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Mémoire de fin de formation

à l’Institut Supérieur de la Magistrature

La liquidation judiciaire aspect


pratique

Réalisé par : MOHAMMED GHMID

PROMOTION : 41

Sous la direction de :
Maitre SAMIR STAOUI: Juge-Commissaire auprès du tribunal
de Commerce de FES

Années de formation : 2015/2017


REMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à remercier Dieu qui m’a donné la force et la patience pour
accomplir ce modeste travail.

J’’exprime mes remerciements à toutes les personnes qui ont contribué à


l’élaboration de ce travail.

Je tiens à remercier Maitre SAMIR STAOUI juge-commissaire auprès du tribunal de


commerce de FES pour sa bienveillance et ses louables efforts d’encadrement et
d’orientation, ainsi pour sa forte collaboration et sa disponibilité continue tout au long de
la réalisation de ce travail.

Je voudrais également exprimer mes remerciements sincères à tous nos maitres


formateurs de l’institut supérieur de la magistrature, pour la qualité de la formation qu’ils
nous ont prodiguée ainsi pour nous avoir faire bénéficier de leurs conseils avisés.

Que toutes personnes ressources qui ont accepté de nous accueillir et de nous
accompagner tout au long de cette mission trouvent ici l’expression de notre haute
gratitude et de nos sincères remerciements.
Dédicace

Je dédie ce travail à :

A mes très chers parents que Dieu les glorifient, à qui je dois en reconnaissance de
leurs immenses sacrifices pour mon éducation, de l’affection, de la sympathie et de la
tendresse dont ils ont rempli ma vie, qu’ils trouvent ici le témoignage de mon amour
et gratitude.

A mes frères.
A toute ma famille, cousins et amis (es) pour leur énorme soutien et encouragement.
A tous ceux et celles qui comptent pour moi et pour qui je compte
Liste des abréviations :
C.C Code de commerce

C.P.C Code de procédure civile

C.C.M Code de commerce marocain

C.C.F Code de commerce français

C.A.C Cour d’appel de commerce

D.O.C Dahir des Obligations et contrats

R.J.M Revue juridique marocaine

Ann. Annales

Act.proc.coll. Actualité des procédures collectives

Bull. inf. C. Cass. Bulletin d'information de la cour de cassation

B.0 Bulletin Officiel du Maroc

Bull. Joly Bulletin mensuel d'information juridique et fiscale des Sociétés

BODACC Bulletin Officiel des annonces civiles et commerciales

BRDA Bulletin rapide de droit des affaires, Francis Lefebvre

CA Cour d'appel

Cah. dr. entr. Cahiers du droit de l'entreprise

Cass Com Cour de cassation chambre commerciale

CC Code de commerce

Cf. Confer

CPC Code de procédure civile

C.S Cour suprême

D Dalloz Sirey (Recueil)

D.A Dalloz affaires

D.O.0 Dahir portant code des obligations et contrats

G.P Gazette du palais


G.T.M Gazette des tribunaux du Maroc

J.C.P Jurisclasseur périodique (la semaine juridique)

J.0 Journal officiel de France

Juris-Class Juris-Classeur, suivi de la spécialité : Civil, Commercial etc

Juris. C.S Jurisprudence de la Cour Suprême

J.C.P. éd. G ou E Juris-Classeur périodique (Edition générale, Entreprise)

Juris-Data Juris-Data (Banques de données juridiques)

Quot. Jurid Quotidien Juridique

P.A Petites affiches

R.A.C.A.R Recueil des arrêts de la Cour d'appel de Rabat

R.J.P.E.M Revue juridique politique et économique du Maroc

RJDA Revue de Jurisprudence de droit des affaires

R.J.0 Revue de jurisprudence commerciale

R.M.D Revue marocaine de droit

R.E.M.A.D.A.E Revue marocaine de droit des affaires et des entreprises

R.E.M.A.L.D Revue Marocaine d'Administration Locale et de Développement

R.M.D.E.D Revue Marocaine de Droit et d'Economie du Développement

Rev. Banque Revue Banque

Rev. Jurisp de la C.S Revue de jurisprudence de la cour suprême

RTD.civ Revue trimestrielle de droit civil

RTD.com Revue trimestrielle de droit commercial

Rev. Proc. colt Revue des procédures collectives

Rev. sociétés Revue des sociétés

Rev. Trib. com Revue des tribunaux de commerce

USAID Agence Américaine pour le Développement International


Introduction générale

Partie 1 : les modalités de saisine du tribunal compétent et les conditions


d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.
Chapitre 1 : LES MODALITES D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE.
Section 1 : l’ouverture sur déclaration du débiteur ou sur assignation d’un créancier
Section 2 : l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire d’office ou sur requête du
ministère public.

Chapitre 2 : LES CONDITIONS D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE.


Section 1 : Une délimitation très étroite quant à la qualité du demandeur
Section 2 : la cessation de paiements et la jurisprudence marocaine.
Section 3 : l’accouplement de la cessation de paiements avec la situation irrémédiablement
compromise du debiteur

Partie 2 : Le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire et ses effets sur le


débiteur et les créanciers
Chapitre 1 : la solution de la liquidation de l’entreprise

Section 1 : la nature du jugement de liquidation


Section 2 : la réalisation de la liquidation
Section 3 La clôture de la liquidation

Chapitre 2 : Les effets de la liquidation judiciaire

Section 1 : les effets très lourds à l’égard du débiteur


Section 2 : les effets néfastes de la liquidation à l’égard des créanciers

Conclusion générale
Introduction générale :

1
Introduction générale

D’origine doctrinale, l’expression « droit des entreprises en difficulté »


est récente. Elle est utilisée pour désigner « les procédures collectives »,
autrefois appelées « faillites ». Cette évolution terminologique n’est pas
seulement formelle. Elle traduit les transformations profondes d’une matière qui,
jadis orientée vers la satisfaction des seuls créanciers du commerçant et teintée
d’un fort esprit répressif, est aujourd’hui constituée d’un ensemble de règles qui
vise aussi et surtout à prévenir et à traiter les défaillances de l’entreprise.

La philosophie du nouveau droit est centrée sur la notion d’entreprise «


lieu de création de richesse et d’emploi »1, entité économique et sociale, dans
laquelle sont prises les décisions où se nouent les différents liens (fournisseurs,
clients, banquier, trésor, etc.) et qui doit être redressée lorsqu’elle est
économiquement viable. Plus qu’un simple mode de règlement des conflits de
droit privé, ce droit semble désormais s’acheminer vers une orientation
économique de la faillite, prenant en compte les impératifs économiques du
redressement ; « il intègre désormais le domaine de la raison d’Etat »2.
De cette nouvelle conception des procédures collectives résulte une
transformation du vocabulaire ; la loi ne parle plus de « faillite », mais de
redressement judiciaire ou de liquidation de l’entreprise, signe précurseur d’une
chance de survie. Selon l’expression de M.Paillusseau3 : « la loi des faillites est
morte vive le droit des entreprises en difficulté » !

1
M.Mernissi, rapport introductif colloque sur le projet de réforme de la société anonyme : implications et
enjeux. RMDED , n°37
2
Erice TEYNIER, « la règle de droit de la faillite et le sort économique des entreprises défaillantes », in RTD.com
1985, n°1 p.57.
33
J Paillusseau, du droit de la faillite au droit des entreprises en difficulté, mélanges houin, 1985, P 109 et S.

2
Le Maroc n'est pas resté indifférent à l'égard de l'évolution législative de
l'ex-métropole, et dans le monde en général, en la matière. En se rendant compte
de la caducité des dispositions du code du commerce de 1913 inspiré du code
napoléonien de 1807 ; il est devenu impératif, pour le législateur national, de
mettre en place un arsenal juridique pour accompagner la grande mutation qui
s’imposait à la société commerciale et industrielle.

Par ailleurs, l'analyse historique des lois sur les procédures collectives ou
la faillite au Maroc démontre une progression importante dans la conception très
divergente du droit d’entreprise en difficulté. Ce droit à vue au début, comme
objectif la punition des commerçants défaillants pour s'intéresser dans une
période suivante aux créanciers au déterminant du débiteur et finir à la fin par
adopter le principe de sauvetage de l’entreprise et la préservation des emplois.

Par conséquent, durant les années quatre vingt dix le Maroc a entrepris
une modernisation de son droit commercial et ce aussi bien sur le plan légal que
Juridictionnel.

Tout d’abord, dans ce domaine précis, le législateur marocain a


commencé dans les années quatre vingt dix par la promulgation des lois des
différentes formes de sociétés commerciales4. Tout en incitant les commerçants
et les entreprises de l’époque, à caractère familial, à se transformer en sociétés
commerciales. Puis il a fait bénéficier les entreprises marocaines d’un régime
comparable à celui apporté par les textes français du 1 er Mai 1984et du 25
janvier 1996, formant code de commerce marocain.

4
Loi N°17-95 relative aux société anonymes et loi N° 5-96 sur la société en non collectif, la société en
commandite simple, la société en commandite simple , la société à responsabilité limitée et la société en
participation . B.O, n°4422 du 17 Octobre 1996.
3
Ainsi, à travers les dispositions du livre V du code de commerce 5 du 1
er Aout 1996 (CC), la finalité retenue par le législateur est la préservation des
entreprises en difficultés. Pour cela, il a instauré la promotion et
l’encouragement de la prévention .Par l’adoption de cette loi, le Maroc s’est
aligné sur la plupart des législations des procédures collectives en adoptant les
mêmes objectifs et espérant les mêmes finalités.

Il est très important de préciser que la majorité des pays, même les plus
récalcitrants tel que la Grande –Bretagne, se sont inspirés du droit américain. En
effet, le droit britannique de la faillite, traditionnellement très favorable aux
créanciers et donc aux antipodes du droit américain, a été réformé à plusieurs
reprises depuis 1986, afin de faciliter le redressement des entreprises viables.

En définitif, toutes les réformes des différents pays ont visé à intégrer
des éléments caractéristiques du chapitre 11 américain.

Le Maroc, à l’instar de ces pays et pour accompagner ces


bouleversements, a connu un ensemble de réformes législatives qui ont touché
des domaines nombreux et diversifiés. On peut considérer la réforme de
l’économie et des affaires comme étant la plus importante5.

La loi marocaine du traitement des difficultés des entreprises témoignent


d'un changement sans précédent dans le rôle de la justice et ses pouvoirs dans le
domaine des procédures collectives.
Ces pouvoirs qui ne se limitent pas seulement à trancher ou se prononcer
sur les litiges classiques ou traditionnels entre les parties, mais dépassent le
cadre restreint pour apporter des solutions qui protègent naturellement les droits

5
Driss.Benjaloun « appréciation critique de l'application du livre cinq du code du commerce » 2015,p8

4
et les intérêts spécifiques des parties en même temps qu'elles doivent protéger
les intérêts économiques générales6. Ces pouvoirs vont s'étendre de plus en plus
que le sort de l'entreprise devient menacer ou incertain.

Le législateur marocain à adopter la nouvelle loi des entreprises en


difficulté suite à sa conviction que le système de faillite était en crise7et il était
dépassé, c’est pour cette raison qu'une révision de ses principes s'impose. Il était
temps d'abandonner son caractère punitif et expéditif et de procéder
impérativement à une refonte des fondements que le législateur avait érigé.

Le système des difficultés de l'entreprise se distingue du système de la


faillite par son caractère de prévention économique. Sa tâche principale et la
protection de l'entreprise, ou tout au moins la tentation de la sauver si elle
connait déjà des difficultés financières ou économiques grâce à une panoplie de
solutions accordées aux juges avec un pouvoir d'appréciation légale dans le
choix de l’issue appropriée. Toutefois, il a été reproché aux auteurs de la loi n°
15- 95 relative au traitement des entreprises en difficulté, d'avoir cloné la loi
française avec une décennie de décalage dans la promulgation. Pourtant en
France, pendant cette période, cette loi a fait couler beaucoup d'encre et à
montrer à travers la pratique plusieurs faiblesses8.

Le code de commerce marocain, venu dans un contexte de crise et de


récession économique profonde, a constitué une mesure ou une tentative, aussi
bien juridique que politique, destinée à soutenir les entreprises marocaines et à
influer positivement sur l’évolution du marché de travail ou, du moins, à ralentir
6
Abdlhmid Akhrif, « le nouveau rôle de la justice dans le droit des entreprise en difficultés » thèse d’Etat
2000,20
7
A.Squali « droit et pratiques en matière de faillite de liquidation judiciaire des entreprises » édition info-
print.1995
8
A.Squali « la prévention des difficultés de l'entreprise dans le nouveau droit marocain des procédures
collectives ». Colloque organisé par le département de droit privé de la faculté de droit et le barreau
Marrakech.les 30 et 31 octobre 1998.
5
la montée croissante du chômage. Il constitue ainsi une réforme profonde de
l’ancien droit de la faillite, à vocation répressive, qui présentait des insuffisances
tenant essentiellement à son caractère archaïque, ne pouvant faire face aux
problèmes crées par la récession économique. Caractérisé par son indifférence
quant au sauvetage des entreprises, il consistait en une procédure d’apurement
du passif qui aboutissait à la liquidation des bien du failli, de sorte qu’il existait
un grand décalage entre la dégradation de la situation économique et les textes
vieillis censés y remédier. Cet archaïsme a rendu impérative la refonte du droit
de la faillite afin de répondre aux besoins urgents d’assainir le monde des
affaires et de garantir ainsi une sécurité aux investisseurs tant nationaux
qu’étrangers.

Toutefois, l’expérience de la réforme de 1996 montre que le code de


commerce a établi un droit des procédures qui n’a pas démontré son efficacité.
Certes, le droit de traitement des difficultés de l’entreprise au Maroc a acquis
une dimension symptomatique. Mais, il ne masque pas les impasses d’un droit
de l’échec n’enrayant pas de manière significative le nombre de liquidations
judiciaires9. Les résultats de l’enquête obtenus au cours des années qui ont suivi
l’entrée en vigueur du livre V de la loi 15-95 relèvent une incapacité
manifestement structurelle à organiser un redressement efficace des entreprises
en difficultés : selon les différentes statistiques disponibles: sur les différentes
affaires de procédures collectives que comptent les tribunaux, plus de 95%
concernent des sociétés en redressement ou en liquidation, très rarement en
prévention. Pire, Neuf entreprises sur dix qui entament une procédure de
redressement finissent par une liquidation judiciaire. Ainsi, les statistiques en
2013 ont été alarmantes. Au 1er semestre, plus de 1.990 entreprises marocaines
ont été enregistrées comme défaillantes. Cette accélération du nombre de
9
Les enquêtes réalisées montrent qu’en pratique la majorité des dépôts de bilan au Maroc se soldent par une
liquidation judiciaire. A cet égard, voir le rapport sur l’observation des normes et codes (RONC) Maroc-
insolvabilité et droit des créanciers disponible au : www.wds.worldbank.org
6
défaillances constatées depuis 2011 est aujourd’hui d’autant plus inquiétante que
la tendance a été poursuivie en 2014 qui a enregistré une augmentation du
nombre d’entreprises défaillantes de plus de 10%, contre 8% en 2013. En 2015,
leur nombre a continué à augmenter de près de 15%10.
Les raisons de cet échec sont multiples. Tout d’abord, l’inadaptation de
la législation à la réalité des entreprises marocaines qui sont en très bonne partie
de petites entreprises qui, souvent, ne tiennent pas leur comptabilité d’une
manière régulière. Comme l’a bien dit un président d’un Tribunal de Commerce,
les plans de redressement basés sur des documents comptables non fiables ne
peuvent pas aboutir à un bon résultat. D’un autre côté, il a été bien souligné que
les entreprises recourent tardivement au mécanisme de traitement des difficultés,
ce qui réduit les chances de réussite des plans de sauvetage.
Comme on l’a bien signalé la réforme de 1996 avait comme objectifs la
préservation de l’entreprise, le maintien de l’emploi et a relégué en troisième
lieu l’apurement du passif .La liquidation est le constat d’un échec .L’entreprise
n’a aucun avenir. Deux des objectifs de la procédure collective ne seront pas
atteints : l’entreprise disparaîtra et l’emploi ne sera pas sauvegardé .Le troisième
ne le sera que partiellement : le passif sera apuré, mais habituellement dans des
conditions peu satisfaisantes, les créanciers ne touchant qu’une faible part de ce
qui leur est dû, surtout s’ils sont de simples chirographaires.

En général la liquidation est prononcée par un jugement rendu à l’issue


de la période d’observation .Elle peut toutefois être décidée dés le jugement
d’ouverture lorsque l’entreprise a cessé toute activité ou lorsque, dés ce
moments, le redressement est manifestement impossible.

L’intérêt du sujet résulte donc de ce taux alarmant de la liquidation


judiciaire qui constitue une catastrophe économique et sociale vu tous les effets
néfastes qu’elle pourra engendrer allant de la fermeture de l’établissement ,la

10
Statistiques du Cabinet inforisk
7
perte des emplois et des droits des créanciers même partiellement, en plus de la
contribution à l’affaiblissement de l’économie national en général en
minimisant ses chances de concurrence dans un climat international d’affaires
dur et ardu .

Par ailleurs l’objectif de notre étude consiste à répondre à la


problématique suivante :

Est-ce que les modalités de saisine des juridictions de commerce sont


favorables à l’application de la procédure de liquidation judiciaire ? Quelles sont
les conditions d’ouverture de cette procédure et comment elles sont évaluées par
notre jurisprudence ? Quelle forme prend le jugement d’ouverture de cette
procédure et qu’elles sont les effets de cette liquidation judiciaire sur le débiteur
et les créanciers ?

La réponse à cette problématique exige une analyse des textes juridiques,


ainsi que les positions du juge en la matière, tout en articulant notre étude d’une
manière plus détaillée sur le taux de réussite des mesures envisagées par les
tribunaux.

Ainsi le plan suivi sera :

Première partie : les modalités de saisine du tribunal compétent et


les conditions d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Deuxième partie : Le jugement d’ouverture de la liquidation


judiciaire et ses effets sur le débiteur et les créanciers.

8
Partie 1:

Les modalités de saisine du tribunal compétent


et les conditions d’ouverture de la procédure de
liquidation judiciaire.

9
Première partie : les modalités de saisine du tribunal compétent et les
conditions d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Il faut signaler à ce niveau que le législateur marocain à l’instar de


plusieurs législations comparées n’a pas élargie la liste des personnes pouvant
demander l’ouverture de la procédure de liquidation contre le commerçant qui a
cessé ses paiements et dont la situation est irrémédiablement compromise
malgré que la procédure revêt un caractère d’ordre public .Dans le même sens il
faut remarquer que le législateur marocain à mal cloné la loi française de 1985
puisque cette dernière permet aux salariés de déclencher la procédure ce qui est
fâcheux . Mais la loi permet au tribunal de se saisir d’office dans le cas
d’irrecevabilité de la demande pour défaut de qualité du demandeur dans la
mesure où il peut s’assurer de la réelle situation de l’entreprise.

Une fois le tribunal compétent est saisi il doit procéder à la vérification


des conditions d’ouverture da la procédure de liquidation judicaire sinon la
demande est vouée au refus.

On va dans un chapitre I aborder la question des modalités de la saisine


du tribunal ensuite on mettra l’accent dans un chapitre II sur les conditions
d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

10
CHAPITRE 1 : LES MODALITES D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION
JUDICIAIRE.

La procédure judiciaire y compris la procédure de liquidation judiciaire


dans la loi marocaine de 1996 est très réglementée .La loi a bien défini les
modalités de l’ouverture de la procédure.

Une fois le tribunal est saisi, il doit procéder à la vérification des


conditions de forme avant de prononcer le jugement d’ouverture.

Les articles 560 et 561 du code de commerce définissent les conditions


de forme pour l’ouverture de la procédure, alors que les articles 561 et 593 du
CC les conditions de la saisine du tribunal.

Selon les dispositions de l’Ar 561 du CC, le chef d’entreprise doit


demander l’ouverture d’une procédure de traitement alors que l’Ar 563 du CC
dispose que la procédure peut être ouverte sur l’assignation d’un créancier .ces
deux modes de saisine vont être traités dans une (section1) .Et selon l’alinéa 2
du même article, le tribunal peut se saisir d’office ou sur requête du ministère
public (section 2).

11
Section 1 : l’ouverture sur déclaration du débiteur ou sur assignation d’un
créancier :

Selon les statistiques des différents tribunaux de commerce du Royaume,


La majorité des demandes d’ouverture des procédures collectives se font à
l’initiative soit du débiteur (§1) soit du créancier (§2).

§1 : L’ouverture sur déclaration du débiteur

L’ouverture de la procédure du traitement doit être demandée par le


débiteur en vertu de l’article 561 du code de commerce qui dispose « le chef de
l’entreprise doit demander l’ouverture de l’entreprise de traitement au plus tard dans les quinze
jours qui suivent la cessation des paiements » .C’est le mode normal de saisine du
tribunal .Mieux que quiconque il connaît l’état des affaires dont il assure la
direction. Lui confier le déclenchement de la procédure est tout à fait
normal .C’est à lui qu’il incombe de donner l’alerte quand il le faut et pas trop
tard .Le verbe « devoir » utilisé par le législateur ne laisse aucune équivoque,
c’est une obligation qui est mise à sa charge.

L’obligation joue en cas de cessation de paiement .Quand elle survient, il


n’est pas possible de laisser se dégrader la situation et d’admettre que naissent
des créances nouvelles dont on sait déjà qu’elles ne seront pas payées .C’est
pourquoi un délai a été donné pour le dépôt de la demande .Elle doit intervenir
dans la quinzaine de la cessation des paiements. Ce délai est très bref, comparé
au délai de 45 jours dans la loi française de 2005 .D’après Le J.C du Tr.Co de
Fès ce délai n’a jamais été respecté.

La demande d’ouverture d’une procédure de redressement ou de


liquidation judiciaire doit être déposée par le chef de l’entreprise débitrice au
greffe du tribunal de commerce dans le but d’éclaircir ce dernier. La
jurisprudence française a précisé que cette déclaration peut aussi être faite par un

12
avocat du débiteur mais dans la seule mesure où il est titulaire d’un pouvoir
spécial.

Elle doit énoncer selon les termes de l’article 562 du code de commerce
les causes de la cessation de paiement et doit être accompagnée des documents
suivants :

 -Les états de synthèse du dernier exercice comptable ;


 - l’énumération et l’évaluation de tous les biens mobiliers et
immobiliers de l’entreprise ;
 - la liste des créanciers et des débiteurs avec l’indication de leur
résidence, le montant de leurs droits ,créances et garanties à la
date de cessation de paiement ;
 - le tableau des charges.

Les documents présentés doivent être datés, signés et certifiés par le chef
de l’entreprise ; dans le cas ou l’un de ces documents ne peut être fourni ou ne
peut l’être qu’incomplètement, la demande doit contenir l’indication des motifs
qui empêchent cette production. Le greffier atteste de la réception du document.

