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L1 de Mathématiques : Algèbre
Année 2013–2014
Le point de vue de ce chapitre consiste à relier une géométrie plane supposée connue aux nombres
complexes (re)découverts dans un chapitre précédent. On pourrait en quelque sorte inverser le
point de vue et reconstruire complètement la géométrie plane à partir de considérations purement
algébriques, mais ce n’est pas la démarche adoptée ici.
I Points et vecteurs
1◦ Coordonnées dans un plan affine euclidien
a) Soit P un plan affine euclidien. C’est d’abord un ensemble dont on appelle points les
éléments, que l’on note A, B, etc. Il y a plus : quand on se donne un couple de points (A, B) ∈ P 2 ,
−−→ −−→ −−→
on forme un vecteur AB. Pour quatre points A, B, C, D, les vecteurs AB et CD sont égaux si
et seulement si ABDC est un parallélogramme, c’est-à-dire que les segments [AC] et [BD] ont
le même milieu (figure 1).
D
C
B
A
u + u0
u0
→
− 3
0 u 2u
− 21 u
→
− u
0
S’agissant d’un plan euclidien, on a de plus une façon de mesurer les distances ou mieux, un
produit scalaire. Le produit scalaire de deux vecteurs u et v est un réel noté hu, vi. Les propriétés
suivantes 1 sont satisfaites pour des vecteurs u, u0 , v et v 0 et des réels λ, λ0 quelconques :
(i) hu, ui ≥ 0 ;
→
−
(ii) hu, ui = 0 si et seulement si u = 0 ;
1. Connues du lycée mais pas revues en amphi.
1
(iii) hu, vi = hv, ui ;
(iv) hλu + λ0 u0 , vi = λhu, vi + λ0 hu0 , vi ;
(v) hu, λv + λ0 v 0 i = λhu, vi + λ0 hu, v 0 i (cela résulte de (iii) et (iv).
Ce produit scalaire permet de définir la norme d’un vecteur u :
p
kuk = hu, ui
et la distance AB entre deux points A et B :
−−→
AB =
AB
.
Il dépend du repère R. Le lien entre coordonnées d’un vecteur et des points est le suivant : si
−−→ B −xA
A a pour coordonnées xyAA , B a pour coordonnées xyAA , alors AB a pour coordonnées xyB
−yA .
Cela provient du calcul :
−−→ −→ −−→
AB = −OA + OB = −(xA e1 + yA e2 ) + (xB e1 + yB e2 ) = (xB − xA )e1 + (yB − yA )e2 .
3 M
2
y
2
y M
1
e2
1 2
e2 x −1 O e1 1 2 3 x 4
1
e1
O −1
c) Repères orthonormés
En fait, comme on a un produit scalaire sur les vecteurs, on peut montrer qu’il existe des repères
orthonormé, c’est-à-dire des repères (O, e1 , e2 ) tels que :
he1 , e2 i = 0 et he1 , e1 i = 1 = he2 , e2 i.
hu, u0 i = hxe1 + ye2 , x0 e1 + y 0 e2 i = xx0 he1 , e1 i + xy 0 he1 , e2 i + yx0 he2 , e1 i + yy 0 he2 , e2 i = xx0 + yy 0 .
2. La notion sera précisée dans le chapitre suivant et au S2.
2
2◦ Affixes
Rappelons une dernière fois que l’on a choisi un repère orthonormé R = (O, e1 , e2 ) du plan affine
euclidien P. Étant donné un point M de P (resp. un vecteur u) ayant pour coordonnées xy ,
(ii) Soient A et B des points d’affixes respectifs zA et zB . Alors, la distance entre ces deux points
est :
AB = |zA − zB |.
Démonstration. (i) Notons z = x + yi et z 0 = x0 + y 0 i avec x, y, x0 , y 0 ∈ R. On a :
Re zz 0 = Re (x + yi)x0 − y 0 i = Re xx0 + yy 0 + (yx0 − xy 0 )i = xx0 + yy 0 .
−−→
(ii) En prenant u = u0 = AB, vecteur qui a pour affixe zB − zA , on a :
−−→
q q 2
AB =
AB
= Re (zB − zA )zB − zA = zB − zA = |zB − zA |.
