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HER-BAK
« DISCIPLE »
DE LA SAGESSE EGYPTIENNE
Illustration de Lucie Lamy
1956
FLAMMARION
PRÉFACE
Ce livre s’adresse aussi bien aux égyptologues qu’à tous ceux qui, sans
préparation spéciale, désireraient connaître l’étonnante civilisation
pharaonique. Il est né du désir d’exposer en une synthèse vivante, et sous
une forme facilement accessible à la mentalité occidentale, l’ensemble des
problèmes évoqués par l’antique Égypte et de la Connaissance impliquée
dans son œuvre. Cette forme de présentation dialoguée a été imposée par la
nécessité de créer l’ambiance permettant de comprendre le rythme de ce
monde ancien sans le déformer par notre propre point de vue.
Cet ouvrage essaie d’exprimer l’enseignement donné, dans le cadre des
temples thébains, au disciple d’un Sage égyptien. Si nous pouvions, en
suivant son chemin, retrouver la méthode employée par ses Maîtres, nous
aurions en main quelques clés pour le déchiffrement de leur enseignement
symbolique.
Nous pourrions peut-être résoudre la plus grande difficulté qui déroute
notre mentalité analytique : difficulté de discerner, sous l’apparente
complexité du développement de leur mythe, la simplicité essentielle de leur
vision synthétique. Nous pourrions, en adoptant leurs propres méthodes,
constater que l’enseignement égyptien, même lorsqu’il expose le détail des
parties, le fait toujours en synthèse, montrant le lien vital de la partie avec
le tout.
Nous pourrions entrevoir leurs divers modes de formation mentale et
psycho-spirituelle, pour les membres d’une élite connaissant la destinée de
l’Homme, et sachant transcrire, sous la signature du symbole, les lois de
l’Univers qu’il résume.
Tel est le but et le programme d’Her-Bak Disciple : partager avec le
lecteur sa propre initiation aux arcanes d’une Sagesse qui fut la source de
toute la civilisation méditerranéenne.
Mais notre formation rationnelle est si éloignée de la mentalité
pharaonique, que Vexpression symbolique des thèmes égyptiens cache à nos
jugements préconçus Vétendue de leurs connaissances.
Pour le lecteur qui, généralement, n’a pas même le point d’appui d’une
documentation sommaire sur « l’état de la question », il n’est possible
d’apprécier ni l’intérêt actuel de la révélation pharaonique, ni le progrès
réalisé dans sa compréhension.
C’est pour cette raison que nous avons adjoint à l’ouvrage – en
quatrième partie – une série de « Commentaires » développant pour le
lecteur moderne les sujets d’Her-Bak ne pouvait traiter qu’en mode
égyptien.
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Pour la même raison, nous avons annexé à l’histoire de « Pois Chich »
un Appendice documentaire donnant un aperçu concis des bases
classiquement admises pour l’étude de l’Égypte ancienne.
RÉSUMÉ
DE
HER-BAK « POIS CHICHE
La jeunesse d’Her-Bak et les diverses phases de sa première formation
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font l’objet d’un ouvrage intitulé Her-Bak « Pois Chiche » .
Un petit garçon égyptien, fils d’un chef de cultures du domaine de
Menkh, grand Maître des Techniciens, se trouve, par une rencontre fortuite,
en contact avec le « Sage » de ce temps-là. Celui-ci, ayant pressenti chez
l’enfant les qualités caractéristiques d’un être prédestiné, lui conseille
d’abord, pour développer ses dons innés, de cultiver la terre et d’observer la
vie des plantes et des animaux.
Un harpiste aveugle, philosophe intuitif et sage, est le premier maître de
Pois Chiche dont le nom à double sens signifie le pois chiche et aussi « face
de faucon » – c’est-à-dire d’Horus –, parce que ce pois porte l’image d’une
face de faucon, l’oiseau d’Horus.
Lorsque son expérience de la nature est jugée suffisante, le seigneur du
domaine, Menkh, devient le second maître de Pois Chiche. Il le fait entrer à
l’école des scribes, puis l’oblige à prendre contact avec les lois de la
matière par l’apprentissage des diverses techniques. Pendant ces quatre
années de culture préparatoire, la précocité de l’enfant prédestiné le met aux
prises avec différents cas de conscience, qui développent en lui le sens de la
responsabilité et forment son jugement. Enfin Pois Chiche se trouve heurté
par les inégalités sociales et les faiblesses de certains dirigeants. Il est
obsédé par le désir de connaître les secrets du Temple et la réalité des Neter,
mais il se révolte devant ce qu’il nomme « superstition et crédulité
populaires ».
Le Sage entre alors en jeu et lui pose le problème du choix entre deux
chemins : la formation humaine d’un chef actif dans le gouvernement du
royaume, ou l’acquisition de « maîtrise » qui l’acheminera vers la
« Connaissance ».
Ayant pesé les obstacles causés par sa nature instinctive, et d’autre part
l’appel de sa destinée, Pois Chiche choisit le chemin de Sagesse et se
soumet à la direction du Maître, qui lui donne son nom d’Her-Bak (face
d’Horus) et le conduit vers le Temple.
*
**
Dans la troisième partie de l’ouvrage, Her-Bak est introduit dans le
Temple extérieur, dit « Péristyle », et le Sage le présente à ses nouveaux
professeurs. Ceux-ci, qui n’ont pas de contact avec l’enseignement
ésotérique du Temple intérieur, rebutent d’abord Her-Bak par la sécheresse
de leurs conceptions utilitaires. Il accepte cependant cette discipline
mentale, avec les heurts et les épreuves qui forment son discernement. Her-
Bak reçoit alors des leçons plus vivantes sur le sens symbolique de « Nout,
mère céleste », des formes architecturales, et des animaux sacrés. Il apprend
à connaître l’Humain, jusqu’à la nuit d’épreuve où la révélation de « son
propre Neter » lui ouvre enfin la porte du Temple intérieur.
Mais avant d’être admis au grand enseignement, le disciple, introduit par
le Sage, est présenté au Pharaon.
*
**
L’histoire d’Her-Bak se situe entre les XXe et XXIe dynasties, dans le
cadre des temples de Moût et d’Amon (actuellement Karnak), donc sur la
rive orientale du Nil, face à la montagne thébaine qui domine la Vallée des
Rois.
PREMIÈRE PARTIE
I
LA QUESTION
LA RÉPONSE
Aqer s’est arrêté devant l’un d’eux ; il laisse son ami contempler la petite
maison charmante : un bloc rectangulaire d’une éblouissante blancheur.
Tout est minuscule mais parfait : les murs construits en briques enduites,
sont lisses comme plaques de calcaire scié ; des petites fenêtres, haut
placées, animent les murs latéraux de leurs stores en vannerie nubienne ; la
corniche est rehaussée de couleurs vives ; la porte est close par une serrure
ouvragée. L’ancien menuisier admire en connaisseur les joints de l’huisserie
faite de bois de meri rouge et d’ébène ; il s’écrie :
— Quel travail admirable ô Aqer ! Quel ajustage ! En vérité, c’est
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menkh .
Aqer approuve en riant :
— Tu ne saurais mieux dire, ô mon ami.
Sur un mot, le portier les introduit ; ils entrent dans la salle à quatre
colonnettes au milieu desquelles devisent amicalement trois personnages,
bien connus d’Her-Bak. L’un d’eux, le Maître de maison, les regarde entrer
en souriant. Her-Bak, muet d’étonnement, reste chevillé en sa place :
— Mon seigneur Menkh !…
Un geste de Menkh le précipite à ses pieds, mais le Seigneur le relève et
le serre dans ses bras en disant :
— Ne tremble pas mon fils : n’es-tu pas mon invité en ce jour ?
Her-Bak se ressaisit ; il salue tour à tour le Sage et Nefer-Sekherou, qui
l’accueillent cordialement avec son compagnon ; puis il prend place sur le
tabouret qui lui est assigné par Menkh.
Aqer semblait fort à l’aise en ce milieu ; la grande déférence qu’il
témoignait envers ses hôtes était compensée par le ton familier de ses trois
supérieurs.
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Quant à l’ancien « porteur-de-sandales », sa joie était si grande qu’il
oubliait d’être gêné par son rôle nouveau d’invité.
Deux petits serviteurs nubiens s’affairaient autour des dressoirs chargés
de coupes de fruits gardés au frais sous des feuillages, de gâteaux au miel,
de lait cuit, de vins de dattes et de raisin. Ils placèrent une table basse
auprès des deux amis, et la couvrirent des vaisselles nécessaires.
Her-Bak, fort occupé à répondre aux questions de Menkh, suivait d’un
regard vague tous leurs préparatifs. Un négrillon s’approche avec un pot de
bronze en sa cuvette.
— Le vase pour l’eau, Excellence !
Her-Bak suit l’exemple d’Aqer, il baigne ses doigts et ses lèvres…
— La serviette, Monseigneur !
Le second négrillon lui essuie les doigts avec respect.
Her-Bak un peu troublé, s’adapte promptement à l’ambiance ; il se laisse
servir, répondant avec enthousiasme aux questions, retrouvant avec l’ancien
maître toute la verve de Pois-Chiche.
Le Sage et Nefer-Sekherou furent instruits en un moment des réactions
diverses d’Her-Bak, écolier, néophyte, et disciple.
Menkh laissait épuiser l’effervescence du « revoir » ; chacun observait le
« nouveau », enregistrant les traits saillants qui précisaient son caractère. Et
le nouveau parlait, laissant entasser dans sa coupe les gâteaux et douceurs
qu’il dévorait distraitement. Les deux négrillons prenaient plaisir au jeu ;
leur regard malicieux le mit en garde… il éloigna son tabouret :
— Qu’ai-je fait ? je ne suis pas un crocodile apprivoisé !
Le Sage esquissa un sourire indifférent :
— Tout s’apprend ; pour le disciple, chaque geste est sujet de maîtrise.
Her-Bak accepta franchement la leçon, il s’excusa de son verbiage ;
Menkh l’en empêcha.
— Aujourd’hui tu es un ami parmi nous, laisse parler ton cœur.
Her-Bak dit :
— En ce cas, ô mes Maîtres, veuillez comprendre que mes yeux ne sont
pas habitués à mon nouveau milieu ; n’y pourriez-vous jeter quelque
lumière ? J’ai questionné Aqer, sans doute ai-je été indiscret : il n’a pas pu
me répondre.
Le Sage interrogea Aqer ; celui-ci répéta les questions d’Her-Bak sans
rien omettre. On l’écouta, mais nul n’ouvrit la bouche pour satisfaire la
curiosité du nouveau.
Les négrillons apportèrent les lampes ; ils offrirent du vin de dattes : on
les renvoya comme on chasse les moineaux, et le calme du soir imprégna
l’atmosphère. Menkh fit approcher les sièges des disciples ; le cercle se
forma. Alors le Sage dit à Nefer-Sekherou :
— O toi qui es l’habile conseiller des relations sociales, veuille donner à
mon disciple quelques éclaircissements sur ce sujet ; s’il ne démérite point,
il vivra dans notre intimité : il est bon qu’il en connaisse les plans et les
directives.
Nefer-Sekherou dit à Her-Bak :
— Tu as connu divers aspects de la vie commune et sociale ; tu as vécu
parmi des paysans ; tu as observé des gérants, des scribes, des
fonctionnaires ; tu as eu l’occasion d’apprécier la valeur des bons ou des
mauvais artisans. Quelle impression as-tu gardée quant à la qualité de tous
ces employés ?
Her-Bak réfléchit, soupira, et n’osa formuler son avis. Menkh dit :
— Ta présence parmi nous nécessite une absolue franchise ; dis toute ta
pensée Her-Bak.
Le nouveau disciple se vit dans l’obligation d’obéir. Il répondit :
— J’ai donné mon amour et mon admiration à mes Maîtres ici présents, à
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mon instructeur Pasab, à Nadjar, au Maître potier, au harpiste Mesdjer , et
à quelques artisans exceptionnels. A part ceux-là, je n’ai connu que des
paysans, des ouvriers, des fonctionnaires, des scribes, même des prêtres,
avides pour le gain et la faveur des Grands plutôt qu’amoureux du métier et
de la Vérité ! Et je suis étonné qu’une telle différence entre ces hommes et
les Maîtres permette de réaliser de grandes choses en ce pays.
Menkh regarda le Sage qui acquiesça volontiers :
— Le problème est clairement posé !
— En effet, dit Menkh : comme tu l’as constaté, il n’y a point de
possibilité d’infuser systématiquement la Sagesse dans la masse.
« Cependant, observe les faits. Tu peux traverser en tous sens les Deux-
Terres : dans tout le pays cultivé, jalonnant les pistes du désert, tout le long
des rives du fleuve, partout tu trouveras des temples, des monuments
funéraires et des stèles, couverts de textes sculptés, ornés souvent de
matières précieuses œuvrées en perfection.
« En tous lieux tu rencontreras des sanctuaires en construction ou
transformation, des chantiers de carriers et de Maîtres de la pierre qui
érigent des colonnes, des statues ou des stèles ; des équipes de sculpteurs et
de peintres qui modifient sans cesse les inscriptions des monuments.
Imagine la foule innombrable de ces travailleurs répartis dans tous les
nomes des Deux-Terres, puisque chaque nome a ses temples modifiés ou
« remis à neuf » selon la nécessité de chaque Temps.
« Or tu apprendras plus tard les formes compliquées exigées par la
« langue » architecturale pour la taille de chaque pierre, ses mesures
différant selon sa destination, la complexité des détails anormaux qui
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inscrivent les secrets de dates et de Nombres dans chaque mur . Cette
précision inconcevable, et la difficulté de calculs et d’exécution, nécessitent
pour ces travaux la coopération d’experts, aussi bien dans la préparation des
ensembles que dans l’exécution technique architecturale et graphique.
« Essaie d’imaginer combien le renouvellement d’un seul sanctuaire
exige de surveillants initiés et d’équipes parfaites ; multiplie ce nombre par
celui des chantiers qui couvrent les Deux-Terres, et tu pourras te demander
comment se fait le recrutement d’une telle multitude de techniciens
compétents.
Her-Bak stupéfait murmura :
— D’où viennent-ils ? Je ne peux pas le comprendre d’après ce que mes
yeux ont vu !
Menkh continua son exposé :
— Apprends à raisonner en te basant sur l’évidence. Mets en parallèle les
petits artisans qui pourvoient aux nécessités du peuple et des domaines,
avec les techniciens employés pour nos œuvres durables et les Maîtres qui
veillent à la perpétuité des traditions : pourrais-tu les classer dans les
mêmes catégories ?
« Les fondeurs de ces alliages extraordinaires utilisés dans l’outillage de
taille pour les matières les plus dures, sont-ils à comparer avec les
fabricants d’instruments vulgaires ?
« Faut-il mettre sur le même pied les propriétaires de domaines, confinés
dans l’unique souci de leurs intérêts personnels, et les possesseurs de
connaissances traditionnelles capables de faire prospérer extraordinairement
les vignes de Khonsou, aussi bien que les magnifiques bovidés d’Amon ?
Tu trouveras, parmi nos Sages, des hommes qui se sont vantés de posséder
ces capacités et d’avoir, cependant, réalisé ce chef-d’œuvre qu’est une
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statue colossale ou l’édification d’un temple .
« Ou bien tu devras reconnaître, devant les preuves matérielles, le
caractère universel de leur connaissance, ou bien tu devras admettre des
fonctions symboliques… qui n’enlèveraient rien à ce fait que les
personnages en question ont laissé dans leurs œuvres architecturales les
témoignages indiscutables de leur science.
— Ont-ils réellement cumulé ces fonctions ?
— Ce n’est pas l’accomplissement journalier d’une fonction qui importe,
répondit le Sage, mais la connaissance fondamentale qui en donne la
maîtrise et en permet la transmission.
« Le premier élément nécessaire à l’enseignement est le « maître » ; le
second est l’élève capable de continuer la tradition du maître. Mais laisse le
chef des Techniciens terminer ce qu’il voulait te démontrer.
— Il y a, dit Menkh, dans notre situation, un paradoxe inexplicable pour
celui qui ne connaît pas notre organisation intérieure, et tu l’as fort bien
pressenti, Her-Bak.
« Tu trouveras parmi le clergé la même différence que dans les autres
professions : si tu considères les prêtres-fonctionnaires des temples, même
de hauts grades, qui assurent leur vie matérielle et sociale par un titre –
souvent transmissible héréditairement –, tu ne peux pas les confondre avec
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les initiés à nos hautes Sciences, ceux dont la Connaissance fut acquise
par un désintéressement et une impersonnalité sévères, garanties de leur
discrétion. Les preuves en sont : la continuité de l’enseignement traditionnel
transmis sur les murs de nos temples en chaque Temps, le secret inviolé qui
le protège, et l’anonymat de leurs œuvres.
« Tu connais assez les milieux de fonctionnaires et de scribes pour savoir
qu’on ne peut pas dominer leurs passions pour les conduire normalement à
cette impersonnalité. Il faut donc qu’il existe un moyen de prélever, à
travers ces différentes classes, les éléments capables de recevoir un
enseignement supérieur qui élève leurs professions à une qualité
extraordinaire, tout en assurant leur silence et leur incorruptibilité.
« Mais si ce moyen existe, il explique pourquoi nous n’avons pas de
castes ni de classes exclusivement délimitées, puisque les éléments d’élite
sont extraits de toutes ces classes, puisqu’ils peuvent passer d’une
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profession à une autre et, éventuellement, les cumuler .
Her-Bak se réjouit de cette explication :
— J’en ai connu plusieurs exemples, et mon Seigneur Menkh en est un
témoignage.
— Sans doute, Her-Bak, mais ne perds pas de vue le fossé qui sépare les
deux éléments du problème : d’une part, les hommes de notre pays sont
classés socialement selon leur profession, et cet ordre officiel peut être
modifié sur demande justifiée, avec acquiescement des gouvernants. Cet
ordre – qui régit les fonctionnaires, les scribes et même les prêtres, les
artisans, employés et paysans participant à la vie fonctionnelle de l’Égypte
–, cet ordre est passible d’injustices et de faiblesses inhérentes à la nature
humaine. Si notre Science et nos techniques dépendaient de cette
organisation, elles auraient – comme en tout pays – dévié selon les caprices
et les interprétations particulières.
« D’autre part, le témoignage de nos œuvres et de nos textes rend
évidente une continuelle fidélité à l’unité de notre tradition.
« Il y a donc coexistence de deux réalités indiscutables : l’une est
l’imperfection des hommes, grands et petits, qui n’ont d’autre horizon que
les devoirs asservissants de la vie matérielle et sociale ; l’autre est la
splendeur et la perfection de l’œuvre accomplie pour le Temple.
« Telle coexistence est invraisemblable pour ceux qui ignorent la
classification secrète que nous allons te révéler, et qui est basée sur ce fait
que la valeur individuelle est appréciée par des Maîtres compétents, selon la
qualité du cœur et la valeur professionnelle.
Le Sage confirma les paroles de Menkh et les compléta :
— La difficulté est de discerner, à chaque échelon de la société, les
éléments évolutifs, les aptitudes méconnues, les êtres disposés à un progrès
rapide. Et lors même qu’ils sont « aperçus », il faut leur donner les moyens
de révéler leurs « possibilités ».
« On n’impose pas aux hommes une vertu que leurs passions
contrecarrent en toute occasion ! Il faut que la joie, provoquée par l’éveil de
leurs dons innés, suscite chez eux la conscience de la noblesse véritable :
noblesse du sens altruiste, noblesse du travail pour une cause
impersonnelle, noblesse de l’incorruptibilité.
« Pour obtenir tel résultat, la constitution sociale n£ suffit pas, car les
efforts individuels y sont pesés selon les succès matériels, quels que soient
les moyens employés. Une balance plus subtile est nécessaire :
l’incorruptible balance de Maât. Or nul n’est compétent en ce domaine s’il
n’a lui-même été formé à cette école. C’est pourquoi un organisme
supérieur doit intervenir, un organisme de « conscience psychologique »
pénétrant l’ordre social sans le violer, mais qui l’empêche d’étouffer les
« lotus » qui veulent chercher la lumière à la surface.
Nefer-Sekherou, sur la demande du Sage, entreprit alors d’expliquer à
Her-Bak cette structure intérieure :
— Notre société vivante est conçue comme un arbre qui a racines, tronc,
feuilles et fruits. Chaque organe de l’arbre a ses lois de génération et de
production ; nous devons te montrer comment sont choisies les cellules du
tronc pour que les cellules de la moelle soient puissantes, capables de
vivifier l’arbre entier et de perpétuer sa force à travers toutes les
tribulations. La Sagesse est la racine, ou point fixe, de cet arbre.
« Imagine un noyau autour duquel vont en s’élargissant trois cercles ou
disques, concentriques comme les cercles formés par les couches
concentriques du tronc autour de la moelle de l’arbre. Le noyau est le centre
vital de notre société ; il englobe la source de sagesse dont le Roi V.S.F. est
le bras agissant.
« Je ne détaillerai point ce noyau. Que ceci te suffise aujourd’hui. Le
premier cercle qui l’entoure est le cercle intérieur, ou d’initiation aux divers
secrets enseignés par le Temple ; le deuxième cercle est mixte ; le troisième
est extérieur, c’est-à-dire sans aucun rapport avec la vie particulière du
premier. Beaucoup de fonctionnaires en font partie : des artisans – et même
des prêtres subalternes –, des scribes, des cultivateurs et gérants de toutes
classes.
« Ces trois cercles s’incorporent, sans délimitation apparente, dans les
diverses classes de notre peuple. Or de même que, dans le tronc d’arbre, la
couche génératrice des cellules est toute proche de l’écorce, et que parmi les
cellules émises, certaines sont repoussées vers l’extérieur, et d’autres vers
les couches intérieures du bois, de même le peuple peut générer des êtres
capables de monter de cercle en cercle vers le centre. N’es-tu pas un
exemple de celles-ci, toi, Her-Bak, alors que ton père est resté parmi les
cellules de la masse ?
« Considère maintenant le deuxième cercle – intermédiaire ou mixte –
dans lequel évoluent des gens de classes diverses : prêtres, scribes,
fonctionnaires de tous grades, techniciens, artisans, qui manifestent des
possibilités compréhensives sans présenter encore les garanties suffisantes
de sécurité pour les instruire davantage.
« C’est un cercle d’observation, où sont offerts les moyens de culture par
les groupements, corporations, rites et fêtes, et par les diverses techniques ;
là sont sélectionnés les sujets admissibles au cercle intérieur.
Her-Bak s’étonnait de plus en plus :
— Comment l’ai-je ignoré ? Ai-je fait partie d’un de ces cercles sans le
savoir ?
— Nul ne connaît leur existence avant d’être de l’intérieur : il n’est point
de barrières visibles. Les « extérieurs » n’ont pas de secrets à cacher ; les
mixtes reçoivent les avantages qui leur conviennent : ils n’ont rien à
envier… si ce n’est la Sagesse. Seuls, ceux de l’intérieur doivent connaître
les autres pour savoir ce qu’ils doivent taire ou révéler.
« Car toutes nos techniques et toute notre science comportent certaines
clés, intransmissibles à l’ambitieux qui les profanerait, à l’insoumis qui les
déformerait, au méchant qui en abuserait.
Her-Bak admirait cette organisation insoupçonnée ; il demanda :
— Accepter d’en faire partie oblige donc à l’obédience, et à des qualités
qui ne sont pas exigées pour les autres ?
— N’est-ce point évident ? La participation de tels dons ne demande-t-
elle pas une conscience supérieure ?
— Pour mériter un tel bonheur, je serai le pire ennemi de mon propre
animal !
Le Sage acquiesça :
— Nous recevons ton engagement. Remarque aussi que si tu n’en étais
point capable tu n’aurais pas été invité parmi nous ; car la vie de ce groupe
est tenue à l’abri des incursions et indiscrétions extérieures, afin d’éliminer
intrigues et obstacles que les intérêts personnels suscitent inévitablement.
« Ainsi nous obtenons cette harmonie et cette paix qui t’ont émerveillé.
La paix est le fruit d’un combat, non d’un sommeil. Nos amis sont vivants,
mais leur but étant identique, la « recherche » domine l’intérêt égoïste, et le
combat est en soi-même, jamais contre son voisin.
— Je veux encore, dit Nefer-Sekherou, préciser un détail essentiel. Dans
le dessin des cercles concentriques, trace deux triangles dont les bases
touchent l’extérieur et dont les sommets se joignent au centre ; dans l’un
situe le Temple, et dans l’autre la cour du Pharaon : tu auras une idée
schématique, mais exacte, de la pénétration des deux grands pouvoirs à
travers les trois cercles.
« Dans l’intérieur, dans le mixte et dans l’extérieur, tu trouveras des
membres de la Cour, du Clergé et des Écoles ; car il ne s’agit point ici de
distinctions honorifiques, mais de qualités évidentes et d’états de
conscience éprouvés.
« C’est ainsi que tel dignitaire peut être un « extérieur » tandis que son
collègue est déjà destiné au grand enseignement ; c’est pourquoi l’on voit
certains d’entre eux cumuler des fonctions apparemment inconciliables ;
quelques-unes sont réelles, d’autres symboliques et comprises seulement de
ceux qui « savent ».
— Devrai-je donc, demanda Her-Bak, douter des titres que se donnent
les possesseurs des stèles et des tombeaux ?
— Tous ceux-là, s’ils ont été autorisés à se « perpétuer » ainsi, ont dû
s’adapter au symbole du nom qui leur fut imposé. Leur fonction peut être
réelle, parce qu’adéquate à leur nature ; mais s’il est bon qu’ils y ajoutent
un pur symbole, ils n’hésitent point car c’est un enseignement qu’ils
inscrivent et non leur vie.
— Je ne m’étonnerai plus, dit Her-Bak, de l’œuvre réalisée avec une telle
abnégation ! Voici donc des hommes qui ont délibérément accepté d’effacer
leur personnalité pour devenir les représentants d’un symbole ? …
L’émotion du disciple toucha les Maîtres ; un instant de communion les
fit vibrer à l’unisson. Her-Bak se prosterna dans un profond respect.
— O vous qui m’avez fait l’honneur de m’appeler, je veux servir comme
vous servez, dussé-je être le dernier de vos serviteurs !
Menkh se leva ; il prit une coupe, il la remplit de vin et l’offrit au Sage
qui, l’ayant portée à ses lèvres, la présenta à son disciple en disant :
— Nous n’avons pas encore bu le vin ensemble ; bois, Her-Bak, et que le
silence soit dans ta bouche désormais.
*
**
Chacun ayant bu le vin, Menkh reprit sa place auprès du Sage ; Her-Bak
vint s’asseoir familièrement à leurs pieds et leur dit :
— Lorsque j’étais Pois Chiche, mon derrière a reçu trois fois la réponse à
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mes questions indiscrètes sur le Temple ; j’en comprends maintenant la
raison ! Oserai-je désormais interroger sans risquer l’insolence ?
Menkh répondit en riant :
— Tu le peux, puisque le Maître de Sagesse t’a fait l’honneur de
t’adopter comme disciple sans passer par le stade d’étudiant.
— Faites-vous donc telle différence entre l’étudiant et le disciple ? …
Comment se peut-il que pareille chose soit accordée au serviteur-ici-
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présent ?
Le Sage dit à Her-Bak :
— Je me suis fait ton répondant devant les Sages de tous les temps pour
hâter ta formation : ai-je été imprudent ?
— O mon Maître, je serai sourd, aveugle et muet, plutôt que de jamais
trahir !
— O incorrigible ! muet suffit : ouvre au contraire tes yeux et tes
oreilles, car il te sera demandé un effort exceptionnel. La différence est
grande entre les étudiants, instruits en nos sciences et nos techniques, et les
disciples, initiés à leurs causes profondes.
— Les étudiants du Temple couvert sont-ils dans le cercle intérieur ?
— Ils n’en font pas partie avant d’être arrivés à un accomplissement qui
comporte certains secrets de métier. Quelques grands techniciens, quelques
hauts fonctionnaires sont des nôtres, sans cependant avoir reçu la formation
du disciple. Celle-ci demande une transformation qui ouvre l’intuition à la
connaissance des Causes.
« Inversement, le disciple fait toujours partie de notre cercle ; mais il est
obligé à une totale soumission.
— A ce prix, qui donc ne l’accepterait pas ?
— Tu te trompes, mon fils, la volonté n’y suffit point : la prédestination
est nécessaire.
— Qui donc pourrait deviner l’être prédestiné ?
— Ceux qui sont cultivés pour cela ; tu en connaîtras les moyens si tu
parviens jusqu’à ce point.
— N’est-ce pas un monde nouveau que je découvre, murmura le
disciple. Comment peut-il se maintenir en harmonie avec les autres
hommes ?
Nefer-Sekherou répliqua :
— Tu peux dire que c’est lui qui rend possible l’harmonie. Si la foule se
gouverne selon ses instincts, les plus forts brimeront les plus faibles malgré
toutes les révoltes de ceux-ci, et les passions humaines auront toujours le
sceptre en main, quelle que soit la classe dirigeante ; car l’avare envieux
veut gouverner pour posséder, et l’ambitieux veut posséder pour gouverner ;
le sceptre de ces deux-là est le fouet. Or la masse courbe l’échiné devant
celui qui tient le fouet ! Alors le pouvoir s’échelonne entre les plus habiles
accapareurs.
— N’y a-t-il pas eu des révoltes en pareil cas ?
— Qu’en est-il advenu ? L’anarchie a changé les maîtres, l’opprimé est
devenu l’oppresseur ; il en est ainsi chaque fois que les privilèges sont
accordés selon l’importance des biens et des revenus, ou selon la naissance.
— N’est-ce pas trop souvent le cas sur notre Terre ?
— Hélas ! il en est ainsi pour certaines charges, non point cependant
pour nos techniques secrètes ni pour les fonctions qui exigent la
connaissance des Lois Universelles. On ne peut pas empêcher totalement
l’injustice dans le monde extérieur, car les passions humaines sont
indomptées. Mais si le cercle intérieur est vivant il donne l’impulsion au
pays, comme le feu de la moelle, à travers ses canaux conducteurs, anime
tous les organes.
« Ces canaux sont nos Frères, formés selon les traditions de hiérarchie
qualitative ; ils maintiennent le principe qui donne la suprématie à la
véritable valeur professionnelle et morale.
— Ces Frères sont-ils les grands dignitaires du royaume ?
— Dignitaires ou non, ce ne sont pas leurs titres qui importent ; ils jouent
le rôle de ferments qui vitalisent toute la pâte selon la spécification du
moment.
— Alors ce sont des Sages ?
— Ils suivent les impulsions des Sages de leur Temps.
— Ont-ils quelquefois gouverné le pays ?
— Dans les grandes époques ils l’ont fait de manière effective ; mais en
tous temps ils ont puisé leur force dans cette Fraternité, ce qui leur
permettait d’affirmer sans vanité leur réelle Sagesse : car cette Sagesse n’est
pas l’œuvre d’un homme, mais d’une formation traditionnelle.
« Dans les périodes de déchéance, ceux qui ont survécu ont joué un rôle
effacé, évitant la destruction totale des racines, sauvegardant ces trésors et
legs de Sagesse, pour les transmettre aux successeurs.
Aqer avait écouté attentivement Nefer-Sekherou ; il se permit une
objection :
— Il n’en est pas moins étonnant que ces bases traditionnelles soient
restées, immuables, malgré les troubles et les invasions ; car nos lettres, nos
symboles, les secrets du canon et des mesures, n’ont jamais été ni perdus ni
profanés depuis les Anciens Temps…
Le Sage approuva les paroles d’Aqer.
— Notre science des Nombres, et certaines clés qui en découlent, nous
ont permis, dit-il, de prévoir les dates néfastes et de prendre les précautions
nécessaires : l’immuabilité dont tu parles en est précisément le témoignage.
Nefer-Sekherou ajouta :
— Le fait que nos envahisseurs n’ont jamais imposé leurs doctrines,
mais se sont adaptés aux nôtres, est encore une preuve de la valeur effective
de notre Connaissance, puisque les nouveaux venus ont trouvé leur intérêt à
l’adopter.
— Notre histoire te confirmera ce fait, dit Menkh à Her-Bak : ce fut
ainsi, en vérité ! Quant à nos troubles intérieurs, c’est la simplicité de nos
mœurs qui nous a permis d’en éviter les conséquences, c’est-à-dire une
chute définitive ; notre richesse métallique aurait rendu possible un échange
considérable avec les pays environnants : nous avons réduit cet échange à
l’essentiel ; nous avons évité ce qui eût introduit le luxe personnel et nous
eût obligés à remplacer le « troc » par une valeur d’échange entre
particuliers.
« Car lorsque le luxe devient indispensable, la prépondérance est donnée
aux riches ; alors la société n’est plus régie par le principe de Qualité, mais
par favoritisme et cupidité.
Aqer répliqua :
— Cependant le luxe aurait accru l’émulation des artisans !
Nefer-Sekherou répondit :
— Nous appliquons le luxe aux choses impersonnelles : culte,
monuments, représentation symbolique : nous l’appliquons même pour la
vie privée lorsqu’il peut apporter l’idée de Qualité en quelques rares objets,
sans tomber dans l’erreur de la complication et de l’âpre recherche de la
quantité. Certes, Menkh avait raison : lorsque la classe dirigeante n’est pas
sélectionnée par la Qualité, elle l’est forcément par la richesse matérielle ;
c’est toujours l’annonce de la déchéance de cette société, et le plus bas
échelon qu’elle puisse atteindre.
Her-Bak interpella son Maître :
— Je ne vois pas clairement l’importance de cette idée de Qualité.
— Il y a, répondit le Sage, deux tendances qui dirigent le choix et l’effort
des humains : la recherche de la quantité et la recherche de la qualité ; ces
deux tendances classent les hommes, car les uns suivent les voies de Maât,
les autres la satisfaction de leurs instincts animaux.
« La quantité se rapporte aux valeurs matérielles et à leur possession.
Elle est gouvernée par la déesse terrestre de la fécondité. Apet-Taourt
(Touéris).
« Apet est le symbole des nombres et des mesures matérielles : Ta-ourt,
31
ventre toujours plein des semences qu’il fait croître et multiplier .
32
« La quantité s’exprime par âch (ou âcha ) qui signifie : nombreux,
33
multiplicité ; or, tu remarqueras que le renversement de âch est châ – le
sable – dont l’un des caractères est la multiplicité des grains.
« La mentalité quantitative, expression de la conscience cérébrale, est la
considération analytique des parties, sans lien vital entre elles.
« La Qualité « en soi » est la puissance créatrice. La création manifeste
une hiérarchie de qualités spécifiées, qui sont les aspects multiples du
grand Neter et les attributs des Neter ; donc elles appartiennent au monde
des Causes, c’est-à-dire qu’elles se rapportent aux « valeurs » qui forment
et régissent la matière ; mais elles se manifestent dans la Nature qui est le
monde des phénomènes, et deviennent alors perceptibles et appréciables par
comparaison.
« Nous attribuons aux diverses qualifications de la perfection des noms
déterminés par leurs aspects matériels : menkh, àqer, an.
« Pour menkh, l’idée d’assemblage par tenons et mortaises spécifie l’idée
d’excellence dans le sens de complexion liée, de jonction parfaite ; l’idée
d’exactitude, correction, conformité, précision.
« Pour àqer, l’idée matérielle est la surface polie, nettement définie, sans
défaut : « une femme brillante de àqeret », au teint lisse, poli ; la dernière
préparation d’un mur, poli, stuqué, avant d’y inscrire un texte. Cet aspect
matériel spécifie l’idée d’excellence, dans le sens d’accomplissement d’une
phase ou d’une fonction définie, d’un état ou d’un chemin délimité, àqer
exprime l’idée d’une qualité fixée, d’un état achevé, d’un résultat acquis.
« Pour an, l’œil a été choisi pour déterminer ce mot qui exprime
l’individualisation de la Qualité ; an est donc la manifestation – ou
34
extériorisation – de la qualité propre à un être ou à une chose Le symbole
est exact, car un œil révèle – par sa couleur et par sa forme – les qualités
35
énergétiques de l’homme ainsi que ses réactions organiques et morales .
« Mais sur toutes les qualités particulières dominent deux Qualités
essentielles : l’une est un rapport d’harmonie entre la « chose » et son
attribution ; nous l’exprimons par her ; l’autre est l’intensité vitale propre à
la « chose » considérée, intensité qui lui donne un pouvoir
d’accomplissement et de « continuité » ; nous la nommons nefer. Ce mot
nefer exprime, pour la chose ainsi qualifiée, ce qu’est le souffle pour le
sang, la force nerveuse pour le corps, et la puissance séminale pour
l’individu.
« Le principe de nefer est le principe qualitatif. Il ne peut être ni
dénombré ni mesuré matériellement. Nos facultés cérébrales et sensorielles
ne nous permettent d’apprécier les qualités que par la spécification qui
résulte de comparaisons des quantités : une matière plus ou moins dure, un
homme plus ou moins fort, plus ou moins habile ; cette appréciation est
relative aux possibilités de perception de chaque individu. Il en est de même
pour des qualités d’ordre moral qui se mesurent par les actes.
« La plante a plusieurs qualités perceptibles sensoriellement, telles que sa
couleur, sa saveur, son odeur ; mais elle possède aussi certain pouvoir
thérapeutique plus subtil que ces qualités apparentes, et ce pouvoir est une
36
des caractéristiques de sa qualité vitale, ou principe qualitatif .
« Ce principe qualitatif – nefer – est perceptible pour nous par
l’intelligence du cœur.
— Mon Maître enseigne-t-il que l’Intelligence du cœur ne peut pas se
tromper ?
— Ce que nous enseignons, Her-Bak, c’est que cette « Intelligence du
cœur » est la vision du réel ou communion avec le réel, c’est-à-dire avec ce
qui est en réalité, c’est-à-dire encore avec la nature et la qualité essentielle
de la chose considérée. Or cette vision (ou connaissance) intégrale exclut
toute possibilité d’interprétation personnelle – intellectuelle ou émotive –,
ou bien elle ne correspond plus à ce que nous nommons « Intelligence du
cœur » ; car c’est cette interprétation qui est faillible, parce que susceptible
de « jugements » subjectifs.
« Chez l’animal, surtout sauvage, cette intelligence est résumée en ce
qu’on appelle l’instinct, qui ne se trompe pas parce qu’il ne risque pas
d’être dévié par le raisonnement mental. Chez l’homme elle devient
l’intuition lorsqu’elle peut être traduite sans erreur par la conscience
cérébrale.
Her-Bak résuma ce qu’il avait compris :
— C’est donc cette intuition qu’il importe de cultiver pour arriver à
percevoir les qualités vitales – nefer – des choses et des êtres, et leur qualité
harmonique, her ?
Le Sage répondit :
— Nous la cultivons lorsque nous incitons l’artisan au souci de la qualité
dans le moindre travail, lorsque nous éveillons, chez nos étudiants, la
conscience des rapports qui relient au Ciel les choses de cette Terre, et plus
généralement lorsque nous formulons les lois analogiques, enfin lorsque
nous exprimons, par la figuration des Neter et par les symboles de nos
lettres, les fonctions et les qualités de la Nature.
« Celui qui se laisse éduquer par cette symbolique constante devient
rapidement un « ouvert-de-cœur ».
Nefer-Sekherou compléta ce discours en répondant à la question d’Her-
Bak qui l’avait motivé :
— Dans le cas social qui t’intéressait, la « sélection qualitative » des
individus est un choix judicieux déterminé par des facultés et les dons innés
qui garantissent l’accomplissement parfait dans le métier ou la profession ;
ce choix doit être ensuite justifié par les qualités d’énergie, de constance et
de loyauté qui permettent d’exalter ces dons.
— Tout ceci est exact, répliqua le Sage, mais ne serait point applicable
sans l’intermission discrète des trois cercles. Car on ne peut pas étouffer la
« masse » en l’obligeant à pratiquer ce qui dépasse encore ses moyens
actuels. Il faut lui laisser la possibilité d’exprimer ses turpitudes, et d’en
acquérir la conscience en subissant leurs effets.
« L’action sélective ne peut jouer que par tâtonnements successifs et par
épreuves indirectes, ce qui est le but effectif des trois cercles. C’est alors
que nous pouvons orienter chacun des éléments sélectionnés vers ses
aptitudes véritables, et lui donner des moyens efficaces pour développer la
puissance de ses dons innés.
Her-Bak se montra convaincu.
— La perfection de votre œuvre prouve le succès de vos méthodes. Mais
le fait même d’être sélectionné n’est-il pas une emprise sur la conscience
individuelle, et une atteinte à la joie de vivre ?
— Non, mon fils : tout ce qui fait la joie de vivre pour l’homme de la
Terre est accordé à chaque classe dans la limite de ses besoins réels. C’est la
culture et les aspirations de chaque individu qui déterminent le choix qui en
est fait. Ce choix, d’ailleurs, ne fait que le diriger progressivement vers des
joies d’une qualité supérieure. Et nul n’est obligé de préférer aux plaisirs
sensuels la « recherche » austère et impersonnelle qui est celle du cercle
intérieur et du noyau.
« Ceux qui ont opté pour cette voie sont le « petit nombre », et leur joie
ne serait point comprise du « grand nombre » ; mais ce petit nombre
comprend les aspirations du grand nombre et s’efforce d’en assurer la
satisfaction équitable, de même que les cellules de la moelle dispensent leur
vitalité jusqu’aux cellules de l’écorce.
« Et c’est cela qui légitime et nécessite l’existence des trois cercles.
Aqer acquiesça aux paroles du Maître, mais il cherchait une autre
possibilité de maintenir le progrès acquis par cette sélection.
— Ne croyez-vous pas à la loi d’hérédité ? Cette hérédité ne peut-elle
pas être une base de continuité pour une classe dirigeante ?
Le Sage voulut répondre lui-même à cette question d’Aqer :
— L’hérédité, dit-il, concerne le sang et le corps ; elle n’affecte pas la
réincarnation de l’âme individualisée. Pour l’âme ancestrale, il y a lignée
d’incarnation dans un même sang ; mais cette lignée obéit à certaines lois
des Nombres.
« Le fils ne reçoit de ses parents que des signatures physiques, émotives
et mentales, c’est-à-dire des tendances et caractéristiques coopérant à la
spécification du corps mortel, de l’âme animique et du KA inférieur. Je ne
te parle ici que des germes héréditaires incarnés dans le foie et la rate,
37
comme tu l’apprendras plus tard .
« Ces caractéristiques personnelles créent des enveloppes d’un rythme
« spécifié » ; transmises ainsi de père en fils, elles constituent un « canal » à
travers lequel l’âme ancestrale pourra retrouver, après plusieurs générations,
le « milieu » correspondant à son rythme qui pourra la ré-attirer. Nous
pouvons donc dire qu’en principe il y a hérédité ; mais en fait ce serait une
erreur que d’accorder sans contrôle les pouvoirs à l’hérédité immédiate.
D’ailleurs, diverses considérations de temps et de coïncidences entrent aussi
en jeu.
