensor
favors the creation of devices for weighing, particularly adapted to dynamic weighing
and also suited to static weighing for large volume objects. A sensor is made with a
steel beam. Depending on the requested application, the beam receives directly the
load or is inserted into a weighing device as a very long force sensor.
Points clés
Domaine : Techniques de mesures
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Extensomètre à fil résistant, collage
Domaines d’application : Pesage ferroviaire et routier
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centre de compétence : CNRS, Centre d’Études Nucléaires de Bordeaux – Gradignan,
UMR 5797, Université de Bordeaux 1
Industriels :
Parution : août 2012
75
Référence Internet
IN148
INNOVATION
1. Contexte σ
Dans un contexte industriel où les gains de productivité sont
sans cesse recherchés, le pesage en dynamique, c’est-à-dire
le pesage d’une charge en mouvement, présente toujours un
grand intérêt pour le gain de temps qu’il représente. Particu-
lièrement vrai pour le pesage sur les chaînes de production,
cela concerne le pesage d’objets ponctuels comme le pesage
de colis ou le tri par le poids, et également le pesage ou le
Limite d’élasticité
contrôle volumétrique de matière en continu sur des transpor-
teurs à bande ou à rouleaux.
Le pesage des véhicules en marche est aussi une problé-
matique d’actualité, notamment celui des trains et des poids
76
Référence Internet
IN148
INNOVATION
B
εx
R1 R2
O X
A C Vs
Jauge de contrainte
Jauges de contrainte simple
rosettes 90o
R4 R3
∆ℓ
εx = (3) Figure 4 – Schéma d’une poutre sur deux appuis supportant
ℓ une charge
∆R ∆ℓ
=k (4) 2.1.2.4 Progrès récents de la technologie des capteurs
R ℓ à jauges extensométriques
Les progrès des dernières décennies ont porté sur la qualité
2.1.2.3.2 Principe du pont de Wheatstone complet
des jauges de contraintes, des collages de jauges et l’intégra-
Le montage en pont de Wheatstone comporte 4 résistances tion de l’électronique dans le capteur, qui devient capteur
égales R1 , R2 , R3 , R4 , branchées comme indiqué sur la numérique.
figure 3. Entre les points B et D, la différence de potentiel est
nulle au repos. Une tension différentielle n’apparaît que
lorsque la condition R1·R3 ≠ R2·R4 est satisfaite. 2.2 Technologie innovante de capteur
Les variations de R1 et R3 agissent dans le même sens et R2
et R4 agissent en sens contraire. Ainsi, de façon générale, 2 Cette nouvelle technologie de capteur utilise une poutre ou
résistances adjacentes agissent en sens opposé et 2 résistan- une section de poutre métallique qui repose sur deux appuis
ces opposées agissent dans le même sens. consécutifs et qui est le corps d’épreuve du capteur. Ce prin-
cipe peut s’appliquer à des capteurs de petites tailles mais son
Dans la majorité des applications de capteurs, est utilisé un avantage est de pouvoir réaliser des capteurs de grandes
pont avec 4 jauges disposées de façon à ajouter leurs effets et dimensions, dont la surface peut servir directement de récep-
à retrancher les effets parasites à éliminer. teur de charge. Cette technologie exploite les propriétés de la
La variation des résistances fait apparaître une tension de résistance des matériaux (RDM) et plus particulièrement les
sortie Vs , proportionnelle aux variations relatives de résis- résultats de la théorie des poutres [1] [2].
∆R
tances de chaque jauge et qui vaut : 2.2.1 Principe du nouveau capteur de pesage
R
2.2.1.1 Cas d’une poutre sur deux appuis
Ve ∆ R1 ∆ R2 ∆ R3 ∆ R4
Vs = − + − (5) Soit une poutre horizontale isostatique, possédant un plan de
4 R1 R2 R3 R4 symétrie dans le sens de la longueur et reposant sur deux
appuis A et B (figure 4). Sur cette poutre, agit une charge
avec Ve , différence de potentiel AC.
concentrée verticale Q à la distance a de l’appui A. On
Les signes + et – de l’équation traduisent la propriété du considère une section droite S de la poutre située à une dis-
montage en pont décrite ci-dessus. tance x de A.
77
3
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Référence Internet
RE182
RECHERCHE
3
Ingénieur chargé de la veille scientifique
SCIJ/groupe Odorologie
Sous-direction de la police technique et scientifique
Direction centrale de la police judiciaire, Écully, France
et Barbara FERRY
Chargée de recherche CNRS
Centre de recherches en neurosciences Lyon
UMR 5292 CNRS – INSERM U 1028 – Université Claude Bernard Lyon 1, France
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Référence Internet
RE182
RECHERCHE
3
Points clés
Domaine : Judiciaire.
Degré de diffusion de la technologie : Émergence.
Croissance : Maturité.
Technologies impliquées : Comportement, études et analyses statistiques.
Domaines d’application : Mise en évidence d’un nouvel élément de preuve
dans les enquêtes judiciaires.
Principaux acteurs français :
Expertise pratique : groupe odorologie, sous-direction de la police technique et
scientifique, Direction centrale de la police judiciaire.
Expertise théorique et scientifique : Équipe CMO, Centre de recherche en neuros-
ciences de Lyon, UMR 5292 Inserm U 1028 – Université Claude Bernard Lyon 1.
Contacts : Barbara Ferry (équipe CMO, CNRS)
barbara.ferry@cnrs.fr
http://www.researchgate.net/profile/Barbara_Ferry/info
80
Référence Internet
RE182
RECHERCHE
3
retrouver [21] [26] [56]. Cette capacité a été exploitée très tôt
par les services de sécurité pour retrouver des individus perdus
ou recherchés grâce au pistage. Les premières études publiées
Organe voméronasal
sur ce sujet font état de la rapidité et de l’efficacité des chiens à
mémoriser une odeur corporelle humaine pour suivre ensuite sa
trace dans des milieux ouverts afin de retrouver la personne à
laquelle elle appartient [44]. Les performances de pistage des
chiens montrent que le chien est capable de comparer l’odeur
d’un individu recherché à des odeurs de nature différente ainsi
qu’aux odeurs laissées par d’autres personnes s’étant trouvées
sur le même lieu [21] [53]. Ces observations suggèrent que le
chien est capable de mémoriser une odeur complexe telle que
Le bulbe olfactif, où arrivent les informations en provenance directe l’odeur humaine et de la comparer aux odeurs d’autres per-
de l’épithélium, est trois fois plus grand que celui de l’homme, sonnes pour l’identifier sur une piste et la suivre.
même si le cerveau du chien est dix fois plus petit. L’organe vomé-
ronasal est spécialisé dans la détection des phéromones. Or, les odeurs humaines sont complexes. Des données en
chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie
Figure 1 – Représentation schématique des structures de masse ont montré que l’odeur corporelle humaine est consti-
impliquées dans le traitement des odeurs chez le chien tuée d’un mélange complexe de plusieurs éléments volatils et
dont la composition diffère d’un individu à l’autre [46]. L’odeur
corporelle humaine contient une composante acquise généti-
Les neurones sensoriels sont situés dans la membrane de quement qui va influencer la composition du mélange de molé-
l’épithélium et les cils qui les prolongent baignent dans le mucus cules chimiques appartenant aux familles des hydrocarbures,
épithélial. Les récepteurs olfactifs sont des protéines membra- des alcools, des acides carboxyliques, des cétones et des
naires présentes à la surface des cils qui captent et fixent les aldéhydes [3] [60] [61]. Elles sont secrétées par les cellules
molécules en fonction d’un certain nombre de propriétés, épithéliales de l’épiderme ainsi que par les glandes apocrine,
comme leur poids moléculaire, leur densité électronique, leur eccrine et sébacée. Cette composante génétique est la signa-
polarisabilité, leur structure tridimensionnelle... Chaque neu- ture de l’activité de notre système immunitaire, elle-même
rone sensoriel (ou neurone olfactif ; NO) exprime un seul type déterminée par un ensemble de gènes codant pour les protéines
de récepteur. À leur autre extrémité (figure 1), les axones des du système immunitaire appelés « complexe majeur
NO sont regroupés en faisceaux de 10 à 100 axones. Ces fais- d’histocompatibilité » [2] [17] [18] [39] [59]. Ce mélange com-
ceaux traversent l’os ethmoïde (lame ethmoïdale), situé à la plexe et unique de molécules odorantes constitue ce que l’on
base du crâne, et convergent dans le bulbe olfactif sur d’autres appelle l’« odeur primaire ». La constitution de l’odeur pri-
neurones relais appelés « cellules mitrales » pour former les maire est propre à chaque individu, elle est constante dans le
glomérules. Le taux de convergence des NO sur ces cellules temps et varie d’un individu à l’autre [14] [37] [43] [58]. Sur
mitrales est très élevé et chaque glomérule reçoit les terminai- cette composante primaire se greffe une composante secon-
sons axonales de plusieurs milliers de NO (voir [15], figure 2). daire contenant d’autres éléments présents dans notre sueur.
Les axones des cellules mitrales forment les filets nerveux qui Cette odeur dite « secondaire » est générée par un mélange de
vont assurer les connexions entre le bulbe olfactif et le cortex molécules issues du fractionnement, par les micro-organismes
olfactif (entorhinal, périrhinal) ainsi que le thalamus et d’autres vivant sur notre peau, des acides gras à longue chaîne produits
régions du système limbique impliquées dans les processus de par les glandes sudoripares. Cette composante secondaire peut
mémoire et d’apprentissage. elle-même être influencée par le régime alimentaire, l’état phy-
siologique (comme le stress, l’anxiété, la dépression...) ou
Mais si le système olfactif peut détecter et reconnaître des pathologique dans lequel se trouve un individu [23] [24] [55].
molécules, grâce à un grand nombre de récepteurs, la perception Enfin, l’odeur tertiaire correspond aux molécules volatiles pro-
de toute odeur ne se résume pas à l’activation d’un récepteur venant des cosmétiques (savon, parfum...) ou d’autres sources
particulier, à la transduction, puis à la transmission du message (comme le tabac).
par une voie spécifique jusqu’aux aires cérébrales. En effet,
même si le nombre de récepteurs différents est élevé (environ Si l’observation du comportement des chiens de pistage
1 200), il reste très inférieur au nombre des molécules odorantes montre qu’ils sont capables de retrouver une odeur humaine
différentes discriminables et des études électrophysiologiques par l’identification de l’ensemble de ces trois composantes [24]
ont montré qu’un récepteur olfactif de la muqueuse peut [26] [51], d’autres études suggèrent que le chien est aussi
répondre à plusieurs molécules odorantes présentant des struc- capable de procéder à un codage élémentaire de l’odeur
tures chimiques différentes (figure 3). Le codage de l’odeur humaine afin d’identifier une odeur humaine particulière parmi
résulte donc d’une activation combinatoire d’un ensemble d’autres par comparaison sélective de leur composante
de récepteurs. Chaque odeur est ainsi représentée, à l’entrée primaire [38] [45] [50]. Le chien a même été plus rapide que la
du bulbe olfactif, par une carte d’activité fonctionnelle qui lui est technologie puisqu’il a été capable d’identifier deux odeurs de
81
3
82
Référence Internet
P2875
Spectroscopie microonde
3
1.
1.1 Description classique..................................................................................... — 3
1.2 Description quantique dans l’approximation du rotateur rigide ............... — 4
2. Spectromètre à impulsions microondes par transformée
de Fourier FTMW......................................................................................... — 5
2.1 Principe général ............................................................................................. — 5
2.2 Spectromètre SIMO ....................................................................................... — 6
2.2.1 Cavité Pérot-Fabry................................................................................. — 6
2.2.2 Jet supersonique................................................................................... — 8
2.3 Avantages de la spectroscopie à impulsions microondes
par transformée de Fourier ........................................................................... — 9
3. Spectromètre à impulsions microondes par dérive
de fréquences CP-FTMW .......................................................................... — 10
3.1 Nécessité d’une évolution ............................................................................. — 10
3.2 Principe général ............................................................................................. — 10
4. Exemples d’applications de la spectroscopie microonde............... — 11
4.1 Spectroscopie de rotation pour l’étude de molécules d’intérêt
atmosphérique ............................................................................................... — 12
5. Conclusion.................................................................................................... — 12
6. Glossaire ....................................................................................................... — 13
Pour en savoir plus ............................................................................................. Doc. P 2 875
utilisé comme détecteur. C’est ainsi qu’en 1655, Newton entreprend ses expé-
riences sur la dispersion de la lumière blanche à l’aide d’un prisme en verre.
Cependant, il a fallu attendre environ 1860 pour que Bunsen et Kirchhoff
construisent le spectroscope à prisme utilisable en tant qu’instrument.
En 1885 Balmer établit de façon empirique une relation mathématique qui
permet de calculer les longueurs d’ondes des raies visibles du spectre de
l’atome d’hydrogène. C’est ainsi que démarre la relation étroite entre l’expé-
rience et la théorie en spectroscopie, l’expérience fournissant les résultats et
une théorie appropriée essayant de les expliquer et de prédire des résultats
dans des expériences voisines.
Cependant, la théorie rencontre de plus en plus de difficultés tant qu’elle est
basée sur la mécanique classique de Newton, et cela jusqu’au développement de
la mécanique quantique par Schrödinger en 1926. À cette époque, les données
provenant des expériences de spectroscopie, sauf celles effectuées sur des atomes
83
Référence Internet
P2875
très simples, dépassent les prédictions de la théorie, limitée par les approxima-
tions faites pour que les calculs puissent aboutir.
La première expérience où les fréquences microondes ont été utilisées pour
étudier une molécule est réalisée par Cleeton et Williams en 1934. Ils avaient
construit des oscillateurs magnétron sur mesure pour effectuer une étude de
l’inversion du mode vibrationnel de la molécule NH3.
La spectroscopie microonde est utilisée dans le domaine de la physico-chimie
dans le but de déterminer la structure des molécules en phase de gaz avec une
grande précision. La difficulté de l’utilisation des spectres dans la détermination de
la structure géométrique d’une molécule augmente avec sa taille et sa complexité.
Les fréquences de transition de rotation pouvaient déjà être mesurées avec haute
précision à cette époque, mais les chercheurs n’étaient pas en mesure de fournir
des informations sur la structure des molécules avec une précision correspon-
dante à celle issue de l’expérience. Cette situation s’est améliorée grâce aux
progrès des méthodes numériques. À partir des années 1960, avec l’arrivée d’ordi-
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Référence Internet
P2875
3
TWA Traveling Wave Tube Amplifier
Nombre quantique associé à la projection
k du moment cinétique selon l’axe
de symétrie de la molécule étudiée en spectroscopie d’émission et absorption et ne sera pas
traitée ici.
m kg Masse
Nombres entiers qui caractérisent le mode L’émission ou l’absorption d’un rayonnement électromagné-
m,n,q
de la cavité tique par la matière ne peut se produire que pour des fréquences
qui lui sont propres. L’ensemble des transitions observées entre
N Nombre de Fresnel
les niveaux d’énergie constitue le spectre du système étudié.
P Quantité de mouvement angulaire
Il représente en quelque sorte une empreinte digitale caractéris-
Q Coefficient de qualité
tique de l’espèce sous examen.
R m Rayon de courbure du front d’onde De façon générale, les photons des régions visible et ultraviolette
du spectre électromagnétique induisent des transitions entre les
Constante de temps de retour niveaux d’énergie électroniques d’une molécule, ceux de la lumière
T2
à l’équilibre infrarouge excitent les transitions entre les niveaux vibratoires alors
que les transitions entre les niveaux de rotation sont générées par les
w m Rayon du champ électromagnétique fréquences de la gamme 1 GHz-1 THz. Les fréquences microondes se
situent entre 1 et 30 GHz.
Repère dans la cavité (z direction
x,y,z La technique de spectroscopie d’émission consiste à stimuler un
de propagation du faisceau d’ondes)
système moléculaire dans un état excité et puis à détecter la radia-
Moment dipolaire de la molécule tion émise par le système moléculaire pendant la relaxation vers
μ D l’état fondamental [15]. À l’inverse, lorsque l’on mesure la radia-
(1D = 3,33564 × 10–30 C.m)
tion atténuée passant à travers un système moléculaire, l’on parle
v s–1 Fréquence centrale du mode de spectroscopie d’absorption [P 2 656].
L’intérêt de l’enregistrement et de la modélisation du spectre de
κ Paramètre de Ray rotation d’un système moléculaire est de conduire à l’identification
non ambiguë de sa structure. La connaissance de la géométrie
λ m Longueur d’onde
donne alors accès aux propriétés physico-chimiques du système
ω s–1 Vitesse angulaire étudié.
1. Spectroscopie de rotation
1.1 Description classique
La spectroscopie exploite l’émission, l’absorption et la diffusion Dans cet article, les concepts théoriques essentiels à la compré-
du rayonnement électromagnétique pour l’étude d’atomes ou de hension de la technique de spectroscopie microonde [15] [16] sont
molécules. L’émission a lieu lorsqu’un atome ou une molécule présentés.
perd de l’énergie en rayonnant de la lumière. L’absorption est le Les transitions entre les niveaux d’énergie de rotation peuvent être
processus inverse. observées de façon isolée par spectroscopie rotationnelle dite pure
ou peuvent accompagner des changements des niveaux d’énergie
Dans le cas de la diffusion, le rayonnement électromagnétique vibrationnels et/ou électroniques. La spectroscopie microonde est
est dévié de sa trajectoire au moment où il interagit avec la matière. généralement concernée par les spectres de rotation pure et ceux-ci
Il s’agit d’une interaction de nature différente de celle observée et sont les seuls traités dans cet article.
85
3
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Référence Internet
P157
et Margot BEGUE
Assistante de recherche
LABÉO, Saint Contest, France
87
Référence Internet
P157
3
l’objectif de cet article est donc de déterminer rapidement, après la collecte des
échantillons d’abeilles mortes, la présence de produits chimiques dans un spec-
tre suffisamment large, d’aider les autorités à prendre les mesures sanitaires
adaptées et de définir les suites à donner, en enquêtant sur l’origine de la conta-
mination. Pour cela, plusieurs analyses sont mises en œuvre au laboratoire.
Nota : cet article est issu de la revue « Annales des falsifications, de l’expertise chimique et toxicologique » éditée par la
SECF (Société des experts chimistes de France).
88
Innovations en analyses et mesures
(Réf. Internet 42112)
Spectromètres RMN de paillasse pour l’analyse en ligne de réactions en flux continu J8015 91
RMN large bande des noyaux quadripolaires en phase solide : exemple du IN166 99
strontium-87
AFM-IR : caractérisation chimique à l’échelle nanométrique IN224 105
Détection d’hydrates par activation neutronique dans des pipelines sous-marins IN249 113
Avancées technologiques des sources et capteurs térahertz. Vers le transfert industriel P2145 117
Le rayonnement térahertz pour l'analyse des matériaux du patrimoine culturel RE213 127
Analyse de tableaux de Léonard de Vinci par spectrométrie de fluorescence des rayons RE200 141
X
Méthodes de spectroscopie d'absorption X pour l'analyse des matériaux du RE214 145
patrimoine
Analyse non destructive des objets d'art par méthodes spectroscopiques portables RE217 151
Analyse de la perte de couleur des peintures au smalt par spectroscopie d'absorption RE211 157
X
Sur www.techniques-ingenieur.fr
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• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
89
Restauration des peintures au plomb par irradiation laser RE224 161
Imagerie par spectrométrie de masse TOF-SIMS pour l’analyse de tableaux anciens RE274 165
90
Référence Internet
J8015
et François-Xavier FELPIN
Professeur à l’Université de Nantes, Membre junior de l’Institut Universitaire de France
Université de Nantes, Laboratoire CEISAM, UMR CNRS 6230, Nantes, France
4
1. Chimie en flux vs Chimie en batch.............................................. J 8 015 – 2
1.1 Définition et sémantique .................................................................... — 2
1.2 Principales différences entre flux et batch ........................................ — 2
2. Spectromètres RMN de paillasse ................................................. — 3
3. Suivi réactionnel par RMN BC 1H................................................. — 6
19
4. Suivi réactionnel par RMN BC F ............................................... — 7
5. Suivi réactionnel par RMN BC 2D................................................ — 8
6. Utilisation de RMN BC dans des réacteurs en flux
autonomes ........................................................................................ — 8
7. Conclusion........................................................................................ — 10
8. Glossaire ........................................................................................... — 13
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. J 8 015
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Référence Internet
J8015
SPECTROMÈTRES RMN DE PAILLASSE POUR L’ANALYSE EN LIGNE DE RÉACTIONS EN FLUX CONTINU ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
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Référence Internet
J8015
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SPECTROMÈTRES RMN DE PAILLASSE POUR L’ANALYSE EN LIGNE DE RÉACTIONS EN FLUX CONTINU
est définie comme le produit de la concentration de la solution en difficultés, il est possible d’immobiliser un réactif solide au sein
produit par le débit du fluide circulant. Il est possible d’exprimer la d’une cartouche [8] ou de plonger le réacteur dans un bain à ultra-
productivité en la rapportant à une unité de volume en prenant en sons [9] pour éviter la formation de particules solides. Dans tous
compte le volume du réacteur. Cette expression de la productivité les cas, une étude préalable doit être menée pour chaque transfor-
est communément appelée space-time-yield par les Anglo-Saxons. mation afin de s’affranchir ou de limiter les phénomènes de bou-
chage par des particules insolubles.
Agitation – Mélange – Transfert de matière. L’agitation d’un réac-
teur fermé est une problématique complexe. En laboratoire de recher-
che, l’agitation est souvent réalisée à l’aide d’un barreau magnétique
recouvert de téflon, de taille et forme adaptées au réacteur utilisé.
L’agitation est souvent une des sources majeures (souvent sous-esti- 2. Spectromètres RMN
mée) de non-reproductibilité d’une transformation. Le régime turbu-
lent de ce type d’agitation conduit à des gradients de concentration de paillasse
(et de chaleur) au sein de l’enceinte réactionnelle. Le transfert de
matière en flux peut-être bien plus efficace grâce à l’emploi de mélan-
geurs ou de réacteurs au design varié [IN 94].
