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Connaissance de la nature
Collection dirigée par Christian Bouchardy
« Mieux connaître et sauvegarder », telle est la devise de la collection
« Connaissance de la nature », dont la mission est de réunir les meilleurs
spécialistes de la nature et de les mettre à la portée de tous. Les livres de
cette collection présentent, dans un langage simple et imagé, les dernières
connaissances scientifiques mais aussi les savoirs anciens et les légendes,
ainsi que les outils pratiques pour découvrir, sur le terrain, la vie
de la faune, de la flore et des milieux naturels.
Déjà parus dans la série Faune :
La Loutre, Christian Bouchardy.
La Tortue sauvage, Bernard Devaux.
Le Grand Coq de bruyère, Bernard Leclercq.
Les Mammifères en France, M.C. Saint-Girons.
Les Rapaces nocturnes, collectif.
Le Chant des oiseaux, collectif.
La Passion des oiseaux, collectif.
Dans la série Flore :
A la découverte des fruits sauvages, Eric Varlet.

Vous intéresse-t-il dette tenu au courant des livres publiés


par léditeur de cet ouvrage ?
Envoyez simplement vos nom et adresse aux
Editions Sang de la terre
30, rue Chapta!, 75009 Paris.
François Couplan

LES
PLANTES
SAUVAGES
COMESTIBLES
PR O M EN A D ES G A STR O N O M IQ U E S

D ESSIN S E T P H O T O S D E L 'A U TEU R


D ESSIN S C H A M PIG N O N S E T CAHIERS
EN C O U LEU R D E W -A B R U N E T

Editions Sang de la T erre


DU MEME AUTEUR :
Mangez Vos Soucis
Éditions Alternatives (1983) - (épuisé)
Plantes Sauvages Comestibles
Guides Point Vert - Editions Hatier (1985) - (épuisé)
Encyclopédie des Plantes Comestibles de l’Europe :
• Vol 1 - Le Régal Végétal - Éditions Debard (1984)
réédition Équilibres aujourd’hui (1990)
• Vol 2 - La Cuisine Sauvage - Éditions Debard (1984)
réédition Équilibres Aujourd’hui (1990)
■ Vol 3 - Les Belles Vénéneuses - Éditions Équilibres
Aujourd’hui (1990)
Retrouvez les Légumes Oubliés
Éditions Flammarion / La Maison Rustique (1986)
Vivre, en Pleine Nature
Éditions Bordas (1987)

En préparation:
Guide des Plantes Sauvages Comestibles et Toxiques
(Manuel d’identification) - Éditions Delachaux et Niestlé

© Editions Sang de la Terre, Paris 1992


ISBN : 0983-2238
ISSN : 2-86985-055-7
Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction réservés pour tous pays.
SOMMAIRE
• Introduction Page 1
• 15 promenades
Au printemps :
1) Salades printanières Page 15
2) Rosettes Page 23
3) Jeunes pousses Page 31
En été :
4) Légumes sauvages de l’été Page 39
5) Des fleurs dans nos assiettes Page 51
6) Nourritures des bois Page 59
7) Grignotez la montagne Page 65
8) Bords de mer comestibles Page 73
9) Aromates sauvages Page 79
En automne :
10) Fruits sauvages d’automne Page 91
11) Le ramassage des graines sauvages Page 101
12) Les champignons Page 109
En hiver :
13) Compagnes hivernales Page 117
14) Fruits des gelées Page 129
15) Déterrons les racines sauvages Page 139
Postface : venez vous promener avec nous Page 147
Liste des recettes Page 149
Index et table de concordance français-latin Page 151
CROQUEZ
LA NATURE * t *

Vouloir manger les plantes qui pous­ gressivement étendue, la cueillette


sent autour de nous peut sembler continua jusqu’à nos jours à tenir une
une drôle d’idée. Et pourtant... place importante dans l’alimentation,
en Europe comme ailleurs. Si son
importance augmentait en période de
Cueillette et culture famine (dont on peut d’ailleurs tou­
D’après les spécialistes, cela fait envi­ jours retracer les origines à des
ron trois millions d ’années que causes politiques), il serait erroné de
l’homme est apparu sur terre. Et les penser que les populations ramas­
premières traces d’agriculture ne saient les plantes sauvages à contre­
remontent guère à plus de dix mille cœur : il s’agissait de traditions
ans. Que s’est-il donc passé entre ces appréciées, et agréables. Ne prenez-
deux dates? L’image de nos ancêtres vous pas plaisir à consommer des
vêtus de peaux de bêtes et se nourris­ champignons, des myrtilles ou des
sant exclusivement de viande n’a pas fraises des bois?
grand chose à voir avec la réalité : si
la chasse a eu une importance consi­ Les plantes sauvages
dérable dans le développement social tombent dans l’oubli
et technologique de l’homme, ce der­
nier consommait quotidiennement Mais depuis la fin du Moyen Age, la
une abondance de plantes. La part cueillette s’était trouvée de plus en
de l’alimentation végétale des diffé­ plus dévalorisée. La société féodale
rents chasseurs-cueilleurs que l’on a était clivée en deux parties inégales et
pu étudier est généralement de loin totalement différentes. L’immense
supérieure à celle du produit de la masse des paysans se nourrissait de
chasse. céréales et de légumineuses, de
Pendant la plus grande partie de légumes rustiques qui poussaient sans
son existence, l’humanité s’est donc difficultés, et de nombreuses plantes
essentiellement nourrie de plantes sauvages régulièrement ramassées. A
sauvages. Même après l’apparition de l’autre extrémité, les nobles puis les
la culture, d’abord localisée puis pro­ bourgeois consommaient surtout de
7
Introduction
la viande, du pain blanc, du sucre et l’homme moderne, et les plantes
des produits raffinés. Leurs légumes qu’elles procurait se trouvaient liées
et leurs fruits étaient surtout d’origine dans le souvenir de ceux qui les
exotique et la culture en était délica­ avaient connues au spectre des
te, mais ils pouvaient se permettre disettes...
d’avoir des jardiniers spécialisés pour Le développement progressif des
les cultiver. Ce processus s’accentua industries agro- alimentaires allait
avec les « grandes découvertes », où également contribuer à ce processus
les expéditions lointaines rapportaient d’appauvrissement en diminuant de
de tous les coins du monde de nou­ façon radicale le nombre d’espèces et
veaux produits végétaux. de variétés cultivées et commerciali­
Il est intéressant de constater que sées.
ces produits forment la base de notre
alimentation actuelle. Ce n’est pour­
tant pas qu’ils soient meilleurs pour Les mille vertus des plantes
nous, puisque la diététique moderne Les plantes sauvages sont fortes car
les attaque vivement. Mais ce qui elles poussent spontanément aux
s’est passé est bien facile à com­ endroits qui leur conviennent le
prendre. mieux et sont soumises aux lois de la
La nourriture des paysans était for­ sélection naturelle. Leur valeur nutri­
tement dévalorisée : ces rustres (du tionnelle est généralement remar­
latin ms, campagne) qui se nourris­ quable : ce sont de véritables concen­
saient de « racines » semblaient à pei­ trés de vitamines et de sels minéraux.
ne être humains! Dès que les révolu­ Le cynorrhodon contient par
tions économiques et sociales leur exemple trente fois plus de vitamine
permirent de quitter leurs champs, ils C que le citron! Les feuilles des
m ontèrent en ville pour devenir légumes sauvages renferment aussi
ouvriers. Là, ils s’em pressèrent d’importantes quantités de protéines
d’adopter le mode de vie valorisé des complètes, équilibrées en acides ami­
bourgeois, et en particulier leur mode nés essentiels. Il est d’ailleurs facile
d’alimentation. Par contrecoup, tout d’observer que ces végétaux, les plus
ce qui pouvait rappeler leur statut anciens aliments de l’homme, rassa­
antérieur était oublié. C’est ainsi que sient rapidement. En plus de leurs
se perdirent rapidement des tradi­ vertus alimentaires, ils nous permet­
tions millénaires, enracinées dans une tent de profiter de leurs propriétés
terre délaissée. Les légumes rustiques médicinales, sous forme curative et
traditionnels, pourtant tellement bien surtout préventive. Les Anciens le
adaptés à nos sols et à nos climats savaient bien puisque Hippocrate
(comme par exemple le panais) disait déjà: « Que ton aliment soit ton
n’étaient plus cultivés. La cueillette remède! »
devenait une activité indigne de Aller chercher soi-même sa nourri­
8
Introduction
ture dans la nature n’est pas seule­ de ne pas le laisser perdre. Parmi ces
ment un agrément. C’est aussi une végétaux oubliés figurent peut-être
source intarissable de bienfaits pour nos aliments de demain!
l’organisme. M archer, respirer à Aliments de santé, nous l’avons vu,
fond, s’exposer au soleil et à l’air loin mais aussi aliments de plaisir avec
du stress urbain permet de retrouver les centaines de saveurs nouvelles
un équilibre indispensable, tant sur le que nous perm ettent d’apprécier
plan psychique que physique. La les plantes sauvages. Quelques
cueillette des plantes sauvages est exemples? Les feuilles de plantain
d’ailleurs une stimulation pour tous ont un curieux goût de champignon.
nos sens, qu’elle nous aide à redé­ Celles de la consoude, trempées dans
couvrir, car vue, toucher, odorat et une pâte à crêpe et frites à la poêle,
goût sont constamment sollicités. Et rappellent étonnament les filets de
quelle joie dans la découverte d’une sole... en moins cher! Quant à la
nouvelle plante, qui sera peut-être tendre stellaire, c’est à la noisette
une nouvelle amie... C’est l’occasion qu’elle fait penser. Et les cormes-
de percer cet « écran vert » un peu blettes : crémeuses, aromatiques et
inquiétant qui nous entoure. Notons sucrées, elles évoquent quelque mys­
d’ailleurs que l’on préconise depuis térieux fruit tropical... Que de trésors
l’Antiquité pour se sentir bien en soi- méconnus!
même et dans son environnement de Trésors nourriciers, dont la
consommer essentiellement ce qui connaissance pourrait s’avérer utile
pousse en saison à l’entour de sa rési­ au cas où il serait véritablement
dence. Que trouver de mieux pour nécessaire de « survivre ». Une forte
cela que les plantes sauvages gorgées crise énergétique, sociale ou écono­
de force vitale? mique n’est malheureusement pas
totalement impensable. Et puis on
peut se perdre en forêt... ou simple­
Un patrimoine utile et agréable ment désirer alléger son sac à dos
La flore européenne comprend envi­ d’encombrantes boîtes de conserve!
ron 12 000 espèces de plantes vascu­ Savoir que, où que l’on soit, on trou­
laires. Sur ce nombre, près de 1 200, vera toujours de quoi se nourrir, se
soit quelque 10 %, ont été utilisées sentir « chez soi » dans la nature,
par nos ancêtres pour se nourrir, ce donne une force dans laquelle il sera
qui représente une variété remar­ possible de puiser en tous temps.
quable par rapport à la cinquantaine
de légumes et de fruits actuellement L’homme et la nature
cultivés. Cette connaissance tradition­ Mais quelles que soient les circons­
nelle fait partie de notre patrimoine, tances, il ne s’agit pas bien sûr de
et, à une époque où l’érosion géné­ ramasser n’importe quoi. Certaines
tique est à l’ordre du jour, il importe plantes sont toxiques et il convient de
9
Introduction
bien les connaître. Il peut exister aus­ de son importance vitale : la terre est
si des problèmes de parasitoses, et véritablement notre mère nourricière!
même les meilleurs végétaux devien­ Il est temps d ’ailleurs de s’en
nent dangereux lorsque la pollution rendre compte. Depuis qu’il est sur
s’en mêle. C’est ainsi que la cueillette terre, l’homme, faible créature au
des plantes nous rend encore plus départ, n’a cessé de développer les
sensibles à la qualité de notre envi­ moyens de se battre contre la nature.
ronnement. Son cerveau s’est montré remarqua­
De plus en plus d’espèces voient blement efficace. Trop même, puis­
leur existence menacée, principale­ qu’il est maintenant arrivé à un point
ment par la destruction de leur habi­ où il ne peut plus continuer dans
tat. Il faudra évidemment s’abstenir la même voie. Et il n’en a d’ailleurs
de les cueillir. D’ailleurs les meilleurs plus besoin. Ce qu’il doit apprendre
légumes sauvages se rencontrent par­ aujourd’hui, c’est à trouver un équi­
mi les plantes les plus communes et libre nécessaire entre la nature et
les plus abondantes, autrement dit les lui-même. Et nous sommes tous
« mauvaises herbes », bien trop sou­ concernés.
vent détruites. Une cueillette intelli­ Il n’est pas impossible que « cro­
gente ne doit donc nullement mettre quer la nature » puisse progressive­
en danger la nature. Bien au contrai­ ment mener à un rapprochement de
re, elle développe le respect de l’indi­ ces deux pôles, le sauvage et le civili­
vidu face à ce qui l’entoure, par la sé, entre lesquels se joue la vie. C’est
prise de conscience directe, concrète, en tous cas ce que je souhaite!

10
A PROPOS DE CE LIVRE
Ce livre comporte quinze prome­ ainsi récemment changé de nom. Les
nades au fil des saisons dans divers Labiées sont devenues « Lamiacées »;
environnements, de la montagne à la les Crucifères, « Brassicacées »; les
mer, à la recherche des légumes, des Ombellifères, « Apiacées »; les Com­
fleurs et des fruits sauvages de nos posées, « Astéracées », etc. Il suffit de
régions. Nous irons aussi ramasser le savoir...
quelques champignons. Au cours de
chaque promenade, vous trouverez La plupart des plantes sont illus­
plusieurs recettes pour vous per­ trées au trait dans le texte, et une
mettre d’accommoder votre cueillette soixantaine d’entre elles ont leur pho­
une fois rentrés chez vous. Je n’ai pas to dans les planches en couleurs pla­
jugé utile d’en donner pour les cham­ cées en hors-texte. Mais ce guide
pignons car il est beaucoup plus n’est pas un manuel d’identification
habituel de les préparer. Aucune de en soi. Il sera important, si les des­
ces recettes ne comporte de quantités criptions des plantes ne sont pas suf­
précises en ce qui concerne les ingré­ fisantes, de le compléter avec une flo­
dients. Il me semble im portant re ou avec un manuel conçu à cet
d’apprendre à « sentir » pour déve­ effet... par exemple le « Guide des
lopper ses propres recettes plutôt que Plantes Sauvages Comestibles et
de suivre des indications trop Toxiques » (Editions Delachaux et
étroites. Ceci permet davantage de Niestlé) du même auteur. Soyez tou­
créativité culinaire. jours certain d'avoir correctement
identifié la plante que vous désirez
Les noms des plantes en gras dans ramasser. A ttention : certaines
le texte sont repris dans des enca­ espèces sont dangereuses, et d'autre
drés, qui donnent leur équivalent sont menacées d'extinction. Rensei­
botanique : nom de genre, nom gnez-vous sur les plantes protégées
d’espèce et famille. Dans le texte, les dans votre région (Ministère de l'en­
noms des familles sont ceux que l’on vironnement en France et en Bel­
a l’habitude d’utiliser dans le langage gique, autorités cantonales en Suis­
courant, tandis que dans les enca­ se).
drés, ce sont les noms actuellement
employés par les botanistes qui sont Mais assez parlé. Il est temps de
donnés. Car quelques familles, peu partir en promenade, à la cueillette
nombreuses mais importantes ont de la nature!

11
PRINTEMPS
1 - SALADES
PRINTANIERES
Le retour du printemps! C’est pour les « plantivores » que nous sommes
l’une des plus grandes joies de Tannée, la promesse de cueillettes abon­
dantes dans la nature reverdie. Avril et mai sont les mois des jeunes
pousses tendres, des feuilles délicates aux saveurs toutes fraîches, des
boutons prêts à éclore en fleurs multicolores... ou souvent déjà éclos.
Que de douces salades en perspective pour nous redonner vie après la
saison du repos! Allons vite remplir nos paniers.

A peine franchi le pas de la porte, finesse de sa saveur demande qu’on


voici qu’un tapis vert touffu arrête l’accompagne, crue en salade, d’une
nos regards. Penchons-nous pour y sauce légère pour pouvoir s’en délec­
contempler d’adorables petites étoiles ter au mieux.
blanches perdues dans un épais Et dire que d’aucuns la traitent de
feuillage : ce sont les fleurs de la stel­ « mauvaise herbe »! Il est vrai qu’elle
laire. Cette plante si commune dans aime à s’étendre au milieu des
les jardins ou les bois frais nous légumes du potager, mais n’est-ce
accorde toute Tannée le plaisir de pas un don du créateur que d’y faire
cueillir de tendres salades au goût de pousser toutes seules des plantes
noisette, mais elle est maintenant au capables de nous nourrir agréable­
meilleur de sa forme. N’hésitons pas ment sans avoir à fournir d’autre
à récolter ses tiges, ses feuilles et ses effort que de nous pencher pour les
fleurs car tout est bon chez elle. Du récolter?
moins en cette saison : plus tard, les Mais attention, s’il arrive que Ton
tiges deviendront fibreuses et seules nomme la stellaire « mouron blanc »
les extrémités seront bonnes. Quelle ou « mouron des oiseaux » - parce
plante délicate que la stellaire! La que ces derniers aiment à la picorer
15
Au printemps :-

STELLA IRE
Stellaria media Famille des Caryophyllacées

Voici quelques idées de sauces de M Mouron rouge : Anagallis arven-


salade pour accompagner ce délicat sis, famille des Primulacées.
légume :
• Guacamole : écrasez un avocat,
puis ajoutez un jus de citron, de
l'huile d'olive, de l'ail pressé, du sel
et du paprika pour obtenir une purée
onctueuse.
• Tahin : délayez de la purée de
sésame (tahin) avec un jus de citron,
puis incorporez délicatem ent de
l'h u ile , comme pour une m ayon­
naise. Salez. Si la sauce « tourne »,
ratrappez-la en y ajoutant un peu
d'eau.
• Yaourt : délayez un yaourt avec un
peu de vinaigre, de la moutarde, de
l'huile d'olive et du sel.
• Aux noix : placez dans un mixer
des cerneaux de noix avec du tofou
{caillé de soja), un peu d'huile et de
vinaigre, du sel et un soupçon de noix
muscade fraîchement râpée. Mixez
pour obtenir une crème, à diluer avec
de l'eau si elle est trop épaisse.

— n ’allons pas pour autant la Mais avant la floraison? Il suffit


confondre avec le mouron rouge. La d’observer que les feuilles du mouron
différence saute aux yeux lorsque ce rouge sont couvertes sur leur face
dernier est en fleurs : ses cinq pétales inférieure d’une multitude de petits
aigus au sommet sont d’un rouge points bruns, contrairement à celles
brique ou souvent d’un splendide de la stellaire qui sont d’un vert uni.
bleu intense — alors que les pétales D ’autre part, les tiges de cette der­
de la stellaire, profondément divisés nière sont parcourues, d’un point
en deux (on dirait qu’il y en a dix, ce d’attachement des feuilles à un autre,
qui donne à la fleur un aspect délicat par une ligne unique de poils blan­
et fragile)— sont d’un blanc virginal. châtres bien visibles. Les tiges du
16
Salades printanières
mouron rouge, elles, sont glabres. Par dame Nature fait pousser à foison.
contre elles comportent quatre angles Voici un autre de ses précieux
alors que celles de la stellaire sont cadeaux : la bourse-à-pasteur. On
rondes. la nomme ainsi parce que ses jolis
Eviter la confusion entre les deux petits fruits en forme de cœur res­
plantes ne relève pas que de l’exer­ semblent aux sacs que portaient
cice d’identification car si la stellaire autrefois les bergers. Mais il est
est l’une de nos meilleures salades, le encore trop tôt pour les voir : pour
mouron rouge peut quant à lui se l’instant, la plante ne fait qu’étaler ses
montrer toxique du fait de sa forte rosettes de feuilles découpées sur le
teneur en saponines (des substances sol des jardins en friches. Ramas-
« moussantes » qui peuvent provo­ sons-les comme les pissenlits (aux­
quer l’hémolyse). Mais vous verrez, il quels elles ressem blent bien
n’est pas bien difficile de distinguer qu’appartenant à une famille toute
la stellaire du mouron et c’est en différente) en coupant la racine à
toute tranquilité que vous pourrez quelques centimètres sous la base des
déguster cette « bonne herbe » que feuilles pour récolter la rosette
BO U R SE-A -PA STEU R
Capsella bursa-pastoris Famille des Brassicacées

Recette : Légumes velours


• Faites cuire à l'eau des rosettes de
bourse-à-pasteur accompagnées de
jeunes feuilles de primevère.
• Egouttez-les et hachez finement.
• Préparez une bécham el épaisse
avec de l'huile d'olive, de la farine,
de l'eau et du lait. Salez et aromatisez
d'un souffle de muscade.
• Mélangez la sauce et les légumes,
parfumez de cerfeuil frais haché et
versez dans un plat creux.
• Parsemez la surface de petits mor­
Bourse-à-
ceaux de beurre et faites réchauffer à pasteur
four moyen.

PRIM EVERES
Primevère officinale : Primula veris
Primevère élevée : Primula elatior Famille des Primulacées
Primevère vulgaire : Primula vulgaris

17
Au printemps
entière. Nous en préparerons un déli­ encore de goûter un fragment de
cieux légume rien qu’en passant ces feuille : la bourse-à-pasteur, en bonne
tendres feuilles à la vapeur, à dégus­ Crucifère, possède une saveur rappe­
ter avec un morceau de beurre ou un lant très nettement celle du chou,
filet d’huile d’olive, un jus de citron alors que les Composées ont un goût
et une pincée de sel. C’est ainsi que « de pissenlit » bien différent.
pratiquent les Grecs, qui savent Chez les graines de la bourse-à-
varier leur alimentation printanière pasteur, c’est la moutarde que l’on
grâce aux nombreuses plantes sau­ retrouve. Piquantes à souhait, on
vages qu’ils récoltent en cette saison. peut d’ailleurs les utiliser comme
La bourse-à-pasteur est une Cruci­ condiment. Et n’oublions pas que le
fère, c’est-à-dire que si nous obser­ sommet des inflorescences, formé des
vons de près l’une des nombreuses fleurs et, au centre, des boutons flo­
petites fleurs blanches de son inflo­ raux peut s’ajouter aux salades tant
rescence, nous la voyons formée de pour le plaisir de la vue que pour
quatre pétales disposés en croix et celui de nos papilles.
(mais il faudrait pour cela s’armer
d’une loupe car elles sont minus­ Les fleurs du printemps par excel­
cules) de six étam ines, quatre lence sont sans doute celles des pri­
grandes à l’intérieur et deux petites à m evères dont le nom signifie
l’extérieur. Et son fruit typique, une d’ailleurs « premier printemps ». Les
silicule, est caractéristique de cette feuilles de nos trois espèces les plus
grande famille qui comprend le chou, courantes (primevère officinale, pri­
la moutarde, le radis, la monnaie-du- mevère élevée et primevère vulgaire)
pape et bien d’autres plantes utiles. sont bonnes à consommer. Nous en
Nous aurons l’occasion d’en reparler ferons, avec quelques pommes de
un peu plus loin. terre et un oignon, de moelleuses
Mais quand fleurs et fruits sont soupes vertes. Et les fleurs décorent à
absents, il est plus difficile d’identifier merveille les salades.
à coup sûr la bourse-à-pasteur car les Les fleurs de la primevère officinale
plantes qui forment une rosette étalée et de la primevère élevée sont grou­
sur le sol ne sont pas rares. Nous en pées en ombelles simples au sommet
rencontrerons bien d’autres. Voici un d’une longue hampe florale, alors que
truc pour la distinguer : les divisions celles de la primevère vulgaire par­
de ses feuilles sont tournées vers le tent toutes du collet de la plante en
sommet, contrairement à celles de lui donnant une apparence bien dif­
la plupart des autres plantes à férente, plus basse. La corolle des
rosettes, généralement des Compo­ fleurs de la prem ière espèce est
sées proches du pissenlit, qui sont petite, concave, jaune foncé à cinq
dirigées vers la base de la feuille. Et taches oranges. Chez la seconde, elle
puis en cas de doute, le mieux est est plus grande et d’un beau jaune
18
Salades printanières
soufre, tandis que chez la dernière, liser de la même manière. Il faudra
elle peut atteindre jusqu’à 3cm de par contre soigneusement s’abstenir
diamètre et est généralement jaune de cueillir les autres espèces de pri­
pâle. Quand les fleurs sont absentes mevère, petites plantes montagnardes
et que l’on ne peut alors se baser que peu fréquentes voire même franche­
sur les rosettes de feuilles, l’identifi­ ment rares, et si jolies là où elles
cation est bien plus ardue. Sachez poussent...
simplement que les feuilles de la pri­
mevère officinale sont brusquement Qui se cache donc au pied de ces
rétrécies en pétiole vers la base, tan­ haies touffues? Son parfum l’a trahie :
dis que celles des deux autres espèces c’est sans nul doute la suave violette.
s’amincissent graduellement pour for­ Il est injuste que la confiture de vio­
mer le pétiole. Ce dernier est très lettes ne soit pas aussi connue que
court chez la primevère vulgaire, celle de roses, mais il est vrai qu’il
beaucoup plus long chez la prime­ faut beaucoup de patience pour
vère élevée. Confondre ces trois cueillir suffisamment de ces fleurs
plantes ne présenterait pas d’inconvé­ odorantes. Évitez de les faire cuire
nient majeur car toutes peuvent s’uti­ afin de préserver toute leur finesse :
V IO LETTE
Violette odorante : Viola odorata
Violette blanche : Viola alba
Famille des Violacées Violette des collines : Viola collina
Violette remarquable : Viola mirabilis

Recette : Soupe de violette • Au moment de servir, ajoutez une


• Faites fondre des oignons hachés ou deux cuillerées de crème fraîche.
dans un peu d'huile d'olive au fond
d'une grande casserole.
• Ajoutez des feuilles de violette
grossièrem ent hachées et laisse z
réduire.
• Ajoutez ensuite des pommes de
terre coupées en morceaux et de l'ail
haché.
Couvrez d'eau et salez.
• Lorsque les pommes de terre sont
cuites, complétez avec de l'eau pour
obtenir la quantité de soupe désirée.
Passez au mixer.

19
Au printemps
avec de la pectine, du sucre et un jus
de citron, vous préparerez facilement
une confiture crue qui surprendra
votre entourage.
En fait, vous l’aviez sans doute déjà
remarqué, les fleurs des violettes ne
sont pas toujours parfumées. Elles le
sont — ô combien — chez la vio­
lette odorante, généralement d’un
beau violet foncé mais dont il existe
aussi une forme blanche. Celles de la
violette blanche, d’ailleurs parfois
violacée, de la violette des collines,
d’un violet pâle, et de la violette
remarquable, d’un bleu pâle, le sont
également. Chez toutes les autres
espèces, les fleurs sont inodores. Elles
décorent malgré cela fort joliment les
salades et leurs feuilles vert foncé en
forme de cœur fournissent l’un des
meilleurs légumes des bois. Douces
et mucilagineuses, on en prépare
entre autres de très bonnes soupes.
Pénétrons maintenant dans ces bois
ombreux qui recèlent certainement
maint trésor comestible. Tenez, ces
étoiles d’or luisantes qui parsèment
en grand nombre ce beau tapis vert
bien dense, ce sont les feuilles de la
ficaire, une proche parente des bou­ distingue aisément de ses cousines
tons d’or. Contrairement à ses cou­ toxiques par le nombre de ses pétales :
sins, trop âcres pour être consom­ elle en possède de six à douze alors
més, cette plante printanière offre ses que les boutons d’or n’en ont que
feuilles un peu charnues à notre cinq. D ’autre part, ses feuilles sont
curiosité gustative. Nous en ajoute­ ovales et entières ou légèrement
rons volontiers quelques-unes à nos sinuées tandis que celles des autres
salades composées, sans en abuser espèces sont généralement profondé­
car la ficaire peut quand même se ment découpées en trois à cinq lobes
montrer légèrement irritante. dentés. Signalons cependant comme
La ficaire est une renoncule. Elle se exceptions notables la renoncule
20
V. Salades printanières
vénéneuse, plante des hautes mon­ croissant soit en haute montagne soit
tagnes dont la grande feuille infé­ dans des lieux marécageux. Notons
rieure unique a la forme d’un rein et aussi que la ficaire vit en colonies
quelques espèces à feuilles ovales denses dans les bois, les haies et les
prés humides.
M A CH E Les feuilles poussant à la base de la
plante sont souvent naturellement
Famille des Valérianacées
blanchies : privées de lumière par les
autres feuilles, leur chlorophylle ne
Mâche des jardins : Valerianella
s’est pas développée, ni le principe
olitoria
âcre qui les rendrait irritantes. Celui-
Mâche d'Italie : Valerianella erio-
ci, la « proto-anémonine », est présent
carpa
en abondance dans toutes les parties
des diverses renoncules. Ces feuilles
Les m âches appartiennent à la
blanchâtres sont donc les meilleures à
même famille que la grande valé­
consommer.
riane (Valeriana officinalis), belle
Et puisqu’il nous faut déjà rentrer,
plante des lieux humides, dont les
que ce ne soit pas sans faire un
parties souterraines agissent remar­
détour par ce talus herbeux où croît
quablement pour rééquilibrer le sys­
la mâche savoureuse que Ronsard
tème nerveux.
aimait à cueillir : il la nommait
la « boursette ». Egalement appelée
Le poète Ronsard aimait à récolter
« doucette » ou « ram pon » (en
les herbes printanières avec son
Suisse), la mâche n ’est pas une
valet Jamyn. Il appréciait particuliè­
plante simple puisqu’il en existe une
rement la jeune raiponce, la mâche
douzaine d’espèces dans nos régions.
et la pâquerette :
Plusieurs d’entre elles ont connu les
honneurs de la culture, principale­
« Je cueilleray, compagne de la
ment la mâche des jardins et la
mousse,
mâche d’Italie. Dans la nature, les
La responsette à la racine douce.
différentes espèces sont impossibles à
Tu t‘en iras, jamyn, d'autre part,
distinguer sans les fruits, qui suivent
Chercher soigneux la boursette
d ’adorables petites fleurs bleues,
touffue,
rosées ou blanches, ressemblant
La pasquerette à la feuille menue. »
quelque peu aux fleurs des myosotis.
EPILO B ES Comme toutes les mâches sont
d’ailleurs comestibles, il n’y aurait
Famille des Oenothéracées
aucun risque à les confondre. Il fau­
dra cependant faire attention à ne
Epi lobe en épi : Epilobium angusti-
pas ramasser pour de la mâche les
folium
jeunes rosettes de certains épilobes
21
Au printemps
(Epilobium roseum, Epilobium tetrago- exemple les jeunes pousses de l’épi-
num, ...) qui à ce jeune stade présen­ lobe en épi) et si vous en glissez -
tent un peu le même aspect que les volontairement j’espère - quelques-
rosettes de nos doucettes et poussent unes dans votre salade de mâche
dans les mêmes lieux. Elles sont vous ne risquez rien d’autre que de
généralement rougeâtres, leurs ner­ découvrir une saveur nouvelle.
vures sont mieux marquées et surtout
— c’est le critère essentiel — l’épi- Quelle belle saison que le prin­
lobe ne possède pas l’inimitable temps! De retour de notre prome­
saveur de la mâche, difficilement des- nade, il ne vous restera plus qu’à
criptible, mais reconnaissable sans la déguster les plats délicats que vous
moindre hésitation par des papilles permettront de préparer les tendres
averties. De toutes façons, rassurez- plantes que nous avons cueillies
vous : les feuilles des épilobes n’ont ensemble. Cuisine printanière, cuisine
rien de toxique (on consomme par légère et pleine de vie. Bon appétit!

22
2 - ROSETTES
Un certain nombre de plantes choisissent de passer la mauvaise saison
au ras du sol. Toutes leurs structures aériennes disparaissent à l’excep­
tion des feuilles qui partent du collet de la plante et s’étalent dans toutes
les directions en formant une rosette. Les botanistes nomment ces
plantes vivaces des « hémicryptophytes » (ce qui signifie « plantes qui se
cachent à moitié »). Une fois l’hiver passé, les voici prêtes à développer
leur hampe florale et à continuer leur cycle de vie. D’autres rosettes sont
formées par des plantes annuelles, qui ne vivent qu’une saison. Beau­
coup de rosettes forment de délicieuses salades et leur récolte au tout
début du printemps était une tradition répandue dans toutes les cam­
pagnes. Quel plaisir — et quel bienfait pour l’organisme — que de man­
ger à nouveau des crudités après la nourriture lourde de l’hiver!