« Mais nous devons tenir compte de ce legs atavique, pour ainsi dire mis
en réserve, afin qu’à l’heure du renouveau l’âme puisse retrouver son
milieu spécifique.
Aqer manifesta une profonde gratitude :
— O Maître de Sagesse, tu nous apprends une très grande chose qui doit
être la clé de plusieurs problèmes…
— … lesquels nous n’aborderons pas aujourd’hui ! « Maintenant tu
comprendras que la continuité de nos précieuses traditions nécessite une
constante sélection ; or, malgré l’existence d’un noyau impersonnel
dirigeant occultement, cette sélection serait impraticable sans l’épreuve
progressive des trois cercles.
« Mais la participation à nos connaissances secrètes est l’objet d’un
choix plus sévère ; elle est sanctionnée par les difficultés de notre écriture
symbolique et de notre représentation théologique ; car celle-ci parle aux
profanes comme images religieuses, mais aux « ouverts-de-cœur » comme
révélation des Principes.
Le Sage se leva ; les deux disciples l’imitèrent. Her-Bak s’émerveillait,
plus que de tout au monde, de ce qu’il avait entendu ; il remercia Menkh de
l’avoir appelé. Celui-ci répondit :
— Tu reviendras, mon fils, si tu fais prospérer tout ce que tu reçois.
Her-Bak ne put réprimer sa curiosité :
— Mon Seigneur demeure-t-il toujours dans ce pavillon ? … Qu’est
devenue la belle maison où je fus porteur de sandales ?
— Tout y est demeuré dans l’état que tu as connu. Tu es ici dans mon
lieu de retraite pour les jours passés parmi mes Frères ; si nous sommes les
canaux vivificateurs du pays, ne faut-il pas que nous puissions renouveler
cette Vie ? …
Et la joie d’Her-Bak s’accrut à ces paroles : il avait trouvé son but et son
chemin.
IV
LES MEDOU-NETER
41
— Par le signe imagé qui spécifie la nature de chacun ; tel est le signe
42
des trois fleurs pour désigner un végétal.
— Lorsqu’un de ces mots n’exprime pas une chose matérielle, mais une
idée, comment le reconnais-tu ?
— Par l’image qui signifie ce qui est sans forme et n’a point de corps.
— Quel est ce signe ?
43
— Le rouleau de papyrus fermé, scellé .
49
« D’abord sa nature : la bouche – ra – est l’ouverture supérieure du
corps ; elle est « l’entrée » qui communique par deux canaux avec les
poumons et avec l’estomac ; c’est pourquoi ce hiéroglyphe donne aussi le
nom générique de l’entrée : ra.
« La bouche s’ouvre et se ferme pour manger, respirer et parler, comme
50
l’œil – ar. T – s’ouvre ou se ferme pour recevoir ou refuser la lumière. La
fonction de la bouche est double, passive et active : elle reçoit l’air et la
nourriture, elle émet le souffle et la voix. De même est double la fonction de
l’œil : réception de la lumière et expression des réactions organiques et
émotives.
« La forme de la bouche se modifie par l’écartement des lèvres pour
l’accomplissement de ses fonctions. Son ouverture s’élargit ou se rétrécit,
comme l’ombre projetée sur un disque par un autre disque qui l’éclipsé
51
graduellement . Dans le disque partiellement occulté, la lentille – ou
bouche noire – est donc la partie complémentaire du croissant resté
52
visible .
« Cette déformation graduelle donne des fractions de grandeurs
différentes qui représentent des parties du disque occulté. Ce caractère de
fractionnement a donné le nom de ra 53 aux parties d’un tout (fractions
numériques, chapitres…). De même l’augmentation de la « lentille » par
diminution du croissant justifie le choix de cette même lettre r pour
exprimer l’augmentation (plus que = r).
« Toi, le « scribe savant dans les medou-Neter », tu pourras remarquer le
54
déterminatif du mot abed (mois) qui dessine une petite lentille dans un
55
croissant …
— Oh ! personne n’avait pu m’expliquer la signification de ce dessin
bizarre !
— Tu avoueras cependant qu’il eût dû attirer l’attention des étudiants…
Tu comprendras maintenant le sens que nous donnons au mois, qui est le
jeu constant de croissance et de décroissance de la lentille – ou bouche
sombre – dans le croissant lumineux.
— Si ces corrélations te surprennent, fit observer le Symboliste,
souviens-toi que toutes nos conceptions sont basées sur les fonctions de la
Nature. L’œil et la bouche sont en rapport avec les deux luminaires : les
deux yeux sont leurs symboles. Le nom de l’œil ar.t signifie aussi : faire,
56
créer. Et le nom de Râ ne s’écrit-il pas avec la bouche r ? Le ciel est notre
modèle, et Râ en est le souverain Maître.
« Son symbole est le cœur, suspendu par un canal à un trait fixe horizontal,
tel un gouvernail godillant qui, par son impulsion sur l’élément liquide,
70
donne la direction vers la droite ou vers la gauche. L’image est absurde ,
le symbole est réel : le mouvement du cœur est rythmé comme les
alternances du monde ; sa contraction et sa dilatation sont l’alternance
essentielle, cause de toute formation. Le canal aérien porte le souffle nef ; le
cœur donne le mouvement alterné ; souffle et mouvement, mobile et moteur
du mobile, générateurs de la qualité essentielle de la vie (la chaleur), donc
la qualité vitale de l’énergie : nefer.
— Nous avons, suggéra Her-Bak, d’autres mots pour exprimer cette
71
notion, par exemple le mot qd .
Le Linguiste reprocha vivement au novice son incompréhension :
— qd a un sens plus quantitatif et plus concret que nefer ; il exprime la
manière d’être, les modalités et les caractéristiques matérielles.
« Si tu veux profiter de cette leçon, mets en comparaison avec nefer le
72
troisième de ces mots essentiels, neter ;en celui-ci, f est remplacé par
73 74
th qui est une lettre terrestre, ou par t qui est terrestre et passive.
« Or, un Neter est un des principes cosmiques ; il définit donc une loi, et
comme tel il a ses propres limites. L’épithète our ne convient donc qu’aux
Neter dont la propriété d’accroissement fait partie de leur qualité
fonctionnelle ; ainsi en est-il d’Isis, de Nephtys, Neith, Moût, et Osiris dans
ce cas particulier.
« Le Neter universel est lui-même le principe de our, et pour cette cause,
Horus est dit aussi Horus-our.
Her-Bak absorbait les paroles du Maître comme la terre avide absorbe
l’eau nouvelle. Un monde de possibilités se révélait à lui ; il avait hâte d’en
franchir les obstacles.
Il interrogea le Linguiste :
— Oserais-je avouer qu’une de tes répliques m’a troublé ? Tu dis à
Abouched : « Tu devrais trouver la réponse dans l’étude de chaque mot. »
Pour ce faire, n’est-il pas indispensable de connaître la valeur des lettres
essentielles, puisque chacune d’elles a son nombre et ses propriétés ?
Le Maître Symboliste échangea quelques mots avec le Linguiste ; celui-
ci dit à Her-Bak :
— Notre réponse à ta question sera le dernier enseignement de cette
leçon ; certes, cette connaissance est nécessaire à la compréhension de nos
textes secrets ; tu ne peux même, sans elle, saisir le sens véritable ni des
mots essentiels, ni des noms, ni des dieux.
« Cependant, je t’ai averti : cette science ne sera pas incluse dans cette
première initiation ; tu vas comprendre la raison de cette restriction. La
parole, djed, est l’expression audible du Verbe-Idée. La fixation visible se
fait à l’aide de signes ou caractères qui, dans notre écriture sacrée, lui
donnent une forme représentative de l’Idée. Chacun de nos « signes-
caractères-lettres » est donc une parole concrétisée (medou), signifiée par
l’image la mieux appropriée ; ils suivent ainsi l’exemple donné par Sefekht
(la déesse de l’écriture), qui signe toute production de la Nature par les
lignes, les formes et les couleurs qui manifestent son caractère.
« Chaque signe-lettre a trois attributs : la forme, le Nombre, le son.
« Le son, modulé par prononciation de la lettre, est son attribut essentiel ;
c’est son « Verbe », donc le principe de son action magique ; ceci t’explique
pourquoi les initiés sont priés, au début de certains textes, de ne pas les
prononcer à haute voix s’ils en connaissent la lecture secrète.
« Le Nombre est la nature intrinsèque de la lettre. Les Nombres,
constituant les principes déterminateurs des formes, sont les véritables
lettres fondamentales. Or, le son et la forme d’une lettre sont ses attributs
« évidents » ; son Nombre réel a toujours été plus ou moins dissimulé par
divers subterfuges.
« La forme des lettres est caractéristique de la conception philosophique
de son auteur et de son mode éducatif. Un nombre déterminé de signes
constitue notre écriture : les medou-Neter.
« Toute langue écrite est une construction dont les éléments-principes
(verbes et nombres) sont formulés par des symboles naturels ou
conventionnels ; la langue la plus réelle est celle où le conventionnel est
réduit au minimum possible. L’architecture de cette écriture est
l’assemblage des signes. Dans les combinaisons de nos medou-Neter
viennent jouer des rapports de nombres et de fonctions représentées par les
lettres assemblées ; de sorte qu’il devient possible d’écrire les éléments
d’un enseignement secret – tels que les phases d’une genèse ou
l’explication d’une allégorie – en choisissant les mots et la disposition de
leurs lettres pour composer une phrase d’apparence banale.
« La connaissance des analogies et la recherche de certaines clés
facilement décelables pourraient, par une étude approfondie, en permettre le
déchiffrement ; mais il intervient ici une difficulté, voulue par le Sage
(philosophe) qui a fait choix d’une des lignées du « Devenir » pour son
expression linguistique. Or sur ce point nous nous taisons, ce qui fait-que,
par l’étude seule, on n’y parviendra pas !
— O Maître, pourquoi ce jeu cruel ?
— Parce que cette architecture est imaginée sur l’architecture de
l’Univers ; révéler cette construction, c’est révéler les secrets de la Genèse
et du « devenir » des choses. Or ceci ne doit jamais être accordé qu’à des
hommes éprouvés qui n’abuseront point de cette connaissance. Et c’est cela
qui justifie, dans notre histoire, le Temple et les secrets du Temple.
Her-Bak s’inclina ; puis il interrogea son Maître :
— Notre langue est-elle l’unique forme possible pour traduire la
Connaissance ?
— Elle est la plus parfaite, répondit le Sage, mais elle n’est pas l’unique
possibilité : un autre système, établi sur la même Connaissance, peut guider
la recherche de la Sagesse. Mais la construction de notre langue par les
Anciens est telle, qu’elle nous permet d’établir une sorte de miroir dans
lequel nous pouvons lire le développement des âges de notre histoire, avec
les phases de chute et de régénération, comme on pourrait lire les plans
superposés d’un monument construit et surchargé par étapes successives, si
82
l’on en connaissait le plan total préétabli .
« Alors il est possible de situer, par les lettres et les combinaisons de ces
lettres formant des mots, le nom et le caractère de ces événements ;
autrement dit, nous pouvons lire ce qui est écrit par le destin.
« Quelquefois même, nous donnons aux événements historiques les
noms que nous avons ainsi « lus ».
Le disciple était partagé entre l’admiration et une vague déception :
— Si le secret total ne peut pas être trouvé par mon travail personnel, à
quoi servira ma recherche ?
— A conquérir le droit à cette Connaissance, par la formation d’une
mentalité qui ne la trahira pas.
— Que faut-il faire pour acquérir cette mentalité ?
— Commencer par éviter les procédés qui s’y opposent :
« Ne cherche pas à expliquer la formation de notre langue comme un
apprentissage progressif ; ses éléments parfaits furent donnés par des Sages
qui établirent dès l’origine ses règles et son évolution.
« Ne cherche pas cette origine dans une composition hétérogène
d’idiomes différents, car toutes les langues qui ont des racines communes
avec la nôtre viennent d’une même source qui remonte au-delà des Temps
connus de toi.
« Ne mets pas en doute l’unité philosophique de notre langue à cause des
nuances modifiées par les temps et les lieux ; car ces différences ne sont que
secondaires – parfois voulues, parfois accidentelles – et n’ont jamais touché
ses éléments essentiels.
83
« Sache que certaines variations , effectuées selon des règles prévues
pour des époques déterminées, sont en elles-mêmes un enseignement qui en
confirmera l’ordonnance préétablie.
« Doute, si tu veux, de toutes ces assertions ; mais si tu les contrôles avec
sincérité dans leurs effets, elles se prouveront par l’éclaircissement des
énigmes.
— O mon Maître, je vois ce qu’il ne faut pas faire. Qu’il me soit donné
d’apprendre comment je dois chercher !
Le Linguiste répondit :
— La règle essentielle est celle-ci : PENSE SIMPLEMENT « Évite les critiques
et arguments spécieux. La pensée de nos Maîtres fut d’autant plus simple
qu’elle était plus proche de sa source ; plus nous nous en éloignons, plus
notre tendance est de la compliquer.
« Cherche directement le fait naturel montré par le symbole. Ensuite,
l’ayant approfondi en tous ses aspects, tu pourras apercevoir la loi
universelle dont ce fait naturel est lui-même le symbole.
Fig. 8. – Ne commets pas l’erreur de mettre un mot à la
place de l’image, en disant par exemple : « la chouette c’est m ».
LE VOYAGE
FIG. 1o. – Les barques funéraires portent les défunts à leur dernier pèlerinage.
« Ce n’est pas le nombre des images perçues qui importe, mais les
impressions ineffaçables dont ta conscience s’est enrichie. C’est surtout leur
correspondance avec tes possibilités actuelles. Souviens-toi des oiseaux
migrateurs ; chacun est rappelé par ses désirs et le but de sa vie.
« Le but définit le voyage… Autre est le pèlerinage passif du « mortel »
dans sa passion Osiriaque, autre est la pérégrination consciente de l’Horus,
qui conquiert sa maîtrise divine en asservissant une à une toutes les forces
animales.
« Ne te laisse pas illusionner par le charme et la variété des paysages de
la rive. Ose chercher un horizon plus vaste ; c’est à toi de tracer l’itinéraire
de ton voyage : il aura l’amplitude de ton désir.
Her-Bak, à son retour, eut la joyeuse surprise de trouver Aouab parmi les
étudiants du Temple intérieur. Cette promotion l’étonna, car la naïveté de
son ami donnait à son intelligence un aspect enfantin qui ne semblait pas
compatible avec la recherche ardue qui leur était imposée.
Le Sage profita de cette occasion pour lui rappeler l’enseignement des
trois Maîtres au jour de la « Question » :
— Si tu veux devenir un adepte de la Sagesse, Her-Bak, il ne t’est pas
permis d’oublier que les voies de Maât sont identiques en leur but, mais
triples en leurs moyens : on peut éveiller l’Entendement par la conscience
des symboles et des analogies, par la connaissance des Nombres, ou par le
don absolu du Moi pour le confondre avec le Soi.
« Il est vrai que les trois voies s’interpénétrent puisque la conscience de
l’une éveille la conscience des autres ; cependant tout chercheur attiré par
Maât doit choisir le chemin correspondant à ses possibilités. Le don
impersonnel et l’altruisme d’Aouab sont une disposition excellente qui l’a
fait adopter par le Maître Mystique. S’il a le courage d’acquérir la
conscience du Bien et du Mal relatifs, sans perdre sa candeur c’est-à-dire le
pur amour du seul Bien absolu, il atteindra la Connaissance par la voie la
97
plus simple qui est celle du Confondement .
— Ta parole me réjouit pour Aouab, répondit le disciple, mais peux-tu
m’expliquer ce que vous entendez par « un Sage » ?
— Certes, je le puis ; le Sage est l’homme conscient, capable de
concevoir en lui-même les trois voies, capable d’aimer impersonnellement,
de connaître ce qui est, sans préjugés, capable d’obéir à la loi de Nature, et
de transcrire ce qu’il a connu.
« Mais ce chemin ne permet point de pitié pour soi-même, ô mon
disciple…
VI
L’ILLUSION
FIG. 13. – Si, pour tirer ses flèches, le Roi bande l’arc mieux que
n’importe quel archer, il est le principe du pouvoir pénétrant.
LE COLOSSE
« La statue royale idéale est le Colosse, qui situe Pharaon comme témoin
de cette phase et symbolise l’homme, image et mesure de son Univers.
— O mon Maître, je comprends l’importance de la statue, si elle
enseigne par ses détails et ses proportions une telle réalité !
— Sur cette réalité, mon fils, est basé tout notre système de symboles.
Dans les anciens Temps, nos Sages furent prudents pour son application
afin de ne point profaner le sens vital, secret, de la corrélation universelle.
Avec la décadence, les mots et les détails se sont multipliés, révélant
certains éléments tenus en réserve jusqu’alors ; l’étudiant consciencieux
trouvera confirmation de ceci à chaque pas. Mais notre architecture a gardé
sans déviation l’enseignement rigoureux des Lois universelles.
« Et le Colosse demeure la grande leçon de l’homme.
*
**
L’HOMME
« Il ne s’agit pas ici d’étudier en détail le corps humain. Je situerai
seulement les points essentiels qui, par leur symbolisme et leur nom, sont
déjà un enseignement.
« Il est intéressant de remarquer d’abord que les mesures de longueur ont
été basées sur les bras et les mains, avec le doigt comme unité.
« L’homme est considéré ésotériquement comme une étoile à cinq
136
branches ; la branche supérieure dessine le tronc avec la tête ; les deux
branches latérales sont les bras ; les deux tiges inférieures sont les jambes
qui touchent la terre.
« Les bras et les mains servent de mesure ; l’avant-bras â, qui, avec la
main, donne la coudée, est aussi le symbole de l’individualité.
« Les mains agissent, donnent ou reçoivent ; mais le côté droit est actif
alors que le gauche est passif ; tu sauras donc que s’il nous arrive de figurer
un personnage avec deux mains droites ou deux mains gauches, cela dénote
l’intention de spécifier son caractère actif ou passif dans ce cas particulier.
« Le dos, soutenu par la colonne vertébrale, est nommé iat, comme les
choses axées par deux pôles : Nord-Sud, haut et bas (bâton, perchoir, etc.).
« Son pôle Nord, la tête avec la boîte crânienne totale se nomme tep ;
• son pôle Sud, le talon et la plante des pieds, est appelé tb.t ;
• les douze côtes – qui enveloppent la poitrine comme une sphère à
double spire – se nomment spr. Or il faut observer que ce cadre qui se
gonfle et se dégonfle suivant le mouvement de l’aspir ou de l’expir porte le
même nom que la fonction spr, qui signifie « aspirer, tendre vers,
implorer »…
« La racine men, contenant l’idée de base, de fondation, de stabilité,
donne les noms de la cuisse – mena, base et stabilité du tronc –, et du sein,
base nourricière pour l’enfant.
« Si tu veux connaître la formation, nutrition et transformation de notre
chair, tu devras étudier les viscères de la nutrition et de la génération
contenus dans le ventre, khat, en te souvenant que le mot khet exprime
également le bois, la « chose », et un feu ; khat est aussi le nom du cadavre.
« Quant aux organes d’animation et de régénération, ils sont situés dans
la cage des côtes qui contient le hati, c’est-à-dire le groupe du cœur et des
poumons, inséparables dans ces fonctions. Le cœur de chair, àb, est un
137
danseur àb dont le mouvement de contraction et dilatation est le
propulseur de l’activité vitale et le mobile de la vie animale. Il régit le
rythme du flux sanguin.
« Mais le cœur, seul, ne pourrait pas remplir son rôle de moteur
animateur : il est assisté par un organe double, les poumons, où se
138 139
rencontrent le feu de l’air porté par le souffle nef , et le sang, senef .
De même que le feu ne peut vivre sans air, de même le cœur de chair a
besoin des poumons, sma, pour animer le sang et unir l’air au feu.
140
Her-Bak esquissait sur le sol le symbole de l’union, sma :
— L’union des poumons est-elle la cause de leur nom, sma ?
— Certainement, si tu donnes à ce mot son sens véritable ; sma signifie :
allier – pour les animer –deux éléments de même origine (mais qui ont été
séparés), de telle manière que chacun participe aux qualités de l’autre et
s’en améliore, sans cependant se confondre avec lui.
141
— Je comprends le symbole sma taoui (alliance des deux Terres) : les
fleurs du Nord se nouent, au centre, avec les fleurs du Sud, et cependant
vivent chacune pour soi.
— Ainsi font nos Deux-Terres, dit le Sage : unité par alliance dans le
gouvernement central, sans se confondre.
« Hati est donc le nom de cette triade qui donne l’impulsion vitale
142
organique. Le symbole du hati est la partie antérieure du corps du lion,
portant le cœur de cet animal solaire et sa poitrine au souffle puissant. Sa
143
tête, avec sa crinière caractéristiquement solaire, complète le symbole .
« Les poumons, aspirant l’air, sont animés par le souffle d’Amon, tandis
que le cœur obéit à l’impulsion de Râ et de son Verbe Horien, her.
« Et toute la vie de l’être humain ainsi développé, nourri et animé, est
144
reflétée dans sa face, her .
« La face est donc le miroir du Verbe her, dont les cinq modes
d’expression sont perçus par les cinq sens. Or il est dit que la céleste Hathor
145
est la « maison du Verbe Horus », comme l’enseigne son nom, het her .
C’est pourquoi nos images représentent souvent la forme d’Hathor
isolément.
Her-Bak se récria :
— Parles-tu de cette face étrange qui porte des oreilles de vache ?
Comment faut-il interpréter ce symbole ?
158 159
C’est le sommet du corps humain, tep , renversement du ciel pet ,
monde des idées, reflet du monde des archétypes. C’est le centre de
relation, comparaison, oragnisation et commandement. Le chef tep n’est pas
forcément en rapports directs avec ceux qu’il dirige ; c’est pourquoi tu
trouveras le plus souvent les deux mots accolés – heri tep –, car presque
tous les chefs de notre royaume sont obligés de cumuler les fonctions
d’observation et de commandement pour assurer l’exécution des lois.
— O Maître, tu nous as enseigné que le cerveau a un rôle secondaire par
rapport à l’intelligence intuitive ; comment se fait-il que, dans les images de
certains textes funéraires, la tête soit représentée isolée, parfois sortant
d’une butte ou d’une plante, comme si elle était l’élément survivant du
défunt ?
— Ton interprétation est inexacte, parce que ton ignorance des divers
éléments de l’être la rend encore incomplète. En attendant une instruction
plus précise, souviens-toi que la tête humaine n’englobe pas seulement les
organes de la pensée et les localisations cérébrales de toutes les fonctions du
corps ; elle contient aussi les centres physiques, sièges des états supérieurs
(spirituels) dont nous parlerons plus tard, et qui, lorsqu’ils sont éveillés,
sont en liaison avec le cœur spirituel. De sorte qu’elle est un petit monde
total, où sont représentés, en poste de commande, tous les « états d’être » et
toutes les activités possibles de l’homme.
« Enfin c’est dans la tête que s’accomplit le plus haut mystère de la
« sublimation », en énergies subtiles, des éléments physiques élaborés par le
corps, de même que les sens corporels – qui ont leurs organes dans la face –
s’y transforment en « sens spirituels ».
« C’est pourquoi la tête représente la plus haute gestation des fonctions
humaines, et la symbolise après son existence terrestre.
Le disciple écoutait avec une attention soutenue, et redoutait la
possibilité d’une erreur d’interprétation.
— Un enseignement si important, dit-il, ne doit laisser subsister aucun
doute ; peux-tu m’éclairer sur ce point : si l’« Intelligence du Cœur » doit
concevoir la Connaissance comme le « produit lié » de toutes les
perceptions, je ne peux pas comprendre – malgré ce que tu viens de
m’apprendre – pourquoi la tête, tep, est le symbole du chef qui coordonne et
commande ?
— Certes, dit le Sage, cette question demande une réponse, car une
instruction incomplète pourrait fausser ton jugement. Or ton idée du chef
est incorrecte : le chef, heri, tep, ou heri tep, n’est ni le roi – ferment de son
peuple – ni l’animateur spirituel du royaume et du roi. Je t’apprendrai, au
moment favorable, ce que tu dois savoir de cette double autorité. Mais tu
peux, dès aujourd’hui, en trouver aussi l’image dans l’homme, où sont
représentés – ne fût-ce qu’en ébauche – tous les échelons de la conscience.
« De même que la lumière ardente de Râ est reflétée par la Lune en
lumière froide et atténuée, de même la vision du cœur est reflétée par le
cerveau. Mais alors que le cœur synthétise toutes perceptions et en crée la
conscience vitale, le cerveau les sépare et les localise ainsi que les autres
fonctions de comparaison et de coordination, qui sont les éléments du
discernement rationnel indispensable au chef. C’est pourquoi le nom du
160 161
cerveau aàs est l’inversion de sàa qui est la conscience du cœur.
— Je croyais que l’organe cérébral était nommé âmm ?
— Si tu veux connaître la nature des choses, tu dois étudier
attentivement le nom qui leur est attribué, et la raison de cette attribution.
« Le nom des viscères de la tête est aïs (a i s), ce même mot désigne
aussi les viscères du ventre. Ce n’est point surprenant si l’on observe la
ressemblance de leurs deux masses aux multiples replis. L’analogie de leurs
fonctions est aussi réelle que l’apparence : le cerveau, aàs, reçoit les
impressions perçues par les sens, comme les intestins reçoivent les aliments
préparés par l’estomac.
« Or, la séparation et localisation des diverses substances de cette masse
alimentaire se fait dans les lieux de l’intestin spécifiés pour cette sélection.
De même, divers « lieux » des circonvolutions cérébrales captent – chacun
selon sa fonction – chacune des perceptions sensorielles. Ces perceptions
étant ainsi isolées et situées, sont ensuite, dans d’autres lieux
« fonctionnels » du cerveau, comparées, critiquées, puis projetées hors de
l’organe matériel en « idées ».
« Les diverses parties des viscères de la tête agissent donc comme celles
des viscères du ventre, sélectionnant les éléments reçus selon leurs
« affinités fonctionnelles » particulières. Mais il faut discerner ici les
fonctions organiques matérielles – donc quantitatives – d’avec les fonctions
plus abstraites, d’ordre qualitatif.
« C’est ici que la Sagesse de notre langue te permettra d’entrevoir
vitalement ce qu’une spéculation ne pourrait pas exprimer.
« Compare ces deux mots :
• le premier mot, ais, nom des viscères d’en haut comme de ceux d’en
bas ;
• le second mot, âmm, qui exprime une fonction attribuable aussi bien au
corps matériel qu’à la personnalité « pensante » : c’est la fonction d’ingérer,
d’absorber, d’un côté les aliments, de l’autre les perceptions. Je parle ici de
la fonction immatérielle, cause du geste physique de l’organe qui, sur son
impulsion, avale et incorpore.
« Cela est juste pour l’animal qui engloutit la proie convoitée, pour le
cerveau qui absorbe les perceptions des sens, et pour l’« avaleuse » des
162
morts, Ammit , laquelle n’est pas autre chose que la Nature réabsorbant
en elle les éléments qui, dans le corps en décomposition, appartiennent à la
Nature.
« âm est la racine qui exprime cette fonction.
« âmm, par le redoublement de m, donne l’idée de renfermer en soi,
d’accaparer, â donne la notion de mesure individuelle. En effet : Nature,
ventre et cerveau, absorbent proportionnellement à leur capacité.
« Considère maintenant aïs comme l’organe matériel (viscères,
cérébraux et abdominaux) ; et sia est le fruit immatériel des perceptions
assimilées par l’Intelligence du cœur.
« Quant au produit de l’organe cérébral ais, c’est-à-dire les pensées, elles
sont la résultante d’un apport extérieur d’une part : idées émises par
d’autres cerveaux, et reçues par la faculté mentale d’absorption âmm ; et,
d’autre part, d’un acquis personnel : constatations sensorielles ou intuitives,
transformées par les comparaisons, dissociations et associations des notions
enregistrées. Ces pensées individuelles deviennent alors des formes
mentales réellement émises par le cerveau ais, et qui peuvent être reçues par
la fonction absorbante âmm d’autres cerveaux, sans l’intermédiaire de
paroles ni d’écrits, donc par évocation.
« Comprends ceci, Her-Bak : de même que la sphère de rayonnement du
Soleil dépasse son globe physique, àten, et lui fait une sphère de chaleur, de
lumière et de diverses radiations, de même ton « corps fonctionnel » de
pensées, âmm, dépasse ton cerveau organique ais ; et c’est cela qui te
permet de rappeler à toi les souvenirs et les idées inscrites des âmm, par
l’appel des centres correspondants de ais, lesquels n’en sont que les relais
organiques.
Her-Bak s’efforçait de s’assimiler le symbolisme positif des hiéroglyphes
et le sens des racines, dont il apercevait maintenant l’importance.
— Cette leçon ardue, déclara-t-il, m’était vraiment indispensable pour
apprendre comment le jeu des lettres peut enseigner SANS THÉORIE, par
l’évocation symbolique, la relation entre les « causes fonctionnelles »
subtiles agissant dans le corps humain, et les fonctions organiques qui en
sont l’expression.
— Ton effort a porté son fruit, dit le Sage. Tu as compris exactement le
but de mes explications, qui doivent te servir d’exemple pour déchiffrer
notre enseignement. Mais tu devrais encore concentrer ton attention pour
apprendre à tirer toute la moelle du sujet. Peux-tu me résumer ta conclusion
actuelle ?
— Si j’ai bien entendu, dit Her-Bak, les lieux organiques du cerveau ais,
et le corps fonctionnel non matériel, âmm, collaborent à l’élaboration des
pensées qui s’inscrivent en âmm, et le jeu des organes ais peut retrouver à
volonté les notions inscrites ?
— C’est exact, mais cela réussit proportionnellement à la vigueur et à
l’équilibre des viscères ais : c’est ce qu’on appelle la bonne ou la mauvaise
mémoire. Cela prouve aussi la relativité et failhbilité des notions ainsi
enregistrées, puisqu’elles proviennent de coordinations plus ou moins
parfaites des apparences.
« Autre chose serait la transcription, par la pensée, de la connaissance sia
acquise par le cœur. Cette conscience est une mise en rapport de la chose
perçue avec ce qui y correspond en nous-mêmes. En opposition à cette
réalité, j’ai nommé « excréments » les pensées résultant d’une association
de notions extérieures à ton être réel.
« Le monde – ou l’état – âmm, est l’état d’absorption perpétuel de tout ce
qui, dans la Nature, est mesurable et assimilable quantitativement : aliments
matériels ou concepts rationnels. C’est l’avidité de la Nature.
« sia est le monde – ou l’état – dans lequel la transformation de
l’impulsion Sethienne (séparatrice, analysante) en impulsion Horienne
(synthétisante), permet le discernement entre le personnel ou particulier (à
163 164
ou i ) et l’Universel (a ), ce qui est le sens critique du Sage.
« Ainsi nous retrouvons encore le concret (ais) capable de conduire, par
son renversement, à l’abstrait sia dont le fruit est immortel.
« Mais pour que mes paroles éveillent ta logique vitale et ne soient pas
traduites en notions figées, tu dois apprendre à discerner ces deux
mentalités, profitant de la plus complexe pour enregistrer les détails
révélateurs, mais sachant éviter l’analyse d’éléments « disséqués », qui en
détruirait le lien vital et obscurcirait l’idée simple originelle.
Her-Bak ne put cacher sa perplexité :
— Mon Maître pourrait-il me dire comment je puis penser que la pensée
est inutile pour acquérir la Connaissance ?
— Rien dans l’homme n’est inutile à l’homme ; mais il faut attribuer à
chaque élément son juste rôle. Ta pensée doit traduire ce que ta conscience
a gravé dans ton corps entier ; l’inverse est un chemin d’erreur : si tu inscris
en ta conscience ce que, par arguments, tu as élaboré, il en résultera des
imaginations et des systèmes arbitraires. Tu ne peux rien inventer ; tu dois
165
t’assimiler ce qui est en réalité . C’est le renversement de la mentalité où
le cerveau est roi.
« L’instinct – ou conscience animale comme celle des fourmis ou des
abeilles – connaît sans effort de pensée les corrélations animiques de la
Nature, sans cependant pouvoir coordonner les notions. Mais l’homme,
doué de raison, qui croit en l’Esprit incarné, et qui donne à sa conscience
supérieure la prépondérance sur la pensée, cet homme dépasse l’instinct
animal et développe l’intuition.
« Je t’appelle dans le vrai chemin, Her-Bak ! Je te parle, moi homme
vivant, à toi homme vivant ; je ne distingue pas ton esprit de ton corps, car
tout ton corps est nécessaire pour saisir cet enseignement. Tu ne sais rien du
Neter, peu de choses du roi ; tu es homme, l’homme est ton Univers ; par lui
tu sauras tout si tu tournes le dos à la science de Seth.
« Mais pour cela, tu dois connaître ce qui fait la supériorité de l’homme
sur l’animal, et même sur l’animal humain – c’est-à-dire sur l’homme
terrestre n’ayant reçu que la première animation. C’est cette première
animation, ainsi que la qualité de son KAindividuel, qui le distingue des
animaux supérieurs.
« Or l’homme serait capable de recevoir deux animations : l’une aboutit
à l’extrême possibilité de la Nature ; l’autre est l’origine d’un retour vers la
Cause.
— Si la première animation aboutit à la fin de la Nature, cette Nature ne
peut donc rien faire de plus parfait que l’homme ?
— C’est exact. L’homme, né de la femme – c’est-à-dire l’Humain –, est
le plus parfait des êtres qui portent en eux leur semence pour se reproduire
sur Terre.
— S’il en est ainsi, la seconde animation doit conduire l’homme au delà
de cette Nature ?
— Elle doit le conduire au delà et en deçà, car ce principe animateur qui
est son KAdivin, est de l’essence même de l’Imprononçable ; il est
indépendant de la Nature et de ses Neter, qui n’ont d’influence que sur ses
KAinférieurs.
— Mais la Nature est-elle dépendante de l’Imprononçable ?
— Nécessairement, sans quoi il y aurait deux absolus. Mais elle est
soumise aux cycles du Devenir, dont le KAdivin est indépendant.
— Tu as dit : « L’homme né de la femme » ; y a-t-il un homme qui ne
soit pas né de la femme ?
— La femme donne toujours le corps terrestre ; tandis qu’elle le geste et
nourrit de sa propre substance, se produisent les animations « premières »
de ce corps ; ce sont les deux moments critiques du quarantième jour et du
quatrième mois.
« Il y a, dans la vie de l’homme en dehors de la matrice de sa mère, une
continuation de la génération qui est celle de la conscience du
KAindividuel ; et c’est aussi à la quatrième période de son âge (sur Terre)
que se fait cette animation.
« Alors commence, pour ce « roi des êtres terrestres », la possibilité d’un
règne qui dépasse l’Humain-terrestre par la culture de cette conscience
supérieure qu’il doit gester en lui comme son corps fut geste par sa mère.
Ce faisant, il s’affranchit des lois de la Terre ; et cela d’autant plus que
l’influence de son KAdivin devient prépondérante.
« C’est ici la semence du « vrai Roi ».
« Ce vrai Roi est la semence de son être incorruptible ; c’est l’Horus
humain « tissé » par son KAdans l’homme qui a cultivé ses rapports avec ce
KA. Son royaume n’est pas de cette Terre, car cet homme, ainsi que tu le
supposais, rayonne au delà de cette Nature.
— Où est le siège de ce Roi ?
— Dans son cœur. Ce n’est pas une vaine parole, ni un mythe, ni une
image. C’est une réalité positive. Mais crois-tu connaître ton cœur ?
— Je sais qu’il fait vivre mon corps, mais je ne le connais pas.
— Le cœur qui fait vivre ton corps est le vase de chair, distributeur du
sang : àb, l’éternel assoiffé dont le rythme gouverne ta vie. Ce rythme, il
l’impose à tout ton organisme, comme les émanations de notre Soleil Râ
s’imposent, selon leur degré d’intensité, aux « errantes » (les planètes) qui
vivent dans son orbe.
« Râ, cœur de notre monde, ainsi que le cœur – soleil de notre corps – ne
pourraient accomplir leur rôle animateur si leur forme matérielle était leur
seule réalité… destructible puisque corruptible !
« Or nos textes parlent toujours du « Soleil indestructible »… Lorsqu’on
recommande au défunt de ne pas perdre son cœur – àb ou hati – dans
l’autre monde, on n’entend pas, évidemment, l’organe de chair enfermé
dans la tombe !
« Le cœur, ainsi que le Soleil, est le centre d’un monde ; il a, comme lui,
deux aspects : l’un est visible et corporel, l’autre n’est perceptible que par
166
ses effets. De même l’àten solaire (ou disque apparent) est le corps de
l’astre réel, centre de sphères de lumière, de chaleur et de diverses énergies.
« Le véritable cœur solaire est la source de cette énergie qui donne la vie
à notre monde.
« Le cœur de chair, àb, est le corps de ce soleil de vie et de Feu qui est le
centre de rayonnement de l’âme BA dont l’aspect inférieur est porté par le
sang.
« Notre vrai cœur solaire, centre d’attraction de notre KAspirituel, est le
centre de ralliement de tout ce qui, en nous, le désire et accepte ses
impulsions.
« Le cœur de chair, qui en dépend et qui bat dans sa sphère, peut alors
être équilibré et animé par lui.
« Alors ce cœur total devient un cœur de feu, un centre de Lumière, une
source de vie qui a toute puissance pour soumettre les esprits animaux de
notre « personnalité »…
*
**
Her-Bak méditait ces paroles, qui donnaient à sa vie un but immédiat.
— Mais le Maître savait que la « vision », pour se fixer, devait se
rattacher à un élément positif.
— Je t’ai montré le but, mon fils, lui dit-il. Il importe maintenant que tu
comprennes le « moyen ». Es-tu capable de le trouver dans mes explications
sur les medou-Neter ?
— Si j’ai bien entendu le sens de tes paroles, dit Her-Bak, je crois
pouvoir conclure que l’homme a deux moyens de comprendre et de
coordonner, selon qu’il accorde son intérêt à l’intelligence comparative, ais,
ou à l’intelligence intuitive, sia ?
— C’est en effet le problème tel que tu viens de le poser. Nos Maîtres y
ont donné une telle importance qu’ils l’ont fixé dans une formule : « hou est
dans la bouche et sia dans le cœur ». Tu as appris que hou, Neter du goût,
est le principe du discernement des saveurs, donc matériel. Si tu te
remémores la leçon des medou-Neter, tu sauras que la double lettre aà (ai)
symbolise les deux aspects de l’Activité originelle : i exprime le « Moi » et
a exprime le « non-Moi », c’est-à-dire le « Soi ».
« sia est le discernement du Moi et du Soi. C’est donc le principe de la
Sagesse, c’est-à-dire de la connaissance de toute chose. C’est
l’Entendement, qui donne la conscience vitale.
« L’intelligence comparative, ais, étant conditionnée par la puissance et
la précision des facultés cérébrales, ses conclusions sont relatives.
« Dans ce jeu de ais et sia, intervient la personnalité qui, recevant la
Connaissance sia, peut se « laisser porter » docilement, ou réagir en lui
faisant obstacle : là est le principe de l’émotion. Si cette émotion n’est pas
étouffée ou déviée par une interprétation rationnelle, elle sera intéressante,
car c’est elle qui manifestera organiquement la conscience de ce qui a été
révélé. Elle agit par le plexus solaire sur le cœur, et éveille la Lumière du
« cœur solaire », d’où vient le nom d’« Intelligence du Cœur ».
« La maîtrise de ces facultés, avec soumission totale de la pensée à
l’Intelligence du cœur, est exprimée par saa, d’où est éliminé le principe du
Moi i, et qui signifie : le principe de Sagesse.
Her-Bak, aux pieds de son Maître, ne savait comment exprimer sa
gratitude. Il murmura :
— Il est donc une voie qui conduit à la Connaissance… et l’homme peut
choisir ! Je comprends maintenant le chemin.
Le Maître prit les mains du disciple dans les siennes :
— Oui, Her-Bak. Aujourd’hui est ton « troisième jour ».
Her-Bak écoutait l’émotion qui enflammait son cœur ; il l’accueillit
comme un don du Neter, et il se sentit fortifié d’une certitude nouvelle.
— Maintenant que tu es sur le « chemin », il est un moyen facile de t’y
maintenir : c’est d’admettre, sans critique arrogante, la réalité de la tradition
transmise de la bouche à l’oreille et gardienne de nos secrets.
« Quelques-uns de nos préceptes te révéleront maintes énigmes si tu sais
les lire, et si tu les « entends » selon la pensée qui les a formulés. Écoute
donc ceux-ci, et vois si ce n’est pas la confirmation véritable de mon
enseignement sur le cœur :
« Celui que Dieu aime, il « écoute », mais celui qui « n’écoute pas » est
haï du Neter (opposé à son cœur sia). »
« C’est le cœur qui fait que son maître écoute ou n’écoute pas… »
« Ce que l’on souhaite à un homme par la formule « Vie-Santé-Force »,
c’est la perfection de son cœur… »
« Le cœur d’un homme, c’est son Neter personnel. »
« Her-Bak, comprends-tu maintenant ton propre Neter ?
VIII
LE CIEL
« Les produits de cette gestation seront les astres de son ciel, dont chacun
est une personnalité qui a sa propre vie.
« Et dans le corps de Nout la gestation, aussi, continue. Il y a
simultanéité en toutes ses fonctions. Tu l’as compris et exprimé dans ton
image du corps humain. Rentre de nouveau en toi-même, et essaie
d’éprouver la synthèse de ces mondes divers, dont chacun manifeste sa
propre fonction tout en participant à la vie de l’ensemble.
« Le « vase de chair », qui porte les organes de la nutrition, n’est pas
seulement ton corps : chaque organe qui concourt à la transformation des
nourritures en ta propre substance, est un vase de chair ; et chacune de ses
particules est de la nature de ce vase.
« Le « vase des eaux » n’est pas seulement le système des vaisseaux qui
transportent les liquides : chacun des liquides du corps est lui-même un
« vase », avec ses qualités spécifiques.
« Le « vase de l’air » n’est pas seulement l’arbre qui répartit l’air dans la
poitrine : le sang est le « vase » qui distribue dans les moindres parties du
corps les qualités animatrices de l’air. Par lui, et par toute son enveloppe
extérieure, ces qualités vivificatrices sont absorbées par les diverses
humeurs qui deviennent ses « vases », chacune selon son rôle.
« Or, en chacun de ces « vases » (ou mondes, ou états de substance –
solide, fluide, aérien –), en chacun les deux autres collaborent selon leur
nature particulière. Et quoique l’on puisse dire « les chairs, les humeurs et
l’air ». Ces trois se trouvent alliés dans une action commune, vivante et
simultanée. Ainsi en est-il du corps de Nout, qui symbolise la génération et
la gestation de tous les corps célestes.
