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PAYEN Camille

Etude de l’impact de l’addiction sur le


vécu de la grossesse

Responsable : Anna Cognet Avril. 2022


SOMMAIRE

Table des matières


Introduction 2
Cadre théorique 4
Contexte de l’entretien 8
Présentation de la participante 9
Analyse de l’entretien 11
Conclusion 16
Référence bibliographique 17
Annexe 19

⮚ Introduction / résumé

La grossesse représente une période grande vulnérabilité physique et psychique dans la vie
d’une femme. C’est le théâtre d’un remaniement psychique important sous la forme d’une
crise identitaire profonde accompagnée de lourdes angoisses.

Ceci est d’autant plus vrai pour les femmes présentant un risque de naissance prématurée dont
Winnicott (1956, 1969) a observé la présence d’une réactualisation des angoisses primitives.

Or la consommation d’un objet d’addiction toxique (tabac, alcool …etc) durant une grossesse
(sujet de santé publique plus qu’important) augmente ce risque.

Au vu des risques pris par la mère en ce qui concerne sa santé et celle de l’enfant à naître
(infections, retard de croissance, malformations importance, naissance prématurée, voire mort
in utero), il nous paraît important de comprendre les processus et mécanismes mis en jeu.

Le présent article est une étude de l’impact d’une problématique addictive sur le vécu de
grossesse d’après un entretien clinique semi-directif d’une trentaine de minutes.
Cette recherche a pour but de mettre en évidence nos hypothèses selon lesquelles la
participante devrait présenter une forme de culpabilité vis-à-vis de sa conduite addictive ayant
mis l’enfant en danger. Elle devrait également évoquer des difficultés d’un point de vue
médical, émotionnel, mais aussi d’un point de vue d’un remaniement psychique et identitaire
important. De plus nous nous attendons à voir émerger du discours la notion d’angoisse, ainsi
qu’un surinvestissement de la relation dyadique mère / enfant dans un but compensatoire.

Pour ceci, nous avons réalisé plusieurs analyses de l’entretien, notamment une analyse
thématique et une analyse pour relation d’opposition (ARO) nous permettant globalement
d’affirmer que, malgré l’expression des éléments quelque peu différent de ce à quoi nous nous
attendions, la globalité de nos hypothèses ont tendance à se vérifier.

Mots clé : grossesse / addiction / parentalité / tabagisme / étude de cas

Partie Théorique
⮚ Cadre théorique

La grossesse est une période très particulièrement dans la vie d’une femme, elle représente un
moment de forte vulnérabilité physique et psychique ainsi qu’une période de grands
changements.

Ces changements à multiples dimensions sont l’occasion d’un remaniement psychique


important car elle est synonyme du passage d’une vie à une autre, le passage de la vie de
jeune femme à la vie de maman. C’est un processus de transformation vers une identité
nouvelle. Tel que la plupart des auteurs s’accordent à le souligner, la grossesse, de la même
manière que l’adolescence, représente une crise symbolique du passage d’enfant à celui de
jeune adulte, et est une période de conflictualité importante éveillant son lot d’anxiété et de
doutes. C’est notamment la problématique d’une nouvelle identité qui présente une
conflictualité psychique chez la femme enceinte. Il s’agit de reconstruire une nouvelle version
de soi, tout en concevant un nouvel individu, de nombreuses questions se posant en cette
période. Quelle personne veut-on être pour son enfant ? Quelle éducation donner ? Comment
être une « bonne mère » ?

Durant 9 mois, la femme doit faire face aux changements physiques important qu’induisent la
maternité, se faire à ce corps, à l’image de soi marqué à jamais par le passage de la vie, mais
également affronter tout ce que représente l’aboutissement de cela, dire adieu à la jeune
femme, devenir responsable d’un nouvel être en plus de soi. Il est nécessaire pour la mère
d’apprendre à coexister avec l’enfant à naître, apprendre à accepter ce corps bien qu’il ne soit
plus tout à fait sien, mais qu’il soit partagé.

Il semblerait que les sensations internes procurées par le fœtus aux environs du deuxième
trimestre joue un rôle non négligeable dans le remaniement psychique évoqué.

Comme l’exprime Dydlowski (2006) l’expérience de la grossesse est difficilement


communiquable, mettre des mots dessus n’est pas chose aisé, ainsi d’une certaine manière, la
gestation isole la femme dans une impression d’incompréhension notamment par le
compagnon et induit un besoin de référence et de soutiens féminin tel que sage-femme, mère,
sœurs, collègues.

Le remaniement psychique évoqué plutôt est dû à la fragilité que représente la maternité. Elle
est un moment de réminiscence du passé sous la forme d’affects douloureux, triste et
irraisonné de l’enfant qu’on été autrefois, comme l’exprime Monique Dydlowski (2006)

Selon Winnicott (1956 et 1969), chez les femmes présentant un risque de naissance
prématurée, on peut observer par la particularité de leur vulnérabilité, une réactualisation des
angoisses primitives (angoisse de morcellement, l’angoisse de ne pas avoir de relation avec
son corps, angoisse d’isolement, etc).

Or, les conduites addictives augmentent le risque de prématurité des enfants.

Selon le DSM V, on peut évoquer un trouble addictif lorsque l’individu manifeste au moins
deux des 11 critères définis durant une période de un an, (Annexe) tel « Craving ou désir
urgent de consommer. », « Tolérance, définie par l’une des manifestations suivantes : • Besoin
de quantités toujours plus grandes de la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet
désiré ; • Effets nettement diminués en cas d’usage continu de la même quantité de
substance. », « Poursuite de l’utilisation de la substance malgré la connaissance de l’existence
d’un problème physique ou psychologique persistant ou récurrent déterminé ou exacerbé par
la substance. »
D’après M’Uzan (2004) la consommation de drogue a pour fonction de rétablir un « tonus
identitaire de base », qu’il définit comme étant un élément essentiel qui permet au sujet de se
sentir complet et de maintenir l’unicité de soi.

Ainsi, selon lui, les personnes présentant une problématique addictive auraient une carence du
tonus identitaire de base, impliquant une incapacité à se sentir soi-même. Cette carence devant
être compensée par un apport extérieur, c’est-à-dire l’objet de l’addiction.

De plus, l’addiction sert également de décharge des affects et des éprouvés, il n’est pas rare
d’entendre un fumeur dire que la cigarette le « détend », le « calme » ou lui « permet de
relâcher la pression ».

Certaines études s’accordent à dire que le processus addictif est grandement similaire d’un
individu à l’autre.

On rencontre généralement le même type d’angoisse (angoisse de vide) ainsi que les mêmes
types de comportement observable.

De la même manière, on observe des similitudes flagrantes dans l’inscription du sujet dans le
processus addictif présenté par 3 facteurs lié à l’histoire et à la vie du sujet que l’on retrouve
de pour chacun des individus : les facteurs V.E.P (Vulnérabilité, exposition, produit)

● La vulnérabilité

Celle-ci est induite par certains traits de personnalités, aspects biologique et psychologique
des individus, qui joue leur rôle dans la recherche de sensation, la recherche de nouveauté et
un faible évitement du danger

En termes de comportement, ceux-ci s’en trouvent perturbés avec une tendance générale à
l’agressivité, l’impulsivité, ainsi qu’une augmentation des troubles affectifs.

Dans la vie des sujets présentant un comportement addictif, on observe la plupart du temps un
traumatisme vécu par celui-ci.

● L’exposition

L’exposition engage lui aussi 3 types de facteurs, c’est-à-dire des facteurs environnementaux,
des facteurs sociaux (âge, appartenance à un groupe sociale, initiation, etc.) et des facteurs
familiaux (visualisable à partir du discours du patients, se sont les habitudes familiales, les
consommations de l’entourage familiale par exemple)
● Le produit

Le type de produit consommé et ses caractéristiques influencent les comportements et


n'entraînent pas les mêmes conséquences sur les individus.

De manière générale, l’histoire de la consommation est classique, au début celle-ci est


contrôlée et satisfaisante, son but premier est la recherche de sensation, puis au fur à mesure
la consommation augmente jusqu’à la perte de contrôle. Celle-ci est maintenant devenue
addiction, et l’utilisation de l’objet n’a plus pour but la recherche de sensation mais plutôt une
stratégie d’évitement des conséquences lié au sevrage, c’est-à-dire que l’objet sert maintenant
de soutien face à l’anxiété notamment.