Dans le cas où le débiteur ne fournit pas les documents ci-dessus, le


tribunal peut prononcer le refus de la procédure11le débiteur encourt une
déchéance commerciale ou même une poursuite pénale12

Comme on l’a déjà signalé le débiteur selon l’article 561 du code de


commerce doit saisir le tribunal dans un délai de 15 jours de la CDP .Mais dans
la pratique la majorité voire tous les débiteurs ne respectent pas ce délai, malgré
que le législateur ait prévu la déchéance commerciale dans le cas du non respect
de ce délai 13

11
Arrêt Tr .Co.de Casablanca.n°17/2 du 21/02/2002.Non publié.
12 Art 721 CC.
13 Arts 712 et 714 CC .
13
Mais dans la jurisprudence, on relève un cas où le tribunal a appliqué
cette sanction à l’encontre du débiteur défaillant14.

Dans un autre cas d’espèce ,le tribunal a même refusé l’ouverture de le


procédure pour motif du non respect du délai de 15 jours par le débiteur chose
qui n’est pas prévu par le droit des entreprises en difficulté mais il faut signaler
qu’il s’agit d’un cas extrême car la déclaration n’a été faite qu’après un délai de
cessation de paiement de dix ans15.

Sur ce point la position des tribunaux marocains a évolué dans le temps.

Selon un juge du Tr.Co.de Fès :

« Le non respect du délai cité ci-dessus est considéré comme une faute
du responsable de l’entreprise .La sanction qui en découle est la déchéance
commerciale du dirigeant selon l’Art 714 alinéa 4.Seulement, dans la pratique,
cette sanction n’est appliquée que si la mauvaise foi est prouvée, sachant que les
dispositions légales sont générales et ne sont pas impératives »16. Alors que la
position du Tr.Co.de Meknès est :

« les premières années, le tribunal ne prononçant pas le déchéance, mais


par la suite et pour responsabiliser les chefs d’entreprise au respect de la loi ,le

14
Arrêt C.A.Co de Casablanca .n°1931/2001 du 28/09/2001.Dossier n° 201/2000/10.Le tribunal a prononcé la
déchéance commerciale du dirigeant pour motif du non respect du délai de 15 jours pour demander l’ouverture

de la procédure .Non publié .

15
Tr.Co .de Fès .Dossier commercial n°10/09/12 du 09/12/2009 .Dossier appel n ° 04/2010.Décision de la cour
d’appel n°34 du 20/06/2009 qui a confirmé la décision du Tr.Co.Non publié.

16
Un entretien avec un juge commissaire du Tr.Co.de Fès.

14
tribunal a prononcé la déchéance commerciale de certains chefs d’entreprise
qui n’ont pas respecté les délais impartis par la loi »17.

Selon les dispositions de l’Art 562 du CC. le chef d’entreprise doit


déposer au greffe les documents énumérés pour justifier la cessation des
paiements .Mais on peut se demander quelle serait la position du tribunal en cas
de manquement à cette obligation.

Devant le vide juridique, puisque la loi n’a pas prévu de sanction,


l’attitude des tribunaux n’est pas uniforme .En effet :

Selon un juge du Tr.Co.de Fès :

« Dans le cas où le chef d’entreprise ne dépose pas les documents cités


à l’Art 562, le tribunal peut chercher à les acquérir lui-même auprès de service
du registre du commerce et de se baser sur tous les moyens de preuve autorisés
l’également pour s’assurer si l’entreprise est en CDP ou non, tant que la
procédure du traitement des entreprises en difficulté est d’ordre public. A
défaut, le tribunal peut prononcer le refus de la demande pour motif d’absence
de justificatifs ».

Alors qu’un juge du Tr.Co de Meknès a affirmé que :

«Dans certains cas, où le chef de l’entreprise n’a pas déposé les


documents cités à l’article 562 ,le tribunal a prononcé le refus de l’ouverture de
la procédure puisqu’il était convaincu que l’entrepreneur cherchait juste à
profiter des dispositions de l’Art 653 pour arrêter les vois d’exécution ».

Malgré que la demande d’ouverture de la procédure de liquidation


judiciaire par le débiteur constitue une sorte d’aveu de sa part de la cessation de
ses paiements et de la situation désespéré de son entreprise ,cette affirmation et
17
: un entretien avec un juge commissaire du Tr.Co.de Meknès.

15
cette demande n’imposent pas au tribunal de le suivre dans sa demande et de
prononcer la liquidation judicaire .Il doit vérifier les déclarations du débiteur et
utiliser tous les moyens dont il se dispose pour enquêter et déceler la réelle
situation juridique et financière de l’entreprise en cause ,par exemple mandater
des experts pour vérifier les déclarations du débiteur et par voie de conséquence
rechercher si les conditions d’ouverture de la procédure de liquidation sont
réunies, car ce n’est que dans ce cas qu’il pourra faire droit à la demande
puisque ces conditions sont d’ordre public, comme ça le tribunal évite les
fausses déclarations faites par les débiteurs dont le seul but de fuir les paiements
de leurs dettes en profitant des avantages que procurent la procédure de
liquidation judiciaire ,même si l’entreprise citoyenne doit déclarer sa cessation
de paiements de bonne foi dans le but de préserver ce qui reste des droits des
créanciers chose qui est presque inexistante dans le monde des affaires.

A notre sens ,le législateur marocain a donné au tribunal de commerce la


possibilité de changer la demande du débiteur contrariant la règle procédurale
qui prévoit que le tribunal doit maintenir la demande des parties telle quelle, cela
sort clairement de la philosophie générale de la prévention des difficultés qui
consiste à préserver les entreprises comme composantes fondamentales du tissu
économique national ,puisque l’Art 576 du CC dispose que le tribunal ne se
décide sur la demande de la procédure de liquidation qu’après avoir entretenu
avec le chef d’entreprise ou l’avoir dûment convoqué ,donc le tribunal ne se
contente pas des déclarations du chef d’entreprise ,en plus le législateur lui a
donné le droit d’écouter toute personne susceptible de l’éclairer sur la réelle
situation du débiteur , comme il peut demander à toute personne de l’expertise et
de l’information sans être contraint par le secret professionnel ,et donc le
tribunal peut en jouissant des pouvoirs qui lui sont donné préciser la procédure à
suivre ,modifier la demande de liquidation en demande de redressement ,s’il a
constaté que l’entreprise n’est pas dans une situation irrémédiablement

16
compromise et que sa situation peut être sauvée malgré la déclaration contraire
du chef d’entreprise ,et quiconque ne peut se prévaloir de l’article 3 de la
procédure civile marocaine interdisant au tribunal de dépasser les demandes des
parties . Le juge doit statuer dans les limites fixées par les demandes des parties
et ne peut modifier d'office ni l'objet, ni la cause de ces demandes. Il doit statuer
toujours conformément aux lois qui régissent la matière, même si l'application
de ces lois n'est pas expressément requise par les parties.

En se référant à plusieurs décisions émanant des différents tribunaux de


commerce et spécialement à ceux du tribunal de commerce de Casablanca on
remarque que les chefs d’entreprise est dans la pluparts des cas ne précisent pas
la nature de la demande et se contentent de demander l’ouverture de la
procédure des difficultés de l’entreprise, laissant au tribunal à travers ses
recherches et ses investigations le choix entre le redressement ou la liquidation
judiciaire18 .

Mais dans d’autres cas le débiteur demande clairement l’ouverture de la


procédure de liquidation judiciaire et le tribunal le suit dans sa demande s’il
constate que les conditions sont réunies, et on peut citer dans ce sens l’arrêt de la
cour d’appel de commerce de Casablanca qui précise que :

« attendu que le tribunal est après déclenchement de la procédure, n’est


plus restreint aux demandes des parties ,et a donc le pouvoir de mettre
automatiquement sa main sur l’affaire, et statue en se basant sur les documents
du dossier et les données de l’affaire ,et que le législateur dans le cadre des
procédures collectives a pris en considération l’intérêt de l’entreprise et non
pas du chef d’entreprise puisqu’il a réglementé la procédure de cession de
l’entreprise aux tiers comme solution au redressement de cette dernière .

18
le tribunal de commerce de Casablanca ,jugement n°2014/800 rendu le 12/04/2014 dossier
n°2014/780 ,jugement non publié.
17
Et attendu donc que malgré que le chef d’entreprise a présenté une
demande qui tend à la liquidation judiciaire de l’entreprise, le tribunal ne l’a
pas suivi automatiquement dans sa demande mais il a ordonné une expertise
pour s’arrêter sur la réelle situation financière de l’entreprise et les difficultés
dont elle souffre et qu’elles sont les raisons.

Et attendu que malgré que l’expert désigné par le tribunal M …a conclu


que l’entreprise est susceptible d’être redressée après ses analyses de sa
situation financière d’un coté et que d’un autre côté l’entreprise n’a pas perdu
la confiance des créanciers en elle et que la banque qui a interjeté appel voit
que sa situation est toujours susceptible d’être redressée ,et donc c’est difficile
de dire avec certitude que sa situation est irrémédiablement compromise .

Et attendu que pour ces raisons on prononce l’infirmation du jugement


interjeté qui a prévu la liquidation judiciaire de l’entreprise intimée et de
prononcer à nouveau l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire à
son encontre »19.

La cour d’appel de commerce de Casablanca a bien précisé la notion de


la procédure du traitement et a met l’accent sur la liberté du tribunal dans le
choix du sort de l’entreprise20.

En se référant à l’Art 561 du CC on remarque que le législateur a précisé


que seul le chef d’entreprise a le pouvoir de demander l’ouverture de la
procédure et n’a pas désigné autre personne telle qu’un mandataire ou un
avocat ,et on peut se demander donc si le chef d’entreprise peut désigner un tiers

19
La cour d’appel de commerce de Casablanca ,arrêt n°2731/2000 rendu le 22/12/2000 dossier n°11/2000/2048 ,arrêt non
publié.

20
La cour d’appel de commerce de Casablanca ,arrêt n°2730/2000 rendu le 22/12/2000 dossier n°11/2000/2047 ,arrêt non
publié.

18
pour déclencher la procédure .Cette question a été posé à la justice française qui
a répondu par oui en permettant au chef d’entreprise de mandater un tiers ou un
avocat par un mandat spécial21. En effet ,l’administration française a mis un
formulaire spécial pour cette cause ,et nous pensons que pour le cas marocain
rien n’interdit au chef d’entreprise de mandater spécialement un tiers ou un
avocat pour faire cette déclaration de cessation de paiement à sa place ,surtout
que le loi réglementant la profession d’avocat prévoit la compétence générale de
l’avocat pour représenter son client devant toutes les instances .

Mais devant l’importance de la présence personnelle du chef d’entreprise


pour répondre aux questions du tribunal ce mandat ne peut qu’être limité à la
seule déclaration de la cessation de paiements22, mais malgré cela rien n’interdit
à l’avocat d’assister le chef d’entreprise devant le tribunal de commerce durant
toute la procédure, contrairement à la déclaration faite par un tiers collaborateur
du chef d’entreprise qui doit être écarté de la procédure qui a des effets
importants et dangereux sur le débiteur et les créanciers ,et vu l’importance de
cette déclaration de cessation de paiements ,une partie de la doctrine française
l’a considéré comme un mode de gestion qui rentre dans les pouvoirs originaires
du chef d’entreprise23.

Si l’entreprise individuelle ne pose pas de problème de détermination da


la personne du chef d’entreprise qui a la qualité pour déposer la déclaration de
cessation de paiements ,le tribunal doit s’assurer de la qualité du chef
d’entreprise lorsqu’il s’agit des sociétés ,car la déclaration de cessation de
21
«le débiteur peut charger un mandataire de déposer la déclaration de cessation de paiements en vertu d’un
pouvoir spécial que même les avocats doivent avoir reçue pour pouvoir procéder à cette déclaration qui ne relève
pas ,sinon,de leur mission de représentation et d’assistance »Com.19 Juillet 1988 Bull 5 n°252
22
L’alinéa une de l’Art 567 du CC prévoit que : Le tribunal statue sur l' ouverture de la procédure après avoir
entendu ou dûment appelée le chef de l' entreprise en chambre du conseil.
23
« Compte tenu du rôle économique que peut jouer une procédure de redressement judiciaire ,certains auteurs
considèrent que le dépôt du bilan est devenu un mode de gestion de l’entreprise ».Casimir et Couret ,Droit des
affaires ,Eerey,n°1820 ».

19
paiements doit être faite par l’appareil légalement compétent ,et le législateur
marocain a précisé la notion du chef d’entreprise à travers la dernière alinéa de
l’Art 545 du CC qui dispose que (On entend par chef d' entreprise au sens du
présent livre, la personne physique débitrice ou le représentant légal de la
personne morale débitrice).

Et la jurisprudence marocaine a confirmé la qualité légale du


représentant de la société à demander l’ouverture de la procédure de liquidation
judiciaire, c’est ce qui ressort d’un arrêt de la cour d’appel de commerce de
Casablanca qui a précisé que :

« Attendu que l’appelant avance que le demandeur de la liquidation n’a


pas la qualité pour le faire et viole les dispositions légales réglementant la
procédure du traitement des difficultés de l’entreprise.
Et attendu qu’en vertu des articles 561 et 563 du code de commerce
l’ouverture de la procédure du traitement peut être demandée par le chef
d’entreprise par déclaration ou par l’un des créanciers par requête introductive
d’instance, comme elle peut être ouverte d’office par le tribunal ou sur demande
du ministère public.
Et attendu que d’après les documents du dossier le défunt M.François
Luca est celui qui était le directeur général de la société et que M .Jean luca n’a
pris la commande de la direction et de la gérance de la société qu’après le
décès de son directeur général.
Et attendu qu’aucun document ne démontre que le conseil administratif
a investit M .Jean Luca de la fonction du directeur général ou que l’assemblée
générale s’est réunit pour cette cause après le décès de son directeur général. Et
en revenant aux dispositions statutaires aucune disposition ne permet le
remplacement d’office du directeur général décédé par son vice-directeur
comme c’est le cas dans notre cas de figure .Et donc le demandeur de

20
l’ouverture de la procédure n’a pas la qualité du chef d’entreprise pour le faire
et suite à ça on prononce l’annulation du jugement sujet d’appel et
l’irrecevabilité de la demande pour défaut de qualité du demandeur24.

Il faut enfin remarquer que si le législateur marocain a élargi le champ


des dirigeants responsables en cas de mise de l’entreprise sous la procédure de
la liquidation judiciaire dans un but de préservation des droits des créanciers
qu’il soit des dirigeants de droit ou de fait salariés ou non , il a par contre limités
la liste des personnes pouvant demander l’ouverture de la procédure de
liquidation judiciaire c’est ce qui ressort de l’Art 702 du code de commerce qui
dispose que : «Les dispositions du présent titre sont applicables aux dirigeants
de l'entreprise individuelle ou à forme sociale ayant fait l'objet d’une procédure
qu'ils soient de droit ou de fait, rémunérés ou non ».

En comparent cet Art avec le dernier aliéna de l’Art 545 et l’Art 561 on
remarque que seul le chef d’entreprise légalement investit de cette qualité peut
demander l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire alors que les
sanctions touchent le chef d’entreprise et le dirigeant en dépit de leurs qualités.

Il convient de préciser pour finir que, le délai doit être respecté sous
peine de sanctions. Le débiteur peut faire l’objet d’une condamnation à la faillite
personnelle .Le prononcé de la faillite personnelle est cependant facultatif et ,en
fait ,le non-respect du délai légal pour « déposer le bilan » n’est ainsi
sanctionner par les tribunaux que dans les cas les plus graves , c’est ainsi que la
cour d’appel de Casablanca a prononcé la déchéance commerciale à l’encontre

24
la cour d’appel de commerce de Casablanca arrêt n° 99/1003 ,dossier n° 11/99/783 en date du 08/07/1999 arrêt
non publié .

21
25
d’un commerçant qui a omis de déclarer sous le délai prescrit car ils ne
veulent pas dissuader le débiteur de prendre l’initiative de la procédure .

En outre, la cour de cassation a considéré que le dépôt tardif de la


déclaration de cessation des paiements était constitutive d’une faute de gestion
de nature à justifier la condamnation du dirigeant à combler l’insuffisance de
l’actif social.

Pour certains, le dépôt de bilan est un acte de gestion et la déclaration de


cessation des paiements est savamment préparée. Mais pour la majorité des
débiteurs, le dépôt du bilan est ressenti comme un échec commercial dont ils
tentent de retarder l’échéance .La plupart des tribunaux se trouve en présence
d’entreprises dont la situation est gravement obérée.

D’une manière générale, les commerçants en cessation des paiements,


répugnent à déposer leur bilan .ils retardent une formalité qui est la
reconnaissance de leur échec, et qui entraînera une intervention de la justice
dont ils mesurent mal les effets même si, le dépôt de bilan, est aussi quelquefois,
le début d’un redressement.

Cependant, leurs raisons ne sont pas toujours personnelles .Ainsi, un


grand nombre de chefs d’entreprise espèrent qu’un retour vers une situation
meilleure, évitera des licenciements 26et la prolifération du chômage, symbole de
misère et de désolation sociale.

En France, une procédure sur trois s’ouvre sur une déclaration de


cessation des paiements27.Toutefois, celle-ci intervient habituellement après le
délai légal de quinze jours.

25
arrêt du 28 sep.2000
26
TADILI ,op.cit.pp.360,361.
27
Yves GUYON,op.cit,t.2,2003,n°1131.
22
Face au peu d’enthousiasme du débiteur et au pessimisme latent des
créanciers, il faut, par conséquent, autoriser le tribunal à se saisir d’office pour
que des mesures soient prises à l’encontre des entreprises en cessation de
paiements. Toutefois, deux procédures sur trois sont ouvertes sur assignation des
paiements28.

§2 : L’ouverture sur assignation d’un créancier

La procédure peut être ouverte sur l’assignation d’un créancier, quelle


que soit la nature de sa créance29 car l’égalité entre les créanciers permet à tous,
sans distinction ,de demander le redressement ou la liquidation judiciaire .

L’article 563 du code de commerce dispose : « la procédure peut être


ouverte sur l’assignation d’un créancier quel que soit la nature de sa créance»
.Cette faculté reconnue aux créanciers de demander l’ouverture de la procédure
de liquidation s’explique par l’origine des faillites qui étaient conçues avant tout
comme des procédures collectives de paiement .En effet, les créanciers ont
intérêt à déclencher cette procédure afin d’éviter que le débiteur ne continue à
abuser de son crédit.

Peu importe la nature commerciale ou civile de la créance ,son caractère


chirographaire ou privilégié ,l’existence ou non d’une sûreté ,tout créancier peut
demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation
judiciaire à l’égard de son débiteur .

Mais, le législateur n’a apporté aucun éclaircissement sur les modalités


de l’assignation par un créancier.

28
V.Info stat justice, novembre-décembre, 1990, n° 18.
29
Art.563 du CC.Voir dans ce sens l’arrêt de la Cour Suprême du 26 septembre 2001 ,Revue de la jurisprudence
de la Cour Suprême édition numérique ,décembre 2004,n°57-58,p.360.
23
Par contre, le décret français du 27 décembre est plus explicite, car dans
son Art 7, il précise les mentions que doit comporter l’assignation :

- La nature de la créance …. même si cette disposition ne


présente aucune utilité puisque le texte stipule « quelque soit la nature de
la créance » .
- Le montant de la créance …..ce qui est absolument
nécessaire.
- Et les procédures ou voies d’exécution déjà exercées pour
obtenir le recouvrement de ces créances.

Certains tribunaux français exigent du créancier demandeur la situation


réelle et globale de l’entreprise .Ces tribunaux vont jusqu'à désigner un expert
pour cette mission aux frais du demandeur.

Ceci suppose que c’est au créancier d’apporter au tribunal, par tous les
moyens, la preuve de la CDP du débiteur. En somme, le créancier30 doit prouver
la CDP ,ce qui est normal .Cette preuve est libre du moment que la CDP est
indéniable .

Sur ce point et selon le juge commissaire du tribunal de commerce de


Fès Maître .Samir staoui :

« Dans certains jugements, le tribunal est allé dans ce sens et a demandé


au créancier d’avantage de justificatifs sur la situation de l’entreprise, afin
d’éviter d’exercer par légèreté une mauvaise pression sur l’entreprise .Le
tribunal peut aller jusqu’à procéder à une expertise aux frais du débiteur».

30
Tr.Co de Tanger .Arrêt n° 265 du 17/03/2005.La preuve de la CDP incombe au créancier s’il est
demandeur .Publié cabinet bassamat.net.

24
A notre avis, il n’est pas judicieux de demander à un créancier de fournir
les données complètes qui permettent de déterminer la situation de l’entreprise
parce que ceci est considéré comme de la dissuasion ou même demander
l’impossible ce qui peut retarder le déclenchement de la procédure avec tous les
effets néfastes qui en découlent .

Donc La demande en liquidation ne peut être traitée à la légère par le


créancier qui n’aura recours à cette procédure que lorsque les conditions
paraissent réunies et quand en particulier la cessation des paiements résulte bien
des éléments apportés.

Ainsi a été admise l’assignation faite contre une société par l’un de ses
actionnaires qui détient auprès d’elle un compte courant créditeur exigible31.

Mais, il a été décidé qu’un associé non dirigeant n’a pas qualité pour
demander l’ouverture de la procédure de traitement des difficultés de
l’entreprise32.

Par ailleurs, quand bien même la loi ne prévoit pas expressément la


possibilité pour les salariés de l’entreprise débitrice d’initier la demande
d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire .Il n’en
reste pas moins, à notre avis33 ,qu’ils puissent le faire s’ils arrivent à prouver
l’état de cessation de paiement ,notamment en cas d’arrêt de paiement des
salaires par l’entreprise34. Cependant ,il est nécessaire au créancier ,sous peine
de rejet de sa demande ,d’apporter la preuve de l’existence de sa créance
certaine exigible .En l’absence de cette preuve ,sa demande est rejetée par le
tribunal .La cour d’appel de Casablanca de commerce a jugé en ce sens par son
arrêt du 20 mars 2000 auquel elle a considéré que « le créancier doit apporter

31
(Tribunal de commerce d’Agadir ,décision du 3 Mars 2000 ,n 01/2000,dossier 07/2000,inédite. )
32
(Tribunal de commerce d’Agadir ,décision du 3 Mars 2000 ,n 01/2000,dossier 07/2000,inédite. )
33 ( Tribunal de Commerce de Marrakech ,décision du 1er novembre 2000 ,15/2000 ,dossier 06/2000 ,inédite. )
34
(Voir avis contraire de Me Abdelaziz TRID, Pt du TC de Meknès),op.cit.p.14
25
la preuve qu’il a une créance certaine et que l’entreprise est dans l’incapacité
de la payer à l’échéance ».

