Vous êtes sur la page 1sur 691

ÉGYPTE

ANCIENNE

Champollion-Figeac (M.,
Jacques-Joseph)
r*..

L I BR A R Y Of THE UNIVERSITY OF CALIFORNIA LIBRARY I


:
f

go

CALIFOR NIA LIBRARY OF THE UNIVERSITY OF CALIFORNIA LIBRARY F

1
IQt ^ >

CALIfORNIA
7e3
MM
Ha

r r IL
ORNU UBRARf OF THE UNIVERSITY OF CAUFORNIA

l IBR ARY OF î H E UNIVERSITY OF CAUFORNIA

ce

0 R N i
'

UBRARY OF THE UNIVERSITY OF CALIFORNU

2
TYPOGRAPHIE DE FIRMIN D1DOT FRERES,
nrr jacob, h* 56.

Digitized by Google
ÉGYPTE
ANCIENNE,

PAR

M. CHAMPOLLfON-FIGEAC,
CO*SFBY\TF.lB DR L\ BIBUOTHRQlîR BOYALR, RTC.


: • *

• »

PARIS,
F1BM1N D1DOT FRÈRES, ÉDITEURS.
mmtviMJIIS-MBlUIRES I>K I.*IH!*TITUT l>K RBAHri,
RVI lACOi, •«" Ml.

m nccr. xxxix.

Digitized by Google
Digitized by Google
L'UNIVERS,
OU

TOIRE ET DESCRIPTION
DE TOUS LES PEUPLES,
DE LEURS RELIGIONS, MOEURS, COUTUMES,

EGYPTE
PAR M. CHAMPOLLION-FIGEAC,
IVATSU* A LA BIBLIOTHÈQUE DU BOI.

# . .

Lé* est située au centre de l'an- delà ntiû/rej et *e fleuve m frite encore
cien continent ; elle est arrosée par un le. cûfte* divin qu'une philosophie re-

tas fAi» grands fleuves connus : placée connu'sstinte nu tiu oro; ,.Hl: \: a/plus de
entre TA sic et l'Afrique, ce n'est pas quatTe'niilîeîahs.; l! 6âttôa}oli/s V' père
uns quelque contradiction que la Géo- nourricier de l'Egypte* et les varia-
graphie moderne l'attribuetantôt à tions extraordinaires qui se manifestent
f une, tantôt à l'autre de ces deux par- périodiquement dans son état exer- ,

tes du monde; enfin, communiquant cèrent une grande influence sur les vues
arec l'Europe par une mer facile et de politiques et les établissements des pre-
p-eu (Tétendue, elle sembla destinée, miers législateurs.
t^rsa position naturelle, à devenir le De plus grands phénomènes moraux
berceau delà civilisation, à en répandre se développèrent encore sur cette terre
les premiers essais et les premiers bien- dès l'origine des sociétés humaines.
faits sur le reste de la terre. Alors l'isolement des peuples les em-
Tout fut singulier ou mystérieux dans pêchait de se rencontrer et de se com-
<*rte contrée à jamais célèbre. Les battre. La vallée du Nil jouit très-long-
premières pages des annales humaines temps du calme nécessaire aux na-
si
nous entretiennent de ses immenses tions comme aux individus pour éla-
travaux et de sa gloire; sa constitution borer de grandes pensées, et fonder
physique était caractérisée par des phé- sur des bases solides la félicité publique
nomènes particuliers, et le progrès des ou domestique. Le pays tut observé
pences n'a pas affaibli de nos jours avec une attention et une persévérance
intérêt puissant qu'ils ont toujours inépuisables; la connaissance des lois
du climat inspira des règles de police
Les sources du fleuve auquel elle est qui participèrent de la constance ae ces
redevable de son existence et de sa fer- fois; une expérience réfléchie concou-
tilité, nous
sont inconnues comme elles rut sans cesse à les rendre plus corn-
i&ùatt aux plus anciens observateurs et plus parfaites, et la con-
Vimwmm. (Égttt..)

Digitized by Google
3 L'UN vrRS. v
stitution politique se proposa de sou- elle par la voie si lente de l'expé
mettre, à des; règles certaines les mou- et du progrès au point d'avano
vements mêmes de la volonté et de social où ses plus anciens ou\
l'intelligence générales, à l'imitation nous l'ont montrée? ou bien , j
4e ces lois éternellement semblables elle' une science toute faîte
oui soumettent chaque jour lè sol de autre peuple qui l'avait précédée
1Keypte à l'action des mêmes phéno- cette voie de primitifs essais H'
mènes. nisation sociale? Que de jours et
Les sages égyptiens s'attachèrent nées dans l'une et l'autre supposi
avec une rare prédilection }r tfcut ce De telles difficultés n'émeuvent
Îui était en soi vrai utile -et durable.
, vrai, que les esprits qui les camp
,ç bonheur de tous étattjq but^e leur nent on n'en trouvera la soîi
:

"étude- 4\?'nommg et Se [ la nature que lorsqu'on aura fixé avec certi


étude éclajrée parla' Constance, fortifiée 1 époque où l'homme apparut si
'par la solitucfe; et ces sages compri- terre et celle où il s'essaya à la so<
rent heureusement que, pour arriver avec une aptitude et dés inclinât!
à ce noble but , ils devaient se faire à dont le degré et la force sont enc
la fois rois et pontifes; ils devinèrent le secret du Créateur.
ainsi les véritables fondements de la so- L'observation attentive des f
ciété humaine, et celle qu'ils créèrent en nous montre l'Egypte comme une
Égypte eut une durée qu'aucune autre ciété complètement réglée et sou m
n'égala et n'égalera peut-être jamais, à des lois éprouvées par une Ion*
témoignage irrécusable de la puissance expérience. Elle avait pour limites"]
des lois habilement appropriées à l'es- litiques ses limites naturelles. Le ;

prit et aux mœurs du peuple qu'elles du pays avait été divisé en


plusiei
âouverneftt j et -aussi desjumièrejs ,*du régions , administrées par des lois ui
ésintéressGÏnant et «d&*la! pVbijfté" du formes pour toutes; un fleuve ir
législateur. mense, par son cours naturel ou
Notre esprit s?éSR'eùt jirpfoQd^raent'
p
des canaux habilement dirigés, po
au spectacle de cetté organisation mo- tait sur tous les points la vie et
rale et politique de l'ancienne Egypte, fécondité; une religion, qui avait poi
oui semble être sortie îles mains du dogmes les principes les plus élevés
d
Créateur toute dotée des institutions la morale, se manifestait aux yeux d
les plus nécessaires à son existence et vulgaire nar un culte bien propre pa
à son développement social on ignore ; la magnificence des temples et le
lux
en effet ses origines, et aux époques des cérémonies à frapper tous les es
les plus reculées auxquelles la critique prits, à saisir toutes les imagination;
historique a pu remonter, elle a re- chez une nation d'ailleurs essentielle
trouvé l'Egypte avec ses lois , ses ment religieuse et méditative. Le gou
•v mo'iirs ses villes, ses rois et ses
, vernement, après avoir été sacerdotal,
dieux; et en arrière de ces mêmes devint monarchique par une révolu-
époques, il y avait encore des ruines tion ; la couronne fut dès lors hérédi-
d époques plus anciennes. taire de mâle en mâle, par ordre de
ATlièbes, des portions ruinées de di- primogéniture; le frère succédait au
vers édifices permettent de reconnaître frère mort sans enfants survivants;
des restes de constructions antérieures, et à défaut de fils, la tille succédait au
employés comme matériaux dans ces père , et celui qu'elle épousait était le
mêmes édifices qui existent aujourd'hui mari de la reine sans être roi. La
depuis trente-six siècles. Où remonte nation était divisée en classes et non
donc la véritable souche de ces géné- pas en castes ; le pouvoir royal était
rations successives de ruines? Il faut modéré par l'influence de la classe sa-
le craindre les origines de l'Êgypte
: cerdotale , en qui se concentraient les
sont peut-être dérobées pour toujours plus importants privilèges l'interpré-
,

à notre légitime curiosité. Arnva-t- tation des lois , l'administration de la

Digitized by Google
Digitized by Google
s- «• . » ».
EGYPTE.
justice, la culture des sciences, des nation pleinement constituée, d'un
arts et des lettres , et les cérémonies étatsagement policé. Nous avons dû
de la religion : la classe des militaires donner d'abord de l'ancienne Egypte
défendait l'état, le peuple avait pour cette idée générale qui préparera le
son lot la culture des terres, F industrie lecteur et l'intéressera peut - être
et le commerce. L'antiquité classique plus directement à l'étude des détails
tout entière a fait et conservé à PÉ- que nous allons présenter sur chacune
gypte une renommée de sagesse qui fait des principales parties de notre sujet.
supposer que son gouvernement fut Il embrassera l'histoire entière de l'E-
habituellement modéré et fondé sur gvpte , considérée dans sa constitution,
les vrais intérêts du pays. Il subit ce- physique et morale, dans ses princi-
pendant des révolutions intérieures pales institutions, leur marche pro-
qui amenèrent successivement sur le gressive ou rétrograde , enfin dans son
trône plusieurs races de rois; il subit influence sur la civilisation moderne.
aussi des invasions étrangères: le luxe «

de sa civilisation devait y attirer des I. ÉTAT PHYSIQUE.


peuplades moins policées. De vastes
monuments publics, les plus grandes La vallée de PÉgypte n'est dans sa
productions connues de l'architecture, longueur que le tiers à peu près de la
ornaient la capitale et les principales eontrée que le Nil arrose dans son
villesde PÉçypte; tous les arts avaient cours du midi au septentrion, où
concouru à les embellir, la sculpture, il se perd dans la Méditerranée; ce
la peinture et l'emploi des métaux pré- fleuve entre en Egypte quand il fran-
cieux, du verre et des plus riches chit la cataracte au-dessus d'Assouan
émaux. L'Égypte exploitait des mines et d'Éléphantine ( voyez planche 3 ),
et des carrières, fabriquait les étoffes sur sa rive droite, les terres fertiles
de lin , de laine et de coton nécessai- sont bornées par des sables, les
res à ses habitants , et ne dédaigna pas monts Arabiques et la mer Rouge;
d'admettre ou d'imiter les plus rienes sur la rive gauche sont les déserts Li-
tissus de l'Inde. Les guerres l'avaient byques et leurs Oasis. La tradition
mise en communication avec l'inté- rapporte que le Nil séparait autrefois
rieur de P A frique et les d verses nations
i
l'Asie d'avec l'Afrique ; il est. du moins
de l'Asie ; et malgré cette activité inté- certain que la portion de P Egypte fé-
rieure de sa population et ses relations condée par le Nil divise par sa riche
au dehors , l'Egypte ne paraît pas végétation deux vastes contrées égale-
avoir connu Pusage des monnaies de ment stériles et inhabitables.
métaux. Celui de l'écriture était gé- La longueur de la vallée de l'Egypte
néral, et l'invention de cet art ad- qui se dirige du sud au nord et décline
mirable fut successivement perfec- un peu à l'ouest , est de sept degrés
tionnée et poussée jusqu'à l'idée si et un cinquième , qui forment exacte-
heureuse, si extraordinaire d'abord, ment la cinquantième partie de la cir-
et si simple aujourd'hui pour nous, conférence de la terre , comme le di-
des signes alphabétiques. On peut saient les anciens. Deux chaînes de
ajouter qu'aucun peuple ne fit de l'é- montagnes resserrent cette vallée au
criture un usage aussi fréquent, ni midi et sur près des trois quarts de
aussi varié ; ses édifices publics en son étendue; ensuite elle s'élargit su-
étaient couverts, et leurs ruines nous bitement, et forme une grande plaine
restituent encore, chaque jour, les triangulaire, qui est traversée en
débris écrits des coutumes publiques diverses directions par les eaux du
de l'Egypte et des transactions privées Nil divisé en plusieurs brandies,
entre ses habitants. mises en communication réciproque
Ce sont là les véritables signes ca- par de nombreux canaux.
ractéristiques d'une civilisation avan- L'Égypte est divisée en trois grandes
cée, d'une législation régulière, d'une régions: PÉgypte supérieure, Saïd ou
1.
4 L'UNIVERS
Thébaïde ; l'Égypte moyenne ou Hep- eaux; entre les montagnes de grès, la
tanomide; la Basse-Egypte ou le Delta : largeur de la vallée n est pas de plus
c'est à cause de sa forme triangulaire d'une lieue ; mais dans le pays calcaire,
que la plaine située entre les deux le Saïd, le Nil prend mille à douze
branches extérieures du Nil, et qui cents mètres de largeur pour son lit;
est bornée au nord par la mer, doit des bandes sablonneuses bordent ses
ce nom de Delta, qui est celui d'une rives; sur celle de droite, le terrain
lettre de l'alphabet grec , dont la cultivé s'étend à près d'une lieue de là,
forme est en effet triangulaire. Plu- celle de la rive gauche à plus de deux
sieurs lacs, dont quelques-uns ont près lieues; la largeur moyenne de la vallée
de 20 lieues d'étendue, existent sur dans la Haute-Égvpte approche ainsi
les bords de la mer et communiquent de trois lieues et demie.
avec elle par des coupures qu'on a re- La chaîne Arabique finit brusque-
connues comme d'anciennes bouches ment au Caire, et par une coupure
du Nil. L'état des lieux a beaucoup très-escarpée. La chaîne Libyque ou
changé en effet depuis la haute anti- occidentale se termine au nord par
quité; les atterrissements du fleuve et un talus peu rapide; à la hauteur du
de la mer ont agrandi et prolongé la Caire, qui est sur l'autre rive du Nil,
base du Delta ; mais une partie du ter- elle jette vers l'intérieur de la vallée
rain que les anciens Égyptiens défen- un éperon qui forme la plateforme des
daient par des digues, est aujourd'hui pyramides , et va en déclinant au nord-
sous les eaux, et on attribue à des af- ouest se perdre dans les plaines sablon-
faissements qui se sont opérés depuis neuses du Delta ; c'est la qu'elle forme
les temps historiques, l'extension de la vallée des lacs de natron , et celle
plusieurs de ces lacs. Par des travaux qu'on nomme le fleuve sans eau, où
récents , quelques-uns d'entre eux ser- 1 on ne trouve en effet, au grand éton-

vent aujourd'hui à la navigation entre nement des voyageurs, qu'une quan-


le Nil et le port d'Alexandrie. tité considérable ae bois pétrifié. Lne
Deux chaînes de montages encais- coupure de cette même chaîne, dont
sent toute la vallée de l'Egypte, le le sol s'incline du côté opposé à l'E-
Delta excepté. Ces montagnes sont gypte , et qui s'élargit de plus en plus
médiocrement élevées, incultes, et en s'éloignant du Nil, est l'entrée
absolument nues depuis leur base jus- d'une vaste plaine qui forme à elle
qu'à leur sommet. De leur extrémité seule une province nommée le Fayouin ;
vers la Basse-Égyptc jusou'à quelques l'un des plus grands rois de l'Egypte
lieues avant la cataracte, elles sont l'une donna son nom au lac situé dans la
et l'autre de nature calcaire; au-delà, partie occidentale de cette province :

c'est un grès habituellement employé on verra plus bas pourquoi ce lac fut
dans les édifices de la Thébaïde. Énlin célèbre dans l'antiquité.
vers Syène et Philae (voy. pl. 4 ) se On résumerait les notions sur l'état
trouvent ces carrières de granit rose physique de l'Egypte en disant, qu'elle
si renommées par les grands monu- est une vallée cultivée, une bande de
ments qui en ont été tirés, et d'où terre végétale qui traverse les déserts.
provient aussi l'obélisque de Louqsor, Les vallées qui servent de lit à de
nouvellement transporté à Paris. grands fleuves, forment une espèce de
Ces deux chaînes ne sont pas égale- Berceau dont les eaux occupent le fond.
ment rapprochées , d'où il resuite que L'opposé arrive en Egypte ; sa section
la vallée n'est point partout d'une lar- transversale est une courbe légèrement
geur égale ; cette largeur s'accroît à me- convexe ayant dans sa partie supé-
sure qu'elle avance vers la mer. Dans rieure uie échancrure profonde, qui
la région granitique , il n'y a que la est le lit même du Nil dans les basses
distance nécessaire pour le passage du taux. Il résulte de cette singulière dispo-
fleuve, et une étroite lisière de terrain sition du terrain , que dès que le fleuve
qui disparaît même parfois sous les s'élève tant soit peu au-dessus du ni-

Digitized by Google
Google

« • • •
• «

• • • »

• • • •
» •

• • • •
•• •• • • • •
• • •

• • • • • • • •
• • .

• • • •

Digitized by Google
ÉGTPTE.
fcs berges, il peut submerger la fraîcheur, la force de la végétation
ia partie convexe du terrain li- nouvelle, l'abondance des productions
c'est-à-dire la totalité du qui couvrent la terre, surpassent tout
cultivé. Aussi l'Égvpte n'est que ce qu'on admire dans nos pays les plus
•tdu fleuve; ce qu'if n'arrose pas, vantés. Durant cette heureuse saison,
st le désert , et ce désert , les eaux l'Egypte n'est, d'un bout à l'autre,
nef ne sauraient, comme celles du au'une magnifique prairie, un champ
S. le rendre fertile. On explique par e fleurs ou un océan d'épis ; fertilité
pbenomène une ancienne fable reli- que relève le contraste de l'aridité ab-
des Égyptiens : Isis est l'épouse solue qui l'environne : cette terre si
; d'Osiris, nom sacré du Ml; déchue justiGe encore les louanges que
ys est l'épouse stérile de Ty- lui ont données jadis les voyageurs.
pbôn, "et ne pourrait engendrer que Mais malgré toute la richesse du spec-
p^r un adultère avec Osiris c'est-à- : tacle, la monotonie du site, il faut
&* que le désert ne peut être fé- l'avouer , en diminue beaucoup le
condé que par le >il. L'observation charme; l'aine éprouve un certain vide
a donne le mot de cette énigme sacer- par défaut de sensations renouvelées;
le
dotale, de cette allégorie ifondée sur et d'abord ravi , s'égare bientôt
l'oeil,
tin phénomène observé par l'antiquité avec indifférence sur ces plaines sans
et dont la véracité est aujourd'hui fin , qui , de tous côtés , jusqu'à perte
incontestable. de vue, présentent toujours les mêmes
Quant à l'aspect pittoresque de l'E- objets, les mêmes nuances, les mêmes
gypte, nous allons en emprunter les accidents.
traits principaux à la relation d'un sa- « Tout concourt à augmenter cet
vant ODservateur, M. de Rozière , in- effet. Le ciel, non moins uniforme que
génieur en chef des mines , et membre la terre, qu'une vodte con-
n'offre
àe la commission d'Ésypte. stamment pure, durant le jour plutôt
«Les environs deSyène et de la ca- blanche qu'azurée ; l'atmosphère est
taracte présentent un "aspect extrême- pleine d'une lumière que l'œil a peine
ment pittoresque. Mais le reste de a supportei ; et un soleil étincelant,
rÉsypte, le Delta surtout, est d'une dont rien ne tempère l'ardeur, em-
monotonie dont on se fait difficilement brase , tout le long du jour, cette im-
Tidée , et qu'il serait peut-être impos- mense plaine , presque découverte
sible de rencontrer ailleurs Les car, c'est un trait du site de l'Egypte,
champs du Delta offrent trois tableaux d'être dénué d'ombrages, sans être
différents, suivant les trois saisons de pourtant dénué d'arbres.
Tannée égyptienne; dès le milieu du « Telle qu'elle est, cependant, l'E-
printemps", les récoltes, déjà enlevées, gypte plaît encore aux étrangers , et
qu'une terre grise et
ne laissent voir enchante ses habitants. Elle possède
poudreuse, si profondément crevas- en effet, ce que les hommes prisent le
sée, qu'on oserait à peine la par- plus dans leur pays : un sol fertile et
un beau ciel. Sous ce climat heureux,
« A equinoxe d'automne, c'est une
I où l'eau n'est jamais glacée , où la
immense nappe d'eau rouge ou sau- neige est un objet inconnu, où les ar-
mârre, du sein de laquelle sortent des bres ne quittent leurs feuilles que pour
palmiers, des villages, et des digues en produire de nouvelles, la végétation
étroites qui servent de communica- n'est jamais suspendue; et le labou-
tions; après la retraite des eaux, qui reur, comblé dans ses vœux, ne comp-
se soutiennent peu de temps dans ce terait qu'une saison constamment pro-
degré d'élévation, et jusqu'à la fin de ductive, si les circonstances du débor-
la saison, on n'aperçoit plus qu'un sol dement du Nil ne limitaient la cul-
noir et fanceux. ture à une partie de l'année: aussi,
« C'est pendant l'hiver que la nature quand les travaux des hommes sup-
déploie toute sa magnificence. Alors pléent aux inondations, la terre peut

Digitized by Googl
L'UNIVERS.
donner jusqu'à deux ou trois récoltes de dix à douze pieds, se bifurque con-
dans un an. Aux avantages qu'elle stamment, ainsi que ses branches peu
tient de la nature, son antique civili- nombreuses, courtes et inflexibles, qui
sation ajoute, pour le voyageur éclairé, portent à leur extrémité, en forme de
un charme particulier registre, des tubercules assez gros
,
« Le Saïd étale une culture plus durs, ligneux, d'une forme irrégulière,
riche encore que la Basse-Égypte. Ce d'une couleur et d'un goût de pain
sont bien aussi ses immenses mois- d'épice, avec de larges faisceaux de
sons dorées de blé, d'orge, de maïs, feuilles longues et rigides, étalées en
ses champs de fèves fleuries à perte éventail. v

de vue , ses plaines verdoyantes de « La Thébaïde , riche surtout en


trèfle, de lupins : on y voit de même monuments et en souvenirs anciens ,
ces champs de lin et de sésame qui semble vraiment un pays enciianté :
fournissent l'huile du pays; le henné, c'est l'impression qu'elle produit jus-
dont les femmes se teignent les ongles que sur les esprits les moins cultivés.
en rouge de temps immémorial; son Vingt cités et beaucoup de lieux inha-
indigo, son coton herbacé, ses pieds bités offrent au voyageur toujours
de tabac, et ses pastèques rampantes, surpris ces grands édifices antiques,
qui couvrent de leurs globes verts les chers -d'oeuvre de l'architecture, non
}liages sablonneuses. Si elle a de moins seulement par leurs masses impo-
es rizières, qui demandent des ter- santes, leur caractère grave et reli-
rains bas et noyés, les forêts de cannes gieux, mais par leur belle et simple
à sucre y mûrissent parfaitement ; le ordonnance, par l'éléçante et sage dis-
coton arbuste s'y nlaît davantage; elle position des sculptures emblématiques
a de plus le cartliame, dont la fleur qui les décorent, et par la richesse in-
rouge et précieuse se recueille avec concevable de leurs ornements, qui
des soins tout particuliers ; le bamicr, ne sont jamais insignifiants.
qui donne un fruit vert et gluant ; « Thèbes, bouleversée par tant de
surtout le dourah aux longues feuilles révolutions, Thèbes, maintenant dé-
courbées en arc, aux tiges élevées, qui serte, remplit encore d'étonnement
peuplent les terres exhaussées de la ceux qui ont vu les antiques mer-
Thebaïde, et portent, dans leurs lon- veilles de Rome et d'Athènes. Thèbes,
gues panicules , la nourriture princi- à l'aspect de laquelle nos armées, vic-
pale du pays. torieuses de tant de pays célèbres dans
« Le Fayoum a ses champs de roses les arts, s'arrêtèrent "spontanément
qui donnent l'essence la plus suave. en poussant un cri unanime de sur-
Ici les lotus révérés des anciens, et prise et d'admiration; Thèbes, célé-
qu'on ne trouve plus dans le Saïd brée par Homère, et, de son temps,
laissent épanouir à la surface des eaux la première ville du monde, après

Eendant l'inondation ces brillantes vingt -quatre siècles de dévastation en


eurs roses, blanches ou d'un bleu est encore la plus étonnante! On se
céleste, si communes aussi dans les croit dans un songe, quand on con-
canaux et les terrains inondés de la temple l'immensité de ses ruines , la
Basse-Égypte. Le nopal ou raquette grandeur, la majesté de ses édifices
épineuse, avec ses feuilles d'un vert et les restes innombrables de son an-
sombre, épaisses de plusieurs doigts tique magnificence.....
forme des clôtures semblables â de « Ainsi, malgré sa misère et sa dé-

hautes murailles. On y voi^ l'olivier gradation actuelle, l'Égypte retrace


qui a disparu du reste de l'Egypte ; la Pimage d'un sort jadis brillant et pros-
vigne et le saule, presque aussi rares. père, et ce contraste, toujours pré-
« Ce qui frappe particulièrement la sent, de ce qu'elle fut et de ce qu elle
Tue dans tous les champs de la Thé- est, bien qu'affligeant en lui-même,
bnïde , c'est le palmier- doum , arbre n'est pas sans un grand intérêt pour
d'un port singulier : son tronc, haut l'observateur. Il se demande pourquoi

Digitized by Google
ÉGYPTE.
«tique prospérité a cessé; et senté sur un grand nombre de monu-
it la nature la même en toutes ments, de forme humaine, assis sur
que par le passé, il Toit dans son trône, étroitement enveloppé dans
Érence des institutions sociales une tunique Weue ; sur ce corps hu-
casse d'un si prodigieux change- main est placée une téte de bélier,
t; faste et digne sujet de médita- dont la face est verte, et il tient dans
\
pour ceux qui retracent l'histoire ses mains un vase duquel s'épanchent
peuples et pour ceux qui sont ap- les eaux célestes. Le dieu Nil céleste
[fcies à m tache si glorieuse et si diffl- avait quelquefois à côté de ses repré-
de les régir. • sentations trois vases, qui étaient l'em-
blème de Vinondation : l'un a> ces
vases représentait l'eau que l'Éevpte
produit elle-même; le second, celle qui
H parait que les anciens philosophes vient de l'Océan en Egypte, au temps
zrecs avaient tiré du sanctuaire de de l'inondation ; et le* troisième, les
lEeypte l'opinion d'après laquelle Veau eaux de pluie qui , à l'époque de la
était le principe de toutes choses crue du Nil, tombent dans les parties
urement à Tor- méridionales de l'Éthiopie. Voilà ce
des autres par- aue raconte Horapollon , celui qui a
du globe, et que ce principe de écrit un précis sur l'interprétation des
ï humidité, oui était la mère et la
hiéroglyphes.
nourrice des êtres, fut appelé par les Le Nil terrestre était représenté par
Grecs l'Océan et par les Égyptiens le un personnage de forme humaine, fort
-V Ce nom fut aussi celui du grand gras, et qui semble participer des deux
fleuve qui arrosait leur pays. sexes. Sa tête était surmontée d'un
Ce fleuve fat en effet , de tout bououet d'iris ou glaïeul , symbole
temps, pour la teire^Egypte, le véri- du fleuve à l'époque de l'inondation.
Il faisait, au nom des rois qu'il avait
teur ; c'est au limon annuellement pris sous sa protection, .des offrandes
apporté par ses eaux que cette riche aux grands aieux de l'Egypte. On l'a
contrée doit son existence; c'est le en effet représenté portant sur une
Nil qui en maintient et en renouvelle tablette tantôt quatre vases contenant
inépuisable fécondité : aussi ce fleuve
l'eau sacrée, et séparés par un sceptre
fut non -seulement sur- ~ui est l'emblème de la pureté, tantôt
le très-saint, le père et le ,1 es pains, des fruits, des bouquets de
conservateur du pays, mais il fut fleurs et divers genres de comes-
encore regardé comme un dieu, et eut tibles , surmontés aussi du sceptre de
en cette qualité un culte et des prêtres. la pureté. Il était ainsi représenté sur
Les fteyptKM allaient jusqu'à con- deux bas -reliefs qui ornaient deux
sidérer leur fleuve sacré comme une cotés du dé sur lequel s'élevait en
image sensible d' Ammon, leur divinité Étîypte l'obélisque de granit qui vient
suprême; il n'était pour eux qu'une d'être transporté à Paris. De pareilles
ion réelle de ce dieu qui représentations de ce dieu existent sur
forme visible, vivifiait et beaucoup d'autres monuments: les
Ffiffvpte ; aussi Grecs
les Égyptiens appelaient ce dieu en leur
avaient appelé lé Nil, le Jupiter égyp- langue, Hôpi-môu, et ce nom signifie :
tien.
celui qui a la faculté de cacher ou re-
Les philosophes égyptiens avaient tirer ses eaux, après en avoir couvert
imagine dans le ciel des divisions sem- le solde l'Égypte pour le féconder.
blables à celles de
terre; ils avaient
la Rien n'est plus célèbre en effet, et
donc un Nil céleste et un Nil terrestre. dès la plus haute antiquité, que les
Lear grand dieu Cnouphis était con- inondations périodiques du Nil, et
sidéré comme la source et le régula- l'incertitude qui existait alors sur le
\y et il est repré- heu où il prend sa source n'a pas

Digitized by Googl
L'UNIVERS.
de Syène comme une chute prodi- que de courir très-vite et enfin a
, v
gieuse dont le fracas frappait de sur-
, rencontré, vu et entretenu dans
dité les habitants du voisinage Sénè-
: désert le philosophe hermétique 1
que et Cicéron n'hésitaient pas à le colas Flamel, et sa femme Pernel
croire, à le dire dans leurs écrits, et couple , dit-il , encore très - vivac
cette opinion servait de thème aux ré- ce couple, à la vérité, était mort c
cits qui se débitaient encore, avec un puis plus oc trois cents ans.
succès marqué, au siècle même des Mais des témoins désintéresses, p!
plus brillantes productions de no- amis du vrai que du merveilleux, o
tre littérature. Devant le grand roi vu et mesuré la cataracte de Syèn
Louis XIV et ses contemporains , Paul notre planche n° 3 en donne une id
Lucas, voyageur payé par la cour, très-fldèle.
racontait au public, de retour de son Sur les deux rives du fleuve s'élèvei
premier voyage au Levant, en !704, lesdeux culées d'une montagne tran
mi'à quelques lieues de Svène le bruit versale que son cours a coupée pre.
de la cataracte se faisait déjà entendre. que à pic pour y former son lit ; ce f
« Nous arrivâmes, ajoûte-t-il, une est inégal parsemé de pics de gran
,

heure avant le jour à ces chutes d'eau plus ou moins élevés, plus ou motr
si fameuses. Elles tombent par plu- rapprochés, formant des écueils don
sieurs endroits d'une montagne de quelques-uns sont de grandes fies ; ce
plus de deux cents pieds de haut. On pics s'élèvent au-dessus des eaux , e
me dit que lesBarbarinsydescendoient barrent le Nil dans tous les sens; ar
avec des radeaux, et j'en vis deux en ce ré té contre ces obstacles, le fleuve si

moment qui s'y jetèrent de cette ma- refoule , se relève et les franchit ; i

nière avecleNil. Le seul endroit remar- forme ainsi une suite de petites casca
quable est une belle napped'eaulargede des, dont chacune est haute d'un de-
30 pieds qui forme en tombant une es- mi-pied ou moins. L'espace est rem-
pèce d'arcade, par-dessous laquelle on i
1)1
de tourbillons et de gouffres, et
pourroit passer sans se mouiller, et il e bruit des eaux qui se brisent est
y a apparence qu'on prenoit autrefois entendu à quelque distance. Ce pas-
ce plaisir ; on y voit en effet comme une sage serait très-dangereux pour la na-
petite plate-forme où il va plusieurs ni- vigation , mais une espèce de chenal
ches pour s'asseoir . . Quand j'eus con-
. est ménagé sur la rive gauche ; durant
templé assez de temps cet endroit où les grosses eaux , tous les écueils de ce
le fleuve se précipite de si haut , l'élé- côte du fleuve sont couverts et s'y
vation et la commodité du lieu m'en- changent en canal navigable ; dans les
gagea à dessiner le cours du Nil , dont basses eaux, les barques remontent le
voici en petit la copie de la carte qu'on courant à la cordelle et en serrant la
m'a fart l'honneur de présenter au côte; en le descendant, elles sont en-
roi. » traînées avec une grande rapidité.
A ce récit en effet est jointe une Voilà au vrai la fameuse cataracte
prétendue carte du Nil , où ne sont pas de Syène, qui se réduit à quelques
oubliées les montagnes de 200 pieds cascades distribuées sur une certaine
de haut formant les cataractes selon
, étendue de terrain et dont l'ensemble
Paul Lucas, qui, du reste, avait acquis donne à peine quelques pieds de chute
le privilège des plus incroyables inven- aux eaux du Nilà son entrée en Egypte.
tions , par l'accueil que reçut sa pre- On ne peut s'empêcher de s'étonner
mière relation où il ne s'en est pas de l'existence d'un pareil obstacle à la
montré économe , lui qui avait déjà navigation du fleuve, quand on pense
vu , dans ses autres voyages , des à ces preuves nombreuses d'une ad-
géants escaladant les montagnes de ministration attentive et puissante
la Thessalie comme les marches or- dont le gouvernement de ancienne I

dinaires d'un escalier, des hommes à Égypte a laissé tant de traces encore
une seule jambe qui ne laissaient pas subsistantes. Ces écueils de Syène ac-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 11

csmiefit sa prévoyance ; mais ils nous pluiesdu tropique. Ces pluies com-
il mêlent plutôt, et on
ne doit y voir mencent dès le mois de mars. Cet
lu moyen efficace de défense contre effet ne se fait sentir sur le Nil en
\ B nuisions des peuplades éthiopien- Egypte qu'à la fin de juin dès cette ;

as qui , plus d'une tois époque , le fleuve croît pendant trois


, attaquèrent
ilçvpte, y établirent à force ouverte mois, jusqu'à l'équinoxe d'automne ;
ut domination temporaire, et qui il décroît alors durant les trois mois
juraient peut-être envahie pour tou- suivants ,
après lesquels il est rentré
cette barrière naturelle, forti- dans son lit , et il reprend son cours
% encore par les secours de Kart ordinaire.
Savait contribué à réprimer l'esprit Durant l'inondation, l'aspect de l'K-
4e conquête de ces peuplades, et à les gypte est merveilleux ; c'est comme
retenir dans les limites de leur terri- une grande mer, du sein de laquelle
toire au midi de l'Egypte. sortent des villes, des édifices publics
Après les cataractes, les notions les et des chaussées qui conservent les
plus populaires sur le ÏNil sont celles communications.
de ses inondations ou débordements Mais l'effet de ce phénomène a eu
annuels et réguliers. Peu de phéno- pour l'Égynte une tout autre im-
mènes ont en effet plus vivement ex- portance : les débordements du Nil
cité la curiosité des hommes ; M. de ont créé au milieu d'un désert le sol
Rozieresqui lésa observés sur les lieux, nécessaire à l'un des plus célèbres
ajoute : « C'était un spectacle bien empires qui aient jamais existé ; il a
digne d'admiration, de voir réculière- secondé la nature dans la formation
ment chaque année, sous un ciel se- même de ce sol , et toute la Basse-
rein , sans aucun symptôme précur- Égypte n'est que le résultat d'un at-
seur, sans cause apparente, et comme terrissement successif par le fleuve ,
par un pouvoir surnaturel , les eaux gui a ajouté ainsi une contrée entière
d'an crnnd fleuve , jusque-là claires et à la vallée de la Thébaïde en rejetant
limpides, changer subitement de cou- plus loin les bornes mêmes de la mer ;
leur à F époque fixe du solstice d'été le Delta n'est ainsi qu'une dépouille
se convertir à la vue en un fleuve de l'Abyssinie , transportée par le
de sang , en même temps grossir fleuve à près de trois cents lieues de
s'élever graduellement jusqu'à l'équi- distance. Les anciens disaient avec
noxe d'automne , et couvrir toute la raison que la Basse-ïtgypte était un
surface de la contrée ; puis , pendant présent du Nil ; le sol cultivable de
an intervalle aussi régulièrement dé- i'Kgypte entière a aussi la même ori-
terminé , décroître , se retirer peu à gine. C'est ce que les prêtres de TÉ-
peu , et rentrer dans leur lit a l'é- gypte disaient aux voyageurs grecs
poque où les autres fleuves commen- assurant que ,
lorsque
, leur Menés
cent à déborder. » Sremier roi , monta sur
trône , la le
Les anciens philosophes se sont oc- tasse-Egypte n'était qu'un marais
cupes à rechercher les causes de ce s'étendant de la Méditerranée jusqu'au
débordement : ils en ont proposé plu- lac Maris , ce qui t'ait une distance
sieurs explications plus ou moins fon- de sept jours de navigation. Hérodote
dées ; on sait aujourd'hui que les ajoute à leur récit qu'au - dessus
pluies périodiques de l'Abyssinie , au même de ce lac, et jusqu à trois autres
wkJi dû tropique du Cancer
, sont la journées de navigation , le terrain
seule cause de ces inondations ; car n'est encore qu'une alluvion du Nil ;
il ne tombe presque pas de pluie en il remonte en effet à la première bi-

Egypte, très-rarement dans la basse, furcation du fleuve, à quarante lieues


et c est un phénomène quand on en environ du rivage actuel de la mer
oit dans la haute. Toute la végéta- en ligne droite. »

tion en Egypte est donc le résultat de Tout ce que disaient Hérodote et


l'inondation annuelle du Nil par les les prêtres égyptiens a été reconnu

Digitized by Google
L'UNIVERS.
vrai par les savants modernes, et l'ex- Les Égyptiens disent aussi <
vins.
haussement du sol du Delta égyptien siMahomet en eût bu, il aurait
est un des faits les plus importants mandé à Dieu une vie éternelle pc
sur lesquels la géologie puisse exercer pouvoir en boire toujours. On < en
ses théories. Ce qu'ils disaient relative- voie encore tous les jours à Consts
ment à Menés, n'est peut-être pas tinople , pour l'usage du grand - s
aussi exact ; les temps paraissent trop gneur et celui du sérail. L'an ah
courts pour qu'une lente opération chimique de cette eau a en effet ce
du fleuve ait pu, depuis Menés jusqu'à firme la bonne opinion que les Orie
nos jours, c'est-à-dire dans un espace taux et même les voyageurs europée
de près de sept mille ans, transformer en donnent généralement.
les bas-fonds des bords de la mer en On voit, par cettedescription abrég
terre habitable et cultivée. du Nil, tous les bienfaits qu'il répai
L'exhaussement est produit par les sur l'Egypte. Elle ne se forme, el
matières que le Nil détache des mon- n'existe que par lui ; si ses débord
tagnes de l'Abyssinie , entraîne avec ments cessaient , la disette la p/c
lui et abandonne successivement dans cruelle frapperait ses habitants; si
les diverses parties de son cours. Ces fleuve se desséchait, l'Egypte clisp*
matières exhaussent le lit du fleuve, raîtrait de la surface du globe , et J

et le limon déposé sur les terres ex- sol végétal qui la forme serait biente
hausse également celles qui en oc- stérileeten peu de temps reconquis pa
cupent y a équilibre dans
les rives. Il le désert : il ne resterait de ce crac*
les résultats de ces deux opérations. empire que le nom. Un illustre Por
On a déduit d'une foule de considé- tugais, Albuquerque, voulut détruir
l'Egypte au XV siècle de notre ère
e
rations très-rationnelles , et d'observa-
tions faites sur les lieux, que l'exhaus- et pour y parvenir , il songea à en dé
sement était de 57 pouces en mille tourner "le Nil avant qu'il atteignît h
ans, ce qui depuis le roi Menés donne- cataracte de Syène l'entreprise était
:

rait un exhaussement de 2(3 pieds 1/4. hardie, mais supérieure à son génie,
Or il est constaté que des fouilles de et l'Égypte échappa à la fureur de <x
quatorze à quinze mètres ( de 40 à 45 vice-roi des Indes portugaises.
pieds ) faites dans le Delta n'ont tra-
versé que des couches de terre végé- III. LE Fa Y or M ET LE LAC MŒRIS.
tale, entremêlées de couches de sable
quartzeux, semblable à celui que le On comprend tous les soins que le
ISil charrie. Il faut donc supposer que gouvernement de l'Egypte donna â
l'amélioration des bas - fonds de la rétablissement des canaux, quand on
Basse-Égypte fut antérieure au roi se rappelle (me le sort du pays dé-
Menés, qui avait été d'ailleurs précédé pendait entièrement de l'inondation
en Egypte par le gouvernement théo- du Nil ; si elle avait manqué abso-
cratiqùe. Peut-être faut-il seulement lument , l'Égypte , si féconde , était
attribuer à ce roi un système de cana- frappée de stérilité , et la famine dé-
lisation qui concourut très-directement truisait la population. Il était reconnu
à cette amélioration ; mais il est utile, aussi que si elle était insuffisante, iJ
dans toutes ces questions, de s'efforcer y avait disette ; il en était de même,
de mettre d'accord les faits naturels si l'inondation était trop abondante:
avec les données historiques. ces résultats dépendaient absolument
Du reste, l'eau du Nil a une répu- de la quantité des pluies de l'Abys-
tation bien ancienne de salubrité, et sinie, et aucun moyen humain ne pou-
les modernes la lui ont confirmée. vait les régler selon les besoins du
Elle est très-légère, et d'une saveur pays. La sagesse du gouvernement
très-agréable, ce qui a fait dire à un égyptien surmonta cependant ces dif-
voyageur qu'elle est parmi les eaux ce ficultés. Il avait compris de bonne
que le vin de Champagne est parmi les heure que les inondations du Nil par-

Digitized by Google
I

• •••
• «
. j » *

- . . • • 4 »

» . »

. • -< • ' •

# «

Digitized by Google
ÉGYPTE.
Ajbv* 3 une hauteur convenable surmontées d'un colosse assis, et Hé-
ftp.-' - .' srules assurer l'abondance rodote en conclut que le lac avait été
mgarantissait aussi le repos des creusé de mains d'homme. Mais on a
fcçàes. Ce gouvernement entreprit pu y bâtir les pyramides avant que le
P
|r
prévenir le mal qui résultait ega-
* -i'une r rue insuffisante ou ex-
bas-fond fût occupé par les eaux dé-
rivées du Nil. (Voy. la planche 23. )
&^ Tr. ;
î pour assurer ces immenses L'importance de ce lac, qui n'avait
fcv 'y il fit disposer un réservoir pas moins de 60 -lieues carrées, était
I de soixante lieues carrées de immense pour PÉgypte : il régulari-
Lrv v c'est le lac du Fayoum.
: sait les inondations et rendait sans
Sous avons déjà dit qu'une cou-
[ effet sensible l'inégalité des pluies du
rir? de la chaîne Libyque , située à tropique. Au moyen ducanal tiré du
fia* journée et demie" au-dessus des Nil, le lac se remplissait lors de la
^Timides de Sakkara, et large d'en- crue des eaux, et s'élevait au niveau
Brr. une lieue el demie, e1 qui s'é- du plus haut débordement ; quand le
rpt en s'enfoncant au couchant , Nil décroissait, le lac était fermé par
a une vaste* plaine, au Favoum,
Knrj*jîitt des digues et des écluses, et conser-
bit est un appendice de la vaflée du vait les eaux jusqu'au mois de dé-
Bil, et qui égalait en développement cembre ; on ouvrait alors les digues f
fîétendue de la Basse- Kgvpte. C'est là les eaux s'écoulaient par deux embou-
fu existent les traces étendues de la chures , et elles contribuaient à as-
fbs vaste entreprise sociale qu'ait surer la fertilité dans le Fayoum , le
Dite le génie de l'homme, je veux territoire de Mempbis et une partie
dire le lac Mœris. La province où il de PÉgypte moyenne. Il suppléait
était situé formait sous les Grecs et ainsi à un débordement insuffisant
les Romains un nome appelé d'abord et pouvait prévenir les effets d'une
Crocodtlopplite et ensuite Arsinoïte , trop grande inondation en retenant
J
et par les Égyptiens, avant les Grecs, les eaux comme un vaste réservoir.

j
Piom , et P'hatom , mot qui désigne Ces grands intérêts étaient présents
]
un lieu aqueux , marécageux , et que à Pesprit du roi qui ordonna ce vaste
les Arabes ont conservé dans le nom ouvrage d'utilité publique, et l'histoire
J de Fayoum sous lequel cette province a été reconnaissante en conservant
est encore désignée aujourd'hui. au lac le nom
de Mœris.
La signification de ce nom permet Ce prince, qui porta aussi le nom de
de présumer que le sol du Fayoum Thutmosis dans les historiens grecs
fut d'abord occupé par un marais. régnait 1700 ans avant Jésus-Christ.
Selon le rapport des anciens, le pha- Son nom est encore gravé sur quelques-
raon Mœris en aurait fait un lac ; si uns des plus grands édifices de Thebes,
l'on âdmet qu'il fit creuser ce lac dans de la Nubie ; il reçut aussi les titres de
la partie occidentale de la province bienfaiteur des mondes, serviteur du
comme il avait près de quarante lieues Soleil. L'obélisque qui est à Saint-
de tour et une assez grande profon- Jean-de-Latran à Rome ; avait été
deur, il s'ensuivrait que
Éîjyp- les érigé en son honneur en Egypte; il y
tieus en le creusant auraient enlevé a aussi dans le musée de Turin une
plus de onze cents milliards de mètres statue de ce roi ; elle est de propor-
cubes de terre ; ce qui ne peut pas tions colossales , et en granit noir à
être supposé : il faut donc admettre taches blanches. Les prêtres égyptiens
que le roi Mœris profita de la dispo- parlèrent de lui à Hérodote, quoique
sition naturelle du terrain pour y éta- ce prince fût mort alors depuis plus
blir ce lac. Un canal , tiré du Nil de mille ans. Mœris a mérité, par les
et construit à travers les sables et immenses ouvrages exécutés sous son
l«s
y conduisait les eaux du
rochers, rèçne , notamment par le lac du
milieu du lac s'élevaient
fleuve; vers le Fayoum , dont nous avons essayé de
deux pyramides d'une grande hauteur, donner une idée, la renommée que Phis-
14 L'UNIVERS.
toire lui a conservée jusqu'à nos jours. mois de juillet amène la plan ta tic
Les eaux du lac du Fayoum, qu'on riz,du maïs, la récolte du lin e
appelle aussi en arabe Birket-el-Ka- coton, et l'abondance des raisins
roun , ont un degré de salure très-con- environs du Caire. Au mois d'à
sidérable ; trois mois après que l'eau
coupe du trèfl<
c'est la troisième
du Nil y est arrivée, elle est six fois floraison du nénuphar et du jasri
plus salée que celle de la mer, et ce-
pendant le lac n'est.alimenté que par
les palmiers et les vignes sont cha
de Fruits mûrs, les melons sont
leseaux douces du Nil. Mais des effio- trop aqueux. La récolte des oran/
rescences salines existent- sur les ber- citrons, tamarins, olives et du
6es du canal qui les conduit, et ces annonce le mois de septembre ; e
erges contiennent une quantité très- en octobre commencent des sema il
considérable de muriate de chaux ; la l'herbe s'élève assez haut pour cac
base calcaire du terrain du lac a quel- le bétail, et les acacias et autres
ques veines de sel gemme ; on trouve bustes épineux sont couverts de fle
aussi ce même sel dans les environs
odorantes. Rien n'égale nulle part ce
du lac.
richesse et cette variété de végétatic
que n'obtiendrait-on pas d'un tel pa
IV. FERTILITÉ DE L'EGYPTE.
>
si l'industrie et la civilisation euroi
ennes pouvaient y répandre tous lei
On peut donner une idée de la ferti- bienfaits?
lité de l'Egypte, en disant que la terre
porte tous les mois et des fleurs et des V. CLIMAT DE L'EGYPTE.
fruits. On sème les blés en novembre,
à mesure que les eaux du Nil se reti- Le climat de l'Égypte est très-saii
rent; les narcisses, les violettes et les et il a été reconnu par des rechercha
colocassiers fleurissent : on récolte les très-exactes, faites durant l'expéditio
dattes et le fruit du sébestier. En dé- française, que la mortalité parmi Je
cembre, les arbres perdent leur feuil- Européens y était moindre que dans no
lage mais les blés, les herbes, les climats. C'est cependant en Egypte qu
fleurs couvrent partout la terre, et lui la peste paraît avoir pris naissance e
donnent l'aspect d'un nouveau prin-
y être indigène. Elle se montre aprè
temps. En janvier, on sème les lupins la retraite des eaux de l'inondation
et autres crains, les fèves et le lin: Nous ferons voir, en parlant des mo-
l'oranger, le grenadier fleurissent, les mies ou corps embaumés, comment
blés montrent leurs épis dans la Haute* les anciens Égyptiens se proposèrent
Egypte, et dans la basse, on récolte de se préserver d'un tel fléau. 11 y a
la canne à sucre , le séné et le trèfle. cependant de très-mauvais vents en
Au mois de février, la verdure couvre Egypte ; les vents du nord soufflent en
toutes les campagnes, on sème le riz, octobre; au mois de juin, le vent em-
on récolte l'orge; les choux, les con- brasé du midi se manifeste, mais il
combres et les melons mûrissent. En dure peu de jours : on le nomme Kham-
mars , les plantes et les arbustes fleu- syn en Egypte et Sémoum dans le dé-
rissent,on récolte les blés semés en sert ; par son influence , l'atmosphère
octobre et en novembre. Durant la se trouble, une teinte pourpre la co-
première moitié d'avril, la récolte des lore; l'air n'est plus élastique ; une
roses; ensuite on sème des blés et on chaleur sèche et brûlante règne par-
en moissonne d'autres ; le trèfle donne tout, et des tourbillons, semblables aux
une seconde coupe ; en mai , la récolte émanations d'une fournaise ardente,
des blés d'hiver; l'acacia, le henné se succèdent par intervalle. Malheur
fleurissent , les fruits précoces sont au voyageur que le Sémoum surprend
cueillis, tels que les raisins, figues, dans le désert Ce fut par ce fléau si
! ,

caroubes et dattes. En juin, la Haute- l'on en croit l'histoire , que fut détruite
Egypte récolte la canne à sucre; le l'armée envoyée par Cambyse contre

Digitized by Google
!
ÉGYPTE. 1S

ferf Amman-, avançant à travers


s* Dakhel , Farârréh , El-Behryéh , d'où
feaMes , d\\ Hérodote et se trouvant
, Fon parvient par une route au nord-
,

à moitié chemin, un vent ouest, à plus célèbre des Oasis,


la
Yiotent et tempétueux, vint nommée aujourd'hui de Syouah, et
pendant le temps qu'elle par les anciens Oasis de Jupiter»
arrêtée pour manger, et ce vent Ammon. C'est la en effet qu'existait
de tels tourbillons de sable, que
1 le fameux oracle que toute antiquité
1

'innée entière fut engloutie et dispa- alla consulter, et qui cessa de prédire
1 entièrement. "Le chameau, ce ro- et de parler, comme tous les autres,
fcûe habitant du désert , redoute le quand l'importance politique du pays
si:um, et quand ce vent souffle, il se où il était établi fut anéantie. On rap-
Jocstrait à son influence meurtrière, porte l'origine de l'oracle d' Ammon à
à tenant ses yeux constamment fer- une intervention supérieure, et on ra-
las et en enfonçant sa téte dans les conte qu'une colombe partie du grand
,

pbtes , qui dessèchent moins son ha- temple de Thèbes d'Egypte, alla dési-
face déjà embrasée par la haute tem- gner, avec évidence, le heu où l'oracle
pérature et la réverbération du désert. devait être établi. Le temple d'Am-
mon , qui était la grande divinité de
Tl. OASIS. Thèbes, et que les Grecs ont assimilé
à leur Jupiter, fut en effet construit
On donne le nom
d'Oasis n des dans la partie la plus fertile de l'Oasis.
portions plus ou moins étendues de La statue du dieu était faite avec du
terrain qu'une source d'eau fertilise bronze où l'on avait mêlé des émerau-
au milieu des sables ; ce sont de vé- des et autres pierres précieuses. Il
ritables fies de verdure sur la plage était porté sur une barque d'or, comme
stérile des déserts. Elles sont situées à les autres grands dieux de l'Egypte.
Poccident de la chaîne Libyque sur la Plus de cent prêtres étaient attachés
r/re gauche du Nil, et connues dès la au service du temple, et c'était par la
plus hante antiquité. Elles furent à la bouche des plus anciens que le dieu
même époque des dépendances du ter- Ammon rendait ses oracles , les plus
ritoire de l'Egypte. L histoire a en effet célèbres de toute l'antiquité; Hercule,
conservé la tradition d'une rébellion des Persée, et une foule d'autres personna-
habitants du territoire Libyque, dès les ges illustres dans les traditions histo-
premiers temps de la monarchie égyp- riques de la Grèce, allèrent religieuse-
tienne. On ne parvient dans ces can- ment le consulter. Non loin du temple
tons isolés qu'après plusieurs journées était une autre merveille; c'était une
de marche dans le désert; quelques source nommée la Fontaine du Soleil:
Toyageurs modernes y ont pénétre, et selon Hérodote , l'eau en était tiède le
Ton possède aujourd'hui des notions matin et froide à midi, tiède au cou-
exactes sur les principales Oasis de cher du soleil, et bouillante vers le
l'Egypte. milieu de la nuit. Alexandre-ie-Grand
Leur nom est tiré de l'ancienne lan- voulut visiter et consulter cet oracle
gue égyptienne où il signifiait habita- de Jupiter, l'auteur de sa race, disait-
tion, et comme
le dit un géographe il; il descendit donc des environs de
grec, c'étaient des régions habitées et Memphis dans , la Basse-Égypte , au-
entourées de vastes déserts; un autre f>rès
du Maréotis; il s'enfonça de
lac
écrivain grec trouvait qu'elles offraient à dans le désert avec les personnes
assez Qragréments pour mériter le nom qu'il avait désignées pour le voyage à
d'i&i des bienheureux. La grande l'Oasis d'Ammon. Les deux premiers
Oasis des anciens est celle qu'on nomme jours, Quinte-Curce, la fatigue
dit
aujourd'hui EJ-Khargéh , à la hauteur était quoiqu'on n'eût
supportable,
deThèbes : elle est la plus méridionale jamais vu de telles solitudes; mais dès
des Oasis de l'Egypte. En s'avançant qu'on fut avancé dans ces mers de
vers le Delta, on trouve celles de sable, l'aspect de la terre ne frappait

Digitized by Google
I

16 '
L'tJlUVERS.
plus les yeux; pas un arbre, pas une tante est couverte par trois énorr
trace de végétation ; la provision d'eau, pierres qui lui servent de plafond ; e-
portée par les chameaux, était épuisée ont chacune 26 pieds sur 33, et pès
et fl n'y en avait pas dans ce sable brû- ainsi cent mille livres chaque ; <

lant; le soleil avait tout desséché; mais sculptures subsistent encore et pr<
il survint heureusement un peu de vent que le temple était dédié à
pluie, et on se désaltéra avec avidité, ë'ande divinité de Thèbes, à A mine
même en recevant dans sa bouche Peau a, le Jupiter-Ammon des Gre<
qui tombait du ciel. On mit quatre Des inscriptions en caractères bféfl
jours à traverser ces vastes solitudes. glyphiques accompagnaient les scèr
Comme on approchait , une troupe de religieuses figurées sur les bas-i
-

corbeaux vint servir de guide à l'ar- liefs. Non loin de ces ruines, au su
mée d'Alexandre; enfin il arriva h est, on retrouve dans un bois de pi
f Oasis d'Ammon, où il vit, au milieu miers la fontaine dont les eaux soi
d'immenses déserts, le temple en- alternativement chaudes et froid
touré d'un bois épais, où des sources dans l'espace de 12 heures. Voilà doi
nombreuses entretenaient la fraîcheur le véritable temple de Jupiter-Ammc
et la végétation, et il visita aussi la et la fontaine du Soleil dont Hérodot
fontaine du Soleil , dont Hérodote a donné la description et qu'Alexandn
avait fait connaître l'existence aux le-Grand alla visiter, après qu'il eu
Grecs, un siècle auparavant. Alexan- fait la conquête de l'Égypte. Cambys
dre consulta l'oracle, qui déclara avait voulu détruire ce temple; so
sans hésitation, qu'il était le fils de armée périt à la traversée du désert
Jupiter. Alexandre s'y rendit pour honorer U
Les voyageurs modernes ont re- dieu, et aussi , dit une tradition, para
trouvé à l'Oasis de Syouah les restes qu'Hercule et Persée avaient fait a
des temples égyptiens, la fontaine in- voyage. L'Oasis d'Ammon fut célè-
termittente qu'Hérodote et Alexandre bre dès la plus haute antiquité : c'é-
avaient bien connue, des tombeaux tait un temple dédié au grand dieu de
creusés dans le roc,des restes de momies l'Egypte, Ammon-Ra à tète de bélier,
et plusieurs lieues de terrains fertiles, comme le montrent les sculptures du
appartenants à plusieurs villages. La temple d'Omm-Beyda; quant à l'ora-
Vide de Syouah, qui donne aujourd'hui cle, il est vraisemblable qu'il fut ima-
son nom à l'Oasis, en est le chef-lieu. giné par les Grecs; et Cambyse, qui
Cette ville est placée sur le sommet le méprisait, ne pensait, en occu-
d'un rocher; elle est divisée en deux Eant le pays des Ammoniens , qu'à en
parties distinctes; dans une, celle qui
l lire la conquête.
est à l'Orient , habitent les gens ma- Autrefois réunies à l'Egypte, dont
riés , les femmes et les enfants ; dans elles étaient des dépendances politi-
l'autre, à l'occident, sur un sol plus ques, les Oasis en sont aujourd'hui
bas, les veufs et les garçons. Les rues séparées de fait, et ne conservent avec
sont couvertes et on circule dans la elle quedes relations de commerce; les
ville, d'une maison à l'autre, comme Oasis sont les stations , les lieux de
les abeilles dans une ruche; mais en rafraîchissement des caravanes qui
plein midi, ilfaut avoir une lampe à la Fartent chaque année de l'intérieur de
main. La population de Syouah est Afrique, et traversent Je grand dé-
d'environ 2500 individus. sert pour se rendre en Egypte. Elles
A une lieue et demie de cette ville, sont d'une ressource infinie pour la
à Test-nord -est, existent, à Omm- sûreté et le succès de ces voyages.
Béyda, les ruines d'un grand temple
de style égyptien; il était formé de Vil. LA MER 110UGB.
trois enceintes, dont la plus étendue
avait 360 pieds de longueur , sur 300 A l'orient du Nil , le sol de l'Egypte
de largeur. Une salle encore subsis- s'étend en désert montueux jusqtfaux

Digitized by Google
ÉGYPTE. tî

rtvutsde la mer Rouge, dont la cote a sur leurs pas et de camper devant
f La même direction que le bassin Hahirotb; cette ville existe encore
_ O désert était occupé autrefois sous le nom de Hadjérctfa. Cest à peu
fa Troglodytes ou habitants de près vis-à-vis dece lieu que les Israélites
lescreusées dans le roc. L'extré- passèrent la mer Rouge à pied sec;
4e la mer Rouge est à la hauteur c'est là que s'est formé en effet un
Kaire; ces deux points ne sont ensablement qui a séparé cette mer du
thunes que d'environ 25 lieues; il v a vaste bassin oui la borne au nord , et
b même distance du bras occidentafde avant que cei ensablement fût com-
Jl mer Rouge à la mer Méditerranée, plet, if a dû n'être qu'un bas-fonds
[•or b mer Rouge se termine de ce guéable à marée basse. Moïse, qui
cdté par deux bras : c'est dans l'espace àvait long-temps habité les bords de la
trur^ulaire renfermé entre ces deux mer Rouge, ne devait pas ignorer
feras que sont situés des lieux célè- cette particularité; il en profita pour
bres dans l'histoire sainte,
le désert et sauver le peuple de Dieu des armes du
«mont Sinaï, par séjour de Moïsele Pharaon égyptien. Les Arabes Bé-
et des Israélites , et Pétat des lieux of- douins ont conservé jusqu'à nos jours
fre encore des rapports frappants avec la tradition du passage de la mer Rouge
ks indications et les relations de la par Moïse , et ils donnent encore a quel-
BibJe. ques sources d'eau douce le nom de Fon-
Cest à Memphis, à 25 lieues du bras taines de Moïse. On sait la suite de ce
droit de la mer Rouge, que se sont grand événement; les Israélites arrivè-
passés les grands événements où Moïse rent sans et saufs au désert de Sinaï et
j'>ue le principal rôle. Il entreprend dressèrent leurs tentes vis-à-vis de la
l'ordre de Dieu, de délivrer les montagne. Moïse v monta pour parler à
Hébreux de Pesclavage où ils vivent Dieu; il revint ensuite vers le peuple,
™ Egypte depuis plusieurs siècles ; il en fit assembler les anciens; il leur ex-
Amande Paiement du roi pour se posa les ordres de Dieu , qui , descendu
rendre dans le désert, afin, lui dit-il lui-même sur le Sinaï, au milieu des
te faire des sacrifices pour lesquels on éclairs, du tonnerre et des feux, donna
•inmoUit des animaux révérés par sa loi, dont Moïse présenta ensuite les
> Egyptiens. II se met en route suivi tables au peuple en lui disant : Elles
ie son
peuple, et après avoir em- sont écrites de la main de Dieu. Tou-
prunté aux Égyptiens , toujours sous le tes les descriptions de ces lieux men-
ntàne prétexte de leurs sacrifices dans tionnes dans la Bible sont encore
k désert, une grande quantité de vases d une complète exactitude; on y suit
doretd'argent, Moïse se rendit dans le Moïse errant avec son peuple aux en-
désert de Sinaï; il ne prit pas le che- virons du Sinaï, essayant, sans succès,
min le plus court; il conduisit les de passer en Syrie pour conquérir la
Hébreux , dit la Bible, par le chemin terre de Chanaan, attendant dans le
du désert qui est près de la mer désert que le courage et l'obéissance
Rouge. Il cachait ainsi au roi d'Egypte vinssent à son peuple indiscipliné, et
je véritable but de son entreprise, et que les souvenirs et les regrets de
ï suivit ,
pendant trois jours entiers r Egypte fussent effacés par la mort de
fc rivage ae cette mer; le premier, ils ceux des Israélites qui y étaient nés.
arrivèrent à un lieu nommé Socoth Il voulait donner a son peuple des
et quin'est plus connu ; le second lois et un culte qui fussent la hase et
au fond du désert , entre la mer et les garants de sa nationalité f il y tra-
«les rochers inaccessibles, et cette posi- vailla durant 38 ans, mais il mourut
tion est encore reconnaissable à Byr- pendant sa seconde entreprise contre
Soueys, où un coude de la mer se ioint la Syrie, sans entrer dnasla terre pro-
à la Haute chaîne du mont Attaka et mise, et il désigna Josué pour son
sembte fermer Je désert; le troisième successeur. Ainsi l'histoire des rois
jour, Dieu leur ordonna de revenir d'Egypte est intimement mêlée aux
r Livraison, (tarrru.)
,

18 L'UNIVERS.
ait dit que 1* Afrique en nourr
narrations de la Bible* et nous aurons
encore plusieurs fois l'occasion de faire beaucoup et qu'elle était leur
, W
— - qu'elles se prêtent un secours
voir
: ble patrie. Plus d'un moderne p
mutuel et concourent par leurs témoi-
gnages à la manifestation de la vérité
de fiustoire générale.
Nous ne devons pas omettre de rap- climats lointains, par cela seui
peler combien de tentatives ont été ces animaux ne ressemblent pas
laites pour mettre la mer Méditerranée
types qui lui sont familiers , à
qu'il a l'habitude de voir autou
en communication avec la mer Rouge,
lui. Sa réserve doit même aller
au moyen d'un canal , et pour parvenir
ainsi très-îacilement de l'Europe mé- qu'à se garder de croire qu'il ne
ridionale dans Tlnde. Mais les eaux exister que dans ces types, des for
de la mer Rouge sont élevées de plus de assorties, des proportions har
30 pieds au-dessus, du niveau de cellesde nieuses, des mouvements régal
la Méditerranée. C'est cette différence et gracieux, et des fonctions fa<

de niveau qui empêcha et les rois d'E- et naturelles. La connaissance


animaux particuliers à l'Egypte pi
gypte et les rois de Perse qui la gou-
vernèrent, de terminer le canal com- vera à plusieurs égards l'exactit udi
mencé d'une mer à l'autre. Il paraît notre remarque.
toutefois que les Ptolémées achevèrent Les espèces des poissons du
ce canal, et Pline en donne la lon- sont assez variées : les uns s'éloîgn
gueur, qui a été trouvée exacte par les peu de son embouchure; ce sont
modernes. Le calife Omar lit aussi habitués de la mer, qui font de h
rouvrir le canal, et il est prouvé que gues excursions i.ans les fleuves où
les Arabes y naviguèrent pendant plus
cherchent une certaine profondeur
d'un siècle. Enlin, durant l'expédition un fond qui remplit certaines coq
française en Egypte, on examina cette tions. Les autres sont répandus d
question qui est d'un si grand intérêt tout le cours du Nil, et ils en sont
avec véritables habitants; sontdescen
Four le commerce de l'Europe
ils

Asie et f Inde; on chercha les traces en Egypte avec lui des régions p
de ce grand ouvrage des anciens , et méridionales. Le plus singulier de
ce fut l'empereur INapoléon , alors gé- poissons est le btchir y qui tient à
l'ois du serpent par sa forme allons
néral en chef de l'armée d'Orient, oui
les découvrit le premier dans le dé-
et la nature de ses téguments ; 3

sert de Suèz ; il lit , avec son escorte cétacées, en ce qu'il est pourvu d
quatre lieues dans le canal même, dont vents ou d'ouvertures dans le
il reconnut ainsi la direction ; mais il Sar où l'eau s'échappe ; enlin des
faillit périr par le retour précipité de la rupèdes, par des extrémités a
marée, car il s'égara durant cette re- gues à leurs membres. Sa queue t
connaissance. La nuit approchait ; courte, son abdomen est de grande di
cependant il parvint heureusement à mension, et ses nageoires dorsale
Uadjcroth : c'est le lieu même où très-nombreuses. Il a environ deu
Moïse avait campé avant de traverser pieds de longueur, et, vivant dans le

la mer Rouge, et 3,300 ans avant lieux les plus profonds du ileuve, le,

Napoléon. pêcheurs le prennent très-rarement


il est carnassier; sa chair est blan
VIII. ANIMAUX PARTICULIERS clie et savoureuse; la solidité de sa
A L" écaillesne permettant pas de l'entama
avec le couteau, ou le l'ait d'abord
En faisant connaître ici quelques-uns cuire au four et on le retire ensuite
des animaux qui sont particuliers à l'E- de sa peau comme un manchon de
gypte , nous ne les qualitierons pas tous son etui. Xjzjaèiuku est un autre pois-
de monstres, quoique un auteur ancien sou non moins singulier; quoique ai*

Digitized by Google
ÉGTPTE. 19

avant la faculté de se remplir le héron , l'ibis blanc et l'ibis noir, le


û se gonfle en respirant à ta rhyncée du cap de Bonne- Rspérance
sde feau; son ventre devient les" chevaliers ; enfin parmi les palmi-

^olumineux et, le poids du dos


,
pèdes , les hirondelles de mer, le cor-
mot à remporter, ranimai culbute moran et les canards.
«meure renversé sur le dos, ayant Le Nil de grandes tortues d'eau
a
d^un globe hérissé d épi- douce, comme tous les autres grands
3 servent à sa défense, fleuves des pays chauds ; on a trouvé
'wune au hérisson de terre. Le fa- en effet, des trionyx, ou grande tor-
* vient en Éj^pte avec les eaux de tue du Nil dans les rivières de la
,

oodati on ; le déDordement le jette Géorgie, de la Caroline, du Sénégal,


les terres, où le Nil l'abandonne de la Perse et de l'Inde, et toutes ces
•ffcse retirant ; toute la population des tortues se ressemblent par des carac-
asp^nes attend ce moment avec tères essentiels. Les trionvx ont leur
^patience; elle ramasse les fahaka mâchoire çarnie de véritables lèvres
ffrk empressement et y trouve une mobiles; elles tournent sur elles-mêmes
«taimture abondante ; les oiseaux les en nageant, de sorte que lorsqu'elles
recherchent aussi; enfin les enfants sont a fleur d'eau, on voit alternati-
J trouvent le sujet d'un divertisse- vement leur dos et leur ventre. Cest
ment tres-désiré; ils les observent et ce que font aussi les cétaeées qui allai-
tes promènent sur les eaux , les lan- tent leurs petits, et qui leur procurent
fant comme des billes de billard; après ainsi le moyen de venir puiser à la
mort de l'animal, ils gonflent et surface de l'eau l'air nécessaire à leur
vident sa peau à volonté; desséchés respiration. Les trionvx du Nil ont
sous leur forme sphéroïde, les fahaka jusqu'à 3 pieds de longueur.
ont ta faculté de conserver l'air d nt Parmi les reptiles du Nil on distin-
îk sont remplis et peuvent long-tenips ue aussi le tupinambis, qui vit sur les
servir de ballon après leur mort. On Ik>rds du fleuve et y va chercher sa
dit que ce poisson a de la voix. Les nourriture au fond des eaux. Ce lézard,
habitants de l'Rgvpte connaissent aussi de 3 à 4 pieds de longueur, jouit d'une
te silure tremblant , oui est un pois- très-bonne réputation parmi la popu-
on électrique; les Arabes le nomment lation égyptienne; on ne l'appelle que
riad ou raa.sch % le tonnerre, n'igno- la sauvegarde , le sauveur, le mo-
rant pas les propriétés électriques nui nitor : on prétend, en effet, que lors-
rendent ce poisson si remarquable. Ils que des hommes se trouvent, à leur
croient que la couche de graisse qu'on insu, menacés par le crocodile, le
trouve sous sa peau , et qui est son tupinambis s'empresse de les avertir,
^piwreil électrique, est un remède in- par ses sifflements, de la présence du re-
II ibte contre beaucoup de maladies; doutable amphibie. Ces sifflements sont
on la brûle sur des brasiers et on ex- en effet des cris d'alarme, par lesquels
pose le malade au contact du gaz pro- le tupinambis exprime son propre ef-
duit par la combustion. froi à la vue du crocodile, qui est pour
Le >\ sterne général des oiseaux fa lui un ennemi très-dangereux. Le
l'Égypté comprend des ordreset des monitor n'a point les pattes palmées
familles très-variés, que, parmi
tels comme les autres reptiles nageants; sa
les oiseaux de proie, les vautours, queue est comprimée latéralement et
les éperviers, les chouettes; parmi les surmontée d'une crête longitudinale
eriinpeurs, les couas et les coucals ; très-prononcée. Il y aaussi un tupinam-
parmi ies passereaux, l'hirondelle, la bis dudésert; il ressemble à celui du Nil;
mouette, le merle, la fauvette, le seulement sa queue n'a point de crête
roitelet, l'alouette, le moineau, le et elle est presque exactement ronde;
bouvreuil; parmi le.s passengalles, Hérodote des g ne celui-ci sous le nom
les piseons et les colombes ; parmi les de crocodile terrestre, et les bateleurs
échasaers, le pluvier, le vanneau, du ÎUire l'emploient assez ordinaire-
2.

Digitized by Google
L'UNIVERS.
ment dans leurs parades publiques mais ils savent aussi qu'il n'y en a |
après toutefois avoir arraché les dents en n'en approchant pas à une o
à cet animal très-carnassier. En cap- taine distance; la vipère se contente
tivité, il refuse toute nourriture, et les suivre du regard , après avoir dre<
c'est par la violence qu'on parvient à sa téte. Les bateleurs du Kaire y.
lui en faire avaler. viennent cependant à apprivoiser
Les espèces des couleuvres sont as- redoutable reptile; après lui avoir I
sez nombreuses en Égypte ; on a donné raché les crochets venimeux , ils
la description des cinq principales; la dressent à un grand nombre de ton
plus jolie de toutes est la couleuvre à qui charment la population de PÉgyfi
capuchon, remarquable par la dispo- et charmeraient aussi sans doute ce
sition très-gracieuse de ses couleurs , la de TOccident. La v ipère hajé se ch<w±
brièveté de sa queue et celle de son corps en bâton , contrefait le mort , etc. Poi
entier, qui ne dépasse guère un pied. en faire un bâton , le bateleur crael
L'ne grande tache noirâtre, qui couvre dans la gueule du serpent , le contrai
le dessus de sa téte, depuis le bout du à la fermer, lui appuie la main st
museau jusqu'à l'occiput, et qui ligure la téte, et aussitôt le serpent de viei
un capuchon, a fait donner à cette roide et immobile ; il semble tombé e
couleuvre le nom qu'elle uorte. Le catalepsie, et ne se réveille que lorsqu
scy thaïe des Pyramides, qui ressem- les bateleurs saisissent sa queue et 1
ble beaucoup à la vipère , a comme roulent fortement dans leurs main<
elle des crochets venimeux; il parvient Ceci rappelle tout ce que l'antiquit
rarement à une longueur uc deux nous a dit des nsylles, ou individu
pieds ; il est très-redouté au Kaire et qui ont le don ae charmer les serpent:
dans les environs des Pyramides; c'est et de guérir leurs morsures.
contre lui surtout qu'on invoque la Plusieurs auteurs ont attesté la vé-
science et le pouvoir surnaturel des rité de leur science sur ce point il pa
-,

nsylles , dont nous parlerons tout à raît que les psylles d'Egypte étaient les
l'heure, La vipère céraste, ou cornue, plus célèbres;" ils y formaient une cor-
n'est pas moins redoutable; au-dessus poration qui s'est perpétuée jusqu'à
de chacun de ses deux yeux naît une pe- nos jours. Les psylles actuels affir-
tite eminence ou petite corne , de 2 a 3 ment que tout homme qui ne descen-
lignes de hauteur, s'inclinant un peu drait pas d'un psylle de pure race psylle,
en arrière ; c'est de là que le céraste a tenterait en vain d'exercer leur pro-
tiré son nom. La vinèrc hajé est égale- fession ( car c'en est une parce qu'ils
,

ment très-connue des habitants de l'E- sont habituellement appelés pour pu r-


gypte ; elle n'a pas moins de cinq pieds ger les habitations des serpents qui s'y
de longueur, et trois pouces de tour. introduisent très -fréquemment ). On
Cette vipère a la faculté d'élargir en chasse les couleuvres comme on chasse
manière de disque la partie la plus les souris de nos demeures , sans en
antérieure de son corps, en le redres- être effrayé, quand on les rencontre
sant et paraissant marcher sur le reste. dans leschambres , ou sur les lits et
Dès qu'on l'approche, elle dresse sa autres meubles. On appelle un psylle
téte pour veilter à sa défense; sa mor- pour se défaire des serpents dange-
sure est très-dangereuse; la plus petite reux. Les psylles figurent, en Egypte,
3uantité de venin placée par incision
,
dans les fêtes et promenades religieu-
ans la cuisse d'un pigeon , détermine ses, et en sont un des plus curieux
chez lui des vomissements abondants, ornements ils portent l'émotion du
:

de violentes convulsions, et il meurt peuple au plus haut degré d'énereie.


au bout d'un quart d'heure. Cette vi- bans les principales rues du Kaire,
père est très-repandue en Egypte, dans les psylles v paraissent presque nus
tes fossés, et plus souvent dans les affectant des manières d'insensés, et
champs; les cultivateurs connaissent portant des besaces assez vastes , aiin
le danger d'une pareille rencontre, d'y rassembler un plus grand nombre

Digitized by Google
ÉGYPTE. 2!

;*rpents. Ils se font un


mérite d'a- qu'ils placent leur confiance dans un
ir Je ces animaux enlacés autour appel qui imite le cri d'amour du ser-
siveloppant leur cou, leurs pent. L'habileté consiste à en bien
et toutes les autres parties de contrefaire la voix , par un sifflement
corps. Pour exciter davantage tantôt sonore comme le mâle, tantôt
re*t des spectateurs, ils se font plus étouffé comme celui de la femelle,
et déchirer la poitrine et le et ce n'est effectivement qu'à cette con-
par les serpents , et réagissent dition que le serpent peut entrer en
une sorte de fureur sur eux , af- émoi, et se déterminer à quitter sa
de les manger tout crus. Dans retraite.
>jours ordinaires, les plus pauvres Avec dejolis serpents, il y a aussi
™tre les psylles se dévouent au en Kgypte de jolis lézards. Ces ani-
métier de bateleur dans les carre- maux "sont en général de forme élé-
tours et lieux ti^fréauentés : ils em- gante , parés de couleurs très-vives
ploient les serpents ae toutes les fa- et d'une extrême agilité; ils ont quel-
çons, variant tous leurs tours, au que intelligence et sont d'un naturel
moyen desquels ils espèrent exciter doux et timide. Mais, s'ils se défen-
une eitréme surprise , et jusqu'à de dent, ils montrent à la fois du cou-
nfc sentiments de terreur. Le serpent rage et de l'adresse. I ne fois accou-
qu'ils préfèrent est la couleuvre hajê. ples , les deux individus restent
Le gens riches qui craignent les ser- ensemble pendant toute la saison ; le
pents s'adressent aux psylles pour en mâle se bat avec acharnement pour
préserver leurs maisons : mais c'est le conserver sa femelle.
pus petit nombre qui agit ainsi par Le plus connu , à juste titre, de tous
prévoyance, les psylles étant peu nom- les lézards d'Kgypte, est le crocodile.
breux, et très-exigeants quant à leur Sa férocité, sa structure monstrueuse,
«laire. Le spirituel Denon raconte sa taille de 30 à 40 pieds, l'ont tou-
qu'étant un jour chez le général en chef jours fait remarquer ; les anciens ob-
Bonaparte, au Kaire, on v introduisit servèrent ses habitudes , et la relation
«es psylles , et on leur fit plusieurs l'en a écrite le pere de l'histoire,
questions relativement au mystère de
S érodote , est encore vraie en ses
*ur secte et à la relation qu'elle a points principaux. « Je vais parler, dit-
il , des mœurs
aTec les serpents auxquels ils parais- du crocodile. Pendant
,

sent commander; ils montraient plus les quatre mois d'hiver, ces animaux
d'audace que d'intelligence dans leurs ne prennent aucune nourriture. Le
réponses. On en vint à l'expérience : crocodile , quoique quadrupède , vit
Voulez- vous connaître , leur dit le également à terre et dans Peau ; mais
général, s'il il pond toujours ses œufs sur le sable,
y a des serpents dans ce
palais? et, s'il
y en a , pouvez-vous les où ils éclosent. Il passe la majeure
°toi&er de sortir de leur retraite? Ils partie du jour à sec, et la nuit tout
répondirent par une affirmation sur entière dans le fleuve , dont l'eau a
les deux questions : on les mit à Pé- une température plus chaude que n'est
ï>rewe, ils se répandirent dans les alors celle de l'air et de la rosée. De
appartements ; un moment après, ils tous les animaux que nous connais-
déclarèrent qu'il y avait un serpent, sons , le crocodile est celui sans doute
«s recommencèrent leur recherche, dont l'accroissement est le plus ex-
pour découvrir où il était: ils prirent traordinaire. Ses œufs ne sont pas
quelques convulsions en passant de- beaucoup plus grands que ceux d'une
vant une jarre placée à I angle d'une oie, et il en sort par conséquent un
«es ci ambres du palais, et indiquèrent animal proportionné; cependant cet
que l'animal était là; effectivement on en grandissant atteint jusqu'à
'

•e trouva
: ce fut un vrai tour d'adresse, 17 coudées de longueur, et Quelque
* les spectateurs convinrent que ces fois davantage. Il a^ les veux d'un co-
tyMei étaient fort avisés. Il paraît chon, les dents saillantes en dehors

Digitized by Google
23 L'UN
et très-grandes dans la proportion de ture, comme on l'a raconté aussi des
son corps. Il est le seul de tous les crocodiles de l'Amérique, ii mange
animaux qui n'ait point de langue , le aujourd'hui durant toute l'année. Il y
seul aussi dont la mâchoire inférieure avait autrefois des crocodiles dans la
ne soit pas mobile, et oui fasse au con- Basse comme dans la Haute-Kgypte.
traire retomber la mâchoire supérieure Au contraire, on remonte, de" nos
sur l'inférieure. Il a des ongles extrê- jours, cent lieues du Nil, depuis son em-
mement forts, et une peau écai lieuse Douchure, sans en apercevoir : il paraît
qui est impénétrable sur le dos. Il voit que c'est l'élévation de la température
mal dans l'eau, mais, en plein air, sa qui retient le crocodile dans la Haute-

vue est très-perçante. Comme il se Kgypte. Il est habituellement cruel


nourrit particulièrement dans le Nil farouche, inquiet, audacieux, prudent
il a toujours l'intérieur de la gueule et rusé. Il guette les femmes qui vien-
tapissé d'insectes qui lui sucent le nent puiser de l'eau au Nil, et les en-
sang. Toutes les espèces d'animaux lève s il le peut. I n Albanais dormant
terrestres ou d'oiseaux le fuient; le dans sa tente, près du Nil, fut saisi
trochilus, seul, vit en paix avec lui, par une jambe et entraine dans le Nil.
parce que ce petit oiseau lui rend un Ceci se passa près d'Esnéh en 1820.
grand service toutes les fois que le
: Le crocodile vil dans l'air, mais il pré-
crocodile sort de l'eau pour aller sur fère l'eau , pour laquelle est plus par-
I

la terre, et qu'il s'étend, la gueule ticulièrement organisé. C'est la cha-


entr'ou verte (ce qu'il a coutume de leur solaire qui fait éclore ses œufs;
faire en se tournant vers le vent du M. Caitliaud, dans son voyage en Nu-
midi), le trochilus s'y glisse et avale bie, recueillit des œufs de crocodile,
tous les insectes qui s'y trouvent : le les déposa dans sa barque , qui , un ma-
crocodile, reconnaissant, ne lui fait tin, fut envahie par autant de petits cro-
aucun mal. codiles; ils étaient eclos bien naturelle-
« Il y a plusieurs manières de chasser ment. Les tupinambis, dont nous avons
ces animaux ; voici celle qui parait la deja parlé, et l'ichneumon , détru sent
plus remarquable. Après avoir attaché un grand nombre d'uufsde crocodile.
a un hameçon le dos d'un porc , et Lorsqu'ils se rendent, dans le jour, en
l'avoir jeté' au milieu du (leuve, les troupes, sur les rives du Nil, l'un d'eux
chasseurs se placent sur la rive , et fait le guet, en appliquant l'oreille sur
frappent un petit cochon qu'ils ont ap- le sol alind'enieiiure le moindre bruit.
,

porté avec eux. Le crocodile, enten- A l'égard de sa langue, la vérité est qu'il
dant les cris de l'animal, se dirige vers en ii une, mais peu épaisse, et enga-
le lieu d'où vient la voix, et, rencon- gée dans des téguments. Il est vrai
trant dans son chemin l'appât qui a aussi que la mâchoire inférieure n'est
été tendu, l'avale avec l'hameçon. presque pas mobile, et c'est la mâ-
Alors les chasseurs le tirent à eux choire supérieure qui joue sur elle;
et lorsque le crocodile arrive sur la mais la mâchoire supérieure ne forme
terre, un d'entre eux, avant tout, qu'un seul tout avec sa tête entière.
s'avance et enduit les yeux de l'ani- C'est de cette manière que les anciens
mal d'argile délavée qu'il a préparée ; ont, en effet, représenté le mouve-
avec cette précaution , on vient facile- ment de la mâchoire supérieure du
ment à bout du reste; autrement, il crocodile, notamment sur les médail*
en coûterait beaucoup de peine. » les romaines de la colonie de Nîmes.
Voila ce qui se disait en Égvpte sur La dureté de Ja peau du crocodile est
le crocodile, du temps d'Hérodote. Les aussi une vérité incontestable ; les l«l-
observateurs modernes ont rectifié, en les de calibre tirées à une distance
,

certains points, une telle narration. moyenne, glissent sur ses écailles, et
Ainsi, dans le cas où, au commence- le réveillent à peine, s'il est endormi.

ment des choses , le crocodile passait C'est un petit pluvier qui nettoie sa
quatre mois sans prendre de nourri- gueule des innombrables insectes qui

Digitized by Google
ÉGYPTE.
tarent, et dont le défaut de longue settes sont susceptibles d'éducation:
atfè oe lui permettrait pas de se dé- qu'elles s'attachent aux personnes qui
bm&er. Enfin on a apporté en
, en prennent soin; on les accoutume
France plusieurs momies de crocodiles aussi à êtrecaressées par tout le
ns-artistement embaumés. Quand monde ; elles lèchent comme les
ït mile approche la femelle , il la tourne chiens, et en ont t ute la familiarité.
hj le dos, et s'il oublie, ou s'il est D'autres fois, elles témoignent une
entpéhë de la retourner, quand il la affection particulière pour leurs maî-
îuît*,elk ne peut changer sa position tres, en mordant ou en égratigmant
par ses seuls efforts, et devient ainsi les personnes qu ne connaissent
elles
b pro*e des chasseurs. On porte à cinq pas. On peu disposé à
est, toutefois,
/;.rrv

ilti espèces de ernn.dik'S élever des roussettes, à cause de leur
]w rivent dans le NiL odeur et de celle de leurs urines.
autres animaux dont il
Panai (es XJichneumon est aussi un animal as-
nous est venu d'Kgypte un grand nom- sez timide pour être susceptible d'édu-
bre de momies, on doit surtout remar- cation ; on en acheté de jeunes , qui
fH 'ifcu , dont les Égyptiens connu-
l font la chasse aux rats et aux souris
noi deux espèces , le blanc et le noir, dans les maisons. Il devient doux et
qui d'insectes , de vers aquati-
vivent caressant en domesticité ; il distingue
î<j«s, et même de poissons. Les an- la voix de son maître, et le suit pres-
irfts ont attribué la sépulture que les que aussi fidèlement qu'un chien. Il
txvptiens accordaient a l'ibis, a leur mange dans le lieu le plus retiré et le
romoaissance fondée sur ce que l'ibis plus obscur, et il ne faut alors rap-
torusait les serpents. Il est connu procher qu'avec beaucoup de précau-
lujounihui que l'ibis ne fait point la tions. Il lape en buvant, et levé une
?uerre a ces reptiles. Les ibis ne ni- jambe de derrière en pissant; il a à la
3<eot point en Egypte , et ils y arri- fois des habitudes du chien et des
vent des que le B)9 commence à croî- grands carnassiers. Il vit de rats, de
tre; ils disparaissent avec l'inondation. serpents , d'oiseaux et d'œufs. Lors-
L'ibis était consacré au grand dieu que l'inondation le pousse vers les vil-
Thôth, 1 inventeur des sciences et des lages , il y détruit les poules et les pi-
lettres, et il est figuré très-fréquemment geons ; mais le renard lui fait la guerre,
»r les monuments antiques. On attri- et surtout le lézard nommé tupinam-
bue aussi à cet oiseau l'invention des bis, très-friand aussi des œufs de cro-
clysteres; on raconte que lorsqu'il est codile, mais plus adroit et plus agile
niatade , il s'injecte de l'eau dans l'anus, que l'ichneumon. Les anciens ont
au moyen de son bec et de son cou ait que, pour attaquer un serpent,
<p>i sont fort longs. Les ibis se voient l'ichneumon se roule dans la vase,
en Nubie, où les voyageurs les ont Îju'il la fait sécher au soleil, pour s'en
plusieurs fois observés ; on les trouve aire une espèce de cuirasse, qu'il pré-
salement dans toute l'Afrique. serve son museau en repliant sa queue
Les chauve-souris sont très-abon- autour, et qu'ainsi armé, il se jette
dantes en Êcvpte , il sur les plus grands serpents.
y en a huit genres
distincts; elles habitent l'intérieur des Quant aux grands quadrupèdes , on
temples abandonnés, les tombeaux et trouve aussi en Egypte la célèbre
lesautres édifices ruinés. Les unes hyène d'Orient ; elle y vit dans les lieux
poursuivent leur proie dans les airs les plus reculés, et sur la lisière du dé-
autres la saisissent sur les arbres. sert ; les terrains déchirés lui servent
Oile qu'on appelle la roussette n'a aussi d'asile. Elle inspire peu de ter-
presque pas de queue , et on a observé reur , et n'attaque que les troupeaux
quna face ressemblait à celledu chien
; ou les animaux isolés. Le schaM
prouve les roussettes en grand nom- est le loup d'Egypte ; il est également
bre, surtout dans les chambres de la très-rusé , très-hardi , et vit des proies
grande pyramide. On sait que les rous- qu'il se procure par tous les moyens

Digitized by Google
24 L'UNIVERS.
connus. On peut dire qu'en général, de l'Afrique, le cordia mjnca, Tac
les animaux d'Egypte ont moins de lebbeeket le cassia fistula, origîna
férocité qu'en d'autres climats ; le cro- de l'Inde. Dans la Basse- Egypte , f.
codile même y est plus timide. lement inondée, croissent les rosea
L'hippopotame habite les régions deux espèces de nymphaca ou lotus
us méridionales du Nil; il ravage
1)1 enfin le papyrus, autrefois très-<x
es récoltes , mais n'attaque pas mun , aujourd'hui très-rare dans c*
l'homme. On repousse dans le Nil
le contrée, il y a quelques végétaux d.
avec des feux allumés et beaucoup de le désert. On sème dans les terres
bruit. rosées le trèfle et plusieurs aut
Si, à cette nomenclature des ani- plantes de la classe des légumineusc
maux les plus remarquables parmi ceux on cultive le riz , le froment , les fêx
qui se trouvent en Egypte, on voulait l'orge, leblé, la laitue, les lupir
ajouter la liste de ceux qui furent con- la gesse, les pois chiches, les lentil
nus par les anciens Égyptiens , et qui et le blé de Turquie; le pavot, le tat
sont figurés par la peinture ou par la et le chanvre y sont abondants; on r

sculpture dans leurs monuments, il connaît ni le seigle ni l'avoine. ]

faudrait nommer les principaux ani- canne à sucre, le coton et l'indigo


maux de l'Afrique et de l'Asie , des oi- viennent très-bien. Il n'y a en Égyp
seaux , surtout des quadrupèdes. On a que du blé barbu , et on en a rétro u'
trouvé un tomlieau très-antique entiè- flans des tombeaux , où il était dépoi
rement peint de figures d'oiseaux dif- dès la plus haute antiquité.
férents, au nombre de plus décent, De toutes les plantes d'Egypte
et tout autant de quadrupèdes, en par- papyrus , ou byblos , fu\ une des pli
tie étrangers à l'Egypte, entre autres, utiles dans les temps de la prosperit
une espèce de conçoro , l'éléphant, et de cet empire. Il servait de papier dan
un ours brun mené par des bateleurs l'Orient , dans l'empire romain , et 1.

en compagnie d'un singe. On voit France même jusqu'au XI* siècle, h


aussi sur les monuments sculptés, des papyrus, très-rare aujourd'hui, crois
singes de l'intérieur de l'Afrique, des sait dans les lacs et dans les ma
perroquets au plus riche plumage , des rais; il s'élevait a dix pieds de haut
éléphants, et même la girafe, (igurés environ ; sa tige porte au sommet unf
parmi les tributs payés par les peuples chevelure qui n'est d'aucun usage. Poui
vaincus. Il parait également certain faire du papyrus à écrire avec cette
que les anciens rois d'Egypte emme- tige, on retranchait les deux extrémités,
naient avec eux à la guerre un lion on coupait la tige en deux parties éga-
apprivoisé , qui les secondait et les gar- les dans sa longueur, et on séparait
dait dans le combat. On a parlé aussi successivement , avec une pointe , les
en d'autres temps de quelques lions tunigues , au nombre de vingt environ,
apprivoisés; Méhémet- Ali , vice-roi ac- qui forment cette tige, dont le diamè-
tuel d'Egypte, en a un dans son pa- tre est de deux ou trois pouces. La
lais, et assis habituellement auprès de blancheur des tuniques croissait à me-
lui. sure qu'on approchait du centre. Oo
Parmi les végétaux observés en les étendait séparément ; chacune d'el-
Egypte , les uns y sont indigènes , d'au- les formant une feuille , et après di-
tres y arrivent par les vents ou par le verses préparations, on collait deux
Nil. Entre les arbres particuliers à la feuilles l'une sur l'autre, mais plaeéesde
Haute-Égypte, il faut compter le pal- manière que leurs fibres se croisassent;
mier, le doum et le sayal. Vacacia la feuille prenait par-là une suffisante
nilotica est un des arbres qui appar- consistance. On battait , pressait et
tiennent à la Haute et à la Basse- polissait chaque feuille, et avec plu-
Egypte ; d'autres ne viennent que par sieurs, collées à la suite l'une de l'auDre,
la culture , et tels sont le sycomore et on faisait des pièces de papier de tou-
le tamarinier, originaires de" l'intérieur tes longueurs. On enduisait ensuite ce

Digitized by Google
EGYPTE.
pqwtfbuile de cèdre, comme très- une production aussi utile. L'in-
f
T^rf a le prëserrerde la corruption. vention des papiers de coton et de
Us possède , écrites sur papyrus d'É- chiffes a fait négliger la culture du
-ffie des chartes de rois de France
, papyrus; on ne le trouve presque plus
^empereurs et de papes; des livres en en Egypte. Du reste , on peut voir au
aw ou en latin qui remontent aux ,
musée égyptien du Louvre et à la Bi-
r r«niers te nips <Je la monarchie fr;in- bliothèque royale de beaux manuscrits
<aise ; mais I antiquité de ces monu- sur papyrus a Egypte et de toutes les
aents écrits ne peut entrer en consi- époques.
dération à côté des papyrus égyptiens Pour compléter ce qui vient d'être
4*rooverts en Égypte , dans des jarres ditdans ce paragraphe relativement aux
-iarple, hermétiquement scellées, et productions naturelles de l'Egypte , il
imposées dans les tombeaux. Ces papy- est nécessaire de rappeler avec quel soin
rus sont de toute nature ; il y a des les anciens Égyptiens les étudie rent
rituels ou livres de prières pour les et le fréquent usage qu'ils en firent
morts , des registres de comptabilité dans leurs institutions publiques. Les
de simples lettres , des dossiers de animaux et les végétaux les plus con-
procès, et surtout des contrats passés nus en Egypte furent en effet consa-
entre particuliers pour achats et ven- crés à des divinités diverses, et em-
tes, et autres conventions civiles. ployés comme symboles religieux ou
Quelques-uns de ces contrats en carac- ornements sacrés dans les temples et
tères égyptiens remontent même aux les cérémonies du culte. Le nombre
tfmps antérieurs à Moïse, et n'ont pas des êtres divins était considérable dans
* présent moins de 3500 ans d'anti- la croyance égyptienne ; ils représen-
quité ; ils sont bien conservés , grâces taient individuellement les diverses
a la salubrité des lieux où ils ont été qualités du grand dieu qui les renferme
imposés, et vraisemblablement aussi toutes ; on consacra donc à chacun de
a la bonne préparation de cette espèce ces êtres divins l'animal à qui les
4c papier, dont aucun de nos papiers Égyptiens attribuaient de posséder es-
modernes n'égalera jamais la solidité sentiellement ces mêmes qualités;
et la durée. Les anciens se servirent chaque animal donc un symbole
était
de plusieurs sortes de papyrus ; le plus religieux , et employé comme tel
il est
fin et le plus beau était le papyrus dans les représentations nombreuses
roftt/, et papyrus augustus sous les 2ui nous restent du culte égyptien,
Romains; venait ensuite le papyrus l'est pour cela qu'il nous est parvenu
hiératique, servant aux écritures et un si grand nombre de figures, en tou-
aux livres qui intéressaient la religion ; tes manières, représentant les mêmes
on l'appela plus tard livius, pour flatter animaux, tels que le bélier, le scha-
Livie, la femme d'Auguste. Ces déno- kal , le chat, le singe, le crocodile,
minations varièrent dans la suite, quand Tépervier, l'ibis, le taureau, le sca-
on fabriqua du papyrus à Rome et en raoée, le boeuf, le vautour, diverses es-
d'autres villes de l'ancien monde, là où pèces de serpents , quelques insectes
la nature du sol favorisait la végétation et quelques arbres, arbustes et plantes.
de cette plante aquatique.L'Egypte en Pour faire comprendre les motifs du
cultiva cependant plus que toute autre choix de chacun de ces symboles,
contrée. Saint Jérôme dit que, de son nous citerons quelques exemples des
temps , l'usage du papyrus était géné- idées qui guidèrent ces prêtres et
rai aussi on avait grevé cette
; pro- philosophes de l'Égypte. Ils consacrè-
duction et cette industrie d'impôts rent le cynocéphale (espèce de singe)
tellement considérables, que Cassio- a la lune , parce que le cynocéphale,
dore ,par une épître bien con-
félicita nourri dans les temples , était privé
nue , le genre humain tout entier sur de la vue pendant les conjonctions du
la diminution opérée par Théodoric soleil avec la lune; Tépervier était le
dans le tarif de l'impôt existant sur symbole du dieu soleil , parce que cet

Digitized by Google
L'UNIVERS.
oiseau avait ta faculté de fixer ses yeux sur un tapis de pourpre ! » Tous
sur cet astre; le scarabée était aussi sanctuaires de l'Egypte renferma
consacré au soleil, parce nue le sca- en effet un animal vivant; ce n*«
rabée a 30 doigts comme le mois so- pas l'animal qu'on adorait, maft
laire a 30 jours ; le vautour était aussi divinité dont il était \e symbole vit
l'emblème de la déesse-mère, parce et consacré. Les exclamations
qu'il n'y avait que des femelles parmi saint Clément sont donc sans ot:
cette espèce d'oiseau ; l'ibis était con- Les Égyptiens pensèrent qu'il é
sacré à la lune, parce que cet oiseau plus digne de leurs dieux, de les a
s'occupe de ses œufs pendant la durée rer dans des symboles animés I de
de la croissance et de la décroissance souffle créateur, que dans de vains
de la lune. L'ibis représentait le grand mulacres de matières inertes ;
Hermès ou Thôth , particulièrement croyaient d'ailleurs que l'intellige
adoré en Égypte , parce que cet oiseau des'animaux les liait de parenté a
marche avec mesure et gravité , que les dieux et les hommes.
son pas était un étalon métrique , et
qu'il avait inventé la science des nom- IX. POPULATION
bres. On disait aussi qu'une espèce de
cynocéphale connaissait la valeur des L'opinion selon laquelle l'ancien
lettres ; il était en conséquence le imputation de l'Egypte appartenait
rbole du dieu Thôth, l'inventeur a race nègre africaine, est une err**
sciences ; on figure, en effet, cet qui a long-temps été adoptée comi
animal tenant dans ses pattes une ta- une vérité. Les voyageurs au Levai
blette d'écrivain. Le bélier fut le sym- depuis la renaissance des lettres , j>
bole delà prééminence, d'Ammon-faa, capables d'apprécier avec exactittn
grand (lieu de l'Egypte, parce que
le w les notions que les monuments de P.
sa pr' m'Ô)a,e f° rce Pst d ans * a De, e
l gypte fournissaient sur cette quostk
téteetqu il est toujours placé en avant importante, ont contribué à propag<
du troupeau pour le conduire. Le cette fausse idée, et les géograpb<
chat, le crocodile, des serpents étaient n'ont guère manqué de la reproduin
aussi des emblèmes d'autres dieux de même de notre temps. I ne grave m
l'Egypte. Chacun de ces animaux torité s'était aussi déclarée pour cetl
était nourri avec beaucoup de soin, opinion, et avait, pour ainsi dire, reii
et selon ses goûts, dans le temple du cette erreur populaire. Tel fut IV
consacré au aîeu dont il était l'em- fet de ce que le célèbre Volney pub/i
blème, soigneusement mis en mo-
et sur les diverses races d'hommes au
mie anrès sa mort. S. Clément d'A- avait observées en Egypte. Il dit dan
lexandrie rapporte que les temples son } orage, qui est* dans toutes le
égyptiens étaient de magnifiques édi- bibliothèques , que les Coptes sont le!
fices, resplendissants d'or, d'argent et descendants des anciens Égyptiens
des pierres précieuses de l'Inde et de mie les ('optes ont le visage Douffi
l'Ethiopie: « Les sanctuaires, ajoute- 1 œil gonflé, le nez écrasé, et la lèvn
t-il,sont ombragés par des voiles tissus grosse "omme les mulâtres; qu'ils res
dur ; mais si vous avancez dans le fond semblent au sphinx des pyramides, le-
du temple et que vous cherchiez la quel est une téte de nègre très-carac-
statue, un employé du temple s'avance térisée , et il en conclut « que les an-
d'un air grave en chantant un hymne « ciens Égyptiens étaient de vrais
en langue égyptienne , et soulève un « nègres de l'espèce de tous les naturels

peu le voile, comme pour vous mon- « d'Afrique. A l'appui de son opi-

trer le dieu; que voyez-vous alors? nion, Volney invoque celle d'Héro-
un chat, un crocodile, un serpent in- dote qui , à propos des habitants de la
digène, ou quelque autre animaldange- Colchide, rappelle que les Égyptiens
reux Le dieu des Égyptiens paraît !...
! avaient la peau noire et les cheveux
C'est une béte sauvage se vautrant , crépus. Mais ces deux qualités physi-

Digitized by Google
ÉGYPTE.
saa m suffisent pas pour caractériser lèvres sont épaisses , sans être ren-
nègre, et la conclusion de versées comme citez les nègres ; les
§fp
Mkv, m
relative à l'origine nègre de dents sont belles, peu avancées; lin,
J3?*nne population égyptienne, est le teint est seulement cuivré : tels sont
entament forcée et inadmissible. les Abyssins observés par M. Larrey,
Les fets observés la contredisent très- et qui sont plus généralement connus
diimttmnt. sous le nom de Berbers ou Barabras ,
h* est, en effet, reconnu aujourd'hui, habitants actuels de la Nubie. M. Cail-
«3» les habitants de l'Afrique appar- Uaud, qui les a vus dans leur pays,
tiennent à trois races , dans tous les nous les dépeint comme des hommes
teams très-distinctes Tune de l'autre : laborieux, sobres, d'un tempérament
1* w% Nègres proprement dits,au sec; au-dessus de la Basse-Nubie, ils
«tre et à l'occident ; Y les Ca/res, sont plus robustes , leurs membres
b côte orientale qui ont un angle
**r , mieux proportionnés; leurs cheveux
ixiM moins obtus que celui des nè- sont à demi crépus, courts et boucles,
gres, et le nez élevé, mais les lèvres ou bien tressés comme les anciens
^paisses et les cheveux crépus; 3* les Egyptiens et habituellement huilés ;
Maures, semblables par la taille, la les Berbers sont, au Kaire , ce que les
phjriononiie et les cheveux , aux na- Suisses sont à Paris ; leur fidélité les
*v-os les mieux constituées de l'Europe fait employer dans les charges de con-
et de r Asie occidentale , et n'en diffé- fiance. Voila , selon les meilleurs obser-
rant que par la couleur de la peau qui vateurs, le type et les descendants de
*§t brume par le climat. C'est à cette l'ancienne race égyptienne; telle est
dernière race qu'appartenait l'ancienne aussi l'opinion de Qiampollion jeune,
population de l'Egypte , c'est-à-dire à qui a étudiéà la fois, sur les lieux, et les
umxblanche. Pour s'en convaincre, anciens et les modernes habitants de
?] suffit d'examiner humai-
les figures l'Egypte. « Les premières tribus qui
nes représentant des Égyptiens sur « peuplèrent l'Éçypte, dit-il, c-'est-à-
te monuments, et surtout le grand « dire la vallée ou Nil, entre la cata-
nombre de momies (jui ont été ouver- « raete de Syène et la mer, vinrent de
tes; couleur près de la peau , qui
à la « l'Abyssinie ou du Sennaar. Les an-
â été noircie par fa chaleur du climat, « ciens Egyptiens appartenaient à une
<* sont les mêmes hommes que ceux « race d'hommes tout-à-fait semblables

de l'Europe et de l'Asie occiaentale; « aux Ken nous Ou Barabras , babi-


les cheveux crépus et lanugineux « tants actuels de la Nubie. On ne re-
sont les véritables caractères de la « trouve , ajoute-t-il , dans les Coptes
race nègre; or, les Égyptiens avaient des « de l'Egypte aucun des traits ca-
chefeux longs et dé la même nature « ractéristiques de l'ancienne popula-
qoe ceux de la race blanche d'occident « tion égyptienne. Les Coptes sont le
Le docteur Larrey
fit de curieuses « résultat du mélange confus de toutes
recherches cette question , en
sur « les nations qui, successivement, ont
Egypte même ; il dépouilla un grand « dominé sur l'Egypte. On a tort de
nombre de momies, en étudia les crâ- vouloir retrouver chez eux les traits
nes, en reconnut les principaux ca- « principaux de la vieille race. » Et ce
ractères , les retrouver dans
chercha à fut après son retour de la Nubie, que
les diverses vivant en É crypte
races Champollion le jeune consigna cette
et y réussit ; les Abyssins lui parurent opinion dans le mémoire historique
les réunir tous, à Pexclusion surtout sur l'Égypte, qu'il écrivit pour le pa-
de la race nègre. L'Abyssin a les yeux cha, et qu'il lui remit à Alexandrie
grands , le regard agréable , l'angle en 1829.
interne en est incliné ; les pommettes Cette opinion est conforme en tout
sont saillantes ; les joues forment avec aux rapports de l'histoire. Diodore de
les angles prononcés de la mâchoire et Sicile nous a conservé une tradition
de laquelle un triangle régulier ; les absolument analogue à cette opinion

Digitized by Google
28 L'UNIVERS.
gui est fondée sur l'observation des phis , offrit aux eaux un large lit de
faits. « Les Éthiopiens, écrit Diodore, sable inculte, etd'une pente régulière; il
affirment que l'Egypte est une de leurs y déposa son limon, et il en sortit l'un
colonies ; le sol lui-même y est amené des plus florissants empires de l'univers.
par le cours et les dépôts du Nil; il y Au-dessous de Mempnis, ses atterris-
a des ressemblances Frappantes entre sements créèrent une seconde contrée,
les usages et les lois des acux pays ; on égale à la surface même de la vallée
y donne aux rois le titre de dieux ; primitive; aucun homme, sans doute,
les funérailles sont l'objet de beaucoup ne fut témoin de cet autre miracle
de soins ; les écritures en usage en opéré par le Nil : mais l'état physique
Ethiopie sont celles mémesde l'Égypte, des lieux et une tradition constante en
et la connaissance des caractères sa- rendent un éclatant témoignage. La
crés, réservée aux prêtres seuls en Basse- Egypte fut ajoutée à la Haute ; la
Egypte , était familière à tous en mer Rouge, par des atterrissements
Ethiopie. Il y avait, dans les deux pays, successifs ,se sépara de la Méditerra-
des collèges de prêtres organisés de la née ; et l'état actuel de cette portion
même manière, et ceux qui étaient de la région du Nil devint des lors
consacrés au service des dieux , prati- un état normal auquel il ne manquait
les mêmes règles de sainteté et que la présence de l'homme.
El reté , étaient également rasés et
és de même ; les rois avaient aussi
Il y descendit de l'Éthiopie avec le
fleuve miraculeux qui forma d'abord
le même costume , et un aspic ornait l'Egypte et qui est encore, après des
leur diadème. Les Éthiopiens ajou- milliers d'années , la cause unique et
taient beaucoup d'autres considéra- nécessaire de son existence et de ses
,

tions pour prouver leur antériorité prospcrités.L'antiquitédes Éthiopiens,


relativement à l'Egypte, et démontrer de leur empire de Méroé, l'antique
que cette contrée est une de leurs civilisation des plateaux d'Axum et de
colonies. » Gondar qui en était issue , et au
L'état physique des lieux témoigne fond de ce tableau pittoresque des
en faveur de cette prétention des conquêtes de l'intelligence humaine,
Éthiopiens. Il est certain qu'à une l'Inde aussi vieille que l'Égypte, sont
époque dont l'ancienneté échappe à dans souvenirs de l'histoire comme
les
tous les calculs raisonnables , le Nil ces nombreux , découverts
fossiles
était arrêté parla montagne granitique dans des régions diverses, et qui ne
à travers laquelle il s'est ouvert , ou témoignent que des catastrophes qui les
bien il lui a été ouvert par un accident bouleversèrent.
quelconque , le passage qui forme au- 11 reste encore en Éthiopie des tra-
jourd'hui la cataracte de Syène. A cette ces manifestes des origines égyptien-
même époque , la mer Rouge était nes. Les Barabras y arrangent leurs
jointe à la Méditerranée; alors il n'y cheveux comme les monuments de
avait pas d'Éeypte. Le Nil gagnait la l'Égypte nous montrent que les simples
Méditerranée a travers le désert Liby- particuliers égyptiens arrangeaient les
que , et une mer de sable , monu- leurs, et de belles perruques antiques,

ment d'un état phvsique antérieur tirées des tombeaux , ne sont pas au-
changé aussi par l'effet des révolutions trement agencées. Ils font encore usage
naturelles , occupait l'étroit espace qui de sandales tissues de feuilles de pal-
s'étend entre les oords de la mer Rouge mier, en tout semblables à celles
à l'est, et les chaînes de montagnes qu'on découvre dans les sépultures
parallèles à l'ouest. Le fleuve trouva égyptiennes. La plupart des animaux
enfin un libre passage dans sa direc- sacrés selon la religion égyptienne
tion vers le nord, et la vallée, de quel- sont étrangers à l'Egypte proprement
ques lieues de largeur, encaissée entre dite , et existent encore dans la Nubie;
les monts Arabiques et les monts Li- tels sont les ibis, blancs ou noirs , que
byques depuis Syène jusqu'à Mem- tous les voyageurs y ont retrouves,

Digitized by Google
*

* a

• • •»

» t »» • •

• * • •

• • •• t

• •

» . » a

• • *

Digitized by Google
I
ÉGYPTE.
teEif habitants du pays, et qui ne dre , de proportions colossales comme
inascnt en Egypte qu avec l'inonda- de très-petites dimensions; ce sont
it ài Nil ; iis" )a quittent quand le toujours les mêmes caractères et la
mrt est rentré dans son lit. On même physionomie. Le teint des Egyp-
pitf sous la té te des momies un tiens était bruni par le climat ; cette
en bois , prenant le contour particularité a été exprimée dans les
h tête, et posant sur un pied de monuments , en donnant à la face des
Ikpies pouces , pour la relever. L'u- figures d'homme une teinte rougeâtre,
fee de ce meuble est inconnu dans et à celle de femme, qui paraît avoir
fevpte moderne ; il est commun en été moins brune , une teinte jaunâtre.
faîne, et M. Cailliaud en a rapporté Ces deux teintes pouvaient assez exac-
tout neufs, comme objets de coin j
m -
tement indiquer la nuance générale du
on- L'ancien gout égyptien , les teint des deux sexes de la population
caractères du style habi- égyptienne. On a ouvert un grand nom-
emplové dans la fabrique bre de momies dans divers pays , et on
fesmeubles de petites proportions, se n'a reconnu, dans l'examen d aucun de
^marquent encore dans les meubles ces nombreux corps égyptiens, de ca-
es objets de parure , armes et autres ractères physiques de la race nègre ; et
des babitants de la Nubie.
Biens! les cependant ces corps sont conservés
Lei coutumes changent bien rare- pour la plupart, en entier; la peau est
ment dans des pays où la population intacte, les cheveux,parfoisartistement
8tt babituellement isolée et vit bien arrangés, sont à leur place et adhè-
?
loin de r influence des idées nouvelles rent à la tête avec une solidité surpre-
*; de la perfection graduelle des arts. nante. On voit sur notre seconde
L'influence réciproque de P Ethiopie et planche deux têtes de momies exacte-
terÉgypte, dans l'antiquité, ne peut ment figurées : l'angle facial très-pro-
donc être contestée; les laits que nous noncé, le nez long et arqué, les che-
menons de citer corroborent les tradi- veux longs et non laineux , éloignent
tions de l'histoire : la population de toute idée d'origine africaine , et sont
l'Egypte v est descendue de l'Ethiopie ici un témoignage de plus en faveur
a*ec k 201: la Haute-Égypte a été, en des traditions historiques que nous
««et , bien plus tôt habitable que la avons d ja rapportées.
fosse, qui tut long-temps inondée, Les Egyptiens connurent très-bien
roême après que le Nil et la mer ne s'y larace nègre, et ils l'ont figurée dans
^«contrèrent plus; une population ve- leurs monuments avec une rare exac-
nue de F Asie n'aurait pu pénétrer dans titude. Notre première planche ne
vallée du Nil qu'à travers ces mers contient que des figures tirées de ces
ces marais, également impratica- mêmes monuments. C'est dans les tom-
bles pour les hommes . à ces époques beaux des rois, à Biban-el-Molouk
près de Thèbes , qu'on retrouve la re-
On voit par la figure d'homme, N° 1 présentation des diverses races d'hom-
de notre première planche comment , mes qui furent connues des Égyptiens.
les Égyptiens se représentaient eux- II faut conclure de l'exactitude de ces re-
inémes sur leurs monuments , et il est présentations, qui remontent au moins
impossible de retrouver sur cette fi- au XV e
siècle avant l'ère chrétienne
gure aucun des traits qui caractérisent qu'à cette époque l'Egypte connaissait
k race nègre. L'angle facial est beau très-bien l'ancien continent, les races
les traits sont réguliers les lèvres
, diverses oui habitaient l'Europe, l'A-
prononcées mais bien jointes , et le frique et r Asie , et les peuples princi-
reste des habitudes du corps tel les qu'on paux de ces deux dernières contrées.
les reconnaît dans les individus de la De longues guerres avaient mis en
race blanche. Cette même figure de contact rÉgypte avec l'intérieur de A- I

régyptien est répétée un million de frique ; aussi distingue-t*on sur les


fois dans des monuments de tout or- monuments égyptiens plusieurs espèces

Digitized by Google
30 L'UNIVERS.
4e nègres, différant entre elles par les des bas-reliefs. J'avais cru d'abord,
traits principaux que les voyageurs d'après les copies de ces bas- reliefs
modernes ont aussi indiqués comme publiées en Angleterre, que ces peu-
des dissemblances , soit a l'égard du ples , de race bien différente, conduits
teint qui fait les nègres noirs ou les par le dieu Horus, tenant le bâton
nègres cuivrés, soit^a l'égard d'autres pastoral , étaient li s nations soumises
formes non moins caractéristiques. au sceptre des Pharaons ; l'étude des
D'autres guerres avaient pousse les légendes m'a fait connaître que ce ta-
Égyptiens en Arabie et contre le grand bleau a une signification plus générale.
empire d'Assvrie ; les Arabes, les As- Il appartient a la 3' heure au jour,

syriens, les Mèdes, doivent donc se celle où le soleil commence à faire sen-
trouver ligures sur les monuments tir toute l'ardeur de ses rayons , et ré-
égvptiens; ils y sont en effet. Les In- chauffe toutes les contrées habitées de
diens y paraissent non moins fréquem- notre hémisphère. On a voulu y repré-
ment , parce que l'Egypte guerroya senter , d'après la légende même , les
avec les Indiens et sur terre et sur mer. habitants de VÈgypte et ceux des
Elle connut aussi les Ioniens, et par con- contrées étrangères. Nous a»ns donc
séquent la race grecque ; on les retrouve, ici sous les yeux l'image des diverses

en effet, dans des peintures de simple races d'hommes connues des Égyp-
ornement , exactement tels que les tiens, et nous apprenons en même
plus anciens vases grecs nous les font temps les grandes divisions géographi-
connaître, avec l'antique chlamvde ques ou ethnographiques établies à
le carquois sur l'épaule, l'arc d'une cette époque reculée.
main et la massue de l'autre, ou bien « Les hommes guidés par le pasteur

la lyre en main , dans des scènes do- des peuples, Uorus , appartiennent à
mestiques. Enfin, la race blunde de quatre familles bien distinctes. Le pre-
l'Europe fut également connue, et fi- mier ( n° 1 de notre planche ), le plus
gurée par les Égyptiens des temps an- voisin du dieu, est de couleur rouge
térieurs a la guerre de Troie , et leur sombre y taille bien proportionnée, phy-
costume n'annonçait pas, pour ces sionomie douce nez légèrement aqui-
,

temps reculés et chez les Européens, de lin , longue chevelure nattée, vêtu de
grands pas dans la carrière de la civi- blanc; les légendes désignent cette
lisation : ils étaient encore couverts espèce sous le nom de Rot-en-ne-rômc,
de peaux avec le poil , et tatoués pour la race des hommes, les hommes par
toute parure. excellence , c'est-à-dire les Égyptiens.
Telle était la science ethnographique ne peut y avoir aucune incertitude
« Il

de l'Egypte , dans les temps primitifs sur la race de celui qui vient après ( n* 2
de l'histoire écrite, et pour une époque denotre planche)-, il appartient à la race
certaine, intermédiaire entre Abraham des nègres, qui sont désignés sous le
et Moïse. Ce sont les tombeaux royaux nom gene raldeNAHASI.
de cette époque qui ont fourni les élé- « Le suivant présente un aspect bien

ments de cette curieuse et importante différent (n° 3 de la planche) peau


:

observation ; ild'en laisser


est juste couleur de chair tirant sur le jaune,
parler celui qui l'a faite, et qui nous ou teint basané, nez fortement aquilin,
en a expliqué toute l'importance pour barbe noire, abondante et terminée en
[histoire. Champollion le jeune ra- pointe , court vêtement de couleurs
conte ainsi ce qu'il a vu : variées ; ceux-ci portent le nom de
« Dans la vallée proprement dite de NAMOU.
Biban-el-Molouk , nous avons admiré, « Enfin le dernier ( n° 6 de la plan-
,

comme tous les voyageurs nui nous che) a la teinte de peau que nous nom-
ont précédés , l'étonnante fraîcneurdes mons couleur de enair, ou peau blan-
peintures et la linesse des sculptures che de la nuance la plus délicate, le
de plusieurs tombeaux. J'y ai fait des- nez droit ou légèrement voussé , les
siner la série de peuples figurée dans yeux bleus barbe blonde ou rousse
, .

Digitized by Google
EGYPTE. 31

Mb haute et très-élancée , vêtu de peuples Mèdes, ou habitants primitifs


reaude bœuf conservant encore son de quelque partie de la Perse, leur
ç>d, véritable sauvage tatoué sur physionomie et costume se retrouvant
Averses parties du corps ; on les en effet, trait pour trait, sur les mo-
uutume TAMHOU. numents dits persrpoiitains (n° 4 de
* Je me hâtai de chercher le tableau la planche). K)n représentait donc Pà-
rorrespondant à celui-ci dans les au- sic par l'un des peuples qui l'habitaient,
1res tombes royales, et, en le retrou- indifféremment. Il en est de même de
vaut enettet dans plusieurs, les varia- nos bons vieux ancêtres les Tamhou
tions que fy observai nie convainqui- (n u 6 de la planché); leur costume est
reot pleinement qu'on a voulu ùgurer quelquefois différent ; leurs têtes sont
ia les habitants des quatre parties plus ou moins chevelues et chargées
Im momie , selon l'ancien système d'ornements diversifiés; leur vêlement
*xvpnèn, savoir: 1° les habitants <ie sauvage varie un peu dans sa forme;
I fcgypte, gui,
à elle seule, formait mais leur teint blanc, leurs yeux et
iœ partie^du monde, d'après le très- leur barbe conservent tout le caractère
a «leste usa ge des vieux peuples; 2° les, d'une race a part. J'ai fait copier et
habitants propres de ÏA/rique, les colorier cette curieuse série ethnogra-
nèçres; 3° les Asiatiques ; 4° enfin phique. Je ne m'attendais certaine-
et fai honte de le dire, puisque no- ment pas, en arrivant a l;iban-el-!\lo-
tre race est la dernière et la plus sau- louk , d'y trouver des sculptures qui
vage de la série ) les Européens qui, pourront servir de vignettes à l'his-
a cesépoques reculées, il faut être luire des habitants primitifs de l'Ku-
juste, oe faisaient pas une trop belle rope, si on a jamais le courage de
ti^ure dans ce monoe. 11 faut entendre l'entreprendre. Leur vue a toutefois
ici tous les peuples de race blonde et à quelque chose de flatteur et de conso-
p^au blanche , habitant non-seulement lant, puisqu'e lle nous lait bien appré-
\Enrope, mais encore Y Asie, leur cier lechemin que nous avons parcouru
point de départ. depuis. » La ligure n° S est celle d'un
« Otte manière de considérer ces Çrec ou Ionien,
tableaux est d'autant plus la véritable L'origine de
la race égyptienne une
que, dans les autres tombes, les mé- foisdéterminée, continuons à l'ohscr-
nws noms génériques reparaissent et ver dans sa migration sur les rives
constamment dans le même ordre. On inférieures du Nil ,
et, s'il est possible,
y trouve aussi les Égyptiens et les voyons comment elle s'établit et se
Africains représentés de la même ma- constitue dans ses nouvelles demeures ;
niera, ce qui ne pouvait être autre- comment de simple colonie, elle s'é-
ment mais les Namou (les Asia-
: lève au rang de première nation du
tiques) et les Tamhou (les races monde, par sa sagesse comme par sa
européennes ) offrent d'importantes constitution sociale.
?t curieuses variantes. L'état delà civilisation de l'Kthiopie,
Au lieu de l'Arabe ou du Juif (n° 3),
- au moment où une colonie en sortit
s» un tom-
simplement vêtu, figuré dans pour aller habiter au nord de la cata-
^u,PAsi> a pour représentants dans racte actuelle de Syène, nous étant
l'autre* tombeaux (ceux de Rhamsès- inconnu , on ne saurait dire avec quel-
Meiamoun, etc.) trois individus tou- que certitude si les Éthiopiens, par-
jure à teint basané , nezaquilin, œil venus en Egypte, eurent a subir les
noir et barbe touffue, mais costumés divers degrés d'épreuves et de progrès
une rare magnificence. Dans l'un, que les philosophes modernes suppo-
sont évidemment des Assyriens : sent inévitables pour des peuples qui se
tair costume,
jusque dans les pluspe- sont formés loin des préceptes et des
^détails, est parfaitement semblable exemples d une civilisation antérieure,
a celui des
personnages gravés sur les voisine ou éloignée. L'idée seule de
cylindres assyriens; dans l'autre, les quitter la terre qui la nourrit, pour

Digitized by Google
L'UNIVERS.
aller en chercher une autre , suppose venue à leur esprit , aucune nécessite
?u*une population a déjà échappé à publique ne l'avait provoquée, et, en-
état de nature, à l'usage unique des tre les particuliers , il ne pouvait y
(nroductions spontanées de la terre, à avoir qu'un commerce d'échange pu-
'état de simple chasseur ou de pécheur rement accidentel et momentané.
qui sait ajouter à l'insuffisance de ces L'empire de quelques règles s'établit
productions. Les premiers habitantsde par l'effet de leur utilité générale; ce
(
'Égypte étaient au moins déjà formés rut le premier germe d'une législation
en tribus nomades, sans demeure fixe nationale, et, après une première idée
il est vrai , et tels que sont encore les d'ordre public, il est très-vraisembla-
Arabes Bédouins; mais l'esprit d'asso- ble que toutes les autres se succédè-
ciation avait déjà pénétre dans ces rent avec rapidité ; que cette popula-
peuplades vagabondes; l'esprit de fa- tion , que d'abord aucun lien commun
mille se manifestait aussi dans toutes n'unissait étroitement , s'aggloméra de
leurs coutumes il y en eut de généra-
: plus en plus , mit ses intérêts en com-
les pour toute la tribu, de particu- mun, et forma enfin, par uqe commu-
lières pour son chef et son protecteur : nauté de vues et d'entreprises une
c'est le commencement d'une organi- nation qui, se donnant ou acceptant
sation régulière , une première idée de bon gré une langue , une forme de
d'intérêts généraux et de justice. La ouvernement , des lois , une religion,
suite des siècles développa ces germes F écriture , les arts utiles et les beaux-
précieux; les familles, en se fixant arts, s'assura par sa sagesse la longue
isolément sur les bords fertiles du Nil, y possession de tous ces avantages , et
implantèrent sans y penser la tribu tout remplit enfin le monde entier d'une
entière; une terre prodigue de biens, durable renommée.
presque sans peine et sans travail, l'y Les commencements de ces grandes
attacha pour jamais; des demeures institutions nous sont inconnus,
permanentes s'élevèrent, leur voisi- comme ceux de la nation même qui
nage en fit des bourgades et des villages ; leur fut redevable de toutes ses pros-
le progrès de cette civilisation, d'abord pérités. L'histoire écrite nous a con-
agricole et dotée ensuite de tout le servé quelques souvenirs dont la fidé-
luxe des arts, en fit enfin des cités lité pourrait être suspectée ; le témoi-
fraudes et puissantes. C'est dans la gnage des monuments encore subsis-
Ïaute-Égypte qu'on jeta les fonde- tants est pour nous d'un autre poids,
ments des premières ; les points les et il ne saurait être légitimement in-
plus anciennement habités furent les firmé ou mis en doute , si l'inter-
territoires de Louqsor et de Karhac à prétation de ces documents si authen-
Thèbes, ensuite ceux où s'élevèrent tiques ne s'écarte pas dans ses ex-
plus tard les villes d'Esné , Efou et pressions des règles de la saine
les autres villes du Saïd au-dessus
, critique historique, et n'en tire que
de Dendera. La population continua des conséquences dont la simplicité
de descendre à mesure qu'elle fut sur- corrobore révidence.
abondante dans les régions supérieu- C'est d'après ces moyens éprouvés
res. Elle s'arrêta d'abord dans l'Egypte que nous allons exposer les notions
moyenne , et s'établit enfin dans la qu'il nous est possible de réunir ici sur
Basse-Égypte , à mesure que l'exhaus- les principales institutions publiques
sement du sol , la végétation et l'éta- de 1 Égypte: les monuments éclaircis
blissement des canaux principaux en au moyen des relations écrites par
desséchèrent le sol , assainirent le cli- les anciens, et les recherches faites
mat et la rendirent habitable. L'agri- par les savants modernes, doivent
culture, gui assurait les produits né- nous servir de guides : nous dirons
cessaires a la subsistance des habitants non pas comment furent les choses
du pays, était leur seule occupation; au commencement de l'empire égyp-
l'idée de commerce n'était pas encore tien, mais comment elles étaient à

Digitized by Google
ÉGYPTE. 33

r époque la plus reculée à laquelle il ne put échapper au désavantage des


dous a été permis de parvenir par les modifications successives auxquelles la
monuments contempora.ns de chaque condamnèrent son inexpérience ou des
siècle dont l'antériorité relative de
, et ambitions heureuses;caron trouve aussi
l'un a l'autre forme une échelle ré- à l'origine des sociétés, des hommes en-
trograde des temps historiques , qui treprenants, plus soucieux d'assurer
peut être remontée avec certitude ae- leur domination que de travailler au
uis le règne d'Auguste, qui réduisit bonheur de leurs semblables. Le des-
F empire égyptien à une préfecture ro- potisme d'un seul , secondé par des
maine , jusqu'au vingt-troisième siècle intérêts qui le firent tout- puissant
avant le reçne de ce prince. Nous fut la première loi que l'Egypte con-
pouvons savoir comment l'Égypte était nut. Faut-il conclure de ce lait , dont
alors : de riches et nombreuses popu- toute l'antiquité rend témoignage, que
lations se- partageaient l'Asie , et celle le caractère de la population égyptienne
de l'Inde n'était inférieure à aucune la portait à souffrir cette servitude
autre; les annales du grand empire et lui appliquer une opinion d'Aristote
d'Assyrie nomment pour ces mêmes et de Platon , d'après laquelle la forme
époques, Belus, Ninuset ensuiteSémi- du gouvernement qui pesa dans les
ramis; les Hébreux nomment aussi premiers temps sur l'Egypte, n'aurait
Abraham à la dixième génération après été que la conséquence de la mollesse
leur déluge, et à plus de trois mille des mœurs et de la pusillanimité des
ans après Adam. Enfin , peu après ces esprits ? On ne saurait répondre avec
mêmes temps, des peuplades encore trop de réserve à une telle question
barbares tombent comme un fléau dé- et il est naturel de penser que la co-
vastateur, des régions hyperboréennes, lonie venue de l'Éthiopie en Egypte,
sur la civilisation égyptienne, détrui- Quelque peu nombreuse qu'elle pdt
sent ses ouvrages et arrêtent sa mar- tre, n'y descendit pas sans un chef,
che pendant trois siècles. Quand le sans se soumettre au mo.ns à la direc-
fléau eut cessé , les débris de l'indus- tion d'un ancien, autorité alors toute-
t ie antérieure furent amassés reli- puissante. L'habitude put donc porter
gieusement, et anciennes institu-
les la population égyptienne à accepter
tions rétables avec la nationalité une forme de gouvernement sur la-
égyptienne, par le courage et le génie quelle on ne l'appela vraisemblablement
des rois égyptiens. On peut donc , par pas à délibérer, et qui ne lui parut pas
ces diversesdonnées historiques et mauvaise, puisque son inexpérience ne
monumentales, savoir ce qu'était l'E- lui en révélait pas de meilleure.
gypte comme nation , bien des siècles Cet état de choses ne fut pas de
avant que les peuples de l'Occident ap- longue durée. Il y eut du despotisme
paraissent dans les annales humaines: au commencement de l'existence sociale
et c'est un phénomène dijmede la plus de chaque nation , et il est vrai de dire
séreuse attention, que l'Egypte pos- que, relativement à leur avancement
sédant à ces époques si reculées toutes intellectuel, ce régime n'avait pas
les institutions civiles, religieuses et tout l\ dieux que ce mot comporte
militaires, indispensables à la prospé- dans l'opinion des sociétés modernes
ritéd'un grand peuple,et toutes les jouis- qui prétendent à la jouissance légale de
sances que le luxe des arts peut ajou- tous les biens que la culture de i esprit
ter à la possession des avantages qu'as- leur a révélés. La théocratie, ou gou-
surent l'autorité des lois civiles et vernement des prêtres, fut le premier
religieuses , la culture des sciences et que les Égyptiens connurent et il faut
;

le sentiment profond de la dignité et encore donner à ce mot prêtres l'ac-


de la destination de l'homme. ception qu'il avait dans ces temns re-
culés, où les ministres delà religion
X. COI VKR \ M£. i: VI .

étaient aussi les ministres de la science,


L'organisation sociale de l'Egypte de sorte qu'ils réunissaient en eux les

f Livraison. (ÉoTïT*.)
3
34 L'UNIVERS.
deux plus nobles missions dont l'homme travaillait, et le fruit de toutes c
puisse être investi , le culte de Dieu peines appartenait au gouvernemci
et celui de l'intelligence. Du reste, en Il en employait une partie à solder I

fait de despotisme (et nous ajoutons ces militaires, qui contenaient le peuj
réflexions pour rassurer les lecteurs dans le devoir, et il disposait du su
trop prompts â s'alarmer sur la con- fil
us à son gré: les deux classes pri >
dition sociale des premiers Égyptiens), égiées maintenaient ainsi la trois ici
il y a du despotisme de tant de façons, dans l'esclavage. Du reste, ces ni«
que les Égyptiens durent en accepter heurs ne frappèrent pas l'Kgv|i
une comme condition nécessaire: il y toute seule; I Inde et la Perse' «
a en effet, dans le gouvernement théo- Orient, les uaules dans l'Occident, ^.
cratique, chance ue despotisme reli- birent aussi le joug théocratique ,
âieux ; dans la monarchie, chance de pour i'Kgypte, ce ne fut même qu'ut
esj'otisme militaire ; dans l'aristo- coutume importée de i'hthiopic CHL
cratie ou olygarcuie, chance de despo- selon Diodorc de Sicile, les prètr«
1

tisme nobiliaire; dans la république, disposaient de la vie nié me des rois.


chance de despotisme populaire : j>ar- Mais les progrès que le temps réali*
tout chance d'oppression. Le bien inévitablement partout, amenèrent a
relatif sera là où ces cliances sont les Egypte un notable changement dai
moindres , et tel est le gouvernement cet" état de choses. La rivalité naqui
monarchique tempéré. C'est donc entre les deux premières classe*: If
une heureuse invention que la cons- militaires se lassèrent d'obéir aveulit-
titution qui répartit l'autorité législa- ment aux prêtres; une révolutioj
tive à trois pouvoirs, système qui ne éclata, un chef militaire se saisit cli
diffère de la république que par l'hé- pouvoir, établit le gouvernement r
rédité du pouvoir executif, combinai- et son hérédité pour sis descendants:
son entrevue par les anciens, mais il changea ainsi et ameli ra, on peut h
plus facile à imaginer, disait Tacite, dire, l'état social de l'Lgypte,et cuiisa t
qu'à réaliser. Toutefois l'obéissance les progrès qu'elle avait faits par k
passive dut être la grande vertu pu- succession des siècles. Ce che! se ijimii-
blique de la nation égyptienne sous le mait Menai' ou Menés: il est inscrit
gouvernement théocratique. L'admi- comme le premier roi dans les listes
nistration était sous la direction du des dynasties égyptiennes de \lan< -
grand -prêtre qui, au nom de Dieu thon, et sur un grand nombre d'édili-
même, transmettait ses ordres dans ces égyptiens encore subsistants, dont
tous les cantons du pays. Le gouver- quelques-uns, classes par leur date
nement des premiers kalifes sur les parmi les plus anciens monuments de
Arabes était aussi une théocratie, mais rÉgypte, corroborent par leur autorité
plus parfaite que celle de la primitive celle qui est propre a ces listes connues
Egypte : ici le gouvernement pouvait et ad jpiées par toute l'antiquité savante.
être sans contradiction injuste, op- Cette grande révolution politique en
presseur et ennemi de tout progrès ; Egypte eut, sur l'état gênerai de la
on ne sait pas s'il se montra ainsi. La nation, une influence dont n uis de-
natura de l'homme, alors que rien ne vons rappeler les principaux effets.
ralentissait l'ardeur de ses passions, Du despotisme sacerdotal qui com-
semble faire craindre : ce que la
le mandait, au nom du ciel, une obéis-
tradition a conservé des formes et sance entière, les Égyptiens passèrent
de l'action de ce gouvernement nous sous l'autorité d'une monarchie ci-
montre ce pouvoir habile à s'établir et vile tempérée, qui les rendit libres,
à se fortifler par les institutions les sages et heureux. Le chef de l'état
plus favorables a ses vues. Ainsi il di- était roi , et son pouvoir passait, dans
visa d'abord la nation égyptienne en l'ordre de pr.mogéniture, à ses en-
trois classes distinctes : les prêtres, les fants mâles, à ses Mlles s'A n'avait
militaires et le peuple; le peuple seul pas de garçons, enlin a ses frères et

Digitized by Google
. » » »

. » • •
-

• m • . •

m « « » • • • •

. *

• « •
* • m »
*

Digitized by Google
Google
« «

« - - » « . * •

. . - * . -> • •

• »

• «

- • -

- * *

Digitized by Google
ÉGYPTE.
a sessœurs si sa descendance directe méliora; les connaît
manquait entièrement : on ne pouvait
utiies à la prospérité publique furent
vouloir plus fermement et
| garantir particulièrement recherchées , encou-
avec plus de certitude
le principe de ragées; l'administration de la cité se
• hérédité de la couronne royale. Cette completta par leur progrès succes-
autorité n'étaitpoint absolue; elle fut sif; elles concoururent au perfection-
tempérée par l'influence et le
concours nement de toutes les institutions ci-
la classe
sacerdotale , qui ne fut viles ce que les nations modernes
:
pas entièrement éloignée du gouver- ont découvert par de longs efforts
nement, quoique réduite cependant
à l'Egypte l'avait découvert aussi, en
son rôle naturel , celui
de diriger l'ad- avait fait les plus utiles applications
ministration des choses sacrées,
d'in- à sa propre félicité; et devenue forte
struire les peuples par
les préceptes et puissante dans tous les arts de la
la morale et la
Je pratique des arts. civilisation, elle s'engagea avec succès
Elle conserva de plus
les magistratures dans de grandes entreprises militaires,
a^ies; mais chez un peuple
éminem- dont l'histoire a conservé quelques
ment religieux, les ministres des dieux souvenirs. Kllefut, par l'effet même de
nient exercer toujours un grand ces on grès, soumise a cette diversité
«mpire sur l'état , sur^la
marche et de fortunes dont toutes les grandes
progrès de la nation qu'ils avaient
J« nations ont dri subir la commune loi,
•ong-temps gouvernée ; et les lots
du et CEgypte n'en lut pas même pré-
P^s ne se dépouillèrent jamais de servée par cette sagesse profonde dont
jet aspect religieux dont la première
l'antiquité sacrée et l'antiquité pro-
22* «• gouvernement les avait
Profondément empreintes. Le pouvoir
fane lui ont assuré l'honorable renom-
mée, dont nous allons reconnaître
et
nouveau fut contraint de
s'entendre les traces dans un tableau tres-som-
avec le pouvoir déchu, et le sceptre maire de ses institutions publiques.
Q v d admettre encore au partage
»l
de Celles-ci remontent à une si haute an-
» autorité le sceptre
sacerdotal. Thebes, tiquité, qu'il devient impossible d'in-
jwMieu du gouvernement theocra- diquer l'ancienneté relative de chacune
e, devint aussi
le siège du gou- de ces institutions; les historiens tarées
ornement civil; ce|>ëndant Mènes, le l'ignoraient eux-mêmes, ou ne pen-
Panier roi jeta les fondements de
, sèrent peut-être pas a s'en enquérir :
^emphis, qui devint larivale de à leur exemple, nous rappelons les faits
"ïebes, une seconde capitale de l'K- d<»nt les uvenir est conservé dans les
Çpte, et une ville tortillée. Le
(ils de annales qu'ils nous ont transmises, ou
Menés poursuivit l'exécution
des idées dans les monuments nouvellement
de son perc;
et c'est de cette ville nou- interprétés par la critique moderne.
ille que sortit la famille de rois
qui
tonna la troisième dvnastie
de ceux XI. KTAT POLITIQUE DR LA KATIOff.
J Wpte les pyramides
1

J^uret de Sakkara furent


; de Dehs-
construites Rien des recherches ont été faites
j*>ur leur
sépulture, et à cette même pour parvenir a la détermination de
2**iue qui en fait les plus anciens la quantité d'hommes qui existait
monuments du génie de l'homme, dans en
Egypte à l'époque de sa prospérité; on
w monde connu. Voy. planche
( 10.) a lait entrer, comme une donnée im-
<-est sous le gouvernement royal portante dans cette recherche, les im-
T JP I
Kgvpte prit tout San développe- menses travaux exécutés par la nation
nt
*™
intellectuel; elle montra, di- égyptienne, ses vastes édifices sur terre,
anciens , une grande sagacité
les
ses souterrains, plus vastes encore,
g* I étude de la nature et une creusés dans le liane des montagnes.
prande pénétration
dans l'invention {V. planche 12). Aucun peuple ne peut,
°es arts.
Les sciences comme les arts sur ce point, rivaliser avec l'Kgvpte;
Perfectionnèrent, leur culture s'a- il est juste , toutefois , de faire

3.