Une plante vient immédiatement à plantes à l’état de rosette : même les


l’esprit : le pissenlit. Qui n’a pas botanistes hésitent parfois! Il faut dire
connu les joies de sa cueillette dès que certains d’entre eux sont allés
que les beaux jours sont de jusqu’à décrire plus de mille
retour? Et le plaisir de espèces de pissenlit.
déguster ses tendres Le pissenlit appartient
feuilles croquantes à la grande famille des
sous la dent, accom­ Composées, dont la
pagnées de « chapons » plupart des membres
frottés à l’ail ou, forment des rosettes,
moins diététiquement, bien souvent comes­
de petits lardons? Mais tibles. Certaines comp­
le pissenlit a de nombreux tent parmi les meilleures
cousins avec lesquels on le
Chondril le
salades sauvages. La palme
confond souvent. Il faut d’ailleurs revient selon moi à la picridie, petite
bien s’y connaître pour pouvoir iden­ plante annuelle fréquente au bord des
tifier avec une précision absolue les chemin du Midi. Ses feuilles glabres
23
Au printemps

P ISSEN LIT
Taraxacum officinale Famille des Astéracées

Picridie : Reichardia picroides • Ajoutez des pissenlits, ou une autre


Chondrille : Chondrilla juncea des plantes mentionnées, finement
Laitue vivace : Lactuca perennis hachés. Salez et mélangez bien.
Lampsane : Lapsana communis • Faites cuire de petites galettes dans
une poêle huilée. Dégustez avec un
Tous ces bons légum es sauvages peu de beurre ou de crème fraîche.
appartiennent à la même famille des
A stéracées, ou des Com posées
comme on disait autrefois... Ils ont en
com m un - et avec encore bien
d'autres plantes de la même famille -
de posséder des feuilles allongées et
profondément découpées, ainsi que
de donner des capitules de fleurs
jaunes toutes en languettes. Ce sont
d'excellentes salades, que l'on peut
également faire cuire.

Recette : Blinis sauvages

• Quelques jours avant de préparer


les blinis, mélangez de la farine de
blé et de sarrasin avec de l'eau pour
obtenir une pâte liquide. Couvrez
d'un linge et placez dans un endroit
tiède (environ 20°C).
• Lorsque la pâte a fermenté - ce qui
se reconnaît à son odeur acide et aux
petites b u lle s qui se form ent -,
délayez-la avec un peu d'eau pour
obtenir la consistance d'une pâte à
crêpes.

et glauques sont charnues, cro- vient du grec picris, amer. Quelle


quantes, très tendres et de saveur injustice! La chondrille est presque
exquise. Et dire que son nom pro- aussi bonne. On en prépare de déli-
24
Rosettes
cieuses salades. C’est une plante plus les faire cuire à l’eau avant de pou­
élevée que la picridic (ses tiges peu­ voir les consommer.
vent atteindre un bon mètre de hau­ Quant à la chicorée, ses feuilles
teur), aux feuilles moins charnues, étalées en larges rosettes sont déjà un
reconnaissable à ce que la petite peu amères même en cette tendre
pousse au centre de la rosette, qui saison. On la ramasse pourtant cou­
deviendra la tige, est couverte de ramment en Crête, où elle est régu­
poils rigides roses! A la floraison, au lièrement vendue sur les marchés.
cours de l’été, les feuilles de la rosette Simplement cuite à l’eau et servie
se fanent et disparaissent. avec de l’huile d’olive, les grecs en
Les différentes laitues forment aussi font leurs délices au sortir de l’hiver,
des rosettes. Mais la plupart du conscients des bienfaits que leur pro­
temps, leurs feuilles sont amères dès cure la chicorée. Les feuilles renfer-
leur plus jeune âge — et le devien­
nent encore plus en vieillissant. Il
vaut mieux ne les ajouter qu’avec
parcimonie aux salades. Par contre,
dans le Midi, n’hésitez pas à remplir
les saladiers des feuilles de la laitue
vivace. Elles sont tendres, cro­
quantes et pas amères pour deux
sous. C’est d’autant plus étonnant
qu’elle pousse dans les lieux les plus
arides et les plus caillouteux qu’elle
puisse trouver : ce n’est a priori pas là
qu’on penserait cueillir de bonnes
salades.
La lampsane, toujours une Com­
posée, préfère quant à elle la terre
profonde et riche de nos jardins :
c’est l’une de nos meilleures « mau­
vaises herbes ». Les feuilles de cette
plante annuelle sont caractérisées pat-
un lobe terminal beaucoup plus
grand que les autres, ce qui donne à
sa rosette une allure géométrique très
particulière. Une fois développée, sa
tige peut atteindre quatre-vingt centi­
mètres de hauteur. Ses feuilles sont
bonnes dans leur jeunesse, mais avec
l’âge, l’amertume les gagne et il faut
25
Au printemps
ment environ 14 000 UI (Unités
internationales) de provitamine A,
soit environ deux fois plus que les
épinards et quinze fois plus que les
tomates. Et toute la plante est un
excellent tonique amer, qui possède
des propriétés dépuratives et une
action favorable sur le foie.
N ’oublions pas non plus que sa
Famille des Astéracées

Chicorée : Cichorium intybus


Laiteron maraîcher : Sonchus oie
raceus
Laiteron âpre : Sonchus asper
Laiteron des cham ps : So n ch u s
arvensis
Cirse potager : Cirsium oleraceum

racine, qui peut encore être déterrée


en cette saison, est coupée en mor­
ceaux puis torréfiée pour donner un
succédané du café, que l’on prépare
en décoction. Sachez aussi que la
chicorée sauvage devient, par for­
çage, l’endive. Laissée dans ses
champs, elle donnera à la fin de l’été
de très jolis capitules d’un bleu pâle
attendrissant, posés çà et là sur les
Chicorée intybe
rameaux rigides.
26
Rosettes
Son cousin le laiteron n’a peut-
être pas autant de titres de gloire,
mais c’est malgré tout un excellent
légume sauvage. Ses rosettes sont très
bonnes dans les salades, ainsi que les
jeunes pousses qui se développeront
par la suite sur la tige à Faisselle des
feuilles développées. Ces dernières,
qui ne deviennent jamais amères,
peuvent encore se faire cuire comme
légumes. Trois espèces de laiteron
poussent dans les jardins et dans les
friches : le laiteron maraîcher, aux
feuilles les plus opulentes, le laiteron
âpre, dont les feuilles deviennent
piquantes en vieillissant, et le laite­
ron des champs, moins fréquent.
Savez-vous qui a les plus grosses
rosettes? C’est un gros chardon à
fleurs jaunes, qui possède la particu­
larité de ne pas piquer. Le cirse
potager ne se rencontre pas dans les
jardins, mais il a connu, voici long­
temps, les honneurs de la culture. Il
pousse en abondance dans les bois
humides et au bord des eaux, où il
forme parfois de belles colonies. Ses
racines sont comestibles, de même
que ses feuilles. Toutes jeunes, elles
sont très bonnes dans les salades
composées. Plus tard, ce sont de
bons légumes cuits, au goût particu­
lier, assez prononcé : le cirse potager
est excellent en gratins, en tartes, ou
en mélange avec d’autres légumes
sauvages.
En dehors de famille des Compo­
sées, bien d’autres plantes forment
des rosettes appliquées sur le sol.
Nous avons déjà vu par exemple la Cirse potager

27
Au printemps
mâche et la bourse-à-pasteur, toutes
deux succulentes. L’onagre bisan­ O N A G R E B IS A N N U E LLE
nuelle n’est pas aussi bonne, il faut Oenothera biennis Famille des
l’avouer, bien qu’on la nomme par­ Oenothéracées
fois « jambon des jardiniers ». En
tous cas, ses rosettes de feuilles vertes L'onagre bisannuelle est de la même
à nervure blanche sont très régu­ famille que les épilobes que nous
lières, de toute beauté. Mais si leur avons rencontrés au cours de notre
saveur n’est pas désagréable, elles ont précédente promenade.
tendance à râper quelque peu la
gorge : il est nettement préférable de
les faire cuire et de les servir avec
une sauce blanche qui les adoucira.
Ses graines aussi sont comestibles, et
ses superbes fleurs jaunes décorent
merveilleusement les salades.
L ’onagre bisannuelle est originaire
d’Amérique du Nord. Elle est sub-
spontannée le long des routes et
des voies de chemin de fer, et on la
cultive fréquemment dans les jardins
pour la beauté de ses grandes fleurs
odorantes qui s’ouvrent dans la soi­
rée. Cette particularité lui a valu le
nom de « primevère du soir ». Incon­
nue voici quelques années, l’onagre
est devenu rapidement célèbre grâce
à son huile, extraite des minuscules
graines, très riche en acide gamma-
linolénique, précurseur des prosta­ Onagre bisanuelle
glandines indispensables à la santé.
La plupart des Crucifères forment Leur saveur est un peu piquante et
des rosettes, et pratiquement toutes passablement amère, mais la barbarée
sont comestibles. A part la bourse-à- ajoute en tout cas une note différente
pasteur, citons la barbarée, que l’on aux salades. Sa cousine, la barbarée
rencontre fréquem ment dans les printanière, n’est pas amère. Moins
endroits humides. Ses rosettes sont fréquente à l’état sauvage que la
très jolies, formées de feuilles vert barbarée vulgaire, il arrive qu’on la
foncé, luisantes avec un lobe terminal cultive dans les jardins sous le nom
arrondi, plus grand que les autres. de « cresson-de-terre ».
28
Rosettes
feuilles étaient fréquemment ramas­
sées pour cuire comme légume,
en particulier en Languedoc et en
Provence. Elles sont pourtant peu
remarquables, et qui plus est velues,
mais leur saveur est excellente. On a
quand même bien du mal à croire
qu’elles vont donner les magnifiques
fleurs rouges qui ornent (ou qui
ornaient ?...) nos champs de céréales.
C O Q U E L IC O T
Papaver rhoeas Famille
des Papavéracées

Quelques espèces voisines se distin­


guent très difficilement lorsqu'elles
ne sont pas en fleurs. On peut de
toutes façons les utiliser comme les
coquelicots.

Recette :
anneau de coquelicot
• Faites cuire à l'eau des feuilles de
coquelicot et égouttez-les.
• Faites revenir des oignons, avec
de l'ail et des grains de cumin (du
vrai, pas du carvi...), puis ajoutez-y
le coquelicot, des noix hachées, du
jus de citron, quelques oeufs légère­
ment battus et une tasse de miettes
de pain. Salez.
• Graissez un moule en anneau et
Terminons notre promenade avec saupoudrez de farine, puis versez la
les rosettes du coquelicot. Bien qu’il mixture dans le moule. Faites cuire
passe dans l’esprit de certains pour au bain-marie à four moyen.
être toxique, peut-être à cause de son • Démoulez délicatement et rem­
latex blanchâtre, le coquelicot est plissez le centre d'une purée sou-
absolument inoffensif et ses jeunes bise (à base d'oignon et de riz).

29
Au printemps
Un dernier mot : pour cueillir les entier l’ensemble de la rosette. Gar­
rosettes, le mieux est de couper le dez les yeux sur le sol, et bonne
sommet de la racine pour récolter en « chasse ».

Laitue vivace

30
3 - JEUNES POUSSES
Le printemps est la saison des jeunes pousses tendres. Il est étonnant de
voir comment des plantes habituellement ligneuses et bien peu attirantes
offrent alors de délicats bourgeons. Certaines sont même toxiques à
l’état adulte, bien que leurs pousses soient tout à fait inoffensives. Et ces
jeunes structures remplies de force vitale feront le plus grand bien à nos
organismes un peu fatigués par la saison froide... Profitons-en!

Voici d’abord l’asperge, un bâton l’asperge officinale, que l’on cultive


vert terminé par des écailles renflées. dans les jardins et qui pousse toute
Ses pousses se cassent comme du seule çà et là dans les bois, mais de
verre entre les doigts ; qui pourait l’asperge à feuilles aiguës, plus
imaginer qu’elle va devenir dure petite et plus savoureuse. Comme
comme du bois ? L’asperge sauvage son nom l’indique, c’est un buisson
est couramment ramassée, surtout d’épines à l’état adulte. Plus rien à
dans le Midi où il s’agit non pas de voir avec la tendre asperge! Goûtez
ASPERGE SA U VA G E
Famille des Liliacées

Asperge à feuilles aiguës : Asparagus


acutifolius
Asperge officinale : Asparagus offici
nalis

Recette :
A ccom pagnez les jeunes pousses
crues ou cuites des sauces crémeuses
dont nous avons nappé la salade de
stellaire au cours de notre première
promenade. Asperge officinale

31
Au printemps
les jeunes pousses crues : aroma­ H O U B LO N
tiques et légèrement amères, c’est un
légume bien différent des grosses Humulus lupulus Famille des
asperges cultivées, souvent blanchies Cannabacées
par buttage et toujours servies cuites.
Rien ne vous empêche d’ailleurs de Recette :
faire cuire vos asperges sauvages. jets de houblon
Dans le Midi, on a coutume d’en à l'italienne
préparer des omelettes, mais vous
pouvez bien sûr faire appel à votre • Faites cuire les jets de hou­
imagination. blon pendant une dizaine de
Attention, les jolies boules rouges minutes dans de l'eau bouil­
qui décorent les buissons d’asperges lante salée. Egouttez- les soi­
officinales adultes sont toxiques. Elles gneusement, puis disposez-
contiennent des saponines qui peu­ les dans un plat.
vent provoquer l’hémolyse, c’est-à- • Faites fondre du beurre et
dire faire éclater les globules rouges versez-le sur les jets.
du sang! Conservons ces jolis fruits • Salez et poivrez, saupou­
pour la décoration. Chez l’asperge drez de persil haché, d'ail
à feuilles aiguës, les fruits sont noirs écrasé et de parmesan râpé.
et moins attirants, mais tout aussi • Gardez au chaud jusqu'au
dangereux. Floublon
moment de servir.

Voici maintenant une liane. A voir


ses feuilles, on dirait de la vigne, mais bois, etc. On le reconnaît aisément au
d’une part elles sont opposées, et toucher rugueux de ses feuilles et de
d’autre part leur toucher très rêche ses tiges. Et à la fin de l’été, les
est bien curieux. En fait, il s’agit du grappes de cônes qui décorent les
houblon. Surtout connu pour ses pieds femelles sont caractéristiques.
cônes, qui servent à aromatiser Ces cônes renferment une poussière
la bière depuis le Moyen Age, le hou­ jaune cireuse, amère et très aroma­
blon présente au printem ps de tique, le lupulin, qu’il ne faudrait pas
tendres pousses, ou « jets », que l’on prendre pour du pollen. Ce lupulin
consomme crues ou cuites de possède des propriétés médicinales
diverses façons. Leur saveur aroma­ bien marquées : c’est avant tout un
tique est si prisée que certains restau­ sédatif et un hypnotique. Les oreillers
rants de luxe n’hésitent pas à propo­ de cônes de houblon sont censés
ser à prix d’or leurs « jets de houblon ». rendre le sommeil aux insomniaques.
Le houblon est très répandu dans L’odeur qu’ils dégagent est en tout
les endroits frais et humides : bords cas très agréable. Et bien sûr, la
des rivières et des fossés, lisières des plante est cultivée dans les houblon-
32
Ficaire - Ranuculus ficaria

Barbarée - Babarea vulgaris


Fragon - Ruscus aculeatus

Onagre - Oenothera biennis fl.


Lampsane - Lapsana commuais

Fruit du fragon - Rusais aculeatus


WWMWWW Jeunes pousses
nières, dans le Nord, en Bourgogne, TAM IER
en Alsace et en Belgique pour la Tamus commuais
fabrication de la bière. Famille des
Dioscoréacées
Une autre liane s’enroule autour du Recette : omelette
tronc des arbres à la lisière de la de pousses de tamier
forêt. Mais celle-ci est peut-être
encore plus surprenante avec ses • Faites cu ire légèrem ent des
larges feuilles en forme de cœur,
lisses et luisantes : on la croirait pousses de tamier dans de l'eau
échappée tout droit d’une forêt tropi­ • Coupez les pousses en tronçons
bouillante salée.
cale. Ce n’est d’ailleurs pas faux car de quelques centimètres de lon­
le tamier est dans nos régions le seul gueur et faites-les revenir dans une
représentant de la famille des Diosco- poêle.
réacées dont tous les autres membres • Battez des oeufs en omelette avec
poussent sous les Tropiques, le plus
connu étant l’igname. Chez le tamier, sel et po ivre, et versez sur les
une seule partie est comestible : • Ne faites pas trop cuire si vous
pousses de tamier.
l’extrémité des tiges au printemps. Le aimez
reste de la plante passe pour être votre omelette baveuse.
toxique à l’état adulte, en particulier Si vous préférez les goûts plus pro­
ses fruits, de jolies baies rouges et noncés, omettez la première opéra­
luisantes, très décoratives, qui, tion.
comme ceux de l’asperge, renferment
des quantités dangereuses de sapo-
nines.
Les pousses de tamier ont une his­
toire : consommées depuis l’Anti­
quité, on les avait progressivement
oubliées jusqu’à ce qu’au siècle der­
nier les mineurs de Decazeville et de
sa région minière redécouvrent leur
Intérêt. Depuis, la passion des
pousses de tamier, les « rispounchous »
s’est propagée à tout le département
du Tarn. Et chaque printemps, les
habitants battent la campagne pour
remplir leurs paniers de ces bonnes
pousses. On les fait cuire à l’eau pour
les servir ensuite avec une sauce, à omelettes.
moins encore une fois d’en faire des Dans le langage populaire, le
33
Au printemps
tamier est « l’herbe aux femmes bat­ plante d’aspect aussi peu engageant
tues ». C’est que son rhizome épais et ait quelque chose de comestible. Et
charnu, blanc à l’intérieur, possède la pourtant, si nous fouillons bien entre
propriété d’effacer les « bleus » rien les tiges de la plante, qui persistent
qu’en le frottant dessus. L’effet est tout l’hiver, il nous arrivera de
surprenant, mais bien réel. On vend découvrir quelques jeunes pousses
aussi le tamier pour alléger, par fric­ violet foncé, term inées par des
tions, les douleurs des rhumatismes. écailles plus claires, que l’on pourra
Au creux des bois pousse une jolie facilement casser entre les doigts.
plante très décorative, au feuillage Elles sont aromatiques et amères et il
terriblement piquant. C’est le fragon est nettement préférable de les faire
épineux ou petit houx, de la même cuire.
famille que l’asperge, le lis ou le Là aussi, les jolis fruits rouges du
muguet, les Liliacées. Il est vraiment fragon sont toxiques, toujours à
surprenant d ’apprendre qu’une cause de leur teneur en saponines.

F R A G O N EPIN EU X • Béarnaise: faites cuire des écha-


Ruscus aculeatus Famille des lottes et de l'estragon hachés avec du
Liliacées vinaigre. Une fois refroidi, ajoutez-y
un jaune d'œuf et un peu de farine
délayés à part. Placez au bain-marie,
FO U G E R E A IG LE salez et incorporez du beurre fondu
Pteridium aquilinum Famille en remuant bien. La sauce prend en
des Polypodiacées refroidissant.
• Aux olives: dénoyautez des olives
noires et mettez- les dans un mixer
EPILO B E EN EPI avec de l'a il, un jus de citron, de
Epilobium angustifolium Famille des l'huile d'olive et un peu de thym.
Oenothéracées M ixez. Délayez avec de l'eau si la
sauce est trop épaisse.
V o ici quelques recettes de sauces • Pesto: placez dans un mixer des
pour accommoder les pousses de ces feuilles fraîches de basilic, des noix
différentes plantes: ou des pignons, de l'ail et de l'huile
d'olive. Salez, mixez,
• Au bleu: écrasez du bleu d'A u­ • Crème de cerfeuil: mélangez de
vergne ou du Roquefort avec un peu l'huile de noix avec un jus de citron,
de vinaigre et d'huile d'olive, plus un du cerfeuil finement haché, du sel, du
yaourt, pour en faire une crème onc­ poivre et de la crème fraîche pour lier
tueuse. le tout.

34
Jeunes pousses
Une précision botanique : ce que l’on
prend pour les feuilles de la plante
sont en réalité de petits rameaux
aplatis et terminés en pointe, nom­
més « cladodes ». Ils portent au
centre de leur face supérieure de
minuscules fleurs à six pétales, res­
semblant en petit à des fleurs de lis.
C’est là aussi que sont attachées les
boules rouges de ses fruits, d’un mer­
veilleux effet décoratif sur le vert
foncé du feuillage.
Bien d’autres plantes nous propo­
sent leurs jeunes pousses en cette
saison printanière. Mais nous en
retrouverons la plupart lorsque leurs
feuilles se seront développées.
L’armoise par contre est nettement
meilleure en ce moment. L’extrémité
de ses tiges rougeâtres forme de
grosses pousses feuillées, vert sombre
sur une face et blanches cotonneuses
sur l’autre. L’extrémité des tiges,
pelée, se grignote telle quelle ou
s’ajoute, crue, aux salades. Elles sont
juteuses et croquantes, avec un éton­
nant goût d’artichaut. Au Japon, les
jeunes feuilles sont cuites à l’eau et
mangées avec des graines de sésame facilite la digestion. En raison de ses
grillées et de la sauce de soja. On emplois en gynécologie, qui remon­
s’en sert aussi pour aromatiser et tent à l’Antiquité, on l’avait dédiée à
colorer les boulettes de riz gluant. Artemisia Illythis, reine de Carie. Ce
Pour pouvoir en disposer toute sont surtout les sommités fleuries,
l’année, les jeunes feuilles sont blan­ très amères, que l’on emploie médici-
chies à l’eau bouillante puis séchées à nalement.
l’ombre et enfin au soleil.
L ’armoise renferme une huile Quittons un instant le monde des
essentielle et un principe amer. Elle plantes à fleurs pour aller à la ren­
stimule et régularise les menstrua­ contre des fougères. Les jeunes
tions, aide à l’excrétion de la bile et pousses de différentes espèces sont
35
Au printemps
comestibles lorsqu’elles sont encore cela : les colonies d’épilobes ne sont
très tendres. Elles sont caractéristi- encore qu’en feuilles. C’est le bon
quement enroulées sur elles-mêmes moment pour cueillir délicatement
en forme de crosse. Au Canada, on entre le pouce et l’index le sommet
les nomme « violons ». Mais seule la feuillé des tiges. Ces jeunes pousses
fougère aigle est suffisammant serviront entre autres à faire de déli­
répandue pour qu’on puisse se per­ cieux gratins. Leur saveur est très
mettre de cueillir ses pousses. Les agréable et, avantage indéniable, on
autres espèces doivent être protégées. peut les ramasser en grande abon­
Les « crosses » de fougère aigle se dance.
font cuire à l’eau, pas trop longtemps
pour éviter qu’elles ne se ramolissent Bien d’autres jeunes pousses pour­
à l’excès, puis se servent avec une raient être ramassées : d’une façon
sauce. Il arrive qu’elles dégagent en générale, toutes les plantes dont les
cuisant une forte odeur d’amande feuilles sont consommables sont
amère, et qu’elles soient elles-mêmes encore meilleures à l’état de jeunes
amères au goût. En ce cas, il faudra pousses. La liste est longue. Réjouis­
les jeter car elles contiennent de sons-nous!
l’acide cyanhydrique ou prussique,
poison violent. Mais en général, il n’y
a pas de problème.
La fougère aigle est la plus grande
de nos espèces indigènes. Elle se
déploie en forme d’aile finement
découpée jusqu’à parfois près de
deux mètres de hauteur dans les sols
les plus riches. Elle affectionne les
bois et les landes des terrains siliceux
où elle forme souvent de grandes
colonies. Les collines prépyrénéennes
du Pays basque par exemple sont
couvertes de champs de fougère aigle
sur des dizaines de kilomètres carrés.
Cela en représente des jeunes
pousses!
Encore un peu plus haut et nous
voici en montagne. C’est là que croît
l’épilobe en épi, dont la magnifique
floraison rose-violacé égaie les bords Fougère aigle
des chemins. Mais il est trop tôt pour
16
ETE
4 - LÉGUMES
SAUVAGES DE L’ÉTÉ
L’été approche à grands pas! Il nous promet la chaleur... et les délicieux
légumes que dame Nature se charge de faire pousser. Si certaines
pousses printanières ont un peu trop grandi, si quelques fleurs se sont
déjà fanées, le moment de manquer n’est pas encore venu, Livrons-nous
cet été aux plaisirs méconnus de la gastronomie sauvage...

Il n’y a pas à aller bien loin pour est bien meilleure : tendre et de
trouver notre pitance : le jardin luxu­ saveur douce, cette herbe si commu­
riant où le sarcloir s’est montré ne est l’un de nos légumes sau­
discret, le champ épargné vages les plus rem ar­
par les herbicides (il en quables. Crue, elle four­
existerait encore...), la nit de délicieuses
friche si dédaignée salades. Cuite, elle
recèlent des trésors. connaît tous les usa­
Pour qui sait les ges des épinards :
voir, car c’est de gratins, soufflés,
« mauvaises herbes » gougères farcies.
que je vais vous Notons d ’ailleurs
parler. que l’épinard est un
Voici d ’abord une proche cousin de
plante au nom curieux, notre chénopode, que
le chénopode blanc. Il sylvestre l’on nomme aussi « épinard
rappelle en fait, par le truche­ sauvage ». Le goût du chéno­
ment de la langue grecque, que la pode blanc est, je trouve, plus délicat
feuille de ce bon végétal affecte et il n’est à mon sens de meilleure
la forme d’une patte d’oie. Mais elle façon de le déguster qu’en le cuisant

39
En été

C H É N O P O D E B LA N C
Chenopodium album Famille des
Chénopodiacées

Recette : Gougères farcies

• Préparez des gougères en pâte à


chou :
• Faites fondre du beurre dans un
peu d'eau et dès que le mélange
entre en ébullition, jetez-y d'un
seul coup de la farine. Remuez
vigoureusement pour dessécher la
pâte, qui se détache bientôt des
parois.
• Ajoutez un à un quelques oeufs
entiers, en les incorporant bien à la
pâte. Ajoutez un peu de fromage,
mélangez et formez sur une plaque
des bo ules de ta ille m oyenne.
Faites cuire à four chaud sur une
plaque.
• Mettez à cuire à la vapeur une
grande quantité de feuilles de chéno-
pode blanc et m élangez-les à une
béchamel épaisse.
• Lorsque les gougères sont cuites et
bien gonflées, découpez-en délicate­
ment la base et remplissez l'intérieur
avec le légume en sauce. Replacez le
fond et disposez les gougères farcies
sur la plaque. Saupoudrez de fromage
râpé et faites gratiner.

légèrement à la vapeur pour le servir « mauvaise herbe »? Il n ’en a


arrosé d’un filet d’huile d’olive et de d’ailleurs pas toujours été ainsi
jus de citron. puisque nos ancêtres appréciaient le
Ne trouvez-vous pas injuste que chénopode blanc à sa juste valeur :
l’on traite cette bonne plante de on a retrouvé ses graines dans des
40
Légumes sauvages de l'été
restes de cuisine datant de l’époque sent : ses graines sont produites en
néolithique. Elles sont fréquentes quantités impressionnantes et leur
dans les villages de l’âge du fer durée germinative peut aller jusqu’à
entourant les lacs suisses. Elles cinquante ans! Dès qu’une terre est
étaient très probablement cuites en remuée, elles ne tardent pas à pro­
gïuau, comme le sont encore duire de délicates pousses qui au
aujourd’hui dans les Andes celles cours de l’été peuvent devenir de
d’un de ses cousins, le Quinoa, un belles plantes de plus d’un mètre de
chénopode sud-américain que les hauteur. Ses tiges rameuses portent
Incas appréciaient déjà. de nombreuses feuilles, tendres et un
Mais comment reconnaître le ché­ peu charnues, vert foncé sur la face
nopode blanc parmi les nombreuses supérieure et plus pâles en dessous.
adventices de nos cultures ? Signa­ Les rameaux sont terminés par des
lons tout d’abord qu’il est omnipré­ grappes de minuscules fleurs ver-
M AUVE
Famille des Malvacées

Mauve sylvestre : Malva sylvestris


Mauve à petites fleurs : Malva parvi-
flora
M auve à fe u ille s rondes : M alva
pusilla (=M. rotunclifolia)
Mauve alcée : Malva alcea
Mauve musquée : Malva moschata

Recette : fondue végétale

• Dans une poêle à fond épais, faites


rissoler des oignons hachés avec de
l'huile d'olive.
• Ajoutez des feuilles de mauve fine­
ment coupées et remuez bien.
• Laissez mijoter à feu doux jusqu'à
ce que les feuilles soient réduites en
purée. Ajoutez un peu d'eau si néces­
saire.
• Faites revenir dans du beurre de • Versez dans la purée de mauve et
l'ail, du cumin et du coriandre écra­ d isp o se z le plat au m ilie u des
sés. convives.

