Vous êtes sur la page 1sur 20

I.

Introduction :
J’ai choisi d’effectué mon stage au sein d’un des services de l’Union Départementale
des Associations Familiales (UDAF), le Centre d’Accueil et d’Orientation (CAO) qui
accueille les demandeurs d’asile. Lors de mon expérience plusieurs éléments ont fait
interrogés ma représentation de l’accompagnement.
Dans un premier temps je vais vous faire une présentation de la structure et du CAO, je vais
vous expliquer les facteurs qui ont amené l’émergence de ma thématique :
« L’accompagnement du demandeur d’asile dans les démarches administratives, en vue de
favoriser son autonomie »​. Je vous détaillerais les éléments qui ont conduit à mon
émergence et les retours des professionnelles suite à mes questionnements. Je vous exposerais
en suivant, mes recherches théoriques, en vous apportant une définition de
l’accompagnement, avec des approches juridiques et un éclaircissement sur l’état physique et
psychique des demandeurs d’asile. Dans un autre temps, je vous apporterais des aspects sur
les leviers d’accompagnement qui favorise l’autonomie des demandeurs d’asile, en vous
expliquant le regard porté sur les capacités des personnes et l’importance de l’apprentissage
de la langue française, en vue d’une intégration sociale.
Je finirais en vous exposant mon analyse, la proposition d’ateliers présentés à l’équipe et sa
mise en œuvre, ainsi que le bilan effectué avec les professionnels du CAO en appui sur la
transmission de l’ensemble de ce travail de réflexion.

II. Présentation :
a) La structure et ses services :
L’ordonnance du 3 Mars 1945, qui souhaitait associer les familles à la reconstruction
civique, sociale, économique et culturelle du pays, a créé l’Union Nationale des Associations
Familiales (UNAF). L’UNAF souhaitant constituer des instances de proximités, a créé
l’Union Départementale des Associations Familiales (UDAF).
Une UDAF est une association à but non lucratif qui relève de la Loi du 1​er Janvier 1901, qui
fût créé le 3 Août 1945. Elle a pour missions de représenter officiellement les familles, elle
donne son avis aux pouvoirs publics sur les questions d’ordre familial et propose des mesures
conformes aux intérêts matériels et moraux des familles. Une UDAF gère tout service

1
d’intérêt familial, dont les pouvoirs publics estimeront devoir lui confier la charge, et exerce
1
au nom des familles toute action civile auprès des juridictions compétentes.
L’UDAF qui m’a accueilli pour mon stage, recense trois unités : l’unité administrative et
comptable, l’unité de mesures judiciaire et de médiation familiale, et l’unité logement.
Chacune de ces unités, est constituées de différents services.(voir organigramme en annexe)
J’ai plus particulièrement effectué mon stage au sein du Centre d’Accueil et d’Orientation
(CAO), qui dépend de l’unité logement. Le CAO a été créé en Janvier 2016, pour répondre au
démantèlement de la jungle de Calais. C’est à dire à la démobilisation des camps de migrants
et de réfugiés installés depuis le début des années 2000, aux abords de l’entrée française du
tunnel sous la manche et de la zone portuaire de Calais. Ce dans l’objectif de répartir les
personnes installées dans ces camps, dans différentes régions françaises et vers différentes
structures d’accueil.
Le CAO est entièrement financé par la Direction Départementale de la Cohésion Sociale et
Protection des Populations (DDCSPP), la subvention versée s’élève à 21€ par jour et par
personne. Le CAO accueil des migrants exclusivement des hommes, souhaitant faire une
demande d’asile. Ils sont hébergés sur cinq appartements de cinq places chacun, loués auprès
d’un bailleur social. Ces logements situés en milieu urbain, sont proches de toutes
commodités et sont entièrement meublés par l’UDAF.
2
b) Missions du CAO :

L’objectif principal du CAO est d’offrir un sas d’accueil et de proposer une orientation
pour les migrants stationnant sur le territoire français, avec nécessité d’une solution
temporaire de mise à l’abri. Le service accompagne les demandeurs d’asile dans les diverses
démarches administratives, dans l’accès aux soins. Il apporte un soutien sur le plan de
l’alimentation (Banque alimentaire, courses...), permet la domiciliation et l’inscription aux
cours de français en partenariat avec une association. Le service est présent et soutien tous les
aspects de la vie quotidienne. Le service accompagne aussi, les personnes vers les partenaires
de droits communs, certains de ces accompagnements se font en présence du demandeur
d’asile, afin de permettre aux demandeurs d’asile de découvrir et d’appréhender le
fonctionnement administratif français, et ainsi l’inciter à s’autonomiser pour la sortie du
dispositif.

1
Livret d’accueil et projet associatif de l’UDAF
2
Fiche de poste du CAO et rapport d’activité 2019 du CAO

2
Depuis le 1​er Janvier 2020, le CAO est devenu Hébergement d’Urgence pour Demandeurs
d’Asile (HUDA). Le service garde les grandes missions, à la différence de la subvention
versée, qui est maintenant de 17€ par jour et par personne. Du fait de ce changement de
subvention, l’HUDA n’est plus en capacité de pouvoir financer les cours de français. Le
service a arrêté les cours et oriente les demandeurs d’asile vers des associations de la
commune. Le cahier des charges de l’HUDA, est relatif à l’arrêté du 19 Juin 2019, exécuté
par le ministre de l’intérieur.
c) Le public et les principes du droit d’asile :
Lors de mon stage, le public accueillis au sein de l’HUDA était principalement des
hommes, la majorité de ces messieurs sont des Afghans et ont entre 20 et 30 ans. Ces
hommes ont fui leur pays qui est en état de guerre et y ont, pour la plupart, subi des
traumatismes. L’exil ne leur pas été non plus de tout repos, ils ont souvent été victime de
violence et d’humiliation. A leurs arrivées dans le service, ces hommes sont très souvent
fatigués de leurs exils et présentent des états psychologiques fragiles. Ils parlent souvent
plusieurs langues comme l’anglais, le turque, l’italien..., en plus de leur langue maternelle qui
est le Pachto ou le Dari. Mais ils ne parlent pas un mot de français, ni le comprennent. Les
personnes hébergées par l’HUDA, sont dirigées sur le service par l’Office Français de
l’Immigration et de l’Intégration (OFII), qui leur assure aussi une source de revenu,
l’Allocation Demandeur d’Asile (ADA). Avant d’être dirigées par l’OFII, en arrivant en
France, les personnes posent leurs empreintes au Guichet Unique des Demandeurs d’Asile
(GUDA), qui va déterminer la procédure dont la personne va dépendre. Il existe trois
procédures différentes : NORMALE, ACCÉLÉRÉE, DUBLIN.
Procédure NORMALE : la personne a posé ses empreintes dans aucun autre pays que celui où
elle se trouve, sa procédure sera statuée NORMALE. La personne sera convoquée à l’Office
Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides (OFPRA), pour y être interviewée. Si la
personne rejette la demande d’asile, alors la personne peut faire un recourt à la Cours
Nationale du Droit d’Asile (CNDA), suite à ce recours la personne obtient la protection de la
France, soit le statut de réfugié ou la protection subsidiaire. Au contraire si la demande est
rejetée par la CNDA, la personne sera déboutée et reçoit une Obligation de Quitter le
Territoire Français (OQTF).
Procédure ACCÉLÉRÉE : la personne est en France depuis plus de 90 jours, l’OFPRA
suspecte une fraude ou une fausse identité, la personne effectue une deuxième demande

