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IFPEK

Institut de formation en ergothérapie

Le Jeu, la Paralysie Cérébrale et


l’Ergothérapie :

Jouer un objectif en ergothérapie

UE 6.5. S6

Puech Coralie

Année scolaire 2013-2014


IFPEK

Institut de formation en ergothérapie

Le Jeu, la Paralysie Cérébrale et


l’Ergothérapie :

Jouer un objectif en ergothérapie

Sous la direction de Jean-Jacques Durand

UE 6.5. S6

Puech Coralie

Année scolaire 2013-2014

Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle


faite sans le consentement de l'auteur est illégale.
Remerciements

Je souhaite remercier,

mon directeur de mémoire, Monsieur Jean-Jacques Durand, pour ses conseils et ses paroles
d’encouragement qui m’ont permis d’avancer,

les ergothérapeutes ayant contribué de près ou de loin à l’élaboration de ce travail,

mes parents, ainsi que mes frères et sœurs pour leur soutien et leur aide,

enfin je remercie plus particulièrement mes amis de promotion qui m’ont apporté un grand
soutien, de précieux conseils et m’ont permis de croire en ce travail.
Citations

C'est sur la base du jeu que s'édifie toute l'existence expérientielle de l'homme.

Winnicott (1975)
Sommaire

Introduction................................................................................................................................ 1

1ère Partie : Problématique ....................................................................................................... 2

1. Questionnements de départ ........................................................................................... 2

2. Lectures préliminaires ..................................................................................................... 3

3. Entretien exploratoire ..................................................................................................... 5

4. Question de recherche .................................................................................................... 7

2ème Partie : Partie Théorique ................................................................................................. 8

1. Le jeu chez l’enfant.......................................................................................................... 8

a. Qu’est-ce que le jeu ? .................................................................................................. 8

b. Le jeu d’après D.W. Winnicott ................................................................................. 9

c. Le jeu d’après J. Piaget .............................................................................................. 10

d. Illustration des apports du jeu ............................................................................... 11

2. La paralysie cérébrale et le jeu...................................................................................... 13

a. Définition de la Paralysie Cérébrale .......................................................................... 13

b. Epidémiologie ........................................................................................................ 14

c. Etiologie ..................................................................................................................... 14

d. Les différentes formes ........................................................................................... 15

e. Troubles associés ................................................................................................... 15

f. Le jeu chez l’enfant atteint de paralysie cérébrale ................................................... 17

3. Le jeu en ergothérapie .................................................................................................. 19

a. Les concepts clés de l’ergothérapie .......................................................................... 19

b. Le jeu dans le modèle ludique de F. Ferland ......................................................... 20

3ème partie : Partie pratique ................................................................................................... 23

I. Méthodologie ................................................................................................................ 23
1. Choix des outils d’enquête..................................................................................... 23

2. Choix de la population interrogée ......................................................................... 23

3. Elaboration des outils ............................................................................................ 24

II. Analyse des données ..................................................................................................... 25

1. Présentation des ergothérapeutes interrogés ...................................................... 25

2. Utilisation du jeu en séance ................................................................................... 26

3. Retard dans le développement du jeu................................................................... 27

4. Evaluation du niveau de jeu de l’enfant ................................................................ 28

5. Moyens pour proposer un jeu adapté au niveau de l’enfant ................................ 29

6. Utilisation du jeu en séance d’ergothérapie .......................................................... 31

7. Pertinence du développement du jeu de l’enfant en ergothérapie ...................... 32

8. Choix du jeu............................................................................................................ 34

9. Modèle ludique de F. Ferland ................................................................................ 34

4ème Partie : Partie discussion ................................................................................................ 36

I. Conclusion de l’analyse ................................................................................................. 36

II. Vérification de l’hypothèse ........................................................................................... 38

III. Critique ...................................................................................................................... 39

IV. Nouvelles pistes de réflexion..................................................................................... 40

1. « Jouer » un objectif en ergothérapie mais selon le degré du handicap .............. 40

2. Le jeu dans les environnements de l’enfant .......................................................... 40

3. L’intégration sensorielle favoriserait le développement du jeu ............................ 41

Conclusion ................................................................................................................................ 44

Bibliographie ............................................................................................................................ 46

Annexes ........................................................................................................................................

Résumé .........................................................................................................................................
Introduction

Le jeu est l’activité primordiale de l’enfant. A travers ses activités ludiques, l’enfant
développe de nombreuses compétences. Courir après un ballon, découvrir différentes
textures, comprendre le fonctionnement des objets, interagir avec ses camarades, ressentir
des émotions… Les jeux stimulent les différentes sphères du développement de l’enfant.
Cependant, certains enfants atteints de paralysie cérébrale ne peuvent pas découvrir leur
environnement au même titre que les autres enfants. Parfois, leur limitation motrice les
gêne dans la manipulation des objets, dans l’exploration de leur environnement. Missuana
et Pollock (1991) parlent d’un handicap secondaire qui survient face à différentes barrières :
motrice, sociale, personnelle et environnementale.

L’ergothérapeute est un professionnel qui cherche à favoriser l’autonomie et


l’indépendance d’un individu en situation de handicap, dans toutes les activités qui lui
semblent importantes. Il cherche à améliorer les capacités nécessaires à la réalisation de
l’activité et cherche des moyens ou des stratégies pour adapter l’environnement.

Ainsi, l’ergothérapeute est un professionnel privilégié pour intervenir auprès de ces


enfants et favoriser leur autonomie et indépendance dans le jeu. Cette étude s’intéresse à la
pratique des ergothérapeutes afin de déterminer en quoi « jouer » peut être un objectif en
ergothérapie, et les intérêts de suivre cet objectif.

Dans un premier temps, il est présenté l’évolution de l’émergence du sujet jusqu’à la


question de recherche. Dans une seconde partie, la théorie permet de définir les concepts
clés de ce mémoire. Puis, dans un troisième temps, après une présentation de la
méthodologie suivie de la justification et l’explication des outils choisis, les données
recueillies par des entretiens et des questionnaires sont analysées. Enfin dans un dernier
temps, la discussion permet de conclure l’analyse en croisant les données théoriques, de
vérifier l’hypothèse, de rapporter les critiques du travail, et les nouvelles pistes de réflexion.

1
1ère Partie : Problématique

1. Questionnements de départ
Le thème de mon mémoire émane de plusieurs expériences de stages auprès
d’enfants.

Tout d’abord, en terminale, j’ai effectué un stage d’observation d’une semaine dans
un Institut d’Education Motrice (IEM). La plupart des enfants suivis étaient atteints de
paralysie cérébrale. Au cours de la semaine, j’ai pu assister à des séances d’ergothérapie et
d’orthophonie. L’orthophoniste avait suivi une formation sur la rééducation des troubles
logico-mathématiques. Cette formation s’appuie sur les théories piagétiennes selon
lesquelles l’enfant développe son raisonnement grâce aux manipulations lors d’activités
ludiques. Elle mettait les enfants en situation de jeu libre et observait leur niveau de
développement du raisonnement. Puis elle cherchait à les faire progresser dans les étapes
du développement du jeu pour améliorer leur raisonnement et permettre l’acquisition du
langage. Ainsi, pour l’orthophoniste certains enfants paralysés cérébraux présentaient un
retard dans leur développement du jeu. En parallèle, j’ai suivi des séances d’ergothérapie
pour ces mêmes enfants. Le jeu était utilisé pour rééduquer des troubles spécifiques
(cognitif, moteur, sensoriel). Cependant il m’a semblé que les ergothérapeutes ne prenaient
pas en compte un potentiel retard dans le développement du jeu et qu’ils choisissaient le jeu
en fonction de l’âge chronologique de l’enfant. Je me suis donc questionnée sur cette
différence. Est-ce que les enfants présentaient un retard dans le développement de leur
jeu ? Est-ce que les ergothérapeutes prenaient en compte leur niveau de jeu lors du choix du
jeu ? Ainsi, mon intérêt pour le jeu est apparu.

J’ai ensuite réalisé un stage dans un Service d’Education Spécialisé de Soin à Domicile
(SESSAD). J’ai de nouveau observé que le jeu était utilisé pour améliorer des fonctions
spécifiques de l’enfant : sensorielle, cognitive ou motrice. Bien que le jeu était employé pour
susciter la motivation de l’enfant, dans la pratique il me semblait vécu comme un exercice
de rééducation d’une fonction. Cette manière de procéder me questionnait. L’aspect ludique
semblait s’estomper au détriment de l’implication de l’enfant dans l’activité et nuire à la
transposition des acquis dans la vie quotidienne. Pourtant, n’était-il pas l’objectif des
ergothérapeutes d’utiliser une activité plaisante pour l’enfant afin qu’il s’investisse dans sa
prise en soin ?

2
Lors des cours suivis à l’école d’ergothérapie, j’ai appris que le jeu était le moyen
privilégié par les ergothérapeutes dans les prises en soin des enfants. L’ergothérapeute est
un professionnel de la santé qui utilise l’activité comme un moyen et comme un objectif, et
le jeu est l’activité essentielle pour l’enfant. Grâce à l’activité, l’individu acquiert ou récupère
des fonctions déficitaires (physique ou psychique) afin de pouvoir réaliser ou de nouveau
réaliser ces activités. Ainsi par exemple, chez un adulte, la cuisine peut être utilisée afin de
rééduquer des troubles attentionnels, ici l’activité est un moyen ; mais l’objectif final est que
l’individu soit autonome et indépendant lors de son activité cuisine, on peut alors dire que
l’activité est un objectif.

Au regard de mes deux expériences de stages en pédiatrie, plusieurs questions me


sont apparues :

- Est-ce que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans le
développement du jeu et pourquoi ?

- Si oui, existe-t-il des outils permettant d’évaluer le niveau de développement du jeu de ces
enfants ?

- Comment le jeu est-il utilisé en ergothérapie ?

- Jouer peut-il être l’un des objectifs lors des séances d’ergothérapie ?

2. Lectures préliminaires
Au cours de mes lectures, je me suis fait une idée plus précise de ce qu’était le jeu et
de son développement chez les enfants sans troubles.

De nombreuses définitions du jeu existent car il est difficile de trouver plusieurs


caractéristiques communes à tous les jeux. D’après le Larousse le jeu est une « Activité
d'ordre physique ou mental, non imposée, ne visant à aucune fin utilitaire, et à laquelle on
s'adonne pour se divertir, en tirer un plaisir […] ». En effet la notion de plaisir revient dans
beaucoup de définitions, elle semble indispensable pour qu’un jeu soit considéré comme tel.

Le jeu est l’activité essentielle de l’enfant. Il suit un développement selon plusieurs


étapes entre l’âge de 0 et 12 ans majoritairement. Grâce au jeu, l’enfant découvre son
environnement et les objets qui l’entourent. Par exemple, il apprend qu’une balle roule
contrairement au cube, que des objets sont durs et d’autres mous, il découvre la

3
permanence des objets. L’enfant expérimente autour de lui et acquiert des connaissances
nécessaires pour son développement futur. Il apprend également à maîtriser son univers.
Lors d’une activité ludique, il est libre de faire ce qu’il veut avec les objets, il est maître de
ses actions. Le jeu permet de développer son imagination, sa créativité. L’enfant peut
exprimer ses émotions à travers son jeu, qu’elles soient négatives ou positives. Les activités
ludiques permettent le développement social des enfants, ils apprennent à jouer entre eux
et à respecter les autres.

Le jeu développe donc de nombreuses habiletés : sensorielles, cognitives, motrices,


affectives et sociales.

Piaget (1978) décrit le développement du jeu en lien avec le développement de


l’intelligence. Un lien fort entre cognition et motricité se dégage de cette théorie. En effet,
dans le stade sensori-moteur, l’enfant comprend son environnement en agissant sur les
objets et acquiert des connaissances. Grâce à ses capacités motrices, l’enfant construit des
connaissances et acquiert ses premiers raisonnements.

Ainsi je me suis demandée si un enfant atteint de déficience motrice depuis la


naissance présentait un retard dans le développement du jeu.

En quoi une déficience motrice présente depuis la naissance limite l’enfant dans la
découverte de son environnement ? Est-ce que cette limitation d’expérimentation entraine
un retard dans le développement du jeu ?

Plusieurs études ont été menées entre les années 1980 et 2000 sur l’impact de la
déficience motrice sur le développement du jeu. Ces dernières ont démontré que les enfants
atteints de déficiences sensitivo-motrices suivent la même séquence de développement du
jeu que les enfants sans déficience (Vedeler, 1986; Simard, Ferland et O’Neill Gilbert, 1994),
mais leur activité ludique évolue plus lentement (Vedeler, 1986). La limitation physique peut
entrainer un retard de l’imitation (Simard, Ferland et O'Neill Gilbert ; 1994) et donc du
développement cognitif. Des retards sont notés dans différents domaines : social, affectif,
cognitif du fait de leur incapacité à découvrir leur environnement et à réaliser des
expériences de manière indépendante. Missuana et Pollock (1991), parlent d’un handicap
secondaire qui s’ajoute à la limitation initiale. Par ailleurs, des études ont montré que
l’attitude et l’intérêt face au jeu présentaient peu de différences entre des enfants dits

4
« normaux » et des enfants avec une déficience physique (Rome-Flanders et Ferland, 1997 ;
Dufour, Ferland et Gosselin, 1998 cités par F. Ferland, 2003).

Ainsi, certains enfants atteints de paralysie cérébrale peuvent présenter un retard


dans le développement de leur jeu. Les formes de paralysie cérébrale et l’importance des
atteintes sont très variées et donc les habiletés de jeu le sont aussi pour ces enfants.

3. Entretien exploratoire
J’ai réalisé un entretien téléphonique avec une ergothérapeute travaillant dans un
Institut d’Education Motrice auprès d’enfants paralysés cérébraux. Celle-ci guide les enfants
dans leurs expériences sensori-motrices car leur exploration de l’environnement a été
freinée par leur déficience motrice. Elle les met en situation de jeu et les amène à progresser
dans le développement du jeu. L’ergothérapeute propose également des adaptations pour
permettre l’accès au jeu. Elle cherche à éviter un sur-handicap lié au manque d’exploration.
Bien sûr, cette rééducation ne permet pas de compenser totalement les troubles mais
permet de favoriser l’organisation cérébrale en lien avec la plasticité du cerveau. D’après
l’ergothérapeute, ce travail doit se faire le plus tôt possible, dans l’idéal aux alentours de 3
mois en proposant des jeux à regarder, à attraper, par exemple. Elle va également jouer un
rôle important auprès des parents en les guidant sur les jeux qu’ils peuvent proposer à leur
enfant. Enfin elle m’a dit que sa démarche s’inspirait du modèle ludique de Francine Ferland
et qu’elle utilisait les deux bilans proposés.

J’ai ainsi découvert le modèle ludique de Francine Ferland qui est décrit dans son livre
Le modèle ludique : Le jeu, l'enfant ayant une déficience physique et l'ergothérapie (1er
édition en 1994, revue en 1998 puis en 2003).

Dans un premier temps, elle décrit l’importance du jeu chez les enfants « normaux », puis
chez les enfants ayant une déficience physique1. Elle constate que ces enfants,
particulièrement ceux atteints de paralysie cérébrale avec troubles associés, présentent un
retard dans certaines composantes du jeu : sociale, affective, cognitive et sensorielle.

1
D’après F. Ferland, 2003, p.40 « L’expression « déficience physique » désigne ici toute anomalie ou
modification des systèmes, principalement physiologique ou neurologique, amenant une perturbation de la
capacité à réaliser des activités considérées comme normales pour un enfant et susceptibles d'entraîner une
situation de handicap.»

5
Dans un second temps, elle resitue la place du jeu dans le suivi en ergothérapie. F. Ferland
constate alors que la plupart des ergothérapeutes utilisent le jeu afin de motiver l’enfant
dans sa prise en soin, mais celui-ci vise à améliorer des fonctions déficitaires du
développement (motrice, cognitive ou sensorielle). Le jeu est utilisé comme moyen pour
atteindre les objectifs de traitement. La vision globale de l’enfant dans son environnement
et dans ses habitudes de vie ne se retrouve pas dans ce genre de prises en soin ciblé sur les
troubles repérés.

Enfin, F. Ferland propose un modèle conceptuel où l’enfant est au centre de la prise en soin,
il choisit le jeu qu’il souhaite faire et l’ergothérapeute s’adapte à ce choix. Les objectifs
généraux du modèle sont de stimuler, développer et maintenir l’attitude ludique, l’intérêt
face aux jeux et les habiletés ludiques de l’enfant. Le jeu devient un moyen et un objectif, il
est perçu comme une activité de vie quotidienne à part entière pour l’enfant. Deux
évaluations sont proposées : l’une, sous forme d’observation de l’enfant, permet de situer
son niveau de développement, l’autre un questionnaire-entretien avec les parents pour
comprendre le niveau de socialisation et de communication familiale.

Cette évaluation multidimensionnelle permet de proposer des jeux qui correspondent au


niveau du développement réel de l’enfant. Il peut alors s’impliquer dans sa rééducation
d’autant plus si l’ergothérapeute adopte une attitude ludique. L’enfant pourra alors
transférer ce qu’il apprend en séance dans ses activités quotidiennes.

Ce modèle a été élaboré dans un premier temps pour les enfants d’âge préscolaire (de 0 à 6
ans) présentant une déficience physique. Des études parallèles ont permis de montrer que le
modèle était applicable auprès d’autres populations telles que les enfants présentant des
déficiences intellectuelles, présentant des retards de développement, ayant un problème de
santé mentale, et des adultes2.

J’ai retrouvé dans ce modèle plusieurs réponses à mes interrogations :

- la limitation motrice d’un enfant entraîne un retard dans le développement du jeu.

- la plupart des ergothérapeutes utilisent le jeu dans le seul but d’améliorer une fonction
précise de l’enfant (sensorielle, cognitive, motrice), mais il existe une utilisation plus
multidimensionnelle.

2
F. Ferland, 2003, pp. 97- 100.

6
- des évaluations du niveau de développement du jeu existent, et sont utilisées par des
ergothérapeutes.

- une attitude ludique est nécessaire pour qu’un jeu thérapeutique soit réellement une
situation ludique.

4. Question de recherche
Les observations que j’ai pu faire au cours de mes stages concernaient
l’accompagnement d’enfants d’âges scolaires, donc âgés de plus de 6 ans. Le modèle ludique
de Francine Ferland a été réalisé pour les enfants d’âge préscolaire car le développement du
jeu se déroule principalement de 0 à 6 ans. Peut-on appliquer ce modèle pour les enfants de
6 à 10 ans? D’autant plus que chez ces enfants présentant des troubles du développement et
de l’apprentissage, il est remarqué des attitudes ou des actons ludiques similaires à des
enfants d’âge préscolaire. Il me semble que pour les ergothérapeutes il est naturel de
stimuler les aptitudes ludiques des très jeunes enfants. Mais une fois scolarisé, cet objectif
est souvent abandonné au profit d’objectifs axés sur les compétences scolaires de l’enfant.

Au cours de mes recherches, j’ai également constaté que beaucoup d’articles et


d’études concernant le jeu en ergothérapie avaient été publiés par des auteurs américains
ou canadiens, et très peu par des auteurs français. Avons-nous la même utilisation du jeu en
ergothérapie en France ? De plus, lors de mes stages j’ai remarqué que les ergothérapeutes
n’utilisaient pas le modèle ludique de Francine Ferland. J’ai demandé aux ergothérapeutes
du SESSAD pour quelles raisons elles n’utilisaient pas ce modèle, elles m’ont répondu
qu’elles ne le connaissaient pas.

Pourquoi ce modèle est sous utilisé par les ergothérapeutes français ?

Les lectures précédentes, ainsi que les remarques des ergothérapeutes m’ont amenée à
établir des recherches, sur le jeu dans l’accompagnement des enfants paralysés cérébraux
en ergothérapie. Ainsi ma question de recherche et mon hypothèse sont :

En quoi « jouer » peut-il être un objectif lors de l’accompagnement en ergothérapie des


enfants paralysés cérébraux de 6 à 10 ans?