A noter que le législateur ne préjuge pas d’une éventuelle responsabilité


du créancier poursuivant .Mais il faut observer que tout créancier doit se
montrer prudent lorsqu’il décide d’assigner en redressement ou en liquidation
judiciaire car la jurisprudence peut retenir sa responsabilité civile s’il assigne le
débiteur à la légère .Une telle responsabilité obéit aux règles du droit commun et
suppose que le débiteur rapporte la preuve du préjudice qu’il a subi. Le
dommage résultera le plus souvent d’une perte de crédit auprès des organismes
bancaires ou des fournisseurs. Quant à la faute ,elle se peut déduire du
déclenchement de la procédure sur le seul fondement d’un refus de payer du
débiteur alors que celui-ci contestait l’existence de la créance .Le créancier ne
doit pas abuser de son droit d’agir en justice et utiliser la menace de liquidation
judiciaire comme moyen de pression pour obtenir le paiement de sa créance.

Aussi l’assignation par un créancier pose problème dans le cas de la


résolution par le tribunal d’un règlement amiable .Une fois de plus, le législateur
marocain est resté muet sur ce point .Car selon l’Art 558 du CC, le tribunal se
contente de prononcer la résolution de l’accord et la question qui se pose : est ce
que les créanciers non signataires disposent de ce droit et peuvent saisir le
tribunal pour demander l’ouverture de la procédure suite à la résolution d’un
plan amiable ?
35
Selon la doctrine et la jurisprudence française seules les parties à
l’accord peuvent demander le redressement ou la liquidation, car le règlement
amiable a un caractère confidentiel.

35
Y.Guyon « Droit des affaires ».6ème édition .0p cit.p149 .,
26
Après ce bref aperçu sur la saisine faite par le débiteur ou l’un des
créanciers c’est le moment de se penser sur les deux autres modalités de saisie à
savoir la saisine d’office par le tribunal ou par le ministère public

Section II : l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire d’office ou sur


requête du ministère public.

La saisine d’office du tribunal (§1), qui est inhabituelle au regard des


principes classiques de la procédure, se justifie dans une matière qui intéresse
l’ordre public économique.

Et la saisine par le ministère public (§2) devrait se limiter aux cas où la


continuation de l’activité de l’entreprise en cessation de paiements cause un
trouble à l’ordre public, notamment en faussant le jeu de la concurrence.

A titre principal, les deux modes de saisine pallient la carence du


débiteur et des créanciers.

§1 : La saisine d’office par le tribunal

La loi donne au tribunal le droit de se saisir d’office, l’article 563 du


code de commerce édicte : « ….le tribunal peut se saisir d’office ou sur requête
du ministère public ….. ».Il s’agit là d’un pouvoir exorbitant dont il doit user
avec une grande prudence pour la protection de l’intérêt général.

On citera là-dessus un certain nombre de cas où le tribunal peut se saisir


d’office :

 - à la suite d’un accord intervenu entre le créancier, demandeur à


l’ouverture d’une procédure de redressement et son débiteur, le

27
tribunal reçoit un désistement qui met fin à l’instance. Mais des
informations dont dispose le tribunal il apparaît que la cessation de
paiement existe bien et que l’accord intervenu ne règle rien à cet
égard . Peut-être même organise-t-il un paiement préférenciel,
confère-t-il des avantages ou privilèges au créancier pour prix de
son désistement ce qui est de nature à aboutir à un accroissement
du passif, le tribunal peut se saisir d’office ;
 - La procédure introduite par le créancier ou la déclaration de
cessation de paiement est atteinte d’un vice qui peut entraîner la
nullité du jugement .Pour éviter de tel risque, le tribunal se saisira
d’office ;
 - le débiteur déclare la cessation de paiement puis la rétracte .le
tribunal peut vouloir s’assurer de ce qu’elle n’existe effectivement
plus ;
 - le président peut être informé par la rumeur publique ou par les
tiers ;
 - enfin le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du
personnel peuvent communiquer au président du tribunal ou au
procureur du Roi tout fait révélant la cessation de paiement de
l’entreprise, en particulier le défaut de paiement des salaires .

Une telle saisine n’oblige d’ailleurs pas le tribunal à prononcer


obligatoirement l’ouverture d’une procédure .Il reste parfaitement libre si les
conditions ne sont pas réunies de juger qu’il n’a a pas de lieu à prononcer le
redressement ou la liquidation judiciaire.

Généralement l’intérêt de la saisine d’office est de dissimuler


l’insuffisance des créanciers et du débiteur, en évitant qu’une entreprise ne

28
continue de fonctionner, alors qu’en réalité, elle est en cessation des
paiements36.

Il est vrai que la difficulté essentielle se rapporte à l’information du


tribunal puisque, afin de pouvoir se saisir d’office, il faut que celui-ci puisse
connaître le cessation des paiements.

Le législateur marocain, en matière des difficultés de l’entreprise, a


évoqué le cas de la saisine d’office ou sur requête de ministère public au sens du
deuxième alinéa de l’article 563 du Code de commerce.

C’est ainsi que la cour d’appel de commerce de Marrakech 37en date du


21 décembre 2000 a fait l’application de ces dispositions .Cependant, la saisine
d’office du tribunal, quand elle a pour objet l’ouverture de redressement ou de la
liquidation, semble critiquable, notamment quand elle tend au prononcé de
sanctions personnelles .

En principe la saisine d’office ne joue qu’un rôle secondaire et surtout se


limite aux entreprises qui ont déjà pratiquement disparu. Elle n’intervient que
dans moins de 4% des procédures38.

Le droit du tribunal de prononcer d’office l’ouverture des procédures de


traitement des difficultés de l’entreprise entraîne en principe des conséquences
importantes :

- Si le chef d’entreprise demande le redressement judiciaire, le


tribunal peut déclarer d’office la liquidation judiciaire39.Inversement, le

36
(GUYON,op.cit.,2003,n°1134.)
37
C.A.C de Marrakech ,arrêt n° 761 du 21/12/2000 ,dos.n°384/449/2000,inédit.5 .cependant A.Slimani,les voies de recours
contre les jugements prises en matières des difficultés de l’entreprise ,R.E.M.A.D.A.E.,n°5 2005,p.81 et s (en langue arabe)
.5.aussi le Tr.Co. de Rabat ,jugement n° 12 du 18/05/2005,dos .n° 5/27/99 .
38 Info stat justice,ibidem.
( Jugement du Tr.Co de Fès n°54 du 3112/11/32 n° du dossier 164/8218//3112
39

29
tribunal peut refuser de prononcer la liquidation judicaire demandée par
les créanciers et prononcer d’office le redressement judiciaire40.

Le juge français de la chambre civile de la Cour de cassation en date


du 9 décembre 1997 a retenu ces 41La déclaration d’office peut intervenir au
cours d’une instance formée par des créanciers, si le tribunal reconnaît que
l’assignation de ceux-ci est irrégulière en la forme ,il peut passer outre et
prononcer d’office le redressement judiciaire du moment que les conditions
de fond sont remplies .il en est de même au cas de désistement des créanciers
qui avaient assigné ;

- Le tribunal peut prononcer d’office l’ouverture des


procédures de traitement, si les conditions sont réunies sur une assignation
en paiement dirigée contre le débiteur une simple action en paiement, le
tribunal peut, à cette occasion, prononcer d’office le redressement
judiciaire ;
- Enfin, si le redressement judiciaire est prononcé, le tribunal à
la demande motivée du syndic, d’un contrôleur, du chef de l’entreprise ou
d’office et sur rapport du juge-commissaire, peut toujours ordonner la
cession totale ou partielle de l’activité et prononcer la liquidation
judiciaire42.

En conclusion ,la saisine d’office n’a qu’un rôle complémentaire .Celle-


ci permet de régulariser une procédure mal engagée à la requête du débiteur ou
des créanciers .Ce rôle ,plutôt correctif et dynamique ,indique que le tribunal
joue un rôle actif dans la procédure collective alors que ,dans le droit judiciaire
traditionnel ,le juge est un arbitre qui ne prend pas d’initiatives43.

40
Jugement du Tr.Co. de Fès n° 11 du 01/02/2017 n° dossier 264/8303/2016
41
dispositions (Cass.Com.,9 décembre 1997,D,1998,p.229,note G.BOLARD .

42
(art.572).
43
(GUYON ,op.cit .,t.2,n° 1135.)
30
En résumé, la saisine d’office n’a qu’un rôle complémentaire .Celle-ci
permet de régulariser une procédure mal engagée à la requête du débiteur ou des
créanciers. Ce rôle, plutôt correctif et dynamique, indique que le rôle actif que le
joue le tribunal dans la procédure de redressement judiciaire alors que, dans le
droit judiciaire traditionnel, le juge est un arbitre qui ne prend pas d’initiatives.

§2 : la saisine sur requête du ministère public

L’action publique est intentée au non et dans l’intérêt de la société .Elle


tend à désigner le coupable de l’infraction et à lui appliquer la peine
correspondante prévue par la loi .Il appartient à la société et à elle seule ,le droit
de l’exercer ou d’y renoncer (amnistie ,abrogation de la loi pénal ,prescription
).Cette action est exercée par le ministère public il est à souligner que le
deuxième alinéa de l’article 563 du C.C. prévoit cette saisine qui précise le rôle
prépondérant que joue le ministère public dans le droit économique .Le
procureur du Roi devra présenter au tribunal une requête indiquant les faits de
nature à motiver sa demande. Ensuite, il appartiendra au président de faire
convoquer par les soins du greffier le débiteur .Cette convocation interviendra
par acte extrajudiciaire dans les mêmes conditions que celles afférentes à la
saisine d’office. Elle ne peut être l’objet de sa part, ni de renonciation, ni de
transaction ni d’acquiescement Il s’agit de l’agrément d’une proposition et la
non-opposition à celle-ci, l’intérêt de la société s’y opposant44 .

Notamment en cas d’inexécution par l’entreprise débitrice des


engagements financiers conclus dans le cadre de l’accord amiable .Il convient de
noter que ce cas n’est pas limitatif .le ministère public pouvant demander
l’ouverture de la procédure pour d’autres raisons.

44
FILALI ,op.cit.,1964,p 118.
31
En effet ,pour se forger une conviction sur l’état de cessation des
paiements ,le parquet dispose ,outre de ses moyens classiques d’information
dans le cadre ,par exemple, d’une procédure pénale ,de différentes sources de
renseignements : protêts pour défaut de paiement ,reports d’échéance
,réclamations des services fiscaux ,ou indications émanant des salariés surtout
lorsqu’ils sont dotés d’institutions représentatives investies du droit d’alerte.
L’article prévoit, en effet, expressément que le comité d’entreprise ou, à défaut,
les délégués du personnel peuvent communiquer au président du tribunal ou au
procureur du Roi tout fait révélant la cessation des paiements de l’entreprise.
Mais il faut noter que les salariés n’ont pas de droit de saisine directe.

Cette saisine par le Parquet est cependant peu fréquente car, en général,
le procureur informe le tribunal des faits dont il a eu connaissance et celui-ci se
saisit d’office.

Au niveau du tribunal de commerce de Fès et d’après son J.C, pendant


les années 2016 et les cinq premiers mois de l’année 2017, aucune procédure de
liquidation judiciaire ou de redressement n’a été déclenchée par le ministère
public.

A noter par ailleurs qui si le commissaire aux comptes est chargé par la
loi d’informer le Président du tribunal du commerce de la situation compromise
de l’entreprise, il n’a pas la prérogative d’initier l’ouverture de la procédure de
traitement.

La limitation de la liste des personnes pouvant initier une procédure de


traitement des difficultés semble présenter des conséquences juridiques sur la
qualité des personnes pouvant interjeter appel contre le décision d’ouverture de
la procédure .Ainsi, il a été décidé que l’appel ne peut être interjeté contre le
jugement d’ouverture que par le débiteur .le Ministère public ou le créancier
poursuivant ( à la demande duquel la procédure a été ouverte ) et il en a été

32
déduit qu’il ne peut être admis l’appel formé par un créancier contre la décision
d’ouverture d’une procédure de redressement sur demande du débiteur lui-
même45.Cette solution a été étendue aux créanciers et aux contrôleurs qui
,d’après la même Cour, ne peuvent exercer de recours contre la décision de
continuation de l’entreprise prise en vertu de l’article 590 du code de
commerce : respectivement l’arrêt n° 40C du 17/09/2003 46.Cette solution
revient à nier, de manière générale et catégorique, aux créanciers de l’entreprise
débitrice, autres que celui poursuivant le cas échéant, tout intérêt pour agir .Ce
qui n’est généralement pas vrai.

En conclusion on ne peut que signaler L'inadaptation des conditions de


la saisine qui est confirmée par les statistiques des juridictions .En effet ,le
Maroc a institué des juridictions de commerce spécialisées qui sont les seules
compétentes à connaître tous les litiges commerciaux, y compris les procédures
collectives : les tribunaux de commerce.
On peut affirmer que le tribunal, à travers son intervention et
l'organisation des procédures collectives, contribue activement à l'application
des mesures de redressement. Dans le cas échéant, il procède à la liquidation de
l'entreprise, à l'assainissement du milieu des affaires et à la garantie de l'ordre
public. Par conséquent, tout demandeur doit saisir le Tr. Co. Compétent
territorialement. Cependant une analyse de la pratique révèle un nombre très
réduit de ces
Tribunaux avec une mauvaise répartition géographique et une saisine du
tribunal très tardive.
L'inadaptation des conditions de la saisine est confirmée par les
statistiques des juridictions. De point de vu pratique, il a été possible d’accéder à
l’ensemble des demandes d’ouverture des procédures d’ouvertures des

45
( arrêt de la Cour d’appel de commerce de Fès n°18 TC du 22/04/2003 ,dossier n°22/03 ,inédite
46
.dossier n° 40/03 ,inédite et l’arrêt n°15C en date du 16/04/2003.dossier n°66/03C,inédite. )

33
procédures collectives enregistrées auprès de tous les tribunaux de commerce du
pays.

Tribunaux Casablanca Rabat Marrakech Fès Agadir Tanger Meknès Oujda

1998 28 16 7 5 6 3

1999 60 35 19 21 9 14

2000 162 35 15 22 10 18

2001 189 45 36 40 14 20 8 6

2002 209 56 16 21 20 24 22 8

2003 212 58 38 23 32 19 21 6

2004 209 72 24 22 29 16 27 12

2005 194 56 26 18 20 12 25 12

2006 84 55 25 21 9 13 27 12

2007 107 58 23 11 13 10 10 10

2008 67 15 22 8 9 5 12 11

2009 64 47 25 16 10 13 7 5

2010 42 15 23 9 14 9 11 6

2011 52 22 16 9 23 11 8 11

2012 35 12 7 7 15 8 5 5

2013 19 14 6 3 12 7 4 3

2014 18 11 3 2 16 5 2 2

2015 21 15 5 4 15 6 3 3

2016 16 13 3 2 14 4 2 3

Tableau 1 : demandes d’ouverture des procédures collectives auprès des Tr.co du Maroc 47

47
Ces chiffres sont tirés des données récoltées auprès des Tr.co du Maroc
34
Selon ces chiffres, les demandes d’ouverture de procédure collectives,
enregistrées auprès de l’ensemble des tribunaux de commerce marocains depuis
leur création jusqu'à la fin de l’année 2016 sont, en tout et pour tout, au nombre
de 3632.

Evolution, en fonction des années, des demandes


d’ouverture auprès des différents tr.co du Maroc

35
Une analyse détaillée de ces chiffres montre, pour l'ensemble des
tribunaux, que les demandes d'ouverture étaient élevées les premières années
d'entrée en vigueur de la loi de 1996 et l'installation de Tr. Co. Ces demandes
ont connu un maximum aux alentours de l'année 2003. Depuis cette date, les
demandes sont en chute libre. Le même phénomène a été observé dans les
procédures extrajudiciaires. Ceci peut s'expliquer par le fait que les Tr. Co, au
début de leur création, appliquaient les termes de la loi, alors que par la suite, ils
ont appliqué l'esprit de la loi ; ce qui a dissuadé bon nombre de dirigeant à
recourir aux procédures collectives par peur de refus de leur demande. Ceci est
corroboré par les données des Tr. Co qui montrent que le maximum des
demandes a été enregistré entre 2003 et 2004.

Tribunal casa R Rabat Marrakech Fès Agadir T tanger Meknès Oujda

Année 2003 2004 2003 2003 2003 2003 2004 2003

Maximum 212 72 38 23 32 19 27 12

Demandes

Tableau sur les années du maximum de demandes d’ouverture des procédures collectives48

On peut relever, toujours d’après les statistiques des tribunaux de


commerce, que les tribunaux ne sont pas sollicités avec la même acuité.

48
Ces chiffres sont tirés des données récoltées auprès des Tr.co du Maroc
36
répartition des demandes d'ouverture de jugement sur les
différents tribunaux

Trib Casa Trib Rabat trib marrakech trib Fès


Trib Agadir Trib Tanger Trib Meknès Trib Oujda

CHAPITRE 2 : LES CONDITIONS D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE.

Le législateur marocain a retenu deux conditions de forme obligatoires


pour que le tribunal puisse appliquer les procédures collectives .En effet,
l’article 560 stipule :

« Les procédures de traitement des difficultés de l’entreprise sont


applicables à tout commerçant, à tout artisan et toute société commerciale, qui
n’est pas en mesure de payer à l’échéance ses dettes exigibles ».

Et l’Art 561 précise :

« Le chef d’entreprise doit demander l’ouverture d’une procédure de


traitement au plus tard dans les quinze jours qui suivent la cessation de ses
paiements ».

Ces deux articles fixent deux conditions pour l’ouverture de la procédure


collective .la première a instauré une délimitation très étroite quant à la qualité
du demandeur (Section 1) alors que la deuxième a conservé une approche

37
ancienne de la CDP (Section 2). S’y ajoute à ces deux conditions qui sont
communes à la procédure collective la condition de la « situation
irrémédiablement compromise » de l’entreprise en question pour que le tribunal
ordonne sa liquidation judiciaire (section 3).

SECTION 1 : Une délimitation très étroite quant à la qualité du demandeur.

D’après les dispositions de l’Art 560 du CC., pour bénéficier des


dispositions de la procédure ,en plus de la CDP , le débiteur doit être
commerçant ,personne physique ou morale ,ou artisan .Par contre les
agriculteurs et les fonctions libérales en sont exclus.

La qualité du commerçant est acquise par l’exercice habituel ou


professionnel de l’une des activités mentionnées dans l’Art 6 et 7 du CC 49Alors
que la société l’acquiert par la forme, quelque soit son objet social .Par contre,
l’artisan n’a jamais bénéficié d’une définition légale.

C’est ainsi que les données des Tr. Co .montrent que tous les débiteurs
sont des commerçants (§1), alors, on peut soulever la question de l’absence au
Maroc de cas jurisprudentielle d’ouverture de procédure à l’encontre de l’artisan
(§2).

§1 -Les débiteurs sont des commerçants.

Le tribunal devait impérativement vérifier les deux conditions avant


l’ouverture d’une telle procédure .Sur ce point, la cour d’appel de commerce de
50
Casablanca avait statué en confirmant dans un arrêt que seul le chef
d’entreprise, le créancier, le ministère public et le tribunal d’office sont habilités
à demander l’ouverture de la procédure.

49
91 ‫ ص‬9111 ‫امحمد الفروجي ''التاجر و قانون التجارة بالمغرب ''الطبعة الثانية مطبعة البيضاء‬

50
:C .A.C de Casablanca .Arrêt N°377/2002 du 15/02/2002.Non publié .)
38
C’est ainsi que le Tb.Co de Fès a rejeté une demande de redressement à
cause de l’absence de la qualité de commerçant du débiteur51.La cours d’appel
de commerce de la même ville dans un autre arrêt a refusé ,pour le même motif
qui est l’absence de la qualité de commerçant ,la demande de l’ouverture de la
procédure à un demandeur qui exerce ,en sa qualité de médecin ,une fonction
libérale52.

Par contre ,la C.A.C de fès53 a estimé qu’il est possible d’étendre
l’application des procédures collectives à un agriculteur dans le cas où il est
prouvé que dans son activité ,il utilise les procédés de spéculation ou de la
garantie bancaire ,dans ce cas la qualification de commerçant est une
appréciation souveraine du juge.

Dans le même esprit ,le C.A.C de Casablanca a annulé un jugement du


Tr.Co de Casablanca ,qui a prononcé la liquidation judiciaire ,alors que le
demandeur était juste un directeur adjoint et n’avait pas la qualité légale de
dirigeant pour que sa demande soit admise 54Conformément au droit commun, la
compétence d’attribution dépend de la qualité du débiteur .Elle revient au Tb.Co
si le débiteur est un commerçant, personne physique ou morale, ou un artisan
55
La compétence d’attribution dépend alors de la qualité du débiteur.

Dans la pratique ,la jurisprudence reste confuse sur cette règle surtout
lorsque la fonction libérale et forme sociétaire se sont chevauchées. C’est ainsi
que le Tb.Co d’Oujda a refusé l’ouverture des procédures collectives à l’égard
d’une société polyclinique ,qui est une société commerciale pour motifs que les
médecins sont interdits d’exercer leur activité dans le cadre d’une société 56 . En

51
Tribunal de commerce de Fès .jugement 6/2005 du 09/02/2005.Dossier n° 02/10/2004 .Non publié .
52
:Arrêt C.A.C de fès n° 10/2005 du 09/03 /2005 .Arrêt non publié.
53 Ordoannance C.A.C de Fès n° 50 du 15/10/2003 . Dossier 03/63.Non publié
54C.A.Co de Casablanca 1003/99 n°783/99/11 du 08/07/1999 .Publié cabinet bassamat.net.
55 Art 560 CC
56
: Jugement du Tr.Co d’Oujda n° 1/2001,dossier n° 05/2001/01 du 21/11/2001 612 ‫ ص‬62‫منشور بمجلة اإلشعاع عدد‬

39
même temps, on trouve que le tribunal de commerce a ouvert la procédure
judiciaire à l’égard d’une clinique exploitée sous forme sociétaire (SARL) créée
57
par des médecins la même décision a été prise par le tribunal de commerce
d’Agadir à l’encontre d’une clinique ,malgré l’objection du ministère public qui
s’est appuyé sur l’article 49 de la loi 94/10 interdisant la constitution de sociétés
commerciales entre médecins .Alors que les deux tribunaux se sont basés sur la
qualité commerciale par la forme des dites sociétés pour motiver leurs décisions.

La loi a fait de la qualité de commerçant du débiteur une condition sin


qua none pour l’application des procédures collectives .Ceci sous-entend que le
tribunal doit rejeter toute demande où la qualité du commerçant n’est pas
prouvée .Selon la doctrine, chaque fois que le tribunal constate le défaut de la
qualité de commerçant .Le Tr.Co doit refuser l’ouverture de la procédure et ne
pas prononcer la non compétence, car les Tr.Co ont l’exclusivité de compétence
de des procédures collectives.

Selon un juge du Tr.Co de Fès :

« La qualité de commerçant est obligatoire comme condition nécessaire


à l’ouverture de la procédure, par conséquent la procédure ne peut être
appliquée qu’aux commerçants (personnes physiques ou sociétés commerciales)
sachant que les artisans sont considérés des commerçants par le nouveau code
de commerce58.

Mais il est possible d’ouvrir la procédure à l’encontre du commerçant


du fait qui exerce le commerce même s’il tombe sous le coup de l’interdiction, le
déchéance ou l’incompatibilité59.