3
d’asile ou la personne vient d’un pays dit « sûr ». La personne sera en procédure
ACCÉLÉRÉE. Cette procédure est basée sur les mêmes principes que la procédure
NORMALE, cependant les délais sont plus courts. Statistiquement, nous avons déjà idée
d’une réponse négative.
Procédure DUBLIN : la personne a posé ses empreintes dans un autre pays de l’espace
3
Schengen , avant celui où elle se trouve actuellement, la personne sera en procédure
DUBLIN. Le pays où la personne a posé ses empreintes en premier est responsable de la
demande d’asile. Dans ce cas la préfecture du département a six mois à compter de la date
d’accord entre les deux pays, pour proposer une solution de retour dans le pays responsable.
Passer ce délai, le pays où se trouve le demandeur devient responsable, ce qui met fin à la
procédure DUBLIN et place la personne en procédure NORMALE.
Les hommes accueillis à l’HUDA étaient principalement en procédure NORMALE ou
DUBLIN.
Ces hommes ont droit à la demande d’asile, qui est affirmée par la Constitution qui
dit : « Tout homme persécuté de son action en faveur de la liberté, a droit d’asile sur les
territoires de la République ». Ils ont droit de demeurer provisoirement sur le territoire jusqu’à
qu’il est été statué sur leurs demandes, décision du 13 Août 1993 par le Conseil
constitutionnel. Selon la convention de ​Genève du 28 Juillet 1951​, ces hommes ont droit à un
examen impartial de leur demande d’asile, ainsi que des conditions d’accueil dignes pendant
toute la durée de l’examen. Une durée qui peut s’étaler sur plusieurs années, j’ai pu rencontrer
des personnes qui étaient au sein du service depuis presque trois ans et attendaient encore
d’être convoquées à l’OFPRA. Une attente qui pour certains de ces hommes, est souvent
devenu insupportable, les journées leurs paraissent interminables et ne pas avoir le droit de
travailler, leur apparaît comme une injustice. Ces hommes présentent souvent des états de
dépressions psychologiques, une majorité de ces personnes sont pris en charge par une
psychologue membre d’une association. Vient ensuite, pour les personnes qui ont pu être
interviewé à l’OFPRA, l’attente de la décision qui peut durer plusieurs mois, seul appartient à
l’OFPRA le soin de reconnaître la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection
subsidiaire, selon la ​Loi du 25 Juillet 1952​. En cas de rejet, le demandeur dispose d’un mois
pour introduire un recours à la CNDA, à cette fin il peut bénéficier de l’aide juridictionnelle.
La CNDA est une juridiction de plein contentieux, qui réexamine l’ensemble du dossier et

3
Regroupement de 26 États Européens ​https://WWW.touteleurope.eu

4
peut annuler la décision de l’OFPRA ou au contraire la confirmer. Les personnes vont encore
se retrouver là, en situation d’attente pour la convocation à la CNDA et la réponse de celle-ci.
d) Les partenaires :
L’HUDA comporte un volet partenariat important, avec tous les services de droit
communs (CAF, CPAM…), ainsi que les institutions de l’État comme l’OFII, le DDCSPP et
la préfecture du département, à qui le service rend compte hebdomadairement, de l’avancée
des statuts des demandeurs d’asile, de leurs accompagnements et des places vacantes sur le
dispositif. La banque alimentaire et le Foyer des Jeunes Travailleurs (FJT), où un contrat de
partenariat a été mis en place, pour apporter une aide à l’alimentation des demandeurs d’asile.
Ainsi qu’un partenariat avec des Techniciennes de l’Intervention Sociale et Familiale (TISF),
dépendant de l’Aide à Domicile en Milieu Rural (ADMR), dans le but d’apporter aux
demandeurs d’asile un soutien dans l’entretien de leurs logements et dans la préparation des
repas.
e) L’équipe pluridisciplinaire :
L’équipe de l’HUDA est composée de deux accompagnatrices sociales (Éducatrice
Spécialisée et Conseillère en Économie Sociale et Familiale), d’une volontaire en service
civique et d’une responsable d’unité.
► ​La responsable d’unité​ : est décisionnaire, elle donne les accords pour toutes demandes
d’ordre financière par exemple.
► ​1​
ère
accompagnatrice sociale : est à 100% sur le service, elle assure le suivi des 25 personnes
et l’accompagnement dans les démarches administratives et juridiques. Elle coordonne les
missions de la volontaire en service civique et fais le relais nécessaire à la 2​ème
accompagnatrice sociale.
► ​2​
ème
accompagnatrice sociale : est à 30% sur le service, elle est en soutien à la 1​ère
accompagnatrice sociale et assure le remplacement pendant les absences et congés de celle-ci.
► ​La volontaire en service civique : effectue les accompagnements des demandeurs d’asile
lors de rendez-vous médicaux et administratifs. Elle est présente pendant les cours de français
et assure la logistique pour la banque alimentaire. Elle ne prend aucune décision concernant
les suivis et n’effectue pas d’entretien social seule.
Les professionnelles de l’HUDA ont pour missions d’accueillir les personnes sur le site
d’hébergement, ainsi qu’établir un premier état des lieux de la situation du migrant (nom,
prénom, date de naissance…), afin d’obtenir l’attestation de demandeur d’asile délivrée par la

