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I.

INTRODUCTION
L’étude de la propagation des ondes acoustiques de fort niveau dans l’air est
un sujet relativement récent. C’est en effet avec l’invention des armes à feu
qu’un intérêt a été porté sur l’étude des sons de fort niveau, notamment à des
fins balistiques. On peut par exemple citer les travaux de Benjamin Robins en
1740, qui mesura la vitesse supersonique d’une balle de mousquet à l’aide d’un
pendule balistique. Il remarqua aussi que le son émis par le mousquet est
audible quasiment au même instant que l’impact et en a conclu que le son émis
par le mousquet devait se propager à cette vitesse. Des militaires ont aussi plus
tard reporté qu’à une distance suffisamment grande de l’officier, l’ordre de tirer
était entendu après le son produit par l’arme à feu. Cette démonstration prouva
que l’onde de choc générée par la détonation se propage plus vite que les ondes
acoustiques de plus faible niveau correspondant au cri de l’officier. Les ondes
acoustiques sont un type de propagation d’énergie à travers un milieu au moyen
d’un changement et d’un déchargement adiabatique. Les grandeurs
importantes pour décrire les ondes acoustiques sont la pression acoustique, la
vitesse des particules, le déplacement des particules et l’intensité acoustique.
La modélisation mathématique du phénomène des ondes de choc s’amorce en
1808 lorsque Siméon Denis Poisson trouve une solution discontinue aux
équations aux dérivés partielles correspondantes à la conservation de la masse
et de la quantité de mouvement. En 1876, Ernest Mach établit le rapport entre
la vitesse du mobile et la célérité du son comme étant le paramètre principal
des ondes de choc, ce qui donnera le nombre de Mach. A la fin du XIXème
siècle, Rankine et Hugoniot établissent chacun les équations de conservation
de la masse, de la quantité de mouvement et de l’énergie pour donner les
équations de l’onde de choc droite. Une onde de choc est d’abord une onde,
c’est-à-dire la propagation d’une perturbation qui produit sur son passage une
variation réversible des propriétés physiques du milieu, sans transport de
matière mais avec un transport d’énergie. Une onde de choc est caractérisée
par une transition brutale voire discontinue des grandeurs physiques du milieu
dans lequel elle se propage, telles que la température, la pression, la masse
volumique et la vitesse ainsi que par une vague de haute pression
accompagnant cette perturbation.
Le travail va se consacrer sur les ondes acoustiques et ondes de chocs en
général puis l’application de ces dernières dans le domaine militaires et l’impact
qu’elles ont sur d’autres domaines et l’engouement commercial qui en découle.
II. ONDES ACOUSTIQUES
1. Pression acoustique
La pression acoustique est la valeur efficace, sur un intervalle de temps donné,
de l'amplitude de la variation rapide de la pression atmosphérique qui cause
une impression sonore. L'unité pour la pression est le pascal (équivalent au
N/m², symbole : Pa) ; cette unité s'applique à la pression acoustique.
Les variations de la pression atmosphérique capables de causer une sensation
auditive peuvent s'analyser en fréquences allant de quelques hertz à plusieurs
milliers de hertz. Les vibrations de l'air suivent les mêmes lois physiques,
qu'elles soient audibles ou non (ultrasons), aussi l'acoustique fait de l'étude de
la mécanique de la transmission des vibrations et de l'étude de l'impression
auditive que celles-ci provoquent deux domaines distincts, respectivement,
l'acoustique physique et la psychoacoustique.
La variation de pression correspondant aux ondes sonores est d'ordinaire très
petite par rapport à la pression atmosphérique (statique). Une personne
parlante normalement produit une pression acoustique de l'ordre de 0,1 pascal
(Pa) à un mètre de distance, un million de fois moins que la pression
atmosphérique moyenne au niveau de la mer (101 300 Pa).
Cependant, la pression acoustique développe au contact d'une paroi
une puissance qui permet de fabriquer des transducteurs, dans lesquels la
force que produit la pression acoustique déforme une membrane conçue
spécialement à cet effet, exposée sur une de ses faces à l'espace sonore, tandis
que l'autre face donne sur un espace isolé des variations rapides qui conserve
la pression atmosphérique moyenne.
La pression acoustique s’exprime :

Et la puissance acoustique s’exprime comme suit :

➢ S : la surface de la paroi
➢ P : la pression acoustique
➢ : la masse volumique de l’air
➢ C : vitesse du son, C= 343m /s

Le niveau de pression acoustique repère la valeur efficace de la pression


acoustique par rapport à une valeur de référence valant 20 μPa. Plutôt que le
rapport brut, on utilise le décibel, qui représente dix fois son logarithme décimal.
Cette représentation simple utilise des nombres entiers. Un décibel représente
à peu près la plus faible variation de pression acoustique que les humains
puissent distinguer ; le niveau de référence correspond à la pression acoustique
d'une onde sonore dont l'intensité acoustique est de 1 pW/m2, d’un son un peu
plus ténu que le plus faible que l'oreille humaine puisse percevoir. On obtient
ainsi un repère pratique où tous les niveaux sont des nombres positifs, et se
passent de décimales. Par convention, le niveau de pression acoustique se
désigne par LP et vaut :

Les disciplines qui doivent quantifier le son, c'est-à-dire faire correspondre à un


lieu un nombre qui représente la force de la perception sonore à cet endroit se
basent sur l'évaluation de la pression acoustique.
Les études d'acoustiques architecturales comme les techniques en rapport
avec la sonorisation, se préoccupent des moyens nécessaires pour utiliser le
son comme moyen de communication. La quantification du son leur est
nécessaire pour comparer des situations diverses et les moyens nécessaires
pour atteindre leurs objectifs.
Les études d'acoustique environnementale ont leur origine dans les plaintes de
personnes estimant que le son qui leur parvient est une nuisance, voire une
atteinte à leur santé. Ces plaintes donnent lieu à des litiges. Pour assurer
l'équité, ceux-ci doivent être réglés sur la base de mesures permettant de
comparer les situations entre elles. Ces mesures interviennent assez tard dans
la constitution des litiges, et limitent la multiplication des contestations.
esti é

ones
L
ession acoustique
i eau e

seui

ontou s isosonie ou e é ision


ou es o i ina es eu ou ones

Figure 1 Niveau de pression acoustique

2. L’intensité acoustique
L'intensité acoustique en un point est la moyenne dans le temps de l'intensité
acoustique instantanée :

La moyenne est prise sur un temps suffisamment long, par rapport à la plage
de fréquence considérée, pour que la moyenne ait une valeur stable, mais sur
un temps suffisamment court pour que cette moyenne mobile puisse suivre les
variations d'intensité acoustique. En champ libre, c'est-à-dire si aucune variation
du milieu ne s'oppose à la propagation de l'onde, la pression et la vitesse varient
ensemble.

