Vous êtes sur la page 1sur 162

Titres disponibles dans la même collection SOMMAIRE

Le besoin d'information : formulation, négociation, diagnostic, par Yves-F. Le Coadic. 1998

Intelligence économique : mode d'emploi, par Pierre Achard el Jean-Pierre Bernai. 1998

Créer et maintenir un site web : cours INRIA, 28 septembre - 2 octobre 1998, Ptiti. ouvrage coor-
donné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Hidoine. 1998

Economie de l'information spécialisée : valeur. nscif>ex professionnels, marchés, par Daniel Avant-propos
Confland. 1997

Science de l'information et philosophie : une communauté d'interrogations, par Marie-France


Introduction 13
Blanquet. 1997
Chapitre I
La s\nrhèse : produit documentaire et méthode pédagogique, par Agnès Caron. en collaboration
avec Ariette Boulogne. 1997 L'ANALYSE; DOCUMENTAIRE; : DÉFINITION ET PRATIQUES 15
Qu'est-ce qu'analyser ? 15
La recherche d'information sur les réseaux. Internet : pour en savoir plus : cours INRIA, 30 sep-
tembre • 4 octobre 1996, Trégastel, ouvrage coordonné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Qu'est-ce que l'analyse documentaire ? 16
Hidoine. 1996 L'analyse dans le cadre des opérations documentaires 18
Analyse et politique documentaires 19
L'identité professionnelle des documentalistes : le cas des médias, par Christine Leteinturier. 1996
Annexe pédagogique 33
Les coûts en documentation : calculs, analyses et décisions, par Emmanuel Moulin. 1995

Guide pour la gestion d'un centre d'information : la maîtrise des chiffres-clés, par Bernard
Chapitre 11
Chevalier. Dominique Doré et Eric Sutler. 2 e édition augmentée et mise à jour, 1995 LA LECTURK DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER 35
Les conditions de la lecture documentaire 36
Le traitement électronique du document : cours INRIA, 2-7 octobre 1994, Aix-en-l'iwence.
ouvrage coordonné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Hidoine. 1994 Petit détour par la « lecture rapide » 37
Observer avant de lire 3g
Le dossier documentaire : conception, réalisation, valorisation, par Viviane Coii7incl, Patricia
Huvillier, Paul-Dominique Potnart et Dominique Velten. 1994
Annexe pédagogique 45

Stocks of English : a dislance Ieamins> course for information workers and lihnitïtms, par Chapitre 111
Michael Brookes. 1993
LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49
Pratique du management de l'information : analyse de la valeur et résolution de problèmes, par Les textes et leurs caractéristiques 49
Jean Michel, en collaboration avec Eric Sutter; préface de Michel Cm/on. 1992
Les textes et leur contenu 58
Construire un thésaurus : manuel pratique, par Jean Aitchison et Alan Gilchrisl. traduction Comment lire ? 54
Dominique Hervieu. re'vision scientifique Jacques Manie/.. 1992 Annexe pédagogique 7J
Sen'icex d'information et qualité : comment satisfaire les utilisateurs, par Eric Sutter. 1992
Chapitre IV
Valeur et compétitivité de l'information documentaire : l'analyse de la valeur en documentation.
LA LECTURE DOCUMENTAIRE : STRUCTURE ET VOCABULAIRE 73
par Jean Michel et Eric Sutter. 2e édition mise à jour, 1991
Trouver l'information utile : la recherche d'un plan 73
Mise au point du présent manuscrit : Isabelle Kersimon L'élaboration de grilles de lecture 75
Trouver l'information utile : l'aide du vocabulaire 84
Titres disponibles dans la même collection SOMMAIRE
Le besoin d'information : formulation, négociation, diagnostic, par Yves-F. Le Coadic. 1998

Intelligence économique : mode d'emploi, par Pierre Achard et Jean-Pierre Bernât. 199K

Créer et maintenir un site web : cours INRIA, 28 septembre - 2 octobre 1998, Paît, ouvrage coor-
donné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Hidoine. 1998
Avant-propos 7
Economie de l'information spécialisée : valeur, usages professionnels, marchés, par Daniel
Confiant!. 1997
Introduction 13
Science de l'information et philosophie : âne communauté d'interrogations, par Marie-France
Blanquel. 1997
Chapitre I
La synthèse : produit documentaire et méthode pédagogique, par Agnès Caron. en collaboration
L'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES 15
avec Ariette Boulogne. 1997
Qu'est-ce qu'analyser ? 15
La recherche d'information sur les réseaux. Internet : pour en savoir plus : cours INKIA. 30 sep- Qu'est-ce que l'analyse documentaire ? 16
tembre - 4 octobre 1996. Trégastel, ouvrage coordonné par Jean-Claude I.c Moal cl Bernard
Hidoine. 1996
L'analyse dans le cadre des opérations documentaires 18
Analyse et politique documentaires 19
L'identité professionnelle des documentalistes : le cas des médius, par Chris! inc Lcteintuner. 1996
Annexe pédagogique 33
Les coûts en documentation : calculs, analyses et décisions, par Emmanuel Moulin. 199?
Chapitre II
Guide pour la gestion d'un centre d'information : la maîtrise des chiffres-clés, par Bernard
Chevalier. Dominique Doré et Eric Suller. 2e édition augmentée et mise à jour. 1995 LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER 35
Les conditions de la lecture documentaire 36
Le traitement électronique du document : cours INRIA, 2-7 octobre IW4. Aix-fii-Prm-ence,
Petit détour par la « lecture rapide » 37
ouvrage coordonné par Jean-Claude Le Moal et Bernard Hidoine. 1994
Observer avant de lire
Le dossier documentaire : conception, réalisation, valorisation, par Viviane Cou/inet, Patricia Annexe pédagogique 45
Huvillier, Paul-Dominique Potnart et Dominique Velten. 1994

Stocks of English : a distance Icantinx courue for information workerx and tibrarians. par Chapitre III
Michael Brookes. 1993 LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49
Pratique du management de l'information : analyse de la valeur et résolution de problèmes, par Les textes et leurs caractéristiques 49
Jean Michel, en collaboration avec Eric Sutter; préface de Michel Cro?on. 1992 Les textes et leur contenu 58
Construire un thésaurus : manuel pratique, par Jean Ailchison ei Alan Cïilchrist. traduction Comment lire ? 64
Dominique Hervieu, révision scientifique Jacques Manie/. 1992 Annexe pédagogique 71
Services d'information et qualité : comment satisfaire les utilisateur*, par Eric Suller. 1992
Chapitre IV ,
Valeur et compétitivité de l'information documentaire : l'analyse de la valeur en documentation. LA LECTURE DOCUMENTAIRE : STRUCTURE ET VOCABULAIRE 73
par Jean Michel el Eric Sutler. 2e édition mise 5 jour. 1991
Trouver l'information utile : la recherche d'un plan 73
Mise au point du présent manuscrit : Isabelle Kersimon L'élaboration de grilles de lecture 75
Trouver l'informatinn u t i l e - l'niHp du vnrsihnïaïrp
Chapitre V Compatibilité des langages d'indexation 218
ANALYSE DOCUMENTAIRE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRE 95 Quel avenir pour les langages documentaires ? 219
La recherche documentaire 96
Place de l'analyse documentaire dans les banques de données 101 Conclusion 223
Aspects techniques de la recherche documentaire informatisée 107
La recherche documentaire en texte intégral 111 Annexe I :
La recherche d'informations sur Internet 118 Textes et articles 227

Chapitre VI Annexe 2 :
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE 121 Corrigés des exercices 267
O p f î1111UUU
L'CI nïtirm II Z
~ï 1I

Usages et usagers 122 Références bibliographiques 307


Les différentes formes de résumés 124
Les résumés documentaires 127
Le rôle du résumé documentaire dans une banque de données 128
Comment réaliser un résumé documentaire 128
Derniers conseils 137
Annexe pédagogique 141

Chapitre VII
INDEXATION 149
Qu'est-ce qu'indexer ? : 41-;
usage et applications ij i
Rôle de l'indexation dans une banque de données 152
Comment indexer? 153
Comment évaluer l'indexation ? 160
L'indexation en 10 conseils 169

Chapitre VIII
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES I 75
Un peu d'histoire 175
Les autorités 176
Les langages documentaires 182
Les langages documentaires de type classificatoire 186
Les langages documentaires de type combinatoire 195
Les vrais langages à structure combinatoire :
lexique et thésaurus 203
AVANT-PROPOS

À la fin des années soixante-dix, l'ADBS intégra à son programme de


formation un stage sur l'« analyse documentaire » sans qu'il y ait eu
alors une véritable étude de besoins. Manifestement, l'intuition était
juste puisque ce stage perdure. Dès l'origine, cette formation a été
conçue dans une perspective méthodologique, de façon à dépasser les
modes et l'évolution des techniques. Tout en évoluant d'année en année,
la structure du stage a été enrichie sans être fondamentalement
modifiée. Une capitalisation pédagogique réalisée et déposée à l'ADBS
en 1996 est à l'origine de cet ouvrage, conçu d'abord comme un guide
à l'usage des formateurs.
L'avis de plusieurs professionnels et l'assistance plus qu'efficace de
Claudine Masse m'ont conduite à approfondir certains aspects et à
introduire des éléments de réflexion qui sous-tendaient la formation,
sans être tout à fait exprimés. J'ai beaucoup hésité avant d'entreprendre
ce travail. L:n effet, comment parler d'analyse documentaire à l'heure
d'Internet ' ? Quelle vision passéiste engagerait des auteurs, un éditeur,
à publier un ouvrage que le plus grand nombre des lecteurs potentiels
estimerait dépassé ? Serait-ce inconscience ? provocation ? ou naïveté
si profonde qu'on le jugerait avec une indulgente condcscendanee...
Quelques raisons, pourtant, jouent en faveur de l'existence du présent
manuel.
L'analyse documentaire reste une pratique courante et nécessaire par
le fait que, même si leur nombre décroît, il existe encore des services
de documentation n'ayant pas accès aux outils les plus modernes.
En outre se posent fréquemment des questions de terminologie : en
documentation, on utilise un certain nombre de concepts sans trop les
définir, et les opérations qui en découlent en souffrent, par manque
d'approfondissement : « Le développement de la science de l'infor-
mation a longtemps reposé sur des concepts ambigus, polyvalents, à la
transparence trompeuse. 2 » Si les chercheurs ont le souci du terme
juste, qu'en est-il dans la vie professionnelle ? Quel dialogue peut
AVANT-PROPOS
AVANT-PROPOS

Ces techniques classiques ont elles-mêmes besoin d'être « dépous-


s'instaurer entre usager et documentaliste lorsque chacun attribue un siérées », car nombre d'idées fausses entourent l'analyse documentaire,
sens différent au même vocable ? Y a-t-il, y compris dans l'enseigne- à commencer par la représentation qui en est faite sous la forme du
ment et la formation, une prise en compte suffisante de la réalité d'un résumé. Ce manuel a donc l'ambition d'éclairer ce qu'est vraiment
concept ? Quel(s) sens donner au mot « information » ? Qu'entend-on l'opération d'« analyse documentaire », toujours liée à sa finalité : la
par « recherche » ? Que veut-on dire par « survol », « lecture en diago- recherche documentaire. Qu'en est-il donc de cette recherche via les
nale » ? Que fait l'étudiant quand on lui demande de rédiger une « fiche nouvelles technologies ?
de lecture » ? Si l'on compare les accès aux banques de données classiques et les
La vie professionnelle n'est pas assujettie à la seule technologie. Si pages d'accueil d'Internet, on ne peut que constater que ces dernières
les services de documentation sont de mieux en mieux équipés, n'est-il brillent et séduisent ; la navigation entre les écrans est rapide, simple,
pas nécessaire de maîtriser l'information en amont des machines, ainsi conviviale. Quelques décideurs pressés en déduisent donc que,
que le rappelait récemment l'Unesco : « Avant d'investir dans les puisqu'il suffit de cliquer, les banques de données, les services de
moyens techniques, il importe de comprendre les flux et les besoins documentation, et plus encore les documentalistes sont inutiles. Or,
d'information [...] la technologie a rarement réponse atout. Une bonne « Internet est le contraire d'une banque de données documentaire, dans
gestion de l'information exige que le personnel comprenne ce qu'est la mesure où son objectif est de diffuser et d'échanger de l'information
l'information, comment elle peut être recueillie, traitée et employée à — et non de la chercher. Internet n'est pas une bibliothèque, c'est un
telle ou telle fin. [L'émergence des industries de l'information] a donné kiosque à journaux amélioré ! ' »
naissance à une nouvelle catégorie de professionnels de l'information, Source ininterrompue de renseignements de toute espèce, Internet
à savoir les chercheurs et les analystes de l'information. ' » souffre, aux yeux du chercheur, des deux obstacles principaux à la
Dans la pratique professionnelle, en admettant que l'analyse de textes recherche documentaire :
en amont disparaisse, à court ou moyen terme, une analyse des ques- - le bruit, car la multiplicité des réponses ne correspond pas toujours,
tions, trop souvent éludée au bénéfice des outils permettant d'y répon- ni précisément, à la question posée ;
- le silence, dans la mesure où il est impossible de savoir si le
dre, demeurera néanmoins nécessaire.
document le plus pertinent est inaccessible ou s'il est inexistant.
La numérisation n'est pas appliquée à toute la production imprimée.
« Pendant quelques années encore et beaucoup plus suivant les domai- « Utiliser des moteurs de recherche et autres index thématiques
nes, les mondes du document numérique et du document papier vont satisfait parfois notre demande mais leurs réponses nous noient souvent
coexister. Tout ce qui a été imprimé ne sera pas numérisé. Pour l'utili- sous un grand nombre de pages ou de sites web dont nous ne sommes
sateur, le support n'importe généralement pas. Ce qu'il désire, c'est un généralement pas en mesure de connaître la validité. A une époque où
texte validé et disponible facilement [...] Les bibliothèques et centres le temps semble si précieux, ne serait-il pas préférable de privilégier la
de documentation doivent rester, à travers leurs sites web, des lieux de logique qualitative à la logique quantitative ? " »
médiation de la connaissance et des sources d'information Que l'on ne se méprenne cependant pas : notre propos n'est pas de
pertinentes. 4 » Pour assurer la médiation de la connaissance et rester sous-estimer Internet, moyen sans égal de communication mondiale.
performant dans un univers de plus en plus teclmiciste, il n'est pas inu- Ce manuel n'a pas d'autre ambition que clarifier la place, l'intérêt et les
tile de reconsidérer les techniques classiques à la lumière des nouvelles limites des opérations documentaires, spécifiquement l'analyse, en tant
AVANT-PROPOS AVANT-PROPOS

que point de départ de la recherche documentaire. L'un de ses objectifs ne prétendent pas répondre à toutes les questions dans la mesure où
est de rappeler à quel point la qualité du traitement documentaire est la l'analyse documentaire n'est pas une science exacte, mais ils sauront
première valeur ajoutée que Von attend des documentalistes. orienter le lecteur dans sa démarche d'apprentissage. Dans un souci de
cohérence, certains développements, comme ceux concernant les
Les études actuelles sur la recherche documentaire, le plus souvent
sciences cognitives, n'ont pas été effectués. Quant à l'analyse des ima-
orientée vers les sources électroniques, portent aussi sur le traitement
ges fixes ou animées, voilà un sujet propre à l'élaboration d'un autre
de ces sources — et ne sont pas menées sous le seul angle technique. manuel...
Les travaux de l'International Society for Knowledge Organization ' en
témoignent de façon exceptionnelle, car ils cherchent à allier les deux
approches : « Very central in this réorientation in information science 11 me reste à remercier tant de personnes que je ne citerai que quel-
are both a newfocus on meaning and a newfocus on thé social envi- ques noms, de peur d'en oublier beaucoup ; mais que tous ceux qui sont
ronment ofboîh users and Systems. " » D'autres articles récents prou- absents ici sachent qu'ils sont présents dans mon esprit — et souvent
vent, s'il en était besoin, l'importance de la réflexion face aux change- dans mon cœur : tous les professionnels de la documentation que j'ai
ments qui modifient considérablement nos modes de fonctionnement ', croisés et dont les remarques, réflexions, questions ont enrichi quoti-
La deuxième conférence du chapitre français de l'ISKO '" a pour diennement ma pratique et mes propres questionnements ; tous ceux,
thème « L'indexation et les métadonnées à l'ère d'Internet ». Le texte particulièrement, qui se posaient et se posent encore de vraies questions
d'appel aux communications assure que « l'indexation reste un des pédagogiques : ils se reconnaîtront à ce terme. Ensuite, ma reconnais-
domaines les plus actifs en recherche d'informations. Avec l'introduc- sance va vers les innombrables étudiants et stagiaires qui, depuis plus
tion d'Internet, ce champ est appelé à se renouveler. L'abondance de de vingt-cinq ans, en France, en Europe, en Afrique, ont travaillé avec
documents disponibles conduit à la fois à l'impossibilité d'une indexa- moi sur l'analyse documentaire ; qu'ils sachent qu'ils m'ont donné plus
tion autre qu'automatique et à la nécessité d'un outil puissant de sélec- qu'ils n'ont reçu.
tion de l'information ». En attendant que la recherche, dont on ne peut Je tiens aussi à remercier spécialement Claire Guinchat, sans l'aide
que souhaiter le développement, aboutisse à des résultats applicables, amicale et efficace de laquelle ce manuel n'aurait pas pu voir le jour,
réfléchir à des pratiques abolies pour certains, mais utiles à d'autres Daniélc Degcz, qui a inspiré tout ce qu'il y a de bon dans le chapitre sur
pour quelques années encore, semble s'imposer comme une nécessité. les langages documentaires, et Jean-Claude pour son infinie patience.
Ht bien sur Claudine Masse, associée à la conception et à la rédaction
Ce manuel se présente comme un outil pédagogique propre à initier, de cet ouvrage, dont la compétence, la disponibilité et la précieuse
former des étudiants ou des débutants dans la fonction, en leur appor- amitié m'ont accompagnée et soutenue sans relâche tout au long d'un
tant un certain nombre de connaissances et une méthodologie. En cher- parcours qui ne fut pas sans défaillance.
chant à approfondir la pratique professionnelle, il propose quelques Et pour que ma reconnaissance soit complète, je tiens à dédier ce
pistes de réflexion pour les enseignants, les formateurs, ainsi que les travail à la lumineuse mémoire d'Aline Puget et de Jacqueline Viaux.
responsables de services de documentation et d'information.
S. W.
L'aspect pédagogique étant privilégié, on trouvera ici une alternance
d'apports théoriques et d'exercices pratiques. Les propositions de cor-
rection et les commentaires sur les exercices, placés en fin de volume.
AVANT-PROPOS
INTRODUCTION

NOTES
1 Le Dictionnaire encyclopédique de l'Information et de la Documentation
[30], publié sous la direction de Serge Cacaly, chez Nathan, en 1997, ne pro- « Dans notre service, nous ne faisons plus d'analyse car cela coûte
pose aucune entrée au terme « analyse documentaire », alors que cet ouvrage trop cher, mais nous indexons tous nos documents.
présente à l'heure actuelle le meilleur état de la science et des techniques — Et vous indexez comment ?
concernant ces domaines. — Eh bien, c'est classique, nous avons un thésaurus [variantes : une
liste de mots clés, un index, un langage documentaire...] et nous choi-
2. Source : [49].
sissons les mots caractéristiques du contenu...
3. Source : [65], p. 298. — Et comment se passe la recherche ?
— Oh... Vous savez bien que cela ne va jamais tout seul ; mais c'est
4. Source: [51], p. 6 et 7.
normal, tout le monde en est là... »
5. Source :[!!]. Combien de fois avons-nous entendu ces propos, de la bouche même
de professionnels résignés à l'insuffisance de leurs résultats ! Lorsqu'ils
6. Source: [5l], p. 6.
sont confrontés à des audits d'analyse de la valeur, les documentalistes
7.1SKO-FRANCE, 61 rue de la Corvée, 21000 DIJON. découvrent le déséquilibre entre les fonctions techniques et les
fonctions de production, c'est-à-dire entre le temps passé à fabriquer
8. Source: [42], p. 16.
l'outil de production et ce qui en découle : des effets médiocres, des
9. Voir : [9], p. 75-82 ; [78], p. 83-86 ; [8], p. 139-143. insatisfactions et, finalement, un certain fatalisme... Comment en est-
on arrivé là ?
10. Lyon, 21 et 22 octobre 1999.
Ce manuel n'a pas pour vocation de conter l'histoire d'un certain
désenchantement, lié à une routine qui menace tout le monde, et spécia-
lement le monde de la documentation. C'est tellement sécurisant de
continuer comme l'on a toujours fait : progressivement, traiter le
Les références bibliographiques se trouvent en fin d'ouvrage, pages 307-312. document devient la finalité du travail et l'on oublie tout aussi graduel-
lement à qui et à quoi ce travail était destiné.
L'un des objectifs que nous nous sommes fixés est de rétablir
quelques vérités : l'analyse documentaire, ce n'est pas faire des
résumés. L'indexation, ce n'est pas chercher des mots dans un langage
documentaire. L'analyse documentaire, c'est l'opération pivot de la
qualité ou de la non-qualité de la recherche documentaire qui en est
l'aboutissement. C'est l'opération par laquelle des auteurs vont pouvoir
communiquer avec une multitude de lecteurs intéressés, par la trans-
mission de leurs œuvres. C'est la façon de répondre à la question : qui
CHAPITRE I
INTRODUCTION L'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES

a pu écrire quoi pour qui ? Et ce quoi n'est pas n'importe quoi ! L'ana-
lyse documentaire consiste à extraire d'un texte tout son sens pour le
transmettre à qui en a besoin. L'une des bases de la méthodologie appliquée à l'analyse documen-
Nous proposons donc une méthodologie visant à réussir cette trans- taire consiste à veiller attentivement et méticuleusemcnt au vocabulaire
mission ' en définissant d'abord de quoi l'on parle. Qu'est-ce qu'ana- des textes étudiés. Il est donc juste de commencer par préciser la termi-
lyser ? Et qu'est-ce qu'analyser dans un contexte documentaire ? Quels nologie qui sera utilisée dans ce manuel.
sont les éléments qui influent sur cette opération ? Une attention parti-
culière sera portée à la connaissance des textes (« Les spécialistes des
sciences de l'information n'ont pas porté beaucoup d'attention au pro- Qu'est-ce qu'analyser ?
cessus de compréhension et de rédaction de textes 2 »), à leur approche :
comment lit-on ? Pourquoi lit-on ? Comment trouver le sens du texte et Pourquoi avoir nommé une opération documentaire « analyse » ? Et
les informations que l'on juge utiles? Peut-on parler d'une lecture que signifie ce mot dans le langage tel qu'il est fixé par les diction-
documentaire propre à l'usage qui en sera fait ? Comment cette lecture naires les plus utilisés ?
peut-elle aider l'écriture ? Comment, après avoir repéré le sens à trans- Le Robert ' (entre autres) part du grec analuxis et en exploite les deux
mettre, le formuler soit en résumant, soit en indexant ? sens : décomposition et résolution.
Nous prenons parti pour une réhabilitation du résumé, non pas un Dans le sens de « décomposition », il nous propose six acceptions :
résumé long et difficile à écrire, mais un résumé tout simple dont le but «- didact. : opération intellectuelle consistant à décomposer une
est d'aider la sélection au moment de la recherche. L'existence d'un œuvre, un texte en ses éléments essentiels, afin d'en saisir les rapports
résumé simplifie la formulation de l'indexation, en général surinvestie. et de donner un schéma à l'ensemble (V abrégé, sommaire) ;
Notre souci premier est de situer l'analyse dans la complexité des opé- «- gram. : division d'une proposition en mots, ou d'une phrase en
rations documentaires, tout en simplifiant son approche ; nous souhai- propositions dont on détermine la nature et la fonction ;
tons ainsi en faciliter l'exercice. « - chim. ; action de décomposer un mélange dont on sépare les
constituants, ou une combinaison dont on recherche ou dose les élé-
ments, déterminant la nature, les proportions des constituants ;
« - phys. : analyse spectrale : décomposition de la lumière blanche
NOTES par réfraction ou diffraction ;
1. Cette méthodologie n'a rien d'original ; elle est élaborée à partir d'apporis « - élèv. : décomposition d'une image à transmettre en éléments
multiples, lectures, échanges, expériences, retours d'expériences. Certains y séparés ;
reconnaîtront leurs idées. C'est pourquoi ce manuel est plein de références de « - économ. : décomposition et reclassement des tâches du travail :
toutes sortes et, sans aucun doute, il en manquera un grand nombre. Ainsi analyse des tâches, du travail... »
pourrait-on parler d'ingratitude (cf. Alain Ficnkiclkraut) alors qu'il n'y a là que
le témoignage vivant de tout ce que l'on doit à ceux qui ont précédé nos efforts Quel que soit le domaine d'étude auquel ce terme s'appliqua, il existe
une similitude dans l'action : division, séparation d'un corps, d'un en-
et les ont nourris.
semble, d'une phrase, d'un texte, d'un raisonnement en autant d'été-
2. Source : [64], p. 56.
QU'EST-CE QUE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE ?
DÉFINITION ET PRATIQUES

opération... acte ou série d'actes (matériels ou intellec-


ments qui le constituent, ces éléments faisant l'objet d'étude, de mesure, tuels) supposant réflexion et combinaison
de moyens en vue d'obtenir un résultat
d'identification. déterminé
Dans le sens de « résolution », deux définitions nous sont proposées : [tel que]
« - math. : méthode de démonstration consistant à déduire de la pro- .. (qui consiste) à présenter... - mettre sous les yeux (ou à la portée) de
position à démontrer d'autres propositions jusqu'à ce qu'on parvienne à quelqu'un
- faire connaître au public
une proposition reconnue comme vraie ; - remettre quelque chose à quelqu'un en
« - log. : opération intellectuelle consistant à remonter d'une propo- vue d'un examen, d'une vérification, d'un
sition à d'autres propositions reconnues pour vraies d'où l'on peut jugement
ensuite la déduire. Méthode de raisonnement analytique, de la consé- [de façon]
... (sous une forme) concise - brève, courte, dense, sobre, succincte
quence au principe. L'analyse est une régression. [...}
« Un raisonnement régressif vu des conséquences aux principes. et précise... •-claire, définie, explicite, qui ne laisse
place à aucune indécision dans l'esprit
« Une résolution est une opération intellectuelle consistant à décompo-
ser un tout en parties^ou une proposition en propositions plus simples. » ... des données... - ce qui est admis, connu ou reconnu et qui
sert de base à un raisonnement, de point de
Toutes ces définitions aident à préciser le sens, à construire une départ pour une recherche
i/nage de l'analyse documentaire. Celle-ci est une opération profession- ... caractérisant... - définissant, déterminant, spécifiant
nelle technique, certes, mais c'est d'abord une démarche intellectuelle. ... l'information... - un renseignement, un message
[extraits de]
... (contenue) dans un document - tout écrit qui sert de preuve ou de
ou un ensemble de documents renseignement
Qu'est-ce que l'analyse documentaire ?

Selon l'AFNOR, « l'analyse documentaire est l'opération qui consiste Ensuite, en envisageant l'opération sous un angle propre à l'activité
à présenter sous une forme concise et précise des données caractérisant du documentaliste :
l'information contenue dans un document ou un ensemble de
documents 2 ». opération... observation, identification, compréhension
Si l'on applique à cette phrase une méthode d'analyse, on peut la d'un texte, selon des normes, méthodes et
pratiques,
reformuler de différentes façons, d'abord en élargissant, grâce au dic-
tionnaire, le sens des mots ou propositions (voir ci-contre). On pourrait ... (qui consiste) à présenter...
... (sous une forme) concise dans le but de rendre utilisables...
multiplier ce genre d'exercices afin d'élargir encore l'image de l'analyse et précise...
documentaire qui se dégage de ces développements sémantiques. ... les thèmes, sujets, personnalités
Chaque analyste a ainsi la possibilité d'élaborer, dans son propre voca- ... des données caractérisant
l'information... identifiés dans un texte... '
bulaire, la définition qui correspond le mieux à l'environnement dans
.. (contenue) dans un document ... et issus de monographies, articles,
lequel il travaille, aux produits qu'il doit fournir, et à la politique ou un ensemble de documents \, rapports, etc.
documentaire à laquelle il participe.
DÉFINITION ET PRATIQUES ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

L'analyse dans le cadre des opérations documentaires sont capables de remplacer intégralement l'analyse dite manuelle, en
opposition à l'analyse dite automatique. Tous ces termes sont bien
trompeurs : l'analyse automatique exige des programmes préalables des
• Dans l'enseignement documentaire classique, l'analyse documen-
plus sophistiqués, tandis que l'analyse manuelle fait d'abord appel à la
taire s'applique uniquement au traitement du contenu d'un texte ou
matière grise de l'analyste...
d'une image et aboutit à un résumé, une indexation ou une synthèse.
• Dans l'enseignement bibliothéconomique, ce terme n'existe pas ;
c'est une phase du catalogage qui concerne aussi bien la cotation que le Quelle qu'en soit cependant la pratique, le terme « analyse documen-
choix des vedettes-matières. Mais il s'agit bien encore du traitement taire » est le plus souvent appliqué à la recherche des informations
d'un contenu, en identifiant un thème ou un sujet. contenues dans un document, en distinguant bien analyse du contenu et
analyse de contenu. L'analyse du contenu consiste à repérer l'informa-
• En archivistique, l'analyse est « l'étape essentielle de la description tion explicite, ce qu'a écrit l'auteur et ce que lit l'analyste. L'analyse de
archivistique qui consiste à présenter, sous une forme organisée, contenu travaille sur des messages et consiste à repérer l'information
concise et précise, les données d'ordre historique et diplomatique [au implicite, ce qu'on lit « entre les lignes ». C'est le domaine des psycho-
sens de science auxiliaire de l'histoire] contenues dans un document ou sociologues, non celui des documentalistes.
un ensemble de documents (de la pièce au fonds)' ».
• Dans la pratique courante des banques de données, l'analyse
documentaire couvre le traitement global du document, c'est-à-dire :
• l'aspect formel, l'extérieur ou le contenant : ce qui est propre à la des- Analyse et politique documentaires
cription bibliographique, au catalogage, éventuellement à la cotation ;
• l'aspect fondamental ou le contenu : ce qui est propre aux opéra-
tions d'indexation, de condensation. Quels que soient sa nature, son importance, son effectif, un service
de documentation ne peut vivre (et survivre) sans une politique
Dans ce dernier cas, l'analyse documentaire assure : documentaire explicite, basée sur des objectifs régulièrement évalués et
• le repérage de toutes les informations utiles à l'exploitation d'un adaptés aux besoins de l'institution dans laquelle il est inséré.
document (aspect formel) ;
• la condensation des informations (au sens documentaire, c'est-à- Les opérations documentaires évoluent parce que de nouvelles
dire conceptuel) contenues dans le document, c'est-à-dire le fait de technologies y invitent les services les plus nantis. L'analyse documen-
trouver, repérer, extraire, mettre en lumière ce que l'auteur a rédigé, et taire est une opération traditionnellement appliquée à l'enrichissement
sélectionner dans le texte ce qui est jugé important pour une utilisation d'une banque de données, à la mise en valeur d'un stock d'informations.
ultérieure. Il semble que l'avenir soit davantage orienté vers les flux que vers les
stocks.
• Dans les banques de données en texte intégral, l'analyse documen-
taire paraît absente ; en fait, elle est déléguée aux systèmes internes de Mais de quels flux s'agit-il : quantitatifs ou qualitatifs ? Acceptera-
recherche — le plus souvent basés, actuellement, sur les analyses sta- t-on longtemps des réponses vagues pour la raison qu'elles Çonl rapides
tistique, morphologique, syntaxique et sémantique des textes (cf. et nombreuses ? Envisage-t-on, ici comme ailleurs, un accès à l'infor-
p. 111-120). L'expérience est trop courte pour assurer que ces systèmes mation à deux vitesses : précis et rapide pour les spécialistes qui utili-
ANALYSE ET roirriQUE DOCUMENTAIRES
DÉFINITION ET PRATIQUES

Ces réponses sont proches de la définition officielle, centrée sur


sent entre eux un vocabulaire limité au cadre de leurs recherches,
l'opération documentaire et non sur sa finalité. Or, on ne résume pas,
rapide sûrement mais infiniment large et aléatoire pour le grand public
on n'indexe pas pour le plaisir d'indexer ou de résumer L'analyste agit
confronté aux banques de données de taille maintenant mondiale ?
dans un but bien défini. En tant que lecteur professionnel, il veille à ce
La meilleure évolution des sources d'information, de quelque nature que ses produits soient intelligibles pour et utilisables par toute autre
qu'elles soient, ne tient-elle pas au fait qu'elles répondent aussi précisé- personne que lui-même (cf. chapitre m, p. 49-71).
ment que possible à la politique du lieu où elles sont élaborées et/ou
On a beaucoup parlé d'« explosion documentaire » : ce n'est pas un
utilisées ? vain mot. Les chercheurs, les utilisateurs de toute nature n'ont pu faire
Selon les lieux, l'analyse documentaire est plus ou moins mise en face à fa surinformation envahissante, quel que fût leur champ d'études.
œuvre. Elle dépend d'un certain nombre d'éléments à prendre en L'opération d'« analyse documentaire » est née de cet état de fait, car
compte et à mettre en interaction pour définir la politique documentaire les utilisateurs ne pouvaient raisonnablement pas prendre connaissance
à appliquer selon les cas. En effet, pourquoi analyser des documents ? de tout ce que leurs activités les obligeaient à lire, voire seulement à
Pourquoi analyser tel document ? survoler.
Toute politique documentaire est basée sur l'équilibre entre le fonds Orientée vers la satisfaction des usagers, l'analyse documentaire est
du service et l'usage qui en est fait. Il serait même plus juste de préciser nécessaire dans plusieurs activités documentaires :
que c'est l'usage qui détermine la composition et la qualité du fonds. - elle est préalable à la recherche par la voie de {'indexation et du
Les questions préalables à la détermination de la politique documen- résumé dans les banques de données ;
taire concernant l'analyse vont suivre un ordre à peu près logique (à - elle est à la base de .synthèses, ou documents rédigés sur un thème
ceci près qu'il est toujours nécessaire de pratiquer l'itération) : ou un sujet précis en s'appuyant sur plusieurs sources de natures
- Quel en est le but ? diverses ;
- Pour qui la fait-on ? - enfin, c'est sur elle que repose la cotation d'un ouvrage si celui-ci
- Pour quoi ? fait l'objet d'un classement conceptuel.
- Sur quoi ?
- Avec quels moyens ?
DESTINATAIRES DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE
Le statut et la nature de l'institution pour laquelle travaillent les
FINALITÉ DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE
documentalistes exigent-ils l'opération d'analyse documentaire ? Quels
Cette question, souvent posée au début d'une session de formation à sont les domaines d'études ? les champs d'application ? les pratiques de
des participants déjà engagés dans la vie professionnelle, recueille des recherche des services et des utilisateurs ? Dans une entreprise, il est
réponses assez diverses, mais le plus souvent orientées sur l'action elle- indispensable d'intégrer sa culture, son langage1, les besoins des
même : « décomposer les éléments d'un texte, restituer le sens général, utilisateurs et de leurs secteurs d'activités. « A snhject analysis imftlies
les idées directrices, principales, essentielles, dégager les mots clés, an interprétation of thé potential of thé document in relation to thé
rechercher, mettre en évidence, en valeur les principaux thèmes, les knowledge intérêts ofa given information xystem, and this analysis is
articulations logiques, trouver le sens d'un texte »... undertaken in a given historical, cultural, professional context. * » Un
DÉFINITION ET PRATIQUES ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

bureau d'étude ne peut pas se passer de l'analyse, alors qu'un service de La pratique de l'analyse documentaire sera donc différente selon
vente n'en a aucun besoin. C'est donc à l'intérieur d'entreprises ou de qu'elle est destinée à une clientèle innombrable et potentielle ou à un
services bien définis que l'on peut aller plus loin dans la connaissance petit groupe d'usagers connus dont on peut suivre avec attention les
des usagers. besoins et, surtout, l'évolution de ces derniers. Toutefois, il faut être
conscient du fait qu'une banque de données interne est toujours suscep-
La classique analyse des besoins des utilisateurs paraît à présent un
tible de s'ouvrir à l'extérieur, ce qui détruit l'argumentaire des paragra-
peu limitée. Pour suivre une terminologie très rigoureusement
phes précédents... Il s'agit, à nouveau, d'une décision politique à pren-
précisée6, il faut distinguer l'utilisateur de l'usager, du consommateur
dre en connaissance de cause, après étude approfondie des besoins
ou du client. directs (utilisateurs internes) et éventuels (domaine peu exploité, par
Dans les services de documentation où la recherche est effectuée en exemple).
interne, où le documentaliste côtoie quotidiennement ses utilisateurs
(ou usagers), on effectue des analyses de besoins régulières en vue de
fournir l'information pertinente. Ces études sont adaptées, révisées PRODUITS Dt-: L'ANALYSE DOCUMENTAIRE
régulièrement pour que la politique documentaire soit toujours en
Les responsables de la politique documentaire ont à distinguer entre
adéquation avec la demande, tout en sachant que « les usagers inven-
les produits à court ou à moyen terme. Selon les publics à satisfaire,
tent, détournent » 7 et que l'étude de besoins présente toujours un carac-
l'analyse documentaire peut revêtir différentes formes : résumé, indexa-
tère aléatoire. L'utilisateur se sert d'un outil ; il profite des services de
tion ou synthèse.
façon plutôt passive. L'intérêt d'une étude de besoins bien conduite est
de « transformer l'utilisateur en usager »", c'est-à-dire faire de lui un Par exemple, est-il opportun d'élaborer des résumés - activité
véritable partenaire, capable de se passer des services du documen- exigeant du temps — pour des revues de presse dont le principal intérêt
taliste au moment de la recherche, mais intéressé par le travail en amont est de fournir 1res vite l'information jugée essentielle tel jour ou telle
afin que l'analyse effectuée soit de mieux en mieux ciblée. semaine, alors qu'on sait fort bien que ce produit connaît une durée de
vie plus qu'éphémère ?
Si l'analyse est destinée à un « grand public » innombrable et dont les
attentes précises sont difficiles, sinon impossibles à cerner, l'étude de L'analyse documentaire prend toute sa valeur sur le long terme. C'est
besoins classique est inutile. Il n'y a plus, dans ce cas, d'utilisateurs ou pourquoi la méthodologie ici présentée privilégie le résumé et l'indexa-
d'usagers, mais des consommateurs et des clients. L'enjeu est économi- tion destinés à une banque de données. C'est à partir de celles-ci que
que autant qu'intellectuel, et l'étude de besoins doit se transformer en l'on peut éditer des bulletins bibliographiques, chronologiques, théma-
étude de marche. On peut, bien sûr, cerner des catégories par discipli- tiques, etc., établir des diffusions sélectives et ciblées, élaborer rapide-
nes, niveaux de compétence, centres d'intérêt, mais les besoins restent ment des bibliographies ou des dossiers sur un sujet précis, et répondre
de nature générale et l'usager réel demeure inconnu. On sait, par aux questions posées, ce qui — ne l'oublions pas — est l'objectif
ailleurs, que tous les sondages doivent prendre en compte une marge prioritaire de tout service de documentation.
d'erreur, à intégrer dans l'élaboration de la politique de vente. La poli- La partie bibliographique des revues comporte généralement des ré-
tique d'analyse est donc encore plus aléatoire. C'est plutôt la cohérence sumés. La plupart du temps, ces résumés sont signés, ce qui indique une
interne du produit qui en assure alors la qualité. prise de position des analystes vis-à-vis du document dont ils rendent
DÉFINITION ET PRATIQUES ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES

compte. Il s'agit alors de résumés critiques requérant une excellente Comment le sélectionner ?
connaissance du domaine et de son environnement bibliographique. Ce Choisir est une activité délicate : garder un document signifie qu'on
produit échappe, en général, au travail courant du documentaliste- en rejette un ou plusieurs autres. Les documentalistes éprouvent des
analyste. difficultés à sélectionner, c'est-à-dire à jeter. En expliciter les raisons
Ces opérations de résumé et d'indexation seront détaillées au cours peut aider à surmonter la crainte de mal faire.
des prochains chapitres. Notons, cependant, que la rédaction de syn- 11 y a peu encore, le documentaliste devait compter uniquement sur
thèses ne sera pas abordée dans la mesure où un excellent ouvrage est son fonds pour répondre aux questions des utilisateurs. L'interrogation
déjà paru sur ce sujet1. des banques de données n'était pas une pratique si courante, pour des
raisons budgétaires certainement, mais aussi par manque de formation
et de pratique. De ce fait, tout document revêtait un intérêt, même
minime, et cette part minime plaidait en sa faveur : on le gardait, on le
LE FONDS DOCUMENTAIRE; traitait, on l'insérait dans la banque de données locale. Compter sur son
seul fonds est également le signe d'un isolement, réel dans certains cas,
Comment l'établir et l'alimenter ? fictif dans d'autres. Il existait et il existe encore une mauvaise complé-
Le fonds documentaire est établi en fonction des besoins de l'institu- mentarité entre services, par méconnaissance parfois, par défiance
tion et de ses usagers, en ne négligeant aucune des questions suivantes : surtout. Et c'est ainsi que l'on traite les mêmes documents, que l'on
dépouille les mêmes revues dans deux blocs d'immeubles contigus,
• Quelle est la nature des documents à analyser ? On ne traite pas de quand ce n'est pas dans la même tour... Les restrictions budgétaires
la même façon des collections répertoriées, stockées, à caractère plus d'une part, le travail en réseau d'autre part ont aidé les documentalistes
ou moins unique (documents internes à une entreprise, par exemple), et à combler leur ignorance et à dépasser des réactions de repli sur soi,
des documents dont la valeur d'usage est immédiate, mais très vite dommageables à plus d'un titre.
obsolète (la presse, par exemple).
Il y aurait une étude à mener sur le comportement de ceux qui « ne
• Quels sont les types de supports et leurs champs disciplinaires ? Des jettent rien parce que ça pourra toujours servir... » et, à l'intérieur de
monographies (générales, spécialisées) ? des articles de journaux cette étude, sur un sous-ensemble concernant les documentalistes, si
(revues « grand public » ou scientifiques et techniques) ? des brevets ? nombreux à manifester ces symptômes. Ces attitudes ne sont pas
des cédéroms ? Le fonds est-il de nature encyclopédique ou très rationnelles, et le plus raisonnable des professionnels est d'accord sur le
spécifique ? fait que, dans les piles de Journal officiel ou de Moniteur des travaux
publics encombrant des couloirs, des caves ou des greniers, on ne
• Quel est le pourcentage de documents en langue étrangère ? Et
pourra jamais entreprendre une recherche efficace.
combien de langues différentes ?
Ce ne sont pas seulement les couloirs qui sont encombrés, mais aussi
• Quel est le volume d'alimentation du service ? Quel est le nombre
la banque de données. La quantité rassure, même si elle est inutile. Il
de documents distincts à traiter par jour, par semaine, par mois ? est vrai que les services de documentation vivent, depuis'plusieurs
C'est seulement après avoir clarifié le cadre dans lequel doivent s'ins- années, une mutation plus ou moins rapide entre le réel et le virtuel. Les
crire le fonds et son alimentation que l'on passe à la politique de sélection. réactions des documentalistes sont plus compréhensibles, dans la
ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES
DÉFINITION ET PRATIQUES

fiables, paramétrés selon les vrais désirs des documentalistes ? Sont-ils


mesure où ils affirment que les usagers souhaitent encore obtenir le
maîtres du budget global de leur service (et pas seulement de celui des
document primaire, plutôt que le texte sur l'écran. Il faudra, sans doute,
acquisitions) ? Peut-on dire de ce budget qu'il est au moins correct ?
encore quelque temps pour que l'accès à la documentation virtuelle soit
Sont-ils assez autonomes pour gérer aussi régulièrement que possible
accepté par tous. Mais pourquoi traiter tout ce que l'on garde ? Pourquoi
leurs propres activités, en tenant compte, par exemple, du rythme des
ne pas identifier les autres sources de recherche présentant les
transactions (questions, recherches, diffusion, etc.) à assurer par jour,
documents de son fonds sans encombrer sa banque de données ? C'est
une autre façon de jouer les complémentarités, qui ne sont plus alors par semaine, par mois ?
géographiques mais thématiques. Et si l'on n'est pas véritablement L'étude précise des moyens dont on dispose est en fait l'élément
satisfait des notices consultées, pourquoi ne pas les télédécharger et décisif d'une politique documentaire. Trop souvent, les documentalistes
modifier, par exemple, le seul champ d'indexation pour le rendre rêvent au lieu de compter ; ils sont ensuite déçus de ne pouvoir aller
conforme aux habitudes des usagers ? A terme, face à la multiplicité jusqu'au bout de leurs rêves et cela leur coûte très cher... Ce n'est pas
des sources d'information, chaque service ne devrait plus avoir à traiter abdiquer devant les gestionnaires que d'être réaliste face à la limite de
que la littérature grise de son entreprise, en jouant ainsi un rôle irrem- ses moyens, en n'entreprenant que ce que l'on pourra mener à bien.
plaçable de dépôt légal.
Enfin, il existe un autre encombrement, de nature qualitative, qui Les moyens intellectuels
pose le problème réel de la cohérence scientifique des banques de Quel est l'effectif du personnel disponible? sa polyvalence? sa
données. « La plupart des banques de données sont aujourd'hui compétence ? 11 n'est pas inutile de s'interroger sur les qualités requises
comparables à d'immenses machines à enregistrer qui additionnent les pour effectuer l'analyse documentaire.
documents en les empilant les uns sur les autres sans souci d'animation
ou de coordination de ces documents entre eux [...] L'addition sans Très souvent, il est demandé à l'analyste une compétence dans le
synthèse régulière des savoirs humains... ouvre ainsi sur le gaspillage domaine ou dans la discipline propres à l'activité de l'entreprise. Cela
est juste dans certains cas, tels qu'un laboratoire pharmaceutique, un
du travail documentaire et du travail scientifique. I 0 »
service d'analyse économique, un centre de recherche nucléaire — dans
La question de la sélection, importante pour l'image même de la tout lieu où la compréhension précise du contenu est indispensable
profession, sera traitée à plusieurs reprises dans ce manuel. pour sélectionner, valider et transmettre l'information. Il est préférable
alors qu'un spécialiste du domaine se forme aux techniques de
l'analyse. Mais si cette option n'est pas acceptée par l'entreprise, il reste
LES MOYENS DU SERVICE au documentaliste à passer ses capacités au crible de trois questions :
« Que sais-je sur le sujet ? », « Que sais-je sur les besoins de l'entre-
Les moyens matériels prise ? », « Que sais-je sur moi-même ? »
Une minorité de services de documentation ne dispose pas encore
• « Que sais-je sur le sujet ? » Si la réponse est « peu de choses »,
d'outils informatiques. Mais ceux qui sont informatisés ont-ils eu le
il est indispensable de trouver un recours dans l'entreprise,, ce qui ne
choix du logiciel, ou leur a-t-on imposé des SGBD standard ou un
signifie pas qu'on se sente dévalorisé. Le documentaliste est embauché
logiciel « maison » dont on sait que la maintenance est rarement
pour traiter et diffuser l'information utile et non pour être aussi
assurée ? Peuvent-ils compter sur des outils informatiques souples et
ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES
DÉFINITION ET PRATIQUES

• « Que sais-je sur moi-même ? » Autrement dit : « Quelle est ma


économiste ou biologiste, ou spécialiste de tout autre discipline qu'il capacité de recul lorsque je lis un texte, à quelle place se situe ma sub-
eût fallu expliciter au moment de l'embauche (et de la détermination du jectivité ? » II est illusoire de considérer l'objectivité comme acquise
montant du salaire...). Le documentaliste a le droit et le devoir de dans l'opération de traitement d'un texte, quel qu'il soit. Or il n'est pas
demander une aide à un spécialiste du domaine dans lequel il doit
question pour l'analyste de faire l'impasse sur ses opinions (comment le
opérer, sans en posséder le savoir : « La compétence du destinataire
pourrait-il ?), mais au contraire d'en avoir une connaissance précise, de
n'est pas nécessairement celle de rémetteur." » Peu à peu, il acquerra
manière à ne pas être piégé par toute lecture « pour ou contre ». La
les grands traits, la terminologie et la connaissance du milieu. « Un
situation la plus difficile est du reste d'avoir à sélectionner des articles
texte repose sur une compétence mais, de plus, il contribue à la
dans une revue dont on partage les opinions : comment accepter qu'ils
produire. " » Le plus souvent, ce n'est pas la connaissance du domaine
ne soient pas tous le reflet de la (de ma) vérité ? Le problème de la sub-
ou de la discipline qui est prioritaire pour l'analyste, mais celle de la
jectivité n'est pas négligeable et on ne peut pas l'évacuer par une
littérature propre à ce domaine ou à cette discipline. Selon les cas, en
boutade. La vigilance est encore plus exigible lorsqu'on analyse la litté-
deux, trois ou six mois, un documentaliste digne de ce nom (c'est-à-dire
rature en sciences humaines ou sociales, les sciences exactes étant (et
pourvu d'une intense curiosité intellectuelle) saura repérer les auteurs,
encore,..) plus à l'abri des interprétations... Il est alors important de
les collections, les revues, les éditeurs reconnus dans le domaine. 11
faire appel au jugement d'autrui, de confronter des opinions différentes.
saura déjà sélectionner, puis valider avant de transmettre. De plus, sa
Lorsque l'obstacle paraît trop grand, lorsque discerner devient difficile,
position dans l'entreprise l'obligera à s'intéresser à toutes les périphéries
il est conseillé, dans la mesure du possible, de « laisser reposer » : il est
du domaine principal ; il est rare qu'un documentaliste n'ait pas à élargir
fréquent que les lendemains matins apportent la clarté attendue, surtout
le cadre de ses compétences ; c'est du reste l'un des aspects les plus
si l'on a pu exposer ses difficultés au cours d'un échange professionnel
fascinants de la fonction. « C'est un des rôles de la culture générale que
(ou non) fructueux. Qu'ajouter, sinon qu'il ne s'agit pas ici de compé-
de préparer des généralistes, c'est-à-dire des spécialistes de la traduc-
tences techniques ou intellectuelles, mais d'introspection personnelle
tion, de la transposition, de l'inter-relation, qui, plongés ou non dans
pour laquelle il existe d'autres manuels que celui-ci ? Toutefois, cet
une ou plusieurs spécialités, restent ouverts à toutes et capables de les
aspect du travail sera à nouveau évoqué, en particulier dans les exerci-
articuler à l'objet commun. " » ces et leur corrigé.
• « Que sais-je sur les besoins de l'entreprise (dans le cadre d'un
service interne) ? » Si la réponse est « ce que tout le monde en sait
dans le service », c'est sans doute insuffisant. Ce qui peut arriver de
pire à un analyste, c'est de ne faire que des analyses ; c'est le meilleur
Le terme « analyse documentaire » couvre uniquement les opérations
moyen de s'enfermer dans un monde de plus en plus abstrait en perdant
intellectuelles (comprendre, formuler) préalables à l'action dont les
le contact avec les vrais besoins. Ceux-ci sont repérables chaque jour produits les plus visibles sont le résumé et l'indexation. Pour en aborder
en écoutant les questions des utilisateurs. L'idéal pour un documen-
la pratique, plusieurs phases préparatoires sont indispensables :
taliste-analyste, c'est l'alternance entre les périodes centrées sur les - être très au clair sur la finalité et les conditions du travail, c'est-à-
textes et les périodes ouvertes sur les questions. Les deux activités se
dire avoir réfléchi et répondu aux questions concernant la, politique
nourrissent l'une l'autre et avivent leurs qualités respectives. L'infor-
documentaire (</.' p. 19-20). On doit savoir pour qui, pourquoi l'on
mation sélectionnée, validée à partir du texte, devient aussi utile face
travaille et quel en sera le produit ;
aux questions.
DÉFINITION ET PRATIQUES
ANALYSE ET POIFTIQUE DOCUMENTAIRES

- s'interroger sur la façon dont on lit, dont on repère le sens et le 8. Source : [50], p. 19.
vocabulaire d'un texte ;
- considérer les différentes facettes des documents ; 9. Source : [16].
- repérer les différentes formes d'information qu'ils contiennent ;
10. Source : [14], p. 70-71. Cet ouvrage sera souvent exploité car il abonde
- identifier les différentes pratiques de recherche documentaire.
d'idées vivifiantes pour notre profession. Que l'auteur soit ici spécialement
Pour l'étudiant débutant, il est nécessaire de passer par ces étapes remerciée pour la qualité de son apport à la pensée documentaire.
pour parvenir à résumer et indexer dans une optique documentaire.
11. Source: [33]. p. 64.
Le professionnel exercé accomplit de façon globale tout ce qui est
12. Source: [33]. p. 69.
détaillé dans les chapitres suivants : observer, comprendre, structurer,
formuler, résumer, indexer. C'est pour lui une activité qu'il cherche à 13. Source: [32], p. 135.
améliorer chaque jour, comme le sportif à l'entraînement. Mais, tout
comme le sportif, il peut lui être utile de disséquer très précisément
chaque phase de l'action, en vue de découvrir en quoi et comment il est
possible de l'améliorer et en y découvrant le passage incessant des opé-
rations mentales (et non techniques) de l'analyse à la synthèse, et vice
versa.

NOTES

1. Toutes ces définitions sont extraites de [29].

2. Source : [7].

3. Extrait de la dernière version du Dictionnaire de Terminologie archivisttque,


à paraître en Tan 2000.

4. Source : [77], vol. 33, n° 2, p. 86-88.

5. Source : [2], vol. 24, n° 3, p. 142.

6. Source : [50], p. 56.

7. Source : [74]. p. 31.


ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 1

Le lecteur désireux de tester ses possibilités peut, à présent,


rédiger un résumé documentaire tel qu'il le ferait pour son
entreprise, ou selon l'idée qu'il s'en fait, puis l'indexer, c'est-à-dire
choisir des mots clés qu'il juge significatifs pour caractériser le
contenu.
Le texte proposé (Liliane Lurçat. — Les effets violents de la télé-
vision. — Esprit, juillet 1994, n° 7), présenté en page 227, a été
choisi en fonction de sa bonne lisibilité et de son sujet, un intérêt
que l'on peut juger commun à tous. Sa bonne tenue intellectuelle
a aussi influencé le choix : on ne résume pas n'importe quoi en
documentation.
Il servira plusieurs fois au cours de ce manuel ; c'est pourquoi il
est recommandé de garder sous la main ce premier travail afin de
le confronter aux différentes phases qu'il illustrera : typologie et
caractéristiques d'un document (p. 35-47), grille de lecture (p. 73-
93), correction de résumés sous l'aspect formel et rédaction de
résumés (p. 121-148), enfin indexation (p. 149-173).
Il peut être intéressant de mesurer le temps passé à ce premier
exercice afin de le comparer aux progrès certainement réalisés en
fin de parcours.
CHAPITRE II
LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER

En se basant sur la définition de la politique documentaire, l'analyste


sélectionne les documents qui alimenteront la banque de données. La
première phase de l'analyse documentaire consiste à prendre connais-
sance de chaque document et à sélectionner ce qui est jugé intéressant
pour le produit à fournir. Ce premier travail suppose la lecture et l'iden-
tification précise du document.
On peut dire du documentaliste qu'il n'arrête pas de lire ; dans le
même temps, il se plaindra qu'il ne lit plus. Comment expliquer ce
paradoxe '? Sans doute par l'idée commune qui voit dans la lecture un
divertissement. Chacun à leur manière fort différente, Proust, Borges et
Pennac ont écrit des pages éblouissantes sur le plaisir de lire. Qui peut
nier l'existence de ce plaisir, le bonheur et la fascination qu'il procure ?
Cependant, le jeune étudiant choisissant la profession de bibliothécaire
ou de documentaliste parce qu'il « aime lire » découvrira vite une
réalité tout autre : dans .su vie professionnelle, le documentaliste ne lit
plus pour lui, mais pour d'autres ; il ne choisit pas ce qu'il a à lire et
ne lit plus jamais un texte dans son intégralité.
Dès lors, la question cruciale se pose : que signifie « lire » pour le
documentaliste-analyste ? Comment ce professionnel saura-t-il « ne
plus lire » et, paradoxalement, exploiter ses non-lectures pour en ex-
traire matière à réponses, sachant que « tout lecteur a trois tâches à ac-
complir : visuelle (mise en pages, calligraphie), intellectuelle (compré-
hension, mémorisation), affective (intérêt, curiosité...)' » ? L'équilibre
intellectuel que nécessite cette pratique particulière et la réalisation de
ces trois tâches seront analysés tout au long de ce manuel. L'approche
visuelle cl l'approche intellectuelle seront directement étudiées. Quant
à l'aspect affectif— dont on penserait volontiers qu'il importe peu dans
le travail du documentaliste, obligé, de par son métier même, de lire des
textes qu'il n'aurait certainement pas choisis par plaisir — ,'il se révèle
omniprésent dans le rapport subjectivité-objectivité que nous avons
évoqué en page 29 et dont il sera de nouveau question plus avant.
LES CONDITIONS DE LA LECTURE DOCUMENTAIRE
bRE ET OBSERVER

CONNAÎTRE SES i.IMITES


Les conditions de la lecture documentaire
L'activité d'analyste, donc, requiert une grande attention. Un peu
comme pour l'entraînement sportif, il est recommandé à chacun de
SE CONCENTRER ET EN TROUVER LES MOYENS
suivre son propre rythme, sachant qu'il n'est ni mesure standard ni
Avant toute autre considération, l'analyste doit trouver l'environne- comparaison possible entre analystes. S'il existe une forme de compé-
ment et le temps favorisant la concentration, assertion aux allures de tilion, c'est avec soi-même et non vis-à-vis d'autrui. Il importe de rester
quadrature du cercle, tant est varié le travail du documentaliste et toujours un peu en deçà de ses possibilités, ce qui permet le plus sûre-
ment de les améliorer régulièrement. Comme pour l'ensemble des
tenace l'idée de sa totale disponibilité. activités intellectuelles, il faut «savoir respirer», ne serait-ce qu'en
Comment, en effet, prendre connaissance d'un texte et de ses infor- s'accordant deux à trois minutes de véritable détenle entre deux
mations primordiales, alors qu'on est installé au milieu d'une salle de documents. Ces pauses permettent de régénérer les facultés de concen-
lecture bruyante et passante, et qu'on peut être sollicité à tout moment tration, et, par conséquent, de gagner du temps — non d'en perdre.
par les utilisateurs, des appels téléphoniques, un collègue demandant
de l'aide ou manifestant simplement le besoin d'un moment de détente ?
Pourtant, parce que cette situation est habituelle, elle est considérée ORGANISER SA LECTURE
comme normale. Pourrait-on porter un regard critique sur cet état de
Les piles de documents présentent souvent un caractère dissuasif.
fait et trouver le moyen d'y remédier ? sinon découragcanl ! Par l'observation préalable (cf. p. 3K-44), qui
La réponse est simple : l'analyste doit pouvoir disposer de une ou permet d'affecter une priorité à tel type de documents, ou à telles
deux heures de tranquillité absolue, sans sollicitation extérieure, à des revues, ou à tel domaine, le documentaliste peut alléger sa tâche de
périodes régulières correspondant à une charge de travail décidée dans manière significative. Quelques mesures faciles à mettre en œuvre
le cadre de la politique documentaire. contribuent à cet allégement des bureaux ainsi que des esprits, telles
que se débarrasser très vite des revues au contenu superficiel ou aux
Cette solution présente de nombreux avantages, et spécialement
sujets simples et faciles à traiter; grouper et analyser à la suite les
ceux-ci : documents couvrant des domaines à peu près similaires ; traiter les
- un travail suivi permet l'approfondissement de la tâche, une documents plus difficiles ou plus importants lorsque la qualité de
meilleure qualité du produit, ainsi qu'un gain de temps ; l'attention et de la concentration est la plus grande.
- le fait d'exiger le respect d'une opération la valorise. Or la lecture
documentaire, insérée parmi d'autres opérations, est actuellement
considérée comme quasiment négligeable. Petit détour par la « lecture rapide »
(Cette dernière remarque vaut pour un grand nombre d'opérations
documentaires qui exigent par nature une attention soutenue et une
concentration importante. Elles sont, malheureusement, souvent exé- Les méthodes dites de « lecture rapide » sont basées sur dc's exercices
cutées comme des tâches bureaucratiques répétitives et considérées progressifs de perception oculaire ; les mécanismes ainsi mis en place
permettent d'augmenter la vitesse d'appréhension de la vision. Elles
comme telles par l'encadrement de l'entreprise.)
OBSERVER AVANT DE LIRE
LIRE ET OBSERVER

La typologie
présentent des avantages certains pour un public déjà conscient de ce
qu'est l'acte de lecture — le Robert donne, du verbe lire, une première C'est un premier repère. On n'analyse pas un article de revue men-
définition ainsi formulée : « suivre des yeux en identifiant (des suelle comme un quotidien, un brevet comme un texte législatif, une
caractères, une écriture...) ». monographie comme une note technique. Le regroupement des
Pour le jeune étudiant, habitué aux exercices universitaires, il peut supports par type est un bon moyen d'entrer dans un processus de
s'agir d'une prise de conscience bénéfique de ce qu'est le déchiffrement, lecture.
activité oculaire à partir de laquelle cessent malheureusement de pro- Chaque type présente des caractères formels spécifiques. Une mono-
gresser ceux qui deviennent des illettrés. Une série de méthodes et/ou graphie a toujours un titre, quelquefois un sous-titre, toujours une table
techniques — appelées souvent « écrémage », « repérage », « survol » des matières, souvent une bibliographie et un index, et elle peut faire
ou « mémorisation » — suivent généralement, plus ou moins bien expli- partie d'une collection. Une revue nécessite un dépouillement, à moins
citées selon la qualité des ouvrages et des formations. L'important est de qu'il ne s'agisse d'un numéro spécial ou consacre à un sujet. Un rapport
mesurer ce qu'apporté la « lecture rapide » à la vie professionnelle. peut être assimilé à une monographie. Les notes techniques sont (géné-
S'il s'agit de tout lire très vite, de façon mécanique, on en devine ralement) toujours présentées de la même façon. Feuilleter rapidement
l'absurdité, stigmatisée par Woody Allen lorsqu'il s'affirme capable de permet d'évaluer les conditions de lisibilité (cf. p. 40-44) et les caracté-
'
lire les Frères Karamazov en quinze minutes chrono... En revanche, si ristiques propres à chaque document.
ces méthodes permettent d'appréhender un ensemble de documents en
vue de les sélectionner plus vite et de repérer ainsi ceux qui exigeront
Les caractéristiques
plus de temps (cf. page précédente), alors la lecture rapide, prenant
toute sa raison d'être, devient lecture efficace, quelquefois même Un autre repère comprend les caractéristiques d'un document, c'est-
appelée « lecture adulte 2 ». à-dire l'ensemble des éléments visibles et repérables permettant déjà de
Le professionnel exercé élabore souvent sa propre méthode, sans être sélectionner :
capable, généralement, d'en préciser la teneur. L'essentiel est qu'il reste • Que connaît-on de l'auteur, de son œuvre (cf. « œuvres du même
lucide sur sa pratique de lecture et qu'il cherche toujours à l'améliorer. auteur» sur les pages de garde) ou de son affiliation (organisme de
rattachement, niveau de responsabilité) ?
• Quelle est la revue ? Quelle est son ancienneté ? Quelle est sa pério-
Observer avant de lire dicité 7 Comment est-elle financée? Provient-elle d'un groupe de
presse? d'une société savante? d'une association professionnelle?
d'une municipalité ? d'un ministère ? Quelle est son orientation ?
OBSERVER UN DOCUMENT
• Qui est l'éditeur ? Que produit-il habituellement ? Est-il
Quand on survole un paysage, on en a une vue panoramique. spécialisé 7 généraliste ? Peut-on prendre connaissance de Ses produits
Survoler, pour ce qui nous concerne, signifie donc observer globale- par des catalogues complets, régulièrement mis à jour ? Quelles sont
ment le document comme un objet doté d'un volume, d'un poids, d'une
ses tendances scientifiques, économiques, politiques, etc. ?
couleur, d'une forme.
OBSERVER AVANT DE LIRE
LIRE ET OBSERVER

Exercer un repérage visuel consiste à survoler, feuilleter un


• Le document a-t-il pour origine un organisme officiel ou para- document. Il n'est pas question de lire le texte, mais d'observer certains
public ou associatif ? Est-il facilement accessible ou relève-t-il de ce éléments de présentation qui le constituent :
que l'on appelle « littérature grise », c'est-à-dire tous les documents - la typographie ;
produits sans objectif de commercialisation ? - la présentation (organisation des chapitres, titres, sous-titres, notes
en bas de page...) ;
• Le document fait-il partie d'une collection ? Qui en est le directeur
- les illustrations (photographies, dessins, couleurs, légendes...) ;
scientifique? Quel est son objectif? L'analyste a-t-il déjà étudié
- l'importance des paragraphes, des alinéas, des espaces (marges,
d'autres monographies de cette même collection ? interlignes simple, double...) ;
• Quelle est la date du document ? Est-ce une réédition, c'est-à-dire - la ponctuation.
une mise à jour, ou une refonte du contenu garantissant son actuali- Le regard doit parcourir rapidement l'ensemble et en appréhender
sation (à ne pas confondre avec une réimpression, qui n'est qu'une « l'architecture » avant même de lire (voir page suivante).
nouvelle mise sur le marché de la dernière édition parue) ?
Tous les textes n'étant pas systématiquement présentés de façon aussi
• Est-ce une traduction ? De quelle langue et de quel pays ? A-t-on lisible, il paraît utile de rappeler brièvement les fonctions des
• connaissance du titre original, du premier éditeur ? paragraphes et des signes de ponctuation pour comprendre l'intérêt de
révélation rapide que possèdent ces entités au moment du repérage
11 apparaît donc ici clairement qu'il ne s'agit pas de lire, mais bien de
visuel.
- repérer les éléments constituants qui permettent de se faire une idée de
l'objet et d'entrer rapidement dans le sujet.
Le paragraphe
L'identification bibliographique permet de répondre à quelques-unes
Le paragraphe est un ensemble signifiant composé d'une suite de
de ces questions grâce aux zones préconisées par les normes de
phrases ou subdivisions du discours possédant une cohérence séman-
catalogage : auteur, adresse bibliographique, date, collection, etc.
tique. Une unité d'information est privilégiée, perçue comme essen-
En renseignant les champs de description de sa banque de données tielle, toutes les autres s'accrochant à cette unité, en entretenant des
(cf. p. 101-102), l'analyste s'approprie le document et approche peu à rapports sémantiques les unes avec les autres. Entre la fin d'un paragra-
phe et le début du suivant se situe la phrase de transition.
peu l'information qu'il détient.

Les signes île ponctuation


OBSERVER LA MISK EN PAGES : LIL RKPÉRAGI-: visu KL Tous les signes de ponctuation ont un sens et exercent une fonction
précise 1 :
Cette phase d'observation, hélas ! souvent négligée par les documen- - le point (.) indique la fin d'une phrase, celle-ci exprimant un sens
talistes, est pourtant le point de départ essentiel pour l'analyse du complet ; .
contenu, la compréhension des textes et la sélection des informations - la virgule (,) sépare, au sein d'une phrase, des éléments semblables
utiles. Elle est, de surcroît, un excellent outil pour une meilleure gestion (mots ou propositions) ;
du temps.
LIRE ET OBSERVER
OBSERVER AVANT DE LIRE

Introduction indiquant
- le point-virgule (;) sépare des propositions de même nature à l'inté-
le nombre de parties
rieur d'une même phrase ;
- les deux-points (:) annoncent une énumération ou une citation ;
- les parenthèses () intercalent, à l'intérieur de la proposition, une
double interligne
indication explicative ou accessoire ;
- le tiret (—) sépare du contexte de la phrase des mots ou des pro-
Première partie : 1 positions ;
- le point d'interrogation (?) exprime la demande, le questionne-
simple interligne ment direct ;
Première partie : 2 - le point d'exclamation (!) clôt une phrase exprimant un sentiment
spontané ou violent ;
simple interligne - les guillemets (« ») encadrent une citation ou un discours direct ;
Première partie : 3 - les points de suspension ( . . . ) indiquent l'inachèvement non de la
phrase, mais de la pensée exprimée. Lorsque les poinis de suspension
simple interligne sont encadrés par des crochets carrés ([...]), ils indiquent une sup-
Paragraphe de transition pression clans une citation ;
l'alinéa s'emploie pour passer d'un groupe d'idées à un autre.
double interligne
De l'utilité du repérage visuel
Deuxième partie ; 1 Grâce au repérage visuel, l'analyste est donc, avant lecture, en
mesure de se faire une idée de la composition du texte. En général, on
considère que l'abus des paragraphes longs et lourds dénote l'impuis-
simple interligne sance à organiser les idées et à les exposer clairement, alors qu'un sur-
Deuxième partie : 2 plus d'alinéas prouve la difficulté à hiérarchiser des idées afin de les
présenter en ensembles cohérents. Toutefois, l'écriture est sensible, elle
simple interligne aussi, aux effets de mode. Ainsi le style journalistique actuel fait-il bien
Paragraphe de transition trop souvent l'impasse sur les verbes, moteurs de la phrase. Ceux-ci
sont normalement repérables grâce aux points et points-virgules qui
séparent des propositions normalement constituées. De même, les
double interligne
points d'interrogation peuvent indiquer les questions que se pose
Troisième partie : 1 l'auteur. Y répond-il dans le texte (voir exercice n° 5, p. 47) ? Peut-on y
discerner l'amorce d'un plan ?

simple interligne Tout en pratiquant le repérage visuel, l'analyste passe rleu à peu de
l'observation à la lecture. Il peut ainsi identifier le domaine, la grande
etc.
discipline, dans lequel se situe le texte et le type auquel il appartient :
LIRE ET OBSERVER ANNEXE PÉDAGOGIQUE

savant (paragraphes denses, tableaux légendes...), et/ou technique


(schémas, chiffres...), ou encore « grand public » (encadrés, illustra-
tions, couleurs...), sans attribuer, pour autant, à ces observations un
Les différents exercices proposés n'ont qu'un objectif : entraîner
caractère immuable. à voir avant de lire. Ils exigent donc une certaine discipline indivi-
Le repérage visuel donne, certes, une idée que l'on peut qualifier duelle pour s'observer en train d'observer !
d'« extérieure » du texte, mais il ne s'agit pas pour amant de détails
Étudiants ou professionnels sont invités à faire ces exercices en
anodins : la mise en pages et l'application des règles de lisibilité son!
chronométrant très fidèlement le temps passé ou en s'aidant d'un
des garanties d'intérêt. Sans affirmer que médium et message ne font
qu'un, force est de reconnaître que le premier contribue fortement à la compte-minutes.
diffusion et à la compréhension du second. En effet, tout doit être terminé dans un temps défini, afin de
Cette première phase d'appréhension du document est également conjurer toute tentation d'entrer dans le contenu des documents.
utile pour la gestion du temps car il devient alors possible d'affecter un
ordre au travail du jour : des textes les plus faciles, rapidement traités,
aux plus complexes, demandant davantage d'attention.
Exercice n° 2 - Typologie et caractéristiques

Réunissez de façon aléatoire (ou trouvez) un grand nombre de


documents textuels sans vous soucier de leur origine, en vue de les
trier par type (ouvrages et revues édités commercialement et
littérature grise ; textes officiels, notes techniques internes à un
NOTES organisme), puis de les comparer et d'opérer une distinction, par

1. Source: [76]. exemple :


- par date ;
2. Voir à ce sujet : [ 54]. - par langue d'origine ;
- par types d'éditeurs, pour les revues. Leur périodicité et leur
3. Toutes ces définitions sont extraites de [38].
origine éditoriale doivent être relevées car elles pourront servir de
critères de sélection.
Chacun doit pouvoir imaginer des catégories selon ses propres
objectifs de lecture et de travail.
L'intérêt est de faire cet exercice à intervalles réguliers et de
minuter son temps pour un même nombre de documents. On doit
aller de plus en plus vite, tout en acquérant un regard de plus en
plus aigu sur l'aspect extérieur des documents.
ANNEXE PÉDAGOGIQUE
LIRE ET OBSERVER

Exercice n° 5 - Repérage visuel à l'aide des signes typographiques


Exercice n° 3 - Caractéristiques d'un document
L'objectif est de repérer rapidement des ponctuations servant de
L'objectif est de repérer les éléments caractéristiques d'un balises pour entrer dans le contenu.
document apportant des critères de sélection autres que le
Regardez (sans le lire) le texte ci-dessous en vue de déterminer
contenu. combien de parties seront développées après ce paragraphe.
Utilisez l'article « Les effets violents de la télévision », proposé en Extrait de : Guy Le Boterf. — De la compétence à la navigation
page 227. En se basant sur les questions soulevées p. 39-40, peut- professionnelle, -- Paris : Éditions d'Organisation, 1997 (§ 1,
on en savoir plus sur la revue et sur l'auteur ? En admettant que le
chap. I).
sujet soit intéressant, quels sont les éléments extérieurs au contenu
qui peuvent influer — ou non — sur la sélection de cet article ? La réponse doit être donnée dans les 5 secondes. Correction en
page 268.
Temps maximum si la revue est connue : 2 minutes ; si la revue
n'est pas connue : 5 minutes. Correction en page 267.
Pourquoi cet appel croissant à In notion df professionnalisme ? Qjieltfs sont les
raisons qui poussent acttuBement 1rs responsables des entreprises et ries organi-
sations à rechercher des professionnels et à mettre en place des dispositifs de pro-
fes.sionnalisa.lion ? Comment expliquer cet effarement progressif de la figure de
Exercice n° 4 - Repérage visuel des paragraphes d'un texte
l'ouvrier qualifié ou de l'homme de métier au profit de relie du professionnel ? f>
changement de langage est-il dû à des effets de modes passagers ou réf>ond-il à de
Prenez un article de revue et ne le lisez surtout pas, mais nouvelles exigences des situations et des organisations du travail ?
observez-le en vous posant les questions suivantes :
OParts : Éditions d'Organisation, 1997
- combien de parties cet article comprend-il ?
- existe-t-il des paragraphes de transition ?
- peut-on en faire le schéma comme en page 42 ?
- peut-on en déduire quels sont les paragraphes à sélectionner
pour la lecture ?
Renouvelez l'exercice de façon régulière, en variant les articles et
les revues.
Rappelons encore une fois qu'il s'agit de regarder, et non de lire.
Cette situation inhabituelle est, certes, très difficile à supporter,
mais l'intérêt de cet exercice est de développer cette approche
essentielle, et sa répétition est nécessaire pour qu'elle devienne
familière. Une fois cette pratique acquise, plus question de se
laisser impressionner par des articles longs et sans intertitres !
Selon la longueur et la complexité de l'article, le temps peut
-varier de 30 secondes à 2 minutes (ce qui est très long).
CHAPITRE III
LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE

Le repérage visuel a rendu l'objet familier et l'analyste est, plus ou


moins consciemment, progressivement « entré » dans le document, en
identifiant ainsi le contenu principal, ou domaine d'intérêt.
De la visibilité, il passe à la lisibilité, puis à la lecture au sens de
« faire du sens avec des signes ». Les signes étant repérés, les plus im-
portants étant sélectionnés, il reste à « fabriquer » du sens, c'est-à-dire
à entrer dans le processus de compréhension des textes en commençant
par en identifier les principales caractéristiques.