En France, 25 à 30% des personnes présentant une problématique addictive sont des femmes
selon Lejeune (2007)

Bien que le pourcentage exact de femme enceinte présentant une addiction ne soit pas établi,
nous savons qu’une majorité croissante de ces femmes présentant une conduite addictive sont
en âge de procréer.

A titre d’exemple, l’INSERM a réalisé en 2003 une expertise qui a permis d’estimer
qu'environ 1000 et 2500 femmes enceinte étaient sous Subutex (substitut aux opiacés) sur
l’année en France.

Pourtant, il est connu et reconnu que l’usage de toxique (tabac, drogues, alcool …etc) expose
aussi bien la mère et que l’enfant à naître à des risques très élevé de problèmes de santé tel
que des infections, des retards de croissance intra-utérin, des malformations importantes voire
à de lourdes complications médicales comme une naissance prématuré, ou pouvant même
mener à la mort in utero de l’enfant.

C’est pour cela que l’addiction dans une situation de grossesse est source de nombreux
doutes, et d’angoisses encore plus importantes que pour une grossesse classique.

La grossesse étant un temps de crise au cours duquel le changement est un point central,
celui-ci peut aussi bien basculer du côté de l’aggravation que de la diminution voire de l’arrêt
total de l’addiction.
Ce contexte de gestation permet à la femme de trouver une motivation pour arrêter mais peut
tout aussi bien être source d’une barrière supplémentaire, une source d’anxiété à laquelle il
faut faire face, donc une raison pour continuer voire d’accentuer la consommation.

Ainsi, on peut penser qu’il existe grossièrement 2 réactions opposés à l’annonce d’une
grossesse pour les femmes présentant une problématique addictive : arrêter ou continuer.

C’est d’après ces nombreux constats que nous nous sommes intéressés à la problématique
suivante : en quoi une problématique addictive peut-elle avoir un impact sur le vécu de la
grossesse ?

La grossesse devrait être vécue de manière singulière par chaque femme souffrant de
dépendance, c’est pourquoi nous avons décidé pour explorer notre sujet, de réaliser un
entretiens semi-directif personnel avec une femme ayant vécu une grossesse dans un contexte
d’addiction.

Nous pensons que la prise de risque que représente la consommation de toxiques durant une
grossesse aura tendance à faire émerger un sentiment de culpabilité de la part de la mère.

La participante devrait évoquer des difficultés durant le suivi de la grossesse en termes de


ressenti émotionnelle, et de bouleversement psychique et identitaire, mais également en
terme de suivi médicale.

Durant le récit sur le vécu de sa grossesse, notre participante devrait, selon nous, évoquer des
angoisses, notamment ciblé sur les angoisses primitives, la peur de ne pas être suffisamment
bonne pour son enfant.

Nous pensons également que la relation mère/enfant doit être impactée par la situation, par
une tentative de réparation de la mère auprès de l’enfant, investissant particulièrement la
relation.

Partie pratique :
*Par respect de l’anonymat tous les éléments permettant l’identification de la
participante ont été modifiées (Noms, Prénoms, enfants, conjoint … etc)
⮚ Contexte de l’entretien

Nous avons eu la chance d’être mise en contact avec Madame A* grâce à l’intervention de sa
cousine, une camarade de promotion en Psychologie à l’Université Picardie Jules Verne, qui a
vu passer mon annonce sous forme de Poster (Annexe) sur les réseaux Sociaux (Facebook).

Madame A a quasiment immédiatement accepté de participer à cette étude afin de partager


son histoire, mais avant cela, elle a tenu à préciser une chose sans que nous comprenions
vraiment pourquoi.

Madame A nous a précisé, grâce à l’intermédiaire de sa cousine, je cite « […] et je n’ai pas eu
de problème avec le tabac. Pendant ma grossesse, à part Lorenzo* qui a eu des soucie du
cordon ombilical autour du cou, et ça lui a causé une hydrocéphalie, donc il est hyperactif
aujourd’hui »

Ce message nous a mis la puce à l’oreille sur le fait que Madame A s’était fait une idée
préalable des attendus de l’étude malgré le peu d'explications fournies sur le poster.

Madame A, habitant à moins de 25 minutes de voiture, l’entretien a pu se faire chez elle, dans
sa chambre personnelle, malgré les conditions sanitaires.

L’entretien a été prévu environ 3 semaines à l’avance, pourtant, à la veille de celui-ci,


Madame A a invité des membres de sa famille pour le repas.

Ainsi, durant l’entretiens, 5 ou 6 enfants était présent dans l’appartement, et 3 autres adultes,
dont le conjoint de Madame A. Bien que nous nous soyons isolés dans une chambre à part, un
bruit constant venant des jeux des enfants ainsi que des discussions des adultes nous a
accompagnés durant la globalité de l’entretien.

Afin de mener l’entretien à bien, nous avons décidé de réaliser une grille d’entretien (Annexe)
en 4 points chronologique ayant servi d’appui tout au long de celui-ci. De plus, il a été
explicité à Madame A les éléments essentiels de l’étude.

Malheureusement, la tournure de l’entretien et des réponses de Madame A, ainsi que notre


manque d’expérience dans le domaine, nous ont obligés à modifier la façon de faire. En effet,
nous avons dû relancer à de nombreuses reprises l’entretien avec des questions plus ou moins
ciblées.

Grâce à l’accord signé de Madame A (consentement éclairé) l’entretien a été enregistré puis
entièrement retranscrit (Annexe) avant d’être supprimé.

L’entretien a ensuite été analysé de manière aussi complète que possible, dans son discours et
dans la gestuelle observée, c’est-à-dire d’un point de vue verbal et non verbal.

Présentation de la participante

Madame A est une jeune femme de 32 ans, maman de 3 enfants de deux pères différents.
Madame A vit en concubinage avec un homme depuis 6 ans environs, c’est une mère au foyer
dont la vie est rythmée par les rendez-vous médicaux presque journaliers pour ses enfants,
notamment son fils porteur de handicap mais également pour ses deux filles.

Madame A a commencé à fumer du tabac à l’âge de 12 ans, à son entrée au collège, puis a
continué avec plusieurs autres drogues à fumer en parallèle de la cigarette, pour désormais ne
consommer que cela.

Vers l’âge de 14/15 ans (niveau 3ème du collège), sa mère l’a mise à la porte du logement
familiale, l’obligeant à loger dans la rue, chez des amis ainsi que chez ses « fréquentations »
comme elle les appelle.

Sa première grossesse a eu lieu vers 18 ans, avec l’homme qui partagera sa vie durant 6 ans,
un homme violent et qui l’aurait trompé à de nombreuses reprises et qui sera également le
père du second enfant de madame A.

Cette grossesse était non désirée, et n’ayant toujours pas de logement, l’enfant a été à la garde
de plusieurs tiers (mère, sœur, père de l’enfant), mais presque jamais à la garde de Madame A,
durant environ 2 ans. 2 ans durant lesquelles Madame A continue de vivre sa vie
d’adolescente, à sortir faire la fête très régulièrement, à boire, à fumer plusieurs sortes de
drogues, et bien d'autres choses.

En réalité, la garde de l’enfant sera délivrée à Madame A a la suite de sa seconde grossesse


(toujours du même père), également non désiré qui sera pour elle un réel déclic dans sa vie.
Elle décrit l’accouchement comme étant un déclic lui permettant d’enfin se rendre compte de
son rôle de mère, de ses responsabilités. Après cet événement, Madame A cherche un
logement, arrête de sortir s’amuser, et prend ses responsabilités en main pour élever ses deux
petites filles. Elle décide également de quitter son conjoint à ce moment-là.

Sa seconde fille déclare quelques mois après la naissance, de lourds problèmes de santé la
menant à réaliser de nombreux et long séjour à l’hôpital durant 2 ans.

Quatre ans plus tard, Madame A rencontre un homme, avec qui, après 1 mois de relation, elle
conçoit son troisième enfant, une nouvelle fois non désiré. La grossesse sera le lieu de
multiples angoisse et problèmes de santé qui marquera Madame A.

A la naissance, le bébé ne respire pas, mais est rapidement réanimé par l’équipe soignante.

Depuis, cet enfant a lui aussi déclaré plusieurs troubles de la santé, menant à la déclaration
d’un handicap par la MDPH, et l’amenant à être suivi par plusieurs spécialistes de santé.

⮚ Analyse de l’entretien

Afin de réaliser l’analyse de l’entretien, nous avons décidé, dans un premier temps, de faire
une analyse thématique, c’est-à-dire par les thèmes les plus récurrents évoqués par la
participante, et ce de manière chronologique.