Aborder le jeu, en ergothérapie, comme activité de la vie quotidienne, permet de favoriser


l’autonomie et le bien-être de l’enfant.

7
2ème Partie : Partie Théorique

1. Le jeu chez l’enfant

a. Qu’est-ce que le jeu ?


Il est difficile de donner une définition au jeu. D’après L. Wittgenstein3, toutes les
activités que l’on appelle « jeu » n’ont pas un critère commun, mais elles sont toutes reliées
à l’une ou l’autre de différentes façons, par des « airs de famille ». En effet il existe tellement
de jeux différents qu’il est difficile de trouver une définition commune F. Ferland (2003,
p.33.) cite P. Chance (1979) «Le jeu, c'est comme l'amour ; tout le monde sait ce que c'est,
mais personne ne peut le définir».

De nombreux auteurs ont avancé des théories sur le jeu. Si pour certains, le jeu est un
moyen d’investir un surplus d’énergie (Spencer,1898 )4, pour d’autres, il représente une
activité de délassement (Lazarus, 1883 ; Patrick, 1916 )5. Enfin, des auteurs considèrent le
jeu comme le « travail de l’enfant » (Reilly, 1974 )6.

D’après Fazio et Parham (2008), le jeu est une « activité spontanée et organisée qui
procure du plaisir, du divertissement, de l’amusement ou de la diversion ». La notion de
plaisir paraît comme l’élément primordial du jeu. En effet, tous les auteurs semblent
d’accord sur ce point : le jeu n’existerait pas sans le plaisir. Bundy7 écrit « sans attitude
ludique (playfulness), toute activité, même de jeu, devient travail ». Le plaisir est lié à la
motivation intrinsèque ; l’enfant est motivé par l’expérience du jeu lui-même. Baldwin8 parle
alors de « jeu autotélique »,auto signifiant en grec « soi-même » et telos « le but ». On
comprend par là que l’enfant entreprend cette activité dans le seul but de l’activité en elle-
même.

Caillois, dans "Les jeux et les hommes, le masque et le vertige" (1967)9 reprend la définition
du jeu de Huizinga (1938), un auteur hollandais, et décrit qu’une activité de jeu doit être
libre et improductive.

3
Cité par L.D. Parham, 2008, p.6
4
Cité par L.D. Parham, 2008, p.7
5
Cité par L.D. Parham, 2008, p.8
6
Cité par F. Ferland, 2003, p. 49
7
Cité par F. Ferland, 2003, p. 33
8
Cité par L.D. Parham, 2008, p. 5 et par M. Metra, 2006
9
Cité par Bergeret, 1978, p. 9.

8
Lorsqu’un enfant s’adonne à une activité où il est libre d’agir, il ressentira alors du plaisir.
Cette activité n’a pas un but de rendement mais de réaliser l’activité en elle-même.

De nombreuses descriptions du développement du jeu ont été faites par différents


auteurs, nous allons voir dans un premier temps le développement du jeu en lien avec le
développement affectif selon D. W. Winnicott, puis dans un second temps, le
développement du jeu en lien avec le développement cognitif selon J. Piaget.

b. Le jeu d’après D.W. Winnicott


D.W. Winnicott (1975) apporte une approche psycho-dynamique du jeu : lien entre le
développement affectif et celui du jeu

Dès le début de la vie, l’enfant entretient une relation fusionnelle avec sa mère, il ne
se distingue pas de celle-ci. La mère « suffisamment bonne », décrite par D. W. Winnicott,
est celle qui répond aux besoins de l’enfant au bon moment, entretenant ainsi un sentiment
de toute-puissance, d’omnipotence*, chez le nourrisson. Celui-ci a l’illusion de créer la
réponse à ses besoins. Sans sa mère, il n’a pas le sentiment d’exister. Ainsi, se crée et se
développe la confiance de la fiabilité de la mère. Une mère fiable se retrouve dans la qualité
du holding (la manière de porter le bébé) et le handling (la manière dont elle prend soin de
son enfant).

Dans un second temps, le rôle de la mère est de créer un phénomène de désillusion.


Petit à petit, l’enfant est sevré de sa mère. Il doit apprendre à se distinguer de celle-ci. En
parallèle, l’objet transitionnel fait son apparition. Cet objet va aider l’enfant à dépasser l’état
de fusion avec sa mère et lui permettra de garder un sentiment d’existence malgré l’absence
de celle-ci. Cet objet peut, par exemple, être matérialisé par une couverture, un mouchoir
ou encore une peluche. Ce dernier va permettre à l’enfant de se structurer, de développer
son propre imaginaire, de se rassurer.

L’espace transitionnel est l’espace qui à la fois unit et sépare l’enfant de sa mère. Il ne
relève ni de la réalité intérieure ni de la réalité extérieure de l’enfant. Cet espace peut se
développer uniquement lorsque l’enfant a confiance en sa mère. C’est dans cet espace qu’il
va évoluer en jouant. Le nourrisson va découvrir le monde extérieur dans lequel il puise des
éléments pour les intégrer à son monde intérieur : « Dans cette aire l’enfant rassemble des

9
objets ou des phénomènes appartenant à la réalité extérieure et les utilise en les mettant au
service de ce qu’il a pu prélever de la réalité interne ou personnelle.»10. Cet espace va
permettre à l’enfant d’acquérir une autonomie personnelle.

C’est dans cet espace que l’enfant expérimente, crée. L’enfant croit créer le monde
alors qu’il ne fait que le découvrir.

Si l’environnement est bon, l’enfant devient capable d’être seul, ce qui témoigne
d’une maturité affective. Il joue avec la certitude que la personne en qui il a confiance est
présente dans sa réalité interne. L’enfant a compris que sa mère ne l’abandonnerait pas,
c’est donc dans un climat de confiance qu’il peut s’adonner au jeu. Il peut alors enrichir
progressivement son espace transitionnel avec ses propres expériences créatrices en lien
avec ses expériences culturelles.

Puis, l’aire de jeu de l’enfant et celle de la mère peuvent se chevaucher en y associant


du plaisir. L’enfant est capable de partager son jeu. Dans un premier temps avec sa mère
uniquement, puis petit à petit avec tout autre individu.

c. Le jeu d’après J. Piaget


J. Piaget (1976) fait le parallèle entre le développement ludique et l’intelligence. C’est à
travers les expériences que l’enfant réalise avec son corps et son environnement qu’il en
comprend le fonctionnement. Aussi, il distingue trois grandes étapes dans le développement
du jeu.

La première période est appelée la période sensori-motrice, elle se déroule de la


naissance jusqu’à deux ans environ. J. Piaget parle de jeux d’exercices. « […] tout est jeu
durant les premiers mois de l’existence à part […] la nutrition ou des émotions comme la peur
et la colère »11. L’enfant répète des conduites dans le seul but d’un plaisir fonctionnel. Il joue
d’abord avec son propre corps (babillement, balancement, agite ses mains), puis, avec les
objets et en découvre les propriétés et leurs caractéristiques. Il découvre son environnement
par les sens et le mouvement. A ce stade, il acquiert la permanence de l’objet*. Lors de ce
stade, l’enfant commence à comprendre la relation de causalité*.
Puis, arrive le stade pré-opératoire (de 2 à 6 ans). L’enfant entre dans cette phase
lorsqu’il est capable de représenter quelque chose d’absent par un signe ou un symbole.

10
D. W. Winnicott, Jeu et réalité, 1971, p.
11
J. Piaget, La formation du symbole chez l’enfant, 1978 p. 95.

10
Cette période est marquée par l’apparition du langage. Le jeu caractéristique est le jeu
symbolique ou le jeu de faire semblant. L’enfant est capable d’imaginer des scènes, des
objets ou des actions qui ne sont pas en train de se réaliser dans la réalité.
Enfin, entre l’âge de 7 à 11/12 ans, J. Piaget parle du stade opératoire. On parle alors
de jeux, de règles qui sont « des jeux de combinaisons sensori-motrices (courses, jet de billes
ou de balles, etc.) ou intellectuelles (cartes, échecs, etc.), avec compétition des individus (sans
quoi la règle serait inutile) et réglées soit par un code transmis de génération en génération
soit par accords momentanés. »12. Le stade opératoire est considéré comme une grande
période du développement social.
J. Piaget décrit également des jeux de construction sans les répertorier dans ces
périodes. Selon lui, les jeux de construction font la transition entre les trois autres formes de
jeu.

d. Illustration des apports du jeu


D’après Wallon (1995)13, « le jeu est l’activité principale de l’enfant, indispensable à
son développement psychologique, sensoriel, cognitif et affectif ».

En effet, les expériences réalisées au cours du jeu vont permettre à l’enfant de se


construire. On distingue plusieurs domaines qui sont développés par le jeu : cognitif, social,
moteur, affectif, sensoriel.

Ce propos est illustré par l’analyse d’activité d’une situation fictive de jeu libre chez
deux enfants, âgés d’environ 5 ans, qui ne présentent pas de trouble.

La motricité :

Les deux enfants observés jouent à la poupée. Ils disposent d’un grand espace, et leur
jeu requiert de nombreux déplacements : aller au lit de la poupée, se déplacer jusqu’à la
table à langer, puis faire un tour à la cuisinière. La marche est plus ou moins pressée (par
exemple s’il faut aller consoler la poupée qui pleure). Les deux enfants doivent adapter leur
marche et leur déplacement. Assis sur une chaise pour donner le biberon à la poupée,
debout devant la cuisinière, les enfants passent sans arrêt d’une position à l’autre qu’ils
doivent maintenir plus ou moins longtemps.

12
J. Piaget, 1978, p.151
13
Cité par J Pelicand,2006 Site INPES : http://www.inpes.sante.fr/slh/articles/385/08.htm

11
La préhension est également mise en jeu. Les enfants doivent porter la poupée par
une prise globale qui met en jeu tout le bras. Différentes prises sont utilisées pour tenir les
objets : une prise digito-palmaire cylindrique pour le biberon, une prise digito-palmaire en
crochet pour la brosse à cheveux. Pour coiffer et habiller la poupée, une certaine dextérité
est nécessaire. Les attaches des vêtements requièrent l’utilisation de la pince pouce-index.

D’autre part, les enfants exercent un contrôle oculomoteur sur leurs actions. Ils
l’utilisent pour se déplacer et déplacer les objets d’un endroit à un autre, pour réaliser des
gestes fins.

La sensorialité :

Dans un premier temps, la vision est tout de suite stimulée par les couleurs des
jouets : la robe fleurie de la poupée, les cheveux brillants de celle-ci, la table à langer de
toutes les couleurs. Tous ces objets de différentes tailles, couleurs, attirent l’œil et donnent
envie de les prendre en main. Dans un second temps, les autres sens sont également
sollicités. Le tactile permet de discriminer les différentes textures : plastique (le biberon, la
brosse à cheveux), tissus (la robe, le corps de la poupée), nylon (les cheveux), dur (les
extrémités de la poupée) ou mou (le tronc de la poupée). L’odorat est également stimulé.
Qui ne se souvient pas de l’odeur particulière que dégageait sa poupée, les vêtements, les
jouets en plastiques ? Les enfants font différents bruitages pour rendre leur jeu encore plus
réel : le bébé qui pleure, le bruit de la cocotte… tous ces bruits stimulent l’audition.

La cognition :

Les deux enfants jouent à un jeu d’imitation, un jeu symbolique (Piaget, 1978). Ils
tiennent compte des contraintes du réel et reproduisent les liens logiques qu’ils ont compris
de leur environnement à travers le jeu. Par exemple, s’ils font semblant de donner à boire à
l’enfant, ils vont faire semblant de remplir le verre au robinet avant de le lui donner, s’ils
donnent le bain, ils remplissent le bain d’eau, déshabillent la poupée, la mettent dedans, la
lavent, l’essuient et la rhabillent. Ils respectent l’ordre logique des étapes de réalisation des
actions, en fonction de leur niveau de raisonnement.

Ils apprennent à comprendre le fonctionnement des objets. Les étapes du jeu


sensori-moteur (Piaget, 1978) qui ont précédé ce jeu symbolique ont permis aux enfants de
bien connaître les propriétés des objets. Ainsi, ils peuvent détourner un objet de sa fonction

12
initiale pour l’introduire dans leur jeu. Par exemple, ils peuvent utiliser le couvercle rond
d’une boîte pour figurer un volant de voiture, ou une assiette, utiliser un stylo pour
mélanger la purée de l’enfant comme s’il s’agissait d’une cuillère, prendre des cailloux pour
faire comme s’il s’agissait de nourriture. Dans le stade sensori-moteur, les enfants ont acquis
la notion de cause à effet (Piaget, 1978) et peuvent ainsi l’expérimenter. Les capacités
d’adaptation sont également impliquées : si l’un des enfants introduit le fait que la poupée
pleure parce qu’elle a froid, l’autre enfant doit s’y adapter et réagir en conséquence. De
même, les enfants utilisent la permanence de l’objet (Piaget, 1978). Par exemple, si l’un des
enfants fait semblant de mettre un plat au four, l’autre ou lui-même fera semblant que celui-
ci s’y trouve encore quand il ouvre le four.

L’affectif :

Les enfants ont passé les étapes du développement psycho-affectif de D.W.


Winnicott (1975), ils sont dans un climat de confiance et peuvent jouer sans la présence de
la mère et partager leur aire de jeu. Les enfants ont un sentiment de maîtrise, ce sont eux
qui agissent sur les objets et qui décident de leurs actions. Ils découvrent le plaisir d’agir. De
plus, les enfants peuvent expérimenter différents sentiments et émotions. Par exemple, ils
peuvent exprimer de la colère envers la poupée, faire pleurer cette dernière, exprimer leur
joie du premier mot de « leur enfant ».

Le social :

Dans ce jeu, les enfants jouent à deux. Ils partagent alors leur espace de jeu. Ils doivent
apprendre à s’adapter à l’autre et à interagir ensemble. Les enfants font découvrent et
expérimentent différents rôles sociaux : dans ce jeu ils se placent en tant que parents.

2. La paralysie cérébrale et le jeu

a. Définition de la Paralysie Cérébrale


La paralysie cérébrale vient du terme anglo-saxon « Cerebral Palsy ». En 2007,
Rosenbaum et ses collaborateurs publièrent une définition : « Paralysie Cérébrale (PC) est un
terme qui désigne un groupe de troubles permanents du développement du mouvement et
de la posture, responsables de limitations d'activité, imputables à des évènements ou
atteintes non progressives survenus sur le cerveau en développement du fœtus ou du
nourrisson. Les troubles moteurs de la paralysie cérébrale sont souvent accompagnés de

13
troubles sensoriels, perceptifs, cognitifs, de la communication et du comportement, par une
épilepsie et par des problèmes musculo-squelettiques secondaires »14.

En France, le terme paralysie cérébrale regroupe l’Infirmité motrice cérébrale (IMC)


et l’Infirmité Motrice d’Origine Cérébrale (IMOC). Pour G. Tardieu15, l’IMC est un trouble
moteur prédominant et non évolutif dû à une lésion cérébrale suite à lésion prénatale (avant
la naissance), périnatale (pendant l’accouchement) ou postnatale (après la naissance)
précoce, pouvant s’accompagner d’atteintes sensorielles et d’atteintes partielles des
fonctions supérieures à l’exception d’une déficience intellectuelle. L’IMOC fait alors
référence aux IMC présentant une déficience intellectuelle.

Nous parlons de paralysie cérébrale lorsque les atteintes cérébrales surviennent


avant un certain âge. En France, l’âge limite est de deux ans. Cet âge varie en fonction des
pays.

b. Epidémiologie
En France, environ 2 enfants sur 1000 sont touchés par la paralysie cérébrale, soit 1500
enfants chaque année (C. Cans, 2005).

La paralysie cérébrale est la première cause de déficience motrice chez les enfants.

Depuis 1990, Le taux de prévalence* a tendance à augmenter principalement chez les


enfants modérément prématurés (32-36 semaines d’aménorrhées) et les grands prématurés
(avant 32 semaines d’aménorrhées). Cette augmentation s’explique par les progrès de la
prise en soin néonatale (des nouveau-nés) qui ont permis de sauver des grands prématurés
qui présentaient un faible poids à la naissance.

c. Etiologie
 Anténatale

Les causes anténatales représentent un quart des cas (Bérard, 2008) de paralysie
cérébrale. Parmi elles nous retrouvons les cas de malformation cérébrale, d’accident
vasculaire cérébral, d’infection ou d’intoxication de la mère (cytomégalovirus, rubéole,
toxoplasmose).

14
Cité par la Fondation Motrice.
15
Cité par C. Cans, 2005, p. 52

14
 Périnatale

36% des cas de paralysie cérébrale font suite à une cause périnatale. Ces causes peuvent
être en lien avec une hypotonie de l'enfant secondaire à une souffrance fœtale dans le cadre
d'un accouchement difficile. D’autres causes de la paralysie cérébrale peuvent survenir
autour de la naissance telles que l’ictère nucléaire* et un trouble circulatoire du fœtus
provoqué par une mauvaise position du cordon ombilical.

 Postnatale

Les causes après la naissance représentent moins de 10% des cas. Les complications
postnatales donnant lieu à une paralysie cérébrale sont liées à une baisse ou un arrêt de
l’irrigation du cerveau suite à une infection (séquelle de méningite, encéphalopathie liée au
virus du SIDA), ou après un traumatisme physique (accident de la voie publique, syndrome
de Silverman* entrainant un traumatisme crânien) ou encore suite à une tumeur cérébrale,
des convulsions, un arrêt cardiaque, une maladie métabolique.

Enfin, un quart des cas de paralysie cérébrale ont une étiologie inconnue.

d. Les différentes formes


Il existe différentes formes de paralysie cérébrale en fonction de la localisation du
déficit moteur. On parle de monoplégie pour l’atteinte d’un seul membre, d’hémiplégie
lorsque l’atteinte touche un hémicorps, de diplégie pour une atteinte à deux membres,
d’une triplégie pour l’atteinte de trois membres et enfin la quadriplégie est l’atteinte des
quatre membres.

A l'atteinte motrice est associé une atteinte neurologique telle que la spasticité*, la
dyskinésie* (athétose*, choréique* ou choréo-athétose*) et l’ataxie*.

e. Troubles associés
En plus des troubles de la posture et du mouvement, les enfants paralysés cérébraux
présentent très souvent des troubles associés : sensoriels, neuropsychologiques,
comportementaux, langagiers, relatifs à l’épilepsie ou encore à une déficience intellectuelle.

 Troubles sensoriels

Les troubles visuels retrouvés chez les enfants paralysés cérébraux regroupent : les
déficiences visuelles pouvant aller jusqu’à la cécité (acuité visuelle >0,05), des troubles de la
15
poursuite oculaire, des nystagmus ainsi que des strabismes. Ces derniers sont très fréquents
chez ces enfants.

Au niveau auditif, les troubles retrouvés sont la surdité partielle ou complète, des
infections au niveau de l’oreille moyenne, et également des difficultés de perception.

 Troubles neuropsychologiques

Les troubles neuropsychologiques sont des troubles cognitifs spécifiques : un domaine


de la cognition est touché en laissant intacts les autres. Les troubles neuropsychologiques
suivants seront décrits selon M. Mazeau (2005)

 Troubles praxiques : On observe plusieurs formes de troubles praxiques chez les


enfants paralysés cérébraux : la dyspraxie constructive non visuo-spatiale, la
dyspraxie constructive visuo-spatiale, la dyspraxie de l’habillage, la dyspraxie
gestuelle, et enfin la dyspraxie bucco-faciale.
 Troubles gnosiques : On peut retrouver des troubles gnosiques visuels, auditifs et
tactiles.
 Troubles du langage oral : La plupart du temps, les enfants paralysés cérébraux
présentent des capacités de compréhension supérieures à leurs capacités
d’expression. On parle de dysphasie ou encore de dysarthrie.
 Troubles attentionnels et des fonctions exécutives : Les troubles de l’attention
peuvent entrainer des troubles mnésiques car l’information sera partiellement
encodée.
 Troubles mnésiques : La mémoire de travail est en lien avec l’attention. Cette
mémoire est donc souvent altérée. Elle permet de conserver des informations
quelques secondes et de les associer à des données déjà connues.