La nature non invasive de la détection RMN est un atout considé-
Transfert de chaleur. Dans le cas d’une convection électrique tra- rable pour le suivi de réactions en ligne en comparaison de la chro-
ditionnelle, le transfert de chaleur au milieu réactionnel est assuré matographie liquide ou gazeuse, notamment pour la détection de
par les parois du réacteur. Un réacteur en flux possède un ratio composés hautement réactifs susceptibles de réagir avec la phase
entre la surface de contact et le volume bien plus élevé qu’un réac- immobilisée des colonnes chromatographiques. La spectroscopie
teur en batch à taille équivalente. Pour s’en convaincre, il suffit de RMN est utilisée depuis de nombreuses années pour le suivi en
comparer la surface de contact entre un ballon en verre communé- ligne de réactions chimiques, grâce à sa capacité à fournir de pré-
ment utilisé dans les laboratoires de recherche pour les réactions cieuses informations structurales ainsi que des données quantitati-
en batch avec un simple réacteur tubulaire du même volume. ves justes et précises. La RMN à haut champ (HC) a longtemps
L’amélioration du transfert de chaleur en flux se traduit bien sou-
vent par des cinétiques réactionnelles (lorsque celles-ci sont dépen-
dantes d’une activation thermique) considérablement améliorée.
constitué l’outil privilégié, via l’utilisation de sondes RMN dédiées
à l’analyse en flux [10] ou plus récemment grâce au développement
de tubes en flux compatibles avec une configuration RMN de rou-
4
Inversement, les réactions exothermiques sont mieux contrôlées tine [11]. Attention, il s’agit ici de l’analyse qui est en flux et non la
car la dissipation de la chaleur par les parois du réacteur en flux réaction, par prélèvement du milieu réactionnel agité en cuve fer-
est favorisée par rapport à un réacteur en batch. mée. Bien que la RMN HC bénéficie d’une sensibilité et d’une réso-
lution relativement élevées, les spectromètres HC sont difficilement
Exemple compatibles avec la chimie en flux. En effet, ces équipements lourds
Il est possible de comparer la surface de contact entre un réacteur et coûteux sont généralement installés dans des laboratoires dédiés
fermé et un réacteur tubulaire en flux contenant le même volume de et pilotés par un personnel spécialisé. À l’inverse, la RMN à bas
solvant. La surface de contact d’un réacteur fermé en verre de forme champ (BC), basée sur l’utilisation de petits aimants permanents,
cylindrique de rayon r rempli à moitié de solvant équivaut à S = 2pr 2. permet de contourner ces inconvénients grâce à une taille réduite
Pour ce qui est d’un réacteur en flux tubulaire, la surface de contact qui rend les instruments de mesure compatibles avec un environne-
correspond à l’aire de la surface courbe de rayon r et de longueur L ment de synthèse organique (utilisation sous hotte standard).
exprimée par S = 2prL. Dans le cas d’un volume utile de 2,5 mL, le Pendant plusieurs dizaines d’années, la RMN à bas champ a été
réacteur cylindrique possède des cotes standardisées avec un rayon limitée à la relaxométrie, utilisant des aimants permanents à bas
d’environ r = 1,6 cm. La surface de la demi-sphère est donc de champ (0,5 T) dont l’homogénéité n’est pas suffisante pour acqué-
16 cm2. Pour ce qui est d’un réacteur tubulaire, la surface dépend du rir des spectres RMN avec une résolution acceptable. Dans le cas
diamètre interne. Afin de calculer une surface moyenne, un rayon de de la relaxométrie, l’information pertinente consiste en une distri-
0,25 mm est utilisé pour le calcul. Dans ce cas, la longueur du tube est bution des temps de relaxation obtenue par déconvolution du
de L = 13,5 m pour obtenir un volume de 2,5 mL. La surface calculée signal de précession libre FID (Free Induction Decay). Bien que
est donc dans ce cas de 212 cm2, c’est-à-dire 13 fois supérieure à la cette approche ait été utilisée pour le suivi de réactions chimiques
surface calculée pour le ballon en verre. Ce calcul n’est qu’une gros- en temps quasi-réel [12] [13], elle apparaı̂t limitée à certaines clas-
sière approximation car dans le cas d’un mélange réactionnel de ses de réactions où les réactifs et les produits sont caractérisés par
250 mL par exemple, la taille du réacteur fermé est de l’ordre de des régimes de relaxation significativement différents.
500 mL alors que le même réacteur tubulaire de 2,5 mL peut tout à
fait être utilisé dans un procédé en flux continu. Dans ce cas, la sur- Plus récemment (dans les années 2010), une nouvelle génération
face de surface de contact du réacteur en flux pour 250 mL de volume de spectromètres RMN à bas champ est apparue comme une alter-
réactionnel est 130 fois supérieure à celle du réacteur fermé. native prometteuse. Ces spectromètres RMN dits « de paillasse »
(benchtop) sont également basés sur des aimants permanents,
mais dont l’homogénéité est devenue suffisante pour réaliser
Pression. Lorsque l’écoulement au sein d’un réacteur micro- et l’acquisition de spectres RMN classiques avec une résolution
milli-fluidique est assuré par des pompes issues ou dérivées de acceptable [14]. Depuis 2015, les spectromètres RMN de paillasse
systèmes HPLC, il est possible de travailler à des pressions allant ont ouvert de nouveaux marchés pour la RMN, rendant cette der-
jusqu’à plusieurs centaines de bar en toute sécurité grâce à l’utili- nière accessible à des environnements exigeants comme les sites
sation d’un régulateur de pression. De telles pressions ne sont de production ou les laboratoires de synthèse organique. Ces équi-
atteignables en batch qu’à l’aide d’autoclaves dans des conditions pements compacts, disponibles commercialement auprès de plu-
d’utilisation et de sécurité bien plus complexes. La possibilité de sieurs fournisseurs, ont l’avantage d’un coût raisonnable (de 50 à
pouvoir travailler sous hautes pressions et hautes températures 100 k€, contre plusieurs millions d’euros pour les spectromètres à
dans des conditions de sécurité optimales, a permis de développer très haut champ) et d’un coût de fonctionnement quasi négligeable.
des procédés en conditions supercritiques [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7]. Les spectromètres de paillasse ne nécessitent pas de fluides cryo-
Dans ces conditions, les propriétés des solvants et des réactifs géniques, étant construits à partir d’aimants permanents constitués
sont profondément modifiés. d’alliages de terres rares. Les équipements commerciaux actuels
Réaction avec des solides. L’une des limitations des réacteurs en utilisent des champs magnétiques entre 1 et 2 T, correspondant à
flux concerne l’utilisation de réactifs solides ou la formation de sels une fréquence de résonance 1H entre 40 et 80 MHz.
ou de précipités au cours de la réaction qui peuvent boucher les Les spectromètres RMN de paillasse ont ouvert la voie à de nou-
canaux de faibles diamètres internes. Pour remédier à ces velles applications de la RMN dans les domaines du suivi
93
4
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Référence Internet
IN164
INNOVATION
Points clés
Domaine : techniques d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Spectroscopie de diffusion Raman, accélérateur de
particules, cyclotron
Domaines d’application : matériaux, nucléaire, géologie, hautes températures
Principaux acteurs français :
Industriels : Renishaw, Horiba Jobin Yvon, Andor Technology, Bruker Corp.,
Jasco, Thermo Scientific, BW Tech, BaySpec, Kaiser Optical System
Parution : septembre 2013
95
Référence Internet
IN164
INNOVATION
1. Contexte
96
Référence Internet
IN164
INNOVATION
Unités
Lumière
collectée
Un spectre Raman est la représentation d’une intensité
diffusée en fonction de l’énergie des photons.
Monochromateur
Les ordonnées s’expriment en nombre de coups détec-
tés par le pixel du CCD correspondant à l’énergie
concernée (qui est en réalité un gamme d’énergie). On
utilise souvent une unité arbitraire, dont l’abréviation
peut-être confondue avec d’autres unités (unités
atomiques). On préférera l’abréviation u.arb.
En spectroscopie vibrationnelle, les abscisses
s’expriment en nombres d’ondes (n.o), en cm–1. D’autres
spectroscopies utilisent des unités comme le nanomètre
(optique visible), le GHz (Brillouin), l’eV (spectroscopies Figure 2 – Schéma d’un prémonochromateur
électroniques).
Rappelons les équivalences suivantes :
1 eV = 8 065 cm–1 = 242 THz
1 cm–1 = 30 GHz = 1,24 × 10–4 eV
d’atteindre une limite bas nombres d’ondes inférieure à
10 cm–1, tout en conservant l’accès aux spectres Stokes et
antiStokes. Leur prix est aujourd’hui élevé, 10 à 20 fois
4
Notons que fréquences et nombres d’ondes sont des supérieur à celui des filtres précédents.
grandeurs couramment utilisées.
2.1.2 Étages multiples
Il est également possible d’accéder aux bas nombres
2.1 Accès aux très bas nombres d’ondes d’ondes en utilisant un spectromètre à étages multiples
(figure 2), le plus souvent triple monochromateur [1]. Le
Les bas nombres d’ondes désignent la gamme spectrale dernier « étage » (monochromateur) est utilisé pour la dis-
inférieure à 150 cm–1 dont l’obtention est complexe en persion du signal collecté, alors que les deux premiers jouent
raison de la diffusion élastique Rayleigh (et de la réflexion le rôle d’un filtre extrêmement sélectif (la limite bas nombres
à la surface de l’échantillon en configuration de rétrodiffusion) d’ondes du spectre Raman peut atteindre les 1,5 cm–1) fonc-
et dont l’intensité dépasse de plusieurs ordres de grandeur tionnant pour toutes les longueurs d’ondes.
celle du signal Raman. Pourtant, cette gamme spectrale peut
présenter un grand intérêt, par exemple dans l’étude des Le premier monochromateur disperse la lumière analysée,
verres (pic de Boson) et dans le cas de mesure de tempéra- c’est-à-dire étale spatialement les différentes composantes
ture par méthode Stokes/antiStokes. spectrales du signal collecté depuis l’échantillon. Une fente
sélectionne physiquement les longueurs d’onde d’intérêt, en
2.1.1 Filtres empêchant le signal de diffusion élastique de pénétrer dans le
second étage de dispersion (faisceaux violets sur le schéma).
Les spectromètres commerciaux les plus courants utilisent Ce deuxième monochromateur a pour rôle de « remélanger »
un filtre interférentiel (type Edge ou Notch) pour éliminer la le faisceau (tronqué de la composante élastique) au moyen
diffusion élastique de Rayleigh. d’un réseau monté en opposition. L’ensemble de ces deux
Les filtres holographiques Notch sont obtenus par un monochromateurs constitue le « prémonochromateur »
processus d’impression photographique : un milieu photosen- soustractif du système à étages multiples. Le cas des
sible est exposé à deux sources cohérentes qui vont interférer systèmes à étages multiples où les dispersions s’ajoutent
et ainsi créer une distribution périodique de l’indice de réfra- (systèmes additifs), dont l’intérêt est d’obtenir une résolution
ction. Cette couche photo-imprimée est ensuite protégée entre spectrale maximale, n’est pas abordé ici.
deux lames minces. Ces filtres sont de type coupe-bande : ils La gamme du spectre à filtrer est sélectionnée en modifiant
permettent d’obtenir les modes Stokes et antiStokes (ces la position des réseaux. Il est ainsi possible de mesurer les
derniers sont principalement utilisés pour la mesure de la raies Stokes et antiStokes (figure 3).
température). Les filtres Notch permettent de descendre à
Ce dispositif permet l’accès aux très bas nombres d’ondes
relativement bas nombres d’ondes (80-120 cm–1), mais ont
pour toutes les longueurs d’ondes d’excitation. Cependant, le
une durée de vie limitée.
passage par deux monochromateurs diminue fortement la
La technologie Edge, également basée sur les inter- luminosité du système et par conséquent l’intensité du signal
férences, est désormais la plus répandue. Les filtres Edge sont Raman. Par ailleurs, le réglage et la stabilité du système, plus
constitués de couches minces obtenues par une pulvérisation complexes qu’un simple filtre interférentiel, réservent ce
par faisceau d’ions (IBS) qui vont, grâce aux interférences, système aux spectroscopistes Raman avertis et à une utili-
atténuer la raie Rayleigh (densité optique = 6), et transmettre sation en laboratoire.
90 % du signal Stokes (uniquement). Ce sont des filtres
passe-bas. Le front de montée et les taux de réjection sont
aujourd’hui comparables aux filtres holographiques Notch. De 2.2 Hautes températures
plus, ils offrent une très bonne résistance mécanique (bonne L’étude des propriétés des matériaux à haute température
durée de vie, seuil de dommage élevé). requiert des développements instrumentaux originaux, notam-
L’apparition récente de filtres coupe-bande très efficaces ment en raison de l’émission thermique de l’échantillon dans
(Ondax SureBlockTM) permet d’avoir accès aux très bas le visible lorsqu’il est chauffé à plus de 1 000 oC. Nous verrons
nombres d’ondes. Leur fabrication repose sur la technologie quelles sont les techniques qui permettent d’acquérir un
du filtre holographique réflectif en volume. Ils permettent spectre Raman à très haute température.
97
Référence Internet
IN164
INNOVATION
Stokes 1000 K
0,8
AntiStokes 1200 K
1400 K
0,6
1800 K
ν0 - νvib ν0 ν0 + νvib 2200 K
0,4
a spectre 2600 K
3000 K
0,2
Stokes
0,0
4 ν0 - νvib ν0 ν0 + νvib
Figure 4 – Luminance spectrale du corps noir à différentes
Nombre d’ondes (cm–1)
AntiStokes
105
104
ν0 - νvib ν0 ν0 + νvib
L(T)/L(1 000 °C)
102
Figure 3 – Filtrage de la raie Rayleigh au niveau de la fente
intermédiaire du prémonochromateur
101
2.2.1 Difficultés
L’émission thermique est la lumière émise par un échantillon
100
dont la température est supérieure au zéro absolu. A tempé-
1 000 1 200 1 400 1 600 1 800 2 000 2 200 2 400
rature ambiante, les radiations sont uniquement émises dans
le domaine spectral de l’infrarouge, donc ne gênent pas dans Température (°C)
la gamme spectrale d’intérêt en spectroscopie Raman. Mais
lorsque la température du matériau augmente, le maximum Figure 5 – Luminance spectrale en fonction de la température
à 532 nm [2]
d’émission se décale vers le rayonnement visible (loi de dépla-
cement de Wien).
Gardons en mémoire que l’intensité de la diffusion Raman avec C1 = 1,191 × 10–16 W · m–2,
est trop faible pour être visible à l’œil nu. Or nous avons tous C2 = 1,439 m · K,
vu un corps émettre dans le visible, du fer porté au rouge au
filament d’ampoule chauffé à blanc qui nous éclaire. Nous σ nombre d’ondes,
comprenons alors que le signal d’émission thermique de T température absolue.
l’échantillon, qui se superpose au signal Raman, va dans un La luminance spectrale d’un corps réel est reliée à celle du
premier temps (gamme 600 à 1 000 oC) détériorer le rapport corps noir par son émissivité :
signal sur bruit du spectre, puis à plus haute température va
complètement masquer le signal Raman. L (σ , T ,θ )
ε (σ , T ,θ ) =
Un corps noir idéal absorbe toute la radiation incidente. Sa L0 (σ , T )
luminance spectrale, représentée sur la figure 4, est donnée La figure 5 [2] représente l’évolution de l’intensité de la
par la loi de Planck : luminance spectrale du corps noir en fonction de sa tempé-
rature, L (T ), normalisée par rapport à la luminance spectrale
C1σ 3 à 1 000 oC, L (1 000 oC) (à 532 nm).
L0 (σ ,T ) =
C σ On peut retenir que la luminance du corps noir augmente
exp 2 − 1 approximativement d’un facteur 10 tous les 200 oC dans notre
T gamme d’intérêt.
98
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INNOVATION
4
Chargée de recherches CNRS
Docteur en chimie de l’université Pierre et Marie Curie (Paris)
Institut Charles Gerhardt de Montpellier, UMR 5253, France
et Christian BONHOMME
Professeur
Ingénieur ENSCP
Docteur en chimie de l’université Pierre et Marie Curie (Paris)
Laboratoire de chimie de la matière condensée de Paris, UMR 7574, France
Résumé : La RMN en phase solide des noyaux quadripolaires (I > 1/2) se distingue
de la RMN des spins 1/2 du fait de l’interaction quadripolaire. Celle-ci peut être très
intense, entraînant un élargissement considérable des raies de résonance. Cet article
passe en revue les propriétés des noyaux quadripolaires et les principales séquences
d’impulsions dédiées à leur étude. Il insistera plus particulièrement sur les derniers
développements en RMN en mode statique (excitation et acquisition large bande),
conduisant à des gains en sensibilité très importants, et montrera comment appliquer
ces nouvelles méthodologies à l’étude du 87Sr (I = 9/2).
Abstract : Solid state NMR of quadrupolar nuclei (I > 1/2) differs from NMR of spin 1/2
nuclei due to the quadrupolar interaction, which can be very strong and lead to a significant
broadening of resonances. This article give an overview of the properties of quadrupolar
nuclei and the main pulse sequences dedicated to their study. It will insist more specifically
on the latest developments of NMR experiments in static mode (broadband excitation and
acquisition), which lead to a significant gain in sensitivity. It then illustrates how to apply
these new methodologies in the specific case of 87Sr (I = 9/2).
99
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INNOVATION
Points clés
Domaine : technique d’analyse structurale
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : résonance magnétique nucléaire (RMN), calculs
théoriques par la fonctionnelle de la densité (DFT)
Domaines d’application : chimie des matériaux
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : CEMHTI (Orléans), ENS (Paris), CRMN/ENS Lyon (Lyon),
LCMCP (Paris), UCCS (Lille), ENSICAEN (Caen), IRAMIS/CEA (Saclay), ISCR
(Rennes), Tectospin-ILV (Versailles), ICMMO (Orsay), ICPME (Créteil), IECB
(Bordeaux), ISM2 (Marseille), ICGM (Montpellier), CEA/INAC (Grenoble), IMN
(Nantes), CRM2 (Nancy)
Centres de compétence : réseau TGIR-RMN (http://www.tgir-rmn.org/)
Industriels : Bruker France
4
Autres acteurs dans le monde :
Acteurs industriels : Bruker, Agilent, Jeol
Pour une liste (non exhaustive) d’acteurs académiques dans ce domaine,
consulter également http://www.rockychem.com/links/whos-who-in-ssnmr.html
Contact : danielle.laurencin@univ-montp2.fr, christian.bonhomme@upmc.fr
100
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INNOVATION
généralement, une collection de spins dans le cas de la matière Cette fréquence dépend explicitement du noyau (via γ ) et
condensée : solutions, solides ou gaz sous pression) et un du champ magnétique extérieur B0 . La grandeur γ peut être
champ magnétique extérieur qui sera noté B0 . Dans le cadre de positive ou négative. Nous choisissons de définir ν0 comme
la mécanique quantique [1] [2], cette interaction peut être une grandeur positive, ce qui justifie l’utilisation d’une valeur
absolue dans l’équation (5). Dans le tableau 1 sont réperto-
représentée par un hamiltonien Ĥz , que l’on nommera riées quelques fréquences de Larmor. L’ordre de grandeur
« hamiltonien Zeeman » par la suite : sera retenu : de quelques dizaines à quelques centaines de
MHz.
ˆ = − γ h/2 π B ˆ
H I (2)
z 0 z Lorsque B0 = 0 T (soit en absence de champ magnétique
externe et en négligeant toute influence du champ terrestre,
où Îz correspond à la composante de l’opérateur Î , parallèle
~ 50 µT), toutes les énergies Em sont égales (on parle alors
au champ magnétique B0 . La signification de l’hamiltonien est I
entièrement décrite dans l’ouvrage de Cohen-Tannoudji de « dégénérescence des niveaux mI »). En présence de
et coll. [2]. B0 ≠ 0 T (de 7 à 24 T pour la plupart des spectromètres
modernes), il y a levée de dégénérescence des niveaux
D’après les principes de la mécanique quantique, le nombre
quantique de spin I (≠ 0) est associé à un second nombre d’énergie Em . Prenons l’exemple d’un noyau possédant un
I
quantique (entier ou demi-entier), mI , tel que mI = – I, spin nucléaire I = 1/2, d’où mI = ± 1/2 (voir figure 1a, pour
– I + 1, ..., I – 1, I. D’un point de vue énergétique, chaque
niveau mI est associé à une énergie que l’on notera Em :
I
γ > 0). Pour B0 ≠ 0 T, l’écart d’énergie présent entre les deux
niveaux d’énergie est donné par l’équation (4). Cette 4
différence d’énergie conduit à une différence de peuplement
Em = − mI γ h/2 π B0 (3) des différents niveaux. En notant N+1/2 et N–1/2 les
I
populations respectives de ces niveaux et en utilisant la
D’un point de vue mathématique, les énergies définies dans statistique de Boltzmann, nous avons :
l’équation (3) correspondent aux valeurs propres de l’hamilto-
nien Zeeman, défini ci-dessus. Lors d’une expérience de RMN,
des transitions spectroscopiques entre niveaux d’énergie vont N –1 /2 ∆E −γ ℏB
0
= exp − = exp (6)
être mesurées. Les transitions RMN dites « permises » N +1 /2 kT kT
correspondent à ∆mI = ± 1. L’écart d’énergie présent entre
deux niveaux d’énergie successifs étant donné par :
où k représente la constante de Boltzmann
∆E = γ h/2 π B0 (4)
h
(k = 1,38 × 10–23 J· K–1), T la température (en K) et ℏ =
.
Il en résulte immédiatement l’expression suivante pour la 2π
fréquence ν0 associée à la transition entre deux niveaux À température ambiante (T = 293 K), et compte tenu de la
d’énergie, dite « fréquence de Larmor » : très faible valeur de ∆E, il est facile de calculer une bonne
approximation de la différence de population n :
γ B0
ν0 = (5) ∆E
2π n = N +1 /2 − N −1/2 ∼ (7)
2 kT
γ Q 0
AN
Noyau I (B0 = 19,96 T)
(%) (107 rad · s–1 · T–1) (10–28 m2)
(MHz)
1H 1/2 99,98 26,75 – 850,13
19F 1/2 100 25,18 – 799,92
31P 1/2 100 10,84 – 344,14
29Si 1/2 4,68 – 5,32 – 168,90
93Nb 9/2 100 6,57 – 0,32 208,32
17O 5/2 0,037 – 3,63 – 2,6 × 10–2 115,25
133Cs 7/2 100 3,53 – 3 × 10–3 111,50
87Sr 9/2 7,02 – 1,16 0,305 36,84
I : nombre quantique de spin.
AN : abondance naturelle.
γ : rapport gyromagnétique (peut être négatif).
Q : moment quadripolaire (peut être négatif).
ν0 : fréquence de Larmor, donnée en valeur absolue.
Nota : les noyaux de forte AN et de γ élevé (en valeur absolue) seront dits « sensibles » en RMN. Ce sera le contraire pour les noyaux de faible AN
et de γ peu élevé (en valeur absolue). Ainsi, le 87Sr sera particulièrement peu sensible en RMN.
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^
^ ^ HQ(2)
HZ HQ(1)
mI = – 3/2
^
H ^
Z HA MQ
mI = – 1/2
mI = -1/2
ν0 ν0 + ∆A mI = ± 1/2, ± 3/2
mI = ±1/2 SQ
(B0 = 0 T)
(B0 = 0 T)
mI = + 1/2
mI = + 1/2
mI = + 3/2
a I = 1/2 b I = 3/2
Figure 1 – a) Diagramme des niveaux d’énergie pour un spin I = 1/2 (␥ > 0) en absence de champ B0 , à gauche, et en présence
de champ B0 , à droite , b) diagramme des niveaux d’énergie pour un spin quadripolaire I = 3/2 (␥ > 0) en absence de champ B0 ,
à gauche, et en présence de champ B0 , à droite
Pour obtenir cette expression, nous avons utilisé le fait que bobine, puis amplifiés, digitalisés et traités mathémati-
∆E quement par transformation de Fourier : on obtient alors un
⬍⬍ 1 . Nous retiendrons de cela que n est une valeur très spectre RMN standard, dans le domaine des fréquences
kT (comme mentionné précédemment, ces fréquences
faible, ce qui est la cause de la faible sensibilité de
correspondent aux transitions spectroscopiques entre niveaux
l’expérience de RMN. L’écart de population conduit à la
d’énergie).
création d’une aimantation macroscopique M0 , parallèle à B0
et dont l’intensité est donnée par la loi de Curie : À ce stade de l’exposé, nous avons décrit le principe de
l’expérience de RMN, en insistant tout particulièrement sur la
notion de diagramme d’énergie. Cette description est
N γ 2 B0 ℏ2 I (I + 1) commune à la RMN en solution et à la RMN en phase solide.