Avant-propos il est important de souligner que tous les thèmes n’ont pas été abordés car tous
n’étaient pas pertinents à analyser pour cette étude.

L’un des premiers thèmes abordés par Madame A est la santé de son fils.

En effet, l’une des choses qui nous a frappé immédiatement sont les premiers mots de
Madame A. « L’histoire c’est plutôt mon fils ». Voici la réponse fournie lorsque nous lui
expliquons en quoi consistait notre étude, c’est-à-dire de connaître en quoi une problématique
addictive peut avoir un impact sur le vécu de la grossesse. On pourrait penser qu’elle dévie le
sujet, qu’elle ne voudrait pas en parler, voire même qu’elle se serait préparée en amont. Mais
nous pensons que la réalité est tout autre. Madame A parlera longuement de son fils et surtout
de sa santé, revenant plusieurs fois sur le sujet, de même que la santé de seconde fille, ainsi, il
est intéressant de se demander si elle n’aurait pas fait elle-même le lien entre le tabac, la
grossesse et les problèmes de santé de ses enfants.

L’hypothèse selon laquelle Madame A aurait fait un lien entre son addiction et la santé de son
fils se confirme lorsqu’elle répète plusieurs fois « mais c’était pas dû au tabac hein ! »,
comme une défense, une tentative de nous convaincre et se convaincre en même temps mais
également faire face au jugement potentiel.

Il est probable que Madame A, en début d’entretien ne se sentait pas suffisamment à l’aise
avec nous, la poussant à établir des défenses direct, pour écarter l’hypothèse de son rôle et du
rôle de sa conduite addictive dans les problèmes de santé de ses enfants, en délayant le sujet
d’entrée de jeu et ainsi éviter que nous lui en parlions.

Le second thème évoqué, présent tout au long du discours, est le stress.

Comme nous avons pu l’imaginer lors de nos recherches précédentes, le stress et la peur font
partie intégrante du récit.

Madame A commence à aborder massivement la notion de stress pour répondre à la


semi-question « pendant la grossesse, ça vous a … ». Elle nous évoque du fort stress, de la
peur, en expliquant que ce stress fait partie intégrante de sa vie depuis toujours, que c’est « de
famille ».

Pour elle, ses grossesses ont été la source d’angoisse, pourtant Madame A ne donne pas
particulièrement d’indice sur les causes de ce stress. En revanche, plus tard, il nous sera
possible de mettre en lien cette notion avec la suite de son récit.

Parmi les thèmes récurrents, nous avons remarqué que Madame A évoque souvent la notion
de cause et d’origine des phénomènes « c’était dû à … » ou « c’était pas dû à … ».

Il semblerait que l’origine des événements est une place importante pour elle.
C’est d’après cette constatation, que nous avons pu faire le lien avec une seconde chose
marquante, son rapport au temps.

En effet, Madame A se réfère beaucoup au temps tout au long de l’entretien, en le répétant


plusieurs fois, par exemple « c’était il y a 2 ans, 2 ans ? oui oui c’est ça 2 ans, oui ».

Cette fixette pour le temps nous a longuement interrogé lors de l’analyse, puisque nous ne
parvenions pas à le rattacher à quelque chose de plus concret. C’est grâce à une subjection de
notre professeure que nous avons pu émettre une hypothèse intéressante, que l’on peut lié
également à la notion d’origine et de cause.

Madame A pourrait sûrement présenter une obsession du contrôle.

Il est probable qu’elle tente de garder un contrôle constant en faisant référence à des éléments
fixes tel que le temps. De plus elle se pose beaucoup de question sur les origines des choses,
et tente d’impliquer les autres dans les causes et conséquences des évènement, par exemple «
Ils aurait pu s’en rendre compte plus tôt », « ils me croyait pas, ils m’ont prise pour une folle
», « ils pensaient que c’était dû … que c’était normal ».

Ainsi, elle pourrait conserver le contrôle des éléments en se retirant de toutes implications
personnelles.

Lorsque Madame A raconte son histoire, elle estime que tout a commencé à une période
précise, le début de son adolescence.

Cette période à l’air d’avoir une importance toute particulière pour elle puisque le thème du
collège, de ces 12 ans, correspondant donc au début de l’adolescence, est évoqué à de très
nombreuses reprises.

Cette période a été celle du changement pour Madame A, elle explique que c’est le moment
où elle s’est mise à fumer, et à « fréquenter » un certain nombre de personnes.

L’adolescence étant, comme on le sait déjà, une période de crise identitaire profonde, de
changement et de remaniement psychique, nous n’avons pas été très étonnés qu’elle en fasse
un objet important de son discours.
Comme nous avons pu le comprendre encore une fois dans la partie théorique, l’adolescence
est en ce point similaire à la grossesse que cette période représente une crise identitaire, un
remaniement psychique important. C’est pourquoi, nous n’avons pas été surpris de constater
que le récit de son adolescence soit mêlé à celui de ses grossesses.

En effet, la période adolescents à semble-t-il était un moment de bascule dans la vie du sujet,
accompagné de son lot d’angoisse. Nous savons, d’après nos recherches dans la littérature,
que ces crises sont liées par leur manière d’exercer un profond changement de manière
durable et souvent difficile.

La difficulté générale de ses épreuves explique le fait qu’elle ait été suffisamment marquante
pour Madame A pour paraître aussi prédominante dans son discours.

Il est clair, dans l’ensemble du texte que Madame A insiste sur le fait qu’elle ne voulait pas
de ses enfants, c’est un élément qu’elle répète plus de 12 fois, et parfois même à la suite.

Et c’est ce point qui, selon nous, est le plus en lien avec la majorité des thèmes abordés car
c’est de ce non-désire que peut découler par exemple, du moins en partie, la quantité de stress
ressenti durant ses grossesses, mais pas que …

En effet, les grossesses de Madame A ont chacune été décrit longuement comme ayant été
très compliqué à vivre d’un point de vue psychique, par le stress engendré, mais également
par le fait qu’elle n’en voulait pas et que cela a causé un remaniement interne important.

Elle l’exprime à sa manière, « pendant la grossesse ça … ça travaille beaucoup vous savez,


beaucoup de stress, beaucoup de … de tout ça ». Grâce à ses mots, il est possible d’entrevoir
que de nombreux éléments sont entrés en jeu durant la grossesse, des éléments dont nous
avons fait l'hypothèse avant de mener cette étude.

Mais pourtant, on peut voir, lorsque l’on évoque sa relation avec ses enfants, que Madame A
se décrit comme étant tout pour eux, elle se place aux centre de leur intérêt. Elle exprime
n’avoir aucun répit, toujours sollicitée par ses enfants qui ne voudraient quasiment voir
personne d’autre que leur mère.
Elle évoque leur relation comme étant fusionnelle, « c’est des enfants à maman, ça c’est sûr !
».

Il existe un thème représentant un point de bascule dans l’histoire de Madame A, la naissance


de sa seconde fille, décrite comme un déclic dans sa vie, qui est d’ailleurs la seule date
précise, le 28 septembre.

« J’ai eu un déclic, ça a été ma protégée, et puis c’était MA fille »

Vécu comme une renaissance, ce déclic a été pour Madame A la ressource nécessaire pour
enfin se rendre compte de son rôle de mère (ce qui n’était pas le cas avant), elle explique que
ça lui a permit de se rendre compte des choses, de changer de vie, « arrêter mes conneries »,
Madame A a arrêter de boire à ce moment, à chercher un logement, mais a également décidé
de quitter son conjoint violent.

Ici on peut apercevoir le fossé qu’il existe entre sa première fille et le reste de la famille, ainsi
que son origine.

En effet, si cette naissance a été vécue comme un déclic pour prendre conscience du rôle de
mère qu'il incombait désormais, cela signifie surtout que durant ses deux premières années de
vie la petite première n’a pas été considérée comme étant sa fille. Ballotté de mains en mains,
je pense qu’Elena (la première fille) et Madame A n’ont pas construit ce lien si important de
la prime enfance.

« Ils ont 2 ans d’écart, donc 2 ans pour avoir un déclic comme quoi j’avais dû avoir le premier
avant … »

Il existe un réel fossé entre Elena et sa mère, que l’on explicitera un peu plus dans l’analyse
par relation d’opposition.

