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PROPOSITION DU GROUPE

DE TRAVAIL

PROFESSIONNALISATION ET
RECRUTEMENT DES IMAMS

Version du 10/02/2023 1
PRÉAMBULE

La figure de l’imam prend sa source dans les textes scripturaires et la tradition savante de
l’islam. Depuis les origines et jusqu’à nos jours, la fonction de l’imam s’est imposée comme un
élément caractéristique fondamental de la civilisation islamique, quels que soient les époques,
les régions et les contextes culturels.
Le rôle de l’imam ne s’arrête pas à celui d’un ministre du culte, il touche des domaines plus
larges, comme l’enseignement religieux, la réflexion théologique, l’accompagnement
spirituel, ou encore la participation au débat citoyen et à la vie de la société.

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L’imam : essai de définition adaptée au contexte français
On distingue traditionnellement, s’agissant de l’exercice de la fonction d’imam en lieu de culte
musulman, l’imam fixe (râtib), qui dirige les cinq prières quotidiennes, et l’imam prêcheur
(khatîb), en charge de l’office du vendredi et des fêtes religieuses (lequel peut éventuellement
cumuler les deux fonctions).

Les missions de l’imam sont essentiellement liées à la direction du culte qui englobe, outre les
prières quotidiennes, du vendredi et des deux fêtes, les cérémonies à l’occasion de la
naissance, de la circoncision, du mariage et de la mort, et toutes les demandes de bénédiction
que les fidèles peuvent formuler. Ces fonctions religieuses sont distinctes de celles
d’enseignement, de production théologique et de consultation canonique : l’enseignant et le
théologien sont reconnus comme tels par leurs diplômes ou la qualité de leur savoir, et ils
peuvent ou non exercer en tant qu’imams dans une mosquée.

Dans le contexte français, le terme imam a tendance à être utilisé dans un sens générique et
polysémique. Dans les associations musulmanes, à côté de la direction du culte, il est souvent
demandé aux imams de répondre aux questions des fidèles, de dispenser des cours de religion
et d’apprentissage du Coran, de faire de la médiation auprès des familles, de donner des
conférences, de participer au dialogue interreligieux.

A noter qu’une partie des missions spirituelles et religieuses ci-dessus est assurée, dans
l’armée, les prisons et les hôpitaux, par les aumôniers du culte musulman, qui remplissent à
ce titre les fonctions d’imam dans le cadre de leurs responsabilités spécifiques.

Certains imams sont ainsi devenus des chargés de mission polyvalents qui occupent, le plus
souvent, quatre types d’emplois : ministre du culte, enseignant, animateur en pastorale,
médiateur. On peut ici parler d’« emplois » dans la mesure où ils correspondent à des fiches
de poste qui requièrent des compétences précises et des cursus de formation spécifiques.

Un imam ayant en charge le culte doit-il forcément occuper les autres emplois ? Avec quels
objectifs et compétences requis ? Il est indispensable de clarifier ces points, et de préciser les
attentes des musulmans, afin de déterminer un champ de compétences et d’activité de l’imam
qui soit réaliste. Il est nécessaire, enfin, de définir un socle de base de la fonction d’imam, en
contexte français, centré sur la direction du culte et la mission pastorale, et de proposer des
cursus de formation et une validation des acquis permettant de justifier des compétences
nécessaires.

Missions prioritaires des imams en France


Partant en premier lieu des exigences et besoins des musulmans et des musulmanes de France
(épanouissement spirituel, pratique cultuelle, éducation religieuse et responsabilités
quotidiennes), le GT-PRI a essayé d’établir une liste exhaustive des charges prioritaires qui
peuvent ou devraient être assumées par les imams, plus ou moins complètement, et en

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fonction de leurs compétences. En toute logique, les compétences reconnues déterminent les
missions que l’imam peut assurer. Un imam ne peut assumer que les missions correspondant
à son profil, à sa formation et à ses compétences (savoir, savoir-faire, savoir-être).
Les missions principales des imams s’articulent autour de quatre grands axes :

Diriger les différentes prières rituelles : prières quotidiennes ; prière et prêche du vendredi ;
prière des deux fêtes annuelles ; prières surérogatoires de nuit (tarawih) durant le mois de
Ramadan ; prières mortuaires, etc.