41
En été
dâtres - on a parfois du mal à croire mucilage, substance adoucissante qui
qu’il s’agisse de fleurs... Chacune leur confère la vertu de calmer les
donne naissance à une petite graine irritations, tant internes qu’externes.
noire, luisante et aplatie. Avec l’habi­ Nous allons donc nous soigner tout
tude, on reconnaîtra facilement le en consommant les douces salades de
chénopode blanc à son aspect bien feuilles de mauve, joliment décorées
particulier, mais il est bon de savoir de leurs fleurs.
que le toucher permet de l’identifier Les anciens, en particulier les
sans le moindre doute : le revers des romains, aimaient à manger les
feuilles, surtout vers le sommet de la feuilles de mauve cuites en légumes,
plante et en particulier lorsqu’elle est qui passaient pour un légume très
jeune, est couvert d’une poudre fari­ sain. La coutume s’en est maintenue
neuse donnant au toucher une sensa­ jusqu’à nos jours. On en prépare,
tion d’humidité caractéristique. Il entre autres plats délicieux, une
s’agit en fait de poils globuleux se soupe épaisse équivalente de la
détachant facilement. D ’autres « molokhia » égyptienne : dans le plat
espèces de chénopode voisines de situé au milieu des convives, chacun
notre plante procurent la même sen­ trempe un morceau de pain. Voici
sation lorsqu’on passe la main sur le une véritable « fondue végétale »,
revers de leurs feuilles, en particulier pleine de surprises et d’amusements.
le chénopode bon-henri, que nous Contrairement à ce que son nom
rencontrerons lors de nos excursions pourrait laisser à supposer, la mauve
en montagne. Toutes ces plantes se sylvestre ne pousse pas dans les
préparent et se consomment comme forêts (les botanistes ont parfois de
le chénopode blanc. bien curieuses notions car si la
La mauve aime aussi les terres en mauve sylvestre se rencontre occa­
friche, les lieux cultivés, les bords des sionnellement en ville, la benoîte
chemins et d’une façon générale tous urbaine quant à elle, ne croît que
les endroits où la terre a été remuée. dans les bois...).
Il en existe d’ailleurs plusieurs Lorsqu’elle peut se développer
espèces — toutes aussi bonnes pour convenablem ent, c’est une belle
notre propos. Nous commencerons plante de plus d’un mètre de hauteur,
par nous arrêter devant la mauve à l’abondant feuillage vert foncé, lui­
sylvestre aux belles fleurs... mauves, sant. Chaque feuille, portée par un
la plus productive de ces plantes long pétiole, possède une forme
dans nos régions. Ses petites feuilles arrondie avec plusieurs lobes plus ou
fraîchement écloses, d’un beau vert moins profonds et présente souvent à
clair, sont tendres, tendres... On la base une petite tache pourpre. Sa
dirait qu’elles fondent dans la floraison est splendide : chaque
bouche. C’est qu’en fait elles renfer­ plante est un buisson couvert de
ment de grandes quantités d ’un grandes fleurs à cinq pétales mauves
42
Légumes sauvages de l'été
striés de rose foncé. Les stries indi­ Mais il commence à faire chaud :
quent aux abeilles la direction des cherchons un peu l’abri des bois.
nectaires situés à la base de la Voici en lisière, au bord d’un fossé
colonne que forment les nombreuses humide, une colonie de plantes aux
étamines soudées entre elles. Cette larges feuilles qui pourraient nourrir
colonne staminale est caractéristique un régiment vu leur taille et leur
de la famille des Malvacées : on la abondance! Réjouissez-vous, il s’agit
retrouve chez les fleurs de la gui­ de la consolide, un excellent végétal
mauve, des hibiscus, de la rose tré- oublié qui revient à l’honneur. Il
mière et du coton, toutes des cou­ figure aujourd’hui en bonne place
sines de notre mauve sylvestre. dans les nouveaux jardins américains,
Il nous arrivera sûrement de rencon­ et l’Europe le redécouvre.
trer aussi d’autres mauves : la mauve Chez nous, la consoude croît toute
à petites fleurs et la mauve à feuilles seule, et sa récolte est rapide car les
rondes, dont les fleurs blanches sont feuilles sont, bien qu’un peu rêches,
beaucoup plus petites que celles de la faciles à cueillir. Les plus jeunes
mauve sylvestre; la mauve alcée et la ajouteront une note toute personnelle
mauve musquée, assez grandes aux salades composées. Quant aux
plantes aux feuilles découpées et aux plus anciennes, il n’en est de meilleur
belles fleurs rose pâle. usage que ces moelleux « filets de
CO N SO U DE
Symphytum officinale Famille des Boraginacées

Recette : filets de consoude

• Préparez une pâte à frire assez


liquide avec de la farine, du sel et de
l'eau.
• C o lle z deux par deux de belles
feuilles de consoude, dos à dos, en
^
Jfe
appuyant avec la main ou un rouleau
à pâtisserie (ou une bouteille) pour V
qu'elles adhèrent bien ensemble.
• Trempez les feuilles dans la pâte
puis d é posez-les dans une poêle
graissée très chaude. Faites dorer des uj}
deux côtés et dégustez chaud avec un
filet de citron. wr Consoude

43
En été
consoudes », dont la saveur rappelle blanche, jaunâtre, rose, violette... Les
de façon surprenante celle de la sole ! grappes sont recourbées sur elles-
Quelle extraordinaire plante que la mêmes pour former une « cyme scor-
consoude ! En plus de ses qualités pioïde », inflorescence « en queue de
gustatives, sur lesquelles tout le scorpion » caractéristique des Boragi-
monde s’accorde, elle possède nacées : on la retrouvera chez le
d ’importantes vertus diététiques. myosotis par exemple. C’est encore
Ses feuilles renferment environ 5 % par le toucher que l’on identifiera la
de protéines (en poids frais, près de consoude avec la plus grande certi­
30 % en poids sec) équilibrées en tude : ses feuilles et ses tiges sont
acides aminées, c’est-à-dire de valeur couvertes de poils courts et raides
équivalente, aux protéines animales, donnant à celui qui la touche
supérieures même à celles de la l’impression de caresser une joue mal
viande! Et sa productivité est énorme : rasée...
d’après des essais réalisés en Grande- Cette sensation doit toujours être
Bretagne, un hectare de consoude présente lorsque l’on cueille les
peut produire environ 8 fois plus de feuilles de consoude : soyez sur vos
protéines que la même surface plan­ gardes si vous avez à faire à de
tée en céréales et 50 fois plus que si douces feuilles couvertes de poils
l’on y élevait du bétail pour la viande! soyeux. Il s’agit probablement de la
Peut- être y aurait-il quelque chose à mortelle digitale! Si la confusion
creuser par là... s’évite facilement quand les plantes
D’autre part, la consoude renferme sont en fleurs (la digitale, que l’on
de la vitamine B 12, que l’on préten­ nomme aussi « gant Notre-Dame »,
dait autrefois absente du règne végé­ possède de grandes fleurs pourpres
tal et dont on pouvait, théorique­ en forme de doigt de gant), elle est
ment, craindre la carence chez les plus difficile au printemps, avant que
adeptes d’un régime végétarien strict, les hampes florales ne se soient déve­
ou « végétalien ». Bonne nouvelle loppées. Et il est arrivé que des gens
donc pour ceux qui désirent limiter préparent au lieu de filets de
leur consommation de produits ani­ consoude des « filets de digitale » qui
maux. auraient pu les libérer de tous leurs
Et si la consoude était facile à soucis terrestres s’ils n’avaient été
reconnaître, ce serait vraiment un prévenus à temps de leur erreur!
don des dieux! Son aspect est carac­ Alors, commencez peut-être par
téristique, avec ses larges feuilles ramasser la consoude au cours de
pointues, longuement pétiolées, et ses l’été.
hampes florales portant à 80 cm ou
plus au-dessus du sol des grappes Ne quittons pas la fraîcheur des
denses de fleurs en forme de cloche bois sans avoir grignoté quelques
allongée de couleur variable : feuilles d’angélique, fortes et parfu-
44
Légumes sauvages de l'été

A N G E L IQ U E
Angelica sylvestris Famille des Apîacées

Archangélique ou Angélique offici­


nale : Angelica archangelica

Recette : tiges d'angélique


confites

• Coupez des tiges encore tendres et


coupez-les en tronçons d'une dizaine
de centimètres.
• Faites-les cuire environ une demi-
heure à l'eau bouillante, puis égout­
tez-les.
• Placez les tiges dans une casserole
et recouvrez-les de sucre Faites cuire
à feu vif. Lorsque le mélange com ­
mence à épaissir, baissez le feu et
remuez constamment, jusqu'à ce que
le sucre cristallise.
• Dès qu'il commence à refondre,
retirez du feu et versez les tiges
confites sur un plat pour qu'elles
refroidissent. Conservez dans des
bocaux fermés.

mées. Cette plante splendide aux du verger, ou les intrigantes baies


grandes feuilles découpées aromatise sauvages qui seront l’un de nos pro­
de manière affirmée les salades, les chains propos. Semences et racines
soupes, les légumes, et même pour­ parfum ent agréablem ent les
quoi pas les salades de fruits. On uti­ liqueurs... qui acquièrent par la
lisera au choix les feuilles ciselées, les même occasion des qualités médici­
jeunes tiges encore bien tendres après nales. Une bonne façon de joindre
les avoir pelées et coupées en ron­ l’utile à l’agréable!
delles, ou les semences. Mais surtout, L ’angélique est la « plante des
l’angélique communique à toute anges » à cause de ses innombrables
confiture un goût « sauvage » qui la vertus : elle aide la digestion, combat
transfigure. A essayer avec les fruits les flatulences, tonifie l’organisme et
45
En été
fige unique, souvent rougeâtre, porte
de grandes feuilles divisées en nom­
breuses folioles aiguës, d’un vert
foncé. La base très élargie des
pétioles enveloppe caractéristique-
ment les jeunes inflorescences. Les
ombelles hém isphériques sont
blanches ou d’un joli rose vineux.
Chaque fleur donne naissance à un
fruit ailé, très aromatique lorsqu’on
l’écrase entre les doigts. L’angélique
est glabre dans toutes ses parties.
A la même famille que l’angélique
appartient une plante au nom curieux :
l’égopode des goutteux. Il paraît
qu’autrefois sa décoction passait pour
soigner la goutte, cette douloureuse
maladie provenant d’une accumula­
tion d’acide urique dans les tissus.
C’est en tous cas un excellent légume
sa racine mâchée telle quelle ou prise sauvage, de saveur fine et aroma­
en décoction combat à merveille tique. Ses toutes jeunes feuilles, fri-
grippes et rhumes. Tout ceci est dû à
une huile essentielle jaunâtre d’odeur
exquise mais de saveur brûlante qui
sourd dès que l’on coupe la racine.
Dans le nord de l’Europe il existe
une cousine de notre plante, plus
grande dans toutes ses parties, qui a
même accédé au titre d’ « archangé-
lique » tant son parfum est agréable.
C’est la plante dont la tige fournit les
« bâtons d’angélique » confits dont on
décore les cakes. On la cultive parfois
dans les jardins, et la région de Niort
s’est fait une spécialité de sa culture
commerciale.
Notre espèce indigène est l’angé­
lique sylvestre. Elle pousse dans les
bois frais et les fossés. C’est une
Ombellifère de belle venue, dont la Tussilage (fleurs)
46
Légumes sauvages de l'été

T U S S ILA G E
Tussilago farfara Famille des Astéracées

Recette : Recette : papet sauvage


beignets de tussilage
• Faites cuire à l'eau des feuilles de
• Cueillez les feuilles de tussilage en tussilage hachées. En ce qui concerne
leur laissant leur pétiole pour pouvoir les quantités, sachez qu'elles rédui­
les tenir facilement. Nettoyez-les soi­ sent peu.
gneusement car, vu leur habitat, elles • Dans une casserole, faites revenir à
sont souvent terreuses. l'huile d'olive des oignons.
• Préparez une pâte à frire avec de la • Faites cuire à part, à l'eau, des
farine, de l'eau et du sel. Trempez-y pommes-de-terre coupées en mor­
les feuilles, puis faites frire des deux ceaux.
côtés dans une poêle copieusement • Une fois que les pommes-de-terre
remplie d'huile ou de graisse végétale et le tussilage sont bien cuits (il doit
bien chaude. être très tendre), a jo u te z-les aux
• Posez rapidement sur un papier oignons. Versez quelques verres de
absorbant et dégustez chaud. vin blanc ou de vinaigre, salez et poi­
v re z, rem uez puis la isse z cu ire
encore quelque temps à feu doux
pour que le mélange « fonde » bien.
• Dégustez chaud ou froid.

pées et comme vernissées, sont ajou­


tées aux salades, tandis que ses
feuilles développées font de très bons
légumes cuits.
L ’égopode aime les sous-bois
frais... et les jardins qu’il envahit
grâce à ses rhizomes traçants. Il est
donc doublement intéressant de l’uti­
liser: pour se nourrir agréablement
tout en désherbant! L ’égopode se
reconnaît facilement à ses feuilles
deux fois divisées en trois parties, et
à son pétiole à section caractéristique,
en forme de « U » en dessus et de
<i V » en dessous.

47
En été

O SEILLE
Rumex acetosa Famille des Polygonacées

C R E SSO N
Nasturtiurn aquaticum Famille des Brassicacées

V É R O N IQ U E B E C C A B U N G A
Veronica beccabunga Famille des Scrophulariacées

Recette :
choucroute de cresson

• Hachez grossièrement le cresson, ♦ Déposez sur le cresson une cuille­


tiges, feuilles et inflorescences et pla- rée à café de sel, et versez en plu­
cez-les dans un bocal de verre en les sieurs fois de l'eau bouillante pour le
tassant bien pour arriver à deux ou recouvrir d'environ un centimètre.
trois centimètres en-dessous du bord. Tassez de nouveau pour que l'eau
pénètre partout.
• Fermez le bocal et placez-le pen­
dant trois semaines dans un endroit
tiède (environ 20°C).

Cette choucroute acidulée peut se


déguster crue, en salade, ou se faire
cuire. On peut la préparer avec toutes
sortes d'autres légumes sauvages. Il
s'agit d'une lacto-fermentation.

Il est important que les plantes soient


entièrement recouvertes d'eau, sans
quoi tout le contenu du bocal risque
de pourrir. On peut si c'est nécessaire
poser par-dessus un linge maintenu
en place par des caillous non cal­
caires.
Ne vous inquiétez pas si les bocaux
coulent au début de la fermentation,
c'est normal. Pensez à mettre des
journaux dessous.

48
Légumes sauvages de l'été
feuilles sortant directement de terre.
Exactement aux mêmes endroits
poussaient dès la fin de l’hiver une
multitude de jolis capitules de fleurs
jaunes portés chacun sur une courte
tige écailleuse. C’est le tussilage,
autrefois nommé « filius ante patrem »
à cause de son mode de vie un peu
anormal, puisque ses fleurs paraissent
avant ses feuilles.
Les fleurs de tussilage s’ajoutent
crues aux salades, qu’elles peuvent
décorer dès le mois de février, ou se
font revenir à la poêle dans un peu
de beurre : je leur trouve ainsi un
goût particulièrement agréable. Les
feuilles sont épaisses, vert clair par­
dessus et recouvertes d ’un duvet
blanchâtre par-dessous. Leur texture
caoutchouteuse ne permet de les
manger crues que lorsqu’elles sont
vraiment toutes jeunes. Par contre,
le tussilage est un très bon légume.
On en prépare en particulier de déli­
cieux beignets et un « papet sau­
vage « nourrissant.
Le tussilage est aussi une plante
médicinale appréciable, puisque ses
fleurs et ses feuilles, riches en résines
et en substances balsamiques, possè­
dent d’indéniables vertus expecto­
rantes, utiles dans les rhumes et les
irritations des voies respiratoires. De
là vient d’ailleurs son nom, du latin
tutsis agere, chasser la toux.
Les plantes estivales seraient encore
Les terres remuées argileuses et nombreuses. L’oseille aux feuilles
compactes, où l’on ne penserait pas acides, dont on prépare de si bonnes
que puisse pousser quoi que ce soit, soupes ou de délicats accompagne­
se couvrent par endroits d’un man­ ments pour les poissons, est au
teau vert formé de nom breuses mieux de sa forme. Tandis que dans
49
En été
les eaux courantes, le cresson flotte la véronique beccabunga est sou­
tranquillement. Faites-le cuire sans vent délicate. Parfois nommée « cres-
arrière-pensée en soupes ou comme son-de- cheval », bien que n’étant pas
légume savoureux, mais méfiez-vous du tout parente du cresson, elle par­
si vous désirez le consommer cru. tage avec ce dernier l’habitat aqua­
Car il peut être l’hote de la redou­ tique. Sa saveur légèrement piquante
table douve du foie, un parasite des et amère en fait une plante intéres­
ruminants, qui peut provoquer de sante à ajouter crue aux salades.
graves troubles chez l’être humain. Il Cuite par contre, elle ne vaut pas
faut donc s’assurer de façon absolu­ grand chose... Alors, soyez circons­
ment certaine qu’aucune vache ni pects!
aucun mouton ne broute ou n’a
récem m ent brouté en amont de L’été s’est montré généreux, Sui­
l’endroit où pousse le cresson. En cas vant les lieux, la variété s’est peut-
de doute, il n’y a pas trente-six solu­être un peu réduite depuis le prin­
tions: il faut faire cuire la plante pour
temps, mais l’abondance est toujours
détruire le parasite. là. Il ne manque que le dessert.
Patience, l’automne et ses fruits sau­
C’est pour cela que la cueillette de vages ne vont pas tarder à venir.

50
5 - DES FLEURS
DANS NOS ASSIETTES
Voilà encore une drôle d’idée ! Déjà, vouloir nous faire manger ces
herbes, bonnes et « mauvaises », qui poussent toutes seules, passe encore :
ce sont toujours des légumes (feuilles ou racines) analogues à ceux que
nous cultivons. Mais des fleurs dont on pourrait faire de si beaux bou­
quets! Et pourquoi pas? On décore bien les salades de fleurs de capu­
cine, à la fois décoratives et condimentaires. Quant aux choux-fleurs et
aux brocolis, ce ne sont que les inflorescences hypertrophiées de choux
cultivés. Et tout le monde connaît les beignets de fleurs d’acacias ou de
courgettes ainsi que l’inimitable confiture de fleurs de rose. Laissez-moi
vous emmener à la découverte de quelques-unes des fleurs comestibles
que nous offre la nature.

Dès le printemps, nos salades vont ou roses, de même que leur cousine
s’égayer du jaune des prime- cultivée, l’immense rose tré-
vères et du violet des., m ière, présente dans
violettes — odorantes tous les jardins. Peu
ou non — toutes sont de temps après, c’est
bonnes. Un peu plus au tour des étoiles
tard, les coquelicots d’azur de la bour­
prendront la relève de rache aux feuilles
leur rouge éclatant, mal rasées de venir
puis la mauve syl­ décorer les salades,
vestre aux belles fleurs et d ’y ajouter leur
mauves. Les autres inimitable saveur
mauves s’emploient aussi Rose trémière d’huître. Car les fleurs ne
que leurs fleurs soient blanches se contentent pas d’embellir
SI
En été

RO SE TREM IERE
Alcea rosea Famille des
Malavacées

BO U RRACHE
Borago officinalis Fam i 11e des
Boraginacées

SA LSIFIS
Tragopogon pratensis Famille des
Astéracées

TREFLE
Trifolium pratense et T. repens
Famille des Fabacées

les plats : elles les parfument aussi. dant nectar, et les capitules, égale­
Elles permettent également à l’orga­ ment sucrés, des salsifis — sauvages
nisme de bénéficier de leurs proprié­ ou cultivés — absolument délicieux.
tés médicinales ; notons que les six
fleurs mentionnées ci-dessus sont Quant aux fleurs-légumes, le som­
célèbres pour leurs vertus adoucis­ met des tiges des diverses Crucifères
santes. Nous ajouterons à cette série peut être dégusté à la façon de leurs
de fleurs à salades les inflorescences cousins les brocolis, c’est à dire crus
des trèfles, bien connues des enfants ou légèrement cuits à la vapeur ou à
qui se délectent de sucer leur abon­ l’eau. Les meilleurs « brocolis sau­
52
Des fleurs dans nos assiettes

vages », et les plus proches des culti­ mais elle est couramment cultivée
vés sont sans doute ceux de la passe- dans nos jardins d’ornement. C’est
rage drave, une petite Crucifère à en tous cas l’une des fleurs les plus
fleurs blanches qui aime à coloniser appréciées en Extrême-Orient : les
le bord des chemins. Mais ne négli­ boutons floraux sont cuits à la
geons pas pour autant les m ou­ vapeur, de même que les fleurs épa­
tardes, radis sauvages et autres nouies. C’est un légume très tendre
ravenelles — en bref toutes les de saveur aromatique et sucrée... et
plantes de la famille dont les inflores­ produit à profusion. Même les fleurs
cences (boutons floraux, fleurs, fanées sont employées, fraîches ou
jeunes fruits et partie tendre de la séchées, dans les soupes!
tige) sont de taille suffisante.
L’hémérocalle, ou lis rouge, se Passons maintenant aux beignets :
rencontre rarement à l’état sauvage, de la même façon qu’avec les fleurs

53
En été

d’ « acacia », nous préparerons de ne pas confondre ses fleurs blanches


savoureux beignets de sureau noir et avec les fleurs jaunes du cytise ou
de glycine. Afin de mieux préserver aubour, qui sont extrêm em ent
la délicatesse des fleurs, on peut pré­ toxiques. Quelques beignets de cytise
parer une pâte à beignets légère, pourraient suffire à vous envoyer
composée de fécule, de sel et d’eau, dans un monde meilleur. Les fleurs
plutôt qu’à base de farine, d’œufs et des deux arbres sont odorantes. Bien
de lait. Nous aurons l’occasion de sûr, vous savez encore distinguer le
reparler plus longuement du sureau blanc du jaune et vous ne pratiquez
cet automne. jamais la cueillette de nuit, mais
Une précision concernant l’acacia l’expérience montre malheureuse­
(ou plus exactement le robinier car ment que la confusion est possible :
ce bd arbre au feuillage léger et aux elle se produit régulièrement! Et
fleurs odorantes n’est pas un véri­ pourtant, leurs feuilles aussi sont très
table acacia) : faites bien attention à différentes : celles du robinier sont
54
y * » ' 1" v • Des fleurs dans nos assiettes
composées de nombreuses folioles Quelle que soit la taille des fleurs ou
disposées de part et d’autre de la ner­ leur couleur, généralement blanche
vure centrale; celles du cytise n’ont ou jaune, parfois rose ou violacée, ce
que trois folioles et ressemblent à schéma est respecté. Les fruits des
d’énormes feuilles de trèfle. Crucifères sont également typiques :
Terminons ce tour d’horizon floral ils sont formés de deux coques exté­
avec un délicieux dessert : il était tra­ rieures et d’une partition interne ou
ditionnel en certaines régions de « septum », sur laquelle sont fixées les
France et d’ailleurs de préparer du graines. C’est ce qui distingue ce
« miel » de pissenlit avec ses mer­ fruit de la gousse des légumineuses
veilleux capitules d ’or. Dans les qui, lui, ne possède pas de septum,
Vosges, c’était la « cramaillotte ». Il les graines étant alors fixées aux
s’agit en fait d’une sorte de confiture, parois. Ce septum est particulière­
très agréable à déguster en tartines ment visible chez la monnaie-du-
ou de toute autre manière. pape — fin et translucide, d’un blanc
nacré, ses qualités ornementales sont
La plupart des plantes rencontrées bien connues. Lorsqu’ils sont très
au cours de cette promenade fleurie minces et allongés, les fruits des Cru­
sont bien connues et pourront être cifères sont nommés « siliques » ; s’ils
identifiées sans difficulté. Seules les sont larges et courts, comme chez la
trois Crucifères sont plus difficiles à bourse-à-pasteur par exemple, ce
différencier, mais la famille possède
des caractéristiques faciles à recon­
naître, que nous avons d’ailleurs déjà
vues : les fleurs possèdent quatre
pétales en croix et six étamines,
quatre grandes et deux petites.
H EM E R O C A LLE
Hemerocallis fulva Famille des
Liliacées

Recette :
délice d'hémérocalle

• Faites revenir délicatement dans


un peu de beurre des boutons flo­
raux d'hém érocalle ou des fleurs
tout juste épanouies. Salez.
• C'est tout: bon appétit !

55
En été

SU REA U N O IR
Sambucus nigra Famille des
Caprifoliacées

G L Y C IN E
Wisteria sinensis Famille des
Fabacées

A C A C IA
Robinia pseudacacia Famille des
Fabacées

U Aubour : Laburnum anagy-


roides Famille des Fabacées

sont des « silicules ». Le port de ces


plantes est encore une bonne façon
de les reconnaître. Leurs longues
inflorescences terminent les tiges et
sont composées de haut en bas : des
boutons floraux, des fleurs épanouies,
des fruits en formation et des fruits
mûrs, prêts à libérer leurs graines,
tous présents en même temps.
L’ensemble de ces critères devraient
vous permettre de distinguer les Cru­
cifères des autres plantes. Et comme,
à part la Giroflée et le Vélar, toutes
sont comestibles, voici une connais­
sance bien utile.
J’espère que cette mise au point
botanique ne vous aura pas coupé
l’appétit. Vive la cuisine des fleurs!
56
Des fleurs dans nos assiettes

PISSEN LIT
Taraxacum officinale Famille des Astéracées

Recette : d'un citron pendant une demi-heure.


miel de pissenlit • Pressez à travers un linge et mélan­
gez avec du sucre ou du miel (envi­
• Ram assez un grand nombre de ron 1,3kg pat litre), puis faites cuire à
capitules de pissenlit et détachez les feu doux ju sq u 'à épaississem ent.
jolies fleurs jaune d'or des parties Remuez constamment vers la fin de
vertes (réceptacle et involucre) qui les la cuisson.
entourent. • Pour le conserver, versez ce sirop à
• Mettez-les à chauffer dans un peu consistance, odeur et couleur de miel
d'eau avec le jus d'une orange et dans des bocaux.

57
6 - NOURRITURES
DES BOIS
Si je vous disais que les arbres se mangent, sans qu’il soit pour cela
nécessaire de posséder des dents d’écureuil, qu’en penseriez-vous?... Eh
bien non, vous auriez tort, et pour vous en donner la preuve, je vous
emmène avec moi en grignoter quelques-uns.
Vous l’avez peut-être deviné, ce n’est citron, fruit des pays chauds qui n’a
pas à leur dure écorce que nous franchement rien à voir avec nos
allons nous attaquer, mais à leurs Conifères. Encore un mystère de la
tendres feuilles qui, en ce début d'été nature.
montagnard, sont au meilleur de leur
forme. Voici d’abord les Conifères :
l’épicéa au feuillage piquant, disposé
tout autour du rameau comme un
écouvillon, et le sapin, moins fré­
quent mais plus connu de nom, dont
les feuilles sont étalées sur deux rangs
dans un seul plan. Remarquez-vous
ces taches d’un vert jaunâtre à
l’extrémité des rameaux, qui tran­
chent sur le manteau vert foncé de
l’arbre? Ce sont les jeunes pousses,
fraîchement écloses des bourgeons.
Goûtez-les : leur saveur acidulée rap­
pelle étrangement... le citron! Et
chose encore plus curieuse, lorsqu’on
étudie leur analyse chimique, on
s’aperçoit qu’elles sont extrêment
riches en vitamine C, tout comme le
59
En été

EPICEA M ELEZE
Picea abies Famille des Larix europaea Famille des
Pinacées Pinacées

SA PIN CEDRE
Abies alba Famille des Famille des Pinacées
Pinacées
Cèdre du Liban : Cedrus libani
Cèdre de l'Atlas : Cedrus atlantica
Cèdre de l'Him alaya : Cedrus deo-
dara

Recette :
sirop de bourgeons de « sapin »

• Récoltez les jeunes pousses d'un


des divers conifères mentionnés dans
le texte (... sauf l'if!) et placez- les
dans un bocal de verre en couches
alternant avec des couches de sucre.
• Placez le bocal au soleil jusqu'à ce
que le sucre ait entièrement fondu.
Filtrez et conservez le sirop en bou­
teille.

60
Nourritures des bois
En tout cas, les jeunes pousses de
ces grands arbres font merveille dans
la salade : elles peuvent même y rem­
placer le citron. On en prépare aussi
un « sirop de bourgeons de sapin »,
contre les affections pulmonaires.
Mais il n ’y a pas besoin d’être
malade pour déguster ce délicieux
sirop rafraîchissant, que l’on peut
boire à tout moment. Les jeunes
pousses de mélèze et de cèdre sont
également très bonnes, mais atten­
tion, celles de l’if sont mortelles! Si
jamais vous y goûtiez, voici le truc :
elles ne sont pas acidulées mais
amères.
L’épicéa et le sapin sont suffisam­ persistantes et plus rigides que chez
ment connus pour qu’il n’y ait pas le mélèze. On ne le rencontre chez
besoin de les décrire. Vous avez vu nous qu’à l’état cultivé, mais il en
plus haut comment les différencier existe de belles forêts, sur le flanc
l’un de l’autre. Encore un moyen sud du mont Ventoux par exemple.
mnémotechnique et tactile pour vous Trois espèces de cèdre poussent de
y aider : l’épicéa pique, car ses par le monde : le cèdre de l’Atlas
aiguilles sont rigides et pointues. au Maroc, le cèdre du Liban, et le
Celles du sapin sont plus souples et cèdre de l’Himalaya ou « déodar ».
arrondies au sommet ; elles ne Toutes trois peuvent se rencontrer
piquent pas. Le mélèze est le seul dans nos parcs ou nos jardins.
conifère de nos régions à avoir des Quant à l’if, c’est un arbuste ou
feuilles caduques : elles jaunissent en parfois un petit arbre spontané dans
automne, transformant les flancs des les bois des montagnes à moyenne et
montagnes en tapis d’or, puis tom­ basse altitude. Les plus beaux ifs sau­
bent peu après. L’arbre se plaît dans vages de France poussent dans la
les zones continentales de nos Alpes : forêt de la Sainte-Beaume au nord-
Savoie, Dauphiné, Haute-Provence et est de Marseille : ce sont là des
Valais en Suisse. Mais il arrive qu’on arbres de plus de dix mètres de hau­
le plante ailleurs. Ses fines aiguilles, teur! Tout simplement parce qu’on
souples, sont réunies en grand les a laissé tranquillement pousser
nombre, en faisceaux, à l’extrémité depuis des siècles, sans les abattre
de rameaux extrêmement courts. prématurément comme font d’habi­
Les feuilles du cèdre ont une dis­ tude les forestiers. Certains spéci­
position semblable, mais elles sont mens cultivés atteignent également
61
En été
graine, prenez soin de la recracher!
IF
M aintenant, il nous faudrait la
Taxus baccata Famille des
salade. Vous avez le choix : hêtre,
Cupressacées
tilleul ou érable nous offrent leurs
feuilles délicates, encore toutes trans­
lucides, et tellement tendres... à
condition de les cueillir avant qu’elles
ne soient trop développées. Leur
saveur est si douce que les jeunes
feuilles de l’un ou de l’autre de ces
arbres peut véritablement former la
base d’une salade, à la place de la
classique laitue. Rien ne vous interdit
d’y ajouter les petites plantes des
sous-bois : violette, ficaire, primevère,
cardamine, stellaire et tant d’autres
en saison. Et pensez à l’abondance de
cette production : combien de salades
une taille impressionnante. L’if est un une forêt de hêtre peut-elle donner?
arbre d’ornement très apprécié pour Ou même le tilleul de votre cour? Il y
son feuillage vert sombre et ses a autour de nous de quoi nous sur­
<i fruits » rouges qu’il porte souvent prendre!
en grand nombre. Ses feuilles sont Chacun de ces trois arbres possède
étalées sur deux rangs, comme celles sa particularité : les feuilles d’érable
du sapin mais elles sont aiguës (celles sont sucrées bien sûr. Même si sous
du sapin sont arrondies au sommet), notre climat sa sève ne contient pas
molles (celles du sapin sont souples) assez de sucre pour qu’on puisse
et d’un vert jaunâtre uni sur la face comme au Canada en tirer un sirop.
inférieure (chez le sapin, elles sont Celles du tilleul sont mucilagineuses
décorées par-dessous de deux bandes et adoucissantes. Si on les fait cuire,
blanchâtres). Le feuillage et les elles soulagent les inflammations
graines du « fruit » de l’if sont intestinales et combattent les consti­
toxiques de par leur richesse en alca­ pations. Les feuilles du hêtre sont
loïdes. Mais pour terminer sur une tout simplement très bonnes.
note plus gaie, sachez que la partie Hêtre, tilleul et érable sont parmi
rouge du « fruit », que l’on nomme les arbres les plus fréquents de nos
« arille », est comestible. Elle est forêts et de nos parcs, et les identifier
sucrée mais très mucilagineuse — ne devrait pas poser de problème
c’est à dire visqueuse —, pas désa­ majeur. Attention simplement à ne
gréable du tout à grapiller. Attention pas confondre les jeunes tilleuls avec
quand même : ne mâchez pas la des noisetiers, dont la forme de la
62
«sva Nourritures des bois

H ETRE
Fagus silvatica Famille des
Fagacées

ERABLE
Famille des Acéracées

Erable plane : Acer platanoides


Erable sycomore : Acer pseudoplata
nus Tilleul
Erable champêtre : Acer campestre
Erable à feuilles d'obier : Acer opuli-
folius le tilleul à petites feuilles, répandu
Erable de Montpellier : acer mons- presque partout. Les jeunes feuilles
pessulanum de ces trois espèces sont comestibles.
Et n ’oubliez pas de ramasser au
début de l’été leurs fleurs parfumées
T ILLE U L pour en préparer de bénéfiques infu­
Famille des Tiliacées sions, calmantes et digestives.
Quant aux érables, il en existe cinq
Tilleul à grandes feuilles : Tilia platy espèces : l’érable sycom ore et
phyllos l’érable plane en basse et moyenne
Tilleul intermédiaire : Tiliax vulgaris montagne, l’érable à feuilles d’obier
Tilleul à petites feuilles : Tilia cor- dans l’Est et le Midi, l’érable de
data Montpellier dans la moitié sud de la
France et l’érable champêtre dans
toutes nos régions. Seules les feuilles
feuille est assez semblable. En cas de des deux premières espèces sont inté­
doute, regardez les jeunes tiges : chez ressantes en ce qui nous concerne.
le noisetier, elles sont typiquement
droites sur plusieurs mètres et recou­ C’est sous le hêtre que pousse une
vertes d’une fine écorce brun clair ; petite plante bien jolie et attachante :
chez le tilleul, elles ne restent pas l’aspérule odorante, qui couvre les
droites aussi longtemps et leur écorce sous-bois frais de ses feuilles en étoile
est grise. Trois espèces différentes surmontées par des fleurs miniatures,
poussent dans nos régions : le tilleul blanches et odorantes. C’est avant
à grandes feuilles dans l’Est et le qu’elles ne se m ontrent que l’on
Midi, le tilleul intermédiaire dans coupe l’aspérule pour en préparer le
les mêmes régions mais plus rare, et fameux « Maitrank ». L’aspérule est
63
En été
rez ensuite pour la préparation.
A SPER U LE O D O R A N T E
Conservez l’aspérule dans une boîte
Asperula odorata Famille des
ou un bocal hermétique et malgré les
Rubiacées
années, elle gardera son arôme.
L ’aspérule odorante est une très
Recette :
jolie plante vivace qui ne mesure
crème à l'aspérule
guère plus d’une vingtaine de centi­
mètres de hauteur. Comme chez les
• Faites infuser un bouquet d'aspé-
gaillets, ses cousins, les tiges portent
rule séchée dans du lait bouillant.
plusieurs étages superposés de
• Filtrez, puis versez dans le lait
feuilles verticillées par six à huit. Ses
aromatisé de la fécule délayée dans
fleurs sont groupées en corymbes à
du lait froid.
l’extrémité de chaque tige. La plante
• Sucrez avec du m iel, portez à
se propage par ses tiges souterraines
ébullition et faites bouillir trois ou
et forme sur les tapis de feuilles
quatre minutes.
mortes des colonies espacées. Quelle
beauté lors de la floraison, qui a lieu
Versez dans un grand bol ou dans
en mai ou juin suivant les régions :
des récipients individuels et laissez
on va jusqu’à nommer l’aspérule
refroidir avant de déguster.
« petit muguet », ou « reine des bois ».
En allemand, c’est le « waldmeister »,
mise à macérer dans un bon vin le maître des forêts... La coumarine,
blanc sec pendant plusieurs semaines. qui se développe au séchage de la
Le résultat possède un délicieux par­ plante, lui confère, outre son déli­
fum, dû à la coumarine que contient cieux parfum, des propriété sédatives :
la plante. Pour le sentir au mieux, il l’infusion d’aspérule calme le système
suffit de laisser sécher l’aspérule qui, nerveux. Comme quoi nous pouvons
au bout de quelques jours dégage également nous soigner tout en
une suave odeur de vanille. Il était dégustant les plantes des bois.
d’ailleurs traditionnel dans les régions
où la lavande n’existe pas de parfu­
mer le linge avec des bouquets
d’aspérule. Quant au Maitrank, c’est
une boisson d’origine germanique,
encore en honneur au Luxembourg,
en Belgique, en Lorraine, en Alsace,
en Allemagne et en Suisse. Vous
pouvez confectionner des crèmes et
des flans délicatement parfumés à
l’aspérule en faisant infuser la plante
séchée dans le lait que vous emploie­
64
Egopode -
Aegopodium padagracia