M0 = (8)
3 kT Dans les paragraphes suivants (2.1 à 2.3), nous allons
préciser les spécificités de la RMN en phase solide. Nous
Il est à noter que l’aimantation M0 n’est pas induite instan- conseillons au lecteur de se familiariser avec certains dévelop-
tanément en présence de B0 . L’établissement de M0 est pements de la RMN en solution en se reportant à deux articles
correctement décrit par un temps caractéristique T1 (ou temps publiés dans les Techniques de l’Ingénieur [P 2 880]. Deux
de relaxation spin-réseau). Ce temps caractéristique T1 ouvrages de Canet et coll. sont de bonnes introductions au
intervient dans les équations de Bloch, qui régissent le domaine de la RMN [3] [4]. Pour un niveau plus avancé,
comportement de l’aimantation en présence de champs l’ouvrage de Levitt [5] est recommandé.
magnétiques [P 2 880].
L’expérience de RMN à proprement parler consiste à utiliser 2.1 Interactions internes et externes en RMN
un second champ magnétique B1 , perpendiculaire à B0 et à la
résonance (fréquence de Larmor). Ce champ oscillant B1 est Afin de bien cerner les potentialités de la RMN en phase
créé par une bobine située au cœur de la sonde RMN et solide dans le cadre de l’analyse structurale, il est important
entourant l’échantillon étudié. Il en résulte un mouvement de d’appréhender les principales interactions intervenant au
grande amplitude de M0 et la création de composantes niveau du système de spins. Mehring [6] distingue les
oscillantes dans le plan de mesure (perpendiculaire à B0). Ces interactions externes et les interactions internes au
signaux (dans le domaine temporel) sont recueillis par la système.
102
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■ Les interactions externes sont reliées aux champs travers les liaisons, alors que le couplage dipolaire correspond
magnétiques B0 et B1. Comme nous l’avons vu ci-dessus à une interaction à travers l’espace. Cette interaction est à
(équation (2)), la présence de B0 dans l’expérience RMN l’origine de l’observation des multiplets, en particulier en RMN
conduit à l’interaction Zeeman, caractérisée par l’hamiltonien en solution [P 2 880] ;
Ĥz . L’aimantation macroscopique, M0 est parallèle à B0 avant – l’interaction quadripolaire n’intervient que pour les
noyaux dits « quadripolaires », caractérisés par un spin
l’application de B1 (via une impulsion RF). L’interaction I > 1/2 (entier ou demi-entier). Cette interaction provient du
externe correspondant au champ B1 s’exprime sous la forme couplage entre le moment quadripolaire, Q, du noyau (dû à la
d’un hamiltonien radiofréquence (RF) : non-sphéricité de la charge à l’intérieur du noyau) et le
gradient de champ électrique local [5]. Le moment quadripo-
ˆ = − 2γ B cos (2 πν t + α ) Iˆ laire est une grandeur intrinsèque du noyau considéré : elle
H (9)
RF 1 ref x est tabulée (tableau 1). Le gradient de champ électrique (EFG
Electric Field Gradient) est une grandeur tensorielle de rang 2
Nous remarquons immédiatement que, contrairement à
(comme le déplacement chimique). La constante quadripolaire
ˆ,H
H ˆ fait intervenir une des composantes perpendiculaires s’exprime de la façon suivante :
z RF
sion de ĤRF ).
103
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Ce repère particulier est appelé « repère des axes Supposons une poudre contenant un très grand nombre de
principaux » (Principal Axes System, PAS) ; Aii correspondent cristallites que nous désirons étudier par RMN en phase solide.
aux valeurs propres de A. Nous appelons « valeur isotrope de Supposons également que chaque cristallite porte un unique
noyau magnétiquement actif soumis à l’interaction A. Chaque
1
l’interaction » la quantité Aiso = ∑ i Aii (connue en mathéma- cristallite, et donc le PAS de A associé, présente une orien-
3 tation particulière par rapport au champ magnétique externe,
tique comme la trace du tenseur). Cette valeur isotrope a une B0. Pour chaque cristallite, l’orientation de B0 dans le PAS est
signification particulière dans le sens où elle correspond à la spécifiée par deux angles d’Euler, θ et ϕ (figure 2a).
valeur mesurée par RMN en solution, en présence de mouve- L’interaction A va modifier les niveaux d’énergie selon :
ment brownien (nous supposons ici que l’on peut négliger tout
effet éventuel de solvant). D’un point de vue mathématique,
nous notons que la trace de A, ∑ i Aii , est un invariant lors de Em = − mI γ h/2 π B0 + E (1) + E (2) + ... (15)
tout changement de repère à partir du PAS. I mI mI
4
ZPAS (A)
B0
θ
YPAS (A)
ϕ
XPAS (A)
X’(ϕ) D 0 –D (kHz)
a c
δ11 = δ22
+ 3/2 ↔ + 1/2 – 1/2 ↔ – 3/2
0 (kHz)
CQ/96 – CQ/96
Anisotropie de déplacement chimique :
Interaction quadripolaire :
Lorsque δ11≠ δ22 ≠ δ33, le spectre est dit « quelconque ».
Lorsque δ11≠ δ22, l’anisotropie est dite « axiale ». La L’intensité de la transition centrale n’est pas à l’échelle (elle est
valeur isotrope de l’interaction, δiso, correspond à la fortement réduite). On note la présence de huit transitions
moyenne arithmétique des trois valeurs principales. satellites. CQ est la constante quadripolaire associée au noyau.
b d
Figure 2 – a) Représentation du repère des axes principaux de l’interaction A (ou PAS), b) forme de raie correspondant à l’interaction
d’anisotropie de déplacement chimique (CSA) ␦ . ␦11 , ␦ 22 et ␦ 33 sont les valeurs principales de l’interaction, c) forme de raie
correspondant à l’interaction dipolaire hétéronucléaire (doublet de Pake), d) forme de raie pour un spin I = 9/2 (et Q = 0)
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Points clés
Domaine : techniques d’imagerie et d’analyse chimique
Degré de diffusion de la technologie : croissante
Technologies impliquées : microscopie à force atomique et laser infrarouge
Domaines d’application : science des polymères, science de la vie, photonique,
science des matériaux, pharmacie, patrimoine culturel
Principaux acteurs français :
— pôles de compétitivité
— centres de compétence
— industriels
Autres acteurs dans le monde :
https://www.anasysinstruments.com/
https://www.bruker.com/products/surface-and-dimensional-analysis.html
4
Contact : alexandre.dazzi@u-psud.fr/ http://www.lcp.u-psud.fr/spip.php?article358
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optique infrarouge est complexe à développer et à utiliser pour apportée par la lumière infrarouge est convertie en augmenta-
les non-experts. tion locale de température, c’est l’effet photothermique. Cette
Dans ce contexte, une solution alternative pour la mesure d’ab- augmentation de température induit une contrainte forte à l’inté-
sorption a été proposée en contournant les difficultés associées rieur de l’échantillon qui la relaxe en se dilatant. En effet, la
aux mesures des techniques de champ proche optique : notam- variation relative de volume d’un objet est proportionnelle à son
ment celle qui consiste à extraire l’information d’absorption d’une coefficient de dilatation thermique multiplié par l’augmentation
mesure relative à un mélange d’ondes évanescentes. La solution ΔV
de température ( = β × ΔT ; V volume, b coefficient de dilata-
simple est de mesurer la réponse acoustique ou thermique V
engendrée localement par l’absorption d’une impulsion lumineuse tion thermique et T température). Cette dilatation est transmise
incidente. Les travaux de C. Boccara et al. présentent, de manière au levier via la pointe de l’AFM, provoquant ainsi son oscillation
assez complète, comment il est possible de réaliser des mesures (figure 2a). Les lasers infrarouges utilisés sont pulsés avec une
de spectroscopie infrarouge en utilisant l’effet photothermique [8]. durée d’impulsion de quelques dizaines de nanoseconde. La dila-
De nombreuses expériences fondées sur ce principe ont été déve- tation thermique induite est donc extrêmement rapide comparée
loppées pour le champ proche par H. Pollock et al. et ont montré au temps de réponse du levier de l’AFM, qui est proche de la cen-
également la possibilité de reproduire des spectres d’absorption taine de microseconde. Chaque fois qu’il y a absorption d’une
IR grâce à une sonde locale capable de mesurer les variations de impulsion laser, la dilatation de l’échantillon est « ressentie »
température [9][10]. Bien que toutes ces expériences aient par- comme un choc transmis par la pointe de l’AFM, induisant l’oscil-
lation libre du levier (figure 2b). Lors de cette oscillation, tous
4
faitement prouvé leur efficacité à reproduire les spectres infrarou-
ges des échantillons étudiés, elles n’ont pas pu démontrer la pos-
sibilité de réaliser des images avec une résolution meilleure que
celle de la microscopie infrarouge classique.
aser
La technique AFM-IR, décrite dans cet article, est une tech- de l
Dio
nique de champ proche fondée sur la détection de l’effet photo- Photodiode
thermique induit suite à l’absorption de la lumière infrarouge.
Contrairement aux premiers travaux réalisés en photother-
mique, la mesure de l’absorption est directe avec une résolution
proche du nanomètre.
0,2
Oscillation du levier
0,1
Fa
isc
ea 0,0
u
IR
Dilatation –0,2
–0,3
0,00 0,05 0,10 0,15 0,20 0,25 0,30
Lumière absorbée ms
a Vue schématique illustrant b Représentation de l’oscillation (déflexion) amortie du levier AFM
le principe photothermique après un choc induit par l’absorption infrarouge d’un échantillon
Figure 2 – A) Vue schématique illustrant le principe photothermique B) Représentation de l’oscillation (déflexion) amortie du levier AFM
après un choc induit par l’absorption infrarouge d’un échantillon
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les modes propres de vibration sont sollicités. La mesure de l’ab- de lipides dans des bactéries filamenteuses : la topographie
sorption locale de l’échantillon se fait simplement en mesurant révèle un faisceau de filaments bactériens. L’information de
l’amplitude de ces oscillations grâce à la photodiode utilisée topographie obtenue par l’AFM est morphologique et est complé-
pour la mesure de déformation du levier AFM (figure 1). Il est tée par l’acquisition des cartographies d’absorption pour localiser
important de noter que l’amplitude d’oscillation du levier est les lipides à l’intérieur de la bactérie. Les lipides en question sont
directement proportionnelle à l’absorbance : cette relation de majoritairement des triacylglycérols et possèdent une forte
proportionnalité a été démontrée par différents travaux théori- absorption à 1 740 cm-1 (élongation de la liaison C = O de leurs
ques et expérimentaux [11][12]. Généralement, l’oscillation est fonctions ester). Grâce à l’acquisition des images à ce nombre
amortie par les frottements de la pointe avec la surface et s’es- d’onde spécifique, on peut visualiser les accumulations de lipides
tompe après une demi-milliseconde. qui se font sous forme de vésicules à l’intérieur des bactéries.
Ainsi, cette méthode permet de mesurer un spectre d’absorp- Dans notre exemple, les dimensions de ces vésicules (entre 500
tion en un point donné de la surface (en fixant la position de la et 50 nm) sont largement plus petites que la longueur d’onde
pointe AFM) en accordant la longueur d’onde du laser. Pour utilisée (5,76 mm). Dans le cas de cette image, la résolution de
chaque longueur d’onde, l’amplitude des oscillations est mesu- l’image est donc de l/100.
rée ce qui permet de reconstruire le spectre point par point
(figure 3a). De plus, il est possible de faire des cartographies D’une manière générale, les spectres obtenus par AFM-IR
d’absorption en déplaçant la pointe de l’AFM sur la surface et en reproduisent fidèlement ceux obtenus par spectroscopie clas-
fixant la longueur d’onde (figure 3b) de la source IR. L’image de sique (FTIR) alors que les dimensions des échantillons sont bien
500 nm 500 nm
Figure 3 – A) Méthode de construction d’un spectre infrarouge B) Exemple d’une cartographie chimique obtenue sur des bactéries formant
des filaments et capable de stocker de forte concentration de lipides. À gauche, la topographie représentant un faisceau de filaments
bactériens. À droite, l’image infrarouge correspondante à l’absorption à 1 740 cm 1
-
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IN237
INNOVATION
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IN237
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Points clés
Domaine : Techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Maturité
Technologies impliquées : Spectroscopie infrarouge
Domaines d’application : Matériaux de construction à base cimentaire
Principaux acteurs français :
— pôles de compétitivité : AXELERA, MATERALIA, MINALOGIC ;
— centres de compétence : C2RMF (Centre de recherche et de restauration des
musées de France) ; ENS-LYON ; INSA-Toulouse (laboratoire Matériaux et Durabilité
des Constructions de Toulouse) ; laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne
(département Interfaces) ; université de Lorraine (laboratoire Matériaux optiques, Pho-
tonique et Systèmes) ; université Gustave Eiffel (Institut français des sciences et tech-
nologies des transports, de l’aménagement et des réseau, IFSTTAR) ;
— industriels : Bruker ; Thermofisher Scientific.
Autres acteurs dans le monde : Instituto de Ciencias de la Construcción Eduardo
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IN237
INNOVATION
4
ques heures de travail pour étudier un échantillon. Enfin, l’ana-
étudiées par spectroscopie infrarouge à partir des années 1970,
lyse en mode de réflexion totale atténuée (ATR) permet d’étudier
afin de caractériser les bandes infrarouges de l’alite, de la bélite
la surface des matériaux à base de ciment sans aucune méthode
et de la célite. Bensted et Varma [3] ainsi que Ghosh et Chatter-
de préparation particulière (tels que le nettoyage au solvant ou
jee [4] [5] ont ainsi publié, en 1974, certaines des premières
le stockage sous vide) qui pourrait modifier la composition du
communications liées à des analyses par spectroscopie IR-TF et
matériau analysé ou compliquer le prélèvement.
pratiquées dans l’industrie du ciment. Ghosh et Handoo [6] ont
ensuite rédigé un des premiers articles de synthèse en 1980.
1.2.2 Principales limites Ces premiers documents ont été essentiellement consacrés aux
analyses effectuées en mode transmission (seule la référence [5]
La spectroscopie IR-TF ne peut être considérée comme une mentionnait des analyses effectuées en mode ATR).
méthode de quantification : il est très difficile (voire impossible
lorsque le « pic » infrarouge est en fait constitué de plusieurs Le tableau 1 et la figure 2 montrent les pics spécifiques (et
raies) de faire la relation entre l’intensité ou la surface d’un conformes à la littérature [3] à [6]) des phases synthétiques
bande IR et une quantité spécifique. Néanmoins, l’intensité de de clinker d’après des analyses effectuées en mode transmis-
certaines bandes IR bien spécifiques (telles que celle de la sion. Ces phases pures Ca3SiO5 et Ca2SiO4 avaient été prépa-
portlandite comme nous le verrons au chapitre 2.1) peut forte- rées par chauffages successifs d’un mélange de carbonate de
ment varier en fonction de leur contenu dans l’échantillon, on calcium et de silice finement divisé, avec des proportions stœ-
parlera alors de « semi-quantification » notamment lorsque chiométriques appropriées. Un double pic à 995-900 et 938-
l’on souhaite suivre dans le temps l’évolution d’une réaction 883 cm-1, caractérisant respectivement les phases de bélite
chimique via la création d’un autre composé (par exemple la (C2S) et d’alite (C3S), est assignable aux vibrations d’étire-
transformation de la portlandite en calcite). De plus, il faut gar- ment asymétriques de la liaison Si-O. La détection de la phase
der à l’esprit que la présence de composés chimiques peut être minérale ferrite (C4AF) est mal aisée en raison de l’absence de
sous-estimée, ou rendue non détectable, en raison de la forte pics particuliers alors que la célite (C3A) est beaucoup plus
intensité d’autres bandes infrarouges comme celles liées à la facile à détecter en raison d’un grand nombre de pics bien défi-
présence de silice ou de carbonate de calcium (qui ont la parti- nis, attribués à la liaison Al-O.
cularité d’avoir des bandes d’une largeur significative et de
forte intensité). Enfin, la présence d’une grande quantité
d’eau capillaire dans l’échantillon hydraté pourra aussi mas- Phases anhydres dans le clinker Portland
quer certains composés chimiques et perturber l’interprétation
des spectres. En définitive, la spectroscopie IR-TF, comme de Quatre phases minérales principales composent le clinker
très nombreuses autres techniques d’analyse, doit être utilisée Portland (qui, après broyage en présence d’une faible quan-
en connaissance de cause, c’est-à-dire en ayant une bonne tité de gypse deviendra le ciment Portland traditionnel) :
idée de ce que l’on cherche à démontrer, et reste donc peu — l’alite ou silicate tricalcique (Ca3SiO5), (C3S en notation
utile pour détecter des composés inattendus, surtout lorsqu’ils cimentière) ;
sont présents à l’état de traces. — la bélite ou silicate dicalcique (Ca2SiO4), (C2S en nota-
tion cimentaire) ;
— la célite ou aluminate tricalcique (Ca3Al2O6), (C3A en
À retenir notation cimentaire) ;
— la ferrite Ca4Al2Fe2O10, (C4AF en notation cimentaire).
– L’analyse IR-TF des matériaux cimentaires peut être
effectuée même si seuls quelques milligrammes de matière L’alite est la phase réactive (avec l’eau) la plus présente en
sont disponibles. proportion dans le clinker (généralement de 60 à 70 %), c’est
– Les résultats d’analyse peuvent être connus seulement elle qui va permettre d’obtenir les résistances mécaniques
quelques minutes après prélèvement des échantillons. dans un temps relativement court (de 1 jours à 28 jours après
– Il est très difficile d’utiliser cette méthode de caractérisa- le début de la prise par exemple). La bélite est une phase
tion comme un outil de quantification. moins réactive (avec l’eau) et participera plutôt aux résistan-
– La teneur des composés présents à l’état de traces peut ces mécaniques acquises sur le long terme. La célite et la fer-
être sous-estimée en raison de la forte intensité de certaines rite sont des phases dites « interstitielles », occupant l’espace
bandes infrarouges. autour des grains d’alite et de bélite au sein du clinker.
111
4
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Référence Internet
IN249
INNOVATION
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IN249
INNOVATION
Points clés
Domaine : Techniques d’analyse de la composition des matériaux, à base de neutrons
Degré de diffusion de la technologie : Croissance
Technologies impliquées : Radiographie de neutrons – NAA (Neutron Activation
Analysis)
Domaines d’application : Industrie du pétrole
Principaux acteurs français : Science-SAVED
4 – Industriels : TechnipFMC
Autres acteurs dans le monde : Research Neutron Source Heinz Maier-Leibnitz
Zentrum (MLZ) à Garching près de Munich en Allemagne
Contact : contact@science-saved.com & https://science-saved.com/en/
Début
matériaux qui bouchent les tuyaux [13]), il est possible d’obser-
20
ver la formation de glace d’hydrocarbure ou hydrate à l’intérieur Fin H2O (I)
Trempe
des pipelines sous-marins due aux basses températures dans les + CH4 (g)
à 77 K
H2O (I)
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Référence Internet
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INNOVATION
4
Pour localiser ces bouchons d’hydrates in situ et sans contact
avec les pipelines, les techniques non destructives à base de
neutrons, proposées au réacteur de neutrons du Heinz Maier-
Leibnitz Zentrum (MLZ) à Munich, sont tout indiquées, car les
neutrons sont sensibles à la différence de compositions des
matériaux. Il faut donc s’appuyer sur la différence de composi-
Figure 2 – Bouchon d’hydrate extrait d’un pipeline [22] tion qui existe entre les hydrocarbures et les hydrates : dans le
cas par exemple du méthane (CH4, constituant principal des gaz
par 1 000 ou 2 000 mètres de fond. Les techniques utilisées par naturels [14] [22]), l’hydrocarbure contient environ 40 % plus
l’industrie du pétrole pour détecter la présence d’hydrate à l’inté- d’atomes d’hydrogène et 85 % plus d’atomes de carbone que
rieur de pipelines reposent sur : l’hydrate (voir figure 4). Enfin, il faut également vérifier la capa-
cité des neutrons et du signal retour à traverser l’épaisse struc-
— l’imagerie thermique [23] et la détection gamma [24]. ture des pipelines sous-marins, ainsi que la possibilité d’extrac-
Ces deux méthodes de détection sont toutefois limitées à des tion du signal retour malgré la présence d’eau de mer. La voie
observations sur terre et ne peuvent pas être appliquées en sera ainsi tracée pour le développement d’un équipement trans-
milieu sous-marin [25] ; portable qui pourra être embarqué dans un véhicule sous-marin
— les techniques à base d’ultrasons. Elles sont largement uti- commandé à distance (ROV pour Remote Operated Vehicle),
lisées dans l’industrie du pétrole [26] et permettent de différen- comme cela a déjà été réalisé en eau peu profonde [31], afin
cier les deux phases, hydrate et hydrocarbure, grâce à la de « survoler » les pipelines sous-marins, par 1 000 ou
réflexion des ultrasons à l’interface entre ces deux phases. 2 000 mètres de fond, et localiser les hydrates, dès le début de
Cette interface n’est toutefois pas très bien caractérisée car les leur formation, pour qu’ils puissent être éliminés.