3. Propagation des ondes


❖ Equation de propagation

La propagation d'une onde est régie par l'équation d’Alembert :

Avec U( M,t) l'amplitude de l'onde au point M et à l'instant t.


En dimension 1, l'équation des ondes devient :

La dérivée par rapport au temps de U est une dérivée seconde, et donc l'onde
qui remonte le temps U (M ; -t) vérifie la même équation. Cette invariance par
retournement du temps découle du caractère réversible de la propagation d'une
onde.
❖ Mode de propagation
En dimension 1 d'espace, on distingue deux modes de propagation : les ondes
progressives, qui se déplacent dans la direction de l'axe, et les ondes
régressives, qui se déplacent dans la direction opposée. Elles correspondent
en fait aux deux familles de solutions générales de l'équation des ondes en
dimension 1. Onde progressive, qui se déplace dans le sens des x croissants.
Les ondes stationnaires sont des ondes qui oscillent mais qui ne se propagent
pas. Elles sont pourtant la résultante d'ondes qui se propagent.

Onde stationnaire formée par une onde progressive et une onde régressive.
Les ondes évanescentes sont également des ondes qui ne se propagent pas.
Un exemple serait de bouger l'extrémité d'une corde assez lentement pour que
la corde suive le mouvement de l'opérateur sans que l'on aperçoive d'impulsion
apparaître.