« Ce sont les mouvements et circuits de ces différents corps et « vases »,
et tout l’ordre harmonique dont ils dépendent, qui font les aspects
géométriques de l’astronomie du ciel pt. Si tu pouvais percevoir
l’inextricable entrecroisement d’ondes, d’effluves, de sillages et de
radiations diverses, tu comprendrais le sens précis de mes paroles.
« pt est le « lieu » et le Feu grâce auxquels sont gestées par Nout les Idées
qui sont dans le ciel pt. Mais si tu veux situer ce « lieu », tu te trouveras
aussi impuissant que pour situer en ton corps le lieu du Feu vital ; car si tu
connais certains organes d’émission et de transfert, souviens-toi qu’il n’est
pas une parcelle du corps qui en soit démunie, faute de quoi elle se
corromprait et cesserait d’être, comme lorsque l’âme quitte le corps. Car
c’est l’aspect « âme » du ciel qui rend Nout vivante (animée).
— Tout ceci, murmura Her-Bak, est conforme à ce que mon cœur m’a
montré.
Alors tu peux comprendre aussi que pt est le « lieu » où les Nombres
sont situés et vont s’imposer, dans les grands comme dans les petits cycles,
et à toutes les heures. Et de même qu’aucune partie de ton corps n’est
indépendante de son Feu, de même aucune substance composante de
l’Univers, aucune étoile, n’est indépendante de pt.
Her-Bak, ayant longuement réfléchi, demanda :
— Quand on dit : « Ce qu’il y a dans le Ciel, dans la Terre, et dans la
Douât », que faut-il entendre par ces trois lieux ?
— Ces trois lieux se rapportent aux trois états d’un même Esprit, depuis
son origine jusqu’à la fin de ses kheprou (transformations). Mais encore une
fois, toute délimitation précise est impossible ici !
« Le Ciel est le monde de l’Esprit, c’est-à-dire des Hiérarchies Causales
(monde Archétypique).
« La Douât est le monde de la Forme-Principe, (monde Ectypique) ; c’est
le monde des formes qui délimitent (définissent) l’Esprit pour le
179
corporifier .
« La Terre est le monde des corps, c’est-à-dire de l’Esprit informé
(monde Typique).
180
« La Douât est beaucoup moins un lieu qu’un état ; et toi, dans ton
sommeil, tu vis sans le savoir dans la Douât. Elle comporte différentes
régions qui correspondent à divers états de conscience, et, par rapport à
notre Terre, à divers temps.
FIG. 21. – Nout, la vache céleste, soutenue par Chou. Les deux
positions de la barque solaire évoquent son double mouvement.
La nuit se dilue dans la clarté de l’aube ; une lourde vapeur est montée
de la terre, effaçant toute forme. Le Sage et son disciple, assis sur le flanc
de la « Cime », se trouvent enveloppés dans une brume légère.
Le Sage murmura :
— Il est bon quelquefois de perdre de vue notre terre, pour être délivré
de l’obsession des formes.
Her-Bak répondit en écho :
— Sans doute l’homme qui s’en libérerait pourrait connaître les Neter…
— N’est-ce pas sur cette montagne que Pois Chiche est venu les
chercher ?
229
— Pois Chiche ne les a pas rencontrés .
— Si Her-Bak pouvait éprouver en lui-même le rapport des effets et des
causes, il pourrait aujourd’hui les trouver.
« Le nuage descend : que vois-tu maintenant ?
— Je vois une brume épaisse qui couvre la vallée ; le fleuve est invisible
et l’on ne distingue plus ni temples ni maisons.
— Pourquoi parles-tu de maisons, de fleuve, de vallée ? Il n’y a rien
puisque tu ne vois rien… ou bien il y a tout ! La brume qui te cache le
monde des Puissances est plus opaque, infiniment, que ce voile jeté sur la
vision coutumière. Si tu constates l’une, pourquoi douter de l’autre ?
« Cependant, autre chose est de connaître « en soi » ces Puissances
motrices du monde, autre chose est d’en étudier la théorie qui en explique
les fonctions. Car les définitions schématiques n’ont point de vie ; or nous
vivons de ces Puissances : elles t’ont formé, modelé, signé, caractérisé.
Mais alors qu’en te voyant toi-même tu oublies la multiplicité des forces
qui te font vivre, il arrive qu’inversement, si tu détailles leurs
manifestations dans la Nature, tu oublies la source unique dont elles sont les
noms et Qualités.
« C’est pourquoi il n’est pas sans danger d’en risquer l’analyse. Car le
cerveau est prompt à se l’approprier ; et ces notions figées voilent la
connaissance de leur action génératrice.
— Dois-je entendre qu’on risque, en voyant les multiples Neter,
d’oublier le Neter unique ?
— C’est en effet le principal danger. Mais les hommes ont besoin
d’images : s’ils n’en ont point, ils inventent des idoles ; mieux vaut donc les
orienter sur des réalités qui conduiront le chercheur sincère vers la source.
— Si les Neter sont les Qualités et Fonctions de l’Unité inconnaissable,
peut-on parvenir à cette source sans avoir détaillé les Neter ?
— Le contemplatif le pourrait par pur confondement. L’homme proche
de la Nature en découvre certaines puissances ; mais plus la pensée l’en
éloigne, et plus il se fourvoie ; et si, à travers la Nature, il ne vénère plus les
divers aspects de l’Éternel, il s’adorera lui-même : sa pensée deviendra son
Neter destructeur… Et ce danger est plus terrible que tout autre.
« C’est pourquoi je t’instruirai maintenant comme ont été instruits nos
instructeurs. Mais je m’efforcerai de montrer l’harmonie des Neter dans un
mode qui soit lui-même une clé, ouvrant une porte sur leurs autres sens.
*
**
« Il est dit qu’au pied de cette colline les huit Neter du commencement,
ayant formé l’œuf du Monde, sont venus dormir sous la butte, attendant à
chaque décade la visite du « grand serpent »… Essayons de les évoquer.
« Tout est en tout, parce que tout vient d’Un qui se regarde et ainsi se
divise. Mais avant de se diviser, Il est le chaos primordial qui porte en lui
toutes les possibilités.
« Et ces possibilités ont double aspect : le passif et l’actif. Elles y sont en
puissance et ne sont point différenciées. Cette « confusion est le total des
activités du Monde ; mais ces activités sont niées par leur propre passivité,
car dans cet état l’une ne prédomine pas sur l’autre. Et je ne puis les
nommer sans les « penser », et les penser c’est déjà les différencier.
« Le premier nom possible dans cette confusion est Noun, c’est-à-dire
l’énergie N qui, se niant elle-même (nn), se polarise manifestant ce qui était
en son « eau chaotique » : le principe « Esprit-Lumière » heh et le principe
Ténèbre kek. Alors il y aura Nou, l’Eau céleste nourricière génératrice du
Monde, Amonienne, invisible.
« Ainsi sont Noun et Nounet, Heh et Hehet, Kek et Keket, Niaou et
Niout : quatre « doubles » en un, qui « sont » en puissance avant d’être
manifestés. La dualité de ces Primordiaux signifie la contradiction qui
manifeste le Chaos en le divisant. C’est toujours l’androgynat originel qui,
dans sa confusion des natures, est incompréhensible.
FIG. 22. – Alors il y aura Nou, Veau céleste nourricière génératrice du monde.
Le Sage dit :
— L’ignorance du fil conducteur excuse telles sup positions ; sa
connaissance te montrera leur puérilité. Admets d’abord l’affirmation dont
notre enseignement t’apportera les preuves :
• il n’y eut pas de luttes théologiques entre les théologies successives ;
• pas de compétitions entre les temples et les villes pour la prédominance
de leur Neter ;
• pas d’adaptation opportuniste à quelque but politique.
« Certes les passions humaines essaient toujours d’intervenir ; mais le
contrôle incessant de nos Sages ne leur permit de toucher aux symboles que
dans la mesure et la manière correspondant au rythme de l’époque : le plan,
conforme à la réalité Cosmique, était fixé d’avance, nul n’avait le droit
d’innover.
— Je le comprends pour les grandes lignes, mais je supposais que le
peuple avait multiplié les Neter des premiers Temps.
— Théologiquement le peuple ne peut rien inventer. Posé devant le ciel
et la Nature, il peut, constatant certains phénomènes, leur attribuer
superstitieusement une cause surnaturelle : il n’en déduira jamais une
théologie. Quant aux clergés, ils ne modifient qu’en accentuant l’aspect
utilitaire qui peut affermir leur pouvoir. Jamais une religion initiatique
n’évolue en ajoutant de nouveaux éléments aux bases théologiques, mais en
analysant celles-ci.
« La forme théologique est toujours apportée par un instructeur initié,
avec toutes les bases essentielles. Lorsqu’une Révélation se perpétue à
travers plusieurs millénaires, les noms divins devront se modifier pour
correspondre à ce qu’ils représentent. Pour donner force religieuse à une
théologie, l’initié inspiré lui accorde souvent un caractère historique ; et
cela ne va pas contre la vérité, car il est impossible à un homme non inspiré
de donner une Révélation correspondant au Temps et qui soit véridique.
Her-Bak jetait sur le Sage un regard suppliant :
— O mon Maître, me feras-tu connaître le fil conducteur ?
Le Sage répondit :
— Soit, je parlerai… pour ton bonheur ou ton mal heur : si ton cœur est
simple et sans arrogance, ce fil te conduira vers les portes secrètes ; sinon tu
seras plus aveuglé qu’auparavant.
Her-Bak baisa la main du Sage et lui dit gravement :
— Maître, j’en ai fait l’expérience ; j’écouterai.
*
**
Le Soleil était sorti de l’horizon ; l’ardeur de ses rayons avait vaincu la
brume ; sa lumière découpait crûment toutes les formes. Alors le Sage
consentit à dévoiler pour son disciple la Hiérarchie des Neter :
— Il y a, lui dit-il, l’histoire abstraite de la création primordiale ; celle-ci
se rapporte aux divers aspects de la Puissance créatrice, et à ses expressions
ou « Paroles » successives dans le Monde des Principes ; il y a l’histoire
236
concrète de leur réalisation, à travers la succession des procréations .
« La première histoire est divine.
« Dans l’Unité première sont Her et Reh. L’un est comme le miroir de
l’autre, comme à l’origine les ténèbres regardent les ténèbres d’où jaillira la
lumière. Reh regardera la face de Her ; et ce sera la première opposition
dont la lutte cause le Monde :
« Her étant la Lumière du Verbe ; Reh – dont la manifestation sera Seth –
étant le séparateur, destructeur, stérile, cause de la dualisation qui fait le
« monde » par opposition. C’est pourquoi Horus et Seth sont nommés les
237
Reh-ouy . (La même appellation appartient aux deux sœurs
« complémentaires » Isis-Nephtys, quoiqu’elles soient moins caractérisées :
les Reh-ty.)
« L’un ne peut être sans l’autre, car l’un est la cause de l’autre. Cette
dualité se poursuivra d’une façon constante dans la Nature : elle est le
principe de la sexualité qui est cause de naissance, donc de mort.
« La première trinité, divine, originelle, est indivisible et
incompréhensible dans son unité. Lorsque nous nommons le Principe
créateur : Atoum, Amon ou Râ, c’est déjà d’une trinité qu’il s’agit. A partir
de cette première trinité nous parlerons de Ptah et des triades divines, dont
chacune est l’origine d’une lignée dans la création continue :
Horus – Hathor – Ihi ;
Ptah – Sekhmet – Nefer-Toum ;
Amon – Moût – Khonsou ;
Osiris – Isis – Horus leur fils ; telles sont les principales triades.
« Et ce qui, dans ces diverses lignées, concerne les réalisations, fait
partie de la deuxième histoire.
« La première histoire te fera connaître encore les Neter du quaternaire,
les quatre piliers du monde, ou éléments constitutifs. Ils sont signifiés sous
quatre aspects principiels, dont chacun est quadruple car l’élément simple
n’est pas perceptible :
• leur principe qualitatif est donné dans les deux premiers couples : Chou
et Tefnedj, Geb et Nom ;
• leur nature à’éléments-innés est représentée par les quatre « BA »
contenus dans la colonne djed : BA de Râ ou Feu, BA à” Osiris ou Eau, BA
de Chou ou Air, BA de Geb ou Terre (les quatre barres de la colonne djed) ;
• l’aspect féminin – substantiel-non-matériel – des éléments, est
symbolisé par les quatre femmes : Net (Neith), Serqet (Serket), Aset (Isis),
Nebhet (Nephtys) ;
• les natures organiques animales des éléments sont données par les
quatre fils d’Horus : Amset, Hapi, Douamoutef, Qebhsenouf.
« Je ne parlerai point du divin Nombre Cinq, qui sera un jour ton Neter
de Lumière.
« Le Nombre Sept te donnera le nom de Sefekht qui signe toute chose en
ce monde.
« Tu connais déjà les huit Primordiaux, associés de Thot, et les Neter de
l’Ennéade.
« Le Nombre Dix est le triangle du monde des Principes.
Her-Bak était fort intrigué par l’omission du Nombre Six ; il en fit la
remarque avec hésitation
— … car, dit-il, ce n’est sans doute point un oubli de mon Maître…
L’astuce fit sourire le Sage qui répondit :
— Six un est Nombre secret dont le caractère est « équilibre » et en
même temps « séparation » ; il « ouvre » et « ferme ». Mais la valeur de cette
définition ne t’appa-raîtra que plus tard, si tu approfondis l’étude des
Nombres et de nos lettres.
Her-Bak s’excusa de cette interruption et supplia son Maître de continuer
cet enseignement.
*
**
Le Sage dit :
— La deuxième histoire te montrera les fonctions de la Nature en aspect
réalisateur.
« Les deux fonctions maîtresses résultent de l’opposition dans la Dualité,
qui fait le Bien et le Mal et donne la science de la Nature ; ce sont la
contraction et la dilatation. Pour comprendre leur expression symbolique,
souviens-toi que toute fonction en action provoque la réaction
complémentaire ; nos mythes et nos clés te seront inaccessibles si tu
négliges ce fait essentiel.
« Ainsi le scorpion serq est, en soi-même, principe de fixation
« contractante » ; de ce fait il provoque la dilatation « aspirante ». C’est ce
double jeu qu’il symbolise par sa vie et par le dessin – normal ou anormal –
qui le représente.
— En effet, constata Her-Bak, il est étrange qu’on le représente parfois
sans queue !
Le Maître répliqua :
— Ce que tu appelles sa queue est la partie la plus allongée de
l’abdomen. Si cette partie est supprimée dans le dessin, c’est que l’on omet
l’idée de venin, et que l’importance est donnée à la « dilatation aspirante.
« Il y a, dans le crocodile de Sobek, l’expression d’une qualité
contractive. L’idée de contraction est aussi exprimée dans le radical saq, par
le jeune saurien repliant sa queue. Mais le symbole parfait de la contraction
(fixation) est Sokar.
« La fonction de dilatation appartient à Anup (Anubis). Oupouat
représente un aspect particulier de cette fonction. Le nom du parfait
238
accomplissement de la dilatation est ouadj .
« La digestion a son symbole en Anubis dans son aspect de chacal, qui
dévore même les os et transforme en substance vivante la matière putride.
« La digestion de la semence – digestion qui tue et décompose pour
former et gester un nouvel être – appartient à Moût. Ce principe féminin ne
peut pas donner vie sans faire mourir la semence, c’est-à-dire sans fixer en
« volume » corporel l’impulsion de vie qu’apporte la semence. Le premier
effet sera putréfaction. Si le principe féminin fécondé n’est pas lui-même
vivant, la putréfaction sera corruption, et Moût deviendra mat (mort).
« Sekhmet, autre forme de Moût en sa fonction Hathorienne, est un
aspect de ce qui tue pour animer.
« Apet-Ta-ourt (Touéris) au ventre énorme et aux seins de nourrice est le
symbole de l’abondance, de la fécondité maternelle et de la concrétisation ;
c’est le corps et le ventre contenant ce qui est en gestation. Elle est aussi le
principe de la terre maternelle et nourricière.
« Khnoum est le Neter de toute conjonction. « Heqet est celui de la
renaissance par re-génération du ferment, et de la multiplication.
*
**
« Si je voulais détailler les diverses expressions du Principe féminin, je
devrais d’abord séparer ses rôles dans les Principes de vie d’avec ses
fonctions dans l’existence terrestre. Or je ne puis pas le faire, les unes
rendant les autres compréhensibles.
« Ses quatre grands aspects sont figurés par les quatre déesses : Aset
(Isis), Nebhet (Nephtys), Net (Neith), Serqet (Serket).
« Isis est le Principe féminin de la Nature, en qualité de siège et lieu qui
situe toute activité. Elle est l’aimant qui attire la semence mâle et en
provoque le jaillissement ; c’est la passivité agissante de la féminité et la
mère de l’existence.
« Son principe fluide (ses larmes) est spiritualisant : il ne ressuscite point
239
le corps terrestre d’Osiris mais son « djed » (sublimé), d’où jaillira
périodiquement « l’Eau nouvelle » de toute sève.
« Elle est la substance maternelle qui, dans le marécage, geste et nourrit
Horus qui révélera la face spirituelle de son père Osiris.
« Nephtys est la passivité négative de la féminité. De nature subtile, elle
corrompt pour donner la vie ; elle est immanente à Isis dans sa fonction de
pleureuse qui provoquera la putréfaction, et « fera » ainsi le « digéreur »
240
Anubis (évoquera cette fonction).
« Neith est la Féminité spirituelle animatrice, la double énergie
lumineuse, sans forme, qui provoque la formation par fixation des
compléments (croisements). Vierge, elle mit au monde avant qu’on mît au
monde ; extrême dilatation, elle provoque la contraction, c’est pourquoi
nous mettons son symbole dans la poitrine dilatée du cobra. De ses flèches
croisées, elle fixe la substance. Le mouvement de sa navette tisse la
première matière du Monde.
« Serket est la féminité sexuelle ; elle est la puissance ténébreuse
contractive qui provoque la dilatation (donc l’aspiration).
Fig. 27. – Deux Nils, portant sur la tête les emblèmes des nomes Hermopolite et Héliopolite du Nord.
FIG. 28. – Scène du Grand Pas. Derrière le Roi, les symboles du scorpion et du KA, sous le demi-ciel.
« Mais un signe n’agit pas seul, car son vis-à-vis réagit comme un
complément. Vous voyez que le signe opposé au Taureau est le Scorpion ;
nous avons donc subi l’influence réactive du Scorpion en même temps que
celle du Taureau. Or, constatez que l’un des symboles est le scorpion monté
296
sur le « chen » qui est un nœud sur le circuit.
« Le deuxième hiéroglyphe est une composition symbolisant par son KA
le taureau, puisqu’il en est le nom (ka). Les quatre éléments qui donnent à
la colonne djed la stabilité sont inscrits dans le KA dont cette colonne est la
base (men), spécifiant ainsi les caractéristiques du taureau : l’assise, la
puissance vitale et la stabilité.
297
« Les bras du KA supportent un symbole qui est ici le hiéroglyphe
secret du « Bélier » d’Amon qui suit le Taureau et dans lequel s’achèvera
notre histoire.
Les disciples manifestèrent leur émerveillement.
Le Sage continua :
— Nous sommes maintenant dans le signe du Bélier ; son opposé est le
signe akh (horizon) (la Balance) qui est en rapport avec la balance de Maât.
Or vous savez combien sont importants les rôles de akh et de Maât dans
notre symbolique et notre théologie…
« Mais lorsque le Soleil se lèvera dans le signe des Poissons, le poisson
sera le symbole du nouvel « Envoyé », et le signe qui jouera le rôle réactif
sera son vis-à-vis : ta rpà la « femme » (signe de la Vierge).
La lumière était aveuglante. Il n’y eut pas d’autres paroles ce jour-là.
DEUXIEME PARTIE
BA ET KA
298
INTRODUCTION AUX « SEPT JOURS » DE BA ET KA
Les textes égyptiens qui parlent des sujets traités dans les sept « jours »
de BA et KA sont toujours énigmatiques, les Égyptiens ayant considéré BA
et KA comme inséparables des états qui leur correspondent dans l’Univers ;
plus exactement, ils pensaient que ces états, dans l’homme et dans
l’Univers, ne font qu’un.
Ce sujet constitue le programme de base et le but essentiel du Mythe
égyptien, qui, à son origine, est unique. Son apparente déformation dans la
suite des Temps a pu laisser croire que l’on avait affaire à plusieurs mythes
différents ; tandis qu’en réalité il s’agissait du développement successif
d’un thème unique et de son adaptation progressive aux phases de l’Égypte
et à la conscience du peuple.
Les Égyptiens, en dehors des Théogonies fondamentales, l’enseignent
sous des formes variées : parfois par épisodes du séjour dans la Douât,
relatant les transformations des divers éléments de « l’être » ; parfois par
des contes ou des légendes présentant un de ces éléments sous son aspect
particulier ; parfois dans des tableaux qui précisent quelques-uns de leurs
rapports mutuels. Or les formes étranges des symboles qui illustrent les
textes dits « funéraires », ainsi que le caractère énigmatique de ceux-ci,
opposent souvent à l’étudiant moderne un obstacle apparemment
insurmontable.
Cette présentation mystérieuse avait pour but d’éveiller la
compréhension intuitive des hommes cultivés dans cette mentalité, ne
livrant aux profanes que le sens apparent des textes et des gestes rituels. Le
déchiffrement de leur sens initiatique exige la connaissance de la science
égyptienne quant à la valeur philosophique des lettres, et quant aux
analogies existant entre les principales formes du règne animal et les divers
organes et centres occultes du corps humain, ainsi qu’avec les différents
états subtils qui leur correspondent.
Ce sont là les bases indispensables à l’interprétation exacte du BA et du
KA. Notre but, dans cet ouvrage, était de préciser les notions essentielles
résultant de cette recherche, dans la mesure nécessaire à la compréhension
de la science égyptienne quant aux divers états de l’être, du devenir de
l’homme et de son évolution spirituelle. Nous nous sommes efforcés – pour
rester conformes à la réalité – d’en montrer une structure synthétique, mais
cela n’était possible qu’après avoir étudié particulièrement chacun des
éléments.
Ce sujet ardu devait être situé à cette place dans le programme d’Her-
Bak, mais il est nécessaire de connaître l’ouvrage entier avant d’aborder
l’étude approfondie des « sept jours » de BA et KA, leur ensemble
constituant en soi-même une totalité qui est l’histoire de l’animation.
Les problèmes qui y sont traités sont si condensés qu’on ne peut se les
assimiler par une lecture superficielle. Cependant les précisions données
sont suffisantes pour permettre, en suivant la méthode indiquée, de se
familiariser avec cette partie fondamentale de l’enseignement égyptien.
Évidemment, les bases de ces données essentielles ne sont – et ne
peuvent être – qu’identiques à celles de toute tradition véridique ;
néanmoins l’expression égyptienne nous paraît la plus précise et la plus
facilement assimilable pour la mentalité occidentale.
Elle est précise, par la valeur rigoureusement exacte des lettres et signes,
choisis dans chaque cas pour définir le sens particulier attribué à un mot.
Elle est simple, parce que dénuée d’images littéraires et d’interprétations
sentimentales dont le caractère subjectif nuirait à la réalité de cette
métaphysique.
La plus grande difficulté réside dans la compréhension du KA, pour la
traduction duquel aucun mot n’existe dans la langue française, BA est plus
facile à exprimer par le mot âme, en tant que souffle animateur de tout ce
qui vit ; mais pour le KA il est préférable de garder le mot égyptien, en
tenant compte de ses différentes acceptions, car toute traduction ne serait
qu’approximative, ne pouvant exprimer le sens philosophique donné par la
composition de ce mot.
Seul, le mot KA peut révéler les divers aspects qui y furent
originellement inclus (aspects différenciés par les nuances de son
inscription hiéroglyphique), sans cependant créer l’idée d’une multiplicité
dans son essence.
Le nombre de mots égyptiens employés fréquemment dans ces sept
chapitres est assez restreint pour que l’on puisse faire l’effort de s’en
souvenir, ce qui facilitera la pénétration de ce mode de pensée.
*
**
Connaissant les difficultés créées par la complexité du sujet, nous
insistons pour prier le lecteur d’observer les recommandations suivantes :
1º Nous conseillons une première lecture attentive des sept « jours » de
BA et KA dans l’ordre donné, et sans s’attarder aux difficultés premières ;
puis l’étude particulière de chacun des « jours », en alternant chacun d’eux
avec le septième, puis le deuxième avec le septième, etc., car ce septième
est la synthèse et la clé qui permet de revoir avec fruit chacun des autres.
2° Ne pas se lasser de rechercher sans cesse, à l’aide de l’index, tout ce
qui a été dit dans l’ouvrage entier, sur chaque sujet mentionné.
SOMMAIRE DES SEPT CHAPITRES DE BA
ET KA
Premier jour
Notions élémentaires sur akh, BA, KA.
Les origines du « devenir ».
Deuxième jour
Les quatre lettres principielles : N, H, S, M.
Racines essentielles qui en découlent. La « Synthèse des Principes ».
La source des KA. Les deux Maât.
La « Hiérarchie des Neter » comparée à la « Synthèse des Principes ».
Troisième jour
Le KAet la peau meska.
Les « vases » du corps khat.
L’unité humaine ouâ.
Comment l’Unité devient « diversité ».
La nature du KA et des KA.
Les Principes Neter en l’homme.
Quatrième jour
Le nom. Le « moi » nek, inek.
La « corde ». Volonté d’existence, ikou.
Les sept « Puissances fatales ».
Les kaou et les hemsout.
Cinquième jour
La conscience, ses éléments.
Formes et degrés de la conscience.
Les milieux d’inscription.
La responsabilité.
L’Ombre, khaibit.
Les diverses mémoires.
La « dévoreuse » âmmit.
La scène de la pesée.
Les deux Maât. Les deux « soifs » : àb et tekh.
Le destin personnel : chaï.
Les enveloppes et les peaux.
Cœur solaire et cœur lunaire.
La « nedj » de l’homme.
Sixième jour
Les divers « lieux » ou états (de l’être et de la Douât).
Nout, « échelle » de l’homme.
La réincarnation.
khaïbit.
maâ-kherou.
Meskhent et Renenedjet.
Le sâh et Sah (Orion).
Les voies d’Occident et d’Orient.
Septième jour
Le djet, corps subtil indécomposable.
Formation de l’œuf humain.
Rôle de Meskhent et Renenedjet.
Lien de tous ces éléments.
Explication globale du KA.
Voie Osirienne, voie Horienne (Rédemption).
XII
BA ET KA
PREMIER JOUR
BA ET KA
DEUXIÈME JOUR
Her-Bak, par faveur spéciale, passa la nuit dans une des chambres
d’étude du temple. L’atmosphère était favorable à sa méditation, comme si
les murs eussent été imprégnés du sujet qui le préoccupait.
Lorsque son Maître vint l’y trouver au matin du lendemain, Her-Bak lui
soumit un problème :
— Tu enseignes que toute genèse commence par la division ; la division
est dualisation d’une Unité première : pourrait-il y avoir division s’il n’y
avait pas différence de nature entre les deux parties d’origine ?
— Tes paroles sont imprécises et ce sujet exige une exactitude
329
rigoureuse. Toute genèse , dans le monde créé, commence par une
division, comme la création se fait par la scission incompréhensible de
l’Unité.
« L’erreur est de transporter dans l’Unité la notion de dualité (c’est-à-dire
sexualité) que te donne la séparation. Pourtant tu ne peux pas penser
autrement ; c’est là le mystère de la Création, réalité que les Sages, seuls,
peuvent démontrer.
« Sache donc que le moteur originel est l’Esprit-Verbe dont la force sera
le Feu, c’est-à-dire le Principe même de l’impulsion et non le feu commun
qui en est seulement l’image. Nous ne pouvons comprendre ses Qualités
que lorsqu’elles ont évoqué leurs complémentaires ; celles-ci constituent le
Principe Eau, que l’on pourrait appeler aussi : la résistance s’opposant à
« l’Activité-Feu », et créant de ce fait le premier « lieu » en lequel se situe
le Monde.
« Tu ne peux pas imaginer sans erreur les Qualités abstraites de ces deux
Éléments principiels ; mais si tu étudies les hiéroglyphes par lesquels nous
les représentons, tu apprendras à connaître leurs rapports mutuels et leurs
effets, d’après le rôle que jouent ces hiéroglyphes dans la formation des
mots qui s’y rapportent.
« Quatre lettres symbolisent le rôle de ces Qualités élémentaires dans la
330
création : N, H, S, M .
« Le sens métaphysique des deux premières, N et H, se rapporte au
mouvement de l’Esprit animateur : les deux autres, S, M, en sont la
résultante dans l’œuvre de Nature.
« Mais tu dois d’abord te souvenir que N symbolise l’Énergie cosmique
agissant comme onde ; or c’est son caractère d’alternance qui fait la
manifestation. Par extension N représente le principe de l’onde, quelle que
soit la nature de celle-ci.
« N, en tant que Qualité pure, Énergie pure, Vie divine, est inconcevable
pour nous. Elle est le principe du Feu agissant, l’Essence même de la
331
Forme, cause de toutes les formes ; tandis que H est le Principe de la
Substance, de la nature du principe Eau, en laquelle agit le Feu essentiel
source de la Forme. Mais cette substance, H, émanée de la source Divine, et
incréée, est aussi abstraite – spirituelle – que le Feu cosmique qui l’anime.
« Les deux medou-Neter N, H, considérés dans leur sens abstrait, sont les
attributs de la Vierge-Cosmique dont le mystère divin ne peut jamais être
expliqué par une langue humaine : Vierge sans cesse unie au Verbe-Feu
divin qui la féconde et qu’elle enfante éternellement, elle est Mère de la
Lumière incréée que nous nommons le Divin Râ.
« N devient plus compréhensible dans la « création continue », comme
alternance de l’Énergie en Neith, dont les deux flèches signifient cette
alternance qui donne « aspect » à toute chose dans le Temps : lumière et
obscurité, chaleur et froid, montée et descente, dilatation et contraction.
« Leur manifestation dans la Nature est symbolisée par la double lettre S
332
; l’aspect affirmatif, générateur, est signifié par S vertical , l’aspect
333
négateur et Sethien (brûlant) est signifié par S horizontal (z ).
334
« Le croisement des flèches de Neith et le croisement de sa navette
représentent la neutralisation de deux « activités ».
335
« D’autre part les croisements de H signifient la « mise en
mouvement » des Fonctions primordiales par lesquelles s’engendre la
première Substance et qui seront les causes métaphysiques du « devenir »
de la Matière. Cette Substance qui en résulte est le premier état que nous
puissions concevoir comme Substance animante et animée ; c’est le second
sens de la lettre H.
Ce hiéroglyphe est le meilleur symbole synthétique qui puisse en être
donné : une corde (ou fil ou écheveau) qui paraît double par le fait qu’elle
se croise elle-même. Ce signe magnifique se passe de commentaire.
« Les croisements de H déterminent les instants de neutralité de
l’Activité causale, puis provoquent la réactivité qui sera cause du
336
phénomène. Cette neutralité sera le principe de M . De même que S est la
résultante de N dans le monde du Devenir, de même le principe M est la
résultante de H.
« Il faut aussi distinguer alternance et croisement. L’alternance précise le
temps, les croisements précisent des états.
« M dans son aspect abstrait, exprime la neutralité, l’impassibilité, le
point mort de la balance ; c’est le principe du « vase » passif, sans forme,
qui donne naissance à la forme créée par l’activité gui la remplit. M est
l’Idée du « contenant », du milieu réceptif, inerte par lui-même, qui peut
être animé par une activité.
« Dans son aspect concret, elle est le caractère passif de l’eau, qui peut
prendre les formes de tout ce qui la contient. En tant que « milieu », elle
peut recevoir et laisser gester en elle toute semence, dont elle deviendra
alors le vase ou « contenant ».
337
« Les deux lettres H et M assemblées, HM , expriment la passivité
vivante, apte par sa neutralité à recevoir une impulsion, mais capable aussi
– lorsque la réaction prédomine sur la passivité – de laisser prendre forme à
l’activité qu’elle localise.
« Pour préciser encore la nature de ces quatre lettres, souviens-toi que
NH signifie la perpétuité de la Vie Universelle, et que les lettres SM
composent le nom de ce qui peut prendre forme, sm, et de ce qui en naît,
338
ms .
« Enfin ces quatre lettres assemblées donnent le nom du natron, hsmn,
qui est le premier sel du Monde.
Her-Bak dit à son Maître :
— Je parviens à imaginer le principe de HM et de M ; me rappelant ce
que tu m’as dit de Thot et d’Horus je puis encore apercevoir le sens
véritable de H ; mais il m’est difficile de concevoir, sans les confondre, les
caractères des « Feux » de N, de Neith et de S…
Le Sage répondit :
— Ne s’agit-il point des bases mêmes du Monde ? Ne prétends jamais
les comprendre avant d’avoir obtenu, par l’intensité de ton désir, qu’elles se
révèlent en toi-même. Je ne t’en donne aujourd’hui que les simples notions
nécessaires à la compréhension de la constitution de l’homme. Écoute-les
comme telles, sans confondre les symboles et la réalité.
« N reste toujours qualitative, mais à divers degrés de manifestation ;
dans ce sens la raison peut discerner trois états de N :
« Le premier est N Originelle, Qualité pure, Énergie pure,
incompréhensible.
« Le deuxième est Énergie essentielle indéterminée, qui, se polarisant,
339
donne les aspects complémentaires symbolisés par les deux colonnes an .
340
Elle est Nt (ou Neith) aux deux flèches : elle est l’Énergie animante de
l’Univers, qui soutient toutes choses par son activité ; elle donne la rougeur
du sang ; la couronne rouge est son symbole.
« Le troisième degré est sa manifestation dans le Monde terrestre sous la
forme d’onde, quelles que soient sa nature et ses propriétés : onde porteuse
d’une des manifestations de l’Énergie, onde qui « environne », onde qui
réfracte et révèle les apparences de toutes choses.
« Mais les deux flèches de Nt trouvent, dans l’œuvre de Nature, leur
concrétisation dans le double Feu de S, principe actif qui donne la Forme ;
et cette expression de la Dualité, virtuelle en N, est la cause du choix des
341
deux lettres S, N, pour exprimer le « double », le nombre deux, s .
« S est Principe actif, Feu essentiel immortel, inné dans la Matière, mais
déterminé par la semence en laquelle et par laquelle il agit, laquelle
semence lui sert de ferment spécificateur.
Her-Bak pesait chaque parole, mesurait la valeur des mots, mais perdait
pied dans l’abstraction et cherchait l’appui d’une image.
— O Maître, ce que tu dis de N, de Neith, et de S, se confond en ma
pensée avec l’idée de Ptah, et je ne parviens pas à les différencier !
Le Sage parut satisfait de l’objection ; il invita Her-Bak à approfondir ce
sujet :
— En étudiant le ciel pet, tu as appris qu’il est le lieu où se jouent, se
croisent et se définissent les différentes Puissances-Fonctions que nous
symbolisons par les Neter. Imagine toutes ces Fonctions, non plus en
puissance mais en action dans tout germe, dans tout œuf en gestation : tu
auras l’image de Ptah agissant comme formateur forgeron de toute chose
dans l’Univers. Ptah est le Principe actif causal qui, par sa chute dans le
« corporel », a été ligoté. C’est la chaleur de cette Activité qui va être
source de toute vie, et que nous symbolisons par le Feu.
« De même que l’œuf fécondé porte en lui la Forme spécificatrice qui
sera celle de l’embryon, et porte en même temps la substance nourricière
qui multipliera progressivement la matière de son corps, de même est
façonnée perpétuellement par Ptah la première matière du Monde ; et cette
première matière que nous nommons pat (ou paout si l’idée du volume y est
342
incluse), est déjà la création corporelle ou « continu ».
« Or l’œuf fécondé porte en lui le Principe S, Feu essentiel déterminé par
l’espèce, dont cet œuf est issu ; tandis que l’œuf fécondé porte le Feu
spermatique, S, du père qui a fécondé l’œuf, et ce S spécificateur
caractérisera le poussin qui en naîtra. Or, pendant toute sa gestation, l’œuf
sera animé par le feu non spécifié de N, comme l’est notre sang pendant
toute notre existence.
« Telle est la différence entre les modes d’action des Feux N et S :
• S spécificateur particulier,
• N animateur continu universel. Le complément de cette activité sera
symbolisé par meh, la vache meh-ourt, correspondant à l’Eau-mère passive,
universelle, qui a conçu et qui geste la matière engendrée par ces « Feux ».
« Ainsi tu as les premiers éléments pour connaître les quatre bases du
Monde : N, H, S, M.
*
**
Her-Bak écoutait ces notions nouvelles et s’efforçait de les relier aux
enseignements déjà reçus. Tant de perplexité contractait son visage que le
Maître s’en étonna. Le disciple avoua les raisons de son embarras :
— La définition que tu donnes de S, spécificateur qui donne la forme et
les caractères de chaque être, me paraît identique à ce que tu enseignes sur
343
KA : « Forme qui donne forme à la Substance pour faire la Matière…
Qui donne la spécification héréditaire »…
Le Sage interrompit Her-Bak :
— Tu confonds les Temps et les phases, et ceci n’est pas étonnant car il
est difficile de saisir en effets succes sifs ce qui est simultané. Dans leur
Origine S et KA « sont » simultanément ; pourtant dans le Devenir, S
précède le KA et les KA… Mais j’aurais tort d’expliquer par arguments
logiques une réalité que les Sages se sont contentés d’affirmer en paroles
essentielles.
« Si tu as étudié et mûri la « Hiérarchie des Neter », tu as un aperçu des
Fonctions Principielles. Hier je t’ai donné des notions très succinctes sur les
éléments spirituels des êtres et sur les causes du Devenir.
« Maintenant que tu peux entrevoir les principaux détails du problème, je
voudrais essayer d’ébaucher la synthèse des Principes afin que tu puisses
situer (depuis le commencement du Commencement) l’origine de l’homme
créé de Dieu, puis l’homme né de la femme, jusqu’à son retour en l’Homme
Cosmique… ce qui est l’histoire de la Conscience.
« La première étape est une dégradation de la Cause unique, primordiale
et indéfinissable, vers le « corporel ». Nous, de notre point de vue, nous ne
pouvons pas comprendre autre chose puisque nous sommes du côté
corporel.
« Or il est impossible d’inventer aucune « combinaison », aucun
système, si ingénieux soient-ils. Ce que je t’en dirai ne sera que quelques
mots, quelques lettres, constituant fidèlement un précieux extrait du Plan
des Anciens.
« Ce que je t’en transmets ici est véridique, mais détaché de ce trésor
comme une pierre d’un collier, pour apporter une parole substantielle dans
laquelle ne se glisse aucune opinion ni interprétation arbitraire sur un aussi
grave sujet.
*
**
344
La Synthèse des Principes
« Dans l’Origine d’où émane tout ce qui est, il y a trois Principes en Un ;
ces trois Principes sont innommables, et nous ne les désignons que par trois
lettres, A, N, H. L’un ne peut se situer avant l’autre, car ils sont Unité
parfaite quoique chacun ait en soi ses propriétés typiques. L’un est
inconcevable sans l’autre, et l’un procède de l’autre. Or A est le Principe-
Action, essentiel-originel, source de toute activité ; N et H procèdent de A et
sont par A, mais on ne peut parler de A qu’à travers N et H.
« C’est donc en N et H qu’il faut chercher la source de tout ce qui
constituera l’échelle des Puissances, puis leur manifestation.
*
**
« Dans le Principe Éternel il y a le triangle A, N, H, trois en un ; A est en
N et H qui procèdent de A.
« N ou AN, double en un, est le Feu divin, Principe de la Qualité, source
de la Forme ;
« H ou AH, double en un, est la Substance spirituelle dans la passivité de
laquelle peut agir AN.
« En elles sont virtuellement contenues toutes les Puissances qui en
procèdent :
• de N procéderont : NT, qui contient les Causes du Ciel et de la Terre,
• et le Principe de S en son unité primitive,
• et le Principe ternaire du KA originel.
« De H procéderont : M, passivité neutre et principe du « contenant »,
• et le principe du Verbe Her, Face qui est à l’image du Tout.
« Mais tous ces Principes, n’ayant pas encore agi les uns sur les autres,
étaient unis en eux-mêmes et il n’y avait point d’opposition.
*
**
« Or lorsqu’ils se reflètent dans leur propre image ils se révèlent en leurs
effets.
« De N procèdent : NT et Nout qui contient NT,
l’Energie NR, Lumière vivante ou énergie agissante parce qu’elle a
345
trouvé sa résistance qui la mesure , et toutes ses Qualités et propriétés
immanentes,
l’Élément principiel Feu, contenant en puissance les divers feux du
Monde,
les Principes des « Caractéristiques » : le KAdivin et le double feu de S
non divisé ;
et par eux : le Principe du Nom,
le Principe paternel,
et le Principe du Temps ;
et toutes les « Possibilités » des formes et de leurs noms.
« De H et de M procèdent :
le Verbe animateur Her (ou Esprit substantiel) ;
l’Élément principiel Eau, matrice de l’Esprit ;
le Principe de la Masse, matrice du Feu, qui fera la Matière ;
et, par ces derniers, le Principe maternel,
et la matrice de l’Humanité.
*
**
« Or il n’y avait pas encore, en cet état, la division des forces qui cause la
Nature. Mais la Puissance créatrice des Formes-en-possibilités était connue
de chacune d’elles parce que confondue avec elles.
« Et l’ultime Forme, l’Humain, image de la Totalité divine, connaissait et
nommait toutes les autres Formes. Et cela était la conscience Maât, fille-
épouse-mère de la Lumière omnisciente, source de tous les KA divins, qui
viendront s’incarner dans les matrices humaines, pour y prendre conscience
des forces inférieures et y éveiller l’Horus humain, qui accomplira le retour
à l’Homme Cosmique.
« Et cette nouvelle Conscience, conscience du « discernement », est la
seconde Maât : la Maât du jugement.
« Et cette « nécessité » devint la possibilité de la « séparation », appelée
par le Soi évoquant le Moi, le « Même » (djes) évoquant « l’Autre » (ta) et
émanant le désir de l’existence (ikou).
346
« La détermination de cette initiative est symbolisée par dj , premier
agent « du choix » :
• si le Moi s’identifie avec le Soi par la Conscience, tout demeurera dans
la Vie Éternelle ;
347
• mais si le Moi s’oppose au Soi, c’est la chute dans la Matière ; alors
commence la grande lutte de Maât qui, à travers vie et mort, devra souffrir
dans le corporel pour reconquérir l’état initial ;
alors N devient l’Onde, qui réfracte et révèle les qualités
348
particulières ;
et les flèches de Neith polarisent les Qualités ;
S se divise en Feu Horien et Feu Sethien ;
et HM devient matrice ;
et SM devient la forme (semence) ;
et M devient Moût, féminité gestante, et moût la mort qui en résulte.
« Et tout cela, œuvre de Ptah, est la « création continue », Ptah forgeron
des choses, père des KAOU de la Nature, porteur intermédiaire des KA
humains.
