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La vie devant soi

GARY, Romain (AJAR, Émile)


Par BÉDARD, Vincent; GRENON, Sarah; LETIEC, Francis

Nationalité de l'auteur : Française


Genre : Roman
Courant : Existentialisme
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Deuxième cycle secondaire
Auteur de la séquence : BÉDARD, Vincent; GRENON, Sarah; LETIEC, Francis
Date du dépôt : Hiver 2019

Première partie

Introduction
 
Le présent travail vise à présenter les principaux aspects théoriques qui guideront l’élaboration
d’une séquence didactique. Celle-ci sera bâtie autour de l’œuvre de Romain Gary, La vie devant
soi, dont un résumé est présenté dans le paragraphe suivant. Le choix de cette œuvre sera justifié
à l’égard des programmes ministériels. Nous présenterons également les deux approches
théoriques retenues qui serviront de lignes directrices lors de l’élaboration de la séquence
didactique complète. Puis, seront présentés et justifiés les quatre problèmes de lecture autour
desquels seront articulées les activités charnières de la séquence. Ensuite, nous présenterons les
principaux savoirs à enseigner à d’éventuels élèves dans le cadre de la séquence. Finalement, les
objectifs principaux de la séquence didactique à venir seront clairement énoncés. Ainsi, il sera
possible de bien visualiser le fond théorique sur lequel sera bâtie notre séquence didactique.
 
C’est avec humour et candeur que Momo nous raconte son histoire et celle de Madame Rosa,
une ex-prostituée qui l’a pris sous son aile alors qu’il n’avait que trois ans. Une infinie tendresse
lie ces deux personnages qui n’ont pourtant en commun que leur malchance et leur peur du
monde. Ils seront tout l’un pour l’autre jusqu’au jour où Madame Rosa n’en pourra plus de
monter les six étages qui les séparent de leur appartement. Commence alors pour Momo un long
chemin pour accompagner celle qu’il aime vers la mort. À travers cette terrible épreuve, Momo
se rappelle les bons et les mauvais jours. Il parle avec simplicité des personnages singuliers qui
rythment son quotidien et qui l’aident, chacun à leur manière, à trouver la place qu’il souhaite
occuper dans le monde.
 
1. Justification du choix de l’œuvre
 
Gagnant du prix Goncourt en 1975 et adapté au cinéma à deux reprises, La vie devant soi est
visiblement un classique de la littérature française qui vaut la peine d’être lu, notamment au
secondaire. Bien que Suzanne Chartrand (2015), dans Caractéristiques de 50 genres pour
développer les compétences langagières en français, conseille d’aborder ce roman
psychologique au premier cycle, nous tenons à le travailler en quatrième année, puisque cela
nous permettra d’analyser l’œuvre plus profondément qu’avec des jeunes de première ou de
deuxième secondaire. Des élèves plus vieux pourront également avoir une compréhension et une
interprétation beaucoup plus approfondie de l’œuvre. Si l’on se fie au Programme de formation
de l’école québécoise (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec, 2007) et à la
Progression des apprentissages au secondaire (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du
Québec, 2011), Romain Gary, dans La vie devant soi, offre une véritable mine d’or en ce qui a
trait aux contenus à aborder en classe de français et aux compétences à acquérir à l’école.
 
Selon la Progression des apprentissages (PDA), le roman psychologique doit être travaillé en
deuxième, en quatrième et en cinquième secondaire. Les thèmes abordés dans ce roman, par
exemple la drogue, le racisme, l’amitié, la prostitution ou l’aide médicale à mourir, sont toujours
d’actualité dans la société et sont probablement mieux adaptés à des élèves de deuxième cycle.
Dans La vie devant soi, Momo nous raconte son histoire en abordant ces thèmes avec une
certaine innocence : « pendant longtemps, je n’ai pas su que j’étais arabe parce que personne ne
m’insultait » (Gary, 1975, p. 12) ou d’une manière peu soignée : « si Madame Rosa était une
chienne, on l’aurait déjà épargnée mais on est toujours beaucoup plus gentil avec les chiens
qu’avec les personnes humaines qu’il n’est pas permis de faire mourir sans souffrance » (ibid.,
p. 113). Ces deux passages, pris à titre d’exemple, touchant au racisme et à l’aide médicale à
mourir, sont très lourds de sens et susceptibles d’accrocher les jeunes du secondaire, notamment
grâce aux formulations parfois humoristiques de Momo. Par l’entremise de l’œuvre de Gary, les
élèves pourront donc élargir leur vision du monde et mieux comprendre l’actualité ou
l’universalité des thèmes qui y sont traités (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du
Québec, 2011, p. 27).
 
De plus, selon la PDA, doivent être enseignés systématiquement en lecture le contexte historique
ou socioculturel de production, le processus d’édition et le processus de diffusion des livres
(MELS, p. 29). Avec notamment le prix Goncourt qu’elle a gagné, ses adaptations
cinématographiques et la publication du roman sous un pseudonyme, La vie devant soi est une
œuvre parfaite pour développer de telles connaissances. La Progression des apprentissages
demande également aux enseignants d’aborder systématiquement la narration et la
reconnaissance « des marques de l’attitude du narrateur par rapport aux personnages » ou par
rapport à son propos (ibid., p. 30), par exemple, un extrait du roman où Momo parle de Madame
Rosa et dit : « je peux dire ça à la décharge de Madame Rosa comme Juive, c’était une sainte
femme » (Gary, 1975, p. 53). Ce passage parmi tant d’autres touche également une autre
connaissance de la PDA, soit de cerner et décrire les personnages grâce à l’insertion d’éléments
descriptifs en utilisant un « vocabulaire exprimant les sentiments, les émotions, les valeurs, les
croyances ou d’autres caractéristiques sociales et culturelles » (Ministère de l’Éducation, du
Loisir et du Sport du Québec, 2011, p. 30).
 