Il y a une problématique bien existante en ce qui concerne ce rôle maternel qui a été si
tardivement acquis par Madame A.
La naissance de sa seconde fille a pu être vécu comme une seconde naissance pour elle aussi,
la naissance de ce rôle, comme une rupture entre la jeune Madame A et la maman
d’aujourd’hui.

Pourtant, lorsque Madame A parle d’elle en tant que « maman » (terme employé plus de 40
fois), il est étonnant de constater que jamais elle ne l’évoque à la première personne du
singulier.

On remarque une sorte de dépersonnalisation, ou du moins une mise à distance du terme «


maman » si souvent usité. « Maman elle est pas … », « maman elle respire pas ».

Une hypothèse d’interprétation de ceci nous est venu au cours de notre réflexion, peut-être
qu’il existe une sorte double identité entre Madame A, la jeune femme insouciante qui voulait
juste vivre et s’amuser, et « maman », la femme responsable de ses enfants, qui doit assurer le
quotidien. Mais pourtant, ses deux parties d’elle coexistent pour une bonne raison, Elena.

En effet, Elena est arrivée alors que Madame A n’était pas encore psychiquement mère, elle
fait partie de l’histoire de la jeune femme, la Madame A d’avant. Ainsi, renoncer à cette
facette, et investir totalement le rôle de maman, c’est également renoncer à la jeunesse, à la
vie d’avant, mais aussi à ce petit bout d’histoire, à ce coche manqué du début de vie d’Elena.

Il est évident que tout ceci n’est que des hypothèses et des analyses subjectives et qu’une
trentaine de minutes d’entretien ne permettent pas d’affirmer quoi que ce soit.

Mais il nous paraît tout de même important de rattacher ce bouleversement avec la notion de
stress abordé plus tôt. En effet, il a déjà été démontré que les crises identitaires connues au
cours de la vie sont toujours accompagnées par de l’angoisse, plus ou moins forte.

Ainsi, il est naturel de voir émerger du discours de Madame autant de notion de stress,
d'angoisse. Par ailleurs, nous avons vu que Winnicott à démontré que les femmes présentant
un risque de prématuré, vivant d'autant plus d’angoisse que les femmes dont la grossesse est
plus classique.

Pour en finir avec ces analyses thématiques, nous pouvons conclure que le discours de
madame A est relativement riche et nous permet d’explorer les résultats sur la base de nos
hypothèses.
Nous avons notamment pu voir que Madame A a traversé un bouleversement identitaire
particulièrement intéressant lors de la naissance de sa seconde fille, dont nous avons pu faire
un lien avec la crise identitaire de l’adolence qui semble avoir une importance dans l’histoire
de vie de la participante. Nous nous sommes également attardés sur le fait que le stress et
l’angoisse ont beaucoup marqué le vécu de ses trois différentes grossesses. Nous avons
également pu voir que Madame A a rattaché d'elle-même la santé de son fils aux
conséquences de la consommation tabac durant sa grossesse, pouvant induire que Madame A
pourrait ressentir une certaine culpabilité masquée face à la situation.

Afin d’appuyer notre analyse première, analyse thématique, nous vous proposons d’étudier
une relation d’opposition conjointement à une analyse implicite du paragraphe étudié, qui
nous a semblé important de traiter dans le discours de Madame A car celui est en lien direct
avec sa première fille et leur relation.

Tout au long du discours Madame A semble créer une distance entre elle et sa première fille,
comme nous avons pu le constater plus tôt. D’ailleurs, ce phénomène est flagrant dans un
paragraphe en particulier.

Elle insiste de nombreuses fois pour faire la différence entre elle et sa fille lorsque l’on
évoque la relation entre les enfants et leur père. Dans ce paragraphe, elle évoque que sa fille
n’a pas de relation particulière avec son père, et que sur le sujet, Madame A lui laisse décider
entièrement.

Elle répète à 4 fois en très peu de temps « elle sait », mis en opposition par 3 fois avec « je
sais pas ».

On peut penser qu’à travers le sujet de la relation au père, Madame A ne nous évoque pas que
cela. On pourrait penser que, de manière plus générale, elle nous parle également de sa
relation avec sa fille, ce qui voudrait dire que Madame A ne la comprend pas, qu’elle ne sait
pas, elle dit même clairement « je sais même pas comment … j’arrive même pas à la
comprendre ».

Nous pensons qu’il est légitime d’émettre l’hypothèse que Madame A ne fait pas uniquement
référence au lien père/fille, mais plus globalement, au fait qu’elle ne comprend pas sa fille.
Ici on voit bien qu’elle installe une relation d’opposition entre sa fille, qui sait, qui a le
contrôle sur la situation, qui détient les clés du savoir, et elle qui ne sait pas, qui ne comprend
pas vraiment sa fille.

⮚ Conclusion

Pour conclure, revenons sur nos hypothèses de départ.

Premièrement, nous avions émis l’hypothèse selon laquelle la participante devrait présenter
des signes de culpabilité voire clairement évoquer cette culpabilité vis-à-vis du fait d’avoir eu
une conduite à risque durant la grossesse, qui aurait pu avoir de lourdes conséquences sur le
devenir de l’enfant.

Comme nous avons pu le constater, l’expression de cette culpabilité était très inattendue. Il a
été remarqué que celle-ci a peut-être été déplacée sur les autres en mettant en avant les
problèmes de santé de son fils et en se posant une position de défense directement. Madame A
manifeste une sorte de culpabilité que nous avons traité au travers de la santé de son fils mais
également dans son obsession du contrôle par la notion de cause, d’origine et par son rapport
au temps.

En ce qui concerne la seconde hypothèse, c’est-à-dire que nous nous attendions à ce que la
participante évoque des difficultés d’un point de vue émotionnelle, d’un point de vue d’un
bouleversement psychique et identitaire en plus d’un point de vue médicale, nous pouvons
désormais pensé que celle-ci est vérifié.

D’après l’ensemble de l’analyse effectué, il est clair que Madame A a vécu de grandes
difficultés émotionnelles durant ses trois grossesse, ne serait-ce que par la récurrence du
thème du stress et de la complexité.

Les difficultés émotionnelles rencontrées sont évidemment à mettre en lien avec le


bouleversement psychique et identitaire là aussi rencontré dans le discours de Madame A.
Nous avons pu explorer le fait que Madame A a vécu un renversement identitaire lors de la
naissance de sa seconde fille, ce qu’elle décrit comme un déclic, et que nous avons assimilé à
la naissance d’un second moi.

Cette notion de bouleversement a également été révélée au travers du thème de son


adolescence, théâtre de grands changements qui a été mis en parallèle avec le bouleversement
qu’ont représenté ses grossesses.

L’hypothèse avait été posée en amont concernant la présence d’angoisse et de peur,


notamment la peur de ne pas être une bonne mère pour ses enfants. Ici, l’exploration de la
relation entre elle et ses enfants a été particulièrement intéressante.

En effet, bien qu’elle exprime à de très nombreuses reprises qu’elle ne voulait pas de ses
enfants, Madame A a une relation très fusionnelle avec eux, que l’on pourrait interpréter
comme un surinvestissement de la relation.

Notre hypothèse allait dans le sens d’un surinvestissement dans un but compensatoire des
fautes commises, allant de pair avec la notion de culpabilité. Pourtant, le discours de Madame
A ne nous permet pas de faire un réel lien construit entre la force de cette relation, ce
surinvestissement, et une sorte de culpabilité, ou un but de compensation.

Ainsi, nous pouvons bien affirmer qu’il existe un surinvestissement de la relation mère /
enfants, malgré l’ambivalence présente, mais nous ne pouvons pas réellement en affirmer les
tenants et les aboutissants.

Ainsi, l’étude de Madame A nous a permis de confirmer les hypothèses générales, bien que
nous ayons été surpris par l’expression de chacun des éléments.

Il est nécessaire d’émettre quelques critiques au travail de recherche réalisé afin d’assurer
l’objectivité de celui-ci.

Dans un premier temps, l’exercice de l’entretien semi-directif, bien que particulièrement


intéressant et enrichissant, était une première pour nous et n’a donc pas était réalisé de la
meilleure des façons, ainsi nous n’avons pas su récolter toutes les informations qui aurait
permis d’explorer plus profondément les thèmes importants du discours.

De plus, il est nécessaire de préciser qu’un seul et unique entretien n’est pas suffisant pour
généraliser les résultats de cette étude.

Ainsi pour pallier cette limite, nous avons imaginé une solution.

De manière globale, il serait fortement intéressant d’étendre cette étude à plus grande échelle.