Les textes ci leurs caractéristiques

Si le repérage visuel a permis d'inscrire le texte dans son domaine, le


lire s'impose désormais pour déterminer ce que l'on nomme soit « caté-
gorie d'intérêt », soit « typologie des informations ». Il importe donc,
maintenant, de se poser les questions suivantes ;
• Pour qui le texte a-t-il été écrit ? Quels niveaux ou types de
compétence requiert-il pour être exploité (quelquefois, l'existence et le
contenu d'une bibliographie apportent des éléments de réponses) ?
• Que peut-on en extraire ? description de faits uniquement ? ou éga-
lement réflexions, commentaires sur ces faits ? expériences confirmées
ou témoignages hâtifs ? démonstrations ? état de la question, etc. ?
Selon les lieux documentaires, une typologie des informations
permet de repérer rapidement l'intérêt, la valeur d'usage de tel ou tel
texte. Ainsi, par exemple, une banque de données de presse propose-
t-elle interview, biographie, chronologie, enquête, etc. ' (cf. p. 102-105).
Une lecture plus approfondie aide à caractériser le contenu sous
différents aspects. Tout texte est écrit pour atteindre non seulement un
public, mais aussi un but.
LIRE ET COMPRENDRE LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

Avant de chercher de quoi le texte traite, l'analyste peut repérer législatifs) font l'objet d'une réécriture explicative pour le public non
comment il se présente et quel objectif intellectuel s'est fixé l'auteur. juriste. Le meilleur exemple est celui des publications Liaisons sociales.
Pour simplifier, on peut classer tes textes en deux grands types : des- Ces textes, d'origine normative, deviennent alors des textes didactiques.
criptif et problématique.
LES TEXTES PROBLÉMATIQUES

LES TEXTES DESCRIPTIFS


Ils décrivent une situation dans laquelle existent ou co-existent un ou
Ils présentent les éléments d'un événement dans un temps et dans un plusieurs problèmes. Le mot « problème » doit être ici compris comme
espace ; ils décrivent une situation statique ou évolutive. On distingue expose de la complexité d'une situation, d'une idée ou d'un raison-
nement. Un texte problématique se compose toujours d'une partie
quatre types différents.
descriptive, en général située au début.

Texte narratif
Texte problématique simple
11 décrit le déroulement, l'évolution, la transformation d'une action,
souvent de façon imaginaire (roman, nouvelle, théâtre). Si ce texte n'est Dans un texte problématique simple, l'auteur du texte décrit la
pas de nature scientifique et technique, il ne peut être l'objet d'une ana- situation complexe, expose les idées différentes, apporte quelquefois
des éléments de solution sans, cependant, prendre position ; il demeure
lyse documentaire.
toujours extérieur aux problèmes énoncés.

Texte explicatif
Texte argument al if
II décrit, lui aussis une action ou une idée sous les mêmes aspects,
mais il s'agit souvent d'événements réels (description d'une expérience, Dans un texte argumcntatif ou critique, l'auteur défend sa thèse, son
explication d'une notion ou d'une théorie, relation d'un voyage, d'une opinion face au(x) problème(s) décrit(s) ; il prend explicitement parti.
rencontre...) dont les éléments sont reliés plus ou moins logiquement.
Texte polémique

Texte didactique Un texte polémique est un texte argumentatif dans lequel l'auteur veut
convaincre son lecteur par tous les moyens.
C'est un texte descriptif explicatif où l'auteur a pour objectif de
faciliter la compréhension du contenu ; il y a volonté d'enseigner, de
transmettre un savoir (manuels scolaires ou universitaires,..).
LES TEXTES THÉORIQUES

Texte normatif II convient de réserver un paragraphe complet aux textes purement


II impose le contenu de ses informations comme règles : lois, consi- théorique.1; où sont exposées des constructions intellectuelles per-
gnes, normes, textes officiels, mais aussi notices techniques, Code de la mettant l'approfondissement des sciences, qu'elles soient exactes,
route, recettes de cuisine... Certains textes normatifs (comme les textes sociales ou humaines. « Les théories visent à atteindre des connaissan-
LIRE ET COMPRENDRE LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

ces nouvelles. Une théorie en remplace une autre parce qu'elle rend Exercice 6 - Reconnaître un type de texte
mieux compte du passé, mais surtout parce qu'elle ouvre l'avenir. 2 ».
Les textes théoriques sont descriptifs dans leur relation aux idées, mais Indiquez à quel type appartiennent chacun des quatre textes
ils ouvrent et délimitent un champ d'investigation porteur de dimen- suivants (extraits de S. Neveu, D. Lemaître. — Vers la maîtrise du
sions problématiques. texte. — Hachette, e Éditions Hachette).

La distinction entre ces types de textes ne revêt pas seulement un 6.1 - Ce texte est-il de type :
aspect didactique ; elle sous-tend véritablement un mode de lecture et DESCRIPTIF Q PROBLÉMATIQUE LJ
d'usage :
- les textes descriptifs (et théoriques) sont construits logiquement ; narratif LJ argumentatif LJ
leur plan est relativement facile à retrouver (cf. p. 76-79). Ils ne sus- explicatif LJ polémique LJ
citent pas une lecture trop subjective. Ils servent principalement à
didactique LJ
l'apprentissage, à la confirmation, à la recherche de preuves ;
- les textes problématiques confrontent des opinions diverses et normatif Q
peuvent ainsi troubler la subjectivité de l'analyste. Il est indispensable,
alors, d'identifier les systèmes de valeur tant de l'auteur que du lecteur
l^es jeux sont innombrables et de multiples espèces : jeux de. société, d'adresse, de
pour atteindre l'objcctivation nécessaire. Ce type de textes apporte des
hasard, de plein air, df patience, de. construction, etc. Malgré cette diversité pres-
informations complémentaires, aide à poursuivre ou approfondir une que infinie et avec une remarquable constance, le moi -jeu » appelle les mêmes
réflexion, à infirmer ou confirmer des points de vue, à infléchir des idées d'aisance, de risque ou d'habileté. Surtout, il entraine immanquablement
décisions1. une atmosphère de délassement ou de divertissement, il repose et il amuse. Il évo-
Repérer la typologie des informations contenues dans un texte et que une activité sans contrainte, mais aussi snn.s conséquence pour la vie réelle.
Il s'oppose au sérieux de celle-ci et se voit ainsi qualifié de frivole.. Il s'oppose
émettre des hypothèses sur les intentions de l'auteur facilite la compré-
d'autre part au travail comme le temps perdu au temps plein employé. En effet, le
hension et, par suite, favorise l'analyse. Les textes suivants sont jeu ne produit rien : ni biens ni œumes. Il est essentiellement stérile. À chaque nou-
proposés comme exercices et illustrations. velle partie, et joueraient-iLs toute, leur vie, If s joueurs se retrouvent à zéro et dans
les mêmes conditions qu'au premier début. Issjeux d'argent, paris ou loteries, ne
font pas exception : iis ne créent pas de richesses, ils les déplacent seulement.
Cette gratuité fondamentale du jeu est Inen le, caractère qui le. discrédite le plus.
C'est elle aussi qui permet, qu'on s'y livre avec insmtdancf et qui le maintient isolé
des activités fécondes. Chacun, dès l'abord, se persuade de cette manière que le jeu
n'est rien que fantaisie agréable et distraction vaine, quels que soient le soin
qu'on y apporte, les facultés qu'il mobilise., ta rigueur qu'on exige.. On le sent bien
dans la phrase suivante de. Chateaubriand : - La géométrie spéculative a ses jeux,
ses inutilités, commet les autres sciences. »
(Extrait de Roger CAILLOIS. -- les Jeux et les Hommes. -
Gallimard, 1967.)
© Édition; Gallimard
LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES
LIRE ET COMPRENDRE

Moralisatrice ? H n 'est personne parmi les partisans de la peine de mort qui ait
6.2 (Deux extraits du Journal officiel. Annales de la Chambre des osé soutenir que la peine de mort soit moralisatrice.
députés, 1908 : extraits des discours de 1) Maurice Barrés; 2) Elle l'est si peu, que ceux qui en demandent le maintien sont d'accord pour qu 'elle
Aristide Briand). soit appliquée dans l'obscurité. De même que le meurtre privé se cache par crainte,
vous demandez que le meurtre social se cache par honte f . . . ]
Ces textes sont-ils de type : La peine de mort est-elle du moins exemplaire ? On vous a rappelé comlnen de
DESCRIPTIF Q PROBLÉMATIQUE Cl criminels, au moment de l'exécution, ont avoué avoir assisté antérieurement à de
tels spectacles.
narratif Q argumentatif Q Je suis arrivé au point If plus intéressant du problème : la peine de, mort
explicatif Cl polémique Q exercerait-elle une intimidation sur les malfaiteurs ? Si la peine de mort a une
puissance d'intimidation, sa suppression doit amener immédiatement une
didactique Q recrudescence des crimes ; si cette, recrudescence ne. se manifeste pas, c'est que
l'abolition demeure sans effet.
normatif Cl Or, c'est la conclusion à laquelle, on aboutit quand on considère les différents pays
où la peine de mort a été supprimée, et quand on ne prend pas les chiffres d'une
1 - Si nous supprimons la peine de. mort, si nous faisons cette expérience de désar- année pour les opposer arlntrairement à ceux d'une autre année, quand on prend
'• mement, au risque de qui serait-elk faite ? Il faut bien le constater : ce sont les
pauvres que nous découlerons, ce sont eux qui pâtiront d'abord. Qjioi qu'on fasse,
des périodes suffisamment longues, des périodes de dix ans, par exemple [...].
O Journal officiel

il est bien certain que la police protégera toujours mieux les riches que Ifs pauvres
/.../
Cette suppression de la peine de mort sera-t-elle, un ennoblissement de notre civili-
6.3 - Ce texte est-il de type :
sation ? Si quelques-uns sont disposés à U croire, c'est qu'ils désirent mettre, de
plus en plus, notre soâété d'accord avec les données que nous fournit Ifi science. DESCRIPTIF G PROBLÉMATIQUE Q
Nous écoutons les médecins qui nous disent en regardant le.s assassins : « Ils sont
narratif CJ argumentatif Q
nécessité. Celui-ci tient son crime de. son atavisme, cet autre If tient du milieu
dans lequel il a été plongé >• [... / explicatif CJ polémique Cl
Pour ma part, je demande que l'on continue à nous dél>arrasser de ces dégradés,
didactique CJ
de ces dégénérés dans les conditions légales d'aujourd'hui, en tenant compte des
indications qui nous sont fournies par les hommes de science compétents, quand normatif CJ
ils nous disent que celui-ci relève des asiles plutôt que de la punition. Je crois qu'il
y a lieu de recourir à la punition exemplaire.
C'est par amour de la santé sociale, que je rote le maintien et l'nftfiliration de la L'automobile est un excellent et agréable, engin de transport rapide d'un point a
peine, capitale. En tout cas, qu'il me snit permis de vous dire en terminant, que un autre, mais un détestable moyen d'investigation. Jamais on n'a tant voyagé,
cette mesure que vous croyez une mesure de générosité, c'est une générosité que et jamais aussi fe.s gens n 'ont moins profité de leurs voyages. Ces malheureux, qui
nous ferons aux dépens des autres. avalent pêle-mêle des kilomètres et des sauces sophistiquées dans des auberges
d'opéra-comique, traversent la moitié de la Erancf, six provinces, trente villes,
quatre cents villages, vingt siècles d'histoire, de coutume, de vieux1 terroir, de
2 - Recherchons si la peine de mort présente les qualités que doit avoir un finesse paysanne, sans en retirer d'autres souvenirs que ceux d'un embarras
châtiment dans une société civilisée. Elle dei'iait être tout à hijots moralisatrice gastrique et de trois fmeux crevés.
et intimidante.
LIRE ET COMPRENDRE LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES

C'est presque une banalité de répéter que la seule manière adéquate de visiter CARACTÈRES GÉNÉRAL ET SPÉCIFIQUE
certaines régions, c'est de les parcourir à pied. D'abord parce que la marche en
elle-même aiguise à la fois l'appétit et l'intellect autrement que les coussins d'une Une dernière phase d'analyse d'un texte en distingue le caractère
automobile, et plact naturellement le. voyageur dans un état de réceptivité qui général, spécifique et temporel.
multiplie l'intérêt de. tout ce qu'il rencontre.
Ensuite, parce que ce moyen-là est lent, il exige un effort personnel, permet
d'entrer en contact avec, les choses et les gens d'une manière progressive et. intime.
Texte de type générai
Et ceciest encore plus agréable qu'ailleurs en montagne, où l'extrême diversité des Un tel écrit traite d'un sujet dans sa globalité, hors du temps ou de
aspects, l'abondance des détails pittoresques ou humains sont dignes d'attirer à l'espace. La situation décrite est large, « relativement universelle », et
chaque instant l'attention de l'observateur. peut être comprise sans qu'il soit besoin de connaître la personnalité de
À pied, un arbre est un arbre, avec sa peau rugueuse, une fourmillière peut-être
l'auteur ou les circonstances qui l'ont conduit à écrire. Il s'agit le plus
entre deux racines et un écureuil charbonnier dans les branches. En voiture, c'est
une ombre parmi des centaines d'ombres toutes pareilles, quelque chose qui ne souvent d'un texte de type descriptif n'exigeant pas de l'analyste une
mérite même pas un regard. A pied, tout prend un sens, tout chante son petit connaissance préalable du sujet. Par exemple, dans les Jeux et les
couplet. Chaque brin d'herbe a son criquet ; une montée monte. Une source, c'est Hommes, Roger Caillois traite du jeu sous toutes ses formes et tous ses
une aubaine délicieuse. Un faucheur dans un pré, c'est un homme et non un aspects ; le jeu est ici thème d'étude exclusif.
vague accessoire à peine entrevu, fs. monde se subdivise à l'infini, révêle à chaque
seconde des visages dont on ne soupçonnait même pas l'existence, éveille l'intérêt Texte de type spécifique
par cent détails inattendus. Mais la vitesse unifie tout...
11 traite d'un sujet dans des circonstances qui exigent de le situer dans
(Extrait de Samivel. — l'Amateur d'abîmes. — Stock, 1981). un contexte historique, économique, culturel, etc. pour en comprendre
© Éditions Stock
toute la portée. L'analyste doit tenir compte de la personnalité de
l'auteur et des références éventuelles à la situation particulière décrite.
Par exemple, dans un grand nombre de ses ouvrages sur le développe-
6.4 - Appliquez la même grille au texte « Les effets violents de la ment psychologique des enfants, Jean Piaget traite du jeu comme aide
télévision » (p. 227). Commentaires en page 269. à ce développement ; dans cet esprit, il expose quels jeux sont favora-
bles à quels âges et pour quels développements. Notons que le contenu
du texte peut traiter du passé, du présent, se projeter dans le futur ou
couvrir l'un, l'autre ou les trois ensemble.

L'étude du document (contenant ou signifiant) et du texte (contenu ou


signifié) permet à l'analyste d'identifier l'environnement culturel de ce
qu'il doit traiter. Avant de résumer et/ou d'indexer, l'analyste peut
s'interroger sur :
- la place propre de l'auteur dans la façon de transmettre l'infor-
mation (ou contenu) ;
- la place propre du lecteur dans la façon de recevoir, comprendre et
réduire l'informât ion.
LES TEXTES ET LEUR CONTENU
LIRE ET COMPRENDRE

ration ? En effet, le rôle du documentaliste n'est pas d'accumuler des


Les textes et leur contenu connaissances pour lui-même, mais de les reconnaître, de les sélection-
ner et de les mettre en forme pour autrui.

Après avoir identifié la forme du document et l'intention de son La mémoire du lecteur spécialiste (chercheur, ingénieur, etc.) sélec-
auteur, l'analyste doit s'attacher à la compréhension du texte et au tionne les savoirs dans un certain domaine de recherche ou d'intérêt, les
compare aux acquis, les assimile ou les rejette. C'est une capitalisation
public auquel il est destiné.
en vue d'un projet personnel qui fait appel à une mémoire longue (ou à
long terme) et approfondie. Celle-ci constitue un stock de connaissan-
LA COMPRÉHENSION DU CONTENU
ces de longue durée, alimenté et renforcé régulièrement.
La mémoire du documentaliste est d'une autre nature. La sélection
La question a déjà été posée (cf. p. 27-28) : que sait-on sur le sujet '?
des savoirs s'effectue en vue d'ajouter de nouvelles références à un
L'aide d'un spécialiste, nécessaire au début, doit permettre d'élargir la
question à : «Que pouvons-nous connaître» quand nous lisons 4 ? ensemble documentaire organisé. C'est une mémoire de travail, courte
Quand il décrit la posture du « lecteur modèle », Umberto Eco parle des mais étendue, enfouie après chaque traitement, mais réactivée par
« mouvement coopératifs actifs et conscients de la part du lecteur », chaque nouveau texte. Avec l'expérience, la mémoire du documenta-
coopératifs car « un texte est un mécanisme paresseux qui vit sur la liste devient souvent une mémoire longue.
plus-value de sens qui y est introduite par le destinataire [...] un texte
veut que quelqu'un l'aide à fonctionner [...] un texte est émis pour quel- Inférence
qu'un capable de l'actualiser' ». Dans sa première lecture, dans sa ren- La perception et l'activation de la mémoire entraînent l'inférence, les
contre avec le texte, l'analyste met en activité non seulement la struc- relations entre savoirs, la mise en route d'une connaissance documen-
ture de ses connaissances acquises, mais aussi tout un processus psy- taire de plus en plus organisée, consciente, construite, à l'opposé d'une
chologique de perception, de mémorisation, d'inférence h . « culture mosaïque : morcellement des connaissances qui, privées de
leur cadre, ne permet pas de caler les éléments de la mosaïque entre
Perception eux, de reconstruire celle-ci, c'est-à-dire d'établir des relations entre les
Le repérage visuel, première appréhension d'un texte, induit la per- choses sues* ».
ception d'une forme, mais aussi de signes, et l'analyste, comme tout bon
lecteur professionnel, reconnaît dans un même temps les « signes
connus dans les signes vus 7 ». Cette reconnaissance s'appuie sur une
sorte de banque de données personnelle, ce qu'Eco appelle « sa propre La compréhension des textes repose donc sur un processus intel-
encyclopédie », variable selon les cultures et les expériences. lectuel complexe, éclairé par les sciences cognitives. Isabelle Monday
explique bien comment les schémas intellectuels que chacun se fabri-
Mémoires que « font office de structure de la mémoire humaine. Ils permettent
Cette banque de données mentale, comme toutes les autres, est aux individus d'encoder sous une forme ou une autre la* réalité les
activée au moment où l'on en a besoin, en faisant appel à la mémoire. entourant et, par le fait même, d'emmagasiner l'information perçue.
. Mais s'agit-il véritablement de mémoire ? Ne s'agit-il pas de remémo-
LES TEXTES ET LEUR CONTENU
LIRE ET COMPRENDRE

Aussi la somme de connaissances de chaque individu résulte-t-elle de L'histoire d'un terme en éclaire la teneur : né du latin, l'ancien fran-
cet encodage [...] continuellement stimulé par son environnement, çais enformer signifie à la fois « donner une forme à » et « instruire
l'individu incorpore à ses schémas personnels l'information perçue de ». Entre le xn e et le xvr siècle, le mot véhicule les deux sens :
« façonner, donner une forme » et, au figuré, « représenter idéalement,
dans son milieu ' ».
former dans l'esprit, se faire une idée de ».
Le champ de la compréhension est donc plus large que le savoir brut.
Si, au fil du temps, le premier sens a été oublié, le second trouve son
Au fur et à mesure que l'expérience professionnelle s'intensifie et
essor d'abord dans le vocabulaire juridique : l'information est « enquête
s'approfondit, l'analyste augmente sa capacité de perception, de mémo-
judiciaire ». « renseignement obtenu de quelqu'un ». De cette dernière
risation et d'infércnce. Il devient, de ce fait, plus à même d'anticiper, de
définition, on arrive à « renseignement obtenu sur quelqu'un », « action
pondérer, de relativiser l'importance de tel ou tel texte, de repérer les
de prendre des renseignements... que l'on porte à la connaissance du
vraies innovations, de sélectionner l'information utile. public ». d'où l'introduction du terme dans le monde de la presse.
Puis, en anglais, information donne naissance à « élément ou système
L'USAGE DU CONTENU pouvant être transmis par un signal ou une combinaison de signaux »,
définition composante de la théorie de l'information puis de l'infor-
Ce paragraphe pourrait tout aussi bien s'intituler « Essai de définition matique et, par là, résurgence de la « forme » '•.
de l'information documentaire »... Le terme est employé dans de nombreux champs disciplinaires
... « Apprendre à lire, c'est apprendre à comparer, extrapoler, anticiper, (systémique, cybernétique, écologie, biologie, génétique...) et porte,
induire, déduire, argumenter [...] il s'agit bien, lorsque je lis un texte, de chaque fois, l'ambiguïté native de la forme et de l'idée. Peut-on les dis-
savoir ce que j'en lis. I0 » « Ce que j'en lis » ou « Ce que je vais tirer de socier ?
cette lecture en vue de son usage », ce qui — dans le texte — peut être
Les chercheurs de la Gestaltlheorie rappellent que tout signe
considéré comme information, et comme information documentaire. perceptif est subordonné à une structure, une forme. La linguistique a
Le mot « information » fait partie du langage courant et le grand formalisé le signifiant (forme) et le signifié (idée). Par exemple, le mot
public assimile le plus souvent « les informations » aux journaux « chaîne » évoque de multiples représentations (collier, bracelet, mais
télévisés. aussi forçat, arpentage ou amarrage...), alors que son seul et unique
signifiant est formé d'une « chaîne » de caractères !
Mais on parle aussi des « industries de l'information », de la « société
de l'information», du «coût de l'information» sans oublier la Si l'on tenle d'identifier la spécificité de l'information documentaire.
« désinformation », la « surinformation » ou la « sous-information »... c'est certainement en insistant sur l'aspect du sens, de l'idée, en tant que
Ce concept a été et sera étudié et approfondi dans des cadres plus signification, élément de connaissance.
élaborés que celui de ce manuel. Pour l'information documentaire, le signifié est plus important que le
On peut ici, toutefois, tenter de définir ce que pourrait précisément signifiant (à la différence de l'informatique), l'énoncé est porteur de
être l'information documentaire dans le contexte d'une définition de sens et non seulement de codes (à la différence de la cybernétique).
l'analyse documentaire, et en quoi cette information documentaire L'élément de connaissance n'est pas détérioré par le temps (à la
différerait d'autres types d'informations". différence du journalisme) et n'a pas pour principal objectif d'apporter
LES TEXTES ET LEUR CONTENU
LIRE ET COMPRENDRE

une preuve (à la différence du droit). Enfin, l'information documen- forme, la nature, le volume » 15 . Elle fait la différence avec la connais-
taire, en devenant virtuelle, prend une forme numérique ou optique et sance explicite qui s'applique à l'information scientifique et technique
se dissocie de la contingence du document classique (à la différence vérifiée mais qui n'est pas toujours enregistrée, « inscrite », formelle,
des bibliothèques et des archives, lieux de conservation et de traitement comme l'est la science de la documentation.
des objets formels). Peut-on mesurer l'information documentaire en fonction de son
Les énoncés porteurs de sens sont-ils tous de l'ordre de l'information impact ou de sa valeur ?
documentaire ? et de quel sens s'agit-il ? Rien n'est mieux partagé que Dans une excellente étude, Michel J. Menou propose un intéressant
le sens commun, ou le bon sens, né d'une information perçue à partir modèle conceptuel de mesure et d'évaluation de l'usage de l'infor-
d'une réalité immédiate et sensible, subjectivement jugée. mation. Mais c'est la façon dont il cherche à en élargir le concept qui
Ainsi l'opinion publique, renforcée par des médias aux investigations nous intéresse ici. Il s'appuie sur les cinq degrés de la pyramide de
limitées, verse des larmes sur la destruction des forêts d'Amazonie, Maslow "' concernant les besoins essentiels de l'être humain, en mettant
« poumons de la terre », et prédit l'asphyxie lente mais sûre de notre en regard les différents niveaux d'intérêt de l'information, de la simple
pauvre planète. Or, en l'état des connaissances actuelles, « des forêts reproduction à l'aide qu'elle apporte à chacun, puis aux possibilités de
comme l'Amazonie ou la forêt tropicale africaine, en réalité, ne pro- clarification et d'enrichissement qu'elle propose dans le cadre social ou
duisent pas d'oxygène [à l'ensemble de la planète], mais se contentent individuel, enfin à la possibilité pour toute personne d'écrire, de
de le recycler, en même temps que le carbone. Prétendre qu'elles produire de l'information et d'en tirer un sentiment de satisfaction et
fournissent de l'oxygène consiste à confondre la forêt avec son feuillage d'accomplissement. Pour lui, l'information est latente, repérable par
en ignorant son sol réducteur"». Cet exemple illustre la différence ceux qui en ont vraiment besoin, et sa valeur documentaire est fonction
entre une pseudo-information commune véhiculée sans vérification, et de la façon dont on en tirera du sens : « A message recognized only at
la véritable connaissance justifiée par des scientifiques qui y engagent thé semantic and syntactics levels wil! hâve no, or limited, e/Jéct.IT »
C'est bien le sens qui constitue le pivot de son intérêt, mais le sens
leur responsabilité.
utilisable et utilisé.
La connaissance sensible manque, en effet, d'esprit critique et de
vérification. Marie-France Blanquet inclut, dans ce type de connais- La sélection des textes à traiter repose donc sur l'identification d'une
sance, les informations publicitaires et journalistiques ainsi que les information documentaire vérifiée, analysée, et mémorisée en vue de sa
pseudo-sciences, en les opposant aux informations relevant de la diffusion. Cette information ne peut être isolée, mais située dans un
connaissance scientifique, qui s'applique à « réduire le sensible à ensemble d'autres informations de même type, traitées de façon
cohérente ; elle n'a d'intérêt que porteuse de sens en vue de répondre
l'intelligible M ».
à des besoins déclarés.
En développant avec clarté les trois genres de connaissance -
sensible, scientifique et philosophique (tels que les a distingués Comment, alors, à partir d'une « matière première complexe »,
Spinoza) —, Blanquet souligne la « matière première fort complexe » chercher un sens repérable par chaque individu, en fonction de ses
sur laquelle les documentalistes ont à travailler. Mais elle distingue besoins propres ? Considérée ainsi, l'analyse documentaire revêt tous
bien la connaissance implicite -— « non énoncée [...] née de l'affec- les caractères d'une gageure. Chaque analyste est encouragea soutenir
tivité, de la croyance, de l'expérience ou de l'intuition » -- des ce défi, à l'aide de quelques méthodes et techniques, mais surtout grâce
« connaissances explicitées et inscrites », rcconnaissables par « la à ses propres qualités de réflexion.
LIRE ET COMPRENDRE COMMENT LIRE ?

Comment lire ? Cette pratique permet, en outre, à l'analyste de mesurer sa


connaissance de la littérature d'un domaine, en repérant très vite que
telle revue développe une politique éditoriale pertinente tandis que telle
Selon l'expression consacrée, l'analyste est invité à « survoler » le autre cultive une certaine fantaisie. On découvre alors que certaines
contenu d'un texte. Mais survoler ne signifie pas jeter un coup d'œil revues d'apparence rébarbative sont beaucoup plus faciles à traiter,
rapide et aléatoire. La lecture documentaire exige au contraire qu'on grâce à leur rigueur, que d'autres, au premier abord plus séduisantes.
« lise » vraiment certains passages du texte choisis en connaissance de
cause, puisque l'on en survole ensuite l'ensemble île façon consciente. Le résumé d'auteur
Chaque support requiert un mode de lecture différent : on n'analyse Le résumé d'auteur doit être lu s'il existe, mais il ne saurait remplacer
pas de la même façon l'article d'une revue scientifique et une le résumé documentaire (cf. p. 125). Il sert de point de départ en expo-
monographie. Toutefois, il existe certaines constantes qu'il est utile de sant le sujet de l'article, selon son auteur. L'analyste commence ainsi à
rappeler, dont le but est la recherche des idées directrices. construire une trame de contenu, d'autant plus qu'il est, normalement,
Comment définir l'idée principale ou directrice ? Isabelle Monday capable de distinguer s'il s'agit d'un texte de type descriptif, probléma-
pose cette question dès le début de son article déjà cité et elle y répond tique ou théorique.
en insistant sur l'importance des processus cognitifs. Ceux-ci ont été
succinctement exposés au paragraphe précédent. Il s'agit maintenant de Le chapeau
.
propositions beaucoup plus concrètes, mais qui n'ont de valeur que Dans la presse et, de plus en plus, dans les revues scientifiques, on
liées aux réflexions précédentes. peut trouver un chapeau présentant le contenu des articles jugés impor-
tants. Dans certaines revues, ce chapeau suffit à résumer l'article.

LECTURE DOCUMENTAIRE D'UN ARTICLE Les intertitres


Ayant ainsi pris connaissance du ou des sujets exposés par l'auteur,
La lecture documentaire d'un article (document le plus souvent l'analyste en vérifie la conformité avec les intertitres. Ceux-ci peuvent
analysé en documentation) exige, en premier lieu, d'observer le servir de guide efficace ou, au contraire, mettre en vedette des éléments
contenant (cf. p. 38-44). insignifiants mais accrocheurs (attention aux articles de presse !). Leur
Cette pratique, qui peut sembler rébarbative au début, devient intérêt est donc aléatoire.
progressivement naturelle et entre dans la méthode d'analyse sans
même qu'on en soit conscient, à la manière de Monsieur Jourdain qui Les mots en exergue
s'émerveillait de parler en prose.
Les mots soulignés ou en italique sont assimilables aux intertitres : ils
Puis on feuillette l'ensemble du texte pour évaluer sa construction peuvent indiquer le sujet principal d'un paragraphe, se révélant très
typographique, ce qui permet de déceler immédiatement la présence utiles sur ce plan, mais ils peuvent également valoriser une opinion ou
éventuelle d'un résumé d'auteur, de sous-titres ou intertitres, de mots un aspect soulignés par l'auteur, et dans ce cas détourner l'analyste de
soulignés, de toutes sortes d'accrochés qui attirent l'œil. la recherche de l'information principale.
LIRE ET COMPRENDRE COMMENT LIRE ?

Les paragraphes de tête Exercice 7 - Lecture documentaire d'un article

La présence de ces éléments ne dispense cependant pas de lire les


Pour les deux textes proposés, la consigne est la même : lisez de
trois premiers paragraphes, le dernier, et éventuellement l'avant-dernier
façon documentaire (voir les deux chapitres précédents) et repérez
paragraphe de l'article. les idées directrices des trois premiers paragraphes.
Les paragraphes d'introduction doivent normalement présenter, dans
l'ordre ou le désordre :
- les idées directrices qui seront développées ainsi que les intentions, 7.1 - Texte : « Les effets violents de la télévision » (cf. p. 227).
les objectifs de l'auteur ;
- le contexte dans lequel ces idées sont présentées ;
7.2 - Texte : « Les droits d'auteur des œuvres numériques ». -
- quelques exemples pour les illustrer (surtout dans la presse). Pour la Science, septembre 1996, n° 227.
Si l'analyste ne parvient pas à repérer les points importants d'un texte
à la fin du troisième paragraphe, il est probable que l'ensemble de Depuis 1926, des millions de lecteurs ont adoré l'histoire de Winnie l'Ourson et
l'article manque de corps et de rigueur, et qu'il témoigne d'un phénomène de ses amis. Aussi n'est-il pas surprenant que James Milne (enseignant de
couramment appelé «délayage», entraînant une perte d'information l'Université de. l'iowa, sans relation avec A. Milne qui créa ces histoires) ait
vmtlu mettre Winnie l'Ourson sur le Web, le réseau d'information mondial
pour le lecteur, et une perte de temps pour l'analyste. Un article préala-
véhiculé par Internet : dans un ordinateur relié au réseau, il plaça quelques
blement sélectionné en raison de son titre prometteur doit, à ce moment- fichiers de texte et d'image, permettant ainsi à tous Ifs enfants équipés d'ordi-
là, être banni du traitement. Cependant, il peut exister certaines excep- nateur de découvrir ces charmantes histoires. En avril 1995, peu de temps après
tions, en particulier si l'article en question a été écrit par un membre de la création de ce. site weh, J. Milne reçut une lettre polie de la société E. Du/ton,
l'entreprise ; cela ne devra pas, pour autant, faire oublier à l'analyste que, qui détient les droits d'exploitation du texte et des images de Winnie l'Ourson ; il
en l'occurrence, le champ « auteur » sera le plus interrogé, et que les y était indiqué que, smis peine de poursuites judiciaires, If site devait être fermé.
champs « résumé » et « indexation » peuvent être simplifiés. Vers la même éf>oque, un livre narrant la vie privée de François Mitterrand était
interdit de diffusion en France. Il réapparut sur Internet peu de, temps après, sans
Les paragraphes de fin que personne puisse s'opposer à sa dissémination numérique.

Les derniers paragraphes, ou paragraphes de conclusion, font en Comment la loi doit-elle réglementer If, fonctionnement du réseau ? Certains
général écho à ceux de l'introduction, mais ils ont été enrichis par fanatiques du réseau Internet prônent une. liberté totale de l'information, mais
il'autres pionniers du réseau soutiennent que son avenir passe par le contrôle et
l'apport de l'article, ce qui fait dire à certains qu'il est préférable de lire
la facturation de chaque information qui y transite. Comment les institutions
la conclusion avant l'introduction. Malheureusement, les conclusions légales et culturelles réagiront-elles ? ]f.s lecteurs de demain seront-ils encore
sont souvent rapides et pleines de tous les regrets de l'auteur : on y autorisés à feuilleter les livres numériques sur Ifs réseaux informatiques comme ils
trouve fréquemment les idées « à venir » et non pas celles qui ont été le font pour les livres et magazines classiques dans les librairies ? Pourront-ils
exposées. emprunter des ouwages dans des bibliothèques virtuelles ? lœs auteurs, les
éditeurs, les bibliothèques et les Etats débattent encore ces questions. t
C'est pourquoi la conclusion ne représente pas obligatoirement ce
6 Pour la science
qu'il faut lire absolument, alors que l'introduction permet à l'analyste de
poser des « hypothèses de lecture » (cf. p. 68-69). Voir commentaires en pages 270-271.
LIRE ET COMPRENDRE COMMENT LIRE ?

LECTURE DOCUMENTAIRE D'UNE MONOGRAPHIE sens général développé par l'auteur et sur les informations utiles à pré-
senter dans le résumé ou l'indexation. Le survol du texte est donc sou-
La lecture documentaire d'une monographie est plus aisée. Après tenu par ces premières impressions et a pour objectif de les confirmer
avoir pris connaissance du titre (et du sous-titre, quelquefois plus expli- ou de les infirmer. Dans ce dernier cas, la recherche des idées directri-
cite), du nom du ou des auteurs, de la date (est-ce une nouvelle édi- ces n'a pas été bien menée, ou le texte est mal construit, ce qui ne plaide
tion ?), de l'éventuelle collection, d'une mention éventuelle de traduc- pas en sa faveur.
tion, on dispose presque toujours d'une table des matières ou d'un som-
Le survol est donc une activité dynamique : l'analyste est sur une
maire qui présente le plan de l'ouvrage, sa colonne vertébrale en quel-
piste et il doit en contrôler la vraisemblance ; il part d'hypothèses et non
que sorte, sur laquelle repose toujours le travail de repérage de l'infor-
d'affirmations. 11 va interroger le texte pour obtenir des réponses, ce qui
mation utile (cf. chapitre iv, p. 73-93). La lecture de l'introduction doit
est la meilleure façon de l'exploiter. Chaque texte est une découverte ;
confirmer l'organisation du sommaire. Les notices de quatrième de
chaque lecture est singulière ; chaque analyse correspond à un objectif.
couverture ont un objectif commercial ; qu'elles soient lues attentive-
Celui qui aborde tous les textes de la même manière, sans tenir compte
ment ou survolées n'a pas de rapport avec leur crédibilité.
de leur spécificité ou des réponses particulières qu'ils peuvent offrir, se
' Il peut être intéressant de sonder des passages de deux ou trois cha- conduit tel le client pressé qui consomme tous les plats offerts par un
pitres. Si l'on connaît le sujet, on peut évaluer la qualité de l'exposé ; si restaurateur comme un même brouet sans goût. L'analysie doit se
on ne le connaît pas, on peut juger au moins la clarté de la prèsentalion, mettre dans la situation de l'utilisateur final, et c'est bien ce qu'on attend
la précision du vocabulaire et le degré de compréhcnsibilité. de lui car un texte est un réservoir de réponses, et c'est dans cet esprit
qu'il doit être lu.
Toutes les monographies, cependant, ne présentent pas de table des
matières explicite. Une lecture plus approfondie devient alors irnpé-
rative et doit être incluse dans l'organisation du travail et la gestion du
temps. Cette lecture presque complète sera de moins en moins néces-
saire à mesure qu'augmentera l'expérience de l'analyste. Mais les débu-
tants doivent l'accepter, et même la considérer comme un investisse- NOTtS
ment pour le futur. Les hypothèses de lecture se révèlent alors très 1. Source : (30], p. 285.
précieuses.
2. Préface de Louis Armand pour [82].

3. Toutes ces définitions doivent beaucoup à quelques manuels de langue


LES HYPOTHÈSES DB LECTURE française, parmi lesquels : [67], [68], [48],

II y a hypothèses de lecture quand un texte est lu en fonction des 4. Source : [14]. p. 23 et suiv.
réponses qu'il peut apporter... car un texte ne répond que si on l'inter- 5. Source : [33], p. 63-64. « Le lecteur modèle », chapitre Ml de cel ouvrage,
roge. C'est le repérage visuel (mise en pages, ponctuation), puis l'étude mérite une lecture approfondie.
progressive du contenu (catégorie d'intérêt, types de textes, recherche
des idées directrices) qui apportent à l'analyste ces hypothèses sur le 6. Source : [27].
LIRE ET COMPRENDRE

ANNEXE PÉDAGOGIQUE

7. Source : [72],

8. Source : [14], p. 53.

9. Source : [64], p. 57. Exercice 8 - Lecture documentaire d'une monographie


10. Source : [79], p. 65-66.
Pour vous exercer à lire de façon documentaire une mono-
11. Voir en particulier [41], p. 13 et suiv. graphie, comparez les ensembles présentés en pages 233-245,
extraits de :
12. Source : [31]. - Gros temps sur la planète (Jean-Claude Duplessis, Pierre Morel.
- Éditions Odile Jacob, 1990) ;
13. Source : [36], p. 200. Les mots sont en italique dans le texte original.
-Le grand remue-ménage : la crise de la famille (Evelyne Sullerot.
14. Source : [14], p. 32 et suiv. -Fayard, 1997);
- La Méditerranée : l'espace et l'histoire (sous la dir. de Fernand
15. Source : [14], p. 48 et suiv. Braudel. — Flammarion, 1995).
" 16. Source : [60]. Ces trois extraits correspondent à peu près au survol des livres
eux-mêmes (page de titre, sommaire, avant-propos ou introduc-
17. Source: [62], p. 482. tion). Il vous est demandé de :
* Comparer ces extraits.
• Formuler des hypothèses de contenu à partir des éléments
fournis.
• Faire cet exercice en 6 minutes maximum.
• Choisir la monographie qui semblerait la plus facile à analyser.
Commentaires en pages 271-273.
CHAPITRE IV
LA LECTURE DOCUMENTAIRE :
STRUCTURE ET VOCABULAIRE

La lecture documentaire — survol et compréhension — permet de


poser des hypothèses de contenu. Le lecteur professionnel qu'est
l'analyste est prêt à interroger le texte comme il le ferait d'une personne.
Pour approfondir l'étude, il va s'aider de la construction grammaticale.
Celle-ci est liée à des modalités propres à certains textes (juridiques,
médicaux, etc.) ; elle est matérialisée par des mots de liaison, véritables
indicateurs du déroulement du discours, permettant de repérer la
construction logique (dialectique, déductive, inductive), préalable à la
recherche du plan. L'énoncé utilise un vocabulaire représentatif du
contenu, les verbes soutenant l'action et les substantifs les thèmes.
Cette interrogation du texte poursuit également un but défini : en quoi
ce contenu, ces thèmes vont-ils être utiles aux usagers ? Peuvent-ils
enrichir un sujet, conforter une opinion, apporter une opinion contraire
par la confrontation de différents points de vue ? Le texte inutile aurait
déjà été rejeté, mais ce texte sélectionné, quel est son véritable intérêt ?

Trouver l'information utile : la recherche d'un plan

Un premier survol a permis de repérer le type de texte en le situant


dans un environnement documentaire connu, c'est-à-dire dont le
domaine, ou la notoriété de l'auteur, de la revue, de la collection, etc.,
assurent un intérêt réel pour son utilisation future.
La recherche de l'information utile dans un texte s'appuie d'une part
sur les mots, fa formulation des idées, c'est-à-dire l'étude du vocabu-
laire employé, d'autre part sur les phrases, les paragraphes, Vorganisa-
tion des idées, c'est-à-dire la structuration, le plan de l'article. En fait,
les deux opérations mentales d'analyse (identification des mots) et de
synthèse (repérage du plan) sont exécutées de pair, dans un vaîet-vient
incessant entre les deux lobes du cerveau. Quel que soit le texte,
l'opération se déroule en trois temps.
STRUCTURE ET VOCABULAIRE L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

1. Lire, observer, comprendre : - la superstructure, ou structure rhétorique : « type of conventional


- lire l'introduction (normalement clé du texte, dans la mesure où elle production scheme to which texf is adapied », ce qui nous renvoie d'une
annonce les points essentiels qui seront développes) ; part à un essai de taxonomie des textes (cf. p. 49-57), et d'autre part à
- à partir de cette lecture, identifier les idées directrices et poser des l'idée que ces textes sont construits selon des schémas, ce que Monday
hypothèses ; appelle des « grammaires du récit »,
- vérifier ces hypothèses en observant l'organisation typographique
du texte, puis par un survol rapide du contenu. 11 est vrai que la séquence type d'une recherche expérimentale va
suivre à peu près le schéma suivant : sujet, objectifs, méthodologie.
2. Repérer l'organisation des idées directrices : expérimentation, hypothèses, résultats, conclusion... Selon les types de
- chaque idée directrice repérée est considérée comme une unité textes et les champs disciplinaires, on peut repérer des « grammaires du
d'information ou un « item » ;
récit » en chimie, en pharmacie, en médecine, en statistiques, en écono-
- chaque item fait partie d'un champ lexical à identifier grâce à des
mie, par exemple. Mais chaque domaine peut se prévaloir de schémas
mots ou phrases clés (vocabulaire) ;
classiques, ou au contraire toujours renouvelés, ce qui est surtout le cas
- chaque item est articulé au suivant grâce à des mots de liaison ou à dans les sciences humaines.
des tournures de phrase annonciatrices du déroulement logique (plan).
H peut être intéressant pour les unités documentaires très spécialisées
3. Préparer l'écriture documentaire :
d'élaborer des grilles de lecture adaptées à leur type d'information
- le texte primaire imprimé étant destiné à d'autres lecteurs, il ne doit
dominant. Pour l'étudiant, il est recommandé de commencer par des
jamais être surchargé d'aucun signe ;
grilles de lecture standard.
- selon les types de textes, les choix personnels, ou encore l'expé-
rience acquise, on peut élaborer des grilles de lecture, prendre des
notes, souligner les passages importants au crayon à mine de plomb, en
n'oubliant pas d'effacer toute marque visible à la fin du travail. L'élaboration de grilles de lecture
A l'issue de la deuxième phase, l'analyste est en mesure de maîtriser
les « structures sémantiques du texte » ' :
L'analyste débutant doit pouvoir s'aider de quelques outils qui facili-
- la micro-structure, ou le niveau primaire du discours ;
teront sa démarche. Au fur et à mesure qu'il acquiert de l'expérience, il
- les liens lexicaux entre les termes ;
pourra soit les abandonner, soit les modifier pour son usage propre,
- la cohérence sémantique assurée par les mots d'articulation (cf. p. 84) ;
selon son champ disciplinaire, la typologie des documents et des infor-
- la progression thématique, ou développement logique du discours ;
mations à traiter, les produits à fournir, les besoins à couvrir.
- enfin, la macro-structure ou organisation générale du texte.
Pinto-Molîna 3 parle également des structures du texte et en distingue Les trois grilles ci-après sont chacune suivies d'un exemple per-
trois niveaux : mettant une claire visualisation de leur principe. Les textes en question
- la micro-structure, ou structure de surface, qui est effectivement le ont été choisis car ils ont l'avantage d'être courts et faciles à lire ; ils
texte primaire imprimé ; sont donc propices à l'illustration.
- la macro-structure, ou structure profonde, ce qu'elle appelle la Toutefois, on ne traite jamais de façon aussi approfondie des articles
« sève » du texte, après avoir comparé celui-ci à un arbre ; de ce niveau parce qu'ils n'ont pas vocation à être conservés, sauf dans
L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE
STRUCTURE ET VOCABULAIRE

des services de documentation de presse dont les politiques documen- 1" item exposé
taires diffèrent des services de documentation à vocation scientifique. 1" item rejbf mule

- 1" item complété (1" complément)


- - 1 er complément du l t f item illustré
1.2 - \" item complété 12' complément)
GRILLE DE LECTURE POUR UN TEXTE DESCRIPTIF 1.21 2e complément du 1" item, lui-même complété
{INSPIRÉE DE [24])
TRANSITION (souvent un très court paragraphe)
concluant le premier item et annonçant le second
La structuration d'un texte descriptif est généralement la plus facile à
repérer. L'analyste relève les idées directrices (ou items principaux) au 2* item exposé
2' item reformulé
fur et à mesure de leur apparition dans le texte. Si l'introduction a fait - 2e item complété (1 e 1 complément)
apparaître deux items, on fait l'hypothèse de deux têtes de chapitre. La
grille de lecture correspondante est présentée ci-contre. etc.

L'introduction

L'introduction permet d'identifier les unités d'information, ou items, Application de celte grille au texte : « Le brevet d'invention ». — Le
qui seront soumis à divers enrichissements : Monde, mars 1984.
- exposition-formulation : chaque item est formulé et représente
une partie des idées qu'exposé l'auteur ; chacun est lié au précédent et
au suivant dans l'enchaînement du plan sous-jacent ;
reformulation : tout item important est répété sous une autre
Si le Français a la réputation d'être débrouillard il INTRODUCTION
forme. La redondance est un signal donné par l'auteur ; est moins sûr qu'il soit véritablement inventif. En contexte de l'article : siluation quan-
- complément d'information : tout item peut être complété par des effet, seuls 25 % des brevets déposés chaque année
tilative de la France face aux puis-
en France appartiennent aux nationaux. Les
sous-items dépendants dont le sens est lié à celui de l'item principal (cf. Allemands déposent chez eux trois fois plus de bre- sances occidentales
hiérarchisation des idées, notions, sous-notions, etc.) ; vets ; les Américains près de six fois plus. Pourtant, importance du brevet d'invention
le brevet d'invention est une arme déterminante dans dans la compétition industrielle
illustration de l'information : tout item peut être illustré par des la compétition industrielle.
citations, expériences, preuves, exemples, schémas, images, anecdo- Toute personne physique, l'inventeur, ses héritiers, ITEM ! - Dépôt d'un brevet
tes... (jamais repris dans un résumé, sauf rares exceptions). ses ayants droit, ou toute personne morale légale- Conipl. 1 . 1 : qui peut déposer ?
ment déclarée, peut déposer un brevet. Mais atten-
tion : une idée, même géniale, n'esl pas protégeable
en tant que telle si elle ne répond pas à certaines Compl- 1.2 : conditions de dépôt
La conclusion conditions. lit pour qu'une demande aboutisse à un
brevet, il faut qu'elle décrive très exactement le pro-
La conclusion est, quant à elle, partielle pour chaque item, servant blème envisage, la solution inventée et les moyens
quelquefois de transition, mais complète pour la fin du texte, ayant de réalisation technique de celle-ci Qu'est-ce qui est
brevetahle '.' « Ttiute invention ntiinvllc qui implique Compl. 1.3 : que peut-on déposer ?
valeur de synthèse et d'ouverture grâce aux nouveaux approfondisse-
ments apportés par l'auteur au thème.
STRUCTURE ET VOCABULAIRE L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

une activité inventive par apport à ta technique el ploitalion industrielle ou commerciale de l'inven-
qui est susceptible d'application industrielle. » C'est tion. Cet organisme agit également comme conseil
l'INPI (Institm national de la propriété industrielle), Compl. 1.4 : où dcpose-t-on ? et permet aux inventeurs et au» peines entreprises
organisme de service public placé sous la tutelle du de mieux appréhender les problèmes que soulève
ministère de l'Industrie et de la Recherche, qui a l'exploitation de leurs trouvailles. Ces difficultés
pour mission d'enregistrer et d'examiner les deman- 1.41 : rôle de l ' I N P I sont nombreuses... Des fortunes ont certes clé CONCLUSION
des, de délivrer el conserver les brevets. construites à partir d'invenlions parfois technique-
Les moyens d'information mis à la disposition du ment simples, qu'il s'agisse de la fermeture à curseur
public par l'INPI ont été considérablement déve- (4 millions de kilomètres produits chaque année [illustrations]
loppés, et c'est à cet organisme qu'il faut s'adresser dans le monde) ou de l'attache trombone (produc-
en priorité pour se procurer le Guide du déposant de tion mondiale : 26 milliards d'unité). Mais les en-
brevet, ainsi que tous tes textes législatifs en thousiasmes impétueux risquent fort d'être déçus :
vigueur. sur cent brevets déposés à l'INPI, un .seul est réelle-
Trois titres permettent de protéger une invention : ITEM 2 - Protection d'un brevet ment exploité.
G Le Monde
le brevet d'invention assure une protection de vingt Compl. 2.1 : brevet d'invention
ans (renouvelable) à dater du |our du dépôt de la
demande, sous réserve du paiement d'une taxe
annuelle pour son maintien en vigueur. Dans ce cas,
un avis documentaire établi par l'INPI cite les anté-
riorités susceptibles d'affecter la breviabilité de l'in-
GRILLF, DE LECTURE POUR UN TEXTE PROBLÉMATIQUE
vention. Ce document est important : lui seul permet (INSPIRÉE DE [22])
d'apprécier l'opportunité d'effectuer d'autres dépôts
de brevets à l'étranger. On peut néanmoins s'en
tenir au certificat d'utilité : la protection, sans avis Compl. 2.2 : certificat d'utilité
La grille précédente renvoie aux plans classiques d'organisation
documentaire, ne dîne alors que six ans. Le certifi- Oonipl. 2.3 : certificat d'addition logique du discours, très repérable grâce aux mots d'articulation (cf.
- cat d'addition rattaché au brevet ou au certificat p. 84). La plupart des textes descriptifs suivent ce plan sans variantes
d'utilité protège un perfectionnement de l'invention
principale. excessives, donc applicable au texte problématique en l'assortissant des
Combien coûte un brevet d'invention français ? ITEM 3 - Coût d'un brevet questions suivantes :
2 900 francs de taxes de dépôt el d'établissement Compl. 3.1 : taxe de dépôt
d'avis documentaire, auxquels viennent s'ajouter la
Compl. 3.2 : taxe de délivrance
taxe de délivrance (500 francs) et les taxes annuelles
(progressives) pour le maintien du brevet. Compl. 3.3 : taxe de maintien
Ceux que les formalités relatives à l'obtention du
brevet d'invention rebutent peuvent, recourir à un Quelle est la situation décrite ? normalement perceptible dès l'in-
mandataire professionnel. Les conseils en brevet ITEM 4 - A i d e s troduction
jouent ce rôle : leur profession est organisée par Compl. 4.1 : conseils
décret et ils sont groupés au sein d'une compagnie • En quoi est-elle problématique ? exposes comme items principaux
nationale (liste sur demande auprès de l'INPI). Quel(s) est (sont) 1c(s) problème(s) ?
Il faut envisager des honoraires de 3 000 à 5 000
francs pour rémunérer l'intervention de ces spécia- • Y a-t-il recherche des causes, expo- selon les cas, à identifier comme :
listes. Les inventeurs qui nourrissent d'autres ambi- sition des conséquences du (des) pro- - compléments d ' i n f o r m a t i o n
tions peuvent également demander une protection Compl. 4.2 : protection européenne blème(s) ? (accompagnés, é v e n t u e l l e m e n t ,
européenne qui confère à son titulaire, dans chacun (voir aussi ITEM 2) d'illustrations)
des pays contractants pour lequel il a été délivré, les • Y a-t-il propositions de solutions ?
mêmes droits qu'un brevet national délivré dans ce
- ou comme items principaux
pays. L'ANVAR (Agence nationale pour la valorisa- Compl. 4.3 : aide financière • Y a-t-il exposition explicite des
tion de la recherche) vient en aide financière aux (accompagnés de compléments
valeurs que l'auteur défend face à et illustrations)
inventeurs à condition qu'ils aient pour objectif l'ex- ce(s) problème(s) ?
STRUCTURE ET VOCABULAIRE L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

La dernière question est importante pour éclairer le plus possible les Le Tribunal des mineurs enregistre également une
augmentation îles violations dans le domaine de.s
prises de position, les opinions, les points de vue, toutes les argumenta- stupéfiants, alors que les dénonciations pour les
tions qui risquent de peser sur la subjectivité de l'analyste. C'est la raison infractions à la législation sur la circulation routière
sont en baisse sensible. Pour les magistrats, l'ouver-
pour laquelle il est si important d'observer le document dans son ensem- ture de vitrines où l'on vend le parfait nécessaire du
ble et spécialement ses caractéristiques (cf. p. 39-40). Toutes ces mesu- petit fumeur ne favorise pas !e respect de la loi sur les
res aident à la distanciation nécessaire. Ci-dessous figure un exemple de stupéfiants. « Certains étals de marchés proposent Complément 2
des tisanes, des huiles et autres friandises à base can- Illustration
grille de lecture appliquée à un texte problématique. Les passages en ita- nabique, alors qu'ailleurs dans certaines campagnes,
d'énormes champs de chanvre deviennent accessibles
lique indiquent la correspondance entre les unités d'information, leurs à tous. Autant de tentations et d'occasions pour les
compléments et illustrations. jeunes qui souhaitent goûter au fruit défendu. La
banalisanon de ces produits sème incontestablement
la confusion che7 les enfanls. »
Fin réalité, la difficulté des magistrats réside moins Situation problématique 2
Les juges des mineurs « dénoncent » le monde des adultes. - Le dans le /ait d'appliquer lu loi. t/u? dans celui île
Journal de Genève, 3 avril 1997. faîiv tlisfMrvitrf tfs causes à l'origine de la délin-
quance. « Nous nous trouvons de plus en plus face à
îles jeunes que l'on qualifie de sauvages, dans le
sens qu'ils .se sont élevés pratiquement 'nui seuls, Causes
Dana leur rapport sur l'administration de la jus- qu'ils n'ont quasiment jamais eu lie règles sociales à 2
lice. André Karlen cl Jean Zermatten. les juges respecter et qu'ils n'ont pas \ubi de frustrations. 3
raUn» des mineurs, sonl formels : « En 1996. Cette situation est supportable jusqu'à l'entrée dans
nous avons ouvert plus île 1 000 dossiers concer- Exposé de la situation l'adolescence. L'enfant sympathique à qui l'on pas-
nant des mineurs. Un chiffre supérieur à la moyenne sa» ses caprices devient alors exigeant, menaçant,
des affaires suivies depuis la création du Tribunal capable de recourir au chantage, et surtout habile à
des mineurs. » Malgré ce constat, les magistrats déborder les limites dans tous les domaines. »
enregistrent une .fiabilité du nombre de délax com- Selon les juges, cette évolution provoque des phé- Conséquences
mis ce.î cinq dernières années. Par contre, la nature
Situation problématique 1 1,2
nomènes de rejet familial et de renvm scolaire. Face
et la gravité des infractions inquiètent la justice. à un délit, /c tribunal ne peut plttx .se contenter de 3
« Les délinquants deviennent de plus en plus Rcformulation par illustration iu%vr uniquement l'acte interdît /mi' la lin. '< De plus
effrontés et même malveillants, confie André en plus, nous devons faire en sorte que les condi-
Karlen. Autrefois, les jeunes commettaient un vol en tions à l'origine du délit soient modifiées pour que le
cachette. Aujourd'hui, ils n'hésitent plus à arracher jeuic délinquant ne réitère pas son acle. Danx nos
un sac à main en plein jour. Les cas que nous décisions, nous devenons ainsi les partenaires de la
sommes amenés à traiter reflètent l'évolution des réinsertion du mineur, avec la famrllc. les institu-
jeunes dans nos sociétés modernes. Ce constat ne tions spécialisées et les éducateurs. Dans cette Conclusion
diffère guère d'un canton .suisse à l'autre. » société du lout, et tout de suite, nous avons île plttx
Les affaires dénoncées restent prioritairement les en plus de difficulté.'! à jouer ce rôle d'intégra-
infractions contre le patrimoine et, parmi celles-ci. Complément 1 teurs. » C Le Journal de Genève
les vols et dommages à la propriété. Or le rapport, la
modification du Code pénal suisse et la nouvelle
jurisprudence du Tribunal fédéral oni fixé la pour-
suite d'office des vols à l'étalage pour une somme de EXEMPLE D'UNI- GRILLE DE LECTURE STANDARD
300 francs. H Quelle signification cela a-t-il pour les Développement e( illustration
enfants ? Tout simplement que l'on peut suhtiliser
des objets sans grande valeur, sans risque. Pourtant À ces deux grilles de lecture, on peut en ajouter une troisième, plus
la somme de (00 francs constitue déjà, pour la plu- banale, plus courante. Elle est basée sur la question à se poser avant
part, un montant important », commentent les deux
juges. toute analyse : « De quoi s'agit-il dans ce texte » ? Cette grille aide à la
précision des réponses.
STRUCTURE ET VOCABULAIRE L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE

Les jeunes néonazis refont surface. — Construire, 16 avril 1997, n° 16. De quoi s'agit-il dans ce texte ?

Le texle en regard illustre com-


Les jeunes néonazis refont surface ment utiliser cette grille, de deux
façons différentes :
À Zurich, des skinheads ont terrorisé tout un quartier sans que la police
intervienne. Et l'on craint d'autres manifestations du même type. QUI ou sujet 1 - une centaine déjeunes
qui peut être 2 - le racisme
- Juerg Ffîschknecht, vous êtes journaliste, potentiel de violence qu'il faut prendre une personne
politologue, spécialiste de l'extrême-droite très au sérieux. l-a société .se doit de leur une institution
en Suisse. Après les derniers événements de imposer des barrières. Et les forces de un concept
Zurich, peut-on s'attendre à une recrudes- l'ordre ont, dans cette optique, un rôle un fait
cente de ce type de manifestations en important à jouer.
Suisse ? ACTION ou verbe 1 - ont manifeste
- Le débat actuel sur l'or nazi et les fonds
- Depuis novembre 1995, les skinheads juifs favorise-t-il l'émergence de ces 2 - est à l'origine
s'étaient montrés 1res discrets. mouvements racistes?
Aujourd'hui, on a l'impression qu'ils soin - Ce genre de débat réveille des QUOI objet 2 - des manifestations
en (rain de se réorganiser. Et il est fort sentiments racistes et antisémites qui
probable qu'ils se manifestent à nouveau. étaient jusqu'ici latents, cachés. Ile tels espace 1 - à Zurich
Il ne faut pas oublier que le 20 avril - OÙ
mouvements en profilent pour les lieux 2 - de Zurich
l'anniversaire d'Hitler - est une date exprimer au grand jour. Cette attitude
importante pour eux. reste toutefois très minoritaire.
C'est, par ailleurs, ta première fois qu'ils QUAND temps 1 - e n avril 1997
ont été aussi nombreux, une centaine, à - Et en Suisse romande ? Doit-on également circonstances 2 - le mois dernier
défiler dans les rues de Zurich. Certains craindre les groupes de jeunes néonazis ?
venaient d'Allemagne. Cela montre qu'ils - 11 y a aussi des skinheads eu Suisse
savent nouer des contacts au niveau romande. Un facteur les différencie COMMENT méthodes - violemment
international. cependant de leurs compères de -Suisse moyens
alémanique : ils oni gardé des liens avec
- Ils ont tabassé des passants, scandé des l'ancienne générât ion des m i l i t a n t s résultats
COMMENT
slogans racistes, mais n'ont pas été inquiétés d'ex ire trie-droite, représentée, par cela s'est-il passé ? conséquences
par
I
la
- ~
r
police.
-
Y a-t-il eu complicité de la part exemple, par le Vaudois Gaston-Armand
des forces de l'ordre
' ? Amaudruz. cause
- Certains policiers uni peut-être des POURQUOI
raison 1 - racisme e! antisémitisme
.sympailiies d'extrême-droite. Mais o.n doit - Qui sont ces jeunes skinheads?
se garder de généraliser. Dans le cas - Contrairement à ce qu'on pourrait
précis, il y a eu erreur manifeste d'appré- penser, il ne s'agit pas de jeunes chômeurs EN VUE DE QUOI but
ciation. La polire a failli à sa mission. Une ou de jeunes marginaux. Ils ont presque objectif
tous un travail stable. Ils vivent chez leurs
parents, dans de petites villes ou à la
campagne, et n'ont en général pas de
petite amie. Exercice 9 - Analyser une monographie et un article
Ils ont dans leur majm ité moins de 20 ans.
immédiatement obtempéré. Mais ne sous-estimous pas le danger qu'ils
peuvent représenter pour la société ! Choisissez et appliquez une grille de lecture pour les textes cités.
- Convient-il de prendre ces mouvements au
sérieux ?
- Politiquement, les skinlicads n'ont guère 9.1 - Monographie : extrait de « Le grand remue-ménage » ( p. 236).
rie poids. Ils représentent toutefois un Marie-Jeanne Krill *
9.2 - Article : « Les effets violents de la télévision » ( p. 227).

© Construire Commentaires et corrigés en pages 273-287.


STRUCTURE ET VOCABULAIRE
TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Trouver l'information utile : l'aide du vocabulaire Exercice n° 10 - Travailler sur les mots d'articulation

La recherche de l'information utile s'appuie sur l'étude de la Cet exercice a pour objectif de rappeler la fonction précise de ces
mots et, ainsi, de discerner rapidement les différentes parties d'un
formulation des idées — le vocabulaire —, et sur celle de l'organi-
plan. Cette aide à la lecture documentaire sert également à l'écriture
sation des idées — le plan. On aurait tout aussi bien pu discuter cette
documentaire, dans la mesure où leur utilisation dans la rédaction
question en début de chapitre car, dans la pratique, toutes ces phases
des résumés sera tout à fait appropriée. La liste suivante présente 47
sont combinées. mots d'articulation présentés dans l'ordre alphabétique. Inscrivez
L'étude d'un vocabulaire documentaire aide : chacun de ces mots dans les 11 cadres indiquant leur fonction ; un
- la lecture documentaire, dans la recherche des champs lexicaux et nombre très minime peut appartenir à plusieurs cadres.
dans l'articulation du discours ; Correction et commentaire en page 288.
- l'écriture documentaire, tant dans sa forme résumé (texte rédigé)
que dans sa forme indexation (choix de mots clés). Ainsi Effectivement
Au contraire Notamment
Même si ce chapitre est consacré encore à la lecture, il préfigure ce Aussi En définitive
Avant tout Par conséquent
que celle-ci peut apporter à l'écriture et doit donc être lu dans les deux En effet
Car En outre
perspectives. Cependant Par exemple
En premier lieu Par le fait que
C'est-à-dire En résumé Parce que
C'est pourquoi En revanche
D'abord Pour conclure
Encore
LES MOTS D'ARTICULATION Dans un premier temps Enfin
Pour toutes ces raisons
Pourtant
D'autant plus Ensuite Premièrement
La langue française est riche en termes indiquant des modes d'arti-
culation très spécifiques. L'analyste doit maîtriser la forme et la place : De plus Mais
Puisque
Tout d'abord
- des termes d'amorce : introduction, énuméraîion. illustration ; Donc Même
- des termes de liaison : addition, insistance, cause, conséquence, D'où Néanmoins
restriction, opposition ;
- des termes de rappel ;
- des termes conclusifs. Introduction Énumération Addition

Le choix et la place de ces mots assurent la cohérence sémantique du


Opposition Restriction
discours et facilitent normalement le repérage du plan. Cause

L'exercice proposé ci-contre a pour objectif de rappeler la fonction


précise de ces termes et, ainsi, de discerner rapidement les différentes Conséquence Insistance Illustration
parties d'un plan. Cette aide à la lecture documentaire sert également à
l'écriture documentaire dans la mesure où son utilisation dans la rédac- Rappel Conclusion
tion des résumés sera tout à fait exacte.
___^__^
STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

LA NATURE DES MOTS les dernières éditions), mais que les milliers de mots qui constituent
notre langue ne sont pas utilisés de la même façon et que l'on peut illus-
Plus que sur l'étude classique des registres du langage (soutenu, trer leur différence en les schématisant ainsi, toujours en s'inspirant des
courant, familier...), l'analyste est invité à réfléchir sur la nature du travaux de A. Moles (voir schéma en page suivante).
vocabulaire usuel.
Ce schéma, capable d'illustrer plusieurs notions importantes et utiles
Entre les 216 mots relevés par la compagnie BELL, représentatifs à l'indexation (voir chapitre vu, p. 149-173) et à la compréhension des
d'une journée de communications téléphoniques aux États-Unis, et les langages documentaires (voir chapitre vin, p. 175-222) est infiniment
24 800 mots du langage shakespearien ', où se place le vocabulaire riche. Il s'impose comme un outil indispensable à avoir en mémoire :
documentaire ? - lors du premier survol, pour identifier les termes univoqucs
Une langue est un organisme vivant. Les mots naissent et meurent de porteurs de sens qui serviront également lors de la rédaction du
résumé ;
façon inéluctable, mais on peut toutefois discerner des constantes où
- lors de l'indexation en langue naturelle, pour situer les mots clés
l'on remarque 4 :
- des mots-vides, c'est-à-dire les mots nécessaires à l'articulation choisis et vérifier leur zone de « dangerosité » (voir chapitre vu, p. 163-
d'une phrase, mais que l'on peut exclure sans en altérer le sens. Ce sont 168).
les mots que l'on excluait des télégrammes à l'époque où l'on en
envoyait encore. I! en existe une centaine dans la langue française ;
LA RICHESSE DES MOTS : POLYSEMIE, MONOSÉMIE
- les mots du vocabulaire courant, appris de façon intuitive, comme
toute langue maternelle, surtout composé de termes concrets et de
Par l'expression « richesse des mots », nous entendons leurs qualités
verbes d'action (environ 4 000) ; de polysémie (ou homographie) ou de monosémie 1 . Tous ces mots sont
- les mots du vocabulaire scientifique de base que l'on acquiert des
porteurs de sens, mais de façon tout à fait différente.
les études secondaires et qui augmente en importance et en précision au
fur et à mesure que l'on approfondit le champ scientifique (4 000 éga-
Le vocabulaire courant
lement) ;
- enfin les mots du vocabulaire scientifique et technique II est doublement trompeur :
spécialisé, propre à chaque discipline, science ou pratique (médecine, - éminemment polysémique, il ne peut servir au repérage du sens
philosophie, mais aussi chaudronnerie, pratique du ski, etc.). Il est qu'intégré à la phrase qui le détermine ;
impossible de les dénombrer, d'autant plus que c'est parmi eux que l'on - principalement composé de mots concrets, il donne à « voir » le
compte le plus de « naissances ». Pour tenter d'en donner une échelle, sens de façon immédiate : le mot voiture, comme tous ses nombreux
rappelons simplement qu'il existe actuellement 90 000 noms d'insectes synonymes, évoque le sens « mode de transport ». En revanche, le mot
identifiés — et beaucoup d'autres qui ne le sont pas... canon possède près de quinze significations différentes...
Si l'on pose la question suivante : « Combien de mots la langue « Un terme est en soi incomplet quand bien même il recevrait une
française comprend-elle ? », les interlocuteurs restent en général définition en termes de dictionnaire minimum. Le dictionnaire nous dit
pantois et indécis, et les réponses vont de 2 000 à 1 million. 11 est inté- qu'un brigantin est un navire, mais il laisse impliciter par navire
ressant de rappeler que le Robert annonce à peu près 80 000 mots (voir d'autres propriétés sémantiques." »
STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Dans un premier cercle se trouvent les mols-tides. Le vocabulaire scientifique de hase


environ une centaine.
II comprend un 1res grand nombre de termes dits « généraux » ou
Le deuxième cercle concerne les 4 000 mots du
v n c a h u l a i r i CMiir:in1
« athématiques », tels que : fonction, modèle, opération, système, etc.,
que l'on retrouve souvent dans la partie « mots outils » des thésaurus,
car ils ne peuvent pas s'insérer seuls dans un champ sémantique déter-
Le troisième cercle comprend aussi environ 4000
miné. Ils sont de ce fait polysémiques et porteurs de sens divers. Ce
mots : ceux du vocabulaire scientifique de base n'est donc pas le vocabulaire prioritairement utile à l'analyste.

