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L’entrepreneuriat social (ES) est un concept émergent.

Apparu
aux États-Unis dans les années 1990, avec notamment la
social enterprise initiative lancée en 1993 par la Harvard
Business School, il s’est ensuite développé dans plusieurs pays
européens sous des formes variées1 regroupées sous l’ombrelle
« d’entreprises sociales ». En France, suite aux conclusions du
rapport d’Alain Lipietz, la loi sur les coopératives de 1947 a été
adaptée pour intégrer la forme de société coopérative d’intérêt
collectif (SCIC)2 en 2002. Le concept d’entrepreneuriat social
se développe en parallèle avec ceux de l’économie sociale et
de l’économie solidaire dont les racines remontent au milieu du
19e siècle. L’économie sociale s’attache à réunir des personnes
avant de réunir des capitaux, sans chercher en priorité la rémuné-
ration du capital3. Elle rassemble des initiatives privées, ce qui
permet de la distinguer du secteur public. Quant au concept
d’économie solidaire, il s’est développé dans les années 1980
dans un contexte marqué par la crise économique et le chômage
de masse. Orientées vers des activités de niche que ni l’État,
ni le secteur privé ne sont en mesure de satisfaire, l’économie
solidaire rassemble diverses activités comme le commerce
équitable, la protection de l’environnement, la finance solidaire,
les structures d’insertion par l’activité économique dont le poids
économique ne cesse de croître. Selon une étude de l’Insee
(2009), l’économie sociale et solidaire représentée par les
associations, les coopératives, les mutuelles et les fondations,
représente 10% de l’emploi en France, 215 000 employeurs et
2,3 millions de salariés4.

Il n’existe pas de statistiques propres à l’entrepreneuriat social,


d’où la complexité de l’étude de cette forme entrepreneuriale.
Dans la pratique, lorsque l’on observe la liste des organisations
qui se reconnaissent dans ce concept, nous constatons qu’elles
sont systématiquement affiliées au champ de l’économie sociale
et solidaire. Ce fait révèle que l’entrepreneuriat social s’inscrit
dans une logique de complémentarité et non de rupture avec
l’économie sociale.
L’usage du terme entrepreneuriat au lieu d’économie permet de
reconnaître le rôle de l’entrepreneur qui impulse le projet collectif
et s’assure de son développement. Ce concept est source de
crainte de la part des défenseurs de l’économie solidaire et de
ses principes fondamentaux (liberté d’adhésion, gouvernance
démocratique, lucrativité limitée5, etc.). Ces derniers redoutent
que l’introduction des outils de management du secteur privé et le
développement de l’esprit entrepreneurial dans le champ du social
puissent nuire aux missions sociales et politiques des structures
de l’économie sociale. L’émergence de l’entrepreneuriat social
invite à étudier ses spécificités par rapport aux autres formes
entrepreneuriales et notamment, les modèles économiques
privilégiés pour assurer la pérennité des organisations. La notion
du business model est elle-même un paradigme de recherche
nouvellement apparu. Le présent article propose d’explorer ces
deux concepts émergents : business model et entrepreneuriat
social. Notre objectif est de proposer un modèle intégrateur qui,
malgré l’extrême diversité des entreprises sociales, permet une
représentation simplifiée des composantes du business model.
Les résultats de nos études de cas montrent que chaque business
model est construit autour de trois composantes explicites : la
proposition de valeur, l’architecture de valeur et l’expérimenta?
tion sociale ainsi qu’une composante implicite qui renvoie à la
recherche de la transformation sociale.
Dans un premier temps, nous présentons une revue de la littéra?
ture des travaux sur les définitions du concept d’entrepreneuriat
social et du business model. Dans un deuxième temps, nous
abordons la méthodologie de recherche ainsi que les résultats
et discussions de nos analyses des deux études de cas. Dans
un troisième temps, nous proposons un modèle intégrateur des
business models des entreprises sociales. Dans un quatrième
temps, nous présentons les implications managériales de notre
étude.

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