5
préfecture. Elles accompagnent les personnes dans la procédure juridique de demande d’asile,
jusqu’à l’obtention ou non d’une protection. Elles élaborent le dossier OFPRA avec le
demandeur et un traducteur, où le demandeur va raconter son récit de vie, expliquer ce qui l’a
amené à quitter son pays et demander la protection de la France. En cas de refus OFPRA, les
accompagnatrices sociales s’occupent de la demande de recours auprès de la CNDA, de faire
la demande d’aide juridictionnelle et de trouver un avocat qui représentera le demandeur
d’asile. Les professionnelles réalisent aussi toutes les démarches administratives auprès des
services publics, pour les ouvertures de droit commun (CPAM, CAF…).
Les accompagnatrices sociales communiquent par le biais de leurs téléphones professionnels
(SMS, appels), ainsi que par Mail. Les transmissions se font aussi de façon verbale et
informel sur les temps de bureau et pendant les réunions d’équipe mensuels.

III. L’émergence de ma thématique :


Les demandeurs d’asile sont un public avec lequel j’ai souhaité approfondir mes
connaissances, et avoir l’opportunité de mieux connaître la façon dont la professionnelle les
accompagne, de leurs arrivées à l’HUDA et tout au long de leurs parcours. J’ai rapidement su
repérer le rôle de chaque professionnelle au sein de l’équipe, par sa petite capacité, j’ai su m’y
impliquer et faire des retours systématiques des accompagnements effectués. Lorsque cela
s’avérait nécessaire, j’ai pu solliciter les accompagnatrices sociales et la responsable d’unité.
J’ai constaté que les demandeurs d’asile étaient dans l’inactivité et dans l’ennui, ils le
signifiaient en nous disant : « Les journées sont longues, il n’y a rien à faire, on s’ennuie ! ».
L’attente de demande d’asile, pour être convoqué à l’OFPRA et ensuite à la CNDA, si cela
s’avère nécessaire, est très longue. Certains d’entre eux demandent à pouvoir faire des
activités ou du bénévolat pour occuper leur journée.
J’ai rapidement été mis en collaboration avec les accompagnatrices sociales et la volontaire en
service civique, j’ai effectué plusieurs démarches d’ordres administratives comme la demande
et/ou le renouvellement de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C),
dont tous les demandeurs d’asile bénéficient. Ainsi que la demande de Revenu de Solidarité
Active (RSA), que les demandeurs d’asile acquièrent une fois qu’ils ont obtenu le statut de
réfugié ou la protection subsidiaire. La demande de RSA faite en amont est un droit que les
demandeurs d’asile ont, et pour lequel la CAF effectue une rétroactivité au demandeur, une
fois que celui-ci a obtenu le statut. J’ai pu participer à l’élaboration du dossier OFPRA, qui est

6
fait avec la présence du demandeur d’asile et un interprète qui a été sollicité par la
professionnelle, cet échange avec l’interprète se fait par téléphone. Lors de cet échange le
demandeur d’asile raconte son récit de vie, ce qui l’a poussé à quitter son pays, l’interprète
traduit afin de permettre à l’accompagnatrice sociale de pouvoir rédiger l’histoire du
demandeur d’asile. J’ai participé à des dossiers pour des recours en CNDA, rédiger des
demandes d’aides juridictionnelles et échangé avec des avocats qui représenteront le
demandeur d’asile lors du recours. Ce ne sera que lorsque qu’une date pour la convocation à
la CNDA sera connue que les professionnelles mettront le demandeur d’asile en contact avec
son avocat.
J’ai observé lors de certaines démarches que les accompagnatrices sociales remplissaient
seules les documents, sans la présence du demandeur d’asile. Elles font signer le demandeur
plus tard, sans particulièrement lui apporter d’explication sur l’utilité de ce document, si le
demandeur n’en fait pas la demande. Le fait que le demandeur d’asile pouvait signer tout
document qui peut lui être présenté, sans en interroger la nécessité et le besoin, m’a interpellé.
Je me suis questionnée par rapport au fait que le demandeur d’asile ne nous interrogeait pas
ou peu, sur les fonctionnements des dispositifs administratifs et juridiques.
a) Questionnements et retours des professionnelles
J’ai partagé avec les accompagnatrices sociales, mes observations sur leurs pratiques
concernant la place des demandeur d’asile dans l’accompagnement des démarches
administratives, et en leurs demandant pourquoi, elles remplissaient sans la présence des
personnes certains documents ? Et même si les personnes n’en faisaient pas particulièrement
la demande lors de la signature de ceux-ci, pourquoi parfois elles ne leurs en expliquaient pas
l’utilité ?
Les professionnelles ont entendu mes questionnements et m’ont apporté des réponses. Elles
m’ont expliqué qu’au début de la création du service, elles avaient mis en place des temps
pour faire ces démarches avec les demandeurs d’asile. Mais ceux-ci n’ont pas été dans la
durée, par manque de temps et parce que les professionnelles trouvaient que c’étaient trop
anxiogène pour les demandeurs d’asile. Elles se sont très vite rendues compte que la barrière
de la langue est un frein dans l’explication et que de faire appel à un interprète était un coût
trop important pour le service. Elles ont également ajouté que pour certains des demandeurs,
ces moments à leur expliquer les documents pouvaient aussi paraître très anxiogène, par
rapport à leur état psychique trop fragile et que « les demandeurs ont besoin d’être portés par