Le vocabulaire scientifique et technique spécialisé


11 est en fait le plus intéressant pour l'analyste, car il est composé de
II n'y a pas de quatrième cercle, mais une série de termes désignant une chose et une seule et par là même univoques. Un
faisceaux à l'intérieur desquels on trouve le vocabu-
laire scientifique et technique spécialisé, propre à
écrit de Michel Tournier (le Vent Paraclet, Gallimard, 1977) à son sujet
chaque discipline, science ou pratique, etc. Tous les nous éclaire davantage encore.
-• autres mots du vocabulaire français se repartissent
dans ces faisceaux.

Un écrivain, homme arbitres et philosophe, approfondit ces ilijférences : -II y n trois


activité* de célébration qui sont la philosophie. If roman et la poésie. Elucider la
Les mots les plus courants sonl le plus souvent por- {mu lion, le fonctionnement et les relations de ressemblance et de différence de ces genres
teurs de plusieurs sens : on les dit polysémique* serait l'objet d'unf élude difficile et de longue haleine. Notons amplement qtir le mut
(«plusieurs sens», selon la racine grecque). Les el l'idée changent de poids respectifs d'un genre ti l'autre. Dam un poème. />• mot
termes les plus spécifiques sont en général appliqués
l'rmpotte sur l'idée, laquelle mit comme elle petit ou ne snit pas du tout. IM musique
à une notion ei une seule ; on les dit tinivttques (« une
seule voix », selon la racine latine). des rimes est première. L'enchaînement des lignifications si-i-onflaire. Au contraire,
Le cercle « vocabulaire scientifique de base » esl pour un philosophe l'idée l'emporte absolument sur le mot. (slui-ci n'est jamais CMW-
celui qui comporte le plus de termes généraux, c'est- subordonné à l'idée, an point que le philosophe est constamment amené à créer des
à-dire ceux qui ne peuvent jamais être employés
seuls pour indexer un texte.
tri mr\ pou r mieux exprimer sa pensée.
De là le jargon philosophique dont les niais ont grand tort <\e se plaindre. I) 'uhoxl
par (/IIP le vocabulaire technique est If f>mf>re de. toute discipline — médecine, biologie,
On peut bien comprendre !a notion de champ séman- physique, mathématique — et on ne voit pas pourquoi seule la philosophie dn<rait s'ni
tique (dans un thésaurus, on appelle ainsi l'ensemble abstenit Ensuite parce que le terme technique est la promesse — généralement tenue •—
des termes relatifs à un domaine d'intérêt et choisis
pour l'indexation) en se demandant, par exemple,
qu'une fois comprise el assimilée sa définition ne changera plus et jouera comme une
dans quel cercle mettre le mot si nus Les réponses clé irremplaçable pour comprendre le texte. Il y a certes des philosophes qui écrivent
varient du vocabulaire courant au vocabulaire scien- avec les mois de tout le monde. Cf. sonl les plus flous, les plus ingrats, en un mot les
tifique de base. Mais le mot xinux évoque deux sens plus fli/Jinlf.s. Comparons par exemple l'un d'eux, Descartes, avec Kunt dont
principaux s'il es! exclu de son conlexie d'utilisation.
Si l'on dessine deux secteurs à partir d'un premier l'arsenal terminologique effarouche souvent le. nouveau venu. Isirsque Kanl pni/r tir
faisceau (trigonométrie, ou mathématiques) et d'un sriK'tmtlisme traiiscctuliintal, il emploie une expression qu'il a forgée et dont il a
deuxième faisceau (anatomie). dans lesquels on donné ah inilio une définition coulée dans le bronze. Des expressions de cettf sorte, il
trouve le mol sinus, celui-ci devient alors univoquc,
puisque inscrit dans son champ sémantique. Cette
y en a dans son enivre une vingtaine, pas davantage, et la maîtrise de ce petit lexique
image est utile tant à l'indexation qu'à l'interrogation. — évidemment indispensable — livre à elle seule {a moitié du kantisme. Au contraire.
STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

Connotation
lorsque Desrartes parle des « idées flaires et distinctes -, il marie Irai* mots dont la
définition nt. se trouve nulle part dans son cruvre, et varie sans doute noltihlrmenl Sous l'angle de la connotation, chaque mot possède des sens
d'une page, à l'autre. Tout au plus ces mots de tout le monde donnent-ils au lecteur nombreux, perceptibles par chaque individu de façon personnelle ; sa
paresseux l'illusion qu'il a compris d'emblée et qu'il peut s'en aller. Une interprétation signification est suhjectivée. Connoté, un mot reflète une multiplicité
exigeante des textes cartésiens soulève les pires difficultés et se wldf par des résultais
de points de vue, d'opinions ; il est porteur d'imaginaire, de poésie
sovvent ktillanls mais toujours disnitabUs... -
© Éditions Gallimard (« Words. words... »). La connotation induit les points de vue, les
opinions liés au pôle sensible de l'être humain. Les mots sont souvent
soumis à la polysémie (plusieurs contenus, plusieurs valeurs) et/ou à
l'cquivocité (contenus égaux, mais pouvant être interprétés différem-
LA RICHESSE DES MOTS : DÉNOTATION, CONNOTATION ment). Ces mots sont issus du vocabulaire poétique (langue recherchée)
ou courant (langue naturelle).
La richesse sémantique et symbolique du vocabulaire sous-tend
l'expression de la pensée et de la connaissance. Elle révèle les méca- Exemples
nismes complexes de l'acquisition et de la structuration du savoir. « One
can consider human knowledge on a sensual levé! (through four ele- On peut illustrer l'importance de ces aspects, dans la pratique de
mentary variables : sensation, perception, imagination ami memory) l'analyse, par la relation d'un exercice conduit à plusieurs reprises au
and at an intellectuel levé! (covering ihrce realilit's : concept forma- cours de formations à l'analyse documentaire de textes. À partir d'un
tion, jitdgment and rcasoning).1 » mot écrit au tableau, les participants doivent immédiatement, de façon
totalement spontanée, en écrire un ou plusieurs autres que ce premier
Chaque mot de la langue française peut être étudié et compris
évoque ; puis chacun de ces mots est inscrit au tableau par l'animateur
différemment. Dans la pratique professionnelle, « dénotation » et
selon quatre critères, non explicités tout d'abord. Le mot volcan donne
« connotation » font plutôt partie du vocabulaire de l'analyse de
toujours d'excellents résultats pour illustrer ce propos. Les termes les
l'image", mais sont également présents dans l'analyse de textes.
plus fréquemment relevés sont (dans le désordre de l'expression, mais
dans l'ordre de l'exploitation) :
Dénotation 1 ) lave, cratère, magma ;
Sous l'angle de la dénotation, la définition d'un mot donnée dans un 2) montagne, éruption ;
dictionnaire assure le consensus de tous ses utilisateurs ; sa signifi- 3 ) Vésuve, Fitna, Auvergne, Tazicff (montagne Pelée, SoufTrière aux
cation est objectivée. Dénoté, un mot devient un terme défini, à ten- Antilles.,.) ;
dance monosémique (ou univoque). La dénotation repose sur des 4) peur, feu, flamme, souffle, fumée, rouge, dévastation, etc.
faits, des définitions, des descriptions liés au pôle cognitif de l'être
Les deux premiers groupes s'intègrent facilement dans les champs
humain. Les termes monosémiques et univoques (un seul sens quel
dénotes d'un langage contrôlé : le premier comprend des termes
qu'en soit l'emploi) sont le plus souvent issus du vocabulaire
appartenant à un éventuel champ sémantique « volcanologie ».
scientifique et technique spécialisé. Ils sont majoritaires dans les
domaine particulier dans lequel ils ont un sens spécifique et univqque ;
langages contrôlés.
le second est nomme «champ thématique», étant plus large et plus
polysémique que le premier : un volcan est bien une montagne, mais
STRUCTURE ET VOCABULAIRE TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE

toutes les montagnes ne sont pas des volcans ; « éruption » ne peut pas Observer, lire, comprendre, repérer l'organisation du texte (de la
être employé seul et exige de devenir « éruption volcanique » pour être micro-structure à la macro-structure), identifier le vocabulaire perti-
accepté dans le champ sémantique. nent sont les opérations propres à l'analyse documentaire, indispensa-
Les deux autres groupes sont de l'ordre de la connotation. Les mots bles pour rédiger un résumé documentaire et sélectionner des mots clés.
proposés entrent d'une part dans un champ culturel, selon les lieux ou Mais toutes ces opérations ne sont effectuées que dans un seul et
unique but : favoriser et faciliter la recherche documentaire.
les milieux où ils sont utilises, d'autre part dans un champ symbolique :
les mots suggèrent plus qu'ils ne définissent ou ne sont définis.
L'analyste doit être très conscient de la distinction entre terme (précis,
contrôlé, pertinent, le plus univoquc possible) et mot (naturel, sujet à la
polysémie et au flou), dès la lecture du texte à analyser. L'auteur choisit
également son vocabulaire en fonction de ses options. Il est intéressant NOTES
de relire le troisième paragraphe de l'article « Les droits d'auteur des
œuvres numériques» (cf. p. 253) dans lequel « ... \es fanatiques... 1. Source : [64J, p. 60.
prônent une liberté totale de l'information, mais d'autres pionniers du 2. Source : [70], p. 225-226.
réseau soutiennent que son avenir passe par le contrôle et la facturation
de chaque information qui y transite... » Sans aller plus loin, on 3. Cité par Georges Stciner, au cours de l'émission « Bouillon de culture»
connaît déjà l'opinion de l'auteur. diffusée le 23 mai 1997.

Comme il ne peut y avoir de lecture objective, il est recommandé de 4. Ces catégories sont inspirées de [63].
lire en état d'alerte, c'est-à-dire conscient de toutes les déviations pré-
sentes dans la relation entre auteur et lecteur. Pour se les rappeler, on 5. Sur la différence enire ces deux termes, voir chapitre vin, p. 183.
peut relire la très vieille légende indienne des six aveugles et de l'élé- 6. Source : [33], p. 65.
phant : « Le premier aveugle, palpant une défense, déclare que c'est là
une lance ; le second, touchant les flancs de l'animal, prétend qu'il s'agit 7. Source : [70], p. 229.
bien plutôt d'une muraille. Le troisième, qui explore des doigts une 8. Voir en particulier [45] et [47].
patte, croit avoir affaire à un arbre, tandis que le quatrième, tâtant la
trompe de l'éléphant, pense que c'est un serpent. Le cinquième, lui, 9. Extrait de [66].
s'agrippe à une oreille de la bête, lui trouve une ressemblance certaine
avec un éventail, et le sixième aveugle, attrapant l'éléphant par la
queue, est sur d'avoir une corde entre les mains.' 1 »
En découvrant l'ambiguïté du vocabulaire à la lecture, l'analyste
prend conscience de sa responsabilité lors de la rédaction du résumé et
du choix des mots clés. L'art de l'analyse documentaire repose sur cet
aller-retour entre le texte et ce qui en sera fait.
CHAPITRE V
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

L'analyse documentaire a pour but d'apporter des réponses aux


demandeurs d'information, de différentes manières et sous différentes
formes, la plus répandue étant la constitution de banques de données
dans lesquelles les champs de recherche sont classiquement — mais
non exclusivement — les champs de résumé et d'indexation.
En effet, i) convient de ne pas confondre recherche, recherche
documentaire et renseignement. La recherche, ou recherche scientifi-
que, couvre l'ensemble des efforts, des travaux effectués pour appro-
fondir ou renouveler la connaissance ; c'est l'activité des chercheurs, à
quelque domaine qu'ils se consacrent.
On appelle recherche documentaire « l'action, les méthodes et procé-
dures ayant pour objet de retrouver dans des fonds documentaires les
références des documents pertinents?), et recherche de l'information
« l'action, les méthodes et procédures ayant pour objet d'extraire d'un en-
semble de documents les informations voulues » '. Le terme anglais
information retrieval ne fait pas de différence entre les deux ; obtenir une
référence complète est la première étape d'une recherche d'information et
c'est dans ce sens que l'on parlera ici de « recherche documentaire ».
A l'écoute d'une question posée, il est bon de s'interroger d'abord sur
le type d'information demandée. Le documentaliste est souvent
confronté à une simple demande de renseignement, et la consultation
d'un annuaire ou d'une encyclopédie, en ligne ou imprimés, suffit à
trouver facilement la réponse. Il est alors pourvoyeur d'une information
rapide et simple, et non pas à la recherche de références correspondant
aux lextes sélectionnés et intégrés à la banque de données.
C'est ainsi que Albrechtsen & Hj0rland 3 établissent une typologie et
distinguent les « non-documentary searches » des « document seeking
and -retrieval ». Le premier type est effectivement de l'ordre du rensei-
gnement : où cueillir des champignons, où trouver la liste de stations
thermales... Le deuxième type est séparé en « known item retrieval et
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE

identification of itnknown item(x) » ; la progression proposée, de la demander ces documents (« and I will avoid any unpleaxant remark
vérification des documents à la recherche d'informations contribuant à abont that process ») constate avec douleur qu'ils ne seront pas dispo-
la résolution de problèmes, peut naturellement être plus détaillée, ou nibles avant plusieurs semaines...
même différente. Cette description quelque peu kafkaïenne est rendue obsolète grâce à
Ce qui est important dans cet exemple, c'est l'essai d'une caractéri- Internet et à la possibilité des commandes en ligne. Mais est-on sûr que
sation de ce que l'on appelle communément la recherche documentaire les nouvelles technologies ne vont pas créer d'autres situations tout
en tant qu'auxiliaire de la recherche scientifique. C'est à ce titre que aussi dommageables pour l'utilisateur final, dont on parle beaucoup
sont étudiés ses rapports avec l'analyse documentaire : sans toutefois se mettre à sa place ?
• Quelle est la nature de cette opération documentaire ?
• Comment sont constituées les banques de données pour donner LA PLACE DE L'UTILISATKUR DANS LE PROCESSUS
pleinement satisfaction ? DR [.A RECHERCHE DOCUMENTAIRE
• Quels sont les aspects techniques de la recherche dans les banques
de données ? « Les utilisateurs ne savent pas poser les questions ! » Combien de
fois les documentalistes se désolent-ils de cet état de fait ? Sans doute
• Comment l'analyse documentaire contribue-t-elle à « l'objectif y a-t-il un peu de vrai dans cette déclaration, et on peut en chercher
essentiel de la documentation : mettre en communication ceux qui l'origine notamment dans la coutume pédagogique très française qui
cherchent des sources d'information sur un sujet précis et les auteurs consiste à opposer un « enseigné-écoutant » à un « enseignant-
susceptibles de les satisfaire' » ? parlant ».
Le questionnement pédagogique, seule source de réel apprentissage,
prend progressivement sa place dans l'enseignement, mais il n'est pas
La recherche documentaire encore suffisamment intégré aux pratiques de tous pour porter des
fruits très visibles.
Dans un article déjà ancien 4 , Gilles Deschâtelets décrivait la situation Or, toute recherche commence par un questionnement, et tout ques-
du « end-mer », installé devant son micro, tentant d'entrer en commu- tionnement est le reflet d'une problématique. Une mauvaise question
nication avec un « supermarket » de banques de données, se battant est la preuve que le problème n'est pas clair en amont, ou que la formu-
avec un protocole aussi rigide qu'ésotérique, choisissant une banque de lation des données du problème a besoin d'être clarifiée.
données sur l'avis de trois lignes de description, posant sa question en
termes supposés normaux mais immédiatement refusés pour être Le dialogue qui s'instaure entre le demandeur et le documentaliste
comparés à d'autres, apparemment meilleurs (pour la banque, non pour doit aider ce dernier dans sa pratique de l'analyse documentaire. C'est
l'usager), avec pour résultat quelques titres peu engageants, puis à pourquoi il est indispensable que le documentaliste puisse, de façon
nouveau confronté à des commandes barbares pour obtenir l'affichage régulière, confronter son travail solitaire d'analyse au resultat.de celle-
partiel ou complet qui ne lui donne guère plus de certitudes. Passons ci, à savoir l'adéquation entre le texte analysé et la question à laquelle
sur ce qui se passe ensuite, quand l'usager parti à la bibliothèque il pourra répondre.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE

C'est par ce processus que pourront être constituées des banques de QUEL EST LE BUT DU QUESTIONNEMENT ?
données que l'utilisateur final interrogera et qui lui donneront
satisfaction. De même qu'il existe une différence entre renseignement et
recherches, il est possible d'affiner la nature de ces dernières en s'inter-
rogeant sur les raisons du questionnement, tn effet, on peut poser une
QUI EST LE DEMANDEUR ? question et effectuer une recherche documentaire :

Dès que la demande est complexe, le documentaliste ne peut • Pour apprendre quelque chose : Qu'est-ce qu'un traitement antipara-
répondre sans avoir identifié le demandeur dans sa fonction et dans son sitaire ? Comment le met-on en place ? Dans quelles circonstances ?...
contexte de travail. Lorsque l'utilisateur fait partie de l'entreprise, cette • Pour actualiser une connaissance acquise : Y a-t-il eu de nouvelles
identification est en principe aisée, le documentaliste devant norma- pratiques culturales en zone sahélienne ?
lement connaître ses usagers potentiels — ou, tout au moins, les
services dans lesquels ils travaillent. Lorsque l'utilisateur est étranger à • Pour confirmer une connaissance incertaine : « II me semble que
l'entreprise, il doit justifier de ses droits à la demande ; si ceux-ci sont l'on fait ainsi, mais je veux vraiment être sûr »...
payants, il devient un client à satisfaire et le dialogue qui s'engage en
• Pour confronter, comparer des avis, des expériences, des idées : X a
est le premier moyen.
agit ainsi et Y autrement. Comment savoir ce qui serait préférable dans
telle situation ?
QUELLES SONT LES DONNÉES DU PROBLÈME ? • Pour prendre des décisions, ce qui correspond à la recherche
ultime : « Après avoir appris, confirmé, actualisé, confronté, je suis en
Tout problème est constitué d'un certain nombre de propositions mesure de décider. »
connues permettant d'en trouver une ou plusieurs autres, inconnues. À
partir de la question posée, il est indispensable de clarifier ce que sait On approfondit ainsi le dialogue, en prenant connaissance non
le demandeur pour déterminer ce qu'il ne sait pas. Évoquons ici le seulement de ce que sait le demandeur, mais aussi de sa propre
« paradoxe de la connaissance » ainsi exposé par Platon : « H n'est pas situation vis-à-vis de la demande.
possible à un homme de chercher ni ce qu'il connaît ni ce qu'il ne
connaît pas. En effet, ce qu'il connaît, il ne le chercherait pas parce qu'il
le connaît et, le connaissant, n'a aucun besoin d'une recherche ; et ce QUELLE EST LA FORME DU QUESTIONNEMENT ?
qu'il ne connaît pas, il ne le chercherait pas non plus, parce qu'il ne
saurait même pas ce qu'il devrait chercher' » qui, plus avant, précise : Si la question est formulée en termes généraux (« Qu'avez-vous sur
« Penses-tu qu'il entreprendrait de chercher ou d'apprendre ce qu'il l'agriculture?))), le problème n'est pas posé et aucune réponse
croyait savoir et qu'il ne sait pas avant d'avoir pris conscience de son satisfaisante ne peul être fournie. Soit le demandeur cherche seulement
ignorance ?* » On peut ici parler du « paradoxe de la recherche » qui une vague information, soit il ne veut pas exprimer ce qu'il cherche,
pour différentes raisons.
repose sur le constat suivant : je sais au moins ce que je ne sais pas. La
recherche part de ce que l'on sait pour découvrir ce que l'on veut savoir, Il n'est pas interdit de penser que certains usagers souhaitent ne pas
ce qui est une autre facette d'une situation problématique 7 . dévoiler ce qu'ils ne savent pas — même inconsciemment. Si une rela-
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

lion de confiance ne s'établit pas entre l'usager et le service (soit une d'autant plus que les banques de données manquent très souvent de
personne, soit une machine), aucune vraie recherche ne peut aboutir. cohérence interne, accentuant par là ce désappointement. Cette consta-
tation ne doit pas décourager les acteurs de la recherche documentaire,
Quoi qu'il en soit, le demandeur s'exprime à partir de son univers
mais les éclairer sur leur champ respectif de compétence.
mental el culturel et utilise ses propres mots. La formulation d'une
question passe par un vocabulaire dont on sait déjà qu'il est porteur de Le documentaliste ne peut pas se mettre à la place de l'utilisateur et
sens et d'expression multiples (cf. p. 87-93). L'écoute active du celui-ci ne peut pas attendre de la banque de données qu'elle lasse son
documentaliste doit susciter le plus souvent la reformulation, l'cxplici- propre travail. C'est en reconnaissant à chacun son territoire que l'on
tation de la demande pour arriver à la précision. crée les conditions d'un dialogue efficace.
Quand la question est devenue plus précise (« Quels sont les traite- Il va sans dire que cette situation est propre à la véritable recherche
ments antiparasitaircs de la culture du coton en zone sahélienne ? »), la documentaire et non à la fourniture de renseignements qui font partie
formulation du problème est amorcée, mais elle ne sera opératoire que du travail documentaire, mais ne requièrent pas autant d'exigence.
lorsqu'on aura identifié ce que le demandeur sait déjà sur le sujet (cf.
p. 98) et ce qu'il veut en faire (cf. p. 99). Est-on sûr, toutefois, de
pouvoir vraiment répondre de façon totalement satisfaisante ?
Place de l'analyse documentaire dans les banques de données

QUELLES SONT LIES LIMITES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE ?


Même si la recherche documentaire connaît des limites propres à sa
Si l'on parvient, dans le dialogue, à affiner la question, c'est-à-dire à nature, elle doit pouvoir compter sur toutes les possibilités qu'ofirent
poser les différentes propositions du problème, on peut déterminer ce les banques de données. Avant d'étudier les caractéristiques propres à la
qui manque au demandeur pour parfaire son objet de connaissance. recherche en texte intégral (cf. p. 111-118), il est opportun de détailler
C'est précisément ce manque qui va orienter la recherche documen- les différents champs des banques de données classiques, encore pré-
taire. pondérantes dans un grand nombre de services. Chaque document
Mais le documentaliste doit être conscient de la différence fonda- traité est présent dans la banque de données sous forme d'une notice et
mentale existant entre la demande et l'éventuelle réponse. En effet, chez chaque notice est constituée de différents champs (ou zones).
l'utilisateur, la question jaillit de l'apparition d'une faille dans la
construction de sa pensée ; celle-ci est vivante, mouvante et c'est l'une
des raisons profondes de cette difficulté qu'éprouvent certains utilisa- LES CHAMPS DES BANQUES DE DONNÉES
teurs à exprimer vraiment ce qu'ils cherchent.
II existe trois grands types de champs dans les banques de données.
La réponse prend la forme d'une compilation de documents, de textes
qui, dans leur ensemble, ne présentent aucun caractère construit. Or, le • Les champs de gestion, tels que « numéro de la notice », « date de
savoir est une construction de la pensée et non une accumulation de création/de modification de la notice », « identification de l'analyste »,
références, si bien choisies soient-elles. La relation usager-documen- etc., ne sont interrogeables que par l'administrateur de la base et ne
tation est très souvent décevante, pour les uns et pour (es autres, et cela présentent aucun intérêt pour la recherche documentaire.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

• Les champs de description ou d'information. Ils apportent les élé- plupart du temps, malheureusement, les cotes sont peu compréhensi-
ments nécessaires à l'identification du document : « auteur », « titre », bles par l'usager. Par ailleurs, un grand nombre de documents (tels les
« éditeur ou source », « collection », « date », « nombre de pages », articles) ne présentent aucune cote indicative de contenu.
« illustration », « langue », etc. Selon le système, ces champs sont plus
ou moins interrogeables, mais certains doivent l'être dans tous les cas : Domaine
« auteur », « titre », « date », par exemple.
Un tel champ de contenu est préconisé dans deux cas :
• Les champs de contenu, enfin, sont ceux qui pourront répondre à - le service de documentation produit un bulletin bibliographique.
toutes les questions posées à partir d'un sujet. Ils sont, pour la plupart, Les domaines indiqués représentent les têtes de chapitres ou de rubri-
issus de l'analyse documentaire. ques et sont édités automatiquement ;
- la base de données est riche, encyclopédique et/ou polyvalente ; le
tri par domaine permet une première sélection. C'est valable pour les
LES CHAMPS DE CONTENU secteurs de la presse, de la politique, mais aussi dans certains secteurs
apparemment plus précis. Le développement rural, par exemple, couvre
•' Classiquement, on considère comme champs de contenu les champs l'agronomie, la géographie, l'économie, la sociologie, l'ethnologie. la
« résumé » et « indexation » ; et comme on fait de moins en moins de pédagogie, parmi d'autres domaines à explorer.
résumé, la majorité des recherches par sujets repose sur l'indexation. En
Indexation
fait, il peut exister plusieurs champs de contenu dont la complémen-
tarité garantit la qualité de la recherche. Le champ « indexation » (ou mot clé, ou descripteur...), bien sûr, ne
peut pas être absent, mais son importance doit être relativisée en fonc-
Titre tion de tous les autres champs interrogeables en même temps que lui. Le
Le titre est le premier champ de contenu. Choisi normalement par terme « mot clé » n'a pas été vainement choisi : chaque mot sélectionné
pour l'indexation ouvre une porte ; le demandeur a-t-il besoin de tant de
l'auteur, rédigé en langue naturelle, il doit fournir les termes de la
portes, de tant de pièces, de tant de clés ? Ce champ est en général trop
recherche. En fait, il est sujet à caution dans la mesure où le marketing
fourni et, de ce fait, remplit un rôle inverse de celui qu'on en attend.
éditorial impose souvent le principe de l'accroche commerciale plutôt
L'opération d'indexation est développée au chapitre vu, p. 149-173.
que celui de l'information pertinente. L'identification du document est
un premier indice : le titre d'une thèse est plus fiable que celui d'une Résumé
monographie, même signée d'un nom prestigieux, mais éditée par une
entreprise commerciale et généraliste (cf. p. 125). Le champ « résumé » est indispensable pour aider le demandeur à
sélectionner les documents à lire. II répond à la question : « Ce qui me
Cotation manque pour résoudre mon problème est-il dans ce texte, oui ou
non ? » C'est également, avec le titre, le seul champ de contenu rédigé
La cotation, si elle s'appuie sur une classification conceptuelle, est un en langue naturelle ; c'est un atout pour le demandeur qui, souvent,
champ de contenu ; clic indique le lieu de rangement du document, n'aime pas la contrainte d'un langage impose ; l'analyste qui rédige doit
mais également le champ de connaissance dans lequel il s'inscrit. La avoir en mémoire cette caractéristique (cf. chapitre vi, p. 121-148).
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES

Typologie de l'information Le champ « typologie de l'information » ne doit pas être confondu


Ce champ est (trop) rare, bien qu'il aide puissamment à la sélection. avec le champ de description « typologie du document », utile pour
Sa terminologie est en général confondue avec les termes d'indexation, distinguer les articles de presse des communications de congrès, les
ce qui augmente la confusion de ces derniers. Si la question posée est monographies des thèses, les cartes des plans, etc.
celle-ci : « Je cherche des statistiques sur la mortalité des nouveau-nés
au Bangladesh », il est bien évident que le terme « statistique » est
COMPLÉMENTARITÉ DHS CHAMPS ot CONTENU
l'objet de la demande, et non le sujet vu sous son aspect médical, démo-
graphique ou autre. Or, il y a fort à parier que le mot statistique soit Chaque champ de contenu, ainsi que le rôle qui lui est propre, est
présent dans le champ « indexation » en tant que sujet. Ce document identifié clairement. C'est de cette façon uniquement qu'il sera possible
risque donc d'apparaître sur un listing où la recherche porterait d'en reconnaître, au moment de la recherche, la fonction précise ainsi
vraiment sur la « statistique », moyen imparable d'augmenter le bruit que la complémentarité avec les autres champs.
(cf. p. 111).
La possibilité de croiser les champs de contenu dépend essentielle-
" Chaque service peut établir une liste des types d'information les plus ment des logiciels utilisés. Certains, très lourds, obligent à l'interro-
souvent demandés ; l'étude systématique de la formulation des gation champ par champ ; de ce fait, chacun de ceux-ci doit être rensei-
questions doit aboutir à quelques termes qui sont automatiquement gné, même si c'est inutile.
versés dans le champ ad hoc après avoir été sélectionnés au moment de
l'analyse. C'est ainsi qu'un important service parlementaire a défini En revanche, s'il y a possibilité d'interroger toutes zones confondues,
plus de vingt types de textes officiels. Dès 1955, le Laboratoire de on peut alors valablement laisser certains champs — considérés tradi-
psychologie sociale de la Sorbonne B préconisait de distinguer, dans le tionnellement comme obligatoires — non renseignés, comme l'illustre
contenu, ce qui relevait de la « théorie verbale », de la « théorie mathé- l'exemple présenté en page suivante. Toutefois, l'interrogation toutes
matique », de la « méthodologie métrique » ou « statistique ». etc. zones n'est pas sans danger car elle peut favoriser le bruit.

Sans créer un champ de contenu comme celui-ci, certains services Est-ce pour cette raison que les documentalistes eux-mêmes n'ont pas
mettent en place des systèmes similaires. Ainsi la chambre de com- encore intégré pleinement la chance que représente la complémenta-
merce et d'industrie de Paris demande-t-elle aux analystes de la banque rité ? On se réfugie derrière les possibilités des logiciels, alors que
de données Delphes d'utiliser, dans le résumé, des expressions norma- ceux-ci deviennent de plus en plus souples et performants et qu'il doit
lisées qui ne sont pas des descripteurs et qui sont accessibles à la être possible de paramétrer des interrogations « tous champs » qui
recherche en langage libre : « elles permettent la sélection plus rapide feraient gagner beaucoup de temps, en amont comme en aval.
de documents comportant les caractéristiques indiquées" », telles que L'analyste n'est pas responsable du champ « titre », même si celui-ci
« données chiffrées », « données prospectives », « données juridiques », est le seul champ véritablement obligatoire. Si le titre (le cas échéant
etc. Il s'agit bien ici d'une typologie de l'information qui, ainsi traitée, complété par le sous-titre) est suffisamment porteur de sens, si sa
allège considérablement le champ de l'indexation. Une proposition de formulation comprend tout le vocabulaire représentatif du contenu
même nature est suggérée par François Feyler pour les établissements utile, à quoi bon répéter les mêmes termes dans les champs
de l'Éducation nationale '". « indexation » et « résumé » ?
ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES

Dans une banque de données dont l'anonymat sera préservé, on peut Enfin le champ « typologie de l'information » est obligatoire chaque
fois que le sens du texte l'exige. Si un article expose les aspects juridi-
prendre connaissance de la notice suivante :
ques de l'adoption d'un enfant, par exemple, le sens « adoption d'un
enfant » sera dans le champ « indexation », mais le sens « droit » ou
Titre : Principes généraux concernant la résonance magnétique nucléaire « réglementation » ne doit pas s'y trouver, car il peut alors être combiné
avec tous les autres termes choisis. C'est dans cet esprit que le champ
Auteur : Callaghan, P. T.
« typologie » est fortement conseillé pour maintenir la rigueur du
Descripteur : Résonance magnétique nucléaire champ « indexation ».
Résumé : Ce livre présente la technique et les applications de l'imagerie L'analyse documentaire n'est donc efficace qu'effectuée à la lumière
RMN. Après une introduction aux principes généraux de la RMN, l'auteur
de la recherche qui peut en découler. La délimitation stricte des rôles de
explore les thèmes les plus spécifiques de l'imagerie RMN.
chacun des champs de contenu ne doit pas être perçue comme une
contrainte, mais au contraire comme une aide tant en amont (alimen-
tation de la banque de données) qu'en aval (interrogation de ta banque
Fallait-il vraiment remplir les champs « descripteur » et « résumé » ?
de données).
Cet exemple, bien sûr, est valable dans le cas des logiciels permettant
l'interrogation toutes zones.
En revanche, l'analyste est pleinement responsable du champ Aspects techniques de la recherche
« résumé » puisqu'il est rédigé en langue naturelle, comme l'est le titre. documentaire informatisée
Si celui-ci est insuffisamment explicite, le résumé doit en compléter la
teneur, en utilisant un vocabulaire équivalent, mais différent, de façon
à augmenter les chances de recherche par le demandeur. Dans; l'exem- Parmi les outils de la recherche documentaire informatisée, certains
ple ci-dessus, il fallait énumérer « les thèmes les plus spécifiques » de sont indépendants de l'analyse documentaire :
façon à savoir tout de suite si celui qui était cherché s'y trouvait ou - les troncatures ou les masques, qui peuvent remplacer un ou
non. plusieurs caractères ;
La formulation du champ « indexation » est soumise à l'usage des - les opérateurs de recherche numérique (inférieur, supérieur, égal,
langages documentaires (cf. chapitre vin, p. 175-222). L'analyste doit compris entre), particulièrement utiles pour affiner la recherche
chronologique ;
donc choisir les mots clés en fonction de la formulation du titre, du
résumé et de la richesse du langage d'indexation. Normalement, la - les operateurs de proximité (adjacence, distance, etc.), indiquant la
rédaction du résumé précède le choix des mots clés, mais dans la pra- distance entre les mots, particulièrement utiles pour la recherche en
texte intégral ".
tique, les deux opérations dont effectuées en parallèle, ce qui leur
donne, du reste, toute leur valeur (cf. chapitres vi et vu, p, 121-173). La recherche documentaire dans les banques de données utilise aussi
Les champs « domaine » et « cotation » sont facultatifs. Mais si le toutes les ressources de l'algèbre de Boole, permettant le croisement
champ « domaine » existe, c'est l'occasion pour le champ « indexation » des différents opérateurs syntaxiques que sont les clés d'accès ou ter-
mes interrogeables tels que auteur, titre, date, etc. On peut ainsi recher-
d'éviter les termes trop généraux.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE

cher une référence en croisant un auteur et un mot du titre, un type de Figure l - Intersection :
document et un mot clé, plusieurs mots clés, etc. Le choix et le nombre musique ET folklore ET Grèce
de ceux-ci ne sont donc pas indifférents au travail de l'analyste.

LES OPÉRATEURS BOOLÉENS

Le but de ce manuel n'est pas d'expliquer l'algèbre de Boole et ses


incidences sur la recherche documentaire, mais de rappeler rapidement
quels sont les operateurs booléens les plus utilisés.

L'intersection
11 s'agit de l'intersection de deux ou plusieurs ensembles, en reliant
les termes qui doivent se trouver dans le document recherché. Si l'on
cherche des documents sur la musique folklorique de la Grèce, on
croise l'ensemble des références sur la musique, sur le folklore, sur la Figure 2 - Union ;
Grèce, l'intersection des trois ensembles devant normalement offrir des (musique folklorique OU musique populaire) ET Grèce
notices portant sur le sujet. L'opérateur d'intersection s'écrit ET ou
AND, selon le système en vigueur. L'équation de recherche prendra la
forme illustrée par la figure 1, ci-contre.

L'union
II s'agit de l'union de deux ou plusieurs ensembles, en reliant les
termes dont l'un, l'autre ou les autres doivent être présents dans le
document recherché. Admettons que, dans l'exemple précédent, le lan-
gage d'indexation propose à la fois « musique folklorique » et « musi-
que populaire ». Dans ce cas, toutes les références indexées par l'un,
l'autre ou les deux termes peuvent être utiles à la recherche documen-
taire. L'équation de recherche prendra la forme indiquée ci-contre par
la figure 2.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES U RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

LE BRUIT ET LE SILENCE
L'exclusion
II s'agit de l'exclusion d'un ensemble, en reliant des termes dont l'un Dans le jargon documentaire, on appelle « bruit » toute réponse
ne doit pas se trouver dans les références recherchées. Si la question ne obtenue n'ayant aucune pertinence au regard de la question posée, et
concerne que la musique folklorique et populaire, mais pas en Grèce, « silence » le fait de ne pas obtenir de réponses alors que les documents
l'équation sera ainsi formulée : pertinents sont dans la banque de données. Le premier inconvénient
tient au fait qu'on a choisi un trop grand nombre de mots clés dans un
registre trop large, et le second tient à une carence de mots clés ou à un
Figure 3 - Exclusion : choix de mots clés trop spécifiques. Le bruit et le silence sont princi-
(musique folklorique OU musique populaire) SAUF Grèce palement dus à une mauvaise indexation. Certains logiciels permettent
l'autopostage (cf. p. 217-218), qui atténue principalement les risques de
silence.

La recherche documentaire en texte intégral

RECHERCHE SUR FICHIER INVERSE

Les banques de données documentaires dites en « texte intégra! »


comprennent le texte des documents eux-mêmes, généralement associé
à une notice documentaire composée de champs comparables à ceux
détaillés en pages 101 à 105. On pourrait penser que la présence du
texte, dans son intégralité, dispense de l'élaboration de cette notice. En
fait, il existe toujours des informations que le texte lui-même ne peut
apporter et qui sont propres aux champs de description : « auteur »,
« date », « source », « type du document », etc.

Pour la majorité des recherches documentaires, on utilise les opéra- Mais la pratique de la recherche documentaire a poussé un certain
teurs booléens. Tout documentaliste doit avoir cette réalité présente à nombre de documentalistes à créer également des champs de contenu
l'esprit au moment de choisir des mots clés en relation avec tous les pour pallier les insuffisances ou les erreurs dues au texte intégral. En
autres termes des champs de contenu. Dans la mesure où il suffit d'un effet, les outils de recherche les plus répandus aujourd'hui portent sur
mauvais croisement pour obtenir un résultat égal à zéro, on comprend les mots du texte ; à partir d'un fichier inverse, c'est-à-dire d'un index
vite l'importance du choix des termes ; on comprend également qu'un de tous les mots du texte, moins les mots vides (prépositions, "articles,
nombre trop important de termes mène rapidement au même résultat. etc.), ces moteurs de recherche, qui existent depuis de nombreuses
Ce travers de la surindexation sera étudié au chapitre vu, p. 163-168. années, permettent de retrouver les concepts exprimes grâce à une
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES U RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

coïncidence exacte entre les mots de la question et ceux du document. La recherche documentaire en texte intégral ne peut donc pas faire
Mais comme ils ne sont capables de reconnaître ni la morphologie ni la l'économie d'un traitement en amont si l'on veut la rendre performante,
syntaxe d'une langue, on en mesure tout de suite les limites. C'est pour- et le documentaliste a toujours un rôle à jouer pour améliorer la perti-
quoi, par exemple, les documentaliste du quotidien Le Monde {dont la nence des recherches. 11 est, du reste, assez logique de penser qu'un
banque de données est en texte intégral) élaborent un champ appelé texte est écrit en utilisant toutes les ressources de la langue naturelle, et
« titre complémentaire », comparable à un petit résumé, puis indexent qu'il faut beaucoup de chance pour trouver rapidement le terme qui per-
les articles à l'aide d'un thésaurus. II est vrai que la presse ne fournit mettra l'accès direct aux différentes et légitimes formulations suivantes
guère de titres sûrs ; face aux difficultés d'accès par ce biais, la recher- (qu'elles soient au singulier ou au pluriel), du type : « élection présiden-
che dite sur « titre » est en fait toujours effectuée sur « titre complé- tielle », « élection du président de la République », « élection du chef
mentaire », puis sur la zone d'indexation, et en dernier lieu sur le texte de l'État », « échéance électorale présidentielle »...
intégral.
En effet, si l'on cherche uniquement, dans le texte intégral, les articles
concernant la transmission de la maladie de la vache folle aux chats, on RECHERCHE PAR L'INTERMÉDIAIRE D'OUTILS UNGUISTIQUES
obtient le résultat suivant : « vache folle » et « chat » = 12 documents
L'exemple précédent démontre la difficulté de la recherche en texte
dont 2 pertinents.
intégral. Depuis déjà longtemps, existaient quelques logiciels prati-
Pour obtenir le meilleur résultat et uniquement des articles pertinents, quant les techniques statistiques afin de classer les réponses par ordre
il faut poser l'équation suivante : de pertinence, ceci grâce au calcul de la cooccurrencc des mots pour
[dans le titre - complémentaire -] : « vache folle » et présenter en premier les documents considérés comme répondant le
[dans le texte intégral] (transmet ou transmettent ou transmettre ou mieux (ou le plus ?) à la question.
transmis ou transmise ou transmises ou transmission)
Ces outils linguistiques ont été particulièrement améliorés. Ils
adj4 (chat ou chats)
reconnaissent la structure des mots et des phrases grâce aux trois étapes
= 4 réponses toutes pertinentes.
de l'analyse linguistique qui s'applique à la forme des mots grâce à
Il est nécessaire de mentionner la notion de transmission en l'appro- l'analyse morphologique, à l'agencement grammatical grâce à l'analyse
chant de la notion de chat (adj4), sinon l'on risque d'obtenir des syntaxique, et au sens grâce à l'analyse sémantique.
documents sur la transmission de la maladie à l'homme. La combinai-
son du titre complémentaire et du texte intégral permet à la deuxième La forme des mois
requête d'aboutir à un meilleur résultat.
Cette première étape permet de résoudre les difficultés dues :
On voit que l'interrogation du seul texte intégral génère beaucoup de - aux expressions (pomme de terre, Amérique latine) ;
bruit, surtout quand on ne peut pas compter, dans cette opération, sur - aux singuliers et pluriels (cheval - chevaux, social - sociaux) ;
la pertinence des titres ; pour en donner un aperçu, plusieurs articles sur - aux formes verbales (transmet, transmettent, transmis, transmise,
la vache folle sont présents dans Le Monde sous les titres suivants : transmises sont ramenées à transmettre). ,
« Après minuit, fais ce qu'il te plaît », « Maladies à prions », « Les
pouvoirs publics doivent passer aux actes », « L'inaccessible généalogie Toutes les flexions, verbales ou nominales, subissent une opération
du vivant »... de lemmatisation qui leur assure une forme et une seule.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

Cette opération peut être illustrée par l'exemple suivant : une recher- L'agencement grammatical
che portant sur « la réhabilitation des logements sociaux » a été formu-
lée dans ces termes en interrogeant les rapports en texte intégral de la Cette deuxième étape de l'analyse linguistique détermine la nature
Cour des Comptes (interrogeables soit sur cédérom, soit par le site grammaticale des mots : nom, verbe, adjectif,... On peut ainsi distin-
Internet de la Cour : http://www.ccomptes.fr). L'outil logiciel a analysé guer or en tant que nom ou préposition, avions en tant que substantif
la question et l'a reformulée en prenant en compte les mots choisis sous pluriel ou imparfait de l'indicatif, etc. Grâce à l'identification précise
les différentes formes suivantes : l des mots ou groupes de mots constituant la requête, les outils linguisti-
ques actuellement disponibles permettent d'accorder à ceux-ci un poids
logements : locataires
logements : localif différent. Les réponses apparaissent par ordre de pertinence car le
logements : location logiciel s'appuie aussi sur une analyse statistique, donc sur un ordre
logements : logement d'occurrence des termes employés. Ainsi dans la requête : « la réhabili-
logements : loger tation des logements sociaux », tout le poids de la question porte sur le
logements : logeur
logements : logeurs
groupe de mots « logements sociaux », puisque la requête posée sous
logements : louable la formulation « rénovation des logements sociaux » donne le même
logements : louer premier lot de résultats ; les termes « réhabilitation » et « rénovation »
logements : loyer sont pris en compte dans un deuxième temps. Dans ce dernier cas. les
logements : reloger
résultats sont proches, mais l'ordre de présentation des documents
logements : relouer
sociaux : social devant répondre à la question est modifié.
sociaux : socialement
sociaux : socialisation
L'outil linguistique analyse la question et non plus le document. Plus
sociaux : socialiser la question est formulée de façon précise, plus il y a d'informations à
sociaux : socialiste traiter et plus le logiciel parvient à trier et présenter les résultats par
réhabilitation logements ; réhabilitation locatif classes pertinentes. A la requête : « le financement des travaux de réha-
réhabilitation logements : réhabilitation logement
bilitation des logements sociaux », le logiciel répond par plus de dix
réhabilitation logements ; réhabiliter logement
logements sociaux : locataire social réponses classées par ordre de pertinence (voir en page suivante).
logements sociaux : locatif social
logements sociaux : location social
La première réponse est pertinente, puisque tout le poids est donné au
logements sociaux : logement social sens « travaux de réhabilitation des logements locatifs sociaux », la
logements sociaux : logeur social notion de financement ayant un poids secondaire.
La seconde réponse pondère en trois degrés : d'abord « financement
A la différence de la recherche sur le texte sans outil d'analyse, ce des travaux de réhabilitation », puis « logements locatifs », enfin
travail est effectué automatiquement par le logiciel. Même si certaines « sociaux ». Le document consulté porte bien sur tous ces aspects, sauf
équivalences n'entrent pas dans le cadre de la question posée (socia- qu'il est limité au financement de travaux dans le domaine de l'eau. Le
liste, socialiser), l'outil logiciel utilisant l'analyse morphologique per- terme « eau » n'apparaissant pas dans la requête, on a là une excellente
met de retrouver des documents de façon beaucoup plus efficace que illustration de la limite d'un système qui interroge la requête et non pas
par le seul fichier inverse. le document.
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL

1 - Document contenant le(s) lcnnc(s) : (ra\i ta lion-logement s sion des mots et permettent de retrouver des informations qui ne sont
locatifs-sociaux, financement pas formulées avec la terminologie employée dans le texte même, et de
2 - Documenl contenant le(s) lenne(s) : financemcnt-travaux-réliabilitatron. loge- distinguer les termes homographes (cf. p. 183-184), donc de retrouver
ments-locatifs, sociaux le mot canon en tant que pièce d'artillerie, forme musicale ou règle
3 - Document contenant le(s) terme(s) : financement-travaux, logements locatifs-
sociaux, réhabilitation
ecclésiastique, etc.
4 - Document contenant le(s) tcrme(s) : travaux-réhabilitation, logements locatifs, L'exemple proposé est extrait de la banque de données de l'Institut
financement, sociaux national de la propriété industrielle (INPI) consacrée aux brevets
5 - Document contenant le(s) terme(s) ; logements-locatifs-sociaiix. financement, (http://www.inpi.fr). La première formulation a été : « machines pour
travaux, réhabilitation
récolter les prunes » et le premier résultat : « machines à dénoyauter les
6 - Document contenant le(s) terme(s) : financement-travaux, locatifs sociaux,
réhabilitation, logements fruits ou à extraire des fruits les parties contenant les pépins, caractéri-
7 - Document contenant le(s) terme(s) : [ogcmcnls-locatifs-sociaux, financement, sées par leur dispositif d'extraction » ; les autres résultats concernaient
travaux toutes sortes de machines {dont les moissonneuses.,.) et, enfin, en
8 - Document contenant le(s) terme(s) : réhabilitai ion-logements, financement, dixième position, la réponse a été : « cueillette de fruits, légumes, hou-
travaux, sociaux
blon ou de produits similaires : dispositif pour secouer les arbres ou
9 - Document contenant ]e(s) terme(s) : financement-travaux, localils-socraux,
logements arbustes ».
10 - Documenl contenant le{s) tcrmc(s) : réhabilitation-logements, financement, Si la question est formulée « machine à cueillir des prunes », la
travaux
réponse passe de la dixième à la quatrième position ; si l'on demande
« machines pour secouer les prunes », en deuxième position et enfin en
Si la troisième réponse renvoie à un document pertinent. la quatrième première position si la requête est formulée ainsi : « secouer des arbres
limite le terme « social » à « l'objet social » d'une société...
pour cueillir des fruits ». L'expérience montre que le résultat est meil-
Selon la formulation de la question, l'ordre des documents proposés leur si l'on privilégie dans la demande le procédé à mettre en œuvre :
est modifié. Si la requête se présente ainsi : « les problèmes financiers « secouer » et un terme générique : « fruit » au lieu de « prune ».
liés aux travaux d'amélioration du parc de logements locatifs d'HLM »,
Toutefois, les dictionnaires de connaissances permettent de trouver
les résultats sont très proches des précédents, la troisième réponse une réponse alors même qu'aucun des termes utilisés dans la requête ne
arrivant alors en première position.
figure dans la réponse. Ainsi, à la demande « machines à récolter des
Ce type d'outil linguistique recourt à des outils d'analyses morpho- prunes », la réponse est : « cueillette de fruits, légumes, houblon ou de
logique, syntaxique et statistique des textes ; il permet d'obtenir des produits similaires : dispositif pour secouer les arbres ou arbustes » ;
réponses correspondant à la question posée, ee qui provoque souvent l'utilisation automatique des dictionnaires permet d'associer le terme
du bruit mais évite le silence. « récolter » à « cueillette » et « prunes » à « fruits ».
L'association de l'analyse linguistique de la question et des diction-
Le sens naires de connaissances permet de trouver la réponse à une question
L'analyse sémantique, cette troisième étape de l'analyse linguistique, qui, dans un .système booléen, n'aurait pas abouti. Ces logiciels de
met en œuvre des réseaux sémantiques utilisant des dictionnaires de pilotage du texte intégral sont de plus en plus performants, surtout sur
connaissances. Ces outils s'attachent principalement à la compréhen- des corpus importants. Connaissant un large développement, ils sont
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES LA RECHERCHE D'INFORMATIONS SUR INTERNET

souvent interrogés, sur cédérom ou Internet, sans que l'utilisateur en LES RÉPERTOIRES
soit même conscient. Ils s'attachent, comme on l'a vu ci-dessus, à la
compréhension des mots. La recherche s'emploie actuellement à Les répertoires (Yahoo, Nomade, Voilà, etc.) ont été créés pour faire
développer des prototypes pour comprendre le texte. face à la difficulté de la recherche des informations sur le Web. Ces
annuaires sont constitués par des documentalistes qui, en amont,
indexent les sites et proposent à l'utilisateur une possibilité de consulta-
tion hiérarchisée, sur le mode classificatoire.
La recherche d'informations sur Internet

AUTRES OUTILS
On a vu qu'Internet n'était pas actuellement un outil pour la recherche
Certains sites proposent des « plans de site » : l'information présente
documentaire stricto sensu. Mais son développement entraîne déjà —
dans le site est organisée selon un plan défini à l'avance. Ceci nous
et ce phénomène ne fera que croître — les recherches pour améliorer
ramène à la problématique du classement — un document peut être
son utilisation. À l'heure actuelle, deux types d'outils sont mis à la
rangé à différents endroits — et de la classification — un concept peut
disposition des usagers : les moteurs et les répertoires.
être compris et interprété de diverses façons.
Parfois, un moteur de recherche interne au site est mis en place ; il
LES MOTRURS DE RECHERCHE utilise des techniques de traitement automatique du langage naturel
(TALN) qui intègrent tous les outils linguistiques déjà décrits ci-avant,
Les moteurs de recherche sur Internet (Altavista, Excite, Ecila, etc.) plus des dictionnaires très puissants, enrichis de relations sémantiques
fonctionnent en mode recherche sur les mots du texte, comme indiqué proches du thésaurus (cf. p. 203-205), ce qui permet de retrouver, par
ci-dessus. S'y ajoutent des algorithmes statistiques qui permettent le tri exemple, des documents concernant les « impôts en matière de succes-
des réponses par ordre de pertinence. La pondération qui est effectuée sion » alors que le texte indique seulement « la fiscalité patrimoniale ».
tient compte d'une part de la place des mots dans la page (présence dans
le titre, dans le début de page, dans les métatags,..), et d'autre part Face à ces nouveautés qui ne font que s'améliorer et se diversifier de
d'éléments difficiles à connaître car ils relèvent du secret commercial mois en mois, on pourrait douter de la pérennité du travail d'analyse
de chaque moteur. documentaire. Mais l'étude attentive de la mise en œuvre de serveurs
web démontre au contraire que cette opération perdure sous une forme
Les difficultés liées à la recherche d'information sur Internet sont
relativement stable; à plus forte raison dans un site (Internet ou
multiples. Une même question posée avec divers moteurs donne des
Intranet) spécifique, au sein duquel les modalités de la recherche se
résultats très différents. Ceci n'est pas seulement dû au mode de fonc-
ramènent à ce qui a été précédemment exposé dans ce chapitre.
tionnement du moteur lui-même, mais aussi au fait que chaque moteur
n'indexe pas les mêmes parties du Web et ne le fait pas de la même En effet, on intègre au document numérisé lui-même des méta-
manière. Une façon d'améliorer la recherche est l'utilisation de « méta- données qui ressemblent — quant au contenu — aux champ*s de
moteurs », c'est-à-dire de robots qui combinent l'utilisation de plusieurs banques de données classiques (cf. p. 101-102). Qu'on en juge par
moteurs et permettent d'améliorer la pertinence des résultats. l'extrait du Guide pour les producteurs d'information d'EUROPA,
ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES
CHAPITRE VI
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

serveur web de l'Union européenne^ qui distingue dix métadonnées


obligatoires : référence, titre, source, langue, producteur d'information,
type, date de publication, date-alarme, classification, mots clés. Si l'on
exclut la date-alarme qui indique quand il faut mettre le document à L'ensemble du travail d'analyse effectué en amont sur les textes a
jour ou l'éliminer, on se retrouve en terrain connu, même si les règles exige du documentaliste un effort important de réflexion et de compré-
d'écriture diffèrent — ce qui n'exige qu'un apprentissage complémen- hension dont l'aboutissement, à ce stade, représente quelques notes
taire. Nui doute que les métadonnées « classification » et « mots clés » mais pas la moindre phrase. C'est donc maintenant que de lecteur atten-
ne posent les mêmes problèmes que ceux exposés tout au long de ce tif il devient producteur de résumé, d'indexation et/ou de synthèse,
manuel. selon les besoins du service et les finalités décidées par la politique
documentaire. C'est le résumé que nous allons étudier dans le présent
chapitre, ce résumé documentaire qui est de moins en moins présent
dans les banques de données. L'explication de cette désaffection est
d'ordre économique : rédiger un résumé prend du temps et coûte donc
cher. Or, étant donné qu'il est impossible de faire l'impasse sur le
NOTES contenu, on attend de l'indexation qu'elle joue le rôle du résumé. Il
1. Source: [30]. semble que cette confusion mène à d'étranges dysfonctionnements,
dont on prend conscience au moment de la recherche documentaire.
2. Source: [2], p. 137. L'un des buts de ce chapitre est d'aider à une réflexion plus large sur le
3. Source: [56], p. 214. rôle propre du résumé dans une banque de données, en vue d'en
réhabiliter l'usage.
4. Source : [26], p. 126.
5. Source: [71], p. 152.
6. Idem, p. 164. L'ensemble du chapitre du Menon consacré au paradoxe de la Définition
connaissance a été très bien commenté par Bertrand Sajus [73].
7. Pour qui voudrait approfondir la notion de problème, voir l'ancien mais Pour le Robert, résumer consiste à abréger, écourter, réduire, conden-
toujours inégalé [17]. ser. Ce dernier verbe, de nature scientifique, renvoie à la définition de
8. Source : [69]. la condensation en physique : action par laquelle un gaz, une vapeur
diminue de volume et augmente de densité par rapprochement de ses
9. Source: [19], p. 17. molécules.
10. Source : [35]. Si l'AFNOR' définit le résumé documentaire comme « l a présen-
11. Pour en savoir plus sur ces outils, voir [53] p. 63 et [59]. tation plus ou moins concise du contenu d'un document », on peut donc
rapprocher les deux idées : abréger un texte en augmente la densité. Les
12. Source: [18].
publicitaires, qui ne rédigent pas de résumé documentaire, en ont
mesuré l'impact depuis longtemps.
USAGES ET USAGERS
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

courant, de façon suivie, de la littérature propre à son centre d'intérêt.


Les documentalistes doivent donc être pleinement conscients que La situation de recherche n'est plus ponctuelle, mais courante. L'utili-
résumer un texte, c'est bien condenser son contenu en vue de mettre en
sateur est le plus souvent un spécialiste du sujet.
évidence l'information utile et nécessaire pour les usagers éventuels de
ce texte. On ne résume pas un texte pour le texte, mais pour qu'il puisse
répondre, à un moment donné, à une question donnée. C'est bien ainsi ACCOMPAGNEMENT DE RÉFÉRENCES DANS LA PARTIE BIBLIOGRAPHIQUE
que l'AFNOR en précise le sens dans la norme consacrée au sujet 2 :
DE REVUES GÉNÉRALES OU SPÉCIALISÉES
« Le résumé est un texte concis reflétant fidèlement, sans interpré-
tation ni critique, le contenu du document. Il a pour but d'aider le Ces résumés ont beaucoup de points communs avec les précédents,
lecteur à cerner la pertinence du document vis-à-vis de l'information mais la majorité d'entre eux présentent un commentaire critique. Les uti-
recherchée. » lisateurs, souvent spécialistes, cherchent, outre l'actualisation de leurs
connaissances, des opinions, voire des confrontations d'opinions. On ne
peut donc parler, dans ce cas, de résumé documentaire stricto sensu.
Usages et usagers

AUTRES USAGES
Puisque le résumé ne saurait être une fin en soi, il faut avoir constam-
ment à l'esprit l'usage qui en sera fait et l'usager auquel il est destiné. Des résumés peuvent également accompagner :
- des actes de congrès, colloques ou réunions, afin de donner un
aperçu de chacune des communications ;
ALIMENTATION D'UNE MÉMOIRE DOCUMENTAIRE - des bibliographies thématiques, des dossiers documentaires : ils
sont alors comparables aux résumés des banques de données, voire
Les documentalistes remplissent les champs « résumé » des banques
simplement issus de celles-ci ;
de données internes et externes. Le but est d'augmenter la richesse
- des revues de presse : ils sont alors comparables à ceux des
informative d'une référence dans son fond (complément aux autres
banques de données ; ils sont rédigés dans la hâte pour un document
champs de contenu) et dans sa forme (utilisation de la langue
dont la valeur n'est qu'éphémère, ce que l'on peut considérer comme un
naturelle). Ces résumés servent aux utilisateurs dans le cadre de recher-
vrai luxe. Ne vaut-il pas mieux concentrer son énergie sur les résumés
ches documentaires, sur un sujet précis, dans un but et sur une durée
d'une banque de données, dont la raison d'être est de durer ?
bien délimités.
La rédaction des résumés repose, bien sûr, sur la connaissance des
destinataires (cf. p. 21-23) soit en tant que personnes, soit en tant que
ACCOMPAGNEMENT DE RÉFÉRENCES groupes dont les catégories d'intérêt sont bien définies. Il n'est pire
DANS LES BULLETINS BIBLIOGRAPHIQUES résumé que celui effectué pour un groupe indéterminé tel que « public
moyen non identifié ». S'il existe des « non-destinataires » d'un résume.
II est d'usage de faire suivre les références bibliographiques d'un il revient à l'auteur de retrouver, dans le résumé, les idées principales
résumé du contenu. Le but est le même que l'alimentation d'une banque qu'il a souhaité transmettre. C'est ensuite à l'analyste lui-même de
de do'nnées, mais le cadre est différent : le lecteur cherche à se tenir au
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE US DIFFÉRENTES FORMES DE RÉSUMÉS

maîtriser sa subjectivité et de rédiger sans plaisir ni déplaisir. Message de saule sur roue, ce n'est pas un encouragement au noble art
Cependant, il importe que le documentaliste-analyste soit régulièrement de la bicyclette, mais un traité sur l'amélioration de l'approvision-
en contact avec la recherche documentaire, devenant par là même usager nement en eau par de nouvelles méthodes d'assainissement pour la
de ses propres résumés. Il n'existe, en effet, pas meilleur enseignement population rurale de Colombie...
que la confrontation personnelle avec ses erreurs, ni meilleure gratifi-
cation que l'heureuse constatation de ses réussites...
LE RÉSUMÉ D'AUTEUR

La première version de la norme Z 44-004 ' était consacrée aux résu-


més d'auteurs et en précisait le but et le caractère. Le résumé d'auteur
Les différentes formes de résumés est le plus souvent rédigé par celui qui a écrit l'ensemble du texte origi-
nal. On peut donc estimer qu'il n'est meilleur résumé que celui qu'a
rédigé la personne connaissant parfaitement le sujet. Mais l'auteur est
Le mot « résumé» est plus polysémique qu'il n'y paraît. Avant de centré sur le contenu, et non sur l'utilisation de ce contenu ; de plus,
présenter ce qu'est vraiment un résumé documentaire, il est nécessaire étant donné qu'il souhaite que les lecteurs prennent entière connais-
de définir la fonction des formes qui s'en approchent. sance de son texte, son résumé sera souvent persuasif. Par conséquent,
bien que l'analyste ait tout intérêt à s'inspirer de cet écrit, il ne peut le
considérer comme un véritable résumé documentaire.
LE TITRE

Le titre est le premier résumé choisi par l'auteur (cf. p. 102). En tant
LE RÉSUMÉ D'EDITHUK
que premier texte lu, il situe généralement l'article ou l'ouvrage dans
son domaine d'intérêt et peut susciter une première hypothèse de Le résumé d'éditeur concerne les monographies et se situe en général
lecture ; « La traite des esclaves vers les Mascareignes au xvni 1 siècle » en quatrième de couverture. Quelquefois rédige par l'auteur, mais le
répond ainsi à ce que l'on peut attendre d'un titre. plus souvent par le service marketing de la maison d'édition, il a pour
Mais cet élément pourtant essentiel est souvent insuffisant. Un texte but de vendre le livre. S'il présente le contenu, et si l'analyste peut s'en
ayant pour titre « La canne à sucre » traitera-t-il des techniques agrico- inspirer (hypothèses de lecture), son style est de pure persuasion
les ? de la production ? de la transformation ? de l'économie ? de l'en- commerciale. À nouveau, il ne peut s'agir de résumé documentaire.
semble ? « Auvergne et Velay » sont-ils vus sous l'angle de l'histoire ?
de l'architecture ? du tourisme ? de la gastronomie ?
LE COMPTE RENDU
Pire, le titre est trompeur. On a déjà observé ce fait à propos de la
presse, mais les ouvrages offrent aussi de bons exemples. Ainsi les Le compte rendu, ou analyse critique, accompagne souvcrU la partie
Épaves antiques ne font-elles rêver qu'un temps : il s'agit, en réalité, bibliographique des revues spécialisées. Il est rédigé par un spécialiste
d'un traité uniquement technique sur la façon de repêcher les amphores, du domaine ayant les capacités déjuger et la forme et le contenu. Dans
illustré par l'une des expéditions Cousteau en Méditerranée. Quant à la mesure où des jugements sont portés sur la valeur du texte, cette
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE LES RÉSUMÉS DOCUMENTAIRES

forme de résumé est toujours signée. L'analyste doit prendre connais- Les résumés documentaires
sance du compte rendu critique en gardant ses distances face aux juge-
ments de valeur exprimés, sans le considérer, en conséquence, comme
Que peut-on donc qualifier de « véritable résumé documentaire » ?
un résumé documentaire 4 . Dans la formation des documentalistes, on distingue traditionnellement
trois types de résumés. Les deux premiers sont seuls retenus par la
norme, qui en donne la définition suivante.
LE DIGEST

Le digest est un texte réécrit de façon plus condensée pour « raconter


LE RÉSUMÉ INKORMATIF
l'histoire » ; c'est une forme vulgarisée du contenu, souvent proche du
style journalistique. Ces textes entrent dans la catégorie des « connais- « Le résumé infonnatif est une représentation abrégée du document,
sances sensibles» 5 , insuffisamment solides pour apporter une infor- renseignant sur les informations quantitatives ou qualitatives apportées
mation vérifiée. par l'auteur. » L'enseignement traditionnel ajoute que ce résumé déve-
loppe tous les points essentiels, toutes les informations contenues dans
le texte. De plus, il devrait permettre à l'utilisateur de ne pas lire le
L'EXTRAIT document original.

L'extrait reproduit des parties du texte original, les passages jugés


secondaires ayant été rejetés. Ce qui est présenté comme le contenu LE RÉSUMÉ INDICATIF
intéressant est, en fait, coupé de son contexte et peut faire l'objet de
toutes les manipulations de sens imaginables. L'analyste ne peut juger « Le résumé indicatif se contente de signaler le ou les thèmes
ni de la véracité ni de la réalité du contenu. d'études. Il concerne les documents qui, par leur nature ou leur
ampleur, ne se prêtent pas à l'établissement d'un résumé infonnatif. »
On ne fait pas de différence entre les types de textes ; un résumé indi-
LA CONTRACTION DE TEXTE catif cite, énumèrc, indique les points essentiels, les informations utiles
que contient le texte. Il est rapide et global, il explicite un titre trop
Cet exercice de style oblige les candidats, pour certains examens ou court ou incomplet.
concours, à réduire un nombre de mots au 1/100. Cette opération est
centrée sur les capacités des candidats (analyse et synthèse, richesse du
vocabulaire} et à aucun moment sur le texte, encore moins sur les utili- RÉSUMÉ SÉLECTIF
sateurs possibles. Si les méthodes de contraction de texte sont valables
pour acquérir des réflexes de réduction, le résultat ne s'apparente en Le résumé sélectif est le produit des deux ; citant tous |es points
rien au résumé documentaire. Les ouvrages relatifs au résumé dans le essentiels et développant ceux qui intéressent une catégorie spéciale
cadre de la préparation aux concours administratifs sont légion et d'utilisateurs, il modifie l'équilibre du texte, mais répond à des besoins
souvent redondants ; on peut recommander la lecture de [431. identifiés.
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Rôle du résumé documentaire dans une banque de données général, du simple au complexe, du détail à la globalité — et vice versa.
Ainsi, l'appréhension visuelle du document (cf. p. 35-47) précède une lec-
ture plus approfondie (cf. p. 49-71), le vocabulaire (cf. p. 84-93) aide à la
Dans la réalité, ces distinctions sont parfaitement théoriques. C'est
perception du plan (cf. p. 73-83), des hypothèses de lecture (cf. p. 68-69}
sans doute pour les avoir prises au pied de la lettre qu'un grand nombre
sous-tendent la compréhension que l'on doit à présent maîtriser. Résumer
de services ont décidé de suspendre l'élaboration de résumés dans leur
et indexer illustrent cette correspondance : l'opération mentale est globale
banque de données. En effet, qui peut raisonnablement envisager d'ex-
mais les produits sont différents. Ils sont présentés dans deux chapitres
traire « tous les points essentiels, toutes les informations contenues
distincts mais, dans la pratique, ils sont élaborés en même temps.
dans le texte » ? Qui pense réellement qu'un résumé peut remplacer le
texte original ? Le souci du perfectionnisme a poussé les documenta- On l'a vu, l'opération d'analyse documentaire comporte trois phases.
listes à choisir le résumé informatif et à y consacrer beaucoup d'éner- Ainsi en est-il du résumé : compréhension, sélection, construction.
gie, dans un rapport temps-efficacité qui n'a jamais pu être vraiment
évalué. Puis, par souci d'économie (en amont), les résumés ont été
abandonnés et l'on a demandé à l'indexation de remplir leur rôle. COMPRÉHENSION
Or, on a vu (cf. p. 105-107) que chaque champ a son rôle et sa La première phase consiste à observer et comprendre un texte avec un
fonction. Une suite, une accumulation de mots clés ne remplacent pas objectif documentaire ; à partir d'un élément concret (le texte), on va dans
une phrase, même succincte : un poteau indicateur permet de choisir la
l'abstrait (sa signification dans un cadre donné), pour retrouver le concret
route à prendre ; il n'informe pas sur l'intérêt de la ville vers laquelle on
(l'écriture d'un résumé). C'est ce que Pinto-Molina* appelle le cyclical
se dirige ; on sait simplement qu'on est sur le bon chemin. Ainsi en est-
process. Celte première phase de lecture/compréhension, absolument
il de l'indexation, qui oriente, et du résumé, qui informe. Mais l'infor-
essentielle, repose sur une véritable conception de la lecture documen-
mation véhiculée par le résumé a un objectif unique : aider l'usager à
taire, riche des connaissances du contenu, du document qui le supporte et
savoir si ce qu'il cherche se trouve ou non dans le texte, c'est-à-dire à
de tout son paratextc (voir les travaux de Gérard Genctte, principalement
sélectionner les références obtenues après l'interrogation des champs de
orientés sur les œuvres littéraires, à adapter, bien sûr, au contexte de
contenu. Un résumé documentaire ne peut pas remplacer le texte origi-
l'information scientifique et technique), riche également des compétences
nal ; il ne peut pas apporter toute l'information utile, ni la réponse
immédiate. Il est seulement l'outil de la sélection, et c'est dans cet esprit de l'analyste (connaissances, expérience). Cette lecture esl toujours orien-
que sont proposées maintenant quelques réflexions pour l'élaborer. tée vers son utilisation ultérieure par un nombre x de personnes, connues
ou non. Grâce à cette phase de recherche de la structure profonde du texte
et du vocabulaire pertinent (dénoté et univoque), la sélection peut débuter.