Digitized by Google
36 L'UNIVERS.
Suer que le temps est aussi une autre terrier ou cadastre authentique qui
onnée non moins importante dans la servait à rendre ces impôts plus équi-
recherche proposée. Les grands mo- tables. Les produits servaient à l'en-
numents construits en Egypte, comme tretien de la famille royale , des prêtres
les grandes excavations, portent avec et de l'année: c'étaient, si l'on veut,
eux le témoignage écrit de travaux les consommateurs ; les deux autres
successivement exécutés durant de lon- classes seules, les agriculteurs et les
gues années, et même pendant plu- commerçants étaient les producteurs :
sieurs règnes ; et cette succession (Tan- cela est vrai pour l'Egypte, cela est
nées a du produire les ouvrages qu'au- vrai partout ; et partout aussi l'apo-
rait exécutes, en moins de temps, une logue des membres et l'estomac servit
population plus nombreuse , employée à redresser les conclusions trop tôt
simultanément à ces travaux. Quoi qu'il tirées de ce simple rapprochement. On
en soit , celle de l'ancienne Egypte ne affirme aussi, et avec une vraisem-
paraît pas s'être élevée au-dela d'un blance qui a pour elle quelques tradi-
terme moyen entre six et sept mil- tions anciennes , que des assemblées
lions. politiques et solennelles étaient convo-
Après la révolution gui substitua le quées par le roi ou par la loi , soit dans
gouvernement des rois à celui des des circonstances extraordinaires, soit
prêtres, la division en classes diverses pour régulariser le taux et la nature
continua de subsister. Cette division des impots, soit enfin lorsque les chan-
était la base fondamentale de la con- gements de règne , et surtout les chan-
stitution égyptienne , et la royauté en gements de dynastie, les rendaient né-
était le sommet. On peut réduire à cessaires. Chaque nome envoyait un
quatre le nombre réel de ces classes : nombre de députés à l'assemblée gé-
les prêtres, les militaires, les agricul- nérale de ceux de la nation , et c'est
teurs et les commerçants. Les bergers, dans le labyrinthe qu'elle se réu-
ou gardiens de troupeaux, dont parle nissait.
Hérodote, devaient être au service des Cet édiûce célèbre a été vu par Hé-
agriculteurs; les interprètes apparte- rodote ; il subsistait encore au temps
naient à la classe sacerdotale ou a celle de Strabon : il nous semble rappeler
des commerçants , et les marins à l'ar- par sa forme et sa distribution , une
mée : le surplus de la population était des plus importantes institutions po-
esclave. Elle était assez également ré- litiques de I antiquité; et c'est sous ce
pandue sur la surface cultivée de l'E- rapport qu'un vif intérêt doit s'atta-
gypte. La loi attachait les enfants à la chera la description qu'Hérodote donne
profession de leur père , ils ne pou- du labyrinthe , en ces termes :
vaient pas la quitter; et il est vrai- « J'ai vu ce monument, dit-il, que

semblable que la force d'activité de t


'ai trouvé supérieur à sa réputation ;
chaque classe était portée et maintenue e crois même qu'en réunissant tous
au point reconnu nécessaire à l'intérêt es bâtiments construits, tous les ou-
général , à la prospérité de l'état et à vrages exécutés par les Grecs , on
celle des familles : l'histoire dit que resterait encore au-dessous de cet édi-
cette prospérité, fondée sur ces bases, ûce, et pour le travail et pour la dé-
fut d'une longue durée. Le royaume pense, quoique le temple d'Éphèse et
était divisé en préfectures ou nomes, celui de Samos soient justement cé-
et l'administration religieuse , civile et lèbres; les pyramides mêmes étaient
milita re, y était exer ee par des fonc- certainement alors des monuments qui
tionnaires dont la hiérarchie bien ré- surpassaient leur renommée ; chacune
glée assurait la complète exécution des d'eues pouvait être comparée à ce que
lois. Ily en avait pour rétablissement les Grecs ont produit de plus grand ,
des impôts ; ils étaient régulièrement et cependant le labyrinthe l'emporte
répartis , et on ne peut guère douter sur elles. On y voit , dans l'intérieur,
qu'il ait existé dans chaque nome un douze aulœ recouvertes d'un toit, et

Digitized by Google
ÉGTPTE 37

! dont les portes sont opposas alterna- un palais composé d'autres palais ,
it Ércement les unes aux autres. Six de et ce dernier mot donne le sens des
« ces aulœ sont exposées au nord , et aulœ d'Hérodote. Il y avait, ajoute
I six au midi;
elles sont continues et Strabon , autant de ces palais qu'il y
renfermées dans une enceinte formée avait jadis de nomes. C était un ou-
par un mur extérieur; les chambres vrage admirable, puisque chaque cham-
que renferment les bâtiments du laby- bre était couverte par une seule pierre,
rinthe sont toutes doubles , les unes et les cryptes ou couloirs l'étaient
souterraines, les autres élevées sur aussi par des pierres portant , sur toute
ces premières; elles sont au nombre leur longueur, d'un mur à l'autre.
de trois mille, quinze cents à chaque Aussi, en montant sur le haut de l'é-
étage. Nous avons parcouru celles qui d fice, on avait sous les yeux une vaste
sont au-dessus du sol , et nous en laine en pierres. Les dimensions de
parlons d'après ce que nous avons vu ;
r ensemble sont estimées à (i50 pieds
mats pour celles qui sont au-dessous ,
de côté. Enfin, comme complément
nous n'en savons que ce que Ton nous des d nnées relatives a la forme et à
en a dit, les gardiens n'ayant voulu, la destination du labyrinthe, Strabon
pour rien au monde, consentira nous ajoute ce qu'il avait appris, que le
les montrer; elles renferment, disent- nombre des palais égalait celui des
ils, les tombeaux des rois qui ont nomes ou provinces de l'Kgvpte, parce
anciennement fait bâtir le labyrinthe, qu'il était d'usage que les députés
et ceux des crocodiles sacrés ainsi ;
vinssent s'y réunir, chacun envoyant
nous ne pouvons rapporter sur ces ses prêtres et ses prétresses pour faire
chambres que ce que nous avons en- des sacrifices et pour juger les affaires
tendu dire. Quant à celles dp l'étage importantes.
supérieur, nous n'avons rien vu de A ces rapports de l'antiquité grecque
plus grand parmi les ouvrages sortis se I ent directement les notions re-
de la main des hommes : la variété in- cueillies de nos jours sur les grandes
finie des communications et des paie- Pancçyrics égyptiennes, assemblées à
ries rentrant unes dans
les autres,
les la fois politiques et religieuses, prési-
que Ton traverse pour arriver aux dées dYrdinaire par le roi ou l'un des
auke», cause mille surprises à ceux qui princes ses fils, et d nt la célébration
parcourent ces lieux , en passant tantôt est mentionnée sur des monuments
d'une des aulœ dans des chambres qui encore subsistants, comme un des de-
Ves environnnent, tantôt de ces cham- voirs les plus essentiels de la royauté.
bres dans des portiques, ou de ces On conclutdonc de tout ce qui précède,
portiques dans d'autres aulœ. Les qu'il y avait dans l'ancien nome Arsi-
plafonds sont partout en pierre, comme noîte, où était le lac Mœris, contrée
les murailles, et ces murailles sont plus connue aujourd'hui sous la déno-
chargées d'une foulede figures sculptées mination $ El-Fayoum , un vaste édi-
en creux ; chacune de ces aulœ est ornée fice formé de la reunion de douze pa-
d'un péristyle exécuté en pierres blan- lais composés d'un très-grand nombre
ches parfaitement assemblées; à l'angle d'appartements ; que cet édifice était
qui termine le labyrinthe, on voit une entièrement construit et couvert en
pyramide de quarante orgyes de haut, pierres asserhblées avec une grande
décorée de grandes fiçures sculptées perfection; que ces palais étaient ados-
en relief : on communique à cette py- sés ou contigus, sans se communiquer;
ramide par un chemin pratiqué sous qu'ils étaient dans une grande enceinte
terre. » formée de murailles et ornée de co-
Voilà ce qu'avu Hérodote du laby- lonnes ; que l'accès de ces palais était
rinthe, et impression que ce vaste
I
très-difficile, à cause de la multitude
édifice produisit sur son esprit. Stra- de galeries et de couloirs se croisant
bon n'en parle pas en termes moins dans tous les sens, qui y conduisaient ;
clogieux ; il dit que le labyrinthe est et que , privé du secours d'un conduc-

Digitized by Google
38 L'UNIVERS.
teur, un étranger s'y égarait infailli- leurs mouvements, et les classes , c
blement. L'ensemble de ce monument lescorporations, et les individus. L>
frappa d'étonnement et d'admiration sacerdoce tout entier se retrouvait dan
tous les Grecs qui le \jrent, et ils dé- ces occasions mémorables ; et ces réu
claraient que tous les monuments de nions du corps sacerdotal étaienteom m
la Grèce reunis n'égalaient pas celui- de grandes cérémonies religieuses , cm
là. Cet édifice se nommait le Labyrin- l'Egypte tout entière venait s'incline;
the; le nombre des palais fixe à 12 au même instant devant la divinité
fait supposer qu'a l'époque où il fut peut-être était-ce là le lieu du concJa v<
édifié,! Égypte n'était divisée qu'en 12 pour l'élection du grand-prêtre-roi
nomes , nombre qui fut ensuite accru pour l'intronisation et le sacre du nou-
successivement et porté jusqu'à 36. veau roi , quand, après Menés, ce roi
L'époque indiquée par le nom du fon- ne fut plus le grand-prêtre; comme le
dateur, selon Manetbon. appuie cette fut plus tard le granu temple de Phi I i

dernière conjecture; ce fut, d'après cet à Memphis sous les Ptolémées, sans
historien , le roi Labarys qui éleva ce doute a l'imitation des Pharaons, nui
merveilleux palais: ce prince était le abandonnèrent le labyrinthe. Dans les;
Quatrième roi de la douzième dynastie; mêmes circonstances et dans ce même
'après les époques connues de l'his- lieu les grandes mesures d'administ ra-
,

toire des Pharaons, le règne de Labarys tion, les grands intérêts de la guerre
et la fondation du labyrinthe remon- et de la paix, l'examen des ressources
taient à trois mille cinq cents ans publiques, de leur variation et de ses
avant l'ère chrétienne ; et selon les listes causes, leur emploi au développement
du intime Manéthon, Sésostris, à qui des plus utiles établissements publics,
la division en 36 nomes est attribuée, à des entreprises militaires dans les-
est postérieur de dix-neuf cents ans à quelles il pouvait entrer, quoiqu'oftcii-
Labarys. Cet intervalle de temps entre sives, plus de prévisions de sdreté que
ces deux princes aurait donc suffi aux d'esprit de conquête, tous ces grands
progrèsdela civilisation égyptienne, qui intérêts de l'Egypte pouvaient être*
rendirent nécessaire sa division en pro- traitésdans ces assemblées formées de
vinces moins étendues et conséquent* tous les pouvoirs de l'état , le roi , Pé-
ment plus nombreuses. Par une singu- gase et l'armée.
larité digne de remarque, le labyrin- On s'expliquerait ainsi ces limites
the était construit dans une province légales mises à l'exercice de l'auto-
en dehors de la vallée de l'Egypte ; elle rité royale, que l'antiquité mentionne
était centrale pour tous les nômes; elle particulièrement parmi les sages in-
en avait un nombre égal au nord et au stitutions publiques de l'Egypte. — Le
midi , et, des douze palais, six regar- labyrinthe de Cnosse fut construit sur
daient aussi au nord, et les six autres le plan de celui des Égyptiens, mais les
au midi. Sur un des côtés du labyrin- Grecs n'en firent, en l'imitant, qu'une
the, s'élevait la pyramide qui ornait fabuleuse monstruosité, comme de t*w»t
le tombeau de son fondateur. d'autres institutions orientales, qu ils
Si le labyrinthe fut destiné aux as- ne cherchèrent même pas à com-
semblées nationales de l'Ëgypte, à réu- prendre.
nir, dans des occasions solennelles et XII. LOIS
d'un grand intérêt pour l'état, les dé-
putés sacerdotaux, civils et militaires Un assez grand nombre de règles so
des nomes du royaume, il faut conve- ciales sont citées par les écrivains de
nir qu'on ne pouvait imaginer une l'antiquité comme lois de l'ancienne
construction plus dignement et plus Egypte, et à leur suffrage il faut
convenablement appropriée à sa desti- ajouter celui de Hossuet, qui a dit que
nation. 11 était tout-à-fait conçu dans l'Kgypte était la source de toute bonne
l'esprit général des institutions égyp- police. L'examen de ces diverses règles,
tiennes , qui laissaient si peu libres de relativement à 1* Egypte, exigerait, pour

Digitized by Google
,

ÉGYPTE.
^anei-ir à quelque certitude historique relative à îa monnafe, qui ne fut pas in*
" leur réalité , beaucoup de temps et troduite en tfgypte avant l'administra-
nterait de grandes difficultés. Les tion des Perses (525 avant J.-C.y. Ce-
anciens qui en parlent n'ont pendant DicdoredeSicile donne comme
assez distingue les époques de ces une loi égyptienne . celle qui prescri-
, et le* gouvernements différents vait de couper les deux mains à celui
lesquels
celles de ces lois qui qui faisait de la fausse monnaie. La
aèrent réellement, furent rendues, distinction des époques dans les lois
r ne citer qu'un seul exemple de est donc un point essentiel de l'étude
e contusion des temps, il suffira de cette partie des institutions égyp-
rappeler la loi contre les faux mon- tiennes; ne pouvant l'entreprendre
turs, mise par Diodore de Sicile au dans ce résume , nous nous bornerons
ubre des lois générales de l'Egypte, à rappeler ici les principales lois égyp-
côté et au même rang que les* plus tiennes dont l'antiquité a ce iservé le
nennes ; et cependant l'usage des souvenir.
taux monnayés ne commença en Le parjure était puni de mort; le
ypte qu'avec la domination des Per- serment étant admis par la législation
Herodote dit que Darius, fils égyptienne dans beaucoup de circon-
/îtaspe, fut le premier prince qui stances graves, il fallait en assurer
battre de la monnaie de 1 or le plus autant qu'on le pouvait la vérité
et qu'Aryandes, gouverneur de à l'égard de Dieu et des hommes.—
wtepour les Perses, ayant usurpé C'était un devoir pour tous les citoyens
des prorogatives rivales, en fai-
ttfce de prévenir les crimes, d'en poursui-
sant frapper de la nu nnaie d'argent, vre la punition, et celui qui, voyant
Danus ie Ut condamner a mort. L'o- un homme en danger, ne volait pas à
rioo commune est que la monnaie son secours, était assimilé à l'homicide
Darius, ou les dariquvs^ fut la et puni comme tel. —
L'homme devait
première monnaie introduite légale- détendre son semblable contre un as-
ment en Egypte, par la conquête des saillant , le garantir de sa fureur; s'il
Perdes il paraît que jusque-là PÉ-
: prouvait qu'il ne l'avait pas pu , il n'en
Rpte, pour ses relations intérieures, devait pas moins découvrir le coupable
«usait que d'une monnaie de con- et le poursuivre en justice. Il y avait
tention, et pour l'étranger, qu'elle dans cette loi l'idée de l'offense faite
comptait en anneaux d'or ou d'argent par l'effet de chaque crime ou de cha-
d'un poids détermi né ou vér.fié. Les que délit, à la société tout entière,
monuments rendent témoignage de et de l'intérêt qu'il y a pour chaque ci-
w$ peuples vaincus paient
faits : les toyen que ce crime ou ce délit soit
le*
anneaux de métaux ;
tributs en puni : l'exercice du droit de poursuiteau
tons une autre scène nom des lois était donc mis au nombre
, on pèse quel-
ques-uns de ces anneaux pour les don- des dev< irs et déféré à tous les ci-
en échange d'autres objets. Enfin,
u parait qu'il
toyens. —
Ils avaient tous la faculté d'ac-

y avait aussi des masses cuser et de poursuivre; le témoin d'un


d or ayant uné
autre forme que celle crime qui ne remplissait pas ce devoir
de anneau, par exemple, la forme
i
était battu de verges et privé de nour-
«une grenouille d'un veau d'un riture durant trois jours; et l'accusa-
, ,

et q^il était passé en usage teur con vaincu de calomnie subissait


0 estimer te] objet trois au- bœufs, tel la peine réservée à l'accusé, s'il avait
trois veaux
autre entin trois
, tel été déclaré coupable. —
Les Egyptiens
grenouilles,ce qui, pour l'Égyptien, étaient convaincus que la punition des
présentait un poids connu de ce métal.
™ ex2lr'inerii cet
usage de l'Egypte
coupables et la protection des oppri-
més étaient les plus sOrs garants (le la
1** pas être
utile à l'inîerpreta- sécurité individuelle et du bonheur pu-
SJJJf
»°nde certaines traditions homériques, blic : enfin , un coupable qui avait
ous
Rendrons à notre observation échappé a l'accusation durant sa vie

Digitized by Google
40 L'UNIVERS.
ne pouvait se soustraire à celle qui On attribue au roiBocchoris,de lavingt-
l'attendait à l'entrée même du tom- quatrième dvnastie, au huitième siècle
beau : une voix qui l'accusait avec vé- avant l'ère chrétienne^ immédiatement
rité, le faisait priver des honneurs de avant l'invasion des Ethiopiens, diver-
lasépulture. ses h >is relati ves au commerce.L ne dette
1

Cette sévérité fait supposer, et l'his- était nulle, si le débiteur affirmait par
toire ne dit rien de contraire à notre un serment solennel qu'il ne devait rien
conjecture , que les Égyptiens ne con- au créancier qui n'était nanti d'aucun
nurent point cet usage de notre Occi- titre. Dans aucun compte, l'intérêt dû
dent, celui qui admettait les composi- ne pouvait dépasser le capital. Les
tions pour les offenses; ils ne voulurent biens du débiteur étaient engagés pour
ses dettes, mais jamais sa personne :
Eas que le crime piH être effacé par un
raite avec la victime. La rigueur des la loi reconnaissait que la personne

châtiments et la certitude de ne pou- d'un citoyen ne cessait jamais d'appar-


voir s'y soustraire menaçaient sans tenir à l'état, qui ne devait pas en être
cesse les penchants nuisibles à la so- privé, et elle ne voulait pas qu'un par-
ciété. Le guerrier devait réparer par ticulier, par colère ou par avarice,
une action d'éclat une faute de deso- ravît à la cité un membre qui avait en-
béissance ou l'oubli des lois de l'hon- vers elle des devoirs à remplir. Héro-
neur. Les attentats contre les femmes dote attribue à un autre roi du siècle
étaient punis de la mutilation ; la de Bocclions une autre loi relative au
femme infidèle était enlaidie par l'am- commerce ; elle autorisait les Égyp-
putation du nez , son complice était tiens à emprunter en mettant en ecàge
frappé de verges. On arrachait la lan- la momie de leurs pères. Le prêteur

gue a celui qui révélait aux ennemis était en même temps mis en possession
les secrets de l'état; on coupait la du tombeau de la famille de l'emprun-
main à celui qui falsifiait les poids, les teur; c'est à cette condition seulement
mesures, le sceau des princes ou celui qu'il pouvait en effet avoir à sa dispo-
des particuliers , à l'écrivain qui sup- sition les momies données en ga^e
posait des pièces ou qui altérait les ne pouvant certainement pas les dé-
copies qu'il en dél vrait: et, une idée placer du lieu où elles étaient déposées.
domine dans ces dernières lois , celle Celui qui ne paya t pas sa dette, était
d'empêcher que le coupable ne commette privé des honneurs de la sépulture de
deux fois le même crime. Les physio- famille, et en privait aussi ceux de ses
logistes de nos jours diront peut-être entants qui mouraient durant cet en-
que les Égyptiens avaient aussi observé gagement sacré.
et reconnu l'.nOuence des penchants. C'est au roi éthiopien Sabbacon,
La société égyptienne avait connu successeur de Bocchoris, qu'il avait dé-
le parricide, et la loi le punissait par trôné, retenu captif et fait bruïer vi-
les tortures et le bdcher. Les parents vant, qu'on attribue quelques modifi-
qui tuaient un de leurs enfants étaient cations dans les lois criminelles de
obligés de tenir son cadavre embrassé l'Egypte. Hérodote dit que ce Sabba-
pendant trois jours et trois nuits ; la con, si cruel envers Bocchor s, abolit la
loi ne leur infligeait pas la mort, p ;ur peine de mort, et imposa pour châti-
avoir ôté la vie à l'être à qui ils l'a- ment aux coupables qui l'avaient mé-
vaient donnée. L'homicide était aussi ritée, les travaux publics, notamment
puni de mort. Les lois pénales et cri- la construction des digues et l'exhaus-
minelles étaient égales pour l'homme sement du sol des villes par des terras-
et pour la femme ;*les femmes encein- sements.
tes , convaincues d'un crime capital, Parmi les autres lois de l'ancienne
f

n'étaient jugées et condamnées qu'a- Egypte, on d.-it citer encore celle qui
près l'accouchement, afin nue renrtnt, dispensait les fils de nourrir leurs pa-
innocent, fdt soustrait à nnfaiiw* de rents, et qui en faisa t une obligati n
la mère. pour les liiles. La circoncision était

Digitized by Google
ÉGTPTE. 41

, et cette loi n'était qu'une et c'est la même peine qu'on pronon-


prescription d'hygiène publique. Tout çait contre ceux qui étaient reconnus
individu était tenu de donner par écrit coupables de ce dernier crime. Il est
tous les ans au magistrat de la contrée vrai que la loi sur les déclarations est
au habitait, son nom, l'indication
il attribuée par Hérodote au Pharaon
de sa profession et de l'industrie qui Amasis, et l'or gine de cette loi serait
pourvoyait à sa subsistance ; la même des temps modernes de l'histoire de l'E-
toi punissait de mort celui qui ne fai- gypte, du VP siècle avant l'ère chré-
sait point sa déclaration ou ne pouvait tienne ; et à cette époque , que suivit
p>int indiquer ses moyens légitimes de près l'invasion des Perses, les étran-
d'existence. C'est Amasis qui porta gers étaient déjà répandus dans toutes
cette loi , et peut-être ne fut-elle pas les parties du royaume. Cette loi que
,
sans quelque corrélation avec une des Solon transporta à Athènes , et qui
plus singulières lois égyptiennes
,
pour prévenait la mendicité, pouvait, jus-
nos sociétés actuelles du moins, celle qu'à un certain point , diminuer aussi
qui tolérait le vol. Diodore de Sicile le nombre des voleurs, et affaiblir,
en effet, dit que ceux qui voulaient par sa rigueur, l'effet d'une tolé-
suivre la profession de voleur se fai- rance (si la loi primitive existait en-
saient chez le chef reconnu
inscrire core) que les sociétés modernes, fon-
des gens de cette classe , et lui rap- dées sur la propriété, n'ont pas été
portaient tout le fruit de leur indus- tentées d'imiter : du reste , ce ne serait
trie. Ceux qui avaient été volés en qu'après avoir exactement déterminé
frisaient, chez ce même chef, une dé- en quoi consistait le droit de propriété
coration écrite, en
y ajoutant une des- selon la loi de l'Kgvpte, divisée en
cription circonstanciée des objets qu'ils classes investies ou dé privilèges ou de
réclamaient et l'indication du temps
, servitudes , que l'esprit de cette loi
du lieu où ils leur avaient été en- singulière pourrait être justement ap-
levés. Sur ces renseignements , les précié de nos jours.
objets étant reconnus , leur valeur Diodore de Sicile mentionne encore
rtait fixée, en aban-
et le propriétaire plusieurs autres lois égyptiennes, mais
donnait le quart à la société des vo- toujours sans distinguer les temps où
jfurs. Bien des commentaires ont été elles turent en vigueur , et sans s'oc-
faits sur ce
singulier règlement ; et en cuper à discerner l'influence qu'exer-
Omettant sa réalité, il n'y faudrait cèrent sur la législation égvptienne
peut-être voir qu'une de ces transac- l'invasion et les coutumes des Perses
tions de l'ordre social avec les pas- et des Grecs quand ils furent maîtres
sons humaines, comme il s'en voit de l'Kgvpte. C'est à ces mêmes épo-
«nt dans les sociétés modernes. Quel- ques qu il faudra rapporter certaines lois
jws philosophes ont nié un tel acte inconnues à la primitive Egypte. C'est
«ans la législation de l'Kgypte , et se sous les Grecs que le mariage fut per-
sont demandé comment on procédait mis entre le frère et la sœur ; l'histoire
1
voleurs non autorisés , et
rçard des des rois Ptolémées en offre de fré-
î
UX 0*) fêtant fait inscrire, ne quents exemples on n'en trouve au-
m I
rendaient pas un compte fidèle de
:

cun dans les temps antérieurs. La dis-


fcurs rapines.
On oppose aussi , et avec solution du mariage paraît aussi avoir
Pjus de
succès peut-être, cette au- été , durant cette même période , très-
loi
déjà citée, d'après laquelle, facilement autorisée par lès lois. La
JJJJie
année, tout citoyen de FÉ- société conjugale avait ainsi l'apparence
QTte devait faire connaître ses mo- d'une polygamie; et cette circonstance
e
) "s d'existence au gouverneur, de nous expfique pourquoi dans les mo-
la
.
Province qu'il
habitait ; ceux qui numents qui nous restent du temps de
^•'Seaient de faire cette déclaration la domination des Grecs et de ceux
Paient punis
de mort : la loi les pré- des Romains en ftgypte, les filiations
PtPtt vivant d'illégitimes industries, des individus sont plus ordinairement

Digitized by Google
42 L'UNIVERS.
exprimées par les noms de la mère dispositions, et tous les germes d'or-
que par ceux du père. Dans les dre public qu'elle renfermait , êtrr*
temps antérieurs, pour ceux de PÉ- commune à toutes les familles libre*
gypte vivant sous ses propres lois, il des diverses classes de la nation. J\
n'existe aucune trace de pareils usa- serait donc bien téméraire d'aflïrmel
ges. Les monuments historiques ( et encore que la polygamie était auto-
ilssont en très-grand nombre ) n'at- risée. On convient qu'elle était expres-
tribuent à aucun roi plusieurs épouses sément prohibée dans la classe sacer-
à la fois ; on en connaît deux à plu- dotale : on ne saurait prouver que cette
sieurs de ces princes, n tamment à prohibition ne s'appliquait pas égale-
Sésostris, oui vécut et réuna long- ment à toutes les autres. La monoga-
temps; il eut vingt-trois enfants ma* les, mie semble donc avoir été la condition
et cette circonstance donne quelque générale des familles égyptiennes; s'il
(>robabilité à l'opinion d'après laquelle en avait été autrement dans la lettre de
es enfants nés hors de mariage, même la loi, les princes et les prêtres, per-
d'une femme
esclave, étaient, en sonnages les plus influents de Petat,
Kgynte , considérés comme légitimes. devaient, par empire tout-puissant de
I

Ce fut le treizième de ces enfants qui l'exemple donné de si haut , corriger


succéda à Sésostris : ce treizième en- la loi par les mœurs. Du reste, Pétat
fant, dans l'ordre de primogéniture des femmes, que rien ne permet de
était fils de la seconde femme; et l'on supposer placées dans une condition
peut encore conclure de cette autre d'infériorité civile à l'égard des hom-
circonstance, rapprochée du respect mes , est encore une considération
des Kgyptiens pour le droit d'aînesse, puissante à l'appui de cette opinion.
qu'aucun des enfants de la première L'histoire a noté quelques modifi-
femme de Sésostris n'existait plus cations essentielles introduites dans la
quand ce grand prince mourut. Les législation égyptienne , entre autres
droits étaient pleinement réservés aux l'abolition de lapeine de mort par Sab-
enfants de la première femme : le bacon, le chel de la dynastie éthio-
règne du roi flioutmosis III, ou pienne, qui s'établit en'Kgvpte par la
IMrrris , en fournit une nouvelle conquête , environ 700 ans avant J.-C
preuve. Ce roi substitua à cette peine celle des
Le roi Thoutmosis I" mourut, lais- travaux à perpétuité : il disait que la
sant un fils et une fille. Ce fut le fils société trouvait dans le fruit du travail
qui lui succéda selon la loi de l'état du condamné une compensation pour
et il prit le nom de Thoutmosis II; une partie du dommage qu'elle en avait
celui-ci étant mort sans enfants, sa reçu, et que le châtiment, par sa du-
sœur monta sur le trône, se maria, rée n'en était ni moins dur, ni moins
,

eut un fils de ce premier mariage, de- effrayant.


vint veuve, et en contracta un second. Plus anciennement , la législation
Mais ce fut l'enfant du premier lit qui égyptienne avait été détruite de fond
succéda à sa mère sous le nom de en comble; la supériorité des armes ou
Thoutmosis III ou Mœris; le second du nombre avait livré l'Kgvpte à une
mari avait été le tuteur de la minorité peuplade de Barbares; l'histoire les a
du jeune roi; devenu majeur, le roi nommés Pasteurs et ffyAsos. Ils fu-
lit effacer des monuments publics le rent ses maîtres pendant près de trois
nom de ce tuteur, second mari de la siècles, et ce fut d'un de ces chefs
reine, et n'y laissa subsister que celui étrangers que Jcseph, lils de Jacob,
du premier mari, qui était son père. fut le premier ministre. La Bible ra-
Ces faits historiques sont certains conte les faits principaux de son ad-
et remontent au 1S' siècle avant l'ère ministration , et cette narration est
chrétienne; ils nous révèlent la loi féconde en notions intéressantes sur
égypt enne qui réglait l'état des famil- l'état de l'Kgvpte près de deux nulle
les , et qui devait, parla sagesse de ses ans avant l'ère chrétienne. Une famine

Digitized by Google
. fcGYPTEN F«'.vr TE ErnnEiTTb
• • • •
• a

S: • -

Digiti zed by OoogU-


,

ÉGYPTE.
.frappa ce pays; les greniers royaux „ et nous croyons pouvoir nier avec
étaient remplis des Dlés provenant certitude l'existence d'une telle prati-
[du cinquième des récoltes que l'état que en Egypte dès qu'elle forma une
(^relevait sur toutes les terres; celles société régulièrement policée,dès qu'elle
qui appartenaient aux prêtres et aux eut un gouvernement et des lois. Sous
temples en
étaient seules exceptées. pouvons avancer aussi que cette même
.Le peuple de l'Egypte s'adressa au opinion n'a pris quelque consistance
premier ministre Joseph, qui lui lit que dans des temps tres-niodernes
Tendre ses blés en réserve, et tout l'or relativement à l'époque où on suppose
qu'il en retira,
le déposa dans le tré-
il l'usage des sacrifiées humains; et des
sor royal. Lne
nouvelle distribution croyances nouvelles ont pu chercher
debieïut bientôt nécessaire; Joseph a l'accréditer, afin de frapper plus sûre-
demanda en échange les troupeaux que ment lesoroyancesanciennesdunejuste
possédaient les Egyptiens ; tous les réprobation. Selon les écrivains anciens,
chevaux , les brebis, les bœufs, les il n'existe sur ce sujet que des ouï-dire.

Soes lui furent livrés. La famine con- Ainsi Plutarque, ou l'auteur moins an-
cluant Tannée suivante , et le peuple cien encore peut-être, du traité d'Isis
,

s adressant de nouveau à Joseph , lui et d'Osiris , rapporte ( d'après Mané-


disait : >*ous vous avons d< nné notre
<* thon, dit-il) qu'en l\g\pte,à certains
w nos troupeaux, il ne nous reste
et jours, à Eléthya en The aide j aujour-
I

plus que notre corps et nos terres; d'hui Kl-Kab j, on brûlait vifs d es hom-
n us m urrons donc sous vos yeux? mes qu'on appelait typhoniens, et qu'on
.\e\*tez-nous comme esclaves dû roi, jetait leurs cendres au vent. Di< dore
>t achetez aussi dos terres; vous nous de Sicile rapporte aussi comme un ouï-
tonnerez ensuite de la semence nour dire que, anciennement 9 les roisd'K-
«1 cultiver et pour empêcher qu elles gypte sacrifiaient sur le tombeau d'O-
»e se
r
changent en désert. » Joseph siris des hommes de la couleur de Ty-
donna de nouveau du blé et acheta phon , c'est-à-dire roux: et comme il
toutes les terres, que chacun vendait y avait plus d'étrangers que d'Égyp-
presse par la famine ; il accepta aussi les tiens de cette couleur, c'était les étran-
Personnes, et il leur dit « Vous et vos : gers que cette coutume atteignait plus
terres appartenez tous au Pharaon il ; particulièrement. D'autres écrivains
vous donnera la semence, vous lui livre- postérieurs ont commenté et amplifié
ts le cinquième des récoltes le surplus ; ces dires : un savant moderne était
v ous
restera |>our l'ensemencement et même si vivement frappé d'horreur
T otre nourriture; » et les terres et les pour une telle pratique, et en était si
Personnes sacerdotales furent seules préoccupé, qu'il ne voyait plus dans les
exceptées de cette loi générale qui ré- monuments égyptiens les plus inoffen-
duisit la population égyptienne en ser- sifs, les zodiaques par exemple ( ni. 1 1 ),
vitude, et lit du sol de Egypte la pro-
l que des signes de crimes et d'abomi-
pre, le fief des souverains; et du nation, des coutelas et des victimes.
souverain lui-même un seigneur féodal Mais il n'existe en réalité aucun té-
possédant ses hommes corps et biens, moignage imposant en faveur d'une
€t les attachant tous par une loi com- telleopinion, et des faits d'une certi-
mune au servage et à la glèbe telle fut : tude incontestable la contredisent. Ces
' F-fivpte pendant le reste du règne des faits sont de diverses natures d'abord
:

rois Pasteurs. la sagesse générale de la législation


.C'est ici le lieu d'examiner une opi- égyptienne, si unanimement procla-
nion déjà très-ancienne , qui attribue mée par les philosophes de la Grèce;
au * Kgvptiens un usage ou une loi ensuite, les garanties exprimées dans
dont l'atrocité spéciale ne saurait être les lois égyptiennes en faveur même
conciliée sagesse et l'humanité
avec la f des esclaves, puisque celui qui tuait
jj*
la législation générale de l'antique 'volontairement un homme, libre ou
%pte. Il s'agitdes sacrifices humains, . esclave, était puni de
mort. Hérodote

Digitized by Google
L'UNIVERS.
n'a rien appris en Egypte sur ces sortes etAmasis fut l'avant-dernier roi de la
de sacrifices, et il y a recueilli des vingt-sixième dvnastie ; Amosis régnait
notions tout-à-fait contraires; il traite 1800ans avant Père chrétienne, et Ama-
d'absurdes les Grecs qui racontent
m
sis 1200 ans après lui. La distinction
qu'Hercule étant allé en Egypte, les des époques est donc ici une considé-
habitants voulurent le sacrifier en ration importante , et si de suffisantes
grande pompe, niais qu'arrivé auprès autorités attribuaient à Amosis l'abo-
de l'autel et au moment où les prières lition d'une coutume inhumaine, il

commençaient , Hercule , usant de ses faudrait .en attribuer aussi l'introduc-


forces , massacra tous les assistants. tion en Egypte, à la peuplade barbare
« Ce récit , ajoute Hérodote, prouve et inculte qui envahit cette contrée
clairement que les Grecs n'ont aucune deux mille ans et plus avant l'ère
idée du caractère et des institutions chrétienne, qui répandit suiTÉgypte
des Égyptiens. En effet, on a vu qu'il toutes les calamités d'une invasion
ne leur est permis de sacrifier aucun brutale et destructive de toute police
animal, à l'exception des bœufs, des et de toute civilisation , qui s'appliqua
veaux, des moutons, lorsqu'ils sont enfin à abolir les productions des arts,
purs , et des oies : comment donc au- celles de l'intelligence, la religion et les
raient-ils pu vouloir sacrifier des hom- loix, par l'incendie et la mort. Ce fut
mes? » Rien de plus concluant que ce Amosis qui délivra l'Egypte de ce fléau,
passage contre la supposition des sa- qui rétablit l'ancien ordre de choses,
crifices humains ; Hercule et sa fable le culte national et les lois en Egypte:
n'v sont pour rien, c'est l'opinion s'il eut a abolir les sacrifices humains,

d'îlérodote qui est tout : de son temps c'est que les barbares qu'il chassa les
donc , et malgré les nombreuses infor- y avaient introduits ce n'est donc pas
:

mations qu'il a prises sur l'histoire a la législation, à la sagesse égyptienne


et les mœurs de 1ancienne Égypte, il qu'on doit imputer d'avoir jamais, dès
n'y a pas rencontré le moindre souve- que cette législation exista, autorisé ou
nir relatif à un usage aussi remarqua- prescrit les sacrifices humains. Nous
ble, aussi frappant" pour un observa- ne parlons pas de l'Egypte non civi-
teur du caractère d'Hérodote. On lisée : il n' y avait pas encore d'Écypte
ajoute que ce fut le roi Amasis qui fit alors , et à la période de barbarie
cesser ces sacrifices : or, le roi A masis tous les peuples se sont ressemblés;
vécut cent ans avant le voyage d'Héro- mais aux yeux de la morale , leur igno-
dote en Êgypte ; Hérodote raconte fort rance les'a absous de leurs crimes.
en détail les événements du règne d'A- On n'a pas manqué de chercher dans
masis, il mentionne quelques lois qu'il les monuments égypt ens des traces ou
porta , et il ne parle en aucune manière des preuves d'un usage qui n'exista
de celle par laquelle Amasis aurait pro- point , et on a même cru en avoir
hibé les sacrifices humains : Hérou, te trouvé. Mais c'est donner une expres-
est donc , par ses paroles comme par sion trop directe a des compostions
son silence, une autorité contraire aux évidemment symboliques , et dont l'in-
dire recueillis par Diodore et par Plu- terprétation, 'au surplus, ne dérive
tarque. Il est vrai aussi que d'autres que de plusieurs suppositions absolu-
attribuent la loi contre les sacrifices ment gratuites. On voit souvent sur
humains à un autre roi nommé Amo- les monuments historiques un roi égyp-
sis, et des écrivains inattentifs peuvent tien frappant d'un coup de hache, Je
avoir faitquelque confusion entre deux la main droite, un groupe d'hommes
princes dont les noms sont à peu près de physionomies et de couleurs di-
semblables , mais oui appartiennent à verses", dont il a réuni les cheveux dans
deux époques de l'histoire égyptienne sa main gauche. Voilà, a-t-on dit, une
bien éloignées l'une de l'autre*. Amosis représentation de sacrifice humain , un
ou Ahmos fut en effet le premier roi groupe de prisonniers égorgés en sacri-
de la dix-huitième dynastie égyptienne, fice sur l'autel des dieux de l'Egypte

Digitized by Google
,

ÊGYPTE.
par le roi après sa victoire. Les prison- relatif à l'intronisation , au couronne-

niers, ainsi groupés, ont une physiono- ment et au sacre d'un roi d'Égynte :

mie tellement prononcée dans les bas- on ne trouvera donc là, qu'à lauie de
reliefs peints des temples de l'Egypte, gratuites interprétations, des preuves
qu'on y distingue facilement les peu- authentiques de sacrifices humains en
ples divers qui en ont fourni les types; Egypte. Il ne faut donc plus répéter
un y reconnaît l'Africain, l'Asiatique, une suppositii n traditionnelle, démen-
rindien , l'Arabe, etc.; chaque in- tie par les faits de l'histoire.
dividu est la le symbole de la contrée A ces nd ica t i< ns d verses su r la légis-
i . i

qu'il habita , et ('ensemble du tableau lation égyptienne, générale ou particu-


n'est gue l'expression figurée de la lière, on en pourrait ajouter d'autres ti-
conquête de ces contrées par le roi rées d'auteurs de tous les âges de la litté-
vainqueur. Ce roi n'est pas un sacrifi- rature, qui ont attribué aux Égyptiens
cateur , et le sacrificateur n'était pas dt\s lois et des règlements plus ou moins
capable d'abattre d'un seul coup vingt spéciaux et relatifs a la police intérieure
têtes d'hommes à la fois. des cites, eu aux intérêts généraux de
Lne autre scène, scupltée à Médi- l'état. Mais ici encore la distinction des
net-Habou, à Thèbes, a été aussi l'ob- époques deviendrait de plus en plus
jet (Tune interprétation analogue, mais nécessaire, et nous aurons bientôt
également hasardée c'est une céré- : l'occasion de faire remarquer les inno-
monie religieuse relative à l'intronisa- vations que des puissances nouvelles
tion du Pharaon Rhamsès-Méiamoun. introduisirent dans la législation géné-
Deux autels sont surmontés de deux rale de T Egypte. Arrêtons -nous un
enseignes sacrées; deux prêtres, re- instant aux formes qu'elle adopta pour
connàissables à leur téte rasée, et l'administration de la justice.
mieux encore à leur titre inscr.t à côté La classe des prêtres fournissait les
(feux, sont devant le grand-pont le i juges ; cela devait être : là étaient la
qui préside à la Panégyrie et tient science et l'autorité qui la sanctifiait.
en main le sceptre insigne de ses On ne peut douter que les petits inté-
hautes fonctions : ces deux prêtres se rêts ne trouvassent facilement des
retournent pour prendre se» ordres , juues secondaires dans chaque nome ;
pendant qu'un autre prêtre donne la mais il ne nous est parvenu aucun
liberté à quatre oiseaux qui s'envolent. renseignement sur ce point important
On a voulu voir aussi dans cette se ène des institutions égvptiennes. C'est de
des sacrifices humains, en prenant le Thèbes, de Memplus et d'Héliopolis
sceptre du grand-prêtre pour un glaive, qu'on tirait les personnages revêtus
les deux prêtres pour deux victimes , des magistratures les plus élevées : on
et les oiseaux pour l'emblème des aines a demandé pourquoi ce privilège pour
qui s'échappaient du corps des deux ces trois v illes. La réponse aurait pu
malheureux égorgés par une barbare être facilement trouvée : parce que
superstition. Mais une inscription qui dans ces mêmes villes existaient les
faitprtie de la scène en explique le v é- trois principaux collèges sacerdotaux
,
ritable sujet ; elle nous apprend que le et que c'est là que devaient se trouver
grand-prêtre, président de la Pané- les hommes essentiellement revêtus de
gyrie, dit : Donnez l'essor aux quatre cette rare considération que donnent
oies Amset , Sis , Soumauts et Kebh- le savoir et les vertus, et qui ajoute
sniv; dirigez- vous vers le midi, le tant d'autorité à l'autorité même des
nord, l'occident et l'orient, et dites lois. On fixe à dix le nombre des juges
aux dieux de ces contrées que Horus, tirés de chaque collège sacerdotal.
fils d'Isis et d'Osiris, s'est coiffé de la Selon les mêmes historiens, un tribu-
couronne royale , et que le roi Rham- nal suprême, siégeant à Thèbes, ca-
ses s'est aussi coiffé de la couronne pitale du royaume , était composé de
rovale. Cette scène n'est donc encore ces trente magistrats; nous ne pensons
qu'un tableau symbolique et religieux pas qu'ils fussent pris parmi les prêtres

Digitized by Google
46 L'UN vers;
d'ordres différents. Le caractère émi- collèges différents. Cette idée serait
nemment hiérarchique de toutes les analogue à tant d'autres que réalisa
institutions égyptiennes permet plutôt bien cei tainement la sage expérience
de supposer que les tribunaux de divers de l'Egypte ; mais il n'y a au sujet du
degrés étaient composés de prêtres de livre de Tnsmégiste qu'une relation
divers ordres; les prêtres du premier sur laquelle toutes les traditions pa-
ordre devaient donc aller siéger au raissent s'accorder, (''est qu'il était
grand tribunal de Thèbes. En se for- déposé sur une table placée devant le
mant, il désignait son président, et président , et qu'il était attentive-
d'ordinaire cet honneur était déféré ment consulté par le tribunal. Il sié-
à celui d'entre les magistrats qui était geait en robes blanches , et cette ex-
le plus Agé. Une chaîne d'or passée à pression bien moderne est la traduc-
son cou , et a laquelle était attachée tion des paroles des anciens, qui nous
une image en pierre précieuse de la apprennent que les magistrats égyp-
déesse Saté ( la vérité , ligure assise, tiens étaient revêtus d'une robe blan-
ou debout , d'une déesse caractérisée che de lin. Leur costume ne pouvait
car une |ilume qui surmonte sa tête), être, dans les diverses juridictions, que
était la marque de sa prééminence dans celui qui était particulier à Tordre des
le tribunal. >rétres d'où les juges étaient tires. Les
L'histoire ajoute que le président élu uges étaient entretenus par le roi;
appelait et désignait lui-même , pour a classe sacerdotale avait, il est vrai,
le remplacer comme juge , un autre sa portion des revenus publics et devait
f>rêtre tiré du même
collège d'où il était pourvoir a ses propres dépenses et à
ui-méme sorti. C'est donc à 31 qu'était celles di s temples et du culte public.
fixé le nombre des membres de ce tri- Mais en Egypte aussi la justice éma-
bunal supérieur; et aux soins que le nait du roi ,*ct il défrayait ceux qui la
corps sacerdotal se donnait pour ré- rendaient en son nom :du reste, ils
pandre l'enseignement dans tous les jurai* nt, en acceptant ces fonctions,
nomes, on peut croire que l'Egypte de desobéir au roi, s'il leur ordonnait
ne manqua jamais d'hommes capables une action injuste. Le peuple égyptien
d'occuper ses magistratures de divers vénérait les prêtres magistrats, «parce
degrés. Les hiérogrammates , prêtres qu'il leur était permis de voir le roi
chargés des affaires temporelles des nu. » C'est-à-dire que les juges admis
temples et de l'état, devaient posséder facilement auprès du roi tiraient de ce
l'écriture sacrée, la cosmographie, la privilège une considération qui les rc-
géographie, le système solaire, lunaire Ievait encore aux yeux de la multitude.
et planétaire , chorographio de l'E-
la On a conservé quelques souvenirs
gypte et la topographie du Nil : un de la forme de la procédure devant les
rouleau de papyrus et une palette de tribunaux égyptiens. L'objet de la de-
scribe , garnie "d'encre et de plumes mande était exposé par écrit; l'adver-
de roseau, étaient les insignes qui les saire répondait par le même moyen ;

faisaient reconnaître. On a poussé un la réplique était accordée à tous deux

peu loin , ce nous semble à propos , également par écrit ; les juges consul-
du grand tribunal des trente à Thebes, taient ensuite les livres de ïhoth, qui
les suppositions dans l'explication des décidaient le point en litige, et après
motifs qui tirent préférer ce nombre à qu'ilsavaient prononcé, le président fai-
tout autre; on a dit, en effet, que le sait connaître leur jugement en tour-
code des lois égyptiennes , rédigé par nant la ligure de Sait- ou de la vé-
Thôth Trismégistc, contenait dix li- rité vers celui des deux plaideurs qui
vres; que chaque magistrat était spé- avait gain de cause. Il n y avait donc
cialement adonné à l'étude d'un seul ni avocat , ni plaidoiries devant les
et (jue le tribunal des trente renfer- tribunaux de r£g\pte; ceux qui s'a-
mait ainsi trois magistrats possédant dressaient aux magistrats , le faisaient
à fond le même livre, et tirés de trois par écrit; des hommes de loi ou des

Digitized by Google
ÉGYPTE.
airains instruits rédigeaient sans sitôt lacéré ;~dans certains cas, et les
iWte leurs p lacets ; mais les juges contrats passés entre des Egyptiens
ient à l'influence des paroles et des Grecs étant rédigés dans les
séductions des orateurs ha- • deux langues, c'est le contrat égyp-
à manier les passions humaines. tien qui faisait foi ; le contrat grec seul
Ii résulte de tout ce qui précède était sans effet. La prescription était
b législation égyptienne proté- aussi une loi de l'état; la revendica-
t tous les intérêts sociaux, pu- tion devait être exercée dans le délai
avec discernement et modérâ-
it de deux à trois années ; un héritier
délits et les crimes; la re-
tes paraissant en justice, devait prouver
km ajoutait encore à la sévérité sa filiation; sa prise de possession
lois humaines, en montrant au de l'héritage paternel était soumise à
les ctàtiments que lui ré- l'enregistrement légal sous peine d'a-
part dans une autre vie la justice mende ; de fréquentes amnisties étaient
rme. accordées par les Ptolémees après des
On est obligé d'avouer que les in- troubles dans le royaumes; enfin, il
études qui existent sur l'ensemble parait que ces princes autorisèrent de-
c<>rps des lois égyptiennes se ma- vant les tribunaux, du moins dans les
«stent aussi dans les résultats de causes où des Grecs étaient intéressés,
de leurs variations par l'effet le ministère des avocats et l'usage
invasions des étrangers à main des plaidoyers. V oici le sommaire d'un
pe, de leurs établissements tern- procès juge a Thèbes au mois de décem-
ircs d'abord , et deiinitifs quelques bre de l'an 1 17 avant 1ère chrétienne :
les plus tard. c'est tout a la fois un exemple des plus
Il oe subsiste, en effet, aucune anciens procès entre particuliers, et
Xrxr certaine des modifications ou un exposé des formes de procédure
ks innovations introduites dans les établies en Egypte sous les Ptolémees.
o», les coutumes et l'administration C'est un |iapyrus grec du musée de
le l'Egypte, par les rois d'origine Turin ( publié par M. Payron ) qui
«bipenne qui envahirent la contrée nous fournit ces curieux renseigne-
w VIII* siècle avant l'ère chrétienne, ments.
« s'y maintinrent pendant 44 ans. C'est devant le tribunal de Thèbes ,

ta est un peu plus instruit sur quel- la capitale du royaume, que l'affaire
ues particularités du réaime intro- est portée; il est près dé par Héra-
•H par l'effet dt* la conquête de l'É- clide, l'un des commandants des gar-
Wte par Alexandre-le-Grund , en 332 des-du-corps du roi , préfet du nome
irait J.-C. , et de la possession de de la banlieue et surintendant des
* pays par les rois
grecs ses sueces- contributions du nome : il est donc à
*urs mais , comme on va le voir par
; la fois officier militaire , civil et finan-
"piques exemples, et comme le prou- cier.Avec lui siègent deux autres com-
vent t»us les témoignages de l'his- mandants des gardes, Polémon et lié-
toire, l'ensemble des institutions na- rachde , qui est en même temps gym-
tionales fut respecté par la domina- nasiarque ; Apollonius et Uermogme,
grecque; quelques règles nou- des Amis du roi ( titre de cour);
TellfiS
rendues nécessaires par les
i Pancrate , oflicier de cour du second
[apports intimes des deux peuples ordre, un autre militaire, Paniscus
«autant les mêmes cités, habitant du pays et plusieurs autres.
y furent .

*u!es introduites. Ainsi, il était ré- La date est le 22 du mois d'atnyr de I an


w par une loi que tout contrat qui 34 du règne de Ptolémée E vergeté II.
n fiait pas enregistré sur
un registre Hermias , fils de Ptolémée, l'un des
tenu par un
officier public, était sans commandants de la station militaire
autorité; il en était de même d'un d'Ombos, cite en justice Horus, fils
«outrât passé sans caution; tout acte d'Arsiési, et autres cholcbytes, pour
l, produit en justice, était aus- avoir, durant son absence de Thèbes

Digitized by Google
L'UNIVERS.
occupé une maison qu'il possède dans fournit à la critique quelques données
cette ville (on en donne les contins ). sur diverses solennités publiques, sur
Le plaignant expose comment il a plu- plusieurs magistrats et leurs fonctions,
sieurs fois, depuis quelques années, sur les divers ordres de l'état, et d'au-
niais en vain , demande justice c«.ntre tres circonstances non moins intéres-
les occupants; il énumere les suppli- santes pour l'histoire. A la neuvième
ques qu'il a présentées tantôt à l'un , colonne, le juge résume les moyens
tantôt à l'autre magistral, et il ajoute opposés, et par son jugement , il main-
que , soit par l'adresse de ses adver- tient le eholehyte llorus dans la pos-
saires, soit par les devoirs de sa charge session de la "maison revendiquée par
militaire, il a été empêché jusque-la Hermias : ce fut donc le Grec qui per-
d'en venir à un jugement définitif; il dit son procès.
récapitule ses droits de propriété sur lin autre document non moins cu-
sa maison , et cette récapitulation oc- rieux est également tres-utile pour
cupe deux colonnes et demie du ma- nous faire connaître une partie de l'or-
nuscrit. Ondéjà que ce procès
voit ganisation administrative de l'Kgypte
ressemble beaucoup a ceux des temps sous les Grecs. C'est une supplique
modernes. adressée au même Ptolémée Kver-
Suivent les moyens présentés par gete II, au règne duquel se rap|iorte
Philocles et Dinon, avocats des deux le procès deja mentionné, supplique par
parties plaidantes; ces moyens sont laquelle les prêtres d'Isis a Philœ
exprimés à la troisième personne , et ( V. PL. h et ti.) se plaignent de vexa-

ne contiennent que le résumé des pré- tions sur lesquelles ils s'expriment en
tentions respectives, sans ornements ces termes: « Au roi Ptolémée, a la
oratoires. Chacun des avocats produit reine Cléopàtre sa sœur, a la reine
les titres d'acquisition ou de possession Cleopàlre sa femme, dieux évergetes,
favorables a son client, et d'autres salut. Nous , les prêtres d'Isis, adorée
actes légaux relatifs à la cause, rap- à l'A bâton et à Philœ , déesse très-
porte leurs dates et celles de leurs grande, considérant que les stratèges,
clauses qui sont utiles à fa discussion ; les épistates, les théharques, les greï-
ils concluent ensuite, en se fondant liers royaux , les épistates des corps
sur des textes de diverses lois, soit charges de garder le pays, tous les of-
générales , soit municipales. Philocles, ficiers publics qui viennent a Philœ,
avocat d'Ilermias cherche en même
, les troupes qui les accompagnent, et le
temps à corporation des
avilir la reste de leur suite, nous contraignent
choir hy tes et, invoquant une loi et
, de leur fournir de l'argent , et qu'il ré-
quelques rescrits auxquels ils auraient sulte de tels abus que le peuple est
/ contrevenu en exerçant leur profession appauvri , et que nous courons les ris-
de cholchytc ( qui* avait pour objet ques de n'avoir plus de quoi suffira
une partie de l'embaumement des aux dépenses, réglées par la loi, des
morts) dans le voisinage des temples, ce sacrifices et des libations qui se font
qui était formellement défendu par les pour la conservation de vous et de vos
lois. Dinon recommande au contraire enfants; nous vous supplions, dieux
celte corporation , en expliquant la très-grands, de charger, s il vous plaît,
nature, utilité de ses fonctions, en
I Ixuminius, votre parent et épistolo-
ajoutant qu'elle a une place marquée graphe, d écrire a Lochus, votre pa-
dans certaines cérémonies publiques; rent et stratège de la Thebaïde , de ne
enlin, en citant une loi contraire a la point exercer à notre égard de ces
première. Dinon oppose enlin a ller- vexations , ni de permettre à nul autre
mias l'inobservation des règles con- de le la re; de nous donner à cet eftet
sacrées par la hiérarchie judiciaire; les arrêtés et autorisations d'usage,
il invoque aussi la longue posses- dans lesquelles nous vous prions de
sion de son client, en énumere les an- consigner la permission d'élever une
nées, et à l'occasion de ce procès, il stèie où nous inscrirons lu bienfaisance

Digitized by Google
>

Digitized by Google
• •• •
• • ••
••.
• •• •

• ••
• •
• ••

• • •
•••• ••••
• •• • •

•• ••

• •• •••••

• • •

-- • *

• - r— - • > 4
• '

.V
• • • •
# * • •

• • . •
• ••
• • • . • •

• • • •

• • •
••••
• •
• •• •
• • ••
<
• • • • •

••••

> • •

•••
• • • •

• •

Digitized by Google
EGYPTE. 49

ue vous aurez montrée à notre égard ce dernier point , le protocole des Pto-
11 cette occasion , afin que cette stèle lémées n'a pu encore être égalé dans
onserve éternellement fa mémoire de les cours modernes : les courtisans
a grâce que vous nous aurez accor- pourraient y puiser l'idée de auelques
lée. Cela étant fait, nous serons, innovations heureuses, utiles au moins
ïous et le temple, en ceci comme nous à leurs intérêts. Le roi et la reine
le sommes en d'autres choses, vos étaient qualiûés de dieux; le roi don-
très-obligés. Soyez heureux. » nait à la reine le titre de sœur, leurs
Cette supplique, gravée en grec sur enfants étaient princes. Parmi les per-
un socle en granit, a été découverte sonnages attardes au service du sou-
en Egypte en 1815; la traduction qu'on verain ou du palais, les uns avaient
vient de lire a été publiée par M. Le- le titre de parents du roi , d'autres
tronne en 1823. Il explique en même étaient du nombre des premiers amis,
temps les attributions des divers fonc- d'autres ensuite, des amis seulement;
tionnaires désignés dans l'inscription, il y avait auprès du roi, des troupes d'é-

et il considère le stratège comme le lite appelées gardes-du-corps,et, parmi


commandant civil d'un nome, celui les grands fonctionnaires , on comptait
dont tous les autres ofliciers relevaient; les commandants des gardes, \t grand-
les épistates étaient vraisemblable- veneur, Ycpistolographe, ou secré-
ment des inspecteurs des finances ; les taireducabinet. A veccette profusion de
thébarques, chargés de hautes fonctions titres, les décorations ne pouvaient pas
soit dans Thèbes , soit dans son nome ; être oubliées ; le roi décernait donc à
les grefliers royaux étaient aussi des ses principaux officiers une agrafe ou
agents supérieurs, ils pou vaient exercer un collier d'honneur : ceux qui avaient
leur fonction dans deux provinces à la le titre de parents le recevaient de
fois; les épistates du corps commis droit; les monuments ont conservé
à la garde des frontières égyptiennes les noms de quelques-uns de ces ofli-
vers la Nubie étaient charges de la
, ciers décorés, et ces noms sont tous
comptabilité et de l'administration de d'origine grecque. Les magistratures
ce corps. C'est ainsi qu'un seul monu- de tout ordre étaient , en général
ment authentique fournit instanta- déférées à des Grecs. Quoique les
nément plus de notions certaines que formes de l'administration fussent un
bien de pénibles recherches. Les his- mélange d'anciennes coutumes égyp-
toriens r ceux de la Grèce, n'ont pas tiennes et de coutumes grecques in-
d'ailleurs pris la peine d'indiquer le troduites par la conquête, on trouve
mode d'administration que les rois cependant des Égyptiens admis par les
grecs introduisirent en Egypte. Cette Ptolémées à des emplois publics, ci-
supplique nous l'apprend :* on y voit vils ou militaires; le mélange des
aussi que deux autres fonctionnaires usages des deux nations pouvant
du pays, Numénius et Lochus, sont rendre ce mélange d'employés fort
des parents du roi, c'est-à-dire en por- utile, si même il n'était nécessaire. Une
taient la qualification : celle de parent seule ville fut toute grecque , celle de
ronime celle d'ami , que nous avons Ptolémaïs , fondée par les Ptolémées.
déjà rencontrée , était en effet , à la Son administration municipale fut cal-
cour des Ptolémées , un titre honori- 2uée sur celle même des villes de la
fique commun à tous les fonctionnaires rrèce, Corinthe, Rhodes, etc. Il y
d'un rang déterminé dans la hiérarchie avait un sénat, et un prytane comme
politique. premier magistrat.
On dans les deux textes qui
voit Après les Ptolémées vinrent les Ro-
viennent d'être cités les titres de mains: Jules-César et Antoine accep-
plusieurs fonctionnaires d'ordres dif- tèrent l'affectueuse alliance de Cléo-
férents. De ces titres, les uns dési- pâtre et respectèrent sa couronne.
gnaient des magistratures , les autres Auguste dédaigna cette faveur et lui
étaient purement honorifiques , et, en ravit ses états : elle se donna la mort,
4* Livraison. (Éoyptk.) 4
l'univers:
et le royaume d'Egypte fut inscrit lation romaine avec les populations
dans des provinces romaines:
ki liste grecque , égyptienne , juive arabe, ,

les centurions de César commandèrent, nubienne , était comme l'emblème vi-


l'épée à la main , dans le palais des vant des fortunes si diverses que l'E-
Pharaons. Le nouveau vainqueur in- gypte avait déjà subies. L'influence
troduisit dans la législation égyp- romaine la poussa vers sa décadence;
tienne de nouvelles modifications. Au- elle partagea les destins de l'empire.
guste ajouta , pour ainsi dire, l'Egypte Ainsi la décadence de l'Egypte affai-
a ses domaines, en la déclarant province blie s'accomplit à mesure qu'elle se
impériale. Un préfet en eut l'admi- vit arracher par les vainqueurs étran-
nistration supérieure, mais ce préfet gers ses lois , ses coutumes et sa reli-
ne pouvait être ni sénateur ni patri- gion : elle n'exista plus quand elle eut
cien de marque II fallait à la politi- perdu les primitives institutions dont
que de l'empereur un instrument plus nous avons t/lché de réunir ici quelques-
docile et que. sa main prit briser en un uns des traits les plus remarquables.
instant. L'Ésvpte eut été redoutable,
soumise à l'autorité d'un homme puis- XIII. ÉTAT DE r V FAMILLE ROYALE.
sant par son nom, son crédit ou sa capa-
cité. Auguste, ni ses premiers succes- On peut dire, avec toute vérité, à
seurs ne s'y trompèrent nullement, et l'égard de l'Egypte, que le roi était le
des changements très-fréquents, des premier sujet de la loi , et pour l'ad-
punitions sévères jusqu'à la mort, pour ministration des affaires publiques , et
des fautes légères, avertirent les pré- pour les objets qui dépendent , partout
fets de l'instabilité et des dangers de ailleurs, de sa volonté personnelle. En
leur titre. Pour l'Egypte elle-même, Egypte , la loi voulait pour le roi , et
la succession des préfets ne fut qu'une le roi ne pouvait que selon la loi. Tout

nouvelle dynastie de monarques; le pou- le service du palais était déféré à des

voir d'un seul était la base du nou- personnes tirées des diverses classes ,

veau comme de l'ancien gouverne- et les premiers emplois appartenaient


ment. Auguste respecta tous les autres aux fils des prêtres du premier ordre.
usages civils ou religieux des Égyp- A vingt ans , ils joignaient à l'éduca-
tiens, il les abandonna au temps'; il tion la plus soignée la connaissance et
ordonna toutefois deux choses impor- la pratique des plus utiles préceptes

tantes, et qui révélaient hautement le de la morale et de la justice; leur pré-


secret de ses vues la première, qu'un
: sence continuelle auprès du roi avait
noble égyptien ne pouvait aller à pour but d'empêcher qu'il s'en écartât
Rome, ni être admis dans le sénat; la dans sa conduite et dans l'exercice du
seconde, qu'un sénateur romain ou pouvoir. L'emploi de toutes les heures
un chevalier distingué ne pouvait se de la journée du roi était minutieuse-
rendre en Egypte sans l'agrément de ment réglé par la loi: la première
l'empereur. Le préfet , véritable vice- heure après le lever était donnée à
roi temporaire , donnait ses ordres l'ouverture des dépêches relatives aux
aux gouverneurs des nomes, et plu- affaires publiques. Le roi se rendait
sieurs légions gardaient les frontières ensuite au temple, revêtu d'habits
méridionales et l'intérieur du pays. magnifiques et des signes de l'autorité
L'administration s'occupa de réparer royale; après les cérémonies, le grand-
les désordres des derniers règnes des Firërre tirait du rituel un précepte re-
Ptolémées des temples ruinés furent
: igieux, dont il développait, devant le
rétablis en l'honneur des mêmes divi- roi et l'auditoire, le sens et les appli-
nités égyptiennes. On comprit bien- cations : il y trouvait une occasion
tôt que l'Egypte devait être la nourrice journalière de rappeler au prince les
de Rome ; on tourna tous les soins vers devoirs essentiels de la royauté envers
ce grand but , et il fut atteint avec un Dieu et envers son peuple'. Le reste de
plein succès. Le mélange de la popu- la journée était de même employé se-

Digitized by Google
ÉGTPTE. 51

Ion la prescription de la loi , qui avait tière liberté donnait au peuple


: la loi
réglé I heure du bain , celle des repas, ce privilège. Le prêtre prononçait aussi
la qualité et la quantité des mets et l'éloge du mort, rappelait ses services
du ?in qui devaient y être servis , le et ses vertus, et si les applaudisse-
temps et la durée du repos. La loi con- ments de l'assemblée témoignaient en
duisait ainsi la volonté du monarque : sa faveur, le tribunal des 42 jurés dé-
il
y perdait sans doute un peu de sa cidait et le roi recevait les honneurs
liberté ; il y trouvait aussi un préser- de la le mécontentement et
sépulture;
vatif contre les mauvais conseils et les l'opposition du peuple en ont privé,
mauvaises passions , contre la colère dit-on, quelques princes dont les mau-
l'injustice et les remords qui les suivent. vaises actions reçurent ainsi un châ-
11 est de tradition que les rois de l'E- timent bien mérité. La crainte d'un
gypte furent respectés et chéris. La tel jugement était très -propre à re-
nation , affectionnée à des princes fi- tenir les princes dans les voies de la
dèles aux lois du pays , et occupés sans justice et de la vertu. On voit encore
cesse du bonheur die leurs sujets , mê- en Kjgypte des témoignages assez signi-
laitleurs noms dans toutes ses prières ficatifs d'un tel usage; les noms de
et tous les sacrifices. La prospérité de quelques souverains sont soigneuse-
l'empire égyptien , ses conquêtes en ment effacés des monuments qu'ils
Asie et en Afrique, les vastes monu- firent élever durant leur règne; ils
ments dont les cités étaient ornées , sont martelés avec attention jusque
les grands travaux d'utilité publique dans leurs tombeaux.
entrepris et exécutés au profit de Les sépultures royales existent en
l'agriculture et du commerce , la ferti- assez grand nombre en Egypte : les
lité sans pareille du sol et la variété tomluaux des rois des XVIli', XIX*
de ses productions , la perfection et le et XX' dynasties, originaires de Thè-
luxe même
de son industrie, tout ré- bes , se v. ient encore dans la vallée de
vèle en Égvpte une administration ac- Biban-el-Molouk , qui est «ne dépen-
tive éclairée, patriotique, attentive
, dance de cette ancienne capitale. Voici
à tous les intérêts nationaux, ne pui- la description de ces tombeaux, tels
sant que dans ces intérêts toutes les que Champollion le jeune les a vus au
inspirations de son zèle, et trouvant mois de mai 1829 :

sa plus honorable récompense dans « La vallée de Biban-el-Molouk, an-

ses succès même. De tels bienfaits ne ciennement ttib-an-Ourou y hypogées


font pas des ingrats; ce n'est pas à de des rois , était la nécropole royale,
tels titres que des rois furent honnis et on avait choisi un lieu parfaitement
par les peuples. L'amour et le respect convenable à cette triste destination
des Égyptiens pour leurs souverains une vallée aride , encaissée par de
sont souvent cités comme exemple par très-hauts rochers coupés à pic, ou
l'histoire. A la mort du roi , le peuple par des montagnes en pleine décom-
entier prenait le deuil ; les temples position, offrant presque toutes de
étaient fermés , et les cérémonies in- larges fentes occasionées soit par Pex-
terrompues pendant 72 jours ; des trême chaleur, soit par des éboule-
prières funèbres étaient faites sans in- ments intérieurs et uont les croupes
,

terruption par des personnes des deux sont parsemées de bandes noires,
sexes, la tête couverte de cendres comme si elles eussent été brûlées en
une simple corde pour ceinture, et partie; aucun animal vivant ne fré-
s'abstenant de viande.de raisin, de fro- quente cette vallée de mort je ne :

ment et de vin. Kn attendant , on pré- compte point les mouches, les renards,
parait la momie du roi et son cercueil. les loups et les hyènes, parce que c'est
Le délai expiré on exposait publique-
, notre séjour dans les tombeaux et l'o-
ment la momie royale à l'entrée de deur de notre cuisine qui avaient attiré
son tombeau, et là chacun pouvait ac- ces quatre espèces affamées.
cuser le roi de ses fautes avec une en- « En entrant dans la partie la plus

4.

Jigitized by Google
52 L'UNIVERS.
reculée de cette vallée, par une ouver- des piliers encore plus riches de déco-
ture étroite, évidemment faite de main rations , jusqu'à ce qu'on arrive enfin
d'homme et offrant encore quelques à la salle principale, celle que les Égvp-
légers restes de sculptures égyptiennes, tiens nommaient la salle dorée, plus
on voit bientôt au pied des montagnes, vaste que toutes les autres, et au mi-
ou sur les pentes , des portes carrées lieu de laquelle reposait la momie du
encombrées pour la plupart, et dont roi dans un énorme sarcophage de
il faut approcher pour apercevoir la granit. La vue de ces tombeaux donne
décoration : ces portes, qui se res- seule une idée exacte de l'étendue de
semblent toutes , donnent entrée dans ces excavations et du travail immense
les tombeaux des rois. Chaque tom- qu'elles ont coûté pour les exécuter au
beau a la sienne , car jadis aucun ne pic et au ciseau. Les vallées sont pres-
communiquait avec l'autre ; ils étaient que toutes encombrées de collines for-
tous isolés : ce sont les chercheurs de mées par les de pierre
petits éclats
trésors, anciens ou modernes, qui provenant des effrayants travaux exé-
ont établi quelques communications cutés dans le sein de la montagne.
forcées. Plusieurs mois m'ont à peine suffi
« Il me tardait, en arrivant à Biban- pour rédiger une notice un peu détaillée
el-MoIouk , de m'assurer que ces tom- des innombrables bas-reliefs que ces
beaux, au nombre de 16 (je ne parle tombeaux renferment et pour copier
ici que des tombeaux conservant des les inscriptions les plus intéressantes.
sculptures et les noms des rois pour Je donnerai cependant une idée géné-
qui furent creusés), étaient bien,
ils rale de ces monuments par la descrip-
comme je l'avais déduit d'avance de tion rapide et très-succincte de l'un
plusieurs considérations , ceux de rois d'entre eux, celui du Pharaon Rham-
appartenant tous à des dynasties thé- sès, fils et successeur de Meïamoun.
haines , c'est-à-dire à des princes dont La décoration des tombeaux royaux
la famille était originaire tle Thèbes. était systématisée, et ce que l'on trouve
L'examen rapide que je fis alors de ces dans l'un reparaît dans presque tous
excavations avant de monter à la se- les autres , à quelques exceptions près,
conde cataracte, et le séjour de plu- comme ie le dirai plus bas.
sieurs mois que j'y ai fait à mon re- Le bandeau de la porte d'entrée
«
tour, m'ont pleinement convaincu que est orné d'un bas-relief ( le même sur
ces hypogées ont renfermé les corps toutes les premières portes des tom-
des rois des XVIII e , XIX» et XXe
beaux royaux ) qui n'est au fond que
dynasties, qui sont en elTet toutes la préface ou plutôt le résumé de
trois des dynasties diospolitaines ou toute la décoration des tombes pha-
thébaines. raoniques. C'est un disque jaune au
« On n'a suivi aucun ordre, ni de milieu duquel est le soleil à tète de
dynastie, ni de succession, dans le choix bélier, c'est-à-dire le soleil couchai;!
de l'emplacement des diverses tombes entrant dans l'hémisphère inférieur,
royales : chacun a fait creuser la sienne et adiré par le roi à genoux; à ia
sur le point où il croyait rencontrer droite du uisque, c'est-à-dire à l'oriert,
une veine de pierre convenable à sa est déesse ISephtliys , et à la gauche
la
sépulture et à l'immensité de l'excava- (occident) la déesse Isis occupant les
tion projetée. Il est difficile de se dé- deux extrémités de la course du dieu
fendre d'une certaine surprise lorsque, dans l'hémisphère supérieur : à cote
après avoir passé sous une porte assez du soleil et dans le disque, on a sculpté
simple, on entre dans de grandes ga- un grand scarabée qui est ici , comme
leries ou corridors , couverts de scul- symbole de la régénération
ailleurs, le
ptures parfaitement soiçnées, conser- ou des renaissances successives : le roi
vant en grande partie 1 éclat des plus est agenouillé sur la montagne céleste,
vives couleurs , et conduisant succes- sur laquelle portent aussi les pieds des
sivement à des salles soutenues par deux déesses.

Digitized by Google
ÉGYPTE. 53

« Le
sens général de cette composi- dans tout l'éclat de sa course ( à l'heure
tion se rapporte au roi défunt : pen- de midi), lequel adresse à son repré-
dant sa vie, semblable au soleil dans sentant sur la terre ces paroles conso-
sa course de l'orient à l'occident , le lantes. Voici ce que dit Phré, dieu
roi devait être le vivificateur, l'illu- grand , seigneur du ciel : « Nous t'ac-
minateur de l'Egypte et la source de « cordons une longue série de jours
tous les biens physiques et moraux « pour régner sur le monde et exercer

nécessaires à ses habitants ; le Pharaon « fes attributions royales d'Horus sur


mort fut donc encore naturellement « la terre. » Au plafond de ce premier
comparé au soleil se couchant et des- corridor du tombeau , on lit également
cendant vers le ténébreux hémisphère de magnifiques promesses faites au roi
inférieur qu'il doit parcourir pour re- pour cette vie terrestre, et le détail
naître de nouveau à l'orient et rendre des privilèges qui lui sont réservés
la lumière et la vie au monde supé- dans les régions célestes ; il semble
rieur (celui que nous habitons), de la qu'on ait placé ici ces légendes, comme
même manière que le roi défunt devait pour rendre plus douce la pente tou-
renaître aussi , soit pour continuer ses jours trop rapide qui conduit à la salle
transmigrations , soit pour habiter le du sarcophage.
monde céleste et être absorbé dans « Immédiatement après ce tableau ,
le sein d'Ammon, le père universel. sorte de précaution oratoire assez dé-
« Dans le tableau décrit est toujours licate , on aborde plus franchement la
une légende dont suit la traduction question par un tableau symbolique,
littérale. Voici ce qui dit Osiris , sei- le disque du soleil criocéphale, parti
cneur de l'Amenti ( région occidentale de l'orient , et avançant vers la fron-
habitée par les morts ) : « Je t'ai ac- tière de l'occident, gui est marqué par
« cordé une demeure dans la montagne un crocodile , emblème des ténèbres
• sacrée de l'occident, comme aux et dans lesquelles le dieu et le roi vont
a autrt s dieux grands ( les rois ses pré- entrer chacun à sa manière.
« décesseurs); à toi Osirien, roi sei- « Une petite salle, qui succède or-
« gneur du monde, Rhamsès, etc., dinairement à ce premier corridor,
• encore vivant. » Cette dernière ex- contient les images sculptées et peintes
pression prouverait, s'il en était be- des 75 parèdres du soleil , précédées
soin, que les tombeaux des Pharaons, ou suivies d'un immense tableau dans
ouvrages immenses, et qui exigeaient lequel on voit successivement l'image
un travail fort long , étaient commen- abrégée de 75 zones et de leurs habi-
cés de leur vivant , et que l'un des tants dont il sera parlé plus loin.
Rremiers soins de tout roi égyptien « A ces tableaux généraux et d'en-
jt , conformément à l'esprit* bien semble succède le développement des
connu de cette singulière nation , de détails les parois des corridors et sal-
:

s'occuper incessamment de l'exécution les qui suivent ( presque toujours les


du monument sépulcral qui devait être parois les plus voisines de l'orient) sont
son dernier asile. couvertes d'une longue série de ta-
« C'est ce que démontre encore mieux bleaux représentant la marche du so-
le premier bas-relief qu'on trouve tou- leil dans l'hémisphère supérieur (image

jours à la gauche en entrant dans tous du roi pendant sa vie), et sur les pa-
ces tombeaux. Ce tableau avait évi- rois opposées, on a figuré la marche du
demment pour but de rassurer le roi soleil dans l'hémisphère inférieur(image
vivant sur le fâcheux augure qui sem- du roi après sa mort). Plusieurs au-
blait résulter pour lui du creusement tres salles succèdent à ce corridor;
de sa tombe au moment où il était elles sont également ornées de peintures
plein de vie et de santé : ce tableau et de sculptures. La salle qui précède
montre en effet le Pharaon en costume celle du sarcophage, en çenéral con-
roval, se présentant au dieu Phré à sacrée aux quatre génies de l'amenti
téte d'épervier, c'est-à-dire au soleil contient, dans les tombeaux les plus

Digitized by Google
S4 L'UNIVERS.
complets . la comparution du roi de- suader que ces frêles couleurs ont ré-
vant le tribunal des 42 juges divins qui sisté à plus de trente siècles. Les pa-
doivent décider du sort de son aine, rois de cette vaste salle sont couverres,
tribunal dont ne fut qu'une simple du soubassement au plafond, de ta-
image celui qui, sur la terre, accor- bleaux sculptés et peints comme dans
dait ou refusait aux rois les honneurs le reste du tombeau, et chargées de
de la sépulture. Une paroi entière de milliers d'hiéroglyphes formant les lé-
cette salle, dans le tombeau de Rham- gendes explicatives; le soleil est encore
sès V, offre les images de ces 42 asses- le sujet de ces bas-reliefs, dont un
seurs d'Osiris, mêlées aux justifica- grand nombre contiennent aussi , sous
tions que le roi est censé présenter, ou des formes emblématiques , tout le
faire présenter en son nom, à ces ju- système cosmogonique et les princes
ges sévères, lesquels paraissent être de la physique générale des Egyptiens.
chargés , chacun, de faire la recherche Une longue étude peut seule donner
d'un crime ou péché particulier, et de le sens entier de ces compositions que
le punir dans I ame soumise à leur ju- j'ai toutes copiées moi-même, en tran-
ridiction. Ce grand texte , divisé par scrivant en même temps tous les tes-
conséquent en 42 versets ou colonnes, tes qui les accompagnent. C'est du
n'est, a proprement parler, qu'une con- mysticisme le plus raffiné; mais il y
fession négative , comme on peut en a certainement , sous ces apparences
juger par les exemples qui suivent: emblématiques de vieilles vérités que
,

« O dieu (tel)! le roi , soleil modé- nous croyons très-jeunes.


« rateurdejustice, approuvéd' Ammon, « J'ai omis, dans cette description,
« n'a point commis de méchancetés, n'a aussi rapide que possible, d'un seul des
« point blasphémé, nes'estpointenivré, tombeaux royaux , de parler des bas-
« n'a point été paresseux, n'a point en- reliefs dont sont couverts les piliers
« levé les biens voués aux dieux , n'a qui soutiennent les diverses salles; ce
« point dit de mensonges, n'a point été sont des adorations aux divinités de
« libertin, ne s'est point souillé par des l'Egypte et principalement à celles qui
« impuretés, n'a point secoué la tête président aux destinées des anies,
« en entendant des paroles de vérité, Phtha-Socharis , Atmou , la déesse
« n'a point inutilement allongé ses Réresochar, Osiris et Anubis.
« paroles, n'a pas eu à dévorer son « Tous les autres tombeaux des rois

« cœur ( c'est-à-dire à se repentir de de Thèbes, situés dans la vallée de Ri-


« quelque mauvaise action.) » ban-el-Molouk et dans la vallée de
«

« On voyait enfin , à côté de ce texte l'ouest, sont décorés, soit de la to-


curieux , dans le tombeau de Rhamsès talité, soit seulement d'une partie des
Meïamoun, des images plus curieuses tableaux que je viens d'indiquer, et
encore , celles des péchés capitaux : il selon que ces tombeaux sont plus ou
n'en reste plus que trois de bien con- moins vastes et Surtout plus ou moins
servées, ce sont ta luxure, la paresse achevés. Les uns, en effet, se termi-
et la voracité, figurées sous forme hu- nent à la première salle, changée en
maine , avec les têtes symboliques de rande salle sépulcrale; d'autres ont
bouc, de tortue et de crocodile. 5 eux salleS seulement; quelques-uns 7

«La grande salle du tombeau de enfin ne sont qu'un petit réduit creusé
Rhamsès V, celle qui renfermait le à la hâte, grossièrement peint, et dans
sarcophage , et la dernière de toutes lequel on a déposé le sarcophage du
surpasse aussi les autres en grandeur roi, à peine ébauché. Cela prouve
et en magnificence. Le plafond, creusé avec évidence, qu'à son avènement au
en berceau et d'une tres-belle coupe trône, le premier soin d'un roi était
a conservé toute sa peinture : la fraî- de choisir le lieu de sa sépulture et
cheur en est telle, qu'il faut être ha- d'y fa re travailler jusqu'à sa mort. Si
bitué aux miracles de conservation des elle le surprenait, les travaux cessaient,
monuments de l' Egypte, pour se per- et le tombeau demeurait incom-

Digitized by Google
• . •

• • • •
• • • • • « • •
• «
s
• • • •
. . . . . •

> . •

• . •

. •
»...
• . •

• * . • ••««
....

Digitized by Google
I

jitized by Google
-
» • • •


•• • • •••
• • • •
• •

• • •
• . •
• • • a

. •
* • • t * .
•-.
. . •
- -
0«» «

Digitized by Google
Digitized by Google
• • • •

• • • •
• ••• • • ••
••. •
• • •• •
• ••• • • ••
• • • •

> •



• • •

• • •

• • • •

• • • •
-••
• - - -
* *
• • • • •

Digitized by Google
Digitized by Google
ÉGYPTE.
v^t -On peut donc juger de la durée verses représentations témoignent en
3d recM d'un roi par l'état plus ou même temps de l'avancement des arts
pcuos avancé de l'excavatioiv aestinée en Egypte. Le luxe des tombeaux ne
isa sépulture, l^es tombeaux des prin- cédait en rien à celui des palais ; de
«oqui régnèrent le plus long-temps, grands ouvrages d'art les décoraient;
iussi les plus é'endus et les plus for était prodigué dans la préparation
«^tueusement ornés. On
remarque des momies royales; on en a trouvé
te le tombeau deRhamsès-Meïamoun, dont tous les doigts des mains et des
«peintures dont le sujet n'a rien de pieds, la face et peut-être la tête en-
^i.'.r t.rr et eatrt .mtrrs, les nivaux
. t tière étaient enfermes dans des étuis
k la cuisine , les meubles les plus élé- d'or massif ayant la forme de ces
|*ûU et les plus variés ( voyez plan- diverses parties du corps; des momies
ck2V un ; , arsenal complet où se étaient même entièrement dorées et
voient armes de toute espèce et les
des chargées de bijoux ; nos musées abon-
Çfeeisnes des levions égyptiennes; les dent eif colliers , bagues et autres
torques et les canges royales avec tou- joyaux en or et en pierres précieuses,
te leurs décorations ; enfin, des mu- recueillis dans les tombeaux : ceux des
«liens , notamment des joueurs de rois, qui devaient être les plus riches,
tarpe à 21 cordes. (Voyez planche ont été auss* les plus maltraites. Les
24 >C'est aussi dans la "peinture des vainqueurs des Pharaons trouvèrent
turnbeaux qu'on a recueilli de pré- un riche butin dans leurs sépultures.
cieuses données astronomiques, très- Plusieurs monuments égyptiens
u ri les à Y histoire des sciences et à nous ont transmis les opinions et les
celle des institutions publiques en pratiques de l'Egypte relatives à la
naissance et à l'éducation de ses rois.
Un connaîtra par les sujets figurés Étant assimilés à ses dieux, ils ne
sur nos planches 13, 15 et 16, le* cos- Pouvaient naître et grandir que par
tumes des rois égyptiens dans leurs assistance divine. C'est par suite de
diverses fonctions publiques. Sur la cette croyance, qu'à coté des grands
{tlanchte 13, le Pharaon armé en guerre, temples où une triade était adorée,
la tête casquée, son armure recou- on en construisit un de bien moindre
verte d'une tunique d'étoffe rayée, étendue, qui était l'image de la de-
et portant un riche collier, est assis meure céleste où la déesse, second
sur son char, attelé de deux che- personnage de cette triade , avait en-
vaux richement caparaçonnés , la fanté le jeune enfant qui la complé-
tête ornée de plumes d'autruche et tait, et ce jeune enfant n'était que la
retenus par des soldats. Des ombrel- représentation du roi qui faisait éle-
les préservent la tète du roi de l'ar- ver l'édifice : ce petit temple était
deur du soleil. Dans la planche 16, appelé Mammùi %
lieu de l'accouche-
le roi combat o ntre des Indiens; sa ment; et c'est ainsi que dans celui qui
haute taille est le symbole de la puis- est à coté du grand temple d Kdfou,
sance; il foule aux pieds ses ennemis; la naissance et l'éducation de Ptolé-
un serviteurelève aussi le llabelluin a la mée-Kvergete II sont associées à
hauteurdesa tête; le vautour, emblème celles du jeune Har-Sont-Tho , qui est
de la protection divine, plane au-des- le lils du dieu Har-Hat et de la déesse
sus du roi, et tient dans ses griffes le Halt-llôr, et oui forme avec son
svmbole de la victoire. Au-dessous de père et sa mère la triade adorée dans
scène principale , une file de li-
cette ce grand temple. Dans le mammisi
gures nous montre les divers ordres de d Hcrmonthis, c'est la naissance et
troupes employées par les Égyptiens l'enfance de Cacsarion , fils de Cléo-
et les armes particulières a chaque pàtre et de Jules-César, assimilées à
corps. Le sujet de la planche 15 est celles de Harphré, fils du dieu Mandou
one offrande faite au grand dieu de et de la déesse Ritho, triade adorée
Tbèbes assis sur son trône. Ces di- à Hermonthis. Enfin à Louqsor on

Digitized by Google
56 L'UNIVERS.
voit une suite de scènes relatives à la garde royale; le troisième fils joi-
l'origine du roi Aménophis, fonda- gnait à ces mêmes titres de porte-
teur de ce palais : le dieu Thôth vient éventail et de secrétaire royal , celui
annoncer à 1 épouse de Thouthmosis I V, de commandant en chef dé la cava-
qu'A mn ion lui a accordé un fils; cette lerie, c'est-à-dire des chars. Ces mê-
reine, dont l'état de grossesse est vi- mes qualifications furent aussi don-
siblement exprimé , est conduite par nées a d'autres princes ; elles parais-
Chnouphis et Hathôr ( Vénus ) vers la sent avoir appartenu à toutes les
chambre d'enfantement (le mnmmt'sî) ; générations royales, ainsi que plu-
elle met au monde le roi qui fut Amé- sieurs titres sacerdotaux ou civils,
nophis; des femmes soutiennent la tels que ceux de prophète (classe de
gisante , et des génies divins , rangés prêtres) de divers dieux, de grand-
sous le lit, élèvent l'emblème de la prêtre d'Ammon et de chef suprême
,

vie vers le nouveau-né ; la reine nour- des diverses fonctions civiles. Le roi
rit ensuite le jeune prince; le nour- présidait ainsi , par les membres de
risson est présenté par le dieu Nil aux sa famille, h toutes les branches de
grandes divinités de Thèbes ; Am- l'administration publique; il régnait
mon-Ra caresse le royal enfant en et gouvernait en même temps; c'était,
Kigne de protection , et l'investit de disait-on peut-être, l'unité parfaite du
la royauté; en même temps, les pouvoir monarchique, et un élément
déesses protectrices de la Haute et de de sa durée ; élément impuissant tou-
la Basse-Kgvpte lui offrent la cou- tefois : Alexandre succéda en Egypte
ronne, emblème de sa future domi- à trente-une dvnasties de rois.
nation sur les deux contrées; Thôth Le prince désigné par l'ordre de
it lui-même le prénom royal qu'A-
cl iois primogéniture parvenait au trône
ménophis-Memnon doit à jamais illus- paternel ; c'était la religion qui con-
trer. A ces marques de la protection sacrait son avènement, et l'institu-
divine, qui n'étaient d'ailleurs figurées tion royale lui était donnée par les
sur les monuments que lorsque l'enfant dieux mêmes. On voit dans leRnames^
était devenu roi , on ajoutait tous les séum de Thèbes l'institution de Sé-
soins d une éducation civile, militaire sostris; il est en présence des deu*
et religieuse. On instruisait les jeunes plus grandes divinités de l'Egypte;
princes dans les préceptes et les céré- elles l'investissent des pouvoirs royaux
monies de la religion , dans les let- et lui en remettent les insignes. AflH
tres et les arts ; la tradition attribue mon-Ra , assisté de la déesse Mouth,
à quelques rois la composition d'ou- livre à Sésostris la faux de bataille ,
vrages relatifs à certaines parties des arme redoutable , type primitif de la
m
sciences ; enfin, les exercices gy n asti- harpê des mvthes grecs et en même,

ques complétaient l'éducation physique temps, le fouet et le pédum em- ,

et morale des princes. blèmes de la direction et de la modé-


Des dignités de divers ordres leur ration. Ammon-Haditau roi : « Recois
étaient réservées par la loi de l'état ; la faux de bataille pour contenir les
ils étaient revêtus d'un costume par- nations étrangères , et trancher la
ticulier ; le pédum , et un éventail tête des impurs ; prends le fouet et le
formé d'une longue plume d'autruche pédum, pour diriger la terre de Kémé
attachée à une poiçnée très-élégante, (l'Egypte),.
étaient leurs insignes ostensibles. La reine assistait au sacre du roi
Quant à leurs dignités, le fils aîné de près de lui ; elle figurait aussi à côté
Sesostris avait le titre de porte-éven- du monarque dans d'autres cérémo-
tail à la gauche du roi, secrétaire nies publiques. Les scènes domestiques
royal, commandant en chef de l'ar- fournissent d'autres preuves de l'état
mée ; second fils était aussi porte-
le honorable des femmes en Egypte,
éventail à la gauche du roi et secré- compagnes habituelles de l'homme, ef
taire royal , commandant en chef de partageant avec lui les soins «t l'auto»

)igitized by Google
m « • •

« • - .

• * » t

• « • •

Digitized by Goc
/EGYPTEN. EGYPTE EmnEITllï
v

Digitized by Google
EGYPTE
rite* domestiques ; également protégées aussi durable que le ciel ; le roi aura
par ia loi et l'opinion, et soustraites, une longue suite de jours sur le trône
par leur commun
assentiment, à cette d'Egypte; il dominera sur toutes les
inégalitéde condition , si injustement contrées; Thôth inscrit à son nom
réalisée dans FOrient ancien et mo- toutes les attributions royales du so-
derne. L' Egypte flétrit un tel usage leil; midi et le nord, l'orient et
le
par sa sagesse et son équité; et un l'occident lui sont soumis; son règne
tel fait suffit pour révéler toute la sur le inonde sera joyeux ; on lui livre
supériorité de son état social. La con- les Barbares du midi et ceux du nord
dition sociale des femmes s'améliora à fouler sous ses sandales; toutes les
partout simultanément avec la civili- bonnes portes qui seront devant lui
sation; barbarie seule les lit es-
la seront ouvertes; de grandes victoires
claves. y a deux ou trois siècles
Il lui sont accordées dans toute les par-
on dissertait publiquement en France ties du monde , et son nom s'impri-
sur cette question , si les femmes sont mera profondément dans le cœur des
de la même espèce que les hommes ; Barbares. Les dieux et les déesses
et de graves docteurs ne décidaient prennent soin du salut du roi ; la daine
pas pour l'affirmative. Aujourd'hui du palais céleste lève sa main droite
lu contraire, on se demanderait, avec sur la tëtedu monarque, elle la couvre
plus de raison sans doute, si ces d'un casque en lui disant: « J'ai préparé
graves docteurs étaient des hommes. pour toi le diadème du soleil ; que ce
L'un des premiers devoirs de la casque demeure sur
ta corne (ton
royauté, celui dont l'accomplissement front), où je l'ai placé. »
rtiit le plus agréable aux dieux et aux La reine, les (ils et les filles du roi
hommes, c'était la fondation d'édifices prenaient part à toutes les cérémonies,
religieux , ornés de colosses et d'obé- et leur rang et leur place y étaient as-
lisques voy. pl. 14, entrée du palais
( signés. A la foule des dieux que le roi
de Louqsor), et témoignant a la fois devait honorer, il ajoutait religieuse-
de la piété du prince et de celle de ment ses propres ancêtres ; son père et
la D'innombrables bas-reliefs,
nation. sa mère recevaient les premiers hom-
>'ulptés peints, en étaient la dé-
et mages, et les aïeux, quelquefois en
lation principale; elle avait pour grand nombre, étaient ranges et nom-
objet l'onrande du monument à la més après eux dans l'ordre rétrograde
'riade à laquelle il était destiné. Le des générations ; le roi brûlait l'encens,
roi faisait lui-même cette offrande, disent les inscriptions, en l'honneur
et d'autres dieux recevaient aussi ses des pères de ses pères et des mères de
hommages ; et ils s'en montraient re- ses mères. Cet usage, qui se ratta-
connaissants en dotant, à leur tour, chait à une idée profondement morale*
le roi des dons les plus précieux et et profondément gravée dans l'esprit
te plus utiles. Dans ces offrandes, de la nation égyptienne , le respect des
le Pharaon est habituellement protégé vieillards et le culte des ancêtres , ne
|tfr une autre divinité, qui le conduit fut pas aboli par l'influence des étran-
vers le seigneur des dieux. A Louq- gers conquérants de l'Egypte; et l'un
sor, c'est à Ainmon que Sésostris des petits édifices des environs de
t'onsaera son grand édifice; le dieu Thèbes nous montre Ptolémée Ever-
lui dit : « Mon fils bien-aimé, seigneur gète II accomplissant diverses céré-
du monde, mon cœur se réjouit en monies religieuses en présence de per-
contemplant ta bonne œuvre; tu m'as sonnages dès deux sexes , revêtus des
voué cet édifice , je te fais le don d'une insignes de certaines divinités. Les
vie pure à passer dans la royauté tem- légendes écrites auprès de ces person-
porelle. » Les autres dieux s'associaient nages nous apprennent que ces hon-
a ce premier bienfait , et
y ajoutaient neurs sont décernés aux rois et aux
d'autres grâces non moins précieuses: reines de la famille des Ptolémées
i
édifice que le roi vient d'élever sera ancêtres en ligne directe d'Évergète II.

Digitized by Google
L'UNIVERS.
Le premier bas-relief, à gauche, re- archers de la garde et suivi par les
présente en effet Ptolémée Philadelphe officiers attachés à sa personne. Dès
costumé en Osiris, assis sur un trône que l'ennemi était atteint, on lui li-
à côté duquel se trouve la reine Ar- vrait la bataille; la protection divine
sinoé, femme de Fhiladelphe, coiffée donnait la victoire au roi d'Fsypte,
des insignes des déesses Mouth et qui , aussitôt après , haranguait les
Hathor. Évergète II lève ses bras en chefs de ses troupes qui lui présentaient
signe d'adoration devant les deux époux, les prisonniers de marque faits sur
qualifiés , le divin père de ses pères, l'ennemi, et chaque corps d'armée fai-
Ptolémée ; la divine mère de ses mères sait le dénombrement écrit des mains
Arsinoé. Les mêmes hommages, l'en- droites et autres membres coupés aux
cens et la prière sont adressés par le ennemis morts sur le champ de bataille.
roi vivant a ses autres ancêtres admis Les soldats égyptiens étaient armés
au rang des dieux. de casques , d arcs , de carquois , de
Ces usages des Ptolémées n'étaient haches de bataille et de lances, t rie
qu'une imitation des usages antérieu- partie de l'armée, en ordre de ba-
rement pratiqués sous les Pharaons. taille et composée de fantassins pe-
Sur le Rhamesséum de Thèbes ,
samment armés ou hoplites, marchait
Sésostris célèbre une panégyrie; les la première; les troupes légères étaient
rois ses ancêtres y assistent par leur sur les flancs; les chars de guerre
image, et sont figurés par une suite de formaient la dernière ligne. Le roi
statuettes rangées par ordre de règne ; était au centre. Dans les combats sur
Ménès , le premier roi de PKçypte mer, les troupes, rangées sur le ri-
y occupe lepremier rang; après lui vage , soutenaient et secondaient la ma-
est figuré un autre très-ancien roi; rine; les vaisseaux manœuvraient en
viennent ensuite ceux de la XVIII* même temps à la voile et à l'aviron.
dynastie, représentant les neuf géné- Le roi commandait les troupes de
rations antérieures à Sésostris, et Sé- terre, il était au milieu d'elles a pied;
sostris lui - même. De même, à Mé- son char était avec les bagages. Apres
dinet-Habou , Rhamsès-Meïamoun cé- la vietoire, il poursuivait l'ennemi,
lèbre une cérémonie en présence de hissait les rivières sur des ponts que
f
ses ancêtres; neuf statuettes, rangées es monuments nous montrent tres-
chronologiquement , rappellent leurs distinctement, il s'approchait des villes
noms et leur existence. Ces statues ou et des forteresses, ordonnait l'escalade,
représentations des ancêtres royaux les enlevait et les détruisait ; il écou-
étaient aussi portées sur des bâlda- tait les propositions des envoyés en-
3uins dans les cérémonies religieuses, nemis , dictait les traités et imposait:
ont l'accomplissement était un des les tributs, qui consistaient en mé-
devoirs des rois. taux précieux, en productions rares
Lorsqu'une guerre était entreprise, et utiles, en instruments de guerre, et eu
la protection des dieux était invoquée animaux vivants particuliers aux pays
par des cérémonies publiques, et le subjugués , et qui étaient inconnus en
roi prenait le commandement de l'ar- Kpvpte. Le roi réunissait ensuite au-
mée. Elle entrait en campagne ; les tour de mi
i»ur ue supérieurs tic
chefs sujiérieurs
lui les cneis de
troupes de diverses armes prenaient armée, et leur adressait une alloeu-
l'armée, alloeu
leur ordre de marche , sur huit ou dix ion : « Livrez-vous a la joie, s'écriait-;
tion
hommes de hauteur. Un trompette et il , qu'elle s'élève jusqu'au ciel; les
un corj)s d'hoplites précédaient un char trangers sont renversés par ma force;
étrangers
d'où s élevait un mat, surmonté d'une la terreur de mon nom est venue,
tète de bélier ornée du disque so- leurs cœurs en ont été remplis; je me
laire : c'était le symbole du dieu Am- suis présenté devant eux comme un
mon-Ra guidant l'armée a l'ennemi. lion; je les ai poursuivis, semblable à
Le roi monté sur son char de guerre,
, un epervier; 'ai a
1 anéanti leurs ames
-•rivait le dieu; il était escorté par les criminelles; j ai franchi leurs fleuves;

Digitized by Googl
ÉGYPTE. 59

incendié leurs forteresses; je suis à pied , élevaient autour de la châsse


rÉgvpte ce qu'a été le dieu les flabellum et les éventails ordi-
fou; j ai rainai les Barbares; naires ; de jeunes enfants de la caste
bn-Ra était à ma droite comme à sacerdotale marchaient auprès du roi,
poche; son esprit a inspiré mes portant son sceptre , l'étui de son arc
Jutions ; U a préparé la perte de et ses autres armes et insignes.
ennemis; Amon-Ra, moo père, A la suite du roi venaient les au-
lié le monde entier sous mes tres princes de la famille royale,
et jesuis sur le trône à tou- les hauts fonctionnaires du sacerdoce,
L'ordre de rentrer en Egypte et les principaux chefs militaires ran-
harangue,
lit la gés sur deux lignes. Des militaires
marchait par divisions; le
l'armée portaient les socles et les gradins de la
sur son char, le fouet en main,
w
châsse, et un peloton de soldats fermait
SÉoisait lui-même ses chevaux ri- , la marche; la foule était partout.
ment caparaçonnés ; des groupes Parvenu devant le temple, le roi y
prisonniers enchaînés le précédaient ; entrait à pied , allait faire des liba<-
loffieiersétendaient au-dessus de sa tions sur l'autel et brûler l'encens en
de tarées ombrelles. Il rentrait à l'honneur du dieu. On se rendait en-
dans la ville royale de Thèbrs ; suite à l'entrée du temple, où restait
(colonnes de prisonniers , pris panni le cortège. Des prêtres, portant les
I diverses peuplades vaincues, le statues des rois ancêtres du triom-
paient; il allait d'abord au temple phateur , marchaient les premiers ;
Ddre grâces aux dieux de ses vic- d'autres pontifes les suivaient avec les
res et leur faire hommage des cap- enseignes sacrées, les vases, les tables
de proposition et les ustensiles des
jour solennel du triomphe arrw sacrifices solennels ; un autre pontife
ensuite tous les grands de l'état
: lisait les invocations prescrites par le
aient v assister, réunis au peuple, rituel pour l'instant où la lumière du
I célébrer les victoires du souve- dieu franchir le seuil du temple;
allait
H> et de l'armée. On se rendait en le symbole vivant d'Amon-Ra, un
?ge, du palais du roi, au taureau blanc, suivait immédiatement;
pie d' Amon-Ra. Un corps de mu- un prêtre l'encensait, et le roi, coiffé
«, composé de flûtes, de trom- du simple diadème de la région infé-
w, de tambours et de choristes, rieure , précédait le dieu, dont la
nit la marche ; les parents et les statue était portée par 22 prêtres sur
totliers du roi , des pontifes et des un riche palanquin environné de fla-
Actionnaires publics de divers ordres bellum, d'éventails et de rameaux
pnaient la première partie du cor- fleuris.
Venait ensuite, seul, le fils aîné Quand dieu était rentré dans le
le
i ou l'héritier présomptif de la sanctuaire, roi, coiffé du nschent,
le
brillant de l'encens devant symbole de son autorité sur les deux
vainqueur: celui-ci était porté dans régions de l'Egypte, allait lui rendre
i naos, ou châsse richement déco- de nouvelles actions de grâce , précédé
[*i par douze chefs militaires, dont de la musique, des cœurs religieux
* «te était ornée de plumes d'au- et du corps sacerdotal, et accompagné»
™iie. Le monarque , décoré de toutes de tous les officiers de sa maison; il
j*
marques de son autorité supérieure, coupait, avec une faucille d'or, une
assis dans la châsse, suruntnme gerbe de blé, dont il faisait Potïrande;
f ?ant
que couvraient de leurs ailes
, u reprenait le casque militaire, et re-
* J^ges d'or de la Justice et de la tournait au palais avec tout le cor-
; un sphinx symbole de la sa- tège. La reine assistait à toutes les
,
ik
^eunie à la force, et un lion, em- cérémonies.
du courage, étaient figurés de- Le palais, qui n'était pas séparé
grés du troue. Des officiers t d'un des principaux temples , était

I
Digitized by Google
60 L'UNIVERS.
composé de plusieurs corps de logis comme le faisaient, 1,50(
de cours et de pavillons, de grands ans après, les nains appartenant ad
et de petits appartements. Les façades barons féodaux de notre Europe. Da
principales étaient percées de belles compagnies de musiciens, de danseun
fenêtres, décorées avec beaucoup de et de danseuses , étaient aussi admi-
goût; l'édifice • entièrement construit ses dans le palais du roi , pour
en pierres, s'élevait de trois étages: varier les divertissements. Enfin ,
au premier, les fenêtres étaient ornées fêtes religieuses et des panégy
de balcons; des Barbares , en état de étaient fréquemment célébrées d
prisonniers, sculptés en saillie, for- le palais, d'après les indications j*>
maient les consoles qui supportaient la situes du rituel : la loi avait prévu
plate-forme. L'intérieur des, apparte- à la fois les plaisirs et les devoirs du
ments était orné de scènes domes- monarque.
tiques sculptées en relief sur les pa- C'est des monuments encore sub-
rois des murs; la peinture ajoutait à sistants en Egypte que sont tirées ces
l'effet de ces compositions. notions variées sur l'état et la con-
C'était là une véritable babitation dition des familles royales. L'étude
de famille; le roi y vivait familiè- plus approfondie de ces mêmes mo-
rement avec sa femme et ses enfants; numents étendra et complétera ces
ils jouaient en sa présence, même mêmes notions sur la vie intérieure;
avec lui , et la majesté royale s'ef- et toutes les productions des arts n>
façait sous les inspirations de la l'Egypte en rendront témoignage pour
tendresse paternelle. Le roi dînait toutes les époques de son histoire,
en famille ou seul ; il était servi tant ces usages étaient empreints dans
par les dames du palais. Au luxe et les mœurs publiques , tant les pres-
a l'élégance du mobilier, à la somp- criptions des lois étaient respectées
tuosité de l'babitation , on mêlait et affermies par leur religieuse ob-
habituellement les plus gracieuses pro- servation. Le système général des in-
ductions de la nature; des vases de stitutions publiques était tellement
fleurs ornaient les salons , des guir- lié dans ses diverses parties, telle-
landes de verdure se mariaient à ment implanté dans le sol et l'esprit
de riches décorations. Des jardins, du pays, que les influences diverses
ornés de pièces d'eau et de berceaux que la conquête y introduisit ne pu-
de vignes ou d'arbustes, d'arbres ra- rent rien contre lés vieilles habitudes
res et de larges allées , étaient des de la nation, et qu'elle fut dans la né-
dépendances des palais et des gran- cessité de les respecter. Aussi peut-on
des habitations. Le jeu des échecs dire que les monuments du temps
ou un jeu très-analogue, composé des Ptolémées expliquent avec certi-
d'une taule et de pièces nombreuses, tude les temps des Pharaons ; que h
de deux couleurs différentes et mo- relation des cérémonies célébrées pour
biles, était au nombre des distrac- le couronnement de ces rois grecs,
tions que le roi prenait dans son pa- s'appliquerait très - convenablement ,

lais les reines


;
y jouaient aussi. Quand en changeant les noms, aux rois des
le roi sortait, s'il ne montait pas sur anciennes dynasties. Le rituel égyp-
son char, il était porté dans un pa- tien n'avait pas cessé d'être eu ri-
lanquin, ou dans une voiture qui con- gueur. En rappelant donc ici les faits
sistait en une chambre très-bien déco- principaux énoncés dans la célèbre
rée, à porte à deux vantaux , et placée inscription de Rosette, monument
sur un tnuneau. Il y avait dans l'ha- historique du premier ordre, écrit a
bitation royale des chiens, des chats, la fois en langue grecque en langue
,

des singes* qui lui appartenaient, et et en signes démotiques et hiéroglyphi-


des nains, destinés, dès 1,500 ans ques égyptiens , nous reproduisons
et plus avant l'ère chrétienne, à di- des données certaines sur les rapports
vertir les seigneurs égyptiens et leur des rois avec la classe sacerdotale;

Digitized by Google
Digitized by Google
-


• • • •
• •
»... • • • •

• • • •

• •
• • • •
> • •
• • »


• •
• •• • •
• • • • • • • •
• • • * a
9
m • • •
• • • .

• . .

Digitized by Google
EGYPTE. 61

es exposons des notions authenti- prise de possession de cette couronne,


es sur un des points le plus im- dont Ptolémée toujours vivant, le bien-
itants et les plus curieux à la fois aiméde Phtha , dieu Épiphane, prince

Forgnnisatîon sociale de l'antique très-gracieux , a hérité de son père


;xpte : l'esprit des nations se révèle se trouvant réunis dans le temple de
font dans leurs protocoles que dans M empli is, ont prononcé, ce même jour,
nrs entreprises : le calme habituel le décret suivant :

S Egyptiens, source de toute sa- «Considérant que le roi Ptolémée


sse, *dut les rendre nécessairement toujours vivant , le bien-aimé de Phtha,
séquieux et complimenteurs. dieu Épiphane, très-gracieux, fils du
Sous les Pharaons, c'est à Thèbes roi Ptolémée et de la reine Arsinoé,
le le roi était sacré et couronné dieux philopatores, a fait toutes sor-
ir la religinn ; sous les Ptolémées, tes de bien et aux temples, et à ceux
«and Alexandrie devint la nouvelle qui y font leur demeure, et, en gé-
ipitale royale ,
Memphis en fut la néral , à tous ceux qui sont sous sa
Uitale religieuse, et c'est dans le domination ; qu'étant dieu , né d'un
tard temple de Phtha qu'avait lieu dieu et d'une déesse , comme Horus
ttte grande solennité. Tout le sa- le fils d'Isis et d'Osiris, le vengeur
frdoce de l'Egypte s'v était réuni d'Osiris son père , et jaloux de signa-
t mois de mars de an 19G avant I ler généreusement son zèle pour les
^fre chrétienne le couronne- , pour choses qui concernent les dieux , il a
-:.t et l'intronisation <]<• Ptolémée- consacre au. service des temples, de
(jiphane qui , avant succédé à son grands revenus, tant en argent qu'en
ftre Philométor,* décédé depuis neuf blé, et a fait de grandes dépenses pour
Bi* , venait d'atteindre sa majorité et ramener la tranquillité en Egypte, et y
fyvait des lors être couronné et élever des temples ;
aercer par lui - même l'autorité « Qu'il n'a négligé aucun des moyens
fcvale. Les prêtres, après lui avoir qui étaient en son pouvoir pour taire
li> la couronne rovale sur la tête, des actes d'humanité; qu'afm que
luidécernèrent aussi de grands hon- dans son royaume le peuple et en gé-
leurs, et ils en énumèrent les motifs néral tous les citoyens fussent dans
ins décret qu'ils ont eux-mêmes
le l'abondance il a supprimé tout-à-fait
,

fedigé. En rappelant textuellement quelques-uns des tributs et des impo-


k principaux de ces motifs, nous sitions établis en Egypte, et a diminué
tiquons les actes qui , dans l'opinion le poids des autres; que de plus, il a
(ta corps sacerdotal , méritèrent le remis tout ce qui lui était du des re-
plus sa reconnu issance , et on voit à devances royales, tant par ses sujets,
quels titres un roi d'Êgvpte pouvait habitants dé l'Egypte, que par ceux de
» concilier la bienveillance d'une ses autres royaumes, quoique ces re-
nste aussi puissante c'est comme : devances fussent un objet considérable
un résumé des opinions qu'elle avait par leur quantité; qu'il a renvové ab-
sans doute le plus accréditées dans sous, ceux qui avaient été emprison-
la nation. On lit ce qui suit dans nés et mis en jugement depuis long-
leur déclaration, et la variété des temps ;

notions historiques qu'elle renferme « Qu'il a ordonné que les revenus


n'échappera pas au lecteur attentif: des temples et les redevances qu'on
m L'an IX. le 10 du mois de méchir, leur payait chaque année , tant en blé
les pontifes et les prophètes, ceux qui qu'en argent, ainsi que les parts ré-
tntrent dans le sanctuaire pour habil- servées aux dieux sur les vignobles,
ler les dieux , les ptérophores , les hié- les vergers , et sur toutes les autres
rogrammates, et tous les autres prêtres choses auxquelles ils avaient droit du
qui de tous
, les temples situes dans temps de son pere, continueraient à
le pays, s'étaient rendus à Memphis, se percevoir dans le pays;
pour la solennité de la « Qu'il a dispensé ceux qui appartien-
auprès du roi ,

Digitized by Google
L'UNIVERS.
nent aux tribus sacerdotales , de faire geur de l'Egypte; près de cettr
tous les ans le voyage par eau à Alexan- tue, sera place le dieu principe;
temple, qui lui présentera l'arm
« Qu'il a ordonné que les citoyens qui la victoire, et tout sera disposé c
avaient quitté les rebelles armés, et manière la plus convenable. Que
ceux dont les sentiments avaient été prêtres fassent trois fois joi par
dans les temps de trouble opposés au
. service religieux auprès de ces stati
gouvernement et étaient rentrés dans qu'ils les parent des ornements
fe devoir, fussent maintenus en pos- crés, et qu'ils aient soin de leur
session de leurs propriétés; dre, dans les grandes solennités , 1
« Qu'étant entré dans Memphis , en les honneurs qui doivent, sui\
vengeur de son père et de sa propre l'usage, être rendus aux autres die
couronne, il a puni, comme ils le qu'il soit consacré au roi Ptolér
méritaient , les chefs de ceux qui s'é- une statue et une chapelle dorées a
taient révoltés sous son père, et avaient le plus saint des temples, t* que
dévasté le pays et dépouillé les tem- chapelle soit placée dans le sanctuaî
ples ;
avec toutes les autres, et que dans
« Qu'il a fait beaucoup de dons à randes solennités où Ton a eoutu
Apis , à Mnévis et aux autres ani- e faire sortir des sanctuaires »es cf
maux sacrés de l'Égvpte; pelles, on fasse sortir aussi ceil** Ju d i

« Qu'il a fait faire (le magnifiques ou- Épiphane très- gracieux ; et p«>ur
q
vrages au temple d'Apis, et a fourni cette chapelle puisse mieux être u
pour ces travaux une grande quantité tinguée des autres , maintenant
d'or et d'argent et de pierres précieu- dans la suite des temps, qu'on po
ses ; qu'il a élevé et des temples et au-dessus les dix couronnes d'or c
des chapelles et des autels, et qu'il roi, lesquelles porteront sur leur pa
a fait les réparations nécessaires à tie antérieure un aspic, à l'imitatic
ceux qui en avaient besoin, ayant le de ces couronnes à ligures d'aspû n
zèle d'un dieu bienfaisant pour tout sont sur les autres chapelles; et «,

ce qui concerne la divinité ; que , s'é- milieu de ces couronnes, sera pla<
tant informé de l'état où se trouvaient l'ornement royal appelé pschent , o
fes choses les plus précieuses renfer- lui que le roi portait lorsqu'il entra
mées dans les temples , il les a renou- Memphis dans le temple , afin d*
,

velées dans son royaume autant qu'il observer cérémonies légales pre:
les
était nécessaire; en récompense de crites pour la prise de possession d
quoi , les dieux lui ont donne la santé, la couronne; qu'on attache au tëtra
la victoire, et les autres biens;.... la gone environnant les dix couronne
couronne devant lui demeurer ainsi apposées à la chapelle dont on vien
qu'à ses enfants, jusqu'à la postérité de parler, des phylactères d'or, a va
la plus reculée : cette inscription : « C'est ici la chape! li

« 11 a donc plu aux prêtres de tous du roi , de ce rendu illustre?


roi qui a
les temples du pays , de décréter que la région d'en haut et la région d>r
tous les honneurs appartenant au roi bas ; » qu'il soit célébré une fôte el
Ptolémée toujours vivant , le bien-aimé tenu une grande assemblée (ponégy-
de Phtha, dieu Épiphane très-gracieux rie) en l'honneur du toujours vivant,
ainsi que ceux qui sont dus à son du bien-aimé de Phtha, du roi Pto-
père et à sa mère , les dieux philo- lémée, dieu Epiphane très-gracieux,
patores , et ceux qui sont dus à ses tous les ans; cette fête aura lieu dans
aïeux , fussent considérablement aug- tout le pays, tant de la Haute que delà
mentés; que la statue du roi Ptolé- Basse- Egypte, et durera cinq jours à
mée , toujours vivant, soit érigée commencer du premier jour du mois
dans chaque temple , et posée dans le de thoth, pendant lesquels ceux qui fe-
lieu le plus apparent, laquelle sera ront les sacrifices, les libations et tou-
appelée la statue de Ptolémée, ven- tes les autres cérémonies d'usage, pur-

Digitized by Google
ÉGYPTE.
M des couronnes ; ils seront appelés Cest un magnifique morceau de sculp-
prrtrfs du dieu Épiphane-Lucha- ture égyptienne. Le colosse , dont
ferrés-gracieux ) , et ils ajouteront une partie des jambes a disparu, n'a
aux autres qu'ils empruntent as moins de 34 pieds et demi de
au service desquels ils sont Eong. Il est tombé la face contre terre,
ce qui a conservé le visage parfaite-
n qu'il soit connu pourquoi ment intact. Sa physionomie suffit
on glorifie et Ton honore, pour le faire reconnaître comme une
tl est juste, le dieu Epiphane, statue de Sésostris.
gracieux monarque, le présent C'est au nord du colosse qu'exista
net sera gravé sur une stèle de un temple de Vénus (llatliôr), cons-
ire dure en caractères sacrés et en truit en calcaire blanc , et hors de la
•rferes grecs ; et cette stèle sera rande enceinte, du côtéde l'orient. Les
êw dans chacun des temples du ou il les faites par Champollion le jeune
e
t
du 2 et du 3' ordre, existant dans ont constaté dans cet endroit même
J
le royaume. » l'existence d'un temple orné de colon-
7e>t à 'Memphis , dans le temple nes-pilastres accouplées , en granit
ftitha , que ce décret fut rendu , et rose , et ce temple était dédié à Phtha
sfcbns de ce célèbre édifice existent et à Hathor (Yulcain et Vénus), les
*re; ilsont été vus par les voya- deux grandes divinités de Memphis.
nt français en 1 828 , et leurs reclier- Ce fut des prêtres mêmes du tem-
B^e sont même étendues jusqu'à re- ple de Phtha a Memphis qu'Hérodote
ntre la ca rri ère d ou fu rent t '
i rés les recueillit une grande partie des no-
âeriauxdece temple de mon- :c'est la tions qu'il a transmises sur l'Kgvpte,
P* deThorra, sur la rive orientale et c'est par ses relations écrites que
'Ml, et en face même de l'ancien Ton peut se convaincre combien la
lacement de Memphis. La matière religion égyptienne et les usages du
î on beau calcaire blanc ; des ins- pays concouraient à multiplier les fêtes
ultions à l'entrée de l'excavation mbliques, à donner plus d'éclat à
oncent que l'ouverture des plus Ieur célébration.
remonte au règne d'Ahmosis, D'ailleurs, la vie des peuples an-
*rf de la II XV
dynastie. Lne r ciens était tout extérieure de la l'obli-
:

^inscription indique expressément gation pour les gouvernements démul-


frac tion des pierres pour la cons- tiplier les fêtes mibliques qui étaient
,

^jon du temple de Phtha. I n im- politiques et religieuses tout à la fois,


^fcebois de dattiers couvre l'empla- pareeque la religion était alors une
^«"ût de Memphis. Passé le village partie très-intime de leurs consti-
l
^drèchëin qui est à un quart
, tutions sociales. Ce qui vient d'ê-
tare dans les terres, on s'aperçoit tre dit de quelques cérémonies égyp-
^ f
ode le sol antique d'une grande
*. aux blocs de
rt
granit dispersés
tiennes prouve que, dans ce pays,
cette partie inlluente des institutions
1
plaine ;

«>t
<
à CeUl qui décfei-
, publiques n'était pas négligée, et les
lettTniin et se font encore jour antiques pratiques ne cessèrent qu'a-
tavers les sables qui ne tarderont vec indépendance de l'état. Les Pto-
I

^ a les recouvrir pour jamais. En- lémées , qui s'occupèrent constam-


* <* v\\\age et celui de Mit-Rahinèh, ment à se concilier l'opinion des égyp-
élèvent dejx longues collines paral- tiens , ne portèrent aucune atteinte a
, d'une enceinte irn-
eboulfiTients leurs habitudes, respectèrent le culte
^se, en briques crues
nxfsiruite national et ne diminuèrent en rien l'é-
*''>me telle de Sais , et renfermant clat de ses pompeuses cérémonies. Il
JJhs les principaux édifices sacrés de nous reste un monument curieux des
"«nphis. ?;v dans l'intérieur de soins attentifs que la nouvelle dynastie
^^encein e qu'existe le grand co- donnait à la célébration des fêtes, et
"
cihumé il y a quelques années du luxe inouï qu'elle y faisait déployer.

Digitized by Google
C4 L'UNIVERS.
Il s'agit de la fête célébrée à Alexan- pressoir plein de raisins. Soixa
drie en Tan 284 avant le christianisme, lyres les foulaient , en chant
à l'occasion de l'association au trône son de la flûte la chanson du pi
de Ptolémée-Philadelpbe,que Ptolémée- Silène y présidait, et le vin do
Soter, son père, chef de la dynastie lait tout le long; du chemin.
nouvelle, trouva bon de faire cou- Après cette division, marcha
ronner de son vivant. Rien n'a jamais qui portait en pompe les vases
égalé la magnificence de cette fête, tensiles d'or, savoir : quatre c
dont le récit a été recueilli dans l'his- en or, semblables à ceux de La
toire d'Alexandrie par Callixène de et autour desquels courait un <

Rhodes. de pampre ; d'autres , contenait


Après une minutieuse description tre métrètes, deux d'ouvrage d
d'un navillon royal, construit pour rinthe : il y avait à leur partie
cette fête et où l'or et l'argent , les
, rieure de très-belles figures en
pierres précieuses, les dépouilles des et d'autres en demi-bosse, U
animaux les plus rares, les plus riches col qu'à la panse des vases, et
tissus de la Perse et de l'Inde étaient avec le plus grand soin.
mêlés avec profusion aux meubles les On portait aussi en pompe (
plus brillants, et faits des plus riches grands trépieds d'or, un buffet
matières, Callixène décrit la marche du où l'on serrait la vaisselle d'oi
cortège, en tête duquel étaient les ban- buffet avait dix coudées de haut
nières des diverses corporations ad- gradins. II était enrichi de pi
mises à cette cérémonie. Des person- précieuses et présentait sur ses
nages de la religion grecque y figu- dins nombre de figures de quatri
raient dans l'ordre de leur hiérarchie, mes de haut , travaillées avec I

parce que cette fête fut toute grecque, coup d'art; deux calices d'or et
et que le mythe de Bacchus en four- de cristal doré ; deux engythi
nit les principaux sujets. Ces person- d'or, hautes de quatre coudées,
nages étaient en grand nombre sur de autres moindres; dix urnes; un
vastes chars, et y liguraient les scè- de trois coudées, et vingt-cinq gi
nes principales de l'histoire du dieu. mazonomes.
Ses prêtres , ses prétresses y rem- A leur suite, marchaient seize (
plissaient leurs diverses fonctions. enfants, vêtus de tuniques blanc
Après cette partie du cortège, s'a- les uns couronnés de lierre , les
vançait un autre char à quatre roues, très de pin. Deux cent cinquante <

large de huit coudées, traîné par tre eux portaient des congés d o
soixante hommes, et portant assise quatre cents des congés d'à ci i

la figure de la ville de ISisa, haute trois cent vingt autres portaient


de huit coudées; elle était revêtue psyctères d'or, d'autres en porta
d'une tunique jaune, brochée en or, d'argent. Après eux, les autres
Sar-dessus laquelle était un surtout fants portaient , pour le service du
e Laconie. Par l'effet d'un méca- des pots, dont vingt étaient d'
nisme, cette figure se levait sans que cinquante d'argent et trois cents
personne y touchât; elle versait alors émaux de toutes les couleurs, i
du lait d une coupe et se rasseyait, les vins ayant été mêlés dans les
f Ile tenait de la main gauche un thyrse, nés et les tonneaux, ceux qui étal
autour duquel on avait roulé des ban- dans le stade en goûtèrent avec n
delettes; sa tête était couronnée de dération.
lierre et de raisins en or enrichis Il ne faut pas passer sous silei
de pierreries. ce grand char à quatre roues lo ,

Après elle, un autre char à quatre de vingt-deux coudées, large de qii


roues , long de vingt coudées et large torze , traîné par cinq cents honni"
de seize, était roulé par trois cents On voyait dessus un antre siogpfl
hommes. On y avait construit un renient profond, fait de lierre,

Digitized by Google
ÉGYPTE. Ù3

t en rouge.De cet antre s'en- enfants plus jeunes , armés de petits


sent, long de la marche , des
le boucliers et dfe thyrses munis d'une
ons, des ramiers, des tourterelles, lance. Ils étaient tous couverts d'ha-
ît à leurs pattes des rubans at- bits de drap d'or.
lés, afin que les spectateurs pus- On fit suivre des chars attelés de
les au vol. Deux sources
saisir deux chameaux : il y avait de chaqueco'lé
finissaient aussi, Tune de lait, trois de ces chars" de file, après les-
tre de vin. Toutes les nymphes quels marchaient des chariots attelés
entouraient ce char avaient des de mulets : ces derniers charicts por-
ronnes d'or. On y vovait aussi taient les tentes des nations étrangè-
mes avec un caducée <f or et les res. On voyait aussi placées dessus, des
its les plus riches. femmes indiennes qui y étaient assises
Jn autre chariot passa avec tout avec d'autres mises comme des capti-
pareil Bacchus à son retour
de ves. Quelques-uns des chameaux por-
Indes. Ce dieu était mené en taient trois cents mines d'encens;
ope, haut de douze coudées, assis d'autres, deux cents livres de safran ,
un éléphant
, et vêtu d'une robe de casia, de cinnamome, d'iris et d'au-
avec une couronne de
pourpre, tres aromates. Près d'eux étaient les
rre etde pampre en or , tenant en Éthiopiens portant les présents, sa-
Ire un thyrse d'or. Il avait une voir les uns six cents dents d'éléphants,
:

uissure dorée. Devant lui et sur le les autres , deux mille troncs d ébène ;
i Péléphant était assis un petit
de d'autres , soixante cratères d'or et
tyre de cinq coudées , couronné de d'argent, et des paillettes d'or. Ils
anches de pin d'or; de la main étaient suivis de deux chasseurs ayant
Dite, il semblait donner un signal des javelots d'or, et menant des chiens
« une corne de chèvre en or. L'é- au nombre de deux mille quatre cents:
tant ava t .tout son harnais en or ces chiens étaient, les uns de l'Inde,
une guirlande de lierre en or au- les autres de l'Hyrcanie, ou molosses,
ur du cou. A sa suite, marchaient ou d'autres races. Passèrent ensuite
Kj cents petites Olles, vêtues de cent cinquante hommes portant des
niques de pourpre et ceintes d'une arbres d'où pendaient toutes sortes de
^ en or : celles qui étaient en
*e, au nombre de cent vingt, avaient
bétes sauvages et d'oiseaux ; on vit
porter dans des caçes, des perroquets,
s couronnes de pin en or : elles des paons, des pintades, des faisans
btent suivies de cent-vingt Satyres et nombre d'autres oiseaux d'Ethiopie.
"nés de toutes pièces , les unes en Après avoir parlé de beaucoup d au-
rs^ent , autres en bronze.
les tres choses et tait le détail des trou-
Derrière eux s'avançaient cinq ban- peaux d'animaux, Çallixène ajoute cent
« d'dnes, montés par des Silènes trente moutons d' Ethiopie, trois cents
I des Satyrescouronnés. De ces ânes, d'Arabie, vingt de Négrepont, vingt-
« uns avaientdes fronteaux et des six bœufs tout blancs des Indes, huit
ornais en or,
d'autres en argent. d Ethiopie, un grand ours blanc, qua-
J n avait
fait partir après eux vingt- torze léopards, seize panthères, gua-
JOW chars , attelés d'éléphants ; tre lynx , trois oursons, une girafe et
fixante autres, attelés de deux boucs; un rhinocéros d'Êthiopie.
mu. autres, attelés de snaks; sept \ n autre char était suivi de femmes
Jjteles d'orvx et
quinze de bubales. richement vêtues et magnifiquement
II
y avait en outre huit attelages de parées : elles portaient les noms des
™} autruches, sept de deux tfnes- villes, soit de l'Ionie, soit de celles
et quatre d'ànes
sauvages. Sur des Grecs qui habitaient l'Asie et les
ces chars étaient
montés des îles, et qui avaient été rangées sous
™ ant »i en tuniques, en larges cha- la domination des Perses. Elles avaient
F»ux et en habits
de cochers. A toutes des couronnes d'or.
a eux étaient montés De tout ce grand nombre de choses
d'autres
66 L'UNIVERS.
qui se trouvèrent à cette pompeuse trente-six pots à verser le vin, dix
cérémonie, Callixène n'a voulu parler grands aociptres, douze urnes, cin-
que de ce qui était en or et en argent ; quante corbeilles à présenter le pain,
car il y avait encore beaucoup d'objets diverses tables, cinq buffets à serrer les
dignes d'être vus et d'être rapportés; vaisselles d'or, une corne toute d'or de
nombre de bêtes féroces et de che- trente coudées : or, tous ces vases et
vaux, vingt-ouatre très-grands lions; ustensiles d'or doivent être exceptés
en outre, plusieurs chars à quatre de ceux qui furent portés par le cor-
roues-, qui portaient les images des tège même de Bacchus.
rois et même celles des dieux. Ensuite, marchaient quatre cents
^
Après cela , marchait un chœur de chariots portant l'argenterie, vin^t
six cents hommes, parmi lesquels trois portant la vaisselle d'or, et huit cents
cents cytharistes sonnaient de leur in- chargés d'aromates : enfin, toutes les
strument en accord ; ils avaient leurs parties de cette marche pompeuse
cythares toutes garnies d'or en pla- étaient accompagnées de cavalerie et
cage, et des couronnes de même mé- d'infanterie magnifiquement armées.
tal. Après eux, passèrent deux mille L'infanterie était au nombre de cin-
taureaux d'une seule et même couleur, quante-sept mille six cents hommes,
ayant les cornes dorées, des fronteaux et la cavalerie de vingt-trois mille deux
d or, et au milieu des cornes , des cou- cents.
ronnes, des colliers , des éçides devant Ce ne fut pas dans cette occasion
s
le fanon : tout cela était d or. seulement que se inentra la profu-
Après cela, il passa sept palmiers sion des richesses en Égvptc ; là comme
hauts de huit coudées, un caducée, partout ailleurs, le gouvernement ne
une foudre, l'un et l'autre de qua- pouvait être riche que dans une pro-
rante coudées , et un temple ; le tout portion analogue à la richesse du pays
d'or. Ce temple avait quarante coudées et a celle de ses habitants. Cette prb-
de tour; outre cela, chacune des deux f)ortion existait en effet en Égvpte , un
ailes était de huit coudées. On vit uxe sans frein s'y montrait de toutes
aussi à cette pompe nombre de ligu- parts ; dans les jeux publics, Ptoléméc
res dorées , dont plusieurs avaient Soter reçut vingt couronnes d'or, et la
douze coudées; des uetes féroces qui reine Iièrénice vingt-trois ; ces cou-
les surpassaient en grandeur, et des ronnes étaient portées sur des chars
aigles de vingt coudées. Trois mille d'or, et la dépense en fut estimée à
deux cents couronnes d'or taisaient plus de cinq cent mille francs. Ptolé-
partie de ce cortège. Il y avait une mée Philadelphe reçut aussi dans une
autre couronne d'or de quatre-vingts occasion semblable vingt couronnes
coudées de tour, enrichie de pierreries d'or, et l'on vit sur deux chars d'or,
et consacrée aux mystères ou aux cé- une de ces couronnes ayant 6 coudées
rémonies religieuses : c'était la cou- ou près de dix pieds de'diamètre, cinq
ronne qui embrassait l'entrée du tem- couronnes de cinq coudées , et six en-
ple de Bérénice. En outre, on portait core de quatre coudées chacune. A
une égide qui était aussi d'or, et il passa ces récits, l'antiquité se demandait en
nombre de couronnes d'or portées par quel autre pays que l'Egypte on pou-
des jeunes filles richement habillées. vait trouver un tel faste et les trésors
Une de ces couronnes avait deux cou- capables de l'entretenir ; ce n'était,
dées d'élévation et seize coudées de cir- disait-elle, ni à Perséj>oiis, ni à ftaby-
conférence. N'omettons pas une cui- lone , ni dans les régions arrosées pâr
rasse d'or de deux coudées , une cou- le Pactole; le JNil seul roulait effecti-
ronne de chêne enrichie de pierreries, vement de l'or, et comme le disait un
vingt boucliers d'argent, soixante- Foete, il était le véritable Jupiter de
rtre armures complètes ; deux bot- Egypte.
d'or de trois coudées ; douze bas- In gouvernement stable et bien
sins d'or, des coupes sans nombre, constitué pour le pays , la longue du-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 67

rée des mêmes préceptes d'administra- leurs actions furent inscrites sur des
tion que l'expérience avait consacrés stèles placées dans les édifices publics
l'entretien des canaux, la fertilité ex- des pays soumis à leur autorité, et aux
traordinaire du sol , telles étaient les exemples déjà cités , nous en ajoutons
sources plus certaines de l'abondance un nouveau tiré d'un monument qui
générale , du bien-éîre de la popula- existait autrefois à Adulis, en Ethio-
tion, de la richesse et de la force de pie. C'est à la gloire du roi Ptolémée
l'état : et l'on peut croire que le dé- Evergète I" que ce monument était
Touement aux intérêts du pays, leur consacré. Voici la traduction de ce qui
protection assidue, et l'application a été conservé de son texte : « Le
constante à leur prospérité, qui animè- grand roi Ptolémée, fils du roi Pto-
rent de génération en génération les lémée et de la reine Arsinoé, dieux
monarques égyptiens et les agents prin- Adelphes petit-fils du roi Ptolémée
,

cipaux de leur autorité , furent vive- et de la reine Bérénice , dieux Sotères,


ment excités par les éclatants témoi- descendant par son père d'Hercule,
gnages de reconnaissance que toutes les fils de Jupiter, et par sa mère, de
classes de ta nation leur décernaient Dionysus , fils de Jupiter, ayant
à l'envi. Le langage varié des arts en reçu de son père la couronne "d'E-
multipliait la relation sur tous les gypte, de Libye, de Syrie, de Phœ-
édilices publics: chaque prince nicie, de Cynre , de Lycic, de Carie
y voyait
ses bonnes actions écrites de son vi- et des Cyclàdes, et conduit en Asie
vant, et la magnificence du monument une armée nombreuse en infanterie
était comme une garantie de la perpé- en cavalerie, en forces navales et en
tuité de ces souvenirs; et ce temple, éléphants du pays des Troglodytes ou
ce palais que décorait la représentation de l'Ethiopie, pris par son père ou
majestueuse des actions mémorables par lui - même dans ces contrées ,
d'un roi d'Egypte, pouvaient être pour conduits en Egypte , et dressés en-
ses successeurs ce que l'histoire d'A- suite pour la guerre il s'est em- :

chille par Homère fut pour Alexandre : §aré de toutes les contrées voisines
on s'efforçait d'imiter de telles actions e l'Eunhrate, de la Cilicie, de la
pour mériter de tels historiens. Pamphylie, de l'ionie, de IHelles-
Il y avait peut-être une intention pont ,de la Thrace , des troupes et
morale dans les manifestations si mul- îles richesses de ces contrées, des élé-
tipliées des flatteries de la caste sacer- phants indiens qui s'y trouvaient , des
dotale envers les souverains : on con- rois qui les gouvernaient , et ayant
naissait sansdoutela magique influence traversé ce fleuve, il a soumis la Mé-
des éloges accordés au devoir, et on I sopotamie, la Rabylonie, la Susiane,
excitait au bien par toutes les voies la Perse, la Médie et tout le reste du
ouvertes à la pauvre humanité il est
: pays jusqu'à la Bactriane; ayant re-
certain qu'en Egypte, la chose publique couvré les dieux et les choses sarrées
était au suprême degré la chose de enlevées d' Egypte par les Perses, il
tous, antérieure et supérieure à toutes les a renvoyées en Egypte avec d'au-
les choses de chacun. tres trésors pris dans ces divers lieux.»
C'est en ce sens que le soin qu'on ( Le reste de l'inscription est perdu ).

se donnait pour multiplier les monu- Ainsi , les actions mémorables des
ments publics, prenait sa source dans rois étaient, après les bienfaits des
un intérêt réellement national, dans un dieux , les sujets les plus ordinaires
sentiment très-patriotique. La nation des monuments nationaux en Egypte;
s'illustrait dan* les mêmes pages où elle cet usaçe remonte à ses plus anciens
honorait ses bons et sages monarques. temps historiques , et c'est ainsi qu'on
Les monuments deThèbes, ceux de l'E- retrouve, à Ouadi-Halfa, près de la
gypte entière en rendent témoignage à seconde cataracte, en Nubie, sur une
regard des Pharaons; les Ptolémées stèle du roi Osortasen de la XVI*
Meurent garde d'affaiblir un tel usage : dynastie , la représentation des vic-

Digitized by Google
L'UNIVERS.
r
toires du roi dans la Nubie : le dieu qui leur adresse des reproches; les
Mandou , une des grandes divinités soldats, dispersés dans le camp, se
conduit et livre au roi tous les peu- reposent ou préparent leurs armes,
ples démette contrée, avec le nom de et donnent des soins aux bagages ; en
chacun d'eux, inscrit dans une espèce avant du camp, deux Égyptiens ad-
de bouclier attaché à la figure , age- ministrent la Bastonnade a deux pri-
nouillée et liée, qui représente chacun sonniers ennemis , afin , porte la lé-
de ces peuples, dont le nom, ou plu- fende hiéroglyphique , de leur faire
tôt celui du canton qu'ils habitaient, ire ce que fait la plaie de Schéto.
tels que Schanisk
, Osaou , Schoât, Au bas du tableau , est l'armée égyp-
Kôs , ne se retrouveraient que
etc. , tienne en marche , et à l'une des ex-
dans des écrivains remontant, comme trémités se voit un engagement entre
le monument de Ouadi-Halfa, à plus les chars des deux nations. l,a partie
de deux mille ans avant l'ère chré- gauche de ce massif offre l'image d'une
tienne. sériede forteresses desquelles sortent
Au Rhamesséion de Thèbes , on des Égyptiens emmenant des captifs :

a rappelé aussi les grandes actions les légendes sculptées sur les murs de
guerrières de Sésostris, qui vécut cinq chacune d'elles donnent leur nom , et
siècles après Osortasen. apprennent que Rhamsès-le-Grand les
Les tableaux militaires relatifs à a prises de vive force, la VIII' année
ses conquêtes couvrent les faces des de son règne.
deux massifs du pylône sur la pre- Il manque près de la moitié du
mière cour du palais; ils sont vi- massif de droite du pylône ce qui
:

sibles en assez grande partie, parce reste offre les débris d\in vaste bas-
que l'éboulement des portions supé- relief représentant une grande ba-
rieures du pylône a eu lieu du coté taille , toujours contre les Schéto ; on

opposé. Ces scènes militaires offrent Y a représenté l'un des principaux chefs
la plus grande analogie avec celles qui bactnens , nommé Schiropsiro ou
sont sciîlptées dans l intérieur du tem Schiropasiro , blessé et gisant sur le
pie iïlbsamboid et sur le pylône de bord fleuve , vers lequel se dirige
Louqsor, qui font partie du Rhames- aussi, fuyant devant le vainqueur, un
séion ou Rhamséion oriental de Thè- allié, le chef de la mauvaise race du
bes. Les inscriptions sont semblables, pays de Schirbech ou Schilbesch. A
et tous ces bas-reliefs se rapportent côté de la bataille est un tableau triom-
évidemment à une même campagne phal Rhamsès-le-Grand, debout, la
:

contre les peuples asiatiques, qu on ne hache sur l'épaule , saisit de sa main


peut d'après leur physionomie et d'a-
,
gauche la chevelure d'un groupe de
près leur costume, chercher ailleurs captifs, au-dessus desquels on lit :

que dans cette vaste contrée sise entre « Les chefs des contrées du midi et
le Tigre et l'Euphrate d'un côté, l'Oxus « du nord conduits en captivité par sa
et l'indusde l'autre, contrée que nous « majesté. »
appelons assez vaguement la Perse. Les sculptures du massif de droite du
Les Égyptiens désignèrent ces peuples deuxième pylône ou mur sont le tableau
ennemis sous la dénomination de la d une bataille livrée sur le bo.d d'un
plaie de Schéto, de la même manière fleuve, dans le voisinage d'une ville que
que l'Éthiopie est toujours appelée la ceignent deux branches de ce fleuve,
mauvaise race de Kouscli , et il pa- et sur les murailles de laquelle on lit:
raît assez certain que c'est de peuples la ville forte Watsch, ou Batsch (la
du nord-est de la Perse, des Bactnens {>remière lettre est douteuse ). Vers
ou Scythes-Ract riens qu'il s'agit ici. 'extrémité actuelle du tableau , à la
On a sculpté sur le massif de droite gauche du spectateur, l'on voit le roi
la réception des ambassadeurs scvtho- Lhamsès sur son char lancé au galop
bactriens dans le camp du roi; ils au milieu du champ de bataille couvert
sont admis en la présence de Rhamsès de morts et de mourants. Il décoche

Digitized by Google
ÉGYPTE. 69
ks flèches contre la masse des en ne- tourent ; sa harangue a pour but d'en-
Bis en pleine déroute ; derrière le char, courager ses compatriotes à se sou-
far le terrain que te héros vient de mettre au joug de Rhamsès-le-Grand.
fumer, sont entassés les cadavres des Ainsi, après les dieux, les rois ob-
laincus , sur lesquels s'abattent les tenaient les premiers honneurs déférés
ri* vaux d'un chef ennemi nommé 7b- par la voix publique ; et après les bas-
rokani, blessé d'une flèche à l'épaule reliefs où leur courage et leur pieté
ettombant sur l'avant de son char étaient célébrés «î l'envi dans toutes les
Sous les pieds des coursiers du
brise. cités, il n'était pas d'ouvrage d'art
bt,risent, dans diverses positions plus favorable à l'intention de longue
fes corps de Torokato, chef des sol- durée qui présidait à la construction
dais du pays de Sakbésou , et ceux de ces édifices, il n'en était pas de
de plusieurs autres guerriers de dis- plus flatteur non plus pour les rois
tiedion. Le
chef bactrien grand que leurs effigies colossales , érigées
SchiropasirOy se retire sur le bord du dans les cours princi pales des grands
fleuve; les flèches du roi ont deja at- temples, et formant une partie es-
teint Tiofouro et Simalrrosi fuyant sentielle de leur décoration. Les im-
ims la plaine et se dirigeant du côté menses ouvrages , d'un effet si gran-
de la ville. D'autres chefs se réfugient diose encore, après avoir subi les of-
ters le fleuve, dans If-quel se précipi- fenses des hommes et les coups meur-
tent les chevaux du chef Arobscàatosi, triers des siècles, n'étaient pas rares
fe^sseet qu'ils entraînent avec eux. dans les grandes villes, et les fonda-
Husieurs enfin, tels que Thotâro et teurs des grands édifices de l'Egypte
Ma/trima, frère (allié) de la plaie n'oublièrent pas d'y ériger leurs por-
de schéto des Bactriens ), sont allés
( traits; chaque portion de ces monu-
usourir en face de la ville , sur la rive ments, agrandis successivement , ren-
du fleuve , que d'autres , tels que le fermait le colossedu souverain qui avait
Bactrien Sipaphéro , ont été assez ordonné ces travaux. Le Memnonium
heureux pour traverser, secourus et de Thèbes en fournit la preuve et
accueillis sur la rive opposée par une l'exemple.
f 'Ule immense accourue pour connaître « Que l'on se figure , dit Champol-
résultat de la bataille. C'est au mi- lion lejeune, un espace d'environ
lieu de tout ce peuple amoncelé qu'on 1,800 pieds de longueur, nivelé par les
j>*rçoit un groupe donnant des secours dépots successifs de l'inondation cou- ,

^npressés à un chef que l'on vient de vert de longues herbes , mais dont la
retirer du fleuve où il s'est noyé ; on surface déchirée sur une multitude de
W tient suspendu par les pieds la Me points, laisse encore apercevoir des
en bas, et on s'efforce de lui faire débris d'architraves, des portions de
rendre l'eau qui le suffoque, afin de colosses , des fiUs de colonnes et des
le rappeler à la vie. Sa longue cheve- fragments d'énormes bas-reliefs que
lure semble ruisseler, et le traitement le limon du fleuve n'a pas enfouis en-
ne produira aucun effet, si l'on en core ni dérobés pour toujours à la cu-
juge par la physionomie et le mouve- riosité des voyageurs. La, ont existé
ment de l'assistance. On lit au-dessus plus de dix-huit colosses dont les
decegroupe: « Le chef de la mauvaise moindres avaient vingt pieds de hau-
* rare
du pays des Schirbesch , qui teur; tous ces monolithes, de diverses
« s ot éloigne de ses guerriers en matières , ont été brisés , et l'on ren-
* fuyant le roi du coté du fleuve. » contre leurs membres énormes disper-
Fini î c
2
, au milieu de la foule sortie sés ça et là les uns au niveau du sol,
,

de lapar un pont jeté sur l'une des


ville d'autres au fond d'excavations exé-
branches au fleuve , on remarque des cutées'par les fouilleurs modernes. Sur
symptômes d'un prochain changement ces restes mutilés, on lit les noms
dans l'état d*»s esprits: un individu d'un grand nombre de peuples asiati-
afasse un discours à ceux qui l'en- ques dont on voyait les chefs captifs

Digitized by Google
70 L'UNIVERS.
les colosses représentent : « Le sei-
entourant la base de ces colosses re-
présentant leur vainqueur, le Pharaon gneur souverain de la région supérieure
3' du nom, celui et de la région inférieure , le réfor-
Aménophis, le

mé'me que les Grecs ont voulu confom mateur des mœurs , celui qui tient le
dre avec le Memnon de leurs mythes monde en repos, l'Horus qui , grand
héroïques.
par sa force , a frappé les Barbares
^.
le roi soleil, seigneur de vérité, le
, lils
« C'est vers l'extrémité des
ruines
s'élèvent en- du soleil , Amenothnh , modérateur
et du côté du neuve que
de région pure, chéri d'Amon-Ra,
core, en dominant la plaine de Thèbes,
la
d'environ roi des cfieux. »
les deux fameux colosses,
« Ce sont là les titres et les noms du
GO pieds de hauteur, dont l'un, celui
d'une si grande célé- troisième Aménophis de la dix-hui-
du nord, jouit
Meni- tième dvnastie, lequel occupait le
brité sousïe nom de colosse de
trône dès Pharaons vers l'an 1680
BOA (voyez planche 8.) Formés chacun
trans- avant l'ère chrétienne. Ainsi se trouve
d'un seul bloc de grès-hrèche ,
complètement justifiée l'assertion que
portés des carrières de la Théhaide
Pausanias met dans la bouche des
supérieure, et placés sur d'immenses
repré- Thébains de son temps, lesquels sou-
bases de la même matière, ils
tenaient que ce colosse n'était nulle-
sentent tous deux un Pharaon
assis,
les genoux ment l'image dn Memnon des Grecs,
les mains étendues sur
vai- niais bien celle d'un homme du pays,
dans une attitude de repos. J'ai
nement cherché à motivera mes yeux nommé Ph~ tménoph.
et spi- « Ces deux colosses décoraient,
l'étrange erreur du respectable
prendre suivant toute apparence, la façade
rituel Denon, qui a voulu
extérieure du principal pylône de FA-
ces statues pour celles de deux
prin-
ménophion; et malgré l'état de dé-
cesses égyptiennes. Les inscriptions
hiéroglyphiques encore subsistantes, gradation oà la barbarie et le fana-
le dos- tisme ont réduit ces antiques mo-
telles que ce.les qui couvrent
sier du trône du colosse du sud
et les numents , on peut juger de l'élégance,
côtés des deux bases, ne laissent
au- du soin extrême et de la recherche
qu'on avait mis dans leur exécution,
cun doute sur le rang et la nature du
par celles des fi pures accessoires for-
personnage dont ces merveilleux mo-
nolithes reproduisaient les traits
et mant la décoration de la partie anté-
rieure du trône de chaque colosse. Ct
S-rpétuaient la mémoire. L
inscrip-
sont des figures de femmes debout,
on du dossier porte textuellement :
« L'Aroëris puissant, le
modérateur sculptées dans la masse même de cha-
, et n'ayant pas moins
des modérateurs, etc., le roi solei , aue monolithe
e 15 pieds de haut. La magnificence
seigneur de vérité (ou de justice), le
du soleil , le seigneur des diadè- de leur coiffure et les riches détails de
fils
leur costume sont parfaitement en
mes, Aménothpb, modérateur delà
rapport avec le rang des personnages
région pure, le bien-aimé d'Amon-
dont elles ranpelent le souvenir. Fes
Ra, etc., PHorus resplendissant, ce-
inscriptions hiéroglyphiques gravées
lui qui a agrandi la demeure
(la-

cune) à toujours , a érigé ces cons- sur ces statues, formant en quelque
tructions en l'honneur de son pere sorte les pieds antérieurs du trône de
Ammon; il a dédié cette statue
lui chaque statue d' Aménophis, nous ap-
colossale de pierre dure , etc. » Et
sur prennent que la fiçure de gauche repré-
grands sente une reine égyptienne, la mère
les côtés des bases on lit en
hiéroglyphes de plus d'un pied de pro- du roi, nommée fmau-flem-l'a* et
la figure de droite, la reine épouse
portion, exécutes, surtout ceux du
colosse du nord, avec une perfection
du même Pharaon, 7ata, dont le
et une élégance au-dessus de tout
éloge, nom était déjà donné par une foule de
la légende ou devise particulière ,
le monuments. Je connaissais aussi le
prénom et le nom propre du roi que nom de la femme de Thoutmosis IV

Digitized by Google
Digitized by Google
- . «

• a • * ••»•
•• • • •
• •• k

• • • »
• ••
• • •

» • • • •
•••« » • • •
• • a • •

•••• *.v.