Epicéa- Picea abies


Chénopode blanc - Chenopodium album

Coquelicot- Papaver rhoeas


7 - GRIGNOTEZ
LA MONTAGNE
L’été est de retour. La montagne se pare d’une multitude de fleurs aux
couleurs incomparables, vénérées par des générations de randonneurs
amoureux des sommets. Petites gentianes bleues et grandes gentianes
jaunes, ou pourpres, rhododendrons d’un rose intense, nigritelle à odeur
de vanille, petite linaire des Alpes où se marient étonnamment le violet
et l’orange, le lis martagon au port superbe... et parfois la rare, trop rare,
edelweiss. Ces fleurs forment de magnifiques bouquets, c’est vrai, mais
ne les coupez pas : certaines sont protégées et les autres devraient l’être
car les cueillettes abusives ont réduit leurs nombres dans des propor­
tions parfois inquiétantes. Mais si vous voulez récolter des plantes, je
vais vous en présenter quelques-unes que vous pourrez ramasser sans
complexe : pour elles, nul danger d’extinction. Leurs fleurs ne sont pas
les plus belles me direz-vous... Peut-être, encore qu’en s’en approchant,
on puisse découvrir leur délicate beauté. En tout cas, ces plantes présen­
tent un intérêt majeur : ce sont d’excellents légumes.
Commençons par jeter un coup Mais à y regarder de plus près, le
d’oeil autour de ce chalet d’alpage sommet des tiges et la face inférieure
qu’entoure une mer verte, là où au fil des feuilles sont couvertes de minus­
des ans les vaches ou les moutons cules billes blanchâtres qui procurent
ont engraissé la terre. D ’innom­ cette sensation d’humidité. Voici un
brables végétaux aux larges feuilles truc bien pratique pour reconnaître le
vert foncé composent cette vaste seigneur des légumes alpins, le chc-
étendue. Lorsqu’on les touche, nopode bon-benri. Même s’il n’a
l’impression est bizarre : on dirait rien à voir avec Henri IV (ni Henry
qu’elles sont mouillées en-dessous. VIII pour les anglais), cet « épinard
65
En été
sauvage » a une bien longue histoire, proportion de fromage, de lait et de
puisqu’au néolithique on l’appréciait crème... D ’ailleurs ce chénopode a
déjà. Les montagnards en tiraient connu pendant des siècles les hon­
jusqu’à ce siècle une grande partie de neurs de la culture : il est rustique,
leur subsistance, et dans diverses vivace (pas besoin de le semer
régions, la tradition s’est maintenue chaque année), et très productif. En
d’aller ramasser le bon-benri dans les outre, sa valeur nutritive est remar­
alpages. Dans le Comté de Nice, quable, en particulier sa teneur
c’est le « sangarigou », dont on pré­ en protéines (qui sont complètes,
pare de délicieux gnocchis verts. En équilibrées en acides aminés) et en
Gruyère, on le nomme « grachettaz » vitamine C. Que les modes sont donc
et il sert à confectionner l’incontour­ stupides, qui nous ont fait oublier de
nable « soupe de chalet » - qui com­ si bons légumes.
porte aussi bien sûr une importante Le chénopode bon-henri est une
C H É N O P O D E B O N -H E N R I
Chenopodium bonus-henricus Famille des Chénopodiacées

Recette : gnocchis verts Recette : soupe de chalet

• Faites cuire à l'eau bouillante une • Dans une grande marmite, faites
grande quantité de feuilles de Bon- cuire à l'eau des feuilles de chéno­
Henri. pode Bon-Henri, d'ortie et de Rumex
• Une fois cuites, égouttez-les et alpin avec des pommes-de-terre cou­
hachez-les finement, puis ajoutez pées en morceaux.
deux oeufs battus, du sel, du thym, • Ajoutez ensuite des pâtes et laissez
des noix hachées et de la farine pour cuire la soupe.
obtenir une pâte épaisse. • A vant de servir, ajoutez de la
• Mettez une grande cocotte d'eau à crème fraîche et du fromage râpé.
feu vif. Quand elle bout, salez-la et Traditionnellement, cette soupe se
réduisez le feu. Prenez des boules de sert dans un baquet en bois posé sur
pâte à l'aide d'une cuillère et faites- la table au centre des convives, qui y
les glisser dans l'eau. Au bout d'une plongent chacun une cuillère en bois.
dizaine de minutes, elles sont cuites A l'heure actuelle, on n'y met plus
et remontent à la surface. guère que le Bon-Henri, car l'ortie et
• Disposez les boulettes côte à côte le Rumex
dans un plat huilé, saupoudrez de alpin ne sont malheureusement plus
parmesan et faites gratiner. consommés. Comme fromage, choi­
sissez un Beaufort ou un « Fribourg »
(véritable Gruyère suisse).

66
im­
Grignotez la montagne •
plante vivace pouvant atteindre plus
d’un mètre de hauteur. Il porte de
grandes feuilles en forme de fer de
lance, longuement pétiolées. Leur
forme rappelle étonnamment celle de
nos épinards cultivés (introduits de
Perse à l’époque des croisades), ce
qui est somme toute normal car ces
deux plantes appartiennent à la
même famille des Chénopodiacées.
Une famille de plantes éminemment
comestibles puisqu’en font également
partie la betterave sous ses différentes
formes (rouge, à cardes, sucrière,
fourragère...), les arroches et les sali­
cornes, que nous rencontrerons au
bord de la mer. Les fleurs du bon-
henri sont minuscules et verdâtres.
Elles passeraient facilement inaper­
çues si elles n’avaient pas la bonne
idée de se grouper en longs épis
denses terminant chaque rameau.
Chose fort intéressante, ces inflores­ rougeâtres peuvent se consommer
cences sont comestibles lorsqu’elles comme cette dernière, en compotes
sont jeunes, c’est-à-dire tant qu’on ou en tartes. Mieux encore, ils sont
peut les cueillir simplement avec les très bons crus : croquants, juteux,
doigts, car plus tard elles deviennent acidulés — beaucoup moins acides
ligneuses. Légèrement cuites à la que la rhubarbe —, il suffit de les
vapeur — pas trop sinon elles se couper en morceaux et de les peler.
ramollissent exagérément —, et ser­ Leur saveur rappelle un peu celle des
vies avec une sauce vinaigrette, les pommes vertes. Tout comme de ces
« asperges » de bon-henri sont déli­ dernières, n’en abusez pas. Le limbe
cieuses. des feuilles (la partie verte) fournit
un très bon légume que l’on peut
Regardons de plus près : voici accomoder « à la façon des épinards »
d’autres feuilles, d’un vert plus clair, suivant l’expression consacrée par
munies de longs pétioles épaissis res­ l’oubli de nos anciennes nourritures.
semblant presque à une côte de rhu­ Le Rumex alpin est une grande
barbe. C ’est le ru m ex alpin, plante vivace formant d’immenses
d’ailleurs également nommé « rhu­ colonies autour des chalets d’alpage.
barbe des moines » car ses pétioles Dans de bonnes conditions, les
67
En été
feuilles, riches en tanin, sont généra­
RUM EX A LP IN
lement très amères. Notre rumex
Rumex alpinus Famille des
alpin entre dans cette catégorie, mais
Polygonacées
heureusement pour nous, l’amertume
Recette : tarte des montagnes
de ses feuilles est à peine sensible.
Un peu plus loin, dans cette prairie
• Récoltez de grandes feuilles de
humide, voici encore une plante dont
Rumex alpin, aux pétioles épais.
les feuilles se préparent d’innom­
Réservez les limbes pour utiliser
brables manières. Ses colonies sont
com m e légum e et co u p e z les
fort décoratives: de jolis épis roses
pétioles en tronçons de deux ou
aux fleurs en forme d ’orchidée,
trois centimètres de longueur. Pelez-
parsèment le vert mat du feuillage,
les et retirez les fils.
blanchâtre lorsque le vent le retourne.
• Sur un fond de tarte en pâte bri­
C’est la bistorte, une renouée mon­
sée, formez un lit de noisettes ou
tagnarde à grosse racine tordue sur
d'amandes moulues et disposez-y
elle-même (deux fois, d’après l’éty­
les pétioles de Rumex. Nappez de
mologie de son nom), d ’un rose
deux yaourts battus avec du miel
tendre à l’intérieur. Elle est appétis­
liquide pour les sucrer.
sante cette racine, et il paraît que nos
• Décorez de croisillons de pâte et
ancêtres la consommaient car elle est
faites cuire à four chaud.
riche en matières nutritives, en ami­
don surtout. Mais il faudrait la faire
feuilles de la base peuvent atteindre tremper longuement pour en éliminer
avec leur interminable pétiole près le tanin qui lui donne une désa­
d’un mètre de longueur. Leur limbe gréable astringence. Contentons-nous
est ovale et profondément échancré de ses feuilles qui fournissent un
en cœur à la base. Les tiges, encore excellent légume cuit.
plus hautes portent des grappes La bistorte est une renouée, genre
denses de fleurs d’un vert rougeâtre. de la même famille que les Rumex,
Ces inflorescences ressemblent éton­ les Polygonacées, dont il existe une
namment, en plus grand, à celles de vingtaine d’espèces dans notre flore.
l’oseille ou de ces « mauvaises herbes » C ’est une plante vivace qui peut
des prés que l’on nomme suivant les atteindre quatre-vingt centimètres de
régions « parellcs », « patiences », hauteur, portant des feuilles à la fois
« lampés », etc. Toutes ces plantes larges et allongées, dont le limbe se
sont des espèces du genre Rumex, rétrécit brusquement et se prolonge
que l’on peut diviser en deux : d’une le long du pétiole.
part les oseilles, à saveur nettement
acide et dénuée d’amertume ; d’autre On rencontre aussi en montagne,
part les véritables rumex, dont les dans les pâturages de l’étage alpin
68
Grignotez la montagne

B ISTO R TE
Polygonum bistorta Famille des Polygonacées

Recette : gratin de bistorte

• Faites cuire à l'eau des feuilles


de bistorte, puis égouttez-les soigneu­
sement et pressez-les pour en élimi­
ner un maximum d'eau. Hachez-les.
• Pendant que les feuilles cuisent,
préparez une sauce bécFiamel épaisse
avec de la farine, de l'huile d'olive,
de l'eau et du lait. Salez, poivrez et
parfumez d'un souffle de muscade.
Vous pouvez aussi y ajouter du fro­
mage râpé.
• Mélangez soigneusement la bistorte
à la sauce et versez dans un plat à
gratin huilé. Saupoudrez de fromage
râpé et de chapelure.
• Faites gratiner à four chaud.

Renouée vivipare : Polygonum vivi-


Bistorte
parum Famille des Polygonacées

surtout, une toute petite renouée très qu’il en soit, ces bulbilles ont une
curieuse, la renouée vivipare. En- délicate saveur de noisette.
dessous de son épi terminal de fleurs
blanches, sa tige unique porte de Dans les pâturages aussi, mais à
nombreux bulbilles ovoïdes rouges plus basse altitude, règne la berce
surmontés d’un « chapeau » vert : spondyle, une Ombellifère typique
curieux ensemble. Ces petits bulbilles que l’on rencontre souvent aussi en
reproduisent directement la plante plaine. C’est une grande plante fort
par viviparité lorsqu’ils tombent sur commune, dont les feuilles de la
le sol et s’y enracinent. Et, ce qui base, découpées en larges folioles,
vous intéressera sûrement, ils sont peuvent atteindre de très grandes
comestibles. Sans doute sont-ils dimensions. Toute la plante est cou­
nourrissants, mais il en faudrait beau­ verte de poils blanchâtres assez
coup pour remplir un estomac. Quoi raides, qui lui donnent un peu
69
En été
l’apparence d’un « ours mal léché »... plier entre le pouce et l’index, pelez-
d’où peut-être son nom, du germa­ les et dégustez-les comme des bon­
nique bar, l’ours. D’ailleurs en fran­ bons : elles sont juteuses, croquantes,
çais, on la nomme également sucrées, et délicieusement aroma­
« patte d’ours » ou « branc-ursine ». tiques, avec une odeur exquise qui
La base des épais pétioles est large­ rappelle la mandarine agrémentée de
ment engainante, comme chez l’angé­ noix de coco... Les toutes jeunes
lique. Ses grandes ombelles couron­ feuilles de berce, luisantes et fripées,
nent des tiges dépassant fréquem­ sont très bonnes dans les salades,
ment le mètre. Les fleurs, aux pétales qu’elles relèvent de leur arôme parti­
extérieurs beaucoup plus grands que culier. Lorsque les feuilles sont plus
les autres, dégagent une curieuse développées, on les prépare en
odeur (de pipi de chien...), qui attire légumes: les gratins, les soufflés et les
les mouches! tartes leur conviennent particulière­
Les jeunes tiges de berce sont peut- ment bien. Dans les pays slaves,
être l’un des meilleurs produits du on avait coutume de confectionner
règne végétal. Coupez les hampes avec les feuilles et les tiges de la
florales encore assez souples pour
BERCE
Heraclcum sphondylium Famille
des Apiacées

Recette :
inflorescences de berce

• Cueillez de jeunes inflorescences


de berce entourées de la base élar­
gie du pétiole lorsqu'elle est encore
tendre.
• Faites-les cuire à la vapeur en
prenant soin de leur garder suffi­
samment de croquant.
• Mélangez un yaourt avec un peu
d'huile d'olive et des cornichons
hachés finement. Salez et parfumez
d'un souffle de poudre d’ail.
• Faites tiédir cette sauce et versez
sur les pousses de berce dès
qu'elles sont cuites.

70
Grignotez la montagne

berce une « choucroute » (de l’alle­ cette dernière que les racines et les
mand sauer, acide et kraut, herbe), fruits de berce doivent de stimuler la
dont on faisait une soupe, le digestion. La plante renferme de plus
« bortsch » (en polonais « barszcz »). une hormone analogue à l’hormone
La soupe que l’on nomme ainsi à mâle, et on la dit aphrodisiaque...
l’heure actuelle n’a plus grand chose Certains vont même jusqu’à compa­
à voir avec la recette d’origine... rer la berce avec le fameux ginseng,
Les jeunes inflorescences de berce, mais elle possède un gros inconvé­
encore protégées par la base de leur nient : elle est trop commune et on la
grand pétiole, sont un mets raffiné. Il trouve partout!
suffit de les faire cuire à la vapeur et
de les servir avec une sauce légère Vous connaissiez déjà les attraits de
pour se délecter de leur fine saveur. la montagne, mais je pense qu’au
Quant aux fruits aplatis, c’est un bon cours de la merveilleuse promenade
condiment, dont il faut user avec que nous venons de faire ensemble
parcimonie, car ils renferment une parmi les alpages fleuris, vous en
huile essentielle puissante. C’est à aurez encore découvert de nouveaux.

71
En été

72
m

8 - BORDS DE MER
COMESTIBLES
La mer a été de tous temps source de nourriture. Les poissons qu’on y
pêche bien sûr, les crustacés et les coquillages que Ton ramasse sur les
plages et sur les rochers, les algues aussi — injustement oubliées dans
nos régions, mais toujours en honneur au Japon — formaient autrefois
la base de l’alimentation locale. Il faut leur ajouter un certain nombre de
plantes à fleurs (à fleurs souvent vertes et bien petites, il est vrai), main­
tenant méconnues, qui contribuaient à la variété et à l’équilibre de la
nourriture des populations côtières.

Sur les vases salées des estuaires se de mer »... Les jeunes tiges sont en
rencontrent les colonies tous cas excellentes, crues
d’une drôle de petite dans les salades ou
plante qui semble cuites à la vapeur et
réduite à une servies comme des
tige verte formée haricots verts ou
d ’articles des asperges. Il
emboîtés les est traditionnel
uns dans les en Baie-de-
autres. C’est la Somme et à
salicorne, G uérande de
« corne salée », conserver les sali­
qui mérite son cornes dans le
nom car elle est Criste- vinaigre pour les uti­
remplie d’un jus riche
marine
liser à la manière des
en sel. Sa saveur pourrait cornichons. Mais elles
aussi la faire qualifier de « saucisson sont encore meilleures fraîches.
73
En été

S A LIC O R N E
Salicornia europaea Famille des Chénopodiacées

Recette : • Remplissez les bocaux de vinaigre


salicorne au vinaigre de vin ou de cidre et laissez-les pen­
dant trois semaines dans un endroit
• Ramassez de jeunes tiges de sali­ frais avant de les consommer — avec
corne bien tendres et placez-les dans une raclette par exemple.
de petits bocaux de verre avec des Ne gardez pas plus d'un an les sali­
branchettes d'estragon et quelques cornes au vinaigre car elles se ramol­
grains de poivre entiers. lissent avec le temps.

Attention, avec l’âge, les tiges devien­ bien différente d’aspect : ses tiges
nent ligneuses par l’intérieur : vérifiez ligneuses portent des feuilles char­
à la cueillette. nues d’un beau gris argenté. Ce sont
elles que l’on consomme comme
Non loin s’étendent d’autres colo­ légume. D’innombrables recettes, des
nies. Ce sont celles de l’halimione, plus simples aux plus sophistiquées,
cousine de la salicorne et pourtant lui sont applicables.
Si nous quittons maintenant les
vases salées où le pied enfonce pour
revenir sur la terre plus ferme, un
arbrisseau retient notre regard. Ne
dirait-on pas qu’il est paré des
feuilles argentées de l’halimione? Eh
bien nous ne sommes pas loin de
la vérité, car il s’agit de l’arroche
halimus, membre comme les deux
plantes précédentes de la famille émi­
nemment comestible des Chénopo­
diacées (où l’on rencontre notam­
ment l’épinard et la betterave, outre
ces princes des légumes sauvages que
sont les chénopodes). Les feuilles de
cette arroche, que l’on nomme aussi,
à tort, « pourpier de mer », sont déli­
cieuses, crues en petites quantités
dans les salades, ou de préférence
cuites, à l’eau, à la vapeur, à la poêle,
74
Bords de mer comestibles

H A LIM IO N E
Halimione portulacoides Famille des Chénopodiacées

ARRO CHE
Famille des Chénopodiacées

Arroche halimus : Atriplex halimus gène. Incorporez un à un quelques


Arroche hastée : Atriplex hastata jaunes d'œ uf, puis ajoutez-y l'ar-
roche hachée. Salez et poivrez.
Recette : • Battez les blancs d'œuf en neige et
tarte soufflée d'arroche in c o rp o re z-le s dé licatem e n t au
mélange précédent.
• Faites cuire à l'eau ou à la vapeur • Foncez d'une pâte brisée un moule
des feuilles d'arroche ou d'halimione à tarte profond, garnissez-en le fond
et hachez-les. d'une couche d’oignons et versez-y
Mélangez de l'huile d'olive et de le mélange (attention à ce qu'il ne
Ja farine dans une casserole à feu déborde pas en gonflant).
doux, pour obtenir une pâte homo- Faites cuire à four chaud.

etc. Elles sont épaisses et savoureuse­ goûtant que la plante est une
ment salées. voisine de la carotte : sa
Une autre espèce, Earroche saveur aromatique ne peut
hastée, est fréquente au bord des tromper, même si un goût
chemins, non loin du littoral. Ses salé prononcé la masque par­
feuilles sont beaucoup plus larges, tiellement. Les jeunes
d’un vert franc et ont la forme d’un feuilles sont très bonnes à
fer de hallebarde. L ’une de leurs grignoter telles quelles, et
sœurs, l’arroche des jardins ou elles sont encore meilleures
« belle-dame » se rencontrait autrefois dans les salades. Plus âgée,
couram m ent dans les potagers. elle fait d’excellents légumes
Toutes les arraches sont des légumes cuits, et l’on a parfois encore
de choix. coutum e de la confire au
Dirigeons-nous vers ces rochers vinaigre. La criste-m arine
continuellement soumis aux em­ avait autrefois sa place au
bruns. Si ce milieu nous semble hos­ potager, mais cela fait bien
tile, c’est lui pourtant qu’affectionne longtemps qu’on ne l’y voit
la criste-marine, dite aussi « perce- plus.
pierre », une petite Ombellifère aux La criste-m arine est une Arroche
feuilles charnues. On s’aperçoit en la plante rampante puis redressée, à halimus

75
En été
feuilles plusieurs fois découpées en
segments allongés et étalés. Tiges et
feuilles ont une couleur un peu
glauque. Les petites fleurs, d ’un
blanc verdâtre, sont groupées en
ombelles composées, comportant
entre dix et vingt rayons épais.
En retrait de la mer, au bord des
canaux et des fossés, se dresse avec
fierté la guimauve. Bien connue
pour ses vertus médicinales adoucis­
santes et émollientes, on l’emploie
depuis l’Antiquité pour calmer les
inflammations, pour soigner les mala­
dies respiratoires, comme laxatif, etc.
Ses racines sont données à mâcher
aux bébés qui font leurs dents pour
aider celles-ci à sortir. Mais en plus
d ’un remède, la guimauve est,
comme toutes les plantes de la
C R ISTE-M A R IN E
Crithmum maritimum Famille des Apiacées

Recette : profit à la plupart des légumes sau­


criste-marine à la crétoise vages.

• R é co lte z de jeunes fe u ille s de Recette :


criste-marine, bien tendres et faites- condiment de criste-marine
les cuire à la vapeur, en leur conser­
vant un léger croquant. • Hachez finement des feuilles de
• Servez avec un filet d'huile d'olive criste-marine avec de l'ail.
et un jus de citron. Pas besoin de sel • Placez dans un bocal de verre en
car la criste-marine est naturellement mélangeant avec un peu de sel, et
salée. recouvrez de vinaigre de cidre et
Cette préparation extrêm em ent d'huile d'olive. Remuez.
sim ple est probablement celle qui Vous pouvez consommer immédia­
permet de sentir au mieux la saveur tement ou co n se rver quelques
des plantes. On peut l'appliquer avec semaines.

76
Bords de mer comestibles

G U IM A U V E
Althaea officinalis Famille des Malvacées

famille des Malvacées (nous avons hauteur, dont les tiges robustes por­
déjà rencontré sa cousine la mauve tent des feuilles ovales, lobées, cou­
sylvestre en cherchant les salades vertes d’une couche dense de poils
printanières), un bon légume. Ses cotonneux : elles sont au toucher
toutes jeunes feuilles peuvent être d’une douceur extraordinaire. Les
ajoutées aux salades. Plus âgées on grandes fleurs possèdent cinq pétales
les fera cuire comme légume ou en blanc rosé et en leur centre la
soupe, qu’elle épaissit comme le colonne d’étamines typique des Mal­
tapioca. Mais attention le mucilage vacées. On la cultivait beaucoup jadis
qui est à la base des propriétés béné­ pour ses propriétés médicinales.
fiques de la guimauve rend en même
temps ses feuilles quelque peu vis­ Maintenant, le dessert. Toujours
queuses. Si les africains raffolent de sous le signe du feuillage argenté,
cette texture, les occidentaux ont voici un arbrisseau épineux dont les
généralement bien du mal à l’accep­ épais buissons bordent densément le
ter. C’est donc une plante à utiliser rivage : c’est l’argousier, avec un « g »,
avec modération... Sauf en cas de à ne pas confondre avec l’arbousier
constipation ! du maquis m éditerranéen. T out
La guimauve officinale est une autour des rameaux s’agglutinent de
grande plante de plus d’un mètre de jolies baies dont la couleur varie du
A R G O U S IE R
Hippophaë rhamnoides Famille des Elaeagnacées

Recette : sirop d'argousier entonnoir profond. Après un léger


temps d'arrêt, repartez dans le sens
• Peu après la récolte, égrenez les inverse, et ainsi de suite. Ceci permet
argouses et passez- les à travers un au sirop de se conserver sans cuisson
moulin à légumes en inox (fer et alu­ pendant plus d'une année!
minium sont attaqués par l'acidité du • Mettez en bouteilles et bouchez-les
jus) pour en recueillir le jus. Filtrez à herm étiquem ent à la paraffine.
travers un linge fin. Conservez au frais et à l'abri de la
• Ajoutez même poids de sucre roux lumière.
et, à l'aide d'une spatule de bois, Si le sirop commençait à fermenter, il
tournez le liquide toujours dans le suffirait de le faire chauffer à 75°C
même sens jusqu'à formation d'un environ pour stopper le processus.

77
En été
mées d’écailles rousses en dessous.
Recette : gelée d'argousier
Les fleurs, petites et verdâtres, se
voient à peine, contrairement aux
• Faites fondre de l'agar-agar en
fruits éclatants qui leur succèdent.
poudre, en paillettes ou en bâton
L’argousier a une répartition géogra­
dans de l'eau en suivant le mode
phique assez curieuse : il pousse
d'emploi approprié (la poudre ou
aussi bien dans les dunes du littoral
les paillettes me semblent plus pra­
de la Manche, qu’il stabilise grâce à
tiques), m ais dans une quantité
ses puissantes racines, que le long
moindre d'eau.
des torrents du sud-est de la France
• Ramenez à la quantité de liquide
et du Valais, dans les graviers allu­
stipulée en ajoutant du sirop d'ar­
vionnaires. De quoi réconcilier la mer
gousier au mélange chaud d'agar-
agar et d'eau.
et la montagne!
• Versez dans un moule et mettez à
refroidir au réfrigérateur. Démoulez
avant de servir.

jaune orangé au rouge capucine.


Elles sont remplies d’un jus acide,
très parfumé, mais il est bien difficile
de les détacher de leur support : le
mieux est encore d’employer des
ciseaux. Le jus des fruits d’argousier
est remarquablement riche en vita­
mine C (environ 450 mg/100 g —
soit 9 fois plus que le citron ou le
chou). Vu son acidité, il fait un
excellent vinaigre. Autrement, on en
confectionne généralement un sirop
qui se boit dilué dans de l’eau. Ce
sirop est d’ailleurs préparé et vendu
commercialement. Mais c’est la gelée
d ’agousier qui mérite le titre de
meilleur dessert du bord de mer.
L’argousier est un arbrisseau de un
à trois mètres de hauteur, très touffu,
aux rameaux fortement épineux et
densément feuillés. Ses feuilles sont
allongées, d’un vert sombre sur leur
face supérieure, argentées et parse­ Argousier

78
9 - AROMATES
SAUVAGES
En vous promenant dans la nature, il vous est sans doute arrivé de frois­
ser une feuille entre vos doigts pour la sentir. Et je suis sûr que vous
vous êtes souvent émerveillés de l’odeur agréable que percevaient vos
narines. Car les plantes aromatiques, riches en huile essentielle, ne sont
pas rares dans notre flore. Dans le Midi surtout : rien que le nom de
« Provence » évoque en plus du soleil des bouffées d’appétissants par­
fums. Les « herbes de Provence » sont à la base de l’arsenal condimen-
taire de notre cuisine. Toutes se rencontrent chez nous à l’état sauvage,
et bien d’autres encore.

C’est avant tout de la grande plupart des Labiées aroma­


famille des Labiées qu’il tiques du Midi : lors­
s’agit. A leur tête, le qu’elles poussent dans
thym et le romarin, leurs garrigues rocail­
si connus et telle­ leuses et ensoleillées
ment cultivés qu’il ce ne sont que de
est inutile de les petites plantes ra­
décrire. Puis la bougries, mais leur
sauge officinale, arôme est d’une
qui à l’état sauvage grande finesse,
fait de petites alors que quand on
feuilles grises très les cultive dans la
odorantes, bien supé­ bonne terre profonde
rieures à celles des d’un jardin où l’arro­
plantes cultivées. Cette sage ne leur manque pas,
remarque est vraie pour la Origan les plantes grandissent au
79
En été
détriment de leur parfum. Les du littoral. Son odeur est assez forte,
feuilles de sauge ou de roma­ et il est rare qu’on l’utilise.
rin prennent même une
odeur peu agréable à l’état D ’autres labiées aromatiques se
frais, et il est préférable de rencontrent aussi hors de la région
les utiliser séchées. m éditerranéenne. L’origan par
L’hysope et la sar­ exemple est commun au bord des
riette, autres sous- chemins de la plupart de nos régions.
arbrisseaux méditerra­ Il est bien joli avec son bouquet de
néens extrêmement fleurs roses, mais il déçoit un peu car
odorants connaissent il ne parfume pas autant les mets que
aussi une certaine dégé­ son odeur aromatique laisserait pré­
nérescence lorsqu’on les sager. C ’est bien dommage. Le
cultive. Ce sont tous mieux est peut- être encore d’en pré­
deux d ’excellents parer un « thé solaire » en laissant
condiments, mais macérer ses inflorescences pendant
encore davantage quatre à six heures dans un bocal
vu la valeur orne­ rempli d’eau et exposé au soleil. Le
mentale de leur florai­ breuvage est d’une finesse remar­
son, bleu vif chez quable. Le serpolet, cousin germain
l’hysope, blanc pur chez du thym, est une petite plante ram­
la sarriette. Ne quittons pante aux feuilles minuscules et aux
pas le Midi sans parler de boules de fleurs roses ou violettes qui
la lavande, qui n’est pas pousse un peu partout. C’est un bon
Lavande qu’une plante de parfumerie
puisqu’on peut fort bien en
aromatiser des crèmes, des flans ou
d’autres desserts. Il en existe plu­
sieurs espèces dans notre flore : la
lavande aspic (à larges feuilles) qui
pousse en-dessous de 400 m d’alti­
tude et la lavande vraie (à feuilles
étroites), de 400 m à 1800 m. La
seconde est beaucoup plus fine que
la première, et son parfum s’affine
encore à mesure que l’on monte. Ne
parlons pas du lavandin, hybride cul­
tivé dont l’odeur est grossière compa­
rée à celle de la lavande. Quant à la
lavande stœchade, elle ne pousse
que sur terrain siliceux à proximité
80
...
Aromates sauvages

A RO M A TES SA U VA G ES
Famille des Lamiacées

Thym : Thymus vulgaris


Romarin : Rosmarinus officinalis
Sauge officinale : Salvia officinalis
Hysope : Hyssopus officinalis
Lavande aspic : Lavandula latifolia
Lavande vraie : Lavandula angus-
tifolia
Lavande stoechade : Lavandula
stoechas
Origan : Origanum vulgare
Serpolet : Thymus serpyllum
Mélisse : Melissa officinalis
Menthe des champs : Mentha arven-
sis
Menthe pouliot : Mentha pulegium
Menthe aquatique : Mentha aqua-
tica
Menthe sylvestre : Mentha longifolia
Menthe à feuilles rondes : Mentha
suaveolens

condiment, moins puissant que son


célèbre cousin bien sûr mais très déli­
cat. Il sera facile de lui trouver une
foule d’usages.
Et ces belles feuilles vert clair, déli­
catement dentées sur les bords, ces
jolies fleurs blanches que butinent les
abeilles. Froissons une feuille. Cette
odeur citronnée, pas d’erreur, c’est la
m élisse. On la nomme parfois
« citronnelle », mais à tort car la véri­
table citronnelle est une Graminée délicat. Il en existe huit espèces dans
tropicale, plante bien différente. En notre flore, de qualité inégale. Les
tous cas la mélisse parfume délicieu­ meilleures à mon goût sont la
sement desserts et boissons. Quant menthe des champs, dont l’odeur a
aux menthes, le problème est plus une finesse toute spéciale, et la
81
En été
menthe pouliot, plus puissante mais
moins délicate. La menthe aqua­
tique est également très agréable et
dégage une impression de fraîcheur
due au menthol. Au bas de la liste, je
citerais la menthe sylvestre, aux
feuilles allongées grisâtres et la
menthe à feuilles rondes, peut-être
la plus répandue. De ces deux der­
nières espèces, on peut néanmoins
préparer de bons thés solaires.
Toutes les menthes affectionnent les
lieux humides.
En plus de tous leurs bienfaits, les
Labiées présentent l’avantage d’être
faciles à reconnaître avec leurs tiges
carrées, leurs feuilles opposées et
décalées de 90° à chaque « étage »
(les botanistes les qualifient de

Recette : pain de carvi c o u v re z-la et la isse z-la


(« pumpernickel ») doubler de volum e dans
un endroit tiède pendant
• Faites fondre un peu de miel et de environ une heure et demi.
levure de boulanger dans un bol • Pétrissez de nouveau
d'eau tiède. V ous p o uvez aussi et d iv is e z la pâte en
préparer un levain avec de la farine plusieurs boules, suivant sa
de seigle, un peu de miel et de l'eau, taille. Placez les boules sur
à laisser fermenter quelques jours. une plaque huilée,
• Mélangez bien, puis ajoutez de la couvrez et laissez lever
farine complète et du sel. Pétrissez de nouveau.
longuement. • Au m om ent d 'e n ­
• Ajoutez alors quelques cuillerées fourner, faites quelques
à café de grains de carvi et un peu e n ta ille s sur chaque
de farin e de se igle . Pétrissez de bo ule. Pour en rendre
nouveau jusqu'à ce que la pâte soit l'a p p a re n ce plus jo lie ,
souple et les graines bien réparties. b a d ig e o n n e z-le s, au
• Placez la pâte dans un saladier moyen d'un pinceau, d'un
huilé et tournez-la pour que toute sa œuf battu.
surface soit recouverte d'huile, puis Faites cuire à four chaud.