57
Tr.Co de Casablanca : jugement n° 21/2000 du 24/01/2000.Non publié .
58
Art 560 du CC.
59 Art 11 du CC du CC.
40
D’ailleurs, la non inscription au registre de commerce ne peut pas
constituer un obstacle à l’ouverture de la procédure, parce que c’est juste un
manquement à une obligation légale qui n’enlève pas la qualité de commerçant
à la personne qui exerce de manière habituelle ou professionnelle une activité
commerciale donnée.

Il est même possible d’ouvrir la procédure à l’encontre de celui qui


exerce le commerce sous un prêt non et aussi le commerçant apparent. Le
premier parce que c’est un commerçant de fait alors que le deuxième en sa
basant sur la théorie de l’apparent et la règle de la protection des créanciers.

Art 564 stipule qu’il est possible d’ouvrir la procédure à l’encontre du


commerçant et artisan qui a mis fin à son activité ou décédé, dans l’année de sa
retraite ou son décès, si la cessation des paiements est postérieure à ces
événements.

Il résulte de la notion de non diligence déduite de l’Art cité que la


présentation au tribunal d’une demande d’ouverture de la procédure après
l’écoulement d’une année son sort est le refus (Jugement prononcé par le
tribunal de commerce de Fès dans l’affaire de la société COTEF et la décision
de l’appel l’avait confirmé).

Pour les sociétés commerciales légales ou structurées (SA, SARL, SNS et


SC),cette ambigüité ne se pose pas ,puisque la loi des sociétés commerciales
considère que l’inscription au registre de commerce confère la personne morale
à la société .

Pour les sociétés commerciales (SA ,SARL et les autres ) dans le cas où
les formalités d’enregistrement60 ne sont pas accomplies ,ou si la société est en
cours de formation ,il est possible d’ouvrir la procédure à l’encontre des
60
- M. ALAMI-MACHICHI, « droit commercial approfondi ».

41
associés (personnellement) de la société de fait si cette dernière a exercé le
commerce et s’est trouvée dans une situation de cessation des paiements .Mais
on ne peut pas concevoir l’ouverture de la procédure à l’encontre d’une société
qui n’a pas la personnalité morale .

Les fonctions libérales ne confèrent pas par leur nature la qualité de


commerçant .Ceux qui les exercent ne peuvent bénéficier des procédures
collectives .C’est le cas aussi de l’agriculteur61.

Et selon un juge du Tr.Co de Meknès :

« Dans la pratique, le tribunal n’a pas encore ouvert la procédure à


l’encontre d’une personne interdite d’exercer le commerce .Mais selon
l’ancienne loi rien n’interdisant son application à l’encontre d’une personne
non inscrite au registre de commerce.

Je pense que les procédures collectives doivent être applicables à tout


commerçant qu’il soit de droit ou de fait du moment qu’il est établi qu’il
exerçait du commerce. Mais pas de cas d’espèce au niveau du tribunal »62.

§2- Qu’en est il de l’artisan ?

Absence au Maroc de cas jurisprudentiel d’ouverture de la procédure à


l’encontre de l’artisan.

Selon les statistiques des Tr .Co on ne relève aucun cas d’espèce où le


débiteur est un artisan .Et même la doctrine, à force de ne parler que des
commerçants, a banni ce terme de son vocabulaire.

61
Suite à un entretien avec un J.C du Tr.Co de Fès .

62 Suite à un entretien avec un J.C du Tr.Co de Meknès .

42
Alors la question que l’on peut se poser est de savoir si le monde des
artisans est un monde saint qui est à l’abri de difficultés économiques et
financières, et ne connaît pas la CDP pour bénéficier du redressement ou si la
situation est irrémédiablement compromise tomber en liquidation judiciaire, ou
tout simplement c’est une question d’ignorance par cette catégorie de débiteur
qui s’adresse à une autre juridiction c'est-à-dire les juridictions du droit
commun.

Dans cette dernière éventualité, le juge du droit commun est-il compétent


pour connaitre de telles affaires ou devrait-il déclarer la non compétence puisque
de tel litige est reconnu expressément par la loi aux Tr.Co ?

Pour élucider cette ambigüité ,il a fallut dans un premier temps


s’adresser au greffe du tribunal de première instance pour relever des cas où le
débiteur est un artisan dans l’impossibilité de payer ses dettes ,c'est-à-dire en
situation de CDP63, et dans un deuxième temps chercher des réponses auprès des
juges aussi bien commerciaux que ceux du droit commun sur cette défaillance .

En ce qui concerne le premier point, d’après les donnés du tribunal de


première instance de Fès, il était très difficile de mette la main sur des jugements
de ce type .D’après le greffe :

« Dans ces litiges ou plus précisément dans les jugements, il est très
difficile de connaitre la qualité du débiteur pour déterminer qu’il s’agit d’un
artisan .Généralement il s’agit du non paiement d’une dette entre deux
personnes considérées comme des civiles. Par conséquent, le juge ne peut pas
requalifier l’affaire ou déclarer la non compétence »64 .

63
France GURAMAND et Alain HERAUD, droit des sociétés, manuels et Applications,
DUNOD, 2001,

64
Suite à un entretien avec le Greffe du tribunal de première instance de Fès
43
Selon un juge commercial cette absence est imputée à l’artisan lui-
même :

« L’artisan est resté très classique et archaïque dans ses relations


professionnelles .Les mécanismes et l’organisation de l’artisan et de l’artisanat
ne lui permettront jamais de bénéficier des procédures collectives ».

Pour un procureur du Roi :

« La question de l’artisan est très complexe .Cependant, c’est lui qui a le


plus besoin de protection et d’encadrement.

Cette absence peut être expliquée soit par l’ignorance soit par la volonté
d’éviter cette procédure .De plus, le volume des investissements de l’artisan est
faible et le capital est toujours indéfini »65.

Alors que pour un vice président d’un tribunal de première instance :

« la question de l’artisan est très complexe .Tout d’abord la notion


d’artisan n’est pas définie par le législateur, et même l’artisanat n’est pas
limitatif .La limiter dans une liste risque de porter atteinte à une certaine
catégorie.

Le juge du tribunal de 1er instance, conscient du problème de


l’éloignement posé par les Tr.Co.ne peut pas prononcer la non compétence »66.

Une fois la qualité du commerçant est établie, le tribunal doit s’assurer


de la situation de CDP.

Section 2 : la cessation de paiements : tendance jurisprudentielle

§1 : Une approche ancienne de la notion de cessation de paiements

65 Suite à un entretien avec un ex procureur du Roi auprès du Tr .Co de Fès


66 Suite à un entretien avec un vice président du tribunal de première instance de Fès
44
La notion de « cessation de paiements » joue un rôle fondamental dans
les procédures collectives puisque l’ouverture de ces procédures est
subordonnée à la constatation d’une CDP67, et la fixation de cette date de CDP
est le point de départ de la période dite « suspecte » au cours de la quelle et sous
certaines conditions certains actes effectués en fraude des droits des créanciers
peuvent être annulés. En outre, elle joue un rôle essentiel s’il y a extension de la
procédure collective en cas de confusion de patrimoine, ou même sur le
patrimoine personnel des dirigeants sociaux, enfin, elle détermine largement le
champ d’application du droit pénal des procédures collectives, constituant en
particulier un des éléments du délit de banqueroute.

Le CC pose le principe selon lequel le redressement s’ouvre en cas de


CDP ,et d’après les articles 560 et 561 ,on peut déduire que la définition légale
de la CDP est :

« ….pas en mesure de payer à l’échéance ses dettes exigibles »

A ce niveau, on peut relever une différence notable avec la législation


française et ce, sur deux points :

. D’abord ,le législateur français a donné une définition de la


CDP plus complexe .A l’origine ,elle a été définie par la jurisprudence puis
reprise par la loi de 1985 qui l’a définie comme étant l’entreprise qui est dans
l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible .

Ainsi pour déterminer la CDP ,il faut accéder à deux termes ,à savoir le
passif exigible ,qui est l’ensemble des dettes de l’entreprise, civiles et
commerciales professionnelles ou liées à sa vie privée ,et l’actif disponible ,qui

67
A.Squali « L’étude critique de la notion de cessation des paiements en matière de faillite et
de liquidation judiciaire ». Revue de droit et d’économie.N°11.1995. p 53

45
n’est autre que la trésorerie permanente68 constitués de tous les éléments qui
figurent à l’actif du bilan et qui sont suffisamment liquides pour permettre de
faire face aux dettes exigibles .Alors que la définition marocaine est plus simple
,il suffit que des dettes exigibles ne soient pas payées .

. Par la suite ,il a banalisé la notion de CDP .En effet ,depuis


la loi de 2005 et l’introduction de la procédure de sauvegarde ,la notion de CDP
n’est plus une condition sine qua none pour l’intervention du tribunal .Au
contraire, elle a accru le pouvoir d’appréciation souverain de ce dernier qui doit
évaluer les intentions du débiteur pour décider ou non de l’ouverture de la
procédure de sauvegarde69.

Dans le cas général, au Maroc, la CDP est considérée comme une


condition nécessaire pour prononcer l’ouverture de la procédure .Mais ce
principe connait deux exceptions où le tribunal peut prononcer l’ouverture :

. À l’encontre de celui qui n’exécute pas un engagement pris dans le


cadre d’un régalement amiable, sans faire aucune allusion à la CDP.

. De la même façon, le redressement judiciaire s’ouvre à l’encontre


d’un débiteur qui a bénéficié d’un plan de continuation et n’a pas exécuté un de
ses engagements70.

Selon les dispositions de l’Art 560, l’application des procédures de


traitement des difficultés de l’entreprise nécessite le non paiement à l’échéance
des dettes exigibles .Comme alors les Tb.Co .déterminent-ils cette condition ?
68
: J.Stouflet « la notion juridique de trésorerie »,Rev .Juris .Com,n° spé.Nov .1989,p . 30
69
Abderrahim SLIMANI, arrêt du plan de continuation par le tribunal dans le cadre de la
procédure de redressement judiciaire, REMADE, n7, janvier 2005. P25- en arabe

70
Art 602 CC.
46
71
Ainsi dans un jugement, le Tr.Co de Casablanca a décidé que le fait
que le passif d’une entreprise commerciale dépasse son actif justifie qu’elle soit
soumise au redressement judiciaire du moment que sa situation n’est pas
compromise ,donc on peut deviner que si l’entreprise était en situation
irrémédiablement comprise le tribunal aurait déclaré sa mise en liquidation
judiciaire.

La problématique que peut soulever cette condition de CDP, est de


savoir le sort de la demande d’ouverture de la procédure lorsqu’une conciliation
ou un accord a été conclu entre le débiteur et le créancier.

Selon un juge de Tribunal de commerce de Meknès :

« Accord ou pas avec un débiteur le tribunal poursuit la procédure le


tribunal doit se saisir d’office72.

Alors que selon un juge du Tr .Co de Fès :

« à priori un accord ou une conciliation avec un créancier intéressé ne


devrait pas conduire à un report du prononcé de jugement d’ouverture ,parce
que la procédure est d’ordre public .Mais si cet accord ou cette conciliation
conduit à retarder la date d’exigibilité de la dette de sorte que l’entreprise ne
soit plus en situation de cessation de paiements ainsi disparaît la condition sine
qua none pour l’ouverture de la procédure » 73 C’est aussi l’avis du Tr.Co de
Casablanca, qui dans un jugement :

« attendu que ….puisque le représentant du débiteur s’est présenté


devant la chambre de conseil et a demandé d’enregistrer sa renonciation à la

71
Jugement Tr .Co Casablanca .N°116/2000.Dossier n°88/2000/10 du 27/03/2000 .Non publié.
72
: Suite à un entretien avec un juge du Tr.Co de Meknès

73
: Suite à un entretien avec un juge du Tr.Co de Fès

47
procédure, que le représentant du débiteur a présenté un protocole d’accord et
que le débiteur a déclaré que l’entreprise n’a aucune créance exigible ….que la
cessation de paiements n’est plus établie ,….le tribunal déclare le refus de la
demande ».

La doctrine74 n’est pas de cet avis et considère que le tribunal dans le cas
d’espèce n’a pas respecté l’esprit de la loi en prononçant le refus, alors qu’il
devait se saisir d’office et désigner un expert pour évaluer la situation
économique et financière de l’entreprise .C’est la position adopté ,dans un autre
arrêt75.

En définitif, en l’absence soit de la qualité de commerçant ou de la CDP,


le tribunal doit prononcer le refus de la demande d’ouverture de la procédure.
C’est ainsi qu’on trouve un taux très élevé de refus au niveau des statistiques des
Tr.Co.

Casablanca Rabat Marrakech Fès Agadir Tanger Meknès Oujda


Tribunal

Nombre 1634 585 291 242 218 176 178 99


Demandes

Nombre de 1059 301 66 86 76 72 74 42


refus76

Taux de 64.8 % 51.5% 22.3 % 35.5 % 34.5 % 40.9 % 41.6 % 42 %


refus

Tableau : taux de refus.par les tr.co des demandes d’ouverture des procedures collectives77

On constate que d’entrée sur les 3423 demandes, les tribunaux en ont
rejetées 1776.Ce qui constitue 52% des demandes d’ouvertures de refuser.

74
91 ‫عبد الرحيم السليماني مرجع سابق الصفحة‬
75
Arrêt Tr.Co. Casablanca n° 2539/98 .Non publié) ,par le même tribunal de commerce .
76
Le nombre de refus contient aussi bien les demandes de redressement que les demandes directes de
liquidation
77
Ces chiffres sont calculés à partir des récoltées auprès des tr.co du Maroc
48
Les tribunaux de Casablanca et de Rabat connaissent les taux de refus
des demandes les plus élevés. Ces tribunaux n’ont pas donné satisfaction aux
demandeurs qui, à priori, cherchaient à échapper à leurs créanciers par la
protection apportée par les dispositions de l’Art 563 en cherchant uniquement à
arrêter les voies d’exécution.

En conclusion ,le tribunal doit légalement procéder à la vérification de la


qualité de « commerçant » du débiteur et l’existence effective de la CDP ,avant
de statuer sur l’ouverture de la procédure qui ne peut résulter que d’un jugement
qui dans la pratique reste formel .Par conséquent ,en droit marocain ,les mesures
applicables aux entreprises en CDP sont décidées par le tribunal et non par une
autorité administrative.

§2-la CDP n’est pas fixée uniformément par les juridictions commerciales

Le jugement d’ouverture doit fixer la date de CDP qui ne doit pas être
antérieure à 18 mois à la date de l’ouverture de la procédure.

Devant le silence de jugement, elle court à partir de la date du jugement78


En général, le tribunal se base sur les documents fournit par le chef de
l’entreprise tel que c’est stipulé dans l’Art 562 du CC. Mais, comme dans la
pratique, le plus souvent, ce dernier ne fourni que rarement les documents
complets .Ce qui rend difficile la détermination de la CDP.

Pour le tribunal de Fès selon un de ses juges :

« dans le cas où le chef de l’entreprise ne dépose pas les documents cités


à l’Art 562,le tribunal peut chercher à les acquérir lui-même auprès de service
du registre du commerce et de se baser sur tous les moyens de preuve autorisés

78
Arrêt C.A.Co. Casablanca du 22/12/2000.décision n° 2730/2000.Dossier n° :2047/2000/11.Publié cabinet
bassamat.net) (Art 680 CC) .

49
légalement pour s’assurer si l’entreprise est en CDP ou non tant que la
procédure de traitement des entreprises en difficulté est d’ordre public.

A défaut, le tribunal peut prononcer le refus de la demande pour motif


d’absence de justificatifs »79. Alors que la position du tribunal de Meknès est :

« Dans certains cas où le chef d’entreprise n’a pas déposé les documents
cités à l’Art 562 ,le tribunal a prononcé le refus de l’ouverture de la procédure
,puisqu’elle était convaincu que l’entrepreneur cherchait juste à profiter de la
protection des dispositions de l’Art 653 pour arrêter les voies d’exécution »80

Cette condition de CDP, soulève un autre problème lorsque le


demandeur de la procédure est un créancier .A qui incombe la responsabilité
81
d’apporter la preuve matérielle de celle-ci Sur ce point aussi les avis sont
divergents.

En effet, pour le Tr .Co de Tanger il a stipulé dans un de ses jugements82


que :

« Le créancier qui intente une action visant l’ouverture de la procédure


de redressement judiciaire contre son débiteur, est tenu d’apporter la preuve de
l’état de cessation de ses paiements ; celle-ci ne pouvant résulter uniquement de
la production de jugements de condamnation ou des formalités d’exécution ».

Alors que pour le moyen de preuve de CDP, selon un juge commercial


du tribunal de Meknès :

« Selon la jurisprudence marocaine ,le refus du paiement d’une créance


n’est pas suffisant pour prouver la CDP parce que le refus de paiement est
79 : Suite à un entretien avec un juge auprès du Tr.Co de Fès

80: Suite à un entretien avec un juge auprès du Tr.Co de Meknès.

81 Arrêt C.A.CO.Casablanca :30/03/2001 ,n°décision 778/2001 ,n° dossier :1459/2000/11 .Non publié .

82: Arrêt Tr.Co .Tanger du 17/03/2005 ,décision n°265 publié cabinet bassamat
50
complètement différent de la notion d’incapacité de paiement telle qu’elle est
stipulé dans l’Art 560.Ainsi dans le cas de refus de paiement le créancier en
question a la possibilité de recourir aux voies de l’exécution forcée .L’ouverture
de la procédure est subordonnée à la CDP effective et que l’entreprise ne soit
pas en mesure de payer à l’échéance les dettes exigibles avec son actif
circulant ».

C’est la voie adoptée d’une manière unanime par toute la jurisprudence


marocaine .En l’espèce, le Tr. Co de Marrakech a refusé la demande d’ouverture
des procédures collectives à un créancier qui a joint à sa demande un jugement
en paiement de deux billets à ordre, au motif que ce jugement ne prouve en rien
que la société débitrice soit réellement en CDP83. Alors que la doctrine aussi
bien marocaine que française n’est pas de cet avis et considère que l’obligation,
faite au créancier demandeur d’exercer les voies d’exécutions forcées, doit être
interprétée comme moyen pour éclairer le tribunal sur la situation financière de
l’entreprise.

Par contre, un juge du Tr. Co de Meknès a mis l’accent plutôt sur


l’intention du débiteur derrière la notion de CDP :

« Il y’a des cas où la demande d’ouverture de la procédure a été rejetée.


Le refus est prononcé lorsque le tribunal est persuadé que l’objectif du chef
d’entreprise est de stopper les poursuites et profiter des dispositions de l’Art
84
653 du CC ». Une fois le tribunal s’assure de l’état effectif de CDP ,vu son
incidence sur la procédure ,il doit fixer sa date .

Au niveau du tribunal de Fès :

83
:Arrêt C.A.Co de Marrakech du 30/11/1999.Décision n°1865/99 Dossier n° 1310/99/11.Non publié

84
: Suite à un entretien avec un juge auprès du Tr.Co de Meknès

51
« Le tribunal arrête la date de cessation des paiements d’une manière
provisoire dans le jugement d’ouverture de la procédure .Il se base dans sa
détermination sur tous les moyens de preuve spécialement les documents qui
déterminent la date d’exigibilité de la dette que l’entreprise était incapable
d’honorer (chèque ,traite ,créance bancaire ,relevé de compte bancaire
,contrats etc) par la suite le tribunal procède à une comparaison avec les
déclarations du chef de l’entreprise ,des créanciers et le commissaire aux
comptes s’il existe .Enfin, dans le cas de l’impossibilité de déterminer la date de
cessation alors le tribunal l’arrête selon l’Art 680 dans les 18 mois antérieurs à
l’ouverture de la procédure » .

Alors que le tribunal de Meknès se contente d’appliquer les dispositions


de l’alinéa 1 de l’Art 680 du CC, et fixe la date de cessation dans les 18 mois
antérieurs à l’ouverture de la procédure.

Ceci est confirmé par un juge de ce tribunal :

« Généralement, le tribunal arrête la date de cessation de paiements


dans les 18 mois antérieurs à l’ouverture de la procédure »

Selon l’Art 680,le tribunal fixe ,dans le jugement d’ouverture ,la date de
CDP.A défaut ,elle est réputée être intervenue à la date du jugement .Pour la
doctrine, cette dernière disposition est aberrante ,car le jour de la demande
,l’entreprise devrait être en CDP, et que la période qui sépare la CDP de fait et
jugement qui la constate en droit à son importance .Elle est appelée période
suspecte (Art 679 CC) où tous les actes passés par le débiteur sont à priori
suspectés.

La jurisprudence a considéré qu’en cas d’omission par le débiteur de


déclarer la CDP, celle-ci devrait s’apprécier par rapport à la date retenue par le

52
tribunal et qu’il n’y a pas leu de considérer la bonne ou la mauvaise foi dans
l’omission du débiteur85.

Cependant ,la date retenue par le jugement a un caractère provisoire .le


législateur a prévu la possibilité de la modifier par la suite .Selon l’Art 681
CC ,le tribunal a le pouvoir de reporter en arrière cette date sur demande du
syndic. Alors qu’en France ,ce pouvoir est accordé à toutes les parties et même
au parquet et au tribunal lui-même .

Mais ce droit accordé au syndic n’a jamais été utilisé .En effet, selon un
juge du Tr .Co de Fès :

« Il est possible de reporter la date de cessation de paiements sur


demande du syndic à l’occasion de soulever l’annulation de certains contrats ou
des actes du chef de l’entreprise, ou en cas de demande d’annulation de certains
contrats et des paiements.

Il ne s’est pas présenté à la cour d’appel de commerce de Fès, à ma


connaissance, des cas semblables visant à reporter la date de cessation de
paiements.

D’un autre côté ,je pense qu’il faut demander la possibilité de changer
la date de cessation des paiements par une demande à toute partie qui y trouve
intérêt ou même d’office ,par le tribunal qui a prononcé le jugement d’ouverture
,vu qu’il comporte la garantie des droits des différents parties et pour éviter
aussi l’abus d’un organe particulier s’il dispose seul de ce pouvoir86

Toutefois cette faculté de report est doublement limitée .D’un côté ,la
date de CDP ne peut en aucun cas être antérieure de plus de 18 mois au
prononcé du jugement d’ouverture ,pour ne pas envisager la remise en cause

85
Cass .Com Dalloz-siery 1995.Somm. Comm p 244.

86
suite à un entretien avec un juge auprès du Tr.Co de Fès.
53
d’actes accomplis depuis longtemps .D’un autre côté ,pour l’arrêter
définitivement ,le délai de la demande du report expire dans les 15 jours suivant
le jugement qui arrête le choix de la solution87.

On peut relever que le législateur marocain a accordé le droit du report


de la CDP exclusivement au syndic et en a privé les autres parties y compris le
tribunal.

L’avis, sur cette disposition légale, d’un juge de la C.A. Co de Fès est :

« Je pense qu’il faut donner la possibilité de changer la date de


cessation des paiements ,par une demande ,à toute partie qui y trouve un intérêt
ou même d’office par le tribunal qui a prononcé le jugement d’ouverture vu ce
qu’il comporte comme garantie de droits des différentes parties et pour éviter
aussi l’abus d’un organe particulier s’il dispose seul de ce pouvoir88.

