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04 AIFE
Régine Diyani
Directrice 23
Groupe Chantelle
André Wei
Chief technology officer
10 Engie
Gérard Guinamand et Renaud Ribal
Group Chief Data Officer et Directeur Activités 29
Axway
Emmanuel Methivier
Catalyst
13 ACOSS
Jean-Baptiste Courouble
Directeur des systèmes d’information
axway.com/fr 2
Comment les directeurs de la transformation et les directeurs
des systèmes d’information parviennent-ils à capitaliser sur
des avantages technologiques comme les API ?
Nouveaux business models, ouverture aux écosystèmes, nouvelles démarches de cocréation… ces dynamiques
sont au cœur de la transformation actuelle des entreprises grâce au numérique. Elles sont soutenues par un
mouvement généralisé de plateformisation qui implique aujourd’hui autant les acteurs métiers que les DSI
et les CDO.
En effet, une inflexion majeure est apparue ces dernières années, alors que le sujet de l’APIsation des systèmes
d’information, appréhendé par le passé par ses seuls aspects techniques, s’est transformé pour se lier de façon
beaucoup plus intime aux enjeux business des métiers. L’ouverture et la plateformisation sont devenues en ce
sens une question stratégique, tout autant qu’une question technologique… avec toutes les conséquences que
cela implique pour une entreprise, d’un point de vue organisationnel, culturel, ou encore de gestion des
compétences. Ce pivot a aussi été un facteur fédérateur pour les entreprises. « Cette adhésion IT et Métier dans
la réflexion ne s’est pas faite du jour au lendemain, mais aujourd’hui, alors que le changement a lieu, nous voyons
tous l’accélération que cela provoque et les impacts positifs pour les uns et les autres » explique par exemple
Jeremy Segura, Head of Technical & Security Architecture chez BNP Personal Finance (voir notre interview p.17).
Il est coutumier en 2020 d’entendre dire que les transformations auxquelles sont confrontées les organisations
sont extrêmement rapides. Cela est particulièrement vrai concernant l’APIsation et l’ouverture des systèmes :
la courbe de maturation sur ces sujets est rapide, la plupart des acteurs évoquant des changements majeurs à
horizon 18 mois. Ainsi, une entreprise qui découvrait à peine ces sujets il y a quelques années, est bien souvent
aujourd’hui en train de faire évoluer le cœur du réacteur de son SI pour le rendre compatible avec un monde
d’écosystèmes. « Quand j’ai pris mes fonctions en 2016, le comex lançait tout juste l’aventure. L’adhésion à l’idée
d’ouverture était complète mais récente. Nous n’avions alors aucun service communicant sur l’extérieur : le
système d’information n’était pas prévu pour cela ! » se souvient ainsi Laurent Rousset, DSI pour The Adecco
Group en France, en décrivant les changements survenus depuis (voir notre interview p.7).
Reste que face à cette accélération, il est nécessaire d’embarquer toute l’entreprise pour accompagner les
changements. Cela implique en premier lieu que les parti-pris stratégiques soient clairs pour tous et qu’il y ait une
adhésion sur ce que signifie cette ouverture nouvelle. Mais les entreprises sont également amenés à s’interroger
au-delà de ce « pourquoi ? » sur le « comment ? ». Comment créer l’équipe qui va impulser le changement au départ ?
Avec quels profils ? Et quel doit être son périmètre exact ? Pour beaucoup, il s’agit véritablement de se constituer
une « dream team » des fins connaisseurs de l’activité de l’entreprise et des possibilités technologiques pour
amener le changement. Ce qui n’est pas sans implication d’un point de vue managérial.
Les DSI, CDO et acteurs clés de la transformation de leurs organisations qui témoignent dans les pages de ce
carnet ont tous été amenés à se poser ces questions. Ils partagent avec nous les défis organisationnels, culturels
ou techniques auxquels ils ont pu profiter et, surtout, la vision d’entreprise qu’ils entendent servir à travers de telles
transformations. Et malgré des expériences et des secteurs d’activité variés, tous ont en commun une conviction
forte : ces changements sont essentiels et pavent le chemin de leur entreprise vers l’avenir.
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Régine Diyani
Directrice
Effectifs : 150
1 Chorus : système d’information interministériel destiné à piloter les finances publiques en France. Le projet a été
lancé en 2007 et la comptabilité de l’Etat est intégralement tenue dans Chorus depuis 2012.
2 Chorus Pro : solution mutualisée de facturation électronique qui a été mise en place pour tous les fournisseurs —
tant privés que publics — de la sphère publique. La généralisation progressive de la plateforme à toutes les
entreprises s’est faite entre 2017 et 2020.
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recherche d’un consensus entre tous les acteurs concernés. Il fallait faire en sorte que tous les ministères jouent le
jeu et s’engagent vraiment dans une vision commune. Chorus a été l’un des rares grands projets interministériels à
bénéficier de la participation de tous les ministères.
Nous avons dû ensuite agir sur le sujet plus général de la facturation électronique avec la mise en œuvre d’une
nouvelle plateforme, Chorus Pro, suite à une ordonnance de juin 2014 qui précisait le cadre et le calendrier de
l’obligation de facturation électronique pour l’ensemble des fournisseurs de la sphère publique (Etat, collectivités,
établissements publics…). Et nous avons décidé de conserver ce parti-pris de recherche de consensus en mettant
en œuvre une vaste concertation des représentants tant des acteurs privés que publics afin de préciser, tous
ensemble, le cadre de déploiement de la facturation électronique B2G en France.
Avec Chorus Pro, l’offre de services est au cœur de la démarche. La volonté d’ouverture sur tous les acteurs publics
et privés est réelle. Quand on évoque la notion de concertation, il faut qu’il puisse y avoir également un sous-jacent,
une « structure de concertation » facilitée d’un point de vue technique et le sujet des API est donc vite arrivé dans
les discussions. C’était très pragmatique : tous les types d’acteurs devaient pouvoir partager toutes les factures
quelles que soient leurs formes. Sur le papier, c’est une idée simple ; mais la réalité sur le terrain est faite d’une
multitude d’outils, de logiciels comptables différents qui devaient pouvoir se connecter à la nouvelle plateforme
sans que cela devienne une contrainte supplémentaire. Il fallait donc offrir à tous les niveaux les bons services et
l’APIsation est un moyen de simplifier l’interconnexion entre des outils différents.
Effectivement, nous construisons des briques importantes de l’Etat Plateforme. Avec cette stratégie nous nous
sommes rapidement retrouvés à devenir le plus grand « exposeur » de services de l’Etat. Et cette philosophie a
dépassé rapidement le cadre de Chorus Pro. Par exemple, il nous a été demandé d’exposer le Document Unique
du Marché Européen (DUME) : plutôt que de faire juste une nouvelle plateforme avec des formulaires, l’idée a été
de jeter les bases de ce qui pourrait devenir une plateforme mutualisée d’exposition des services de l’Etat, telle
qu’exprimée notamment dans le cadre de la loi Pacte. Cela a amené à la création, il y a quelques mois, de PISTE
(Plateforme d’Intermédiation des Services pour la Transformation de l’Etat), un tout nouvel outil de mutualisation.
Et encore une fois, cela n’a été possible qu’après de nombreuses discussions avec des interlocuteurs publics et
privés, mais nous avions dorénavant cette force et cet argument d’avoir amélioré grandement la gestion des API,
afin de donner une dimension plus industrielle au projet et de faciliter ainsi les échanges.
Effectivement, la DINSIC a pour mission de fixer l’orientation générale dans ce domaine, mais pas de construire les
API. Pour ce qui est de nos systèmes d’informations, nos convictions et notre ADN favorisent la diffusion de cette
vision. Nous pensons depuis longtemps que la transformation d’une organisation ne peut pas se faire en solitaire,
il faut travailler avec les autres. Cela doit passer par un dialogue, tant au niveau stratégique qu’au niveau des
données échangées. Le système d’information doit être au service de cette vision. C’est pour cela que l’APIsation
nous est venue naturellement, et s’est insérée comme une pièce importante du cadre d’interopérabilité générale
que nous imaginons : l’objectif est bien la transformation globale, pas seulement celle d’un système. En termes
de maturité sur le sujet, il y a encore de fortes disparités. Au sein des services de l’Etat, c’est très diversifié, il y
3 DINSIC : Direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’Etat, sous l’autorité du Premier ministre, coordonne les projets des administrations en
matière de système d’information et de transformation numérique.
