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Licence III
Dr Mickaël ETIRI
Bibliographie
ARISTOTE, Métaphysique, présentation et traduction par Marie Paule D. et
Annick Jaulin, Paris, Flammarion, 2008.
BACHELARD G., La Formation de l’esprit scientifique, Paris, Vrin, 1938.
ROUSSEAU Jean-Jacques, Discours sur les sciences et les arts, Paris, Librairie
Générale Française, 2013.
Wright, Brève histoire du progrès, Montréal, Bibliothèque québécoise, 2004.
Lewin, L’évolution humaine, Paris, Seuil, 1989.
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Sommaire
Bibliographie ..................................................................................................... 1
Sommaire ........................................................................................................... 2
Introduction........................................................................................................ 3
I. La définition de la science............................................................................... 3
Conclusion ....................................................................................................... 25
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Introduction
La plus grande invention de l’homme est bien la science. Car elle est le socle du
progrès de l’humanité. Le monde évolue au rythme de la science, et l’homme se
définit par et à travers l’influence de la science sur son existence. Tout le monde
voit dans la science la fierté du temps actuel et se définit comme scientifique.
Cependant, lorsque l’on demande ou l’on se demande ce qu’est réellement la
science, ses différentes figures, son histoire et son ancrage dans la société, l’on
reste étonnamment perplexe. C’est la philosophie des sciences qui s’est donné
la complexe mission de lever le voile autour de ces mystères. Ce cours se
propose, justement, de mettre de la lumière sur l’origine, le parcours et la valeur
de la science, et de dégager les mesures de la technologie dans le monde
d’aujourd’hui.
I. La définition de la science
Le concept science vient du latin « scientia », savoir, et peut se définir comme
toute connaissance rationnelle relative à un objet et vérifiée par des méthodes
quelquefois expérimentales. Dans le sens large, la science renvoie à une
connaissance systématisée, c’est-à-dire organisée en un ensemble cohérent,
suivant une méthode bien déterminée. Il s’agit de toute connaissance fondée sur
la raison, attachée à un fait ou à un phénomène et établie selon une méthode
déterminée. La science s’oppose ainsi au mythe et la religion dans l’explication
des faits ou des phénomènes.
- les sciences formelles (pures) : ce sont des sciences qui étudient les lois de la
pensée et s’appuient sur la déduction. Il s’agit des mathématiques, de la logique,
de l’analyse, etc.
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- les sciences naturelles : ce sont des sciences qui ont la nature pour objet
d’étude. Elles rassemblent plusieurs disciplines, notamment la biologie (la
botanique, la zoologie, la neuroscience, la génétique, etc.), les sciences de la
terre (la géographie, la minéralogie, etc.), la chimie, la physique, etc. Rudolf
Carnap (1891-1970) en a extrait quelques-unes pour créer la catégorie des
sciences expérimentales.
Par ailleurs, cet éclatement n’annule pas l’idée de la science en générale, à partir
de laquelle on détermine toutes les sciences particulières. La science comme
héritage de l’humanité renvoie, justement, au concept de science, c’est-à-dire à
la science comme type de connaissance. L’histoire des sciences n’est pas
l’histoire de chaque science particulière, mais celle de la science en général,
c’est-à-dire l’histoire de la connaissance scientifique.
1
G. Bachelard, La Formation de l’esprit scientifique, p. 10.
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des sciences décrit l’évolution de la connaissance humaine, tenant objectivement
compte de différentes séquences de cette connaissance, examinant avec un
regard épistémique les progrès, les tâtonnements, les difficultés, les bifurcations
et différentes avancées significatives réalisées par la science. L’histoire des
sciences est ainsi un examen de la courbe évolutive de la connaissance objective
de l’homme. Aussi montre-t-elle, chemin faisant avec son évolution, les mérites
et les faiblesses de la science.
L’histoire des sciences n’est pas l’histoire des techniques. Elles sont liées, mais
ne sauraient être identiques. Par exemple lorsque l’homme maitrise le feu, taille
des silex ou invente l’agriculture, il ne fait pas œuvre de science. Et les
connaissances qu’il a accumulées en l’occurrence ne sont pas des connaissances
scientifiques, mais des savoirs artisanaux traditionnels.
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L’histoire des sciences a fait les preuves de son utilité, en ceci qu’elle met en
lumière, dans un processus évolutif, les enjeux de la science, c’est-à-dire les
mérites et les faiblesses de la science. Celle-ci est un grand héritage culturel de
l’humanité qui a impacté la vie de l’homme dans toutes les générations.