Il serait possible par exemple d’établir 3 groupes de femmes ayant une problématique
addictive, ou ayant eu cette problématique durant la grossesse. Nous pourrions imaginer une
étude avec trois groupes de 10 femmes chacun, par exemple un groupe ayant une addiction au
tabac, un groupe dépend de l'alcool, et un dernier dépendant aux opiacés ou substitut. Ainsi, il
serait possible d’analyser des points de différence ou de similarité dans les conduites
addictives durant la grossesse. Est-ce que la nature de l'objet de l’addiction joue un rôle sur
les impacts du vécu de grossesse ?
⮚ Référence bibliographique

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représentation de l’objet interne. Devenir, 13(2), 41. https://doi.org/10.3917/dev.012.0041

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déplacement de l’objet d’addiction vers le nouveau-né. La psychiatrie de l’enfant, 54(2), 433.

https://doi.org/10.3917/psye.542.0433

Géraldine Ursule, G. U. (2010). Grossesse et addictions (Thèse).

https://www.theses.fr/2009AGUY0301

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Qu’est-ce que l’addiction ? Archives de politique criminelle, n° 31(1), 9.

https://doi.org/10.3917/apc.031.0009

Simmat-Durand, L. (2002). Grossesse et drogues illicites. Déviance et Société, 26(1), 105.

https://doi.org/10.3917/ds.261.0105
Simon-Toulza, Caroline; Ghassani, Ali; Parant, Olivier.
Reproduction Humaine et Hormones; Paris Vol. 28, N° 1, (Jan 2015): 41-48.

D. Winnicott (1969), The mother-infant experience of mutuality, in Parenthood, éd.


Anthony and Benedek.

⮚ Annexe

1. Retranscription de l’entretien
🡺 Les blancs de moins de 5 secondes sont représenter par « … », ceux dépassant 5
secondes sont spécifiés.
🡺 « * » tous les informations (noms, prénoms, ville) ont été modifiées dans le but de
respecter l’anonymat

_____________________________________________________________________

*Signature des feuilles de consentement*

C : Vous en voulez une copie ?

A : Non, non, je te fais confiance, je m’inquiète pas … je ne m’inquiète pas

C : Parfait. Bon alors, j’explique un peu l’étude, et ...

A : Oui, un petit peu quand même !

C : Alors, c’est pas très compliqué, dans le cadre de mes études, je réalise un dossier de
recherche. Dans ce dossier de recherche j’ai décidé de travailler sur en quoi une conduite
addictive, donc pour vous, c’est le tabac c’est ça ?

A : non moi ça a pas été le tabac, enfin, les problèmes de santé à mon fils, non ça a pas été le
tabac

C : C’est surtout en fait, le vécu de votre grossesse, pour vous qui avez eu un problème
d’addiction à un moment donné

A : D’accord
C : Voilà, moi c’est surtout sur ça que je me centre, sur tout ce que vous avez pu ressentir, ce
que vous avez vécu, que ce soit physique, mental, tout ça, pendant votre grossesse, la premier
et/ou la deuxième, c’est ça ?

A : J’en ai trois, trois

C : Ah, trois, pardon … Et puis c’est à peu prêt tout, vous avez des questions ?

A : non

C : Bon bah alors je voudrais bien que l’on commence, que vous vous présentiez

A : Bah je m’appelle A*J'ai 32 ans … j’ai 3 enfants et je suis mère au foyer

C : Ok, d’accord

A : …

C : vous pouvez commencer à me raconter un petit peu, dans le sens que vous voulez, comment
ça à commencé ?

A : Bah l’histoire plutôt c’est mon fils, parce que mes deux filles ça s’est bien passé. C’est
mon fils, j’ai eu des gros problèmes de grossesse, qui n’était pas dû au tabac, qui n’était pas
dû … ils savaient même pas à quoi c’était dû … et quand mon fils il a était arrivé au début de
la naissance, enfin quand il est arrivé, avant qu’il arrive même, je sentais sa tête en bas et on
m’a prise pour une folle, on m’a dit que c’était pas vrai et qu’arrivé là, mon fils ça avait bien
la tête en bas mais il avait le cordon ombilicale autour du cou. Quand il est arrivé il était tout
bleu, tout bleu tout jaune, il respirait plus, il était mort quoi en fait. Et de là ils ont été obligés
de le réanimer et puis ça a continué avec des problèmes de vomissements, ça été des
problèmes … cardiaque. On s’est demandé d’où ça venait, ils lui ont fait passer un scanner et
arrivé là dans la scanner, ils ont vu qu’ils avaient fait une grosse bêtise parce que en fait il
avait tout le liquide amniotique qui était resté concentré dans son cerveau… donc il avait rien
rejeté en fait … donc il a eu une androcéphalie. Donc il a été suivi pendant 2 ans, oui 2 ans
c’est ça, 2 ans par un Kiné parce que c’était obligatoire, il fallait qu’il l’aide à s’assoir, il
fallait qu’il l’aide à marcher, il fallait qu’il l’aide à tenir sa tête, il fallait qu’il l’aide à tout,
parce qu’il savait rien faire tout seul et au jour d’aujourd’hui bah ça lui a causé de
l’hyperactivité, parce que bah … dû à son androcéphalie et bah ça joue sur les cervicales
mentales

C : d’accord
A : donc bah son liquide qui est toujours stagné, enfin il en a … enfin ça diminue quand a
grandi mais ça reste toujours au même endroit, donc ça fait qu’il en aura toujours, il en aura a
vie en fait.

Donc aujourd’hui il est suivi par une psychomotricienne, ergothérapeute, orthophoniste,


MDPH et psychiatre

C : mmh, ok

A : avec de l’hyperactivité

C : d’accord … et pour vous ? ça a commencé …

A : bah pour moi euh … bah je fumais et de toute façon je fume toujours (rire). Je fumais une
vingtaine de cigarette par jour pendant ma grossesse de Lorenzo* et bon … j’ai pas trouvé
beaucoup de changement … MAIS d’après les médecins c’est pas dû à la cigarette !

C : Mhh

A : après je perdais beaucoup de sang pendant ma grossesse, j’ai fait plus d’une fois des
aller-retours à la clinique mais sans aucun … sans aucun compte rendu, ils savait pas de où …
c’était normal quoi en fait

J’ai jamais eu vraiment mes réponses à ce que l’on demandait …

C : oui

A : Et … sinon ma grossesse à part ça … bon je buvais pas déjà .. je bois pas d’alcool donc …
(rire) … donc à part fumer, je faisais pas, enfin il y avait pas grand-chose de … non … parce
que c’est une grossesse qui m’a marqué donc … à part mes aller-retour à la clinique, tout le
temps parce que ça allait pas, je perdais du sang, j’avais mal au ventre, je le sentais plus
bouger, mais pour eux c’était normal donc il n’y a pas grand-chose à … le pire c’est la suite
quoi …

C : Ce qu’il se passe maintenant ?

A : c’est ça ! …

C : pendant votre grossesse, ça vous a fait … ?


A : bah pendant la grossesse ça … ça se travaille beaucoup, hein ? beaucoup de stress,
beaucoup de … beaucoup de stress, beaucoup de … et puis après j’ai pas une vie facile, déjà
avant donc …

C : mhh

A : j’ai fait mes deux premières toute seule donc c’était pas facile quoi, toujours peur que ça
arrive la même chose, toujours peur de … pleins de trucs … oui on va dire que j’ai eu une
grossesse beaucoup stressante oui … et je suis une stressé de la vie déjà moi-même donc …
c’est …

C : depuis longtemps ?

A : ooooh oui ! très longtemps ouais ! on est de famille a beaucoup beaucoup stressé, on se
stress pour un rien … on … ouais c’est de famille

C : (rire) je connais oui

A : (rire) c’est de famille donc … si le moindre petit truc il va pouvoir nous faire vriller c’est
le stress … c’est bon on a battu le record quoi …

*Long blanc qui ne repart pas*

C : Lorenzo* c’est votre troisième enfant ?

