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BMCR 2017.08.09
Review by
Jean-Christophe Courtil, Université Toulouse 2-Jean Jaurès. courtil.jean-
christophe@orange.fr
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Quiconque a déjà travaillé sur les textes médicaux latins sait à quel point une
nouvelle édition dans ce domaine est un événement majeur. En médecine romaine,
hormis quelques rares textes de l’Antiquité tardive, nous ne disposons dans la
Collection des Universités de France que de l’édition du De medicina de Celse
(composé certainement sous le principat de Tibère), édition malheureusement
interrompue, après seulement un volume (livres I-II), depuis la disparition de Guy
Serbat. L’édition des Compositiones de Scribonius Largus, traité légèrement
postérieur au De medicina, est donc l’occasion de connaître un peu mieux cette
période capitale dans l’histoire de la médecine, qui marque le passage de la
médecine grecque dans la pensée romaine.
Cette édition de Scribonius est née d’une thèse de doctorat soutenue en 2000, à
l’Université Paris 4, sous la direction d’Hubert Zehnacker. Elle est ainsi
l’aboutissement d’une vingtaine d’années de travail, délai largement justifié par
l’ampleur de la tâche et la qualité du résultat. L’édition de Joëlle Jouanna-Bouchet
comporte quatre sections principales : une introduction (p. VII-CLXXV), le texte
critique avec la traduction française en regard (p. 1-213), des notes
complémentaires (p. 215-351) ainsi qu’une série d’ indices (p. 353-446).
Cette édition, qui se suffit à elle-même par sa richesse, remplace ainsi l’édition de
référence de Sergio Sconocchia (Teubner, 1983) établie à partir du manuscrit de
Tolède, découvert par l’auteur. Il s’agit en outre de la première traduction française
du texte, les traductions antérieures étant peu nombreuses, et essentiellement en
allemand et en italien.
Enfin, le volume s’achève avec une liste des ingrédients utilisés dans les
Compositiones, suivant leur origine végétale, minérale ou animale (p. 353-407). Cette
annexe constitue un supplément indispensable à la lecture du texte de Scribonius
dont la principale difficulté réside dans l’identification des substances qui
composent les préparations. Chacune des entrées propose un terme latin, son
équivalent grec, son identification moderne et quelques éléments explicatifs sur son
usage antique. Suivent quatre indices, un index uerborum (p. 409-431), un index
nominum (p. 433-434), un index uocabulorum graecorum (p. 435) et un index
uocabulorum graecorum latinis litteris scriptorum (p. 437-446), qui constituent un
outil précieux pour procéder à de rapides recherches dans un texte si dense.
Ce livre, passionnant tant par le contenu du texte latin que par la qualité de l’édition
que nous en donne Joëlle Jouanna-Bouchet, présente tout à la fois un texte établi
avec une rigueur remarquable, une première traduction française précise et
élégante, une longue introduction et de très nombreuses notes qui constituent
autant d’éléments de commentaire qui éclairent le texte, sans oublier les outils en
annexe, indispensables à la bonne compréhension de l’œuvre, et qui justifient de
manière parfaitement convaincante les leçons adoptées. Ce beau volume nous
permet de redécouvrir un texte encore trop méconnu, qui constitue pourtant une
étape capitale dans l’histoire des origines de la littérature médicale occidentale. À
cet égard, l’œuvre de Joëlle Jouanna-Bouchet mérite d’être très chaleureusement
saluée.