82
Aromates sauvages
« décussées »), et leurs fleurs à deux antiseptiques. Ah! les merveilleuses
lèvres, sauf chez les menthes, où elles plantes!
sont presque régulières. Toutes ces
plantes sont douées de vertus médici­ Dans le groupe des aromatiques,
nales : elles sont stimulantes, diges­ les Ombellifères arrivent en bonne
tives, antispasmodiques, sédatives
parfois (thym, mélisse, lavande, ser­
polet), plus rarement expectorantes Fenouil : Foeniculum
Famille des Apiacées
(thym, hysope) et presque toujours Carvi : Carum carvi vulgare
Panais : Pastinaca sativa
Berce : Heracleum sphondylium
Carotte : Daucus carota
Myrrhe odorante : Myrrhis odorata

Famille des Astéracées


Tanaisie : Tanacetum vulgare
Sa n to lin e : Sa n to lin a cham ae-
cyparissus
Immortelle : Helichrysum stoechas

Famille des Liliacées


Ail : Allium spp.
Ail des ours : Allium ursinum
C ib o u le tte : A lliu m sch o e n o -
prasum

Famille des Brassicacées


Moutarde : Brassica nigra, Sinapis
alba
Cresson : Nasturtium officinale
Alliaire : Alliaria petiolata

Famille des Rosacées


Petite pim prenelle : Sanguisorba
minor
Grande pimprenelle : Sanguisorba
officinalis

Famille des Cupressacées


Genévrier : Juniperus commuais
Santoline Immortelle

83
En été

Recette : sel aromatique fro id . D é m o u lez au mom ent de


• Broyez dans un moulin à café des servir.
fe u ille s de thym , de rom arin et Vous pouvez remplacer la mélisse
d'hysope, tamisez-les et mélangez à par de la lavande ou de la menthe. La
du sel fin bien sec. menthe pouillot et la menthe des
Vous pouvez varier à l'infini la liste cham ps sont les plus agréables.
des arom ates: sarriette, serpolet, L'agar-agar est une algue décolorée
coriandre, carotte, berce, etc. au soleil, au fort pouvoir gélifiant, qui
permet de préparer des sauces
Recette : huile parfumée épaisses, des gelées et des flans. Elle
peut se présenter en poudre, en
• Remplissez d'huile une bouteille
paillettes ou en bâtons.
de verre à large ouverture (genre
bouteille de jus de fruits).
Recette : beurre d'alliaire
• Placez-y quelques branchettes de
romarin et de sarriette avec deux ou • H a c h e z finem ent des fe u ille s
trois gousses d 'a il coupées en d'alliaire et mélangez- les à du beurre
morceaux. Les amateurs peuvent y ramolli et à un peu de sel fin.
ajouter un piment rouge. • Tartinez de ce beurre parfumé de
• La isse z m acérer pendant trois belles tranches de pain de campagne,
semaines, au soleil si possible, ou que vous pouvez décorer avec les
dans un lieu tiède afin que les fleurs de cette jolie plante.
aromates imprègnent bien l'huile. Vous pourrez préparer de la même
Transvasez l'huile parfumée dans une façon du beurre de bourrache, de
b o u te ille m unie d'un bouchon souci, d'ail des ours ou de genévrier.
verseur, pour po uvoir en arroser
d'une main légère votre nourriture.
Elle est particulièrement délicieuse
avec les céréales et les légumes.

Recette : flan de mélisse


• Faites infuser un bouquet de
feuilles de mélisse fraîches dans du
lait bouillant.
• Filtrez et remettez le lait à chauffer.
Délayez-y de l'agar-agar, en suivant
le mode d'emploi du paquet. Ajoutez
un soupçon de sel et sucrez.
• Lorsque le mélange a cuit, versez
dans un moule et laissez prendre au

84
Aromates sauvages

Recette : vraie moutarde place. Le premier du peloton est sans


nul doute le fenouil car toute la
• Récoltez des graines de moutarde plante exhale au moindre froissement
blanche ou noire, ou bien d'une une délicieuse odeur d’anis. C’est un
autre Crucifère comme l'alliaire ou aromate de premier choix : jeunes
le cresson. pousses dans les salades, feuilles et
• Broyez-les dans un mortier ou un fruits dans divers plats et dans les
moulin à café, et mélangez-les avec boissons, alcoolisées ou non. La
un peu de farine com plète légè­ meilleure tisane se prépare avec ses
rement grillée à sec dans une poêle. fleurs épanouies. En plus de son par­
• D é la y e z avec la quantité de fum délicieux, elle aide à la digestion.
vinaigre nécessaire pour obtenir la Le fenouil pousse sutout dans le
consistance désirée. Salez, parfumez Midi, mais on le rencontre au bord
éventuellement de feuilles d'estra­ des chemins jusque dans la région
gon hachées ou d'un autre aromate parisienne.
à votre choix, et mettez en pots. Le carvi, lui, ne se trouve que dans
les prairies de montagne, mais il y
abonde. Ses fruits, que l’on nomme
souvent à tort « cumin » ont une
remarquable saveur aromatique et on
en parfume les fromages (dits « au
cumin »), la choucroute, des alcools
(le « kümmel »)■ Chez le panais et la
berce, ce sont aussi les fruits que l’on
emploie, mais leur arôme est puissant
et ils sont très piquants. Aussi ne s’en
servira-t-on qu’avec modération, et
préalablement écrasés pour bien les
répartir dans la nourriture. Ils trans­
forment radicalement les céréales ou
les légumes par exemple et permet­
tent en même temps à l’organisme de
bénéficier de leurs vertus stimulantes
et digestives.
Quant aux fruits de la carotte, leur
parfum inattendu d’alcool de poire
est absolument extraordinaire! On en
aromatisera les desserts, les yaourts,
les salades de fruits, etc. Il faudrait
également citer la myrrhe odorante
ou cerfeuil musqué, dont les feuilles
85
En été ■
j ïj

dégagent un suave parfum anisé, un


peu comme le fenouil, mais plus déli­
cat. Dans les pays du Nord, on les
cuit en compotes ou en tartes avec
des fruits acides, dont elles diminuent
l’acidité et permettent ainsi d’utiliser
moins de sucre. Plaisir et diététique
se rejoignent parfois.
La famille des Composées possède
aussi quelques plantes intéressantes,
la tanaisie par exemple, grande
plante aux feuilles découpées forte­
ment odorantes, commune au bord
des chemins. Son parfum camphré
était jadis très apprécié et les anglais
adoraient en parfumer les omelettes.
Il est vrai que leur cuisine nous
déconcerte parfois... Car la tanaisie a quelques fragments de feuilles dans
une odeur un peu médicamenteuse et une infusion de menthe ou d’autres
elle est terriblement amère. Mais plantes aromatiques lui donnent une
dimension supplémentaire. Il est
aussi un peu étrange le parfum de la
santoline, sous-arbrisseau grisâtre et
odorant qui pousse dans le Midi. On
s’en sert surtout pour aromatiser les
olives... Q uant aux capitules de
l’immortelle, méditerranéenne elle
aussi, ils parfument de façon remar­
quable les céréales, le couscous en
particulier.
Et puis n’oublions pas l’ail, dont il
n’existe pas moins de trente-huit
espèces dans notre flore ! Toutes
dégagent cette odeur alliacée bien
connue qu’il n’est nul besoin de
décrire. S’il fallait n’en citer qu’une
seule espèce, ce serait sans hésiter
l’ail-des-ours aux larges feuilles
tendres et, pour dire le moins, odo­
rantes: leur arôme est tenace ! Il
86
Aromates sauvages
forme de grandes colonies dans les
bois frais et pourrait être récolté en
abondance, mais quelques feuilles
suffisent à donner aux plats la saveur
recherchée. Les autres ails sauvages
sont tous utilisables comme condi­
ment à la façon de la ciboulette,
elle-même sauvage dans nos hautes
montagnes. Une petite précision lin­
guistique: lorsqu’il s’agit de l’ail
cutivé, le pluriel est « des aulx », mais
quand on parle de diverses espèces
d’ail sauvage, on dit « des ails »...
Il y a encore les Crucifères, famille
de la moutarde et du cresson. On y
rencontre un nombre presque incal­
culable de plantes à saveur chaude et
piquante dont on peut utiliser les
feuilles et les graines pour relever les
plats. Il serait impossible de les citer
toutes ici. Il suffit de savoir identifier
les Crucifères (nous l’avons vu au
cours de notre promenade « florale »)
: si elles piquent, voici un condiment.
Mentionnons seulement l’alliaire
dont les feuilles ont une odeur d’ail C’est une cousine du fraisier, de la
caractéristique, étonnante chez une rose et du pommier car elle appar­
plante de cette famille. En écrasant tient à la même famille des Rosacées.
les graines de diverses Crucifères, on Ses feuilles ont une délicate saveur de
prépare facilement une « moutarde concombre et de noix verte. On les
sauvage » tout aussi efficace que celle appréciait beaucoup jadis dans les
du commerce. Les différentes plantes salades. La pimprenelle s’utilise
de cette famille sont stimulantes, comme le persil et il est bien dom­
digestives, antiseptiques et expecto­ mage de l’avoir oubliée car elle était
rantes. autrefois couramment cultivée dans
les potagers. Ses feuilles, composées
Voici maintenant un nom connu, de nombreuses petites folioles arron­
bien que peu de personnes sachent dies, forment une touffe dense. La
distinguer dans la nature le végétai petite pimprenelle, commune au
qui lui correspond: la pimprenelle. bord des chemins et dans les prés
En été
secs, a le goût le plus fin, tandis que bien d’autre préparations pourraient
sa sœur, la grande pimprenelle est bénéficier de son parfum pénétrant.
moins délicate. Cette dernière, qui Les cônes de genévrier sont un diu­
pousse dans les prairies humides, est rétique réputé, mais un usage abusif
plus grande dans toutes ses parties et peut gravement irriter le système uri­
les folioles de ses feuilles sont allon­ naire.
gées.
Nous aurions pu encore découvrir
Terminons notre promenade par le bien des trésors de senteurs naturelles
genévrier. Les « baies de genièvre »> (connaissez-vous le parfum des baies
(il s’agit en fait de cônes, comme la de myrte ou celui des rhizomes
pomme de pin, mais charnus), très d’asaret ?), mais je crains que toutes
aromatiques, servent à parfumer la ces odeurs ne finissent par se mélan­
choucroute et certains alcools comme ger. La randonnée a déjà été longue à
le gin ou le genièvre. On peut aussi la recherche de toutes les plantes aro­
l’écraser et le mélanger à du beurre matiques que nous venons de ren-
pour tartiner de belles tranches de conter. Il est temps de prendre un
pain. Son usage condimentaire méri­ repas bien mérité, agrémenté de déli­
terait d’ailleurs d’être développé car cieux effluves végétaux.

88
AUTOMNE
10 - FRUITS SAUVAGES
D’AUTOMNE
Bientôt l’automne. Le soleil de l’été a fait mûrir les fruits de nos vergers,
et n’a pas oublié les sauvageons que Ton a coutume de nommer « baies ».
Pour la petite histoire, mais aussi parce qu’il est bon d’être précis,
notons qu’il s’agit dans la plupart des cas d’un abus de langage : une
baie est pour les botanistes un fruit charnu, mou, dont les nombreuses
graines sont disséminées dans la pulpe. Cette définition s’applique certes
aux myrtilles, aux groseilles, voire à la tomate, mais fraises, framboises
ou mûres ne sont pas de vraies baies. Ne nous laissons pas impression­
ner par ce point de sémantique et partons à la cueillette!

Le sureau noir aime l’homme, ou en manger qu’avec modération, car


du moins son voisinage: il a une pré­ ils sont un peu nauséeux, mais cuits,
dilection pour les terres riches en quels délices! Les mérites de la confi­
azote et fréquente abondamment les ture de sureau ne sont plus à vanter,
abords des villages. Ses fruits sont mais il faut découvrir le « rob »
de petites billes noires, lui­ de sureau (un extrait
santes, réunies en obtenu en faisant
groupes aplatis cuire longuement le
joliment nommés jus), la tarte au
« corymbes », pen­ sureau, et, boisson
dant au bout des des jours de fête, le
branches. Il s’agit vin de sureau, un
bel et bien de baies, délectable champagne
remplies d’un splendide u pourpre!
jus violacé... qui tache doigts Sureau noir
Le sureau était autrefois
et vêtements. Crus, il ne faudra (fruits)
tenu en haute estime car il pas-
91
En automne - -, v; ^

SU REA U N O IR
Sambucus nigra Famille des Caprifoliacées

Recette : tarte aux fleurs


de sureau

• Faites légèrement précuire au four


un fond de tarte en pâte feuilletée ou
brisée.
• D isposez dessus une couche de
noisettes ou d'amandes râpées, puis
recouvrez d'une épaisse couche de
fleurs de sureau noir détachées de
leur corymbe.
• Battez un m élange de crèm e
liquide et de miel chauffé, puis versez
sur les fleurs. Saupoudrez d'un peu
de sucre.
• Finissez de faire cuire à four chaud
la tarte, qui doit caraméliser sur le
dessus.

sait pour porter bonheur. On le plan­ tère à retenir pour identifier le sureau
tait dans ce but autour des habita­ est le suivant : ses feuilles sont à la
tions... et il y est bien souvent resté. fois opposées et composées de cinq à
Sa propagation est d’ailleurs des plus sept folioles allongées et aiguës.
faciles car même une simple bouture Quand on les froisse, elles dégagent
peut reprendre pour peu qu’on une odeur déplaisante. Les fleurs par
l’arrose suffisamment. Et s’il sagit contre sont agréablement parfumées:
d’un fragment de tige enracinée, le la floraison du sureau est un plaisir
voici prêt à devenir un bel arbuste, pour les sens! Petites, d’un blanc jau­
voire même un arbre de plus de cinq nâtre, les fleurs sont groupées en
mètres de hauteur! On reconnaît larges corymbes décoratifs.
aisément le sureau à l’écorce de ses De ces fleurs odorantes on prépare
jeunes rameaux, couverte de lenti- d’extraordinaires tartes et de déli­
celles liégeuses et à la moelle dense et cieux beignets comme avec les fleurs
blanche qui les remplit. Cette moelle d’« acacia ». On en aromatise aussi
sert entre autres choses à monter des des boissons, alcoolisées ou non, et
coupes microscopiques. Le grand cri­ elles donnent au vin blanc un éton-
92
Fruits sauvages d'automne

nant goût de muscat. D’ailleurs dans Quant aux fruits, nous prendrons
la région de Rivesaltes, on se sert bien soin de ne pas les confondre
toujours du sureau pour accentuer la avec ceux du sureau hièble, grande
saveur du vin qu’on y produit. Pour plante herbacée vivant en colonies,
ceux qui le préfèrent, le sirop de dont les corymbes de fruits sont diri-
fleurs de sureau est l’un des meilleurs gés vers le ciel. Ses fruits, de saveur
rafraîchissements pour les chaleurs de amère, sont plus ou moins toxiques,
l’été. Des pommes conservées et en tous cas désagréables à manger,
quelques semaines sur un lit de fleurs II existe encore une troisième espèce,
de sureau séchées développent un le sureau rouge ou sureau rameux,
parfum exotique rappelant l’ananas, que l’on rencontre communément
Du soleil en plein hiver! Et dans les montagnes et dans les forêts
n’oublions pas leurs vertus médici- du nord de nos pays. C ’est un
nales : les fleurs de sureau sont adou- arbuste à fleurs jaune verdâtre grou-
cissantes et sudorifiques. On en pées en boule et non pas étalées
conseille des infusions en cas de comme chez le sureau noir. Diffé-
refroidissement ou de problèmes pul- rence majeure, ses fruits sont d’un
monaires. joli rouge corail. Crus, ils sont vomi-
SU REA U R O U G E
Sambucus racemosa Famille des Caprifoliacées

Recette : gelée de sureau rouge pouvez aussi la mélanger avec des


framboises ou des groseilles rouges.
• Egrappez délicatement des fruits de Cette gelée peut être parfumée avec
sureau rouge et mettez-les dans une des feuilles ou des fruits d'angélique
grande casserole. sylvestre mis à cuire avec les fruits
• Faites crever les fruits à la chaleur, avant de les passer.
puis passez- les à travers un moulin à Sureau hièble : Sambucus ebuius
légumes pour en extraire le jus.
• Filtrez sur une passoire fine et
remettez le jus à cuire avec les deux
tiers de son poids de sucre.
• Versez dans des bocaux en verre
é b o u illa n té s, la isse z refro id ir et
recouvrez d'une couche de paraffine
puis d'un papier de cellophane.
Attendez quelques semaines avant de
déguster cette gelée d'un rouge
superbe, au goût sauvage... Vous

93
En automne :
traditionnelle, que l’on emploie en
garniture comme les olives. Il suffit
de faire macérer les fruits pendant
trois semaines dans une saumure.
Quant au vinaigre de prunelles, il
remplace avantageusement le vinaigre
de vin ou de cidre dans tous ses
usages. D’ailleurs le jus fraîchement
pressé de ces fruits acides peut s’uti­
liser de la même façon. Et ce qui est
encore mieux, c’est que pour s’en
servir de ces différentes manières, il
P R U N ELLES
Prunus spinosa Famille des
Rosacées

Recette : vinaigre \
de prunelles \
tifs et purgatifs, mais fort heureuse­ • R é co lte z quelques 'A
ment, ils deviennent inoffensifs après k ilo s de p ru n elle s \ 6
cuisson : on en prépare de délicieuses {avant ou après les- Æ\ \ f
gelées, que l’on pourra par exemple gelées, peu importe) (w
aromatiser à l’angélique. et placez-les dans un W
récipient de grès ou u
Par endroits, les haies sont cou­ de verre.
vertes de petites boules bleuâtres : ce • Ecrasez-les grossiè- m\ V
sont des prunes miniatures, les pru­ rement et co u vre z M'/ (
nelles, qui sont malheureusement le récipient. Laissez ^ m (\
encore trop âpres pour être dégustées fermenter environ une [jjj |
telles quelles. Il nous faudra attendre semaine. v j
les gelées qui les adouciront. Confi­ • Extrayez le jus des pru- j|
tures, tartes et compotes feront alors nelles avec un appareil ou à >]
notre plaisir... à moins que nous ne travers un linge solide, filtrez
tentions de les distiller pour obtenir sur une passoire fine et mettez ;
une petite « prunelle », comme on en bouteille.
faisait souvent autrefois — mais ce Ce jus acide parfumé s'utilise de
n’est pas très légal... Beaucoup plus la même m anière que du ^
recommandables sont les prunelles vinaigre de vin ou de cidre.
lactofermentées, autre préparation Prune

94
0Bsr'i ■ : :• ï v « :- ! , Frui ts sauvages d'automne

C O R N O U IL L E R M ALE
Cornus mas Famille des Comacées

Recette : liqueur de cornouilles

• Dénoyautez des cornouilles et pla-


cez-les dans une bouteille en verre à
goulot large {genre bouteille à jus de
fruits).
• Remplissez d'une bonne eau-de-vie
de fruits, ajoutez un peu de sucre à
votre goût, et laissez m acérer un
mois ou deux.
• Passez le tout au moulin à légumes
pour réduire les cornouilles en purée,
sur une grille fine, et recueillez le jus
épais.

Conservez cette magnifique liqueur


rouge dans de jolies bouteilles et
dégustez occasionnellement à la fin
du repas.

Cornouiler sanguin : Cornus sangui


nea

n’est pas besoin de patienter jusqu’à jadis pour faire des haies. Dans ces
ce que surviennent les gelées! bordures végétales se rencontrent
Comme leur nom l’indique, les encore beaucoup de prunelliers, dont
prunelles sont de petites prunes. Et la taille varie énormément suivant le
comme le décrit son nom latin de terrain et le climat.
Prunus spinosa, l’arbrisseau qui les Au tout début du printem ps,
porte, le prunellier, est épineux. l’« épine noire », autre nom du pru­
Douloureusement épineux même, nellier — par opposition à l’aubépine
comme ont pu le tester les cueilleurs ou « épine blanche », dont l’écorce
de prunelles! De nombreux rameaux est plus claire —, nous offre sa
sont transformés en épines acérées, magnifique floraison, très appréciée
longues parfois de plusieurs centi­ des abeilles vu sa précocité. Quant
mètres, ce que l’on appréciait fort aux prunelles, qui apparaissent dès la
95
En automne

fin de l’été, elles ne sont pas difficiles du printemps, avant que les feuilles
à identifier : d’abondantes boules n’aient commencé à pousser, ce qui
bleu foncé recouvertes d’une pruine le rend très décoratif. Et comme si
blanchâtre, dont la taille varie entre cela ne suffisait pas, sa floraison est
10 et 25 mm de diamètre, renfer­ odorante. Comment se fait-il qu’on
mant un noyau unique semblable à ne le plante pas davantage pour
celui d’une prune. On ne peut pas l’ornement, sans parler de son intérêt
vraiment les confondre avec d’autres réel comme arbre fruitier? Et atten­
fruits sauvages. dez, ce n’est pas tout : son bois était
autrefois très apprécié pour sa dureté
Avez-vous entendu parler des cor- exceptionnelle : il est dur comme de
nouilles? Ce sont les fruits rouge la corne, d’où son nom latin de
foncé du cornouiller mâle, de la cou­ Cornus et français de « cornouiller ».
leur et de la forme d’une belle olive. Ne le confondez pas avec le cor­
Cet arbre sympathique croît sponta­ nouiller sanguin, si commun en
nément dans nos forêts et dans nos lisière de bois, dont les fruits sont
bois, d’où on l’avait introduit dans noirs, sphériques et plus petits. Ils
mainte cour de ferme pour sa pro­ renferment une pulpe verte et grasse
duction fruitière abondante et succu­ qui ressemble un peu à celle de l’avo­
lente : les cornouilles mûres ont une cat mais est malheureusement amère,
saveur acidulée et sucrée, à mi-che­ purgative et plus ou moins toxique.
min entre la groseille et la cerise. Le cornouiller sanguin est très déco­
Bien mûres et molles, goûtez-les ratif à l’autom ne, lorsque son
crues. Un peu plus jeunes, vous en feuillage vire au rose pourpré. Celui
ferez d’extraordinaires gelées, dont du cornouiller mâle, lui, reste vert. Et
raffolaient nos grands-parents. au plein cœur de l’hiver, une fois
Encore immatures, conservez- les toutes ses feuilles tombées, il conti­
dans la saumure comme les olives nue à tendre ses rameaux opposés
vertes, qu’elles remplaceront une fois d’un joli rouge foncé qui tranchent
lactofermentées. Et dire qu’on a sur la neige. Mais revenons à
oublié de si bons fruits ! l’automne et à ses fruits.
Le cornouiller mâle (en fait il est
hermaphrodite comme presque tout Sur les coteaux calcaires du midi
le monde chez les végétaux : il ne croît un arbrisseau au nom chantant,
pourrait pas être véritablement mâle l’amélanchier. Cet ami des sols
puisqu’il produit des fruits!) est un arides en est au printemps la parure :
bel arbuste à l’écorce grise et aux sa floraison abondante transforme la
feuilles opposées, aiguës et parcou­ plante en une étonnante boule
rues de plusieurs nervures arquées blanche. Chaque fleur aux longs
très nettes. Il présente la particularité pétales immaculés se transforme len­
d’éclore ses fleurs jaunes dès le début tement en un fruit bleu charnu, qui
96
Pourpier - Portulaca oleracea
Morille - Morchella vulgaris
Fruits sauvages d'automne

A M ELA N C H IER
Amelanchier ovalis Famille des Rosacées

Recette : croquants d'amélanche

• Mélangez dans un saladier de la


farine de blé, des noisettes grossière­
ment hachées et un peu de sel.
• Ajoutez du beurre ramolli, du miel
liquéfié au bain- marie et quelques
bonnes po ignées d 'a m é la n ch e s
fraîches ou séchées.
• Versez suffisamment d'eau pour
obtenir une pâte de la consistance
d'une pâte à tarte.
• Etalez cette pâte et découpez-y des
ronds à l'aide d'un verre renversé.
Disposez sur une plaque huilée et
faites cuire ces délicieux gâteaux.

Laissez refroidir avant de déguster.

par la suite sèche souvent sur le l’amélanchier est un arbrisseau ou un


rameau. Ces amélanches sèches sont arbuste d’au moins deux mètres de
très sucrées : on dirait des raisins hauteur. Et les myrtilles ne croissent
secs! Il est d’ailleurs possible — et que dans les terrains acides alors que
délicieux, je vous l’assure — de les l’amélanchier affectionne le calcaire.
employer comme tels dans les Il mérite qu’on le connaisse.
gâteaux par exemple. Fraîches ou
séchées, les amélanches se dégustent Il faudrait parler encore de l’épine-
volontiers crues, et les récoltes abon­ vinette, dont les petits fruits rouges
dantes ne sont pas rares. allongés donnent une délicieuse gelée.
Les amélanches ne risquent pas La confiture d’épine-vinette était
d’être confondues avec d’autres fruits autrefois produite commercialement à
sauvages. Elles ressemblent beaucoup Rouen et à Dijon. Par ailleurs, les
aux myrtilles, avec une petite cou­ toutes jeunes feuilles tendres de cet
ronne formée de cinq sépales pointus arbrisseau épineux s’ajoutent aux
au sommet du fruit, mais la confu­ salades pour leurs saveur acidulée
sion n’est pas à craindre puisque rappelant celle de l’oseille.
97
En automne
Et si nous allions dans le Midi,
nous ne tarderions pas à pouvoir A R B O U S IER
nous délecter d’arbouses, ces grosses Arbutus unedo Famille des
« fraises de maquis », rondes et Ericacées
rouges à souhait, curieusement cou­
vertes de petits tubercules. Mangez- Myrtille : Vaccinium myrtillus
les crues, elles sont bonnes, mais n’en Airelle des marais : Vaccinium uli
abusez pas car votre estomac risque­ ginosum
rait vous faire savoir qu’il n’est pas A irelle rouge : V accinium vitis-
d’accord. Ou préparez-en des confi­ idaea
tures, en les passant pour éliminer les Canneberge : Vaccinium o xyco c
nombreuses granulosités que contient cum
leur pulpe. Quel beau spectacle que
des arbouses bien rouges parmi le vert foncé du feuillage se détachant
sur le ciel bleu pur d’une belle jour­
née d’automne...
A la même famille que l’arbousier,
les éricacées, appartient la fameuse
myrtille, que l’on rencontre en colo­
nies parfois immenses sur les terrains
acides. Tout le monde la connaît
bien, mais trop de gens ignorent ses
cousines. L’airelle des marais lui
ressemble beaucoup avec ses fruits
bleus, mais leur pulpe est blanche à
l’intérieur, et non pas violacée.
Contrairement à ce qu’on en dit par­
fois, les airelles des marais peuvent se
manger crues ou cuites comme les
myrtilles. Leur saveur est générale­
ment plus fade, mais pas toujours.
Les airelles rouges se distinguent
aisément par la couleur des fruits,
que portent de petites plantes
ligneuses aux jolies feuilles arrondies,
d’un vert foncé luisant. Elles sont
acides et pas très bonnes crues. Par
contre, on en prépare de très bonnes
confitures et des sauces qui se man­
gent traditionnellement avec le gibier.
Fruits sauvages d'automne
kystes dans le foie ou dans d’autres
organes. Pour certains spécialistes, les
chiens seraient en fait le principal
vecteur de cette maladie, ce qui veut
dire que la plupart des plantes basses
pourraient être contaminées... En cas
de doute, le seul remède efficace
consiste à faire cuire les fruits ou les
légumes sauvages. Adieu myrtilles
grappillées... Sachez quand même
que l’aire d’extension de l’échinococ­
cose est limitée à l’est de la France
jusqu’aux Alpes, à la Suisse et à une
parüe du Massif Central.
Ne vous découragez pas. En cette
saison, la nature nous offre encore
bien d’autres fruits, de plus haute
taille, à manger crus, en tartes ou en

Les petites boules rouges de la can-


neberge, minuscules plantes des
tourbières, s’adoucissent avec les
gelées, qui diminue leur acidité. On
les prépare comme les airelles rouges.
Mais ne les cueillez pas, car elles
vivent dans les tourbières — milieu
extrêmement fragile et menacé qu’il
est impératif de protéger.
Les myrtilles ont parfois été accu­
sées de transmettre une grave parasi­
tose, parfois mortelle, l’« échinococ­
cose ». Il arrive en effet que les
plantes des bois soient contaminées
par les oeufs de petits vers parasites
transmis par les renards, les échino-
coques. En se développant dans
l’organisme humain, les larves qui en
éclosent peuvent provoquer de graves
99
En automne <3**,
confitures. Nous aurons l’occasion leur nourriture. Avec l’arrivée des
d’en reparler. Si tous ne flattent pas grands froids, les petits fruits leur
forcément nos papilles, les oiseaux et seront une ressource indispensable.
les autres habitants des lieux sau­ Alors n’oublions pas de leur en lais­
vages en font la majeure partie de ser.

100
11 - LE RAMASSAGE
DES GRAINES
SAUVAGES
Les plantes connaissent deux façons de se reproduire. Certaines d’entre
elles adoptent volontiers un mode de reproduction « végétative », où
c’est en fait toujours la même plante qui se divise et se multiplie sem­
blable à elle-même. Pensez par exemple aux fraisiers ou à la redoutable
(et bienfaisante) ortie, qui utilisent pour ce faire des tiges spécialisées
(« stolons » et « rhizomes »). Tous les végétaux possèdent aussi un mode
de reproduction « sexué » dans lequel le pollen féconde un ovule pour
produire une graine. Et c’est tant mieux pour nous car pour survivre,
l’embryon a besoin d’une réserve de nourriture, présente sous forme de
cotylédons: les graines de nombreuses plantes sauvages sont donc nutri­
tives. Profitons de l’automne pour aller les récolter.