7
rapport à leurs histoires de vie et leurs exils qui ne manquent pas d’être périlleux ». Les
accompagnatrices sociales m’ont aussi ajouté que les personnes se sentent souvent
prisonnières de leurs situations, qu’elles ne sont pas disponibles psychologiquement parce
qu’elles sont prises par d’autres pensées et qu’elles ne se sentent pas particulièrement
concernées. Les accompagnatrices sociales ont pu me commenter, que certaines personnes
avaient pu leurs dires, qu’elles étaient payées pour faire les choses pour eux et réfléchir à leurs
places. Elles faisaient alors le lien par rapport à leur culture et leur religion, ajoutant que dans
leur pays les administrations sont peu accessibles, voire inexistantes et par cette
méconnaissance, ils ne peuvent comprendre ce que les professionnelles vont leurs demander.
Les professionnelles de l’équipe ont aussi pu dire, que par manque de temps au regard de la
charge de travail et par facilité, elles préféraient remplir seule les documents. Elles se sont
posées la question de l’illusion qui pouvait être donner aux demandeurs d’asile, si ceux-ci se
retrouvaient déboutés. Les professionnelles de l’équipe ont pu dire, de ne pas être toujours
vraiment dans « les clous de faire avec » et que toutes ces raisons les avaient amenés parfois,
à fonctionner de façon à remplir certains documents à leur place. Or les missions mentionnées
dans la fiche de poste de l’accompagnatrice sociale, sont que les démarches se font avec les
demandeurs d’asile pour leur permettre de découvrir et mieux appréhender les services de
droits commun, afin de les inciter à s’autonomiser en vue de la sortie du dispositif.
b) Mes idées, mes convictions :
Mon idée de l’accompagnement, de tendre à faire avec, m’a amenée à me questionner
sur certaines pratiques professionnelles de l’équipe et sur la place qu’elle peut donner au
demandeur d’asile dans les démarches administratives. Je me suis référée à la définition
d’ « accompagner » selon Maela Paul, Docteur en Science de l’Éducation, qui s’exprime en
trois éléments : « Se joindre à quelqu’un/pour aller où il va/en même temps que lui ». Cette
définition nous enseigne que la relation est première « se joindre à quelqu’un », que la
démarche est de l’ordre d’un mouvement qui se règle à partir de l’autre « pour aller où « il va
» et que les deux avancent « de concert », c’est-à-dire « en même temps », « au même pas ».
Il en résulte une définition minimale, accompagner c’est « être avec » et « aller vers » et des
principes au nombre de trois. Le premier est que de la mise en relation dépend la mise en
chemin, le deuxième qu’il s’agit moins d’atteindre un résultat que de s’orienter « vers »
c’est-à-dire de choisir une direction et le troisième que l’action (la marche, le pas, le
cheminement) se règle sur autrui soit aller où « il va » et « en même temps » que lui ce qui

8
suppose de s’accorder à celui que l’on accompagne. Cette définition a renforcé ma conviction,
sur la place que nous devons laisser à la personne dans l’accompagnement, pour lui permettre
l’acquisition d’un maximum d’autonomie.
Ceci est venu m’interroger sur comment favoriser l’autonomie et l’intégration du demandeur
d’asile en France, s’il n’est pas acteur dans l’accompagnement des démarches administratives,
malgré la différence de culture et la méconnaissance, ainsi que la complexité des services de
droit communs français. Forte de ces constats, des échanges avec l’équipe et de ces premiers
pas dans la recherche de compréhension de ce qu’est accompagné, j’ai choisi m’intéresser
plus particulièrement aux enjeux de «​ ​l’accompagnement du demandeur d’asile dans les
démarches administratives, en vue de favoriser son autonomie ».

IV. Éclairages théoriques :


J’ai choisi d’approfondir la notion d’accompagnement par des recherches que j’ai
effectué sur internet et auprès du Centre de Ressources et de Documentations de mon centre
de formation. Différents professionnels, l’ANESM et France Terre d’Asile, viendront éclairer
mes constats et mes observations à travers leurs ouvrages et leurs travaux. J’ai trouvé
judicieux d’apporter des approches juridique appuyant le concept de l’accompagnement.
a) Accompagnement des demandeurs d’asile :
a-​1​) ​Définition de l’accompagnement :
Selon Bénédicte JACQUEY-VAZQUEZ, membre de l’inspection générale des affaires
4
sociales , le terme d’accompagnement suggère de plus l’idée d’une continuité, d’une relation
qui ne se limite pas à une seule rencontre. Mais prend la forme d’un « compagnonnage » dans
le temps et suppose une interconnaissance et une confiance réciproques entre
accompagnateur(s) et accompagné(s). Penser l’accompagnement d’après Jean-Pierre Boutinet
5
, psychosociologue, c’est penser la relation d’accompagnement entre deux personnes au
statut voisin, la personne qui est accompagnée et la personne qui accompagne. La relation
d’accompagnement met en face à face une accompagnatrice ou un accompagnateur et la
personne accompagnée, cette dernière cherche soit à se faire entraîner en vue de meilleures
performances dans certaines de ses activités, soit à se faire aider car aux prises avec tel déficit,
telle ou telle difficulté. De son côté l’accompagnateur/trice, dispose en guise d’expertise

4
L’accompagnement social rapport de capitalisation
5
​Penser l’accompagnement adulte

9
d’une expérience sur la façon de venir en soutien à autrui. Maela Paul, nous énoncera dans sa
6
conférence lors des journées d’Étude de l’ARSI 2012, deux types d’accompagnement. Un
accompagnement dit « accompagnement/maintien » à dominante sociale et relationnelle,
impliquant d’assurer une présence auprès d’une personnes dans une situation existentielle et
d’autre part un « accompagnement visée », constituant à dynamiser une personne dans la
réalisation d’un projet. Par ailleurs, tout accompagnement est doté d’une double visée :
l’accompagnement « productif » (à visée productive) se décide comme investissement et
s’apprécie comme résultat. Et l’accompagnement « constructif » (à visée constructive) se
réalise dans le projet d’autonomisation de son porteur et s’apprécie comme enrichissement.
De « porteur », celui-ci devient « acteur ».
a-​2​) ​Approches juridiques de l’accompagnement :
Les cadres de l’accompagnatrice sociale se réfèrent à la ​Loi 2002-2 du 2 Janvier
2002 qui rénove l’action sociale et médico-sociale, qui réaffirme la place prépondérante des
personnes. Je soulèverais plus particulièrement un des 7 articles qui est : « une prise en charge
et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie
et son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui
doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à
participer à la décision ». Elle se reporte aussi au cahier des charges du service, arrêté du 19
Juin 2019, qui décrit que les professionnels d’un HUDA : « assurent l’accompagnement des
demandeurs d’asile dans les démarches administratives et juridiques, y compris de manières
dématérialisées. Les professionnels assurent les démarches d’ouverture de droit sociaux des
personnes, notamment l’affiliation à la protection universelle maladie et informent les
personnes sur le fonctionnement du système de santé. Ils sont tenus d’informer les
demandeurs du fonctionnement des services publics locaux et de la possibilité de bénéficier
de prestations disponibles localement. » Nous pouvons nous reporter aussi aux droits des
7
demandeurs d’asile , qui dit qui les conditions matérielles d’accueil comprennent une place en
hébergement (CADA, HUDA…), où le demandeur d’asile bénéficie d’un accompagnement
social et administratif. La loi « asile et immigration » du 10 septembre 2018 étend cet
accompagnement à un accompagnement juridique.
a-​3​) ​Fragiles, vulnérables, les demandeurs d’asile dans l’attente :