Selon le Programme de formation de l’école québécoise en français, langue d’enseignement
(PFEQ), l’expérience de la littérature
 
offre aux élèves de multiples occasions de découvrir d’autres réalités (culturelles, sociales,
historiques, etc.) et de réfléchir sur les rapports entre les humains. Elle leur permet de se situer
par rapport à leurs racines et de confronter leurs valeurs avec celles véhiculées dans les œuvres
qu’ils lisent (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec, 2009, p. 2).
 
La vie devant soi permettrait en effet aux élèves de découvrir les cultures arabe, africaine et
juive, par exemple. Ceux-ci pourraient également confronter le point de vue du narrateur, Momo,
tout au long de leur lecture, puisque ce dernier donne son opinion sur différents sujets tout au
long du roman. La littérature, ayant aussi un apport « à la connaissance du monde, à la
découverte de soi et à la structuration identitaire[,] sera d’autant plus porteu[se] pour les élèves »
(MELS, 2009). Dans le roman de Gary, Momo lui-même est en pleine construction identitaire.
Les élèves pourront donc s’identifier au personnage principal. La vie devant soi s’avère ainsi,
une fois de plus, idéal pour le programme.
 
Bref, nous avons choisi cette œuvre parce que c’est un classique de la littérature et que les
thèmes qui y sont abordés intéresseront sans doute les élèves de quatrième secondaire. Ces
thèmes sont encore très actuels et offrent des réflexions très intéressantes pour des jeunes du
deuxième cycle. La vie devant soi offre presque tout ce qu’il y a à aborder, dans les programmes
(PDA et PFEQ) en lecture et en littérature pour ce degré du secondaire. Il s’agit d’une œuvre
incontournable qui saura guider les élèves dans leur propre développement identitaire et qui leur
permettra de développer leurs compétences en compréhension et en interprétation d’une œuvre
littéraire.
 
2. Analyse de l’œuvre selon les approches théoriques et didactiques
 
Pour notre séquence didactique, nous avons décidé de passer par les approches historique et
subjective pour travailler l’œuvre de Romain Gary, La vie devant soi. Ces deux approches nous
semblaient les plus appropriées afin de rendre notre séquence cohérente. En effet, les contenus
théoriques choisis ainsi que les compétences visées s’articulent harmonieusement avec les deux
approches retenues. Ceci permettra à notre séquence didactique de s’inscrire dans un tout
cohérent qui favorisera des apprentissages signifiants et structurés chez les élèves.

Approche historique

La première approche retenue est l’approche historique. Au début de notre processus de réflexion
quant au choix des approches à retenir pour notre séquence, nous n’étions que peu attirés par
celle-ci. Elle nous semblait rigide et associée à de lointaines pratiques enseignantes. Cependant,
avec du recul et de la réflexion, nous avons considéré à nouveau cette approche. Nous avons jugé
que les connaissances historiques, notamment sur la période de la Seconde Guerre mondiale et
celles sur le courant littéraire existentialiste, sont nécessaires à la compréhension et à
l’interprétation de La vie devant soi. Puisqu’il s’agit des deux principaux objectifs de notre
séquence didactique, il nous a semblé naturel, à bien y repenser, de choisir cette approche.
 
Ensuite, cette œuvre est tout à fait appropriée pour être travaillée dans une approche historique
puisqu’elle possède une grande richesse historique et qu’elle s’inscrit dans un courant littéraire
important du 20e siècle, soit l’existentialisme. Dans ce roman de Romain Gary, on se retrouve
dans le Paris des années 60, plus précisément dans les basfonds de la société française de
l’époque. Romain Gary nous présente des personnages hors normes très attachants. Chacun
d’eux, à sa manière, amène le lecteur à s’interroger sur le sens de l’existence, par sa situation
précaire et le regard qu’il pose sur le monde. Ce roman s’inscrit dans le courant existentialiste
d’après-guerre. Il importe donc, à notre avis, de présenter ce courant littéraire du 20e siècle dans
notre séquence didactique afin que les élèves puissent comprendre la portée de l’œuvre de
Romain Gary et l’interpréter convenablement. Dans le même ordre d’idées, il nous a semblé
indispensable de présenter certains éléments de la Seconde Guerre mondiale dans notre séquence
afin de situer l’émergence du courant existentialiste. Ces connaissances sur cette tragique mais
importante partie de l’histoire contemporaine permettront également aux élèves de mieux
interpréter l’œuvre de Gary. Nous croyons que les élèves devront maitriser un certain nombre de
connaissances sur la Seconde Guerre mondiale et sur le génocide juif afin de bien réfléchir à
cette œuvre et de la comprendre en profondeur. 
 
Finalement, nous considérons qu’il est important d’enseigner dans notre séquence certaines
connaissances historiques sur la Seconde Guerre mondiale et sur le courant existentialiste, car
nous jugeons ces connaissances nécessaires à la compréhension de l’œuvre et de ses
personnages. Nous croyons également que c’est grâce à ces connaissances que les élèves
pourront développer correctement leurs arguments pour répondre aux problèmes de lecture
proposés dans la séquence. Ceux-ci constituent d’ailleurs le cœur de notre séquence didactique.