Digitized by Google
Digitized by Google
• » •» ••••
••• •••
» » • • • .
• a •

• * •
• • •
••••
• •
•••• •
•••• ••••
• •• • •
• ••

*....
ÉGYPTE. 71

Tmavrlîem-ra , mère d'Aménophis- dès qu'elle était frappée par les pre-
tfrnwon, par les bas-reliefs du palais miers rayons du soleil. Ces données
k Louqsor. merveilleuses réveillent sans peine
• Sur un autre point des ruines de dans notre esprit les souvenirs de
TAménophion, du coté de la monta- Memnon et de l'Aurore : les anciens,
gne Libvque , à la limite du désert qui avaient bien autant d'esprit que
et an peu à droite de Taxe passant nous , ne se firent faute d'imaginer et
entre les deux colosses existent deux
, de commenter un rapprochement.
tel
btacs de grès-brèche , d'environ trente Homère fait la guerre de
figurer à
pieds de long chacun , et présentant Troie un Memnon avec dix mille
u forme de deux énormes stèles. Leur Éthiopiens, comme auxiliaire de
surface visible est ornée de tableaux Priiim son oncle. Achille vengea sur
,

et de magnifiques inscriptions formées ce Memnon la mort de son ami An-


chacune de 24 à 25 lignes d'hiérogly- tiloque. Jupiter apaisa la douleur
phes du plus beau style, exécutés de l'Aurore, mère au héros mort, en
de relief dans le creux, "et il est infi- en perpétuant le souvenir par les com-
niment probable nue ces port ions qu'on bats commémora! ils que se livraient
aperçoit aujourd'hui sont les dossiers tous les ans sur son tombeau, dans
des sièges de deux groupes cclossals la Troade , les oiseaux memnonides
inversés et enfouis la face contre qu'il créa tout exprès; enfin les fcthio-
terre. {>iens étevèrent aussi à leur roi
, dans

« Enfin à Ibsamboul le grand tem-


, e Haute-Kgypte, une statue devenue
ple creusé dans le roc, excavation célèbre par les sons mélodieux qu'elle
merveilleuse au plus haut degré, est rendait au lever de l'aurore, et les
annoncé par quatre colosses, n'ayant accents lugubres et plaintifs qu'elle
pasmoins de 61 pieds de hauteur quoi- exhalait le soir, dès qu'elle était en-
que assis , admirables portraits de veloppée par les ombres et par la
Rhamses Sésostris , où la perfection nuit.
du travail rép.nd au grandiose de la Voila les circonstances principales
composition. » des récits que font les historiens et sur-
("est apropos de ces singuliers mo- tout les poètes de l'antiquité. I n autre
numents, dont les artistes grecs ou genre de données plus concluantes que
romains essayèrent rarement de re- ces récits poétiques et mythiques, se
produire dans" leurs ouvrages les gran- tire des témoignages de deux écrivains
des dimensions
,
que nous devons un peu plus graves, de Strabon et de
présenter quelques détails particuliers Pausanias, qui étudièrent à Thèbes
Mr le plus célèbre des colosses égyp- même la statue de Memnon. «J'y ai
tiens sur la statue parlante de
, vu , dit ce dernier auteur, une statue
Memnon. colossale assise , qui représente le so-
On vient de voir ( à la page 70) la des- leil, quoiqu'on lui donne généralement
cription des deux colosses de l'Amé- le nom de Memnon Mais les
uopluon ou Memnonium de Thèbes, Thébains ne veulent pas que cette sta-
dont celui du nord fut cette statue tue soit Memnon , et ils y voient
parlante; c'est le moins grand, en Phaménoph, qui était de leur pays...»
perspective, des deux figures, dont Cambvse l'ayant fait briser, la moitié
notre planche 8 a reproduit les for- supérieure du corps est étendue à
mes, et on distingue les assises de terre, l'autre moitié est restée en
Pierres qui composent toute la partie place et rend chaque jour au lever du
supérieure de son corps. On n a pas soleil un son que je ne puis mieux
Pu représenter sur ses jambes les comparer qu'à celui que produit une
nombreuses inscriptions grecques ou corde de cythare ou de lyre qui se
Mines qui les couvrent et qui témoi- rompt. » Enfin les inscriptions latines
gnent de la réalité des sons harmo- et grecques, dont les jambes de la
tieux que faisait entendre cette statue statue sont encore couvertes, sont

Digitized by Google
, ,

72 L'UNIVERS
de véritables dépositions publiques d'avril, à la deuxième heure, l'an IV
faites par des témoins désintéressés , de notre empereur Vespasien Auguste
de la réalité d'un phénomène merveil- (le l" avril de l'an 73 de J.-C). —
leux , qui a fait qualifier de vocale Un Gaulois est au nombre de ces té-
cette célèbre statue. Dans ces inscrip- moins : Marcus Anicius Verus, fils de
tions , au nombre de soixante-douze Julien , inscrit dans la tribu Voltinia,
nouvellement réunies, publiées, tra- natif de Vienne (capitale de l'ancienne
duites et expliquées par M. Letronne, Allobrogie ),... de la III* légion cyré-
des individus sans qualités connues, et naïque ; j'ai entendu Memnon, en l'an 3
des tribuns, des centurions ou des dé- (du règne de Vespasien) le 4 des ides
curions militaires, des fonctionnaires de novembre; en l'an 4 le 7 des ca-
,

publics de divers ordres, des préfets lendes de janvier, le 18 des calendes


et autres magistrats de l'Egypte , de février,' le 4 des nones et le 5 des
l'empereur Hadrien et Sabine sa ides de ce même mois ; le 15, le 13 et
femme, déclarent unanimement avoir le 12 des calendes de mars, le 7 des
entendu la statue de Memnon rendre ides de mars, le 8 des ides d'avril ,
des sons au lever du soleil : ils indi- le 7 des ides de mai, le 4 des nones de
3 uent ordinairement le jour et l'heure juin ; et le 7 des ides du même mois
e ce fait, et comme pour corroborer de juin , deux fois ( quatorze fois en
ces témoignages en faveur d'une s< rte tout, dont deux fris le même jour
de miracle, quelques témoins décla- durant les années 72 et 73 de J.-C).
rent d'abord n'avoir rien entendu un — Il entrait une idée religieuse dans
jour, et enfin avoir distinctement con- ces sortes de visites à ces statues de
staté le fait à une seconde ou troi- Memnon ; et à l'imitation d'autres
sième observation ; d'autres au con- proscynèmes , ou actes d'adoration
traire certifient avoir entendu Mem- faits a diverses divinités de l'Egypte ,
non plusieurs fois. La singularité de et dont les monuments conservent en-
ce phénomène explique facilement core les traces écrites, ceux qui al-
l'enthousiasme qu'il inspirait, les laient entendre la statue de Memnon ,
voyages à Thèbes dont il était le mentionnaient parfois, dans leur ins-
principal motif, et les efforts, quel- cription,
qu'ils s'étaient souvenus de
quefois malheureux , du génie des telle personne qui leur était chère;
voyageurs qui entreprenaient de retra- ils l'associaient ainsi à leur pieuse vi-
cer en vers grecs ou latins le souve- site , et aux faveurs qu'ils devaient
nir des faveurs que Memnon leur avait ohtenir des dieux. Cette idée religieuse
accordées en daignant se faire enten- paraît s'être introduite successivement,
dre et les satisfaire. et elle domine de plus en plus dans les
Les plus anciennes de ces inscrip- inscriptions du Memnon, à mesure
tions se distinguaient par leur simpli- Qu'elles sont moins anciennes; bientôt
cité : «A. Instuleius Tenax, primi- la visite fut accompagnée de sacrifices
e
pilaire de la XII lésion, fulminée, et de libations, et les dévots ne s'ex-
et Caïus Valerius Pnscus, centurion {aimèrent presque plus qu'en vers
de la XX II* légion , et Lucius Quin- atins ou grecs, dont la composition
tius Viator, décurion ; nous avons en- révèle d'ordinaire plus de dévotion
tendu Memnon, Tan XI de ISéron , au dieu que de bon goiU. Le 14 mars
notre empereur, le 12 des calendes de l'an 95, sous le règne de Domi-
d'avril , à 1 heure (le 15 mars de l'an tien, le préfet de l'Égypte, Titus Pé-
64 de J.-C). —
Titus Julius Lupus , tronius Secundus, a entendu Memnon
préfet de l'Egypte; j'ai entendu Mem- à la première heure et /'a honoré des
non, à la première heure, heureuse- vers arecs ci-dessous écrits. L' inscrip-
ment ( de J.-C. ).
l'an 7t —
L. Junius tion latine du préfet est en effet sui-
Cal vi nus , préfet du canton de Béré- vie de deux vers grecs qui signifient :
nice; j'ai entendu Memnon avec Mu- « Tu viens de te faire entendre (car
nicia Kustica, ma femme , les calendes « ce n'est ô Memnon, qu'une partie de

Digitized by Google
,

ÉGYPTE. TS
* toi-même qui est assise en ce lieu ), coule dans mes veines; passants, jetez
« frappé des rayons brûlants des feux les veux sur ces lignes , qui sont de
! • du fils de I .atone. • « La parenthèse moi , Balbilla. »
[est assez mal placée, ajoute M. Le- La du roi Antiochus était
petite-lille

|
troone; mais les vers grecs n'en sont donc un des poètes de la cour d'Hadrien
pas moins fort passables pour être et de Sabine en Égypte, et les pièces
i ouvrage d'un préfet romain. » Sous le ?[u'elle composa au sujet de la visite
ligne d'Hadrien , un autre fonction- aite à Memnon par l'empereur, nous
naire s'exprimait ainsi en 13 vers montrent combien s'était généralisé
pecs : « Funisulanus Charisius ,
dans l'opinion publique le culte dont
stratège d'Hermonthis, natif de La- la statue de Memnon était devenue
j

I
topolts, accompagné de son épouse, l'objet, après avoir été d'abord celui
Fulvia, t'a entendu, ô Memnon, ren- d une simple curiosité. « Vers de Julia
dre un son, au moment où ta mère Balbilla, lorsque l'auguste Hadrien en-
éperdue honore ton corps des gouttes tendit Memnon: • tel est le titre qui
de sa rosée. Charisius, t'ayant fait précède la pièce suivante de 12 vers
un sacrifice et de pieuses libations grecs , traces sur le haut de la jambe
a chanté ces vers à ta gloire « Dès : — gauche du colosse :

* mon enfance , j'ai appris qu'Argo , « que l'Egyptien Mem-


J'avais appris
* que les chênes de Jupiter Dodonéen non, échauffe par les rayons du so-
avaient été doués de la parole: mais leil , faisait entendre une voix sortie
» tu es leseul que j'aie pu voir de de la pierre thébaine. Ayant aperçu
* mes yeux résonner et faire enten- Hadrien, le roi du monde, avant le le-
« (ire une certaine voix. » Chari- — ver du soleil , il lui dit bonjour, comme
sius a gravé pieusement ces vers pour il pouvait le faire. Mais lorsque le Ti-

toi, qui lui as parlé et Tas salué ami- tan , traversant les airs avec ses blancs
calement. » La
que l'empereur
visite coursiers , occupait la seconde mesure
Hadrien fit à Memnon, accompagné des heures marquée par l'ombre du
de l'impératrice Sabine et de ses cadran, Memnon rendit de nouveau
principaux offic ers, est un événement un son aigu , comme celui d'un instru-
important dans l'histoire de la statue ment de cuivre qui est frappé; et,
parlante; et cet événement porta plein de joie ( de la présence de l'em-
hors de toute limite et l'étendue des pereur), il rendit pour la troisième
inscriptions gravées sur le colosse et lois un son. L'empereur Hadrien sa-
l'emphase ridicule des expressions : lua Memnon autant de fois, et Bal-
au moment où Hadrien , qui visitait billa a écrit ces vers composés par elle-
toutes les merveilles de l'Égypte, par- même, qui montrent tout ce qu'elle
vint enfin en la présence de Memnon, a vu distinctement et entendu. Il a
on grava sur la statue son nom seul, été évident pour tous que les dieux
en grosses lettres, l'empereur Ha- le chérissent. »

drien, comme témoignage de sa visite ;


Uneautre pièce de vers de notre
le reste fut abandonné à la verve des poétesse prouve que l'impératrice Sa-
poètes et ils n'y firent faute. Parmi eux bine entendit aussi Memnon , et Bal-
se distingua une poétesse , Julia Bal- billa en dressa aussi en 6 vers grecs le
billa d'une effrayante fécondité, et
. poétique procès- verbal. Ln jour pour-
qui dans ses vers , n'oublia pas sa
, tant le colosse ne se montra pas très-
aniteuse généalogie. « Mes pieux an- courtois envers Sabine, il demeura
« cétres, dit-elle dans des vers tracés muet; le lendemain il la satisfit, et
colosse , le. savant Balbillus et
\e Balbilla chanta ainsi en 8 vers ces
Antiochus te saluèrent jadis ( ô Mem- graves événements : Hier, n'ayant pas
«
non ) ; Balbillus naquit d'une mère entendu Memnon, nous l'avons supplié
de sang royal , d'Acmé , et le père de de n'être pas une seconde fois défavo-
son père était le roi Antiochus. C'est rable ( car les traits de l'impératrice
deux que je tiens ce noble sang qui s'étaient enflammés de courroux), et de

Digitized by Go
1

74 L'UNIVERS.
faire entendre un son dm
n , de peur temps, Cambyse me Ta enlevée. Main-
que le roi lui-même ne s'irritât, et tenant , mes plaintes ne sont plus que
Qu'une longue tristesse ne s'emparât des sons inarticulés et dénués de tous
e sa vénérable épouse. Aussi, Mem- sens , triste reste de ma fortuue pas-'
non, craignant le courroux de ce sée. » L'influence complète des idées
prince immortel , a fait entendre tout- grecques sur la prétendue statue de
a-coup une douce voix , et a témoigné Memnon de Thèbes se montre en son
3if il se plaisait en la compagnie des entier dans une dernière inscription,
ieux. » Le séjour d'Hadrien en Égypte Tune des plus remarquables par la
en l'an 130 de l'ère chrétienne est pensée et l'expression, et qui eut pour
un des faits les plus importants de l'his- auteur le poète Asclépiodote, procu-
toire de cette contrée dans le second rateur de l'empereur en Égvpte.
siècle de notre ère; il n'est pas éton- « Apprends, dit-il, ô Thétis, toi qui

nant que les fêtes et les cérémonies résides dans la nier, que Memnon res-
dont il fut l'occasion aient attiré sur pire encore, et que, réchauffé parle
ses traces et échauffé les poètes. Après flambeau maternel, il élève une voix
les temps d'Hadrienrenommée de , la sonore au pied des montagnes Liby-
,

Memnon ne décrut point ni le nom- , ques de l'Égvpte, là où le Nil, dans


bre des témoignages de la vénéra- son cours, divise Thèbes aux bêles
tion publique dont sa statue était portes; tandis que ton Achille jadis ,

l'objet.Sous le kigne d'Antonin , au insatiable de combats, reste à présent


mois de mai de Tan 150 de notre ère, muet dans les champs des Trovens,
un autre dévot écrivit sur un des côtés comme en Thessalie. » L'idée deYAu-
du piédestal : « Ta mère, la déesse rore saluée par son fils domine dans
Aurore aux doigts de rose, ô célèbre les vers d' Asclépiodote: Memnon parle,
Memnon, t'a rendu vocal pour moi qui et Achille est muet dans son tombeau
désirais t'entendre. La douzième année près des murs d'Ilium; c'est la puis-
de Antonin , deux fois ô être
l'illustre , sance de l'Aurore opposée à celle de
divin , j'ai entendu ta voix, lorsque le Thétis ; il ne s'offre donc au poète
soleil quittait les flots majestueux de que des idées toutes grecques; a l'é-
l'Océan. Jadis, de Saturne, Ju-
le liis poque où il composait ces vers,
piter, te fit de l'Orient; mainte-
roi toute tradition égyptienne était hors
nant tu n'es plus qu'une pierre, et de sujet ; le colosse de Thèbes était
c'est de cette pierre que sort ta voix. décidément la statue de Memnon, fils
Gemellus a écrit ces vers à son tour, de l'Aurore, saluant sa mère de sa
étant venu ici avec sa chère épouse voix harmonieuse , tous les matins au
Rufillaet ses enfants. » Une femme s'ex- lever du soleil voilà ce qu'ont dépose
:

primait ainsi : « ayant


Ciccilia Trebulla, unanimement dans leurs inscriptions en
entendu une seconde fois Memnon , ( a prose ou en vers grecques ou latines,
,

écrit ces vers): Auparavant Memnon, les personnages dont nous venons de
fils de l'Aurore et de Tithon , nous a rapporter textuellement les témoigna-
seulement fait entendre sa voix ; main- ges. Il est temps de rétablir, contre
tenant il nous a salués comme connais- tant de religieuses et poétiques attes-
sances et amis. La nature, créatrice tations , la vérité de l'histoire , de dire
de toutes choses , a-t-elle donc donné l'origine de la statue vocale de Mem-
à la pierre le sentiment et la voix? La »» non, si elle parla et comment elle
fille de cette Trebulla faisait aussi des parla.
vers grecs, entendit Memnon et lui fit Aménophis III, de la XVIII» dy-
dire dans une inscription de 6 vers nastie égyptienne, occupait le trône
ce qui suit : « Cainbyse m'a brisée, moi, d' Égypte,* vers l'an 1080 avant l'ère
cette pierre que voici, représentant l'i- chrétienne. Il fit élever a Thèbes un
mage d'un roi d'Orient. Jadis , je pos- vaste édifice; sur ses ruines encore
sédais une voix plaintive qui déplorait subsistantes, on voit souvent répété
les malheurs de Memnon. Depuis long- le nom de ce prince, illustré par de

Digitized by Google
ÉGYPTE. 75

victoires sur les nations de monarque persan la destruction des


rion l'usage, les statues du monuments de cette vaste cité, mais
leur, de dimensions colossales, quant au colosse on dit à Strabon
,

décorer la partie principale de


ifnt qu'il avait été brisé par un tremble-
"
* il en fit placer deux, d'un seul
: ment de terre et les chronohgistes
,

jb de grès-brèclie et de v»0 pieds de disent en effet qu'à une année , qui


leur, vers l'extrémité de l'édifice est la 27' avant l'ère chrétienne, Tbè-
côté du fleuve, et dans un lieu où bes avait été dévastée par un violent
k, selon toute apparence, le prin- tremblement de terre. A l'époque où
pylône du palais, qui porta le Strabon visita l'Égypte, quinze ou
ril\t*Âwé*ophkm* tiré de celui du vingt ans après ce grand phénomène,
Amênophj ou Ph-Aménoph, dont il vit les deux colosses ae l Améno-
Grecs firent A ménophis , Phamé- phium de Thèbes, et il en parle ainsi :
et Phaménoth. « Des deux colosses monolithes, l'un est
[De ces deux colosses, l'un est au entier, l'autre est brisé par le milieu ;
pli et l'autre au nord de Taxe de l'é- la moitié supérieure est tombée par
t: c'est celui du nord qui est de- l'effet, dit-on, d'un tremblement de
, dons des temps on pourrait dire terre : » et ce passage de Strabon, où le
st3tue de Memnon. Tant
, la colosse n'est pas encore mêlé à la
dura la domination égyptienne, légende mythologique de Memnon, est
statue d' A ménophis conserva son le premier'renseignement que l'histoire
vanité grecque n'entreprit rien
,la écrite nous fournit sur la mutilation
ei;e au profit de Memnon ; dans du colosse; cette mutilation était en
menophion , existaient le culte et effet contemporaine de ce témoignage,
prêtres du roi Aménophis, et non et l'on conçoit sans difficulté l'effet du
eux du fils de l'Aurore des Grecs, tremblement de terre sur ce monoli-
jamais les Égyptiens n'admirent ce the quand on sait que la brèche dont
,

étranger "au droit de cité , ni


» il est formé, a quelquefois des fissures

leurs cérémonies religieuses; l'E- qui se propagent dans les blocs à de


té même n'existait déjà pl s, et grandes profondeurs, et qu'une fissure
des successeurs d'Alexandre
|tor\te pareille a pu favoriser les effets des
teit presque près de s'éteindre, que la secousses du tremblement de terre et
fbtue vocale ne portait pas encore le la séparation de la masse du colosse
po»n de Memnon. Klle ne fut donc, en deux portions, dont le haut fut
Rqu'a l'invasion de Cambvse, qu'un détaché et jeté à terre. L'inclinaison
'mirable ouvrage rappelant le nom même de la cassure qui, par derrière
la gloire d'un grand roi , et concou- s'élève jusqu'à la moitié du dos , et
nt a l'ornement du faste et opulent par devant jusqu'au-dessus des cuisses
ttificedont ce roi était le fondateur. seulement , indique avec quelle facilité
Aux temps de Cambvse, Thebes fut la partie supérieure a dû* glisser comme
fccragee par les Perses , les temples par une pente naturelle et se séparer
furent renversés et 4es tombes royales du reste ae la statue. De pareilles lis-
violeVs. Les monuments subsistants sures se retrouvent dans des monu-
fil l'honneur des anciens rois ne furent ments non moins considérables; il y
épargnés : est-ce, à cette époque en a une dans l'obélisque de Louqsor
« désastres pour l'Egypte des Pha- transporté à Paris : de la base, elle se
î3' ns que doitêtre rapportée la mu- prolonge jusqu'à quinze pieds de hau-
Wion du colosse de Memnon? l'ne teur, et elle existait quand le bloc fut
tratlition éc rite autoriserait à le croire, taillé en obélisque. Dans le magnifique
mais cette tradition est tardive et ne sarcophage en basalte vert, rapporté
*? owitie pas avec quelques faits plus d'Egypte par Champollion le jeune et
concluants qu'elle. Lorsqu'on parla à déposé au Musée, une fissure a séparé
Strabon Thebes même des ravages
, à , la cuve en deux parties ; aucune frac-
i« Cambvse , on imputa hautement au ture ne suppose le moindre effort , et

Digitized by Google
7e L'UNIVERS.
la partie détachée s'adapte au sarco- On voit par notre planche 8 que <
phage mieux même que ne le ferait restauration consiste en cinq as*
une pièce taillée tout exprès. de pierres qui rétablissent Tef
Cent quarante ans après Strabon, un d'Aménophis dans ses anciennes |

autre voyageur çrec, Pausanias, vit portions.


aussi renversée a terre la partie su- Les faits historiques qui ressor
périeure du colosse, le reste étaut clairement de ce qui précède , pem
en place comme au temps de Strabon. se résumer ainsi : V deux colo
A I époque de ce dernier, peu d'années firent partie de la décoration du i

avant l'ère chrétienne, on parlait déjà que le roi Aménof


nilique édifice
du son que rendait le colosse du nord t élever à Thèbes; 2° ces colosb
dès le lever du soleil ; moins de cin- selon l'usage, représentaient ce
quante années avant , on n'en parlait lui-même et portent encore son no
pas du tout, du moins on n'en avait 3° ils subirent , comme tous les .

rien dit à Diodore de Sicile, qui ne très monuments del'Kgypte, les efî
nous en a rien transmis non plus; du temps et des invasions étranger*
moins encore du temps d'Hérodote; 4° un tremblement de terre. Tan
et c'est aux temps de Néron que com- avant l'ère chrétienne , brisa celui c
mence la grande renommée de la sta- deux colosses qui est placé vers
tue parlante de .M cm non à Thèbes. nord , et en détacha la partie su;
On a vu dans quelles emphatiques rieure; 5° quelques années après ,
paroles s'expriment les principales était bruit dans le pays des sons
q
inscriptions gravées sur le colosse rendait au lever au soleil la pari
même; aucun écrivain de l'époque ne de la statue restée en place , ou
se dispensa dès lors de parler de la socle qui la portait ; (i° dès le rèç»
grande merveille de l'Egypte : Juvé- de ISéron , ce bruit était générai
nal, Dion Chrysostôme, Lucien, Pau- ment répandu et annonçait une nie
sanias , Ptolémée , qui étaient allés veille qui attirait les curieux de tou
en Éey-pte, Pline, Tacite, Denys le condition; 7° dès cette même é/x 1

Périégète , qui écrivaient loin de que, la statue parlante fut considère


cette contrée, tous disaient à leurs comme étant une figure de Memnor
lecteurs que l'impression des rayons fils de Tithon et de l'Aurore , qt
du soleil tirait des sons de la statue de saluait sa mère de sa voix miracu
pierre de Memnbn. L'empereur Ha- leuse, tous les jours au lever du so
drien en avait été plusieurs fois le leil; 8° à l'intérêt qu'excita cett
témoin ; sous le règne des Antonins, merveille, il se mêla bientôt un ca
la renommée du prodige ne fit que ractère religieux envers le héro:
s'accroître ; elle durait encore , mais d'Homère, le demi-dieu d'Hésiode, U
elle s'éteignit tout à coup sousSeptime- roi de l'Orient ; l'admiration le divi
Sévère, qui fit restaurer le colosse. nisa et lui of rit des libations et deî
Deux faits sont essentiellement re- sacrifices; 9" la statue mutilée fui
marquables dans toute cette merveil- restaurée par Septime-Sévère, et sa
leuse histoire; la statue mutilée, ré- voix merveilleuse ne se fit plus en-
duite à sa partie inférieure, assise sur tendre; le prodige et les chants ces-
un trône, et d'une seule pierre, rend sèrent aussitôt.
ces sons admirables qui charmaient à un Ce fut l'époque fatale à bien des
si haut degré tous les voyageurs en oracles antiques, et l'empereur vou-
Thébaïde ; et.la statue restaurée dans lut en vain opposer les miracles de
son ancien état , complétée par la re- Memnon à ceux du christianisme : la
construction de sa partie supérieure, statue restaurée devait posséder une
devient aussitôt muette. La voix et les voix bien plus harmonieuse, rendre
hommages qu'elle excitait cessent dès de véritables oracles : on détruisit ses
le règne de Septime-Sévère , à qui la merveilles parce qu'on en ignorait la
,

restauration du colosse est attribuée. nature. Les observations faites sur

Digitized by Google
I
ÉGYPTE. 77

i« causes de ee phénomène, ipte; Tidée de leur


foepeut pas être révoqué en doute, Memnon se présenta sans hésitation,
fest constaté que les granits et les et vraisemblablement dès. rétablisse-
Ifcbeîproduisent souvent un son ment des Ftolémées en Egypte. Les
fererdu jour , et quant à la sta- Memnonia furent attribues
édilicesdes
de Thebes , les rayons du soleil au héros homérique, et le colosse
M. de Rozières , venant à frapper merveilleux de l'Aménophium ne pou-
, ils séchaient 1 humidité vait plus être que la statue de Mem-
dont les fortes rosées de la
ite non : lesThébains n'avaient pas oublié
couvert sa surface, et ils
«taraient qu elle était une image de leur ancien
tteuient ensuite de dissiper celle roi Aménophis, et Pausanias raconte
foi ces mêmes surfaces dépolies s'é- qu'ils l'en avertirent expressément
m
'

X imprégnées. 11 résulta de la quand il la visita. Voilà comment une


ftmnuite de cette action que. des oiseuse prétention de la vanité grec-
ins ou des plaques de cette brèche que a fait à l'un des nombreux co-
'
et éclatant tout à coup , cette losses que l'Egypte éleva en l'honneur
ite causait dans la pierre ri- de ses rois , une renommée qui paraît
devoir subsister encore long-temps,
ribration rapide, qui produisait surtout depuis que M. Letronne, par
son particulier que faisait entendre ses ingénieuses recherches, l'a ratta-
» statue au lever du soleil. Elle est chée à l'histoire de l'établissement du
en muette depuis seize siècles. « Je ne christianisme en Egypte.
deThèbes même Cham-
••«pas, écrivait En érigeant de tels monuments
H»n le jeune au mois de juin 1829, construits de telles matières et de tel-
nie pas la réalité des harmonieux les proportions, les Égyptiens se fai-
*** n}s que tant saient par leur pensée une lointaine
de témoins affirment
Ornement avoir entendu moduler postérité , à laquelle ils avaient la
1* le merveilleux colosse, aussitôt confiance de transmettre ces monu-
f était
'I
frappé des premiers ravons ments de leur génie, de leur sagesse
tosofeiL Jedirai seulement que,'plu- et de leur grandeur. Cet espoir n'a
fleurs fois,
assis, au lever de l'aurore, pas été déçu, et le souvenir de l'an-
immenses genoux de Memnon
les tique Égypte est présent dans le
*jo»n accord musical sorti de sa bou- monde entier : l'Europe savante re-
d* n'est venu
distraire mon atten- nouvelle en Égypte les philosophi-
tion du
mélancolique tableau que je ques pèlerinages de l'ancienne Grèce,
^templais, la plaine de Thebes, où et ses ruines historiées sont encore
P*ot les membres épars de cette instructives pour nous, comme le fu-
*fe des villes royales. - rent pour les Grecs ses prêtres et ses
1 0 de archives. Il y avait des idées d'ordre,
ses quartiers , situé sur la
m .

gauche du Nil. du coté des d'utilité et île durée , dans toutes les f

tombeaux, s'appelait dès la plus haute institutions de l'Egypte; après le culte'


antiquité
, tes Memnonia, mot d'ori- des dieux venait celui des bons rois ;
f"* égyptienne, qui a la signification d'innombrables monuments célébraient
ç »eu
des sépultures; c'est là qu'exis- les services qu'ils avaient rendus au
^knt
l« édifices religieux et commé- pays et la gloire qu'ils y avaient ac-
***** des rois divinisés les tern- , quise ; après ces statues colossales ,
ît de Medinet-Habou, le Rhames- les obélisques étaient les plus remar-
et l'Aménophium, et dans ce quables de ces monuments royaux.
dernier temple
, on voyait encore du Les obélisques sont une invention
des rois grecs, (les prêtres du égyptienne, particulière à l'Egypte,
Aménophis divinisé. Ce nom de et* les ouvrages les plus simples de
Jjj
wmnonia dut frapper les Grecs, na- Parchitecture de ce pays célèbre. Tous
Wlemeut lestes a adopter les rap- les obélisques égyptiens sont d'une

Digitized by Google
,

78 L'UNIVERS
seule pierre ou monolithes , de granit ments de plusieurs autres subsi s1
rose, tirés des carrières de Syene, dans encore à Rome; on en trouve a us
la Haute-hgypte , et leur forme est Velletri, Hénévent, Florence , Oatd
celle d'un long prisme , de forme qua- Arles; Constantin et Théodose en
drangulaire, se rétrécissant insensi- nèrent l'hippodrome et le palais i

blement de la base au sommet et se perial de Constant inople. Des prej


terminant en pyramide. Il est im- romains en Kgvpte y firent faire
possible de dire à quelle époque le obélisques où feurs louanges étai
premier obélisque fut élevé; la tradi- écrites en caractères hiéroglyphiqu
tion historique attribue des monu- et les envoyèrent à Rome , bu on
ments de ce genre aux plus anciens voit encore.
rois ; mais aucun des obélisques n'est Le mot français obélisque, qu'oi
antérieur a l'avènement de la XVIII* familièrement remplace par celui d
dynastie égyptienne , qui date de l'an uillc, est le latin obeliscus, dimmi
1822 avant ère chrétienne. Il existe
I 5 u grec obelos , broche. Le mot cl
des obélisques de l'époque de plusieurs lisque signilie donc petite broche , ù\
des princes de cette XV I II* dynastie ekelte, et l'on attribue aux Grecs d
1

et de leurs successeurs. La plupart des lexandrie, hommes d'un esprit ca<


rois égyptiens en érigèrent. La fu- tique et main, d'avoir donné ce)
reur de Cambyse détruisit un grand singulière dénomination à ces n*jy
nombre d'obélisques dans les principa- colossales de granit; il y en a de pl
les villes, à Thèbes particulièrement. de cent pieds de longueur.
On d t aussi que, frappé de la ma- Tant qu'on ignora la véritable dt
gnificence et de la majesté d'un des tination des obélisques, l'esprit
obélisques élevés par le roi Rhamsès système ne s'épargna pas pour la d
dans cette vaste cité, le farouche viner au moven des plus arbitrair
conquérant fit arrêter un incendie qui étymologies de ce simple mot grec, i
menaçait cet obélisque. Les historiens les supposa consacrés au soleil. On
disent que le roi qui le fit élever, vit aussi des colonnes ou autels d\
pour garantir la conservation de ce dieux ,des doigts ou des rayons du g
précieux ouvrage et s'assurer des soins leil, des gnomons, ou des syiuboli
de l'architecte et des ouvriers em- du cours de cet astre.
ployés à le dresser, avait fait attacher Les obélisques sont des monumen
son fils au sommet de Pol>élisque. essentiellement historiques, placés a
Si les rois grecs, successeurs d'A- frontispice des temples et des palais
lexandre en Egypte, les Ptolémées annonçant par leurs inscriptions 1
n'exécutèrent pas de nouveaux obélis- motif de la fondation de ces edilkes
ques , ils ornèrent avec les anciens leur destination et leur dédicace à un
les villes qu'ils fondèrent ou qu'ils ou plusieurs des divinités du pays; le
agrandirent. inscriptions des obélisques donnent le
Quand l'Égypte fut réduite au rang détails des constructions, le nom et l<

de province romaine, Auguste com- filiation, des princes qui les élevèrent
prit combien ses dépouilles si mo- ils indiquent les accroissements ou ici
numentales pouvaient répandre d'é- embellissements exécutes par les soin)
clat sur la vWe éternelle, et il lit de chacun d'eux, et par là, répoqin
transporter à Rome les deux obélis- relative de chaque partie de Teamce;
3ues d'Héliopolis. Caïus Caligula en enfin, les obélisques eux-mêmes sont
emanda un troisième, et, au rap|>ort mentionnés dans ces inscriptions
de Pline, la mer n'avait jamais porté parmi les autres actes de la piété des
un vaisseau d'aussi colossales dimen- Pharaons.
sions, que celui oui fut construit On voit par notre planche 14 com-
pour cette entreprise. D'autres em- ment les Égyptiens employèrent Je*
pereurs imitèrent l'exemple d'A uguste; obélisques ; toujours accouplés , te
onze obélisques entiers, et les frag- n'eurent jamais l'idée d'en placer un

Digitized by Google
-

ÉGYPTE.
I m milieu (Tun vaste espace où îl les fantassins régulièrement formés
b»î s'éclipser. Deux obélisques s'é- en carrés. Sur le massif de gauche
lient en avant du pylône ou entrée sont figurés une bataille sanglante, la
Btipale d'un temple ils annon- : défaite des ennemis, leur poursuite ,
çât majestueusement l'édifice et le passage d'un fleuve , la prise d'une
km les premiers insignes de la ville , et on amène ensuite les prison-
iredu prince qui Pavait construit niers , etc.
fhonneur des dieux de la contrée. Ces deux tableaux ont environ cin-
B préciserons davantage les notions quante pieds chacun; ils sont précédés
^ntielles, relatives aux obélisques, par les deux obélisques qui frappent d'a-
us ajouterons infailliblement à bord l'esprit du voyageur; on- peut se
ir ntérét , en les appliquant spécia- faire une idée, quoique b en faible, de
otnt à la description de l'obélisque leur effet dans l'ensemble de ces im-
Louqsor, si heureusement trans- menses constructions , par la vue res-
rte a Taris et destiné à l'ornement taurée de la façade du monument telle
me de nos places publiques. u'elle était aux temps de la splen-
Le v illage de Louasor est une portion 3 eur de l'Egypte. (V oy. pl. 14.)
territoire de Tnebes, sur la rive Une carrière de granit rose de la
r?îte du Nil. Des ruines étendues plus belle qualité, située à Svène ,
y
tirent le voyageur, et c'est vers vers la frontière méridionale de l'E-
sir extrémité nord que se présente gypte, à la première cataracte, a
fitrée pittoresque du palais, ligurée fourni la matière des deux obélisques.
ts son état primitif sur notre plan- Ils sont tous deux d'un seul morceau
1e 14. C'est un pylône, composé de ou monolithes. Les surfaces ont reçu
six massi's pyramidaux entre les- un poli parfait et brillant ; les arêtes
ïels une porte êst ménagée ; celle du sont vives et bien dressées , mais les
'tais de Louqsor n'a pas moins de faces de l'obélisque ne sont point
muante-deux pieds de hauteur; elle exactement planes. Elles ont à l'ex-
h surmontée d une corniche élégante; térieur une convexité de quinze lignes,
s pylônes ont dix-huit pieds de plus et si régulièrement exécutée , qu'on
'élévation et quatre-vingt-douze pieds ne saurait y voir qu'une preuve de
étendue de cliaque coté de cette la science de l'architecte.
urte. On peut diviser l'obélisque en deux
tn avant àu pylône étaient quatre parties : 1° le prisme quadrangulaire
tatua colossales, chacune d'environ ou fût, comprenant toute la partie du
(tarante pieds de hauteu r et d'un seul monument depuis sa base jusqu'au
ïoc , et en avant des colosses les pyramidion ; 2° le pyramidion , qui
beiisques de granit rose. est portion ta filée en forme de py-
la
Les sujets sculptés en bas-reliefs ramide et qui surmonte le prisme ou
or le ppotm sont d'un très grand in- fût.
erët historique. L'immense surface Les dimensions générales de l'obé-
le chacun de ces deux massifs est lisque ont été reconnues comme il suit :

ouverte de sculptures d'un très-bon pied», pouc. lij.

ityle, sujets tous militaires et de plu Hauteur totale de l'o-


•leurs centaines de personnages. C'est bélisque 70 3 5
e roi Rhainsès-le-Grand ( Sésostris), Mus grande
largeur à
issis sur son trône au milieu de son la base [face nord). 7 6 3
:amp, où il reçoit les chefs militaires Plus grande largeur
et des envoyés étrangers
; on y voit à la base du pyrami-
les détails du camp
bagages , ten-
, les dion {j'açes est et ouest) 5 4 4
tes, fourgons, etc., etc.; en dehors, Le poids total du monolithe est
l'armée égyptienne est rangée en ba- évalue à 220,528 kilogrammes ( 4457
taille, les chars de guerre a i'avant , à quintaux), et avec le revêtement en
l'arrière et sur les lianes; au centre, bois pour le transport, le poids du

Digitized by Goc
ao L'UNIVERS.
monument arrfve à 5000 quintaux. sur l'obélisque s'élève à 1GOO ;
L'obélisque était posé sur un dé autant de portraits fidèles de^
carré, en granit, dont la surface a figurés, et l'on comprend q<
été trouvée , par les fouilles , à 3" cette science
fidélité , complet
80 e au-dessous du sol actuel , et qui iconographie qui pouvait en
a été mis à découvert jusqu'à une pro-
fondeur de 1- 60*. On a reconnu que
tous les objets de I univers
était dans les inscriptions é^>*/
m
ce dé a été dégradé par la nature, et une condition essentielle et ton
il n'offre quant à l'extérieur qu'une taie, puisque chacun de ces
croûte friable et scoriée. Les faces sud avait un sens propre, absolu,
et nord étaient autrefois ornées de toute incertitude sur la nat
quatre cynocéphales en relief; les fa- l'objet figuré l'aurait privé aus
ces ouest et est étaient aussi occupées son expression comme signe <l <

par un autre sujet sculpté. et aurait jeté de la confusion da


Le dé en granit était posé sur des dre et l'exposition graphique de:
constructions en pierres de grès, et la Cette condition essentielle de Te
conservation du monument dans son sacrée égyptienne explique la j

état primitif jusqu'à nos jours en mon- tion des sculptures hiéro<rlypr]
tre suffisamment la solidité. Tous les et l'examen de celles de obéi 1 i

grands édifices égyptiens encore subsis- Louqsor, exécutées sur uneroelu


tants sont construits avec le même dure, aussi solide, on pourrai
grès ; on le tirait des carrières de Sil- inaltérable, composée d'au moi m
silis, dont l'exploitation est historique- substances cristallisées , intinx
ment prouvée pour des temps bien adhérentes, et également rebeh
antérieurs à Sésostris. ciseau, doit nous donner une
Les quatre faces de l'obélisque sont idée de l'art, des artistes et des
couvertes d'inscriptions en caractères cédés mécaniques auxquels nous
hiéroglyphiques. Ln léger examen suffit mes redevables d'un pareil monui
}>our faire voir que, sur chacune d'el- Ses inscriptions nous en font
es , les signes sont rangés symétrique- naître l'objet et la destination ; fa
ment pour composer trois colonnes du prince illustre qui éleva le |

perpendiculaires, bien distinctes, et de Louqsor s'y révélait dès Tapp


Formant ainsi trois inscriptions , trois de cet édifice à la fois civil et reng
phrases sur chaque face. Cette dis- et les deux obélisques y sont ex
tinction est encore plus tranchée par sèment figurés et mentionnés ,

la manière dont chaque colonne a que la vaste et somptueuse cous 1

été exécutée; sur toutes les faces, les tion dont ils décoraient le frontis
caractères de l'inscription du milieu Quant au texte des inscription
sont sculptés en bas -relief dans le peut diviser l'ensemble de celle:
creux , à une profondeur de plus de chaque lace de l'obélisque, en
cinq pouces, et parfaitement polis; parties :

les hiéroglyphes des deux colonnes la- 1° Immédiatement au-dessous di


térales ont une proiondeur moitié ramidion, le bas-relief des offrat
moindre, et sont seulement piqués à qui occupe toute la largeur de chu
la pointe. L'œil est satisfait d'une op- lace.
position qu'il saisit facilement et qui, 2°En téte de chaque colonne d*
par la variété des tons et des reflets roglvphes , un encadrement surin
prévient toute contusion dans l'ordre té de la ligure de l'épervier s
et l'expression de ces signes nombreux, Iclique avec la coiffure royale,
admirable tableau sculpté avec la der- terminé en ranges à sa partie ir
i

nière précision , et dans lequel chaque rieure ; on peut donner à cet encad
signe joint à la beauté et au fini du ment le nom de bannière royale
travail la plus grande pureté de dessin. renferme les titres honorifiques et
Le nombre total des signes sculptés ries des princes nommés dans les ol

Digitized by Google
ÉGYPTE. 81

iques, et on le trouve figuré isolé- trois de ces inscriptions furent


rot à coté des rois égyptiens , dans terminées. Comment
ces chants de
es représentations de cérémonies re- victoire interrompus? La
furent-ils
censes ou civiles- •
mort surprit Rhamsès II au milieu de
&S* V
inscription proprement dite, ses trophées.
bot les signes, divises en trois colonnes Rhamsès III ou Sésostris lui suc-
, et écrits les uns au-dessous céda ; il ou termina le R ha mes-
édifia
isolément ou par groupes séion de Louqsor , adopta les obélis-
trois inscriptions verticales ques commencés par son prédécesseur,
de haut en bas.
se lisent employa à y rappeler sa propre gloire,
En général , un obélisque dont les toute la place que Rhamsès II laissait
atre faces ne portent qu une inscrip- inoccupée , c'est-à-dire trois faces en-
o médiate chacune, ne mentionne tières de l'obélisque qui est encore à
ne ie souverain qui le dédia ; quand Louqsor, une face entière de l'obélis-
y a trois inscriptions , c'est un roi que ue Paris, et sur chacune des trois
à celui-ci qui a fait ajouter autres faces terminées , comme sur la
inscriptions latérales. seule que le nom de Rhamsès occupait
Quelques groupes de signes sont en- sur l'autre, la place nécessaire aux
fermés dans un encadrement dont les deux inscriptions latérales qui
contours sont uniformes et réguliers. tent sur toutes les faces également.
Les encadrements se nomment cartou- Sur l'obélisque de Paris les travaux
ches et méritent une attention toute des deux rois sont ainsi distribués :
particulière , les cartouches donnant à / Rhamsès II, l'inscrip-
tous les monuments où il s'en trouve ΄^j
™p\ tion médiale;
une haute importance historique. Rhamsès III, les2in-
e
On entend par cartouche , des grou- > scriptions latérales.
pes de signes hiéroglyphiques renfer- Face ouest, Rhamses III, les 3 in-
més dans de petits encadrements com- scriptions.
posés de deux lignes verticales ou De plus, Rhamsès III fit dresser
norizontales , arrondies par le haut et cet obélisque et graver son nom sous
par le bas, et posés sur une base rec- le plan de la base, et sur toutes les
tangulaire. parties du piédestal où ce nom pouvait
On trouve enfermés dans les cartou- être placé comme ornement ou comme
e
ches : I les noms propres des divinités, renseignement historique.
ou dievr-dynastes, qui furent considé- Enfin, et pour multiplier encore ces
rées comme ayant gouverné l'Égypte et renseignements pour une postérité qui
le monde terrestre à l'origine des cho- devait s'étendre jusqu'à la génération
ses; 2° les noms propres et les prénoms présente , et qu'il était dans la desti-
royaux des rois et des reines qui ré- née de la France de perpétuer par sa
gnèrent en Égypte, soit nationaux, munificence, Sésostris fit écrire sur la
soit étrangers. face nord du monolithe laissé à Louqsor,
Les cartouches de l'obélisque de Pa- Sue lui, seigneur de la région d'en
risrappellent les noms et les actions aut et de la région d'en bas (la Haute
des deux rois; mais l'équité de l'his- et la Basse-Egypte), Germe (fils) des
toire peut faire la part à chacun d'eux. dieux et des " déesses , Seigneur du
C'est Rhamses II qui lit extraire l'o- monde, Soleil gardien de la vé-
bélisque des carrières de Syène , qui le rité, APPROUVÉ PAR PlIRÉ, a /dit
fittransporter à Thèbes, qui le destina ces travaux (le Rhamesséion de Louq-
à la décoration d'un grand édifice qu'il sor ) pour son père Amon-Ra, et qu'il
est difficile de désigner aujourd'hui. a érigé ces deux grands obélis-
Il est certain que cet obélisque de- ques en pierre devant le Rhames-
aitconsacrer parquatre inscriptions et séion de la ville d'Ammon (Thèbes).
transmettre jusqu'à nous le souvenir de Sésostris termina donc ce grand ou-
la gloire et de la piété de Rhamses II ;
vrage commencé par son prédécesseur;
<P Livra'uon. (ÉoYrTE.)

Digitized by Google
L'UNIVERS.
et ce concours de deux rois à l'achè- nous suffira ici pour donner une i
,

vement de ces admirables monuments du contenu des inscriptions de


fournit, pour leur histoire, des notions genre, de mentionner celles qui r
chronologiques assez précises. sellent Rhamsès III, Sésostris. Ta
Le règne de Rhamsès II, qui fit a face ouest de l'obélisque lui app
commencer ces obélisques remonte à
, tient, étant demeurée vide par la m
Tan IÔ80 avant l'ère chrétienne; il deHhamsèsIL
n'existe pas de monuments avec des Dans le bas-relief des offrant
dates postérieures à la quatorzième de laface qui regardait l'ouest , i
année de ce règne, qui (mit bientôt sostiis, coiffé du pschent compl»
après ; ce fut dv ne, vers Tan 1.f>70 que symbole de son autorité sur la Uni
ces obélisques furent entrepris par et sur la Rasse-Kgypte , et surmoi
Rhamsès 11 , après qu'il eut châtié les du glol e ailé du soleil , fait au grai
impurs en Afrique et en Asie, comme dieu éponyme de Thèbes , à Amoo-i
le disent ses inscriptions. l'offrande" du vin.
Sésostris succéda à son frère vers Aux louanges d'usage, la co!oni
Tan I5GÔ; il édilia ou continua le pa- médiate ajoute que Sésostris est le (I
lais de Louqsor, et un tel ouvrage préféré du roi des dieux, celui qu
exigea bien des années; sur les bas- sur son trône , domine sur le mom
reliefs du p\ lone, qui est le frontispice entier. On mentionne le palais qu'il
même du pà.ais(t>7. 14), Sésostris lit fait élever dans l'ôph un midi ( i

sculpter en grand sa campagne contre pa tie méridionale de Thebes). Le ti


les Asiatiques, et les inscriptions h.i tre de bienfaisant lui est donné dan
donnent pour date la cinquième année l'inscription de droite, qui ajoute
du èi.ne de ce roi ; les obélisques ne
i « Ton nom est aussi stable que 1

furent élvés qu'après ce pylône; on « ciel durée de ta vie est éuîile


; la
peut donc les supposer, dès Tan 1650, « la durée du disque solaire. » bésos
a la place où ils ont bravé , pendant tris porte, dans la bannière de Tin
nrès de 3,400 ans. le temps et les scrintion de gauche, le titre de chéri di
nommes. la déesse de la vérité, et, avec d'au-
Qu'il nous soit pennis de dire que tres louanges très-ordinaires dans II
leur destin est bien changé: monu- protocole royal égyptien, cette in-
ments nationaux et sacrés sur les scription proclame Rhamsès III « l'en*
rives du M,
ils ne seront plus, sur « gendrédu roi des dieux pour pren-

celles la Seine, que des aiguilles


de « dre possession du monde entier. •

de granit dont l'antiquité, l'origine et Les trois colonnes de cette face sont
la magn ficence peuvent concourir à uniformément terminées par le car-
l'éclat que les prodiges des arts répan- touche nom propre d»i roi , le fils du
dent sur une civilisation éclairée. Soleil, le chéri d'Ammon Rhamsès.
Les inscr ptions célèbrent à la fois A la Face Sud, la bannière et {'in-
la gloire des deux rois leurs victoi-
, scription de la colonne de droite pro-
res, leur piété, et rappellent spéciale- clament Sésostris « TAroéris puissant,
ment que ce sont eux qui ont élevé « ami de la vérité, roi modérateur,
ces mai niliques édifices en l'honneur « très-aimable comme Thmou , étant
du grand dieu deThèbes, auquel ils les n un chef né d'Ammon, et son nom

ont consacrés : c'était là la véritable des- « étant le plus illustre de tous. » Sur

tination des obélisques, monuments la colonne de gauche, on lit dans la


singuliers, dont l'invention tout égyp- bannière « L'Aroéris,
: roi vivant
tienne a pour caractère propre une « des régions d'en haut et d'en bas,

grandeur colossale et une éternelle « enfant d'Ammon; » V inscription


durée. donne à Sésostris le titre de roi direc-
Les inscriptions hiéroglyphiques teur, mentionne ses ouvrages, et ajoute
concernent les deux rois qui ont con- qu'il est « grand par ses victoires , lils
couru à l'élévation de l'obélisque , et il « préféré du soleil dans sa royale d*

Digitized by Google
EGYPTE, 81

I meurt, le roi (tes pr s jet nom nemis , et sur l'amour que la prospé-
• propre;, celui qu" rité de la patrie inspire aux citoyens;
f comme le du ciel, par il l'enrichit de la dépouille de Vingt
peuples rivaux ou jaloux ; il ajouta à
». • toutes les merveilles de l'Egypte et de
AFace Est ,
la la bannière de la la Nubie, d'autres monuments non
tbffjnne de gauche est remarquable moins dignes de ce nom. Il voulu*
ptf le grand nombre de signes qui aussi , par des soins presque mi nu*
iemposent sa légende, qui signifie: tieux , s'assurer la gloire d'avoir érige
» L'Aroéris puissant, le grand des les deux obélisques de Louqsor, com-
* fanqueurs , combattant sur sa me s'ils devaient
par leur inaltérable
,

» force. » L'inscription nomme Së- solidité, réaliser les promesses surhu-


mns grand conculcateur, le seigneur maines que les prêtres de l'Egypte
4b victoires , qui a dirigé la contrée lui firent au nom de leurs dieux , qui
entière, et qui est très-aimable, hnfin, ne sont déjà plus. Les obélisques do
li bannière qui surmonte l' inscrip- Sésostris leur survivent depuis quinze
tion de droite annonce que Sésostris siècles , et , par une ovation nouvelle,
«t l'Aroéris fort , puissant dans les
=>
la civilisation moderne rajeunit à ja-
( assemblées ci- mais de Sésostris et Pan-
et la gloire
« ou religieuses ) , l'ami du
nies tique illustration de l'Égypte. La
« monde, et le roi modérateur. » L'in- France s'y emploie avec succès en les
«ription ajoute , comme pour com- associant à sa propre renommée, et il
bler b mesure des éloges, qu'il est entre sans doute dans l'accomplisse-
aussi « le prince des grands
,
jouissant ment de ce devoir un juste sentiment
• du pouvoir royal comme Thmou de reconnaissance, car les sciences,
• et que les
die s des habitants de la source première de nos prospérités,
1 terre
entière sont tous sous ses san- nous sont aussi , comme la lumière ,

«Mes. arrivées de l'Orient.
Les inscriptions latérales de la face Ce n'est pas moins un spectacle
wnl n'expriment pas de moins magni- des plus surprenants , et par cela même
fiques éloges : dans celle de gauche bien digue de notre époque, qui est celle
ta bannière qualifie le roi de Aroéris des plus extraordinaires coïncidences
puissant, gardien des vigilants , et que ce monument inaltérable d'une
l'inscription rappelle sa force et ses gloire qui semble délier le temps, et
victoires, ainsi que sa gloire dans la l'envie plus cruelle que lui , s'élevant
tore entière. Dans la colonne de sur une des places de la capitale de la
droite, c'est le Gis chéri de la vérité; France , c'est-à-dire sur les cendres à
test un second dieu Mandou, dont il jamais refroidies des générations gau-
«t le fils; et le monde entier a trem- loises , romaines , grecques et égyp-
m par ses exploits. tiennes.
Le dé et toutes les parties du sou- Que d'histoire entre Sésostris et
tassement portent uniformément ie nous , et c'est le génie des arts qui a
nom de Sésostris : combien l'antique jalonné cet espace par ses merveilles !

^nommée de ce roi qui date aujour- Les armes d'Achille avaient servi à
d'hui de trois mille quatre cents ans, plusieurs générations de héros, pour-
najoute-t-elle pas de merveilleux in- quoi le même monument ne servirait-
à un tel monument! Ce prince, il pas à plusieurs triomphes? Qu'il me
térêt

«ffet , illustra son nom et son rè- soit permis de te répéter ici : aura-
par les éminents services qu'il t-on nien tout fait , quand l'obélisque
rendit à son pays dans les camps com- de Sésostris sera convenablement
•ue dans la cité* ; il fut à la fois erand dressé sur une de nos places publi-
conquérant et sage législateur con-
; il ques, et doit-il suffire a la satisfac-
la véritable gloire , fondée sur le tion du gouvernement de l'y montrer
^ct que la victoire impose comme une difficulté vaincue,

6.

Digitized by LiOOQle
«4 L'UNIVERS
un tour de force très- péri lieux de no- en maintinrent héroïquement l'hon-
tre mécanique moderne , qui aura neur et la renommée.
l'immense mérite d'avoir élevé sur un Puissent d'honorables suffrages
piédestal une pierre du poids de quel- donner un jour quelque valeur à un
ques milliers de quintaux? et ne vien- vœu sans intérêt , et qui , réalisé , ac-
dra-t-il à l'esprit ou au cœur d'aucune quitterait une dette sacrée pour la

des personnes dont la voix a quelque France tant qu'elle restera lidèle à sa
autorité dans les conseils du prince propre gloire !

ou dans ceux de la nation , que cette Celle de l'empire égyptien , comme


pierre peut être animée par d illustres sa puissance, se révèlent ici par la
souvenirs , consacrée par im sentiment splendeur du trône et les magnificences
religieux et national à la mémoire de la royauté. Tant d'éclat ne pouvait
des enfants de la France morts pour procéder que d'un ordre parfait , et un
sa gloire dans ce même désert d'où tel ordre dans un grand état suppose
l'obélisque vient d'être arraché? Tout un pouvoir respecte au dehors , intel-
le monde comprendrait très-clairement ligent au dedans, passionné pour le
cette pieuse résolution de la France, bien public, en dirigeant toutes les
qui , au prix du sang de ses enfants sources vers l'utilité commune ; pro-
avant délivré d'une mortelle oppres- fondément imbu de cet esprit de mo-
sion et relevé à jamais l'antique re- dération qui est le secret de la véri-
nommée de l'Égvpte , en consacrerait table puissance et le signe d'une rai-
les reliques sur les bords de la Seine son éclairée ; imprimant dans tous les
aux mânes de ses héros abandonnés cœurs un amour ardent pour le pays
sur les rives du ÎSil. et un ferme élof gnement pour les étran-
Qu'une loi ordonne que l'obélisque f;ers; enfin, assez proue, ou assez
sera élevé en mémoire de L'EXPEDI- îeureux pour avoir amené une na-
,

TION FRANÇAISE EN ÉGYPTE , Car tion nombreuse, active et rélléchie,


mémorable entreprise
elle est la plus vivant dans l'abondance du nécessaire
des temps modernes par son objet
,
et dans les profusions d'un luxe per-
ses moyens , l'illustration des noms fectionné, éminemment morale, re-
qui s'y* rattachent, et par ses nom- ligieuse jusqu'à la superstition , adon-
breux résultats , les uns déjà si utiles née avec une égale ponctualité à ses
à la prospérité de la France , au pro- Rlaisirs et à ses devoirs, chérissant se>
grès des peuples du Levant vers la )is, ses princes et ses magistrats,
civilisation , et les autres d'un si haut plus exigeante peut-être pour ces ver-
intérêt pour la véracité des annales de tus mêmes, à cette fusion complète
la philosophie humaine. des existences individuelles en une puis-
une inscription simple, précise, et sante nationalité, et pour lui avoir
très-intelligible pour tous , dirait : inspiré cette habitude de confiance et
de soumission qui sont Tordre même,
A l'armée d'orient et, chez les peuples civilisés , un té-
I QUI OCCUPA moignage manifeste de l'affection ré-
./ÉGYPTE ET LA SYRIE ciproque des princes et des citoyens.
en 1798, 1799, 1800 et 1801. Telle fut T Egypte dix-huit cents ans
LOI DU avant l'ère chrétienne ; les monuments
nous l'apprennent ; on n'a exposé jus-
L'armée d'Orient grava ses vœux qu'ici que les résultats les plus cer-
patriotiques pour la France sur les tains tirés des tableaux historiques
rochers de Syène, à la frontière ex- dont ces monuments sont décorés. Au
trême de l'Egypte vers le midi. A son spectacle de tant de sagesse , unie à
tour la France manifesterait enfin sa tant de puissance, l'imagination s'é-
gratitude envers ces phalanges savan- lance curieusement vers ces temps pri-
tes et guerrières qui portèrent son mitifs de l'histoire, et y recueille avec
nom jusqu'aux contins de la .Nubie, et orgueil et respect ces preuves nom-

Digitized by Google
I

EGYPTE. 85
HfBses de rantiquité de la sagesse hu- oes personnages, inoiiDiinniemeni chi-
ujïDe ; et nous demandons a Dieu et nois de physionomie et de costume
hh hommes de nous dévoiler les mys- se retrouvent peints par des Egyptiens
tères de son origine , de ses expérien- au nombre des peuples étrangers re-
» , de son perfectionnement. présentés dans un des plus anciens

La nation égyptienne n'était pas tombeaux de la même ville; enfin, les
seuîe au monde dans ces temps si ré- certitudes historiques dans les annales
cite pour nous : à ia même époque de la Chine remontent à plus de six
Ét grands empires se partageaient les siècles au-dela des temps de la restau-
ferres et les mers de l'Orient; tous, ration de la monarchie égvptienne , '

mais diversement , civilisés. après la lin des Pasteurs.


En Afrique , les souvenirs de Pam- .Dès le règne de la XVI II* dynastie, les
pre de Méroé remontent au-delà de Égyptiens combattent sur terre et sur
«rite époque; et si l'Egypte fut une mer contre des peuples indiens ; les ar-
émanation de la civilisation éthio- mes et l'attirail militaire sont sembla-
pienne, elle ne fut point infidèle aux bles des deux côtés ; les bois et les mé-
devoirs de la reconnaissance, et par- taux artistement travaillés , s'y mon-
,

que au plus haut période de sa splen- trent sous mille formes diverses ; les
deur, elleconfondit sa gloire avec ses chevaux etd'autres animaux y sont dans
oriîines monuments de style égyp-
; les la domesticité de l'homme ; des chars
tien et de la domination royale de guerre , de riches costumes , des
égyp-
tienne jalonnent encore en Ethiopie villes fortifiées, des ponts jetés sur
*n espace de quatre cents lieues, en des rivières dans le pays où la victoire
remontant le T\il au midi de la eata- a conduit l'armée et là flotte du Pha-
nrte de Syène. Dans le sanctuaire de raon, annoncentdans le paysocrupé par
^emné, au sud de la seconde cataracte, ces Indiens toutes les ressources d'une
If roi Osortasen , le troisième de la civilisation non moins avancée que
XVir dynastie égyptienne, est adoré celle de l'Kgypte, et on ne saurait re-
ff'mme un dieu. Les noms d'Amosis fuser à l'Inde les temps historiques
sixième roi de la même dynastie
te révélés par ces rapprochements.
* le prédécesseur immédiat de la A Babylone, les règnes de Bélus
XVIIr, sont inscrits dans les bas- et de IVinus étaient déjà anciens; Sé-
religieux du même temnle. Ce
rrîiefs miramis était morte depuis plus d'un
MThouthmosis III, le Mœris ae cette siècle; depuis le même temps les mer-
"réme XVIII e dynastie, qui consacra veilles de Babylone , ses riches palais
« temple au dieu iNil et au roi Osor- ses innombrables canaux, ses ponts
Wsen, l'un de ses ancêtres divinisé. et ses quais , annonçaient la splendeur
O même Thouthmosis éleva d'autres de l'empire ; cette reine illustre av ait
«lifices royaux et sacrés à Contra- élevé de vastes édifices dans la Médie
^wné, à Amada, autres lieux de la dans l'Assyrie, étendu sa puissance
-Nubie ; et ces témoignages historiques au-delà des sources du Tigre, et fondé
nous disent assez l'état avancé de l'fi- dans la Grande- Arménie, à cent cin-
thiopie et de l'Egypte dans une civili- quante lieues de Babylone , cette ville
^tion analogue, qui fit Thebes d'abord de Semiramacerte (là v ille de Sémira-
^ale et ensuite héritière de Méroé. mis), dont l'existence a paru fabu-
pans l' Asie orientale , l'empire chi- leuse malgré les rapports des écrivains
nois en était déjà alors, et depuis plu- grecs et orientaux , jusqu'au moment
81 ws siècles , a cette civilisation d'a- où des découvertes toutes récentes ,
dultes, qui n'était pas prédestinée à faites sous les auspices de la France
k tïrilite, et la Chine n'était vrai- ont fait retrouver sur les bords du lac
semblablement pas inconnue à l'E- de Van l?s ruines étendues de cette
^"pte quelques débris de l'industrie
; ville, de ses châteaux, et les vastes
chinoise ont été recueillis sur le sol do syringes qui furent creusées dans les
Thèbes, dans des fouilles profondes; flancs de la montagne, et qui sont

Digitized by Google
L'UNIVERS
encore tapissées de nombreuses in- A Méroé, la théocratie arec ses <w
scriptions en caractères cunéiformes brageuses exigences , et autour d'cll
comme ceux des inscriptions de Baby- des peuplades de pasteurs indompU
lone, et en style assyrien. C'est là en- et vagabondes.
core un synchronisme très-significatif En Chine, l'égalité civile ouvrant
pour la civilisation égyptienne, comme tous, par la voie des lettres, par la pr
aussi de celle de Babvïone, qui eut, motion et le mariage, l'accès aux pr
bien des siècles après, les Chaldéens et mières charges de l'état et la parti*
les Perses pour héritiers de sa splen- pation à un pouvoir essentielleme
deur et de sa puissance. despotique par sa vétusté, de sa n
Les villes de la Svrie se confédé- ture imperfectible.
raient du temps de Moïse ; leur fon- Dans l'Inde, l'inertie flegmatiqi
dation , leur puissance remontaient à des masses les précipitant dans c
des époques antérieures; les courtiers éternel et contemplatif repos auqu
universels du commerce de l'Orient, un pouvoir mi-parti civil et religiei
les Phéniciens, les avaient fondées, les condamnait pour sou propre a va
enrichies et agrandies; ils fréquen- tage.
taient toutes les régions alors con- A Babylone, la tyrannie du roi <

nues , les cotes de l'Egypte sur la celle des satrapes s'appropriant av<
mer Rouge et la Méditerranée; des une ardeur rivale une domtnatîo
manuscrits phéniciens ont été trouvés hiérarchiquement tyrannique, esse*
mêlés avec des papyrus de l'Egypte. tiellement féodale, de laquelle depei
Ainsi , pendant que l'Kgj pte renais- daient, corps et biens, et les provinces
e
sait à son ancien état avec sa XVIII et les cités, et les individus.
dynastie, et couvrait de nouveau le A Tyr, à Sidon, au contraire, la dé
sol de ses villes de monuments où se mocraiie commerçante, des rois inar
déployait à l'envi le luxe de tous les chauds, et des marchands pour rois
arts ; 'autour d'elle , de près et de loin, population à oui le tarif des bénéfice;
le même avancement de Y intelligence tenait lieu d'esprit national ; qui
humaine, dirigé et soutenu par la animée d'un patriotisme de comptoir,
pratique des arts , se montrait dans fondait de nouvelles cités ou créait de!
les habitudes sociales , dans les cou- rois nouveaux sous les inspirations d<
tumes de paix et de guerre de plusieurs monopole , et que les satisfactions in«
des nations de l'Afrique et de l'Asie ; satiables du pouvaient seule*
lucre
en même temps se montraient aussi éloigner de l'émeute et des séditions ;
les premiers rois hellènes dans notre misérable clientelle pour tout gouver-
Europe; en tous ces lieux divers à la nement sage et prudent, et qui sait
fois le génie de l'homme accomplit par que l'homme, nativement doué de
sa culture sa divine destinée; l'or et sentiments plus impérieux que l'ab-
la puissance se montrent partout, mais jecte passion des intérêts, cherche ail-
à F Egypte seule le privilège de la sa- leurs que dans les races carthaginoises
gesse dans (es lois , et comme l'a dit les inspirations du patriotisme et les
Bossuet, «les exemples de toule bonne liens des devoirs civiques.
police ; » réalisés en effet par la com- A l'Egypte donc appartient légiti-
binaison en un pouvoir unique d'in- mement cette renommée de science et
fluences diverses , rivales, mais réci- de sagesse que lui fit unanimement l'an-
proquement restrictives , et forcément tiquité classique tout entière; elle est
dirigées par la puissance de l'habitude, confirmée par l'idée sommaire que
l'influence de l'opinion et l'effet des nous venons de donner de ses institu-
franchises réservées aux castes populai- tions sociales, des droits et des devoirs
res, vers le bien général , le culte des qu'elle avait faits à la royauté.
dieux et la dignité humaine.
Rien de pareil n'exista dans les ci- XIV. DE LA CLASSE SACERDOTALE.
vilisations contemporaines. On sait déjà , nous l'avons dit , que

Digitized by Goc
ÉGYPTE.
lacaste sacerdotale était, à proprement vivre, parce que le roi leur faisait dis-
parler, la partie instruite et savante tribuer du bled tiré des greniers pu-
de la nation. Elle était spécialement blics. Il est donc certain , par cette
vouée à l'étude des sciences et au curieuse et antique relation , que,
progrès des arts ; elle était chargée en avant l'invasion des pasteurs, ou
oatre des cérémonies du culte, de hyk-shos, c/est-a-dire , plus de deux
l'administration de la justice, de ré- mille ans avant l'ère chrétienne . la
tablissement et de la levée des impôts, caste sacerdotale était dotée de pro-
invariablement fixés d'après la nature f>riétés territoriales ; ce ne furent pas
et l'étendue de chaque portion de ter- es pasteurs qui imaginèrent ce moyen
rain mesurée d'avance; enfin, de toutes de conservation et de perpétuité pro-
les branches de l'administration ci- pre en Egypte au premier corps de
vile. l'état, ils respectèrent seulement un
Souveraine dans la primitive orga- usage consacre par les lois et par le
nisation de l'Égypte, en passant au temps ; ils le respectèrent dans les con-
second rang, lorsqu'une révolution jonctures les plus favorables à leur es-
l'obligea de céder premier au roi
le prit de conquête , et l'influence de la
créé par la caste militaire, elle con- caste sacerdotale explique
suffisam-
serva néanmoins la plus grande partie ment les ménagements qui furent
lui
de son influence ,
et, sans doute, parce alors accordés. I n autre privilège pa-
qne cette influence avait été fondée rait avoir été des l'origine concède en
dès foristine , sur de vastes possessions même temps à la caste sacerdot le ; ses
t rritoriales et sur de grands privilè- propriétés étaient exemptes d'impôt ;
ges. La caste sacerdotale était consti- toutes les terres d'Egypte, selon l'his-
tuée en effet sur le principe qui , dans toire précitée, furent taxées, au pro-
toute organisation sociale, porte avec fit du lise royal , au cinquième
lui, et lui seul, des éléments» immua- de leur produit*, excepté encore les
bles de solidité et de durée , sur la terres sacerdotales, qui furent libres
propri«Hé territoriale. Durant le règne de tout impôt sous les rois pasteurs.
des pasteurs, et de la XV! f dynastie Elles l'étaient auparavant sans doute;
des Pharaons, une famine ravagea et nous tirons notre pensée de l'uni-
TÉsypte. Ce
fut pendant le ministère formité des institutions égyptiennes
de Joseph , et l'on peut croire à une pour toutes les époques, car il en était
famine dans le pays le plus fertile ainsi du temps de l'annaliste que nous
mais où la certitude des récoltes repo- consultons : « Depuis ce temps ( de-
sait sur la régularité des inondations puis Joseph; jusqu'à ce jour, dit
du fleuve, et l'entretien régulier des Moïse, deux siècles après Joseph, on
canaux, en un mot, sur les soins at- paya au roi dans toute l'Egypte le
tentifs et expérimentés de l'adminis- cinquième du produit des terres, et
tration publique, puisque cette admi- ceci est comme passé en loi ; excepte
nistration et le gouvernement du pays les terres sacerdotales, qui sont affran-
appartenaient à une horde de barbares chies de cet impôt. » Les temples, c'est-
conquérants, incapables de prévoyance à-dire caste sacerdotale, jouissaient
la
p t ignorants de tout précepte d'ordre donc en Egypte de cette perpétuité de
social. L'histoire biblique de cette fa- possession et de revenus qui , s'ils s'é-
mine nous apprend que Joseph acheta lèvent à un taux considérable, sont
avec ses blés de réserve toutes les un moyen certain d'autorité et d'in-
propriétés particulières et fit ainsi le fluence', moyen dangereux pour l'or-
roi maître de toutes les terres de l'É- dre public, conservation des famil-
(a
pvpte, excepté, dit la Bible, les terres les, la prospérité de l'état, et contre le-
des prêtres qui leur avaient été don- quel tant d utiles exemples, consignés
,
ijws par le roi ; et les prêtres, ajoute dans l'histoire ancienne et moderne
l'historien furent dispensés de l*o-
. ont consacré une résistance nécessaire.
Wigation de vendre leurs terres pour La splendeur des temples et la pompe

Digitized by Google
sa L'UNIVERS.
des cérémonies religieuses prouvent as- seigneur du monde , soleil
sez que le sacerdoce en Egypte posséda de la région inférieure, approuvé r
de grandes richesses ; et S est certain Phtha, Fils divin du soleil, seigneur
que le produit des terres n'en fut pas des contrées, Rhamsès chéri d Am-
la source unique. mon, divin président » titres officiels
,

11 nous est parvenu des registres de Rhamsès V, qui est aussi un des i

originaux des recettes faites dans les rois Rhamsès de Manéthon ; et c'est
temples , et ce n'est pas sans preuves dans ce même registre qu'on trouve
qu'on peut affirmer que ces recettes mentionné parmi les contribuables,
comprenaient des produits autres que un individu appartenant à la demeure
les revenus des domaines sacerdotaux; du roi divin , un habitant
c'est-à-dire
des redevances diverses étaient payées du palais bâti par un autre roi à Thè-
en nature aux temples de l'Kgyptê; la bes. I n autre ue ces registres de comp-
piété des citoyens ne pouvait pas rester tabilité, tenu par le scribe IMandou-
stérile, etlà 'où les métaux monnoyés mès, est presque sans lacunes pour
n'existaient pas, les produits de la cinq mois consécutifs; il y a aussi
terre ou de l'industrie devaient être parmi les personnes qui ont" payé leur
les seules valeurs habituellement en tribut , un nommé Natdi - Amoun ,

circulation : les métaux précieux débi- homme appartenant à la demeure du


tés au poids n'étaient qu'une sorte de roi Rhamsès Méiamoun; les officiers
ces mêmes valeurs. Ces registres de du palais n'étaient donc pas exemuts
recettes pour les temples consistaient des redevances perçues au profit a es
en feuillets de papyrus arrangés ou en temples. Un autre papvrus en rouleau,
rouleaux , ou en registre de plusieurs presque complet , renferme un compte
feuillets sur lesquels on écrivait sur le très -détaille d'objets reçus ou livrés
recto et sur le verso. Ces registres par les prêtres chargés au culte du
portaient sur le premier feuillet le Pharaon Rhamsès ;X et ici il y a
Protocole entier du roi régnant, et analogie entre ce registre et les autres
année de son règne ; les articles de pièces comptables relatives aux finan-
recettes y étaient ensuite inscrits jour ces des temples, le culte des rois étant
par jour jusqu'à la tin du registre, et assimilé à celui des dieux , et les re-
un scribe du temple était commis à la cettes et dépenses faisant également
tenue de ce registre. Les objets reçus partie de la comptabilité des temples
y étaient inscrits à mesure qu ils où leur cuite était établi. Enfin on
étaient déposés , et le nombre en était trouve, sur un autre registre , l'addi-
indiqué en chiffre à l'extrémité de la tion en un total des recettes faites
ligne; on additionnait les diverses pendant six années de suite, qui fai-
recet'es par mois et par années. Ces saient la durée entière d'un règne, et
registres étaient écrits en écriture hié- l'on voit par ces divers détails, d'a-
ratique ou sacerdotale; le plus com- bord toute la régularité apportée dans
plet des manuscrits hiératiques de ce cette partie de 1 administration publi-
genre est du règne du Pharaon RUain- que , et combien elle devait être con-
sès V, le dernier roi de la dix-huitième sidérable , puisqu'il en subsiste encore
dynastie, qui vivait au XV siècle tant de traces écrites après un laps
avant 1ère chrétienne. Ce registre con- de temps de plus de trois mille ans.
siste en trois fragments formant en- Un autre document, non moins au-
semble cinq pages à peu près entières, thentique que ces registres , et qui est
et ce registre appelé, des recettes d'une époque intermédiaire , nous
sacrées , était tenu par un scribe nom- avertit de la continuation de ces pra-
mé Thoutmès; le protocole du ma- tiques administratives de la vieille
nuscrit annonce qu'il est de Tan douze, Kgvpte, en ce qui concerne les temples
et le premier article porte la date du 16 et fa religion de l'état, et ajoute encore
du mois de paophis , « sous la divine d'utiles notions à celles qui viennent
providence du roi du peuple obéissant, d'être exposées.

Digitized by Google
EGYPTE.
Le texte de l'inscription de Rosette était considérable ; que sur le cercueil

sous donne, en effet, sur l'état légal de ces momies , plus ou moins riche-
If la caste sacerdotale et l'administra- ment traitées, étaient écrits, comme on
ion des tmples, une foule de rensei- le voit sur tous les cercueils connus, le
i cments du plus haut intérêt. Outre nom et la filiation du défunt. Dans les
*irs revenus propres , les temples bas temps on attachait même au cercueil
créeraient encore, sur les autres pro- une tablette en bois où ce nom et
priétés territoriales , des taxes en blé cette filiation étaient également écrits.
t en argent sur les terres laboura- Ainsi arrangées , ces momies étaient
is, et des taxes en nature sur la vi- mises en chantier dans les tombeaux
ne et les prairies. On ne peut énu- creusés dans la montagne , et où l'on
mer au juste les diverses sources de voit encore de ces momies empilées
induits sur lesquels reposait la ri- par milliers; les prêtres avaient la
Irese des temples ; mais les prêtres propriété et la police de ces funéraires
?uent habituellement les rois d'avoir habitations , et toutes les momies qui
•ourvu par leur autorité à ce que les y étaient déposées payaient chaque
r r'its des temples fussent maintenus année un droit fixe , dont le produit
le pays selon les anciennes lois tendait continuellement à s'accroître.
t l'on doit comprendre sans peine que Il existe des contrats qui rendent té-
* lois étaient d'autant plus sacerdo- moignage de ce fait , et qui nous ap-
ces au elles étaient plus anciennes, prennent encore que les prêtres ven-
t pria plus empreintes de la primitive daient pour un certain nombre d'an-
•lUsanee de la caste. Les temples per- nées les droits à percevoir dans di-
daient donc des droits sur les cho- vers tombeaux , à une espèce de fer-
es et sur les personnes; la dévotion mier général qui sous-traitait avec
ta rois, influencée par les prêtres, d'autres fermiers pour un ou plusieurs
w manquait pas d'y ajouter encore tombeaux en particulier; et dans un
t des dons fréquents et considéra- contrat, on trouve la liste nominative
nts; c'est encore les prêtres qui nous des momies qui, dans chaque tombeau,
[prennent par leurs louantes en payaient annuellement ce droit de
"honneur des rois qui ont fait beau- gîte. C'est ainsi que les vivants et les
oupdedons aux dieux de l'Egypte, morts concouraient également à en-
RB animaux sacrés , leur symbole vi- richir les temples et au maintien de
^nt: qui ont pourvu magnifiquement la puissance sacerdotale, dotée à la
• leurs funérailles , aux frais des sneri- fois par la loi, par la piété des rois et
i es, des solennités qui se célébraient des citoyens.
hns les temples; qui ont élevé des tem- Il est à remarquer, cependant, que
>!' S ou des chapelles, agrandi
,
décoré, le lise royal percevait alors sur
nrichi d'or et de pierres précieuses les temples* des impositions de plus
*nx qui existaient déjà ; et c'est pour d'un genre, et ce droit n'était, peut-
,f>
u> ces bienfaits rue les dieux ac- être, dans l'intention du législateur,
ordaient aux rois par la bouche des
,
qu'un moyen de modérer, au gré de
prêtres, la santé , la victoire , la force I autorité * publique , l'accroissement
tous les autres biens qu'ils pouvaient des richesses d une caste toujours
désirer. puissante par son influence morale;
Il faut mettre aussi au nombre des la bienfaisance des princes; et la raison
revenus des temples perçus par les vi- d'état prescrivant sans doute, selon les
vants, les redevances établies sur les temps, ou de rigoureuses perceptions,
usorts: résulte de diverses données
il ou des remises entières ou partielles.
authentiques, que, dans la Thébnïde, Il résulte en effet de diverses don-
ja momies qui n'avaient pas un tom- nées historiques, tirées de monuments
beau particulier, étaient déposées authentiques et notamment de l'in-
,

datis un tombeau commun à toute une scription de Rosette , que les temples,
tille, ou à tout un quartier, si la ville entre autres contributions au fisc royal,

Digitized by Google
00 L'UNIVERS.
lui livraient chaque année une certaine le droit que les prêtres payaient
quantité de toiles de byssus , et il ar- être inities aux mystères. Cette
riva qu'à l'occasion de son couronne- tiation n'était vraisemblablement
ment « Ptolémée Épiphane Gt aux tem- l'avancement successif des néopbj
ples de rÉçvpte la remise non-seule- dans les divers degrés de la ni'
ment des toUes qu'ils étaient en retard sacerdotale, d'où il faudrait
de fournir depuis huit ans, mais en- plusieurs faits également rei
core celle des indemnités que le fisc blés , savoir : que l'avancement
pouvait réclamer pour une portion de l'ordre sacerdotal et la promotion
ces toiles qui , avant été fournies , se fonctions supérieures étaient n
trouvaient inférieures à l'échantillon : par une loi de l'état; que Pau toi
et ceci est une donnée curieuse , en ce royale intervenait dans 1 exécution
au'elle autorise à croire qu'il y avait cette loi, et que le lise percevait
dans ces temples des manufactures de droit sur les promotions : singuli<
toiles de byssus, et peut-être encore organisation qui a précédé de de
d'autres objets dont la consommation, mille ans le régime actuel de certain
comme celle de ces toiles, était con- classes sacerdotales qui tiennent au<
sidérable dans la caste sacerdotale. Les leur pouvoir et leur promotion
temples payaient aussi au lise une con- l'autorité civile , en reçoivent une d
tribution annuelle en blé et une au- ration nécuniaire, et la faculté de pc
tre en argent; Ptolémée Épiphane leur seder des propriétés territoriales a
eh fait aussi la remise pour les huit sont soumises à la loi générale u
premières années de son règne, quoi- contributions publiques.
que ce qui était du" formât , dit l'in- L'autre coutume singulière que ne
scription , une valeur considérable. La avons à signaler est l'obligation
ligne suivante de ce précieux monu- étaient tous ceux oui appartenais
ment nous apprend que les terres sa- aux tribus sacerdotales , de faire U
crées payaient aussi annuellement au les ans un voyage par eau à Alexandrie
trésor royal une artabc pour chaque Le nom de cette ville pourrait fai
aroure dé ces terres, et une amphore supposer que cette obligation impos
de vin pour chaque aroure de vigne, aux membres de tout rang de la cai
ce qui est évalue à un peu plus de six sacerdotale était une innovation il
anciens boisseaux de blé, ou outres traduite par les Ptolémees, en M
pains, pour un journal de terre la- moire peut-être d'Alexandre, fonda
bourable , et à environ trente-six de teur de la monarchie grecque e\
nos anciennes pintes de Paris \mir Égypte ; mais on ne saurait où trouve
un journal de vigne. la preuve d'une telle innovation ou (1
Deux autres obligations, imposées toute autre de cette importance faiU
au profit de la couronne sur la caste en Kgypte par les Ptolémees. A l'exern
sacerdotale, paraissaient un peu étran- pie d'Alexandre , ils respectèrent , ili
ges, et feront juger avec certitude du continuèrent les anciens usages de <*
degré de supériorité auquel la classe pa\ s ; et si sous les Ptolémees les prê-
militaire, d'où était tirée la famille tres étaient tenus de faire tous les ans
royale , était parvenue à l'égard de la un voyage par eau à Alexandrie,
caste sacerdotale, primitivement en c'était sans doute par suite d'une au*
possession d'une si haute prééminence cienne loi qui obligeait les membres
sur tous les autres ordres de l'état. du corps sacerdotal à se rendre une
Pour l'initiation aux mystères , chaque fois par an dans les capitales du royau-
prêtre payait un tribut au roi. me , Thèbes, Memphis et ensuite
Nous lisons en effet dans l'inscrip- Alexandrie; là était le grand-prêtre,
tion de Rosette que Ptolémée Épi- le centre de l'union et de la discipline
phane abaissa au taux anciennement en religieuse , l'autorité qui jugeait, qu*
usage, et tel qu'il était établi à la pre- conseillait, la source des promotions»
mière année du règne de son père, des récompenses et des faveurs. L'his*

Digitized by Google
ÉGYPTE. 91

M donne aucune explication des leur autorité. Dans les bas-reliefs his-
dc la loi qui ordonnait ces voya- toriques, les Ptolémées et les empe-
à une caste très-nom- reurs romains se montrent dans des
autre conjecture sur ce
toute cérémonies publiques pareilles à celles
Hjft serait oiseuse ; il en résulte seu- où les monuments contemporains des
fenw»fit une preuve de plus de l'autorité plus anciens Pharaons connus nous
<te lois civiles sur la classe si puis- montrent ces mêmes Pharaons s' incli-
sant* des prêtres de l'Egypte, et, on nant devant la majesté divine person-
peut k dire, du perfectionnement suc- nifiée par les prêtres de divers ordres;
«sif des formes d'un gouvernement et jusqu'aux derniers temps de la
fii avait su conciiier en des points monarchie égyptienne, le monaroue
fe-importants l'autorité et l'obéis- appelé au trône par sa naissance tut
*ace, r usage de certains privilèges intronisé et sacré a Memphis, dans une
Hec accomplissement d'impérieux
1"
assemblée générale de Tordre sacer-
Avoirs ; habile enchaînement de fran- dotal, convoquée |>our la proclama-
chises spéciales à chaque caste et tion du nouveau roi. Dans tous les
Cane commune dépendance de l'auto- temps aussi de la monarchie, les rois
nie aes
rité des lors,
lois, qui savait a lois sou
à la fois sou- ne cessèrent uede travailler a l'édifica-
;ïedilica-
I

mettre irrésistiblement à leur empire tion, à l'agrandissement ou à l'ornement


k sceptre , l'épée , la mitre et des monuments religieux , et en cela
charrue. ils ne faisaient que souscrire à une in-
Tel était l'état de la caste sacerdo- fluence toujours puissante par elle-
k»»e égyptienne , considérée dans les même et surtout par l'opinion du
hases essentielles de sa constitution ,
pays. On sait en effet la persistance
dans celles sur lesquelles reposaient de la nation égyptienne dans ses
réellement son existence , son pouvoir croyances religieuses ; les persécutions
et l'autorité que doivent donner dans des Perses , la tolérance du culte grec
un pays très-civilisé, à l'un des pre- et du culte romain en concurrence avec
miers ordres de l'état , la richesse fon- le culte égyptien, qui ne cessa pas d'être
dée sur des revenus certains et de la religion dominante, rien n'altéra
grandes possessions territoriales. II l'esprit religieux del'Kgypte, sa foi aux
nous reste à considérer cet ordre dans dieux de ses ancêtres.' La présence
*on état moral, dans sa hiérarchie et des légions romaines n'empêchait pas
ses fonctions
diverses, dans ses autres que de fréquentes séditions naquissent
devoirs comme dans ses autres pri- à la plus légère insulte faite par le
vainqueur aux dieux et aux autres ob-
On a vu par les détails des principa- jets du culte national égyptien: la
«s cérémonies religieuses dont la loi caste sacerdotale tira donc de la dévo-
faisait un devoir aux monarques tion publique une force d'influence et
égyp-
tiens dans les circonstance marquantes une autorité qui ne pouvaient succom-
de ieur vie, combien l'autorité sacer- ber Qu'avec la monarchie et la natio-
dotale était mêlée à l'autorité royale, nalité de l'Kgypte. La royauté comme
et am
époques les plus connues de le sacerdoce furent redevables de leur
I
de l'Kgvpte, aucun signe ne
histoire longue durée au même système so-
«manifeste visïblement qui nous ré- cial, celui de la propriété à toujours
^e la décadence de cette caste puis- substitué à une classe de citoyens et
sante. Ce qu'Hérodote a vu , ce que non pas à une famille; ils étaient
Diodore de Sicile a raconté d'après les l'un et l'autre implantés profondé-
ecrivaios qui l'avaient précédé, nous la ment dans le sol national , le temps
montrent partout présente, ayant le favorisait également leur croissance;
nopole des sciences et des princi- la monarchie et la prêtrise devaient
i

branches de l'administration de durer autant que le sol , et même tou-


fâ ^ de grands revenus et de gran- jours, si un déluge, ou une invasion
de propriétés incoinmutaOles comme armée non moins calamiteuse, ne ve-

Digitized by Google
92 L'UN]
ravager ou le détruire. Il a
riaient le cerdotal vivaient avec les enfants do
eu aussi ses mauvais jours. monarque, et remplissaient ainsi au-
Ainsi constituée sur ia possession près du roi lui-même les fonctions les
territoriale, la caste sacerdotale tout plus relevées dans le service du palais.
entière était comme une famille pos- L'alliance des rois et des prêtres était
sédant un vaste héritage, transmissible, intime comme celle de la royauté avec
selon des conditions connues, à ses le sacerdoce : pouvoir un "autrefois,
divers membres de génération en gé- et qu'une révolution avait divisé en
nération. C'est ce droit d'héritage de deux parties intimement adhérentes
la terre qui rendait obligatoire l'héré- pour leur commune utilité, maïs que
dité des fonctions, parce que la nature des intérêts rivaux devaient empêcher
de ces fonctions déterminait la part de jamais se confondre.
cohéréditaire afférente à chaque mem- L'organisation symétrique du culte
bre de la famille : c'est sur ce principe public multiplia , au gré d une popula-
fondamental que repose toute la con- tion essentiellement religieuse , les
stitution de la caste sacerdotale égyp- temples et les lieux sacrés ; l'habitation
tienne. des morts était aussi de ce nombre ;

Les prêtres se mariaient donc, et enfin déification et le culte des rois,


la
leurs enfants mâles étaient prêtres. soit de leur vivant, soit après leur dé-
La multiplicité des lieux de dévotion, cès, ouvraient de vastes carrières où les
leurs riches dotations et la fertilité de prêtres de tout rang trouvaient un em-
l'Egypte, expliquent sans difficultés ploi assuré. Tout porte à croire qu'on
comment un si grand nombre de prê- multipliait ou qu'on restreignait ces
tres pouvait vivre dans l'aisance ; et à emplois dans une juste proportion avec
ces dotations , à ces professions , il les ressources de chaque temple ; quand
faut ajouter encore les subventions les prêtres de M
emplis établissent dans
qu'ils recevaient du trésor royal pour les principaux temples un service re-
les nombreuses fonctions salariées qui ligieux en l'honneur du roi Ptolémée
étaient réservées à leur caste et qui Kpiphane qui vient de se montrer si
embrassaient toutes les branches de bienfaisant envers les dieux, ils pour-
l'administration publique non spéciale- voient en même temps aux dépenses du
ment militaires. Ainsi l'existence des culte de ce dieu nouveau , à celles des
familles sacerdotales était assurée à sacrifices et des libations qu'il occa-
perpétuité par la possibilité de la sionnera. Le service journalier des
transmission d'une part de l'héritage dieux exigeait d'ailleurs beaucoup de
commun, proportionnée au nombre inonde , et la diversité des emplois ex-
des membres de la famille ; la même plique la diversité des classes de prê-
condition leur était aussi garantie , tres qui composaient l'ordre en gêne-
le rang hiérarchique était de même rai. Comme dans tous les pays sans
héréditaire ; il n'y avait donc que des doute , et surtout dans les corporation
chances de promotion pour les famil- religieuses, la capacité se faisait jour
les comme pour les individus, espèce des rangs infimes jusqu'aux premiers
de tontine d'honneur et de fortune, emplois ; ainsi le voulait l'intérêt de
garantie de toutes les mauvaises chan- l'association ; lade l'héridité des
loi
ces par la loi d'une indissoluble asso- charges n'en aucune at-
souffrait
ciation. teinte; là, comme ailleurs, des famil-
Le grand -prêtre , le chef suprême les s'éteignaient sans descendance , et
de l'ordre, était, après le roi, le pre- ouvraient ainsi une voie certaine à des
mier fonctionnaire de l'état. On mon- promotions successives. La diversité
tra à Hérodote la série chronologique des fonctions attribuées à la classe sa-
des statues des grands-prêtres elles
; cerdotale était un moven de plus de
étaient déposées dans le temple à côté classer les personnes sefon leur mérite,
de la suite des statues royales. Les lils et le hasard de la naissance devait
des principaux titulaires *de l'ordre sa- aussi, dans cette antique société , faire

Digitized by Google
ÉGYPTE.
pauvres d'esprit les
les genre de maladie; c'était un moyeu
martyre, ou les plus
du de la mieux connaître , et de la guérir
emplois. Ceux-ci n'étaient s'il était possible. Quoique non pres-
sans doute ni les prêtres savants en- crite par les lois , cette spécialité n'est
seîgnani dans les écoles des temples pas étrangère aux sociétés modernes
les sciences , les arts , les lettres et les plus belles réputations médica-
b musique , le dessin , la cosmogonie, les sont , en général , fondées sur ces
a physique , l'histoire naturelle , la spécialités. Puisqu'elles étaient de rè-
rcimon et la morale ; ni des prêtres gle en Egypte, il faudrait voir dans
adnûnistrateurs des finances, chargés cette loi une nouvelle preuve de cet
de la repartition et de la levée des im- esprit de prévoyance, ou de régula-
pôts; des prêtres administrateurs
ni risme si l'on veut , qui avait fait trou-
de la justice
, interprétant des lois , et ver en Egypte des prescriptions im-
jugeant au nom du roi toutes les con- muables pour les nécessités les plus mo-
testations civiles et criminelles. Les biles des sociétés humaines. Avec la
membres de la caste sacerdotale étaient sévérité du régime imposé à la nation
donc dans le plus intime rapport avec tout entière, il est possible toutefois
tous les intérêts individuels, et les qu'il y eût en Egypte plus de constance,
intermédiaires inévitables entre Dieu plus d'uniformité dans la série an-
et les hommes , entre le roi et les ci- nuelle des faits physiques et physiolo-
tovens. Leur concours aux affaires pu- giques, dans l'état, conséquemment, de
bliques n'était pas moins constant la santé publique , et qu'elle lût ainsi
ni moins nécessaire ; l'esprit reli- à l'abri de ces importations pestilen-
gieux de la nation mêlait à toutes tielles qui rendent si variable l'état
ses actions l'iuvocation des dieux ; annuel de nos populations dans nos
dans la paix et dans la guerre , dans contrées, que rien ne préserve d'un
famille etdans la cité , à la retraite mélange universel et d une commu-
des eaux de l'inondation, à l'ouverture nauté réelle de biens et de maux. La
des sillons pour la semence des grains, variété et l'influence proportionnelle
a la récolte des fruits de des maladies pouvaient donc être ap-
terre , lesla
d'eux apparaissaient par
les prêtres , proximativement connues en Égypte,
dirigeaient les décisions les plus im- et l'administration sacerdotale \ qui
portantes, ou sanctifiaient
, par des avait sous sa main le collège de mé-
témoignages de leur satisfaction, la decine, pouvait régler chaque année
possession des fruits dont ils avaient le nombre des médecins à admettre et

Es prémices en offrandes. Les


scribes des temples écrivaient
nationales, les livres sacrés,
-aies
leur répartition dans les divers ser-
vices : l'activité et la convenance par-
faite des mesures de police et de salu-
les brité pouvaient donner aussi à ces
rituelsfunéraires plus ou moins
étendus que la piété des familles dépo- déterminations une suffisante certi-
sait dans le
cercueil des parents morts ; tude.
ou écrivait beaucoup en Egypte , et si Personne n'a contesté aux Égyptiens
lesprêtres avaient presque seuls le mo- le talent d'observation et une aptitude
D°pole de cet
art admirable , ce mo- particulière à la recherche des faits na-
nopole devait être considérable et lu- turels : aucune nation n'a connu son
cratif i le grand nombre de signes de pays comme le col.ége des prêtres sa-
j
écriture employée dans
hiératique, vants connaissait l'Egypte, et nulle
plupart des cas devant rendre
, part l'administration publique ne fut
bien peu
communs hors de la classe plus attentive à réaliser dans l'intérêt
«ayante l'usage et la pratique de général les conseils et les prescriptions
Pé-
enture. gui ressortaient de cette connaissance.
Les prêtres professaient aussi la mè- Il est vrai que l'uniformité annuelle
ne et la
chirurgie; chaque méde- des principaux phénomènes physiques
toait s'adonner à l'étude d'un rendait a la fois cette étude plus facile,

Digitized by Google
L'UNIVERS.
et l'expérience des conseils plus cer- Après
la retraite des
taine. Cetteimmense et merveilleuse laterre est couverte du limon
inondation du Nil, revenant tous les a déposé, et de la dépouille des
ans même jour, laissant pendant le
le maux de toute espèce que l'inondât/*
même espace de temps l'Egypte sous a submergés. L'élévation de la ter
les eaux, inculte et stérile, et sa po- pérature , après la retraite Piidu
pulation vagabonde sur une mer de dessèche tres-vite ce limon , et I
quelques mois; la retraite des eaux matières animales, après un long s
donnant au pays une surface nouvelle jour dans l'eau . tombent promi
et à la race humaine qui l'habitait une ment en putréfaction ; l'air en
activité que rien n'arrêtera plus que le corrompu , et la peste frappe et
retour inévitable du même phénomène; sonne la population imprévor.
cette régularité, cette prédestination Ordinairement les pestes les* pit
providentielle, imprimaient infaillible- meurtrières suivent les plus fort*
ment au caractère de la nation, des inondations ; les eaux s'élèvent en e
habitudes d'ordre et de prévoyance fet davantage dans les terres f atte
qui prennent rarement au cœur de gnent les cimetières sur des hauteur
nos populations mobiles et légères, où le volume du fleuve l'a fait parv<
impatientes de tout frein social, am- nir ; il y a donc plus d'inondation
bitieuses d'indépendance et considé- plus de matières animales en putréfai
rant le travail comme une obliga- tion plus de peste et plus de morte
,

tion ignoble, et réalisant les avanta- lité.Voila ce que nous apprennent le


fçes
de la liberté dans les torpeurs de observations laites en Egypte à de
a paresse et la licence des dissipations. époques diverses, mais toutes posté
1/ Egypte s'observait attentivement neures aux premiers sièc.es de Ter
et n'observait qu'elle-même pour son chrétienne. L'Egypte primitive, et
propre avantage , renouvelant chaque n'y en a pas d'antérieure aux ir~
année ses observations , les contrôlant tions périodiques du Nil , dut
pour leur succession périodique, es- les mêmes lois, jusqu'à ce que la cauJ
sayant des remèdes à des maux bien originelle des épidémies annuelles s'<
constatés, et parvenant ainsi à une tant révélée par l'observation à l'ad
série de préceptes d'une utilité incon- ministration publique du pays, eJJej
testable consarrés par cette observa- opposa une grande mesure; "elle tant
tion et l'expérience. la source de cette meurtrière pesti-
De tous ces préceptes , de toutes ces lence, en prévenant la putréfaction
créations protectrices fruit si pré- des matières animales , en prescrivant
cieux de cette sollicitude attentive qui leur embaumement avec des matières
caractérisa , dans les temps de sa diverses très-abondantes dans le pays;
splendeur, l'administration publique et associant habilement ce précepte
de l'Egypte , il en est une que nous prophylactique à des idées de patrie
devons particulièrement remarquer, à et de famille , elle créa ce respect, ce
cause de son importance sans égale, et culte des ancêtres , qui fut aussi une
qui révèle aussi , par son objet comme des croyances les plus salutaires et les
par ses moyens, cette constante al- plus morales de la sage Égypte. Elle
liance de la" science avec la religion, fut délivrée du fléau de la peste. Toute
enseignées l'une et Kautre dans les l'antiquité rend témoignage de la sa-

temples , l'une et l'autre dans les at- lubrité perpétuelle de l'Egypte, et


tributions de la caste sacerdotale. Je nulle relation des épidémies qui rava-
veux parler des momies, de la mo- gèrent l'ancien monde ne nomme l'E-
mification des corps morts , institution gypte comme en ayant éprouvé les
a la fois politique et religieuse, et, en cruels effets. Délivrée par la moniifi;
résumé, précepte d'hygiène publique, cation des putréfactions animales , il
sanctionné par l'autorité divine, sanc- lui restait et son climat sans pluie et
tiliépar le concours de la religion. nuage , et les plus saines produc

Digitized by Google
ËGYPÎE.
rions , et l'eau la plus salubre de l'u- notions sur l'histoire de la cruelle épi-
nivers. démie si commune dans le levant: sou-
L'histoire des pestes et des épidé- haitons avec lui que Mohamed Ali
mies observées depuis le sixième siè- éclairé par les conseils de notre savant
cle de l'ère chrétienne jusqu'à la fin philantrope, applique sa volonté tpute
du dix-huitième , est unanime sur un puissante à la destruction de ce fléau,
point : toutes lespestes , les véritables et imite en cela ( antique prévovance
pestes qui ont affligé l'Orient et l'Oc- des Pharaons : l'Europe serait recon-
cident, sont venues d'Égypte; l'É- naissante d'un tel bienfait, et la France
gypte est le pays natal de la peste ; cha- serait heureuse de l'avoir inspiré.
que année elle en éprouve les cruelles C'est aussi dans les sanctuaires que
atteintes; cependant la peste fut in- les sciences exactes étaient spéciale-
connue à l'antique Egypte , durant une ment étudiées, perfectionnées, et qu'on
longue série de siècles. Que s'est-il en recherchait attentivement les appli-
donc passé en Egypte dans ce long cations d'une utilité générale. Les as-
intervalle, pour qu'a tant de bien ait tronomes étaient aussi des prêtres ; et
succédé un si meurtrier fléau , depuis les vastes plates-formes des temples
te sixième siècle de notre ère? C'est servirent uobservatoires. Il est cer-
depuis ce même siècle que l'usage et tain, en effet, mie les Égyptiens ob-
l'obligation de momitier les morts ont servèrent assidûment l'ordre des phé-
cessé : les Pères du désert qui prê- nomènes célestes , et le connurent avec
chèrent le christianisme sur les bords toute la précision qu'exigent les usages
dû Nil, et saint Antoine surtout, qui communs de la société. L'explication
mourut en 356 , défendirent à grands de l'inégale durée des jours , des phases
crisaux nouveaux chrétiens , et sous de la lune , des éclipses , celle des mou-
les peines de la damnation éternelle, vements apparents des planètes, enfin
d'imiter les Daîens
leurs ancêtres
, l'étude de tous les principes fonda-
qui embaumaient cadavres de leurs
les mentaux de l'astronomie , composaient
parents, et les entouraient de signes une science réelle, qu'on s'attacha sur-
et d'ornements diaboliques; on écouta, tout à consacrer à l'utilité publique.
on suivit ces pieuses et ignorantes Elle fut mêlée intimement avec la re-
prédications répétées pendant un siè- ligion, et elle fournit au gouvernement,
cle : on ne lit plus ae momies , et dans ce pays où les phénomènes phy-
Tannée 543 est la date de la première siques se renouvelaient annuellement
peste à bubon que l'Egypte donna au avec une merveilleuse périodicité, plus
monde; elle ravagea l'Europe pendant d'un bon précepte pour une adminis-
un demi-siècle , et tous les ans , après tration éclairée et prévoyante. La suite
ta. retraite des eaux de l'inondation, des observations leur lit connaître que
rKçypte en éprouve les effets plus ou le lever des mêmes astres cessait,
moins meurtriers , plus ou moins con- après l'intervalle de plusieurs siècles,
tagieux pour les nations voisines; et de correspondre aux mêmes saisons ,
il n'y a jamais de peste dans la Haute- et ils avaient remarqué ce déplacement.
Kçypte, dans la partie du pays la plus Ils avaient divisé le ciel en constel-
chaude cependant, parce que le Nil, lations ; leurs noms et leurs ligures
encaissé dans la vallée, n'inonde pas avaient des rapports certains avec le
les terres riveraines, ne submerge pas climat de l'Éeypte. L'institution du
d'animaux , ne laisse pas après lui , en zodiaque fut leur ouvrage , et elle re-
se retirant , de germes d'un homicide monte à des époques antérieures à l'an
fléau. deux mille cinq cent avant l'ère chré-
C'est au docteur Pariset qu'appar- tienne. Le calendrier civil était réglé
tient opinion dont on
l'ingénieuse alors et le cycle sothique établi. L'an-
ient de motifs: il a exnliqué,
lire les née était composée de 365 jours, di-
je crois
, l'origine de la momification visés en 12 mois de 30 jours chacun ,
en Égypte, et recueilli de précieuses suivis de cinq jours épagomènes ou

Digitized by Google
96 L'UNIVERS.
complémentaires. Alors aussi existait Mars, Jupiter, Saturne, et la u
la semaine, ou période de sept jours, en continuant d'en suivre la série;
l'un des plus antiques vestiges de la troisième jour était nécessaireim
civilisation, période d une certitude celui de Mercure , puisque la
sans égale , et qui ayant pour unique nète de Mercure était la premiï
élément le jour, permet de remonter quatre qui, dans Tordre de <

sans interruption, sans confusion ni appartenaient à ce jour, et


erreur, d'aujourd'hui au premier soleil suite, jusqu'à la fin de la
que vit la race humaine. On croit que Les sept jours de cette pé i< i

le nombre des jours de la semaine fut saient tout juste tableau des
le
tiré du nombre des planètes alors con- nètes après quatre roulenu
nues, et qu'on donna aux jours de la cutifs et
; il est a obs
semaine les noms de ces mêmes as- arriverait au même ordre dai
tres. Il est certain du moins que nominations des jours de la
l'antiquité classique nous a conservé et au même épuisement im
cette période ainsi constituée; et si tableau des planètes, 24 fois
l'on se demande pourquoi cette appa- affectant une planète a chaque
rence d'arbitraire, ou ce signe d'igno- du jour divisé en 24 parties ai
rance peut-être, qui se manifeste dans (î, selon une autre opinion

l'ordre actuel des jours de la semaine, il faudrait seulement opérer d

nui ne sont pas rangés dans l'ordre dre rétrograde des sept plani
des planètes selon la durée de leurs ré- viennent d'être nommées. (

volutions, c'est à l'Egypte que nous sur cet ordre que repose un de^ u-
demanderons la solution de ce singu- le plus universellement répandus, la
lier problème ; et nous apprendrons inaine, et peut être le seul dans
nue de noire temps, comme dans ceux sociétés modernes, qui ait pour |i

de toute l'antiquité, le premier jour de si haute sanction d'antiquité et de di


la semaine était celui de la lune, lundi, rée. L'Kgvpte est donc arrivée jus<j
le deuxième était celui de Mars, le nous, et c est elle qui règle encore u\
troisième de Mercure, le quatrième de sa religieuse autorite une d»' nos pi
Jupiter, le cinquième de Vénus, le cipales inMitutions publiques, la <

sixième de Saturne, et le septième du sion civile du temps la plus usité-


soleil , ou le jour de Dieu; tandis que celle qui a prévalu sur tous les sys
l'ordre astronomique des planètes fut mes proposes par la science, ou
tout autre: la lune, Mercure, Vénus, l'autorité de l'église ou de \\
le soleil, Mars, Jupiter et Saturne Mais on sait que la haute ant
c'est-à-dire, pour les dénominations des de l'astronomie pratique en K
jours de la semaine , si elles étaient avait ete révélée par des faits eertai
analogues , lundi , mercredi , vendredi, l'expression la moins équivoque uc
dimanche (jour du soleil ou de Dieu ) tains monuments, autres même que 1

mardi , jeudi et samedi. Un auteur zodiaques d'Ésnéh et de Dendérah(


ancien . Dion Cassius , nous a donné 11), incontestablement sculptés dura
la clef de cette énigme , et appris que la domination romaine en Egypte, soi
les Egyptiens avaient divisé le jour en comme monuments composés
Quatre' parties ; que chacune d'elles des événements contemporains ob
était sous la protection d'une de ces construction des édifices où ils furen
planètes, et que chaque jour prit le placés , soit , ainsi que le veulent d'
nom de la planète qui en protégeait la très opinions, comme copies d'anci
première partie. Ainsi , le premier jour tvpes semblables , remontant à une an-
lut celui de la lune , parce que les tiquité exprimée par le thème astrono-
quatre parties de ce jour étaient con- mique qui s'y trouve figuré , et que le
sacrées aux quatre planètes, la lune 9 temps avait détruit. Il est indispen-
Mercure, Vénus et le soleil; le jour sable de rappeler que ces opinions de
suivant était dédié aux quatre planètes l'antiquité des types antérieurs aux

Google
Digitized by Google
>
• • »

• • • • •
* •

• • • • • •

• •
• • a •
• • .
• • •
• • •

• •
•• « •
• • • • • •
• • • • •

••••

Digitized by Google
EGYPTE.
zodiaques actuels,et de leur expression des temples ou des tombeaux en Haute-
chronologique, s'accréditèrent difficile- Kgvpte , a reconnu qu'en Tannée ju-
ment, malgré la science profonde de lienne 3285 avant l'ère chrétienne , les
Hilustre Fourier, dont l'esprit supé- Égvptiens avaient déterminé dans le
rieur et l'habileté de critique devaient ciel la vraie position de l'équinoxe
«pendant recommander les jugements. vernal, du solstice d'été et de l'é-
L'antiquité extraordinaire de la civili- quinoxe d'automne ; de plus , que 1 506
sation égyptienne était encore une ans plus tard , en 1 780 avant la même
opinion trop nouvelle , elle dérangeait ère , ils avaient reconnu que ces points
aussi trop d'avis contraires bruyam- primitifs s'étaient considérablement
ment énoncés avec plus ou moins de déplacés; enfin, que les Égyptiens ont
conviction, pour qu elle se put établir exprimé ces deux états du ciel sur leurs
sans contradicteurs, et il ne lui en man- monuments. M. Biot emploie en ces
qua point. Mais de nouvelles recher- curieuses recherches celles par les-
ches devaient les confondre, et on quelles Champollion le jeune , dans
n'en trouve presque plus aujourd'hui son Mémoire sur la notation graphi-
que contre ceux qui refuseraient à l'K- que des divisions civiles et astrono-
svpte autant de science et autant de miques du temps, avait prouvé par
siècles qu'il plaît à ses partisans de lui les monuments que l'année vague
en accorder. égyptienne, composée de 12 mois
Nous ne signalons pas ici une versa- dé* 30 jours et de 5 jours épagomènes
de plus dans les opinions de no-
tilité s'écrivait depuis la plus haute anti-
tretemps , mais un progrès , et il est quité sur les monuments par des signes
aujourd liui permis -d'exposer, de dé- qui la partageaient en trois saisons
montrer, de soutenir au sein même la végétation, la récolte et l'inonda-
des académies, la science et l'anti- tion. A chacun des douze mois était
itéde TÉgypte, les grandes actions attaché un personnage divin qui v pré-
ses rois , les grands travaux de ses sidait: parmi eux, Champollion faisait
artistes, les grandes découvertes de reconnaître les emblèmes des deux sol-
ses astronomes. L'un des plus savants stices et de l'équinoxe vernal; et
de notre époque, M. Biot, a porté M. Biot a fait voir que la répartition
au -delà de toute prévision la révéla- de ces emblèmes s'accordait très-exac-
tion des notions astronomiques dont tement avec les phases correspondan-
on ne peut refuser aux Égyptiens la tes de l'année solaire vraie , dans les
parfaite connaissance ; et il conlirme trente ou quarante siècles qui ont pré-
ainsi ce que Fourier avait publié, que cédé notre ère. Toutefois , l'année va-
les antiquités astronomiques observées gue était plus courte que cette année
enÉgypte faisaient remonter l'institu- vraie; la notation écrite de la première
tion de la sphère égyptienne, fruit d'ob- ne coïncidait plus avec l'état réel de
servations antérieures , au 25* siècle la seconde ; la différence s'accroissait
avant l'ère chrétienne; qu'ils en avaient tous les jours jusqu'à ce qu'elle eilt
ensuite observé les déplacements, et amené une nouvelle coïncidence entre
que des monuments subsistants por- les phases écrites et les pliases réelles.
tent des témoignages évidents de Ceci arrivait après un intervalle de
(*tte observation. Avec les formules 1505 ans juliens. Os
coïncidences
établies par les géomètres pour repré- appartiennent aux années 275 ,1780
senter les mouvements planétaires , et 3285 avant l'ère chrétienne; M. Biot
pour en reproduire les phénomènes et a reconnu celle de l'an 1780 comme
pour reconstruire l'état des cieux pour figurée au Rliamesseum de Thèbes,
une antiquité quelconque, M. Biot, différente, comme elle doit l'être,
interprétant les représentations astro- de celle de l'an 3285; distinction bien
nomiques dont Champollion le jeune a intentionnelle, conséôuemment obser-
recueilli les dessins dans les tableaux vée , et qui donne à la plus ancienne
historiques ou religieux qui décorent le caractère d'expression primitive, et

''livraison. (Kgypte.) 7

Digitized by G
L'tmivtàs.
permet de rapporter à la meïne épo- rrage ; mais la date des deux plurs ai
que l'institution originelle du calen- est encore postérieure de 12
drier civil dont l'Ktfvpte aura ainsi de 18 mois à celle de l'éciipse préc
té l'image pendant quatre mille tée ; il ne nous est donc parvenu i
l'Asie , par les Grecs que des notioi
,

Ceci est bien l'ueuvredes membres de qui ne remontent pas au-dela du VII
la caste sacerdotale charges de l'ob- siècle avant l'ère chrétienne. Mais 1
servation du ciel , et les recherches du annales de la Haute- Asie nous so
savant astronome moderne tendraient inconnues; la puissance des grain
à prouver que les anciens remplirent empires qui occupaient cette vas
*4 • 4* V* Alt A I,...— ^JV. / ,, lU>* Mil»
a
uigneinent leur oiuee. L. est a eux
0%
contrée semblera toujours inséparab
aussi que d'autres savants, nos con- de la pratique des sciences et des ar
temporains , ont attribué les noms et de la civilisation. H n'y pas de suppe
les ftgures des constellations, déter- table division du temps pour les usa
g
minés par leurs rapports avec le climat civils sans une astronomie fondée si
de i'Kgypte et ayant pour objet d'an-
, quelques théorèmes de géométrie ;
noncer l'ordre des saisons parles levers I usage de quelques instruments él
île ces constellations , au commence- mentaires leur put suft re pour ci-
de la nuit. Mats Ton ignore si observations d'éclipsés. Les prêtres <

Égyptiens ont acouis , par leurs Bélus, selon Diodore, observaient a


'
observations , les connaissan- stddment les astres du haut des ton
ces antérieures que suppose cette divi- de Habvlone; ils avaient réuni 111
sion du rrel , ou s'ils les ont reçues des série d'observations embrassant 111
antres nations de l'Asie; le défaut de série de siècles; et Ptolémée ajou
monuments «Tune antiquité certaine que des listes d'éclipsés avaient é
et recueillis dans cette vaste contrée apportées de Habvlone en Egypt
rend très-difficile la solution de cette Pourquoi donc Càllisthènes , arrn
question Mais l'histoire écrite de l'ob- dans cette vaste cité avec Alexandr
servation dn ciel par les anciens Asia- n'aurait-il pas pu connaître les r
tiques conserve néanmoins quelques gistres de ces observations , et ci
traits dignes d'une sérieuse considé- voyer à son oncle Aristote, comn
ration. Les astronomes de l'école d'A- le dit Simplicius, d'après Porphvn
lexandrie ont assis leurs théories sur un état de ces éclipses de soleil êt t
leurs propres observations qu'ils com- lune observées par les prêtres eba
paré re ht avec celles de leurs devan- deens, pendant les 1903 ans qui avaiei
ciers en Asie. Ils citent de celles-ci précédé la conuuéte d'Alexandre? La*
un certain nombre qui sont autant de multanéité delà civilisation de Thèl*
faits consignés dans les antiques an- et de Rabylone, les invasions milita
nales des sciences , d'où les Grecs les res de l'Egypte en Asie dès le XVII
tirèrent ; et l'usage qu'en firent siècle avant 1 ère chrétienne , celles qi
sans hésitation Hipparque et Ptolémée avaient eu lieu plus ancieimement cr
donne à ces observations relatées core sans doute, puisque cette civil
toute l'autorité qui est propre aux faits sation simultanée des deux empire;
historiques les plus avérés. Il est vrai bien antérieure à cette dernière ép<
«ue la plu? ancienne observation citée que, avait dû* créer aussi antérieun
dans l'Almagcste , ou Grande Compo- ment cette rivalité d'intérêts et c
sition rédigée par Ptolémée , est celle prépondérance qui ne cessa que pi
de l'échpse de lune du 19/20 mars de l'asservissement commun des dei
l'an 721 avant l'ère chrétienne; ob- empires sous l'épée romaine; tout*
servation faite à Habvlone par un as- ces circonstances, disons-nous, et
tronome dont on n'a" pas conservé le facilité des communications par U
nom. D'autres phénomènes lunaires, routes de mer, ne permettent çuèi
observés aussi a Habvlone , sont em- de supposer en Assyrie une scient
ployés par Ptolémée «ans le même ou- de l'observation des astres qui aura

Digitized by Go<
ÉGYPTE. 99

été ignorée en Égypte. L'époque dp phénix symbole de l'astrologie, et


restitution originelle du calendrier qui portait toujours, pendus à son
civil en Éçvpte, assignée par M. Hiot, bec , les livres astrologiques de Thoth,
supnose douleurs, et avec une juste au nombre de quatre le :premier
réciprocité pour les prêtres babylo- traitant de l'ordre des étoiles errantes
niens, cette science bien ancienne et apparentes ; le second des conjonc-
parmi les membres de la caste sacer- tions et de l'illumination du soleil et
dotale égyptienne, à qui cette partie de la lune ; les deux autres du lever
de l'enseignement et de la pratique de ces deux astres. Enfin, il paraî-
des sciences était attribuée. trait, par un rapport de Chœrémon
Diodore de Sicile rapporte ce qui dans Porphyre , que le prêtre horos-
suit : « Les prêtres exercent les enfants cope était placé bien au-dessus de la
dans l'étude de l'arithmétique et de la foule des autres prêtres , soit pasto-
géométrie; car les inondations du Ml phores, soit néoenores, ceux-ci n'é-
détruisant chaque année les limites des tant pas soumis à de si nombreuses
terres, de nombreuses contestations ou à de si complètes purifications.
s'élèvent entre les voisins, et c'est 11 résulterait donc de tous ces rap-
par la géométrie qu'on les vide. L'a- ports , que les anciens Egyptiens ,
rithmétique sert aussi et pour les usa- détournant une science vraie de ses
ges sociaux, et pour les spéculations applications rationnelles et logiques,
de la géométrie. Elle est surtout très- auraient fait, comme tant d'autres
utile à ceux qui cultivent Y astrologie y peuples anciens et modernes, de l'as-
car les Égyptiens , comme d'autres trologie avec les principes de 'astrono-
l

peuples, observent aussi les lois et mie; et cette erreur remonte en effet
le mouvement des astres , et conser- à une très-haute antiquité, selon les
veot une série d'observations qui re- rapports de quelques écrivains assez
montent à un nombre incroyable d'an- renommés , et les recherches plus ré-
nées, cette étude étant cultivée chez centes d'un de nos plus habiles cri-
eux dès les plus anciens temps. Ils tiques , M. Letronne. Mous rappelons
ont aussi soigneusement décrit les ici sommairement ces diverses no-
mouvements, la marche et la station tions.
des planètes , et l'influence bonne ou Toutes de l'antiquité
les traditions
mauvaise de chacune d'elles sur la placent berceau de l'astrologie
le
naissance des êtres, et ils en tirent dans la Chaldée et en Égypte , et Ton
souvent des prédictions sur les événe- {>eut remarquer en passant que ce fait
ments de la vie des hommes. >• >ien avéré est une nouvelle preuve
Porphyre a su que les prêtres égyp- des communications qui existèrent
tiens employaient les nuits, partie à (les entre ces deux contrées. Quant à l'E-
ablutions, et partie à l'observation gypte, adonnée très-anciennement à
des astres. Strabon a vu à Héliopolis la pratique de l'astrologie, Ciçéron
un vaste édifice qui était l'habitation nous dit formellement que les Egyp-
des prêtres adonnés spécialement à tiens sont considères comme connais-
l'étude de la philosophie et de l'astro- sant , depuis un grand nombre de siè-
nomie; et Diodore ajoute à ce qui cles , cette science des Chaldéens
vient d'être rapporté , que les prêtre* 2ui , fondée sur l'observation journa-
égyptiens prédisaient l'avenir tant par ère des astres , prédit l'avenir et la
la science des choses sacrées que par destinée des hommes. Hérodote avait
ceUe des astres. Clément d'Alexandrie, dit avant Cicéron : «Les Egyptiens sont
qui avait vu la fin des institutions les auteurs de plusieurs inventions
pharaoniques en Égypte, place dons telles que celle de déterminer, d'après
l'ordre des prêtres, et avant le scribe le jour où un homme est né, quels
sacré, le prêtre qui a les fonctions événements il rencontrera dans sa vie,
(Horoscope. D tenait dans ses mains, comment il mourra , et quels seront
dit lé savant Père , une horloge , et un son caractère et son esprit. » C'est à
7.

Digitized by Google
100 L'UNIVERS
deux Égyptiens, célèbres sous ce rap- compliqués, et se fonder sur l'usai
port dans l'antiquité grecque et ro- de tables astronomiques, dont on n'ai
maine, et nommés Pétosiris et Né- corde pas aisément la connaissance i

cepso, qu'on attribua les ouvrages aux Cnaldéens , ni aux Égyptiens,


fondamentaux de la doctrine astrolo- résulterait de ces données diverses
Sique égyptienne. Mais l'époque où ces que , si la croyance à l'influence d<
eux savants vécurent et composèrent astres est extrêmement ancienne «
leurs écrits est fort douteuse : d'une Egypte, on doit croire aussi que 1<
part, on les fait du siècle de Sésostris; combinaisons infinies et les calcu
de l'autre on confond Nécepso avec le très-longs qui servaient aux n^trok
r
roi d'Kgypte de la 2G dynastie, qui gues pour dresser leurs thèmes , n'ori
porta le même nom ; mais il est posi- pu être exécutés qu'avec le secoui:
tif que Ptolémée et Proclus regardaient d'une astronomie perfectionnée ; et i
ces deux astrologues comme très -an- l'antiquité de l'astrologie égyptienn
ciens, et nue ni Pline, ni aucun autre doit dépendre ainsi de l'antiquité de
écrivain, latin ou grec, n*a mis en connaissances astronomiques dans li
doute l'authenticité de leurs ouvrages : même contrée, on a vu plus haut l'o-
nouvelle preuve de l'origine égyptienne pinion de quelques savants moderne
des écrits qui portent leurs noms et sur ce point important.
de la doctrine qu'ils renferment , et Quoi qu'il en soit, l'antiquité das
dans laquelle dominent le thème na- sique parle des membres de la classa
tal du monde et la théorie des décans. sacerdotale qui s'adonnaient à Pétud<
Le tond réel de la scienee est la del'astroloqw assertion qui, pour les
,

croyance à l'influence des astres et le temps les plus anciens de l'histoire dt


moyen de tirer des pronostics, sur un l'Égypte, me semble devoir s'enten-
homme ,des circonstances de sa nativité, dre seulement et de l'étude des astres
et du lieu des planètes à ce moment. et de celle des phénomènes naturels
Il y avait donc de l'astronomie dans avec la méthode des pronostics qui en
l'astrologie ; mais eelle-ci avait un but étaient déduits, étude qui n'avait en
qui lui était propre et qui s'éloignait elle-même rien d'absurde, qui fat pra-
entièrement de l'astronomie. Eudoxe, tiquée par de très-bons esprits , tels
qui alla en Egypte, y apprit la doctrine que Thalès et Pythagore , et à leur
astrologique ; mais en I expliquant aux exemple par Eudoxe, Euctémon , Cal-
Grecs, il eut le soin de les avertir lippe , Méton , Hipparque , et tint
qu'elle ne méritait aucune créance ; d autres, qui reconnurent, par des ob-
aussi Vitruve assure-t-il que les as- servations, l'influence que le lever et
tronomes grecs, Hipparque entre au- le coucher des astres exerçaient sur
tres , ne firent aucun usage de l'as- les changements de l'atmosphère et
trologie, pas même, on peut le dire, des saisons, et transmirent à leur
ceux qui vécurent après Alexandre. postérité les résultats de leurs recher-
On regarde donc comme certain que ches dans des parapegmes , ou cata-
cette fausse science , lille insensée logues de ces phénomènes naturels.
d'une mère sage , comme la nommait Ces anciens astrologues égyptiens pra-
Kepler, n'avait pénétré ni dans la re- tiquaient-ils aussi les nativités, ou h
ligion , ni dans les usages de la Grèce prédiction de la destinée d'un individu,
libre; et cette assertion n'exclut point d'après l'époque des astres au mo-
par sa généralité les individus qui pu- ment de sa naissance? Hérodote Tas-
rent isolément se délecter aux miracles sure pour son temps. ISous connais-
de la doctrine égyptienne. Les moyens sons donc , par la réunion de ces té-
dont elle usait étaient en rapport avec moignages divers, les fonctions des
les progrès réels de l'astronomie, et membres de la classe sacerdotale à Qui
on savait, dans des temps postérieurs était attribuée l'étude des cieux et des
à l'empire égyptien , user de calculs mouvements des astres, et la science
•inon fort difficiles, du moins très- de l'application des résultats de cette

Digitized by Google
EGYPTE. 101

étudeaux besoins réels, ou aux pre- trologues attachés aux principaux tem-
sses de la société contemporaine. f)lcs de l'Egypte, et qui, gardiens fidè-
Il eo fut ainsi jusqu'à 1 époque de es des principes qui leur avaient été
f influence romaine en Egypte. Des le ens?ijsne> , les transmirent* en effet à
premier siècle de l'ère chrétienne, de leurs (descendants et. jusqu'à nous,
tarants astronomes écrivaient contre co/nme l'indiquent deux monuments
les astrologues et s'efforçaient de mon- que nous devori? 'cjfei uj,
trer la vanité de leur prétendue science; "Le premier, conservé par les écri-
mais ces attaques l'accréditèrent peut- vains ae la science, est le thème natal de
être , car bientôt l'empire romain tout l'univers; il indique les domiciles des
entier crut à l'astrologie , et ajouta planètes au moment même de la créa-
avec une sorte d'ardeur à la doctrine tion du monde : la Lune était dans le si-
futeurale des Étrusques la doctrine as- gne du Cancer; le Soleil dans le Lion;
trologique des Égyptiens. Elle sé- Mercure dans la Vierge ; Vénus dans
duisit des esprits très-élevés ; un il- laBalance; Mars dans le Scorpion ; Ju-
lustre Romain, Nigidius Figulus, ami piter dans le Sagittaire; Saturne dans
de Ciceron , était Tort adonné à Part le Capricorne. Le sage Antonin fit
divinatoire et croyait à la fois à la pos- inscrire en ces signes ce thème natal
sibilité de prédire* l'avenir et par lob- de l'univers sur les monnaies qui fu-
servation a es météores et par ('inspec- rent frappées la huitième année de
tion des entrailles des victimes; Lu- son règne en Égvpte, et l'empereur
cûjs Tarrutius , autre ami de l'ora- romain consacrait, accréditait par son
teur, pratiquait avec confiance et exemple la science des genêt hliaques
autorité la divination par les astres et dans le pays même où elle avait pris
dressait les nativités avec des tables naissance.
de phénomènes célestes rédigées se- D'autres monuments du règne de
lon le style égyptien. Si nous vou- ce même prince appartiennent aussi
bons dire "de quels noms célèbres l'his- à cette science illusoire et nous pré-
toire de cette opinion fut illustrée, sentent un exemple plus développe de
nous citerions Marc-Antoine, ayant ces mêmes thèmes : ce sont deux papy-
pour conseiller intime un astrologue rus écrits en grec et trouvés en Egypte.
égyptien, choisi par Cléopâtre, qui lui Les premières lignes du texte d'un de
inspirait ses prophéties et ses divi- ces papyrus contiennent un préam-
nations ; Auguste , qui fit dresser son bule qui est l'histoire même de la
thème natal par Theogène ; Tibère et science. L'astrologue qui a écrit ce
ses successeurs , dont un porta la thème natal invoque en effet ce qu'il
croyance jusqu'à faire mettre à mort a vu dans beaucoup de livres des an-
un personnage à qui un astrologue ciens sages , particulièrement des
avait prédit l'élévation à l'empire. Chaldéens, de Pétosiris, et surtout
Yesnasien et Domitien se dirigèrent du roi Néchous, qui avaient été eux-
par les plus savants dans cette science mêmes instruits par leur seigneur Her-
apposée , et le docte Hadrien lui-même mès, et par Asclépius, le même que
se disait en état de prédire, dès les Imouth, le fils d'Héphaïstus fPlitha).
calendes de janvier, ce qui devait lui Venait ensuite le thème natal, daté
arriver jusqu'au 31 décembre : et cette de la première heure du 18 e jour du
science était traditionnellement parve- mois égyptien Tybi, de la première
nue à Rome du plus profond des anciens année de l'empereur Antonin ; mais
temples de l'Egypte. Elle était encore le reste du manuscrit est perdu. On
en grande vogue en France, il n'y a peut y suppléer par un autre papyrus
pas plus de deux siècles. mieux conservé, portant sur la même
Tel a été le succès de la science fon- page deux colonnes d'écriture, delà
pée par les Égyptiens Pétosiris ctNé- même date, et ainsi conçu « L'an:

cepso, qui eurent pour successeurs premier d'Antonin César, notre sei-
toutes les générations des prêtres as- gneur, le 8 du mois d'Hadrien, selon

Digitized by Google
103 L'UNIVERS.
les Hellènes, (c* est-a-dire t
les Grecs Mars , le point inférieur de Jupitei
d'Alexandrie), et selon les anciens et les confins de Vénus.
Le second la fortune es
sort de
Cles Égyptiens), le 18 du mois de
Tybi , a lij. première, heure du jour dans le Cancer, Il degrés, la mai
commençant.. V
.Le te\te dit «insulte : son de la Lune, le point supérieu
Le Sofeil'dims le Sagittaire, Itt de- de Jupiter, le point inférieur de Mars
grés 23»n>inuJesLf ;o;h)s la maison de*. les contins de Vénus. »

Jupiter//^r*fe£ ^ftn$ de Vénqs*.


:
Le signe dominant de la nativité es
La Lune dans le Verseau , 3 degrés donc Pastrede Vénus.»»
(i minutes, à l'orient, dans ta maison Voilà un thème natal , ou geneth
de Saturne, sur les confins de Mer- fiaque régulièrement formule pa
cure. un homme expert en la science de
Saturne dans le Verseau , ... degrés nativités; on les dressait encore di
1

8 minutes , dans son deuxième firma- même en France au XVI siècle. Cetti
ment propre, dans les confins de Mer- partie des sciences occultes était auss
cure. considérée comme originaire de l'K
gypte; la chimie et l'alchimie tiraien
.Jupiter dans le Bélier, 2 degrés 44
minutes, dans le deuxième firmament,
même leur nom , selon les adeptes , d
celui de cette contrée, nommée Chêmé
dans la maison de Mars, le point su-
périeur du Soleil , le point inférieur de
ou Chimi, dans les livres coptes; le
Chaldéens, Pétorisis, Tséchous, Hernie
Saturne, sur les confins de Vénus.
et Asclépius ont conservé jusqu'à no
Mars à l'extrémité du Capricorne
jours leur antique renommée ; Pun d
30 degrés , point de minutes , dans le
nos deux papyrus astrologiques le
dixième firmament, la maison de Sa-
turne , son propre point supérieur , le
nomme formellement; d'autres antcj
rités, et les écrivains anciens surtout
point inférieur de Jupiter, et ses pro-
appellent Nécepso celui <uie le papyru
pres confins.
désigne par IVéchous: l un et Pautr
Vénus dans le Sagittaire , 2 degrés
à l'orient, dans la
noms ont été portés par des rois égyp
51 minutes,
maison de Jupiter, et les confins (du
tiens de la XX
YT dynastie. Le papy
rus désigne aussi le premier par ï
Soleil ? ).
titre de roi ; mais il est très-vraisem
Mercure dans le Sagittaire, 15 de- daucien
hlahle, d'après Pépithète
grés 2 minutes , dans Vespénis , la nue leur donne Ptolemée , que ce son
maison de Jupiter, et les confins de deux astrologues d'une époque biei
Vénus. antérieure au \IV siècle avant Pèn
L'horoscope dans le Sagittaire, t5 chrétienne , et telle était Popinion di
degrés , la maison de Jupiter , et les Cicéron, bien justifiée nar les fait
confins de Vénus. historiques ci -après rappelés.
La conjonction dans les Gémeaux , Cette opération divinatoire et pro
10 degrés, la maison de Mercure et phétique a laquelle nos deux papyru;
les confins de Mercure. donnent tout le caractère d'un faj
Le milieu du ciel dans la Vierge historique, et qu'ils nous présenten
8 degrés, la maison de Mercure, le comme le résultat d'une croyance i

point supérieur de Mercure, le point l'astrologie judiciaire, généralemen


inférieur de Mercure, les confins de répandue et dominante en Égypte
Vénus. n'est point unique dans les annale)
L'hypogée dans les Poissons , contemporaines de Rome , et elle fu
degrés , la maison de Jupiter, le point accréditée par l'adhésion publique dei
supérieur de Vénus, le point inférieur plus savants hommes de Pempire. Ta
de Mercure, les confins de Vénus. cite raconte gravement les miracle*
Le premier soit de la fortune es! dans qui s'opérèrent à Alexandrie d'Kgypt*
le Capricorne, 11) degrés, la maison pendant le séjour de Vespasicn , cem
de Saturne, le |>oint supérieur de même que Pempereur opérait lui-même

Digitized by Google
ÉGYPTE. m
par lagrâce de Sérapis : il guérissait rôle dans l'histoire de ces
mémorables
tes aveugles et les érloppés. Plus tard événements. Moïse et Aaron, étant
lemage A mu
phi s évoquait les démons en la présence du Pharaon, dît la
ei faisait pleuvoir à Tolonté. Le chris- Bible , Aaron jeta sa verge devant le
tianisme ne détruisit pas entièrement roi et ses serviteurs , et elle fut chan-
cette superstition ; Origène affirmait la {;ée en serpent. Le Pharaon fit venir
<ertituoe des préceptes et de l'usage de es sages d'Égvpte et les magiciens,
la magie , non pas de celle d'Èpicure et qui tirent la même chose, par les en-
<r*Aristote, disait-il, mais Part qui se chantements du pavs et pur les secrets
pratiquait de son temps ; il reconnaît la de leur art , car chacun d'eu* ayant
puissance de certains mots égyptiens jeté sa verge, elles furent changées en
pour opérer sur une classe de démons, serpents ; il est vrai que la verge d'Aa-
et celle de certains mots persans pour ron dévora les verges des Égyptiens.
açir sur une autre classe de ces gé- Dans une autre circonstance", Aaron
nies indomptés. Il avoue toutefois que éleva sa verge et frappa l'eau du fleuve
les gens instruits possèdent seuls ces devant le roi et ses serviteurs , et Peau
secrets de science, et que cette
la fut changée en sang; les poisson*
science est une
partie de cette théolo- moururent, le fleuve se corrompit,
gie cachée qui élève les esprits- vers le il y eut du sang dans toute l'Égypte ;

créateur de l'univers. La possession par mais les magiciens d'Egypte firent la


les dénions était aussi en grande vogue même chose avec leurs enchantements,
alors , et saint Jérôme raconte l'aven- et le peuple ne trouva de l'eau pour
ture d'une jeune possédée, subitement boire qu'en creusant la terre le long du
saisie fureur parce qu'un jeune
de fleuve. Quand ensuite Aaron, étendant
homme de Gaza, qui en était épris , sa main sur les eaux d'Kgypte , en fit
avait enfoui sous le seuil de la porte sortir des grenouilles de toute part
de son amante une plaque de métal les magiciens du roi opérèrent encore
sur laquelle il avait grave des signes le même prodige par leurs enchante-
au'il avait appris des prêtres égyptiens ments; ils rivalisaient victorieusement
de Meniphis. Saint Jérôme ajoute que avec la puissance surnaturelle de Moïse
saint Hilarion délivra la jeune fille du et d' Aaron; ils échouèrent néanmoins
démon, avec lequel il eut préalablement quand ils voulurent, en frappant la
un long colloque. poussière de la terre, la changer en
Tout ceci était la suite des opinions moucherons, comme venaient de le
égyptiennes et chaldéennes, dont l'exis- faire les chefs du peuple hébreu.
tence est historiquement prouvée dès Des monuments contemporains de
une très-haute antiquité. On voit en cette relation et des faits dont elle a
effet en Egypte , dès la XVII" dynas- retracé les circonstances extraordinai-
tieégyptienne , près de deux milfe ans res, subsistent encore en Égypte et
avant Jésus-Christ , le roi , effrayé par rendent le même témoignage au sujet
ses songes , faire appeler les devins et du crédit dont jouirent , en Orient,
les sages de l'Égypte, pour en avoir dès la haute antiquité, les plus oiseu-
r interprétation ; ce fut l'Hébreu Joseph ses spéculations ae l'esprit et les plus
qui la lui donna, les sages égyptiens fausses applications des préceptes les
n'ayant pu le faire. Ceci est raconté plus vrais, des observations les plus
dans le plus ancien livre qui parle de certaines qu'il ait été donné à l'homme
rKgypte , dans la Genèse, et se rap- de faire dans le vaste domaine de la
porte au temps des rois pasteurs. nature. Dans ces mêmes monuments,
Quelques siècles plus tard, après la l'astronomie et l'astrologie sont inti-
restauration de la monarchie nationale mement mêlées avec les représentations
égyptienne, à l'époque de la sortie des psychologiques et a l'expression des
Hei>reu\ de 1'Kgypte sous la conduite idées qui composaient la philosophie du
de Moïse, l'art des devins, des magi- temps et se manifestaient par la lan-
eieas et <ks astrologues, joue un grand gue des symboles. C'est dans les tom-

Digitized by Google
104 ê LIN
beaux des rais à Thèbes que sont même; après que le soleil enfant
conservés ces précieux documents; reçu de deux déesses nourri
les soins
Famé du roi défunt, assimilée au ces, la barque part et navigue sur Yc
soleil, accomplit sa double destinée céan céleste , Partner, qui coule eomm
sur la terre et dans les cieux , comme un fleuve de rorient a ïoccident ^ o
l'astre lui-même parcourt successi- il forme un vaste bassin , dans lequ<
ve ment les deux hémisphères , I" hé- aboutit une branche du fleuve tra ver
misphère supérieur, ou lumineux , et sant Y hémisphère inférieur, cTocci
Théirii sphère inférieur, qui fut aussi dent en orient.
en Egypte celui des ténèbres. A ce « Chaque heure du jour est indiqué
premier tableau d'expressions toutes sur le corps du ciel par un disqui
métaphysiques , il en succède un se- rouge, et dans le tableau par douz<
cond ou dominent les signes les plus barques ou bari dans lesquelles parai
apparents de l'astronomie et de l'as- le dieu Soleil naviguant sur POcéai
trologie. Ce tableau , dressé sur un céleste avec un cortège qui change ï
plan régulier , parce que la science en chaque heure, et qui l'accompagne suj
dirigea la composition , est peint sur les aeujc rives.
les plafonds des tombeaux, et occupe « A la première heure , au moment
toute la longueur d'un corridor et de où vaisseau se met en mouvement,
le
deux salles continues. Voici , textuel- les esprits de l'Orient présentent leurs
lement, la description d'une de ces hommages au dieu debout dans son
importantes représentations, les plus naos , qui est élevé au milieu de la
anciennes de ce genre que la science bari ; l'équipage se compose de la déesse
ait jusqu'ici recueillies , et telles que SorL qui donne l'impulsion à la proue ;
Champollion jeune les a vues dans le
le du dieu Sev ( Saturne ) , à la tête de
tombeau d'un des Pharaons Rhamsès, lièvre, tenant une longue perche pour

dans la vallée de Biban-el-.Molouk à sonder le fleuve, et dont i! ne fait


Thèbes : usage qu'à partir de la huitième heure,
« Le ciel, sous la forme d'une femme c'est-à-dire lorsqu'on approche des
dont le corps est parsemé d'étoiles parages de l'Occident ; le réïs ou com-
enveloppe de trois côtés cette immense mandant est Horus , avant en sous-
composition le torse se prolonge sur
: ordre le dieu Haké-Oëris , le Phaëton
toute la longueur du tableau , clont il et le compagnon fidèle du soleil ; le
couvre la partie supérieure; sa tête pilote manœuvrant le gouvernail est
est à l'occiaent; ses bras et ses pieds un hiéracocéphale nommé Haôu;
plus
limitent la longueur du tableau, divisé la déesse Neb-Wa (la dame de
la Bar-
en deux bandes égales : celle d'en que), dont j'ignore fonctions spé-
les
haut représente l'hémisphère supérieur ciales; enfin le dieu gardien supérieur
et le cours du soleil dans les douze des tropiques. On a représenté" sur
heures du jour; celle d'en bas, l'hé- les bords du fleuve, les dieux ou les
misphère inférieur , la marche du so- esprits qui président à chacune des
leil pendant les douze heures de la heures du jour; ils adorent le soleil a
nuit. son passage , ou récitent tous les noms
«A l'orient, c'est-à-dire vers le point mystiques par lesquels on le distin-
sexuel du grand corps céleste ( de la {;uait. A la seconde heure paraissent
déesse Ciel ) , est figurée la naissance es ames des rois, ayant à leur tête le
du soleil; il sort du sein de sa divine défunt Rhamsès V, allant au-devant
mère NéUh, sous la forme d'un petit de la bari du dieu pour adorer sa lu-
enfant portant le doigt à sa bouche mière : aux quatrième , cinquième et
et renfermé dans un disque rouçe le : sixième heures, le même Pharaon prend
dieu Métà (l'Hercule égyptien , la rai- part aux travaux des dieux qui font la
son divine), debout da'ns la barque guerre au grand Apophis, caché dans
destinée aux voyages du jeune dieu , les eaux de l'Océan. Dans les septième
élève les bras pour l'y placer lui- et huitième heures , le vaisseau céleste

Digitized by Google
• • • *

• •• •

I •
• - -

». •

. » . *
» • 4

-

• _ •

Digitized by Google
Digitized by Google
I
ÉGYPTE. 105

côtoie les demeures des bienheureux ,


« Heure 4* , les constellations des
jardins ombragés par des arbres de deux étoiles ( influent ) sur l'oreille
Afférentes espèces, sous lesquels se gauche.
promènent les dieux et les âmes pures. « Heure 5", les étoiles du fleuve (in-
Enfin le dieu approche de l'Occident : fluent) sur le cœur.
Sec [ Saturne ) sonde le fleuve inces- « Heure 6*, la tête (ou le commen-
samment, et des dieux échelonnés sur cement) du lion (influe) sur le cœur. *
le Ht âge dirigent la barque avec pré- «Heure 7% laflèche (influe) sur l'œil
caution; elle contourne le grand bassin droit.
de l'ouest , et reparaît dans la bande su- « Heure 8', les longues étoiles, —
périeure du tableau, c'est-à-dire dans sur le cœur.
rbémisphère inférieur, sur le fleuve, « Heure 9', les serviteurs des parties
quelle remonte d'occident en orient. antérieures ( du quadrupède , Menté )

Hais , dans toute cette navigation des (le lion marin?) (influent) sur le bras
douze heures de nuit, comme il arrive gauche.
«score pour les barques qui remontent « Heure 10 e , le quadrupède Menté
le >fl , h
bari du soleil est toujours (le lion marin ? ) —
sur l'œil gauche.
,

orée à la corde par un grand nombre « Heure 1 1% les serviteurs du Menté,


de génies subalternes , dont le nom- — sur le bras gauche.
bre varie à chaque heure différente. « Heure \2\lepied de la truie (in-
Le grand cortège du dieu et l'équipage flue) sur le bras gauche.
ont disparu , il ne reste plus que le Nous avons donc ici une table des
pilote debout et inerte à l'entrée du influences , analogue à celle qu'on
ûaos renfermant le dieu , auquel la avait gravée sur le fameux cercle doré
depsse Thméî (la vérité et la justice) du monument d'Osymandyas, et qui
oui préside à l'enfer ou à la région in- donnait, comme le dit Diodore de Si-
létïeure semble adresser des consola- cile, les heures du lever des constel-
tions. lations arec
les influences de chacune
» Des légendes hiéroglyphiques pla- d'elles. Cela démontrera sans réplique,
cées sur chaque personnage et au com- comme l'a affirmé M. Letronne, que
mencement de toutes les scènes indi- Yastrologie remonte , en Égypte , jus-
gent les noms et les sujets en faisant , qu'aux temps les plus recules; cette
connaître l'heure du jour ou de la nuit question, par le fait, est décidée sans
à laquelle se rapportent ces scènes retour.
symboliques. « La traduction que je viens de don-
- Mais , sur ces mêmes plafonds et ner d'une des vingt-quatre tables qui
en dehors de cette composition, exis- composent la série des levers, est cer-
tent des textes hiéroglyphiques d'un taine dans les passages où j'ai intro-
intérêt plus grand peut-être , quoique duit les noms actuels des constellations
liés au même sujet. Ce sont des tables de notre planisphère ; n'ayant pas eu
des constellations et de leurs influen- le temps de pousser plus loin mon
ces pour foutes les heures de chaque travail de concordance, j'ai été obligé
mois de f année ; elles sont ainsi con- de donner partout ailleurs le mot à
çues : mot du texte hiéroglyphique.
- Mois de Tôbi , la dernière moitié. «J'ai dû recueillir, et je l'ai fait avec
— Orion domine et influe sur l'oreille un soin religieux , ces restes précieux
gauche. de Vastronomie antique, science qui
,r
m
«Heure l , la constellation d'Orion devait être nécessairement liée à Vas -
(influe) sur le bras gauche. trologie , dans un pays où la religion
•Heure 2", la constellation de Sirius fut la base immuable' de toute l'orga-
(influe) sur le cœur. nisation sociale. Dans un pareil sys-
r
Heure 3% le commencement de la tème politique , toutes les sciences
constellation des deux étoiles (les gé- devaient avoir deux parties distinctes :
meaux?), sur le coeur. la vartie des faits observés, qui con-

Digitized by Google
106 L'UNIVERS.
çtitue seule nos sciences actuelles ; la n'en était pas moins extravagante
partie s/)écutative, qui liait la science comme toutes les autres parties de
a la croyance religieuse, lien, néces- l'astrologie.
saire, indispensable même en Egypte, Les zodiaques découverts en Égypte
où la religion, pour être forte et pour portent avec eux , dans leur composi-
l'être toujours, avait voulu renfermer tion, les preuves de l'influence de cet
l'univers entier et son étude dans son art chimérique, déviation irration-
domaine sans borne ; ce qui a son bon nelle des préceptes élémentaires de
èt son mauvais coté, comme toutes l'astronomie. Notre planche it est
les conceptions humaines. » une réduction soignée du zodiaque
Onpeut voir une nouvelle preuve circulaire de Dendérah. Au premier
du mélange intime de la science avec aspect, on n'aperçoit qu'un mélange
les idées religieuses, dans l'usage oui de ligures diverses entourées d'inscrip-
existait encore en itgypte du temps des tions en caractères sacrés : une légère
empereurs , de mettre l'homme et les attention fera remarquer d'abord un
diverges portions de son corps sous l'in- cercle extérieur, occupé par une in-
fluence et la protection des planètes scription tracée en caractères de cet
ou dan dieux. Le papyrus , en écriture ordre, et coupée à des distances égales
hiératique, trouvé (fans la momie de par des ligures à tête de femme debout,
l'étauunoph , fils d'un archonte de ou à tête d'épervier accroupies , et qui
Thèbes, sous Trajan, est un curieux de leurs bras également élevés , sou-
exemple de ces pratiques superstitieu- tiennent un médaillon entièrement
ses que les sociétés modernes n'ont Parni de signes de toute espèce. Si
pas dédaigné d'imiter et de propager on étudie ce médaillon, où l'on a voulu
dans les tableaux fantastiques qui uér figurer le ciel, on reconnaît bientôt
corent ordinairement les almanaclis un peu au-dessous du centre de ce
populaires, comme si l'on réservait disque, vers la gauche, un lion, suivi
a dessein pour les livres les plus ré- d'une femme et marchant sur un ser-
pandus, un choix attentif des plus mi- pent: c'est réellement le signe du Lion
sérables erreurs de la science et de clans ce zodiaque. Derrière le groupe
l'imagination des hommes. On lit donc du lion marche une femme portant
dans le manuscrit de Pétainénoph, que dans sa main gauche une tige de blé:
sa chevelure appartient au Mil céleste, c'est la Vierge. Après elle, on retrouve
sa tête au dieu Soleil , ses yeux à la successivement, en allant de droite à
Vénus égyptienne , ses oreilles au dieu gauche , la Balance avec ses deux pla-
Macédo, gardien des tropiques, la teaux, le Scorpion, le Sagittaire, sous la
tempe gauche à l'esprit vivant dans forme d'un centaure ai lé; le Capricorne,
le soleil, la droite à l'esprit d'Amon, moitié chèvre et moitié poisson; un
le nez à Anuhis dans demeure de
la homme répandant l'eau contenue dans
Sackem, les lèvres au même Anubis, deux vases qu'il tient dans ses mains:
les dents a la déesse Selk, la barbe c'est le Verseau; les Poissons unis par
au dieu Macédo , le cou à Isis , les un triangle, et le signe figuratif eau ;
^ras à Osiris, les genoux à Aéith, un bélier, un taureau, deux ligures
dame de Sais, les coudes au dieu sei- humaines marchant en emble , ou les
gneur de G bel , le dos à Sischô . les Gémeaux; enfin le Cancer, qui les suit
parties sexuelles à Osiris ou a la immédiatement. Voilà bien les douze
déesse Koht , les cuisses au dieu Bal- signes du zodiaque; et pour recon-
bôr (l'œild'Horus), lesjambesà îNetphé, naître l'ordre dans lequel ils sont ran-
les pieds a I Mit ha, et les doigts aux dées- gés , en un mot quel était le premier
ses. Les astres et les divinités gou- des douze signes dans l'ordre de ce
vernaient toutes les zones de l'univers monument , M suffit de faire attention
physique et tous les êtres créés , et que le Cancer est placé immédiatement
cette opinion , pour être propre à ex- au-dt* t de la tête du lion ; qu'ainsi
pliquer en apparence bien des choses les douze signes forment, non pas

Digitized by Google
KGYPTE. 107
m cerclesans commencement ni laire reproduit sur notre planche il.
la, mais une spirale qui indique tiai- Il n'en est pas de même des zodia-
frffleot que le Lion est le premier si- ques d'bsnéh, ville au midi de Thèoes;
gne dans le système de ce zodiaaue; et si la composition générale et géo-
tous les autres viennent après dans métrique de ces monuments présente
leur ordre ordinaire; et la vérité de partout une ressemblance réelle, on
<rt te observation est prouvée par l'état

du zodiaque rectangulaire du même de détails très- sensibles , et d'une


tanplede Dendérah, où les signes étant importance majeure pour l'intelli-
ranges en procession , le Lion y est gence certaine de ces monuments
aussi le premier de tous. Kn dedans compares entre eux , et pour l'appré-
4 en dehorsde la spirale que forment ciation exacte de l'expression particu-
les douze signes , se trouvent un cer- lière du thème spécial ligure sur cha-
tain nombre de ligures qui rr présen- cun d'eux. Ainsi, dans les zodiaques
tent les principales constel lations extra- de Dendérah, le signe du Lion est le
zwiiaciles, et l'on a généralement premier, et marche en tête de tous
recounu dans l'animal monstrueux, les autres; c'est le signe de la Vierge
mannant debout, qui occupe à peu près dans les zodiaques d' Ksnéh. L'ordre
k centre du disque, une ancienne relatif des signes est le même dans
personnification de la grande Ourse; tous ces monuments; mais s'ils repré-
& sorte que, près d'elle, se trouve» sentaient tous un état réel du ciel
mit b place du pôle septentrional. On un théine réellement astronomique, il
r«t par là que les formes sous les- en résulterait qu'à Ksnéh c'est l'état
quelles les oonste liât ions
extra -zodiaca- du ciel quand le soleil était dans la
les sont urées dans ce zodiaque sont
lis; \ierge au solstice d'été , et à Den-
bien différentes des ligures des zodia- dérah , ce même état quand ce solstice
ques romains et modernes , et que les était dans le Lion. 11 y aurait une
{retnières sont tirées de la m) thologie science tout entière dans cette diffé-
Wtienne. rence d'un signe, puisqu'il faudrait
On doit remarquer aussi cette sé- en conclure 1* que les Égyptiens
né méthodique de ligures qui avaient observé le déplacement insen-
ij«tt circulairement la circonfei sible des signes par la rétrogradation
du disque et appuient leurs pieds sur des points équinoxiaux, en d'autres ter-
* ligne même qui la décrit. Ces figu- mes, la précession deséquinoxes; 2° que
ra* principales,
dont quelques-unes cette retr< gradation étant aujourd'hui
Wf»t accompagnées de signes acces- connue et estimée ù 72 années par de-
wires, sont au nombre de trente-six
; gré de signe du zodiaque , ou a 2160
« sont les décans dépendants , par ans pour un signe entier , si le zodia-
groupes de trois, de chacun des douze que d'Esnéh exprimait le solstice au
S'resdu zodiaque; et les groupes de même degré dans la Vierge que le zo-
•Ww hiéroglyphiques oui les avoisi- diaque de Dendérah l'exprimait dans
^t, groupés tous également termi- le Lion , il y aurait une différence d'un
nes par une étoile signe entier ou de ces 2 l(H) ans entre le
qui est le signe dé-
terminatif grammatical de l'espèce de thème astronomique figuré dans cha-
ofc groupes
, ne sont que les noms cun de ces deux zodiaques , et celui
Mânes de chacun de ces décans
, d' Ksnéh serait plus ancien de ce même
Omiwiis, Chachnoutms,Ouaré,etc.; nombre d'années que celui de Den-
'on a reconnu dans ces inscriptions dérah. A son tour, le zodiaaue de

te* noms
mêmes qui sont assignés Dendérah exprimerait un ordre de
WI decans du zodiaque par les an- phénomènes solaires antérieur à l'é-
wens écrivains sur l'astrologie. En riueoù, pour le calendrier moderne,
tous ces points , zodiaque rectangu-
le solstice d'été rétrograda dans le
laire du portique
du temple de Dendé- Cancer, le Bélier devenant ainsi le
rah <*t semblable
au zodiaque circu- signe de l'équinoxe du printemps. Ce

Digitized by Google
108 L'UNIVERS.
fut bien des siècles avant Père chré- « Le 16 novembre 1828, nous ar
tienne que le solstice d'été passa du v A mes en lin le soir à Dtneiémh.
Lion dans le Cancer; le Lion . pre- faisait unde lune magnifique,
clair
mier signe du zodiaque de Dendérah, nous n'étions qu'à une heure de di
aurait donc été le signe soUticial d'été tance des temples : pouvions-nous r
durant les 2160 ans antérieurs à ces sister à la tentation? Souper et pan
siècles ; et plus anciennement encore sur-le-champ furent l'affaire d'un i
la Vierge , premier signe du zodiaque stant seuls et sans guides , maïs a
:

4'Esnéh , aurait été le signe solsticial mes jusqu'aux dents, nous prîmes
pendant les 2160 ans précédents, dès travers champs, présumant <|ue h
que le Soleil aurait abandonné la Ba- temples étaient en ligne droite de n<
lance : et voilà comment, en admet- tre maasch. Nous marchâmes ainsi
tant ces explications comme exactes, chantant les airs variés des opéras le
on a trouvé tant d'antiquité et tant de plus nouveaux , pendant une heure f
siècles écrits dans les zodiaques de l'E- demie sans rien trouver. On découvri
gypte. enfin un homme; nous l'appelons
*
Mais on a refusé d'abord aux prêtres mais il s'enfuit à toutes jambes , nou
astronomes de Thèbes la connaissance prenant pour des Bédouins, car, ha
des lois de cette rétrogradation des billés à l'orientale et couverts d'ur
points équinoxiaux , ou de la préces- grand bernous blanc à capuchon . nou:
sion des équinoxes, qu'il faudrait leur ressemblions , pour l'Égyptien , à un<
accorder pour que les données pré- tribu de Bédouins tandis qu'un Eu-
,

cédentes fussent douées de quelque ropéen nous eut pris, sans balancer,
exactitude, |>our que la différence pour un chapitre de chartreux bien
dans Tordre des mêmes signes dans armés. On m amena le fuyard, et le
ces deux zodiaques prit être considérée plaçant entre quatre de nous, je lui
comme l'expression de résultats astro- ordonnai de nous conduire aux tem-
nomiques réellement observés et con- 5 les. Ce pauvre diable, peu rassure
statés par la science. Aujourd'hui qu'on 'abord, nous mit dans la bonne voie
paraît accorder aux Égyptiens la con- et finit par marcher de bonne grâce :
naissance des lois les plus importantes maigre, sec, noir, couvert de vieux
de la marche des corps célestes [supra, haillons, c'était une momie ambulante :
page 97), faut -il aussi admettre ces mais il nous guida fort bien et nous
données et lire les zodiaques comme le traitâmes de même. Les temples
des thèmes réguliers où serait écrit nous apparurent enfin. Je n'essaierai
l'état successif du ciel , réel et bien ob- pas de décrire l'impression que nous
servé, a plus de deux mille ans d'in- lit le grand propylori et surtout le por-

tervalle ? L'époque incontestable où les tique du grand temple. On peut bien


deux tableaux ont été sculptés et où le mesurer , mais en donner une idée,
furent édifiés les monuments mêmes c'est impossible. C'est la grâce et la
dont ils font partie, ôterait à une opi- majesté réunies au plus haut degré.
nion affirmative sur cette ouestion Nous y restâmes deux heures en extase,
une grande partie de la véracité qu'elle courant les grandes salles avec notre
pourrait tirer de toute considération pauvre fallot, et cherchant à lire les
sdentifique; les temples d'Esnéh et de inscriptions extérieures au clair de la
Dendérah, où les zodiaques ne sont lune. On ne rentra au maasch qu'à
qu'une faible portion de leur décora- trois heures du matin pour retourner
tion, sont en effet du dernier pé- aux temples à sept heures. C'est là
riode de la puisssance égyptienne , et que nous passâmes toute la journée du
tous deux de l'époque romaine : voici 17. Ce qui était magnifique à la clarté
ce qu'en dit Cnampollion le jeune, de la lune , l'était encore plus lorsque
après avoir étudié à fond ces deux cé- les rayons du soleil nous firent dis-
lèbres édifices. Il vit d'abord Den- tinguer tous les détails. Je vis dès
dérah : lors que j'avais sous les yeux un chef-

Digitized by Google
Digitized by Google
• • • •

• • • •

• • • •
• •

»• • - * • • •
» « •

• • •

•••••
v ...