Comment réaliser un résumé documentaire


SÉLECTION
I
Les chapitres précédents ont contribué à répondre à cette question. En À la question « De quoi s'agit-il dans ce texte ? », une ou plusieurs
effet, toutes les activités décrites jusqu'ici reposent sur un aller et retour réponses ont été apportées. Peu importe, du reste, sous quelle forme et
entre les opérations mentales d'analyse et de synthèse : du particulier au dans quel style. À cette étape, il est essentiel de ne pas se préoccuper
COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Cette phase de sélection-élimination réduit l'écrit à ses éléments


de la tournure des phrases, d'oublier les acquis préconisant l'emploi
jugés pertinents en regard du texte lui-même et de son objectif
d'un « beau style », et de ne pas chercher à rédiger sous une forme défi-
documentaire. Ces éléments doivent alors être reconstruits.
nitive. !1 s'agit simplement ici de réduire T (le texte) en t (le résumé),
en ayant en mémoire les règles suivantes 7 :
« / conserve le contenu informât!f de T ;
CONSTRUCTION
« les éléments de T qui ne sont pas dans t ne nuisent pas
« à la cohérence de T ; Pour un certain nombre de chercheurs en science de l'information,
« ce qui est vrai pour t l'est pour T. » cette phase est souvent appelée « phase d'interprétation » ; « Once
Les textes de l'information scientifique et technique, majoritairement selected (contractée, reduced and condensée) lext nnist be interprcted,
rédigés par des auteurs ayant, peu ou prou, pratiqué l'enseignement, ont a.ssigning it a content.*' » « Qu'en est-il d'un texte écrit, que l'auteur
génère et confie ensuite à divers actes d'interprétation, comme on jette
tendance à présenter plusieurs fois et de façon différente les mêmes
une bouteille à la mer ? '" » Ce terme gêne l'analyste, qui se veut tou-
notions. Robert Escarpit* estime à 50 % le (aux de redondance de la
jours à l'abri d'un quelconque commentaire sur l'œuvre résumée. Mais
majorité des textes écrits. On se rappelle que la reformulation (cf. p. 76)
lo interpret signifie également «traduire». II existe de nombreux
est un signal donné par l'auteur : s'il réitère un élément de son discours
points communs entre le travail de l'analyste et celui du traducteur, ce
sous une autre forme, c'est qu'il tient à le communiquer. Le documen-
qui nous remet en mémoire l'adage italien traduttore, tradifore. Le
taliste sait donc qu'il devra retenir l'information ainsi transmise, mais
traducteur est-il toujours un traître ? L'analyste peut-il toujours être sûr
non la répéter. Résumer, c'est donc déjà éliminer d'un texte ce qui a été de ne pas interpréter ? Ou peut-on affirmer que l'analyse documentaire,
écrit plusieurs fois, de différentes manières. bien qu'elle ne relève pas des sciences exactes, a quelque chose à voir
La grille de lecture proposée pages 76 à 79 indique bien l'articulation avec la logique floue : « The t\vo main sets offoofs for interpreling are
entre les « items », à retenir, et les compléments d'information, à sérier inverse and complementary : déduction and induction, reasoning and
selon leur importance dans l'objectif documentaire. S'il s'agit d'élé- inference, Reasoning involves security ; inference involves probability.
ments secondaires d'information, on peut les éliminer dans le résumé The basic activities tnay be improved when applied in a furzv
numner. " »
final,
Enfin, la même grille met en lumière certains éléments intéressants « Le résumé est une construction nouvelle mais qui suppose entre
dans le fil du discours, maïs non pertinents, donc inutiles pour la l'auteur et le lecteur un savoir commun. | : » C'est donc pendant cette
phase que l'analyste doit serrer au plus près l'objectif documentaire du
compréhension du sens, tels que les illustrations, les citations, etc.
résumé, pour mettre en lumière le sens utilisable, tout en respectant
autant que possible les principes suivants :
- linéarité : le résumé doit suivre l'ordre de l'énoncé ;
- homogénéité : le résumé doit respecter l'importance de critique
Compléments partie du texte ;
d'information
-fiabilité : le résumé doit présenter le sens du texte, non un commen-
taire ou un jugement de valeur sur le contenu ou les idées exprimées.
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Selon les lieux et les objectifs, la construction peut suivre un schéma


Il convient cependant de garder toujours à l'esprit que la finalité de la
préétabli. C'est le cas de certains laboratoires de recherche fondamen-
rédaction n'est pas le « beau style », mais bien la lisibilité, garante de
tale ou appliquée. Robert Pages, directeur du Laboratoire de psycho-
l'impact qu'aura le texte résumé sur le lecteur final, sans oublier que la
logie sociale de la Sorbonne, demandait à ses analystes de rédiger les
compétence du destinataire n'est pas nécessairement celle de l'émet-
résumés selon l'ordre suivant : contexte, but (objectif de l'auteur), thè-
teur : « Le scriptcur doit anticiper, à travers sa propre lecture du texte
mes (spécifications du problème, notamment variables et hypothèses),
qu'il produit, l'activité de lecture de celui auquel il s'adresse. M » Ceci
arguments (moyens de démonstration dans le cadre d'une démarche
ne doit pas occulter le fait que le résumé est un simple passage entre le
formelle), procédures (démarche et moyens matériels), résultats,
texte original (l'émetteur) et celui qui le lira (l'utilisateur), l'analyste se
discussion. On peut s'inspirer de ce schéma ou en construire d'autres,
situant dans ce cadre comme un lecteur-scripteur intermédiaire géné-
en fonction de la nature des textes à résumer.
rant, lui aussi, un texte (le résumé) : « Générer un texte signifie mettre
En fait, la construction d'un résumé repose beaucoup sur la recherche en œuvre une stratégie dont font partie les prévisions des mouvements
du plan (cf. p. 73-83), sur la structuration interne du texte lui-même. Le de l'autre — comme dans toute stratégie. l? »
repérage d'ensembles cohérents permet de hiérarchiser, après les avoir Alors, quelle stratégie mettre en œuvre ? Sourions, au passage, à
sélectionnés, les items exposés. Ce travail de mise en place des ensem- propos de la réflexion de Jean-Luc Godard '" qui, après avoir lu l'édito-
bles facilite la rédaction. L'exercice 15 (p. 148) illustre bien la néces- rial d'un quotidien, demandait au rédacteur en chef s'il rédigeait, lui
sité de cette phase préalable de structuration. aussi, en colonnes avant de donner son papier à la composition... On
rédige pour être lu, certes. Mais comment être lu ? Quatre maximes' 7
peuvent être méditées :
RÉDACTION <( - maxime de la quantité : fais en sorte que ta contribution soit infor-
mative autant que le requiert la situation d'échange ;
Cette étape est souvent appelée « synthèse », dénomination pertinente
« - maxime de la qualité : ne dis pas ce que tu crois être faux et ne
puisqu'il s'agit d'utiliser les éléments sélectionnés dans le texte et de parle pas de ce dont tu n'as pas de preuves adéquates ;
construire, à partir d'eux, un ensemble cohérent et lisible. Toutefois « - maxime de la relation : ne parle pas pour ne rien dire ;
l'emploi de ce terme est vivement déconseillé, dans la mesure où il peut « - maxime de la manière : évite les expressions obscures, l'ambi-
entraîner une confusion entre la synthèse documentaire, effectuée à guïté, sois bref, sois conséquent. »
partir de plusieurs documents sur le même sujet, et la rédaction d'un
résumé documentaire, qui s'applique à un texte unique. Ce viatique en tête, on peut aborder les formes possibles d'un résumé
documentaire.
Rédiger un résumé documentaire nécessite une certaine aptitude à
l'expression écrite. D'excellents manuels sur ce sujet |l peuvent aider les Style télégraphique ?
néophytes ou les documentalistes qui ont perdu l'habitude d'écrire ; la
profession, en morcelant ses activités, provoque malheureusement de « Bien sûr que non ! », s'exclament les puristes. Et pourquoi pas, si le
telles déperditions. La métaphore sportive se révèle, ici encore, tcxle le permet ? La décision de recourir à ce style doit être'prise très
adaptée : écrire quotidiennement est la meilleure façon de trouver et rapidement. Si la réponse à la fameuse question « De quoi s'agit-il ? »
.s'exprime naturellement sous forme de phrases non verbales, pourquoi
d'entretenir sa forme.
ne pas les accueillir (elles quelles ? Certains textes, par exemple tous
COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

lions. « Si l'auteur a explicité de façon concise des notions complexes,


les textes descriptifs, s'y prêtent plus que d'autres. Ecrire en style
il ne faut pas hésiter à employer telles quelles des phrases (ou des élé-
télégraphique (qui envoie encore des télégrammes ?) revient à changer
ments de phrases) présentes dans le texte plutôt que de chercher mala-
la syntaxe et à pratiquer ce que les linguistes appellent la « thémati-
droitement à le paraphraser. 2 " »
sation ». Ainsi la phrase suivante IR : « Giraudoux écrivait avec élégance
et même avec un peu d'affectation ; il aimait les expressions nouvelles,
les mots rares, les belles cadences... » est thématisée en : « style de Concision des phrases
Giraudoux ». La thématisation est, du reste, une opération classique
Un résumé documentaire efficace repose sur la concision des phrases
préalable à l'indexation.
et la précision du vocabulaire. La façon dont les phrases du résumé sont
Il est sans doute plus difficile d'écrire en style télégraphique quand un construites dépend beaucoup de la structure du texte original. Le
texte, de type problématique, rend compte d'opinions complexes et de résumé peut donc avoir un caractère :
confrontations d'idées. Mais il est peut-être plus simple de commencer - chronologique. Il indique une succession de faits dans le temps :
le résumé par une phrase introductive telle que « Comparaison entre X « le bilan 1993... le bilan 1 9 9 4 » ;
et Y sur les domaines suivants : ...» que par des phrases alambiquées - ènumératif. Il indique une succession de faits, de situations dcnonv
d'où ne se dégageront pas tout de suite la clé et l'enjeu du texte original.
brables successivement « premièrement, deuxièmement, troisième-
La seule règle à appliquer est la suivante : quel que soit le choix opéré,
ment », ce qui est différent de «première partie, deuxième partie».
il faut le maintenir ; style télégraphique ou style rédigé, mais maintenu
L'éiuimération s'applique ici aux faits ou aux idées, et non à la façon
du début à la fin. Il ne saurait être question de variations ou d'alternance.
dont ils sont présentés ;
- logique. Il indique une organisation raisonnée du discours dans un
Style rédigé
enchaînement cohérent des idées : « d'abord, puis, ensuite, enfin ».
Existe-t-il un style propre au résumé documentaire ? Peut-on parler " p u i s q u e , donc » ;
d'écriture documentaire, ou simplement renvoyer aux règles de la - alternatif. Il propose deux idées possibles : « soit, soit », « ou, ou
communication scientifique^, donc à un style froid, objectivé et distan- bien » ;
cié ? En effet, l'auteur du texte original énonce directement, tandis que
- antithétique. Il oppose deux idées, rapprochées pour amplifier
l'analyste rend compte de l'énoncé T. Quelques recommandations
l'effet de contraste : « au contraire, en revanche », « d'un côté, de
s'imposent, par conséquent : l'autre ».
- éviter les tournures personnalisées (« nous nous trouvons », « nous
pensons », « nous devons ») ; Si une phrase concise est courte, elle doit pourtant rendre compte,
- entrer directement dans le sujet sans commencer par : « l'auteur sans trop de coupures, de la structure logique du raisonnement et de
présente », « dans cet article » ; l'articulation des idées. C'est la ponctuation (cf. p. 41-43) qui assure
- faire ressortir, grâce à l'écriture, à la ponctuation et au rythme des alors la lisibilité. A nouveau, la lecture est complémentaire de l'écri-
phrases, le nombre d'items exposés. Il est inutile d'écrire « dans la pre- ture. Si le point, la virgule, le point-virgule et les deux-points sont bien-
mière partie », « dans la deuxième partie », alors qu'il existe des mots venus dans un résume documentaire, il faut restreindre l'usage des
d'articulation (cf. p. 84) aussi utiles à la lecture qu'à l'écriture ; parenthèses, des guillemets, des lirets grammaticaux, et éviter absolu-
- utiliser le vocabulaire de l'auteur dans la mesure où il présente un ment les points de suspension et d'exclamation.
caractère permanent, ce qui ne signifie pas faire des collages de cita-
COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

Précision du vocabulaire sans tableau ni illustration et en principe sans diagramme ni formule


compliquée.21 » Son contenu doit être rapidement et globalement perçu.
À la concision de la phrase doit correspondre la précision du vocabu-
laire. L'idéal serait de choisir un maximum de termes dans le vocabu- Décider a priori combien de mots doit comprendre un résumé
laire scientifique et technique spécialisé (cf. p. 86-87) dont le caractère documentaire n'a aucune raison d'être. Cette contrainte vaut, certes,
monosémique garantit la juste transmission du sens entre auteur et pour les exercices de contraction de texte (cf. p. 126), mais leur finalité
lecteur. Mais l'essentiel est d'éviter tous les termes porteurs de conno- n'a aucun point commun avec celle du résumé documentaire. Un texte
tation. 11 conviendra, par exemple, de préférer « accident » à « catastro- doit être résumé en fonction de la richesse du sens qu'il véhicule, non
phe », « difficulté » à « crise », même si l'auteur a choisi ces termes. en fonction du nombre de mots utilisés, ïl fut un temps où les systèmes
informatisés imposaient un nombre limité de caractères, mais c'est de
Quant à cette phobie bien française de la répétition des termes, si elle plus en plus rare. À moins d'être encore soumis à cette sujétion, il
peut être justifiée pour les textes rédigés en « beau style », elle provo- n'existe aucune raison pour soumettre la rédaction d'un résumé
que de nombreux contresens ou faux-sens dans des écrits de nature documentaire à une longueur préalablement déterminée.
scientifique et technique, et tout particulièrement dans les résumés
documentaires. Voilà pourquoi il est vivement recommandé, pour ces
derniers, de préférer la répétition à un supposé synonyme désastreux.
Derniers conseils
Enfin, il convient de choisir les mots du résumé en fonction des
autres champs de contenu (cf. p. 102-107) ; il est préférable de ne pas
réutiliser les mots du titre et de l'indexation, tout au moins sous la POUR ASSURER LA PERTINENCE
même forme. En s'équipant d'un bon dictionnaire de langue, l'analyste
augmente la richesse de son vocabulaire et la souplesse de sa rédaction. • Adapter chaque terme à la fois à l'expression des notions contenues
dans les documents primaires et à l'usage normal du vocabulaire.
Un résumé n'est pas une œuvre littéraire. Autrement dit, le style doit
être correct, bien sûr, mais il faut toujours garder à l'esprit sa vocation • Ne pas dévier le sens de l'information : faux-sens (conformité).
première : transmettre le sens du texte original. • Ne pas dénaturer le sens de l'information : contresens (véracité).
• Choisir chaque terme non seulement en fonction du contenu
Présentation formelle
informatif du texte — prioritaire — mais aussi en fonction des profils,
Un résumé documentaire n'est jamais isolé de l'identification biblio- motivations, centres d'intérêt et niveau de compréhension des
graphique du texte primaire. Dans une banque de données, les champs utilisateurs.
de description (cf. p. 102) accompagnent le champ du résumé. Dans un
bulletin bibliographique, la notice bibliographique, rédigée selon les
normes ou les spécifications de l'unité documentaire, précède toujours POUR AUCiMIiNTER L'HFRCACITR
le résumé documentaire.
• S'assurer que tous les termes choisis sont utiles.
Le résumé documentaire se présente sous la forme d'un paragraphe
unique,.sans alinéa ni numérotation. «C'est essentiellement un texte • Vérifier qu'une notion est exprimée par un seul terme.
COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE

10. Source : [33], p. 68.


• Contrôler qu'un terme ne sert à exprimer qu'une seule notion.
1 1 . Source : [70], p. 233.
• Ne jamais utiliser les mots généraux ou athématiques (« rôle »,
« principe », « type », etc.) seuls. 12. Source : [3].

13. Pour tout ce qui concerne le résume documentaire, voir, en particulier, les
petits manuels de la collection « Profil-Formation » des éditions Hatier.
POUR TENDRE VERS L'OBJECTIVITÉ
14. Source; [76]. p. 151.
• Choisir les termes dans un souci de neutralité. 15. Source: [33], p. 70.
• Éviter les termes subjectifs ou relatifs au temps (« renouveau », 16. « À voix nue ». entretien entre Jean-Luc Godard et Noël Simsolo, France-
« décadence », « ancien », « moderne », « contemporain », « récent », Culture, vendredi 3 avril 1998.
etc.).
17. Source : [39]. (Maximes conversationnelles, extraites de [33], p. 86.)
• Éviter les termes porteurs d'options, de valeurs.
18. Source : [25].
» Résister aux variations de vocabulaire qu'entraîné la mode.
19. Parmi beaucoup d'autres, voir [80].
20. Source : [35], p. 27.
21. Source : [3].

NOTES
1. Source : [7].

2. Source : [3].

3. Source : [3].
4. La norme Z 44-004 de décembre 1984 indique expressément que ce genre
de résumé ne fait pas partie du travail documentaire.

5. Source : [14], p. 32.

6. Source : [70], p. 225.


7. Source : [25].
8. Source : [34].
9. Source: [70], p. 231.
ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 11 - Lecture critique de résumés sous l'angle formel

L'objectif est de repérer, dans des résumés existants (ils ont été
rédigés par des personnes susceptibles de changer de fonction dans
leur entreprise et ayant reçu une formation très brève sur le résumé
documentaire), les erreurs de forme à éviter.
Lisez d'abord le texte suivant (Alain Lebaube. — Le temps du désé-
quilibre permanent. — Le Monde, supplément Initiatives, mai 1995)
en appliquant la lecture documentaire (cf. p. 35-71), sans chercher à
repérer les idées directrices puisque la consigne consiste seulement à
vérifier si les recommandations des pages 132 à 137 ont été suivies.

LES METAMORPHOSES DU TRAVAIL- Le temps du déséquilibre permanent

Sous ce qu'on a appelé abusivement « la crise » (depuis le temps, le terme ne


correspond plus à la réalité), les mutations souterraines ont amorcé une recompo-
sition du marché du travail
D'abord, il faut e.n finir avec l'idée selon laquelle tous ces mouvements ne seraient
que le fruit d'une adaptation conjoncturelle, donc réversible.. Le retour en arrière
ne se produira pas, à supposer que la croissance retrouve ses rythmes d'antan, car
les conditions technologiques de production interviennent désormais dans un
environnement bouleversé, de compétition internationale. Au contraire, nous
sommes bien dans un changement dont le caractère structurel se confirme jour
après jour. Un nouvel équilibre se dessine, dont le mode de fonctionnement instau-
rerait, justement, le déséquilibre permanent.
Trois axes convergent pour le signifier. Autrefois hégémonique dans sa fonction
productive comme dans sa gestion sociale, l'entreprise s'éclate. Pour être plus
performante et pour coller à un contexte de turbulences, elle distingue le cœur de
cible de ses activités, son « métier », de toutes les autres fonctions ou missions
qu'elle n'intègre, plus. Entourée de cercle concentriques, de la filiale à la sous-
traitance, des partenaires au recours aux indépendants, elle organise une forme
de précarité entrepreneuriale.
Il est temps d'admettre que cette gestion en flux tendus, durable, coïncide, plus
qu'on ne le pensait, avec l'éclatement de l'emploi lui-même. Là aussi, selon un
parallèle saisissant, l'ancien modèle dominant de l'emploi à temps plein, à durée
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
ANNEXE PÉDAGOGIQUE

indéterminée et à statut, tend à perdre de sa superbe. A côté dit noyau dur du


Prenez ensuite connaissance des neuf résumés de ce texte et
salariat se développent les formes satellites de l'emploi qui giavitent sur des orbites
plus ou moins éloignées. Du travail à temps partiel, en pleine explosion, aux relevez les erreurs de forme en vous basant sur les éléments des
contrats à durée déterminée, à l'intérim, aux stages, au travail indépendant et pages 132 à 137.
même au travail au noir, toute la palette existe, qui associe le plus souvent
précarité et vulnérabilité, non pas dans le désordre, mats bien dans un esprit de 1 — La « crise » du travail est bien réalité.
système. C'est-à-dire, que, de la réponse à des difficultés immédiates, on en est passé Il ne faut plus croire que cela est le fruit d'une adaptation à
à une utilisation régulière de formules pour une optimisation des résultats. caractère conjoncturel mais plutôt structurel.
Quand (rien même, cette double rencontre d'offportunités devait de toute façon Cela pour trois raisons. Aujourd'hui l'entreprise s'éclate. Elle
avoir Heu, en raison d\tn troisième fadeur. A savoir, l'inéluctable évolution du organise une forme de précarité entrepreneuriale. Le travail à
travail proprement dit, dont le contenu est éclaté sous le double effet de l'introduc- temps partiel, les contrats à durée déterminée, l'intérim, les stages,
tion des nouvelles technologies et de la tendance à la « tertiarisation », qui s'est le travail indépendant et même le travail au noir se développent.
étendue des services à l'industrie. Les contours de ce qui fait un travail sont deve-
nus imprécis, et les rapports au temps comme à l'espace se sont distendus dans de Le troisième facteur sera la tendance à la tertiarisation.
nombreuses activités professionnelles. Désormais, on ne peut plus prétendre que le En raison de ces trois causes, il faudra changer de mentalité, mais
temps de travail reste l'instrument intangible de mesure de la valeur ajoutée il faudrait d'abord résoudre les problèmes urgents.
fabriquée ou vendue. De même, l'usine et le, bureau ne constituent pas forcément Il faudra être suffisamment fort pour exister sans repère.
les lieux exclusifs où s'exercent les métiers et sont d'autant plus concurrencés que Pour se préparer à une vie d'homme, l'éducation sera
quantité de travailleurs manient quotidiennement des notions abstraites. indispensable.
En fonction de ces trois causes, qui se complètent et se recouvrent, nous assistons
à la mise en place des fondements d'une nouvelle société, voire d'une autre civili- 2 — D'après Alain Lebaube, en mai 1995, le changement du
sation. Ce qui suppose, un changement des mentalités, pour s'adapter, qui marché du travail se confirme par la précarité de l'entreprise, du
prendra des générations alors que les problèmes à résoudre sont urgents. travail et de son contenu. L'homme devra accepter le fait que le
De, quoi s'agit-il ? D'apprendre, à vivre dans un univers incertain, où l'entreprise travail occupe une moindre place dans sa vie. L'éducation devra l'y
pourra être virtuelle ou diffuse, oit l'emploi sera mobile, souple et indépendant, aider.
réclamant de l'initiative individuelle, et où le travail, à son tour, aura un
contenu à la fois peu palpable et cependant relié aux informations venues de toute
3 — Décomposition du marché du travail. Nous sommes dans un
la planète. Bref, il faudra être suffisamment fort pour exister sans repères et
accepter de gérer en permanence l'incertitude. Par ailleurs, il est également changement dont le caractère structurel se confirme jour après
manifeste que tout pousse à relativise} la place et la valeur du travail, ainsi qu 'en jour, le déséquilibre permanent.
témoigne l'aspiration au temps libre, que nous aurons à admettre que le niveau Trois axes convergent pour le signifier.
de diplôme ne, corresponde plus automatiquement à un niveau d'emploi et qu'il 1/ L'entreprise s'éclate pour être plus performante et pour coller
sera nécessaire de substituer la notion de professionnalisation, servant à désigner au contexte de turbulences.
les compétences exigées par la tertiarisation, à la. notion de qualification, qui reste 2/ L'éclatement de l'emploi avec l'emploi à temps plein, les CDI,
confondue avec l'ère industrielle absolue.
tend à perdre de sa superbe. L'explosion du temps partiel, les CDD,
Vaste programme ! Mais la recomposition en cours signifie sans doute que le tra- les intérims... toute la palette existe qui assure précarité et vulnéra-
vail ne sera plus la préoccupation centrale, quoique indispensable,, et que l'éduca- bilité.
tion aura encore plus pour mission de préparer à une vie d'homme, au sens plein.
3/ Le contenu du travail est éclaté avec la tendance à la « tertia-
risation ».
Ai AIN /jf/M(.w;
En fonction de ces trois causes, nous assistons à la mise en place
© Le Monde
d'une nouvelle société qui prendra des générations malgré
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
ANNEXE PÉDAGOGIQUE

l'urgence. L'éducation aura encore pour mission de préparer à une


vie d'homme au sens plein, le travail n'étant plus la préoccupation Bref, il faudra être suffisamment fort pour exister sans repères
centrale, quoique indispensable. et accepter de gérer en permanence l'incertitude. Le travail ne sera
plus la préoccupation centrale et l'éducation aura pour mission de
4 — Dans un contexte de turbulence et d'éclatement des mieux le préparer à une vie d'homme.
entreprises, les nouvelles technologies et la tertiarisation
entraînent le plus souvent la précarité et la vulnérabilité des 7 — La « crise » ou recomposition du marché du travail présente
emplois. L'urgence de la situation ne peut attendre un changement un caractère structurel et non conjoncturel. La précarité de
de mentalité des individus qui doivent être suffisamment forts pour l'entreprise, l'éclatement de l'emploi, l'évolution du travail le
s'adapter dans cet univers incertain. signifient. Emploi souple, mobile et indépendant caractérise la
Dans l'avenir, l'éducation devra préparer à une vie d'homme dont nouvelle société. Celle-ci suppose des changements de mentalité
la préoccupation principale ne sera plus le travail. pour faire face à l'incertitude. Cette recomposition du travail, la
nécessité d'y être préparé, conduiront à un renforcement de la
5 — Le monde du travail évolue, l'entreprise et l'emploi, de mission éducative de la société.
même que la nature du contrat de travail : tout mute pour donner
naissance à une autre approche de l'activité professionnelle. 8 — L'éclatement de l'entreprise, de l'emploi et du travail met la
L'approche même de celle-ci s'en trouve modifiée par un société en déséquilibre. Pour s'adapter au changement permanent,
changement quant aux valeurs humaines : les repères, la profes- il est recommandé de savoir gérer l'incertitude, de relativiser
sionnalisation, la qualification seront à intégrer pour faire face à l'importance du travail, de préférer la qualification à la profession-
une nouvelle éducation pour une nouvelle génération. nalisation et de miser sur l'éducation.

6 — D'abord il faut en finir avec l'Idée selon laquelle un retour 9 — La recomposition du marché du travail n'est plus de nature
en arrière est possible, les mutations souterraines ont amorcé une conjoncturelle, mais structurelle. Le déséquilibre permanent de la
recomposition du marché du travail.
société est dû à trois mutations : l'entreprise n'intègre plus ses
Trois axes convergent pour le signifier :
fonctions classiques, s'organise en filiales, utilise des sous-
L'entreprise s'éclate : pour être plus performante et pour
traitances, des partenaires indépendants ; l'emploi connaît des
coller à un contexte de turbulences, elle organise une forme de
formes diversifiées, temps partiel, CDD, intérim, stages, travail
précarité entrepreneuriale par le biais de la sous-traitance. On
assiste à l'éclatement de l'emploi lui-même. C'est-à-dire que l'on indépendant, travail au noir ; le contenu du travail lui-même est
est passé à une utilisation régulière de formules telles que CDD, remis en cause par l'arrivée des nouvelles technologies et la
intérim, stage, qui associent donc précarité et vulnérabilité. tendance à la « tertiarisation ». Une nouvelle société exige la
L'inéluctable évolution du travail dont le contenu est éclaté résolution urgente des problèmes alors que les changements de
sous le double effet des nouvelles technologies est un autre mentalité s'étendent sur plusieurs générations. Il faut se préparer à
facteur. exister sans repères, gérer l'incertitude, relativiser la place et la
En fonction de ces trois causes, nous assistons à la mise en valeur du travail, et à substituer la notion de professionnalisation à
place d'une nouvelle société, voire d'une autre civilisation. Les la notion de qualification. L'éducation peut nous y aider.
problèmes à résoudre sont urgents et pourtant si l'on suppose un
changement des mentalités, cela prendra des générations !
Commentaires en pages 289-290.
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE
ANNEXE PÉDAGOGIQUE

Exercice n° 12 - Écriture : rétablir la ponctuation d'un texte Exercice n° 13 - Écriture : reconstituer un texte
L'objectif est de retrouver l'ordre logique d'un texte, ce qui
L'objectif est de mesurer l'importance d'une ponctuation permet de réviser les mots d'articulation (cf. p. 84). Remettez dans
adaptée pour rendre un texte intelligible et lisible. le bon ordre six paragraphes mélangés d'un même texte. (Extrait
de : Gilberte Niquet. — Écrire avec logique et clarté. — Paris, Hatier,
Rétablissez la ponctuation d'un paragraphe. Vous pouvez tenter
1996.)
d'appliquer une grille de lecture pour trouver la logique de la
pensée. 1 — D'autre part, la gymnastique volontaire est une occasion de
contacts. Des personnes de métiers et de genres très divers s'y
L'une des Mythologies (éditions du Seuil, 1957, coll. « Points ») de
retrouvent. J'y ai rencontré, par exemple, un juge des enfants qui
Roland Barthes est intitulée « Romans et enfants ». Le premier
m'a parlé de sa profession et m'a beaucoup intéressé.
paragraphe est transcrit intégralement. Le deuxième l'est sans
ponctuation ni majuscule.
2 — La gymnastique volontaire est maintenant très répandue, et
je m'en réjouis car elle offre de nombreux avantages.

3 -- La gymnastique volontaire procure enfin une excellente


A en croire Elle, qui rassemblait naguère sur une même, photographie soixante- détente. Grâce à elle, chacun s'évade de son univers quotidien pour
dix romancières, la femme de lettres constitue une espèce zoologique, remarquable : ne plus vivre qu'avec son corps dans un cadre sympathique.
elle accouche pêle-mêle de romans et d'enfants. On annonce par exempte :
Jacqueline I^enoir (deux filles, un roman) ; Marina Grey (un fris, un roman) ; 4 - - D'abord, elle apporte une compensation salutaire à la
Nicole, Dutreil (deux fils, quatre romans), etc. sédentarité de nos vies. Nous marchons peu, en effet, pour nous
qu'est ce que cela veut dire ceci écrire est une conduite glorieuse mais hardie rendre au travail, que nous utilisions pour ce faire les transports en
l'écrivain est un artiste on lui reconnaît un certain droit à la bohème comme il commun ou un engin individuel. Par ailleurs, notre activité profes-
est chargé en général du moins dans la France d'Elle de donner à la société les sionnelle est bien souvent statique. La gymnastique volontaire, qui
raisons de sa bonne conscience il faut bien payer ses services on lui concède mobilise chacun de nos muscles, nous permet de compenser cette
tacitement le droit de mener une vie un peu personnelle mais attention que les sédentarité et de rendre à notre corps son équilibre.
femmes ne croient pas qu'elles peuvent profiter de ce pacte sans s'être d'abord
soumises au statut éternel de la féminité les femmes sont sur terre pour donner 5 — Pour toutes ces raisons, je pense que la gymnastique
des enfants aux hommes qu'elles écrivent tant qu'elles veulent qu'elles décorent volontaire est une belle réalisation sociale. Facteur d'équilibre, de
leur condition mais surtout qu'elles n'en sortent pas que leur destin biblique ne rencontres et d'enrichissement, elle est sans nul doute à pratiquer.
soit pas troublé par la promotion qui leur est concédée et qu'elles payent aussitôt
par le tribut de leur maternité cette bohème attachée naturellement à la vie 6 — Ces possibilités de contacts ouvrent des horizons. C'est ainsi
d'écrivain que je me suis mise à fréquenter la piscine grâce à des membres de
© Éditions du Seuil, 1957 mon club de gymnastique qui m'y ont entraînée. Avec d'autres
personnes, j'ai visité un musée local que je ne connaissais pas.
© Éditions t-fatier, 1996

Correction et commentaires en page 290. Corrigé en page 291.


LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE CHAPITRE VII
INDEXATION
Exercice n° 14 - Rédaction d'un résumé documentaire
d'un texte déjà étudié

Résumez (enfin !) le texte « Les effets violents de la télévision » L'indexation est certainement l'opération la plus fréquente, et donc la
(en page 227) en utilisant tous les exercices précédents, et plus banalisée du travail documentaire ; elle est même parfois confon-
particulièrement la phase de structuration (voir exercice et corrigé
due avec la cotation, en particulier en bibliothéconomie. Elle est
du chapitre iv, p. 83 et 278-287).
pourtant « largement méconnue, du fait de la complexité et de la variété
Essayez de le rédiger dans l'optique d'une banque de données des notions et des traitements qu'elle met en œuvre » '. Il est utile d'en
d'un service de la recherche d'une chaîne de télévision. réviser les objectifs, les formes, les usages et les exigences.

Propositions de corrigés et commentaires en pages 292-293.

Qu'est-ce qu'indexer ?

Exercice n° 15 - Rédaction d'un résumé documentaire


A partir des travaux préparatoires des comités techniques de l'ISO
d'un texte nouveau
{International Standard Organization) et de l'Unesco, l'AFNOR a
élaboré, en 1978, une norme 2 en vue d'« établir des méthodologies
Le texte « Des objectifs pour le journalisme » (Claude-Jean valables et cohérentes pour la description et la caractérisation des
Bertrand, Études, septembre 1993, en page 246) est nouveau dans
documents à l'aide de représentations de concepts (mots clés, descrip-
ce manuel. Il a été choisi pour sa qualité, mais aussi pour son
teurs, indices, etc.) ». En simplifiant la formulation, on peut retenir de
apparente structuration. On choisira, pour travailler, le contexte de cette norme :
la banque de données d'une école de journalisme.
• Une définition : l'indexation est l'opération destinée à représenter
Il doit faire l'objet de toutes les étapes précédentes : repérage
par les éléments d'un langage documentaire ou naturel des données
visuel, caractéristiques du texte, lecture documentaire (les trois
résultant de l'analyse du contenu d'un document ou d'une question.
premiers paragraphes) amenant à des hypothèses de lecture, à la
recherche de la structuration, du vocabulaire. • Une finalité : l'indexation indique rapidement, sous une forme
Cet exercice peut être conduit de deux façons : concise, la teneur d'un document ; elle « permet une recherche efficace
- soit vous rédigez immédiatement et vous comparez votre des informations contenues dans un fonds de documents ». Il est bien
résultat avec ceux qui sont proposés en pages 293 à 298. (Ces spécifié que cette recherche est possible «par indexation de la
résumés ne sont pas du tout des modèles et il est donc important question, opération analogue [c'est nous qui soulignons] à l'indexation
de relever leurs erreurs, tant dans la forme que dans le fond.) ; du fonds », c'est-à-dire des informations qui y sont contenues.
- soit vous prenez connaissance de ces résumés avant de rédiger • Un processus en deux étapes :
et, après les avoir critiqués, proposez votre propre version. « - la reconnaissance des concepts contenant l'information dans les
documents à indexer... ;
Structuration et deux corrigés possibles en pages 298-300. « - la représentation de ces concepts dans le langage documentaire ».
INDEXATION
USAGE ET APPLICATIONS

La norme insiste bien sur la nécessité d'exprimer le contenu dans un


Les paragraphes suivants exposent les méthodes classiques et tentent
langage libre avant d'utiliser un langage contrôlé. En fait il existe véri-
d'en montrer les limites, à partir d'une interrogation toute simple :
tablement trois étapes, car la reconnaissance des concepts implique
comment fournir du sens uniquement avec des mots ?
d'abord leur compréhension.
En 1984, l'ISO a lancé un projet de norme internationale \s par
la Grande-Bretagne *. Les termes sont sensiblement les mêmes que
ceux de la norme AFNOR. Ainsi que le suggère le titre, ces deux Usage et applications
projets sont essentiellement centrés sur l'examen du document, la défi-
nition de son contenu, l'identification des notions principales expri-
Selon la norme AFNOR de 1978, l'indexation sert à la « confection
mées et leur expression en langages d'indexation, et non sur une finalité
d'outils de recherche documentaire tels que des index de livres ou de
liée à la recherche documentaire. En ce sens, la norme AFNOR, anté-
bulletins bibliographiques, des catalogues organisés de matières ou
rieure, garde toute sa valeur. encore des fichiers manuels, mécaniques ou automatiques ». Outre que
En effet, l'indexation n'a d'intérêt que dans son utilisation principale : les systèmes informatisés ont beaucoup modifié ces usages, il existe
aider la recherche, inspirer la requête. C'est une opération dynamique une différence importante entre l'index d'un livre et l'indexation d'un
et non statique, centrée sur l'usage et non sur la description, même si fichier matière, quelle qu'en soit la forme.
celle-ci est nécessaire. C'est « l'opération centrale de tout système
documentaire pour le stockage et la recherche des informations. Les
produits de l'indexation servent à retrouver l'information et à la sélec- L'INDEX D'UN LIVRLi

tionner pour répondre aux besoins des utilisateurs - ». Une étude très
centrée sur les possibilités de l'indexation automatique en fait la condi- L'index d'un livre est le résultat de choix effectués par l'auteur qui
tion première : « L'indexation est, dans tous les cas de figure, un préala- décide d'aider le lecteur à entrer dans son œuvre par le biais de termes
ble indispensable à la recherche documentaire, et il ne convient pas divers : noms propres de personnes, d'institutions, de lieux, d'événe-
d'opposer les logiciels de recherche documentaire classiques à ceux ments ; noms communs présents dans le texte et correspondant à diffé-
basés sur le texte intégral. * » rents sujets, qu'ils soient jugés importants ou accessoires.
Une définition dynamique de l'indexation pourrait être de dire que Ces index renvoient aux pages du texte courant. Les meilleurs
lorsque l'on indexe, on cherche dans un texte des réponses à des ques- exemples sont ceux des grandes encyclopédies qui ne présentent pas de
tions susceptibles d'être posées. Ceci implique que l'information obte- rubriques à tous les sujets mais permettent, par le biais d'un volume
nue par cette voie soit porteuse de sens, sans quoi il n'y aura pas de d'index, d'orienter le lecteur vers la rubrique où tel sujet est présenté à
réponses, mais seulement du bruit ou du silence. « Nous savons codi- la faveur d'un autre.
fier et automatiser l'information : il n'en va pas de même du sens...
Ainsi, l'index de la Grande Encyclopédie Larousse indique qu'un
l'information ne fait plus l'objet d'aucune hiérarchie et perd son sens...
article de quatre pages traite de la « délinquance » et de la « délin-
Les métiers de l'information ne consisteront plus à mettre de l'informa-
quance juvénile », mais renvoie à onze autres entrées {adolescence,
tion à disposition, mais à la hiérarchiser et à lui donner du sens. 7 » Ces
alcoolisme, arriération mentale, criminologie, etc.) où « délinquance »
quelques phrases donnent à réfléchir sur la façon habituelle d'indexer.
et « délinquance juvénile » apparaissent aussi.
INDEXATION
COMMENT INDEXER ?

question est posée. Ces mots clés doivent naturellement être pertinents
L'indexation du texte d'un document, effectuée le plus fréquemment en regard du texte, en fonction de la demande, mais ils ne doivent
par un documentaliste-analyste, a pour vocation d'alimenter un fichier surtout pas être trop nombreux. En effet, s'il y a trop de clés, comment
de recherche intégré de plus en plus souvent à une banque de données savoir quelle est la bonne porte ? On verra plus loin (p. 163-168) quel-
dont l'un des champs de contenu est le champ « indexation ». C'est dans ques aspects pervers de la surindexation.
cette perspective que l'opération d'indexation sera présentée ici.

Comment indexer ?
Rôle de l'indexation dans une banque de données
La norme AFNOR insiste bien sur un processus en deux étapes
Parmi les champs de recherche, et spécialement les champs de consistant à comprendre le texte et à en traduire le contenu avec son
contenu (cf. p. 102-105), le champ « indexation » sert à retrouver une propre langage avant d'utiliser un langage documentaire, quel qu'il soit.
information à partir de son sujet, caractérisé par un ou plusieurs mots L'étude de la première étape a déjà été approfondie précédemment,
clés. « Théories in information retrieval présuppose thé concept oj particulièrement au chapitre vi. On se souvient aussi que les réponses
match and of similarity between a request and a set of documents. * » sur le contenu du texte sont construites à l'aide d'un vocabulaire pré-
Le mode d'indexation suit les politiques documentaires décidées en senté au chapitre iv (nature, richesse et organisation des mots) que nous
amont. L'informatisation a modifié et modifiera ces politiques, encore allons maintenant analyser plus en détail. À cette phase de l'indexation,
trop tributaires des fichiers classiques qui nécessitaient un nombre qui n'utilise que la langue naturelle, il est effectivement question de
mots et non encore de termes.
important d'accès-matières. Ce n'est plus le cas puisqu'on peut combi-
ner tous les champs de description et de contenu, ou tout au moins on Toutefois, bien que le langage ne soit pas encore contrôlé, il est
devrait pouvoir le faire de façon plus large (cf. p. 105-107), et parce possible de l'épurer. Une règle à suivre dans l'établissement des langa-
qu'il faut encourager le maintien ou l'introduction des résumés, si courts ges documentaires consiste à choisir des substantifs masculins singu-
soient-ils. On ne saurait trop insister sur le rôle d'ouverture que doit liers comme termes d'indexation en langue naturelle. Un adjectif ne
jouer l'indexation : une clé dans la bonne porte ! Pour reprendre la sera admis que dans un mot clé composé. On peut opter pour des mots
métaphore du poteau indicateur placé à un carrefour, rappelons que le isolés ou Unitermes tels que « traitement » ou « parasite », ou préférer
poteau donne la direction à suivre mais n'informe ni sur l'histoire de la des expressions composées comme « traitement parasitaire ». Dans le
ville ni sur le nombre d'habitants ou les bons hôtels ; ces indications ne premier cas, le choix de deux mots clés distincts entraîne une post-
seront fournies que plus tard, lorsque la bonne route aura été empruntée. coordination, c'est-à-dire que, au moment de la recherche, il faudra
Lors de la requête, l'utilisateur pose une question à l'aide d'une phrase obligatoirement combiner ces deux termes, par ailleurs totalement
ou de quelques mots ; cette question doit naturellement être reformulée indépendants l'un de l'autre. Dans le deuxième cas, c'est la pré-
pour que l'on soit sûr du sens réel de la demande (cf. p. 96-101). C'est coordination qui a été choisie, et « traitement parasitaire » correspond
à partir des termes porteurs du sens requis (les mots clés) que la alors à un mot clé et un seul, que l'on devra utiliser tel quel au moment
de la recherche. Il est vrai que la formulation des mots clés et le choix
INDEXATION COMMENT INDEXER ?

entre pré-coordination ou post-coordination sont soumis aux langages


1. Agressivité 25. Images subliminales et inconscient
contrôlés qu'il faudra utiliser (cf. p. 188-193, 196-198, 203-205), mais 2. Automatisme 26. Imaginaire
il n'est pas inutile d'être déjà tout à fait au clair sur ces choix, même en 3. Connaissante effets 27. Imitation
langue naturelle. 4. Contagion émotionnelle 28. Immédiatcté
5. Contagion mentale 29. Imprégnation
Comment faire pour choisir ce ou ces mots qui serviront de clé(s) ? 6. Délinquance 30. Manipulation
Comment éliminer les intrus ? 7. Déontologie 31. Médias
8. Déontologie de la télévision 32. Mimétisme
'). Détachement émotionnel 33. Mimétisme et manipulation
10. Données statistiques 34. Psychanalyse des foules
ÉLIMINER, COMMENT ? 1 1 . Emotion 35. Psychologie
12. Émotivité 36. Publicité
Il est toujours intéressant de s'appuyer sur des exemples concrets pour 13. finfant 37. Réalité
exposer clairement les techniques d'indexation. Nous exploiterons donc 14. Enfants 38. Réceptivité psychique
les résultats d'un entraînement proposé à des documentalistes débutants 15. Enfants - adolescents 39. Réel
16. Enquête 40. Kclativisation des émotions
lors d'une formation sur le sujet. 11 s'agissait d'indexer le texte (bien 17. Esclavage télévisuel 41. Séduction
connu) « Les effets violents de la télévision » ; aucune consigne précise 18 États-Unis 42. Soumission
n'avait été donnée quant au traitement à exécuter, sinon qu'il s'agissait 1*). Fascination 43. Suggestion
de la première étape, donc d'un choix en langage libre. L'ensemble des 20. Hypnose 44. Télévision
21. Hypnose télévisuelle 45. U.S.A.
participants, même les plus inexpérimentés, travaillaient dans un
22. Hypnotisme 46. Violence
service de documentation ; on pouvait, par conséquent, raisonnable- 23. Illusion 47. Violence et télévision
ment espérer qu'ils avaient eu l'opportunité d'y observer quelques prati- 24. Images subliminales 48. Violence juvénile
ques valables. Le texte ayant déjà été travaillé, ils bénéficièrent de dix
minutes pour choisir les mots clés jugés utiles à la caractérisation du
contenu du texte. Ces mots furent relevés et listés par ordre alphabéti-
que, puis distribués à chaque participant dans l'attente de leurs études - la présence du même mot au singulière! au pluriel (13,14) : ce n'est
et remarques, le souhait du formateur étant que les principales anoma- pas forcément important au moment de la recherche puisque l'on peut
lies fussent remarquées par les stagiaires eux-mêmes (voir ci-contre). utiliser des troncatures, mais cela peut générer des index quelque peu
L'exploitation de ce premier exercice a permis de constater un certain désordonnés ;
nombre de phénomènes. - des juxtapositions et des ensembles qui forment un obstacle à la
recherche (3,15) : l'utilisateur devra-t-il chercher à « enfants » ou i\ adolescen
• À propos de la forme :
- un texte de 5 pages et 48 formulations différentes : c'est la preuve - l'utilisation de et (25, 33, 47) : cette conjonction est à proscrire dans
immédiate de la nécessité d'un langage contrôlé pour une juste tout mot clé à cause des confusions possibles dues aux équations
indexation, même s'il existe des équivalences ( 1 1 / 1 2 , 20/22, 37/39, booléennes ;
19/41). L'équivalence 18/45 est d'une nature spécifique qui sera étudiée - des termes généraux (athématiques) porteurs de sens multiples s'ils
ultérieurement (cf. p. 176-181) ; sont employés isolément (2, 7, 27, 29, 30, 41, 42, 43) : ce sont
INDEXATION
COMMENT INDEXER ?

typiquement des mots « Uniterme », c'est-à-dire des mots isolés qui CHOISIR : POURQUOI ?
devraient normalement se suffire à eux-mêmes pour désigner le sens
voulu. Si l'on choisit le mot clé « automatisme », cela signifie que le Ayant ainsi « nettoyé » la liste, on peut de nouveau poser la question :
texte en parle comme étant l'un des sujets principaux ; est-ce le cas ici ? « De quoi s'agit-il dans ce texte ? »
Les mots athématiques ont donc besoin d'être accompagnés d'un ou de
plusieurs autres mots pour former un terme pré-coordonné (cf. ci-avant Les mots enfant/enfance, adolescent/adolescence, télévision, vio-
et chapitre vin, p. 175-222); lence apparaîtront en premier. Ils sont assez représentatifs du contenu
- des expressions littéralement issues du texte (4, 5,9, 17, 21, 34, 38, et peuvent, en conséquence, servir de mots clés pour entrer dans le lan-
40, 48) : c'est le péché mignon des débutants qui ne maîtrisent pas la gage contrôlé. Ils ne suffisent cependant pas à identifier le contenu
distanciation nécessaire face au texte étudié, et qui picorent ça et là des intégral du texte, mais cette fonction est celle du résumé. II ne faut pas
formulations qui les frappent ou qui leur paraissent représentatives d'un transformer l'indexation en « résumé du pauvre » mais garder à l'esprit
contenu. Cet exemple le prouve encore : ces expressions sont souvent que sa raison d'être est de cibler l'essentiel.
liées à l'affect beaucoup plus qu'à la raison.
Le choix des termes d'indexation en langage libre repose donc
- À propos du fond : entièrement sur les deux points clés de l'opération : Quelles sont les
informations utiles contenues dans le texte ? Comment pourra-t-il être
Toute la difficulté pour les débutants est de bien saisir la différence
interrogé ? Ou, en d'autres termes, quel sens véhicule le texte et
entre les mots qui décrivent et ceux qui interrogent. Une manière de la
comment le traduire ? Pourquoi tenter d'exprimer ce sens uniquement
résoudre est de garder à l'esprit, au moment du choix des termes perti-
avec des mots ? On a vu que le résumé constituait une grande zone de
nents, une série de questions qui conduisent à l'élimination relativement
liberté pour l'analyste; pourquoi ne pas conserver cette liberté dans
facile des mots inutiles. En passant la liste au crible, on questionne :
cette phase de l'indexation, puisque la formulation, jusqu'à présent.
- si je cherche des informations sur la publicité (36), qu'est-ce que ce
peut être faite en langage libre ? Si l'on avait demandé aux analystes
texte m'apporte ?
novices d'indexer le texte précédent en répondant à la question « De
- si j'interroge la banque sur le problème de la délinquance (6),
quoi s'agit-il ? » par une courte phrase plutôt que par des mots, n'aurait-
qu'est-ce que ce texte m'apporte vraiment ?
- qu'est-ce que ce texte m'apprend sur le mimétisme (32) ? sur les on pas fait l'économie d'un nombre important des formulations
incriminées ci-dessus ?
États-Unis (18), etc. ?
- II importe aussi de mettre en lumière les mots se rapportant à la Cette habitude d'indexer avec des mots renvoie à l'époque où les
forme d'une partie du texte, et non à son contenu : même si l'on langages contrôlés n'étaient pas toujours en vigueur mais, dans une
rapporte les données statistiques (10) d'une ou de plusieurs enquêtes banque de données, le champ « indexation » est maintenant toujours
(16), ce texte ne livre aucune information sur ce qu'est une enquête ou contrôlé ; les mots choisis librement, qu'ils soient isolés ou extraits
sur ce que sont des données statistiques. d'une phrase, doivent donc être confrontés au langage d'indexation en
usage dans le service (cf. p. 175-222). S'il y a adéquation entre le choix
L'exploitation de cet exercice attire l'attention sur les principales et le langage, aucun problème ne se pose. Si les mots choisis librement
erreurs qui peuvent être commises au moment de l'indexation. L'élimi- jie font pas partie du langage contrôlé, il convient de chercher les
nation progressive des mots clés incorrects permet de choisir en meil- termes les plus proches sémantiquement, en veillant très attentivement
leure connaissance de cause ceux qui peuvent à nouveau être étudiés. à ce qu'ils ne dévient pas trop du sens requis.
COMMENT INDEXER ?
INDEXATION

Comme il faut tenir compte de la complémentarité des champs de Ces distinctions sont valables si elles correspondent aux modes
contenu (cf. p. 105-107), c'est à ce moment-là qu'intervient la courants d'interrogation : une banque exige des noms d'entreprises, une
rédaction définitive du résumé où il faut veiller à introduire les termes agence de publicité des noms de marques, une agence de voyages des
absents du langage documentaire. En effet, il existe forcément des noms de lieux. Mais il faut également que le système d'interrogation
analogies de contenu entre toutes ces formulations. Plus il en existe soit adapté, c'est-à-dire que l'on puisse croiser les mots clés, quels qu'en
soient les champs, avec la plus grande rapidité possible.
dans les champs interrogeables, et plus l'éventail est ouvert pour l'utili-
sateur qui pose ses questions avec son propre vocabulaire. Il est inté- En revanche, on doit émettre de fortes réserves sur les notions de
ressant d'introduire des mots équivalents dans les champs « titre », sujet principal zi sujet secondaire. En effet, l'indexeurse retrouve tenté
« résumé » et « indexation » qui sont les sources prioritaires de la de « viser plusieurs cibles à la fois », ce qui risque de conduire à bien
recherche documentaire. Deux de ces champs sur trois sont de la res- des excès, comme il en sera question plus avant. Au moment de la
ponsabilité du documentaliste. recherche, les documents choisis prendront-ils en compte l'aspect
secondaire de telle ou telle référence, face à un utilisateur pressé et, par
Enfin, le choix définitif doit être en cohérence avec la banque de
conséquent, relativement insatisfait du résultat ?
données. L'idéal serait d'interroger celle-ci à chaque indexation pour
être sûr de l'homogénéité des textes et de la façon dont ils sont traités, Enfin, quelques banques de données ouvrent un champ « indexation
idéal bien sûr illusoire à cause de la pression du temps. Mais il est libre » offrant à l'analyste la possibilité d'y inscrire les mots qu'il n'a pas
souhaitable de le faire ; trouvés dans le langage d'indexation et qui lui semblent indispensables
- en amont, à tout moment d'hésitation ou d'insatisfaction dans la pour décrire le contenu du texte. Cette option est. la plupart du temps,
première phase ; celle des banques de données sans résumé. Faut-il rappeler que, dans
- en aval, et de façon régulière, sur quelques termes qui « bloquent » l'optique choisie depuis le début de ce manuel, ce champ est une
au moment de l'interrogation. hérésie ? En effet, les mots nécessaires à l'interrogation peuvent libre-
ment être insérés dans le champ « résumé », le champ « indexation »
n'étant qu'une ouverture. Mais cette affirmation ne signifie pas qu'un
LES DIFFÉRENTS CHAMPS D'iNDF.XATION langage d'indexation ne puisse être augmenté, modifié, adapté aux
besoins d'une expression scientifique qui évolue toujours. L'analyste
Certaines banques de données proposent à l'indcxeur la possibilité de expérimenté estimant qu'un terme absent du langage contrôlé doit
sérier les champs d'indexation. Selon les systèmes, on peut donc absolument s'y trouver peut l'y introduire grâce aux différents moyens
trouver des champs : mis en oeuvre pour la maintenance du langage (cf. p. 215).
- sujet principal ;
- sujet secondaire ;
- heu géographique ; LA PROFONDEUR DE L'INDEXATION : EXHAUSTIVITÉ ? SÉLECTIVITÉ ?

- date ;
- nom de personnes ; Les normes insistent beaucoup sur les notions d'exhaustivité et de
- nom d'entreprises ; sélectivité, c'est-à-dire le fait que l'indexation retiennne toute l'informa-
- nom de marques ; tion utile, et uniquement l'information utile. Tout le monde s'accordera,
- indexation libre (ou candidats-descripteurs), etc. bien entendu, sur le principe. Mais quelle forme lui donner ?
INDEXATION COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

L'exhaustivité, ou profondeur étendue, choisit de ne donner aucune QUALITÉ DL: L'INDHXEUR


limite au nombre de concepts retenus, à condition qu'ils soient porteurs
de sens, évidemment. Cette option favorise le bruit et diminue le Le rêve absolu est évoqué : quel que soit l'indexeur, un même texte
silence. La sélectivité, ou profondeur restreinte, limite le nombre de devrait toujours être indexé de la même façon ; de surcroît, un même
descripteurs, ce qui provoque l'effet inverse : on freine le bruit, mais on indcxeur devrait choisir les mêmes mots clés pour le même texte à
risque le silence. plusieurs jours ou plusieurs mois d'intervalle.
Ne s'agit-il pas d'un faux problème ? Le nombre de concepts retenus La réalité est connue : on ne peut exaucer ces deux vœux, et pour des
doit servir à entrer dans le document. La règle classique est toujours de raisons tout à fait valables. Le même texte est lu par des indexeurs qui
choisir les mots les plus précis correspondant au sujet. Mais si la préci- n'ont pas forcément des objectifs d'utilisation semblables ou des langa-
sion existe déjà dans le titre, pourquoi renseigner le champ « indexa- ges d'indexation similaires. Le même indexeur, d'une part, affine son
tion » ? Celui-ci ne devrait plus être obligatoire à partir du moment où mode de fonctionnement et modifie son approche d'un texte, d'autre
il peut être considéré comme un champ complémentaire aux autres et part s'enrichit au fur et à mesure de son activité professionnelle de tous
non plus comme le seul champ important et prioritaire à l'interrogation. les besoins diversifiés de ses utilisateurs. Le « cas idéal » évoqué par
Une autre question est souvent posée : peut-on indexer avec des les normes non seulement, donc, n'existe pas en soi, mais ne devrait
termes faisant partie du même champ sémantique, sur la même ligne jamais exister — sous peine d'uniformiser ce qui ne peut pas l'être.
hiérarchique (cf. p. 175-222)? Par exemple, un manuel sur le riz En revanche, demander aux indexeurs de tendre à l'impartialité,
peut-il également être indexé à « céréales » (à condition, bien sûr, d'approfondir leur connaissance des domaines traités, d'établir et entre-
que le terme existe dans le langage d'indexation) ? La réponse dépend tenir des contacts directs avec les utilisateurs, tout cela constitue des
des autres champs interrogeables : à nouveau, les champs « titre », garanties de qualité, sans toutefois suffire à assurer totalement celle-ci.
« domaine » et « résumé » complètent le champ « indexation » sur
lequel ne devrait plus peser l'entière responsabilité de la recherche.
Enfin, la plupart des logiciels proposent l'autopostage qui permet, à QUALITÉ DES OUTILS
partir d'un terme du langage contrôlé, de naviguer sur sa ligne séman-
tique, en ascendant ou en descendant (cf. p. 217-218). Ces nouvelles L'outil d'indexation, compris par les normes comme étant le langage
approches de l'indexation devraient abolir toute question sur le choix documentaire, doit effectivement être non seulement adapté à la
entre l'exhaustivité et la sélectivité. situation, mais suffisamment souple pour évoluer en fonction des
besoins. On verra plus avant que, pour les rendre utilisables, il est
nécessaire de maintenir à jour les langages d'indexation.

Comment évaluer l'indexation ? Un autre outil existe, que les normes ne mentionnent pas : le système
informatisé en place. Ses possibilités techniques et la vitesse d'interro-
gation dont il est capable sont des éléments importants pour l'augmen-
Les normes AFNOR et ÏSO présentent les mêmes critères de contrôle tation de l'efficacité de la recherche. Cela devrait influencer, en amont,
de qualité dans l'opération d'indexation, dépendant de deux facteurs : la qualité de l'indexation si les documentalistes ont bien pris conscience
l'indexeur et l'outil d'indexation. des atouts que leur donnent les performances des logiciels.
INDEXATION
COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

Enfin il faut évoquer la pondération, les liens, les indicateurs de rôle,


- combien de documents non pertinents extraits en fonction du nom-
tous moyens d'affecter aux termes d'indexation des caractéristiques bre de documents non pertinents existants ?
capables de lever les ambiguïtés possibles. L'exemple classique est
celui du document indexé par les quatre descripteurs « Histoire », Ce modèle de sondage peut se trouver dans tous les articles et
«Technique », « Documentation », « Enseignement » qui peut produire manuels traitant de l'indexation". Dans la réalité, ont-ils souvent été
vingt-quatre combinaisons différentes". Cet exemple est tout ausi théo- appliqués ?
rique (puisqu'il suffit, en effet, de choisir des mots plus précis et moins
En revanche, il est important de pratiquer régulièrement des études
nombreux pour lever le problème) que les études qui n'ont pas, jusqu'à d'occurrence des termes d'indexation : tous les trois ou six mois, on
présent, débouché sur des applications pratiques satisfaisantes, mais
peut vérifier, par sondage, combien de fois tel terme a été utilisé ou tel
qui facilitent les projets en cours concernant les logiciels d'interroga-
autre n'a pas été choisi. Ces tests, souvent appliqués dès qu'il existe une
tion en texte intégral (cf. p. 111-118).
maintenance régulière d'un langage contrôlé, prouvent qu'un indexeur
mal formé utilise environ 20 % des possibilités offertes par le langage
d'indexation.
LES TESTS POSSIBLES
C'est une illustration de la « loi du moindre effort », ainsi nommée
Les normes préconisent, enfin, de procéder à « une analyse des résul- par le linguiste américain George K. Zipf pour rendre compte du
tats de recherche documentaire [...] à l'aide du calcul des taux de rappel phénomène suivant : si l'on classe les différents mots d'un texte par rang
et de précision ». Ces mesures de performance sont très bien exposées de fréquence décroissante, le produit du rang par la fréquence est
dans l'article de D. Soergel I0 qui distingue : constant, c'est-à-dire que la fréquence d'un mot est inversement propor-
- le rappel : « Recall can be seen as thé probability oj an item heing tionnelle à son rang.
retrieved, gtien that it is relevant. » ;
Dans le cas d'un langage d'indexation, l'indcxeur novice (ou insuffi-
- la précision : « The fraction of relevant items in thé items
samment formé) utilise toujours les mêmes termes, n'effectuant aucune
retrieved. » ;
recherche pour savoir si d'autres existent, qui seraient plus pertinents.
- le déchet : « The complément of discrimination is fallout, thé
fraction of ail irrelevant documents incorrectly retrieved. » ; C'est pourquoi ces tests d'occurrence doivent être effectués avec
- la discrimination : « Discrimination can he seen as thé probability beaucoup de finesse. L'utilisation trop fréquente d'un terme d'indexa-
ofan item being rejected, given that it is not relevant. » tion — ou, au contraire, son absence dans les index — ne signifie pas
Des sondages statistiques de ce type peuvent effectivement être effec- toujours que le langage est mauvais mais qu'il peut être mal utilisé.
tués pour contrôler la cohérence interne d'une banque de données :
- combien de documents pertinents retrouvés en fonction du nombre
LA SURINDEXATION
de documents pertinents existants ?
- combien de documents pertinents retrouvés en fonction du nombre
La surindcxation consiste à choisir et à retenir plus de mots clés que
de documents extraits ?
d'informations contenues dans le texte étudié. La peur du silence (oubli
- combien de documents non pertinents extraits en fonction du nom-
d'un mot cléjjedinent) a entraîné le choix du bruit. La nécessité déonto-
bre de documents extraits ?
logique de ne jamais répondre « non » a provoqué trop de mauvais
INDEXATION COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

« oui ». Cet argument cache une réalité moins noble : le bruit ne gêne Les conséquences de la surindexation
que l'utilisateur final, le documentaliste fournissant son listing ou son
Le problème est posé nettement par les meilleurs spécialistes de la
paquet de documents avec le sentiment du devoir accompli — le nom-
profession ; « Nous nous interrogeons ici sur le sens à donner aux tita-
bre est encore souvent source de satisfaction. Le silence, en revanche,
nesques additions de textes condensés ou intégraux amassés dans les
met le documentaliste mal à l'aise ; il lui renvoie l'idée que son système
banques de données [...] La mission [de la science de l'information]
n'est pas valable, ou que son travail n'a pas abouti comme il le désire.
est-elle d'activer une mémoire intelligente ou de construire des banques
Combien de fois n'est-on pas sûr d'avoir eu en main un document répon-
géantes et agrégatives, au point de faire courir à l'humanité les risques
dant exactement à la question posée, face à un écran désespérément
liés à tout fonctionnement de mémoire mal organisée : la sur-informa-
vide... Le silence est proprement insupportable pour le professionnel de
tion ou la sous-information ? l2 » M.-F. Blanquet, déjà citée à propos de
l'information qui se doit d'avoir réponse à tout (ou presque !).
la nécessité de sélectionner en amont (cf. p. 25-26), souligne le fait que
« l'agrégation sans intelligence des textes entre eux a pour effet de
Les causes de la surindexation
laisser coexister dans une mémoire donnée des informations "vraies" et
À l'époque où les utilisateurs ne pouvaient guère diversifier leurs des informations "fausses" ».
sources de recherche, on pouvait éventuellement trouver quelques
On peut ajouter à la validation des informations le manque de
explications justifiant ces excès.
sélection des documents traités : informations vraies ou non vérifiées,
Maintenant que les accès se sont multipliés et que les sources se sont
informations nécessaires cl durables noyées au milieu de textes occa-
diversifiées et étendues internationalement, il ne peut plus y avoir
sionnels, répétitifs et inutiles. Les mauvais choix des textes et des mots
d'excuse à la surindexation, qui a plusieurs causes : nuisent à la recherche documentaire.
- les mauvaises habitudes acquises ;
- la difficulté de réviser ses modes de fonctionnement ; Les deux exemples proposés en page suivante (extraits d'une banque
- l'inexistence ou la disparition des résumés, et l'illusion que l'indexa- de données qui restera anonyme) peuvent illustrer les dangers de la
l
tion peut les remplacer ; surindexation. On y trouve, certes, de très bons passages, mais aussi
- le manque de formation et de réflexion d'un grand nombre d'ana- d'importantes erreurs d'écriture. Les termes d'indexation ont été choisis
lystes novices partant du principe que plus il y a de mots clés, plus on en fonction d'un langage préétabli qui permet l'utilisation de mots
augmente les chances de retrouver le texte ; athématiques (administration, fonds, évolution...), mots encombrants
- la répartition des rôles dans les grands services : celui qui analyse et n'apportant pas de sens utile (cf. p. 211-215). Puisqu'ils existent,
n'est pas celui qui interroge, et vice versa ; l'indexeur les utilise... Mais a-t-il réfléchi aux conséquences ?
- le manque fréquent d'une politique cohérente et suivie de la banque
en tant que mémoire documentaire. • Les risques de la combinatoire
Toutes ces raisons ont fait des ravages dans les banques de données. La recherche documentaire informatisée est basée sur la
Par peur du silence, on a favorisé le bruit. Cet état d'esprit prouve à quel combinatoire et l'utilisation des équations booléennes. Si l'on cherche
point l'on est éloigné des exigences actuelles des vrais usagers, qui des informations sur l'administration au Québec, qu'est-ce que le
désirent la réponse et non l'encombrement. L'évaluation de l'indexation premier texte .apprend ? Et si l'on interroge le deuxième sur l'évolution
ne se fait pas au poids, mais à la précision. du Québec en faveur des handicapés ? Ces questions feront sortir des
INDEXATION COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ?

Exemples commentés de surindexation articles qui n'ajouteront que du bruit à la liste. Il n'a pas fallu beaucoup
de temps pour trouver ces deux exemples ; d'autres pourraient être
présentés et encombrer inutilement ce chapitre. Le lecteur est renvoyé
Première notice :
à ses prochaines recherches pour renforcer l'argument... Plus il y a de
termes dans le champ « indexation », plus la combinatoire risque d'être
Titre : Le réseau informatise des bibliothèques gouvernementales : un
maillon de la chaîne documentaire du Québec faussée, et plus on produit de bruit à l'interrogation.
Auteur : Daniel Allaire
Source : Documentation et bibliothèques, vol. 40, n° 2, avril-juin 1994, • Les ternies donnant l'illusion de l'information
p. 61-66
Résumé : L'administration publique québécoise compte un peu moins d'une On ne saurait trop rappeler que l'indexation, clé d'accès à une infor-
centaine de bibliothèques spécialisées constituées en majorité de petites mation pleine, doit fournir des références à des documents qui appor-
unités de trois employés ou moins. On y retrouve près de 3,6 millions de
documents de tout genre. Au cours des cinq dernières années, ces biblio- tent du contenu et non pas seulement des citations : ainsi, si l'on
thèques ont informatisé leur fonctionnement à l'aide du logiciel Best-Seller cherche des informations sur les caractéristiques du logiciel Best-
et l'exploitation de la documentation se fait maintenant en réseau. Le Seller, l'interrogation de la banque de données fournit la première réfé-
regroupement des bibliothèques gouvernementales dispose désormais d'un rence, et le résumé indique seulement que ce logiciel est utilisé dans les
instrument lui permettant de rationaliser la gestion des ressources
documentaires de l'État. bibliothèques gouvernementales du Québec.
Indexation : Administration - Réseau bibliothèque - Bibliothèque spécia-
lisée - Informatisation bibliothèque - Logiciel - Québec - BEST-SELLER • Les répétitions abusives et les choix pertinents
Son regard fixé sur le texte et sur le langage contrôlé en vigueur,
Deuxième notice : l'indexeurpcrd souvent le sens d'une simple réalité. La deuxième notice
est un bon exemple de surindexation et de mauvais choix de vocabu-
Titre : La bibliothèque Braille ou une odyssée de 95 ans laire. Le titre de l'article indique bien qu'il s'agit d'une « bibliothèque
Auteur : Michelle Brûlé spécialisée » {mot clé) et de son histoire, présentée métaphoriquement
Source : Documentation et bibliothèques, vol. 40, n° 2, avril-juin 1994, en tant qu'« odyssée de 95 ans », mots inutiles pour l'interrogation. Seul
p. 81-86
Résumé : Cet article présente une bibliothèque unique en Amérique du le nom propre « Braille » peut être considéré comme univoque, évoca-
Nord, la bibliothèque Braille de l'Institut Nazareth-ct-Louis-Braille, à tcur d'un certain style d'écriture et de lecture, pour une population tout
Longueil, son histoire presque centenaire, son fonctionnement, l'état de sa à fait ciblée. En tant que nom propre, le vocable « Braille » apparaît
collection, ses projets. L'auteur de l'article est aujourd'hui présidente et deux fois dans le résumé, et en tant que système, deux autres fois. Pour
directrice de la Bibliothèque Jeanne-Cypihot, corporation sans but lucratif
avec laquelle l'Institut et diverses instances gouvernementales ont entrepris faire bonne mesure, il est repris comme terme d'indexation.
une réflexion concernant un éventuel transfert de la collection Braille. Ce En revanche, c'est le terme plutôt générique « handicapé » qui
nouvel organisme diffusera sous peu, sous forme de prêt, des livres-
disquettes en Braille, produits à partir des fichiers-sources d'éditeurs qué- représente la population spécifique visée ; le terme « support informa-
bécois. tion » double inutilement le nom « Braille », déjà abondamment
Indexation : Bibliothèque spécialisée - Handicapé - Ponds - Support infor- présent. Sans doute le langage contrôlé ne donnait aucune autre
mation - Besoin utilisateur - Evolution - Québec - BRAILLE possibilité.'Âïors, pourquoi les mots « cécité » ou « aveugle » n'appa-
INDEXATION L'INDEXATION EN 10 CONSEILS

raissent-ils pas, d'une façon ou d'une autre, dans le résumé ? Malgré le L'indexation en 10 conseils
nombre imposant de mots clés inutiles, c'est un bel exemple de silence
en vue.
1. Tenir compte du destinataire final et de l'environnement
On voit donc que la surindcxation n'exclut pas les risques de silence ; documentaire.
il ne suffit pas de « mettre » beaucoup de mots ; encore faut-il qu'ils
soient choisis judicieusement. On trouve bien ici la coupure existant 2. Prendre connaissance du texte et l'interroger. (De quoi s'agit-il ?)
entre analyse et recherche. Dans l'enseignement de la profession, on 3. Écrire une courte phrase faisant ressortir le(s) sujet(s) essentiel(s).
peut constater que les opérations booléennes font le plus souvent partie
du cours sur la recherche automatisée, sans aucun rapprochement avec 4. Caractériser ce(s) sujet{s) en langue naturelle : avoir à l'esprit tout
les cours sur l'analyse et l'indexation. Cette tradition perdure jusque ce qui est sous-jacent à la formulation d'un mot (vocabulaire courant /
dans la pratique professionnelle quotidienne. Si les analystes n'interro- spécialisé, champ sémantique / symbolique, etc.) et vérifier ceux qui se
gent pas les banques de données de façon régulière et réfléchie, si les trouvent déjà dans d'autres champs de contenu.
recherchistes ne se confrontent pas à la difficulté du travail d'analyse,
les banques de données deviendront de plus en plus ces mastodontes 5. Se poser la question : si j'interroge à partir de ce(s) mot(s),
sans âme que leur masse condamne à l'immobilisme. quellc(s) information(s) suis-je susceptible de récupérer ?
6. Distinguer les termes d'indexation portant sur le sujet principal des
• Le coût de la surindexation termes d'indexation caractérisant les aspects sous lequel le sujet est
traité. Exemple :
Un dernier aspect nocif de la surindexation tient à son coût. On parle
Politique sociale communautaire Sujet
très souvent et ajuste titre du coût de l'analyse, mais circonscrit au temps
Droit communautaire Aspect législatif
passé à la rédaction du résumé et au choix des termes d'indexation.
« L'analyse coûte cher », répète-t-on et, sans doute, est-ce l'une des 7. Consulter le langage contrôlé (cf. chapitre vin, p. 175-222) pour
raisons des recherches actuelles pour augmenter l'utilisation des interro- choisir les termes d'indexation.
gations en texte intégral ou de tous les autres systèmes visant à terme à
supprimer l'analyse dite manuelle (!). Ces recherches sont légitimes, à 8. Si les termes sont nombreux, les passer au crible des opérateurs
condition de prendre aussi en compte le coût de l'interrogation qui booléens pour éviter les croisements fâcheux.
n'aboutit pas. L'économie d'une transaction repose sur l'amont et sur 9. Consulter la banque de données pour vérifier l'utilisation de ces
l'aval : tout ce qui n'est pas fait au départ doit être fait à l'arrivée, et termes en vue de maintenir une cohérence interne.
comment ? Faut-il reporter sur l'utilisateur final le soin de se tirer
d'affaire, alors qu'il vient avec sa seule demande, sans avoir normalement 10. Choisir définitivement et sans état d'âme les seuls termes
exploré le vocabulaire existant comme sait le faire tout documentaliste ? d'indexation utiles à la recherche documentaire.
L'indexation n'est certainement pas une science exacte, mais elle
répond à quelques règles dont il faut tenir compte avant d'aborder
l'étude des langages contrôlés, passage obligé pour parachever
l'opération.
INDEXATION
ANNEXE PÉDAGOGIQUE

NOTES

1. Source : [52], p. 51.

2. Source : [4].
Les exercices de ce chapitre, plus encore que les autres, ne
3. Source : [46]. peuvent faire l'objet de corrections précises. En effet, l'indexation
est principalement tributaire : de la politique documentaire
4. Source: [15]. décidée en amont ; du langage contrôlé employé en aval ; de
l'existence (ou non) d'un résumé.
5. Source : [40].
Politique et langage sont propres à chaque unité d'information
6. Source : [52], p. 4.
documentaire et ce manuel ne peut qu'y rester extérieur. Les
7. Source: [8], p. 143. commentaires insisteront donc sur les erreurs à éviter et ne
pourront pas donner un résultat définitif, tant sont différentes les
8. Source : [2], p. 142. pratiques et possibles les interprétations.