Un juge du Tr .Co de Meknès lui aussi souhaite élargir ce droit à d’autres


parties :

« Il est souhaitable de s’aligner sur la position française (bas de page :


La loi française a accordé le droit de demander le report de la date de CDP au
tribunal.), pour que cette mesure, vu son incidence sur l’intérêt des parties, ne
soit pas réservée à une seule personne89 .

Pour bénéficier de la procédure de liquidation judiciaire il faut en plus de


la réunion des conditions ci-dessus que l’entreprise soit en plus de sa cessation
de paiements en « situation irrémédiablement compromise ».

SECTION 3 : l’accouplement de la cessation de paiements avec la situation


irrémédiablement compromise du débiteur.

87
Art 680 CC.
88
Suite à un entretien avec un juge de la C.A.Co de Fès
89
Suite à un entretien avec un juge de Tr.Co de Meknès ».
54
Dans un sens d’évolution marquant ,le législateur marocain ne prévoit
plus pour l’ouverture de la liquidation judiciaire la cessation de paiements
comme fait indépendant ,contrairement ce qui a été prévu dans l’ancien code de
commerce .En effet ,avec la réforme le tribunal doit approcher globalement la
question financière de l’entreprise ,ainsi ,le tribunal ne se contente pas de la
déclaration du débiteur de sa cessation de paiements et sa demande d’ouverture
de liquidation de l’entreprise à son encontre ,il doit s’assurer que l’entreprise ne
se trouve pas dans une situation irrémédiablement compromise ,puisque le
premier alinéa de l’Art 568 du C.C. dispose que :
Le redressement judiciaire est prononcé s'il apparaît que la situation de
l’entreprise n'est pas irrémédiablement compromise. A défaut, la liquidation
judiciaire est prononcée.

Donc l’état de cessation de paiements ne signifie pas automatiquement


l’ouverture de la liquidation judiciaire mais plutôt l’ouverture des procédures du
traitement des difficultés de l’entreprise qui peuvent se terminer par l’ouverture
de procédure de redressement si le tribunal constate une sérieuse possibilité de
continuation de l’entreprise ou bien par une liquidation judiciaire s’il constate
une détérioration grave non susceptible d’aucune tentation de redressement.
Donc dés le moment que l’entreprise tombe en cessation de paiement
elle n’est plus maître de son destin c’est le tribunal qui en décide. En effet ,la
jurisprudence marocaine à travers plusieurs jugements et arrêts a confirmé qu’il
n’est pas obligée de suivre les parties dans leurs demandes ,et que les juges sont
indépendant de constituer leur intime conviction à travers des expertises
neutres90.

90
Jugement du Tr. Co de Fès n° 15/105 du 25/11/2015 ,dossier n° 77/10/2002 .Non publié.) Jugement du Tr. Co
de Fès n° 11/105 du 01/08/2016 ,dossier n° 108/8301/16 .Non publié.
55
Cette nouvelle vision du législateur marocain de la procédure collective
et surtout du régime de la liquidation judiciaire montre sa volonté de faire
intégrer l’entreprise dans le tissu économique et surtout de l’assister et de la
maintenir, puisque il met fin au rôle dissuasif que jouait le tribunal dans l’ancien
régime de la faillite.
En effet en se référant à plusieurs décisions rendues par nos tribunaux et
cours on constate vite que la plupart des décisions d’ouvertures de la procédure
de liquidation judiciaire se transforme en procédure de redressement par les
cours d’appel dés qu’elles constatent une chance même minime susceptible de
sauver l’entreprise et de maintenir l’emploi.
Tout ça, montre que la justice commerciale est tenue, de jouer plus que
jamais, un rôle de médecin, qui cherche tout médicament ou même chirurgie
susceptible de sauver son patient du décès. Et donc c’est logique de trouver de
nos jours une partie de la justice commerciale défend sa décision de transformer
la liquidation judiciaire en redressement judiciaire par une contrainte de
développement économique national à coté d’autres fondements juridiques et
financières à travers lesquels elle a essayé de trouver le fil séparateur entre une
crise financière grave justifiant la liquidation judiciaire et une crise financière
passagère justifiant l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire .

Dans ce sens la C.A.C de Casablanca a tranché comme suit :


« Attendu que le l’appelant souffre d’une crise financière et qu’il
demande l’ouverture d’une procédure de redressement à son encontre avec tous
les effets qui en découlent qui sont prévus dans le C.C.
Et attendu en se référant à l’expertise faite par l’expert qui a constaté
que l’entreprise recrute 16 salariés et que le chiffre d’affaires est en constante
évolution ,et donc la situation de l’entreprise n’est pas irrémédiablement
compromise contrairement à ce qui a été avancé par le jugement interjeté en
appel ,et donc l’entreprise traverse une crise financière passagère qu’elle peut

56
surmonter et continue en l’occurrence son activité et contribuer positivement
dans le développement économique du pays et dans le maintien de l’emploi ,en
conformité avec les dispositions de premier alinéa de l’Art 568 du C.C. ».

Mais dans d’autres cas jurisprudentiels le tribunal n’a aucune solution


que de mette terme à l’existence de l’entreprise, on se contentera de citer deux
exemples :

Cas n° 1 : La société SONAFAP ,SA ,au capital de 5.000.000 Dhs a été


constituée en 1962 avec objet la fabrication de la farine de sardine destinée à la
consommation animale .Le recul des captures de sardine depuis le début des
années 1990 a engendré la dégradation de sa situation financière ,cumulant une
perte de 17,27 millions de dirhams jusqu’au 31 décembre 1991 .

Cette société était sur la liste des sociétés publiques privatisables, fixée
par la loi sur le transfert des entreprises publiques au secteur privé.

Pour préparer sa privatisation, l’Office de développement industriel


(ODI) a entrepris les actions suivantes :

- Indemnisation des membres du personnel, avec une


enveloppe du 2,8 millions de dirhams ;
- Remboursement des dettes, avec une enveloppe de 7,912
millions de dirhams ;
- Paiement des droits de douane restant à la charge de la
société.

Le ministère de la privatisation a fait, par la suite, deux offres de vente


restées infructueuses.

57
Le tribunal a constaté que la situation de l’entreprise était
irrémédiablement compromise et celle-ci ne pouvait être redressée par voie
judiciaire .Par conséquent, seule reste envisageable la voie de la liquidation
judiciaire91.

Cas n° 2 – Outre l’existence d’une saisine exécution sur le fonds de


commerce de la société le fait que le chef d’entreprise débitrice :

- n’a pas tenu se promesse de rembourser sa dette exigée ;


- ne se soit pas présenté au tribunal pour justifier de la situation
financière de la société et de ses actifs, nonobstant les délais qui lui étaient
accordés ;
- ne s’est pas montré coopératif avec l’expert désigné par le
tribunal ;implique que ladite entreprise est incontestablement en cessation
de paiements et que situation financière est irrémédiablement compromise
(bas de page : Arrêt de la Cour d’appel de Fès du 04/03/2003 n° 239
,dossier n° 16/01.Dans le cas d’espèce ,le caractère irrévocablement
compromis de la situation juridique de l’entreprise est évoqué pour motifs
du défaut de mise en harmonie des statuts de la société (SARL) avec la loi
la régissant (loi n° 05/96 ).

Après avoir met l’accent sur les modalités de saisine et les conditions qui
doivent être réunies pour que le tribunal décide l’ouverture de la liquidation
judiciaire, c’est le moment de se pencher sur le jugement d’ouverture de cette
procédure et ses effets.

91
Tribunal de commerce d’Agadir du 24 mars 2000 ,décision n° 10/2000,dossier n° 05/2000 ,inédite .
58
Partie 2 :

Deuxième partie : Le jugement d’ouverture de


la liquidation judiciaire et ses effets sur le
débiteur et les créanciers.

59
Deuxième partie : Le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire et ses
effets sur le débiteur et les créanciers.

Lorsque l’entreprise est en CDP et sa situation est irrémédiablement


compromise, le législateur a prévu la procédure de liquidation sans perte de
temps et sans tergiverser entre les différentes solutions .La liquidation judiciaire
est considérée comme la procédure la plus simple et la plus rapide .

La liquidation est constat d’échec .L’entreprise ne présente aucune


chance d’être sauvée .L’entreprise va s’éteindre et les emplois vont disparaître et
les espoirs du législateur sont réduits à néant.

On se retrouve dans une situation analogue à celle de l’ancien système


de la faillite .Dans l’absence d’autres objectifs ,la procédure se réduit à
l’apurement du passif c'est-à-dire essayer au maximum de satisfaire les intérêts
des créanciers92 .

La liquidation est une solution à part entière des procédures collectives

(chapitre I), qui va produire des effets irréversibles sur les parties
(chapitre II) .

92
Abdelaziz SQUALLI, Evaluation globale de l’expérience marocaine en matière de difficultés
des entreprises. Colloque organisait par le département du droit des affaires de la fsjes Fès
sur les droit des entreprise en difficultés vingt temps d’application 24 mars 2016.

60
Chapitre I : la solution de la liquidation de l’entreprise

En général, le tribunal prononce la liquidation dans un jugement dont la


nature dépend de la situation de l’entreprise et du débiteur (section 1), et il
confie au syndic sa réalisation (section 2) pour finir par prononcer sa clôture
(section 3).

Section 1 : la nature du jugement de liquidation

En général la liquidation est prononcé par un jugement rendu à l’issu de


la période d’observation .C’est ce qu’on peut qualifier de liquidation directe
autrement dit c’est une liquidation sans passer par les autres solutions de
redressement (§2).

Mais la liquidation peut être prononcée suite à l’inexécution du débiteur


de ses engagements dans la continuation ou l’inexécution du repreneur des
termes de la cession. C’est ce qu’on va appeler liquidation pour inexécution des
engagements (§1 ) .

§1: la liquidation suite à l’inexécution des termes de la continuation : échec confirmé


par les données des tribunaux.

Selon les termes de l’Art 602 du CC .Le tribunal peut prononcer la


résolution du plan de continuation .Mais bien que la loi utilise le terme
résolution ,ce terme ne paraît pas techniquement exact, car il sanctionne
l’inexécution d’un contrat93 ,alors que le plan n’a pas une nature purement
contractuelle .En réalité ,le tribunal rétracte son précédent jugement et lui
substitue une nouvelle décision ,adaptée à la situation actuelle de l’entreprise .Il
s’agit d’une résiliation ,car elle opère seulement pour l’avenir .Elle ne reviendra

93
. Youssef LAHJOUJI, les droits des débiteurs et des créanciers dans le projet de réforme
des procédures collectives : quel équilibre ? Colloque organisait par le département du
droit des affaires de la fsjes Fès sur les droit des entreprise en difficultés vingt temps
d’application 24 mars 2016.
61
pas rétroactivement sur les engagements qui ont été exécutés94.Dans l’Art 602
du CC .le législateur a fixé les conditions requises pour prononcer la résolution
du plan :

1-La non exécution par le débiteur des engagements prévus dans le plan
,quelque soit leur nature ,tel que le non paiement des créances dans les délais
prévus ou procéder à des modifications dans la structure ou l’activité de
l’entreprise .

2-La demande de la résolution faite par un créancier.

3-l’obligation d’entendre l’avis du syndic.

Le même article a autorisé le Tr.Co de se saisir d’office pour prononcer


la résolution comme il lui a donné un pouvoir souverain de refuser la demande
d’un créancier .Ceci est confirmé par le caractère contractuel du plan de
continuation .Mais si le défaut du débiteur est constaté le Tr.Co. va décider la
liquidation judiciaire.

Dés lors, les effets de la continuation vont s’estomper et les créanciers


contractuels au plan vont refaire la même démarche et déclarer la totalité des
créances restantes et leurs sûretés95.

La même mesure s’applique aux créances nées après l’adoption du plan


dont les titulaires doivent, eux aussi, déclarer l’intégrité de leurs créances.

94
V .les obs .de J.P.Haechl.J.C.P.,1989,éd.E,2,15642 .

95
Enquête sous forme de questionnaire auprès de cinquante cabinets les plus représentatifs
dans le domaine du commissariat aux comptes à Casablanca, Rabat et Marrakech.

62
Casablanca Rabat Marrakech Fès Agadir Tanger Meknès Oujda
Tribunal

Demandes 207 21 32 52 55 21 19 16
acceptées

Nb total de 154 11 21 38 34 03 14 04
liquidation

% des 75% 52% 66 % 73 % 62 % 14 % 74% 25%


liquidations

Tableau : Pourcentage de conversion de la continuation en liquidation96

Le tableau ci-dessus montre, qu’à l’exception des Tr.Co de Tanger et


d’Oujda, le taux d’inexécution des plans de continuation atteint des proportions
alarmantes, d’autant plus que nombreux parmi ces plans sont encore en cour
d’inexécution et que la procédure n’est pas encore clôturée pour parle du
sauvetage définitif de l’entreprise.

Pour les Tr.Co de Tanger et d’Oujda le taux de conversion en liquidation


est relativement faible, il est respectivement de 14% et 25% .Il semble indiquer
que ces deux tribunaux ont bien ficelé les plans de continuation ainsi que le suivi
de l’exécution.

Par contre, pour les autres tribunaux plus de la moitié des plans de
continuation se sont soldés par un échec .Alors que pour les Tr.Co de
Casablanca et de Fès les trois quarts des plans de redressement se sont voués à
l’échec et tous les efforts du tribunal ont été réduits à néant.

Mais le plus grave dans la liquidation pour l’inexécution de plan est


qu’elle met en échec aussi bien la loi des procédures collectives que le rôle de la
justice à travers le tribunal .Cette liquidation met en cause le fondement du

96
Ces pourcentages ont été calculés à partir des données des Tr.Co .
63
choix du tribunal et la qualité du plan de continuation et du suivi de son
exécution .

Une fois la liquidation pour inexécution est prononcée, l’entreprise


tombe sous le coup d’une procédure de liquidation classique.

§2 : la liquidation directe : un taux alarmant

En général, la liquidation est prononcée par un jugement rendu à l’issu


de la période d’observation .Elle peut être toutefois décidée dés le jugement
d’ouverture lorsque la continuation n’est pas possible et aucun repreneur ne s’est
manifesté.

La loi de 1996 sur le traitement des entreprises en difficulté est basée sur
une conception dualiste de la procédure .La liquidation judiciaire est une
procédure autonome qui peut s’ouvrir sans période d’observation .La situation
de l’entreprise est désespérée, mais la solution est claire, elle se réduit à un
apurement du passif et uniquement à cela.

En France, la loi de 10 Juin de 1985 avait adopté une conception unitaire


de la procédure parce qu’elle imposait au tribunal de prononcer d’abord un
redressement de la société, et ce n’est qu’après une période d’observation que le
tribunal peut prononcer la liquidation.

Mais cette conception s’est avérée être irréaliste ,car la pratique a montré
qu’il est inutile de passer nécessairement par une procédure de redressement en
1er lieu ,puis la liquidation après une période d’observation si le tribunal a établit
que la situation de l’entreprise est irrémédiablement compromise 97,ce qui va
nécessairement aggraver la situation financière de l’entreprise et compromettre
les intérêts des créanciers .Ceci a poussé le législateur français à faire marche
arrière et revenir à la conception dualiste dans la loi de 10 Juin 1994.

97
Yves Guyon .Op cit.p329.
64
Par le prononcé de la liquidation de l’entreprise, deux objectifs des
procédures collectives ne seront atteints : l’entreprise va disparaître et l’emploi
ne sera sauvé .Le troisième ne le sera que de manière très partielle .Le passif
sera apuré mais généralement les créanciers ne touchent qu’une faible part de ce
qui est leur dû98.

Malheureusement la liquidation est statistiquement la plus fréquente ,car


lorsque la procédure s’ouvre ,il est souvent trop tard pour sauver l’entreprise
.Ceci est confirmé par les statistiques des Tr.Co.qui montre qu’un nombre
important de chefs d’entreprise demande directement une liquidation de
l’entreprise et non son redressement .Ce qui laisse planer des doutes sur les
intentions du débiteur et supposer que l’entreprise a été bien préparée à l’avance
à cette solution .

Casablanca Rabat Marrakech Fès Agadir Tanger Meknès Oujda


Tribunal

Demandes 821 362 246 229 142 110 114 61


acceptées

Demandes 385 172 43 150 45 70 29 28


de
liquidation
% des 49% 48% 18 % 66 % 32 % 64 % 25% 46%
liquidations

Tableau : Pourcentage des demandes directes de liquidation par le chef de


l’entreprise99

A ces liquidations demandées directement par le chefs d’entreprise ,il


faut ajouter les liquidations prononcées à l’issue de la période d’observation

91Infosat Jusitce n°19,janv.1991


99:Ces pourcentages on été calculés à partir des données des Tr.Co.
65
,sans passer par l’une des solutions de sauvetage ,pour accéder au nombre total
des liquidations qualifiées directes.

Casablanca Rabat Marrakech Fès Agadir Tanger Meknès Oujda


Tribunal

Demandes 821 362 246 229 142 110 114 61


acceptées

Nombre 539 183 64 188 79 73 43 52


total
liquidation
% des 66 % 51% 26 % 82 % 56 % 66 % 38 % 52 %
liquidations

Tableau : pourcentage des liquidations directes.

Le taux de liquidation directe est très élevé .A l’exception des Tr.Co de


Marrakech et de Meknès, le taux est supérieur à 50% .Le maximum est observé
au Tr.Co de Fès avec 82% des liquidations directes. Ce taux soulève la question
de l’utilité des procédures collectives et leurs chances de sauver les entreprises
dans un tel environnement.

Mais la liquidation, qu’elle soit prononcée à l’issu de la période


d’observation ou suite à l’inexécution du plan de continuation, conduit
automatiquement à un dessaisissement du chef de l’entreprise qui est remplacé
par le syndic dont la mission, cette ci, est unique et qui consiste à la réalisation
de la liquidation100.

100
Loi 81-14 complétant et modifiant l'intitulé du livre V et l'article 546 de la loi n° 15-95
Code de l’organisation judiciaire.

66
Section 2 : la réalisation de liquidation

En principe, le jugement qui prononce la liquidation maintient le syndic


qui va remplacer le chef d’entreprise, puisqu’il est dessaisi, et doit procéder sans
retard à la réalisation de l’actif par la vente judiciaire des biens de l’entreprise101.

Normalement les ventes judiciaires s’effectuent aux enchères publiques.


En effet, ce principe garantit une concurrence parfaite entre les acquéreurs pour
la vente des différents éléments de l’actif de l’entreprise. Seulement l’expérience
a montré que les ventes aux enchères ne rapportent pas toujours le meilleur prix
et qu’aussi certaines unités de production peuvent avoir encore une certaine
valeur si elles ne sont pas démantelés102 .La loi du 1996 a autorisé deux
mécanismes de vente des biens de l’entreprise .Le premier concerne la cession
d’unités de production (§1) et le deuxième qui est relatif à la vente des biens
isolés (§2).

§1: Cession des biens de production

Il s’agit du cas où l’entreprise à liquider dispose encore des unités de


production rentables, dont il convient d’assurer la survie. Par unité de
production il faute entendre, comme en matière d’apports partiels d’actifs, un
ensemble de moyens matériels et humains permettant l’exercice d’une activité
économique autonome 103et qui peuvent faire l’objet d’une cession globale104.

Le syndic suscite les offres et fixe le délai pendant lequel elles seront
reçues.

101
www.wds.worldbank.org
102
Yves Guyon .Op cit p 330
103
Paris ,27 fèv1990.Rev.trim .dr .com,1990,479,note haehl.
104
(Art 623 CC).

67
L’offre est transmise au syndic dans les délais qu’il a fixé auparavant, et
déposée au greffe .Elle doit être écrite et doit refléter les intentions du
cessionnaire et comprendre les indications des alinéas 1 à 5 de l’Art 604 ,comme
dans le cas de la cession globale de l’entreprise ,pour prouver son engagement
sérieux .

L’offre est communiquée au J.C. qui doit entendre le chef de l’entreprise


et les contrôleurs pour donner leurs avis .Il peut même entendre le propriétaire
des locaux de l’exploitation à céder. Il doit choisir les offres qui donne les
meilleurs garanties pour que l’exploitation pour que l’exploitation de l’unité
cédée soit durable. Il faut préciser que l’offre est décidée par le J.C. et non le
tribunal entier105.

Seulement dans ce cas particulier de cession ,l’Art 623 du CC n’a pas


106
prévu la transmission des contrats nécessaires au maintien de l’activité De
même le législateur n’a pas prévu de sanction à l’encontre du cessionnaire qui
n’exécute pas ses engagements.

§2 : la vente des biens isolés

Par bien isolé, il faut entendre les immeubles ,les meubles corporels
,notamment les stocks et le cas échéant les éléments incorporels du fonds de
commerce (droit de bail ,brevets, marques etc…)107C’est au J.C. , après avoir
entendu le chef d’entreprise ou dument l’appelé ,et après avoir recueilli l’avis

105
http://www.taj.fr/prtail/liblocal/docs/enqu%25c3%25ate/enqu%25c3%25aate%2520insol
vabilit%....
106
com.19 déc .1995,Bull .civ .5,n°303,p 277
107
:B.Soinne, « les modalités de constatation et de réalisation des actifs mobiliers ,fonction essentielle des
juridictions consulaires et de leurs mandataires » ,Rev.Proc,1988 ,1.

68
des contrôleurs ,que revient le droit de fixer les formes de vente de ces biens108
(Art 624 CC).Ainsi la vente peut être soit :

. De gré à gré ,aux conditions fixés par le J.C. une certaine

publicité serait souhaitable pour tirer le prix maximum du bien vendu109

. Adjudications amiables c'est-à-dire généralement par l’intermédiaire

d’un notaire. Une surenchère sera possible110

. Vente judiciaire c'est-à-dire vente aux enchères.


Cette diversité des formes de vente des biens de l’entreprise montre la
souplesse des mécanismes de la liquidation judiciaire qui devrait être exploitée
dans l’intérêt des créanciers et garantir les meilleurs prix des ventes.

Section 3 : La clôture de la liquidation

La liquidation judiciaire est considérée comme la procédure la plus


simple et la plus rapide .A tout moment le tribunal peut prononcer sa clôture.

Deux cas de figures sont envisageables111 :

.Le plus souvent la procédure prend fin sans que les créanciers
aient été payés en totalité .Le tribunal prononce alors une clôture avec
insuffisance d’actif ou pour insuffisance d’actif112.

108
S.Jaffrain, «modalités de vente d’un fonds de commerce dans le cadre d’une liquidation
judiciaire »,J.C.P,1993.Ed.E ,I ,205
109
Yves Guyon .Op cit .p 332 .
110
« 991 ‫ عبد الرحيم شميعة إجراءات الوقاية و المعالجة من صعوبات المقاولة مرجع سابق ص‬.