Cet impact de la science a exhumé le génie de l’homme qui s’est déployé dans
tous les domaines de la vie humaine. Mais, chemin faisant avec le désir du
progrès et le besoin d’émancipation, l’homme a usé de la science, d’une manière
démesurée, jusqu’à en faire un cercle infernal. Ceci s’observe dans la mesure où
la science a fait de l’homme un véritable titan, un monstre gigantesque, une
machine vouée à la destruction de la nature. Conséquence directe de
l’affaissement, de la destruction de la nature, de l’environnement humain. Telle
est la résultante d’une crise éthique et environnementale consécutive au progrès
technoscientifique. C’est pourquoi, un décryptage historique de l’évolution des
sciences s’impose, en termes de nécessité afin de comprendre les forces et les
faiblesses de la science, et de dresser une approche palliative des dégâts, en vue
de mettre en perspective un management de la prévention et de la pérennisation
de l’environnement. C’est dire que nous partirons du parcours historique de la
science, en tant que grand héritage culturel de l’humanité, passant par ses forces
et faiblesses afin d’en dégager une approche prospective de conscientisation de
la science. Tel sera l’objet de notre cours.
1. La préhistoire de la science
La préhistoire de la science détermine la période d’avant la naissance de la
science. Elle rend compte des pratiques cognitives traditionnelles. Cette période
est essentiellement marquée par l’absence de l’écriture et la prééminence de la
technique ou plutôt des pratiques rudimentaires, traditionnelles.
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Historiquement, la technique précède la science. S’appuyant sur des procédés
empiriques, l’homme a mis sur pied, de façon très rapide, des instruments, des
outils traditionnels, et découvre le feu. C’était donc l’âge de la pierre taillée; le
paléolithique (qui commence il y a environ 2,5 millions d’années et s’achève
vers le XIe millénaire avant notre ère). À cette époque, nous ne saurions parler
d’aucune science en tant que telle, mais de l’usage monotone de la technique
manuelle.
Il est fort évident de remarquer que la science n’est pas née ex nihilo, son
histoire sinon sa naissance est redevable à sa préhistoire, qui en a posé les bases.
Les procédés mécaniques et traditionnels qui ont marqué l’histoire des hommes,
ont consécutivement marqué la préhistoire de la science. Le comptage ou
dénombrement du bétail (dans l’élevage), qui ne nécessitait certainement pas un
savoir rationnel, a jeté les bases du calcul, de l’arithmétique. Les mesures
dimensionnelles et le traçage mécanique des terrains, en Égypte par exemple,
ont entrevu en perspective l’invention de la géométrie.
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L’apparition et la lecture des astres au ciel (étoiles, lune,…) permettaient aux
hommes de déterminer les temps, de comprendre le mouvement de l’univers,
jetant ainsi les bases de l’astronomie et la météorologie. Toutes ces occurrences
montrent à suffisance que la connaissance humaine a connu une préhistoire,
avant de se constituer en science.
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matérialisme) ; et d’autre part, le formalisme, historiquement introduit par
l’école pythagoricienne et proposant une vision mathématique d’un cosmos
ordonné par les nombres.
Ces deux courants qui faisaient office de la science grecque, et ayant pour
objectif de définir et interpréter le monde, portent en eux un attachement très
fort à l’expérience. On parle alors de la science « contemplative » pour désigner
l’attitude antique des scientifiques grecs. L’astronomie en est l’exemple parfait.
Si l’astronomie grecque, à ses débuts, était fortement imprégnée de
présupposées philosophiques (géocentrisme, mouvements circulaires uniformes
des astres), elle a su s’en écarter progressivement, à mesure que des observations
plus fines venaient contredire ces présupposées.
Les penseurs grecs sont considérés comme les fondateurs des mathématiques car
ils ont inventé ce qui en fait l’essence même : la démonstration. Celle-ci a
permis à la connaissance grecque de se détacher de la philosophie spéculative
pour se constituer, progressivement, en science autonome. Cette occurrence a
valu aux grecs le titre de pères de la science. Et Thalès est considéré comme le
premier philosophe qui a eu l’idée de raisonner sur les êtres mathématiques,
jetant ainsi les bases de la géométrie. IL a donné le coup d’envoi de la
connaissance scientifique en cherchant et en donnant une explication rationnelle
à la structure de l’univers. Il met en être la géométrie pour expliquer le monde.