3◦ Angles
La définition n’est motivée que si on sait ou si on croit qu’il existe une notion d’angles, que l’on
peut ajouter ou retrancher des angles, etc.
Définition. Soient u et u0 deux vecteurs non nuls d’affixes respectifs z et z 0 . On appelle mesure
de l’angle défini par (u, u0 ) et on note u,
d u0 , ou plus simplement (u, u0 ), tout argument du
z0
nombre complexe non nul z .
u0 (z 0 )
u(z)
e2 θ
α0
α
O e1
Esquisse de justification (figure 4). Soit α un argument de z = z1 . C’est, par définition, une
mesure de l’angle (e1 , u) ; idem pour α0 , un argument de z 0 , qui est aussi une mesure de (e1 , u0 ).
Mais alors, si on croit à l’addition des angles, on doit avoir :
z z0 z0
(u, u0 ) = −(e1 , u) + (e1 , u0 ) = −arg + arg = arg [2π].
1 1 z
Ce n’est donc pas si extravagant.
3. En effet, contre toute attente, affixe est un mot masculin.
3
Proposition. Soient A, B, C, D quatre points d’affixes respectifs zA , etc. On suppose que
−−→ −−→
A 6= B et que C 6= D. Alors une mesure de l’angle AB, CD est :
−−→ −−→ z D − zC
AB, CD = arg [2π].
zB − z A
II Transformations géométriques
Rappelons une post-ultime fois que le plan P est rapporté à un repère orthonormé (O, e1 , e2 ).
On va considérer un certain nombre de transformations du plan, c’est-à-dire de bijections de P
dans P. Si F est une de ces transformations, on lui associe une bijection f : C → C de la façon
suivante : pour z ∈ C, on considère le point M d’affixe z et on définit f (z) comme l’affixe de
l’image M 0 de M par F .
En termes plus sophistiqués, si on note A : P → C la bijection qui à un point M de P, associe
son affixe z = A(M ), la correspondance entre F et f est (vérifier !) : f = A ◦ F ◦ A−1 ou, ce qui
revient au même : F = A−1 ◦ f ◦ A. Il revient au même de se donner F ou f .
Dans cette situation, on dira que f est l’écriture complexe de F ou que F est la transfor-
mation géométrique correspondant à f .
1◦ Translations
a) Définition
Définition. Soit u un vecteur. On appelle translation de vecteur u et on note (ici, entre nous)
Tu l’application de P dans P définie ainsi. L’image d’un point M est l’unique point M 0 tel que
−−−→0
M M = u.
Le lemme suivant est facile et utile mais il n’a pas été vu en amphi.
→
−
Lemme. (i) L’identité est la translation de vecteur 0 .
(ii) La composée de deux translations de vecteurs u et u0 est la translation de vecteur u + u0 .
(iii) Si u est un vecteur quelconque, Tu est bijective et la bijection réciproque est : Tu−1 = T−u .
→
− →
−
Démonstration. (i) Si u = 0 , on a, pour M ∈ P et M 0 = T− → (M ) : M M 0 = 0 , i.e. M = M 0 .
0
−−−→ −−−→ −−−−→
(ii) Pour M quelconque, M 0 = Tu (M ) et M 00 = Tu0 (M 0 ), on a : M M 00 = M M 0 + M 0 M 00 = u + u0 .
(iii) En prenant u0 = −u, on voit que Tu ◦ T−u = T− → = IdP et, de même : T−u ◦ Tu = IdP .
0
b) Écriture complexe
Lemme. Soit u un vecteur, soit w son affixe et soit Tu la translation de vecteur u. Alors, si M
est un point de P d’affixe z et si z 0 est l’affixe de son image M 0 = Tu (M ), on a :
z 0 = z + w.
4
2◦ Homothéties
a) Définition
Définition. Soit A un point et k un réel non nul. On appelle homothétie de centre A et de
rapport k et on note (ici, entre nous) HA,k l’application de P dans P définie ainsi. L’image
d’un point M est l’unique point M 0 tel que
−−→0 −−→
AM = k AM .
Remarque. Si k 6= 1, l’homothétie HA,k admet un unique point fixe : A. En effet, M est fixe SSI
−−→ −−→ −−→ −−→ −−→ → − −−→ → −
M 0 = M SSI AM 0 = AM SSI k AM = AM SSI (1 − k)AM = 0 SSI AM = 0 (car 1 − k 6= 1).