Approche subjective

La deuxième approche choisie est l’approche subjective. Nous trouvions intéressant de mettre
l’accent sur la subjectivité du lecteur dans notre séquence didactique puisque nous travaillons
avec une œuvre où la place laissée au lecteur est très grande. En effet, dans La vie devant soi, il y
a d’innombrables passages qui laissent place à la subjectivité. En choisissant l’approche
subjective, nous nous assurons de mettre cet aspect de l’œuvre au centre de notre séquence. Le
choix de cette approche semblait tout naturel afin de renforcer la cohérence entre les approches
sélectionnées, les savoirs à acquérir et les compétences à développer de notre séquence
didactique. Cette cohérence permettra à notre séquence, nous l’espérons, d’être la plus efficace et
la plus claire possible pour des élèves de la quatrième année du secondaire.
 
Par la suite, comme mentionné plus haut, ce roman de Romain Gary peut facilement être abordé
par l’approche subjective puisqu’il laisse une grande place aux interprétations des lecteurs. Il est
donc facile de centrer la séquence autour de cet aspect. Ce roman est donc le lieu
d’apprentissages parfait pour les élèves afin qu’ils puissent saisir la place qu’ils peuvent occuper
au sein d’une œuvre, même lorsque celle-ci est achevée. Cette séquence permettra aussi aux
élèves de comprendre que « la lecture littéraire est un coup de force, à chaque fois personnel,
singulier, unique » (Gervais, cité dans Martin, 2017, diapositive 9), autrement dit, qu’ils peuvent
interagir avec le texte pour en construire le sens. Les diverses activités de notre séquence
amèneront les élèves à mettre à profit leurs connaissances, mais également à travailler en équipe
afin de nourrir mutuellement leurs interprétations, ou encore de les confronter entre elles. Ils
pourront ainsi bien comprendre la place qui leur a été laissée dans l’œuvre de Romain Gary. 
 
En somme, l’approche subjective est le terrain parfait pour travailler l’interprétation des textes
littéraires, l’une des deux compétences ciblées par notre séquence. De plus, cette approche peut
être une bonne entrée pour travailler la compréhension du texte. En effet, pour avoir une bonne
interprétation de La vie devant soi, il faut impérativement avoir compris le roman en profondeur.
Un lecteur peu attentif ne pourra pas fournir une interprétation solide et cohérente de l’œuvre. Il
apparait donc que nos approches sont complémentaires : l’une se concentrant davantage sur le
développement de la compétence comprendre, l’autre plutôt sur la compétence interpréter. Le
fait de jumeler dans une même séquence ces deux approches permettra, nous l’espérons, de faire
réaliser aux élèves que la compréhension et l’interprétation d’une œuvre vont de pair, que ces
deux compétences permettent de construire le sens de l’œuvre lue.
 
3. Justification du choix d’un ou de plusieurs problèmes de lecture posés par l’œuvre
 
D’entrée de jeu, chaque problème de lecture posé par l’œuvre que nous avons choisie en est bel
et bien un puisque d’y répondre demande nombre de connaissances et de savoir-faire (comme
des connaissances sur le courant existentialiste et sur les figures et les évènements de la Seconde
Guerre mondiale), puisque l’on peut répondre à chacun de ces problèmes de différentes façons
(pour chacun des problèmes de lecture retenus, différentes interprétations seront exposées plus
loin) (De Ketele, cité dans Sauvaire, 2018, diapositive 5), et parce qu’ils sont directement liés au
texte étudié et nécessitent donc de se pencher à nouveau sur de nombreux passages du texte
(Sauvaire, 2018, diapositive 3).
 
Le premier problème de lecture posé par l’œuvre que nous avons retenu réside dans cette
question : pourquoi Madame Rosa conserve-t-elle un portrait d’Hitler? Certains pourraient
interpréter le fait que Madame Rosa conserve un portrait d’Hitler parce que cela lui rappelle
qu’elle a vécu bien pire et qu’il ne vaut pas la peine de s’emporter pour des raisons
insignifiantes, alors que d’autres pourraient plutôt y voir une façon pour elle de se remémorer
toute sa fierté qu’Hitler n’ait pas eu raison d’elle. Nous avons choisi ce problème de lecture
parce qu’il touche des enjeux centraux de l’œuvre, à savoir notamment la xénophobie et le
racisme, et, de façon plus précise, la Seconde Guerre mondiale et l’Holocauste, et puisqu’il
permet d’approfondir la compréhension et l’interprétation de l’œuvre. Concrètement, la
résolution de ce problème de lecture permet de mieux saisir le rapport qu’entretient Madame
Rosa avec son vécu et son appartenance socioculturelle, ce qui permet nécessairement de mieux
cerner le personnage et, de ce fait, de rendre plus riche la lecture de l’œuvre littéraire.
 
Le deuxième problème de lecture posé par l’œuvre que nous avons choisi peut être formulé par
le biais des questions suivantes : pourquoi Momo a-t-il jeté les cinq-cents francs pour lesquels il
avait vendu son chien dans une grille d’égout (Gary, 1975, p. 26)? Pourquoi Momo jette-t-il une
paire de gants tout de suite après les avoir volés (Gary, 1975, p. 100)? On pourrait penser que
Momo a jeté l’argent pour ne pas risquer d’altérer la relation qu’il entretient avec Madame Rosa,
parce que la richesse est pour lui synonyme de vice ou parce que selon lui, Super ne méritait pas
de se faire vendre, mais adopter. En ce qui a trait aux gants, on pourrait croire qu’il a posé ce
geste parce qu’il avait du mal à trouver un sens à l’existence ou parce que cela constituait pour
lui une façon d’évacuer toute la haine qu’il ressentait. Soulignons que nous avons choisi ce
problème puisqu’il concerne lui aussi des enjeux centraux de l’œuvre, à savoir notamment la
singularité du personnage de Momo, sa perception de la vie et de l’existence, la douleur qu’il
éprouve et son rapport à Madame Rosa. C’est aussi parce qu’il permet d’approfondir la
compréhension et l’interprétation de l’œuvre que nous l’avons sélectionné : si l’on parvient à
répondre à ces questions, on saisit déjà mieux le personnage et on est déjà par conséquent dans
une meilleure posture d’analyse et d’interprétation de l’œuvre.
 