Digitized by Google
••••
. . • -

• • > • -

• • • •

ê » •«
-

• - .

• • #

Digitized by Google
ÉGYPTE. 100

feint d'architecture couvert de , diaque, n'est pas d'une époque dif-


rnlptures de détail du plus mauvais férente. Voici encore la relation du
*n>. Yen déplaise à personne , les voyageur français :

b-reliefs de Dendémh sont détesta- « Le


mars 1829, au matin, nous
3
is, et cela ne pouvait être autrement: arrivâmes à Esnéh, où nous fûmes
l sont d'un temps de décadence. La très-gracieusement accueillis par Ibra-
wlptare s'était Jéja corrompue , tan- him-bey, le mamour ou gouverneur
feqoe l'architecture, moins sujette à de province; avec son aide, il nous
la
arier, puisqu'elle est un art chiffré , fut permis d'étudier le grand temple
Vtait soutenue digne des dieux de d' Esnéh, encombré de coton, et qui
tapteet de l'admiration de tous les servant de magasin général de cette
Wes. Voici les épooues de la déco- Production, a été crépi de limon du
ction la partie la plus ancienne est
: iil , surtout à Pextérieur. On a éga-

i muraille extérieure , à l'extrémité lement fermé avec des murs de boue


ta temple, où sont figurés, de pro- l'intervalle qui existe entre le premier
fitons colossales , Ctéopûtre et son rang des colonnes du pronaos, de sorte
k Ptolémée-Carsar. Les bas-reliefs que notre travail a du se faire souvent
«1* rieurs sont du temps de l'empe- une chandelle à la main, ou avec le
*ir Ivguste, ainsi que les murailles secours de nos échelles, afin de voir
ateneures latérales du naos , à l'ex- les bas -reliefs de plus près.
'^t»on de quelques petites portions « Malgré tous ces obstacles , j'ai re-
fii sont de l'époque de Xéron. Le cueilli tout ce qu'il importait de sa*
pronaos est tout entier couvert de voir relativement à ce grand temple f
Rendes impériales de Tibère , de sous les rapports mythologique et His-
(a !«, de Claude et de Méron; mais torique. Ce monument a été regardé*
Affis tout l'intérieur du naos, ainsi d'après de simples conjectures établies
te les chambres et les édifices sur une façon particulière d'interpréter
rcnstniits sur la terrasse du temple, le zodiaque du plafond comme le plus
,

« n'existe pas un seul cartouche sculp- ancien monument de l'Egypte : l'étude


tâtons sont vides et rien n'a été ef- que j'en ai faite m'a pleinement con-
fet; mais toutes les sculptures de ces vaincu que c'est au contraire le plus
$Hrtements, comme celles de tout moderne de ceux qui existent encore
'^teneur du temple, sont du plus en Egypte : car les bas-reliefs qui le
«lovais style, et ne peuvent remonter décorent , et les hiéroglyphes surtout
F» haut que les temps de Trajan ou sont d'un style tellement grossier et
Intonin. Elles ressemblent a celles tourmenté, qu'on y aperçoit, du pre-
J
du propvlon, mier coup d'œil, le point' extrême de
qui est de ce dernier em-
pereur, et qui , étant dédié à /sis la décadence de l'art. Les inscriptions
,
conduisait au temple de cette déesse hiéroglyphiques ne confirment que trop
derrière le grand temple, qui est cet aperçu les masses de ce pronaos
:

ton le temple de Hathôr


( Vénus ) ont été élevées sous l'empereur César-
25* le montrent les mille et une nberius-Lfaudius- Cermanicus (l'em-
dédicaces dont il est couvert , et non pereur Claude) , dont la porte du pro-
P» le temple d'/sù , comme Ta cru naos offre la dédicace en grands nié-
Commission d'Egypte. Le grand roglyphes. La corniche de la façade et
[J
propvlon est couvert des images des le premier rang de colonnes ont été
empereurs Domitien et Trajan. Quant sculptçs sous les empereurs f'espa-
^ Typhonium , il a été décoré sous sien et Titus ; la partie postérieure du
7rai<tn
Hadrien et Antonin-te-pievx. » pronaos porte les légendes des empe-
y

reurs Antonin, Marc-Aurèle et Com-


Jf* renseignements recueillis à Es-
^ w sont pas moins positifs sur l'é- mode ; quelques colonnes du pronaos
Pf*l
u e où le pronaos du grand tem- furent décorées de sculptures sous
P*e, orné d'un zodiaque, a été construit; Trajan y Hadrien et Antonin; mais,
*k petit temple où , est un autre zo- à l'exception de quelques bas-reliefs

Digitized by Google
L'UNIVERS.
de l'époque de Domitien, tous ceux tions encore tendent à amoindrir
des parois de droite et de gauche du l'importance scientifique et archéolo-
pronaos portent les images et les lé- gique de ces monuments , qui n'en sont
gendes <\eSej)time Sévère, et de Géta, pas pour cela moins important* par
que son frère Caracalla eut la barbarie leur sujet , leur patrie et leur véritable
d'assassiner, en même temps qu'il Ht époque ; enlin on ne peut se soustraire
proscrire son nom dans tout l'empire; à la nécessité d'admettre d ias leur
il parait que cette proscription du composition l'influence des opinions as-
tvran fut exécutée à la lettre jusqu'au trologiques alors dominantes dans tout
fond de la Thébaïde, car les cartou- l'empire romain, où elles avaientété im-
ches noms - propres de l'empereur portées de la patrie même de ces zodia-
Géta sont tous martelés avec soin ; ques. La présence des décans sur te
niais ils ne l'ont pas été au point de zodiaque Je Dendérah caractérise tou-
m'empécher de lire très-clairement le tes les compositions analogues; et elles
nom ae ce malheureux prince : I'em- étaient, on pourrait dire, vulgaires eu
pereur César-Géta le directeur, Égypte, car des cercueils de momies,
« Ainsi donc , l'antiquité du pronaos de personnages peu considérables eu
d'Esnéh est incontestablement tixée ; sont ornés. Dans le cercueil de Péta-
sa construction ne remonte pas au- ménoph qui est à la Bibliothèque
,

delà de l'empereur Claude; ses sculp- royale, est peint un zodiaque com-
tures descendent jusqu'à Caracalla , mençant aussi par le signe du Uon ;

etdu nombre de celles-ci est le fameux celui du Cancer est tiré de la série , et
zodiaque dont on a tant parlé. » placé au-dessus; et il se trouve que te
Si donc ces zodiaques , évidemment Cancer était le signe où le soleil H
sculptés et édiliés par les Egyptiens trouvait au mois de janvier de Tan Oi
du temps de la domination romaine, de notre ère, qui est le mois de U
représentaient un état du ciel tel qu'on naissance de Petaménoph. L'n autre
a voulu l'y reconnaître d'après l'ordre zodiaque , commençant aussi par le
apparent des signes du zodiaque, la Lion, est peint dans le cercueil de ta
Vierge étant le signe chef dans l'un, jeune Sensuos, sœur du même Peta-
le Lion dans Pautre , et cette substi- ménoph, et morte à peu d'anneei
tution du Lion à la Vierge procédaut d'intervalle de son frère. L'ensemble
de l'intention de représenter dans ces de la composition des zodiaques , la
tableaux le phénomène que l'astrono- présence des décans, la singularité de
mie moderne nomme la précession ladissection des figures, qui est diffé-
des équinoxes, qui aurait été connu rente dans les monuments d'une épo-
des anciens, on est obligé de supposer que très- rapprochée comme le suât
,

que ces mêmes tableaux, sculptes au ceux d'Esneh et de Dendérah, et qui


premier etau second siècle de l'ère est semblable dans des ouvrages d'une
chrétienne, sont des copies de mo- époque comparativement plus éloi-
numents d'une plus haute antiquité, gnée, comme le zodiaque de Dendérah,
qui fut contemporaine des siècles bril- et ceux qu'on voit dans les momies de la
lants de Thèbcs et de Memphis. 11 famille de Pétaménoph; l'usage vul-
y
aura des personnes que cette sup- gaire de ces compositions sculptées ou
position satisfera peut-être ; mais utes ; enlin l'é|>oquedes plus célèbres
avec la loi des précessions on compo- r'ces zodiaques, époque qui fut celle
sera des zodiaques pour une époque de la prospérité générale de l'astrolo-
d'une antiquité ou d'un avenir sans gie dans le monde romain , nous por-
limites; les astronomes de Tlièbes y tent à croire qu'on ne peut méconnaî-
en les faisant aussi savants que l'exige tre dans ces compositions l'influence
l'interprétation supposée de nos zo- de cette fausse science , dont la prati-
diaques, purent composer de ces thè- que remontait à une haute antiquité
mes poar les temps bien antérieurs à en Égypte et paraît avoir été l'occu-
lèur Siècle ; bien d'autres considéra- pation spéciale de certains membres de

Digitized by Google
EGYPTE.
laclasse sacerdotale , tontes les scien- brables degrés de la toute-puissance du
ces étant le privilège de cette caste rand pontife à l'humble profession
puissante qui formait le premier ordre e portier des temples et des palais t
de Pétat et s'était intimement immis- peut-être même de leurs serviteurs,
cée aux droits et aux devoirs de la line nomenclature de ces fonctions
royauté. nombreuses , malgré qu'elle fût
Cest l'importance même de cette fort variée, serait bien aride sans
caste , la variété de ses attributions doute malgré sa nouveauté : nous
et l'incertitude des notions recueillies la hasarderons toutefois pour ce der*
sur elle par l'antiquité classique nier motif, et à cause de I authenticité
qui s'opposeront encore long-temps 5 des sources d'où nous la puisons, c'est*
ce que l'on connaisse complètement sa à-dire des monuments mêmes.
constitution politique : les Grecs, qui Chaque divinité avait ses prêtres
s'en occupèrent bien anciennement comme ses temples particuliers ; il est
avaient du sacerdoce une idée fort mince vraisemblable que les prêtres gardaient
relativement à l'autorité de la classe entre eux le rang même que la religion
sacerdotale égyptienne; en Grèce, le donnait aux dieux qu'ils desservaient,
service des temples était la seule oc- et le culte de grande divinité de
la
cupation des prêtres'; en Egypte, ils Thèbes, d'Ammon, roi des dieux ,
étaient un corps de l'état, gouvernant, étant le plus répandu , les monuments
pour ainsi dire , les rois et les peu- relatifs à ses prêtres devaient être les
ples au nom des dieux , et ayant lé plus nombreux ; ses temples devaient
monopole de l'administration de là être les mieux dotés , ils étaient élevés
justice, de la culture des sciences et dans la capitale de l'empire. Cest pour
Je leur enseignement. Aussi trouve- ces motifs qu'on retrouve donc assez
t-on les membres de cette caste par- fréquemment des serviteurs d'Ammon,
tout, dans tous les rangs de la société et de tous les degrés ,
rappelés dans
égyptienne) et reconnaît-on dans les les inscriptions égyptiennes. Avec les
attributions des plus infimes fonc- prêtres d'Ammon , elles nomment
tionnaires que, par quelques points, ils aussi des prêtres des autres dieux
se rattachent , ou par les titres , ou par d'Hap-mou (le Nil), d'Osiris,de Phtha
leur office , à la religion et à ses d'Horus, de Thoth , et des déesses
ministres. On retrouve dans quelque* fféith , Thméi ,
Bubastis, Souan ou
écrits des anciens les qualifications Lucine.
propres aux diverses classes des prê- Les monuments nous désignent aussi
tres : Clément d'Alexandrie désigne les grands-prêtres attachés au culte
très- vraisemblablement dans l'ordre des rois , et à la fois à celui d'un dieu
inverse de la préséance , le chanteur et d'un roi ; des rois revêtus du titre
l'horoscope, ou observateur des as- de grand-prêtre d'une divinité; enfin,
tres, rhiéro-rammate , le stoliste et les pères-prêtres ou prophètes ;
le prophète. Plus anciennement, r In- Les hiérogrammates ou scribes sa-
scription de Rosette nomme les pon- crés, charges de l'administration des
tifes, les prophètes, les stolistes, les revenus sacrés, tirant leur titre du dieu
utéropbores , les hiérogrammates et honoré dans le temple où ils étaient
les autres prêtres de tout ordre em- placés : il y avait aussi les hiérogram-
ployés sous des titres divers dans toute mates des villes.
Egypte. Enfin, en consultant les mo- Les archi -prophètes, les prophètes,
numents , source inépuisable de docu- les prophètes de Hathôr et autres
ments, on neut le dire , vierges encore, dieux ou déesses ;
la caste sacerdotale s'offre à nous avec Les gardiens des temples , ou atta-
ses ramifications inGnies dans tous les chés aux temples ; les supérieurs dans
rangs, et, n'en dédaignant aucnn, est les divers rangs;
présente partout, au moyen d'une vaste Les sphraghistes ou scribes des vic-
hiérarchie qui descend par d'innom- times, chargés de marquer d'un grand

Digitized by Google
L'UNIVERS
sceau les victimes propres aux sacri- dérable de toutes, nous font conce
fices ;
l'idée d'un corps semblable a Vw
Les prêtres des villes , comme Tétait ceux qui existèrent autrefois <

Soutimés dont le cercueil est au Mu-


, notre Occident, et qui, dominant
sée de Paris, et qui se qualifiait de dant des siècles toutes les rh.'ili
prêtre de Thèbes, chargé des offran- implantés à la fois dans le sol et
des faites à Ammon , à Mouthis-IS'eith, pinion du pays, assez riches pour
à Khons et à tous les autres dieux redoutables aux grands et secouru
des régions supérieures et inférieures, aux petits , se rattachaient d'une il
et qui était en même temps hiérogram- aux puissances du ciel et de la te:
mate et scribe des temples de Thebes; et, de l'autre, régissaient empirii
Leshiéracophores, les prêtres royaux; ment les populations contempora
ceux qui étaient charges de présenter })ar une habile dispersion dans 1
les offrandes funéraires; les libano- es rangs sociaux d'adhérents fidèle
Fhores, ou prêtres chargés d'offrir intéressés, ayant, aux avantages
encens aux dieux ; les spondistes , ou l'association , une part proportion
chargés des libations ; les surveillants à leurs services et a leurs mérites
des temples; les fonctionnaires infé- conservant dans plusieurs emplois
rieurs attachés à leur service ; les avantages et les privilèges particuli
porteurs de ilabellum ou flabellifères, à la caste puissante où ils étai
pour les dieux, les portiers, les dé- d'ordinaire inaperçus. Le cachet
corateurs, les chanteurs, les inspec- cerdotal était einpreint sur tous
teurs. Enlin les Taricheutes, les Para- individus introduits dans l'ordre :

schistes et les Cholehytes étaient serviteurs n'étaient point prètr


les membres des rangs inférieurs de mais en servant les prêtres ils pai
cette caste toute - puissante et em- cipaient à tous leurs privilèges.
frioyés à l'embaumement des morts : Les costumes étaient variés et rég
es 'premiers préparaient les corps avec en tout point comme la hiérarchie,
le natron , ou les enveloppaient de avec des obligations générales im|
bandelettes ; les seconds étaient les sées à tous les membres de la cast
incUeurs, ou chargés d'ouvrir les il y avait encore les coutumes oui
flancs pour extraire les entrailles, et jonctions particulières à chaque ord
les troisièmes avaient des fonctions de prêtre. INous av ons donc à indiqu
relatives aussi à l'embaumement, mais les prescriptions communes à la Cad
peut-être plus relevées que celles des sacerdotale tout entière, et celles qi
deux autres sortes de prêtres. spéciales aux divers ordres , servaie
Plusieurs fonctions sacerdotales pou- à distinguer chacun d'eux de tous 1
vaient être conférées à la même autres.
personne; et un monument funéraire Comme prescription générale ai
montre un Egyptien, nommé Khon- prêtres égyptiens , on doit mettre i
soumosis, qui réunissait les titres premier ranç celle d'être entièremej
de prêtre d Ammon dam Oph ( la rasés et épiles; c'était un devoir imp
partie méridionale de Thèbes ) , d'hié- rieux pour eux de prendre ce soin toi
rogrammate du temple de la déesse les trois jours; Hérodote l'affirme p<
Mouthis-Bouto , et de membre du sitivement, et l'on sait par d'autre
collège des hiérogrammates de Thèbes. écrivains anciens que Eudoxe, voulai;
Si Ton se fait une idée de cet en- fréquenter les prêtres égyptiens, se fi

semble de titres et d'emplois, leur raser la barbe et les sourcils , et qu


nombre et leur variété, qui n'avaient en était encore de même sous les Rc
très-vraisemblablement pas échappé à mains, puisque l'empereur Commod
cette action symétrique qui organisa se fit aussi raser la tête , afin d'assis
toutes les autres institutions égyp- ter aux pompes Isiaques et d*y portei
tiennes, et qui était plus nécessaire le simulacre d'Anubis. Il entrait dam
peut-être encore dans la plus consi- cette prescription une idée de sûrtU

Digitized by Google
- • • - • • . •

- • •

. . •

Digitized by Google
1 "vi KN r.Yl- •
r Kl mu.:]! :

Digitized by Google
EGYPTE. 113

et de propreté corporelles que et dans tous autres pays. Les an-


les
>nt exiger le commerce des pré- ciens disent qu'il résultait' de ce cos-
avec les dieux et l'administration tume éclatant de blancheur, de la gra-
b^es sacrées. Dans la raontt- vité habituellede la physionomie, de
tfs égyptiens de toutes les époques, la démarche et des parofes des prêtres,
^connaît en effet les prêtres de tout un extérieur imposant que complétait
F a leur té te entièrement rasée et le repos forcé des bras et des mains
jk'. voyez planche 26, les prêtres habituellement cachés dans les plis
fent la 6a ri du dieu Amon à , des vêtements les monuments con-
:

firment cette observation faite par les


circoncision était prescrite à tous
-a anciens. A la tête entièrement rasée
Égyptiens, aux prêtres comme aux et à la forme des tuniques de lin , on
tm" citoyens. reconnaît donc facilement les figures
^'imitation de r Egypte, le sacerdoce des prêtres dans les tableaux égvptiens,
lavait aussi prescrit ces mêmes règles et ce n'est que par une erreur bien
lous ses membres; un insecte mort excusable aujourd'hui , que quelques
f la peau ou dans leshabillements auteurs ont avancé autrefois que les
prêtre juif l'exposait à des peines diverses classes de prêtres étaient dis-
L La propreté, et le choix des tinguées par la diversité des coiffures.
pour le vêtement de certaines Ces auteurs auraient été plus près de
ou de certains individus, fut la vérité en parlant de quelque diver-
tous les temps, parmi les nations sité dans le costume, diversité consis-
ous les degrés d avancement un , tant en quelques insignes caractéristi-
t très-expressif de supériorité. ques des rangs dans les mêmes fonc-
Lgvpte ne négligea pas ce moyen tions, et surtout de la divinité dont
innocent d'influence sur les mas- le prêtre desservait le culte. Les prê-

; ses prêtres, d'ailleurs exempts tres portaient en effet , suspendues à


toute difformité corporelle, ne leur cou , des figures des dieux ou des
être habillés que de robes déesses ; ils avaient dans leurs mains
lin; l'usage des étoffes de laine des enseignes sacrées et d'autres em-
Rir était défendu. On a cherché les blèmes religieux. La palette du scribe,
lotifs secrets d'une telle loi, et les le kasch ou roseau taillé, un papyrus
Ivinations tirées des plus occultes roulé ou déroulé , désignent d ordi-
ferets de la physique ou de la religion naire un prêtre hiérogrammate , ou
font pas été épargnées; la laine, le scribe sacré; c'est aux prêtres de cet
toil. le crin proviennent, a-t-on dit ordre qu'était réservée l'administra-
nine source impure ; le lin naît de la tion des choses sacrées, et l'on m'ex-
pre immortelle. La vérité est que cusera peut-être de dire en passant
te tissus de lin procuraient des vête- que l'habitude de poser sa plume sur
ments très -fins, très -légers, d'une le haut de l'oreille droite n'est pas une
blancheur éclatante , propres à toutes invention du génie bureaucratique mo-
les saisons, et qui n'engendraient au- derne : il y a trois mille ans qu'on a
cune essence immonde. Ces vêtements peint dans les monuments de Thèbes
devaient être les plus recherchés ; ceux aes scril>es de divers ordres paperassant
oui en usaient étaient donc distingués librement de leurs deux mains au
de la foule à laquelle étaient réser- moyen de ce secours emprunté à leurs
vées les étoffes communes et grossiè- oreilles. Le tehenti était leur habil-
res. En somme , la loi relative à l'ha- lement habituel, courte tunique que
billement des prêtres leur prescrivait I on a réservée vraisemblablement pour

d'être vêtus plus proprement et plus l'intérieur; la calasiris, plus longue


richement que ne Tétait la masse de et plus ample, couvrait le schenti.
la population égyptienne , et si ce fut line peau de panthère jetée sur la
vin secret politique en Égypte, il a été tunique de lin caractérise spécialement
îacilement deviné dans d'autres temps les prêtres d'Osiris; elle était l'insigne

$lkrai$on. (Égypte.) 8

Digitized by Google
114 L'UNIVERS.
de cette classe de prêtres. D'autres tits sceaux en terre émaillée &
se distinguaient par des pectoraux en vaient à marquer les victimes de p
forme de petit naos, renfermant le petite taille, telles que les oies ,
scarabée sacré, ou des images de divi- veaux, etc. Des couteaux de sac
nités, la bari symbolique, les em- fice,des tables et des vases à libati
blèmes de la vie, de la stabilité, et en pierres dures ou tendres , méi
des ligures d'animaux sacrés. De ri- en terre cuite, mais également on
ches colliers à plusieurs rançs ajou- de sculptures ou de peintures
taient à l'éclat au costume des prê- voient aussi dans nos collections ;
tres, des bagues ornaient leurs doigts y remarque des autels de matières
et leurs pieds étaient couverts et dé- de formes variées ; enfin, des vans i
fendus par des chaussures en papyrus, crés en bronze ou en substances r
ou bien en palmier, nommées tabtebs, turelles, espèce de grand seau à ain
ayant la forme de la plante des pieds et destiné a porter Veau du ISil da
et se terminant par de longues pointes les cérémonies religieuses.
recourbées , et attachées sur le cou-de- Ces seaux grands ou petits, so
t
d'ordinaire trcs-ornés. Le Musée êgy
Les prêtres employaient dans toutes tien du Louvre en possède un
les cérémonies du culte divers usten- bronze, remarquable a la fois par
instruments en matières va-
siles et dimension et par les sculptures do
musées renferment pres-
riées, et nos il est couvert. La panse est occupée \\

que tous ceux dont les monuments un tableau représentant un prêt


nous montrent la figure. Les parfums scribe d'Ammon noinr
et d'Osiris,
offerts aux dieux étaient brmés dans Chapochomis. de Psamméticïni
fils

un amschir, ou encensoir en bronze, recevant les honneurs funèbres q


formé d'une coupe posée sur une main lui sont rendus par son fils Pétési
sortant d une tige de lotus. Une tête prêtre d'Ammon, lequel offre l'encci
d'épervier, ou d'un autre animal sacré, a son père , lui fait une libation , et r
termine la poignée; le manche des cite pour lui une prière qui est gra\
am se h u s était quelquefois en bois à cote de cette scène en plusieurs lîgnj
sculpté. Des coffrets de même matière, d'écriture hiéroglyphique. Sur d'aï
incrustés en ivoire ou en bois de très vans sacrés , le tableau représen
couleurs variées, renfermaient les seulement le personnage auquel il
parfums; des cuillers en ivoire, en appartenu, rendant ses devoirs rel
bois , en serpentine, en terre émaillée gieux aux divinités oui étaient Pobj
ou en pâte d'émail , servaient à les en particulier de ses dévotions.
extraire, et ces cuillers n'étaient point A ces détails sur l'état social de la clas«
de formes muettes ou insignifiantes : sacerdotale égyptienne et sur queJqm
l'imagination et la piété des Égyptiens parties de ses privilèges, de ses devoii
animaient tout ce qu'elles produisaient; ou de ses fonctions nombreuses et m
ces cuillers à parfums imitaient donc riées, il faudra ajouter encore, pou
des bouquets, des boutons, des feuil- en présenter une idée moins incom
les, des fleurs ou une corbeille de lo- plète, tout ce qu'on sait sur les prati
tus; une femme cueillant les tiçes de ques intimes du culte , des cérémonie
cette plante sacrée ; et des animaux et des sacrifices; le lecteur ne srr
de divers ordres, tels que le chien, pas privé de ces notions ; l'ordre de
l'oie, ou une gazelle oryx. I^es fouilles sujets adopté pour cet écrit a mai
faites en Égypte nous ont aussi fait qué leur place un peu plus loin, dan
recouvrer quelques-uns des grands la section relative a la religion égyp
sceaux en bois qui servaient à marquer tienne en général.
les bœufs-mondes reconnus propres à Il ne nous reste donc qu'à dire quel
être offerts en sacrifice, sceaux dont ques mots sur une question souven
M servaient les prêtres sphraghistes agitée parmi les savants et qui nou:
ou scribes des victimes. De plus pe- semble aujourd'hui décidée par le te

Digitized by Google
EGYPTE.
tonnage des monuments. Seion le un manuscrit également funéraire on ,

ap^>rt"d*Herodote, il n'y eut point lit les prières pour Thaouaisis, autre
s Kivpte J- \ >rétresses; ilOti Im Jtiii- servante d'Amon-Ra, titre religieux
fcs y étaient exclues du sacerdoce, commun peut-être aux femmes et aux
teamnoins les cérémonies iliaques et tilles des prêtres, en attendant que ,
iculte dlsis, introduits dans le inonde comme la lille ou la sœur du roi Thouth-
omaiu, admettaient lesfemmescomme mosis, elles fussent employées effecti-
jrètresses , et quelques monuments de vement au culte d'une déesse, qu'elles
art confirment cette première indica- entrassent réellement dans le sacer-
fcn. Il est vrai qu'elle est recueillie doce et obtinssent le titre et le rang
jursde l'Egypte ; mais l'inscription de de prêtresse. Ainsi , en la question
luette, qui est toute de formule égyp- présente, il est diflicile d'accorder le
atime, nomme
expressément des tem- témoignage des monuments antérieurs
xr S prêtresses, telles que Pyrrha et postérieurs à Hérodote , avec l'as-
i.ï fonctions d'athiophors
reiiipiit les sertion si positive de cet historien
te h reine Bérénice-Évergète; Areia, d'après laquelle le sacerdoce en Egypte
r:iiephore d'Aninoé Phitopator; en- aurait été interdit aux femmes : les
uii .Irène , prétresse de la même faits ici cnumérés autorisent à croire
reine Arsinoé. D'autres actes du règne le contraire. On sait aussi que, dans
ta Lapides en Egypte fournissent les familles royales et sacerdotales, les
à&> notions absolument semblables et filles étaient vouées des leur bas âge
ft&nment des prétresses des diverses au culte des divinités; les reines pre-
reines qui jouirent après leur mort naient le titre d'épouses cT Amman, et
ifes honneurs divins. la sépulture de plusieurs de ces reines
oue l'inscription de Ro-
bira-t-on ainsi qualifiées existe encore dans une
sette Egypte grecque et d'une
est de 1 vallée de Thebes, non loin du Rha-
^oquc assez postérieure à Hérodote ? messeum occidental. Un est donc for-
ues lors nous invoquerons les monu- tement induit à adopter une opinion
ments qui sont à la fois d'origine contraire à celle d' Hérodote , et à croire
^}ptienne pure et bien antérieurs aux 3ue les femmes ne furent pas exclues
fcmps de l'historien grec. Telle est u sacerdoce, qu'elles y parcouraient
uoe stèle du Musée royal du Louvre, à divers titres une hiérarchie de fonc-
<» le roi Thouthmosis III, de la tions variées qui les élevaient au rang
IXÏÏV dynastie, est suivi de la et aux fonctions de prêtresses, soit
pincesse Mouthetis, sa sceur ou sa des déesses, soit des reines divinisées.
qui est quai liée de prétresse des
i Les dispositions générales de la con-
déesse» Mouthis et llathor, et qui fait stitution de la classe sacerdotale furent
ses adorations à la première de ces sans doute obligatoires pour les prê-
deux divinités. Dans plusieurs autres tresses, comme elles l'étaient pour les
monuments du même musée , les fem- prêtres; l'objet que les statuts avaient
mes et les filles des urètres portent principalement en vue, c'était la consi-
des titres religieux qui pouvaient être dération nécessaire à cette caste, véri-
q u Hgue chose dp plus qu'une simple table ordre religieux dans ses fonctions
aussi que
qualification sociale. 11 fallait extérieures, mais réellement corps po-
t<3 tilles
des prêtres eussent quelque litique par son concours nécessaire
part aux privilèges de la caste à laquelle dans les affaires principales de l'état, par
rites appartenaient
irrévocablement, son influence inévitable même dans les
les déesses avaient besoin aussi de plus minimes, et surtout par sa con-
prêtresse de divers ordres pour leur stitution territoriale. La loi voulait lui
*r?ice. Aussi voit-on que dans un ta- faire cette considération en lui pres-
to»u funéraire Ténési , fille du prêtre crivant la pratique de toutes les ver*
« soleil Osoroéris , prend la qualité tus ; la piété envers les dieux et la pa-
* menante d'Amon-Ra , que sa
mère, trie, l'accomplissement régulier de
femme de ce prêtre, portait aussi. Dans tous les devoirs religieux, la fidélité à
8.

Digitized by Google
116 L'UNIVERS.
la loi etau prince, la bonne adminis- de statues de grands-prétres dépo
tration des affaires publiques , la dans le temple par chaque pontift
science, la frugalité, la modestie, la son vivant. Plus tard , ils montré
retraite et la bienfaisance. 341 de ces statues à Hérodote, e
Ce que l'histoire rapporte de ces les lui comptant l'une après Tau

fwétres, Hérodote, qui a vécu fami- commençant par l'image du gn


ièrement avec eux pendant que l'E- prêtre dernier mort, ils lui firent
gypte était sous la domination des marquer que chacun de ces persoi
Perses , le confirme par son témoignage ges avait succédé à son père jusqi
formel. «Du reste, ajoute-t-il, les plus ancien.
prêtres jouissent, en retour de leurs Sans nous arrêter à discuter c
nombreuses obligations , de beaucoup sériede 341 générations d'homn
d'avantages. Ils n'ont aucun soin do- dont la durée est estimée dans le r
mestique , ni aucune dépense à faire ; d'Hérodote à 1 1,340 années ^ et j
les mets consacrés leur servent de dant laquelle, disaient les Egypt
nourriture , et chaque jour on leur à l'historien grec, le soleil s'était
présente en abondance de la chair de deux fois au point où il se cou
bœuf et des oies. On leur fournit en d'ordinaire, et s'était couché deux I

outre du vin de raisin ; mais il ne leur au point où il se lève (phénomène b


est pas permis de manger du poisson. ou mal observé, bien ou mal éno
Les Égyptiens ne sèment jamais des par les prêtres , bien ou mal cornj
fèves dans leurs champs , et si quel- par le voyageur , et que tant de sava
ques-unes y croissent naturellement modernes ont vainement tenté d'ex
ils ne doivent les manger ni crues, quer plausiblement ) , nous ferons
même ni cuites ; les prêtres ne peu- marquer, par occasion, et dans 1*
vent en supporter la vue, et ils les térët des recherches nouvelles que
considèrent comme un légume im- rapport merveilleux des prêtres égi
pur. » tiens ne manquera pas d'exciter encoi
Hérodote confirme aussi l'existence que l'estimation ue la durée de <

des divers collèges de prêtres , chaque générations, à raison de trois pc


divinité ayant le sien, qui était régi un siècle , est éminemment erroné
par un pretre-chef ou grand-prêtre de et qu'Hérodote, à qui elle paraît t
collège dignité également héréditaire
,
partenir a mal à propos applique
,

comme tous les degrés du sacerdoce l'Orient une règle qui n'était bon
sans en excepter le pontife suprême que pour la population de la Grèce
chef de la hiérarchie religieuse , dont des autres contrées de l'Occident,
le centre était dans la capitale de l'em- où généralement les hommes se m
pire et dans le temple de sa grande rient vers l'a^e de trente ans;
divinité, le temple d'Ammon à Tnèbes. comme en était autrement en Égypt
il

Ce pontife suprême était traité par sa où la puberté et les mariages étaie


caste à l'égal des rois, et le même bien plus hâtifs, l'estimation de la à
temple, où l'autorité publique dépo- rée des 341 générations est exagén
sait la série chronologique des statues dans Hérodote, et ce sera dans i
des souverains , recélait aussi la série intervalle moindre que celui de 11,3
chronologique des statues des grands- années que se seront manifestés 1

f»rétres. Hécatée de Milet, qui visita phénomènes solaires, vraisemblabi


'Égypte avant Hérodote, se vantait ment inexplicables, qu'on a si inut
devant les prêtres d'Ammon de sa gé- lement cherché et qu'on cherche"
néalogie qu'il attachait à un dieu par encore à expliquer, d'après la relatk
son seizième ancêtre; les prêtres se d'Hérodote, peut-être même d'apn
moquèrent de son origine aivine à la l'élément nouveau que notre observa
seizième génération, en lui montrant tion fournit à l'examen de cette antiqu
plus de trois cents générations successi- tradition. Et pour ne rien omettre d
ves d'hommes, représentées par autant ce qui peut être utile à cet examen

Digitized by Google
EGYPTE. 117

peut-être à jamais oiseux et stérile, sidérables qui conservaient fidèlement


nous ajouterons que nos recherches les images de leurs aïeux. Erigées et
sur des générations réellement histo- consacrées au nom des lois , celles des
riques, certaines et nombreuses des frjrands-prétres , placées à côté de cel-
monarques é^vpt iens , ont porté à 28 és des rois , étaient également d'im-
aïs au plus la durée des générations posants accessoires des annales pu-
humaines pour FÉgypte , ce qui don- bliques; on réunissait ainsi à l'effigie
nerait au calcul d'Hérodote une exa- des rois la relation de leurs bonnes
gération de près de 1800 ans. Mais il actions, car les prêtres étaient à la fois
est peut-être plus raisonnable de ne les dépositaires des archives et les
toir dans ces chiffres et ces généra- écrivains des annales qui en étaient
tion qu'un de ces nombres, en quel- extraites. On sait ce que le judicieux
que sorte religieux, consacrés, du Hérodote pensait de l'esprit et du
moins par la cosmogonie et les chro- caractère des égyptiens, appliqués à
niques nationales, comme tels autres la recherche des faits relatifs à leur
que la tradition nous a conservés , propre histoire; « ils sont très-soi-
i ancienne chronique entre autres qui, gneux, dit-il , de conserver le souve-
supputant les temps connus de 1* Egypte, nir des événements , et ils me parais-
fixe la durée du règne des dieux et des sent de tous les peuples que j'ai con-
rots à 36.Ô2.S ans, et ce nombre con- nus , les plus instruits en faits histo-
tient exactement la durée de2ô périodes riques. »
^iliaques de 1461 années chacune, Après cette dernière assertion d'Hé-
temps de la révolution des deux années rodote , qui a tant et tant questionné
solaires, la vague et la lixe, et après les prêtres égyptiens et sur leur pro-
lequel les deux années recommençaient pre histoire et sur celle des peuples
le même jour. Si donc une idée sem- étrangers à l'Egypte , on ne sera pas
blable était entrée dans la supputation surpris qu'un si bon esprit , frappe à
des 341 générations d'hommes dont la lois de leur science et de l'antiquité
d'Egypte parlèrent si haut
prêtres de leurs annales, les ait aussi in-
a comme à Hérodote, on ne
Uécatée terrogés sur les faits les plus anciens
pourrait aujourd'hui la retrouver ni et les plus mémorables de l'histoire de
"ce les nombres d'Hérodote, tels la Grèce. « J'ai cru, dit-il encore,
qu ik nous sont parvenus , ni en por- devoir demander aux prêtres égyptiens
tant la somme à 26 ans de plus, leur opinion sur ce que les Grecs ra-
comme l'exigent les éléments mêmes content de la guerre de Troie, et s'ils
de son calcul
; et la plus grande ap- le regardent comme vrai ou comme
proximation entre le nombre exprimé controuvé. » Ils lui répondirent et sur
des générations et le nombre des pé- le rapt d'Hélène et sur la prise de
riodes de 1461 ans, donnera les deux Troie, et sur le voyage de Menélas en
nombres 10,230 ans , somme de 341 Egypte, des choses si positives et à
générations à 30 années pour chacune, la fois si conformes à Tordre ordi-

? 10,227 ans, somme de sept périodes naire des choses humaines , qu'Héro-
de 1461 années. dote n'hésita pas à donner la préfé-
Quelque oiseuses et stériles aussi rence à la relation historique des
que puissent être ces indications, il prêtres sur la relation merveilleuse
reste le fait principal que nous avons d'Homère; « il me semble, ajoute-t-il,
recueilli du récit d Hérodote, qui a vu qu'Homère n'a pas ignoré ces faits;
dans le temple d'Ammon à Thèbes le mais comme ils ne s'accommodaient
"eu où étaient conservées les statues pas heureusement avec le plan de son
gyritt en bois, des grands-prétres épopée , il a adopté une autre version,
rtiefc de la
hiérarchie sacerdotale en en laissant apercevoir cependant qu'il
crypte. Ces statues devaient recevoir était instruit de la narration égyp-
au moins les
mêmes honneurs que celles tienne; » et cette réflexion si sensée
des ancêtres des autres familles con- est une preuve de plus de cette appli- .

Digitized by Google
118 L'UN
cation constante d'Hérodote à la re- son hôte, et amenez-ie oevant moi
cherche attentive de la vérité. Au sou- alin que ic sache de lui-même ce qu
venir des brillants et poétiques récits peut alléguer en sa faveur? »
d'Homère, qui sont présents à l'esprit Thonis ayant reçu ces ordres, i

de tous nos lecteurs, ajoutons ici arrêter Pâris et refint ses vaisseau:
l'histoire de la destruction de Troie il le mena ensuite, avec Hélène,
d'après les annales égyptiennes, et Memphis, où l'on conduisit aussi tout
te. ic qu'Hérodote nous 1 a transmise. les richesses trouvées sur les vaisseau
Pàris enleva Hélène de Sparte, et et même les domestiques qui s'étaiei
voulut la conduire à Troie ; mais des réfugiés dans le temple. Lorsque toi
vents contraires qui s'élevèrent pen- furent rendus à Memphis, le roi d
dant qu'il traversait, la mer Egée le manda à Paris qui il était et d'où
jetèrent dans celle d'Ég\pte. Ces vents venait. Le prince déclara, sans di
ne s'étant pas calmés, ils le forcèrent Acuité, sa naissance, le nom de i

d'aborder a la côte, et d'entrer dans patrie, et son voyage. Mais le r


le IN il par la bouche de Canope pour ayant voulu savoir ensuite où il aya
débarquer aux Tarrichées. II y avait pris Hélène, il commença à hésit<
alors sur le rivage, comme il y exista dans ses réponses et à s'écarter de
de tout temps, un temple consacré vérité. Alors on fit paraître les suj
à Hercule, avec droit d'asile. Un es- pliants d'Hercule, qui donnèrent toi
clave, quel que fût son maître, qui les détails du crime. Enfin, le r
s'y réfugiait et consentait à se donner prononça ces paroles : ne coi
« Si je
au dieu en se laissant imprimer sur sidérais pas comme mon premier d<
le corps une marque sacrée, y était voir de ne jamais faire périr aucu
à l'abri de toute poursuite; et ce droit des étrangers que les vents forcei
d'asile, comme le temple, existaient d'aborder dans mes états , je vengera
encore du temps d'Hérodote. sur toi , ô le plus scélérat des hommes
Quelques domestiques de Paris, l'injure que tu as faite aux Grecs t
instruits de ce privilège, abandon- commettant, au sein de l'hospitaiitc
nèrent leur maître , et se réfugièrent un forfait aussi impie; je te punirai:
dans le temple. Iài , assis en suppliants, toi nui, non content d'avoir profar
ils se déclarèrent les accusateurs de le ht de ton hôte , lui dérobes î
Pâris; et , dans le dessein de lui nuire, femme séduite par tes ruses, et tu
racontèrent en détail ce qui s'était encore, insatiaole dans tes crimes
passé à l'égard d'Hélène, et l'injure chargé des dépouilles de la maison qi
qu'il avait faite à Ménélas. Leur ac- t'a reçu. Cependant, comme avar
cusation et leurs plaintes furent en- tout il m'importe de n'avoir pas à n;
tendues du prêtre du temple, chargé reprocher la mort d'un de mes hôtes
de la garde de la bouche de Canope je me bornerai à t'empécher d'en
et dont le nom était Thonis. Informé mener plus loin cette femme; et K
de ces faits , le prêtre envoie , en richesses dont tu t'es emparé, je h
toute diligence, un exprès pour infor- garderai pour le Grec oui t'a aonri
mer le roi de l'arrivée d'un étranger, 1 hospitalité , et je les lui remets
Troyen d'origine, qui vient de com- dès qu'il viendra lui-même les r<
mettre en Grèce un grand forfait. Il prendre. Quant à toi , et à ceux qi
a séduit la femme de son bote et montent tes vaisseaux, je vous donu
Temmène avec lui ; ses vaisseaux por- trois jours pour sortir de mes étal
tent de grandes richesses les vents
: et gagner la haute mer. Si vous n'e
Font forcé d'aborder en Egypte; doit- béissez , je vous trairerai comme nu
on le laisser tranquillement se rem- ennemis. » Paris obéit au roi , et quitt
barquer, ou bien lui reprendre tout l'Egypte ; Hélène y fut retenue ave
ce qu'il emporte? Le roi répondit : ses richesses.
« Emparez -vous de cet étranger ac- Mais les Grecs, comme les prêtre
cusé d'une si cruelle injure envers égyptiens déclaraient le savoir d'apre

Digitized by Google
i
ÉGYPTE. 119
nne tradition Tenant de Ménélas lui- nements qui avaient eu lieu dans leur
même, les Grecs, à la suite du rapt propre pays.
d'Hélène , assemblèrent une armée qui Et pourquoi auraient-ils ignoré les
arriva dans la Teucrîde pour soutenir Grecs, Troie et le bruit de la destruc-
Ménélas ; cette armée , après être dé- tion de l'empire de Priam, quand à, cette
barquée , établit son camp, envoya des même époque la renommée des Éevp-
députés à Troie; Ménélas lui-même tiens, de leurs armes , de leur civilisa-
fut du nombre. Cette députation, re- tion , avait pénétré dans toutes les par-
çue dans l'enceinte des murs de la ties de l'Asie; quand leur puissance,
Tille, réclama Hélène, ainsi que toutes assez révélée par leurs richesses et la
les richesses que P ins avait dérobées magnificence de leurs monuments, était
et emportées avec lui, et demanda, si intéressée à fréquenter tout le bassin
en outre , vengeance de l'injure faite oriental de la mer intérieure et l'Ar-
aux Grecs; mais les Troyens répon- chipel, qui n'en est qu'un appendice.
dirent alors ce qu'ils ont toujours L'active mais discrète curiosité des
soutenu depuis, soit sous la foi du Égyptiens leur avait appris les na-
serment, soit dans leurs discours or- tions voisines , leur puissance et leurs
dinaires, que ni Hélène, ni les richesses intérêts, et jusqu'à leur physionomie?
redemandées ne se trouvaient en leur Dans les tableaux emblématiques qui
pouvoir; que ces trésors, et Hélène décorent les tombeaux de leurs rois,
elle-même % étaient en Égypte , et qu'il ils ont habituellement représenté avec ,

serait injuste de les rendre respon- une bien remarquable précision , les
N»He> d'objets qup le roi d'Égypte habitants de l' Égypte et ceux des con-
tenait en sa possession. Mais les Grecs, trées voisines; le dieu Horus, le pas-
ajoutent les Égyptiens, avant pris cette teur des peuples , marche à leur tête ;
réponse pour une raillerie, firent le les Occidentaux
y figurent après les
siège de la ville , finirent par la pren- Asiatiques, et les Ioniens y sont nomi-
dre ; et après s'en être rendus les maî- nativement mentionnés.
tres, comme ils n'y trouvèrent pas C'est un Ionien que représente la
Hélène , forcés alors d'ajouter foi aux figure 6 de notre planche 1 ; c'est
1

premières paroles des Troyens, ils rén- une famille absolument grecque de
ovèrent Ménélas en Egypte. physionomie et de costume que re-
Ménélas s'y rendit donc; et après produit une précieuse peinture, en-
avoir remonté le Nil , il arriva clans core existante dans un des tombeaux
Memphis, où il se fit connaître; il de Beni-Hassan, où l'on voit une
fut traité avec les plus grands hon- femme, couverte d'une tunique pous- ,

neurs, comme un hôte distingué, et sant devant elle un âne qui porte deux
on lui remit, avec Hélène qui n'avait jeunes entants dans des paniers , et
point eu à se plaindre de son séjour sous la protection d'un homme habillé
en Egypte, les richesses qui lui' ap- de la chlamyde grecque, et tenant
partenaient. d une main l'antique lyre grecque à
Les Égyptiens disaient ensuite que trois cordes , et de l'autre un bâton.
Ménélas ^malgré tant de services, se Tout ceci est grec , puisqu'il est écrit
rendit coupable d'un sacrilège, et que, au-dessus , en signes alphabétiques
poursuivi par les Égyptiens, il remonta lourd, Ioniens; et ces figures de Grecs,
précipitamment sur ses vaisseaux et peintes exactement par les Égyptiens,
s'enfuit en Libye. Les prêtres égyp- remontent incontestablement a plus de
tiens ne savaient pas ce que .Ménélas quatre cents ans au-delà du temps des
devint après cette fuite, mais ils as- aventures d'Hélène et des malheurs
surèrent que tout ce qu'ils venaient de la famille de Priam.
de raconter au sujet des trésors d'Hé- Hérodote savait sans doute aussi
lène, ils le savaient d'une manière bien que nous les antiquités de la
certaine , soit par les recherches qu'ils Grèce et celles de l'Égypte; on ne doit
avaient faites , soit comme des évé- pas être surpris de la confiance qu'il

Digitized by Google
L'UNIVERS.
accorde à la narration égyptienne; et un ouvrage peut-être sans modèle , el
cherchant jusque dans Homère les certainement sans rival. Du reste , il
faits les plus propres à la justifier , il faudrait nier tous les rapports de FÉ-
rappelle que ce poète convient que Pâ- gypte avec la Grèce dans les temps
ris , forcé par les vents d'errer en primitifs de ses annales, et les Grecs
divers lieux, aborda avec Hélène à eux-mêmes les ont assez reconnus et
Sidon, en Phénicie, limitrophe de proclamés, pour refuser aux prêtres
PEgypte; qu'il en emporta des toiles égyptiens toute notion certaine sur
peintes de diverses couleurs, précieux l'histoire des Grecs, leurs élevés : les
ouvrages des femmes de cette indus- Grecs eux-mêmes nous ont appris
trieuse cité ; qu'Hélène possédait plu- qu'Homère vit et connut l'Egypte, et
sieurs remèdes utiles que lui avait appris conféra avec ses prêtres, dépositaires,
la femme du prêtre Thonis , de Canope des sciences et des archives humaines.
le même dont les Égyptiens disaient Mille fois Hérodote révèle les era-
le nom à Hérodote; enfin que Méné- rnts de toute nature que leur ûrent
las avouait à Télémaque que les dieux Grecs.
l'avaient retenu long-temps en Egypte. Au contraire , dit encore Hérodote ,
Dans tous ces passages , dit Hérodote, les Égyptiens n'ont adopté aucune des
Homère manifeste qu'il avait connais- institutions des Grecs; et s'ij existe à
sance des courses de Paris et de son Chemmis, dans le nome de Thèbes,
débarquement en Egypte; et si, con- un temple consacré à Persée, fils de
tinuait-il, Hélène avait rte en effet Danaé, et en l'honneur de ce héros
dans Troie quand les Grecs menaçaient des jeux gvmniques , c'est parce que
la ville, certainement elle leur aurait Persée descendait de Danaùs et de
été rendue avec ou sans le consente- Lyncée, habitants de Chemmis, et
ment de Paris; car comment croire qui avaient autrefois passé en Grèce.
Priam et ses parents assez insensés Les prêtres égyptiens connaissaient
pour mettre en danger leur existence très-bien l'histoire des premiers phi-
cellede leur famille et de la vide en- losophes de la Grèce, et des tradi-
tière afin de favoriser les crimes de
, tions sur leur séjour et sur leurs re-
Pâris? Après même une telle résolu- cherches en Egypte y étaient soigneu-
tion , si elle avait été prise d'abord sement conservées. Ces prêtres affir-
auraient-ils persisté quand tant d'il- maient quec'estàeux-mémesqu'Orpliée
lustres Troyens, tant d'enfants même avait emprunté les mystères qu'il in-
de Priam succombaient sous le fer des stitua en l'honneur de* Bacchus et de
Grecs? Comment aussi expliquer la Cérès, qui, n'étaient que l'Osiris et
détermination d'Hector , héritier de l'Isis de l'Egypte, et que sa fable des
l'empire ,se sacrifiant à la défense enfers n'était qu'une parodie des cé-
d'un frère coupable et auteur de tant rémonies funéraires qu'il avait vu pra-
de maux ? Les Troyens eux-mêmes s'y tiquer par les Égyptiens. 11 s'en trou-
seraient unanimement soustraits en vait même parmf eux qui affirmaient
rendant Hélène, s'ils l'avaient pu; qu'Orphée et Amphion étaient nés sur
niais elle avait été retenue en Égypte le bord du ML Les vers d'Hésiode
et l'obstination des Grecs à ne pas le abondent en idées égyptiennes tra-
croire ne put être que l'ouvrage des vesties. Pythagore apprit en Égypte
dieux ; ils voulaient manifester aux tout ce qu'il parvint a savoir, et il
hommes que les grands crimes attirent sut beaucoup de choses très-positives,
toujours les grandes vengeances. D'a- et quelques-unes qui l'étaient un peu
près ces précieuses traditions histo- moins. Ses préceptes sur les prin-
riques , Hérodote aurait donc recueilli cipes de la philosophie naturelle, sa
en Égypte l'histoire de Troie ; et Ho- doctrine des nombres, ses mystères
mère, qui l'avait aussi connue, en sur la science, sur la morale, sur l'o-
avait compose une épopée : son génie rigine du monde , ses symboles et ses
en créa tout le merveilleux , et en fit énigmes, tout est égyptien dans cet

Digitized by Google
EGYPTE.
«ère des prêtres de l'Égypte, si dis- munications qu'ils arrachèrent à la
bnïué d'ailleurs , et chéri par ses
si réserve habituelle des prêtres égyp-
maîtres, dont le plus illustre fut l'ar- tiens. Ils ne révélaient pas leurs mys-
chiprophète Soncnès. Solon, Thaïes de tères à toute sorte de personnes, dit
Milet apprirent d'eux aussi tout ce Clément d'Alexandrie ; ils ne portaient
qu'ils enseignèrent à la Grèce. Nous pas les choses divines à la connaissance
connaissons les maîtres égyptiens du di- des profanes, mais seulement des per-
vinPlaton ; Proclus nomme comme tels sonnages destinés au trône, et de ceux
Paténéïth,Ochaaps d* Héliopolis, Éty- d'entre les prêtres qui étaient les plus
nwn de Séhennytus l'histoire nomme
: distingués par la naissance, l'éduca-
encore Sechnoùphis d' Héliopolis. On tion ou la science. Et Fourier, dans
montra à Strabon le collège où Eu- cet écrit si justement admiré , où
doie et Platon avaient étudié à Hélio- Fontane trouvait, avec tant de rai-
polis; et je ne sais quel prêtre de son , la grâce d'Athènes réunie à la sa-
l'une de ces villes savantes lui répétait gesse de l'Éçypte , a résumé toutes ces
quelquefois : « O Platon Platon vous! ! pensées de I antiquité sur la puissance
« autres Grecs, vous n'êtes que des du sacerdoce dans l'Egypte , quand il
enfants ! » a dit que sa religion, 'unie à l'étude
Eudoxe reçut aussi à Héliopolis les des phénomènes naturels était en
,

leçons du prêtre Conuphis; et bien même temps intellectuelle et physique,


d'autres Grecs s'instruisirent à la qu'elle ne révélait qu'à quelques es-
même école : Eudose et Platon étaient irits sages les principes abstraits de
ailes ensemble en Égypte ; on montra a morale , et les offrait à tous sous
à Strabon la maison qu'ils avaient des formes sensibles. La Grèce ne
habitée, et on lui dit que ces deux comprit peut-être pas complètement
philosophes avaient passé jusqu'à treize ces deux parties de cet admirable sys-
années dans cette ville célèbre par tème , si approprie à l'insuflisance or-
son collègesacerdotal ; qu'ils y avaient dinaire de l'intelligence humaine , et
vécu dans le commerce habituel des qui, par la forme ou par le fond, ins-
prêtres; qu'à force de temps et de pire invinciblement aux esprits de
prévenances , ils obtinrent enûn de tout ordre les pratiques ou les convic-
ces doctes ministres de la science et tions, les actions et les pensées les
, très-instruits en astro-
de la divinité plus utiles à Tordre social et au bon-
nomie, mais d'habitude très-mysté- heur de l'homme. '

rieux et peu communicatifs , la "con- De tous les élèves des doctrines


naissance de quelques théorèmes ; mais égyptiennes, le plus célèbre est Moïse,
que les prêtres leur cachèrent la plus le législateur des Hébreux. On con-
(ronde partie de ce qu'ils savaient, naît les merveilles de sa naissance
notamment la méthode des intercala- et de son éducation. Protégé par la fille
tions qui donnaient à l'année civile du roi d'Égypte , élevé dans le palais du
une durée égale à la révolution so- souverain, au sein des magnificences
laire, intercalât mu ignorée des Grecs, d'un grand empire, «il fut instruit dans
ajoute Strabon , ainsi que bien d'au- toute la sagesse des Égyptiens , et de-
tres choses
, jusqu'à
ce que des astro- vint puissant en paroles et en œuvres.»
nomes (modernes au siècle du voya- Les autorités ne manquent pas sur la
geur J l'eussent connue au moyen des véracité de l'histoire de Moïse, même
traductions en langue grecque des mé- dans l'antiquité profane. Strabon le con-
moires rédigés par les prêtres égyp- sidère comme un prêtre égyptien qui
tiens, mémoires où les astronomes voulant bannir les animaux vivants des
puisaient encore de son temps , ainsi cérémonies religieuses , essaya de chan-
que dans les écrits des Chaldéens. Pla- ger les formes du culte public. Justin
ton et Eudoxe furent donc redevables disait que Moïse avait reçu de la na-
à cette persévérance que leur donnait ture les plus rares qualités , et , com-
un ardent désir de savoir , des com- me son ancêtre Joseph, le don d'ex-

Digitized by Google
L'UNIVERS.
Sliquer les songes de faire des Dro-
et : Moïse ne s'occupa que de
ites, étant également instruit dans la plus élevée, car l'astroi
la science humaine et les secrets des mie, l'astrologie et la géométrie
p
dieux. On prête à Manéthon un juge- sèrent chez [es Egyptiens pour <

ment fort sévère sur Moïse on lui tait


: études vulgaires et peu relevées :

dire qu'une populace lépreuse et mi- attachait, au contraire, un grand


p
sérable, condamnée aux plus vils comme aux études hiéroglyphiques, que V
aux plus pénibles travaux , à creuser enseignait dans les sanctuaires, n
des canaux, à élever des chaussées , fut au premier venu du vulgaire, maii
enfermée dans l'enceinte d'Aouaris, des gens choisis et excellents. » Enl
construite quelques siècles avant par H était de tradition écrite dans l'ar
les Pasteurs, et que, désireux de se quité , que Moïse avait reçu une et
soustraire à un honteux esclavage, ils cation toute royale, qu'il tut à la f
élurent pour chef un prêtre d'Hélio- prophète, législateur, militaire, pc
polis, nommé Osarsiph, qui leur donna tique et philosophe, tout ce qui
un culte nouveau, et, changeant de nécessaire pour être roi , disent
nom ,
prit celui de Moïse. Diodore de anciens ; et l'on sait avec quels ava
Sicile rangea néanmoins le législateur tages il lutta plus tard de merveil
des Hébreux parmi les hommes d'une et de miracles contre les sages et
prudence consommée, d'un courage à enchanteurs du Pharaon , de qui
toute épreuve , et qui , chef d'une peu- voulait obtenir la délivrance de j

plade étrangère à l'Egypte, où elle frères d'Isiaél. Il battit les Égyptû


était esclave, l'en lit sortir, la con- avec leurs propres sciences , et sa i
duisit dans le désert voisin , lui donna nommée est restée attachée à une i
des lois , secondé par le concours des plus mémorables époques de l'histoi
hommes les plus capables, qu'il institua des nations orientales.
à la fois prêtres et magistrats , con- Tous ces hommes illustres de l'an
servant pour lui-même l'autorité su- quité , qui inlluèrent si directeme
prême, dont il était digne par sa sur leur siècle et sur leur pays , s i
science , comme par son caractère. struisirent en Egypte ; ils sont , da
Lorsque l'àne était venu il avait, en
,
l'ordre des progrès de la philosophi
effet, étudié dans les collèges sacer- les glorieux intermédiaires entre I

dotaux de l'Égvpte, et des maîtres les premiers instituteurs de l'homme


{)lus distingues, dit Clément d'A- ceux qui , dans les temps moderne
exandrie , raritlunétique et la géo- ont abaissé par d'immortels eflort
métrie, le rhvthme et l'harmonie, la les dernières barrières devant l'int<
médecine et "la musique. Moïse s'a- ligence humaine. L'Europe civilis
donna en outre à l'étude de cette profite encore des connaissances
q
partie de la science qui s'exprime par l'Egypte transmit à tant de natio
des symboles et les signes hieroglyphi- anciennes, et dont la caste sacerdot,"
quesi ce qui ne peut laisser dans 1 esprit fut si long-temps la dépositaire fid<
d'autre idée que la connaissance de et toute-puissante.
la partie symbolique de l'écriture sa- S'il était en effet nécessaire d'ajo
crée des Egyptiens; et saint Justin, ter quelques considérations nouvel
martyr, autorise en effet cette inter- à tous les faits qui nous révèle
prétation des paroles de Clément d'A- hautement cette puissance inOnie »

lexandrie, oui écrivit deux siècles après la caste sacerdotale en Égypte,


Justin. Celui-ci, dans ses Questions constante influence sur les moeurs
aux orthodoxes, se demande « Pour- les lois, sur les coutumes publiqu
quoi Moïse, s'il a été instruit dans ou les habitudes domestiques, et
toute la science égyptienne, ne s'est précieux appui qu'en retirait l'aut
pas adonné à l'astronomie , à la géo- rité royale pour maintenir les pei
métrie, à l'astrologie et aux autres pies dans l'amour de l'ordre et l'obéi
études analogues ; à quoi il fait cette sance, il nous suffirait de rappel<

Digitized by Google
,,

ÉGYPTE.
que cette même caste avait de longue
main préparé et habitué la population mais n'en existe qu'un très -petit
il

A cette influence, sans doute par la nombre de complètes. Écrites en signes


pratique des plus rares vertus et par hiéroglyphiques ou en signes hiéra-
fa profusion des biens les plus utiles tiques, ces copies sont également re-
à l'homme policé, mais surtout en connaissables à une suite de scènes
inculquant dans tous les esprits, en qui sont peintes au haut des colonnes
les révélant oralement aux plus sages, ou pages du manuscrit , et qui nous
en les exprimant sous des formes sen- montrent un personnage de forme hu-
sibles aux yeux des plus bornés, les maine comparaissant successivement
préceptes d'une morale épurée, source en la présence d'un assez grand nombre
de tous les dogmes salutaires et con- de divinités auxquelles il fait des of-
solants , et qui proclamait l'imite de frandres ou adresse des supplications.
Dieu, l'immortalitéde Pame , les On voit parfois, mêlé avec les pages
peines et les récompenses d une autre d'écriture, un tableau d'agriculture,
vie. où le même personnage laboure, sème
Cette croyance qui mêlait sans cesse et moissonne dans des scènes variées ;
la terre avec le ciel, et l'homme avec enlin la deuxième partie du livre est
Dieu, dans les mvstères d'une religion terminée par un autre grand tableau
où Ton puisait à la fois les plus utiles où un assez grand nombre de person-
préceptes d'hygiène publique, et la rè- nages occupent la scène : c'est la re-
gle des nobles" actions et des vertueuses présentât ion du jugement même de
pensées, était empreinte dans tous les I'ame , c'est le sujet reproduit sur no-
coeurs, écrite dans tous les livres, expri- tre planche 20.
mée figurativement sur les monuments Ce rituel funéraire, quand il est
publics. On ne pourrait, sans errer, complet, est composé de trois parties;
contester à PÉgypte ces sublimes ré- on en connaît plusieurs exemplaires,
sultats de sa longue étude de l'homme tous en rouleau, et qui n'ont pas
et de Piinivers. Ce fut en Egypte, dit moins de 30 à 40 pieds de longueur,
un écrivain chrétien du premier siè- sur un à deux pieds de hauteur. Le
cle, qu'Homère et Platon apprirent titre général de ouvrage est celui-ci:
I

ce dogme de Punité de Dieu ; et un Livre des Manifestations à la Lu-


autre savant père grec ajoute que mière. Dans les temps de la splendeur
l'autre dogme celui (le l'immortalité
, de l'empire égyptien , on en plaçait
de Pame a passé de PÉgypte chez les
, auprès de chaque corps embaumé une
Grecs ,
que Platon l'apprit de Pvtha- copie plus ou moins complète, plus
core, et beaucoup d'autres de Platon. ou moins soignée , selon la qualité du
Les transmigrations successives de l'a- personnage, soit la première et la
ine séparée de l'homme qu'elle a animé deuxième subdivision, soit la deuxième
sur la terre, idée propre à PÉgypte et la troisième, ou enlin quelques
les ses primitives institutions, ne fut chapitres seulement, ce qui arriva
ue le tableau des épreuves que cette surtout dans les momies les moins
Uine émanation avait à subir afin anciennes. Cet ouvrage religieux, qu'on
d'arriver à l'infinie perfection , qui de- peut assimiler à nos livres de prières
vait être le but constant de ses ver- appelés Heures , et dont on met aussi
tueux efforts. La prévoyance qui ca- un exemplaire dans la bière chrétienne,
population égyptienne nous
ractérisa la est un recueil très-étendu des for-
a transmis le tableau complet de ces mules relatives à l'embaumement, au
épreuves redoutables, dans le rituel des transport des morts dans les hypogées,
cérémonies imposantes que prescri- et il contient une foule de prières
vait ie code des lois religieuses pour adressées à toutes les divinités qui
ceslongues et difficiles épreuves. pouvaient décider du sort de Pame
Ce tableau est généralement connu soit dans Penfer, où elle était jugée,
vhis le nom de Rituel funéraire ; les soit dans les régions mystiques qu'elle

Digitized by Goc
,, .

154 L'UNIVERS.
devait habiter avant de recommen- habit de deuil, et tenant un long
cer le cours de ses transmigrations. ton dans leurs mains. Dans la \

Un des rituels en caractères hiérogly- nière partie de cette curieuse peinti


phiques , du Musée royal du Louvre près d'un amas d'offrandes de or
est un extrait des diverses parties du genres, on remarque la mère du
livre des Manifestations à la Lu- funt disant le dernier adieu à la 1

mière; il est orné de peintures colo- mie de son fils. Le prêtre d'Os
riées avec beaucoup de soin , et il ap- accomplit les dernières cérémonies
partient à la momie d'un prêtre graih- la momie dressée devant rentrée

mate, ou secrétaire de justice, nommé l'hypogée, ou catacombe de sa faim


Névoten. La porte en est ouverte, et le de
La grande scène initiale représente nateur a tracé au-dessous le plan nié
ce magistrat, vêtu de blanc, suivi de de l'hypogée. Un long escalier cond
sa mère Amenhem-hèb, et de sa sœur à une porte peinte en jaune, donn.
Hnisannoub , faisant les offrandes au entrée dans une première salle où
dieu Osiris , assis sur un trône dans voient un autel et un fauteuil ; i
un naos richement décoré. Le texte seconde porte conduit à un cabii
qui suit ce tableau religieux est ex- ui communique à la grande sali

trait de la première partie du rituel ans laquelle est une estrade porta
et contient les prières relatives au la momie du mort. Une galerie, [
transport de la momie du défunt dans i m Hèle à cette grande salle , renferi
l'hypogée de sa famille, cérémonie offrandes funérain
les coffrets et les

retracée avec détail dans la longue Dans quinze petites vignett


les

vignette placée au-dessus du texte. On peintes oui suivent , on voit le àéfur,


voit, au centre de cette corn posit ion, vêtu de blanc , adorer successiveme
la momie de Névoten , étendue sur le les génies des huit régions d'Uermè

lit funèbre placé dans une barque les génies de l'Orient, les oiseaux s

portée sur un traîneau que tirent crés Hennou et Ghenghen, Kespr


quatre bœufs. La mère du défunt, d Atmou sous la forme d'un bélier
Amenhem-hèb , les cheveux épars et le dieu Phtha dans son naos , cuti

la tunique souillée en signe de deuil,


divers animaux et emblèmes sacré:
pleure sur la momie de son fils. Deux Les autres vignettes sont relatives au
femmes, figurant les déesses ISephthys divinités qui président à J'embaume
et Isis , vêtues de rouge , veillent à la ment des corps. Au-dessous de chaqu
tête et aux pieds du mort. A côté de vignette est placé le texte qui s'y rap
ta barque funèbre est un prêtre d'O-
porte directement. Dans la suite d
siris , reconnaissable à la peau de manuscrit , le défunt Névoten ador
panthère qui le couvre, ainsi qu'à l'en- Osiris, suivi d' Anubis et de ses pa
censoir et au vase à libation qu'il porte rèdres ; il se présente ensuite comm
dans ses mains. Quatre hommes con- suppliant dans le palais de la vérité, oi
duisent sur un second traîneau un sont les images des quarante-deux jupe:
grand coffre noir , en forme de naos des morts. Plus loin il adore Osiri;
renfermant les vases funéraires qui dans un naos au milieu de l'Amenti
contiennent les viscères et les intes- devant le dieu est la balance poui
tins du défunt, embaumés séparément. peser la conduite des ames , la plunn
Le dieu Anubis, à tête de schacal d'autruche , emblème de la justice
prend possession de ce coffre funé- et le Cerbère égyptien. Le défunt
raire que suivent immédiatement les voten est ensuite admis dans le palais
parentes du mort, échevelées, vêtues de la vérité, où est l'arche symbolique
de tuniques souillées de cendre ou de du soleil. Il navigue bientôt dans le ciel
poussière. A la suite de ces femmes accompagné de sa femme Mouthem-
qui se lamentent, comme l'indique la hèb, aans un vaisseau à voiles. Un
position de leurs bras, viennent les autre tableau représente le défunt
parents ou les amis de Névoten , en contemplant le vaisseau sacré du dieu

Digitized by Goc
ÉGYPTE.
bt. Le texte qui suit immédiate- et de vignettes dessinés en noir, avec
lent cette scène est relatif aux divi- une finesse et une pureté de trait ad-
mirables. Ce rouleau est de l'espèce
es divers membres du corps humain, de papyrus nommée royale, la plus
a traduction d'un texte analogue est précieuse de toutes; aussi est-il beau-
la page 106 ci-dessus. coup moins foncé, et a-t-il conservé
Un autre manuscrit hiéroglyphique plus de souplesse que les autres rou-
fest que l'extrait des trois parties du leaux découverts jusqu'ici dans les ca-
rand rituel funéraire, orne de pein- tacombes égyptiennes.
ures relatives aux divers textes. On .Un autre manuscrit hiératique n'est
remarque successivement le défunt qu'une feuille de papyrus contenant
ihonsoumosis, prêtre d'Ammon dans les premières formules de la prière
hjb hiérogrammate du temple de la
, pour les morts, intitulée : Tascho-
feesse Mouthis-Bouto, membre du Mah-Snau, par laquelle on supplie
allège des hiéroçrammates de Thèbes, « Hathôr, déesse de la contrée occi-
aisant une libation et offrant l'encens « dentale , de faire prospérer le nom
m dieu Phré - Atmou , seigneur du • de Sot r r , fils de Baphor , le jour et
rrand temple ; à Osiris Pethempamen- « la nuit; d'assurer à ce défunt une
bes, surnommé Onnofris, modéra- « place dans la demeure céleste, afin
teur à Isis , grand'mère
des vivants ; « que son nom germe dans le ciel par
iirine , et à Nephthys, déesse adelphe « le dieu Phré ( le soleil ) , et dans le
e tnme portent les légendes hiérogly- « monde physique par le dieu Sèv
phiques tracées au-dessus des person- « ( Saturne ) ; de faire enfin que ce
nages de la première scène ; Khonsou- « nom soit agréable à Osiris ,
seigneur
mosis, adorant les emblèmes de la « de l'occident, et à toutes les puis-
meure des morts ; le même person- « sances de l'Amenthès , maintenant
nage, labourant et coupant la mois- « et à toujours. » Ce manuscrit est de
son dans les Champs- Élysées, au mi- l'époque romaine en Egypte.
lieu des âmes pures; lé défunt sup- D'autres papyrus , également funé-
pliant à l'entrée de leur palais, dont raires , abondent en tableaux symbo-
les portes sont ouvertes , les quarante- liques, dans lesquels sont figurés les
deux juges des ames dans l'Amenthi ; formes emblématiques et les attributs
le même de différentes divinités, et principa-
, présentant des offrandes de

[oins à huit des gardiens du palais lement ceux du soleil et d'Osiris. On


d'Osiris, à têtes de rat et d'uraeus
y remarque 1° le défunt adressant une
alternées ; le même, adorant les quatre prière au dieu de la lumière venant
eeuies des morts , précédés des attri- du ciel , dont les yeux illuminent le
buts d'Osiris, le thyrse, la peau de monde matériel et dissipent les té-
panthère et la coupe ; le , même
arri- nèbres de la nuit, etc. : dans le ta-
vant au bassin mystique de feu liquide, bleau qui suit cette prière, on a figuré
sur les bords duquel sont quatre cyno- des ames et des hommes adorant un
céphales. disque lumineux ; 2° prière à Phré
La dernière scène représente la mo- dieu grand, manifeste dans les deux
mie de Khonsoumosis , couchée sur le firmaments, et symboles des deux
lit funèbre, au-dessous duquel sont formes de cette divinité ; 3° prière aux
vases funéraires. L'ame du
J quatre
plane au-dessus du corps em-
défunt
dieux Phré et Thôth, autre symbole
de Phré; 4° prière à la déesse Netohé,
baume. Plus haut sont les déesses Isis la grand'mère des dieux , pour qu elle
et Nephthys
devant une table chargée accorde à l'Égyptien Amenhem la con-
d offrandes
funéraires. templation au disque de la lumière
In troisième manuscrit, mais en dans toute sa splendeur ; le tableau
caractères hiératiques, est un rituel fu- représente la déesse Netphté, dont le
néraire à peu près complet , écrit par corps couvert d'étoiles se recourbe
"ne tres-bêlie main , orné de tableaux comme pour circonscrire l'espace ; c'est

Digitized by Google
156 L'UNIVERS.
le ciel personnifié : le dieu Sôou, Tune la plus curieuse de la Tell*
des formes de Knèph ou le Démiurge, gieuse des Egyptiens .
L'hiéL_
placé entre l'orient et l'occident, per- mate , dans la composition de ce sujet
sonnifiés sous l'apparence de deux singulier, a su donner un corps au*
femmes, élève, dans l'espace circon- idées les plus métaphysiques , et nous
scrit par le ciel ( Netphé), le vaisseau y trouvons la preuve" évidente que le
du soleil dont il semble ainsi déter-
, dogme de l'immortalité de Faîne et
miner le cours; 5° prières à Osiris, celui des récompenses et des peines
seigneur de la région de stabilité. Les dans une autre vie furent les fonde-
emblèmes de ce dieu , ainsi que Thôth ments principaux de la religion des
ibiocéphale, sont renfermés dans un anciens Égyptiens. Il est naturel en
cercle formé par le serpent qui se effet de ^trouver ces grands principes
mord la queue, emblème de l'éternité ; de la morale chez un peuple dont l'an-
6° prière à toutes les divinités oui tiquité tout entière a célébré la sa-
président aux régions habitées par les gesse. L' Écriture sainte elle-même ne
ames représentées symboliquement
,
dédaigne pas de la rappeler , quoi-
dans grand tableau suivant; 7° à
le qu'elle condamne en même temps ces
10° courtes invocations aux dieux Osi- formes matérielles sous lesquelles TÉ-
ris, Nofré-Atmou, et à la vache sa- gypte trouva bon de voiler ses doc-
crée d'Hathdr. trines.
Enfin, un autre manuscrit hiéro- Cette scène se trouve d'ordinaire à
glyphique, colorié, est entièrement la finde la seconde section du rituel
formé de tableaux symboliques relatifs funéraire entier, mais sert de conclu-
au système psychologique des hgyp- sion à tous les rituels abrégés ; elle
tiens*. On y a représenté les divers présente la Psycho$to*ie , c'est-à-dire
états de Pâme , ainsi que les divinités le jugement que, selon les doctrines
2ui présidaient a ses transmigrations. égyptiennes, devait subir l'ame des
:e papyrus appartenait à la momie morts en quittant le corps mortel
d'une femme nommée Tetcbonsis. dans la région inférieure de \\4mtn-
Malgré l'analogie des sujets de ces thi, où l'on examinait sévèrement et
manuscrits, on remarque toutefois où l'on pesait ses actions durant sa vie
quelques diversités dans le nombre sur la terre. L'édifice où la scène se
et l'ordre des scènes, diversités dé- passe est le prétoire même de l'A-
terminées très- vraisemblablement par menthi , le palais du juge suprême des
celle des qualités ou du rang du per- ames. On distingue à gauche de la
sonnage pour lequel le manuscrit fut scène le dieu lui-même assis sur son
dessine , et les plus complets comme trône. Il est caractérisé par une coif-
les plus beaux appartenaient nécessai- fure particulière, formée de la par-
rement aux membres de la caste sa- tie supérieure du pschent ( une tiare
cerdotale, à la classe spécialement royale }, ceinte d'un large diadème et
chargée du service des dieux et des unie au disque du soleil et aux cornes
choses sacrées. Ce qu'il y a d'uni- de bouc, emblèmes de la lumière et de
forme dans tous les rituels , c'est la la faculté génératrice. Le dieu tient

scène finale de la seconde subdivision dans ses mains un fouet et un scep-


de l'ouvrage , qui est aussi celle de la tre recourbé en forme de crochet ,

linde la vie, uniforme aussi pour soit pour exprimer le pouvoir d'exci-
tous , et telle qu'elle est représentée ter le mouvement des choses et de les
sur notre pl. 20. ralentir, soit par allusion au nom
f Après les divers pèlerinages de 1 ame de la région infernale à laquelle ce
du défunt dans les régions nombreuses dieu préside, c'est-à-dire PAmenthi,
Qu'elle doit visiter, elle arrive enfin qui attire les ames de tous les vivants
ans YAmenthi, l'enfer, où elle va su- et qu'on crovait les relancer dans le

bir son jugement. La scène qui le re- monde; ce dieu est Osiris, dieu très-
présente offre à nos regards la partie bienfaisant, seigneur de la vie, dieu

Digitized by Google
ÉGYPTE. 127

rod médiateur éternel, président


,

la région inférieure, et roi divin.


laisse pas
soit le
douter que cet animal ne
type du chien Cerbère, qui,
Nous retrouvons donc là le souve- selon les' mythes grecs , gardait 1 en-
rain de
l'enfer égyptien, Osiris, divi- trée du palais d'Ades. La légende égyp-
nité qu'Hérodote, Diodore de Sicile et tienne le nomme Oins , et le qualihe
Plutarque regardaient unanimement de recteur de la région inférieure.
comme le type primitif du Dionysos A l'autre extrémité de cette scène
ou Bacchusdes Grecs et des Ruina ms. (à droite), on remarque un groupe
L'opinion de ces classiques est pleine- de trois personnages , c'est-à-dire une
ment confirmée par le groupe emblé- femme qui, la tète surmontée d'une
matique placé en face du dieu et dans lume, présente une personne vêtue
b chapelle même. Ln grand nombre S la manière ordinaire des Égyptiennes,
de papyrus montrent clairement dans à une déesse caractérisée par un sceptre
ce groupe un vase d'où sort un thyrse, et par l'emblème de la vie céleste ( la
auquel est liée par des bandelettes une croix ansée ) qu'elle tient dans sa main
peau de panthère. Ainsi ces principaux droite. C'est l'ame d'une défunte sous
emblèmes de Bacchus sont constam- les formes corporelles, conduite par
ment figurés auprès d'Osiris , et on les deux déesses hérité et Justice
en conclut l'origine égyptienne de la devant le grand juge des morts.
divinité grecque, le culte égyptien Thméï, «Ile du Soleil , fut la com-
étant sans aucun doute antérieur au pagne habituelle d'Osiris dans l'Amen-
culte grec. Toutefois les Grecs adop- thi ; elle représente le personnage ana-
tant la divinité égyptienne , en restrei- logue à la Perséphonè des Grecs et à
gnirent singulièrement les attribu- la Proserpine des Latins; ses fonc-
tions. De même Phtha, le ministre tions sont de recevoir les aines des
immédiat du dieu su|>érieur et orga- morts à l'entrée Je l'Amenthi , et elle
nisateur du monde physique, devint semble les rassurer et exciter leur
en occident le forgeron Héphaïslos , œ nuance pendant qu'on examine leur
,

Vulcain. Osiris, le principe humide conduite sur la terre. Elle est en outre
du monde, ne fut ainsi pour les Grecs, la présidente des quarante-deux juges,
du moins dans la croyance populaire, ou plutôt quarante-deux jurés votants
que l'inventeur de la vigne, le dieu 3ui ont le droit d'assister au jugement
uu vin, et le pin fut ajouté au thyrse. es aines, aux assises infernales, et
Devant la sainte habitation du dieu qui occupent , sur deux lignes , le haut
de l'Amenthi est un autel chargé d'of- de la scène.
frandes, telles que des pains, des vian- L'antiquité grecque parle de ces
des diverses, des grenades et des juges auxquels les Egyptiens soumet-
fleurs de lotus ; et ce lotus est le sym- taient les personnes* de toutes les
bole du monde matériel. classes de la nation avant de permettre
Le voisinage du séjour du suprême que leur dépouille mortelle fût dépo-
juge de l'Amenthi est annoncé par un sée dans le tombeau des ancêtres.
piédestal sur lequel se repose un ani- Certains juges inexorables examinaient
mal monstrueux , mais dont les formes en présence du peuple la conduite te-
sont si déterminées, qu'on ne peut y nue par le mort avec ses concitoyens,
méconnaître un hippopotame mélangé et ils refusaient à son corps une place
de crocodile : c'est le cerbère égyptien. dans la catacombe, s'il n'avait pas
Ici, c'est l'hippopotame femelle, qui, religieusement rempli ses devoirs en-
dans les tableaux astronomiques de vers les dieux et envers les hommes.
Thèbes et d'Lsnéh, occupe dans le Cette coutume, éminemment morale,
ciel même la place que les Grecs ont produisait d'autant plus d'effet sur les
donnée à ia grande Ourse. Cette con- moeurs publiques , qu'elle s'appliquait
stellation était nommé le Chien de aux rois mêmes. Les sculptures des
Typhon par les Égyptiens, et sa pré- temples et des palais qu'on voit encore
sence dans l'Amenthi ( l'enfer ; ne dans les ruines de Thebes , constatent

Digitized by Google
1*8 L'UNIVERS.
suffisamment que les noms de quel- Cette déesse, fille du Soleil, dont
ques Pharaons furent proscrits par ces la figure est si fréquente sur les me*
mêmes juges suprêmes. numents, parce qu'elle était regardée
Ainsi les Égyptiens imitaient sur la comme laprotectrice de FÉgypte eî
terre , à l'égard du corps , ce qu'ils la directrice du pouvoir royal*, a été
croyaient, selon leurs doctrines reli- prise, par les Grecs pour \êut ffçra
gieuses , être pratiqué à l'égard des la Junon des Latins. Mais chez le>
ames dans l'enfer , l'Amenthi , où Égyptiens, Thméï était l'emblème dr
elles passaient après leur séparation la vérité; de là elle fut dite la pre-
du corps. La dernière scène des pa- mière née du dieu de la lumière, et
pyrus représente donc cette épreuve on lui attribua la suprême président
finale , la plus complète de toutes des régions infernales, où les appa-
puisqu'elle exige de ame un compte rences mondaines s'évanouissent, oè
l

général des motifs de ses actions , et tous les projets humains disparaissent
en tout la plus redoutable, puisque pour faire place aux éternelles réalités.
les juges sont les dieux mêmes, les Elle devait donc diriger et régler les
êtres supérieurs , ceux à qui tout est opérations des juges de rAmenthi, et
connu jusqu'aux plus secrètes pensées. son image, celle de la vérité, devait
Dans cette scène finale , 1 amê du se trouver appendue au cou et sur la
défunt, figurée, pour lever toute in- poitrine des juges composant le tribu-
certitude et comme dans sa présenta- nal qui , sur la terre, décidait des plus
tion à Thméï, sous les formes corpo- importants intérêts. des familles, /ë-
relles mêmes dont il fut revêtu du- *rité et justice sont deux idées essen-
rant son séjour sur la terre , se voit "tiellement connexes dans l'ordre mo-
de nouveau représentée à genoux, les ral; un seul et même mot exprimait
bras élevés, en attitude suppliante, l'une et l'autre dans l'ancienne langue
devant les images des quarante-deux des Égyptiens, et le plus beau et le
juges de l'Amenthi, rangées sur deux plus ordinaire des titres que prirent
files , ce qui a rendu nécessaire la ré- les Pharaons sur leurs obélisques, fut
pétition de la figure de l'ame , sur le sans doute celui d'ami de ThméU
sort de laquelle ces juges doivent pro- ami de la vérité, c'est-à-dire, de la
noncer la sentence. Les têtes de ces justice.
quarante-deux juges sont assez variées ; En présence de ces quarante-deux
les unes ont la forme humaine , d'au- juges, d'autres divinités Taisaient elles-
tres la tête de divers animaux, tels mêmes l'examen de la conduite que
Ïie crocodile, aspic, bélier, épervier, l'ame avait tenue sur la terre. Ses ac-
is, schakal, hippopotame, lion et tions étaient rigoureusement mises
cynocéphale. Cette diversité de têtes dans la balance de l'Amenthi , et cet
provenait de la nécessite de caractéri- instrument, qui décidera du sort de
ser un à un ces divers juges figurés l'ame, est placé au-dessous des juges.
hiératiquement , ayant d'ailleurs des Le fût ou colonne qui le supporte est
fonctions diverses leurs quarante-deux
; surmonté d'un cynocéphale assis
noms propres se lisent dans les rituels image symbolique 'de l'un des minis-
funèbres complets , auprès de la scène tres du dieu Thoth, appelé alternati-
du jugement, avec l'indication précise vement Api ( nombre, quantité ), et
de la région céleste à laquelle chacun Hap (jugement, sentence), noms,
d'eux présidait. Diodore de Sicile comme on le voit, relatifs aux fonc-
parle de ces quarante-deux génies en tions du* génie qui préside à la pesée
décrivant des bas-reliefs du tombeau des actions de l'ame sur la balance in-
d'Osymandias , sur lesquels était figuré fernale dont la garde lui était corn
le jugement de l'ame de ce conquérant; mise.
et dans d'autres manuscrits, ces juges Deux autres personnages sont de-
sont figurés assis devant Thméï, leur bout auprès des bassins de la balance,
et pèsent les bonnes et les mauvaises

Digitized by Google
ÉGYPÎE. 1»
fions dudéfunt. La figure à droite, suprême des a mes, Osiris, dont la
toi examine attentivement le fil ou bouche doit prononcer la sentence dé-
<
jfomb au moyen duquel les Égyptiens finitive. Considéré selon ces fonctions
raient coutume d'estimer le poids dans l'enfer égyptien, Thoth corres-
'datif des deux bassins de l'instru- pond exactement au Mercure Psycho-
lent , est le dieu Horus le fils chéri
, pompe des Grecs.
Os iris et d'Isis, bien reconnaissable à Tel est le sens de la scène figurée
ia tête d'épervier, de même que par son dans la deuxième partie des papyrus
;
'•oui d'ordinaire écrit au-dessus de lui. elle rend ainsi sensible aux yeux toute
Le personnage de gauche , à la téte de la doctrine psychologique des Égyp-
idiakal , ou de loup d'Égypte est le , tiens, c'est-à-dire l'ame du défunt qui
lieu Anubis, fils d'Osiris et de Neph- entre dans l'Amenthi, et qui se trouve
tis. Les fonctions spéciales de ces deux en présence de la vérité ; ses minis-
frères étaient de peser les actions des tres, les quarante-deux juges, sont
morts en présence des juges de l'A- chargés d'examiner les motifs de ses
menthi. Les mauvaises sont symboli- actions ; ces mêmes actions sont pe-
quement figurées par un vase 'd'argile sées par certains dieux; la sagesse
posé dans le bassin de droite , et les divine (Thoth) écrit le résultat de
bonnes dans le bassin de çauche, par cette nesée; la bonté de Dieu, figurée
une petite figure de Thmeï, ou de sa par l'être bienfaisant par excellence
,
plume seulement, c'est-à-dire par le Osiris , récompense l'ame fidèle à ses
svmbole même de la justice
J et -de la devoirs en l'appelant dans un monde
venté. • 4 meilleur, ou bien il la punit de ses fau-
Kn avant de l'instrument redoutable tes en la rejetant sur la terre pour v
on voit une autre divinité, dont la subir de nouvelles épreuves et y en-
haute stature annonce la dignité; car, durer de nouvelles peines sous une
dans les tableaux symboliques des nouvelle forme corporelle, jusqu'à ce
Egyptiens, la hauteur des figures est qu'elle se présente pure de toute faute
presque toujours en raison du rang au tribunal de l'Amenthi. Ici l'ame
du personnage figuré, toutes les fois a été reconnue coupable de glouton-
du inoins que l'espace ne s'oppose pas nerie, et elle est renvoyée sur la terre
à la pratique de cette règle. L'hiero- sous forme d'une truie.
la
grammate a représenté ici le dieu Thoth On
trouve dans cette scène allégo-
(
la science et la sagesse divines per- rique toute la représentation de l'en-
sonnifiées ) , l'inventeur des lettres et fer des Grecs et des Romains. Orphée,
le premier législateur des Égyptiens. et les autres très-anciens instituteurs
Quand Osiris revêtit des formes hu- du culte des Grecs, furent les dis-
maines pour introduire la vie civile ciples des prêtres égyptiens ; il n'est
dans le monde, Thoth, le Mercure donc pas surprenant que le palais d'A-
des Égyptiens, fut son fidèle compa- dès ne soit en grande partie autre
gnon et comme l'ame de ses conseils. chose que la copie de l'Amenthi égyp-
Les mêmes traditions religieuses ajou- tien. Osiris est devenu en occident
taient au'il n'abandonna jamais Osiris, Adès, ou Pluton ; Thméï, Proserpine;
même lorsque ce dieu établit sa de- Oms, le Cerbère; Thoth, le Mercure
meure dans l'Amenthi pour juger les Psychopompe; enfin Horus, Api et
aines. Le Mercure égyptien est carac- Anubi, semblent être les types origi-
térisé par sa téte d'ibis , oiseau qui naux de Minos, Éaque et Rhaua-
dans récriture sacrée égyptienne , est mante et de tels rapprochements
:

le symbole du cœur et de l'intelligence. font comprendre quels précieux ren-


Il tient dans sa main un calam, et seignements sur origines de la re-
les
il écrit sur une tablette
le résultat de ligion des Grecs des Romains, peut
et
la pesée dans la balance de l'Amen- fournir l'étude approfondie des mo-
thi, des ceuvres du défunt. Thoth porte numents de tout genre qui nous
ce résultat à la connaissance du juge tent de l'antique Egypte.
9- livraison. (Ég\£te.)

Digitized by Google
m L'UNIVERS.
L'expression figurée de cette même sur paroi de gauche la grande scé
la
croyance au sujet du jugement de l'ame de psychostasie. Ce vaste tu
la
des morts, par les svmboles qui pou- relief représente la salle h,
vaient la rappeler directement à l'es- (Oskh ) t ou le prétoire de F A men
prit de tous, était multipliée avec avec les décorations convenables,
une attentive persévérance: fondement gran<id juge Osiris occupe le fond
de la morale publique, elle était re- aile; au pied de son trône s'éle
ta sa
produite sur les monuments publics le lotus, emblème du monde matern
par le concours de tous les arts. Le surmonté de l'image de ses quatre ei
tableau qui la représente entrait dans fnnts, génies directeurs des quati
le système de décoration religieuse points cardinaux.
des grands édifices. On la retrouvait « Les quarante -deux ju^es asse
ainsi et dans les livres et dans les seurs d'Osiris sont aussi ranges su
temples de l'Egypte, tant que dura deux lignes, la téte surmontée d'un
l'influence des institutions nationales ; plume u autruche, symbole de la ju:
les rois et les citoyens comparaissaient tice debout sur un socle, en avai)
:

devant le même tribunal. Ce même ta- du trône, le Cerbère égyptien, mon»ti


bleau religieux existe encore, en effet, compose de trois natures diverses, 1

parmi les bas-reliefs peints du petit crocodile , le lion et l'hippopotame


temple qui s'élève derrière l'Amcno- ouvre sa large gueule et menace le 1

Èion sur la rive occidentale de Thè-


, ames coupables : son nom , Têouùtn
s : il fut dédié aux deux déesses enement signifie la devoratriee (h
y

Hathor et Thméï, vers l'an 200 avant l'occident ou de l'enfer. Vers la port<
l'ère chrétienne, comme le disent les du tribunal parait la déesse Thméï
dédicaces, qui nomment le roi Ptolémée- dédoublée , c'est-à-dire figurée deux
Epiphaneet la reine Cléo pâtre sa femme. fois, à cause de sa double attribution
Cnampollion le jeune a vu et décrit ce de déesse de la justice et de déesse de
monument; il a déterminé l'époque de la vérité; la première forme, qualifiée
sa fondation, un peu antérieure au Thmeï,rect.ricede l'Amenthi (la vérité;,
règne d'Kpiphane; il a donné à la présente l'ame d'un Égyptien, sous Jes
fois le nom du prince qui le dédia formes corporelles, à ta seconde forme
et celui des divinités auxquelles il fui de la déesse (la justice), dont voici la
consacré : il a reconnu que le naos légende : Thméï, qui réside dans l'A-
du temple est divisé en trois salles menthi où elle pèse les cœurs dans la
,

ou sanctuaires contigus; que le sanc- balance aucun méchant ne lui échapi*.


:

tuaire principal, celui du milieu, est Dans le voisinage de celui qui doit su-
décoré de tableaux d'offrandes adres- bir l'épreuve, ont lit les mots suivants ;

sées à tous les dieux adorés dans le «Arrivée d'une aine dans l'Amenthi.»
temple, et que celui de droite est spé- Plus loin, s'élève la balance infernale,
cialement réservé à la déesse Hathor. les dieux Horus, iils d'isis, à tète
« Le sanctuaire de gauche, ajoute le d'épervier, et Anubis, fils d'Osiris, à
voyageur, est consacré à la déesse téte des chakal , placent dans les bas-
Thmeï, gui fut la Dicé et i'Aleté des sins de la balance , l'un le cœur du
mythes égyptiens aussi , tous les ta-
; prévenu , l'autre une plume , emblème
bleaux qui nécorent cette chapelle se de justice : entre le fatal instrument
rapportent-ils aux importantes fonc- qui doit décider du sort de l'ame , et
tions que remplissait cette divinité le trône d'Osiris, on a placé le dieu
dans l'Amenthi , les régions occiden- Thoth ibiocéphale , Thoth le deux
tales ou l'enfer des égyptiens. fois grand, le seigneur de Schmoun
« Les deux souverains de ce lieu (Hermopolis Magna;, le seigneur des
terrible , où les ames étaient jugées , divines paroles, le secrétaire de jus-
Osiris et Isis reçoivent d'abord les tice des autres dieux grands dans U
hommages de Ptolemée et d'Arsinoé, salle de justice et de vérité. Ce gref-
dieux Philopatores; et l'on a sculpté fier divin écrit le résultat de l'épreuve

Digitized by Google
ÉGYPTE. 131

a laquelle vient d'être soumis le cœur celle du on a figuré les vingt-


lever,
te i*E<rvptien défunt , et va présenter quatre heures du jour astronomique
Ion rapport au souverain juge. » sous forme humaine une étoile sur
,

! Ob voit donc encore ici, dans le sanc- la téte, et marchant vers le fond du
tuaire de la déesse Thméî, la représenta- tombeau comme pour marquer la
,

tif de la pswchostasie , qu elle


telle direction de la course du dieu et in- ,

«t dans ia deuxième partie de tous diquer celle qu'il faut suivre dans l'é-
tes funéraires.
rituels tude de ces tableaux qui offrent un in-
scènes d'un ordre sembla-
D'autres térêt d'autant plus piquant que, dans
,

it et non moins significatives a Té* chacune des douze heures du jour, on


tard des dogmes psychologiques en* a tracé l'image détaillée de la barque
Kisnés et reçus chez les Egyptiens du dieu , naviguant dans le fleuve cé-
Ristent encore comme décorations leste sur le fluide primordial ou Y /E-
reiiaeuses de monuments comptés Hier , le principe de toutes les choses
parmi tes plus anciens de ceux qui œu- physiques selon la vieille philosophie
vrent si pompeusement le sol égyp- égyptienne, avec la figure des dieux
tien et :ces diverses scènes sont qui l'assistent successivement; et de
comme le complément, et, s'il en plus , la représentation des demeure*
était besoin , l'interprétation intelli- célestes qu il parcourt , et les scènes
^We à tous , de
celle du jugement de mythiques propres à chacune des heures
lame, pour ses bonnes ou ses mau- du jour. Ainsi , à la troisième heure,
vaises actions sur la terre. Ces scènes le dieu Soleil arrive dans la zone cé-
imposantes nous montrent la série leste où se décide le sort des ames
des (bâtiments terribles et variés que relativement aux corps qu'elles doi-
recevaient dans l'autre vie les ames vent habiter dans leurs nouvelles trans-
coupables et indignes de pardon; et à migrations ; on y voit le dieu Atmou
efoè de ce tableau des sévères effets assis sur son tribunal , pesant à sa
te f inévitable justice, est placé celui balance les ames humaines qui se pré-
tes félicités, sans cesse renaissantes sentent successivement : l'une d'elles
la même justice a réservées aux vient d'êtrecondamnée; on ia voit
vn« pures de toute souillure, et qui ramenée sur terre dans une bari qui
« sont élevées à cette perfection en s'avance vers la porte gardée par Anu-
suivant avec ardeur et persévérance la bis, et conduite à grands coups de
voie du devoir et de la vertn. C'est verges par des cynocéphales, emblèmes
dans les catacombes royales de Riban- de la justice céleste; le coupable est
*MIolouk , où reposent les restes des sous la forme d'une énorme truie,
rois, de la e
18% de ta 19* et de la 20 au-dessus de laquelle on a gravé, en
dynastie,que sont conservées ces pré- grands caractères, gourmandise ou
poses représentations. On y décrit gloutonnerie y sans uoute le péché ca-
par une série innombrable de figures pital du délinquant, quelque glouton
«a marche
emblématique du dieu So- de l'époque.
leil dans l'hémisphère supérieur et Le dieu cinauième heure,
visite, à la
lumineux, et successivement dans l'hé- les Champs-Elysées de la mythologie
mtspliere inférieur
, qui est celui des égyptienne, habités par les ames bien-
ténèbres éternelles. Les nombreux ta- heureuses se reposant des peines de
bleaux relatifs à la marche du dieu au- leurs transmigrations sur la terre :
de l'horizon et dans l'hémi- elles portent sur leur téte la plume
spliere lumineux, sont partagés en d'autruche, emblème de leur conduite
uouze séries, annoncées chacune par juste et vertueuse- On les voit pré-
un riche battant de porte sculpté senter des offrandes aux dieux ; ou
,
et gardé par un énorme serpent :
ce bien, sous l'inspection du seianeur dé
*ont les portes des douze heures du la joie du cœur, elles cueillent les
jour.
fruits des arbres célestes de ce paradis.
Près du battant de la première porte, Plus loin | d'autres tiennent en main

Digitized by Google
, .

L'UMVERS.
des faucilles : ce sont les ames qui et leur nature perverse et leur séjou
cultivent les champs de la vérité ; leur dans l'abtme des ténèbres. Les unei
légende porte « Elles font des liba-
: sont fortement liées à des poteaux , é
« tions Je Peau et des offrandes des les gardiens de la zône, brandissant
« grains des campagnes de gloire; elles leurs glaives , leur reprochent les cri-
« tiennent une faucille et moissonnent mes qu'elles ont commis sur la terre
« les champs qui sont leur partage; D'autres sont suspendues la té te en
« le dieu Soleil leur dit : Prenez vos bas; celles-ci, les mains liées sur h
« faucilles , moissonnez vos grains , poitrine et la tète coupée , marchenl
« emportez-les dans vos demeures en longues files ; queques-unes . les
« jouissez -en et les présentez aux dieux mains fiées derrière le dos , traînent
« en offrande pure. » Ailleurs , enfin sur la terre leur cœur sorti de leur
on les voit se baigner, nager, sauter poitrine; dans de grandes chaudières,
et folâtrer dans un grand bassin que on fait bouillir des ames vivantes
remplit l'eau céleste et primordiale soit sous la forme humaine, soit sous
le tout sous l'inspection du dieu Mt- celle d'oiseau , ou seulement leurs têtes
Céleste, le vieil Océan des mythes et leurs cœurs. Il y a des ames jetées
égyptiens. dans la chaudière avec l'emblème du
La marche du soleil dans Yhémi- bonheur et du repos céleste (l'éven-
sphère inférieur, celui des ténèbres, tail), auxquels elles avaient perdu tous
pendant les douze heures de nuit leurs droits. A chaque zône et auprès
c'est-à-dire la contre-partie des scènes des suppliciés, on lit toujours leur con-
précédentes, se trouve sculptée sur damnation et la peine qu'ils subissent.
les parois des tombeaux royaux, op- « Ces ames ennemies, y est-il dit,
posées à celles dont on vient de don- • ne voient point notre dieu lorsqu'il
ner une idée très-succincte. Là le * lance les rayons de son disque; elles
dieu , assez constamment peint en « n'habitent plus dans le monde ter-
noir de la tète aux pieds , parcourt « restre, et elles n'entendent point la
les 75 cercles ou zones auxquels « voix du Dieu grand lorsqu'il traverse
président autant de personnages di- « leurs zones; » tandis qu'on lit au
vins de toute forme et armés de glai- contraire , à côté de la représentation
ves. Ces cercles sont habités par les des ames heureuses, sur les parois
ames coupables qui subissent divers opposées : « Elles ont trouvé grâce aux
supplices. C'est véritablement là le « veux du Dieu grand ; elles habitent
type primordial de X Enfer du Dante, « les demeures de gloire , celles où
car h variété des tourments a de « l'on vit de la vie céleste ; les corps
quoi surprendre; et on ne doit pas « qu'elles ont abandonnés reposeront
rétonner que quelques voyageurs, « à toujours dans leurs tombeau*
effrayés de ces scènes de carnage, « tandis qu'ellesiouiront de la présence
aient cru y trouver la preuve de « du Dieu suprême. »
l'usage des sacrifices humains dans Cette double série de tableaux , tels
l'ancienne Egypte; mais les légendes que CI ki m poil ion le jeune les a re-
lèvent toute espèce d'incertitude à cet cueillis dans ses dessins, et expli-
égard. qués dans ses Lettres , nous offre donc
Les ames coupables sont punies le système psychologique égyptien
d'une manière différente dans la plu- dans ses deux points les plus impor-
part des zônes infernales que visite le tants et les plus moraux , les récom-
dieu Soleil : on a figuré ces esprits penses et les peines ; c'est un irréfra-
impurs, et persévérant dans le crime, gable témoignage en faveur de tout
presque toujours sous la forme hu- ce que les anciens ont dit de la doc-
maine , quelquefois aussi sous la forme trine égyptienne sur l'immortalité de
symbolique de la grue, ou celle de rame, et le but positif de la vie hu-
Yépervier à me humaine entièrement maine. L'Egypte symbolisa ainsi to
peint en noir, pour indiquer à la fois double destinée des ames nar la oein*

Digitized by Go
,

ÉGYPTE 113

tare de course du soleil dans les


la est écrite sur plusieurs monuments du
deux hémisphères. premier ordre. Il y avait dans l'Amen-
L'antiquité classique connut et con- thi des Égyptiens, le séjour des bien-
serva égyptienne relative
la tradition heureux et celui des coupables. Ces
au jugement de l'ame séparée du corps idées, d'origine égyptienne, passèrent
qu'elle anime ; et cette antiquité fit chez tous les peuples policés de l'anti-
plus encore à l'égard d'une partie de quité ; elles n'ont pas encore vieilli, et il
cette tradition , la pesée des ames , est évident que l'idée de peines et de
elle se l'appropria et l'introduisit dans récompenses éternelles fut inséparable
ses propres croyances. Lapsychostasie de celle de l'immortalité de l'ame.
figure dans les écrits des Grecs, dans Personne n'a refusé aux sages de l'E-
ceux des Latins , et sur leurs monu- gypte la priorité de la connaissance de
ments. Homère décrit Jupiter sur le ce dogme; Isis et Osiris, dit Héro-
sommet du mont Gargare , déployant dote , régnent dans l'enfer des Égyp-
ses balances d'or pour y peser les tiens; ce peuple est le premier qui ait
destinées des guerriers troyens et celles dit que l'ame de l'homme est immor-
des Grecs valeureux ; il saisit le milieu telle; ils croient qu'en
quittant le
des balances , qu'il élève , et le jour corps de l'homme, elle passe dans
fatal aux Grecs est arrivé : leur des- celui d'un autre animal, successive-
tin penche vers la terre , et celui des ment dans le corps des êtres animés
Troyens vers les cieux. C'est dans ces de toute espèce, terrestres, marins
luêmes balances que Jupiter place en- ou aériens ; de là elle occupe de nou-
suite les destinées fatales d Achille et veau le corps d'un homme, et ces
d'Hector ; le destin cruel d'Hector em- transmigrations s'opèrent dans un in-
la balance, et le héros descend tervalle de trois mille ans. C'est à
les enfers. Virgile imita cette trois épreuves semblables que l'ame
belle image dans la description du aurait été soumise successivement
combat d .Knee contre Turnus. Une idée recueillie aussi par Platon, qui
belle patère étrusque représente un savait que l'ame qui, après ces trois
sujet analogue, et le nom d'Achille épreuves, restait innocente, retournait
se lit à côte d'un des deux bassins de aux dieux, d'où elle émanait ; les ames
la balance , chargés de deux figures coupables, au contraire, animaient
humaines. Sur un vase grec on a peint d'autres corps durant des myriades
le combat d'Achille contre Memnon, d'années avant de rentrer dans le sein
et au-dessus des combattants, Her- de la divinité. Pindare ne semble-t-il pas
mès, le Tboth des Grecs, pèse dans avoir eu présente la pensée de ce séjour
une balance les ames des héros, en de joie et de plaisirs pour les ames
présence de ïhétis et de l'Aurore. pures, qui est décrit a une de nos
Enfin, Plutarque rapporte que tel était pages précédentes, lorsqu'il rappelle,
le sujet de la Psychostasie d'Eschyle ; dans ses vers , que les ames qui sor-
et Milton ne dédaigna pas d'imiter tent pures de ces trois épreuves, par-
cette riche fiction, reste difforme d'une viennent aux demeures de Saturne et
Ënde pensée et d'un dogme sublime, aux Iles des bienheureux que rafraî-
ormais consacré par l'assentiment chissent les vents de l'Océan , où
des siècles , la conscience publique et brillent des fleurs qui ont l'éclat de
Tordre nécessaire de l'univers. l'or , qui naissent de la terre, ornent
Ce tableau très-expressif des terri- les arbres ou s'élèvent du sein des
bles châtiments réservés aux ames eaux, et dont les habitants de ces lieux
coupables, dément assez hautement fortunés se font des couronnes et des
l'assertion de ceux oui , parmi les sa- colliers? Pindare imite ici l'inépui-
vants des temps modernes, ont avancé sable modèle des poètes, Homère dans
qu'il n'y avait pas, dans l'enfer égyp- son Odyssée ; et comme pour conserver
tien, dé peines physiques infligées aux à cette opinion son origine égyptienne,
condamnes; la preuve du contraire c'estdans la bouche derégyptien Protée

Digitized by Google
184 L'UNIVERS.
met ces paroles adressées divins qui dès l'origine des choses,
fi*Homère
Ménélas
,

Votre destin n'est pas de


: «
,

comprit l'essence de ce Dieu suprême.


connaître la mort ; les dieux vous trans- Il avait, selon les mythes sacrés de
porteront dans les Champs-Élysées l'Egypte, consigné ces nautes connais-
où les heureux jouissent à jamais d'une sances dans des livres qui restèrent
vie fortunée ; la neige , les pluies , les inconnus jusqu'à ce que le Démiurge
longs hivers n'attristent point ces eût créé les ames , et par suite Puni-
lieux ; sans cesse l'Océan leur envoie nivers matériel ainsi que la race hu-
les douces haleines du zéphyr, qui maine. Le premier Hermès avait écrit
porte aux hommes une agréable fraî- ces livres en langue et en écrituws
cheur. » Homère consignait ainsi une divines ou sacrées ; mais après le ca-
opinion égyptienne dans ses immor- taclysme, lorsque le monde physique
tels écrits : « Il y a des Grecs, ajoute fut réorganisé et reçut une nouvelle
Hérodote . qui se sont approprié cette existence, le Créateur,'prenant pitié des
opinion , les uns plus tôt , les autres hommes qui vivaient sans règles et
plus tard ; je connais mène leurs sans lois , voulut , en leur donnant
noms, mais je ne veux pas les écrire l'intelligence et une direction salutaire,
dans mon récit. » Le même historien leur tracer la voie qui devait les ra-
rend le même témoignage sur l'origine mener dans son sein dont ils étaient
égyptienne de la métem psychose ; on émanés. Ce fut alors que se manifes-
rien parla parmi les philosophes grecs tèrent sur la terre Isis etOsiris, dont
qu'aux temps de Pherécyde et de Py- la mission spéciale fut de civiliser l'es-
tnagore : c'est à ce dernier que la pèce humaine. Ces deux époux avaient
propagation de cette idée parmi les pour associé et pour conseiller fidèle,
Grecs est attribuée, ainsi que celle Thoth, nommé aussi Thmjth par les
de l'immortalité de ame a Thalès;
l Grecs, qui fut le second Hermès, et
et cependant on entrevoit cette opi- n'était toutefois qu'une incarnation du
nion très-distinctement dans les poè- premier, ou l'Hermès céleste mani-
mes d'Homère. Dès le début, il parle festé sur la terre.
des ames nombreuses de héros qu'A- Tout ce que tentèrent Isis et Osiris
chille a envovées aux enfers; leurs pour tirer les humains de l'état sau-
corjis étaient fivrés aux chiens et aux vage , fut ou suggéré ou approuvé par
vautours. Ft à la fin de l'Odyssée, il Thoth, et c'est a ce second Hermès
décrit la belle prairie habitée par les que les Egyptiens se croyaient rede-
ames des défunts , demeure toutefois vables de toutes leurs institutions so-
peu attrayante dans l'esprit des Grecs, ciales. Les hommes étaient encore
Suisque Achille aurait préféré le sort réduits, comme les animaux, à ne
'un misérable villageois sur la terre manifester leurs sensations que par
au titre de roi de toutes ces ames dans des cris confus et sans liaison ; Thoth
les enfers. L'opinion sur l'état de leur apprit une langue articulée, et
l'ame, après l'extinction de la vie du imposant des noms a tous les objets
corps, était incertaine encore chez les il donna à chaque individu le moven
Grecs à ces époques reculées de leur de communiquer ses pensées et de *

histoire. Ce fut l'Egypte qui les in- s'approprier celles des autres. Il fit
struisit ; elle leur communiqua la plus, il enseigna à les fixer d'une ma-
science qu'elle avait reçue des dieux nière durable , en inventant Part de
mêmes. l'écriture ; il organisa l'état social
D'après l'histoire sacrée de Ptëgvpte, établit la religion , et régla les céré-
ce fut Thoth, le premier Hermès, le monies du culte ; il connaître aux
fit
Trismégistc , ou trois fois très-grand , hommes l'astronomie et la science des
uni écrivit tous les livres par l'ordre nombres, la géométrie, l'usage des
du Dieu suprême. Ce premier Thoth poids et des mesures. Non content de
fut PUemies céleste, ou l'intelligence satisfaire à tous les besoins de la so-
divine personnlliée, le seul des êtres ciété humaine par ces importantes et

Digitized by Go
ÉGYPTE. m
utiles créations , le second Hennés ment toutes les découvertes utiles
s'occupa aussi de tout ce qui pouvait faites par les membres de la caste
contribuer à embellir la vie : il in- sacerdotale, Thoth étant pour elle,
venta la musique, fabriqua la lyre, à à la fois , et son instituteur et sa pro-
laquelle il ne donna que trois cordes, pre image, sa personnification dans
et institua les exercices gymnastiques. les mythes sacrés ; Thoth était reconnu
C'est ce même dieu, enGn, qui fit pour l'arbitre souverain du cœur et
connaître aux hommes l'architecture de Y intelligence humaine, et le même
la sculpture, lapeinture et tous les mot égyptien exprimait en même temps
arts utiles. Voilà ce gu'en ont dit Pla- les idées coeur, intellect ou intelli-
ton , Plutarque et bien d'autres écri- gence. Dans les livres sacrés , le pre-
vains. mier Thoth , l'Hermès trois fois très-
Ils ajoutent que la langue et récri- grand , est qualifié de père et direc-
ture inventées par Thoth, et commu- teur de toutes choses, et d'historio-
niquées aux hommes par cette divinité graphe des dieux, et ces titres sont
bienfaisante , différaient de la langue pleinement justiOés par les attribu-
et de récriture des dieux , dont s'était tions particulières de cet être divin
servi le premier Hermès pour rédiger selon les mythes nationaux déjà rela-
ses livres. L'écriture employée par le tés. C'est ce même dieu qui pré*
second Hermès est appelée hiérogra- para la matière dont furent formés
pftique par Manéthon, parce qu'elle les corps de la race humaine; et il
servit d abord à écrire les livres sa- promit alors ( prescience trompeuse î)
crés, dont ce dieu confia la garde à de rendre ces nouveaux êtres fort
la caste sacerdotale, qui lui devait, doux, et de leur inspirer la prudence,
dit-on , son organisation et toutes les la tempérance, l'obéissance et l'amour
connaissances dont elle fut la déposi- de la vérité. Osiris et Isis révélèrent
taire et la dispensatrice. Il paraît même aux hommes les livres de Thoth qui
que cet instituteur des hommes ré- devaient régler leur vie intellectuelle
serva, pour cette caste seule, un certain et physique; ce Thoth est l'intelli-
ordre Je notions, entre autres celle de gence 'divine personnifiée dans cet être
la véritable longueur de l'année. Les puissant, et le dieu supérieur ne le
prêtres égyptiens reconnaissaient ce nomme que : Ame de mon ame et ,

dieu pour 1 auteur des livres sacrés intelligence sacrée de mon intelli-
Ji'.te
chacun d'eux devait posséder à gence en un mot, celui qui connaît
,

ond, en totalité ou en partie, selon tout. délégua au second Thoth, qui


Il
l'ordre de ses fonctions et son rang était son incarnation, le gouvernement
dans In hiérarchie. Ces livres de Thoth, de la terre , celui de la lune , et un
au nombre de quarante-deux, renfer- ministère supérieur dans les enfers.
maient toutes les règles, tous les pré- Ce second Thoth fut pour les Égyp-
ceptes et tous les documents relatifs à tiens l'auteur de tous les livres connus;
la religion, au culte, au gouvernement, on mi en attribua un très-grand nom-
à la cosmographie, à la géographie, à bre. II y eut réellement en Egypte des
tous les arts et à toutes les sciences ; bibliothèques et des archives considé-
en un mot, ces livres sacrés dont nous rables. Dans le magnifique édifice ap-
indiquerons les sujets, formaient une pelé par l'antiquité grecque le tom-
véritable Encyclopédie égyptienne. beau d'Osymandyas , il y avait une
Les deux Thoth étaient les auteurs bibliothèque de livres sacrés, et sur
de tous ces ouvrages , le second sur- sa porte on avait écrit remède de
tout, chargé plus particulièrement du Came. Au Rhnmesséïon de Thèbes, qui
gouvernement de la terre et de la po- a tant d'analogie avec le prétendu
lice des hommes. Il rassemblait dans tombeau d'Osvmandvas décrit par,

lui-même toutes les sciences divines Diodore de Sicile, d'après Hécatée,


et humaines ; aussi les prêtres égyp- Champollion le jeune a aussi reconnu,
tiens lui attribuèrent-ils religieuse- après le promenoir, la salle des li*

Digitized by Google
136 L'UNIVERS.
rres ou la bibliothèque. La porte qui qu'il prit ces livres pour suides dai
conduit d'une de ces deux pièces dans la rédaction de son ouvrage, et
l'autre , et dont les ornements en re- nous est parvenu des fragments orif
lief ont été stuqués et dorés , porte naux en écriture sacrée , soit des h
l'annonce évidente de la destination tes authentiques des rois, soit è
donnée à la deuxième de ces deux sal- relations des événements de leur r
les. Au bas des jambages, et immé- gne , qui remontent aux temps <

diatement au-dessus de la dédicace, Moïse I^s livres d'Hemi


et au-delà.
sont sculptées deux divinités , la face contenaient toute la science socia
tournée vers l'ouverture de la porte , des Égyptiens , ils étaient en grarx
et regardant la seconde salle, qui était vénération ; Artaxercès , maître de PI
par conséquent sous leur juridiction. gypte, en amassa un grand nomlu
Ces deux divinités sont, à gauche, le dans les temples, d'où il les enleva
dieu des sciences et des arts, l'inventeur et les prêtres les rachetèrent de l'ei
des lettres, Thoth à tête d'ibis, et à nuque du roi, pour beaucoup d'argeni
droite la déesse Saf,compagne de Thoth, Cependant, tous les livres dit
portant le titre remarquable de Dame d'Hermès n'étaient pas également v<
des Lettres et présidente de la biblio- nérés en Égypte. Les uns, considéré
thèque ( mot à mot la salle des livres ). comme les plus anciens et renferman
De plus , le dieu est suivi d'un de ses les préceptes divins les plus essentiels
Paredres, qd'à sa légende et à un étaient robjet constant de l'étude de
grand œil qu'il porte sur la tête, on prêtres chargés d'en lire chaque jou
reconnaît pour le sens de la vue per- quelque chapitre au roi et au peuple
sonniGé , tandis que le Parèdre de la et d'autres,moins anciens, d'une étud<
déesse est le sens de l'ouïe, caractérisé moins fréquente et moins obligée
par une grande oreille tracée égale- étaient des commentaires orthodoxe*
ment au-dessus de sa téte, et par le des précédents, et traitaient de matiè-
mot solem ( l'ouïe ) sculpté dans sa res moins relevées , de sujets plus à la
légende; il tient de plus en main tous portée des vulgaires intelligences.
les instruments de l'écriture, comme Clément d'Alexandrie rapporte ce
pour écrire tout ce qu'il entend. Est- qui suit : « Les Égyptiens suivent
il possible
, ajoute
notre voyageur, de une philosophie particulière à leur
mieux annoncer, que par de tels bas- fiays; c'est dans leurs cérémonies re-
reliefs, l'entrée dr u ne bibliothèque ?

igieuses surtout qu'on s'en aperçoit ;
Les livres étaient si abondants en on y voit d'abord , marchant le *prc-
Egypte, que le nombre des ouvra- mier, le chanteur, portant un svraooie
ges attribués à Hermès est porté par musical ; il est obligé de savoir detix
lamblique à vingt mille, par Manéthon des livres d'Hermès, l'un contenant
à un nombre encore supérieur, et les hymnes en l'honneur des dieux
Hermès c'est la caste savante et la l'autre les règles de vie pour les rois.
science même, selon les idées égyptien- Après le chanteur vient l'horoscope;
nes. Les livres sacrés étaient les plus re- il porte dans ses mains une horloge et

cherchés, et l'on considérait comme une palme. Il faut qu'il ait toujours
tels ceux qui traitaient de la natu- dans son esprit les qitatre livres qui
re , de la hiérarchie et du culte des traitent des astres, l'un des astres
dieux : un roi nommé Suphis , celui errants , l'autre de la conjonction du
auquel on attribue la grande pyra- soleil et de la lune, les derniers de leur
mide, était l'auteur d'un de ces trai- lever. Vient ensuite le prêtre hiéro-
tés. On considérait aussi comme sacrés grammate , reconnaissais aux plumes
les livres historiques renfermant les qui ornent sa tête; il a dans ses mains
annales de la nation , les grandes ac- un livre et une palette garnie de l'en-
tions des rois et des citoyens illustres; cre et des joncs nécessaires pour écrire.
ces livres étaient déposes dans les ar- L'hiérogrammate doit posséder les
chives des temples; Manéthon déclare connaissances qu'on appelle hiérogly*

Digitized by Google
Egypte. «7
(ou interprétatives des anciens ancienne aussi en Egypte, de célébrer,
0 et qui comprennent la cosmogra- par la poésie lyrique, chantée dans
phie , la géographie , les phases du so- les cérémonies publiques et dans les
leil et de la lune, celles des cinq pla- repas de famille, les louanges des
, la rhorographie de l'Egypte , le dieux et les belles actions des hommes.
du Mil et ses phénomènes, l'état Clément d'Alexandrie mentionne les
possessions des temples et des compositions de ce genre comme fai-
qui en dépendent, les mesures sant partie de deux des principaux
et tout ce qui est utile à l'usage des ouvrages d'Hermès : les bons exemples
temples. Le stoliste vient ensuite, laissés par les anciens rois y étaient con-
portant la coudée, emblème de la jus- signés pour l'instruction de leurs suc-
- e
et le vase de purification. Celui- cesseurs, et cette instruction procédait
• i sait tout ce qui concerne l'art d'en- de ces exemples mêmes rappelés tous
de marquer du sceau
et l'art les jours à la mémoire et à la vénéra-
jeunes victimes. Dix livres
les tion des hommes. Diodore de Sicile
relatifs au culte desdieux et aux pre- avait remarqué que les poëmes en
ide la religion ; ils traitent des sa- l'honneur de Sésostris différaient quel-
i, des prémices , des hymnes quefois , pour les faits , des annales
des prières , des pompes religieuses et des prêtres. Il n'est pas rare de trou-
autres sujets analogues. Après tous ver dans les tableaux historiques, dont
les prêtres marche le prophète, portant les monuments de l'fegypte sont dé-
le seau sacré , suivi de ceux qui portent corés, des scènes
où des chanteurs
des pains; comme le supérieur des accompatment leurs paroles avec le
autres prêtres, le prophète apprend son de divers instruments les louan-
:

les dix livres qu'on appelle sacerdo- ges des dieux et celles des bons rois
t'ius. où est contenu ce qui concerne devaient être constamment dans la
les lois et l'administration de l'état et bouche d'un peuple religieux et soumis,
de la cité, les dieux et la règle de comme elles étaient déjà dans tous ses
Tordre sacerdotal. Il y a en tout qua- livres.
rante-deux livres principaux d'Her- Outre le titre de ceux qu'a indiqués
mès, dont trente-six, où est exposée Clément d'Alexandrie, d'autres écri-
toute la philosophie des Egyptiens, vains de l'antiquité en désignent en-
sont appris par des prêtres des clas- core bien d'autres qui traitaient de
ses qui viennent d'être désignées ; les la physique, de la nature des choses,
>.\ autres livres sont étudiés par les de la connaissance de soi-même, et de
pastophores , comme appartenant à divers sujets philosophiques exposés
l'art de guérir , et ces livres parlent et discutés dans des discours à Tat à ,

en effet de la construction du corps Ammon , à Asclépius, d'Isis à Horus,


humain, de ses maladies, des instru- et autres titres recueillis par des au-
ments et des médicaments , des yeux teurs grecs ou latins ; livres dont il
enfin des maladies des femmes. » nous est parvenu des fragments qui
Au témoignage de Clément d'A- révèlent de trop évidentes interpola-
lexandrie, bien "moderne par rapport tions au milieu de quelques restes
à l'époque où la caste sacerdotale trop rares de leurs primitifs précep-
égyptienne était dans toute sa puis- tes et de leur rédaction originelle.
sance, se joignent, pour accréditer ces Après les livres sacrés, les ouvra-
précieux renseignements sur la litté- ges de Thoth, on a nomme des hom-
rature sacrée de l'antique Éjrypte, mes comme auteurs de quelques écrits
d'autres témoignages plus anciens et utiles ou remarquables. Un roi Am-
non moins imposants. Platon a su que mon , selon Justin Martyr, écrivit
de très -anciens poëmes égyptiens un traité sur Dieu ; un prophète nommé
étaient des hymnes en l'honneur u'Isis, Bitys avait découvert dans le temple
et toute l'antiquité classique affirme de Sais un exposé de la doctrine de
que c'était uue coutume générale et très- Thoth sur l'ascension des ames à Dieu,

Digitized by Google
m L'UNIVERS
écrite en hiéroglyphes ; î! l'Interpréta logiques. L'empereur Alexandre-*
et offrit son ouvrage à un roi nommé vère parcourut l'Égypte, fît en le*
Ami non, qu'un autre ouvrage
ainsi des temples tous les livres mythim
sur le L'Inérogrammate Épeis
bien. qu'il y trouva , et les flt déposer <ïa
était l'auteur d'un commentaire sur le tombeau d'Alexandre à AlexarxMl
les symboles égyptiens, nui fut traduit afin qu'on ne prtt , à l'avenir , étudl
en grec par Àrius d'Héracléopolis. le contenu de ces ouvrages.. Hortil
Nous avons déjà parlé de l'ouvrage du connaissait la renommée des Rt*vptH|
roi Suphis ; un autre roiAthothis
, dans l'art de guérir, et l'emploi è
second roi de la première dynastie remèdes était réglé par la loi : tou
fondateur des palais de Memphis, com- infraction funeste au malade, exposa
posa des écrits d'anatomie : on attribue le médecin à la mort. J,a loi régl4
aussi des livres sur l'astronomie et sur aussi la composition des remèdes <y|
l'astrologie au roi H échos ou Né- consistaient en mixtions; et un livré
chepso, et a un Pétosiris dont on nr nommé Ambrés , contenait la soient!
connaît pas l'époque. Galien et Aêtius des diagnostics et des pronostics 4
citent un remède contre la pierre, médecine. Aélien nous a transmis 1
tiré des ouvrages de médecine de !Vé- renommée de l'Égyptien lachus, dort
chepso. Pline mentionne quelques don- la mémoire était célèbre dans sa pntrfc
nées relatives aux planètes, recueillies pour les services qu'il lui avait rendus
des mêmes écrivains Néchepso et par sa science profonde en médecine
Pétosiris ; et Servius ne craint pas et le succès avec lequel il avait com-
d'affirmer qu'ils avaient fait de bonnes battu et arrêté de meurtrières epidé-
observations sur la nature de certains mies. L'art de traiter les métaux et fou-
météores. Suidas attribue au même, tes les substances propres aux, autres
ou a un autre Pétosiris, des commen- arts utiles fut porté très-loin en Éçypte;
taires sur les dieux et les mystères des une science aujourd'hui très-pexiec-
Égyptiens. On nomma plus tard deux tionnée, la chimie, a pris son nom
géographes égyptiens , Cynchrus et de celui même que FÉgypte porta très-
Blautasus; Apollonius de 'Rhodes af- anciennement ( chémi ou chimi }.

firme que les Kgvptiens connaissaient Enfin Dioclétien , abusant de sa vic-


la terre, le nom et la distance des lieux toire en Égypte, y fit rechercher et
hors de l'Égvpte. Quant à leurs an- briller tous lès anciens livres de chimie
nales nationales, elles étaient soigneu- qui traitaient de l'or et de Tardent
sement écrites dans les registres des afin d'appauvrir les Égyptiens, et que,
temples ; Hérodote a vu , de ses pro- pauvres , ils lui fussent plus soumis.
pres veux ,les registres sur papyrus On connaît encore, par Théophile,
où efles étaient consignées; Dioîlore patriarche dWntioche , un ouvrage
les mentionne souvent; Manéthon les d'Apollonidès, surnommé Orapios, qui,
prit pour guide dans son histoire d'K- sous le titre de Sémenouthi ( mot égvp-
gypte et Théophraste parle sciemment
, tien corrompu), le livre divin, trai-
de l'histoire des rois d'Égypte, qu'il tait des dieux de PÉgvpte. Enfin on
a parfaitement connue. Apulée indique ne peut douter qu'outre les instruc-
des livres sur des sujets religieux, qui tions orales que Platon reçut des prê-
n'étaient pas communiqués aux profa- tres égvptiens, il n'ait aussi obtenu
nes; Ammien Marcellin, l'ouvrage se- d'eux de voir de ses propres yeux
cret où l'on avait particulièrement noté leurs livres philosophiques et doctri-
l'Age du bœuf Apis; Achïllès-Tatius naux ; les hiérogrammates Sachoniate

l'autre ouvrage où un prêtre était et Seenuphis, ses instituteurs, durent


chargé spécialement d'étudier et de lui montrer ces précieux ouvrages,
prévoir le retour du phénix d'Rthiopie comme on croit que, avant Platon,
en Egypte , c'est-à-dire le retour du le prêtre Péréms avait montré ces livres
commencement de la période sothia- à Pythagore, et primitivement Éthi-
que; et Damascius, des livres théo- mius à Orphée. Il est certain que H*

Digitized by Google
,

ÊGTPTE.
ton obtint des prêtres égyptiens beau- ces ouvrages est intitule, Pimander f
f
coup plus de communications que la et l'autre Àscltpius. Le premier traite
Hnpart des autres philosophes grecs; de la puissance et de la sagesse de
3 était profondément instruit de leurs Dieu ; le second de Dieu , de I homme,
rines cosino jon i.jues et psychologi- et de l'univers. Un autre ouvrage
;et parce qu' on les lui avait corn- d'Asclépius, les Définitions, est adressé
uécs comme des secrets , que le au roi Amiuon, et l'auteur s'y déclare
re même des hommes instruits le disciple de Thoth.
Usât indigne de connaître, Platon les Rien n'est plus connu dans l'an-
conserva dans son esprit comme des cienne littérature que les écrits réunis
jpystères sacrés , s'abstint de les con- sous la dénomination commune de
signer en corps de doctrine écrit, en Livres hermétiques; ils sont écrits en
parla avec réserve, et ne les rappela grec pour la plupart, on ne sait quand
dans ses ouvrages que par des phrases et moins encore par qui. Ceux qui les
énigmatiques et parfois inintelligibles écrivirent en cette langue déclarent
pour tout autre que pour lui-même. les avoir traduits de textes antiaues
Il laisse toutefois à entendre , il s'en en écritures sacrées égyptiennes, if est
«pliai je même
assez clairement , que certain qu'un examen attentif y fait
les doctrines égyptiennes dominent reconnaître des idées étrangères au
dans ses écrits. S'il se propose pour monde égyptien , qui sont nées de
sujet de ses méditations Tordre de sectes diverses dans des temps pos-
l'univers, il veut s'y livrer d'après térieurs à celui de la splendeur pha-
l'opinion de ceux qui l'introduisirent raonique, et qui turent ainsi inter-
dans cette étude par des signes figu- polées dans l'antique texte, comme
rés, indispensables pour pénétrer de pour leur donner quelque crédit à la
Ws secrets. Et ces opinions égyp- faveur de cette origine supposée. Mais
tiennes, si Platon s'imposa la réserve il ne faut pas, pour ces interpolations

de ne pas les écrire, du moins il en avérées, rejeter entièrement ces livres


parla souvent à ses disciples, à ses hermétiques ; Champollion le jeune les
amis; et ce qu'en a conservé Aris- a étudiés à fond, et il a déclaré pu-
tote dans ses ouvrages, et qui est bliquement, malgré les jugements har-
conforme aux doctrines de Platon, dis ou hasardés qu'en ont portés quel-
passe assez généralement pour avoir ques critiques modernes , que ces li-
été recueilli par Aristote,de la bouche vres renferment réellement une niasse
de son divin maître. de traditions purement égyptiennes,
,
De tous les écrivains de l'ancienne et constamment d'accord avec les mo-
Egypte, le dieu Thoth fut et devait numents les plus authentiques de l'É-
&re le plus fécond ; une pieuse défé- gypte.
rence lui attribuait toutes les décou- Parmi les fragments qui nous sont
vertes utiles; aussi le nombre des parvenus, on remarque celui d'un
«rits qui ont été mentionnés sous discours d'Hermès , adressé à Thoth :

son nom par l'antiquité classique , est- « Il est difficile à la pensée, lui dit-il,
il très - considérable
; les uns sur des de concevoir Dieu, et h la langue d'en
sujets graves et d'une haute philoso- parler. On ne peut décrire par des
phie, d'autres sur des matières oi- moyens matériels une chose immaté-
, les sciences occultes, et l'art rielle; et ce qui est étemel ne s'allie
de la divination. Deux ouvrages do- que très-diflicilement avecree qui est
minent cependant cette liste des pro- sujet au temps. L'un passe, l'autre
ductions attribuées à Thoth ou Her- existe toujours. une percep-
L'un est
mès, et ils sont dignes, par leur ob- tion de 1 esprit , une réa-
l'autre est
jet, de la réputation de sagesse supé- lité.... Ce qui peut être connu par les
rieure et de divine inspiration dont yeux par les sens, comme les corps
et
Tlioth a joui dans tous les temps et visibles peut être exprimé par le lan-
,

tous les pays de l'antiquité. L'un de gage; ce qui est incorporel, invisible,

Digitized by Google
140 L'UNIVERS.
immatériel sans iorme, ne peut eire
, élèves de l'haypte, et employée dans
connu par nos sens : je comprends par leurs disciples , on l'a ho-
les livres
donc, ô Thoth, je comprends que Dieu norée en la mettant sous la protection
est ineffable. » d'un nom à jamais illustre dans les
« La mort dit-il ailleurs
, , est pour annales de la science et de la vertu,
certains hommes un mal qui les frappe celui de Socrate. La méthode socra-
d'une profonde terreur. C'est de 1 i- tique ou de l'enseignement par le
y

gnorance. La mort arrive par la dé- dialogue , est ainsi un autre bienfait
bilité et la dissolution des membres du émané de la science égyptienne.
corps ; le corps meurt , parce ou'il ne On retrouve cette même forme de
peut plus porter l'être : ce qu on ap- dialogue dans un autre écrit qui est
pelle mort, c'est seulement la destruc- considéré par les critiques modernes
tion des membres et des sens du comme le plus ancien et le plus au-
corps ( l'être, l'ame ne meurt pas). » thentique des premiers livres philoso-
« La vérité , ut-il encore , c'est ce Ehiques de l'Égypte. On a vu , plus
qui est éternel et immuable ; la vérité aut, le jugement qu'en a porté Cham-
est le premier des biens; la vérité n'est pollion le ieune, et qui s'applique
pas et ne peut pas être sur la terre: il surtout , dans son intention , au
se peut que Dieu ait donné à quelques Pimander d'Hermès Trismégiste. Cet
hommes , avec la faculté de penser aux ouvrage , souvent publié , et dont
choses divines, celle de penser aussi il existe plusieurs manuscrits grecs à

à la vérité; mais rien n'est la vérité sur la Bibliothèque royale, passe pour
la terre, parce que toute chose y est avoir été traduit ou au moins imité de
une matière, revêtue d'une forme cor- l'égyptien, et pour conserver, plus sû-
porelle sujette au changement, à l'al- rement que tout autre fragment , les
tération , à la corruption , à de nou- traces des doctrines psychologiques et
vellescombinaisons. L'homme n'est cosmologiques égyptiennes. Pimander
pas la , parce qu'il n'y a de vrai
vérité a aussi la forme "d'un dialogue qui a
que ce qui a tiré son essence de lieu entre Pimander et Thoth; et
soi-même, et qui reste ce qu'il est. comme le mot Pimander signifie 17»-
Ce qui change, au point de ne pas telligence suprême , et que Thoth est
être reconnu, comment cela serait-il aussi une autre Intelligence, manifestée
la vérité ? La vérité est donc ce qui aux hommes, c'est donc un dialogue
est immatériel, qui point en-
n'est entre l'Intelligence divine et l'Intelli-
fermé dans une enveloppe corporelle gence humaine, la première révélant
qui est sans couleur et sans ligure, a la seconde , pour le salut du eenre
exempt de changement et d'altération ;
humain, l'origine de l'ame, sa desti-
ce (mi est éternel. Toute chose qui née, ses devoirs, les peines ou les
périt est mensonge ; la terre n'est que récompenses qui lui sont réservées.
corruption et génération ; toute géné- IS'ous essaierons de donner une idée
ration procède d'une corruption ; les du contenu de ce dialogue. C'est Thoth
choses ue la terre ne sont que des ap- qui raconte lui-même sa conversation
parences et des imitations de la vé- avec Primander.
rité , ce que la peinture est à la réa- « Comme ie un jour sur
réfléchissais
lité. Les choses de la terre ne sont la nature des choses, élevant mon
pas la vérité. » entendement vers les cieux, et mes
Dans ce sommaire de pensées, plus sens corporels assoupis, commé il ar-
développées dans le texte des frag- rive dans le profond sommeil aux
ments , la forme de ce texte n'est pas hommes fatigués par le travail ou la
conservée; elle est la même dans tous satiété, il me sembla voir un être
les écrits hermétiques dont il nous d'une stature démesurée, qui, m'ap-
est parvenu quelques portions, et elle pclant de mon nom , m'interpella en
est remarquable, puisque introduite ces termes « Que désires-tu voir et
:

dans la Grèce par les philosophes entendre? ô Thoth que souhaites- tu


î

Digitized by Google
EGYPTE. 141

d'éprendre et de connaître ? » Je lui • Quand ces choses furent dites, je le


demandai : * Qui es-tu? Je suis, — priai long-temps pour qu'il tournât
e dit-il , Pimander la Pensée de la , vers moi sa figure. Dès qu'il l'eût
puissance divine; dis-moi ce que tu fait , j'aperçois aussitôt dans ma Pen-
sesires , je serai en tout à ton aide. » sée une lumière environnée de puis-
- Je désire, lui dis-je, apprendre la sances innombrables, brillant sans
aature des choses qui sont, et con- limites, le feu contenu dans un espace
naître Dieu. » Il me répondit : «Expli- par une force invincible, et se main-
que-moi bien tes désirs, et je t'ins- tenant au-dessus de sa propre base.
truirai sur toutes choses. » M'ayant « Je vis toutes ces choses par l'effet
ïinsi parlé, il changea de forme : et du Verbe de Pimander , qui , me
soudainement il me révéla tout. trouvant plongé dans la stupeur , m'a-
l'avais alors devant les yeux un dressa de nouveau la parole ainsi :
spectacle prodigieux ; tout s'était con- « Tu as vu en ta Pensée la première
verti en lumière, aspect merveilleuse- forme prévaloir sur le principe in-
ment agréable et séduisant; j'étais fini, et autres choses semblables. »
saisi de ravissement. Peu après, une Je lui demandai d'où émanent les élé-
ombre effroyable , qui se terminait en ments de la nature ? a De la volonté
obliques replis, et se revêtait d'une de Dieu , me dit-il , laquelle s'étant
oature humide, s'agitait avec un fracas saisie de sa perfection , en a orné tous
terrible. Une fumée s'en échappait les autres éléments et les semences
pc bruit; une voix sortait de ce viables qu'il a créées; car l'intelligence
bruit ; elle me semblait être la voix de c'est Dieu, possédant la double fécon-
U lumière et le Verbe sortit de cette
, dité des deux sexes , qui est la vie et
'où de lumière.
la la lumière de son intelligence; il
«Ce Verbe était porté sur un prin- créa avec son Verbe une autre intelli-
cipe humide, et il en sortit le feu pur gence opérante; il est aussi Dieu Feu
» le^er qui , s'élevan t , se perdit dans et Esprit Dieu. Il a ensuite formé
'«airs. L'air léger, semblable à l' Es- sept agents, qui contiennent dans les
prit, occupe le milieu entre l'eau et cercles le monde matériel , et leur
* fcu î et la terre et les eaux étaient action se nomme le Destin. Le Verbe
tellement mêlées ensemble, que la de Dieu s'est ensuite réuni , se sé-
^rface de la terre, enveloppée par parant des éléments agités par un
'«seaux,n'apparaissait en aucun point, simple effet de la nature , et s est uni
pes furent toutes deux agitées par à l'intelligence opérante, car il était
»e Verbe de l'Esprit, parce qu'il était de même essence. Dès lors les élé-
porté au-dessus d'elles; et dans ments de la nature sont restés décli-
ce
jjoment Pimander me dit : « As-tu nants sans raison , pour qu'ils fussent
J
tacle?—
compris ceque signiûe ce spec-
connaîtrai , » lui dis-je.
e le
simplement de la matière.
• L'intelligence opérante et le Verbe
" ajouta
: « Cette lumière, c'est moi : renfermant en eux les cercles et tour-
je suis
l'intelligence, je suis ton Dieu nant avec une grande vélocité , cette
p |e suis
f bien plus ancien que le prin- machine se meut dès son commence-
"pe humide qui s'échappe de l'ombre. ment jusqu'à la fin, sans avoir ni com-
Je suis
le germe de fa pensée , le mencement ni fin ; car elle commence
toujours au point où elle finit. C'est


resplendissant, le
te dirai
donc : Pense que ce qui
fils de Dieu.

de l'ensemble de ces cercles, l'intel-


et entend ainsi en toi , c'est le ligence l'a voulu ainsi , qu'ont été ti-
J2
>e rbe du maître, c'est la Pensée, qui res , des éléments inférieurs , les ani-
2*nt
m
Dieu le ne sont aucune-
père ; ils maux privés de raison, car elle ne
séparés union , c'est la
, et leur leur en a pas donné. L'air porte les êtres
Vl e.
Tfatth Trismégiste : Je te rends ailés; l'eau, ceux qui nagent. L'eau
firaces.
Pimander : Médite d'abord sur et la terre diffèrent entre elles de la
13
lumière, et arrive à la connaître. manière que l'Intelligence l'avait pres-

Digitized by Google
L'UNIVERS.
pèces qui toutes devaient se pro
animaux qui étaient en elle , les qua- selon leurs propres caractères
drupèdes, les serpents, les animaux « Celui donc qui se connaît lui
sauvages et les animaux domestiques ; conquis le bien supérieur à son es
mais l'Intelligence, père de tout, qui celui qui se laissa tromper par l'an)
est la vie et la lumière, a procréé du corps, fut Jeté dans les ténèb
l'homme semblable à elle - même de la mort.... Dieu, qui est l'intel
et Ta accueilli comme son fils; car il gence , a voulu que chaque homme i

était beau et était le portrait de son participe à cette intelligence se a


père. Dieu s'étant complu dans l'image rât en lui-même.» aTous les hoi
de lui-même, concéda a l'homme la fa- dit Thoth, ne possèdent donc pas
culté d'user de son ouvrage. Mais intelligence?— Tu penses juste, r
Thomine, ayant vu dans son père le Pimander, et je suis moi-même Tint
créateur de toutes choses, voulut aussi gence pour les hommes bons , pu
créer, et il se précipita de la eon- pieux , saints ; ma présence leur est
templation de son père dans la sphère aide , et aussitôt ils connaissent tou
de la génération. Tout étant soumis et le Père est pour eux propice et
à son pouvoir, il considéra les attri- séricordieux. C'est pourquoi ils
butions des sept agents. Ceux-ci se brent ses louanges par des h)
plaisant à favoriser l'intelligence hu- abandonnant le corps à sa mort
maine, lui communiquèrent leur pou- repoussant Jes illusions des sens qu'i
voir. Dès qu'il eut ainsi connu leur savent être mortelles. L'intelligence
essence et sa propre nature, il désira est pour eux comme une sentinelle qui
de pénétrer dans les cercles et d'en les garantit des entreprises et des em-
rompre la circonférence, s'attriouant bûches du corps, et se ferme les voi
la force de celui qui domine sur le feu de leur séduction. Au contraire,
lui-même. Et celui qui avait eu tout m'éloigne des ignorants, des médian
pouvoir sur les animaux mortels et des envieux, des homicides et des û
privés de raison, s'éleva, sortit du pies; je les livre au démon vengeur,
sein de l'harmonie , pénétra et rompit qui aime les coupables et les punit par
la puissance des cercles, et montra la le feu. » Thoth des lors demande à sa-
nature comme une des belles formes voir ce qui arrivera après l'ascensiou
de Dieu.... L'homme se prit d'amour de l'ame vers le Père. — «Le corps ma-
pour elle. Il en naquit une forme d'être tériel perd sa forme, qui se détruit
privé de raison.... Mais de tous les ani- avec le temps ; les sens, qui ont été
maux terrestres, l'homme seul est doué animés, retournent à leur source, et
d'une double existence ; mortel par son reprendront un jour leurs fonctions;
corps , immortel par son être même. mais ils perdent leurs passions et leurs
Immortel, tout lut est soumis ; les au- désirs, et l'esprit remonte vers les
tres êtres vivants subissent la loi des cieux pour se voir en harmonie; fl
destins. I / homme fut donc une harmo- laisse dans la première zone la faculté
supérieure, et pour l'avoir voulu d'accroître et de décroître; dans la
pénétrer, est tombé dans l'esclavage. .
i I seconde , la puissance du mal et les
Comme l'homme, tous les autres ani- fraudes de l'oisiveté ; dans la troisième,
maux sont détruits; mais Dieu dit : les déceptions de la concupiscence;
Vous à qui ane part d'intelligence est dans la quatrième, l'insatiable ambition;
concédée , connaissez votre propre na- dans la cinquième, l'arrogance, l'au-
ture et considérez votre immortalité. dace et la témérité ; dans la sixième,
L'amour de la portion corporelle de le goût improhe des richesses mal ac-
vous-même sera cause de votre mort. quises ; et dans la septième le men- ,

Après ces paroles la Providence, selon songe. Et l'esprit , ainsi purifié par l'ef-
les lois des destinées et de l'harmonie fet de ces harmonies, retourne à l'état
des inondes, composa les mélanges si désiré, ayant un mérite et une force
d'éléments divers, et constitua les es- qui lui sont propres, et il habite enfin

Digitized by Google
ïtGYPTE. 14$
ïfttceux qui célèbrent les louanges du bre des philosophes y fut grand, sans
Père. Ils sont dès lors placés parmi compter les sophistes : aussi le grand-
les pouvoirs, et à ce titre ils jouissent prêtre de Cérès disait-il encore € O :

ie Dieu. Tel est le suprême bien de mon lils! quelles étranges lumières
feux à qui il a été donné de savoir , ils ont apportées sur la terre ces hommes
ifrôinent Dieu.» « Ayant parlé ainsi, célèbres qui prétendent s'être asservi
Pimanderretourna parmi les pouvoirs la nature et nue l'étude de la philo-
!

foins et moi je me mis à conseiller


, sophie serait humiliante, si, après
au tommes la pieté et la science. O avoir commencé par le doute, elle
bouiine* vivez sobrement , abste-
! devait se terminer par de semblables
nez -de gloutonnerie. Pourquoi
tous paradoxes. »
KXi> précipitez-vous vers la mort, puis- Finissons cet exposé sommaire et
se vous êtes capables d'obtenir l'im- imparfait des dogmes psychologi-
iBortaiité ? Fuyez les ténèbres de l'i- ques égyptiens, par un trait d'une
porance, retirez-vous de la lumière sublime invention. C'est parmi les
^ure, échappez à la corruption, ae- âmes sorties victorieuses de toutes les
yrez l'immortalité ! Conducteur et épreuves, parmi les ames les plus
<bd de la race humaine, je lui mon- pures, que Dieu choisissait ame des l

terai les voies du salut , et je remplirai rois. Si elles remplissaient dignement


«s oreilles des préceptes de la sa- cette nouvelle et difticile mission , en
gesse. » rendant les peuples heureux et en
A travers cet ensemble de mots étant pieux envers les dieux et envers
i une langue bien moderne employée les hommes, ces ames rentraient heu-
exprimer des idées très-vraisemnla- reuses dans le sein de la divinité, et
Nemeot fort anciennes, le lecteur voyaient Dieu pour l'éternité. Ce pré-
j Tj-t-jl puisé une notion précise des cepte de morale royale et populaire
Rimons renfermées dans ces débris, tout à la fois aidait les sujets dans
peut-être bien informes , des antiques leur respect pour le monarque, et
Dresde l'Hermès Trismégiste , qui, plaçait les devoirs du prince dans
jous ces noms grecs , représente dans son plus cher intérêt. Les prêtres lui
l'histoire des opinions humaines, celles rappelaient fréquemment l'un et l'au-
des primitifs philosophes de l'Egypte? tre , et cette éducation des princes, en
(
>n u'osrtrait dans ce cas
l'espérer, et harmonie avec leur croyance religieu-
'1nous sera permis de répéter aujour- se, pouvait être aussi fructueuse que
jl«y ce que le graud-pretre de Ceres toute autre idée tirée des considérations
J'^t à Anachar&is , au sujet de la de l'orgueil ou du pouvoir. Le grand-
Ihilosopbie de Pythagore. « L'obscu- prétre, qui rappelait au roi avec succès
»ue et les inconséquences que trouve ses futures béatitudes , était à la fois le
lecteur en parcourant ces écrits maître du prince et de l'état : s'il était
proviennent des ténèbres dont seront honnête homme, il méritait de jouir
toujours enveloppées les questions du bonheur qu'il promettait.
qiils traitent; de la diversité des D'après cet exposé des droits et
^teptions dans lesquelles sont pris des devoirs de la caste sacerdotale
les mots qui composent la langue phi- en Kgypte , y eut-il jamais au monde
îoso^himie; des couleurs dont les pre- une autre association d'hommes qui
ers interprètes de la nature revêti-
:ilj
égalât son crédit, sa puissance, et ca->
rent leurs dogmes; de la diversité des pahie, au même degré qu'elle , du bien
Rhodes introduites dans les éco- et du mal? N*n, jamais.: et celle-ci
let. »
Toutes les idées égyptiennes n'a été maudité que par ceux qui , je
Posèrent dans la Grèce, ou elles ne ne sais sous quelles modernes influen-
restèrent pas stériles. L'esprit prodi- ces, l'ont considérée comme l'ennemie
gieux et t'active imagination des Grecs de la science et des hommes.
exploitèrent avec une incessante acti- On esteonduitpartouteequi démon-
vité ce domaine des idées ; le nom- tre la haute inlluencede la caste sacerdo*

Digitized by Google
144 L'UNIVERS.
taie , à penser que les prêtres des dieux la forme mystique de sphinx &
des temples et des rois, devaient être d'insignes variés.
honorés par de pompeuses funérailles. Le second cercueil de la mon
Les monuments recueillis en Égypte l'hiérogrammate Soutimès
sont d'accord avec cette présomption. mait jadis le précédent ; les
Les plus riches cercueils, en bois peint qui décorent cette caisse s<
comme en matières dures, sont des tées avec plus de soin et de
cercueils de prêtres , et leurs momies que celles du premier cercuei
sont d'ordinaire enrichies de dorures remarque également le défunt
ou d'objets en or massif , plus abon- sant ses supplications aux dîet
dants quand le prêtre appartenait à à Chnouplus assisté de IVeïth
une classe plus élevée. On remarque ris, à Isis veuve, et à ^îephf"
au Musée du Louvre les riches cer- plorant la mort d'Osiris -
cueils de deux momies mâles; ils ont criptions contiennent le n<
appartenu à deux prêtres de Thèbes : titresde Soutimès , et une prit
le corps embaumé de chacun d'eux est censé adresser à la
était enfermé dans un double cercueil, monde céleste.
et n'est pas rare d'en trouver jus-
il . Uncartonnage de toile ;

qu'à trois, enfermés successivement vait de couvercle intérieur au


1 un dans l'autre, et tous les trois cercueil de la momie de l'hiéi
couverts de peintures religieuses par- mate Soutimès. Le scarabée du
faitement conservées et accompagnées décore la poitrine du défunt,
d'un très-grand nombre d'inscriptions sous est la déesse Netphé ( Rhéa,
hiéroglyphiques. Nous donnerons une d'Osiris) , les ailes déployées et U
idée de la magnificence de ces sépul- l'emblème de la vie. A droite \
tures par la description, mais soin- gauche, l'hiérogrammate adresse*
maire , de quatre cercueils sacerdotaux prières à divers dieux et déesse?,
du Louvre; ils sont tous les quatre deux colonnes verticales d'hiéra
en bois peint. Shes contiennent le nom et les ti
Le premier cercueil avait renfermé e Soutimès, et se terminent par
la momie d'un prêtre de Thèbes, chargé invocations à la déesse Netphé.
des offrandes faites à Ammon, à Mou- Le premier la mo
cercueil de
this-Neïth , à Khons et à tous les au- d'un autre hiérogrammate de 7h<
tres dieux des régions supérieures et est celui du nommé Poéris. Sut
inférieures, hiérogrammate, scribe des côté gauche du cercueil sont les scè
temples de Thèbes , nommé Soutimès. suivantes : 1° Le dieu Soou , souten
Le couvercle de ce cercueil offre l'i- le ciel par le secours du dieu Chi*
mage du défunt ayant les bras croisés phis, l ame du monde; à leurs pi
sur sa poitrine. Les peintures qui le est le dieu Sèv ( Saturne ) , couché,
couvrent, et qui sont d'une finesse dont les chairs sont de couleur ver
très- remarquable, représentent ce per- 2° le défunt Poéris , adorant les qua
sonnage, adorant successivement les génies des morts; au pied du cercu
dieux Phré ( le soleil ) , Chuouphis , la déesse Isis portant tes emblèmes
Osiris assisté d'Isis ou de Nephthys ; la vie, de la stabilité et du bonhei
divers animaux sacrés, et le dieu Osi- Sur le coté droit, 1° Osiris, assis si

ris se levant de son lit funèbre. Sur son trône et assisté de la déesse <

les pieds sont figurées les déesses Isis l'occident, reçoit de son (ils Hom
et Nephthys, pleurant la mort de leur accompagné du dieu Thoth , l'œil svn
divin frèrê Osiris. Toutes les parois bolique gauche 2° le défunt Poéri?
;

extérieures et intérieures de ce magni- adorant les quatre génies des mort*


fique cercueil sont couvertes de scènes Vers la téte du cercueil on a peint l
peintes, dans lesquelles le défunt adore déesse Nephthys Ptérophore. Le foix
successivement la plupart des divinités du coffre est occupé par une maffrn
égyptiennes, dessinées en pied, ou sous fique ligure en pied de la déesse Isis

Digitized by Google
ÉGYPTE.
< * |4*€Cond
cercueil de la momie de gnes sacrées. —
3* registre : l'Égypte
flftgrammate prêtre d'Amraon Poé- supérieure et l'Égypte inférieure^per-
sans couvercle. A l'extérieur, sonnifiées, adorant Osiris Sarapis, le
la téte , est peinte la déesse dieu de l'inondation. —
4' registre :

ys, entre deux symboles de le jeune dieu Horus et son Epervicr


Côté droit du cercueil: sacré. —y déesse Selk
registre : la
et Nephthys, adorant Osiris étendant ses ailes sur les pieds de la
2° le "défunt Poéris , à la
ur ; momie.
un
palais, contemple la scène 2° Un
autre cartonnage provenant
présentation de l'œil mystique, de la momie d'un prêtre d Ainmon
par les dieux Horus et Tlulth à nommé Afomoutliis. Au-dessus du
assisté de la déesse A menti et collier, richement peint, est 1* l'Kper-
Hcki ; 3° le défunt adore le vier criocephale du dieu Chnouphis, la
soleil, Phré, dans sa bari ou vais- téte surmontée du disque lunaire; 2*
que remorqué par des scha- une scène représentant le 2 e Hermès,
quatre divinités secondaires : Thôth, conduisant le défunt à Osiris
navigue sur le caractère ciel assisté d'isis et des quatre Génies des
au - dessus d'un serpent , e in- morts ; 3° l'Épervîer du dieu Phré ( le
du cours des planètes 4° Isis ; Soleil ), les ailes éployées ; 4* les dées-
thys, adorant leur frère Osiris ; ses Isis et Nephthys ptérophores; 5° les
er
déesse ISetphé, au pied de l'ar- Éperviers du 1 Hermès, affrontés;
ystique, nourrissant de son fruit 6° sur les pieds de la momie, les scha-
du défunt Poéris, et lui versant cals gardiens des deux hémisphères.
divin. Coté gauche du 3° Des scarabées funéraires avec des
e cercueil : 1° Isis, Osiris et noms de personnages de divers grades
ithys ; 2° scène déjà écrite , n* 1 de la caste sacerdotale.
premier cercueil (Sôou) ; 3° le ju- 4° Des images funéraires d'individus
gent de l'amedu défunt Poéris, le- du même ordre ; lesdites images en
est tiguré non loin de la balance, bois, terre émaillée, porcelaine, terre
nt sur sa main ses yeux et sa cuite ou serpentine, et rappelant par
he, comme pour attester la pureté leurs inscriptions les titres variés des
ses regards et de ses discours ; 4° personnes défuntes pour lesquelles ces
défunt adorant la vache mystique images furent faites, et ces images
Jt la déesse Hathôr, sortant d'une étaient renfermées dans des coffres pla-
Aontagne sur le flanc de laquelle est cés à côté des momies dans les tom-
te porte de l'hypogée qui devait rece- beaux. Enfin, il existe aussi, provenant
foir la momie' du défunt. des tombeaux de la caste sacerdotale,
Le musée royal possède aussi : des vases funéraires contenant les par-
J* un cartonnage de toilepeint, ayant ties intérieures des corps, séparées de
«ontenu la momie d'un Thébain, em- la momie et embaumées. On compren-
ployé dans la maison royale, nommé dra qu'en Egypte, comme dans tous
>Petof, et qualiGé de prêtre d'Ammon. les pays, toute la pompe des funérail-
fLe masque est dore. Au centre du les était surtout déployée pour la
collier est une image de la déesse caste qui dispensait sur la terre les
* Thmei ( la justice) ; au-dessous , le sca- bienfaits du ciel et les gages de la pro-
rabée du I' r Hermès déployant ses tection divine.
ailes ornées d'émaux. A droite et à Telle fut la caste sacerdotale en
pauche sont les emblèmes de la déesse Egypte. Elle posséda à la fois les hon-
Netphé (Khéa) et du dieu Scv ( Sa- neurs, le pouvoir et la richesse. A côté
turne). — 1
er
registre : le dieu Thôth, d'elle la loi de l'état avait placé la caste
a téte d'ibis, présente le défunt Pétof, militaire : essayons d'en laire connaî-
assisté de la déesse Amenti , au dieu tre l'antique constitution.
Phré assis sur son trône. — Dans
le 2* registre sont peintes 17 ensei-

10' Livraison. (Égtptb.) 10

Digitized by Google
140 L'UNIVERS.
$ XV. DES MILITAIRES. pas en ces régions de population no-
tante, sans feu ni lieu, inerte fa ou
Tous historiens de l'antiquité
les néante , à laquelle il oe restât d'à ut
donnent à la classe ou caste militaire ressource que celle de vendre sa vu
le second rang dans l'organisation so- son pays ; la loi avait donc déféré
ciale de l'Égvpte, et les monuments service militaire, comme unprivilé^
comme les écrivains déposent de sa à une classe de la nation, qu elle avî
puissance , et de son concours aux af- pourvue d'une dotation territorial*
faires commeà la défense de l'état. héréditaire œmme son office. Les É^rv
L'existence de cette caste puissante tiens pensaient qu'il était raisonnai
remonte aux premiers temps des éta- de remettre défense de l'état à cet
la
blissements civils de l'Egypte; sous qui possédaient quelque chose qu'
le gouvernement théorratique , elle avaient intérêt de protéger.
était aussi le second ordre de l'état ; On ignore d'après quelles règles U
elle devmt le premier quand les sol- produits de la dotation de cette casl
dats, las d'obéir à un pretre-roi, choi- étaient annuellement répartis entre h
sirent dans leurs rangs le plus illustre chefs de divers grades et les soldai
d'entre eux, rélevèrent sur le pavois, de diverses armes. La tradition autt:
et faisant succéder, dans l'exercice de rise à penser que la portion possède
l'autorité suprême, des hommes aux par chaque soldat n'était pas au-des
dieux, fondèrent les dynasties de rois, sous de six de nos arpents ( douz
etreconnurent Mènes comme chef du aroures); mais c'était plutôt l'habita
nouveau système de gouvernement. tion de sa famille et la sienne en temp
Ce fut alors que la théocratie vit rédui- de paix que sa solde en temps di
re son autorité jusque-là , souveraine, guerre. Une portion du revenu pu
en une influence presque aussi puis- blic était expressément affectée ain
sante, et qui, dans ses limites léga- dépenses de l'armée ; les terres mili-
les, lui laissait encore, même en ne taires étaient affranchies de toute im-
les dépassant pas, un pouvoir illimité position.
pour faire le bien. On a vu plus haut Au temps d'Hérodote, ces guerriers
quelle fut, après cette révolution mi- étaient connus sous deux dénomina-
litaire , la nouvelle position de l'ordre tions différentes : les Calasiries et
sacerdotal ; il la conserva jusqu'aux les Hermotvbies, suivant différents
les
derniers jours de la puissance égyp- nomes de I
Égypte d'où étaient ti-
ils

tienne. rés. Peut-être trouvera-t-on quelque


La constitution politique de la caste jour, de ces dénominations, une meil-
militaire reposait sur les mêmes bases leure explication que celle qu'en donne
3 ue celle de l'ordre des prêtres ; avec notre historien. Il a recueilli la nomen-
'autres devoirs, elle avait été dotée clature des nomes qu'habitaient les
des mêmes droits , elle tenait au sol Hermotvbies, dont le nombre s'élevait
par la propriété. Elle était une portion jusqu'à cent soixante mille ; les Cala-
considérable de la nation ; chargée de siries, qui résidaient dans d'autres
la défense de l'état, elle veillait à sa nomes , fournissaient jusqu'à deux
silreté pendant que les prêtres instrui- cent cinquante mille hommes : leurs
saient les peuples, invoquaient les possessions étaient aussi bien plus
dieux, et que la caste industrieuse se- considérables que celles des premiers.
condant la fertilité du sol , et prati- Ces nombres u hommes indiqués par
quant tous les arts utiles, assurait la Hérodote sont ceux des soldats égyp-
subsistance de tous, et fournissait à tiens, quand la population militaire
tous les besoins de la vie, à tous les de- de l'Egypte était dans un état très-
sirs d'une civilisation avancée. Srospère; car l'armée, par sa consti-
L'idée de troupes nationales ou trou- Jtion, était soumise à tous les désa-
pes soldées n'était pas venue à l'es- vantages des variations inévitables
prit des sages de l'Egypte ; il n'y avait dans Pétat de toutes les populations.