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a certains qui commencent tout juste à acquérir cette culture API. D’autres s’y lancent très sérieusement. Mais
dès que l’on se tourne vers des partenaires du privé, notamment du côté des éditeurs de logiciels, cette maturité
est bien présente. En termes de « culture IT » en tant que telle, en interne, nous avions au départ beaucoup de
questionnements sur la démarche, mais progressivement nous sommes passés à une philosophie API First. C’est
une transformation sans big bang, un réflexe d’adaptation : nous amenons les API partout, car elles permettent
d’être plus évolutifs que des systèmes lourds. L’AIFE est au service de tellement d’acteurs différents que nous
sommes obligés d’évoluer et de nous adapter aux demandes d’aujourd’hui et de demain. En pensant ainsi la
logique d’architecture globale des systèmes, nous garantissons que cette adaptation est bien possible d’un point
de vue technique.
L’évolutivité est un des points clés de la vision de l’AIFE pour ses projets. « Sur des visions de long terme, il est
nécessaire de pouvoir s’adapter continuellement. Honnêtement, quand nous nous sommes lancés sur le projet
Chorus Pro par exemple, nous étions loin d’imaginer que nous créerions finalement autant de services exposés !
Mais nous avons pu garder cette possibilité ouverte, notamment parce que l’utilisation d’API est un moyen pour
garantir cette souplesse » témoigne Régine Diyani, sa directrice. Le sujet est d’autant plus important pour l’agence
qu’elle pratique volontiers une forme avancée de concertation avec des partenaires extérieurs. « C’est l’originalité
de notre approche : nous menons la concertation avant, pendant et après. Ainsi pour Chorus Pro, nous avons
créé une instance de pilotage mutualisée, qui réunit des représentants des entreprises (Medef, CPME…), des
collectivités locales (association des maires de France, des départements, …) des ministères, des établissements
publics … et nous continuons de faire évoluer l’outil, ensemble. De nouvelles idées émergent de l’animation de cette
communauté. Et à condition de savoir s’y adapter, cela permet à tous ces acteurs de s’approprier ces choix et la
démarche » ajoute-t-elle.
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Laurent Rousset
Directeur des systèmes
d’information
axway.com/fr 7
personnes et de réinventer le dialogue avec nos écosystèmes. Nous avons ainsi lancé l’app mobile « Adecco &
Moi », pour mieux gérer la relation avec les intérimaires, mais aussi un portail pour nos clients, permettant le suivi
des demandes de mission, des relevés d’heures, etc. Avec « Adecco Analytics » nous décodons par ailleurs la data
sur le marché du travail pour fournir des éléments de pilotage stratégique aux entreprises : c’est un tout nouveau
métier pour nous. Mais plus encore, nos clients se digitalisent et nous demandent d’interagir avec eux sur un
modèle digital. Dans le secteur des RH, c’est extrêmement nouveau et nous devons trouver les moyens de mieux
coopérer avec les HRTech, les start-up de notre milieu, mais aussi avec tous nos partenaires. Nous devons mieux
échanger l’information et la donnée pour imaginer les services de demain.
Cet impératif de « fournir des services à l’extérieur » doit évidemment s’appuyer sur une capacité technique.
Quand j’ai pris mes fonctions en 2016, le comex lançait tout juste l’aventure. L’adhésion à l’idée d’ouverture était
complète mais récente. Nous n’avions alors aucun service communicant sur l’extérieur : le système d’information
n’était pas prévu pour cela ! Nous avons donc lancé une démarche d’APIsation. Or, en la matière le rôle de la DSI
est clé, car bien souvent ce mouvement peut être « subi » dans l’entreprise s’il n’est pas bien amené et compris,
plutôt que d’être vu comme un moyen de mieux lier le business et le numérique. Il faut donc que tout le monde
comprenne qu’une entreprise qui veut être leader sur son marché doit devenir prescripteur sur la façon dont
s’échange la donnée, et donc les services, dans l’écosystème. Autrement dit : les API sont une opportunité pour se
mettre réellement centre de son écosystème. Derrière cette dimension technique, ce sont en effet des questions
stratégiques qui se posent : est-ce que l’entreprise veut réellement devenir une plateforme leader ? Où va-t-elle
finir par devoir utiliser la plateforme d’un autre et se mettre sous son influence ? La taille et la légitimité d’Adecco
font que nous partons avec un avantage : il faut en profiter. La DSI doit donc être moteur sur l’APIsation, mais nous
avons aussi été confrontés à d’autres enjeux, notamment autour des référentiels centrés sur l’humain.
C’est-à-dire ?
Tous nos référentiels métiers évoluent de manière drastique. Ils étaient très datés sur des sujets comme les
formations par exemple, ce qui avait des conséquences sur nos façons d’échanger avec notre écosystème. Dans
notre secteur, les produits ne sont pas aussi bien définis que dans le retail. Les nouvelles façons de partager la
donnée soulèvent alors de nombreuses questions : les candidats sont-ils les produits ? Pourtant chacun est unique
et ne peut être mis dans une case… Les dimensions dans l’appréciation de la data sont donc très complexes.
Heureusement, les capacités techniques ont évolué et permettent enfin de digitaliser des sujets très « soft »,
comme l’évaluation des candidats. Nous commençons tout juste à être en confiance sur notre façon d’analyser la
donnée, pour normaliser de plus en plus. Le travail sur les API est un pendant obligatoire de cette réflexion de fond
qui est à la fois « métier » et « IT », car ils sont la base pour partager des référentiels centrés sur l’humain.
Nous n’en sommes encore qu’au début, mais nous surveillons de très près l’intensification des échanges qui
s’avère rapide et importante. C’est le signe que notre travail pour faire adhérer les acteurs business fonctionne.
Aujourd’hui, au niveau des API transactionnels internes pour gérer les échanges sur nos portails, nous en sommes
à plusieurs milliards de transactions par an. Vers l’extérieur, c’est un peu plus limité, mais la croissance est là. Nous
avons un catalogue d’environ 50 API publiés, qui concernent avant tout les candidats et les compétences. Mais le
meilleur indicateur de notre montée en puissance, c’est qu’aujourd’hui aucune démarche n’est lancée sans qu’elle
soit associée à la notion d’ouverture, à des API, et donc derrière à des KPI mesurables. Nous sommes sortis de
l’émotionnel qui peut être souvent encore être lié à ces stratégies d’ouverture dans les entreprises.
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Encadré : Créer de l’adhésion « business » autour de l’APIsation
L’un des plus gros enjeux d’une stratégie d’ouverture de l’entreprise (et de son SI) est sans aucun doute, au-delà de
la technique, la compréhension du sujet par les acteurs business. En la matière, une DSI doit convaincre, et vite, des
impacts positifs de la transformation. « Ce n’est pas un secret : il faut apporter des preuves rapides. L’application
mobile a été pour nous un moyen de montrer la différence en moins d’un trimestre. Il s’agit surtout de montrer
que l’on peut travailler « autrement ». Cela permet de créer des adhésions des acteurs business » résume Laurent
Rousset, DSI du groupe Adecco en France. A partir de là, l’ambition est de fédérer autour de la démarche plateforme
dans son ensemble. « La plateforme doit être vue comme un produit à part entière. La plus grande difficulté pour
une telle transformation est de sortir de la pensée en mode « projet », où les personnes se disent qu’il y a un début
et surtout, une fin. Or, la démarche de plateformisation n’a pas vocation à avoir de fin. Ce changement du projet
au produit est clé dans la dynamique d’Apisation » détaille le DSI. Pour faciliter ce changement majeur, Adecco
s’est doté d’une entité dédiée à la transformation sous toutes ses formes, pas seulement digitale. Le groupe a
ainsi fait émerger un schéma de gouvernance lié à ses trois piliers stratégiques, qui se décline ensuite en produits
stratégiques ou tactiques ; d’abord au niveau business, puis technologique. Et Laurent Rousset identifie au moins
un impératif en la matière : « L’un de nos engagements pour faciliter cette approche globale est d’avoir des équipes
systématiquement mixtes business et techniques ».