Entraînement Croissance
Agglomération Bouchon
de l’eau de la cage d’hydrate
Gaz
Hydrocarbure
Eau
Attraction capillaire
Figure 3 – Illustration de la formation de l’hydrate qui commence au centre du pipeline, avant sa propagation jusqu’à la paroi [18]
115
Référence Internet
IN249
INNOVATION
Oxygène (O)
Hydrogène (H)
a Hydrocarbure = (CH4)n
40 % plus d’atomes H
85 % plus d’atomes C
b dans l’hydrocarbure
4
que dans l’hydrate
Figure 4 – (a) Hydrocarbure (CH4) en phase liquide avec une présence d’eau en trace provenant de la condensation dans le pipeline,
(b) hydrate de méthane. Une cage de glace contenant 6 molécules H2O permet de piéger une molécule d’hydrocarbure [14]
À retenir
2. Matériels et techniques
expérimentales Acier
116
Référence Internet
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Avancées technologiques
des sources et capteurs térahertz
Vers le transfert industriel
ionisant donc sans danger pour l’opérateur, un diagnostic sans contact donc
117
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P2145
CMOS Complementary Metal Oxide Semiconductor RFIC Radio Frequency Integrated Circuit
(technologie silicium complémentaire) (microprocesseurs numériques et des circuits
radiofréquences)
CS Compressive Sensing (compression d’images)
RTD Resonant tuneling diode (diode à tunnel résonant)
DR Dynamic Range (plage dynamique)
SBMIR Single-Beam Multiple-Intensity Reconstruction
FFT Fast Fourier Transform (transformée de Fourier) (reconstruction d’un hologramme)
FPA Focal Plane array (réseau plan focal) SiGe Silicium Germanium
FMCW Frequency Modulated Continuous Wave (radar SLM Spatial Light Modulator (modulateur spatial de
modulé en fréquence) lumière)
IL Injection locked (verrouillé par injection) VAR Varactor (SVAR si symétrique, ASVAR si
asymétrique)
IMPATT IMPact ionization Avalanche Transit-Time diode
(temps de transit à avalanche à ionisation par xn Multiplicateur par n
impact)
118
Référence Internet
P2145
de capteurs THz FPA (Focal Plane Array) ont été rapportés dans la
littérature [2] [3]. Cependant, une telle intégration est accomplie au
Attentes
4
700 GHz [5] en laboratoire.
Figure 1 – Cycle de Gartner : évolution dans le temps des nouvelles Le tableau 1 [1] résume la multitude d’innovations développées
technologies dans les deux filières technologiques pour disposer des sources
capables de fonctionner au-delà des 500 GHz. Les circuits sont réfé-
rencés selon que l’oscillateur est déverrouillé ou verrouillé avec des
(2) La publicité précoce produit un certain nombre d’histoires de chaines de multiplication de fréquence (unlocked oscillator versus
réussite – souvent accompagnées de dizaines d’échecs. Puis locked oscillator and multipliers). Côté détecteur, on observe les
viennent la confrontation à la réalité industrielle et la désillusion. mêmes tendances. Toutefois, les détecteurs au silicium offrent une
(3) L’intérêt diminue à mesure que les expériences et les implé- capacité d’intégration nettement plus élevée comparée aux techno-
mentations faillissent. Les producteurs de la technologie sont logies de détection THz à température ambiante, telles que les
ébranlés ou vacillent. Les investissements ne se poursuivent que si diodes barrières Schottky sur InP, les amplificateurs à faible bruit
les fournisseurs survivants améliorent leurs produits à la satisfac- HEMT (High-Electron-Mobility Transistor), les cellules de Golay [6],
tion des premiers utilisateurs. Puis survient la croissance. les microbolomètres [7] et autres détecteurs pyroélectriques. En rai-
son du manque de pré-amplification à faible bruit dans la bande
(4) De plus en plus d’exemples illustrent comment la technologie THz, les détecteurs de puissance au silicium sont mis en œuvre sous
peut profiter à l’entreprise. Cette nouvelle technique va être mieux forme de système de détection directement couplé à une antenne.
comprise et diffusée. Les produits de deuxième et troisième généra- Par conséquent, les méthodes principalement exploitées pour la
tions proviennent de fournisseurs plus aguerris de technologie détection directe THz sont soit un auto-mélange non quasi-statique
robuste et déployée « à façon » pour des objectifs spécifiques. Plus dans les canaux MOSFET froids [8] ou la rectification dans la jonc-
d’entreprises financent des projets pilotes ; et les entreprises conser- tion base-émetteur d’un HBT ultrarapide [9].
vatrices restent prudentes. Puis un plateau de productivité survient.
En conclusion partielle, il a été constaté que les circuits intégrés
(5) L’adoption grand public commence à décoller critères d’éva- THz à base de silicium augmentent le potentiel en imagerie et
luation de la viabilité des prestataires sont plus clairement définis. détection THz en particulier avec la compacité des systèmes. La
La large applicabilité et la pertinence de la technologie sur le mar- conception est récemment devenue un domaine de recherche avec
ché sont clairement payantes. la réalisation de percées dans l’applicatif et avec de potentielle
C’est explicitement ce type de « succes story » que suivent les intégration des composants THz. Les frontières technologiques qui
systèmes et la technologie « térahertz ». Cette lente évolution a été constituent le goulot d’étranglement pour l’adoption et la commer-
décrite dans de nombreux articles scientifiques. cialisation de la technologie THz s’amenuisent de jour en jour. En
particulier, la recherche démontre que les circuits intégrés THz ont
Parmi toutes les techniques ayant démontré la capacité à générer
permis la réalisation d’applications THz, telles que l’imagerie,
ou détecter un tel rayonnement, l’intégration de circuits en tech-
l’imagerie multi-spectrale, l’imagerie radar haute résolution, l’ima-
nologie silicium a toujours été attrayante pour les systèmes d’ima-
gerie en champ proche [10]. Les réflexions identifient deux forces
gerie THz car elle offre des avantages indéniables, y compris les
motrices pressantes majeures : premièrement, la capacité à géné-
économies d’échelle, l’intégration de systèmes monolithiques, la
rer de la puissance avec des circuits intégrés THz est étroitement
portabilité et la faible consommation d’énergie pour un système
liée aux progrès de la technologie du silicium. La technologie SiGe
complet intégré. Dans [1], qui fait un état de l’art récent sur les
HBT de niveau fonderie est sur le point de s’approprier la partie
sources intégrées, une puissance typique de rayonnement de 0 dBm
inférieure du spectre THz, et elle continue de montrer un grand
(1 mW) a été signalée pour un réseau de sources d’éclairage SiGe
potentiel de développement avec des f max prédits au-delà de
HBT (Hetero Junction Bipolar Transistor) à environ 0,5 THz.
1 THz [11]. Par conséquent, la technologie SiGe BiCMOS peut
Aujourd’hui également, les composants en Silicium peuvent désor-
apparaître comme la plate-forme technologique unique pour les
mais offrir un maximum de 150 dB de plage dynamique DR (Dyna-
composants THz à faible coût. Deuxièmement, les progrès de la
mic Range) pour l’imagerie THz. Cependant, une telle performance
technologie THz sur la base de composants III-V sont dus à l’inven-
ne peut être réalisée que lorsque toute la puissance de la source est
tion de nouvelles architectures de circuits et de systèmes qui
concentrée en un seul point qui est déplacé mécaniquement à tra-
exploitent la conception de la technologie silicium.
vers la section transversale de l’objet pour former une image ; un
détecteur hétérodyne capture alors l’information de chaque pixel. Les concepteurs de circuits intégrés THz sont confrontés à un
Pour améliorer la vitesse d’imagerie, la détection peut être paralléli- ensemble de défis interdisciplinaires, comme la conception élec-
sée à l’aide de plusieurs capteurs et de nombreux réseaux matriciels tromagnétique, les niveaux de vieillissement, la gestion de l’éner-
119
Référence Internet
P2145
Puissance
Puissance
Fréquence en régime
Technologie Architecture du circuit Antenne émise Référence
(GHz) continu
(dBm)
(mW)
4 osc verrouillés
65 nm CMOS 247 à 272 antenne fentes + lentille Si 0,5 800 [54]
+ 8 × 4 osc push
45 nm CMOS 276 à 285 osc + x2 + H2 extraction 16 radiateurs actifs distribués – 7,2 820 [35]
2 osc verrouillés + 3 osc push
65 nm CMOS 283 à 288 anneau + lentille Si – 4,1 275 [55]
en anneau
65 nm CMOS 284 à 301 osc + H3 extraction anneau – 2,7 19,2 [56]
130 nm SiGe HBT 305 à 375 2 osc push + PA + x2 patch 0 1 700 [57]
65 nm CMOS 312 à 315 osc demi quadrature 4IL + x4 4 fentes + céramique 0,8 298 [58]
4 osc à ondes stationnaires
4
130 nm SiGe HBT 332 à 352 4 patchs (plaques) – 10,5 425 [38]
+ 4 osc push
65 nm CMOS 337 à 339 16 osc verrouillés + 4 osc push 16 patchs (plaques) – 0,9 1 540 [36]
antenne à fente
130 nm SiGe HBT 426 à 437 osc Colpitts + x2 – 6,3 165 [52]
circulaire + lentille Si
antenne à fente
130 nm SiGe HBT 490 3 osc push Colpitts – 14,2 45 [59]
circulaire + lentille Si
130 nm SiGe HBT 519 à 536 osc colpitts push verrouillés anneau + lentille Si – 12 156 [53]
28 nm CMOS 524 à 555 osc couplage transversal + x3 anneau + lentille diélectrique – 22 19 [60]
65 nm CMOS 609 à 624 osc + H5 extraction anneau – 23 17 [61]
1 010 à
130 nm SiGe HBT 42 osc couplés + H4 extraction 42 slots + lentille Si – 10,9 1 100 [39]
1 016
1 300 à
65 nm CMOS x5 + SVAR + x2 + ASVAr 2 patchs – 22,7 – [68]
1 460
120
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P2145
gie et de la thermique. Par conséquent, les circuits intégrés THz ne tance thermique Rth par sa capacité thermique Cth. Pour favoriser
doivent pas seulement être considérés comme des composants une détection rapide, il faut donc privilégier des structures de
compacts, peu coûteux et alternatifs à l’équipement THz tradition- transducteurs présentant le produit RthCth le plus faible possible.
nel, mais en tant que sources de nouvelles modalités d’imagerie, Un compromis est à trouver avec la résistance thermique qui
ouvrant de nouvelles applications et des marchés à créer. Donc, la inversement doit être la plus élevée possible pour assurer la meil-
science autour de la génération et de la détection s’est également leure sensibilité.
améliorée en tirant profit des avancées technologiques (se référer Les détecteurs électroniques basés sur des recombinaisons
aux articles Sources et détecteurs aux fréquences térahertz [RE 73], électron-trou dans des bandes électroniques du semi-conducteur
Lasers à cascade quantique d’imagerie THz [E 6 470]). Outre l’inté- sont plus rapides que les capteurs thermiques où les phénomènes
gration de circuit en technologie silicium, une deuxième avancée de relaxation sont plus longs. En revanche ces derniers présentent
majeure pour les applications : le déploiement de systèmes de des spectres d’absorption sur une bande de fréquence beaucoup
capteurs intégrés fonctionnant à cadence vidéo, c’est-à-dire les plus large que les détecteurs électroniques. Un moyen possible de
systèmes caméras THz temps réel. réduire le NEP d’un détecteur est de le refroidir à des températures
cryogéniques pour limiter le bruit thermique. Cependant, le coût
élevé et les contraintes techniques relatives à la réfrigération sont
un frein au déploiement de cette approche pour des applications
2. Caméras THz hors des laboratoires même si des progrès significatifs ont été
démontrés récemment.
4
rés.
manière similaire à un appareil photographique numérique, un
capteur matriciel permet d’imager une scène plus rapidement
qu’un détecteur monopoint.
Il existe deux types de détection térahertz, les détecteurs 2.1 Imageurs électroniques non refroidis
incohérents, pour lesquels seule une information d’amplitude
ou de puissance du rayonnement est mesurée, et les détec- Les technologies d’imageurs électroniques non refroidis dans la
teurs cohérents qui permettent d’acquérir à la fois l’ampli- gamme térahertz sont nombreuses ; ces technologies ne néces-
tude et la phase du champ. sitent pas de moyens cryogéniques lourds comme l’emploi de
l’azote liquide (77 K) et pour des températures plus basses. Aussi
Une des caractéristiques d’un détecteur est sa sensibilité. La nous décrirons essentiellement celles à base de diodes Schottky et
sensibilité correspond au rapport entre signal de sortie en de transistors à effet de champ FET (Field Effect Transistors). Ces
courant ou tension et la puissance optique incidente, et est détecteurs qui peuvent être réalisés sous forme matricielle sont
exprimée en V/W ou en A/W. réalisés à partir de composants qui redressent le signal électrique
Le bruit, issu des différents composants de la chaîne de induit dans une antenne par le rayonnement térahertz.
mesure d’un détecteur est caractérisé par la densité spectrale
La diode Schottky est composée d’une jonction métal semi-
de bruit, et est donné en .
conducteur type N qui grâce à un temps de commutation très
Pour pouvoir comparer les détecteurs térahertz, qu’ils soient court et une tension de seuil très basse permet d’obtenir un
incohérents ou cohérents, il est intéressant d’utiliser le terme redressement du courant avec un temps de réponse très court
de puissance minimale équivalente au bruit NEP (Noise (< 1 ns) [13]. Avec des dimensions de l’ordre du micromètre, il est
Equivalent Power). Le NEP exprimé en est la puissance possible de détecter des rayonnements jusqu’à plus de 2 THz [14]
pour laquelle le rapport signal sur bruit RSB (signal to noise [15]. Le NEP peut descendre jusqu’à à la fréquence de
ratio (SNR)) est égal à 1 lorsque l’on intègre le signal sur une 0,891 THz pour un capteur mono pixel [16]. Les capteurs matriciels
demi-seconde. Il correspond au rapport entre la densité spec- à base de diodes Schottky ne contiennent généralement que peu
trale de bruit et la sensibilité du détecteur. Plus le détecteur de détecteurs, jusqu’à 20 pixels [17].
sera sensible et plus son bruit est faible, plus le NEP est faible.
Des détecteurs à bases de transistor à effet de champ
Un autre critère de mérite d’un détecteur pouvant être retenu couplés à des antennes peuvent aussi être utilisés comme redres-
est la puissance minimale détectable MPD (Minimum seurs radiofréquences du rayonnement THz. Lorsque les dimen-
Power Detectable) en W lorsque la fréquence d’acquisition est sions du canal du transistor sont de l’ordre du micromètre voire
définie ; il permet de plus facilement confronter les imageurs submicronique, il est possible d’atteindre des fréquences de fonc-
matriciels en mode vidéo pour leur mise en œuvre dans des tionnement dans la gamme THz [18]. Les meilleures performances
conditions réelles. Un récapitulatif des quelques détecteurs non de NEP aux fréquences subterahertz sont de l’ordre de
refroidis avec leur NEP est donné dans [12]. . Les matrices de FET peuvent être réalisées en maté-
riaux III-V (AsGa par exemple) mais aussi à base de la technologie
Un autre critère de différenciation des détecteurs ou des camé- CMOS (Complementary Metal Oxyde Semiconductor) en silicium
ras est relatif au phénomène physique de conversion du rayonne- des filières de microélectroniques industrielles. Dans ce dernier
ment optique en une grandeur mesurable électriquement. La cas, les capteurs peuvent alors être réalisés sous la forme de
détection électronique fonctionne sur le principe de l’absorption matrice contenant plus de 100 pixels [19] avec des coûts de fabri-
directe d’un photon dans un matériau semi-conducteur qui va cation relativement peu élevée.
déclencher l’excitation d’un électron. Les électrons générés sont
alors lus comme un courant électrique par un circuit électronique
de proximité. Les détecteurs thermiques reposent sur l’absorp- 2.2 Imageurs thermiques
tion du rayonnement électromagnétique par un matériau qui voit
sa température augmenter. Par exemple, dans les capteurs ther- Une caméra thermique enregistre les différents rayonnements
morésistifs, cette augmentation de température se traduit par une infrarouges (ondes de chaleur) émis par les corps et qui varient en
évolution de la résistance électrique qui peut ensuite être déchif- fonction de leur température. Trois types principaux de détecteurs
frée comme une variation de courant ou de tension. La constante thermiques sont utilisés et adaptés dans la gamme THz : les cap-
de temps du capteur thermique est reliée au produit de sa résis- teurs pyroélectriques, les microbolomètres et les cellules de Golay.
121
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Rayonnement térahertz
Absorbeur
Coefficient d’absorption optique η(λ)
Température Tabs
V R – ∆R
Thermistance
I + ∆I Température Tth
Capacité thermique Cth
Coefficient thermique de résistance électrique (TCR) γ
Pertes thermiques dans le puits thermique Gth
4
Dans les trois cas, l’échauffement d’un matériau absorbant le L’absorbeur et le thermomètre sont isolés thermiquement du
rayonnement térahertz est mesuré par des techniques optiques et/ substrat – ou puits thermique – sur lequel les pixels sont réalisés.
ou électroniques. Cette isolation est réalisée au moyen d’une structure micropont
qui maintient la membrane où sont situés l’absorbeur et le thermo-
■ La cellule de Golay fonctionne sur le principe de l’expansion mètre. Cette isolation se caractérise par une résistance thermique
d’un gaz placé dans une cavité, dont une des parois est une Rth exprimée K/W (ou une conductance thermique Gth). La capacité
membrane flexible ou un diaphragme. Lorsque le rayonnement thermique Cth et la résistance thermique Rth dépendent des maté-
térahertz est absorbé, le gaz est chauffé causant son expansion. riaux utilisés et de la géométrie. La montée en température du
Cette expansion provoque une pression qui déforme la membrane bolomètre peut être modélisée par un circuit de type filtre RC ;
et cette déformation est ensuite mesurée par un système optique. cette évolution a la forme d’une exponentielle qui tend vers une
Le phénomène pneumatique mis en œuvre dans une cellule de valeur maximale avec un temps caractéristique :
Golay fait qu’un tel capteur se distingue par une sensibilité élevée
et une réponse constante sur une large gamme fréquentielle. Cela
explique pourquoi ce détecteur est généralement utilisé pour
mesurer la puissance d’une source et comme moyen de calibration Le circuit de lecture est souvent établi sur la lecture de la varia-
des autres détecteurs térahertz. Le temps de réponse est d’environ tion de courant qui traverse la résistance électrique du pixel pola-
10 ms. Elle peut-être aussi utilisée comme détecteur ponctuel pour risé à une tension constante Vbias.
l’imagerie [20] [21]. En revanche, la taille du détecteur ne permet Historiquement, cette technologie de microbolomètres a été
pas son intégration en un capteur matriciel. développée pour l’imagerie infrarouge (IR) thermique [26] [27].
Pour adapter cette technologie à la gamme THz, il a fallu prioritai-
■ Un capteur pyroélectrique fonctionne sur le principe d’une rement optimiser l’absorption du rayonnement optique THz (avec
variation temporaire de la polarisation électrique induite par le des longueurs d’onde largement supérieures à celles de l’IR), ainsi
changement de température du matériau. Comme ce phénomène que des impédances différentes. Les équipes de recherche japo-
est transitoire, un tel détecteur requiert la modulation du signal naises (NEC) ont initialement optimisé les pixels bolométriques
optique soit par voie optique (par exemple avec un hacheur), soit sans changer leur architecture mais en modifiant l’impédance de la
par voie électronique. En appliquant par une modulation de la couche absorbante [7]. Au CEA-Leti, une approche plus en rupture
source à environ de 10 Hz, le NEP d’un capteur pyroélectrique peut a été adoptée, basée sur le principe de dissocier physiquement les
atteindre environ sur une large gamme de fréquence, deux éléments clés d’un pixel bolométrique, l’absorbeur et le ther-
du THz jusqu’à l’infrarouge (0,3 à 300 THz). Des images à 0,52 et momètre. Le couplage des ondes THz est assuré par des antennes
0,71 THz révélant l’intérieur d’objets opaques à la lumière ont été chargées. Les charges sont échauffées par les courants induits par
réalisées avec ce type de détecteur [22]. D’autres images d’objets le rayonnement optique capté. Cette chaleur est alors transmise à
centimétriques obtenues grâce à un capteur matriciel à base de la couche thermorésistive placée sur la membrane suspendue du
détecteurs pyroélectriques et un laser à gaz émettant 10 mW à pixel. La variation de température induite s’accompagne d’une
2,52 THz ont été obtenues en moins de 30 s [23]. modification de la résistance électrique de cette couche qui est
alors lue par un circuit électronique situé sous le micropont dans le
■ Les bolomètres résistifs, représentés sur la figure 2, sont basés substrat, ce substrat servant aussi de puits thermique [28] [29]. De
sur la mesure électrique de la variation d’un matériau thermo- plus, dans cette architecture, l’absorption du rayonnement par le
résistif lorsque celui-ci est chauffé par un autre matériau absorbant pixel est optimisée par l’introduction d’une cavité diélectrique
le rayonnement THz incident. Ces deux fonctions, absorption et optique quart d’onde λ/4 entre la membrane et un réflecteur placé
thermomètre, peuvent être assurées par un même dispositif, mais sous cette structure suspendue sur le substrat.
actuellement les matrices micro-bolométriques développées pour Pour optimiser la sensibilité des microbolomètres, les matériaux
des caméras infrarouges et THz [24] [25] intègrent toutes un dispo- thermo-résistifs doivent présenter de forts TCR, typiquement entre
sitif absorbant (couche de TiN, par exemple), différent de la couche – 2 et – 3 %/K à 300 K. Ils doivent aussi être conçus avec des
thermorésistive. Cette dernière est constituée d’un matériau semi- membranes suspendues par des bras de conductivité thermique
conducteur, comme l’oxyde de vanadium VOX ou le silicium Gth très faible et encapsulés sous vide – typiquement à une pres-
amorphe a-Si, qui présente la propriété d’avoir un coefficient ther- sion de 10–3 mbar – pour limiter les pertes par conduction dans
mique de résistance électrique TCR (Temperature Coefficient of l’atmosphère environnante [30]. Avec une capacité thermique de
Resistance) négatif. l’ordre de 1 × 10–10 J/K et une conductance thermique 1 × 10–8 W/K,
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Référence Internet
RE263
RECHERCHE
4
Ingénieur de Recherche CNRS
Affiliation Laboratoire des Matériaux et du Génie Physique (LMGP)
Université Grenoble Alpes, LMGP, F-38000 Grenoble, France ;
CNRS, LMGP, F-38000 Grenoble, FRANCE.
Points clés
Domaine : Innovation,
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Atomic Layer Deposition (ALD)
Domaines d’application : Microélectronique, énergie, OLED, santé,
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : Minalogic, Tenerrdis
Centres de compétence : OMNT (http://www.omnt.fr/index.php/fr)
Industriels : Équipementier (Encapsulix, Annealsys, Picosun, Beneq)
Autres acteurs dans le monde :
Contact : jean-luc.deschanvres@grenoble-inp.fr ; carmen.jimenez@grenoble-
inp.fr
Parution : octobre 2016
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Référence Internet
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RECHERCHE
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Référence Internet
RE263
RECHERCHE
chemin réactionnel, qui devra être validé par d’autres 2.1.2 Suivi par QCM des dépôts des matériaux
méthodes, comme la spectroscopie d’infrarouge ou la spec- composés
troscopie de masse, qui seront présentées plus tard. Nous allons voir maintenant un exemple des mesures par
On présente maintenant quelques résultats à titre d’exemple QCM effectuées sur des matériaux composés. Si les dépôts
sur des procédés ou matériaux. sont réalisés à partir des cycles de 2 précurseurs cationiques
alternés avec un gaz actif, le procédé d’ALD permet de
2.1.1 Détermination du GPC par QCM sur des oxydes déposer :
simples i) des matériaux nanolaminés, s’il n’y a pas d’interaction entre
les nanocouches ;
L’article de Elam [5] décrit l’installation d’un cristal de ii) des alliages s’il y a interaction entre des couches d’épais-
quartz avec un balayage d’azote. La résolution de l’appareil seur similaire ;
est de 0,375 ng/cm3, qui représente une résolution de
iii) des matériaux dopés si un des cations est déposé lors de
0,007 Å pour le dépôt de ZnO en considérant sa densité de
plusieurs cycles successifs, et donc avec une fréquence supé-
5,61 g/cm3. Ce travail consiste en l’étude du dépôt de ZnO à
rieure à l’autre cation.
partir de Diethylzinc (DEZ) et H2O. La variation de masse
observée sur le cristal de quartz est analysée en termes de
Un exemple intéressant est le dépôt à 200 °C d’un nano-
variation de masse pour les différentes étapes du cycle de
composite de W : Al2O3 [7] à partir de Trimethylaluminium
4
dépôt (Figure 1). L’exposition de la surface au précurseur de
(TMA) et H2O pour l’Al2O3, et à partir de WF6 et Si2H6 pour
zinc (DEZ) provoque une forte augmentation (~120 ng/cm3).
le W. Les auteurs ont étudié les signaux détectés par le cris-
Lors de la première étape de purge, le signal diminue légère-
tal de quartz pour trois dépôts avec des concentrations de W
ment, ce qui probablement reflète une légère désorption.
différentes. Les variations détectées sur le QCM sont présen-
L’exposition à l’eau provoque une toute petite augmentation,
tées en figure 2. Pour chaque expérience, le pourcentage de
qui est suivie encore par une diminution lors de l’étape de
W est défini comme suit
purge. À partir de ces mesures et en supposant la densité du
ZnO de 5,61 g/cm3, le GPC pour le ZnO est de 2,0 Å/cycle.