Digitized by Google
>TE. 147

Les nombres donnés par Hérodote, chus I* s'était particulièrement allié


a dont indique une armée de
le total avec les Ioniens et les Cariens ; il per-
jyiatre cent dix mille hommes, ne mit aux commerçants de ces deux na-
«appliquent peut-être qu'aux temps tions grecques établies en Asie, de se
Bénie de l'historien. A cette époque, fixer en Égypte, il leur concéda des
'Égypte avait subi d'affreuses inva- terres, et prit à sa solde un corps
sions, celles des Ethiopiens et celles très-considérable de leurs troupes. La
les Perses; les prospérités de l'Égypte caste militaire égyptienne vit dans
traient sensiblement décliné, et les cette mesure une violation flagrante
Seinpsde sa décadence approchaient. de ses privilèges, s'irrita de ce que le
Vu jour de sa splendeur, sous ses rois roi confiait a des étrangers encore
k ladix-huitieme dynastie, la popula- barbares la défense de la terre sacrée;
tion militaire, proportionnelle à celle et l'irritation de cette caste fut portée
le l'É£ypte entière, devait être bien à son comble quand elle vit les pre-
[Aus considérable, et par l'effet naturel miers postes de l'armée occupés par
îles lois de l'institution militaire. Aussi ces Grecs. Cent mille soldats quittè-
Strabon portait-il plus qu'au double du rent spontanément la garnison où le
nombre donné par Hérodote, celui des roi les avait à dessein rélégués, et ils
soldats sous dont les tombeaux
les rois allèrent former un établissement au-
existent encore à Thèbes. L'Égypte, delà des cataractes.
long temps environnée de nations in- Plus de vingt siècles avant l'ère
cultes et barbares, dut avoir, pour sa chrétienne , des barbares venus de
vlreté, sur toutes ses frontières, de l'Orient fondirent comme un torrent
puissants établissements militaires. La sur T Égypte, se jetèrent dans Aouara,
plupart de ses guerres furent défen- campement fortifié, non loin des lacs
des. Les tribus nomades, les nations amers vers la mer Rouge, et s'y main-
voisines, attirées par ses richesses et tinrent pendant près de trois 'siècles.
la fertilité de l'Egypte, la menaçaient Un blocus qui dura plusieurs années
incessamment ; et* plusieurs fois elle et les efforts successifs de deux rois
fat impuissante pour leur résister. illustres furent nécessaires pour les
Kl le faisait garder sa frontière d'É- chasser de cette place de guerre.
thiopie par ses forces réunies à Élé- Aux environs de Thehes, dans la
phant! ne , celles d'Arabie par les gar- plaine rocailleuse qui s'étend vers la
nisons de Daphné, qui défendaient PÉ- chaîne lihyque, existe encore une en-
iivpte contre les Arabes et les Syriens, ceinte d une grande étendue, assise
et celles de la Libye des Grecs, par ses sur des monticules factices, et entou-
troupes réunies a Maréa. Péluse était rée de larges fortifications. Ce fut aussi
aussi une place considérable et la clef un établissement militaire, un camp
de l'Égypte à l'orient; enfin, des camps ftermanent occupé par les troupes de
retranches subsistaient aussi sur divers a garnison de Thèbes et la garde des
points de l'Égypte. Le service , dans Pharaons.
ces stations militaires ou dans les gar- Cent llermotybies et cent Calas i-
nisons des villes frontières, était tem- ries composaient cette garde , chaque
poraire et successivement déféré aux jour sans doute; et tous les corps
divers corps de l'armée; ce service de l'armée étaient à tour de rôle char-
actif était fixé à deux années, et il gés de fournir cette garde pendant une
arriva, sous le roi Psammétichus, que année, afin que tous, sans exception,
lestroupes stationnées à Éléphantme pussent profiter des avantages que pré-
désertèrent en Ethiopie et s'y fixèrent, sentait le service auprès de la famille
parce qu'elles étaient dans cette garni- royale. Ceux qui le faisaient recevaient,
son depuis trois ans, et que Te roi en etiet, outre leur part dans le pro-
avaitnégligé de les faire relever. duit de la dotation territoriale, cinq
On dit aussi nue cette émigration livres de pain, deux de viande et deux
eut un plus noble motif. Psamméti- mesures de vin chaque jour. On se
10.

Digitized by Google
148 L'UNIVERS
proposait par ces largesses de porter ils lançaient des flèches contre l'ennemi
le soldat à se marier, afin de main- ou le frappaient de la hache de ba-

tenir au taux désiré la population de la taille. On les vit au milieu de la mêlée

caste militaire. encourager l'armée par leur exemple,


On porte à un taux moyen de 180 et concourir ainsi à la conquête de la
mille nommes la force ordinaire de victoire. Un lion apprivoisé et éduque
l'armée égyptienne en temps de paix pour les combats, suivait ordinaire-
mais on ignore les détails et les pro- ment ou précédait le char du roi.
portions de sa composition. Si l'on Il n'y eut point de troupes de cava-

interroge les sources les plus authen- lerie proprement dite : cette opinion
tiques, c'est-à-dire les monuments est tirée du témoignage unanime des
contemporains des anciennes époques monuments et des tableaux militaires.
de l'histoire égyptienne, on distinguera L'usage de monter et de guider le*
facilement les diverses espèces de chevaux n'était pas inconnu , mais il
troupes qui composaient ces armées. n'était pas employé dans l'armée ; on
D'abord les combattants en char, né- a remarqué dans deux ou trois bas-
cessairement en moindre proportion reliefs historiques, un homme monté

Sue les autres armes.


Chaque char à sur un cheval qui court à toutes jam-
eux roues , ouvert par le fond et at- bes. Mais dans un de ces bas-reliefs,
telé de deux chevaux , était monté par l'homme à cheval est un courrier por-
un combattant armé de flèches ou de tant en toute hâte une lettre qu'il tient
haches ; il avait à sa gauche, debout dans sa main ; et dans l'autre bas-
à côté de lui, un cocher chargé de relief, la physionomie de l'homme
gouverner les chevaux. Le surplus de monté est celle d'un étranger qui cher-
Farinée était formé de fantassins ; les che son salut dans la vitesse de son
uns, les soldats de ligne, étaient armés cheval, sans harnais, sur lequel il s'est
d'une cuirasse, d'un bouclier, d'une jeté. Ainsi les bas-reliefs historiques
lance ou d'une hache et de l'cpée; observés jusqu'ici en Éçyptc, et ils
les autres étaient des troupes légères, sont en fort grand nombre et d'épo-
composées de compagnies d archers, de ques diverses, prouvent que les trou-
frondeurs et d'autres soldats portant la pes de cavalerie furent inconnues dans
hacheoû la faux de bataille {yoy.pl. 16). l'Egypte, et n'entrèrent pas dans la
Les troupes se mouvaient selon des composition de son armée.
manœuvres régulières, marchaient ou Toutefois , une tradition antique et
manœuvraient par légion ou par com- révérée semblerait contredire haute-
pagnie , et les évolutions s'exécu- ment cette conclusion tirée des mo-
taient au son du tambour ou de la numents. Cette tradition remonte
trompette. au temps de Moïse. Il raconte, au cha-
Le roi était le chef suprême de l'ar- Çitre XIV de l'Exode, la marche des
mée ; il déléguait à ses fils , à des sraélites à leur sortie d'Egypte et le
princes de sa race ou aux fils des fa- passage de la mer Rouge. Aussitôt que
milles les plus marquantes, le comman- le Pharaon fut informé que les Hébreux
dement des différents corps ou des diffé- avaient pris la fuite, dit la Bible, il

rentes divisions des forces nationales. attelleson char de guerre et se fait


Comme partout ailleurs , la hiérar- suivre par tout son peuple; il prend
chie de l'autorité procédait de celle des six cents chariots choisis et tous les
grades. Des rois guerriers comman- chars de l'Égypte, et les chefs sur
èrent eux-mêmes de lointaines expé- eux tous. Jusqu'ici la tradition est
ditions, et prirent, par leur présence, conforme aux monuments mais pres- ;

une part active à toutes les circon- que aussitôt le texte sacré dit : « Les
stances comme à toutes les fatigues Égyptiens se trouvèrent bientôt près
de la guerre. Montés sur un cnar, du camp d'Israël , sur le bord de la
excortés par leur garde et par les prin- mer, et toute la cavalerie et les cha-
cipaux officiers , armés de pied en cap, riots du Pharaon, avec toute son *r-

Digitized by Google
Digitized by Google
< *
» •

• • • •
• > • • • • • •
•• • •

»•a •

Digitized by Google
>
• • » •
• • • • » • •

• • •
• • • • • •

• a • •
• • •
• • •



• • »4 •
• ••• . • • •
• • •>• m
• • -• • - • -
• • • »

ed by Google
,EGYP1 EN. EGYPTE

Iraneport eines Coloas Gymnas :i


1 k IlepcHO,»'*. bcjiwkama m rnnMicmaxi.

Digitized by Google
ÉGYPTE. 149

mée, s'arrêtèrent à Pihahiroth.» Plus moins variés; l'éducation du soldat


bas , Dieu doit être glorifié dans Pha- était longue et sérieuse, et depuis le
raon , dans son char et dans sa cavale- tête à droite , jusqu'à la petite guerre,
rie ; enfin , poursuivant les Israélites ilen parcourait tous les degrés sous
sur le fond de la mer, qu'ils viennent l'autorité d'une discipline sévère. Du
de traverser à pied sec, le Pharaon s'y reste , il en prenait de bonne heure le
engage avec toute sa cavalerie, ses §oût et les habitudes : tous les mâles
chariots et ses chevaux , qui furent en- e la caste militaire étaient de vérita -

veloppés parles Ilots, et y périrent tous. bles enfants de troupe; la loi leur
— Cette mention si souvent répétée défendait toute autre profession.
de la cavalerie égyptienne n'infirme Les grandes pages historiques dont
cependant pas l'autorité des monu- les surfaces des monuments égyptiens
ments ; et en se tenant plus près des sont ornées, nous enseignent aussi
textes originaux, on y trouverait men- tous les détails des camps. Une palis
tionnés plutôt des cavaliers que de la sade en formait l'enceinte ; un peloton
cavalerie; les mots du verset 23 disent de fantassins en gardait l'entrée; la
que les Égyptiens suiv irent les Hébreux, tente du roi ou du chef était au point
et entrèrent après eux, tous les chevaux opposé à l'entrée; de petites tentes,
de Pharaon , son char et ses cavaliers, destinées aux officiers principaux,
c'est-à-dire les hommes montés sur les étaient dressées près de la première ;
chars de guerre. Avec cette modification le lion apprivoisé du roi était tout au-
dans l'acception des mots, la tradition près, accroupi, les deux pattes de de-
historique ne sera plus contredite par vant liées ensemble, et surveillé par
les monuments qui, soit antérieurs, un gardien armé d'un long bâton.
soit postérieurs à Moïse, rendent con- Les chevaux et les ânes sans harnais
stamment le même témoignage contre étaient symétriquement rangés du côté
l'usage des corps de cavalerie dans l'ar- de l'entrée; les fourrages leur étaient
mée egvptienne. Aussi , dans leur can- distribués, soit à terre, soit dans des
tique dictions de grâces, les Hébreux mangeoires; les chars, en files réguliè-
ne parlent-ils que des chars du Pharaon res, étaient dans la partie opposée. Dans
tombés, comme une pierre, au fond les intervalles libres,on plaçait les ba-
des eaux. gages et harnais, ceux des chevaux
les
On tirera la même conséquence des Sour les atteleraux chars; ceux des
notions assez positives, et des mêmes nés, comme pour des bêtes de char-
temps, qui nous sont parvenues au su- ge , consistaient en un bât , auquel sont
jet de l'éducation de la caste militaire. attachés deux paniers ou autres usten-
Parmi les exercices variés qui fout siles propres au transport des vivres
partie de cette éducation , et qui sont et des liquides.
figurés sur de nombreux monuments, Sur la droite du camp étaient les
on ne retrouve aucune idée de l'équi- hommes valides, se livrant aux exer-
tation. Tous ces exercices se font à cicesou aux amusements que conseil-
pied , et sont dirigés selon les précep- lait règle ou le loisir; les recrues
la
tes de la gymnastique la plus perfec- sont instruites dans les manœuvres ;
tionnée. Rien n'est plus varié que les les anciens jouent, joutent ou se
poses et les attitudes des lutteurs querellent; plus loin l'ordonnance mi-
attaquant , se défendant , reculant et litaire est mise à exécution, et un in-
avançant tour à tour, se baissant, ou subordonné subit la peine à laquelle il
renversés , se relevant , et triomphant a été condamné; des officiers en char
de l'adversaire par la force , la ruse ou à pied inspectent partout et don-
et l'adresse. Dans ces exercices, les nent des ordres gui sont écoutés avec
lutteurs étaient nus; une large cein- attention, et exécutés vraisemblable-
ture soutenait et favorisait leurs ef- ment de même.
forts ( voy. pl. 32 ). Les exercices mili- Sur la gauche du camp étaient les
taires proprement dits n'étaient pas hôpitaux et les ambulances ; les che-

Digitized by Google
150 L'UNIVERS.
vaux et les ânes malades y étaient sieurs substances solides en forme de
réunis ; des vétérinaires les soignaient gaines, et fermés avec un couvercle
et les pansaient; enlin, on voit à l'angle orné d'une téte de lion dorée; des
droit de ce même côté, les soldats fouets, des cravaches de combat de
malades auxquels l'infirmier adminis- formes assez différentes ; enfin , de
tre une potion qu'ils boivent avec em- belles côtes de mailles en métaux assor-
pressement. Les exercices des chars tis. Ces curieux objets militaires peints
et les manœuvres des corps de fantas- dans ce tombeau représentent sans
sins se passaient autour de la palissade nul doute des objets d'armement à
en dehors du camp. l'usage de l'armée dans l'antique
C'est à ces deux espèces d'armes seu- Égynte.
lement qu'il nous paraît que les Égyp- Chaque corps avait aussi son en-
tiens se bornèrent dans la composition seigne , et c'est dans ce même tombeau
de leur armée. Toutefois les corps de qu'on a retrouvé plusieurs types de ces
fantassins furent variés, et si nous nous signaux égyptiens; ils étaient placés à
en rapportons au témoignage des mo- l'extrémité d'une grande hampe qui
numents, nous y reconnaissons : l°des par son élévation , les rendait visibles
soldats portant un bouclier qui couvre a tous les yeux. Les enseignes étaient,
leur corps de la ceinture à la tête, ar- comme on devait le penser, empruntées
més d'une lance dans la main droite à la religion. Les unes consistaient
d'une courte hache dans la gauche , et dans la coiffure même et les insignes
couverts d'une courte tunique, ceux-ci caractéristiques des divinités représen-
marchent en colonne serrée et for- tées sous forme humaine, telles que
maient le gros de l'armée; 2° des sol- Ammon, Phtha, Osiris ou Isis; d'au-
dats composant sans nul doute les tres substituaient aux traits humains
troupes légères, portant de la main gau- du dieu ou de la déesse, la téte de l'a-
che un petit bouclier rond, de la droite nimal qui était son emblème vivant,
la harpé, ou sabre recourbé garni tel que l'épervier, le lion, et quelque-
d'un manche; leur tête était couverte fois même la figure complète de ce
d'un casque en cuir ou en métal diver- symbole , comme l'ibis et le schacal.
sement orné à son sommet ; 3° les ar- Avec les ressources d'une population
chers proprement dits, habilles de militaire aussi nombreuse, et le perfec-
longues tuninues, portaient un arc tionnement successif qu'elle acquit
triangulaire de grande dimension et dans l'art de la guerre, par l'étude
un énorme carquois sur l'épaule. et par la pratique , l'Egypte était en ce
Dans les marches de l'armée , les point aussi avancéequ'ait pu l'être toute
chars de guerre étaient à l'avant , à autre nation ancienne ou moderne,
l'arrière et sur les lianes; au centre, tant que l'usage des armes à feu fut
les fantassins pesamment armés inconnu ; et ceux qui , d'après une
protégés par leur grand bouclier; et opinion irréfléchie, disent et répètent
les troupes légères à l'avant-garde et que la nation égyptienne ne fut pas guer-
sur tous les points menacés. rière , parce qu'ayant plutôt étendu sa
L'n chef militaire a fait orner son tom- domination par (les colonies que par
beau de tous les instruments de sa pro- des conquêtes , elle n'eut pas l'avan-
fession ; ce tombeau a été étudié par des tage d'aguerrir ses soldats par les ba-
voyageurs modernes , qui ont eu la sa- tailles; ceux- la n'ont point étudié les
tisfaction d'y reconnaître un arsenal monuments où sont retracés en uu
antique tout entier plusieurs faisceaux
: nombre infini d'actions les faits mili-
de longues piques, des casques de taires de l'antique histoire de l'Egypte.
formes différentes et diversement or- Nous avons deja dit qu'environnée de
nés d'inscrustations en métaux ou en peuplades nombreuses, elle dut être
matières précieuses; des poignards habituellement sous les armes pour dé-
longs et droits dans leur fourreau et fendre ses richesses et sa civilisation
non moins ornés; des carquois de plu- contre leurs entreprises , et qu'obligée

gitized by Googl
EGYPTE .
< «
t • • 4

- • » * « ; , » »

Digitized b)
. - •

. •

Digitized by Google
Digitized by Google
ÉGYPTE. 151

diverses , et Ton peut


victoires pour se garantir contre s plus modernes, la commé-
de nouvelles invasions, elle porta ses înoraison des campagnes du roi Séson-
armes très-loin au-delà des frontières chis, sculptées sur une partie du palais
de r Egypte , vers Test et le midi. Ses de Karnac à Thebes. On y voit ce roi,
armées combattaient en rase campa- traînant enchaînés aux pieds de la tri-
gne dans les bois et les défilés pas-
, ,
ni te thébaine, les chefs de plus de trente
saient les rivières, assiégeaient les nations vaincues , parmi lesquelles li-
villes et les forteresses, les réduisaient gure très -distinctement loudahama*
par la tortue et le bélier , ou par l'es- Jek , le royaume de Juda ou des Juifs
calade ; et elles ajoutaient à leur force personnifie ; et la Bible rapporte , au
et à leur courage le secours de ma- chapitre 14 du 111* livre des Rois , que
chines diverses, offensives et défensi- le pharaon Sésonchis, nommé Sches-
ves , et dont quelques-unes lançaient chouk par les Égyptiens, et par la Bible
virement , et a une grande distance Sèsac ou Schéschôk , prit Jérusalem
an certain nombre à la fois de flèches dans la 5« année du règne de Roboam :
ou de javelots. c'est cette même victoire de Sésonchis
A tous ces détails il serait peut-être ui est représentée dans les bas-reliefs
possible d'en ajouter quelques autres, 3 e Karnac; et d'après la fidélité de phy-
non moins minutieux, et déduits de sionomie que les Égyptiens apportaient
l'examen attentif des scènes militaires dans la représentation des peuples étran-
dont les monuments nous présentent gers , cette figure du royaume de Juda
l'aspect infiniment varié; cette nomen- peut être considérée comme un type de
clature aurait sans doute son mérite la physionomie du peuple juif au X*
archéologique : mais il nous est permis siècle avant l'ère chrétienne , et peut-
d'espérer que l'intérêt et la satisfaction être comme un portrait de Roboam lui-
des lecteurs seront plus sûrement exci- même.
tés par des descriptions exactes de Sésostris régnait six siècles avant
l'ensemble de ces scènes éminemment le vainqueur de Juda ; les vastes parois
historiques dont on a décoré les grands de la grande salle du temple d'iosam-
monuments de l'Egypte de ces com-; boul sont couvertes des représentations
positions immenses qui méritent à tant qui rendent témoignage des nombreu-
de titres la dénomination de tableaux ses victoires de ce prince illustre, en
homériques , d'œuvres de la sculpture Asie et en Afrique ; en voici un abrégé
héroïque , parce qu'ils sont pleins de pris sur une partie de ce grand temple
ce feu et de ce désordre sublime oui (ou spéos , temple creusé dans la
nous entraînent si fort à la lecture des montagne) :

er
batailles de l'Iliade. On Ta
déjà remar- 1 tableau. Rhamsès- le -Grand est
qué : chaque groupe de ces vastes sur son char, les chevaux sont lancés
compositions, considéré à part, sera au grand galop ; il est suivi de trois de
jugé certainement défectueux dans quel- ses montes aussi sur des chars de
fils

ques points relatifs à la perspective, guerre; il met en fuite une armée as-
ou à ses proportions, comparativement syrienne et assiège une place forte.
aux parties voisines ; mais ces défauts 2\ Le roi à pied , venant de terras-
de détail sont rachetés, et au-delà, ser un chef ennemi , et en perçant uu
par l'effet des masses ; c'est, on peut second d'un coup de lance. Ce groupe
le dire , comme les plus beaux vases est d'un dessin et d'une composition
grecs peints , représentant des com- admirables.
e
bats , qui pèchent aussi, si péché il y 3 . Le roi est assis au milieu des
a, s tus les mêmes rapports que les bas- chefs de l'armée ; on vient lui annon-
reliefs égyptiens. cer que les ennemis s'avancent pour
Des scènes de cet ordre ont été ob- l'attaquer. On prépare le char du roi
servées sur tous les grands monuments et des serviteurs modèrent l'ardeur des
de l'Égypte ; elle appartiennent à des chevaux , qui sont dessinés , ici comme

Digitized by Google
1S2 L'UNIVERS.
ailleurs, dans Plus loin se
la perfection. prince, lui présente un groupe de
voit l'attaque des ennemis , montés sur prisonniers arabes asiatiques. Plus
des cliars de guerre et combattant loin , le pharaon est représenté comme
sans ordre une ligne de chars égyptiens vainqueur , frappant lui - même un
méthodiquement rangés. Cette partie homme de cette nation, en même
du tableau est pleine de mouvement et temps que le prince ( Sésostris ) lui
d'action : c'est comparable à la plus présente les chefs militaires et une
belle bataille peinte sur les vases grecs, foule de prisonniers. Le roi , sur son
que ces tableaux nous rappellent invo- char , poursuit les Arabes , et son ûls
lontairement. frappe de sa hache les portes d'une
4«. Le triomphe du roi et sa ren- ville assiégée; le roi foule aux pieds
trée solennelle (a Thèbes , sans doute), les Arabes vaincus, dont une longue
debout sur un char superbe, traîné file lui sont amenés captifs par le
par des chevaux marchant au pas et rince son fils : tels sont les tableaux
C
richement caparaçonnés. Devant le istoriques décorant la paroi de gau-
char , sont deux rangs de prisonniers che de ce qui formait la salle princi-
africains , les uns de race nègre et les pale du monument, en supposant
autres de race barabra , formant des aue cette portion du spéos ait jamais
Sroupes parfaitement dessinés , pleins été couverte.
'effet et de mouvement. « La paroi de droite présente les
e
et 6 . Le roi faisant hommage de détails de la campagne contre les
captifs de diverses nations aux dieux Éthiopiens, les Bischari et des Nè-
de Thèbes et à ceux d'Ibsamboul. gres. Dans le premier tableau , d'une
Des monuments de la gloire du grande étendue, on voit les Barbares
père de Sésostris existent aussi dans en pleine déroute, se réfugiant dans
un autre lieu de la Nubie. Champol- leurs forêts, sur les montagnes, ou
lion le jeune, qui Ta explorée au mois dans les marécages. Ce second ta-
de janvier 1828, en donne la descrip- bleau , qui couvre le reste de cette
tion en ces termes : paroi , représente le roi assis dans un
« Près de Kalabschi est l'intéres- naos et accueillant , avec un geste de
sant monument de Bet-Oually, qui la main , son fils aîné ( Sésostris) , gui
nous a pris les journées des 28 , 29 lui présente, 1° un prince éthiopien
30 et 31 janvier jusqu'à midi. Là mes nommé Aménémoph fils de Poéri,
yeux se sont consolés des sculptures soutenu par deux de ses enfants, dont
barbares du temple de Kalabschi une coupe comme pour
l'un lui offre
qu'on a faites riclies parce qu'on ne lui donner la force d'arriver au
savait plus les faire belles, en contem- pied du trône du père de son vain-
5 tant les bas-reliefs historiques qui queur; 2° des chefs militaires égyp-
écorent ce spéos d'un fort beau style
, tiens; 3* des tables et des buffets cou-
et dont nous avons des copies com- verts de chaînes d'or et avec elles des
plètes. Ces tableaux sont relatifs aux peaux de panthère ; des sachets ren-
campagnes contre les Arabes et des fermant de Por en poudre, des troncs
peuples africains, les Kouschi (les de bois d'ébène, des dents d'éléphant,
Ethiopiens), et les Schari qui sont des plumes d'autruche, des faisceaux
probablement les Bischari a'aujour- d'arcs et de flèches , des meubles pré-
d'hui; campagnes de Sésostris dans cieux et toutes sortes de butin pris
sa jeunesse et du vivant de son père sur Pennemi ou imposé par la con-
comme le dit expressément Diodore quête; 4° à la suite de ces richesses,
de Sicile qui, à cette époque, lui fait marchent quelques Bischaris prison-
soumettre en effet les Arabes et pres- niers, hommes et femmes, l'une de
que toute la Libye. celles-ci portant deux enfants sur ses
« Le roi Rhainsès père de Sésos- ,
épaules et dans une espèce de couffe ,
tris, est assis sur son trône dans un suivent des individus conduisant au
naos, et son lils, en costume de roi des animaux vivants, les plus cu-

)igitized by Google
EGYPTE JÔ3

rieux de l'intérieur de l'Afrique, le prudence et de n'avoir pas écouté


lion , la panthère , l'autruche , des lorsqu'on leur disait : « Voici que le
sinçes et la girafe , parfaitement des- lion s'approche de la terre d' Ethiopie
sines, etc., etc. On reconnaîtra là, ( Kousch ). » Ce lion - là était le roi
j'espère, la campagne de Sésostris Horus qui fit la conquête de l'Éthiopie
contre les Éthiopiens, lesquels il força, et dont le triomphe est retracé sur les
selon Diodore de Sicile encore, de bas-reliefs suivants.
payer à l'Égypte un tribut annuel en Le roi vainqueur est porté par des
or, en ébèné et en dents d'éléphant. chefs militaires sur un riche palan-
Les autres sculptures du spéos sont quin , accompagné de flubellifères. Des
toutes religieuses, et de nombreuses serviteurs préparent le chen in aue le
inscriptions contemporaines de ces cortège doit parcourir; à la suite du
précieuses représentations militaires Pharaon viennent des guerriers con-
les accompagnent et en expliquent les duisant des chefs captifs; d'autres
sujets.» soldats, le bouclier sur l'épaule, sont
Le spéos de Silsilis commencé par
, en marche , précédés d'un trompette ;
le roi Horus, de la XVIII - dynastie, un groupe de fonctionnaires égyp-
en fournit plusieurs autres exemples. tiens , sacerdotaux et civils , reçoit le
Cette belle excavation devait être d'a- roi et lui rend des hommages.
bord un temple dédié à Ammon- La légende hiéroglyphique de ce ta-
Ka, ensuite au dieu Nil, divinité du bleau exprime ce qui suit : « Le dieu
lieu, et au dieu Sevek (Saturne àtéte gracieux revient ( en Égypte ) , porté
de crocodile), divinité principale du par les chefs de tous les pays ( les No-
nome Ombite, auquel appartenait Sil- mes ) ; son arc est dans sa main
silis. Cest dans cette intention qu'ont comme celui de Mandou , le divin sei-
été exécutés, sous le règne d'Horus, gneur de l'Égypte; c'est le roi direc-
les sculptures et les inscriptions de la teur des vigilants, qui conduit (cap-
porte principale, tous les bas-reliefs tifs ) les chefs de la terre de Kousch
du sanctuaire, et quelques-uns de ceux (l'Éthiopie), race perverse; ce roi
qui décorent une longue et belle ga- directeur des mondes, approuvé par
lerie transversale qui précède ce sanc- Phré , fils du soleil et de sa race , le
tuaire. serviteur d'Ammon , Horus, le vivifi-
Cette galerie, très-étendue, forme cateur. Le nom de sa majesté s'est
un véritable musée historique. Une fait connaître dans la terre d'Éthiopie
de ses parois est tapissée dans toute que le roi a châtiée conformément aux
sa longueur de deux rangées de cran- paroles que lui avait adressées son
dés stèles ou de bas-reliefs sculptés père Ammon. »
sur le roc, et, pour la plupart, d'é- Ln autre bas- relief représente la
Qies diverses; des monuments sem- conduite, par les soldats, des prison-
les décorent les intervalles des niers du commun en fort grand nom-
cinq portes qui donnent entrée dans bre ; leur légende exprime les paroles
ce curieux muséum. suivantes qu ils sont censés prononcer
Les plus anciens bas-reliefs, ceux dans leur numiliation : « O toi ven-
du roi Horus, occupent une portion geur! roi de la terre de Kémé (l'É-
de la paroi ouest : le Pharaon y est gypte ) , soleil de Niphaïat ( les peuples
représenté debout, la hache d'armes libyens), ton nom est grand dans la
sur recevant d'Ammon-Ra
l'épaule, terre de Kousch (l'Éthiopie), dont
l'emblème de divine et le don
la vie tu as foulé les signes royaux sous tes
île subjuguer le nord et de vaincre le pieds! »
midi. Au-dessous sont des Éthiopiens, Maisc'est à Thèbes, la ville des
les uns renversés, d'autres levant des merveilles , que ces tableaux militai-
mains suppliantes devant un chef res sont surtout exécutés sur de vas-
égyptien qui leur reproche, dans la tes proportions. Au Memnonium, ou
légende, d'avoir fermé leur cœur à la plutôt au Rhamesséum, élevé par

Digitized by Google
154 L'UNIVERS.
Rhamsès-Sésostris, au grand dieu de l'image d'une série de forteresses, des
Thèbes Ammon-Ra, les tableaux mi- quelles sortent des Égyptiens enime
litaires, relatifs aux conquêtes du roi, nant des captifs : les fégendes sculp
couvrent les faces des deux massifs tées sur les murs de chacune d'elle
du pylône sur la première cour du donnent leur nom, et apprennent qu
palais ; ils sont visibles en assez grande Rhainses- le -Grand les a prises d
partie, parce que réboulement des vive force, la huitième année de soi
portions supérieurs du pvlone a eu règne.
lieu du côté opposé. Ces scènes mili- Près de là on trouve un grand ta
taires offrent la plus grande analogie bleau de guerre, mais qui se partagt
avec cel es qui sont sculptées dans
t en deux parties principales : dans ui*
Tintérieui du temple d'Ibsamboul et vaste plaine, le roi Rnamsès vient de
sur le pylône de Louqsor, qui font vaincre les Schéto, qu'il a mis en pleine
partie duRhamesséum orienta! de Thè- déroute. Deux princes sont à la pour-
bes. Les inscriptions sont semblables suite de l'ennemi ; ces fils du roi se
et tous* ces bas-reliefs se rapportent nomment Mandouhi Schopsh et Schat-
évidemment à une même campagne hemkémé : c'étaient le 4T et le 5' des
contre des peuples asiatiques qu'on ne enfants de Rhamsès. Les vaincus sont
peut, d'après leur physionomie et d'a- encore des peuples de Schéto ( des
près leur costume, chercher ailleurs Bactriens?); ils se dirigent vers une
que dans cette vaste contrée sise en- ville placée à l'extrémité droite du
tre le Tigre et l'Kuphrate d'un côté, tableau, où s'ouvre une nouvelle scène.
l'Oxus et l'Indus de l'autre, contrée Quatre autres fils du conquérant , les
e e e
que nous appelons assez vaguement 7 , 8 , 9' et 10 de ses enfants, appelés
la Perse. Cette nation, ou plutôt le Méïamoun, Amenhemwa, Noubtei et
pavs qu'elle habitait, se nommait Setnanré, sont établis sous les murs
C/ito, Chcto, Schéto ou Schto. Les de la place ; les assiégés opposent une
Égyptiens désignèrent ces peuples en- vigoureuse résistance; mais déjà les
nemis sous la dénomination de la plaie Égyptiens ont dressé les échelles, et
de Schéto, de la même manière que les'murailles vont être escaladées. Une
TÉthiopie est toujours appelée la mau- fracture a malheureusement fait dis-
vaise race de Kôusch , et tout porte à paraître la première partie du nom
croire fermement que c'est de peuples de la ville assiégée : il finissait par....
du nord -est de la Perse, des Bac- apouro.
triens ou Scythes- Bactriens, qu'il s'a-
, Quelquefois les représentations des
git ici. hauts faits militaires des rois égyp-
Ona sculpté sur le massif de droite tiens s'exprimaient emblématiqiie-
la réception des ambassadeurs scytho- ment ; c'était comme des trophées éle-
baetriens dans le camp du roi ; ils vés ii leur gloire , et pour ainsi dire
sont admis en la présence de Rham- consacrés par la religion. Aussi dans
sès, qui leur adresse des reproches; les le vaste édifice de Medinet-IIabou,
soldats, dispersés dans le camp, se qui est à la fois un temple et un palais,
reposent ou préparent leurs armes, on remarque dans l'intérieur de la
et donnent des soins aux bagages ; en petite cour deux massifs de pylônes
avant du camp, deux Égyptiens admi- ornés, ainsi que les constructions nui
nistrent la bastonnade a aeux prison- les unissent au grand pavillon, de fri-
niers ennemis , afin , porte la légende ses anaglyphiques portant la légende
hiéroglyphique, de leur faire dire ce du fondateur Rhamscs-Méïamoun , et
que fait la plaie de Schéto. Au bas de bas -reliefs d'un grand intérêt
du tableau, est l'armée égyptienne en parce qu'ils ont trait aux conquêtes de
marche, et a l'une des extrémités se ce Pharaon.
voit un engagement entre les chars des La face antérieure du massif de
deux nations. droite est nresque entièrement occupée
La partie gauche de ce massif offre par une ligure colossale du conqué-

Digitized by Google
ÉGTPTE. 155

rant levant sa hache d'armes sur un Le grand du pays de Pa (le


groupe de prisonniers barbus dont sa reste est détruit).
maiu gauche saisit les chevelures ; le Sur l'épaisseur du massif de gauche,
dieu Amon-Ra, d'une stature tout Rhamsès-Méïamoun casqué, le carquois
aussi colossale, présente au vainqueur sur l'épaule , conduit des groupes de
la harpe divine en disant : « Prends prisonniers de guerre aux pieds d'A-
cette arme , mon fils chéri , et frappe in on- Il n. Le dieu dit au conquérant :
les chefs des contrées étrangères » ! « Va ! empare-toi des contrées ; sou-
Le soubassement de ce vaste tableau mets leurs places fortes, et amène
est composé des chefs des peuples leurs chefs en esclavage. »
soumis par Rliamsès-Méïamoun . age- Un peu plus loin s'offre le premier
nouillés, les bras attachés derrière le pylône du grand et magnifique palais
dos par des liens qui, terminés par du même Pharaon Rhamsès-Méïa-
une houppe de papyrus ou une (leur de moun. Tout y prend des proportions
lotus, indiquent si le personnage est colossales. Les faces extérieures des
un Asiatique ou un Africain. deux énormes massifs du premier py-
Ces chefs captifs, dont les costumes lône, entièrement couvertes de sculp-
et les physionomies sont très-variés, tures, rappellent les exploits du fon-
offrent, avec toute vérité, les traits dateur de l'édifice, non-seulement par
du visage et les vêtements particuliers des tableaux d'un sens vague et géné-
à chacune des nations qu'ils représen- ral, mais encore par les images et les
tent : des légendes hiéroglyphiques noms des peuples vaincus, par celles
donnent successivement le nom de du conquérant et de la divinité pro-
chaque peuple. Deux ont entièrement tectrice qui lui donne la victoire. On
disparu ; celles qui subsistent , au voit sur le massif de gauche, le dieu
nombre de cinq, annoncent : Phtah-Socharis livrant à Rhamsès-
Le chef du pays de Méïamoun treize contrées asiatiques
Kouschi, mauvaise dont les noms, conservés pour la plu-
race {Y Ethiopie) part, ont été sculptés dans des cartels
Le chef du pays de Afrique; servant comme de boucliers aux peu-
Térosis ples enchaînés. Une longue inscription,
Le chef du pays de dont les onze premières lignes sont
Toroao assez bien conservées, nous apprend
et 3 ne ces conquêtes eurent lieu dans la
Le chef du pays de ouzième année du règne de ce Pha-
Robou raon.
en Asie.
Le chef du pays de Dans grand tableau du massif de
le
Moschauscn droite, le dieuAmon-Ra, sous la forme
Un tableau et un soubassement ana- de Phré Wéracocéphale, donne la harpe
logues décorent la face antérieure du au belliqueux Khamses pour frapper
massif de gauche ; mais ici tous les vingtriieuf peuples du nord ou du
;nptifs sont des chefs asiatiques : ou midi ; dix-neuf noms de contrées ou
es a rangés dans l'ordre suivant : de villes subsistent encore le reste :

Le chef de la mauvaise race du pays a été détruit pour appuver contre le


le Schéto ou Chéta ; pylône des masures modernes. Le roi
Le chef de la mauvaise race du pays des dieux adresse à Méïamoun un long
d'Aumor ; discours ; voici le contenu des dix
Le grand du pays de Fekkaro ;
premières colonnes : « Amon-Ra a
Le grand du pays de Schairotana, <« dit : Mon (ils, mon germe chéri,
contrée maritime; « maître du monde, soleil gardien de
Le grand du pays de Scha (le « justice, ami d'Ammon, toute force
reste est détruit). « t'appartient sur la terre entière ; les
Le grand du pays de Touirscha, « nations du septentrion et du midi
contrée maritime; « sont abattues sous tes pieds ; je ce

Digitized by Google
156 L'UNIVERS.
« livre les chefs des contrées méridio- attestant que Rhamsès-Méïamoun a
« nales ; conduis-les en captivité , et consacré cette grande porte en belle
« leurs enfants i leur suite ; dispose pierre de granit a son pere Amon-Ra
« de tous les biens existant dans leur et qu'enfin les battants ont été si riche-
« pays : laisse respirer ceux d'entre eux ment ornés de métaux précieux,
« qui voudront se soumettre, et punis qu'Ammon lui-même se rrjouit en les
« ceux dont le cœur est contre toi. contemplant.
« Je t'ai livré aussi le Nord.... (lacune); On se trouve , après avoir franchi
« la Terre-Rouge (l'Arabie) est sous tes cette porte , dans la seconde cour du
« sandales, etc., etc.» palais,où la grandeur pharaonique se
Une grande mais très-fruste,
stèle, montre dans tout son éclat la vue
:

constate que ces conquêtes eurent lieu seule peut donner une idée du majes-
la onzième année du règne du roi. tueux effet de ce péristyle , soutenu à
C'est à la même année du règne de l'est et à l'ouest par d'énormes colon-
Rhamsès-Méïamoun que se rapportent nades, au nord par des piliers contre
les sculptures des massifs du premier lesquels s'appuieut des cariatides, et
pylône du côté de la cour. Il s agit ici derrière lesquels se montre une seconde
d une campagne contre les peuples colonnade. Tout est chargé de sculptu-
asiatiques nommés Moschausch. res revêtues de couleurs très-brillantes
Au fond de cette première cour encore et c'est là qu'il faut envoyer,
:

s'élève un second pylône, décoré de pour les convertir, les ennemis systé-
figures colossales sculptées, comme matiques de l'architecture peinte.
partout ailleurs, de relief dans le creux; Les parois des quatre galeries de
celles-ci rappellent les triomphes de cette cour conservent toutes leurs dé-
Rhamsès-Méïamoun, dans la neuvième corations : de grands et vastes tableaux
année de son règne. Le roi , la tête sculptés et peints appellent de toute
surmontée des insignes du lils aîné part la curiosité des voyageurs. L'œil
d'Ammon , entre dans le temple d'A- se repose sur le bel azur des plafonds
mon-Ra et de la déesse Mouth, con- ornés d'étoiles de couleur jaune doré ;

duisant trois colonnes de prisonniers mais l'importance et la variété des scè-


de guerre, imberbes et enchaînés dans nes reproduites par le ciseau absorbent
diverses positions : ces nations, appar- bientôt toute l'attention.
tenant à une même race , sont nom- Quatre tableaux, formant le registre
mées Schakalascha, Taônaou et Pou- inférieur de la galerie de l'est, côté
rosato. Plusieurs voyageurs, examinant gauche, et une partie de la galerie
les physionomies et le costume de ces sud , retracent les principales circon-
captifs, ont cru reconnaître en eux des stances d'une guerre de Rhamsès-
peuples hindous. Sur le massif de Méïamoun contre des peuples asiati-
droite de ce pylône, existait une énorme quesnommés Robou, teint clair, nez
inscription , aujourd'hui détruite aux aquilin, longue barbe, couverts d'une
trois quarts par des fractures et des grande tunique et d'un surtout trans-
excavations. On voit, par ce qui en versalement rayé bleu et blanc ce :

subsiste encore, qu'elle était relative costume est tout-à-fait analogue à ce-
à l'expédition contre les Schakalascha, lui des Assyriens et des Mèdes figurés
les Fekkaro, les Pourosato, les Taônou sur les cylindres dits babyloniens ou
et les Ouschascha. Il y est aussi ques- persépoli tains.
tion des contrées d'Aumoretd'Oreksa, 1" tableau. Grande bataille : le
ainsi que d'une bataille navale. héros égyptien, debout sur un char
Une magnifique porte en granit rose lancé au galop, décoche des flèches
unit les deux massifs du second pylône. contre une foule d'ennemis fuyant
Des tableaux d'adoration aux diverses dans le plus grand désordre. On aper-
formes d'Amon-Ra et de Phtha en çoit sur le premier plan les cliefs
décorent les jambages, au bas desquels égyptiens montés sur des chars, e(
on lit deux inscriptions dédicatoires leurs soldats entremêlés à des alliés

Digitized by Google
>TE. 157

les Fekkaro, massacrant les Robou dre importance, mais non pas moins
épouvantés, ou les liant comme pri- utiles pour l'histoire. Ainsi , la femme
sonniers de guerre. Ce tableau seul et la famille entière du roi vainqueur
contient plus de cent figures en pied, assistaient à son triomphe; la criti-
sans compter les chevaux. que a retiré de ces représentations les
T tableau. Les princes et les chefs noms et l'ordre de succession de ces
de l'armée égyptienne conduisent au enfants , et des données de ce çenre
roi victorieux quatre colonnes de ont servi à éclaircir avec certitude
prisonniers des scribes comptent et
: plus d'un doute sur le rang des prin-
enregistrent le nombre des mains droi- ces qui composèrent les nombreuses
tes et des parties génitales coupées dynasties égyptiennes.
aux Robou morts sur le champ de ba- Ainsi , sur la paroi du fond de la
taille. L'inscription porte textuelle- galerie de l'ouest de la même cour,
ment Conduite des prisonniers en
: « alerie formée par une double rangée
« présence de sa majesté ; ceux-ci sont 8 e piliers cariatides et de colonnes, 24
« au nombre de mille; mains coupées, grands bas-reliefs retracent les hom-
« trois mille; phallus, trois mille. » mages pieux du roi envers les dieux
Le Pharaon, aux pieds duquel on dé- ou les bienfaits que les grandes divi-
pose ces trophées , paisiblement assis nités de Thèbes prodiguent au Pha-
sur son char, dont les chevaux sont re- raon victorieux. Une série de ligures
tenus par des officiers , adresse une en pied ornent le soubassement de
allocution à ses guerriers ; il les féli- cette galerie et méritent une attention
cite de leur victoire, et prodigue fort particulière.
naïvement les plus grands éloges à sa Les légendes hiéroglyphiques inscri-
propre personne- tes à côtede ces personnages revêtus
En dehors de ce curieux tableau du riche costume des princes égyp-
existe une longue inscription malheu- tiens, dont ils tiennent en main les
reusement fort endommagée, et re- insignes caractéristiques, constatent
lative à cette campagne , qui date de qu'on a représenté ici enfants de
les
Tan 5 € du règne de Rhamsès-Méïa- Rhamsès-Méïamoun par ordre de pri-
moun. mogéniture. On a seulement fait deux
3* tableau. Le vainqueur , le fouet groupes distincts des enfants mâles et
en main et guidant ses chevaux , re- des princesses. Les princes , dont les
tourne ensuite en Égypte ; des grou- noms et les titres ont été sculptés à
pes de prisonniers enchaînés précè- côté de leurs images, sont au nombre
dent son char; des officiers étendent de huit, savoir :
au-dessus de la tête du Pharaon de 1 .Rhamsès - Amonmai basilico- ,

larges ombrelles; le premier plan est grammate commandant des troupes;


occupé par l'armée égyptienne divisée 2. Rhamsès -Amonhischopsch , ba-
en pelotons marchant régulièrement silico-grammate commandant de ca-
en ligne et au pas , selon les règles de valerie.
la tactique moderne. 3. Rhamsès-Mandouchischopsch, ba-
Enfin Rhamsès rentre triomphant silico-grammate commandant de ca-
dans Thèbes ( 4* tableau ) ; il se pré- valerie;
sente à pied , traînant à sa suite trois 4. Phréhipefhbour , haut fonction-
colonnes de prisonniers, devant le naire dans 1 administration royale ;

temple d'Amon-Ra et de la déesse 5. Mandouschopsch , idem ;


Mouth; le roi harangue les divinités 6. Rhamsès - Maithmou, prophète
et en reçoit en réponse les assurances des dieux Phré et Athmou;
lesplus flatteuses. 7. Rhamsès- Amonhischopsch, sans
A
côté de ces faits d'un intérêt gé- autre qualification que celle de prince;
néral, retracés dans ces vastes com- 8. Rhamsès-Méïamoun , idem.
positions militaires, se trouvent ex- Les trois premiers, après la mort
primées des circonstances d'une moin- de leur père Rhamsès - Méïamoun

Digitized by Google
i
158 L'UNIVERS.
étant successivement montés sur le La seconde campagne est plus
trône des Pharaons, leurs légendes taillée elle eut lieu contre les F
:

ont dû être surchargées pour recevoir karo, les Schatalascha et autres peu[
les cartouches prénoms ou noms pro- de même race, à physionomie htndo
tableau. Le roi Rhamsès
er
pres de ces princes parvenus au sou- 1 -Mt
verain pouvoir. 11 faut remarquer moun en costume civil, harangue
,

aussi , à propos de cette liste intéres- chefs de la caste militaire ag;enoui


sante, qu'à cette époque le nom de devant lui, ainsi que les porte-enseig
Rhamsès était devenu en quelque des différents corps; plus loin ,
sorte le nom même de la famille, et soldats debout écoutent les paroles
3ue le conquérant avait concentré souverain qui les appelle aux an
ans les membres de sa maison les pour punir les ennemis de fltpypl
postes les plus importants de l'armée, les chefs répondent à l'appel du
de l'administration civile et du sacer- en invoquant les victoires récentes,
doce. Les noms propres des filles du protestent de leur dévouement a
roi n'ont jamais été sculptés. prince qui obéit aux paroles d'Ame
Enfin, la muraille nord de la même Ra. La trompette sonne, les arsen.i
partie du palais de Médinet-Habou est sont ouverts ; les soldats, divisés /
couverte de tableaux sculptés et peints, pelotons et sans armes, s'avance
qui suffiraient presque pour nous faire dans le plus grand ordre guidés r
connaître dans leurs principaux dé- leurs chefs , on leur distribue des a
tails les éléments essentiels ues insti- qiies, des arcs, des carquois f des I;
tutions militaires de l'Egypte, et sur clies de bataille, des lances et tout
terre et sur mer. La description de les armes alors en usage.
ces belles sculptures nous en appren- T tableau. Le roi, tête nue et 1
dra bien plus a ce sujet que de minu- cheveux nattés, tient les rênes de s
tieuses et méthodiques relations. chevaux et marche à l'ennemi : m
Deux campagnes du même Rhamsès- partie de l'armée égyptienne le pr
Méïamoun y sont figurées la pre- : cède en ordre de bataille; ce sont I
mière est contre des peuplades nom- fantassins pesamment armés ou o\ \

mées les Maschausch et les Rohou. tes : sur s'avancent par peu
le flanc
Dans le premier tableau l'armée , tons les troupes légères de différent]
égyptienne se met en marche, trom- armes ; les guerriers montés sur di
pettes en tiUe, et conduite par le char chars ferment la marche. Une d<
où reposant les insignes d'Ammon, la inscriptions de ce bas- relief comp.ij
divinité protectrice. Le sujet du le roi au germe de Mandou, s'avança r
deuxième tableau est une bataille san- x>ur soumettre la terre entière à s<
glante les Maschausch prennent la
: iois; ses fantassins, à des taureaux
fuite ; le roi quatre princes
et les et ses cavaliers ou chars, à des éper
égyptiens en font un horrible carnage. viers rapides.
e
On voit, sur le tableau suivant, Rham- 3 tableau. Défaite des Fekkari
sès -Méiamoun debout sur un trmie, et de leurs alliés. Les fantassins égyj
haranguant cinq rangs de chefs et de tiens les mettent en fuite sur tous \c
guerriers égyptiens qui conduisent une points du champ de bataille ; M< k«
foule d'ennemis prisonniers , et ces moun, secondé par ses chars de guerre
chefs font une réponse au roi. En tête en fait un horrible carnage; quelque
de chaque corps d'armée, on fait le chefs ennemis résistent encore, mon
dénombrement des mains droites cou- tés sur des chars traînés soit par dfttj
pées aux ennemis morts sur le champ de chevaux, soit par quatre boeufs : ai
bataille , ainsi que celui de leurs phallus, milieu de la mêlée et à une des extré-
sorte d'hommage rendu à la bravoure mités, plusieurs chariots, traînés pat
des vaincus. L'inscription porte à 2,535 des bœufs et remplis de femmes el
le nombre de ces trophées sur autant d'enfants, sont défendus par des Fek-
d'ennemis courageux et vaillants. karo ; des soldats égyptiens les atta-

Digitized by Google
ÊGYPTE.
quent et les réduisent en esclavage. « a placé le monde entier dans mes
4* tableau. Après cette première «.mains. » Les princes et les chefs
victoire, l'armée égyptienne se met en répondent au Pharaon qu'il est un so-
marche, toujours dans Tordre le plus leil appelé à soumettre tous les peuples
méthodique et le plus régulier, pour du inonde, et que PÉgypte se réjouit
atteindre une seconde fois l'ennemi ; d'une victoire remportée par le bras
elle traverse des pays difficiles infestés du fils d'Ammon , assis sur le trône
de bêtes sauvages : sur le flanc de de son père.
l'armée , le roi, attaqué par deux lions, V
tableau. Retour du Pharaon
vient de terrasser l'un et combat con- vainqueur à Thèbes après sa double
tre l'autre. campagne contre les Robou et les
5* tableau. Le roi et ses soldats Fekkaro on voit : principaux chefs
les
arrivent sur bord de la mer au
le de ces nations conduits par R ha ses m
moment où égytienné en est
la flotte devant le temple de
grande triade la
venue aux mains avec la flotte des thébaine, Amon-Ra, Mouth et Chons.
Fekkaro, combinée avec celle de leurs Le texte des discours que sont censés
alliés les Schairotanas, reconnaissables prononcer les divers acteurs de cette
à leurs casques armés de deux cornes. scène à la fois triomphale et religieuse
Les vaisseaux égyptiens manœuvrent subsiste encore en grande partie. En
à la fois à la voile et à l'aviron des : voici la traduction :

archers en garnissent les hunes, et Paroles des chefs du pays de Fek-


«
leur proue est ornée d'une téte de « karo et du pays de Robou qui sent
lion. Déjà un navire fekkarien a coulé, « en la puissance de S. M., et qui glo-
et la flotte alliée se trouve resserrée « rident le dieu bienfaisant , le sei-
entre la flotte égyptienne et le rivage, « çneur du monde, soleil gardien de
du haut duquel Rhamsès-Méïamoun « justice, ami d'Ammon : Ta vigilance
et ses fantassins lancent une grêle de « n'a point de bornes règnes
; tu
traits sur les vaisseaux ennemis. Leur « comme un puissant soleil sur l'É-
défaite n'est plus douteuse, la flotte « gypte ; grande est ta force ; ton
égyptienne entasse les prisonniers à « courage est semblable à celui de
côté de ses rameurs. En arrière et « Boré (le griffon) ; nos souffles t'ap-
non loin du Pharaon on a représenté « partiennent, ainsi que notre vie, qui
son char de euerre et les nombreux « est en ton oouvoir à toujours. »
officiers attachés à sa personne. Ce « Paroles du roi seigneur du mon-
vaste tableau renferme plusieurs cen- « de, etc., à son père Amon-Ra, le roi
taines de figures. « des dieux : Tu me l'as ordonné ; j'ai
6" tableau. Le rivage est couvert « poursuivi les barbares j'ai com- ;

de guerriers égyptiens conduisant di- « battu toutes les parties de la terre ;


vers groupes mêlés de Schairotanas et « le monde s'est arrêté devant
de Fekkaro prisonniers ; les vain- « moi ; mes bras ont forcé les
queurs se dirigent vers le roi, arrêté « chefs de la terre , d'après le com-
avec une partie de son armée devant « mandement sorti de ta bouche. »
une place forte nommée Mogadiro. Là « Paroles d'Amon-Ra, seigneur du

se fait le dénombrement des mains « ciel , modérateur des dieux Que :

coupées. Le Pharaon du haut d'une


, « ton retour soit joyeux tu as pour- !

tribune sur laquelle repose son bras « suivi les neuf arcs (les barbares);
gauche annuyé sur un coussin, haran- « tu as renversé tous les chefs ; tu as
gue ses fils ét les principaux chefs de « percé les cœurs des étrangers et
son armée, et termine son discours « rendu libre le souffle des narines de
par ces phrases remarquables « Amon- : « tous ceux qui.... (lacune). Ma bou-
« Ra était à ma droite comme à ma « che t'approuve. »

• gauche; son esprit a inspiré mes Ces tableaux retracent les principa-
« résolutions; Amon-Ra lui-même, les circonstances de deux campagnes
k
• préparant la perte de mes ennemis, du conquérant égyptien dans la XI*

Digitized by Google
100 L'UNIVERS.
onnée de son règne; ils arment jus- On peut y recueillir aussi des noms
qu'au second pyfone du palais : de ce plus modernes et qui n'en sont p^s
point jusqu'au premier pylône, les moins utiles à l'histoire, qui ignore
sculptures n'abondent pas moins; mais souvent les faits que nous révèlent ces
plusieurs tableaux sont enfouis sous monuments. C'est ainsi qu'au temple
des collines de décombres. On peut situé au nord d'Esneh, et sur les sculpt ti-
distinguer deux bas-reliefs faisant par- res duquel se trouvent successivement
tie d'une troisième campagne du roi les noms de Ptolémée Évergète T% de
contre des peuples asiatiques, avec les sa femme Bérénice, de Philopator, et
légendes en très- mauvais état. L'un des empereurs Hadrien, Antonio e:
représente Rhamsès- Meïamoun com- Vérus, le soubassement extérieur dr
battant à pied , couvert d'un large la partie gauche est occupé par un ta-
bouclier , et poussant l'ennemi vers bleau représentant une série de captifs
une forteresse assise sur une hau- où sont figurés les peuples vaincus par
er
teur. Dans le second tableau, le roi, Ptolémée Évergètê 1 , selon tout<*
à la tête de ses chars, écrase ses apparence. Chacune des figures porte
adversaires en avant d'une place dont attaché à sa poitrine un bouclier sur
une partie de l'armée égyptienne lequel le nom de sa nation est tracé,
pousse le siège avec vigueur ; aes sol- et on lit très-distinctement, dans In
dats coupent des arbres et s'approchent liste des peuples que le vainqueur se
des fosses, couverts par des mantelets ; vante d'avoir soumis , les noms de
d'autres , après les avoir franchis, at- l'Arménie, de la Perse, de la Thrace et
taquent à coups de hache la porte de delà Macédoine; peut-être aussi ces
la ville; plusieurs, enfin, ont dressé conquêtes furent- elles faites par un
des échelles contre la muraille et mon- empereur romain.
tent à l'assaut, leurs boucliers rejetés 11 est toutefois indispensable de faire

sur leurs épaules. remarquer à ce sujet, que les scènes


Sur le revers du premier pylône, militaires relatives aux guerres des
existe encore un tableau relatif à une Ptolémées ou des empereurs romains
campagne contre la grande nation de sont d'une extrême rareté sur les
Skhéta ou Ghéto : le roi, debout sur monuments de l'Égypte; au contraire,
son char, prend une flèche dans son les scènes religieuses du même temps
carquois fixé sur l'épaule, et la décoche y sont fort communes l'antique ri-
:

contre une forteresse remplie de bar- tuel égyptien avait jusque-là conserve
bares. Les soldats égyptiens et les offi- toute son autorité, et l'accomplisse-
ciers attachés à la personne du roi ment des devoirs envers Dieu était
marchent à sa suite, rangés sur quatre pour le roi d'Égypte la plus solen-
files parallèles. nelle comme la plus importante de ses
Ces grandes sculptures méritent bien obligations.
le titre d'historiques, par le nombre Ces tableaux si multipliés des cam-
considérable de noms de peuples et pagnes de l'armée égyptienne donnent
de nations asiatiques ou africaines nécessairement une grande idée de
qu'on peut y recueillir, et qui ouvrent l'état militaire de l'Égypte. On a estime
un nouveau champ de recherches à la à 180 mille hommes "de toutes armes
géographie comparée ; ce sont de pré- les forces de cette nation habituelle-
cieux éléments pour la reconstruction ment sur pied ; mais cet état dut être
du tableau ethnographique du monde successivement augmenté quand l'É-
dans la plus antique période de son gypte entreprit des conquêtes quel-
histoire , et il parait possible de rap- quefois très-lointaines, et qui exigè-
procher ces noms égyptiens de peuples rent un très-grand développement dp
avec ceux que nous ont transmis les moyens militaires, sous le règne de
géographes grecs, et ceux que contien- Sésbstris, par exemple.
nent les textes hébreux et les mémoi- Son nom est un des plus fréquents
res originaux des nations asiatiques. dans les légendes historiques de l'F-

Digitized by Google

* •


l

Digitized by Goc
EGYPTE. 161

aux bords du Phase. De


ces colonnes
représentent des sièges, des combats, militaires élevées par Sésostris dans
des allocutions, des marches militaires, les diverses contrées qu'il soumit, la
des passages de fleuves. U pénétra plupart ne subsistaient plus du temps
dans les pays éloignés de l'Égypte , et d'Hérodote. « Cependant, dit l'histo-
il est , sur* d'autres tableaux , l'objet « rien, j'en ai vu moi-même dans la
des nommages de peuples vaincus ou « Syrie Palestine , sur lesquelles était
captifs , dont la couleur et le costume « gravée I" inscription dont j'ai parlé.»
n'ont rien de commun avec les Égyp- On voit aussi, ajoute-t-il, dans Plonie,
tiens figurés sur ces mêmes reliefs ; deux Ggures de Sésostris sculptées en
il pénétra dans l'intérieur de l'Afrique, pierre; l'une sur le chemin qui va
et on le voit dans de riches sculptures d'Éphèse à Phocée, et l'autre sur celui
recevant en présent des productions de Sardes à Smyrne. Chacune repré-
propres à cette région, telles que des sente un homme de la grandeur de
girafes, des autruches, et diverses quatre coudées et demie, tenant une
espèces de singes et de gazelles. lance dans sa main droite et un arc
Les prêtres dirent à Hérodote que dans la gauche, avec le reste de l'ha-
Sésostrts fut le premier roi d'Égypte billement répondant à cette armure,
qui, s'embanmant sur une flotte com- c'est-à-dire moitié éthiopien, moitié
posée de vaisseaux longs, partit du égyptien ;on voit sur la poitrine de
et
golfe Arabique, et soumit les peuples chaque figure, allant d'une épaule à
habitant les côtes de la mer Érythrée. l'autre, cette inscription en caractères
Ils ajoutaient , qu'en poursuivant sa égyptiens «C'est moi que ces puissan-
:

route, il parvint à une mer où il lui tes épaules ont rendu maître de ce
fut impossible de naviguer à cause des pays. »

bas-fonds, et qu'il se vit forcé de re- Les témoignages de l'historien grec


tenir en arrière. De retour en Egypte au sujet des victoires de Sésostris en
de cette expédition maritime, il se mit Orient et dans l'Europe même avaient
à la tête d'une armée nombreuse, et soulevé beaucoup de doutes, et le
fit une invasion sur le continent, sou- scepticisme moderne, par paresse ou
mettant par la force des armes toutes par vanité , ne voyait clans ces narra-
les nations qu'il trouva sur son che- tions que la suite d'un orgueilleux
min. Dans le cours de ses conquêtes, mensonge de la part des prêtres égyp-
toutes les fois qu'il avait eu à se me- tiens abusant de la crédulité d'Héro-
surer contre des peuples valeureux et dote. Il paraîtrait aujourd'hui que des
» combattant
avec énergie pour leur li- voyageurs de notre temps auraient vu
berté, il faisait élever sur leur terri- aussi dans la Syrie Palestine quelques-
toire, quand il s'en était rendu maître, unes des colonnes commémoratives du
des colonnes portant une inscription passage et des victoires de ce grand
Qui contenait seulement son nom , celui roi. Un voyageur anglais a découvert
de sa patrie, et le détail des forces le premier, à Nahhar-el-Kelb, en Sy-
qu'il avait été obligé d'employer pour rie, non loin de Beyrouth (l'ancienne
soumettre cette contrée. Berythus), une inscription qu'il dit
Sésostris traversa ainsi tout le con- être bilingue, tracée à la fois en hié-
tinent ; passant ensuite de l'Asie en roglyphes égyptiens et en caractères
Europe, il soumit les Scythes et les cunéiformes, et contenant le cartouche
Thraces. Le pays habité par ces peu- royal de Sésostris. Plus récemment
ples est, dans l'opinion d'Hérodote, encore, un oflicier de l'armée fran-
le point le plus éloigné que l'armée çaise, M. C. Callier, capitaine d'état-
égyptienne atteignit, puisqu'on y voit major, a revu ce même monument de
encore, dit-il, des colonnes élevées par Beyrouth , et c'est d'après une note
cette armée, et que Ton n'en trouve dont je dois la communication à son
pas au-delà. A partir de ce point, Sé- obligeance, qu'on en trouvera ici une
sostris revint sur ses pas, et arriva idée plus exacte.

IV livraison. (Éctptb.) 11

Digitized by Google
L'UNIVERS.
À trois heures environ au nord de teb, el-Magara et Seboutb-el-Kaditi
Béryte, en allant vers Tripoli, la route où paraissent avoir existé des issir»
coupe un contre-fort de roche calcaire ur le cuivre; les royaumes «Je B»
qui s'étend jusqu'à la mer, et au pied du- flone etde Ninive, une grande part
quel coule l'ancien l.vcus , nommé aussi l'Asie mineure, Pile de CJhypr*
par les Arabes, Nahr-cl-Kelb, Fleuve plusieurs «es de l'Archipel, et les pan
du chien. Le rocher, taillé pour 'a.re qu'on nomma ensuite la Perse : rie
place à la route, a été ensuite aplani n'égala jamais tant de puissance *

avec soin sur le côté, et des bas- re- tant de splendeur.


liefs encadrés y ont été sculptés. Ces Sésostris avait ramené une fou
tableaux sont de deux à deux au nom- innombrable de rapt ifs de tous les pa
bre de six ; d'autres sont rom inte- mi'il avait subjuguas. Il les occupa'
rnent isolés , et le style de la sculpture de grands ouvrages d'utilité publique
comme le caractère des inscriptions ils tirèrent des carrières les immens*
leur donnent évidemment deux origi- matériaux employés par son ordr
nes et deux époques. Les plus anciens dans la construction du temple d
sont de style égyptien, et pour le tra- Phtha ; ils creusèrent une granu
vail et pour le sujet : ils occupent les quantité de canaux destines par I
places les p'us commodes et les sur- {prévoyance du roi à porter sur too
faces les mieux polies. Leur sculpture es points habités l'eau potable du v
est au simple trait, et quoique très- C'est ainsi mie les plus utiles amélio
dégradés , on y reconnaît les types rations inférieures et une prospérité
essentiels des représentations égyp- universelle légitimèrent, en quelque
tiennes Dans un tableau, le Pharaon sorte, les fruits glorieux de la vie
offre des prisonniers au dieu Ammon; toire.
dans un autre, te roi paraît châtier Ils avaient contribué à établir de«
des rebelles ou des coupables. Dans communications régulières entre Pen>
Tune de ces représentations, plusieurs pire égypt»en et celui de l'Inde son
caractères hiéroglyphiques se distin- contemporain. Le commerce entre les
*
guent facilement séparés entre eux deux pavs avait alors une grande ac-
par des espaces oblitérés par le temps ; tivité la découverte fréquente , dan*
:

enfin, parmi les caractères visibles, on les vieux tombeaux égyptiens , d*


remarque le commencement du cartou- toiles et d'étoffes de fabrique indienne,
che de Sésostris comme l'a assuré à
, de meubles en bois des Indes, et de
M Collier un art ste qui
:
a travaillé pierres dures taillées, venant certaine-
plusieurs années en Egypte. Il nous fau- ment du même pays, ne laissent aucun
dra donc bientôt croire aux campagnes doute sur l'état prospère des relations
lointaines et aux mémorables victoires commerciales entre l'Inde et l'Égvpte.
de Sésostris dans l'ancien inonde; vic- à cette époque où les peuples euro-
toires qui élevèrent P Egypte au plus péens et In plupart des nations asiati-
haut degré de sa puissance politique ques étaient encore opprimées par la
et de sa splendeur intérieure. barbarie ; et c'est ainsi que Thèbes et
1
Si les rapports de l'histoire ne nous Memphis se montrent comme les pre-
trompent pas, Sésostris comptait au miers centres du commerce, avant que
nombre des contrées qii lui étaient Bahvlonc, Tvr, Sidon et Alexandrie,
soumises, ou tributaires de l'Egypte, la héritassent successivement de ce beau
Nubie entière, PAbyssinie, le Sennaar, privilège. l*s triomphes des années
une foule de contrées du midi de l'A- éiryptiennas assurèrent à leur pavs
frique , toutes les peuplades errantes tous ces avantages. Qu'on ne répète
dans les déserts de l'orient et de l'oc- dom* pas que P Egypte ne fut pas guer-
cident du Nil, la Syrie, l'Arabie où rière ; son sol est couvert d'indes-
les plus anciens rois d'Egypte possé- tructibles trophées. Gennanicus, par-
dèrent des établissements dont on a courant les bords du Mil , visita les
reconnu les traces à Djebe,-el-Moka- vénérables débris de la grandeur de.

Digitized by Google
EGYPTE. m
l'antique Thèbes, et il interrogea l'autorité d'un commandant militaire:
ies plus âgés parmi les prêtres, sur lé les inscriptionsgrecques du temps des
contenu des inscriptions hiéroglypni- Ptolémées et des Romains mention-
jues dont ces débris étaient couverts ; nent les noms et les qualités de quel-
°t les prêtres lui répondirent qu'on y ques-uns de ces hauts fonctionnaires
isait des notions sur l'état ancien de royaux et si' l'on voulait réunir des
;

l'Egypte, sur ses forces militaires et notions certaines sur la répartition des
»es "revenus
?
que ces notions se rap-
*
garnisons militaires dans PÉgypte des
wrtaient particulièrement à l'époque Pharaons et dans PÉgypte dès I.agi-
>ù le roi Rhamsès fit la conquête de la des, on pourrait avec succès prendre
'jbye, de l'Éthiopie, de la Syrie et de pour gurde l'état de ces répartitions
Asie; qu'il y avait alors "sept cent consigné dans le précieux opuscule
mile hommes en âge de porter les latin connu sous le litre de Notice des
rmes, et qu'à leur tète ce roi avait dignifcs de l'empire romain. L'état
»énétré chez les Mèdes, les Perses, physique de l'Egypte n'admettait pas
îhiis la Bactriane, la Scythie, en Ar- de* variations sensibles dans son sys-
nénie, en Cappadoce, et avait soumis tème de défense, tant que le système
i la fois la terre et les mers. Des monu- des armes ne changea point. Au midi,
nents encore debout nous tiennent on gardait Éléphantine, Syènc et les
aujourd'hui un semblable langage. De îles voisines ; a Test, Péluse et Daph-
ieux prêtres égyptiens nous rediraient né; à l'ouest, ÎUaréa et autres points
les mêmes paroles que celles que Ger- vers la chaîne libyque.
nanicus entendit sur les ruines de L'rtgypte eut "des possessions au-
rhèbes, et que Tacite nous a lidèle- delà de Svène et de la première cata-
nent conservées. racte. Plusieurs monuments élevés
A ces notions générales, tirées des par les anciens Pharaons y subsistent
àstes militaires Je l'Egypte, il nous encore , et des inscriptions votives ou
•este à ajouter quelques détails pro- dédicatoires prouvent , sans nul doute
pres a compléter, du moins autant que l'autorité militaire y était confiée
me nous le permettent les faits isolés par les Pharaons, à des princes même
ffii nous sont parvenus, ce qu'il est du pays et aux enfants de ses familles
wssible de bien savoir aujourd'hui les plus distinguées.
ror les institutions militaires de cette On n'a trouve, en effet, sur les mo-
llustre nation. numents de Nubie, que des noms
la
roi, chef de l'armée de terre et
Le de princes et nubiens
éthiopiens
le mer, s'en réservait le commande- comme gouverneurs de ces pays. La
nent supérieur, et déléguait à de Nubie était donc si intimement incor-
rrands oflîeiers celui des divisions, des porée à l'Egypte, que les Pharaons con-
)rovinces et des places d'armes. On a fiaient à des personnages nubiens le
mi plus haut, pag. 157, les titres et commandement des troupes dans leur
onctions militait es des trois fils du Pha- propre pays.
raon Rhamsès-Méïamoun, et à la p. 143 On voit, en effet, à Ibsamboul, sur
es grades accordés aux filsde Sesos- les rochers, une stèle sculptée, dans
ris. Les autres chefs militaires, fai- laquelle le nommé Mai, qui porte le
sant le service auprès du roi, étaient titre de commandant des troupes en
appelés a!es oeris, et leur tête était Nubie, et qui est né dans la contrée
ornée d'une plume d autruche. Les of- de Ouaou, l'un des cantons de la même
ùciers de divers grades étaient recon- contrée, célèbre les louanges de Hham-
nus à certains signes extérieurs. On y sès-le-Crand sur un ton très-empha-
ajouta des décorations honorifiques, tique. D'autres stèles désignent di-
enfiu des titres qui Tétaient également, vers autres princes éthiopiens comme
et qui étaient ceux de cousin, de pa- employés militaires de Sésostris en
rentou d'ami du roi. Nubie.
Chaque province ou nome était sous Une des excavations de Maschakith t
11.

Digitized by Google
164 L'UNIVERS
dans la même contrée, est une cha- Le troisième spéos d'Ibrim est du
pelle dédiée à la déesse Anoukè
(Vesta) règne suivant , d'Aménophis II , suc-
et aux autres dieux protecteurs de la cesseur de Mœris , sous lequel les ter-
Nubie, par un prince éthiopien, nom- res du midi étaient administrées par
mé Pohi , qui était gouverneur de la un autre prince, nommé Osorsatë. Sur
province pendant le règne du même la paroi de droite, ce roi Aménophis II
Sésostris : il supplie la déesse pour est représenté assis, et deux princes,
que ce conquérant foule les Libyens parmi lesquels Osorsaté occupe le pre-
et les Nomades sous ses sandales, à mier rang, présentent au Pharaon les
toujours. tributs des terres méridionales et les
Dans un autre tableau, sculpté sur productions naturelles du pays, y com-
les rochers d'Ibsamboul , un autre pris des lions, des lévriers et des scha-
prince éthiopien présente au même cals vivants,comme porte l'inscription
roi Sésostris l'emblème de la victoire, gravée au-dessus du tableau , laquelle
et on y lit la légende suivante : Le spécifiait le nombre de chacun des
royal fils d'Éthiopie a dit : Ton père objets offerts, comme, par exemple,
Amon-Ra doté , ô Rhamsès , d une
t'a 40 lévriers et 10 schacals vivants ;

vie stable etpure ; qu'il t'accorde de l'état de dégradation du texte n'a pas
longs jours pour gouverner le monde permis d'en tirer autre chose que les
et pour contenir les Libyens , à tou- faits généraux. Au fond du speos la
jours. statue du roi Aménophis le représente
Ibrim, l'ancienne Primis des géo- assis entre les dieux d'Ibrim.
graphes grecs, en Nubie, est remar- Le plus récent de ces spéos, le qua-
quable par un certain nombre de spéos trième, est encore un monument du
ou excavations faites de main d'hom- même genre et du règne de Sésostris,
me dans le rocher. Champollion le Rhamses-le-Grand. Cest aussi un gou-
jeune, qui les a vues, en donne la des- verneur de la Nubie qui l'a fait creuser
cription suivante : en l'honneur des dieux d'Ibrim, Her-
Le second spéos, sculpté et peint, mès à téte d'épervier et la déesse
appartient au règne de Mœris, dont la Saté, à la gloire du Pharaon dont la
statue, assise entre celles du dieu sei- statue est assise au milieu des deux
gneur d' Ibrim et de la déesse Saté lu- divinités locales , dans le fond du
non,, dame de Nubie, occupe la niche spéos. Mais, à cette époque, les terres
du fond. Cette chapelle, aux dieux du du midi étaient gouvernées par un
pays, a été creusée par les soins d'un prince éthiopien, dont on retrouve des
prince nommé Nahi, grand person- monuments à Ibsamboul et à Ghirsché.
nage, portant dans toutes les légendes Ce personnage est figuré dans le spéos
le titre de gouverneur des terres mé- d'Ibrim, rendant ses respectueux hom-
ridionales, ce qui comprenait la Nubie mages à Sésostris, et à la tête de tous
entre les deux cataractes. Ce qui reste les fonctionnaires publics de son gou-
d'un grand tableau sculpté sur la pa- vernement, parmi lesquels on compte
roi de droite, nous montre ce prince deux hiérogrammates , plus le gram-
debout, devant le roi assis sur un mate des troupes , le grammate des
trône, et accompagné de plusieurs au- terres, l'intendant des biens, et d'au-
tres fonctionnaires publics, présentant tres scribes sans désignation plus par-
au souverain, à ce mie dit l'inscription ticulière ; et il est a remarquer, à
hiéroglyphique (malheureusement très- l'honneur de la galanterie égyptienne,
courte) qui accompagne ce tableau, les que la femme du prince éthiopien
revenus et tributs en or, en argent, Satnouï se présente devant Sésostris
en grains, etc., provenant des terres immédiatement après son mari, et
méridionales dont il avait le gouver- avant les autres fonctionnaires. Cela
nement. Sur la porte du spéos est montre, aussi bien que mille autres
inscrite la dédicace que le prince a faite faitspareils, combien la civilisation
du monument. égyptienne différait essentiellement de

Digitized by Google
KG YPTE.
celle de rOnent, et se rapprochait de diverses ; des monuments semblables
la nôtre. décorent les intervalles des cinq por-
y a aussi sur les rochers qu'on
Il tes qui donnent entrée dans ce curieux
trouve de Philœ à Syène, un grand muséum.
Kmbre d'inscriptions commémorati- Les plus anciens bas-reliefs, ceux du
ves d'actes relatifs à des militaires. roi Horus , occupent une portion de la
On v voit des sculptures représentant paroi ouest : le Pharaon y est repré-
te princes éthiopiens rendant hom- senté debout, la hache d'armes sur
mage à Sésostris, ou à son grand-père ; r épaule,recevant d'Aramon-Ra l'em-
one inscription mentionnant une vic- blème de la vie divine, et le don de
toire remportée sur les Libyens, par subjuguer le nord et de vaincre le midi.
er
le roi Tbouthmosis I , Tan vu de Au-dessous sont des Éthiopiens , les
son règne, et le 8 du mois de pnamè- uns renversés, d'autres levant des
Qoth; une autre inscription du suc- mains suppliantes devant un chef
cesseur de ce roi , d'Aménophis III égyptien qui leur reproche, dans la lé-
Menwon), et en quatorze lignes, rap- gende, d'avoir fermé leur cœur à la
pelant que ce Pharaon venait de sou- prudence et de n'avoir pas écouté lors-
mettre les Éthiopiens , Tan de son V qu'on leur disait : « Voici que le lion
repie, et que, passant dans ce lieu, il s'approche de la terre d'Ethiopie
v a tenu une pnnégyrie. (Kousch). Ce lion -là était le roi
n des speos de Silsilis est encore
i
Horus qui fit la conquête de l'Ethio-
plus remarquable par l'ensemble des pie, et dont le triomphe est retracé sur
wjets militaires dont il est orné, et les bas-reliefs suivants.
il remonte aux premiers temps de Le roi vainqueur est porté par des
la
XVIir dynastie égyptienne. C'est chefs militaires sur un riche palanquin,
encore aux narrations de Champollion accompagné de flabellifères. Des ser-
le jeune
que la description qui suit est viteurs préparent le chemin que le
empruntée : cortège doit parcourir ; à la suite du
Le plus important des monuments Pharaon viennent des guerriers con-
de Silsilisest un grand spéos, ou édi- duisant des chefs captifs ; d'autres
ficecreusé dans la montagne , et plus soldats, le bouclier sur l'épaule, sont
singulier encore par la variété des en marche , précédés d'un trompette ;
époques des bas-reliefs qui le décorent. un groupe de fonctionnaires égyptiens,
Cette belle excavation a été commen- sacerdotaux et civils, reçoit le roi et
*
cée sous Horus de la XVIII e dynastie lui rend des hommages.
;
ou eo voulait faire un temple dédié à La légende hiéroglyphique de ce
Immon-Ra d'abord, et ensuite au dieu tableau exprime ce qui suit : « Le dieu
Nil, divinité du lieu, et au dieu Sevek gracieux revient (en Égypte), porté par
Saturne à tète de crocodile), divinité les chefs de tous les pays (les nomes) ;
principale du nome Ombite , auquel son arc est dans sa main comme celui
appartenait Silsilis. C'est dans cette de Mandou , le divin seigneur de l'É-
•nteation qu'ont été exécutés, sous le gypte ; c'est le roi directeur des vigi-
feçne d'Horus, les sculptures et ins- lants, qui conduit (captifs) les chefs de
criptions de la porte principale , tous la terre de Kousch (l'Ethiopie), race
'es du sanctuaire, et quel-
bas-reliefs perverse; ce roi, directeur des mon-
ques-uns des bas-reliefs qui décorent des, approuvé par Phré, fils du soleil
une longue et belle galerie transver- et de sa race, le serviteur d'Ammon,
sale qui
précède le sanctuaire. Horus, le vïvificateur. Le nom de sa
Cette galerie, très-étendue, forme majesté s'est fait connaître dans la
un véritable musée historique. Une de terre d'Ethiopie que le roi a châtiée
parois est tapissée, flans toute sa conformément aux paroles que lui
°n?ueur, de deux rangées de grandes avait adressées son pere Ammon. »
stèles ou de bas-reliefs sculptés sur un Un autre bas-relief représente la
rc
*,et, pour la plupart, d'époques conduite, par les soldats, des prison-

Digitized by Goc
'
166 L'UNIVERS.
niera du commun enfort grand nom- dire, elle-même * par ses tableaux,
bre leur légende exprime les paroles
; qu'elle Ut durant des siècles et av
qu'ils sont censés prononcer dans leur une persévérance dans ses entame*
humiliation : « O toi vengeur ! roi de qui proclame bien haut toute la ce ri
la terre de Kémé
(FÉgypte), soleil des tude de h science qui les établît.
Riphaïat (les pu
pies libyens), ton Ben i- Hassan, pl° s au midi que
nom est grand dans la terre de Kousch Kaire, a dans son voisinage un certai
(l'Ethiopie), dont tu as foulé les signes nombre de grottes décorées de peinti
royaux sous tes pieds ! » res d'une parfaite conservation, tout*
Enlin , nous indiquerons encore les relatives a la vie civile, aux arts
monuments de lieit Ouallv, en INubie, métiers, et, ce qui est plus rare, à I

comme formant un tableau complet caste militaire. Les deux hypogées h


des circonstances et des suites d'une Elus reculés au nord surpassent torj
campagne militaire, de ses résultats » autres par leur étendue et par (
pour PÉgypte et pour le pays subju- perfection de leur décoration. L'un de
gué et comme un témo'trnage de la
, deux est le tombeau d'un chef admi
sagesse des Pharaons dans l'usage de la nistrateur des terres orientales d<
victoire, dont aucune pratique barbare I Meptanomide, nommé Néhôihph, ai
e
ne ternissait l'éclat, le prince ne ces- IX siècle avant l'ère chrétienne.
sant d'être inspiré dans ses résolu- Les peintures qui décorent cet hv
tions par la prudence de ses conseils pogée. dit Champollion le jeune, son
et l'intérêt bien compris de son pays de véritables gouaches d'une finesse
qu'il n'oubliait pas d'enrichir des pro- et d'une beauté de dessin fort remar
ductions des provinces conquises. quables; les animaux, quadrupèdes,
]\ous avons deja décrit ces sculptures oiseaux et poissons, y sont peints avec
de Beit-Ouaily ( pag. 1 52). Nous devons tant de linesse et de vérité, qu'ils res-
ajouter que les bas-reliefs sont des plus semblent a nos beaux ouvrages d'histoi-
remarquables par leur exécution, et re naturelle. C'est dans ce même hvpo-
qu'ils donnent une idée vraie de la gée qu'existe un tableau du plus haut in-
perfection de ce genre de travail en térêt il représe nte quinze prisonniers,
:

Égvpte ; dans ces scènes variées , les hommes , femmes ou enfants, pris par
physionomies varient aussi selon les un des fils de Néhâthph, et piésenlés a
circonstances qui dominent le sujet ce chef par un scribe roval, nui of fre en
représenté. même temps une feuille Je papvrus
Mais ce n'est pas dans les temples sur laquelle sont relatés la date de la
seulement que l'historien doit cher- prise , et le nombre de captifs , qui
cher des données positives sur la caste était de trente-sept. Ces captifs, grands
militaire en Éaypte-, comme pour tou- et d'une physionomie toute particu-
tes les autres parties de ses annales, lière, à nez aquilin pour la plupart,
pour celle-ci les tombeaux recèlent des étaient blancs comparativement aux
documents plus précieux et plus com- Égyptiens , puisqu'on a peint leurs
plets que n'auraient pu l'être les plus chairs en jaune roux pour imiter ce
minutieuses narrations écrites. Des que nous nommons la couleur de chair.
tableaux sculptés et peints parlent plus Les hommes et les femmes sont habil-
vivement n l'esprit que
phrases les
les lés d'étoffes très-riches, peintes (sur-
plus parfaites, et ce ne sera pas sans tout celles des femmes) comme le sont
obtenir, nous l'espérons, l'approbation les tuniques des dames grecques, sur les
des lecteurs, que nous aurons préféré vases grecs du vieux style : la tunique,
jusqu'ici la simple description de ces la coiffure et la chaussure des femmes
tableaux si expressifs, à des déductions captives peintes à Béni -Hassan res-
nécessairement incomplètes dans leurs sert iblent n celles des dames grecques
dé'ails. L'tfgypte, eMe-nré'me, a tracé des vieux vases . et on voit sur la robe
pour nos veux ce que nous désirons d'une d'elles l'ornement enroulé fi
d'apprendre : laissons-la donc nous connu sons le nom de (/rerque , peint

Digitized by Google
ËGYPTB. 167

Dieu et noir, ci ira ce îerw- truments à l'usage des troupes. Ré-


ment. cemment encore on a découvert un
hommes captifs, à barbe poin- char tout entier en bois, démonté,
tne^, sont armés d'ares et de tances, et mais qu'il edt été facile de reconstruire.
Ton <i >! tre eus tient en main une Ivre Destiné au musée du Louvre, ce. mor-
erecque de vieux stvle aussi. Soni-ce ceau précieux lui a été soustrait
ô>* liwi»
Je le crois fermement, par linlidelite d'un intermédiaire en
mais des Grecs ioniens, ou un peuple Egypte.
<f Asie-Mineure, voisin des colonies Piutarque dit que les anneaux des
ioniennes et participant de leurs moeurs membres de la caste militaire avaient
et île tairs habitudes n'est-ce pas une
: pour cachet la figure du scarabée, et
chose bien curieuse que des Grecs du Hor.is A polio en donnait cette raison:
f\* siècle avant J.-C., peints avec H- que le scarabée désignait l'homme
dént* par des mains égyptiennes ? J'ai parce qu'il n'v a pas de femelle dans
er ce long tableau en couleur cette espèce d'animal. Hien n'est plus
exactitude toute particulière : commun, en e/Tet, que les scarabées
un rinceau qui ne soi ou non
Ynsrvginal. montés en bague, et portant «raves,
H paraît aussi , par plusieurs monu- sur leur partie plate, les sujets les plus
H un autre senre. que comme variés. On y distingue la figure du
tes autres ci tovens de l'rtgvpte, les mi- scarabée même, des armes diverses, et
litaires accomplissaient les devoirs or- même des hommes en armes.
donnes par la religion : on les Il y ava't aussi des emblèmes con-
nia nans les cercmonins sacrés î l'usage de la caste militaire;
ils exigèrent les mêmes son Je vautoureti'épervier étaient celui dé
seoulture, et des proseynema, faits en la victoire. C'était une opinion com-
leur nom ou par eux-mêmes , se trou- mune en Égvpte, que le vautour, en
vent dans divers lieux de dévotion, temps de guerre, marquait et circon-
habituellement honorés ou visités par scrivait, sept jours d'avance, le lieu
les fidèles durant les prospéré; és d« où l'on devait combattre. On ajoutait
«ilte égyptien. L'île de Begné, voisine que le même oiseau présageait la dé-
<Je cHle de Hhila?, était un de ces lieux faite d'une des deux armées, en se
et sacrés, et le but de pieux pè- tournant du côté de celle qui devait
lernages ; H y subsiste encore une être vaincue et so Trir la plus grande
vinîtiine d'inscriptions attestant que perte; c'est pourquoi les anciens
des personnages de considération y sont rois, dit la tradition, avaient cou-
venus taire leurs dévotions, et parmi tume d'envoyer des inspecteurs pour
enx est nommé un basilico - gram- examiner et leur rapporter de quel
mate, commandant des troupes sous coté du terrain occupe par les com-
Aftiénophis II I ou ÎSlei Knfigxpte, battants le vautour se tournait. Ce
les senti ments religieux étaient une qui est certain , c'est que, dans tou-
<W conditions essentielles du véritable tes les représentations de combats
patriotisme. recueillies sur les monuments égyp-
Nos musées renferment des armes tiens , le roi combattant sur son char
4e toute espèce, semblables à celles ou bien à pied , est accompagné du
que les monuments nous font connai- vautour, qui plane au-dessus île sa
: arcs garnis d'une corde
en bois ,
tète ; son vol est dirigé vers les en-
^ boyau; en bois,
flerlies et Javelines nemis, et il tient dans ses serros l'em-
barbelées, armées de pointes en os ou blème de la victoire (voyez f>).

*n bronze, et celles de cbssse, en jonc, Ji en était de même dans les com-


armées en silex; sabres, poignards, bats snr mer :la inéunc protection et
^che recourbée , masse , etc. , etc. les mêmes présages accompagnaient fe
que des tambours, des flûtes roi. Des monuments authentiques
4*M*< o* rraversières et autres ins- . nous montrent la flotte égyptienne

Digitized by Google
168 L'UNIVERS.
combattant celle d'un ennemi non de la XVII* dynastie ; qu'il est ail

moins avancé dans l'art naval. Les rejoindre le roi à Tanis ; qu'il a pri
navires sont conduits à la rame et part aux guerres de ce temps ,ou n
à la voile : ceux des deux partis s'ap- servi sur l'eau ; qu'il a ensuite com
prochent le plus possible ; les sol- battu dans le midi , où il a fait de-
dats rivaux s'attaquent et combattent prisonniers de sa main; que dans le
d'un bord à l'autre ; des cordages ar- guerres qui eurent lieu la sixième an
més de crocs sont lancés pour saisir née du règne du même Pharaon , il <
l'embarcation ennemie; on monte à pris un riche butin sur les ennemis
l'abordage ; l'équipage et les troupes qu'il a suivi le roi Ahmosis lorsqiH
sont égorgés ou faits prisonniers ; s'est rendu par eau dans l'Ethiopie
dans la mêlée, quelques navires sont pour lui imposer des tribus ; qu'il st
_ M—
. -1A M A 4**<k«*4 11 — Ml
renverses, et ils sont submerges avec
II lt il
distingua aussi dans cette guerre ; et
I I Jill_l1 < Il I

les hommes qui les montent. La forme qu'enfin, il a commandé des bâtiments
et l'armement de ces navires ne per- sous le reçue du roi Thouthmosis I er ,

mettent pas de supposer qu'ils fussent après quoi il mourut.


propres à des navigations de long Cest là sans aucun doute le tom-
cours; mais les mers d'Égvpte n'é- beau d'un des officiers de la marine
taient pas très-difficiles ; des vents qui combattirent sous le roi Ahmosis
périodiques dirigeaient le navigateur contre les Hvkshos à l'époque où ils
le long des côtes de la mer Rouge ; et furent enfin expulsés de l'Égypte, qui
du détroit qui l'unit à l'Océan indien, vit le succès couronner ses efforts
sa distance n'était pas considérable et ceux de ses princes, et reçut de
jusqu'à la presqu'île en deçà du Gange. Thouthmosis I er , qui rétablit l'ancien
Aussi a-t-on reconnu pour des In- ordre de choses en Égypte , la récom-
diens, à leurs physionomies, le peuple pense que méritaient plusieurs siècles
auquel les Égyptiens livrent un com- de bons services rendus à l'état par
bat sur mer. ses ancêtres et par lui-même. Nous
Le combat figuré sur le monu- trouvons, de plus, dans le reste de
ment de Médinet-Habou appartient au l'inscription funérairedu marin Ahmo-
règne de Rhamsès-Méïamoun qui re- sis, un témoignage contemporain de
monte au XV
e
siècle avant l'ère vul- la restauration de la monarchie égyp-
gaire. Il nous reste encore d'autres tienne par l'établissement de la XViir
preuves de l'antiquité de l'emploi d'une dynastie, un peu plus de 1800 ans
marine régulière en Égypte comme avant l'ère vulgaire, les faits relates
force de l'état; et nous indiquerons dans l'inscription s'accordant avec les
comme unedespluscurieuses et des plus fragments qui nous restent des récits
importantes pour l'histoire, un hypogée des mêmes événements par l'historien
creusé dans la chaîne Arabique, au Manéthon. C'est ainsi que chaque
voisinage de la ville d'Éléthya, et qui monument vient à son tour concourir
fut le tombeau d'un grand personnage à étendre les certitudes de l'histoire
nommé Ahmosis, fils des Obschné, et égyptienne, depuis les derniers règnes
e
chef des nautoniers. Une grande in- de la XVII dynastie.
scription de plus de trente colonnes Ajoutons , enfin , que la gloire mili-
est gravée dans ce tombeau, et le dé- taire des Pharaons était célébrée par
funt, qui s'adresse à tous ceux qui la tous les arts à la fois, et tandis que la
liront, leur fait sa propre histoire, dont sculpture et la peinture ornaient les
voici les traits principaux après avoir
: monuments publics des représentations
exposé qu'un de ses ancêtres tenait multipliées de leurs grandes actions
un rang distingué parmi les serviteurs guerrières, l'éloquence les célébrait de
e
d'un des anciens rois de la XVI dy- son côté dans le style le plus élevé et
nastie, annonce qu'il est entré lui-
il en des termes très-propres à exciter
même dans la carrière navale, dans l'amour et la reconnaissance des peu-
les jours du roi Ahmosis, le dernier ples. 11 nous est parvenu un de ces

Digitized by Google
ÉGYPTE. 109
panégyriques, à peu près complet, et antique poème historique en prose.
qui déjà a obtenu quelque célébrité. «Les Schéto (ou Scythes) s'exhortent
(Test k
rouleau de papyrus possédé à attaquer les Égyptiens; dénombre-
par M. Sallier, d'Aix en Provence, et ment de leurs chefs et des diverses
le jeune , qui le rit nations leurs alliées dans cette guerre;
un grand nombre de peuples de l'Asie
ces termes : occidentale y sont dénommés, et par-
•J'ai reconnu dans un paquet de ticulièrement ceux de l'Asie mineure,
papyrus égyptiens non funéraires, l'un tels que les Lyciens et les Ioniens. —
long manuscrit en fort mauvais état, Dénombrement des forces égyptiennes.
<j<ji m'a paru contenir des thèmes as- Le roi les harangue pour les exciter
tro logiques en belle écriture hiérati- au combat c'est Rhamsès lui-même
:

v ; 2° deux rouleaux contenant des qui rappelle cette circonstance et le


espèces d'odes ou litanies à la louance discours qu'il prononça : « Et moi , dit
d'un Pharaon ; 3* un rouleau dont les « le texte, j'adressai mes paroles à mes
premières pages manquent, mais qui « fantassins ainsi qu'aux cavaliers, di-
contient les louanges et les récits des « sant : Préparez- vous, préparez vos
exploits de Rhamsès-Sésostris , tout- « cœurs , ô mes fantassins, ô mes cava-
a-fait en style biblique, c'est-à-dire « liers ; » et les guerriers répondirent à
sous la forme d'une ode dialoguée sa majesté, dont la vie soit heureuse, à
entre les dieux et le roi. leur bon seigneur, dont la vie soit heu-
« Ce manuscrit est de la plus haute reuse; et ils promettent de se montrer
mportance, et le peu de temps que dignes de l'Égypte le jour de la bataille;
fai donné à son examen m'a convaincu ils supplient le roi de les abandonner à
que c'est un vrai trésor historique. leur ardeur, et ils s'écrient, en termi-
J'en ai tiré les noms d'environ douze nant leur discours : Donne la liberté
nations vaincues, parmi lesquelles sont au souffle de nos bouches Le roi
! —
spécialement nommés les Ioniens reprend ensuite la parole, et après
louni, et les Lyciens, Louka ou Louki; [uelques nouvelles exhortations , il met
plus les Éthiopiens, les Arabes, etc. armée en marche et s'approclie con-
II est parlé de leurs chefs emmenés tre la plaie de Schéto. —C'était la
en captivité, et des impositions que sixième rencontre ; et le roi , sembla-
ces pays ont supportées. J'ai relevé ble à un dieu, se précipite sur eux et
avec soin tous ces noms de peu nies en fait un grand carnage. —
Au milieu
vaincus, qui, étant parfaitement lisi- de l'action, le roi ne cesse d'exciter
bles et en écriture hiératique , serviront ses combattants ; enfin la victoire se
a faire reconnaître ces mêmes noms déclare pour Sésostris ; elle est com-
en hiéroglyphes sur les monuments de plète.— Sésostris annonce à ses troupes
Thèbes et'a les rétablir s'ils sont effa- qu'il vient de serrer la main du chef
cés. L'existence de ce manuscrit est ennemi , et arrête le massacre des
un fait immense, et il porte la date dé vaincus. — Récit du combat. Les —
l'an IX , au mois de paon , du règne i troupes de toute arme célèbrent la
de Rhamsès-le-Grand. » gloire du roi, et lui défèrent les titres
A son retour d'Egypte, le voyageur les plus pompeux. — Le chef des vain-
français revit à Afx cette précieuse cus vient haranguer Sésostris ; ré-
relation historique, et la revit avec un ponse du roi ; nouvelle harangue à l'ar-
nouvel intérêt, ayant reconnu ce mée; humble soumission de la mau-
même texte du manuscrit hiératique vaise race de Schéto. » Tout annonce
tracé en caractères hiéroglyphiqes sur que cette mémorable bataille fut livrée
la paroi extérieure sud d'un des palais sur les bords de l'Oxus et qu'elle fut
de Thèbes, toutefois fort mutilé dans suivie de la prise de Bactres, principal
plusieurs passades. établissement des Scythes , et l'une
On a recueilli a Aix, de la bouche de des plus anciennes villes du monde.
Champollion, l'énoncé du plan de cet On sait avec quelle attention l'É-

Digitized by Google
L'UNIVERS.
gvpte s'attacha à la conservation douze aroures de terre
documtnts de son histoire nationale. concédées à chaque individu
L'existence de l'ouvrage que nous ve- par les rois ses prédécesseurs et
nons de faire connaître n'a donc rien sies parmi les meilleures terres. M
de surprenant ; il nous prouve aussi peu de temps après, l'Égypte ayant
que les grands princes trouvèrent de attaquée par une armée nombre
clignes historiens, et les hommes dis- d'Assvriens, aucun soldat ne vouli
tingues de la caste militaire, d'élo- marcher. La classe des artisans „
quents panégyristes. L'éloge des ver- marchands et des ouvriers, se rai
tus militaires et de la science des com- autour du roi la protection des d
:

hats fut donc aussi pour la civilisation vint à son secours, et l'Ëgvpte ne
égyptienne une nécessité sociale. point envahie ; son salut fut ainsi 1"
Ivous avons presque épuisé l'ensem- \ rage de ceux que la loi ne

ble des notions historiques qu'il nous pas de sa défense.


a été possible de réunir sur l'état de Ce fait peut dép faire pressentir 1

la caste militaire en Égypts, et nous décadence d'une antique et puissant


pensons en avoir assez dit pour faire institution. On a r «conté, plus h nui
reconnaîtreson importance dans l'État, l'émigration des garnisons du midi <i
générales de son organisation
les règles l'Kgypte, sous le règne de Psaimneti
et son influence sur les brillantes des- chus, parce que ce roi ne tes avait pa
tinées de l'Égypte. Implantée dans le relevées à l'époque prescrite par 1
sol, elle était indestructible comme les constitution delà caste. La déeadeno
monuments qui la couvraient de toutes
parts ; sa dotation territoriale était la
était donc alors plus avancée, et
pourra prouver qu'une institution
M
mi
garantie de sa durée, de son aisance litaire, telle que celle qui fut créée er

et de ses services ; les produits de Eevpte, n'assurera jamais à l'Étsi


plusieurs provinces lui appartenaient, qu'un patriotisme conditionnel, qu'ur
et si l'on se souvient que quelques dévouement préalablement soldé. Du
villes importantes, telles que Saïs et reste , l'histoire est là avec ses dépo-
Héliopohs, étaient plus spécialement sitions pour éclairer les recherches du
la résidence de la caste sacerdotale, philosophe sur les avantages ou les in-
que Panapolis est désignée comme par- convénients des privilèges héréditai-
ticulièrement habitée par des ouvriers res, des corporations inoom mutables,
en lin et des tailleurs de pierre , peut- propriétaires territoriaux, et nous au-
être ftudra-t-il aussi tirer une consé- rons peut - être fourni quelques don-
quence de plus de ce qui vient d'être nées à la solution de cette question, par
oit des possessions de la caste mili- les détails sommairement réunis ici sur
taire, et considérer les provinces dont une des plus anciennes institutions de
les revenus lui appartenaient , comme ce genre, la caste militaire égyp-
étant aussi sa résidence ordinaire et tienne.
celle des familles qui en faisaient par- Il nous reste à parler do peuple, qui
tie. Enfin, on pourra peut-être aussi était aussi une caste à laquelle on
conclure de tous ces faits rapprochés, avait fait ses droits et ses devoirs;
que l'Egypte était divisée en villes mais on a compris d'avance que par-
royales, villes sacerdotales, villes mi- tout les premiers diminuent et les se-
litaires et villes industrielles. Les conds s'accroissent pour chaque caste,
Hébreux, élèves des Égyptiens n'eu-
, selon qu'elle est plus bas placée sur
rent-ils pas aussi leurs villes royales et l'échelle des institutions publiques :
leurs villes lévitiques? comme partout ailleurs , ta caste po-
On raconte qu un roi, nommé Sé- pulaire était la dernière des trois en
thon par Hérodote, négligea beaucoup Égypte.
l'ordre des guerriers, présumant qu'il
n'aurait pas besoin de leurs services,
èt qu'il s'oublia hismi'à les priver des

Digitized by Google
Egypte. 171

Là et sa renommée s'affaiblirent dans l'o-


pinion; une imprécation contre son
Toute la portion de la population nom fut tracée en caractères sacres
lihrequi n'appartenait ni à la caste sa- dans le sanctuaire même du temple
lerdolale, ni à la caste militaire, com- d'Ammon à Thebes. Ce ne fut pas le
fDsait en Êgypte le troisième ordre de peuple qui porta ce jugement contre
ffcat, la caste populaire. L'agricul- le roi; mais confirma par une ta-
il le
tere, Tindustrie et le commerce lui cite adhésion. nous reste d'ailleurs
Il
forent spécialement attribués par les des preuves plus concluantes de l'auto-
règlements généraux et par un usage rité redoutable que la constitution
ipî? fortifièrent le temps et l'habitude. avait déférée à la caste populaire en
Le peuple néanmoins exerçait une au- Égypte, et des témoignages de l'usage
torité politique dans deux des occasions qu'elle ne manqua pas d'en faire à l'é-
tes plus importantes pour l'état à l'élec-
, gard de ceux ne ses souverains nui,
tion eta la mort des rois. L'élection oubliant ou méprisant leurs devoirs,
oe fut pratiquée qu'aux plus anciens s'étaient justement attiré l'animadver-
temps de ta monarchie; pour les épo- sion publique.
ques postérieures, tout au plus aux « C'est dans la vallée de Bihan-el-
changements de dynastie; et à cet Molouk, à Thèbes, dit Chainpollion le
éaard les rapports 'de l'histoire nous jeune, que sont les tombeaux des rots
laissent dans une profondeincertitude. de la XVI ir et de la XIX' dynastie,
Au contraire , l'autorité populaire à la J'y ai visité ces princes dans leurs de-
mort des rois s'exerça aussi long- meures funéraires; ces appartements
temps nue dura l'antique constitution y sont couverts de sculptures et de
de l'empire égvptien. Après l'expira- peintures, pour la plupart d'une éton-
tion du temps" prescrit pour la durée nante fraîcheur mais j'y ai vu un tom-
;

du deuil public , la momie royale était beau de roi, martelé d'un bout à l'autre,
portée en grande pompe à l'entrée du excepté dans les parties où se trou-
tombeau ; elle y restait exposée aux re- vaient sculptées les images de la reine
grets ou aux malédictions ûi peuple as- sa mère et celles de sa femme qu'on ,

semblé ; chacun avait la liberté de repro- a religieusement respectées, ainsi que


cher hautement au roi mort ses fautes leurs légendes. C'est, sans aucun doute,
et ses mauvaises actions. Un prêtre ve- le tombeau d'un roi condamné après sa
nait ensuite prononcer le panégyrique mort. » Le même voyageur a vu , dans

du prince , rappeler ses services" et ses la vallée d'KI-Assassif territoire de


,

bienfaits. L'assemblée prononçait alors Thèbes, un édifice où une légende rovale


Q ? jugement sans appei; des* applau- a été systématiquement martelée dans
dissements nombreux accordés au pa- une foiile de bas-reliefs de ce temple,
négyrique absolvaient le roi de tout et il a reconnu que cette légende fut
reproche, et les suffrages du peuple celle d'un Am^nenthé, tuteur du roi
accompagnaient sa dépouille dans le Mrrris pendant sa minorité, et en qua-
lieu préparé pour son éternelle de- lité de mari de la sœur du roi, ap-
meure. Si la désapprobation populaire pelée par son a>e à précéder son frère
condamnait la mémoire du roi, il était sur le trône de leur père; et que, par-
privéde funérailles pompeuses, et l'au- venu à sa majorité, Mreris, a qui la
toritédu ju*e s'étendai* jusqu'au droit mémoire et l'autorité de son tuteur
de foire effacer des monuments et des étaient odieuses, fit effacer son nom
annales nationales le nom du roi frap- des monuments publics, avec le con-
pé par ces solennelles condamnations. cours de l'autorité, qu'on invoquait
Longtemps après la mort de Menés, dans ces solennelles circonstances. De
fondateur de la monarchie égyptienne, notre temps, il y a de cela plus de
H mémoire fut proscrite , à cause du 3600 ans.
grand luxe qu'il avait introduit dans On voit aussi au musée de Turin une
ta habitations domestiques. Sa tfoire statue en très-beau grès rougeatre,

Digitized by Google
172 L'UNIVERS.
d'environ quinze pieds de hauteur ; c'est tendue de l'empire; cette proscripti
celle d'un Pharaon debout , dont le nom les atteignit jusqu'au fond de la Tl
se lit sur l'agrafe de la ceinture qui lui baïde : les cartouches contenant le n<
serre sa tunique sur les reins. Utient propre de Géta sur le temple d'Esn
de la main gauche une grande enseigne sont aussi régulièrement mari.
sacrée, et son nom est encore gravé L'autorité morale du peuple égypti
en beaux hiéroglyphes sur le bâton de sur la renommée de ses rois rie sa
cette enseigne ; il se lit jusqu'à sept fois rait donc être mise en doute , et pei
sur les diverses parties de ce même être peut-on dire que quelque sagei
colosse. Une autre statue du même roi se révélait dans cette institution po
est au musée britannique; un second tique, parce que tous les citoyens >

colosse, semblable à celui de Turin, a jugeant et maudissant le roi me


été acheté à Rome et transporté au sur le seuil de son tombeau , étaiej
musée égyptien du Louvre ; c'est tou- appelés à exercer sur le roi vivan
jours le nom de ce même Pharaon qui sans l'embarrasser, une influence q
se trouve répété sur les statues de Lon- ne pouvait être dédaignée.
dres et de Paris. On l'a remarqué aussi On ne saurait dire à quelle époqi
sur les différentes portions du palais de des annales de l'Egypte se i-.itr. .

Karnnc àThèbes; on le retrouve enfin cette singulière institution politique


sur le bel obélisque de la porte du Peu- ni par quelle voie la caste populaii
ple à Rome : ce nom est celui du Pha- réussit à conquérir ces privilèges.
e
raon Mandouëi, de la XVIII dynas- Le gouvernement théocratique re
tie égyptienne; mais partout où ce nom poussait de sa nature la concessioi
existe, soit sur les images de ce roi d'un pareil avantage; le prêtre était
soit sur les édifices qu il éleva, ce nom tout dans cet ordre de choses, et I*

est soigneusement martelé, effacé, peuple n'avaità montrer que de h


quoiqu'il soit exprimé par la figure piété et de l'obéissance. Ce privilège
même du dieu Mandou , dont le Pha- indiquerait donc un temps où des cir-
raon portait le nom. La suppression constances critiques auraient portt
systématique du nom de ce roi sur le sacerdoce égxptien à octrover au
tous les monuments publics ne peut peuple cette part morale dans 'les af-
être expliquée que comme l'effet d'un faires publiques; et comme l'histoire
de ces jugements sévères portés par n'a conserve le souvenir d'aucune lutte
le peuple égyptien contre ses mé- entre l'autorité théocratique et toute
chants rois, au moment de leur mort. autre autorité rivale , si ce n'est cette
Sur le palais de Louqsor, le nom du où Mènes força la tiare à s'abaisser
roi éthiopien Sabaco a été également devant l'épée, époque où le gouverne-
proscrit et martelé; celui de Taraka, ment, de sacerdotal qu'il était, devint
autre Éthiopien, fut également martelé inopinément civil et militaire, il est
à Medinet-Habou. Sous la domination permis de conjecturer que Mènes, pour
romaine, cet usage subsistait encore, consolider les immenses résultats de
et l'autorité qui avait succédé à celle sa périlleuse entreprise, s'allia avec
du peuple, succéda aussi à ses attri- le peuple, en se livrant à lui après sa
butions dans le jugement du mérite mort ainsi que tous les rois ses suc-
dos princes. Ce n'était plus, il est vrai, cesseurs, et s'en fit un utile auxiliaire
Tintérét national qui s'exprimait dans au moyen d'une concession toute nou-
ces solennelles circonstances : les pas- velle qui investissait la caste populaire
sions de l'empereur remplaçaient les d'une intervention puissante , propre
doléances du peuple. On lisait sur le peut-être à la garantir des mauvaises
temple d'Esneh les noms des empe- passions des rois et des mauvais conseils
reurs Septime-Sévère et Géta; Cara- de leurs ministres. S'il en était ainsi,
calla fit assassiner son frère Géta; sa ce ne serait qu'un exemple de plus, bien
mémoire et son nom furent proscrits ancien à la vérité , de. la bienveillance
par l'autorité impériale dans toute l'é- attentive des barons de tous les pays

Digitized by Google
ÉGYPTE. 173

pour les pauvres communes quand ils ment pour vêtement une courte tuni-
avaient besoin d'elles pour lutter avec que de lin nommée Calasiris
, , serrée
sjccès contre la couronnne. Quoi qu'il par une ceinture au-dessus des han-
en soit , le droit attribué a la caste po- ches, ayant parfois de courtes manches
pulairede juger les actes des rois de
. , et garnies de franges par le bas.
condamner leur mémoire, et l'inévita- chaussure était en papyrus ou en cuir,
ble effet de ces jugements , ne sau- mais elle était vraisemblablement ré-
raient être mis en doute : toutefois servée aux classes supérieures. La téte
l'histoire a trop néglige les preuves était habituellement découverte; la
au'on aurait pu recueillir pour l'utilité chevelure était frisée ou nattée; un
4e tous , de 1 ancienneté et de l'efiica- manteau de laine était parfors jeté sur
ritéde cette singulière institution po- la tunique , et ils le quittaient à l'entrée
litique de la vieille Égygte. des temples. Les femmes portaient avec
La fertilité extraordinaire de la la tunique d'amples vêtements en lin ou
terre, un climat bienfaisant, de bon- en coton, à larges manches, unis ou
nes lois que l'expérience avait élabo- rayés, blancs ou de couleur unie; leur
rées , et que le temps sanctionna ; une chevelure était artistement soignée;
administration active et bienveillante leur téte, leurs oreilles et leurs mains
sans cesse occupée à établir et à con- étaient ornées de bandeaux , de boucles
solider Tordre public dans les champs et d'anneaux. Une chaussure légère
comme dans les cités ; l'influence iné- enveloppait leurs pieds; elles sortaient
vitable de la religion sur un peuple le visage découvert, accompagnées de
naturellement pieux, d'un caractère quelques femmes de service, qu'elles
facile, etqu'Hérodote considère comme avaient en assez grand nombre dans
les plus religieux des hommes, permet- leur maison. Habillées aussi avec d'am-
tent de penser qu'en Êgypte la classe ples robes d'étoffes rayées, les suivan-
populaire fut heureuse, et que, occupée tes avaient leurs cheveux tressés et
et laborieuse , modérée dans ses mœurs tombant sur leurs épaules ; elles por-
et dans ses vœux , elle trouva dans taient de plus un larçe tablier de même
son travail les sources d'une aisance gé- étoffe que leur robe , point de bijoux
nérale, et qui fut de longue durée. ni autres parures, et se tenaient dans
Les familles y étaient habituellement une situation très-respectueuse en pré-
nombreuses ; on voit dans les monu- sence de la dame de la maison. Les
ments les plus simples , peints sur un filles sorties de l'âge de l'enfance
panneau de bois ou sculptés sur une étaient habillées comme* leur mère , à
dalle de pierre calcaire , et représentant l'exception des ornements de la téte ;
les devoirs funèbres rendus aux chefs et les enfants des deux sexes n'avaient
'l une famille par tous ses enfants
, que pour tout habillement ou parure, durant
leur nombre pour les deux sexes s'é- les sept à huit premières années , que
lève de huit à douze et parfois au-delà ; des boucles d'oreilles.
et si le luxe de ces monuments désigne La race était belle, d'une haute
'les familles plus distinguées et des taille, un peu grêle en général, et
classes supérieures, ils rendent à l'é- vivant long-temps , comme le prou-
ard de ces familles le même témoi- vent celles des inscriptions funéraires
çnage quant au grand nombre des où l'âge des défunts dépasse, quatre-
enfante qui appartenaient à chacune ; vingts ans. Du reste, toutes les ex-
testableaux sculptés à Thebes nous ceptions à ces données générales se
donnent la liste de neuf descendants rencontraient dans la population égyp-
miles de Rhamsès-Méiamoun, et d'un tienne comme dans toutes les autres :
nombre encore plus considérable de nous ne réunissons ici que les traits
filles. L'ancienne société égyptienne principaux de sa constitution physique,
différa en ce point essentiel âe l'état d'après les monuments d'accord avec
des sociétés modernes. les récits de l'histoire. Du reste, Hé-
La classe populaire avait générale- rodote ,
qui a vu l'Égyptc avant sa

Digitized by Google
174 L'UNIVERS.
entière, assure qu'après les les
Libyens , les Égyptiens étaient en et au premier étage , habitation pou
général les plus sains des hommes. Le la nuit, on ne voit, comme on l'ob
grand nombre de momies d'hommes serve aujofird'hui dans toutes les ville
ou de femmes , qui ont été ouvertes d'Égypte, que de très-petites croisées
corrobore ces divers témoignages. Les couleurs de la peinture qui nom
L'intérieur des familles dénote des fournit ces détails indiquent que ce
mœurs douces et des habitudes d'af- fenêtres étaient à deux vantaux , gai
fection. On voit un de ces intérieurs nis de carreaux en verres de couleur
peints dans un des tombeaux de Gour- Un grenier ouvert sur les côtés et uni
nah. Une mère de famille rentre chez terrasse découverte terminaient o
elle avec ses trois filles d'âges diffé- bâtiment. Un jardin était une dépen-
rents , suivies d'un vieux serviteur et dance des maisons de cet ordre ; dei
d'une servante d'un âge mur. Après arbres fruitiers en plein vent t et par
avoir traversé une première pièce, elles mi lesquels on distingue le grenaoiei
se trouvent dans la seconde, qui eu et le citronnier; des arbres d'agrément
précède plusieurs autres; trois jeunes de forme pyramidale, des bosquets ât
femmes de service viennent au devant verdure et des berceaux eu vigne , en
d'elle, et lui présentent respectueuse- faisaient une possession à la fois utile
ment des fruits et des rafraîchisse- et agréable. Ces vignes étaient régu-
ments; dans l'antichambre, une des lièrement arrosées; on vendangeait
trois filles se désaltère , pressée par la pour cueillir les raisins que la consom-
soif, tandis que la servante distribue mation journalière avait épargnés; Je
des (leurs et des joujoux à une petite raisin coupé était transporté avec des
fille et a un petit garçon sans vêtements, paniers dans une cuve placée entre
accourus vers la porte à la rencon- deux palmiers ; le raisin y était immé-
tre de leur mère, L'autorité paternelle diatement foulé par des hommes oui
fut toute- puissante en Kgvpte par les se soutenaient à une corde tendue
mœurs plutôt que par lès lois : la d'un palmier à l'autre. On emportait
vieillesse était vénérée; lorsque des aussi du pour l'approvisionne-
raisin
jeunes gens rencontraient un vieillard, ment de la maison; on prenait note
ils lui cédaient le chemin et se ran- du nombre de paniers; on infligeait
geaient de côté. De tels sentiments ne une bastonnade au domestique qui, du-
révèlent-ils pas une culture attentive rant les vendanges, n'avait pas ete
des affections de l ame? Les habitudes sobre et fidèle. Il y avait dans la mai-
qu'elles imprimaient se réalisaient son des pièces destinées à serrer toutes
surtout dans l'intérieur des familles. sortes de provisions en fruit, vin,
Çe que nous en savons à l'égard des pains et gâteaux ; en poisson , volaille
Egyptiens nous montre cet intérieur et gibier salés. Les viandes fraîche*
en possession de. tous les biens qui de noeuf , de chèvre et de monton
peuvent faire croire au bonheur, char- étaient d'un usage général. La viande
mer l'homme fidèle à ses devoirs so- de porc était proscrite ; cet animal était
ciaux , et le consoler parfois des peines considéré comme immonde , au point,
qu'ils peuvent engendrer. dit Hérodote, que si un Égyptien
Les habitations particulières étaient touche en passant un de ces animaux,
vastes et à plusieurs étages. Les cham- même seulement par ses vêtements,
bres qui les composaient avaient des il court sur-le-champ vers le fleuve et

destinations analogues aux usages mo- s'y plonge. Aussi était-il interdit aux
dernes. On voit , d une part, de grands gardiens de porcs d'entrer dans les
approvisionnements de comestibles temples, et ces hommes, rejetés ménif
variés, empilés sur des tablettes; d'un des rangs les plus intimes de la so-
autre côté, le sol est couvert par une ciété, ne trouvaient à se marier qu'a-
natte tressée en joncs de couleurs di- vec les filles de leurs pareils. L'inter-
; de petites fenêtres grillées diction religieuse de la viande de porc

Digitized by Google
Digitized by Google
X

>
• • • •

•« •• • • • •
• •

« ' .
• • • •
• ••
V.
• • • »

• • •
• • »
••••
• •
» • • • •
.«.<•• • •• •
» • « • •

# •
•• » •
' • • •
I

I
• • • »
ÉGY PTE.
tjt mesure diététique et sanitaire
une le citron et la grenade , le mimusops
ma répandue en Orient, et ce ne el engi, originaire de l'Inde; le ricin
i»t pas tes Egyptiens seuls qui pour , oui fournissait une huile à brûler; les
artte raison , auraient refusé de baiser dattes du palmier ordinaire ; le fruit
ta Grec sur la bouche, ou de se ser- de l'acacia heterocarpe ; le blé com-
rrr de sou couteau de sa broche ou
, mun ; la figue du sveomore , et parmi
k >j mari m te : de tels scrupules les autres productions d'un emploi fré-
assistent encore de nos jours ; des quent dans les usages domestiques,
seulement en Orient
pratiques utiles la cire, la gomme résine, le vernis,

m\tul encore en Occident de sym- composé avec la résine du cèdre , le


Mes religieux , et témoignent de baume funéraire, qui est un
fuetque ndelite un
cuite particulier,
a d'asphalte ou bitume de Jt
tins un pays qui les respecte tous. des substances aromatiques
L* usage des' lèves était aussi ex pressè- gués au gingembre et à l'amomum ;
rent détendu; on n'en sema t point, la gomme arabique conservant encore
et ks plants qui pouvaient naître par toutes ses propriétés; enfin le beurre
ittsard étaient soigneusement arra- de muscade ou cinnamomum des an-
ém. Ce légume était do-lare impur. ciens. Le feu et l'eau étaient aussi
Hérodote rapporte que les Égvptiens comme de notre temps, les grands
prenaient leurs repas hors de leurs agents pour la composition des mets
niions ; mais il ne reste sur les mo- variés, produits de l'art culinaire en
nameiits connus aucune preuve d'un Égypte. Ses artistes, qui semblent s'ê-
tel usa<:e. tre attachés à ne rien omettre dan?
La nourriture ordinaire de la popu- leurs ouvrages de ce qui se faisait dans
lation entière était le pain lait avec la leur pays , n'ont pas dédaigné, la re-
farine du grain qu'Hérodote nomme présentation des défaite intérieurs des
wgno , et qui est le dotera
,
espèce de cuisines, et du service des repas selon
mais d un usaçe encore général dans les formes reçues dans les classes aux-
l*fc?ypte moderne. Hérodote ajoute quelles la richesse, ou au moins une
<F»e »es pains faits de sorgho étaient grande aisance , permettait de reclier-
Cylietes; il nous est parvenu
appelés cher toutes les commodités et toutes
quelques-uns de ces pains , recueillis les satisfactions que procurent la va-
«mine tant d'autres objets , dans les riété des mets luxe du mobilier , et
. le
tombeaux ; ils sont d'espèces et de for- des serviteurs habiles et nombreux.
mes différentes ; on en voit des figures Du temps d'Hérodote , une sorte de
nou inoins variées sur les monuments. vin tiré de l'orge était la boisson ordi-
Outre les viandes et les poissons, le naire des Égyptiens; l'historien ajoute
miel et plusieurs sortes de fruits en- Îu'il n'y avait pas de vignes en Égypte.
traient aussi dans la nourriture habi- .es monuments démentent cette oer-
tuelle des Égyptiens ; de ce nombre niere assertion d'Hérodote; non seu-
étaient le raisin, la grenade, les dattes, lement l'offrande du vin aux divinités
h banane, plusieurs espèces
figue, la est très-frérjuemment figurée dans les
de melons et de pastèques , l'oignon représentations religieuses , ce qui
f t les autres légumes dont le climat prouve que le vin n'était pas fort rare,
permettait la culture. voit On aussi mais encore on retrouve très-fréquem-
dans oos musées quelques-unes de ces ment, parmi les travaux des champs et
productions , qui nous sont parvenues, ceux de la récolte la culture de la
,

jPrtl avoir séjourné bien des siècles vigne, la vendange et la fabrication


ans les sépultures ; on y remarque le du vin , qu'on enferme ensuite dans de
»uit du palmier doum, les mvroba- grandes jarres qui sont bien bouchées
lans ou bélanites, les raisins de Damas et rangées dans des caves. On voit aussi
Pt de Corinthe , le fruit du lotos qui, sur les monuments, la fabrication du
Homère , faisait oublier leur
HSttBi vin cuit ; le raisin est déposé dans un
puïe aux étrangers qui en goûtaient, grand vase placé sur un fourneau al-

Digitized by Google
176 L'UNIVERS.
lumé; lorsqu'il asuffisamment bouilli, grande pureté ; qu'elle paraît très-
le moût son marc sont mis dans une
et bonne pour la préparation des aliments,
toile , d'où le vin clarifié s'échappe dans et même pour les arts chimiques, où
des vases , au moyen d'une forte tor- elle peut remplacer l'eau de pluie, dont
sion donnée à cette toile avec des le- le pays est privé , et l'eau distillée
viers mus à force de bras d'hommes. difficileà obtenir en grande quantité
Il est très-vraisemblable que la bière dans un pays où les combustibles sont
de grains était d'un usage plus ordi- rares. Elle est surtout bienfaisante et
naire dans la classe laborieuse ; il en salutaire pour l'espèce humaine; elle
était là comme dans toutes les autres est peut-être la plus saine de toutes les
sociétés assez policées pour être divi- eaux de la terre; et sans lui attribuer
sées en classes de condition inégale; les vertus surnaturelles dont une lon-
la meilleure ou la plus agréable nour- gue tradition, à peine éteinte, la dotait
riture était et devait être non pas un sans hésitation , d'unanimes louanges
droit , mais un privilège pour la for- luisont accordées par ceux , soit étran-
tune. gers, soit naturels, qui en ont fait
Du reste, l'eau du Nil était d'un usage dans toutes les saisons , et l'on
usage universel , et si les anciens di- croira sans peine qu'il en existe à
vinisèrent le Meuve comme le créateur Constantinople un approvisionnement
et le père nourricier de l'Êgypte , ils pour l'usage du grand-seigneur et celui
ne lui devaient pas moins de gratitude de sa famille.
oour les qualités essentiellement bien- Les anciens Égyptiens ne négligè-
faisantes de ses eaux. Cette précieuse rent pas de chercher le moyen de
propriété était connue de tous dès la rendre toujours potable cette eau si
plus haute antiquité; Hérodote avait nécessaire, et que les effets de l'inon-
appris que lorsque le grand roi , celui dation rendent , pendant trois mois de
de -Perse, se mettait en campagne, on l'année, trouble, rougeâtre, épaisse,
amenait pour lui, outre les approvi- à force d'être chargée de limon, et réel-
sionnements en viandes et en grains lement dégoûtante, toutefois moins au
nécessaires à sa consommation person- goût qu'à la vue. Ils y parvinrent, et
nelle, l'eau même dont il aurait be- découvrirent que pour clarifier cette eau
soin pour toute la campagne ; que à toutes les époques de l'année , il suffi-
cette eau était tirée du Choaspe, qui sait de frotter avec des amandes amères
traverse la ville de Suze ; que c était la broyées, les bords ou les parois inté-
seule dont le roi fit usage, et qu'un rieures du vase où l'eau est contenue.
grand nombre de chariots à quatre C'est le même procédé que les Égyp-
roues , tirés par des mulets, portaient tiens de nos jours emploient au même
dans des flacons d'argent cette eau, effet, et avec un succès constaté par
qu'on avait fait bouillir auparavant. quelques milliers d'années. Rien nest
Un ignore si les Pharaons, clans leurs plus commun dans les représentations
voyages ou leurs guerres hors de l'É- des usages antiques de 1 Égypte , que
gv'pte et loin du Nil , faisaient apporter d'y voir, dans r intérieur des habita-
avec eux leur approvisionnement d'eau tions, comme au milieu des champs,
de leur fleuve sacré; ce qui est certain, dans les jardins, aussi bien que dans
c'est la juste renommée dont cette eau les lieux de travail , des jarres remplies
n'a pas cessé de jouir depuis les pre- d'eau , posées sur des trépieds en bois,
miers temps historiques jusqu'à nos dans les coins les plus abrités des ha-
jours. Les voyageurs anciens et mo- bitations, à l'ombre d'un arbre dans
dernes sont unanimes sur ce point ; et la campagne ou en plein air, rafraîchies
tous nos contemporains y ajoutent leur par des serviteurs qui agitent l'air au-
suffrage d'une expression non équivo- tour avec des éventails. On ne peut
que. L'analyse chimique a donné les douter, au surplus, que les anciens
raisons d'un tel phénomène , et a fait n'aient devancé les mode mes dans une
reconnaître que l'eau du Nil est d'une précaution si indispensable pour l'ap-

Digitized by Google
i

• - •
« m

Digitized by Google
EGYPTE .

Digitized by Googl
• -

• ' • • • • • «

- * • «

• « • *
• » -

Digitized by Google
EGYPTE, 177

rovisionnement d'eau dans les villes magne, M. de Heeren , disait à ce su-


ituées à quelque distance des bords du jet : « Si l'historien s'enquiert des bas-
s au moyen de quelqu'une de ses bran-
il, reliefs historiquesou ethnographiques,
hes ou de ses canaux l'inondation était
: et des scènes domestiques ou sont pein-
égularisée en effet de telle sorte oue le tes les représentations des moeurs et
leuve, soit par son élévation, soit par des usages de la nation , il demande
les canaux, allât remplir les citernes des- précisément les objets qui sont le
inées à cet approvisionnement usuel; moins éclaircis.* Les détails dans les»
•tsi Ton se souvient de la forme sin- quels nous entrons sur cette partie de
gulière de la vallée du Nil , sa superfl- 1 état civil de la nation égyptienne
ue étant semblable à celle d'un dos satisfont donc à un vœu généralement
l'àne , dont le fleuve occupe le point exprimé, remplissent une lacune gé-
e plus élevé, on voit dès lors avec néralement remarquée; et ce sont les
juelle facilité, et presque sans travail matériaux recueillis avec un admira-
lans un terrain limoneux, les eaux ble discernement dans l'Égypte entière
lu Nil pouvaient être conduites dans par Champollion le jeune, 'qui servent
es lieux habités les plus éloignés des a enrichir l'histoire de ces faits, réelle-
imites où parvient l'inondation, et ment nationaux à l'égard de chaque
<omment ce fleuve, répandant ses bien- peuple ancien ou moderne, les plus
laits sur toute TÉgypte , fécondant son propres aussi à nous faire apprécier
*ol , pourvoyant avec largesse à l'une l'intelligence, la raison et le çodt de
Jes plus impérieuses nécessités pour chacun d'eux , non moins décisifs enOn
la vie des hommes, ce fleuve célèbre que des batailles et des conquêtes.
mérita les autels et le culte qui lui Un vaste jardin était une dépendance
furent décernés par la reconnaissance ordinaire d une habitation égyptienne
d'une nation illustre et puissante. complète {pl. 55). Il était carré; une
Tous ses monuments nous révèlent palissade en bois formait sa clôture; un
cette puissance par le luxe des habita- côté longeait le Nil, ou un de ses canaux,
tions particulières, et celui du mobil er et une rangée d'arbres taillés en cônes
dont elles étaient garnies. Outre l'inté- s'élevait entre le Nil et la palissade.
rieur déjà décrit plus haut (pl. 53), on L'entrée était de ce côté, et une double
voit dans un autre tableau peint la fa- rangée de palmiers et d'arbres de for-
çade d une de ces habitations (pl. 54) : me pyramidale ombrageait une large
c'est un pavillon fort élevé, flanqué à allée 'qui régnait sur les quatre faces.
droite et a gauche de deux corps de bâti- Le milieu était occupé par une vaste
ment, composés de deux galeries l'une tonne en treilles, et le reste du sol
au-dessus ae l'autre, soutenues par des par des carrés garnis d'arbres et de
piliersà chapiteaux , qui en font des fleurs , par quatre pièces d'eau régu-
salles ajour dans toute leur hauteur; lièrement disposées, qu'habitai» nt aussi
des tables chargées de fruits, des tré- des oiseaux aquatiques ; par un petit
pieds garnis de jarres d'eau, y sont pavillon a jour, espèce de siège om-
symétriquement placés. Os îiaferies, bragé; enfin, au fond du jardin, entre
ouvertes sur devant, pouvaient ser-
le le berceau de vignes et la grande allée,
vir de salle à manger; et c'est peut- était un kiosque a plusieurs chambres,
être ce qui aura fait dire h Hérodote la première fermée et éclairée par des
comme on l'a vu plus haut, que les balcons à balustres; les trois autres,
Égyptiens prenaient leurs repas en nui étaient à jour, renfermaient des
public. fruits, de l'eau et des offrandes. Quel-
nous insistons sur ces détails do-
Si quefois ces kiosques étaient construits
mestiques, que le lecteur nous le par- en rotonde à balustres surmontés
donne; c'est la partie la plus nouvelle d'une voûte surbaissée.
de l'histoire ancienne de l'tëgvpte. Il Des peintures à fresque décoraient
n'y a pas long-temps encore qu'un des l'intérieur des habitations ; leur com-
écrivains les plus distingués de l'Alle- position , toute d'ornement , était ex-
e
12 Ueraison. (Egypte.) 12

Digitized by Google
J78 LTÎS VERS.
trémement variée; les couleurs les métaux dorés {pl. 44), ornés d'émaux ou
plus brillantes , habilement mariées , de pierres lines, d'une élégance et d'un?
tonnaient des dessins d'une variété variété de formes que les peintures qui
infinie et que le goût
, moderne adop- nous les ont conservées peuvent seules
tera sans répugnance. révéler à notre esprit , après tous les
Les meubles en bois communs , en chefs-d'œuvre de 1 art des Grecs, com-
bois rares et exotiques, en métaux ornés plétaient le mobilier d'une maison
de dorures ou ciselés (pl. 23 et 57); les égyptienne; et d'après elle on peut ju-
étoffes unies, brochées, brodées, teintes ger de la magnificence des palais.
et peintes, en lin, en coton ou en soie, Sans doute ce luxe et cette magni-
produits des manufactures nationales ficence étaient inconnus au laboureur,
ou étrangères, contribuaient à l'agré- a l'artisan , à la majorité de la popula-
ment des maisons égyptiennes et aux tion mais à l'égard de l'Égypte comme
:

commodités de la vie intérieure. Les de quelques autres contrées, pour que


lits, garnis de matelas, avaient exté- cette opposition soit moins sensible,
rieurement la forme d'un lion , d'un considérée surtout dans ses rapports
schacal , d'un taureau ou d'un sphinx avec les besoins réels de l'homme, ave»
debout sur leurs quatre pieds ; la tête tout ce qui peut être propice à sa nour-
du quadrupède, plus élevée , servait de riture, a sa santé, ajouter à son existence
dossier pour le chevet, et l'imitation leschoses qui flattent ses goûts, plaisent
minutieuse de ses divers membres don- à son esprit et lui aident à reconnaître
nait l'occasion d'ajouter au bois ou-
I , et à soutenir sa propre dignité, il ne
tre les couleurs, l'or et l'émail. On fa- faut pas oublier qu'un très-haut déve-
briquait avec le même soin les mar- loppement du luxe dans les classes su-
che-pieds , les lits de repos à dossier et périeures ne dénonce pas toujours
à chevet, les divans, les canapés, les une grande misère dans les classes in-
armoires à deux portes, les buffets, férieures ; que s'il peut en être ainsi
tablettes , cassettes et coffrets , et tous dans les pays dont les fortunes ne re-
les objets de cette nature nécessaires 5osent que sur les capitaux et les pro-
au service de la famille. Les fauteuils uitsdel'iudustrie, ou eu un jour et par
à bras garnis et recouverts de riches
,
l'effet d'un seul événement la fortune
étoffes , étaient aussi ornés de sculptu- se joue si cruellement de ses plus
res très-variées, religieuses ou histo- habituels favoris, et semble élever
riques : des figures des pasteurs vaincus pour eux de la même main les hôpi-
soutenaient le siège en symbole de leur taux et les palais ; il en est tout autre-
servitude. TJn tabouret était sembla- ment dans les contrées où la richesse
ble pour l'étoffe et les ornements au publique et celle des citoyens sont fon-
fauteuil dont il était l'accessoire. A dées sur les bienfaits périodiques de la
des sièges pliants en bois, les pieds terre; et aucune ne fut jamais plus ré-
avaient la tonne du cou et de la tête gulièrement prodigue de ses biens que
du cygne. D'autres fauteuils étaient la terre d'Égypte. Cette fécondité sans
en bois de cèdre , incrustés d'ivoire et pareille, l'excellence du climat mal-
d'éhène , et les sièges en jonc solide- gré l'ardeur du désert voisin, une hy-
ment tressé. Des guéridons, des tables giène publique à laquelle les convic-
rondes, des tables de jeu, des boîtes tions de l'expérience avaient imprimé
de toute grandeur répondaient par leur une grande autorité , et ce que les pro-
matière et leur belle exécution a l'éclat fits de l'industrie ou du commerce ajou-

du reste du mobilier. Des nattes et des taient à tous ces biens essentiels, nous
tapis en couleurs vives et variées, et autorisent à considérer la population
quelquefois historiées, ou bien des égyptienne comme ayant été générale-
peaux d'animaux sauvages préparées, ment pourvue du nécessaire, et chacune
couvraient l'aire des appartements ou de ses classes comme étant en posses-
des portions les plus habitées; et des sion, selon sa place sur l'échelle des ri-
vases en or, en matières précieuses, en chesses, de toutes les commodités etde

Digitized by Google
Google

• •
• •
• • • • • • a •

V.
• • • •
• • •
• • •
• • *

• • • •
• • • • •
•• • • • » •

•• • •
• •
• • • •

• • • •
I

Digitized by Google
* m m

. - »

ed by Google
Digitized by Google
• • •

• • » •
• » I

Digitized by Google
hGYPTL. A. G YFTh N

Rurale und G *\v f rbc .