 Les troubles spécifiques de l’apprentissage

Les troubles spécifiques de l’apprentissage sont des symptômes résultant des


troubles cognitifs qui se révèlent le plus souvent lors de la scolarisation de l’enfant. On
retrouve la dyslexie, la dysorthographie, la dyscalculie et la dysgraphie.

16
 Epilepsie

Tous les enfants atteints de paralysie cérébrale sont susceptibles de présenter une
épilepsie du fait des lésions cérébrales. 30 à 50% des enfants présentant une déficience
motrice cérébrale souffrent d’épilepsie. Des crises répétées peuvent entrainer des lésions
irréversibles au cerveau.

 Troubles vésico-sphinctériens

Ces troubles sont divers : fuite, incontinence, trouble de la miction, constipation, besoins
impérieux.

 Troubles du comportement

Les troubles comportementaux que nous pouvons rencontrer chez les enfants atteints de
paralysie cérébrale sont très variés : d’une simple irritabilité à des troubles psychiatriques
sévères.

 Déficience intellectuelle

La déficience intellectuelle n’est pas toujours présente chez ces enfants. Un tiers des
enfants paralysés cérébraux ont un quotient intellectuel (QI) inférieur à 50. Cependant,
certains enfants présentent un QI similaire aux autres enfants de leurs âges voire supérieur.

f. Le jeu chez l’enfant atteint de paralysie cérébrale


Les formes de paralysie cérébrale étant variées, les aptitudes et les attitudes ludiques de
ces enfants le sont également. Nous allons voir, dans le tableau suivant, comment les
troubles peuvent entraîner une situation de handicap lors d’une activité ludique. Les impacts
sont très variés ils sont donc présentés à titre d’exemples et ne sont pas exhaustifs ni
généralisables.

17
Troubles Impact sur l’activité ludique
Moteur Difficulté pour manipuler les jouets
Préhension Difficulté pour atteindre les jouets
Déplacement Difficulté pour coordonner ses deux mains
Mouvement choréique, athétosique, Difficulté pour réaliser un contrôle
spastique, ataxique oculomoteur
Sensoriel Difficulté à attraper les objets
Auditif Difficulté à manipuler les objets
Visuel Difficulté à discriminer les différentes
Tactile textures d’un jouet
Peut-être attiré ou éviter certains jouets.
Ex : si l’enfant présente des troubles visuels,
il peut être attiré par des jouets brillants. Si
ce sont des troubles auditifs, il ne sera pas
intéressé par les jeux sonores. Ou encore si
les troubles sont tactiles, il peut être attiré
par les objets rugueux.
Cognitif Désintérêt face aux jeux de construction,
Dyspraxie les dessins, ou encore les histoires imagées.
Agnosie visuelle Difficulté à poursuivre une activité de jeu
Agnosie auditive Difficulté à suivre les étapes d’un jeu, par
Trouble de l’attention exemple lors de constructions.
Trouble des fonctions exécutives Difficulté à se souvenir des consignes
Troubles mnésiques Difficulté à entrer en communication avec
Trouble langage oral ses pairs, et difficultés à exprimer ses
envies et ses pensées.
Intellectuel Difficulté à entrer dans le jeu symbolique
ou fantastique.
Difficulté à comprendre le fonctionnement
des objets
Difficulté pour résoudre les problèmes

En plus des troubles liés à la maladie, les enfants sont confrontés à des obstacles
provenant de l’environnement physique et social. En effet, la plupart du temps
l’environnement matériel n’est pas adapté pour leur permettre une indépendance, ils ne

18
peuvent pas accéder à tous les espaces et matériels de jeux qu’ils souhaitent sans demander
de l’aide à une tierce personne. Les adultes sont alors souvent dans la surprotection et ne
laissent pas à l’enfant le temps de découvrir et de faire ses propres expériences. De plus, ces
enfants ont souvent des difficultés pour entrer en interaction avec leurs pairs à cause de
leurs limitations motrices mais également par le rejet du groupe. Des études16 ont
démontré que les enfants avec une déficience physique présentaient des capacités sociales
plus pauvres que les autres enfants de leur âge.

A cause de leurs limitations, les enfants atteints de paralysie cérébrale vont alors
moins faire l’expérience de la maîtrise de soi et de son environnement. Ils sont moins
acteurs de leur jeu et le sens du contrôle est alors moins expérimenté. Ils auront également
moins de spontanéité à réaliser telle ou telle activité et leur motivation intrinsèque en sera
amoindrie.

Ainsi, les activités ludiques de ces enfants peuvent se retrouver limitées par leurs
déficiences. Pourtant, le jeu est une activité primordiale pour les enfants. Une amélioration
de la participation de l’enfant à son activité principale peut être recherchée en ergothérapie.

3. Le jeu en ergothérapie

a. Les concepts clés de l’ergothérapie


Avant de commencer la présentation de son modèle et afin de justifier sa création, F.
Ferland rappelle des principes clés de l’ergothérapie. Il semble intéressant de les aborder
afin de mieux comprendre la philosophie du modèle proposé.

La philosophie de l’ergothérapie se base sur l’interaction de la personne, son


environnement et ses occupations (S. Meyer, 2007). Cependant le terme occupation ne
convient pas. Celui-ci provient de la traduction littérale de l’anglais « occupation », défini par
G. Kielhofner17 « Human Occpuation [is] : the doing of work, play or activities of daily living
within a temporal, physical, and sociocultural context that characterizes much of human
life ».En français, les notions d’activité signifiante et significative sont abordées : la première

16
Missiuana et Pollock (1991) rapportent des études (Clarke, 1977/1982; Philip & Duckworth, 1982)
17
Cité par M-C. Morel, 2009, p.69

19
signifie qu’elle a un sens pour la personne, la seconde qu’elle a un sens pour la société
(Leontiev18).

Les êtres humains développent des capacités à travers leurs activités signifiantes et
significatives qui permettent de donner un sens à leur vie. Ainsi les ergothérapeutes vont
aider les personnes en situation de handicap à réaliser ou à retrouver leurs activités dans le
but d’une meilleure qualité de vie.

L’activité en ergothérapie peut être un moyen et un objectif thérapeutique : l’activité


permet d’améliorer des fonctions déficitaires, mais le but final est de pouvoir réaliser
l’activité de manière autonome et indépendante.

L’autonomie est définie par la capacité à « se gouverner selon ses propres lois »
(Adant, 1999). Et d’après le petit Robert 1996, c’est la capacité « […] autogérer sa vie,
déterminer librement les règles de son action» (Le Petit Robert19, 1996).

L’indépendance est définie par la capacité à réaliser une activité sans avoir l’aide
d’une tierce personne.

Par ailleurs, l’ergothérapeute doit avoir une vision globale de l’individu. Il ne doit pas
se focaliser sur une fonction précise mais bien prendre l’ensemble de l’individu en
considération. F. Ferland parle d’une vision holistique, où nous devons prendre en compte
toutes les composantes de l’individu : sociale, affective, motrice, cognitive, sensorielle et
environnementale.

Enfin, l’ergothérapeute contribue au bien-être de l’individu. « Pour les


ergothérapeutes, permettre à une personne en situation de handicap de réaliser des activités
qui sont importantes pour elle dans son environnement peut être thérapeutique et améliorer
la gestion du quotidien, le bien-être et la qualité de vie de cette personne et de son
entourage. » (M-C. Morel-Bracq, 2006).

b. Le jeu dans le modèle ludique de F. Ferland


F. Ferland (2003), docteur en ergothérapie canadienne, propose un modèle où
l’enfant est placé au cœur de l’accompagnement ergothérapique en utilisant le jeu.

18
Cité par M-C. Morel, 2009, p.69
19
Cité par F. Ferland 2003, p .80

20
Le jeu, activité signifiante et significative de l’enfant, constitue alors l’outil privilégié
des ergothérapeutes auprès des enfants. Cependant, une étude de F. Ferland montre que le
jeu est souvent utilisé comme un moyen de motivation inséré ou non dans une atmosphère
ludique, afin d’améliorer des troubles spécifiques. Elle apporte ainsi une nouvelle vision du
jeu. Comme nous avons pu le voir précédemment le jeu permet d’aborder l’enfant dans sa
globalité, de façon holistique. L’auteure rapporte des études (Diamond, 2000 ; Magnuson,
2000) qui ont démontré que les différents systèmes de l’enfant se développent ensemble.
Elle fait également part de l’étude de Sparling (1984) qui a montré que des enfants paralysés
cérébraux ayant suivi plusieurs séances d’activités créatrices et de jeu dramatique, ont
présenté des améliorations dans plusieurs sphères de leur développement. Ainsi, F. Ferland
propose une utilisation du jeu permettant une approche globale de l’enfant et non ciblée sur
une fonction précise.

Selon F. Ferland (2003), le jeu est une « Attitude subjective où plaisir, intérêt et
spontanéité se côtoient ; cette attitude se traduit par une conduite choisie librement et pour
laquelle aucun rendement spécifique n’est attendu. Cette conduite se manifeste dans un
environnement donné, comprenant tant des objets que des partenaires. » Dans le jeu se
retrouvent trois composantes : l’action, l’attitude et l’intérêt. L’attitude ludique est
primordiale dans le jeu, c’est l’essence même de ce dernier. Elle va générer l’action ludique.
Le plaisir ressenti dans le jeu pousse l’enfant à agir, à prendre des initiatives, à relever des
défis. Ainsi l’enfant est mis en action par sa propre volonté, il utilise les composantes
sensorielles, motrices, perceptives et cognitives. L’intérêt pour le jeu est donc nécessaire
pour faire naître l’envie d’agir, de découvrir et également maintenir l’attitude ludique.

D’après ce modèle, le jeu est une voie vers l’autonomie de l’enfant. En effet, lors du
jeu, l’enfant doit choisir ce qu’il veut faire, il doit évaluer une situation, il est amené à faire
des choix et à prendre des décisions. Cette notion d’autonomisation est en lien avec le
développement de la capacité d’agir qui est divisé en deux :

- la capacité d’action : L’enfant doit être capable d’accomplir une activité comme il se doit.
Ceci passe par le développement des capacités motrices, sensorielles, cognitives…

- la capacité d’adaptation : l’enfant doit être capable de s’ajuster ou d’ajuster son


environnement afin qu’il puisse réaliser l’activité. Il doit alors trouver de nouvelles stratégies
d’actions, une nouvelle posture ou encore un matériel qui serait susceptible de l’aider. Dans

21
la capacité d’adaptation se retrouve également la capacité de réagir devant une impossibilité
de réaliser l’activité en demandant de l’aide par exemple.

Ainsi, l’autonomie de l’enfant ne se développe pas uniquement par l’amélioration des


fonctions déficitaires mais également par la capacité à prendre des initiatives, à s’adapter
aux situations problèmes.

De plus, l’enfant ressentira du plaisir à agir sur son environnement et contribuera au


développement de son bien-être.

Les objectifs généraux du modèle sont de stimuler, développer et maintenir l’attitude


ludique, l’intérêt du jeu et les habiletés ludiques de l’enfant. Ainsi l’ergothérapeute lors de
leur séance, accompagne le développement de ces trois caractéristiques en proposant des
situations ludiques. Le professionnel doit favoriser la prise d’initiative de l’enfant, tout en
l’incitant à faire de nouvelles découvertes. L’attitude ludique doit être présente afin que
l’enfant ait envie d’agir.

22
3ème partie : Partie pratique
Je rappelle ma question de recherche et de mon hypothèse.

En quoi « jouer » peut-il être un objectif lors de l’accompagnement en ergothérapie des


enfants paralysés cérébraux de 6 à 10 ans?

Aborder le jeu, en ergothérapie, comme activité de la vie quotidienne, permet de favoriser


l’autonomie et le bien-être de l’enfant.

I. Méthodologie

1. Choix des outils d’enquête


Afin de répondre à ma question de recherche, et de confirmer ou d’infirmer mon
hypothèse, j’ai eu recours à deux outils : le questionnaire et l’entretien.

Ma question de recherche a évolué au cours de l’année. Sa première version appelait


à un questionnaire. En effet, il était intéressant d’avoir une vue d’ensemble sur les
différentes pratiques des ergothérapeutes autour du jeu auprès des enfants atteints de
paralysie cérébrale. Il était alors intéressant de recueillir des informations quantitatives.
Cependant, les réponses obtenues n’étaient pas assez claires du fait que le questionnaire
comporte certains biais et du fait de la complexité du sujet.

Ainsi, j’ai modifié ma question de recherche. Je souhaitais alors obtenir des informations
qualitatives sur la pratique des ergothérapeutes et approfondir des points précis qui
n’avaient pas été abordés dans le questionnaire. J’ai donc réalisé trois entretiens semi-
directifs*.

2. Choix de la population interrogée


Ma question de recherche s’appuie sur la pratique des ergothérapeutes. Je me suis donc
adressée uniquement à ces derniers.

a. Le questionnaire
J’ai choisi d’envoyer aux structures recevant des enfants souffrants d’un handicap
moteur. La population concernée par mon étude étant les enfants paralysés cérébraux âgés
entre 6 et 10 ans, j’ai adressé mon questionnaire à différentes structures : Service

23
d'Education et de Soin Spécialisé à Domicile (SESSAD), Centre d'Action Médico-Social
Précoce (CAMSP), Institut d'Education Motrice (IEM), service de rééducation pédiatrique.

Afin de faciliter le remplissage de mon questionnaire, j’ai utilisé « Google drive » où mon
questionnaire a été mis en ligne.

Sur 93 questionnaires envoyés, j’ai obtenu 26 réponses. Certaines structures m’ont


répondu ne pas recevoir actuellement d’enfant de cette tranche d’âge.

b. L’entretien
J’ai réalisé trois entretiens avec des ergothérapeutes travaillant dans des structures
accueillant des enfants atteints de paralysie cérébrale âgés entre 6 et 10 ans. L’Ergo 1
travaillant dans un centre de rééducation pédiatrique, l’Ergo 2 dans un Institut d’Education
Motrice et l’Ergo 3 dans un autre centre de rééducation pédiatrique. Les entretiens sont
retranscrits en annexe. L’entretien avec l’Ergo 1 est en annexe 3, l’Ergo 2 en annexe 4, et
enfin l’Ergo 3 en annexe 5.

3. Elaboration des outils

a. Questionnaire
Mon questionnaire débute par une présentation sommaire de mon sujet, en expliquant
les critères d’inclusions : l’enquête s’adresse à des ergothérapeutes travaillant avec des
enfants paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10 ans.

Le questionnaire est composé de 15 questions. Une première partie, 3 questions, sert à


présenter la personne interrogée. Puis le sujet principal est abordé : le jeu. J’ai alterné les
questions ouvertes et les questions fermées. Les questions ouvertes sont utiles afin de ne
pas induire la réponse des ergothérapeutes et les laisser libres de s’exprimer. Les questions
fermées sont plus rapides à analyser et à remplir. Un questionnaire commenté a été placé en
annexe 2, justifiant les questions posées.

b. Entretiens
Afin de mener correctement mes entretiens, j’ai élaboré un guide d’entretien : une
première partie portant sur une présentation générale de la personne interrogée, puis six
questions sur la pratique des ergothérapeutes. J’ai établi une première grille d’entretien que
j’ai été amenée à améliorer suite au premier échange.

24
II. Analyse des données
Afin d’analyser les différentes données recueillies, j’ai dans un premier temps
procédé à une analyse à plat des deux outils. Pour les questionnaires, j’ai résumé question
par question les réponses des 26 ergothérapeutes. Pour les entretiens, j’ai constitué
plusieurs thèmes que j’ai abordés avec les ergothérapeutes et, j’ai réalisé un tableau
indiquant les réponses de chaque ergothérapeute en fonction du thème. Enfin, j’ai procédé à
une analyse croisée des données recueillies dans les questionnaires et dans les entretiens.

1. Présentation des ergothérapeutes interrogés


 Questionnaires

Les ergothérapeutes interrogés ont reçu leur diplôme entre 1978 et 2012. La médiane
est à 2000,5. Ainsi il y a autant d’ergothérapeutes ayant reçu leur diplôme avant et après
2000. Concernant, leur nombre d’années d’expérience en pédiatrie plus de 77% travaillent
depuis plus de 5 ans dans ce domaine.

Plus de 20 ans

Entre 11 et 20 ans

Entre 5 et 10 ans Série1

Moins de 5 ans

0 2 4 6 8 10

Expérience en pédiatrie

IME Type de structure IME : Institut médico-éducatif


4% EEAP
CAMSP 3% IEM : Institut d’éducation motrice
4%
SESSAD SESSAD : Service d’éducation spécialisé
Centre de
17% et de soin à domicile
rééducation
10%
CAMSP : Centre d’action médico-social
précoce
IEM
62% EEAP : Etablissement pour enfants et
adolescents polyhandicapés

Ce graphique montre que différentes structures ont été contactées. La majorité des
ergothérapeutes exercent dans des Instituts d’Educations Motrices.
25
 Entretiens

J’appellerai les trois ergothérapeutes interrogés : Ergo 1, Ergo 2 et Ergo 3.

Deux ergothérapeutes travaillent dans deux centres de rééducation pédiatrique différents :


Ergo 1 et Ergo 3. Cependant lors de l’entretien, Ergo 3 m’a indiqué recevoir beaucoup moins
d’enfants paralysés cérébraux qu’il y a quelques années. Ergo 2 travaille dans un Institut
d’Education Motrice.

Tous les trois sont diplômés depuis au moins dix ans.

Ergo 1 Ergo 2 Ergo 3


Type de structure Centre de rééducation IEM Centre de rééducation
pédiatrique pédiatrique
Année de diplôme 1995, depuis 19 ans 2004, depuis 10 ans 1985, depuis 29 ans
Expérience en pédiatrie 12 ans 10 ans 27 ans

Présentation des ergothérapeutes

Du fait que les milieux d’exercices soient différents, on peut supposer que la population
des enfants paralysés cérébraux l’est également. Cette variabilité peut entraîner des
différences quant aux objectifs et priorités posés par les ergothérapeutes.

2. Utilisation du jeu en séance


 Questionnaires

Tous les ergothérapeutes interrogés ont répondu utiliser le jeu lors de leurs séances
avec les enfants paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10 ans.

 Entretiens

Les trois ergothérapeutes ont répondu utiliser le jeu en ergothérapie. Cependant,


Ergo 3 a mentionné qu’il utilisait de moins en moins le jeu du fait d’un changement de
population, il l’utilise mais pas uniquement.

Le jeu est donc bien un outil fréquemment employé auprès de ces enfants, par les
ergothérapeutes interrogés.

26
3. Retard dans le développement du jeu
 Questionnaires

Est-ce que vous pensez que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans
le développement de leur jeu ? Expliciter.

L'ensemble des ergothérapeutes interrogés pense que les enfants paralysés


cérébraux sont susceptibles de présenter un retard dans le développement de leur jeu.

La question sur l’explication de leur réponse n’a pas été comprise de la même façon
par tous les ergothérapeutes. 69,2% ont expliqué les raisons du retard de développement du
jeu. 23,1% ont décrit le jeu des enfants paralysés cérébraux. 3,8 % (soit un ergothérapeute)
indique que le retard du jeu ne retenait pas son attention, et un autre ergothérapeute ne
répond pas à la question et explique ses objectifs avec le jeu.

Les raisons du retard dans le développement du jeu : Quatorze ergothérapeutes sur


dix-huit expliquent le retard du développement du jeu de l’enfant par un manque de
manipulation à cause du déficit moteur. Douze ergothérapeutes ajoutent que les troubles
associés sont aussi un obstacle au développement du jeu. Un ergothérapeute explique ce
retard à cause d’un problème d’installation et d’un manque de jeu adapté.

