Fiche rédigée par Éric Vigo Images de presse

Derrière le voile
Chappatte / Paula Bronstein

© Chappatte (Suisse), 2006

Paru dans L’Hebdo (Lausanne) le 17 octobre 1996.

© Paula Bronstein (États-Unis) / Getty Images, 2003

Le 23 février 2003 à Kaladan, en Afghanistan. Des femmes afghanes font la queue pour être soignées à la clinique de Kalakhan.
(V.O. page 3)

© CRDP de l’académie de Versailles – 2010 1/3

Images de presse Fiche rédigée par Éric Vigo

Derrière le voile
Chappatte / Paula Bronstein
Le fait
Toujours jaloux de son indépendance, riche en ressources minières, capable de faire vivre une agriculture
aux produits – licites – appréciés, l’Afghanistan aurait des atouts certains pour vivre en toute prospérité. Mais
l’histoire du pays est aussi tourmentée que sa géographie montagneuse, au cœur de l’Asie Centrale.
Les dernières années du XXe siècle ont vu se succéder des traumatismes historiques dont le pays peine à
se relever : l’invasion par les troupes de l’URSS en 1979, une guerre de libération qui se poursuit jusqu’en
1989, la prise de pouvoir par les talibans (« étudiants en religion ») en 1996, leur mise en place d’un régime
islamiste intégriste où la charia régit toute la vie civile, la guerre menée par une coalition internationale à la
suite des attentats de 2001. Devenu République islamique d’Afghanistan en 2004, alors que la coalition est
toujours militairement présente, le pays connaît encore la guerre.
Lorsqu’ils sont arrivés au gouvernement, les talibans ont rendu obligatoire pour les femmes le port de la
burqa, évolution d’un vêtement traditionnel pachtoune, le tchadri (plus court). Cette imposition, mais aussi
d’autres lois restreignant le droit des femmes, a soulevé l’indignation d’une grande part de la communauté
internationale.

Focus
Voilà un dessin à la forme étonnante ! Ici, le regard du spectateur n’entre pas dans l’image à l’aise comme
dans un vaste paysage. Au contraire, la plus grande partie de la surface est recouverte d’encre noire et seule
une étroite bande horizontale et légèrement incurvée offre une ouverture. On entre dans cette image pour
s’y sentir immédiatement à l’étroit. Fente dans un mur, meurtrière dans un blindage ? Rien de tout cela ! Un
titre tracé en blanc nous informe : il s’agit là de « L’avenir vu par une Afghane ». Le dessinateur suisse Patrick
Chappatte a choisi, en ce mois d’octobre 1996, de dénoncer le sort fait aux femmes dans l’Afghanistan
gouverné par les talibans. Il le fait plus particulièrement en commentant l’obligation qu’elles ont de porter
la burqa, grande pièce de tissu cousu qui les couvre de la tête aux pieds en dehors d’une mince ouverture
au niveau des yeux.
L’avenir que dépeint Patrick Chappatte d’un trait noir incisif n’a rien d’heureux : une piste étroite et défon-
cée conduit la femme vers un sombre futur bordé de ruines fumantes. Un homme assis la tête dans les
mains est l’image même du désespoir. Plus loin, un cadavre est abandonné sur le bord du chemin. Partout,
la mort rôde sur un avenir de guerre et de souffrance. Toute la composition de l’image concentre notre
attention sur lui.
La photographie de Paula Bronstein date de 2003. Les talibans ont été chassés, mais la burqa est toujours
portée. Si elle est devenue le symbole de l’oppression intégriste, on oublie qu’elle est l’héritière d’un vête-
ment traditionnel afghan dont le port n’a jamais disparu, même au cours des années de libéralisation que
connurent par le passé les villes afghanes surtout.
Dans l’image de Paula Bronstein, une assemblée de femmes assises sur le sol contre un mur, les burqas
sont presque partout, emplissant l’espace de leurs bleus vifs, de leurs fins plissés et de leurs drapés. Celles
des deux femmes de dos, très nettes, au premier plan, dessinent un cadre symétrique qui protège autant
qu’il désigne la présence d’une petite fille. Situé au second plan et au centre de l’image, son visage grave
et interrogateur soutient un regard dirigé droit vers l’objectif de la photographe, et donc vers nous. Son
teint hâlé est la seule couleur chaude qui vienne contraster avec les bleus froids qui dominent le reste de la
photographie. Toute la composition de l’image concentre notre attention sur elle.
À l’arrière-plan, déjà légèrement flou, encore des femmes dont nous ne voyons pas les visages.
L’une de ces femmes est probablement une de ses parentes, sa mère peut-être. À son âge, le port de la burqa
n’est pas encore exigé par la coutume. Mais c’est là son avenir. Sera-t-il aussi sombre que celui prédit par le
dessin de Chappatte ?

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Activités
L’enseignant adaptera ces brèves propositions pédagogiques aux besoins de ses élèves. Pour le second degré,
les activités suggérées pour le premier degré pourront être reprises et approfondies.

À l’école
• Faire décrire par plans de l’image la complexe construction du dessin : qu’est-ce que les élèves comprennent
de ce point de vue ? On définira cette notion à partir de cet exemple.
• Faire ressentir aux élèves les contrastes mis en œuvre dans les deux images : la surface majoritairement noire
et la mince « fenêtre » du dessin ; la composition très colorée de la photographie et l’idée d’enfermement et
d’aveuglement qu’elle contient. Proposer des activités de création d’image utilisant les mêmes principes de
composition.
• Imaginer un texte à la première personne dans lequel la fillette de la photographie exprime le sentiment
qu’elle ressent.

Au collège et au lycée
• Faire définir le graphisme de Chappatte et rechercher dans l’histoire de l’art des œuvres qui offrent une fac-
ture semblable. Aborder la notion double de point de vue.
• Décrire la construction symétrique de la photographie, son usage des couleurs (ou plutôt de la monochro-
mie) et des équilibres de volumes, l’absence de profondeur de champ. Quel effet ressent-on ? Débattre de la
question : une photo très esthétique peut-elle plus qu’une autre faire prendre conscience d’un problème ?
• Effectuer une recherche documentaire sur la difficulté d’être femme en Afghanistan.

Pour aller plus loin

Des sites
„„ www.globecartoon.com
Pour découvrir d’autres dessins de Patrick Chappatte.
„„ http://letemps.ch/opinions/chappatte
Le site du quotidien suisse Le Temps, où Patrick Chappatte propose ses dessins
„„ www.visapourlimage.com/news/3896.do?page=7
À propos de Paula Bronstein

Des livres
Parvana, une enfance en Afghanistan, Deborah Ellis, Hachette Jeunesse, 2003.
Afghanes, Suzanne Fisher Staples, Gallimard Jeunesse, coll. Scripto, 2006.

Légende en anglais de la photo de Paula Bronstein

Kaladan, Afghanistan, February 23, 2003 : Afghan women wait in line to be treated at the Kalakhan
health clinic.

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