Accompagner les musulmans à travers les événements de la vie : cérémonies religieuses


(mariage, conversion, etc.) ; conseils religieux au bénéfice des fidèles.

Transmettre la sagesse, la connaissance et les valeurs de l’islam : enseignement du Coran et


des sciences islamiques ; exhortations et instruction religieuse.

Représenter la voix et l’image de l’islam : dialogue interreligieux ; relations avec


l’environnement local (institutions, services publics, médias, etc.).

Vers un statut juridique de l’imam : problématiques et


configurations possibles
En dépit de la dignité éminente de la fonction d’imam en islam, celle-ci manque d’attractivité,
en tant que métier et occupation professionnelle. Il est indispensable de garantir à ceux qui
exercent les missions d’imam à titre professionnel de pouvoir le faire dans les meilleures
conditions possibles, en termes de protection sociale, de droits au chômage et à la retraite,
etc.

L’une des raisons des carences constatées tient à l’absence d’une définition claire ou d’un
statut juridique reconnu de la profession d’imam au regard du droit français. En effet, aucune
fiche-emploi « imam » n’existe jusqu’à présent dans le référentiel national des métiers.

Le GT-PRI a essayé d’identifier les problématiques et les défis en présence, et d’envisager


différentes configurations possibles, sans exclure aucune piste, concernant l’exercice de la
profession d’imam ainsi que les droits associés.

Deux configurations principales apparaissent :

1. le statut du ministre du culte ;

2. le statut de salarié (lien de subordination avec un employeur, en l’espèce,


association loi 1905 ou loi 1901).

Au regard des avantages et inconvénients présentés en annexe, mais aussi de la nature et des
missions propres à la fonction d’imam, qui dépassent le champ d’activité d’un ministre du
culte, la seconde configuration semble préférable et plus adaptée, notamment par rapport
aux deux premières catégories d’imams (imam râtib et imam khatîb). Le GT-PRI préconise

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donc de privilégier la seconde hypothèse, soit le statut de salarié, ou alors d’aménager le
statut du ministre culte existant (horaires et jours de travail, etc.).

Le besoin et l’opportunité d’une structuration locale des


imams
Quelques collectifs regroupant des imams au niveau local, départemental, régional ou plus
large, se sont mis en place sur notre territoire national, sous la forme d’associations ou de
groupe informel.
Le GT-PRI encourage ce type de structuration locale afin de faciliter les échanges et le dialogue
entre le FORIF et les imams exerçant en France.

Ces structures, dont la nature et les attributions sont à définir plus précisément, notamment
en fonction des besoins et des moyens exprimés dans le cadre des ATIF, contribueront à :
 Renforcer la solidarité entre les imams et coordonner leur travail sur le terrain
(remplacement d’un imam, etc.) ;
 Développer leurs compétences dans leurs champs d’intervention (collaboration
scientifique, échange d’expertises théologiques, formation continue) ;
 Répondre aux besoins des fidèles et participer aux débats de société (émission d’avis
religieux communs, positions théologiques concertées, etc.).

Actions à venir

1. Consultation des imams


Nous avons besoin d’une consultation des imams à l’échelle nationale. L’objectif de cette
consultation est de faire un état des lieux, au plus près de l’existant, de recenser les besoins
des imams (protection sociale, chômage, salaires, formation, etc.), et de recueillir leurs avis et
leurs idées éventuelles dans ce domaine.
Le GT-PRI considère que cette consultation est un préalable indispensable à toutes
propositions visant à améliorer les conditions d’exercice de la fonction d’imam en France.
Les contributions des acteurs du terrain et les remontées des expériences locales, à travers
les ATIF et les réseaux du FORIF sur le territoire national, seront essentielles pour mener à
bien ce travail de cartographie et de recensement des besoins, pour tirer profit des bonnes
pratiques, et pour recueillir les propositions.