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Gérard Guinamand Renaud Ribal
Group Chief Directeur Activités
Data Officer
Gérard Guinamand : Notre démarche API est l’un des principaux levier de
« Dès 2020, il nous faut donc notre vision de « Data Driven Company », au côté des usages cloud et de la
mise en place de notre plateforme Common Data Hub. Cette vision est celle
entrer dans une vraie phase d’une importante transformation business, que notre directrice générale
d’adoption, avec des CIO Isabelle Kocher a articulé autour de plusieurs piliers stratégiques : mener
locaux moteurs en termes la transformation vers les énergies renouvelables, rendre possible pour
les entreprises et les collectivités la transition zéro carbone, et proposer
de pratiques et de nouveaux
dorénavant des solutions énergétiques « as a service ». Tous ces différents
usage en écosystème. » aspects de notre transformation ont un point commun : ils impliquent de
mieux partager la donnée. Cette donnée doit devenir un « bien commun »
au sein du groupe afin de mettre en avant sa valeur business. Si le Common
Data Hub permet de collecter et de stocker un maximum de données du
groupe, dans une optique désillotée, il faut ensuite pouvoir partager au plus
grand nombre la donnée enrichie et travaillée par nos différentes business
units. C’est cet enjeu qui nous a conduit à vouloir être API First.
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de ces acteurs devient importante, plus le partage est important. Nous
voyons se multiplier les cas où faciliter les échanges est clé, par exemple « La dynamique business
avec la région Ile-de-France ou aux Etats-Unis avec la Ohio State University
est bien présente. Et les
(voir encadré).
demandes se sont multipliées
Renaud Ribal : Ce partage est aussi un enjeu d’innovation, notamment sur en 2019 de la part de nos
l’intelligence artificielle qui s’appuie sur d’énormes quantités de données. business units autour de
Il nous faut faciliter les expérimentations avec des partenaires, permettre
à la donnée d’être fournie de manière réactive mais aussi maîtrisée
projets qui impliquent des
et sécurisée, dans les deux sens. C’est particulièrement le cas avec capacités de monétisation
nos partenaires météorologiques, alors que nous imaginons pour nos en passant par les API, pour
activités très météo-sensibles de nouveaux algorithmes de prédiction de
que chacune puisse mieux
consommation et de production. Au même titre que la plateforme Common
Data Hub, notre portail Common API est donc une réponse technique à des développer sa propre logique
enjeux très business. d’écosystème. »
— Gérard Guinamand
Comment avez-vous mis en œuvre ce portail ?
RR : Common API permet d’agréger différents API manager, en cela c’est un « portail des portails » qui harmonise
ce qui existe déjà dans nos business units. Il collecte toutes les informations sur les API du groupe : métriques,
usages de consommation… Et permet donc de facturer précisément si besoin l’usage de nos API par des acteurs
extérieurs, dans une optique de monétisation. De plus, il a été pensé pour être complètement agnostique vis-à-
vis de nos systèmes existants. En effet, quand on met en œuvre une « vision centrale » à l’image du portail, il faut
veiller à ne pas tuer dans l’œuf par la contrainte les dynamiques locales qui vont s’y rattacher.
GG : De nombreuses business units ont déjà développé des services autour des données. Le but est maintenant
qu’elles aient le réflexe « d’APIser » systématiquement les services. Common API leur offre la possibilité de le
faire avec le choix technologique qui leur convient le mieux et elles n’ont jamais à reprendre à zéro le travail déjà
accompli. Nous ne voulons pas être intrusif : ce sont aux BU de déterminer ce qui a le plus de valeur ajoutée dans
une logique écosystème par rapport à leurs réalités locales.
RR : Nos KPI permettent de voir ce qui est utilisé et comment, et donc d’améliorer continuellement la pratique.
Nous nous assurons également ainsi de la cohérence entre ce qui est développé localement et la vision globale.
La plateforme, elle, respecte les standards de sécurité et de qualité du groupe. Mais au-delà de la technologie, les
business units doivent également monter en compétences sur l’usage des API. Nous n’avons pas vocation à faire
en central des formations de développeurs pures et dures, mais il faut pouvoir diffuser les bonnes pratiques sur le
développement et l’usage des API.
GG : Ce travail de rationalisation au niveau central et d’autonomie en local est assez nouveau pour le groupe. Avant
2016, la première partie de l’équation n’était pas vraiment développée. Mais aujourd’hui, la transformation globale
du business model rend nécessaire de faire travailler tout le monde ensemble intelligemment. Et il faut que nous
réussissions cela dans tous les pays et auprès de toutes les BU en même temps et au même rythme. Il nous est
donc nécessaire de nous appuyer sur des spécialistes comme Axway, dont les technologies sont le socle du portail
Common API, pour accompagner la diffusion en local, à une si grande échelle.
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Selon vous, qu’est-ce qui permet de convaincre au mieux les entités locales ?
GG : Pour adresser autant de monde en local, il faut montrer concrètement ce qui est produit et qui fonctionne.
Il ne s’agit pas seulement de parler des bonnes pratiques lors de réunions. Les briques globales qui facilitent notre
vision transversale s’imposent parce qu’elles sont bien pensées et qu’elles sont le dénominateur commun le plus
pertinent. L’équipe centrale doit produire cela. Elle le fait pour le Common Data Hub avec AWS et pour le Common
API avec Axway. Aujourd’hui, le déploiement technologique et la démarche de sensibilisation sont bien avancés…
Toutes les BU ont entendu parlé de l’initiative. Dès 2020, il nous faut donc entrer dans une vraie phase d’adoption,
avec des CIO locaux moteurs en termes de pratiques, de nouveaux usage en écosystème, etc. Plus qu’une question
technique, c’est un enjeu culturel et de compétences à acquérir. Mais aujourd’hui, l’APIsation et la plateformisation
sont l’avenir des grandes entreprises en transformation. Il nous faut donc cette capacité à y parvenir rapidement,
car le temps presse toujours.
Encadré : Quand partager la donnée avec des partenaires crée de la valeur business
Chez ENGIE, les usages de partage interne de la donnée grâce à l’APIsation avancent vite. Mais le groupe a
également de plus en plus de cas où ce partage se fait en écosystème, avec des partenaires externes. Ainsi,
fin 2018, lors de son appel d’offre pour le développement du Grand Paris, la région Ile de France a recherché
spécifiquement un consortium de partenaires en capacité d’acquérir toutes les données stratégiquement
pertinentes sur les habitants de la région, puis de les mettre à disposition sur une plateforme pour construire
les politiques et les projets locaux. Et ce, quelle que soit l’échelle : commune, département, région… mais aussi
transversale, avec les transports. Il fallait donc au groupe pouvoir assurer le partage efficace de la donnée.
C’est aussi le cas à l’International, avec des clients qui sollicitent l’entreprise pour réaliser leur propre transformation
zéro carbone, non seulement au niveau de l’énergie qu’ils consomment mais en modifiant aussi leurs usages,
leurs technologies, en se dotant de capacité de production d’électricité et de la capacité à mieux vendre ou
acheter l’énergie… en se connectant intelligemment au réseau. La Ohio State University s’est engagée en ce
sens dans un contrat de 50 ans, où le partage de données est clé. Un cas rendu possible grâce aux possibilités
d’interconnections mises en place par le groupe.
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Jean-Baptiste
Courouble
Directeur des systèmes
d’information
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Quelle forme ces prestations de services peuvent-elles prendre ?
Nous voyons deux aspects principaux. Le premier est le plus attendu pour une institution comme la nôtre :
renforcer notre propre plateforme pour pouvoir fournir de l’aide directement aux cotisants en cas de besoin, sur
les différents aspects d’information et de services, y compris juridiques, autour de la collecte et de l’assistance
à la réalisation des formalités sociales de l’employeur. A ce titre, une attention particulière doit être portée sur
la transformation de notre système d’information, dont la robustesse est un axe critique pour bien gérer les
500 milliards d’euros d’encaissement annuel. Le second aspect est celui des services que nous pouvons proposer
à d’autres plateformes : ceci est totalement nouveau. Nous pouvons en effet potentiellement apporter beaucoup
à des activités économiques qui ne sont pas liées à notre cœur de mission, car de facto l’Acoss possède de
nombreuses données très intéressantes. D’autant plus qu’il y a aujourd’hui un cadre législatif, avec la loi Lemaire,
qui permet d’aller dans ce sens-là. La dimension d’open data portée par la loi offre en effet non seulement
des opportunités dans la démarche de transparence vis-à-vis des citoyens, mais permet aussi de favoriser les
interactions avec des entreprises tierces, en leur donnant un statut de tiers déclarant. De cette façon, au-delà de
nos missions régaliennes, nous pouvons imaginer faire beaucoup plus en termes de services aux employeurs,
particuliers ou entreprises, grâce à l’intermédiation portée par des tiers.