6
​Association de Recherche en Soins Infirmiers
7
Http://www.info-droits-étrangers.org

10
8 9
L’ANESM , dans un de ses projet , dit que l’exil est lié à un départ contraint et
précipité de la personne fuyant une situation de persécution, de conflits intense et menaçants
pour sa survie. L’imprévisibilité du départ et l’impossibilité d’un retour constituent en
eux-mêmes un traumatisme. De même, le déplacement géographique force l’expérience
interculturelle qui peut être douloureusement vécue. L’exil entraîne une perte d’identité due à
un déracinement et à un manque de repères culturels et affectifs. Toutes les marques (statut
social, repères environnementaux, …) d’intégration familiale, sociale, culturelle voire
économique sont inexistantes à l’arrivée en France. L’exilé doit accepter ce vide et la
nécessité de reconstruction. A la douleur de la fuite s’ajoute alors l’acceptation de l’état de
vulnérabilité et de besoin d’aide, d’autant plus difficile à accepter qu’elle se joue dans une
culture et bien souvent une langue inconnue. Dans l’attente d’une réponse à sa demande
d’asile et pour organiser sa vie quotidienne, l’exilé doit rapidement s’adapter à la société qu’il
a rejointe et intégrer les codes culturels et sociaux nouveaux. L’ANESM soulèvera le point de
vue de certains psychiatres, que les demandeurs d’asile vivent « un triple traumatisme : le
traumatisme prémigratoire, les effets potentiellement traumatiques de la migration elle-même
et le traumatisme découlant du risque de déni de leur vécu par le pays d’accueil ». La question
de la santé physique est également prégnante. L’arrivée de la plupart des demandeurs d’asile
fait souvent suite à des voyages longs, dangereux qui peuvent se dérouler dans des mauvaises
conditions d’hygiène et de sécurité. Le traumatisme lié à l’exil se rencontre très fréquemment
et l’impact de ce dernier sur la fragilité psychique du demandeur d’asile est une donnée
fondamentale du type d’accompagnement à proposer par la structure d’accueil.
L’accompagnement dans les structures reste attaché à la décision de l’OFPRA, puis le cas
échéant, à celle de la CNDA. Il doit permettre aux personnes de se ressourcer avant de
construire un parcours de vie intégrant le bénéfice de la situation d’ouverture culturelle vécue.
La personnalisation de l’accompagnement est un véritable enjeu pour les professionnels des
structures. Bien que le temps pour le demandeur d’asile soit comme suspendu et son avenir
sur le territoire incertain, la co-construction d’un projet reste possible dans le cadre du séjour
au sein d’une structure.
Carolina Kobelinsky, anthropologue membre du Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie
Comparative (LESC), portent ses recherches sur les politiques migratoires et d’asile. Dans son

8
Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des établissements et Services sociaux et
Médico-sociaux
9
​Personnalisation de l’accompagnement des demandeurs d’asile accueillis en CADA

11
10
ouvrage , Carolina Kobelinsky, parlera du quotidien des demandeurs d’asile et de leurs corps
en attente. Elle évoquera que contraints à l’inactivité, la vie des hommes et des femmes
demandeurs d’asile est marquée par l’attente. Pour ceux que l’État prend en charge dans des
structures dédiées à l’hébergement et à l’accompagnement pendant la procédure d’asile, la
dilatation du temps s’articule à une rétraction de l’espace. Mise en attente et mise à l’écart ont
des effets concrets sur le corps de ces étrangers au statut juridique précaire qui se trouvent
dans un présent marqué par l’ambiguïté de leur situation. C’est dans ces parcours marqués par
l’errance et la circulation contrainte que vient s’insérer un moment de halte. L’arrivée en
structure fournira aux demandeurs d’asile les conditions matérielles minimales mais
nécessaires pour garantir la survie et permettre de reprendre souffle : manger, dormir, soigner
son corps. Dans les propos recueillis des demandeurs d’asile sur leur présent, on retrouve
l’idée d’un temps « mort », « arrêté », qu’il faut « remplir ». Cette chosification du temps
montre que le présent est perçu comme « bloqué », non vécu. Le « ​vrai problème c’est qu’ils
doivent rester les bras croisés​ ». L’inaction imposée, ainsi que le sentiment d’inutilité qui en
découle, s’inscrit sur les corps des demandeurs d’asile. A la dégradation physique s’ajoutent
parfois des troubles psychologiques liés à l’inactivité. Faire l’expérience du confinement et de
l’inaction peut entraîner un sentiment de résignation qui accentue la dégradation physique et
morale. Elle peut aussi, au contraire, comme a pu l’observer Carolina Kobelinsky au cours de
son enquête, induire un sentiment de révolte qui conduit, au moins partiellement, à une reprise
en main du corps. Avec l’entrée dans un provisoire qui dure, où l’ennui et l’inactivité
s’installent, ce corps infantilisé devient aussi un corps fatigué, dégradé. Afin de l’entretenir,
de le distraire, peut être aussi de l’encadrer, il est bon que la structure propose des activités.
Permet une reprise en main du corps qui sort de l’espace cloîtré de l’institution et s’insère
dans une nouvelle temporalité qui vient en quelque sorte estomper l’attente. La
réappropriation du corps devient possible dés lors qu’on récupère la maîtrise du temps.
L’observatoire Régionale de l’intégration et de la Ville (ORIV) mentionne dans ses
11
recherches : « que ce qui a été vécu par les personnes avant d’arriver en France, cumulées ou
renforcées par les situations de précarité rencontrées ensuite, rendent les demandeurs d’asile
vulnérable matériellement, mais aussi psychiquement. France Terre d’Asile énoncera, que les