Digitized by Google
• -
- « • I

• _
- •

- •

• • • • » » • •

Digitized by Google
RCYPTK A OYFTFN

Kun»iî nui Ocwrl'c.


Digitized by Google
ÉGYPTE. 179

tous les agréments de la vie. Les palais au même usage que la précédente.
avaient un superflu qu'ils déversaient — Cuir maroquiné. Bandelettes et or-
sur de nobles industries qui honoraient nements , avec des sujets frappés sur
aussi le génie de l'homme, et la mai- gomme jaunâtre et représentant plu-
son du laboureur ne manquait jamais sieurs noms de Pharaons. — Feuille de
du nécessaire ; l'argile plus ou moins palmier ou jonc. Chaussures nommées
façonnée ou émaillee y remplaçait la Tabtebs en langue égyptienne , espèce
porcelaine peinte pour le service de la d'espardilles en feuilles de palmier tres-
table du riche; mais ceci n'intéresse sées, arrondies par ïe bout, imitant la
pas de très-près le régime général d'une forme de la plante des pieds avec les
,

nation, ses mérites ou sa puissance, restesdescordonsdestinésà les fixer.


et nous savons ce qu'a fait le peuple Tabtebs terminés en pointe. Deux pai-
égyptien avec ses assiettes de terre res sont faites avec des feuilles de pal-
vernissée , ses corbeilles de ionc , sa mier teintes en rouge. —Tabtebs ter-
simple tunique de lin et sa chaussure minés par de longues pointes qui, se re-
de papyrus. courbant sur le coude-pied, servaient de
Pour compléter ce curieux tableau défense naturelle aux orteils. — Feuille
des usages domestiques et de la vie in- de palmier ou jonc. Tabtebs, avec ou
térieure des Égyptiens, nous croyons sans pointe, ayant un quartier et les
à propos de présenter, comme en étant parties latérales de l'empeigne. —
Cuir
la plus précise description, une liste ou cuir maroquiné rouge" Sandales^'en
abrégée des meubles, ustensiles, objets faut.- Gomme odorante et cuir ma-
d'habillement ou de parure, qui, tirés roquiné vert ; cuir maroquiné rouge.
des tombeaux et provenant des fouilles Soulier d'enfant avec quartier et em-
laites dans divers lieux antiques de peigne. —
Cuir peint. Soulier de femme
l'Kgypte, se montrent à nous comme avec ornements peints en jaune. —
Cuir
des révélateurs naïfs des plus intimes maroquiné pourpre. Paire de pantou-
usages de la plus illustre des nations lles doublées en maroquin rose, ro-
anciennes. Les faits nombreux et im- settes dorées sur le coude-pied et en-
portants qui résultent de tels monu- tre-semelles de papy rus. — Cuir. San-
ments sont les seuls à l'abri des in- dales d'homme. —Gomme odorante et
certitudes ou des passions de l'histoire: cuir. Sandales de diverses grandeurs.
la variété des matières , soigneusement — Une paire de demi-bas à jour. Sabot
indiquées, n'étonnera pas moins que la en bois avec une bride en fer.
variété même des olnets énumérés. On Ustensiles de toilette.— Bronze
s'y fera aussi une idée de l'étonnante et bois. Miroirs eu métal poli , avec
perfection de l'industrie égyptienne, manche en bois imitant une ûeur de
qui savait mettre ces matières en œu- lotus. — Bronze. Miroirs de métal
vre bien des siècles avant le temps que dont le manche représente, soit une
notre Europe assigne avec tant de con- femme la téte surmontée d'une fleur
fiance aux plus utiles ou aux plus rares de lotus, soit la déesse Hathôr (Vénus)
inventions dans les arts ; et nous n'in- tenant une colombe dans sa main gau-
diquons dans cette nomenclature, vé- che. — Bois. Peignes simples. L'un
ritablement historique au plus haut d'eux est orné d'une gazelle agenouil-
degré , que les objets que nous avons lée. — Grands et petits peignes dou-
eus sous les yeux. bles.— Perruques en cheveux, volu-
Objets d'habillement. — Tuni- mineuses, tressées et nattées. —Diver-
ue en toile de coton très-fine, avec ses portions de chevelures, parmi les-
Tes ourlets et des reprises selon l'usage
d quelles on remarque plusieurs tresses
moderne. — Toile de lin. Grande pièce parfaitement conservées. — Ivoire ou
de toile, ayant pu servir de manteau os. Épingles à cheveux , terminées en
terminée, aux deux extrémités, par des forme de grenade ou par un uraeus
franges en cordelettes. — Idem. Pièce dressé. —Bois. Épingles à cheveux
de toile frangée à effilés, ayant servi plus communes. — Bronze. Épingle
12.

Digitized by Google
180 r/L M\ EKS.
ordinaire conservant des restes de do- que les précédents, mais remarquable;
rure. — Petit panier renfermant de pe- par la variété des verres de couleur en
tites olives en terre glaise enfilées et tremélésdont ils sont formés. Tem —
groupées de manière à imiter une émaillée, albâtre et lapis. Petites cou I
masse de cheveux. — Serpentine et al- pes et tasses de formes variées, e
j
bâtre oriental. Vases à collyre, de petits ustensiles à transvaser ou à prt
grandeurs diverses, destinés a renfer- parer des parfums liquides.
mer de l'antimoi ne en poudre, ou toute Bijoux et objets de pabure. -
autre préparation analogue au surmé Ornements d oreilles.- Coquilles fixée,
des Orientaux. —Terre emaillée, bois à un cordon , et ayant servi d'orne
dur, serpentine et albâtre. Étuis à col- ment s d'oreilles. —Or. Boucles d'oreille*
lyre de diverses formes, ou composés terminées par des têtes de bœuf, di
de plusieurs canons de roseaux réunis lion ou de gazelle. —
Argent et breiize
Kar une bandelette de toile. Bois, — Boucles d'oreilles, dont une est termi
ématite et bronze. Styles pour l'ap- née par une tête de bœuf. —
Boucle;
plication du collyre sur le prolonge- et pendants d'oreilles en or, verre doré
ment de l'angle externe des yeux. — or et saphir d'eau , bronze doré et ver
Basalte et albâtre. Molettes et pierres res de couleur. —
Pendants d'oreille ei
à broyer le surmé ou autres cosméti- bois, terre émaillée, émaux ou verre,
ques.— Bronze. Instruments pour la de couleur. —
Ornements d'oreilles for
préparation des collyres et autres cos- més de grains de verroterie ou de cor
métiques. — Terre émaillée, émail et al- naline , d'anneaux d'ivoire et de petite
bâtre oriental de diverses nuances. grenades en terre émaillée verte. -
Vases unguentaires destinés à conte- Ornements d'oreilles formés d'un cor
nir des huiles, onguents ou parfums don passé dans divers amulettes er
liquides. — Albâtre et brèche. Petites terre émaillée, et représentant le pois
amphores et vases ansés de diverses son latus, une grenouille, une espèce
formes. — Terre émaillée, émail et al- de chenille, des scarabées ou des têtes
bâtre oriental. Vases balsamaires avec symboliques de la déesse Hathôr. —
ou sans oreilles (masdi), et de formes Ornements d'oreilles formés de fleur
variées. — Terre émaillée, émail, al- variées en terre émaillée. —
Ornement!
bâtre et bronze. Vases ampulloïdes, ou d'oreilles en terre émaillée, cornalim
ampoules destinées à contenir des par- et lapis, représentant des grenouilles,
fums liquides, ou des huiles parfumées; le poisson latus, des scarabées, une
parfois avec une inscription hiérogly- sauterelle, une mouche, des cygnes,
phique. — Terre émaillée et albâtre. des cynocéphales, un lion , des'hippo-
Vases en forme de gourdes, avec ou potames, des gazelles, un lièvre, des
sans anses. Il y en a dont le goulot est. chats, un hérisson, des têtes humaines,
formé par une fleur de lotus, et les ou des têtes symboliques de la déesse
anses par deux singes accroupis, avec Hathôr.
des inscriptions hiéroglyphiques sur la Colliers. —Collier formé de coquil-
panse , telles que celles-ci Que le dieu
: lages naturels. —
Mois. Olives striées
Phtha accorde d'heureuses années au et peintes en rouge, provenant d'un
possesseur de ce vase ! Que le dieu collier. — Colliers formés d'annelets
Aiiimon et la déesse Mouthis accor- d'ivoire ou entremêlés de grains de cor-
dent d'heureuses années Que le dieu
! naline. —Colliers ou portions de col-
Phtha et la déesse Koht accordent liers formés de lentilles, petits disques,
d'heureuses années! etc. —
Albâtre crains ou olives et demi-olives en terre
oriental et terre émaillée. Vases de émaillée. —
Colliers ou portions de
formes diverses, ayant servi à conte- colliers formés de petits disques en terre
nir différents genres de cosmétiques. émaillée ou en émail de diverses cou-
Il y en a avec des légendes royales. leurs , alternés ou entremêlés. Autre—
Verres et émaux de couleur. Petits fla- formé de scarabées portant gravés sous
cons et vases destinés au même usage leur base des ornements variés ou des

Digitized by Google
I
EGYPTE. 181

iTmbolcs. — Autres
formés de petits Sremier formé d'olives en or; le second
foats, d'un petit naos renfermant e vases à libations, de fleurs de lotus,
Image de la déesse Bubastis, de pe- de lézards et de poissons latus, alter-
its yeux symboliques en terre émail- nés et également en or ; le troisième
ee ,"ou de plaques carrées portant le rang est composé de grains d'agate,
Dom hiéroglyphique d'Osiris. Terre — avec une plaque représentant la tête
émaillée. Lentilles, disques , annelets, du bélier symbolique. — Collier en or
cylindres et amulettes provenant de col- formé d'une double chaîne en gour-
liers. —Autres formes de globules en mette, garni d'un fermoir à trois chaî-
terre émaillée, montés en or. En — nettes, portant une fleur de lotus et
Krains d'émail vert pomme ou bleu cé- deux poissons binni. —Collier en or
leste. —De grains et d'olives en pate de même travail , mais plus finement
d'email , en émaux et en verre de cou- exécuté; dans la chaîne est passée une
leur. —Grains, olives, perles et au- bélière à laquelle on a suspendu une
tres pièces en émail mosaïque, prove- plaque représentant des deux cotés un
nant de colliers , et très-remarquables épervier vu de face et travaillé à grains.
sous le rapport du travail et de la va- — Or. Fermoir d'un collier à six rangs.
riété des couleurs. —
Colliers formés — Or. Fermoir d'un collier orné de
de pièces de corail pâle; —
ou en grains deux chaînons terminés par deux pois-
et cylindres de spath vert; ou en — sons latus. — Émail. Franges de fer-
prinie d'améthyste; —
ou en cornali- moirs de colliers. —
Or. Fleur de lotus,
nes, d'une forme variée, et entremê- jadis incrustée d'émaux, provenantd'un
lées d'amulettes de diverses manières. collier.— Œil en lapis monté en or,
— Grains, olives et perles en jaspe, provenant d'un collier.
agate, chalcédoi ne, lapis, grenat, sar- —
Anneaux et bagues. Bague avec
donyx , granit , etc. , provenant de col- chaton carré en bois doré. — Émail et
liers.— Autre formé de perles
collier terre émaillée. Anneaux portant au
hexagones en argent massif ; formé — chaton des images de divinités en re-
d'une baguette de bronze plaquée en lief, telles que Atmou, Phtha, Horus,
ar;ent, et dans laquelle sont passées Hathôr, etc. — Bagues port mt au cha-
des sonnettes en argent , ou des amu- ton des images en relief de divers ani-
lettes en bois ou en cornaline; com- — maux sacrés, des fleurs de lotus; des
posé de petites pièces en argent repré- yeux symboliques ; des figures d'uraetis,
sentant des veux symboliques entre- (le nilômètre, de divinités ou des lé-
mêlés de perles d'argent doré et de gendes hiéroglyphiques.— Bagues avec
petits amulettes en terre émaillée ; — chaton, ornées de sujets variés tra-
formé de plusieurs centaines d'anné- vaillés à jour. — Doubles bagues por-
es en argent de 2 lignes et demie de tant au chaton des bustes en relief de
diamètre sur un tiers de ligne d'épais- Keïth , d'isis et du dieu K lions. —
seur, passés dans une tresse de che- Bagues à chaton carré avec inscrip-
veux; — en argent, composé d'amu- tions exprimant un souhait d'heureu-
lettes représentant la partie supérieure ses années. — Bronze. Bagues portant
du coquillage nomme
porcelaine ; — des inscriptions hiéroglyphiques ou des
imitation en or du coquillage nommé images de divinités gravées en creux
porcelaine. —
Pièce en or imitant la sur Te chaton. —Bague en fer. —Ar-
partie supérieure du même coquillage, gent massif. Bagues à chatons ovales
et veux symboliques en cornaline.— portant des inscriptions pieuses ou des
Colliers et portions de colliers formés noms de rois. — Argent. Bagues por-
de petites pièces d'or en forme d'olives, tant des têtes symboliques. — Klec-
d'annelets, de perles, perles à jour, trum. Chaton de bague avec inscription
sauterelles , grenades etc. etc. , en-
, , hiéroglyphique. — Or. Anneau travaillé
tremêlées de petits amulettes en cor- à jour et orné d'amulettes en matière
naline ou de scarabées montés en or. dure, enchâssés dans le métal. —Or
— Collier complet à trois rangs : le massif. Bagues à chatons portant les

Digitized by Googl
182 L'UNIVERS.
noms , symboles de plu-
les titres et les céphale. — Argent doré. Figurine*
sieurs divinités. —
Doubles bagues à représentant un dieu. — Argent. Bijou
doubles chatons offrant l'image d'une représentant un petit contre-poids de
jeune lit* adorant successivement Osi- collier, terminé par une tête de déesse.
— —
1 i

ris, Isis et ISephtys. Ces bagues sont Or. Un lion en repos. Plomb
des bijoux funéraires provenant des étain et bronze. Petits éperviers , le*
momies. —
Or. Doubles bagues por- ailes éployées. — Or. Deux grappes de
tant sur leurs chatons les images de raisin , de travail égyptien. —
Argent.
dieux gravées en creux.— Bagues à cha- —
Un petit aigle. Or. Battants de
tons décorées d'ornements incrustés en d'un petit naos, décorés d'une
émaux de couleur. 11 y a sur un chaton de femme debout , portant des
deux petits chevaux de plein relief et et des offrandes.
d'un travail très-fin. —
Bague à triple Ustensiles domestiques. J a- —
anneau avec un chaton orné d'une de- ses.— Bois. Forme de vase à anse en
mi-olive en cornaline. —
Or. Anneaux bois. — Terre cuite. Petits vases de
portant au chaton des yeux symboli- formes diverses, enduits d'un vernis
ques en cornaline, un scarabée, ou de couleur, peints ou non vernisses.
une grenouille, soit en pâte d'émail, —Terre cuite peinte. Bardaques d'une
soit en terre émaiilée. —
Serpent roulé forme encore usitée en Égypte. —
en spirale pour servir de habile. — Grands vases d'une forme analogue à
Bague à triple anneau portant en cha- celle des bardaques, avec cols plus ou
ton les bustes en relief d'Osiris, d'Isis moins évasés. Ornements peints rn
et de Nephtys. —
Idem. Bagues à cha- bleu. — Terre cuite peinte.Grands vases
tons ronds ou carrés sans gravure. — en forme de pomme de pin , décores
Lapis. Bague à chaton carré sans gra- '
d'ornements ou de fleurons de couleur
vure. bleue, rouge ou noire. —
Idem. Vases
Bracelets. — Bracelets tressés en
v
a deux anses, ornés de palmettes et
feuilles de palmier; en corne ou en feuillages tracés en noir. —
Grandes
écaille; en ivoire de diverses gran- amphores en terre cuite. —
Vases à
deurs; en bronze; en papillon doré; huile, avec couverte en jonc natté.—
en fer; fragments de bracelets en ar- Vases domestiques de formes variées
gent ; en feuilles d'or , ornés de deux en serpentine, calcaire blanc , granit-
yeux symboliques. —
Or. Bracelet d'en- —
brèche et granitelle. Albâtre oriental.
tant décoré d ornements gravés en re- Grand vase balsamaire à anses, avec
lief. — Bracelets en or combiné avec couvercle. —
Idem. Vases en forme de
de petits anneaux de beaux lapis ; en cornet, et du genre nommé cadus pjr
or décoré de bouauets de lotus des les anciens Romains. —
Bronze. Vases
deux espèces, et d un lion assis, tra- de diverses formes et autres ustensiles
vaillés à jour, et dont tous les détails domestiques. —Vase en verre blanc,
intérieurs étaient incrustés de lapis et orné de cordons. —
Coupes en terre
de pierres ou d'émaux de diverses cou- émaiilée bleue, ou bleu perse, ornée*
leurs; en or d'un travail analogue à d'étoiles , de bouquets de lotus , ou de
celui du précédent, orné d'un griffon poissons binni tracés en noir. —
Coupes
et de bouquets de lotus ; en or massif, en albâtre oriental. —Coupes en brou-
formés chacun de deux serpents entor- zc, d'un métal trcs-rcmarquahle par
tillés et affrontés. la bonté de son alliage, et le son pur
Bijoux dé formes variées.— Argent. et prolongé que rendent ces coupes
Petit étui avec couvercle à bélière. — lorsqu'elles sont frappées. Le pourtour
Plaque d'or. La vache symbolique de est quelquefois décoré d'une inscrip-
la déesse liathôr, nourrissant un en- tion hiéroglyphique. —
Coupe en on
fant. Bijou funéraire. —
Argent. Petite dont le fond est orné de poissons binni
épde à la téte de lionne. — Plaque se jouant parmi des fleurs de lotus.
d or. Une femme vêtue de la cala- Sur le pourtour, une inscription hié
siris, adorant la déesse Hathor Bou- roglyphique. —
Grands bassins en al-

Digitized by Google
TE. .
t83

bàtre oriental. — Bassin en verre blanc, tillons de toiles de égyptiennes an-


lin
avec le panier qui le renfermait dans tiques. — Tissu quadrille remplissant
un tombeau de Thèbes, où a été il l'effet du tissu moderne nommé Loui-
trouvé.— Albâtre oriental. Cassolettes sine.— Tissu du même genre, un peu
à puiser des liquides , imitant la forme plus — Tissus rayés par l'ourdis-
fin.
du poisson latus. — Patères et simpu- sage. — Tissu de d'une grande ré-
lin
iura en bronze. duction ,à lisière rayée bleue. Toile —
Meubles. —
Bois dur. Fauteuil à de lin avec frange très-fournie à la
pieds de lion, avec dossier orné de lisière , formée par un broché lié dans
marqueteries en ébène et en ivoire cette lisière et produisant l'effet d'une
d'hippopotame. Le siège était formé bordure cannelée. — Tissu rayé par
par un treillis en cordelettes qui existe l'ourdissage, dont la trame est" entiè-
encore en partie. —
Bois. Dossier de rement recouverte par la chaîne. —
fauteuil, avec scène d'adoration peinte. Toile peu fournie en chaîne , teinte au
- Bois. Tabouret dont le siège est re- henné. —
Toile de lin avec un chef
couvert en jonc natté. —Coffrets dé- rouge de l'Inde. —
Tissu très-fin , pré-
corés d'ornements peints de diverses sumé coton, de la réduction de la tur-
couleurs, couvercle à charnière, avec quoise. —
Autre plus fin que le précé-
inscription hiéroglyphique. —
Paniers dent. —
Vingt échantillons de toiles
de formes variées en jonc ou en feuil- égyptiennes de coton, de laine, etc.
les de palmier. —
Paniers de formes — Mousselines variant de finesse. —
variées, tressés en jonc coloré.— Nat- Tissu imitant la mousseline des Indes.
tes en jonc et autres objets de van- —Tissu peluché, raffiné par la chaîne
nerie. sur fond toile. —
Tissu broché , pro-
INSTRUMENTS ET PRODUITS DES duisant le travail des Gobelins, par la
arts et métiers. Armes. —
Arcs — réunion des deux fils travaillant isolé-
en bois, conservant quelques débris ment dans la toile. —
Turquoise bro-
de la corde à boyau . —
Flèches de chasse, chée dans le principe des Gobelins
jonc, armées de fragments de silex : avec quelques parties de broderies au
quelques-unes sont barbelées. Os et — petit point. Les caractères broches sur
bronze. Pointes de flèches et de javeli- ce tissu forment le prénom et le nom
nes, triangulaires ou en forme de car- propre d'un Pharaon.
reau. Objets relatifs aux jeux et
Instruments de musique. Tam- — aux amusements de l'enfance. —
bour à timbre et à double peau tendue Bois. Une poupée ou mannequin, bras
au moyen de lanières de cuir, sur une mobiles; sur la tete existent encore
caisse en bois , de forme bombée , et des cheveux implantés. Ivoire. Une —
composée de petites douves. Tym- — très-pelite poupée. —Idem. Un forge-
panum très-analogue à nos tambours ron , à bras mobiles , d'un travail gros-
de basque. —
Tambour en forme de sier. —Cuir. Paumes formées de sec-
demi -poire avec les restes de la peau tions de sphère en cuir, cousues et
dont il était recouvert. —
Manches de bourrelées de baie d'une plante céréale.
sistres, ornés de la téte symbolique de —Bois. Paume à compartiments peints
b déesse HathôT. —
Une harpe a cor- en bleu et en rouge. Un osselet en —
des nombreuses, recouverte de maro- ivoire. —
Bois. Sabots auxquels on im-
quin vert, décorée en -dessous de fleurs primait un mouvement de rotation par
oe lotus découpées à jour. —
Sambuca le moyen d'un fouet. Latrunculi —
ou petite harpe portative à quatre cor- ou petits cônes en terre émaillée bleue,
des. Débris d'un instrument sembla- ayant servi de pions et de pièces pour
ble. — Roseau percé en forme de flûte. un jeu analogue à nos jeux de dames
Tissus. —
Une poignée de fil teint ou d'échecs ; très-petits modèles en
au henné. — Écheveau de fil très-fin. bois de tous les instruments d'agricul-
—Morceaux de toilede lin, avec fran- ture.
ges de diverses espèces.— Vingt échan- L'étude des monuments originaux

Digitized by Google
,

184 L'UN '


ERS.
nous apprend avec certitude à quali- la maison rurale et sa femme; les
fier chacun de ces objets si nombreux conducteurs de bœufs , de veaux , de
et si variés, et nous en montre l'u- chèvres , et les porteurs de lièvres , de
sage. On les reconnaît aussi dans hérissons, etc. ; le surveillant des che-
les tableaux qu'un personnage distin- mins aboutissant à la maison du chef;
gué a fait peindre dans son tombeau, les portiers ; les pécheurs et les chas-
dès la plus naute antiquité égyptienne, seurs ; les employés au sacrifice do-
tt où il s'est occupe à faire figurer mestique des bœufs et autres animaux.
tous les détails de la vie intérieure Ces emplois ét lient très-subdivisés en
d'une famille nombreuse et puissante. fonctions spéciales; toutes celles qui
On v retrouve toutes les parties du viennent d être indiquées sont rela-
service, tel qu'il était admis ou exigé tives à Pintéricur de l'habitation.

f>ar
les usages de l'époque, soit pour Dans ce qui est de l'extérieur, on peut
'ordre et la bonne tenue de la mai- classer le blanchissage du linge, qui
son, soit pour la représentation né- employait sept personnes, y compris
cessaire au rang de ce riche citoyen lécher de la lingerie; viennent ensuite
ou en rapport avec sa fortune. le scieur de bois, le menuisier, le
Sa famine se composait de sa femme potier de terre, les bâcherons, occu-
légitime et de ses sept enfants, dont pés à fendre le bois ; les charpen-
quatre sont des fils; d'une autre femme tiers , les constructeurs de barques;
et de son fils; enfin de la nourrice les porteurs de la litière du maître,
et de la fille de la nourrice : ces douze et ceux uni conduisent le traîneau ;
personnages étaient tous également de les mariniers et rameurs pour les voya-
Î
a famille, et ils étaient rangés au- ges sur le Nil, sous les ordres d'un
près de son chef dans l'ordre de pré- chef de tout le service du voyage;
séance où nous venons de les désigner; un officier de navigation, le directeur
ils sont présents dans les scènes qui pour le mât et le* timonier-chef du
représentent les usages de la maison gouvernail; le maître, sa femme et
de la ville et ceux de la maison des ses enfants y étaient dans une large
champs. chambre qui occupait le pont, et qui
Au service de la première nous trou- était éclairée par des fenêtres garnies
vons attachés trois prêtres et quatre de verres de couleur; quelquefois le
jeunes clercs, charges du service re- voyage exigeait plusieurs canges, à
ligieux intérieur, chaque particulier caiise des nombreux serviteurs : tel
pouvant établir chez lui des chapelles aujourd'hui un kiaia-bey voyage sur le
pour les dieux du pays et de la con- Mil, suivi de son harem et de la plu-
trée, à la condition de pourvoir aux art des officiers de sa maison. Au nom-
<i?pL iises du culte et des cérémonies.
i
re des serviteurs nécessaires étaient
Après eux viennent lesgrammates, ou aussi tous ceux qu'exigeait la boulan-
secrétaires, soit pour les choses reli- cerie ; les femmes occupées à filer le
iricises, soit pour les affaires civiles. lin , à démêler lesécheveaux , à les dé-
Le valet de chambre, domestique de vider, à tordre fil au
le fuseau et à
confiance, est auprès du maître; ve- ourdir la toile au métier, sous les
naient ensuite l'intendant de la mai- ordres du chef du tissage. Une foule
son, portant un bâton courbé pour de serviteurs subalternes attachés à
marque de son autorité ; la ménagère, chaque partie du service intérieur et
appelée la gardienne des vivres ou des extérieur de la maison de ville se
offrandes, et qui avait deux filles; voient aussi dans les scènes où ces dé-
l'homme charge du soin des sièges, tails sont figurés.
et leporte-siege du maître; le van- La maison de campagne avait éga-
nier et sa femme, à qui était laissé lement un nombreux domestique; à la
le soin des nombreux ustensiles et suite du jardinier étaient les garçons
meubles en vannerie; les jardiniers chargés de cueillir et de conserver les
et leurs sous-ordres; l'intendant de fruits, tels que les ananas, les figues,

Digitized by Google
. - •
* • • • •

<

-
I

• • •

Digitized by Google
Digitized by Google
EGYPTE.
et lesapprovisionnements en légumes est jetée de son épaule gauche sur le
rangés dans les serres pour l'hiver: le côte droit; il s'appuie sur une longue
bereer en chef et les pâtres s'occu- canne ; à ses pieds est un jeune cha-
paient d'une partie très-importante de cal mâle, apprivoisé et portant un col-
la propriété rurale, l'éducation des lier ; un serviteur ombrage la tête du
bestiaux étant en grande vogue et très- maître au moven d'une double ban-
développée en Egypte; aussi voit-on nière de toile." Le troupeau défile en
dans la liste des serviteurs non seu- sa présence; un gardien ou bercer
lement le médecin vétérinaire, mais pousse devant lui le troupeau de cna-
les valets de ferme chargés spéciale- que espèce de bétail , et au-dessus de
ment du soin de certains animaux ; chaque troupeau le nombre des têtes
,

un pour les chèvres, un autre pour est soigneusement indiqué par des chif-
les oies et les canards, un troisième fres, qui sont en grande évidence. La
pour les moutons; et sous les ordres marche est ouverte par les ânes et
tlo chef des bouviers, ceux (jui diri- les ânesses ; un ânon est en tête , et
geaient la race bovine, mission très- leur nombre est de 860; le berger
importante , car il parait que le com- qui les surveille porte au bout d'un
bat des taureaux entrait dans leur bâton appuyé sur son épaule la dé-
éducation ou comme mo>en d'améliorer pouille d'un de ces animaux mort aux
b race, ou comme speclacle donné au pâturages. Viennent ensuite les bre-
maître de la maison; c'est le chef des bis et les béliers, au nombre de 974;
bouviers qui préparait les taureaux un berger de ce troupeau porte dans
à cet exercice. Les chefs de chacun un panier la tête d'un animal sans
de ces services venaient prendre di- cornes, et qui ressemblerait plutôt à
rectement les ordres de leur maître un loup qu'à un bélier. La race bo-
ayant leur main droite posée sur l'é- vine vient ensuite; on y compte 834
paule gauche , et leur autre bras pen- bœufs et 220 vaches ou veaux. Les
dant , en signe de respect ; il en était chèvres mâles et femelles ferment la
de même du gardien et du conducteur marche ; leur nombre est porté à
des ânes et de ceux des bouvillons. Des 2234. Dans un autre tombeau on voit
*hiens d'espèces diverses appartenaient gué le nombre des ânes appartenant
a la maison , et ils avaient aussi leurs a un riche habitant de la movenne
cardiens , qui les soignaient en santé Égypte était de 1304, et celui des
et en maladie. vaches de 830. Il paraîtrait aussi,
Il vient d'être dit nue l'éducation d'après d'autres renseignements, que
des bestiaux était une des grandes ri- les boeufs des fermes royales étaient
chesses agricoles de l'Egypte; les ca- d'une espèce supérieure et des indi-
pitaux de cette espèce étaient consi- vidus de choix. On a remarqué dans
dérables dans ce pays : ce ne pouvait Its peintures d'un autre tombeau, qui
pas être pour une vaine ostentation ; parait avoir été celui d'une grande
mais cette industrie dut être plus fruc- famille de Memphis, des serviteurs
tueuse dans la basse Égypte, vaste faisant l'offrande au défunt des prin-
plaine entièrement arrosée par le Nil, cipales productions de ses domaines
que dans l' Égypte supérieure, vallée telles que des dattes, des figues, des
étroite où la terre féconde ne pou- ananas ; des veaux , des oies , des ga-
vait pas être en grande partie desti- zelles; des fruits et des fleurs : parmi
née à des pâturages. Aussi est-ce dans ces serviteurs, il y en a plusieurs qui
un hypogée des environs des pyra- conduisent en laisse des bœufs de haute
mides que se trouve un tableau qui taille, blancs et rouges, blancs et
est un témoignage authentique de nos noirs, ayant un collier terminé par
assertions.On y voit un Égyptien fai- un ornement en forme de fleur de
sant l'inspection de ses troupeaux ; il lotus, et deux de ces bœufs portent
est debout, couvert de sa calasyris sur leur cuisse gauche une grande mar-
serrée par une ceinture ; une écharpe que, de forme carrée, de couleur noire,

Digitized by Google
L'UNIVERS
et on dans un : Maison royale ,
lit aux poëmes d'Homère, nous a tir ion
/T 43; et dans l'autre, avec les mêmes encore beaucoup à ajouter, si nous dt
indications, le n° 86, chiffres qui in- vions dire tout ce que les monument
diquent vraisemblablement le nombre nous apprennent à la fois et sur le
des boeufs de chacune des deux cou- occupations et sur les amusements de
leurs combinées ; d'où résulte encore habitants des bords du Sil septentrio
la preuve que les grandes maisons nal ; la chasse et la pêche étaient pou
faisaient marquer de leur nom et d'un eux des distractions d'un usage généra
chiffre chaque téte de gros bétail qui (pl. 37 et 43). On chassait aux oiseaux e
leur appartenait. aux quadrupèdes; des lévriers couraien
Dans toutes ces représentations, le l'autruche et la gazelle , la flèche attei
maître de la maison se reconnaît à la gnait le quadrupède du désert , le file
longue canne qu'il tient à la main , ou enlaçait le volatile aquatique; et te
sur laquelle il s'appuie pour se repo- peintures de ces scènes si riches de dé
ser; ce qui a fait dire à un novice tails inconnus {pl. 58) nous montren
interprète des symboles de l'antique en même temps les diverses espèce*
y figurait comme
Égypte, que le bâton d'animaux recherchés ou pris par le;
le plus ingénieux emblème de l'auto- chasseurs; les espèces, diverses aussi,
rité et du gouvernement, et il ne de chiens employés à les poursuivre;
trouve pas tout-à-fait bon que les so- ainsi que toutes les ressources de la
ciétés modernes aient adopté des si- pêche a la ligne , à la cordelle , au filet cl
gnes et des moyens un peu moins au trident. La préparation de tous ces
significatifs. Quoi qu'il en soit, nous comestibles , résultats de l'industrieuse
pouvons ranger des cannes égyptien- activité de l'homme, est le sujet d'une
nes , plus ou moins élégantes , en bois partie de ces riches décorations {pl. 38
étrangers pour la plupart , et portant et 43); et, comme pour assurer aux cu-
des inscriptions où se trouvent des rieuses recherches des temps futurs une
noms propres et des dates , parmi les entière satisfaction, les Égyptiens n'ou-
objets antiques qui donnent à nos blièrent pas les scènes joyeuses qui ani-
collections un intérêt si varié et si maient des délassements plus bruyants :

puissant. des musiciennes jouant de la harpe


D'autres scènes civiles, peintes dans montée de cordes nombreuses , de la
les tombeaux, nous portent à croire lyre, du théorbe et de la double flûte,
3ue le chef de famille était revêtu exécutent des chants accompagnés de
une grande autorité dans sa maison, ces instruments ; des danseuses, cou-
et qu'il avait sur tous ses serviteurs le ronnées de fleurs et de guirlandes de
droit de haute et basse justice. Nous verdure, figurent des scènes animées
avons mentionné déjà des employés in- au bruit du tambour de basque ; d'au-
fidèles qui , nu temps de la vendange tres montrent leur habileté dans le

{pl. 38), prosternés à terre sur leurs jeu des balles, la saltation et les tours
genoux et leurs mains, reçoivent en de forte ou d'agilité; enfin, des hom-
présence de leur maître des remon- mes, accroupis devant des tables basses,
trances et la bastonnade; ailleurs, le jouent aux dames ou aux échecs avec
chef des bergers dénonce un des gar- des pièces nombreuses, mobiles, et
diens des vaches; il s'agit d'un veau; de couleurs différentes : et ceci fut
l'accusé se défend ; des membres épars peint long-temps avant les célèbres
d'un bouvillon sont exhibés comme inventions de P^lamède durant le siège
pièces de conviction, et le gardien re- de Troie (pl. 59).
çoit encore la bastonnade en présence Qu'aucun doute ne s'élève dans l'es-
de son maître, qui a prononcé con- prit du lecteur sur l'antiquité et l'a-
tre lui. vancement de la civilisation égyptienne,
A si curieux de l'inté-
ces détails telle que la révèlent aux siècles moder-
rieur des maisons égyptiennes , pour nes les ouvrages des siècles primitifs
une époque antérieure de dix (siècles de l'histoire ! L'examen nous conseille

Digitized by Google
KGÏPTE.
la foi , et les dépositions de l'antiquité qu'il commence à croître), le sol reste
dassique tout entière nous ont laissé couvert d'une couche plus ou moins
no mémorable exemple d'une telle con- épaisse de limon. La couleur de ce
fiance. Il n'y a rien de monstrueux dépôt fécond , d'abord noire, se change
ni de chétif dans les créations succes- en brun jaunâtre par l'effet de la des-
sives du génie égyptien ; tout son se- siccation à l'air; déposé, comme l'ar-
cret, ce lut le temps* Ce secret est gile, par couches horizontales , il en a
aussi à l'usage des sociétés modernes ; tous les autres caractères. Ce limon a
et a moins de supposer que la nature, été soumis aux analyses chimiques;
par une dérogation qui seule serait on y a reconnu que les quantités de
une monstruosité, aurait jeté l'intel- silice et d'alumine diminuent en rai-
ligence de la population égyptienne son de sa plus graude distance du Nil;
dans un moule plus exigu qu'elle ne l'a il perd en chemin tout le sable qui s'y

fait pour les populations européennes, trouve mêlé, et ce n'est plus, sur les
il faut reconnaître que l'Egypte a pu, par points les plus éloigués, que de l'ar-
l'action constante et naturelle de la gé- gile presque pure.
nération des siècles , arriver à la géné- Ce limon renferme tous les princi-
ration des idées qui l'avaient mise en pes qui servent à la végétation; les
possession de la connaissance ration- cultivateurs l'ont toujours regardé
nelle de l'univers , et l'avaient portée comme un engrais suffisant dans les
a diriger l'application de cette science terres; ils le transportent encore sur
vers la félicité publique. Que ne ferait celles qui leur paraissent en avoir be-
pas une des nations modernes les plus soin , et les observations de la physique
avancées , qui serait pendant mille ans corroborent en ce point cette tres-an-
a l'abri de toute perturbation naturelle cienne pratique agricole.
ou sociale! Et ces mille ans de paix Le tableau de la fécondité extraor-
ne manquèrent certainement pas à dinaire de l'Egypte a été exposé aux
l'Egypte : on n'est embarrassé qu'à yeux de nos lecteurs (J I et IV, pag.
l égard de la véritable place chrono- 3 à 11), tel qu'il a été composé par
logique de cette période de bonheur les observateurs les plus attentifs. Il
cette portion de l'espèce hu- nous reste à dire quelques mots des
travaux périodiques par lesquels l'hom-
Si, de ces détails de moeurs, nous me aidait au plus grand développe-
portons notre attention sur l'état de ment de ces germes inépuisables.
• agriculture, de l'industrie et du com- Les plus utiles , les plus considéra-
merce de l'ancienne Egypte, nous la bles de ces travaux étaient , sans nul
trouverons également instruite , expé- doute , ces canaux nombreux , et leurs

rimentée, et le temps, si propice en dérivations plus nombreuses encore,


bonnes observations, fut encore ici qui sillonnaient les terres cultiva-
son véritable maître. bles de l'Egypte. Les uns arrêtaient
On l'a déjà dit, l'Egypte c'est la par leurs berges élevées les envahisse-
vallée du Nil, le lit même du fleuve, ments du désert, d'autres, par les
rien de plus, ni rien de moins que le épaisses végétations de roseaux qui
terrain qu'il occupe chaque année à croissent naturellement sur leurs
l'époque de sa plus grande élévation. bords. C'est à ces canaux que les dé-
Là ou ses eaux n'arrivent pas, il n'y rivations si multipliées venaient se
a phis de végétation; c'est le désert, rattacher; et des lacs, existants sur les
sol inculte et incapable de fécondité, points les plus opposés, recevaient les
quand même les eaux du ciel v rendraient eaux qui n'étaient point employées à
suppléer à celles du fleuve. l'irrigation , ou dissipées par f év'apora-
Chaque année, après l'inondation tion. Lorsque le fleuve avait rempli ces
périodique du Nil (inondation dont le canaux , et qu'il commençait à baisser
maximum porte le volume du fleuve à on élevait à leur tête un barrage qui
ïiagt fois au-delà de ce qu'il est lors- retenait les eaux ; on fermait également

Digitized by Google
188 L'UNIVERS.
les ouvertures pratiquées pour l'écou- pays. Enfin ce fleuve fut un' dieu qui
lement sur le sol inférieur. On conser- eut ses prêtres et son culte, et du
vait ainsi les eaux nécessaires à Par- temps de Néron encore, les habitants
roseraent des terres après l'inondation ; de Busiris élevaient une statue en Phon-
elles étaient réservées d'une année à neurdu préfet romain Balbilïus, parce
l'autre dans Pintérieur du pays, et les que, par les grâces et les bienfaits de
bienfaits du Nil y répandaient perpé- ce gouverneur , P Egypte jouissait, plus
tuellement l'abondance et la vie. La fé- que jamais , de l'inondation juste et
condité de PÉgynte dépendait de l'en- exacte du fleuve-dieu. On sait aussi
tretien et de la' bonne disposition des quelles fêtes, quelles réjouissances
canaux; l'administration publique en animent chaque année parmi la popu-
faisait l'objet essentiel d'une surveil- lation actuelle de PÉgvpte, la rup-
lance non interrompue. Des postes ture des digues qui ferment les ca-
militaires gardaient les ouvrages con- naux : comme dans la plus haute anti-
struits à la prise d'eau de chaque canal, quité, la crainte de la stérilité et
ainsi que les digues principales. L'in- 1 espérance d'abondantes récoltes s'y
scription de Rosette, au nombre des renouvellent avec les commencements
actions de Ptolémée Epiphane qui ser- de l'inondation.
vent de motif aux honneurs extraordi- Lorsque le Nil était rentré dans son
naires qui IuLsont décernés par ce dé- lit, le travail de la culture commençait.

cret de l'ordre sacerdotal, rappelle que «Chacun, dit Hérodote, vient alors
dans la huitième année du règne de ce jeter les semences dans ses terres et
roi, le Nil ayant fait une crueextraor- y lâche ensuite des animaux; la se-
dinaire, il "a fortifié les bouches des mence est ainsi retournée et enterrée,
canaux , en y employant des sommes et il n'y a plus qu'à attendre la mois-
très-considérables, et qu'il y a établi des son. Les Egvptiens, particulièrement
postes d'infanterie et de cavalerie pour ceux qui habitent au-dessous de Mero-
les garder : cela se passait en l'année phis, sont ceux qui recueillent avec le
196 avant Père chrétienne, à l'époque moins de travail les fruits les plus
même du siège de la ville de Lycopolis, abondants : ils n'ont point à creuser
qui s'était révoltée. Dans l'ancienne inutilement les sillons avec la charrue,
croyance égyptienne, tout ce qui se ils n'ont ni la fatigue de retourner

rapportait a l'état périodique du Nil la terre, ni celle de la bêcher. Ils ne sont


était sacré comme le fleuve lui-même. assujettis à aucun des travaux auxquels
La religion intervenait dans les prin- les autres hommes sont condamnes
cipales circonstances, et consacrait, pour récolter , le fleuve se répandant
par l'assistance des dieux, les faits ue lui-même dans les champs, et se
physiques les plus indépendants de la retirant après les avoir arrosés. » I^s
volonté des hommes. On a appelé la tableaux des scènes agricoles, si mul-
clef du Nil le symbole même de la vie tipliésdans les représentations égyp-
divine. Enfin toute l'antiquité classique tiennes , confirment généralement ces
est remplie des souvenirs du cuite du rapports d'Hérodote (pl. 31);onyvoit
Nil , pere nourricier de l'Égypte. sans équivoque et selon ce qu'exigeait
Les Égvntiens, en effet, considé- la nature d'un sol meuble et léger
raient le Nil comme une manifestation comme Pétait le limon du Nil , qu on
réelle d'Ammon-Chnouphis, leur divi- lui donnait un premier labour à la
nité suprême, qui, sous une forme charrue, à laquelle deux bœufs ou
PÉgypte.
visible, vivifiait et conservait deux vaches étaient attelés au moyen
Homère que ce fleuve tirait son
disait d'un collier, et non pas d'un joug,
origine de Jupiter. Les Grecs, péné- comme dans d'autres pays. Un labou-
trés des doctrines égyptiennes, ont ap- reur dirigeait les bœufs avec un bâton,
pelé le Nil le Jupiter-égyptien, et un autre tenait les bras de la charrue.
les Égyptiens le nommaient le Très- Quelquefois on y employait des hom-
Saint, le père et le conservateur du mes , au nombre de trois ou quatre,

Digitized by Google
Google
••••
• # #» ••••
k - - -
% • * 4 •

• -

w
C w
V . . »
• «• • <•


C
...»

. H

Digitized by GoogU
Digitized by Google

• • • •
• •
• ••• • • • •
••. • ••
• •• • • •

V.
• • • •
• ••
• • •


• • • •
•• • •


<
• •


• •••
"V
••
• •
• • • •

-
*

ed by Google
zed by Google
• • mm ••••
• • • • • •
• • •

• • • •
• • •
• • •
• • * . •
• •
• • • • »

» »• » •

• • • » - - • .

• • • •

* • * • •
Digitized by Google
• ...
•a •• • •• <

*••
• • • m •

• • •

. - - . »
••%• ••••
• •

» » » «

«
EGYPTE. 189
tirant paisiblement à force de bras un sac était pendu à leur main gauche
la corde à l'extrémité de laquelle était ou à leur cou et de la main droite
,

liée la charrue. Celle-ci est ordinaire- ils lançaient les semences à la volée.
ment en bois dur, le sol n'exigeant Les chevaux, les ânes et les bœufs
que rarement que le soc fût armé de étaient également employés aux tra-
métal. Il en était de même de la houe vaux de l'agriculture, et il est à pré-
et de la bêche, qu'on employait dans des sumer que pour mettre une seconde
travaux de mains d nomme moins récolte, dans la même année, sur la
considérables que le labourage des même terre, qui était moins meuble
champs. On jetait ensuite la semence qu'immédiatement après l'inondation,
sur le sol ainsi préparé, et au lieu de on employait pour le second labourage
la couvrir par un second labourage, une charrue dont le soc en bois était
on conduisait sur le sol ensemencé garni de métal : on a cru en recon-
des troupeaux d'animaux domestiques, naître d'ainsi construites sur les mo-
afin de ta re fouler la terre et les grains numents. Les chars à deux roues, traî
ensemencés. Hérodote dit que cette nés par îles bœufs ou des chevaux,
opération se faisait à l'aide de pour- étaient employés aux travaux agricoles,
ceaux; niais n'auraient-ils pas dévoré et cet équipage rural était convena-
les grains plutôt que de les enterrer? blement construit pour le sol de la
Les monuments n'indiquent comme contrée.
employés à cette portion de l'ensemen- Peu de mois après les semailles , ar-
cement des terres que les chèvres et rivait celuide la récolte des blés; des
les moutons on voit des chèvres oc-
: moissonneurs les coupaient par poi-
cupées à ce travail dans les peintures gnées au-dessous de l'épi {pl. 31) ; aer*
des tombeaux de Giseh et de Koum- rière eux les femmes et les enfants ra-
el-Hamar. Dans celles de Beni-Hassan, massaient ces épis et les mettaient dans
et au milieu des autres représentations des sacs; des vases rafraîchissants,
des travaux agricoles, on remarque remplis d'eau et placés sur des tré-
trois hommes armés de corbasch qui pieds non loin des moissonneurs, ser-
frappent un troupeau de béliers et de vaient à les désaltérer pendant leur
moutons , en les poussant devant eux ; travail; ces vases, d'argile poreuse,
rie l'autre côté de ce même tableau sont encore en usage en Egypte. Celui
,

troisautres hommes frappent égale- qu'on y appelle qouleh, oubardaque,


inent les moutons et les poussent dans est !e plu*jconnu ; il est léger, por-
une direction opposée : ii faut voir tatif et d'une forme élégante, d'un
ici l'intention de mettre les moutons usage commode, et on le trouve par-
en mouvement, de les agiter sur le tout. Ses parois minces et d'un tissu
terrain circonscrit où les gardiens les poreux permettent à l'eau de transsu-
contiennent , afin de piétiner ce
, soit der d'une manière imperceptible; aussi
terrain frais et léger, pour tenir lieu la surface extérieure est-elle toujours
d'un léger labourage et y ensemencer couverte d'une couche humide qui se
quelques grains particuliers, soit pour renouvelle sans cesse aux dépens de
enterrer les grains déjà semés sur cette l'eau renfermée dans le vase, et c'est
terre. Nulle part l'on n'a vu les porcs par cette continuité d'évaporation que
employés à cette opération, malgré la température de l'eau intérieure s'a-
l'opinion d'Hérodote répétée par Pline baisse très - sensiblement. L'eau du
l'ancien ; et Diodore de Sicile est plus Nil , qui a 23 degrés de température au
près de la vérité, lorsqu'il dit qu'on fai- coucher du soleil , descend dans la
sait fouler les semences sous les pieds bardaque, pendant la durée de la nuit,
des bestiaux qu'on y avait lâchés. Le à 13 degrés, celle du fleuve étant la
grain foulé par ces animaux avait été même, et la quantité primitive de l'eau
répandu méthodiquement sur la terre du vase s'étant réduite à meins de moi-
labourée; un ou plusieurs semeurs tié. Cela arrive en rase campagne,
suivaient la charrue; une poche ou près du Nil et dans un courant pres-

Digitized by Google
190 L'UNIVERS.
que permanent. On n'obtiendrait donc lequel a pour objet réel de couvrir
pas le même résultat dans l'intérieur les semences, en renversant sur elles ta
des maisons; mais on le recherche par berge du sillon où le semeur les a ré-
quelques moyens artiliciels. Les an- pandues, et cette opération dans le se-
rions Egyptiens y employaient des éven- cond ensemencement de la même terre
tails très-solide, qu ils agitaient avec dans la même année devait tenir lieu
force près des vases; par là ils renou- du foulage par des moutons ou des
vêlaient continuellement l'air, favo- chèvres , qui mi l'Usait dans le premier,
risaient l'évaporation et accéléraient si voisin de la retraite des eaux,
le refroidissement. On reconnaît dans la première, i
Notre planche 3 1 , en regard de gauche, des scènes du registre inférieur
la page 125, représente le labou- de la même planche, la moisson du hk
rage de la terre à la houe, et à la au-dessous de l'épi, et l'usage des
charrue tirée par deux hommes au bardaques, tel qu'if vient d'être men
moyen d'une cordelle deux autres
; tionné. On y retrouve aussi la forme
laboureurs aident à cette opération : de la faucille égyptienne , moins ar
l'un appuie fortement sur la charrue, rondic uuccellede nos contrées, et plus
afin que le soc entre plus avant dans rapprochée de la forme de nos faut,
la la dirige d'une main
terre; l'autre La scène suivante inspirerait quelques
et porte dans l'autre le sac où la se- réllexions, comparée avec la première:
menée est contenue. On doit remar- les gerbes que des hommes lient ou
quer qu'il n'y a aucune différence de transportent sur les épaules , sont
costume entre les quatre personnages formées de brins bien plus longs que
qui concourent à cette opération , que ne le serait la paille du blé coupé pre?
les deux derniers ne portent aucune de l'épi. Ces longues gerbes sont for-
marque d'autorité, et ne paraissent niées de tiges de lin; on ne le coupait
pouvoir exciter l'ardeur des deux pre- pas, on l'arrachait ; lié en gerbes, il
miers que par la parolé. On ne peut était ensuite égrené au moyen d'un
point voir ici des serfs attachés à la peigne qui détachait la graine en me-
glèbe, et employés à la place des ani- nageant la tige. L'ouvrier qui procède
maux , à la cultiver au gré de son à cette opération appuie uu pied sur
seigneur. En Égypte il y avait si peu le talon uu peigne, et consolide ainsi
de fatigue a couper et à ouvrir la terre sa machine qui seconde efficacement
déposée par l'inondation , que le labou- son travail.
reur tirant la charrue ne nous parait Le dernier sujet de notre planche
pas réduit à une condition pire que nos nous représente l'inventaire de ces re-
manouvriers attelés à une petite char- coites en blés : le propriétaire le fait
rette , ou pliant sous le poids d'insup- mesurer au boisseau, et un scribe,
portables fardeaux. Pour l'Egypte agri- accroupi sur un monceau de ce grain,
cole, comme pour les exploitions ru- en écrit compte. On trouve ailleurs
le
raies des temps modernes, tous les cette même scène, un peu inoins
bras étaient utiles, et employés avec abrégée; elle mérite encore quelques
une réserve que la fertilité du sol et détails.
le concours des phénomènes naturels L'antiquité classique a rappelé quel-
dépouillent de toute espèce de mérite qu.es traits des mœurs nationales de
philanthropique. 1 Egypte, qui prouvent combien l'agri-

La même planche 31 représente aussi culture y fut honorée. Dans des cere-
Je labourage par la charrue à laquelle monies consacrées, les rois, dirigeant
des bœufs sont attelés le semeur jette
: la charrue de leur main, ouvraient
le grain dans le sillon qu'il vient de tra- eux-mêmes le premier sillon de la nou-
cer; toutefois, selon la place que le velle année rurale,
dessin lui donne, on pourrait, s'il n'y Dans ces encouragements publics,
avait point un défaut de perspective, la religion apporta aussi le tribut de
y voir le second labourage de la terre, son inîluence. Le paradis promis aux

Digitized by Google
Digitized by Google
Digitized
ÉGYPTE. 10.

tons et aux justes était comme un nouvelles obligations, et les champs


frdin délicieux , planté d'arbres cé- qu'on cultive sont aussi ceux de la
t&s, où les saisons se succédaient vérité elle a été admise avec ces ames
:

tas Tordre le plus


réeulier; où le Nil pures , dans les champs él) sées.
|ttciel, comme celui de la terre, ré- Les champs en culture y sont sillon-
jandait périodiquement les bienfaits nés de canaux tirés du fleuve de l'eau
je ses eaux divines, et dans les plus primordiale ; des arbres s'élèvent sur le
ftiles proportions ; où les plus riches sol. Les ames, sans distinction de sexe,
fkoites couvraient, sans interruption, s'y livrent aux mêmes travaux :elles
& champs d'une culture qui ne cod- labourent avec la charrue, tirée par
pas de sueurs, et où les fleurs de
(tit deux vaches, qu'elles excitent avec un
odeur la plus suave occupaient le fouet; successivement elles m -ment le
Tain délaissé par les fruits du goût grain, le coupent, lorsqu'il est mûr,
plus exquis. Les ames placées dans avec une faux , le font fouler par des
ueu de prédilection l'habitaient vaches, qu'elles dirigent attentivement,
us l'autorité du Seianeur de la joie et font, immédiatement après, l'of-
curur, c' est-a-dire de la cons' .ence frande des prémices de cette récolte sur
fuis reproche. Elles cueillaier libre- un autel place devant le dieu Nil, qui
ment ces fleurs et ces fruits. Ces est assis sur son trône. On trouvera
champs étaient le séjour et ia récom- dans toutes ces représentations une
îse des hommes vertueux. C'étaient preuve nouvelle des analogies nom-
champs de la vérité", et ceux qui breuses qui existaient dans les croyan-
habitaient ornaient leurs têtes de ces égyptiennes entre Tordre des choses
plume qui en était l'emblème. Parmi divines et les choses humaines, l'orga-
ames bienheureuses , les unes te- nisation du ciel et celle de la terre. On
ient en main la faucille propre à cou- eu trouvera d'autres encore dans le
r la moisson, et d'autres présentaient tableau des préceptes religieux de l'an-
s offrandes aux dieux ; ces scènes sont cienne Égypte, et des symboles qu'elle
souvent répétées dans les tombeaux, et adopta pour les faire connaître aux
(annoncées par ces paroles : «Les ames yeux, en même temps qu'elle s'efforçait
pures font des libations de l'eau, et de les inculquer dans les esprits.
des offrandes des grains des campa- Du reste , les pratiques des anciens
gnes de gloire; elles tiennent une pour purilier, serrer et conserver les
faucille et moissonnent les champs grains, différaient peu de celles des
qui sont leur partage; le dieu soleil modernes : on le vannait, en le laissant
leur dit : Prenez vos faucilles , mois- tomber au travers d'un courant d'air
sonnez la récolte ; emportez la ré- qui emportait le sable et la poussière;
colte dans vos demeures, jouissez- on l'enfermait ensuite dans des sacs
en, et la présentez aux dieux en pour le transporter au grenier, où
offrande pure. » il était soit entassé , soit déposé
Dans le Livre de la manifestation dans des coffres plus ou moins vas-
de la lumière, ou Rituel funéraire tes. Si Ton s'en rapporte à des pein-
e
(voy. pag. 123, I * colonne), on retrouve tures nouvellement découvertes en
aussi des scènes d'agriculture parmi Égypte , l'usage de silos n'y aurait pas
les peintures religieuses dont cet ou- été inconnu. On y voit, en effet, que
srage est orné; mais dans Tordre réel le blé, porté par des hommes, est
de ces mêmes scènes , la culture des versé dans de vastes récipients rangés
iliamps ne se voit qu'après les cérémo- ou taillés sur une même ligne, tous
nies d'embaumement de la momie du de forme conique , et qui paraissent
défunt, et qu'après qu'elle a été dé- pouvoir être fermés par le haut des
posée dans Ja chambre sépulcrale, 'au- l qu'ils ont été remplis. Une ouverture
tre vie a donc commencé pour lui en forme de petite fenêtre carrée était
c'est son ame, sous les formes humai- pratiquée vers le milieu de leur hau-
nes de son corps, qui accomplit ses teur, et servait, soit à vider la partie

Digitized by Google
192 LXMYRRS.
supérieure du grain, soit à l'aérer lors- l'usage de toutes les classes, et s
qu il n'était pas plein. lement pour les familles royal
La fécondité de l'Égypte et le com- sacerdotales.
merce de ses grains, qû elle transpor- Une autre substance, le byssu
tait au loin {pl. 44). lui avaient néces- rait avoir été, pour l'ancienne
sairement fait chercher et découvrir les un autre objet de grande conso
moyens de les conserver sains et frais tion. C'est avec des bandelettes d<
pendant des mois et des années. Il pa- matière que les momies étaient
raît aussi qu'on enfermait de même le loppées, selon Hérodote, et on
blé dans son épi et sans être battu; ployait habituellement dans In;
des peintures représentent bien claire- ment. Bien des écrivains , après
ment cet usage. dote, parlent diversement de
La culture du lin n'était ni moins substance, et ils ont jeté des d
abondante ni moins étendue en Égypte sur sa nature et sur sa patrie : le
que celle des céréales. Les écrivains ont considéré le byssus comnx
arabes du moyen âge en ont décrit la espèce de lin, plus blanc et plus
récolte en ces termes : On arrache le que 'e lin ordinaire; d'autres, ce
lin , brin à brin , quand il est devenu une e. oèce de laine ; enfin on le <

jaune et qu'il conserve encore de origina.re de l'Inde et transplan


riiumidité; on l'arrache le matin, puis Égvpte. On s'accorde assez à n
on Tétend , par couches légères , sur naître que cette espèce ele iin
différentes lignes, l'étalant sur la terre produite par un arbre. La partie a
afin qu'il sèche. Au bout de quatre ou que de l'Égypte supérieure, dît IJ
cinq jours, on le lie par petites poi- engendre dès arbres qui portent
gnées de la grosseur de cequ'un homme laine que les uns appellent Gossi
peut embrasser avec ses deux mains et les autres Xylon. On trouvait i

réunies ou de ce qu'on peut lier avec


, da s l'Inde, dit Hérodote, un a
,

un bout de corde long d'une coudée ou sauvage qui avait pour fruit m.e e>
tant soit peu plus. On le frotte ensuite de lame supérieure, par sa beaul
entre les deux mains, pour faire tom- ses qualités , à celle que donnent
ber les feuilles; puis on l'expose au moutons ; et c'est avec cette laine
soleil sur des racines, en serrant les les Indiens fabriquaient leurs v
bottes l'une contre l'autre. Si on ajoute ments. Le rapprochement de tous
à ce passage arabe , dont le texte est passages montre assez clairement
emprunté aux notes de M. le baron de le byssus des anciens n'était pas ai
Sacy, à la suite de sa traduction fran- chose que le coton ; que cet arbre e
çaise d'Abdallatif, ce qui a été déjà cultivé en Égypte; et S. Jérôme aj\
au moyen
dit sur l'usage d'égrener le lin 3u'il y était en grand nombre. C
d'un peigne, l'auteur arabe aura décrit onc le coton qu'il faut reconna
les procédés mêmes des Égyptiens, dans tous les passages des anciens
tels qu'ils sont fréquemment repré- latifs à l'usage du byssus en rtgvj
sentés dans les peintures des toml>eaux, L'inscription de Rosette fuit meut
notamment dans ceux de Keni-Hassan. de cette matière, et rappelle un lait i

Le lin récolté était déposé dans des portant, quand elle nous apprend (
couffes dont on chargeait les ânes ; il les temples de l'Egypte renfermai'
était ensuite teillé, peigné, filé, tissé, des fabriques de tuile de byssus,
pour produire cette grande quantité qu'ils étaient tenus chaque année
de toile de lin dont l'abondance en une redevance de ces toiles envers
Egypte était aussi une branche impor- fisc royal; et quoique le monu/w
tante dé commerce , favorisée par l'a- qui rapporte ce lait curieux ue i

bondance même de cette production, monte qu'au temps des Ptolémee


parla finesse et la blancheur auxquelles comme lu domination grecque necfw
on pouvait l'amener, et par l'habileté gea rien à l'organisation intérieure d
des ouvriers qui le travaillaient pour temples, on peut conjecturer avec qu

Digitized by Google
EGYPTE it GTVTF.N
14

Digitized by Google
«...

Digitized by Google
EGYPTE. M
: confiance que l'existence des
, fa- fécondes toutes les sources de la pros-
nes de toile de bysstis dans les périté publique.
sons sacerdotales était bien plus Au nombre des productions natu-
ienne encore. La
substance et l'é- relles employées habituellement à la
*e qui en était faite furent dans nourriture des hommes, il faut ajouter
s les cas connues en Égvpte des la celles qui sont désignées par Hérodote
> haute antiquité. comme particulières aux habitants des
-orsque le Pharaon eut entendu Jo- contrées marécageuses de l'Egypte.
a, et, satisfait de ses avis, voulut Pour se procurer leur nourriture, dit-
témoigner sa gratitude, il lui donna il, ils ont recours à divers genres d'in-

;ouvernement de l'Egypte, lui re- dustrie : lorsque le fleuve, gonflé, se


Panneau royal, et le fit déborde et couvre les champs voisins,
ie tunique de byssus; aussi Clé- il croît dans ses eaux uue grande quan-

it d'Alexandrie a-t-jl assuré que tité d'une espèce de lis uue les Egyp-
ivssus fut connu en Egypte dès les tiens appellent Lotus (le nympJuea
>ps de Sémiramis, qui fut à peu lotus des botanistes modernes). Ils
s contemporaine de Joseph. On peut moissonnent ces plantes et les font sé-
tefoisreculer encore la fabrication cher au soleil; ils réunissent la graine
l'usage des étoffes de byssus en et en forment une pâte avec laquelle
jpte; ses relations politiques, son ils fabriquent un paiu qu'ils font cuire.
nmerce avec la Syrie et rlnde, la La racine du lotus était également
inaissance réciproque des produc- bonne à manger, et asse2 douce au
ns propres à tous ces pays, par l'in- goût; une autre variété de lis produi-
mediaire des Phéniciens, qui en sait des graines de la grosseur d'un
ient les intrépides courtiers, font noyau d'olive, bonnes à manger fraî-
usemblablement remonter l'usage ches ou séchées; la tige du papyrus
s toiles de byssus aux premiers était aussi une nourriture usuelle : pour
nps de l'histoire du commerce en la rendre plus délicate, on la cuisait
âe. Pour l'Egypte , ses momies de au four; enfin, le poisson, vidé et seu-
otes les époques sont enveloppées de lement séché au soleil, était la plus
*ges et de bandelettes de coton , gé- habituelle nourriture des habitants des
ralement reconnu pour une des es- parties du territoire égyptien les plus
res du byssus des anciens il fut un
: humides.
•j*t d'une
grande importance pour Les légumes entraient particulière-
*?riculture, l'industrie et le com- ment dans le régime nutritif des en-
de l'ancienne Égvpte. Moïse fants, en général très-nombreux dans
le tabernacle de tissus égvptiens; toutes les familles, par l'effet de la loi
prophète Isaïe prédisant à la classe uni , sans distinction des femmes légi-
wustridle égyptienne de prochains times de celles qui ne Tétaient pas
mineurs, s'écrie : « Ils seront réduits considérait comme frères aux mêmes
!a misère, ceux qui cardent le coton droits tous les enfants du même père.
S", et tisserands de tissus
les Les Égyptiens, selon Diodore de Si-
J
Unes. » Le travail de ces ouvriers se cile, les' nourrissaient sans faire de dé-
°it dans
des peintures antiques, et pense et avec une incroyable facilité
« ouvriers en ce genre étaient très- en leur donnant des aliments cuits
ombreux en Égvpte. La barbarie des très-simples, tels que les rejetons du
^«quêtes les priva de ces avantages : papyrus, qui pouvaient être rôtis au
* {wuvernement actuel
y a ramené feu ou sous le cendre, ou bien les ra-
ancienne prospérité en renouvelant cines et les tiges de plusieurs plantes
'^anciennes plantations de coton : on marécageuses, soit crues, soit bouil-
^ferait l'ancienne Egypte tout en- lies ou rôties ; et si Ton ajoute à l'éco-
en rétablissant ses anciennes ins» nomie d'un tel régime, le concours
•tutions.
Le gouvernement des Pha- d'une économie encore plus complète
«*a y avait découvert et rendu au sujet de l'habillement et de la chaus-
Lieroison. (Égypte.) 13

Digitized by Google
m L'UNIVERS.
sure, dont les enfants se passaient fort gne , et des tableaux représentant te
bien dans un climat aussi favorable tes les opérations pratiquées pour fai
on sera porte à croire à ce que Diodore la récoitedu vin : le raisin est cou
ajoute à ce* premiers renseignements, par vendangeurs, déposé dans d
les
c est-à-dire, que la nourriture et Tha- paniers transporte dans des cuve
,

billemeut d'un enfant ne coûtait pas, et est foulé par des hommes; le î
pour toute son enfance, plus de 18 à clair est tiré Je cette cuve et mis da
20 fr. de notre monnaie. On comprend des vaisseaux de bois, d'où il est e
aussi, par ces faits avérés, la grande suite déposé dans des amphores.
population de l'ancienne Egypte, et Le vin qui reste dans le marc de n
comment elle put élever ou creuser en sin en est extrait par divers procéda
aussi grand nombre ses prodigieux par la torsion ou par la pression , *
monuments. a bras d'homme soit à levier, et I

Plusieurs auteurs anciens ont ex- amphores où le vin est réuni su


pressément distingué diverses qualités ensuite soigneusement bouchées et ra
de vins produits par le sol égyptien. gées dans la partie basse de l'habit
Le vin maréotique, récolté dans" le voi- tion, celle qui est le plus à l'abri <

sinage du lac Mareotis,près d'Alexan- l'atteinte de la chaleur. Ces proced


drie (ce qui faisait aussi donner a cette eux-mêmes sont une preuve de Peu
espèce de vin le nom d'Alexandrin), tence de la vigne dans toutes les pat

f>ro venait, selon Athénée, d'un excel- ties de l'Égypte; ie vin est souva
ent raisin, et il était blanc, léger, mentionné dans les inscriptions hier
parfumé et diurétique. Le même auteur glyphiques on y en distingue même c
;

n'accorde pas de moindres éloges aux plusieurs qualités il nous paraît dot
:

vins de la Thébaïde, notamment à ceux avoir été d'un usage général dans lai
de Coptos; il ajoute aussi que le vin cienne Egypte.
de chacune des diverses parties de Plusieurs espèces de bières ou ai
l'Égypte avait ses qualités particuliè- très liqueurs termentées, et l'eau d
res et un goût assez prononcé pour Nil, étaient aussi une boisson univei
les faire distinguer les uns des autres. sellement adoptée.
Ces témoignages sur la culture de la Une assez grande variété de fruit
vigne dans toute l'Égvpte, sur l'abon- ajoutait encore à la variété de la noui
dance et la variété Je ses produits, riture; le figuier et autres arbres an"
sont tirés d'un écrivain grec postérieur Jogues croissaient sur le sol égyptiei
de six siècles à Hérodote qui assu- les terrains marécageux donnaiei
rait que les Égyptiens n'avaient pas aussi leurs productions particulières
de vignes. Il est vrai que cette asser- les espèces de melons et de pastèque
tion d'Hérodote peut ne regarder que y étaient diversifiées, et les peinture
les habitants de la partie ensemencée des hypogées en donnent des figure
de l'Égypte , car c'est d'eux qu'il parle assez exactes , pour reconnaître ce
expressément dans le chapitre où il productions placées sur les tables d'of
affirme qu'il n'y a pas de vignes, et frandes religieuses, ou sur la, tabh
c'est par cette explication de cette même domestique. L'ail et l'oignon d'Ég\(>ù
assertion que les paroles d'Hérodote ont presque de la célébrité; du nioifli
ne se trouveront plus en contradiction l'histoire a consacré leur agréable sa
manifeste avec les monuments les plus veur. 1^ Bible raconte que les Israé
authentiques , et, sans nul doute , an- lites , dans le désert , dégoûtés de l<
térieurs de bien des siècles au temps manne, leur unique nourriture, mur-
où i'écrrvain grec visita l'Egypte, murèrent tout haut , se plaignant
comme le sont ceux d'KIéthya, Béni- n'avoir plus de viande à manger, et
Hassan, Gizeh et Thebes. 11 n'est pas regrettant avec douleur le poisson
rare, en effet , de retrouver dans les dont ils se nourrissaient gratis en
monuments de l'Égypte les preuves Egypte, et surtout les pastèques, les
incontestables de la culture de la vi- concombres, les poireaux, l'ail et

Digitized by Google
ÉGYPTE. 105

«gnon de cette contrée; privés de des tles de


Méditerranée, qu'à cel-
la
i fruits de la terre du Nil leur vie , les de la Guinée ou même de l'Abvs-
lit languissante , ne vovant que sinie. En F.gvpte, le froid ne sus-
anne devant leurs yeux. Hérodote et pend pas la végétation , la défoliation
ine ont conservé 'une vieille tradi- des arbres n'a lieu qu'en décembre et
>n, bien incertaine tant elle est janvier, et la verdure renaît en fé-
wîîe, d'après laquelle la seule dé- vrier ou mars : c'est un hiver sembla-
lire des raves, ail et oignons con- ble à un long printemps. L'acacia , les
sumés par les ouvriers qui construi- sycomores , les cassiers et d'autres
•ent la pyramide de Chéops, se arbres touffus ornaient les jardins et
rait élevée à six cents talents d'ar- donnaient beaucoup d'ombre, et le
at, plus de huit millions de notre dattier était d'une grande utilité jusqut
onnaie. Ceci ne prouve que l'anti- dans ses derniers filaments : son fruit
iitê de l'usage de ces fruits comme sain et nourrissant était un aliment
wrriture des peuples égyptiens ; on agréable ; son bois poreux et léger se
il, du reste, que rail et l'oignon prétait facilement au travail du me-
Toeut beaucoup de leur saveur aYre nuisier et du charpentier ; ses débris
désagréable à mesure qu'ils crois- fournissaient un bon combustible ; avec
ut dans des climats d'une température ses feuilles on faisait des paniers, des
us élevée. Les Européens uKgvpte couffes et des nattes ; et avec le réseau
ont pas pour ces drux productions de ses feuilles de bons cordages peu
éloignement qu'elles inspirent dans coilteux.Le dattier croissait également
os contrées ; leur gout est en effet dans les sables du désert et dans le
1er, moins importun. limon du Ml. I n grand nombre de
ne paraît pas que les Égyptiens
Il plantes y croissent aussi spontané-
ient connu le riz; les écrivains anciens ment, sans être particulières à PÉ-
ai nomment les lentilles de Peluse, pypte; le Nil et les vents les y ont
c parlent pas du riz d'Egypte. Théo- apportées de la Barbarie, de la S*
iiraste mentionne le riz de l'Inde, et rie, de l'Arabie, de la Nubie et ae
u peut conjecturer qu'il n'a été in- l'Inde, et leur végétation annuelle y a
roduit en Énypte, où sa culture est confondu les plantes étrangères avec
ujourd'hui générale, qu'au temps des les espèces primitivement indigènes.
ahfes, qui favorisèrent l'introduction Quelques-unes ont presque disparu ,
les plantes étrangères. et le papyrus, autrefois si abondant,
Du reste, on peut considérer comme est aujourd'hui très-rare, et reste en
ipplicables aux temps primitifs de Pf> Abyssinie, d'où il ne descend plus avec
r>pte civilisée ce qui s'y passe au- le Nil. Le papyrus , comme les. nym*
ourd'hui sur le terrain cultivable, Pu- p/ia a et le pi&tia ont existé en Egypte
liiormité des phénomènes naturels avant que le riz et la canne à sucre y.
nant exigé l'uniformité des pratiques fussent transportés de l'Inde. Les ro-
ikricoles, et les anciens Egyptiens seaux et les joncs fournissaient autre-
o'etant restes en rien au-dessous des fois comme aujourd'hui ces belles nat-
modernes pour la connaissance et l'ex- tes qui sont devenues un objet de
ploitation de leur pays. Alors comme commerce. iNous avons parlé des vas-
aujourd'hui les dépôts limoneux du tes pâturages de la basse Égypte et
produisaient les plantes propres aux
.Nil de PHeptanomide; il est très- vraisem-
marais et aux terrains humides, tan- blable qu'ils consistaient surtout en
dis que le sol du désert s était ré- prairies artificielles; car alors, comme
serve les plantes à ti^es dures et li- aujourd'hui , les dépôts du Fui auraient
gneuses, armé» d'épines, et à Heurs produit plus de roseaux et de plantes
; néanmoins PÉ- coriaces et épineuses que d'herbes pro-
a peu près incolores

tyçte n'était pas tout à fait de l'Afri- pres à la nourriture des bestiaux; la
que, et ses productions végétales étaient paille des divers grains cultivés servait
plus analogues à celles de la Syrie et au même usage ; enûn, les tiges vertes
13.

Digitized by Google
if»; L'UNIVERS.
des pois, des lupins, des gesses, des rature était entretenue à l'aide d'
haricots, pouvaient ajouter à cette es- feu modéré , jusqu'au moment où I

frèce de ressource dans un pays où poulets venaient a éclore, et, penda


'éducation des bestiaux était une par- tout ce temps , un ouvrier s'ooeup
tie très-importante de l'agriculture. jour et nuit à les retourner. Ce pi
La race des chevaux y était, fort sage de Pline est la meilleure exp
belle , semblable à celle qui vient au- sition sommaire de ce qui se pratiq
jourd'hui du Dongola ; Salomon s 'ap- encore aujourd'hui. Le bâtiment <
provisionnait de chevaux dans les ri- un carré long, coupé à l'intérieur
ches haras de l'Égypte. Mais un fait dans toute sa longueur par un cor;
très-digne de remarque, c'est qu'on dor qui sépare deux rangées de petit
ne trouve sur aucun monument la pièces , au nombre de douze au ph
ligure ni la mention du chameau; ha- Chaque pièce est à deux étages;
bitant de l'Arabie, ce précieux animal plus bas est le couvoir; au-dessus,
paraît avoir été inconnu aux anciens chauffoir; une ouverture au milieu
Égyptiens pour leur service. son plancher répandait la chaleur da
Nous ne devons pas omettre de rap- le couvoir. Des hommes sont élevés
peler ici un des moyens qui , avec père en fils à la conduite des fours
les produits de l'agriculture , contri- poulets. Les œufs apportés sont in
buèrent le plus à assurer à l'habitant de crits avec le nom du propriétaire
l'Egypte une nourriture excellente et on les place ensuite dans le couve
dont l'abondance garantissait le bas sur un tas de paille hachée; on eu m
prix ; nous voulons parler des poulets jusqu'à trois un sur l'autre : rompit
I

produits par l'incubation artificielle. tement rempli, un couvoir en contiei


Cette méthode singulière, qui fait quatre à cinq mille. Le chauffoir e
encore l'admiration des voyageurs mo- ensuite garni de braise allumée, et pr
dernes , et qui n'a été introduite dans venant de diverses matières ou con
aucun pays d'Europe , fut connue et bustibles , notamment de fumier mâ
pratiquée par les anciens Égyptiens* de paille hachée , ce qui a pu induir
Comme ceux d'aujourd'hui, ils fai-f en erreur ceux qui ont dit que Vina
saieut éclore les poulets par le moyen bation s'opérait par la chaleur d
des fours. Diodore de Sicile en parle fumier ; méthode que Hadrien n'a pî
comme d'un art depuis longtemps en cru devoir se permettre d'indiquer
usage parmi eux; Pline a dit à peu pudet dicere. On renouvelle cette brai;
près la même chose que Diodore ; deux fois par jour; on retourne et o
Aristote a décrit, le premier, cette remue plusieurs fois les œufs pendar
singulière opération, et l'empereur les dix premiers jours; on continu
Hadrien, qui la vit encore en vigueur de les soigner durant un égal intei
à l'époque de son voyage en Égypte, valle. Le vingtième jour on commenc
ne manqua pas de la mentionner dans à trouver quelques poussins ; le joi
sa lettre relative aux mœurs et usages suivant , ils sont éclos en très-grau
de cette contrée. Ainsi avant Aristote, nombre : ou aide à ceux qui ne peuvez
du temps d'Hadrien , et de nos jours briser leurs coquilles. Les plus faible
encore, les fours à poulets ont été con- sont placés dans le corridor qui fl
nus des Égyptiens. Les auteurs qui échauffe par le voisinage des fours
ont consigne dans leurs écrits quelques les plus torts sont réunis dans un
données sur ce procédé remarquable chambre, pour être délivrés aux prfl
paraissent s'accorder sur un point fort prietaires des œufs, qui ont l'art tti
contestable , lorsqu'ils disent qu'on n'y moins utile d'élever ces poulets sai
employait que la chaleur du fumier. le secours des poules , et au moyen I
Mais un second passage de Pline lui- soins qui sont indispensables pour ri
même est bien plus instructif; les liser le résultat de l'incubation eM
œufs, dit-il, étaient mis sur de la même. Us sout confies à des fenui*
paille dans une étuve dont la tempé- expérimentées, qui ne se charged

Digitized by Goog,
ÊGYPTE.
juc de trois ou quatre cents poulets condité extraordinaire de l'Égypte, et
a la fois; elles les gardent quinze à que le Nil , dont les eaux étaient habi-
vinçt jours , soigneusement nourris lement dirigées au moyen d'un système
loges sur un terrain sec , et préservés d'arrosement longtemps étudié, et
surtout de l'humidité des nuits. Ces conduit à une incontestable perfection
nombreux produits sont ensuite ven- locale , était , en effet , le créateur , le
dus. Le P. Sicard, qui a voyagé en père nourricier et la providence de
Egypte dans le siècle dernier, a re- cette contrée.
connu qu'il v existait alors près de Les produits de la terre étaient aussi
quatre cents fours à poulets, dont cha- variés qu'ils étaient abondants ; et l'in-
cun fournissait deux cent quarante dustrie égyptienue sut les approprier
mille têtes, ce qui portait à cent mil- aux besoins de toutes les classes. Cette
lions de poulets ceux que les fours pro- industrie, si l'on considère la diversité
duisaient chaque année en Egypte. de ses résultats, ne fut point resserrée
Quand on les vend , on ne les compte dans les étroites limites où végète celle
pas,on les mesure au boisseau comme de l'Égypte moderne ; l'ancienne pos-
les grains : il y en a toujours quel- sédait tous les arts de première néces-
ques-uns d'étouffés, mais on s'épar- sité, confectionnait tous les objets d'un
gne ainsi la peine de les classer et de usage universel ou de consommation
les apprécier selon leur grosseur. On journalière, fabriquait les plus com-
rend en poulets les deux tiers des œufs munes comme les plus riches étoffes,
qu'on a reçus. servant à couvrir le fellah, à habiller
Si l'on voulait remonter à l'origine les familles riches ou puissantes, à
de cette méthode, et en expliquer la orner leurs demeures, à satisfaire
réussite, on ne devrait pas oublier de leurs goûts , et le commerce exportait
faire remarquer deux choses essentiel- dans des contrées voisines ou lointaines
les; la première, combien il était utile la plupart de ces produits , sources de
de multiplier une nourriture aussi grands bénéfices, réalisés par les ventes
saine que celle que fournit la viande ou les échanges.
île volaille, et la seconde
, que sans
, Nous avons déjà donné plus haut
cette méthode artificielle, cet avan- une nomenclature qui suffira pour jus-
tage aurait manqué à l'Egypte ,
puis- tifier ce qui vient d être dit : des vases
qu'il est constant que dans la saison de toutes formes et de toutes matiè-
où les poules commencent à couver, res pourvoyaient largement aux usages
l'ardeur de l'atmosphère les pousse domestiques, à la décoration des pa-
dans la société des mâles et leur fait lais, au service des prêtres et des
abandonner leurs œufs. L'étude atten- dieux. Les fabriques de toiles de coton
tive du pays avait dû faire remarquer de lin ou de laine, grossières pour un
aussi qu'il suffisait de la chaleur du emploi plus commun , ou d'une finesse
sable pour faire couver les œufs d'au- égale à celle des plus parfaits ouvrages
truche et de crocodile abandonnés dans de l'Inde en ce genre, brochées ou bro-
le désert ou sur le rivage du Nil. En- dées, blanches, teintes ou peintes,
fin , les oies , les canards, et peut-être pouvaientabondamment fournir à tou-
aussi d'autres oiseaux domestiques, tes les classes de la société , et les pays
étaient également multipliés par ces étrangers se faisaient pour cet ob|et
incubations artificielles : on a fait jus- encore les tributaires de l'Egypte. Les
u'ici d'inutiles efforts pour l'intro- étoffes babyloniennes, peintes avec
3 uire dans nos climats. comme le disaient les anciens,
l'aiguille,
Nous aurions à indiquer encore quel- furent célèbres dès la plus haute anti-
ques autres pratiques particulières à quité historique. La rivalité contem-
I Égypte ; mais il suffit à notre plan , poraine des étoffes égyptiennes n'est
pour faire apprécier ces procédés, de pas moins remarquée par les histo-
rappeler que sur ces pratiques agricoles riens, et ils distinguaient les toiles
et économiques était foudée cette fé- peintes de couleurs diverses fabriquées
198 L'UN]
9

à Babyionne, des toiles tissées de cou- ornée de plusieurs dès qu'un lavage
leurs non moins riches et non inoins l'étoffe dans un autre liquide co po*
variées fabriquées en Egypte. Amasis a détruit le mastic qui préservait
envoya en présent aux Lacedémoniens cette teinture le fond primitif de 1'

une cotte d'armes (ou un ornement de toffe, ou même d'autres dessins pré

Soi tri ne), ouvrage remarquable d'étoffe lablement imprimés. Dans tous c
e lin , dont le tissu représentait de procédés, l'Egypte employait avec si
nombreux dessins de ligures diverses. cès les moyens perfectionnés de 1*1
Elle était relevée de broderies d'or et du teinturier, éclairé par les plus sdr
de franges de coton; et ce au il y avait expériences de la chimie appliquée
de plus merveilleux encore dans ce tra- la connaissance des plantes et des ru
vail , c'est que chacun des fils qui for- taux colorants.
maient le tissu de l'étoffe, quoique L'idée de ces pratiques usuelles, p<
très-fin , était composé de trois cent fectionnées par la véritable scie no
soixante brins , tous visibles. Il n'exis- amènerait à l'examen d'une questic
tait qu'un second chef-d'œuvre sem- très -importante pour l'histoire d
blable, celui que le même Amasis avait connaissances humaines et celle di
consacré à Minerve, dans le temple découvertes qui appartiennent réel]
de Linde. Tel est le récit d'Héro- ment aux anciens, ou auxquelles I
dote. modernes peuvent prétendre avec ui
Cette abondante production de tissus, évidente raison. L'examen d'une tel
et la richesse descostumes reproduits question offrira toujours à la boni
sur plusieurs de nos planches (voy.p/. foi, dans un de ses cotés du nioiu.<
24 et 25) , prouvent aussi que l'art du d'inextricables difficultés. Les te\t<
teinturier devait être aussi perfectionné des écrivains de l'antiquité, qui conce
en Égypte que ' celui du tisserand. nent les procédés des arts, ivéser
L'Egypte possédait les principales subs- tent en effet trop d'incertitude à 1
tances colorantes; elle rivalisait en critique, pour qu'elle puisse en dè
ce point avec Tyr, Babvlone et l'Inde, terminer le sens avec cette rigueti
et Von sait que les principaux com- étymologique et traditionnelle qui n
merçants tyriens avaient un établis- permet à personne de douter qu
sement à Memphis. tel mot indique en effet tel proced
Pline parle avec admiration d'un des arts techniques, ou tel produit d
procédé singulier employé par les Égyp- l'industrie chimique ou manufacttl
tiens pour peindre sur les tissus, et, rière. En un autre coté tout est cer
avec son gout habituel pour l'antithèse, titude; c'est celui qui ne concerne qu
il dit que ce n'est pas avec des couleurs les faits matériels et d'une incontesté
qu'ils peignent de cette manière, mais ble évidence. Tout ce que nous mon
avec des drogues qui détruisent les trent au grand jour les monument
couleurs : l'étoffe est plongée dans le égyptiens est vrai pour l'Egypte , t
liquide chaud ; elle en est retirée d'une ne saurait lui être conteste. Des sa
seule couleur , et bientôt elle se trouve vanta et des voyageurs modernes on
ornée de plusieurs. Mous pensons qu'il soigneusement cherché a connaître e<
s'agit ici d'un procédé qui fut de tout qui lui appartient dans la théorie et l«'

temps connu dans l'Inde, qui est coin, pratique des arts utiles à la civilisa*
munément mis en pratique par l'in- tion, et leurs observations, que nom
dustrie européenne, et qui est connu résumons dans cet écrit , et qui sonl
sous le nom de d ssius réservés. Ou corroborées par le témoignage df*
imprime en effet ce dessin même sur monuments originaux que nous avons
l'étoffe en un mastic inattaquable par ens sous les yeux, nous donnent une
une teinture liquide chaude ou froide, idée avantageuse de la haute expérience
et d'une couleur quelconque; l'étoffe de P Égypte en ce point, à des épcxines
plonsée dans cette teinture en sort très-reculées de l'histoire de 1 indus-
d'une seule couleur , et elle se trouve trie humaine.

)igitized by Google
)igitized by Google
9
• • • •
. « » • * • «

. « •
• • • • • •

• • • •
• • •
• » •
••••

• •
« • • • •

• • • • • • • •
• • • • •

. • • -
• • •

Digitized by Google
• •

• • • ••••
. • * •
• . » •
«
• » » . •
...»
• « • «
• • * *

I
- ' •
• - - é

- • .

Digitized by GooqU
ÉGTPTE. 199

UÉgvpte aTait élevé de grands mo- en pourpre, en èear-


les étoffes teintes
numents d'architecture plusieurs siè- late, en cramoisi, la laine, ou poil de
clesavant la venue d'Anrahain. Des chèvre ou de chameau, le lin, le bys-
barbares les démolirent; et, au XI\* sus, les substances tinctoriales et aro-
ïieele avant Père chrétienne délivrée , matiques, sont mentionnés dans les
fceettesoldatesquemeurtrièreauxarts écrits de la même époque. Les Israéli-
et m\ lois , elle rebâtit de nouveaux tes, oui s'étaient instruits dans les
tonples à ses dieux ; elle
y employa arts de l'Égypte, mettent en œuvre
d?> débris des anciens édifices, et on tous ces matériaux . et exécutent tous
trouve encore ces débris a leur place les ouvrages qu'exigeait le nouveau
dans les masses des monuments nou- culte qui leur est imposé par Moïse, et
veaux qui datent aujourd'hui de trente- qui demandait le concours des sculp-
sept siècles. La sculpture et la peinture teurs, fondeurs, menuisiers, charpen-
ornaient ces édifices, et le luxe des tiers, orfèvres, brodeurs, parfumeurs,
costumes et du mobilier sacré répon- graveurs en pierres lines, etc., etc.;
dit a leur magnificence. Les pierres Moise lui-même fait la dissolution du
Et les métaux précieux , les étoffes de veau d'or. La même industrie se re-
prix, dont le travail avait augmenté trouve encore sous Salomon, par suite
encore la valeur , étaient employés de nouvelles communications avec les
dans la pompe des cérémonies, ou- Égyptiens, et le plan du temple du
vres avec art et ornés avec goilt. Les vrai Dieu n'ft»t (pie l'exacte copie de
métaux communs
et toutes les pro- chacun des grands temples de l'Kgvpte.
ductions utilesétaient en même temps Cette même tradition des arts passa
appropries à tous les besoins, et se- successivement dans la Grèce et chez
c nd.uent, comme d'actifs auxiliaires, les Romains; et si qui, parmi
ceux-ci ,

les de toutes les classes. On n'en


efforts les peuples de l'antiquité, sont entrés
pourra douter à l'exposé sommaire des les derniers à la civilisation par la
Dits recueillis et décrits par les plus voie des sciences et des arts, ont su,
Oacts observateurs , dont nous résu- comme on n'en peut clouter, raffiner
mons ici les attentives recherches, qui l'or parle plomb, le mettre en feuilles,
ont embrassé a la fois l'Égypte souter- dorer les métaux à l'aide du mercure
raine qui renfermait les plus précieux retiré du cinabre, dorer le marbre et
renseignements, et la surface du sol le bois au moyen du blanc d'œuf , sou-
couvert des débr is de semblables témoi- der l'or avec un borax artificiel, souder
gnages. les autres métaux les uns par les au-
hy posées qu'on trouve
Cest dans les tres, étamer le cuivre, composer le
les métaux mis en (ruvre, des nein- bronze, préparer la litharee, le mi-
turps dont les couleurs sont dues a des nium, la ceruse, la potée d étaiu et le
rôdes métalliques* des frittes, des vert de gris; employer dans leurs pein-
WHtS, des émaut colores par ces tures des couleurs soit terreuses, soit
mêmes oxides. Les étrangers qui ont métalliques; l'antique Égypte leur en
A journé en Kgvpte à une époque très- avait donné le précepte et l'exemple.
reculee faisaient usage des métaux Klle leur av.iit appris aussi à apprécier
ji ils s'étaient procures dans ce pays.
(
les riches tissus dont se paraient ses
Abraham donne à Rebecca une bague dieux et ses rois. L'Kgvpte savait de
«'tdt-s bracelets d'or; Joseph reçoit de
m une se procurer les produits moins
Piwnon un anneau et un collier d'or, recherchés, mais nou moins utiles à
|t fait mettre sa coupe d'argent dans l'économie publique ou domestique;
Je
s«v de blé rie son frère Benjamin. elle fabriquait aussi les noirs de fumée,
L« Israélites, lors de leur sortie d'É- de lie et d'ivoire, la colle forte avec le
pPki emportèrent frauduleuse meut, cuir de bœuf; elle teignait en pourpre
luns le désert, d'immenses richesses les moutons en vie, blanchissait la laine
*nipniQ 4 ées aux égyptiens. L'or, l'ar- parla vapeur du soufre; savait encore
S e ût, le cuivre, les pierres précieuses, que si une lampe allumée, qu'on plonge

Digitized by Google
300 L'UNIVERS.
dans une cuve ou dans un lieu souter- que les Israélites firent sur les Madi
rain, venait à s'y éteindre, il était nites; Homère parle de l'étain; e
dangereux d'y entrer. quant au cobalt, l'illustre Daw
en r
L*art de rémailleur était certaine- trouva dans neuf échantillons de ven
ment pratiqué par les anciens habitants bleu transparent des fabriques éçyj
de Thèbes, à la même époque que les tiennes. Le bleu de cobalt est une co\
arts du potier de terre, uu verrier, du leur très-fréquente sur les sculptun
peintre , du sculpteur, du batteur d'or, égyptiennes, et la chimie moderne
du doreur, du statuaire en pierre et en constaté que, par l'effet d'un mordai
métaux, du constructeur de barques, d'une grande puissance, le cobalt <

du graveur, du stucateur, du fabri- les autres couleurs à base métallique


cant de papyrus et des cuirs teints et qui couvrent les sculptures égyptier
maroquinés", du tisserand et du teintu- nés, ont pénétré le grès et le granit
rier. On trouve partout les produits plus d'une ligne de profondeur.
de l'art de rémailleur, et la porcelaine Il est donc hors de doute que l'ai
blanche ou colorée portée au plus haut de faire et de traiter le verre et Ténia
degré de perfection; à la finesse de la fut porté en Égypte à un très-haL
matière se joignait aussi l'élégance des degré de perfection. Les Égyptien
formes. Sèvres a reproduit plusieurs recousaient aussi le verre avec du fi
de ces modèles égy ptiens (yoy.pl. 44) de fer, et le soudaient avec le soufre
et le suffrage public a consacré d'a- ils employaient le verre et l'émail
vance le jugement que nous en portons l'embellissement des temples et de
ici. Rien n'est plus commun non plus, plais, qui étaient pavés de carreau:
dans les ruines égyptiennes, que des brillants du plus vit éclat. La natun
poteries émaillces de diverses couleurs avait ouvert cette voie au génie é^vp
le verre et les pâtes de verre colorées tien , en plaçant à profusion , à la porte*
et non colorées. Un beau et grand de l'Egypte, le sable du désert, le ni
plateau de verre blanc orne notre mu- trate, èt les cendres de kali, inatiert
sée du Louvre. Le stuc, composé vrai- première dont le verre est compose.
semblablement comme le nôtre, de On ne doit pas être surpris si la petite
plâtre et de colle forte, ou, comme verroterie, et tous les objets utiles ou
celui des Romains, de marbre blanc de fantaisie qu'il était possible d'en fa-
et de chaux, n'est pas rare dans les briquer, se retrouvent en très-grande
anciens monuments. Un mastic fort quantité dans les ruines de l'Egypte.
dur est aussi appliqué en relief, et doré Toutefois, on appliqua ces connais-
ensuite comme ornement de meubles sances, fruit d'une longue expérience,
divers; des sculptures qui devaient à de plus nobles usagés , et si Ton en
être dorées étaient couvertes d'une croit l'antiquité classique, l'Kgypte au-
toile très-fine et d'une couche de plâ- rait excité à un haut degré l'etonne-
tre, sur lequel l'or était appliqué et se ment et l'admiration de la Grèce et de
retrouve encore. Les momies d'hom- Rome , par des productions réellement
mes offrent les ornements peints, merveilleuses ae l'art de traiter le
sculptés , coloriés ou dorés, les plus di- verre et les émaux. Strabon affirme
versifiés; et les membres des êtres em- qu'on fabriquait, de temps immémo-
baumés sont parfois couverts ou en- rial, à Thèbes, au moyen de procédés
veloppés de feuilles d'or; des statues tenus secrets, des verres très-beaux,
de bois ou de bronze sont dorées. Des très-transparents, dont la couleur imi-
caisses de momies sont aussi ornées de tait l'hyacinthe, le saphir, le rubis ou
sujets exécutés en mosaïque de pierres le evanus, et que Sésostris avait fait
ou d'émaux de couleur. Les faïences et couler, en verre de couleur d'éme-
les porcelaines émaillées prouvent suf- raude, une statue, qu'on dit ailleurs
fisamment d'ailleurs que les Égyptiens avoir existé à Constantinople jusqu'au
travaillaient facilement l'étain et le co- temps de Théodose; Appien affirme
balt. L'étain se trouva dans le butin aussi qu'un colosse de même matière
EGYPTE. 201

se voyait dans labyrinthe d'Égypte.


le nérales, ornent la plupart de nos mu-
On y* fabriquait encore du faux jayet sées. Le luxe romain lit peu de cas
avec la scorie des métaux , et ils de ces petits meubles , devenus fort
en connurent les oxides, notamment communs dans l'empire par l'activité
ceux du fer, du cuivre, du plomb et de des fabriques thébaines; mais il paraît
l'étain , sans lesquels ils n'auraient pu que bien antérieurement à la domina-
réussir à faire les verres et les émaux tion romaine en Égypte, les vases
colorés, à incruster les pierres pré- murrhins de Thèbes, et surtout la ver-
cieuses; aussi les ouvrages en verre roterie de Coptos, étaient expédiés
furent-ils compris par Auguste, avec par la mer Rouge, et qu'ils étaient
le blé et le froment, dans la liste des recherchés souvent par les peuplades
produits que l'Éçvpte devait payer à de l'Arabie et de la côte d'Afrique.
Rome comme tnBut. Pline dit avoir L'usage du bronze pour les usten-
vu les images d'Auguste et quatre élé- siles et les armes y était général d'où
:

phants de pierre obsidienne donnés par l'Égypte tirait-elle cette quantité de


cet empereur, comme ouvrages mer- cuivre? Cette question mériterait un
veilleux, au temple de la Concorde; long examen ; un fait résulte cepen-
enfin , une statue de Ménélas en verre dant de quelques monuments : une
noir, imitant le jayet, enlevée du tem- stèle trouvée à El-Magara , en Arabie,
ple d'Héliopolis par un gouverneur ro- une inscription gravée sur un rocher
main, fut renvoyée en Egypte par dans le même lieu , et une autre inscrip-
Tordre de Tibère. Nos musées abon- tion sur un rocher de Sabout et Kadin,
dent en bijoux en or, en argent et dans la même contrée, prouvent que
e e
autres métaux, sur lesquels les émaux dans les 31 , 42* et 44 années du qua-
e
furent appliqués par l'industrie égyp- trième roi de la XVII dynastie, vers
tienne. l'an 1950 avant l'ère chrétienne , les
Au nombre de ses produits, sans riches mines de cuivre de ces deux lo-
nul doute plus célèbres, il faut
les calités étaient en pleine exploitation
comprendre vases murrhins artifi-
les sous l'autorité des Pharaons.
ciels. L'antiquité les distingue très- Homère énumère les présents qu'Hé-
bien des vases murrhins naturels que lène et Ménélas reçurent du roi et de
Rome tirait de la Perse , et dont les la reine d'Égvpte: ce fut une corbeille,
plus beaux furent payés plusieurs cen- deux cuvettes et deux trépieds en ar-
taines de mille francs; il est vrai qu'on gent ; une quenouille d'or, et une autre
les jugea dignes d'être consacrés, aux corbeille en argent dont les anses
dieux : les six premiers qui y furent étaient en or.
connus provenaient du trésor de Mi- Homère et son siècle croyaient donc
thridate, et on les déposa dans le temple à la splendeur de Thèbes , à la haute
de Jupiter au capitole. Auguste, après fortune de l'Égvpte. Les monuments
la défaite d'Antoine et de Cléopdtre, antérieurs à Homère, encore sub-
enleva d'Alexandrie un de ces vases, sistants , justifient assez son admira-
qui fut aussi destiné au service des tion; lui et ses contemporains con-
dieux. Il résulte .des recherches soi- naissaient, sans nul doute, les mer-
gneuses et érudites de M. de Rozière veilles du royaume des Pharaons , sa
que la matière murrhine était le spath terre si prodigue de bien , son agricul-
fluor. L'industrie égyptienne imita ture si féconde , son industrie si puis-
parfaitement cette matière , et la fabri- sante et si variée, et les prodiges de
cation des vases murrhins occupait à tous les arts réunis en elle à ceux de la
Thèbes plusieurs manufactures. Ar- nature. Homère avait vu ce sublime
rien les mentionne expressément dans spectacle , et l'Égvpte, sous les rois
son Périple; les fragments de matières de sa vingtième dynastie, inondée de
vitreuses coloriées abondent dans les gloire et de prospérité; et, à la vue
ruines égvptiennes; des vases imitant de tant de calme et de bonheur dans
le spath iluor et d'autres matières mi- l'Égvpte monarchique , le souvenir des ,

Digitized by Google
202 L'UMVERS.
agitations auxquelles l'Ionie et la Grèce homme, surtout les produits remar-
avaient été livrées par tant d'ambitions quables des arts, encore si rares de
rivales, lui inspira peut-être ce précepte son temps chez les Grecs. Au temps
qu'il met dans la bouche du prudent d'Homère, l'Ruypte depuis bien des
Ulysse « Ce n'est pas une bonne chose
: siècles exécutait des ouvrages pres-
que Jegouvernement de plusieurs; qu'il que encore inconnus en Europe; ainsi,
n'y ait qu'un seul chef, qu'un seul roi.» sur les bords du Ml , des quais
Dans les pays que le divin Homère antiques ont une courbure horizon-
connaissait le mieux, les monarchies tale dont la concavité est tournée
venaient de finir- eu même temps que du coté de l'eau. Cette espèce de
les siècles héroïques, si propices au voûte horizontale renferme un grand
génie de la poésie; esprit observateur, principe de solidité, puisque un mur
Homère ne put se soustraire à des rap- ainsi construit oppose une plus grande
prochements, affligeants, peut-être, résistance à la poussée des terres, et
pour lui-même , mais d'une grande quelque élevées qu'elles soient, ces
utilité pour ses ouvrages, dans lesquels quais eu soutiennent la pression sans
il dota la Grèce qui survécut à la guerre s'ébranler : ces résultats supposent
de Troie , de connaissances variées que les extrémités de l'arc sont elles-
qu'elle n'estima qu'après que ses vers mêmes les points d'appui de la voûte
les lui eurent révélées. Ce n était pas en L'expérience des siècles est ici la meil-
effet dans la Grèce contemporaine leure preuve de sa solidité, et elle
qu'Homèreavaitpu voir, commeil le vit donne une idée d'autant plus avanta-
en Égypte,des institutions jwlitiques geuse des constructions egvptiennes,
heureusement appropriées à l'etal des que, malgré l'avancement de nos con-
lieux, et propices également au prince naissances, l'exécution de ces voûtes
et aux sujets; une croyance unique don- horizontales offre , en Europe, de très-
nant à une population nombreuse les es- grandes difficultés.
pérances d'une autre vie ; la pompe des #
On a dit très-haut que les anciens
cérémonies ajoutant à l'éclat du culte Égyptiens ignorèrent l'art de cons-
de la Divinité; les rois inclinant leur truire les voûtes : on n'en a vu dans
front couronné devant ses emblèmes aucun de leurs nombreux monuments,
sacres; des lois protectrices assurant et l'on a cru pouvoir en conclure qu'ils
le maintien de l'ordre et la tranquillité ne les connurent pas. D'abord on a
sur tous les points d'un vaste empire; reconnu des voûtes à voussoir, de
les premières classes de la société don- peu de portée, il est vrai , dans quel-
nant l'exemple de la soumission, et la ques constructions de la Thébaïde;
foule les imitant avec empressement; de plus, supposant même que ces
des villes florissantes succédant à l'a- voûtes ne sont pas des époques les
ridité du désert ; les arts portés a un plus anciennes, au lieu déconsidérer
très- haut degré de perfection; une cette circonstance comme une preuve
architecture savante dans l'art de la négative, il eût peut-être été néces-
disposition des plans et la scienee des saire d'envisager la question sous un
proportions , et des monuments que n'a point de vue plus particulier. I*ulle
égalés aucun autre ouvrage des hom- part, en effet, on ne trouve de fabri-
mes, s'élevant de toutes parts; le sol ques dont les proportions soient aussi
du pays étudié, et son étendue mesu- grandes que celles des monuments (Je
rée ; les phénomènes célestes observés, l'Egypte, et cependant des plafonds
leurs lois les plus utiles découvertes et des plates-formes d'une vaste sur-
et connues, leur théorie fixée par une face y ont été établis sans le secours
série de connaissances positives, et des voûtes. En Europe, au contraire,
l'écriture d'un usage général dans tou- on trouve des voûtes partout, quoi-
tes les classes. que aucune des constructions euro-
Bien d'autres merveilles encore di- péennes, si l'on en excepte une seule,
rent frapper l'esprit siugulier d'un tel n'approche de l'étendue des inonu-

Digitized by Google
I

rTK. 203
ment s de l'Égypte. Si donc l'on con- teau d'une manière uniforme; c'est
çoit bien l'état des arts dans ces deux cette diminution régulière qu'imitent
contrées célèbres, on trouvera la cause les belles colonnes doriques élevées en
de cette différence, qui a droit de Grèce dans le plus beau siècle de son
surprendre, et l'on verra que l'Egypte architecture, et des monuments égyp-
n'eut point de vodtes , parce que sa tiens d'une très-haute antiquité nous
méthode d'exploiter les carrières lui montrent encore en place le type par-
fournissait des pièces de grès ou de fait de cette même colonne dorique
granit de cent pieds en longueur , et des Grecs. Des constructions de plus
que l'Europe au contraire a dû s'en de quatre cents pieds de longueur, sur
servir, parce qu'elle ne peut extraire puis de quarante pieds de hauteur, ne
et mettre en œuvre que des matériaux présentent pas le plus petit dérange-
dont le volume est beaucoup moins ment dans les nombreuses assises de
considérable. Ainsi donc l'usage des pierres qui les composent; l'œil ne
voûtes est pour l'Europe une perfec- voit sur ces vastes surfaces que des
tion qui prouve son infériorité sous lignes parfaitement droites et des plans
ce rapport ; c'est une industrie née de parfaitement dressés; les monuments
la nécessité. grecs et romains sont tous ruinés , et
Si nous considérons ensuite l'archi- les monuments de l'Europe ne résis-
tecture égyptienne dans ses procédés tent point à quelques siècles.
matériels, nous y trouverons aussi quel- Ni les uns ni les autres ne peuvent
ques règles différentes de celles qu em- être comparés à un temple égyptien
ploie l'Europe, puisqu'elle eut d'au- sous le rapport des ornements et de
tres moyens. L'architecture égyptienne leur savante distribution : leur pro-
naquit en Égypte; c'est le premier fusion n'est remarquable qu'en Éeypte,
faitque son étude a démontré. Chaque et le mur de circonvallation d'un seul
peuple imita la nature qu'il eut sous de ses temples est décoré de cinquante
ses yeux les Égyptiens firent leurs
: mille pieds carrés de sculptures reli-
chapiteaux avec les feuilles du palmier, gieuses ou symboliques. .
et lesGrecs y substituèrent les feuilles Nulle part non plus la mécanique n'a
de l'acanthe ; l'Europe a imité la Grèce, produit de si grands résultats ; tous les
et n'a point égalé sa perfection. Dans ouvrages des Égyptiens prouvent cette
l'architecture grecque, comme dans vérité : elle est encore mieux démon-
l'architecture moderne, l'architrave trée par les obélisques de cent pieds de
repose immédiatement sur le chapi- hauteur, par les statues de cinquante-
teau: dans l'architecture égyptienne, cinq et de soixante pieds de pro|>or-
au contraire, un dé carré, placé au tion ; et chacune de ces merveilles d'un
centre du chapiteau, supporte J'archi- art rarement aussi puissant, est d'un
trave, parce que les Égyptiens avaient seul morceau de granit transporté de
senti q'ie cette partie de l'entablement, Syène à Thèbes, que séparent plus de
qui a toujours une apparence de pesan- 40 lieues, et jusqu'à Alexandrie.
teur, ne pouvait pas, sans manquer à On peut donc, sans s'exposer à des
toute convenance, poser sur des cha- contradictions fondées, et d'après les
piteaux composés de feuilles, de fleurs faits qui viennent d'être sommaire-
et d'ornements délicats. Il résulte de ment exposés» considérer l'Égypte dans
ce principe véritablement égvptien sa splendeur civile, agricole et indus-
ne les chapiteaux se trouvant éloignés trielle, comme le type antique de la
a e l'architrave, les grandes limes, qui civilisation créée, agrandie et perfec-
sont toujours une source de beautés tionnée par la culture de l'intelligence,
dans l'architecture, n'éprouvent au- l'amour de l'ordre, le respect des dieux,
cune interruption , et c'est là le carac- la sagesse des institutions politiques
tère éminent de l'architecture égyp- la puissance des lois, des arts, des

tienne. Toutes les colonnes de l'E- sciences et de toutes les connaissances


gypte diminuent de la base au chapi- qui honorent l'esprit humain. Ce qui

Digitized by Google
204 L'UNIVERS
nous reste à dire de Tune des princi- les terres intérieures de l'Afrique. La
pales sources de sa prospérité, de son guerre et la conquête facilitèrent cette
commerce 9 rendra également témoi- extension en révélant les meilleures
gnage en sa faveur. routes; l'Égypte fournissait du blé à
Pour connaître le plus exactement tous les peuples ses voisins qui en
3u*H est possible de le faire, après tant manquaient, et qui durent rechercher
e siècles et de révolutions, l'état du avec soin un moyen d'échanger avec
commerce en Égypte, on ne peut se l'Egypte leurs propres produits, des
dispenser de rechercher ce qu il était iné'aux divers, les aromates surtout,
dans les contrées limitrophes dont la dont il se faisait en Égypte une si
civilisation, égale à celle de l'Egypte, rande consommation pour le service
ne saurait être mise en doute. Ainsi 5 es dieux, pour l'usage des vivants, et
les produits de l'Inde sont désignés pour les honneurs à rendre aux morts
dès les premières pages de l'histoire La pratique de la mer, quelque r- I <

écrite comme objets de jouissance née qu'on la suppose , dut bientôt


et de luxe chez les peuples dont elle seconder toutes ces entreprises ; les
indique l'avancement social; les tissus distances n'étaient pas considérables,
de laine ou de soie, et les pelleteries et le désert était sans danger, au moven
provenant de la Chine ou de l'Asie su- des entrepôts et des comptoirs où 'les
périeure, les aromates et l'encens, caravanes trouvaient toujours sûreté
produits de l'Arabie , sont aussi men- et assistance; et si le commerce de
tionnes dès la plus ancienne époque mer est inséparable de la piraterie
des annales indiennes. Dans le vaste sur terre la probité qui résulte de l'in-
empire d'Assyrie , les parfums, l'ivoire, térêt mutuel protégeait les transac-
les bois précieux,
les perles, les dia- tions , et peut-être qu'alors , comme au
mants, épices et les étoffes de
les temps de l'historien arabe Makrisi, on
l'Inde, ses tapis et les plus beaux trouvait souvent déposées sur la route
ouvrages de ses riches manufactures, du golfe Arabique en Égypte, des car-
ornent de Sémiramis et de
les palais gaisons entières d'épices,qui y restaient
la somptueuse Babylone. De vastes es- intactes jusqu'à ce que les possesseurs
paces séparaient ces populations; mais vinssent les retirer. Il est vrai que
des jalons commerciaux rapprochaient l'Égynte et la partie de l'Afrique si-
les distances ; des entrepôts invitaient tuée dans son voisinage, manquent de
à les parcourir, et la Bible nous dit bois propres à la construction des vais-
que Joseph fut vendu à des Ismaélites seaux de mer; mais les forêts de la
3ui venaient de Galaad, sur les bords Syrie devaient y pourvoir, et l'Egypte
u Jourdain, et transportaient en ne manqua jamais de moyens^d'é-
Égypte, sur leurs chameaux, du par- change pour se procurer chez les peu-
fum, de la résine et de la myrrhe. ples limitrophes les matières qui lui
Ainsi, l'Inde, l'Assyrie et l'Arabie, étaient utiles; Tyr et Sidon n'avaient
s'enrichissaient par ^agriculture l'in-, pu garder à leur seul usage l'art et
le commerce; l'Egypte, non
dustrie et lesmoyens de construire des embar-
moins féconde en produits variés, non cations, et la Méditerranée, la mer
moins industrieuse, non moins em- Rouge et le K il furent sans nul doute
pressée d'échanger ses productions na- fréquentés par la marine égyptienne
turelles contre celles qui étaient étran- à des époques contemporaines du haut
gères à son sol, ne dut pas rester degré de prospérité du commerce et
spectatrice inerte de tant d'avantages. de l'industrie de l'Assyrie et de l'Inde.
L'Ethiopie et Méroé n'étaient ni moins L'état des constructions navales
avancés ni moins avides des avantages égyptiennes ne se révèle pas comme
que la civilisation retire du com- tres-perfectionné dans les bas-reliefs
merce, et bientôt
l'Ethiopie et l'É- dont des combats sur mer sont le su-
se lièrent par des relations qui jet (voyez pi. 4ii); mais si les rapports
Sypte
urent s'éteudre sur les côtes et sur de l'histoire ne permettent pas de

Digitized by Google
Digitized by Google
« « «. -

-MM»
«.«...

fc> v ^ *

. •

J vl
«

- » « •
I

Digitized by Google
Digitized by Google
• » » »
• * • »

• • • •

» • » .
« » » • • ••»
• »• • •

» . . .

» » » »

Digitized by Google
EGYPTE
douter que les Egyptiens furent réelle- des voiles, ayant tous ses agrès et
•ment navigateurs, parcoururent la mer des mousses qui manœuvrent sur les
Rouge, et eurent des relations suivies mâts.
avec les peuples des cotes méridionales Les colonies égyptiennes qui se ren-
de l'Afrique, et avec les Indes orien- dirent en Grèce, avant et après les
tales ; que Sésostris avait fait cons- temps de Sésostris, ne purent y être
truire une flotte de 400 voiles avec transportées que par de grandes em-
laquelle il subjugua toutes les provin- barcations propres à tenir la mer avec
ces maritimes et toutes les îles de quelque sûreté.
cette mer Érythrée, jusqu'aux Indes; Du, reste, la position géographique
que ce fut alors pour la première fois de l'Egypte et la variété de ses pro-
que de grands vaisseaux parurent sur duits n'en faisaient-ils pas l'un des pays
cette mer; que ces expéditions mari- les plus commerçants du globe , et ce
times ne se réduisirent pas à de simples commerce ne fut-il pas pour elle l'un
incursions; qu'elles n'avaient pas pour des plus ardents besoins de la civilisa-
objet des conquêtes, mais des établisse- tion? Sans lui, qu'aurait servi son
ments durables; que les tributs imposés abondance extraordinaire en grains, et
aux peuples de l'Afrique méridionale, comment serait-elle parvenue à donner
de l'Inde et de l'Arabie, font supposer à toutes ses institutions, à ses établis-
que ces relations étaient entretenues sements nationaux , cet aspect de
avec vigilance ; que les peuples du grandeur et de richesse qui les carac-
midi de l'Afrique fournissaient à l'E- térisait? Il lui fallait pour y parvenir

gypte l'or, l'ébene, l'ivoire, les dents une fort habile industrie, et un com-
d'éléphant, des dents et des peaux merce non moins actif, non moins ha-
d'hippopotame, ainsi que des animaux bile, au dedans et au dehors.
rares et curieux; l'Arabie, l'or, l'ar- La solennité des panégyries, qui du-
gent, le fer, le cuivre, la myrrhe et raient plusieurs jours, ne put manquer
l'encens , Ylôfa , des pierres précieu- de favoriser ces deux branches de
ses , diverses matières minérales , et prospérité ; de grandes masses de po-
des riches étoffes, enfin, que le roi pulation y étaient attirées de diverses
Néeos lit entreprendre un voyage au- provinces, et de pareilles réunions
tour du monde , et qu'après trois ans d'hommes ne pouvaient pas avoir lieu
de navigation, ses vaisseaux, partis sans qu'il se fît des transactions com-
de la mer Rouge, entrèrent dans l'O- merciales. Il est vrai que les Égyptiens
céan, suivant toujours les cotes qui avaient un éloignement marqué pour
étaient sur leur droite, et que tournant les étrangers, et ils avaient cela de
la Libve, ils vinœnt surgir dans les commun avec tous les peuples dont la
ports de la Méditerranée : si tous ces croyance religieuse a réglé , par de sévè-
détails sont fidèlement exposés par l'his- res prescriptions, le régime diététique
toire, il faudra accorder à l'art nauti- et alimentaire; mais cet éloignement
que en Égypte un peu plus de perfec- n'excluant pas absolument les relations
tionnement, un peu plus de puissance de toute nature, les caravanes du
qu'on ne lui en attribue d'ordinaire; midi se rendirent à Thèbes, celles de
et c'est un fait assez concluant dans la la Syrie à Mcinphis, et les étrangers,
discussion présente, que celui qui a comme aujourd'hui les négociants chré-
été recueilli par Champollion le jeune tiens chez les musulmans non moins
dans le musée de Turin, où, mettant intolérants que les vieux Égyptiens,
en ordre uu grand nombre de papy- devaient posséder dans ces villes des
rus royaux, c est-à-dire, portant des établissements plus ou moins isolés
dates tirées des règnes des anciens où, comme les Européens dans leurs
rois, il a vu sur un de ces manuscrits, fondoukisde la Barbarie, ils pouvaient
qui est du temps de Sésostris, et sur pratiquer leurs coutumes nationales,
une grande page sans écriture, le des- cuire leur pain , enterrer leurs morts,
sin d'un grand vaisseau armé de gran- et prier selou leur foi. Du reste, l'É-
206 L'UNIVERS.
gypte, ouverte sur la Méditerranée au rieure et méridionale; et ce gra
rtord, devait se défier des arrivages mouvement des peuples fabricants
maritimes, tant qu'elle ne se crut point commissionnaires tirait de son oh
une activité
Sar sa marine sur un et de ses bénéfices
pied respectable érî

e défense. Nous avons déjà dit qu'elle nemment favorable aux bonnes rt
se fit, au sud, des cataractes du Nil à contres du hasard; aussi d'habiles c
Syèue,un rempart puissant contre les ti(jues n'hésitent-ils pas aujourd'hui
descentes des Éthiopiens, qui, néan- affirmer que les Nasamouns jxiussèrt
moins réussirent plusieurs fois à trou- jusqu'au Meuve Joliba ou ISiger, s
bler et à occuper l'Égyntc. condés, comme ils pouvaient Tètr
Thèbes, capitale religieuse et politi- par le service du chameau dans c
que de l'Égypte, était donc aussi sa ville mêmes contrées.
commerciale la plus riche et la plus Deux autres routes commercial
fréquentée; elle était un point central conduisaient de Thèbes en Éthiopie
entre la Méditerranée, la mer Rouge à Méroé; l'une était établie sur I

et l'Ethiopie, et, par cette position, l'en- rives mêmes du Nil, et l'autre au tr
trepôt nécessaire de tous les arrivages vers du désert de Nubie. Les vor
de ces diverses contrées. C'est dans dirigées vers le golfe Arabique n'étaiei
cette cité toute royale, le centre du pas moins fréquentées; il y en avs
commerce de l'Orient, que toute es- une qui partait d'Rdfou; une autre <
pèce de richesses, dit Homère, se trou- Thebes, se dirigeant sur Cosseir; d
vaient entassées , et les caravanes qui dès que les Pharaons eurent des vai
s'y rendaient la mettaient en relation seaux dans la mer Rouge, les commi
tout à la fois avec les contrées voi- nieations les plus courtes durent s'etj
sines du Niger et avec la puissante blir entre les cotes de cette mer et I

Carthage. ville de Thèbes.


Hérodote donne des détails circons- D'un autre côté, Memphis et I

tanciés sur la route commerciale de basse Égypte communiquèrent facik


Thèbes à Carthage, et l'antiquité des ment avec toute la côte de la Méditei
échanges commerciaux porte à croire ranée, et le canal des deux mers 1«
à l'antiquité de cette grande voie afri- liait avec la mer Rouge.
caine. De la capitale de l'Égypte, elle Une route très-connue, surtout dej
se dirigeait au nord-ouest, vers l'Oasis puis Memphis, conduisait en Phénicie
d'Ammon et vers la grande Syrte par où d'autres routes s'ouvraient *er
Augéla, d'où une autre route con- l'Arménie et le Caucase, vers Babylon
duisait, par le sud-ouest, dans le pays par Palmyre et Thapsaque sur l*Eu
des Garamantes; c'est par là que les phrate; et", de Babylone et de Suze, 01
caravanes, parties de Thèbes, pou- communiquait avlt l'Inde, qui étal
vaient rencontrer celles des Nasamouns en rapport avec la Bactriane, laquelli
et des Lotophages. Une autre route, touchait à son tour à d'autres peuple)
également indiquée par Hérodote, se commerçants: c'est par eux que se fat
dirigeait, de l'est à ouest, de Thèbes
I saient les échanges entre l'Orient et h
vers les colonnes d'Hercule et le cap midi de l'Asie, d'où les routes se re-
Soloès, et touchait ainsi à l'Océan; pliaient sur l'Egypte par la Syrie et l<i

et, quelque opinion qu'on se fasse sur Phénicie; et l'Egypte ne dut point en-
l'exacte direction de ces routes, on ne trer sans quelques avantages, ni sans
pourra que reconnaître la réalité de étendre ses connaissances industrielles
cette grande communication entre la et géographiques, dans cette grande
vieille Thèbes et la vieille Carthage, la communauté d'intérêts commerciaux.
Carthage des Chananéens, qui fut con- Nous considérons ici les temps de la
temporaine du successeur de Moïse, grande splendeur de l'Égypte. Durant
et qui recevait ainsi, par la voie de ce long période, et tant que subsistè-
terre, les produits de l'Inde, de l'Ara- rent sans mélange et sans relâchement
bie, de FÈgypte et de l'Afrique inté- ses institutions nationales et même ses

Digitized by Google
ÉGYPTE. *07

prjugés, ne s'opéra pas de grands


il bonne publique et la prévoyance des
foi
fem^etnents dans ses coutumes com- règlements. Les lois avaient prohibé
frriaïes; mais l'invasion des Kthio- l'usure, et réglé les bases des plus im-
rns leur porta le premier coup, et la portantes transactions. L'Êgvpte était,
cadence fut manifeste lors ne Ama- pour l'univers d'alors, le centre né-
>. »:surpateur et suerrier, edt ouvert cessaire des opérations commerciales,
î^vpte aux étrangers. Ils y formèrent à titre de grand entrepôt ; elle en réali-
tVôstrs établissements, "des espèces sait sans risque les premiers bénélices,
colonies, protégées par leurs pro- et ces bénéfices furent dans ce pays,
« dieux et leurs propres lois. Les où le génie patient de la nation et la
aîitages dti commerce d'entrepôt tom- sagesse des lois étaient déjà des germes
ivnt des lors en partage entre les si féconds de prospérité, le véhicule
yptiens et les étrangers , à la faveur actif d'une civilisation qui se manifesta
s nouvelles lois, et cette révolution par la puissance des arts , les prodiga-
Complète par l'invasion des Perses. lités d'un luxe recherché, et par la
L:\pte y perdit son caractère natio- jouissance commune des avantages les
L et fut livrée à l'active influence de plus désirables pour les nations po-
cjste des interprètes, composée des licées.
urtiersdu commerce, des trafiquants La guerre fut aussi quelquefois l'auxi-
ti'iis les pa>s, parlant alors, comme liaire du commerce; ils avaient l'un et
pjrd'bui, toutes les langues, et iu- l'autre ouvert à l'Egypte et au monde ,

xiuisant à Egypte les


la lois d.i#s f de son ép que, tes routes diverses -

-Tî-handises et les idées importées et lointaines que sillonnaient en sens


Tetranger. L*Égypte e(ait a la fois opposes toutes les productions de l'an-
^tienne, grecque et asiatique; toute cien inonde, et qui souvent étaient
•> s'y trouvait abolie; s troupes l< le fruit de la victoire. On les reconnaît
aient recrutées parmi les mercenai- dans les listes des tributs, listes dres-
s, le trône était gardé par des au xi- sées en vue de la gloire du triompha-
'ires eurof»eens , et des guerres con- teur, et aussi des intérêts nationaux
Kjflles semblaient être le résultat attentifs à l'examen de ceux de ces
Tessaire de leur concours solde. Les produits qui étaient particuliers aux
ranjrers étaient dès lors les maîtres contrées soumises, et dont l'impor-
ï
Êgypte; aussi, quand les Perses tation pouvait ëfre pour l'Egypte une
tvurent pour une seule
l'occuper, conquête agricole ou industrielle.
itaiile de Slemphis, pcn-
et le siège Avec les animaux extraordinaires ou
M dix jours, suflirent pour leur li- les animaux utiles, on transportait
ra r empire des Pharaons. Tout fut aussi les plantes et les arbres qui de-
ilition et guerre intestine durant la vaient l'être, et tes guerres prenaient
mination d^s Perses; la religion ani- ainsi l'aspect et avaient l'effet réel d'une
^it contre eux ce qui restait dans les conquête de la civilisation sur la bar-
turs encore de l'antique patriotisme, barie.
anéantissaient
de cruelles représailles Tel était l'ordre d'idées sociales
M apeu l'ancienne caste sacerdotale. auquel rÉgypte s'était élevée dès le
Iiandre chassa les Perses, laissa res- dix-huitième siècle avant l'ère chré-
^ i'fcgypte, et, en fondant Alexan- tienne et il nous en reste d'admira-
,

ne, ouvrit au commerce du monde bles et d'imposants témoignages, no-


e> routes nouvelles, sans que l'Egypte tamment dans un des tombeaux de
essôt (Ten être le plus riche entrepôt. Gournah, territoire de la vieille Thèbes.
l/Égrpte avait ainsi conquis |>ar son Ce tombeau est situé à mi-côte de
ropre génie tous les avantages qu'as- la montagne , derrière le Rhamesséion,
ur «it à la civilisation une agricul- et,comme tous les tombeaux de la
perfectionnée, une industrie éclai- même région il est creusé dans
, le
par les conseils de la science, et roc. Il se compose d'une grande salle
m commerce immense, protégé par la en parallélogramme , et d'un long cor-

Digitized by Goc
208 L'UNIVERS.
ridor; les parois des deux pièces sont registrent deux corbeilles remplie
peintes et non pas sculptées : ces pein- lingots d'argent, une autre rem
tures ont dépéri , mais il reste encore d'une matière bleu de ciel (peut-
dans la première salle un tableau his- de l'indigo) , une corbeille aaont
torique du premier ordre , et qui suf- d'argent, et une série de vases d
firait seul pour la gloire de l'Égypte. cent ou d'or, émaillés ou en émail \
Un personnage est peint en grand des formes les plus riches et les j

à Tune desextrémités de cette première variées ( voyez notre pl. 61 ). Y


salle; c'est le défunt, dont une ins- ensuite une file d'étrangers , au m
cription, aujourd'hui en très-mauvais bre de seize, de couleur basan
état, rappelait le nom, les titres et les sans barbe et à longs cheveux,
services sous le règne du Pharaon reins couverts d'une large ceinture
Thouthmosis III ou Mûris, dont le nom tissu , ornée de dessins tres-vari
se lit dans cette inscription , et se et portant des brodequins non me
trouve souvent répété dans les autres élégants et non moins diversifiés ;
légendes de ce tombeau. Devant le apportent en offrande ou en tribut
personnage, une grande scène histo- vases riches et variés comme ceux
que se déroule sur cinq registres su- se voient auprès des scribes , et
perposés, où près de cent personnes plus des colliers en grains de coule
remplissent des rôles divers. et une dent d'éléphant.
En présence du défunt sont debout
, Au troisième registre, les scril
un certain nombre de scribes , dont inscrivent de nouveau des pfun
cinq sont occupés à enregister les faits d'autruche, des masses d'ébène,
représentés dans les cinq parties prin- cynocéphale privé , des corbeilles d*.
cipales d'un vaste tableau. Dans la neaux et de lingots d'or, de sacs
première, la plus élevée, les scribes poudre d'or, des dents d'éléphant , c
enregistrent deux obélisques en gra- peaux de panthère , et une corbeille
nit rose, deux corbeilles d'anneaux globules de couleur rouge foncé ; trei
d'or, deux corbeilles etdeux monceaux étrangers, de deux races différente
de cornalines, une corbeille de grenats, mais toutes deux de l'Afrique, d
une corbeille de sacs de poudre d'or; Nègres et des Harabras , alternés
ces objets précieux sont exposés devant couverts pour la plupart d'une sinq
les scribes. Viennent ensuite quinze pagne, qui est un morceau de pe.
individus , de race nègre et de race d'animal avec son poil , apportent à
barabra , qui ajoutent à ces premières suite les uns des autres, des co
richesses d'autres corbeilles de cor- beilles remplies d'anneaux , de lioga
nalines , des chapelets de corail ou de ou de poudre de métaux précièu:
grains de cornaline arrondis, des peaux de plumes et d'œufs d'autruche; di
de panthère, des dents d'éléphant, des massues et des pièces de bois d'ébèffl
pièces de bois d'ébène ; qui amènent des dents d'éléphant et des peaux (
vivants des cynocéphales, une antilope panthère et d autres animaux : i

à cornes recourbées, et une panthère; amènent des singes et des animau


qui apportent des œufs et des plumes de tout âge et d espèces différente*
d'autruche, et dans une coufle soi- une panthère, une girafe conduite pa
gneusement suspendue par des cordes des hommes qui la gouvernent a
a une barre de bois portée par deux moyen de deux cordes nouées à se
hommes, un arbre avec ses racines deux pieds antérieurs, et un jeun
enveloppées de terre, et tout garni singe grimpe sur le long cou du graft
de ses feuilles. C'est ici l'introduction quadrupède. Enfin un troupeau di
en Egypte, sous le règne de Mœris, bœufs, et une meute de chiens de chas*
d'un arbre exotique, inconnu sans ayant chacun un collier, terminent a
doute jusque-là sur les rives du Nil. tableau.
Dans la seconde partie ou second Au quatrième registre est une séri<
registre de ce tableau , les scribes en- nouvelle. On voit encore devant te

Digitized by Google
Digitized by GoogU
Digitized by Google
« •

» • - » »

• I

1 « • »

» " «
» » a «
* . •

> • a> « • • • •

Digitized by Google
Digitized by Google
ÉGYPTE. 200
tbr$, an grand nombre de person- déjà capable de satisfaire, par la pra-
|es des vases en métaux
offrant tique perfectionnée de tous les arts, à
eieui ; ces métaux aussi sous di- toutes les exigences d'une civilisation et
ses formes , et de plus , des masses d'une condition sociale très-analogues
cuivre ajoutées aux lingots d'or et à celles de nos temps modernes; affec-
r?ent: mais c'est une race nouvelle tant le même goût pour les mêmes
ommes, qui n'est plus des climats jouissances, et les satisfaisant par des
l'Afrique; elleest blanche, vêtue de moyens semblables, les métaux pré-
pies robes blanches, donf les bords cieux, les animaux rares ou utiles, la
i ornés d'un liséré de couleur, et les pompe des cérémonies publiques, les
othes étroites; un tarbouch ou bon- plaisirs nobles par leurs moyens et par
bbnc retient étroitement leurs leur objet, et oar l'effet de" cette con-
veux, et leur barbe est longue et viction plus noble encore, qui élève les
pue. Ils apportent aussi devant prodiges des arts, dans l'estime géné-
scribes, entre autres productions, rale, au-dessus de toutes les produc-
i
d'eléphmt, des arcs", des
dents tions de la nature.
e
quois, des flèches, des massues, et Telle était rÉ?ypte au XVIII siècle
bottes de joncs de longueurs diffé- avant l'ère chrétienne. Des rapports si
ites. Ils mènent avec eux un char singuliers avec notre Europe, et dans
guerre richement orné, des che- ce qui dépend le plus de la volonté et
«de belle race; enfin, un ours et des inclinations naturelles de l'homme,
éléphant. sont un fait historique d'une haute va-
La cinquième scène est entièrement leur. Pendant trente-six siècles, sur les
•upée par une Ole de personnages bords du Ml, de fil issus, du Tibre et
"amiers, conduits isolément ou en de la Seine, qui se sont réciproque-
wpes par des soldats égyptiens, et ment étrangers, les lois générales, les
0 doit y reconnaître des prisonniers principes des maurs, comme les be-
diverses nations , comme l'indiquent soins du luxe, qu'engendre une civi-
diversité de la couleur des individus, lisation perfectionnée , se sont manifes-
P sont basanés ou blancs, et la di- tés par des siçnes semblables. Serait-ce
Nte des costumes. Après ces grou- donc là l'inévitable destinée d'une por-
pe soldats on voit plusieurs femmes tion de l'espèce humaine et les bornes
sanées, emmenées avec leurs petits de sa perfectibilité intellectuelle,?
fonts qu'elles portent sur leur dos, Pour résumer, à l'égard de l'Egypte,
su dans une couffe attachée à leurs en un tableau succinct, éloquent et
««les et à leur téte, ou qu'elles con- fidèle, l'énumération déjà détaillée des
"*nt j>ar main. Des jeunes filles
la causes de tant de durables prospérités,
la même
:
couleur marchent après les qu'il nous soit permis d'emprunter les
viennent ensuite deux grou- paroles remarquables de l'un des hom-
s
d'hommes de race blanche, cou- mes éminents dans la science, qui étu-
|
rts d'une
longue tunique blanche, et dièrent le plus l'Égypte, de l'illustre
)res
des enfants encore conduits Fourier, qui a retracé en ces termes
1 \»rtés
par des femmes vêtues d'am- l'état général et les époques principales
lrs
tuniques à longues manches et à de la civ ilisation égyptienne :

''P e rang de falbala (voy '«


pi. 6 et 62).. 1 La haute antiquité des arts à Thè-
scènes agricoles occupaient bes et à Memphis, dit-il, est attestée
lJris 'a
même salle la partie de la paroi par le livre des Hébreux. Ces peuples
fre
;.' spOLdante à celle qui porte le arabes, dont les ancêtres avaient fait
to tableau
''
dont nous "Venons de re- un long séjour en Égypte, conservèrent
Me esquisse. Tout ce qui s'y aussi avec beaucoup de soin l'histoire
n
m T révèle do,lc une étuJe lrès *
let
productions de la nature, et
de leur origine, et nous avons aujour-
d'hui plusieurs copies de leurs annales
«avancement remarquable dans celles sacrées qui étaient déposées dans les
ae J
industrie de l'homme, qui était temples. La seule diversité des textes
14 '
Oraison. (Éctptp.) 14

Digitized by Google
210 L'UNIVERS.
pour rendre incertaine la chro-
suffirait vient de parler florissaient dans la p
nologie des temps qui précédèrent les raière capitale de l'Egypte; on
voyages des Hébreux en Égypte; mais trouve sur toutes les parties des te
les époques subséquentes sont mieux pies, dans les habitations des ro
connues, et il n'y a aucun doute que dans leurs sépultures et dans celles <

Ton ne puisse déduire de leurs annales particuliers. 11 manifeste que


est
une partie importante de histoire de
1 nation possédait alors des connaisse
1* Egypte. Par exemple, elles nous font ces fort étendues et qu'elle s'appliqu
,

connaître quel était l'état de la société depuis plusieurs siècles aux grands i

civile et des arts, lorsque les premiers vrages d'architecture et de sculptu


Hébreux arrivèrent à JVIemphis, et sur- Ainsi l'époque intermédiaire que ne
tout lorsqu'ils entreprirent de s'établir avons déduite des monuments asti
en Palestine; elles nous apprennent nomiques (2500 ans avant J. C.) s'i
que, plus de vingt siècles avant l'ère corde avec les antiquités de Thèbes
chrétienne, l'Égypte était soumise à les annales des Hébreux.
un gouvernement fixe qui subsistait « Non-seulement elle est une eorii

depuis longtemps, et était fonde sur le quence nécessaire de la perfection c


respect des meeurs et sur les principes arts physiques, mais elle résulte au
d'une monarchie régulière. Il est évi- de l'état général de la civilisation,
dent que les Hébreux sortant de ce des progrès que les Égyptiens avaie
pays durent conserver plusieurs des faits dans la science du gouvernem<
artj qui étaient d'un usnge général. enfin, elle dérive des chroniques
Quoique leur condition les séparât et tiennes, de l'opinion de la Grèce eT
leur donnât des mœurs fort différentes, tout le corps pe l'histoire des anci<
un grand nombre d'entre eux partici- peuples. Les Égyptiens possédaient I

paient aux connaissances communes; principes des lois et des moeurs, I


c'est ce que l'on voit clairement dans éléments des sciences et ceux de ta
rénumération des arts et des préceptes les arts, c'est-à-dire tout ce que I
qu'exigèrent la construction du taber- connaissances humaines ont de pli
nacle et l'établissement de la loi hé- important et de plus difficile à décoi
braïque. Il est très-important de com- vrir. Les notions fondamentales, fnl
parer, sous ce point <le vue, les arts du temps et du génie, peuvent être m
que les Juifs connaissaient alors, avec appréciées depuis qu'un long usage f<

ceux dont il subsiste encore tant de a rendues familières : la plupart d*


vestiges sur les bords du NU. On re- hommes réservent leur adtniratic
trouve en effet dans les descriptions de pour les découvertes récentes.
l'Exode les éléments de l'architecture « En général, tous les ouvrages (

égyptienne, l'ordonnance du plan, les l'Égypte ont un caractère commun; i


proportions numériques des parties, annoncent le même principe et le méu
l'emploi des colonnes avec leurs bases génie. Les bas-reliefs dont les surfact
et leurs chapiteaux , el les principes de des édifices sont couvertes représeï
la décoration des édifices. On y remar- tent des offrandes et des cérémoni<
que aussi l'usage de divers métaux, graves et pompeuses, où les magistral
1 art des tissus et des broderies en or, et le peuple qui les suit font nommas
celui de teindre les peaux et les étoffes aux dieux des fruits de la terre et d(
de couleurs vives et variées; enfin, productions dues au travail del'homm<
l'art de polir et de graver les pierres a son industrie, aux beaux-arts et a
précieuses, art qui en suppose plu- commerce. Les sculptures rappeller
sieurs autres, et qui était perfectionné les combats, les sièges et les victoirei
en Égypte et en Asie longtemps avant elles fontconnaître l'espèce des armes
que (Ocrons eut paru dans l'Attique. les chars et les instruments de guerre
« Les mêmes conséquences sont con- elles montrent la puissance du monai
firmées par l'étude des monuments; que, l'infortune des captifs,' les mar
elle nous montre que les arts dont on ches triomphales et les honneurs sa

Digitized by Google
THKfcF. S

Digitized by Google
• -t * •

• * *

«.• • » M
J •
»,

Digitized by Google
Digitized by Google
ËGYPTE. 211
prémes réservés au* vendeurs de la
a rendu son territoire
patrie. Les scènes innombrables que plus salubre.
plus fécond et même plus
l'on v observe se rapportent aux usages étendu et
en a développé les avantages
publics, aux sciences, aux coutumes avec un
art admirable. L'Egypte
funéraires, aux jugements prononcés a donné à son
architecture un caractère sublime,
par les hommes ou par les dieux enlin et
; enseigne aux Grecs les procédés
a tous les arts physiques et à tous les sans
lesquels la sculpture et la
éléments qui constituaient alors la so- peinture
n auraient pu faire aucun progrès;
ciété. elle
consacrait à ses dieux la poésie
• On voit aussi combien il est et la
im-
portant d'acquérir une conna7ssance,
^T^ÎT^n^T^
"™ yer
ces grands édifices ont été construits; fondamental** r£ UT „aZ11!
âge l'astronomie.»

Ut en ^.»JSÏàS t
mense que Ton
témoignages de
doit réunjr à tous les
l'histoire. Cette
paraison résout, sans 'aucun doute,
com-
KXŒfe
dique tableau ; et l'on devra principa
ement consulter, en ce qui regarde
I architecture, pour les façades des
plusieurs questions qui s'étaient éle-
temples, les pl.
6, 14, 41 et 52; pour
vées sur l'origine
de nos connaissances : les intérieurs, les/?/. 6, 17, 27, 42 et
appliquée à l'histoire civile de l'É-
56; plans, les pl. 7 et 60; les dé-
les
evpte, elle fournit des résultats incon-
testables et sert à
tails, h pl.
9; les palais, les pl. 23 et
distinguer les faits 55; les maisons et jardins, les pl. 53
les plus anciens de ceux qui appartien- et54; l'agriculture, les pl. 31 et 38;
nent aux derniers dges de la monar- lapèche et la chasse, les pl. 37, 43 et
chie.
58; l'économie domestique et le com-
«C'est d'après ces principes que
merce, les pl. 38 et 44; costumes,
nous avons entrepris oe représenter
musique et amusements, les pl. 24,
fidèlement, mais dans un tableau peu
25, 32 et 59; les meubles utiles et
Étendu, l'ancien état de l'Egypte, les
d'ornement, les pl. 23, 44 et 57; arts
traits les plus remarquables de ses ins- et métiers, les pl. 32,47, 45 et
titutions, et les principes fondamen- 46; li-
tières , voitures et palanquins, pl. 63
taux de ses mœurs, ;
de son gouverne- caricatures politiques, la pl. 34; ar-
ment, de sa religion et de ses arts.
mes, la pl. 61; combats sur terre et
« L'étude de l'Egypte doit
agrandir sur mer, les pl. 16, 49 et 50; pompes
le champ de
l'histoire, elle reporte la
triomphales, les pl. 18 et 26.
pensée sur l'antique civilisation
de On trouvera dans une des sections
Asie, nui a précédé les temps
fabu- suivantes les notions relatives au ca-
leux de la Grèce,
et nous présente la lendrier, à la monnaie, aux poids et
société politique sous des formes qui aux mesures, autres institutions du
ûinerent à plusieurs égards de celles
premier ordre dans l'état politique
|ne les nations
modernes ont adoptées. d une nafion civilisée et qui ne man-
Aucun objet n'est plus digne de notre
quèrent point à l'Égvpte.
attentionque cette ancienne philoso-
phe des Egyptiens car ce peuple
La paroleet l'écriture furent pour
; dont
, elle lesprincipaux agents de son déve-
Europe a reçu la plupart de ses insti-
tutions,
loppement; nous ne pouvons omettre
possédait les connaissances ici quelques notions précises,
morales qui servent de quoique
fondement à abrégées, sur la langue et sur ['écri-
police sage et régulière; il exerçait
ture des anciens Égyptiens.
wn industrie sur toutes les substances
naturelles; il a inventé, LANGUE ET ÉCRITURE.
perfectionné S XVII.
« conservé tous les arts plivsiques; il L'origine de la langue égyptienne
14.