III. Les ondes acoustiques sur le domaine militaire


Depuis la seconde guerre mondiale, les recherches se succèdent en Europe et
en Amérique du Nord pour exploiter les ondes acoustiques à des fins offensives.
Dans cet arsenal « non-létal », la musique est convoquée comme un moyen
efficace d’atteindre l’intimité psychique des personnes ciblées. Cet imaginaire
menaçant est en lien étroit avec la psychologie comportementale, et avec le
champ d’étude plus large de la manipulation sonore qui émerge à partir des
années 1930 autour du théâtre, du cinéma et de la musique d’ambiance Et
depuis lors des recherches se succèdent en Europe et en Amérique du Nord
pour exploiter les ondes acoustiques à des fins offensives. Dans l’imaginaire
militaire et policier, l’objectif des armes sonores, le plus souvent, n’est pas de
tuer. Elles doivent exercer sur les « ennemis » (ou sur les foules « hostiles »)
une pression de nature à fragiliser ces derniers et à infléchir leurs
comportements dans le sens voulu par l’opérateur : les empêcher de
communiquer, de se reposer, de raisonner, les contraindre à la fuite, leur donner
la nausée en mettant leurs organes en résonance, les épouvanter jusqu’à
l’incontinence ou les souffler à terre par un vortex savamment calculé. C’est
cette histoire technique et idéologique que retrace Juliette Volcler dans Le son
comme arme (2011). Elle y croise les documents promotionnels des industries
d’armement, les rapports militaires consultables et les expertises de chercheurs
indépendants. Au long de cette série d’espoirs de nuire à autrui par le son
émerge aussi un imaginaire pris dans une curieuse oscillation : d’une part,
l’efficacité des ondes acoustiques est très souvent surestimée, tant que les
dispositifs sont en projet ; d’autre part, un réseau d’euphémismes apparaît pour
justifier l’utilisation des armes effectivement produites en passant sous silence
leurs effets parfois irréversibles. Dans cet arsenal « non-létal », la musique est
convoquée tantôt comme un son parmi d’autres, tantôt comme un moyen réputé
particulièrement efficace d’atteindre l’intimité psychique des personnes ciblées.
Elle intervient ainsi dans les « opérations psychologiques » (Psy Ops) de
l’armée américaine, et dans la torture « sans contact » des centres de rétention
militaires. Cet imaginaire offensif est en lien étroit avec la psychologie
comportementale, et avec un paradigme plus large de la manipulation sonore
qui émerge à partir des années 1930 autour du théâtre, du cinéma et de la
musique d’ambiance. Dans Contrôle. o ent s’in enta ’a t e a
manipulation sonore (2017), J. Volcler suit la carrière de Harold Burris-Meyer,
ingénieur pionnier des techniques de diffusion sonore.
.
Burris-Meyer (1902-1984) travailla d’abord pour le théâtre, où il conçut et
théorisa des dispositifs « réalistes » d’immersion sonore. Il fut ensuite recruté
par l’entreprise Muzak, spécialisée dans la conception et la diffusion de
musiques d’ambiance sur les lieux de travail, avant d’être réquisitionné durant
la seconde guerre mondiale pour développer des techniques sonores utilisables
sur les théâtres d’opérations. Ayant participé à l’élaboration de leurres
acoustiques qui posèrent les bases de ce qui allait devenir la hi-fi, il rechercha
également des sons épouvantables, qui « feraient passer à leurs auditeurs le
pire moment possible par décibel et par seconde d’exposition » (Burris-Meyer
& Mallory 1960). Enfin, dans les années 1960, il conçut l’Encabulator, un
fauteuil permettant d’enregistrer « la réponse du sujet à des stimuli émotionnels
présentés sous une forme artistique » (Burris-Meyer 1943) – dispositif mis à
profit dans les années 1970 pour des expériences pédagogiques avec des
enfants noirs pauvres.
Les armes sonores utilisent le son de manière calculée, soit pour harceler
quelqu’un, soit avec un effet répulsif, pour briser quelqu’un rapidement. Il y en
a peu en fait qui sont utilisées. La recherche militaire a été très abondante dans
la deuxième moitié du XXe siècle, et surtout au cours des années 1990 aux
États-Unis. Mais il y a eu énormément d’échecs. Ces échecs ont surtout
façonné un milieu ambiant, une manière de penser le son. De cette recherche
sont nés aussi les quelques dispositifs utilisés aujourd’hui. Le principal d’entre
eux est le LRAD (Long Range Acoustic Device). Il s’agit d’un haut-parleur
extrêmement puissant, directionnel, qui peut diffuser, soit une voix émise aux
alentours de 121 dB (niveau sonore audible à 3 km dans des conditions
climatiques normales), soit une alarme située dans les médiums, c’est-à-dire
dans une zone que l’oreille humaine a tendance à amplifier parce qu’elle
correspond aux fréquences de la communication orale. Cette alarme est
diffusée à un niveau considérable qui peut atteindre 153 dB. C’est comme une
alarme de magasin, mais extrêmement puissante. Plusieurs armes
concurrentes du LRAD emploient le même principe.
L’État d’Israël utilise également un autre dispositif qui, lui, n’est employé ni en
Europe, ni aux États-Unis, ni au Canada. Il s’agit d’un canon à détonations qui
produit des explosions sans éclat. Il ressemble aux canons-effaroucheurs
utilisés contre les oiseaux ou contre les rongeurs dans les champs, une sorte
d’épouvantail sonore adapté à l’espèce humaine. Comme beaucoup de
dispositifs dits « non-létaux », il a une genèse dans la contention animale. Ce
dispositif diffuse une explosion de très forte intensité qui crée une sorte de boule
d’air. Non seulement il émet un son extrêmement fort, mais il produit aussi un
effet de souffle qui empêche d’approcher du canon. Il a le même rôle que le
LRAD, mais est moins directionnel ; les explosions ne sont pas aussi
contrôlables dans leur directivité. Il est utilisé en Israël dans les territoires
palestiniens. Son fonctionnement est très proche de celui d’une grenade
assourdissante (que je classe également dans l’armement acoustique), avec
l’effet de souffle en plus. Ce sont là à peu près tous les dispositifs en usage
aujourd’hui.
Y a-t-il eu d’autres projets d’armes sonores ?
Beaucoup d’autres choses ont été imaginées, comme des armes sonores
utilisant les infrasons ou les ultrasons. Cependant, pour les infrasons par
exemple, il a été déterminé au cours des années 1990, à la fois par les États-
Unis et par la Grande Bretagne, qu’ils n’étaient pas utilisables à des fins
militaires ou policières. En réalité, ce sont des sons de tous les jours qui sont
utilisés dans le maintien de l’ordre ou dans la guerre.
Comment expliquer alors que cet imaginaire du « son qui tue » persiste ?
Pour prendre l’exemple des infrasons, ceux-ci pourraient, en théorie, être