*
**
Le Sage se tut, et Her-Bak, respectueux, continuait à écouter…
Le Maître rompit le silence et lui dit :
— Lorsque tu méditeras sur ces paroles, il t’arrivera de les comparer à la
Hiérarchie des Neter, et tu pourras être surpris de la différence des noms,
des mots et du mode d’enseignement…
« En voici la raison : la Hiérarchie des Neter t’enseigne la genèse – ou
apparition successive – des Puissances ou Qualités divines issues de
l’Éternelle Cause, et leur projection vivante dans la Nature.
« La Synthèse des Principes se rapporte aux lois des Nombres-Entités,
contenus en l’Unité originelle puis issus de la première division et
349
constituant la structure abstraite de la Nature concrète .
« Et ces deux enseignements parlent d’une même réalité ; mais la
Synthèse des Principes comporte la connaissance des éléments spirituels de
l’homme, donc indique la possibilité d’un chemin de retour vers la Source
dont ils sont issus.
« Connaissant cet extrait de l’enseignement secret qui est notre
patrimoine, tu pourras t’y référer pour relier les éléments que je dois
évoquer séparément.
« Nous les regarderons dans leur troisième état, c’est-à-dire en fonction
dans la Nature, pour comprendre leur rôle dans la constitution de l’être
humain.
« Toute chose existante est devenue telle par l’action réciproque des deux
éléments primordiaux représentés par S et H, et chacun d’eux a caractérisé
en cette chose les éléments qui leur correspondaient. Tu en vois l’exemple
dans la coexistence du globe jaune et de l’eau blanche dans l’œuf souht.
« Ces deux principes sont assemblés en tout être vivant ; ils y sont
350
voisins (sah ) comme sont voisins le jaune et le blanc dans l’œuf souht.
« Mais pour que devienne le poussin, ce jaune et ce blanc devront se lier,
pourrir ensemble dans un chaos où se développera le germe ; or ce germe a
pris forme par l’essence active sou et est nourri par la substance passive de
ht, qui constitue la base vivante de l’œuf souht.
Her-Bak émit une suggestion :
— Ces paroles semblent montrer un deuxième aspect de la dualité : SN
(sen) signifiant « deux », et SH le double Principe ?
Le Maître répondit :
— Il y a d’autres aspects encore, mais ces deux expressions sont
fondamentales. Leur différence réside en leur situation dans l’histoire de
l’être.
« Tout ce que je t’ai dit aujourd’hui est le développement des éléments
abstraits de la philosophie spéculative, c’est-à-dire ce que la raison nous
enseigne à distinguer. Maintenant passons à l’histoire de l’être : histoire de
l’Esprit, histoire du corps, et histoire de la conscience.
« L’histoire spirituelle n’est concevable pour toi que par méditation – ou
351
confondement ; autrement tu peux essayer de la saisir schématiquement,
par les notions abstraites que tu viens de recevoir et par notre enseignement
symbolique.
« L’histoire corporelle est accessible par l’étude de la gestation dans
toute la Nature.
« L’histoire de la conscience est connaissable par notre propre
expérience, qui peut être accélérée par l’étude des divers états de la
Conscience universelle, car l’ignorance de ces sujets accroît l’aveuglement.
Cette histoire est celle du BA et du KA.
« Le passage de l’histoire spirituelle à l’histoire corporelle – comme
celui de la Substance à l’état de Matière – est un mystère : c’est le mystère
de l’Incarnation.
« Or ceci se fait continuellement dans la Nature, car N, H, S, y jouent un
rôle animateur. Tu ne dois jamais perdre de vue cette réalité ; et la difficulté
est de ne pas confondre leurs deux rôles exprimés par les mêmes lettres ; ici
les medou-Neter te seront d’un grand secours par les subtilités qui en
diversifient la signification.
« Pour répondre à ta question sur les deux expressions de la dualité, SN
et SH, je dirai que SH joue, dans l’hsitoire corporelle, un rôle analogue au
rôle de SN dans l’histoire spirituelle, mais avec un renversement apparent
dans l’ordre des facteurs… ce qui est encore une résultante de la loi du
croisement.
« Et de même que l’histoire spirituelle et l’histoire corporelle
s’interpénétrent par le mystère de l’Incarnation, puis de l’animation, de
même s’interpénétrent cette histoire corporelle et l’histoire de la
conscience, puisque c’est à travers le corps que se forme cette conscience.
« Or le rôle de SH est incompréhensible si l’on ne tient pas compte de
cette simultanéité, car S ex H représentent à la fois les deux Principes
incorporels et les mêmes Principes devenus corporels, qui constituent
« l’œuf » de toute chose vivante.
« Quoique toute matière soit formée par l’action de S et H (ce qui
constitue déjà un premier essai d’union), chaque élément matériel qui en
résulte présente les caractéristiques du Principe qui prédomine en lui : tels
sont le jaune et le blanc de l’œuf, souht. Toute l’histoire « naturelle » est
fondée sur le « voisinage » (sah) de ces deux compléments, dont les
tentatives d’union, les séparations et les reconstitutions successives, causent
les formations, les avatars et renouvellements perpétuels de l’existence.
« Or Osiris, qui est le Maître de SAH (Orion), est le Neter de cette
existence, qui subit les vicissitudes de ces tentatives d’union entre les
Principes S et H.
« L’œuf, souht est une image de l’œuf humain individuel, dont le corps
(seule partie visible) fait oublier les autres éléments « causes » –
énergétiques et spirituels, – ainsi que leur préexistence substantielle et leur
post-existence après la mort du corps.
« Tout le « Devenir » de l’homme, et les diverses phases de ses
transformations (kheprou) ont pour cause déterminante la confusion des
Principes actifs et passifs, S et H, de son être, et la recherche de l’union.
Cette union se fait peu à peu par alternance déformations et destructions, à
travers lesquelles diminue l’antagonisme entre les éléments dissemblables.
C’est ainsi que tu peux expliquer la transformation progressive des matières
nutritives grossières jusqu’aux particules les plus subtiles de la moelle, à
condition qu’elles trouvent à chaque étape le « ferment » qui les
transformera ; c’est ce rôle que jouera le KA en tant que ferment de la
grande transformation.
« Ainsi advient-il à tout moment du jour ou de la suite des existences, et
pour les divers états de l’être (c’est-à-dire de la conscience), jusqu’à la
réalisation de la conscience totale en état indestructible.
— Ma vie terrestre ne serait donc qu’un moment de la vie de mon œuf ?
demanda Her-Bak.
— C’est une phase de son développement, car il était avant que soit ton
corps physique, et le fruit de cet œuf est une première liaison de S et de H
par l’individualité â devenue consciente. Alors cette individualité est sâh,
elle n’est plus décomposée par la mort en destruction définitive, mais elle se
352
trouve apte à évoluer spirituellement comme nous le verrons par la suite .
Her-Bak répliqua gravement :
— Pourquoi donc, possédant une science aussi fondamentale, ne pas
l’avoir écrite intelligiblement au lieu de l’exprimer en énigmes,
incompréhensibles pour celui qui n’est pas directement guidé ?
— Ne sais-tu pas déjà que tout ce qui s’écrit intelligiblement s’adresse à
la pensée de « l’Autre » (ki) ? Et cet « Autre » s’oppose toujours à l’être
impersonnel, dont l’expression est l’Intelligence du cœur. Au contraire,
l’énigme symbolique met en jeu la conscience des rapports analogiques et
des fonctions vitales, qui permet d’apercevoir l’abstrait grâce au concret.
« Demain nous parlerons de l’histoire naturelle de l’homme terrestre
soumis aux Neter ; mais souviens-toi sans cesse de ceci : quant aux
transformations de l’être humain pendant son existence, à sa mort et après
sa mort, tout ce qu’on peut en affirmer par arguments et par spéculations
abstraites n’a point de valeur véritable. Tout ce qu’on peut en expliquer sur
la foi de visions et conceptions imaginaires n’est que fantaisies sans
fondement.
« Or la réalité des états spirituels, et de leurs transformations en
l’Humain, est effective et connaissable.
— Ce que nous en disons à travers nos mythes et nos symboles n’est pas
le fruit de compositions arbitraires, mais d’une connaissance positive de ces
divers états. « Une partie de ces affirmations est contrôlable dès le début par
expérience personnelle ; l’autre partie deviendra progressivement accessible
à l’homme « ouvert de face, ouvert de cœur », mûri par le refus des
préjugés et la recherche impitoyable du réel.
XIV
BA ET KA
TROISIÈME JOUR
BA ET KA
QUATRIÈME JOUR
FlG. 31. –… les sept branches de l’étoile de Sefekht (Sechat) qui signe toute créature.
BA ET KA
CINQUIÈME JOUR
« De Maât sont émanés tous les rayons de Sagesse incarnés, tous les KA
des humains. C’est pourquoi l’on fait dire parfois au défunt : « J’ai été
émané de la bouche de Râ. »
« Maât est donc, en Vérité, la plus haute Conscience spirituelle de
l’Homme, celle qui vient l’animer lors de l’animation supérieure. Car Maât
est l’intermédiaire et le véhicule de l’essence de Râ ; et l’homme n’est
spirituellement vivant que lorsque son KA inférieur s’unit à son
KAsupérieur qui est un « rayon » de Maât, devenu, en sa propre conscience,
sa propre Maât.
« Or, comprends bien ceci : rien ne peut s’assimiler à Maât de ce qui
n’est pas de sa nature, c’est-à-dire conscience véritable indestructible. Tout
ce qui fut produit ou émis par la personnalité inférieure, et qui est de nature
mortelle, factice, cérébrale, ou étranger au KA essentiel de l’individu, tout
cela sera rejeté inévitablement. D’où le « jugement de Maât » ; car la Maât,
juge du cœur, est le propre Verbe de l’Homme devenu conscient et réalisé,
c’est-à-dire maâ-kherou. Si le cœur (nommé parfois àb, parfois hati), centre
psychique occulte de la vie émotive, n’est pas identifié avec son Verbe-
395
Maât, il ne pourra pas s’unir à lui et risquera fort d’être « perdu » dans la
grande aventure de la Douât.
« Il est donc essentiel de connaître les fonctions respectives des deux
cœurs qui jouent un rôle capital dans ton histoire.
Her-Bak s’écria :
— O mon Maître, qu’as-tu dit ? Je n’ai pas deux cœurs en mon corps !
— Ce n’est pas moi, dit le Sage, ce sont nos hiéroglyphes qui te
l’affirment. Je ne parle pas ici de ton cœur spirituel et de ton cœur de chair,
car l’un n’est que le symbole et l’organe physique de l’autre ; j’entends, par
deuxième cœur, le contrôleur des oscillations de la balance, le peson, tekh,
auquel le Neter qui surveille la pesée donne toute son attention.
« Le symbolisme du mot tekh touche à l’un de nos mystères les plus
sacrés ; cependant je ne puis me taire sur ce sujet, car son ignorance rendrait
incompréhensible ce que j’ai encore à te dire. Or son explication est un
problème très ardu, que je peux te clarifier par le parallélisme de son
symbolisme avec celui du mot àb. En effet, dans les deux cas il y a un
double jeu de mots et de pensée qui met en rapport des fonctions physiques
avec des états ou fonctions psychiques, et avec un objet ou un organe qui en
explique le double sens, concret et abstrait.
« Dans les mots àb soif et AB désir, quoique leurs déterminatifs soient
différents, c’est le mot àb, cœur, qui donne le rapport exact qui les relie.
« Le mot àb, écrit avec la lettre concrète, à, exprime la soif ; le mot AB,
écrit avec la lettre abstraite a, exprime le désir, ab. Ce double aspect d’une
fonction (besoin physique et désir psychique) se retrouve dans le sens
donné au mot cœur, àb, selon qu’on entend le cœur « organique » qui boit le
sang continuellement, ou le centre de manifestation psychique que nous
appelons aussi cœur.
« De même le symbolisme de tekh représente un double jeu entre le nom
de l’objet, tekh, et l’état d’ivresse (ou saturation) exprimé par son
homonyme, et, d’autre part, entre le rôle de ce fil à plomb, tekh, et la
capacité d’absorption impliquée par l’état de saturation tekh.
« Il y a en effet un rapport direct entre ces deux notions : l’ivresse
concrétise ici l’idée générale d’imbi-bition jusqu’à saturation. Or, une
matière sèche se trouvant imbibée par un liquide, sa saturation délimite sa
capacité d’absorption.
— Tel est par exemple le cas d’une éponge sèche qu’on imbibe d’eau ?
— L’image n’est pas juste, car il ne s’agit pas ici de contenant et de
contenu : sinon on pourrait dire qu’un vase rempli d’eau est tekh, ce qui est
faux. Cette idée d’ivresse implique la notion de l’extinction d’un feu. Alors,
la capacité d’absorption d’une chose dépend de sa plus ou moins grande
aridité, causée par la puissance de son feu intérieur. Le feu qui est, en toute
chose, l’agent de cette aridité, est le feu de Soutekh (Seth). Qu’il agisse
dans la terre désertique ou dans la fièvre qui consume un organisme, ou
dans l’âcreté des passions égoïstes, c’est toujours lui qui tend à accaparer
toutes les forces naturelles au profit des passions animales qui sont son
combustible.
« Pour combattre cette action destructrice, notre symbolique donne
l’action compensatrice des « eaux du ciel et de la terre », « eau de
rajeunissement » qui régénère les défunts, larme d’Isis et « eau nouvelle »
d’Hapi qui rend végétale la terre desséchée.
« Or cette imbibition suppose la capacité d’absorption de ce qui reçoit
l’eau revivifiante ; et cette capacité est d’autant plus grande que le feu
desséchant est plus intense.
« Il est donc vrai de dire que la capacité d’absorption, qui est la
conséquence de l’état de saturation, est le témoin de la mesure du feu qui a
causé la possibilité de cette « compensation ». Or tel est le rôle du tekh, le
« fil à plomb » qui contrôle l’équilibre des plateaux de la balance, donc le
témoin de la compensation.
« Les lois de génération indiquent que toute chose vivante est
nécessairement constituée par une action alternée du feu et de l’eau. Le feu
de Soutekh ne cherche jamais, de lui-même, à absorber l’eau
compensatrice, mais, au contraire, à tout consumer pour accroître sa force
comburante. Mais son agressivité, existant dans la chose vivante, y devient
une activité qui suscite en cette « chose » une puissance réactive de défense
appelant l’élément compensateur. C’est cette réaction qui rend cette chose
« absorbante », et ceci jusqu’à satiété, c’est-à-dire jusqu’à l’épuisement de
l’avidité du feu ; alors la réaction de la « chose » pourra se faire en sens
inverse (en faveur du feu), si l’élément adverse (eau) devenait à son tour
prédominant.
« tekh se trouve donc, dans toute génération comme dans la balance, le
« témoin » intermédiaire qui assure le libre jeu des forces adverses par la
mesure des possibilités.
« Ce rôle de témoin, entre le cœur « émotif » àb du premier plateau de la
balance et la Maât individuelle de l’autre plateau, donne aussi à tekh un rôle
important dans la définition du destin chaï, représenté parfois dans la scène
396
du jugement par un socle à tête humaine .
« chaï est la « mesure » de la destinée individuelle, dont la prédestination
(pré-natale et natale) est inscrite par Sechat dans l’embryon humain, et que
les volontés et les gestes quotidiens continuent à signer.
— Cela, dit Her-Bak, je le comprends ; mais l’aspect spirituel du cœur
reste pour moi une énigme ; plus énigmatique encore sont ces paroles : « O
mon cœur de ma mère… tu es le KA de mes transformations. »
Le Sage répondit en le priant d’approfondir ce qui venait d’être
expliqué :
— Tu comprendras cette parole si tu reprends le parallélisme entre le rôle
du cœur àb et le rôle de tekh :
« Le cœur àb est l’agent d’équilibre du flux sanguin ; tekh est l’agent
d’équilibre des éléments complémentaires, feu et eau, en toute génération ;
il y joue le rôle de témoin intermédiaire de leurs oscillations.
« Or de même que le mot àb se rapporte à un organe ainsi qu’à une
fonction, de même il existe nécessairement, dans l’organisme humain, un
siège correspondant à la fonction de tekh, ainsi qu’une correspondance de
fonction dans les rapports de l’homme avec son KA.
« En effet, le KA supérieur joue en l’homme un rôle analogue à celui de
« l’eau de réanimation ». Le KA inférieur, qui comporte les caractéristiques
psychiques (innées et acquises) de la personnalité, et qui subit les
impulsions animales de l’organisme, subit aussi l’agressivité du feu Sethien
ainsi que la réaction compensatrice.
« tekh, point de contact de ces diverses impulsions du double KA, en est
le témoin constant. Il joue donc le rôle d’un « cœur-conscience » qui garde
l’impression de cette continuelle expérience vitale, et par conséquent survit
à la destruction du corps.
« Par conséquent il est ce « KA des transformations » incarné dans
l’embryon dès sa formation dans le sein de sa mère, car il est en effet le
témoin constant des transformations successives de l’être.
— En effet, dit Her-Bak, la compréhension du tekh apporte une
clarification inattendue à ce texte troublant : « O le cœur de ma mère, ô KA
de mes transformations ! » Mais c’est l’aspect complexe du cœur qui laisse
encore en moi quelque confusion !
— Ce n’est pas surprenant, s’exclama le Sage ; ton trouble est causé par
l’imagination qui sépare et délimite les divers éléments de l’être spirituel.
« Tout est en tout ; chaque élément contient le principe de tous les autres,
avec accentuation des propriétés qui sont les siennes propres. Si l’on coupe
une jambe d’un homme, le membre corporel est supprimé, mais non le
principe de ce membre qui demeure vivant en cet homme ; et celui-ci
continue d’y éprouver diverses sensations, comme si sa jambe n’était pas
amputée.
« Il est donc erroné d’admettre une discontinuité entre les divers états de
la Forme, depuis le plus matériel jusqu’au plus spirituel. Chaque partie d’un
être – corporelle ou spirituelle – participe de l’être entier ; à plus forte
raison, le cœur (qui est le Soleil de l’être humain dans son aspect corporel
comme dans sa Réalité divine) ne peut être indépendant des autres parties
de l’homme…
— … pas plus que le Soleil n’est indépendant de la Terre ?
— Précisément ! Il y a entre eux des inter-échanges continuels dont
dépend l’harmonie du système total. Dans la constitution du Monde, tout est
forcément « devenu » suivant une même harmonie : si les étoiles errantes
(planètes) participent du cœur-Soleil, elles ont elles-mêmes un soleil dans
leur cœur.
« Ainsi les éléments constitutifs de l’homme sont en rapport avec leurs
analogues cosmiques. Ton KA divin, qui est un « rayon » de la Maât
397
Universelle , est, avec ton âme-BA, en relations identiques à celles qui
relient Maât au divin Râ dont elle est à la fois la fille et la nourriture.
« Ton cœur physique, en tant que soleil de ton corps, porte en lui le
double principe actif-passif, ce que nous exprimons, dans son image, par
398
l’œuf (ou grain) solaire surmonté du croissant lunaire . Le cœur, dans son
état passif (lunaire), est l’aspect féminin, maternel. Si je le considère ainsi,
je dis « la Mère est dans le cœur » ; mais si je veux scinder la notion de la
« mère » et la regarder en elle-même, alors c’est le cœur qui est dans la
mère.
Her-Bak, exaspéré, se révolta :
— A quoi servent de telles énigmes, sinon à compli quer un problème
déjà bien assez obscur ?
Le Sage répliqua :
— Tu demandes l’explication des mystères du Monde : voudrais-tu que
je me serve des formules superficielles qui satisfont les gens du
Péristyle ? …
Le disciple, confus, s’inclina. Le Maître poursuivit :
— L’activité solaire dans le cœur donne à l’être la Forme, et le rend
tributaire de Râ. La passivité de la Lune fait l’Entendement, si elle fixe la
Lumière. L’activité solaire apporte la Lumière, si elle est provoquée par la
passivité.
« La Loi véridique est le croisement ; c’est la clé des énigmes.
« L’énigme est pour les possesseurs de la clé.
« La logique est pour les aveugles qui ne touchent que la terre de leur
bâton… »
Le Maître se tut.
Her-Bak, les yeux clos, gravait profondément en lui ces principes, pour
en découvrir par la suite l’évidence.
Enfin, calme et respectueux, il parla :
— A peine ai-je entrevu l’enseignement caché dans l’image du cœur, et
déjà je comprends « le témoignage accusateur que mon cœur-conscience
tekh porterait » contre mon cœur humain si celui-ci refusait cette leçon !…
« Chaque détail est à considérer dans ce tableau du jugement. Sois béni
pour ce que tu m’en as révélé. Pourrais-je encore savoir quel rôle joue inek
(le Moi) dans cette scène ?
Le Sage répondit :
— Le Moi est le porteur du nom (ren) qui assiste, impuissant, au
399
jugement de son cœur. Le nom est le Verbe apparent de la personnalité
humaine terrestre ; il devrait être l’expression de son KA et de sa nature, s’il
était correctement attribué. Il est toujours la formule magique qui conserve
son image dans la mémoire des hommes.
« Il est le vêtement du Moi-inek ; c’est pourquoi, lorsque cet inek égoïste
s’efface devant l’homme devenu conscient de son but altruiste, nous
modifions son nom pour le mettre en harmonie avec son être et sa fonction
véritables.
— Pourquoi l’âme-oiseau (BA) reste-t-elle à l’écart dans la scène du
jugement ?
— L’âme divine est neutre, impassible et indifférente à cette histoire
personnelle.
« Si l’homme n’a pas cultivé l’affinité de son KApour cette âme, s’il n’a
pas établi, par un appel constant vers son être spirituel, le rapport qui est
400
leur conscience réciproque, l’âme retourne en sa patrie , et son être
unifié, ouâ, ne pourra pas se réaliser.
— Tu n’as point expliqué le rôle des deux personnages, Meskhent et
Renenedjet, qui assistent au jugement.
— O toi, Her-Bak, tu demandes trop de choses en un jour ! Tu ne peux,
d’ailleurs, les connaître qu’après avoir compris ce que nous entendons par
les formes, les enveloppes et les peaux.
« Si tu veux parler de l’apparence d’une chose en ce que tes yeux et tes
doigts peuvent en percevoir, comment la nommeras-tu ?
— Nous avons plusieurs mots pour l’exprimer…
— Ceux qui t’intéressent actuellement sont : irou, qd, sem. La différence
est grande entre ces mots dont le profane déforme souvent le sens.
« Dans le mot sem, m est ce qui retient la Forme ; sem, en son sens
absolu signifie « faire que prenne forme », forme d’ailleurs spécifiée par s.
— sm signifie aussi bénir…
— N’est-ce pas le sens spirituel de bénir ? Si tu veux apprendre la
Sagesse par la langue, tu dois chercher le sens primordial des syllabes, et ne
pas te laisser dévoyer par le langage vulgaire qui nous sert à transmettre
l’enseignement secret en le voilant.
« Le principe fondamental de la forme est qd ; c’est le caractère essentiel
de la « chose », sa forme innée, autour de laquelle sa forme apparente se
construira.
« Le sens absolu de irou est : l’état actuel, qui a été œuvré, formé ; état et
qualité transformables parce que non « innés » mais acquis.
« Nos vieux textes jouent sans cesse sur ces trois mots, aussi ne faut-il
point les négliger.
— N’y a-t-il pas aussi, dans le mot kheprou, une expression des formes ?
401
— kheper est le devenir de la forme, la manifestation de la
transformation.
« Il y a dans notre pensée une grande subtilité, qui ne vient pas d’un jeu
analytique puéril mais de la connaissance du mobile profond dissimulé sous
l’apparence ; et nous nous efforçons, par le choix des images et des mots,
d’éveiller le discernement du lecteur.
« En toute chose nos Maîtres ont considéré ce qui est contenu, et ce qui
contient : ce qui est contenu est ce qui est caché (àmn) ; ce qui contient est
ce qui cache.
« Ainsi dans l’embryon humain, ànm est la peau extérieure ; àmn est ce
qui est caché à l’intérieur, tout ce qu’Amon y a formé : membranes, air et
eau, avec l’élément stable, mn, contenu en Amon.
402
« khen est notre principal symbole de ce qui enveloppe l’intérieur, et
de la force naturelle qui crée elle-même son enveloppe.
« L’énergie réactive nekh est cette force, exprimée dans son effet par le
403
mot nekht .
« Le symbole de khen est une peau de quadrupède, entière sauf la tête ;
elle a pris et gardé la forme de l’animal parce qu’émanée et produite par
lui, montrant ainsi le sens de l’enveloppe et de la peau. Car la peau reçoit
l’inscription des caractéristiques personnelles : c’est pourquoi elle nous sert
de symbole dans la scène funéraire du tikenou et dans les mystères
d’Abydos, qui enseignent la nécessité de « rentrer dans la peau » pour
renaître à une vie nouvelle.
« Ce n’est pas une image idéale : la peau est le symbole vivant et
perceptible des enveloppes imperceptibles qui gardent la « forme » de
l’homme ; khen en est l’expression matérielle parfaite, parce qu’elle
exprime l’identité de nature de l’intérieur et de l’extérieur, celui-ci étant la
créature de celui-là. Or, en parlant de l’intérieur je n’entends pas seulement
le corps organique, mais les puissances vitales et l’action de ses deux
« cœurs », tekh et àb, qui sont les facteurs effectifs de l’expression des
qualités et caractères individuels.
« De même que la peau khen garde la forme de l’animal, de même les
enveloppes invisibles qui sont émanées de l’homme, tout en faisant partie
de son être intérieur, gardent ses empreintes après la mort ; car ces
enveloppes sont les « milieux d’inscription ».
Her-Bak répliqua :
— Comment se fait-il que nous ne puissions pas percevoir ces
enveloppes ?
Le Sage répondit :
— Vois-tu l’air que tu respires ? Cependant tu sens sa présence, comme
tu peux sentir à distance l’atmos phère sympathique ou répulsive d’un
homme. Tu dois encore revenir aux medou-Neter pour comprendre sans
erreur ce que nous entendons par enveloppes.
404
« Le principe causal de l’enveloppe est out ; efforce-toi d’entendre
aussi son sens profond. Nous représentons out par une peau vide, que l’on
405
montre parfois fixée et enroulée sur une tige sortant d’un pot ; l’autre
406
image qui le détermine est le principe de la glande .
« out signifie la délimitation, la définition d’un espace par la fixation en
corps : d’où emploi de ce mot pour exprimer l’embaumement, qui fixe la
momie en état incorruptible et maintient sa forme moulée par les
bandelettes qui l’enserrent. Pour la même raison, out signifie la peau
Sethienne d’Anubis qui retenait l’Esprit emprisonné.
« out est le Ciel contenu, la « chose » délimitée en volume, et ce qui
prend volume. C’est le germe idéal de l’organe, de la glande, et de la
fonction incarnée. C’est pourquoi il est dit que « khaïbit est purifiée s’il n’y
a plus de out en elle » c’est-à-dire plus de germe d’organe, ou de fonction
animale en devenir.
FIG. 33. – Nous représentons out par une peau vide, que l’on montre parfois fixée et enroulée sur une
tige sortant d’un pot.
BA ET KA
SIXIÈME JOUR
Her-Bak veilla plus qu’il ne dormit cette nuit-là, obsédé par le souci de
ne point oublier l’enseignement reçu. Il accueillit son Maître par ces mots :
— Si j’ai bien entendu ce que tu m’as appris, le corps humain est
l’apparence sensible de plusieurs autres formes, plus ou moins purement
spirituelles, dont l’ensemble constitue l’individualité. Le temps de
survivance de chacune diffère, selon son harmonie avec la Maât de cet
homme.
— Ta définition est correcte, répondit le Sage, si ta compréhension de ces
« formes » l’est aussi.
— La fatigue d’un effort continu crispait le visage du disciple ; il
supplia :
— O mon Maître, comment pourrai-je, sans erreur, imaginer ces « états »
si complexes ? Nos symboles nous représentent isolément l’oiseau BA, le
KA, l’Ombre, le Destin, et cependant tu montres en l’être humain leur
présence simultanée ; tu parles de leurs différences et de leur parenté… Si la
mort les sépare, que peut devenir chacun d’eux dans la Douât ? Et que
devient le Moi qui était leur image sur Terre ? On parle de leurs divers lieux
410
de séjour, l’île neserser (nsrsr), le sekhet-iarou (champ des souchets ), le
sekhet-hotep (champ des offrandes) : s’agit-il de symboles ou de réalités ?
Cette diversité me trouble ; ne peux-tu ramener la paix en mon cœur ?
Le Sage estimait à sa juste mesure l’effort de son disciple ; mais il ne
voulut pas compromettre un éveil intuitif en étouffant son inquiétude :
— Ces symboles, dit-il gravement, seront toujours des mystères pour
l’homme qui n’est pas « ouvert de face », c’est-à-dire dont les sens
intérieurs (intuitifs) ne sont pas éveillés, ne pouvant ainsi percevoir par ses
sens extérieurs (corporels) que l’aspect terrestre, tangible, des êtres.
« Mais appelle à ton aide la Maîtresse du Ciel, Hathor, qui contemple en
même temps la Terre, le Ciel et la Douât ; Hathor, la mère de ton Dieu, la
maison de l’Horus divin, de « ton Neter qui est dans ton œuf ».
« Fais de tes yeux ses yeux, pour connaître les divins Luminaires ; rends
tes oreilles si passives qu’elles reçoivent le Verbe du céleste Taureau ; que
tes narines, dociles au rythme de son souffle, aspirent et conçoivent la Vie ;
que ta bouche, fermée aux paroles oiseuses, apprenne à proférer les Verbes
de Maât… Alors tu comprendras le sens de ces symboles, qui ont été tracés
pour ces « ouverts de face » et ces « ouverts de cœur » qui peuvent
percevoir l’autre face d’Hathor.
« Il était sage, en ta question, d’associer l’idée des régions à celle des
états de l’être dans la Douât ; tu ne peux pas séparer l’une de l’autre en
vérité. De même qu’une nom (ville) est l’ensemble des « atmosphères »
émanées du ciel et des hommes, qui donnent à cette ville son propre
caractère dont se ressent aussi celui des habitants, de même la Nout d’un
homme est un complexe d’influences et d’impressions résumant les divers
états de ses personnalités successives. De même un lieu de la Douât est une
ambiance caractérisée, nettement distincte d’une autre ambiance, par le fait
que sont attirés en ce « lieu » les êtres dont la disposition et l’état ont
affinité avec lui.
« Si tu conçois cela tu comprendras aussi l’idée de venir, de passer d’une
ambiance – ou lieu – à un autre lieu ; nous voulons par cela exprimer l’effet
d’une Puissance inéluctable : la loi d’affinité sélective, qui s’impose entre
choses, états et êtres, de la même nature. Ainsi l’entendaient les rédacteurs
des textes quand ils parlaient du défunt en disant : « Il est venu à la terre de
vie… Tu es venu vivant… Il est venu en son nom de… en qualité de tel
Neter ou telle fonction. » C’est comme si l’on disait : « Il est passé à l’état
de… il est devenu de la nature de… »
Her-Bak se laissa diriger par cette impulsion nouvelle :
— C’est en effet un autre mode de pensée que je dois cultiver !… Puis-je
cependant te demander s’il y a un espace – ou distance – entre ces différents
« lieux » ?
— L’espace et le temps sont relatifs à chaque état : la vie d’un
moucheron, par rapport à la conscience du temps, lui paraît aussi longue en
durée que, pour un éléphant, les nombreuses années de son existence. Pour
l’âme divine immortelle il n’y a ni Temps ni Espace ; elle est, par son
« support » humain, en rapport avec Temps et Espace ; mais elle n’en est
pas affectée, ayant, par sa nature divine, la conscience simultanée de toutes
dimensions et de toutes durées.
« Mais ceci, Her-Bak, ne peut pas entrer encore dans ton intelligence !
C’est pourquoi tu es obligé de l’instruire par nos symboles, car ils sont le
plus court chemin pour « passer » du monde des apparences à celui des
Réalités.
« Retiens d’abord ceci : parler des « lieux » de la Douât, c’est parler des
états de l’être et de ses kheprou successifs. S’il t’arrive, pendant ton
sommeil, de visiter des paysages connus ou inconnus, c’est ton « corps
émotif » qui se déplace tandis que ton corps matériel repose sur ta couche ;
ces deux corps sont reliés par un cordon subtil dont la brisure cause la mort.
(C’est pourquoi il ne faut jamais réveiller brutalement le somnambule.)
« Cette « forme » sortie de toi fait partie de ce qui, après ta mort, sera
411
l’Ombre khaïbit . Elle a des propriétés que ne possède pas ton corps
physique parce que sa substance plus subtile n’est pas assujettie aux mêmes
lois : elle peut voguer dans l’espace sans appui ; elle peut traverser les
murailles, car, n’étant pas physique, les obstacles physiques n’existent pas
pour elle. Mais les états (ou mondes ou corps) spirituels lui sont
inaccessibles de la même manière que la muraille est infranchissable pour
ton corps.
« Temps et Espace ont avec elle un rapport très différent de ce que ton
intelligence en conçoit ; d’ailleurs tu as assurément fait l’expérience
d’aventures extraordinaires, d’une longue durée, qui t’arrivent en rêve et qui
ont été provoquées par un incident survenu un instant avant ton réveil ; en
ce cas, ta conscience mentale et intuitive suscite les images des scènes
vécues par ton « corps émotif » ; mais ceci te montre la différence entre ta
conception physique du Temps et de l’Espace et leur connaissance par ta
412
« forme » émotive . Par cet exemple tu conçois que tu peux prendre
conscience du plus inférieur de ces « corps » – ou états – invisibles.
« Si, d’autre part, en éveillant ton oreille intérieure, tu parviens, par
l’Intelligence du cœur sia, à connaître l’analogie qualitative entre tels
végétaux et tels êtres vivants, tu mets en rapport ton KA avec leurs KA, et
ceci dans un mode d’autant plus subtil que tu recherches cette connaissance
avec élimination du mental et sans la faire dépendre de tes impressions et
tes goûts personnels.
« Or cette conscience du « KA » est d’un échelon supérieur à la
conscience émotive ; et quoique l’Ombre, khaïbit, soit comme le vêtement
de ton KA inférieur, elle participe nécessairement de cette conscience plus
élevée, qui la rend plus subtile et moins tyrannique dans ses affinités
terrestres.
« Monte encore un échelon, efforce-toi de revivre certains cas de
conscience où tes tendances inférieures entraient en lutte avec la sagesse du
cœur : le remords d’une faute ou la brisure d’un désir égoïste, qui ont inscrit
en ta conscience la mémoire ineffaçable d’une valeur réelle ; cette
conscience est directement en rapport avec ton KA divin, et enrichit ta
413
Forme-Destinée – ton chaï – d’éléments bénéfiques.
« Il y a des degrés supérieurs qui sont les degrés de conscience et de
libération de la « personne » inférieure ; ils peuvent être acquis sur Terre par
l’homme sage, alors ils sont perfectionnés dans la Douât par ceux-là qui
parviennent à la « possession de leur KA».
« C’est cette échelle dont il est parlé dans nos textes lorsqu’ils « saluent
Nout en son nom d’échelle ». Tu comprends maintenant que c’est sa propre
échelle que l’être humain doit ainsi gravir : la conscience progressive de sa
propre Nout, dont la richesse s’accroît en chacun de ses kheprou.
— Je le comprends, dit Her-Bak ; et j’entrevois aussi ce qu’il faut
entendre par les régions de la Douât… Sans doute ce ne sont pas des
champs, des rivières et des îles ?
— Nous sommes obligés de donner des images familières aux humains,
car ils sont pour la plupart incapables de concevoir le sens abstrait.
« Cependant un exemple peut encore te montrer la raison des symboles
choisis. Tu as connu les mirages du désert : s’ils représentent des paysages
existants ce sont des images trompeuses et renversées. Ainsi en est-il des
414
tableaux illusoires de sekhet-iarou . Toutes les « inscriptions » de la vie
415
instinctive-émotive ont leur reflet dans « la robe de Nout », et ces reflets
durent un certain temps délimité par la durée des consciences inférieures
qui enregistrent ces impressions.
« Les habitants de sekhet-iarou sont les êtres demeurés encore attachés
par leur Ombre aux attraits de la vie terrestre ; ils y retrouvent les mirages
de ce qui fut leur existence, aux prises avec les embûches des forces hostiles
416
qui veulent les empêcher de passer dans l’état supérieur . Car il en est
dans l’autre monde comme dans le nôtre : les esclaves du « Moi », que les
tendances tyranniques de leur KA inférieur tiennent éloignés de leur
KAsupérieur, s’efforcent de multiplier leurs compagnons d’esclavage.
« Le sekhet-iarou et le sekhet-hotep sont considérés comme les « cieux
inférieurs » ; ils sont représentés avec des lacs et des cours d’eau parce
qu’on y flotte dans l’attente incertaine des transformations successives ; par
des îles pour signifier la fixation de certains états ; par des champs parce
qu’il s’agit de « faire sortir du marécage sa propre plante », c’est-à-dire le
nouveau corps subtil conforme à ce nouvel état, qui soit apte à être porteur
du « vrai visage ».
« Ici intervient un autre stage dans ce qu’on appelle l’île neserser (nsrsr),
qui ne peut se situer ni dans le temps ni dans l’espace, mais qui est un
intermédiaire entre la vie terrestre et le sekhet-hotep dont le séjour est une
première béatitude.
« Le mot de neserser exprime l’état créé par le jeu ou circuit perpétuel
des deux feux ou forces énergétique, n et s, qui prennent forme dans les
êtres terrestres.
« Ce sont ces feux qui colorent et qui spécifient les « natures ». C’est
pourquoi il est dit que « l’héritier y rejoint son père pour assurer son
héritage et la continuation du nom paternel sur la Terre ». On veut parler ici
du lien occulte et des rapports d’affinités instinctives caractéristiques, qui se
maintiennent entre le père désincarné et le fils qui perpétue son nom.
« On pourrait considérer neserser comme une Terre plus subtile, qui
refléterait toutes les tendances dans leur aspect universel. C’est en ce
« lieu » que le désincarné doit épuiser et consumer ses désirs instinctifs,
jusqu’au moment où, ayant éliminé sa « soif », il est libéré de sa chaîne et
retrouve son « vrai visage ».
— N’est-ce pas ici, demanda Her-Bak, le même sens que tes paroles :
retrouver intégralement son propre Verbe maâ-kherou, c’est-à-dire réaliser
sa propre Maât ?
Le regard du Maître exprima sa satisfaction.
— Tu as bien entendu, mon fils ! C’est pour cette raison qu’on situe en
ce lieu la « pesée » du cœur par Maât ; car si cette épuration s’est
accomplie, ce n’est plus le inek (Moi) qui commande mais le sâh : celui
qui, devenu maître de ces « feux », possède aussi son cœur, son KA, et peut
poursuivre en paix sa prise de conscience à travers les kheprou de ces cieux
inférieurs.
— Pourquoi, dans ce cas, aura-t-il encore besoin de ses kheprou ?
— Il doit, avant d’atteindre la béatitude suprême des cieux supérieurs,
avoir retrouvé la connaissance de tous les stades intermédiaires, qui sont les
états du Devenir et dont le reflet sur Terre donne les diverses formes de vie.
S’il a réussi, dans son existence terrestre, à identifier tout son être et toutes
417
ses fonctions aux Neter fonctionnels et aux Puissances cosmiques, ces
kheprou deviennent inutiles et il est apte à « devenir comme l’une
418
d’elles » : il est libéré du monde des apparences.
« Si son expérience est encore insuffisante il attendra, dans la béatitude
du sekhet-hotep, l’heure de revenir sur la Terre, en recueillant les fruits de
« l’existence » sans être séparé ni de son KAni de son BA. Ainsi se
régénère un nouvel être qui pourra, dans sa prochaine vie terrestre,
s’incarner comme une Conscience supérieure à la précédente.
Her-Bak se montrait fort surpris.
— Serait-il vrai que l’homme revienne plusieurs fois sur la Terre ?
— C’est vrai d’innombrables fois pour les êtres qui n’ont pas « reconnu »
leur KA. Mais alors la « personne » n’en bénéficie pas consciemment : elle
l’ignore, car la conscience individuelle ne subsiste que par le KA ; on ne
peut donc pas dire en cette occurrence qu’il y ait réincarnation, mais
continuité de la vie instinctive confondue avec les autres existences
instinctives. Il n’y a donc point d’intérêt à enseigner cette doctrine au
peuple qui ne vit que la vie instinctive.
« Quant à l’homme qui acquiert la conscience du KA, il doit apprendre la
nécessité d’accroître en lui le sens de la « responsabilité » et des
conséquences futures de tous ses actes. Pour cette raison, il doit être
personnellement instruit de ces choses que nous laissons, autrement, sous-
entendre par les mots ouhem-ankh, ouhem-mesout, et par diverses allégories
cachant sous l’idée de « renouvellement de vie » celle de « répétition des
419
naissances ».
« C’est pour ces hommes-là que nous symbolisons les différents lieux,
états et jugements, qui déterminent les périodes d’attente dans la Douât,
avec les épreuves ou la béatitude qui résultent de leur degré de libération.
« C’est pour ceux-là que nous insistons sur la nécessité de garder la
mémoire du nom sur la Terre, car c’est un élément de réincarnation. Les
statues, les tombeaux décorés de scènes journalières, ont (en plus de
l’enseignement symbolique) l’avantage d’être des appâts pour assurer la
réincarnation du KA dans la même région ou la même lignée.
« Ce n’est pas le moment opportun pour donner les preuves et les raisons
profondes qui justifient cette doctrine. Cependant je puis encore t’expliquer
deux symboles qui s’y rapportent. Je t’ai parlé des deux entités, Meskhent
et Renenoutet, qui assistent à la pesée du cœur. Or elles se retrouvent
présentes à la naissance… Tu pourras comprendre leurs rôles si tu te
remémores ce que tu as appris en ces six jours, et si tu étudies leurs noms à
la lueur de ces notions nouvelles.
« Tu te souviens que le nom, ren, s’il est judicieusement choisi, doit être
la formule de l’identité individuelle et la définition du cycle personnel dans
lequel se réalisent ses « Possibilités ». D’ailleurs, qu’il soit bien ou mal
attribué, le nom devient, à force d’être prononcé, l’image de son porteur
qu’il évoquera toujours dans la mémoire des hommes.
« Renen-outet est le « mouvement perpétuel » qui « fait tourner en rond »
les fonctions de la Nature. Elle est la nécessité du circuit, chaque fonction
engendrant la suivante si fatalement que la fin appelle un recommencement
analogue au point de départ.
« C’est Renenoutet qui transforme en lait les humeurs sanguines de la
mère qui nourrissaient le fœtus ; c’est elle qui fait monter la sève quand le
temps est passé de la léthargie Osiriaque ; c’est elle qui va nourrir tour à
tour les radicelles de la semence enterrée et le grain au sommet de l’épi, la
racine de l’arbre et son fruit. C’est ce mouvement de Renenoutet qui permet
l’érection du djed, dans la Nature comme dans l’homme ; et lorsque celui-ci
a réveillé, en son djed, son feu de Vie, c’est elle qui le conduit à son
sommet, à l’uraeus frontale qui est le troisième œil de ton Horus. Alors « les
Neter la redoutent » car cet œil de feu les maîtrise et domine leurs forces
420
aveugles .