9. Voir : [58] (malgré sa date, ce texte n'a rien perdu de son intérêt) et [751
p. 591.

10. Source : [75], p. 590. Exercice 16 - Identifier des erreurs d'indexation

11. Voir, entre autres, [20], p. 44-50. Le texte proposé au chapitre précédent comme exercice de
12. Source: [14], p. 70-71. résumé (Claude-Jean Bertrand. — Des objectifs pour le journalisme.
— Études, septembre 1993. Voir p. 246) a été indexé par un groupe
novice au cours d'une formation initiale. 54 mots clés ont été
relevés (voir page suivante). En vous inspirant des pages 154 à 158,
vous devez déceler et analyser les erreurs, puis les éliminer. Vous
proposerez les mots clés que vous conserveriez, ou d'autres qui
vous paraîtraient plus justes.
Commentaires en page 300.

Exercice 17 - Indexation en langage libre

1 - Lisez, page 253, le texte de Ann Okerson. — Les droits* d'au-


teur des œuvres numériques. — Pour la science, septembre 1996,
n° 227. Leltrois premiers paragraphes de ce texte ont été proposés
INDEXATION ANNEXE PÉDAGOGIQUE

dans l'exercice 7 comme application de lecture documentaire d'un Exercice 18 - Indexer en langage libre
article ; on se rappelle que les deux premiers paragraphes illustrent
le titre et que le troisième pose un certain nombre de questions 1 - Lisez, en page 260, le texte : Didier Dubrana. — Haute tension
pouvant servir d'hypothèses de lecture. sous les lignes. — Science & Vie, février 1993, n° 905.

2 - Indexez cet article en langage naturel, soit en choisissant des 2 - Indexez cet article en langage naturel en répondant par une
mots caractéristiques du contenu et susceptibles d'être interrogés, courte phrase à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ?
soit en répondant par une courte phrase à la question : « De quoi
Commentaires en page 305.
s'agit-il dans ce texte ? »
Commentaires en page 302.

Liste des mots clés de l'exercice 16 :

1. actualité 28. médias (x5)


2. amélioration journalistique 29. minorité
3. argent 30. moralité
4. barrière à l'information 31. moyens
5. communication (x4) 32. nouvelles
6. conception du journalisme 33. nouvelles compréhensibles
7. connaissance 34. objectif
8. conscience des gens de presse 35. partialité
9. débat public 36. politique
10. démocratie 37. presse (x3)
11. déontologie (x3) 38. profession
12. déontologie des journalistes 39. pseudo-événements
13. développement de la presse 40. public (x2)
14. diffusion (x2) 41. publicité
15. éducation 42. qualité (x3)
16. États-Unis 43. réalité
17. éthique 44. rédaction
18. information (x9) 45. réforme (x2)
19. information continue 46. rôle
20. intérêt 47. service public
21. journalisme (x4) 48. scientifique
22. journaux (x2) 49. tradition
23. liberté (x3) 50. traduction
24. liberté de la presse 51. traitement de l'information
25. libertés 52. transformation (x2)
26. livraison de l'information 53. transformations (médias (et))
27. média (x5) 54. vérité
CHAPITRE VIII
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

II ne peut y avoir communication sans langage, de quelque type qu'il


soit. Dans le cadre de l'analyse documentaire, les exemples et exercices
d'indexation proposés dans les chapitres précédents montrent spectacu-
lairement les limites de la langue naturelle et prouvent l'absolue
nécessité d'un langage contrôlé. Si « les langues naturelles reposent sur
des conventions partagées au sein d'une communauté 1 », quelles
conventions les langages documentaires sous-tendent-ils ?

Un peu d'histoire

L'importance accordée aux langages contrôlés est relativement


récente ; la recherche de documents a longtemps été effectuée par noms
d'auteurs, comme en témoigne le catalogue des imprimés de la
Bibliothèque nationale. Ce passage d'une recherche de documents
réservée aux érudits (il fallait savoir qui avait écrit sur quoi) à la
recherche documentaire ouverte à tous, grâce aux accès par sujets ou
accès-matières, s'est déroulé en plusieurs étapes :
- vers la fin du xixc siècle, aux Etats-Unis, les bibliothèques univer-
sitaires ont ouvert leurs rayons aux étudiants en classant les ouvrages
par grandes disciplines : ce fut la naissance des classifications, sous-
jacentes au classement ;
- vers les années trente, toujours sous l'impulsion nord-américaine,
les bibliothèques publiques, outre le classement des ouvrages par sujet,
ont établi des fichiers analytiques de matière, à l'intérieur desquels des
fiches classées alphabétiquement indiquaient le sujet de l'ouvrage,
d'abord d'après les mots significatifs du titre, puis selon un lexique plus
ou moins élaboré ; •
- au cours des années cinquante, la mise en place de fiches perforées
a permis les premiers essais de combinaison de termes, puis l'informa-
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES AUTORITÉS

tisation a pris le relais, les outils linguistiques correspondants assurant obligatoirement présents. On peut donc distinguer les autorités
toutes les possibilités de la combinatoire, de la liste la plus simple au reconnues par tous et officiellement utilisées, des autorités internes,
thésaurus le plus perfectionné. choisies et élaborées pour tel ou tel usage.
Ce survol plus que rapide montre que les premiers langages
documentaires étaient appliqués aux champs de contenu, spécialement
LES AUTORITÉS OI-FIC!F,LLES
au champ d'indexation, qui était effectivement le plus employé pour la
recherche documentaire. Les progrès de l'informatisation permettant la La Bibliothèque nationale publie sous forme de microfiches mises à
combinatoire, les langages documentaires contrôlent maintenant
jour deux fois par an des « fichiers d'autorité » pour les noms d'auteurs
l'ensemble du vocabulaire de tous les champs interrogeables, sauf ceux
(personnes physiques, collectivités-auteurs) et pour les titres
rédigés en langage libre, à savoir les champs « titre » et « résumé ».
uniformes.
Tout langage contrôlé est un langage d'« autorité », c'est-à-dire un
La Bibliothèque du Congrès établit ses autorités sous forme de
langage normalisant l'aspect formel des accès. Cependant, l'usage
notices ; auteurs (physiques et collectivités), titres uniformes et
distingue les langages documentaires - affectés à la recherche
collections sont disponibles en ligne et/ou sur cédéroms mis à jour
documentaire par sujet — des listes d'autorité concernant les autres
trimestriellement. Ces notices couvrent la littérature mondiale, donc les
champs, en particulier ceux où se trouvent des noms propres comme
auteurs, titres et collections en langue française sont fortement
les champs « auteurs personnes physiques ou collectivités ». En effet,
comment saisir les noms arabes, africains, orientaux ? Doit-on choisir présents.
« C N R S » ou «Centre national de la recherche scientifique», L'ISO2 publie une liste d'abréviations pour les lieux géographiques et
« U.S.A. » ou « États-Unis » ? Et si les saisies varient, comment effec- les langues des publications'. Ces outils linguistiques assurent l'harmo-
tuer (et réussir) une recherche ? nisation des données, indispensable pour tout échange de notices et
La notion d'autorité est le plus souvent affectée aux champs de pour une interrogation efficace des banques de données internationales.
catalogage. Elle est insuffisamment connue et utilisée dans les services Entre autres, ils résolvent les problèmes posés par la translittération des
de documentation qui réinventent quelquefois ce qui existe déjà par langues non romanes et ils donnent une forme immuable aux noms
ailleurs. Les pages suivantes ont pour objectif de mieux en faire propres : personnes, collectivités, lieux, etc.
connaître la teneur, l'intérêt et l'application tout à fait possible aux L'exemple suivant peut en illustrer l'application. Des étudiants ont
champs d'indexation. récemment indexé l'article « Le parc naturel régional Scarpe-Escaut
prépare son avenir» (Le Monde, 21 janvier 1998, p. 13). Cet article
descriptif donne un rapide aperçu de l'historique du parc, ainsi que de
Les autorités son environnement géographique et politique. Un petit lexique
préétabli a été fourni aux étudiants ; il ne contenait aucune formulation
de lieu. La consigne de l'exercice (qui excluait le résumé) leur
Les champs de description des banques de données (cf. p. 101-102) permettait de proposer des mots clés candidats susceptibles de préciser
suivent à peu de choses près un même canevas ; les éléments propres à le contenu et d'aider la recherche. Les vingt-cinq formulations géogra-
l'ISBD {International Standard Bibliographical Description) y sont phiques relevées méritent d'être présentées :
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES AUTORITÉS

Belgique Parc du Hainaull Province du Hainaut Espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)


Escarpe-Escaut Parc du Hainaut Scarp Escaut EP* ENR
Escault « Parc du Hainaut » Scarpe EP Association pour l'espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)
EP Association Espace naturel régional (Nord-Pas-de-Calais)
Escaut Parc naturel des plaines Scarpe Escaut
de l'Escaut *[:P = employé pour
Hainaull Scarpe-Escaut
Parc naturel régional
Hainaut SCARPE-ESCAUT
Scarpe-Escaut
Nord- Pas de Calais Vallées de la Scarpe et
PNR
de l'Escaut
Nord-Pas-de-Calais
P.N.R. Parc naturel régional Nord-Pas-de-Calais (France)
Wallonie
Parc des plaines de la
PNR
Scarpe et de l'Escaut EP Audomarois (France : Park)
EP Nord-Pas-de-Calais Régional Nature Park
VA* Natural areas, France
VA Parks, France
Sources : Work Catalogue : Institut géographique national (France), 1997
Michelin road atlas France, 1987

•VA = voir aussi


Deux notices d'autorité peuvent être consultées (voir ci-contre). La
première provient de la Bibliothèque nationale de France, et la seconde
est issue de la Bibliothèque du Congrès (Washington). La première sera
choisie par toutes les grandes bibliothèques institutionnelles françaises,
mais un service de documentation indépendant pourra lui préférer la Quels sont donc, parmi les champs de contenu classiques, ceux qui
seconde, plus proche du langage courant — à condition, bien sûr, de s'y nécessitent des autorités ?
conformer ensuite de façon régulière. Intégrée dans l'index des collec-
tivités-auteurs, cette formulation constante simplifie le travail de • Si la cotation répond à un système conceptuel, elle suit un plan de
l'analyste et assure une cohérence globale à la banque de données. classification (cf. p. 186-195).
• Les champs « domaine » et « indexation » représentent les sujets,
donc sont soumis aux langages d'indexation (cf. p. 195-218).
LES AUTORITÉS PROPRES À DES BESOINS SPÉCIFIQUES
• La typologie de l'information dépend, bien sûr, des centres d'intérêt
Chaque service de documentation doit répondre, en revanche, à des el des modes d'interrogation du lieu ; on a déjà parlé des dix-neuf types
besoins spécifiques. Les champs de description et de contenu sont de publications officielles. Une banque de données de presse a
interrogeables et l'on peut en créer autant que de besoin — à condition, sélectionné huit types en indiquant bien leur utilisation :
bien sûr, qu'il ne s'agisse pas de gadgets... Évoquons ici un champ de bibliographie : l'article comprend une bibliographie du sujet traité ;
description « couleur du document »... qui laissait rêveurs les usagers ! même dénomination pour filmographie, discographie, etc. ;
"'
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES AUTORITÉS

- biographie : l'article présente des informations biographiques sur une Ces mêmes services, cependant, méconnaissent encore trop les
ou des personnes, en indiquant au moins fonction, date de naissance ou autorités officielles, considérées comme réservées aux grandes
de prise de fonction, etc. Môme dénomination pour les nécrologies ; centrales documentaires ou aux bibliothèques encyclopédiques
- chronologie : l'article présente la succession d'un ou de plusieurs (nationales, universitaires, etc.). Or, tout service de documentation est
événements dans le temps ; appelé à faire, si ce n'est pas déjà le cas, du déchargement de notices.
- entretien (à distinguer de l'interview) : l'article est composé d'une On peut môme avancer l'hypothèse que moins il a de moyens, plus est
discussion entre différentes personnes ayant à peu près le même niveau intéressant pour lui ce mode d'enrichissement de sa banque de données.
de compétence ; Cela entraine obligatoirement des règles communes dont on constate
- gouvernement : l'article présente la composition ou la modification que si elles sont reconnues et admises lorsqu'il s'agit de PISBD, elles le
d'un gouvernement ; sont beaucoup moins lorsqu'il s'agit des autorités propres à la for-
- interview {à distinguer de l'entretien) : un journaliste interroge une mulation des noms d'auteurs — personnes physiques ou morales —,
personne compétente dans le sujet traité ; des noms de lieux, de collection, etc.
-statistique : l'article présente des données chiffrées utilisables par le La source de ces autorités est bibliothéconomique et elle est surtout
lecteur. Ces données chiffrées ne sont pas nécessairement présentées
utilisée pour les champs de la description bibliographique. Est-ce une
sous forme de tableau ;
raison pour l'y cantonner, alors que l'on peut si rapidement — et de
- synthèse : l'article présente un sujet de la façon la plus complète et
façon quasi universelle — trouver un moyen de se mettre d'accord sur
la plus à jour possible.
la façon de choisir les noms propres dans les champs de contenu ?
Cette liste n'a qu'une valeur d'exemple; elle ne présente aucun
Quelle différence d'écriture entre le champ caractérisant un texte de
caractère d'« autorité » pour d'autres services similaires. Il revient à
« Tchekov » et le champ caractérisant un texte sur « Tchekov » ? Cet
chacun de tester ses choix, d'ajouter ou de retrancher en fonction des
exemple n'est pas anodin, car il soulève les problèmes de translité-
besoins réels. Par exemple, cette banque de données de presse n'a pas
ration, que les autorités officielles aplanissent également.
retenu un champ « rubrique », tandis qu'une autre l'a créé -
« économie », « société », « sports » 4 —, certainement pour favoriser Il est possible, sans faire preuve de beaucoup d'imagination, de se
son mode de recherche documentaire. Le choix de ces autorités représenter ce que peut donner la formulation d'un champ d'indexation
internes offre donc une grande liberté, mais l'important est ensuite de géographique pour un ouvrage traitant de l'Angleterre, sachant qu'on
s'y plier régulièrement, de façon à leur garder tout leur intérêt. peut également choisir Grande-Bretagne ou Royaume-Uni, que l'on
peut trouver des abréviations, choisir entre les tirets, les espaces...
Quelle recherche est ainsi facilitée ? Quelle forme auraient les éditions
MÉCONNAISSANCE OU RÉTICENCE ? venant de diverses sources ?
Les services de documentation ont intégré sans peine les autorités Les autorités officielles ne résolvent pas tous les problèmes, bien sûr,
propres à leurs besoins. L'exemple donné en page précédente peut être mais en règlent un grand nombre. Il est temps pour les documentalistes
complété par des index concernant la typologie des documents, des d'utiliser sans réticence ces outils encore trop peu ou mal connus.'Que
listes de sigles, des codes internes — tous les éléments relativement de temps gagné tant à l'indexation qu'à la recherche, et quelle facilité
répétitifs et requérant une forme immuable. pour un échange international des données !
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Les langages documentaires d'étudier de manière exhaustive l'ensemble de ces obstacles linguis-
tiques, mais on retiendra les plus courants dans la pratique documen-
taire.
DÉFINITION

Synonymie
L'AFNOR définit les langages documentaires comme des « langages
artificiels constitués de représentation de notions et de relations entre La synonymie se définit comme une équivalence entre des mots
ces notions, destinés, dans un système documentaire, à formaliser les différents véhiculant le même sens ou des sens rapprochés : Exode I
données contenues dans les documents et dans les demandes des utilisa- fuite I émigration, Emotion I émotivité. Hypnose I hypnotisme, Agressi-
teurs- ». On peut donc appliquer cette définition à toutes les données : vité des jeunes / violence juvénile.
noms d'auteur, de lieux, comme contenu, matière, thèmes ou sujets.
L'usage a établi une distinction entre les autorités et les langages dits Polysémie
documentaires, plutôt orientés vers l'indexation. Pour simplifier, disons La polysémie, quant à elle, est le « fait, pour un mot, d'avoir plusieurs
que tous ces langages sont contrôlés et qu'ils servent à la recherche sens ou acceptions : pont désigne une partie du navire et une construc-
documentaire, chacun selon sa nature. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'une tion entre les deux rives d'un cours d'eau h », les deux signifiés de ce
recherche par thème ou par sujet (réponse à la question clé : de quoi mot ayant la même étymologie (du latin pons, ponds). Il en va de même
s'agit-il dans ce texte ?), ces langages sont appelés de façon générique d'« expérience » (du latin experientia) : pratique, habitude, épreuve,
« langages documentaires ». Dans ce cas, ils interviennent dans la essai, connaissance, savoir.
troisième phase du processus d'indexation (cf. p. 149-151) :
On peut utiliser ce terme dans tous les cas où un mot (signifiant) peut
- compréhension du texte et de son contenu informatif ;
être porteur de plusieurs sens (signifiés), mais il existe des différences
- représentation verbale de ce contenu informatif ;
subtiles et les linguistes distinguent la polysémie véritable, ci-dessus
- représentation de ces concepts dans le langage documentaire.
définie — où les mots porteurs de sens différents ont une môme étymo-
Outre les problèmes déjà identifiés au cours des chapitres précédents, logie et des traits sémantiques communs — de ['homonymie — qui
la langue naturelle génère des problèmes et des obstacles, définis dans présente les mêmes caractéristiques que la polysémie, moins les traits
le paragraphe suivant, qui sont à l'origine de la création des langages sémantiques communs. La classe des homonymes se subdivise en :
contrôlés. Ces derniers tendent à formaliser le contenu informatif d'un - mots homophones présentant une seule prononciation, plusieurs
texte au moyen de codes servant de pont entre le texte et ses éventuels sens et, le plus souvent, une graphie différente : saint, sain, sein, seing ;
usagers. Ces codes peuvent être des symboles ou des mots. - mots homographes présentant une même graphie et plusieurs sens :
cirque, canon. L'homographie se distingue de la polysémie selon l'éty-
mologie des mots. Ainsi, canon a pour sens « pièce d'artillerie » selon
LES OBSTAC'LES DUS À LA LANGUE
l'origine latine et « décret » selon l'origine grecque.
On a vu que la langue, en tant qu'ensemble de caractères, conventions Le terme « homographe » est utilisé de plus en plus fréquemment pour
ou règles, présente des caractéristiques faisant obstacle à la caractériser les problèmes dus à l'existence d'un seul signifiant pour
transcription aisée de l'information. Ce manuel n'a pas pour objet plusieurs signifiés, sachant que l'homophonie n'introduit pas d'ambi-
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

guïté, actuellement, dans l'élaboration et l'utilisation des langages Et du côté de l'usager, qu'en est-il ? Comment les langages contrôlés
contrôlés. Si l'analyse automatique de la parole intervient un jour dans peuvent-ils favoriser la recherche documentaire ? En effet, l'usager n'a
la recherche documentaire, il faudra étudier de près ce nouvel obstacle. qu'un seul but : trouver le plus rapidement possible le document
répondant à sa question. L'utilisation des langages contrôlés ne lui est
pas familière et il serait illusoire — surtout à l'heure d'Internet -- de
USAGES ET DIFFICULTÉS D'USAGE prétendre l'obliger à s'y soumettre. En même temps, sans doute déçu
par les limites de ce réseau, il souhaitera trouver dans les banques de
On a comparé plus haut le langage documentaire à un pont entre le données structurées des réponses plus précises et validées. 11 est très
texte et son éventuel lecteur. Le documentaliste-analyste est le média- important, pour l'y aider, d'observer ses stratégies. Ira-t-il du général au
teur en amont. Ainsi : particulier, du particulier au général en utilisant un cheminement
logique ? Ou au contraire, de façon complètement aléatoire, va-t-il
L'analyste : L'usager : naviguer ici ou là, s'inspirant de ce qu'il découvre pour rebondir
- comprend et décode les infor- - pose une question en langage ailleurs, sans que l'on puisse — de l'extérieur — suivre vraiment sa
mations contenues dans le texte ; libre ;
- caractérise ces informations en - la transcrit en langage d'indexa- démarche ?
utilisant le langage d'indexation tion pour effectuer la recherche On peut décrire mille variations à partir de ces deux thèmes et, selon
choisi. documentaire.
les cas, pour l'analyste comme pour l'utilisateur, les langages
d'indexation peuvent effectivement être une aide ou un obstacle.
L'existence d'un langage contrôlé n'aplanit toutefois pas les difficultés
du dialogue entre documentaliste et usager, ni les embûches de la recher-
che documentaire. Théoriquement, tout est fait pour unifier les deux bords, TYPOLOGIE DES LANGAGES DOCUMENTAIRES
dans la pratique : « Information retrieval langnage can affect thé sitbject
anafysis [...]. The fact that thé langitage affecte thé suhject analyste may On distingue couramment deux grands types de langages documen-
hâve both positive and négative effects. 1 » II n'est pas rare qu'au moment taires : classificatoires et combinatoires. « Les langages documentaires
de l'indexation le documentaliste-analyste connaisse les affres du choix : découpent les champs de la connaissance selon deux types différents
quel est vraiment le sens, et comment le formaliser ? La tentation est dont les unités sémantiques élémentaires ont chacune un gabarit
grande, alors, de faire l'impasse sur les deux premières phases de com- particulier : les classifications, où l'unité documentaire est le sujet, et
préhension et de formulation. L'histoire vraie de l'analyste non fonné cher- les langages postcoordonnés, où l'unité élémentaire est le concept. Les
chant d'abord si les mots du titre se trouvaient dans le langage d'indexa- premières sont énumératives et arborescentes. Dans les seconds, les
tion, et se contentant de cela, illustre bien cette lâcheuse tendance, appa- sujets sont exprimés par la combinaison des termes élémentaires. * »
remment, hélas !, assez répandue... Cette « loi du moindre effort » (cf. De nombreux et très bons ouvrages ' se sont employés à décrire de
p. 162-163) semble bien rassembler de nombreux disciples. Il est égale- façon détaillée les grands langages documentaires. Si la nature et la
ment vrai que certains langages présentent des insuffisances ou des rigi- structure de ces derniers sont rappelées dans ce chapitre, c'est pour
dités propres à rebuter les indexeurs. Dans un tel cas, si par hasard il existe mettre en lumière leur apport et leur limite dans les opérations
un champ « indexation libre », c'est la porte ouverte à tous les excès. d'indexation et de recherche documentaire.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

Les langages documentaires de type classificatoire Médecine

Sciences
PRINCIPES DE BASE de l'ingénieur Agriculture
Exploitation
agricole Céréales Blé
Le langage documentaire de type classificatoire est basé sur le - Sarrasin
principe d'une subordination logique à l'intérieur d'un système de Agronomie — Recolles - Avoine
pensée qui va du général au particulier, du générique au spécifique et -Riz
répond au processus d'inclusion : Etc.

- Commerce
SCIENCES Plantes
APPLIQl'tES fourragères

Industrie
chimique Légumineuses | Luzerne
Général Particulier L Trèfle
Etc.

- Industrie
métallurgique
Arboriculture
Horticulture
Inspiré de la logique classique, il subdivise une collection d'éléments I k Zootechnie Racines - Betteraves
en un nombre limité de classes. Chaque classe comprend un ensemble Etc. Navets
Etc.
d'objets ayant au moins un caractère commun et peut se subdiviser en Etc.
autant de sous-classes comprenant un autre ensemble d'objets ayant au
moins un caractère commun, etc.
Ainsi, on peut subdiviser la notion ou classe « Sciences appliquées » catégories, d'êtres, de choses ou de notions ayant des caractères com-
en autant de sous-classes qu'il existe de sciences appliquées, par muns, notamment afin d'en faciliter l'étude. I0 » C'est sur ces bases que
exemple « Médecine », « Sciences de l'ingénieur », « Agronomie », Linné a conçu et organisé le système explicatif des règnes animal,
« Commerce », « Industrie », « Industrie métallurgique », etc. On peut végétal et minéral en embranchement, classe, ordre, famille, genre.
ensuite subdiviser chacune de ces sous-classes de la même façon, et espèce, variété, auquel tous les scientifiques se réfèrent pour identifier
l'arborescence pourrait alors ainsi être présentée (voir ci-contre). Cet les éléments de la nature. Mais c'est aussi sur ces principes que les uni-
exemple s'applique à des éléments concrets et mesurables. Les langages versités du xnc siècle organisèrent leur enseignement, fondé sur trois
classificatoires constituent l'une des expressions des systèmes scienti- arts (trivium) — grammaire, rhétorique, dialectique — et quatre dis-
fiques et philosophiques. De Platon à Auguste Comte, nombreuses sont ciplines (quadrivium) — arithmétique, musique, géométrie, astrono-
les représentations organisées et abstraites des connaissances humai- mie —. chacune de ces notions étant subdivisée en sous-notions, sous-
nes. « Une classification est une répartition systématique en classes, en sou s-not ions,'elt.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASS1FICATOIRE

APPLICATIONS POUR LE CLASSEMENT -610 -Médecine

-620 -Sciences
Les langages classificatoires sont nés d'une situation concrète : com- de l'ingénieur - 630 -
ment organiser un classement d'ouvrages par grandes disciplines pour Agriculture
permettre aux étudiants de trouver rapidement les livres correspondant -63! -
à leur centre d'intérêt ? C'est donc à cause de l'opération matérielle de Exploitation
agricole
classement que sont nées les classifications : « Système prédéterminé 600 :
S<ï KM CES -632-... -633.11 -
de notions logiquement structurées, ayant chacune reçu un code identi- Blé
APPLIQUEES - tin
OJ1I 611 611 1 -
ficateur. Ce code est attribué à des notions ou à des ouvrages en Agronomie Récoltes Céréales -633.12 -
fonction de la correspondance des sujets. " » Chaque notion est codi- Sarrasin
fiée, selon un ordre décimal. Dans l'exemple de la page précédente, si -633.13-
Avoine
le code 600 est affecté aux Sciences appliquées, 610 à la Médecine, 620 Etc. Etc.
aux Sciences de l'ingénieur, l'Agronomie sera codifiée en 630 ; puis on -633-2 -Plantes
continue à partir de 630, pour codifier les Récoltes en 633, puis les fourragères
Céréales en 633.1, puis le Blé en 633.11 (ces codifications sont issues
de la Classification décimale de Melvil Dewey), etc. Une classification 631 1 -633-31 -
bibliologique se présentera ainsi (voir ci-contre). Légumineuses Luzerne
634- - 633.32 -
Pratiquement, tous les ouvrages traitant d'agronomie seront classés Arboriculture Trèfle
sous le même code 630, des céréales sous 633.1 et du riz sous 633.18. Etc.

En bibliothéconomie, ces codes sont appelés « notations », ou plus r*rt fin \ 633 41 -
Ltc. fc»*'-t

couramment « indices de classification ». Racines Betteraves


-633.42-
Une classification bibliologique a pour but principal de classer les Navets
Eic.
ouvrages sur rayon selon leur sujet, en suivant un plan logique préala- Etc.
blement déterminé. Ce plan est souvent appelé « plan de classement »
car la classification (outil conceptuel) est le support du classement
(opération matérielle).
Ces langages ont immédiatement servi au classement, mais ils ont été
également à l'origine des catalogues systématiques de matières, à
APPLICATIONS POUR L'ANALYSE l'intérieur desquels plusieurs fiches pouvaient présenter le mc'ine
document ; l'indice principal — représentatif du sujet prioritaire -
Le principe d'arborescence propre aux langages classificatoires a servait aussi pour constituer la cote, et des indices secondaires permet-
l'avantage de structurer la pensée, de hiérarchiser les données et de taient d'indiquer des sujets plus précis. Un document complet sur les
faciliter l'organisation d'un corpus. L'analyste est donc aidé par un « écluses » était classé et indexé à l'indice 626.4 l2 , mais une autre fiche
cadre préétabli dans lequel il trouve, à l'intérieur d'une classe, tous les portait l'indice 627.45, indice secondaire représentatif de la notion
éléments propres à cette classe, présentés du général au particulier. « écluses en rivièftïs ».
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

Toutefois, quelques difficultés majeures ont freiné l'usage de ces ENFANT. Attitudes. Psychologie 159.922.74
langages. L'une de ces difficultés est l'éclatement des sujets selon leur ENFANT. Descriptions. Psychologie 159.922.75
ENFANT. Développement intellectuel 159.922.72
domaine d'application. Si l'on doit trouver un indice caractérisant la F.NFANT. Développement mental 159.922.73
notion d'« enfant », on tombe sur l'impressionnant index présenté ci- ENFANT EN AGE DE SCOLARITE 371.212
contre. ENFANT. Presse 070.445
ENFANT. Psychologie 159.922.7
ENFANT. Représentation. Psychologie 159.922.75
Comment indexer un ouvrage ou un article de synthèse sur le simple ENFANT. Statut 392.37
sujet « Enfant » ? Il est vrai qu'un langage classificatoire ne doit pas ENFANTS ABANDONNES. Éducation 376.56
ENFANTS ADOPTES- Division de personnes -058.H65
être utilisé à partir de son index, mais de sa structure hiérarchique, ainsi ENFANTS ANORMAUX. Psychologie 159.922.76
que le préconise l'édition de 1990 dans son introduction : « Parmi les ENFANTS BATARDS. Division de personnes -05 R.868

classes principales on retient celle où le symbole recherché devrait ENFANTS. Bibliothèque 027.625
ENFANTS BLESSES. Division de personnes -056.262-053.2
normalement figurer et l'on explore cette classe par élimination ENFANTS. Cruauté envers les. Droit pénal 343.62
successive... » Dans ce sens, le mode classificatoire est rassurant. Si le ENFANTS. Cruauté envers les. Morale 179.2
ENFANTS DE BATELIERS. Éducation 376.66
sujet traite de la délinquance juvénile, peu importent les mots à ENFANTS DE DIEU. Sectes 2989
employer. L'indexation suivra un cours logique : ENFANTS DE DIPLOMATES. Écoles 37.018.55
ENFANTS DE GITANS. Éducation 376.66
Délinquance entre dans le grand cadre des sciences sociales ENFANTS DE MILITAIRES Écoles 37.018.55
ENFANTS DE NOMADES. Éducation 376-66
classe 3 ENFANTS DF. TROUPE. École militaires d1 355.231.1
mais n'existe ni en sociologie 30 ENFANTS DELINQUANTS 343.915
ENFANTS. Documents pour les. Division de forme (0.053.2)
ni en statistique 31 ENFANTS. EfTels de l'autorité parentale sur les hiens des. Droit civil 347.636
ni en politique 32 ENFANTS. EfTels de l'autorité parentale sur les. Droii civil 347.635
ENFANTS EN AGE PRESCOLAIRE. Division de personnes -053.4
ni en économie 33 ENFANTS EN AGE SCOLAIRE EN GENERAL. Division de personnes -0535
mais existe en droit 34 ENFANTS EN QUALITE DE CONSOMMATEURS 366-055.2
ENFANTS. Épargne en général 336.722.142-053.2
n'existe pas en droit général 340 ENFANTS. Habits 391.3;
ni en droit international 341 ENFANTS ILLEGITIMES. Division de personnes -05R.868
ENFANTS ILLEGITIMES. Éducation 376.64
ni en droit constitutionnel 342 ENFANTS LEGITIMES. Droit civil 347.631
mais existe en droit pénal 343 ENFANTS. Livres pour les. Division de forme (02.053.2)
ENFANTS. Mauvais traitements infligés aux. Droit pénal 343.62 :
On glissera rapidement sur les procédures pénales, les infractions et E.NFANTS NATURELS. Division de personnes 058.868
ENFANTS NATURELS. Droit civil 347.632
leurs différentes formes, pour repérer enfin en criminalité (343.9) les ENFANTS NECESSITANT UNE AIDE. Infractions contre Droit pénal 343.62
espèces diverses de délinquants et criminels (343.91) pour aboutir à ENFANTS PLACES EN N O U R R I C E . Division de personnes -05H.866
ENFANTS. Protection contre l'autorité parentale. Droit civil 347.637
343.915 : Enfants, mineurs délinquants. Délinquance juvénile. ENFANTS. Rapt. Droit pénal 343.62
Précisons que, dans la logique de ce langage, il n'existe pas d'entrée à ENFANTS KEJKTES. Éducation 376 56
l'index au terme « délinquance juvénile ». E.NFANTS. Responsabilité de personnes non enseignantes ayant en
charge des. Droit civil 347.5153
ENFANTS RETARDES MENTAUX Psychologie 159.922.76
Si l'éclatement des notions pose un problème, l'absence d'indice pour ENFANTS RE1ARDES PHYSIQUES. Psychologie 159.922766
un sujet en pose un autre. Or, une classification de type encyclopé- ENFANTS SANS MILIEU FAMILIAL. Éducation 376.64
[ • N E A N T S - PARtNJS. Relations. Morale 173.6
dique, comme la CDU ne peut tout exprimer. L'introduction précise
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE

bien « qu'une indexation sera réputée correcte lorsque le symbole Les catalogues systématiques ont décliné bien avant l'arrivée de
découvert exprime le contenu de l'ouvrage ou, à défaut, le contient ». l'automatisation, à cause de la rigidité du système. En effet, le principe
L'exemple donné est qu'il faut indexer (et chercher) « p a p i l l o n » à moine de la hiérarchisation freine, sinon empêche l'évolution normale
« lépidoptères ». du langage scientifique ou technique ; la codification devient de plus
en plus fine, et en même temps, de moins en moins lisible ; les quelques
L'index présenté ci-dessus donne l'exemple de la pré-coordination
relations existant entre indices sont de plus en plus difficiles à gérer, de
maximale : chaque terme est inscrit dans une formulation déterminée
même que l'index alphabétique nécessaire pour s'y retrouver. Et la
en fonction du grand cadre dans lequel il s'inscrit. Si des enfants sont
souplesse requise pour l'indexation, on l'a vu, est inconnue du système.
victimes, ce langage classificatoire oblige à choisir entre l'aspect juri-
En revanche, les systèmes classificatoires sont toujours utilisés pour la
dique ou l'aspect moral, car les classes 1 et 3 préexistent et imposent
présentation des bulletins bibliographiques (analytiques ou signalé-
leur loi. On se trouve devant un maximum de rigidité et une totale
absence de souplesse. tiques).
Surtout, le principe d'arborescence est toujours indispensable à
Enfin on constatera, à la lumière de l'extrait ci-dessous, qu'il existe
l'organisation d'un ensemble de connaissances. C'est ainsi que « la
très peu de liens entre les indices. Aucun signe n'indique que la notion
conception d'une arborescence thématique propre à Nomade, domaine
« enfant » apparaît dans bien d'autres endroits que sous le 343.915.
par domaine, catégorie par catégorie [...] [a permis] une véritable
organisation de l'information sur Internet H ». Et l'on remarquera que la
343.9 Criminologie. Sciences criminelles. majorité des sites web présentent leurs données sous une forme classi-
Criminalistique
- 343.2
ficatoire hiérarchisée (voir, en page suivante, un exemple extrait du site
343.9.018 Méthodes de recherches criminologiques Nomade : http://www.nomade.fr).
343.91 Types de criminels, de délinquants
343.911 Délinquants d'habitude. Récidivistes. Délinquants
irrécupérables. Délinquants professionnels
343.912 Délinquants impulsifs. Délinquants occasionnels, APPLICATIONS POUR LA RLCHL-RCEIL
accidentels
343.913 Délinquants perturbés mentalement. Malades mentaux
crimineîs. Aliénation, irresponsabilité criminelle . Les atouts et les inconvénients des langages classificatoires, détailles
343.914 Femmes délinquantes. Délinquance féminine pour l'analyse, se retrouvent au moment de la recherche. Au début d'une
343.915 Enfants, mineurs d'âge délinquants. Délinquance juvénile
343.916 Militaires délinquants. Délinquance militaire
recherche, lorsqu'il s'agit d'explorer largement un domaine, l'accès à un
343.917 Délinquants politiques. Terroristes politiques corpus organisé est tout à fait satisfaisant. Les classifications encyclopé-
343.919 Délinquants particuliers. Affaires criminelles célèbres.
Procès criminels célèbres
diques (Dewey, CDU, Library of Congress) répondent à ce type de
343.92 Influence du milieu physique sur la criminalité. Effets de recherche et, de ce fait, connaissent toujours un réel succès. En effet « thc
l'environnement physique, des saisons, de la localisation structure may even assist thé user in thinking ahouî thé problem and
géographique, etc.
343.93 Anatomie des délinquants. Signes extérieurs de discovering ramifications and new aspects I4 ». L'arborescence permet de
délinquance. Types de délinquants. Anthropométrie monter et descendre, en toute sécurité, dans le domaine de recherche.
criminelle
-* 572.5; 611 Lorsque la recherche est plus précise, les difficultés apparaissent
343.94 Physiologie et biologie des délinquants
343.95 Psychologie criminelle. Psychologie médico-légale assez vite. Une arborescence stricte impose de suivre une ligne et une
- 159.9; 343.8 seule ; les relations entre les sous-classes sont peu nombreuses et
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

Enfin, la recherche repose de plus en plus sur la multidisciplinarité,


Actualité, média
ce qui requiert l'usage de passerelles fréquentes entre les domaines
Arts et culture
d'intérêt. Les grandes classifications sont en général encyclopédiques,
• Infos générales, références
et présentent chaque discipline académique (philosophie, droit,
• Congrès, salons, conférences
sciences physiques, beaux-arts, etc.) selon une stricte hiérarchie qui
• Centres, organismes, associations culturelles
- Alliances françaises
s'accommode mal des besoins de transversalité et de navigation entre
- Belgique les sciences15.
- Canada Toutefois, les grandes classifications et leur principe d'organisation
- etc. des connaissances sont loin d'être abandonnés : « L'utilisation de la
• Cinéma classification dans la recherche en ligne par sujets est une des grandes
• Histoire de l'art pistes actuelles de réflexion [...] des études, américaines en particulier,
• Art populaire, folklore, régionalisme ont montré que la structure hiérarchique et arborescente d'une classifi-
• Manifestations culturelles cation comme la Dewey, permet un balayage plus systématique des
• Musées, monuments, patrimoine sujets et apporte des résultats complémentaires à la recherche par mots.
• Bibliothèques, documentation, archives
Cette piste prometteuse est en cours d'approfondissement. "' »
• Musique
• etc. Ce qu'il faut donc abandonner, c'est l'idée d'une indexation fine
Formation, emploi utilisant ce type de langage. En revanche, le principe classificatoire est
Entreprise, industrie inscrit dans la pensée humaine occidentale et, dans ce sens, il reste un
Service public puissant moteur pour la structuration d'un système ou d'une recherche.
Famille, santé
etc.

n'aident pas le passage d'une branche à une autre. Plus l'on descend Les langages documentaires de type combinatoire
dans la hiérarchie et plus la codification devient difficile à lire,
quasiment impossible à mémoriser. De plus, derrière les codes, les
notions sont la plupart du temps pré-coordonnées, les termes Dans ces langages, les notions sont présentes sous forme de termes et
d'indexation sont donc une fois pour toutes accolés les uns aux autres, non plus de codes. Les termes se succèdent par ordre alphabétique, ce
du fait du langage en amont — et non pour aider la recherche en aval. qui entraîne automatiquement une dispersion des sujets. Selon les
Ainsi, l'indice 621.69 couvre-t-il toutes les informations sur les différents langages de type combinatoire, il existe des liens plus ou
« appareils pour la production de froid intense et pour la liquéfaction moins élaborés entre les termes. M est sans doute utile de rappeler que
des gaz », ce qui est tout à fait intéressant lorsque l'on descend la chaîne les termes (ou mots clés choisis pour l'indexation) peuvent être : ,
depuis les techniques du froid (621.5) et la mécanique industrielle - Unitermes : un mot égale une notion ; par exemple « forêt »,
(621), mais qui n'apparaît pas comme un modèle de clarté, de prime « exploitation ». Chaque Uniterme garde sa valeur tant qu'il n'est pas
abord. Les professionnels s'y retrouvent, mais pas l'utilisateur final. intégré dans une fornïulation pré-déterminée, ou pré-coordonné ;
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

- complexes ; plusieurs mots représentent une notion ; par exemple puisqu'il n'y a plus ni structure ni classes, et exige donc des règles de
«exploitation forestière». Chaque terme complexe est considéré construction des différentes vedettes. Toutes les vedettes apparaissent
comme un ensemble insécable. dans leur ordre alphabétique. Certaines peuvent être mises en
Pour accéder aux notions contenues dans les documents classés selon relation :
une classification donnée, les premiers utilisateurs consultaient l'index - s'il y a équivalence entre deux termes ; le terme exclu renvoie à la
renvoyant à la notation (ou code identificateur). Très vite, les catalo- vedette choisie : « Gâteau voir Pâtisserie », « Catastrophe voir
gues systématiques furent doublés par des catalogues analytiques de Sinistre » ;
matière, présentant en clair les notions symbolisées par une notation. - s'il y a orientation vers d'autres vedettes, chaque terme renvoie à un
En prenant l'exemple de la classification décimale de M. Dewey, les ou plusieurs autres : « Gastronomie voir aussi Cuisine ». « Activité
professionnelle voir aussi Emploi ».
notices des ouvrages portant l'indice 633.1 pouvaient être trouvées au
mot « céréales », celles à l'indice 633.11 à « blé », 633.18 à « riz », etc. Les vedettes sont souvent pré-coordonnées, c'est-à-dire combinées à
De ce fait, les notices étaient dispersées, puisque intercalées par ordre l'avance avec d'autres termes jugés utiles pour l'indexation et la
alphabétique. Pour les notions complexes, plusieurs termes étaient recherche. La pré-coordination n'empêche pas la construction de
choisis et juxtaposés et l'on faisait autant de fiches que de termes, clas- vedette-matière avec des subdivisions de lieu, de temps et de forme l7.
sées selon l'ordre alphabétique. Ainsi sont nées les listes de vedettes-
matières qui gardent encore de leur origine de fortes tendances à la pré-
coordination. L'usage qui en est fait dans les bibliothèques, les logiciels Vedetles-matièrcs Remarques
qui les pilotent n'exploitent pas, malheureusement, les possibilités de Garrigue
combinaison qu'ils possèdent. Gastrite
Gastro-entërologie
voir aussi Digestif (appareil) renvoi d'orientation
La mécanographie et l'usage des fiches perforées à sélection visuelle Gastronomie
marquent le vrai début de la combinaison de termes, dont toutes les voir aussi Cuisine renvoi d'orientation
Gâteau
possibilités, dues à l'algèbre de Boole, explosent avec l'automatisation voir Pâtisserie renvoi d'équivalence au terme choisi
et la création des thésaurus qui sont, avec les lexiques, de vrais
langages combinatoires. voir aussi Gauchisme renvoi d'orientation
Gauche, idéologie pré-coordination
Gauche, nom de lieu, dates indique possibilité et ordre des subdivisions
Gauche, parti politique pré-coordination
voir aussi au nom des partis renvoi d'orientation
LES LISTES DE VEDETTES-MATIÈRES OU LES LANGAGES QUI P O U R R A I E N T Gauche, théorie pré-coordination
ÊTRE COMBINATOIRES... Gauche/Droite pré-coordination
Gauche (extrême) pré-coordination
Gaucher
Principes de base Gaucher, rééducation pré-coordination
Gauchisme
Les listes de vedettes-matières sont basées sur l'ordre alphabétique Gaule
Gaule, Art, voir Arl gaulois renvoi d'équivalence au terme choisi
des notions représentatives d'un contenu, ou mots clés. Le mot clé est Gaule, civilisation pré-coordination
appelé « vedette-matière ». Système pragmatique, utilisable par toute Gaullisme
Gaulois (peuple) pré-coordination
personne lisant un alphabet, il implique une dispersion des sujets etc
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE

La construction des vedettes complexes suit le principe de la concaté- principe, ce type de langage pose de vrais problèmes d'indexation, dus
nation, en juxtaposant les termes qui peuvent l'être, selon un ordre essentiellement à la pré-coordination et à l'aléa des renvois. Les listes
rigoureux. de vedettes-matières ne sont pas du tout faites pour les services de
documentation, aussi n'étudierons-nous pas ce sujet de façon très
approfondie. À titre d'exemple, qu'il soit simplement proposé au lecteur
d'indexer un livre donnant des recettes en cuisine végétarienne à l'aide
des extraits suivants '" :

La juxtaposition n'est pas obligatoire ; elle répond à la précision ALIMENT


voulue pour une indexation plus complète. Si l'on reprend l'exemple Aliment : Voir aussi Produit alimentaire et ;ui nom des aliments

des ouvrages sur les « appareils pour la production de froid intense et Aliment : préparation Voir Cuisine et Diététique
Aliment ; valeur nutritive
pour la liquéfaction des gaz », on choisit le sujet principal comme mot- Aliment : valeur nutritive Voir aussi Diététique
vedette, les sujets annexes étant considérés comme sous-vedettes. On ALIMENT TRANSGÉNIQUE
ALIMENTATION
peut imaginer, dans ce cas, des vedettes ainsi construites : « Froid Alimentation Voir aussi Nutrition
Alimentation : carence Voir Carence alimentaire
intense, Production, Appareil » et « Gaz, Liquéfaction, Production,
Appareil », à condition que les subdivisions de vedettes de sujets soient Alimentation : régime
Alimentât ton : troubles
acceptées par le langage. ALIMENTATION ANIMAI.!: Voir Animal : alimentation

En France, RAMEAU (Répertoire d'autorité-matière encyclopédique


et alphabétique unifié) est un répertoire terminologique créé et mis à ART CORPOREL
jour par la Bibliothèque nationale et le ministère de l'Enseignement ART CULINAIRE Voir Cuisine : recettes
ART D'ÉCRIRE
supérieur et de la Recherche. Il est basé sur la liste d'autorité de l'uni-
versité Laval (Québec), celle-ci se présentant comme la version fran-
çaise des LCSH (Library of Congress Stihject Headings). RAMEAU Cuir : industrie
Cuir : métiers
est utilisé dans un très grand nombre de bibliothèques encyclopédiques CUISINE
Cuisine Voir ait\si Gastronomie et au nom des plats
en France et dans les pays francophones. Il est consultable en version
imprimée, sur microfiches, cédérom ou en ligne 1 ". Cuisine : recettes
Cuisine : régime
Cl.'ISINF, VÉGÉTARIENNE
CUrVRE
Cuivre : alliage
APPLICATIONS POUR L'INDEXATION

Ces langages sont surtout adaptés aux bibliothèques encyclopédiques DIESEL


DIETETICIEN
et aux agences bibliographiques nationales. En effet, un langage DlETETfQUC
spécialisé supporte difficilement le manque d'organisation des connais- Diététique Voir aussi au domaine d'application

sances qu'induit l'ordre alphabétique. Apparemment simple dans son


LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATO1RE

interroger en utilisant ce langage. Selon les logiciels qui le pilotent et


GASTRO-U
Gaslro-entérologie Voir aussi Digestif (appareil) la façon dont il a été utilisé pour l'indexation, différents problèmes
GASTRONOMIE peuvent apparaître, exposés au paragraphe suivant.
Gastronomie Voir aussi Cuisine
Gastronomie : histoire
GATT AU Voir Pâtisserie

APPLICATIONS POUR LA RECHERCHE


RECETTI- BUDGÉTAIRE Voir Budget : recettes
RECETTE DE CUISINE Voir Cuisine el au nom des receltes
RECHERCHE Apparemment le nombre et la précision des termes d'une liste de
vedettes-matières peuvent faire penser à une recherche facilitée. Mais
le plus souvent, de par leur nature, ces listes compliquent plus qu'elles
RKCill- Voir au domaine d'application
RÉGIME ne simplifient la dC-marche du chercheur. En effet, la juxtaposition des
Régime Voir &\\e d'application ex : Alimentation : régime
RÉGION termes oblige à chercher au premier choisi ; les inversions ne sont pas
propres au langage courant et il est plus normal de poser la question
sous ta forme «industrie agro-alimentaire» que «agro-alimentaire.
VHJISME Voir Brahmanisme
VÉGÉTARIEN industrie». Il s'agit bien d'une convention, à peine plus transparente
Végétarien : recetle
Végétarien : régime
qu'un code de classification ; la logique des professionnels n'est pas
VÉGÉTATION Voir aussi Botanique. Écologie végétale et Flore forcément celle des utilisateurs.
Avant l'automatisation, à l'époque des catalogues sur fiches, il était
souvent fait autant de fiches que de vedettes choisies. Une recherche
sur les Brigades rouges pouvait être indexée à «Terrorisme, Italie,
II est visible qu'en allant rapidement, un indexeur choisira « Cuisine Thèse » et faire l'objet de trois fiches intercalées respectivement par
végétarienne », qu'un autre ne verra que « Végétarien, recettes » et ordre alphabétique. Cette inflation de fiches (et d'intercalations...) ne
qu'un troisième s'obligera à prendre les deux formulations. On objec- correspondait nullement à une information supplémentaire mais
tera que cet exemple est trop spécialisé, mais il suffit de se promener permettait au chercheur de trouver par l'un ou l'autre mot.
dans les rayons « vie quotidienne et pratique » d'une bibliothèque muni-
On pouvait imaginer que la recherche informatisée abolirait cette
cipale pour constater que les analystes rencontrent ce genre de
pratique aussi désuète qu'inutile. Or les premiers logiciels qui pilotaient
problème. De ce fait, et avec la meilleure volonté du monde, la pré-
RAMEAU, ainsi que les règles de ce langage, ne permettaient pas la
coordination et le manque de renvois troublent le travail en amont et le
combinaison de la suite des vedettes, ni l'accès direct à une sous-
résultat en aval, en proposant aux utilisateurs une banque de données
manquant de cohérence. vedette. Ainsi, en consultant l'index-matière de la Bibliographie
bourguignonne de 1996 :", il n'y a aucune entrée principale à la vedette
Si le problème n'est pas trop lourd dans les bibliothèques municipales « Sceau », présente pourtant au moins cinq fois, mais en sous-vedette.
où les recherches sont relativement simples, il devient grave lorsque Cette sous-vedette est précédée des vedettes principales, les noms des
l'utilisateur doit effectuer une recherche documentaire précise, dans abbayes, pour lesquelles chaque sceau fait l'objet d'une étude*. Cette
une banque de données normalement faite pour cela. Les documenta- rigidité oblige les analystes à multiplier les entrées matière, comme au
liste s .doivent peu indexer avec RAMEAU, mais sans nul doute ils ont à temps où la combinatoire n'existait pas.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

C'est ainsi qu'un article traitant des artisans dijonnais du textile aux Les vrais langages à structure combinatoire :
xive et xve siècles est indexé comme suit : lexique et thésaurus
- Textiles et tissus - Industrie et commerce - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xiv' siècle
-Textiles et tissus - Industrie et commerce - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xv [ siècle LES LEXIQUES SPÉCIALISÉS
- Inventaire (droit) - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - xiv' siècle
- Inventaire (droit) - France - Dijon (Côte d'Or) - Histoire - XV siècle Sans chercher à construire un langage d'indexation très élaboré, un
- Dijon (Côte d'Or) - Conditions économiques - xiv< siècle grand nombre de services de documentation se sont trouvés dans l'obli-
- Dijon (Côte d'Or) - Conditions économiques - xv siècle
gation de créer des lexiques adaptés à leurs besoins. En effet, l'indexa-
tion libre a fait les ravages que l'on peut imaginer à la lumière des quel-
ques exemples et exercices précédents.
II serait malséant d'incriminer l'analyste qui se trouve dans l'obli-
gation de répéter 4 fois « Histoire », 4 fois « France », 3 fois xive et xv* Ces lexiques rendent obligatoires l'usage de certains termes, établis-
siècles, 6 fois Dijon (Côte d'Or) pour indexer correctement selon les sent au moins des renvois d'équivalence et suivent de près les fluctua-
règles imposées par RAMEAU, c'est-à-dire l'archétype d'une pré- tions du langage. Ainsi, le Centre de documentation scientifique et
coordination plus rigide que rigoureuse, aussi éloignée de la démarche technique du CNRS a réalisé plusieurs lexiques correspondant aux
de l'utilisateur moyen qu'il est possible d'imaginer. différentes rubriques de ses bulletins bibliographiques. A titre
d'exemple, voici un extrait du lexique français-anglais de Pascal -
Les logiciels sont maintenant plus souples et permettent de combiner Sciences de l'Information :
vedette et sous-vedettes. Ainsi l'équation Sport et Droit permet-elle de
récupérer des ouvrages indexés ainsi : « Sports - Droit - France ». Ce Descripteurs Remarques
sont les logiciels qui peuvent faire entrer les listes de vedettes-matières
Abonnement - Subscription
dans le champ des langages combinatoires.
Abréviation - Abbreviation
Malheureusement, si l'interrogation est améliorée, les règles Accès à distance - Remote access pré-coordination
Accès direct - Direct access pré-coorclinalion
d'indexation restent contraignantes. Donc, les analystes des fonds
Accès document - Document access pré-coordination
spécialisés multiplient les vedettes-sujets en tentant de moduler les - - renvoi d'orientalion
- - Fourniture document
différentes entrées de façon à former une sorte de résumé, tout en étant Accès information - Information access pré-coordination
obligés de choisir les termes de RAMEAU, ce qui est frustrant lorsque - - Diffusion information - - renvoi d'orientation
les termes n'existent pas. Accès libre rayon - Open access pré-coorcfi nation
Accès par sujet - Subjcct access pré-coordination
C'est ainsi que l'analyste chargée du fonds Gastronomie (pôle associé Accroissement
de la Bibliothèque nationale de France) à la bibliothèque d'étude de -*• Augmentation -» renvoi d'équivalence du terme exclu au (crme
Dijon, devant indexer un article très intéressant sur les « officiers de choisi (donc, pas de traduction anglaise)
bouche » et les « officiers tranchants » — sujet rarement traité —, n'a Acquisition - Acquisition
eu aucun moyen de faire ressortir ces particularités. Une fois encore, = Entrées -i- = renvoi d'équivalence du terme choisi au terme
l'indexation ne peut remplacer le résumé ; celui-ci doit pouvoir exister exclu
Lk
lorsque le besoin d'un langage libre se fait ardemment sentir.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES
LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

L'INIST (Institut de l'information scientifique et technique du d'autant plus utile que les domaines abordés sont par nature suscep-
CNRS) est également à l'origine d'une initiative intéressante, que l'on tibles d'être différemment interprétés. Mais on peut douter de la
peut rapprocher des lexiques spécialisés, parfaitement bien exposée transcription du modèle présenté pour Pascal (banques de données des
dans l'article « Grilles d'indexation et de préindexation : l'exemple de sciences exactes), vers Francis (banques de données des sciences
Pascal» 2 1 . Il s'agit effectivement de grilles ou de listes de termes humaines), par exemple...
choisis en raison de leur fréquence d'apparition à l'indexation et de leur
pertinence. Ces grilles présentent une organisation logique et sémanti- Un lexique, si simple soit-il, est le point de départ de tout langage
que des termes. « Élaborées pour assurer homogénéité et rapidité d'in- combinatoire quelque peu élaboré. Selon les lieux ou les domaines, une
dexation », elles permettent aux indexcurs de disposer, dans chaque simple liste présentant les équivalences et strictement tenue à jour peut
domaine spécifique traité, d'un ensemble structuré et préétabli de ter- très valablement aider une indexation rigoureuse. Il est préférable de
mes. Avec 300 termes environ par grille, 35 grilles en science de la vie, commencer ainsi, plutôt que d'attendre le thésaurus perfectionné à
32 grilles en sciences exactes et sciences de la terre, l'INIST a forgé un l'extrême qui ne verra peut-être jamais le jour. Et tout vaut mieux
lexique spécifique, « élément essentiel pour l'élaboration des bases de qu'une indexation en langage libre...
connaissance : catégorisation des termes selon l'information séman-
tique qu'ils véhiculent, combinaison sémantique de ces catégories ». Ce Applications pour la recherche
projet, intellectuellement très intéressant, n'a pas encore donne lieu à
une application pratique. Les lexiques spécialisés sont normalement les meilleurs auxiliaires
de la recherche, en ce sens qu'ils sont (ou devraient être) normalement
élaborés à partir du vocabulaire courant des utilisateurs, autant sinon
Applications pour l'indexation
plus que des textes à indexer. Leur adaptation au milieu est le meilleur
Pourtant, les exemples présentés et les domaines choisis (médecine, garant de leur qualité.
pharmacie, chimie) offrent l'immense avantage d'utiliser des termes du
Toutefois, il est indispensable qu'on leur assure autant de renvois
quatrième cercle (cf. p. 88), le plus souvent univoques et peu porteurs
d'ambiguïté. d'équivalence entre termes quasi synonymes qu'il est nécessaire.
Certains jeunes analystes, au moment de l'élaboration d'un tel langage,
Il existe également, dans un centre de recherche de l'INRA, une base sont heurtés par le fait que des non-descripteurs soient quelquefois plus
de connaissance ayant recensé toutes les variétés de tomates, toutes les nombreux que les descripteurs, alors qu'il s'agit là d'une preuve de
maladies pouvant les affecter, tous les moyens culturaux, chimiques, etc. qualité. Chacun doit pouvoir interroger avec son mot clé et admettre
pouvant les soigner ou même prévenir ces maladies. Dès que Ton se qu'il renvoie à un autre — pourvu que l'information soit au bout de la
trouve devant des objets concrets, des phénomènes, des processus, des requête.
propriétés, des équipements et des conditions opératoires descriptibles et
objectiva blés, l'indexation devient presque facile. Matériaux, phénomè- Il va sans dire qu'un véritable lexique admet la combinatoire et la
nes, processus, etc. sont les facettes utilisées dans certains thésaurus (cf. recherche booléenne (cf. p. 108-111). 11 n'est pas rare que, progressi-
p. 207-210) qui, tous, s'appliquent aux sciences exactes ou appliquées. vement, certaines parties du lexique deviennent plus structurées que
d'autres, que^des renvois d'orientation soient précisés ; c'est le signe
De ces remarques, on ne doit pas déduire qu'un lexique spécialisé en d'un langage vivant et le point de départ du langage d'indexation par
sciences humaines est impossible à élaborer. Au contraire, il est excellence : le thésaurus.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

LE THÉSAURUS Pour d'autres, le choix des descripteurs est effectué en fonction de la


population d'usagers. Ainsi EUROVOC, thésaurus créé par et pour le
Principes de base Parlement européen, suit tous les sujets liés aux domaines politique et
Construit sur le principe combinatoire, basé sur l'intersection, la juridique dans l'optique des parlementaires. MOTBIS, utilisé dans tous
combinaison des notions et/ou des classes à partir des opérations boo- les lycées et collèges français, couvre l'ensemble des programmes
léennes (cf. p. 108-111), un thésaurus est un « vocabulaire contrôlé et d'enseignement selon les besoins des lycéens et des collégiens (plus
dynamique, de termes ayant entre eux des relations sémantiques et que selon ceux des professeurs, du reste). Ces deux thésaurus sont
génériques, qui s'applique à un domaine particulier de la connaissance effectivement encyclopédiques quant à leur contenu, mais spécialisés
[...] ; en tant qu'instrument de contrôle de la terminologie, il est utilisé selon leur usage — et ils ne seraient absolument pas interchangeables.
pour transposer en langage plus strict le langage naturel employé dans Outil d'indexation et de recherche, commun à l'indexeur et à l'utili-
les documents, par les indexeurs ou les utilisateurs. 2 2 » Une autre sateur, le thésaurus met en rapport l'utilisateur interrogeant et l'infor-
définition, plus simple et plus concrète, rend compte de la spécificité mation pertinente caractérisée, ce qui est l'objectif de tout langage
de ce langage d'indexation : « Le thésaurus est une liste normalisée et d'indexation, et particulièrement de ceux qui utilisent la véritable
structurée de termes acceptés à l'indexation [...]. Ces termes sont combinatoire. En quoi le thésaurus diffère-t-il donc d'un bon lexique
combinés entre eux pour décrire les documents et écrire les questions spécialisé ?
lors de l'interrogation d'une banque de données. 2 '» Plus riche de
relations, de notations, de modes d'entrée, le thésaurus est l'outil Les relations
d'indexation par excellence ; il donne, en outre, une vision structurée
du vocabulaire d'une discipline et joue un rôle pédagogique essentiel, Première grande différence avec un simple lexique, un thésaurus est
tant pour l'analyste novice que pour l'utilisateur débutant. 11 s'agit bien caractérisé par la nature et le nombre de relations existant entre les
du vocabulaire d'une discipline ; en effet, il est extrêmement dangereux termes. Après avoir collecté le vocabulaire dans le domaine particulier
d'envisager la création d'un thésaurus généraliste. où sera utilisé le thésaurus, on rassemble une liste de mots appelés
candidats-descripteurs. En guise d'illustration, et sans donner à aucun
Toutefois, il existe bien des thésaurus de type encyclopédique, dont moment l'idée que l'on fabrique un thésaurus avec 40 mots (!), voici
le plus connu est le macro-thésaurus de l'OCDE. Touchant toutes les quelques termes rassemblés sur le thème général de la musique :
disciplines, ce thésaurus a bien été conçu comme « macro », c'est-à-
dire un métalangage structuré, contrôlé, mais n'entrant pas dans le
catiliquc histoire de la musique musique de film
détail de chaque domaine. Cette structure a permis, en revanche, la chanson hymne national musique instrumentale
création sur le même modèle de thésaurus spécialisés dans ie domaine chanson de marche initiation à la musique musique pour orchestre
de l'éducation, du travail, de l'audiovisuel, etc. Que font les services de chanson de route instrument à percussion musique religieuse
chanson cnfanline instrument de musique musique sacrée
documentation ayant pour mission de s'intéresser à tous les domaines ? chant choral jeu musical musique vocale
Certains refusent tout langage élaboré comme, par exemple, certains chant de Noël lecture musicale orchestre
chant patriotique mélodie partition musicale
services de documentation de presse pour lesquels les sujets évoluent chant religieux mélodie populaire rythme musical
trop vite ; la recherche se fait surtout par noms de personnes, de lieux, chœur mélhode pour instrument de musique sensibilité musicaje
dictée musicale métrique solfège
par périodes ou par grands événements, et impasse est faite sur un écriture musicale musique théorie de la musique
langage impossible à mettre à jour. éducation musicale musique écrite tradition musicale
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATO1RE

C'est à partir d'une liste de ce type (dont l'arbitaire est revendique) que Termes choisis, ou descripteurs Termes exclus ou non-descripteurs
l'on partage les candidats entre descripteurs et non-descripteurs. L'épu- chanson
chanson de marche chanson de roule
ration est l'opération au cours de laquelle les candidats-descripteurs vont chanson enfantine
être examinés un à un à travers plusieurs cribles, en partant du principe chant de Noël
cantique
chant religieux
que le thésaurus ne doit autoriser que le nombre de descripteurs néces- choeur criant choral
saires et suffisants pour couvrir le domaine considéré. Cette phase extrê- dictée musicale
écriture musicale
mement importante est le point de départ de la normalisation du vocabu- éducation musicale initiation à la musique
histoire de la musique
laire collecté. À chaque concept correspond un seul descripteur. liymiie national chant patriotique
instrument à percussion
• La première relation est la relation d'équivalence et concerne le instrument de musique
jeu musical
vocabulaire. Déjà présente dans les listes de vedettes-matières et les lecture musicale
lexiques spécialisés, elle aide à lever l'ambiguïté du langage, participe mélodie
mélodie populaire
à la recherche du mot univoque, permet de distinguer les descripteurs méthode pour instrument de musique
métrique
des non-descripteurs. À nouveau, le choix entre terme choisi et terme musique
exclu peut relever de l'arbitraire, mais il tient compte, le plus souvent, musique île film
musique instrumentale
du niveau de langage et du contexte documentaire dans lequel le thé- musique pour orchestre
musique religieuse
musique sacrée
saurus est utilisé (voir ci-contre, en haut de page, les équivalences que musique vocale
l'on peut proposer à partir de l'exemple ci-dessus). orehcstre
musique écrite
partition musicale
rythme musical
• La deuxième relation établit une hiérarchie entre les termes choisis sensibilité musicale
et crée les champs sémantiques. Elle structure les descripteurs soit en solfège
théorie de la musique
grandes familles sémantiques à l'intérieur desquelles elle établit des tradition musicale
hiérarchies de type arborescent entre mots de sens proche, soit en gran-
des catégories ou facettes (objet, action, processus, produit), déjà évo-
quées. Les facettes, très prisées par les Anglo-Saxons, sont plus
adaptées aux domaines scientifiques, ou tout au moins concrets li. Les l i r champ sémantique 2' champ sémantique
esprits plus cartésiens adoptent plus facilement les structures arbores- éducation musicale musique

centes presque inconsciemment familières. Quelle que soit leur nature, histoire de la musique mélodie
instrument de musique mélodie populaire
ces relations hiérarchiques expriment les rapports de subordination instrument à percussion musique de film
méthode pour instrument de musique musique instrumentale
entre les notions exprimées par les descripteurs, constituent l'ossature orchestre musique pour orchestre
d'un thésaurus, assurent la cohérence interne en contrôlant son organi- jeu musical musique sacrée
sensibilité musicale chant religieux
sation et permettent de trouver un document traitant de notions très spé- solfège musique vocale
chanson
cifiques à partir d'une question très générale, ou inversement. On peut dictée musicale
chanson de marche
écriture musicale
imaginer que l'exemple précédent présente les descripteurs en deux lecture musicale chanson enfantine
rythme musical chant de Noël
champs sémantiques à l'intérieur desquels les termes sont reliés selon métrique crucur
hymne national
le mode arborescent, ce qui est une autre façon d'introduire l'organi- théorie de la musique
partition musicale
sation classificatoire ci-contre (bas de page). tradition musicale
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMB1NATOIRE

• Pour assouplir ce qu'une relation hiérarchique implique de rigueur, Les notes


une troisième relation dite d'association met en rapport des descrip-
teurs de sens ou d'usage voisins, situés dans des champs sémantiques Tout descripteur doit représenter une notion et une seule. S'il y a ambi-
différents. Cette relation indique des analogies de signification entre les guïté possible, on rédige une note d'application sous le descripteur
termes, établit une correspondance entre des sujets différents mais que retenu, pour en définir les modalités d'emploi, afin de supprimer les der-
leur usage rapproche. Elle implique théoriquement la réciprocité : une nières ambiguïtés pouvant gêner l'indexation ou le questionnement.
question posée à partir d'un descripteur peut trouver une autre forme de Ainsi le thésaurus du Bureau international du travail distingue-t-il bien :
réponse dans un descripteur associé. C'est la plus efficace des relations
d'ouverture, mais elle est établie davantage sur l'usage que sur la
théorie ; elle est donc particulièrement tributaire du lieu où l'on utilise Descripteur : ALIMENTATION ANIMALE
le thésaurus et apparaît toujours arbitraire à l'utilisateur extérieur. Note d'application à utiliser pour toute discussion relative aux
Pour poursuivre l'exemple, on suppose que les termes associes problèmes et aux méthodes d'alimentation des
proposés existent dans d'autres champs : animaux. S'agissant de la nourriture même,
utiliser :
ALIMENT POUR ANIMAUX
Termes descripteurs Termes associés
éducation musicale
éducation artistique
histoire de la musique
instrument de musique
instrument à percussion La date de création ou de modification de chaque descripteur est
méthode pour instrument de musique méthode d'enseignement
orchestre signalée ; l'analyste peut ainsi vérifier l'ancienneté, ou non, du descrip-
jeu musical
sensibilité musicale
jeu éducatif teur choisi.
solfège
dictée musicale Les notes n'ont aucun point commun avec les définitions d'un dic-
écriture musicale
lecture musicale
tionnaire. Elles sont, au contraire, entièrement tributaires de l'utilisation
rythme musical rythme du thésaurus. Cela explique pourquoi on ne présente pas d'exemples de
métrique
théorie de la musique notes à partir de la liste précédente — qui n'est proposée que pour
musique art illustration.
mélodie
mélodie populaire folklore
musique de film cinéma
musique instrumentale
musique pour orchestre
musique sacrée Les différents modes d'entrée
chant religieux religion
musique vocale Un thésaurus comporte toujours une introduction détaillée permet-
chanson
chanson de marche tant son utilisation rapide et efficace. Il est intéressant d'y trouver un
chanson enfantine
chant de Noël
littérature enfantine
Noël
petit historique, le contexte dans lequel il a été fait, le nom des per-
chœur sonnes ou des écjuipcs qui en sont les créateurs, les choix méthodo-
hymne national patriotisme
partition musicale logiques qui ont présidé à son élaboration, les modalités d'emploi, de
tradition musicale ethnologie mise à jour, et tout ce qui en facilite l'accès.
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE

Normalement un thésaurus comprend trois entrées principales : 2) La présentation structurée en champs sémantiques. Cette présenta-
tion varie selon les éditions, listes, schémas, arbres, terminogrammes,
I ) La liste alphabétique des descripteurs et non-descripteurs. Le non-
descripteur renvoie au descripteur choisi. À la grande différence des etc.
lexiques, aucun descripteur n'apparaît isolé, mais au contraire enrichi 3) L'index permuté de tous les termes, permettant de trouver non seu-
de son environnement sémantique, comprenant : lement les descripteurs Unitermes, mais aussi l'accès au deuxième ou au
- l'éventuelle note d'application, la date de création ; troisième terme d'un descripteur composé. Dans le cas des thésaurus
- le ou les non-descripteurs qu'il remplace ; multilingues, il existe un index pour chaque langue utilisée. L'index
- son terme générique et ses termes spécifiques ; permute de l'exemple commencerait ainsi :
- ses termes associés.
La liste structurée de l'exemple commencerait ainsi : cantique
EM CHANT RELIGIEUX CHANSON
CHANSON DE MARCHE
cantique chanson de route
EM CHANT RELIGIEUX EM est l'abréviation de Employer et lie un non- EM CHANSON DE MARCHE
descripteur au descripteur retenu CHANSON ENFANTINE
CHANSON
TG MUSIQUE VOCALE TG - Terme Générique, indique la notion supérieure chant choral
TS CHANSON DE MARCHE TS = Terme Spécifique, indique la notion inférieure EM CHŒUR
CHANSON ENFANTINE CHANT DE NOËL
CHANT DE NOËL
chant patriotique
CHANSON DE MARCHE EM HYMNE NATIONAL
EP chanson de route EP - Employé Pour, lie le descripteur au non- CHANT RELIGIEUX
TG CHANSON descripteur qu'il remplace
CHŒUR
chanson de route chant choral
EM CHANSON DE MARCHE
EM CHŒUR
CHANSON ENFANTINE DICTÉE MUSICALE
TG CHANSON musique écrite
TA LITTERATURE ENFANTINE TA * Ternie Associé, renvoie au descripteur d'un autre EM PARTITION MUSICALE
champ sémantique
chant choral ÉCRITURE MUSICALE
EM CHŒUR ÉDUCATION MUSICALE
CHANT DE NOËL CHANSON ENFANTINE
TG CHANSON MUSIQUE DE FILM
TA NOËL HISTOIRE DE LA MUSIQUE
chant patriotique HYMNE NATIONAL
EM HYMNE NATIONAL initiation à la musique
EM ÉDUCATION MUSICALE
CHANT RELIGIEUX
TG MUSIQUE SACREE INSTRUMENT À PERCUSSION
TA RELIGION INSTRUMENT DE MUSIQUE
CHŒUR •THODE POUR INSTRUMENT DE MUSIQUE
S* MUSIQUE INSTRUMENTALE
EP chant choral
TG MUSIQUE VOCALE JEU MUSICAL
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES US VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMB1NATOIRE

LECTURE MUSICALE • Les noms propres : personnes physiques ou morales, collectivités,


CHANSON DE MARCHE
MÉLODIE
pays ou régions, marques, sigles, etc., sont proposés dans certains
MÉLODIE POPULAIRE thésaurus en listes annexes, sans être assujettis à la structuration des
MÉTHODE POUR INSTRUMENT DE MUSIQUE champs sémantiques. Ils ne relèvent pas toujours d'une gestion rigou-
MÉTRIQUE
reuse. C'est pourquoi l'utilisation des listes d'autorités déjà existantes
JEU MUSICAL
RYTHME MUSICAL
est fortement préconisée (cf. p. 176-181) ;
DICTÉE MUSICALE
• D'autres descripteurs indépendants dépendent des domaines des
ÉCRITURE MUSICALE
ÉDUCATION MUSICALE
thésaurus, mais répondent toujours à la même définition et au même
LECTURE MUSICALE usage.
PARTITION MUSICALE
SENSIBILITÉ MUSICALE
TRADITION MUSICALE
Maintenance du thésaurus
MUSIQUE
musique écrile Comme tous les outils linguistiques, le thésaurus doit suivre
EM PARTITION MUSICALE
l'évolution du langage. Moins rigide qu'une classification, plus struc-
MUSIQUE DE FILM
MUSIQUE INSTRUMENTALE turé qu'un lexique, il nécessite une maintenance régulière et organisée.
etc. De la même façon qu'il ne peut être créé que par des équipes pluridisci-
plinaires, il évolue en fonction des besoins diversifiés qui apparaissent,
Enfin, des listes annexes peuvent rassembler plusieurs types de tant au moment de l'indexation qu'au moment de la recherche. Il est
termes identificateurs. Ces termes n'étant pas subordonnés aux champs indispensable qu'une personne ou une petite équipe soit responsable de
sémantiques structurés, dans la mesure où ils peuvent préciser !e ces transformations, pour développer harmonieusement et garder
contenu de n'importe lequel de ces champs, on peut les considérer vivant un langage toujours adapté aux besoins.
comme descripteurs indépendants :
Les systèmes informatisés qui permettent de remplacer automa-
• Les mots-outils, ou termes généraux ou athématiques, sont tiquement telle formulation par une autre ont beaucoup aidé ces mises
reconnaissables au fait qu'ils sont Unitermes et abstraits : « cas », à jour, qui doivent répondre à des besoins réels, et non à une mode
« condition », « manière », « système » sont effectivement des mots qui
passagère.
ne peuvent être utilisés seuls ; ils ne peuvent s'intégrer à aucun champ
sémantique particulier étant donné leur homographie; de ce fait, ils La création, l'utilisation et la maintenance d'un thésaurus en font un
peuvent être choisis comme descripteurs indépendants, selon l'intérêt outil coûteux ; comment mesurer l'intérêt de l'investissement ? Pour
qu'ils présentent pour préciser un contenu. « Exploitation » peut certains, un thésaurus ne peut jamais être amorti, d'autant plus qu'il
s'appliquer à toutes sortes de situations et n'est porteur d'aucun sens nécessite une maintenance permanente. Pour d'autres, c'est un outil
spécifique, mais « exploitation forestière » devient un descripteur à heuristique de communication à nul autre pareil, chaque interrogation
part entière, du seul fait que le mot devient terme. Certains mots, consi- donnant une réponse pertinente étant un signe de réussite. C'est (Jonc à
dérés comme outils en général, peuvent être tout à fait porteurs de sens l'application qui en sera faite par les analystes et les utilisateurs que l'on
selon les domaines, comme « base » en chimie ; pourra vraiment mesurer sa valeur.
LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES

Applications pour l'indexation - s'il le juge utile, il peut proposer ces mêmes termes afin de les inté-
grer en non-descripteurs dans le thésaurus.
Plus encore que le lexique spécialisé, le thésaurus est l'outil linguis- La pratique prouve que certains thésaurus sont utilisés au vingtième
tique le mieux adapté à l'indexation. En effet, lors des deux premières de leur richesse, en particulier à cause de la « loi du moindre effort ».
phases, le contenu du texte est identifie et formulé en langage libre ; il Peut-on accabler les indexeurs, souvent insuffisamment formés et aux-
suffit de confronter les mots retenus au vocabulaire du thésaurus. quels sont demandés plus de résultats quantitatifs que qualitatifs ? La
Toutefois, selon le degré de compétence de l'analyste et la facilité conséquence immédiate est le manque d'équilibre de la banque de
d'emploi du thésaurus, celui-ci peut effectivement être l'outil linguis- données dans laquelle certains descripteurs sont sur-utilisés, et perdent
tique par excellence, ou au contraire se trouver dévalué par manque donc leur valeur, alors que d'autres sont quasiment ignorés. Le manque
d'exploitation réelle.
de formation des analystes en est une cause, mais la plus importante est
Que font les indexeurs novices (ou insuffisamment formés) ? Ils se due à de mauvaises priorités dans la politique documentaire.
contentent de consulter l'index alphabétique permuté, ou la liste alpha- Il revient au comité de maintenance de surveiller l'état d'utilisation
bétique, pour chercher si les mots retenus sont présents dans le thésau- des descripteurs. Les contrôles d'occurrence ne doivent pas seulement
rus en tant que descripteurs ou non-descripteurs. S'ils les trouvent, ils les aboutir à changer en non-descripteurs des descripteurs insuffisamment
choisissent et les introduisent dans les champs « descripteurs » de la utilisés, mais à vérifier les modes d'indexation, à promouvoir des
banque de données. S'ils ne les trouvent pas et qu'il existe un champ réunions de travail et des temps de formation, en vue d'élargir à la fois
« descripteur libre », c'est la porte ouverte à l'anarchie et on ne voit plus l'horizon des analystes, l'usage du thésaurus et les possibilités de
très bien l'intérêt d'un langage d'indexation dans ce cas de figure. C'est
recherche.
souvent à partir de ces cas, malheureusement, que l'on juge le thésaurus
comme un outil inutile, donc encore plus coûteux !
Applications pour la recherche

En fait, cette erreur de jugement est le résultat d'une mauvaise II est rare que les thésaurus soient mis à la disposition des utilisateurs,
conception de l'indexation, encore comprise comme l'opération où l'on
surtout s'ils n'existent qu'en ligne et que les éditions papier ne sont pas
recherche des mots, alors que le but est de trouver et formuler le sens. mises à jour. Même si ces dernières existent, les utilisateurs sont sou-
C'est pourquoi, même si les mots de la phrase représentative du sens vent rebutés par l'aspect un peu ésotérique de ce vocabulaire et n'en
sont présents dans la ou les listes alphabétiques, l'indexeur doit d'abord voient pas forcément l'intérêt pour leur recherche. II est vrai que chaque
consulter la présentation thématique pour juger de la place des des- recherche est précise, alors que le thésaurus couvre l'ensemble d'un
cripteurs dans le ou les champ(s) sémantique(s) correspondant(s) au domaine. Pourtant, il est possible d'en préciser l'usage dans le guide du
sens. Il navigue d'une présentation à l'autre, ce qui lui permet de service, afin que l'utilisateur puisse élargir la formulation de sa requête,
confirmer son premier choix, ou de découvrir d'autres termes plus voire de sa recherche elle-même, en naviguant de descripteur en des-
précis auxquels il n'avait pas pensé et qui vont enrichir l'indexation
cripteur, de champ sémantique en champ sémantique.
finale. Le premier avantage du thésaurus est donc d'aider l'analyste à
préciser et, en même temps, à élargir son champ d'indexation. Il en La recherche est également tributaire des logiciels utilisés qui
existe deux autres : permettent, de plus en plus, le paramétrage des possibilités d'auto-
- l'analyste intègre dans le résumé les ternies choisis en langage libre postage ; il S'agit d'une fonctionnalité permettant, sur une arborescence,
afin d'augmenter les possibilités de recherche ; d'aller du générique au spécifique, ou inversement. Si le descripteur
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES QUEL AVENIR POUR US LANGAGES DOCUMENTAIRES ?

choisi ne répond pas, ou répond imparfaitement à la question, l'interro- générique. La bibliothèque du Congrès en est un exemple ; la majorité
gation peut automatiquement — et selon la demande — passer aux des termes d'indexation n'apporte guère plus que les cotations selon les
niveaux inférieurs ou supérieurs. deux classifications les plus couramment utilisées : la classification du
Congrès et la classification de M. Dewey. Peut-on parler & indexa-
Cette facilité est également une aide pour l'analyste qui peut proposer tion dans ce cas, et ce champ ne peut-il être assimilé à un champ
une indexation fine, en général risque de silence, sachant que le sys- « domaine », utile dans certains cas ? D'autres sources, comme la Biblio-
tème permettra de monter ou descendre automatiquement lors de thèque nationale de France, utilisent RAMEAU On pourrait imaginer
l'interrogation. que ce langage puisse répondre à davantage de services, surtout s'il est
Les thésaurus bénéficient des expériences passées ; de plus en plus piloté par des logiciels performants ; mais il faudrait aussi l'épurer plus
adaptés aux besoins d'un service et d'une collectivité de chercheurs, ils que l'augmenter, et assouplir des règles d'un autre âge...
sont également mieux présentés et plus conviviaux. C'est l'utilisation Mais quoi qu'il en soit, la fusion des données -- qui peut être
qui en est faite, proche des usagers, qui en assure l'évolution. L'élabo- considérée comme un gain de temps et d'argent considérable pour les
ration et la maintenance d'un thésaurus sont basées sur un travail services de documentation — se heurte au problème de la compatibilité
commun. Ces échanges et retours d'expérience permettent d'approfon- des langages d'indexation. S'il faut effectivement réindcxer chaque
dir le langage d'une entreprise, donc de prendre de la distance vis-à-vis notice avec son propre langage, le temps gagné est vite reperdu.
des modes. En tant qu'outil de structuration et d'affinement du vocabu- Plusieurs études ont cherché à approfondir la question et à apporter
laire, le thésaurus bien employé est un gage de qualité. quelques éléments de solution. L'une des plus remarquables, et des plus
originales, renvoie non pas à l'harmonisation des langages, trop
coûteuse, mais à « l'harmonisation automatique des formules d'indexa-
tion à partir de tables de concordances pré-établies 25 ». Cela nous
Compatibilité des langages d'indexation renvoie aux modalités d'indexation et aux espoirs soulevés par des
études comme celle de Dominique Ménillet 2ft.