Historiquement, la plateforme du CESU (Chèque emploi service universel, ndr) permet aux particuliers employeurs
d’élaborer l’ensemble des bulletins de salaires et de calculer et prélever directement les cotisations sociales pour
ces activités. Il s’agit de prendre en charge tous les aspects administratifs de la relation. Cette offre de services
largement dématérialisée rencontre un grand succès, avec des millions d’utilisateurs. Nous avons d’ailleurs
développé des services + permettant le notamment le virement des salaires depuis le compte employeur vers
le compte salarié. Et début 2020, la gestion du PAS sera intégrée. En outre, les données dont nous disposons
sont centrales pour les nouveaux acteurs de l’économie collaborative que sont les plateformes de « jobbing »
comme Yoopies, Domiserve et bien d’autres. Elles veulent de cette façon mieux faire correspondre les recherches
d’emploi avec les offres disponibles, en fonction d’énormément critères différents rendus accessibles grâce à nos
données (tout cela dans le respect du RGPD évidemment). Proposer ce type de mise en relation n’est pas notre
métier, c’est pour cela que nous voulons nous appuyer sur notre écosystème pour le proposer aux utilisateurs.
Grâce à l’APIsation de notre système d’information, nous pouvons ainsi être acteurs d’un service complet, qui va
de la mise en relation jusqu’à la gestion administrative de cette relation sans toutefois dépasser le cadre de nos
missions, la relation étant essentiellement assurée par les plateformes. Et ce que l’on peut imaginer ainsi autour
du CESU peut tout à fait être dupliqué avec les auto-entrepreneurs par exemple. Pour aller plus loin, les API que
nous proposons vont permettre à ces plateformes de jouer le rôle tiers-déclarant vis-à-vis de leur client. Ainsi la
plate-forme organise l’intégralité de la médiation entre l’employeur et le centre CESU tout en rendant des services
complémentaires. Autant d’expérimentations qui seront opérationnelles dès 2020.
A quel point l’APIsation du système d’information vous parait-elle centrale dans cette stratégie ?
Tous les services de l’Etat multiplient ces logiques d’interconnexions et d’ouverture. On le voit avec le Portail
national des droits sociaux, pour lequel les assurés bénéficient d’un agrégateur grâce aux API pour simplifier leur
relation administrative, mais aussi pour la démarche « Dites-le nous une fois » ou encore pour la mutualisation
des connexions aux services à travers France Connect. A chaque fois, l’APIsation est le moteur de ces nouveaux
services. Il en va de même pour ceux que nous voulons proposer. La démarche « API first » est aujourd’hui une
nécessité, notamment dans l’interopérabilité indispensable avec nos partenaires institutionnels. Ceci prend
encore plus d’acuité dans les extensions de périmètre portées par l’ACOSS suite au remaniement du paysage du
recouvrement social (transfert de la collecte AGIRC-ARRCO, rationalisation du recouvrement des régimes spéciaux,
suppression du RSI …).
axway.com/fr 14
Concrètement quel est l’impact pour votre système d’information ?
La décision a été prise par l’ACOSS de mettre en place un portail d’API et d’Open Data bâti complètement à
neuf pour le 1er janvier 2020. L’idée est d’aller assez loin dans la démarche, jusqu’à la publication de nos codes
sources et de nos algorithmes. Pour nous, au-delà de l’ouverture du SI en tant que tel, il s’agit en effet de créer
les conditions pour que notre écosystème puisse se connecter et se documenter efficacement. D’un point de vue
technique, nous nous sommes basés sur l’API manager de l’éditeur français Axway pour gérer et mettre en œuvre
l’APIsation. Nous avons également dû prendre en compte notre « legacy » et prévoir d’encapsuler nos applications
les plus anciennes, pour amener un niveau d’abstraction dans le système qui nous permette de généraliser les API
et pas seulement de les réserver aux applications les plus récentes.
L’ACOSS s’est dotéee d’une direction de l’innovation et du digital (DID) pour favoriser l’ensemble de ces initiatives
et émuler l’approche innovante au sein du réseau des URSSAF. Ceci s’est concrétisé par la création d’un lab
Urssaf animé par la DID. Côté DSI, nous avons crée une entité « Fabrique Digitale » véritable accélérateur de notre
transformation. De l’association du lab et de la Fabrique a émergé un « hub digital » permettant de matérialiser la
démarche d’innovation au travers de réalisations techniques concrètes.
En termes d’usage, ceci nous permet de nous ouvrir le plus possible vers l’extérieur, au sens propre. Nous faisons
dorénavant venir des cotisants et des organisations dans nos locaux pour organiser des ateliers de travail et de
co-création, basés sur l’Agile et sur de l’UX design pour faciliter le lien avec l’écosystème et la découverte des
services. C’est un moyen de lier innovation IT et métier. Nous avons en parallèle démultiplié les démarches
d’intrapreneuriat dans nos équipes. De même, la Fabrique Digitale met en œuvre des usages de rupture avec nos
pratiques historiques : devops, cloud, agilité… Nous voulons créer de cette façon une dimension mixte très forte et
pas une rupture totale entre « l’ancien et le nouveau monde ». La DSI contribue ainsi à tous les projets digitaux, y
compris à travers la maitrise d’œuvre traditionnelle, dès le départ, car ce sera à elle de réembarquer dans sa feuille
de route et d’industrialiser ces innovations après le MVP.
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Encadré : Une ouverture bien perçue
Une stratégie d’ouverture et de plateformisation implique des changements qui nécessitent d’embarquer toutes
les équipes. Autrement dit, celles-ci doivent croire à cette vision. L’Acoss a pris un soin tout particulier pour créer
cet engagement. « Tout le monde est assez vite tombé d’accord sur la nécessité de s’ouvrir, ne serait-ce que pour
changer l’image de l’institution et démontrer qu’elle est capable d’évoluer dans un écosystème moderne. La courbe
d’enthousiasme est monte en flèche avec les premiers travaux ! » se réjouit Jean-Baptiste Courouble. Toutefois,
des points de vigilance ont été observés, notamment pour éviter que les nouvelles méthodes de développement
viennent s’opposer frontalement aux précédentes. La prise en compte de la sécurité est aussi un facteur clé pour
cet engagement. L’Acoss étant OSE (opérateur de service essentiel, ndr) depuis la transposition de la directive
européenne NIS dans le droit français, la sécurité et la fiabilité de ses systèmes sont passés au crible. « Là, encore
l’accompagnement au changement est essentiel, car ce genre de transformation n’est évidemment pas un long
fleuve tranquille » reconnait le DSI.
axway.com/fr 16
Jérémy Segura
Head of
API Skill Center
Effectif : 19422
axway.com/fr 17
C’est ce qui a rendu l’usage des API central dans votre stratégie ?
En effet, la digitalisation du parcours client passe principalement par l’APIsation de notre système, qui permet en
résumé d’exposer notre savoir-faire auprès de tout notre écosystème. C’est le moyen technique le plus simple et
élégant pour rendre plus fluide la dynamique business autour de la vente indirect et ce, au niveau mondial.
Est-ce que cela a représenté une transformation importante pour vos équipes ?
Oui et non. Le sujet n’est pas en soi une nouveauté. Faire une API est même facile d’un point de vue technique…
mais tout l’enjeu est de concevoir la bonne API. Cela implique de ne pas se tromper de combat : il faut mettre
en place les bonnes guidelines pour tous les acteurs, faire en sorte de respecter les standards, les impératifs de
sécurité, la facilité d’usage… Le diable est dans les détails et au niveau d’une grande organisation, l’industrialisation
de la pratique et de l’ouverture ne s’improvise pas.