10
Corps des affects, Corps en migrations N°10-2012
11
​Demandeurs d’asile et processus d’intégration N°42-Juillet 2009

12
12
statistiques et études sociologiques dévoileront une plus grande marginalisation des
étrangers et un niveau de pauvreté plus important que chez les nationaux.
13
Selon Charles Di psychologue , l’inscription dans le pays d’accueil est un processus
complexe qui nécessite du temps et une élaboration. On observe soit une hypersensibilité, soit
une hyposensibilité. Dans le premier cas, la personne est épidermique et très irritable. La
moindre chose lui semble dramatique et/ou persécutrice. Dans le second cas, le flegme, la
torpeur, la léthargie semblent dominer la personne.
b) Leviers de l’accompagnement vers l’autonomie :
b-​1​) ​Regard sur les capacités des demandeurs d’asile :
14
Selon l’ANESM , l’accompagnement visant l’autonomie de la personne dans sa vie
sociale s’appuie sur ses potentialités à développer ses propres ressources, à opérer des choix et
à construire son organisation quotidienne durant le séjour. Enjeux et effets attendus : les
potentialités de la personne accueillie sont le socle de son autonomie dans la vie quotidienne
et elles doivent en cela être valorisées et entretenues tout au long de son séjour. Le besoin
d’aide, voire d’assistance dans certaines actes ou démarches de la vie quotidienne, diffère
d’une personne à l’autre. Pour certaines personnes, la transmission des principales clés de
compréhension de la société française suffit à ce qu’elles s’en saisissent et s’organisent dans
leur reconstruction personnelle et sociale. Pour d’autres l’appropriation des codes sociaux et
culturels est plus longue et nécessite un accompagnement plus poussé et respectueux des
modes d’action des personnes. Les professionnels proposent des soutiens dans la gestion du
15
quotidien en favorisant l’autonomie des personnes accueillies. France Terre d’Asile , dira que
l’accompagnement mené ne doit pas être vu comme un temps « à part », isolant mais une
étape ou plus justement un relais vers l’autonomie, ou comment permettre à la personne de se
défaire durablement du soutien de l’accompagnant ou de toute mesure d’aide sociale. Quand
on évoque le sujet de la participation des personnes accueillies dans les Établissements
Sociaux et Médico-sociaux (ESMS), on y associe souvent le constat selon lequel toute
tentative est vouée à l’échec, en raison de la situation des personnes qu’on estime trop
fragiles, d’un lien social qui serait tellement délité qu’il empêcherait toute possibilité
d’expression. France Terre d’Asile rajoute que selon cette idée, les personnes que l’on

12
​Guide de l’accompagnement vers l’autonomie
13
​Conflit des cultures dans la constitution de soi
14
Recommandations de bonnes pratiques ​https://www.has-sante.fr
15
Cahier social du Guide de l’accompagnement vers l’autonomie

13
accueille n’auraient de fait pas d’aptitudes nécessaires à la participation, la capacité à
communiquer avec autrui, à trouver leur place au sein d’un groupe, à sortir de leur situation
personnelle pour prendre la mesure de l’intérêt général… France Terre d’Asile toujours, émet
que ces affirmations ne sont pas sans fondements, et elles reflètent une certaine réalité. Il est
vrai qu’il faut prendre en compte les parcours des personnes et les situations de
désocialisation qui peuvent en découler. Cela signifie-t-il pour autant que l’on doive
abandonner sans autre forme de réflexion cet enjeu ? Nous pensons bien évidemment que non.
C’est pourquoi pour dépasser ces obstacles, il est important de veiller à réunir le maximum de
conditions pour rendre la participation possible. En effet la participation ne se décrète pas, elle
se travaille, avec l’usager.
Et il faut garder en mémoire, affirme encore France Terre d’Asile que « quel que soit son
éloignement des normes de comportement habituellement en vigueur, quelle que soit la
difficulté de compréhension qu’il peut rencontrer, l’usager est et demeure un être qui
s’exprime et doit être rencontré en tant que tel ».
b-​2​) ​L’importance de la langue française dans un processus d’intégration :
France Terre d’Asile mentionnera dans son cahier social : « Nous établissons comme
principe de base que le travail d’intégration consiste en la capacité d’accélérer et d’optimiser
un processus initié par la personne elle-même depuis son entrée sur le territoire national. Pour
les étrangers non francophones, la maîtrise de la langue semble être le premier pas vers
l’intégration sociale et professionnelle. Or, les démarches auprès des administrations et
services publics peuvent s’avérer compliquées pour eux, en raison de défauts de
compréhension liés à des difficultés linguistiques et culturelles. La dématérialisation de la
communication entre les services publics qui mettent en œuvre les droits sociaux et leurs
usagers pose également des difficultés aux étrangers. Une personne maîtrisant peu ou mal la
langue ou illettrée ne peut bénéficier de ces services de manière optimale et est souvent
victime de ruptures de droits ». France Terre d’Asile dira que la participation, au-delà d’être
une finalité en soi, est également un outil essentiel à mobiliser pour accélérer l’intégration et
l’autonomisation des usagers.
16
Selon le sociologue Abdelmalek SAYAD , l’intégration est un processus dont on constate le
terme, les résultats, mais qu’on ne peut saisir en cours d’accomplissement, car il engage tout
l’être social des personnes concernées et aussi de la société dans son ensemble… C’est un

16
Demandeurs d’asile et processus d’intégration N°42-juillet 2009

14
processus qui, dans le meilleur des cas, peut se constater sans plus ; et s’il peut, à la rigueur,
être contrarié par quelque action extérieure qui lui soit favorable, il n’est pas sûr qu’il puisse
être orienté, dirigé, volontairement favorisé.
L’ORIV évoquera, que des conditions d’accueil et d’accompagnements peu satisfaisantes
peuvent donc diminuer ou atteindre les capacités des personnes à s’intégrer en cas d’obtention
du statut ou faire un nouveau projet de vie en cas de décision négative. Toujours par l’ORIV,
l’apprentissage du français est plus fréquent bien que non officiel, ne serait-ce que par les
contacts avec les administrations ou d’autres personnes. Il est important de noter qu’un
apprentissage du français avant l’obtention du statut de réfugié permet une intégration plus
rapide et allège l’attente en permettant de se consacrer à une activité ayant du sens.
Cependant, les conditions de l’attente ne sont guère favorables à un apprentissage quelconque.
Tout au long de l’étude, l’importance de garantir une bonne information autant sur la
procédure, sur les droits économiques et sociaux que sur le dispositif d’accueil est apparue
comme un incontournable.