dangereux à de très fortes intensités. L’un des obstacles à leur utilisation réside
dans le fait que les fréquences très basses se propagent de façon circulaire et
non pas directionnelle. On ne peut donc pas mettre à l’abri l’opérateur de l’arme,
c’est compliqué. Le fait qu’elles soient très peu dirigeables va de surcroît à
l’encontre des conventions internationales du droit de la guerre (en droit, une
arme est censée être discriminante, pouvoir choisir une cible). À cela s’ajoute
le fait que, d’un point de vue strictement pratique, pour envoyer un infrason de
très forte intensité – suffisamment forte pour qu’il devienne dangereux – il
faudrait une énergie considérable, de l’ordre de plusieurs fois la puissance d’une
fusée spatiale au décollage. C’est vraiment inimaginable de développer une
telle puissance, pour un effet de surcroît incontrôlable. On s’est donc vite rendu
compte que les armes à infrasons n’étaient pas utilisables. Mais ce mythe de
l’infrason comme outil de contrôle des foules est demeuré. L’idée a été
entretenue dans l’imaginaire collectif par les recherches militaires qui ont été
menées jusque dans les années 1990. Et ensuite, elle n’a jamais fait l’objet d’un
démenti franc. Les démentis, on les trouve en allant creuser dans la littérature
militaire, en allant voir les résultats des rapports, en constatant que tel ou tel
programme de recherche ayant fait l’objet d’un gros investissement financier et
humain a été clôturé l’année suivante…
Il existe une imaginaire magique autour du son, et autour de la technologie
également. On peut se moquer des craintes que cet imaginaire dit populaire
génère. Mais en réalité, où trouve-t-on ces mythes sur les armes sonores ? Ils
sont au départ dans la littérature militaire. On y lit par exemple, écrit noir sur
blanc, qu’on pense pouvoir trouver une arme capable de générer au moyen du
son une température pouvant atteindre un seuil mortel. En fait, l’imaginaire
militaire est aussi, à certains égards, un imaginaire de science-fiction. D’ailleurs
dans les années 1990, au moment où se forgeait toute la doctrine des armes
dites « non-létales » et où un gros programme de recherche était mené sur les
armes acoustiques, au cœur de la direction de ce projet des armes dites « non-
létales », il y avait deux futurologues, Alvin et Heidi Toffler, et deux auteurs de
science-fiction, Janet et Chris Morris. On observe ainsi une porosité constante
entre certaines idées de la science-fiction et l’imaginaire du pouvoir.
Ensuite, qui véhicule ces mythes ? Ce ne sont pas simplement des rumeurs
populaires. Ils sont véhiculés par la presse, y compris par la grande presse. Il
existe un imaginaire tenace parce qu’on veut croire quelque chose. Le rapport
magique au sonore est entretenu par les militaires et par les élites parce qu’eux-
mêmes y sont plongés. Ils en sont partis prenantes, ils n’échappent pas à cette
pensée magique du son. Ce n’est pas une sorte de complot stratégique
absolument extérieur pour faire croire des mythes au peuple. C’est une pensée
commune, partagée. Par exemple, toujours dans les années 1990, un des
généraux qui était très investi dans le programme de recherche sur les armes
dites « non-létales », le général Alexander, était aussi très lyrique sur les armes
« psychotoniques ». Il était certain de pouvoir trouver des armes capables de
manipuler les gens à distance. Il y croyait fermement.
Ces armes sonores, réelles ou imaginées, convoquent les sons pour leurs
simples propriétés vibratoires. Existe-t-il également, dans l’arsenal militaire et
policier, des usages offensifs de la musique en tant que telle ?
L’usage de la musique comme outil de police ou de guerre a une autre
généalogie que celle des armes. Il a émergé au cours de recherches menées
dans les années 1950 sur la privation sensorielle. Donc plutôt sur le silence au
départ, pour ce qui est du sonore. La privation sensorielle englobe non
seulement les atteintes à l’audition mais également celles relatives à la vision,
au toucher, à l’odorat et au goût.
Dans les années 1950, aux États-Unis, s’est mis en place le projet MKUltra qui
trouve lui-même son origine dans un mythe. Les états-majors des États-Unis
étaient fermement convaincus que les communistes, Chinois et Soviétiques,
avaient trouvé des techniques de lavage de cerveau. Ils ne s’expliquaient pas
autrement le fait que les GI capturés en Corée ou au Vietnam finissaient par
s’auto-accuser dans les procès et se retourner contre leur propre pays lors de
prises de parole publiques. Ils conclurent donc à l’existence d’un lavage de
cerveau à grande échelle, et décidèrent de lancer à leur tour un vaste
programme de recherches sur la question. En réalité, assez rapidement, à la fin
des années 1950, deux chercheurs, Lawrence Hinkle Jr. et Harold Wolff,
déterminèrent qu’il n’y avait pas de programme de lavage de cerveau chez les
communistes, et qu’en Chine comme en Union soviétique, on utilisait des
techniques de torture somme toute traditionnelles. Les privations de sommeil,
les coups, etc. suffisent à détruire un individu au point de lui faire dire ce qu’on
veut. Néanmoins, les États-Unis, sur la base de cette foi un peu auto-générée
– qui était aussi un excellent prétexte pour cautionner les dépassements de
certaines frontières éthiques –, menèrent donc ce programme de recherche
assez considérable, le programme MKUltra, en collaboration avec le Canada et
la Grande-Bretagne. Le programme incluait à la fois des universités, des
hôpitaux psychiatriques et des agences gouvernementales. Plus de 100
chercheurs furent engagés pour l’occasion.
Dans le domaine du son, la première recherche fut menée au Canada par le
docteur Hebb de l’université McGill. Les cobayes étaient des étudiants. Lors
d’une première expérience qui consistait à les priver de l’audition trois jours
durant au moyen de cotons imbibés de vaseline dans les oreilles, ces derniers
manifestèrent, selon les expérimentateurs, des signes clairs de désordre
comportemental. Dans une seconde expérience, les jeunes gens furent
enfermés dans un caisson insonorisé, privés de tous leurs sens (moufles,
lunettes qui rendent la vision floue, etc.). Le docteur Hebb en conclut que même
des étudiants rémunérés qui connaissaient l’objectif de l’expérimentation et les
personnes qui en étaient responsables ne tenaient pas plus de 24 ou 48 heures
dans de telles conditions. Des recherches furent ensuite menées sur la privation
sensorielle par saturation – il s’agit là encore de priver quelqu’un de l’usage de
l’audition comme moyen de se repérer dans l’espace et dans le temps, mais
cette fois en l’immergeant dans un bruit fort et continu. Ces expériences