Le troisième problème de lecture posé par l’œuvre et sur lequel nous avons voulu nous pencher
se traduit par la question qui suit : pourquoi Momo emploie-t-il le terme avortement pour parler
d’euthanasie? Pour certains, Momo pourrait parler d’avortement plutôt que d’euthanasie pour la
simple raison qu’il ne connait pas le mot euthanasie. D’autres pourraient croire que c’est parce
qu’il refuse d’employer ce mot qu’il utilise le terme avortement. D’autres encore pourraient
associer cette façon qu’il a de parler d’euthanasie à sa vision du monde selon laquelle
l’avortement et l’euthanasie renverraient en fait à une seule et même réalité; l’avortement, tout
comme l’euthanasie qui abrège les souffrances du mourant, mettrait fin aux souffrances de
l’enfant avant même qu’elles ne le touchent, l’existence humaine se résumant ici à la souffrance.
Nous avons choisi de le retenir parce qu’il est possible de l’associer lui aussi à certains des
enjeux les plus manifestes de l’œuvre (la singularité de Momo, sa perception de la vie et de
l’existence, sa douleur et son amour pour Madame Rosa) et parce qu’il aide le lecteur à
développer et à enrichir sa compréhension et son interprétation du roman. En fait, le fait
d’esquisser une réponse à la question que pose ce problème de lecture aide le lecteur à mieux
connaitre le personnage de Momo et, ultimement, à comprendre le sens de l’œuvre dans une bien
plus grande mesure.
 
Les deux problèmes de lecture précédents donnent lieu au dernier problème de lecture posé par
l’œuvre et sur lequel nous souhaitons nous pencher. Ce dernier peut être concrétisé par la
question suivante : Momo est-il heureux? On pourrait d’un côté affirmer que le protagoniste est
malheureux puisqu’il lui arrive régulièrement de pleurer et de l’autre, qu’il est heureux puisqu’il
dit à la fin du roman avoir aimé Madame Rosa tout en donnant raison à Monsieur Hamil qui
affirmait qu’il était impossible de « vivre sans quelqu’un à aimer » (Gary, 1975, p. 273). Il va
sans dire que découlant des deux derniers problèmes de lecture, il est lui aussi lié aux enjeux
principaux du roman (la singularité de Momo, sa perception de la vie et de l’existence, sa
douleur et son amour pour Madame Rosa) et fournit au lecteur une occasion de peaufiner sa
compréhension et son interprétation de l’œuvre, la résolution de ce problème lui permettant de
mieux comprendre le protagoniste et, plus globalement, l’œuvre elle-même.
 
4. Principaux savoirs à enseigner pour l’étude de cette œuvre en classe
 
Le premier savoir qui sera à enseigner dans la séquence didactique est relatif à la Seconde Guerre
mondiale, et plus particulièrement au nazisme. Le nazisme, ou national-socialisme se définit
comme une « doctrine politique développée par Adolf Hitler, fondée sur le nationalisme et le
racisme » (« National-socialisme », 2014). Plus précisément, seront abordés avec les élèves la
montée du régime nazi au pouvoir, les camps de travail et d’extermination juifs ainsi que les
répercussions de ces derniers sur le 20e et le 21e siècle. Nous aborderons, par le fait même, les
répercussions du génocide juif sur la littérature. Ce sera alors l’occasion de faire des liens
importants entre l’œuvre de Romain Gary et le courant existentialiste.
 
Un deuxième savoir à enseigner pour l’étude de cette œuvre en classe est le courant
existentialiste. Il se trouve qu’effectivement, une certaine connaissance de ce courant – dans
lequel s’inscrit l’œuvre à l’étude - par les élèves leur permet d’approfondir leur compréhension
du roman et d’en affiner leur interprétation. L’existentialisme peut se définir comme un courant
« propos[ant] […] à chacun de découvrir un sens à sa vie au-delà de la conscience même [du]
désespoir » (Laurin, 2013, p. 129) issu du fait que l’humain soit « jeté dans un monde où n’existe
aucune réalité supérieure qui puisse donner un sens à la vie, un monde tragique où tout se
termine par la mort » (idem.).
 
Un troisième savoir nécessaire à l’étude de La vie devant soi en classe est le débat interprétatif,
qui peut être défini comme étant un « genre scolaire oral qui permet d’expérimenter l’ouverture à
la pluralité des significations d’un texte, à partir de l’élucidation d’un ou de plusieurs problèmes
interprétatifs posés par le texte ou par les élèves. » (Aeby-daghé & Dias-Chiaruttini, cités dans
Sauvaire, 2018, diapositive 3). Effectivement, le fait pour les élèves de connaitre ce genre leur
permettra d’en tirer profit au fil de la séquence didactique et ainsi d’enrichir leur compréhension
et leur interprétation de l’œuvre. Et puisque ce genre « repose [notamment] sur la mise en œuvre
de procédés […] de justification » (Sauvaire, 2018, diapositive 3), cette dernière s’avère
conséquemment être elle aussi une habileté nécessaire à l’étude de l’œuvre. La justification peut
se définir comme étant « une conduite métadiscursive [portant] sur le dire » (Chartrand, 2013,
p. 1). Autrement dit, « justifier ses paroles, c’est commenter son propre discours ou, plus
précisément, dire pourquoi on affirme telle ou telle chose » (idem.).
 
