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DÉBATS • ARCHITECTURE
TRIBUNE
Collectif
Publié le 02 décembre 2022 à 05h30 • Mis à jour le 02 décembre 2022 à 05h30 | Lecture 4 min.
Jamais l’architecture, ses métiers, ses disciplines, ses formations n’ont été dans un rapport aussi
immédiat aux enjeux contemporains. C’est précisément au moment où l’habitabilité du monde est
en question que le rôle des écoles d’architecture se rappelle à tous. Ce rôle réside en premier lieu à
former ceux qui concevront, qui transformeront et qui prendront soin des nouveaux milieux au sein
desquels les sociétés pourront s’épanouir.
Pour ce faire, les écoles d’architecture disposent d’une spécificité remarquable : elles offrent un
environnement de formation, de construction de la pensée et de construction de l’action qui repose
sur la culture de projet, dans un élan à la fois partagé, prospectif et responsable.
Attractivité
Quand tout pousse à davantage d’architecture, l’architecte, lui, voit sa reconnaissance professionnelle
diminuer. Rares sont aujourd’hui les maîtres d’ouvrage privés qui confient le suivi de chantier à
l’agence qui en a dessiné les plans ; cette désarticulation des liens savants entre conception et
réalisation démultiplie les effets de non-maîtrise du projet global.
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Lire aussi : « Il reste à inventer l’architecture bas carbone et du vivant, comme il a été inventé
celle de la pierre et du béton »
Par ailleurs, la France est le pays d’Europe qui recense le moins d’architectes avec 30 000 architectes
inscrits à l’ordre, contre 56 000 en Espagne, 111 000 en Allemagne et 160 000 en Italie. L’âge moyen
des architectes français, 51 ans, laisse imaginer la pénurie à venir d’ici la prochaine décennie. Moins
d’architectes n’ont jamais produit plus d’architecture.
Les effectifs des vingt écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) se sont stabilisés à hauteur
de 20 000 étudiants depuis une vingtaine d’années. Dans le même temps, les effectifs d’étudiants
nationaux ont progressé de plus de 28 % et ceux des écoles d’ingénieurs publiques de 52 %.
L’attractivité de la formation est pourtant là, puisque le taux d’accès moyen national sur Parcoursup
est de seulement 13 %.
Cette attractivité est le témoin des efforts considérables entrepris par les écoles depuis les réformes
de 2005 et 2018, inscrivant les établissements dans l’enseignement supérieur. Les ENSA ont multiplié
les doubles cursus avec les écoles d’ingénieur, d’art, de paysage, de commerce, les instituts de sciences
politiques et d’urbanisme ou les universités. Elles ont inscrit l’écoconstruction, l’intervention dans
l’existant, la régénération des territoires, la médiation, le numérique et les activités de recherche dans
la formation initiale.
Elles ont créé de nombreux diplômes de spécialisation dans le patrimoine, les risques majeurs, la
conception postcarbone ou l’urbanisme, ouverts à plusieurs cursus d’origines diverses. La population
étudiante en formation initiale est paritaire (60 % de femmes), mixte (30 % de boursiers), issue de
toutes les filières de baccalauréat, auxquelles s’ajoutent les formations professionnelles continues et
l’apprentissage. Le résultat est une insertion professionnelle des diplômés après trois ans à 85 % dans
leur domaine de compétence, et à 82 % avec un emploi stable.
Lire aussi : Climat : « Le moment est venu de créer un véritable service public de la rénovation
Les écoles délivrent toutes des thèses de doctorat, complétant le cursus LMD (licence master
doctorat), ainsi que l’habilitation à la maîtrise d’œuvre permettant l’inscription au tableau de l’ordre.
Elles ont créé des laboratoires de recherche reconnus par les organismes nationaux comme le CNRS,
et sont lauréates d’appels à projets de premier plan lancés par l’Agence nationale de la recherche ou
les plans d’investissement d’avenir.
L’architecture est en relation directe avec les entreprises du bâtiment, secteur qui doit complètement
se restructurer pour atteindre les objectifs de la transition écologique. Les ENSA sont à même de
porter des chaires industrielles permettant le développement de nouveaux matériaux et modes de
construction, de valorisation des déchets ou de recyclage, ou encore de stratégies de réemploi.
Un enjeu sociétal
De nouveaux modèles d’agences émergent pour accompagner les acteurs publics et privés dans la
transition et la transformation. Ces structures peuvent être accompagnées par des incubateurs au
sein même des ENSA, comme dans toutes les grandes écoles, afin de porter ces innovations à un stade
de développement autonome.
A l’invitation de la Commission européenne, qui appelle à la création d’un Nouveau Bauhaus pour
répondre aux enjeux climatiques, et à l’appui de la stratégie nationale de l’architecture, nous
appelons à un investissement massif dans les écoles d’architecture afin de former les futurs acteurs
de la transition.
Lire aussi : « Il manque une approche globale qui préfigure la forme et le fonctionnement de la
ville postcarbone de demain »
Toutes les écoles pourront dès lors atteindre une taille critique efficiente, et de nouvelles formations à
l’architecture pourront s’ouvrir dans les régions qui en sont dépourvues (Centre-Val-de-Loire,
Bourgogne-Franche-Comté, outre-mer). Il faut former plus d’étudiants à l’architecture (les futurs
maîtres d’ouvrage, ingénieurs, urbanistes) pour partager une culture commune, et former plus
d’architectes aux métiers d’avenir.
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