A : Oui le troisième 

C : le troisième, d’accord

A : j’ai ma première qui s’appelle Elena*, elle a 12 ans, et ma deuxième Léa* qui a 10 ans

*Long blanc qui ne repart pas*

C : et la cigarette, ça a commencé …

A : Ah la cigarette ! moi je fume depuis que j’ai 12 ans

C : Oui

A : j’ai commencé, j'étais au collège … ça date quoi

*Long blanc*

A : après je sais pas sur quoi je peux vous … vous aider
C : Alors moi, l’idéal serait que l’on approche doucement du moment où ça a commencé, le
tabac pour vous, et qu’au fur et à mesure on aille jusqu’à aujourd’hui ….. Peut-être comment
ça a commencé, puis évoluer, vos deux premières grossesse …

A : d’accord, bon bah on va tout remodifier alors

C : non non y a pas de soucis, continuez comme vous le sentez

A : Bah j’ai commencé à fumer j’avais 12 ans, j’étais au collèges, ouais tout à commencé
quand j’étais au collège toute façon (rire)

Bah la cigarette ça a pas trop était … j’ai fumé la cigarette, j’ai … fumé de la drogue, j’ai
fumé un peu de tout. En étant de quartier donc … on est un peu parti en cacahuète quand je
suis rentré au collège. Après le collège j’ai été jusqu’en 3 ème, ouais c’est ça, 3ème et j’ai arrêté.

C’était pas … l’école c’était pas du tout mon truc donc j’ai arrêté et puis après j’ai commencé
à fréquenter. Donc ça a été des fréquentations un peu à droite, à gauche, après ma mère en a
eu marre donc ma mère m’a foutu dehors.

Donc ça a été les fréquentations, après j’ai fréquenter des amis, enfin … ouais j’ai fréquenté
des amis, c’était … j’allais en boite et tout, donc c’était l’alcool, c’était … enfin c’était tout
pendant à peu près 3 ou 4 ans

*Blanc*

Après j’avais … je suis tombé enceinte de ma première, Elena*, qui a 12 ans au jour
d’aujourd’hui. La grossesse elle s’est super bien passé, je fumais aussi, j’ai jamais aussi arrêté
la cigarette, tout façon pour toutes mes grossesse.

J’ai essayé hein ! mais ça a rien donné donc j’ai beaucoup fumé mais par contre je buvais
plus, je continuais à aller en boite

La première ça été ... Ouais plutôt compliqué parce qu’en fait je me voyais pas être maman, je
… j’en voulais pas au début, c’était … je voulais m’amuser quoi, j’étais jeune, j’avais 19 ans
donc j’avais envie de m’amuser.

Donc après c’est ma mère qui la gardait un petit peu et après elle a été placée un moment chez
ma sœur. Ma sœur elle l’avait pris entre ses mains, parce que moi j’avais pas de logement, ils
m’ont menacé de la placer parce que j’avais pas domicile fixe pour moi-même.
Mais après c’est son père qui l’a eu en garde, je ne vie plus avec au jour d’aujourd’hui, son
père qui l’a eu en garde … pff ça ravive le passé (rire) … y a plein de truc que l’on aimerait
bien oublier

C : Ah oui

A : Bon après je l’ai … non j’ai été hébergé par des amis, donc je suis resté près de 9 mois,
donc j’ai récupéré la garde de ma fille parce que le papa, ça été une semaine et puis 2 semaine
et après c’était tout les week-end et c’était toutes les semaines donc au bout d’un moment j’ai
récupéré la garde parce qu’il voulait plus s’en occuper.

Après je suis tombé enceinte de ma deuxième, avec le même papa, la grossesse s’est plutôt
super bien passé sauf qu’arrivé à la naissance je passais mon temps à l’hôpital parce que ma
fille me faisait des absences, en fait elle fixait, elle fixait quelque chose mais elle était pas là.
On avait beau claquer des doigts, l’appeler, crier un coup, l’appeler « Léa*, Léa* », non Léa
elle était plus là, Léa* elle était partie loin et on a jamais su d’où ça venait non plus donc au
jour d’aujourd’hui elle est en Ulysse, elle a des gros problèmes de retard à l’école. Et pour eux
c’est dû à ce qu’elle a fait quand elle était petite, mais a jamais trouvé le problème.

Donc ça a été très compliqué … toute façon, elle a été à l'hôpital de sa naissance jusqu’à ses
deux ans.

Je passais une semaine à la maison, 3 semaines à l'hôpital, une semaine à la maison, trois
semaines à l'hôpital, je faisais que ça et puis du jour au lendemain, elle avait 2 ans, 2 ans et 3
semaines ? 2 ans et 3 semaines stoppé, plus rien. Léa* elle pète la forme, elle faisait plus
d'absence, elle était toujours là, elle courrait partout, elle sautait. On s’est demandé, pourquoi,
comment mais bon pour moi c’était un soulagement, j’me dis tout va bien d’un coup. Et puis
après ça a commencé qu’elle a pas arrêté à être malade, tout le temps, tout le temps, tout le
temps, elle avait rhinos sur rhinos, bronchites sur bronchites, otites sur otites, on a su qu’il y
avait un problème donc.

J’ai fini par aller voir les spécialistes et les spécialistes m’ont envoyé vers un ORL, donc j’ai
été voir, elle a été suivie pendant près de 2 ans.

Au bout de 2 ans après, elle avait 6 ans, ouais 6 ans c’est ça, à l’âge de 6 ans ils ont décidés de
l’opéré des végétations et des amygdales parce que c’était beaucoup trop gros en fait, ça lui
prenait tout … alors qu’ils auraient pu réagir avant et ça a pas été fait.
De là ils se sont fait opéré et elle s’est battu pendant 2 mois, ouais 2 mois, elle a été 2 mois
sans aller à l’école parce qu’elle était allongé, elle pouvait plus boire, elle pouvait plus
manger, l’opération elle l’avait vraiment mal pris, elle avait perdu 8 kilos, on a même cru
qu’on allait la perdre ce jour là, on a vraiment eu peur et … et depuis ce temps-là, là elle a 10
ans, et tout va bien ! Elle est plus malade, elle fait plus de Rhino, elle fait plus de bronchite,
elle a plus aucun microbe, sauf des gros problèmes d’allergies mais ça malheureusement c’est
un peu comme tout le monde

Et puis après j’ai eu … j’ai refait ma vie avec Romain où tout allait bien, moi je suis retombé
enceinte très très vite, ça faisait 3 mois qu’on était enceinte (rire) euuuh qu’on était enceinte,
qu’on était ensemble !

Et depuis ce temps-là Lorenzo* il a 6 ans et puis son problème de Céphalgie, il est suivi par
ses aides, enfin il est pas suivi ses aides, il est suivi par MDPH, ergothérapeute,
psychomotricienne, psychiatre, orthophoniste, tout ça 3, 4 fois par semaine …

C : Oui

A : Pour chaque organisme je suis prise le lundi, enfin la plupart du temps, le lundi, le mardi,
le jeudi et le vendredi, une semaine très chargée donc on voit pourquoi maman elle travaille
pas (rire)

Et puis bon là il faut une demande d’AVS … c’est ça AVS 2 exactement, c’est une AVS qu’il
doit avoir à longueur de journée à l’école pour pouvoir l’aider à se canaliser parce qu’il sait
pas rester assis, il faut toujours qu’il se lève, qu’il bouge, qu’il saute, qu’il jette tout, qu’il
fasse des grimaces, qu’il fasse rire tout le temps, un vrai clown de service.

(rire)

Des fois c’est marrant mais des fois c’est compliqué, c’est très compliqué … donc par … par
tout ça … on continue le petit bout de chemin. Il a rendez-vous là, lundi pour un bilan
supplémentaire, en plus de tous les bilans qu’il a pu faire, de tous les ergothérapeutes,
psychomotricienne et tout, pour voir quel traitement ils vont lui donner et ce qui compte …
dans quoi ils comptent l’avancé quoi, savoir où on va aller avec Lorenzo*

Mais pour ça je vous referais un petit vocal pour pouvoir le rajouter à la liste… donc voilà

C : D’accord, vous m’avez dit, globalement que les 3 grossesses un peu compliqué pour
vous ?
A : OH OUI ! Oui. Bon déjà la première j’en voulais pas, j’étais jeune hein ! je les ai tous eus
avec la pilule, je suis pas au dessus de la pilule, sur tout, donc … c’était magnifique (rire
ironique)

Je suis passé au-dessus de tout, à priori c’était dû à la cigarette que je passe par-dessus les
pilules.

Donc les 3 je les ai eu avec la pilule donc c’était des enfants pas voulu parce que moi j’en
voulais pas au début mais bon j’ai fini par l'accepter.

Mais bon ma deuxième, elle a été voulu sans être voulu parce qu’on la voulait pas maintenant
et bon bah elle était là donc je l’ai accepté et puis mon troisième c’est pareil, avec la pilule
mais j’en voulais pas du tout de suite non plus quoi parce que ça faisait que 3 mois que j’étais
avec le papa.