Cet exemple montre la méthode standard de mesure du avec NW and NAl2O3 les nombres de cycles TMA/H2O et
GPC, en particulier sur des procédés types comme pour le Si2H6/WF6 respectivement. Les lignes indiquent la valeur du
dépôt de ZnO pour lequel la variation de masse est facilement QCM standard obtenue pour le dépôt d’Al2O3 (figure 2a et b
interprétable. Une utilisation plus poussée de cette technique à 35 ng/cm2) et pour le dépôt de W (figure c à 920 ng/cm2).
peut être trouvée dans l’article de Holmqvist [6], qui intègre Dans la Figure 2a, on voit que le dépôt de W inhibe le dépôt
les résultats obtenus par QCM via un modèle sur la dynamique d’Al2O3, qui ne récupère la valeur standard de dépôt
de la phase gazeuse et des états de surface. qu’après quelques cycles. Dans l’ensemble des résultats, on
observe que le dépôt de W est aussi inhibé par la présence
d’Al2O3, et il n’arrive pas, non plus à la valeur standard dans
le cas de forts dopages de W (80 %).
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600
100 100
400
50 50
200
0 0
0
4
0 5 10 15 20 0 5 10 15 20 0 5 10 15 20
Cycles ALD Cycles ALD Cycles ALD
Figure 2 – Variation de la mesure en masse détectée par la QCM en fonction de l’exposition alternée au précurseur d’aluminium ou
tungsten [7]. Les lignes solides correspondent à la valeur QCM obtenue lors du dépôt réalisé uniquement pour un des éléments
les fenêtres (figure 3). L’utilisation des longueurs d’onde dans de l’épaisseur déposée pendant chaque demi-cycle. Ainsi
le visible n’impose pas des contraintes particulières sur la Muneshwar [9] montre dans son étude sur la croissance de
nature des matériaux utilisés pour les fenêtres. ZrN, qu’à partir de telles mesures il est possible, en utilisant
un modèle de Bruggeman (effective-medium-approxima-
2.2.1.2 Quelques exemples d’études in situ tion, EMA), de mettre en évidence une croissance en mode
Avec un modèle adapté, les mesures permettent de remon- diffusif, intermédiaire entre le mode de croissance couche par
ter à l’épaisseur déposée à chaque cycle comme le montre la couche et celui aléatoire [R6490v1].
figure 4 mettant en évidence un comportement linéaire de la
croissance dans le cas de couches d’oxyde ou de nitrure [8]. 2.2.2 Analyses optiques alternatives
La technique permet également de mettre en évidence des Différentes techniques optiques basées sur l’analyse de
effets de retard à la nucléation comme montrée dans la l’intensité du faisceau réfléchi ont été également employées
figure 5 où le dépôt de TiN sur Si/SiO2 ne démarre qu’après pour caractériser la croissance in situ. On peut citer la spec-
un temps d’incubation de 20 cycles. troscopie de différence de réflectivité ou spectroscopie
La réalisation de la mesure dans un temps de réponse court d’anisotropie de réflectivité (RDS pour reflection difference
pour certains dispositifs permet aussi d’accéder à l’évolution spectroscopy ou RAS pour reflection anisotropy spectroscopy)
[10] où, sous incidence normale, la différence de réflectivité
est mesurée pour deux azimuths correspondant à deux direc-
tions cristallographiques différentes. Cette approche n’est
applicable que pour la croissance de couches épitaxiales d’un
matériau anisotrope. D’autres méthodes étudient l’intensité du
ICP (Dispositif à plasma faisceau réfléchi pour une incidence réglée exactement à
par couplage inductif) l’angle de Brewster. Quand les modifications sont liées à
l’absorption du matériau déposé, on parle de technique de
Source de lumière Détecteur
photoabsorption de surface (SPA – Surface PhotoAbsorp-
tion) [11] et dans le cas de matériau diélectrique transparent,
on parle de technique de réflectivité diélectrique incré-
mentale (IDR – Incremental dielectric refection) [12]
126
Référence Internet
RE213
RECHERCHE
Le rayonnement térahertz
pour l’analyse des matériaux
du patrimoine culturel
par Julien LABAUNE
Docteur de l’École polytechnique (C2RMF),
Ingénieur ONERA (DMPH-FPA)
et Emmanuel ABRAHAM
Maître de conférences (HDR) au Laboratoire ondes et matière d’Aquitaine (LOMA),
CNRS UMR 5798, université Bordeaux 1 4
Résumé : Le rayonnement térahertz, grâce à son fort pouvoir de pénétration à
travers de nombreux matériaux opaques, présente sans conteste des atouts
considérables pour l’analyse des objets issus de notre héritage culturel. Pour s’en
convaincre, nous proposons à travers cet article de résumer les récents résultats que
nous avons pu obtenir dans ce domaine à l’aide de deux dispositifs d’imagerie térahertz
complémentaires, portables et mis à la disposition des musées nationaux et
internationaux.
Points clés
Domaine : techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : optique, électronique, traitement du signal,
traitement d’image, algorithmes de reconstruction
Domaines d’application : patrimoine, archéologie, anthropologie, sécurité
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : route des Lasers (Aquitaine)
Centres de compétence :
– Centre de recherche et de restauration des Musées de France (C2RMF) ;
– Laboratoire ondes et matière d’Aquitaine (LOMA) ;
– ALPhANOV, Centre technologique optique et lasers (Bordeaux) ;
– CHARISMA : Cultural Heritage Advanced Research Infrastructure, projet euro-
péen de mise en commun des infrastructures scientifiques au profit de
conservateurs.
Industriels : CIRAM, Analyses scientifiques des objets d’art et du patrimoine
Autres acteurs dans le monde : National Institute of Information and
Communications Technology (NICT, Japon), Picometrix (USA), Teraview
Parution : février 2013
(Grande-Bretagne), GigaOptics
Contact : em.abraham@loma.u-bordeaux1.fr
http://www.loma.cnrs.fr/spip.php?auteur6
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RE213
RECHERCHE
4
IR Infrarouge
illustré au travers de quelques exemples révélateurs.
MEB Microscope électronique à balayage
PIXE Particle Induced X-ray Emission
2. Méthodes d’analyse des œuvres
ps Picoseconde (10–12 s) d’art
QCL Quantum Cascade Laser
« Science » et « art » sont intriqués depuis longtemps car
RBS Rutherford Backscattering Spectroscopy l’homme a toujours été à la recherche de nouveaux matériaux
ou de nouvelles techniques pour améliorer et perfectionner
SNR Signal to Noise Ratio son travail artistique. Pour suivre les évolutions artistiques et
TDS Time-Domain Spectroscopy ou Time-Domain scientifiques successives et donc pour conserver et restaurer
Spectrometer les œuvres, comprendre les techniques de fabrication ou
simplement vérifier leur authenticité, de nombreuses
THz Térahertz (1012 Hz) techniques d’analyse scientifiques ont été adaptées et même
développées pour permettre l’analyse la plus pointue des
UV Ultraviolet matériaux issus de notre héritage culturel.
Un glossaire est présenté en fin d’article.
2.1 Rappel des méthodes usuelles
1. Contexte Il existe de nombreux ouvrages présentant les méthodes
d’investigation usuelles des œuvres d’arts. Dans cet article,
nous avons choisi de les présenter en mettant en avant la
Encore récemment, en mars 2012, la une des journaux nous finalité de l’étude menée par les scientifiques.
rappelait la quête du scientifique italien Maurizio Seracini
consistant à démontrer que La bataille d’Anghiari, fresque
murale peinte par Léonard de Vinci en 1505, est encore 2.1.1 Datation
aujourd’hui dissimulée derrière une autre fresque peinte par La datation, qui permet l’estimation de l’époque de fabri-
Giorgio Vasari en 1563 dans la salle du Grand Conseil du Pala- cation des œuvres, est sans doute la partie des sciences
zio Vecchio à Florence (NY Times du 21 avril 2002, Le Monde concernant le patrimoine la mieux connue du grand public, en
du 15 mars 2012). Comme un indice, ce dernier aurait indiqué grande partie grâce à la datation au carbone 14. Celle-ci
la voie à suivre en inscrivant directement sur son œuvre consiste à doser le rapport entre les isotopes 14 (radioactif) et
l’énigmatique message « Cerca, trova... » (« Cherche, 12 (stable) du carbone contenus dans les résidus organiques.
trouve... »). Cette quasi-exclusivité du carbone n’en fait pas l’unique tech-
Il existe aujourd’hui plusieurs techniques d’investigation nique de datation disponible. La datation par rapport isoto-
pour analyser de façon non destructive les objets d’arts. Ces pique est en fait possible avec tous les composés radioactifs à
méthodes, développées par les scientifiques (ingénieurs et condition d’avoir un renouvellement du stock disponible et des
chercheurs en physique, chimie, etc.), sont de plus en plus niveaux de concentration compatibles avec les seuils de détec-
perfectionnées afin de repousser toujours plus loin les limites tion, ce qui réduit les possibilités, mais le potassium ou
d’investigation. Il s’agit en outre, tout au moins partiellement, l’argon sont des exemples possibles.
de dévoiler l’origine historique et géographique des objets, Une autre technique de datation est la dendrochronologie
leurs méthodes de fabrication (matériaux, mise en œuvre), qui consiste à dater un objet en bois par l’analyse des cernes.
leur évolution jusqu’à nos jours (restauration, modifications) La croissance des cernes est influencée par le climat et les
et de démontrer comment aujourd’hui les restaurateurs séquences traduiront les empreintes digitales de l’époque et
peuvent au mieux procéder à leur conservation. Le sujet est du lieu. Ces deux techniques permettent de dater des objets
donc vaste et complexe... d’origine biologique.
L’objectif de cet article consiste à présenter les atouts et le Deux autres techniques peuvent être utilisées pour dater les
potentiel du rayonnement térahertz (THz) pour l’analyse des objets en argile. La première est le paléomagnétisme qui se
objets et matériaux issus de notre héritage culturel. Ce rayon- base sur la capture du champ magnétique terrestre lors de la
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RE213
RECHERCHE
cuisson. La mesure de celui-ci permet en effet de dater l’objet. L’analyse Raman se base, quant à elle, sur la diffusion iné-
La seconde est la thermoluminescence qui consiste à mesu- lastique des photons lors de l’interaction du rayonnement avec
rer la lumière émise lors du chauffage de l’objet. Lorsqu’un le milieu, ce qui entraîne une modification de la longueur
objet en argile est soumis à une irradiation (naturelle ou arti- d’onde, donnée caractéristique de la maille ou des modes de
ficielle), les électrons peuvent se retrouver piégés dans des vibration moléculaire. La spectrométrie infrarouge permet
états métastables au niveau des défauts cristallins. Lors du de détecter les fonctions chimiques présentes dans l’échan-
chauffage de l’objet, l’énergie thermique permet de les libérer, tillon par absorption vibrationnelle du rayonnement [4].
ce qui conduit à une émission radiative et, en collectant ce D’autres techniques venant de la chimie, comme la chroma-
rayonnement, il est finalement possible d’estimer le laps de tographie, peuvent aussi être utilisées pour déterminer les
temps qui s’est écoulé depuis la dernière cuisson de l’objet. composants d’un mélange en les séparant.
Enfin, certaines méthodes permettent de caractériser les
2.1.2 Analyse élémentaire propriétés mécaniques des matériaux en procédant à des tests
La seconde catégorie de techniques permet l’analyse élé- standards (tests de traction par exemple). D’autres techniques
mentaire conduisant à la connaissance qualitative ou quantita- d’analyse structurelle sont encore à l’étude aujourd’hui,
tive des atomes constituant l’objet. La technique la plus comme la nano-indentation [5].
classique pour ces mesures consiste à utiliser un microscope
à balayage électronique (MEB). Les électrons vont exciter le 2.1.4 Imagerie
nuage électronique des différents atomes qui vont rayonner à
des longueurs d’onde précises selon les principes de la méca-
nique quantique. Cette technique requiert une préparation des
échantillons (polissage et métallisation) qui implique des pré-
La dernière catégorie des méthodes usuelles d’analyse
concerne l’imagerie appliquée aux œuvres. Celle-ci peut être
utilisée soit pour conserver un enregistrement de l’état de
4
lèvements. Les cartographies au MEB permettent de distinguer l’œuvre à un moment donné, soit dans un cadre d’investigation.
la stratigraphie des coupes ou de différencier les pigments [1]. Quand on parle d’« enregistrement », la photographie est géné-
ralement l’idée immédiate qui vient à l’esprit. Cependant, des
Une autre technique est la fluorescence X où des rayons X techniques d’imagerie bidimensionnelle (2D) plein champ
sont utilisés à la place des électrons pour exciter la autres que la photographie existent. Pour rester dans un
matière [RE 200]. Cette méthode ne nécessite ni préparation domaine proche du rayonnement visible, les photographies
ni vide et peut être utilisée sur des œuvres entières. Une UV permettent d’imager les zones restaurées, alors que celles
autre technique basée sur ce principe physique est nommée en infrarouge donnent une distinction différente entre les pig-
« émission de rayons X induite par particules » ou PIXE [2]. ments de couleur proche. La réflectographie infrarouge va
Elle consiste à ioniser les éléments à l’aide de protons ou permettre de visualiser les dessins sous-jacents réalisés à base
autres particules. Pour cela, un accélérateur de particules est de carbone. En s’éloignant un peu plus en fréquence, les
encore nécessaire, mais des techniques innovantes basées sur rayons X permettent la radiographie de l’objet en transmission
des lasers plus compacts pourront peut-être le remplacer dans et rendent compte des différences de densité de celui-ci. Cette
les années à venir. technique d’imagerie sera en outre comparée à l’imagerie THz
La technique, basée sur l’accélération de particules élémen- dans la dernière partie de cet article.
taires, est la rétrodiffusion de Rutherford (RBS). Le prin- Ces techniques d’imagerie peuvent être modifiées pour res-
cipe physique correspond à un choc élastique entre l’atome tituer la structure tridimensionnelle (3D) de l’objet, comme
cible et un projectile. L’énergie de la particule rétrodiffusée va avec la tomographie par rayons X (plus connue sous le
dépendre de sa masse, de l’angle de collection ainsi que de nom de « scanner médical ») [P 950]. Dans le domaine opti-
celle de l’atome cible. C’est donc un autre moyen de connaître que, la structure 3D de l’extérieur de l’objet sera obtenue en
la nature chimique des éléments. utilisant des scanners laser 3D pour une échelle macroscopi-
Enfin, la dernière technique d’analyse élémentaire que nous que, ou la microtopographie pour une échelle mésoscopi-
mentionnons est la spectroscopie de masse. En réduisant que. Notons aussi qu’un certain nombre des techniques
les composés à l’état atomique, puis en les accélérant, il est présentées dans les sections précédentes peuvent aussi être
possible de les différencier (séparer) par calcul de la différence utilisées pour imager les objets, avec une réalisation de
de temps de vol ou l’évaluation de la déviation magnétique. l’image finale en mode « point par point » [6].
Cette méthode d’analyse permet de séparer les éléments mais
La complexité des matériaux du patrimoine est telle que le
aussi les isotopes d’un même élément.
recours simultané aux différentes techniques précitées est très
souvent nécessaire pour corréler les résultats et extraire les infor-
2.1.3 Analyse structurelle mations recherchées [7]. De même, le développement de camé-
L’analyse élémentaire est souvent insuffisante pour caractéri- ras multispectrales est encouragé afin d’analyser les œuvres
ser un objet macroscopique. L’exemple le plus connu est sans simultanément sur une grande partie du spectre des ondes élec-
doute le graphite et le diamant qui ont la même composition tromagnétiques (UV, visible et infrarouge notamment) [RE 140].
élémentaire, le carbone, mais des propriétés physiques bien dif- À l’heure actuelle, il est certain que la science liée à l’art est
férentes. Pour les différencier, il faut effectuer une analyse dite en perpétuelle évolution. Une importante contrainte est la dimi-
« structurelle » qui permet de retrouver la structure cristalline nution du nombre de prélèvements possibles et la préservation
(paramètre de maille, etc.) dans le cas des cristaux, ou la struc- nécessaire des œuvres qui impliquent l’utilisation de techniques
ture chimique (détermination des compositions moléculaires) non intrusives et non destructives. Encore aujourd’hui, il est
dans le cas des molécules [P 3 780] [P 3 781]. donc nécessaire de développer de nouvelles méthodes d’inves-
Une technique très répandue est la diffraction des rayons tigation innovantes issues de nouvelles technologies. C’est ce
X qui fonctionne comme la diffraction de la lumière – inter- que nous proposons ici de démontrer à travers l’utilisation du
action d’une onde électromagnétique avec un objet dont la rayonnement THz, avec une autre contrainte importante
dimension est de l’ordre de grandeur de sa longueur d’onde – concernant la nécessité de pouvoir déplacer le laboratoire vers
mais pour une gamme de longueurs d’onde beaucoup plus l’œuvre et non l’œuvre vers le laboratoire. Les dispositifs d’ima-
faibles [3]. Cette méthode permet de remonter aux para- gerie THz que nous aurons à développer devront donc être
mètres de maille de la structure cristalline étudiée. miniaturisés pour les rendre portables.
129
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RE213
RECHERCHE
2.2 Rayonnement térahertz Le domaine THz a longtemps été labellisé « THz gap » (le
« fossé THz ») car la communauté scientifique l’a longtemps
2.2.1 Domaine THz ignoré. Ce désintérêt ne provenait pas de la physique
elle-même, qui permet dans le domaine THz d’étudier les
Comme nous l’avons déjà mentionné, le domaine THz se niveaux de rotation-vibration des molécules ou encore les
situe entre celui des micro-ondes et celui de l’infrarouge. À phonons dans les cristaux, mais plutôt de la pauvreté des
cause de cela, deux autres noms pourraient être attribués au sources et détecteurs THz disponibles. Depuis une quinzaine
rayonnement THz : l’infrarouge très lointain pour les opticiens d’années, l’évolution des technologies radiofréquences, avec
et les ondes submillimétriques pour les électroniciens. Son l’augmentation des fréquences des composants, et optiques,
étendue spectrale est sujette à discussion et il est généra- avec l’augmentation des longueurs d’onde et surtout la réduc-
lement admis que le domaine THz est compris entre tion des durées d’impulsions laser, a permis de développer un
0,1 THz (ou 100 GHz) et 10 THz. grand nombre de sources et détecteurs THz efficaces. Certains
d’entre eux, décrits dans la suite de cet article, permettent
aujourd’hui d’étudier les interactions matière-rayonnement
Pour les scientifiques travaillant dans le domaine THz, la dans la gamme des ondes THz ainsi que les applications pos-
fréquence est la grandeur de référence, mais les diffé- sibles du rayonnement THz dans notre vie actuelle.
rentes communautés utilisent chacune leur échelle. Les
opticiens, qui utilisent préférentiellement la longueur Les technologies THz restent souvent chères, ce qui explique
qu’elles se cantonnent encore dans les laboratoires et que le
4
d’onde, parleront du domaine compris entre 30 µm et
3 mm, alors que les chimistes familiers de la spectrosco- transfert vers les applications industrielles reste lent. Néan-
pie infrarouge parleront du domaine entre 3,33 et moins, certaines démonstrations ont déjà été réalisées avec
333 cm–1 en utilisant les nombres d’onde. Le tableau 1 succès, ce qui permet aux composants de devenir de plus en
permettra de mieux se retrouver entre les différentes plus robustes et de moins en moins coûteux. Même s’il semble
grandeurs pouvant caractériser le rayonnement THz. difficile de dresser une liste exhaustive des applications des
ondes THz, nous pouvons néanmoins citer quelques utilisations
reconnues dans les domaines de la sécurité des biens et des
Le spectre des ondes électromagnétiques, présenté sur la personnes (mise en place des scanners corporels dans les aéro-
figure 1, permet de situer les différents rayonnements et leurs ports en 2010, quelques tests avec la poste japonaise pour
applications quotidiennes. Les ondes THz sont situées aux scanner les enveloppes sans les ouvrir), du contrôle non des-
confins du domaine micro-ondes – dont les ondes peuvent tructif de matériaux (industrie de masse, industrie aérospatiale
pénétrer profondément la matière (on pensera au four à et aéronautique, etc.), de l’industrie agroalimentaire et phar-
micro-ondes de nos cuisines) – et du monde de l’optique dont maceutique, etc. Pour plus d’informations, le lecteur pourra
les longueurs d’onde sont compatibles avec le développement également se référer à l’article [RE 143], traitant des applica-
d’une imagerie de précision. Dans l’absolu, on s’attend donc à tions au sens large de la spectro-imagerie THz.
ce que les ondes THz puissent se comporter comme le trait
d’union entre ces deux domaines : nous offrir à la fois une 2.2.2 Rayonnement THz et patrimoine
pénétration efficace dans les matériaux tout en conservant
des images avec une résolution spatiale satisfaisante. Une autre manière de classer les techniques d’analyse des
œuvres d’art repose sur la base des aspects chimiques ou
physiques des mécanismes impliqués dans les mesures.
L’aspect physique peut se subdiviser en une interaction
Tableau 1 – Table de conversion THz matière-matière ou une interaction rayonnement-matière.
Lon- En se référant à la figure 1 précédente, il est possible de loca-
Fré- Nombre Tempé-
gueur Énergie liser les diverses techniques d’analyse en fonction de la fré-
quence d’onde rature
d’onde quence, avec notamment l’utilisation des radars géologiques ou
autres techniques à grande échelle pour les fréquences
1 THz 0,3 mm 33,3 cm–1 4,1 meV 47 K comprises entre les ondes radio et les micro-ondes, le
Fréquence
(Hz) 107 108 109 1010 1011 1012 1013 1014 1015 1016 1017
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RECHERCHE
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permet donc, a priori, de les identifier) ;
– la relativement bonne profondeur de pénétration des
ondes à travers les matériaux isolants et non conducteurs
(voir les quelques exemples présentés au cours de cet Figure 2 – Image d’un papillon en graphite sous 5 mm
article) ; de plâtre [12]
– la possibilité de réaliser des images et de les confronter à
celles obtenues par les autres méthodes d’investigation.
publiée dans des revues d’optique ou de conservation. On
Le premier article concernant l’utilisation du rayonnement
observe actuellement une nette transition allant de l’analyse
THz pour l’étude du patrimoine est un acte de congrès publié
purement scientifique sur des éprouvettes (échantillons) pro-
en 2006 par l’équipe de Martin Koch (Technical University of
duites en laboratoire, vers celle d’œuvres réelles préservées
Braunschweig, Allemagne) [10]. Il s’agissait déjà d’analyser
dans les plus grands musées du monde, comme la récente
une peinture sur chevalet par imagerie THz en transmission.