Le lemme suivant est facile et utile mais il n’a pas été vu en amphi.
Lemme. (i) Pour tout point A, l’identité est l’homothétie de centre A et de rapport 1.
(ii) La composée de deux homothéties de même centre A et de rapports k et k 0 est l’homothétie
de centre A ayant pour rapport le produit des rapports kk 0 .
(iii) Une homothétie de centre A et de rapport k est bijective et la bijection réciproque est
l’homothétie de centre A et de rapport 1/k.
−−→ −−→
Démonstration. (i) Si k = 1, on a : AM 0 = AM donc M 0 = HAk (M ) = M pour tout M .
−−−→ −−→ −−→
(ii) Si M 0 = HA,k (M ) et M 00 = HA,k0 (M 0 ), alors on a : AM 00 = k 0 AM 0 = k 0 k AM .
(iii) Cela résulte de (i) et (ii) en prenant k 0 = 1/k.
b) Écriture complexe
Lemme. Soient A un point, zA son affixe, k un réel non nul et soit HA,k l’homothétie de centre
A et de rapport k. Alors, si M est un point de P d’affixe z et si z 0 est l’affixe de son image
M 0 = HA,k (M ), on a :
z 0 = k(z − zA ) + zA = kz + (1 − k)zA .
Autrement dit, l’écriture complexe de HA,k est hA,k : z 7→ kz + (1 − k)zA .
−−→ −−→
Démonstration. Avec ces notations, on a : AM 0 = k AM , d’où : z 0 − zA = k(z − zA ). Terminé.
Exercice. Soient k un réel, b un complexe et soit f l’application de C dans C définie par :
f (z) = kz + b pour tout z ∈ C.
Si k = 1, alors f est l’écriture complexe de la translation de vecteur ayant pour affixe b. Si
k 6= 1, alors f a un unique point fixe w = b/(1 − k) et c’est l’écriture complexe de l’homothétie
de centre A, le point d’affixe w, et de rapport k.
Exercice (pas vu en amphi). Soient H et H 0 deux homothéties de rapports k et k 0 et de centres
quelconques. Montrer que la composée H ◦ H 0 est une translation si kk 0 = 1 et que c’est une
homothétie si kk 0 6= 1. (Utiliser l’exercice précédent.)
3◦ Rotations
a) Définition
Définition. Soit A un point et θ un réel. On appelle rotation de centre A et d’angle θ et on
note (ici, entre nous) RA,θ l’application de P dans P définie ainsi. L’image d’un point M est
l’unique point M 0 tel que
(
AM 0 = AM
−−→ −−→0
AM , AM = θ [2π] si M 6= A.
5
Est-ce bien défini ? Existe-t-il toujours un tel point M 0 ? Est-il bien unique ? Pour le montrer, le
plus simple est de passer en complexes ! Il n’y a pas de problème si M = A, alors l’image est A
(AM 0 = 0 donne M 0 = A).
Soit M un point distinct de A, on note z son affixe et zA celui de A. Soit encore M 0 un autre
point, différent de A, d’affixe z 0 . Vu que z 6= zA , on a :
0
0 0
z − zA
AM = AM ⇐⇒ |z − zA | = |z − zA | ⇐⇒ = 1.
z − zA
D’autre part, on traduit la condition portant sur les angles en termes d’arguments :
−−→ −−→0 z 0 − zA
AM , AM = θ [2π] ⇐⇒ arg = θ [2π].
z − zA
z 0 −zA
Autrement dit, on connaı̂t le module et l’argument de z−zA :
z 0 − zA
= eiθ ,
z − zA
ce qui est équivalent à :
z 0 = eiθ (z − zA ) + zA .
Cela prouve d’une part que la définition est bien formée et nous donne l’écriture complexe d’une
rotation.
Lemme. Soient A un point, zA son affixe, θ un réel et RA,θ la rotation de centre A et d’angle
θ. Alors, si M est un point de P d’affixe z et si z 0 est l’affixe de son image RA,θ (M ), on a :
z 0 = eiθ (z − zA ) + zA .
Le lemme suivant est facile et utile mais il n’a pas été vu en amphi.