111
http://www.cours-de-droit.net-entreprise.en.difficulté

69
. Il arrive que la procédure prenne fin parce que tout le passif a été
payés113On parle alors de clôture pour extinction du passif. Seulement ce cas de
figure soulève une interrogation sur le choix de la solution, parce que si tout le
passif est payable c’est que l’entreprise était susceptible de redressement et que
le tribunal aurait dû prononcer la continuation de l’entreprise.

Le tribunal peut même refuser la liquidation judiciaire ,malgré que


l’entreprise soit en CDP et que la situation est irrémédiablement compromise
,pour motif d’absence totale d’actif. En effet ,la liquidation est prévue pour
apurer le passif par l’actif existant ,par conséquent l’absence d’actif rend la
114
demande de liquidation irrecevable étant donné que dans ce cas elle ne peut
pas produire ses effets .

Chapitre 2 : Les effets de la liquidation judiciaire

La liquidation judiciaire a pour objectif unique la réalisation de l’actif de


l’entreprise pour liquider et le répartir entre les créanciers ,autrement dit à ce
niveau la liquidation judiciaire este envisagée pour assurer au maximum la
protection des créanciers .Pour cette raison la loi marocaine 15-96 a prévu
plusieurs effets de la liquidation les uns à caractère financier et d’autres à
caractère sanctionnateur. Les effets doivent s’apprécier ici à un double point de
vue : à l’égard du débiteur (section 1) et à l’égard des tiers (section 2 ) .

112
Avec insuffisance d’actif lorsque la procédure va jusqu’à son terme et s’arrête faute d’actif ,alors que pour
insuffisance d’actif lorsque la procédure est arrêtée prématurément parce qu’il n’y a pas de fonds disponible
parfois même pour couvrir les frais de la procédure .).

113
:Jugement du Tr.Co. de Fès :12 N°2-2001-6 du 30/03/2010 .Non publié.).
114
(Arrêt du Tr.Co. de Fès :06-84 du 21/12/2006 Dossier n°16-12-2006 .Non publié )
70
Section 1 : les effets très lourds à l’égard du débiteur

Un jugement qui prononce la liquidation, entraîne de plein droit des


effets légaux à l’égard de tout débiteur (§1), mais la loi a prévu aussi des
sanctions très particulières à l’égard du débiteur diligent (§2).

§1 : Les effets légaux à l’égard du débiteur

Désormais avec la liquidation, la survie de l’entreprise est exclue.


Aucun motif ne justifie que le débiteur demeure à la tête de son entreprise .Bien
au contraire, le législateur a estimé que sa présence peut être un obstacle à la
réalisation de la liquidation et peut défavoriser les intérêts des créanciers.

Son écartement est une mesure préventive et désormais son patrimoine


est administré par le syndic115

Le jugement de liquidation entraine de plein droit le dessaisissement du


débiteur de la gestion de ses biens au profit du syndic conformément aux
dispositions de l’alinéa 3 de l’Art 619 du CC :

« Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein


droit dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de
ses biens ….Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont
exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le syndic ».

Ce dessaisissement ,qui n’est pas considéré comme une incapacité ou


une sanction mais juste une mesure de sécurité ,a en principe une portée
générale .Il s’applique au débiteur à dater du prononcé du jugement et non de sa
publication. Il s’applique à tout le patrimoine du débiteur aussi bien présent,
c’est-à-dire ceux qui figurent dans son patrimoine au jour du jugement ouvrant
la procédure, qu’avenir c'est-à-dire ceux qui peuvent échoir au débiteur par
donation ou succession.

115
M.N.Legrand « Les pouvoirs du débiteur dessaisi »,Rev.Proc.Coll. ,1991 ,11.
71
Le dessaisissement est général. Il s’applique en principe à tous les actes
que peut accomplir le débiteur .De même il s’applique aux actions en justice tant
en demande qu’en défense .L’acte de procédure accompli par le débiteur seul est
frappé d’une irrecevabilité d’ordre public116.Les instances en cours sont
interrompues et doivent être reprises par le syndic ou à son encontre117.

Cependant, malgré la généralisation du dessaisissement du débiteur il


conserve le droit d’accomplir certaines tâches .Ainsi, il peut accomplir seul des
actes conservatoires .Ces actes ne présentent aucun danger pour les créanciers .Il
en va de même pour les biens insaisissables, qui échappent au dessaisissement
118
car ils ne peuvent être vendus au profit des créanciers .Enfin, le débiteur
conserve le droit de conduire librement et seul sa vie personnelle.

Mais la liquidation peut avoir comme effets, à l’égard de certains


débiteurs, des sanctions particulières119.

§2-Les sanctions particulières à l’égard du débiteur diligent.

Dans des circonstances particulières ,la liquidation judiciaire peut avoir


des effets indirects sur le débiteur .Normalement la liquidation s’applique à
l’entreprise et uniquement à celle-ci .Mais si le débiteur a commis des fautes il
s’expose à des sanctions .C’est ainsi que la loi de 1996 a opéré une distinction
de plus en plus nette entre le chef d’entreprise malheureux ,victime des
circonstances économiques défavorables ,et celui malhonnête qui conduit
sciemment son entreprise à une situation irrémédiablement compromise 120

116
Com .22 mars 1960 ,Bull.civ. 3,n° 112 p.102.
117
Civ,2,6 mars 1991 ,Bull.civ.2,n° 78 .p 43,D,1992 ,somm.88,note Derrida.
118
Com ;11 Juill,1995,Bull.civ.4 ,n°209 .p 195
119
www.l’entreprise.lexpress.fr/difficultés.fr
120
C.Saint-Alary-Houin « Morale et faillite ,dans ,la morale et le droit des affaires »,Montchrestein ,1996.p 159
72
En principe, la liquidation devrait se limiter à la personne morale ,sans
rejaillir sur les associés ou les dirigeants ,mais la loi de 1996 a prévu des
exceptions qui rapprochent la situation des dirigeants et de certains associés de
celle des commerçants personnes physiques .Ils peuvent eux aussi encourir des
sanctions pécuniaires (1) ,personnelles (2) voir même pénales (3) .

1- Les sanctions pécuniaires infligées au débiteur .

Le débiteur personne physique qui subit la liquidation n’a qu’un


patrimoine constitué par les biens à usage professionnel et aussi ses biens
personnels, qui dans le cas échéant seront vendus pour payer les créanciers et
risque une ruine illimitée .

La situation est différente lorsque le débiteur est une personne morale


.En principe, la liquidation est limitée au patrimoine de la société .Mais ,comme
la pratique a révélé des abus de la part des dirigeants et même parfois des
associés ,le législateur a fini par lever le voile de la personnalité morale afin
d’atteindre les dirigeants et les associés responsables de la CDP.Les sanctions
peuvent se limiter dans certains cas à une obligation de combler le passif par les
dirigeants(a) alors que dans d’autres cas la procédure peut être étendue aux
dirigeants et aux associés (b),on mettra enfin l’accent sur l’inadaptation du
régime de la sanction applicable (c)

a-Le comblement de l’insuffisance d’actif par les dirigeants121.

Au cours de la procédure si le tribunal est convaincu que les dirigeants


on contribué à une insuffisance de l’actif, il peut les condamner à combler

121
décision du 5 juillet 2000, dossier numéro 5/200/3,in,ABDELHAK NACARI BENNANI, n
31/2001,p.262 ;arrêt n 1865/99 du 30 novembre 1999,dossier n 3006/99

73
partiellement ou totalement l’insuffisance constaté .En effet ,selon l’Art 704 du
CC :

« Lorsque la procédure concernant une société commerciale fait


apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut ,en cas de faute de gestion
ayant contribué à cette insuffisance d’actif ,décider que cette dernière sera
supportée ,en tout ou en partie ,avec ou sans solidarité ,par tous ses dirigeants ou
seulement certains d’entre eux ».

L’obligation de combler le passif suppose une décision librement


appréciée par le tribunal D.Plantamp122 . .Mais l’Art 704 CC .mentionne
expressément la faute de gestion. Il faut que la faute existe et qu’elle soit
constatée par le tribunal, indépendamment de l’insuffisance de l’actif, à
condition qu’elle ait contribué à l’insuffisance de l’actif.

Ainsi ,il est retenu comme faute la non déclaration de la CDP dans le
délai de quinze jours de sa constatation malgré l’accroissement des pertes et la
diminution des biens de la société qui auraient pu être évités par un
redressement de la situation à temps où la continuation de l’activité d’une
manière abusive ,ce qui conduit à un accroissement du passif de tel sorte qu’il ne
peut pas être comblé par l’actif .

De même ,les dirigeants qui ne cherchent pas la restitution des biens et


des créances de l’entreprise ou qui procèdent à des investissement non adaptés à
la taille et aux moyens financiers de l’entreprise, ceux aussi qui ne procèdent pas
à la convocation de l’assemblée générale à temps ou ne prennent pas les mesures
nécessaires de prévention prévues dans l’Art 546 du CC ou ne prêtent pas
d’attention à l’alerte de C.A.C. peuvent eux aussi tomber sous le coup de l’Art
704 du CC .

122
« Contribution à la recherche de certaines responsabilités encourues en cas de défaillances d’une société
commerciales » thèse Grenoble ,1987
74
Pour le comblement du passif les dirigeants le tribunal peut se saisir
d’office ou à la demande du syndic .Les créanciers ne peuvent pas intenter
l’action alors qu’ils sont les premières victimes de l’insuffisance d’actif123

Le dirigeant est dûment convoqué devant le tribunal statuant en chambre


de conseil pour lui permettre de présenter ses moyens de défense en présence du
syndic.

Par la suite ,le tribunal statue en audience publique après avoir entendu
le rapport du J.C (Art 709 CC) .Il a un pouvoir d’appréciation souverain pour
fixer la somme que le dirigeant doit verser pour combler le passif ,sans pour
autant que la somme dépasse l’insuffisance d’actif124

En cas de pluralité des dirigeants, c’est également le tribunal qui décide


s’il y a ou non lieu à la solidarité entre eux125

Les sommes versées par le (les) dirigeant(s) sont réparties doit verser la
somme qui a été mise à sa charge .Dans le cas échéant, il risque l’extension de la
procédure.

b-l’extension de la procédure aux dirigeants .

L’ouverture d’une procédure collective et le prononcé de la liquidation


judiciaire d’une entreprise dont la situation est irrémédiablement compromise
vise à assainir le milieu des affaires et cherche à protéger les droits des
créanciers .Mais le législateur marocain ,à l’instar des autres législations ,a
instauré la règle de l’extension de la procédure à tous ceux qui ne sont pas

123
Com.8 janv.1985,D,1987 ,88 note F .Derrida.).
124
Com.20déc.1988,Rev.Soc,1981 ,502,note A.Honorat. « le montant des condamnations est très variable .Le
record en France est de 400 millions de francs dans une affaire où le passif dépassait deux milliards de
francs ».Paris,18 juin 1991,Rev,Soc,1991,somm.827 .
125
Yves Guyon .Op cit.p423 .
75
acquittés de l’insuffisance du passif qui est à leur charge ou ont accompli des
actes qui ont conduit à la CDP de l’entreprise.

L’extension de la procédure a des conséquences plus graves que


l’extension du passif .Le dirigeant, en plus de l’obligation de payer les dettes de
la société, est soumis à tous les inconvénients et à toutes les restrictions de
pouvoirs qui résultent de l'ouverture de la procédure.

L’extension de la procédure judiciaire d’une personne morale à ses


dirigeants est une sanction .Elle ne peut pas avoir un caractère automatique .Elle
est prononcée par le tribunal, mais elle suppose des manquements précis et
prouvés126

Cette extension est possible dans deux cas de figures. Soit le dirigeant
n’a pas comblé la partie du passif que le tribunal a déclaré à sa charge soit il a
commis une faute de gestion énumérées à l’Art 706 du CC.

. Non comblement du passif par le dirigeant :


« Le tribunal doit ouvrir une procédure à l’égard des dirigeants à la
charge desquels a été mis tout ou une partie du passif d’une société et qui ne
s’acquittent pas de cette dette ».

Selon les dispositions de cet article (Art 705 CC) ,le législateur a estimé
que les dirigeants reconnus responsables de l’insuffisance du passif et qui se
sont abstenus de rembourser les sommes auxquelles ils étaient condamnés ,le
tribunal doit prononcer l’extension de la procédure à ses dirigeants.

Mais cet article est ambigüe .En effet, si l’entreprise fait l’objet d’une
liquidation et que les conditions sont réunies, le tribunal doit étendre la

126
Artz « l’extension du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens aux dirigeants
sociaux »,Rev.Trim.dr.com.,1975,1. ) .
76
procédure aux dirigeants sans préciser pour autant sa nature à savoir est-ce qu’ils
vont être soumis à un redressement ou vont connaître le même sort que
l’entreprise c'est-à-dire la liquidation ?

La doctrine marocaine ne voit aucun inconvénient à ce que le tribunal


soit souverain dans les choix de la procédure à étendre aux
dirigeants .Seulement, on peut s’interroger sur l’utilité de l’ouverture d’une
procédure de redressement à l’encontre des dirigeants dont la société est en
liquidation. Serait-il alors possible de faire sortir la société de la liquidation et la
faire entrer dans une phase de redressement127.

A notre avis ,il serait logique ,dans la mesure où l’extension de la


procédure a tété envisagée essentiellement pour contraindre les dirigeants à
payer les sommes dues à l’entreprise en liquidation dans l’intérêt des créanciers
,que le tribunal prononce l’extension de la liquidation aux dirigeants et éviter
aux créanciers les supplices du redressement.

. Fautes des dirigeants énumérées à l’Art 706 du CC .


Cette fois l’extension est une sanction du comportement du dirigeant .Le
législateur marocain qui a instauré des règles de gestions modernes à travers une
approche globale de la bonne gouvernance des entreprises ,a prévu aussi des
moyens de dissuasion à l’encontre des dirigeants qui font passer leur intérêt
personnel avant l’intérêt général de l’entreprise128.

L’Art 706 du CC . permet l’extension de la procédure non pas aux


dirigeants qui ont commis de simples fautes de gestion du type imprudence ou
négligence qui nécessite une simple obligation de combler l’insuffisance du
passif, mais à l’égard de ceux contre lesquels est révélé l’un des faits suivants :

127
619 ‫ عبد الرحيم شميعة اجراءات الوقاية و المعالجة من صعوبات المقاولة مرجع سابق ص‬.
128
Jugement Tr.Co. Casablanca n° 330/2001 du 19/11/2001.Numéro de dossier : 141/2001/10 .Non publié .
77
- Avoir disposé des biens de la société comme des biens
propres .

Le dirigeant est supposé accomplir des actes dans l’intérêt de l’objet


social de la société ,mais s’il fait un usage abusif de ses biens pour un profit
personnel ,tel qu’au mépris des lois sur les sociétés ,il se fait consentir des
avances par la société ,fait cautionner par elle des dettes ou encaisse à son
propre des sommes qui reviennent de droit à la société129.

- Faire des actes de commerce dans un intérêt personnel ,sous


le couvert de la société marquant ses agissements.

Le dirigeant peut user d’une couverture de la société pour conclure des


contrats dans un intérêt personnel .l’utilisation de la société comme couverture
pour masquer les vrais agissements personnels du dirigeant est passible d’une
extension de la procédure .C’est le cas notamment lorsque le dirigeant spécule ,à
la bourse ,au non de la société130.

Cependant, il faut exclure de cette catégorie les cas où il a obtenu


l’accord de la société pour conclure les contrats libres ou autorisés tels quels
sont réglementés par la loi sur les sociétés du 17/95 modifiée et complétée ,et la
loi du 05/96.

- Faire des biens ou du crédit de la société un usage à des fins


autres que l’intérêt de la société .

Pour protéger la société et couper court à tout agissement du dirigeant de


nature à compromettre les intérêts de la société ,au regard de l’Art 706 du CC ,le
législateur a sanctionné par l’extension tout acte irrégulier de disposition des
biens ou des crédits de la société ,fait soit dans l’intérêt direct du dirigeant131ou

129
20 janv.1987.Soc.1987,273 note A .Honorat.
130
Com.20 juill.1973,J.C.P. ,1973 ,4,344 .
131
Arrêt C.Cass.Rabat du 23/10/2002 .Non publié.
78
d’une entreprise qu’il contrôle ou qui l’intéresse directement ou indirectement
132
.

- Poursuivre abusivement ,dans un intérêt personnel ,une


exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à une CDP .

Certains dirigeants essaient parfois de camoufler la situation réelle de


l’entreprise .Pour sauver la face ils continuent à diriger l’entreprise en difficulté
au risque de la conduire à la CDP 133 .Dans ce cas l’extension de la procédure est
envisageable à condition d’évaluer l’intention du dirigeant .Pour cela ,il faut
prouver que l’exploitation était maintenue arbitrairement dans un intérêt
personnel .

- Tenir une comptabilité fictive ou faire disparaître des


documents comptables ou s’abstenir de tenir une comptabilité
conforme .

En principe, la comptabilité doit donne une image réelle et fidèle de la


situation de l’entreprise .C’est le principal document technique qui permet aux
associés, aux tiers et aux CAC .ainsi qu’à la justice de déterminer la situation
financière exacte de l’entreprise.

Vu sous cet angle et vu l’importance de la comptabilité dans la vie des


134
sociétés, tout manquement aux obligations comptables des commerçant fait
présumer que des biens sociaux ont été appréhendés par le dirigeant.

132
Com.11 juillet .1987,Rev.Soc,1980,161,note Sortais.
133
12 nov.1990.Bull .civ.4,n°276 .p193.
134
Com .28 mars 1995,Bull.civ.4,n°107,p94
79
- Détourner ou dissimuler tout ou partie de l’actif ou
frauduleusement augmenté le passif de la société .

Par tous ses agissements, le dirigeant a plus ou moins confondu le


patrimoine de la société avec son propre patrimoine. Il y a confusion entre les
biens sociaux et les biens personnels .L’extension de la procédure va permettre
aux créanciers de poursuivre le dirigeant sur ses biens .

- Tenir une comptabilité manifestement incomplète ou


irrégulière .

Même si le dirigeant n’a pas cherché à dissimuler des documents


comptables ou tenir une comptabilité fictive ou refuser de tenir toute
comptabilité, mais juste le fait de la tenir incomplète ou d’une manière
incorrecte expose le dirigeant à une extension de la procédure.

On en conclut que le fait de ne pas tenir une comptabilité complète,


régulière et claire selon les règles comptables en vigueur est suffisant pour
l’extension .

Enfin ,il reste à préciser que même lorsque le dirigeant se trouve dans un
cas visé par l’Art 706 du CC .Le tribunal a un plein pouvoir d’appréciation ,Il
peut donc juger que le comportement du dirigeant est excusable et ne pas
prononcer l’extension de la procédure contre lui135.

135
Com .13 nov.1979,Rev.Jurisp.Com.1981,331,note du Cheyron .

80
L'action en comblement de l'insuffisance136 d'actif sert aujourd'hui à la
fois de l'action en responsabilité spéciale et de la sanction.

En tant que responsabilité spéciale, l'article 704 du code du commerce


137organise une responsabilité collective des dirigeants de droit. En
conséquence, lorsqu’une fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif
a été commise par la direction d'une société anonyme à conseil d'administration,
l'application de l'article 704 va conduire à la mise en jeu de la responsabilité
collective de tous les administrateurs civils, qu’ils aient ou non participé
personnellement aux décisions fautives.

Certes, les juges puisent dans le premier alinéa de cet article un pouvoir
modérateur qui leur permet, une fois le principe de responsabilité collective
retenue, de modifier les condamnations en fonction de la situation de chacun des
administrateurs, voire d'exonérer certains d'entre eux de toute condamnation si
cela paraît équitable. il n'en reste pas moins que l'article 704 pose un principe de
responsabilité collective contraire aux principes fondamentaux du droit
marocain de la responsabilité qui veut que chacun ne soient responsables que
des ses propres fautes.

Ce texte peut avoir des effets pervers sur les administrateurs. Le cas des
administrateurs

salariés mérite d’être spécialement mentionné. Il est difficile d’admettre


qu’un cadre salarié qui, à titre de promotion interne, a été nommé administrateur

136
(bas de page : Il convient de constater qu'aucune décision jurisprudentiel ne donne application à l'article 704
et par voie de conséquence à l'article 705 malgré la mention expresse de ces deux articles dans le corps des
jugements ;exemple. (Jugements du tribunal de commerce.cas n174/2004 du 21-06-2004-n 118/2004 du 26-04-
2004 ;-N111/2004 du 19-04-2004-n 329/2002 du 29-07-2002 ; n 253/2002 du 24-06-2004-N 233/2001 du 31-07-
2001
137
Lorsque la procédure concernant les sociétés commerciales fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal
peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que cette dernière sera
supportée, en tout ou en partie, avec ou sans solidarité, par tous ses dirigeants our seulement certains d'entre eux.
81
d’une société anonyme familiale souvent avec peu d’actions, puisse être rendu
responsable avec les administrateurs, actionnaires majoritaires, d’une
insuffisance d’actif. Ceci risque d’aller à l’encontre des règles du gouvernement
d’entreprise, en dissuadant des actionnaires minoritaires d’accepter des postes
d’administrateurs au sein du conseil.

Par ailleurs, l'article 705 du code du commerce met à la charge du


tribunal obligation d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire ou de
liquidation judiciaire à l'égard des dirigeants à la charge desquels a été mis tout
ou partie de l'insuffisance d'actif d'une personne morale et qui ne s'acquittent pas
de cette dette.

L’article 706 du code du commerce constitue un autre cas d’utilisation


de l’ouverture d’une procédure collective comme sanction à l’encontre des
dirigeants contre lesquels auraient été relevés certains faits et des agissements
frauduleux. Face à ses intentions frauduleuses et à des agissements nuisibles aux
créanciers et à l’entreprise, les juges n’hésitent pas à recouvrir de manière quasi
automatique à la sanction d’extension de la procédure judiciaire.

Par ailleurs, un certain nombre de fautes permettant l’ouverture d’une


procédure de redressement ou de liquidation judiciaire constituent des fautes
pénales de droit commun ou de droit des sociétés qu’il est possible de
sanctionner sur cette base.

Mais selon la gravité des erreurs commises par le dirigeant, ce dernier


risque même des sanctions personnelles.

82
2- LES SANCTIONS PERSONNELLES INFILIGEES AU
DEBITEUR .

Traditionnellement, la faillite avait un aspect répressif. Celui ci était très


marqué dans l’ancien droit qui préconisait des sévices corporels sur le
commerçant défaillant138 .Cette répression s’est peu à peu atténué. On est passé
d’une sanction corporelle à une sanction limitée à ses biens et à certains de ses
droits .La loi a opéré une distinction entre le sort de l’entreprise et celui de
débiteur. Le livre 5 de la loi 15-95 a conservé la sanction de la déchéance
commerciale de l’ancienne loi de la faillite.

Mais ces sanctions personnelles ne sont encourues que dans les cas les
plus graves, et la loi traite de la même manière les personnes physiques et les
dirigeants sociaux139.

Les sanctions personnelles ne s’appliquent qu’aux personnes physiques.