Notre dynamique API a clairement permis d’améliorer les échanges entre l’IT et les métiers. Depuis plusieurs
années, je sollicitais des décideurs métiers sur le sujet de l’ouverture de nos systèmes, car l’IT seul ne peut pas
définir ce que les API vont vraiment apporter comme valeur. Une stratégie business sur le sujet doit permettre
de définir les priorités et d’identifier là où les API peuvent vraiment faire une différence, sur le court terme et puis
sur le long terme pour notre activité. Cette adhésion IT et Métier dans la réflexion ne s’est pas faite du jour au
lendemain, mais aujourd’hui, alors que le changement a lieu, nous voyons tous l’accélération que cela provoque
et les impacts positifs pour les uns et les autres. Les métiers parlent d’API tout comme nous, ils ont formalisé une
stratégie et voient les API comme une source de valeur business extrêmement concrète. Les fonctionnalités les
plus utilisées concernent la souscription de crédit en tant que tel, sur toutes les étapes allant de la récolte des
pièces justificatives, jusqu’à la livraison des contrats et à la signature électronique, que l’on décline pour tous les
différents types de produits financiers.
L’outil de conviction principal, c’est une démarche d’acculturation assumée et méthodique. Dès 2017, nous avons
créé un module d’acculturation qui a permis de mettre en ligne tous les acteurs métiers, les commerciaux, les
opérations… Ce n’était pas une formation, mais un moyen de vulgariser les enjeux d’un point de vue stratégique
et business. Il s’agissait d’expliquer concrètement ce qui se cachait derrière ce mot barbare d’API. Bien entendu,
certains métiers se sont emparés du sujet plus rapidement que d’autres, mais de manière générale l’engagement
est parti de là. Nous avons également bénéficié d’un très fort sponsoring du CIO groupe, qui en définissant le plan
IT stratégique 2017-2020 a concrétisé la création de trois équipes pour porter des piliers de notre transformation :
la digital factory, l’équipe data, et l’équipe dédiée aux API, appelée PF as a service, dont j’ai la responsabilité.
Nous sommes une équipe de sept personnes, très centrale, qui rayonne auprès des équipes IT métier. Il ne s’agit
pas faire « à la place » d’eux, même si c’était très tentant au départ pour avoir des résultats rapides. En effet, si
l’on adopte une telle démarche, le savoir-faire ne se diffuse pas et les API restent une niche d’expert ; c’est une
mauvaise idée. Nous privilégions donc une pratique plus pérenne de support des bonne pratique de conception
et de développement. Nous avons en revanche gardé la main sur les aspects de sécurité. Parmi les compétences
importantes que nous avons réunis pour cette mission, nous avons notamment un profil technique expert de
l’administration de la plateforme d’API management d’Axway que nous utilisons, deux architectes API qui sont les
garants des guidelines de conception et de sécurisation, et un architecte sécurité.
axway.com/fr 18
Cette équipe a-t-elle vocation à grandir ?
Pas énormément, mais nous avons ajouté récemment un profil en charge de la gouvernance des API en tant que
tel. En effet, l’un des enjeux pour une organisation qui veut industrialiser sa pratique API, est d’éviter de voir naître
des doublons partout et que l’enthousiasme se transforme en chaos. A l’origine, j’avais volontairement fait le choix
de ne pas mettre l’accent sur cette dimension gouvernance trop tôt, afin de ne pas tuer la dynamique naissante
dans l’œuf. Je ne voulais pas que l’équipe décourage les initiatives par la contrainte, sous prétexte que 100% d’une
guideline n’était pas exactement suivi. Nous avons décidé de laisser tous les pays entrer dans le vif du sujet et de
mettre en production rapidement. En 2019, nous avons cependant atteint des volumes et une maturité suffisante
pour privilégier le fait de réconcilier les initiatives en cours avec la vision globale. Cette gouvernance vise à éviter
qu’un pays ne réinvente la roue avec une API, alors qu’il aurait pu reprendre le design déjà réalisé par un autre pays,
et se contenter d’intégrer les variations réglementaires.
BNPPF dispose aujourd’hui de plus de 150 API à travers le monde, pour plusieurs millions de transaction par mois
et par pays. Depuis la constitution de l’équipe PF as a service, l’augmentation a été continue et très régulière. La
construction du catalogue API global, pour mieux partager les API au niveau mondial est aujourd’hui un enjeu clé,
au-delà des catalogues locaux. « L’idée n’est pas d’en faire un catalogue technique pour les développeurs, mais
bien un catalogue pour les métiers, coconstruit avec eux et leur vision commerciale et marketing » note Jérémy
Segura. Du côté métier, les arguments ont fait mouche : temps gagné pour déployer des services, partenariats
mondiaux plus facile à développer et appels d’offres plus simple à gagner. « Il y a quelques années, cette
couverture globale autour de l’APIsation a pu manquer pour le business : les métiers ne veulent pas que cela se
reproduise » résume Jérémy Segura.
axway.com/fr 19
Frédéric Girardeau
Responsable de
domaine IT
Middle-Office
Effectifs : 1500
aux API »
Cycle de partage d’expériences autour des enjeux
stratégiques et business des écosystèmes et des API
axway.com/fr 20
tous nos sites web, qui se sont appuyés dessus. Mais aujourd’hui, le caractère monolithique de ce système qui a
et continue à faire la force du Groupe pourrait devenir un désavantage alors que l’entreprise se digitalise. Quand
Olivier Daniel a pris ses fonctions, il a impulsé la transformation pour aller au contraire vers de la modularité,
des traitement génériques, des usines de développement informatique duplicables à volonté. Et cela induit une
opportunité de porter une refonte technologique globale et de repenser l’urbanisation du système d’information.
Celui-ci doit en effet absolument répondre aux nouveaux enjeux de nos activités.
Quels sont-ils ?
Le groupe doit continuer sa croissance et son internationalisation sur des secteurs disputés. Il doit aussi être
innovant dans son offre de service, améliorer son offre digitale tant vis-à-vis de l’interne que de l’externe et
accompagner ses clients vers l’utilisation du self-care et ceci en mode multicanal. Cela veut dire que d’un point
de vue informatique, nos solutions doivent être beaucoup plus « user centric » et que nous devons être capable de
mieux exploiter nos données et partager l’information. Nous devons proposer des sites ou des apps performants,
intuitifs, capables par exemple de faire de la simulation de tarifs extrêmement fluide.
Ce qui a poussé la modernisation, c’est donc à la fois cette vision « business driven » mais aussi dans une certaine
mesure des préoccupations financières. Cette transformation doit aussi nous permettre de délivrer plus vite nos
projets / évolutions (time-to-market) tout en, et c’est un vrai challenge, associant cette transformation numérique
avec une baisse / maîtrise du coût du run. Or, quand on reste sur des technologies vieillissantes, les coûts — de
licence, de maintenance — ne cessent d’augmenter avec les années…
Votre roadmap de transformation passe d’abord par la refonte de vos sites web et apps. Pourquoi ?
Pour plusieurs raisons. Transformer les sites web permettaient de montrer un changement rapide à nos clients
et partenaires en apportant immédiatement des services à forte valeur ajoutée. Ensuite, changer un SI, quel qu’il
soit, demande du temps et une expertise affutée. La refonte des portails web est ainsi l’occasion de procéder par
étape, en leur transférant certaines des fonctionnalités auparavant assurées par notre outil de Gestion. Cet effort
d’investissement permet également de commencer à penser dorénavant le SI à partir de composants génériques
(habilitations, microservices…) qui nous font énormément gagner en adaptabilité, et donc économiser pour la suite.
Ceci explique également notre intérêt pour l’APIsation du système.
La présence de notre DSI au Comité exécutif du Groupe a été un fort accélérateur dans la prise de conscience et
l’onboarding du comex sur ces enjeux. Ainsi, l’ensemble de notre direction adhère complètement et est moteur sur
l’ensemble de ces projets. Tout le monde se sent concerné : cela donne des ailes pour agir.