aboutirent aux mêmes effets constatés. Que ce soit avec une musique
permanente, des pales d’hélicoptère, un bruit blanc ou un silence complet, on
obtenait le même résultat.
Des journalistes et chercheurs – dont vous êtes – ont montré que la musique a
été utilisée régulièrement au XXIe siècle par les militaires pour briser les
détenus lors des « interrogatoires renforcés » en Irak, en Afghanistan et à
Guantanamo. Certaines musiques sont-elles employées plus souvent que
d’autres à cet effet ?
Les GI choisissent les morceaux pour la possibilité d’humiliation qu’ils leur
attribuent. Ils diffusent des chansons sexuellement très explicites, censées
heurter les croyances ou la pudeur des prisonniers. Ils utilisent aussi le hard
rock et autres musiques censément « viriles », pour affirmer une suprématie
culturelle, ou bien encore des chansons pour enfants, là encore dans un objectif
d’humiliation, mais pour ridiculiser l’ennemi. Ces choix musicaux, à mes yeux,
servent surtout à conforter l’état d’esprit dans lequel l’interrogateur veut se
mettre face à la personne interrogée. L’efficacité sur les détenus est identique
quelle que soit la musique utilisée. Depuis les années 1950, on sait que l’impact
sur les prisonniers est d’ordre physiologique. L’effet sur les interrogateurs, lui,
est de nature plus psychologique, et il est double. D’une part, les militaires se
positionnent en démiurges. Ils manifestent leur capacité de contrôler
l’environnement du prisonnier de façon expérimentale pendant des jours, des
nuits, voire des mois d’affilée. Ils le contrôlent de l’extérieur, avec une sensation
de toute-puissance. D’autre part, pendant l’interrogatoire lui-même, la musique
peut avoir un caractère stimulant pour l’interrogateur. Elle peut lui donner une
forme de confiance, de motivation, de combativité face au détenu interrogé. Il y
a beaucoup de discours sur la capacité de la musique à stimuler les gens au
travail ou dans d’autres contextes, et les soldats y adhèrent souvent. Il est
difficile là encore de distinguer entre les effets qu’ils ressentent et l’efficacité
plus ou moins magique qu’ils attribuent à la musique en général.
Aux côtés de la torture, vous décrivez aussi un autre usage offensif de la
musique, employée parfois sur les théâtres d’opération militaires.
La musique comme moyen de torture est enracinée dans le projet MKUltra dans
les années 1950. Mais l’idée que le son puisse être utilisé comme moyen de
harcèlement est née pendant la guerre de Corée et la guerre du Viêtnam. Des
mixages réalisés sur cassettes par les Psy Ops étaient diffusés, à plein volume
et de nuit. Conçus spécialement à cet effet, les enregistrements étaient pensés
comme des armes visant à affecter et affaiblir l’ennemi. La cassette la plus
connue est celle de « l’âme errante » : elle mêle des musiques funéraires
bouddhistes avec d’autres sons. On y entend une voix réverbérée, censée
représenter l’âme errante d’un combattant Viêt-Cong, mort au combat. Il appelle
ses frères d’armes à se rendre. On entend aussi la voix d’une petite fille qui dit
« Papa, papa, reviens ! ». Les GI avaient déterminé que dans la culture
bouddhiste, une âme ne pouvait se reposer que si le corps qui l’abritait était
enterré sur la terre de ses ancêtres. Dans le cas contraire, elle était condamnée
à l’errance éternelle. Ils avaient donc conçu un aperçu audio post-mortem,
comme une sorte d’émission en direct depuis l’errance éternelle, diffusée de
nuit depuis les hélicoptères.
Ces voix étaient mêlées à d’autres sons. Un tigre avait été enregistré au zoo de
Bangkok spécialement pour ce mixage, par exemple. Il y avait aussi des cris, et
des effets acoustiques de films d’horreur donnant parfois un effet « halloween »
aux enregistrements. Il s’agissait de mélanges de beaucoup de choses
différentes. Certaines bandes-son faisaient référence à la culture des
« ennemis », mais finalement elles reflétaient surtout ce que les GI imaginaient
de la culture de leurs ennemis. Des efforts similaires avaient déjà été réalisés
durant la seconde guerre mondiale au sein d’une station expérimentale de
l’armée. Les GI étaient alors allés enregistrer des sons dans la jungle
panaméenne, pensant que son atmosphère sonore serait assez proche de celle
de la campagne japonaise ! Les rapports militaires décrivent les Japonais
comme des paysans arriérés ; on y apprend également que pour eux, entendre
l’aboiement d’un chien véhicule instantanément l’idée d’une mort imminente…
De fait, une vision très approximative du paysage sonore du théâtre d’opération,
et une vision très simpliste aussi de la culture de l’ennemi.
A-t-on des informations sur l’impact de ces opérations sonores ?
Dans les rapports et les récits des vétérans de ces opérations, on lit que ces
opérations sonores étaient très efficaces, aboutissaient à de nombreuses
redditions – plus que n’importe quel autre moyen –, et que leur impact était
psychologique. Du côté des théoriciens des armes sonores, c’est plutôt l’impact
physiologique qui ressort, comme le fait d’empêcher les Viêt-Cong de dormir
pendant la nuit en diffusant de la musique ou des mix à plein volume. La
privation de sommeil est en effet une technique très efficace. Par ailleurs, les
cassettes audios diffusées depuis les airs participaient aussi à l’affirmation
d’une toute-puissance technologique, destinée à établir un rapport de
domination sur l’ennemi. S’y ajoutaient aussi des techniques de propagande
plus classiques, comme la désinformation, diffusée avec les mêmes procédés.
Il est donc difficile, en fin de compte, de tirer des conclusions sur l’efficacité des
mixages eux-mêmes.
Vos recherches semblent indiquer qu’au XXe siècle se profile une nouvelle
forme de contrôle qui ne convoque plus les sons comme simples symboles d’un
pouvoir – ce qui existait déjà finalement auparavant avec les cloches d’église
par exemple –, mais comme une technique d’action, directement efficace sur
les corps et les esprits. Comment émerge ce paradigme moderne de la
manipulation sonore ?
Un basculement s’opère dans les années 1930, lorsque la recherche autour des
nouvelles technologies sonores – un domaine en pleine ébullition – rencontre la
psychologie comportementaliste. L’institution la plus emblématique de cette
ébullition est Bell Labs. Dans cette usine à création permanente, les chercheurs
mènent un nombre considérable d’expériences pour améliorer les techniques
de diffusion sonore et déposent à cette époque un grand nombre de brevets.
Les laboratoires Bell œuvrent par exemple au perfectionnement du procédé
stéréophonique pour le reproduire de manière contrôlable, prédictible. À la
même époque, l’industrie du cinéma travaille également sur le son. Les