Et Jean pierre Vernant de dire : « cette géométrisation de l’univers physique
entraine une refonte générale des perspectives cosmologiques ; elle consacre
l’avènement d’une forme de pensée et d’un système d’explication sans analogie
dans le mythe3. » C’est la naissance de l’esprit scientifique.
3
J. J. Vernant, Les Origines de la pensée grecque, Paris, P.U.F, 1962, p. 120.
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circonférence de la terre), Archimède (base de la mécanique), Théophraste (base
de la botanique), etc. Mais toutes ces prouesses sont rangées sous la bannière de
la philosophie, comme la science primordiale.
La liste des savants grecs importants est fort longue. On citera dans l’ordre
chronologique : Thalès, Pythagore, Hippocrate, Aristote, Euclide, Archimède,
Aristarque, Ératosthène, Hipparque, etc.
Il faut aussi noter qu’en dehors de la Grèce antique, la science a connu une
naissance ou plutôt une histoire disséminée qui s’est observée dans plusieurs
lieux du monde notamment en Égypte, à Rome, en Chine, en Inde…
L’on note aussi l’utopie des sciences médiévales qui participe au déclin de la
science. La science tend à l’interprétation des phénomènes sur la vase des
théories élaborées sur fond d’exercice pure de la raison. Ces connaissances n’ont
guère d’impact direct sur le cours de la vie. Le désenchantement prend
systématiquement la place de l’engouement de l’âge d’or de la science. Il y a
aussi la relativité des connaissances scientifiques et la guéguerre des
scientifiques qui offensent la science.
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Au Moyen-âge, les sciences grecques sont conservées, notamment par la
traduction en arabe de nombreux livres présents dans la bibliothèque
d’Alexandrie. Ces sciences sont alors enrichies et diffusées par la civilisation
arabo-musulmane, avec les savants comme Al-Khwârizmî, Alhazen, Al-Biruni,
Avicenne et Averroès.
Dans les temps modernes on note plusieurs découvertes. Blaise Pascal fit des
découvertes en mathématiques (probabilités), et en mécanique des fluides
(expériences sur l’atmosphère terrestre). Christian Huygens développa une
théorie ondulatoire de la lumière, qui, pour avoir subi un siècle d’éclipse, n’en
est pas moins géniale.
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On note aussi l’héliocentrisme (théorie scientifique qui place le soleil au centre
du système de planètes entourant la terre) de Galilée qui se veut confirmé de
multiple manière, et fut finalement accepté par l’église catholique romaine
(Benoît XIV) en 1714 et 1741, de sorte que les écrits de Galilée furent retirés de
l’Index (liste des livres interdits par l’Église catholique).
Mais le scientifique le plus important de cette époque est Isaac Newton. Avec
Gottfried Wilhelm Leibniz, il invente le calcul différentiel et intégral. Avec son
optique, il établit dans cette science une contribution tout à fait significative, et,
surtout, il fonde la mécanique sur des bases des mathématiques, établit ainsi de
manière chiffrée le bien-fondé des considérations de Copernic et Galilée Son
livre Philosophiae naturalis principia mathematica a marqué l’évolution de la
conception que l’homme se fait du monde comme aucun ouvrage avant lui, et a
été considéré comme le model insurpassable de théorie scientifique jusqu’au
début du XXe siècle. Le prestige de Newton aura largement dépassé les
frontières de la science, influençant ainsi de nombreux philosophe comme
Voltaire, David Hume, etc.
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L’optique de Newton subit une révision radicale avec les travaux de Young et
ceux de Fresnel : on passe de la conception corpusculaire de Newton à une
révision de la conception ondulatoire de Huygens. L’électricité et le magnétisme
sont unifiés au sein de l’électromagnétisme par James Maxwell à la suite de
travaux de nombreux physiciens et mathématiciens tels Ampère, Faraday…
Le point marquant de cette évolution des sciences est bien entendu leur mise en
application. Les connaissances scientifiques sont essentiellement mises en
pratique pour améliorer et esthétiser la vie. La production s’accroit
systématiquement dans tous les domaines, et l’on parle de la révolution
industrielle. Le destin du monde est à l’entière disposition de l’homme, qui se
doit de créer un nouveau monde, un cosmos qui libère pleinement la modernité.