Description du jeu : Quatre ergothérapeutes sur six décrivent que les enfants
présentent un retard dans l’imitation et n’ont pas accès aux jeux symboliques. Deux
ergothérapeutes sur six font remarquer que les enfants ont peu d’autonomie dans le jeu et
ne jouent pas en l’absence de l’adulte. Deux ergothérapeutes rapportent que les enfants ne
sont pas attirés par les jeux qui les mettent en difficulté. Enfin un ergothérapeute décrit un
comportement de jeu pauvre et peu varié chez ces enfants.

 Entretiens

Lors de l’entretien, je n’ai pas posé directement de question sur le retard dans le
développement du jeu, sauf à l’Ergo 3. Cependant certains passages de leurs discours
montrent qu’ils pensent tous trois que certains enfants paralysés cérébraux présentent un
retard dans le développement de leur jeu. Ergo 1 dit : « […] on a des enfants qui ne savent
pas jouer, qui ne font que manipuler parce qu’au niveau intellectuel ce sont des handicaps
beaucoup plus lourds. ». Ergo 2 dit : « […] ils peuvent aussi, du fait d’avoir beaucoup été
dirigés, avoir plus de difficulté à élaborer, eux, leur propre imaginaire. ». Enfin, Ergo 3 dit :

27
« Forcément, vu qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’expérimenter comme les autres… », « Il est
forcément en décalage ! ».

Je peux donc conclure que tous les ergothérapeutes interrogés pensent que certains
enfants paralysés cérébraux ont un retard dans le développement de leur jeu.

4. Evaluation du niveau de jeu de l’enfant


 Questionnaires

Evaluez-vous le niveau de développement du jeu de l'enfant ?

50% des ergothérapeutes ont répondu évaluer le niveau de jeu de l’enfant, et 50% ne
l’évaluent pas.

Si oui, par quel moyen évaluez-vous le développement du jeu?

Les modes d’évaluations utilisées :

- Treize ergothérapeutes évaluent le niveau de jeu l’enfant. Certains utilisent plusieurs


moyens différents. J’ai pu dégager sept méthodes différentes pour évaluer le niveau de jeu
de l’enfant.

- Huit ergothérapeutes sur treize utilisent l’observation en séance, à l’école ou au domicile.

- Cinq s’appuient sur des entretiens et des échanges avec les parents afin de connaître les
aptitudes ludiques de l’enfant dans sa vie quotidienne

- Quatre s’adressent aux autres professionnels de la structure, et échangent leurs


observations.

- Trois utilisent le modèle ludique de F. Ferland qui comporte un entretien avec les parents
et une grille d’observation de l’action et de l’attitude ludique de l’enfant.

- Neuf ergothérapeutes disent évaluer le jeu grâce à des bilans non spécifiques au jeu :
NEPSY, Frostig, Batterie Talbot, MIF Môme, Brunet Lézine. (Voir annexe).

28
Si non, pourquoi?

Pourquoi la moitié des ergothérapeutes n’évalue pas le niveau de jeu de l’enfant ?

Treize ergothérapeutes n’évaluent pas le développement du jeu de l’enfant. Cependant,


quatre ergothérapeutes observent le jeu en séance ou questionnent les parents, mais n’ont
pas estimé qu’il s’agissait d’une évaluation, et informent ne pas connaître d’évaluation
validée du jeu. Deux ergothérapeutes ne souhaitent pas « classer » l’enfant à un niveau mais
l’accompagner là où il en est. Sept ergothérapeutes indiquent que leur objectif n’est pas
d’accompagner l’enfant dans le développement du jeu, objectif étant suivi par d’autres
professionnels de leur structure. La priorité de leur suivi s’axe sur des objectifs de
rééducation fonctionnelle.

 Entretiens

Je n’ai pas abordé particulièrement cette question lors des entretiens. Cependant,
Ergo 2 m’a indiqué qu’il procédait à une évaluation du jeu à l’aide du modèle ludique de F.
Ferland notamment lorsqu’il doit conseiller les parents sur les jeux à choisir.

Peu d’ergothérapeutes utilisent et connaissent les évaluations du niveau de jeu


l’enfant. La plupart procèdent uniquement par l’observation et l’échange avec les parents.
Certains pensent évaluer par l’observation, d’autres estiment que ce n’est pas une
évaluation.

5. Moyens pour proposer un jeu adapté au niveau de l’enfant


 Questionnaires

Si vous pensez que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans le
développement de leur jeu, comment adaptez-vous le jeu à l'enfant?

L’ensemble des ergothérapeutes interrogés a répondu à cette question. J’ai pu dégager huit
idées que j’ai classées dans ce graphique.

29
Moyens dégagés par les ergothérapeutes pour proposer un jeu adapté à l’enfant

18
16
14
12
10
8
6
4
2
0

Ce graphique montre que la plupart des ergothérapeutes adaptent le matériel de jeu aux
difficultés de l’enfant : informatique, contacteur, adaptation des pions, support visuel… En
deuxième position arrive la simplification des règles. Les rééducateurs adaptent la consigne
du jeu afin de le rendre plus accessible aux difficultés cognitives et/ou motrices de l’enfant.
Ensuite, certains proposent des jeux en fonctions de l’âge de développement du jeu mais
une minorité stipule proposer des jeux en fonctions de l’âge chronologique de l’enfant. Ces
derniers indiquent que les enfants peuvent se sentir lésés de jouer à des jeux pour enfants
plus jeunes. Sept ergothérapeutes s’appuient sur l’intérêt de l’enfant, c’est ce dernier qui
choisit le jeu qu’il souhaite réaliser. L’installation a été mentionnée 4 fois par les
professionnels, qu’il s’agisse de l’installation à la maison ou lors de la séance d’ergothérapie.
Enfin un ergothérapeute indique qu’il questionne les parents sur les jeux utilisés par l’enfant
dans sa vie quotidienne afin de se rendre compte des centres d’intérêt et du niveau de
l’enfant.

 Entretiens
Les trois ergothérapeutes ont indiqué qu’ils adaptent le matériel de jeu et donnent
des conseils aux parents. Les Ergo 1 et 2 ont parlé de conseils concernant le choix du jeu
lorsque les parents veulent offrir un cadeau. Alors que l’Ergo 3 donne des conseils
concernant l’adaptation des jeux. Afin de faciliter la compréhension de la consigne, Ergo 1

30
utilise des signes de la langue des signes ou autre (les signes Borel)20, et insiste sur
l’articulation des mots.

En premier lieu, les ergothérapeutes interrogés proposent des adaptations du


matériel face aux limitations de l’enfant. Puis en second lieu, les professionnels proposent
des stratégies de compensation aux limitations cognitives et/ou motrices.

6. Utilisation du jeu en séance d’ergothérapie


 Questionnaires

Dans quels objectifs utilisez-vous le jeu auprès de ces enfants?

J’ai pu dégager quatre notions principales. Tous les ergothérapeutes ayant répondu à
mon questionnaire utilisent le jeu comme un moyen de rééduquer les troubles déficitaires
précis (troubles moteurs, cognitifs, sensoriels…). Cependant certains ergothérapeutes
utilisent le jeu différemment. Treize d’entre eux utilisent le jeu pour motiver l’enfant à sa
prise en soin, pour qu’il ressente du plaisir et qu’il revienne avec envie aux séances
suivantes. Trois ergothérapeutes utilisent le jeu pour valoriser l’enfant, pour lui montrer ce
qu’il est capable de faire. Enfin huit ergothérapeutes pensent que développer l’autonomie
de l’enfant dans le jeu est important. Ainsi ils stimulent et améliorent les aptitudes ludiques
de l’enfant afin qu’il puisse également être autonome dans cette activité de la vie
quotidienne.

 Entretiens

Les trois ergothérapeutes utilisent le jeu comme un moyen pour rééduquer des
troubles spécifiques le plus souvent moteur ou cognitif. D’autre part, les trois pensent que
stimuler et améliorer les aptitudes ludiques de l’enfant peut être un objectif. Cependant les
Ergo 1 et 3 ne l’appliquent pas dans leur pratique actuelle. Tous deux indiquent que cet
objectif est poursuivi par les autres professionnels du centre, principalement les éducateurs
et les animateurs. L’Ergo 3 explique ceci par le fait que la population des enfants paralysés
cérébraux accueillie dans sa structure a changé ces dernières années. Les enfants présentent
un handicap moins lourd, et la priorité ne se trouve pas dans le jeu mais plus dans la
scolarité pour les enfants de 6 à 10 ans. Par ailleurs, l’Ergo 2 précise que selon lui, le jeu est

20
Gestes associés aux sons.

31
une activité de vie quotidienne, ainsi son rôle est de favoriser l’autonomie de l’enfant dans
cette activité. De ce fait, en plus de l’accessibilité du jeu, il cherche à apprendre à jouer à
l’enfant, à lui permettre de nouvelles expériences. « […] je le vois comme un temps de
découverte. », « […] c’est beaucoup découvrir de nouvelles choses, comment les faire,
comment les faire autrement, comment les utiliser pas la même façon que la fois d’avant… ».
L’Ergo 3 utilise également le jeu comme un moteur, comme une motivation. Il propose en fin
de séance un jeu qui plait à l’enfant et qui le valorise, afin que celui-ci revienne à la séance
d’après. « On essaye de faire à la fin, quelque chose qui leur fasse plaisir, qu’ils réussissent,
pour qu’ils aient envie de revenir la prochaine fois », « ou c’est la carotte, tu dis « tu vois ton
puzzle, il est là, il est prêt. Tu n’as pas fini ça, pas de puzzle, tu as finis ok tu as le droit »

Tous les ergothérapeutes ayant répondu au questionnaire, utilisent le jeu comme un


moyen pour rééduquer des fonctions précises. L’expérience d’un échantillon
d’ergothérapeute a mis en évidence qu’il était possible d’utiliser le jeu comme un objectif. Le
jeu est alors perçu comme une activité de la vie quotidienne et l’ergothérapeute doit
favoriser l’autonomie et l’indépendance dans cette activité au même titre que les autres.

7. Pertinence du développement du jeu de l’enfant en ergothérapie


 Questionnaires

Si vous pensez que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans
le développement de leur jeu, comment adaptez-vous le jeu à l'enfant?

Vingt-et-un des vingt-six ergothérapeutes estiment qu’il est pertinent de favoriser le


développement du jeu en ergothérapie. Cependant cinq ergothérapeutes ne trouvent pas
cet objectif pertinent.

La majorité des ergothérapeutes estime que le développement du jeu favorise le


développement général de l’enfant au long terme. L’enfant sera capable de jouer seul, de
jouer avec les autres, de ressentir du plaisir. Tous ces éléments contribuent à son bien-être.
D’autres ergothérapeutes indiquent que les compétences acquises lors du jeu permettent
une meilleure indépendance dans la vie quotidienne car il transpose ses acquis. Deux
ergothérapeutes expliquent que le jeu étant une activité de vie quotidienne,
l’ergothérapeute a toute sa place dans son développement. Enfin trois ergothérapeutes
pensent que le développement du jeu est surement favorable à l’enfant, mais que cet

32
objectif n’est pas prioritaire. Selon deux ergothérapeutes, cet objectif ne fait pas partie de
leurs champs de compétences, et est donc repris par leurs collègues (psychomotricien ou
psychologue).

Il est intéressant de remarquer que deux ergothérapeutes ont un discours


contradictoire dans la mesure où ils disent ne pas s’occuper du développement du jeu de
l’enfant, mais pensent qu’il est pertinent de le développer en ergothérapie. Un
ergothérapeute indique à la question (Evaluez-vous le niveau de développement du jeu de
l'enfant ?) sur l’évaluation : « Par contre, le DEVELOPPEMENT du jeu n'est pas prédominant
dans mon esprit, il s'agit plus de l'UTILISATION. » et lors de la question (Pensez-vous qu'il est
pertinent de faire progresser l'enfant dans les étapes du développement du jeu en
ergothérapie?) sur la pertinence du développement du jeu en ergothérapie « Le
développement du jeu est indispensable. », « Il est donc indispensable de favoriser ce
développement. ». L’autre ergothérapeute indique que le jeu n’est pas une de ses priorités
mais qu’il est toujours pertinent de faire progresser l’enfant dans son développement.

 Entretiens

Les trois ergothérapeutes sont d’accord sur le fait que le jeu permet une meilleure
autonomie et qualité de vie au long terme de l’enfant. Tous pensent qu’un enfant handicapé
doit pouvoir jouer comme un autre enfant et qu’ainsi le jeu favorise son bien-être, sa qualité
de vie. L’Ergo 1 et l’Ergo 2 pensent que si l’enfant peut jouer seul, c’est qu’il est en partie
autonome. L’Ergo 1 dit : « ça va le rendre autonome sur des temps où il n’aura pas besoin de
ses parents », l’Ergo 2 dit : « déjà pouvoir être seul c’est une forme d’autonomie ». Puis les
trois ergothérapeutes développent des idées différentes sur l’autonomie à long terme grâce
aux jeux. L’Ergo 1 rejoint les ergothérapeutes du questionnaire indiquant que le jeu permet
l’acquisition de compétences que l’enfant pourra réutiliser dans sa vie quotidienne. Selon
l’Ergo 2, c’est le fait d’agir, d’explorer son environnement qui va permettre le
développement de son autonomie. Enfin l’Ergo 3 indique que faire le choix d’un jeu, de le
maintenir et progresser dans la manière de l’utiliser est une forme d’autonomie. Cependant,
ce dernier a cependant indiqué par la suite ne pas laisser totalement libre le choix du jeu à
l'enfant.

Deux principales idées ressortent de ce thème. Tout d’abord, le développement du


jeu favorise un développement global de l’enfant. Il peut ainsi partager son jeu, et interagir

33
avec les autres, ou encore jouer seul, tous ces éléments contribuent au fait que l’enfant
ressente un bien-être. Ensuite, le jeu permet d’acquérir des compétences que l’enfant
pourra transposer dans les autres activités de la vie quotidienne au service d’une meilleure
autonomie et indépendance.

8. Choix du jeu
 Questionnaires

Sept professionnels ont indiqué qu’ils laissent l’enfant choisir le jeu. Trois ont précisé
que le choix s’effectue parmi une sélection de jeux qui répondent à leurs objectifs.

 Entretiens

Je n’ai pas demandé à l’Ergo 1 comment se faisait le choix du jeu en séance. L’Ergo 2
et l’Ergo 3 ont expliqué qu’ils ne pouvaient pas tout le temps laisser le choix à l’enfant car
sinon il choisirait les jeux qu’il connait et qui ne le mettent pas en difficulté. « Ils vont
systématiquement choisir ce qui ne va pas les mettre en difficulté […] » (Ergo 2), « A. si on
l’écoutait on ferait toujours la même chose » (Ergo 3). Lorsque l’Ergo 2 utilise le jeu en tant
que moyen, il choisit lui-même le jeu en fonction de son objectif. Lorsqu’il l’utilise pour
travailler l’autonomie dans le jeu, le professionnel va le plus souvent choisir le jeu afin de
faire découvrir de nouvelles expériences à l’enfant, mais pas systématiquement. Quant à
l’Ergo 3, il va induire le choix de l’enfant en fonction des objectifs qu’il veut travailler lors de
la séance.

Seulement une minorité des ergothérapeutes laissent l’enfant choisir le jeu.


Cependant, le choix du jeu est souvent guidé et orienté par le professionnel.

9. Modèle ludique de F. Ferland


 Questionnaires

Utilisez- vous le "Modèle Ludique" de Francine Ferland ? Expliciter la réponse à la question


précédente

Une grande majorité des ergothérapeutes interrogés n’utilisent pas le modèle ludique.
Seulement sept sur vingt-six l’utilisent.

34
Parmi les rééducateurs ne l’utilisant pas, une majorité ne connait pas le modèle, deux
trouvent qu’il n’est pas applicable à la population qu’ils accueillent, trois le connaissent mais
ne l’appliquent pas sans expliquer pourquoi.

Parmi les professionnels utilisant le modèle, trois ont fait la formation et utilisent la
démarche pendant une partie de leur séance, deux indiquent utiliser les bilans, un n’a pas
fait la formation mais utilise ce qu’il en connaît et comprend.

 Entretiens

Deux ergothérapeutes interrogés ne connaissent pas le modèle ludique de F. Ferland : Ergo 1


et Ergo 3. Ergo 2 m’a indiqué qu’il utilise ce modèle notamment lorsqu’il évalue le niveau de
développement du jeu de l’enfant. Sa démarche lors de l’utilisation du jeu comme objectif
semble également inspirée de la philosophie de ce modèle.

Sur les ergothérapeutes interrogés très eu connaissent le modèle ludique et encore moins
l’utilisent.

35
4ème Partie : Partie discussion

I. Conclusion de l’analyse
Tout d’abord, en adéquation avec la théorie, l’enquête montre que le jeu est un outil
fréquemment utilisé par les ergothérapeutes lors des interventions auprès des enfants
atteints de paralysie cérébrale. Cependant, un retard dans le développement du jeu est
souvent observé auprès de cette population. Les ergothérapeutes expliquent ce retard par
un manque de manipulation et d’expérience du fait d’une limitation motrice. En effet,
d’après la théorie piagétienne les premières étapes du jeu (le jeu sensori-moteur) se
développent principalement grâce aux interactions du nourrisson avec son corps puis avec
son environnement. Le développement se fait donc grâce à des manipulations et des
expériences variées que certains enfants paralysés cérébraux ne sont pas à même de réaliser
seuls. Missuana et Pollock (1991) parlent d’un handicap secondaire qui surviendrait face aux
limitations motrices. Les troubles associés peuvent également constituer un obstacle lors
des activités ludiques. Ainsi, ces enfants sont souvent dépendants de l’adulte et arrêtent de
jouer en l’absence d’une tierce personne. En adéquation avec l’étude de Simard, Ferland et
O’Neill (1994), les ergothérapeutes constatent que le retard du jeu se traduit fréquemment
par un manque d’imitation et d’imagination, et donc un jeu symbolique pauvre.

Ces enfants se retrouvent donc en situation de handicap lors d’activité de jeu. Les
ergothérapeutes, du fait de leur compétence en matière d’adaptation, sont à même de
proposer des aménagements du matériel de jeu. En effet une grande partie des
ergothérapeutes rapportent qu’ils adaptent ou proposent du matériel de jeu adapté face
aux limitations motrices, cognitives et/ou sensorielles. D’après leur référentiel de
compétences, les ergothérapeutes doivent pouvoir « adapter l’activité en fonction des
capacités et des réactions de la personne, du contexte de la personne, du contexte et des
exigences requises pour l’accomplissement de l’activité » (compétence 3). En lien avec leurs
compétences professionnelles, ils cherchent le meilleur positionnement et installation afin
que les enfants puissent accéder à l’activité. « Installer la personne de façon appropriée et
ergonomique» (compétence 3 du référentiel de compétence)

Les ergothérapeutes peuvent donc être amenés à évaluer les aptitudes ludiques de
l’enfant. L’enquête a révélé que peu de professionnels utilisent et connaissent des
évaluations spécifiques du niveau de développement du jeu de l’enfant. La plupart d’entre

36
eux utilisent l’observation, ce qui reprend la théorie de L. Vedeler (1986) qui indique que
l’observation du jeu de l’enfant révèle ce que l’enfant peut faire. L’observation doit se faire
dans différents lieux, dans les lieux significatifs de l’enfant afin d’être au plus proche de ses
réelles capacités. Les ergothérapeutes s’adressent également aux parents afin qu’ils
partagent leurs observations sur les comportements et les intérêts du jeu de l’enfant. Ces
deux moyens d’évaluation sont d’ailleurs repris par F. Ferland dans le modèle ludique :
l’Evaluation du comportement ludique et l’entrevue initiale avec les parents. Le premier est
une grille d’observation du jeu comportant l’échelle normale du développement du jeu que
le thérapeute remplit en observant l’enfant en situation de jeu libre. Le deuxième se fait
sous forme d’entretien avec les parents. Ces derniers sont les personnes les plus aptes à
décrire les comportements ludiques de leur enfant. Cette évaluation permet de compléter
les observations faites par l’ergothérapeute. Une autre partie des ergothérapeutes utilise
des évaluations non spécifiques au jeu (NEPSY, Frostig, Batterie Talbot, MIF Môme, Brunet
Lézine), afin d’évaluer le niveau de jeu des enfants. Cependant, selon Cohn, Miller et Tickle-
Degnen (2000) il est plus utile d’évaluer des sphères d’activités de l’enfant plutôt que ses
composantes (motrice, perception, cognition). Cette façon de procéder montre que les
ergothérapeutes prennent peu en considération le niveau de développement du jeu dans
leurs évaluations. Cela se recoupe avec les dires de certains ergothérapeutes qui ne
distinguent pas la place de l’ergothérapeute dans le développement du jeu de l’enfant.