premiers films parlants dataient de la fin des années 1920. Mais ils n’étaient
parlants que parce qu’on y calait de temps en temps quelques intermèdes
musicaux et quelques interjections. À la fin des années 1920 et au début des
années 1930, la synchronisation du son et de l’image fait l’objet d’une attention
accrue. Le studio Disney, par exemple, franchit un cap de cette manière. Il
n’était jusque-là qu’un petit studio parmi d’autres. Il décide d’investir dans le
procédé nouveau de la bande optique – des bandes qui permettent de
synchroniser de manière très précise le son et l’image. C’est ainsi
qu’apparaissent les premiers dessins animés musicaux de Disney, et aussi la
figure de Mickey qui jusque-là n’était pas très connue (et qui ne s’appelait même
pas encore ainsi). Toute la série des Silly Mélodies met en scène
l’environnement de façon musicale. Mickey joue de la batterie, il y a des
concerts d’animaux… Ces nouveaux dessins animés où sons et images sont
finement synchronisés accroissent nettement la notoriété du studio, améliorant
au passage aussi sa situation économique.
Dans le milieu du théâtre également, Harold Burris-Meyer réfléchit aux
techniques sonores. Il exprime la crainte que l’art théâtral ne soit relégué
derrière celui, naissant, du cinéma, ou bien derrière la radio. Burris-Meyer se
détourne du vieil art du bruitage, qu’il dénigre quelque peu, et travaille justement
pour créer des environnements sonores mixés en direct, à l’intérieur du théâtre.
Toutes ces avancées techniques ont lieu à une époque où le
comportementalisme est déjà bien installé. La naissance du
comportementalisme peut être datée en 1913 avec John Watson qui pose dans
la Psychological Review que « la psychologie telle que le comportementaliste
la voit », c’est « la prédiction et le contrôle du comportement » (Watson 1913).
On peut noter au passage que « la prédiction et le contrôle du comportement »
– une modification prédictible, reproductible – est exactement ce qui articulera,
dans les années 1990, la recherche autour des armes dites « non-létales ».
Le comportementalisme à ses débuts propose de ramener l’humain à une
mécanique assez simple en fin de compte, où l’on ne s’intéresse plus au
cheminement intérieur des personnes. Ce qui intéresse la psychologie
comportementaliste, ce sont les effets mesurables. Elle se distancie ainsi de
l’ancienne psychologie qui était plus introspective, ou plus spiritualiste. La
psychologie, comme les autres sciences, devra désormais s’appuyer sur des
données quantitatives précises, obtenir des effets quantifiables, et avoir des
retombées industrielles. Dans le discours des comportementalistes des années
1910-1920, la recherche doit aussi très clairement servir l’ordre social (un ordre
bien entendu capitaliste).
Quelqu’un comme Burris-Meyer, par exemple, utilisera les prédicats
comportementalistes au théâtre : on envoie tel stimulus pour produire telle
réaction dans le public. C’est à cette époque aussi qu’émerge l’idée de façonner
le public en tant que masse. Pour Burris-Meyer, un théâtre doit produire un effet
sur une masse de gens. Cela vaut encore pour l’industrie du cinéma aujourd’hui.
L’effet créé doit être collectif et le public doit devenir une sorte de gigantesque
corps avec une seule paire d’oreilles qui réagit de façon prédictible et univoque
à ce qu’il va entendre. C’est le façonnage de la foule comme masse uniforme
et donc contrôlable. En réalité, c’est aussi la création d’une discipline de
l’écoute. Au fond, l’écoute est nécessairement singulière, elle est liée à l’histoire
de chacune et de chacun, elle est liée au contexte social et politique dans lequel
la personne s’inscrit, elle est liée à de multiples facteurs. Une musique ou un
son n’aura jamais le même effet sur deux personnes différentes. Mais le
comportementalisme induit l’idée d’une écoute quantifiable et moyenne. C’est
un discours autoréalisant, performatif.
Quand on lit les descriptifs de Burris-Meyer, le son permet de contrôler les corps
des gens et l’esprit des gens. Il le dit sans scrupule. C’est assez étonnant car
cela s’accorde assez mal avec l’idée d’une démocratie éclairée. Mais à partir du
moment où l’on veut divertir de façon industrielle, l’objectif devient – Burris-
Meyer l’écrit – d’appliquer les principes du taylorisme aux arts du spectacle. Il
s’agit de rationaliser la chaîne de production d’une pièce pour réduire les coûts
et augmenter les bénéfices, mais aussi de rationaliser les effets produits sur le
public, de faire en sorte qu’ils soient quantifiables, prévisibles et, en bout de
chaîne, de contrôler la production des émotions voire des pensées.
La musique a-t-elle été mise également au service du taylorisme dans les
usines ?
L’entreprise Muzak, spécialisée dans les systèmes de diffusion de musique
d’ambiance, repère Burris-Meyer en 1937-1938. La société lui commande, à lui
et à son collègue Richard L. Cardinell, une étude des effets de la musique sur
les ouvriers et ouvrières dans les usines. Leur rapport sera le point de bascule
vers une nouvelle forme de musique d’ambiance qui cessera alors d’être
simplement un choix effectué par un programmateur sur les derniers succès du
moment. Le choix de programmation sera désormais dicté par des
considérations « scientifiques ». C’est à partir de ce moment que la musique
d’ambiance deviendra un outil de masse. Elle sera désormais diffusée par
tranches horaires spécifiques, avec des longueurs de morceaux précises.
Muzak construira progressivement au cours du XXe siècle tout un discours
« scientifique » sur la musique d’ambiance. L’entreprise s’appuiera sur des
études comme celle de Burris-Meyer, selon lesquelles les tranches horaires de
diffusion, le fait d’éviter certains morceaux (trop euphorisants par exemple) et
d’en privilégier d’autres a une efficacité sur la qualité du travail, sur le temps de
présence, réduit l’absentéisme, augmente la productivité… Dans les années
1930, ces expériences portent en premier lieu sur l’usine et en second lieu sur
les bureaux. Parallèlement, Muzak commence à diffuser aussi dans les
magasins, mais les études à ce sujet sont postérieures.
Il y a donc une nouvelle « science » de la musique d’ambiance qui se crée à
partir des années 1930 ?
Au départ, c’est assez basique. Juste avant que Burris-Meyer et Cardinell ne
fassent leur étude, Muzak commence à attribuer des codes de stimulus aux
morceaux : il faut ici un morceau gai, là un morceau calme ; des morceaux avec
des cuivres dans les usines pour surmonter le bruit des machines, tandis que
dans les bureaux, les cuivres sont bannis. La musique est ainsi disséquée.
Toute parole est proscrite, parce que les paroles éveillent des pensées