Elles sont toujours la conséquence d’une procédure collective ouverte contre
elles ,soit directement soit contre la personne morale qu’elles dirigent. On peut
aussi ajouter les dirigeants des groupements d’intérêt économique à caractère
140
commercial .

Cependant ,les causes de ces sanctions diffèrent selon la nature de la


personne physique .En effet ,pour les dirigeants des personnes morales ,le
tribunal doit se baser sur les actes énumérés à l’Art 706 du CC. déjà étudiés au
paragraphe de l’extension de la procédure aux dirigeants .Par contre ,pour les
commerçants et les artisans ,le tribunal peut évoquer les actes énumérés à l’Art
712 du CC. Pour prononcer la déchéance commerciale :

138
Szramkiewicz, « Histoire du droit des affaires »,n°748.
139
D.Tomasin, « Les sanctions civiles et professionnelles applicables aux dirigeants sociaux »,Annales
Université Toulouse 1986 ,267 .
140
903 ‫عبد الرحيم شميعة اجراءات الوقاية و المعالجة من صعوبات المقاولة مرجع سابق ص‬
83
- Avoir poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui
ne pouvait conduire qu’à la CDP .

Cette cause est justifiée ,car le maintien artificiel de l’activité défaillante


entraîne une diminution de l’actif de telle sorte que les créanciers ne pourront
pas être payés .

- Avoir omis de tenir une comptabilité conformément aux


dispositions légales ou fait disparaître tout ou partie des documents
comptables.

La comptabilité permet de fixer l’actif et le passif du commerçant .

Son absence compromet les droits des créanciers. Seulement dans les cas
de l’artisan, qui n’est pas tenu d’avoir une comptabilité, il serait difficile de
retenir cette cause.

- Avoir détourné ou dissimulé tout ou une partie de l’actif ou


frauduleusement augmenté son passif.

Un tel comportement montre la mauvaise foi du commerçant qui cherche


intentionnellement à réduire les chances de paiement des créanciers141.

Alors que l’Art 714 du CC Énumère les faits qui pourront conduire le
tribunal à prononcer la déchéance de tout dirigeant d’entreprise c'est-à-dire les
causes communes aux dirigeants, aux commerçants et aux artisans :

- Avoir exercé une activité ou des fonctions dans des


conditions irrégulières

141
Jugement Tr.Co. Casablanca n° 330/2001 du 19/11/2001 .Numéro de dossier : 141/2001/10 . Op cit

84
C’est le cas où l’activité est exercée dans la méconnaissance d’une
interdiction ,d’une déchéance ,ou sans les autorisations nécessaires .

- Avoir acheté pour vendre en dessus du cours, ou employé des


moyens ruineux pour reconstituer des fonds dans le seul but d’éviter
l’ouverture d’une procédure.
- Avoir accepté, au profit d’autrui, des engagements très
importants pour l’entreprise.
- Avoir payé, de mauvaise foi ,un créancier au détriment des
autres pendant le période suspecte.
- La non déclaration, dans le délai de quinze jours, de la CDP .

Enfin ,la déchéance peut être prononcée à l’encontre du dirigeant qui ne


s’est pas acquitté de l’insuffisance d’actif auquel il a été condamné .

La déchéance commerciale est à la foi une sanction disciplinaire et une


142
mesure de sûreté .A titre principal ,elle entraîne automatiquement ,selon les
Art 711 et 718 du CC ,l’interdiction d’exercer une activité commerciale ou
artisanale et de diriger toute personne morale ayant une activité économique .Le
faillit est malhonnête ou gravement incompétent ,il mérite d’être écarté du
milieu des affaires .

La déchéance emporte aussi l’incapacité du failli d’exercer une fonction


publique électorale .Une personne malhonnête ou incompétente en affaires n’est
pas digne d’assumer des fonctions électorales ou sociales à caractère public,
c’est-à-dire d’intérêt public .En France, cette incapacité vise principalement les
magistrats consulaires143.

142
W.Jeandidier,«Droit criminel et droit de la faillite »,n° 11 ,Etudes Roblot p 501 ,Paris 1984 .
143
Yves Guyon .Op cit.p 451
85
A titre secondaire, le dirigeant failli est déchu de ses droits de vote dans
les assemblées de la société .Ce droit est exercé par un mandataire désigné par le
tribunal à la requête du syndic.

De même le tribunal peut ordonner la cession des parts sociales ou des


actions des dirigeants.

La vente peut être forcée .Elle sera réalisée par les soins d’un mandataire
de justice .Cette mesure a une double portée .D’une part le prix de la vente va
contribuer à combler l’insuffisance d’actif. D’autre part ,elle va conduire à
évincer complètement et définitivement le dirigeant de son entreprise par la
perte de pouvoir attaché à la possession des droit sociaux144.Le tribunal qui
prononce la déchéance prend fin à l’expiration de la durée fixée par le tribunal
de plein droit sans qu’elle soit inférieure à cinq ans ,mais elle ne doit pas être
perpétuelle (Art 719 CC). Elle prend effet à dater de sa notification à l’intéressé,
et doit être publiée au B.O .

En général, la déchéance prend fin à l’expiration de la durée fixée par le


tribunal de plein droit sans nécessiter un nouveau jugement .Mais le failli peut
demander au tribunal la réduction de la durée ou son annulation carrément s’il a
apporté une contribution suffisante au comblement du passif (Art 720 CC).

La déchéance peut aussi prendre fin par la clôture de la procédure pour


extinction du passif lorsque tous les créanciers ont été intégralement payés .

La faillite et la déchéance commerciale constituent des sanctions très


lourdes .Mais si le débiteur ou le dirigeant a commis des actes spécialement
indignes il risque des sanctions plus graves : les sanctions pénales de la
banqueroute.

144
Yves Guyon ;D.,1995,note G.Parléni.

86
L’analyse des décisions jurisprudentielles relativement à la sanction de la
déchéance commerciale, démontre un recours quasi systématique de cette
sanction. On observe également une certaine unanimité concernant la durée de
cette déchéance, fixée pratiquement par tous les jugements à cinq ans, durée
minimale des sanctions prévues par l’article 719 du code du commerce. Or la
définition d’une durée minimale est critiquable car il ne permet pas une
adaptation en fonction de la gravité de la faute, qui paraît pourtant nécessaire.

3- LES SANCTIONS PENALES INFLIGEES AU


DEBITEUR .

Le législateur marocain a énuméré les délits constitutifs de délit de


banqueroute dans l’Art 721 du CC (b).Mais cette législation mérite certaines
réflexions(a)145.

a-Réflexions sur la législation qui organise les délits de


banqueroute.

Tout d’abord, le C.C n’a pas abrogé les dispositions de l’ancienne loi
concernant les mêmes délits .Ce qui a entrainé la jurisprudence dans une
confusion et a soulevé un grand débat sur les règles légales applicables.

D’autres part, selon l’Art 726 du CC ,la compétence est attribuée à la


juridiction répressive du tribunal de première instance .Ceci est en
contradiction avec les dispositions de l’Art 566 du CC. :

« Le tribunal qui a ouvert la procédure de traitement est compétent pour


toutes les actions qui s’y rattachent ».

145
A.Squali« Les obstacles au rôle de l’entreprise dans l’édification du maghreb:l’entreprise
en difficulté » Publication de l’Université d’hiver de Marrakech.1993.

87
Dans la pratique, cette disposition est inefficace car on voit mal
comment un Tr.Co,qui a instruit toute la procédure concernant une entreprise
en difficulté ,va à la fin confier les délits de la banqueroute à un autre
tribunal,d’autant plus que les Tr.Co disposent eux aussi d’un parquet.

Enfin ,la loi du 15-95 a opéré à la foi une dépénalisation et une


unification des délits de la banqueroute ,car d’un côté elle a supprimé les
anciens cas de banqueroute simple pour ne retenir que les agissements qui
constituaient autrefois la banqueroute frauduleuse et d’un autre côté elle a
généralisé la sanction ,sans distinction ,aux commerçants, aux artisans et aux
dirigeants des personnes morales qui commettent le délit de banqueroute.

d-les délits de la banqueroute

Le délit de banqueroute suppose la réunion de trois éléments146 .D’abord


il faut l’existence d’une procédure collective, puis des faits volontaires qui
s’apparentent à des faux ou à des détournements, enfin que ces actes orient
commis par un commerçant, un artisan ou un dirigeant d’une personne morale .

Les faits en question sont énumérés à l’Art 721 du CC .Il sont peu
nombreux et définis d’une manière imprécise147

-Acheter en vue de revendre au dessous du cours ou employer des


moyens ruineux pour se procurer des fonds pour retarder la CDP .

- Détourner ou dissiper une partie de l’actif .Par conséquent


l’organisation volontaire de son insolvabilité est un délit .

146
J.PAILLUSSEAU. ; le droit est aussi une science d’organisation.RTD com.1989 .
147
Derrida ,Dodé et Sortais , «redressement judiciaire »,n°474 .

88
-Augmenter frauduleusement le passif.

Cette fois ci le débiteur cherche à augmenter le passif au profit d’autrui


qui est le plus souvent un complice.

-Tenir une comptabilité non conforme aux règles en vigueur, elle


peut être fictive ou irrégulière ou carrément inexistante.

Selon l’Art 722 du CC . la banqueroute est punie de peines


correctionnelles d’emprisonnement d’un à cinq ans et une amende de dix milles
à cent milles dirhams ou seulement l’une de ces peines .Les mêmes peines
s’appliquent aux complices même s’ils n’ont pas la qualité de commerçant .

Il reste à préciser que ces peines sont doublées si le banqueroutier est


dirigeant d’une société côté en bourse.

Quant aux sanctions pénales148, malgré la rareté des condamnations


prononcées par les juridictions marocaines, le dispositif légal demeurent
extrêmement sévère à l’encontre des dirigeants sociaux. En effet, il apparaît que
notre dispositif légal prévoit des cas de banqueroute qui sont déjà prévus par
d’autres textes. En application de l’alinéa 1 de l’article 721 du code du
commerce, constitue un cas de banqueroute le fait « d’avoir, dans l’intention
d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de traitement, soit fait des
achats en vue d’une revente au dessous du cours, soit employé des moyens
ruineux pour se procurer des fonds ». Or cette situation est déjà visée par la
défaillance commerciale149.

148
Quant au délit de banqueroute, on constate la rareté des condamnations .Quant au contenu des peines
prononcées, il s’agit de peines trop faibles pour ne pas dire dérision dérisoire qui ne peuvent avoir aucune vertu
de dissuasive. Ca varie entre deux mois et quatre mois avec sursis, Assorti de dommages et intérêts entre 6000 et
40 000 dirhams.
149
Article 714 alinéa 2 du code du commerce.
89
Les effets de la liquidation ne se limitent pas au débiteur et aux
dirigeants mais ils sont néfastes pour les tiers : les créanciers.

Section 2 : les effets néfastes de la liquidation a l’égard des créanciers.

Il va de soi que la liquidation d’une entreprise quelque soit sa taille et


son activité produira des effets énormes sur les créanciers.

Cependant, le principe d’égalité entre les créanciers dans le redressement


et la liquidation judiciaire des entreprises est-il toujours l’âme du droit des
procédures collectives ? la règle de l’égalité entre les créanciers, conçue
traditionnellement comme une règle dont la fonction était d’assurer le paiement
le plus égalitaire possible des créanciers chirographaires d’un failli connait un
déclin irréversible, faute d’effectivité .Elle n’est en effet ,qu’une égalité devant
150
le néant .La cause de cette infortune est bine connue ,elle réside dans
l’inflation des privilèges et garanties de tout genre qui absorbent la totalité de
l’actif du débiteur .

En définitif, Tous les créanciers sont atteints par les procédures


collectives et plus particulièrement par la liquidation judiciaire de l’entreprise
.Mais ils ne le sont pas de la même manière .Il faut opérer une distinction entre
les créances antérieures au jugement, qui prononce la liquidation , (§1) et les
créances nées après ce jugement (§2) .

§1– les créanciers antérieurs au prononce de la liquidation ; rupture du principe


d’égalité

La liquidation judiciaire rend toutes les créances exigibles, mais en


même temps elle interdit aux créanciers d’agir individuellement, car seul le
syndic a la qualité pour agir dans l’intérêt des créanciers et en leur nom (Art 642

150
Larribau-Viala Ysaline . « le principe d’égalité des créanciers dans les procédures collectives,
Thèse .Université des sciences sociales Toulouse 1.2001 .

90
du CC ).Ces derniers vont subir les mêmes interdictions que celles prévues
pendant la période de la préparation du plan (Art 653 du CC ).

Tous les créanciers sont atteints par la procédure de liquidation


.Cependant, ils ne le sont pas tous de la même manière .En effet, la liquidation
laisse subsister des causes de préférence, quant au paiement des créances, qui
résulte des privilèges et des sûretés .Du coup les créanciers chirographaires vont
en faire les frais car il est rare que l’actif soit conséquent pour qu’ils espèrent
être payés même partiellement sur une partie de leurs créances.

La détermination des diverses catégories de créanciers revient à fixer


l’importance et la nature du passif. Dés les huit jours du jugement d’ouverture
de la procédure, les créanciers sont invités à déclarer leurs créances au syndic
(Art 569 du CC ), dans un délai fixé par le législateur à deux mois à dater de la
publication du jugement au B.O .

Sinon le créancier court la forclusion (Art 687)151.Même les créances du


152 153
trésor public et de la sécurité sociale qui ne porte aucune garantie sont
soumises à la formalité de déclaration dans les délais.

Il doit être procédé à une vérification sommaire des créances par le


syndic sous le contrôle du J.C (Art 640 du CC) .Les créances mal fondées seront
écartées, et le tribunal va disposer au bout de délai imparti aux intéressés qui est
fixé par la loi, de la liste des créanciers qui entendent participer à la procédure et
à la distribution des fonds de l’entreprise154

151
Ordonnance Tr.Co Meknès n ° 05/06 du 18/05/2005 n° de dossier 23/04/2006 .Non publié .
152
Arrêt C.A.C ,Casablanca n° 720/2004 du 15/03/2004 ,n° de dossier 4/2004/290 . Publié cabinet Bassamat.net
153
Arrêt C.Cass Rabat du 16/02/2005 N° de dossier 118/32/2003 .Non publié.
154 M.J.Coffy de Boisdeffre, « les dispositions de la loi du 25 janvier 1985 et du décret du 27 décembre 1985
concernant la déclaration ,la vérification et l’admission des créances »,A.L.D.,1986,111.
91
Les décisions du J.C. sont déposées au greffe. Le greffier doit procéder,
sans délai, à une publicité au B.O, invitant les intéressés à formuler leurs
réclamations dans un délai de quinze jours (Art 698 du CC).

Le J.C. statue sur les contestations du débiteur ou des créanciers en


matière d’admission des créances après avoir entendu ou dûment appelé le
syndic et les intéressés .Par la suite ,l’intéressé peut formuler un recours contre
la décision du J.C devant la cour d’appel dans les quinze jours de la notification
(Art 701 du CC) .

Mais le J.C. peut décider de ne pas vérifier le passif chirographaire


lorsqu’il apparaît que l’actif sera absorbé complètement par les créanciers
titulaires de sûretés (Art 691 du CC).Il est alors inutile d’accomplir des
formalités vaines et couteuses155.

Quinze jours après la publication de l’arrêté des créances ,celles qui ne


seront pas contestées sont admise définitivement .L’admission est une décision
juridictionnelle. Elle est revêtue de l’autorité de la chose jugée .Elle fixe
définitivement le droit du créancier .Elle établie l’existence de la créance156, son
montant 157et sa nature158.

Il est reconnu que le jugement de liquidation entraîne le déchéance du


terme et par conséquent toutes les dettes deviennent exigibles (Art 627 du CC ) ,
car après la clôture de la liquidation ,qui libère le débiteur du passif non payé
,aucune dette ne peut être payée et les créanciers n’ont aucun moyen d’exercer
individuellement leurs actions159.

155
: Yves Guyon .Op cit. p 348
156
12 nov.1991 ,Rev.Trim.dr.com.,1992 ,691 ,note Martin Serf.
157 Com .16 avr.1982,Bull.civ,4,n°123.
158 5 déc.1995,Bull.civ,4,n°281 ,p260
159 B.Dureuil et J.Mestre , « la purge des dettes par l’Art 169 de la loi du 25 janvier
1985 » ,Rev.Proc.Coll.,1989,389.
92
Cependant, la réalisation du passif impose aux créanciers des sacrifices
,car il est rare que tous les créanciers puissent être payés intégralement .Mais les
sacrifices ne sont pas égaux et le principe d’égalité ne joue qu’entre créanciers
de même catégorie.

Les créanciers sont payés sur le prix de vente des actifs. Si le débiteur est
une personne physique tout son patrimoine est vendu dans les mêmes
conditions. Ce n’est qu’en cas de poursuites individuelles que le créancier
professionnel doit saisir de préférence les biens eux aussi professionnels .Dans
ce cas les créanciers titulaires de sûretés réelles spéciales ,notamment les
créanciers hypothécaires sont payés les premiers avant même les créanciers
postérieurs .En effet ,ceux-ci peuvent provoquer la vente de l’immeuble trois
mois après le jugement qui prononce la liquidation (Art 628 du CC)160.Mais le
délai de paiement est très long car le plus souvent la vente immobilière est très
lente.

Un autre défaut de cette vente est que les créanciers hypothécaires


n’exercent aucun contrôle sur le prix auquel est vendu l’immeuble de qui risque
de réduire les montants payés aux créanciers161.

Par la suite ,si les créanciers hypothécaires n’absorbent pas la totalité de


la vente de l’immeuble ,le surplus sera réparti entre les autres créanciers.

Ensuite ,on trouve les créanciers gagistes et nantis qui sont dans une
position relativement favorable 162

En effet ,le créancier gagiste ,dont la créance a été admise ,lorsqu’il est
en possession de la chose peut user de son droit de rétention et la garder .Devant
ce fait accompli le syndic peut :
160
Com. 19 mars 1991,360 note A .Honorat
161
Les obs.de M.Senéchal aux mélanges Derruppé ,p 368 ,Paris,1991 .

162
J.Devèze , « les créanciers titulaires d’un gage ,d’un nantissement ou d’un droit de rétention
»,Rev.proc.Coll.,119.
93
- Soit demander au J.C. une autorisation de payer la totalité de
la créance du gagiste pour conserver le bien nanti surtout s’il fait parti
d’une chaine de fabrication et que sa perte peut affecter énormément la
valeur du reste de l’actif (Art 626 du CC) .
- Soit procéder à la vente du bien et désintéresser le créancier
gagiste sur le prix de la vente .Cette option est préférable lorsque la
vente dégage , par rapport à la créance ,un surplus qui va permettre le
paiement d’autres créances (Art 626 alinéa 6 du CC) .Dans ce cas ,le
droit de rétention est reporté sur le prix de la vente .

Enfin, s’il reste quelque chose, la dernière catégorie des créanciers ceux
qui sont démunis de toute garantie c'est-à-dire les créanciers chirographaires
seront payés d’une manière égale. Ils subissent un abattement calculé par le
syndic. On dit qu’ils sont payés au marc franc. Les sommes qui leur sont
attribuées sont généralement faibles .Les plus souvent aucune distribution ne
sera effectuée pour cette catégorie pour cause d’épuisement de l’actif.

En conclusion, les créanciers bénéficiaires de sûretés, sans être assurés


d’un paiement total, se trouvent dans une situation plus confortable que les
créanciers chirographaires .Notamment les titulaires de gage avec ou sans
possession sont dans une position avantageuse.

§2– les créanciers postérieurs au prononce de la liquidation : priorité de paiement.

Pour cette catégorie de créanciers, vu l’importance de la continuation de


l’activité de l’entreprise pendant la procédure de la liquidation, le CC.,dans son
article 620 alinéa 2,leur a accordé le privilège des créances nées après jugement
conformément aux dispositions de l’Art 575 du CC. dans le cadre de la

94
continuation provisoire de l’activité telle qu’elle a été stipulée dans l’Art 620 du
CC. :

« lorsque l’intérêt général ou l’intérêt des créanciers nécessite la


continuation de l’activité de l’entreprise soumise à la liquidation judiciaire ,le
tribunal peut autoriser cette continuation pour une durée qu’il fixe … .

Les dispositions ……Celles de l’article 575 sont applicables aux


créances nées pendant cette période ».

Il ne faut pas considérer cette protection comme une fleur faite à ces
créanciers et qu’elle va porter atteinte aux créanciers antérieurs et constituer une
rupture du principe d’égalité entre les créanciers .Au contraire, la continuation
de l’exploitation durant la liquidation est normalement envisagée dans l’intérêt
des créanciers antérieurs .Elle est censée renforcer d’actif de l’entreprise qui
sera, enfin de compte, redistribué entre les créanciers.

Ceci explique le droit d’être payé à l’échéance qui leur est accordé ainsi
que les droits de priorité et de préférence pour la réalisation de leurs créances
.Ils peuvent même intenter des actions individuelles163et leurs créances ne font
l’objet d’aucune déclaration auprès du syndic164

Ces créanciers165 qui sont visées à l’article 575 du code de commerce


Échappent au principe de l’arrêt des poursuites, à l’obligation de déclarer leurs
créances et aux règles de l’arrêt du cours des intérêts ou des inscriptions de
suretés.
Le sort des créanciers antérieurs et des créanciers postérieurs est donc
radicalement opposé et il est fonction de la date de naissance de leurs créances.

163
Arrêt C.Cass.Rabat n° de décision du 26/10/2005 .N° de dossier 253/3/2/2005.Publié cabinet Bassamat.
164
Arrêt C.Cass.Rabat n° 1004 du 12/10/2005.Publié cabinet Bassamt.
165
C.A.Co.,Fès n° 354 du 14/03/2006.Dossier n° 1592/05.Non publié. .

95
Le code de commerce établit cette distinction en faisant référence à «
l’origine de la créance » avant le jugement d’ouverture et à « la naissance
régulière de la créance » après le jugement d’ouverture. Cette distinction est
conçue pour apurer le mieux possible son passif, ou du moins, pour donner une
priorité de paiement aux créances liées à la procédure.
Néanmoins, la rédaction de l’article 575 a pour effet de garantir le
paiement de créances qui n’ont aucune utilité, ni pour le redressement, ni pour
les besoins de la liquidation. Il en résulte que la solution de droit positif devrait
être repensée en jetant un regard différent sur ce que doit être cette période de
paiement.
En effet, l’article 575 du code de commerce se réfère au seul critère
chronologique de la date de naissance de la créance. Dés lors que la créance est
née régulièrement, après le jugement d’ouverture, elle doit être privilégiée. La
généralité des termes de l’article 575 ne permet d’exclure aucune créance, de
quelle que nature qu’elle soit. Peu importe son utilité pour la continuation de
l’activité ou pour la procédure elle-même. Le texte ne tient pas compte de la
double finalité de la loi qui est de sauvegarder les éléments d’actif et permettre
l’éventuelle continuation de l’activité. Le critère de l’origine sombre bien
souvent dans l’argutie, pour fonctionner correctement, il a besoin de garde-fou
que constitue le double fondement sur le quel repose le régime des créances de
la procédure.
Le travail sur le retour à la véritable date de naissance des créances doit,
à notre sens, être complété par l’adoption d’un critère téléologique pour définir
le champ d’application de l’article 575 du code de commerce.