Digitized by Google
213 L'UNIVERS.
est inconnue; on la trouve employée trouvent à la fois dans l'égyptien .

sous des formes régulières dans *les dans l'hébreu, on peut même dire dar
plus anciens monuments de rËgypte et le syriaque , le chaldéen et le saro;
de la Nubie, et si elle est descendue, ritain , dialectes de la riche faraill
avec la population, des régions supé- arabe, furent vraisemblablement in
rieures du Nil, ce serait dans ces ré- troduits dans l'hébreu par l'effet de
gions antiques qu'il faudrait en chercher rapports des Israélites avec TÉgyp
te herecau. La science a fait de vains te , et des institutions de Moïse
efforts pour le découvrir, et Ton igno- élève des sciences égyptiennes. Il e
rera peut-être toujours les origines de fut de même à l'égard des autres m
la langue égyptienne. On ne saurait tions qui fréquentèrent l'Egypte à de
même s'éclairer avec quelque certi- époques diverses, antérieurement ,

tude par des analogies év identes entre l'ère chrétienne aussi les écrivains d.
:

les formes et les mots de cet idiome l'antiquité grecque ont-ils mentions
et ceux de toute autre langue de l'Asie dans leurs ouvrages un certain nom
ou de l'Afrique; au milieu d'elles la bre de mots de la langue égyptienne
langue égyptienne est seule et comme dont l'acception par eux indiquée se
isolée, sans origine et sans descen- trouve en général exacte.
dance, mais montrant sur d'immenses Il vient d'être dit que des inscrip-
monuments la haute antiquité de son tions de toutes les époques de la
existence dans la longue vallée du NU. narchie égyptienne, soit pharaonique,
Elle y fut en usage pendant toute la éthiopienne ou persane, soit grecque
durée de l'empire égyptien, et malgré ou romaine, prouvent, sans nul doute,
les invasions Successives et violentes le constant usage du même idiome
des Perses, des Orées et des Romains; national en Egypte. Dans une foule tie
et nous ne mentionnons pas les inva- contrats réglant les affaires civiles
sions des Éthiopiens, parce que les entre particuliers, ou décrits assez
monuments élevés par les princes variés par leur sujet, et dont les un*
éthiopiens et en Egypte et en Ethiopie, remontent au delà du temps de Moïse,
indiquent, par les inscriptions dont ils et dont les autres sont contemporain*
sont couverts, que la langue égyp- des empereurs romains, le même
tienne , connue les autres institu- idiome est employé. Devant les tribu-
tions de l'Egypte, fut commune aux naux, aux temps de la domination
deux contrées. Les monuments écrits grecque, le contrat écrit en langue
subsistant depuis Naga et le mont égyptienne avait seul de l'autorité en
Rarcal, à deux cents lieues au midi justice, et l'expédition decc contrat tra-
des frontières de l'Egypte, jusqu'aux duit en grec ne suffisait pas pour sou-
ruines d'Alexandrie, s'expliquent par tenir un droit. Du temps même oYs
cette même langue, et tous ceux qui Romains, les prières dévotes enfer-
l'ont étudiée à fond se sont réunis dans mées dans les cercueils avec les momies
cette opinion , qu'elle est une langue étaient écrites aussi en langue égyp-
mère qui n'a de rapports avec aucune tienne ; et tous ces laits sont démontres
autre. Les anciennes relations des As- par les manuscrits sur papyrus co;
syriens, des Hébreux et Arabes avec servés dans nos musées. Les écrivain!
l'Egypte expliquent suffisamment pour- anciens joignent leur témoignage
quoi quelques mots des langues de ces celui des monuments; Plutarquc rap-
peuples se trouvent dans l'égyptien, porte que Cléopâtre, la dernière reine
et réciproquement pourquoi dés mots d'Egypte, répondait sans interprèt
de la langue égyptienne se sont intro- aux étrangers, tandis que quelques-u
duits dans l'idiome de ces mêmes peu- des rois ses prédécesseurs s'étaient mis
ples. Il est à remarquer seulement, très-peu en peine de savoir la langua
en ceci, que le peuple le plus civilisé à égyptienne. Origène parle deux foisâû
dd exercer la plus grande inlluence, cette langue comme d'un idiome vi-
et qu'en conséquence les mots qui se vant de son temps. Les soldats romains

Digitized by Goog
ÉGYPTE. 213

élevèrent à l'empereur Gordien III, égyptienne. Bien peu d'idiomes ont eu


sur les frontières de la Perse, un tom- comme elle une durée constante de
beau sur lequel ils gravèrent une ins- quatre mille ans au moins.
cription en langue égyptienne et en Il résulte naturellement de ce qui
quatre autres idiomes, afin que le sujet vient d'être dit, que nous considérons
ae cette connu par
inscription put être la langue vulgairement nommée copte
tous les étrangers. On
rapporte au se- comme identique avec la langue égyp-
cond siècle de l'ère chrétienne un ou- tienne. Nul doute, en effet, ne pou-
vrage égyptien qui contient la philo- vait en ce point s'élever dans l'esprit
sophie des Gnostiques. C'est au cin- des hommes sensés après les preuves
quième siècle qu'on fixe l'époque de la évidentes qu'ont réunies , en faveur de
traduction en langue égyptienne des cette identité, l'abbé Renaudot, Ja-
livres de l'Ancien et du Nouveau Tes- blonski, l'abbé Barthélémy, et, de nos
tament. jours, MM. S. de Sacy et Et. Quatre-
Saint Jérôme a fait plusieurs fois mère. Line masse nouvelle de témoi-
mention de langue égyptienne dans
la § nages semblables résulte des travaux
ses écrits; il rapporte que saint Paul, eChampollion le jeune sur les monu-
ermite, était également instruit dans ments existants de l'ancienne Égypte,
les langues grecque et égyptienne; que et du très-grand nombre d'exemples
6aint Antoine ne parlait que l'égyptien ; employés dans sa Grammaire égyp-
que le prêtre (àVonius et le moine tienne. Les textes antiques en ca-
Isaac servirent quelquefois d'interprè- ractères hiéroglyphiques y étant trans-
tes à ce saint, et qu'il avait écrit en égyp- crits signe par signe , d'après son
tien plusieurs lettres adressées à des alphabet, en caractères coptes , ils pro-
monastères de la Haute-Egypte, où duisent une foule de mots et de phrases
l'on dit qu'elles furent longtemps con- régulières de la langue copte qui, se
servées , et un savant moderne a publié trouvant ainsi exister sur les plus an-
deux fragments de ces mêmes lettres. ciens monuments de l'Égypte, ne peut
Des faits non moins concluants que être ()ue la langue égyptienne elle-
ceux-ci, en faveur de l'existence de la même ; et non -seulement les mots et les
langue égyptienne, se produisent de phrases prouvent avec toute évidence
siècle en siècle dans les écrits de l'E- cette identité et cette unité de deux
gypte chrétienne; et, jusqu'à l'invasion idiomes qui n'ont de différent que le
dê$ musulmans en Egypte, il fut d'un nom, mais elles ressortent surtout des
usage général, soit de réciter simulta- éléments mêmes du langage, de ses
nément les litanies et autres prières plus intimes parties constituantes, des
dans deux langues grecque et égyp-
les articles, des pronoms, des préposi-
tienne, soit, dans la célébration des tious , etc. , qui sont écrits dans la lan-
offices, de lire en grec les leçons de gue copte en signes de l'alphabet grec,
l'Écriture et de les expliquer aux fidèles comme ils sont écrits, de toute anti-
en langue égyptienne. Il existe un grand quité, en signes sacrés dans la langue
nombre de "manuscrits ascétiques ou égyptienne des monuments. Il serait
théologiques eu cette même langue; la superflu de chercher sur ce point de
plupart ont été publiés. Tous les livres plus manifestes témoignages. La lan-
théologiques aujourd'hui en usage par- gue copte est donc la langue égyp-
mi les chrétiens égyptiens sont écrits tienne; c'est toujours lemême idiome à
dans les deux idiomes égyptien et toutes les époques de son existence.
arabe. L'église chrétienne' d'Egypte Mais cette existence se divise en deux
nous a conservé cette langue jusqu'au périodes inégales, pendant lesquelles
e
milieu du XVII siècle; et le P. Vans- on usa successivement de deux écritu-
leb, voyageant à cette époque dans le res différentes pour écrire cette même
Levant, par l'ordre de Louis XIV, a langue : d'abord des signes antiques et
vu le prêtre chrétien qui ,1e dernier de primitifs nommés hiéroglyphes, et
tous, a eu quelque usage de la langue ensuite des signes mêmes de l'alphabet

Digitized by Google
214 L'UNIVERS.
Frec , augmenté de quelques signes de fluenee grecque, d'abord lorsquV
ancien alphabet populaire égyptien; adopta par nécessité un grand noi
de sorte que la langue copte n'est plus de locutions grecques, et ensuite U
autre chose que la langue égyptienne que les signes de l'alphabet grec ft
même, écrite avec les signes grecs au substitués à ses signes hiéroglyphiqi
lieu de l'être avec les signes hiéro- Ce sont ces deux influences réunies
glyphiques. La langue allemand* peuvent servir à constater l'état
écrite avec les caractères gothiques sent de la langue copte, qui n'en
ou avec les caractères romains, n'en pas moins la langue égyptienne, écri
est pas moins toujours la langue alle- avec les lettres de l'alphabet grec
mande. ayant adopté un certain nombre de
La constitution grammaticale de la mots de la langue grecque, sans pres-
bogue égyptienne était propre à la que perdre, d'aucun de ces mots gn
préserver de corruption et de la dé-
la les équivalents égyptiens ; de sorte q
cadence; mais elle ne pouvait prévenir en définitive , les dénominations
absolument l'introduction, dans l'i- langue égyptienne et de langue
diome écrit et parlé, des mots tirés de n'indiquent que deux épooues , Vûi
la langue des peuples étrangers fré- primitive et l'autre secondaire, d'
quentés par les Égyptiens; et c'est un seul et même idiome.
des caractères de là langue égyptienne J,a haute antiquité de son origine e4
à sa seconde période, que d'accepter de son usage sur des monuments pu-
des mots exotiques composés de toutes blies excite la plus vive curiosité, etj
pièces , radical , préposition et dési- l'esprit doit se complaire à rechercher
nence, et de employer sans les sou-
les et a reconnaître le procédé employé.]
mettre à ses propres règles. Les mots par le génie humain, dans ces temps»
grecs surtout s'y introduisirent sous considères comme primitifs, pour la
rinfluence de l'autorité grecque; les formation du langage, et comment la J

termes de l'administration nouvelle pensée sut se produire oralement par


furent acceptés avec le pouvoir qu'ils des signes systématiquement ordonnés ;
désignaient ; les noms des mois macé- comment enfin se manifestèrent ces
doniens furent employés dans les dates leux créations jusque-là inouïes, cette
de quelques dédicaces de temples éle- première logique de la langue, cette
vés durant le règne desPtolémées. Un première grammaire de la pensée, su-
mot grec est écrit en caractères égyp- blimes révélations de l'intelligence hu-
tiens dans la partie intermédiaire ou maine dans sa toute- puissance.
monument de Rosette. Avec la religion Exposons sommairement les faits
chrétienne se répandirent une foule généraux de la constitution de la langue
d'idées nouvelles, pour lesquelles il égyptienne, telle qu'elle est connue
fallut des mots nouveaux, et ce fut la dans la primitive antiquité.
langue des prédicateurs de la foi chré- La langue égyptienne est monosyl-
tienne qui dut les fournir. Ces mêmes labique dans ses mots primitifs: Ce
mots et une foule d'autres s'introdui- principe ne souffre absolument aucune
sirent dans les traductions égyptien- exception; et l'on peut dire avec certi-
nes des nouveaux livres religieux qui tude que tout mot de plus d'une syl-
étaient écrits en grec, soit parce que labe est un mot dérivé ou bien un mot
la langue égyptienne n'avait pas de composé.
mot pour exprimer une idée sembla- De ces mots primitifs ou racines
ble, soit parce que le traducteur n'en- se forment, par dérivation ou par
tendant pas complètement le mot grec, composition, une foule de mots em-
ou ne voulant pas prendre le temps d'en ployés pour présenter, sous divers as-
chercher l'expression absolue, trans-f pects qui les modifient, Vidée dont h
crivait ce mot grec dans sa version 1 primitif est, par convention, le signe
égyptienne. Il arriva donc à la langui? représentatif,
égyptienne de subir une double ni- Les dérivés naissent de la racine

Digitized by Google
ÉGYPTE. 215
d'après des règles uniformes et cons- tions exprimant autant de modifica-
tions régulières de cette idée-racine.
Os règles sont fixes et limitées; Le sens de chaque monosyllabe ou
chacune d'elles apporte une modifica- mot primitif est en effet changé par
tion différente à l'idée que représente l'addition d'autres monosyllabes, si-
la racine; chaque racine subit un
et gnes constants des genres, des nom-
nombre ou moins grand de ces
plus bres , des personnes , des modes et des
modifications , selon que ridée dont temps. Ces marques distinctives, qui
eHe est le signe peut s'y prêter plus font successivement passer le radical à
moins. l'état de nom commun , de nom abs-
Des mots formés de la racine par trait, de nom d'action, d'adjectif pri-
déri vation deviennent eux-mêmes pri- vatif, d'adjectif intensitif, de participe t
mitifs, relativement à d'autres mots de verbe actif, négatif et transitif, se
auxquels ils donnent naissance d'après placent toujours en augmentant, et les
les mêmes principes; on peut les ap- modifications grammaticales ne s'opè-
peler racines secondaires. rent que fort rarement par le moyen
L'union de deux ou de plusieurs ra- des désinences ou des terminaisons.
cines primitives ou secondaires forme La langue égvptienne se prête avec
les mots composés. une admirable facilité à la formation
Les mots composés se partagent en des mots composés, et joint à cet
deux 1° ceux qui
classes distinctes
: avantage celui d'une extrême clarté,
sont formés par combinaison de la les formes et les mots déterminatifs
y
deux racines primitives ou secondaires étant très-multipliés.
indifféremment; 2° ceux qui résultent La construction ou syntaxe est danc
de la réunion d'une racine quelconque l'ordre logique comme dans la langue
à un certain nombre d'autres racines française, en tenant compte toutefois
'
t

qui entrent constamment dans la for- des monosyllabes qui établissent les rap-
mation des mots composés, en modi- ports des mots de la proposition entre
fiant d'une manière uniforme les idées eux , et qui sont soumis aux règles que
exprimées par les racines avec les- nous venons d'indiquer.
quelles on les combine. Cette langue a un certain nombre de
Des mots composés, des deux classes, mots communs à l'hébreu et à l'arabe;
peuvent être considérés comme primi- ils sont dus aux rapports suivis qui ont

tifs par rapport à plusieurs autres mots toujours existé entre ces peuples dès
qui en dérivent, d'après les principes les plus anciennes époques; mais la
communs aux racines primitives et se- grande masse des mots et toute la
On peut considérer tous ces
condaires. grammaire diffèrent essentiellement de
mots composes comme des racines ces deux autres idiomes et de leurs
composées. . analogues.
Les dérivés des racines primitives, On doit faire remarquer aussi que
secondaires et composées, forment des la langue égyptienne renlerme un grand
mots comj>osés en se combinant entre nombre de mots formés par onoma-
eux indifféremment. topée.
Ces principes généraux sont puisés Nous ne pouvons nous dispenser de
dans la nature même de la langue présenter ici quelques traits saillants
égyptienne. Ils donnent une idée claire
m
-.ma.
IlIn

...

^m
* ah
••
et précise de la marche qu'on a suivie
• *,"» * » *• i *
I
1 , Ê~9 » * . \ W\ r\ » * I 1 I I I /~k

M*tM«i4 A
# m/^ »V
\ »"\ att
MIJ*
de la langue égyptienne; ils nous pa-
mI *

raissent propres d'abord à prouver


t — «m 1-m a-m s* *-ë «m mrm ». . _m

dans la combinaison des éléments qui l'originalité de cet idiome, et ensuite


la composent. à expliquer quelques-uns de ses plus
Le sens d'un mot- racine monosyl- curieux procédés : ce sont là des élé-
labique employé d'après ces principes, ments essentiels de l'étude philoso-
et modifié dans ses expressions autant phique d'une langue.
que le permet l'idée dont il est le signe, Comme toutes celles qui sont pri-
peut subir quarante-deux transforma- mitives, la langue égyptienne procède

Digitized by Google
216 LTJNIVERS.
par imitation, en attachant un son débile de cœur, timide; hèt-nascht
plutôt qu'un autre à Pexpression d'une cœur dur, inclément hèt-snaou, avan
;

idée donnée, comme si ce son était deux cœurs, indécis; tam-hèt y cœ


imitatif de l'idée même. Ainsi, dans fermé, fermé de cœur, obstiné;
TÉgypte, le nom de la plupart des hct , mangeant sou cœur, repe
animaux n'est que Pimitation approxi- athèt ou at-hèt, sans cœur, insensé,
mative, selon notre oreille, du cri avec ces mêmes mots qualificatifs,
propre chaque animal. Klle nommait
«i la simple addition du monosyllabe
donc l'âne iô, le lion mmii, le bœuf qui signifie attribution , on formait 1
êhè, la grenouille crour, le chat chaou, noms abstraits mèt-hèt-schem , l'attri
Je porc rir, la huppe pclépép, le ser- bution d'avoir le cœur petit, c'est-
pent hfo, hof à-dire la patience, la longanimité.
De même, des objets inanimés ou Enfin, une foule de verbes égvpti
des manières d'être physiques ne fu- se sont formés de ce même mot hêt
rent pas oralement représentés par des cœur, pour exprimer par des si
sons arbitraires; il y avait encore imi- tudes, tirées de l'ordre phvsique,
tation dans sensen, signifiant sonner, actions ou des manières d'être pure
rendre un son; thophtheph , cracher; ment intellectuelles; en voici quelques
onodiouedj , mAcher; kim, frapper; exemples Ei-hèt, qui signiGe propre-
:

kemkem, sistre, instrument de per- ment sentir venir son cœur, exprime
cussion; bremrem, bruit; kradjradj, les idées rêver, réfléchir; thôt-hfty
grincer les dents ; teltel, tomber goutte mêler le cœur, tempérer, persuader;
a goutte; schkelkil, sonnette; omk, ka-hèt, placer son cœur, se confier;
avaler; rodjredj, frotter, polir; kher- ti-hèt, donner son cœur, observer,
khety ronfler; nef, nifê, soufller. examiner; djem-hèt, trouver de cœur,
Mais ces moyens d'imitation furent savoir; meh-hèt, remplir le cœur, sa-
bientôt épuisés* dans la langue égyp- tisfaire, contenter. On voit p»c ces
tienne; on chercha alors des simili- exemples quelle variété d'idées expri-
tudes, et, par le choix de sons doux, ment les modifications grammaticales
rapides, durs, on rappelait des objets du mot radical hèt, cœur. Il en est de
dont les qualités physiques paraissaient même d'une foule d'autres mots pri-
analogues à ces mêmes sons; c'est mitifs , que de tôt, main,
et c'est ainsi
ainsi qu'on exprimait en égyptien par on a donner la main, aiJer;
fait tilot,
sousou un instant très-rapide; parouô, hitot, jeter la main, commencer. D'ê-
voix; par chouchou, flatter, louer, ca- tres mots d'acception phvsique ont
resser ; par bridj, éclair ; par cherchôr, aussi servi à exprimer des idées méta-
détruire; par loti, loulai, se réjouir. physiques ; apdjir, étymologiquement
EnGu, on en vint aux assimilations, rechercheur de mouches, c'est-à-dire
toutes tirées de l'ordre physioue seul, avare; djerbal, œil pointu, impudent;
quand il fallut exprimer les idées abs- djacebaty œil levé, audacieux ; balhèt,
traites et les objets intellectuels. En cœur dans l'ail, ingénu, naïf; déta-
voici de curieux exemples fournis par cha, retirer le nez, se moquer; nas-
un seul mot, lièt, qui signifie cœur, c/itmakh, cou dur, obstiné.
et par suite esprit, inteliigence , com- Tous ces mots nous révèlent les vé-
prenant l'idée de la plupart des quali- ritables procédés de formation de la
fications morales, et s'exprimant par langue égyptienne, et en même temps
les modifications grammaticales de ce son originalité, faits d'un haut intérêt
mot radical hct. Les Égvptiens disent à l'égard de nos modernes idiomes,
donc hètchèm* qui signilie à la lettre qui sont de dernière formation, sem-
petit cœur, et exprime l'idée craintif, blables en cela aux roches venues après
lâche; harchihèt, cœur pesant ou bien les grandes révolutions de la terre, et
lent de cœur, c'est-à-dire patient ; ssaci- qui sont formées d'irrégulières agglo-
tiét, cœur haut ou haut de cœur, or- mérations des restes dispersés deVro-
gueilleux; ssab-tUt, cœur débile ou ches primitives.

Digitized by Google
EGYPTE. 217

Du reste, on remarque, dès une mains et les Arabes. Mais la grammaire


ssez haute antiquité, quelque diffé- de cette langue ne subit pas de notable
ence dans la manière de prononcer changement; de sorte que la phrase
ette même
langue égyptienne dans les d'un manuscrit copte des derniers
ifférentes provinces* du pays ; ces siècles- sera logiquement construite
liiïérences lurent constatées ,* et ser- comme le fut la phrase correspon-
ait à caractériser trois dialectes prin- dante sur un monument des temps
ipaux, thébain, ou de la haute
le antérieurs à Sésostris. Il n'y aura de
Lgypte memphitique, , ou de la
, le différents que les mots étrangers qui se
Doyenne et de la basse Egypte, et le seront introduits dans cette phrase
)aschmourique, ou du Fayyoum, Fan- copte, et qui sont les synonymes exacts
ienne provincede Baschniour; les deux de mots égyptiens restés néanmoins
premiers sont communément nom- dans le langage.
nés par les modernes dialectes sâidi et Du reste, il existe des grammaires
^ahhiri. Le plus ancien des trois dia- de l'idiome copte, composées soit par
iectes est le saïdique ou thébain, qui des Coptes mêmes, soit par des sa-
fut le fond même de
langue égyp-
la vants d'Europe, et des dictionnaires
tienne. Le memphitique
vint après, ou plutôt des nomenclatures de mots
m lis très-anciennement sans nul doute. dont l'ordre a été déterminé par la
Le dialecte baschmourique tenait à la nature de l'écriture figurée de l'an-
foisdu memphitique et du thébain, cienne Egypte, antérieure à l'alphabet
Fayyoum , nommé Baschmour, est
et le copte; et aux ouvrages indiques plus
une province intermédiaire à l'égard haut, comme écrits en copte, nous
des provinces de Thèbes et de Mem- n'avons à ajouter qu'une collection
phis. Ces dialectes étaient caractérisés d'hymnes chrétiennes en strophes et
par quelques permutations de con- en vers rimés et un recueil de Recettes
,

sonnes de l'un à l'autre; le p thébain médicales contre les maladies les plus
à venait ph dans le memphitique; k communes en Égypte, recueil déjà
et tthébain étaient ch et th en mem- mentionné dans ce précis.
phitique; r de l'un et de l'autre de- A l'ancienne tfgypte aussi nous pou-
venait / dans
le dialecte de Basch- vons attribuer la culture de la langue
mour; voyelles, vagues de leur
les en ce qui pouvait s'approprier et servir
nature, se permutaient avec plus de aux dons de l'esprit, comme à l'ex-
facilité encore. On verra plus bas com- pression des passions de l'âme. Une
ment une seule écriture représenta ce- chanson rustique est écrite dans un
pendant ces trois manières différentes tableau à la suite d'une scène peinte
d'orthographier un mot, et c'est ainsi d'agriculture, et dans cette chanson,
qu'à chaque observation nouvelle l'É- comme dans les strophes chrétiennes,
uypte nous montre une preuve de plus c'est toujours la langue égyptienne qui
de l'intelligence laborieuse qui présida se montre dans les deux époques que
a toutes ses institutions. nous avons déjà signalées, et dans les
langue à son époque
Telle fut cette productions d'une second période, avec
primitive; à l'époque secondaire, l'empreinte non équivoque des in-
quand elle se nomma
latujue copte, fluences qu'elle avait subies.
dans l'Égvpte devenue chrétienne, elle Ce fut plus qu'une influence, ce fut une
était encore la même, mais elle avait révolution réelle par ses effets, à la fois
admis un grand nombre de mots grecs politique et religieuse, que la langue
et arabes, et quelques mots latins, égyptienne eut à éprouver, nuand , au
emplovés concurremment avec les mots système des signes par lesquels elle s'é-
égyptiens exprimant les mêmes idées, tâit exprimée pendant toute la durée de
et dont l'introduction était l'effet des sa longue prospérité, on substitua un
longs et intimes rapports qui s'établi- système graphique tout nouveau, quand
rent entre cette nation et ses domina- l'écriture hiéroglyphique fut remplacée
teurs successifs, les Grecs, les Ro- par l'alphabet copte. Une science ha-

uigm ed by Google
318 L'UNIVERS.
bile etprofonde inventa ce moyen puis- fut , à l'exclusion de toute autre, le \
sant delever entre l'ancienne et la fidèlecourtier de l'intelligence,
nouvelle Egypte cette impénétrable
'
reste, ce qui va être dit de Pinvent
barrière de Ignorance des temps an- et du premier usage de Pécriture cl
ciens, afin nue les opinions, les souve- les Égyptiens, s'appliquera directem
nirs et la gloire en fussent complète- à tous les peuples qui furent invente
ment effaces dans l'esprit des nouveaux aussi des mêmes choses; car, en
citoyens. Les nombreux témoignages telles matières, Pesprit humain est
écrits qui en subsistaient dans tous les capable de deux bonnes inventions
pour eux illisibles aussi,
lieux étaient : fois.
peu de nations ont été plus complète- L'ancienne écriture égyptienne
ment étrangères à leurs propres ori- généralement connue sous le nom d
gines, à leur primitive illustration. La criture hiéroglyphique* composée
destruction, d'autorité impériale, des signes nommes hiéroglyphes, et i

livres qui renfermaient l'histoire et les sont en effet, comme le dit Pétymo
doctrines des ancêtres, et l'introduc- gie, des caractères sacrés sculj-t
tion d'un alphabet nouveau, qui fit Ces signes n'ont pas une expressi
perdre complètement la connaissance uniforme, et les différences, qui
de l'ancien, opérèrent cette monstruo- divisent en trois classes, indique
sité politique, et il a fallu quinze très-vraisemblablement l'origine et
siècles pour en faire cesser, dans l'in- perfectionnement successif du systèi
térêt des sciences, les effets trop long- graphique tel qu'il est aujourdli
temps destructeurs. constitué. Ce qui s'est passé presq
Ce grand fait de l'histoire de PÉ- sous nos yeux, parmi les peuples <

gypte peut être considéré sous deux nouveau monde, nous révèle plus v«
aspects principaux : 1° l'état ancien du semblablement encore ce qui se pas
système graphique ou des écritures dans l'ancien, et en Egypte cornn
usitées dans l'ancienne Égypte; 2° la ailleurs, quand l'idée d'écrire se ré
cause, l'époque et l'effet de l'introduc- à l'homme.
tion du nouveau. a. Les objets matériels frap

%
L'exposé, même très-sommaire, des ses regards; il reconnut leurs fc
règles de l'ancien système graphique et quand il voulut conserver ou
égyptien intéressera* à un tres-haut mettre le souvenir d'un de ces obj
degré par la singularité de sa théorie, il en traça la fiçure, et ce tracé fut u
qui est absolument ctrangere à nos caractère d'écriture, caractère purd
idées comme à nos pratiques usuelles. ment figura ti/y peignant directemen
Rien n'est plus commun, dans les so- l'objet et non pas indirectement l*M I

ciétés modernes, que Pusage de l'écri- de ce même objet, toutefois sans indi
ture composée d'un très-petit nombre cation de temps ni de lieu; c'est à c
de signes suffisants pour représenter point que sont parvenus et que se son
aux yeux et rappeler a l'esprit tous les arrêtés les peuples de POcéanie.
sons de la langue, et, par leurs com- b. L'insuffisance de ce premie.
binaisons diverses, tous ses mots, moyen dut se faire sentir bientôt; a
toutes ses phrases et toutes les idées traçant la figure d'un homme, on n'in
de ceux qui la parlent; mais rien n'est diquait pas un individu en particulier
fil
us' rare que l'examen analytique de il en était de même des figures da
'origine, de la formation et îles règles lieux. Le besoin de distinctions indivi-
de cette écriture, etque l'appréciation duelles créa l'usage d'une autre sort<
du laps de temps et des efforts inouïs de signes dont chacun devint particu-
de l'intelligence humaine pour arriver lier à un homme ou à un lieu ces si- :

à celte théorie si simple, si exacte de gnes furent pris ou des qualités physi-
l'écriture alphabétique, institution ques des individus ou d'assimilations à
d'une utilité sans égale, l'auxiliaire in- des objets matériels ; et comme ces si-
dispensable de la civilisation, et qui gnes n étaient plus proprement figurt-

Digitized by Google
ÉGYPTE.
tfs, ils ne furent que des symboles, imaginé, en possédait complètement
| on les nomma pour cette raison ca- la théorie et la pratique, mais seule*
tropiques ou symboliques , si- nient tant qu'il n'eut pas besoin de
auxiliaires des caractères figura- rendre son écriture intel igible à des
% et employés simu tanément avec sociétésou a des individus étrangers.
. Cest là que sont arrivés les Mais dès que ce besoin se fut mani-
xicains, ne sont pas allés au
et ils festé et qu'il fallut seulement écrire le
Il nous parvenu des listes
est nom d'un seul individu étranger à ce
indvidus et des listes de noms de peuple, les signes figuratifs, symboli-
jeux en écriture mexicaine; chaque in- ques ou tropiques, ne suffisaient plus,
fridu est désigné par une tète hu- parce que le nom de l'individu étranger,
ne , signe figuratif, et auprès de sa n'ayant aucun sens dans la langue du
Se est tracé un objet choisi ou peuple qui voulait l'écrire et ne lui
la nature ou dans l'industrie hu- présentant ainsi aucune idée, ce nom
koe, et qui était un signe symboli- ne pouvait pas être écrit par des signes
3 de sorte que Ton qui n'exprimaient que les idées.
t voit clairement
îtte les individus s'appelaient le Ser- On s'arrêta donc, on ne sait com-
pent, le Loup, la Tortue, la Table, le ment, aux sons qui formaient ce même
pâioti , et !e> villes, dont un carré était nom, et on comprit en même temps
sizne figuratif, et un serpent, un de quelle utilité seraient des signes qui
?sson le siene symbolique, se nom- exprimeraient ces mêmes sons : nou-
t la ville du Serpent, la ville du veau et dernier progrès dans l'art gra-
n, etc. phique, et qui en fut le plus ingénieux
c. De la représentation de ces objets perfectionnement, si régulièrement fa-
physiques à l'expression des idées mé- vorisé par la nature des langues de ce
xaphvsiques, le pas à faire était im- temps -la, qui étaient généralement
mense : les peuples de l'ancien monde formées de mots et de racines d'une
ïe franchirent; ils exprimèrent par des seule syllabe. On introduisit donc dans
&£ues écrits les idées dieu, ame, et l'usage les signes des sons, signes gé-
celle* des passions humaines; mais ces néralement nommés phonétiques, et
Renés furent arbitraires et conven- dont le choix ne fut pas difficile, puis-
tionnels en quelque sorte, quoique ti- qu'on n'eiit qu'a choisir dans les signes
rés d'analogies plus ou moins vraies figurés ,
pour chaque svllabe a expri-
entre le inonde physique et le monde mer phonétiquement, le signe repré-
moral; le lion fut pris comme l'expres- sentant un objet dont le nom dans la
sion de force. Cette nouvelle es-
l'idée langue parlée était cette svllabe même :
Ç/ecede signes, nommés énigmatiques ainsi le disque du solefl exprima la
et ajoutés aux deux premières classes, syllabe re, parce que cette syllabe était
les figuratifs et les symboliques, fu- lé nom même du soleil, et ainsi de
rent intentés et employés par les Égyp- suite. Les Chinois arrivèrent à ce procé-
tiens et par les Chinois, et le système dé syllabique,et ils l'ont conservé sans
d'tcriture qui résultait de ces trois progrès jusqu'à nos jours, pour écrire
déments était entièrement idéogra- les noms et les mots etrangers.à leur
phique, cVst-à-dire composé de signes langue. Les Égyptiens parvinrent par
qui exprimaient directement Vidée de$ cette même voie un véritable système
;i

(ûjets, et non pas les sons des mots alphabétique , et l'introduisirent dans
qui désignaient ces mêmes objets. Ce leur système d'écriture sans changer
genre d'écriture était aussi une pein- la nature de leurs signes figurés.
ture, puisque la fidélité de leur ex- Nous allons direen quoi consistaicntle
pression dépendait de la fidélité du systemeancien de l'écriture égyptienne,
tracé de chacun d'eux, qui devait être la diversité de ses éléments, leur mode
un portrait. de combinaison, et les modifications,
cL Ce système d'écriture pouvait suf- dans la forme des signes seulement,
fire aux usages du peuple qui, l'ayant que le temps et les besoins sociaux y

Digitized by Google
220 L'UNIVERS.
firent introduire. Nous prions aussi lieu de la figure entière du lion coucb
le lecteur attentif deviter toute confu- par exemple, on exprima la silhoueti
sion des deux idées, si différentes d'ail- de la partie postérieure, et cet abréj
leurs, que représentent ces deux mots du lion conservait dans l'écriture
écriture et langue; dans la langue le même valeur que sa figure entier)
mot parlé était (é signe direct de l'idée, Ainsi l'écriture hiératique était coi!
et dans récriture le mot phonétique posée du m/me nombre de signes ai
écrit n'était que le signe direct du mot l'écriture hiéroc/lyphimte , dont cl
13arlé, et ainsi le signe indirect de était une abréviation a l'égard de I

'idée. forme des signes seulement, et q


Dans le système d'écriture hiérogly- abrégé des signes avait la même valet
Éiique des, Egyptiens on doit principa- que les signes entiers.
ment considérer deux choses : A. 3. L'écriture démotiqiœ (ou p
A. La forme matérielle des signes pulaire, ou énistolographique) se coir
qui constitue trois espèces de carac- posait des mêmes signes que Técritui
tères nommés hiératique; c'était aussi une abrévia
1 H iérogl y phiques (*) 4ion des signes hiérogly
conservant encore la m
i

2 Hiératiques,
3 Démotiques. seulement, le nombre des ca
/?. La valeur ou expression particu- de l'écriture démotique , employés pou
lière de chaque signe, laquelle consti- les usages ordinaires de la vie, efai
tue trois espèces de signes, qui sont moindre.
Figuratifs, On voit donc que les trois sort^
Symboliques, d'écriture usitées simultanément d
Phonétiques. Egypte n'en formaient réellemen
A. 1. L'écriture hiéroglyphique pro- qu*une seule en théorie, et que, pou
prement dite est celle qui se com- la pratique seulement, on avait adopt

pose de signes représentant des objets une tachygraphie des signes primiti"
du monde physique, animaux , plantes, imitation fidèle des objet* naturels
figures de géométrie, etc., etc., dont produits par le dessin ou par la pei
le tracé est ou simplement linéaire, ture. Ces trois sortes d'écriture étai
ou bien entièrement terminé, et même d'un usage général; toutefois, la pre
colorié, selon l'importance du monu- mière, l'écriture hiéroglyphique, estai

ment qui porte l'inscription, ou selon seule employée pour les monument
l'habileté du sculpteur. Le nombre de publics; mais les plus humbles ou<
ces signes différents est d'envron huit vriers s'en servaient pour les plus
cents. communs usages, comme on le voil
A. 2. 1 SécnUirchiératiqvc est une vé- par les. ustensiles et les instrument!
ritable tacht/graphie de la précédente. des plus vulgaires professions, ce qui,
Les signes de 1 écriture hiéroglyphique soit dit en passant, contredit tant dV.S'
ne pouvant être convenablement tracés sertions hasardées sur les prétendus
qu'avec la connaissance du dessin, et mystères de cette écriture, dont les
cette connaissance ne pouvant être prêtres égyptiens avaient fait un moyen
universelle, on créa en faveur de ceux d'ignorance et d'oppression pour h
qui ne l'avaient point, un système d'é- population égyptienne. La deuxième
criture abrégé, dont les signes pou- espèce, l'écriture hiératique ou sacer-
vaient être facilement exécutés; mais dotale, était plus particulièrement à
ce système ne fut point arbitraire, l'usage des prdres, qui l'employaient
chaque signe hiératique ne fut qu'un dans tout ce qui dépendait de leurs at-
abrégé d'un signe hiéroglyphique : au tributions religieuses et judiciaires. La
troisième espèce enfin, l'écriture po-
(*) Soigneusement dessinés, ou sculptés pulaire et la plus facile, la plus siwpk
et coloriés, ou simplement linéaires ou sil- île toutes, servait à tous les usages que
houettes. son nom même indique suffisamment.

Digitized by Google
EGYPTE. Ml
Clément d'Alexandrie dit que, parmi ratifs, symboliques et phonétiques,
les Égyptiens, ceux qui reçoivent de tandis que nos écritures modernes,
l'instruction, apprennent d'abord récri- semblables en cela aux écritures des
ture démotique, ensuite l'écriture hié- autres peuples de l'antiquité classique,
ratique* et ensuite l'écriture hiéroaly- n'emploient que les caractères phoné-
ykique : c'est l'ordre inverse de leur tiques, c'est-à-dire alphabétiques, à l'ex-
invention, mais l'ordre direct quant à clusion de tous les autres.
la facilité de leur étude. On trouve sou- Il n'en résultait néanmoins aucune
vent les trois écritures employées a la confusion, la science de cette écriture
fois dans le même manuscrit. étant générale dans le pays ; et en suppo-
Quant a l'expression ou valeur gra- sant cette phrase , Dieu a créé les hom-
phique des signes, la théorie n'en est mes, l'écriture hiéroglyphique s'expri-
pas moins certaine que leur classifica- mait tres-clairement 1° le mot Dieu
:

tion matérielle. par le caractère symbolique de l'idée


JL 1 . Les signes figuratifs expriment Dieu; 2° a créé par les signes phoné-
tout simplement l'idée de l'objet dont tiques représentatifs des lettres qui
ils reproduisent les formes; l'idée d'un formaient le mot égyptien créer, pré-
cheval, d'un lion, d'un obélisque, cède ou suivi des signes phonétiques
d'une stèle, d'une couronne, dune grammaticaux , qui marquent que le
chapelle, etc., etc., est exprimée gra- mot radical créer était à la troisième
phiquement par la figure même de personne masculine du prétérit de l'in-
chacun de ces objets; le sens de ces dicatif de ce verbe; 3 U les hommes, soit
caractères ne peut présenter aucune in- en écrivant phonétiquement ces deux
certitude. mots selon les règles de la grammaire,
B. 2. Les signes symboliques, ou soit en traçant le signe figuratif homme
tropiques, ou éniematiques, expri- suivi de trois points, signe gramma-
maient une idée métaphysique par l'i- tical du pluriel; et il n'y avait point
mage d'un objet physique dont les d'équivoque dans l'expression de ces
qualités avaient une analogie, vraie signes, 1° parce que le premier, qui
ieion les Égyptiens, directe ou indi- était symbolique, n'avait une valeur
recte , prochaine ou éloignée , selon eux ni comme signe figuratif ni comme si-
encore, avec 1 idée à exprimer. Cette gne phonétique, 2" parce que le signe
sorte de caractère parait avoir été par- figuratif homme, qui termine la phrase,
ticulièrement inventée et recherchée n'avait que ce même sens figuratif,
pour les idées abstraites, qui étaient 3° pan e que les signes phonétiques in-
du domaine de la religion, ou de la termédiaires exprimaient des sons qui
puissance royale si intimement liée formaient le mot indispensable à la
avec système religieux. Vabeitle
le clarté de la proposition ; et malgré cette
signe symbolique de l'idée roi;
était le différence de signes, l'Égyptien qui li-
tes bras élevés, de l'idée offrir et sait cette phrase écrite la prononçait
offrande; un vase d'oùCeaus'épand, comme si elle avait été entièrement
la libation, etc., etc. écrite en signes alphabétiques.
B. 3.Les signes phonétiques expri- La théorie de l'enseignement du sys-
maient les sons de la langue parlée, el tème graphique égyptien n'offrait pas
avaient , dans l'écriture égyptienne , let plus de difficultés l'élève, averti de
:

mêmes fonctions que les lettres de la nature des signes figuratifs, n'avait
r alphabet dans la notre. aucun effort d'intelligence a faire pour
L'écriture hiéroglyphique diffère en retenir lesens. La science des signes
donc essentiellement de l'écriture gé- symboliques était une affaire de no-
néralement usitée de notre temps en , menclature, il devait la mettre dans
oc point capital qu'elle employait à la sa mémoire, et apprendre successive-
fois, dans le même texte, dans la même ment la raison de ces assimilations de
phrase et quelquefois dans le même certaines ligures à certaines idées : la
mot, les trois sortes de caractèrcsyî</M- connaissance de la nomenclature suf-

Digitized by Google
232 L'UNIVERS.
Osait même au plus grand nombre. où les murs de tous les édifices publia
Quant aux signes phonétiques ou étaient couverts d'inscriptions serval^
alphabétiques , voici comment procéda d'explication aux tableaux sculptés qn
l'Egypte pour les déterminer. Habituée rappelaient les grandes actions des rôti
à une écriture idéographique, peignant ou les bienfaits des dieux du pays. Df
les idées et non les sons de la langue, reste, le nombre des hiéroglyphes pbi
elle ne pouvait s'élever du premier nétiques ne s'élevait guère au delà di
bond à la simplicité tout arbitraire de deux cents, et quelques-uns des alpha-
nos alphabets. Obligée de combiner la bets européens ne contiennent jkîs al
forme des nouveaux signes avec ceux bien moindre nombre de sons ou de le!
dont elle avait déjà consacré l'usage très. Toutefois c'est cette espèce
,
A
par une longue pratique, elle ne re- caractèrequi domine dans tous les texte!
uonca pas à la figure des ohjets na- hiéroglyphiques; ils s'y trouvent dam
turels, elle en continua l'emploi, et la proportion des deux tiers , le sur*
décida seulement, après avoir analysé plus appartenant par portions à peu
les syllabes de son langage et en avoir près égales aux caractères figuratifs d
décomposé les sons jusqu'aux plus aux caractères symboliques.
simples éléments, qui sont les lettres, On comprend par là toute l'impôt*
une la figure d'un objet dont le nom tance, pour les sciences historiques , dt
oans la langue parlée commencerait par la découverte de l'alphabet des hiéro-
la voix À y serait, dans l'écriture, le glyphes égyptiens. Kn disant comment
caractère A; que la figure d'un objet on a réussi à la faire, on dira aussi
dont le nom, dans la langue parlée » toute sa certitude.
commencerait par l'articulation 6, se- On ne parvient à connaître une
rait, dans l'écriture, le caractère ZJ, langue ou une écriture qu'on ignore
et ainsi de suite. Dans l'écriture pho- qu'avec le secours d'un interprète ;
nétique, l'aigle, qui se nommait .ihôm c'est un homme, ou un livre, ou un
en égyptien, devint donc la lettre A; écrit quelconque. Cet interprète de
une cassolette, Herbe, H; une
la lettre l'ancienne Egypte fut trouvé en rtsvp-
main, 7'of, le T et le I); une hache, te même par la France : c'est la cé-
KelMn, le K et le C dur; un lion lèbre inscription de Rosette, pierre
couché, Labo, le L; une chouette, de quelques pieds de hauteur et sur
Movladj , le M une bouche Hô % le R
; laquelle furent gravées trois inscrip-
etc., etc. Il résulta ainsi de ce pre- tions à la suite l'une de l'autre ; la
mier principe, non pas que tous les première, tronquée par le haut, en ca-
objets dont le nom commençait par ractères hiéroglyphiques la deuxième
,

R, devinrent le signe graphique de en caractères demotiques, et la troi-


cette lettre (il en serait né trop de sième en grec. On sait par cette der-
confusion) , mais que quelques-uns de nière qu'elle est la traduction nn*me
ces objets seulement, les nlus connus, de ce qui précède : voilà donc l'in-
les plus ordinaires ceux dont la forme
, terprète des hiéroglyphes égyptiens,
était le plus sûrement déterminée, et qui manquait à l'érudition moderne.
pouvait être le plus facilement trans- Cette traduction grecque d'un texte
crite , furent affectés d'autorité à rc- éguptien devait ouvrir une voie nou-
Brésenter le son R, et ainsi des autres, velle. L'inscription de Rosette fut
y eut donc un certain nombre de si- publiée et reçue avec empressement;
gnes homophones , ou exprimant le mais ce ne fût qu'après vingt ans et
même son, dans l'alphabet écrit des vingt essais sans résultats que la lu-
Égyptiens, et cela était nécessaire dans mière jaillit enfin de ce monument,
une sorte d'écriture où la combinai- etpour l'en tirer, il fallut s'arrêter
son et l'arrangement matériel des si- aux données suivantes après avoir
gnes étaient soumis à des règles dic- épuisé toutes les autres 1° le texte
:

tées pa» la convenance de la décoration grec prouve que l'inscription est un


des monuments , dans un pays surtout décret des prêtres de l'Égypte en Thon*

Digitized by Google
ÉGYPTE.
eut de Ptolémée Épiphane ( Suprà, mettre fin à tant d'incertitudes : il
âge 61); 2" ce décret contient plu- ne refusa pas ce grand bienfait aux
kjrsfors le nom de ce roi et plusieurs lettres et a l'histo re. 6° L'infortuné
Btres noms propres ; 3° on a pu tra- Belzoni découvrit à Philae un cippe
bire et écrire en égyptien toutes les portant une inscription grecque , et un
ttes exprimées dans* le texte grec; petit obélisque portant aussi une ins-
ttis noms propres grecs n'ex pri-
les cription hiéroglyphique: on reconnut
ant aucune idée en égyptien , ils n'ont que le cippe et" l'obélisque formaient
B être traduits; il a donc fallu écrire un seul et même monument; ce point
I caractères égyptiens les sons que capital fut publiquement constaté :
taroent ces noms propres dans le l'inscription grecque nommait aussi
ire ; 4" il doit donc y avoir dans l'ins- un roi Ptolémée, une reine Cléopd-
nption égyptienne de Rosette des tre,et l'on remarquait dans l'inscrip-
ipes hiéroglyphiques exprimant ces tion hiéroglyphique, au lieu même où
Diis; il pourrait donc aussi y avoir devait se trouver le nom du roi Ptolé-
bns Pecriture hiéroglyphique des si- mée, le même groupe encadré que,
mes phonétiques , ou exprimant les dans l'inscription de kosette on avait
,

pas et non pas les idées ; 6° le texte supposé être le mot Ptolémée: ce pre-
fyptien présente un groupe de signes mier résultat tire de l'inscription de
ttëfoglvphiques, distingue par unenca- Rosette était donc pleinement con-
Ireraënt elliptique qui l'entoure : cô firmé; on avait donc avec certitude le
poupe, est répété plusieurs fois dans nom du roi grec Ptolémée écrit en hié-
* texte égyptien; le nom propre du roglyphes; dès lors le groupe d'hiéro-
foi Ptolémée repété plu-
était aussi glyphes encadrés qui, sur obélisque,
I

urs fois dans


texte grec le groupe
le : suivait le nom de ce roi, ne pouvait
teroglyphes encadré peut donc être le être que le nom de la reine ( léopatre % et
n de et, dans cette sup-
Ptolémée, le premier siçnedu mot Ptolémée, P,
signes ainsi groupes écri-
ition, les se trouva être en effet le cinquième
t ce nom en hiéroglyphes, ces de celui de Cléopa'tre ; le deuxième de
Hgnes sont alphabétiques ,* et le pre- l'un, le T, le septième de l'autre; le
mier est un P, le second un T, etc. quatrième du premier, le L, était bien
Voilà déjà plusieurs des hiéroglyphes le deuxième du second : le nombre des
alphabétiques retrouvés, et il ne reste signes reconnus s'accrut donc de tous
îu'a compléter cet alphahet si dé- ceux qui composaient le nom de Cléo-
liré. 5* Bien des obstacles s'y opposent pAtre, et on eut la moitié de l'alphabet.
encore : le groupe encadre" dans une Et une fois que les groupes d'hiérogly-
ellipse , ou cartouche , est le nom phes encadres, ou cartouches, eurent
ée Ptolémée , ou bien il ne l'est pas : été reconnus pour des noms de rois et
tons le premier cas, il est nécessaire de reines ainsi distingués par l'étiquette,
i éprouver la vérité dece premier résul- et ces cartouches étant nombreux sur
tat alphabétique, sur d autres noms les monuments , l'alphabet lut sans
propres écrits a la fois en hiéroglyphes peine complète, et la découverte la plus
et en grec, et dans lesquels se retrou- débiree et la plus inespérée depuis la
vât toutes les lettres deja reconnues, renaissance des lettres était enlin ac-
°u supposées l'être, par le nom de complie. Tel fut le résultat des recher-
frûlémée. L'inscription grecque de ches de Champollion le jeune; la suite
Rusette contient plusieurs autres noms de ses investigations analytiques et la
propres vers son commencement; mais Î>ersévcrancc qui les caractérisa ont
* texte hiéroglyphique étant tronqué ait le reste: les mystères de l'ancienne
*ers ce point, nous sommes privés Egypte ont été ainsi dévoiles; les ap-
de ce moyen de comparaison. Il n'y plaudissements du monde savant ont
av ait donc rien de rigoureusement cer- été la récompense d'un devoûment qui
tain dans le résultat de tant
jusque-là ne se démentit pas un seul instant pen-
fc recherches, et le temps seul pouvait dant vingt-cinq aunées, et uue mort

Digitized by GooqU
O O Ù tf.tfJ ^
T * r* « A ** *** t
A
E î.

2 te.* V
e !. jv
h ! r /n. w. i. V ftxn
I m. y» . <4/.

K V-r- i<«. V-

A SJXJ./
M J
3 S ô o .4.y=.^f J

0 T f f . Sx f»fl*.e.U.—
n
P
£ .

* ;
- - le Oi w .1
T *

Y 1
». -,

Ou.*.*-,
n f f *

TO- AO -JHL r«S 7**l |W|


.

EnanerrcKO-Jt a.r'vKj

Digitized by Goole
ÉGYPTE.
rs dialectes de la langue égyptienne, cet alphabet en caractères hiérogly-
i étaient précisément caractérisés phiques, tels qu'on les retrouve sur
i- la permutation réciproque de ces des monuments de tout ordre et dans
3 mes
lettres; Un phénomène d'une la première partie de l'inscription de
is grande portée encore existe à Rosette; et en caractères démoti-
gara de récriture chinoise; la même ques ou populaires, qui étaient em-
jrase est lue par des peuples qui par- ployés dans les contrats civils, les let-
11 des idiomes différents : c'est le tres les affaires domestiques , les actes
,

opre de toute écriture idéographique; administratifs d'un intérêt général


:iee est une, mais les mots qui l'ex- comme on en voit tant d'exemples dans
i trient diffèrent selon la nature des les nombreux manuscrits sur papyrus
; «messigne figuratif arbre don-
: le recueillis en Égypte, sur des stèles fu-
ra à -tous ridée d un arbre; mais néraires, des inscriptions vulgaires,
tte idée sera exprimée, et ce signe enfin dans la partie intermédiaire de
ra lu au moyen d'un mot qui diffé- l'inscription de Rosette, et son texte
ra dans chaque pays. grec nomme ce caractère enchorial ou
On a déjà vu sur là planche 22 Pal- du pays. Ces signes démotiques don-
îabet égyptien tel qu'il fut découvert nent aussi l'idée de la forme des signes
publié au mois de septembre 1822, par hiératiques ou sacerdotaux , d'où les
tiampollion le jeune; il fut tiré spé- démotiques avaient tiré leur origine.
alement des monuments de l'époque Enfin on voit par la colonne de gauche
-ecque et de Pépoque romaine; appli- de notre planche, à quelle lettre de
lé ensuite airx inscriptions du temps l'alphabet grec répond phonétique-
>s pharaons /«cet alphabet s'accrut ment chaque signe démotique et cha-
un certain nombre des signes de que signe hiéroglyphique; à la diffé-
îême nature, et enfin il a été publié rence près des formes, ces signes
:>mplet en 1836, dans la Grammaire s'employaient comme s'emploient les
lyptienne, des pages 35 à 46, et tel lettres de notre alphabet.
lie Ta déterminé l'étude attentive des Pour ne rien laisser à désirer, nous
îonuments de toutes les époques citerons ici deux lignes d'une inscrip-
Dit en Égypte même, soit dans les tion en caractères hiéroglyphiques,
ollections formées en Europe. d'une haute antiquité , et dont voici l'ex-
>otre planche 22 représente à la fois plication graphique et grammaticale.

5> oL^Ki^^tZâ.
Cette inscription doit être lue de de signes séparés les uns des autres *
droite à gauche; nous avons déjà dit et de quatre signes isolés qui sont
que toute inscription en caractères quatre particules nécessaires pour la
hiéroglyphiques se lit en commençant construction de la phrase.
par le côté vers lequel regardent les Le premier groupe est composé de
têtes d'hommes ou d'animaux qui font deux signes; l'un est la figure même
partie de l'inscription. du dieu Chons, reconnaissable à ses
Celle-ci se compose de huit groupes insignes particuliers ; cette figure est

15* livraison. (Égypte.) 15

Digitized by Google
^26 L'UNIVERS.
le sujet de la proposition, et signifie : Egypte pendant une longue succesj
je. dieu Cfions; le signe au-dessus
le de règnes et d'événements , qui n
est phonétique, et se lit ti ou éili, qui portèrent, dans cet État, aucune
signifie donne, accorde. riation notable. Ce n'est pas cer.
Le deuxième groupe est également dant que Égypte ignorât l'existé
I

phonétique , et se lit sche-m (ou sche- des langues et des systèmes d*écrit
nem) % qui signifie aller. particuliers à d'autres peuples t et
Bans le troisième groupe le pronom différaient entièrement de ceux qu*
est exprimé phonétiquement, et il est avait adoptés : et quoiqu'il ne n
suivi de la figure d'un roi; ce groupe soit pas donné de connaître complt
se lit pephhonlf sa majesté. ment usages, en ces graves r
les
Le
signe isole qui suit, le 4% est la tières,des nations civilisées conte
lettre L, article au. oraines de la haute splendeur
Le groupe d'après, n°5, est terminé, r Égypte, quelques faits avérés s
à gauche, par deux signes qui avertis- lisent toutefois pour nous démon!
sent que les quatre qui les précèdent ces différences. Le patriarche Jos*
forment le nom d'un pays ces quatre : ne parla d'abord à ses frères que |

signes sont en effet les lettres des sons le secours d'un interprète qui conn,:
il, sch,t, n, et se lisent Baschten. sait à la fois la langue de Jacob
et c*
Le signe n° 6 est le même que le des Égyptiens. La variété des écritui
quatrième, et il a ici le sens du mot devait être connue aussi bien que
pour. variété des idiomes ;#deux papyr
Le groupe suivant est phonétique, et écrits en phénicien ont été trou\
se lit sens de délivrer.
nohern, avec le parmi des papyrus égyptiens dans i

w
Le groupe n 8, tout phonétique, se tombeau de la tïiébaîdè; et l'on n'a p
compose des lettres T. S.; la première appris (jue les invasions éthioptenn
est article féminin, et la deuxième, le
I aient, à cet égard, rien introduit \
signe s , l'abréviation de 51, lîls , et ici nouveau en Egypte. Sous les Perse:
fille, comme l'exige l'article féminin. l'écriture et la languedes monuments
Le signe suivant est la tettreN, qui celles des contrats particuliers furer
se prononce an, et oui est notre article les mêmes que du tempsdes pharaons
de dans la langue égyptienne. les Perses y laissèrent cependant que
L'homme debout avec une canne à ques traces d'écriture en caractère
la main est le signe figuratif de l'idée cunéiformes. Durant la dominât io
chef. des Grecs , les usages égyptiens ne sl
Le N
est déjà expliqué, de;
signe birent en ce point aucune modification
que
ainsi groupe final qui est le
le la langue égyptienne pour la populatioi
même que le cinquième de notre texte. indigène la langue grecque pour
, h
Cette inscription se lit donc mot à Grecs; l'écriture hiéroglyphique pom
mot ; Je, dieu Chons, accorde aller les monuments, l'écriture hiératique
Sa Majesté au pays de Baschtanpour pour les choses sacrées; la démotique
délivrer la fille du chef du pays de pour contrats, et pour ceux-ci une
les
Basch tan; c'est-à-dire « Je consens à : antigraphie ou seconde expédition en
ce que Sa Majesté (le roi d'Égypte) se langue grecque ( la langue du gouverne-
rende dans le pays de Baschtan , pour ment), et avec ces deux circonstances
délivrer (ou pour épouser) la fille du assez remarquables, savoir: 1° que ces
chef de Bascntan, » et c'est le dieu contrats étaient soumis au droit d'enre-
Chons qui parle ainsi dans le texte gistrement, et que l'enregistrement
(ligne \h* ) aune stèle historique qui était inscrit en langue grerque sur Je
existe dans les ruines du sud-est de contrat conçu en langue égyptienne ;2 #
Karnak, à Thèbes, stèle copiée par que, devant les tribunaux, le contrat
Champollion le jeune , et dont la tra- en langue égyptienne avait seul de l'au-
duction existe dans ses notes. thenticité, même à l'égard des natio-
Tel fut l'état de l'écriture sacrée en naux grecs. On devine aisément com-

Digitized by Google
,, ,,

ÉGYPTE. 227

en de tels usages durent contribuer sont autant de signes de Tanrien alpha-


étendre réciproquement parmi les bet démotique égyptien, introduits dans
?ux populations la connaissance si* le nouveau pour exprimer les sons
ultanée des deux langues. Le décret propres à la langue égyptienne qui
mnu sous le nom de pierre Rosette, inconnus dans la langue 'des Grecs , ne
it a ia fois rédigé en égvptien et en pouvaient pas se trouver dans leur al-
rec , et publié en écriture hiérogly- pha M. Tel est l'alphabet copte qui fut
iiique , en écriture démotique , et en substitué aux anciennes écritures égyn*
Titure grecque. tiennes pour écrire la langue égyp-
Durant ia domination romaine , les tienne, opération semblable à celle
iciens usages égyptiens furent conser- qui aurait aujourd'hui pour objet d'é-
»; la langue grecque continua d'être crire la langue française avec les ca-
«Ile du gouvernement ; les inscriptions ractères grecs ou tous autres : ce se-
es monuments publics furent tracées raient d'autres signes alphabétiques
n caractères hiéroglyphiques ; les con- mais ce serait toujours la même lan-
rats particuliers continuèrent d'être gue française.
crits en caractères démotiques, parmi L'époque et la cause de la substitu-

s Égyptien!. Il nous est parvenu de tion de ce nouvel alphabet a l'ancien


ootiesies stèles funéraires, où cette sont généralement rapportées ù l'in-
triture populaire se retrouve encore; troduction du christianisme en Egypte ;
X ces vieilles institutions de I' Égypte il serait plus exact de dire que ce fut

levaient durer jusqu'au temps marqué à son influence, dès qu'il fut devenu
tour la (in des anciennes crovanc.es dominant. C'est l'évangéliste saint Marc
lans l'ancien monde, et pour la substi- qui est considéré comme l'apôtre de
tilion du christianisme à toutes les rÉglise d'Alexandrie, que saint Pierre
riiilosophies antérieures qui semblè- aurait désigné à cet effet, et qui y se-
*nt se prêter, presque sans combat, rait mort vers le temps de Néron. Cette
i voir se résumer en une doctrine première époque du christianisme en
nouvelle et dominante , tout ce qu'il y Egypte fut sans influence sur les an-
Hait eu en elles-mêmes de vrai , de ciennes institutions nationales ; le
bon et d'utile. temps seul pouvait les oblitérer insen-
C'est en effet à rétablissement du siblement ; et nous trouvons en effet,
,

christianisme parmi les Égyptiens jusqu'en l'an 211 , les monuments pu-
qu'on rapporte généralement la substi- blics ornés des tableaux et de l'écriture
tution de l'alphabet copte aux an- de l'ancienne religion. Les noms de
ciennes écritures égyptiennes : opéra- Caracalla et de Géta sont inscrits sur
tion aussi simple dans son action, que ces tableaux.
profonde et efficace dans ses effets; car A cette même époque, un Démé-
h langue égyptienne écrite jusque-là
, trius , le onzième successeur de saint
au inoven des caractères hiéroglyphi- ]>larc,étaitpourvudePévêchéd'Alexan-
ques, hiératiques ou démotiques fort ",
drie; vintensuite Diocletien, qui traita
nombreux , et d'expressions diverse* les chrétiens de telle sorte , que l'ère
*>it figurative , soit idéographique ou de son règne fut pour eux ère des I

iphabetique , et représentant les uns martyrs; et ce n'est pas dans de telles


les idées mêmes , les autres les mots circonstances que l'Église chrétienne
^$nes des idées, ne fut plus écrite pouvait être dans la nécessité de faire
qu'avec une série de trente et un signes, écrire sa liturgie dans une écriture
dune expression identique, tous re- plus expéditive que ne Tétait l'écriture
présentant alphabétiquement les voix égyptienne démotique. C'est de cette
et les articulations propres à compo- même écriture que la généralité des
ser les syllabes et les mots de la langue savants pense que les soldats de Gor-
parlée, et de ces trente et un signes dien se servirent dans l'inscription en
vingt-quatre sont ceux mêmes qui com- plusieurs langues dont ils firent déco-
posent l'alphabet grec, et les sept autres rer le tombeau de cet empereur; cir-
15.

Digitized by Google
22H L'UNIVERS.
constance qui date aussi du troisième ( Dioctétien 662 , et du
Van de
siècle, et qui , soit dit en passant , in- sin 334) il est vrai aussi qu'à Vt
;
firme hautement l'opinion des criti- de cette inscription, déposée sur
ques qui , tels que Lacroze et le tombe d'une chrétienne, les Aral
P. Georgi , font remonter l'usage de gouvernaient l'Égypte depuis tri
l'alphabet copte jusqu'au règne du Pha- siècles révolus. Les Coptes conseï
raon Psammetichus ; ou bien tels que rent leur alphabet longtemps eix
le P. Bonjour, D. Montfaucon, Ja- après, comme le prouvent des mai
blonski , Valperga et Schow, oui le rap- crits coptes qui ne sont pas antéri<
portent aux règnes d'Alexandre ou des au seizième siècle de notre ère , é\
Ptolémées, ou plus généralement à un qui fut, comme nous l'avons déjà
temps antérieur à l'ère chrétienne. celle où la littérature copte jeta
Mais le docte Zoéga, malgré tant d'au- dernières lueurs, et qui vit finir, i

torités contraires, n'a pas hésité à dé* espoir de retour, la langue et tous
clarcr que l'alphabet copte ne lui pa- systèmes d'écriture successivement us
raissait pas avoir été adopté, au plus tôt, tés en Égypte, dont nous avons fl
avant le troisième siècle de l'ère chré- sayé de donner ici une idée sans dont
tienne. Ajoutons que, dans l'île de trop sommaire ; mais nous avions ans
Philae, on adorait encore Isis et Osiris quelques mots à dire sur d'autres iot
dans la seconde moitié du sixième titutions de l'Egypte des pharaons.
siècle chrétien. Enfin , il reste assez
d'incertitudes , dans l'esprit des meil- S XVIll. SYSTÈME NUMÉRIQUE.
leurs critiques , sur l'époque de la ver- TRIQUE. MONNAIE.
sion copte de l'Ancien et du Nouveau
Testament , pour qu'on ne puisse tirer, Ce que nous avons appris par Iq
de ces opinions diverses, aucune don- monuments au sujet du système nu
,

née précise, et utile a la question pré- mérique des anciens Égyptiens , nouj
sente. Le savant Michaèlis a résumé prouve que leur arithmétique n'étaî
toutes ces opinions, dont les unes ten- pas plus perfectionnée que celle da
dent a démontrer des rapports patents Grecs; ils ignorèrent l'admirable fonq
entre la version copte et la version la- tion du zéro, et pour les signes
tine, et dont les autres la trouvent chiffres la valeur de position : mgé
,

plus conforme au grec des Septante; nieux et féconds procédés au moyei


et il existe peu.de manuscrits coptes desquels, avec neuf chiffres dont k
de ces textes sacrés, dans les divers dia- valeur augmente en progression dé
lectes coptes, qui paraissent antérieurs cuple à mesure qu'on les avance ven
au septième siècle: les plus anciens la gauche, nous pouvons, dans le sys
sont écrits sur papyrus; les autres terne moderne venu des Indiens pai
sur peau de gazelle, sur vélin , ou sur les Arabes, exprimer eommodémeni
papier. On connaît aussi en langue et les nombres
les plus considérables.
en caractères coptes, et des inscrip- ne nous est parvenu aucune no-
Il
tions funéraires, et un assez grand tion écrite sur l'arithmétique des Égyp-
nombre de lettres missives écrites sur tiens; les signes de nombre une (ois
des fragments de poterie recueillis dans reconnus, on a recueilli tout ce qu'on
les ruines des anciennes villes égyp- a trouvé écrit en chiffres sur les mo-
tiennes ; mais bien peu de ces débris numents, et on en a tiré des données
portent des dates; et la plus ancienne nécessairement incomplètes, en ce sens
qu'on y ait retrouvée jusqu'ici est de qu'on ne doit pas croire que les Égyp-
l'an 945 de l'ère chrétienne. Il est re- tiens ignorèrent une partie quelconque
marquable toutefois que cette inscrip- de la science des nombres, parce qu'on
tion copte chrétienne porte une double n'en trouve pas d'application sur leurs
date , dont Tune est tirée de l'ère de monuments. On sait en combien de
Dioctétien ou des martyrs, et l'autre circonstances la connaissance de la
de l'ère de Mahomet ou de l'hégire, géométrie était nécessaire à leur ci-

Digitized by Google
, . • * • . •
* • • • .
• • J . t

... I »

i V « . •

Digitized by GooqU
o, ». * .

a
3 =4
a;
ir
a

saurai
r»tj
^^
7^
<^A
|J
—=>
lljfl

:l>
lit*
M =g S
Il 9*

g
H) ^ h? à
r
JT'O - - -
M ne
;;K Ml
r :lt 3 : ! 7^7 - ^
r
-* 72
m « :B

VA
* i s g
r»w
O-m
0-»
nè)
vfi

4. Sua «g s* ^ ijj
s: m
b:
1

F!
Bï SE ;

3 ÎO" *r d
Vrvl »

.Vit; n f.

Kg
5

t s* t£Hl J
<^ »4
!«!I g 3d oW 11»)
3i
ÊS în S EH?

V •
w 111
Ma»
E!

V" •

0^
>
p
- n
— înû ^
«r'
A -

« -+=»

f m '
tir
S 0/
Sun 0*
oui ^
EH Fis -H I*
;! i a
> fis

"5o Ça E

| «1 2Î l\ Ça B -* -
7| 2^ ôï^
54 U)(l

gin
-i
U

3
«S
1

Digifeed by-4sO'
EGYPTE. 229

vilisation; on voit aussi leurs mo- le signe dix était également spécial , et
numents exactement orientés, et sur il était ensuite modifié par l'adjonction

les magnifiques créations de leur ar- des chiffres des unités pour former des
chitecture, tous les secours qu'ils caractères qui offraient l'expression
surent tirer de cette science: on ne des idées deux fois dix , trois rois dix
peut donc leur refuser d'avoir possédé quatre fois dix, etc.; un signe parti-
des règles dont il nous reste de si nom- culier signifiait cent ; et , par une com-
breuses applications. Voici dans leurs
, binaison très - analogue à celle des
limites réelles, les résultats tirés de dizaines , ce même signe exprimait les
l'étude des monuments, et un résumé nombres 200 , 300 , etc. , jusqu'à 900 ;
de. ce qui se trouve plus au long ex- le signe spécial du nombre mille était
posé dans le IX* chapitre de la Gram- soumis à la même règle, et figurait
maire égyptienne de mon frère, sur sans équivoque les multiples de mille
les mots et les signes qui ont servi à parles neuf premières unités; ensuite
la numération chez Égyptiens.
les un signe particulier disait dix mille,
Remarquons d'abord à , ce sujet et , en le répétant neuf fois , on arri-
que les nations modernes sont tom- vait à exprimer l'idée 90 mille; enfin,
bées dès Ionîztemps dans une contradic- pour les quantités supérieures,, on les
tion manifeste : le système graphique exprimait facilement par une combi-
de tous les mots de leur langue est al- naison systématique des signes des
Ehabétique , et les signes des mots de centaines et des mille avec celui de la
i numération sont entièrement idéo- myriade , et ces chiffres combinés se
graphiques ; ces signes étaient aussi lisaient : cent fois mille ou cent mille,
idéographiques chez les Égyptiens, cent fois dix mille ou un million , cent
mais du moins ils se trouvaient en cela fois vingt mille ou deux millions, etc.
dans une parfaite analogie avec leur Dans démotique, ou po-
l'écriture
écriture nationale. fiulaire système de numération était
, le
Les numératifs ou noms de nombre e même que pour l'écriture hiérati-
se divisaient aussi en ordinaux et car- que , et les signes-chiffres presque sem-
dinaux ; ceux-ci exprimant la quantité blables aussi. Ces chiffres étaient em-
des objets, et ceux-là déterminant leur ployés à la numération de toutes sortes
ordre relatif. d'objets, à l'exception formelle des
Chacune des trois subdivisions du dates pour les quantièmes du mois.
système général d'écriture avait aussi Il est digne de remarque, en effet,

sa série de signes de nombre. que ce quantième fut exprimé par des


L'écriture hiéroglyphique avait un chiffres particuliers pour les nombres
signe particulier pour chacun des nom- un , deux , trois et quatre ; et pour les
bres un, dix , cent, mille, et dix mille; nombres 5, 6, 7 et 8, on s'attacha à
ils étai mt écrits autant de fois que reproduire, par la combinaison de
l'exigeait la somme à exprimer; on ces chiffres, les groupes hiéroglyphi-
figurait jusqu'à neuf fois le signe de ques qui représentaient ces mêmes
l'imite pour exprimer l'idée 9; neuf nombres. Le signe du nombre 9 était
fois le signe de la dizaine pour expri- également spécial. Enfin , pour les
mer 90 ; neuf fois le signe cent pour dates composées de dizaines et d'uni-
figurer le nombre 900 , et ainsi de suite tés, les signes 20 et 30 avaient aussi
pour les autres chiffres ( voyez notre une forme particulière, et leur tracé
planche 66, n° A). était un groupe qui se décomposait en
L'écriture hiératique procédait d'une 10, 3 et 2, pour dire 15; en 20, 3 et
autre manière ; elle avait un signe par- 3 pour dire 26, et ainsi de suite jus-
ticulier pour chacun des nombres un, qu'à 30 figuré par un chiffre spécial
deux, trois, quatre, et neuf; au con- (voyez la même planche 66, n° B).
traire, les nombres 5, 6, 7 et 8, s'ex- Les contrats, les manuscrits, et no-
primaient au moven des chiffres com- tamment les registres de comptabilité
binés 3 et 2. 3 et 3, 3 et 4, 4 et 4; des temples , ont fourni les éléments

Digitized by Google
L'UNIVERS.
de ces notions sur le système numé- tiquité firent avec succès des observ
rique des Égyptiens ; on y trouve aussi tions astronomiques, les employère
des exemples nombreux 'de l'emploi de dans la description de la terre /et d
ces chiffres dans des sommes expri- terminèrent avec exactitude la situ
mées par les unités, les dizaines, les tion de quelques points principaux <

centaines, les mille et les myriades. globe. Les résultats de teurs observ
C'est répreuve certaine des théories lions furent exprimés en mesures a
qui viennent d'être exposées. thentiques : il faut donc suppos
Quant aux numératifs ordinaux, qu'alors déjà ces mesures étaient sy
ilsétaient écrits au moyen des signes tématiquement déterminées, et furet
des nombres cardinaux, qui étaient pré- des divisions astronomiques du degi
cèdes d'un caractère complexe placé au- terrestre. Les mêmes mesures eurï-i
dessus de ce signe cardinal. Il en était des rapports précis avec les divisioi
de même pour exprimer les nombres du temps ; et si on a entrevu dans U
fractionnaires , et on a aussi des exem- rapports comparés de l'antique lit t«
ples d'additions composées à la fois rature , une division commune du cie.
de nombres entiers et de fractions. On de la terre, de l'année et du jour e
ne connaît pas d'exemple écrit des 720 parties , d'après d'autres aperçu
autres parties de l'arithmétique, telles l'unité aurait été divisée d'abord e
que la soustraction, la division, la trois grandes parties, puis en douze
multiplication , etc. ; on ne connaît pas en trente-six, et finalement en troi
non plus de signe pour exprimer di- cent soixante. Ce qu'il y a de certain
rectement un nombre supérieur à la c'est l'association habituelle de troi
myriade : mais on ne doit pas prendre divinités dans le même culte , dans I

les limites de nos recherches pour les même temple; l'union religieuse de;
limites de la science des Égyptiens trinités locales, assimilation régulier*
dans l'arithmétique : d'autres monu- à la trinitc primitive; enfin la dîvisioi
ments peuvent nous en enseigner da- de l'année civile en trois saisons,
vantage. Concluons , toutefois , de tout comme l'année agricole et l'état d(
ce qui vient d'être exposé, que le sys- la surface du sol qui changeait sensi

tème numérique des Égyptiens avait blement d'aspect tous les quatre mois.
des rapports intimes avec celui que On a remarqué avec toute raison
les Grecs adoptèrent ensuite, et que qu'un goût naturel, que l'état constam-
les théories durent être appliquées ment normal du gouvernement et des
par des procédés analogues. lois, fortifie par sa régularité même,
L'intérêt réel , historique, archéo- portait les. Égyptiens vers la stricte pra-
logique des notions qui précèdent , se tique des choses exactes; qu'ils attri-
réalise essentiellement dans leur appli- buèrent à Thôth , le plus savant des
cation a la recherche des dates qui se dieux, l'invention des poids et des
trouvent très-fréquemment sur les mo- mesures ; et que le mesurage des ac-
numents égyptiens: chaque date est" croissements périodiques du Nil, et la
uu fait de grande considération, et reconnaissance des limites des terres
très-fécond en résultats utiles à la cer- annuellement confondues par l'inonda-
titude historique; nous avons tâché de tion, avaient rendu nécessaires la con-
réunir sur nos deux planches numé- naissance et l'emploi de ces mesures
rotées 65 et 66, les moyens et les dès les premières idées de la propriété,
exemples les plus propres à les faire dès les premiers labours donnés au
reconnaître, et à les traduire exacte- sol de l'Egypte ; et , comme toutes ses
ment en supputations modernes. autres institutions , le temps et le pro-
Système métrique. On est porté à grès naturel des sciences durent per-
croire, d'après l'autorité que quelques fectionner aussi son système métrique.
savants modernes ont imprimée à leur Il comprenait à la fois les mesures
opinion , que longtemps avant le siècle itinéraires ou de longueur; celles de
d Alexandre quelques peuples de l'an- superficie , ou agraires , divisées ou

Digitized by Google
• -» » •

• M , • « •

• • .

• • »
- » • i

» t ' %
> .

Digitized by Google
,

ÉGYPTE.
mnltipliées selon que Tusage Payait parvenu plusieurs d'originales de cette
successivement exigé, et toujours res- même dimension ; et l'examen atten-
pectivement à un étalon primitif, dont tif qui en a été fait , leur assigne pour
l'origine était rattachée à une grande longueur exacte 444 millimètres , dont
opération astronomique ou geodési- le palme était la sixième partie, et le
<rie, d'où le degré avait été déduit. doigt la vingt-quatrième. Il y a aussi
C'est à ce degré que Ton rapportait des coudées de sept palmes, qui sont
en effet les scheenes, les milles, les ainsi plus longues d un sixième que
stades, les aroures, les plèthres, les celle qui vient d'être indiquée.
cannes, les oryges , les pas , les pieds On trouvera, sur notre planche 65
et les coudées, types divers et d'iné- au n° f, la figure d'une portion de
gales dimensions,' nous a-t-on dit, qui la coudée, contenant exactement les
composaient ce système. Mais il faut neuf premiers doigts, formant les deux
reconnaître qu'on n'a trouvé que dans premiers palmes , plus un doigt. On
b littérature occidentale ces noms , ces reconnaît facilement que la forme de
mots et les acceptions qui leur ont
, la coudée était parfaitement appropriée
été il serait difficile de les
attribuées; à son usage. Celle que nous reprodui-
ramener tous à des origines égyp- sons est en bois dur, dit de Méroé.
tiennes ; et , afin de ne pas nous dé- C'est comme une règle ayant deux mil-
tourner du plan de notre travail et de limètres d'épaisseur et le double de
b considération des monuments ori- largeur, et dont la partie supérieure
gnaux , c'e>t de la coudée , principale est divisée en deux parties, l'une des
mesure égyptienne, comme étant la deux étant coupée en biseau, mais cha-
plus usuelle, que nous parlerons ici cune des deux portant une inscription
Particulièrement. Comme à l'égard de hiéroglyphique, où se trouvent par-
toutes les autres mesures égyptiennes, fois des noms et des dates.
ti txiste une foule de passages sur la L'aspect général de la coudée nous
coudée, sa longueur et ses divisions, montre cette règle divisée en parties
ce? passages ont été diversement ex- égales, qui sont les vingt -quatre ou
pliques, et peut-être un peu trop au les vingt-huit doigts, et en trois ban-
p-é des divers systèmes généraux sur des longitudinales. Aux cases qui cor-
les mesures égyptiennes, nouvelle- respondent aux quinze premiers doigts,
ment publiés avec une égale masse en allant de gauche à droite , et dans
d'érudition , avec un semblable dévoue- la bande la plus éloignée, on a inscrit
ment à la recherche naïve de la vérité. la figure ou le nom des quinze divini-
Il nous est parvenu des coudées égyp- tés auxquelles chacune de ces divisions
tiennes intactes, originales, en bois était consacrée; la première est le
ou en pierre, divisées, graduées, si- soleil et la dernière Thôth. Dans la
,

gnées, authentiques: un seul de ces bande intermédiaire, on a écrit les


monuments nous en dit plus que tous principales divisions de la coudée; les
les passages des anciens ensemble ; et premiers signes , en allant de gauche
les notions que nous allons en déduire a droite , sont les lettres S T N {sou-
seront à la fois certaines et com- ten y roi , royal); le signe suivant, un
plètes. bras plié jusqu'au coude , est le signe
Les écrivains de l'antiquité parais- figuratif de la coudée elle-même; de
sent avoir établi une différence entre sorte que ce groupe doit se lire cou-
la coudée qu'ils qualifient de royale
,
dée royale. D'autres groupes indiquent
et d'autres mesures auxquelles ils don- les subdivisions de la coudée, et suc-
nent aussi le nom de coudée; mais, cessivement un doigt, deux doigts,
en général , ils s'accordent à dire que trois doigts, quatre doigts ou le palme;
la coudée royale était divisée en six ensuite le pied, etc. Enfin, on trouve
]>almes, et chaque palme en quatre dans la troisième bande, les doigts et
doigts.Cette coudée se composait donc leurs subdi visions en fractions de doigt;
de *»ngt-quatre doigts. Il nous en est le premier, à gauche, est divisé eu.

Digitized by Google
232 L'UMVERS
moitié de doigt, et le signe qui est productions les plus précieuses était
au-dessus est un M
, lettre initiale du abondantes, où le commerce t< de
mot méti, qui signifie moitié. Les au- l'Orient était centralisé, les unités
tres divisions croissent successivement compte devaient être fortes, le systèi
du tiers au seizième de doigt, et le numérigue et le système métrique <

signe qui surmonte ces chiffres est vaient être capables de représenter
un R, initiale de re> monosyllahe qui très-grandes quantités : les pays pa
fait passer le nombre que ce signe ou vres et les petits États ne peuvent
j
que ce mot précède , à l'état de déno- même avoir l'idée des myriades n de
minateur d'une fraction. riades ; ils ont des petits poids et d
Voilà les traits principaux à obser- petites monnaies.
ver dans une coudée. On en voit dans A l'égard de la monnaie, nous avo
les musées de Paris , de Turin, et ail- déjà dit que PÉgypte n'eut pas Pid
leurs ; elles sont uniformément cons- d'un système monétaire légal , ni pei
truites , soit qu'elles soient de bois , et être même le besoin; et il en se
épaisses comme celle dont nous ve- ainsi pour toute nation qui, ne U
nons de parler , soit qu'elles soient en sant de commerce qu'avec elle-inëm
matières calcaires, et, dans ce cas, ou bien avec des alliés dont les int
quatre fois plus larges qu'elles ne sont réts ne seront pas différents des sien:
épaisses. Sur toutes celles qui nous n'éprouvera pas la nécessité d'i
sont parvenues , et qui toutes ont été signe d'échange généralement reeonn
recueillies dans des tombeaux , on voit comme avant la valeur intrinseqi
des inscriptions funéraires sur le côté à lui assignée par l'autorité qui i

opposé à celui qui porte les divisions met en circulation. Il lui suflit, e
métriques, quelquefois aussi sur les réalité , d'un signe d'échange dont 1

tranches; et une de ces inscriptions valeur arbitraire ne sera contestée pa


offre le nom du roi Horus, de la dix- aucun des individus auxquels ce m -
huitième dynastie , ce qui prouve que sera présenté pour cette valeur. Le
cette mesure était en usage plus de billets de banque donnent l'idée de c>
1600 ans avant l'ère chrétienne. signe monétaire conventionnel ; et i

. Toutes ces notions nous amènent à n'y a peut-être pas de matière dont j,

reconnaître , djaprès les recherches les minime valeur soit plus au-dessous d<
plus récentes ï que la coudée égyp- la somme que représente chacun d<
tienne de six palmes était égale à 444 ces billets, frêle morceau de papier.
de nos millimètres ; sur cet étalon très- qui ne vaudrait pas matériellement un
authentique, on peut se procurer des centime, si les lettres historiées donl
données qui ne le seront pas moins il est orné cessaient d'être l'expression

sur les autres mesures égyptiennes d'un engagement public, hypothèque


qui n'étaient que des multiples ou des sur des tonnes d'or existantes réelle-
tractions de cette même coudre. ment dans un dépôt inviolable. Des
Quant aux poids en usage en Égypte que, en Égypte, l'état de la société
la seule notion certaine que nous puis- eut fait succéder aux échanges de gré
sions en donner ici , est tirée d'un à gré, la vente et l'achat de toutes

f)oids antique , en basalte vert , dont sortes de choses vénales , par le moyen
a figure , de la grandeur de la moitié d'une sorte particulière de ces mar-
de Toriginal , se trouve sous le n° 8, de chandises, sorte utile et nécessaire à
notre planche 65 ; ce poids, très-régu- tous, au gouvernement comme aux ci-
lièrement taillé, pèse exactement 62 toyens , dont la valeur invariable n'é-
gram. -£; on voit qu'il est marqué du tait contestée par personne, avec la-

nombre cinq; il représente donc cinq quelle on se procurait de suite tout ce


fois une unité, qui était réglée à 12 qui était nécessaire à la vie, et qu>o
gram. et qui devait aussi avoir de
-, , conséquence tous voulaient acheter
nombreux multiples : dans un État riche au moyen des produits soit de la terre,
et puissant comme l'était l'Egypte, où les soit dès arts , il y eut alors en Egypte

Digitized by Google
J
EGYPTE. 233
une monnaie légale. Toutefois elle ne ces revers ne sont point diversifiés,
consista qu'en une monnaie de con- et, sans ces dates ils seraient inutiles
,

vention, nécessaire au petit commerce ; à l'histoire.


on croit qu'une classe de ces nom- La domination romaine en Égypte
breux produits de l'industrie égyp- y introduisit le système monétaire
tienne , qu'on appelle scarabées, parce romain; la langue grecque y fut con-
qu'ils ont la forme de cet animal , et servée pour les légendes. On frappa,
sur lesquels on lit les noms des Pha- en Égypte , la monnaie romaine égyp-
raons , servit , à cet effet , de pe- tienne , à l'effigie de l'empereur
tite monnaie. Mais , pour les transac- comme dans le reste de l'empire,
tions considérables, on se servait mais avec des dates et des revers
d'anneaux d'or pur, d'un poids et d'un tirés des coutumes égyptiennes; et
diamètre déterminés; on se servait on ajouta, à la série (les monnaies
aussi d'anneaux d'argent à un titre et à générales de l'Égypte , une série de
un poids également réglés par l'auto- pièces frappées pour chacun de ses
rité publique: on n'a rien découvert nomes ou provinces. Sous Tibère et
en Égypte qui donnât l'idée des mon- sous Néron , on commença d'abaisser
naies en usage chez d'autres nations le titre des monnaies d argent; sous
de l'antiquité , ou chez les peuples mo- Antonin , ce titre s'altéra de plus en
dernes. plus; sous Marc-Aurèle et sous Com-
Tel fut, à cet égard, l'état de l'É- mode , l'alliage fut encore plus fort ;
gypte tant que durèrent ses institutions on n'employa bientôt plus que le po-
nationales. Conquise par les Perses, tin , ou argent à très-bas titre ; enfin
Darius, fils d'Hystaspe, y mit en cir- les monnaies de cuivre prirent insen-
culation des monnaies de l'or le plus siblement le dessus M mesure que la
pur, et elles y eurent cours légal, ainsi décadence de l'empire s'accroissait;
nue dans les autres parties de l'empire et l'on n'en connaît pas d'un autre
(les Perses; on les appelait dariques, métal depuis Aurélien jusqu'à Dio-
du nom du roi qui les avait fait frap- ctétien. Ce dernier empereur ajouta
per. A son exemple, Arvandès, gou- à ses autres actes de rigueur envers
verneur de l'Égypte, lit des monnaies l'Égypte, la suppression de son ate-
d'argent qu'on appela aruandiques; lier' monétaire on y frappa cepen-
:

et, pour ce fait, accusé d usurpation dant encore quelques monnaies sem-
des droits royaux , il fut mis à mort. blables à celles du reste de l'empire;
La monnaie d'Alexandre succéda à mais lalégende était latine , et, en ce
celle des rois persans ; celles des villes point encore, la nationalité de j'É-
et des rois de la Grèce, de l'Italie et gvpte fut abolie à la fin du troisième
de la Sicile, ne durent pas y être in- siècle de l'ère chrétienne. Les Ro-
connues; les Ptolémées frappèrent des mains n'y firent point frapper de
monnaies particulières à l'Égypte , mais monnaie d'or ; la collection des pièces
ils ne s'écartèrent pas du système mo- en argent , en potin ou en bronze , est
nétaire des rois grecs et de ceux de fort nombreuse; et la variété des
Syrie. Il nous est parvenu des pièces dates et des revers les rend très-
frappées à i'efligiedes rois et des reines utiles pour les recherches historiques.
de la famille des Ptolémées , en or, en Depuis les Romains, l'Égypte a connu
argent et en bronze , et de plusieurs toute sorte de monnaies /parce qu'elle
dimensions. Celles des premiers suc- a connu toute sorte de maîtres. Ses
cesseurs d'Alexandre sont remarqua- monnaies nationales, en métaux di-
bles par la pureté du métal et la per- vers , remontent au grand Alexandre,
fection de l'art : pour les dernières et finissent avec Dioctétien : on dit
pièces de cette race , le métal et l'art que la belle reine de Palmyre, Zéno-
sont tous deux de mauvais aloi ; elles bie, s'attribua momentanément, en
portent l'effigie du prince, et au revers Égypte , le partage de l'autorité impé-
une date tirée de l'année de son règne ; riale mouétaire.

Digitized by Google
234 L'UNIVERS.
Quant au calendrier, on
près son usage même
sait, d'a-
dans les sociétés
tronomie et dans la philosophie.
d'eux , ajoutait-il , que vient l'usage è
O
modernes, par quelle importance et régler le temps, non d'après la rev<
quelle utilité est caractérisé ce simple lution de la lune, mais d'après cell
tableau de la division légale du temps du soleil; ils ajoutent aux 12 mois d
pour les usages civils. On pensa à un 30 jours chacun, cinq jours tous Je
calendrier en Égypte , dès qu'on y pensa ans; et comme il reste encore, pou
à quelque civilisation ; mais il rie reste compléter la durée de l'année , une cei
point de traces authentiques de son taine portion de jour, ils en formen
institution première. Il est vraisem- une période composée d'un noinbr
blable qu'elle manqua d'une hase cer- rond de jours et d'années suffisant
taine, puisque l'exactitudedu calendrier pour que les parties excédantes étan
dépend de la certitude avec laquelle on ajoutées, soient absorbées en un jou
est parvenu, par des procédés très-com- entier. Le même écrivain rapport
pliqués, à déterminer la longueur aussi que Platon et Kudoxe passeren
réelle de l'année solaire, dont le calen- plusieurs années à Héliopohs dans V
drier. ne doit représenter qu'une divi- commerce des prêtres de cette ville
sion exacte en parties ou périodes qui s'adonnaient particulièrement i

d une durée également ûxe. Il ne nous l'étude de la philosophie et de Castro*


est parvenu sur l'Égypte qu'une vague nomie; que ces deux voyageurs gre. s
notion sur une année civile de 360 obtinrent de ces prêtres , fort" peu
jours seulement, et sur une addition communicatifs d'ailleurs , la connais-
de cinq jours complémentaires, qui au- sance de quelques théorèmes; mais
rait été faite à ce premier nombre dès que ces prêtres laissèrent ignorer s
les plus anciens temps de l'histoire de Platon et à Kudoxe, qu'ils ajoutaient
l'itgvpte; de sorte que l'usage d'une aux 365 jours de l'année la portion du
année de 305 jours est attribué à ce jour et de la nuit nécessaire pour l.i
pays dès la plus haute antiquité. compléter, et que c'est par suite de
Cette année était divisée en 12 mois cette réserve que les Grecs ignorèrent
de 30 jours chacun, suivis de 5 jours cette intercalation , jusqu'à ce que les
complémentaires ou èpagomènes ;mais astronomes plus modernes la connus-
cette période de 365 jours était réelle- sent au moyen des traductions en lan-
ment plus courte que la durée de l'an- gue grecque des livres égyptiens où ,

née solaire, à peu près d'un quart de l'on puisaitencore du temps de Stra-
jour. Il en résultait que cette période bon, ainsi que dans les écrits des Chai-
rétrogradait sur la révolution solaire déens.
à peu près d'un jour tous les 4 ans, On voit donc par ces témoignages
d'un mois tous les 120 ans, et d'une formels , et malgré le silence d'Hip-
année de 365 jours tous les 1460 ans. parque,d'Ératosthèneset de Ptolémee,
Une telle institution aurait donc été au sujet des secours qu'ils ont trouvés
erronée dans ses éléments, et il en au- dans les écrits des Égyptiens , que les
rait pu résulter de graves perturbations prêtres astronomes d'Héliopolis et de
dans les affaires générales , les prati- Thèbes connaissaient la véritable Ion-
ques du culte et les usages publics. De geur de l'aunée solaire de 36 jours et
>

plus, elle ferait supposer que les Égyp- un peu moins d'un quart de jour; et
tiens furent peu avancés dans la phy- sur d'autres témoignages non moins
sique générale, et ne possédèrent pas irrécusables, que le calendrier, tel
les pratiques fondamentales de l'étude qu'il fut institué en Egypte, et tel
du ciel, et la plus nécessaire aux inté- qu'il y fut en usage pendant une lon-
rêts d'une nation civilisée. gue série de siècles , ne donnait à l'an-
Mais l'antiquité classique a de quoi née civile que 365 jours juste , sans
nous rassurer sur ce point. Strabon aucune intercalation.
disait que les prêtres de Thèbes pas- Toutefois il n'y a pas lieu ici d'accu-
saient pour être très-vei sé» dans l'as- ser l'Égypte d'ignorance ; les traditions

Digitized by Google
ÉGYPTE. 235
historiques, au contraire, nous portent année se nommèrent : Thoth; 2,
à croire que \*>s Égyptiens firent réel- Paôphi 3, Athyr ; 4, Choïak ; 5, Tybi ;
;

lement connaître a la Grèce le quart 6,Méchir; 7,* Phaménoth; 8, Phar-


de jour qui complète à peu près la ré- mouthi; 9, Pachôm; 10, Pavni; 11,
volution annuelle du soleil , quoiqu'ils Kpiphi ; 12, Mésori; et ils étaient sui-
n'en tinssent pas compte dans leur ca- vis des cinq jours célestes , ou jours
lendrier civil. On sait qu'il y avait en épagomènes, désignés seulement par
er
Egypte des collèges de prêtres spécia- leur ordre numérique 1 , 2% 3 e , 4*
e
lement attachés a l'étuae des astres, et 5 .

et que Pythagore et les philosophes des Nous avons reproduit sur notre
générations suivantes étaient allés planche 66, n* C, la série des signes
s'instruire parmi eux. Les écrivains au moyen desquels ces noms des '

grecs attestent que ces prêtres obser- mois sont exprimés dans les inscrip-
vaient régulièrement les solstices, dont tions hiéroglyphiques. On doit remar-
la connaissance leur indiquait assez quer d'abord que ces 12 noms se divi-
exactement le commencement de la sent en trois séries dont chacune est
crue du Nil. Hérodote n'hésite pas à caractérisée par un signe particulier,
assurer qu'ils savaient très-bien que la surmonté de la figure du croissant de
durée de leur année civile était plus la lune renversé, et tracé 1, 2, 3 ou 4
courte que celle de Tannée solaire, et fois. Ces trois séries qui représentent
qu'après un certain nombre de révolu- les 12 mois , nous prouvent que l'année
tions, ces deux années inégales recom- égvptienne était partagée en trois sai-
mençaient le même jour. sons seulement, et ces trois signes de
Nous devons donc nous représenter série indiquent en effet, le premier,
les sages de l'Egypte comme ayant des la saison des plantes ou de la végéta-
notions exactes sur la durée de l'année tion; le second, la saison des récol-
solaire, et néanmoins comme ne l'ayant tes ; et le troisième , la saison de
pas introduite dans l'institution du Yinortdation. Un croissant au-dessus
calendrier civil en usage dans l'empire du premier signe dénote le premier
égyptien ; ce calendrier sciemment ir- mois de la saison de la végétation, ou
régulier ne comptait que 365 jours le mois de thoth ; un croissant suivi
complets , et rétrogradait ainsi presque du signe du nombre 4, désigne le
d'un quart de jour chaque année sur quatrième mois de la même saison,
larévolution solaire. ou le mois de choïak , et il en est ainsi
Ce fut ce calendrier qui fut seul en des trois saisons et des douze mois.
usage dans toute l'Égypte, dès les plus Les jours épagomènes sont aussi in-
anciens temps auxquels ses annales diques par un groupe dans lequel en-
peuvent remonter, et malgré les vicis- trent les idées ciel et soleil, et les
situdes qui troublèrent à diverses épo- nombres 2, 3, 4, 5 exprimés par
1,
ques l'ordre établi et les coutumes autant de chiffres détermines, donnent
nationales de l'Égypte. L'usage de ce aussi le quantième de chacun de ces
calendrier fut du nombre des insti- jours.
tutions publiques que la politique Telle fut la notation graphique des
d'Alexandre ordonna de respecter; la noms des mois et des jours complé-
puissance romaine se contenta de le mentaires du calendrier égyptien , dé-
modifier, mais en même temps elle couverte par Champollion le jeune qui
l'adopta dans tous les actes de son ad- la rendit publique en 1828.
ministration qui intéressaient spécia- Ce n'est pas ici le lieu de remonter
lement l'Égypte. à l'origine de cette division de l'année
Ce calendrier de 365 jours ne repré- égyptienne en trois parties seulement
sentait qu'une année vague, et elle était de 120 jours chacune ; mais on ne peut
ainsi appelée, parce qu'elle rétrogradait omettre de faire remarquer que la pé-
à chaque période sur la marche du riodicité du débordement annuel du
soleil. Les mois qui composaient cette M, et sa durée, partagent de la même

Digitized by Google
L'UNIVERS
manière l'année agricole. Au solstice avant Tère chrétienne, et quelq
1

d'été, le fleuve se gonfle, croît succes- siècles après, cette belle étoile s
sivement, se déborde, s'abaisse en- levée le même
jour fixe, en Égy
suite, et se retire; on sème en oc- ( parallèle moyen), un peu avant lé
tobre, et la germination s'opère ainsi leil ( lever héliaque) , et ce jour a
120 jours après le solstice ; c'est la du- le 20 de notre calendrier juli<
juillet
rée de la saison de V inondation. Après et , s'il est vrai, d'après certaines t
le même espace donné à la saison Je la ditions , que les Égyptiens cnnside
végétation y la récolte commence en rent ce lever héliaque de l'étoile Sir
mars, et une autre période de 120 jours comme ayant présidé à l'origine
ramène l'année au solstice où elle a monde et comme servant de signe <
,

commencé. La religion avait aussi minateur dans l'organisation astro


consacré le calendrier civil ; les noms gique de l'univers, ils durent natur
des mois étaient ceux de douze divi- lement donner à ses phases u
nités chaque jour et chaque partie de
;
singulière attention. Mais, ce qui <
jour étaient également mis sous une plus certain encore, c'est que l'appa
protection spéciale. C'est aussi par l'in- tion matinale de cette étoile d'Isis , i

fluence de ces mêmes idées que l'on peu avant le soleil , était religieus
explique le long usage d'un calendrier ment liée, en Égypte , avec le premi
civil aussi imparfait; et un auteur an- jour du mois de thoth, qui était aus
cien affirme que l'usage de cette an- le premier jour de Tannée; et Chan
née vague fut religieusement conservé pollion le jeune a recueilli de cet
par lesÉgyptiens, vu que, par l'ef- importante liaison , du lever de Sirii
fet de rétrogradation annuelle, le
la et du commencement de Tannée , di
commencement de Tannée arrivant un témoignages que nous rapportons i<

jour plus tard tous les quatre ans , ce textuellement.


commencement se trouvait ainsi, dans « Je l'ai observée, dit-il, dans le U
une série connue d'années, tomber bleau astronomique sculpté au plafon
dans toutes les saisons ; toutes les fêtes de la salle du Rhamesséum (àThèbes
religieuses attachées aux divers jours appelée le Promenoir, et qui date d
de l'année mobile y tombaient aussi la dix-huitième dynastie. Là , Sirius, oi
successivement, et les sanctifiaient Sothis, est désigné au-dessus du moi
tous. Il paraît , enfin , que le collège de thoth, sous la forme d'une femnn
des prêtres persista invariablement coiffée de longues plumes, et port an
dans l'usage de cette espèce d'année, le nom d'Isis -Thoth, accompagne
puisqu'il obligeait chaque roi, à son comme déterminatif, d'une étoile soulp
avènement, à s'engager, par un serment tée; c'est le nom égyptien de Siriu?
solennel de maintenir Tannée ainsi
, dans tous les monuments. Au plafonc
fixée, et de ne jamais y intercaler ni du tombeau de Ménephtha P r plu* ,

de jour, ni de mois; en'un mot, de la ancien encore que le Rhamesséum,


maintenir telle qu'elle avait été réglée auoiquepareillementde la dix-huitième
par les anciens. ynastie, la déesse Thoth porte en
La rétrogradation de Tannée civile même temps le nom d'étoile d lsisf que
ou vague sur Tannée solaire, a donné toute l'antiquité nous atteste avoir été
naissance à une période très-connue, la désignation de Sirius chez les Égyp-
des astronomes et des chronologistes tiens. Une autre preuve de cette rela-
sous le nom de période solhique, ou tion se trouve encore dans la présence
cynique j ou de 1460 ans ; et ces noms du même nom de Thoth, accompagné
sont tires de ceux de l'étoile de Sirius d'une étoile, au-dessus de la vache
3ui est la principale de la constellation couchée dans une barque avec une
u chien {cynos), qu'on a nommée grande étoile entre les cornes , qui se
aussi solhis, et qui était, pour les Égyp- voit dans les tableaux astronomiques
tiens , V étoile dlsis. d'Ombos, de Dendérah et d'Esneh.
Or, pendant plus de trois mille ans Sur le zodiaque rectangulaire de Dea*

Digitized by Google
ÉGYPTE.
dérah, la déesse qui est figurée eu que son premier jour arrivait succes-
pied est appelée Isis-Thoth; la vache sivement dans toutes les saisons de
couchée est désignée par le même nom l'année; on apprécia aussi cette rétro-
écrit à côté d'elle, et sur le zodiaque gradation, qui était d'un mois tous les
du petit temple au nord d'Esneh, la 120 ans, et d'une année entière de
déesse et la vache avec le nom de Thoth 365 jours après 1460 années fixes. On
se trouvent ensemble dans un même trouva ainsi une période qui ramenait
bateau II n'est pas un monument as- le premier jour de l'année vague au
tronomique égyptien qui ne confirme lever héliaque de l'étoile, ou à une
cette relation de l'étoile Isis avec le année naturelle; alors le premier jour
premier mois de Tannée. » du premier thoth de l'année fixe cor-
Ce lever héliaque de Sirius, Sothis respondait au premier jour de l'année
ou Isis-Thoth, était, en effet, un évé- vague ; les deux années avaient un point
nement en Egypte; il arrivait d'abord initial commun à toutes deux; et
que cet astre cessait , pendant un mois comme ce point initial était le lever
et demi environ, d'être visible sur héliaque de'cette étoile Sothis , on ap-
l'horizon , parce qu'il se levait et se pela période sothiaque la série des
couchait pendant le jour. On commen- 1460 années fixes et des 1461 années
çait ensuite à l'apercevoir à l'orient, vagues après lesquelles les deux années
ûn peu avant le lever du soleil , et les recommençaient au même instant; car
jours suivants il se montrait de plus 1460 années de 365 jours et l renfer-
en plus sur l'horizon avant la fin de ment exactement le même nombre de
la nuit. Os premières apparitions de jours que 1461 années de 365 jours; il
l'étoile d'Isis avaient lieu quelques y en a 533,265 dans chacune des deux
jours après le solstice d'été, et elles séries.
concouraient exactement avec les pre- .Nous venons d'indiquer l'origine et
mières crues du Nil. Cette étoile, par la composition d'une période célèbre
son lever, concourait donc avec le plus dans l'antiquité et dans les ouvrages
grand phénomène naturel de l'Egypte modernes, période incontestablement
l'inondation; et l'on comprend qu'il connue des prêtres de Thebes etd'Hé-
dut être observé tous les ans avec une liopolis , puisqu'elle n'est autre chose
inquiète exactitude. Ces observations que la connaissance de l'année de
tirent bientôt connaître que ce lever 365 jours et J , dans ses rapports avec
avant eu lieu par exemple, le premier
, le calendrier civil de l'Egypte; et à
,"
jour de l'année , le premier du mo.s de l'égard de cette année fixe les témoi-
thoth , il n'était visible, quatre années gnages d'Hérodote , de Strabon , et de
plus tard , que le deuxième jour du Diodore de Sicile, déjà cités, ne sau-
même mois; quatre ans plus tard en- raient être plus formels. Platon s'ex-
core , que le 3 et qu'après 1 20 années
. prime en termes plus honorables en-
cette même apparition de Sothis n'ar- core pour les prêtres de l'Egypte : ils
rivait plus que le premier jour du se- considéraient les astres comme les ins-
cond mois de l'année. On connut truments du temps , et cherchaient la
ainsi la cause véritable de ce retard division et la mesure de toutes ses par-
apparent, des qu'on eut remarqué que ties dans l'observation du ciel. Il pa-
l'année réglée par le calendrier civil rait aussi qu'ils connaissaient une pé-
ne renfermait que 365 jours, tandis riode lunaire fort courte, composée de
que le lever héliaque de l'étoile n'ar- 25 années civiles qui formaient 309
rivait qu'après 365 jours et \. On ap- lunaisons; ils avaient aussi établi la
précia ainsi les causes de cette rétro- période de sept jours, et une autre pé-
gradation de l'étoile d'Isis sur le riode de trente ans ou des grandes pa-
calendrier ; on détermina ainsi deux es- négyries , plus religieuse peut-être
pèces d'années, l'une de 365 jours et j , que physique ou astronomique. Les
qui fut appelée fixe, et l'autre de 365 prêtres' égyptiens connaissaient donc
jours seulement , nommée vague, puis- a la fois I année vague ou sacrée, et

Digitized by Google
L'UNIVERS
l'année fixe ou agricole, qui dépendait core , celui de Tannée 4242 , si les sup-
du retour périodique des équinoxes et putations égyptiennes paraissent ja-
des solstices. mais l'exiger.
La coïncidence du premier jour de Voilà donc les véritables éléments de
Tannée vague avec le premier jour de la période sothiaque; leur détermina-
Tannée fixe, coïncidence qui n'arrivait tion était du plus ha ut intérêt pour les
qu'après 1461 «innées vagues, fut une lumières indispensables à l'histoire;
époque mémorable dans les annales car Télément de cette période est une
égyptiennes ; et si la science a pu dé- année entièrement conforme à notre
terminer le jour fixe, dans Tannée ju- année julienne; de sorte qu'un jour de
lienne proleptique, où cette coïnci- cette périodeest, pour l'histoire, unjour
dence, ce renouvellement des deux du calendrier julien supposé en usage
années a pu avoir lieu une seule fois, dans ces temps reculés; enfin, c'est a
on a pu en déduire facilement tous les l'aide de cette même période que les
renouvellements précédents. C'est ce innombrables dates historiques, expri-
qui est arrivé en effet; on pouvait, il mées selon le calendrier de Tannée
est vrai , déduire de ce qui a été ex- vague, sont rapportées à leur concor-
posé plus haut (sur la coïncidence, pen- dance avec Tannée julienne, et sont
dant une suite de siècles bien plus ainsi revêtues d'une expression intelli-
longue que la durée d'une période so- gible dans le stvle moderne et les sup-
thiaque du lever de Sothis avec le 20
, putations générales de l'histoire.
juillet julien), que bien certainement On a en effet dressé des tables de
ce même 20 j illet avait été aussi un concordance des deux sortes d'années
r
jour de coïncidence du l' thoth vague pendant toute la durée d'une période,
er
avec le 1 thoth fixe; mais les tradi- et rédigé des méthodes pour traduire
tions écrites ne rendent pas même immédiatement, en style julien, les
cette déduction nécessaire: Censorin, dates exprimées selon* le calendrier
qui écrivait au troisième siècle de l'ère vague des Égyptiens. Le jour initial
chrétienne, nous a dit de cette pé- de ces tables est un 20 juillet répon-
riode sothiaque tout ce qu'il fallait dant à un 1 er thoth vague et à un
er
pour la connaître exactement. Son ori- 1 thoth fixe; et comme la rétrogra-
gine , dit-il , se compte à partir de dation annuelle n'était que d'un quart
I époque où le premier jour du mois de jour, il en résultait que le 1 er thotb
de thoth vague coïncide avec le lever vague correspondait, pendant quatre
héliaque de Sirius, lever qui, pour ans, à ce 1" thoth fixe et au 20 juillet;
l'Êiçvpte, arrive ordinairement le 20 mais, dès la cinquième année, il y
juillet. Censorin ne nous apprend pas avait un jour complet de retanl; en
en même temps à quelle époque re- conséquence, cette cinquième année
montent l'observation , la théorie et vague commençait avec le 19 juillet et
la conséquence de cette coïncidence, avec le cinquième jourépagoméne fixe,
mais il nous instruit que la dernière et, de rétrogradation en rétrogradation,
a eu lieu le 20 juillet de Tannée 13!) de tous les jours de Tannée fixe s'épui-
Tère chrétienne. Ce fut donc là un re- saient par le cours entier de ce cycle,
nouvellement de la période sothiaque; et le jour du renouvellement de la pé-
ee renouvellement s'opéra le 20 juillet riode arrivait. L'astronomie et l'his-
139, et il suit que le précédent re- toire ont retiré de ces notions, très-
montait au même jour de Tan 1322 sommaires ici , de grandes lumières et
avant Jésus-Christ. Ce renouvellement de grands services; mais la période
est en effet , expressément mentionné
, sothiaque n'a jamais été employée
par l'astronome Theon d'Alexandrie, comme ère chronologique.
comme un fait conservé par l'histoire. Le calendrier vague subsista en
On peut encore remonter à un renou- Égypte durant un temps immémorial,
vellement antérieur, et qui sera de et Tannée, dont il était l'image, fut
Tannée 2782; enfin, à un antérieur en- réellement adoptée pour établir u ne

Digitized by Google
ÊGYPTE. 23a

n célèbre, fréquemment nommée et romain; de plus, les deux années


mpJovée comme ère chronologique, étant composées d'un nombre égal de
oit dansl'histoire des sciences, soit jours, la concordance des jours des
lans celle des hommes. Ce fut l'ère de deux calendriers romain et égvptien
fcabouassar. dont le premier jour fut fut aussi invariablement établie; le K
i 1* thoth vague qui correspondit au thoth répondait au 29 août, le 2* au
16 février julien de Tannée 747 avant 30, le 3* au 31 , le 4* au 1" septembre,
tesus-llhrist. Les anciens astronomes et ainsi de suite, sauf l'exception tem-
.*ivaient adoptée, et l'un de ceux des poraire qui résultait du bissextile ro-
temps modernes (Bouilliaud) n'a pas main et du sixième épagomène égvg-
fesite à en faire usage dans ses écrits, tien, dette grande réforme s'opéra
fraisemblablcment parce que l'année quand le i m thoth vague répondait au
Égyptienne vasue, qui règle cette ère, 29 août, et les tables de concordance
ÉtLut composée d'un nombre fixe de des deux années vague et fixe montrent
(ours sans frartions, les calculs en de- que le 29 août julien répondait au 1"
venaient plus faciles, et aussi, peut- thoth vague dans les années 25, 24,
être, parce qu'en se servant du calen- 23 et 22 avant l'ère chrétienne; ce fut
drier \ague égyptien , comme l'avaient aussi le temps ou le génie d'Auguste
fait Ptoléinée et ses devanciers, il lui asservit l'Égypte a l'autorité des armes
était plus facile d'apprécier en jours romaines, Os faits sont contempo-
V intervalle qui séparait ses propres rains , et l'Égypte vaincue dut se prêter
observations de celles des astronomes à consacrer cette innovation anti-natio-
grecs qu'il étudiait. Sous les rois grecs nale par une seconde non moins obsé-
ûÉgypte, quoique d'origine macédo- quieuse. L'époque de ces ordonnances
nienne, le calendrier national fut con- romaines devint l'origine d'une ère
servé dans son intégrité : ainsi l'avait chronologique, qui fut nommée 1ère
ordonné Alexandre. d'Auguste. Dès cette époque l'année
Âuguste^en décida autrement. Après fixe, réglée par les rescrits impériaux,
avoir corrigé les irrégularités de son se trouve employée dans une foule
calendrier, par les conseils et la science d'actes publics ou privés; elle le fut
de Sosigène d'Alexandrie, Rome l' im- surtout a Alexandrie. Il est vrai que le
posa a l Éçypte même, et un ordre du reste de l'Égypte peut offrir quelques
tils adoptir de César arrêta tout court rares exemples de l'emploi de l'année
la marche paisible de l'année vulgaire vague, que les astronomes, il est vrai
<v\ Egypte, et, de vague qu'elle était, n'abandonnèrent jamais comme on le
,

cette année devint lixe au moyen d'une voit par les précieux ouvrages de Ptolé-
année de trois cent soixante-six jours inée et de Théori; mais l'église chré-*
tous les quatre ans provenant de l'ad-
,
tienne d'Égypte adopta l'année fixe, et
dition d'un sixième épogomene aux tel est encore aujourd'hui le calendrier
cinq épago mènes de l'antique année légal parmi les Coptes; c'est encore
civile de l' Egypte. Après l'occupation celui qu'on retrouve dans le texte des
d'Alexandrie, Auguste abolit donc l'u- conciles d'Orient; enfin, le précieux
sage de Tannée vague, et ordonna que manuscrit chronologique, connu sous
cette année fixe lut la seule admise le nom d'Hémérologe de Florence, a
dans les affaires publiques. A l'époque fidèlement représenté le tableau com-
où cette institution, si nouvelle pour plet de concordance du jour de ce
la
er
l'tgypte, fut établie, le 1 thoth de calendrier de l'année fixe égyptienne
Tannée vague répondait au 29 août du avec le calendrier romain , et avec celui
calendrier julien, et, comme toute ré- de plusieurs autres nations de l'Orient
trogradation fut arrêtée par l'introduc- des Syriens, des Tyriens,
-
etc., qui
tion du jour dans le calen-
bissextile avaient aussi, en ces anciennes coutu-
drier égyptien, premier jour de la
le mes , subi le joug de la volonté romaine.
nouvelle année fixe égyptienne se trouva Du reste, ce n'est qu'en Égvpte qu'on
immuablement attache à ce 29 août trouve l'exemple de la durée, presque

Digitized by Google
L'UNIVERS.
infinie, d'un établissement tel que le du calendrier des fêtes religieuses
calendrier national. Il subsiste encore, l'Egypte le grand temple d'Esneh m
;

et les recherches de nos savants con- en offre un exemple, et on y Jit enc


temporains, fondées sur des faits as- l'ordre des principales fêtes célebr
tronomiques recueillis par Champol- dans ce magnifique édifice, en Pli
lion le jeune dans les tombeaux des neur de ses trois principales divinit
vieux rois de Thèbes , en font remonter qui étaient Chnouphis, Néïth et
l'institution régulière à Tan 3285 avant jeune Haké. Il y est dit que le 23
l'ère chrétienne; il y a aujourd'hui plus mois d'athyr on célébrait la fête de
de cinq mille ans. déesse Tnébouaou , le 25 du même m
Les monuments originaux qui ser- celle de la déesse Menhi (formes
vent de preuve à cette opinion remon- Neîth), et le 30 celle d'Isis, tertia
tent jusqu'au dix-huitième siècle avant de la même Néïth. Le 1 er du mois
cette même ère; les phases de Tannée choïak, on tenait une panégyrie (;
vague sont notées, écrites sur ces monu- semblée religieuse) en l'honneur i

ments. Ces notes , recueillies et publiées jeune dieu Haké, et dans ce même jo
par le savant Français que je viens de la panégyrie de Chnouphis. autUn
nommer, sont, de l'avis de nos astro- article du calendrier sacré, sculpte s
nomes, les plus anciennes traces de l'une des colonnes du pronaos, por
division civile du temps et de numéra- ce qui suit : A la néomenie de choîal
tion qui nous soient parvenues des panégvrics et offrandes dans le temp
époques antiques. M. Biot en a déve- de Chnouphis, seigneur d'Esneh. 0
loppé la théorie et les conséquences étale tous les ornements sacrés; o
dans un ouvrage spécial ; il y a reconnu offre du pain, du vin et autres I

la simplicité de la notation de l'année queurs, des boeufs et des oies; on pr<


vague égyptienne sur ces monuments, sente des collvres et des parfums a
simplicité telle, qu'elle n'a exigé que dieu Chnouphis et à la déesse sa coin
des yeux et de l'intelligence pour être pagne; ensuite, le lait à Chnoupljis
établie; que sa contexture et la série Quant aux autres dieux du temple, oi
des idées qu'elle exprime, se rappor- offre une oie à la déesse Menhi, un*
tant toutes aux phases du Nil, mon- oie à la déesse Néïth , une oie à Osiris
trent qu'elle est propre à l'Egypte, et une oie à Khem et à Thoth, une oi<
qu'elle n'y a pas été importée de quel- aux dieux Phré, Atmou,Thoré, ains
que autre pays, où elle aurait été usi- qu'aux autres dieux adorés dans le tem-
tée antérieurement; que cette notation ple; on présente ensuite des semences,
était alors l'expression naïve, mais des fleurs et des épis de blé, au sei-
exacte pourtant et numérique, de la gneur Chnouphis, souverain d'Esneh,
succession et de la durée des phéno- et on l'invoque en ces termes , etc. , etc.
mènes que le débordement périodique Le texte de cette prière solennelle est
du Nil amenait pour l'agriculture; que un précieux document de l'histoire
cette notation , constamment fidèle pen- mythologique de l'Égvpte.
dant tous les siècles qui l'ont employée Au palais de Médinet-Habou, on
l'est aujourd'hui encore; et le savant trouve sur la muraille extérieure, au
géomètre, dont nous rapportons ici les côté sud, sculpté en grandes lignes
propres paroles, en a conclu que, dans verticales, le calendrier sacré en usage
cet intervalle de cinq mille ans, le gon- dans cette magnifique habitation royale
flement du Nil s'est opéré constamment de Rhamsès-Meïamoun. Avec des fouil-
à la même époque de l'année solaire, les, notre dernier vovageur français lit
et qu'il a amené une masse moyenne mettre à découvert toute la portion de
d'eau sensiblement égale , parles mêmes ce calendrier sculpté, qui contient les
périodes d'accroissement et de diminu- mois de thoth , paôphi , athyr, choïak
tion , puisque le débordement a duré et et tybi , et vers 1 extrémité du palais se
dure encore le même temps. voit aussi un article à la date du mois
Il nous reste aussi quelques débris de pachôm, le neuvième de l'année. Ce

Digitized by Google
, ,

ÉGYPTE. 241

réeieux calendrier offre le tableau de Le sujet n» 1 do la planche 65 repré-


outes les fêtes de Tannée, mois par sente les neuf premiers doigts de la
•ois; et, à la suite de 'indication del coudée égyptienne, c'est-à-dire, deux
toque fête , on a énuméré synoptique- palmes t un doigt de la grandeur de
e

lent la quantité et l'espèce des où Van- l'original ; mais il ne faut pas oublier
tes présentées dans chaque cérémonie. que ces coudées en bois ou en pierre,
In y lit : mois de thoth, néoménie trouvées dans les tombeaux, n'étant
nouvelle lune, plus ordinairement le que des simulacres de ces mesures, et
y* jour du mois), manifestation de non pas des étalons absolus , on ne doit
fétoile sotfais; l'image d'Amon-Ra, roi pas y chercher une longueur exacte du
les dieux , sort processionnel lement du tvpe légal , ni une scrupuleuse division
bnctuaire, accompagnée par le roi de toutes ses parties. On remarquera
tthamses , ainsi que par les images de donc seulement l'ensemble de cet ins-
tous les autres dieux du temple. Mois = trument et ses principales parties ; mais
de paùphiy le 19, jour de la principale l'uniformité de tous les simulacres
toriéfcvrie d'Amon-Ra , qui se célèbre connus, sauf quelque différence dans
pompeusement dans Oph ( le palais de le texte de leurs inscriptions funéraires,
Karnac); l'image d'Amon-Ra sort du nous autorise à croire qu'ils représen-
*n< tuaire, ainsi que celles de tous ses tent exactement la forme générale des
dieux synthrônes; le roi Rhamsès l'ac- mesures usuelles.
i
compagne dans la panégyrie de ce jour. La religion nationale se montrait
= Mois cTcUtyr, le 26 \ panégyrie de partout en Éçypte, et toutes les divi-
?\\tath-Socharis; le roi accompagne sions et subdivisions des mesures pu-
|
l'image du dieu gardien du Rhamesseum bliques étaient placées sous l'invocation
de Mëîamoun (le palais de Médinet- d'une divinité ainsi on voit sur le mo-
:

Habou) de Tbèbes dans la panégyrie dèle que nous reproduisons (n° 1 ;;/. 65) ,

de ce jour, et cette panégyrie continuait que chaque doigt de la coudée porte,


encore le 27 et le 28 de ce même mois. dans la ligne supérieure, le nom ou le
On se fait une idée de ces cérémonies symbole d'un dieu; le l' r , de droite à
à la fois civiles et religieuses, par la Î;auche, est le soleil; le 2% Thméï ou
-
représentation de celle-ci, qui est le a justice; le S , Osiris; le 6*, Isis; le
sujet des grands bas-reliefs supérieurs 7' Anuhis, etc.
des galeries de Test et du sud de la se- Dans la ligne au-dessous est la dé-
conde cour du palais de Médinet-Habou. signation d'abord de la mesure elle-
Nous ajouterons, pour terminer ce même, coudée royale y et de ses prin-
qui nous restait à dire sur ce sujet, cipales parties.
qu'on a recueilli en Égypte assez de Les chiffres et les traits perpendicu-
renseignements pour restituer tout en- laires qui sont plus au-dessous , indi-

tier son calendrier civil et religieux; quent la division en doigts ; et , de plus


tableau imposant et légal des devoirs les subdivisions du doigt lui-même, de
imposés, pour honorer les dieux, aux droite à gauche, en moitié, en tiers , en
e e
prêtres et aux citoyens d'un pays où quart, en 5% 6*, 7% 8 , 9* et 10 de
la croyance religieuse était aussi une doigt, subdivision qui est portée jus-
loi deïÉtat. qu'à la 16* partie du doigt dans les cou-
Kous avons réuni sur
les planches 65 dées originales. Tous ces détails de la
et 66 tous les exemples d'expressions coudée portent sur notre planche 65 le
graphiques nécessaires pour la connais- n° 1.
sance des mesures, du calendrier et Par les chiffres suivants, on désigne
des dates, et tous ces éléments sont tous les signes d'écriture nécessaires
d'un usage général et constant dans pour exprimer les divisions du temps
Vétude de toute sorte de monuments, et les dates; le signe figuratif du soleil
les mesures et les dates étant des no- se trouve dans tous, parce que la divi-
tions du premier ordre dans la recher- sion du temps était fondée sur la
che des faits de l'histoire. marche de cet astre, qui fait aussi le
e
16 livraison. (Égypte.) 16

Digitized by Google
L'UNIVERS.
jour et la nuit; le n° 2 est le signe de droite à gauche, un, deux, troi
1 heure , et de l'heure de la nuit, par- quatre y trois-deux (cinq), trois -tri
ticulièrement caractérisée par l'étoile; (six), trois quatre (sept) , quatre -qm
le signe n° 3 signifie un soleil, c'est- tre (huit), neuf, dix, dix-un (onzi
à-dire, un jour; n° 4, caractérisé
le dix-deux (douze), dix-trois (treize
par le croissant lunaire renversé, ex- dix-quatre (quatorze) , dix-irois-deu
prime idée mois; le signe du soleil
I (quinze), dix-trois-troU (seize) , dû
précédé de la brandie du palmier, arbre quatre-trois (dix-sept), dix-r/uatrt
qui , selon Horapollon, poussait chaque quatre (dix-huit), dix-neuf (dix-neuf;
année une de ses branches, exprime dix-dix (vingt), double-dix-un ( vin$
l'idée année} le signe n* G est le sceptre et un ) , double -dix-deux ( vingt -deux,
des pauégyries, auquel est suspendu le double-dix-trois (vingt-trois) , rlf>ubU
simulacre d'une grande salle hypostyle dix-deux-deux (vingt-quatre) , douhh
où se tenaient les grandes assemblées dix-trois -deux (vingt-cinq), double,
politiques et religieuses, à des époques dix-trois-trois (vingt-six) , double-dijè
déterminées, et qu'on appelait paué- quatre-trois (vingt-sept), double-dix
gyries : ce sceptre est extérieurement quatre-quatre (vingt-huit), double-dix
dentelé, et chaque cran y indique une neu/{ vingt- neuf), trente.
année; le groupe qui porte le n° 7 est A l'exception de quelques variété*
un exemple de l'emploi des signes pré- de forme dans les signes, le système
cédents; ils sont tirés d'une stèle fu- démotique se produit par les 'mêmes
néraire, et indiquent la durée exacte combinaisons. Ou trouve de ce dernier
de la vie du défunt, qui vécut : années, système graphique numérique un très-
77; mois, 9; jours, 20. grand nombre d'exemples dans /es
Les chiffres de cette date sont en contrats très-fréquemment découverts
écriture hiéroglyphique. Le tableau en Égypte et dont les dates , exprimées
,

complet des signes de cette écriture au moyen de ces chiffres , sont d'un in-
suffisants pour exprimer, par de faciles térêt supérieur pour l'histoire; et ce
combinaisons, tous les nombres, de- grave motif est plus que surlisant pour
puis un jusqu'à un million, et au delà, assurer à cet expose, malgré la minutie
est exposé sur notre planche 66 (ta- des détails, l'attention bienveillante du
bleau A). Le tableau B présente les lecteur.
chiffres hiératiques et les chiffres dé- Elle sera attirée non moins vivement
motiques. La connaissance de ces trois sans doute par le tableau C des signes
classes de chiffres est indispensable hiéroglyphiques destinés à désigner
Çour l'étude fructueuse des monuments chacun des douze mois de l'année; ils
égyptiens; car 11 y a peu d'inscriptions sont répartis en trois saisons : la pre-
dans lesquelles on ne trouve ou des mière est celle de la végétation, figurée
nombres ou des dates, qui sont expri- par un sol planté d'arbres et de fleurs.
més sur les monuments delà sculpture, Ce signe de saison est surmonté du
en chiffres hiéroglyphiques (tableau A) ; croissant lunaire renversé, répété jus-
sur les manuscrits provenant des tem- qu'à trois fois , ou bien accompagné des
ples , en chiffres hiératiques (tableau B) ; chiffresexprimant les nombres I, 11,
et sur tous les contrats, lettres et au- III, 1111, ce qui fait lire les signes:
tres écrits des particuliers, en chiffres première lune (ou premier mois) de la
démotiques (même tableau II). On voit végétation, seconde lune, etc. Cette
que ce système numérique n'était pas notation des mois est uniforme pour
arrivé à la perfection du système des chacune des deux autres saisons, et le
modernes, quoiquecertains siguesaient cinquième groupe de notre tableau se
des formes semblables, et la lecture de lira, d'après le même principe: pre-
ces signes était aussi embarrassée que mière lune ou premier mois de la sai-
leur expression graphique. La série des son des récolles; enfin, le neuvième
chiffres hiératiques abonde en singula- groupe , où le signe figuratif de l'eau est
rités de (*t ordre; on y lit en effet, de trois fois répété, se lira également pre-

Digitized by Google
lOTPTE

A. S on e s i Nu m eriquc s H Dates de h 7>0 jours du mois.

Hiératiques Demotiques Videur


00 000
D . . .

M
O.ûO.tniOD // //
Ma
13 1
a.
la
/

114 t 2
im. ooûooo al. al
33 33
/rr *<y ***

m 31
11. 44-
7

DD If /t'

i/ ff

11J DDOBO<?0D
tc.CM trrrr
3/
fi

fj

1/
C. Table au de* Mois
m* £. * '

a 1/ tâ

*y*y 16.

*y> % 3V n
D 0
2 XV rs

V fp

-
DO 0
c .
>
f S S/'

ti
i : ;

U
00 08
tJ

2 yi 12/ U
c D
Jour» Epa\>ornènes *i/ ts

c : g
00D0G 3
y ta

t?
DOO
11 »ï •

ts

s c

i
oc
-
CDD V
Digitized by Google
Digitized by Google
;
ÉGYPTE. 543
ë&e lune on premier mots île la sai- par leurs emblèmes, et ils sont flguréi
00 de V inondation. On voit à côté de dans l'action de marcher. Dans le
que <rroupe le nom de chaque mois tableau du Rhamesscum de Thèbes,
p calendrier. Enfin, on nommait les qui date du règne de Sésostris, les
jours célestes les cinq jours épa- mois ne figuraient que comme une por-
* qui terminaient et complé- tion seulement d'une vaste composition
Tannée vague égyptienne. On à la fois astronomique et religieuse.
planche, à suite des
la On s'est donc attaché à l'exacte dé-
is , le signe des jours épa- termination de tous ces personnages
ou célestes; le chiffre qui ter- emblématiques, et il a été possible d'y
ne ce «troupe indiquait assez claire- discerner ceux qui personnifient les
tant si le jour noté était le premier douze mois , au moyen des noms pro-
in le cinquième. pres et des attributs particuliers qui
Nous rte saurions trop nous arrêter les accompagnent. C'est cet important
ïri sur une singularité que présente un travail que Champollion le jeune en-
•ri calendrier, qui sera sans doute re- treprit avec une attention et une pa-
marquée par nos lecteurs , et laissera tience que soutenait la conviction de
dans leur esprit quelques doutes sur l'utilité des résultats qu'il en tirerait;
la régularité des rapports d'une année il expliqua donc ces noms, caractérisa

vasrne de sa nature avec les signes de les attributs qui les accompagnent, et
ses divisions tirés de la révolution so- parvint à classer les douze personnages
laire ; car le sens des caractères so- des mois dans la série hiérarchique des
laires des mois ne pouvait se raccorder divinités égyptiennes. Il étudia a fond
ivec Tétat phvsique de TÉgvpte que tous les attributs physiques , atin de
pendant de courtes périodes qui ne se mettre en évidence tous leurs rapports
renouvelaient qu'à de grands inter- avec les phases de Tannée solaire qui
valles. Mais la science sait tirer de correspondent aux saisons où ils sont
telles données, des faits utiles à son placés ; il parvint jusqu'à déterminer
Vi\slo\re, et qui font disparaître en et faire reconnaître dans ces mysté-
même temps d'un tel état de choses rieuses compositions les personnages
toutes les apparentes anomalies. représentatifs des deux solstices et de.
Terminons sur cette importante Téquinoxe du printemps. La place de
matière, en rappelant que, Hérodote ces personnages dans la série des mois
avait appris gue, chez les Égyptiens Correspond d'une manière précise à la
chaque mois de Tannée et chaque jour distribution de ces phases de Tannée
du mois étaient placés sous la protec- solaire dans les plus anciens temps
tion d'un personnage divin qui
y pré- de l'histoire; et cette série de notions
sidait , et en ceci, on trouve l'intime scientifiques fut complétée par une dé-
rapport de toutes les institutions égyp- termination non moins exacte des
tiennes avec les croyances religieuses. personnages qui , dans ces tableaux si
On ne pouvait manquer de reconnaître éminemment historiques , représentent
encore en ce point , par les témoigna- les jours et les heures; il en rechercha
f
ges des monuments, la véracité Hé- ensuite les traces antiques, afin de
rodote. Deux tableaux sculptés, l'un remonter, s'il est possible, à l'origine
dans le temple d'Edfou, Tautrc au de l'institution dont ces tableaux ren-
Hhamesseum deThebes, sont compo- dent témoignage : il rétrograda ainsi
séschacun d'une série de personnages de monument en monument jusqu'au
mythologiques , mâles ou femelles , et 15 paôphi de la 40* année du règne
e
d'Osortasen T , qui est du XXI siè-
r
leur figure est accompagnée de leur
nom, qui est un des douze groupes cle avant Tère chrétienne, et il ajoute
connus comme étant les noms des à la suite ces graves paroles : « Cette
mois du calendrier. Dans les deux ta- date prouve que cette notation égyp-
bleaux , les personnages sont indenti- tienne des divisions du temps était déj^
<iu«, ou par leur forme même, ou en usage alors, et rien n'autorise à
1*.

Digitized by Google
la
rt de
ites ,
était Ce
jrent à
m vtl
i

ies
jsés dans le
lotif réel ;

.mes, il n\vj
s astrologiqt
J'en doter la
i monun ie/>
mentaient I

- suppositions , mats
étrangers en ignoraient
^e et l'interprétation ; les supi
citions les moins fondées, les n
raisonnables s'accréditèrent ainsi , 1

.oujours pétées par quelques écrivains de


.vive école de tiquité, et ceux des temps modérai
x toute civilisa- out encore ajouté à toutes ces erreur
par des suppositions nouvelles, noj
moins hasardées que celles dont il? si
religion. faisaient les bénévoles plagiaires.
s*
C'est sur de si incertains témoi
.
ces premières liçnes sur
jtit
gnages que les anciens philoso/»//
S'insimportantes institutions égyptiens, instituteurs d'une des plu
fy-Le Égypte, nous nous rap- illustres nations qui aient jamat
/f^sans le vouloir, ces paroles existé, ont été déclarés ignorants
des anciens livres philoso- la divinité, enfoncés dans les ténebr
ÉgjL égypgtiens,, attribués à Her- du polythéisme, n'adorant que d
Jgf, O Egypte, Egypte, y est-il dit, agents matériels, en un mot, aveu-
'temps viendra où, au lieu d'une gles , impies, et athées pour tout dire.
'i'iiaion pure et d'un culte pur, tu Quelques philosophes cependant,
'

0 'auras
plus que des fables ridicules, plus disposés à bien voir , animes de
\ ,-ncroyables
à la postérité, et qu'il ne quelque impartialité, et plus capables
lie restera plus que des mots graves de sérieuses études , approchèrent peu
« sur la pierre , seuls monuments qui à peu de la vérité, et furent ainsi
« attesteront ta piété. » récompensés de la fatigue de leurs
Le temps et les malheurs qui frap- veilles. Porphyre osa affirmer que les
pèrent l'Égvpte réalisèrent aussi cette Égyptiens ne connaissaient autrefois
fatale prophétie, et les peuples lettrés qu'un seul dieu ; Hérodote avait dit
que PEgypte éduqua , se chargèrent aussi que les Thébains avaient l'idée
à l'envi Je lui prêter les plus ridicules d'un dieu unique qui n'avait pas eu
croyances , les plus monstrueuses pra- de commencement, et qui était im-
tiques. mortel; lamblique, très-curieux scru-
Selon quelques écrivains grecs ou tateur de la philosophie des anciens
romains l'adoration des animaux et de
, siècles, savait, d'après les Égyptiens
certaines productions de la terre était eux-mêmes , qu'ils adoraient un dieu
un des préceptes de la religion égyp- maître et créateur de l'univers , supé-

Google
EGYPTE. 24Ô
mts, par lui-même vie qui serait celle des peines ou des
*J, incréé, indi- récompenses.
t par lui -même Le second point peut se résumer
comprenant par ces paroles de Champollion le
*t a tout; et jeune, écrites en la contemplation des
•te lephi- monuments mêmes qui avaient si vi-
*nsei«ne vement son esprit dans la re-
éclairé
mîtes cherche studieuse des traces de la phi-
«par losophie égyptienne.
!
ui, • C'est dans le temple de Kalabschi,
'e en Nubie (qu'il visitait le 27 janvier
1829), que découvert une nou-
j'ai
velle génération de dieux , et qui eom-
olète le cercle des formes d'Amon,
oint de départ et point de réunion
ue toutes les essences divines. Amon-
Ra, Vétre suprême et primordial,
^ •

wieaux religieux
mêmes étant son propre père, est qualifié de
mari de sa mère (la déesse Mouth , sa
monuments, et les portion féminine renfermée eu sa pro-
.. qui en donnent l'interpré- pre essence à la fois mâle et femelle,
ont ratifié enfin l'opinion des ApaîvcOùv; tous les autres dieux égyp-
:

» de bonne que n'offen-


foi tiens ne sont que des formes de ces
[»s l'antiquité de la raison hu- deux principes constituants, considé-
,et qui ne réservent pas orgueil- rés sous différents rapports pris isolé-
tien t pour leur siècle et pour ment. Ce ne sont que de pures abs-
amis, les révélations de l'esprit et tractions du grand être. Ces formes
plus nobles inspirations de l'âme. secondaires, tertiaires, etc., établis-
eiques mots peuvent suffire pour sent une chaîne non interrompue qui
'ner une idée vraie et complète de descend des cieux, et se matérialise
eyptienne c'était un mo-
: jusqu'aux incarnations sur la terre, et
ue pur. se manifestant extérieu- sous forme humaine. La dernière de
'
'lient par un polythéisme symbolique, ces incarnations est celle d'il or us , et
tst-à-dire , un seul dieu dont toutes cet anneau extrême de la chaîne di-
s et les attributions étaient vine forme, sous le nomd'Horammon,

f^onniliees en autant d'agents actifs l'Q des dieux, dont Amon-Horus (le
ou divinités obéissantes,
grand Amon, esprit actif et généra-
tons cette religion antique, comme teur) est l'A. Le point de départ de la
toutes celles de l'ancien monde,
*ns mythologie égyptienne est une triade
remarque trois points principaux ,
1
formée des trois parties d\1mon-Ra
-tir : le dogme, ou la morale; la savoir Amon (le mille et le père),
:

«tirarchie indiquant le rang et l'au- Mouth femelle et la mère), et


(la
,
torité des agents; enfin le culte, ou la
Riions (le enfant). Cette triade
fils
forme de ces agents , et les cérémonies s'étant manifestée sur la terre, se ré-
^ttées pratiquées en public ou dans le sout en Osiris, Isis et Horus. Mais la
Wet du sanctuaire. parité n'est pas complète, puisque
Le premier point, à l'égard des
.
Osiris et Isis sont frères. C'est à Ka-
^fyptiens , est clairement établi par les labschi que j'ai enfin trouvé la triade
kiU et l'opinion des hommes les plus finale, celle dont les trois membres se
distingués, et il est tres-vrai que les fondent exactement dans trois mem-
%ptiens s'étaient élevés, par leur bres de la triade initiale Horus y
:

Prisée et la longue observation de la porte en effet le titre de mari de la


ptere, à idée de l'unité de Dieu de
I , mère ; et le fils qu'il a eu de sa mère
ïiuuuortaJite de l'âme , et d'une autre et qui se nomme Mahuli ( le Mandotdi

Digitized by Google
21G L'Util VERS.
dans les Proscynéma grecs), est le D'autres divinités étaient en menu
dieu principal de Kalabschi, et cin- temps adorées dans un même temnh
quante bas-reliefs nous donnent sa pour des motifs particuliers c'étaien
: 1

généalogie. Ainsi triade finale se


la des divinités synthrônes auxquelles ot
formait d'Horus, de sa mère Isis et adressait des prières et des offrande!
de leur fils Malouli , personnages qui après avoir fait ce qui était dû à li
rentrent exactement dans la triade Triade.
initiale, Amon, sa mère Mout et leur Par une déférence toute politi
fils Khons. Aussi Malouli était-il la divinité principale d'un nome
adoré à Kalabschi sous une forme pa- adorée comme divinité synthrône
reille à celle de Khons , sous le même le nome le plus voisin. Des règles
costume , et orné des mêmes insignes ; et conformes avaient établi ces pi
seulement , le jeune dieu porte ici de séances, et elles sont assez certamei
plus le titre de Seigneur de Talmis, pour aider l'archéologue à reconnaître,
c'est-à-dire de Kalabschi, que les aux tableaux religieux qui subsister'
géographes grecs appellent en effet encore dans les ruines des édîGces.
falmhy nom qui se retrouve d'ail- quelles divinités y furent adorées en
leurs dans les inscriptions des tem- première ou en deuxième ligne.
ples. » Ainsi, au petit temple de Thèbe?
Ainsi l'ensemble du système de la situé derrière l'Aménophium, et dan-
hiérarchie religieuse égyptienne était un lieu solitairedénué de toute végé-
composé d'une série de triades, diver- tation, les tableaux qui ornent le ban-
f
sifiées sans être isolées, s enchaînant deau de la porte du propvlon , repré-
v
les unes aux autres par des alliant es sentent Ptolemée Soter ll faisant des
collatérales attentivement constituées, offrandes, du coté droit, à la déesse
et chaque temple de lÉgypte était Hathôr (Vénus) et à la grande triode de
spécialement consacré à une de ces Thèbes, Amon Ra, Mooth et Chons;
triades. du côté gauche, à la déesse Thmé du
Chaque nome ou province avait sa Thème! (la vérité ou la justice, Thé-
triade; et celle qui était adorée dans mis) et à une triade formée du dieu
le temple de capitale d'un nome,
la hiéracocéphale Mandou de son épouse
,

du culte public dans


était aussi l'objet Ritho et de leur fils Harphré. Ces trois
tous les temples des autres lieux du divinités, celles qu'on adorait princi-
même nome *, chaque nome ayant ainsi palement à Hermonthis, occupent la
on pourrait dire, un culte particulier partie du bandeau dirigée vers cette
voué à trois portions distinctes de capitale de nome.
l'être divin, lesquelles avaient leurs Os courts détails suffisent, lors-
noms formes spéciales.
et leurs qu'on est un peu familiarisé avec le
Quelquefois un grand édifice était système de décoration des monuments
consacré, divisé conventionnellement égyptiens, pour déterminer avec certi-
en deux portions, à deux triades en tude, 1° à quelles divinités fut spécia-
même temps ; ainsi le grand temple lement dédié le temple auquel ce pro-
d'Ombos, dont les ruines ont encore pylon donne entrée; 2* et quelles
un aspect très-imposant, était occupé divinités y jouissent du rang de syn-
par deux triades, et chacune d'elles thrônes; et il devient ici de toute évi-
résidait dans une moitié de l'édifice dence qu'on adorait spécialement dans
divisé longitudinalement. De ces deux ce temple le principe de beauté con-
triades, l'une est composée des divini- fondu et identifié avec le principe de
tés Sevek-Ra (la forme primordiale de vérité, de justice, ou, en termes mytho-
Saturne , Kronos), à téte de crocodile, logiques , que cet édifice était consacré
de Hathôr, la Vénus égyptienne, et de h la déesse Hathôr, identifiée avec la
leur fils Khons-Hdr l'autre comprend
; déesse Thméï. Ce sont, en effet, ces
Aroëris, la déesse Tsonénoufré et leur deux déesses qui reçoivent les premiers
fiJs Pnevtho. hommages de Soter II e ; et comme Vt»

Digitized by Google
,

ÉGY PTE. 347

difice faisait partie de Tbèbes et avoi- de l'Occident ,


pour être vivifié à tou-
sinait ie nome d'Herraonthis, on y jours. »

offrait aussi , d'après une règle de saine La


reine Cléo pâtre est aussi associée
politique, des sacrifices en l'honneur à cette dédicace , dans la suite de cette
de la triade thébaiue et de la triade inscription.
hermonthite. La suite de la description Ces textes justifient entièrement ce
de l'intérieur de ce temple n'est pas que nous venons de dire, d'après les
étrangère à notre sujet elle nous : sculptures du propylon , relativement
montre en réalité des laits et des cou- aux divinités honorées dans ce. tem-
tumes religieuses dont la description ple.
plutôt qu'un expose détaillé, peut être Les bas-reliefs encore existants sur
agréable au lecteur. les parois de droite et de gauche du
Les adorations pieuses figurées sur pronaos, ainsi que sur la façade for-
le propyton de ce temple sont répétées mant le fond de ce même pronaos,
sur la porte du temple proprement dit, Ertiennent tous au règne d'Épi-
qui s'ouvre par un petit péristyle que e. Tous se rapportent aux déesses
soutiennent des colonnes a chapiteaux lôr et Tbméï, ainsi qu'aux grandes
ornés de fleurs de lotus et de houpes divinités de Thèbes et d'Hermontis.
de papyrus combinées ; les colonnes et On a divisé le naos en trois salles
les parois n'ont jamais été décorées de contiguës; ce sont trois véritables
sculptures. Il n'en est point ainsi du sanctuaires : celui du milieu, ou le
pronaos, qui est formé de deux colonnes principal, entièrement sculpté, con-
et de deux piliers ornés de têtes symbo- tient des tableaux d'offrandes à tous
liques de la déesse Hathor, à laquelle ce les dieux adorés dans le temple, les
temple fut consacré. Les tableaux qui deux triades précitées, et principale-
couvrent le fût des colonnes* représen- ment aux déesses Hathôr etThméï,
tent des offrandes faites a cette déesse qui paraissent dans presque toutes les
et à sa seconde forme Thmeï, ainsi dédicaces du sanctuaire, inscrites sur
qu'aux dieux Amon-Ra, Mandou, les frises de droite et de gauche au nom
Tmouth, et plusieurs formes ter- de ftolémée-Philopator.
tiaires de la déesse Hathor, adorée « L'Horus, soutien de l'itgypte, ce-
roi Ptolémée-Épiphane , sous
r le lui qui a embelli les temples ci mme
règne duquel a été iaite la dédica- Tbôth deux fois grand , le seigneur des
ce du monument, comme le prouve panégyries comme Phtah, le chef sem-
la grande inscription hiéroglyphique blable au soleil, le germe des dieux
sculptée sur toute la longueur de la fondateurs, l'éprouvé par Phtah, etc. ;
frise du pronaos , et dont voici la tra- le fils du soleil, Ptolémée toujours vi-
duction qui n'est que la formule ordi- vant, bien-aimé d'isis, l'ami de son
nairement adoptée pour les dédicaces père ( Philopator), a fait cette cons-
des temples. truction en l'honneur de sa mère Ha-
Partie de droite. ) Première ligne.
( thor, la rectriee de l'Occident. »
* roi ( dieu Épiphane que Phtah-
Le C'est à la déesse Hathor qu'apparte-
Thoré a éprouvé, image vivante d'A- nait plus spécialement le sanctuaire de
nxm-Ra), le chéri des dieux et des droite; cette grande divinité y est re-
déesses mères,bien-aimé d' Amon-
le présentée sous les formes variées, rece-
Ra, a fait exécuter cet édifice en vant les hommages des rois Philopator
l'honneur d' Amon-Ra , etc. , pour être et Kpiphane ; les dédicaces des irises
vivifié à toujours. » sont faites au nom de ce dernier.
( Partie de gauche. ) Première ligne. Le sanctuaire de gauche fut consacré
• Le fils du Ptolémée toujours
soleil ( à la déesse Thméï , la Dite et l'Alétè
vivant, dieu aimé de Phtah), chéri des mythes égyptiens; aussi, tous les
des dieux et des déesses mères, bien- tableaux qui décorent cette chapelle,
aimé d'Hathôr, a fait exécuter cet édi- se rapportent-ils aux importantes fonc-
fice en l'honneur de sa mere, lajectrice tions que remplissait cette divinité

Digitized by Google
248 L'UNIVERS.
dans l'Amenthi , les régions occidenta- une série de bas-reliefs offre , en que)
les ou l'enfer des Éevptiens. que sorte , toutes les transfigurations
Le grand et magnifique temple d'Ed- de ce dieu. On l'y trouve d'abord (00
fou était consacré à une autre triade qui devait être) en liaison avec Har*
composée, 1° du dieu Har-Hat, la Hat ( le grand Hermès Trismégiste) *
science et la lumière célestes person- sa forme primordiale, et dont lui
nifiées; 2° de la déesse Hathôr ou Vé- Thôth, n'est que la dernière
nus; 3° de leur Ois Harsont-Tho (PHo- formation , c'est-à-dire , son i
rus soutien du monde , qui est à peu tion sur la terre à la suite d" /

près Êros ou Amour des mythes de la Ha etde Mouth incarnés en Osi ris
Grèce). Ces trois divinités sont figu- en Isis. Thôth remonte jusqu'à Y Her-
rées dans les tableaux sculptés a Edfou, mès céleste ( Har-Hat ) , la sagesse di-
avec des qualifications , des titres et vine , l'esprit de dieu en passant par
,

sous des formes qui jettent un grand les formes : 1° de Pahitnonfi (celui dont
jour sur plusieurs parties importantes le cœur est bon); 2° tiArihosnofri ou
du système théogonique égyptien. On Jrihosnovfi (celui qui produit les
Lvoit aussi , représentés sur quatorze chants harmonieux) ; 3° de Meui ( la
s-reliefs dans l'intérieur du pronaos, pensée ou la raison) : sous chacun de
le dieu Har-Hat identifie avec le soleil, ces noms Thôth a une forme et des
ainsi que son lever et son coucher insignes particuliers , et les images de
comme cet astre, et ses formes sym- ces diverses transformations du second
boliques à chacune des douze heures Hermès couvrent les parois du temple
du jour : et cet ensemble de représen- de Dakkèh. On y voit aussi ce Thoth
tations à la fois mythologiques et (le Mercure égyptien) armé du cadu-
symboliques , doit être d'un grand se- cée , c'est-à-dire , le sceptre ordinaire
cours pour la connaissance de la petite des dieux , entouré de deux serpents et
portion de la religion égyptienne à la- d'un scorpion.
quelle il se mêlait quelques idées as- A Beit-Oually, les sculptures du
tronomiques. spéos sont en grande partie religieu-
Le grand temple d'Esnéh était dédié ses. Ce monument était consacré au
à l'une des plus grandes formes de la grand dieu Amon-Ra et à sa forme se-
divinité , à Chnouphis , qualifié des condaire Chnouphis. Le premier de ces
titres nev-en-tiio-snr , seigneur du dieux déclare plusieurs fois, dans ses
pays d'Esnéh, esprit créateur de l'uni- légendes, avoir donné toutes les mers
vers , principe vital des essences di- et toutes les terres existantes à son fils
vines, soutien de tous les mondes, etc. chéri, « le Seigneur du monde (Soleil
A ce dieu sont associés la déesse Néith gardien de justice), Rhamsès (II e ).
représentée sous des formes diverses Dans le sanctuaire, ce pharaon est re-
et sous les noms variés de Menhi, Tné- présenté suçant le lait des déesses
bouaoUy etc., et le jeune Hâké, repré- Anouké et sis. « Moi qui suis ta mère,
I

senté sous la forme d'un enfant; ce la dame d'Éléphantine dit la première,


,

2 ui complète la triade adorée à Esnéh. je te reçois sur mes genoux , et te pré-


l'était a ces trois personnages qu'é- sente mon sein pour que tu y prennes
taient consacrées les principales fêtes ta nourriture, ô Rhamsès !» a Et moi,
et panégyries célébrées annuellement ta mère Isis, dit l'autre déesse, moi,
à Esnéh. la dame de Nubie, je t'accorde les pé-
Le temple de Dakkèh , l'ancienne riodes des panégyries ( celles de trente
Pselcis, en Nubie, présente un double ans) que tu suces avec mon lait et qui
intérêt sous le rapport mythologique ; s'écouleront en une vie pure. »
il donne des matériaux infiniment pré- Nous avons déjà rappelé une liste des
cieux pour comprendre la nature et dons et des grâces accordés par plu-
les attributions de l'être divin que les sieurs divinités à un roi qu'elles décla-
Egvptiens adoraient sous le nom de raient prendre sous leur protection
Thôth (l'Hermès deux fois grand); spéciale.