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Statut juridique
Parallèlement à la consultation des imams, il entend poursuivre son travail de réflexion et de
recherche autour des statuts de l’imam, des fiches de poste, des contrats de travail. Ces
travaux vont être développés et approfondis en étroite collaboration avec des juristes et des
avocats spécialisés en droit du travail et en droit social. Le GT-PRI souhaite s’appuyer
également sur l’expertise d’autres participants du FORIF.

2. Formation des imams


Concernant le volet formation des imams, les participants de ce GT et du GT dédié à
l’organisation des aumôneries, au sein du FORIF, ont constitué un groupe commun pour
réfléchir et travailler ensemble sur le socle de base d’une formation commune à la fois pour
les imams exerçant dans les mosquées et pour les aumôniers musulmans.

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ANNEXE : Avantages et inconvénients respectifs des deux statuts (salarié VS ministre du culte)
SALARIE (CDI ou CDD) MINISTRE DU CULTE
REGIME REGIME GENERAL REGIME DES CULTES
CONDITIONS Le salarié doit être au profit et sous le pouvoir hiérarchique Un ministre du culte, en raison de ses fonctions religieuses, ne relève pas du code de travail.
de celui qui l’emploie. Ne conclut pas un contrat de louage de service (contrat de travail) .
Existence d’un contrat de travail. N’est pas en lien de subordination pour ses activités.
Dans un état de dépendance (imposition d’un horaire, Ne peut pas se défendre devant un conseil des prud’hommes qui se déclarent incompétent.
imposition d’une fréquence d’intervention, transmission de Peut travailler le dimanche sans autorisation de l’inspecteur du travail
directives et de consignes de la part de l’employeur, Peut opter pour le régime général de sécurité sociale mais ne cotise pas à l’assurance
contrôle du travail fourni, rémunération fixe et régulière). chômage (Pôle Emploi) et par conséquent n’a pas droit aux allocations chômage.
En étant intégré dans « un ensemble organisé ».
Moyennant rémunération. Affiliation à la CAVIMAC qui procède au recouvrement des cotisations et des contributions
sociales, et assure la liquidation et le service des prestations d’assurance maladie, maternité
et invalidité.
AVANTAGES Une meilleure couverture sociale. Possibilité de réduire les cotisations et prestations maladie.
Couverture accordée en matière d’assurance chômage (pas
besoin de contracter une assurance complémentaire).
L’accès à la retraite permettant de bénéficier d’une pension
retraite correcte.
Une protection sociale plus coûteuse. Pas d’indemnités journalières en compensation partielle d’une perte de salaire.
INCONVENIENTS Relève du code du travail (besoin d’adaptation ou d’une Pas non plus d’indemnités en cas d’accident du travail.
convention collective ?). Pas d’assurance chômage (besoin de contracter une assurance complémentaire).

A titre d’information et de comparaison, il peut être intéressant de connaître la configuration propre au culte protestant en la matière.

Les pasteurs relèvent du statut des ministres du culte. Etant affiliés, comme les rabbins et plus de la moitié des pasteurs évangéliques, au régime général des salariés, ils ne
paient pas de cotisations « chômage ». L’Eglise Protestante Unie de France (EPUF) recourt à un Fonds de solidarité et de reconversion (FO.SO.REC) lorsqu’un « proposant »
n’est pas admis « ministre » ou lorsqu’un de ses ministres démissionne et demande la radiation du rôle ou est radié du rôle pour un tout autre motif (différend avec la base,
sanction disciplinaire, etc.). Les responsables de l’EPUF ont historiquement négocié une assiette de cotisations correspondant à un « traitement mensuel » auquel s’ajoute un
forfait de mise à disposition d’un logement ainsi que la possibilité de sur-cotisation. Ceci conduit notamment à une bonification des pensions « vieillesse ». Le traitement brut
mensuel de base au 1er janvier 2017 était de 1182,18 euros auquel s’ajoutait une indemnité de résidence d’un montant maximum de 1360 euros et un « crédit documentaire »
de 275 euros.

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