Les plus connues sont gnons au plus profond


certainement les châ­ des bois! Quel plaisir
taignes, dont l’aman­ intense et vrai que de
de savoureuse et respirer à plein nez
sucrée est en même l’humus de la forêt
temps très nutritive. puis, le soir au coin
Ah, ces journées du feu, d’entendre
automnales, brumeuses autant que de sentir les
et humides, passées à trs marrons qui grillent...
quer châtaignes et champi- Chataîgne Les châtaignes formaient
101
En automne

C H A T A IG N E
Castanea sativa Famille des Fagacées

Recette : castagnaccia

• Tamisez finement de la farine de


châtaigne.
• Ajoutez une pincée de sel, un zeste
d'orange râpé et des raisins secs.
• Délayez avec suffisamment d'eau
pour obtenir une pâte mi-liquide, ver­
sez dans un plat allant au four en
co u ch e de quelques centim ètres
d'épaisseur, et faites cuire à four
moyen.

Le zeste d'orange peut être remplacé


par du romarin ou du fenouil, qui
donnent à ce plat une saveur toute
méditerranéenne. On peut aussi y
ajouter des morceaux de fruits frais,
des poires en particulier.

Chataîgne

depuis des temps reculés la base de cuites avec des légumes et peut-être
l’alimentation dans les montagnes un peu de viande, incorporées à des
siliceuses du sud de l’Europe. En gâteaux ou réduites en purée.
France, il s’agissait principalement Séchées, on les moulait en farine
des Cévennes (les marrons de dont on préparait des bouillies. La
l’Ardèche sont célèbres), des Maures « polenta » corse, au goût de chocolat
et de la Corse. Les châtaignes est fameuse.
fraîches étaient bouillies, grillées, Il n’y a pas besoin de présenter le
102
Le ramassage des graines sauvages
châtaignier, qui forme de splendides le tanin ait été éliminé. L’eau est
forêts en terrain siliceux — il ne sup­ alors claire (elle était précédemment
porte absolument pas le calcaire. Ses d’un beau brun chocolat) et toute
bogues épineuses renferment trois l’amertume a disparu de l’amande.
châtaignes dont l’une est souvent La purée obtenue, très nutritive, sert
plus grosse que les deux autres, apla­ de base à de délicieux pâtés végétaux
ties et souvent vides. Dans certaines ou à diverses tartes et gâteaux. Il est
variétés, il n’y a plus qu’une seule intéressant de savoir que les glands
châtaigne, bien rebondie, dont la étaient, sous forme de bouillie, à la
peau intérieure sous l’écorce brune base de l’alimentation des Indiens de
ne pénètre pas dans l’amande et peut Californie. D’autre part, on retrouve
ainsi être facilement retirée : on en Europe des traces de la consoma-
nomme « marrons » ces fruits géné­ tion régulière de glands dans de
reux. Ne les confondez pas bien sûr nombreux sites néolithiques.
avec les marrons d’Inde, produits en Les chênes sont peut-être les plus
abondance par le marronnier, et qui connus de nos arbres, en tous cas ils
eux sont toxiques à cause de leur sont présents dans toutes nos forêts
forte teneur en saponines. sauf en montagne. Il en existe de très
Les glands sont faciles à ramasser
en quantité dans toutes nos forêts.
Pourquoi les fruits des chênes, telle­
ment fréquents, ne sont-ils pas utili­
sés? C’est que leur amande, riche en
protéines et en amidon, renferme
aussi beaucoup de tanins. Ceux-ci lui
confèrent une saveur amère et astrin­
gente et rendent les glands imman­
geables, voire même dangereux car
les tanins se décomposent en sub­
stances toxiques. Fort heureusement,
ils sont aisément éliminés par l’eau
bouillante et une simple préparation
permet de mettre à profit l’un des
cadeaux les plus abondants de la
nature. Il suffit d’entailler les glands,
de les mettre quelques minutes dans
l’eau bouillante pour en faciliter
l’écorçage, puis de hacher l’amande
et de la faire bouillir dans plusieurs
eaux successives jusqu’à ce que tout
103
En automne

CHEN E
Famille des Fagacées

Chêne rouvre : Quercus petraea Recette : tarte aux glands


Chêne pédoncule : Quercus robur
Chêne pubescent : Quercus pubes- • Préparez une pâte sablée et foncez-
cens en un moule à tarte.
Chêne vert : Quercus ilex • Ajoutez à de la purée de glands
Chêne chevelu : Quercus cerris quelques yaourts ou de la crème
Chêne tauzin : Quercus pyrenaica fraîche, du miel fondu au bain-marie
Chêne-liège : Quercus suber et des raisins secs. Délayez avec un
Chêne kermès : Quercus coccitera peu de lait pour obtenir un mélange
pas trop épais. Aromatisez à votre
Recette : pâté de glands choix de gingembre frais râpé ou de
cannelle moulue.
• Préparez les glands comme indiqué • Versez le mélange sur le fond de
dans le texte pour obtenir une purée tarte et faites cuire à four moyen.
dépourvue d'amertume.
• M élan ge z à cette purée de la La purée de glands peut être allégée
graisse végétale fondue ou de l'huile en y ajoutant deux ou trois blancs
d'olive, des olives hachées, quelques d'oeufs battus en neige. Cette recette
oignons hachés, de l'ail et un peu de est particulièrement indiquée si la
sel. Parfumez de «baies » de genièvre purée de glands est encore astrin­
écrasées. gente car les protéines du lait
• Mettez le pâté dans un moule et (et éventuellem ent des oeufs) se
faites cuire quelque temps à four co m binent au tanin des glan d s
moyen. qu'elles neutralisent.
C e pâté est m eilleu r fro id . Il se
conserve facilement plusieurs jours.

nombreuses espèces, dont neuf sont est caractéristique de la région médi­


présentes dans nos régions. Dans la terranéenne, mais il croît le long du
moitié nord de la France, on rencon­ littoral atlantique jusqu’en Bretagne.
trera surtout le chêne rouvre, ou C ’est principalement dans l’Ouest
chêne à fleurs sessiles, et le chêne que l’on pourra trouver le chêne
pédonculé. Sur les terrains calcaires, chevelu et le chêne tauzin, qui
plus chauds, pousse aussi le chêne affectionne les landes siliceuses. Le
pubescent ou chêne blanc, très littoral méditerranéen, toujours sur
répandu dans le Midi. Le chêne vert silice, est le domaine du chêne-liège,
104
Le ramassage des graines sauvages
dont l’épaisse écorce liégeuse sert à étaient autrefois fort appréciées : elles
fabriquer des bouchons, des isolants, contiennent une huile comestible
etc. Une espèce voisine, le faux d’excellente qualité. L’huile de faînes
chêne-liège est limité aux départe­ se bonifie même en vieillissant, alors
ments du Var et des Alpes-Mari­ que la plupart des huiles rancissent.
times. N ’oublions pas le chêne-ker­ S’il est bien compliqué de l’extraire,
mès, arbrisseau peu élevé aux feuilles ne négligeons pas pour autant ces
coriaces et piquantes, typique des graines à saveur douce : le mieux est
garrigues méditerranéennes. On l’uti­ de les faire légèrement griller pour en
lisait autrefois pour le chauffage des rehausser l’arôme, puis de les
fours à pain et le tannage, ainsi que employer comme condiment dans les
pour le « kermès », une cochenille légumes ou les céréales, ou bien dans
parasite de ce petit chêne, qui fournit les gâteaux et les desserts à la façon
une belle couleur écarlate. Les chênes des amandes. On déconseille de
sont de proches parents du châtai­ manger en trop grandes quantités les
gnier. faînes crues car il est arrivé que leur
consommation excessive provoque
Restons dans la même famille (celle des maux de tête.
des Fagacées) avec les faînes du Le hêtre est lui aussi l’une de nos
hêtre. Ces graines triangulaires ren­ essences forestières les plus répan­
fermées dans une coque caractéris­ dues. Il aime les sols frais et profonds
tique couverte de poils ligneux et dans le Sud, on ne le rencontre

H ETRE
Fagus silvatica Famille des Fagacées

Recette : faînes grillées

• Retirez les amandes des faînes de


leur coque triangulaire et faites-les
griller délicatement à la poêle ou,
mieux, à four doux.
• H ach e z ces d é licie u se s faînes
g rillé e s et se rv e z-le s avec de la
salade, des légumes cuits ou des
céréales. Vous pouvez aussi les saler
et les servir en apéritif, ou en prépa­
rer d'étonnantes « pralines » en les
faisant cuire dans du sucre.

105
En automne ;

N O ISETTE
Corylus avellana Famille des Bétulacées

Recette : chou farci aux noisettes Séparez délicatement les feuilles et


coupez en croix le centre trop dense.
• Faites précuire un beau chou à la Remplissez de farce tous les inter­
vapeur (plutôt qu'à l'eau, car il per­ stices entre les feuilles et refermez-
drait de sa saveur). les. Recouvrez le sommet du chou de
• Faites cuire une céréale, de l'en- quelques larges feuilles posées en tra­
grain ou de l'épeautre par exemple. vers, fermez votre cocotte et faites
• Faites légèrement griller des noi­
settes au four.
• D ans un salad ier, m élangez la
céréale, les noisettes grillées, des
oignons et des olives hachés, de l'ail
écrasé et du fromage râpé. Salez, poi­
vrez et parfumez d'herbes aroma­
tiques variées. Ajoutez une bonne
rasade d'huile d'olive.
• Placez le chou dans une cocotte
avec un peu d'eau et d'huile d'olive
au fond.

qu’en altitude, sur les « ubacs », ver­ coquelicot produit une abondance
sants exposés au nord et plus frais de petites graines brunes de saveur
que les « adrets » ensoleillés. Le hêtre agréable, qui contiennent elles aussi
est bien facile à reconnaître avec son de l’huile. Les Romains utilisaient
écorce grise et lisse et ses feuilles couramment l’huile de coquelicot.
bordées de cils blancs. La texture de Les graines bleuâtres de son cousin le
ces feuilles, minces et souples, est pavot étaient d’ailleurs couramment
curieuse: en les touchant, on croirait employées jusqu’à ce siècle pour pro­
qu’elles sont en plastique! duire l’« huile d’œillette », que l’on
estimait à l’égal de l’huile d’olive
D ’autres graines sauvages sont dans le nord de la France. Les
oléagineuses. La noisette est sans graines de pavot sont encore utilisées
doute la plus connue, elle fournit par en Europe centrale pour décorer les
pression une huile extrêmement pains et fourrer les pâtisseries.
fine... mais utiliser l’amande entière Contrairement au latex, dont on tire
est quand même plus rentable. Le l’opium, ni les graines ni l’huile ne
106
tft‘‘ Le ramassage des graines sauvages

C O Q U E L IC O T
Papaver rhoeas Famille des
Papavéracées

Recette : « gomasio »
de coquelicot

• Faites griller dans une poêle des


graines de coquelicot avec un peu
de sel. Remuez constamment et ne
laisser pas trop longtemps car ces
petites graines brûlent vite!
• Passez l'ensemble dans un moulin
à café et conservez en bocal.
C e co n d im en t s 'u tilis e com m e
le sel.

Pavot : Papaver somniferum

renferment d’alcaloïdes toxiques. Les


graines de notre beau coquelicot des
champs (là où les herbicides ne l’ont
pas éliminé...) peuvent servir elles
aussi sur les gâteaux.
Voyons un peu. Le noisetier est
suffisamment connu de tous pour
pouvoir nous abstenir de sa descrip­
tion... du moins lorsque les noisettes
sont présentes car il arrive parfois
qu’on le confonde avec le tilleul sau­
vage par exemple, dont la feuille a pavot, originaire d’Asie, est souvent
une forme semblable. Q uant au cultivé dans les jardins d’ornement.
coquelicot, sa grande fleur rouge suf­ Plusieurs autres végétaux nous
fit à l’identifier. Mais pour en offrent des graines de petite taille,
recueillir les graines, ce sont ses mais fort nutritives, que nos ancêtres
petites capsules allongées, solitaires employaient volontiers comme
au sommet de longues tiges velues, céréales : le chénopode blanc, dont
qu’il faudra savoir reconnaître. Le les hommes du néolithique faisaient

107
En automne
grand cas ; son cousin montagnard, elle est remarquable par son abon­
le chénopode bon-henri , l’ama- dance et son intérêt alimentaire : plus
ranthe, « mauvaise herbe » d’origine encore que ses graines, on en
américaine, dont une espèce voisine consomme comme légume les feuilles
était avec le maïs la principale céréale et les jeunes inflorescences avec le
des Aztèques ; et enfin le pourpier, sommet encore tendre des tiges.
plante grasse ram pante dont les
graines étaient réduites en farine pour Tendre, le pourpier l’est toujours,
préparer des galettes et des bouillies. même à un âge avancé. Sa tige rou­
Nous avons déjà présenté le chéno­ geâtre et ses feuilles sont charnues,
pode blanc avec les « légumes sau­ juteuses et acidulées : on les mange
vages de l’été », et le bon-henri est en salade depuis des temps immémo­
l’une des plantes de la montagne que riaux. Le pourpier est d’ailleurs cul­
nous avons grignotées. L’amaranthe, tivé dans les potagers et il en existe
« mauvaise herbe » tenace, est aussi plusieurs variétés. C’était autrefois un
fréquente dans les jardins que le ché­ légume très apprécié. N ’oubliez pas
nopode blanc. Sa tige rougeâtre porte d’admirer ses jolies petites fleurs
des feuilles alternes à nervures très jaunes. Quant à ses graines, il faut
marquées et se termine par de longs avouer qu’elles sont vraiment bien
épis de minuscules fleurs verdâtres. petites et qu’il est heureux que la
La plante n’est pas très belle, mais nature nous en fournisse d’autres!

108
12 - LES
CHAMPIGNONS
La cueillette des champignons est un passe-temps fort répandu. Vous
êtes donc sans doute déjà familiers avec certains de ceux que nous
allons rencontrer au cours de cette promenade. Mais je voudrais vous
faire découvrir la variété qui nous est proposée, avec la mise en garde
habituelle : ne cueillez que les champignons que vous êtes absolument
sûr d’avoir identifié avec certitude. Et si possible, faites-les vérifier par
un spécialiste car chaque année surviennent des accidents. La randon­
née que nous allons faire à travers bois et prés sera toute subjective, car
je vous présenterai les champignons dans l’ordre de mes préférences
gustatives. Vous saurez tout!

A tout seigneur tout honneur. bolets, ses cousins, font un


T out le monde s’accorde peu figure de parents
pour dire que le cèpe est pauvres. Certains sont
le meilleur des champi­ pourtant très accep­
gnons. Il est en tous cas tables. S’il arrive à leur
facile à identifier avec sa chair de bleuir au
« mousse jaune » et son contact de l’air, ne vous
pied renflé, et il est vrai affolez pas car il ne s’agit
que sa saveur est extrê­ nullement d’un signe de
mement délicate. On toxicité. Et certains de ces
peut même le manger bolets bleuissants sont
cru pour découvrir son d’excellents comestibles.
remarquable goût sucré. Mais attention, mé­
A côté, les autres Bolet bai fiez-vous du bolet
109
En automne
Satan et d’autres bolets à pores les insectes se sont servis. Seulement
rouges. attention, l’amanite panthère, violem­
ment toxique, lui ressemble beau­
Il est un champignon que je met­ coup, bien qu’elle reste toujours
trais volontiers au-dessus du cèpe s’il blanche. La golmote est un champi­
n’était si rare de le rencontrer. C’est gnon pour connaisseurs.
l’oronge vraie ou amanite des
Césars. Quelle délicatesse, quelle Pénétrons maintenant dans ces bois
saveur et quelle allure avec son cha­ de pins, car c’est là que nous atten­
peau orange, son pied et ses lamelles dent les sanguins en forme d’enton­
d’un beau jaune. Il semble impossible noir monté sur pied. Leur cassure
de pouvoir le confondre avec une provoque un flot abondant de liquide
autre espèce, mais c’est tout de rouge foncé. Ils sont à mon gré bien
même une amanite. Alors ne l’appro­ meilleurs que leurs cousins, pourtant
chons que si nous sommes sûrs de nommés lactaires délicieux. A la
bien distinguer le jaune du blanc, cassure, ces derniers donnent un lait
couleur du pied et des lamelles des rouge orangé : on dirait du jus de
amanites mortelles. Je suis tenté de carotte. Je vous conseille les « san­
vous présenter aussi la golmote ou guins sur le grill » : les chapeaux
amanite vineuse. C’est un excellent entiers sont retournés, arrosés d’huile
champignon, que l’on reconnaît à la d’olive, agrémentés d’un hachis d’ail
coloration rosée ou rougeâtre que et salés, puis cuits sur les braises. La
prend sa chair là où les limaces ou chair des sanguins est ferme et
savoureuse. Vous en redemanderez!
Il existe bien d’autres lactaires, qui
tous possèdent la caractéristique de
contenir un latex blanc, jaune ou
rarement violacé. Plusieurs espèces
sont bonnes, mais chez d’autres, le
lait est beaucoup trop piquant et irri­
tant.
La girolle ou chanterelle aime à se
nicher au creux de la mousse, qui fait
un écrin vert à ses jolis boutons cou­
leur abricot. Elle n’est jamais très
grande, mais c’est peut-être aussi
parce qu’on la ramasse tellement
qu’elle n’a pas le temps de grandir !
C’est un curieux champignon en ce
qu’elle ne possède pas de lamelles,
110
Les champignons
mais des plis longuement prolongés
sur le pied court. Crue, sa saveur est
assez piquante et c’est en cuisant
qu’elle développe tout son arôme. Vu
ses qualités gustatives (Ah! les ome­
lettes aux girolles...) et la facilité avec
laquelle on peut l’identifier, c’est l’un
des champignons préférés de nom­
breux cueilleurs.
Mais voici quelque chose d’éton-
nant : un petit parapluie planté au
milieu du chemin ! C’est la coule­
melle ou lépiote élevée, de taille
impressionnante. Son grand chapeau
grisâtre, couvert d’écailles, est porté pied n’a jamais la trace d’un sac
par un long pied mince muni d’un à leur base, la volve, caractéristique
anneau coulissant. Sa cousine, la des amanites mortelles. Il existe de
lépiote déguenillée, est très bonne nombreuses espèces d’agarics, dont
aussi. Mais il faudra se méfier des certaines poussent dans les bois. La
petites lépiotes car certaines espèces plupart sont com estibles, mais
sont mortelles! quelques-unes sont indigestes.
Il est temps de sortir des bois à la Restons encore dans les prés et les
recherche des rosés des prés, égale­ pelouses : c’est là que nous découvri­
ment nommés agarics ou psalliotes, rons les ronds de sorcière du frêle
cousins du champignon de Paris que mousseron d’automne, le marasme
l’on cultive commercialement. On les des oréades. Son chapeau est d’une
nomme rosés car en retournant le jolie couleur chamois clair. C’est un
chapeau, les jeunes lamelles ont très bon champignon, parfumé, qui
effectivement une jolie teinte rose. En présente l’avantage de sécher très
vieillissant, elles deviennent brun- facilement, mais son pied fibreux est
chocolat. Ceci permet de les distin­ coriace et il faut l’éliminer.
guer facilement des amanites mor­
telles, auxquelles ressemblent un peu Nous y apercevons aussi un peu
les agarics, car les lamelles des ama­ partout les boules blanches des
nites sont toujours blanches. Malheu­ vesses-de-loup. Il faut réhabiliter ces
reusement, lorsque les agarics sont champignons généralement négligés :
très jeunes, et parfaits pour la lorsqu’ils sont jeunes et que leur
cueillette, leurs lamelles sont généra­ chair est bien blanche, on peut les
lement blanches elles aussi. Mais leur manger crus ou cuits et s’en régaler
111
En automne
car ils sont d’excellente qualité. Et
C H A M P IG N O N S qui plus est, leur identification est
des plus faciles. N ’attendez pas bien
Cèpe : Boletus edulis sûr que les spores aient commencé à
Bolets : Boletus spp. se former, auquel cas l’intérieur des
Oronge vraie : Amanita caesarea vesses-de-loup devient mou et bru­
Golmote : Amanita rubescens nâtre. Ensuite, le champignon se des­
Sanguin : Lactarius sanguifluus sèche et libère ses spores qui s’envo­
Lactaire délicieux : Lactarius deli- lent sous forme d’une fumée brune
ciosus sous la moindre pression. Ce que je
Girolle : Cantharellus cibarius vous souhaite de rencontrer un jour,
Coulemelle : Macrolepiota procera ce sont ces incroyables vesses-de-
Lépiote dégu e n illée : M a cro le ­ loup géantes qui sont parfois grosses
piota rhacodes comme une citrouille. Certains m’ont
Rosé des prés : Agaricus campes- affirmé en avoir vu de la taille d’un
tris mouton et d’autres en avoir repéré
M ousseron d'autom ne : M aras- depuis un avion (un petit avion de
mius oreades tourisme volant à basse altitude, pas
Vesses-de-loup : Lycoperdon spp., un Boeing)... et ce n’était pas dans le
Bovista spp. Midi ! En tous cas, il m’est arrivé
Vesse-de-loup géante : Calvatia- d’en couper des tranches qui tenaient
gigantea tout juste dans une poêle : un cham­
Pied-bleu : Rhodopaxillus nudus
Mousseron de printemps : Calo-
pignon pour dix personnes!
cybe gambosa (Tricholoma georgii) N’oublions pas les tricholomes, si
Tricholome équestre : Tricholoma divers. Les meilleurs sont certaine­
davovirens ment le pied bleu, le mousseron de
Petit-gris : Tricholoma terreum printemps ou tricholome de la Saint
Coprin chevelu : Coprinus comatus Georges, le tricholome équestre et
Morilles : Morchella spp. le petit gris ou tricholome terreux,
Trompette de la mort : Craterellus très populaire dans le Midi. Ces
cornucopioides quatre tricholom es, et il y en a
Russule charbo nnière : Russula quelques autres, sont d’excellents
cyanoxantha comestibles. Par contre, certaines
Palomet : Russula virescens espèces sont immangeables (elles
Pied-de-mouton : Hydnum repan- dégagent une odeur de savon, de gaz
dum d’éclairage, de soufre,...) et le gros
Pleurote : Pleurotus ostreatus tricholome tigré est violemment
C la v a ire ch o u -fle u r : C la va ria toxique. Les différents tricholomes ne
(Ramaria) botrytis sont pas toujours faciles à distinguer
Sparassis crépu : Sparassis crispa les uns des autres et il faudra donc
112
Les champignons
leur accorder beaucoup d’attention
pour les identifier avec certitude.
Tout au contraire, le coprin che­
velu se reconnaît au premier coup
d’œil : une cloche allongée parsemée
de grosses mèches blanchâtres et por­
tée par un pied fragile muni d’un
anneau mobile. En vieillissant, les
lamelles deviennent noires et se liqué­
fient, le chapeau semble fondre et ne
subsiste qu’en lambeaux. Quel drôle
de champignon... Il n’hésite pas à
pousser, souvent en groupe, dans la
terre compacte et caillouteuse du
bord des chemins, voire à travers
l’asphalte des routes mal entretenues !
Quand il est très jeune et que ses
lamelles sont bien blanches, c’est un
très bon champignon, qui présente
l’avantage de pouvoir être consommé
cru. Mais il faut l’utiliser sans
attendre car la transformation de ses proches parents de la girolle qui
lamelles débute rapidement et au poussent en touffes à l’automne.
bout d’une journée, la récolte est Malgré leur aspect assez peu enga­
devenue une masse noirâtre peu geant, c’est l’un de nos meilleurs
appétissante. champignons pour préparer des
soupes et des sauces ou pour
Quelques mots sur les morilles, employer comme condiment. Elles
ces champignons creux en forme sont très faciles à faire sécher.
d’éponge tellement recherchés. Elles
poussent généralement au printemps, Bien d’autres champignons mérite­
au bord des chemins ou en lisière des raient encore une petite visite.
bois. Fraîches, les morilles ne sont Quelques russules, surtout la char­
guère fameuses, du moins à mon bonnière à chapeau violet et le palo-
goût, et elles sont toxiques crues. met à chapeau verdâtre, sont vrai­
C’est au séchage que se développe ment d’excellents champignons. Mais
leur arôme et il est vrai que l’on en il faudra faire attention à ne pas
prépare alors des sauces extraordi­ ramasser de russules à saveur âcre,
naires. Il en est un peu de même piquante, qui peuvent irriter et se
pour les trompettes de la mort, ces montrer vomitives. Le pied-de-mou­
113
En automne
ton n’est pas mauvais non plus, et il aplatis, dont la chair dégage une déli­
est facile à identifier par les nom- cate odeur de cannelle...
breux aiguillons qui parsèment, à la
place des classiques lamelles, la face Eh bien, nous en avons vu des
inférieure de son chapeau chamois choses au cours de cette promenade.
ou orangé. J’aime aussi les pleurotes, S’il avait fallu toutes les goûter, nous
ces champignons du bois mort au aurions sûrement une indigestion.
pied excentré de façon caractéris­ Car les cham pignons, même les
tique. Une espèce est censée ressem­ meilleurs, sont à déguster avec parci­
bler à des huîtres - jolie comparaison. monie, et de façon sélective. Mais il
En Extrême- Orient, les pleurotes est dommage de se limiter comme on
sont des champignons très appréciés le fait trop souvent à la cueillette
et on les cultive fréquemment. Leur d’une ou de deux espèces. Bien
culture est récemment apparue en d’autres méritent notre intérêt, à
Europe. Citons encore la clavaire condition de savoir reconnaître à
chou-fleur, en forme de corail et sa coup sûr les quelques champignons
cousine le sparassis crépu, grosse toxiques de nos forêts. Il serait trop
touffe brun clair formée de rameaux bête de se rendre malade!

114
HIVER
13 - CAMPAGNES
HIVERNALES
Qui penserait qu’au cœur de la mauvaise saison poussent encore suffi­
samment de bons végétaux pour agrémenter nos repas? C’est pourtant
le cas en plaine sous le climat atlantique ou méditerranéen : les mon­
tagnes et nos régions plus continentales sont soumises à de rudes gelées
qui ne laissent guère subsister de plantes, et fréquemment la neige les
recouvre. Ce qui ne facilite pas les explorations botaniques! Par contre,
une couche de neige épaisse joue un rôle protecteur, et dès sa fonte, des
dizaines de légumes sauvages seront prêts à affronter la vie de la saison
nouvelle.

Il est vrai qu’il faut s’y prendre à dans nos salades, car il est souvent
plusieurs fois avant de repérer bien coriace. On peut quand même
quelque chose de vert et d’appé­ trouver quelques petites feuilles
tissant au milieu de cette encore tendres au centre de
végétation roussie par la rosette. H eureuse­
le froid! Et pourtant, ment, la cuisson nous
nos pieds foulent propose de multiples
toujours les touffes façons gastrono­
de plantain, qu’il miques de déguster
soit grand au le plantain : anneau
bord des chemins, de plantain, soufflé,
moyen dans les plantain au vin
prés et les bois, ou blanc, etc.
bien lancéolé, le plus Il existe de nom ­
souvent peut-être. breuses espèces de
Mais en cette saison, nous plantain dans notre flore.
pouvons rarement profiter de On peut facilement les diviser
son étonnant goût de champignon en deux catégories. D’une part les
117
En hiver

P LA N TA IN
Famille des Plantaginacées

Grand plantain : Plantago major roux qui caramélisera et faites cuire à


Plantain moyen : Plantago media four chaud.
Plantain lancéolé : Plantago lanceo Cette tarte peu conventionnelle aura
lata
Psyllium : Plantago psyllium

Recette : tarte sucrée


au plantain et à l'ortie

• Préparez une pâte brisée et foncez-


en un moule à tarte.
• Faites cuire à l'eau le plantain et les
orties. Lorsqu'ils sont cuits, égouttez
les légumes et hachez-les.
• Battez quelques oeufs avec un peu
de lait et du miel fondu au bain-
marie. M élangez avec les légumes
Fiachés et ajoutez une petite poignée
de raisins secs.
• Couvrez le fond de tarte de noi­
settes ou d'amandes hachées, versez
par-dessus le mélange, décorez de
bandes de pâte, saupoudrez de sucre

plantains à petites feuilles linéaires et form ant une rosette étalée; les
coriaces, particulièrement répandus hampes florales, à épis allongés, éga­
dans le Midi ou en haute montagne. lent ou dépassent à peine les feuilles.
A ce type appartient le psyllium, Le plantain moyen a également de
dont on utilise les graines comme larges feuilles, mais leur pétiole est
laxatif mécanique. D ’autre part se très court et elles sont appliquées sur
rencontrent les plantains herbacés, de le sol; les hampes florales, à épi com­
loin les plus répandus. Il s’agit princi­ pact, sont quatre à cinq fois plus
palement des trois espèces que nous longues que les feuilles. Quant au
avons citées plus haut. plantain lancéolé, ses feuilles sont
Le grand plantain possède des étroites et allongées, atténuées en
feuilles larges, longuement pétiolées, pétiole et rassemblées en une rosette
118
Campagnes hivernales

V IO LE T T E
Viola spp. Famille des Violacées

Recette : violettes parmentier • Mélangez les feuilles hachées h la


purée et versez dans un plat huilé
• Faites cuire à la vapeur environ allant au four. Parsemez la surface de
deux poignées de feuilles de violettes fromage râpé, de morceaux de beurre
par personne, puis hachez-les. et de chapelure.
• Préparez une purée de pommes de • Faites cuire à four chaud jusqu'à ce
terre et mélangez- y un œuf. Délayez que le plat soit gratiné.
avec un peu de lait et ajoutez du Servez chaud.
fromage râpé à volonté.

dressée; les hampes florales, à épi quoi pas? Mais en quantité un peu
court, dépassent les feuilles. Tous importante, il faudra les servir cuites,
nos plantains ont comme caractéris­ en soupe ou en sauce blanche.
tique d’avoir des feuilles à nervures
principales parallèles, ce qui est très Dans les bois, tes feuilles de vio­
rare chez les dicotylédones (alors que lette, cœurs parfaits d’un vert foncé,
c’est la règle chez les monocotylé- attendent aussi notre venue. N ’hési-
dones tels les lis, les ails, les orchi­
dées, les graminées, etc.).
Bien qu’elle soit censée fleurir à
Pâques, la pâquerette est présente
avec nous toute l’année. Il n’est
d’ailleurs pas rare d’apercevoir ses
pompons blancs et roses en plein
cœur de l’hiver. C’est l’une des rares
fleurs à oser égayer nos prairies au
cours de cette morne saison. Nous
allons donc même pouvoir, avec un
peu de chance, nous payer le luxe
d’une salade fleurie. Sinon il nous
reste en tous cas les feuilles menues
de la pâquerette : leur aspect caracté­
ristique en forme de spatule nous
permettra de les identifier facilement
dans les prés hivernaux. Quelques
feuilles crues dans les salades, pour­
119
En hiver V '-*. '« * 1

STELLA IR E
Stellaria media Famille des Caryophyllacées

Recette : soupe crue brièvement. Si vous mixez trop long­


temps, les pommes de terre risquent
• Cueillez de la stellaire bien tendre de devenir collantes.
(attention surtout à ce qu'elle ne soit Ne remplissez pas trop votre mixer; il
pas fibreuse) et placez- la dans un vaut mieux procéder en plusieurs fois
m ixer avec quelques pommes-de- et mélanger le tout. Dégustez tiède
terre cuites, de l'huile d'olive, de l'ail cette délicieuse soupe, en la faisant
cru et du sel. réchauffer délicatement: si vous la
• Ajoutez juste ce q u 'il faut d'un fa isie z b o u illir, son superbe vert
mélange d'eau et de lait, et mixez deviendrait tristement brunâtre...

tez pas à les ajouter aux salades car


leur richesse en mucilage assure leur
douceur, même en ces mois les plus
froids. Les feuilles des primevères,
par contre, devront être cuites, et
mélangées de préférence avec celles
d’autres plantes car il arrive que les
intestins fragiles aient quelque peine
à les supporter. Si le gel n’est pas
trop agressif, les bois nous procure­
ront peut-être encore quelques
exquises salades de stellaire — à
moins que vous ne préfériez en pré­
parer une soupe crue, d’un vert prin­
tanier à faire rêver... Il n’est pas
impossible que des touffes de stel­
laire se dissimulent en quelque coin
de votre jardin, ou de celui du voisin,
qui sera ravi que vous l’en débarras­
siez.
La pâquerette n’a probablement
pas besoin d’être décrite : fleuries ou
non, ses délicates rosettes sont suffi­
samment connues. Quant à la vio-

120
Campagnes hivernales

PAQ U ERETTE
Bellis perenrtis Famille des
Astéracées

lette, à la primevère et à la stellaire,


nous les avons déjà rencontrées au
cours de nos précédentes prome­
nades.
Mais le soir tombe vite et il nous
faudra bientôt rentrer. En retraver­
sant les prés, cueillons quelques
feuilles de trèfle qui, semble-t-il,
résisteraient à tous les temps, pour
LAM IER PO U R PR E
Lamium purpureum Famille des Lamiacées

Lamier blanc : Lamium album


Lamier tacheté : Lamium maculatum

TREFLE
Famille des Fabacées
Trèfle blanc : Trifolium repens
Trèfle rouge : Trifolium pratense ♦ Ajoutez le levain, mouillez d'eau et
pétrissez longuement pour obtenir
Recette : pain d'herbes une pâte souple ne collant pas aux
doigts. Laissez lever deux heures dans
♦ Préparez un levain en délayant de un lieu tiède.
la farine avec suffisamment d'eau • Pétrissez de nouveau la pâte, divi-
pour obtenir une pâte liquide, que sez-la et mettez dans des moules
vous mettrez à fermenter quelques graissés. Laissez lever puis faites cuire
jours dans un lieu tiède (environ à four chaud.
20°C). Evitez d'utiliser de l'eau chlo­
rée du robinet. Dégustez ce délicieux "pain vert" en
• FHachez finement diverses plantes belles tranches beurrées. Si vous avez
sauvages, trèfles ou lamier en cette de la difficulté à préparer du levain,
saison, et mélangez-les à de la farine. utilisez de la levure de boulanger
Salez. délayée dans un peu d'eau tiède.