étude d’une œuvre de Giotto à la Galerie des Offices à
Les auteurs ont en outre démontré que les pigments ont une
Florence [13].
réponse THz différente selon qu’ils sont à base de plomb, de
fer et de zinc, ce qui permet de les discerner. Une année plus Les supports analysés se sont multipliés avec, par exemple, la
tard, un deuxième article était publié par l’équipe de Kaori détection d’encre sur les manuscrits [14], l’analyse de pan-
Fukunaga (NICT, Japon) relatant la possibilité de discriminer neaux de bois servant de support aux peintures sur
les pigments et les liants par analyse des spectres THz dans le chevalet [15], ou encore l’étude des dessins sous-jacents pré-
domaine très étendu 0,1 à 20 THz [11]. Un article suivant sents sous les peintures [16] [17]. Les études spectroscopiques
revient sur l’aspect spectroscopique permettant de différencier se sont également poursuivies avec une diversification des
les pigments en cherchant à exploiter la profondeur de péné- techniques de génération des ondes THz [18] ou la prise en
tration pour visualiser des fresques recouvertes d’une couche compte de la taille des grains de pigments sur l’absorption [19].
de plâtre [12]. L’une des images obtenue est présentée sur la
Un schéma récapitulant l’intérêt d’utiliser les ondes THz pour
figure 2 où un papillon dessiné au graphite est visible sous
l’analyse des peintures sur chevalet est reproduit sur la
5 mm de plâtre (objet modèle réalisé en laboratoire).
figure 3. Ce schéma simplifié traduit la transparence des
Aujourd’hui, depuis environ cinq ans que s’est développée matériaux utilisés en peinture sur chevalet et n’apparaît pas
l’étude spécifique « rayonnement THz et objets du directement reliée à l’augmentation de la longueur d’onde. En
patrimoine », une trentaine d’articles scientifiques a été effet, il apparaît que les différentes plages de longueurs
THz RX IR Visible UV
Retouches
Vernis
Peinture
Sous-couche
Primaire
d’accrochage
Support
(toile, bois, etc.)
Figure 3 – Coupe stratigraphique d’une peinture sur chevalet et profondeur de pénétration des différentes ondes électromagnétiques
131
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Abstract : Monna Lisa painted by Leonardo da Vinci has been scanned with a multi-
spectral camera in october 2004. 240 000 000 diffuse reflectance spectra divided on
the whole painting have then been digitally recorded. In a first time, the analysis of
these spectra allows quantifying the color of each pixel and producing an image with
very high quality. The absorption of the aged varnish has then been taken into account.
A virtual removing of the varnish has been realized and allows finding again the original
colors. The comparison between the recorded spectra and spectral databases allows the
identification of the pigments used by the artist. Finally, the theoretical study of the
spectra allows depicting the composition of the Monna Lisa’s sfumato. An Umber is
identified in the upper layer of her face, and a mixture of 1 % vermilion and 99 % lead
white is identified in the under layer. An artistic technique of art glaze is also under-
lined, a technique invented by the flemish primitive painters and unknown in Italy at
this period.
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RECHERCHE
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un outil d’analyse exceptionnel. Nous détaillons ci-dessous ces
techniques non destructives, classées selon le besoin spéci-
fique des acteurs du monde artistique.
Figure 1 – Réseau de craquelures du vernis sur la Joconde.
Macrophotographie obtenue avec la caméra multispectrale
Techniques d’analyse non destructives in situ des à 1 500 dpi
œuvres d’art
• Techniques d’examen : 1.2 Restauration
– la photographie noir et blanc en lumière diffuse et
rasante, en couleur, en UV, en IR et fausses couleurs ; Lors d’une intervention de restauration, la localisation
– la radiographie et l’émissiographie de rayons X ; d’éventuels repeints à retirer, la connaissance de la nature du
– la réflectométrie IR. vernis et l’identification des couches picturales sont des infor-
mations nécessaires. Elles déterminent le choix du solvant
• Techniques d’analyse : adapté au vernis à alléger et qui n’attaquera pas la couche
– la spectrométrie de réflexion diffuse et la tomographie picturale sous-jacente. Elles permettent de choisir le pigment
optique cohérente (OCT) pour l’identification des pigments à utiliser lors du comblement d’une lacune. Elles aident à défi-
et des colorants ; nir le processus approprié en cas de changement de support
– la spectrométrie Raman, la microfluorescence de (ré-entoilage par exemple). Le suivi colorimétrique et spectral
rayons X et la diffraction X pour l’identification des en cours de restauration est également un outil de contrôle
pigments ; permettant de décider de la fin d’une intervention.
– la goniophotométrie et la microscopie confocale pour la Le restaurateur peut enfin avoir à tester certains produits de
quantification de l’état de surface ; restauration (consolidants, fixatifs, nouveaux vernis) sur des
– la spectrométrie d’émission de fluorescence UV pour échantillons qu’il a préparés avant son intervention sur
l’identification des vernis. l’œuvre. Outre l’efficacité de la protection du nouveau maté-
riau testé, il doit modifier le moins possible l’aspect visuel de
l’œuvre. Les spectres fournis par la caméra multispectrale per-
1.1 Conservation mettent d’identifier les matériaux de la couleur par
comparaison avec des bases de données de référence et de
Une première étape de la conservation des œuvres du patri- mettre en évidence toute modification de l’aspect visuel.
moine porte sur un constat d’état suivi d’un archivage. Le
constat d’état comprend tout d’abord des images, en noir et 1.3 Histoire de l’art
blanc et en couleur, avec des éclairages diffus et rasant en
lumière visible, en UV et en IR. Ces images doivent être stoc- L’historien de l’art a recours à des méthodes d’appréciation
kées sans dégradation au cours du temps. Elles doivent être visuelle comparatives : entre les œuvres d’un même artiste au
portables et comparables. L’imagerie numérique haute défini- cours de sa vie, entre les œuvres de différents artistes pour
tion d’une caméra multispectrale répond à ces critères. définir une école, lors d’une demande d’authentification...
L’imagerie haute définition de la caméra multispectrale, dont
La seconde étape porte sur un constat de l’état de dégrada- les couleurs ont été normalisées, fournit un outil numérique
tion éventuel de l’œuvre le jour de l’enregistrement (réseau portable permettant cette comparaison en évitant le problème
de craquelures, vieillissement du vernis, modification de l’état de la reproduction des couleurs (tant que l’écran utilisé pour la
du support...). Le grandissement au pixel près de l’image déli- visualisation des images possède toujours la même définition).
vrée par la caméra répond à cet objectif, comme l’illustre la Le calcul des coordonnées colorimétriques de chaque pixel et
figure 1. Enfin, l’analyse du spectre de chaque pixel permet donc de plus d’une centaine de millions de points permet, de
l’identification des matériaux de l’œuvre (pigments, colorants, plus, de chiffrer la palette du peintre et fournit ainsi les
vernis) et peut être adjointe au constat d’état. moyens d’une comparaison quantitative. L’identification pig-
Ces enregistrements et leur archivage peuvent alors per- mentaire obtenue à partir des spectres de la caméra est une
mettre au conservateur de juger des conditions de information supplémentaire lors de ces comparaisons.
conservation des œuvres du patrimoine et de leur suivi lors Certains détails des œuvres sont invisibles à l’œil nu ou sur
d’une exposition ou à l’occasion d’un transport lors d’un prêt une image en lumière visible. Il s’agit par exemple des
pour une exposition temporaire. repentirs du peintre ou de dessins sous-jacents. Si la réflecto-
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Les sourcils de la Joconde apparaissent alors qu’ils sont
actuellement invisibles à l’œil
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Points clés
Domaine : Techniques d’analyse et spectroscopie
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Parution : août 2012 - Dernière validation : mars 2022
137
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4
– le modèle inverse, qui définit la manière de recons-
tructif seront montrées. Pour de plus amples informations sur truire le volume imageant l’objet acquis.
les sciences autour du « térahertz », le lecteur peut se référer à
de nombreuses publications accessibles pour présenter et ana-
lyser cette technologie récente ([1] à [9] [RE 143] [RE 144]). 2.1 Définitions et principes
Un rayonnement électromagnétique a une énergie et un pou-
2. Principes de la tomographie voir de pénétration qui lui permet de traverser la matière. Pen-
dant ce processus, le faisceau de rayons subit fatalement une
et applications actuelles atténuation. Avec les rayons X, cette atténuation est localement
proportionnelle à la densité et à la quantité de matière traver-
La tomographie consiste en une technique d’imagerie sée. Ainsi, en radiographie X, les rayons transmis au patient
utilisée pour reconstruire le volume d’un objet à partir subissent une perte d’intensité globale proportionnelle à la
d’une série de mesures (projections) acquises depuis nature physico-chimique et à l’épaisseur des tissus traversés.
l’extérieur de celui-ci. C’est cette mesure de perte d’intensité relative – traduite en
une image en niveaux de gris – qui permet ensuite d’établir un
diagnostic.
Ce concept est apparu au début du XXe siècle, avec les tra-
vaux de Johann Radon [10] [11]. Mais il n’a été mis en pra- Dans un scanner à rayons X médical ou industriel, une
tique que dans les années 1970 lorsque le premier scanner coupe 2D de l’objet est acquise en mesurant l’atténuation des
médical à rayons X a été développé par G.N. Hounsfield et A. rayons pour différents angles autour de l’objet. Pour chaque
Cormark [12]. Une barrette de détecteurs diamétralement angle, on obtient une projection 1D. Une méthode de rétro-
opposée à un émetteur mesure l’atténuation subie par les projection permet de reconstruire la coupe 2D modélisant
rayons X au travers du patient à différents angles de visuali- l’objet acquis à partir de l’ensemble des projections [17] [18].
sation. Cette atténuation est proportionnelle à la quantité et à Une acquisition coupe par coupe permet ensuite de recons-
la densité des tissus traversés. Le volume imagé à l’intérieur truire le volume 3D.
du corps du patient est ensuite obtenu par des algorithmes de Soit par exemple un domaine f (x, y), représentant une
reconstruction spécifiques. fonction d’atténuation (figure 1a). Chaque projection 1D est
y θ(ρ) θ y
θ
ρ
f (x,y)
reconstruit
f (x,y)
θ θ
x x
a b
Figure 1 – (a) Une droite de projection est définie par un angle et une position radiale . Sa valeur correspond à la somme des
valeurs f (x, y) le long de la droite. Dans le cas où f (x, y) est la fonction d’atténuation, cette valeur correspond à l’atténuation globale
subie par le rayonnement, (b) Une seule projection ne suffit pas pour retrouver le domaine initial par « rétroprojection »
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θ2 θ2
θ3 θ3
y y
θ1
θ1
θ4 θ4
θ2
θ3 θ2
θ4 θ1 θ4
x x
f (x,y)
f (x,y) reconstruit
a b
Figure 2 – (a) Acquisition de plusieurs angles distincts ; (b) L’intersection des données disponibles sur les différentes projections
4
permet de reconstruire la fonction f de manière plus précise
définie selon un angle θ. Une droite de projection suivant θ est Le nombre d’échantillons par projection est noté Nρ . Il est
donnée par sa position radiale ρ et est notée (θ, ρ). La valeur commun à toutes les projections d’une acquisition donnée. Le
de projection θ (ρ) correspond à la somme des valeurs pas angulaire entre deux projections successives est noté
f (x, y) sur la droite, c’est-à-dire à l’atténuation globale subie π
par le rayonnement le long de cette droite. dθ = . De même, on note dρ le pas d’échantillonnage sur la
Nθ
Pour un angle donné, l’ensemble des valeurs θ (ρi ) définit projection, c’est-à-dire la distance entre deux droites de pro-
la projection θ, notée θ . Communément, on note et on jections successives.
appelle « sinogramme » l’ensemble des projections acquises
et utilisées dans les algorithmes de reconstruction. Comme le Une acquisition avec Nθ projections de Nρ échantillons four-
montre la figure 1b, une seule projection « rétroprojetée » nit le sinogramme *, qui est un sous-sinogramme du sino-
dans l’espace 2D ne permet de retrouver efficacement f (x, y). gramme idéal . Il est représenté par une image 2D, de taille
En revanche, grâce à des acquisitions à angles distincts Nρ × Nθ , où chaque ligne correspond aux valeurs d’une projec-
(figure 2a), f (x, y) est reconstruit de manière plus significa- tion. Soient iθ et iρ les index de la projection et de l’échantillon
tive et plus précise (figure 2b).
tels que 0 ⭐ iθ < Nθ et 0 ⭐ iρ < Nρ . Le pixel (iθ , iρ) contient la
Ce processus d’acquisition/reconstruction correspond
mathématiquement à la transformée de Radon [10], définie valeur θ (ρ) . Par exemple, l’image de la figure 3b représente
par Johann Radon en 1919. La transformée directe décrit la l’acquisition avec 180 projections et 512 échantillons/projec-
valeur d’une droite de projection à un angle θ et une position tion du fantôme de Shepp-Logan [20] représenté figure 3a. La
ρ par la somme des atténuations locales sur la droite première ligne (512 pixels) contient les valeurs de la projec-
(θ, ρ) [10] [11] : tion d’angle θ = 0o, la seconde ligne contient les valeurs de la
projection d’angle θ = 1o, et ainsi de suite.
∞ ∞
θ (ρ) = ∫−∞ ∫−∞ f (x, y) δ (ρ − x cos θ − y sin θ)dx dyy (1) Un tel sinogramme est utilisé pour reconstruire une image I
modélisant l’espace acquis. Cette reconstruction s’effectue
où θ et ρ sont respectivement les coordonnées angulaire et avec une version discrète de la BFP, notée R–1 telle que :
radiale de la droite (θ, ρ), et δ (•) est l’impulsion de Dirac.
Nθ −1 Nρ −1
La transformée inverse retrouve le domaine à partir de ses
projections. Soit un sinogramme contenant l’ensemble des R−1 (i , j) = I (i , j ) = ∑ ∑ BFP
θ
(ρ) pk (θ , ρ, i , j) (3)
acquisitions θ (ρ) telles que θ ∈ [0, π[ et ρ ∈⺢ , alors : iθ = 0 iρ = 0
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a b
Figure 3 – (a) Fantôme de Shepp-Logan analytique représenté dans une image 512 ⴛ 512 pixels ; (b) Sinogramme avec 180 projections
et 512 échantillons/projections
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Docteur en physique et chercheur à l’Installation européenne de rayonnement
synchrotron (ESRF)
et Philippe WALTER
Directeur de recherche au CNRS, Laboratoire du Centre de recherche et de restau-
ration des musées de France, UMR 171 du CNRS
Résumé : Les visages de sept œuvres de Léonard de Vinci, exposées au Louvre, ont
été analysés par fluorescence des rayons X. Les spectres de fluorescence X obtenus ont
été traités grâce au logiciel PyMca permettant une analyse multicouche. Par une modé-
lisation de la stratigraphie de la peinture, il est possible d’obtenir des informations sur
la composition et l’épaisseur des couches.
Dans les œuvres les plus tardives, Sainte Anne, la Vierge et l’Enfant, la Joconde et le
Saint Jean-Baptiste, l’utilisation de glacis plus épais dans les zones sombres est
nettement mise en évidence et s’accompagne d’une modulation de l’épaisseur des
couches de blanc de plomb. Au contraire, les œuvres plus anciennes (la Belle Ferron-
nière, par exemple) semblent ne pas présenter de glacis.
Abstract : Seven paintings from Leonardo da Vinci, exhibited in the Louvre museum,
have been analysed by X-ray fluorescence. PyMca software which permits a multilayer
analysis was used for the data treatment. It is possible to get information on the layers
thickness and their composition, based on hypotheses on the layer stacking.
In the latest paintings, the Virgin and the Child with Saint Anne, The Gioconda, Saint
John the Baptist, the use of thicker glazes in the shadows is clearly shown with
variations in the thickness of the lead white layers. In the earliest paintings (la Belle
Ferronnière, for example) on the contrary, the artist would not have used glazes.
Points clés
Domaine : Techniques d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Spectrométrie de fluorescence X
Domaines d’application : Analyse des œuvres d’art
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Parution : mars 2011
Industriels :
Autres acteurs dans le monde :
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4
recherche : la superposition de ces fines couches de peinture physique qui régit cette technique est un processus atomique
translucides permet de créer des effets de profondeur et de en trois étapes (indiquées sur la figure 2a) :
volume. 1) L’ionisation en couche profonde de l’atome cible par le
Depuis, Madeleine Hours et son laboratoire d’analyse dédié faisceau de rayons X incident.
au patrimoine, situé au Louvre, des grands pas ont été faits 2) Le remplissage de la lacune électronique ainsi créée par
pour percer les secrets de l’énigmatique Mona Lisa. À cause un électron d’une couche plus externe : le retour à l’état
de leur caractère précieux, l’étude des carnations chez d’équilibre se fait par transition d’un électron d’une couche
Léonard de Vinci nécessite la mise en place d’une approche « supérieure » vers la couche présentant la lacune, et se
non destructive. En octobre 2004, une grande campagne caractérise par une diminution de l’énergie potentielle de
d’analyse de la Joconde a été menée au Centre de recherche l’atome.
et de restauration des musées de France (C2RMF). À la suite 3) Le relâchement de l’excédent d’énergie par émission d’un
de cette campagne, d’autres expériences ont été réalisées en rayon X caractéristique. On parle alors de fluorescence X.
septembre 2005 lors de l’ouverture annuelle de la vitrine pro- 3 bis) Cette énergie peut aussi être transférée à un
tégeant Mona Lisa et ont posé le premier jalon de cette étude électron périphérique qui est alors éjecté. Il s’agit de l’effet
sur la réalisation du sfumato. Une série de points alignés a été Auger, processus non radiatif, qui entre en compétition avec
étudiée par fluorescence des rayons X le long de ce visage. Ils l’émission X.
décrivent la transition de la lumière à partir du milieu du
visage, en direction de l’ombre, proche des cheveux. L’inter- 2.2 Spectre de fluorescence X
prétation des résultats a nécessité la mise en place d’une pro-
cédure de traitement des spectres de fluorescence X
2.2.1 Position des raies et analyse qualitative
permettant d’en ressortir des informations quantitatives sur
les différentes couches de peinture. Cette procédure s’appuie L’énergie émise est caractéristique de l’élément considéré.
sur un logiciel développé à l’ESRF (European Synchrotron Dans un spectre de fluorescence X (figure 3), la position des
Radiation Facility) dont l’utilisation implique une grande raies est liée au numéro atomique de l’élément et aux couches
connaissance des matériaux et de la stratigraphie de la pein- considérées. Les transitions des éléments les plus légers
ture. Cette technique, utilisée sur l’ensemble des œuvres de correspondent aux plus faibles énergies, d’après la relation de
Léonard de Vinci présentes au Louvre, a permis de mieux Moseley :
comprendre la réalisation du sfumato, en particulier dans les
E = K (Z − σ )2
ombres des visages, par la détermination de la stratigraphie
des couches présentes. avec K constante dépendante de la couche atomique mise en
Nous présenterons tout d’abord le principe de la fluorescence jeu,
X, technique d’analyse non destructive, particulièrement σ constante d’écran (voisine de l’unité pour la série K).
appropriée à l’analyse de ces œuvres, et le développement
À partir d’un spectre de fluorescence X, il est donc possible
d’une procédure de traitement des spectres qui permet d’accé-
d’identifier les éléments présents dans l’échantillon (analyse
der à des informations en profondeur sur la nature, la composi-
qualitative). Cependant, des raies d’éléments différents
tion et l’épaisseur des couches. Enfin, nous montrerons
peuvent se superposer (les raies Kα du soufre et les Mα du
comment l’ensemble de ces données nous permet de suivre
plomb, par exemple) : il faut considérer l’ensemble des raies
l’évolution de la technique de Léonard de Vinci au travers de
caractéristiques de l’élément pour conclure sur sa présence.
ces œuvres, technique qu’il a cherché à perfectionner conti-
Ainsi, la position des pics mais aussi les rapports d’intensité
nuellement afin de mieux rendre compte de la réalité et qui lui
dans la série de pics doivent être utilisés.
a permis d’atteindre une perfection admirée depuis 500 ans.
Idéalement, la fluorescence X peut être utilisée pour tous
les éléments sauf l’hydrogène et l’hélium. Cependant, les
2. Spectroscopie de fluorescence tubes à rayons X utilisés couramment n’émettent que
faiblement à basse énergie. De plus, l’analyse des éléments de
des rayons X numéro atomique inférieur à celui du silicium doit être effec-
tuée sous vide ou sous flux d’hélium : l’air absorbe fortement
On distingue, parmi les techniques d’investigation des les rayonnements d’énergie inférieure à 3 keV. En atmosphère
peintures, celles qui peuvent être réalisées directement sur d’hélium, on peut alors détecter des rayons X de plus faible
l’œuvre, sans dommage, de celles qui nécessitent de prélever énergie, jusqu’à 1 keV environ.
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1) Approche globale
Observation à l'œil nu
et sous microscope
Photographies
Réflectographie IR
Radiographie
Émissiographie
2) Approche locale 45
3
2
4
1
Analyse invasive :
Microprélèvement (coupe stratigraphique)
Préparation de l'échantillon
Figure 1 – Schéma des différentes techniques les plus utilisées pour l'analyse des peintures
M
M1 3s
Lα1 Lα3
Lα2
3bis L3 2p3/2
L L2 2p1/2
hν2 L1 2s
2. Kα1 Kα2
3. Kβ1 Kγ
K K 1s
Fluorescence Effet Auger
Émission rayons X Processus non radiatif Kβ2
Dans la convention de Siegbahn, encore très couramment utilisée, la lettre romaine majuscule désigne la couche de
laquelle l'électron a été éjecté, niveau final mis en jeu par la transition. Elle est suivie d'une lettre grecque qui désigne
l'intensité relative de cette transition par rapport aux autres transitions vers la même couche. La notation recommandée
par l'IUPAC est plus descriptive. Elle utilise une lettre romaine majuscule et éventuellement un numéro pour designer la
couche de laquelle l'électron a été éjecté, et celle originaire de l'électron qui effectue la transition.