Les impacts/demandes business se voient de toute façon au quotidien. Pour illustrer cela, nous constatons une
tendance de fond auprès de nos clients/partenaires les plus importants : certains se sont eux aussi engagés
dans la digitalisation, se sont dotés aux-aussi de plateforme APIsée et recherchent donc un partenaire, yc sur le
domaine de couverture santé, qui comme Henner, est à même de leur proposer des services en mode « pick and
choose » et de plus facilement interopérables avec leur écosystème. Il nous faut donc absolument nous adapter
pour nous interconnecter beaucoup plus facilement avec ces partenaires et ne pas être un facteur bloquant pour
leurs propres transformations. Pour eux, les API changent vraiment la donne. Et pour nous, cela reflète bien notre
engagement : proposer des services de qualité, modulables et adaptés à nos clients.
axway.com/fr 21
Les équipes au sein de la DSI étaient-elles prêtes pour ces changements de pratique ?
Nous nous sommes formés à de nouvelles méthodes, à des façons de faire autrement nos métiers et à une
philosophie complètement différente, notamment autour des microservices et des API. C’est un très fort
changement, mais nous l’amenons en douceur. Nous avons d’abord sollicité nos internes les plus experts,
qui connaissent bien les spécificités de notre SI afin qu’ils puissent eux-mêmes exprimer les contraintes
auxquels nous sommes confrontés face aux nouveaux besoins. Le plan de réurbanisation sur 3 ans valorise les
compétences et le savoir de ces équipes. Nous avons recrutés des architectes pour créer une toute nouvelle cellule
architecture au sein de la DSI, et son travail se base principalement sur la modélisation faite par nos experts. De
manière générale, la nouvelle dynamique au sein de la DSI, nous a permis d’aborder de très nombreux nouveaux
sujets : cloud, DevOps, usine de développement... Tout est lié. En 18 mois, nous avons véritablement découvert un
nouveau monde d’industrialisation qui s’appuie sur l’APIsation. Nous avons été accompagnés par nos différents
prestataires, mais nous avons conscience d’être encore trop dans l’entre-soi. Nous devons continuer à nous
ouvrir. Notre marché voit beaucoup de transformations, avec des exemples médiatiques comme La Parisienne
Assurance sur le mode Open API. Nous voulons donc maintenant confronter notre vécu à celui d’autres entreprises,
partager nos défis et également les façons dont nous les avons relevés. Les témoignages sur la technologie sont
intéressants, mais ce qui nous intéresse le plus aujourd’hui, c’est bien de confronter des visions globales d’activité.
La réurbanisation du SI du groupe Henner est cadencé sur trois ans, afin de servir au mieux la transformation
métier en cours.
Ainsi, si nous regardons uniquement les portails web, le premier site web « nouvelle génération », entré en
production en septembre 2019, est dédié aux partenaires de santé (hôpitaux, réseaux de soin…). En 2020, ce sera
le tour du portail consacré à notre activité de Courtier Grossiste, qui accueillera les simulations de tarifications,
puis du site dédié aux RH des clients du groupe. Enfin, début 2021, le site Affiliés achèvera la métamorphose.
En parallèle, « le système de Gestion sera lui aussi ré-urbanisé afin de reprendre certaines « dérives » et de le
recentrer sur le cœur métier : contrats, gestion des prestations, et des cotisations… » détaille Frédéric Girardeau,
responsable de domaine IT Middle-Office pour le groupe. Et de la même manière, la montée en compétences
sur l’APIsation du système se fait progressivement. Les API sont devenus les points d’entrées de la couche
d’abstraction « middle-office » qui relie le système de Gestion et les nouveaux sites web. « Nous ne nous sommes
pas directement lancés sur du cloud pour notre API manager, mais nos API, elles, sont bien hébergées dans le
cloud, et nous sommes donc en train d’éprouver ce fonctionnement, vis-à-vis de la réurbanisation globale. C’est
un apprentissage permanent » complète-t-il.
SUCCESS STORY
France From managing bank accounts to buying groceries, the digital channel
is fast becoming the preferred way to engage with brands and businesses.
Challenges In the insurance sector, individuals and enterprises alike now increasingly
expect the ability to access self-service capabilities online and on mobile —
Groupe Henner aimed to delight
and are willing to vote with their feet if providers are unable to offer a
customers with self-service
frictionless experience.
capabilities — but batch-based
legacy applications limited its ability
This was the situation facing Groupe Henner, one of the leading providers
to innovate.
of health and life insurance in France. The company aimed to offer seamless
digital journeys across all its key product lines, but legacy systems stood in
Solution the way of innovation.
axway.com 1
axway.com/fr 22
André Wei
Chief technology
officer
Effectif : 6000
à l’APIsation »
Spécialiste français indépendant de la lingerie créé en 1876, le groupe
Chantelle poursuit aujourd’hui une transformation digitale, commencée
lors de son tournant vers l’univers BtoC et l’e-commerce. André Wei, chief
technology officer du groupe, détaille sa feuille de route, l’impact sur
les activités BtoB et la place prise par les API au côté des autres sujets
stratégiques de son entreprise.
axway.com/fr 23
Concrètement, quelle est votre feuille de route en tant que CTO ?
J’ai rejoint l’entreprise en août 2017 dans un contexte d’accélération de la transformation. Mon champ de
responsabilité couvre à la fois le cadre d’une direction technique traditionnelle, en charge des postes de travail et
des infrastructures, et des missions beaucoup plus larges autour de la nouvelle gestion de la data et du digital.
J’accompagne également la diffusion d’une importante culture des technologies et du numérique dans toute
l’entreprise. Avec une telle culture, jusqu’au niveau du comex, il est enfin possible de parler de transformation
sans avoir besoin de jargon informatique. Alliée avec des projets intéressants, c’est aussi cela qui permet
d’attirer de nouveaux talents dans un paysage technologique moderne. Par ailleurs, le groupe est multimarque et
multi-enseigne, ce qui implique une complexité du métier mais aussi du système d’information : des centaines
d’interfaces différentes, du legacy…. L’une des principales missions sur ma feuille de route est donc de simplifier,
notamment les interconnexions de toutes les composantes de notre système d’information. C’est obligatoire pour
proposer une expérience simple, intuitive et plaisante à tous nos utilisateurs. L’enjeu est que la DSI ne dise plus
« non », et qu’elle puisse se concentrer sur la réalisation des choix business, sur l’orientation stratégique d’activité…
Ce parti-pris est de nature à changer la relation avec tout le management.
Le nouveau portail pour nos clients professionnels. Les attentes des vendeurs BtoB de notre écosystème
deviennent presque identiques à celles des clients finaux. Ils souhaitent une grande qualité dans les interactions,
beaucoup de personnalisation, mais aussi énormément de réactivité. L’attendu est fortement lié aux possibilités du
digital : les processus doivent être intuitifs et l’acheteur professionnel attend du portail qui lui est dédié les mêmes
qualités qu’un site e-commerce grand public. Aujourd’hui, pour avoir un avantage concurrentiel, il faut pouvoir
aller plus loin que les anciens interfaçages que nous pouvions établir avec les systèmes de ces professionnels.
Et nous devons être en mesure d’intégrer tous les nouveaux acteurs de notre écosystème, comme les vendeurs
web émergeants, beaucoup plus petits et agiles que les grandes enseignes. Le « projet Karajan », véritablement
structurant, a été lancé en 2018 pour répondre à ces nouveaux enjeux d’interconnexion et d’intégration.
Grâce à un APIsation ?