121
En hiver
les ajouter aux salades ou bien les semblent beaucoup mais sont sou­
cuire comme légume. Il vaut mieux vent amères. Porcellcs, liondents,
ne ramasser que les folioles (les trois picrides sont quelques-unes de ces
— ou quatre pour les chanceux — Composées à feuilles en rosette que
« feuilles i) du trèfle) et laisser le l’on prend parfois pour des pissenlits.
pétiole (la « queue ») qui est plutôt La supercherie se découvre facile­
coriace. Et puis n’omettons pas les ment lorsque la hampe florale se
pissenlits qui développent déjà des développe : les capitules du pissenlit
cœurs tendres et pâles, au fond des­
quels se cachent de succulents bou­
tons. Bientôt épanouis en capitules
d’or, ils ne tarderont plus guère à
redonner vie à nos campagnes. Voici
d’ailleurs qu’au milieu de la touffe de
feuilles colorées qui coiffent le
lamier pourpre pointent de gra­
cieuses fleurs roses, de quoi décorer
agréablement les salades. Il semble
que l’hiver touche à sa fin...
Il existe de nombreuses especes de
trèfle dans nos régions. Aucune
n’étant toxique, une confusion serait
sans danger, mais certaines sont trop
coriaces pour être consommées et
quelques unes, plantes des mon­
tagnes, sont trop rares pour qu’on
puisse se permettre de les ramasser.
Nous cueillerons surtout le trèfle
blanc, petite espèce rampante, et le
trèfle rouge, plus développé.
N’oublions pas que leurs jolis capi­
tules de fleurs sucrées (les enfants
aiment à en sucer le nectar) font
merveille dans les salades de légumes
ou de fruits...
Il en est d’ailleurs de même des
capitules des pissenlits. Ces plantes si
communes dans nos prés n’ont pas
besoin d’être décrites en détail, mais
évitons de les confondre avec cer­
taines de leurs cousines qui leur res­
122
Campagnes hivernales

O R T IE
Urtica dioica Famille des Urticacées

Petite ortie : Urtica urens • Préparez une sauce bécham el


épaisse avec de la farine, du beurre
Recette : soupe d'ortie ou de l'huile et du lait coupé d'un
peu d 'e a u . A jo u te z le jaune de
• Faites revenir un oignon ou deux quelques oeufs (un par personne),
dans une grande casserole, puis puis battez les blancs en neige et
ajoutez les jeunes feuilles d'ortie. incorporez-les à la sauce. Salez et
Laissez fondre en remuant. poivrez.
• Ajoutez des pommes de terre cou­ • Egouttez soigneusement les orties
pées en morceaux, puis suffisamment (pressez-les si elles ont cuit à l'eau),
d'eau pour couvrir les légumes, salez hachez-les finement puis mélangez-
et laissez cuire une vingtaine de les à la sauce précédente.
minutes. • Versez dans un moule à soufflé et
• Lorsque les légumes sont cuits, mettez à cuire à four bien chaud
ajoutez encore de l'eau ou du lait pendant une petite demi-heure.
pour parvenir à la quantité de soupe Dégustez avec un vin blanc sec.
souhaitée - et quelques cuillerées de
crème fraîche pour les gourmets. Recette : panade d'ortie séchée
Mixez et servez chaud.
• Faites cuire ensemble quelques
Recette : soufflé d'ortie cuillerées à soupe de paillettes d'or­
tie séchée et de pain rassis dans un
• Faites cuire les jeunes feuilles d'or­ peu d'eau salée.
tie à l'eau ou de préférence à la • D élayez bien pour obtenir une
vapeur (elles absorbent moins d'eau). consistance crémeuse. Au moment
L'ortie réduit à peu près comme les de servir, ajoutez un morceau de
épinards. beurre dans chaque assiette.

sont solitaires au bout d’un pédon­ lement à la campagne, dans le Midi


cule unique à consistance caoutchou­ surtout. Parmi elles, la chondrille, la
teuse, alors que chez les autres picridie et la laitue vivace, que nous
genres, les hampes florales sont géné­ avons déjà rencontrées, sont peut-
ralement rameuses et rigides. Mais ne être bien nos trois meilleures salades
les dédaignons pas toutes : certaines sauvages, douces et croquantes, supé­
font partie de ces salades de prin­ rieures à mon goût aux pissenlits.
temps que l’on ramasse traditionnel­ Quant au lamier pourpre, c’est un
123
En hiver
proche parent du lamier blanc et du autant de minuscules seringues hypo­
lamier tacheté, que l’on nomme par­ dermiques remplies d’un venin urti-
fois respectivement « ortie blanche » cant. Chaque poil, creux, est formé
et « ortie rouge ». A tort d’ailleurs car de silice et se casse au moindre choc,
ces plantes n’ont rien à voir avec les produisant une cassure coupante qui
véritables orties, piquantes comme incise la peau et y laisse pénétrer un
chacun sait, si ne c’est l’aspect de mélange de substances allergisantes,
leurs feuilles opposées. Les lamiers renfermant en particulier de l’hista­
ont de grandes fleurs colorées à deux mine et de l’acétylcholine. 1/10 de
lèvres et, bien que n’étant pas odo­ milligramme suffit à déclencher une
rants, appartiennent à la famille de la réaction! C’est pour cela que se for­
menthe, les Labiées. Les orties par ment sur la peau après une piqûre
contre ne possèdent que de minus­ d’ortie de disgracieux boutons rouges
cules fleurs verdâtres, réunies en qui démangent terriblement. Mais
grappes pendantes, et elles sont cou­ tout mal connaît son remède, et il
vertes de poils urticants. Les feuilles suffit de frotter une feuille de plan­
des lamiers sont comestibles — une tain à l’endroit sensible pour que
méprise serait donc sans danger —, cesse, en moins d’une minute, la
mais celles des orties sont, à mon douleur ! Et la nature doit être bien
goût, autrement plus savoureuses. faite car on est presque toujours
assuré de trouver du plantain là où
Enfin les orties! J’aurais pu vous poussent les orties. Il existe de nom­
en parler plus tôt, au printemps par breuses espèces d’ortie à travers le
exemple, saison où leurs pousses monde, dont quatre poussent en
délicates sont le plus fréquemment France. La plus courante, et aussi la
récoltées. On bien en montagne, où plus intéressante, est l’ortie dioïque
elles voisinent tout l’été avec le bon- ou « grande ortie », qui possède la
henri et le rumex alpin autour des particularité de porter des fleurs
chalets d’alpage. Mais comme c’est mâles et des fleurs femelles sur des
ma préférée, j’ai voulu la garder pour pieds différents. C ’est une plante
la fin. Et puis on peut en profiter vivace, contrairement à la petite
pratiquement toute l’année, du moins ortie ou « ortie brûlante », qui, elle,
là où le climat est assez doux : il est annuelle. Quelle que soit leur
m’est souvent arrivé de cueillir en espèce, les orties sont de grosses
plein hiver de tendres orties, alors gourmandes qui se plaisent sur les
particulièrement appréciables. sols riches en azote, fréquents autour
Pourtant tout le monde n’aime pas des endroits habités ou des lieux
l’ortie, et son seul nom suffit à évo­ fumés par le bétail. Pour cette raison,
quer de cuisants souvenirs. Car avant les botanistes les traitent de plantes
tout, elle pique. Les innombrables « rudérales », du latin rudus, ruderis,
poils qui la recouvrent sont tout qui signifie « décombre ». On dirait
124
s* •••• >■•. Campagnes hivernales
qu’elles poursuivent l’homme par­
tout!
Mais le mépris que l’on a trop sou­
vent pour l’ortie disparaît dès que
l’on s’y intéresse un peu. Cette
« mauvaise herbe » détestable devient
alors une plante médicinale et un
légume sauvage des plus intéressants.
De ses racines jusqu’à ses graines, les
occasions d’utiliser l’ortie pour le
bien-être de notre corps et le plaisir
de nos papilles ne manquent pas. Et
d’abord, si elle pique, c’est aussi un
bienfait. Difficile à croire? Demandez
aux innombrables personnes souf­
frant d’arthrite ou de rhumatismes
qu’a soulagés l’application de tiges
feuillées d’ortie. On soupçonne
l’acide formique, dont la plante est si
richement fournie, d’avoir une action
anti-inflammatoire efficace. Quoi
qu’il en soit, ce remède héroïque était
déjà connu des anciens Romains et
nos grands-parents le pratiquaient
couramment. De sa racine, on pré­
pare des lotions qui passent pour
tonifier le cuir chevelu et pour aider
à combattre la calvitie. La plante
entière est un excellent dépuratif et
un tonique général de l’organisme.
La décoction de feuilles d’orties,
fraîches ou séchées, possède des pro­
priétés diurétiques et galactagogues.
On la conseille donc aux nourrices. à la fois nutritive, agréable... et quasi­
Quant aux graines d’orties, qui pen­ ment inépuisable! Elle peut s’apprêter
dent de l’aisselle des feuilles durant d’autant de façons que l’épinard — et
tout l’été, d’aucuns leur attribuent même davantage. La soupe d’ortie
des vertus aphrodisiaques... est bien connue, et rien ne peut rem­
L’ortie est aussi l’un des meilleurs placer sa saveur typique. Dans de
légumes sauvages, source alimentaire nombreuses campagnes — et même
125
En hiver

maintenant en ville — on continue à bonnes qu’au début du printemps. Et


la déguster chaque printemps, met­ les feuilles d’ortie peuvent aussi se
tant à profit ses vertus dépuratives et faire sécher au soleil, dans un four
régénérantes au sortir de l’hiver. Mais entr’ouvert ou simplement sur un
l’ortie se prépare aussi en omelette, radiateur. Pour s’en servir, il suffit de
en quiche, en gratin, en soufflé ou en les réduire en paillettes en les frois­
timbale, et certains grands chefs ne sant entre les mains (pas de crainte,
dédaignent pas de la mettre sous une sèches, elles ne piquent plus). On les
forme ou une autre à leur menu. saupoudre sur les aliments pour y
L’ortie est même cultivée commercia­ ajouter en plus d’un goût agréable les
lem ent dans le sud-ouest de la vitamines et les oligo-éléments gages
France et la « mauvaise herbe » mise d’une bonne santé hivernale.
en conserve se vend à prix d’or aux
États-Unis et au Japon! N ’oublions Et les orties en salade? Pas de quoi
pas non plus l’ortie en dessert. Les dresser les cheveux sur la tête :
gâteaux de riz, les flans et les entre­ quelques pousses finement ciselées et
mets divers à base de semoule ou de mélangées à d’autres légumes et à
tapioca sont encore meilleurs si on y une bonne sauce ne risquent absolu­
joint quelques cuillerées de pointes ment pas de piquer, mais apportent
d’ortie passées au mixer. Et que dire une incomparable saveur fraîche et
des tartes, des crêpes, des gaufres ou « verte », bien différente de celle de
des beignets qui seront métamorpho­ l’ortie cuite. De toutes façons, les
sés par sa venue? L’ortie peut même orties perdent plus ou moins rapide­
se préparer en sirop et en limonade ! ment leur pouvoir urticant après
Pour profiter au mieux de la finesse avoir été cueillies, et elles sont inof­
de sa saveur, il faut savoir cueillir fensives une fois mouillées. Ce qui
l’ortie : on ne ramasse que les jeunes inciterait à les récolter sous la pluie
pousses et les quelques feuilles du pour éviter de se piquer les doigts,
sommet des tiges. Lorsque ces der­ car les diverses méthodes consistant à
nières se développent au cours de la les prendre par dessous, à retenir son
saison, elles prennent un goût plus souffle voire à leur parler ne sem­
fort, qui rappelle étrangement celui blent guère efficaces. La solution?
du poisson — ce pourrait d’ailleurs Repérer le plantain à proximité... ou
être l’occasion de préparer une intri­ bien mettre des gants!
gante « brandade d’ortie »... Heureu­
sement, il est facile d’avoir presqu’en Mais les extraordinaires qualités
toutes saisons de jeunes pousses nutritionnelles de l’ortie méritent bien
fraîches en coupant régulièrement les qu’on se pique un peu les doigts. Sa
tiges lorsqu’elles commencent à mon­ richesse en protéines est telle qu’il
ter. Les jeunes repousses sont aussi n’est pas faux de dire qu’un plat

126
Campagnes hivernales
d’ortie vaut un bifteck : les analyses d’autres usages. Une décoction
révèlent qu’elle en contient entre 6 et concentrée des feuilles, saturée de sel,
9 g par 100 g en poids frais, et servait autrefois à faire cailler le lait.
jusqu’à près de 40 g par 100 g en Les fibres de la tige, très résistantes,
poids sec, soit davantage que le soja! sont utilisées depuis des temps recu­
Et, fait important, ces protéines, par­ lés pour fabriquer des tissus, des
faitement équilibrées en acides ami­ cordes et des filets de pêcheurs. Cette
nés, sont des protéines complètes, industrie était particulièrement floris­
tout à fait comparables à celles des sante en Suède. Les jardiniers
produits animaux! L’ortie contient apprécient aussi les vertus fertili­
davantage de chlorophylle et de fer santes et insecticides de l’ortie, mise à
que les épinards — on en extrait fermenter quelques jours dans de
commercialement la chlorophylle —, l’eau pour en préparer un purin —
et elle renferme par ailleurs de nom­ malodorant mais efficace. Croyez-
breux sels minéraux. Sa teneur en moi, s’il ne fallait garder qu’une seule
provitamine A (carotène) et en vita­ plante sur terre, je souhaiterais que
mine C est également remarquable. Il ce soit l’ortie!
n’est donc pas étonnant que les ani­
maux que l’on nourrissait tradition­ Et puis l’hiver, c’est avant tout la
nellement de pâtée d’ortie (en parti­ saison des racines, dont nous allons
culier les oies dans le Sud-Ouest) longuement parler. Pour compléter
aient toujours été si bien portants. Il notre repas, il nous faudrait aussi des
ne tient qu’à nous d’en bénéficier fruits : la généreuse nature nous en
aussi. propose encore plusieurs, et parmi
L ’ortie a connu encore bien les meilleurs à mon goût!

127
En hiver m a

128
Cynorrhodon - Rosa sp.
Grande ortie -
Urtica dioica

Asteraceae -
Tussilago faefara
14 - FRUITS
DES GELEES
Brrr! qu’il fait froid le matin ! Les vraies gelées sont arrivées. Même si
l’hiver n’est pas encore tout à fait là, on le sent venir à grands pas. Mais
voyez-vous, la nature est bien faite, car si le gel ravage nos potagers
(dont la plupart des éléments proviennent de pays exotiques et ne sup­
portent pas le froid de nos régions...), il nous permet par contre de
déguster des fruits qui autrement seraient immangeables.

Vous avez certainement entendu consomment fraîches. Les fruits du


parler des nèfles, mais en avez-vous vrai néflier, globes prolongés par cinq
goûtées ? Il est peu probable que longs sépales persistants, sont bruns
vous en ayiez même jamais lorsqu’ils sont mûrs, mais ils
vues, du moins récem­ sont durs, acides et forte­
ment, car ce fruit autre­ ment astringents ; on
fois très apprécié est ne peut pas les man­
complètement ger crus et ils ne
négligé de nos jours. sont guère meilleurs
A ttention, ne les cuits. Il faut les éta­
confondez pas avec ler sur un lit de
les « nèfles du Japon », paille sèche et
fruits d’un arbuste patienter. Au bout
extrême-oriental de la de quelques semaines,
même famille (les Rosa­ ils auront subi une fer­
cées), que l’on cultive dans mentation (partiellement
le Midi, le « loquat » ou « biba- alcoolique), le blettissement,
cier ». Jaune-orangé, ces fausses qui en aura profondément transformé
nèfles ressemblent à des abricots et se la chair. Les nèfles blettes sont
129
En hiver

NEFLE
Mespilus germanica Famille des Rosacées

Recette : nèfles meringuées très ferme avec une pincée de sel,


puis in corporez délicatem ent du
• Passez les nèfles au m oulin à sucre en poudre en le versant en
légumes après en avoir extrait les gros pluie.
noyaux. • R eco u vre z la com pote d'une
• Faites cuire à feu doux dans une épaisse couche de meringue et faites
casserole avec un peu de vin rouge, cuire à four très doux pendant une
du miel et un soupçon de gingembre dizaine de minutes. Servez tiède ou
frais râpé, puis versez cette compote froid.
dansun plat allant au four.
• Battez des blancs d'oeufs en neige Loquat : Eriobotrya japonica

molles, sucrées et merveilleusement formation chimique. Il est simple­


parfumées, avec une petite saveur ment plus que mûr.
vineuse qui fait le plaisir des ama­ Les nèfles blettes se dégustent
teurs. N ’allez surtout pas croire crues, ou cuites en compotes après
qu’un fruit blet soit pourri : il ne en avoir retire les gros noyaux. On
s’agit pas du tout de la même trans­ en prépare un délicieux « vin de
130
Fruits des gelées
nèfles » en laissant fermenter les On rencontre occasionnellement cet
fruits écrasés avec de l’eau. intéressant arbuste dans les haies ou
dans les forêts de nos régions. Son
Mais si le néflier n’a plus notre bois, à la fois dur et flexible, était
faveur comme arbre fruitier, nous jadis apprécié pour faire des manches
pourrions au moins le conserver pour d’outils.
décorer nos parcs et nos jardins. Car
il a belle allure avec ses feuilles larges Laissés sur l’arbre, certains fruits
et allongées et ses grandes fleurs blettissent avec les gelées, parfois
blanches qui s’épanouissent au mois même avant : c’est le cas des
de mai. En automne, son feuillage cormes, que l’on peut dès le mois de
prend une magnifique couleur vieil septembre ramasser blettes à point
or teintée de rose. Une splendeur! Sa sous ces arbres splendides — et
forme tortueuse contribue aussi maintenant rares — que sont les cor­
beaucoup à ses qualités décoratives. miers. Les cormes sont arrondies ou

CO RM E
Sorbus domestica Famille des Rosacées

Recette : bûche de cormes D é co re z de quelques corm es


entières.
• Récoltez des cormes blettes, bien
molles, et passez- les à travers un Attendez quelques heures avant de
moulin à légumes pour en éliminer la servir. Si tout ce travail vous rebute,
peau et les pépins. vous pouvez aussi bien déguster
• Préparez une pâte à biscuit de directement la purée de cormes, telle
Savoie et versez-la en couche mince qu e lle ou en la m élangeant à un
sur une plaque carrée recouverte yaourt
d'un papier d'alum inium graissé.
Faites cuire à four moyen.
• Etalez la purée de cormes sur la
surface du biscuit de Savoie encore
chaud et souple, soigneusement déta­
ché de son papier d'aluminium.
• Roulez délicatement, imprégnez la
bûche d'un mélange d'eau, de bonne
eau-de-vie de fruits et d'un peu de
sucre. « Glacez » avec du fromage
blanc sucré au miel. Cormier

131
En hiver
en forme de petites poires et présen­ une forme caractéristique, est com­
tent à maturité un mélange de vert, mun dans les bois des plaines. Ses
de jaune et de rouge. Elles sont alors petits fruits bruns ponctués de taches
amères, en plus d’être dures et âpres rougeâtres, les « alises », sont très
au palais. Mais le blettissement fait bons une fois blets. On en prépare
d’elles les plus exotiques de nos d’excellentes confitures.
fruits : crémeuses et parfumées à sou­
hait, elles font penser aux anones Le sorbier des oiseleurs, lui, pré­
tropicales que l’on a coutume de fère l’altitude — bien qu’on le plante
comparer à des flans fruités. Quand souvent en plaine pour la décoration
on pense qu’on a pu oublier un fruit que procurent ses feuilles découpées
aussi exquis! Je dis bien oublier, car et ses corymbes de fruits rouges.
les cormes étaient autrefois régulière­ Avant les gelées, ces derniers sont
ment consommées, fraîches ou pré­ trop amers et acides pour être bons.
parées de diverses manières. On en Même par la suite, il vaudra mieux
faisait un vin, le « cormé », qui était les faire cuire, par exemple en « chut­
une boisson courante en diverses neys », ces sauces épicées, à la fois
régions. D ’autre part, le bois du acides et sucrées tant appréciées en
cormier était fort apprécié : autolu- Inde. Dans les Vosges, on en distillait
brifié, il servait en particulier à faire un alcool.
des engrenages de moulin.
Q uant à l’allo uch ier, c’est en
Trois cousins du cormier sont fré­ moyenne montagne qu’on le ren­
quents dans notre flore. L ’alisier contre. Sa caractéristique ? Des
torminal, dont les jolies feuilles ont feuilles vertes en dessus et d’un
splendide blanc argenté en dessous.
Le moindre coup de vent soufflant
sur les crêtes où se complaît
l’allouchier transforme comme par
enchantement la couleur du pay­
sage. Les « allouches », rouges
et sphériques, sont souvent
insipides et plutôt fari­
neuses. Mélangées à un
peu de miel, crues ou
cuites, elles ne sont pas
mauvaises.
Ces quatre arbres appar­
tiennent tous au genre Sorbus :
cormier, alisier et allouchier sont
Alisier torminal aussi des sorbiers. D’ailleurs le cor-
132
Fruits des gelées

SO R B IER D ES O ISE LEU R S


Sorbus aucuparia Famille des Rosacées

Recette : • Faites cuire quelque temps à feu


chutney de sorbier doux, puis passez au « mix-soup »
pour obtenir une sauce crémeuse.
• Faites cuire les sorbes détachées de
leur grappe, puis passez-les au mou­ Les chutneys sont des sauces
lin à légumes. indien nes à la fois a cid u lé e s,
• Dans une casserole, faites revenir piquantes et sucrées, qui se servent en
des oignons et ajoutez la purée de accompagnement de riz, ou d'autres
sorbes. Ajoutez ensuite du vinaigre, céréales, et de légumes. Vous pouvez
de l'ail haché, des raisins secs, du mettre ce chutney en bouteille et le
miel et du piment fort. Salez. garder plusieurs jours au réfrigérateur.

mier est souvent nommé « sorbier peut atteindre une quinzaine de


domestique », et pour certains, les mètres de hauteur avec un tronc de
cormes sont des « sorbes » (mais ce plus d’un mètre de diamètre! Mais il
n’est pas de ces fruits que vient le est généralement beaucoup plus petit.
mot « sorbet »...). On distinguera Ses feuilles sont composées de onze à
assez facilement les différents sor­ dix-sept folioles dentées sur les deux
biers. Le cormier est un bel arbre qui tiers supérieurs (la base des folioles
133
En hiver

Famille des Rosacées fruits rouges ressemblent à ceux du


sorbier des oiseleurs, mais ils sont
Alisier torminal : Sorbus torminalis plus gros. Quant à l’alisier torminal,
Allouchier : Sorbus aria assez commun dans nos bois, c’est
un petit arbre que l’on ne peut
Poirier à feuilles d'amandier : Pyrus- confondre avec aucun autre dès que
amygdaliformis l’on a vu sa feuille tant sa forme est
Poirier sauvage : Pyrus communis spéciale : elle est presque aussi large
Poirier à feuilles de sauge : Pyrus que longue, tronquée à la base et
salvifolia comprend de cinq à neuf lobes aigus,
Poirasse : Pyrus cordata les inférieurs plus profonds que les
autres et étalés. Il existe aussi un ali­
sier nain, arbrisseau de moins d’un
est entière). On le rencontre parfois mètre de hauteur qui pousse sur les
dans les haies et les bois, mais sa rochers de nos hautes montagnes.
reproduction est difficile car pour Ses petits fruits rouges orangé, fari­
pouvoir germer, il semble que les neux et pulpeux, sont comestibles
graines doivent d’abord passer à tra­ mais pas très bons.
vers l’estomac d’un oiseau... En tous
cas, l’arbre n’est pas très courant, Lorsqu’une poire est blette, elle
sauf en certains endroits du Midi, où devient trop molle et peu agréable à
il était d’ailleurs jadis très cultivé. manger. Il est rare qu’on l’aime ainsi.
Le sorbier des oiseleurs ressemble Par contre, les poires sauvages ne
beaucoup au cormier, mais il s’agit sont guère comestibles autrement :
généralement d’un arbuste plutôt que avant, elles sont dures et astringentes.
d’un arbre et ses folioles sont dentées Même cuites, il y a mieux. Mais
presque jusqu’à la base, qui est blettes, quel régal! A ce stade, les
oblique. Et bien sûr les petites boules fruits du poirier à feuilles d’aman­
rouges de ses fruits se distinguent du dier par exemple, comptent à mon
cormier au premier coup d’œil. Elles avis parmi les meilleures productions
persistent pendant l’hiver. Comme il du règne végétal : on peut leur appli­
est très décoratif, on cultive parfois le quer tout ce qui a été dit précédem­
sorbier des oiseleurs dans les parcs, ment à propos des cormes. On se
voire le long des rues. L’allouchier demande parfois comment s’arrêter
est très ornemental lui aussi, mais il d’en manger... L’hybridation et la
ne semble pas aimer descendre de ses culture ont transformé les poires, de
montagnes. C’est un arbuste ou un façon agréable, c’est vrai. Mais c’est
arbre plus ou moins élevé dont les ainsi qu’a été oubliée la valeur des
larges feuilles ovales et dentées pré­ poires sauvages et de tous ces excel­
sentent comme nous l’avons vu la lents fruits qui nous viennent du
particularité d’être bicolores. Ses froid.
134
Fruits des gelées
Quatre espèces de poiriers poussent long pédoncule. On ne la trouve que
spontanément dans nos régions. Le dans l’Ouest.
poirier sauvage est l’un des parents
de notre poirier cultivé (d’origine Comme vous avez pu le constater,
hybride). C ’est un petit arbre à tous ces « fruits des gelées »
rameaux épineux et à fruits assez qu’appréciaient fort nos aïeux ont été
gros — environ quatre centimètres de oubliés — injustement à mon avis car
diamètre —, charnus. On le ren­ c’est de toute une catégorie de sensa­
contre dans presque toute la France. tions gustatives agréables que nous
Le poirier à feuilles de sauge a nous privons ainsi. Seuls les « cynor-
également d’assez gros fruits et on le rhodons », les faux-fruits des églan­
cultivait jadis pour fabriquer du « tiers sont parfois encore utilisés.
poiré », un délicieux cidre de poires. Les églantiers, tout le monde les
Cet arbre non épineux pousse dans connaît : ce sont les rosiers sauvages,
le Centre. Le poirier à feuilles qui poussent dans les haies, dans les
d’amandier est un arbuste épineux à lisières ou sur les coteaux de toutes
feuilles allongées et à petits fruits, qui nos régions. Ce sont de beaux arbris­
vient dans les lieux arides du Midi. seaux à longues tiges minces et
Enfin, la « poirasse » est un arbuste souples, armées de solides aiguillons
peu épineux à feuilles larges et très souvent crochus. Ses feuilles divisées
longuement pétiolées et à fruits en plusieurs folioles et surtout ses
petits, peu charnus, portés par un jolies roses miniatures leur font une

135
En hiver

C Y N O R R H O D O N / ÉG LA N T IE R
Rosa canina Famille des Rosacées

Recette : soupe de cynorrhodons Cette soupe se déguste au choix au


début ou à la fin du repas.
• Faites cuire doucement des cynor­
rhodons dans de l'eau jusqu'à ce Recette : pizza sauvage
q u 'ils soient ram ollis. Si vous les
ramassez après les gelées alors qu'ils • Préparez une purée de cynorrho­
sont déjà mous, il est inutile de les dons comme indiqué ci- dessus, mais
faire cuire. faites-la épaisse, et n'y rajoutez pas
• Passez au moulin à légumes pour d'eau.
élim iner les peaux, les grains et le • Faites revenir des oignons et de l'ail
"poil-à-gratter". dans de l'huile d'olive, et ajoutez la
• Ajoutez ou non de l'eau suivant la purée de cynorrhodons.
consistance que vous désirez, salez • Salez, pimentez légèrement, agré­
légèrement, sucrez à votre goût et mentez de marjolaine, de thym et de
remettez sur le feu. romarin. Versez sur une pâte à pain
• Délayez de la maïzena dans un peu étalée dans un moule.
d'eau froide, versez dans la soupe et • D é co re z de filets d 'a n c h o is,
portez à ébullition. d'olives noires et de morceaux de
• Servez tel quel, chaud ou froid, mozzarella. Faites cuire à four chaud.
avec une cuillerée de crème dans
chaque assiette. Etonnant!

parure splendide, mais fragile car les priétés fortement irritantes de ce


pétales tombent rapidement. Les duvet jaunâtre.
cynorrhodons, ces boules rouges Il existe chez nous de nombreuses
allongées qui couvrent en grand espèces d’églantier, mais la plus
nombre les rameaux, ne sont pas de généralement répandue est la Rosa
véritables fruits. Il s’agit en fait de canina, le « rosier des chiens », ce que
l’extrémité des pédoncules, transfor­ signifie en grec « cynorrhodon ». Car,
mée en une sorte d’urne contenant paraît-il, on vantait autrefois ses
les fruits, de petits grains durs entou­ racines comme remède de la rage...
rés d’un redoutable « poil- à-gratter », La seule propriété médicinale que
d’où le nom populaire du cynorrho- l’on accorde aujourd’hui à l’églantier
don; « gratte- cul »... De nombreux est l’astringence. Ses feuilles sont uti­
écoliers ont mis à profit, au grand lisées en décoction contre les diar­
dam de leurs condisciples, les pro­ rhées et la dysenterie, ou en garga-
136
Fruits des gelées
sont fréquemment commercialisés
dans nos pays, et la soupe de cynor­
rhodons est si populaire en Suède
qu’on l’y vend déshydratée, en
sachets, dans les superm archés.
Quant à la sauce qu’on prépare avec
ces faux-fruits, elle ressemble à s’y
méprendre à de la sauce tomate, et
on peut l’employer pour accompa­
gner les pâtes ou préparer des pizzas!
Dès que passent les premières
gelées, les cynorrhodons se ramollis­
sent et peuvent se déguster crus sur
l’arbrisseau, tels quels. Il suffit de les
cueillir et d’en presser délicatement la
base entre les doigts pour que sorte
un filet de pulpe orange, acidulée et
sucrée, que l’on suce comme une
friandise. Dans les régions au climat
sec, les cynorrhodons sèchent sur
l’églantier pendant l’hiver et peuvent
encore se récolter au printemps sui­
vant, voire en plein été. On en pré­
pare alors de délicieuses tisanes en les
faisant bouillir. Leur saveur rafraî­
chissante en fait une excellente bois­
rismes contre les angines et les irrita­ son pour l’été, proche de l’infusion
tions de la gorge. de « karkadeh », cet hibiscus africain
Les jolis pétales des roses sauvages à la saveur acidulée. En Suisse, on
font merveille dans les salades. Mais peut d’ailleurs boire dans n’importe
l’églantier est avant tout un excellent quel café du « thé » de cynorrhodon,
arbre fruitier. La tradition de la en infusette, parfois mélangé au kar­
consommation des cynorrhodons kadeh. Lorsqu’on prépare la tisane
remonte aux temps les plus anciens. chez soi, il est préférable de la filtrer
En les passant au moulin-à-légumes sur du papier pour retenir le poil-à-
(les grains durs et le poil-à- gratter gratter.
restent dans la grille), on en prépare La pulpe séchée des cynorrhodons
une purée d’un splendide rouge qui cueillis sur l’églantier, soigneusement
sert de base à des sirops, des confi­ débarrassée des grains qu’elle
tures, des soupes ou des sauces. Le contient, se suce comme un bonbon
sirop et la confiture de cynorrhodons végétal. On peut aussi étaler au soleil
137
En hiver
ou faire sécher au four de la purée de espèces, mais la moyenne se situe
cynorrhodons en couche mince, puis autour de 1000 mg par 100 g, soit
la découper en carrés. Ce n’est pas vingt fois plus que les oranges, qui
qu’un simple plaisir : c’est en même sont pourtant censées en être une
temps une source de santé car les bonne source!
cynorrhodons sont les aliments les
plus riches en vitamine C que l’on Que de trésors en cette saison
connaisse. Leur teneur en cette pré­ froide!
cieuse vitamine varie selon les

138
15 - DETERRONS LES
RACINES SAUVAGES
Chez de nombreuses plantes, les parties souterraines servent d’organes
de réserve pour la mauvaise saison : du printemps à l’automne, elles se
gonflent des sucres (stockés surtout sous forme d’amidon) que fabri­
quent les feuilles grâce à la photosynthèse. Cette énergie ainsi mise en
réserve permet à la plante de prendre un départ précoce Tannée sui­
vante et donc de produire rapidement fleurs, fruits et graines. Les
organes en question ne sont pas seulement des racines renflées: il s’agit
également de tiges souterraines nommées « rhizomes », ainsi que de
bulbes.