Si ça dure pas ? Si ça tient pas ? on fait comment ? et puis en fait je l’ai gardé parce que je …
je pouvais pas concevoir que … de l’élevé c’était pas possible, donc je l’ai gardé et puis tout
s’est bien passé sauf que … ouais les plus compliqué ça a été les deux premières ouais

C : Oui

A : le troisième ça a été dure mais pas question santé mais les deux première c’était
vraiment … non j’en voulais pas ! j’en voulais pas, j’en voulais pas mais ils sont là.

C : Oui

A : J’en voulais pas et puis j’étais pas aidé puisque j’étais cocu, battu, c’était pas … c’était pas
… je sais pas comment vous le dire, enfin comment TE dire, c’était pas vraiment des enfants
voulu quoi, je voulais pas de cette vie là.

Je suis resté avec le papa parce que je voulais pas qu’ils vivent sans père et puis ça a fini par
réellement cassé parce que j’en avais marre et puis … bah ils sont là quoi, que avec maman

C : Ils ne voient plus leur papa ?

A : la première elle le voit mais c’est très très compliqué, surtout que là aujourd’hui il a
d’autres enfants derrière, il a 9 en tout et les frère et sœurs, ils viennent de se faire placer y a
quoi ? y a 2 jours ? Donc c’est très compliqué et Léa non elle veut pas en entendre parler.

Bon Léa elle le connaît pas de toute façon

C : D’accord
A : ça s’est arrêté, j’avais 9 mois, elle avait 9 mois oui. Quand j’ai mis un stop à tout ça elle
avait 9 mois, donc elle a pas grandit avec, elle avait pas le ... Elle le connaît, elle sait qui c’est,
elle lui parle, « coucou papa, ça va ? » mais elle ira pas vers lui, elle ira pas passé un
week-end, elle ira pas le voir, elle ira pas … elle a pas le truc

Dans sa tête elle sait que c’est son père mais elle veut pas en fait, elle sait que c’est son papa,
elle sait qui c’est mais c’est pas son père, je sais pas comment vous l’expliquer, je sais même
pas comment … j’arrive même pas à la comprendre, c’est son père mais c’est pas son père
c’est … (rire) je sais pas

C : (rire) pas de soucis, vos mots me suffisent

A : Bah déjà c’est compliqué quoi, elle fait comme elle le sent, comme elle a envie, tu veux,
vas, tu veux pas, vas pas

C : Mhh Ok … D’accord

*Blanc qui ne repars pas *

C : vous m’avez parlez pour vos grossesse que c’était compliqué, que vous n’en vouliez pas
*blanc qui ne prend pas* il a eu autres choses qui a fait que c’était compliqué ?

A : Non, il y a eu que ça … ma première j’en voulais pas, j’avais envie de m’amuser j’étais
jeune, quand on m’a dit que j’étais enceinte j’avais 18 ans, j’ai pas l’âge d’être maman et
foutez moi la paix avec ça (rire)

Et puis j’ai suivi ma grossesse quand même, j’ai suivi correctement mais j’avais envie de
m’amuser donc je m’en occupais pas comme je devais m’en occuper.

Et puis ma deuxième j’en voulais, j’en voulais et j’en voulais pas, c’est parce que le papa il
était pas là, en fait il était pas présent, il était un coup à droite, un coup à gauche, sans savoir
que j’étais cocu, parce que je savais pas au début, donc il était là, il était pas là, il était là, il
était pas là, et je me sentais pas capable d’en élevé 2 toute seule, c’était pas … C’était pas
possible pour moi

Et puis les mois ils sont passé, ils sont passé, j’ai accouché le 28 septembre et bah j’ai eu un
déclic, ça a été ma petite protégée et puis, c’était MA fille et j’ai arrêté toute mes conneries,
j’allais plus en boite, j’ai cherché un logement, y avait que ma fille qui comptait, il y avait que
mes enfants qui comptait … mais ça a été quand même un peu euuh …
Ils ont 2 ans d’écart, donc 2 ans pour avoir un déclic comme quoi j’avais dû avoir le premier
avant et que là je venais d’avoir la deuxième. Ça m’a fait un déclic que quand j’ai accouché
de ma deuxième, dire « stop maman là il faut que tu arrêtes, tu en a pas un mais tu en a deux,
faut y aller mollo dans les bêtises »

C : c’est là que vous vous être rendu compte de

A : C’est ça !

C : d’accord

A : Et c’est là que je me suis rendu compte, que j’ai vraiment ouvert les yeux et que j’ai vu
que … j’étais pas toute seule dans la vie de mon ex conjoint. Et après une fois qu’on a trouvé
le logement, il m’a dit « ouais ça va s’arrêter gnagnagna », après ça été toujours cocu, battu,
mais je suis resté 6 ans quand même, comme ça

*blanc*

C : 6 ans ?

A : oui 6 ans, avec lui, comme ça, mais au bout d’un moment la maman elle a dit stop *blanc*
stop va voir ailleurs, c’est mieux pour toi, enfin y a même pas besoin d’aller voir ailleurs
parce qu’y a avait déjà quelqu’un d’autre donc il savait déjà où aller (rire) ça le dérangeait pas
trop (rire) … donc voilà

*blanc*

C : Durant vos grossesses, comment gérer votre relation avec la cigarette ?

A : J’ai essayé de ralentir. Essayé hein. J’ai même beaucoup essayé, parce que j’avais ralenti
un petit peu mais bon avec le … on va dire que j’avais pas une vie simple, avec le stress, le
papa qui est toujours à droite, à gauche, qui était toujours en train de râler, il comprenait pas,
il fallait toujours que je fasse tout toute seule.

Oui ça a été très compliqué, oui j’étais stressé donc … arrêté la cigarette en étant stressé alors
que je fumais déjà beaucoup c’était quasi impossible

Quand on est déjà stressé habituellement, là avec la grossesse et tout, c’est quasiment
impossible, celui qui arrive à la faire franchement je lui souhaite bon courage mais moi j’ai
tout essayé et non. Ça a pas du tout été possible pour moi.
C : De la même manière pour les 3 ? *blanc* Vous avez essayé … de ralentir ou
d’arrêter pour les 3 ?

A : Pour les deux premières ! je suis passé à … bah j’étais à une quarantaine de cigarettes,
parce que je fume beaucoup, je suis passé à une dizaine de cigarettes par jour.

J’ai beaucoup ralenti avec mon dernier … pendant la grossesse.

Mais après j’ai continué à ralentir sauf que quand il a commencé à grandir, qu’il a commencé
à faire voir son caractère, son hyperactivité, ses problèmes de santé, parce que c’est pas de sa
faute en fait.

Au début avec Lorenzo* on pensait que c’était des comédies, c’était du fait exprès mais à la
longue on voit très bien que l’enfant il est en stop quoi, même lui il en peut plus quoi.

Donc là j’ai recommencé la cigarette, à fumer, je fume beaucoup plus maintenant mais ce
qu’il fait …

Une fois qu'on est adepte à la cigarette, pour arrêter c’est dur, très dur.

*blanc qui repars pas*

C : Vos grossesses sont les seuls moments où vous avez tenté d’arrêter ?

A : non j’ai essayé entre deux, parce que même au jour d’aujourd’hui j’essaie. Mais c’est …
quand on a une vie un peu perturbée c’est très compliqué

C : Donc selon vous c’est plutôt le stress qui vous fait continuer ?

A : oh oui c’est ça mais après on a le stress comme nos habitudes en fait. Parce qu’on va pas
dire qu’il y a que le stress.

On a beau dire qu’on arrive pas à arrêter de fumer mais il y a quand même des habitudes
dedans et on a du mal à s'enlever, c’est la cigarette du matin, la cigarette après manger.

On a beau dire qu’il a du stress, qu’au arrive pas mais y' a quand même des habitudes dedans
enfin moi je prends comme ça.

Je sais que j’arrive pas à arrêter mais on voit très bien qu’il a quand même des habitudes, des
habitudes. Tu vois quand on a des habitudes, c’est comme manger tous les midis, manger tous
les soirs, c’est une habitude qu’on a tous les jours qu’on pourra jamais enlevé et la cigarette
c’est pareil en fait, c’est des habitudes qu’on a et qu’on se dit qu’il faut enlevé mais qu’on
arrive pas. C’est des habitudes qu’on garde, le rythme de vie

C : Oui

A : C’est un rythme de vie quoi, c’est comme manger tous les matins et tous les soirs, tous les
midis

*Blanc*

C : Vous direz que cela a eu un impact votre quotidien, sur avant, la grossesse, maintenant ?