421
« Ainsi Renenoutet est un agent de tout renouvellement (renp),
comme du circuit vivant de l’année dans le ciel (renpet). Elle enferme l’être
nouvellement né dans l’orbe du cycle qui est personnel à cet être ; elle le
« berce » dans son propre rythme, et le maintient dans les limites de ses
« Possibilités ». Elle est donc la conservatrice du nom de chaque espèce et
de chaque individu, puisqu’elle est la mesure de leur cycle particulier qui
détermine leur retour périodique.
« Quant à Meskhent, elle est cette force expansive qui fait surgir
l’extérieur de l’intérieur, qui fait « paraître au jour », qui fait naître ce qui
« était dedans » : l’enfant, la peau, l’enveloppe subtile émanée de chaque
homme et grâce à laquelle il pourra, comme par une peau, aspirer et fixer la
lumière rayonnée.
« Pendant l’existence terrestre, ces deux Puissances font partie intégrante
de l’individu et de sa Nout ; la mort du corps les sépare du cadavre, mais
elles restent attachées à son entité survivante par l’affinité du nom et de
cette « Meskhent », peau spécificatricê qui garde son empreinte.
« S’il y a renaissance elles réapparaissent, et ce sont elles qui font le lien
avec la dernière existence : Renenoutet comme gardienne de son cycle
terrestre, Meskhent comme matrice en laquelle s’est re-généré, dans la
Douât, l’être qui s’incarnera.
« C’est là ce qu’entendent les textes qui parlent de la « maison-
Meskhent » habitée par le désincarné dans les cieux inférieurs : « maison ou
vase », disent-ils. Et ils précisent encore cette signification : « cette maison
(meskhent), en cette nuit de naissance, est un vase ».
« Ce « lieu de séjour » ou « maison » ou « enveloppe subtile », est cette
Meskhent en laquelle son Moi – inek – doit s’effacer « sans résidus » pour
faire place à son sâh, c’est-à-dire aux Principes essentiels de l’entité
vivante. Cet objectif sera réalisé quand « toute soif sera éteinte » et toutes
« poussières effacées » ; tu comprends, n’est-ce pas, que cette soif est
l’attrait des tendances passionnelles, et que les poussières sont les résidus
hétérogènes du Moi.
« Parvenu à ce point, le sâh peut « s’élever » dans le sekhet-hotep où il
trouvera « l’abondance » spirituelle d’un état supérieur, et où il pourra jouir,
dans la béatitude, des fruits de la conscience acquise. La caractéristique du
sekhet-hotep est la possibilité d’y devenir akh parmi les akhou (esprit parmi
les esprits) ; c’est-à-dire qu’après les épreuves de sekhet-iarou, l’esprit
pourra sortir victorieux des ténèbres marécageuses…
Her-Bak interrompit son Maître :
— Est-il écrit aussi qu’il y retrouvera sa Meskhent ?
— Oui, mais purifiée et plus glorieuse. O Her-Bak, ne te laisse pas
troubler par ces images ; l’éveil d’une conscience supérieure efface les
formes illusoires, les remplaçant par la vision des Causes qui déterminent
ces effets. Ainsi se développe et s’épure la vision du nouvel être, par états
successifs aussi différents l’un de l’autre que le sont les états de
transformation du ver en chrysalide, puis en nymphe, puis en papillon.
Nommerons-nous ces diverses étapes : mondes ? lieux ? ou corps ? …
Chacun d’eux vit de sa vie spéciale, avec les êtres de même disposition, et
ceci constitue « son monde ». Et chaque changement d’état n’est qu’une
épuration, un « dévêtement » successif des formes de transition accumulées
sur Terre et qui obscurcissent sa vision de la Réalité lumineuse.
« Mais écoute encore ce que tu dois connaître de ces cieux inférieurs. La
caractéristique des chemins d’accès du sekhet-iarou est la purification dans
l’eau et dans le marécage ; alors, disent nos vieux textes, le « purifié » y
sera conçu par le ciel comme Sah (Orion) auquel il s’assimile, et c’est
422
Sothis qui sera le troisième élément de cette triade qui conduira
l’heureux sâh vers les sources de vie, nefer, du ciel. Or si tu veux penser
avec Sagesse pour approfondir ces symboles, tu remarqueras que Sah
(Orion) est, avec Sothis, la constellation qui règle les Temps Osiriens de la
Terre et des hommes ; le sâh humain est donc aussi Osiriaque, et devra
renaître sur Terre comme Osiris renaît dans la végétation au Temps du
renouveau.
423
« Observe aussi que Sothis – soped – est la « pourvoyeuse », et que
chacun de ses éléments représente un des deux Principes S H. Elle est donc,
en vérité, la sœur des sâh, auxquels elle donne les facultés Osiriaques-
Isiaques et la nature nourricière qui est la sienne.
« La caractéristique de l’île neserser est la fixation de conscience de ce
qui a nature de terre et de feu ; c’est ainsi que l’on y situe la lutte des deux
feux N, S, qui y justifie le jugement du double cœur (ab-tekh) ainsi que la
présence des Ancêtres terrestres et des animaux terrestres ; on y « devient
fils de Geb » Neter de la terre.
« Il y a cependant, dans la Douât, une autre possibilité, car il est
conseillé « d’éviter les voies d’eau de l’Occident et de choisir les voies de
l’Orient » ; or cela ne concerne plus le chemin d’Osiris, mais le chemin
d’Horus… et ce sera l’enseignement du septième jour.
XVIII
BA ET KA
SEPTIÈME JOUR
XIX
LE LEGS DE L’EGYPTE
PHARAON ET SAGE
— PLANCHES I A VII
— TABLE DES COMMENTAIRES.
— COMMENTAIRES.
— TABLE DES FIGURES.
Les planches I, II, III (signes hiéroglyphiques) veulent montrer les signes entrant dans la
composition alphabétique d’un mot. Cette nécessité n’a pas toujours permis de reproduire la
disposition correcte des groupements qui désignent généralement ces mots.
FIGURATIONS DES NETER
1 – Amon
2 – Anubis
3 – Atoum
4 – Apet
5 – Bès
6 – Chou
7 – Fils d’Horus
8 – Geb
9 – Hathor
10 – Horus
11 – Isis
12 – Khnoum
13 – Khonsou
14 – Maât
15 – Min
16 –Montou
FIGURATIONS DES NETER
17 – Mout
18 – Nephtys
19 – Nefertoum
20 – Neith
21 – Nekhbet
22 – Nout
23 – Osiris
24 – Ouadjit
25 – Ptah
26 – Reneoutet
27 – Sechat
28 – Sekhmet
29 – Serket
30 – Seth
31 – Sobek
32– Thot
Carte de l’Égypte.
COMMENTAIRES
TABLE DES COMMENTAIRES
I. L’écriture hiéroglyphique
II L’enseignement intérieur ou ésotérique
III Les animaux dans le mythe égyptien
IV Quelques précisions nécessaires à la compréhension de
l’enseignement égyptien
V Théologie – Neter
VI Astrologie – Astronomie
VII L’Homme Microcosme
VIII L’enseignement des tombes égyptiennes.
COMMENTAIRES I
L’ÉCRITURE HIÉROGLYPHIQUE
1. LES HIÉROGLYPHES.
L’écriture hiéroglyphique est une écriture valable à travers tous les
Temps, car les végétaux, les animaux et les parties du corps humain qui la
composent en majorité, portent leurs symboles – c’est-à-dire la signature de
leurs fonctions –, à travers tous les Temps.
Témoignage de Plotin (IIIe siècle apr. J. -C.) :
« Les Sages de l’Égypte me paraissent avoir fait preuve d’une science
consommée ou d’un merveilleux instinct quand, pour nous révéler leur
Sagesse, ils n’eurent point recours aux lettres qui expriment des mots et des
propositions qui représentent des sons et des énoncés, mais qu’ils figurèrent
les objets par des « hiéroglyphes » et désignèrent symboliquement chacun
d’eux par un emblème particulier dans leurs mystères. Ainsi chaque
hiéroglyphe constituait une espèce de science ou de sagesse et mettait la
chose sous les yeux d’une manière synthétique, sans conception discursive
ni analyse ; ensuite, cette notion synthétique était reproduite par d’autres
signes qui la développaient, l’exprimaient discursivement et énonçaient les
causes pour lesquelles les choses sont ainsi faites, quand leur belle
disposition excite l’admiration. » (Plotin, Enéades, V, 8,6, Trad. Bouillet,
III, 1, 117.)
De Philon le Juif (l™ siècle apr. J. -C.) : « Les discours des Égyptiens
fournissent en outre une philosophie qui s’exprime au moyen de symboles,
philosophie dont ils font montre dans les lettres appelées « sacrées »… »
(Cf. Marestaing, Rec. 33, 1911, p. 3-12.)
— « Écriture ammonienne » ou « lettres ammo-niennes » se dit de
l’écriture mystérieuse des livres que Sanchoniathon trouva dans les temples
d’Égypte, et qu’il consulta pour rédiger son histoire. (Larousse, A. 279.)
De Plutarque : « Il n’y a, en effet, aucune différence entre les textes
appelés hiéroglyphes et la plupart des préceptes des Pythagoriciens… »
(Plutarque, Isis et Osiris, 10.)
« … Rien n’est aussi spécial à la philosophie pythagoricienne que
l’usage des symboles, tels que ceux qu’on emploie dans la célébration des
Mystères. C’est là une manière de parler qui tient à la fois du silence et du
discours… Ce qui se dit est très clair et très évident pour ceux qui sont
accoutumés à ce langage ; c’est pour les ignorants qu’il est obscur et
inintelligible. Le sens de ces symboles n’est pas le véritable, mais il faut y
chercher celui qu’ils semblent recouvrir. » (Plutarque, Frag. 33, trad.
Bétolaud.)
Les Anciens Égyptiens ont exclu toute définition rationnelle à cause de
l’impossibilité de fixer quoi que ce soit dans l’évolution constante de la
genèse cosmique. Tout ce qui fait partie de l’Univers perceptible ne peut
être défini que par la transparence d’une image symbolique qui laisse
percevoir le jeu mouvant de ses rapports vitaux avec sa cause. C’est
pourquoi l’écriture égyptienne est composée de symboles inscrits dans la
Nature. Aussi les hiéroglyphes ne sont-ils pas seulement des « signes-
mots » – comme on aurait trop tendance à le croire –, mais les signatures
d’activités ou fonctions causales dont ils sont les témoins. Ils pourront donc,
dans certains cas (par exemple pour représenter le caractère général d’une
fonction), n’être pas la simple copie d’un objet, mais un composé
symbolique de caractéristiques identiques dans divers objets.
2. L’ALPHABET ÉGYPTIEN.
Le problème de l’alphabet est la clé de l’expression philosophique de
l’Égypte ancienne. Cet alphabet – dont les égyptologues nient encore
l’existence bien qu’elle soit formellement affirmée par des commentateurs
grecs et latins –, se compose d’un nombre de lettres précis et ordonné.
Est lettre simple le hiéroglyphe principiel caractéristique d’une phase de
la Genèse ou d’une fonction essentielle. Chaque lettre symbolise par son
image certains états d’être et qualités qui découlent de cette fonction
fondamentale. De plus, la situation qu’elle occupe dans l’alphabet secret
des Égyptiens lui attribue un Nombre dont elle représente aussi les
propriétés.
L’ordre des Nombres analyse les éléments – ou agents – de la Genèse et
les fonctions qui déterminent leurs transformations en toutes phases.
L’ensemble de l’alphabet résume donc toute une philosophie dans les
éléments de base d’un langage.
Si le Nombre de chaque lettre fut gardé secret dans l’enseignement
exotérique, le symbole hiéroglyphique était offert aux étudiants comme une
évidence naturelle. En constatant ces évidences on peut apprendre à
reconnaître les éléments apportés par une lettre dans la formation d’un mot,
en tant qu’idées, qualités et fonctions. Cependant, le rôle d’une lettre est
modifié par celui de la lettre qui la précède ou qui la suit ; c’est le rapport
de ces deux lettres qui explique le sens de la racine ou du mot.
La notion de racine – les syllabiques. Les multiples aspects que peut
produire l’Activité causale dans la Nature sont analysés grâce à des
combinaisons de hiéroglyphes essentiels donnant naissance à des racines
simples. Dans ce cas, un hiéroglyphe peut symboliser à lui seul le
groupement de ses composants, il prend alors la valeur de syllabique. Ce
syllabique est bilitère ou trilitère.
4. HOMONYMES-HOMOPHONES.
Les égyptologues appellent « homophones » des mots composés des
mêmes lettres, mais « ayant un sens différent avec un son identique ». Vu la
difficulté de restituer la vocalisation égyptienne exacte, il serait préférable
de les appeler « radicaux à mêmes consonnes formatives ».
Or, ces mots composés des mêmes lettres sont à rattacher à une racine
mère. Leur orthographe particulière – parfois signes alphabétiques simples,
ou jeu d’alphabétiques et de syllabiques – permet le plus souvent de
spécifier leur nature.
La parenté entre ces homophones est précisée par le Nombre et la valeur
symbolique des lettres de la racine mère. L’analyse de chacun de ces mots
devra donc se faire en partant de ces lettres de base, envisagées dans l’un
des trois rôles qui leur sont attribués :
• rôle abstrait, qui se rapporte aux principes ou causes abstraites ;
• rôle concret, qui représente la matière, la nature, ou les caractéristiques
d’existence des choses et des êtres ;
• rôle fonctionnel, qui représente une fonction vitale, fonction que cette
lettre peut aussi exercer par rapport aux autres lettres du mot.
Le syllabique aura pour but de souligner un de ces aspects.
5. VARIATIONS D’ORTHOGRAPHE.
Une étude fructueuse à entreprendre serait celle de la fixation des
différentes phases du développement de la langue égyptienne. En dépassant
le cadre des manuels généraux, il serait bon désormais de grouper
systématiquement les formes grammaticales et le vocabulaire de périodes
déterminées. On apercevrait alors rapidement une modification linguistique
obéissant à un plan philosophique général, plutôt qu’à un simple
phénomène d’usure de la langue.
COMMENTAIRE II
L’ENSEIGNEMENT INTÉRIEUR OU
ÉSOTÉRIQUE
3. LE SYMBOLE.
Un exemple donné par Plutarque sur le symbolisme égyptien : « Je veux
d’abord interpréter pour toi la théologie des Égyptiens : ceux-ci, en effet…
révèlent par des symboles certaines images de notions mystiques, cachées et
invisibles, de même que la nature, dans les formes sensibles, a exprimé
jusqu’à un certain point par des symboles les raisons invisibles des
choses… »
Sur le symbolisme du limon :
« Écoute donc, maintenant, selon l’esprit même des Égyptiens,
l’interprétation intellectuelle des symboles… Considère donc le limon
comme représentant tout ce qui est corporel, matériel, nutritif, génital, toute
forme matérielle de la nature emportée avec les courants instables de la
matière ou qui reçoit le fleuve de la genèse et se dépose avec lui, ou bien la
cause première préexistante dans une raison fondamentale des éléments et
de toutes les puissances élémentaires. » (Jamblique, Mystères, VIIe partie, 1
et 2.)
Pour définir le sens du mot « symbole » tel qu’il est entendu dans cet
ouvrage, nous emprunterons quelques passages du Temple dans l’Homme,
de R.A. Schwaller de Lubicz.
« Le sens admis actuellement pour le mot « symbole » implique toujours
un caractère conventionnel. Une figure ou un signe représentent, par
analogie ou convention, une idée.
« Pour être conforme au sens véritable du symbole dans l’Ancienne
Égypte, nous devrions employer le terme « medou-Neter », dont la
traduction grecque, « hiéroglyphes », déforme le sens égyptien. Les medou-
Neter sont les Neter – ou Principes – portés par un signe.
« Le mot symbole signifie pour nous la chose même, ou l’idée
matérialisée qu’il évoque ; il ne la représente pas seulement par analogie. Il
y a une réalité, c’est-à-dire une cause à effet inéluctable dans les medou-
Neter ou symboles, comme dans l’image chrétienne de la Croix, comme
dans la vie ou la légende du Saint dont le religieux prend le nom.
« … Dans tous les cas le symbole s’impose, même s’il est choisi
arbitrairement, parce qu’il évoque nécessairement un complexe de pensées
qui se projettent en lui ; et c’est cette projection qui s’impose ensuite à
nous… Cependant cette compréhension moderne du symbole diffère de la
mentalité pharaonique à laquelle nous devons, pour être véridiques, nous
conformer.
« Dans nos langues modernes, il n’y a pas de mot pour désigner le sens
exact du symbole, tel qu’il était conçu par les Anciens. C’est pourquoi nous
aimerions le remplacer par le mot medou-Neter, qui exprime les signes
porteurs des Neter (Neter signifiant le Principe, ou l’Idée dans le sens
platonicien).
« D’après leur conception de la Nature, tous les produits de la terre,
toutes les plantes et tous les animaux étaient les symboles d’un ensemble
d’éléments vitaux cristallisés dans chacun d’eux ; chacun ne pouvant être ce
qu’il est que par les conditions et circonstances causant sa naissance.
Chacun est la manifestation, ou incarnation d’une Idée, et constitue un
chaînon dans l’évolution de la Conscience, depuis le Verbe originel (le
Verbe de Ptah), jusqu’au retour conscient en la Cause.
« … La symbolique égyptienne peut nous donner connaissance d’un
autre sens que le sens vulgairement admis pour un grand nombre de mots…
L’image laisse la porte ouverte sur un monde qualitatif et fonctionnel. Par
exemple en disant : « Un homme marche », nous voyons un homme
marchant, mais nous le voyons d’une façon limitée : ce n’est que le fait de
se mouvoir, de marcher, que nous imaginons. Nous pouvons le placer
ensuite dans le passé, le présent, le futur et toutes les nuances de ces temps ;
nous situons ce mouvement en Temps et Espace. Au contraire, si nous
voyons une image représentant un homme qui marche – ou simplement des
lignes figurant un homme –, nous ne l’imaginons plus, nous ne le situons
plus : il est là, c’est la fonction qui nous intéresse, et la qualité de cette
fonction. Nous pouvons ensuite peindre cet homme en vert ; ce ne sera plus
seulement la fonction de marcher avec les jambes qui sera évoquée : ce
mouvement pourra signifier végétation ou croissance. Or marcher et croître
sont deux fonctions différentes pour notre raisonnement, mais en réalité il y
a un lien abstrait entre marcher et croître : c’est le mouvement, sans
considération de Temps et de Chemin.
« Si nous voulons définir ce mouvement, nous le réduirons
immédiatement en Temps et Espace, tandis que le sentiment du mouvement
– qu’il soit en marche ou en croissance –, n’a plus besoin d’être défini :
l’image – le symbole – fait office de définition, et nous pouvons
effectivement éprouver cet état (en quelque sorte nous confondre avec lui
sans le raisonner), comme le ferait n’importe quel enfant en regardant des
images.
« Ainsi la figuration – le symbole – est notre seul véritable moyen pour
transmettre un sens ésotérique que, dans une écriture alphabétique, nous
devons rechercher dans la parabole ou, éventuellement, dans la métaphore
ou l’allégorie. La mentalité chinoise est caractéristique de cette mentalité
symbolique transcrite : on circonscrit l’idée, mais on ne la nomme pas.
Quelque chose de cette mentalité, que nous retrouvons dans l’Égypte
pharaonique, est restée dans les peuples du Moyen-Orient : question et
réponse indirectes.
« La figuration symbolique et l’écriture imagée sont la pure forme
hiératique d’expression ésotérique. C’est par la symbolique, et seulement à
travers elle, que nous pourrons lire la pensée des Anciens. Ce n’est que par
la symbolique que nous pourrons coordonner les éléments connus de cette
grande civilisation, et que l’écriture prendra son véritable sens.
« A propos de ce mode d’expression, nous citerons ici Ampère, Essai sur
la Philosophie des Sciences, t. II, p. 103-104 :
« Ces rites, ces dogmes, cachent souvent des idées autrefois réservées à
un petit nombre d’initiés, et dont le secret, enseveli avec eux, peut
cependant être retrouvé par ceux qui font une étude approfondie des
renseignements de tout genre qui nous restent sur les anciennes croyances et
sur les cérémonies qu’elles prescrivaient. De là une science à laquelle on a
donné le nom de Symbolique, que je lui conserverai, et où l’on se propose
de découvrir ce qui était caché sous des emblèmes si divers. »
COMMENTAIRE III
LES ANIMAUX DANS LE MYTHE ÉGYPTIEN
467
2. L’ANIMAL DE LA LETTRE F .
Une documentation massive a été réunie par le savant égyptologue et
naturaliste Keimer, tendant à prouver qu’il faudrait reconnaître, dans le
hiéroglyphe f, une vipère à cornes. Or les représentations figurées de cette
lettre montrent plusieurs caractéristiques qui ne s’accordent pas avec cette
assertion : les soi-disant « cornes » sont le plus souvent dessinées comme
des palettes courbes qui, parfois, s’élargissent comme de grandes oreilles ;
elles ne ressemblent pas aux cornes de la vipère qui ont la forme d’épines ;
leur emplacement même est différent.
Le corps très court qui a plutôt, sur ces images, les proportions d’une
grande limace, est rempli par des croisillons réguliers qui pourraient aussi
représenter un tissu.
On est obligé d’admettre, devant ces bizarreries, que l’animal est une
composition conventionnelle concrétisant plusieurs idées d’un symbolisme
réaliste : l’idée d’une forme primitive de vie, sous l’aspect d’un être
rampant, gluant, qui évoque aussi bien l’image d’une limace que celle d’une
vipère (vivipare : qui émet la chair vivante) ; l’idée d’une force vitale
dualisée en ses deux aspects que symbolisent toujours les deux cornes ou
les deux oreilles.
Cette dualité est précisée et confirmée dans l’image figurée sur le
manche d’un couteau d’ivoire conservé aujourd’hui à PUniversity Collège :
deux petits serpents (ou vipères, ou limaces ?) ayant la forme et les oreilles
du signe f, et qui sont entrecroisés comme un caducée ; le double
croisement crée la forme et donne la vie ; deux hexagrammes y confirment
le symbole.
On peut aussi nommer cette dualité : activité-réactivité. Or on trouve un
témoignage de ces assertions dans les groupements kherou-f et khesef, où la
lettre f croise le signe de kherou et le phonogramme khesef.
Dans le premier de ces groupements, kherou-f, le hiéroglyphe de kherou
(voix, « Verbe ») est traversé en croix par l’animal de la lettre f (souffle
porté) ; or un signe peut croiser un autre signe quand il y a possibilité
d’action de ce signe sur l’autre signe pour la définition d’un lieu et la
formation d’une chose.
Dans le deuxième groupement, khesef (qui représente un fuseau pour
filer), le fuseau traversé par l’animal f signifie l’obstacle, le mouvement
contraire à celui du fuseau, c’est-à-dire : résistance réactive. Cette image
illustre exactement l’idée des deux croisements nécessaires à la formation
de toute chose. Or cette idée est résumée dans le symbolisme de f – cornes
et croisillons – qui en exprime aussi le résultat : la substance corporelle àf.
Le symbole de f résume donc les idées :
— idée du souffle porté, et idée principielle de porter, fà ;
— idée du souffle émis (faou, vent, nef, air) ;
— idée de ce qui est émis, rejeté, sécrété (fed. t, sécrétion, sueur, etc.) ;
— idée de la « chose » formée : substance corporelle (àf, chair).
3. L’ANIMAL DE SETH.
L’animal de Seth est une figuration symbolique, composée selon le
caractère ou la fonction qu’il doit exprimer.
Généralement sa couleur est rouge (le rouge Sethien). Souvent ses yeux
sont rouges (à Edfou). Sa caractéristique constante est : deux oreilles droites
et raides ; la queue relevée avec l’extrémité fourchue (affirmation Sethienne
de la dualité).
Le papyrus Ebers (1, 14) dit que le mal fait par Seth s’appelle « les
choses rouges ». Ses actions bienfaisantes sont « les choses vertes » (Pyr.
1595). C’est l’opposition entre la stérilité désertique et la fertilité de ce qui
est devenu « végétable ». C’est cette stérilité qui est symbolisée par la
maigreur de son corps, souvent réduit à un simple trait.
468
4. BENOU-PHŒNIX
D’après Gardiner, le benou serait la même espèce que l’oiseau
représentant le héron « shenty », c’est-à-dire VArdea cinera ou l’Ardea
purpurea.
En fait, les rôles donnés au benou sont des rôles mythiques auxquels on
ne peut attribuer une espèce déterminée.
Tel le phœnix que la légende hermétique fait brûler sur un bûcher pour
renaître de ses cendres.
Les Égyptiens mettent en rapport la Vénus du matin avec le benou,
l’oiseau porteur de l’âme à’Osiris. C’est un oiseau fabuleux dont Hérodote
a parlé sous le nom de phœnix. Il n’en a vu, dit-il, que la peinture : sa forme
et sa grandeur approchaient de celles de l’aigle ; ses plumes étaient rouge et
or. Parlant d’après une légende héliopolitaine, Hérodote raconte que le
phœnix arrivait tous les cinq cents ans en Égypte, partant d’Arabie, lorsque
son père venait à mourir : il enveloppait son corps dans un œuf de myrrhe et
le transportait ainsi en Égypte pour l’y déposer dans le temple du Soleil.
5. LE GRIFFON.
Latin : gryphus.
Grec : grups (vautour).
Cf. Greisen (crampon) – gripe = grappin (cramponner).
Le Griffon est un animal fabuleux, moitié aigle moitié lion, qui « veillait
à la garde des trésors ».
Sa correspondance en égyptien est « âkhekhou », déterminé par un
animal fantastique : serpent avec quatre pattes et deux ailes, ou oiseau à tête
Sethienne et ailes pointues. On trouve aussi des lions ou léopards ailés avec
serres de griffon dans plusieurs représentations de tombes royales ou de
panneaux décorant un trône.
Son symbolisme se rapporte à une phase de surévolution du principe
royal ou de ce qu’il représente.
469
7. L’ABEILLE .
L’abeille était l’emblème de souveraineté pharaonique du roi du Nord,
porteur de la couronne rouge. La raison de ce choix comme symbole royal
est facile à comprendre : la société d’une ruche constitue un « corps
organisé » autour d’un centre reproducteur et multiplicateur de la race qui
est la reine. Autour de cette reine gravitent, comme autant d’organismes
vivants, différents groupes d’individus spécifiés dans chacune des fonctions
nécessaires à la vie de la ruche et de sa reine.
Ainsi l’abeille est le prototype du Principe royal, que l’Égypte concevait
comme centre et ferment de son peuple et dont les fonctionnaires étaient les
organes individualisés.
Le choix de ce symbole pour le royaume du Nord est d’ordre plus subtil :
alors que la royauté blanche du Sud a pour emblème le jonc – végétal
primitif sorti du marécage –, la royauté rouge du Nord est représentée par
l’insecte producteur du miel doré, qui est l’extrait quintessencié du règne
végétal. L’étude détaillée des caractéristiques et des mœurs de l’abeille
accentuerait la profondeur de ce symbolisme : tel par exemple, pour le vol
nuptial de la reine, le concours d’altitude qui décide du choix du mâle
fécondateur…
Il est à remarquer que le nom du miel – bi. t (bà) – est très proche de BA,
nom de l’âme.
8. L’OISEAU BA.
L’oiseau BA n’a pas pu être identifié d’une façon certaine par les
égyptologues parce que, d’après Keimer, aucun oiseau de ce genre ne se
trouve aujourd’hui en Égypte. Seule, dit-il, la grande cigogne Jabiru du
Soudan pourrait correspondre à ses représentations hiéroglyphiques.
Ses caractéristiques sont : les hautes pattes d’un échassier ; un long bec
dont le bout est renflé à la partie supérieure, et la base renflée à la partie
inférieure. Enfin et surtout les excroissances – ou caroncules – qui pendent
sous la base du cou, sur la poitrine, mais que l’on trouve aussi parfois sous
la gorge (Ancien Empire), ou qui sont même parfois omises.
En tout cas les détails qui varient dans les diverses figurations dénotent
certainement des différences symboliques.
On pourrait, dans certains dessins, rapprocher l’oiseau BA de la cigogne,
connue aussi bien en Égypte qu’en Europe. Son caractère migrateur
justifierait son emploi comme symbole de l’âme.
9. LE « CHACAL » D’ANUBIS.
Les auteurs classiques n’ont jamais rangé le chacal au nombre des
animaux sacrés ; mais ils ont nommé Cynopolis (« ville du chien »,
aujourd’hui Cheikh el-Fadl), la ville où était vénéré Anubis ; alors que la
ville consacrée à Oupouat était nommée Lycopolis (ville du loup).
Le chacal d’Égypte – Canis lupaster – a le poil de couleur gris jaunâtre,
la queue courte et touffue. On trouve, parmi les figurations des tombes de
Béni Hassan, un canidé à oreilles droites et à queue touffue qui se lit sab, et
470
qui paraît se rapporter au petit chacal de la vallée du Nil . Cependant, ni
le chacal, ni le loup, ni aucun des canidés égyptiens ne réunit à la fois les
caractéristiques de l’animal sacré d’Anubis et d’Oupouat : oreilles droites,
longues et pointues du renard, queue du chacal ou du loup, robe noire d’un
« chien errant » égyptien. Le plus approchant pourrait être ce « chien errant
d’Égypte », sans cependant lui correspondre entièrement ; il a les oreilles
droites et pointues – plutôt courtes –, la queue pendante, longue et touffue,
poil court et hérissé allant du roux au gris, mais quelquefois noir. Il vit et
mange la nuit, et se nourrit de charognes ; il a deux trous-terriers : l’un à
l’Est et l’autre à l’Ouest, quittant l’un pour l’autre dès que l’un commence à
recevoir la lumière.
On a rarement trouvé des espèces sauvages parmi les animaux momifiés,
mais le plus souvent des espèces bâtardes, des canis lupaster, et
principalement des chiens errants d’Égypte qui sont un croisement de
diverses espèces. On a trouvé aussi dans une statue d’Anubis (Musée du
Caire) un squelette embaumé appartenant à l’espèce des chiens errants.
Mais il est évident que l’animal sacré d’Anubis et d’Oupouat est une
figuration composite donnant les caractéristiques nécessaires à la
représentation de telle ou telle fonction. (Cf. Her-Bak « Pois Chiche »,
chap. XXXIV.)
10. LA GRENOUILLE.
En égyptien, qrr. Le nom du Neter grenouille est Heqet = hqt. Ce mot est
donné, d’après Gardiner, dès les XVIIIe et XIXe dynasties, comme
idéogramme de la formule « ouhem ânkh », c’est-à-dire de répétition de vie
(repeating life).
D’autre part, le têtard, en égyptien, se nomme hefen (hfn), et ce mot
signifie aussi « cent mille ». Or ce têtard est placé sur le chen (la boucle-
circuit) qui est dessiné au pied de la tige de palmier sur laquelle Thot
compte les années.
Enfin, il y a homonymie entre le mot hqt (grenouille) et le mot hnqt ou
hqt (bière), comme s’il y avait un rapprochement entre l’idée de ferment –
ou levain – de la bière (levure de bière), et le ferment individuel qui serait la
base des « répétitions de vie ».
Il est évident que la courte existence d’une grenouille (cinquante à
soixante ans) ne peut pas légitimer le symbolisme du têtard pour les « cent
mille » ou millions d’années souhaitées dans ces formules ; il faut donc que
vienne jouer ici un symbolisme : sans doute celui des transformations
successives du têtard en grenouille, et sans doute aussi celui du levain.
*
**
Les grenouilles et les crapauds sont des batraciens, ordre des anoures.
Leurs caractéristiques essentielles sont :
• leurs transformations ou métamorphoses depuis leur sortie de l’œuf
jusqu’à l’âge adulte.
• Ils sortent de l’œuf sous forme de têtards ; pas de membres, une
nageoire impaire, continue, entourant l’extrémité caudale ; pas de
squelette ; cœur à deux cavités ; pas de poumons : respiration branchiale.
• Le passage du têtard à l’état adulte présente des transformations
compliquées :
• apparition des pattes postérieures, puis antérieures ;
• aux branchies externes succèdent les branchies internes, puis des
poumons qui persistent seuls chez l’adulte. Mais ces poumons sont de
simples sacs qui jouent surtout un rôle hydrostatique et communiquent
presque directement avec la bouche, la trachée et les bronches étant peu
développées. La respiration cutanée, au contraire, est très importante.
• Le squelette des adultes comporte des vertèbres individualisées, des
côtes réduites qui se soudent aux vertèbres. On trouve chez eux la première
différen ciation des régions de la colonne vertébrale : région cervicale,
région dorso-lombaire, région sacrée.
Chez la grenouille et le crapaud (chez les anoures) apparaît pour la
première fois l’oreille interne moyenne, qui se forme comme un diverticule
du pharynx et reste en communication avec lui par la trompe d’Eustache.
Le cœur des adultes a trois cavités : un ventricule, deux oreillettes. Le
têtard a six, puis quatre paires d’arcs aortiques. L’adulte n’a plus qu’une
paire de crosses aortiques et une paire d’artères pulmonaires indépendantes.
• Fécondation externe : le mâle féconde les œufs au moment de leur
expulsion. Les œufs sont pondus généralement dans les herbes aquatiques,
ou déposés au fond de l’eau.
• Les organes mutilés se régénèrent souvent, surtout chez les jeunes.
• La sueur et le sang du crapaud sont toxiques.
• Le crapaud peut jeûner pendant de longs mois.
11. L’HIPPOPOTAME.
Quadrupède biongulé, l’hippopotame est le type de la masse animale,
pesante et informe. Le ventre est pendant sur les courtes pattes ; le sacrum
est plus élevé que le garrot. La tête, aussi informe que le corps, est
quadrangulaire avec un museau monstrueusement large. La lèvre supérieure
recouvre la bouche. Les narines obliques sont très en arrière.
L’hippopotame vit sur terre et dans les parties stagnantes des cours d’eau.
Lorsqu’il plonge il ne reste pas plus de quelques minutes sous l’eau. Il dort
volontiers dans l’eau : des mouvements des pieds réguliers le maintiennent
à la surface, où émergent seulement les yeux, les narines et les oreilles.
La femelle est unipare ; elle nourrit et soigne son petit pendant
longtemps avec une grande sollicitude.
L’hippopotame est un dévastateur des cultures car il engloutit des
quantités énormes de végétaux. Il est très friand des plantes aquatiques les
plus fines, tels que les papyrus et les lotus.
L’hippopotame, dit Hérodote, n’était sacré que dans le nome paprémite.
Il était l’animal symbolique d’Apet : symbole de la maternité gestante et
471
nourricière .
Il était considéré comme Sethien parce que véritable incarnation de la
bestialité, de la masse et de la multiplication quantitative.
12. LE LION.
L’Égypte a suffisamment détaillé le symbolisme du lion pour démontrer
les caractères qu’elle lui attribuait.
Elle en a fait un hiéroglyphe alphabétique, la lettre r, mais une r plus
mouillée que la lettre r du mot Râ (Soleil) puisqu’elle correspondait souvent
à la lettre l qui n’existe pas autrement en égyptien.
Elle a pris les deux moitiés du corps du lion pour signifier les deux
notions essentielles : devant-avant (hati), derrière-arrière (peh).
La première, qui dessine la tête avec sa crinière solaire, sa poitrine et ses
pattes avant, se nomme hati, qui est aussi le nom du groupe organique
cœur-poumons. Le nom et le dessin de ce hati réunissent les symboles de
Soleil et feu (tête solaire et cœur), et d’air par le puissant coffre respiratoire
du lion.
Le nom du derrière, peh, signifie aussi « terrain marécageux ». Son
dessin montre les pattes arrière, le bassin et la croupe ; la queue est
redressée mais elle n’est pas dualisée comme la queue Sethienne. Son
caractère est la terre, mitigée par l’eau, ainsi que le confirme son nom, peh.
Or, l’importance donnée à cette symbolisation des éléments est accentuée
par les autres figurations du lion : Chou et Tefnedj – qui sont les doubles
472
qualités primordiales (sec et chaud, froid et humide) – sont représentés
par deux lions.
D’autre part, ce sont deux lions – ou deux hati de lions – tournant le dos
(à droite et à gauche) au Soleil de l’horizon, qui représentent les deux
473
aspects de ce Soleil : celui qui se couche dans la montagne et celui qui
en sort le matin. Et le premier se nomme « hier », et le second se nomme
« demain » (Livre des Morts).
Enfin le symbole du feu solaire, dans le lion, est précisé par la couronne
de flammes (semblable à la « couronne » du Soleil) qui entoure sa tête
quand on veut accentuer ce caractère, par exemple autour de la tête de
Sekhmet.
Quant à la symbolisation de l’eau par le lion, il serait plus difficile de le
croire s’il n’y avait les nombreux exemples de lions-gargouilles qui font
écouler l’eau du toit des temples. Ce fait est confirmé dès la Ve dynastie :
on trouve des gargouilles en forme de lions « verseurs d’eau » dans la cour
de la pyramide de Sahuré. On trouve aussi, dans la chambre de la pyramide
à degrés de Saqqarah, une table d’offrandes en pente sur le dos de deux
lions pour laisser couler les liquides d’offrandes dans un vase situé au-
dessous (Hor m heb, – Sahuré, Mariette, Musée du Caire. Cf. Burschardt,
Sahuré).
La raison en est expliquée par Plutarque : « Ils honorent le lion, et ornent
leurs temples avec des têtes de lion ayant des gueules ouvertes parce que le
474
Nil déborde quand le soleil passe par le signe du Lion (juillet-août). » Or
les lions verseurs d’eau témoignent de ce fait dès l’Ancien Empire.
Pour la sagesse égyptienne, le Feu et l’Eau étaient les deux mobiles du
Monde, les deux « verrous » qui ouvrent et ferment toutes les portes de la
Nature. C’est pourquoi ils ont aussi choisi le lion comme verrou qui ouvre
et ferme, en expliquant, parfois par un texte approprié, le caractère du feu
ou de l’eau qui joue ce rôle dans tel cas particulier.
13. LE SCARABÉE.
Le scarabée, en égyptien khepra, est un des thèmes principaux des textes
funéraires, indispensables à connaître. Horapollon décrit trois scarabées
vénérés : le scarabée « sacré » qui féconde son propre germe, le fait gester
dans une boule de fumier (dans les ténèbres), et enfouit cette boule en la
roulant à reculons. Le deuxième scarabée est consacré à Isis parce qu’il a
des cornes comme la Lune. Le troisième, dit Horapollon, a une corne
unique et est consacré à Thot-Hermès.
Les caractéristiques du scarabée sacré sont si intéressantes qu’elles
méritent des détails précis. Sa couleur d’insecte parfait est noire, mais sa
nymphe, qui a la forme d’une momie, est jaune ambre, et lorsqu’il s’en
dépouille, il a le thorax, les pattes et la tête rouge sombre, l’abdomen blanc,
et les élytres blanc jaunâtre. Un mois est nécessaire pour l’accomplissement
de la couleur noir d’ébène.
Il faut différencier la boule dont se nourrit le scarabée d’avec la boule
gestatrice de son germe.
La première est grossièrement composée de bouse de mulets ou de
bovidés, plus ou moins mélangée d’aiguilles de foin ; il l’enfouit sous terre,
s’enferme avec elle et la dévore méthodiquement en excrétant, au fur et à
mesure, le résidu, en un fil continu qui peut atteindre trois mètres de long.
Ce scarabée, dit l’entomologiste Fabre, peut digérer à peu près son volume
de nourriture en une seule séance d’une douzaine d’heures !
La boule qui sert de nid au futur scarabée est faite d’une bouse plus
subtile, plus molle et mieux liée (généralement bouse de mouton) ; la pilule
est d’abord un peu creusée en forme de vase nou, avec un petit col-
bourrelet, rond, qui est ensuite étiré pour donner à la boule une forme de
poire ; quand le germe est déposé, le col est obturé par un souple bouchon
qui permet à l’air d’y pénétrer. Ainsi est créé un milieu maternel, gestant et
nourrissant, qui explique le caractère andro-gyne donné au scarabée
légendaire.
Le scarabée est consacré par ses symboles remarquables :
1° Symboles solaires : lorsqu’il a ses deux élytres déployées, il est
l’image du Soleil dans son double chemin – ascendant et descendant.
Enfouissant sa boule, il figure « Râ qui descend dans sa montagne ».
Khepra, nom du scarabée, est le nom du Soleil à son lever.
2° Symbole lunaire : vingt-huit jours de gestation.
3° Il symbolise le principe de l’être qui produit et réalise par lui-même
ses successives transformations, comme l’enseigne son nom et les mots
dont il découle :
• kheper = exister, devenir, prendre forme.
• Kheprer = qui produit lui-même sa genèse ; principe de l’être qui cause
lui-même les phases de ses transformations.
• kheprou = formes, transformations.
C’est pour cette raison que les Égyptiens posaient sur la momie le
scarabée à l’emplacement du cœur. Ce n’est pas le cœur de chair qu’il
représentait, mais le cœur psychique, le cœur subtil dont ils disaient que le
défunt ne devait jamais le perdre, et qui subissait l’épreuve des kheprou
(transformations).
La matière rituelle du scarabée du cœur était de l’or et de l’argent, afin
que les deux principes – solaire et lunaire – y fussent alliés.
On a trouvé aussi des scarabées de momie en pierre noire ou vert
sombre, symbole de l’état de transformation.
14. LE SERPENT.
Le serpent est un des thèmes les plus fréquents dans la symbolisation
égyptienne. L’uraeus est presque inséparable de la coiffure pharaonique,
elle entre dans la titulature royale, elle décore les frises et corniches des
temples.
Mais le serpent a diverses significations. Dans les tombes des rois où
sont développés les aspects occultes de l’être humain et les mystères de la
Douât, on voit de multiples serpents, différant comme formes et comme
attributions.
Pour comprendre le sens de ces scènes mystérieuses, il faut considérer
d’abord les caractéristiques génériques de ces reptiles, puis ce qui les
différencie.
— Caractères généraux des serpents : l’absence de membres sur le long
cylindre du corps, la platitude de la tête, et l’importance presque exclnsive :
475
de la colonne vertébrale munie de côtes sur toute sa longueur . Le serpent
est une colonne vertébrale habillée de peau, colonne si souple qu’elle peut
prendre toutes les positions, enveloppe si extensible qu’elle peut « avaler »
un volume considérable. Mouvement rampant inévitable.
L’idée générale symbolisée par le serpent est la nature rampante,
ondulante, visqueuse, qui peut être ignée ou aquatique selon l’espèce
représentée.