Face aux échanges internationaux de données, les documentalistes se


trouvent confrontés à la diversité des langages utilisés. Lorsqu'ils
interrogent des banques de données uniquement pour la recherche Quel avenir pour les langages documentaires ?
documentaire, cette diversité les renvoie à leur connaissance des logi-
ciels et à leur capacité d'adaptation. En revanche, lorsqu'ils souhaitent
alimenter leur propre banque en déchargeant des notices venant de tous Face à cette question, plusieurs tendances s'affrontent actuellement.
les horizons possibles, le problème apparaît dans toute son ampleur. Si Ceux qui considèrent Internet comme un gisement d'informations
les champs de l'ISBD répondent en général aux normes internationales, documentaires n'ont pas tous conscience de la nécessité d'un langage
les champs de contenu présentent des disparités très fortes — y compris contrôlé ; mais on a vu que, jusqu'à présent, Internet ne doit pas être
les champs qui pourraient bénéficier des autorités officielles. En fait, confondu ave<ç une banque de données. Les moteurs de recherche
lorsque l'on pratique les champs de contenu des très grandes sources fonctionnent sur le principe de la recherche en texte intégral (cf.
internationales, on constate que l'indexation reste à un niveau très p. 1 1 1 - 1 1 8 ) , maïs la nécessité d'offrir un accès plus structuré à l1 in for-
I
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES QUEL AVENIR POUR LES LANGAGES DOCUMENTAIRES ?

mation est vite apparue, aussi bien au sein des applications spécifi- NOTES
quement « documentaires » que sur le plan de la recherche générale 1. Source ; [55]. p. 7.
d'information sur le Web.
2. Fichiers d'autorité de la Bibliothèque nationale de France : Service de vente
Paradoxalement, ce sont les vieilles classifications datant de la fin du des publications, 2 rue Vivienne. 75084 Paris Cedex 02 — 01 47 03 88 98.
xixc siècle, en usage dans les grandes bibliothèques encyclopédiques,
qui ont servi de support aux structurations des répertoires (cf. p. 119) : 3. Distributeur en France du cédérom des notices d'autorité de la Bibliothèque
non pas les classifications elles-mêmes, mais les principes classifica- du Congres : Doc&C'o. 56 rue Dombasle. 75015 Paris -- 01 56 56 62 20.
toires, toujours utiles pour l'organisation de la pensée, des concepts et mcl ogiraud@cybercab1e.fr
des informations à transmettre. Ainsi, derrière ces écrans brillants et
ces accès rapides, travaillent toujours des documentalistes qui mettent 4. Source : [30], p. 285.
au point des classifications adaptées pour indexer les sites. On appelle 5. Source : [7].
encore cela P« indexation manuelle ».
6. Source : [38].
L'ingénierie linguistique est à la base de toutes les recherches concer-
nant le traitement automatique du langage naturel. Les analyses linguis- 7. Source: (2). p. 143.
tiques et sémantiques sont sous-jaccntes dans tous les logiciels pilotant
la recherche en texte intégral. S'il existe des langages contrôlés, ce sont 8. Source: [56], p. 215-216.
bien ceux-ci, mais comme ils restent transparents pour l'utilisateur 9. Voir [83], [57]. [ 1 ] et [44].
final, ce dernier a rarement conscience des recherches importantes dont
ils sont l'objet. 10. Source : [ S I ] .
Enfin, dans cette période intermédiaire où les nouveaux outils ne sont 1 1 . Source : [7].
pas encore destinés à tous (coût, intérêt limité aux corpus importants),
les langages d'indexation, et particulièrement les thésaurus, sont 12. Source : [23]. Tous les exemples suivants en sont extraits.
toujours utilisés, et nécessaires, dans les unités documentaires. Pour
13. Source : [37], p. 176.
combien de temps encore ? Nul ne peut estimer si, « dans un mois, dans
un an » — ou davantage — tous les langages décrits dans ce chapitre 14. Source : [75], p. 595.
seront, ou non, relégués au magasin des accessoires encombrants. Mais
nul ne peut affirmer que les constructions intellectuelles sur lesquelles 15. Cet aspect est bien exposé et développé dans [10].
ils ont été bâtis ne perdureront pas dans les pratiques professionnelles. 16. Source : [30], p. 138.

17. Exemples extraits de [ 13].

18. Voir [12]. Renseignements auprès de l'Agence bibliographique de l'ensei-


gnement supérieur (ABBS), BP 4367, 34196 Montpellier cedex 5.

19. Extrait de [13].


LES LANGAGES DOCUMENTAIRES CONCLUSION

20. Source : [21].

21. Voir: [61],

22. Source ; [6].


II est écrit quelque part dans les pages précédentes qu'une conclusion
23. Source : [30], p. 577. est pleine des regrets de l'auteur. Pourquoi celle-ci ferait-elle
exception ?
Faut-il rappeler que la méthodologie proposée n'en est qu'une parmi
beaucoup d'autres et que le lecteur est vivement encouragé à inventer
25. Source ; [56], son propre cheminement, adapté à ses besoins professionnels et à son
26. Source : [61].
propre tempérament ? Faut-il insister sur le fait que rédiger des résumés
et/ou indexer des documents nécessitent un entraînement comparable
aux exercices sportifs, progressifs mais surtout réguliers ? Les exer-
cices sont proposés dans cette perspective : la recherche du plan d'un
texte (cf. p. 73-75) peut être considérée comme un exercice contrai-
gnant, inconcevable dans la pratique. C'est vrai. Mais nous invitons tout
analyste, confronté à des textes qui « résistent » à la première lecture,
à s'y exercer au moins deux ou trois fois, afin d'en découvrir les
capacités opératoires. Il suffit quelquefois d'entrouvrir une porte
inconnue pour détecter les facultés latentes que l'on possède sans le
savoir.
Tout ce manuel a été élaboré à partir des opérations documentaires
elles-mêmes. C'est pourquoi il y est question d'analyse documentaire,
bien sûr, mais aussi d'information documentaire, de lecture documen-
taire, d'écriture documentaire, de recherche documentaire, de langage
documentaire.
La lecture documentaire est une activité dynamique. Un texte est
vivant. Tout auteur dit quelque chose à un lecteur et celui-ci doit y
trouver ce qu'il y cherche : détente dans le loisir, bonheur dans le style,
information(s) dans le texte qui est — insistons — un réservoir de
réponses. À nous de savoir l'interroger.
La complémentarité lecture-écriture a-t-elle été assez soulignée ? Le
documentaliste qui'lit beaucoup perd souvent la pratique de l'écriture.
La recherche du « beau style » et le souvenir des sanctions scolaires y
CONCLUSION
CONCLUSION

sont sans doute pour quelque chose. L'écriture documentaire est très « plusieurs sens » à : « même écriture » (ou « même signe » ou « même
différente de l'écriture académique ; elle est sans doute plus facile pour caractère »). En faisant ce choix, ne donnons-nous pas l'avantage à la
le professionnel déjà engagé dans l'action que pour l'étudiant littéraire forme du terme plus qu'à son sens ? À nouveau, répétons que le lan-
baignant encore dans les grands textes ; quant à l'étudiant scientifique, gage est plus que le langage et que l'usage d'un terme le dépasse. C'est
il comprend et analyse vite mais, le plus souvent, a perdu l'habitude de ainsi que, en toute bonne conscience, nous pouvons opter pour une voie
qui n'est pas forcément la nôtre. Utilisons avec vigilance toutes les
rédiger plusieurs phrases à la suite. Or, nous sommes de plus en plus
possibilités du monde électronique mais restons maîtres de notre objec-
confrontés à l'obligation d'écrire à cause de l'extension des messages
électroniques. Certains se suffisent du « parlé-écrit », mais d'autres tif premier, à savoir être les médiateurs du sens.
nécessitent une rédaction plus élaborée. Peut-on rêver qu'à la place de
l'international bad english communément admis, on arrive à commu-
niquer dans sa propre langue en se faisant comprendre grâce à la conci-
sion du style et à la précision du vocabulaire : les deux règles d'or du
résumé et de l'indexation documentaires ?
Quant à la recherche documentaire, le plus souvent absente des écrits
sur l'analyse, le résumé et l'indexation, elle tient une place prioritaire
puisqu'elle est l'enjeu de l'opération. Une dernière fois, qu'il nous soit
permis de répéter qu'il ne peut pas exister d'indexation de qualité sans
savoir à qui et à quoi elle peut servir. L'indexation à la chaîne que
certaines entreprises sous-traitent alimente des banques de données sur
le seul critère de la quantité ; les fameux monstres évoqués plus haut en
sont les résultats. Quel rapport entre ces usines à gaz et l'outil de
recherche dont les vrais utilisateurs ont besoin ?
La richesse de la langue est infinie ; elle est une source intarissable
d'inspiration pour tous les poètes (dont nous pouvons être du reste).
Mais l'analyse documentaire exige la rigueur d'un vocabulaire sans
ambiguïté grâce auquel l'usager cherche et trouve ce qu'il souhaite. II
est certain qu'Internet permet de trouver rapidement une ou plusieurs
réponses à partir d'un ou de plusieurs mots servant de requête ; les
résultats immédiats cachent ce qu'une interrogation plus fine pourrait
apporter : c'est là à la fois l'attrait et le danger d'Internet.
Puisque l'on évoque l'importance du vocabulaire, concluons sur un
exemple. Au terme « polysémie » est actuellement préféré son prétendu
synonyme «homographie». Cela veut dire que l'on glisse de :
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Liliane Lurçat. — « Les effets violents de la télévision ». — Esprit.


n°203, juillet 1994.

ESPRIT

Revue internationale
212, tue Saint-Martin, 7S003 Paris
Rédaction: 48 04 92 90
Administration, abonnements, société des lecteurs 48 04 08 33

Fondée en 1912 par r'mminucl Mounwr. l rc%uc f >,'"' a élê dirigée par \lhtM Bcguin
Jimi-Mirit niwwnirh M W l47hH'l Fiul Thihiurt (1177.I1RRI

DiRxtcur de la rédaction : Olivier Xltingin


ROdiictcurs en chef Pierre BourcI/, /rie Conan.
.Inêl Roman, Jcan-l.nuh Schlrurl
Secrétaruii île rédaction : Jérôme (iiudicelli, Marc-Olivier Padis

Dircctrtci: iidjomlc pour la gestion : Mireille de Situai


Conseiller pour la gestion : Alain Mallarl

Comilc de rédaction

Journal : Daniel Lindetiherg


/tontimic : Bernard Perret
Mreurs. société Alain Khrcngerg, Jean-François l.aé. Patrick Mignon
Vcraniquc N'abitum-tirappc. Jacqucr Scdal, (leorgcs \'igaretlo
KnM'ii>nenient : f .m Coq. I .il Delannm
Pohiiquc. justice Pierre ("hanihat, François Colcomhel. Jacques Don>elot
Antoine Carapon. Ipuillaume Malaurie. Hernanl Manîn
Michel Marian, Marc Osouf
internaiicmal : Gilles Bataillon. André F.negrén. Ttiicrrj Kabre
Marc l.asar, Jnseph Maïla. Jean-l.LC Pnuthicr
Luc Koscn/wcig, Olivier Roy
Luropt Nicole ( riiesiitio. Pierre Hasaner
AlekMiniler Smnlar, l'aul Thiliaud
Sciences, techniques Jean-Michel Bernier. Dominique Bourg
Jean-Pierre Dupiiy. Jean-Luc Cirilione, Pierre T.évv
Rcligiona Olii ier Abel. Alc\, Jean-Claude F*lin
l^dition Onminique Bourel, Jean-Marc Ferry
Philippe Kaynaud. Jean-Loup Thébaud
l.eitrcs. arts . Jacques Darras, Jean-Philippe Dnmecq
I i.in.di.i ( i.iill.n (I. < lande Hahih. \nnc Laurent, pierre Mayol
Bujiir Nedekoiici, Ihîerry Paqunl. Alfred Simon

r Images, médias : Vincent Amiel, Michel Mesnil

n° 203. juillet 1994


ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES EFFETS VIOUNTS DE LA TÉLÉVISION »

Les effets violents [...]. L'expérience directe conitiiciiçail à foules et les publics a été traite au siècle « quand on étudie le mécanisme de la
de la télévision faire défaut. [...] Dans ce supermarché, dernier et au début de ce siècle, princi- suggestion, on note toujours que
où se débitaient les succédanés de palement par des médecins comme l'émotion y joue un grand rôle, et qu'il
l'expérience direcle, les vieilles lignes de Liébeault (5) cl Bcrnheim (6), et des est utile d'émotionncr le sujet pour lui
Les particularités démarcation s'effaçaient. [•-•] Une brume auteurs de formations variées, comme faire accepter une suggestion ».
de la situation télévisuelle nouvelle, qu'aucune machine n'axait pu Gustave Le Bon (7) et Tarde (8).
jusqu'alors fabriquer, enveloppait 7. Si le rapport au réel est médiatisé,
l'univers télévisé et finissait par envahir 5. Georges Dumas est l'auteur d'une le vécu télévisuel engendre une conta-
l. La télévision introduit la vie
le monde réel lui-même. Les Américains mise au point sur la contagion mentale gion émotionnelle immédiate. C'est ainsi
publique au foyer sous la forme
s'accoutumaient si bien à ce brouillard, (9). La contagion est un concept médi- qu'on peut parler de la puissance d'action
d'images. C'est à une forme transposée
ils se sentaient si à l'aise dans ce flou ras- cal : « La contagion est la transmission de la télévision sur les émotions. Elle
du monde que les enfants accèdent : car
surant, réconfortant, que la réalité elle- .d'une maladie d'un individu à un autre rend possibles les mimétismes ou imi-
la télévision n'est pas le monde, mais
même, avec ses arêtes vives, les distinc- par un contact immédiat ou médiat ». tations inconscientes et les imitations
une illusion du monde dont on ne voit
tions tranchées qu'elle opérait entre les Quand il s'agit de faits psychologiques, conscientes induites par sa puissance
que des images ( l ) . Cetle sorte d'ini-
gens, les lieux, les dates et les conditions on parle de contagion morale ou men- suggestive. Tout ce qui est montré est
fiation s'accompagne d'un éloignement
météorologiques, finissait par avoir tale : « Le contact est immédiat quand le imprégné d'émotions et rend crédibles
du réel. En effet, le jeune enfant,
quelque chose de vaguement irritant. » suggestionné subit directement par la les informations mises en scène ou tout
spectateur et auditeur, est plongé dans
vue, l'ouïe ou par correspondance épisto- autre événement dont la présentation
une situation où il se sert exclusivement 3. Le rapport médiatisé au réel laire l'influence d'un contagionneur. Le semble objective et neutre. L'illusion de
de la vue et de l'ouïe. Ce rapport média- favorise l'habitude de croire plutôt que contact reste médiat lorsque l'influence vérité provient de l'illusion d'immé-
tisé aux élres et aux choses qu'imposé la d'analyser et chercher à comprendre : nocive s'exerce par la voie de la presse et diateté de l'événement, accréditée par la
télévision domestique, dès les débuts de l'image porte en elle sa propre crédi- du livre, comme il arrive souvent pour la charge émotionnelle.
l'existence, a modifié les étapes de l'ini- bilité, sans que la référence à une quel- contagion de la morphinomanie ».
tiation. C'est là le paradoxe de la situa- conque réalité extérieure soit nécessaire, 8. Cette puissance suggestive de la
tion télévisuelle, elle donne l'illusion de La distinction entre le réel et l'imagi- 6. J'utilise personnellement le concept télévision est exploitée par la publicité
rapprocher les gens de la réalité, mais en naire, entre le vrai et le faux s'estompe. de contagion émotionnelle (10) pour télévisuelle. Selon Guy Durandin (12),
fait, elle les sépare, elle les en coupe. Le Elle n'est pas nécessaire pour la jouis- parler de l'action contagieuse de la télé- la publicité constitue une part impor-
raccord au réel nécessite ['activité, sance du téléspectateur, elle ne l'est pas vision par le biais des émotions. Le lien tante des ressources des médias : 40 % et
l'usage des cinq sens, l'action sur les non plus intellectuellement, car l'attitude entre l'émotion et la suggestion était bien plus pour un quotidien et jusqu'à 100 %
choses, et le rapport direct avec les critique n'est pas en éveil : on n'a pas connu des savants qui ont utilisé pour une chaîne de télévision privée. Le
autres (2). l'hypnose, comme Pierre Janct ( I I ) : développement de la science psycho-
besoin de comprendre pour se laisser
absorber par l'image. logique contemporaine, écrit-il, comme
2. Daniel Boorstin a réservé un
la réflexologie de Pavlov, la psychologie
chapitre de sa vaste fresque Histoire des 4. La télévision crée une ambiance 5. A. Liébeauh, le Sommeil prowquf et /cv états
Américains (3) aux transformations des profondeurs, la psychanalyse des
favorisant un unisson émotionnel (4). anaingitei, Oclave [loin. I9K9.
foules, a suscité la mise en œuvre de
apportées par la télévision, qu'il F:lle a un effet puissant sur la sensibilité. techniques d'influence qui se voulaient
compare à un cataclysme modifiant pro- î'on impact émotionnel peut se com-
gressivement le rapport à la réalité : « La scientifiques. Vance Packard! ( 1 3 ) l'a
prendre si l'on considère l'ensemble des remarquablement montré en analysant
télévision a introduit un halo d'incer- téléspectateurs comme une foule
titude autour de l'expérience quotidienne les travaux de ceux qu'il nomme les
imiiense, émiettée devant les écrans, et grands maîtres de la persuasion
ressentant simultanément les mêmes clandestine. La psychanalyse des foules,
1. L. Lurçat. le Jeune Knfani devant les ap/xiiÏ-HCC.V émotions, sans se connaître ni se ren- écrit-il, est devenue dans les campagnes
télévitiielles. ESF, 19B4. 9 (i. Dumas, » l a contagion mentale », Renie
contrer, partageant les mêmes implicites pliih.v/'iiit/iic. 36' année, t. L X X I . janvier-juin de persuasion le fondement d'une
2. L. Lurçat. « Imprégnation télévisuelle et alliludcs et les mêmes références. Le thème des
scolaires ». in les 2-7 ans à {'/tenir de VEumpt, suggestions et des contagions dans les
lïrfrr iln ct>l/<njitt'. Nathan. 1991. 12. (i. Durnnilin. l'Information, la né.tiitfm-mantin et
la Réalité. Puf. 1993.
3. D Uoor.sUn. Histoire lies Américain*, cuil.
« Moiiquins ». l.alïmil. _V partie, diapiire 44. I W I . 13. V Packard lu PCI-SIMMI»! fliinth-itiiii: PI.
19X9(1" éd. I C >«1
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES EFFETS VIOLENTS DE LA TÉLÉVISION »

industrie puissante dans le domaine contagions par l'action immédiate des constamment discuté, et l'est encore, détachement émotionnel qui leur permet
commercial puis dans le domaine images et de l'ambiance sur les émo- c'est la responsabilité de la télévision de commettre des crimes incroyables
politique, quand les partis ont fait appel tions. Troisièmement, renforçant ces dans cette augmentation. Seuls les actes avec une absence totale de sentiments
aux « persuadeurs » professionnels au effets de la situation télévisuelle, la mimétiques qui décalquent des choses « normaux » comme celui de culpabilité
moment de l'élection présidentielle de manipulation sophistiquée des désirs et vues à la télévision peuvent lui être et de remords ».
1956 aux États-Unis. C'est toujours le des mobiles. Cette manipulation utilise imputés avec certitude.
16. Des enquêtes plus récentes ont
même principe : « O n agit plus des techniques psychologiques induisant confirmé ces analyses, avec toujours ces
14. Aux États-Unis, des enquêtes
facilement sur les attitudes des gens par l'imitation automatique par l'action statistiques inquiétantes sur l'augmen-
officielles sont entreprises de manière
leurs émotions que par leur intelli- subconsciente ou subliminale, et l'imi- régulière. C'est le secrétaire général à la tation de l'agressivité et de la criminalité
gence. » tation plus ou moins consciente par la des jeunes. Joshua Meyrovvitz ( 16) cite
Santé qui assure la publication des
suggestion. lui aussi les chiffres du FBI. Entre 1951
9. C'est d'ailleurs Vance Packard qui le « Rapports sur la télévision et le com-
premier a dénoncé l'usage des images //. Dans les débats sur la violence, on portement social ». Déjà, en 1972, et 1981. on note les augmentations sui-
subliminales. Il s'agit d'une stimulation attribue parfois la responsabilité des quatre sur les cinq volumes ainsi édités vantes observées chez les moins de
subconsciente ou subliminale, se situant effets aux téléspectateurs, trop jeunes ou sont consacrés à des études traitant des quinze ans : arrestations pour meurtre.
en dessous du seuil de perception trop impressionnables. La télévision effets des programmes de violence à la 500 % ; vols à main armée, 1 750 % ;
consciente. Elle est fondée sur la décou- serait alors te révélateur de la faiblesse télévision. Ils montrent notamment que. viols, 4 000 %.
verte que le cerveau peut enregistrer des humaine et non l'inducteur d'effet? entre 1952 et 1972, selon les chiffres du
17. La télévision exerce un effet de
images ultra-brèves et des sons mur- néfastes, ce qui annule toute discussion FBI. le nombre des jeunes arrêtés pour
fascination sur les jeunes enfants qui
murés sans que nous en ayons sur les contenus. Il n'y aurait pas d'exem- délits graves et violents a augmenté de d'ordinaire sont actifs et remuants. Elle
conscience. L'industrie publicitaire ples suggestifs mais uniquement des 1 600 %. Cela correspond à la période au les immobilise et ils demeurent captés
s'appuie en partie sur les travaux des gens fragiles qui devraient se connaître cours de laquelle la télévision a pris une par elle. L'immobilisation favorise l'im-
hypnotiseurs. On peut lire dans la Revue comme tels, et fermer le poste. On met importance croissante.
prégnation par ce qui est regarde réguliè-
de l'hypnotisme de 1902 (14) une ainsi de côté le rôle essentiel de l'imita- 15. Marie Winn, qui rapporte ces faits rement. L'imprégnation est un mode
définition de l'hypnotisme qui paraît très tion, en particulier aux âges sensibles de dans son livre TV Drogue (15), écrit : puissant d'apprentissage opérant surtout
moderne : « l'hypnotisme est un nom l'enfance et, bien sûr. de tous tes effets « L'avènement de la télévision dans les dans les premières années de la vie, mais
pour un groupe de moyens empiriques calculés mis au point grâce aux foyers américains a amené la pire des aussi dans toute situation où il n'est pas
par lesquels nous pouvons arriver à méthodes sophistiquées de la manipula- épidémies de violence juvénile qu'ait nécessaire de savoir qu'on apprend. La
prendre possession des facultés sublimi- tion du désir. connu le pays ». L'aspect qui l'a spécia- personne apprend sans le savoir, ni par
nales ». 12. Il nous faut comprendre comment lement frappée, c'est la transformation conséquent sans savoir ce qu'elle
le spectacle de la violence montré de brutale des enfants, passant soudaine- apprend. La violence de la situation télé-
manière répétitive peut déboucher sur ment plus de trente heures par semaine à visuelle se manifeste dans cette sorte de
Effets mimétiques cr actes suggérés l'imitation impulsive, ou encore suggérer la télévision, première génération capture de celui qui regarde et qui ne
des actes violents réalisés de manière américaine d'enfants téléspectateurs. peut se détacher sans effort. Par la seule
10. On peut comprendre l'action «Cette situation estompe, écrit-elle, la réception, il s'imprègne alors de thèses
violente de la télévision avec les consciente, c'est-à-dire provoquer l'imi-
différence entre rêve et réalité. » « C'est auxquelles il n'adhérerait pas nécessaire-
éléments dont nous disposons à présent : tation à ses deux niveaux : l'imitation
comme si notre société avait engendré ment de manière volontaire. La télé-
Premièrement, l'effet de déréalisation mimétique inconsciente d'elle-même, et
un nouveau type en la personne de vision crée un état de réceptivité psy-
par un rapport médiatisé au réel, l'imitation consciente
l'enfant meurtrier qui ne ressent aucun chique spéciale par sa nature et par son
permettant toutes sortes de confusions remords et qui est à peine conscient de prestige. Son action s'apparente à une
ou d'amalgames en noyant les dis- ses acles ». Marie Winn écrit encore : suggestion permanente.
tinctions indispensables à l'exercice du L'existence des effets violents
« Le facteur commun qui caractérise ces
jugement rationnel. Deuxièmement, les 13. L'augmentation des actes agressifs gosses changés qui tuent, qui torturent et
H). J. Mtyrowit?. l'Knlani mlitltf ri l'.-liiiilii-1•nfunl
et criminels, notamment chez les moins qui violent, semble être une forme de
La III^IIHI i/c's li.ijo il l'ère iU' Iii ù-li'\i\i«n. in li /'imv
14. M. Miingm. Le mécanisme de la mgg de quinze ans, a été observée très tôt aux cl ttin avenir. Es\ai\ la tradition et l'cn-ici-
d'après les travaux de K Mycrs de Cambridge. États-Unis, en même temps que se géné- ifnt'tHfiir, revue le 7i'"i/n tte lu ri'lh'\ion. VI,
de rhri'nntisme. 1902, p. 259. ralisait la télévision. Ce qui a été 15 M WJnn. JVDragut, Hcurus. I97<). Gallimard 19R5.
« GROS TEMPS SUR LA PLANÈTE »
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

Jean-Claude Duplessis, Pierre Morel. — Gros temps sur la planète.


18. Marie Winn parle d'étal hypno- nés Américains, âgés de 8 à 3l ans, à se
tique chez ces enfants qui regardent si tirer une balle dans ta tête. — Éditions Odile Jacob, 1990.
longtemps la télévision. Elle parle d'une
20. Les effets de suggestion, indépen-
sorte d'extase. Selon nombre de parents a W
qu'elle a interviewés, l'enfant paraît damment de ceux obtenus par la publi- X, U —
fi r-ï
sombrer dans une « véritable cata- cité, sont parfois observés après coup,
pour des séries qui, en elles-mêmes,
lepsie ». Nous retrouvons là le vocabu-
laire des hypnotiseurs du siècle dernier. paraissent de bonne qualité. Le dernier
exemple connu est celui d'un jeune
T- = -
19. C'est à la faveur de cette fascina- garçon prénommé Romain qui a imité
tion que peut jouer la charge émotion- Mac Gyver donnant la recette réaliste
nelle des productions aux effets calculés, d'un explosif de fortune, mais très effi-
utilisant la vitesse et la violence pour cace, au point que lui cl son camarade se
M ïs
I.Ï S. 2 'E -1 —
accrocher le téléspectateur. L'émotion a sont tués. Dans ce cas, l'induction à I 2
une grande force de contagion et l'enfant l'imitation est obtenue par la séduction X E
plus que l'adulte est la proie des conta- qu'exercé le héros. i: -a* G il
gions émotionnelles. A la télévision,
21. Les mimétismes s'observent chez
•Ei
n _ l^
n i3* 5. - '5.. ï "à 'S
T3 -±
'S. > 1*
c'est par le biais des contagions émotion- js u j; ^ _n S -o £ 2 A
l'homme et aussi chez l'animal, ce sont O O
nelles que la violence agit, pouvant
engendrer des mimétismes. On peut donc des conduites archaïques. La sug-
comprendre ainsi les épidémies déclen- gestion est proprement humaine car clic
chées par certains spectacles ou certai- passe par le langage. A la télévision, il y
nes mises en scène des informations. Le a induction d'actes automatiques sous
suicide mimétique à la télévision a été forme de mimétisme et d'imitation par
nommé effet Werther ( 1 7). La projection suggestion.
du film Decr Hunier (« Voyage au bout 22. Il faudrait réfléchir à une déonto-
de l'enfer »). qui comporte une séance de logie des médias, en se basant sur une
roulette russe, a poussé vingt-neuf jeu- meilleure connaissance des effets voulus
ou non voulus sur la sensibilité cl sur les z « âinh
a&
11. Af'/'mi'he tulnm-llc et éducative an prvNèmt tic conduites-
la iwlcnce. Conseil de l'Europe, document 5013-K
Strasbourg, 1983. Liliane Lurçat

Esprit, 1994

O)
y: -+^
11
c
a*
c4
•— •
^^ Od
o ^
O S
-k]
S Gros temps sur la planète
de données numériques, au point de rendre praticable une simu-
lation réaliste, sur ordinateur, des phénomènes physiques et
Avant-propos chimiques qui se déroulent à l'échelle de notre planète.
Ce vaste progrès des connaissances, fruit de la coopération de
centaines de savants et de techniciens, nous permet d'entrevoir
la Terre comme une entité dynamique, un gigantesque système
interactif, fait d'une multitude de mécanismes enchevêtrés dont
A l'approche de l'an mil, la population médiévale de l'Europe
nous commençons tout juste à dérouler l'écheveau. La science
trouvait dans le ciel des signes précurseurs de l'Apocalypse et la technique nous ont hissé jusqu'à un belvédère d'où l'on
annoncée par !a Bible. À l'aube du troisième millénaire, les peut embrasser le panorama des phénomènes qui régissent
médias se sont faits les hérauts d'une nouvelle peur obsidionale, l'environnement terrestre. Rien d'étonnant si l'on découvre
celle d'une catastrophe planétaire résultant de la dévastation de aussi quelques précipices effrayants. Mais le simple fait de voir
l'environnement naturel par l'Homme. ou de prévoir les dangers ne justifie pas l'affolement.
Dans nos sociétés occidentales, les regards accusateurs des Bien au contraire, il faut se féliciter de l'intérêt nouveau que
écologistes se tournent vers la technique et l'industrie, jugées suscitent ces problèmes de l'environnement planétaire. 11 serait
responsables de la pollution globale de l'air et de l'eau. On ne en effet préférable que les choix à long terme de nos sociétés
parle que de l'effilochage de la couche d'ozone et de l'emballe- humaines soient fondés sur la connaissance de la réalité objec-
ment de I'effet de serre. Sur la base d'informations scientifiques tive plutôt que sur l'illusion anthropocentrique.
incomplètes ou à demi comprises, on prédit avec emphase la Faire partager au mieux les connaissances spécialisées
ruine de notre planète. acquises dans leur discipline est une partie du contrat des scien-
Les scientifiques, dépassés par l'ampleur des réactions média- tifiques. Les phénomènes du climat sont concrets, tangibles
tiques et politiques, restent le plus souvent à l'écart, perplexes dans leurs conséquences quotidiennes. Ils sortent néanmoins du
et silencieux. Et pourtant le savoir, accumulé principalement champ familier de l'expérience courante, tant par l'énormité des
depuis les dernières décennies, est riche et fascinant. quantités mises enjeu que par la complexité de l'enchaînement
L'extension des réseaux d'observation terrestres et la multipli- des causes et des effets- Les auteurs ont voulu apporter au lec-
cation des satellites artificiels donnent, depuis dix à vingt ans, teur le complément d'informations empiriques et les explica-
une vision globale de l'atmosphère planétaire et bientôt de tions théoriques nécessaires pour comprendre les principes qui
l'océan. Les extraordinaires progrès de l'analyse chimique et régissent le fonctionnement du « système Terre » et son évolu-
isotopique ont apporté une information précise sur la chronolo- tion probable dans le futur.
gie et l'ampleur des changements climatiques passés, au cours
électronique a fourni le moyen de traiter d'immenses quantités
4' page de couverture
Gros temps sur la planète
À l'aube du troisième millénaire, faut-il craindre une catastrophe
planétaire ? Est-il vrai que l'homme, apprenti sorcier, a couvert la
Terre d'un épais couvercle de polluants et de poussière '.'
réchauffement dû à cet « effet de serre » entraînera-t-il !a fonte des
glaces, noyant les continents ? Enfin, nuage le plus sombre de
ceux qui s'accumulent au-dessus de nos lêles, l'« hiver nucléaire »
nous menace-t-il ?
Ces inquiétudes légitimes de l'opinion, entretenues par les médias,
font plus que jamais obligation aux scientifiques d'exposer claire-
ment ce qu'ils savent. Jean-Claude Duplessy et Pierre Morel nous
livrent ici une véritable « notice pour les usagers de la Terre >
une description de cette prodigieuse machine, dont nous sommes
à la fois des pièces et, pour une part, les maîtres.
Jean-Claude Duplessy
Géochimiste, dirige un laboratoire mixte du CNRS et du CEA a
G if-sur-Yvette, dont les recherches en paléoclimatologie font
mondialement autorité.
Pierre Morel
Professeur à l'université Pierre-et-Marie-Curie de Paris, est le ton-
dateur du Laboratoire de météorologie dynamique (CNRS) et le
secrétaire du Programme mondial de recherche sur le climat.
© Éditions Odile Jacob, 1990.
• F.ditions du Seuil. 1992.
Du même auteur Evelyne Sullerot i <
•n 1<2.
Q) -
La Presse féminine, Armand Colin, 1963. < 3
Histoire de la presse féminine, Armand Colin, 1964. % 3
Q. w>
La Vie des femmes, Gonthier-Denoël, 1965.
Demain les femmes, Laffont, 1965.
Histoire et Sociologie du travail féminin, Gonthier
Denoël, 1965.
La Femme dans le monde moderne, Hachette, 1970. (D
Les Françaises au travail, Hachette, 1973. Le grand remue-ménage (Û
Histoire et Mythologie de l'amour, huit siècles d'écrits U
3
féminins, Hachette, 1974, couronné par l'Académie La crise de la famille a.
française.
Le Fait féminin, ouvrage collectif dirigé par E. Sullerot,
préface de André Lwoff, prix Nobel, Fayard, 1978,
ouvrage couronné par l'Académie des Sciences
3
morales et politiques. EU
lu
L'Aman, roman, Fayard, 1981.
Pour le meilleur et sans le pire, Fayard, 1984, couronné 5T
par l'Académie française. n
L'Âge de travailler, Fayard, 1986. S
L'Enveloppe, roman, Fayard, 1987. Q.
Quels pères ? quels fils ?, Fayard, 1992.
Alias, roman, Fayard, 1996.
Fayard
AVANT-PROPOS
Que nous soyons partisans de « la famille » au singulier ou
« de nouvelles formes plurielles » des séquences de vie privée,
pour le mariage ou pour l'union libre, nous sommes tous nés
d'un père et d'une mère et la plupart d'entre nous ont ou auront
des enfants. Nous sommes tous inscrits dans la chaîne des
générations qui se sont succédé durant ce dernier demi-siècle.
Nous avons tous subi et nous avons tous fait l'histoire récente
de la famille en France. Nous ne sommes cependant pas d'ac-
cord sur ce que représente la famille ici et maintenant, à l'aube
du xxr' siècle.
La famille est-elle, comme tendent à le prouver de très nom-
breux sondages, la « valeur » la plus appréciée des Français de
toutes tendances politiques, leur refuge contre la solitude, leur
rempart contre les aléas de la vie, le but de leurs efforts quoti-
diens, la source principale de leur bonheur individuel ?
Ou bien la famille est-elle le cheval de Troie qui ramène
l'ordre moral, l'increvable survivance du pétainisme triom-
phant, la forme la plus pernicieuse de la mise au pas de l'indi-
vidu qui y perd sa liberté, enchaîné par la marâtre Nature, sous
sa forme modernisée qu'est la génétique ?
C'est à peine, c'est tout juste s'il y a accord sur un diagnos-
tic : la famille est en crise. Faut-il s'en lamenter ou s'en réjouir ?
Librairie Arthème Fayard. 1997. Doit-on et peut-on permettre à la famille, cellule de base de la
société, de se rétablir, pour éviter une implosion ? Ou bien la
Le grand remue-ménage Avant-propos
société française entre-t-elle dans une nouvelle phase de son Car la famille est affaire privée et affaire publique. Elle se
organisation qui se passera de ce groupe intermédiaire entre situe dans le champ de la vie privée de chacun, mais elle est
l'individu et l'Etat, et faut-il aider une telle évolution ? objet de politique publique. Elle est concernée à la fois par
On ne peut répondre à cette question, ni même faire un pro- l'histoire des dispositions protégeant l'individu, sa sexualité, ses
nostic, sans envisager le passé récent et la manière dont se sont amours, son chez-soi, son histoire propre, ses secrets ; et par
constituées les familles dont nous sommes issus et celles que celles qui intéressent le devenir collectif de la nation, sa popu-
nous avons fondées ; sans analyser comment et pourquoi cer- lation, la reproduction des générations, ou le vieillissement de
taines ont duré, comment et pourquoi certaines ont éclaté, com- ia structure par âge, la protection et l'éducation des enfants et
ment aujourd'hui se présentent celles qui vont aborder le siècle des jeunes, les pensions de retraite des vieux, la répartition des
nouveau. Pour comprendre ces changements et leurs causes, il aides sociales.
faut les replacer dans la durée. Procédant de la nature et de la culture, concernant l'individu
Composées d'individus et composant une société, les familles privé et le destin de la communauté nationale, la famille n'a pas
forment un ensemble complexe auquel il faut réserver une échappé à l'institutionnalisation par le droit. Le droit a défini
approche systémique : on ne peut retracer leur histoire qu'en l'identité juridique de ses membres, leurs statuts, rôles, droits et
multipliant les éclairages et en variant les angles de prise de vue. devoirs réciproques. Le droit a régi les unions et les désunions,
Car la famille est un fait de nature et un fait de culture. Tout les filiations, les transmissions des noms et des biens, enca-
être humain a deux parents qui lui confèrent son identité biolo- drant les naissances, les enfances, les amours et les décès. Ces
gique. Les découvertes récentes de la génétique ont permis lois ont été confrontées ces dernières années à des avancées de
d'établir à la fois que chaque être est unique et qu'il existe des la science génétique et des techniques precréâtiques. Elles ont
liens indéniables, inaltérables et infalsifiables entre père et dû s'adapter, ou elles ont vieilli, obsolètes.
enfant, entre mère et enfant, entre frères et sœurs. Ces liens On trouvera tout cela, entrelacé, interagissant, dans cette his-
sont indépendants de toutes formes institutionnelles comme le toire de la famille. D'abord, les évolutions démographiques ; les
mariage ou l'adoption. Ils perdurent toute la vie. Mais la culture facteurs économiques, les attitudes face au travail, les modali-
a entouré ces liens biologiques de relations fortes d'amour, de tés de la consommation ; mais aussi les opinions sur l'amour, le
tendresse, de fidélité, de protection, de responsabilité, de trans- sexe, les hommes, les femmes, le mariage, l'union libre, la
mission, d'éducation qui donnent à la famille humaine son conception et la contraception, l'éducation des enfants, les rela-
incomparable richesse. Elle n'est pas seulement le cadre de la tions avec les parents qui ont accompagné ces évolutions, ainsi
reproduction de l'espèce. Elle est un espace de culture et un que les mots nouveaux, le vocabulaire à la mode par lequel se
véhicule de ta civilisation. sont exprimées les mentalités. On trouvera les réponses de la
10 Le grand remue-ménage
société institutionnalisée, la libéralisation des lois régissant le
mariage, la procréation, la filiation, l'autorité parentale, le
divorce — et les crispations de certains juristes et magistrats
devant cet aggiornamenlo. On y trouvera aussi l'histoire de la Table des matières
grande politique familiale française surgie de la Libération,
puis l'on verra s'affaiblir la volonté politique qui l'animait, se
diversifier et se dénaturer ses modes d'intervention, se dévalo-
riser ses moyens.
Ces changements ne suffisent pas à eux seuls à expliquer la
crise que traverse aujourd'hui la famille. Il faudra également
faire entrer en scène les francs-tireurs puis les bataillons qui ont
attaqué la famille : du persiflage innocent au terrorisme politi-
caily correct, les dénigreurs, les saboteurs bien placés dans
l'appareil d'État, les doctrinaires antifamille. En face, il faudra AVANT-PROPOS
mentionner les reculades sans gloire et les indignations ineffi-
caces des derniers fantassins fami lia listes. CHAPITRE [" : 1939-1945 : la famille refuge
À quoi tout cela mène-t-il ? Comment fera-t-on face aux coûts Chantage aux maris et fils prisonniers, 12. - La mère au
financiers, humains et sociaux des désintégrations familiales ? pinacle dans la famille intense fermée, 13. - La clandestini-
Que pourra être une démocratie d'individus déconnectés ? té domestique, 15. -Tout est incertain, donc on s'engage, on
se marie..., 16. - ... Et on fait des enfants, 17.
CHAPITRE II : 1945-1955 : le familialisme consensuel 21
Une politique familiale révolutionnaire, 2 - Deuils,
retrouvailles, séparations, deux années de désordre, 23. -
Repeupler le pays, volonté unanime, 25. - On n'a rien, donc
rien à perdre d'avoir des bébés, 27. - Mystique du « couple »
et rajeunissement des mariés, 28. - Première entrée en scène
des « psy ». 30. - Les jeunes mères sont épuisées, 32.
282 Le grand remue-ménage Table des matières 283
CHAPITRE III : 77. - Pour l'harmonie des couples ou pour la liberté sexuelle
1955-1965 : grands problèmes féminins 33 des femmes ?, 79. - Mort de la puissance paternelle, 83. - La
La peur des grossesses, la grand'peur d'aimer, 33. - puissance maternelle dans la famille naturelle, 85. -Tous les
Catholiques et communistes contre la contraception, 37. - enfants naissent égaux, 87. - Les « ados » sont majeurs, 90. -
Les hommes abandonnent les « précautions » aux femmes, IVG, une loi pour les femmes, 9 l . - Un divorce sans rigueur.
39. - Une femme mariée peut-elle travailler « au dehors » ?,
93. - Divorce avec enfants : le juge tranche dans la famille, 95.
40. - De moins en moins de femmes au travail, 43. - Vents
- Les remises en cause de la politique familiale, 97. - De moins
d'Est, vents d'Ouest, grande querelle sur l'éducation des
en moins familiale, de plus en plus sociale, 98. - Choix de vie
petits, 44. - Une doctrine de l'éducation « démocratique »
privée contre la famille, 100.
hors famille, 45. - Plus un sou pour la mère au foyer, 48. -
La « condition » de la femme dans la famille, 50.
CHAPITRE VI :
CHAPITRE IV : 1965-1975 : la grande cassure 53 1975-1985 : la décennie du narcissisme 103
Un nouveau modèle de famille, 53. - L'éducation par la fra- Les « comportements » modifient l'équilibre démogra-
trie en voie de disparition, 55. - L'épisode des conceptions phique, 104. - Indéterminations personnelles des généra-
prénuptiales 1965-72, 57. -Avances sur mariage ? mariages tions « bulldozers », 106. - La gauche refoule la famille vers
forcés ? divorces ?, 59. - Cohabitation ? concubinage ? la droite, 107. - Comment rétablir un équilibre démogra-
union libre ?, 61. - Report du mariage ou refus du maria- phique rompu, 108. - Les célibataires ne se marient plus, les
ge ?, 62. - Une classe d'âge en rupture, 63. - De la consom- divorcés ne se remarient plus, 110. -Tout ira très bien, disent
mation familiale aux consommateurs concurrents, 65. - les optimistes, 113. - Les nouvelles familles hors mariage.
Malaise de la communication et coupure de générations, 66. 115. - « Les hommes deviennent entièrement privés »,
- D'une révolte égalitaire à l'implosion individualiste, 68. - 117.— Moi, ma personne, je m'accomplis, 119. - Les
Inventer la vie hors de la famille, 69. - Contre la famille, les chantres de l'individualisme tiennent l'information. 120. - La
communautés, 71. - Que chacun découvre et épuise ses famille écrasée entre hédonisme et socialisme, 122. - Ne pas
désirs !, 73. parler de la famille biologique, 123. - Parole « libératrice »
de l'Église réformée. 125. -Renoncera la famille « lignée »
CHAPITRE V : 1965-1975 : toutes les lois changent 75 comme à un péché. 126. - L'Église catholique face au « cou-
Le grand chantier du droit de la famille : égalité des époux, plisme », 128. - L'amour plus « pur ». plus « authentique »
75. - Remise en cause de la famille à propos de l'adoption, des cohabitants, 129. - 11 n'y a plus que des individus. 131.
Table des matières 285
284 Le grand remue-ménage
familles à problèmes ni des laissés-pour-compte, 177
CHAPITRE V I I :
thèmes et diffamations pleuvent sur les tenants de la famille. 180.
1975-1985 : les mères jouent les premiers rôles
- Le pays le plus féministe du monde se remet à faire des entants.
Les femmes à l'assaut du travail, 135. - Les femmes deman-
182. - En Suède, on prône la coparentalité. 184. -Tout s'écroule
dent le divorce et gardent les enfants, 138. - II n'est question
en Suède et en France. 186, - L'Enquête sur les situations fami-
des pères qu'à la forme négative, 141. - On parle de l'intérêt
de l'enfant, mais on exonère les parents, 142. - Promotion liales (ESF), 187. - Les enfants séparés de plus en plus toi d'un
de leurs parents. 189. - Pères et enfants séparés n'émeuvent pas
des « bons » divorces et des « bonnes » familles recompo-
l'opinion, 190. - Deux fois plus de « ménages recomposés » pour
sées, 144. - Des techniques de procréation qui dissocient le
les enfants, 193. - Le vocabulaire de la famille est en pleine
couple parental. 146. - Un géniteur anonyme à jamais incon-
nu de la femme fécondée, 147. - De l'hétéro-insémination « recomposition », 194.
aux banques de sperme congelé, 148. - Éthique et pratique
des CECOS, 150. - Les manipulateurs de sperme ne croient CHAPITRE IX :
pas au père génétique, 152. - Les enfants ne sauront jamais, La fin du siècle : entre le droit et la génétique
Doit-on maintenir la famille naturelle dans le matriarcat '.'
153. - La mère biologique est génitrice et gestatrice, 154. -
197. - Pour l'égalité des droits et devoirs des père et mère, 199.
Porter l'enfant, en accoucher, c'est la vraie maternité, 156. -
- Une solution de compromis ridicule. 201. - II faut mieux
Alors, les mères porteuses ?, 158. - Désir d'enfant, droit à
responsabiliser les parents naturels, 202. - Pour une moder-
l'enfant, 159. - Ébranlement de tout le système de parenté,
nisation de la filiation : principes et questions, 204. - Accord
160. - Avènement de la preuve biologique absolue et per-
unanime sur les « parents de cœur », 206. - La Convention
plexité..., 162. - Les concubins ne passent pas devant le
internationale des Droits de l'enfant ratifiée mais contredite.
maire, mais devant notaire, 162. - Échec d'une politique
208. - Le « droit au secret » entre au Code civil. 209. -
familiale démocratiquement choisie, 164. - Une politique
sénateurs dressent des chicanes devant la vérité, 210. - II fau-
sociale népprogressiste sous Giscard, 166. - Ambiguïtés anti-
dra bien libérer l'accès à la vérité des filiations, 212. - Le droit
famille et fraudes des usagers, 168. - Les socialistes renon-
couvre l'anonymat du géniteur et punit les révélations, 2 1 3 . -
cent à tout changer et aident les femmes divorcées. 171.
En Suède, on veut ménager l'avenir, en France, on verrouille
215. - Les deux fronts de la guerre entre le droit et la vente
CHAPITRE VIII :
génétique, 216. - Recherche de ses origines par l'enfant
La fin du siècle et le démaillage familial
adopté, 217. - Les enfants du malheur et les intervenants
Des grands-parents mariés aux grands-parents divorcés, 174.
sociaux. 220. - Qu'est-ce qui fait le père ?, 223. Propositions
- Des parents contents d'eux-mêmes. 175. - Ne pas parler des
286 Le grand remue-ménage
pour le xx* siècle, 225. - La famille procède du vivant, 226. -
Nous ne pourrons plus mentir, 228. - La génétique n'est ni de
droite ni de gauche, 229. - Donner la vie à un enfant donné, 230.
- Versions télévisées des relations choisies, 232.
CHAPITRE X : Choix du passé contre l'avenir 235
Gauche ou droite, une grande continuité, 236, - L'argent de
la Famille va à la Vieillesse car les vieux votent, 238. - Les
politiques familiales ont été inspirées par des sceptiques du
fait familial, 239, - La politique familiale française n'est
plus la première en Europe, 241. - Quelques mesures entre
1985 et 1993, 242. - Un rapport qui réveille l'Assemblée,
244. - 1994. Une loi cache-misère, 246. -Va-t-on aller jus-
qu'à fiscaliser les allocations, 247.
CHAPITRE XI : La montée du désarroi 251
Un courant antimariage, un courant CUCS, 252. - La paren-
talité et l'éducation au centre du dispositif, 255. - Décalage
entre principes et propositions, 256. - Encourager la solida-
rité familiale, 258. - Un code, un ministère, un observatoi-
re, 259. - Coût financier des instabilités familiales. 261. -
Coût humain : retentissement sur la santé physique et psy-
chique, 262. - Violences à l'école : que font les parents ?,
264. - La famille, une chance pour l'intégration, 266. - La
famille, prévention de l'exclusion, 268. - Réhabiliter le rôle
paternel, 270. - Sans famille, la galère pour les jeunes, 271.
- L'enchaînement chômage-divorce ou divorce-chômage,
273. - Prévenir les ruptures, promouvoir des accords, 274.
- Famille et démocratie, 276.
La Méditerranée, t'Espace et
Dans la même collection LA MÉDITERRANÉE l'Histoire a été publié pour la pre-
mière fois en 1977 par Arts e ÛJ
il Q.
Métiers Graphiques dans une édi-
Fernand BRAUDEL - Georges L'ESPACE ET L'HISTOIRE o 5
tion illustrée. D 0l
DUBY C
LA MÉDITERRANÉE
Les Hommes et l'Héritage (sous la
direction de Fernand Braudel).
sous la direction de
Fernand BRAUDEL FERNAND BRAUDEL
Écrits sur l'Histoire.
Georges DUBY
L'économie rurale et la vie des
campagnes dans l'Occident médié-
val (2 vol.)
Saint Bernard. L'art cistercien.
L'Europe au Moyen Âge.
1985
FLAMMARION
8 LA MÉDITERRANÉE
Sommaire raconter elle-même, de se revivre elle-
même. Par plaisir sans doute, non moins
par nécessité. Avoir été, c'est une condi-
1 Méditerranée tion pour être.
LA TERRE Qu'est-ce que la Méditerranée ? Mille
Fernand Braudel Dans ce livre, les bateaux naviguent ; les choses à la fois. Non pas un paysage, mais
vagues répètent leur chanson ; les vigne- d'innombrables paysages. Non pas une
2 mer, mais une succession de mers. Non
LA MER rons descendent des collines des Cinque
Terre, sur la Riviera génoise ; les olives pas une civilisation, mais des civilisations
Fernand Braudel sont gaulées en Provence et en Grèce ; les entassées les unes sur les autres. Voyager
3 pêcheurs tirent leurs filets sur la lagune en Méditerranée, c'est trouver le monde
L'AUBE immobile de Venise ou dans les canaux de romain au Liban, la préhistoire en
Fernand Braudel Djerba ; des charpentiers construisent des Sardaigne, les villes grecques en Sicile, la
barques pareilles aujourd'hui à celles présence arabe en Espagne, l'islam turc en
4 Yougoslavie. C'est plonger au plus pro-
d'hier... Et cène fois encore, à les regar-
ROME der, nous sommes hors du temps. fond des siècles, jusqu'aux constructions
Filippo Coarelli Ce que nous avons voulu tenter, c'est mégalithiques de Malte ou jusqu'aux pyra-
5 une rencontre constante du passé et du mides d'Egypte. C'est rencontrer de très
L'HISTOIRE présent, !e passage répété de l'un à l'autre, vieilles choses, encore vivantes, qui
un récital sans fin conduit à deux voix côtoient l'ultramoderne : à côté de Venise,
Fernand Braudel
franches. Si ce dialogue, avec ses pro- faussement immobile, la lourde agglomé-
6 blèmes en écho les uns des autres, anime ration industrielle de Mestre ; à côté de la
ESPACES ce livre, nous aurons réussi dans notre barque du pécheur, qui est encore celle
Maurice Aymard propos. L'histoire n'est pas autre chose d'Ulysse, le chalutier dévastateur des
qu'une constante interrogation des temps fonds marins ou les énormes pétroliers.
révolus au nom des problèmes et curio- C'est tout à la fois s'immerger dans l'ar-
sités - et même des inquiétudes et des chaïsme des mondes insulaires et s'éton-
angoisses - du temps présent qui nous ner devant l'extrême jeunesse de très
entoure et nous assiège. Plus qu'aucun vieilles villes, ouvertes à tous les vents de
autre univers des hommes. la Méditer- la culture et du profit, et qui. depuis des
ranée en est la preuve, elle ne cesse de se siècles, surveillent et mangent la mer.
LA MÉDITERRANÉE LA MÉDITERRANÉE LA MEDITERRANEE
Tout cela parce que !a Méditerranée est cyprès, jamais non plus, ce sont des évidente, cet être profond de la Méditer-
un très vieux carrefour. Depuis des millé- Persans. Tout ceci pour le décor. Mais, ranée, comment l'expliquer ? Il faudra s'y
naires, tout a conflué vers elle, brouillant, quant au moindre repas, que de surprises efforcer à plusieurs reprises. L'expli-
enrichissant son histoire : hommes, bêtes encore - qu'il s'agisse de la tomate, cette cation, ce n'est pas seulement la nature
de charge, voitures, marchandises, navi- péruvienne ; de l'aubergine, cette indien- qui, à cet effet, a beaucoup œuvré ; ce
res, idées, religions, arts de vivre. Et ne ; du piment, ce guyannais ; du maïs, ce n'est pas seulement l'homme, qui a tout lié
même les plantes. Vous les croyez médi- mexicain ; du riz. ce bienfait des Arabes, ensemble obstinément ; ce sont à la fois
terranéennes. Or, à l'exception de l'olivier, pour ne pas parler du haricot, de la pomme les grâces de la nature ou ses malédictions
de la vigne et du blé - des autochtones de terre, du pécher, montagnard chinois - les unes et les autres nombreuses - et
très tôt en place - elles sont presque devenu iranien, ni du tabac. » Pourtant, les efforts multiples des hommes, hier
toutes nées loin de la mer. Si Hérodote, le tout cela est devenu le paysage même de ta comme aujourd'hui. Soit une somme
père de l'histoire qui a vécu au v siècle Méditerranée : « Une Riviera sans oranger, interminable de hasards, d'accidents, de
avant notre ère, revenait mêlé aux tou- une Toscane sans cyprès, des éventaires réussites répétées.
ristes d'aujourd'hui, il irait de surprise en sans piments... quoi de plus inconcevable, Le but de ce livre, c'est de montrer que
surprise. Je l'imagine, écrit Lucien aujourd'hui, pour nous ? » (Lucien Febvre, ces expériences et ces réussites ne se
Febvre, « refaisant aujourd'hui son péri- Annales, XII, 29). comprennent que prises dans leur
ple de la Méditerranée orientale. Que Et si l'on dressait le catalogue des ensemble ; plus encore qu'elles sont à rap-
d'étonnements ! Ces fruits d'or, dans ces hommes de Méditerranée, ceux nés sur procher les unes des autres ; que la lumiè-
arbustes vert sombre, orangers, citron- ses rives ou descendant de ceux qui, au re du présent leur convient très souvent,
niers, mandariniers, mais il n'a pas le sou- temps lointain, ont navigué sur ses eaux que c'est à partir de ce que l'on voit au-
venir d'en avoir vu de son vivant. Parbleu ! ou cultivé .ses terres et ses champs en ter- jourd'hui que l'on juge, que l'on comprend
Ce sont des Extrême-Orientaux, véhicu- rasses, puis tous les nouveaux venus qui hier - et réciproquement. La Méditer-
lés par les Arabes. Ces plantes bizarres tour à tour l'envahirent, n'aurait-on pas la ranée est une belle occasion de présenter
aux silhouettes insolites, piquants, même impression qu'en dressant la liste une « autre » façon d'aborder l'histoire.
hampes fleuries, noms étrangers, cactus, de ses plantes et de ses fruits '.' Car la mer. telle que l'on peut la voir et
agaves, aloès, figuiers de Barbarie - mais Dans son paysage physique comme l'aimer, est, sur son passé le plus étonnant,
il n'en vit jamais de son vivant. Parbleu ! dans son paysage humain, la Médi- le plus clair de tous les témoignages.
Ce sont des Américains. Ces grands terranée carrefour, la Méditerranée hété-
arbres au feuillage pâle qui. cependant. roclite se présente dans nos souvenirs
Fernand Braudel
portent un nom grec, eucalyptus ; comme une image cohérente, comme un
oncques. n'en a contemplé de pareils. système où tout se mélange et se recom-
Parbleu ! Ce sont des Australiens. Et les pose en une unité originale. Cette u n i t é © Flammarion, 1985
Études
Septembre 1993
Des objectifs pour le journalisme *
Claude-Jean Bertrand
ENDANT des siècles, la livraison de l'information (D
a été gênée par des obstacles matériels ; puis par
des obstacles politiques : aussitôt que la presse est née, son
développement a été freiné par les gouvernements et les tri-
bunaux. Depuis le début du xxc siècle, une autre barrière à
l'information est apparue : l'obstacle économique. Trop de
patrons de médias, et tous les annonceurs, traitent les médias
seulement comme des moyens de gagner de l'argent.
Pourtant, ces trois facteurs ne sont pas seuls responsables de
la désinformation. Et même, ces trois facteurs ne sont pas les
pires - car ils sont bien connus et sont souvent dénoncés. La
pire menace vient sans doute des professionnels des médias
eux-mêmes, qu'il s'agisse de leurs péchés propres ou de leur
tolérance vis-à-vis des péchés des patrons de médias.
2 Je suis persuadé que les médias sont meilleurs
aujourd'hui qu'ils n'ont jamais été. Ils restent néanmoins
médiocres. Et leur amélioration n'est pas simplement sou-
haitable : le sort de l'humanité en dépend. Il est des Occiden-
taux pour penser que pour obtenir des médias de qualité, il
suffit d'étendre la liberté politique à la presse de tout le
globe. Or la liberté est nécessaire mais elle n'est pas suffi-
sante. C'est une condition ; ce n'est pas le but. Le but, c'est
l'existence de médias qui servent bien les citoyens, tous les
* Bon nombre des idées présentées dans ce texte son! empruntées à la Earl
Engltsh U'diire. 1992. conférence que j'ai été invité à taire à la Faculté de
journalisme de l'Université du Missouri en avril 1992.
citoyens. Partout dans l'Occident industrialisé, les médias n'a qu'à peine commencé. L'évolution est ralentie par le
commerciaux ont joui de la liberté politique depuis long- conservatisme de la profession.
temps, et pourtant, bien souvent, ils ont fourni un service 6 De même, on doit cesser de penser que le « journal »
déplorable. est à publier à des moments déterminés. Il faut offrir au
3 Je présenterai ici douze objectifs pour des journa- citoyen le type d'information continue qui s'est répandu aux
listes : douze améliorations possibles. La plupart de ces États-Unis, pour la radio dans les années 70, grâce aux sta-
améliorations sont liées à une redéfinition du produit tions « Ail News » (modèles de France-Info), et dans les
médiatique et des informations. Je reprends ici ces points. années 80 pour la télévision, à commencer par CNN.
faisant remarquer d'emblée que l'obstacle interne à une L'usager doit aussi pouvoir passer commande à des
bonne information ne consiste pas, comme on le prétend banques de données audio et vidéo, en vue d'obtenir son
parfois, en l'existence de quelques reporters malhonnêtes, propre mélange de « nouvelles », ou plutôt d'informations,
mais dans la combinaison de propriétaires de médias bor- à tout moment, sur tout sujet.
nés, de journalistes mal formés et, principalement, de 7 Distinguer le divertissement de l'information. - On
quelques traditions puissantes au sein du journalisme. distingue traditionnellement entre journaux populaires et
4 Ne pas imposer aux informations une taille on une journaux de qualité. On ferait mieux de distinguer entre
heure fixe. - Naguère encore, quand les médias partici- feuilles de divertissement et feuilles d'information. Mais il
est encore difficile de faire admettre aux journalistes que
paient de l'industrie traditionnelle, ils ont pris l'habitude de
l'usager consomme beaucoup de ce qu'ils croient être des
fabriquer un produit de taille presque identique tous les
« nouvelles » comme du divertissement. Par là, je ne fais pas
jours, à la même heure, avec le même mélange d'ingré-
allusion seulement à un divorce à la cour d'Angleterre, mais
dients. Ils continuent d'agir ainsi, sans tenir compte de ce
aussi aux résultats sportifs, à une attaque contre une banque,
qui vient de se passer dans le monde. Ils rétrécissent ou ral- à l'éruption d'un volcan lointain, à un accident d'avion, et
longent les « nouvelles » ; selon le cas, ils occultent des même à certaines guerres pourvu qu'elles aient lieu assez
informations importantes ou font du rembourrage, afin loin, comme la guerre du Golfe. Loin de moi l'idée que le
d'emplir sans déborder l'espace ou le temps dont ils dispo- divertissement médiatique soil méprisable. Le divertisse-
sent. Le compte rendu de l'actualité en est déformé. ment est crucial dans la société moderne et il est fourni sur-
5 Ceci est évitable : le remède tient dans une redéfini- tout par les médias : c'est là une de leurs fonctions majeures.
tion des « nouvelles » et dans l'utilisation de la technologie Mais, dans la mesure où c'est possible, on doit distinguer le
disponible pour une distribution continue de l'information. divertissement et l'information sérieuse. Il ne faut pas laisser
Des paquets de nouvelles préparés par des journalistes peu- le premier éliminer la seconde ou la « futiliser » ( 1 ).
vent désormais être taillés par ordinateur de façon à satis-
faire les besoins et les goûts, réguliers ou exceptionnels, de
( 1 ) Un mémorable exemple de « Invialisation » : en 1976. après que le futur
chaque uSager. La taille des paquets peut aussi varier selon Président Jimmy Carter au donne une excellente interview à Ptayhoy. ou i!
l'actualité, et ils peuvent être livrés par des canaux divers en exposait son programme, tous les médias états-umens ont monté en épingle
des lieux divers. Ce mode de fabrication et de distribution son bref épilogue un peu coquin.
8 éviter les omissions dues à la partialité. - L'omis-
sion est le pire des péchés des médias. Certes, elle peut être des « nouvelles ». qui ne constituent souvent qu'une imbé-
due à la nature du média (la radio, par exemple, ne dispose cile mosaïque de petits événements. Ils devraient se soucier
que de 24 heures par jour) ou à un irrémédiable manque de d'information. Cela implique plus d'un changement.
ressources ; mais elle peut aussi être due à la rapacité des 12 D'abord, il faut mettre davantage l'accent sur le
propriétaires et à des tares chez les journalistes. Un exem- « verre à demi plein », les événements positifs. Les bonnes
ple tiré d'une presse qui est souvent citée en exemple. nouvelles sont-elles dépourvues d'intérêt : telle la fin de la
Chaque fois qu'on lit un quotidien de grande ville états- seconde guerre mondiale, la découverte de la pénicilline,
unienne, on est choqué de constater l'énorme proportion de l'arrivée d'hommes sur la lune ou l'écroulement du commu-
publicité (2) et l'infime proportion de nouvelles interna- nisme ?
tionales. 13 Par ailleurs, l'actualité ne doit pas consister seule-
9 Le progrés que je souhaite à cet égard est lent à se ment dans les nouvelles qu'apprécié la minorité des riches
réaliser, malgré la pression des diverses minorités dans la ou la minorité au pouvoir, clients, sources ou amis des
population de chaque pays. Même les meilleurs médias ont patrons des médias. L'information de qualité, c'est tout ce
du mal à abandonner leurs préjugés, filtres à information que chacun des groupes dans la population juge important
qui, selon les cas, sont ceux des patrons de médias, des pour son bien-être. Et ce ne sont pas, comme le voudrait la
annonceurs, des « hommes jeunes blancs cultivés » qui tradition, les seules nouvelles politiques, c'est-à-dire des
peuplent les salles de rédaction, de la partie riche de la nouvelles sur le gouvernement, local ou national.
population, ou encore, simplement, de la majorité dans le 14 L'échec des médias classiques dans ce secteur a été
pays. Tous ces acteurs de la communication sociale font évident aux Etats-Unis à l'époque où ils ne donnaient rien,
donc obstacle à une bonne information, mais, au bout du ou presque, sur la minorité noire, avec pour effet les
compte, les professionnels, les journalistes, sont respon- grandes émeutes en chaîne dans les ghettos à la fin des
sables. années 60. Ni la paresse, ni l'avarice, ni un souci myope de
10 Deux exemples de distorsion et d'omission. Les plaire à l'usager, ni la tradition ne doivent empêcher les
Français sont les plus gros consommateurs de boissons médias d'informer sur le monde entier, chaque nation et
alcoolisées au monde ; il est rare que leurs médias traitent chaque groupe qui le constituent, et aussi l'évolution qui a
du coût véritable de l'alcoolisme. Tous les médias occiden- mené au présent état de fait (3).
taux, d'autre part, occultent des maladies tropicales qui
tuent depuis longtemps davantage que le sida, et auxquelles
on consacre peu d'argent et de recherche. (3) Je trouve remarquable qu'un hebdomadaire au été lancé en I*W], en
France, sous le litre Courrier international, qui choisi! et iraduit rapidement
11 Changer la définition de l'information. - Même des articles tirés d'autres quotidiens et périodiques du monde entier, des
quand ils n'omettent rien, les médias s'occupent avant tout textes qui donnent au lecteur français un point de vue différent sur les
affaires de son propre pays et des autres. A la même époque, toujours en
France, la télévision publique FR3 avait une émission du matin intitulée
(2) 60 % de la surface des quotidiens en moyenne. Continentales, qui présentait, avec de;, sous-litres, des journaux rdé'.i^é'-
étrangers de la veille.
poursuite de la Guerre froide. Comment expliquer autre-
15 Faire apparaître les pseudo-événements pour ce ment que ce premier incident sud-coréen ait été si peu traité
qu'Us soni. ~ Un défaut de l'information a été signalé
depuis de nombreuses années : beaucoup de ce qu'on publie alors et jamais plus mentionné ensuite ?
17 II y a une autre façon plus importante pour les
comme « nouvelles » est fabriqué par ceux qui profitent de médias de chercher la réalité derrière l'apparence (5). c'est
la publication. Daniel Boorstin les a baptisées des « pseudo- de manifester l'existence de phénomènes graves mais
événements » (4) : conférences de presse présidentielles, encore invisibles, hors des feux de l'actualité, sous la sur-
festivals de cinéma, défilés de protestation... De tels événe- face de la réalité, et d'identifier des mouvements profonds
ments ont l'avantage, aux yeux des patrons de presse, d'être avant qu'ils n'émergent sous la forme de problème^ sérieux,
(pour la plupart) annoncés bien à l'avance et parfaitement sinon de catastrophes. Il n'est pas difficile de trouver des
« conditionnés » pour leur usage par les médias. Bien sûr. exemples de tendances majeures qui n'ont pas été repérées
il arrive que des nouvelles de ce genre aient de l'impor- à temps : quels grands médias en France ont enquêté dans
tance, mais elles doivent être soigneusement sélectionnées les années 70 sur les ghettos de banlieue où s'accumulaient
et commentées : les usagers doivent pouvoir en connaître la Maghrébins et Africains, et ont prévu la criminalité et les
vraie source et la nature. émeutes qui s'ensuivraient, et annoncé la conséquente mon-
16 Chercher la réalité sous les apparences. - De deux
façons. D'abord, les médias doivent s'efforcer de discerner tée d'une extrême-droite fasciste ?
18 Rendre les nouvelles compréhensibles. - Les gens de
l'actualité réelle, au lieu de se faire l'écho des positions offi- plus faible culture trouvent les médias d'information
cielles. Prenons un exemple : deux avions de ligne sud- ennuyeux, particulièrement la presse écrite, surtout parce
coréens ont eu, à plusieurs années d'intervalle, des ennuis qu'ils ont du mal à les comprendre : ils ne connaissent pas
avec les Soviétiques On a beaucoup parlé du deuxième, bon nombre des mots et des concepts que les médias utili-
abattu par deux chasseurs au-dessus du Pacifique. Le pre- sent. Mais la plupart des citoyens, même intéressés, ne peu-
mier, lui, se trouva déboussolé au-dessus du pôle et. au lieu vent souvent pas comprendre les antécédents d'un événe-
de voler vers les États-Unis, se dirigea vers l'URSS ; il fut ment, son contexte, sa signification, ses éventuelles consé-
repéré au-dessus d'une base militaire, poursuivi et endom- quences. Une raison de cette carence : la formation insuffi-
magé par des chasseurs, mais continua sa route vers le sud sante des gens de presse. Une autre : la vieille habitude de
sur plusieurs centaines de kilomètres, jusqu'à se poser tran- s'adresser à une élite, de tenir pour acquise une vaste
quillement sur un lac gelé. Un incident international banal '.'
Bien sûr que non ! Il démontrait que l'Union soviétique connaissance du monde.
(Vêtait pas la formidable forteresse qu'on prétendait. Mais
voilà qui était désagréable pour ceux qui avaient intérêt à la
(5KC'ûtaii là un but majeur des techniques réunies ttons les années 70 par
ip Me\er
nuip
iPhilip .Mi:\ur sous
MIUS leii. nom
ni'iii de
uv juvcisiiin
,.... ,. îaurnalixm
, _., ou .1 journalisme vaenii-
t'iquc a, i:oiiMSl:ii\ à appliquer les méthodes des sciences sociales et la puis-
|4| Daniel J. Boorstin. Chc liante I lim 'iv/i/.ï m \nn-rn\t. sance îles ordinateurs à l'analyse d'arehivo ou d'enquêlcs {\itir The Vi'ir
S*w York, Atheneurn. l % l lùdmon de MHIS-UIIC ,i|OUI L - •ni, Bloommgton, Indiana DP. 1941).
I97U.
19 Rendre intéressantes les nouvelles importantes, - stimulante, sur la recherche et les réalisations dans un sec-
Les médias doivent non seulement rendre compréhensibles teur ou l'autre de la science et de la technologie. Les médias
les informations importantes, mais aussi les rendre intéres- doivent ainsi se comporter non seulement en messagers,
santes pour tous. mais aussi en explorateurs et initiateurs. Diversifier et
Si l'on veut que la société fonctionne bien, il faut que tous aiguiser l'appétit est presque aussi important que de fournir
ses membres aient une idée juste du vaste monde, qu'ils y de la nourriture. Il y a de moins en moins de différence
soient ou non naturellement enclins. S'ils n'y sont pas entre journalistes et enseignants : les deux contribuent à la
enclins, il faut que les médias stimulent leur intérêt, en formation continue indispensable pour tous.
montrant, par exemple. l'effet que tel événement peut avoir 22 Animer le débat public, — Les médias devraient
sur leur vie personnelle. La réalisation n'est pas facile (6). considérer comme une de leurs fonctions d'encourager à la
20 Montrer gué des nouvelles intéressantes sont impor- participation dans la vie sociale ; d'exciter la pensée et
tantes aussi...- Pour montrer qu'un fait divers ne relève pas l'imagination de chaque citoyen au sujet de son environne-
uniquement du divertissement, on n'a pas seulement besoin ment, de promouvoir des débats publics vigoureux sur les
de savoir-faire et de temps, mais aussi d'une conception dif- questions d'intérêt général. Hélas, ils ont la mauvaise habi-
férente du journalisme. Par exemple : un homme a abattu sa tude de céder à la majorité ou à des groupes de pression.
femme et ses six enfants avec un pistolet mitrailleur. Joli D'une manière générale, ils ont peur des idées neuves, non
massacre avec du sang, des cris et des larmes ; mais que dit- conformistes ou extrêmes. Il faudrait au contraire qu'ils
il sur la société où il a eu lieu ? À quoi est-il dû ? À l'al- encouragent la discussion de questions brûlantes, avec la
coolisme, à un manque de surveillance psychiatrique, au participation des minoritaires de toute espèce, même de
chômage, à l'obtention trop facile d'armes automatiques ? ceux que la majorité trouve répugnants.
21 Traduire le discours scientifique. - Les médias doi- 23 Dans ce style, USA Today {quotidien national états-
vent interpréter e( faire connaître les découvertes, les sou- unien né en 1982) a innové en publiant tous les jours sur la
cis et les pensées des chercheurs et savants. La descente même page des « libres opinions » systématiquement oppo-
goutte à goutte de l'information, depuis la revue savante sées à son éditorial. Bien avant cela, la télévision française
jusqu'au quotidien local, est fort lente et incomplète. Le peu avait pris l'habitude de faire débattre avec des journalistes,
que font les newsmagaiines et les documentaires de télévi- à des heures d'assez bonne écoute, des politiciens
sion est insuffisant. Tous les journaux, imprimés ou audio- d'extrème-gauche et d'extrême-droite.
visuels, devraient publier chaque jour une chronique claire. 24 Faire campagne pour des réformes. - C'est une des
fonctions des médias que de dénoncer les tares sociales (7).
(6) Le Daily Mirror, quotidien national populaire anglais, y érait parvenu
En 1991, \ePMladelphia tnquirer a publié une remarquable
dans les années 60 avec une rubrique intitulée « Mirrorscope ». Mais Rupert
Murdoch. magnat australien, a tait glisser alors la presse britannique plus
bas qu'elle n'avait jamais été, avec un régime de seins nus. de commérages (7) Cela est clairement énoncé dans un des meilleurs codes américains de
diffamatoires, do crimes, de sports et de chauvinisme exacerbé - autrement déonrologie, celui de l'APME, l'Associated Press Managing Editors
dit. à coups de divertissement Associai ion.
BB
lement, l'humanité.
Claude-Jean BERTRAND
Institut français de presse
Université de Pans-ll
ANNEXE
» *> Ils sont environ une
U n S , è m e facteur es, ,e prog«s de la =ce
q«-
18) ., Amenca Wh» Wcm Wrong " . .L'Aménque : «
des médias élaborent par consensus ; - des critiques les perceptions du public, les contenus et surtout certaines
internes et des « commissions d'évaluation des contenus » absences de contenu, c'est-à-dire les omissions ; - les asso-
(comme celles qui ont été mises en place par des quotidiens ciations de consommateurs et d'usagers des médias ; - et
japonais dès les années 1920) pour scruter les journaux surtout l'enseignement universitaire.
chaque jour et s'assurer que la déontologie n'est pas violée ; Enfin, certains « M.A.R.S. » sont presque inconnus
- les journalistes spécialistes des médias (média reporters) et rarement mentionnés d'un côté comme de l'autre de
qui observent toute l'industrie d'un œil critique ; - de dis- l'Atlantique : - les questionnaires d'exactitude et d'équité
crets organismes de liaison mis en place par les médias et postés ou publiés à certaines époques par quelques petits
quelque profession avec laquelle ils sont presque inévita- journaux états-uniens ; - la société des rédacteurs, une
blement amenés à entrer en conflit ; - \'ombudsman de association de journalistes travaillant pour une publication
presse, salarié par un journal, une slation de radio ou de ou une entreprise de radiotélévision, qui souvent possède
télévision, pour recevoir et traiter les plaintes des usagers ; des actions dans le capital de la compagnie et donc une
- des conseils de presse locaux, occasions de rencontre
pour les professionnels des médias locaux et des représen-
tants de la population ; - des conseils Je presse régionaux
voix dans l'établissement de la politique rédactionnelle. La
première à attirer l'attention fut, en 1951, celle du quotidien
Le Momie : - la société de lecteurs, encore plus rare, est
s
et nationaux, organismes d'arbitrage (comprenant patrons, une association d'usagers qui a acheté des actions dans un
professionnels et usagers) mis en place par les médias à média et exige d'avoir son mot, même modeste, à dire dans
l'intention des citoyens qui ont un grief contre une publica- la fixation de la politique générale de l'entreprise.
tion ou une station.
Certains autres « M.A.R.S. » ne sont pas d'ordinaire
mis sur le même plan que ceux dont il vient d'être question :
- les encadrés de correction très visibles ; - le courrier des
lecteurs et les tribunes libres ; - les enquêtes d'opinion
régulières ; - la présentation systématique d'opinions
contradictoires au sujet de toutes les questions d'intérêt
public ; - Information continue des professionnels (grâce à
des ateliers d'un jour, des séminaires d'une semaine, des
périodes universitaires de plusieurs mois) ; - des livres
écrits par des professionnels et des revues spécialisées dans
la critique des médias (comme, aux États-Unis, la Washing-
ton JR ou la St Louis JR).
D'autres « M.A.R.S. » sont extérieurs au monde des
médias : - la recherche non commerciale, initiée par des
universitaires, sur des sujets comme la distorsion volontaire. ©Études, 1993