Les résultats ont montré que le jeu est souvent employé pour susciter la motivation
et l’implication de l’enfant dans leur suivi, car il est source de plaisir. Un plaisir qui, au regard
de la définition du jeu, contribue au fait que l’enfant s’adonne à l’activé. Mais pouvons-nous
réellement parler de plaisir lorsque le jeu est utilisé comme un appât ? En effet quelques
ergothérapeutes ont expliqué que pour motiver l’enfant à revenir, à s’impliquer, ils utilisent
le jeu une récompense. Si l’enfant fait correctement les jeux choisis par le thérapeute, il
pourra choisir un jeu à la fin. Cette méthode me parait dénaturer l’essence même du jeu qui
est l’attitude ludique. Dans ces cas, les choix imposés par le thérapeute sont comparables à
des exercices analytiques.

37
II. Vérification de l’hypothèse
L’hypothèse de départ supposait que le jeu en ergothérapie, considéré comme une
activité de vie quotidienne, favorise l’autonomie et le bien-être de l’enfant paralysé cérébral
de 6 à 10 ans.

L’enquête a montré que la plupart des ergothérapeutes interrogés utilisent le jeu


comme un moyen pour rééduquer des fonctions déficitaires spécifiques, ce qui est conforme
aux constats évoqués dans l’étude de F. Ferland. Quelques ergothérapeutes se retrouvent
sur le fait que la priorité n’est pas de jouer mais d’améliorer les fonctions déficitaires en lien
avec la scolarité de l’enfant. Un faible échantillon a expliqué que jouer n’était pas un objectif
principal du fait du niveau de déficience des enfants suivis. A l’inverse, cet échantillon met
en évidence qu’un handicap plus lourd justifierait davantage cet objectif du fait que cet
enfant aurait moins facilement accès au jeu. Le fait qu’une majorité d’ergothérapeutes ne
perçoivent pas le jeu comme un objectif mais uniquement comme un moyen peut en partie
s’expliquer par le fait qu’ils n’aient pas connaissance de l’approche proposée par F. Ferland.

Cependant, pour certains ergothérapeutes, le jeu est une activité de vie quotidienne.
Pour cette activité, les objectifs exprimés sont de favoriser l’autonomie et l’indépendance de
l’enfant. En l’amenant à faire de nouvelles découvertes et de nouvelles expériences, les
ergothérapeutes stimulent et développent les aptitudes ludiques de l’enfant. Lorsque
l’enfant se retrouve limité par son handicap, les thérapeutes adaptent l’environnement. Ces
ergothérapeutes ont ainsi indiqué adapter le matériel de jeu, la consigne ou encore
l’installation de l’enfant. Il en ressort que certains ergothérapeutes considèrent et abordent
le jeu selon l’approche abordée dans mon hypothèse. Ils consacrent du temps à suivre cet
objectif en parallèle d’autres objectifs, tels que l’amélioration des fonctions déficitaires
spécifiques et des apprentissages scolaires. Malgré la scolarisation des enfants, ces
ergothérapeutes semblent estimer que favoriser l’autonomie et l’indépendance dans le jeu
est important.

Voyons maintenant, la deuxième partie de mon hypothèse : cette utilisation


favoriserait l’autonomie et le bien-être de l’enfant paralysé cérébral. L’enquête a montré
que la plupart des ergothérapeutes pensent que le jeu est favorable au bien-être de l’enfant.
En effet, jouer donne de la satisfaction, du plaisir, permet à l’enfant d’échanger avec ses
pairs : ce sont tous ces éléments qui contribuent au sentiment de bien-être. De plus, jouer

38
favorise l’autonomie et l’indépendance de ce dernier. Quelques ergothérapeutes indiquent
que les compétences acquises par l’enfant dans le jeu, peuvent par la suite être transférées
dans les autres activités de la vie quotidienne. F. Ferland appuie également le fait que le jeu
favorise le bien-être et l’autonomie de l’enfant. Par le jeu, l’enfant développe sa capacité
d’action et d’adaptation, il est alors acteur dans une activité qui lui procure du plaisir. Il peut
ainsi ressentir le plaisir d’agir.

Je peux donc conclure que mon hypothèse « Le jeu en ergothérapie, abordé comme
une activité de vie quotidienne de l’enfant, favorise son autonomie et son bien-être » est en
partie validée. Certaines données ont mis en évidence que le jeu pouvait être utilisé de cette
manière, mais cette approche n’est pas reprise par une majorité d’ergothérapeutes. Il serait
intéressant de faire une enquête approfondie de ce sujet, afin de déterminer les raisons
pour lesquelles cette approche est sous-utilisée.

III. Critique
L’analyse des résultats de l’enquête permet de porter un regard critique sur ce
travail.

Dans un premier temps, en analysant les réponses du questionnaire, je me suis rendu


compte que cet outil était difficile à élaborer et qu’il avait peut-être manqué un peu de
rigueur. Les réponses des ergothérapeutes étaient souvent floues et peu développées.
Certaines réponses pouvaient être interprétées de plusieurs façons car les professionnels
n’élaboraient pas forcément leur réponse. Cet outil ne permet pas de réorienter la personne
interrogée. Ainsi nous avons pu voir que la question 6 a amené deux types de réponses : les
raisons du retard du développement du jeu et la description de comportement ludique. Un
essai sur une population test aurait pu permettre d’éviter des questions trop vagues, mais le
temps ne nous le permet pas.

De plus, ma question de recherche a évolué en vue des premières réponses. J’ai donc
souhaité procéder à un deuxième recueil de données avec des entretiens semi-directifs. Afin
de sélectionner les ergothérapeutes qui allaient répondre à mes entretiens, je me suis
uniquement intéressée à des ergothérapeutes dont la structure accueille des enfants
paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10 ans. Or, il s’est avéré que l’Ergo 3 m’a avoué recevoir
peu de patients correspondants à mes critères qu’au début de mon entretien et non lors de

39
mon premier appel. Ainsi, La sélection des ergothérapeutes entretenus aurait pu être plus
rigoureuse.

IV. Nouvelles pistes de réflexion


Les recherches pour ce mémoire ainsi que l’analyse des enquêtes m’ont permis de réfléchir à
de nouvelles pistes de réflexion.

1. « Jouer » un objectif en ergothérapie mais selon le degré du handicap


Comme me l’a fait remarquer l’Ergo 3, les priorités ne seront pas les mêmes pour
tous les enfants atteints de paralysie cérébrale. Pour les enfants avec une atteinte légère
âgés entre 6 et 10 ans, les objectifs thérapeutiques en ergothérapie s’orienteront davantage
sur les compétences scolaires (graphisme, troubles visuo-spatiaux, utilisation des outils
scolaires…). Il aurait donc pu être intéressant de savoir si les professionnels favorisant
l’autonomie et l’indépendance dans le jeu, utilisent cet objectif avec tous les enfants
paralysés cérébraux ou s’ils considèrent que cela concerne plus particulièrement les enfants
avec un handicap plus important. J’aurais ainsi mettre en parallèle sur la manière d’aborder
le jeu et le niveau de capacité de l’enfant.

2. Le jeu dans les environnements de l’enfant


F. Ferland rapporte que le jeu permet une vision holistique, globale de l’enfant.
L’ergothérapie prône cette approche. L’être est à prendre comme un tout, et on ne peut
isoler une partie. Ainsi, les facteurs internes (composante sensorielle, motrice, cognitive,
psycho-affective, et sociale) et les facteurs externes (l’environnement) sont à considérer
ensemble. Les principaux environnements de l’enfant paralysé cérébral de 6 à 10 ans sont le
domicile, l’institution et l’école.

Selon, F. Ferland le jeu permet une prise en soin globale de l’enfant, car à travers le
jeu l’enfant agit sur son environnement, bouge, active ses sens, fait des découvertes
cognitives, ressent des émotions et interagit avec d’autres. Toutes les composantes de
l’enfant sont réunies et sont prises en compte. Le jeu fait partie de la vie quotidienne de
l’enfant, ainsi il peut être intéressant d’étudier le jeu de l’enfant au sein de sa famille. Ainsi
l’environnement familial est également pris en compte. F. Ferland explique que son modèle
permet le bien-être de l’enfant mais également de sa famille. Par le jeu, les parents entrent
en interaction avec leur enfant, et peuvent échanger des moments autres que ceux des soins
quotidiens. Les frères et sœurs sont également impliqués dans le modèle. Le jeu est l’activité

40
de choix pour créer des liens fraternels. D’autant plus, que le plus souvent les frères et
sœurs sont les principaux partenaires de jeu de l’enfant et peuvent ainsi permettre
d’accroître ses aptitudes ludiques. Les ergothérapeutes apprennent aux parents et aux frères
et sœurs comment jouer et prendre du plaisir avec l’enfant handicapé. Dans l’enquête, les
ergothérapeutes interrogés ont parfois évoqué la famille, surtout quand il s’agissait
d’évaluer le niveau de jeu de l’enfant. Certains professionnels ont également expliqué qu’ils
pouvaient être amenés à donner des conseils aux parents sur le choix de jeux adaptés au
niveau de l’enfant. Mais donnent-ils des conseils aux parents et frères et sœurs sur la
manière de jouer avec cet enfant ? Ceci fait-il partie des compétences des ergothérapeutes ?
Le référentiel des compétences indique à la compétence 5 « Elaborer et conduire une
démarche d’éducation et de conseil en ergothérapie et en santé publique » que les
ergothérapeutes peuvent « conseiller les aidants et les partenaires en fonction de leurs
connaissances et de leur savoir-faire afin de faciliter l’activité […] » Ainsi les ergothérapeutes
sont compétents pour donner des conseils aux aidants, ici la famille. Cependant il pourrait
être intéressant de rechercher si cette pratique se retrouve dans les objectifs des
ergothérapeutes.

A l’institution, le jeu est repris avec les différents professionnels : les éducateurs
spécialisés, les animateurs, les psychomotriciens, les kinésithérapeutes, les
ergothérapeutes…

A l’école, le jeu a peu de place. Cependant, dans la récréation ou lors des pauses les
enfants peuvent s’adonner au jeu. Est-ce que les ergothérapeutes agissent à l’école afin que
l’enfant paralysé cérébral puisse jouer avec ses pairs ? Les installations, des conseils de jeux
adaptés, expliquer à ses camarades comment jouer avec lui pourraient être des objectifs de
l’ergothérapeute. Est-ce que les ergothérapeutes suivent de tels objectifs dans leur
pratique ? Il serait intéressant de mener une étude complémentaire afin de savoir comment
les ergothérapeutes pourraient introduire le jeu dans le milieu scolaire afin de permettre à
l’enfant paralysé cérébral d’interagir davantage avec ses pairs. Cela rejoint la notion de bien-
être abordée précédemment.

3. L’intégration sensorielle favoriserait le développement du jeu


Au cours de mes recherches, j’ai remarqué que l’intégration sensorielle était une
méthode très courante en ergothérapie en Amérique du Nord. Cette méthode se développe

41
peu à peu en France mais est encore méconnue. Cette théorie utilise le jeu et s’exerce avec
des enfants atteints de paralysie cérébrale. C’est ainsi que j’en ai fait la connaissance.

Cette théorie a été développée par A.J. Ayres en 1972 (cité par C. Dufour et S. Ray-
Kaeser, 2013) ergothérapeute et docteure en neuroscience. Cette approche s’adresse aux
enfants présentant des troubles de l’intégration sensorielle. C’est-à-dire qu’ils présentent
des difficultés à intégrer une information sensorielle ce qui engendre des réponses
inappropriées. Ainsi, la thérapie de l’intégration sensorielle a pour objectif de favoriser le
développement neuronal afin de permettre une réponse adaptée aux stimuli. Ainsi les
enfants atteints de paralysie cérébrale pourraient bénéficier de séances d’intégrations
sensorielles. En effet, l’intégration sensorielle est proposée pour les enfants souffrant de
troubles de l’apprentissage, de dyspraxie, et les troubles moteurs seraient en lien avec des
troubles sensoriels.

D’après Z. Mailloux et J.P. Burke (2008), l’intégration sensorielle contribue au


développement du jeu. En effet, le jeu stimule fortement tous les sens des enfants : vision,
audition, olfaction, gout, vestibulaire, proprioception et toucher. Ainsi, lorsque des troubles
de l’intégration sensorielle sont notés, le jeu de ces enfants est affecté. Les parents
rapportent des comportements ludiques inappropriés et des décalages du niveau de jeu par
rapport à son âge. Des retards dans le développement du jeu pourraient donc s’expliquer
par des troubles de l’intégration sensorielle. En effet, l’Ergo 2 qui va suivre une formation sur
l’intégration sensorielle, pense que l’intégration sensorielle va être un préalable au
développement du jeu.

Une récente étude a été publiée dans le « American Journal of Occupational


Therapy 21» de mars 2014, qui cherchait à étudier la relation entre l’intégration sensorielle et
le jeu. Cependant, les recherches ont manqué de preuves et ne peuvent conclure l’enquête.
Des nouvelles recherches vont être poursuivies. Ainsi, le domaine est à explorer.

Dans cette méthode, le jeu est également utilisé comme un moyen. L’intégration
sensorielle est favorisée par des expériences ludiques. Ce sont le plus souvent des activités
motrices très globales. Cette approche permet également un accompagnement global de
l’enfant. Ainsi il aurait pu être intéressant de faire des recherches plus approfondies à ce

21
WATTS, Tara, STAGNITTI, Karen, 2014.

42
sujet afin d’enrichir ma réflexion sur l’utilisation du jeu en ergothérapie auprès d’enfants
paralysés cérébraux de 6 à 10 ans.

43
Conclusion
Cette recherche émane d’une réflexion autour de l’utilisation du jeu en ergothérapie
dans l’accompagnement des enfants atteints de paralysie cérébrale âgés entre 6 et 10 ans.
Le jeu, souvent utilisé par les ergothérapeutes pour améliorer des fonctions déficitaires
spécifiques (motrice, cognitive, sensorielle), est, par nature, l’activité signifiante et
significative de l’enfant. Pourtant, certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent
des retards dans leur développement du jeu à cause d’un manque de manipulations et
d’expérimentations. Ce mémoire a donc été l’occasion de discerner le rôle de
l’ergothérapeute dans le développement de l’autonomie et de l’indépendance de ces
enfants dans le jeu.

Les données collectées lors de cette recherche ont permis de dégager que le jeu
constitue une activité de vie quotidienne à part entière de l’enfant. Cependant, elles ont mis
en évidence que peu d’ergothérapeutes considèrent le jeu comme tel dans leur pratique :
rares sont ceux qui ont pour objectif de favoriser l’indépendance et l’autonomie dans cette
activité. Enfin, les ergothérapeutes perçoivent le jeu comme une activité favorisant le bien-
être de l’enfant ainsi que le développement de son autonomie au quotidien. Ainsi, en accord
avec le modèle proposé par F. Ferland (2003), permettre à l’enfant de jouer et l’aider à
développer ses aptitudes ludiques, peut constituer un objectif pour les ergothérapeutes.

Ces recherches et l’analyse des enquêtes m’ont permis de découvrir et de réfléchir à


de nouvelles perspectives. Dans un premier temps, je souhaiterais poursuivre ma recherche
afin de déterminer plus précisément le type d’enfants pour qui sa pratique serait prioritaire.
Ensuite, F. Ferland indique que le jeu permet une approche globale de l’enfant. Je
m’interroge donc sur les pratiques des ergothérapeutes quant aux conseils et aux
préconisations qui peuvent être faites par rapport au jeu, à l’école et au domicile. Enfin, de
nouvelles recherches concernant le lien entre le développement du jeu et la thérapie par
l’intégration sensorielle m’ont interpelée. Du fait de l’importance de la sensorialité dans le
jeu, l’intégration sensorielle favoriserait le développement de celui-ci, et des désordres
d’intégration sensorielle seraient un facteur de retard du jeu.

Ce travail de recherche m’a permis d’approfondir mes connaissances sur la paralysie


cérébrale mais plus particulièrement sur le jeu et son développement. Ainsi, j’ai découvert
une nouvelle façon d’utiliser le jeu en ergothérapie. Les remarques des professionnelles

44
m’ont permis de mieux comprendre cette approche. Ce mémoire a confirmé mon désir de
travailler plus tard auprès d’enfant paralysé cérébraux. Je souhaiterai à mon tour appliquer
cette approche.

45
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47
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49
Annexes

Annexe 1 : Glossaire

Annexe 2 : Questionnaire justifié

Annexe 3 : Entretien avec Ergo 1

Annexe 4 : Entretien avec Ergo 2

Annexe 5 : Entretien avec Ergo 3


Annexe1 : Glossaire
Age chronologie : âge réel de l’enfant, en opposition à l’âge de développement.

Agnosie auditive : L’agnosie auditive est un trouble de la perception et de la reconnaissance d’un


stimulus auditif sans altération des fonctions de réception.

Agnosie tactile : L’agnosie tactile est un trouble de la reconnaissance et de l’identification des objets
par le tact et la palpation, sans altération des sensibilités élémentaires tactiles.

Agnosie visuelle : Un trouble gnosique visuel est l’incapacité ou difficulté d’un enfant à reconnaître
un objet ou une image par la vue en l’absence d’atteinte ophtalmologique sévère.

 Agnosie des images : est une incapacité ou difficulté à reconnaître l’image présentée.
C’est la plus fréquente des agnosies visuelles, elle touche environ 10% des enfants
atteints de paralysie cérébrale (DENNI-KRICHEL, 1998).
 Prosopagnosie : est une incapacité ou difficulté à reconnaître les visages.
 Agnosie des couleurs : est une incapacité ou difficulté à reconnaître les couleurs.
 Agnosie des objets : est une incapacité ou difficulté à reconnaître les objets.

Ataxie : L’ataxie correspond à une atteinte du cervelet. Ainsi elle est caractérisée par des troubles de
l’équilibre, des tremblements, un tonus hypotonique et une incoordination des mouvements.
L’enfant a des difficultés à contrôler l’amplitudes de ses mouvements, on parle alors de dysmétrie. La
marche est souvent ébrieuse, le polygone de sustentation est souvent élargi et ces enfants font
fréquemment des chutes.

Athétosique : La forme athétosique est caractérisée par des mouvements involontaires et lents. Les
troubles sont déclenchés lors des mouvements. L’enfant présente une difficulté à coordonner, régler
et réguler ses mouvements. Les mouvements volontaires sont difficiles à exécuter à cause d’une
mauvaise coordination entre les muscles agonistes et antagonistes. Ces troubles peuvent se
retrouver au repos. Cette forme correspond à une atteinte extrapyramidale. On retrouve une
atteinte plus importante au niveau du tronc et au membre supérieur qu’au niveau des membres
inférieurs.

Batterie Talbot : Evalue le développement psychomoteur de l’enfant des enfants de 0 à 6 ans :


motricité globale, motricité fine.

Brunet Lézine : échelle du développement psychomoteur des enfants d’âge préscolaire.

Choréique : Les mouvements choréiques sont des mouvements involontaires brusques qui
empêchent les mouvements volontaires. Ces deniers chaotiques et imprévisibles.