Finalement, le quatrième savoir jugé essentiel est le texte justificatif. Marie-Hélène Forget
exprime dans sa thèse de doctorat que le texte justificatif est « l’actualisation, par un locuteur, de
formes discursives, textuelles et linguistiques [où] le locuteur choisit les formes discursives
prototypiques les plus pertinentes en fonction de son intention et de la situation » (Forget, 2014,
p. 44). L’enseignement du texte justificatif permettra aux élèves d’exprimer efficacement et de
manière crédible leurs interprétations de La vie devant soi. Ce savoir est donc jugé essentiel dans
notre séquence afin de fournir aux élèves les outils nécessaires à la mise en texte de leurs
différents points de vue sur le roman travaillé dans la séquence.
 
5. L’objectif général de la séquence
 
L’objectif général de notre séquence didactique est de comprendre et d’interpréter La vie devant
soi  de Romain Gary.
 
Conclusion
 
Que ce soit concernant les programmes, les thèmes traités dans l’œuvre ou sa complexité, ce
roman est pertinent à travailler au deuxième cycle du secondaire. L’histoire de Momo et les
savoirs à enseigner pour mieux la comprendre pourront enrichir la culture des jeunes de
quatrième secondaire et les problèmes de lecture que nous avons choisis permettront une
véritable réflexion interprétative et une meilleure compréhension globale des élèves. La vie
devant soi offre donc un excellent appui pour développer les compétences et les connaissances
des jeunes en littérature.

Deuxième partie

Introduction
 
La présente séquence didactique se destine aux élèves de la quatrième année du secondaire et est
basée sur l’œuvre de Romain Gary, La vie devant soi. Elle a pour objectif principal de
comprendre et interpréter l’œuvre. Chacune des activités de la séquence est présentée dans un
tableau afin que l’enchainement des activités soit clair. Les différentes activités ont toutes été
explicitées dans l’optique d’augmenter leur faisabilité dans une variété de contextes scolaires.
Les choix didactiques qui sous-tendent chacune des activités seront justifiés à la suite du tableau.
 
Tableau des activités
 
Séance Activités Durée Objectif(s) Savoirs à Ce que fait
spécifique(s) de la enseigner l’enseignant/ce que
séance (ce que les élèves font les élèves
doivent  
apprendre pour
répondre à
l’objectif)
1 1. Présentation du 15 Se préparer à la Connaissances L’enseignant
  roman min lecture de l’oeuvre liées au paratexte distribue le roman
      du roman (date de aux élèves et le
  parution, auteur, présente à la classe
notion de de façon magistrale.  
pseudonyme, etc.)  
Les élèves écoutent
l’enseignant, roman
en main.
2. 45 Comprendre que les Connaissances sur L’enseignant
Contextualisation min évènements de la la Seconde Guerre effectue un
historique Seconde Guerre mondiale enseignement
  mondiale ont eu un   magistral sur les
  impact sur le vécu Connaissances sur évènements de la
du personnage de le courant Seconde Guerre
Madame Rosa existentialiste mondiale et sur le
  courant
Comprendre que le existentialiste.  
courant  
existentialiste a En triades, les
influencé l’écriture élèves sont invités à
de l’oeuvre de placer divers
Romain Gary évènements
historiques sur une
ligne du temps qui
leur est fournie.
3. 15 Comprendre la Connaissances sur L’enseignant  
Contextualisation min réalité des banlieues ce contexte présente une vidéo
socioéconomique parisiennes des socioéconomique documentaire sur
années soixante les banlieues
dans laquelle les parisiennes des
personnages du années soixante.
roman évoluent  
Les élèves
répondent à un
guide d’écoute
pendant la
projection du
documentaire.
2 4. 60 Comprendre Caractéristiques L’enseignant
  Caractéristiques min comment dégager psychologiques et projette un extrait
des personnages différentes biographiques de de texte et effectue
caractéristiques des personnages de une séquence
personnages d’un fiction et leur complète
roman identification d’enseignement
explicite sur la
façon d’identifier
les caractéristiques
des personnages.
 
 
Les élèves sont
tantôt à l’écoute,
tantôt à
l’identification,
avec de l’aide ou
par eux-mêmes, des
caractéristiques de
personnages de
fiction. 
5. Présentation du 15 Connaitre le Caractéristiques du L’enseignant
journal dialogué min fonctionnement du journal dialogué présente et
journal dialogué et explique  le projet
être en mesure de le du journal dialogué.
compléter Il annonce les
correctement équipes
préalablement
 
formées.
 
Les élèves suivent
les explications de
l’enseignant à l’aide
de leur propre
journal.
À la 6. Lecture du 3 sem Prendre Aucun savoir à L’enseignant  
maison roman connaissance de enseigner s’assure de
l’oeuvre   l’assiduité des
élèves.
 