L’objectif était d’aller vers le temps réel dans la gestion des échanges, de simplifier les connecteurs mais aussi
d’assurer la sécurité. Toutes ces attentes conduisent naturellement à l’APIsation. En la matière, il fallait à la fois
nous outiller et nous former, en créant une cohérence pour l’équipe technique, entre l’exploitation et l’intégration,
auparavant séparée, pour avoir une vision harmonisée de bout en bout. C’est aussi pourquoi nous nous sommes
appuyés sur l’API Gateway proposée par l’éditeur Axway, afin de mettre en place une centrale de gestion de tout
le sujet API, que ce soit en matière de sécurisation ou d’ouverture sur l’externe. En termes d’usages, il s’agit par
exemple d’être capable de montrer facilement notre stock de produits, quel que soit le point de contact sur nos
systèmes. Ce travail d’harmonisation permet de passer commande, sans différenciation et sans accroc sur un site
comme en boutique. C’est aussi ce qui nous permettra bientôt de mettre à disposition les données relatives aux
caractéristiques de nos produits, pour nos clients et nos partenaires. Le Groupe Chantelle a toujours été fier de la
proximité établie avec ses clients et cette ouverture est un moyen de la renforcer. Notre objectif n’est pas que ces
services digitaux éloignent le facteur humain, bien au contraire : c’est aussi cela qui convainc notre direction de
l’importance de ces changements. Nous fluidifions et simplifions la relation avec tous les acteurs qui interagissent
avec l’entreprise.
axway.com/fr 24
Encadré : L’APIsation d’un système hybride
André Wei le reconnait, les enjeux de transformation d’un système d’information sont d’autant plus terre à terre
que la complexité de celui-ci est grande. Dans le cas du groupe Chantelle, le CTO était confronté à un système qui
d’un côté accueille une software factory dans le cloud fortement automatisée ou encore des googles apps… mais
aussi tout une partie des applications qui fonctionnent depuis des décennies sur de très anciens systèmes IBM,
en AS/400. C’est pourquoi le CTO a privilégié une approche hybride de la transformation : « Pour les API, il fallait
pouvoir gérer du cloud, mais aussi des échanges cloud/on premise, ou encore on-premise/on-premise. C’était une
feuille de route ambitieuse qui a demandé une coopération étroite de plusieurs partenaires technologiques autour
du projet d’API Gateway ». Le tout alors que se prépare le budget 2019 et que la direction attend de premiers cas
d’usages concrets. Le CTO s’engage pour fin 2019, mais assiste ensuite à un important effet d’accélération : le
nouveau portail à destination des clients BtoB, basé sur Salesforce, avance vite, dès janvier 2019. Et avec succès :
les flux liés aux commandes et aux tarifs sont maintenant temps réel, malgré les règles complexes de prix en BtoB.
« Nous avons pris 9 mois d’avance et mis en avant de véritable cas d’usages business pour la direction. C’était le
plus urgent » se réjouit André Wei.
axway.com/fr 25
Mickaël Galibert Julien Caenevet Ali Hajali
Manager Manager Manager
technique et pas la
dimension écosystème »
L’entreprise internationale de conseil et de technologie Accenture a
été nommée parmi les leaders du Forrester Wave 2019 en matière
d’accompagnement des entreprises dans leurs stratégies API globales.
Julien Caenevet, senior manager, Ali Hajali et Mickaël Galibert, managers,
analysent le niveau de maturité des entreprises quand il est question de
stratégie d’APIsation et résument les défis qui restent à relever en 2020
dans les organisations.
Ali Hajali : La maturité est très visible sur le plan technologique mais elle
l’est aussi dorénavant sur le stream stratégique, avec des entités digitales
qui sont rentrées dans le dur de sujets et qui ne se contentent plus de
mener des projets superficiels. On voit des différences d’une entreprise à
une autre, mais c’est plus culturel que sectoriel. Des entreprises a priori
similaires peuvent paradoxalement avoir des maturités très différentes.
axway.com/fr 26
Mickaël Galibert : Les entreprises ont lancé des projets d’API Management il y a 4-5 ans. L’accélération de
l’APIsation a été fortement liée à celle du « new IT », et à la digitalisation globale des entreprises, c’est-à-dire à
l’implication croissante des métiers sur le numérique. Ces démarches d’APIsation ont permis aux équipes métiers
de « retoucher » le SI, rééquilibrant ainsi les rôles face à des DSI qui par le passé ont pu être perçues comme
distance et « cloisonnée » sur ce périmètre. Des contraintes règlementaires dans certains secteurs d’activité ont
également permis de dynamiser ces chantiers d’API Management, notamment dans le secteur bancaire avec la
seconde directive européenne sur les services de paiements (PSD2), mais également dans le secteur de l’énergie
et des utilities avec le développement d’offres de service pour l’accès aux données de comptage.
Ali Hajali : De plus en plus d’éléments de la relation façon « ancien monde » disparaissent. On a assisté a des
tentatives plus ou moins heureuses avec la création de directions du digital voici quelques années, mais plus
récemment c’est bien l’avènement des digital factory qui a été un facteur notable de transformation.
Julien Caenevet : En soi, la place de la DSI n’est pas remise en question, mais cela permet de redistribuer les
cartes. Les entreprises rééquilibrent naturellement la relation autour de leur stratégie d’APIsation : la force d’une
DSI réside dans la capacité d’industrialisation et le passage à l’échelle… Elle est la garante qui permet de dépasser
les POCs et de faire en sorte que la valeur obtenue se diffuse dans toute l’organisation. La DSI y voit son compte
en reprenant ainsi sa mission originelle et en valorisant sa capacité à mieux servir les métiers.
Julien Caenevet : En effet, aujourd’hui aucun client ne remet en cause la nécessité d’ouverture du SI, et plus
généralement la stratégie d’ouverture sur l’écosystème. Tous les métiers y voient une opportunité d’un point de vue
business. Proposer des nouveaux services pertinents, que ce soit en BtoC, en BtoB ou en BtoBtoC, passe par là et
ils en ont bien conscience… C’est pour cela que l’on voit beaucoup de POC être menés. Et c’est bien là le défi : aller
au-delà de l’expérimentation tout en trouvant les financements nécessaires.
Mickaël Galibert : L’enjeu est celui d’une vision globale. Les véritables signes de maturité, c’est quand on parvient
à lier cette stratégie d’ouverture aux questions centrales de la sécurisation, du cloud, du respect des règles du
RGPD… En 2020, la sécurisation des données, notamment dans une logique d’APisation et d’ouverture des données
vers l’externe, sera un sujet extrêmement important. Pour le moment, beaucoup d’entreprises avancent encore sur
de l’interne, avec un API management on-premise. Mais pour les investissements qui suivront, il faudra identifier
les bons services, définir les bons business cases, calculer de nouveaux ROI, tout en ayant en permanence en tête
une vision orientée cloud, sécurité et qualité de service. La standardisation des protocoles de sécurisation des API
et l’adéquation des entreprises avec ces standards (OAuth2.0, Open ID Connect) seront de véritables accélérateurs
pour les entreprises dans leur stratégie d’exposition à l’externe et d’identification de nouveaux partenariats.
Ali Hajali : Il va également y avoir un énorme enjeu de compétence. Recruter des profils techniques qui ont un fort
lien métier, est toujours compliqué. De nombreuses personnes capables de développer des API sont disponibles
sur le marché, mais ce n’est pas le sujet. La difficulté pour les entreprises est de trouver les personnes avec le bon
mindset, qui vont pouvoir développer la bonne API, bien formalisée ; celle qui va vraiment servir les partenaires
et non pas les convaincre de se rapprocher d’une autre plateforme. Ce n’est pas simple, car le sujet n’est pas
technique : il dépend de la capacité à comprendre finement les enjeux business de l’entreprise tout en ayant la
capacité à s’adapter aux standards et aux normes de son écosystème.
axway.com/fr 27
Comment organiser ces compétences dans l’entreprise, le cas échéant ?
Julien Caenevet : Elles sont rares, il faudra donc les concentrer dans des cellules consacrées à l’APIsation, pour
apporter une vraie garantie de qualité centralisée… mais cela ne doit pas aller plus loin. Elles ne peuvent pas
être présente partout, en mode « centre de services » comme cela a pu être le cas par le passé. Ces équipes
réduites doivent plutôt fournir le cadre de cohérence, imaginer les bons labels et devenir un centre de facilitation
qui responsabilise les métiers sur leurs projets. A partir de là, les product owners vont acquérir également des
casquettes d’API owner. En résumé, il faut créer une homogénéisation globale mais pas un goulet d’étranglement.
Ali Hajali : Cela passe par la mise en place de centre de compétences, qui permette de procéder à une vraie montée
en compétences, que ce soit côté IT ou métier. Le piège des API en 2020, c’est que le terme est tellement à la mode,
que tout le monde pense bien connaître le sujet et savoir bien les utiliser. L’entreprise reste alors avec une approche
superficielle et perd du temps.
Mickaël Galibert : Ceux qui pensent connaitre les API, maitrisent en fait souvent la couche technique mais
rarement la dimension écosystème, qui est la plus importante pour le futur de l’entreprise : on parle d’API Economy.