Aux vues des apports théoriques mentionnés, les notions de l’accompagnement sont
de prendre en compte la situation des personnes plus ou moins fragile, au regard de leur
parcours de vie, d’exil, de leur histoire personnelle et des difficultés qu’elles rencontrent au
quotidien. Mais l’accompagnement est de rendre l’usager acteur à part entière et non une
personne qui subit les difficultés. Faire participer la personne est lui rendre un peu de dignité,
d’estime de soi et le revaloriser. L’accompagnement est un fondement du travail social qui
vise à donner aux personnes l’accès aux droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale
et à exercer une pleine citoyenneté. De plus, selon les auteurs que j’ai découvert dans ce
travail de recherche, travailler l’apprentissage de la langue française est primordiale, pour
permettre aux personnes de favoriser leur autonomie en vue de leur intégration sociale.

V. Analyse, Transmissions, propositions :


a) Analyse :
Aux regards de mes recherches théoriques, il me semble indispensable de mettre le
demandeur d’asile au cœur de l’accompagnement socio-éducatif, malgré les difficultés que
l’on puisse rencontrer qui ont été citées auparavant. J’ai pu rencontrer lors de mon stage, une
professionnelle d’un Centre d’Accueil pour Demandeur d’Asile (CADA) du département, que

15
je nommerai Dalie, qui a pris le temps de m’expliquer, qu’à l’arrivée des demandeurs d’asile,
ceux-ci étaient très fatigués et souvent dans un mauvais état de santé. Que les personnes
avaient besoin d’un temps de repos pour permettre la reconstruction de soi, l’apprentissage de
la langue et d’autres prérequis. Dalie m’a défini la réalité des conditions de travail et
l’urgence de certains documents administratifs à faire à l’arrivée du demandeur d’asile,
comme la Complémentaire Santé Solidaire indispensable pour la prise en charge des soins des
personnes et qu’elle remplissait seule ce document. Elle a pu m’expliquer qu’engager les
demandeurs d’asile dans leurs accompagnements n’était pas leur but premier, mais qu’on ne
pouvait pas non plus passer à côté. Cela se fait au fil du temps et se met en place par rapport
aux capacités des personnes et de leur évolution physique et psychique. Dalie m’a présenté sa
structure et l’équipe pluri-professionnelles, j’ai constaté rapidement la différence en capacité
d’accueil et le nombre de professionnelles qui constituaient l’équipe, qui sont bien plus
nombreuses par rapport à l’HUDA. J’en ai défini, que le CADA rencontrait les mêmes
difficultés pour l’accompagnement des demandeurs d’asile que l’HUDA et que la différence
de capacité et du nombre de professionnelles n’étaient pas la cause de ces difficultés mais que
c’était liés aux situations des demandeurs d’asile. Pour cela, Dalie m’a présenté des activités
et ateliers qui sont mis en place au sein du CADA, pour faciliter au mieux l’accompagnement
et l’intégration des demandeurs d’asile. Ces pistes de travail collectif m’ont parues
intéressante à partager avec l’équipe puisque ce type d’intervention n’existe pas au sein de
l’HUDA. J’ai très vite noté qu’il fallait adapter les mesures d’accompagnement à la situation
du demandeur d’asile, en prenant en compte son niveau linguistique, son état de santé
physique et psychique. Comme on peut dire « faire du cas par cas ».
Il est primordial de signifier que pour le demandeur d’asile, savoir reconnaître la fonction des
différents services administratifs et apprendre à remplir les documents nécessaires au travail
d’intégration des personnes et est un besoin repéré qui demande à être anticipé. Après m’être
informée auprès des demandeurs d’asile que j’accompagnais, il est apparu, que même si
l’attente de demande d’asile était très longue, ce temps apparaissait comme trop court aux
yeux des demandeurs d’asile pour l’apprentissage du français. Ils me l’ont expliqué
simplement en me disant : « Le français c’est très très dur ». S’ajoute une difficulté
supplémentaire pour certaines personnes qui, déjà dans leur langue maternelle, ne savent ni
lire, ni écrire. La réalité du demandeur d’asile une fois réfugié, c’est qu’il devra réaliser seul
sa vie administrative et sociale, il devra savoir vers quel organisme s’adresser pour faire une

16
quelconque demande, cela afin qu’il puisse jouir de ses droits et repérer les personnes
ressources auprès desquelles il pourra se tourner. Je relèverais aussi, après mes échanges avec
les demandeurs d’asile, que ceux-ci ne demandent qu’à apprendre et de pouvoir occuper leur
journée. Les cours de français donnent du sens à leur quotidien et s’occuper en journée leur
permet aussi, de ne pas accaparer leur esprit à la remémoration de leur histoire de vie et de
migration. Dans mes recherches théoriques, a été soulevé la vulnérabilité de ces personnes qui
peut mettre en danger la vie future de celles-ci, qui d’après mes observations, est lié,
notamment à la différence culturelle et la méconnaissance du système français. Une personne
autonome et intégrée socialement limite son niveau de vulnérabilité.
b) Échanges, transmissions et propositions à l’équipe :
Après avoir échangée avec les différentes professionnelles de l’équipe lors d’une
première réunion, qui a été planifiée et communiquée à toute l’équipe par ma référente de
stage, et cet échange a été effectué par mail interne. Durant cette réunion, je leur ai rapporté
les témoignages des demandeurs d’asile, de Dalie la professionnelle du CADA, ainsi que mes
recherches théoriques. J’ai proposé à l’équipe d’élaborer et mener des ateliers que je
souhaitais animer avec des outils que je confectionnerais, pour expliquer aux demandeurs
d’asile les fonctionnements et l’utilité de certains services administratifs français, comme la
CAF et la Sécurité Sociale prioritairement, pour lesquels les demandeurs d’asile sont
principalement concernés. Aussi lors de ces ateliers, je leur apporterais les explications
nécessaires, pour remplir les documents associés aux services de la CAF et la Sécurité
Sociale, pour les demandes de RSA et de la Protection de Maladie Universelle. L’équipe a
validé ma proposition et m’a laissée l’initiative d’agir, tout en me signifiant que cette
démarche partait sur une base expérimentale. Lors d’un second temps, que j’ai soumis par
mail, à la responsable d’unité, de le mettre dans l’ordre du jour durant la réunion d’équipe
mensuel. Cela pour présenter et échanger sur les outils que j’avais créé et comment j’allais
organisé mes ateliers. Lors de cette réunion je leur ai présenté à l’aide du logiciel
« Powerpoint », un diaporama des différents outils éducatifs et pédagogiques que je souhaitais
mettre en place pour animer mes ateliers. Les professionnelles m’ont donné certaines
recommandations sur certains détails de mes outils, comme la formulation des phrases qui
devaient être simples, et nous avons aussi choisis ensemble, les demandeurs d’asile que
j’inviterais à participer aux ateliers. Suite aux observations et recherches que j’ai apporté lors