Dysarthrie : est une « pathologie de la sphère buco-phonatoire qui permet la réalisation du langage
écrit sonorisé » (M. MAZEAU, 2005).

Dyskinétique : Des mouvements dyskinétiques sont des mouvements incontrôlés et involontaires. Il


en existe plusieurs formes : des mouvements choréiques, athétosiques, et dystoniques.

Dysphasie : est «un désordre langagier en lien avec un dysfonctionnement […] des structures
cérébrales […] spécifiquement mises en jeu lors du traitement de l’information langagière. » (M.
MAZEAU, 2005).
Dystonie : La forme dystonique correspond à un dérèglement du tonus musculaire à cause d’une co-
contraction des muscles antagonistes. Le mouvement est possible mais dépend de l’ampleur et de la
fréquence des co-contractions. La dystonie est déclenchée par un ou plusieurs mouvements
volontaires spécifiques.

Entretien semi-directif : enquête qualitative qui tourne autour de thèmes prédéfinis par l’enquêteur
préparés dans une grille d’entretien.

Epilepsie : L’épilepsie est une affection neurologique caractérisée par des crises imprévisibles,
soudaines et la plupart du temps brèves.

Frostig : Test de développement de la perception visuelle

Ictère nucléaire: Jaunisse

MIF Môme : Mesure de l’Indépendance Fonctionnelle pour les enfants. Evalue l’indépendance et
l’autonomie dans les activités de vie quotidienne.

NEPSY: un bilan neuropsychologique de l’enfant de 3 à 12 ans qui permet l’évaluation de cinq grands
domaines : Attention et Fonctions exécutives, Langage, Fonctions sensorimotrices, Traitements
visuo-spatiaux, Mémoire et apprentissage.

Omnipotence: pouvoir de décision absolue. (D.W. Winnicott, 1975)

.Permanence de l’objet : l’objet continue d’exister bien qu’il ne soit pas visible. (Piaget, 1978)
Prévalence : Nouveaux cas sur la population d’étudiée.

Relation de causalité : Existence d’un lien entre la cause et l’effet (Piaget, 1978).

Spasticité : La spasticité est un désordre moteur caractérisé par une augmentation du réflexe
d’étirement sensible à la vitesse, et par une augmentation des réflexes ostéo-tendineux. Elle se
caractérise par une contraction involontaire des muscles de flexion et de pronation au niveau du
membre supérieur et les muscles d’extension des membres inférieurs.

Syndrome de Silverman: Syndrome des «enfants battus», lésions cérébrales à l’origine de violence
physique.

Trouble attentionnel :

 Trouble de l’attention soutenue : incapacité à maintenir son attention sur une période
prolongée
 Troubles de l’attention sélective : incapacité à faire abstraction des stimuli extérieurs
 Troubles de l’attention divisée : incapacités à partager son attention sur deux
informations présentes au même moment

Trouble fonction exécutive : Le trouble des fonctions exécutives concernent un déficit de la


planification d’une tâche, l’incapacité de s’adapter à un changement, l’incapacité d’inhiber les
comportements automatiques, l’incapacité à choisir et à appliquer une stratégie adéquate.

Trouble praxique : Les troubles praxiques sont des difficultés à planifier, à réaliser et à automatiser
un geste dans un but précis.
 Dyspraxie bucco-faciale : La dyspraxie bucco-faciale est une difficulté à organiser et
coordonner l’utilisation des muscles de la sphère orale (difficulté dans les
mouvements de langue, gonfler les joues, souffler, se moucher…).
 Dyspraxie constructive : La dyspraxie constructive se traduit par une difficulté à
programmer et réaliser un geste dans le but d’assembler des éléments dans l’espace
(puzzle, jeux de construction, mosaïque, géométrie…).
 Dyspraxie constructive visuo-spatiale : La dyspraxie constructive visuo-spatiale (ou
visuo-constructive) associe un trouble dans l’organisation du geste et un trouble
oculomoteur (l’enfant n’arrive pas à explorer un espace pour rechercher un élément,
il a des difficultés à fixer un élément fixe et/ou mobile). Cette dyspraxie est la plus
fréquente chez les enfants paralysés cérébraux. Elle se révèle le plus souvent lors de
l’apprentissage du graphisme et entraine des difficultés dans ce domaine.
 Dyspraxie gestuelle : La dyspraxie gestuelle est décrite sous deux formes
différentes : la première correspond à une difficulté à utiliser et manipuler des objets
et la deuxième est une difficulté à réaliser des gestes sans objets (imiter quelqu’un,
mimer quelque chose...).
 Dyspraxie de l’habillage : La dyspraxie de l’habillage est une difficulté de
planification, d’organisation, de manipulation lors de l’habillage. L’enfant se retrouve
en difficulté pour prendre ses vêtements, les organiser, les déplacer, les enfiler, faire
des lacets…
Annexe 2 : Questionnaire justifié
1) Année de diplôme *
Ecrire l'année de l'obtention de votre diplôme d'ergothérapie

Cette première question permet d’avoir une première idée du niveau d’expérience professionnelle de
l’ergothérapeute.

2) Type de structure *
Choisir le type de structure dans lequel vous travaillez. Si autre préciser

Service d'Education et de Soin Spécialisé à Domicile (SESSAD)

Institut d'Education Motrice (IEM)

Médecine Physique et Réadaptation (MPR) pédiatrique

Centre d'Action Médico-Social Précoce (CAMSP)

Autre :
Grâce à cette question, je peux comprendre l’environnement de travail de la personne interrogée. Dans les
structures contactées, de nombreux facteurs pouvant influencer la pratique des ergothérapeutes seront
différents d’un établissement à un autre : les conditions matérielles, le niveau d’atteinte des enfants, le type de
suivi mis en place.

3) Depuis combien de temps travaillez-vous en pédiatrie ? *

Moins de 5 ans

Entre 5 et 10 ans

Entre 11 et 20 ans

Plus de 20 ans
Cette question permet de connaître l’expérience des ergothérapeutes dans le domaine de la pédiatrie et ainsi
faire un lien sur leur connaissance dans ce domaine. De plus, il est probable que nous notions une différence de
leur pratique en fonction de leur expérience.

4) Utilisez-vous le jeu lors de vos séances avec les enfants ? *

Oui

Non
Cette question permet une entrée dans le sujet de mon mémoire et vérifie que les ergothérapeutes vont
pouvoir répondre aux questions qui vont suivre.

5) Est-ce que vous pensez que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans le
développement de leur jeu ? *

Oui

Non
6) Expliciter *
Expliciter votre réponse à la question précédente
Ces questions permettent de confirmer l’un de mes premiers questionnements (les enfants atteints de
paralysie cérébrale présentent un retard dans le développement de leur jeu du fait d’un manque
d’expérimentation et de manipulation) et permet d’amener à la question suivante.

7) Si vous pensez que certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard dans le développement de
leur jeu, comment adaptez-vous le jeu à l'enfant?
(Au niveau matériel, au niveau de l'âge de développement…)
Cette question interroge sur les actions mises en place par les ergothérapeutes pour favoriser l’autonomie et
l’indépendance de l’enfant dans le jeu.

8) Evaluez-vous le niveau de développement du jeu de l'enfant ? *

Oui

Non
Je souhaite savoir si les ergothérapeutes prennent en compte le niveau de développement du jeu.

9) Si oui, par quel moyen évaluez-vous le développement du jeu?


(Évaluation validée (laquelle), observation en séance, questionnaire et/ou entretien avec les parents...) Préciser votre réponse.
Par cette question, je souhaite savoir par quel moyen les ergothérapeutes évaluent le jeu : évaluation validée,
observation, bilan maison…

10) Si non, pourquoi?


(Manque de temps, fait par un autre collègue (précisez) ...)
Je souhaite alors comprendre pourquoi les ergothérapeutes n’évaluent pas le niveau de jeu de l’enfant : est-ce
qu’ils pensent que cela ne fait pas partie de nos compétences ? Qu’il y a d’autres priorités ?...

11) Dans quels objectifs utilisez-vous le jeu auprès de ces enfants? *


(Pour améliorer une fonction précise, pour développer ses aptitudes ludiques, pour le motiver...) Préciser
Cette question est primordiale pour répondre à ma question de recherche. Je peux alors comprendre la place
que prend le jeu dans la pratique des ergothérapeutes, quelle vision ils en ont.

12) Pensez-vous qu'il est pertinent de faire progresser l'enfant dans les étapes du développement du jeu en
ergothérapie? *

Oui

Non
13) Pourquoi? *
Développer la réponse à la question précédente (fait par un autre collègue, pas la priorité ...)
Par cette question, je souhaite savoir si les ergothérapeutes pensent que nous avons un rôle dans cet objectif,
et en quoi un développement du jeu de l’enfant lui serait favorable.

14) Utilisez- vous le "Modèle Ludique" de Francine Ferland ? *

Oui

Non
15) Expliciter la réponse à la question précédente
Pourquoi, Comment ...
Ainsi, je peux faire un parallèle entre la manière d’utiliser le jeu et la connaissance et l’application de ce
modèle.
Annexe 3 : Entretien avec Ergo 1
Moi : Pour commencer, je vous rappelle que la population qui m’intéresse, ce sont les enfants paralysés cérébraux âgés
entre 6 et 10 ans. Vous travaillez avec ce genre d’enfant ?

Ergo1 : Oui, oui. J’essaye d’avoir des cas dans ma tête comme ça je me réfère à des cas bien précis.

Moi : Ok. Alors dans quel type de structure travaillez-vous ?

Ergo1 : C’est un centre de rééducation, les enfants viennent en hôpital de jour, c’est-à-dire qu’ils viennent à la journée.

Moi : D’accord, il n’y a pas d’enfants qui restent en internat ?

Ergo1 : Nan, pas dans ceux que je suis.

Moi : Depuis quand êtes-vous diplômée ?

Ergo 1 : Ca va faire 19 ans cette année.

Moi : D’accord. Et depuis combien de temps travaillez-vous en pédiatrie ?

Ergo1 : 12 ans.

Moi : Ok. Utilisez-vous le jeu auprès des enfants paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10 ans ?

Ergo 1 : Oui.

Moi : Ok. Alors, et comment l’utilisez-vous?

Ergo1 : Le jeu en général ? Ou un type de jeu ?

Moi : Comment utilisez-vous le jeu dans votre pratique ?

Ergo1 : La question c’est au quotidien, des choses comme ça, ou c’est dans quel but ?

Moi : Dans quel but vous l’utilisez dans votre pratique ?

Ergo1 : Alors c’est en général, c’est dans un but, ça dépend ce que je veux travailler. Si c’est au niveau moteur ça va être
plus dans un but de récupération motrice ou d’augmentation de la capacité motrice en tout cas. Autrement ça peut être au
niveau cognitif.

Moi : D’accord. Pensez-vous que « jouer » puisse être un objectif thérapeutique ?

Ergo1 : Ah bah oui bien sûr !

Moi : Donc vous pensez que stimuler et améliorer les aptitudes ludiques de l’enfant puisse être un de vos objectifs ?

Ergo1 : Oui parce que c’est par le jeu que vont passer certaines fonctions. Apprendre le tour de rôle des choses comme ça, à
composer. Les capacités que l’on va observer avec le jeu vont être observées plus tard dans la vie quotidienne.

Moi : D’accord, donc vous utilisez le jeu pour qu’il acquière des compétences qu’il transposera ensuite dans la vie
quotidienne ?
Ergo1 : Oui, tout à fait oui.

Moi : D’accord. Est-ce que vous considérez le jeu comme une activité de vie quotidienne de l’enfant ?

Ergo1 : Moi oui. Parce qu’un enfant qui ne va pas jouer ce n’est pas un enfant. De même qu’un enfant qui ne va pas faire de
bêtises n’est pas un enfant.

Moi : Et est-ce que vous allez favoriser son autonomie et son indépendance dans le jeu ?

Ergo1 : Oui, on est même amené à conseiller les parents dans les jeux qu’ils vont choisir. Souvent pour les anniversaires ou
au moment de Noël. Les parents sont souvent demandeurs d’indices. Donc là par exemple on va pouvoir indicer pour leur
indiquer où en est l’enfant pour qu’ils puissent choisir un jeu qui lui plaît et qui soit utilisé au quotidien après.

Moi : D’accord. Et est-ce que par rapport à l’accès au jeu vous intervenez ou pas ?

Ergo1 : Oui, ça dépend du handicap en fait. Plus on a des handicapés très lourds plus on adapte les jeux. Après on a des
enfants qui ne peuvent pas accéder à des jeux qui ne sont pas de leur âge. On est souvent obligé de proposer des idées de
jeu qui sont réellement en rapport avec leurs capacités.

Moi : Et est-ce que quand vous jouez avec l’enfant vous adoptez une attitude ludique ou une attitude particulière ?

Ergo1 : Oui, une attitude très ludique. C’est-à-dire qu’on rigole beaucoup. On surjoue. On exagère toutes les mimiques, le
langage. On utilise des signes aussi, les signes Borel qui sont plus des signes de langage écrit mais aussi des signes de la
langue des signes. Même si l’enfant n’est pas sourd ça aide à la compréhension du jeu. On insiste pour qu’il lit sur des lèvres
ou des choses comme ça. Même chez les enfants IMC. On va surjouer le jeu, si on a gagné on explose de joie. On va
surjouer pour que l’enfant trouve de l’intérêt à jouer. On va jouer à la marchande, on va jouer à des choses comme ça. On
rigole beaucoup en fait.

Moi : Et est ce qu’au final quand vous utilisez un jeu, votre objectif c’est un peu de cacher votre objectif à vous pour
rééduquer un trouble précis ou c’est un objectif très global pour toucher plusieurs sphères du développement?

Ergo1 : C’est très variable. Je peux utiliser par exemple un jeu comme ce matin, où un enfant avait un cahier de
communication, où j’utilisais un jeu de loto tout simple pour voir comment il pourrait mémoriser les pages de son cahier.
Lui il a joué, moi j’ai travaillé sur le travail de la mémorisation. Donc là c’est sur un point précis qui va s’utiliser après
vraiment concrètement au quotidien. Là c’est vraiment sur une chose bien précise.

Moi : Et est-ce que vous l’utilisez de manière plus globale pour toucher plusieurs sphères du développement ?

Ergo1 : Oui, je pense que oui. J’essaye de réfléchir à ce que je propose… Ah c’est souvent bien précis quand même. Mais si
c’est un jeu de construction par exemple je vais pouvoir travailler en même temps que le moteur, l’apprentissage des
couleurs. Donc je vais travailler en même temps les compétences en rapport avec l’apprentissage scolaire et le côté
moteur. Donc ça peut toucher plusieurs sphères en effet.

Moi : D’accord. Et est-ce que vous pensez que le jeu favorise l’autonomie et la qualité de vie de l’enfant à long terme?

Ergo1 : Ça c’est sûr! Parce qu’un enfant qui joue chez lui va pouvoir s’occuper tout seul. Ça paraît tout bête mais ça va le
rendre autonome sur des temps où il n’aura pas besoin de ses parents. S’il ne sait pas jouer tout seul ou s’il ne sait pas jouer
tout court, parce qu’on a des enfants qui ne savent pas jouer, qui ne font que manipuler parce qu’au niveau intellectuel ce
sont des handicaps beaucoup plus lourd. Ça veut dire qu’ils seront toujours en recherche de l’adulte pour faire quelque
chose.
Moi : Et du coup est ce que vous amenez ces enfants qui ne savent pas jouer tout seul à développer leur autonomie ?

[Problème de connexion]

Ergo1 : Je ne vous entends plus, ah là c’est mieux.

Moi : Je vous demandais est ce que vous êtes parfois amené à développer la capacité ludique de ces enfants qui ne
savent pas jouer tout seul ?

Ergo1 : Oui, alors attendez je réfléchis là. Dans ce cas-là ça ne va pas être sur la séance en elle-même. Parce qu’on a la
chance nous d’avoir, enfin nous du coup certains enfants vont à l’école dans le centre de rééducation et les plus jeunes sont
sur un petit groupe qu’on appelle le jardin d’enfant, ce qui est vraiment un lieu de vie et ça va être plus des interventions
vraiment autour du lieu de vie. On va proposer des activités, des jeux pour leur permettre de … enfin petit à petit on va leur
proposer des jeux différemment pour qu’ils puissent choisir d’eux-mêmes. Déjà s’ils peuvent choisir eux-mêmes c’est un
peu d’autonomie en fait.

Moi : Mais du coup, ça sera pour les enfants qui ont moins de 6 ans ?

Ergo1 : Nan nan y’en a qui ont plus de 6 ans. Après au niveau du reste du service, y’a aussi des éducateurs donc y’a aussi
cette structure qui permet ça. Ou les jeux sont proposés, alors parfois y’a des jeux qui sont imposés par moment mais y’a
des moments de temps libre donc à ce moment-là les jeux sont à disposition et l’enfant va aller choisir ce qu’il veut et il
peut être guidé par moment. Mais là c’est pas moi directement.

Moi : Donc là ça sera plus les éducateurs ?

Ergo1 : Oui au niveau des lieux de vie.

Moi : Et est-ce que vous pensez aussi que jouer permet de développer la capacité d’agir, la capacité d’action de l’enfant ?

Ergo1 : Oui parce que quand on joue on agit sur l’environnement. Pas directement si on veut, mais c’est de toute façon une
action volontaire.

Moi : Est-ce que vous connaissez le modèle ludique de Francine Ferland ?

Ergo1 : Pas du tout ! Nan parce que moi je suis nulle dans tous les modèles !

Moi : Si vous avez l’occasion de vous renseigner c’est très intéressant.

Ergo1 : Ah bah je vais le faire !

Moi : C’est un modèle proposée par une ergothérapeute canadienne, qui met au centre le jeu dans le but justement de
favoriser l’autonomie et la qualité de vie de l’enfant et donc elle essaye de stimuler et développer les capacités ludiques
de l’enfant pour qu’il puisse se développer grâce au jeu car lui permet de toucher toutes les sphères du développement.

Ergo1 : Ah oui bah je ne connaissais pas, peut être que j’ai lu mais que j’ai oublié. Je suis un peu nulle là-dedans.

Moi : Ok bon ça touche à sa fin. Merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions !
Annexe 4 : Entretien avec Ergo 2
Moi : Avant de commencer, je vous rappelle que je m’intéresse aux enfants paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10 ans.
Donc toutes les questions qui vont suivre concerneront ces enfants.

Ergo 2 : D’accord.

Moi : Dans quel type de structure travaillez-vous ?

Ergo 2 : C’est un Institut d’Education Motrice

Moi : Et tous les enfants sont internes à l’institut ou il y en a qui rentrent chez eux parfois?

Ergo 2 : Ça dépend. Certains rentrent chez leurs parents le soir, ils ne restent que la journée. Il y a des enfants qui sont à
l’internat. Il y a aussi des enfants qui sont scolarisés à l’extérieur, qui sont en inclusion dans des écoles à côté.

Moi : Ok, depuis combien de temps êtes-vous diplômée ?

Ergo 2 : Depuis 2004.

Moi : Et depuis quand travaillez-vous en pédiatrie ?

Ergo 2 : Depuis 10 ans.

Moi : Utilisez-vous le jeu avec les enfants paralysés cérébraux de 6 à 10 ans ?

Ergo 2 : Oui

Moi : Pour vous, qu’est-ce que le jeu ?

Ergo 2 : C’est difficile comme question… euh le jeu c’est …

Moi : Dites-moi juste les éléments qui pour vous font penser qu’une activité est un jeu, les éléments qu’il faut
absolument retrouver pour qu’un jeu en soit un.

Ergo 2 : Il faut que l’enfant ressente du plaisir… Le jeu c’est expérimenter. Oui c’est ça expérimenter les objets, faire des
expériences différentes. L’enfant doit être libre d’agir. Oui c’est ça le plaisir, expérimenter et agir. Je ne sais pas si j’ai
répondu à ta question...