En ce qui concerne la continuation provisoire de l’exploitation Le


tribunal doit être prudent et ne doit chercher que l’intérêt des créanciers.

96
On en déduit que chaque fois qu’il s’agit de l’intérêt public de quelle
nature qu’il soit économique, social ou même sécuritaire, sans perdre de vu la
protection des créanciers, le tribunal devrait autoriser la continuation provisoire
de l’activité .

Cette continuation va renforcer les pouvoirs et les décisions du syndic,


qui est le seul à apprécier les contrats à continuer et ceux à résilier, y compris les
contrats de travail166 et le contrat de bail, selon l’intérêt de l’entreprise durant
cette période provisoire conformément aux dispositions de l’Art 573 du CC.

Pour ce qui est du contrat de bail, la liquidation judiciaire n’entraine pas


de plein droit sa résiliation .Par conséquent il revient au syndic la décision de ne
pas continuer le bail. Il est résilié et la résiliation prend effet par une simple
demande.

Mais le syndic peut décider la continuation du bail ou sa cession dans les


conditions prévues dans le contrat afin d’éviter qu’une résiliation intempestive à
la demande du bailleur n’entraîne un effondrement de la valeur du fonds dont le
prix reviendra aux créanciers (Art 621 du CC)167 . Le bailleur dispose d’un délai
de trois mois du jugement pour demander la résiliation du contrat pour des
causes antérieures à la liquidation.

Ainsi La liquidation est la solution la plus désastreuse pour les parties.


Le dirigeant va perdre son entreprise, les emplois vont disparaître et le passif va
être apuré, mais habituellement dans des conditions peut satisfaisante.

Au Maroc, on ne peut que constater, avec désarroi, le nombre alarmant


des demandes de liquidation directe, où le débiteur n’a nullement l’intention de

166
999 ‫عبد الرحيم شميعة الوضعية المتردية لالجراء من خالل نظام صعوبات المقاولة ص‬
167
: Arrêt C.A.Co Casablanca n° 2001/1989 du 15/10/2001 .Non publié .
97
sauver l’entreprise .Il sera dessaisi de l’entreprise, mais en contre partie il sera
débarrassé du passif.

Le tribunal va procéder à la vente des biens de l’entreprise et au


paiement, sur le prix, des créanciers. Mais la surenchère des garanties et des
sûretés a conduit à une rupture de principe d’égalité entre les créanciers .Les
chirographaires sortiront, le plus souvent bredouille de cette procédure.

Cependant, la liquidation peut avoir des effets graves, si le tribunal


estime que le montant du passif est imputable aux agissements des dirigeants.

Ces derniers encourent une injonction en comblement du passif, ou une


déchéance commerciale voire même, en cas de banqueroute prouvée, des
sanctions pénales.

98
Conclusion générale:

99
Conclusion générale.

La loi sur les procédures collectives, telle qu’elle est établie dans le livre
5 du CC, a mis sur pied des mécanismes susceptibles en premier lieu de prévenir
les défaillances, et en second lieu de contribuer à la remise en activité des
entreprises victimes d’accidents passagers. Et si le redressement s’avère
impossible, la loi a prévu les procédés pour toutes les parties concernées.

L’application de cette loi a été renforcée par la création pour la 1 ere fois
au Maroc de tribunaux spécialisés ; les Tr. Co. Le législateur marocain a confié
à ces tribunaux, et à eux seuls, le droit de connaître les litiges des entreprises en
difficultés.

Pour la phase judiciaire, le juge dispose de trois options établies selon un


ordre de priorité .En 1er lieu, le juge doit évaluer les chances de réussite de la
continuité de l’activité.

A défaut, et si une telle solution s’avère inapproprié aux difficultés de


l’entreprise, le juge doit envisager un plan de cession dans la mesure où la
réussite d’un tel plan peut constituer un remède et sauver l’entreprise.

Par contre si la situation de l’entreprise est compromise de manière


irrévocable et que l’entreprise ne peut pas être redressée, le juge va prononcer la
liquidation de l’entreprise.

Donc il est souhaitable de trouver des moyens pour permettre à la justice


de prévenir les difficultés très tôt ,et intervenir à un stade précoce avant que les
difficultés ne deviennent insurmontables168 .Il était souhaitable dans la dernière
modification du C.C que le législateur prévoie l’obligation du débiteur de saisir
le Pd.Tr dans un bref délai après avoir été alerté par le CAC., car d’après tous

168
www.ccip.fr

100
les acteurs de la procédure ,la CDP est un stade fatal pour le sauvetage et la
survie des entreprises169.

En se basant sur les 16 années d’applications des procédures collectives


par la justice, un certain nombre de suggestions peuvent être proposées :

- Il est souhaitable que les autorités judiciaires planifient des


mécanismes de sensibilisation et d’information des commerçants.
- Sur le point de la distribution des juridictions, il serait
regrettable de les supprimer .Il serait préférable soit de les maintenir
dans les villes où elles existent et créer des chambres commerciales au
sein des tribunaux de première instance dans les autres villes, soit
limiter la compétence matérielle de ces tribunaux au montant de la
créance et/ou capital social.
- Pour la fonction de syndic, il est souhaitable de créer un
corps spécialement formé pour cette mission qui maîtrise à la fois le
juridique et l’économique .Il peut être soit rattaché au greffe ce qui
représente l’avantage d’être hiérarchiquement sous l’autorité du
tribunal, soit un corps privé responsabilisé.

Enfin, tout projet de réforme du DED devrait chercher à encadrer les


dirigeants et leur inculquer la culture des procédures collectives afin de faire
évoluer les mentalités170 .C’est ce que préconise un Pd.C.P.C :

« CDP ou non, procédure de sauvegarde ou non, n’est pas la solution .la


sauvegarde des entreprises en difficulté est une question de mentalité. Tant qu’il
y a de la mauvaise volonté, on ne peut rien sauver. Il suffit de constater que

169
Tribunal de commerce de Casablanca du 2 7 mars 2000, conférence du 9 décembre 2003.
Jugement n116/2000
170
www.cabinet.basamat.com
101
dans la majorité des affaires traitées, le plus souvent le débiteur a déjà préparé
sa liquidation .A ses yeux, le DED est un moyen pour échapper aux créanciers.

Il faut un droit qui tient compte de la mentalité des dirigeants et des


investisseurs ».

102
Bibliographie :

- Traites et ouvrages
- Erice TEYNIER, « la règle de droit de la faillite et le sort économique des entreprises
défaillantes », in RTD.com 1985, n°1.
- J Paillusseau, du droit de la faillite au droit des entreprises en difficulté, mélanges houin,
1985.
- S .MEZIANE .Diagnostic et redressement des entreprises e difficultés .SIBF – Alger-D : E.S
Banque 2008.
- Driss.Benjaloun « appréciation critique de l'application du livre cinq du code du
commerce » 2015.
- Abdlhmid Akhrif, « le nouveau rôle de la justice dans le droit des entreprise en difficultés
» thèse d’Etat 2000,20
- A.Squali « droit et pratiques en matière de faillite de liquidation judiciaire des entreprises
» édition info-print.1995
- C.CHAMPAUD, l’entreprise et le droit, D.1972
- Y. Guyon, Droit des affaires, T2, Entreprises en difficultés, Redressement judiciaire,
Faillite, Economica, 7ème éd, 1999,
- Y. GUYON, Droit des affaire : entreprises en difficultés, redressement judiciaire- faillites,
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- A.EL HAMMOUMI, n°7, , M. JEANTIN et P. LE CANNU, op.cit., n°451, p.291/292.

-M. ALAMI-MACHICHI, « droit commercial approfondi ».

- Moulay lahbib. « Droit des entreprise en difficultés : quelles sont vos droits »
- France GURAMAND et Alain HERAUD, droit des sociétés, manuels et Applications,
DUNOD, 2001,

- Articles et chroniques

- A.Squali « La cessation des paiements en droit marocain" Revue des procédures


collectives. (France)

- A.Squali « Droit et pratique en matière en matière de faillite des entreprises ou la


nécessité d’une réforme immédiate " Revue de droit et d’économie.N° spécial.1994.

- A.Squali « L’étude critique de la notion de cessation des paiements en matière de faillite


et de liquidation judiciaire ». Revue de droit et d’économie.N°11.1995. p 53

- A.Squali« Les obstacles au rôle de l’entreprise dans l’édification du maghreb:l’entreprise


en difficulté » Publication de l’Université d’hiver de Marrakech.1993.

- la vie économique du 9 Mars 2009, les requêtes dans le cadre des procédures
collectives.

103
- C.saaint-alary houin, droit des entreprises en difficulté,N 456 par T.Granier

- G. Bilanc. La situation du commissaire aux comptes après la loi N 84148 mars 1984. J.C.
P, 16304 ; étude et commentaires, N 46

- M.A.CHAOUI, Jour. L’ECONOMISTE, 12 mai 2011.


- MONTEBOURG et F. COLOMMBRET, les tribunaux de commerce : une justice en faillite ?
Rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale n°1038, éd Michel.
LAFON.
- BENJALOUN DRISS, « les procédures collectives : le point de vue des juges » journée
d’étude.25 mars 2012. Faculté des sciences économique, juridiques et sociales fes.
Revue semestrielle des juristes affaires.n 4.2013..
- A.Janquiemin, « le droit économique, serviteur de l’économie » R.T.D.com. 1979.
- Abderrahim SLIMANI, arrêt du plan de continuation par le tribunal dans le cadre de la
procédure de redressement judiciaire, REMADE, n7, janvier 2005. P25- en arabe

- Colloque
- Colloque organisait par le département du droit des affaires de la fsjes Fès sur les droit
des entreprise en difficultés vingt temps d’application 24 mars 2016.
- Abdelaziz SQUALLI, Evaluation globale de l’expérience marocaine en matière de
difficultés des entreprises. Colloque organisait par le département du droit des affaires
de la fsjes Fès sur les droit des entreprise en difficultés vingt temps d’application 24
mars 2016.
- Anas BENBARAKA, La néo-revendication en droit des procédures collectives. Colloque
organisait par le département du droit des affaires de la fsjes Fès sur les droit des
entreprise en difficultés vingt temps d’application 24 mars 2016.

- M. Youssef LAHJOUJI, les droits des débiteurs et des créanciers dans le projet de
réforme des procédures collectives : quel équilibre ? Colloque organisait par le
département du droit des affaires de la fsjes Fès sur les droit des entreprise en
difficultés vingt temps d’application 24 mars 2016.

- Driss BENJELLOUN, lecture et analyse des statistiques des juridictions commerciales


marocaines en matière de difficulté des entreprises. Colloque organisait par le
département du droit des affaires de la fsjes Fès sur les droit des entreprise en
difficultés vingt temps d’application 24 mars 2016.

104
- Lamyae SAHRAN, lecture du projet de réforme du livre V du code de commerce.

- A.Squali « la prévention des difficultés de l'entreprise dans le nouveau droit marocain


des procédures collectives ». Colloque organisé par le département de droit privé de la
faculté de droit et le barreau Marrakech.les 30 et 31 octobre 1998.
- A.Squali « les principales difficultés d’application de la loi sur les procédures
collectives », Table ronde organisée par le département de droit privé de la faculté de
droit de Fès. Revue de droit et d’économie. N°19.2002. p 133
- Ord. Expt. Compt, « La prévention interne des difficultés des entreprises », Journée
d'étude 2 juillet 1998.
- A.Squali « Droit et pratique en matière de faillite des entreprises ». Journée d’étude
organisée par le département de droit privé de la faculté de droit de Meknes : « Le
traitement des difficultés de l’entreprise », le 21 mars 1998

- Mohammed El Idrissi, les effets de la procédure de redressement judiciaire sur les


intérêts de la banque, colloque MJ-USAID 2005 .
- M.Mernissi, rapport introductif colloque sur le projet de réforme de la société anonyme
: implications et enjeux. RMDED , n°37.

- J.PAILLUSSEAU. ; le droit est aussi une science d’organisation.RTD com.1989 .

- Les enquêtes et statistiques


- Le département de la Justice et des Libertés qui a préparé un projet de réforme du Livre
V du code de commerce en 2014

- L’enquête menée par le cabinet Euler- Hermes sur la défaillantes au Maroc en 2013

- Statistiques du Cabinet inforisk de 2015

- Enquête sous forme de questionnaire auprès de cinquante cabinets les plus


représentatifs dans le domaine du commissariat aux comptes à Casablanca, Rabat et
Marrakech.

- Statistiques fournis par le greffe du tribunal de commerce de Marrakech de 2012

- Les statistiques des tribunaux de commerce de Rabat et de Casablanca ne sont pas


disponibles, ces chiffres nous ont été fournis par leurs présidents respectifs.

- Statistiques de la Cour d’appel commerciale de Casablanca, activités judiciaires de 2008.


- Statistique des tribunaux de FES, CASABALNACA, OUJDA, RABAT ,MEKNES 2014.

105
- Les lois et textes officiels
- Loi N°17-95 relative aux sociétés anonymes.

- Loi N° 5-96 sur la société en non collectif, la société en commandite simple, la société en
commandite simple, la société à responsabilité limitée et la société en participation.

- Loi 15-95 du code de commerce du dahir N° 1.96.83 daté du 1 er Aout 1996 publiée au
B.O, N°4418 du 3 octobre 1996.

- Dahir des obligations et contrat 1913

- Loi 1-97 formant code de recouvrement des créances publique.


- Dahir du 24 mai 1955 relative aux baux immeubles ou de locaux loués a usage
commercial, industriel ou artisanal, BO du 11 juin 1955 ,
- Loi 81-14 complétant et modifiant l'intitulé du livre V et l'article 546 de la loi n° 15-95
Code de l’organisation judiciaire.
- Loi française n 85-99 du 24 janvier 1984.le législateur français a apporté d’autres
modification en 2005 et 2010.

Jurisprudence
- Jugement du Tr.Co. de Fès n° 11 du 01/02/2017 n° dossier 264/8303/2016
- Arrêt C.A.Co de Casablanca .n°1931/2001 du 28/09/2001.Dossier n° 201/2000/10.Le
tribunal a prononcé la déchéance commerciale du dirigeant pour motif du non respect
du délai de 14 jours pour demander l’ouverture de la procédure .Non publié .
- Tr.Co .de Fès .Dossier commercial n°10/09/12 du 09/12/2009 .Dossier appel n °
05/2010.Décision de la cour d’appel n°35 du 20/06/2009 qui a confirmé la décision du
Tr.Co.Non publié.
- Arrêt Tr .Co.de Casablanca.n°17/2 du 21/02/2002.Non publié.
- le tribunal de commerce de Casablanca ,jugement n°2014/800 rendu le 12/04/2014
dossier n°2014/780 ,jugement non publié.
- La cour d’appel de commerce de Casablanca, arrêt n°2731/2000 rendu le 22/12/2000
dossier n°11/2000/2048 ,arrêt non publié.
- La cour d’appel de commerce de Casablanca, arrêt n°2730/2000 rendu le 22/12/2000
dossier n°11/2000/2047, arrêt non publié.
- la cour d’appel de commerce de Casablanca arrêt n° 99/1003 ,dossier n° 11/99/783 en
date du 08/07/1999 arrêt non publié
- Tr.Co de Tanger .Arrêt n° 265 du 17/03/2005.La preuve de la CDP incombe au créancier
s’il est demandeur .Publié cabinet bassamat.net.
- Tribunal de commerce de Fès .jugement 6/2005 du 09/02/2005.Dossier n°
02/10/2004 .Non publié .

106
- Arrêt C.A.C de fès n° 10/2005 du 09/03 /2005 .Arrêt non publié.)
- Tr.Co de Casablanca : jugement n° 21/2000 du 24/01/2000.Non publié
- Jugement Tr .Co Casablanca .N°116/2000.Dossier n°88/2000/10 du 27/03/2000 .Non
publié.
- décision du 5 juillet 2000, dossier numéro 5/200/3,in,ABDELHAK NACARI BENNANI, n
31/2001,p.262 ;arrêt n 1865/99 du 30 novembre 1999,dossier n 3006/99
- Jugement du Tr.Co de Fès n°54 du 2016/11/23 n° du dossier 164/8318//2016
- C.A.C de Marrakech, arrêt n° 761 du
21/12/2000 ,dos.n°384/449/2000,inédit.5 .cependant A.Slimani,les voies de recours
contre les jugements prises en matières des difficultés de l’entreprise
,R.E.M.A.D.A.E.,n°5 2005,p.81 et s (en langue arabe) .5.aussi le Tr.Co. de Rabat
,jugement n° 12 du 18/05/2005,dos .n° 5/27/99 .
- arrêt de la Cour d’appel de commerce de Fès n°18 TC du 22/05/2003, dossier
n°22/03 ,inédite
- arrêt de la Cour d’appel de commerce de Fès n°18 TC du 22/05/2003, dossier
n°22/03 ,inédite
- C .A.C de Casablanca .Arrêt N°377/2002 du 15/02/2002.Non publié.
- Tribunal de commerce de Fès .jugement 6/2005 du 09/02/2005.Dossier n°
02/10/2004 .Non publié .
- Arrêt C.A.C de fès n° 10/2005 du 09/03 /2005 .Arrêt non publié
- C.A.Co de Casablanca 1003/99 n°783/99/11 du 08/07/1999 .Publié cabinet
bassamat.net.).
- 1 Art 560 CC
- Jugement du Tr.Co d’Oujda n° 1/2001,dossier n° 04/2001/01 du 21/11/2001 ‫منشور بمجلة‬
295 ‫ ص‬26‫اإلشعاع عدد‬
- le tribunal de commerce d’Agadir décision du trois mars 2 000, numéro 01/2000, dossier
07/2000)
- Jugement du tribunal de commerce de Casablanca numéro 90/2005 en date du
20/03/2005 non publié. Arrêt numéro20/2006 en date du 11/04/2006 non publiés.
- Jugement du tribunal de commerce de Casablanca numéro 106 en date du 30/04/2006
non publié.
- Jugement du 18/04/2001-n 117/2005.
- jugement de redressement judiciaire numéro 2- 2000 du 20 avril 2000 confirmé par la
cour d’appel de commerce de Marrakech suivant l’arrêt numéro 761 du vers tr
décembre 2000 numéro 133/200.
- Arrêt du tr.co Oujda n 1/2001,dossier n 5/2001/01.
- Jugements du tribunal de commerce de fes.cas n174/2004 du 21-06-2004-n 118/2004
du 26-04-2004 ;-N 111/2004 du 19-04-2004-n 329/2002 du 29-07-2002 ; n 253/2002 du
24-06-2004-N 233/2001 du 31-07-2001).
- Arrêt du tr.co Marrakech. n 101 du 21/01/2003.dossier n 05/2798.

107
- Arrêt de la cour d’appel de commerce de Casablanca, n°2203/2002 du 26/07/2002.
Artémis UGGC & Associés , Casa, 9 dec.2003. Egalement Ordonnance trib com. De
Casablanca du 15/02/2002 dossier de liquidation n°166
- arrêt de la cour suprême de Rabat, n° 1545 du 18/12/2002, dossier n° 640/2002, Rev.
Jurisprudence de la CS, n°62 p.140. Artémis, UCGG & Associés Conférence du 9
décembre 2003
- Arrêt de la cour d’appel de Casablanca, n°2661/2000 du 14/12/2000, dossier n°
1139/2000/11
- L’arrêt de la cour d’appel de Casablanca 48/2000 du 6/1/2000, dossier n 510/99/11.
- Arrêt n 2006/1124 de la cour de Casablanca. Du 12/04/5006 .

- webographie
 http://www.taj.fr/prtail/liblocal/docs/enqu%25c3%25ate/enqu%25c3%25aate%2520ins
olvabilit%....
 www.wds.worldbank.org
 www.usaid.gov.ma
 www.ccip.fr
 www.chefd’entreprise.com
 www.deloittercrute.fr « l’entreprise en difficulté en france »
 http://www.cours-de-droit.net-entreprise.en.difficulté
 www.cabinet.basamat.com
 www.l’entreprise.lexpress.fr/difficultés.fr

108
Table de matière :
Introduction générale.......................................................................................................................... 2
Première partie : les modalités de saisine du tribunal compétent et les conditions d’ouverture de la
procédure de liquidation judiciaire. .................................................................................................. 10
CHAPITRE 1 : LES MODALITES D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE. .......................... 11
Section 1 : l’ouverture sur déclaration du débiteur ou sur assignation d’un créancier : ........ 12
§1 : L’ouverture sur déclaration du débiteur ....................................................................... 12
§2 : L’ouverture sur assignation d’un créancier .................................................................... 23
Section II : l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire d’office ou sur requête du
ministère public. ........................................................................................................................ 27
§1 : La saisine d’office par le tribunal .................................................................................... 27
§2 : la saisine sur requête du ministère public ...................................................................... 31
CHAPITRE 2 : LES CONDITIONS D’OUVERTURE DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE. ......................... 37
SECTION 1 : Une délimitation très étroite quant à la qualité du demandeur ........................... 38
§1 -Les débiteurs sont des commerçants.............................................................................. 38
§2- Qu’en est il de l’artisan ? ................................................................................................. 42
Section 2 : la cessation de paiements : tendance jurisprudentielle .......................................... 44
§1 : Une approche ancienne de la notion de cessation de paiements ................................ 44
§2-la CDP n’est pas fixée uniformément par les juridictions commerciales ......................... 49
SECTION 3 : l’accouplement de la cessation de paiements avec la situation irrémédiablement
compromise du débiteur. ......................................................................................................... 54
Deuxième partie : Le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire et ses effets sur le débiteur
et les créanciers. ................................................................................................................................ 60
Chapitre I : la solution de la liquidation de l’entreprise ................................................................ 61
Section 1 : la nature du jugement de liquidation ...................................................................... 61
§1: la liquidation suite à l’inexécution des termes de la continuation : échec confirmé par
les données des tribunaux..................................................................................................... 61
§2 : la liquidation directe : un taux alarmant ...................................................................... 64
Section 2 : la réalisation de liquidation ..................................................................................... 67
§1: Cession des biens de production ..................................................................................... 67
§2 : la vente des biens isolés ................................................................................................. 68
Section 3 : La clôture de la liquidation ...................................................................................... 69
Chapitre 2 : Les effets de la liquidation judiciaire ........................................................................ 70
Section 1 : les effets très lourds à l’égard du débiteur.............................................................. 71
§1 : Les effets légaux à l’égard du débiteur .......................................................................... 71

109
§2-Les sanctions particulières à l’égard du débiteur diligent. .............................................. 72
Section 2 : les effets néfastes de la liquidation a l’égard des créanciers. ................................. 90
§1– les créanciers antérieurs au prononce de la liquidation ; rupture du principe d’égalité 90
§2– les créanciers postérieurs au prononce de la liquidation : priorité de paiement. ......... 94
Conclusion générale. ....................................................................................................................... 100
Bibliographie :.................................................................................................................................. 103

110
111

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