Une grande partie des végé racine qui devient vite ligneuse.
taux dont les racines sont Les fleurs apparaissent,
comestibles est formée puis les fruits, et la
de plantes bisannuelles plante meurt, son cycle
: nées d’une graine au accompli. Si Ton veut
printemps, elles ne en consommer la
développent la pre­ racine, il est indis­
mière année que pensable de la
des feuilles et une récolter entre la fin
racine qui se rem­ de la première
plit de réserves. Dès année et le début de
le début de la la seconde, après
seconde année, la quoi elle devient
hampe florale pointe inutilisable. Le pro­
hors de terre et son Petite ciguë blème de l’identification
développement épuise la s’en trouve compliqué car
139
En hiver

C A R O T T E SA U V A G E
Daucus carota Famille des
Apiacées

G ran d e cigu ë : C o n iu m
maculatum
Petite cig u ë : A ethusa
cynapium
Ciguë vireuse : Cicuta virosa

Phellandrie aquatique : Phel-


landrium aquaticum
Oenanthe safranée : Oenanthe
crocata

charnue. Souvent de belles dimen­


sions, elle est extrêmement aroma­
tique et sucrée : on l’ajoutera avec
bonheur, hachée ou coupée en ron-

fleurs et fruits sont absents, mais


l’habitude permet rapidement de
reconnaître ces végétaux à leurs
seules feuilles.
Parmi nos bonnes bisannuelles,
allons tout d’abord rencontrer la
soeur d’un de nos légumes les plus
cultivés, la carotte sauvage. Pour
l’identifier, l’odorat suffirait : à les
sentir, ses fanes et surtout sa racine
rappellent à tel point la carotte de
nos jardins qu’aucune erreur n’est
possible. Si elle est cueillie au bon
moment, comme nous l’avons dit
plus haut, la racine est tendre et
140
Déterrons les racines sauvages
déliés, aux salades composées et on
pourra l’utiliser cuite dans les mêmes
préparations que la carotte cultivée.
Différence importante : la carotte
sauvage est blanche, parfois violette,
mais jamais rouge, et sa racine reste
souple. Les formes rouges que nous
cultivons seraient venues d’Asie
Mineure.
La carotte sauvage appartient à la
grande famille des Ombellifères où
l’on rencontre, à côté d’excellents
légumes (céleri, panais) et de condi­
ments appréciés (cerfeuil, persil,
fenouil, aneth, carvi, coriandre,
cumin) quelques plantes violemment
toxiques. La plus connue est sans
conteste la grande ciguë, qui servait
de poison judiciaire dans l’Antiquité.
Elle pousse en bordure de chemin ou
dans les décombres. Sachez aussi que
quatre autres Ombellifères sont mor­ toute jeune, est couverte de poils
telles : la petite ciguë, assez fréquente hérissés. Le toucher est là encore un
dans les bois et dans les jardins, où sens à ne pas négliger pour identifier
l’on peut la confondre avec le persil ; ces végétaux. On y adjoindra l’odorat :
la ciguë vireuse, la phellandrie aqua­ les racines de carotte sauvage sen­
tique et l’oenanthe safranée, toutes tent... la carotte, et très nettement, on
trois plantes des lieux humides: bords ne devrait pas pouvoir s’y tromper.
des cours d’eaux et des étangs, Les Ombellifères toxiques aquatiques
marais, voire prairies humides. ont une odeur aromatique qui n’est
Pour identifier précisément toutes pas désagréable, tandis que la grande
ces espèces, la tâche est ardue, mais et la petite ciguë ne sentent vraiment
on peut s’aider des critères suivants : pas bon lorsqu’on les froisse entre les
plusieurs de ces plantes poussent doigts. En combinant ces indications,
dans des lieux humides (on évitera à condition de le faire sérieusement,
donc de ramasser des Ombellifères il n’y a guère de danger de confu­
croissant dans cet habitat), leurs sion.
folioles sont toujours très découpées Et si le doute persiste, laissez gran­
(mais celles de la carotte aussi), et dir la plante : la carotte forme de
surtout, toutes ces plantes sont jolies ombelles blanches munies
glabres alors que la carotte, même d’une fleur stérile pourpre en leur
141
En hiver
centre (il arrive qu’elle soit absente vous tromper sur les plantes de pre­
de certains individus). Puis les mière année, à racine tendre.
pédoncules se recourbent pour for­
mer une sorte de nid lorsque la Dans les mêmes lieux (terres
plante est en fruit. Froissez l’un de remuées, bords des chemins, prai­
ces grains entre vos doigts : il dégage ries...), voici un cousin de la carotte,
une délicieuse odeur de poire, miti­ le panais sauvage autrefois cultivé
gée de térébenthine quand il n’est pas comme légume et fort apprécié pour
encore tout-à-fait mûre. On peut sa rusticité et la saveur aromatique,
d’ailleurs s’en servir comme condi­ sucrée, de sa grosse racine. Celle de
ment. Aucune autre plante n’a cette la forme sauvage est également tout à
odeur. Étudiez bien alors la forme fait nutritive. On en prépare d’excel­
des feuilles, leur texture, leur odeur, lents ragoûts en la faisant revenir
pour pouvoir les reconnaître sans avec des oignons, des pommes de
terre et des carottes... sauvages. Les
« fanes » de panais fournissent de
bonnes soupes et de délicieux
légumes cuits.
Le panais est également une
Ombellifère. Il sera impos­
sible de le confondre avec
les plantes toxiques que
nous avons mentionnées
plus haut car, bien qu’on le
rencontre dans les mêmes
endroits que la grande ciguë, il
s’en distingue aisément par ses
larges folioles non divisées (celles
de la ciguë sont découpées en fins
segments). Ses hampes florales por­
tent de petites ombelles de fleurs
d’un jaune verdâtre, alors qu’elles
sont blanches chez la plupart des
membres de cette famille. Le fenouil
possède également des fleurs jaunes,
mais il est bien facile de le distinguer
du panais rien qu’en froissant ses
feuilles : le parfum anisé qui s’en
dégage est tout autre chose que
l’odeur plutôt grossière des feuilles de
Grande ciguë panais. Les fruits aplatis de notre
142
Déterrons les racines sauvages

PAN A IS
Pastinaca sativa Famille des Apiacées

Recette : tourte au panais

• Lavez soigneusement les racines de


panais et coupez- les en morceaux.
Faites les cuire à l'eau.
• Passez les panais au m oulin à
légumes pour en obtenir une purée,
ou écrasez-les simplement. Salez et
arom atisez de no ix m uscade
fraîchement râpée ou de macis.
• Préparez une pâte brisée et foncez-
en un moule en laissant largement
déborder les bords. Réservez une
partie de la pâte pour le couvercle.
• R em plissez le fond de tarte de
purée de panais, recouvrez d'une
abaisse de pâte et soudez les bords
en pinçant.
Faites cuire à four moyen.

plante exhalent un arôme puissant et couche de poils denses les recouvre.


leur saveur est fortement piquante. Ce sont les furano-coumarines que
Malgré cela, ils forment, frais ou renferme la plante qui sont respon­
séchés, un bon condiment, à condi­ sables de son action photodynami-
tion de les écraser pour bien les sante.
répartir dans la nourriture... et de ne
les employer qu’avec modération. Que sont ces grandes feuilles vert
Attention, il existe aussi un panais clair qui ressemblent un peu à de la
urticant (souvent considéré comme rhubarbe ? Un coup d’œil aux tiges
une simple sous-espèce du panais de l’année, portant à l’extrémité de
sauvage), dont les feuilles peuvent leurs rameaux ces redoutables teignes
par simple contact avec la peau de que les enfants aiment à se jeter sur
personnes sensibles provoquer des les habits... ou dans les cheveux :
brûlures au second degré! Ses feuilles c’est la b ard an e, l’une de nos
sont d’un vert grisâtre car une meilleures racines sauvages. Elle

143
En hiver
affectionne les terrains vagues, les dans un peu d’huile, c’est, seule ou
décombres, les abords des maisons et en mélange, un excellent légume. Par
se rencontre parfois en belles colo­ contre, le limbe des feuilles est trop
nies. C’est encore une plante bisan­ amer pour être utilisé. Dommage vu
nuelle, qu’il faudra donc ramasser à sa taille ! Par contre leur pétiole peut
cette époque de l’année où les être cuisiné comme les côtes de bette
légumes se sont faits rares. Mais après avoir été blanchi. La jeune
jamais lorsque la hampe florale est hampe florale, pelée, peut même se
présente! Les racines de bardane manger crue : elle est absolument
atteignent souvent une belle taille et délicieuse, tendre, croquante et de
leur saveur particulière rappelle net­ saveur délicate. Son goût rappelle
tement celle de l’artichaut : tous deux aussi, mais discrètement, celui du
renferment un sucre caractéristique fond d’artichaut. Rien qu’à ce titre, la
des plantes de la famille des Compo­ bardane mériterait une place sur nos
sées, l’inuline. Cette substance pré­ tables, et dans nos potagers. Au
sente la particularité de se décompo­ Japon, c’est d’ailleurs un légume fré­
ser dans l’organisme, non pas en quemment cultivé pour sa racine,
glucose comme les amidons, mais en sous le nom de « gobo ». Le gobo est
lévulose, ce qui permet aux diabé­ parfois vendu chez nous, dans les
tiques d’assimiler sans difficulté les magasins de produits macrobiotiques,
légumes contenant de l’inuline. et certaines personnes paient très
La racine de bardane, possède éga­ cher les mêmes plantes qui poussent
lement des vertus dépuratives mar­ toutes seules sur le pas de leur
quées. C ’est donc un véritable porte... Est-ce amusant ou plutôt
« légume de santé », recommandable triste ?
à tous. Crue, elle sera râpée ou La bardane n’est pas vraiment une
hachée finement pour être dégustée jolie plante : elle est un peu trop
en salade ; cuite à l’eau, ou revenue dégingandée pour être belle. Mais en

BA R D A N E
Arctium lappa Famille des Astéracées

Recette : nituké de bardane ajoutez un peu d'eau (attention aux


éclaboussures) et la isse z m ijoter
• Choisissez des racines bien tendres quelques minutes à couvert.
ju sq u 'a u coeur et co u p e z-le s en • En fin de cuisson, ajoutez un peu
rondelles assez minces. de tamari (sauce de soja). Servez
• Faites-les revenir dans une poêle chaud.bien chaude.
avec de l'h u ile de sésam e, puis • Posez rapidement sur un papier.

144
Déterrons les racines sauvages
terrain profond, son feuillage atteint qui a inspiré l’invention du « Velcro »,
des dimensions impressionnantes (sa système d’attache rapide par simple
racine aussi d’ailleurs) et est alors contact. L’observation de la nature
très décoratif. A la façon typique des peut même être source de réussite
Composées, ses fleurs sont groupées commerciale !
en capitules. Toutes les fleurs, d’un Les parties souterraines de bien
joli rose violacé, sont en forme de d’autres végétaux sont comestibles
tube, comme chez les chardons. Elles mais souvenez-vous que vous tuez la
sont entourées par de nombreuses plante en la déterrant. Il faudra donc
bractées recourbées en crochets, ce toujours prendre bien soin de ne les
qui permet aux capitules de s’accro­ ramasser que si les plantes poussent
cher aux poils des animaux afin de en grande abondance afin de ne pas
disséminer efficacement les graines. nuire à l’espèce. S’il y a le moindre
C’est d’ailleurs cet ingénieux procédé doute, abstenez-vous!

Bardane

145
POSTFACE : VENEZ VOUS
PROMENER AVEC NOUS
Vous pouvez accompagner l’auteur
dans les promenades sauvages qu’il
anime toute l’année en France, en
Suisse, en Belgique et en bien
d’autres lieux fleuris. Car pour
apprendre à les connaître, rien ne
vaut le contact direct des végétaux
sur le terrain sous la direction d’un
spécialiste.
Pour tous renseignements,
contactez :
François Couplan
Haut Ourgeas
04330 Barrême
Tel. 92.34.25.29
en Suisse :
François Couplan
et Françoise Marmy
1692 Massonnens
Tel. 037/53.19.78
Merci de joindre une enveloppe
timbrée pour la réponse.
Nous vous souhaitons beaucoup de
plaisir à la découverte des plantes
comestibles que nous offre la nature.

147
INDEX DES RECETTES
Pages
• Anneau de coquelicot 29
• Beignets de tussilage 47
• Beurre d’alliaire 84
• Blinis sauvages (pissenlit) 24
• Bûche de cormes 131
• Castagniaccia (châtaigne) 102
• Chou farci aux noisettes 106
• Choucroute de cresson 48
• Chutney de sorbier (sorbier des oiseleurs) 133
• Condiment de criste-marine 76
• Crème à l’aspérule 64
• Criste-marine à la crétoise 76
• Croquants d’amélanche 97
• Délice d’hémérocalle 55
• Faînes grillées 105
• Filets de consoude 43
• Flan de mélisse 84
• Fondue végétale (mauve) 41
• Gelée d’argousier 78
• Gelée de sureau rouge 93
• Gnocchis verts (chénopode bon-henri) 66
• « Gomasio » de coquelicot 107
• Gougères farcies (chénopode blanc) 40
• Gratin de bistorte 69
• Huile parfumée (romarin, sarriette) 84
• Inflorescences de berce 70
• Jets de houblon à l’italienne 32
• Légumes velours (bourse-à-pasteur, primevère) 17
• Liqueur de cornouilles 95
• Miel de pissenlit 57
•Nèfles meringuées 130
• Nituké de bardane 144

148
Index des recettes

• Omelette de pousses de tamier 33


• Pain de carvi (« pumpernickel ») 82
• Pain d’herbes (lamier pourpre,trèfle) 121
• Panade d’ortie 123
• Papet sauvage (tussilage) 47
• Pâté de glands 104
• Pizza sauvage (cynorrhodons) -T 136
• Salicorne au vinaigre 74
• Sauces pour jeunes pousses (fragon,fougère aigle, épilobe) 34
• Sauces à salade (stellaire, asperge) 16/31
• Sel aromatique (thym, romarin,hysope) 84
• Sirop d’argousier 77
• Sirop de bourgeons de « sapin » (sapin, épicéa, cèdre, mélèze) 60
• Soufflé d’ortie 123
• Soupe de chalet (chénopode bon-henri) 66
• Soupe crue (stellaire) 120
• Soupe de cynorrhodons 136
• Soupe de violette 19
• Soupe d’ortie 123
• Tarte aux fleurs de sureau (sureau noir) 92
• Tarte des montagnes (rumex alpin) 68
• Tarte sucrée au plantain et à l’ortie 118
• Tarte soufflée d’arroche 75
• Tarte de glands 104
• Tiges d’angélique confite 45
• Tourte au panais 143
• Vinaigre de prunelles 94
• Violette parmentier 118

149
INDEX DES NOMS FRANÇAIS
L es chiffres indiqués dans cet index perm ettent de repérer la page.

A Cèdre de l’Atlas................................60
Acacia.................................................56 Cèdre de l’Himalaya........................ 60
Ail des ours....................................... 83 Cèdre du Liban.................................60
Ail sauvage........................................ 83 Cèpe.................................................112
Airelle des marais.............................98 Cerfeuil musqué................................83
Airelle rouge...................................... 98 Châtaignier.......................................102
Alisier torminal................................134 Chêne...............................................104
Alliaire................................................83 Chénopode blanc..............................40
Allouchier.........................................134 Chénopode bon-henri......................66
Amaranthe.......................................108 Chicorée.............................................25
Amélanchier......................................97 Chondrille..........................................24
Angélique.......................................... 45 Ciboulette..........................;...............83
Arbousier............................................98 Cirse potager..................................... 26
Argousier............................................77 Clavaire chou-fleur.........................112
Armoise..............................................35 Consoude.......................................... 43
Arroche halimus................................75 Coprin chevelu................................112
Arroche hastée..................................75 Coquelicot.................................29-107
Asperge à feuilles aigües..................31 Cormier............................................131
Asperge officinale..............................31 Cornouiller mâle...............................95
Aspérule odorante.............................64 Coulemelle.......................................112
Cresson........................................ 48-83
B Criste-marine....................................76
Barbarée.............................................28 Cynorrhodon................................... 136
Bardane............................................143 E
Berce.............................................83-70
Bistorte...............................................69 Églantier...........................................136
Bolet................................................. 112 Égopode.............................................46
Bourrache...........................................52 Épicéa................................................60
Bourse-à-pasteur...............................17 Épilobe...............................................20
Épilobe en épi...................................34
C Épine-vinette.....................................98
Canneberge....................................... 99 Érable champêtre..............................63
Carotte sauvage.........................140-83 Érable plane...................................... 63
Carvi..................................................83 Érable sycomore................................63
150
Index des noms français

F M
Fenouil...................................... 83 Mâche............................................... 21
Ficaire................................................20 Mauve alcée......................................41
Fougère aigle.....................................34 Mauve à feuilles rondes...................41
Fragon épineux.................................34 Mauve à petites fleurs......................41
Mauve musquée................................41
G Mauve sylvestre................................41
Genévrier.......................................... 83 Mélèze................................................60
Girolle..............................................112 Mélisse...............................................81
Glycine...............................................56 Menthe à feuilles rondes..................81
Golmotte..........................................112 Menthe aquatique............................ 81
Guimauve.................... 77 Menthe des champs......................... 81
Menthe pouliot.................................81
H Menthe sylvestre...............................81
Halimione.......................................... 75 Morille..............................................112
Hémérocalle......................................55 Mousseron d’automne...................112
Herbe-aux-femmes-battues............. 33 Mousseron de printemps...............112
Hêtre.......................................... 63-105 Moutarde blanche.......................53-83
Houblon.............................................32 Moutarde noire........................... 53-83
Houx (petit), voir Fragon..................3 Myrrhe odorante...............................83
Hysope...............................................81 Myrtille...............................................98
I N
If......................................................... 62 Néflier..............................................130
Immortelle......................................... 83 Noisetier....................... 106
L O
Lactaire délicieux............................112 Onagre bisannuelle........................... 28
Laiteron âpre.....................................26 Origan................................................81
Laiteron maraîcher........................... 26 Oronge vraie................................... 112
Laiteron des champs........................ 26 Ortie dioïque................................... 123
Laitue vivace.....................................24 Oseille................................................48
Lamier blanc................................... 121
Lamier pourpre...............................121 P
Lamier tacheté................................121 Palomet............................................112
Lampsane.......................................... 24 Panais sauvage.......................... 83-143
Lavande aspic...................................81 Pâquerette........................................121
Lavande stcechade............................ 81 Passerage drave.................................53
Lavande vraie....................................81 Pavot................................................107
Lépiote déguenillée........................ 112 Petite ortie........................................124

151
Index des noms français

Petit-gris...........................................112 Sanguin............................................112
Picridie...............................................23 Santoline........................................... 83
Pied bleu..........................................112 Sapin..................................................60
Pied de mouton...............................112 Sauge..................................................81
Pimprenelle (grande).......................83 Serpolet..............................................81
Pimprenelle (petite)......................... 83 Sorbier des oiseleurs...................... 133
Pissenlit........................................ 23-57 Sorbier domestique.........................131
Plantain (grand)..............................118 Sparassis crépu...............................112
Plantain lancéolé.............................118 Stellaire.......................................15-120
Plantain moyen............................. 118 Sureau noir..................................56-92
Pleurote............................................112 Sureau rouge.....................................93
Poirasse..... ......................................134
Poirier à feuilles d’amandier......... 134 T
Poirier à feuilles de sauge..............134 Tamier...............................................33
Poirier sauvage................................134 Tanaisie..............................................83
Pourpier...........................................108 Thym .................................................81
Primevère élevée...............................17 Tilleul à grandes fleurs....................63
Primevère officinale..........................17 Tilleul à petites fleurs......................63
Primevère vulgaire............................17 Tilleul intermédiaire......................... 63
Prunellier................. Trèfle blanc...............................52-121
94
Psyllium...........................................118 Trèfle rouge...............................52-121
Tricholomeéquestre........................112
R Trompette de la mort.................... 112
Radis cultivé...................................... 54 Tussilage........................................... 47
Radis ravenelle..................................54
Renouée vivipare...............................69 V
Rhubarbe des moines...................... 67 Véronique beccabunga.....................48
Robinier.............................................56 Vesse-de-loup..................................112
Romarin............................................ 81 Vesse-de-loup géante..................... 112
Rose trémière....................................52 Violette.......................................19-119
Rosé des prés.................................. 112 Violette blanche............................. 20
Rumex alpin......................................68 Violette des collines.......................... 20
Russule charbonnière..................... 112 Violette odorante...............................20
Violette remarquable........................ 20
S
Salicorne............................................74
Salsifis......................... 52

152
INDEX DES NOMS LATINS
Les chiffres indiqués dans cet index perm ettent de repérer la page.

A C
Abies alba.......................................... 60 Calocybe gambosa..........................112
Acer campestre.................................63 Calvatia gigantea.............................112
Acer platanoides................................63 Cantharellus cibarius...................... 112
Acer pseudo-platanus......................63 Capsella bursa-pastoris....................17
Aegopodium podagraria................. 46 Cardaria draba..................................53
Agaricus campestris....................... 112 Carum carvi......................................83
Alcea rosea........................................52 Castanea sativa................................102
Alliara petiolata.................................83 Cedrus atlantica................................60
Allium schoenoprasum....................83 Cedrus deodara................................ 60
Allium ursinum.................................83 Cedrus libani.....................................60
Allium spp........................................83 Chenopodium album.......................40
Althaea officinalis............................. 77 Chenop odium bonus-henricus.... . 66
Amanita rubescens..........................112 Chondrilla juncea..................... ;......24
Amanita caesarea............................112 Cichorium intybus........................... 25
Amelanchier ovalis........................... 97 Cirsium oleraceum........................... 26
Angelica sylvestris............................45 Clavaria botrytis..............................112
Arbutus unedo..................................98 Coprinus comatus...........................112
Arctium lappa.................................144 Cornus mas.......................................95
Artemisia vulgaris............................ 35 Corylus avellana..............................106
Asparagus acutifolius.......................31 Craterellus cornucopioides.............112
Asparagus officinalis........................ 31 Crithmum maritimum.....................76
Asperula odorata...............................64 Cynorrhodon..................................... 14
Atriplex halimus................... 75 D
Atriplex hastata.................................75 Daucus carota........................... 83-140
B E
Barbarea verna..................................29 Epilobium angustifolium..................34
Barbarea vulgaris............................. 29 Epilobium roseum, Epilobium
Berberis vulgaris................................98 tetragonum........................................ 22
Boletus sp p ..................................... 112
Borago officinalis..............................52 F
Bovista spp.......................................112 Fagus silvatica........................... 63-105
Brassica nigra....................................53 Ficaria ranunculoides.......................20
153
Index des noms latins .

Foeniculum vulgare......................... 83 Mentha pulegium.............................81


Mespilus germanica........................130
H Morchella spp.................................112
Halimione portulacoides..................75 Myrrhis odorata................................83
Helichrysum stoecha........................83
Hemerocallis fuiv a ........................... 55 N
Heracleum sphondylium..................70 Nasturtium officinale..................48-83
Hippophaë rhammoides...................77
Humulus lupulus..............................32 O
Hydnum repandum....................... 112 Oenothera biennis............................ 28
Hyssopus offïcinalis......................... 81 Origanum vulgare............................ 81
J P
Juniperus communis........................ 83 Papaver rhoeas......................... 29-107
Papaver somniferum...................... 107
L Pastinaca sativa......................... 89-143
Lactarius deliciosus.........................112 Paxillus involutus..............................18
Lactarius sanguifluus..................... 112 Picea abies..........................................60
Lactuca perennis...............................24 Plantago lanceolata..........................118
Lamium album...............................121 Plantago major................................118
Lamium maculatum....................... 121 Plantago media................................118
Lamium purpureum...................... 121 Plantago psyllium............................118
Lapsana communis.......................... 24 Pleurotus ostreatus....,.................... 112
Larix europaea..................................60 Polygonum bistorta.......................... 69
Lavandula angustifolia.....................81 Primula elatior................................... 17
Lavandula latifolia............................ 81 Primula offïcinalis.............................17
Lavandula stoechas.......................... 81 Primula veris.....................................17
Lycoperdon spp..............................112 Prunus spinosa..................................94
Pteridium aquilinum........................ 34
M Pyrus salvifolia................................134
Mal va alcea....................................... 41 Pyrus communis.............................134
Malva moschata................................41 Pyrus amygdaliformis.................... 134
Malva parviflora................................41 Pyrus cordata..................................134
Malva pusilla.....................................41
Malva sylvestris.................................41 Q
Marasmius oreades.........................112 Quercus spp.................................... 104
Melissa offïcinalis..............................81 R
Mentha rotundifolia......................... 81
Mentha aquatica...............................81 Ramaria botrytis................................17
Mentha arvensis................................81 Raphanus raphanistrum...................54
Mentha sylvestris..............................81 Raphanus sativus..............................54

154
Index des noms latins

Reichardia picroides......................... 23 Taraxacum officinale..................23-57


Rhodopaxillus nudus ......................112 Taxus baccata...................................62
Robinia pseudacacia........................ 56 Thymus serpyllum........................... 81
Rosa canina..................................... 136 Thymus vulgaris...............................81
Rosmarinus officinalis......................81 Tilia cordata......................................63
Rumex alpinus..................................68 Tilia platyphyllos............................. 63
Rumex acetosa..................................48 Tilia x vulgaris..................................63
Ruscus aculeatus...............................34 Tragopogon pratensis......................52
Russula virescens............................112 Tricholoma equestre...................... 112
Russula spp..................................... 112 Tricholoma georgii........................ 112
Russula cyanoxantha..................... 112 Tricholoma terreum....................... 112
Trifolium pratense....................52-121
S Trifolium repens....................... 52-121
Salicornia europaea.......................... 74 Tussilago farfara...............................47
Salvia officinalis................................81
Sambucus nigra.........................56, 92 U
Sambucus racemosa......................... 93 Urtica dioica.................................... 123
Sanguisorba officinalis.....................83 Urtica urens.................................... 123
Sanguisorba minor........................... 83
Santolina chamaecyparissus............ 83 V
Sinapis alba..................................53-83 Vaccinium myrtillus......................... 98
Sonchus arvensis...............................26 Vaccinium oxycoccum.....................98
Sonchus asper...................................26 Vaccinium uliginosum..................... 10
Sonchus oleraceus....;......................25 Vaccinium vitis-idaea.............. 98
Sorbus aria...................................... 134 Valerianella eriocarpa.......................21
Sorbus aucuparia............................133 Valerianella olitoria.......................... 21
Sorbus domestica............................131 Veronica beccabunga.......................48
Sorbus torminalis............................134 Viola alba...........................................19
Sparassis crispa...............................112 Viola collina...................................... 19
Stellaria media.................................120 Viola mirabilis................................... 19
Symphytum officinale......................43 Viola odorata..................................... 19
Viola spp....................................19-119
T
Tamus communis............................ 33 W
Tanacetum vulgare.......................... 83 Wisteria sinensis................................56

155
Aux éditions Sang de la terre
Collection « Les dossiers de l'écologie »
Agriculture européenne et environnement, F. Roelants du Vivier
La Nature en crise, Philippe Lebreton
Santé de lhomme et environnement, collectif
Les Vaisseaux du poison, F. Roelants du Vivier
Le Ciel déchiré, John Gribbin
Le Bonheur de la pêche, Jean-Marcel Dubos
Demain la chasse ?, Jean-Louis Bouldoire
Le sol, la terre et les champs, Claude Bourguignon
La Loire en sursis, collectif
Sauver la ville, François Lapoix
Homo Plasticus, Gérard Bertolini
Désastre écologique en URSS, Mikhaïl Lemechev
Guerres, crimes écologiques, Nicolas Skrotzky
Sauver nos régions, Bernard Charbonneau
Collection « L a pensée écologique »
Le Miracle dêtre, Robert Hainard
Robert Hainard, peintre et philosophe de la nature, Roland de Miller
Henry Thoreau, léveillé du Nouveau Monde, Gilles Farcct
La Peur de la nature, François Terrasson
Toucher terre, Henri Pourrat
La Porte du verger, Henri Pourrat
Le Blé de Noël, Henri Pourrat
Pastorale, C.F. Ramuz
La Terre et les hommes dans les lettres gréco-latines, Pierre Savinel
Les Pionniers de lécologie, Donald Worster
Beaux livres
Le Paysage français, Georges Plaisance
Images de jardins, collectif
Le Cochon, histoire, symbolique et cuisine, collectif
La Cuisine à quatre pattes, Bernard Devaux
France sauvage, François Merlet
La Pomme, histoire, symbolique et cuisine, collectif

Catalogue sur simple demande à :


Editions Sang de la terre
30, rue Chaptal - 75009 Paris
Maquette et réalisation technique : Garamond Studio
Imprimé chez Graphitype pour le compte
des Editions Sang de la terre
Dépôt légal : juillet 1992
Numéro d’édition : 05 92 060
Numéro d’impression : 1593
A
imeriez-vous enrichir votre vie de mille saveurs nouvelles?
Auriez-vous envie de mieux vivre grâce à une alimentation
pleine de force et de santé? Et s'il était possible de mieux profiter
de vos sorties en pleine nature, qu’en penseriez-vous?
La solution est là ,à votre porte. Partout poussent des plantes
sauvages qui peuvent vous nourrir agréablement, sainement...
et gratuitement. Nos grands-parents les connaissaient bien, mais
nous les avons oubliées, sans vraie raison. Dommage, car nous
nous privons ainsi d'un grand nombre de joies, que ce soit le
plaisir de la cueillette ou celui de la dégustation de ces bons
végétaux. Il y a autour de nous tout un monde nouveau,
passionnant, à découvrir.

A
u fil des pages de ce livre, l'auteur vous invite
à l'accompagner dans quinze promenades à travers
des paysages variés. Vous y découvrirez entre autres les salades
printanières, les légumes sauvages de l'été, les nourritures
des bois, les bords de mer comestibles, les aromates sauvages,
les fruits des gelés, etc. Et grâce aux nombreuses recettes
données pour chaque promenade, vous apprendrez facilement
à préparer votre récolte. C'est une étonnante gastronomie qui
s'offre à vous: fougères farcies au chénopode, filets de consoude
au goût de sole, anneau de coquelicot, fondue végétale, miel
de pissenlit ou sirop d'argousier... Des noms chantants pour
des expériences que vos papilles n'oublieront pas!

François Couplan est ethno­


botaniste. Il a parcouru le monde
à la recherche des plantes
sauvages, il a acquis une longue
expérience de la cueillette en
pleine nature et de la préparation
culin aire des plantes sur
lesquelles il a écrit de nombreux
articles et livres.

ISBN 286985 0557


C O U V E R T U R E VI 92
9 "782869"850552" ^ELL0>T\T0\E Prix: 140 F. T T C

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