Lemme. (i) Pour tout point A, l’identité est la rotation de centre A et d’angle nul.
(ii) La composée de deux rotations de même centre A et d’angles θ et θ0 est la rotation de centre
A ayant pour angle la somme des angles θ + θ0 .
(iii) Une rotation de centre A et d’angle θ est bijective et la bijection réciproque est la rotation
de centre A et d’angle −θ.
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4◦ Similitudes directes
a) Définition
Est-ce bien défini ? Y a-t-il toujours un unique point M 0 ? Il n’y a pas de problème si M = A,
alors l’image est A (AM 0 = 0 donne M 0 = A).
Soit M 6= A, soit z son affixe et zA celui de A. Soit M 0 6= A un point quelconque d’affixe z 0 . Vu
que z 6= zA et k > 0, on a :
0
0 0
z − zA
AM = k · AM ⇐⇒ |z − zA | = k|z − zA | ⇐⇒ = k.
z − zA
D’autre part, on traduit la condition portant sur les angles en termes d’arguments :
−−→ −−→0 z 0 − zA
AM , AM = θ [2π] ⇐⇒ arg = θ [2π].
z − zA
z 0 −zA
Autrement dit, on connaı̂t le module et l’argument de z−zA :
z 0 − zA
= keiθ ,
z − zA
ce qui est équivalent à :
z 0 = keiθ (z − zA ) + zA .
Cela prouve que la définition est bien formée et nous donne l’écriture complexe d’une rotation.
Lemme. Soient A un point, zA son affixe, k un réel strictement positif, θ un réel et soit SA,k,θ
la similitude directe de centre A, de rapport k et d’angle θ. Alors, si M est un point de P
d’affixe z et si z 0 est l’affixe de son image M 0 = SA,k,θ (M ), on a :
z 0 = keiθ (z − zA ) + zA .
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b) Similitudes directes et applications affines complexes
Toutes les transformation que l’on a vues jusqu’à présent ont une écriture complexe de la forme
z 7→ az + b, c’est-à-dire une applications affines complexes :
– c’est une translation SSI a = 1, ;
– c’est une homothétie SSI a = k ∈ R, a 6= 1 ;
– c’est une rotation SSI a = eiθ a pour module 1 ;
– pour une similitude directe, a = keiθ et b = zA − keiθ zA .
On va terminer la classification.
Proposition. Soit S une similitude directe du plan. Alors, pour tous points A, B, C, D du
plans tels que A 6= B et C 6= D, on a, en notant A0 = S(A), etc. :
(i) dilatation des distances : il existe k > 0 indépendant de A et B tel que A0 B 0 = k · AB ;
C 0 D0 CD
(ii) préservation des rapports de distances : 0 0 = ;
AB AB
−−→ −−−→ −−→ −−−→
(iii) préservation des angles orientés : A0 B 0 , C 0 D0 = A0 B 0 , C 0 D0 [2π].
zD 0 − zC 0 azD + b − (azC + b) zD − zC
= = .
zB 0 − zA 0 azB + b − (azA + b) zB − zA
8
Théorème. Soit S une bijection du plan dans lui-même qui préserve l’alignement et les angles
orientés, c’est-à-dire :
(i) si A, B, C sont alignés, alors S(A), S(B) et S(C) sont alignés ;
(ii) si A, B, C, D sont quatre points tels que A 6= B et C 6= D et si A0 , B 0 , C 0 , D0 sont leurs
−−→ −−−→ −−→ −−−→
images, alors A0 B 0 , C 0 D0 = A0 B 0 , C 0 D0 [2π].
Alors S est une similitude directe : il existe (a, b) ∈ C∗ × C tel que s, l’écriture complexe de S
soit :
∀z ∈ C, s(z) = az + b.
Théorème. Soit S une bijection du plan dans lui-même qui préserve les rapports de distance :
il existe un réel k > 0 tel que pour tous points distincts A, B d’images respectives A0 , B 0 , on a :
A0 B 0 = k AB.
Alors S est une similitude : il existe (a, b) ∈ C∗ × C tel que s, l’écriture complexe de S soit de
l’une des deux formes suivantes :
∀z ∈ C, s(z) = az + b ou ∀z ∈ C, s(z) = az + b.