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Elle permet d’actionner des machines comme des métiers à tisser ou la
locomotive. Les premières industrialisations sont l’extraction du charbon, la
production du textile, la métallurgie, etc. L’industrialisation commence par le
travail domestique, et l’utilisation des machines volumineuses et l’augmentation
de la production ont conduit à la création des usines.
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outils, des procédés et des méthodes employés dans les diverses branches de
l’industrie. Elle fait donc l’état de l’art des pratiques scientifiques et techniques
aux diverses périodes de l’histoire en vue d’innover et d’en accroitre les
performances.
La notion semble avoir été utilisée pour la première fois par le physicien
allemand Johan Beckmann en 1772, quoique le consensus des étymologistes en
soit relatif. Et c’est un professeur de Harvard (Jacob Bigelow) qui systématise la
notion et son usage dans son texte intitulé Éléments of technology en 1829. De
ce baptême scientifique, le concept a pris de l’envergure et est entré dans le
langage courant au point d’incarner la modernité, le progrès de l’humanité, la
puissance de la communication, etc. Néanmoins, pour des raisons de prudence
intellectuelle, l’on se doit de faire observer que les pratiques de la technologie
auraient devancé le concept.
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ville de Québec en 1885, et, à la même époque, Paris commence à être
électrifiée.
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catégorie humaine à une dignité qui conjugue la prééminence du sujet. L’homme
s’est démarqué de la nature pour se mettre à la hauteur actuelle grâce à la
science et à la technologie. C’est dire que les produits de la science marquent le
pas de l’homme sur la nature et le distinguent davantage des autres êtres vivants.
Avec la science et la technologie, l’homme a déjà fait ses adieux à l’idée de la
nature humaine et s’est fait une seconde nature qui fait la fierté de la modernité.
La modernité comme conscience et réalité du progrès est donc l’effet de
l’évolution de la science à travers toutes ses figures.
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robotisation du travail qui fait de l’homme un simple spectateur de son propre
travail. L’on note aussi la numérisation du travail qui engendre les phénomènes
combien merveilleux de télétravail et visio-conférence, qui font gagner le temps,
accroissent la performance et jouent la carte de l’efficacité.
La science fait entrer dans l’intimité de la nature afin d’en saisir les contours et
les mystères. Grace aux sciences naturelles, les lois de la nature sont mises au
grand jour. Les phénomènes nature sont maitrisés et soumis au contrôle de la
raison. C’est dans cet ordre d’idée que Descartes laisse à entendre que la science
doit nous rendre « maître et possesseur de la nature ». Tous les mystères de la
nature sont aujourd’hui maitrisés, contrôlés et mis à la disposition du jeu du
progrès. Cette connaissance de la nature a beaucoup évolué en passant de la
simple connaissance à la connaissance pratique. Car la science, en sa qualité
technique, transforme la nature en vue de répondre aux besoins existentiels. Les
composants de la nature sont métamorphosés et adaptés aux exigences de la vie
pour répondre à l’appel de la conscience de la modernité. Telle est la réponse de
la raison à l’invite marxienne de sa Onzième thèse sur Feuerbach, qui stipule
que « les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières, il
importe de le transformer ». En suivant l’invitation de Marx, la science a
changé de figure et est devenu technique pour soumettre la nature aux besoins
quotidiens de l’homme. C’est pourquoi la science est entrée dans toutes les
scènes de la vie. Nous mangeons grâce à la science, nous nous déplaçons grâce à
la science, nous dormons mieux grâce à la science, nous nous habillons grâce à
la science, nous communiquons grâce à la science, etc.
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scientifique parait nécessaire pour rappeler à la conscience du progrès les
rançons de la modernité.
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concourent ainsi à l’émergence et au développement des dispositions fâcheuses
dans l’esprit humain. Elles imposent à la conscience sociale des exigences
d’ordre esthétique qui la vacillent et occultent sa probité naturelle. Rousseau
passe en revue tous les miasmes qui se profilent à l’arrière-plan du progrès des
sciences
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encore suivirent les lettres et les arts. Tel est le luxe né comme eux de l’oisiveté
et de la vanité des hommes. Le luxe va rarement sans les sciences et les arts, et
jamais ils ne vont sans lui » (Rousseau, 2013, p. 59). Les sciences sont des
sources et des facteurs du luxe, et l’envie du luxe conduit à l’égarement de
l’esprit et à la profanation de la pudeur. Car, il apprend à résister à l’appel
intérieur de la conscience et à écouter la mélodie des passions qui résonne dans
le dispositif corporel aveuglant, pour ainsi dire, les esprits. L’homme intérieur
perd ses qualités, et le comportement humain change. Les valeurs morales sont
absolument effacées de la conscience, et un nouveau registre de vie s’empare de
l’esprit humain et détricote les fibres éthiques de la vie sociale.