Les élèves lisent le
roman à la maison
en suivant
l’échéancier.
7. Journal Réfléchir à sa Prise de conscience L’enseignant
dialogué lecture et enrichir sa de l’existence s’assure de
compréhension et d’une diversité l’assiduité des
son interprétation de d’interprétations élèves et lit les
l’oeuvre à l’étude pour un problème journaux.
  de lecture donné    
S’améliorer à   Les élèves
expliciter son point Justification écrite remplissent le
de vue de ses conceptions journal dialogué en
  suivant
l’échéancier.
3 8. Enseignement 30 Justifier Connaissance de la L’enseignant
de la justification min correctement, à visée d’une recueille les
orale l’oral, son ou ses justification conceptions des
interprétation(s)   élèves et se base sur
Reconnaissance du celles-ci afin de
caractère recevable dégager quelles sont
d’une justification les caractéristiques
  d’une justification
 
Connaissance de la recevable.
façon de construire  
une justification en Les élèves partagent
bonne et due forme au reste du groupe
leur conception de
ce qu’est une bonne
justification et
l’ajustent.
9. Mise en 45 L’enseignant fait  
pratique de la min piger aux élèves des
justification orale mises en situation et
circule entre les
équipes pour
s’assurer du fait que
les conceptions
nouvellement
ajustées sont
reflétées dans
l’activité.
 
Les élèves justifient
oralement, les uns
aux autres, leurs
réponses à
différentes mises en
situation qu’ils
pigent (par
exemple, pourquoi
as-tu fait le choix de
venir à l’école ce
matin? Pourquoi
avoir décidé de te
vêtir ainsi?)
4 10. Comités de 45 Confronter son Prise de conscience L’enseignant
lecture à partir min point de vue sur les de l’existence demande à chaque
des problèmes de différents problèmes d’une multiplicité équipe d’arriver à
lecture de lecture avec celui d’interprétations un consensus pour
des pairs pour ainsi pour un problème chacun des
l’enrichir de lecture donné problèmes de
    lecture proposés.
  Ouverture aux  
interprétations des Placés en triades,
pairs les élèves sont  
invités à échanger
sur leurs
interprétations des
différents
problèmes de
lecture dans le but
d’arriver à un
consensus pour
chacun d’eux.
11. Retour en 30 Tenir compte d’un Ouverture aux L’enseignant
plénière min plus grand nombre interprétations des demande à chaque
de points de vue sur pairs équipe de partager
les problèmes de au reste du groupe
lecture en question les consensus
auxquels elle est
 
arrivée.
 
Les équipes
énoncent leurs
consensus au
groupe.
5 12. Débat 75 Enrichir sa Énonciation et L’enseignant tient  
interprétatif min compréhension et justification de son le rôle de
son interprétation point de vue modérateur en
d’une oeuvre à   gérant le débat et
partir du point de Réception du point relance les
vue des pairs. de vue des pairs discussions en cas
  de redondance.
Ouverture aux  
interprétations des Les élèves énoncent
pairs leurs réponses quant
aux divers
problèmes de
lecture et les
justifient tout en
dialoguant.
6 et 7 13. Production 150 Produire un texte Aucun savoir à L’enseignant
textuelle  min créatif en enseigner présente la consigne  
  s’appuyant sur son d’écriture aux
interprétation de élèves et circule
l’oeuvre. dans la classe pour
les aider.
 
Les élèves  
planifient leur
production et en
effectuent la mise
en texte.
  14. Révision/ 75 Aider ses pairs à Aucun savoir à L’enseignant circule
8 correction du min améliorer leur texte enseigner dans la classe pour
texte des pairs aider les élèves.
 
En triades, les
élèves lisent les
 
textes de leurs pairs
et émettent des
commentaires
constructifs sur
ceux-ci en vue de la
réécriture.
9 15. Révision/ 75 Améliorer son texte Ouverture et point L’enseignant circule
correction de son min à l’aide des de vue critique par dans la classe pour
propre texte commentaires de rapport aux aider les élèves.
ses pairs commentaires des  
 
  pairs Les élèves
  produisent la
version finale de
leur texte.

 
Justification de l’articulation
 
D’abord, bien qu’elle n’y occupe pas une place prédominante, la langue est au service de la
lecture dans cette séquence. Effectivement, seront abordés avec les élèves les faits de langue
propres à La vie devant soi, tant au moment de la contextualisation socioéconomique de l’œuvre
que dans le journal dialogué. On y questionnera les élèves quant à la façon particulière qu’a
Momo de s’exprimer, ce qui leur permettra de mieux comprendre et interpréter l’œuvre.
 
 Également, dans notre séquence, l’oral est au service de la lecture dans la mesure où nous
faisons appel à la diversité interprétative, définie par Sauvaire comme « l’ensemble des
interprétations produites concomitamment par différents lecteurs en interaction et
successivement par un même lecteur » (Sauvaire, 2015, p. 1). Effectivement, tant au moment de
participer au comité de lecture qu’au débat interprétatif, les élèves ont l’occasion de remettre en
question leurs interprétations en empruntant certains éléments des interprétations de leurs pairs
(Sauvaire, 2015, p. 3). Ainsi confrontées, leurs interprétations sont enrichies.
 
 L’écriture s’avère aussi être au service de la lecture de La vie devant soi dans cette séquence
dans la mesure où l’écrit d’invention final produit par les élèves, qui consistera d’ailleurs en un
hypertexte de l’œuvre étudiée, mobilise la fonction épistémique de l'écriture en leur permettant
de continuer d'affiner leur compréhension et leur interprétation de l'œuvre et de rendre compte de
ces dernières. Autrement dit, dans cet exercice, les élèves sont appelés à écrire pour lire.
 