û.
c o

vi Q-
y: Q' O n- ?"
11=11 |1 i || IN ? ^1
" 2. ~ S F1 =". •- 5: 3 £L)
o- o E 2 n
O '.n -^ ^_
rt
-1 C C
r+
ï
2 a
—3 3
_ O. » 3 n>
(Tï> C

§ 2" § £~ ^ £.
c
0)
IHNi
-" .c — •
Ci- ^, '-"
o w
—'
3
O
C
<
= - '

.
in
n _ ' C C - = = ^ ^ ? —
?Ti p ^ r , -• 3 i C 3 w
CR -0 S' ^ w T3 tu 2 c . 2 - 3 r ^ ? r - ^ 3
c
X ^ i 5 3 = - " S ^ ° 5- 1 s.
X
CL
O
s-g a.- -Si '"•

- « i g S 5=
&>' l_=
C. ^
^ ^ W
—T
,„
t/1
11
"3 s- o
n
°- Oj-5 So-S-g-gll^
n 31 ° 3 p" o o —. _i .yi ^ ^ ' r i s
• =. 3' S ' 2. 2' — c
«a ' =T -• Q. « 5' = ç ? 5 - ô ' p 5
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

aux échanges numériques sont devenues coût inférieur ; de surcroit, la copie choix techniques américain (Office of société. Aujourd'hui encore, aux États-
considérables. Aux États-Unis, au début numérique d'un document ou d'un pro- Technology Assessment) recommandait, Unis, les règles qui définissent la pro-
des années I990, les branches d'activité gramme est en tous points identique à en 1986, de renoncer à la protection sur priété littéraire et artistique sont fondées
liées au droit d'auteur, qui couvrent prin- l'original. le droit d'auteur tel que nous le connais- sur leurs capacités à promouvoir les
cipalement les secteurs de l'édition, de Toutefois, ces auteurs ne sont que les sons aujourd'hui et de chercher de nou- progrès des sciences, des arts et des
l'audiovisuel et de la musique, annon- passagers d'un gigantesque paquebot de veaux principes. lettres.
çaient un chiffre d'affaires annuel de transferts de données, obligés de s'adap- En France et aux États-Unis, au fil des
plus de mille milliards de francs, soit ter à des lois communes. L'enthousiasme réformes, les parlements ont augmenté
L'état de la loi la durée de la protection des auteurs,
approximativement 3.6 pour cent du pro- des éditeurs pour les nouveaux produits
duit intérieur brul américain. En 1993, est tempéré par la crainte qu'une seule L'origine des lois sur le droit d'auteur est étendu le champ d'application de la loi à
lorsque les sociétés QVC et Viacom se vente, à une bibliothèque ou à un parti- ancienne, et l'évolution de ce droit a été de nouveaux types d'oeuvres et ratifié
disputèrent la Paramount, l'enjeu était culier, ne soit suivie de la reproduction tortueuse. L'un des tout premiers conflits des accords internationaux comme la
les droits d'auteur des films d'archives. du document sur tout le réseau Internet, eut lieu au vr siècle, en Irlande : saint convention de Berne. 1826. Les signa-
Depuis 1981, la Société américaine des ruinant les espoirs d'exploitation com- Colomba avait recopié un manuscrit de taires de cette convention s'engageaient
auteurs a poursuivi en justice des socié- merciale et de développements ulté- l'auteur latin Psalter, alors que le pro- à protéger légalement, dans leur pays,
tés d'édition comme celle du New York rieurs. priétaire de l'original, Finnian de Druim les auteurs dont les œuvres de l'esprit
Times pour la vente non autorisée de Les problèmes posés par l'application Finn, y était opposé. Le roi arbitra en ces entrent dans le champ d'application de
copies informatiques des œuvres de ses des lois sur la propriété littéraire et artis- termes : « De même que le veau appar- cette convention.
membres. Même les universités cher- tique dans l'utilisation des nouveaux tient à la vache, la copie appartient à En 1976, la dernière réforme de la loi
chent aujourd'hui à augmenter leurs médias sont nombreux. Dans quelle l'original », Une guerre un résulta, que américaine sur la propriété littéraire et
revenus en conservant les droits des tra- mesure les œuvres sont-elles protégées les « pirates » remportèrent, conservant artistique a complété la précédente. Elle
vaux qu'elles produisent, plutôt que de sur les réseaux? Le cyberespace est-il leur copie ; celle-ci devint l'ouvrage concerne les livres, les compositions
les laisser aux éditeurs. un Far West moderne où chacun peut fétiche du clan Colomba, aujourd'hui musicales, les œuvres dramatiques, les
La majeure partie des droits de repro- piller les créations des autres en numéri- conservé à la bibliothèque de l'Acadé- pantomimes, les œuvres chorégraphi-
duction concerne des produits de grande sant les images ou en copiant des mie royale irlandaise, à Dublin. ques, les œuvres de dessin, de peinture,
diffusion comme les livres, les films et fichiers ? De nombreuses œuvres sont le Le décret de la reine Anne (statut? of d'architecture, de sculpture, de lithogra-
les produits dérivés (le roman Jurassic fruit de collaborations : à qui appartien- Anne), promulgué en 1710 en Angle- phie, les œuvres cinématographiques et
Park, par exemple, a donné naissance à nent-elles et qui peut y avoir accès ? terre, fut la première loi moderne pour autres créations audiovisuelles (les bre-
un film, à une cassette vidéo, à une cas- Comment peut-on déterminer l'étendue la protection des droits d'auteur : aupa- vets et les marques sont régis par des lois
sette audio, à des T-shirts, à des jouets et de la propriété de chacun, en supposant ravant, certains auteurs et éditeurs béné- spéciales, tout comme les secrets de
à divers produits). Aux États-Unis, les même que la notion de propriété ail un ficiaient de privilèges royaux particu- fabrication).
publications universitaires et littéraires, sens ? Comment peut-on dédommager le liers. Cette loi reconnaissait des droits La loi protège le titulaire d'une œuvre
qui sont la mémoire scientifique, cri- propriétaire d'une œuvre lorsque son tra- aux auteurs et limitait leur durée. Elle de l'esprit en lui octroyant le droit d'in-
tique et artistique de ia société, ne repré- vail est dispersé mot par mot, phrase par servit de modèle pour la rédaction de la terdire à quiconque de la reproduire, de
sentent qu'un demi pour cent de l'en- phrase ou même, pour la musique, note première loi régissant les droits d'auteur l'adapter à un autre mode d'expression,
semble, soit cinq milliards de francs par par note 7 Quelle est la responsabilité aux États-Unis, en 1790. Les premières de procéder à la commercialisation d'une
an environ. Les publications financées des opérateurs du réseau Internet, qui lois françaises furent deux textes révo- copie de l'œuvre, de la représenter ou de
par l'État et distribuées librement jouent devraient être attentifs aux risques de lutionnaires, l'un relatif aux spectacles, l'exposer sans autorisation préalable.
un rôle négligeable dans ce marche. violation de la loi par le nouvel outil en 1791. et l'autre aux droits de pro- La loi limite toutefois les droits d'au-
Les chercheurs et les enseignants pré- qu'ils mettent à la disposition du public ? priété des auteurs d'écrits ; des composi- teur de plusieurs manières. La plus
fèrent souvent la large diffusion de leur En France, l'Office parlementaire des teurs, des peintres et des dessinateurs, importante de ces limitations est la
travail à des rémunérations. Le réseau choix scientifiques et technologiques en 1793. Des deux côtés de l'Atlantique, reconnaissance de l'« usage loyal » (fair
Internet leur convient bien, parce qu'il n'a, à ce jour, rien publié sur les réseaux les lois sur la protection des auteurs use), qui autorise, sous certaines condi-
transmet les informations plus rapide- informatiques au regard des droits d'au- furent un compromis entre les intérêts tions, la duplication sans paiement de
ment que les supports imprimés et à un teur, mais, aux États-Unis. l'Office des privés et le besoin d'information de la droits ni de permission. L'usage loyal

«POURl.A SCIENCE. N" 227 Sl-.PHlMIiRP 1W «1POI RIASCIF.NCI N"2?7


ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

permet de faire des copies à des fins de Lehman a rejeté le pire des scénarios,
recherche, d'enseignement, de journalis- liberté des utilisateurs. La Commission donc dupliqué plutôt que.transféré. Les
qui ferait baisser les revenus des éditeurs propose, par exemple, que chaque infor- moyens légaux par lesquels le posses-
me, de critique, de parodie ou de conser- et des auteurs au point que ces derniers
vation par tes bibliothèques. mation, dès lors qu'elle transite, pour un seur de la copie électronique d'une
n'auraient plus intérêt à produire de nou- œuvre pourrait la vendre ou la donner,
La propriété littéraire el artistique est temps aussi court soit-il. sur la mémoire
veaux ouvrages et à les mettre sur le un geste parfaitement légal pour un livre
chaudement débattue dans tous les pays d'un ordinateur, soit considérée comme
marché. F.n effet, la Commission recom-
depuis plusieurs années, notamment « fixée » au regard du droit d'auteur. En imprimé, restent à définir. Il en résulte
mande des contrôles stricts de la dupli-
parce que l'usage de la photocopie ou du revanche, la loi actuelle sur la propriété que, dans le monde informatique, la pos-
cation par moyens informatiques. En
prêt en bibliothèque ont rendu caducs les littéraire et artistique ne protège que les sibilité de se faire une opinion en jetant
revanche, les bibliothèques et les ser-
accords anciens. Cependant, le cyberes- œuvres de l'esprit originales fixées sous un coup d'ceil sur un ouvrage (ce qui est
vices éducatifs, les serveurs de réseau ou
pace s'est initialement développé en une forme tangible, c'est-à-dire lorsque admis dans les bibliothèques ou dans les
les particuliers sont hostiles aux proposi-
marge des secteurs au le droit d'auteur leur forme est suffisamment stable pour librairies) disparaîtrait. Feuilleter des
tions, craignant un monde où plus rien
était protégé. De nombreux textes et ne sera accessible, lisible ou reproduc- leur permettre d'être vues, reproduites ouvrages «en ligne», sans autorisation
images d'origines diverses transitaient liblc sans autorisation préalable ou paie- ou communiquées. préalable, serait considéré comme une
vers le monde informatique, alors que ment. De nombreuses bibliothèques ont Cette distinction est fondamentale. Si violation de la loi.
peu d'œuvres informatiques faisaient le déjà des difficultés avec les coûts de l'in- les recommandations de la Commission Les universités et les autres organismes
chemin inverse. Cette dissymétrie a rapi- formation, particulièrement ceux des sont suivies, chaque personne qui trans- qui fournissent des accès au réseau
dement évolué, et la rapide colonisation livres scientifiques, qui augmenteront mettra, entre deux ordinateurs, une Internet sont particulièrement préoccu-
du réseau Internet par les autres médias, d'environ dix pour cent chaque année. information protégée, sans avoir l'autori- pés par cette proposition de la Commis-
au milieu des années I990, a montré que Le budget de l'obtention d'informations sation du possesseur violera la loi. F.n sion, qui prévoit qu'ils seraient responsa-
les frontières étaient tombées. Le rapport par les réseaux, qui permettent aux effet, le groupe de travail recommande bles des infractions à la législation sur
d'une commission d'experts américains. bibliothèques e( aux écoles d'accéder à que la loi soit modifiée pour reconnaître les droits d'auteur commises par leurs
en l9')4, a avivé le débat. des documents dont elles ne disposent que la transmission est du ressort exclu- utilisateurs. Cette situation les obligerait
pas directement, est devenu supérieur au sif du possesseur des droits. Dans ces à faire la police informatique, en les
Le grand débat budget consacré à l'achat des livres cl des conditions. la seule consultation d'une obligeant de vérifier la légitimité de
magazines. Aussi les bibliothécaires page web, qui implique la transmission données que les étudiants, le personnel
Par courrier, par télécopie et par courriel- voient-ils d'un mauvais itil que l'on pré- entre un serveur et un ordinateur person- ou les utilisateurs lisent ou publient.
électronique, cette commission, dirigée nel, sera considérée comme un acte illé-
conise une généralisation des licences
par Bruce Lehman, a reçu les réactions à
d'utilisation. Du point de vue du prix, de gal si clic n'est pas précédée d'une auto- Un équilibre nécessaire
la présentation de son premier rapport.
la responsabilité et de la durée de pro- risation.
Les principaux acteurs du marché des Si la Commission propose un futur très
priété, les licences d'utilisation avanta- La Commission refuse également
droits d'auteur envoyèrenl ainsi plus (Je éloigné de la tradition d'un accès public
gent les fournisseurs d'information. Si les d'étendre aux duplications électroniques
I 000 pages de commentaires. En sep- . accords contribuent à maintenir un prix aux données, des moyens techniques très
la notion d'épuisement du droit par la
tembre 1995, le groupe a remis la ver- simples pourraient contourner ces obs-
excessif pour l'utilisation de l'information première vente : toute personne qui
sion définitive de son rapport sous la
électronique, les opérateurs des réseaux achète un livre ou un magazine peut tacles. La Commission insiste sur les
forme d'un livre blanc qui contient des prospéreront, mais les bibliothèques n'au- revendre ou donner cet exemplaire sans aspects techniques de transmission et de
propositions pour réactualiser les lois
ront plus les moyens d'y avoir accès et les payer de droits supplémentaires. Cette résidence des données, mais de nom-
sur le droit d'auteur. Naturellement, les fournisseurs péricliteront. Un compromis possibilité serait interdite pour l'infor- breux spécialistes trouvent leur analyse
débats qui onl eu lieu aux Etats-Unis ont doit donc cire trouvé. mation numérique. insuffisante sur ce plan. Un examen plus
été largement commentés dans les autres
De surcroît, aux yeux de nombreux C'ette recommandation, i I logique en complet des possibilités techniques de
pays membres de l'Union de Berne. citoyens et de représentants du milieu
D'une manière générale, les industries apparence, est fondée sur la constatation transfert de fichiers, qui inclut les
éducatif, les propositions de la com- que, lors d'un transfert électronique, méthodes de codage pour limiter le
de l'information ont accueilli les recom- mission Lehman modifient l'équilibre
mandations du livre blanc avec enthou- le fichier est physiquement présent sur nombre de copies permanentes lors du
que la loi actuelle avait instauré entre le au moins deux ordinateurs, ne fût-ce transfert, pourrait étendre les travaux de
siasme et soulagement : la commission respect des droits des auteurs et de la que quelques millisecondes, et se trouve lu Commission.
flPCH'R LA SCIENCE . N° 227 SI.PII'MMRI I')')(.
«> PUl'R l.\E M • 127 SI PT1 MHRf- IW
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « LES DROITS D'AUTEUR DES ŒUVRES NUMÉRIQUES »

D'autre part, pour que l'accès aux


organismes universitaires de procéder à lions face à la loi. A une époque où cha- Pour plus d'informations sur les lois
documents informatiques sans paiement
des expériences sur la consultation élec- cun est un éditeur potentiel pourvu qu'il américaines concernant les droits d'au-
systématique de droits soit admis dans
tronique de documents, généralement teur :
certains cas, on doit se préoccuper de possède un ordinateur et un modem, les
dans le cadre d'accords écrits. http://www.library.yale.edu/
l'usage loyal du copiste et tenir compte textes qui régissaient le comportement
Les détenteurs des droits d'auteur sem- okerson/copyproj.html
de ce droit pour déterminer un compro- de quelques entreprises s'appliqueront à
blent encore loin de poursuivre en justice
mis entre le respect des droits des auteurs des millions de personnes.
les bibliothèques et les écoles. Les scien-
et ceux des utilisateurs. Un tel compro- La prochaine loi sur la protection des
tifiques ou les enseignants qui créent des
mis fut déjà recherché dans le cas de la droits d'auteur déterminera l'avenir des
pages web sont parfois, formellement, Légendes des illustrations
photocopie des ouvrages imprimés. techniques d'information. La puissance
dans l'illégalité, mais ils sont rarement (non reproduites)
La définition de l'usage loyal du de ces nouvelles techniques bouleverse
poursuivis. Et s'ils l'étaient plus qu'au-
copiste reste toutefois ambiguë dans le les habitudes de travail du monde créatif
jourd'hui, l'avenir de la distribution élec-
cadre des réseaux informatiques. La et les moyens par lesquels les auteurs et
tronique de l'information s'assombrirait. 1. DANS LI-S UHRAIRIES I-T LI-.S Bllil IOTIII (Jl I S.
Commission l'envisage peu, bien qu'elle les éditeurs publient les œuvres. Peut-on
Pour de nombreux participants des un admet la consultation gratuite des
précise que la notion d'usage loyal doit simultanément satisfaire les utilisateurs.
groupes informels de discussion, les ouvrages. Des modifications de In loi sur la
perdurer dans le monde des connexions qui veulent accéder simplement à une
désaccords méritent d'être entretenus. protection des droits d'auteur limiteraient les
informatiques, et que la nécessité dimi- information bon marché, et les auteurs et
Beaucoup pensent que la technique n'est possibilités analogues d'exploration électro-
nuera avec la généralisation des licences éditeurs, qui entendent tirer des publica- nique el pourraient même les inlcrdirc. sauf
pas suffisamment au point pour que l'on
et d'autres moyens de paiement automa- tions les moyens honorables de leur sub- après oblcntion d'un accord préalable. Bien
établisse des directives claires sur la
tique. Les représentants des utilisateurs sistance ? Nous devons agir sagement qu'il paraisse improbable qu'un éditeur inlcr-
notion d'usage loyal. Ils rechignent à
et des lecteurs regrettent ces impréci- pour que tous les acteurs et les utilisa- disc complèiement aux utilisateurs de se pro-
faire des recommandations législatives
sions troublantes. Si la Commission a teurs des nouvelles techniques profitent mener dans leur calaloguc de publications, les
tant que toutes les implications ne sont
pris une position ferme en faveur des de la révolution de l'information. auteurs craigncn! qu'une ouverture même par-
pas claires. Il faudra encore attendre
droits des auteurs, elle n'a pas su clari- tielle ne les pénalise.
pour parvenir à un compromis accep-
fier les droits des utilisateurs.
table sur la notion d'usage privé. 2. Dt:. NUMRRHJSFS COP1KS D'i'N TI.XT1- IW'OH-
Elle a cependant continué à réunir
Malgré toutes les critiques que certains Ann OKERSON, bibliothécaire adjointe MArigui sont parfois réalisées lors de son
informellcment, chaque mois, des utili-
aspects du rapport Lehman ont suscitées. de l'université de Yalc, travaille sur la transfert entre deux sites du réseau Internet. Il
sateurs, des auteurs, des bibliothécaires,
un certain consensus existe. Dans de consultation électronique des ouvrages. arrive, par exemple, qu'un fichier traverse 13
des avocats et des représentants des édi-
nombreux cas. les réactions provoquées ordinateurs dilTéreiits, d'un silc de Fobscrvi-
teurs, pour essayer d'élaborer des recom- B. EDELMAN, La propriété littéraire et
par les recommandai ions ne concer- toire de Meudon jusqu'à un ordinateur situé à
mandations précises sur la notion naient pas leur adéquation au fond du artistique. Coll. «Que sais-je?», PUF. Sophia-Antipolis (identifies par leur nom et
d'usage loyal. Les premières réunions A. LUCAS, Propriété littéraire et artis- leur localisation approximative) lors de son
problème, mais jusqu'à quel point elles
ont montré qu'un accord ne sera sans devaient être codifiées dans les textes de tique. Coll. «Connaissance du droit», parcours. Certains spécialistes des droits
doute pas atteint avant les discussions d'auteur estiment que chaque copie ne peut
loi. Si presque tout le monde juge illicite Dalloz, 1994.
devant les députés. être créée qu'après accord du détenteur des
le piratage des programmes conçus pour P. SIRINELLI, Industries culturelles et
Pourtant, ce désaccord n'est peut-être empêcher la copie d'une œuvre, les droits. Dans l'état actuel de la loi. les proprié-
pas mauvais. Certes, les deux camps nouvelles techniques. Rapport de taires de toutes les machines intermédiaires
seules questions posées concernaient Commission, ministère de la Culture et
craignent qu'en l'absence de recomman- peuvent être tenus pour responsables de loute
l'étendue des sanctions encourues pour de la Erancophonie/La Documentation
dations claires sur la notion d'usage loyal, violation de la loi.
ce délit et la possibilité de présumer Française, 1994.
les utilisateurs, (elles les universités, l'existence d'une faute.
O. ITEANU, Internet et le droit. Aspects 3. À (JUI APPARni-.NNI-.NT I CS Ml >R( I A L ' X '.* Les
seront gênés par l'ambiguïté de la loi.
De même, à l'exception de la petite créations multimédias sont composées de
Toutefois, les lois doivent être élaborées
minorité qui refuse les droits d'auteur sur
juridiques du commerce électronique,
textes, d'images et de sons d'origines diver-
dans le calme et la réflexion. L'absence Internet, tout le inonde s'accorde à Eyrolles. 1996.
ses. Ainsi une fiagc web peut-elle appartenir à
de réglementation spécifique permet aux P. GOLDSTEIN, Copyright'.* Higliway :
reconnaître qu'il est urgent de mieux plusieurs propriétaires. Les problcmes*de pro-
éditeurs, aux bibliothèques et aux autres From Gutenherg tu Ihe Celestîal
informer les citoyens sur leurs obliga- priété et de rétribution sont alors compliqués,
Jukebox, Hill and Wang. 1994. ec qui peut mettre en danger la création.
C POUR LA SCIENCE . N* 227 SEPTEMBRE 19%
«POl'R LA SCIENCE . N° 227 SrPThMBRf IWh
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « HAUTE TENSION sous LES LIGNES »

Didier Dubrana. — Haute tension sous les lignes. — Science & Vie. enfant dort dans un champ électroma- La révolte coutichoise n'est pas
février 1993. gnétique d'une valeur de 27 mîlligauss, isolée. La France est parcourue d'une
alors que. d'après les enquêtes cpidé- vague de protestations contre les
miologiques, les risques de leucémie lignes à haute tension. Dans pas moins
apparaissent lors d'expositions chro- de 26 « points chauds ». des Français
niques à un champ de 3 milligauss ! », s'opposent à EDF. Alors, oui ou non,

HAUTE TENSION s'alarme Michel Ryckebusch. Pendu


en haut d'un poteau électrique, un
l'électricité est-elle dangereuse pour la
santé ?
Si l'on en croit une récente enquête
SOUS LES LIGNES mannequin de chiffon se balance dans
le vent glacial qui balaye les rues de
Coutiches. Sur son torse, un slogan à
épidémiologique publiée par le célèbre
institut Karolinsk», de Stockholm, la
réponse ne peut être aussi tranchée,
l'encre rouge résume le sentiment des
Les lignes à haute tension provoquent-elles des cancers ? habitants : « Cobaye d'HDF ».
mais il y a de quoi s'inquiéter ( l ).
Cette question tourne à l'obsession chez les habitants Cette enquête, dirigée par Maria
Mais, du côté du monopole public,
Feychting et Anders Ahltoni, concer-
de certains villages de France, dominés par des lignes l'affaire est entendue : « La ligne à nait un demi-million de personnes
véhiculant 400 000 volts. Elle est prise très au sérieux haute tension ne sera pas déplacée (436 503 exactement) dont le point
puisqu'il n'y a aucun risque pour la commun était de résider à moins de
par des scientifiques suédois et canadiens. Deux rapports santé». Directeur du comité des étu- 300 m d'une ligne à haute tension entre
importants viennent d'être publiés à Stockholm à ce des médicales d'F.DF, Jacques Lam- 1960 et 1985. Toutes ces personnes
sujet, un troisième au Québec. La diffusion des résultats brozo lance : « Ceux qui veulent partir avaient moins de 70 ans. Les cher-
peuvent le faire puisque EDF s'engage
d'une enquête franco-canadienne a été retardée. Le à acheter leur maison ». El il ironise :
cheurs ont calculé la dose moyenne
annuelle d'exposition à laquelle a été
problème semble même plus vaste, puisque certains « L'un des habitants vivant sous la soumis chaque résident. Pour cela, il a
mettent en cause les champs électromagnétiques émanant ligne a même proposé que nous ache- fallu tout d'abord mesurer la distance
des appareils électroménagers. tions sa maison pour la lui relouer entre les habitations et les lignes à
ensuite. Preuve qu'il n'a pas aussi peur haute tension. En effet, la valeur du
que ça pour la santé de ses enfants... » champ électromagnétique diminue en
Une brèche a cependant été ouverte

P sychose à Coutiches. Ce village


de 2 000 habitants, situé à
vingt-cinq kilomètres de Lille,
vit dans la hantise de la nouvelle ligne
tous les Coutichois ont entendu parler
de ces inquiétantes enquêtes épidé-
miologiques sur l'augmentation du
dans le système de défense de l'entre-
prise : « Les habitants de Coutiches
ont obtenu, pour la première fois en
fonction du carré de la résistance. Par
exemple, sous une ligne de 400 000
volts dans laquelle passe un courant
d'une intensité de 2 000 ampères, la
nombre de cancers chez les « riverains France, qu'un suivi médical soit réalisé valeur du champ est de 130 mîlligauss
à très haute tension (deux fois 400 000
des lignes électriques» et tout parti- auprès des 65 familles vivant dans un (mG). À 30 m de la ligne, le champ est
volts) installée en 199l par EDF. Celte
culièrement chez les enfants. couloir de 250 mètres de part et d'autre de 80 mG et à 200 m. de 1 mG (soit
ligne passe à moins de 120 mètres
Les médecins ont constaté des cas de la ligne», indique Michel Loscto, encore 5 fois plus important que le
d'une zone habitée, et certains câbles
d'ec/éma et d'insomnie, et le malaise de SOS Environnement, l'association champ magnétique naturel moyen).
pendent même à moins de 10 mètres
gagne la campagne Certains parents luttant pour le déplacement de la ligne Comme la valeur du champ varie avec
(nous l'avons vérifié) au-dessus de la
consignent leurs enfants dans les mai- EDF. Ce protocole d'accord, cosigné le l'intensité du courant passant dans la
chambre des enfants de la famille
sons tandis que les familles les plus 29 juillet I991 par EDF, la municipa- ligne, les chercheurs ont demandé aux
Ryckcbusch. « Les grésillements de la
inquiètes envoient leur progéniture au lité et SOS Environnement, intéresse compagnies électriques de leur fournir
ligne sont insupportables ! », loin. Le père du petit Antoine a même I I O volontaires qui seront soumis à le relevé quotidien de l'intensité du
s'exclame Michel Ryckebusch. « Et déplacé le lit de son enfant : en effet, des examens sanguins et urinaires tous courant circulant dans chaque ligne
lorsque le vent souffle dans les câbles, celui-ci se trouvait dans la partie de fa pendant toute la période d'étude : ils
leur vrombissement est comparable à les six mois. Mais, en dépit de ses en-
pièce la plus exposée aux champs gagements, EDF retarde la mise en ont donc pu calculer pour chaque jour
celui d'un avion survolant le village. électromagnétiques produits par la de l'année, pendant vingt-cinq ans, la
place de ce suivi médical : aucun pré-
On ne dort plus ». Il y a plus grave : ligne qui surplombe la maison. « Mon valeur du champ émis par ces lignes.
lèvement sanguin n'a encore été fait...
« HAUTE TENSION sous LES LIGNES »
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES

qui envisage d'établir des normes au travail, de l'université Mac Gili à


Enfin, en reconstituant l'historique du dans chaque résidence et de surcroît,
d'exposition aux champs électroma- Montréal, conclut en ces termes (en
temps approximatif passe à son domi- les données statistiques recueillies.
gnétiques. Car, pour l'instant, il français du Québec) : « Même si les
cile par chaque habitant, Feychtung et Ainsi, cette imprécision pourrait expli-
n'existe aucune norme inlcrnalionalc, évidences associant les excès de can-
Ahlbom ont défini la dose moyenne quer l'absence de corrélation entre
ni nationale. Les seules données en la cer à l'exposition aux champs électro-
annuelle reçue. l'exposition des appartements et l'ap-
matière sont les seuils maximum d'ex- magnétiques ne sont pas encore très
Quatre fois plus de risques de déve- parition des leucémies ». Autre hypo-
position - très élevés - conseillés par solides, il faut reconnaître que les
lopper une leucémie, c'est ce qu'en- thèse : les matériaux de construction
l'International Radiation Protection éludes les plus récentes et souvent les
courent, d'après les résultats de cette des appartements pourraient faire
Association et l'Organisation mondiale plus perfectionnées n'ont pas contredit
étude, les enfants de moins de 15 ans écran aux champs électromagnétiques.
de la santé. Les seuils considérés sont les premières effectuées sur le sujet.
vivant dans les maisons exposées à une Voilà près d'un siècle que les cher-
de 5 000 mG par jour en milieu pro- Les dernières études réalisées en labo-
dose de radiations électromagnétiques cheurs s'affrontent sur la question de
fessionnel, et de I 000 mG par jour ratoire sur la cellule et l'animal ont
de 3 mG. Même à 2 mO, le risque est l'impact des champs électromagnéti-
pour l'ensemble de la population. Bien aussi renforce la plausîbilité de tels
triplé : l'incidence de la maladie, qui ques sur la santé.
qu'aucun riverain d'une ligne à haute effets. Il n'y a donc pas certitude
est normalement de 1 sur 20 000, pas- La polémique, elle, démarre en
tension ne reçoive de telles doses, les d'effets cancérigènes mais possibilité
serait à 3,8. Il faut descendre à 1 mG 1979, lors de la publication d'une
Suédois sont suffisamment impres- de tels effets, particulièrement chez les
pour retrouver l'incidence normale. enquête de deux sociologues améri-
sionnés par l'enquête de l'institut enfants et les travailleurs ». Publié
Les chercheurs n'ont, en revanche, cains de l'université du Colorado.
Karolinska pour entreprendre une car- sous l'autorité du département de santé
trouvé aucune preuve d'une menace Nancy Werthcimcr et Ed Leeper. Ils
tographie des écoles se situant près des communautaire du centre hospitalier
accrue de cancer chez les adultes. Pour avancent que les enfants de la région
lignes à haute tension en vue de sur- de l'université Laval, ce rapport jette
l'épidémiologiste Michel Goldberg. de Denvcr habitant près des réseaux de
veiller la santé des écoliers. un discrédit supplémentaire sur les
directeur de l'unité 88 de l'INSERM, distribution électrique (lignes et trans-
11 faut dire que les résultats de cette certitudes affichées par le service
« sur le plan méthodologique, c'est formateurs) courraient deux fois plus
l'enquête épidémiologique la plus enquête viennent à l'appui des conclu- médical d'EDF.
de risques de mourir de leucémie. D'autant que Gilles Thériault n'est
convaincante jamais publiée à ce jour Depuis, bien d'autres enquêtes sont sions d'une autre étude émanant, elle,
de l'institut national suédois de méde- autre que le coordinateur d'une autre
sur ce sujet. » Pour la première fois, les venues confirmer ou infirmer ces
cine du travail, qui dénonce l'augmen- enquête lancée conjointement par EDF
épidémiotogistes établissent un lien conclusions. En 1986, l'enquête menée
tation du nombre de leucémies chroni- et deux compagnies d'électricité cana-
entre la dose du champ électromagné- par le Suédois Lcnnart Tomcnius,
ques lymphocytaircs che/. les travail- diennes (Ontario-Hydro et Hydro-
tique et son effet sur la santé. médecin épidêmiologislc de Stock-
leurs exposés aux champs électroma- Québec) pour connaître l'impact des
L'enquête suédoise est évidemment holm, constate un accroissement du
gnétiques (2). Cependant, cette en- champs électromagnétiques sur la
contestée. En effet, la corrélation entre nombre des tumeurs du système ner-
quête, qui portait sur l'observation de santé des iravailleurs de l'électricité.
les cancers et l'exposition aux ondes veux chez les enfants habitant dans des
250 cas de leucémie et 261 cas de can- Nous avions évoqué cette étude il y a
électromagnétiques n'existe que chez maisons situées près d'installations
cer du cerveau survenus entre 1983 et trois ans (3). Les résultats auraient dû
les personnes vivant dans des pavil- électriques. Mais, un an plus tôt. l'An-
1987 dans deux régions de Suède n'a être publiés en 1991. On nous assure
lons. Feychting et Ahlbom n'ont pu glais Alan Myers, biologiste à l'univer-
pas permis de définir un niveau cri- aujourd'hui qu'ils seront rendus
prouver ce lien pour les familles vivant sité de Leeds, avait déclaré, au terme
tique. publics vers le mois de juin prochain...
dans des appartements. Pourquoi ? Les d'une étude portant sur 339 cas de can-
De l'autre côté de l'Atlantique, le Cette enquête, effectuée sur un échan-
deux chercheurs devraient répondre à cer chez des enfants de moins de 15
gouvernement du Québec a demandé, tillon de 150 000 personnes, devait
cette question dans une prochaine ans, « ne pas observer d'association
publication. À l'INSERM, Michel en 1989. la mise en place d'un comilé dire si l'exposition des travailleurs aux
significative entre la proximité des ondes électromagnétiques des lignes
Golberg avance une hypothèse : « Les maisons avec les lignes de transport de suivi des études sur les effets des
lignes à haute tension sur la santé. électriques augmente le risque de can-
pavillons étudiés sont à la campagne, électrique et le risque de cancer ».
Lequel n commandé un rapport cer. En France, il s'agit, bien entendu.
les appartements en ville. Or, en Version nouvelle de l'adage ancien,
milieu urbain, la variabilité du champ complet sur l'état Oc touics les des salariés d'EDF.
« Hippocratc dit oui, mais Galicn dit Comme le montre le rapport cana-
électromagnétique est très grande, non ». recherches scientifiques e 11 cet nées
compte tenu des nombreuses sources dans ce domaine. Dans ce rapport, dien, nombre de systèmes biologiques
Néanmoins, les récentes conclusions sont effectivement modifiés par
d'émission ; ce qui brouille d'autant la de l'institut Karolinska sont prises au public en janvier 1991. Gilles
précision des mesures d'exposition Thériault, directeur de l'Ecole de santé l'exposition à des champs électroma-
sérieux par le gouvernement suédois.
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES « HAUTE TENSION sous LES LIGNES »

gnétiques. Ainsi, ces derniers modifie- Légendes des illustrations


de santé de l'université du Texas à San (non reproduites)
raient la perméabilité de la membrane Antonio, les champs électromagnéti-
cellulaire aux ions calcium, ce qui ques auraient le même effet que la
pourrait entraîner une modificalion de lumière : ils entraveraient la sécrétion
la synthèse protéique. Par ailleurs, en champ magnétique. L'association de ces
de mélatonine, ce qui entraînerait une Seront-ils malades demain f
I983 et I988, l'équipe américaine de deux champs orthogonaux crée ce que l'on
modification des rythmes biologiques, C'est en (oui cas ce que craignent les habi-
Daniel Lyle, de la Food and Drug Cette diminution de la sécrétion de appelle un champ électromagnétique.
tants de Coutiches, petil village du Nord
Administration (4), a mis en évidence, mélatonine pourrait être responsable Unfin, le passage du courant génère un
qui vit sous un treillis de lignes à haute ten-
chez la souris, une diminution de de défaillances immunitaires, d'insom- « effet couronne ».
sion. 1:I)F s'est engagée à mettre sur pied
l'efficacité du système immunitaire Le champ électrique naît de l'écart de
nies ou de changements d'humeur. un suivi médical des 65 familles les plus
proportionnelle à l'intensité du champ potentiel entre le conducteur et le milieu
Reitcr va plus loin : « Si, comme cela concernées, A ce jmir. aucune prise tic sang
électromagnétique. Lyle constate une environnant. Ce champ est proportionnel à
est suggéré, l'exposition aux champs n'a encore été faite...
diminution de la cytotoxicité des lym- la tension de la ligne. Il s'exprime en volts
électromagnétiques est associée à
phocytes T, cette variété de globules par mètre. Son intensité au sol dépend prin-
l'apparition de cancers, cela peut être Maléfiques, les baguettes de la fée Elec-
blancs qui attaque les antigènes et cer- la conséquence de la réduction de pro- cipalement de la tension et de la hauteur
taines cellules cancéreuses. Il semble tricité 1 de la ligne. Il est modifie par n'importe quel
duction de mélatonine ». Sous une ligne à très haute tension, le
que les champs électromagnétiques ne objet conducteur, de la végétation aux
Il faut se rendre à l'évidence : le champ électrique est tellement élevé qu'il
soient pas directement mutagènes. En bâtiments en passant par les accidents de
soupçon que les ondes électromagné- génère une différence de potentiel entre la
revanche, ils pourraient stimuler un tiques sont capables de nuire à la santé terrain.
cancer latent. En effet, on constate une ligne et le sol suffisante pour allumer un Le champ magnétique apparaît lors du pas-
se renforce au fil des enquêtes et des
augmentation de la concentration tube à néon tenu à bout de bras - comme sage du courant dans un conducteur. H
expérimentations, Didier Dubrana
d'une enzyme, l'ornithine décarboxy- l'ont vérifie les habitants du village de dépend de l'intensité de ce courant et de la
lase, dans les cellules humaines expo- Borrowby. dans le Yorkshire «.irandc- distance au conducteur. L'induction magné-
sées aux champs (5). Or, cette enzyme Fïrclagnc). À Cmitichcs, on vit en perma- tique lice au champ qui traverse un milieu
joue un rôle dans la croissance cellu- nence sous un tel champ. de perméabilité donnée s'exprime habituel-
( I ) Magne/if ficld ami cant'ff in peoplt rfxiding
laire. L'augmentation de sa production lement en gauss ou en lesla (un tcsla égale
ni-ar .Vim/n/r high voilage />rtuvr ltin-\,
pourrait stimuler les cellules cancé- Stockholm. IW2. l :i tension moine 104 gauss). Mais l'unité légale d'intensité
reuses. Sur 26 sites accueillant des lignes de haute de champ magnétique dans le système
(2) FkxJerus B.. Onii/'alitinol ev/w.ture ll> flec~ ou très haute tension, des associations de international est l'ampère par mètre.
Récemment, l'attention des cher-
triimagnetic /ields in relaliiin ta leiikcmia arul protection de l'environnement accusent Le champ magnétique traverse sans être
cheurs s'est centrée sur une petite
hmin lumnrs. Départirent nf Ncwonicdccine, LDF de « détruire le paysage » (pylônes modifié tous les corps organiques (bois,
glande située à la partie postérieure du
National Insiitulc of Occupât ion al Health. Solna, feuille, peau, etc.), une grande partie des
tronc cérébral, en avant du cervelet : la verts sur la carte) ou de mettre en péril la
Sweden, I992. roches (pierre, brique, ciment, de.) et la
glande pînéalc. Celle-ci produit santé des habitants (pylônes rouges).
notamment la mélatonine. Cette hor- (3) Voir .ScKror.s <! lïc, n° K68, p. 40. plupart des métaux. En revanche, il est
mone est sécrétée la nuit, avec un pic Un métier à risques modifié par les métaux dit ferromagné-
(4) Lyle PD. et al.. « Suppression of T-lymphocy-
maximal entre minuit et 4 heures du Les travailleurs de l'électricité sont-ils par- tiques (fer, nickel, cobalt) et par beaucoup
tc cytotoxicily fullowing exposurc lo smusoidally
matin. La glande s'arrête de sécréter le ticulièrement exposes aux risques de can- de leurs alliages (aciers simples, aciers
ampli lutte-modulaicd filcds >.. Bioctectm-
jour lorsque la lumière imprègne la cer '? Une enquête cpidémiologique, réali- inox, céramiques dites ferrites, etc.).
magneiwa. vol. 4. p. 303-313. 1983.
rétine. Ainsi la production de cette sée par EDF et deux compagnies d'électri- L'effet couronne est dû à un faible passage
(5J Gain CD. fiai. « Efforts nf M) M? fiekls im du courant à travers l'air, qui s'ionise sous
hormone suit fidèlement le rythme des cité canadiennes, devrait répondre à cette
ornithinc dccarhoxyfase aclivily in hone cclls and l'action du champ électrique exisiant entre
jours et des nuits au gré des saisons, en qucsiion. Mais sa publication, annoncée
fibroblasls », Cnniractor'x Review Mi't'ling. deux fils d'une ligne à haute tension. Ce
réglant les rythmes circadiens, c'est-à- pour 1991, a déjà été rcpoussée à juin
DOE/EPKI, Dcnver. novembre I9K6. passage s'accompagne d'une luminescence
dire les cycles de sommeil, les cycles 1993...
hormonaux, etc. Or, d'après les récen- de l'air, qui peut, alors, s'étaler en trails
tes expériences réalisées sur les rats lumineux ramifiés. Ces derniers sont res-
Les champs des lignes
par Russel Reitcr, professeur de neuro- ponsables du bruit de friture caractéristique
Lorsqu'un courant électrique passe dans un
endocrinologie au centre scientifique des lignes à haute tension.
O Science & Vie, 1993 fil, il produit un champ électrique cl un
ANNEXE 2
CORRIGÉS DES EXERCICES

CHAPITRE 1

Exercice n° 1 : Résumé de l'article « Les effets violents de la télé-


vision »

La correction en sera faite au fur et à mesure de l'utilisation de ce


texte dans différents chapitres.

CHAPITRE 2

Exercice n° 3 : Caractéristiques d'un document

Questions concernant la revue :


•Quelle est son ancienneté? Fondée en 1932, donc durable et
stable puisqu'elle en est, en 1994, à son cinquième directeur en
soixante-deux ans.
• Quelle est sa périodicité ? On peut supposer une périodicité
mensuelle, à partir de la date indiquée : juillet 1994.
• Quel est son financement ? Impossible à déduire des éléments en
présence.
• Quelle est son origine éditoriale ? L'adresse dit peu ; on peut
toutefois évacuer des éditeurs officiels (ministère, municipalité...).
• Quelle est son orientation ? Le nom d'Emmanuel Meunier devrait
mettre sur la piste du mouvement personnaliste...
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

L'ancienneté, l'importance du comité de rédaction, quelques noms Naturellement, on ne peut jamais faire une confiance totale aux
peut-être reconnus par d'anciens étudiants (D. Bourg, P. Lévy), des auteurs... Il ne s'agit pas de dire ici que ce chapitre comporte
lecteurs du Monde ou des auditeurs de France-Culture (B. Perret, V. automatiquement 4 parties, mais que le survol n'est plus linéaire
Nahoum-Grappe, G. Vigarello, M. Lazar, J.-P.Domecq, etc.), la mais actif, et que l'analyste se met en position de questionnement.
périodicité mensuelle, le nombre de références bibliographiques Un texte ne répond que si on l'interroge (cf. chapitre 111).
font pencher pour une revue d'étude et de recherche, plutôt
orientée vers les sciences humaines.

Questions concernant l'auteur : « Qui est fauteur ? »


• Elle ne fait pas partie du comité de rédaction. CHAPITRE 3
• Quatre références (sur 17) sont signées de son nom; la plus
ancienne date de 1981.
Exercice n° 6 : Les textes et leurs caractéristiques
• Elle a participé à un colloque (réf. n° 2) sur la petite enfance.
On peut donc la considérer comme ayant déjà traité et étudié le 6.1. Extrait de Roger Caillots : type descriptif, éventuellement
sujet. Un auteur confirmé écrivant dans une revue d'étude laisse explicatif ou didactique. Certaines expressions — « le caractère qui
penser que l'article n'avance pas d'idées non argumentées. le discrédite le plus », « distraction vaine » — peuvent induire une
autre orientation et servir d'arguments pour juger ce texte problé-
Cette étude des caractéristiques fait pencher la balance pour la
matique. Ceux-ci s'effacent dès que l'on se trouve devant un texte
sélection de l'article. C'est une première façon de valider l'infor-
mation, avant même d'avoir pris connaissance du contenu. véritablement problématique.
6.2. Extraits des discours de Maurice Barrés et d'Aristide Briand : ces
deux textes sont de type polémique. Le choix est révélateur des
options personnelles : si un texte est jugé polémique, l'autre est
Exercice n° 5 : Repérage visuel à l'aide des signes typographiques alors purement explicatif... C'est un bon miroir de la lecture
subjective.
Quatre points d'interrogation devant être immédiatement vus 6.3. Extrait de Samivel : de type problématique (ou argumentatif
permettent de poser des hypothèses de contenu. La lecture pour qui connaît l'auteur). Si le choix a été « polémique », cela
documentaire est sous-tendue par une recherche de ces quatre signifie que ce texte a servi d'exutoire aux textes précédents !
parties.
6.4. Le texte de L. Lurcat est de type problématique.
La rapidité est essentielle pour donner à cet exercice son impact. À
nouveau, il s'agit de regarder et non pas de lire. La façon de faire Cet exercice a pour but d'insister sur la différence entre textes
habituelle va rendre hésitants les lecteurs chercheurs de sens, alors descriptif et problématique, sachant que ce dernier engage le
que l'habitude du repérage visuel permet, d'un seul regard, de lecteur de façon personnelle. Le reconnaître permet de se'mettre
partir à la recherche de ces quatre parties, en rendant le survol en éveil vis-à-vis de soi-même, première étape de la lutte contre la
dynamique. subjectivité.
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 7 : Lecture documentaire d'un article Le 3r paragraphe rappelle l'exercice sur la ponctuation. Il y a 4
points d'interrogation : il reste à vérifier si les réponses sont
7. /. « Les effets violents de la télévision » données dans le corps de l'article.
Par repérage visuel, on a déjà remarqué le sous-titre et les Même si Pour la Science est une excellente revue de vulgarisation
orientations de l'auteur à travers les références bibliographiques scientifique, son objectif est davantage grand public que la revue
(cf. exercice du chapitre n). Esprit, d'où l'accroche des paragraphes initiaux qui, indéniable-
Les deux premières phrases du 1Fr paragraphe introduisent tout de ment, mettent rapidement le lecteur sur la voie de ou des idées
suite l'idée : télévision = images = illusion du monde. Les deux der- directrices (l'article entier sert d'exercice au cours du chapitre vu).
nières complètent l'idée paradoxale : illusion pour les téléspectateurs
de se rapprocher de la réalité, alors qu'ils en sont séparés, coupés.
Le 2F paragraphe est une illustration par une citation.
Le 3e paragraphe apporte une idée supplémentaire : habitude de EXERCICE N° 8 : LECTURE DOCUMENTAIRE DE MONOGRAPHIES
croire, plutôt que d'analyser et chercher à comprendre.
La densité du texte laisse supposer qu'il faudra lire aussi le 4*
paragraphe pour délimiter vraiment le propos de l'auteur ; mais en 8.1 Premier extrait :
feuilletant, on verra qu'il y a trois sous-titres et qu'en particulier la Titre : Gros temps sur la planète
deuxième partie courte (« Effets mimétiques et actes suggérés ») Auteurs : Ce que nous dit la 4e page de couverture :
peut être éventuellement une partie de transition ; en lisant rapi- Jean-Claude Duplessy Géochimiste, dirige un laboratoire mixte
dement, on découvre alors que ce paragraphe central est le pivot du CNRS et du CEA à G if-sur-Yvette dont
de l'article : « On peut comprendre l'action de la télévision avec les les recherches en paléoclimatologie font
éléments dont nous disposons à présent : premièrement... deuxiè- mondialement autorité.
mement... troisièmement... » Pierre Morel Professeur à l'université Pierre-et-Marie-
On verra plus tard comment aller encore plus loin dans la structu- Curie de Paris, fondateur du Laboratoire
ration de cet article, et comment, par la lecture des 3 ou 4 premiers de météorologie dynamique (CNRS) et
paragraphes, on devine déjà comment lire de façon secrétaire du Programme mondial de
documentaire — ce texte en vue de l'analyser. recherche sur le climat.
Éditeurs : Odile Jacob et Seuil
7.2. « Les droits d'auteur des œuvres numériques » Date : 1990
Le 1er paragraphe raconte une histoire sur une « belle histoire ». Le Collection : « Points », série Odile Jacob
2* paragraphe fait de même à propos d'une moins belle histoire. L'affiliation des auteurs, la notoriété de l'éditeur et le sérieux
habituel de la collection contredisent le caractère fantaisiste du
Ces deux premiers paragraphes d'illustration posent le problème titre ; cela nous engage à aller plus loin et à regarder la table des
des droits d'auteur appliqués aux œuvres numériques : ils dévelop- matières ; les 9 chapitres sont entièrement consacrés à l'étude
pent le titre en mettant immédiatement le lecteur dans le sujet. du climat et de son environnement.
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Le domaine étant défini, déjà induit par la personnalité des 8.3 Troisième extrait
auteurs, l'avant-propos composé de 6 paragraphes introduit le
contenu et expose les intentions des auteurs : Titre : La Méditerranée
1" et 2* § : contexte du sujet : quelle représentation est donnée, Sous-titre : L'espace et l'histoire
dans l'histoire et par les médias, de la dégradation de l'environ- Auteur et éditeur scientifique : Fernand Braudel
nement ? Éditeur : Flammarion
3e, 4e et 5e § : amorce du contenu : place de la recherche scienti- Date : 1985
fique face à ces propos Collection : « Champs »
6e § : intentions des auteurs : les quatre dernières lignes, Les noms de Fernand Braudel et Georges Duby suffisent à situer
auxquelles on pourra ajouter les termes scientifiques de la table le niveau du texte et le domaine dans lequel il s'inscrit. Le titre
des matières, forment déjà un résumé documentaire possible indique la Méditerranée à la fois dans son espace et son histoire.
pour cet ouvrage. Le sommaire est aussi concis que celui de l'ouvrage précédent
était prolixe. Il faut donc lire l'avant-propos pour en savoir plus.
8.2. Deuxième extrait : Dès le 2e paragraphe, l'auteur annonce son intention : « ce que
nous avons voulu tenter... ». Mais l'obstacle tient à la forme poé-
Titre : Le grand remue-ménage
tique, presque narrative, de ce texte pourtant lourd d'intentions.
Sous-titre : La crise de la famille
Les illustrations-exemples sont enchevêtrés avec les caractères
Auteur : Evelyne Sullerot
Éditeur : Fayard purement informatifs. Ce texte est sûrement le plus long à appré-
Date: 1997 hender des trois, même si son thème peut sembler le plus attirant.
Même si l'on n'a pas la 4* page de couverture sous les yeux, on
peut prendre connaissance de fa bibliographie de l'auteur,
presque entièrement consacrée à la sociologie de la femme, puis
de la famille.
Le titre est une accroche sans aucun contenu informatif précis, CHAPITRE 4
mais le sous-titre indique que ce « remue-ménage » s'applique
à la famille.
La table des matières, apparemment complète, est en fait Exercice n° 9 : Structuration de textes et recherche de plans
décevante si l'on cherche la logique de l'auteur ; trop détaillée,
trop linéaire, elle n'aide pas à avoir un regard global sur Bien que les textes soient tous deux de type problématique, il est
l'ensemble. proposé une application de la grille problématique pour la mono-
If faut donc lire l'avant-propos et en comparer la progression graphie et une application de la grille descriptive pour l'article. Plus
avec celle de la table des matières. que de corrections, il convient de parler de propositions de structu-
Ce texte sera repris au chapitre iv, pour en étudier la structu- ration. En effet, toutes les divergences sont acceptables, dans la
ration.
mesure où l'on retrouve le même fil conducteur et les mêmes
grandes unités d'information — ou idées directrices.
9.1 « Le grand remue-ménage » et 9.2 « Les effets violents de la
télévision » : voir pages suivantes.
AVANT-PROPOS
INTRODUCTION : ON POSE UN PROBLÈME

Que nous soyons partisans de « la famille » au singulier ou


Je nouvelles formes plurielles » des séquences de vie privée
pour le manage ou pour l'union libre, nous sommes tous nés
d'un père et d'une mère et la plupart d'entre nous ont ou auront
des enfants. Nous snmrn^ tous in^rin dans la rh^ ^,
• Constat
Sénémlions qui se sont succédé durant ce dernier demi-siècle
Nous avons tous subi et nous avons tous fait l'histoire récente
; la famdle en France. Nous ne sommes eepenHant r»< #**. Problème
£Qrd sur ce que représente la famille ici ei maintint à l'aube
du xxie siècle. complété
La famille est-elle, comme tendent à le prouver de très nom-
breux sondages, la << valeur » |a pi.. s apP rérié P ^ v™^ de 1) représentation positive
toutes tendances polittques, leur !$&& contre la solitude leur
temearî contre les aléas de la vie, le but de leurs efforts quoti-
JlenS ' la Source prinrjpale de l ? » r h»n h eiir inriiviH.,»| ?
Ou bien la famille est-elle le cheval de Troie qui" ramène -
fiEdajDQOL l'increvable survivance du pétainisme triom- 2) représentation négative
phant, la forme la plus pernicieuse de la mise au pa « H - r i n H ; .
vidu qui y perd sa liberté, enchaîné par la marâtre Nature, sous
sa forme modernisée qu'est la génétique ?
C'est à peine, c'est tout juste s'il y a accord sur un diagnos-
tic : la famille est m rrisp. Faut-il s'en lamenter ou s'en réjouir ?
(cf. sous-titre : « La crise de la famille »)

Dojt-on et peut-on permettre à la famille, cellule de basejje Formulation du problème


la_socjété. de se rétablir, pour éviter une implosion,? Ou bien
la société francaise_gntre-t-elle_dans une nouvelle phase de ion
organisation qui se passera de ce groupe Intermédiaire entre
l'individu et l'État, et faut-il _aijjer une_telle évolution^
On ne peut répondre à cette question, ni même faire un pro- MÉTHODOLOGIE DE L'ETUDE
nostic, sans envisager le passé récent et la manière dont se sont
constituées les familles dont nous sommes issus et celles que
nous avons fondées ; sans analyser comment et pourquoi cer-
taines ont duré, comment et pourquoi certaines ont éclaté, com-
ment aujourd'hui se présentent celles qui vont aborder le siècle
nouveau. Ppur_comprendre ces changements_gt leurs causes, il 1) regard historique
fautjes replacer .dans la durée.
Composées d'individus et composant une société, les familles 2) regards multiples
forment un ensemble complexe auquel il faut réserver une et approche systémique
approche systémique : on ne peut retracer leur histoire qu'en
multipliant les éclairages et en variant les angles de prise de vue. , CORPS DE L'ÉTUDE, DÉVELOPPEMENT
Car la famille est un fait de nature et un fait de culture. Tout
être humain a deux parents qui lui confèrent son identité biolo- DU SUJET :
gique. Les découvertes récentes de la génétique ont permis 1} Les changements intervenus dans la famille
d'établir à la fois que chaque être est unique et qu'il existe des sous les aspects :
liens indéniables, inaltérables et infalsifiables entre père et
enfant, entre mère et enfant, entre frères et sœurs. Ces liens - biologique
sont indépendants de toutes formes institutionnelles comme le
mariage ou l'adoption. Ils perdurent toute la vie. Mais la culture - culturel
a entouré ces liens biologiques de relations fortes d'amour, de
tendresse, de fidélité, de protection, de responsabilité, de trans-
mission, d'éducation qui donnent à la famille humaine son
incomparable richesse. Elle n'est pas seulement le cadre de la
reproduction de l'espèce. Elle est un espace de culture et un
véhicule de la civilisation.
Car la famille est affaire privée et affaire publique. Elle se - privé
situe dans le champ de la vie privée de chacun, mais elle est
objet de politique pubfïque. Elle est concernée à la fois par
l'histoire des dispositions protégeant l'individu, sa sexualité, ses
amours, son chez-soi, son histoire propre, ses secrets ; et par
celles qui intéressent le devenir collectif de la nation, sa popu- - public
lation, la reproduction des générations, ou le vieillissement de
la structure par âge, la protection et l'éducation des enfants et
des jeunes, les pensions de retraite des vieux, la répartition des
aides sociales.
Procédant de la nature et de la culture, concernant l'individu
privé et le destin de la communauté nationale, la famille n'a pas - juridique
échappé à l'institutionnalisation par le droit. Le droit a défini
l'identitéjuridique de ses membres, leurs statuts, rôles, droits et
devoirs réciproques. Le droit a régi les unions et les désunions,
les filiations, les transmissions des noms et des biens, enca-
drant les naissances, les enfances, les amours et les décès. Ces
lois ont été confrontées ces dernières années à des avancées de
la science génétique et des techniques procréatiques. Elles ont
dû s'adapter, ou elles ont vieilli, obsolètes.
On trouvera tout cela, entrelacé, interagissant, dans cette his- démographique
toire de la famille. D'abord, les évolutions démographiques ; les
facteurs économiques, les attitudes face au travail, les modali- économique
tés de la consommation ; mais aussi les opinions sur l'amour, le
sexe, les hommes, les femmes, le mariage, l'union libre, la sociologique
conception et la contraception, l'éducation des enfants, les rela-
tions avec les parents qui ont accompagné ces évolutions, ainsi
que les mots nouveaux, le vocabulaire à la mode par lequel se
sont exprimées les mentalités. On trouvera les réponses de la

- politique
société institutionnalisée, la libéralisation des lois régissant e
mariage la procréation, la filiation, l'autorité parentale, le
divorce — et les crispations de certains juristes et magistrats
devant cei aggiornamento. On y trouvera aussi l'histoire de la
grande politique familiale française surgie de la Liberation,
puis l'on verra s'affaiblir la volonté politique qui l'animait se
diversifier et se dénaturer ses modes d'intervention, se dévalo-
riser ses moyens. 2) Les adversaires de la famille
Ces changements ne suffisent pas à eux seuls a expliquer la
crise que traverse aujourd'hui la famille. Il faudra également
faire entrer en scène les francs-tireurs puis les bataillons qui ont
attaqué la famille : <l.i persifla^ innocent au terrorismej^
cath- fffV", w Hpnifrreurs. les saboteurs bien places dans
l'appareil d'Étgt lft« Hnrtrinaires aniifamilk. En face, il faudra
mentionner les reculades sans gloire et les indignations ineffi-
caces des derniers fantassins familialistes. — EN FORME DE CONCLUSION
À quoi tout cela mène-t-il ? Comment fera-t-on . ^_^
fIinancicrs,
„ .;»,-L- hi.m-.ins
[imuania pt
*.' sociaux
j\fvi"f^ des
w H' : 'S'""i*-m
L g™tions familiales . les termes du problème
Oue Dourractre démocratie d'indn id"* Hémnneclés
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Les effets violents


de la télévision TITRE GLOBAL
[...]. L'expérience directe commençait à
faire défaut. [...] Dans ce supermarché,
où se débitaient les succédanés de
l'expérience directe, les vieilles lignes de
Les particularités démarcation s'effaçaient. [...] Une brume
de la situation télévisuelle I. Première unité d'information nouvelle, qu'aucune machine n'avait pu
jusqu'alors fabriquer, enveloppait l'uni-
/. La télévision, introduit la vie vers télévisé et finissait par envahir le
publique au foyei so_us_ l_a_ forme monde réel lui-même. Les Américains
d'images. C'est à une forme transposée s'accoutumaient si bien à ce brouillard,
du monde que les enfants accèdent : car ils se sentaient si à l'aise dans ce flou ras-
la télévision n'est pas le monde, mais surant, réconfortant, que la réalité elle-
une illusion du monde dont on ne voit même, avec ses arêtes vives, les distinc-
que des images ( 1 ). Ce tte _sorle_d' i nitja- 1.1 tions tranchées qu'elle opérait entre les
tion s'accompagne d'un élojgngment du gens, les lieux, les dates et les conditions
réej. En effet, le jeune enfant, spectateur météorologiques, finissait par avoir
et auditeur, est plongé dans une situation quelque chose de vaguement irritant. »
où il se sert exclusivement de la vue et
de l'ouïe. Ce rapport médiatisé aux élres 3. Le rapport médiatise au réel 1.2
et aux choses qu'imposé la télévision favorise l'habitude de croire plutôt que
domestique, dès les débuts de l'exis- d'analyser et chercher à comprendre :
tence, a modifié les étapes de l'initiation. l'image porte en elle sa propre crédibi-
C'est là le paradoxe de la situation télévi- lité, sans que la référence à une quel-
suelle, elle donne l'illusion de rappro- conque réalité extérieure soit nécessaire.
cher les gens de la réalité, mais en fait, La distinction entre le réel et l'imagi-
elle les sépare, elle les en coupe. Le naire, entre le vrai et le faux s'estompe.
raccord au réel nécessite l'activité, Flic n'est pas nécessaire pour la jouis-
l'usage des cinq sens, l'action sur les sance du téléspectateur, elle ne l'est pas
choses, et le rapport direct avec les non plus intellectuellement, car l'attitude
autres (2). critique n'est pas en éveil : on n'a pas
besoin de comprendre pour se laisser
2. Daniel Boorstin a réservé un I 1 absorber par l'image.
chapitre de sa vaste fresque Histoire des
Américains (3) aux transformations illustration par citation 4. La télévision crée une ambiance 1.3
apportées par la télévision, qu'il com- favorisant un unisson émotionnel (41.
pare à un cataclysme modifiant progres- Elle a un effet puissant sur la sensibilité.
sivement le rapport à la réalité : « La Son impact émotionnel peut se com-
télévision a introduit un halo d'incer- prendre si l'on considère l'ensemble des
titude autour de l'expérience quotidienne téléspectateurs comme une foule
immense, émiettée devant les écrans, et
ressentant simultanément les mêmes
1. L, Lurçat. le Jeune Enfant devant /p.i apparences
télévisuelles, ESK. 1984. émotions, sans se connaître ni se ren-
contrer, partageant les mêmes implicites
2. L, Lurçal. « Imprégnation télévisuelle et altitudes illustrations
et les mêmes références. Le thème des
scolaires», in le* ï-leauàfiiaméeFEwpt, actes
du coIlt-c/Hf, Nathan. 109], suggestions et des contagions dans les
3. D. Boorstin. Histair? des Américains, coll.
« Rouquins », LalTont. .V partie, chapitre 44. 1991. 4. L. Lurçal, À tinq ans, seul avec Ciiiliiiirak, Syros.
1981
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

foutes et les publics a été traité au siècle par références on étudie le mécanisme de la suggestion.
dernier et au début de ce siècle, princi- on note toujours que l'émotion y joue un
palement par des médecins comme grand rôle, et qu'il est utile d'émotionner
Liébeault (5) et Bemheim (6), et des le sujet pour lui faire accepter une
auteurs de formations variées, comme suggestion. »
Gustave Le Bon (7) et Tarde (8).
7. Si le rapport au réel est médiatisé,
5, Georges Dumas est l'auteur d'une par citations le vécu télévisuel engendre une conta-
mise au point sur la contagion mentale gion émotionnelle immédiate. C'est ainsi 1.3
(9). La contagion est un concept médi- qu'on peut parler de la puissance d'action
cal : « La contagion est la transmission de la télévision sur les émotions. Elle
d'une maladie d'un individu à un autre rend possibles les mimctismes ou complément
par un contact immédiat ou médiat ». imitations inconscientes et les imitations
Quand il s'agit de faits psychologiques, conscientes induites par SJL puissance
on parle de contagion morale ou men- suggestive. Tout ce qui est montré est
tale : « Le contact est immédiat quand le imprégné d'émotions et rend crédibles
suggestionné subit directement par la les informations mises en scène ou tout
vue, l'ouïe ou par correspondance épisto- autre événement dont la présentation
laire l'influence d'un contagionncur. Le semble objective et neutre. L'illusion de
contact reste médiat lorsque l'influence vérité provient de l'illusion d'immé-
nocive s'exerce par la voie de la presse et diatcté de l'événement, accréditée par la
du livre, comme il arrive souvent pour la charge émotionnelle.
contagion de la morphinomanie. »
8. Cette puissance suggestive de la
6. J'utilise personnellement le concept 1.3 télévision est exploitée par la publicité illustré par exemple et citation
de contagion émotionnelle (10) pour télévisuelle. Selon Guy Durandin (12),
parler de l'action contagieuse de la télé- reformulation la publicité constitue une part impor-
vision par le biais des émotions. Le lien tante des ressources des médias : 40 % et
entre l'émotion et la suggestion était bien plus pour un quotidien et jusqu'à 100 %
connu des savants qui ont utilisé l'hyp- pour une chaîne de télévision privée. Le
nose, comme Pierre Janet ( M ) : « Quand développement de la science psycho-
logique contemporaine, écrit-il, comme
la rcflexologie de Pavlov, la psychologie
5. A. Liébe.iult, le Sommeil /rmvoqiic el les états des profondeurs, la psychanalyse des
analogues. Octave Doin, 1989.
foules, a suscité la mise en œuvre de
6. H. Bernheim, De la suggestion et de ses techniques d'influence qui se voulaient
applications à la fhàrnpeiilique. Octave Doin, 1891.
scientifiques. Vancc Packardi (13) l'a
7. G. Le Bon, Psychologie des foules. 1983 (l'cd. remarquablement montré en analysant
1895).
les travaux de ceux qu'il nomme les
8. C. Tarde. l'Opininn el h Foule, PUF. 1989 ( 1 " éd. grands maîtres de la persuasion clandes-
1901) tine. La psychanalyse des foules, écrit-il.
9. G. Dumas, <i La contagion mentale ». Revue est devenue dans les campagnes de
philosophique. 36' année, t. LXXI. janvier-juin persuasion le fondement d'une industrie
1911.