contemplatives, et font appel à la réflexion ou à la mémoire des gens. On ne
veut surtout pas éveiller la pensée. On recherche des réactions réflexes. La
musique doit discipliner. Non pas renvoyer chacun à son individualité, mais au
contraire créer une humeur et un rythme communs dans l’usine comme au
bureau. Muzak continue à affiner ces réflexions dans les années 1950-1960,
pour aboutir à la « courbe de progression du stimulus ». Là encore, le stimulus
renvoie à la conception comportementaliste. Les diagrammes promotionnels de
la firme sont presque caricaturaux : la courbe de productivité de l’employé
baisse au long de la journée, parce qu’il se fatigue et que son moral décline ; en
revanche, la musique suit une courbe inverse. Le stimulus musical est ainsi
censé compenser la baisse de productivité ou de moral de l’employé. C’est là
encore une action presque magique.
Si l’on vous suit bien, il s’agit d’une forme de « marketing scientifique ». Vos
recherches en donnent d’ailleurs d’autres exemples, expliquant peut-être aussi
comment certaines idées sur le son persistent dans nos imaginaires. Mais tout
de même, la musique d’ambiance n’a-t-elle pas montré une certaine efficacité
pour infléchir les comportements collectifs ? Qu’en est-il par exemple de ces
lieux publics où l’on décide de passer de la musique classique dans le but
explicite d’éloigner les « jeunes » ? Ou bien de ces gares et aéroports qui
immergent les voyageurs dans une ambiance musicale censément apaisante ?
Il y a une expérience qu’on fait toutes et tous : certaines musiques nous mettent
individuellement, selon nos goûts, notre histoire, notre culture, selon le contexte,
dans des dispositions favorables ou pas. Donc oui, il y a cette expérience
commune : la musique a un impact sur nous. Mais c’est un impact singulier. La
musique d’ambiance entend produire au contraire des effets industriels. C’est
là qu’on entre dans une pensée magique du sonore : telle musique aurait un
effet universel sur tous les auditeurs.
Pour moi, la musique d’ambiance a bien une efficacité, mais celle-ci tient dans
le fait d’énoncer un discours. La musique dans un lieu public pose d’abord de
manière claire quelle est autorité qui peut parler dans ce lieu. Elle s’exprime à
travers une technologie omniprésente – on le voit dans les gares, avec les
annonces qui sont diffusées partout à la fois. Elle marque la propriété sur un
espace, de façon acoustique. Elle énonce aussi un règlement informel de
comportement pour cet espace. Elle pose les comportements qui y sont
attendus. En cela, elle oblige à une réponse. Je suis très sceptique à l’égard
d’une critique souvent faite à la musique d’ambiance : elle empêcherait de
penser. La musique d’ambiance n’empêche pas de penser. Elle constitue en
revanche une injonction à laquelle on est obligé de répondre, soit en s’en
accommodant, soit en s’y opposant délibérément. C’est en cela qu’elle agit : elle
ne laisse pas la flânerie libre ; elle rappelle le règlement de l’espace traversé :
« attention, vous entrez dans une zone gérée par telle marque ou telle société
de transport, etc. ; ici c’est telle attitude, telle disposition d’esprit, tel type de
comportement qui sont appropriés ». On peut toujours adopter un
comportement inverse, mais ce sera alors un choix conscient, délibéré. En ce
sens – et en ce sens seulement –, la musique d’ambiance est bel et bien
efficace.
Existe-t-il un lien entre ces théories de la manipulation sonore et la
musicothérapie ? Les effets dont rêvent Burris-Meyer et Muzak semblent
reposer sur une hypothèse assez proche de celle qu’on imagine parfois derrière
les usages thérapeutiques du son : l’idée qu’on peut infléchir par la musique le
fonctionnement cognitif d’autrui, agir directement sur ses processus psychiques
et somatiques sans faire appel à son jugement.
Autour de la seconde guerre mondiale se sont développées deux idées de façon
concomitante. D’une part, la musique d’ambiance devenait un moyen
d’augmenter la productivité ouvrière. Les arsenaux militaires furent parmi les
premiers à être intéressés par ce genre de diffusion. D’autre part, les hôpitaux
militaires commencèrent à étudier sérieusement la possibilité d’utiliser la
musique pour soigner les hommes qui revenaient du front. L’art de la thérapie
musicale est bien antérieur à la seconde guerre mondiale, mais son application
industrielle bascule à ce moment-là. Des blessés par milliers reviennent du front
et il faut les soigner en masse. On essaie de trouver alors des usages aisément
reproductibles de la musique d’ambiance pour soigner, comme on essaye d’en
trouver pour stimuler la production. De ce point de vue, il y a bien une racine
commune. Ces deux utilisations de la musique d’ambiance se développent en
même temps, sur un même substrat comportementaliste.
Cependant, la thérapie musicale ne peut être réduite à cela. Pour revenir à cette
question de la singularité de l’écoute, les thérapeutes actuels utilisent la
musique de manière spécifique, dans une relation particulière à une personne.
Il s’agit alors d’une sorte d’artisanat, qui peut me semble-t-il avoir une efficacité,
dans la mesure où il prend en compte l’écoute propre à chaque individu.
Burris-Meyer, lui, reprochait justement à la musicothérapie son caractère trop
artisanal. Il fallait selon lui des professionnels qui déterminent à quel endroit
positionner les haut-parleurs, quelle playlist diffuser et ainsi de suite. Ce qu’il
voyait était trop peu taylorisé à son goût, imparfait, inexact, insuffisamment
fondé sur des données chiffrées. Il a pu à la fin de sa vie mener ses propres
expériences sur quelque chose d’assez similaire en fin de compte – l’utilisation
de stimuli auditifs pour améliorer l’apprentissage d’enfants issus de milieux
défavorisés. L’expérimentation fut menée exclusivement sur des enfants noirs
et pauvres, avec une vision humaniste très condescendante et fondée sur des
prémisses très contestables : il s’agissait d’accompagner l’éducation de ces
enfants en captant et en analysant discrètement leurs réactions émotionnelles ;
ces informations étaient ensuite utilisées pour influencer leurs comportements
en classe, notamment par la diffusion de certains sons. Le fait d’utiliser des
outils comportementalistes autour du sonore trouvait ainsi une sorte de
cautionnement moral assorti de l’idée que cela permettrait à ces gens de
progresser vers le savoir. Burris-Meyer n’a jamais tenté de soigner par les sons,
mais pour moi, cette expérimentation menée à la fin de sa vie dans le domaine
des nouvelles techniques d’éducation est extrêmement proche de la thérapie
musicale qu’il appelait.