 Activités 1, 2 et 3 : Présentation et contextualisation du roman
 
 Les trois activités regroupées dans cette section doivent faire partie de la séquence puisqu’elles
permettront notamment aux élèves de comprendre l’impact des évènements de la Seconde
Guerre mondiale sur le vécu du personnage de Madame Rosa, l’influence du courant
existentialiste sur l’écriture de l’oeuvre de Romain Gary de même que la réalité des banlieues
parisiennes des années soixante dans laquelle les personnages du roman évoluent. Cela leur
permettra éventuellement de mieux comprendre et interpréter l’œuvre. Nous avons choisi de
présenter l’oeuvre aux élèves et de la contextualiser dès le début de la séquence afin de susciter
leur intérêt pour l’oeuvre le plus tôt possible. Ces activités sont pertinentes d’un point de vue
didactique si l’on considère que « les prédictions augmentent la motivation et l’engagement du
lecteur, ce qui améliore sa compréhension » (Giasson, cité dans Falardeau, s.d., p. 3).
 
Activité 4: Caractéristiques des personnages
 
Cette activité permettra aux élèves de comprendre comment dégager différentes caractéristiques
des personnages d’un roman et, ultimement, de mieux comprendre et interpréter La vie devant
soi. Effectivement, « comprendre les personnages demeure [...] le moyen fondamental de
comprendre l’histoire comme un tout […]; [les] connaître […] permet au lecteur d’établir des
liens de cause à effet et de faire des prédictions sur le comportement futur du personnage »
(Giasson, cité dans Falardeau, s.d., p. 3). Par ailleurs, nous comptons aborder la distinction entre
état psychologique et caractéristique psychologique avec les élèves puisqu’ils sont en quatrième
secondaire et que nous considérons qu’ils sont en mesure de bien saisir cette distinction. L’idée
est de les amener plus loin et d’éviter qu’ils ne dégagent les caractéristiques des personnages à
partir d’évènements ponctuels et particuliers vécus par ces personnages. Nous avons choisi de
placer cette activité avant la lecture du roman pour que les élèves puissent s’intéresser au profil
psychologique des personnages présentés dès leur lecture, ce qui pourra les aider dans les étapes
suivantes de la séquence. Nous avons choisi l’enseignement explicite pour cette activité puisqu’il
permet d’attirer l’attention des élèves sur les stratégies à mobiliser pour relever les
caractéristiques psychologiques des personnages de fiction en amenant les élèves à se poser des
questions d’ordre métacognitif et à être actifs dans leurs apprentissages (pratique guidée,
pratique autonome, réinvestissement).
 
Activité 5 : Présentation du journal dialogué
 
L’objectif spécifique de cette activité, connaitre le fonctionnement du journal dialogué et être en
mesure de le compléter correctement, n’a pas de lien direct avec l’objectif général de la
séquence, comprendre et interpréter La vie devant soi. Cependant, pour que les élèves profitent
pleinement du journal, ils doivent bien comprendre l’outil qu’il est. Il est essentiel que les
consignes et explications pour compléter ledit journal, et le journal lui-même, soient donnés aux
élèves avant que ceux-ci n’entament la lecture de l’oeuvre, puisque la complétion du journal
aidera à la compréhension et à l’interprétation de l’oeuvre et soutiendra les autres activités de la
séquence.
 
Activité 6: Lecture du roman
 
Le roman sera lu à la maison dans le but d’optimiser le temps de classe avec les élèves, mais
aussi et surtout pour éviter que les premières activités de la séquence soient trop éloignées de la
production textuelle finale. L’échéancier relatif à la lecture du roman et à la rédaction dans les
journaux dialogués qui sera fourni aux élèves présentera évidemment des objectifs réalistes et
aura été construit de façon logique, soit en fonction des problèmes de lecture.
 
Activité 7 : Journal dialogué
 
Dans notre séquence, le journal permettra, par les questions posées aux élèves, d’aborder les
problèmes de lecture pour une première fois. Il s’agira peut-être d’une confrontation de
l’interprétation d’un élève. Ce dernier pourra ainsi approfondir ou remettre en question sa propre
interprétation de l’oeuvre en plus d’affiner sa compréhension grâce aux interactions avec un pair.
C’est également dans le journal que le lexique particulier de La vie devant soi sera abordé par le
biais de questions puisque, pour les élèves, l’usage non normatif de la langue peut représenter un
défi pour la compréhension et l’interprétation de l’oeuvre. En  permettant aux élèves d’être « de
plus en plus habiles à exposer clairement leurs points de vue » et d’améliorer leur compréhension
(Lebrun, 1994, p. 36), le journal dialogué constitue un outil didactique pertinent. Lors du comité
de lecture et du débat interprétatif, les élèves seront appelés à exprimer oralement aux autres
élèves leurs points de vue. Le journal sera donc un point de départ pour les autres activités de la
séquence. Afin d’assurer une assiduité et un travail sérieux de la part des élèves, le journal sera
évalué sommativement.
 
Activité 8 : Enseignement de la justification orale
 
L’enseignement de la justification orale en classe a pour but de fournir aux élèves tous les outils
nécessaires pour les prochaines activités de la séquence. En effet, les comités de lecture et le
débat interprétatif, qui permettront de bien comprendre et interpréter La vie devant soi, exigeront
des élèves qu’ils sachent justifier efficacement leur point de vue afin de favoriser des échanges
susceptibles d’enrichir le leur. Pour enseigner la justification orale, nous partirons des
conceptions initiales des élèves. Il s’agit donc de leur présenter des apprentissages convaincants
et logiques afin qu’ils actualisent leurs conceptions (Giordan, cité dans Herbé, 1999, p. 22-25).
 
Activité 9 : Mise en pratique de la justification orale
 
La mise en pratique de la justification orale sera l’occasion pour les élèves de mobiliser
concrètement les savoirs enseignés dans l’activité précédente. Cette activité servira l’objectif
général de la séquence, car elle permettra aux élèves de mieux comprendre interpréter le roman
étudié. Il s’agit d’un premier pas vers une transposition des savoirs en compétences. La présente
activité fait donc office de consolidation des savoirs appris sur la justification orale afin que les
élèves puissent les transposer dans les activités suivantes.
 