Moi : Si si ça me va très bien comme réponse. Alors je vais vous poser une question sur le moyen et une sur l’objectif. En
quoi le jeu peut-il être un moyen ?

Ergo 2 : Alors, le jeu est l’activité significative et peut être signifiante de l’enfant. Significative c’est-à-dire qui a un sens pour
la société et signifiante, qui a un sens pour lui. Donc forcément en ergothérapie on utilise cette activité avec les enfants.
C’est un moyen dans le sens où je l’utilise pour le travail moteur, cognitif et tout…

Moi : Ok, et maintenant en quoi le jeu peut-il être un objectif ?

Ergo 2 : Du coup, pour moi, le jeu est une activité de vie quotidienne de l’enfant, au même titre que l’habillage, la toilette…
donc mon objectif peut être de favoriser l’autonomie dans cette activité. Donc ça va passer par l’accès au jeu. On adapte
des jeux quand il y a une atteinte motrice, et quand c’est plus cognitif, on va essayer de trouver des jeux au niveau de
l’enfant. On donne parfois des conseils aux parents. Souvent au moment des anniversaires ils nous demandent de l’aide.
Donc là j’utilise le modèle ludique pour déterminer au niveau affectif, social, moteur… et le reste, j’observe alors où en est
l’enfant. Et après je peux proposer des jeux à son niveau, des jeux qui lui feront plaisir. Si c’est un enfant que je connais, je
les guiderai sur des jeux en lien avec ses centres d’intérêts. Si je ne le connais pas, les parents choisissent dans plusieurs
jeux que je leur propose, et ils arrivent à relier avec les centres d’intérêts de leur enfant. Mais les conseils qu’ils
demandaient sont plus sur l’adaptation en niveau de ce qu’il peut faire et en particulier de ce qu’il peut faire tout seul.

Moi : D’accord. Et du coup est ce que dans vos séances vous pouvez avoir comme objectif de stimuler et améliorer les
aptitudes ludiques de l’enfant ?

Ergo 2 : Oui. Alors nous ça peut même être dans les projets d’équipe, en particulier au niveau de l’imaginaire, parce que
justement c’est vrai que les enfants qui sont beaucoup dirigés… ils peuvent aussi, du fait d’avoir beaucoup été dirigés, avoir
plus de difficultés à élaborer eux leur propre imaginaire. Donc dans nos séances on peut l’intégrer. Par exemple dans un jeu
de construction on va imaginer qu’on fait la maison d’un des bonhommes et on invente une histoire autour… Voilà, on le
travaille tous un peu dans nos séances.

Moi : Et du coup vous parliez d’un travail d’équipe, mais quels professionnels ?

Ergo 2 : Tous, instit, éduc, psychomot, neuropsy, psychologue… enfin tous les professionnels que l’enfant rencontre. Après
je parle d’imaginaire mais ça va être pareil au niveau de l’imitation, imiter quelqu’un, jouer à plusieurs... A deux au début
puis à plus nombreux…

Moi : Ok, et est-ce que vous pensez que le jeu favorise l’autonomie de l’enfant au long terme ?

Ergo 2 : Oui, parce que avec le jeu, l’enfant va avoir envie d’agir sur son environnement. Les enfants paralysés cérébraux
vont parfois avoir des difficultés pour découvrir leur environnement, découvrir ce qu’il y a autour d’eux. Donc c’est qui est
important c’est de favoriser l’envie de découvrir par lui-même et de limiter l’appréhension dans l’exploration. Donc ça peut
être l’appréhension au niveau du mouvement, par exemple l’appréhension de se pencher, l’appréhension de tomber. Ça
peut être aussi l’appréhension de rester tout seul. Enfin… oui c’est ça. De faire les choses sans avoir un regard sur ce qu’il
fait, de l’adulte. Et du coup effectivement pour moi les enfants paralysés cérébraux qui ont envie de faire par eux-mêmes,
ils ont au maximum des capacités qu’ils peuvent développer. Déjà pouvoir être seul c’est une forme d’autonomie. Et ce
qu’ils vont apprendre en ergo, ils voudront le réutiliser dans leur vie. Donc oui oui ça favorise son autonomie.

Moi : Et est-ce que vous pensez que le jeu favorise une meilleure qualité de vie de l’enfant ?

Ergo 2 : Alors, euh… Tous les enfants jouent. Donc en quelque sorte, oui ça favorise sa qualité de vie. Certains ont un jeu
pauvre, ils reproduisent toujours la même chose, les jeux qu’ils savent faire. Donc proposer des situations différentes, de
nouvelles expériences… Ils vont pouvoir bénéficier de situations variées, qui alternent des moments peut être où ils le font
tout seuls et avec d’autre, où ils sont guidés par l’adulte, et d’autre où ils sont initiateurs. Et plus l’environnement de jeu va
être riche et du coup effectivement je pense que ça favorise… Oui c’est un critère de la qualité de vie. Surtout que le jeu est
indissociable de la relation dont bénéficie l’enfant avec les adultes, avec d’autres enfants.

Moi : D’accord, ok. Et du coup est ce que vous pensez que le jeu peut permettre une approche holistique de l’enfant ?
Donc holistique veut dire prendre l’enfant dans sa globalité. Je ne sais pas si vous voyez…

Ergo 2 : Si si si. Mais, je réfléchis juste… A mon sens dans la société actuelle et dans ce qu’on demande aux enfants
handicapés par rapport à l’inclusion, parce que les autres enfants à partir de 6 ans ils ne jouent pas beaucoup ils travaillent.
Et en fait on est très souvent à leur imposer des choses même si c’est très intéressant l’école ce n’est pas ça que je veux
dire. Mais finalement on décide du programme de ce qu’ils vont apprendre. Donc finalement l’inclusion ça fait que les
enfants handicapés, les paralysés cérébraux à 6 ans aujourd’hui en France, pour la grande majorité, sont dans ce système-
là, grâce à l’inclusion. Du coup si nous on met en place des choses uniquement autour du jeu à ce moment-là, je pense
qu’on ne prend pas suffisamment en compte toutes les réalités de la vie quotidienne. Il y a des choses qu’il va falloir qu’on
fasse plus en lien avec l’école.

Moi : Oui, donc vous allez-travaillez des choses en lien avec les apprentissages scolaires ?

Ergo 2 : Oui c’est ça. On devra proposer des adaptations, par exemple des règles, des ciseaux… et ça on ne pourra pas le
faire en lien avec le modèle ludique. Donc pour moi, ça ne permet pas une approche holistique parce qu’il n’y aura pas la
scolarité.

Moi : Après il y a des enfants paralysés cérébraux qui vont très peu à l’école dans votre IEM nan ? Ou des enfants qui ont
un retard au niveau scolaire donc qui auront un niveau plus bas ? Parce qu’au final en maternelle, il y a encore beaucoup
de jeux…

Ergo 2 : Du coup moi ça n’est pas le cas de ma pratique. Alors après il y a certains jeunes qui arrivent à 6 ans à qui on va
pouvoir proposer une inclusion en grande section mais finalement la grande section c’est vrai qu’il y a des temps de jeu
mais il y a déjà beaucoup de temps où c’est du pré travail. Oui c’est ça c’est du préscolaire en fait. Il y a déjà pas mal de
graphisme, du travail des formes, du travail des couleurs, un peu de truc qu’ils appellent connaissance du monde. Ce sont
des expériences qui sont passionnantes mais qui sont complètement guidées par l’institutrice quoi. Ça n’est pas du jeu
libre, ni du jeu pour le jeu. Après oui ils ont plus de temps en maternelle.

Moi : Ok. Et du coup je reviens un peu sur votre pratique, comment vous faites en séance pour le choix du jeu : est-ce
que vous laissez l’enfant choisir ou c’est vous qui choisissez ?

Ergo 2 : Alors, ça n’est pas toujours quand je veux travailler l’autonomie dans le jeu, que je vais laisser choisir l’enfant parce
qu’en fait pour moi la séance d’ergo c’est un moment où peut-être je vais lui montrer pas mal de choses où il va vivre des
réussites. Et le jeu il va avoir envie de le redemander sur des moments où il est en temps libres. Et ça c’est d’autant plus
favorisé que c’est la même salle. C’est-à-dire que les jeux de l’ergo ne sont pas utilisés qu’en ergo.

Moi : D’accord.

Ergo 2 : Et du coup, moi je… surtout que ce sont des enfants pris en charge une fois par semaine la plupart du temps et du
coup je le vois comme un temps de découverte. Alors après, une fois que le jeune connaît tous les jeux et que… après c’est
vrai qu’on aussi un lien avec la ludothèque et tout ça donc je suis souvent en train de chercher de nouveaux jeux…

Moi : Mais est-ce qu’il y a une différence entre le fait que vous utilisiez le jeu en tant que moyen et le jeu en tant
qu’objectif dans le choix du jeu ?

Ergo 2 : Alors, effectivement si c’est le jeu en tant que moyen, que j’ai un objectif bien précis à travailler derrière, je vais
choisir le jeu. Pour qu’il puisse travailler ce que j’ai choisi de travailler. Par exemple la coordination bi-manuelle. Surtout
qu’ils vont systématiquement choisir ce qui ne va pas les mettre en difficulté et ça c’est intéressant dans l’autonomie dans
le jeu mais ça ne l’est pas pour les objectifs ergo qu’on peut avoir, du type améliorer les capacités visuo-spatiales… Après
pour moi ce n’est pas quelque chose d’embêtant parce que de toute façon la construction des apprentissages des enfants
actuellement n’est pas faite comme ça. L’école n’est pas faite comme ça non plus, ce sont les adultes qui guident donc
après si tout ça ça change on fera autrement. Mais voilà !

Moi : Ok. Est-ce que vous utilisez le jeu en tant qu’objectif est ce que vous favorisez plus une forme de jeu, genre la
forme libre, dirigée, semi-dirigée ?
Ergo 2 : Alors en fait moi quand j’utilise le jeu libre, c’est pour évaluer l’enfant. Pour pouvoir participer aux discussions de
l’équipe par rapport au jeu libre, mais pas en séance. Alors parfois ça peut arriver, parce que par exemple, je suis là à une
autonomie repas et je participe au temps libre d’après, donc dans ce cas-là ce sont des choses auxquelles je vais faire
attention sur ces temps-là. Mais sinon je suis plus sur le relais sur le jeu libre parce que sinon il n’y a pas assez de temps
ergo. Après du coup ce que je disais c’est beaucoup découvrir de nouvelles choses, comment les faire, comment les faire
autrement, comment les utiliser pas la même façon que la fois d’avant… Du coup ça c’est dans le jeu semi-dirigé, je dirais.

Moi : D’accord. Oui parce que vous êtes quand même assez présente et vous le guidez dans ses expériences.

Ergo 2 : Oui, c’est-à-dire même si l’enfant il a choisi le jeu, au fur et à mesure je peux, par exemple s’il a commencé à
raconter une histoire, et du coup si on invente une histoire de la maison d’un bonhomme et que sa maison c’est une tour,
on peut dire que c’est un phare et tout ça mais après il faut construire la digue, le port… Voilà quoi. Et donc oui je vais un
peu participer au jeu et derrière je vais avoir des idées, si je lui raconte ça il y a des chances qu’il expérimente ça.

Moi : Et est-ce que vous connaissez l’intégration sensorielle ?

Ergo 2 : Oui. Beaucoup. Enfin beaucoup nan. C’est-à-dire que c’est un sujet qui m’intéresse beaucoup en ce moment, je fais
la formation à l’ANFE fin juin. Donc pour l’instant je pense que je perçois pas mal de besoin dans ce domaine-là chez les
enfants. Il y a une ergo formée à la méthode Bullinger qui vient parfois, donc on voit un peu.

Moi : Et est-ce que vous pensez que l’intégration sensorielle va permettre le développement du jeu ?

Ergo 2 : Alors, oui parce que les désordres d’intégration sensorielle vont être un obstacle au jeu, et donc l’empêcher de
faire des expériences. Alors limitateur à cause des appréhensions tout ça et puis aussi du fait de la qualité de la prise
d’information par le jeune quand il expérimente. Donc ça me paraît effectivement être une… chez les enfants chez lesquels
on soupçonne des troubles de ce côté-là, ça me parait être un préalable au jeu même si dans une rééducation de
l’intégration sensorielle on va utiliser le jeu aussi. Ça va être des jeux moteurs, des jeux beaucoup plus dans le grand espace,
mais ça va être des jeux aussi. Mais en fait je vois ça encore comme un préalable de l’utilisation du jeu.

Moi : D’accord. Merci beaucoup d’avoir pris le temps de répondre à mes questions !
Annexe 5 : Entretien avec Ergo 3
Moi : Pour vous repréciser, mon sujet porte sur les enfants paralysés cérébraux âgés entre 6 et 10ans. Donc les questions
que je vais vous poser concerneront uniquement ces enfants-là.

Ergo 3 : Ok.

Moi : Dans quel type de structure travaillez-vous ?

Ergo 3 : Dans un service de rééducation fonctionnelle enfant, mais on travaille en institution dans le cadre de l’hôpital. La
différence est que l’hôpital est sensé accueillir l’aigu et la maladie, tandis que nous, on est un service de rééducation
fonctionnelle, plutôt le handicap et le chronique.

Moi : D’accord, et donc les enfants sont en internat ?

Ergo 3 : Donc on a de tout. On a des enfants en internat, des enfants en hospitalisation de jour. L’internat est un internat de
semaine, sauf les enfants qui sont des traumas crâniens ou des post-opératoires qui sont renvoyés soit chez les adultes soit
chez les grands enfants le week-end et donc ils sont là à la semaine. On a des enfants qui viennent là à la journée et on a
quelques enfants qui viennent là pour des rééducations ponctuelles qui sont scolarisés à l’extérieur.

Moi : Ok et les enfants paralysés cérébraux la plupart du temps ils sont dans quel cas ?

Ergo 3 : Alors, on en a de moins en moins. On a une jeune qui est accueillie à la journée, elle rentre chez elle le soir. Elle
vient quatre fois par semaine puisqu’il n’y pas école le mercredi, donc elle est ou chez elle ou au centre aéré. Et on a des
hémiplégies infantiles qui sont intégrés dans leurs écoles et qui viennent uniquement pour une prise en charge bien précise
ici : kiné/ergo, ou psychomot/ergo, ou orthophonie…

Moi : D’accord. Et depuis quand êtes-vous diplômée ?

Ergo 3 : Depuis 1985.

Moi : Et depuis combien de temps travaillez-vous en pédiatrie ?

Ergo 3 : Depuis 1987.

Moi : Est-ce que vous utilisez le jeu avec les enfants paralysés cérébraux de 6 à 10 ans ?

Ergo 3 : On utilise le jeu bien sûr. Mais de moins en moins parce qu’on a moins d’enfant d’athétosique, et de Little. Quand
on en avait beaucoup, c’était parce qu’il n’y avait pas de SESSAD, ils n’allaient pas ailleurs ces enfants-là. Il n’y avait pas
d’ergo en libéral non plus. On était leur seul lieu de rééducation possible donc on en avait vraiment beaucoup beaucoup. Et
là de moins en moins. Donc on utilise le jeu forcément, mais comme avec les autres, pas que le jeu ! La jeune fille, A., est
athétosique donc c’est autant la préhension fine et la coordination bimanuelle avec le jeu et les activités manuelles que
l’accompagnement du scolaire avec l’apprentissage du graphisme, et tout ce qui est cognitif : le raisonnement, le jugement.
Tout ça ! Et le jeu, oui forcément… Après qu’est-ce que tu appelles jeu, est ce que c’est le jeu de société ou est-ce que c’est
un puzzle, ou est-ce que c’est faire un coloriage, un collier de perles… ?

Moi : Justement c’était ma question suivante : qu’est-ce que le jeu pour vous ?

Ergo 3 : Le jeu ? Le jeu c’est quoi ? Alors le coloriage c’est pas du jeu, parce qu’il n’y a pas de règle du jeu…
Moi : Il n’y a pas forcément de règle dans le jeu. Dans le développement du jeu, juste manipuler des objets ça va être un
jeu déjà.

Ergo 3 : Oui, oui. Donc j’essaie de réfléchir et en même temps, j’essaie de réfléchir des enfants qu’on a, qu’on avait. Alors
qu’est-ce qu’on fait ? Nous notre problème, c’est qu’avec les enfants en internat on peut jouer sans règle. Et on manipule.
Mais après on n’est pas éducatrice, on n’est pas animatrice. On a toujours un objectif de rééducation. Donc même si tu
présentes une dinette ou n’importe quoi, tu as quand même des objectifs bien précis en tête. Ce n’est pas jouer pour jouer.
Donc même s’il n’y a pas de règles de jeu bien établies, toi t’as quand même un… pas un protocole, mais quand même une
ligne de conduite, l’enfant ne pourra pas faire ce qu’il veut parce que toi tu as quand même envie qu’il progresse dans ta
prise en charge et donc tu vas quand même induire des contraintes, tu vas proposer des consignes, proposer des objets qui
vont correspondre à ce que toi tu travailles. Je ne suis pas animatrice, je ne suis pas éducatrice.

Moi : Du coup pour vous, le jeu ça ne peut pas être un objectif en ergothérapie ?

Ergo 3 : Ah nan ! Pas avec des paralysés cérébraux. Ou alors si c’est un jeu de société. C’est différent. Si c’est un jeu de
société, je travaille la mémoire, l’anticipation déjà le jugement et le raisonnement, la compréhension de la consigne, la
mémoire et puis le respect des autres, le respect de la règle. Là oui, là je joue, mais l’objectif là ce ne sera pas en terme de
préhension, là ça ne sera pas moteur, ça sera cognitif dans ce cas-là. Donc là effectivement, si je joue aux petits chevaux, je
joue… Mais c’est toujours pareil c’est toujours avec des contraintes bien précises.

Moi : D’accord…

Ergo 3 : Je ne jouerai pas à la dinette pour ça. Encore que, avec un petit je pourrais jouer à la dinette mais toujours avec…
En essayant de lui faire construire quelque chose…

Moi : Donc toujours avec un objectif cognitif ou moteur derrière ?

Ergo 3 : Oui voilà. Mais pas tripoter des choses pour tripoter comme on fait avec un bébé. Ça, ça peut être intéressant mais
ça va dépendre de l’âge des gamins, mais jouer pour jouer ça va être les enfants tout petits les moins de trois ans si. Mais à
partir de trois ans, à partir du moment où ils vont être scolarisés ou en âge d’être scolarisé, tu vas forcément être sûre
d’avoir des contraintes, soit de reconnaissance de forme, soit d’association de couleurs, soit de classement par taille ou de
respect d’un rythme, ou des choses comme ça. Mais déjà c’est plus du jeu pour moi. C’est plus gratuit quoi. Même si on sait
que l’enfant se construit à travers son jeu… Moi, déjà, j’ai quelque chose en tête et moi ce n’est pas de la manipulation pure
et simple. Donc dans la mesure où tes enfants c’est à partir de 6 ans, non. Moi je ne manipule plus, pour moi ce jeu-là, ils le
feront pas ici [en ergothérapie]. Ils le feront en salle de jeu, s’ils sont en internat ou en hospitalisation de jour, mais ils ne le
feront pas en ergo. Je n’ai pas le temps, j’ai 3/4 d’heure avec eux, j’ai pas le temps de laisser… à partir de 6 ans c’est plus
possible.

Moi : D’accord, et est-ce que vous pensez que les enfants paralysés cérébraux peuvent présenter un retard dans leur
jeu ?

Ergo 3 : Oui, forcément.