L’un des enjeux dans l’exposition de services concerne la facilité d’utilisation d’une API et son intuitivité. On parle
alors « d’affordance des API », c’est-à-dire la capacité de l’API à susciter son propre usage, mais également de
« Developer Experience » (DX) : l’objectif est de permettre aux développeurs — notamment au sein d’entreprises
tierces — de consommer les API en toute autonomie, de telle sorte à faciliter l’innovation et le développement
de nouveaux usages, mais également dans une optique de réduction des coûts de support. Il s’agit là d’un des
facteurs majeurs pour arriver à se mettre vraiment au centre de son écosystème.
Derrière une appellation générique, toutes les API ne se ressemblent pas. Et les entreprises ont intérêt à mesurer
la pertinence et la maturité d’une API pour vérifier sa pérennité et l’impact réel qu’elle aura à moyen et long terme
sur son business et son écosystème. En la matière, les experts d’Accenture citent le « modèle de maturité de
Richardson » qui permet de comparer les API en écho avec les bonnes pratiques de développement de l’ère du
web… Le modèle classe les API en quatre catégorie, numérotée de 0 à 3, qui implique une intuitivité croissante,
avec une capacité de plus en plus importante de l’API à guider l’utilisateur en autonomie. « Nous recommandons de
travailler à minima sur le niveau 2, bien normalisé. Le niveau 3 est plus coûteux et représente un « nice to have », qui
inclut notamment des liens hypermédias… cela est moins courant. En revanche, avoir une stratégie qui n’implique
pas au moins le niveau 2, revient de notre point de vue à se mettre dans l’impasse vis-à-vis des développeurs et de
l’écosystème » explique ainsi Julien Caenevet.
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Emmanuel
Methivier
Catalyst
Effectif : 1885
axway.com/fr 29
de l’activité des entreprises et voient le client comme un bien qu’il faut capter et protéger contre toute influence
extérieure, de bout en bout dans un parcours très fermé. Parler d’ouverture, de partage de la donnée et de services
en écosystème va à l’encontre de cette vision. En face, on a vu apparaître de plus en plus de « hackers » des
business models traditionnels, poussés par une vision de transformation fondamentale… Avec des modèles
d’entreprises qui se permettent de perdre beaucoup d’argent à l’origine, pour des promesses de rentabilité et de
domination, des années plus tard, comme l’a montré Amazon.
Quelle place prend l’APIsation du système d’information dans ces orientations stratégiques ?
Il est indispensable de ne plus parler seulement d’APIsation… mais d’Open-APIsation, quand on place la réflexion
au niveau stratégique. L’Open-APIsation est au cœur de ce hacking du business traditionnel que je décrivais. C’est
la brique de base qui va permettre de rentrer dans la nouvelle « network economy », qui profite de la force des
écosystèmes en actionnant les leviers que sont les lois exponentielles du digital, à commencer par celles de Moore
et de Metcalfe. C’est une transformation profonde… Ce que n’est pas de la simple APIsation d’un SI. Pour le résumer
plus directement : l’APIsation, c’est de l’optimisation opérationnelle, l’Open-APIsation, c’est un pivot stratégique.
Cette nuance devient primordiale alors que beaucoup d’acteurs ont un intérêt direct à garder un certain flou autour
de ces concepts pour coller aux objectifs qu’on leur donne. La problématique de l’optimisation opérationnelle tend
alors à phagocyter celle de la véritable transformation.
La situation est encore compliquée. On voit trop souvent les DSI seuls à la manœuvre… Leur engagement sur le
sujet est une condition nécessaire mais pas suffisante. Leur vision amène l’entreprise au milieu du gué, et il est
souvent très compliqué de raccrocher les wagons avec les métiers une fois que la DSI s’est lancée et a avancé
seule, souvent sur l’APIsation et non pas sur l’Open-APIsation. Les opportunités de cette dernière n’apparaissent
que pour des organisations qui mobilisent tout le monde : lignes métiers, marketing, commerciaux, DSI…
Quand on observe la réussite industrielle des GAFA, on se rend compte que le point de départ est une vision
globale de l’entreprise « en rupture » avec les partis-pris et les indicateurs traditionnels. Ces entreprises ont
donné les manettes à des véritables « hackers », qu’ils s’appellent Jeff Bezos, Elon Musk, Sergey Brin ou Larry
Page. En France, nous avons encore trop souvent de purs gestionnaires à la tête des organisations. Ils ne peuvent
provoquer le changement. Dans de nombreux plans stratégiques, des mots comme « open » ou « plateformisation »
n’apparaissent encore pas de tout. Nous avons pourtant quelques exemples inspirants : Xavier Niel avec Free, Fred
Potter quand il a lancé Netatmo… Et dans un tout autre genre, Carlos Tavarès, qui a véritablement « hacké » Renault
avec sa vision autour de concepts comme l’Alpine, avant même de prendre la tête de PSA.
D’un point de vue technologique, deux sujets seront à regarder de près : la blockchain dépasse une période de
désillusion avec l’arrivée de projets bien pensés qui se multiplient. Ils formalisent enfin le déport du rôle du tiers
de confiance dans le digital. À l’inverse, l’intelligence artificielle retourne une nouvelle fois dans cette période de
désillusion, car trop souvent les entreprises ont misé sur des projets simplistes, qui n’apportent pas beaucoup de
valeur. Depuis deux ans, « l’IA washing » a fait beaucoup de mal… et des résultats comme les robot-advisors actuels
sont loin de ce que les entreprises pouvaient espérer au départ. Tous ces facteurs font que 2020 va être une
année de transition plutôt que de bouleversement. Il y a des signes qui vont dans le bon sens, comme la volonté
de l’Etat français d’être sur un modèle de government as a platform qui dépasse l’open data pour aller vers l’open
API. Mais cela va prendre du temps. Les meilleurs exemples de réussites seront sans doute à aller chercher dans
le monde de la logistique, pour lequel les opportunités se multiplient. À l’opposé, le secteur bancaire va devoir se
débloquer après être passé à côté d’un véritable open banking, avec la DSP2. On verra toutefois des opportunités
axway.com/fr 30
de concentration d’entreprises naître autour de grandes plateformes de banking, mais celles-ci seront-elles
françaises ? Encore une fois, ce seront sans doute les acteurs les moins traditionnels qui feront bouger les lignes !
Les enjeux de l’Open-APIsation dépassent de loin les seules considérations techniques. Cette considération
stratégique interroge naturellement la posture des « partenaires du numérique » qui accompagnent les entreprises
dans leurs transformations, et en particulier celle d’un éditeur de logiciel français comme Axway, spécialiste des
API. « L’open APIsation est vraiment le cœur du réacteur des transformations en cours, mais elle nécessite d’ouvrir
des systèmes legacy et surtout de préparer les solutions de gouvernance qui permettront de tenir compte de cette
évolution. Il y a quelques années, ces enjeux de gouvernance étaient beaucoup moins présents… Aujourd’hui, nous
avons dû prendre le sujet en main et se positionner plus clairement dans cet accompagnement stratégique et cette
démarche de conseil multifactorielle… On sort alors de l’édition de logiciels au sens strict » explique Emmanuel
Méthivier. Bien sûr, des spécificités techniques, notamment en termes de sécurité, différencient encore les offres
entre les acteurs, mais pour le Catalyst d’Axway, ce n’est plus suffisant : « Au-delà de la qualité des produits, nous
devons accompagner les entreprises à se forger une vision du monde différente, à travers leur ouverture sur leurs
écosystèmes ».
axway.com/fr 31
Ces entreprises qui se transforment en écosystèmes grâce aux API
Nouveaux business models, ouverture aux écosystèmes, nouvelles démarches de cocréation… ces dynamiques sont
au cœur de la transformation actuelles des entreprises grâce au numérique. Elles sont soutenues par un mouvement
généralisé de plateformisation et d’APIsation, qui implique autant les acteurs métiers que les DSI et les CDO.
En complément d’une première rencontre qui a eu lieu en novembre 2019, ce guide porte l’ambition de renforcer une
dynamique de partage franche et inspirante. Vous découvrirez dans ces pages les interviews de 8 dirigeants qui ont
porté des projets ambitieux et reviennent sur les parti-pris stratégiques et organisationnels qui les ont guidés.