Activité 10 : Comités de lecture à partir des problèmes de lecture
 
Lors des comités de lecture sur La vie devant soi, les élèves devront tenter de trouver un
consensus aux différents problèmes de lecture posés en justifiant la recevabilité de leurs propres
interprétations. Les élèves seront placés en triades, car « la principale raison de constituer des
triades tient à l’intérêt didactique de leur fonctionnement » (Bain et al., 2016, p. 342). En
discutant avec leurs pairs, les élèves seront à nouveau confrontés à d’autres points de vue et cela
enrichira leurs interprétations des problèmes de lecture. Les comités de lecture se feront avant le
débat interprétatif dans le but de l’enrichir. Les élèves bénéficieront donc du journal dialogué, de
compétences en justification orale en plus des comités de lecture pour se préparer au débat. Par
ailleurs, une recherche de Sauvaire montre  que « les comités de lecture [permettent] à la plupart
des élèves d’identifier leurs problèmes de compréhension et d’y remédier » et que les
interprétations des élèves « sont non seulement plus nombreuses, mais aussi plus explicites et
complexes » à l’issue des comités de lecture (Sauvaire, 2015, p. 3).
 
Activité 11 : Retour en plénière
 
Le retour en plénière servira le débat interprétatif prévu pour la séance suivante. Les équipes
mettront en commun leurs interprétations. Ce sera donc le moment pour les élèves de prendre
conscience des différents points de vue des autres équipes. Il se peut même que certains élèves
adhèrent à une autre interprétation ou approfondissent encore plus la leur, ce qui renvoie à
l’objectif général de notre séquence.
 
Activité 12 : Débat interprétatif
 
Prévu à la suite des comités de lecture, le débat interprétatif sera une des principales sources
d’inspiration pour la production textuelle des élèves. Le débat interprétatif, genre scolaire oral
(Aeby-daghé, 2010; Dias-Chiaruttini, 2015), permettra aux élèves de prendre connaissance de la
multiplicité des significations d’un texte, à partir de la résolution d’un ou de plusieurs
problème(s) de lecture. Les élèves devront ici justifier oralement la recevabilité de leur
interprétation. L’objectif du débat est d’enrichir la compréhension et l’interprétation des élèves
de l’oeuvre de Romain Gary, ce qui concorde avec l’objectif général de notre séquence. Ce sera
le moment pour l’enseignant, à la fin du débat, de souligner, d’une façon neutre, les consensus,
mais également les dissensus interprétatifs (Citton, 2013, p. 154) et ainsi montrer qu’il existe une
pluralité d’interprétations pour une même oeuvre littéraire.
 
Activité 13 : Production textuelle
 
La production textuelle sert l’objectif général de la séquence puisqu’elle constitue un retour sur
ce qui a été enseigné tout au long de la séquence didactique. Cette activité mobilise tous les
savoirs enseignés, c’est pourquoi elle est située à la toute fin de la séquence. En ce sens, il sera
important que l’enseignant rappelle aux élèves les principaux savoirs appris afin de s’assurer que
chaque élève parte sur les mêmes bases pour réaliser cette activité évaluée de manière
sommative. Cette activité constitue un outil didactique de choix pour évaluer la compréhension
et l’interprétation des élèves dans la mesure où les élèves, comme mentionné plus tôt, y écrivent
pour lire. Elle sera réalisée à l’ordinateur puisque ce type de mise en texte facilite grandement la
révision-correction (Bisaillon, cité dans Chartrand, 2013, p. 9). La consigne d’écriture et la grille
d’évaluation associées à cette activité se trouvent en annexe.
 
Activité 14 : Révision-correction du texte des pairs
 
L’objectif de la révision-correction n’est pas lié à l’objectif de la séquence. Il sert plutôt, de
façon générale, le développement des compétences langagières des élèves en classe de français.
La mise en place de la révision-correction est pertinente, car elle est bienveillante à l’égard des
élèves et s’appuie sur le souci qu’a l’enseignant de mettre en place les dispositifs nécessaires au
plein développement des textes de ses élèves. De plus, tous les élèves devraient avoir la
possibilité de tirer profit de l’aide d’un pair pour bonifier leur texte. Cela leur permet d’éviter des
erreurs récurrentes ou de faire fi d’éléments importants de la tâche d’écriture (Chartrand, 2013,
p. 7).
 
Activité 15 : Révision-correction de son propre texte
 
Finalement, pour la dernière activité de la séquence, les élèves devront réviser et corriger leur
propre texte avant que celui-ci ne soit évalué par l’enseignant. Les élèves seront libres de prendre
ou non en considération les commentaires ayant été faits par leurs pairs. Le but de l’activité est
de laisser aux élèves une dernière période pour qu’ils puissent remettre une version finale de leur
texte dont ils sont fiers et qui soit représentative du processus réflexif que représentent la
compréhension et l’interprétation de l’œuvre de Romain Gary, La vie devant soi.
 
Conclusion
 
Cette séquence se veut un outil complet et réaliste pour les enseignants pouvant être utilisé en
contexte scolaire. Elle vise à faire acquérir aux élèves des savoirs et compétences transposables
qui leur serviront tout au long de leur parcours scolaire, professionnel et personnel. Elle
permettra aux élèves comme aux enseignants de tirer profit de l’œuvre en en développant une
compréhension et une interprétation affinées et singulières.
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© 2023, Université Laval
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