Différences symbolisées par les espèces (réelles ou mythiques) :
1° Serpents venimeux, soit par morsure, soit par crachat. Leurs
principales figurations sont :
Le cobra (l’uraeus), caractérisé par sa poitrine développée, symbolise le
centre vital de la respiration, symbole accentué par la navette de Neith que
l’on inscrit en son milieu. Le trajet du feu vital est évoqué par le dessin de
la colonne vertébrale. La montée victorieuse de ce feu jusqu’au centre
frontal, est symbolisée par l’uraeus frontale du Pharaon. Les corps ou
« mondes » constituant l’être humain, sont représentés dans l’uraeus lovée
476
ou dressée : le corps matériel (absorbant et digérant) figuré par les replis
du serpent, semblables aux intestins ; le corps psychique, symbolisé dans le
dessin complexe de sa poitrine ; l’état supérieur (spirituel) représenté par la
tête, qui n’a pas de calotte crânienne et qui est couronnée.
Les vipères. Les deux vipères – ou feux primordiaux du monde – qui se
dressent dans le dessin des « buttes » primordiales. La vipère à cornes qui
dans le hiéroglyphe F, symbolise le souffle de vie ; ce symbolisme est
accentué par les deux idéogrammes de la vipère entrant ou sortant de son
trou (signifiant « sortir », « entrer ») ou l’expir et l’aspir du souffle. Ces
vipères ont été choisies comme les meilleurs symboles pour ces deux idées.
2° Parmi les serpents non venimeux, les Egyptiens ont figuré :
• les reptiles terrestres ou aquatiques, du genre couleuvre (idée générale
du reptile, voir ci-dessus) ;
• les serpents encerclant les momies : figurant la force vitale dont le
corps était le support ;
• les longs serpents aux multiples boucles et replis : figurant, par le
nombre de leurs circonvolutions, les phases de progrès et chutes successifs
qui constituent la longue évolution d’un être ;
• les « serpents-fleuves » sur lesquels on voit la tête du défunt naviguer à
travers ses pérégrinations d’outre-tombe. (Voir chap. VII.)
Enfin, ajoutons à ce schéma grossier les figures composites des multiples
serpents mythiques auxquels on a donné des jambes, des bras, des ailes,
pour figurer les divers « feux » ou énergies dont les textes et tableaux
funéraires enseignent la fonction dans la genèse du Monde et des êtres.
Ce nom de « feu » est souvent précisé pour expliquer le symbole de
certains serpents (surtout cobra).
A remarquer aussi les uraeus qui sortent du disque solaire dans la plupart
de ses représentations.
URAEUS. – iârt ou àârt.
L’uraeus est le cobra, représenté dressé avec la poitrine élargie, sur le bas
du corps qui forme des lacets.
Le nom égyptien, iârt – ou àârt – est formé de la racine iâr ou àâr, qui
signifie « monter ». Ce nom fait allusion au geste du cobra dont la tête
s’élève, mais aussi à la montée du serpent de feu le long de la colonne
vertébrale, et jusqu’au front du Pharaon où il est représenté, se dressant
devant la coiffure ou la couronne.
OUADJIT. – Ouadj.t est le nom du Neter féminin qui « patronne » et
protège le royaume du Nord ou Delta. Elle porte la couronne rouge.
Lorsqu’elle est mise en parallèle avec Nekhbet, « patronne » et
protectrice du Sud, elle est représentée par une uraeus portant deux grandes
ailes et la couronne rouge ; dans ce même cas, Nekhbet – vautour ou uraeus
– porte la couronne blanche.
18. LE CHAT.
La déesse à tête de chat, Bastit, était la sœur de Sekhmet dont elle
représente l’aspect doux. Elle boit du lait alors que Sekhmet boit du sang…
Le phonogramme bas, qui fait partie du nom de Bastit, est une jarre
d’huile. Quelquefois Bastit tient en main la tête de Sekhmet, pour montrer
qu’elle peut avoir l’aspect redoutable.
Le chat était l’animal sacré à Bubaste, où Bastit avait son temple ; les
chats y étaient tabous, et on les y envoyait pour être momifiés.
Le chat a un aspect lunaire et un aspect solaire. Il est doué d’une
extraordinaire souplesse de la colonne vertébrale et d’une puissance
énergétique très intense.
19. LE CROCODILE.
Les particularités remarquables du crocodile sont : d’abord la curieuse
phase intermédiaire qu’il représente dans le règne animal. Quoique classé
comme reptile, il a des points communs avec les poissons, et d’autres avec
les oiseaux ; par l’organisation et la position de sa dentition, il est apparenté
aux poissons : il a, dit-on, 66 à 70 dents qu’il renouvelle pendant toute sa
vie. Par les caractéristiques de son développement embryologique et de son
anatomie, il se révélerait être un ancêtre des oiseaux : par son cœur, ses
reins, ses poumons (il ne respire pas dans l’eau) ;
• il pond des œufs ;
• son œil est semblable à l’œil de l’oiseau.
D’autre part ses poumons spongieux le rapprochent du mammifère.
Son deuxième caractère essentiel est son extraordinaire puissance vitale
physique, dont la force musculaire se manifeste dans la queue. Il pond un
grand nombre d’œufs (on en a compté jusqu’à 60 et même, dit-on, 99). Sa
croissance est aussi remarquable que sa fécondité : il multiplie jusqu’à cent
fois sa longueur originelle.
La troisième particularité du crocodile est son caractère de dualisme. Sa
vie est double : dans l’eau la nuit, sur terre le jour. Il a deux aortes qui se
rejoignent au-dessous du cœur ; l’artère droite (qui seule subsiste chez les
oiseaux) est la plus importante.
Les plaques de sa carapace forment de véritables « os dermiques », qui
lui constituent comme un deuxième squelette extérieur. Enfin, bien qu’il
reste étendu au soleil pendant le jour, ses yeux ne supportent pas la forte
lumière, dont ils se protègent par une troisième paupière.
Le crocodile était réputé pour son impossibilité de regarder en arrière.
Horapollon le qualifie de « rapace prolifique et furieux ». Tous les animaux
le fuient, excepté le héron et un petit oiseau – le tro-chileus, dont certains
auteurs font une sorte de pluvier –, qui entre dans sa gueule pour y manger
les insectes qui s’y trouvent. Son ennemi mortel, d’après Diodore, est
l’ichneumon, qui cherche ses œufs pour les briser, et entre même dans sa
gueule pour aller dévorer ses intestins, et ressortir indemne du corps qu’il a
ainsi tué (sic).
Le crocodile est si vorace qu’il lui arrive même de manger ses propres
enfants. Certains auteurs le mettent en relation avec Saturne, pour ce fait et
pour d’autres raisons : d’après Plutarque (Isis et Osiris, 76) et Elien (Nat.
anim., V, 42), la femelle porte ses œufs pendant 60 jours, en pond 60, les
couve 60 jours, a 60 vertèbres, 60 dents, et vit 60 ans. Or ces auteurs font
remarquer que le nombre 60 est la première unité dont se servent les
astronomes, et ils établissent un rapport entre Seb-Sobek et Chronos, dieu
du Temps.
Le crocodile était considéré comme animal sacré dans certains lieux
d’Égypte (par exemple au lac sacré du Fayoum). Comme tel il était protégé,
nourri et apprivoisé. Un homme blessé ou tué par un crocodile était
considéré comme privilégié, et les prêtres se chargeaient de son
embaumement.
Son Neter, Sebek – ou Sobek – était généralement représenté par un corps
humain ayant une face de crocodile. Sobek a, comme son animal
symbolique, un caractère Sethien, très explicable par les particularités du
crocodile : puissance matérielle et dualisme. C’est ce dualisme qui est
accentué dans le temple de Kom Ombo, dont Sobek est un des principaux
478
Neter . (Deux sanctuaires, deux portiques, etc.)
A Ombos (Kom Ombo) le Soleil est identifié avec le crocodile Sebek ;
on lit sur le temple : « Sebek-Râ, qui s’avance hors du Nou primordial, la
première de toutes les divinités… » C’est la forme du crocodile qui s’élance
du Nou sacré et primordial, qui dure comme principe. Tout ce qui est entré
dans l’existence n’y est entré qu’après l’origine de ce principe. (Brugsh,
Rel. und Myth., p. 105 ; A. Deiber, Cl. d’Alexandrie, p. 39-40.)
Il faut remarquer que « Sobek crocodile » symbolise deux fonctions
essentielles : la contraction de la première matière devenant solide, et la
fonction de broyer et mettre en poudre, qui précède toute transformation.
20. LE CYNOCÉPHALE.
Ce grand singe au museau allongé est remarquable par sa crinière, et sa
pèlerine particulièrement chevelue.
Ses cris et gambades à l’aube et au crépuscule lui ont donné un rôle
479
symbolique important. Creuzer suivant Horapollon, explique qu’il était
en même temps le hiéroglyphe :
« 1° de la Lune parce que cet animal, selon les Égyptiens, devenait
aveugle, et avait un flux de sang menstruel à la Nouvelle Lune, ce pourquoi
il était nourri dans les temples ;
2° de l’écriture ;
3° de la caste sacerdotale parce qu’il ne mange pas de poisson ;
4° du Monde, étant comme celui-ci composé de soixante-douze parties. »
Le cynocéphale était, à cause de ses rapports avec la Lune et le Soleil, un
symbole du Temps : sous son nom de Hetet, il salue le Soleil du matin ;
480
sous son nom de Benti, il salue son coucher . Il est dit qu’aux deux
équinoxes de l’année, ce singe urine douze fois par jour – à savoir à chaque
481
heure –, et qu’il fait la même chose pendant les deux nuits .
Pour ces raisons, il est souvent représenté assis contre la clepsydre, de
laquelle l’eau s’écoule par son pénis.
Le cynocéphale, dont on trouve souvent les statues dans les temples (par
exemple à Karnak, temple de Khonsou) est le symbole de Thot, et d’un des
quatre « fils d’Horus », Hapi.
22. L’IBIS.
L’ibis est l’oiseau de Thot, lequel est généralement représenté avec une
tête d’ibis.
Il y avait deux espèces d’ibis : le plus vénéré, qui avait la réputation de
combattre les serpents, était noir, et ne se trouve plus qu’au sud de Ouadi
Halfa. Celui-ci est l’oiseau du hiéroglyphe gem, qui signifie « trouver ».
L’autre espèce est l’oiseau de Thot : blanc, avec plumes noires à la tête,
au cou, au sommet des ailes et au croupion.
L’ibis blanc et l’ibis noir ont un très long bec recourbé et de hautes
jambes fines.
Ils étaient protégés comme tabous, et leurs cadavres étaient envoyés à la
ville de Thot, Hermopolis, pour y être momifiés et conservés.
23. LE TAUREAU.
Le nom égyptien du taureau – KA – explique pourquoi il avait été choisi
comme « animal sacré », dont le principal caractère était une « incarnation
de Ptah », c’est-à-dire du Feu générateur de tous les êtres terrestres.
482
Le KA , en effet, est la puissance vitale de la Nature, mobile animateur
de tous les êtres de la Terre. La force animale d’un être fait partie de son
KA inférieur. Le KA a un aspect actif, et un aspect passif qui est parfois
483
représenté par les hemsout .
Le taureau est le type animal de la force génératrice, de la force
passionnelle, de la force matérielle et de la force passive. C’est son aspect
actif qu’on entend par « taureau Apis », et l’aspect passif par « bœuf Apis ».
Le taureau Apis (appelé en grec « Epaphus »), était le nom du « bœuf »
ou plutôt taureau sacré de Memphis. Son choix était fait par des prêtres dès
la mort du dernier Apis. Il fallait trouver un veau noir, ayant au front une
tache blanche carrée, une image d’aigle sur le dos, un « nœud » sous la
langue en forme de scarabée. Les poils de la queue devaient être mi-blancs,
mi-noirs. Enfin un croissant blanc sur le côté droit. Il devait avoir « été
conçu dans un coup de tonnerre » (« par un rayon céleste », disent certains
textes). Aussitôt trouvé, il était nourri pendant quarante jours, servi
uniquement par des femmes ; puis on le conduisit à Memphis dans une
barque dorée. Il était reçu en grande cérémonie, paré, nourri
somptueusement. Il avait ses vaches « concubines » soigneusement
choisies. Sa mort était un deuil public, et ses funérailles étaient faites en
grande pompe.
Apis, disait-on, incarnait « l’âme de Ptah ». D’autre part, la couleur noire
du taureau sacré est comparée à la couleur du limon qui est comme le corps
d’Osiris, Neter de fertilité végétable ; sa naissance, ses taches, son
484
accouplement, sont en rapport avec la Lune dont Osiris est la puissance .
On a trouvé à Memphis un monument souterrain, le Sérapeum, qui
contenait les sarcophages des Apis.
— Les autres aspects du taureau sacré étaient : Montou, Boukhis et
Mnévis.
Montou était la représentation animale de la force terrestre d’Horus dans
son aspect combattant. Quand on lui donnait une tête de faucon sur un
corps d’homme, il symbolisait la même force, mais subtiliée.
Montou taureau était honoré dans quatre temples de la région thébaine :
Medamoud, Hermonthis (Erment), Tôd et Karnak. Ces quatre aspects
étaient les « quatre faces de Montou » ou les « quatre mâles de
l’Ogdoade ». On les considérait cependant comme « unis en un ».
Boukhis (aussi nommé par les Grecs : Bacis » et « Onouphis ») était un
aspect de Montou, taureau sacré d’Hermonthis. Il était traité comme Apis.
Mnévis, taureau sacré d’Héliopolis, qui, d’après Plutarque, aurait été
considéré comme « père d’Apis », et honoré en second lieu après Apis
(Plutarque, Jsis et Osiris, p. 323 sq.).
Il était noir, « avec des épis sur le corps et la queue », et était traité de la
même manière qu’Apis.
COMMENTAIRE IV
QUELQUES PRÉCISIONS NÉCESSAIRES
A LA COMPRÉHENSION DE L’ENSEIGNEMENT ÉGYPTIEN
490
3. CRÉATION « CONTINUE ».
La Création est le « Fiat Lux » de la Genèse, c’est-à-dire la manifestation
des Principes virtuels immanents à l’Unité-Cause. Ces Principes vont
ensuite générer la Nature par le caractère éternel de la Création. Cette
génération ne peut être autre chose que la même fonction créatrice, mais
agissant dans la succession des formes, devenant procréatrice. Il y a
création quand quelque chose se fait de rien, et cette même création devient
puissance génératrice quand, par la forme ou semence, il y a concrétisation
de la substance abstraite.
La Création, provoquant le « devenir » de l’Univers sortant de rien, se
situe nécessairement hors du Temps puisque la durée n’est le propre que de
la créature ; on peut donc dire qu’elle se situe au commencement des
Temps, c’est-à-dire de l’Univers à durée limitée. La Création qui est un acte
momentané de transition entre l’indivisible Unité et les formes, n’est
momentanée que par rapport à l’effet produit, mais est nécessairement une
fonction continue de concrétisation de l’abstraite substance. Ainsi la
créature, qui est dans le temps, puisqu’elle a un commencement, n’est pas
éternelle ; tandis que la Création, par rapport à l’Univers créé, a caractère
éternel, c’est-à-dire sans commencement ni fin ; elle est continue, sinon il
faudrait admettre qu’il y ait une raison « raisonnable » pour faire cesser
l’état de sérénité de l’Unité originelle, ce qui imposerait déjà une dualité,
une volonté par rapport à quelque chose.
6. LA MAGIE EN ÉGYPTE.
Nous ne pouvons parler de la magie en Égypte sans nous référer à
491
l’ouvrage bien documenté du Professeur Lexa . Cette documentation
confirme le fait, déjà évident, que la magie était pratiquée en Égypte depuis
le commencement de son histoire. Mais l’opinion des égyptologues qui ont
étudié cette question diffère quant à la définition de la magie, à son principe
d’action et aux causes de sa réussite ou de ses échecs.
Une réflexion du Professeur Lexa nous autorise à chercher la raison de
ces divergences dans un malentendu quant à la conception de la « Nature »
par les anciens Égyptiens.
« Les anciens Égyptiens, dit-il, connaissaient bien la différence entre les
phénomènes naturels et [les phénomènes] magiques, et entre les médecines
naturelles et [les médecines] magiques. Selon leur opinion, [un] phénomène
naturel était l’effet d’une force naturelle, un phénomène magique [était
l’effet] d’une vertu magique. Outre la loi de la causalité naturelle, ils
connaissaient encore la loi de la causalité magique. La médecine d’après la
loi de la causalité naturelle guérissait la maladie ; la formule magique
prononcée pendant la fabrication du médicament d’après la loi de la
causalité magique et au moment où on le prenait, faisait son effet plus fort
et plus vite. »
Il donne ensuite sa propre définition de la magie :
« C’est l’activité tendant à produire l’effet dont la connexion avec cette
action n’est pas subjectivement explicable par la loi de causalité. »
Il semble bien que deux points seraient à éclaircir pour contrôler la
valeur de ces assertions : quelle était, dans la pensée égyptienne, la limite
des forces naturelles ? Et la seconde question qui est un corollaire de la
première : en quoi et comment les Égyptiens ont-ils différencié les
causalités naturelles et les causalités magiques ?
Or, ils établissaient une étroite connexion entre les phénomènes naturels
et les Fonctions principielles ou Neter.
Il n’existe pas un seul phénomène « naturel » qui ne soit attribué à
l’action des Neter : si la graine se décompose en racines qui vont en
profondeur, en germe qui lève, et en matière nourricière de ce germe, c’est
la force Sethienne qui démembre Osiris, c’est la puissance Osirienne qui se
manifeste dans le « redressement » du germe, c’est la puissance de
Renenoutet (une des fonctions du principe féminin universel Isis-Hathor)
qui « fait monter son lait » pour nourrir la pousse nouvelle.
Ces images ne sont pas des figures littéraires : elles sont l’expression des
forces causales naturelles qui agissent d’une manière analogue en tous les
êtres terrestres puisqu’ils dépendent de la Nature. Or le caractère de cette
Nature est Osirien-Sethien, c’est-à-dire toujours destiné à subir, comme
Osiris, ou à provoquer la division-dualisation comme Seth. L’origine de
cette division remonte à Atoum ou Toum, qui est le premier principe de
naissance et de mort avec la première dualisation de l’Origine. Pour les
Égyptiens, la Nature commence à ce point et ne finit que lorsque le principe
Horien, devenu conscient dans l’Humain, acquiert, par l’unification avec la
Cause, la maîtrise sur les Neter de la Nature, c’est-à-dire de la Terre et des
cieux inférieurs. C’est le principe de Rédemption, qui n’est qu’annoncé en
Égypte par la figuration du jeune « Horus sauveur » maîtrisant les animaux
malfaisants (scorpions, serpents, etc.).
Cette réalisation, qui signifie la victoire de la conscience spirituelle sur
les forces naturelles, marque donc la limite du domaine de celles-ci.
Pour les Égyptiens, une seule puissance dépasse la Nature : l’âme
universelle, l’Esprit. Lorsqu’ils parlent d’un Neter, s’ils le considèrent sous
cet aspect ils le désignent comme Maître de tous les Neter, ou comme
Maître du Ciel, de la Terre et de la Douât, et au suprême degré, comme
l’Inconnaissable.
Il y aurait donc deux limites au domaine de la Nature : la Cause
spirituelle qui le précède, et la spiritualité consciente et victorieuse qui le
suit. Entre ces deux limites, tous les Neter sont de la Nature ; à ce titre, ils
montrent leur relativité par une limitation, ou conditionnement de leur
puissance. Râ lui-même, en tant que Neter solaire dépendant des rythmes
cycliques (jeunesse, maturité, décadence), subit les enchantements d’Isis
qui lui « arrache » le secret de son nom. Mais en tant que divin Principe
animateur, il est hors d’atteinte de ces influences.
Il découle de ceci que l’Égypte devait considérer comme phénomènes
naturels tout ce qui est causé par le jeu des forces naturelles, dont le
domaine ainsi conçu se trouvait beaucoup plus étendu que dans les
définitions reproduites par le Professeur Lexa.
Selon la pensée moderne, l’expression « forces naturelles » peut être
traduite par les propriétés actives de la matière en ses différents états, par
les divers aspects et propriétés de l’énergie, et les lois qui les régissent.
Selon la pensée égyptienne, elles correspondent aux qualités
fonctionnelles des Neter, et aux sept puissances que nous avons traduites au
chapitre XV par les « Puissances fatales ».
Mais nous commettrons une erreur si nous considérons ces forces actives
sans tenir compte de la source dont elles émanent et dont elles ne sont que
les fonctions manifestées. L’Égypte a nommé BA et KA les deux aspects de
la source d’énergie Universelle : BA, principe purement spirituel, en dehors
de la Nature ; KA, principe fixateur du BA à travers tous les degrés de
l’énergie. Dans son état supérieur il dépasse la Nature, mais en dessous de
cet état spirituel il devient le générateur des forces réactives qui donnent les
caractéristiques de tous les êtres vivants, comme de tout ce qui est
492
manifesté dans l’Univers (depuis les astres jusqu’à leurs éléments
constituants), des différents états de la matière et des divers aspects de
l’énergie, que la science rationnelle traduit par les états physique, mental,
psychique.
L’Égypte résume les diverses modalités de l’être dans la formule : « Tout
ce qui est dans la Terre, dans le Ciel et dans la Douât. » (La Douât est
comprise dans son double aspect : préformatrice et transformatrice.) Mais
elle donne des précisions dans ces diverses expressions du BA et du KA. La
Puissance animatrice – BA – est, en elle-même, indépendante de la Nature,
quoiqu’elle coopère avec elle sans jamais être affectée par elle. Le KA, dans
ses manifestations inférieures, subit les avatars de toutes les incarnations,
dont il est par l’intermédiaire de tekh, le « point fixe ».
*
**
Les deux mots égyptiens qui désignent les pouvoirs magiques des Neter
et de l’homme, sont sa, et hekà ou hekàou. Le mot hekàou évoque les
puissances du KA ; le mot sa, qui est l’homophone de sa (dos), met ce
pouvoir en rapport direct avec le double flux énergétique qui longe la
colonne vertébrale, et le courant central que les Neter influent au Pharaon
par l’imposition de la main sur la nuque ou sur le bas du dos.
Toutefois il faut discerner si le Neter qui fait ce geste est considéré
comme « de la Nature » ou comme divin animateur ; dans ce dernier cas,
l’acte « magique » qui provoque son « don de force » ne pourrait plus être
magie naturelle, mais magie spirituelle qui est d’un ordre essentiellement
différent.
*
**
Ces considérations sur les conceptions égyptiennes étaient
indispensables pour la définition correcte de leur magie, puisqu’elles nous
amènent, comme première conséquence, à définir comme phénomènes
naturels tout ce qui ne concerne pas l’animation.
Leur deuxième conséquence est une notion de parenté essentielle entre
tous les KA, donc entre les forces vitales de l’homme et toutes celles de la
Nature. Il s’ensuit qu’en dehors des procédés scientifiquement admis, il
existe pour l’homme des possibilités d’agir sur les différents états de l’être,
de l’énergie et de la matière, à condition qu’il emploie la faculté
correspondant à l’état qu’il veut modifier, ou qu’il se serve d’un agent –
matière ou objet –, de même signature que celle de l’effet souhaité. Si le
sang d’un veau noir peut empêcher le grisonnement des cheveux (pour
prendre l’exemple cité par Lexa), c’est que la qualité du KA de ce sang
imprégnera de sa signature le sujet qui le recevra, et servira de ferment
colorant pour la chevelure. Si une parole est susceptible d’altérer la stabilité
d’une matière, c’est que le mode du « verbe » – ou rythme de vibration – de
cette parole agit en telle discordance avec l’état vibratoire de cette matière
qu’elle peut en désagréger la structure, de même qu’un verre peut se trouver
brisé par certaines sonorités musicales. Et ces deux effets sont des
phénomènes physiques.
Beaucoup d’autres modes d’action peuvent être employés dans les actes
magiques : autant que de modalités des « forces » mises en jeu. Les
relations d’analogie, de sympathie ou d’antipathie, en sont les principaux
éléments. Dans tous les cas, il s’agit donc de produire ou de modifier des
phénomènes naturels, même s’ils sont d’états subtils tels que le mental ou
le psychique qui font partie, en Égypte, des « ondes » du corps de Nout et
sont modifiables par les ondes de même nature ; en langage moderne, cette
intervention serait nommée « suggestion », mentale ou émotive.
La différence entre l’action naturelle et l’action magique devrait,
logiquement, être définie comme différence entre l’action rationnelle et
l’action irrationnelle, l’irrationnel étant pris dans le sens de ce qui n’est pas
logiquement explicable par les lois scientifiques classiquement reconnues.
Il est donc évident que les limites de l’irrationnel reculeraient avec la
493
connaissance des lois vulgairement dites « occultes », telles que les lois
d’affinité, sympathie et antipathie, aussi réelles dans les états subtils
(mental, nerveux ou énergétique) que sont réelles les affinités dans les
combinaisons chimiques.
Tous les phénomènes dépendant de ces lois étant, dans l’esprit des
Anciens, naturels, les moyens employés pour les obtenir sont forcément
naturels.
Mais puisque aucun phénomène n’est indépendant de l’harmonie
universelle, et que cette harmonie comprend en même temps les influences
des astres, des vibrations psychiques, mentales et énergétiques qui
composent « l’ambiance » du moment, la meilleure définition de la magie
serait probablement : « la science des moyens qui permettent d’établir un
rapport de coïncidences favorables à la production du phénomène désiré ».
Ces coïncidences peuvent être créées en modifiant la disposition du sujet
à influencer, pour le mettre en état de réceptivité ou de résistance par
rapport aux forces naturelles dont on désire attirer ou contrecarrer l’action.
Le cas de « modification des constellations », cité par Lexa, est un exemple
de fausse interprétation d’une telle intervention : il n’est, certes, pas
possible de changer l’influence ni la position d’une constellation ! Mais on
peut adapter la réceptivité du sujet, soit en modifiant son état physique, ou
psychique, ou mental, soit en employant des formules, objets ou matières
qui compensent la désharmonie redoutée entre le sujet et l’influence
actuelle de la constellation.
Ce genre de protection, qui peut aussi bien se rapporter aux diverses
forces de la Nature, était fréquemment employé en ancienne Égypte ; il
serait nommé, dans la terminologie moderne, « procédé scientifique », ou
« pratique magique », selon qu’il s’agirait d’un but et d’un procédé admis
par la science moderne (telle la protection contre la foudre par le
paratonnerre), ou d’un moyen étranger à la science officielle (telle la
protection d’un bateau contre la foudre par une peau de hyène hissée au
grand mât). Entre le magnétisme de la peau de hyène et celui de la peau de
chat sauvage pour les rhumatisants, faudra-t-il distinguer médecine et
magie ?
La couleur des vitraux des cathédrales, les parfums d’encens, de myrrhe,
etc., employés dans les sanctuaires d’Égypte comme des autres religions,
qu’ils fussent dénommés artifices magiques ou rites religieux, n’étaient-ils
pas des moyens naturels d’agir sur les états mental et psychique des
assistants pour les rendre plus réceptifs aux influences souhaitées ?
Les Anciens communiquaient l’efficacité d’une formule à l’eau d’un
breuvage ou d’une ablution : quel est le mode d’action de l’eau bénite des
sanctuaires ? …
La base de toutes ces anciennes traditions était d’abord la foi consciente
en une Unité d’origine, une Cause efficiente qui reste, malgré les multiples
effets qui en découlent, indépendante de ses diverses manifestations ;
ensuite, la connaissance d’une hiérarchie de puissances, plus ou moins
accessibles à l’Humain selon qu’elles étaient Qualités immanentes à la
Cause absolue (nommée en Égypte « l’Inconnaissable »), ou émanées d’elle
en effets relatifs et devenant – à divers degrés de subtilité – puissances de
Nature.
Les rapports directs de l’homme avec les premières Puissances
(spirituelles) sont essentiellement réduits à la pénétration immédiate, ou
confondement de l’esprit en Esprit. Les moyens pour y parvenir ont
toujours été des procédés d’exclusion ou de maîtrise des états
intermédiaires (psychique et mental) susceptibles de s’interposer. Ils ont
donné naissance aux rites religieux : liturgie ou magie du verbe, magie
« sympathique » religieuse (reliques, images symboliques, scapulaires,
gestes et couleurs), pour subjuguer les puissances inférieures et pour rendre
propices les supérieures.
Parallèlement à cette « magie » religieuse cherchant les effets
secondaires, on a toujours constaté l’existence d’une magie analogue
servant des buts utilitaires, et qui, partant d’une cause mentale ou
psychique, produit des phénomènes physiques, ou au moins, sensorielle-
ment perceptibles.
Les Sages de l’Égypte – comme en tous les Temps –, lorsqu’ils ont
utilisé ou toléré la magie dans l’un ou l’autre de ses différents modes, pour
des buts scientifiques ou d’exaltation mystique ou de guérison, ne se sont
pas trompés sur le caractère de relativité des résultats obtenus, partant de ce
principe que tous les phénomènes sont illusoires, c’est-à-dire résultent de
relativités. Un seul aspect échappe à cette relativité, c’est l’action directe de
l’Esprit.
En effet, il est vrai que l’Esprit pur, l’âme spirituelle – Universelle ou
individuelle –, ne dépend pas de la Nature. Cependant il peut arriver qu’en
connaissance de cause l’homme puisse créer les coïncidences naturelles qui
provoquent l’action de l’Esprit sur la matière. Ceci seul dépasse l’action
naturelle et constitue la véritable Magie spirituelle avec laquelle ne peut être
confondue aucune des autres pratiques de magie, ni même une partie des
rites religieux qui n’affecte que les forces psychiques et mentales.
En dehors de cette Science spirituelle, apanage de quelques rares Sages,
il faut encore distinguer de la vulgaire magie la connaissance des rapports
harmoniques de la Nature, ou philosophie de la magie, qui n’est alors que la
science du geste juste, dans le milieu juste, au moment juste.
Quant à ses applications, souvent abusives et dénaturées par l’avidité et
l’incompréhension populaires, elles ont donné naissance à la magie
superstitieuse et à la grossière sorcellerie.
On pourrait objecter (au sujet de la scène du canard décapité décrite au
chap. VI) que dans le « Conte de Khoufou (Chéops) et le magicien », ce
dernier n’accepte pas d’opérer ce même « prodige » sur un homme, laissant
supposer par son refus qu’il ne s’agissait pas d’une suggestion mais d’une
décapitation effective. Or ce refus est suffisamment légitimé par le fait que
l’émotion des spectateurs pourrait provoquer un choc psychique capable
d’entraîner la mort de l’homme.
Mais il est vrai aussi que, par l’usage de certaines forces psychiques, il
est possible d’obtenir la désagrégation matérielle sans modification de la
494
forme particulière, et, sur cette image substantielle , même une
décapitation peut avoir lieu sans affecter la forme de l’être matériel.
Cette remarque effleure un sujet qui dépasse infiniment le cadre de cet
ouvrage. Aussi ne se justifie-t-elle que par l’obligation de ne pas induire le
lecteur en erreur en omettant un aspect réel de la question.
COMMENTAIRE V
THEOLOGIE – NETER
4. THÉOGONIE. – THÉOLOGIE.
498
La Théogonie est la genèse, ou apparition successive, des Puissances
ou Qualités divines issues de l’Unité originelle où elles sont à l’état latent,
puis leur genèse aans la création continue par laquelle elles se manifestent à
travers la Nature.
La Théologie, ou science des « états » de la divinité, explique
théoriquement la genèse et manifestation de ces Puissances.
Sans la Nature et sans le classement « intelligent » de ce qu’elle
manifeste, il n’y aurait pas de théologie ; tandis que la Théogonie est une
réalité en soi, indépendante de l’intelligence humaine. C’est la philosophie
spéculative qui la classera, mais ce classement n’est pas une nécessité.
La Théogonie est donc une Réalité.
La Théologie est une construction de l’intelligence.
*
**
Les Qualités divines sont des « En Soi », c’est-à-dire des abstractions qui
peuvent être enseignées en trois modes : soit par une philosophie
spéculative, soit par des figurations imagées, soit par la démonstration de
leurs effets dans la Nature.
Le Temple égyptien a exprimé son enseignement par la figuration
symbolique et parfois mythique, évitant ainsi l’erreur stérilisante des
schémas, des classements et des spéculations théoriques qui conduisent trop
souvent l’intellect orgueilleux à la véritable hérésie.
L’Inconnaissable ne peut être approché que par la pure méditation sans
objet, ou par l’intuition éveillée par les symboles analogiques.
Le Temple égyptien a adopté cette dernière méthode ; celle-ci n’exclut
pas cependant l’initiation à la « métaphysique » de la théologie : elle en
donne même tous les éléments dans ses textes et ses tableaux, mais toujours
voilés sous un sens banal apparent. Il faut, pour déchiffrer leur sens réel,
connaître la valeur philosophique de chaque hiéroglyphe, les clés de leur
disposition, et aussi le langage de l’architecture : nature, coloration, taille et
mesure des pierres, disposition de ces pierres en coïncidence avec les textes
et les images, etc.
Alors le danger des théories arbitraires s’efface nécessairement devant la
coïncidence des Nombres, des Mesures et des Temps avec les fonctions et
les Qualités représentées hiéroglyphiquement.
Le sens profane des textes les situe historiquement (dans le Temps) ; le
symbole des noms, des gestes et fonctions des personnages permet de
découvrir les principes abstraits par leurs rapports analogiques avec ces
représentations concrètes.
LA TERRE FAIT LE CARACTÈRE DE SES HABITANTS. Chaque contrée accepte ou
refuse d’acclimater telle espèce animale, modifie la couleur et la saveur des
végétaux ; de sorte que c’est la terre elle-même qui définit, par ses
influences, les véritables limites des zones constituant des « pays » de
caractère particulier.
L’art et le symbolisme, qui expriment le rapport de la conscience et de la
vie, subissent forcément l’influence de la terre ; non seulement parce que
leurs sujets et leurs images sont fournis par la nature, la faune et la flore de
leurs pays respectifs, mais parce que le caractère individuel de ceux-ci
donne nécessairement son empreinte aux modes d’expression des hommes
qui y vivent. Si l’on ajoute à cette imprégnation l’influence des époques
astrologiques où naquirent les divers systèmes symboliques, on comprend
que chacun d’eux, tout en exprimant des réalités immuables, l’ait fait dans
un mode correspondant au pays et au Temps de sa conception.
Par conséquent, on ne peut pas espérer transposer littéralement un
symbolisme dans un autre, sous peine de commettre des erreurs par la
différence des points de vue – ou positions – adoptés par les initiateurs,
selon la « signature » du pays et du Temps.
Il y a cependant plus qu’une analogie entre les divers systèmes du
symbolisme religieux ; mais on ne peut pas établir leurs rapports en les
superposant : leurs rythmes et leurs méthodes étant forcément différents, il
en résulterait des combinaisons erronées qui dénatureraient le sens de
chacun d’eux.
Le seul moyen de trouver leur relation est de les étudier chacun pour soi,
comme des secteurs d’un cercle éclairés par une Vérité centrale. Ainsi dans
une année solaire, les mois et les saisons concourent à l’accomplissement
d’un cycle de végétation, chaque période apportant son expression
particulière pour un effet global cycliquement répété.
Cette image est plus qu’une figure littéraire, car les ressemblances et
dissemblances des saisons entre elles peuvent être comparées à celles des
divers symbolismes initiatiques. Les facteurs – ou puissances naturelles –
ne jouent pas le même rôle en toutes les périodes saisonnières : la neige et
la gelée, bénéfiques en hiver, sont désastreuses pour les bourgeons du
printemps ; la chaleur, la pluie, le vent, sont des Neter bénéfiques ou
maléfiques selon les dates de leur apparition. Ainsi les vérités
fondamentales sont enseignées aux hommes sous un aspect ou sous un
autre, selon le caractère de l’époque ou de la « tranche » d’humanité pour
laquelle elles sont révélées.
C’est pourquoi, par exemple, le symbolisme hindou ne peut pas se
transposer dans le symbolisme égyptien ; ce ne sont pas seulement les noms
qui diffèrent dans l’expression, mais la couleur, le rythme de pensée, et la
correspondance avec la formation du peuple qui en est le dépositaire. De
même le symbolisme judaïque, bien que sorti de l’Égypte, n’est pas
superposable au système égyptien ; il ne le rencontre que dans plusieurs
points clés qui sont, en eux-mêmes, la révélation d’un héritage. Les mêmes
vérités y sont exprimées en mode différent, coloré par la mentalité du
peuple d’Israël, elle-même modifiée successivement par les différents lieux
(désert, Chaldée, Palestine) où il a émigré.
Chaque mythe en soi est un système complet, montrant une vérité
identique sous un point de vue différent. Ce sont des différences, et non des
divergences ; et ces différences demeurent, tant que l’enseignement reste
dans le domaine du relatif, où la multiplicité des aspects est nécessaire à la
compréhension logique. Mais elles s’effacent graduellement lorsqu’on se
rapproche du centre, c’est-à-dire lorsqu’on simplifie l’expression, se
concentrant sur l’étude des Causes principielles sans se laisser séduire par la
diversité de leurs effets.
Or ceci ne peut pas aboutir par des spéculations métaphysiques, car ces
spéculations éloignent de la « vision directe » qui est le but central, la
perception « en soi » des Puissances causales du Monde. En ce centre
essentiel, but final de toutes les initiations, toutes sont unifiées, et les
« systèmes » sont abolis puisque ceux-ci sont les chemins employés pour y
parvenir. La progression vers le centre n’est donc pas marquée par des
complications, mais par la simplification.
Ce qui, graduellement, se simplifie, c’est la nature du symbolisme qui,
en son temps le plus excentrique, s’appuie sur les multiples manifestations
des Forces et des fonctions à travers les diverses productions et organismes
de la Nature.
Plus proche du centre est le symbolisme géométrique, qui traduit le jeu
des formes Idéelles, causes génératrices des formes organiques. Plus pur
encore est le jeu des Nombres principiels qui ont été l’objet des initiations
symboliques les plus secrètes du Monde ; encore ces symbolismes n’ont-ils
été découverts qu’aux hommes susceptibles d’une formation particulière,
qui donnait à leurs facultés supérieures le développement nécessaire pour
en « entendre » le sens réel.
D’après cette progression, il apparaît qu’en Égypte les pyramides furent
l’expression de la plus pure symbolique, témoignant ainsi d’un état plus
voisin de la perfection « centrale » que ce qui leur a succédé. Elles étaient
donc, dans la simplicité de leur symbolisme essentiel, plus proche de la
SIGNIFICATION universelle qui est à la base de tout système initiatique.
499
Les points de vue de la Théologie égyptienne .
Dans toute tradition théologique, la partie théogonie, traitant du
problème de l’Origine, ne l’enseigne jamais rationnellement. Ces notions
métaphysiques ne peuvent, en effet, s’exprimer que par le jeu du Nombre
dans les formes architecturales, dans les mesures et proportions des images.
Dans les textes, les fonctions princi-pielles et le rôle des Nombres sont
exprimés par la nomenclature des phases (ou périodes) d’une genèse, par
des Principes personnifiés et par les noms, et même les âges, de ces
personnifications.
Plusieurs systèmes théogoniques, présentant d’apparentes divergences,
ont été formulés par les Temples les plus importants – Héliopolis,
Hermopolis et Memphis –, sans compter les mythes d’Osiris, d’Horus, et
plusieurs légendes inscrites en divers lieux et diverses époques.
Si l’on considérait tous ces récits mythiques comme étant les chapitres
500
d’une théologie unique enseignant les lois de la Genèse selon des points
de vue déterminés, le fil qui les relie apparaîtrait rapidement, et leurs
contradictions s’effaceraient.
Supposons un enseignement astronomique qui développerait plusieurs
histoires intéressant les mêmes astres, en leur attribuant des rôles différents
selon la position choisie par l’observateur (par exemple système
héliocentrique ou système géocentrique), ou encore selon la situation de ces
astres dans le thème de chaque histoire (car ce thème peut se rapporter à
l’un des cycles astronomiques : mois lunaire ou année solaire, ou cycle
précessionnique, etc.). Chaque histoire serait alors véridique malgré les
divergences, et les rôles différents attribués à chaque astre seraient légitimés
par les divers points de vue d’un unique enseignement.
Cette conclusion est celle qui s’impose si l’on remplace l’étude des
astres par l’étude des Neter en suivant les diverses filières du mythe
égyptien. On s’aperçoit alors que les bases essentielles de la connaissance
humaine (histoire du Ciel, de la Terre et de l’Homme), qui sont séparées
dans la science moderne, se trouvent liées dans la science pharaonique dont
les théogonies expriment une unique philosophie.
Vues sous cet angle, leurs divergences deviennent des différences dont on
peut discerner les motifs.
Les différences de temps (ou d’époques des inscriptions) sont en rapport
avec le rôle attribué aux périodes historiques dans la genèse qu’elles
symbolisent.
Les différences de lieux sont en rapport avec le principe développé
particulièrement dans chaque Temple initiateur (par exemple principe
solaire à Héliopolis, principe lunaire à Dendérah).
Les différences de noms correspondent aux rapports des Temps (ou
grandes dates) astronomiques, avec les phases de la genèse étudiée : genèse
d’une chose, ou d’un être, ou d’un peuple, ou de l’Humanité.
Ceci étant reconnu, il faut s’appliquer à discerner les « points de vue » de
la théologie égyptienne.
La première difficulté provient de ce que chaque système a pour but
d’enseigner plus spécialement le rôle d’un des agents de la genèse. Il ne
faut donc pas en entreprendre l’étude particulière avant d’avoir déterminé
sa situation dans le plan général. Cette distinction étant établie, on
s’aperçoit encore que cette genèse est considérée sous plusieurs points de
vue qu’il faut savoir différencier, faute de quoi les divers éléments de cette
théologie (doctrines, mythes et légendes) prendront une apparence de
complexité incohérente.
Si l’on veut en découvrir la structure préétablie, c’est une genèse totale
qu’il faut étudier à travers l’ensemble des systèmes théogoniques, et non
point chaque système pour soi.
Suivant cette méthode, nous étudions donc les différents points de vue de
la théologie égyptienne en suivant la filière de chacun d’eux à travers
divers systèmes théogoniques (Memphite, Héliopolitain, etc.), sans jamais
rapporter les noms ou épisodes au système dont ils émanent, puisque ces
divers éléments du mythe ont été répartis entre tous ces systèmes (selon la
date et le lieu de leur promulgation) pour correspondre à l’une des phases
du point de vue envisagé.
Or on peut distinguer quatre points de vue dans cette théologie :
• Le point de vue métaphysique, qui est « l’histoire divine » des Neter et
se situe au commencement de toute chose.
• Le point de vue naturel, qui se rapporte aux fonctions de la Nature,
c’est-à-dire au monde de la manifestation.
• Le point de vue cosmologique ; il se rapporte aux cycles célestes qui
font la synthèse des deux premiers points de vue.
• Le point de vue mystique, qui se rapporte à la libération de la
conscience qui dépasse la Nature.