A : mmmh je sais pas, franchement je sais pas du tout, parce que je vois que on dit souvent
que la cigarette c’est pas bon pour la santé sauf que moi j’en connais qui ont arrêté, ça fait 8
ans, et au jour d’aujourd’hui ça fait 8 ans qu’il est au cimetière alors qu’il venait d’arrêter la
cigarette et quelques mois après on lui dit qu’il a un cancer du poumon … alors qu’il a arrêté
de fumer donc je sais pas … je sais pas que … vraiment je sais pas sur la cigarette ce que je
pourrais vous dire, vraiment je sais pas quoi en penser

*blanc*

Ce dire voilà arrêter, alors que moi au jour d’aujourd’hui j’ai 32 ans et on vient de
m’annoncer un cancer de l’utérus. Est-ce que c’est la cigarette ? est-ce que c’est pas ? est-ce
que c’est les rapports ? est-ce que c’est … je sais pas.

J’ai pas mes questions à tout ça, enfin j’ai pas les réponses, j’ai pas les questions, j’ai … à
voir si c’est vraiment la cigarette ou … je sais pas

*Blanc*

Moi je dis que la cigarette elle a pas un impact sur tout.

Il y a qui fume pas, qui boit pas et on leur déclare des cancers on leur déclare n’importe quoi
comme maladie donc …

C : On vous à déclarer votre cancer récemment ?

A : Mon cancer ça fait 1 an que je vis avec, ça fait 1 an que je vis avec sauf que je viens de
recevoir seulement les résultats … ils avaient perdu mon dossier et quand ils me les ont
envoyés, ils m’ont envoyé mes résultats 1 an après, donc je sui suivi que là depuis 1 mois

C : D’accord
A : Mais ça fait 1 an que je suis atteinte du cancer de l’utérus ... et voilà … et un an après on
me dit « tout va bien madame, ça va, ça va aller ! » (Rire)

C : Vous êtes traité pour ça ?

A : Non, je suis seulement suivi, je passe une colposcopie le 4 Avril pour voir où ça en est, à
quelle stade et là on saura vraiment où ça en est, ce qu’on doit faire.

Parce qu’au bout d’un an faut faire un tas d’examens parce que ça fait quand même un long
moment mais bon y a un an c’était que covid, covid, covid, covid, covid, covid, covid et voilà
où ça en arrive. Les gens reçoivent leurs résultats un an après, qu’on leur annonce qu’ils ont le
cancer, c’est magnifique

C’est plutôt beau, c’est la vie

*long Blanc*

C: Est-ce que vous pouvez me parler de votre relation avec vos enfants ?

A : la relation que j’ai avec mes enfants ? Bon … (rire)

Avec ma première c’est vrai très très très compliqué, c’est une petite fille qui est beaucoup
réservée, renfermée, avec des problèmes psychologiques parce qu’elle a été touchée par tout
ce qui s’est passé.

Donc elle voit un psychologue tous les 15 jours pour vider ses émotions, son sac, donc c’est
pas vraiment … elle est toujours là à m’aider « maman, ça va ? Maman tu veux un coup de
main ? maman ceci » mais c’est pas la petite fille qui viendra me raconter tous ses chagrins en
fait, elle va rester dans sa bulle, elle va tout garder pour elle et puis quand ça éclate, ça éclate
quoi, donc ça peut durer 1 an, 2 ans, ça peut durer très longtemps.

Ma deuxième c’est la fille à maman. Elle vit pas 2 minutes sans maman, « maman fait ci,
maman fait ça, maman va là ». Elle va dormir chez personne, y a que chez maman, si elle voit
plus maman elle est … déjà même pour aller à l’école elle est très perturbée

Et puis Lorenzo*, bah c’est pareil c’est « maman, maman, maman » y a que maman qui
compte, que maman qui existe, papa il existe pas, il est pas là, beau-papa non plus, c’est
maman, maman, « maman fait-ci, maman fait ça, maman t’as pas ci, maman t’as pas ça ».

C’est les enfants à maman.


Léa* elle va me dire tout ce qu’elle pense, tout ce qu’elle ressent, Elena non, et puis Lorenzo*
si, il va me dire mais pas, pas de la même manière parce que c’est un enfant speed, un enfant
pour qui il faut que ça soit du « time-time », dans la seconde qui suit il m’a parlé, il faut que je
réponde, faut que je trouve la solution alors que des fois maman … maman non, j’ai pas de
solution, tu vas attendre un petit peu (rire), on va se détendre hein et on va en parler après.
Sauf que Lorenzo* c’est tac-tac-tac-tac-tac mais maman elle est pas tac-tac-tac-tac-tac des
fois (rire)

J’ai pas la réponse à tout

Mais sinon c’est des enfants, ouais plutôt maman, c’est plutôt maman oui, surtout les filles
oui, c’est maman qui les a élevés, et Lorenzo* c’est pareil, avec papa qui travail, c’est
beaucoup maman, maman, c’est maman qui l’amène à ses rendez-vous, c’est maman qui fait
tout. Parce que papa il peut pas travailler plus, oui c’est les enfants à maman

*Blanc*

Maman elle respire pas … des fois, quand ils sont à l’école

*Blanc*

Et voilà

C : Vous dites « elle ne respire pas » ?

A : Pourquoi je respire pas ? Bah parce que je passe ma vie au rendez-vous, toute la semaine,
entre l’orthophoniste, la psychomotricienne, la psychologue, l’ergothérapeute … je rentre, je
fais à manger, je fais le ménage et puis je les mets au dodo et puis après bah … bah … c’est
maman qui va coucher. Je respire que quand je dors.

Parce que c’est du boulot 2 enfants en mode handicap, en situation de handicap, plus ma
première avec des problèmes psychologiques par rapport à tout ce qui s’est passé avec son
père … ouais c’est, c’est du sport

C : quand vous me dites « tout ce qui s’est passé », vous faites référence à quoi ?

A : bah elle a tout vu, maman qui se fait taper dessus, papa qui allait toujours voir ailleurs,
papa qui partait à droite à gauche, il revenait quand il avait envie, après il l’a abandonné
pendant quelques années, il est revenu, il est reparti, ça a été prés compliqué

Surtout pour un enfant de son âge, à 12 ans, c’est très dur de devoir supporter tout ça
*blanc très long*

C : Vous voulez rajouter quelques choses ?

A : Bah non, tu as su … tu as su la plupart de ma vie, ma vie de … la vie de trou … euh non
… c’est bon

C : Dans ce cas là c’est bon pour moi aussi

A : Niquel, je t’envoie juste un petit exemplaire de ce qui va se dire Lundi pour Lorenzo*,
comme ça t’auras la fin

C : C’est comme vous voulez, il y a pas de soucis

A : d’accord

C : Bon, bien je vous remercie beaucoup

A : Bah c’est avec plaisir

C : C’est gentil de m’avoir accordé du temps, je sais que c’est pas facile de …

A : Oui, non c’est pas facile mais des fois ça fait du bien d’en parler, ça vide un peu le sac

C : vous n’en parlez pas souvent ?

A : Oh non, j’en parle jamais, oh non non, c’est pas des choses où on a envie de parler …
encore moins avec les enfants à côté … c’est pas toujours facile mais bon, faut avancer …
faut avancer dans la vie, on a pas trop le choix

C : Alors je vous remercie

A : y a pas de quoi, c’était sympas. Y a eu d’autres personnes pour votre travail ?

C : Non vous êtes la seule, et puis vous étiez la seule volontaire

A : ah bon ? Ah tu sais on m’a envoyé vers toi parce que je suis forte, je suis blindée moi
maintenant, je suis blindée, mes proches le savent, je peux encaisser, je suis blindée.

Mais c’était sympas, j’ai personne à qui en parlez de tout ça, alors j’ai bien aimé

*Fin de l’enregistrement*
2. Les critères du DSM V de l’addiction

3. Grille d’entretien

Question / thème à aborder :


● La chronologie de la problématique addictive (quand ça a commencé, avec quoi,
comment c’était reçu par l’entourage …)
● L’annonce de la grossesse (ressenti, idée, projet …)
● La grossesse en elle-même (point de vue médicale, familiale)
● La gestion de l’addiction ou du sevrage durant la grossesse (ressenti psychologique,
ressenti physique …)

4. Poster d’appel à candidature

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