Tandis que les valeurs morales œuvrent pour la cohérence de la société, le luxe
creuse des fosses de distinction. Il se lève, en principe, et constitue l’emblème
du bonheur et de la domination de certains sur les autres, en mettant en doute le
principe d’universalité de la condition humaine. Le luxe constitue de facto le
langage par excellence de l’opulence et symbolise l’autorité financière. C’est,
alors que, toutes les sociétés sont divisées en différentes classes quelquefois
antagonistes, dont Marx a tant décrié la légitimité. C’est le luxe qui consacre de
façon tragique les différences dans les sociétés contemporaines. Car, pour
exprimer leur suprématie financière, les riches habitent dans des quartiers
différents, roulent dans des voitures luxueuses, construisent des maisons de luxe,
portent des habits de luxe, fréquentent dans les écoles de luxe, etc.
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détriment des certaines exigences pédagogiques ; car, en y déployant un regard
plus profond, on s’aperçoit que, derrière cette innovation se profilent aussi des
agents pathogènes qui absorbent les facultés intellectuelles. À titre d’illustration
simple, la pédagogie de la technologie confère une place stratégique à la
machine, qui doit accomplir presque tout à la place de l’homme : elle calcule,
corrige les fautes, aide à écrire, etc. Et, dans ce contexte, l’apprenant serait un
inspecteur ignorant qui accompagne simplement sa machine. Ainsi, l’horizon de
l’esprit se rétrécirait et les facultés mathématiques déclineraient. Si l’on
demandait à nos enfants qui fréquentent aujourd’hui dans les écoles luxueuses,
où les machines écrivent et calculent en lieu et place de l’homme, de faire
quelques exercices intellectuels à la mode dans les systèmes classiques, on ne
sera pas étonné de les voir balbutier. Les soubresauts de l’esprit, qui inscrivent
l’homme actuel dans le cycle infernal du mal, résulteraient en partie du péché
relatif à l’évolution des sciences.
L’envie du luxe est loin d’éclore la chaîne des vices produits par l’évolution des
sciences, d’autres travers plus graves les accompagnent aussi. Le plus grand tort
que les sciences et les arts causent à la société est l’outrage aux bonnes mœurs.
Avec le progrès des sciences, le sujet trouve plaisir à fouler les bonnes manières.
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le gouvernement et les lois pourvoient à la sureté et au bien-être des hommes
assemblés, les sciences, les lettres et les arts, moins despotiques et puissants
peut-être, étendent des guirlandes de fleurs sur les chaînes de fer dont ils sont
chargés, étouffent en eux le sentiment de liberté originelle pour laquelle ils
semblent être nés, leur font aimer leur esclavage et en forment ce qu’on appelle
des peuples policés » (Rousseau 2013, p. 44). Le couronnement des sciences
auréole les esprits d’une gloire esthétique irrésistible et les détourne
irréversiblement de leur destin. Les sciences colonisent ainsi les âmes et les
inscrivent dans la logique de l’immoralité manifeste. L’homme se livre
entièrement aux exigences de l’esthétique en offensant les principes de la
morale. Les fondements de la société sont de facto basculés dans le cyclone du
creuset des sciences. Les sciences avilissent les mœurs.
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L’on note aussi les égarements nucléaires de la science et de la technologie. La
science et la technologie mettent en perspective la possibilité de l’idée de
l’apocalypse pour chercher l’équilibre du monde et intimider les État à degré
scientifique et technologique faible. Plutôt que de chercher le bonheur de
l’humanité, la raison tourne contre l’homme pour élaborer des plans de son
extermination.
Conclusion
L’histoire des sciences est marquée par nombre de révolutions qui jalonnent le
cours du destin de l’humanité. L’on note la naissance de la science au Vème
siècle, son hibernation au Moyen-âge, l’avènement de la science moderne, la
mutation de la science en technique et la consécration de la technologie. À
travers toutes ses figures, la science est un acquis pour le bonheur et pour le pire.
Et cela plaide pour la mise en route d’une véritable éthique de la science, de la
technique et de la technologie.
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