Ces quatre points de vue s’enchevêtrent à travers l’histoire des Neter, qui
est développée sur toute l’étendue (en temps et en espace) de l’histoire
égyptienne, à tel point que ces deux histoires se confondent souvent. Et
cette union intime du mythe théologique avec le fait historique adapté,
démontre l’existence d’un programme préétabli, avec des étapes fixées
quant aux dates et aux lieux que l’on devrait successivement choisir pour
leur réalisation.
6. LES NETER.
503
Pour comprendre la signification des Neter , il faut les considérer en
dehors de la complexité théologique, dans le milieu même qui est leur
domaine d’action : la Nature. En somme, c’est la Nature que nous avons
sans cesse devant les yeux, c’est la Nature qui nous impose ses lois, c’est
elle qui manifeste le devenir de l’être à travers toutes ses transformations.
Quels que soient les noms égyptiens donnés aux puissances qui la régissent,
ils se rapportent toujours à des Principes connaissables par leurs effets,
c’est-à-dire par des phénomènes naturels. Ces Principes sont les Neter, et
ces phénomènes sont les effets de la manifestation des Neter, ou Fonctions
504
cosmiques .
Cependant leur classification dans le panthéon égyptien révèle une
hiérarchie évidente. Si la plupart de ces Neter représentent des Fonctions
génératrices de la matière et des organismes de la Nature, quelques-uns sont
situés comme agents déterminateurs de ces Fonctions, ce que nous
pourrions nommer principes de Cause. Ceux-ci sont représentés dans
l’aspect trinitaire, mais on cite plusieurs trinités, et leurs caractères diffèrent
comme leurs noms, parce qu’elles ne se rapportent pas aux mêmes temps de
la Genèse.
Autre est la Trinité créatrice, Amon-Râ-Ptah « trois en un », autres sont
les trinités secondaires telles que :
• Amon-Mout-Khonsou,
• Osiris-Isis-Horus,
• Horus-Hathor-Ihi.
Chaque Principe de ces trinités est présenté dans différents rôles et ceci
est un sujet de confusion si l’on ne distingue pas les deux aspects essentiels
505
qui peuvent leur être attribués : Principe de la Nature, ou hors la Nature .
Cette distinction est possible grâce aux noms et aux qualificatifs par
lesquels ils sont, en chaque occasion, désignés.
C’est ainsi qu’Anton peut être considéré dans sa qualité absolue « au
nom caché » :
• ou comme animateur de la semence, à travers Moût principe de
maternité,
• ou comme Amon-Râ dans la Nature, en tant que semence animée
porteuse de l’hérédité.
C’est ainsi qu’on différencie Râ, divin créateur non dépendant de la
Nature, et Râ, Neter solaire assujetti aux lois des mondes qu’il régit.
La trinité Osirienne est la plus facile à comprendre, parce qu’elle
correspond au monde de la Nature, et de l’homme naturel ; ses Neter sont
les maîtres de la Nature dont ils régissent – et en même temps subissent – la
loi des cycles de l’existence. Mais l’Horus de cette triade ne doit pas être
confondu avec l’Horus de la trinité Horus-Hathor-Ihi.
Horus est la clé de la théologie égyptienne, comme le Verbe est la clé du
Nouveau Testament chrétien.
Au commencement et en tous temps, Horus universel (fréquemment
exprimé par Horus our) est l’axe de l’âme animatrice du Monde. Il est
l’animateur de l’Homme adamique pré-naturel, avant sa chute dans la
dualisation.
La « chute dans la Nature » crée son antagoniste, Seth, qui, par son
opposition constante, manifeste les puissances latentes d’Horus dans la
Nature, depuis Horus l’Ancien, puis Horus fils d’Isis, jusqu’à l’Horus
victorieux qui devient, dans l’Humain, l’Horus surnaturel qui réunit les
compléments divisés et résout toute opposition.
Hathor est, pour ainsi dire, inséparable d’Horus puisqu’elle est la
Maison du Verbe, son miroir qui le manifeste, et son pouvoir « actuel ».
C’est par lui qu’elle peut être la nourrice du Monde, la « Vache céleste ».
Elle est un des aspects du grand Principe féminin universel, que l’Égypte
présente comme Un et multiple, et qu’elle situe au delà de la multiplicité en
unifiant ses apparences passagères : soit qu’elle parle de Neith, la « Mère
divine » primordiale, ou de Maât (situées hors du Temps comme dans le
Temps), ou d’Hathor, épouse et mère du Verbe Horus, ou de Nout qui
engendre les Neter, puis d’Isis génératrice de l’Horus semence d’Osiris, de
Moût en ses diverses formes, etc.
Et tous ces Neter féminins ne sont que les révélations et manifestations
de la grande Mère universelle dont Maât est la Sagesse divine, lien, par
cette conscience, entre le « divin » et le « naturel ».
Il faut, à ce propos, remarquer ce qui différencie les Neter et l’Humain
relativement au microcosme :
• un Neter n’est pas le microcosme, il en est un aspect ou une Fonction
principielle. C’est l’Humain qui est le microcosme : il synthétise les Neter.
Si l’on approfondit la théologie égyptienne, on constate qu’en dehors des
trois Principes, créateur, animateur et rédempteur, et du Principe féminin
universel, les Neter sont de la Nature – entendant par Nature tous les états
transitoires et relatifs par rapport à l’état éternel de l’Esprit d’origine, et à la
conscience spirituelle acquise à travers la Nature. L’Égypte inclut, dans cet
état hors Nature, le BA (âme spirituelle, universelle et particulière) et le KA
divin (KA humain supérieur qui fait partie de Maât, la Conscience
506
universelle ).
COMMENTAIRE VI
ASTROLOGIE – ASTRONOMIE
1. ASTROLOGIE. – ASTRONOMIE.
« Il n’y a peut-être pas de pays où les positions et les mouvements des
astres soient observés avec plus d’exactitude qu’en Égypte. Ils conservent,
depuis un nombre incroyable d’années, des registres où ces observations
sont consignées. On y trouve des renseignements sur les mouvements des
planètes, sur leurs révolutions et leurs stations ; de plus, sur le rapport de
chaque planète avec la naissance des animaux, enfin sur les astres dont
l’influence est bonne ou mauvaise. En prédisant aux hommes l’avenir, ces
astrologues ont souvent trouvé juste ; ils prédisent aussi fréquemment
l’abondance et la disette, les épidémies et les maladies des troupeaux. Les
tremblements de terre, les inondations, l’apparition des comètes et
beaucoup d’autres phénomènes qu’il est impossible au vulgaire de connaître
d’avance, ils les prévoient d’après des observations faites depuis un long
espace de temps. On prétend même que les Chaldéens de Babylone, si
renommés dans l’astrologie, sont une colonie égyptienne et qu’ils furent
instruits dans cette science par les prêtres d’Égypte. » (DIODORE DE SICILE, I,
LXXXI.)
2. LES DÉCANS.
La division de chaque signe zodiacal en trois secteurs est justifiée par
l’intention de situer trois phases de chaque signe. Chaque décan détermine
schématique-ment les secteurs du commencement, du milieu ou de la fin du
signe, avec des chevauchements d’influence du premier décan du prochain
signe sur le dernier décan du signe actuel.
La subdivision du circuit annuel en 36 décans, transmise par l’astronome
Ptolémée, est encore observée par les astrologues modernes, mais ce
fractionnement en 36 parties égales est une conception schématique ne
correspondant pas à la mentalité pharaonique, pas plus qu’à un nombre
exact de symboles attribués aux décans.
Les mois égyptiens sont comptés de 30 jours, comme douzième partie
d’une division géométrique du cercle : ce n’est donc pas une division
astronomique.
Chaque signe zodiacal est une région peuplée d’un nombre inégal
d’étoiles importantes. C’est le passage du Soleil sur le méridien où se
situent ces étoiles qui leur donne leur valeur. Par conséquent, l’importance
d’un décan réside dans le nombre d’étoiles particulièrement influentes qu’il
comporte. Ces influences sont représentées par des personnages ou autres
symboles qui ne sont, effectivement, que les moments caractéristiques de
ces décans.
COMMENTAIRE VII
L’HOMME MICROCOSME
L’HOMME PHYSIQUE
1. L’HOMME MICROCOSMIQUE.
La conception classique du cosmos est : « l’Univers considéré comme un
système bien ordonné ».
Le fait de considérer un macrocosme et un microcosme séparément
situerait l’un et l’autre dans le temps et l’espace, leur accordant une
grandeur.
Or pareille situation serait une réalité relative à leur aspect phénoménal,
c’est-à-dire à l’existence senso-riellement perceptible des éléments qui les
composent. Ce point de vue ne considère pas les forces ou mobiles qui
déterminent les formes perceptibles de ces « cosmos ».
On établit ainsi un rapport erroné – une comparaison de grandeurs –,
entre l’Univers « grand cosmos » et le « petit cosmos » humain, alors qu’il
faut y voir une identité à travers les fonctions causales et leur projection
dans l’existence phénoménale. La différence consiste en ce que le fait
d’« exister » est le monde des apparences, dans lequel les forces causales se
manifestent dans le temps et l’espace : c’est le monde des fonctions
corporifiées en organes à travers toute l’échelle des êtres.
Or cette échelle, qui va du plan infime des organismes vivants jusqu’à
leur résumé total qui est l’homme, est l’échelle de la conscience, c’est-à-
dire la connaissance de chaque fonction essentielle acquise par l’expérience
vitale de chaque élément organique qui en est l’effet manifesté.
Tous les éléments organiques sont les signatures des fonctions causales
devenues effectives.
L’homme, comme produit actuellement final de la Nature, est la synthèse
de toutes ces « incarnations » fonctionnelles, et son organisme représente la
totalité de ces signatures.
L’incarnation des Fonctions causales constitue la genèse. Or puisque ce
sont les mêmes Fonctions essentielles qui sont les causes actives de toute
genèse, il est évident que leurs effets sont régis par des lois fondamentales
identiques (ce qui explique les analogies qui en résultent entre ces multiples
effets). Ainsi il y a analogie fonctionnelle entre le monde vitalement
organisé du système solaire et le monde organisé de la Terre, et finalement
de l’homme ; ainsi il y a rapport analogique entre le Macrocosme et le
Microcosme humain qui en est l’image-synthèse.
Mais puisque tous les organismes sont la projection et corporification de
Fonctions causales, il y a donc un « monde Causal » dont le monde
phénoménal n’est que l’effet. C’est précisément ce qui se trouve dans le
sujet terrestre qui totalise les « possibilités » fonctionnelles, c’est-à-dire
l’homme.
Le monde Causal se réfléchit en lui comme monde fonctionnel
organique, mais alors que ce dernier est limité dans le temps et l’espace par
le corps physique de l’homme, les Forces et états les plus subtils de
l’Univers pénètrent cet homme comme des ondes coïncidentes sans le
limiter à sa forme matérielle ; sa limitation à leur égard est mesurée par la
limitation de sa conscience.
L’homme est microcosmse dans le même sens que l’arbre par rapport à
sa semence le contenant virtuellement, virtualité qui sera alors son
macrocosme puisque la semence comprend toutes les possibilités de cet
arbre, son espèce, sa variété et toutes ses propriétés. Mais cette semence ne
développera ces dernières que si elle reçoit de la terre et du ciel les énergies
corresponsantes. A plus forte raison, l’homme, qui a en lui la semence
totale de l’Univers, y compris la semence de ces états spirituels, peut
s’identifier à cette totalité et s’en nourrir ; et la relation de ce Microcosme
avec le Macrocosme n’est plus alors une relation d’image et de grandeur,
mais une identité qui n’est dépendante que de son degré de perfection d’être
humain, par rapport à l’Homme en tant que finalité prévue par la Cause.
2. ORGANES ET FONCTIONS.
A propos du rapport établi entre les organes humains et les Neter, il ne
faut pas conclure que le membre ou l’organe attribué ou dédié à un Neter
représente ce Neter ou ses fonctions. Les Égyptiens croisent toujours les
notions ; ils définissent les choses par l’effet qu’elles produisent et non par
leur caractère propre. Si l’on parle de la face de Râ cela ne veut pas dire que
Râ soit la face, mais ce qui agit sur les cinq sens de la face, c’est-à-dire du
Verbe émetteur des « verbes ».
Il faut encore remarquer que les textes égyptiens n’attribuent pas
toujours les mêmes Neter aux mêmes membres et organes du corps
humain ; ces relations varient selon les fonctions considérées dans chaque
texte. L’enseignement de chacun d’eux ne pourra être clarifié que par
l’étude des rapports intentionnellement établis entre les Neter désignés dans
un texte.
En revanche, les noms des organes et des Neter révèlent directement
leurs fonctions vitales ou cosmiques, si l’on tient compte des jeux de mots
et des symboles.
3. L’ŒIL.
L’œil joue un rôle considérable dans la symbolique égyptienne. Les deux
yeux y signifient les deux luminaires : l’œil droit pour le Soleil et l’œil
gauche pour la Lune. Il est dit que la face d’Horus Universel (Horus l’Aîné)
a deux yeux, le Soleil et la Lune, et qu’il fait le jour ou la nuit selon qu’il
ouvre ou ferme l’œil solaire. Dans ce rôle, cet Horus s’identifie au divin Râ,
dont l’œil droit est aussi le Soleil, ou Râ manifesté.
Le nom de l’œil est irt ; sa racine, ir, est l’homonyme de îr, « faire,
créer ».
Il est dit que les larmes (rem) de l’œil de Râ ont créé les hommes (remt).
Les larmes d’Isis ressuscitent le cadavre d’Osiris. Ce rôle créateur de l’œil
divin rappelle le vieux symbole chrétien : l’œil du Créateur dans le triangle,
symbole de la Trinité.
Il est dit aussi que l’œil d’Horus fils d’Isis fut découpé par Seth, en petits
fragments qui furent rassemblés par Thot en un œil complet (meh) et sain
(ondjat). L’image de cet œil oudjat est prise comme un type de mesure : le
hekat, mesure de capacité pour les grains, valant 4,785 litres.
La fraction attribuée à chacun des fragments est un exemple de jeu
symbolique sur les Nombres. Cet œil est détaillé en six parties : la pupille,
les deux triangles (interne et externe) du « blanc » de l’œil, qui entourent la
pupille ; le sourcil, le fil spiralique qui descend sur la joue et qui est
identique au fil qui s’élève de la couronne rouge, enfin le signe gd, petit
bâton en forme de piquet à cran d’arrêt que l’on dessine sous l’œil. Ces
deux derniers signes font partie de la figuration de l’œil du faucon d’Horus.
Or, le triangle blanc interne vaut 1/2 ; la pupille vaut 1/4 ; le sourcil vaut
1/8 ; le triangle externe vaut 1/16 ; le fil spiralique vaut 1/32 ; le signe qd
vaut 1/64. L’addition de toutes ces fractions donne 63/64, c’est-à-dire le
total moins 1/64…
Il est intéressant de remarquer que le hiéroglyphe qd, auquel est attribué
la plus petite fraction, signifie « configuration », « caractère », et construire,
et qu’il exprime aussi l’entier, le complet, comme si ce 1/64 évoquait la
semence infime qui, dans toute chose créée, est aussi l’infime partie et
cependant la contient tout entière…
Il faut aussi noter que cet œil oudjat – dit « complet » (meh) – contient
les trois couleurs essentielles du symbolisme égyptien : le noir (de la terre
noire) par la pupille, le blanc de la couronne blanche par les deux triangles,
et le rouge de la couronne rouge par le fil spiralique.
Enfin il faut se souvenir que le nerf optique est l’unique nerf qui,
s’épanouissant en un organe extérieur, puisse être contrôlé visuellement
dans l’activité de sa fonction. Non seulement la sensibilité et la mobilité de
l’œil lui permettent d’exprimer tous les réflexes moraux, mais l’état des
yeux révèle celui des organes qui leur correspondent, tels que les poumons,
les ovaires, les testicules. (Remarquez le rapport constamment établi entre
l’œil d’Horus et les testicules de Seth.)
4. L’OREILLE.
Pour signifier l’audition attentive, les Égyptiens disaient : « donner maâ
(la tempe) », c’est-à-dire prêter son attention, alors qu’en pareil cas nous
dirions « prêter l’oreille ». Or R.A. Schwaller de Lubicz fait remarquer que
l’os temporal recouvre la zone auditive du cerveau ; c’est-à-dire que « les
Égyptiens accordaient plus de valeur à la fonction vitale dont cette zone est
le centre qu’à l’organe de la perception auditive, l’oreille » (R.A. Schwaller
de Lubicz, Le Temple dans l’Homme, p. 31).
D’autre part, dans la construction de leurs personnages, « l’axe de
stabilité passe par l’oreille (oreille interne, siège du centre de l’équilibre) et
aboutit à la plante du pied » (op. cit., p. 54). On sait que le siège du centre
de l’orientation se trouve dans les canaux semi-circulaires de l’oreille
interne. La lésion de ces canaux altère le sens de l’orientation et de
l’équilibre du corps. Or le sens des directions de l’espace est une condition
essentielle à l’existence de toute chose vivante, puisque toute chose a
volume, donc dépend fondamentalement de ces « directions ».
Des paroles hindoues montrent une analogie de pensée avec le
symbolisme égyptien. Ces textes des Upanishads révèlent la connaissance
des Anciens quant à la fonction spatiale de l’oreille :
« Il (le Créateur) médite sur l’homme (Universel) ; sous l’effet de sa
méditation… ses oreilles éclosent ; de ses oreilles, le son ; et du son, les
points cardinaux (Aitareyopanishad, I, 4).
« … puis, ces Pouvoirs étant manifestés, Il leur assigne leurs stations
respectives : « les points cardinaux, devenant le son, entrèrent dans les
oreilles… » (Op. cit., II, 4.)
Parlant de Purusha, l’Homme universel, il est dit encore :
« Ses yeux sont le soleil et la lune ; ses oreilles sont les points
cardinaux. » (Mundakopanishad, II, 4.)
Le symbolisme égyptien, lorsque les principes en sont connus, est plus
accessible à la mentalité moderne, parce que plus direct et plus positif que
celui de l’Hindouisme. Mais ces textes des Upanishads peuvent faire
comprendre pourquoi ces antiques traditions enseignent que la fonction
« universelle » de l’oreille est, d’une part, d’engendrer le son et les
« directions » de l’espace, et, d’autre part, de recevoir le son et d’en
produire la conscience.
Il est remarquable que les Égyptiens aient choisi, comme symbole
hiéroglyphique de l’ouïe, l’oreille d’un animal caractéristique pour
l’intensité de cette fonction.
D’après l’étude d’Horapollon sur les hiéroglyphes (I, 47), le signe
symbolisant l’ouïe est l’oreille du taureau : la vache, lorsqu’elle est en
chaleur, mugit fortement pour appeler le taureau ; celui-ci entend cet appel à
très grande distance et accourt immédiatement.
5. LA VIE, ANKH.
La Synthèse des Principes, au « Deuxième jour » de BA-KA, explique
que les lettres du triangle originel – a n h – expriment la vie
525 ; 526
Principielle de même les trois lettres du signe ânkh, â n kh
expriment la vie manifestée.
En effet, la vie est la manifestation de l’Esprit dans la matière. La
527
puissance de vie est la mesure de sa force réactive . Or la lettre â est la
lettre de l’individualisation et de sa mesure ; nekh exprime la force
528
réactive ; le mot ânekh signifie donc la mesure individuelle de la force
réactive. Si cette force diminue, il y a déclin ou vieillesse ; si elle est
supprimée il y a mort.
Or l’Égypte ne limitait pas la vie à l’existence physique : elle appliquait
l’épithète « vivant » à la conscience individuelle du défunt, à laquelle elle
reconnaissait la possibilité de continuer son expérience dans l’au-delà. On
trouve, dans les textes du Livre des Morts, des Sarcophages et des
Pyramides, de nombreux exemples de cette affirmation : « Tu es venu
vivant… Tu vis vivant… » On lui promet la participation à l’œuvre des
forces cosmiques, s’il « apprend à les connaître » et à s’identifier à elles ;
mais on lui recommande de résister aux forces mauvaises qui veulent
empêcher ses progrès ; on lui souhaite de « ne pas perdre son cœur », et
d’arriver à « épuiser sa soif » (c’est-à-dire les désirs qui le rattachent à la
Terre), etc.
Il s’agit donc encore d’une lutte entre les activités opposées : autant entre
ses propres tendances contradictoires qu’entre les forces hostiles et les
forces bienfaisantes qu’il peut rencontrer. C’est sa propre réactivité qui
décidera de sa victoire ou de sa perte : il y a donc aussi, à un degré plus
subtil que sur Terre, l’expression d’une force réactive individualisée, qui est
la vie ânkh.
L’HOMME INTERMEDIAIRE. L’INTELLECT
6. LES DEUX INTELLIGENCES.
Ce commentaire, paragraphe 7, parle des deux voies que peut suivre la
science. Ces deux voies exigent des moyens différents, c’est-à-dire deux
modes d’intelligence : celui de la comparaison, et celui de la connaissance
« a priori ».
L’homme, par sa synthèse microcosmique, a inscrit en son être la
conscience des règnes inférieurs, ce que l’on appelle « l’instinct ». Cet
instinct est une conscience innée qui parle à notre raison sans que soit
nécessaire la perception sensorielle de l’objet. C’est « l’Intelligence du
cœur » ; elle se manifeste lorsque nous avons développé l’intuition qui en
permet l’expression. Ainsi pouvons-nous avoir des certitudes qu’il nous est
impossible de comprendre, telles la certitude de l’Unité insécable, la
certitude de la spirale sphérique, même la certitude de l’Axe (par exemple
l’axe de la Terre qui est imaginaire seulement).
L’instinct nous met vitalement en rapport avec la vie qui nous entoure ;
l’Intelligence du cœur, ou connaissance a priori, exige une transcription de
l’instinct. Cette transcription peut rester pure par la voie de l’intuition
synthétisante, ou se perdre dans la voie de l’analyse, ou mode d’intelligence
discursive. Nous appelons parfois cette dernière « intelligence cérébrale »,
529
parce qu’elle est fonction des organes cérébraux qui permettent la
comparaison, son élément essentiel.
Nous associons donc Connaissance et intuition d’une part, intelligence
cérébrale (discursive) et compréhension d’autre part.
Or, les inscriptions des notions se font dans le cerveau pour les notions
concrètes et constituent le savoir par un mécanisme d’affirmation et de
négation.
Les inscriptions de la Connaissance se font par le « canal » de l’énergie
nerveuse dans l’homme subtil de nature indestructible. Néanmoins cette
dernière acquisition ne pourrait pas se faire sans l’instrument cérébral qui
met en rapport la conscience innée avec le monde objectif.
La différence finale entre les deux intelligences consiste donc dans la
qualité et la permanence de l’acquisition.
L’intelligence analytique augmente le savoir, ou notions cérébralement
enregistrées, et permet de maintenir « l’acquis » psychique.
L’Intelligence du cœur, Connaissance, éprouve et imprime dans l’état
subtil de l’être la conscience du conflit entre le « mortel » et
l’« immortel » ; par ce fait qu’elle efface peu à peu les « impressions »
psychiques qui empêchent la libération des liens terrestres. On trouvera la
correspondance formelle de cette conception dans les enseignements du
Temple égyptien. (Voir les paragraphes 13, 15 et 16 de ce Commentaire, et
les sept chapitres de « BA et KA »).
9. LA CONSCIENCE.
« En admettant une Cause-source de l’Univers, cette Cause est
nécessairement unique. Or, si la raison nous impose l’idée d’une unité
insécable, donc sans quantité, la notion de cette unité échappe à notre point
de vue de créature faisant partie de cet Univers, conséquence de la Cause
unique. Cette unité n’existe pour nous que si la comparaison est possible ;
or comparaison signifie conscience et dualité. Par conséquent la création
s’accomplit [se situe] entre les Nombres Un et Deux ; et la dualité sera le
caractère fondamental de l’Univers créé.
« … La dualité [la Nature en tant qu’état dualisé], implique la
comparaison, et une succession de phénomènes… L’Unité crée en « se
regardant elle-même »… Nous pouvons appeler cette Unité : Dieu ou
Énergie sans polarité en tant qu’Unité insécable, et Dieu ou Énergie
polarisée en tant qu’Unité consciente d’elle-même.
« De ce fait, l’Univers n’est que conscience, et ne présente qu’une
évolution de conscience, de l’origine à sa fin qui est retour à sa cause ;
c’est-à-dire évolution d’une « conscience innée » vers la conscience
psychologique qui est « conscience de la conscience innée », première étape
vers la conscience libérée des contingences physiques… (C’est-à-dire la
Conscience permanente ou immortelle.)
« … L’homme est l’individualisation de toutes les fonctions, affinités et
pouvoirs de l’Univers, et la Conscience est la mesure de l’individualisation,
rendant actuel ce qui est virtuel dans l’harmonie cosmique.
« … L’individualisation a corporifié dans l’organisme les fonctions de
« genèse » séparant les effets de la Pensée créatrice dans le temps et
l’espace ; la conscience doit les unifier à nouveau.
« … Ainsi, la conscience vient de la connaissance des éléments de la
genèse,… puis de la connaissance du lien spirituel qui les unit. Autrement
dit, il y a connaissance du Bien et du Mal, et la connaissance de l’Unité ;
l’intelligence du mortel qui sépare comme la faux, et l’Intelligence du
permanent qui unifie. » (Extraits du Temple dans l’Homme, R.A. Schwaller
de Lubicz.)
L’HOMME PSYCHO-SPIRITUEL
11. L’AME DANS LES DIVERSES TRADITIONS.
Les divers états de l’être – depuis l’état matériel jusqu’à l’état le plus
spirituel – ont été enseignés par toutes les traditions ésotériques, qui les ont
désignés par des noms différents selon leur langue et la valeur numérique de
leurs lettres alphabétiques. Leur étude démontre que toutes ces traditions
enseignent une Vérité unique, malgré la différence des mots et quelques
nuances d’expression qui précisent le point de vue de leur « génie »
particulier.
On peut entendre par « génie » l’état d’âme ou de conscience du temps –
et du peuple – qui a nécessité cette Révélation ; on pourrait dire aussi, pour
les grandes Révélations, la « loi du Manou » de son cycle.
Il n’est pas possible de développer ici la totalité des noms et des nuances
par lesquels les traditions successives ont désigné les modalités de la
conscience humaine que le Christianisme appelle d’un nom unique : l’âme.
Les nuances qui peuvent différencier ces diverses expressions
proviennent :
1° de la difficulté de déterminer des états sensoriel-lement
imperceptibles, et qui ne sont pas délimités par des cloisons étanches ;
2° du fait que ces états sont des projections ou plutôt des incarnations
dans l’Humain, d’états identiques dans l’Universel.
Ces nuances peuvent devenir des divergences selon les interprétations
des traducteurs étrangers qui, s’ils ne connaissent pas les valeurs
numériques et symboliques de chaque alphabet, ne peuvent pas pénétrer la
signification métaphysique des termes employés.
Une autre difficulté de transcription provient de la structure artificielle de
nos langues européennes qui n’ont à leur disposition ni la correspondance
des Nombres ni le jeu des symboles pour transcrire les mots construits sur
ces principes. Le même obstacle a créé des divergences de compréhension
dans notre propre langue pour des termes à sens abstraits – tels que :
« intellect, raison, pensée, conscience » – qui augmentent la confusion dans
l’interprétation des textes et obligent chaque auteur à sa propre définition.
C’est ainsi que, dans l’interprétation des textes hindous, certains
orientalistes traduiront le nom du Principe Suprême non manifesté, tantôt
par Brahman et tantôt par Brahma. C’est ainsi que Mahat – l’Idéation
Universelle, l’Ame-Intelligence Universelle – sera généralement considérée
comme correspondant en l’Humain au principe Buddhi, tandis que d’autres
verront Mahat en rapport avec le principe supérieur de Manas, l’Ego
conscient.
La tradition Védique comporte diverses « positions » ou manières
d’envisager le sujet (les six Darshanas) ; il s’ensuit une variation dans
l’ordre des Principes étudiés et parfois dans l’application de leurs noms, qui
peut créer un trouble dans l’esprit des commentateurs occidentaux. Nous
avons essayé d’en résumer ici très succinctement les interprétations les plus
autorisées, en donnant exclusivement les notions nécessaires au sujet qui
nous intéresse, et en les classifiant pour en faciliter la vue d’ensemble.
TRADITION VÉDIQUE
LE MONDE DIVIN
BRAM, Absolu, Suprême, Universel, insécable, impersonnel, neutre,
non qualifié, non-Etre. Considéré comme Esprit universel, Suprême « Soi »,
il est Atma – ou Atman – qui pénètre toutes choses en lesquelles il devient
jivâtman.
MONDE DE L’INDIVIDUALISATION
La projection – ou individualisation – des Principes universels en
l’Humain est généralement traduite par les termes suivants :
— Atmâ Esprit universel qui constitue le milieu
ou énergétique de tout être, le souffle, le Grand Soi sous ses deux
aspects :
Atman, universel, paramâtman ;
individuel, jivâtman,
— Buddhi, véhicule à’Atmâ,
premier principe spirituel manifesté en l’Humain ;
principe de la Raison essentielle, dans le sens de Logos ou
Verbe. Buddhi est assimilé à Mahat le Grand Principe, Idéation-
Sagesse universelle.
De Buddhi-Mahat émanent les deux facultés « internes » :
Ahankara et Manas.
— Manas et Ahankara. Manas, le Mental
(sens interne par rapport aux sens externes), en relation par son
aspect supérieur avec Buddhi, et avec Ahankara – la conscience
du Moi – comme avec ses facultés inférieures qui constituent la
Pensée formelle.
532
— Chitta, conscience intellectuelle et imaginative .
— Kâma, Force instinctive,
cause des mouvements passionnels et instinctifs, essense du
sang (et qui a son siège dans le foie).
— Linga-sharira, « double » éthérique, ou forme subtile
(a son siège dans la rate). Ce Linga-sharira (ou sûkshma-
sharirà), est composé des trois enveloppes subtiles (ou Koshas)
qui sont des états de conscience résultant des trois éléments
inférieurs de l’homme : les souffles vitaux, ou diverses formes
du Prâna, les facultés mentales, et les cinq essences
élémentaires ou tanmâtras.
— Enfin cinq facultés sensorielles,
— cinq facultés d’action,
— cinq prâna, ou courants vitaux
qui sont les manifestations de l’Énergie universelle, Atmâ-Jivâ,
dans l’individu.
TRADITION HÉBRAÏQUE
La Kabbale hébraïque enseigne que l’âme humaine est composée de trois
éléments principaux :
• neshama, le plus élevé des trois, Esprit de la Lumière divine,
indépendant du corps physique.
• rouah, âme responsable, siège des impulsions intellectuelles et
instinctives.
• nephesh, esprit moins subtil, vie des sens, mobile des mouvements de
la vie animale ; c’est cette âme inférieure qui est dite « portée par le sang ».
• Un quatrième élément est admis par la Kabbale sous le nom de
« Principe individuel » : Yeshida, l’Idée ou forme émanée de l’âme, qui est
présente dès la conception et quitte le corps avant la mort.
Enfin quelques auteurs admettent encore l’esprit vital, souffle de vie qui
réside dans le cœur et régit la vie animale végétative.
*
**
Le but principal de la Kabbale est de montrer les rapports existant entre
l’Homme Cosmique et l’homme terrestre, afin d’enseigner à celui-ci les
possibilités de Maîtrise quant aux puissances latentes en son individualité,
le but suprême étant l’union avec ce Divin Homme Cosmique.
L’hindouisme donne un enseignement analogue dans certains éléments
du Véda, mais développé dans toutes les nuances de toutes les possibilités,
ce qui crée, pour la mentalité occidentale, une complexité inextricable.
Il y a des parentés évidentes entre la Tradition des Parses et les livres
hébraïques d’une part, et certains éléments hindous d’autre part. L’intérêt ne
consiste pas dans l’ancienneté de tels ou tels ouvrages dont l’interprétation,
d’ailleurs, varie en beaucoup de détails selon les diverses écoles.
La valeur immuable de chaque Tradition réside dans les noms et les
symboles attribués par chacune d’elles ; les noms se rapportent aux
Nombres, et les symboles aux fonctions vitales de la Nature, permettant, par
analogie, de saisir les rapports métaphysiques enseignés dans ces traditions,
à condition que chacune d’elles soit étudiée pour elle-même, et que l’on ne
commette jamais Verreur de transposer ses noms et ses symboles dans ceux
d’une autre Tradition.
L’avantage de l’enseignement égyptien est que les textes authentiques
nous sont offerts sur le lieu même de leur inscription, sans avoir été
dénaturés par des transcriptions successives. Ses Nombres, ses clés et ses
symboles permettent, en étudiant selon la méthode égyptienne, d’atteindre
directement le sens ésotérique voilé par le sens apparent. Or la Tradition
révélée par ces textes présente une parenté avec les autres Traditions
initiatiques. Le principe de l’Homme Cosmique – ou Macrocosme –
projetant son image dans le microcosme humain, est affirmé par l’Égypte
où tous les membres et organes sont assimilés aux Principes des Neter.
(Voir, dans ce Commentaire, le § 15.)
Nous retrouvons dans le Véda la même affirmation. Pour exemple :
« Lumineux et sans forme est en vérité cet Homme (Purusha, l’Homme
Cosmique). Il ne naquit jamais… De lui naissent la vie, le mental et tous les
sens…
« La substance ignée est sa tête ; ses yeux sont le soleil et la lune ; ses
oreilles sont les points cardinaux ; sa voix, les lois manifestées ; sa vie est
l’air ; son cœur l’univers ; la terre est pour ses pieds ; Il est, en un mot,
l’intime Soi de toute créature. » (Mundakopanishad II, 2,3, 4.)
Le développement des attributs de l’Adam Kadmon (l’Homme divin) –
les dix Séphiroth de la Kabbale hébraïque –, quoique de date relativement
récente (depuis le XIIe siècle), est trop apparenté aux traditions antiques
pour ne pas être pris en considération ; il a l’avantage de donner des
précisions remarquables par leur conformité aux idées égyptiennes.
Il y a d’abord l’affirmation du Zohar : « Tout ce qui est sur terre est
également en haut. » (Zohar, 156 b.) Il y a ensuite la théorie des Séphiroth
dont le centre, Yesod – le Fondement –, est le milieu et le fondement des
autres Puissances, la « matrice du Monde ». Les neuf autres Séphiroth sont
groupées en trois tri-nités, considérées comme monde de l’Émanation,
monde de la Création, monde de la Formation.
La traduction française de leurs noms hébraïques exprime mal leurs
significations métaphysiques :
COMMENTAIRE VIII
L’ENSEIGNEMENT DES TOMBES
ÉGYPTIENNES
Il n’y a pas de logique apparente dans les représentations et textes de ces
tombes, si l’on y cherche une « histoire » de la vie du défunt. Trop d’images
apparemment absurdes contrediraient cette assertion : exagération de
proportions, de faits, d’images : disproportion de la taille du « maître » avec
celle des ouvriers, un « homme-arbre », des animaux fantastiques, etc.
Le symbolisme seul peut donner le programme et la clé de ces tombes,
dont la décoration a été composée comme si elles étaient destinées à
instruire leurs visiteurs. Si l’on écarte cette hypothèse, on ne peut pas
expliquer le développement considérable des thèmes – cosmogoniques,
astronomiques et mystiques – exposés dans les tombes pharaoniques
(Pyramides des Ve et VIe dynasties, tombes des rois et des reines du
Nouvel Empire dans la nécropole thébaine), ni l’accentuation des anomalies
546 547
à but symbolique dans les tombes d’un Ramose ou d’un Khérouf ,
telles que des yeux aveuglés ou au contraire exagérés, des taches et des
découpures volontaires sur les membres, sur le cou, sur le sexe, etc., sans
souci de la détérioration de l’image !
Si les tombes n’étaient destinées qu’à servir de sépulture, scellée dès
l’accomplissement des funérailles, pourquoi y trouverait-on les témoignages
d’études faites longtemps après la mort de leur possesseur ? Par exemple la
« mise en carreaux » de certains tableaux, exécutés sur la peinture d’une
548 549
époque postérieure (tombes de Kenamoun , d’Anena ) ; par exemple
encore des annotations telles que les graffiti datant de Ramsès II (XIXe
dynastie) trouvés dans la tombe de Ptah-Shepes (Ve dynastie). Pourquoi
550
Kha-m-hat (XVIIIe dynastie) aurait-il gravé dans sa tombe, à l’entrée de
la chambre intérieure, cet appel aux visiteurs :
« O ceux qui seront sur Terre des grands et des petits, ô tous les scribes
sachant dénouer les difficultés graphiques et habiles dans les hiéroglyphes,
ceux qui s’élancent à la recherche des connaissances, ceux qui jouissent
béatement des résultats acquis, tous ceux qui passeront par cette chapelle
que j’ai construite pour être un lieu de repos de bienheureux, ceux qui
contempleront les parois et y liront à haute voix mes phrases… » etc. ?
(A.S. 40, p. 602.)
Tous les tombeaux dont les murs sont couverts de tableaux et de textes
gravés, peints ou sculptés, présentent des caractéristiques assez
remarquables pour mériter une étude comparée, seule capable de révéler
l’intention de leurs auteurs. Cette comparaison doit s’appliquer, d’une part
aux diverses époques de leur construction, d’autre part à la fonction sociale
attribuée à leurs destinataires : rois, grands dignitaires ou chefs d’artisanat.
D’une époque à l’autre (Ancien Empire, Moyen Empire, Nouvel
Empire), on constate des différences dans leur disposition intérieure, dans
leur situation et même dans leur orientation, qui demandent une observation
approfondie. Sous l’Ancien Empire, à l’époque des Pyramides, les
tombeaux des grands fonctionnaires du règne sont groupés dans le
voisinage immédiat de la Pyramide royale qui comporte tout un complexe
architectural : temple dit « funéraire », barques votives, rampe d’accès et
temple de la vallée.
A la XVIIIe dynastie au contraire, les tombes royales se trouvent réunies
à Thèbes dans le cirque terminal de la Vallée des Rois, alors que les temples
« funéraires » s’échelonnent dans la vallée du Nil à la limite des cultures.
Les tombes des particuliers, des grands fonctionnaires et des nobles de
chaque règne – dont l’accroissement des prérogatives correspond à une
situation plus indépendante – s’étagent dans les collines avoisinant le
temple.
On constate en effet, au cours des trois grandes périodes, une progression
systématique dans la participation des « grands » du royaume aux mystères
et aux rites funéraires qui furent, dans l’Ancien Empire, des privilèges
royaux. Cette progression est parallèle à la prise de pouvoir des princes et
gouverneurs – de provinces ou nomes – laquelle aboutit aux périodes quasi
féodales de la première époque intermédiaire.
Le mode d’expression de l’enseignement ésotérique suit un rythme
analogue : la concision des textes de l’Ancien Empire est en harmonie avec
la rigidité géométrique des monuments (constructions de Zozer à Saqqarah,
Pyramides, temple du Soleil à Abousir, etc.). Avec le Aloyen Empire
commence une expansion de l’enseignement qui s’amplifie graduellement à
partir de la XVIIIe dynastie, dans les thèmes architecturaux comme dans la
statuaire et les textes. Les secrets du symbolisme et les mystères de l’au-
delà sont alors développés dans les tombeaux jusqu’à la fin des Ramsès.
Dans les monuments de la période ptolémaïque on arrive à la prolixité,
aussi bien dans la floraison de ses colonnes et chapiteaux que dans ses
hiéroglyphes. Sous le couvert de nouveaux signes – qui d’ailleurs
multiplient les énigmes hiéroglyphiques –, on révèle (pour ceux qui
connaissent les clés de lecture) ce qui, jusqu’alors, avait été voilé sous un
symbolisme concis. Des portes monumentales résument le programme des
anciens temples. Les nouveaux temples – Edfou, Dendérah, Philae –
totalisent selon leur caractère respectif la philosophie égyptienne.
Cependant, l’enseignement initiatique des destinées humaines a
synthétisé sa plus haute expression dans la nécropole thébaine du Nouvel
Empire, parce que celle-ci fut la sépulture des trois dynasties qui réalisèrent
le sommet de la mission pharaonique : les dynasties solaires des Ramsès
(XIXe et XXe) préparées et « gestées » par la XVIIIe, avec son Sage,
Amenhotep, fils de Hapou.
Ce rôle capital de la XVIIIe dynastie a été signifié par le culte qui fut
rendu, pendant les XIXe et XXe dynasties, à ses fondateurs – Aménophis Ier
et la reine Ahmès Nefertari, et Thoutmès III (XVIIIe dynastie) –, en tant que
patrons divins de cette « Vallée des Rois ».
C’est pourquoi cette nécropole thébaine, dans l’ensemble de ses vallées
funéraires, représente un grandiose foyer initiatique, par les groupements
sélectionnés des trois thèmes d’instruction.
En effet, cet enseignement prend trois aspects, selon qu’il est donné dans
le tombeau d’un chef d’artisanat, ou d’un grand fonctionnaire, ou d’un
Pharaon.
Luxor, 1950.
Plan-de-Grasse, Pâques 1956.
TABLE DES FIGURES
1. Scène d’offrande, bas-relief, grès - LOUXOR, temple d’Amon,
XVIIIe dynastie.
2. Scène funéraire, peinture murale - THEBES, tombe d’Amenemonet,
XVIIIe dynastie.
3. Palmiers-doum, sycomores et dattiers, peinture murale - DEIR EL
MEDINEH, tombe de Sennedjem, XIXe dynastie.
4. Construction d’une barque, bas-relief - SAQQARAH, tombe de Ty,
Ve dynastie.
5. Thot, bas-relief, calcaire - ABYDOS, temple de Seti Ier, XIXe
dynastie.
6. Scribes, bas-relief - SAQQARAH, tombe de Ty, Ve dynastie.
7. Groupe hiéroglyphique n r w, bas-relief, calcaire - KARNAK, XVIIIe
dynastie.
8. Chouette, bas-relief, calcaire - KARNAK, XVIIIe dynastie.
9. Horus dans la barque, bas-relief, grès - EDFOU, temple d’Horus,
époque ptolémaïque.
10. Barque funéraire, peinture murale - THEBES, tombe de Menna,
XVIIIe dynastie.
11. Cynocéphales et barque solaire, peinture murale - DEIR EL
MEDINEH, tombe de Sennedjem, XIXe dynastie.
12. Personnage tenant en main le signe S, bas-relief, calcaire -
THEBES, tombe de Ramose, XVIIIe dynastie.
13. Roi tirant à l’arc, bas-relief, granit - KARNAK, temple d’Amon,
e
XVIII dynastie.
14. Danseurs, bas-relief, grès quartzeux - KARNAK, temple d’Amon,
XVIIIe dynastie.
15. Nils liant les plantes du Nord et du Sud, bas-relief, granit noir -
LOUXOR, temple d’Amon, cour de Ramsès, socle d’un colosse assis,
XIXe dynastie.