Moi : Et du coup, ils peuvent présenter des aptitudes ludiques de moins de 6 ans ces enfants-là…

Ergo 3 : Forcément, vu qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’expérimenter comme les autres… Puisque les bébés tu les laisses
par terre, ils vont tous seuls vers les objets. Ils vont tout seuls tripoter, ils vont tout seuls… Ils regardent les autres et ils
essayent de faire. Ils n’ont aucune difficulté, aucune déficience qui les empêche d’imiter les autres ou de faire comme leurs
frères et sœurs ou les autres à la crèche. Mais un gamin handicapé qui a du mal à tenir assis, qui a du mal à coordonner ses
membres, qui a du mal à attraper, qui a du mal à tenir, qui a du mal à lâcher. Il ne peut pas expérimenter ! Il est forcément
en décalage ! S’il a jamais été à quatre pattes pour aller vers les objets… Et qu’il est obligé d’attendre que l’on lui amène et
qu’on fasse pour lui la pyramide, forcément !

Moi : Mais du coup, pour vous ce n’est pas l’ergothérapeute qui a un rôle pour développer ses aptitudes ludiques qu’il
n’a pas pu développer tout seul ?

Ergo 3 : [pause] ça dépend de la structure ou tu travailles.

Moi : Ici, nan ?

Ergo 3 : Ici, plus maintenant. On a plus d’enfant pour qui c’est l’objectif. On n’a plus ces enfants-là, on n’a plus les enfants
pour qui l’objectif est de développer ses capacités ludiques.

Moi : Pour vous ça serait pour quel type d’enfant ?

Ergo 3 : Développer les aptitudes ludiques d’enfants de plus de 6 ans ? Dans d’autres structures. A [Nom d’IEM 1], elles ont
plus…

Moi : Donc plus en IEM vous pensez ?

Ergo 3 : Oui voilà, on va dire ça comme ça. Nan, mais c’est vrai ! J’étais en train de réfléchir. Ce sont des choses qu’on
développait avec des enfants avant parce qu’il n’y avait pas de SESSAD, il n’y avait pas… Ils n’avaient pas de place ailleurs
pour faire les choses autrement. Donc effectivement, on fonctionnait différemment ici. Donc là, effectivement, on jouait
pour jouer. Mais au jour d’aujourd’hui avec les enfants paralysés cérébraux à partir de 6 ans, nous on le fait plus… Alors est-
ce que à [Nom d’IEM 1] ils le font ? Est-ce que à [Nom d’IEM 2] ils le font ? Je pense que oui… Mais du coup à [Nom d’IEM 2]
ils accueillent des enfants qui ont un retard franc…

Moi : Plus de déficiences ?

Ergo 3 : Voilà, un retard déclaré. Nous nos gamins, s’ils ont juste 1 an d’écart, 1an, 1an et ½ ou 2 ans de décalage par
rapport à la norme, ça… ça compte pas pour du beurre, c’est important mais quand t’auras 15 ans et que tu joues comme
un enfant de 13, qu’est-ce que ça peut faire ? On ne voit plus trop trop la différence. Mais c’est pour ça qu’à partir de 6 ans,
on a passé un cap.

Moi : Mais c’est pour ça que j’ai choisi 6-10 ans. Souvent, vu que les enfants sont scolarisés à 6 ans, on ne s’intéresse plus
trop au jeu en lui-même on s’intéresse plus aux capacités scolaires. C’est pour ça que j’ai choisi cet âge-là en fait.

Ergo 3 : Alors A. [enfant paralysé cérébrale évoqué plus tôt], elle est arrivée ici, elle n’était absolument pas stimulée chez
elle. Absolument pas. Elle ne parlait pas. Elle ne faisait rien. Et ça a été un gros gros travail de l’amadouer, qu’elle apprenne
à parler, qu’elle apprenne… Voilà, les parents ne sont toujours pas ok pour le fauteuil qui reste ici alors que… Voilà. Mais
elle effectivement, elle a un gros décalage et elle devrait savoir lire et écrire. Si elle avait juste un âge normal et qu’elle avait
était stimulée, mais elle est encore en apprentissage. Mais même avec elle, on ne joue plus pour jouer. Même avec elle, la
collègue elle travaille le scolaire plus plus. On essaie de la faire dépasser le « je ne colorie que en rose, je ne prends que des
gommettes roses et je prends de la pâte à modeler rose… » On essaie de faire un cran au-dessus. Tu vois ? Mais elle je
pense que son décalage il est dû au fait qu’elle n’ait pas été stimulée quand elle était gamine. Elle revient de loin. Mais il n’y
a plus qu’elle dans le service qui correspond à ta population.

Moi : Et du coup si elle est en décalage, elle est aussi en décalage par rapport au jeu, donc ce sont plus les éducateurs, les
autres professionnels qui vont la stimuler plus dans ses aptitudes ludiques ?
Ergo 3 : Et, oui, non, le projet pour elle c’est la scolarité, donc l’éveil… La relation sociale c’est important… Mais jouer pour
jouer, ça elle va faire en salle de jeu si tu veux. Ou alors en kiné quand elle est verticalisée. Pour passer le temps. Mais là il
n’y a aucune contrainte, elle patouille, elle colorie, comme elle veut. Mais parce qu’elle fait autre chose pendant ce temps.
Mais en ergo nan. En ergo, nous on a envie parce qu’on sait qu’elle est « capable de », on a envie qu’elle progresse au
niveau de l’école, et on a envie de l’accompagner là, et donc c’est la priorité.

Moi : Ok. Bon on va passer aux questions suivantes. Est-ce que vous considérez le jeu comme une activité de la vie
quotidienne de l’enfant ?

Ergo 3 : Bah bien sûr !

Moi : Et du coup, est ce que vous faites quelque chose pour favoriser son autonomie et son indépendance dans le jeu en
ergothérapie ? Pas forcément pour cette enfant, mais en général, en fonction des enfants que vous aviez avant.

Ergo 3 : Par rapport, aux paralysés cérébraux ? Donc je te parle dans le temps ?

Moi : Oui parlez-moi dans le temps.

Ergo 3 : Ok, nan mais il faut que tu précises. Mes réponses elles sont plus de mon expériences que dans la pratique actuelle
dans le service. Oui, le jeu bien sûr. Mais dans le temps, on faisait des groupes avec les éducateurs, on faisait des groupes
d’enfants et on jouait aux marionnettes, on faisait des chants… Là les enfants jouaient. Donc oui. On était deux adultes avec
4 ou 6 enfants. Et là, la situation de jeu était possible. Beaucoup plus que… Comment tu veux demander à une gamine de 6
ans… On est toutes les deux face à face séparées par un bureau, « vas-y joue ! » euh… Je ne sais pas si j’aurais envie de
jouer comme ça. Je caricature et j’exagère en te disant ça comme ça. Mais la situation s’y prête moins maintenant. Ça
n’empêche que si je veux qu’une gamine soit autonome pour ses boutons, ses laçages, se coiffer, l’idéal c’est de lui donner
une poupée pour qu’elle habille la poupée, pour qu’elle lave la poupée, pour qu’elle fasse à manger la poupée et là oui
effectivement. Mais est ce que toi tu considères que c’est du jeu ?

Moi : Ça dépend de son attitude, de comment il est amené.

Ergo 3 : Bah le but du jeu, c’est qu’ils prennent plaisir quand même. C’est de les faire progresser avec des choses qui les
intéressent. C’est la chance qu’on a en ergo, c’est qu’on trouve toujours des choses qui les intéressent pour aller dans le
sens qui nous intéresse. On a quand même plus de chances que les kinés qui doivent tirer sur les muscles et tant pis si ça
fait mal. J’exagère aussi. Mais dans ce cas-là, bien sûr que c’est de l’autonomie, parce que c’est choisir un jeu, c’est s’y tenir,
c’est progresser dans ta manière d’appréhender… Oui la poupée c’est l’idéal pour les faire s’habiller… Une gamine qui part
dans tous les sens je lui dis « comment tu vas mettre le pantalon à la poupée là ? »

Moi : Et si c’est un handicap plus lourd, qu’est-ce que vous faites pour favoriser l’autonomie de l’enfant ? Est-ce que vous
adaptez les jeux ? Ou donner des conseils aux parents sur le choix de jeu ?

Ergo 3 : Bien sûr. Les puzzles, tous les trucs des petits parce qu’on reste longtemps avec les IMC avec des choses plutôt
grossières, à manipuler les encastrements. Nous notre caverne d’Ali-Baba ce sont les classes de maternelle. On a des
encastrements, des cubes… ça ressemble à une classe de maternelle. Les puzzles pour les petits, soit ils n’ont pas de plots,
soit ils des petits plots. Et donc les petits plots que l’on trouve dans le commerce sont trop petits pour ces gamins-là. Donc
nous on va les grossir, ou on demande aux parents de faire un truc plus gros. Lester certains jeux, lester les poussettes pour
que la gamine ne s’envole pas. Bien sûr qu’on adapte des jeux, ou qu’on propose des adaptations et on dit aux parents
qu’on va pouvoir le faire.

Moi : Ok, est ce que vous pensez que le jeu favorise la qualité de vie de l’enfant ?
Ergo 3 : C’est quoi la qualité de vie pour toi ?

Moi : C’est le bien-être, c’est être satisfait de sa vie.

Ergo 3 : Je ne sais pas comment répondre à cette question. Je pense que oui, un enfant qui ne joue pas ça ne peut pas… il
ne peut pas… Il se construit moins bien qu’un autre. Mais est-ce que ça va l’aider à … ? C’est compliqué ! Je pense que le jeu
c’est indispensable. Je n’imagine pas un enfant ne pas jouer. Alors après est-ce que ça suffit de dire que… Je pense
effectivement s’il joue et que ça l’aide à se construire de quelque manière que ce soit… Mais…. Comment répondre à cette
question simplement. Je ne sais pas… Je pense que dans ces cas-là, un enfant handicapé c’est comme un enfant normal. Il a
besoin de jouer, il a besoin du symbolique, il a besoin de l’imaginaire, il a besoin de manipuler… Il se construit en
construisant le jeu, il se construit en jouant avec les autres, il se construit en regardant les autres… Parce que ça l’aide à voir
ses limites, à se rendre compte des limites qu’elles soient physiques, mentales ou … qu’autour de lui il y a les autres, et qu’il
faut en tenir compte aussi. Je pense que c’est indispensable. Mais par rapport à la qualité de vie je ne sais pas répondre.

Moi : Ok, ce n’est pas grave. Et ensuite, pensez-vous que le jeu puisse permettre une approche holistique de la
personne ? De l’enfant ? Holistique veut dire qu’on prend la personne dans sa globalité, toutes ses composantes : social,
psychologique, motrice, cognitive…

Ergo 3 : Avec les limites et les contraintes, oui... Parce qu’un gamin qui vient d’un milieu favorisé où les parents sont au
taquet, ils ont bien accepté ou ils l’accompagnent, l’aident… Ils cherchent pour lui des choses qui soient adaptées, ils sont
dans le relationnel, dans l’ouverture au monde. Ça va être différent d’une gamine qui vient là, qui a passé ses deux
premières années assises dans un coin, à qui on n’a pas parlé, à qui on a rien donné parce que les parents étaient tellement
démunis qu’ils ne pensaient pas qu’ils pourraient jouer avec une gamine comme ça. Forcément que le jeu, ça va avec la
qualité de vie. Ça ouvre aux autres, ça … Les deux questions sont assez proches.

Moi : Oui, mais je vous parle de l’ergothérapie, est-ce que en ergothérapie, le jeu peut permettre une approche
holistique de l’enfant ? Je vous rappelle qu’holistique signifie prendre en compte toutes les composantes de la
personne : motrice, cognitive, sensorielle, sociale, affective.

Ergo 3 : En ergo… oui. Avec le jeu on peut toucher le moteur, le cognitif… et tout ça comme tu dis ! Donc oui oui, le jeu … on
peut avoir une approche globale de l’enfant. Mais c’est vrai qu’on va plus s’intéresser à des points bien précis.

Moi : Ok. Et je vais vous poser une dernière question sur votre pratique, quand vous utilisez le jeu en séance, c’est vous
qui choisissez le jeu ou c’est lui ?

Ergo 3 : Ça dépend des objectifs de travail qui sont posés. Dans la mesure où plein de trucs à travailler, si c’est juste les
préhensions que je veux travailler je vais induire un peu quand même en lui disant « bah alors qu’est-ce qu’on fait
aujourd’hui ? » s’il dit quelque chose qui ne me correspond pas, je lui dis « bah non, ça on a déjà fait… on va faire autre
chose » Mais…

Moi : Vous orientez pas mal le choix ?

Ergo 3 : Oui voilà, il a un pseudo choix mais quand même avec des limites et des contraintes. A. si on l’écoutait, on ferait
toujours, toujours, toujours la même chose. Et donc là tu ne progresses pas. Elle adore les puzzles, elle est performante aux
puzzles. Si tu lui demandes elle fait un puzzle. Dès qu’il y a des stagiaires : puzzle. Elle s’engage pas, elle est sûre de ne pas
louper, donc c’est valorisant pour elle. Donc les trucs elle les connaît par cœur. Donc c’est cool, c’est cool. Mais moi en
ergothérapie, mon objectif c’est de la faire progresser. Donc soit je lui fais plaisir, et je reste dans la catégorie puzzle mais
soit il est plus grand, soit il n’y a pas de modèle. Voilà j’essaie de trouver un truc qui soit plus contraignant qui l’oblige à
réfléchir, qui l’oblige à manipuler autrement, qui l’oblige à progresser, à se dépasser. Soit je lui dis « ah non, ça commence à
me plaire, on va faire autre chose. »

Moi : Et du coup quand vous utilisez le puzzle avec elle, c’est pour travailler les fonctions cognitives ?

Ergo 3 : Bah non, parce que les puzzles elle les connaît par cœur. Donc je la laisse faire des puzzles, je vais être beaucoup
plus exigeante avec la manière dont elle approche la pièce, dont elle la range… ça va plus être du machin je te la pète et tu
te débrouilles avec ça. Je lui dis « non mais arrête tu sais comment la mettre tu fais un effort, tu la prends comme il faut. Tu
essaies de ne pas la lâcher avant qu’elle soit le plus proche de la place. » C’est à toi de régler les contraintes aussi. Si elle a
pas besoin de réfléchir, si le puzzle elle le connaît et qu’elle n’a pas besoin de réfléchir, et que cette pièce-là, le point rouge,
elle est là et pas là, et elle voit pas ce que c’est le truc avec le point rouge. Elle n’a pas besoin d’être mobilisée au niveau
intellectuel. Alors là tu vas pouvoir lui demander des efforts au niveau moteur. Là tu lui dis « tu vas faire un effort, tu
essayes de la prendre le plus précisément possible, et tu la tiens, et tu la lâches le plus tard possible. » Tu changes la
contrainte. Elle est contente, elle aura fait un puzzle et toi tu seras contente parce que t’auras travaillé un peu … Mais
choisir pour choisir, on a plus le temps. Les gamins on les voit ¾ d’heure une fois par semaine si c’est pour que les laisser
faire ce qu’ils veulent… Attend, moi on me demande « qu’est-ce que tu veux faire ? » je ne sais pas si je serais tellement, si
j’aurais envie de bosser tout le temps… de me mettre en difficulté. Le but du jeu c’est aussi qu’ils reviennent avec plaisir
donc on ne fait pas une séance de ¾ d’heure, on ne fait pas la même chose pendant ¾ d’heure. On morcèle notre séance. Et
on essaye de faire à la fin quelque chose qui leur fait plaisir, qu’ils réussissent, pour qu’ils aient envie de revenir la
prochaine fois. Et donc là ce moment-là, ça peut être « bah vas-y lâche-toi, fais-toi plaisir, fais ton puzzle. Tu as bien travaillé
le reste, tu fais ton puzzle. » Ou c’est la carotte, tu dis « tu vois ton puzzle, il est là il est prêt. Tu n’as pas fini ça, pas de
puzzle, tu as fini ok t’as le droit. » Donc là effectivement, ils jouent pour jouer. Mais … Je ne sais plus la question….

Moi : C’était par rapport au choix du jeu.

Ergo 3 : Donc oui, en général non. Alors là je pense à un gamin qui vient me voir pour l’apprentissage du clavier et ça le
gonfle ! Mais il a plein de chose à travailler, il n’est pas repéré dans le temps, dans l’espace, les constructions géométriques
c’est la cata ! Donc on fait du clavier parce que c’est pour ça qu’il vient, mais on fait plein d’autres choses aussi. Qu’il aime
ou qu’il n’aime pas… Les tableaux à double entrée, les miroirs, les choses comme ça. Il n’aime pas trop ça, mais on fait aussi
quelque fois des dominos, pleins de truc. Et il a repéré un jeu de billes, tu sais c’est une bille qui se balade sur un plateau et
tu dois la faire passer dans un labyrinthe ? Si je le laissais faire, il ne ferait que ça ! Il ne jouerait que à ça pendant 45 min et
à chaque fois qu’il vient. Donc lui c’est clair que non, lui jamais. Je lui dis « ça c’est pas pour toi, tu en auras un à l’étude, tu
en auras un à la garderie ou n’importe mais ici on n’a pas le temps, on a pas le choix. Je veux bien faire des trucs qui te font
un peu plus plaisir que l’ordi et machin mais pas… » Mais lui non, parce que je sais que son choix ça va être ça, mais jamais,
jamais il aura ça avec moi en ergo, c’est pas possible. Voilà. C’est vraiment au cas par cas les réponses.

Moi : Et au final ça dépend du niveau d’atteinte de l’enfant. Comme vous disiez…

Ergo 3 : Oui aussi, oui oui. Si on en reste aux paralysés cérébraux…

Moi : Après c’est tellement large comme population. Et une dernière question, connaissez-vous le modèle ludique de
Francine Ferland ?

Ergo 3 : le modèle ludique… Nan je ne crois pas, qu’est-ce que c’est ?

Moi : C’est un modèle inventé par une ergothérapeute canadienne qui utilise le jeu dans le but de favoriser l’autonomie
et la qualité de vie de l’enfant. Elle essaye de stimuler et développer les capacités ludiques de l’enfant pour qu’il puisse
se développer grâce au jeu car il permet une approche globale de l’enfant.
Ergo 3 : ok, nan je ne connaissais pas… Je retiens le nom !

Moi : Ok, j’ai fini mes questions, je vous remercie !


Résumé

Le jeu est l’activité essentielle de l’enfant. C’est à travers lui, que l’enfant se
développe et acquiert de nombreuses compétences (motrice, cognitive, sensorielle, sociale,
affective). Cependant, certains enfants atteints de paralysie cérébrale présentent un retard
dans le développement du jeu à cause d’un manque de manipulation et d’expérimentation.

En ergothérapie, le jeu est l’outil privilégié lors de l’accompagnement de ces enfants.


Ce dernier est le plus souvent utilisé comme un moyen pour améliorer des fonctions
déficitaires spécifiques (motrice, cognitive, sensorielle). La priorité est souvent mise sur les
aptitudes scolaires pour les enfants de plus de 6 ans.

Cette étude cherche à déterminer en quoi « jouer » peut être un objectif en


ergothérapie dans l’accompagnement de ces enfants âgés de 6 à 10 ans.

Des entretiens et des questionnaires, interrogeant des ergothérapeutes, ont permis


de révéler que le jeu abordé en tant qu’activité de la vie quotidienne, favorise le bien-être et
le développement de l’autonomie de l’enfant.

Mots clés : Jeu, Ergothérapie, Paralysie Cérébrale, Activité de la vie quotidienne, Modèle
Ludique

Play is an important occupation for every child. Through it, the child grows up and acquires
numerous skills (motor, cognitive, sensorial, social, and emotional skills). However, some
children with cerebral palsy are facing a delay in play’s development as a consequence of
their condition. Their movements deficits affect their ability to interact with, and explore the
environment.

In occupational therapy, play frequently comes to use with those children in order to recover
functional skills (motor, cognitive and sensorial skills). The priority is often on scholastic
aptitudes for children older than 6 years.

The objective of this study is to establish how “play” can be a goal in occupational therapy’s
intervention with children aged from 6 to 10 years old.

Interviews and questionnaires, addressed to occupational therapists showed that, when seen
as a daily life activity, play benefits the well-being of a child and its independence.

Key words: Play, Occupational Therapy, Cerebral Palsy, Daily living activity, Ludic Mode

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