10. L. Lurçat. Violence à la lélé. L'enfant fasciné, 1 2. ( i. Durandin. rinlnimatinii. In t)c.\tnf,irntulit>n cl


Syros. 1989.
lu Kt'iililt; Puf. 1993.
11. P Janet, De l'angoisse à l'extase, I. Il, Félix 1 .1. V Packard /» c. PUF. I9H9
Alcan. 1928.
[I" cil. l'JSH).
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

puissanle dans le domaine commercial


puis dans le domaine politique, quand Troisièmement, renforçant ces effets de
les partis ont fait appel aux « persua- la situation télévisuelle, la manipulation
deiirs » professionnels au moment de sophistiquée des désirs et des__mobiles.
l'élection présidentielle de 1956 aux Cette manipulation utilise des tech-
États-Unis. C'est toujours le même niques psychologiques induisant l'imi-
principe : « On agit plus facilement sur tation automatique par l'action sub-
les attitudes des gens par leurs émotions consciente ou subliminale, et l'imitation
que par leur intelligence. » plus ou moins consciente par la
suggestion.
9. C'est d'ailleurs Vance Packard qui le
premier a dénoncé l'usage des images //. Dans les débats sur la violence, on-
subliminales. Il s'agit d'une stimulation attribuc parfois la responsabilité des
subconsciente ou subliminale, se situant effets aux téléspectateurs, trop jeunes ou
en dessous du seuil de perception trop impressionnables. La télévision
consciente. Elle est fondée sur la décou- serait alors le révélateur de la faiblesse
verte que le cerveau peut enregistrer des humaine et non l'inducteur d'effets
images ultra-brèves et des sons murmu- néfastes, ce qui annule toute discussion
rés sans que nous en ayons conscience. sur les contenus. Il n'y aurait pys d'exem-
introduction de la deuxième
L'industrie publicitaire s'appuie en partie ples suggestifs mais uniquement des
gens fragiles qui devraient se connaître unité d'information
sur les travaux des hypnotiseurs. On peut
lire dans la Revue de l'hypnotisme de comme tels, et fermer le poste. On met
1902 (14) une définition de l'hypnotisme ainsi de côte le rôle essentiel de l'imita-
qui paraît très moderne : « L'hypnotisme tion, en particulier aux âges sensibles de
est un nom pour un groupe de moyens l'enfance et, bien sûr, de tous les effets
empiriques par lesquels nous pouvons calculés mis au point grâce aux métho-
arriver à prendre possession des facultés des sophistiquées de la manipulation du
subliminales. » désir.
12. Il nous faut comprendre,comment
le spectacle de: la violence montré de
Effets mimétiques et actes suggérés manicrg_ répétitive peut déboucher sur
10. On peut cojnpiendre_ l'action l'imilalionjmpulsivc. ou encore suggérer
rappel du titre principal des actes .violents réalisés de manière
violente de la télévision _avec Jgs
élémenlsjjoritngjjsjlisrjQsgns à présent : consciente^ c'est-à-dire provoquer l'imi-
Premièrement, l'effel_de déréalisalion tation à ses, deux niveaux : l'imitation
par uj/apport-médiatisé an réel, permet- reformulation des § 1 à 9 mimétique inconsciente d'elle-même, et
tant toutes sortes de confusions ou l'imitation conscicntc-
d'amalgames en noyant les distinctions
indispensables à l'exercice du jugement
rationnel. Deuxièmement, les conla- L'existence des effi'ts violents
gions_parJ^aclJQn immédiate,des images 13. L'augmentation des actes agressifs
et de l'ambiance sur_lcs_ _érnoti.ons. et criminels, notamment chc/ les moins
de quinze ans. a clé observée très tôt aux
14, M Mangin, Le mécanisme de la suggestion Etats-Unis, en même temps que se géné-
d'après les travaux de F Myers de Cambridge. Renie ralisait la télévision. Ce qui a été
Jel'hypmriisme. 1902. p. 259, constamment discuté, et l'est encore,
c'est la responsabilité de la télévision
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

dans cette augmentation. Seuls les actes avec une absence totale de sentiments
mimétiques qui décalquent des choses « normaux » comme celui de culpabilité
vues à la télévision peuvent lui être et de remords ».
imputés avec certitude.
16. Des enquêtes plus récentes ont
14. Aux Etats-Unis, des enquêtes confirmé ces analyses, avec toujours ces
officielles sont entreprises de manière statistiques inquiétantes sur l'augmen-
régulière. C'est le secrétaire général à la tation de l'agressivité et de la criminalité
Santé qui assure la publication des des jeunes. Joshua Meyrowitz (H>) cite
a Rapports sur la télévision et le com- lui aussi les chiffres du KBI. Entre 1951
portement social ». Déjà, en 1972, illustrations par enquêtes et 1981, on note les augmentations sui-
quatre sur les cinq volumes ainsi édités et mesures... vantes observées chez les moins de
sont consacrés à des études traitant des quinze ans : arrestations pour meurtre.
effets des programmes de violence à ta 500 % ; vols à main armée, I 750 % ;
télévision. Ils montrent notamment que, viols, 4 000 %.
entre 1952 et 1972, selon les chiffres du
FBI, le nombre des jeunes arrêtés pour 17. La télévision exerce un effet de
délits graves et violents a augmente de fascination sur les jeunes enfants qui
I 600 %. Cela correspond à la période au d'ordinaire sont actifs cl. remuants. Elle compléments :
cours de laquelle la télévision a pris une les immobilise et ils demeurent captés « suggestion »
importance croissante. par elle. L'immobilisation favorise l'im- « imprégnation »
prégnation par ce qui est regardé
/5. Marie Winn, qui rapporte ces faits régulièrement. L'imprégnation est un
dans son livre TV Drogue (15), écrit : mode puissant d'apprentissage opérant
« L'avènement de la télévision dans les surtout dans les premières années de la
foyers américains a amené la pire des vie, mais aussi dans toute situation où il
épidémies de violence juvénile qu'ail n'est jas nécessaire de savoir qu'on
connu le pays. » L'aspect qui l'a spécia- apprend. La personne apprend sans le
lement frappée, c'est la transformation savoir, ni par conséquent sans savoir ce
brutale des enfants, passant soudaine- qu'elle apprend. La violence de la l'
ment plus de trente heures par semaine à situâtkjrj[télévisuelle se manifeste dans reformulation...
la télévision, première génération améri- cette sorte de capture de ccluLJjuj
caine d'enfants téléspectateurs. « Cette regarde et qui ne peut se détacher sans
situation estompe, écrit-elle, la diffé- cl ton l'ar la '-eulu réception, i l
rence entre rêve et réalité. » « C'est s'imprègne alors de thèses auxquelles il
comme si notre société avait engendré n'adhérerait pas nécessairement de
un nouveau type en la personne de manière volontaire. La télévision crée
l'enfant meurtrier qui ne ressent aucun un état de réceptivité psychique spéciale
remords et qui est à peine conscient de par sa nature et par son prestige. Son
ses actes ». Marie Winn écrit encore : action s'apparente à une suggestion
« Le facteur commun qui caractérise ces
gosses changés qui tuent, qui torturent et
qui violent, semble être une forme de
détachement émotionnel qui leur permet 16. J. Mi:yriiwit7. l'I-lnfanl uilutie cl l'iirlullc ,-n/tini
de commettre des crimes incroyables /.il III\H>II i A \s à l'i-n- ,li- lu ick-vi\um. in /r /Vi.\M-
fl \im awnir. A"ivui\ la tradition cl l'i'itM'i-
Vtit'metti. ccrm1 IL- Tcnt/iM tic lu réflexion, VI.
15. M. Winn. Tl-'Drogue. Fleurus. 1979. Gallimard, I<)K5
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

CONCLUSION
18. Marie Winn parle d'état hypnoti- 21. Les mimétismes s'observent chez
... et illustrations
que chez ces enfants qui regardent si l'homme et aussi chez l'animal, ce sont
longtemps ta télévision. Elle parle d'une donc des conduites archaïqucs. La sug- reformulation générale
sorte d'extase. Selon nombre de parents gestion est proprement humaine car elle
qu'elle a interviewés, l'enfant parait passe par le langage. À la télévision, il y
sombrer dans une « véritable catalep- a induction d'actes automatiques sous
sie ». Nous retrouvons là le vocabulaire forme de mimétisme et d'imitation par
des hypnotiseurs du siècle dernier. suggestion. souhaits
19. C'est à la faveur de cette fascina- I 2 22. Il faudrait réfléchir à une déonto-
tion que peut jouer la charge émotion- logie des médias, en se basant sur une
nelle des productions aux effets calculés, meilleure connaissance des effets voulus
utilisant la vitesse et la violence pour ou non voulus sur la sensibilité et sur les
accrocher le téléspectateur. L'émotion a conduites.
une grande force de contagion et l'enfant compléments
« émotion » Liliane Lurçat
plus_que l'adulte_est la proie des conta-
gions émotionnelles. À la télévision, « mimétisme »
c'est par le biaisdes contagions émotion-
nelles que la violence agit, pouvant
engendrer des mimétismes. On peut
comprendre ainsi les épidémies déclen-
chées par certains spectacles ou certai-
nes mises en scène des informations. Le
suicide mimétique à la télévision a été
nommé effet Werther ( 1 7), La projection illustration
du film Dci'r Hunier (« Voyage au bout
de l'enfer »). qui comporte une séance de
roulette russe, a poussé vingt-neuf jeu-
nes Américains, âgés de 8 à 31 ans, à se
tirer une balle dans la tête.
20. Les effets de suggestion, indépen- reformulation de 11.1
damment de ceux obtenus par la publi-
cité, sont parfois observés après coup,
pour des séries qui, en elles-mêmes.
paraissent de bonne qualité. Le dernier
exemple connu est celui d'un jeune
garçon prénommé Romain qui a imité
Mac Gyver donnant la recette réaliste
d'un explosif de fortune, mais très effi-
cace, au point que lui et son camarade se
sont tués. Dans ce cas, l'induction à
l'imitation est obtenue par la séduction
qu'exercé le héros.

17. Appnx-hc fiillurcllc cî éducative <>i< finiMcme île


la violence. Conseil de l'Europe, document 5013-F.
Slrashoiirgr I9R3.
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

CHAPITRE 6
Exercice n° 10 : Les mots d'articulation

Cet exercice a été construit à partir de la Nouvelle grammaire


française : applications. — Maurice Grévisse et André Goosse. — 3e
éd. — Paris ; Louvain : Duculot, 1995.
Exercice n° 11 : Lecture critique de résumés sous l'angle formel
Ainsi : conséquence, illustration, En premier lieu : énumération
rappel En résumé : conclusion Principales remarques concernant l'aspect formel des résumés :
Au contraire : opposition En revanche : opposition 1) ne pas inscrire dans un résumé les données des champs de
Aussi : addition Ensuite : addition description : auteur et date de l'article (2)
Avant tout : introduction Et : addition 2) rédiger en bloc, sans alinéa (1, 3, 4, 5, 6)
Car : cause Finalement : conclusion 3) respecter le style choisi et ne pas mélanger styles rédigé et
Cependant : restriction Mais : restriction télégraphique (3)
C'est-à-dire : illustration Même : insistance 4) s'il y a 3 axes, ou 3 causes, ne pas l'annoncer tel quel (1, 3, 6),
C'est pourquoi : conséquence Néanmoins : restriction mais l'intégrer dans l'énoncé (7, 8, 9)
D'abord : introduction Notamment : illustration 5) on peut utiliser les expressions de l'auteur lorsqu'elles sont
Dans un premier temps : Or : rappel porteuses de sens (caractère conjoncturel, structurel,...) et non
énumération Parce que : cause figures de style : « vie d'homme », « perdre de sa superbe »,
D'autant plus : insistance Par conséquent : conséquence « turbulence », « palette », ...
De là : conséquence Par contre : opposition 6) respecter les guillemets voulus par l'auteur si l'on utilise le
De même : rappel Par exemple : illustration néologisme « tertiarisation » : comparer 1,4 et 3,9
De plus : insistance - ne pas employer de point d'exclamation (6)
Par le fait que : cause
Donc : conséquence, conclusion Pour conclure : conclusion 7) Faiblesses de style :
D'où : conséquence, rappel - ne pas personnaliser : « nous sommes, nous assistons... » (3)
Pourtant : restriction
- éviter les injonctions trop répétées : « il faut... il faudrait... il
Effectivement : cause Pour toutes ces raisons :
faudra... » (1)
Également : addition conséquence, conclusion - ne pas commencer par « d'abord... bref... » (6)
Encore : addition, insistance Premièrement : énumération - le substantif « mutation » supporte difficilement le passage à la
En définitive : conclusion Puis : addition forme verbale : « tout mute... » (5)
En effet : cause Puisque : cause 8) sans entrer vraiment dans le fond, on peut remarquer que le
Enfin : conclusion Tout d'abord : introduction nombre important de termes généraux dans (5) empêche ce
En outre : addition résumé d'être représentatif d'un contenu clair.
Toutefois : restriction
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 13 - Exercice d'écriture : reconstituer un texte


Enfin, il est permis de critiquer les trois derniers résumés, rédigés
respectivement par trois formateurs dont un seul était documen-
taliste t 1. D'autre part, la gymnastique volontaire est une occasion de contacts. Des
personnes de métiers et de genres très divers s'y retrouvent. J'y ai rencontre par
exemple un juge des enfants qui m'a parlé de sa profession et m'a beaucoup
intéressée.
2. La gymnastique volontaire est maintenant très répandue, et je m'en réjouis
Exercice n° 12 - Exercice d'écriture : car elle offre de nombreux avantages.
rétablir la ponctuation d'un texte 3. La gymnastique volontaire procure enfin une excellente détente, Grâce à
elle, chacun s'évade de son univers quotidien pour ne plus vivre qu'avec son
Romans et enfants. — Roland Barthes — extrait des Mythologies. corps dans un cadre sympathique.
Éditions du Seuil, 1957 (Points, 10} 4. D'abord, elle apporte une compensation salutaire à la sédentarité de nos
À en croire Elle, qui rassemblait naguère sur une même photographie vies. Nous marchons peu, en effet, pour nous rendre au travail, que nous utili-
soixante-dix romancières, la femme de lettres constitue une espèce sions pour ce faire les transports en commun ou un engin individuel. Par
zoologique remarquable : elle accouche pêle-mêle de romans et d'enfants. ailleurs, notre activité professionnelle est bien souvent statique. La gymnas-
On annonce, par exemple : Jacqueline Lenoir (deux filles, un roman) ; tique volontaire, qui mobilise chacun de nos muscles, nous permet de compen-
Marina Grey (un fils, un roman) ; Nicole Dutreil (deux fils, quatre ser cette sédentarité et de rendre à notre corps son équilibre.
romans), etc. 5. Pour toutes ces raisons, je pense que la gymnastique volontaire est une belle
Qu'est-ce que cela veut dire ? Ceci : écrire est une conduite glorieuse, mais réalisation sociale. Facteur d'équilibre, de rencontres et d'enrichissement, elle
hardie ; l'écrivain est un « artiste », on lui reconnaît un certain droit à la
est sans nul doute à pratiquer.
bohème ; comme il est chargé, en général, du moins dans la France d'£7/e,
de donner à la société les raisons de sa bonne conscience, il faut bien payer 6. Ces possibilités de contacts ouvrent des horizons. C'est ainsi que je me suis
ses services : on lui concède tacitement le droit de mener une vie un peu mise à fréquenter la piscine grâce à des membres de mon club de gymnastique
personnelle. Mais attention : que les femmes ne croient pas qu'elles qui m'y ont entraînée. Avec d'autres personnes, j'ai visité un musée local que
peuvent profiter de ce pacte sans s'être d'abord soumises au statut éternel je ne connaissais pas.
de la féminité. Les femmes sont sur terre pour donner des enfants aux
Ordre des paragraphes : 2 - 4 - 1 - 6 - 3 - 5
hommes ; qu'elles écrivent tant qu'elles veulent, qu'elles décorent leur
condition, mais surtout qu'elles n'en sortent pas : que leur destin biblique La facilité de cet exercice tient à sa brièveté, à la simplicité du
ne soit pas troublé par la promotion qui leur est concédée, et qu'elles payent contenu et à la bonne place des mots d'articulation.
aussitôt par le tribut de leur maternité cette bohème attachée naturellement
à la vie d'écrivain.
Après la première phrase interrogative, l'auteur répond par 3
phrases (bien indiquées par 3 points) : la première s'intéresse à
l'écrivain, la deuxième est une phrase de transition qui introduit la
troisième, où il est question de la femme écrivain. La ponctuation
intermédiaire soutient l'ordre du discours.
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

Exercice n° 14 : Rédiger le résumé documentaire Cet essai de style télégraphique marque la limite du genre. Même si
l'on comprend à peu près de quoi il est question, le texte méritait une
d'un texte déjà étudié
rédaction plus approfondie.

Résumé et indexation ne relevant pas des sciences exactes, il ne 4. Le rapport médiatisé aux choses éloigne le jeune enfant du réel. Celui-ci
peut pas exister un résumé parfait. C'est pourquoi cinq versions peut être amené, par fascination émotionnelle et mimétisme, à commettre des
sont ici proposées, et aucune d'entre elles n'est exempte d'erreurs. actes violents. 11 faudrait réfléchir à une déontologie des médias.
En comparant votre résumé à ceux-ci, vous pourrez sans doute La première phrase, trop vague, sous-entend qu'on a lu l'article. La
deuxième phrase est bonne. La troisième est inutile et dispropor-
relever vos propres erreurs d'interprétation. Quant aux erreurs
tionnée : à nouveau on ne trouve aucune information sur ce sujet dans
formelles, vous n'en faites plus depuis le premier exercice !
le texte, sauf sous forme d'un souhait.
Les effets violents de la télévision. -- Liliane Lurçat. -- Esprit, 5. En éloignant le public de la réalité, l'image télévisuelle favorise l'émotion
n° 203, juillet 1994, p. 175-179 plus que la réflexion et rend possibles les mimétismes inconscients comme les
1. La TV initie l'individu à la vie publique en le coupant de la réalité et en le imitations conscientes. De nombreuses enquêtes prouvent que les spectacles
rendant passif. Les effets émotionnels et de suggestion de la TV sur les indivi- violents à la télévision peuvent avoir un réel impact sur un public fragile,
dus sont décrits avec de nombreuses illustrations. Elle induit un mimétisme particulièrement les enfants fascinés, imprégnés par des images pouvant
impulsif ou conscient qui rend souhaitable la création d'une déontologie des engendrer des mimétismes dangereux.
médias. Certainement le meilleur des cinq, quoique cherchant sans doute à en
Bon essai de condensation, mais : dire trop. Si les deux grandes parties du texte sont bien indiquées
- « individu », écrit deux fois, ne rend pas l'idée du public fragile puisque ce résumé est composé de deux phrases, la seconde phrase est
composé de l'enfant et de l'adolescent, dont il est question dans le meilleure que la première.
texte ;
- la troisième phrase commence par « Elle » : quel est le sujet ?
- dans un texte aussi court, « TV » — abréviation acceptable ? — est
répété deux fois ;
- toujours dans un texte aussi court, doit-on donner tant de place à la
dernière phrase de conclusion : phrase de souhaits et non d'infor-
mation. Exercice n° 15 : Rédiger le résumé documentaire
d'un texte nouveau
2. La télévision a plusieurs répercussions sur le comportement du spectateur :
elle favorise l'habitude de croire plutôt que d'analyser, elle a un puissant effet
Des objectifs pour le journalisme. -- Claude-Jean Bertrand. -
sur la sensibilité, elle rend possibles les imitations inconscientes et conscien-
tes. Il s'agit de comprendre comment le spectacle de la violence montré de Études, septembre 1993
manière répétitive peut déboucher sur l'imitation impulsive et quels sont les 1) Étude critique de six résumés n'ayant aucune valeur d'exem-
effets de suggestion de fa télévision. plarité ; selon l'exercice choisi, on peut :
Ce résumé est mieux rédigé que le précédent, mais l'« individu » est - soit comparer avec le résumé déjà rédigé ;
devenu « spectateur » sans préciser de quel public il s'agit vraiment. - soit les étudier pour en relever les aspects positifs puis rédiger le
3. Effets de la télévision sur les enfants : passivité, contagion émotionnelle, résumé ; '
imitations conscientes et/ou inconscientes pouvant déboucher sur des délits - soit les étudier de façon critique, prendre connaissance des
plus ou moins graves et violents. remarques faites en pages 295 à 298, puis rédiger le résumé.
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

1. Les médias face à l'amélioration de la qualité. Avec 12 6. Au fil des temps l'information a dû surmonter des obstacles
propositions, présentation pour un journalisme actuel qui propose matériels, politiques, économiques. Afin d'arriver à produire une
une information à la fois sérieuse, commentée, qui suscite l'intérêt information valable, il est nécessaire de remplir un certain nombre
du plus grand nombre et encourage à une vie sociale également de d'objectifs qui sont de :
qualité. - ne pas diffuser une information à intervalle régulier ;
- distinguer le divertissement de l'information ;
2. Pendant des siècles, l'information a été gênée par des obstacles
- éviter les omissions dues à la partialité ;
matériels et politiques. Depuis le début du xx* siècle, une autre
- intéresser un maximum de lecteurs ;
barrière à l'information est apparue : l'obstacle économique. Ces
- donner aux événements la place qu'ils méritent ;
facteurs ne sont pas seuls responsables de la désinformation.
- savoir discerner l'actualité réelle ;
L'amélioration des médias est souhaitable : le sort de l'humanité en
- rendre les nouvelles compréhensibles, intéressantes, et en
dépend. Douze possibilités d'amélioration possibles sont présen-
démontrer l'importance ;
tées pour les journalistes :
- interpréter de façon claire les recherches et découvertes scienti-
- ne pas imposer aux informations une taille ou une heure fixes ;
fiques ;
- distinguer le divertissement de l'information ; - encourager les débats ;
- éviter les omissions dues à la partialité ; - dénoncer les tares sociales.
- changer la définition de l'information ;
- faire apparaître les pseudo-événements pour ce qu'ils sont ; Trois facteurs permettent de voir ces transformations s'amorcer et
- chercher la réalité sous les apparences ; la mentalité des journalistes évoluer :
- rendre les nouvelles compréhensibles ; - la croissante complexité des sociétés ;
- rendre intéressantes les nouvelles importantes. - le niveau d'éducation des populations ;
- le progrès des sciences.
3. Depuis ses origines, la diffusion de l'information a été entravée
L'élaboration d'une éthique pourrait servir de contrôle de qualité.
par des obstacles d'ordre matériel, politique (gouvernements,
tribunaux, etc.) et économique (pressions des patrons de vente et
annonceurs). Pourtant ces facteurs ne sont pas considérés comme 2) Quelques critiques concernant les six résumés précédents sont
seuls responsables de la désinformation. Il y en a un plus grave proposées ci-après.
provenant des professionnels eux-mêmes qui pratiquent l'auto-
censure, ce qui engendre la médiocrité. Douze propositions ou buts
à atteindre sont développés dans cet article pour remédier à cet
état de fait.
1. Les médias face à l'amélioration de la - faux style télégra-
4. Le sort de l'humanité dépend de l'amélioration des médias... qualité. Avec 12 propositions, présen- phique
Douze objectifs liés principalement à la transformation de la redéfi-
tation pour un journalisme actuel qui - ce résumé est mal
nition du produit médiatique et des informations apporteraient
douze améliorations nécessaires.
propose une information à la fois rédigé, mais t tente
sérieuse, commentée, qui suscite l'intérêt honnêtement de rendre
5. Douze améliorations possibles des médias liées à une redéfi- du plus grand nombre et encourage à une compte de l'essentiel du
nition du produit médiatique et des informations. vie sociale également de qualité. contenu
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

2. Pendant des siècles, l'information a été 4. Le sort de l'humanité dépend de l'amé- - « Le sort de l'huma-
gênée par des obstacles matériels et poli- lioration des médias... Douze objectifs nité » a visiblement im-
tiques. Depuis le début du xx c siècle, une - 10 lignes pour résumer liés principalement à la transformation de pressionné les rédac-
autre barrière à l'information est apparue : le premier paragraphe teurs... Cf. remarque au
la redéfinition du produit médiatique et
l'obstacle économique. Ces facteurs ne résumé n°2
des informations apporteraient douze
sont pas seuls responsables de la désinfor- - les 12 objectifs ne sont
améliorations nécessaires.
mation. L'amélioration des médias est sou- pas détaillés, cependant
haitable : le sort de l'humanité en dépend. - cette phrase est le leur orientation est plus
Douze possibilités d'amélioration possibles reflet d'une opinion ; claire que dans le
sont présentées pour les journalistes : elle ne doit pas paraître résumé précédent
- ne pas imposer aux informations une dans un résumé
taille ou une heure fixes ; 12 propositions sont
- distinguer divertissement et information ; annoncées, mais 8 seule- 5. Douze améliorations possibles des _ pour faire court on a
- éviter les omissions dues à la partialité ; ment sont citées médias liées à une redéfinition du produit f a j t court ! Point trop
- changer la définition de l'information ; médiatique et des informations. n'en faut...
- faire apparaître les pseudo-événements
pour ce qu'ils sont ;
- chercher la réalité sous les apparences ;
- rendre les nouvelles compréhensibles ;
- rendre intéressantes les nouvelles im-
portantes. Ayant fait le choix d'une
6. Au fil des temps l'information a dû
surmonter des obstacles matériels, politi- certaine exhaustivité, le
ques, économiques. Afin d'arriver à pro- rédacteur a réussi un
3. Depuis ses origines la difiùsion de - à nouveau l'essentiel très bon travail, dans la
l'information a été entravée par des obsta- duire une information valable, il est
du résumé concerne le mesure où l'équilibre
cles d'ordre matériel, politique (gouverne- nécessaire de remplir un certain nombre
premier paragraphe entre les différentes
ments, tribunaux, etc.) et économique d'objectifs qui sont de :
parties est bien res-
(pressions des patrons de vente et annon- - ne pas diffuser une information à inter- pecté.
ceurs). Pourtant ces facteurs ne sont pas valle régulier ;
considérés comme seuls responsables de la - distinguer le divertissement de l'infor-
désinformation. II y en a un plus grave, pro- mation ;
venant des professionnels eux-mêmes qui - éviter les omissions dues à la partialité ; La formulation des
pratiquent l'autocensure, ce qui engendre la - ce qui fait le corps de - intéresser un maximum de lecteurs ; objectifs a été plusieurs
médiocrité. Douze propositions ou buts à l'article est annoncé, - donner aux événements la place qu'ils fois modifiée, de façon
atteindre sont développés dans cet article mais aucune informa- méritent ; souvent intéressante...
pour remédier à cet état de fait. tion n'est donnée - savoir discerner l'actualité réelle ;
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

- rendre les nouvelles compréhensibles, in- ... en particulier dans cohérents. À partir de quatre parties (et non de douze), on peut
téressantes et en démontrer l'importance ; cette phrase qui couvre fournir un résumé très court (mais informant sur l'essentiel :
- interpréter de façon claire les recherches trois objectifs proches premier résumé) ou développer les quatre parties (second résumé).
et découvertes scientifiques ; La rédaction utilise beaucoup les verbes, donnant ainsi le sens
- encourager les débats ; dynamique du texte original.
- dénoncer les tares sociales. En revanche, ceci est
restrictif en regard du THÉMATISATION
paragraphe résumé
§ STRUCTURATION

INTRODUCTION Mauvaise image des médias à


1 à3
améliorer

4à6 1" Ul* - en changeant la forme


Trois facteurs permettent de voir ces Mais ce très bon
transformations s'amorcer el la mentalité résumé, sous l'angle du 7 à 1 7 + 20 2e Ul - en choisissant et en définissant
des journalistes évoluer : mieux les informations à trans-
contenu, souffre de la mettre
- la croissante complexité des sociétés ; présentation en alinéas
- le niveau d'éducation des populations ; qui ne sont pas accep- 18, 19 et 20 y ui - en ayant un rôle pédagogique
- le progrès des sciences. tables dans un résumé
documentaire. 22 à 24 4'UI - en participant au débat public
L'élaboration d'une éthique pourrait servir
de contrôle de qualité. CONCLUSION Ce qui motive et aide ces transfor-
25 à 29
mations
Ul : Unité d'Information

Premier résumé :
3) Rédiger un résumé documentaire : proposition de corrigés. Les médias souffrent d'une mauvaise image. Plusieurs idées sont
avancées pour améliorer la qualité de l'information journalistique :
Des objectifs pour le journalisme. -- Claude-Jean Bertrand. - des modifications de forme, une définition plus fine de ce qui doit
Études, septembre 1993.
être transmis, une prise en compte d'un rôle pédagogique, une
La structuration de ce texte est l'étape de travail la plus importante participation au débat public.
pour arriver au résumé. En effet, les 12 objectifs donnent l'impres-
sion de former le plan, mais l'intérêt est de procéder aux regroupe- Second résumé :
ments proposés dans le tableau suivant. On est bien dans un pro- Les médias souffrent d'une mauvaise image, due jadis à des
cessus de hiérarchisation des idées et d'organisation d'ensembles obstacles matériels, politiques et économiques, actuellement au
mauvais usage d'une large liberté. Douze idées sont avancées pour
améliorer la qualité de l'information journalistique. En modifier la
forme : assouplir le principe des délais immuables, utiliser toutes les
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

ressources de la technologie pour varier l'envoi des nouvelles et les • des termes généraux qui n'ont aucun sens lorsqu'ils sont em-
rythmes de publication. Définir davantage l'information à trans- ployés seuls (et dont beaucoup sont peu porteurs d'information) :
mettre : distinguer le divertissement de la véritable information, 1, 7, 10, 15, 20, 23, 25, 29, 31, 34, 35, 36, 42, 43, 45, 46, 49, 52
éviter les omissions dues souvent à la partialité, valoriser l'aspect
positif des nouvelles plutôt que le spectaculaire et le convenu, • des expressions copiées du texte : 2, 4, 6, 8, 12, 19, 33, 39
repérer les phénomènes porteurs d'avenir. Prendre en compte le • des termes qui ne sont pas porteurs d'information : 3, 16, 41, 50
rôle pédagogique de la presse : rendre intéressantes les nouvelles
importantes, dépasser l'événementiel pour atteindre l'essentiel,
rendre intelligible le discours scientifique. Participer au débat Réflexions avant élimination ou choix :
public : rendre possible la participation à la discussion, à la vie Certains termes cherchent à traduire :
sociale, à la mise en place de réformes sur des sujets plus proches • le sujet principal de l'article consacré au journalisme, vu sous
des vrais besoins que majoritairement admis. La croissante l'aspect d'une nécessaire amélioration (ce que 2 dit maladroi-
complexité des sociétés, l'élévation du niveau d'éducation, le
tement) : 5, 26, 32, 44, 51. Mais tous sont trop généraux et peuvent
progrès de la conscience des journalistes doivent aider les médias à
même entraîner des faux sens (32, 44, 51). On peut même — hors
engager ces transformations, permettant d'augmenter le prestige
et l'influence de la profession. contexte — considérer 32 comme un adjectif féminin pluriel ;
• la responsabilité des journalistes : 11, 17, 30 ;
• un seul aspect du texte : 9, 24, 47.
On peut tous les éliminer sans état d'âme, car ils ne devraient que
provoquer du bruit à l'interrogation.
Restent les suivants qui visent directement le sujet principal en
CHAPITRE 7 diversifiant les formulations :

Exercice 16 : Identifier des erreurs d'indexation 18 : information - exige un adjectif qui le qualifie
22 : journaux - journaux ou journalisme ?
Cette liste donne la preuve qu'indexer n'est pas un don ! À la 21 : journalisme (présent dans le titre)
décharge de ce groupe, le travail de réflexion sur l'indexation en 27/28 : média(s) justes, mais tellement généraux
tant que moyen de recherche n'avait pas encore été abordé — ce 37 : presse
qui fut fait à partir de cette liste et a donné, bien sûr, d'excellents
résultats.
élimination : Ces termes ne sont pas faux, mais éloignés du sens véhiculé par le
texte. Que faire ? Il est certain que tous les exercices de ce chapitre
- des simples erreurs de forme : auront un goût d'inachevé, puisque l'on ne peut pas proposer un
-pas d'adjectif (48) langage contrôlé adapté à chacun. Donc, partir de la phrase-
- pas de pluriel (23/25, 27/28) sésame : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? » et de la réponse,
- pas de tournure alambiquée (53) présente dans les résumés : « Comment améliorer la qualité de
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

l'information journalistique ? ». Selon le langage contrôlé utilisé,


on cherchera à traduire le sens de cette phrase avec le vocabulaire 1. Bibliothèque
existant. 2. Commission Lehman
Si l'on se met à la place de l'utilisateur qui cherche un article sur ce 3. Coût
sujet, il interrogera sur le terme le plus central : journalisme, presse, 4. Coût de l'information
média. C'est au résumé de l'aider à la sélection. 5. Diffusion de l'information (x 2)
6. Diffusion électronique de l'information
7. Document numérisé
8. Droit d'auteur (x 5)
Exercice 17 : Indexer en langage libre 9. Droit d'auteur sur Internet
10. Droit de l'information (x 2)
11. Droit de reproduction (x 3)
Les droits d'auteur des œuvres numériques. — Ann Okerson. -
12. Droit de reproduction sur Internet
Pour la science, septembre 1996, n° 227
13. Droits d'auteur (x 3)
À nouveau, il est difficile de proposer une correction pour cet 14. Éditeur
article. En revanche, vous pouvez comparer votre indexation avec 15. Édition (x 2)
le résultat obtenu dans une session de formation au cours de 16. États-Unis (x 3)
laquelle 14 personnes ont d'abord choisi des mots clés, puis ont 17. France
répondu à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? » 18. Informatique numérique
19. Internet (x 12)
1) Liste de mots clés : voir ci-contre. 20. Législation (x 2)
21. Législation américaine
On retrouve dans cette liste les mêmes erreurs que dans l'exercice
22. Lehman
précédent.
23. Loi sur la propriété intellectuelle
- À éliminer d'office : 24. Œuvre numérique (x 5)
- l'erreur de forme (pluriel) : 13 25. Propriété intellectuelle
- les termes généraux : 3, 20, 24, 28, 30, 31, 34 26. Propriété littéraire et artistique (x 3)
- une expression copiée du texte : 35 27. Protection des droits d'auteur (x 6)
- des termes non porteurs d'information dans ce contexte : 1, 18, 32 28. Protection des œuvres
- des termes porteurs d'information après avoir lu le texte : 2, 22, 29 29. Rapport Lehman
- des termes ne caractérisant qu'un aspect du texte : 4, 5, 7, 10, 14, 30. Réglementation
15, 16, 17,21, 31. Réglementation du réseau
32. Réseau informatique (x 6)
- Restent deux ensembles correspondant aux deux éléments du
problème : 33. Réseau Internet
34. Transmission
- la protection des droits d'auteur : 8, 9, 11, 12, 13, 23, 25, 26, 27
-face à la diffusion sur Internet : 6, 19, 33 35. Usage loyal
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES

2. Réponses à la question : « De quoi s'agit-il dans ce texte ? »


Toutefois, ce texte est difficile à indexer car il est principalement
Six réponses ont été choisies sur les 14 proposées : problématique, à l'exception de la partie historique. Il est clair que
des termes isolés (même de formulation composée) ne peuvent que
très difficilement rendre compte d'une confrontation entre des
1. Projet de loi pour la protection des droits d'auteur suite à la diffusion éléments complexes. La nécessité d'un résumé documentaire
d'oeuvres sur le réseau Internet s'impose, d'autant plus que le chapeau est bien peu informatif.
- le texte n'est pas un projet de loi
- le terme « œuvres » est trop général

2. Nécessité d'une réglementation sur les droits d'auteur concernant les œuvres
numériques
- à « œuvres numériques » (copie du titre), préférer « création littéraire Exercice 18 : Indexer en langage libre
et artistique »
- le problème posé par la diffusion sur Internet n'apparaît pas
Haute tension sous les lignes. — Didier Dubrana. — Science & Vie,
3. Problèmes de propriété littéraire et artistique et de droits d'auteur posés par février 1993, n° 905
l'apparition des documents numériques
- bon début, mais c'est la diffusion de ces documents sur Internet qui Étudiez les 5 réponses suivantes en les comparant à votre propre
pose surtout un problème proposition :

4. Protection des œuvres littéraires et artistiques en respectant les droits 1. Les risques pour la santé causés par les lignes à haute tension
d'auteur dans le cadre d'Internet
- bon
2. Impact des champs électromagnétiques dus aux lignes à haute
tension sur la population. Rappel historique des recherches
5. La création artistique sur Internet et le respect des droits d'auteur 3. Enquêtes et rapports sur la polémique des effets des lignes à
- bon, mais il faut deviner qu'« artistique » couvre au«i « littéraire » haute tension sur la santé de l'humain

6. Les droits d'auteur et les problèmes posés par l'édition électronique et la 4. Les effets des lignes à haute tension sur la santé
diffusion sur le réseau Internet. Rappel historique sur la législation, / état 5. Risques pour la santé par exposition aux champs électromagné-
actuel de la réflexion et propositions de la commission Lehman tiques générés par les lignes à haute tension
- jusqu'à / très bonne réponse. « État actuel de la réflexion » n'apporte
aucune information. « Proposition Lehman » devrait plutôt apparaître
dans le résumé, pour les utilisateurs qui en auraient connaissance Quelques commentaires :

• Aucune de ces phrases ne fait honneur à la langue française, mais


II est spectaculaire d'observer qu'un grand nombre de mots inutiles ce n'est pas important à ce stade du travail.
n'apparaissent pas dans ces phrases et qu'en tenant compte des • Malgré leur forme différente, le sens global est le même. *
quelques remarques faites, les mots choisis sont presque tous
porteurs du sens principal. • Si l'on compte les occurrences des termes les plus fréquents, on
retient :
ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

- lignes à haute tension (x 5)


- santé (x 4)
- champs électromagnétiques (x 2)
L 1 1 Aitchison, Jean et Gilchrist, Alan. - Construire un thésaurus: manuel pratique / iratl.
On ne peut s'empêcher de comparer ces résultats à la liste suivante, par Dominique Hervieu ; révision scientifique par Jacques Maniez. - Paris : ADBS Édi-
obtenue après « indexation traditionnelle » :
tions, 1992

1. Canada (x 4) [2] Albrechlsen. Hanne et Hjorland, Birget. - Information seeking and knowledge orga-
15. Leucémie (x 3)
2. Cancer (x 4) nisation. - Knowledge organisation, 1997, vol. 24, n" 3
16. Ligne à haute tension (x4)
3. Champ électromagnétique (x 3) 17: Maladie [31 Association française de normalisation (AFNOR). - Analyses et résumés d'auteurs:
4. Coutiches (x 3) 18. Mélatonine Z 44-004. - Paris La Défense: AFNOR, 1963
5. EDF (x 3) 19. Miligauss
6. Électricité (x 2) 20. O.M.5. |4) Association française de normalisation (AFNOR). - Principes généraux pour l'in-
7. Enfant 21. Onde électromagnétique dexation des documents: Z 47-102. - Paris La Défense: AFNOR. 1978
8. Enquête 22. Polémique
|5| Association française de normalisation (AFNOR). - Recommandations aux auteurs
9. Enquête épidémiologique (x 2) 23. Recherche des articles scientifiques et techniques pour la rédaction des résumés: Z 44-004. - Paris
10. Épidémiologie 24. Risque pour la santé La Défense: AFNOR, 1984
11. États-Unis (x 2) 25. Santé publique
12. France (x 2) 26. Suède (x 2) [6| Association française de normalisation (AFNOR). - Règles d'établissement des thé-
13. Haute tension 27. Suivi médical saurus monolingues: 747-100. - Paris La Défense: AFNOR, 1981
14. I.R.P.A.
[7| Association française de normalisation (AFNOR). - Vocabulaire de la documenta-
tion. -2e éd.-Paris La Défense: AFNOR, 1987

Peut-on parler d'acharnement à fournir des mots, comme si le (8) Attali, Jacques. - Hypermonde et géopolitique. - Documentaliste - Sciences de l'in-
nombre compensait la compréhension ? On ne reprendra pas cette formation, 1998, vol. 35, n° 3
liste pour relever les erreurs, faciles à détecter après les deux
[9] Ballz. Claude. - Une culture pour la société de l'information? Position théorique.
derniers exercices. On ne peut que souligner la spectaculaire diffé-
définition, enjeux. - Documentaliste - Sciences de l'information, 1998, vol. 35, n° 2
rence entre les deux modes d'indexation (les groupes ayant produit
ces résultats étaient de niveau similaire). [10] Beghtol. Clare. - Knowledge domains: multidisciplinarity and bibliographie clas-
L'indexation n'est pas achevée pour autant : on n'apprend rien de sification Systems. - Knowledge organisation, 1998. vol. 25, n° 1/2
sérieux dans cet article sur les « champs électromagnétiques » : [ 1 1 1 Bernât. Laurent, - Internet et recherche documentaire. - Paris : ADBS, janvier
faut-il le conserver comme terme d'indexation ? M peut être à 1999 (Support de stage, document interne)
l'origine de bruit si l'on recherche vraiment des documents sur ce
sujet. |12) Bibliothèque nationale de France. Service de coordination bibliographique et
Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Agence bibliographique de
Il est vrai aussi que cet article n'a pas un niveau scientifique ou l'enseignement supérieur. - Guide d'indexarion RAMEAU : règles d'indexation, liste de
technique suffisant pour être intégré à une banque de données. Il subdivisions. - Montpellier: ABES. 1995 ]Le Journal des créations et modifications est
faut le considérer comme un bon support d'exercice. accessible sur le serveur web de l'ABES : http://www. abcs.fr]
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[13] Blanc-Monlrnayeur. Martine et Danset. Françoise. - Choix de vedettes matière à |27) Dcschênes, André-Jacques. - La compréhension et la production de textes. -
l'intention des bibliothèques. - N"c éd. - Paris: Éditions du Cercle de la Librairie, 1998 Montréal : Presses universitaires du Québec. 1988

[14] Blanquet, Marie-France. - Science de l'information et philosophie: une commu- |28] Dewey, Melvil. - Classification décimale de Dewey et index. -Ire version fran-
nauté d'interrogations. -Paris: ADBS Éditions, 1997 çaise intégrale d'après la 18' éd. par le Groupe lyonnais de classification... - Paris: diff.
Cercle de la Librairie, 1974
[15] Bristîsh Standard Institution (BSI). - Recommendations for examining
documents, determining their subjects and selecting indexing terms : BS 6529. - [29] Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française / par Paul Robert.
Londres: BSI, 1984 - Paris: Société du Nouveau Lillré. 1969

[16] Caron, Agnès et Boulogne. Ariette. - La synthèse : produit documentaire et [30] Dictionnaire encyclopédique de l'information et de la documentation / Serge
méthode pédagogique. - Paris: ADBS Éditions, 1997 Cacaly, dir. du comité de réd. ; Yves F. Le Coadic. Michel Melot, Paul-Dominique
Pomart, Eric Sutter. comité de réd. - Paris: Nathan, 1997
[17] Caspar, Pierre. - Problèmes: méthodes et stratégies de résolution. - Paris: Édi-
tions d'organisation, 1978
|31 ] Dictionnaire historique de la langue française... / sous la direction d'Alain Rey. -
Paris: Dictionnaires Le Robert. 1992
[18] Cattelain, Marlène. - Guide pour les producteurs d'information EUROPA. le ser-
veur web de l'Union européenne: chapitres relatifs aux métadonnées. In: Décrire, stoc-
|32] Domenach. Jean-Marie.-Cequ'il faut enseigner... - Paris: Éditions du Seuil. 1989
ker et retrouver l'information sur son site web: les métadonnées/Journée d'étude orga-
nisée par l'ADBS, 2 février 1999. - Paris: ADBS, 1999 [Document non publié remis
aux participants] ]33] Eco, Umberto. - Lector in fabula: le rôle du lecteur ou la coopération interpréta-
tive dans les textes narratifs / trad. de l'italien par Myriem Bou/aher. - Paris: Librairie
[19] Chambre de commerce et d'industrie (Paris). Direction de l'information écono- générale française. 1985
mique. - Le thésaurus de Delphes. - Paris: CCIP, 1993
|341 Escarpil, Robert -Théorie générale de l'information et de la communication. -
[201 Chaumier. Jacques. - Le traitement linguistique de l'information documentaire : Paris: Hachette. 1976
analyse et langages documentaires. -Paris: Entreprise moderne d'édition. 1982
[35] Feyler, François. - L'analyse documentaire: résumer, indexer, techniques, outils.
[2l] Chauney-Bouillol, Martine. - Bibliographie bourguignonne. 32' série (1996). - pratiques. - (Poitiers] : CRDP de Poitou-Charentes, 1995
Dijon: Société des Annales de Bourgogne: AB1DOC, 1998
[36| Frontier. Serge et Pichod-Viale. Denise. - Écosystèmes: structure, fonctionne-
[22]Chosson, Jean-François.-L'entraînement mental.-Paris: Éditions du Seuil. 1975 ment, évolution. - 2' éd. rcv. et augm. - Paris: Masson, 1995

[231 Classification décimale universelle : édition moyenne internationale. - 2' éd. - |37| Gourbin. Géraldine. - Une nouvelle profession: cyber-documentaliste. L'exemple
Liège (Belgique): CLPCF, 1990. - (FID, n° 692) de Nomade. - Documentaliste - Sciences de l'information. 1998. vol. 35, n° 3

[24] Clouzot. Olivier. - Former autrement : apprentissages intellectuels, langage et |3K] Grevisse, Maurice et Gousse. André. - Nouvelle grammaire française: applica-
structuration des connaissances. - Paris: Éditions d'organisation. 1990 tions. - 3e éd. - Paris ; Louvain: Duculot, 1995
[2?] Condenser: cahiers du groupe de recherches sur la condensation de l'information
|39] Grice. H.P. - Logic and conversation. - Harvard University, 1967
en langue naturelle. - Clermont-Ferrand : Faculté des lettres et sciences humaines.
Institut de linguistique, 1980
|40| (ïuiiichal. Claire cl Menou. Michel. - Introduction générale aux sciences et tech-
[26] Deschâtelets, Gilles. - The threc languages theory in information retrieval. - niques de l'information et de la documentation. - 3 éd. - Paris: Presses de l'UNESCO,
International classification, 1986, vol. 13, n° 3 1985
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[4l] Guinchal. Claire et Skouri. Yolande. - Guide pratique des techniques documen- [56] Manie?., Jacques. - Fusion de banques de données docu ment aires et compatibilité
taires... - N fc éd. - Vanves: EDICEF, 1996 des langages d'indexation. - Documentaliste - Sciences de l'information, 1998, vol. 34.
n° 4-5
[42] Hj0r)and, Birger. - Information retrieval. text composition and semantics. -
Knowledge organization, 1998, vol. 25, n° 1-2 [57] Maniez, Jacques. - Les langages documentaires et classificatoires : conception,
construction et utilisation dans les systèmes documentaires. - Paris: Éditions d'organi-
[43] Hoffbeck, Ge'rard et Walter, Jacques. - Le résumé aux concours. - Paris : Dunod. sation, 1987
1989
[58| Manie/. Jacques. - Problèmes de syntaxe dans les systèmes de recherche
[44] Hudon, Michèle. - Le thésaurus : conception, élaboration, gestion. - Montréal : documentaire. - Documentaliste - Sciences de l'information. 1983, vol. 20. n° 2
ASTED, 1995
[59] Marandin, Clarisse. - Des banques de données pour les étudiants, les enseignants.
[45j Hudrisier, Henri. - L'iconothèque. - Paris : Institut national de la communication
les chercheurs. - Paris : Ministère de l'Education nationale, de la Recherche et de la
audiovisuelle: La Documentation française, 1983
Technologie. Sou s-direct ion des bibliothèques. 1998
[46] International standard organisation (ISO). - Documentation - Methods for exa-
[60] Maslow, Abraham Harold. - Vers une psychologie de l'être / trad. et adapté de l'an-
mining documents, deterrnming their subjects and selecting indexing terms: ISO/DIS
5963.2 glais par Mesrie-Hadesque. - Paris: Fayard. 1972

[47] Kattnig, Cécile et Léveillé, Janny. - Une photothèque : mode d'emploi. - Paris : [61] Ménillcl, Dominique. - Grilles d'indexation et de préindexation : l'exemple de
Éditions d'organisation, 1989 Pascal. - Dofumentiilisti' - Sciences de l'information, 1992, vol. 29, n° 4-5

[48] Labouret. D. et Meunier, A. - Les méthodes du français au lycée. - Paris: Bordas. |62] Menou, Michel J. - The impact of information. I : Toward a research agenda for
1995 ils définition and measurement ; 2 : Concepts of information and ils value. -
Information Processing & Management, 1995. vol. 31, n° 4
(49| Le Coadic, Yves-François. - La science de l'information. - 2' éd. - Paris: Presses
universitaires de France, 1997. - (Que sais-je; 2873) [63] Moles, Abraham A. - Socio-dynamique de la culture. - Paris: La Haye: Mouton.
1971
[50] Le Coadic, Yves François. - Usages et usagers de l'information. - Paris : ADBS :
Nathan, 1997 |64| Monday, Isabelle. - Les processus cognitifs et la rédaction de résumés. -
Documentation et bibliothèques, avril-juin 1996, vol. 42, n° 2
[51] Le Moal. Jean-Claude. - Avant-propos. In : Créer et maintenir un service web:
cours INRIA, 28 septembre - 2 octobre 1998, Pau. - Paris: ADBS Éditions, 1998 [65] Moore. Nick. - La société de l'information. In: Rapport mondial sur l'information /
UNESCO. - Éd. 1997-1998. - Puris: Unesco. 1997
[52] Lefèvre, Philippe. - Recherche documentaire: indexation par mots-clés ou texte
intégral. - Clamait: EDF-DER, 1997 [Rapport interne] [66] Morgan. Gareth. - Images de l'organisation. - Québec : Presses de l'Universtié
Laval. 1989
[53] Leloup, Catherine. - Moteurs d'indexation et de recherche: environnement client-
serveur, Internet et Intranet, - Paris: Eyrolles, 1998
[67] Neveu, F. et Lemaître, D. - Vers la maîtrise du texte. - Paris: Hachette, 1991
[54] Lobrot, Michel et Ziinmermann, Daniel. - La lecture adulte. - Paris : ESF -
Entreprise moderne d'édition, 1975 [68| Pages A. et al. - Le français en seconde. - Paris: Nathan, !992

[55] Ludwig. Pascal. - Le langage: introduction, choix de textes, commentaires, vade- |69| Pages, Robert. - Une grille d'analyse des documents en psychologie sociale. -
mecum et bibliographies. - Paris: Flammarion, 1997 Paris: Laboratoire de psychologie sociale, 1962
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
TABLE DES MATIÈRES

[70] Pinto Molina, Maria. - Documentai^ abstracting: toward a méthodologies] mode!.


- Journal of thé American Society <>f'Information Science, 1995, vol. 46. n° 3

[71] Platon. -Menon/ traduit et présenté par Monique Canto-Sperher. - 2e éd. -Paris; 7
Flammarion, 1993 Avant-propos

[72] Richaudeau, François. - Sur la lecture. - Paris: A. Michel, 1992 Introduction 13


[73] Sajus, Bertrand. - Le the'saurus en question. - Mérn. 1NTD : 1997

[74] Scardigli, V. - Apprivoiser la technique. - La lettre de l'ASTS, Axiales, 1996, n° 19 Chapitre I


L'ANALYSE DOCUMENTAIRE : DÉFINITION ET PRATIQUES 15
[75] Soergel, Dagobert. - Indexing and retrieval performance : thé logical évidence. -
Journal of'thé American Society for Information Science, 1994, vol. 45, n° 8 QU'EST-CE QU'ANALYSER ? 15

QU'EST-CE QUE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE ? 16


[76] Sublet, Françoise. - L'acte d'écrire. In : Décrire l'écrire. Actes de l'université d'été,
Toulouse, 6-12 juillet 1988 / sous la dir. de Jacques Fijalkow. - Toulouse : CRDP : L'ANALYSE DANS LE CADRE DES OPÉRATIONS DOCUMENTAIRES 18
Presses universitaires du Mirail, 1988
ANALYSE ET POLITIQUE DOCUMENTAIRES 19
[77] Sutter, Éric. - Apprendre à caractériser les cultures professionnelles, - Finalité de l'analyse documentaire 20
Documentaliste - Sciences de l'information, 1996, vol. 33. n° 2 Destinataires de l'analyse documentaire 21
Produits de l'analyse documentaire 23
[78] Sutier, Éric. - Pour une écologie de l'information. - Documentaliste - Sciences de 24
l'information, 1998, vol. 35, n° 2 Le fonds documentaire
Comment l'établir et l'alimenter? 24
Comment le sélectionner? 25
[79] Thévenet, Eric. -Apprendre à lire et apprendre à penser. - Cahiers pédagogiques,
1996, n° 344/345 Les moyens du service 26
Les moyens matériels 26
[80] Timbal-Duclaux, Louis. - La communication écrite scientifique et technique: qua- Les moyens intellectuels 27
lité et lisibilité. - Paris: ESF-Entrcprise moderne d'édition, 1990
ANNEXE PÉDAGOGIQUE 33
[81] Trésor de la langue française... /Centre national de la recherche pour un trésor de
la langue française. - Paris : Éditions du CNRS, 1974

[82] Ulltiio, Jean. - La pensée scientifique moderne / préf. de Louis Armand. - Paris : Chapitre II
Flammarion, 1981 LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET OBSERVER 35

LES CONDITIONS DE LA LECTURE DOCUMENTAIRE 36


[83] Van Slype, Georges. - Les langages d'indexation : conception, construction et uti-
lisation dans les systèmes documentaires. - Paris: Éditions d'organisation, 1986 Se concentrer et en trouver les moyens 36
Connaître ses limites 37
Organiser sa lecture 37

PHTIT DÉTOUR PAR LA « LECTURE RAPIDE » 37

OBSERVER AVANT DE LIRE 38


68
Observer un document 38 Lecture documentaire d'une monographie
68
La typologie 39 Les hypothèses de lecture
Les caractéristiques 39 71
ANNEXE PÉDAGOGIQUE
Observer la mise en pages: le repérage visuel 40
Le paragraphe 41
Les signes de ponctuation 41
De l'utilité du repérage visuel 43 Chapitre IV
LA LECTURE DOCUMENTAIRE :
ANNEXE PÉDAGOGIQUE 45 STRUCTURE ET VOCABULAIRE
73

TROUVER L'INFORMATION UTILE : LA RECHERCHE D'UN PLAN 73

L'ÉLABORATION DE GRILLES DE LECTURE 75


Chapitre III
Grille de lecture pour un texte descriptif 76
LA LECTURE DOCUMENTAIRE : LIRE ET COMPRENDRE 49
76
L'introduction
76
LES TEXTES ET LEURS CARACTÉRISTIQUES 49 La conclusion
Grille de lecture pour un texte problématique 79
Les textes descriptifs 50
Exemple d'une grille de lecture standard XI
Texte narratif 50
Texte explicatif 50 TROUVER L'INFORMATION UTILE : L'AIDE DU VOCABULAIRE 84
Texte didactique 50 84
Les mots d'articulation
Texte normatif 50 86
La nature des mots
Le texte problématique 51 La richesse des mots: polysémie, monosémie 87
Texte problématique simple 51 87
Le vocabulaire courant
Texte argumentatif 51 89
Le vocabulaire scientifique de base
Texte polémique 51 Le vocabulaire scientifique et technique spécialisé 89
Les textes théoriques 51 90
La richesse des mots: dénotation, connotation
Caractères général et spécifique 57 90
Dcnolution
Texte de type général 57 91
Connotation
Texte de type spécifique 57 91
Exemples
LES TEXTES ET LEUR CONTENU 58
La compréhension du contenu 58
Perception 58
Chapitre V
Mémoires 58 ANALYSE ET RECHERCHE DOCUMENTAIRES 95
Inférence 59
LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE
96
L'usage du contenu 60
La place de l'utilisateur dans le processus de la recherche documentaire 97
COMMENT LIRE ? 64 Qui est le demandeur ?
98
Lecture documentaire d'un article 64 Quelles sont les données du problème ? 98
Le résumé d'auteur 65 Quel est te but du questionnement ? 99
Le chapeau 65 Quelle est la forme du questionnement ? 99
Les intertitres 65 Quelles sont les limites de la recherche documentaire ? ' 100
Les mots en exergue 65
PLACE DE L'ANALYSE DOCUMENTAIRE DANS LES BANQUES DE DONNÉES 101
Les paragraphes de tête 66
Les champs des banques de données
loi
Les paragraphes de fin 66
Les champs de contenu 102 Le compte rendu 125
Titre 102 Le digest 126
Cotation 102 L'extrait 126
Domaine 103 La contraction de texte 126
Indexation 103
Résumé LES RÉSUMÉS DOCUMENTAIRES 127
103
Typologie de l'information Le résume informât!f 127
104
Complémentarité des champs de contenu Le résumé indicatif 127
105
Le résumé sélectif 127
ASPECTS TECHNIQUES DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE INFORMATISÉE 107
Les opérateurs booléens LE RÔLE DU RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE DANS UNE BANQUE DF DONNÉES 128
108
L'intersection 108 COMMENT RÉALISER UN RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE 128
L'union 108 Compréhension 129
L'exclusion 110 Sélection 129
Le bruit et le silence Construction 131
LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE EN TEXTE INTÉGRAL Rédaction 132
Recherche sur fichier inverse 111 Style télégraphique? 133
Recherche par l'intermédiaire d'outils linguistiques 113 Style rédigé 134
La forme des mots 113
Concision des phrases I 35
L'agencement grammatical 115 Précision du vocabulaire 136
Le sens ! 16 Présentation formelle 136
LA RECHERCHE D'INFORMATIONS SUR INTERNET 118 DERNIERS CONSEILS 137
Les moteurs de recherche 118 Pour assurer la pertinence 137
Les répertoires 119 Pour augmenter l'efficacité 137
Autres outils 119 Pour tendre vers l'objectivité 138
ANNEXE PÉDAGOGIQUE 141

Chapitre VI
Chapitre VII
LE RÉSUMÉ DOCUMENTAIRE 121 INDEXATION 149
DÉFINITION 121 QU'EST-CE QU'INDEXER ? 149
USAGES ET USAGERS 122
Alimentation d'une mémoire documentaire
USAGE ET APPLICATIONS 151
122 L'index d'un livre 151
Accompagnement de références dans les bulletins bibliographiques 122 L'indexation du texte d'un document 152
Accompagnement de références dans la partie bibliographique
de revues générales ou spécialisées 123 RÔLE DE L'INDEXATION DANS UNE BANQUE DE DONNÉES 152
Autres usages 123 COMMENT INDEXER ? 153
LES DIFFÉRENTES FORMES DE RÉSUMÉS 124 Éliminer, comment? » 154
Le titre 124 Choisir: pourquoi? 157
Le résumé d'auteur 125 Les différents champs d'indexation 158
Le résumé d'éditeur 125 La profondeur de l'indexation: exhaustivité? sélectivité? 159
COMMENT ÉVALUER L'INDEXATION ? 160 LES VRAIS LANGAGES À STRUCTURE COMBINATOIRE :
Qualité de l'indexeur 161 LEXIQUE ET THÉSAURUS 203
Qualité des oulils 161 Les lexiques spécialisés 203
Les tests possibles 162 Applications pour l'indexation 204
La surindexation 163 Applications pour la recherche 205
Les causes de la surindexation Le thésaurus 206
164
Principes de base 206
Les conséquences de la surindexation 165
Les relations 207
Exemples commentés de surindexation 166
Les notes 211
L'INDEXATION EN 10 CONSEILS 169 Les différents modes d'entrée 211
Maintenance du thésaurus 215
ANNEXE PÉDAGOGIQUE 171 Applications pour l'indexation 216
Applications pour la recherche 217
COMPATIBILITÉ DES LANGAGES D'INDEXATION 218
Chapitre VIII
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES 175 QUEL AVENIR POUR LES LANGAGES DOCUMENTAIRES ? 219
UN PEU D'HISTOIRE 175
LES AUTORITÉS 176 Conclusion 22.?
Les autorités officielles 177
Les autorités propres à des besoins spécifiques 178
Méconnaissance ou réticence? ISO
ANNEXE 1 - TEXTES ET ARTICLES 227
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES 182 Les effets violents de la télévision 227
Définition 182 Gros temps sur la planète 233
Les obstacles dus à la langue 182 Le grand remue-ménage 236
Synonymie 183 La Méditerranée: l'espace et l'histoire 243
Polysémie 183 Des objectifs pour le journalisme 246
Usages et difficultés d'usage 184 Les droits d'auteur des œuvres numériques 253
Typologie des langages documentaires 185 Haute tension sous les lignes 260

LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE CLASSIFICATOIRE 186


Principes de base ANNEXE 2 - CORRIGÉS DES EXERCICES 267
186
Applications pour le classement 188
Applications pour l'analyse (88 Références bibliographiques 307
Applications pour la recherche 193
LES LANGAGES DOCUMENTAIRES DE TYPE COMBINATOIRE 195
Les listes de vedettes-matières
ou les langages qui pourraient être combinatoires 196
Principes de base 196
Applications pour l'indexation 198
Applications pour la recherche 201
Liste des textes reproduits dans cet ouvrage,
avec l'aimable autorisation de leurs éditeurs

Les effets violents de la télévision / Liliane Lurçat. Esprit, juillet 1994, n° 203
De la compétence à la navigation professionnelle / Guy Le Boterf. Éditions
d'Organisation, 1997
Les Jeux et les Hommes / Roger Caillois. Gallimard, 1967
L'amateur d'abîmes/ Samivel. Stock, 1981
Les droits d'auteur des reuvres numériques / Ami Okerson. Pour la science, septembre
1996, n° 227
Gros temps sur la planète / Jean-Claude Duplessis et Pierre Morel. Éditions Odile
Jacob. 1990 et Éditions du Seuil (pour la quatrième de couverture), 1992
Le grand remue-ménage: la crise de la famille / Evelyne Sullerot. Fayard, 1997
La Méditerranée : l'espace et l'histoire / sous la direction de Fernand Braudel.
Flammarion, 1985
Le brevet d'invention. Le Monde, mars 1984
Les juges des mineurs « dénoncent » le monde des adultes. Le Journal de Ccnèvc. 3
avril 1997
Les jeunes néo-nazis refont surface / Marie-Jeanne Krill. Construire, 16 avril 1997,
n° 16
Le vent Paraclet / Michel Tournier. Gallimard. 1977
Les métamorphoses du travail : le temps du déséquilibre permanent / Alain Lebaube.
Le Monde, supplément Initiatives, mai 1995
Mythologies / Roland Barthes. Seuil, 1957
Écrire avec logique et clarté / Gilbcrte Niquct. Huiler, 1996
Des objectifs pour le journalisme / Claude-Jean Bertrand. Éludes, seplembre 1993
Haute tension sous les lignes / Didier Dubrana. Science <5 Vie, février 1993, n° 905

Vous aimerez peut-être aussi