IV. Les ondes de chocs


Une onde de choc est une discontinuité de pression dans la propagation d’un
fluide homogène. Le processus est irréversible. Il peut être créé par une
explosion ou par le déplacement d'un objet à vitesse supersonique.
Cette appellation s'applique d'abord historiquement aux gaz qui sont décrits par
l'équation de Boltzmann. Elle s'étend à tous les milieux pouvant être décrits de
la même façon : liquides, solides, milieux dispersés (trafic routier...).
Elle est parfois appliquée à tort aux interfaces liquide-gaz comme les vagues
déferlantes. Bien que l'on assiste pour celles-ci à la formation d'un front de
l'interface devenant localement vertical il n'apparaît pas de discontinuité des
quantités décrivant chacun des milieux pris séparément. Elle est aussi indûment
utilisée pour décrire des phénomènes se matérialisant par un sillage comme le
sillage d'un bateau ou l'effet Tcherenkov. Les ondes de choc sont des ondes
sonores acoustiques composées de deux phases : une phase positive très
brève (10 ms) correspondant à la compression, suivie d’une phase de pression
négative d’amplitude plus basse et de plus longue durée à l’origine de
phénomènes de cavitation. Ces phénomènes correspondent à une production
de bulles gazeuses dans les tissus interstitiels et produisent des micro
dommages tissulaires responsables d’une partie de l’effet thérapeutique.
V. LES ONDES DE CHOCS DANS LE DOMAINE BIOMEDICAL
Le principe des ondes de choc a été découvert dans les années 50. Cependant,
on n'en trouve des applications dans le domaine biomédical que depuis les
années 80, dans le cas du traitement des calculs urinaires. Ce traitement, dont
nous étudierons le fonctionnement plus tard, s'appelle la lithotritie
extracorporelle. Aujourd'hui elle reste la thérapie de référence pour cette
maladie qui touche encore environ 10% de la population. Suite à cette
découverte, le monde de la recherche s’est intéressé de plus près aux effets
des ondes de choc sur le corps humain, et aux thérapies futures. Au début des
années 90, les chercheurs se sont concentrés sur l’application des ondes de
choc en ostéologie, et plus particulièrement sur les cas de retard de
consolidation ou de pseudarthrose. Le terme désigne une absence de
consolidation de deux fragments osseux survenant après une fracture. En
appliquant le traitement sur la zone endommagée, les scientifiques se sont
aperçus que la lithotritie avait un effet bénéfique non seulement sur les os
fracturés, mais aussi sur les tendons environnants (bien souvent également
abîmés). Cette découverte a donc intéressé les spécialistes de la médecine du
sport qui ont alors appliqué ce traitement aux tendons et aux aponévroses
(membrane enveloppant les muscles ou liant les muscles aux os). Aujourd'hui,
ce traitement n’est plus uniquement réservé aux sportifs de haut niveau et s’est
largement démocratisé.
L’utilisation des machines ondulaires répare les tissus et augmente la
croissance rapide des cellules. L’application d’ondes acoustiques crée des
micro-ruptures capillaires (un capillaire sanguin est un vaisseau sanguin
extrêmement fin, souple et élastique, relié aux veines et aux artères) dans les
tissus et les muscles, et augmente significativement la sécrétion des indicateurs
de croissance (éléments tels que eNOS, VEGF, PCNA et BMP, utilisé dans
notre corps pour réparer, par exemple, les coupures).
Les domaines dans lesquels la thérapie grâce aux ondes sont sollicités sont :
❖ Les calculs urinaires : Les calculs urinaire sont le résultat de la
cristallisation de sels présents dans l’urine. Ils peuvent se former à divers
endroits dans les voies urinaires, c’est-à-dire dans le rein lui-même, dans
l’uretère, dans la vessie ou dans l’urètre. Dans 90 % des cas, les calculs
sont aussi petits qu'un grain de sable. Ils peuvent alors passer inaperçus
et sont facilement éliminés par le système urinaire. Cependant, s'ils sont
plus gros, ils provoquent au niveau du dos une violente douleur, nommée
colique néphrétique. Depuis son apparition dans les années 80, la LEC
est le traitement le plus utilisé contre les calculs urinaires rénaux et
urétéraux. Elle se fait par diffusion d’ondes de choc planaires, où l’embout
qui permet de défocaliser les ondes est un ballon en caoutchouc qui se
remplit progressivement d’eau au niveau d’eau au contact de la peau.
❖ La cardiologie : Les thérapies cardiaques par ondes de choc (CSWT) sont
actuellement en phase d’essai clinique. Le protocole opératoire est très
semblable à celui de la LEC. L’efficacité de la CSWT a été démontrée
contre des troubles comme : L’angine de poitrine non revascularisable,
La cardiopathie ischémique ; Le phénomènes de « no-reflow » après une
intervention coronarienne percutanée ; La calcification coronarienne
diffuse Ils sont dus à des troubles du métabolisme et à une irrigation
insuffisante du tissu myocardique. La CSWT permet donc de traiter ces
maladies en augmentant la circulation sanguine, le débit cardiaque,
l’absorption d’oxygène, le VEGF et récepteur, la densité capillaire, etc.
❖ La dermatologie esthétique : Dans le domaine de l’esthétique, les ondes
de chocs sont utilisées dans le traitement de la cellulite, les vergetures et
le relâchement cutané. Ce traitement peut s’appliquer au corps et au
visage.
❖ L’urologie : Les ondes de choc focalisées permettent désormais un
traitement de la dysfonction érectile d’origine organique, de la maladie de
La Peyronie et du syndrome de douleurs pelviennes chroniques. La
dysfonction érectile désigne un trouble sexuel qui empêche d’avoir ou de
maintenir une érection suffisante pendant une durée prolongée malgré
l’excitation sexuelle.
❖ Le traitement des pathologies tendineuses : Dans la médecine du sport,
les pathologies tendineuses peuvent être traitées par utilisation des
ondes de choc radiales. Après repérage de la zone à traiter, celle-ci est
soumise à 2000 à 3000 impulsions à 2.5 bars. Généralement, 4 à 6
séances à intervalle d’une semaine sont réalisées.
❖ Le traitement des pathologies osseuses : Dans les années 80 les
scientifiques craignaient des dégâts osseux au niveau du bassin et des
têtes fémorales lors de traitement de calculs vésicaux par LEC. L'effet
des ondes de choc sur les os a donc été étudié. Contre toute attente, au
lieu d'engendrer des dégâts sur l'os, elles ont augmenté l'ostéosynthèse
osseuse. En effet, l'augmentation de pression sur l'os stimule
l'ostéogenèse par la création de microfractures et une néovascularisation.
Les ondes de choc radiales sont actuellement utilisées avec succès dans
les retards de consolidation des petits os. Dans le milieu du sport, elles
sont également utilisées depuis plus de 15 ans sur les fractures de
fatigue.
VI. LE DE DE H DA L’AEUR AUT QUE
La manifestation la plus connue des ondes de chocs dans le domaine de
l'aéronautique est le 'bang' supersonique parfois accompagné d'un nuage
lorsqu'un avion franchit le mur du son. Lorsqu'un avion se déplace dans l'air,
il génère des ondes de pression qui s'éloignent de lui comme les ronds dans
l'eau. Ainsi, lorsque la vitesse de l'avion est très inférieure à Mach 1, les
ondes se propageant à la vitesse du son sont bien plus rapides que l'avion
et elles se propagent tout autour de lui. Au fur et à mesure que l'avion se
rapproche de Mach 1 (M1), les ondes qui se déplacent dans le même sens
que lui (vers l'avant), ont de plus en plus de mal à le distancer. Une fois que
l'avion a atteint M1, il rattrape les ondes qu'il émet. De ce fait ces dernières
s'accumulent sur le nez de l'avion, créant une grande pression. Elles
provoquent aussi des vibrations et une augmentation de la traînée. C'est ce
que l'on nomme couramment le mur du son. Lorsque l'avion vole à M1, un
nuage peut se former autour de l'avion. Il est dû aux changements de
température et de pression de l'air en aval des ondes de choc. Ces dernières
provoquent une forte détente et une baisse de la température, entraînant une
condensation de la vapeur d'eau si l'atmosphère est suffisamment humide.
Quand l'avion a franchi le mur du son, les ondes de choc accumulées au
niveau du nez de l'appareil se libèrent et forme un cône de mach. Ce cône
est l’unique zone où l'on peut entendre le "bang". C'est pour cette raison que
le pilote n'entend pas le 'bang' car il est situé à l'intérieur du cône. En fonction
de la vitesse de l'avion, ce cône prend une forme différente : plus l'avion vole
rapidement et plus le cône est étroit. Son angle peut être déterminé :

𝑽𝒔𝒐𝒏
Sin (angle) =
𝑽𝒂𝒗𝒊𝒐𝒏

Le mur du son était connu des pilotes avant même d'avoir été franchi. En
effet, beaucoup d'avions qui n'étaient pas conçus pour voler à de telles
vitesses furent détruits en plein vol. De plus certains pilotes ont également
perdu le contrôle de leur appareil en s'approchant de M1. Nous allons voir
quelles contraintes imposent les ondes de chocs à la structure de l'avion, et
quelles méthodes, aussi bien pour la structure que pour la motorisation les
constructeurs ont mis en place pour faire voler des avions à des vitesses
bien supérieures à celle du son.

VII. CONCLUSION
Les ondes acoustiques et de chocs jouent un rôle très important sur plusieurs
plans tels que dans le domaine militaire, médicale et de l'aéronautique. Elles
participent à la création des armes militaires et des machines thérapeutiques
et aussi dans l’aéronautique.
PLAN DU TRAVAIL

I. INTRODUCTION
II. ONDES ACOUSTIQUES
1. PRESSION ACOUSTIQUE
2. INTENSITE ACOUSTIQUE
3. PROPAGATION DES ONDES

III. ONDES ACOUSTIQUES DANS LE


DOMAINE MILITAIRE
IV. ONDES DE CHOCS
V. LES ONDES DE CHOCS DANS LE
DOMAINE BIOMEDICAL
VI. LES ONDES DE CHOCS DANS
L’AERONAUTIQUE
VII. CONCLUSION
LES MACHINES DE THERAPIES AUX ONDES
BIBLIOGRAPHIE DU TRAVAIL

➢ GOOGLE SCHOLAR
➢ WIKIPEDIA
➢ YOUTUBE
➢ CHAT GPT

MERCI POUR VOTRE ATTENTION

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