16. Nout, le ciel, bas-relief, calcaire - ABYDOS, cénotaphe de Seti Ier,
côté Ouest du plafond de la salle du sarcophage.
17. Les deux lions aker, peinture - MUSÉE DU CAIRE, sarcophage de
Khonsou, XVIIIe dynastie.
18. Phœnix, peinture - VALLÉE DES REINES, tombe de Nefertari,
e
XIX dynastie.
19. Thot, bas-relief, grès quartzeux - KARNAK, temple d’Amon,
XVIIIe dynastie.
20. Barque solaire, peinture murale - VALLÉE DES ROIS, tombe de
e
Ramsès VI, XX dynastie.
21. Vache céleste, relief peint - VALLÉE DES ROIS, tombe de Seti Ier,
XIXe dynastie.
22. Nou, bas-relief, calcaire - ABYDOS, temple de Seti Ier, XIXe
dynastie.
23. Chou séparant Geb de Nout
24. Sarcophage, granit rouge- VALLÉE DES ROIS, tombe
d’Horemheb, XVIIIe dynastie.
25. Scène funéraire, peinture - MUSÉE DU CAIRE, sarcophage de
Khonsou, XVIIIe dynastie.
26. Vautour, bas-relief, calcaire - KARNAK, XIIe dynastie.
27. Nils agenouillés, bas-relief calcaire - ABYDOS, temple de Seti Ier,
XIXe dynastie.
28. Scène du « Grand pas », bas-relief, grès quartzeux - KARNAK,
temple d’Amon, XVIIIe dynastie.
29. Le défunt assis devant le sycomore, peinture murale - THEBES,
tombe d’Ouserhat, XVIIIe dynastie.
30. Ptah, peinture murale - VALLÉE DES REINES, tombe de Nefertari,
XIXe dynastie.
31. Le Roi et Sechat, bas-relief, grès quartzeux - KARNAK, temple
d’Amon, XVIIIe dynastie.
32. Maât, peinture - VALLÉE DES REINES, tombe de Nefertari, XIXe
dynastie.
33. Isis et Osiris, bas-relief, calcaire - ABYDOS, temple de Seti Ier,
XIXe dynastie.
34. Nout au sycomore, peinture murale - THEBES, tombe de Nakht,
e
XVIII dynastie.
35. Le Roi offrant les tissus au djed, bas-relief, calcaire - ABYDOS,
temple de Seti Ier, XIXe dynastie.
36. Le redressement du djed, bas-relief, calcaire - ABYDOS, temple de
Seti Ier, XIXe dynastie.
TABLE DES MATIÈRES
PRÉFACE
Résumé d’Her-Bak « Pois Chiche »
PREMIÈRE PARTIE
I. — La Question
II. — La Réponse
III. — Les trois cercles
IV. — Les medou-Neter
V. — Le voyage
VI. — L’Illusion
VII. — Le Colosse
VIII. — Le Ciel
IX. — Libre arbitre et Fatalité
X. — Hiérarchie des Neter
XI. — Astrologie
DEUXIEME PARTIE
BA et KA
TROISIEME PARTIE
QUATRIEME PARTIE
PLANCHES I A VII
COMMENTAIRES.
I. – L’écriture hiéroglyphique
II. – L’enseignement intérieur ou ésotérique
III. — Les animaux dans le mythe égyptien. 3
IV. — Quelques précisions nécessaires à la compréhension
de l’enseignement égyptien
V. — Théologie – Neter
VI. — Astrologie – Astronomie
VIL. — L’Homme Microcosme
VIII. — L’enseignement des tombes égyptiennes
TABLE DES FIGURES
9772 – 1980. – IMPRIMERIE TARDY QUERCY S.A. – BOURGES ;
N°d’édition 10678 – 3e trimestre 1980. PRINTED IN FRANCE.
Notes
[←1]
Voir le Résumé de Her-Bak « Pois Chiche ».
[←2]
Her-Bak « Pois Chiche » (Édition Flammarion, Paris, 1955).
[←3]
Sirius
[←4]
Ici, matrice exprime l’idée générale du milieu qui reçoit la semence.
[←5]
Un même mot, khetn, exprime « ignorer » et « ténèbres ».
[←6]
Erreurs causées par les transpositions des procédés de chaque voie :
• en Mystique : déformation d’élans mystiques en spéculations rationnelles ;
• en Symbolique : déformation des lois vitales et des analogies réelles, en fantasmagories
ou en paradoxes fabuleux ;
• en Géométrie : déformation du sens métaphysique des Nombres et des formes, en
imaginations utopiques.
[←7]
Voir signe 16, Pl. I.
[←8]
Le mot her, face, est l’homonyme de her, Horus, qui est le Verbe animateur.
[←9]
Chou, frère jumeau de Tefnedj, et fils d’Atoum. Voir N° 3, Pl. V.
[←10]
Voir signe 17, Pl. I.
[←11]
Voir signe 18, Pl. I.
[←12]
Voir signe 19, Pl. I.
[←13]
Voir signe 20, Pl. I.
[←14]
Voir le Commentaire IV, § 3.
[←15]
Voir signe 21, Pl. I.
[←16]
Voir signe 22, Pl. I.
[←17]
Temple couvert, c’est-à-dire le Temple « intérieur :
[←18]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XLIV.
[←19]
Voir signe 23, Pl. 1.
[←20]
Voir signe 24, Pl. I.
[←21]
. Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XL.
[←22]
menkh : parfaitement ajusté.
[←23]
. Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XVIII et XIX.
[←24]
Voir Her-Bak « Pois Chiche »
[←25]
Voir R.A. Schwaller de Lubicz, Le Temple dans l’Homme.
[←26]
Tel fut Amenhotep fils de Hapou.
[←27]
Voir le Commentaire II, § 1.
[←28]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice III, § 3.
[←29]
Voir Her-Bak « Pois Chiche ».
[←30]
« Serviteur-ici-présent » : locution respectueuse employée devant un supérieur pour
remplacer le pronom je ou moi.
[←31]
Apet-Touéris. Voir n° 4, Pl. V.
[←32]
âcha – nombreux.
[←33]
châ = sable.
[←34]
Voir les caractères de la lettre n, chap. IV.
[←35]
Voir le Commentaire VII, § 3.
Traduction classique de ces mots : menkh = assemblé par tenons et mortaises, d’où :
durable, solide, sûr, àqer = excellent, an = être beau.
[←36]
Son « arcane ».
[←37]
. Voir chap. XVIII, et le Commentaire VII, § 10.
[←38]
Voir le Commentaire I, § 2.
[←39]
Sechat-Sefekht : Neter de l’écriture et de tout ce qui s’inscrit et se « signe » dans la Nature.
On lui donne une forme féminine, portant sur la tête une étoile sous une paire de cornes
renversées.
[←40]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice IV, § 7.
[←41]
Signe « déterminatif ».
[←42]
Signe « déterminatif ».
[←43]
Voir signe 28, Pl. I.
[←44]
Voir le Commentaire II, § 1.
[←45]
Tels sont les rouleaux portés par les statues et les images des cathédrales, ou entourant
certains textes.
[←46]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice I, § 3.
[←47]
Lettre r, Pl. IV.
[←48]
Lettre n, Pl. IV.
[←49]
Voir signe 19, Pl. I.
[←50]
Voir signe 17, Pl. I.
[←51]
Voir signe 29, Pl. I.
[←52]
Voir signe 30, Pl. I.
[←53]
Voir signe 19, Pl. I.
[←54]
Voir signe 15, Pl. I.
[←55]
C’est le symbole schématique du jeu de la lentille proportionnellement au croissant.
[←56]
Voir signe 19, Pl. I.
[←57]
Voir signe 32, Pl. I et fig. 26.
[←58]
Voir signe 33, Pl. I.
[←59]
Lettre n, Pl. IV et fig. 7.
[←60]
Voir fig. 22.
[←61]
Voir signe 34, Pl. I.
[←62]
Lettre dj, Pl. IV.
[←63]
Voir le Commentaire II, § 2.
[←64]
Voir signe 35, Pl. I.
[←65]
Voir signe 36, Pl. I.
[←66]
Voir signe 37, Pl. I. Ner, en hébreu = Lumière, en tant que première manifestation de
l’Énergie.
[←67]
Voir signe 33, Pl. I.
[←68]
Lettre ƒ, Pl. IV.
[←69]
Voir signe 38, Pl. I.
[←70]
Absurde, car le cœur n’est pas « suspendu » à la trachée.
[←71]
Voir signe 39, Pl. I.
[←72]
Voir signe 40, Pl. I.
[←73]
Lettre th, Pl. IV.
[←74]
Lettre t, Pl. IV.
[←75]
Voir le Commentaire V, § 6.
[←76]
Voir tekh, chap. XVI.
[←77]
Voir le Commentaire VII, § 4.
[←78]
Fin décembre, janvier, février.
[←79]
La vie solitaire du lièvre et son extrême excitabilité sexuelle en font un intrus redouté des
tribus lapines. Aussi arrive-t-il que les lapins mâles attaquent le lièvre en quête de femelles, le
terrassent et l’émasculent avec leurs dents. Or il est dit aussi que le sexe d’Osiris fut dévoré
par un poisson.
[←80]
Voir signe 41, Pl. I et fig. 7
[←81]
Voir signe 42, Pl. I.
[←82]
Voir le Commentaire VI, § 5.
[←83]
Voir le Commentaire I, § 5.
[←84]
Voir le Commentaire III, § 1.
[←85]
Même si, étant remplacées par un « syllabique », elles ne sont pas inscrites, car leur valeur
reste sous-entendue et doit s’ajouter au symbole du syllabique.
[←86]
Cataractes.
[←87]
Sur les nombreuses stèles des îles du Nil.
[←88]
Sounou : Assouan.
[←89]
Wadi Hammâmât, dans la montagne de pierre bekhen.
[←90]
Symbole royal du Sud. Voir signe 43, Pl. I.
[←91]
Cavernes.
[←92]
Les escorteurs.
[←93]
Le crocodile de Seth.
[←94]
Une des formes d’Horus.
[←95]
Pyramide = mer.
[←96]
Voir per-da, chap. VII.
[←97]
Voir le Commentaire VII, § 15.
[←98]
Voir le Commentaire IV, § 6.
[←99]
Voir le Commentaire VII, § 7 et § 9
[←100]
Voir le Commentaire VII, § 6.
[←101]
Voir le Commentaire IV, § 6.
[←102]
A priori.
[←103]
« Aux deux équinoxes de l’année, ce singe urine douze fois par jour, à savoir à chaque
heure, et il fait la même chose pendant ces deux nuits » (Horapollon, I, 16).
[←104]
Le fait d’exprimer un désir ou un souhait suscite, par réaction dans le « subconscient », un
doute qui compromet la réalisation du souhait, et cela d’autant plus que ce doute est plus
inconscient.
[←105]
Voir signe 31, Pl. I.
[←106]
Voir signe 34, Pl. I et nedj, chap. IV, p. 66.
[←107]
Voir le Commentaire VII, § 16.
[←108]
Voir chap. Ier.
[←109]
Voir le Commentaire IV, § 2.
[←110]
Voir signe 44, Pl. I.
[←111]
Voir signe 45, Pl. I.
[←112]
Voir signe 46, Pl. I.
[←113]
Voir signe 47, Pl. I.
[←114]
Lettre s (z), Pl. IV.
[←115]
Voir signe 48, Pl. I
[←116]
Lettre s, Pl. IV.
[←117]
Lettre s, Pl. IV.
[←118]
Voir signe 49, Pl. II.
[←119]
Voir signe 50, Pl. II.
[←120]
Voir signe 43, Pl. I.
[←121]
Voir signe 51, Pl. II
[←122]
Voir signe 52, Pl. II
[←123]
Voir le chap. XV.
[←124]
Voir signe 32, Pl. I.
[←125]
Amenhotep fils de Hapou avait construit aussi, entre autres monuments, le temple de
Louxor qui est le Temple de l’Homme.
[←126]
. Voir signe 124, Pl. III.
[←127]
Voir signe 53, Pl. II.
[←128]
Voir signe 54, Pl. II.
[←129]
Voir signe 55, Pl. II.
[←130]
Voir lettre r, Pl. IV.
[←131]
Voir signe 56, Pl. II.
[←132]
Voir signes 57 et 58, Pl. II.
[←133]
Voir signe 59, Pl. II.
[←134]
Cf. la tombe thébaine de Kha m hat.
[←135]
Voir signe 56, Pl. II.
[←136]
On peut en trouver des exemples figurés dans certaines tombes royales.
[←137]
àb = cœur et danseur.
[←138]
Voir signe 67, Pl. II.
[←139]
Voir signe 68, Pl. II.
[←140]
Voir signe 69, Pl. II et fig. 15.
[←141]
Voir signe 70, Pl. II et fig. 15.
[←142]
Voir signe 71, Pl. II.
[←143]
Astrologiquement le Soleil est sous la domination du signe zodiacal du Lion.
[←144]
Voir signe 73, Pl. II.
[←145]
Voir signe 74, Pl. II.
[←146]
Voir signe 20, Pl. I.
[←147]
Voir signe 17, Pl. I.
[←148]
Voir signe 75, Pl. II.
[←149]
Voir signes 76-77, Pl. II.
[←150]
Voir signe 120, Pl. III.
[←151]
Voir signe 61, Pl. II.
[←152]
Lettre n, Pl. IV.
[←153]
Lettre s, Pl. IV.
[←154]
Voir signe 62, Pl. II.
[←155]
Voir signe 16, Pl. I.
[←156]
Voir signe 12, Pl. I. Ce signe est le même pour signifier « ciel », pt, et « au-dessus », her.
[←157]
Voir signe 63, Pl. II.
[←158]
Voir signe 65, Pl. II.
[←159]
Voir signe 64, Pl. II.
[←160]
aàs = ais. Voir signe 79, Pl. II.
[←161]
sàa = sia. Voir signe 80, Pl. II.
[←162]
Monstre représenté dans la scène du Jugement (pesée). Voir chap. X et XVI.
[←163]
Lettre à, Pl. IV. Voir le Commentaire I, § 3.
[←164]
Lettre a, Pl. IV.
[←165]
Voir le Commentaire VII, § 6.
[←166]
Voir signe 66, Pl. II.
[←167]
Voir signe 64, Pl. II.
[←168]
Voir signe 81, Pl. II.
[←169]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXIV.
[←170]
Voir signe 13, Pl. I.
[←171]
Voir signe 82, Pl. II.
[←172]
Voir signe 64, Pl. II.
[←173]
Lettre p, Pl. IV.
[←174]
Lettre t, Pl. IV.
[←175]
Voir signe 82, Pl. II.
[←176]
Voir signe 81, Pl. II.
[←177]
Voir le Commentaire IV, § 3.
[←178]
Voir signe 83, Pl. II. Cf. Her-Bak « Pois Chiche », fig. 50.
[←179]
Voir le Commentaire IV, § 1.
[←180]
Voir chap. XVII et XVIII. Cf. Her-Bak « Pois Chiche », Appendice V, § 4.
[←181]
Voir signe 84, Pl. II.
[←182]
Coulissant entre droite et gauche, entre Occident et Orient.
[←183]
Constellations.
[←184]
Bande zodiacale.
[←185]
Voir le Commentaire VI, § 2.
[←186]
Les planètes.
[←187]
Terme astrologique qualifiant la planète lorsqu’elle se trouve à moins de 8° 30’ du Soleil.
[←188]
Le benou correspond au Phénix, l’oiseau fabuleux qui renaît de ses cendres. Cf.
Commentaire III, § 4.
[←189]
ouâ = un.
[←190]
hou = nourriture.
[←191]
Voir le Commentaire VI, § 1.
[←192]
Horus de l’horizon.
[←193]
L’Occident et la Terre des morts.
[←194]
Oup signifie « ouvrir ».
[←195]
Pour la division du mois et le nombre des bakou, voir le Commentaire VI, § 2.
[←196]
. Voir le Commentaire VI, § 1.
[←197]
Iah est le nom de la Lune.
[←198]
Matière.
[←199]
Continu par l’Esprit.
[←200]
Sepdi : provisions, approvisionnement.
[←201]
Les objectiver.
[←202]
Voir signe 85, Pl. II.
[←203]
Saturne
[←204]
Voir signe 85, Pl. II
[←205]
Voir le Commentaire VI, § 3.
[←206]
Voir signe 71, Pl. II. Partie antérieure du corps du lion, hat, devant, avant.
[←207]
Voir signe 72, Pl. II. Partie postérieure du corps du lion, peh, derrière, etc.
[←208]
Clepsydres.
[←209]
Un texte mentionne l’existence d’horloges mécaniques donnant même les phases de la
Lune.
[←210]
Voir le Commentaire VI, § I.
[←211]
Bande zodiacale.
[←212]
Le KA spirituel, ou KA divin, est le KA supérieur, désigné dans le
christianisme par le terme trop global « âme » qui est employé dans ce
chapitre pour simplifier l’exposé. Pour la justification de ces mots :
âme, BA, KA, voir les sept chapitres : « Les sept jours de BA et KA. »
[←213]
Voir le Commentaire VI, § 6.
[←214]
Périodes géologiques.
[←215]
Voir le Commentaire VII, 9.
[←216]
Corporification.
[←217]
Conscience : cf. R.A. SCHWALLER DE LUBICZ, Le Temple de l’Homme. Derain, dépositaire,
Lyon.
[←218]
Voir p. 158 « dans son heure ».
[←219]
Distinguons encore ici « savoir » et « connaissance ». On peut passer de l’ignorance au
savoir ; mais pour atteindre la « connaissance », il faut l’intervention d’un sens supérieur, dont
les possibilités dépassent les facultés sensorielles et cérébrales.
[←220]
« Science sacerdotale », c’est-à-dire sacrée, dans le sens de non profane, parce qu’elle
nécessite chez l’étudiant un sens métaphysique exercé, le discernement du « réel » et la
conscience de ses responsabilités.
[←221]
Voir le Commentaire VII, § 6.
[←222]
L’homme raisonnable : doué des facultés de raison discursive, et d’Intellect (au sens
thomiste), c’est-à-dire la faculté supérieure de connaissance, tant discursive qu’intuitive.
[←223]
Voir le Commentaire VII, § 9.
[←224]
Psychique-émotive.
[←225]
Voir le Commentaire VI, § 6.
[←226]
. Voir le Commentaire VI, § 5.
[←227]
Voir le Commentaire V, § 1.
[←228]
Voir le Commentaire V, § 4.
[←229]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXVI et XXX.
[←230]
Voir signe 86, Pl. II.
[←231]
Voir signe 87, Pl. II.
[←232]
Voir signe 89, Pl. II.
[←233]
Voir signe 90, Pl. II.
[←234]
Raison discursive (rationnelle).
[←235]
Voir fig. 17.
[←236]
Voir le Commentaire V, § 4, § 5, § 6.
[←237]
Les deux reh.
[←238]
Voir signe 91, Pl. II.
[←239]
. Le mythe d’Osiris ne le montre pas recommençant à vivre corporellement sur terre. Il
passe dans la Douât où il devient souverain et principe de pérennité pour les êtres qui s’y
trouvent.
[←240]
Anubis est fils de Nephtys et d’Osiris.
[←241]
Causé par la précession des équinoxes.
[←242]
Voir signe 130, Pl. III.
[←243]
A ne pas confondre avec la grande année, et avec des cycles encore plus vastes.
[←244]
160 ans.
[←245]
Min, dont le symbole est celui de la foudre.
[←246]
Voir les hommes de la famille de Chéops, dans la nécropole de Gizeh.
[←247]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXXVII.
[←248]
L’homme adamique, androgyne, qui n’est pas encore rejeté dans la Nature.
[←249]
Hermès-Mercure.
[←250]
Chemsou : suivants, ou compagnons, ceux qui évoluent avec Horus, ou plutôt en lui. Voir
le Commentaire V, § 8. Historiquement, l’histoire ou phase des Chemsou d’Horus est située
comme la dernière période préhistorique.
[←251]
Disposés, selon leur situation et la nature de leur terre, comme les organes du corps de
l’Égypte. Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice I, § 3.
[←252]
Maât, cf. chap. xvi et Her-Bak « Pois Chiche », Appendice V, §5.
[←253]
Voir signe 92, Pl. II.
[←254]
Voir signe 93, Pl. II.
[←255]
Voir signe 94, Pl. II.
[←256]
Voir les nombreuses représentations de la fleur qui sort d’un germe placé dans l’eau de ce
bassin.
[←257]
Voir signe 21, Pl. I.
[←258]
« Dévoreuse » : âmmit, âmmout (avaleuse des morts). Voir chap. VII et XVI.
[←259]
Voir chap. XVI.
[←260]
Voir le Commentaire VI3 § 5.
[←261]
Les planètes.
[←262]
Les circumpolaires.
[←263]
Cf. les trente années de vie cachée de Jésus-Christ jusqu’au jour où il doit manifester sa
mission et se révéler comme « fils du Père ».
[←264]
« Descente aux enfers. »
[←265]
C’est-à-dire de la royauté « historique » qui recommençait un nouveau « Temps » ou
« âge » avec Mena.
[←266]
Participation au titre « Osiriaque », aux rites et aux privilèges funéraires.
[←267]
. Voir le Commentaire VII, § 14.
[←268]
Voir signe 137, Pl. III et fig. 35 et 36.
[←269]
Voir signe 139, Pl. III
[←270]
. Voir le Commentaire VI, § 1.
[←271]
Iounou est Héliopolis.
[←272]
Le delta du Nil.
[←273]
Voir les Commentaires IV, § 4, et V, Cf. Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXXIV et
Appendice I, § 3.
[←274]
Hermopolis du Sud.
[←275]
Voir oun, p. 62.
[←276]
Voir signe 142, Pl. III.
[←277]
Voir signe 95, Pl. II et fig. 26.
[←278]
Cercueil de Petamon, prophète d’Amon. Cf. MASPERO, Notes, in Recueil 23, 1901, p. 196.
[←279]
Trésor de Tout-Ankh-Amon.
[←280]
Ouast = Thèbes. Voir signe 96, Pl. II.
[←281]
Voir les Commentaires IV, § 2 et VI, § 5.
[←282]
Voir le Commentaire VI, § 2.
[←283]
Janvier, février, mars, avril.
[←284]
Mai, juin, juillet, août.
[←285]
Voir le Commentaire IV, § 4.
[←286]
Voir le Commentaire VI, § 1.
[←287]
Voir le Commentaire II, § 2.
[←288]
Voir le Commentaire VII, § 10.
[←289]
Voir le Commentaire IV, § 4.
[←290]
Voir le Commentaire IV, § 2.
[←291]
Voir signe 97, Pl. III.
[←292]
Voir signe 98, Pl. III.
[←293]
Solstice d’hiver.
[←294]
21 mars.
[←295]
21 juin, 21 décembre.
[←296]
Voir signe 99, Pl. III.
[←297]
Voir signe 100, Pl. III.
[←298]
L’enseignement des deux aspects de l’âme et de la Conscience Humaine a été traité par
ISHA SCHWALLER DE LUEICZ dans La Lumière du chemin (Éd. La Colombe, 1960).
[←299]
Voir signes 52, Pl. II et 101, Pl. III.
[←300]
Voir signe 102, Pl. III.
[←301]
L’horizon est représenté par les deux montagnes entre lesquelles on situe le soleil.
[←302]
Khonsou, produit par Amon et Moût, révèle la « face » d’Amon comme la plante révèle ce
qui était contenu en la semence.
[←303]
Il est écrit que le corps djet devient indestructible quand il est réuni à son KA dans la
« Maison de Râ ». Alors peut se réaliser l’être parfait par la réunion définitive de son BA.
[←304]
Voir le Commentaire IV, § I.
[←305]
Voir signe 103, Pl. III.
[←306]
Voir le Commentaire IV, § 3.
[←307]
Voir signe 104, Pl. III. Remarquer que toutes ces formes de akh, qui sont représentées par
des images différentes, ont la même orthographe : akh, voir signe 105, Pl. III, à laquelle
s’ajoute parfois le t.
[←308]
Voir les différents états de « Sainteté » du catholicisme : Vénérable, Bienheureux, Saint.
[←309]
Voir le Commentaire VII, § 12.
[←310]
Voir le Commentaire IV, § 1.
[←311]
Voir KA, signe 117, Pl. III.
[←312]
Voir image du taureau, Chap IX.
[←313]
C’est pourquoi le taureau est dit « incarnation de l’âme de Ptah créateur » ; et le temple de
Ptah à Memphis est nommé Hat-ka-Ptah (jeu de mots).
[←314]
Voir signe 108, Pl. III.
[←315]
Pronom personnel égyptien de la première personne : je, moi = nek ou inek
[←316]
ki = l’autre.
[←317]
Lettre à, i ; traduite par à, ou i.
[←318]
En opposition à la définition de sou, on traduit l’impersonnalité concrétisée de iou par tou
qui est le pronom indéfini « on ».
[←319]
Voir signe 107, Pl. III.
[←320]
Voir signe 3, Pl. I et Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXXIII.
[←321]
Voir signe 109, Pl. III.
[←322]
Cf. SPEELERS, Textes cercueils : Discours 162 (400-401).
[←323]
Notez bien : ciel et terre, donc dualité, tandis que iaaou est encore Unité.
[←324]
L’archange rebelle de la tradition judéo-chrétienne.
[←325]
Voir le Commentaire IV, § 4.
[←326]
rekh = apprendre à connaître.
[←327]
Voir signe 111, Pl. III.
[←328]
Voir signe 110, Pl. III.
[←329]
Voir le Commentaire IV, § 4.
[←330]
Voir les lettres n, h, s, m, Pl. IV.
[←331]
Voir le Commentaire IV, § 1.
[←332]
Voir lettre s, Pl. IV.
[←333]
Voir lettre J (z), Pl. IV.
[←334]
Voir signes 112 et 113, Pl. III.
[←335]
Voir lettre h, Pl. IV.
[←336]
Voir lettre m. Pl. IV.
[←337]
Voir signe 115, Pl. III et hem, chap. XV.
[←338]
mes = naître, né. Voir signe 114, Pl. III.
[←339]
an, voir signe 116, Pl. III.
[←340]
Voir signe 112, Pl. III.
[←341]
senou = deux, double, jumeaux. Voir signe 62, Pl. II.
[←342]
Voir le Commentaire IV, § 3.
[←343]
Voir chap. XII.
[←344]
Voir le Commentaire V, § 5.
[←345]
Résistance, mais non opposition.
[←346]
Le serpent dj. Voir lettre dj, Pl. IV.
[←347]
Voir chap. IX.
[←348]
Comme le prisme qui, en réfractant, fait paraître la couleur.
[←349]
Voir le Commentaire V, § 5.
[←350]
sah = voisins, proches.
[←351]
Voir le Commentaire VII, § 15.
[←352]
Voit Chap. XVIII.
[←353]
Voir le Commentaire VII, § 9.
[←354]
Voir signe 117, Pl. III.
[←355]
Voir signe 118, Pl. III.
[←356]
« Vases », voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XX.
[←357]
Plexus solaire.
[←358]
Voir signe 119, Pl. III
[←359]
Nom de Khnourn, voir signe 120, Pl. III et Khnoum, N° 12, Pl. V.
[←360]
Khnem est le principe de « conjonction ».
[←361]
Chambre de la naissance, au temple de Louxor.
[←362]
sia
[←363]
Voir le Commentaire VII, § 15.
[←364]
Voir le Commentaire VII, § 9 et § 10.
[←365]
Voir les Commentaires VII, § 16 et VIII.
[←366]
Voir le Commentaire VII, § 11.
[←367]
Voir signe 44, Pl. I.
[←368]
Voir signe 121, Pl. III.
[←369]
Les scènes funéraires des tombeaux royaux (Séti, etc.) montrent partout cette corde.
[←370]
Remarquer le rapport de nouh et de houn, jeune enfant.
[←371]
Voir les Commentaires VII, § 10 et VIII.
[←372]
Affinité.
[←373]
Voir le Commentaire V, § 9.
[←374]
Voir signe 122, Pl. III.
[←375]
Voir signe 123, Pl. III.
[←376]
Voir signe 124, Pl. III.
[←377]
khem = sanctuaire, feu intense, annulation, ignorance. Voir signe 125, Pl. III.
[←378]
… Et la lumière était dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point connue (Jean, I, 5).
[←379]
Voir signe 126, Pl. III.
[←380]
Voir le Commentaire V, § 9.
[←381]
Voir signes 57 et 58, Pl. II.
[←382]
sefekht = sept. Voir signe 123, Pl. III et le Commentaire V, § 9.
[←383]
kaou, pluriel de KA.
[←384]
Voir le Commentaire VII, § 13.
[←385]
Voir signe 115, Pl. III et p. 232.
[←386]
. Voir signe 127, Pl. III.
[←387]
BA et KA supérieurs. Voir le Commentaire VII, § 11 et § 12.
[←388]
Voir le Commentaire VII, § II.
[←389]
Vases dits « canopes ».
[←390]
Dévoreuse des morts : âm-mout.
[←391]
Voir p. 249. Cf. La Lumière du chemin (Isha Schwaller de Lubicz, Éd. La Colombe).
[←392]
Cette scène, appelée aussi psychostasie, est une de celles que les Égyptiens ont volontiers
reproduites et dont on a trouvé de nombreux exemples, spécialement dans le « Livre des
Morts ». La composition varie, selon le programme et l’état spirituel attribués au défunt.
[←393]
Voir signe 128, Pl. III.
[←394]
Voir chap. X.
[←395]
Les textes funéraires expriment souvent la crainte de ce danger.
[←396]
Ce socle représente probablement une coudée.
[←397]
Voir chap. XVIII.
[←398]
Voir signe 10, Pl. I.
[←399]
Voir le Commentaire VII, § 10.
[←400]
C’est-à-dire qu’elle abandonne l’individualisation, et se confond de nouveau avec son
origine.
[←401]
Voir signes 57 et 58, Pl. II.
[←402]
Voir signe 132) Pl. III. Ce mot, écrit avec ce hiéroglyphe, signifie : ce qui est à l’intérieur,
la partie cachée d’une demeure, etc.
[←403]
Voir signe 131, Pl. III.
[←404]
. Voir signe 133, Pl. III.
[←405]
Voir signe 134, Pl. III.
[←406]
Voir signe 135, Pl. III.
[←407]
Voir signe 136, Pl. III. tout signifie : image, statue, réunir, assembler.
[←408]
Zodiaque.
[←409]
Affinité sélective.
[←410]
« Champ des roseaux » ou « des souchets », et « Champ des offrandes », sont les
traductions de l’égyptologie classique.
[←411]
Voir chap. XVI.
[←412]
État ou corps émotif (appelé parfois improprement « astral »).
[←413]
cha, chaou = destin, ce qui est fixé.
[←414]
Champ des souchets (des roseaux).
[←415]
Prise ici dans le sens â’akasha. Voir le Commentaire VII, § II.
[←416]
C’est un des aspects de ce qu’on appelle, dans la religion chrétienne, le purgatoire.
[←417]
. Voir le Commentaire VII, § 15.
[←418]
Comme l’une de ces Puissances. Voir Genèse 3, 22.
[←419]
La réincarnation.
[←420]
Voir le Commentaire VII, § 16.
[←421]
Renenoutet est un agent « déterminant » des renouvellements, tandis cfu’Osiris en est le
principe actif général.
[←422]
Allégorie d’Orion qui, au renouveau du Printemps, va vers un lever héliaque avec Sothis,
et sera ainsi (pour la Terre) « confondu » dans la lumière solaire.
[←423]
Voir le Commentaire VI, § I.
[←424]
djed = parole, et aussi la colonne d’Osiris. Voir signe 137, Pl. III et fig. 35 et 36.
[←425]
Le double pilier d’Osiris est souvent représenté dans les tableaux des textes funéraires.
[←426]
Voir chap. XVI.
[←427]
Voir le Commentaire VII, § 12 et p. 176.
[←428]
Comme Adam-Ève eurent une « robe de peau » après la « chute » (Genèse, 3, 21.)
[←429]
Comme les enfants de Geb et Nout.
[←430]
L’allantoïde.
[←431]
Le chorion.
[←432]
Voir le Commentaire VII, § 10.
[←433]
Cette fonction de la rate et celle du foie n’ont été citées ici que pour leur rapport immédiat
avec le sujet de ce chapitre ; en fait, le rôle de ces deux organes est beaucoup plus complexe,
et donne un bel exemple du croisement des fonctions, par l’action de la rate sur les globules
rouges, et du foie sur les globules blancs.
[←434]
tekh : voir p. suiv. et chap. XVI.
[←435]
Voir au début du chapitre : le double feu nefer de la colonne vertébrale.
[←436]
Magnétisme vital, etc.
[←437]
Voir le Commentaire VII, § 10. Cf. ISHA SCHWAIXER DE LUBICZ, La Lumière du chemin (Éd.
La Colombe).
[←438]
Cf. p. 304.
[←439]
Puissances représentées dans les tableaux astronomiques.
[←440]
Voir signe 140, Pl. III.
[←441]
Vénus ; cette épithète est aussi attribuée à Horus, en certains cas.
[←442]
mi Râ djet (comme le corps indestructible de Râ).
[←443]
Réalisation christique. Voir le Commentaire VII, § 11.
[←444]
Cf. les chrétiens par rapport au Christ : ils doivent réaliser Christ en eux.
[←445]
La renaissance spirituelle est à comprendre comme un « éveil » à un état spirituel
supérieur.
[←446]
Voir signe 114, Pl. III.
[←447]
Noël : khoïak. La date de Noël correspond à l’époque des fêtes osiriennes d’Abydos.
[←448]
« Siècle des siècles » des chrétiens.
[←449]
Paout = les Temps primordiaux, l’origine des Temps, paouty et paât – type primordial.
[←450]
Voir le Commentaire VII, § 14.
[←451]
Voir le Commentaire VII, § 13.
[←452]
Le jour de la mort.
[←453]
Voir signe 53, Pl. II.
[←454]
Voir signe 141, Pl. III.
[←455]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », chap. XXIII.
[←456]
Cf. ISHA SCHWAIXER DE LUBICZ, La Lumière du chemin, chap. VI. (Éd. La Colombe.)
[←457]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », dernier chap. : « Pharaon. »
[←458]
. Voir le Commentaire VI, § 5.
[←459]
ta-meri _= « terre aimée » ou plutôt « terre aimant ». C’est un des noms de l’Égypte.
[←460]
Voir le Commentaire VII, § 13.
[←461]
Voir lettre a, Pl. IV.
[←462]
Voir lettre à, Pl. IV.
[←463]
Cf. R.A. SCHWALLER DE LUBICZ, Le Temple dans l’Homme.
[←464]
Mesure, cf. Commentaire IV, § 2.
[←465]
Sens « intérieur », cf. ci-dessus, § 1.
[←466]
Tombes de Beni-Hassan.
[←467]
Voir lettre ƒ, Pl. IV.
[←468]
Voir fig. 18
[←469]
Voir l’image de l’abeille, Chap. VI dernière page.
[←470]
GAILLARD et DARESSY, Faune momifiée de l’Ancienne Égypte, II
[←471]
Voir l’image d’Apet, photo en hors-texte.
[←472]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice V, § 5
[←473]
Les deux aker, V. fig. 17.
[←474]
PLUTARQUE, Isis et Osiris, p. 329. Même idée chez Horapollon.
[←475]
Jusqu’à l’anus.
[←476]
Dans certaines tombes, l’uraeus est placée sur une colonne djed.
[←477]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice I, § 5 et fig. 26.
[←478]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice I, § 5, Kom Ombo.
[←479]
CREUZER, Religions de l’Antiquité, notes sur le Livre III.
[←480]
Voir chap. VI, p. 83.
[←481]
HORAPOLLON, I, 16.
[←482]
Pour les divers aspects du KA, voir les chap. XII à XVIII.
[←483]
Voir chap. XV, p. 270.
[←484]
. PLUTARQUE, Isis et Osiris ; HÉRODOTE, L. II ; KREUTZER, 498.
[←485]
Tout le texte qui suit est la transcription de la réponse qui fut donnée par R.A. Schwaller de
Lubicz en 1949.
[←486]
On peut se semander si la valeur a/a=1 est une mesure, c’est-à-dire si l’on peut considérer
le rapport de nombres égaux comme une mesure. Je pense que le rapport d’un nombre avec
lui-même est une définition de la Quantité et non une mesure, puisque l’Unité par elle-même
n’est pas une mesure, à moins qu’elle ne soit mise en rapport avec le nombre Deux. C’est le
rapport i : a/a qui serait mesure et non a/a = i.
[←487]
La brasse est la distance entre l’extrémité des deux mains quand les bras sont tendus
horizontalement en prolongement de la clavicule. La brasse, encore utilisée de nos jours dans
la marine, est la millième partie d’un mille marin. Un mille marin vaut une minute d’arc. Cet
arc est une partie du cercle de méridien entourant la terre en passant par les Pôles. Or
l’aplatissement du Pôle Nord de la terre donne à ce méridien une modification de sa courbure,
et par suite, de son rayon traceur. Ainsi la minute d’arc (donc le mille marin, donc la brasse)
varie suivant ce rayon, depuis l’Equateur jusqu’au Pôle. De nos jours, on a
conventionnellement admis le cercle correspondant à l’arc de la courbe à 450 de latitude Nord.
[←488]
On pourrait aussi appeler le disque : première surface, délimitée par une ligne unique dont
chaque moment peut être considéré commencement ou fin ; la grandeur de la circonférence est
dite « irrationnelle ». Avec le triangle nous avons affaire à la première surface rationnelle, qui
présente une forme résultant d’une proportion.
[←489]
Pour la commodité du raisonnement nous adoptons le triangle rectangle, parce que le
triangle obtus, jusqu’à 18o°moins une quantité infiniment petite, ne représente que le
dédoublement du triangle rectangle.
[←490]
Thème développé par R.A. Schwaller de Lubicz dans Symbole et Symbolique.
[←491]
LEXA, La Magie dans l’Égypte Antique, Geuthner, Paris.
[←492]
Les 14 kaou de Râ, etc.
[←493]
Ce qui signifie pas autre chose que « officiellement ignorées »
[←494]
Voir dans ce Commentaire le § 1.
[←495]
On entend par Hindouisme (ou Védisme, ou Brahmanisme), la Connaissance traditionnelle
basée sur le Véda, avec les diverses sciences qui en dépendent. Le Bouddha – qui n’était pas
un Brahmin – a modifié plusieurs principes du Brahmanisme, tel que celui des castes, pour
offrir à tous les hommes le chemin de la Délivrance.
[←496]
Porteur d’un sistre.
[←497]
Horus qui unit les Deux-Terres.
[←498]
Pour l’interprétation égyptologique moderne de la théologie égyptienne, voir ce
Commentaire, § 3.
[←499]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice V, § 1.
[←500]
Voir le Commentaire IV, § 4.
[←501]
On pourrait dire l’enjeu… mais effectivement les Égyptiens ne dissocient pas l’effet de son
mouvement causal, et rappellent à toute occasion l’action de ce mouvement causal comme
étant la réalité dans les effets apparents.
[←502]
Voir le Commentaire VI, § 5.
[←503]
Il ne faut pas confondre Neter et totem. Voir, à ce sujet, Totem et Neter, dans ce
Commentaire, § 2.
[←504]
C’est ce que signifie la ligature qui enserre le hiéroglyphe Neter (voir N° 40) : la Fonction
cosmique principielle est « ligotée » par sa matérialisation ; ainsi le Neter est esclave de son
propre déterminisme.
[←505]
Voir le Commentaire VI, § 1.
[←506]
Cf. Index : Maât, et Her-Bak « Pois Chiche », Appendice V, § 5.
[←507]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice II, § 3.
[←508]
Voir Her-Bak « Pois Chiche », Appendice I, § 5 : Hiérakonpolis.
[←509]
Comme Adam, cherchant son « semblable », provoque sa dualisation.
[←510]
Soutekh, nom de Seth.
[←511]
Voir Sechat, fig. 31.
[←512]
Ce fait est caractérisé par la construction des grandes portes des enceintes, où se trouvent
résumés les principes de chaque temple.
[←513]
Si, dans la suite des temps, certaines versions particulières portèrent le nombre des
morceaux à 16 ou même davantage, le mythe originel de 14 resta toujours inchangé.
[←514]
40 jours de J. -C. au désert pour sa tentation. Trois périodes de 40 jours où les Hébreux
errent dans le désert.
[←515]
Locution égyptienne textuelle.
[←516]
L’image de la balance est couramment employée dans les figurations de la psychostasie,
qui est la scène du « jugement ». Voir Pl. VIII.
[←517]
Ce n’est pas une idée égyptienne que nous exprimons par cristal et cellule, mais une image
employée par nous pour expliquer deux formes de l’enseignement égyptien.
[←518]
Voir Apet, N° 4, Pl. V.
[←519]
Voir Sefekht (Sechat), N° 27, Pl. VI.
[←520]
La même déesse porte parfois le nom de Sefekht et parfois le nom de Seehat.
[←521]
Voir fig. 31.
[←522]
Voir signe 44, Pl. I.
[←523]
Cf. R.A. SCHWALLER DE LUBICZ, Le Temple dans l’Homme.
[←524]
Voir chap. IX.
[←525]
Voir chap. XIII.
[←526]
Voir signe 129, Pl. III.
[←527]
Voir R.A. SCHWALLER de LUBICZ, Le Temple dans l’Homme, p. 12-13.
[←528]
Voir chap. XV.
[←529]
Voir Commentaire, § 8.
[←530]
Voir Commentaire III, § 13.
[←531]
Voir signe 145, Pl. IV.
[←532]
. On exprime aussi par chitta, la « Substance mentale » universelle.
[←533]
Le nom du taureau est KA.
[←534]
Voir la fig. 29.
[←535]
Voir ce Commentaire, § 10.
[←536]
Voir ce Commentaire, § 10.
[←537]
Voir lettre dj, Pl. IV.
[←538]
. Voir R.A. SCHWALLER DE LUBICZ, Le Temple de l’Homme, p. 31.
[←539]
Voir Voir R.A. SCHWALLER DE LUBICZ, Le Temple de l’Homme.
[←540]
Voir signe 9, Pl. I.
[←541]
Voir Commentaire II, § I.
[←542]
Chemin des longues purifications par les épreuves réitérées de l’existence terrestre.
[←543]
Voir le chap. XVI.
[←544]
Voir le fig. 21.
[←545]
Voir ce Commentaire, § 15.
[←546]
Tombe n° 55.
[←547]
Tombe n° 192.
[←548]
Tombe n° 93.
[←549]
Tombe n° 81.
[←550]
Tombe n° 57.
[←551]
Tombe nº 96.
[←552]
Voir l’image de nefer, Chap. IV
[←553]
. Textes de VAm-Douat dans les tombes des Thoutmès et des Aménophis. Plafonds
astronomiques de Seti Ier et des Ramsès.
[←554]
Montou-m-hat, règne de Taharqa, tombe n° 34. Pediamenopet, époque Saîte, tombe n° 33.
[←555]
Voir le monstre âmm. t. chap. XVI