Figure 2 – Schéma de principe de la fluorescence X en compétition avec l’effet Auger (a). Notation des raies (b)
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Nombre de coups
104
103
102
4 10
2 4 6 8 10
Énergie (keV)
Position des raies → analyse qualitative/Intensité des raies → analyse quantitative
Données (noir), fond continu (rouge), fit des différents éléments (autres couleurs)
2.2.2 Intensité des raies et analyse quantitative La méthode des paramètres fondamentaux utilise un algo-
rithme intensité-concentration. Cette méthode permet le calcul
L’intensité des raies de fluorescence dépend de la
des rapports relatifs entre intensité et concentration à partir
concentration de l’élément, mais aussi de la composition de
des équations fondamentales, connaissant la géométrie du
tout l’échantillon (correction due aux effets de matrice, princi-
système (angles d’incidence et de sortie) et les conditions
palement l’absorption). On ne détaille pas ici les étapes de
expérimentales (distance détecteur-échantillon, nature de
calcul qui amènent à l’expression générale de l’intensité de
l’anode, tension, épaisseur de la fenêtre de béryllium...). Le
fluorescence. Pour plus de précisions, on peut se référer à [2]
principe est de poser une hypothèse sur la composition de
ou à [3]. Le taux de comptage N mesuré du groupe de raies
l’échantillon, de calculer les intensités de fluorescence à partir
caractéristiques d’un élément peut s’exprimer comme :
des équations fondamentales et de comparer avec les intensi-
tés mesurées. Des ajustements successifs de la composition
Ω sont faits jusqu’à obtenir une adéquation entre les intensités
N = I0 C ∑ Rj
4π théoriques et celles mesurées. La validité de cette méthode
j
est désormais bien établie dans le cas d’un échantillon
(algorithme utilisé pour l’analyse quantitative par le logiciel épais [6]. Pratiquement, on utilise des algorithmes et on opti-
PyMca [4]). mise par itération l’écart quadratique χ2 entre le modèle choisi
et le spectre mesuré [7].
avec I0 intensité du faisceau incident,
Différents logiciels, développés en interne ou commerciaux,
C fraction massique de l’élément, ont été mis au point et permettent la calibration des systèmes
Ω/4π angle solide de détection, de fluorescence ainsi que les corrections des effets de matrice
par les paramètres fondamentaux. Ces logiciels, tels
Rj rapports d’intensités relatives des raies, corrigées qu’AXIL-QXAS [8] le plus répandu, nécessitent en général
par les effets de matrice et le durcissement du l’utilisation de standards. Les analyses quantitatives sont réa-
faisceau incident (c’est-à-dire l’augmentation de lisées comparativement en présupposant que les standards
l’énergie moyenne du faisceau du fait de ont des compositions similaires aux échantillons analysés [9].
l’absorption, plus importante à basse énergie). Ce Des efforts récents ont été menés afin de réaliser des ana-
terme correctif prend notamment en compte lyses sans utilisation systématique de références : lorsque
l’atténuation des rayons X à travers l’ensemble des l’instrumentation est parfaitement stable et bien caractérisée,
couches. tous les paramètres sont connus, ce qui permet une quantifi-
L’analyse quantitative est la mesure des concentrations de cation sans référence [10]. Ainsi, le logiciel PyMca, dont le
chaque élément présent dans l’échantillon. Il est nécessaire de principe sera expliqué par la suite, permet, après une
prendre en compte les effets interéléments pour le calcul des calibration complète du système, de s’affranchir de l’emploi
concentrations. Deux types d’approche sont utilisés pour des standards [4].
cela [2] [5] :
– les méthodes comparatives, qui reposent sur une 2.3 Analyse des peintures
compensation expérimentale des effets de matrice ;
– les méthodes mathématiques, qui passent par la réso- Dans le cas des peintures, les objets considérés sont inho-
lution d’un algorithme. mogènes et présentent une structure en couches ce qui rend
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Méthodes de spectroscopie
d’absorption X pour l’analyse
des matériaux du patrimoine
4
Chargée de recherche détachée du CNRS, LAMS (laboratoire d’Archéologie Moléculaire
et Structurale) UMR-8220
Chef du groupe imagerie et responsable de la ligne de lumière ID21, au synchrotron
européen de Grenoble (European Synchrotron Radiation Facility)
Émeline POUYET
Étudiante en thèse à l’université Joseph Fourier, Grenoble, au synchrotron européen
de Grenoble (European Synchrotron Radiation Facility)
Marie RADEPONT
Étudiante en thèse à l’université d’Anvers et l’université Pierre et Marie Curie, Paris VI,
LAMS (laboratoire d'Archéologie Moléculaire et Structurale) UMR-8220
et Jean SUSINI
Docteur en chimie-physique de l’université Pierre et Marie Curie
Directeur de la Division Instrumentation au synchrotron européen de Grenoble
(European Synchrotron Radiation Facility)
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Domaine : Techniques d’analyses appliquées aux œuvres d’art
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Spectroscopie d’absorption X (XANES et EXAFS)
Domaines d’application : Matériaux du patrimoine
Principaux acteurs français : Synchrotron français SOLEIL et synchrotron
européen ESRF
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Industriels :
Autres acteurs dans le monde : tous les synchrotrons dans le monde, avec une
forte activité en Allemagne (BESSY, DESY) et aux États-Unis (SSRL, APS, ALS).
Contact : cotte@esrf.fr
1. Contexte
Au-delà de leur valeur esthétique, les objets et œuvres d’art
Nombre de publications
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a b c
b
Absorption
4
Interférences Interférences
1,0 a destructives constructives
e
d
Seuil K du Cr
dans K2CrO4
E0
0,0
Par principe, la spectroscopie d’absorption X consiste à dans la matière (figure 2). Cette structure fine renseigne sur
mesurer la variation du coefficient d’absorption µ d’un élément l’environnement chimique de l’élément analysé.
cible dans une matrice, en fonction de l’énergie E des rayons Il est habituel de distinguer plusieurs régions dans un
X incidents, selon la loi de Beer-Lambert : spectre XAS en référence à E0 , l’énergie au seuil ; elle corres-
pond à l’énergie de liaison de l’électron éjecté (figure 2). La
I (E , x) partie dite XANES (pour X-ray Absorption Near Edge
µ x = − log Spectroscopy ) couvre environ 100 eV autour du seuil. La par-
I0 (E)
tie dite EXAFS (pour Extended X-ray Absorption Fine
où I0 intensité des rayons X incidents, Structure ) s’étend sur environ 1 000 eV après le seuil. Les
spectres XAS, en particulier la partie EXAFS, montrent des
I intensité des rayons X transmis, oscillations qui sont souvent expliquées par un modèle de
x longueur du trajet optique dans le matériau analysé, mécanique classique ondulatoire associant le photoélectron
émis à une onde (figure 2b et 2e).
µ coefficient linéique d’absorption.
Quand E, l’énergie des rayons X, est suffisante pour pro-
Comme l’a observé pour la première fois en 1913 Maurice mouvoir une transition d’un électron de cœur, mais reste infé-
de Broglie, ces spectres d’absorption se caractérisent par des rieure à E0 , ces transitions se dirigent vers des niveaux
variations abruptes dites « seuil d’absorption », dont la valeur vacants des orbitales moléculaires. C’est la région dite de
correspond à l’énergie nécessaire pour arracher un électron de pré-seuil (figure 2a). Quand E est égale à E0 , un accrois-
cœur de l’atome. Si le photoélectron provient du niveau 1s, on sement brutal du coefficient d’absorption est observé : c’est le
parlera de seuil K. S’il provient d’un niveau 2s ou 2p, on par- seuil. Quand E est supérieure à E0 , l’électron atteint les états
lera de seuil L, ainsi de suite pour n = 3, 4... avec les seuils du continuum avec une énergie cinétique égale à la différence
M, N... Ces énergies de seuil étant spécifiques d’un élément entre E et E0 . Juste après le seuil, l’énergie cinétique des pho-
donné, la mesure est par nature sélective. toélectrons émis est relativement faible. Les photoélectrons
En 1920, Hertz, puis plus tard en 1931 Krönig, montrèrent ont donc un libre parcours moyen relativement grand (de
que ces seuils d’absorption ont une structure fine due à des l’ordre de plusieurs dizaines d’angströms). Ils peuvent être
oscillations d’intensité liées à la diffusion du photoélectron alors diffusés plusieurs fois par les atomes voisins les plus
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Détecteur de
fluorescence X
Échantillon
Platines
piézoélectriques
100 µm
Support du
diaphragme 4
Figure 4 – Préparation et montage d’un échantillon de peinture dans le microscope X sur la ligne de lumière ID21 (ESRF)
149
4
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Résumé : Après une brève présentation de l’histoire de l’analyse des objets d’art,
l’accent est mis sur les deux révolutions, celle des années 1950 avec la floraison de
nombreuses techniques destructives, puis celle des années 2000 avec l’apparition
4
d’instruments portables (XRF, XRD, IR, Raman, LIBS). Les processus de coloration et
les technologies propres aux Arts du Feu (céramiques, verre, métaux) offrent à l’étude
des micro- et nanostructures des marqueurs chronologiques et technologiques. La
microspectromètrie Raman, technique sans contact, portable et non destructive,
apparaît comme la méthode la plus appropriée.
Points clés
Domaine : Techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : mesures non destructives et portables ; optique,
spectroscopies
Domaines d’application : objets et œuvres d’art ; verre, céramique, matière
picturale, pigments
Principaux acteurs français : LADIR, C2RMF
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Industriels : HORIBA Scientific, Bruker Optics, Renishaw, Kayser Optical, BWTec,
Deltanu, Thermo Fisher Scientific
Autres acteurs dans le monde : Bradford University, Art Institut Chicago,
Ghent University, University of the Basque Country, Victoria & Albert Museum,
Parution : novembre 2012
151
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balayage permettant une analyse en fluorescence locale des on-line (mesure sur place par intermittence) ou même in-line
échantillons (quelques mm2 puis quelques µm2), refocalisa le (mesure en continu, sans perturbation). Ces instruments per-
travail sur l’analyse de fragments ou prélèvement d’objets de mettent ainsi de contrôler un dispositif nouvellement installé ou
qualité pour une étude précise de leurs décors, de leur état de la constance d’une production. Ces avancées, innovations des
conservation/corrosion, etc. À partir de 1970, les méthodes années 2000, ont conduit à des dispositifs transportables,
d’analyse par (micro)faisceaux nucléaires [P 2 545] comme le mobiles puis portables, de fluorescence X (figure 1a, 1c, 1d),
RBS (Rutherford backscattering) [P 2 563], le PIXE (Particle de diffraction des rayons X, de spectrométrie IR (figure 1e), de
Induced X-ray Emission) et le PIGE (Proton Induced Gamma spectroscopie Raman (figure 1b) et très récemment de LIBS,
Emission), développées initialement pour l’analyse des maté- l’analyse des objets d’art étant aussi souvent un des acteurs du
riaux de la microélectronique [P 2 557] [P 2 564], furent développement de cette instrumentation et de ses procédures.
utilisées pour l’étude de quelques objets d’art, en particulier Les dispositifs portables non destructifs révolutionnent la
avec le faisceau extrait de l’accélérateur AGLAE du CR2MF connaissance des objets d’art exceptionnels en permettant
(Palais du Louvre, Paris) [P 3 780] [P 3 781], le premier et leur étude in situ (composantes d’ouvrages) ou dans leur lieu
longtemps seul dispositif de cette nature consacré à l’analyse de conservation sécurisé (musées, collections particulières).
des objets d’art. Le faisceau extrait évite d’avoir à mettre le Les méthodes optiques sans contact sont privilégiées.
fragment ou l’objet à analyser sous vide. Les coûts d’installa-
tion et de fonctionnement des accélérateurs produisant des
faisceaux de particules sont cependant tels que le nombre 2.1 Fluorescence X (XRF)
4
d’installation en fonctionnement se limite à quelques
instruments par pays et leur impact sur la progression de la De très nombreux fournisseurs offrent des dispositifs
connaissance des objets d’art reste encore marginal. portables, permettant une mesure à la volée (temps de
comptage typique 1 à 10 min par point), développés pour des
applications industrielles (soudage, dépôt, corrosion,
1.3 Miniaturisation et révolution de l’analyse recherche géologique et minière, etc.). Un exemple d’appareil
de fluorescence X est présenté figure 1a. La source de rayon
Le développement de la microélectronique et la miniaturisa-
X est une anti-cathode d’argent, de rhodium, voire de molyb-
tion de l’instrumentation optique (sources, filtres et détec-
dène (0 à ~ 40-50 keV) et le détecteur au silicium (Silicon
teurs) induisent depuis les années 2000 une véritable
Drift Detector) permet l’analyse des éléments légers (magné-
révolution dans les techniques d’analyse. Les instruments ana-
sium) aux plus lourds (uranium). L’absorption des rayons X
lysent simultanément plusieurs éléments (ICP-MS, Inductively
par l’air nécessite un quasi-contact avec l’objet à analyser. Un
Coupled Plasma-Mass Spectrometry [P 2 720]). Ils deviennent
pompage sous vide primaire du volume de parcours des
compacts, portables ((micro)spectromètres infrarouge
rayons X (dans le dispositif), et/ou une injection d’hélium, y
[P 2 845] et Raman [P 2 865] [RE 5], « pistolets » de fluores-
compris entre l’objet et l’instrument améliore la mesure des
cence X ou transportables (spectroscopie d’émission LIBS :
éléments légers. Des mesures à différents voltages augmen-
Laser Induced Breakdown Spectroscopy [P 2 685]), fonction-
tent la précision. Néanmoins, la peau de nombreux objets
nant soit avec des micro-prélèvements ou même de façon
(métaux patinés, objets émaillés, etc.) étant différente du
totalement non destructive, sans contact avec l’objet à
volume, il est impossible de connaître précisément la pénétra-
analyser (figure 1).
tion des rayons X - et donc le volume analysé - et ainsi d’accé-
Nous présenterons d’abord les différentes techniques der à une mesure quantitative, en utilisant même des étalons
d’analyse portables puis montrerons en considérant les diffé- et des logiciels de correction des effets de matrice. Les infor-
rentes méthodes de coloration de la matière et les techno- mations (semi)quantitatives obtenues sont par contre très utiles
logies des Arts du Feu (céramiques [AF 6 620] [AF 6 621], pour conforter les conclusions des autres méthodes portables.
verre [AF 3 600] [J 2 296], vitraux, émaux [C 940] et patines
métalliques [M 1 570]) que l’évolution de ces technologies
offre des marqueurs technologiques et chronologiques qui 2.2 Diffraction RX
restent inscrit dans les micro- et nanostructures. Difficilement
Quelques fournisseurs proposent des dispositifs portables de
décelables à l’aide des cinq sens traditionnellement utilisés par
diffraction de RX, parfois combinés avec la mesure XRF par
les historiens des arts et des techniques, les archéologues et
des applications industrielles ou par la géologie/volcanologie
les acteurs du marché de l’art, ces marqueurs deviennent
de terrain. Des laboratoires académiques ont aussi assemblés
alors accessibles aux méthodes mobiles traitées ci-après.
divers composants commerciaux (sources, détecteurs).
Nous aborderons brièvement les autres arts décoratifs pour
L’étendue et la qualité de la base de données JCPDS
lesquels l’apport des techniques spectrométriques est bien
[P 1 080], collectant depuis plus de cinquante ans les diffrac-
établi, y compris avec des instruments mobiles (peintures,
togrammes propres à chaque phase cristalline, permettent
fresques, pastels, dessins...), mais à l’opposé nous ne traite-
une identification simple et rapide des phases cristallines
rons pas les objets dont les procédures d’analyse avec des
présentes, sans contact avec l’objet d’analyse. La pénétration
dispositifs mobiles sont encore en début de développement
des rayons X étant variable selon la composition, de quelques
(meubles et instruments musicaux en bois, laques, tissus...).
à plusieurs dizaines de microns, l’analyse reste assez super-
ficielle et la question du volume effectivement analysé doit
être considérée pour de nombreux objets (métaux
2. Spectrométries portables patinés/corrodés, céramiques et verres émaillés).
(XRF, XRD, IR, Raman, LIBS)
2.3 Spectroscopie IR
La combinaison des nécessités opérationnelles industrielles
(comme la réduction de la durée de la chaîne mesure-diagnostic Des dispositifs portables de spectroscopie IR, opérant dans le
-action), des possibilités de miniaturisation de l’instrumentation domaine des modes harmoniques et de combinaisons (proche
scientifique et des progrès en traitements des données (chimio- infrarouge, NIR, > 4 000 cm–1 [P 3 820], domaine où l’interac-
métrie) ont conduit au passage des analyses off-line (hors de, tion étant faible l’obtention d’un spectre d’absorption ou de
prélèvement et transport) à at-line (mesure près de) puis réflexion est facilitée), ont été les premiers à être développés
153
Référence Internet
RE217
RECHERCHE
tête tête
fibres
optiques
4
PC spot
laser spectromètre laser
& CCD
laser
a fluorescence X : l’instrument b microspectromètre Raman : la tête déportée est couplée par 2 fibres
doit être au contact de l’objet optiques, l’une à la source laser, l’autre au spectromètre ; détails du
montage de la tête pour les mesures en extérieur (peintures rupestres) ou
en intérieur, un tissu noir recouvre la tête et l’objet pour
protéger l’opérateur et éviter les perturbations par la
lumière ambiante [24]
objectif
de microscope
spot
laser
d utilisation sur
un instrument
de laboratoire
d’un soufflet
pour régler la
focalisation du
spot laser sans
déplacement de e mesure de
la pièce réflexion IR
154
Référence Internet
RE217
RECHERCHE
pour des mesures at-line, on-line et in-line. Des systèmes opti- de travail pouvant être de plusieurs centimètres. Des disposi-
ques fonctionnant dans l’UV-visible étaient déjà disponibles. La tifs plus complexes sont plus performants. La résolution verti-
complexité des signatures nécessite l’utilisation d’outils mathé- cale est toujours moins bonne, typiquement le double. Pour
matiques performants (chimiométrie). Aussi, cette approche un matériau transparent pour la longueur d’onde du laser
est surtout pratiquée pour des problématiques industrielles où d’excitation, l’analyse peut être réalisée en profondeur sur
les questions sont formulées précisément et de façon récur- plusieurs millimètres. Il est ainsi facile de traverser une vitre
rente, mais peu utilisée pour l’analyse des objets d’art. Depuis et d’analyser des pastels, des dessins, ou des miniatures à
2010, des dispositifs travaillant en MIR (moyen infrarouge, travers leur verre de protection, sans démontage [25]. Le
~ 400-4 000 cm–1), c’est-à-dire dans le domaine des modes choix de la couleur du laser est donc fondamental. Les courtes
fondamentaux d’élongation et de déformation des unités vibra- longueurs d’onde excitent le phénomène de fluorescence, mais
tionnelles, sont disponibles. Ils peuvent fonctionner en absorp- nettoient en quelques secondes ou minutes l’extrême surface
tion (micro-échantillonnage), en réflexion (sans contact, des éventuelles couches biologiques/organiques, première des
l’exploitation pouvant se faire en considérant le spectre de causes de la fluorescence. L’analyse de composés organiques
réflexion ou sa conversion par calcul en absorbance, figure 1e), nécessite souvent une excitation IR pour éviter une dégrada-
en réflexion ATR (Attenuated Total Reflectance avec tion, ainsi par exemple pour la différentiation entre les diffé-
contact [AM 3 271]), en diffusion diffuse DRIFT (Diffuse Reflec- rents types d’ivoires (éléphants d’Afrique ou d’Asie, narval,
tance Infrared Fourier Transform avec micro-échantillonnage) mammouth) [25] et les imitations (dents, os, produits synthé-
ou en transflection (mesure de la composante d’absorption en tiques). La figure 1b montre ainsi divers systèmes de mesure,
4
réflexion, sans contact [P 2 845]). La pénétration de la lumière en extérieur ou en intérieur. L’exploration de surfaces signifi-
varie selon les échantillons et, en ATR, dépend du nombre catives vis-à-vis de l’hétérogénéité des matériaux permet une
d’onde dans une gamme de l’ordre de quelques microns à dizai- efficacité souvent supérieure aux autres méthodes pour la
nes de microns, ce qui complique l’analyse de matériau dont la détection des phases secondaires présentes, cristallines ou
surface/peau peut être différente du volume. amorphes. Par contre, la grande variabilité de la section effi-
cace Raman avec la nature de la liaison chimique (quasi-nulle
Comme la diffraction RX, la spectroscopie IR dispose de bases pour les liaisons ioniques) et le nombre d’électrons mis en jeu
de données bien documentées et efficaces car, quel que soit la rendent difficiles les mesures quantitatives, même avec une
phase analysée, un spectre IR est obtenu et les intensités des calibration. En outre, pour des échantillons colorés, l’interac-
spectres de chaque phase sont à peu près proportionnelles à tion entre les niveaux électroniques et la lumière laser n’est
leur teneur, permettant une analyse (semi)quantitative et l’uti- plus virtuelle et la ou les liaisons chimiques peuvent être exci-
lisation de procédures et de bases de données informatisées. tées, donnant lieu au phénomène de résonance Raman. La
Cependant, la largeur des bandes IR, intrinsèque à la nature de pénétration du faisceau de lumière cohérent peut alors être
la sonde – les dipôles instantanés résultant des vibrations ato- fortement réduite, à quelques dizaines de nm ou moins, l’ana-
miques/moléculaires – rend difficile la détection de phases lyse devenant alors uniquement surfacique. L’analyse est alors
secondaires. très sélective, par exemple seul le réseau vitreux entourant un
chromophore contribuera au spectre et non l’ensemble du
2.4 Spectroscopie Raman réseau silicaté [26] [27]. L’intensité diffusée est aussi fonction
de la qualité optique de la surface de l’objet analysé. Cela per-
met des études spécifiques des mécanismes de corrosion (ver-
Depuis les années 1990, avec la disponibilité de filtres
res lixiviés et/ou microcraquelés) et par ce biais une possibilité
performants pour rejeter la diffusion élastique Rayleigh du
de datations relatives [25] [28].
laser d’excitation (des ordres de grandeur plus intense que la
diffusion inélastique Raman [RE 5]), des sondes déportées
sont utilisées pour suivre des processus industriels. Ces son- 2.5 LIBS
des sont reliées par plusieurs mètres à dizaines de mètres de
Le LIBS (Laser Induced Breakdown Spectroscopy) utilise un
fibres optiques à la source laser et au spectromètre Raman
laser pour volatiliser une petite partie de la surface d’un objet,
équipé de détecteurs CCD refroidi par air (et non par de
le plasma formé étant analysé par spectroscopie d’émission. Il
l’azote liquide comme dans la génération antérieure). Les pre-
est ainsi possible de forer l’objet sur plusieurs dizaines de
mières campagnes de mesure sur site d’objets d’art
microns et ainsi de différentier composition de volume et de
(figure 1b) ont été effectuées avec ces premiers dispositifs,
surface. Depuis 2005, quelques fournisseurs proposent des
volumineux mais transportables, car exempts de pièces mobi-
dispositifs mobiles, beaucoup plus onéreux que les dispositifs
les, ou avec un dispositif de blocage de celles-ci pendant le
IR et Raman. Un tel dispositif a été installé sur le robot
transport. L’évolution combinée de la puissance de calcul des
envoyé sur la planète Mars en août 2012.
ordinateurs portables et de la miniaturisation des dispositifs
(contrôle électronique du détecteur, sources lasers solides) a
permis l’apparition de véritables systèmes Raman mobiles à 2.6 Concurrents : mesures
partir des années 2000 [24]. La miniaturisation a conduit à par micro-faisceaux
des dispositifs de quelques kilos, au prix d’une perte en réso- (accélérateurs, synchrotrons)
lution importante (> 5 cm–1 contre 0,5 cm–1 au laboratoire)
et/ou en gamme spectrale (150 à 3 000 cm–1 ou moins) Ces instruments ne sont pas portables mais sont en
contre – 4 000 (anti-Stokes) à + 4 000 cm–1 (Stokes) avec les compétition avec les méthodes portables pour l’étude des
instruments fixes. En outre, la ligne de base est complexe objets d’art, car leurs avantages spécifiques, réels ou
(ondulations, rupture de pente). Le diamètre latéral du spot supposés [P 2 700], justifient le déplacement exceptionnel
d’analyse varie entre ~ 0,5 µm pour les objectifs à très fort d’objets de qualité. Les faisceaux de particules générés par
grossissement (× 200, soit 2 000 fois en tenant compte de la des accélérateurs (10 à 100 MeV) pénètrent bien la matière et
chaîne optique instrumentale, équivalente à l’oculaire d’un permettent des mesures précises de nombreux éléments,
microscope classique) et une très longue distance de travail légers ou lourds, avec dans certains cas des profils de
(~ 15 mm), entre le point de focalisation/mesure et la lentille concentration depuis la surface sur une profondeur de plu-
frontale de l’optique, et plusieurs centaines de microns pour sieurs dizaines de microns. Cela permet par exemple l’étude
les faibles grossissements (× 5 soit 50 fois) avec des distances des technologies de dorures, des lustres métalliques, de la
155
4
156
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RE211
RECHERCHE
4
de Recherche sur la conservation des Collections (CRCC), USR 3224 du CNRS,
Museum national d’histoire naturelle)
Nicolas TRCERA
Scientifique sur la ligne LUCIA du synchrotron SOLEIL
Sandrine PAGÈS-CAMAGNA
Ingénieure de recherche du ministère de la culture au Centre de Recherche
et de Restauration des Musées de France (C2RMF)
Marika SPRING
Scientifique à la National Gallery à Londres
et Solenn REGUER
Scientifique sur la ligne DiffAbs du synchrotron SOLEIL
Abstract : The chemical modifications associated with the colour loss of smalt
pigment in historic paintings were analysed by synchrotron X-ray absorption spectros-
copy. The micron-sized X-ray beam and the broad energy range offered by the LUCIA
and DiffAbs beamlines at SOLEIL synchrotron have been crucial in allowing individual
smalt particles to be probed in paint samples coming from the National Gallery
(London) and the Louvre museum (Paris) collections. XANES and EXAFS spectra
collected at the K edge of the colouring ion cobalt revealed the colour change to be
linked to a coordination change of the cation.