17
de la première réunion, nous avons trouvé judicieux de distinguer les personnes, par rapport à
leurs capacités physiques, psychiques et linguistiques.
Après la validation de l’équipe, j’ai préparé les ateliers que j’ai choisi de mener en quatre
temps et j’ai invité par SMS, les demandeurs d’asile que nous avons choisis, pour participer
aux ateliers.
c) ​Bilan et retours des ateliers :
Le temps de cette transmission pour me permettre de faire les retours des ateliers à
l’équipe, a été posé quand j’avais défini des dates de ceux-ci. Dates que j’ai communiqué par
mail interne à la responsabilité d’unité, qui les a ensuite transmises également par mail
interne, aux autres professionnelles de l’équipe. J’ai ensuite proposé un jour pour la réunion
toujours par le biais d’échange de mail à la responsable d’unité, qui a validé ma proposition et
en a informé l’équipe, par le même mode de communication déjà évoqué.
J’ai pu faire le retour de l’analyse des ateliers à l’équipe, que j’avais préparé par écrit et ainsi
pu expliquer que ceux-ci avaient dans l’ensemble très bien fonctionnés. Les demandeurs
d’asile se sont à chaque fois présentés à tous les rendez-vous des ateliers. Les personnes
accueillies se sont montrées très curieuses et ont pu me poser toutes les questions sur les idées
qui pouvaient les interroger. Ils ont trouvé ces temps très intéressants et constructifs, ils ont pu
me dire avoir appris sur les différents services présentés, qui leur étaient vraiment méconnus.
La compréhension des documents a par contre été plus complexe, dû à un acquis de la langue
française encore trop fragile et la méconnaissance de certains vocabulaires. Malgré cela, les
demandeurs d’asile ont apprécié ces temps qui ont été conviviales et dans lesquels ils se sont
sentis mis en considération. Ils m’ont pour certains dit : « Enfin on s’intéresse à nous, c’est
important pour nous de connaître tout ça et surtout quand nos familles seront là, on pourra
leur apprendre ! ».
L’équipe a exprimé être ravie de mes retours, elle m’a signifiée l’importance de mon initiative
suite à mes observations, qui a apporté aux demandeurs d’asile des moments d’activités, des
connaissances et qui a pu contribuer à une revalorisation de soi. Les professionnelles m’ont
aussi dit qu’un regard nouveau, avait amener à l’équipe un meilleur esprit de corps.
L’équipe a souhaité garder les outils que j’avais élaboré pour pouvoir établir la continuité des
ateliers, tout en prenant en compte les capacités et les freins des demandeurs d’asile.
L’équipe a accordé du crédit et de l’importance à mes observations, et a adhéré aux enjeux qui
sont liés à l’accompagnement du demandeur d’asile dans les démarches administratives. Ainsi

18
approuver que l’autonomie et l’intégration de ceux-ci étaient primordiale pour leur projet de
vie, qu’ils soient statutaires ou déboutés du droit d’asile.

VI. Conclusion :
J’ai souhaité traiter certains aspects de l’accompagnement dans le travail social, ce qui
est pour moi une fonction primordiale pour permettre aux personnes d’accéder à une certaine
forme d’autonomie.
Le travail que j’ai mené avec l’équipe m’a paru pertinent et essentiel, pour accompagner les
demandeurs d’asile dans leur projet de vie. Toutes les recherches que j’ai effectué ont apporté
des éléments nécessaires à prendre en compte, pour améliorer l’accueil des demandeurs
d’asile et favoriser leur intégration sociale. Pertinent et essentiel pour les professionnelles de
l’HUDA, qui ont pu me dire au début de mes interrogations, qu’elles manquaient de temps et
que les conditions de travail ne leur permettaient pas de mettre les personnes au cœur de
l’accompagnement dans les démarches administratives. L’action de mettre en place des
ateliers peut permettre de rendre les demandeurs d’asile moins dépendant des
professionnelles, et d’accorder à celles-ci, une fois le demandeur d’asile un minimum
autonome dans les démarches administratives, de libérer du temps pour les autres personnes.
Celles qui ne sont pas encore prêtes physiquement, psychiquement et linguistiquement, à
rentrer dans un apprentissage de la langue française et de mettre les personnes en situation
d’apprendre les fonctions des services publics avec les documents appropriés.
J’ai trouvé essentielle la transmission des informations entre les professionnelles, qui a permit
de considérer tous les avis et les interrogations des professionnelles de l’équipe. En tant que
futur professionnelle, la prise de parole en réunion ou au sein d’un groupe a favorisé la
confiance en moi, elle m’a permit également de pouvoir exprimer mes idées. J’ai également
été surprise par la considération que l’équipe m’a apportée, ce qui a avantagé mes prises de
responsabilités, mon intégration dans l’équipe et mon implication professionnelle.
J’ai aussi pris conscience de la complexité de la situation des demandeurs d’asile avec la
souffrance vécue par les personnes qui en plus découvre une nouvelle langue et qui ne sont
pas forcément disponible psychiquement pour appréhender l’ensemble des documents
administratifs, à travers notamment des ateliers où les personnes peuvent s’informer, se
former et s’entraider. Le point de vigilance, à ne pas réduire les demandeurs d’asile à leurs

19
incapacités du fait de leur histoire de vie et de leur exil, comme l’a fortement souligné France
Terre d’Asile.
L’importance du travail en équipe, de la transmission d’information pour évaluer au mieux les
besoins de chacun et ajuster ses postures d’accompagnement, que j’ai pu retrouver dans mes
lectures entre « Personnalisation de l’accompagnement des demandeurs d’asile », « Guide de
l’accompagnement vers l’autonomie » et Maela Paul qui m’a marquée dans mes recherches de
travail.
Tout mon travail de recherche a pu m’éclairer et m’a permis de mieux appréhender
«​ ​l’accompagnement du demandeur d’asile dans les démarches administratives, en vue de
favoriser son autonomie ».​

20

Vous aimerez peut-être aussi