157
Référence Internet
RE211
RECHERCHE
Points clés
Domaine : Technique d’analyse synchrotron
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Spectroscopie d’absorption X
Domaines d’application : Analyse chimique d’œuvres patrimoniales
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Industriels :
Autres acteurs dans le monde :
Contact : http://www.synchrotron-soleil.fr/ipanema
4
1. Contexte c’est-à-dire la peinture dans le cas d’un pigment. Une peinture
est un matériau composite, mêlant matériaux organiques
comme le liant, et matériaux minéraux parfois de différentes
La réalisation (conception) d’une œuvre d’art passe par le
natures notamment dans le cas des mélanges. Par ailleurs, la
choix des matériaux de base (support, construction), puis des
constitution d’une peinture est multicouche, avec des épais-
matières servant à créer le jeu de couleurs et de lumières en
seurs de strates variables selon la nature et la fonction de cha-
surface. Le choix de ces dernières peut être le fait de pouvoir
cune d’elles. Pour cette raison, il est indispensable pour réaliser
symbolique rattaché aux matières premières, à leurs stabili-
des analyses, d’effectuer un micro-prélèvement de peinture
tés, aux facilités d’approvisionnement, aux moindres coûts de
(moins d’un millimètre carré), à inclure dans une résine polyes-
revient, ou enfin aux propriétés physiques réelles de ces
ter translucide, afin de préparer une coupe transversale qui
matériaux. Parmi elles, se retrouve la couleur. Ainsi les miné-
sera polie en surface. Les techniques analytiques sont choisies
raux naturels ont servi dans un premier temps de base à la
en fonction des questions posées, mais aussi de la nature et de
création colorée des tableaux et objets peints avant d’être
la taille du matériau d’intérêt. Une approche multi techniques
rapidement complétés par des matériaux manufacturés : colo-
étant généralement nécessaire, il est important que ces techni-
rants extraits des végétaux, pigments de synthèse comme la
ques soient peu, voire pas destructives.
cérusite ou le bleu égyptien, etc.
Cette intervention humaine visait à se substituer à la nature
pour obtenir un matériau coloré pouvant avoir les qualités
requises à la réalisation d’une peinture : compatibilité avec les 2. Spectroscopie d’absorption
liants et autres pigments, inertie, pouvoir colorant, etc. Ainsi des rayons X utilisant
dès l’Antiquité, le problème du bleu se révèle crucial, la nature
ne permettant pas d’obtenir aisément un pigment utilisable :
le rayonnement synchrotron
fragilité de l’azurite à l’humidité, coût trop lourd du lapis-lazuli.
La fabrication de pigment à partir d’ion métallique se révèle 2.1 Caractéristiques du rayonnement
donc une solution : le cuivre et le cobalt entrent dans la syn- synchrotron
thèse de pigments qui dérivent bien souvent de l’industrie ver-
rière avec des traitements thermiques parfaitement maîtrisés. Il est aujourd’hui très fréquent d’utiliser le rayonnement syn-
La compréhension des processus de dégradation des chrotron (RS) pour étudier la matière dans tous ses états
matériaux de la couleur permet d’envisager une meilleure (solide, liquide ou gazeux). L’augmentation croissante du nom-
conservation des œuvres patrimoniales. Estimer les para- bre de centres de RS dans le monde a généralisé l’utilisation des
mètres (thermiques, lumineux, humidité ou autres), qui ont techniques spectroscopiques à tous types de matériaux.
conduit à l’altération physique des matériaux, permet à la fois Le RS est l’émission de lumière produite par des particules
de réduire le contexte d’altération lorsqu’il est extérieur, et chargées (électrons ou positrons) relativistes circulant dans un
d’éviter de le reproduire dans le cadre de la conservation- anneau de stockage (succession de sections courbes et droites)
préservation du patrimoine, voire même d’envisager une solu- et soumises à des accélérations centripètes. Au cours de leur
tion visant à rétablir un retour à l’équilibre. Toutefois, certai- circulation, ces particules sont déviées de leur trajectoire par
nes altérations des matériaux dues à des paramètres des champs magnétiques produits avec des aimants de cour-
intrinsèques à l’œuvre sont irréversibles ; la compréhension bure (sections courbes), des onduleurs ou des wigglers (sec-
du phénomène n’est utile alors qu’à redéfinir une nouvelle lec- tions droites). À chaque modification de trajectoire, les
ture de l’œuvre. En effet, quand la dégradation modifie non particules perdent de l’énergie, produisant ainsi la lumière du
seulement certaines qualités physiques comme l’adhérence, RS. Le but de cet article n’est pas de faire une présentation du
mais également la couleur, cette dernière entraîne une RS (l’article [P 2 700] en a déjà effectué une revue), nous ne
atteinte telle que les spécialistes ne voient plus l’expression rappellerons ici que les caractéristiques principales qui différen-
réelle de l’artiste : il faut alors redéfinir l’iconographie. cient la lumière obtenue par RS des autres sources de lumière
La compréhension de l’altération et des mécanismes mis en classiquement utilisées au sein des laboratoires de recherche
jeu nécessite d’étudier le matériau dans son environnement, d’étude des matériaux du patrimoine.
158
Référence Internet
RE211
RECHERCHE
2.2 Apports du rayonnement synchrotron s’étend de l’infrarouge lointain (environ 0,4 meV) jusqu’aux
pour l’étude des matériaux rayons X durs (environ 100 keV) et offre ainsi aux expérimen-
tateurs un large choix de techniques. La figure 1 présente les
du patrimoine lignes de lumière du synchrotron SOLEIL couvrant la totalité
des domaines énergétiques disponibles.
■ Brillance :
La première caractéristique du RS par rapport aux sources ■ Constance du flux de photons :
conventionnelles est l’intensité du rayonnement (ou flux de Les anciennes générations de synchrotrons souffraient d’un
photons par unité de surface). Ce flux de photon est de inconvénient de taille : la décroissance en fonction du temps de
plusieurs ordres de grandeur supérieur aux sources classique- l’intensité moyenne du rayonnement. En effet, les paquets de
ment exploitées telles que celle des tubes à rayons X. particules circulant dans l’anneau de stockage des synchrotrons
se dégradent progressivement au cours du temps entraînant la
■ Continuité spectrale : nécessité de réinjecter plusieurs fois par jour des particules
L’obtention de lumière par RS permet d’obtenir un spectre dans la machine. Les synchrotrons les plus récents, tels que
continu (grâce aux aimants de courbure) ou continûment SOLEIL en France, SLS en Suisse ou DIAMOND en Angleterre,
accordable (dans le cas des onduleurs). La gamme spectrale ne possèdent plus cette contrainte. Il est fréquent aujourd’hui
Figure 1 – Domaines énergétiques de travail des lignes de lumière du synchrotron SOLEIL (Crédit Synchrotron SOLEIL)
159
Référence Internet
RE211
RECHERCHE
de trouver le mode de fonctionnement dit « Top-Up » corri- samment d’énergie (E1) arrache un électron d’une couche de
geant la dégradation des paquets de particules. Ce mode per- cœur de l’atome étudié, créant ainsi une lacune dans cette
met de réinjecter quasiment en continu de nouvelles particules couche. Très rapidement, de l’ordre de 10–15 seconde, cette
afin de conserver un nombre de paquets de particules et un lacune est comblée par un électron d’une couche supérieure.
courant constants dans l’anneau de stockage. Il se produit alors l’un des deux phénomènes suivants : (i)
émission d’un photon X d’énergie E2 (processus radiatif) ou
(ii) émission d’un électron Auger (processus non radiatif). La
2.3 Utilisation de la spectroscopie compétition entre ces deux phénomènes dépendra du numéro
d’absorption des rayons X atomique Z des éléments chimiques. Dans le cas des éléments
chimiques avec un faible Z, le processus non radiatif est
Dans le cadre de l’étude de la décoloration des peintures au
majoritaire ; pour les éléments chimiques à haut Z, le proces-
smalt, l’utilisation du rayonnement synchrotron a permis
sus radiatif devient majoritaire (figure 5 de [1]).
d’étudier des fragments de peintures grâce à deux
techniques : La principale propriété de la fluorescence des rayons X à
– la micro spectrométrie de fluorescence X (µ-XRF pour retenir dans notre cas est la valeur de l’énergie des photons
micro X-Ray Fluorescence) ; de fluorescence en fonction de l’atome excité. Comme illustrée
– la micro spectroscopie d’absorption des rayons X (µ-XAS dans la figure 2, la différence d’énergie entre les deux niveaux
pour micro X-ray Absorption Spectroscopy). énergétiques mis en jeu (niveau de cœur et niveau supérieur)
4
est propre à chaque atome, ce qui entraîne une spécificité de
2.3.1 Fluorescence X l’énergie des photons émis. En collectant ces photons de
fluorescence à l’aide d’un détecteur adapté [P 2 695], et
La fluorescence X a été présentée dans des articles puisque l’intensité de fluorescence est proportionnelle à la
précédents [P 2 695] [RE 200]. Dans celui-ci, nous ne ferons concentration en élément présent dans l’échantillon, il est pos-
que des rappels nécessaires à la compréhension des expérien- sible d’utiliser la fluorescence des rayons X comme une sonde
ces réalisées sur les échantillons de smalt. élémentaire. Le couplage de la fluorescence des rayons X avec
Le principe de la fluorescence X est la réémission d’un un système de platines de translation de l’échantillon permet
photon X suite à la désexcitation d’un atome préalablement notamment d’effectuer des cartographies élémentaires. La
excité. La figure 2 présente les différentes étapes de ce figure 3 présente un spectre de fluorescence des rayons X
processus. Dans un premier temps, un photon X avec suffi- enregistré sur une coupe transversale de peinture contenant
Niveau d’énergie
E1
Processus Processus
Non radiatif radiatif
L L
E2
K K
160
Référence Internet
RE224
RECHERCHE
Abstract : Lead-containing pigments, which have been widely used in paintings and
polychrome sculptures since antiquity, show a specific instability. The pigments
alteration often leads to a darkening of the pictorial layer, which is harmful to the aes-
thetic and understanding of the artworks. No specific restoration technique is available
to recover the original color of the discolored paint areas. The thermal properties of
lead compounds, however, allow to conceive a method based on continuous-wave laser
irradiation of the blackened layer. A set of experimental tests was achieved to optimize
the process, and validate the technique in a real situation of a restoration workshop.
161
Référence Internet
RE224
RECHERCHE
Points clés
Domaine : Technique de traitement
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Irradiation par laser continu
Domaines d’application : Restauration des œuvres d’art
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Industriels :
Autres acteurs dans le monde :
Contact : sebastien-aze@laposte.net
4
1. Contexte accompagnées par un blanchissement superficiel de la
couche picturale.
L’investigation scientifique des matériaux du patrimoine Ce phénomène spécifique de vieillissement est particulière-
historique et culturel a connu un essor au cours de la ment dommageable aux œuvres, l’aspect visuel pouvant être
deuxième partie du XXe siècle. Face à la nécessité de totalement dénaturé. En effet, dans les cas les plus extrêmes,
conserver les objets classés au titre des monuments la totalité de la couche picturale, d’une épaisseur de plusieurs
historiques et les œuvres des collections publiques et privées, dizaines de micromètres, est altérée. Les mécanismes
les outils et méthodes de caractérisation ont investi un champ régissant ces transformations ont fait l’objet de nombreuses
auparavant réservé aux matériaux de synthèse ou aux problé- publications, basées sur des essais de vieillissement artificiel
matiques géologiques. Ainsi, des méthodes complémentaires et sur les résultats d’analyse de micro-échantillons de peinture
d’observation et d’analyse sont employées pour affiner la prélevés dans des zones noircies. D’après ces analyses, le
connaissance des matériaux et des techniques de mise en noircissement est le plus souvent lié à la transformation du
œuvre ou, dans certains cas, pour des besoins de datation ou minium en plattnérite, la forme orthorhombique du dioxyde
d’authentification. Par ailleurs, des programmes de recherche de plomb (β-PbO2). Les conditions d’apparition de ces altéra-
sont mis en place pour comprendre les causes et les tions sont encore imparfaitement connues, notamment du fait
mécanismes des altérations observées sur les objets du patri- de la complexité des matériaux et des contraintes auxquels ils
moine, aidant à définir les meilleures conditions de sont soumis. En effet, les peintures murales présentent une
conservation des œuvres. structure et une composition complexes et subissent des
interactions multiples avec leur environnement : variations de
Une problématique récurrente concerne les phénomènes
la température, de l’humidité atmosphérique relative,
d’altération chromatique des pigments à base de plomb.
condensation superficielle, flux hydriques internes, éclaire-
Le minium – de couleur rouge – et le blanc de plomb, en
ment, pollutions, contaminations microbiennes, etc.
particulier, sont connus pour noircir après leur mise en œuvre.
Dans le cas du minium, ce phénomène est connu depuis le De fait, la rapidité et l’intensité du noircissement des
Moyen-Âge, avec notamment l’avertissement émis par pigments au plomb sont influencées par ces différents
Cennino Cennini dans le Livre de l’Art, un traité de référence facteurs. Un travail récent a notamment mis en évidence le
sur les matériaux et techniques artistiques : rôle majeur de polluants gazeux (SO2 , CO2), conjointement à
« Le rouge que l’on nomme minium est un produit de la la présence d’humidité, dans les processus de transformation
chimie. Cette couleur est bonne seulement employée sur du minium en plattnérite. Pour autant, il n’existe à ce jour
panneau. Si tu t’en servais sur mur, aussitôt qu’il verrait l’air aucune méthode spécifique de restauration susceptible d’être
il perdrait toute sa couleur et deviendrait noir ». mise en œuvre pour restituer aux zones altérées leur couleur
originelle.
De fait, ce phénomène est fréquemment observé en peinture
murale, où le minium a été largement employé depuis l’Anti- La recherche d’une technique permettant de restituer
quité. Ce pigment a été identifié – seul ou mélangé avec l’aspect original de la couche picturale, tout en rétablissant les
d’autres pigments – dans de nombreuses œuvres, en particulier propriétés physico-chimiques du pigment utilisé par l’artiste,
en peinture murale, sur des sculptures polychromes ou pour la est une démarche atypique, que justifient l’ampleur et la
réalisation d’enluminures de manuscrits. L’usage du minium valeur du patrimoine susceptible d’en bénéficier. Il s’agit
concerne des cultures variées, puisqu’on le retrouve aussi bien d’éviter les interventions destructives consistant à éliminer les
en Europe (Ier siècle av. J.-C.) qu’au Moyen-Orient (Égypte, IIe produits issus de l’altération du pigment. Nous présentons
siècle ap. J.-C.) ou en Asie (Chine, Ve siècle ap. J.-C.). Dans de dans cet article la démarche expérimentale et les résultats des
nombreux cas, on observe dans les zones peintes avec du essais qui ont conduit à mettre au point une technique opéra-
minium l’apparition de tâches brunes à noires, parfois tionnelle basée sur l’utilisation d’une source laser continue.
162
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RE224
RECHERCHE
4
métallique.
Après broyage et homogénéisation, l’acétate de plomb gène (figure 3), de même que la fragilité de la couche picturale,
est placé dans un four chauffé à température modérée, interdit a priori l’usage de traitements chimiques. Cependant, les
pour produire un mélange de cérusite (PbCO3) et propriétés physiques de la plattnérite permettent d’envisager un
d’hydrocérusite [2PbCO3 · Pb(OH)2]. Ce mélange, de procédé basé sur le traitement thermique de la couche altérée.
couleur blanche, est utilisé tel quel comme pigment, le En effet, la dégradation thermique de la plattnérite se produit par
blanc de plomb (ou céruse), ou sert de produit de départ le biais de pertes successives d’oxygène, menant à une réorgani-
pour produire d’autres oxydes de plomb de couleurs sation du réseau cristallin et à la formation d’oxydes inférieurs
différentes : une nouvelle cuisson entraîne la déshydrata- PbOn (1 艋 n < 2) . L’évolution de l’indice n en fonction de la tem-
tion et la décarbonatation de la céruse, et mène à la for- pérature a été étudiée par Otto en 1966 [4]. Ces transformations
mation de litharge, la forme quadratique du monoxyde de successives étant exothermiques, l’apparition des différents oxy-
plomb (α-PbO), de couleur jaune orangé. En augmentant des inférieurs en fonction de la température a pu être mise en
la température, et en assurant une bonne oxygénation du évidence par DSC (calorimétrie différentielle à balayage) par
matériau par brassage et renouvellement de l’air dans le Gravichev et al. en 2008 [5]. Lors d’un chauffage progressif de la
four, la litharge est transformée en minium (Pb3O4) de plattnérite, la dégradation suit la séquence suivante, chaque
couleur rouge vif. Ce dernier est parfois chauffé à plus étape se produisant dans un intervalle de température donné :
haute température pour produire du massicot, la forme – perte de molécules d’eau présentes dans le réseau
orthorhombique du monoxyde de plomb (β-PbO) de cou- cristallin de β-PbO2 (I) ;
leur jaune citron (figure 1). – dégagement d’oxygène gazeux et formation des différents
oxydes inférieurs : PbO1,89 (II), PbO1,43 (III), PbO1,29 (IV) et
PbO (V).
Figure 1 – Composés du plomb traditionnellement utilisés Figure 2 – Exemple de noircissement du minium utilisé comme
comme pigments : (a) blanc de plomb (hydrocérusite pigment dans les peintures murales de l’abbaye de Saint-Savin
2PbCO3.Pb(OH)2), (b) litharge (α
α-PbO), (c) minium (Pb3O4), (XIIe siècle) (crédit photo : D. Bouchardon, Laboratoire de recherche
(d) massicot (β
β-PbO). des monuments historiques, 2008)
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Référence Internet
RE274
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Points clés
Degré de diffusion de la technologie : Croissance
Technologies impliquées : Spectrométrie de masse par temps de vol à ions
secondaires
Domaines d’application : Patrimoine, archéologie
Principaux acteurs français :
— Centres de compétence : Laboratoire d’Archéologie moléculaire et structurale
(LAMS)
Contact : Alain Brunelle
1. Techniques
-
Nota bene : noms en français et acronymes en anglais : cet article est écrit en
français, mais la plupart des termes usuels et des acronymes sont en langue
anglaise. Ils seront donc définis en français et en anglais, puis l’acronyme anglais
1.1 TOF-SIMS
4
sera utilisé.
Il existe de nombreuses techniques d’analyse élémentaire qui
peuvent être utilisées pour étudier et caractériser la composition
chimique d’échantillons du patrimoine. Parmi celles-ci, la fluo- 1.1.1 Principe
rescence de rayons X, la spectroscopie infrarouge à transformée
de Fourier, la spectroscopie Raman, l’émission de rayons X Lorsqu’un ion accéléré avec une énergie cinétique de quelques
induite par particules sont des méthodes établies et largement dizaines de keV heurte une surface, il pénètre dans le matériau
utilisées (voir [RE 200], [RE 214], [P 2 557], [P 2 558], [P 2 865] en se ralentissant par une série de collisions élastiques, sur une
pour ces méthodes). Plusieurs techniques de spectrométrie de profondeur de plusieurs dizaines de nanomètres. Ces collisions
masse sont aussi utilisées pour accéder à des compositions induisent un endommagement du solide, les molécules organi-
moléculaires, comme la spectrométrie de masse couplée à la ques, éventuellement présentes selon la nature du matériau,
chromatographie en phase gazeuse, la désorption-ionisation sont détruites le long du trajet de l’ion primaire. L’énergie dépo-
laser assistée par matrice (MALDI), la spectrométrie de masse à sée près de la surface engendre l’émission d’ions, appelés « ions
source électrospray (voir [P 2 645] et [P 2 647] pour des articles secondaires », positifs et négatifs, d’atomes, de molécules neu-
plus généraux sur la spectrométrie de masse). Néanmoins, tres, d’électrons, et de photons (figure 1) [1]. Les ions secondai-
celles-ci nécessitent souvent une extraction préalable à l’ana- res ne sont émis que des premiers nanomètres (moins de 10)
lyse, et sont donc des méthodes qui sont considérées comme
près de la surface, c’est la raison pour laquelle la spectrométrie
étant destructives. La spectrométrie de masse d’ions secondai-
de masse d’ions secondaires est une méthode d’analyse de la
res, a contrario, lorsqu’elle est pratiquée dans les conditions qui
surface. Les ions secondaires peuvent être des fragments carac-
seront décrites par la suite, est une technique d’analyse de sur-
face, donnant accès à la composition minérale ainsi qu’aux molé- téristiques des molécules composant l’échantillon, ou des molé-
cules organiques, sur l’ultra-surface de l’échantillon, c’est-à-dire cules (M) intactes ionisées, sous la forme d’ion radical M+•, de
au maximum quelques nanomètres, ou éventuellement sur plu- molécules protonées [M+H]+, cationisées, généralement par le
sieurs microns. La préparation d’échantillon est généralement sodium ou le potassium (qui sont deux cations très présents sur
très simple, et ne nécessite aucune application de métal, de toutes les surfaces et les milieux biologiques), [M+Na]+ ou
matrice, ni aucune dérivatisation chimique. L’échantillon reste [M+K]+, en mode positif, ou de molécules déprotonées [M-H]-,
alors utilisable pour des analyses ultérieures par d’autres métho- en mode négatif, pour les types les plus courants. Ces ions ne
des comme celles citées plus haut dans ce paragraphe. représentent généralement qu’un dix-millième de l’ensemble
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Support
Traversées isolant
électriques
Canon à Pointe
Filament
électrons de Courant Extracteur
neutralisation de chauffage
Échantillon
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