Digitized by Google
LGYPTE. 249
On trouve dans quelques temples des « la déesse épouse, la royale mère, la
îWeaux représentant des dieux secon- « royale épouse, la puissante dame du
aires Tenant adorer le grand être « monde, Ahmosis-Nofré-Ari : Je viens
auon-Ra en compagnie même des
, « pour rendre hommage à mon père
ois. Ainsi au Rhamesseum de Thebes « A mou roi des dieux; mon cœur est
,

ans une pièce voisine de la salle hvpos- « joyeux de tes affections (c'est-à-dire,
yie, et qui était dans la partie privée « dé l'amour que tu me portes); je suis
c ce palais, destinée à l'habitation de « dans l'allégresse en contemplant tes
i race royale, on reconnaît le sano « bienfaits. O toi, qui établis le siège
uaire spécial du grand dieu de Thebes. « de ta la demeure de
puissance dans
.es bas- reliefs sculptés sur les parois, « ton Seigneur du monde, Rham-
fils le

ta droite et à la gauche de la porte, tes, accorde-lui une vie stable et


présentent quatre grandes barques ou « pure; que ses années se comptent par

•artsacrées , portant un petit naos sur « périodes de panégyries !»


equet un voile semble jeté, comme Il existe encore aux environs de
>our dérober à tous les regards le per- Médinet-Habou , à Thebes, un édifice
sonnage qu'il renferme. Ces bari sont de petites proportions et qui n'a pas
jjortéès sur les épaules par vingt-quatre été termine. La dédicace annonce ex-
mi dîx-buit prêtres, selon l'importance pressément que le roi PtoUmêe Ev tr-
iu maître de la bari. Les insignes qui otte II, et sa sœur la reine Cléopâtre,
décorent la proue et la poupe des deux ont construit cet édifice, et l'ont con-
premières barques sont les têtes sym- sacré à leur père , le dieu Thôth, ou
boliques de la déesse Mouth et du dieu Hermès Ibiocéphale.
Cbons, réponse et le Ois d'Amon-Ra; C'est le seul des temples encore
enfin, la troisième et la quatrième por- existants en Égypte qui soit spéciale-
tent les têtes d'un roi et d'une reine, ment dédié au dieu protecteur des
coiffées des marques de leurdignité. Ces sciences, à l'inventeur de l'écriture
tableaux, comme l'apprennent les lé- et de tous les arts utiles, en un mot
gendes hiéroglyphiques, représentent à l'organisateur de la société humaine.
les deux divinités et le couple royal On retrouve son image dans la plupart
venant rendre hommage au père des des tableaux qui décorent les parois de
dieux, A
mon- Ha. qui établit sa de- la seconde salle , et surtout celles du
meure dans le palais de Rhamsès le sanctuaire. On l'y invoquait sous son
Grand. Les paroles que prononce cha- nom ordinaire de Thôth, que suivent
cun des visiteurs ne laissent d'ailleurs constamment soit le titre sotbm qui
aucun doute à cet égard : « Je viens exprime la suprême direction des cho-
• dit la déesse Mouth , rendre mm mage I ses sacrées , soit la qualification //o-
« au roi des dieux, Amon-Ra, modé- en-Hib , c'est-à-dire , qui a une face
• rateur de l'Égypte, afin qu'il accorde d'Ibis, oiseau sacré, dont toutes les
« de longues années à son Gis qui le figures du dieu , sculptées dans ce
c
chérit, le roiRhamsès. » temple, empruntent la téte , ornée de
« Nous venons vers toi, dit le dieu coiffures variées.
* Chons, pour servir Ta Majesté, ô On rendait aussi dans ce temple un
Amon-Ra, roi des dieux! Accorde culte très-particulier à iïohcmouo ou
* une vie stable et pure à ton fils qui Nahamouo, déesse que caractérisent
« t'aime, le Seigneur du monde. » le vautour, emblème de la maternité,
Le roi Rhamsès dit seulement : « Je formant sa coiffure , et l'image d'un
viens à mon père Amon-Ra, à la petit propylon s'élevant au-dessus de
suite des dieux qu'il admet en sa pré- la coiffure symbolique. Les légendes
» sence à toujours. tracées à côté des nombreuses repré-
Mais la reine Nofré-Ari , surnommée sentations de cette compagne du dieu
iciAhmosis (engendrée de la lune), Thôth, qui , d'après son nom même
«prime ses vœux plus positivement; paraît avoir présidé à la conservation
ïuscription porte : • Voici ce que dit des germes, l'assimilent à la déesse

Digitized by Google
Saschfmoué , compagne habituelle de coté de chacune de ces ima«;
ThôUiy régulatrice des périodes d'an- répété les mots : Vempef
nées et des assemblées sacrées. Trqjan-Hadrten.
Le bandeau de la porte qui donne « Quatre grands
entrée dans la dernière salle du tem- posés deux à deux couvrent la
ple, le sanctuaire proprement dit, est du fond du sanctuaire. Les cl eux'
orné de quatre tableaux représentant reliefs supérieurs représentent V>
Ptolémée taisant de riches offrandes pereur Hadrien , costumé en fils s
d'abord aux grandes divinités protec- d'Amon, adorant une déesse coi:
trices de Thebes, A mon- lia , Mouth du vautour, emblème de la niatero/
et ( h ans , généralement adorées dans et surmonté des cornes de vache,
cette immense capitale , et en second disque et d'un petit trône. Ce sont
lieu aux divinités particulières du tem- insignes ordinaires d /*/* , et la U*ga
nle, Thôth et la déesse Aahamouo. sculptée à côté des deux images de
Dans l'intérieur du sanctuaire , on re- déesse , porte en effet : Isis la 'ara tu
trouve les images de la grande triade mère divine qui réside dans la whc
thébaine, et même celles de la triade taane de C Occident. Les bas- reiii
adorée dans le nome d'Hermonthis intérieursnous montrent le mec
ui commençait a une courte distance empereur présentant des offrandes ;

a u temple. Deux grands tableaux, l'un dieu Monlh ou Manthou, le dit


sur la paroi de droite, l'autre sur la éponyme d'Hermonthis, et au roi d<
paroi de gauche , représentent , selon dieux Amon-lia , le dieu éponyme Q
l'usage, la bari ou Arche sacrée de Thebes.
la divinité à laquelle appartient le sanc- « Ainsi , ce temple fut consacré à )
tuaire. L'Arche de droite est celle de déesse Isis , puisque ses images oc ru
TiiÙTH-PEHO-Eis-Hin ( Thôth à face pent sans partage la place d'honneur a*
d'Ibis), et l'Arche de gauche, celle de fond du sanctuaire; au-dessous Û'elh
Tuôth Psotem (Thoth le surinten- paraissent les grandes divinités <k
dant des choses sacrées ). L'une et nome de Thtbes et du nome Hermon-
l'autre se distinguent par leurs proues thite, dieux synthrônes adores aussi
>
et leurs poupes décorées de tètes de- dans ce même temple. Mais le dieu
pervier, surmontées du disque et du Manthou y occupant la droite, quoique
croissant, à téte symbolique du dieu tenant dans ces mythes sacrés un rang
Chons, le fils aîné d'Amon et de inférieur à celui du roi des dieux
Mouth, la troisième personne de la Ainon-Ra, qui occupe ici la gauche,
triade thébaine, dont le dieu Thôth il devient certain que le temple cflsis,

n'est qu'une forme secondaire. situé au sud de l'Hippodrome, dépen-


Un autre petit temple de Thèbes, dait du nome d'Hermonthis et non du
situé au sud de l'enceinte fortifiée nome Diospolife, puisque le dieu Man-
nommée improprement Hippodrome f dou reçoit immédiatement après Isis
et qui est de époque romaine, sert a
I et avant Amon-Ra, dieu éponyme dé
démontrer la réalité de l'usage qui a Thèbes , les adorations de l'empereur
été plus haut mentionné, sur les divi- Hadrien.
nités particulières à chaque nome; et « Ainsi la divinité locale, celle que
l'ancienne division géographique de de la bourgade du nome
les habitants
l'Égypte tire parfois de ces données Hermonthite, qui exista jadis autour
d'utiles renseignements. du temple, regardaient comme leur
Les salles intérieures de ce petit protectrice spéciale, fut la déesse
temple sont couvertes de tableaux isis, qui réside dans Ptôou-es-emem
qui, presque tous, surtout ceux du ( ou la Montagne de l'Occident ) ;
et
sanctuaire, appartiennent à l'époque cette qualification nous parait ana-
û'Hadiïen, Ce successeur de Trajan logue aux titres H item Pselk } rési-
comble de dons et d'offrandes les di- dant à Pselchis; Hitem Manlah, ré-
vinités adorées dans le temple; et à sidant à Philœ ; Hitem Souan, résidant

Digitized by Google
EGYPTE. 3âl

Htiem Ebôu résidant à


, et la dernière, temple actuel qui n'a
le
tine; Hiiem Snè, résidant à jamais été terminé, sous Auguste,
; Mittm Ebôty résidant à Caïus Caligula et Trajan; et la légende
, etc. , que reçoivent constant- du dieu Afalouti, dans un fragment
Tbôtb , lsis , Chnouphis , Saté, de bas-relief du premier temple, em-
, Osiris, etc., dans les temples ployé dans la construction du troisième,
leur élevèrent ces anciennes villes, ne diffère en rien des légendes les plus
sous leur protection immédiate. récentes. Ainsi donc, le culte local de
bas -reliefs sculptés sur les toutes les villes et bourgades de la Ku-
latérales et sur la porte du bie et de l'Egypte n'a jamais reçu de
re ainsi que ceux qui décorent
, modification; on n'innovait rien , et les
e extérieure du naos, et les anciens dieux régnaient encore le jour
du grand propylon, represen- où leurs temples ont été fermés par le
aussi l'empereur Othon ou ses christianisme. Les dieux de l'Egypte
urs, faisant des offrandes à s'étaient aussi, en quelque sorte, par-
de la montagne d'Oeci- tagé l' Egypte et la Nubie, constituant
leat , en même temps qu'aux dieux ainsi une espèce de répartition féodale.
^utlirônes Manthou et Jiitho , les Chaque ville avait son patron; Chnou-
Lramdes divinités du nome llerinon- phis et Sate régnaient à Éléphantine,
fcifcr. De semblables hommages sont a Syène et à Kéghé, et leur juridiction
^sst rendus aux dieux de Thebes, s'étendait sur la Nubie entière; Phré,
Amon-Ra, Mouth et Chons, suivant à Ibsamboul, à Derri et à Amada;
l'usage établi d'adorer à la fois dans un Phtah, à Ghirsche; Anouké, à Mas-
Vaptple d'abord les divinités locales, chakit; Thôth, le surintendant de
ensuite celles du nome entier, et enfin Chnouphis sur toute la Nubie, avait
un dieu du nome le plus voisin : ses fiels principaux à Ghebel-Addeh et
comme pour établir entre les cultes à Dakkè; Osiris était seigneur de Dan-
particuliers de chacune des préfectures dour; lsis, reine, à Philac; Hathôr, à
«le l'Egypte, une liaison successive et Ibsamboul , et enfin Malouli , à Kalabs-
continue qui les ramenait ainsi à l'u- chi. Mais Amon-Ra règne partout et
nité. Tous les temples de l'Égvpte et occupe la droite des sanctuaires.
de la Nubie offrent les preuves de cette Il en était de même en Egypte, et

pratique, motivée sur de graves con- l'on conçoit que ce culte partiel ne pou-
sidérations d'ordre public et de saine vait changer, puisqu'il était attaché au
politique. » (Lettres de Champollion pays par toute la puissance des croyan-
jeune. ) ces religieuses. Du reste, ce culte,
Et l'époque où ce temple fut élevé pour dans chaque
ainsi dire exclusif
ne doit en rien diminuer l'autorité des localité, ne produisait aucune haine
données oui en ont été si évidemment entre les villes voisines, puisque cha-
tirées : la perpétuité des usages et cune d'elles admettait dans son temple
des croyances de l'ancienne Égypte, (comme synthrônes), et cela par un es-
durant sa plus mauvaise fortune, est prit de courtoisie très-bien calculé, les
mise hors de doute par une foule de divinités adorées dans les cantons limi-
monuments, et il est reconnu que les trophes. Ainsi on voit à Kalabschi
temples élevés sous la domination des les dieux de Ghirsché et de Dakke, au
Grecs ou des Romains ne sont que des midi ceux de Déboud , au nord oceu-
; ,

reconstructions des édifices pharaoni- fwnt une place distinguée; à Deboud,


ques , et qu'elles étaient consacrées aux es dieux de Dakkè et de Philm; à Phi-
mêmes divinités. C'est ainsi qu'il y a la?, ceux de Déboud et He Dakkè, au
eu à Talmis trois constructions succes- midi; ceux de Béghé, d'Éléphantine et
sives du même temple dédié au dieu de Syène, au nord; h Syène enlin, les
hîatouli; une sous les pharaons et du dieux de Phila* et ceux d'Ombos.
règne d'Aménophis II, successeur de Ce que nous venons d'exposer si
Mœris; une du temps des Ptolémees, sommairement sur un sujet aussi

Digitized by Google
552 L'UNIVERS.
étendu que l'exposé de la religion d'un de la misère humaine, et quoique
peuple éclairé, donnera, nous l'espé- cupant presque la dernière place
rons, une idée suffisante de l'objet réel système religieux, n'y perdaient ri
des temples égyptiens tous consacrés à
, en puissance ni en dignité; Horus en
une triade, dihérente dans chacun; et devenait à son tour le chef d'une triad<
ces trois dieux, le père, la mère et leur c'est-à-dire, qu'il en faisait part
fils, n'étaient <|ue la personnification, comme père, Isis comme mère, M;
à des degrés différents dans la hiérar- louli comme (ils, et, par cet extr*
chie, des trois agents immédiats du anneau de la chaîne des êtres div
Srand être, qui occupaient le premier Horus, qui n'était que la dernière
egré de l'échelle des puissances et des carnation d'Amon, le grand être,
(générations; car l'ordre hiérarchique rattachait à cette puissance suprême c
était fondamentalement réglé et déter- rentrait en elle-même, pour que n
miné par l'ordre généalogique. même être fût tout en lui-même,
Il y avait donc destriadés pour toutes commencement et la fin.
les régions du monde. En ce point, le comme pour retracer le my-
C'était
ciel et la terre avaient reçu une orga- the de personnification de la triade,
la
nisation identique, et l'autorité comme qu'on élevait, à côté de chaque tempJe,
le rang diminuaient à mesure que le un autre petit édifice, auquel on a donné
dieu s occupait plus directement des le nom Je Mammisi. Des petits tem-
affaires terrestres. Osiris, Isis, Horus, ples de ce genre existent a Hemion-
formaient la triade à laquelle était com- this, à Philx, à Omnos; et il devait
mise la conservation de Tordre dans le en subsister un semblable auprès de
inonde sublunaire; ils étaient, en quel- chaque grand temple, pour l'histoire
que sorte, le dernier anneau de cette mythologique de la triade qu'on y ado-
grande chaîne théogonique qui embras- rait. A Hermonthis ,
par exemple , le
sait l'univers entier, et qui de triade
, mammisi qui a été construit sous le
en triade, remontait à Amon-Ra, le règne de la dernière Cléopâtre, fille
grand être, le père des dieux , le créa- de Ptolémée-Aulétès , est une coin mé-
teur de toutes choses. Osiris, Isis et mo rai son de la grossesse de cette reine,
leur fils Horus , devaient donc être plus et de son heureuse délivrance de Pto-
habituellement l'objet de l'adoration lémée - Caesarion , fils de Jules-César.
et des prières des hommes ; ils étaient La triade de ce temple était composée
en Égypte comme les dieux populaires; du dieu Mandou, de la déesse Ritho,
leurs noms ont dû l'être aussi ; et les et de leur fils Harphré ; les trois per-
foules incultes qui s'introduisirent, sonnages royaux se substituent sym-
des diverses parties de l'ancien monde, boliquement aux trois divinités dans
dans les cités égyptiennes, ne purent y les scènes figurées sur les bas -reliefs
apprendre que lès noms et les idées re- de l'édifice.
ligieuses répandus parmi la population La relia du temple est en effet divi-
égyptienne qu'ils purent fréquenter, et sée en deux parties : une grande pièce
ce fut toujours celle du dernier rang. On (la principale), et une toute petite,
voit donc pourquoi les noms de ces trois tenant lieu ou la place du sanctuaire.
divinités du dernier ordre sont parve- On n'entre dans celle-ci que par une
nus jusqu'à nous, comme étant les petite porte; vers l'angle de droite,
plus connus populairement, et ont été toute la paroi du mur de fond de cette
répètes d'âge en âge par l'antiquité petite pièce (laquelle est appelée le lieu
classique, qui ne s'éleva pas, dans ses de l'accouchement, dans les inscrip-
incomplètes remarques sur la religion tions hiéroglyphiques) est occupée par
égyptienne, au delà de ces noms et de un bas-relief représentant la déesse
ces pratiques populaires. Il n'en est pas Ritho femme du dieu Mandou , accou-
,

moins certain que Osiris , Isis , Horus chant du dieu Harphré. La gisante est
qui étaient, on pourrait dire, les dieux soutenue et servie par diverses déesses
les plus à la portée de l'ignorance et du premier ordre : ï'accouc/iewe cti*

Digitized by Google
EGYPTE* 263
rixe tire l'enfant du sein de la mère; Ptolémée-Osarion et de sa mère Cléo-
! nourrice divine tend les mains pour fiâtre. Il n'y a donc point de doute sur
le recevoir, assistée d'une berceuse. e motif de sa construction. Il est vrai
Le père de tous les dieux, Ammon, que les colonnes de l'espèce de pronaos
(Amon-Ra) , assiste au travail , accom- qui le précède n'ont point toutes été
pagné de la déesse Soven , l'Iiilthya sculptées; le travail est demeuré im-
la Lueine égyptienne , protectrice des parfait , et cela tient peut-être au motif
accouchements. Enfin, la reine Cleo- même de la dédicace du temple : Au-
pâtre est censée assister à ces couches guste et ses successeurs , qui ont ter-
divines , dont les siennes ne seront ou miné tant de temples commencés par
plutôt n'ont été qu'une imitation. L'au- les Lagides , ne pouvaient être très-
tre paroi de la chambre de l'accouchée empressés d'achever celui-ci, monu-
représente l'allaitement et l'éducation ment de la naissance du fils même de
du jeune dieu nouveau-né ; et sur les Jules-César, roi enfant dont ils ne res-
parois latérales sont figurées les 12 pectèrent guère les droits.
heures du jour et les 12 heures de la A Ombos, le çrand temple était con-
fiuitj sous la forme de femmes ayant sacré à deux triades; le petit temple
un disque étoilé sur la téte. Le tableau était aussi un double mammisi, où
astronomique du plafond pourrait bien sont représentées la naissancede Kons-
n'être que le thème natal de cet Har- Hôr, fils de Serak-Ra et d'Hathôr; et
puré , ou mieux encore celui de Caesa- celle de Pnevtho, fils de Aroëri et de
rion , nouvel Harphre. la déesse Tsonénoufré. On trouve aussi,
En sortant de la petite chambre pour dans l'existence de ces monuments, la
entrer dans la grande, on voit un vaste preuve près pie superflue du maintien
has-relief sculpté, sur la paroi , à gau- de l'ancien culte égyptien sous les do-
che de cette principale pièce; il repré- minations étrangères en Égypte. Si
sente la déesse Kit ho, relevant de l'on cherchait un très-ancien exemple
couche , soutenue encore par la Lu- d'un mammisi, on le trouverait au pa-
eine égyptienne Soven , et présentée à lais de Louqsor, où, dans deux des salles
rassemblée des dieuv ; le père divin de ce vaste édifice élevé par le roi Amé-
Amon-Ra, lui donne affectueusement nophis-Memnon^elaXVIIPdynastie,,
la main comme pour la féliciter de son on remarque une série de bas - reliefs
heureuse délivrance, et les autres relatifs à la personne même du fonda-
dieux partagent la joie de leur chef. teur, et à sa naissance. On y a successi-
Le reste de cette salle est décoré de vement représenté le dieu Thôth an-
:

tableaux dans lesquels le jeune Har- nonçant a la reine Tmauhemva $


phré est successivement présenté à Am- femme du pharaon Thouthmosis IV,
mon, à Mandou son pere, aux dieux qu'Ammon générateur a accordé
lui
Phré, Phtah, Sev (Saturne) , etc., qui un fils. — La même reinedont l'état ,

l'accueillent en lui remettant leurs in- de grossesse est visiblement exprimé


signes caractéristiques , comme se dé- conduite par Chnouphis et Hathôr
mettant , en faveur de l'enfant , de tout (Vénus) vers la chambre d'enfante-
leur pouvoir et de leurs attributions ment (le mammisi) ; cette même prin-
particulières : et Ptolémée-Ca?sarion cesse , placée sur un lit , mettant au
a face enfantine, assiste à toutes ces monde le roi Amênophis; des femmes

Présentations de son image, le dieu soutiennent la gisante, et des génies


larphré, dont il est le représentant divins, rangés sous le lit , élèvent l'em-
sur la terre. Tout cela est de la flatte- blème de la vie vers le nouveau-né. —
rie sacerdotale , mais tout à fait dans La reine nourrissant le jeune prince.
le génie de l'ancienne Égypte , qui as- — Le dieu Nil peint en bleu ( le temps
similait ses rois à ses dieux. Du reste, des basses eaux), et le dieu Nil peint
toutes les dédicaces et inscriptions inté- en rouge (le temps de l'inondation),
rieures et extérieures du temple d'Her- présentant le petit Amênophis, ainsi
monthis, sont faites au nom de ce que le petit dieu Harka et autres en-

Digitized by Google
254 L'UNIVERS.
fants divins, aux grandes divinités de Démiurge eût créé la lumière et ot
Thèbes. —
Le royal enfant dans les donné univers, renfermait dans so
1

bras d'Amon-Ra, oui le caresse.— sein les germes de tous les êtres
Le jeune roi institue par Amon-Ra; venir. Aussi, les vers des Orphiques
les déesses protectrices de haute et
la vénérables débris de la plus ancienn
de la basse Égvptelui offrant les cou- théologie des Grecs, et qui, con tien
ronnes , emblèmes de la domination nent des doctrines conformes , su
sur les deux pays , et Thôth lui choi- presque tous les points, à celles de
sissant son grand nom, c'est-à-dire Égyptiens, donnent -ils à la déessi
son prénom royal, Soleil Seigneur de Nyx (la Nuit primitive), les titres J<
justice et de vérité, qui , sur les mo- première née , commencement de tout,
numents, le distingue de tous les au- habitation des dieux, et celui de ge
très Jmètwphis. nératrice des dieux; titres qui ré
Ce qui vient d'être exposé suffira, pondent exactement aux qualifications
nous l'espérons , pour donner au lec- grande déesse mère des dieujr . el
tour une idée générale de la hiérarchie génératrice des dieux grands y don-
divine dans lu constitution religieuse nées à Bouto dans les légendes hiéro-
de l'Égypte, Nous avons dit briève- glyphiques.
ment sa pensée sur le grand Etre On donnait avec raison le surnom
qu'elle nommait Ammon ou Amon-Ra, de mèbe des dieux à la déesse Bouto,
et la personnification des attributions puisque, unie au dieu Phtha , elle
de cet être primordial, en autant d'au- av ait enfanté Phrè ou le Soleil
y des-
tres dieux qui n'étaient que ses agents, nuels naquirent ensuite tous les autres
11 serait difficile d'énumérer ici les dieux. JtcJios ou le dieu Soleil des
fonctions des principales divinités Grecs, passait aussi pour lils de la
égyptiennes, et d'exposer les effets de déesse Nyx (la Nuit).
leur concours à l'organisation générale Bouto était aussi , selon la croyance
s Égyptiens , la nourrice de cer-
avons donné dans un précédent para- tains dieux. On disait qu'Isis avait
graphe (page 134), quelques notions confié à cette divinité ses deux en-
sur les deux Thôth ou les deux Hermès, fants Ilorus et Bubastis ; et ce précieux
promoteurs et protecteurs de toutes dépôt fut caché dans l'île de C/iem-
les voies particulières à l'intelligence mis située dans le lac voisin de la ville
et à l'industrie humaines ; nous ajou- de Bouto, île que la déesse rendit
tons ici quelques courtes notions sur flottante pour dérober les deux ja-
des divinités principales dont les attri- meaux aux poursuites et aux recher-
butions bien connues nous montrent ches de Typhon.
avec évidence l'origine égyptienne de
quelques opinions mythologiques de la en Egypte, se nommait Nèith; elle
Grèce. était aussi le type d'une des princi-
Selon les Égyptiens , la déesse Bouto pales divinités grecques. On sait , en
fut la compagne du grand Être et la effet, que le grand dieu qui en Egypte,
,

nourrice des dieux. Elle fut connue et porta les noms &Jmon, Amon-Ré,
étudiée par les plus anciens philosophes Cnèph ou Chnouphis, fut , comme oit
instituteurs de la Grèce. a pu le voir, le principe générateur
Cette déesse, l'emblème de l'antique mâle de l'univers; et les Égyptiens
Nuit ou des ténèbres primitives , source symbolisèrent , dans le personnage de
féconde d'où sortirent une foule d'ê- Nèith, le principe générateur femelle
très vivants
?
fut considérée par les de la nature entière.
Égyptiens , ainsi que dans la cosmogo- Ces deux principes , étroitement
nie des Grecs et de la plupart des peu- unis, ne formaient qu'un seul tout
pies orientaux , comme cette obscurité dans l'être premier qui organisa le
première oui , enveloppant le monde monde. De la vient que les Égyptien!
a.vant que la main toute-puissante du considéraient Nèith comme un être à,

Digitized by Google
EGYPTE.
I fois mâle et femelle, et que le nom céda de sa voix un être femelle par»
lèpre de cette divinité exprimait en Jaitement beau (c'était la nature, le
teue égyptienne , comme nous i'ap- principe femelle, Nèith), et le Père
*od Plutarque , l'idée : Je suis venue de toutes choses la rendit féconde.
f moi-même. On retrouve dans cette naissance de
La déesse Nèith occupait la partie Nèith, émanation d'Ammon , la nais-
périeure du ciel. Inséparable du Dé- sance même de l'Athénè des Grecs,
turge , elle participa à la création de sortie du cerveau de Zeus.
travers , et présidait à la génération Sous le nom de Phtlia, les Égyp-
fc espèces : c'est la force qui meut tiens connurent aussi un personnage
Bt. d'un ordre supérieur, un ouvrier di-
Le culte de cette divinité , général vin, où les Grecs puisèrent aussi ridée
tes toute l'Egypte, comme les monu- d'un de leurs anciens dieux.
*iU le prouvent , était spécialement Ptatha occupait la troisième place
i dans la ville principale de
honneur dans la nombreuse série des divinités
t Égypte , a Sais, où résidait
baise de l'Égypte; les Grecs, en l'assimilant
R collège de prêtres. Le temple de la à leur Héphaistos, le Vulcoin des Ro-
ércse portait l'inscription fameuse : mains , out singulièrement rabaissé et
îms tout ce qui a été, tout ce qui son rang et son importance ; ils ont
|i et tout ce qui sera. Aul n'a sou- réduit les hautes fonctions de ce çrand
té k roile qui me couvre. Le fruit être cosmogonique à celles d'un simple
*fai enfanté est le Soleil. Il serait ouvrier.
tàïcile de donner une idée plus grande Telle ne fut point l'opinion des
t plus religieuse de la divinité créa- Égyptiens sur leur Phtha; selon leurs
nce. mythes sacrés , la puissance démiur-
Se'tih était le type de la force mo- gique, l'esprit de l'univers, Cnèph ou
?k et de la force physique. Elle pré- Chnouphis , avait produit un œuf de sa
dit à sagesse , à la philosopnie
la bouche, et il en était sorti un dieu qui
t a de la guerre ; c'est pour
l'art portait le nom de Phtha. Cet œuf
* que les Grecs crurent recon- était la matière dont se compose le
«ftre, dans la Nèith de Sais, leur monde visible; il contenait Y agent,
Pe*é ; la Minerve des Latins, di- Youvrier qui devait en coordonner et
fcité également protectrice à la fois en régulariser les diverses parties ; et
Ues saies et des guerriers. Phtha est l'esprit créateur act\f, l'in-
,
Selon les débris de la doctrine égyp- telligence divine qui , dès l'origine des
*ine, épars dans les écrits des der- choses, entra en action pour accom-
Platoniciens et dans les livres plir l'univers, en toute vérité et avec
mnétiques, la déesse Nèith, ou la un art suprême.
merre égyptienne, ne formait qu'un Les Égyptiens, nui voulaient ratta-
N tout
avec le Démiurge Amoun, cher l'histoire de la terre à celle des
•^poque même qui précéda la créa- cieux , disaient que Phtha avait été ie
Pj des âmes et celle du monde phy- premier de leurs dynastes , mais que
^ue. C'est en la considérant dans cet la durée de son règne ne saurait être
*at
d'absorption en l'Être premier, lixee. Les pharaons lui avaient consa-
f* les hgvptiens qualifièrent Neuh
»es Ésvntiens Nèith cré leur ville royale, Memphis, la se-
divinité a la fois maie et femelle, conde capitale de l'empire; ainsi, les
g'monde étant composé de parties quatre principales villes de l'Égypte,
^es et de parties femelles, il fallait Thèbes, Memphis, Sais et liéliopolis,
Ken que
leurs principes existassent étaient chacune sous la protection spé-
le dieu qui en fut l'auteur. Aussi ciale de l'une des quatre grandes divi-
**mt le moment de
créer les ames nités.A'mon- Chnouphis, Phtha, Nèith
? le
monde arriva , suivant les
, Dieu et Phré. Le magnifique temple de
iSîi'
1 *°Hriï 7 ordonna que la
ens Phtha à Memphis, où se faisait l'inau-
hQ!ur ?
fùt f et, à l'instant, il pro» guration des rois , a été décrit, en par*

Digitized by Google
3S5 L'UNIVERS.
tic,par Hérodote et par Strabon; les maine pure, avec les attributs
plus illustres d'entre les pharaons le ciaux au dieu; 2« le corps hum.
décorèrent de portiques et de co- avec la tête de l'animal spécîalen
losses. consacré à ce dieu ; 3° cet ani
L'être auquel on attribuait l'orga- même avec les attributs spéciaux
nisation du inonde , devait nécessaire- dieu qu'il représentait, et parce
ment le connaître à fond , ainsi que les les qualités qui constituaient le cai
lois et les conditions de son bien-être tère de cet auimal avaient , selon
et de son existence; aussi les prêtres Égyptiens, quelque rapport avec
égyptiens regardaient-ils Phtha comme fonctions de ce dieu.
l'inventeur de la philosophie ; bien dif- Ces notions s'appliquent, sans i

férents, en cela , des Grecs, qui ne ci- ception, à toutes les figures qui
taient de leur Héphaistos que des trouvent exprimées sur les bas reli
œuvres matérielles et purement mé- et les peintures, et qui sont réun;
caniques. dans les musées publics.
Quant au culte proprement dit, aux Les signes caractéristiques cliaq de
cérémonies religieuses qui se prati- divinité se voient sur leur téte,
quaient à l'intérieur et à l'extérieur forment sa coiffure. Le visage et
des temples, on peut croire, d'après nez sont parfois teints d'une coulei
l'étendue et la magnificence des édi- consacrée pour chaque divinité ; c
fices religieux , le grand nombre et la rien n'était laissé à l'arbitraire de fa
richesse de proportion et de matière tiste. Ces représentations étant ain
des représentations figurées du grand réglées, par la loi ou par ï usugt
dieu et des autres êtres divins, que dans tous leurs détails, cette unifoi
cette magnificence et cette richesse mité constante est d'un très-grai;
ont été rarement égalées. Du reste, secours pour l'étude de la refîgio
ce culte était essentiellement favo- égyptienne dans ses formes Ggureeï
rable au progrès des arts, sinon pour Les mêmes attributs indiquent tou
la perfection des formes trop assujet- jours la même divinité, ei Vallhnc
ties à des types consacrés , au moins des attributs, celle des personnage
pour toute la partie technique et ma- divins , selon les idées et les croyance:
térielle, dont la puissance se révèle égyptiennes.
incontestablement par la parfaite exé- Le nombre considérable des per-
cution des plus bizarres compositions sonnages du Panthéon égyptien , quoi-
reproduites à l'infini dans les matières que émanant tous d'un premier être,
les plus dures , les plus rares comme a multiplié aussi le nombre et la va-
les plus communes. riété des attributs, et compliqué ainsi
Cette multiplicité de représenta- l'étude de ces personnages ; mais comme
tions des êtres divins provenait, en les divinités principales, celles du pre-
ftgypte , d'abord de la multiplicité mier ordre étaient aussi les pJtrs
de ces êtres mêmes, et surtout de honorées, et devaient être plus ordi-
ce que le même personnage se repro- nairement figurées, il en résulte que
duisait par un triple type. Nous de- leur représentation fut aussi la plus
vons, sur ce sujet, entrer dans quel- nombreuse ; elle est aussi la plus fré-
ques détails qui pourront d'abord quente. Il nous suffira donc d'indi-
suffire à l'exposition de notre sujet, 3uer ici les caractères et les attribut*
et de plus à explication de la plupart
I e la plupart de ces divinités princi-
de nos planches; enfin, à reconnaître, pales.
dans nos collections archéologiques, Comme caractères généraux com-
la représentation de ces mêmes êtres muns à toutes les divinités, nous indi-
divins. quons, 1° la croix ansée ( ou sur- T
La même divinité, chez les Égyp- monté d'un anneau), symbole de la

tiens , était donc représentée sous trois vie divine ,


que chaque dieu tient d'une
formes différentes : 1° la forme hu- main ;
2° le sceptre de l'autre; et ce 1

Digitized by Google
Digitized by Google
ÉGYPTE. 257

?ptre, ou b;1ton long, est terminé l'oreille;


visage vert, le corps en gaine
haut par une téte de coucoupha pour (n° 2); Pooh (le dieu Lunus);
i divinités môles (symbole de la bien- Idem y avec le sceptre , le nilomètre
sance) , et par un pommeau évasé et la croix ansée dans ses mains jointes
ur les divinités femelles. De plus, (le même dieu Lunus);
ligure humaine d'un dieu a un an- Idem y assis dans une barque et adoré
nui ce au menton en forme de barbe, par des singes cynocéphales le même :

»ssée , et les déesses n'en ont ja- dieu Pooh (Lunus) ;

ais. Knfin, dans certaines actions, Idem, retenant de ses deux mains
» divinités occupées à une fonction un disque rouge sur sa téte, et ayant
rticulière, ont quitté ces deux pre- près de des oiseaux à téte humaine:
lui
iers croix ansée et le
attributs , la le même Pooh (Lunus), directeur des
eptre ; mais on les reconnaît à leur âmes, qui sont représentées par ces
•îfture spéciale. Voici donc l'énumé- oiseaux ;
tion des principales coiffures: La mitre flanquée de deux appen-
I. Divinités égyptiennes, caractéri- dices recourbés par le haut, le fléau
es par
leurs coiffures. et le crochet dans les mains , corps en
Dieux de forme humaine pure
1 ° gaine : Osiris (roi de l'Amenthi, ou
>rtant sur leur tête : enfer égyptien) ;
Deux longues plumes droites le nu , Le pschent entier (coiffure royale)
ïinten bleu; c'est Ammon, le créa- avec le lituus et le sceptre à la main
ur du monde {pl. 33, n° 1); et avec (n° 5) : le Mars égyptien;
i caractère de plus Ammon géné- : Corps humain monstrueux par l'exa-
itour ( Mendès , Pan) ; gération des traits de la figure et le
Unbonnet serrant fortement la tête; volume du ventre ; Typhon , le mau-
isa^e vert; le corps en gaîne, appuyé vais génie ;
jntre une colonne à plusieurs chapi- 2° Déesses déforme humaine pure
;aux , et dans les mains le nilomètre : portant sur leur téte :
ht ha (Hèphaïstos, Vulcain) ; La dépouille d'une
d'une pintade,
ni et le
Tête nue, ou avec le même bonnet; pschent complet (n° 8) ; le nu en jaune :
(n°8);
jrps d'enfant trapu et difforme, mar- Nèith (l'Athénè ou Minerve égyp-
iant, ou debout sur un crocodile; tienne) ;

jlorés en vert ou en jaune : Phtha- Le même pschent sans la dépouille


iokharis enfant, Vulcain; de la pintade ; à droite une téte de
Deux plumes recourbées sur la téte, vautour, symbole de la maternité, et
?ec deux longues cornes ; le fléau avec couverte de la partie inférieure du
u sans le crochet ou pedum dans les pschent; à gauche, une tête de lion
laiiis : le même Phtha-Sokharis; (la force), portant les deux plumes
Deux cornes de bouc, coiffure blan- droites ; des ailes étendues , et les
he, visage vert ; deux serpents uracus signes des deux sexes Nèith , géné-
:

ressés sur les cornes; un disque au ratrice ( Physis, la Nature, Minerve);


milieu , et deux plumes droites sur- Une plume seule, recourbée par le
montant le tout ( n° 3} Souk (Succhus,: haut, coiffure bleue, le nu jaune,
ironos , Saturne) ; avec ou sans ailes ( n° 9): Thmé ( la
Une seule plume recourbée par le justice et la vérité);
aut; coiffure rayée; visage vert : Une espèce d'autel évasé vers le haut :

)jom ou Gom (Hercule) ; ISephthis ;

Deux plumes séparées et droites; La mitre du pschent en jaune, flan-


oiffure noire, \isage vert, le corps quée de deux cornes , le nu peint en
ouvert d'une longue robe rayée le : rouge Anouké (Anucis, Estia, Vesta) ;
:

îéme Djom ou Gom ; Deux grandes cornes, un disque au


Honnet serre, noir ou bleu , le crois- milieu , avec ou sans l'uracus sur le
ant de la lune avec un disque au mi- front (n« 13): Isis, sœur et femme
•eu; une mèche tressée pendante sur d'Osiris;
e
17 Livraison. (Egypte.) 17

Digitized by Google
258 L'UNIVERS.
Un diadème, surmonté de feuilles Tète d'épervier, avec la partie ra
de couleurs variées; le nu peint en rieuredu pschent sur la main :

jaune (n° 12) Tpé (Uranie, la déesse


: même Phtha-Sokharis;
du Ciel) ; Idem, sans ornement: Horus.
Diverses coiffures; le corps déme- d'Isis et d'Osiris;
surément allongé horizontalement Idem, coiffée du pschent on*'
orné de cinq disques ou d'étoiles les , lituus Horus-Arsiesi ;
:

bras et les jambes pendant perpendicu- Idem, ornée du croissant lun.iii


lairement la même Tpé (Uranie ou le
: un disque au milieu , avec ou sans
Ciel) ;
serpent ura'us; le tout peint en jaur.
Epervier avec une coiffure symboli- Pooh-Hiéracoeéphale (le dieu Lun J
que; la déesse ayant dans les mains quelquefois aussi la tête d'épervier)
des bandelettes ou lacs (n° 10) Ha- : double , et le corps porté sur deux cl
thôr (Aphrodite, Vénus); codiles;
La dépouille de la pintade , surmon- Idem, surmontée d'un grand disq
tée de la ligure d'une porte de temple, rouge, avec ou sans l'ura?us: Pfc
avec des fleurs bleues qui rayonnent (Héïios, le- soleil);
autour: la même Uathôr; Idem, avec le disque d'où s/>rt<
Deux cornes, un disque rouge au Puraeus, et deux plumes droites : yu
milieu, et montrant d'une main un dou-Ré (Mandoulis);
bourrelet pendu à son cou la même
: Idem, et de ses mains répamb
Uathôr ;
l'eau contenue dans un vase : Tho
La inférieure du pschent
nartie trois fois grand (Hermès trisiné^t
ornée d'un lituus ; carnation verte le premier Hermès);
(n° 14) : Itouto (Letô , Latoue, les té- Tête d'ibis; deux cornes longues; de
nèbres primordiales); ura'us; la mitre du pschent très-ornei
hlem , avec deux crocodiles qui vont Thoth deux fois grand ( le dtuxieii
prendre son sein : Bouto nourrice des
, Hermès) ;
dieux; Idem, avec le croissant lunaire
Ln trône Isis. : ledisque au milieu : le même Tiw
II. Divinitésde forme humaine, à deux lois grand, en rapport avec Pc<
tète d'animal. ou Lunus;
m Dieux. Tète de bélier, bleue, Idem, sans ornement, et dans
\ I

surmontée du disque et de deux plumes : mains du dieu un sceptre terminé f


Ammon, Amon-Ké( Jupiter- Ammon) ; une plume panachée Thoth deux ro : i

Tête de bélier, verte; deux longues grand , seigneur de la région in fi

cornes ; le disque et le serpent uracus : rienre ;

Chnouphis ( Ammon-Chnouphis) ; Idem, sans ornement, d'une mai


— de bélier avec deux longues cor-
, une tablette, et de l'autre un sty
nes, et dans les mains un vase pen- ou roseau Thoth Psychopompe \
:

ché d'où l'eau s'échappe : Chnouphis- deuxième Hermès écrivant le resull


Nilus (Jupiter-Nilus, le dieu INil); de la pesée des âmes dans l'Amenth
— de chacal : Anubis, ministre de ou enfer égyptien) ;
PAmenthi ou enfer égyptien ; Tète de vanneau: le dieu Bennd;
— d'hippopotame , ventre volumi- — de scarabée ailé, dressé sur le

neux : Typhon , génie du mal ; pattes de derrière : Thoré, une da


— de crocodile, avec ou sans deux formes de Plitha ;
cornes de bouc , surmontées de deux — de nilometre, surmontée dedeu
urajus et de deux plumes, avec ou sans longues cornes, du disque et de ilrui
disque: Souk (Succhus, Cronos , Sa- plumes ; dans les mains le fouet et È<

turne) ; crochet ; Phtha stabiliteur.


— d'épervier, avec la mitre du 2° Drisses de forme humaine ,i
pschent , orné de deux appendices té te d'à ni mat:
rayés : Phtha-Sokharis ; Tête de lionne : Tafné ou Tufnd ;

Digitized by Google
I

• •

»
• » 4 -
• •
« m • • • • • •

• - • • *


• • • * . .

»...
0
• * * *
• 4
t « •

» -

Digitized by Google
ÉGYPTE
Téte de vache le disque rouge et
; Vache avec un disque sur la tête :
deux plumes recourbées entre les cor- Hathôr;
nes : Hathôr (Aphrodite, Vénus); Snhynx mâle (barbu) le disque rouge

,

de vautour, avec un diadème ou et Turacus sur la téte: Phré (le so-


longues bandelettes, un arc et une flèche leil);
dans les mains: l'Ilythia égyptienne, Disque rouge ailé, duquel sortent
accélératrice des accouchements. quelquefois des rayons ue lumière,
III. Animaux symboliques , repré- avec ou sans les deux croix ansées,
sentant les dieux mêmes qui portent deux palmes et deux uraeus : Thôth tris-
quelquefois leur téte : mégiste (le premier Hermès);
Serpent barbu avec deux jambes Disque jaune dans une barque, avec
humaines: Chnouphis; c'est ce qu'on ou sans cynocéphales : Pooh (le dieu
nomme l'Agathodémon (ou bon gé- Lunus).
nie); Les exemples qui viennent d'être
Uraeus , la téte ornée de la partie cités suffiront pour donner une idée
inférieure du pschent et du lituus; générale de la représentation des divi-
Taureau avec un disque sur la téte: nités égyptiennes sous les trois formes
Apis ; ci-dessus indiquées, et pour instruire
Chacal sur un autel , avec ou sans le lecteur sur les principales circons-
fouet: Anubis; tances extérieures d'une des plus an-
Bélier richement caparaçonné, la tiques religions nationales.
téte ornée du disque et des deux plumes Dans son étude, on ne doit jamais
droites d'Ammon Amon-Ra : ; oublier cette triple manière de repré-
Idem, avec le disque seul : Chnou- senter les divinités; et c'est par là que
phis ; cette multiplicité apparente des repré-
Cynocéphale , une tablette de scribe sentations se réduit déjà de beaucoup
à la main : Thôth deux fois grand (le au moyen de cette synonymie ; e$
deuxième Hermès); nous devons ajouter, en finissant, au
Cynocéphale avec le croissant de la sujet du sphinx {pl. 19), qu'il paraît
lune et un disque peint en jaune Pooh : avoir été l'emblème de toutes les di-
(le dieu Lunus); vinités , et même des rois et des reinea
Scarabée à téte de bélier ornée du de l'Egypte. Il n'y a néanmoins au-
disque et de deux agathodémons sur cune confusion à redouter pour les
ses cornes , auxquelles deux croix an- dieux symbolisés sous la forme du
sées sont appendues: Chnoupbis-Ni- sphinx, puisque la coiffure et les em-
lus; blèmes qui caractérisent spécialement
Vautour coiffé de la mitre du pschent, chacun d'eux, caractérisent aussi cet
ornée, et portant une palme dans cha- être fantastique; et que, à l'égard des
cune de ses serres: JNeith ; rois et des reines, le cartouche ou en-
Ibis blanc sur une enseigne : Thôth cadrement elliptique qui renferme leur
deux fois grand (le second Hermès) ; nom, est toujours placé à côté de ce
Épervier sans ornements : Horus ; sphinx mAle ou femelle.
Épervier, le disque et un uraus sur Nous bornons ici notre résumé sur
sa tele Phré (le soleil) ;
: la principale des institutions de l'an-
Épervier, le disque rouge sur sa cienne Égypte, celle qui pénétra le plus
tète , avec deux uraus, une palme et profondément dans l'esprit et le cœur
une croix ansée Thôth trismégiste (le
: de la population avantage social du
:

premier Hermès) ; f>remier ordre; car cette croyance fut


Épervier, sa téte ornée du pschent e lien intime entre toutes les classes
avec beaucoup d'accessoires: Phtha- de la nation, qui, y trouvant toutes
Sokharis ; leur honneur et leurs avantages, ne
Vanneau avec des aigrettes: Bennô; s'en détachèrent jamais; et ce lien
Épervier dans un carré : Hathôr politique et national avait ramené
(Vénus égyptienne); a l'unité tous les devoirs, tous les
17.

Digitized by Google
260 L'UNIVERS.
droits, et tous les intérêts d'un grand tre , à faire dessécher
le corps entier
peuple. en le pendant soixante-dix
laissant,
Nous ne pouvons pas omettre cepen- jours , plonger dans le natron, à l'ense-
dant, en parlant de la religion égyptien- velir ensuite dans un linceul de toile
ne, de rappeler qu'en Egypte plus que grossière, plus grossièrement cousue
dans aucune des sociétés modernes, la et de le déposer en cet état dans les
croyance et le culte étaient mêlés à la catacombes publiques. On étendais
vie intime de l'homme. La religion di- quelquefois le mort sur une planche de
rigeait ses actions avec une autorité sycomore, enveloppée aussi dans ta
absolue; elle s'emparait de l'individu toile.
à sa naissance , et ne l'abandonnait Si l'individu pouvait faire quelque
plus même après sa mort. Elle lui dépense, on employait l'huile de cèdre
assurait d'honorables funérailles selon pour nettoyer l'intérieur; on dessé-
sa condition, et un lieu de repos où chait le corps avec le natron; les
ses cendres devaient être pour tou- membres, chacun à part, ou bien le
jours à l'abri de l'insulte, soit dans la corps entier, étaient entouré de bande-
sépulture des familles, soit dans les lettes de coton imbibées de la même
sépultures publiques. Enfin elle pres- huile, ou de toute autre substance
crivait pour tous l'usage des pratiques conservatrice , et le corps était ensuite
découvertes par l'industrie pour la enfermé dans un cercueil plus ou moins
conservation presque éternelle des orné de peintures. Le nom du mort,
corps humains, dernier et attentif celui de sa mère, et sa profession,
hommage à la dignité de l'espèce. étaient écrits habituellement sur k
On est redevable «à cette coutume devaut de ce cercueil qui était de bois
égyptienne de l'innombrable quantité On peut se faire une idée de la \a-
de corps humains embaumés qui nous riété de ces pratiques, en pensant à tou;
sont parvenus si parfaitement conser- ce que la piété, la tendresse ou la vanité
vés, et auxquels on a donné le nom purent imaginer potrr les décoration»
de momies. Nous allons en dire som- de cette dernière demeure de l'homme,
mairement ce qui , de ce sujet presque et à tous les degrés qu'il fut possit ri-

populaire, doit le plus intéresser le de parcourir, depuis la toile d'embal-


lecteur. lage du pauvre, jusqu'au magnifique
Hérodote parle en termes très-précis sarcophage royal en granit ou en ba-
des usages de l'Egypte dans les deuils salte. J'ai ouvert un grand nombre de
et les funérailles. Quand le chef de la momies, et étudié les objets d'art qu?
famille mourait, toutes ses femmes se les tombeaux nous ont conservés; je
couvraient le front de boue, et se ré- Ruis donc compléter ces notions sur
pandaient, échevelées, dans la ville. îs embaumements en Égvpte, en rt-
Les hommes suivaient le même usage Mimant à la fois et les récits laissa
à l'égard des femmes. par les anciens écrivains, et mes pro-
Après ces premières manifestations pres observations.
de la douleur, le corps du mort était La première opération des embau-
immédiatement livré aux embaumeurs, meurs consistait à extraire le cer-
classe inférieure de l'ordre sacerdotal, veau par les narines au moyen d'un
prêtres nommés Taricheutes et Chol- instrument recourbé; la cavîté de U
chytes, dont l'embaumement des morts tête était ensuite remplie par injection
La famille con-
était la fonction spéciale. de bitume liquide et très-pur, qui s'en-
venait avec eux du prix de cette prépa- durcissait en se refroidissant. On 2
ration, lequel dépendait de la simplicité tiré de quelques têtes de momies b
ou de la magnificence de l'embaume- coiffe du cerveau parfaitement con-
ment qui était désigné. Il y en avait servée.
en effet de plusieurs classes. La plus On faisait aussi l'extraction J«
commune se bornait à purger avec des yeux, et on les remplaçait par des
drogues de vil prix l'intérieur du ven- yeux en émail.

Digitized by Google
• • • > • •

• . • «

*
» .

» «

Digitized by Google
,, ,

ÉGYPTE 261

La chevelure étaitconservée (voy. savoir: d'homme, de chacal , d'éper-


L 2), et on en a vu dans toute sa lon- vier et de cynocéphale, qui sont celles
leur, quelquefois tressée, d'autres des quatre génies de l'Amenthi, ou
«s frisée, et dans un ordre qui ré- enfer égyptien , nommés Àmset Hapi ,

îiaît la main du coiffeur. Soumaoutf et Kebhsniv.


Au moyen d'une pierre tranchante, Après les soixante-dix jours d'im-
D faisait une incision dans le flanc mersion dans le natron, le corps était
auche, à la hauteur des iles ; par cette enseveli. On enveloppait chaque doict
overture, on
extrayait les intestins isolément de bandelettes étroites; la
t les viscères. Les cavités de l'abdo- main ensuite, et le bras séparément.
oen et de l'estomac étaient soigneuse- La même opération avait lieu pour
ment lavées avec des décoctions de chacun des autres membres, et pour
nn de palmier ou d'aromates, et la tète plus soigneusement encore. La
sauvées avec des aromates pi lés ; toile la plus fine, quelquefois une très-
>n lès remplissait ensuite avec de la belle mousseline, était celle qui tou-
myrrhe et autres parfums même de , chait immédiatement la peau. Plusieurs
ia sciure de bois odoriférant, et on couches successives couvraient la figu-
y mêlait des bijoux et des figurines re , et leur adhésion est telle que , enle-
religieuses en métaux précieux ou com- vées en masse, ces couches ont pu servir
munes, en pierres dures ou en porce- de creux pour y couler du plâtre et
laine. avoir ainsi le portrait du défunt.
Le corps ainsi préparé intérieure- On enveloppait ensuite le corps en-
ment, était dépose dans le natron , tier dans toute sa longueur, et on ré-
substance très-commune en fcgypte tablissait, avec des linges artistement
dans tous les temps, et on l'y laissait disposés sous les bandelettes, les for-
pendant soixante -dix jours;' la chair mes primitives de chaque membre, que
et les muscles y étaient complètement l'action do natron avait entièrement
dévorés, et il né restait pins de ce corps détruites. Quelquefois la dernière en-
<\ue la peau collée sur les os. Tel est veloppe, artistement cousue, et ayant
1 des momies dépouillées qu'on
état l'aspect d'un pantalon collant et d'un
voit dans quelques cabinets. gilet à manches très-serré, donnait à
Souvent, au lieu de dessécher ainsi la momie l'apparence d'une personne
le corps, on injectait dans toutes ses ainsi vêtue.
veines, par des procédés très-compli- On a remarqué dans des momies de
qués et très-coûteux, une liqueur chi- cet ordre, que les ongles de leurs pieds
miquement composée , qui avait la et de leurs mains avaient été dorés ;
propriété de conserver le corps , et de on a trouvé des plaques d'or sur les
laisser à ses membres presque toute yeux et la bouche , la téte entièrement
leur élasticité naturelle. Borée aussi ; enfin les corps des per-
En attendant, on soumettait les in- sonnes royales étaient complètement
testins et les principaux viscères du dorés , ou* même enfermés dans une
mort à une préparation de bitume bouil- première enveloppe en or, espèce
lant ; on enveloppait séparément le cer- d'étui au repousse, qui reproduisait en
*eau, le cœur, le foie, dans un linge, relief et leur portrait et toutes leurs
et on les déposait dans quatre vases formes corporelles.
^'on remplissait de la même subs- Avant d employer les bandelettes
tance renoue liquide par le feu. Ces 3ui enveloppaient le corps entier, on
Quatre vases sont ceux qu'on nomme onnait aux bras une position réglée
^Igairement canopes. Ils étaient faits par l'usage et la loi on croisait les
:

de toute matière, depuis l'argile cuite mains des femmes sur leur ventre; les
jusqu'à l'albâtre oriental rubané, et au bras des hommes restaient pendants
granit. Us sont de forme conique ren- sur les côtés ; quelquefois la main gau-
versée, et lesquatre couvercles sont che était placée sur épaule droite; ce
I

surmontés de quatre têtes différentes bras faisait ainsi écharpe sur la poitrine.

Digitized by Google
2C3 L'U.i VERS.
On g trouvé sur ces mêmes corps ou du géomètre, et avec des momies
et aii-dessous de toutes les bandelettes, d'enfants des joujoux de toute sorte.
ou sous leurs diverses couches, les Les parents et les amis accompa-
baaues aux doigts des momies et les gnaient religieusement le mort dans sa
colliers à leur cou, des bijoux variés, dernière demeure; ils se procu raient
des figurines, des objets d'affection, des figurines de dimensions et de ma-
de petits meubles, des pièces d'étoffes tières diverses, précieuses si le mort
diverses; enfin des manuscrits placés était un personnage considérable : ces
soit sur les cotés, soit entre les jambes, figurines, en argile, en porcelaine, er
et enveloppés, comme le mort, de bi- bois ou en matières dures, étaient
tume et de bandelettes. faites, le plus possible, à In ressem-
Il parait aussi , par l'état de quelques blance du défunt; son nom était inséré*
momies, qu'après ces préparations, dans la prière funèbre inscrite sur ces
on les plongeait tout habillées dans figurines, et tous ceux qui. accompa-
une cuve de bitume bouillant, qui les gnaient la momie déposaient ces figu-
pénétrait jusqu'à la moelle des os , rines dans un cofTre funéraire qui était
et, une fois refroidies, elles n'étaient placé vers la tête du cercueil ; les
plus qu'une masse de bitume durci, 3uatre vases canopes Tétaient deux à
inaltérable en quelque sorte. eux sur les côtes.
Ainsi enveloppée de langes et d'un On plaçait aussi dans les tombeaux
linceul retenu par des bandelettes en des stries funéraires, dalle mise de
croix , la momie , où toute appa- champ et cintrée par le haut, ou étaien t
rence de cadavre et de préparation avait représentés ,
sculptés et peints , sur
disparu, était placée dans un cercueil pierre dure ou tendre, ou sur bois, les
eu bois, en granit, en basalte, ou au- parents du défunt lui offrant les pré-
tres matières. Ce cercueil était orné sents funèbres, lui rendant leurs der-
de peintures et de sculptures; pour les niers devoirs, et une inscription ex-
personnages considérâmes, le premier pliquait complètement ce tableau , et
cercueil était enfermé dans un second donnait les noms des morts et des vi-
et 1? second dans un troisième, tous vants qui y étaient figurés. Le défunt
également ornés de sujets religieux, est assis; les parents sont debout ou
répétition orthodoxe des scènes du à genoux, faisant leurs offrandes. Sur
f;rand rituel funéraire, où Ton voit notre planche 67, une de ces stèles est
'âme du défunt faire sa visite et ses reproduite, mais c'est une stèle royale,
offrandes à toutes les divinités dont et à deux registres : su rie premier, ce-
elle doit implorer la protection. lui de dessus, sont deux cou pies royai.'x
C'est dans l'intérieur de ces mêmes assis; a la droite, c'est le roi Amênof
cercueils qu'on a recueilli aussi des ma- tepet la reine Ahmos-Nofrè-Atari , la
nuscrits, parties plusou moins complè- tête surmontée de deux longues plu-
tes de ce grand manuscrit funéraire, de mes; à la gauche sont deux rois ,
ce livre de manifestation à la lumière, Thouthmosis T et Mûris; au-dessous
r

dont les exemplaires sont nombreux Thouthmosis IV avec un jeune fils; et


dans les cabinets de l'Europe, parce en face à genoux une Noirè- Atari , en
que ce livre de prières faisait partie du acte d'adoration de ces trois rois de
mobilier funéraire des Égyptiens. la XV III* dynastie.
On a trouvé aussi dans ces cercueils La momie était déposée dans le tom-
des bijoux de toute espèce , des objets de beau de la famille ou bien dans le tom-
parure, de volumineuses perruques de , beau public. En haute Egypte, ces
grosses tresses de longs cheveux, des tombeaux étaient creusés dans le flanc
chaussures, des instruments de diver- de la montagne libyque ; on y re-
ses professions, et avec les momies trouve encore de ces catacombes géné-
des scribes sacrés la palette à plusieurs rales où les momies sont déposées,
godets, les calams et le canif pour les symétriquement arrangées en chan-
tailler; enfin la coudée du marchand tier, et leur nombre est encore in-

Digitized by Google

• » • 0
i

4
* 0 * •

0 0 0 0
• 0 • • • •

• • • 0
0 40 0 ••••
• • • « •
* • 4 0

...
• • •
0 0 0 0

* • » 0

• » 0 i • ë t »

• » « »
0

Digitized by Google
Digitized by Google
» •••

»•••

- • • *
....
m
. - •
"S
• • *

I
• • •

» •
I

kl JM

Digitized by Google
EGYPTE
ÉG1 TE. 263

croyable, malgré les ravages commis tion annuelle à l'État, et que l'État
par les Arabes qui viennent habiter ces vendait ce produit à des fermiers, qui
tombeaux , et qui, de temps immémo- cédaient à leur tour à des sous-fer-
rial , se servent de ces momies pour miers tout ou partie de leur concession
les besoins du ménage, combustible générale. Le respect religieux des ancê-
plus économique que le bois à brûler tres, qui était profondément empreint
qui manque dans ce pavs. Dans la dans les mœurs égyptiennes, prévenait
busse Éçypte, le sol est foré de puits toute opposition a 1 idée et à la gestion
très-profonds, qui conduisent à des d'un tel impôt. C'est par suite d'une
chambres creusées dans le roc, et où conviction également religieuse qu'un
la population de la basse Égypte dépo- étranger, trouvé mort par l'effet d'un
sait ses morts; l'orilice du puits était accident, recevait de pompeuses funé-
ensuite soigneusement bouché, afin de railles aux dépens du lieu où il était
le préserver des suites de l'inondation. découvert. On sait aussi que la momie
Les pyramides (voy.flf. 10) n'étaient du père pouvait être donnée en gage
que Jes montagnes factices dans les- par son fils ; mais il était note d'infamie
quelles on déposait les cadavres des s'il ne la retirait pas. Enfin, on montrait

rois. dans les repas le simulacre en bois


Les grands personnages de l'ordre peint des ancêtres morts ; c'était encore
sacerdotal, les princes, les rois et les un moyen de les honorer, bien plutôt
reines, étaient déposés dans de riches qu'une occasion pour les convives de
sarcophages en granit ou en basalte, s'eveiter à boire et à manger, parce
ornés sur toutes leurs faces, intérieures qu'ils devaient aussi mourir.
et extérieures, de scènes religieuses ana- On voit des momies humaines dans
logues à celles du rituel. On peut voir tous les cabinets; on reconnaît celles
au musée du Louvre le sarcophage, en des hommes à un appendice, en forme
granit rose, du roi Rhamses-Méîa- de barbe tressée, qui est attaché au
moun, le chef de la dix-neuvième dy- menton; il n'y en a pas aux momies de
nastie égyptienne, qui régna au quin- femmes. Les momies d'enfants sont
zième siècle avant l'ère chrétienne. rares, et celles de diverses espèces d'a-
Cette couche funèbre du pharaon est nimaux, très-communes. Il ne faut pas
creusée dans un seul morceau de granit onblier que ces animaux étaient des
ro>e de quinze pieds de long, sur huit emblèmes des dieux {supra, page 259);
de hauteur et six de largeur. Les offi- ue ces animaux étaient nourris vivants
ciers du bâtiment qui est allé chercher :i ans le temple , et embaumés après leur

l'obélisque a Louqsor,en ont rapporté, mort. L'ibis était consacré a Thùth, et


de Thèbes à Paris, le sarcophage de la l'on trouve à Hermopolis (la ville
reine Amasis, morte peu d'années d'Hermès ou Thôth) des momies d'ibis
avant l'invasion de Camhvse. par milliers, comme on trouve ail' ""S
On trouve, du temps des Grecs, un des momies de chats, de crocnH ;i «s,
usage singulier, et l'on manque d'au- d'ichncumons,d'éperviers,depo. - us,
torité pour lui donner une origine de serpents, de bœufs, de beliei*; té-
égyptienne. Il est certain que dans les moignages irrécusables en faveur des
temps où les institutions nationales notions plus haut exposées sur le sym-
florissaient en Égypte, les catacombes bolisme de ces êtres animés, opposé
publiques recevaient les momies des à toute idée d'adoration directe, dans
personnes qui ne possédaient pas une les préceptes du culte dont les animaux
sépulture de famille; il en était de même furent l'objet en Égypte.
du temps des Grecs; mais il paraît cer- On verra sur notre planche r>9 un
tain aussi que, durant leur domination, appareil funéraire presque complet; la
le dépôtd'une momie dans ces tombeaux momie est placée sur un lit, les quatre
publics n'était réellement que la loca- vases canopes sont auprès, et le dieu
tion d'une place pour laquelle les pa- Anubis semble prendre possession de ce
rents du mort payaient une contribu- nouvel habitant de l'Amenthi.La pl. 71

Digitized by Google
1

264 L'UNIVERS.
donne une idée topographique de la val- tion primitive. Son antiquité sera donc
lée deBiban-el-Molouk Thèbes, vallée-
a celle de la raison même appliquée avec
étroite, inculte et inhabitée, où sont succès à l'organisation de la société.
situés les tombeaux des rois, creusés Cette recherche intéresse au plus haut
des deux côtés dans le versant de la degré la philosophie de l'histoire, la
montagne; la planche 68 est une vue dignité humaine, la vérité. Nous
ne
de cette même montagne où la place parlons pas de l'origine du monde, de
et l'entrée des tombeaux sont indi- l'époque de sa création, du premier
quées; la planche 70 contient le plan homme, questions oiseuses, comme
le
d'un de ces tombeaux , qui n'est pas prouve le très-grand nombre de sys-
un des plus anciens, et au-dessus tèmes qu'elles ont enfantés , systèmes
est reproduit un passage du rituel fu- également incertains pour leur géné-
néraire, composé d une bande de scè- ralité même, et d'autant plus qu'ils
nes représentant l'âme d'une défunte, ont affecté une autorité plus grande ou
en tunique blanche, faisant ses offran- plus absolue.
des aux divinités que le rituel lui or- Pour l'Egypte en particulier, elle a
donnait de se rendre propices; au- toujours joui, dans opinion unanime
I

dessous de la scène sont les colonnes des nations civilisées de l'Occident,


verticales d'écriture hiéroglyphique, d'une renommée d'ancienneté qui leur
ayant à peu près dix pouces dé hauteur faisait rechercher avec empressement
dans l'original, et contenaut lesdiverses et vénération ses souvenirs et ses
prières que l'âme suppliante devait exemples. Platon n'hésitait pas à lui
Prononcer; enfin, la planche 72 est accorder une existence sociale de plu-
f
'entrée d'un tombeau creusé dans la sieurs milliers d'années, et il parlait
montagne de Beni- Hassan, entrée de faits importants qui ne lui parais-
qui est décorée de colonnes d'ordre saient nullement douteux, quoiqu'il les
dorique pur, antérieures de plusieurs crût de dix mille années antérieurs à
siècles à l'usage de ces colonnes dans son époque. L'opinion d'un homme de
la Grèce. cet ordre n'a pas été sans influence sur
On a vu sur notre planche 20 la celle des siècles les plus éclairés.
scène du jugement de l'âme; tel était Il est vrai que bien des doutes s'éle-
le but final de la morale religieuse en vaient dans les esprits les plus saçes
Égypte, tel était aussi l'objet essentiel sur ce fait qui paraissait isolé au milieu
de la plus puissante de toutes ses ins- des vastes champs de l'histoire, où
titutions nationales, de celle qui pé- rien de si antique ne se montrait avec
nétra le plus tous les esprits de l'es- une apparence de réalité dans les an-
sence même de son objet, et qui, par nales d'aucun autre peuple, si ce n'est
là, commanda le plus aux princes et dans des systèmes ou des prétentions
aux peuples, et contribua aussi, à un également' inadmissibles. La critique
plus haut degré, à assurer la durée de moderne n'avait pas examiné les faits
l'empire égyptien , comme à fonder et de ses yeux clairvoyants, et elle flot-
à perpétuer sa renommée. Essayons tait incertaine, soumise à des influen-
maintenant de remonter à son origine, ces dont elle ne scrutait guère l'ori-
et de mesurer les temps qui lui furent gine. Le temps est ensuite venu où
accordés par la Providence. elle a pu voir elle-même, fouiller de
ses mains expérimentées dans les dé-
S XIX. CHRONOLOGIB. combres de l'Egypte, interroger ses
ruines si riches de notions écrites, de
En traitant cette partie de l'histoire preuves monumentales, de témoigna-
ancienne de l'Égvpte, nous ne pouvons ges imposants par leur évidente véra-
pas oublier la liante portée d'un tel cité ; elle a pu comparer ces notions
sujet , par rapport à l'histoire générale et ces témoignages avec l'opinion des
de l'esprit humain. La civilisation anciens sages, avec les traditions des
égyptienne est pour nous une institu- anciens livres, et, tout armée de sa

Digitized by Google
»

- . -
... v
«
V 1
• • • • O » * «

Digitized by Google
W7 k » « » » * •
b

».»••;• •••• • 11 •

Digitized by Google
» mm*
- . - -

- » - -
» < .
« *

* ta w w
« • • .

Digitized by Google
.
•*
• ••• • -
«• • ••

• • • •

» . « •

fc • •

• .-
- *
» » a

- .

Digitized by Google
-

• •••
•• •• • • • »

• • • «

••••
» « •


•¥ ••
»

Digitized by Google
,

ÉGYPTE.
puissance d'examen, d'analyse, de les Égyptiens se l'étaient fait, et tel
rapprochement, de comparaison et de que leurs annalistes nous l'ont trans-
logiques déductions, conclure et ex- mis ; T le témoignage de monuments
poser avec méthode les éléments cer- encore connus qui confirment et met-
tains de la chronologie égyptienne, tent hors de tout doute la véracité
échelle immense de jours et de siècles, &une partie de cette même chronolo-
sur laquelle peut se placer par d'ins- gie. Nous nommerons donc partie
tructifs synchronismes l'histoire en- historique tous les temps de la chro-
tière de "l'intelligence humaine, et nologie égyptienne pour lesquels nous
celle de toutes les nations qui l'ont connaissons des monuments contem-
cultivée, honorée, avancée par leurs porains de ces mêmes temps , et partie
pensées ou par leurs actions. systématique, tous les temps de ces
Il est donc connu par les relations, annales pour lesquels nous ne con-
par les faits observés, que les Égyp- naissons pas de monuments contem-
tiens fondaient leur chronologie na- porains. Les certitudes de l'histoire de
tionale sur des documents authentiques l'Egypte commencent donc là où des
soigneusement réunis dans les archi- monuments existants et contemporains
ves des temples, et sur l'autorité des des faits, viennent unir leur témoignage
monuments publics dont l'Egypte était à ceux des annales écrites.
couverte et cette assertion ést haute-
; Celles-ci consistent en deux pièces
ment justifiée par les recherches dont principales: 1° la Vieille Chronique,
cette contrée célèbre a été le sujet de 2° les Listes des dynasties royales égyp-
notre temps. Malgré les ravages qu'elle tiennes rédigées par Manéthon.
subit depuis deux mille ans, aucun Il est aussi des monuments analogues
État moderne, à son plus haut degré à ces relations écrites ; ce sont des listes
de splendeur, ne peut lutter de magni- d'anciens rois d'Egypte tracées sur pa-
ficence avec les vénérables ruines de pyrus en caractères hiéroglyphiques,
l'Egypte. On y a recueilli récemment des tables généalogiques de ces mêmes
des " monuments chronologiques pro- rois, plus ou moins complètes, pour
prement dits, des listes de rois, des des époques différentes, gravées parmi
tableaux généalogiques de dynasties les bas-reliefs de plusieurs temples , et
souveraines. Quand donc ses histo- la plus célèbre de ces tables généalo-
riens affirment qu'ils ont travaillé giques est celle que M. Cailliaud a dé-
d'après les documents nombreux exis- couverte et copiée au nord d'Abydos,
tant de leur temps, il n'est pas pos- table dont le dernier roi en liste est
sible de suspecter leurs dires. INous Sésostris, l'un des grands rois de la
avons encore sous les yeux la plupart dix-huitième dynastie; et dont les pre-
de ces documents. La critique mo- miers remontaient au delà de la quin-
derne y reconnaît les faits mêmes qu'en zième même. Ces listes et ces tables
avaient tirés les historiens anciens. quant à leur témoignage à l'égard des
C'est donc retrouver tout ensemble temps antérieurs a l'époque où elles
les annales d'un grand peuple, l'his- ont été exécutées, nous leur reconnais-
torien qui les a dressées, et les piè- sons la même valeur historique qu'a la
ces qui en sont les preuves authenti- Vieille Chronique et aux Listes ae Ma-
ques. néthon ; en ajoutant cependant que la
Ceci, dans sa généralité, exige ce- concordance de tous ces monuments
pendant une distinction. Ces annales ensemble donne à chacun d'eux une
remontent à une époque très-reculée, autorité individuelle qui procède de
et le témoignage direct ou contempo- leur autorité commune , et la critique
rain de ces documents n'atteint pas historique, surtout pour des époques
jusqu'au même terme. Il y a donc dans si éloignées , ne fonde pas toujours sa
la chronologie égyptienne deux choses foi sur un tel concours d'autorités aussi
très-distinctes, 1° le système général probantes. lien résulte, sans difficulté
de cette chronologie historique tel que et sans opposition, que, dès la plus haute

Digitized by Goc
26G L'UNIVERS.
antiquité, PÉgypte avait un svstème devons faire connaître au lecteur les
d'annales nationales uniformes dans documents principaux du système g
leur ensemble et dans leurs détails , et néral de chronologie historique tel qu
que Manéthon nous avait fidèlement l'Égypte avait adopté pour ses propres
l

transmis ce svstème égvptien dans son annales.


intégrité. Voilà l'idée générale qu'on La I ieille Chron ique nous a été con-
peut se faire de la chronologie histo- servée en grec par George le Syneelle,
rique de l'Ésvpte. chronographedu huitième siècle rhré-
Quaut à s?i certitude pour nous, et tien, et aw, des noms grecs qui cer-
c'est ici que commencent les droits du tainement n'étaient pas dans le texte
critique, libres de croire ou de ne pas égyptien, où les dieux devaient porter
croire à ce svstème égvptien , nous an- leur véritable nom. Il y est dit :
pelons les monuments au secours de # M
notre bonne foi , et , classant , comme £now comb:pn de ; mp!l t

nous l'avons fait déjà, parmi les tra- IMkm {\r soini), fiu dH^pbaïMos .
^oe m-
3o 000
ditions écrites ceux de ces monuments ; • -y y • •
:

'

, e t
• * . Crnnos e-vrr U * douze autres dieux rrgne-
qui rapportent des laits antérieurs a m ,t riisrin |,i e 3yM
leur propre époque, nous n'interro- Le» huit ro.s demi -dieux régnèrent en-

eeons les autres monuments que sur ««M«.... • • "7


^£J^Si7^^
: :
A
Fes faits mêmes dont
sont contem-ils

porains. Ainsi la dédicace inscrite sur cycle Mtbuque jusqu'à ramé» 413

la porte d'un temple, comme *partie Ui6My«.l«s Taniie, d- scm..^ ,<*>

. .F \ i' . *• .
i l » *4„ 1.317 e losMnnphilesdc 4 i <o
intégrante de la décoration de cette u
porte annonce-t-elle qu'un roi qu'elle
,
u 10 e
. .
i„M«iipui!esde 14
!«• Diœpuiitexde 5
i.-»i>m«por.te»de s
—— •
34s
194
»is
nomme a fait...construire ce temple à
/ I •
' • Lan*....
-

les Tiinitr» dp 6 t7t


une époque désignée de son règne, je u»»»....ks Twitec dc 3 48
tire de cette inscription, gravée en La«3 e . . . iesDio< P ni,ir S de 19

relief sur un monument public, plu- ••• |« */ \ }j


sieurs également certains; 1°
faits Ul6 - ... i M M«.,»phite.dc * ni
l'existence de ce roi dont le nom se 1*37" iv r *rs lei de 5 . n4
lisait dans les listes écrites; 2° la ccr-
u >»*.... (i«cune)

titude en ce point du témoignage tiré


de ces listes; 8» la preuve que^ ce
même temple a ete élevé par ce même
u 8vll i«T.niic.Vi
Somm
y compris
^ ;;

éaaJhpêr}9WL%m$net
les
'ni'/.

règne* de i»»$*dja. 36,5a5»n*.


'.'.'.'.Y.'. !•

roi ;4» et que ce roi a régné au moins


un nombre d'années égal à celui qu'in- Sur quoi Georges le Syneelle fait
dique la date de cette dédicace. Si remarquer que ce nombre de 36,555
noitf avions un ou plusieurs témoigna- ans, divisé par 1,461 , donne juste 25
ges dc cet ordre pour chacun des prin- périodes sothiaques, cette période étant
ces Listes de Mané-
nommés dans les en effet composée de 1,461 années va-
thon, il serait difficile de refuser un gues de 3G5 jours,
grand degré de certitude à ces mêmes II est certain que cette rencontre
Listes , et dc vérité aux conséquences infirme singulièrement l'autorité de la
qui en découleraient très-naturelle- Vieille Chronique égyptienne, et l'on

ment. Mais ces témoignages manquent peut se demander combien serait grand
pour la partie la plus ancienne de ces le hasard qui produirait 25 périodes

mêmes Listes ; ils existent au contraire justes entre le commencement du re^


pour les époques subséquentes. C'est gne du soleil et la fin de celui du roi

donc avec ces époques que commence- fiectanèbe, le premier roi de la 30'
ront les certitudes des annales égvp- dynastie. Toutefois, deux choses nous
tiennes fondées sur les monuments paraissent assez certaines dans ce rap-
contemporains. prochement : 1° la Chronique egyp-
Après ces explications, peut-être né- tienne, qualifiée de vieille
(«J**»
cessaires à plusieurs égards, nous y/t ) par le Syneelle, pourrait bieo

Digitized by Google
EGYPTE 267

avoir été inventée après le règne de formellement à l'addition des règnes,


Nectanèbe, et même de ses deux suc- on obtiendra, à 11 ans près, les mê-
cesseurs , puisque l'auteur savait qu'il mes résultats quej'ai déjà tirés d'autres
y avait eu plusieurs rois a la trentième documents pour lixer a l'an 2082 l'in-
dynastie : il ne comprend en effet dans vasion dés Pasteurs et le commence-
son calcul que le premier des princes ment de la XVII e dynastie, et a 1822
e
Tanites qui composent cette dynastie ;
la première année de la XVIII dynas-
2° c'est sur les nombres antérieurs à tie : et pour des époques aussi' éloi-
la seizième dynastie qu'a pu porter gnées de nous, une si minime différence
l'aroitraire au moyen duquel on est ne saurait être ni attaquée ni défendue,
arrivé à ta somme des années néces- ily aurait donc , dans ce que la Vieille
saires pour former les 25 périodes Chronique contient au sujet des quinze
sothiaques. 11 était en effet indifférent premières dynasties et de la seizième
3 ue le soleil, les dieux et les demi- une tradition historique bien propre
ieux eussent régné quelques centai- à donner à ce document, quelle que
nes d'années de plus ou de moins la : soit son origine, un intérêt qui s'ac-
partie réellement historique de cette croît par la rareté de pareils rensei-
Chronique ne commence donc qu'avec gnements.
l'article relatif aux quinze générations Les Listes de Manéthon, dans leur
postérieures aux demi-dieux. ensemble, ont néanmoins un autre ca-
Ce* article nous semble avoir tous ractère. Elles nous ont été conservées
les caractères d'une précieuse indica- et transmises par des écrivains chré-
tion chronologique ; et quand l'auteur tiens, Jules l'Africain, du troisième
de cette Vieille Chronique dit qu'après siècle de J C, et Eusèbe, du quatrième.
.

les demi-dieux vinrent quinze familles Le Syiicelle avait heureusement recueilli


(ou dynasties, puisqu'il mentionne les extraits de Manéthon insérés dans
e
immédiatement la XVI dynastie), les- l'ouvrage de Jules l'Africain, qui est
quelles quinze dynasties sont inscrites perdu ; il les a rappochés de ceux que
dans 443 années du cycle sothiaque, donne Eusebe, dont la Chronique nous
il veut évidemment nous apprendre est parvenue. Ainsi les Listes des rois
que, dans son opinion, ces quinze d'Egypte par Manéthon nous sont
premières dynasties s'étendirent, de- connues par le Syncelle, qui les avait
puis une époque dont il ne dit pas le tirées de Jules l'Africain et d' Eusèbe,
point initial , jusqu'à l'année 443 du et par Eusèbe lui-même. Résumons
cycle, et qu'en conséquence la XVI
e
les rapports de ces trois auteurs
dynastie commença de régner l'an grecs.
444 de ce mêmecycle. Or", ce cycle Manéthon , né à Sébennytus, grand
est celui dont la première année ré- prêtre et scribe sacré pour'les archives
pond à l'an 2782 Julien avant l'ère des temples de l'Égypte, sous le règne
chrétienne : ce serait donc à l'an 2339 de Ptolémée Philadelphe, rédigea en
quç la première année de la XVTdy- grec, par les ordres de ce roi , des an-
nastie serait indiquée par cette Chro- nales tirées des monuments histori-
nique. Il y a donc la, je crois, un ques, tels que les stèles et autres,
souvenir, une véritable tradition his- écrits en hiéroglyphes. Son ouvrage
torique ; et il est bien digne de remar- était composé de trois volumes ou trois
que en un tel sujet, que si l'on ajoute parties. A la relation des événements,
a Tannée 443 du cycle, laquelle fut la il joignit le tableau des dynasties roya-
dernière de la XV|Ê dynastie, 1° 190 les de l'Egypte. Le premier volume
ans pour la durée des règnes de la comprenait les temps des onze pre-
XVI e dynastie; 2° les 178 ans qui mières dynasties d'hommes, qui four-
e
manquent, avec les 6 ans de la XXVIII nirent 292 règnes, dont la durée fut
dynastie dans les détails numériques
, de 2,350 ans 70 jours selon l'Africain,
de la Chronique pourarriver .au nom- et de 2,300 ans et 70 jours selon Eu-
bre total de 36,625 ans qu'elle donne sèbe. La douzième dynastie et les sui-

Digitized by Googl
268 L'UNIVERS
vantes, jusqu'à la dix-neuvième inclu- Listes de Jules l'Africain, et que celles
sivement , qui donnèrent 96 rois selon d'Eusèbe nous sont connues par trois
l'Africain, et 92 selon Eusèbe, dans copies différentes, par le grec qu'a
l'espace de 2,121 ans selon les deux recueilli le Syncelle, par la versiou
chronologistes, étaient le sujet du se- arménienne et par la traduction la-
cond volume. Dans le troisième , on tine qu'en fit saint Jérôme depuis la
trouvait l'histoire des dynasties sui- seizième dynastie; et nous ne nous
vantes, depuis la vingtième jusques et y arrêterons pas à discuter ici quelques
compris la trente et unième, qui finit différences qui s'aperçoivent entre Jules
avec la conquête de l'Egypte par l'Africain et Eusèbe au sujet de ces
Alexandre, et la durée de ces douze Listes, et entre les trois copies mêmes
dernières dynasties est portée à 1,05Q de celles d'Eusèbe comparées entre
ans par l'Africain, et a 833 ans par elles, puisque le résultat de cet examen
Eusèbe. Du grand ouvrage de Mané- serait de peu d'importance à l'é-
thon il ne nous reste donc que quelques gard de la durée totale de ces trente
fragments de sa relation historique, et une dynasties. Nous ne compren-
et le tableau des dynasties royales, drons dans notre tableau que le règne
tableau qui indique, pour chacune des hommes : le premier fut Menés;
d'elles, le nombre des rois, le nombre mais il paraît que Manéthon désignait
des générations que ces rois ont for- aussi comme prédécesseurs de Menés
mées dans la même dynastie, la durée les demi-dieux , les dieux et Héphafs-
du règne de chaque roi avec son nom tos, ainsi que le faisait la Vieille Chro-
et son origine paternelle; enGn la nique. Manéthon était l'historiographe
durée totale de la dvnastie ; et*, lors- de l'Égynte selon les doctrines na-
u'il abrège ces indications pour les tionales égyptiennes : il dut donc dres-
3 ynasties de rois fainéants, il n'omet ser la liste "des rois d'après les archives
jamais les données principales et les des temples et les documents publics,
f)lus importantes pour la chronologie, comme il affirme l'avoir fait, et comme
e nombre des rois et la durée totale des monuments qui nous sont parve-
de leurs règnes ; c'est du moins dans nus, et que Manéthon a vraisemblable-
cet état que ses Listes nous sont par- ment vus et étudiés, ne permettent
venues ; et ce n'est peut-être pas con- plus d'en douter. Ceci est donc un peu
damner injustement leurs abréviateurs, plus concluant que les mauvais propos
C|ue de leur reprocher le tort que font à que le Syncelle se permet contre Ma-
1 histoire leurs malheureuses suppres- néthon , et que les explications même
sions. qu' Eusèbe a cherchées de bonne foi
Ces Listes sont reproduites dans le pour des nombres d'années qui n'inté-
tableau oui suit ce paragraphe ; il ressent aucunement ni le déluge, ni
coutient la liste des trente et une dy- Abraham, ni l'histoire, ni la chrono-
nasties égyptiennes qui précédèrent logie positive, puisqu'ils sont le produit
l'invasion d'Alexandre, selon le texte arbitaire de spéculations astronomi-
d'Eusèbe , et nous l'avons préféré parce ques ou mythologiques.
qu'il n'existe qu'une seule copie des

[Suit le Tableau des Dynasties égyptiennes selon Manéthon.)

Digitized by Google
ÉGYPTE.
Ordre des Nombre Durée de Commencèrent
dynasties. Leur origine. des rois. ' leurs règnes. avant J. C.

dynastie.. . Tinile-Tlicbaïnc 8 rois 25a ans 5867


a' Tinile-Tkèbajoe. . . . 9 297 56i5
3" Memphilc 8 197 53 18
4* Memphite 17 448 5xac
5« Élépbantine 9 (•) 248 (*) 4673
6* Memphite 6 (•) ao3 4425
7* Memphite 5 75 422a»
e
8 Memphite 5 100 4147
e Héliopolite 100
ç, 4 4047
10* lléliopolite 19 i85 3947
e
xi Thébaïne 17 5g 376a
n r
Thébaïne 7 245 3703
i3* Thébaïne. Go 453 -3417
14* Xnïte 76 484 3oo4
c
i5 Thébaïne » 25o a52o
16* Thébaïne 5 190 2270
I
Pharaons Thébains.. 6 \ £° Q
*f *6 2o8a
i Pasteurs 6 )

18* Thélwïne 17 348 182a


iy« Thébaïne 6 194'. 1473
e Thébaïne
20 xa 178 '279
21' Tanite 7 x3o 11 01
2a e Kubaslik-.. ; 9 (*) iao (*) 971
a3« Tanite 4 (*) 89 (•) 85
a4 c Saïte. . v x 4; 76a
?5 e Éthiopienne 3 44 7x8
a6* Saïte 9 x5o (*) 674 (**)
a:' Persane 8 xao 5a4 (•**)
o. 8- Saïte 1 6 404
a y* Mendésienne 5 ar 398
3Ô° Sébennilique 3 38 ( # ) 377
3i* Persane 3 8 (*•) 339
Fin de son règne 33 x

El la conquête de FÉgyptc par Alexandre le Grand est fixée par les chronologisles à l'an
33a avant J. C.

(•) Selon l'Africain.


(") Selon l'Africain . Eusebe et le Canon des rois , conférés.
(••*) U conquête de l'Egypte par Cambyse est fuée à l'an Ji5 avant C J.

Quelques observations sont néces- rains avec datemanquent presque ab-


cessaires au sujet de ce tableau. solument. L'autre partie du tableau
1° Eu égard à la certitude histori- a un autre caractère : les monuments
que t ce tableau doit être divisé en deux existants donnent à la seizième dynas-
parties; Tune comprend les quinze tie et aux suivantes une suffisante au-
premières dynasties. Pour le nombre thenticité ; et si , tout en suivant Eu-
des rois et la durée de chacune, nous sèbe, nous avons quelquefois préféré
avons suivi Eusèbe ou l'Africain et , l'Africain ; si encore quelques-uns de-
il n'y a, pour le moment, aucun inté- nos nombres ne sont exactement ni
rêt discuter les différences qui se
a ceux d'Eusèbe ni ceux de l'Africain,
trouvent entre les chiffres de ces nom- c'est que des documents, que nous ne
bres ,
puisqu'il s'agit d'époques pour pouvons ni rapporter ni discuter ici
lesquelles les monuments contempo- nous ont induits soit à opter avec quel-

Digitized by Google
L'UNIVERS
que fondement entre l'un ou l'autre manuscrits sur papyrus, et des tables
de ces chronologistes, soit à ne suivre généalogiques des dynasties royales.
précisément aucun des deux. C'est dans le musée de Turin que
2 u Ce n'est qu'à compter de cette l'existence de ces manuscrits histori-
même seizième dynastie que la con- ques nous a été révélée pour la pre-
cordance des époques égyptiennes avec mière fois. Un fragment, portant le
des années juliennes antérieures à Père cartouche royal de Sésostris, attira
chrétienne est revêtue de quelque cer- d'abord l'attention de mon frère sur
titude. Selon nos aperçus, la vingt- des feuilles ou des'rouleaux dénués de
septième dynastie, qui fut celle des peintures; et, explorant aussitôt tous
Perses , commença avec l'an 524 avant les fragments semblables qu'il avait
J. C. , et Ton sait d'autre part que ce sous les yeux, il reconnut les noms de
fut en 525 que Cambyse, chef de cette presque tous les rois de la XVIII* et
dynastie, s'empara de l'Egypte. C'est de la XIX* dvnastie, ordinairement
aussi à l'an 331 que se rapporterait la accompagnés de dates en années , mois
conquête d'Alexandre, et elle est una- et jours, tirées du règne de chacun
nimement fixée à l'an 332 avant J. C. d'eux. C'étaient des débris de registres
Mais nous ne pouvons discuter ni de comptabilité des temples, où les re-
trancher ici cette différence d'une an- cettes et les dépenses étaient écrites à
née à l'égard de ces deux époques. Nous leur date précise, ou bien des actes
nous sommes donc tenus ici au texte isolés de l'autorité de ces rois, et les
même des auteurs, et nous nous con- uns les autres portaient en eux-
et
tenterons de foire remarquer qu'en pa- mêmes tous les caractères intrinsèques
reille matière , et pour des temps aussi et extrinsèques des plus authentiques
éloignés , la concordance, de nos sup- documents originaux de l'histoire. Les
putations, à une année près, avec des dates y avaient cette forme : « Dans
e e
événements d'une époque connue, et l'année 5 et le 5 jour du mois de
qui servent de contrôle à ces mêmes tobtjy de la direction du roi du peuple
supputations, est un résultat assez obéissant, soleil stabiliteur du monde
important, et qui peut lever un assez (prénom royal), Dieu, fils du soleil,
grand nombre de doutes, embarras- Thoulhmès (nom propre), » et ce roi
sants encore pour les annales de l'an- est le Thouthmosis-Mœrisde laXVIII"
tiquité. dynastie. On trouve des dates sem-
3° J'ai borné ce tableau des dy- blables des années 4 et 24 d'Améno-
nasties égyptiennes à la conquête d'A- phis II; 6, 10 et 24 de Rhamsès-Méïa-
lexandre , qui , avec les rois grecs moun, et l'abondance des papyrus
dont j'aidressé la chronologie dans historiques recueillis depuis en Égypte,
mes Annales des Laaides, ibrme la a multiplié ces dates, et en a procuré
trente -deuxième, à laquelle succéda un tel nombre, qu'il y a peu de règnes,
la puissance romaine; car là où il n'y depuis la XVT
dynastie, pour lesquels
a point d'incertitudes, il n'est pas be- on n'en ait recueilli une ou même
soin de discussions. plusieurs.
Tel est donc l'ouvrage célèbre de A ces faits isolés, mais importants,
Manéthon , l'une des plus précieuses le même examen en ajouta un plus
compositions qui nous soient parve- général et d'une autorité considérable
nues de l'antiquité, et qui tire un pour la certitude des annales de l'E-
lustre nouveau de son accord parfait gypte mon frère reconnut en effet et
:

avec les monuments authentiques et rassembla près de cinquante fragments


originaux que l'Egypte a récemment d'un autre manuscrit, et il y reconnut
restitués à nos vaux, et que nous de- un véritable canon royal, ou tableau
vons faire connaître aussi , comme chronologique des rois et des dynasties
de nouveaux fondements de sa chro- de l'Egypte, dont la forme rappelle
nologie. celui des Listes de Manéthon ; ces frag-
Ces monuments originaux sont des ments réunis contenaient les uoms de

Digitized by Google
PTE. 27!

plus de cent rois, et il paraissait ne ment cette seconde série de la Table


pas descendre au-dessous de ceux de la d'Abydos , qui n'est pas complète à sa
XIX* dynastie. droite, le monument étant détruit sur
Un très-grand nombre de stèles, soit ce coté.
funéraires, soit religieuses, dont les I*i ligne d'en haut contenait un égal
inscriptions contiennent des dates, nombre de cartouches différents; ils

sont des témoignages , toujours con- ont été, pour le plus grand nombre,
temporains des faits, qui ne sont pas détruits ou mutiles; notre planche re-
d'une moindre autorité pour l'histoire présente ce qui en reste, et on annonce
des temps anciens de J'Égypte. D'au- que notre honorable consul général en
tres monuments, d'une espèce et d'une Egypte, M. Mimant, a recueilli, dans
destination très-variées, portent aussi les ruines du monument, quatre car-
des d.ites d'époques oui ne le sont pas touches de plus, et qu'il a été assez heu-
moins, et l'on peut dire qu'il n'existe reux pour sauver d'une destruction
pour aucun autre peuple de l'antiquité, imminente ce vénérable livre des races
proportionnellement à sa durée, un royales égyptiennes, en le transpor-
pareil nombre de données de cet ordre tant à Pans.
et aussi utiles pour asseoir les bases, En l'état où nous le reproduisons, il
donner les développements les plus est constant pour tous qu'il se compo-
complets de ses annales, sans lacune et sait d'une série de noms royaux au
sans merveilleux. nombre de plus de quarante; et comme
Enfla, des tableaux généalogiques celui de Sésostris y est écrit le dernier,
des races royales existent encore dans immédiatement après celui de son pré-
des monuments publics du premier décesseur, nommé aussi dans l'inscrip-
ordre, et le plus célèbre de tous est tion verticale qui encadre cette liste,
celui qui occupe, sculpté en bas-relief, il en faut conclure aussi que ce tableau

la paroi d'une des salles du temple a été dressé sous le règne de Sésostris,
creusé dans le rocher, au nord de la et que les noms qui précèdent le sien
ville d'Abydos. Ce bas-relief est repro- sont ceux des rois qui le précédèrent
duit sur notre planche 47. aussi sur le trône.
Il se compose de trois séries hori- La preuve peut en être facilement
zontales de cartouches royaux, placés donnée.
de gauche à droite. La série d'en bas Après les deux cartouches, le nom
est composée de dix-huit cartouches, propre et le prénom royal de Hham-
formant neuf groupes de deux cartou- sès II (en tete de la ligne intermé-
ches différents, qui sont le nom propre diaire), on n'a inscritdans celte Table
et le prénom royal de Sésostris neuf des règnes que les cartouches prénoms
fois répétés; ce sont les mêmes qui se des autres princes; les noms propres
retrouvent sur les deux inscriptions ne s'y lisent pas : on peut donc con-
latérales de trois faces de l'obélisque cevoir quelques doutes sur l'ordre
de Paris, et sur les trois inscriptions même dans lequel ces prénoms y sont
de la face qui est tournée vers le palais placés.
des députés. Mais les monuments qui, à l'égard
La ligne intermédiaire d'Abydos des cartouches prénoms de la ligne in-
commence par un cartouche nom pro- termédiaire, à la droite du nom de
pre^ qui se lit Amon-Mal-Rhcm&ès. Rhamsès II, contiennent à la fois et le
suivi d'un cartouche prénom, soleil même prénom exprimé par les mêmes
gardien de vérité ; ce sont ceux du signes idéographiques, et le nom pro-
prédécesseur même de Sésostris, de pre composé de signes phonétiques,
Rhamscs II , qui avait commencé l'obé- sont très-nombreux. On a donc pu
lisque de Paris, et ses deux cartou- placer ces noms propres à côté de ces
ches s'y lisent en effet dans les inscrip- prénoms; et, en y conservant l'ordre
tions médiates de trois de ses faces. dans lequel ils sont inscrits dans la
Seize autres cartouches différents for- Table, on aura le nom propre des rois

Digitized by Go
L'UNIVERS.
pharaons, prédécesseurs du roi Scsos- toutes les cités, et même de moindres
tris dans Tordre même où ils sont ins-
, lieux de TÉgypte et de la ÎVubie égyp-
crits dans les Listes de Manéthon. tienne.
La Table d'Abydos contenait donc Les éléments de la chronologie égyp-
une série de plus de quarante rois, tienne se retrouvent donc revêtus d'ûne
classés dans l'ordre même de leur rè- évidente authenticité dans les listes de
gne; elle est conforme aux Listes de la Vieille Chronique, dans les Listes de
Manéthon en tous les points dont Manéthon dans ses manuscrits de
, tout
d'autres monuments ont permis de ordre et d'époques diverses, le Canon
faire la comparaison ; enfin, cette Table royal sur papyrus du musée de Turin,
a été dressée du temps même de Sesos- la Table royale d'Abvdos, les tables
tris , au seizième siècle avant l'ère chré- analogues de Carnak et des tombeaux
tienne. Quel est le peuple, ancien ou de la Thébaïde; dans les dates nom-
moderne, dont les annales primitives breuses oui se lisent sur les stèles, les
sont fondées sur des documents d'une temples, les palais, sur les monuments
telle authenticité? isolés de tout ordre et en toute ma-
La Table d'Abvdos nous offre donc, tière : et tous ces éléments, infiniment
dans un ordre admirable pour ses con- variés d'époque et d'objet, concourec'
séquences historiques, la série, dans unanimement à composer, à démontre
Tordre de leur succession, des rois et à confirmer un seul et même sys-
prédécesseurs de Sésostris; d'abord tème chronologique pour Thistoirede
son frère Khamsès II (ligne intermé- l'antique Egypte; système qui consiste
diaire), et les dix rois qui, avant lui, dans la liste de ses rois -rangés dans
appartinrent à la XVIII e dynastie; en- une série de dynasties successives,
suite (toujours de çauche a droite) les entre lesquelles se partage inégalement,
e
six rois pharaons île la XVII ; la la- mais d'après un même principe, et par
cune qui suit contenait les rois de la des computs naturels, par des calculs
e
XVI ; la ligne supérieure désigne les uniformément employés dans les an-
dynasties antérieures; et, pour un cer- nales vraies de tous les peuples connus,
tain nombre de rois des dynasties an- toute la durée de celles de Tempire
térieures à la XVIIT,
nous est îl égyptien , depuis sa fondation jusqu'à
parvenu des monuments isolés dont son abaissement au rang de simple
Tintérêt est parfois augmenté par des province romaine.
dates. Avec une telle abondance de docu-
Ce n'est pas tout : de semblables ments, on appelait avec ardeur la lu-
listes royales, moins étendues, se mière qui devait éclairer et révéler la
trouvent dans d'autres monuments pu- durée et les périodes successives des
blics, dans des temples du premier temps qu'ils embrassent; il fallait sur-
ordre, dans les palais de la vieille Thè- tout y découvrir des synchronisme*
bes; et ces listes diverses, où le nom certains avec les annales des peuples
de Ménès, le fondateur de la monarchie qui existèrent en même temps, et. par
égyptienne, est inscrit le premier de cet accord , fortifier la confiance dans
tous, non-seulement sont parfaitement les annales de TÉgypte et celtes de ses
identiques avec elles-mêmes et avec la contemporains.
grande Table d'Abvdos, mais encore Les deux points extrêmes de cette
elles en complètent la lacune pour la immense échelle des temps historiques
XV I* dynastie et le commencement étant connus, et celui qui est le plus
de la
e
XV
; et ces vénérables archives près de nous avec une pleine certitude,
de ses antiques dynasties, l'Egypte les dès lors l'appréciation des temps inter-
avait consacrées èt accréditées a la fois, médiaires n'était plus une insoluble
en les déposant dans les sanctuaires difficulté; et, en plaçant la durée des
des dieux, et en leur donnant une pu- dynasties antérieures à celle des Perses
blicité facilement contrôlée par les au-dessus de Tau 525 avant Tère chré-
monuments nombreux qui ornaient tienne, époque précise de l'invasion

Digitized by Google
* - « »
« «
• • •• • <• * «

<

» » • »

Digitized by Google
BOYPTE
ÉGYPTÉ.
de l'Égypte par Cambyse qui fut le que la moins crédule ne peut rejeter
chef de cette dynastie, on trouvait la l'imposante autorité.
place successive de toutes les dynasties Si l'on remonte aux temps de la
antérieures à ce conquérant, et, par XVIII dynastie, on la voit s'établir
suite de ces premières données, la après l'expulsion des Pasteurs qui com-
place de chacun des rois de chacune posèrent la XV II*, conquérants étran-
de ces dynasties. Mais, pour réaliser gers, Scythes très-vraisemblablement,
ce précieux résultat, on devait désirer qui détruisirent tant qu'ils le purent
aussi , comme moyen de critique et de I ordre politique auquel l'Égypte devait

comparaison, quelques faits d'une cer- déjà des siècles de prospérité, régnant
titude évidente et intime qui se pla-
, par la force, réunis en hordes farou-
ceraient comme des jalons lumineux ches, ignorantes de toute culture, in-
dans ce long espace d'années, pour capables de tout ordre, et vrais fléaux
diriger et raffermir en même temps la de toute. civilisation. Venus par l'Est,
curiosité et les recherches de l'histo- ils se rendirent maîtres de la basse
rien. Ces jalons n'ont pas manqué à ses ÉÇypte et de l'Égypte moyenne; ils s'é-
justes désirs; le mathématicien Théon tablirent dans une ville fortifiée nom-
en a laissé un fort évident, en un livre mée Aouaris, et se donnèrent un chef
de ses commentaires sur l'Almageste qui eut cinq successeurs; le troisiè-
de Ptolémée : il résulte, en effet, d'un me se nommait Apophis. C'est de ce
passage plusieurs fois publié, que le chef, disent unanimement les chroni-
renouvellement d'une période sothia- ueurs chrétiens, que Joseph, lils de
que s'opéra sous le règne d'un roi acob, fut le premier ministre; et Jo-
que Théon nomme Ménophrès, et que seph, en effet, élève de la civilisation
ce renouvellement fut celui qui arriva particulière aux tribus arabes, devait
l'an 1322 avant l'ère chrétienne; or, paraître un habile administrateur aux
dans les listes des rois d'Égypte, dres- yeux d'un chef de hordes qui n'étaient
sées, d'après Manéthon, sur les don- pas même parvenues à la sociabilité
nées qui précèdent, le règne d'/tméno- de l'état pastoral: et ce n'étaitque sous
phis, troisième roi de la XIX e dynas- un tel chef en Egypte qu'on pouvait
tie, renferme en effet dans sa durée trouver un pareil ministre.
cette même année 1322. Or, dans notre tableau des dynasties
Pour une époque moins ancienne, de Manéthon, la XVI', contemporaine
la Bible rapporte qu'un roi d'Égypte, d'Abraham, et la XVIP, qui fut celle
qu'elle nomme Schéchôfc, attaqua et des Pasteurs dont Joseph fut un des •

prit Jérusalem d'où il enleva les bou- ministres, sont en parfaite concor-
cliers d'or de Salomon , et que cela ar- dance avec ce que la chronologie sacrée
riva dans la cinquième année du règne rapporte encore des deux patriarches
e
de Roboam : or, on voit parmi les et avec l'époque de la XVIII dynastie
sculptures du palais de Karnac à Thè- pharaonique, dont la restauration est
bes, la représentation des conquêtes assez clairement indiquée par ces mots
du pharaon Schéchonk ( le Sésonchis de la Bible : Et tune surrexit rex novus
des listes de Manéthon), dans des con- qui ignorabat Joseph.
trées diverses, limitrophes de l'Égypte; Il est vrai qu'il existe contre ces ré-

il conduit aux pieds de la trimie de sultats une objection grave par elle-
Thèbes les chefs des nations qu'il a vain- même et par l'autorité du savant qui
cues; parmi eux est figuré le royau- la produit; la voici : Les Pasteurs dé-
me de Juda, peut-être Roboam lui- truisirent tous les monuments de la
même (voy. pl. 76) : et notre liste civilisation et des arts de l'Égypte,
chronologique des rois d'Égypte nous dans la basse Égypte surtout, leur sé-
montre le pharaon Schéchonk régnant jour habituel; il est certain aussi que
.l'époque même où les listes de la les monuments antérieurs à la XVIII*
'
onologie sacrée ont inscrit Roboam ; dvnastie, subsistants à leur place, sont
niveau synchronisme, dont la criti- d*une extrême rareté; cependant on
18* Livraison. (Égtpte.) 18

Digitized by Google
,

274 L'UNIVERS.
voit encore à Héliopolis, sur son pié- mentionne ces ravages des Pasteurs |

destal , un obélisque qui porte le leur durée; l'histoire écrite mentu


r
nom du roi Osostasen l* , l'un des aussi les Pharaons contemporains,
princes de la XVI* dynastie (pl. 74); un certain nombre de monuments
et puisque ce monument est encore core existants prouvent invinciblei
sur pied, on peut en conclure que l'in- le succès de leurs efforts pour maint
vasion des Pasteurs fut antérieure à nir, sur un point quelconque du
cette XVI* dvnastie. On trouve, en égyptien, l'antique autorite et les
effet, un ancien texte qui paraît rai>- tiques institutions nationales. Ces
fiorter cette invasion aux temps de numents portent des dates, et
aXV e
dynastie. Mais il est à observer instruisent de la durée du règne
1
que les meilleurs critiques s'accordent quelques-uns de ces Pharaons. Ils n
unanimement à considérer la dynastie levèrent pas des édifices aux dieux
des Pasteurs comme contemporaine de l'rtgypte, à Thèbes ni ailleurs, pai
e
la XVII des Pharaons ; que l'obélisque que des étrangers avaient envahi tiè
d'Héliopolisestleseulmonumententier basse et la moyenne Égypte; que toutes]
de cette XVI e dynastie, qui subsiste en- les ressources de ces Pharaons
core; qu'on n'en trouve en Égypte que tournées vers l'expulsion de ce
e
très-peu de la XVII ; etgue, pour expli- res : il faut donc laisser à la XV
quercettecirconstance absolument uni- dynastie les Pasteurs, qui ne fui
que, cette objection unique aussi, tirée définitivement chassés que par le pi
e
de l'obélisque d'Héliopolis, il suffira de mier roi de la XVIII Ce triompl
.

Eenscr que cet obélisque, renversé d'a- mémorable est fixé, par l'autorité des
ord et conservé dans les ruines de
, meilleurs documents, vers l'an 1821
la ville où il fut primitivement érigé, avant 1ère chrétienne, et cette date est
à Héliopolis ou toute autre, fut ensuite comme un jalon intermédiaire auquel
réédifié à Héliopolis ,
après le rétablisse- on peut avec certitude rapporter les
ment de l'ancienne autorité en Egyp- dates antérieures et les dates posté-
te. C'est ainsi qu'on voit encore à rieures de l'histoirede l'Égypte; elleest
Alexandrie, villetoute grecque, un comme la clef de sa chronologie , et le
obélisque qui avait été exécuté dans point initial ou médiat d'une échelle
une ville toute égyptienne, au nom du sur laquelle se placeront comme d'eux*
roi Moeris , antérieur de douze siècles à mêmes tous les événements connus et
Alexandre, et cet obélisque ne put être à connaître des annales égyptiennes.
élevé à Alexandrie, où il est aujour- On ne saurait raisonnablement exiger
d'hui placé, que dans des temps bien plus de certitudes, et il serait à désirer,
postérieurs. pour celles de l'histoire ancienne en gé-
Un autre fait d'une haute autorité néral , et même pour les annales des
peut aussi corroborer notre opinion: premiers siècles des temps modernes
comme simples maté-
c'est l'existence, qu'une égale réunion de documents
riaux, dans les ruines des monuments authentiques vînt jeter de semblables
actuels de Thèbes élevés par des rois lumières sur leurs trop nombreuses
de la XVIII* dynastie, de débris sculp- obscurités.
tés provenant des édifices de la XVI e L'ancienne Égypte jouira donc, à
dynastie et des dynasties antérieures, juste titre, des avantages qu'elle atten-
que détruisirent ces mêmes Pasteurs. dait de l'attention religieuse avec la-
Les six rois de cette origine sont ins- quelle elle faisait recueillir les faits
e
crits dans la XVII dynastie; mais il importants de son histoire, du zèie
e
exista synchroniquement une XVII dy- éclairé et persévérant de ses annalistes
nastie de Pharaons qui s'étaient retirés à inscrire ces faits dans les registres dé-
en haute Égypte et vers les cotes de la poses aux archives des temples, à les
mer Rouge , fuyant devant les dépré- graver sur les édifices publics. Les sa-
dations commises par ces étrangers, vants de la Grèce virent tous ces docu-
maîtres de Memphis. L'histoire écrite ments historiuues ; Mauethon les coin-

Digitized by Google
ÉGYPTK. Î75
puisa , les traduisit en langue grecque. pour compléter cette faible esquisse
De ces mêmes documents, quelques- d'un si grand sujet , à retracer un pré-
uns subsistent encore, et nous les cis historique des principaux événe-
avons aussi étudiés et traduits dans les ments, intérieurs et extérieurs, qui
idiomes modernes. Une foule de mo- figurent dans les annales égyptiennes,
numents isoles corroborent de leur durant l'intervalle borné entre l'inva-
naïf témoignage les témoignaçes de ces sion de l'Égypte par les Arabes , sous la
mêmes monuments publics la chrono-
: conduite d'Omar second , successeur de
; togie des temps historiques de l'Égypte Mahomet leur prophète, et les plus an-
i est donc fondée sur des certitudes , et ciennes époques mentionnées pour K- I"

nous venons d'en résumer ici l'exposé gypte dans les ouvrages des hommes.
très-conséquent. Nous pouvons donc Pour la première fois on trouvera
dès a présent, essayer de présenter, dans ce précis le résumé des témoigna-
dressé dans Tordre même des temps, un ges que renferment et les écrits authen-
tableau sommaire , un précis historique tiques qui nous sont restésde l'antiquité
des événements politiques ou militai- classique, et les monuments égyptiens
res, de l'état des principales institu- encore subsistants, revêtus de cette
tions publiques de l'origine et de l'épo-
, inaltérable autorité que les siècles ont
que des plus remarquables productions consacrée, et que leur étude impartiale
des arts en Egypte, depuis les temps confirme de plus en plus. Ces monu-
les plus anciens jusqu'à la Un de la do- ments publics, temples ou palais, ontex-
mination romaine en Orient. Tel sera cité au plus haut degré l'admiration de
le sujet du paragraphe suivant de cet tous les hommes qui les ont vus; ils
sont couverts sur toutes leurs parois
de tableaux sculptés et d'inscriptions
S XX. PRÉCIS HISTORIQUE. retraçant en un grave langage les traits
divers de l'histoire des rois qui les éle-
Ona exposé sommairement, dans vèrent aux dieux ou les édifièrent pour
les paragraphes qui précèdent celui-ci, y faire leur demeure et ces sculptures
;

les opinions et les usages de la nation contiennent une foule de noms et de


égyptienne en ce qui concerne ses prin- claies. D'autres ouvrages moins consi-
cipales institutions; ce qu'elle pensa de dérables, également authentiques, ori-
ses origines de son antiquité , et de la
, ginaux, non moins dignes de l'atten-
terre qu'elle habita ; de Dieu, et com- tive confiance de l'historien, ajoutent
ment elle l'adora; de l'univers, et com- à cette première série de données, d'au-
ment elle le conuut ; d'elle-même, enfin, tres renseignements égaux en nombre
et comment elle s'organisa, se nourrit, comme en autorité, et les uns- et les
s'habilla, régla sa police et ses lois autres concourent à constituer cet en-
donna des préceptes etdes typesaux arts semble de notions historiques qui don-
divers qu'elle cultiva; comment elle les nent aux annales d'un peuple toute
appropria au culte des dieux a l'orne-
, leur valeur, en y répandant à la fois la
ment des cités, à tous les établisse- lumière et la certitude. Celles de l'E-
ments d'utilité publique, tels que les gypte en retireront inévitablement cet
veut une civilisation successivement avantage; et pour une grande partie
perfectionnée par les conseils d'une lon- de ces annales, ces mêmes monuments
gue expérience, et par les méditations se trouvent en un accord trop cons-
habituelles de ce peuple sage , réfléchi, tant avec les listes chronologiques des
inoral et laborieux. On a également es- dynasties égyptiennes de Manéthon
sayé de donner une idée précise et com- pour que l'on veuille, pour que l'on
plète de la littérature de l'ancienne puisse séparer ou isoler des témoigna-
Egypte, de l'origine et de la eonstitu- ges d'un tel ordre; car nous croyons
tion de sa langue, de celle de sonécri- a la véracité de ces listes d'hommes,
ture, agent général de la pensée par- comme â l'autorité des autres monu-
tout où cet art fut connu. Il nous reste, ments qui n'ont rien non plus de sur-
18.

Digitized by Google
276 L'UNIVERS.
humain. Le lecteur sait donc déjà que régnèrent sur elle 135 ans, auxquels i

nous prendrons pour guides dans ce faut ajouter le temps des diverses ré
précis historique les listes de Mané- voltes des Égyptiens, qui ne pur
thon et les monuments originaux. tolérer ni la dureté des gouverne
Pour un long intervalle de temps ils établis par les rois de Perse, ni V
se corroborent réciproquement ; quand piété que les conquérants manifestai
on s*enfonce plus avant dans les an- envers les dieux du pays; enfin , les M
ciennes époques , Manéthon est seul cédoniens tinrent le sceptre en Êaypti
car la barbarie a aussi ses antiquités pendant 270 ans. Dans tout le reste d<
dans l'histoire de ses œuvres ; mais temps, le pays n'eut pour souverain!
nous recueillerons religieusement tous que des rois indigènes l'on en compu
:

les indices que pourront fournir, pour 470 et 5 reines, l^es prêtres conser
les anciens temps . les monuments de vaient dans des livres sacres , qui
tout âge , même les plus modestes. transmettaient à leurs successeurs,
Diodorede Sicile a tracé en quelques annales historiques de tous ces rois
lignes un résumé assez exact de l'his- remontant jusqu'aux époques les plus
toire générale de l'Égypte, et il est réculées. On y trouvait consigné que lle
remarquable que ce résumé peut , à avait été la puissance de chacun de ces
quelques différences numériques près, souverains, quel était son caractère,
convenir a notre propre travail à nos , ce qu'il avait fait pendant la durée iU>
propres idées, comme si Diodore avait son règne; mais pour nous, ajoute Dio-
acquis par son voyage en Égypte la dore de Sicile, il serait superflu et trop
science ou la conviction de la concor- long de donner des uns et des autres
dance des monuments avec Manéthon. une histoire séparée qui embrasserai
Et comme pour prévenir toute mé- nécessairement une foule d'objets inu-
prise à ce sujet, Diodore a exactement tiles: nous essayerons donc seulement
séparé la cosmogonie des Égyptiens, d'exposer en abrégé les faits principaux
dans laquelle figurent leurs dieux et et dignes d'être conservés dans la mé-
leurs héros , de leurs annales qui ne moire des hommes. »
s'occupent que des hommes, en un Cette dernière réflexion de Diodore
mot, leur mythologie de leur histoire. ne peut manquer d'exciter quelques re-
e
• Il s'exprime ainsi ( liv. I, 2 partie, grets; malheureusement on n'en est
chap. 44) : « Suivant leur mvthologie, plus, de notre temps, en ce qui con-
quelques Égyptiens prétendent qu'en cerne les annales de l'antique Égypte,
premier lieuses dieux et les héros ré- à la nécessité d'abréger, car "non
gnèrent en Épypte pendant un espace seulement l'ensemble des documents
de temps qu'ils n'estiment pas beau- connus jusqu'à ce jour ne contient rien
coup au-dessous de dix-huit mille ans, de superflu ni de trop long ; il y reste
et que le dernier des dieux qui fut roi au contraire d'immeuses lacunes, et
est Horus, fils d'Isis. les écrivains modernes en sont réduits
« Depuis,pays a été gouverné par
le aux abrégés d'Hérodote, de Manéthon,
deshommesqui régnèrent un peu moins de Diodore, aux abrégés même des
de cinq mille ans, jusqu'à la 180' olym- monuments, puisqu'ils sont tous ou
piade ( 60 ans avant l'ère chrétienne ). mutilés ou détruits.
Parmi cette longue série de souverains, Parmi les documents historiques, le
dont le plus grand nombre était indi- tableau des dynasties égyptiennes est ce-
gène, l'on en trouve à peine quelques- lui qui nous reste le plus entier, du
uns d'origine éthiopienne, perse ou moins par rapport au système général
macédonienne, et l'on compte seule- qui présida à sa rédaction. Cette liste,
ment quatre rois éthiopiens qui n'ont par les noms des rois qui s'y succèdent
pas même
régné de suite, mais de loin dans l'ordre du temps, et par l'indica-
â loin, un peu moins de 36 ans. De- tion du nombre des années du règne de
puis Cambyse, qui soumit par les ar- chaque prince ou de chaque dynastie,
mes la nation égyptienne, les Perses forme une véritable échelle chrbuologi-

Digitized by Google
EGYPTE 277

3ue sur laquelle les noms et les faits ont de la table royale du Memnonium de
'avance leur place marquée : suivons Thèbes , table sculptée dans ce temple
ce fil conducteur dans 1 ensemble des durant le règne de Sésostris; imitint
temps et des événements que nous en- en cela tant d'autres rois égyptiens
treprenons de raconter. qui, pour honorer leurs ancêtres par
« Après le règne des demi-dieux, dit un culte ou des offrandes, rappelaient
Alanéthon, et celui des Mânes, vint la d'abord dans ces tableaux historiques
première dynastie , composée de huit leurs plus proches aïeux, et inscrivaient
rois qui régnèrent ensemble pendant toujours Menés en téte de ces listes,
252 ans. Menés fut le premier de ces plus ou moins nombreuses, de leurs
rois il était originaire
: de This; il pères et prédécesseurs. La table royale
porta les armes égyptiennes dans les sculptée dans la chambre des rois du
pays étrangers et se rendit illustre; il palais de Karnac à Thèbes, ne renferme
rut enlevé par un hippopotame, après pas moins de 60 ligures de rois égyp-
un règne de 62 ans. » tiens, accompagnées de leurs noms; ils
Menés, chef de la caste militaire, reçoivent les offrandes et les adorations
opéra heureusement la révolution qui de Thouthmosis III (Mœris), leur suc-
substitua le gouvernement civil à la cesseur vers l'an 1700 avant l'ère chré-
théocratie; il fut revêtu le premier du tienne. Enlin, le célèbre canon chrono-
titre de roi ; et de ce nouvel ordre de logique des dynasties égyptiennes, écrit
choses, sortit le gouvernement royal sur papyrus en caractères hiératiques,
héréditaire. Quoique occupé de con- composé vers le XV
siècle avant notre
quétes-au dehors par la guerre Menés
, ère , appartenant au musée de Tu-
et
(ou plutôt Mknki d';i près les monu- rin , s'ouvre par le nom même du roi
ments ) ne négligea pas les établisse- Ménès, en ces termes Stn Mnei nphr
:

ments delà paix. Il jeta les fondements nnecooulniou.... I*e roi Ménès exerça
de Memphis, prévoyant avec raison les attributions royales. ... années. ( Ma-
que la grande Thèbes ville toute sa-
, nuscrits de ChampoUlon le jeune. )
cerdotale, pourrait demeurer sous des A Ménès succéda son fils Athothis
influences plus puissantes que celles ( Athôth ) , qui fit bâtir le palais des
du gouvernement nouveau. Il fortifia rois à Memphis, cultiva les sciences
et garantit la nouvelle ville par des physiques, écrivit un ouvrage d'anato-
chaussées, redressa le coude du Nil mie, et mourut après 27 ans de règne.
pour le porter plus au midi, fit creu- L'histoire ne mentionne pas de ce
ser un lac pour la défendre au nord prince d'autre action mémorable. Six
et éleva le temple de Phtha, édifice autres lui succédèrent de père en fils :
célèbre a toutes les époques de la mo- Cencènes, qui régna 31 ans; Ouané-
narchie égyptienne. Sous son règne, le phis, dont le règne dura 42 ans, et fut
luxe, jusque-là réservé pour les demeu- marqué par une famine qui désola l'E-
res et le culte des dieux, s'introduisit gypte; Ousaphès et Niébaïs, qui oc-
daus les habitations et les usages des cupèrent le trône sans lustre et sans
hommes; moyen d'un effet puissant gloire, s'il faut en juger par le silence
pour adoucir les mœurs de la nation, des historiens, le premier pendant 20
exciter son génie, la tortiller et l'enri- ans, le second pendant 26; Mempsès
chir; circonstance toutefois qui nuisit (ou Simempsis), qui régna 18 ans,
à la mémoire de Méuès dans l'estime période féconde en grands crimes , et
de la postérité. pendant laquelle une peste cruelle ra-
Les monuments ont cependant con- vagea PÉgypte; enlin, Oubienthis ou
serve le nom du fondateur de la mo- Vibithis qui régna 26 ans, et fut le der-
narchie égyptienne, et c'est à ce titre nier des rois de la première dynastie.
qu'il se trouve inscrit le premier dans La seconde fut composée de neuf
les listes royales qu'on voit gravées princes, d'origine thinite-thébaine,
dans divers temples de l'Ésypte encore comme ceux de la première, et elle ré-
subsistants. Mènes est le premier nom gna en Egypte pendant 297 ans. Le

Digitized by Google
278 L'UNIVERS.
premier de ses roîs porta le nom de très-habile en médecine, et c'est pour
Bôchos, et régna 38 ans. Durant ce cela que les Égyptiens le considérè-
règne, un gouffre s'ouvrit auprès de rent comme leur Esculape. On lui at-
Bubaste, et occasionna la mort de plu- tribue aussi l'art de tailler les pierres
sieurs personnes. A Bôchos succéda pour la construction des édifices ; tra-
Choùs qui régna 39 ans et régla le
,
dition incomplète sans doute, puisque
culte des trois animaux sacrés. Apis à Thèbes et Memnhis existaient avant le
Memphis, Menévis à Héliopolis, et le règne de Sésortnos ; et c'est peut-être
bouc à Mendès. plus légitimement qu'on pourrait lui
Biophis, qui régna 47 ans, fut le faire honneur de l'application de la scie
troisième roi de la seconde dynastie. à la coupe des pierres employées dans
C'est à lui que l'histoire fait honneur les édifices, la figure de ce précieux
d'une loi nouvelle en Égypte , celle qui instrument existant sans nul doute sur
appela les femmes à la surcession de les plus anciens monuments de l'E-
l'autorité royale; institution fonda- gypte. Ce fut enfin ce même roi , di-
mentale, propre à tout État où la loi sent les chroniques , qui s'appliqua à
est toute-puissante, le pouvoir pondéré donner aux signes de l'écriture des
pnr l'influence des castes ou les privilé- formes exactes et élégantes; contri-
gesdes corps politiques, et que l'Egypte buant ainsi par ses propres études à
conserva jusqu'aux derniers moments perfectionner les institutions publi-
de son existence sociale. ques, à faciliter dans sa patrie le pro-
L'histoire nomme à peine les trois grès de la civilisation.
successeurs de Biophis, Tlas, Sethi- Les six successeurs de Sésorthos
nès , Chœrès ; elle se borne à dire qu'ils sont nommés dans les annales égyp-
ne firent rien de remarquable; juge- tiennes; mais ils régnèrent sans éclat :

ment dont le laconisme augmente en- Tyris 7 ans, Mésochris 17 ans, Sou-
core la sévérité. phis 16 ans, Tosertasis 19 ans, Acnés
Après eux, Népherehérès régna 25 et Séphuris 72 ans à tous deux , et
ans; et si la tradition recueillie dans Kerphérès 26 ans.
les annales publiques ne cache pas quel* Ce fut cependant par des rois de
ue allusion , il raudra croire que pen- cette dynastie que furent bâties les
3 ant onze jours les eaux du Nil furent pyramides de Sakkarah et de Dah-
mêlées de miel. schour; elles sont pour nous les plus
Le règne suivant, celui de Séso- anciens monuments sortis de la main
chris , qui dura 48 ans , fut marqué des hommes, dans le monde connu.
par un autre prodige : le roi était d'une La quatrième dynastie fut remar-
corpulence extraordinaire; il avait cinq quable par le nombre des princes qui
coudées de haut (2 mètres et demi) et la composèrent et la longue durée de
trois coudées de large. Son succes- leurs règnes. Originaire de Memphis,
seur se nomma Chénérès ; ce nom est elle fournit dix-sept rois qui occupè-
tout ce qui nous reste de son histoire. rent trône pendant 448 ans.
le
e
Il fut le dernier roi de la II dynastie. Le premier de cette liste fut nommé
La troisième dynastie fut originaire 8ouphi.il est mentionné dans les annales
de Memphis ; composée de huit rois, égyptiennes comme un prince impie et
eHe occupa le trône pendant 197 ans. orgueilleux ; revenu toutefois au senti-
Néchérophès en ouvre la liste, et on ment de ses devoirs, il écrivit sur les
attribue 28 ans à son règne. Il fut choses sacrées un livre que les Égyp-
troublé par la guerre : les Libyens at- tiens eurent eu grande estime. Apres
taquèrent l'Égypte ; mais, effravés par un règne de 63 ans, il eut pour pre-
une grandeur en apparence extraordi- mier successeur Sensaouphi, qui ré-
naire de la lune, ils se soumirent
Sia aussi 66 ans, et après celui-ci,
d'eux-mêmes et rentrèrent dans Tor- anchérès, dont le règne fut encore de
dre. Néchérophès eut pour successeur 63 ans. On nomme aussi Sôris, Ra-
bcsorthos, qui régna 29 ans; il fut toeses t Bi< hères > Seberchères et

Digitized by Google
• • # *
• *
• • » * * +
• - «
• • » •
• - •

• • •
<
• m *

« « • » «

» * ,
I
* * * *
« • ê t

m * * m
EGYPTE

Google
• h » •

- » »

• » • • •

<

' • 6

te »

Digitized by Google
EGYPTE JE GTPTEN
.U
I

Jàé

M e mp hi «

Digitized by Google
KGYPTE 279

ïampntis , parmi successeurs ae


les et la chaîne libyque, et du spbinx , qui
ces trois princes; mais il y a de Tin- s'élève au-dessus du de la même
sol
certitude sur la vérité de ces noms, plaine. Dans la planche 39, ces pvra-
sur leur ordre de succession; et ces mides surgissent à l'horizon au mi-
incertitudes naissent du silence des lieu des palmiers, des Turcs et des
abrértateurs de Manéthon , dont un ruines de l'antique capitale ; la plan-
seul â mentionné ces cinq derniers che 60 offre la véritable physionomie
noms dans la liste abrégée de cette de la grande pyramide et du sphinx
quatrième dynastie. qui l'avoisine. Enfin l'entrée et I inté-
Les pyramides de Ghizé furent édi- rieur de celte même pyramide sont
fices par les trois premiers rcis de géométriquement figurés sur notre
cette dynastie, et leur servirent de planche 75. Quelques mots encore,
tombeau. Autour de ces immenses consacrés à sa description , feront
monuments s'élèvent d'autres pyrami- connaître complètement ce merveil-
des de moindres proportions , et des leux monument.
tombeaux construits en grandes pier- La première assise de pierre repose
res qui ont servi de sépulture aux prin- sur le rocher même qui tonne la plai-
ces de la famille de ces anciens rbis. ne , et cette assise y est placée dans
Il v a peu de distance entre les py- une ligne parfaitement dressée et creu-
ramides de Sakkarah au nord et celles sée verticalement de sept à huit pouces.
de Ghizé au sud , et elle est occupée Au-dessous de cette première assise
par le désert. encastrée , le rocher est taillé en socle
A Sakkarah est l'antique cimetière régulier, ayant cinq pieds huit pouces
de Memphis , appelé la Plaine des mo- et demi de hauteur. Le rocher qui
mie* , parsemée de pyramides et de fournît le socle, est naturellement
tombeaux. Son aspect est aujourd'bui élevé de près de cent pieds au-dessus
triste et affligeant. La rapacité des des plus grandes eaux du Nil, et il
fouilleurs y a répandu la dévastation; forme un solide dont on n'a pas trouvé
les tombeaux ornés de sculptures sont la base à deux cents pieds de profon-
ravagés ; le sol est couvert de monti- deur. A sa surface, c'est un désert
cules de sable produits par les boule- privé de toute espèce de végétation :
versements, et il est tout parsemé l'homme ne s'y manifeste que par ses
d'ossements humains à découvert ossements impitoyablement exhumés
blanchis par le temps , restes des plus de leurs tombeaux.
vieilles générations. Au-dessus de la première assise en-
A Ghizé, sont les pyramides les castrée , on en compte deux cent deux
plus célèbres par leurs niasses; ces autres placées successivement en re-
merveilles ont besoin d'être étudiées traite, la supérieure sur l'inférieure,
de près pour être bien appréciées; el- d'environ neuf pouces et demi par pied
les semblent diminuer de hauteur à d'élévation mesure moyenne, et for-
,

mesure qu'on eu approche, et ce n'est mant autant de gradins. Ces deux cent
3u'en touchant les blocs de pierre trois gradins , au-dessus du socle qui
ont elles sont formées, qu'on acquiert les porte, donnent à la pyramide
une idée juste de leur masse et de pour hauteur verticale quatre cent
leur immensité. vingt-huit pieds trois pouces et quel-
Ici lecteur doit attendre la des-
le ques lignes (139 mètres 117 millim.);
cription des pyramides; nous ne par- mais, dans l'état actuel du monument,
lerons toutefois que de la plus grande, on voit que deux assises au moins ont
de celle de Ghize, celle de toutes oui été abattues à son sommet : en tenant
a été la plus étudiée et qui est la plus compte de cette destruction et du so-
connue. cle pris dans le rocher, la hauteur to-
Notre planche 10 donne l'aspect gé- tale et primitive de la grande pyra-
néral des pyramides des environs de mide devait être de quatre cent cin-
Memphis , entre la rive gauche du Nil quante pieds moins quelques pouces ;

Digitized by Google
280 L'UNIVERS.
c'est plus de deux fois la hauteur des ainsi liée de toute sa hauteur : aussi
tours de l'église Notre-Dame de Paris. n'a-t-on remarque sur aucun point ni
La base du monument a été mesu- le plus léger écart ni la moindre dé-
rée à la ligne d'encastrement de la gradation.
f>remière assise, et elle a été reconnue Selon des traditions d'époques di-
ongue de sept cent seize ^ieds et demi verses, la grande pyramide aurait été
(232 mètres 747 millimètres) : il en revêtue extérieurement de manière
résulte un volume d'un million quatre 3ue les gradins étaient couverts par
cent quarante-quatre mille six cent es pierres en forme de prisme trian-
soixante-quatre toises cubes, en ne gulaire, qui remplissaient les vides de
tenant pas compte des vides peu con- chaque degré, et la surface de chaque
sidérables qui existent dans l'intérieur. côté de la pyramide était ainsi un plan
Les matériaux d'une si colossale incliné. Tel a été le dire d'Hérodote et
construction furent tirés des carrières de plusieurs autres écrivains qui ont
de Thorrah, sur la rive droite du Nil adopté son avis. Il parait même que
précisément en face de Memphis. Ces des fragments de granit de forme pris-
carrières dé calcaire blanc furent ex- matique, trouvés auprès d'une autre
ploitées du temps des Pharaons, des pyramide , servaient à appuyer cette
Perses , des Ptolémées , des Romains opinion. Mais les difficultés et le dé-
et des Arabes; de nombreuses ins- faut de solidité d'une telle construc-
criptions tracées durant ces époques tion, en ont fait rejeter l'idée par
.

diverses en rendent encore témoi- d'autres écrivains qui ont pensé que
gnage : les derniers voyageurs français le revêtement extérieur de la grande
en Egypte y ont découvert les noms fiyramide consistait seulement dans
d'Auguste, de Ptolémée, d'Achoris; 'emploi d'une pierre plus dure , plus
et deux stèles sculptées dans les deux égale, plus susceptible de recevoir un
carrières les plus vastes de toutes beau poli , que la pierre de la chaîne
leur ont appris que ces deux carrières Libyque, dont on s'est servi pour l'in-
furent ouvertes en l'année 22 du rè- térieur du monument. Enfin , comme
gne d'Amosis, le Pharaon prédéces- ila fallu niveler la plaine pour asseoir
seur de la dix-huitième dynastie, et la pyramide, on pense aussi que le
que les matériaux qui en furent ex- noyau du rocher , plus élevé en appro-
traits furent employés à la réparation chant du centre du monument, a seu-
des temples d'Apis, Phtha et Ammon lement été coupé pour s'ajuster aux
à Memphis. En examinant les pier- pierres du parement. Du reste, rien
res du parement des galeries et de la n'est plus variable que les renseigne-
chambre inférieure de la pyramide, ments sur les pyramides, qui sont con-
on est aussitôt convaincu que ces pier- signés dans les écrits des anciens, soit
res ont été en effet tirées des carrières sur leur origine, leur époque ou leur
de Thorrah et de Messarah , dans destination , soit sur la dépense qu'el-
la petite chaîne arabique nommée au- les occasionnèrent et les motifs qui
jourd'hui le Mokattam. portèrent les rois à les élever. Les
L'emploi de ces matériaux est re- auteurs de ces écrits en ont rapporté
marquable en ce qu'on reconnaît sans tout ce qu'ils pouvaient dire d'un
peine qu'il est difficile d'appareiller monument célèbre qui les frappait
avec plus d'exactitude, d'établir des d'admiration quand ils le visitaient,
lignes plus droites, et des joints plus mais dont ils ignoraient complète-
parfaits que ceux que présente la ment l'histoire, et dont ils ne pou-
construction intérieure de la grande vaient apprendre de leur temps que
pyramide. Chaque pierre des quatre les plus fabuleuses traditions. Les
arêtes est incrustée dans la suivante; écrivains orientaux , venus après les
la pierre inférieure, creusée de deux Grecs et les Latins , n'ont fait qu'en-
pouces, reçoit une saillie égale de la chérir sur leurs douteuses assertions.
pierre supérieure , et chaque arête est Nous n'entreprenons pas de les conci-

Digitized by Google
EGYPTE.
lier ; nous ne consignons ici que des qui a dix-sept pieds dix pouces de long
faits recueillis et authentiqués par le sur seize pieds un pouce de large. Elle
concours des plus exactes observations est vide.
et des opinions les plus dignes de con- En retournant à l'entrée du canal
fiance. horizontal on monte dans une nou-
,

La grande pyramide est exactement velle longue de cent vingt-


galerie,
orientée , chacun de ses quatre angles cinq pieds, et qui en a vingt-cinq de
fait face à l'un des quatre points car- hauteur et six et demi de largeur. De
dinaux ; ce n'est encore aujourd'hui chaque côté sont des banquettes de
qu'avec de grandes diflicultes qu'on vingt et un pouces sur dix-neuf de lar-
réussirait à tracer une méridienne ge. Vingt-huit trous, de douze pouces
d'une aussi grande étendue sans dé- sur six et demi de profondeur, ont été
vier; et de cette orientation de la pratiqués sur chaque banquette. Huit
grande pyramide on a tiré ce fait d une assises de pierre en encorbellement for-
haute importance pour l'histoire phy- ment les murs de cette galerie et dou-
sique du globe : c'est que depuis plu- aient l'aspect d'une voûte à son pla-
sieurs milliers d'années la position de fond. A son extrémité on arrive sur
Taxe terrestre n'a pas varié d'une ma- un palier, de là dans un vestibule qui
nière sensible : et la grande pyramide conduit à une ouverture de trois pieds
est le seul monument sur la terre qui, trois pouces de large, sur trois pieds
par son antiquité, puisse fournir l'oc- cinq pouces de haut , et sept pieds dix
casion d'une semblable observation. pouces de longueur; c'est l'entrée de
La face nord-est de la grande pyra- la chambre supérieure nommée la
mide est celle où se trouve son entrée Chambre du Roi , entrée primitive-
actuelle, au niveau de la quinzième ment fermée et cachée par des blocs
assise et a quarante-cinq pieds environ de pierre.
d'élévation au-dessus de la base. Le Cci te cha mbre est entièrement cons-
hasard l'a fait découvrir; à l'époque truite en larges blocs de granit , par-
où l'on a cherché à pénétrer dans la faitement dresses et polis; voici ses
pyramide, l'enlèvement du parement dimensions :
aura mis à découvert une construc- Hauteur 18 pieds 0 pouce 5 lignes.
tion différente de tout le reste; c'était Largeur N. 32 2 8
celle qui formait l'entrée de l'étroite S. 32 2 10
çalerie du canal incliné, exactement Largeur 0.16 1 5
figure sur notre planche 75; ce pre- E. 16 * 0 1

mier canal a douze toises trois pieds A l'extrémité ouest de la chambre


de longueur : il aboutit à un autre de on voit le sarcophage, aussi en granit
mêmes proportions (trois pieds cinq de sept pieds un pouce de long sur
pouces de haut et de large), mais as- trois pieds un pouce de large et trois
cendant et de cent deux pieds de lon- pieds six pouces de haut il est place
:

gueur. Un gros bloc de granit le ferme dans la ligne du nord au sud; son cou-
exactement vers le coude de jonction vercle n'a pas ete vu. Un vide existe
desdeux canaux , et il a fallu tourner au-dessus ne cette chambre sépulcrale:
cet obstacle en brisant les pierres il n'est élevé que de trois pieds; les
plus tendres qui forment le massif sur pierres qui forment cette enceinte
la droite du canal, et parallèlement à également en granit, sont dressées
sa direction. On entre ainsi dans le se- sans être polies, et celles du plancher,
cond canal ; à son extrémité on se troi ve i qui est le revers du plafond de la
sur un palier, et on a a sa droite l'en- chambre royale, sont brutes et d'une
trée d'un puits profond taillé dans le hauteur inégale; il résulte de ce vide
roc. Là aussi commence un canal ho- un double plafond pour la chambre
rizontal , de dix-neuf toises et demie royale, propre à la préserver des effets
d'étendue. conduit à une chambre
Il de la surcharge supérieure.
qu'on a nommée Chambre de la Reine, Le puits, déjà indiqué à l'entrée

Digitized by Google
282 L'UNIVERS.
de horizontale , est en grande
la galerie ses actions et de son antiquité , anté-
partie creusé dans le rocher , dans des rieurs à toutes les traditions de l'his-
dimensions tellement étroites (vingt- toire, et aussi les titres les plus cer- -

deux pouces sur vingt-quatre), qu'un tains et les plus anciens que puisse
homme peut s'y accroupir mais non invoquer le généalogiste des œuvres de
pas s'y courber; c'est cependant un l'intelligencehumaine.
travail de main d'homme , et à une Depuis le voyage scientifique et mili-
grande profondeur qu'on a reconnue taire de l'armée française en Égypte,
jusqu'à deux cents pieds. Des entailles et la publication des observations re-
irregulières pratiquées dans les parois, cueillies sur ce pays, il s'est ouvert à
renuent la descente moins pénible et la civilisation européenne, et de nou-
moins périlleuse. On n'est point par- velles recherches y ont été faiies, qui
venu au fond, mais, dans la partie re- compléteront celles que le commence-
connue , on est descendu jusqu'à cin- ment de ce siècle avait produites. Le
quante pieds au-dessous du niveau sphinx des pyramides a été étudié; le
du ML sable qui l'encombrait momentanément
C'est dans la partie de la chaîne Li- détourné, et il a été reconnu que ses co-
byque qui s'avance à l'est vers la plaine, lossales dimensions avaient permis de
qu'existe la ligure du sphinx ( f'oir pratiquer entrelehautde sesjambes an-
notre planche 60) ; c'est dans une des térieures et son cou , une entrée qu'in-
faces de la coupure de la chaîne qu'il a diquent d'abord les montants d'une
été taillé; il adhère au sol ; et son élé- porte ; elle conduisait à des galeries
vation de quarante pieds au-dessus de souterraines creusées dans le rocher
ce sol, est le témoin et comme la mesure sur une très-grande distance, et en-
de la quantité de pierres enlevée à la lin on se trouvait en communication
superficie pour dresser cette nartie de avec la grande pyramide. Ceci expli
la plaine. La longueur totale du sphinx querait 1° ce que disaient les écrivains
monolithe est de trente-neuf mètres arabes , savoir : qu'il y avait plusieurs
(cent dix-sept pieds); contour de la puits et galeries souterraines dépen-
téte au front, vingt-sept mètres (qua- dants de la grande pyramide; 2" qu'il
tre-vingt un nieds); hauteur depuis le y avait dans la téle du sphinx une ou-
ventre jusqu'au sommet de la tète, verture qui menait à ces galeries et à
dix-sept mètres (cinquante et un pieds). la pyramide; enfin, on comprend pour-
Une excavation de quelques pieds a été quoi on ne pouvait entrer dans la py-
pratiquée sur la tète : elle servait à y ramide par une porte extérieure, "et
fixer lesornements et la coiffure rovale comment les galeries indiquées sur
ou religieuse qui déterminaient f'ex- notre planche étaient extérieureii
pression symbolique de ce sphinx. fermées par des blocs de granit.
A cette description, dont l'exactitude La grande pyramide , comme toutes
fera peut-être excuser la monotonie, les autres qui subsistent dans la basse
nous n'avons à ajouter que quelques Égypte , était un tombeau Le sarco-
j
observations critiques ou historiques phàge royal occupait la chambre sépul-
dans l'intention de lixer l'opinion du lec- crale; la chambre inférieure pouvait 1
teur sur l'objet et l'époque de ces mo- être une chapelle destinée aux cérémo-
numents immuables , destinés dès leur nies périodiques ordonnées envers les
origine à frapper d'une admiration dieux ou envers le défunt, et accomplies
non interrompue toutes les générations par ses successeurs.
d'hommes qui devaient se succéder sur D'après les historiens arabes, on au-
la terre , et à s'offrir à elles envelop- rait autrefois recueilli unegrande quan-
pés d'énigmes, de grandeur et ae tité d'objets précieux dans cette pyra-
souvenirs. Que le génie de l'homme mide, même beaucoup de monnaies
veille religieusement à la conservation d'or. Mais cette tradition est bien nou-
de ces ouvrages merveilleux : ce sont velle pour mériter quelque confiance,
des témoignages de son existence, de et les Arabes sont de trop récente

Digitized by Google
ÉGYPTE.
époque en tfgvpte pour avoir appris ce tème graphique n'était pas constitué;
que ne sut aucun des anciens Grecs qui enfin ,
qu'on ignorait encore l'art de
virent ce pays avec la plus attentive « fixer la parole et de parler aux yeux. »

curiosité. Les Arabes, un seul excepté, Bien d'autres considérations tirées de


Abdallatif, ont parlé si étourdiment, faits de divers ordres appuieraient cette
si merveilleusement des antiquités de opinion assez généralement adoptée,
l'Égypte, qu'il est difficile de leur ac- qdi nous montre, approximativement il
corder la moindre foi, si ce n'est quand est vrai, le temps où commença l'unedes
de bons observateurs nous certifient plus grandes institutions de la civilisa-
que les faits énoncés sont vrais,quoique tion égyptienne; et l'on doit inévitable-
les Arabes les aient racontés. Il est ment subordonner à cette observation
certain qu'il ne reste dans la pyramide tout ce qui peut être dit de l'invention
qu'un sarcophage en granit, sépulture et de l'usage de l'écriture chez s an- I

ordinaire des rois. ciens Égyptiens ; on peut aussi ajouter


*
Mais ce sarcophage n'est orné d'au- qu'elle y était inconnue du temps du
cune figure, ne porte aucune inscrip- roi Souphi, le premier des dix-sept
tion, et jamais on n'en a reconnu au- princes de la quatrième dynastie.
cune trace sur aucune des parties de A quelle époque remonte donc ce
la pyramide. Hérodote raconte, ce- règne mémorable par l'exécution de
pendant , que son interprète lui expli- tels monuments? Réunissons ici quel-
qua une inscription gravée sur une des ques faits propres à éelaircir les doutes
faces de la pyramide, et qui contenait qui environnent la solution de cette
le compte des dépenses faites en raves question. Hérodote place le roi qui fit
et autres légumes pour les ouvriers qui bâtir la grande pyramide, après un
avaient travaillé à la construction de ce Sésostris , et au cinquième règne avant
monument ; on disait aussi que cette l'Éthiopien Sabaccon. Quant à Sésos-
inscription était tracée sur le revête- tris, on est enclin à croire que ce nom,
ment de la pyramide, mais l'on a fait ou celui de Sésoosis, fut porté par
remarquer avec toute raison que le plusieurs princes célèbres pour leurs
revêtement primitif, s'il fut contem- fai's militaires, dans les annales de
porain du temps de la pyramide, put l'Kgvpte :et >'il s'agissait du Sésostris
être postérieurement restauré, et aussi, qui avait sur les monuments le nom
que le roi qui avait fait faire cet ou- de Rhamsès (III), ce serait entre le
vrage (que ses contemporains ni la milieu du XV
e
siècle avant 1ère chré-
postérité ne pardonnèrent pas),
lui tienne, temps du règne de Sésostris,
n'avait aucun intérêt à braver la haine et le commencement du VIII* siècle
publique, en proclamant avec une avant la même ère, époque du roi
ostentation sans bénéfice, ces détails Sabaccon, qu'il faudrait placer la cons-
d une dépense qui l'avait rendu odieux truction des pyramides. Une telle opi-
universellement. Un fait domine toutes nion n'aurait micun fondement, et le
ces il n'y a jamais eu
considérations; déplacement évident des noms et de
un seul trait d'écriture dans la grande leurs époques relatives, dans le texte
pyramide; le sarcophage en granit en d'Hérodote qui cite quelques noms cé-
fst absolument dépourvu sur toutes ses lèbres sans avoir l'intention de rappor-
face* extérieures et intérieures plus ; les ter la liste complète et chronologique
anciens tombeaux de Thèbes tous
, et des dynasties égyptiennes, concourt à
les sarcophages qui s'y sont trouvés, faire rejeter une telle indication. On
Oui-mêmes de personnages de con- peut appliquer la même considération à
ditions secondaires, en sont absolu- ce qu'a dit sur le même sujet un autre
ment couverts : l'antiquité des pyra- écrivain grec, Diodore de Sicile, car
mides expliquera suffisamment nette Champollion le jeune a découvert, dans
différence. Il paraît donc qu'a l'époque le fossé même die la seconde pyramide,
°u elles ont été élevées, l'usage de près de l'angle et de face nord, le tom-
ïécriture n'était pas connu , que le sys- beau d'un officier de Sésostris ; de plus,

Digitized by Google
28-4 L'UNIVERS.
il est avéré qu'il se trouve sur le grand du sol, au milieu des
sphinx une inscription hiéroglyphique Sakkara, mou frère a recueilli
datée du règne de Thouthmosis IV, touche-prénom d'un très - vî
qui précéda Sésostris de plus de deux dont il n'existe pas de mention
cent cinquante années. On sait aussi les tables généalogiques qui remo
qu'on a recueilli dans les tombeaux à l'invasion des Pasteurs ; et à cé
creusés dans le roc au voisinage des py- cartouche-prénom, est placé le
ramides , des noms de rois qui ne se propre du même roi, écrit et
trouvent pas dans In série successive, tères alphabétiques, et qui se
et règne par règne, des dynasties égyp- ou Asso. Mais nous serions
tiennes, à commencer par le premier d'étendre cet exposé au delà des
roi de la dix-septième dynastie , dont le que nous devons lui imposer ici
règne remonte à un peu plus de deux nous fallait énumérer tous les
mille ans avant l'ère chrétienne. Il faut tifs qui peuvent porter le l**<~îeuc
donc, sur l'antiquité des pyramides, considérer, en toute conscience, ]
suivre l'opinion des écrivains natio- pyramides de Sakkara et de Gbsaj
naux qui pouvaient être bien instruits comme les plus anciens ou vraies soi^
par des recherches consciencieuses dans de la main des hommes, coin met
les archives publiques, et laisser avec plus anciens monuments de la terii
Manéthon, la grande py ramide deGhizé et antérieurs a toutes les autres prel
dans le tableau des faits mémorables ves connues de l'antiquité des scieries*
du premier roi de la IV e dynastie. des efforts et des succès de Pinteifi
Il paraît aussi que des tombeaux gence humaine. Celles que la .urand
creuses peu de temps après, pour des pyramide porte en soi , et que de
parents ou des officiers des rois de cette nommes habiles ont développées
époque, offrent déjà des preuves de la les rapports astronomiques et géo
pratique de la peinture, car ces tom- triques, témoignent de l'avancem
beaux en sont décores; et aussi de de égyptienne, dxins
la civilisation
l'écriture, car on y a recueilli des pratique des arts les plus utiles
inscriptions. Enfin, une dernière ob- nommes, à l'époque de rétablisseme
servation nous est suggérée par les de la IV e dynastie des rois hér oxlita/*
monuments, et elle nous semble très- Tes. Souph'i en fut le vingt -sixième
importante : le nom de la ville de depuis Menés.
Memphis , écrit phonétiquement dans Sensaouphi, son successeur, éiei*
les textes hiéroglyphiques, et qui se aussi, pour lui servir de tombeau, une
prononçait Mannbphré ou bien an- M grande pyramide près de celle de Soit-
nouft, a pour caractère déterminatif phi ; Mankherri , troisième roi nuira ,

spécial, la figure d'une pyramide pla- l'exemple de ses prédécesseurs. Le*


cée avant même le caractère détermi- trois grandes pyramides de Ghizé sont
natif générique qui signifie ville ou les trois tombeaux de ces trois souve-
contrée; o\\ peut eu induire que lorsque rains; les deux plus récentes des trois
l'orthographedu nom vulgaire de la ville ne paraissent pas avoir été ouvertes.
de Phtha,ou demeure de Phtha, nom On compte depuis Menés jusqu'à la
sacré de Memphis, fut réglée, les pvra- fin de la IV dynastie, quarante-deux
mides voisines de cette ville existaient règnes et 1 194* années.
déjà, et qu'elles pourraient avoir précédé Dès lors, Memphis perdit tempo-
l'usage de l'écriture, au moins l'intro- rairement l'avantage de voir sur le
duction de l'écriture alphabétique dans trône d'Égypte des familles originaires
le système hiéroglyphique; et il n'existe de ses murs. La V
dynastie sortit
pas de monument connu dans lequel en effet d'Éléphantine, île située aux
on puisse remarquer l'absence de cette frontières méridionales de l'Egypte
écriture alphabétique. Dans un des plus vers l'Kthiopie.
anciens tombeaux de l'Egypte, creusé Cette cinquième dynastie eut pour
dans le roc au-dessous de la surface chef Ousercnérès , et l'on ignore par

Digitized by Goo<
ÊGYPTE. 385

quelles circonstances il fut appelé à fois adopté pour les prénoms royaux
remplacer sur le trône d'Égypte l'héri- d'autant de princes qui se succédèrent
tier des deux familles menîphites qui dans cette même dynastie. Ce qui s'est
venaient de l'occuper pendant plus de passé dans les temps modernes fourni-
six siècles. On n'est pas plus instruit rait des exemples analogues , de prati-
sur les événements de son règne , sur ques inspirées par des motifs humains
ses vices ou sur ses vertus; on sait seu- ou religieux.
lement qu'il régna 28 ans. Il eut huit A
la mort du dernier roi de la cin-
successeurs qui régnèrent, savoir Sé- : quième dynastie, une famille nouvelle
phrès 13 ans, Népherchérès 20 , Sisi- parvint au trône nous ignorons par
:

ris 7, Chérès 20, Rathouris 44, Men- quelle voie mais on sait que la ville
;

ehérès 9 , Tanchérès 44 années aussi royale de Memphis récupéra son ancien


e
et On nos 33. La durée totale de la V privilège et le conserva pendant plu-
dynastie fut ainsi de 248 ans et de 9 sieurs siècles; la VI e dynastie et les
règnes. deux qui lui succédèrent furent en
Ou a pu remarquer , dans la liste de effet originaires de cette célèbre capi-
ses rois, plusieurs noms terminés par tale.
les deux svllabescAeré.v; il en est de mê- Othoès fut le premier roi de la
me pour fes princes de la dynastie pré- Vr dynastie ; il fut mis à mort par
cédente , et nous arrêterons un moment ses propres gardes ; voila tout ce que
le lecteur sur cette particularité, afin l'on sait de sa vie. L'histoire écrite
de l'informer en même temps qu'on earde un silence non moins regretta-
trouve, parmi les plus anciens rois d'É- ble sur les quatre premiers successeurs
gypte de la liste qui résulte du Canon d'Othoès : elle les nomme Phios, qui
chronologique fourni par le papyrus régna pendant 53 ans; Methousouphis,
hiératique de Turin, plusieurs noms pendant 7 ans; Phidps, qui vécut jus-
de ces vieux Pharaons termines aussi qu'à l'dge de cent ans et Menthesou-
;

pari es mêmes sy a bes chérès, des no m s


1 1 phis, qui n'occupa le trône que pendant
même absolument identiques avec ceux une année.
que les abréviateurs de Manéthon nous C'est à ce roi que succéda la reine
donnent comme appartenant à des Vois Nitocris, la femme la plus belle et la
de la IV et de laV dynastie : et une telle plus distinguée de son temps, la pre-
analogie peut un jour acquérir quelque mière aussi qui porta la couronne royale
poids dans l'ensemble des preuves pour en Égypte i à la faveur de la loi par
e
l'histoire des premiers temps de la mo- laquelle Biophis, roi de la II dynastie,
narchie égyptienne. Du reste, l'exa- avait modifie en ce point les règles an-
men attentif" des monuments, et en térieurement établies.
partieu lier celui des cartouches -pré- L'histoire et la fable ont également
noms des rois, nous porte à croire, et célébré les actions de Nitocris; Héro-
par l'analogie des signes graphiques et dote apprit des prêtres égyptiens, que
par l'analogie d'expression qui en est le fière de cette reine fut précipité du
la conséquence, qu on s'attacha a mul- trône et égorgé par ses propres sujets.
tiplier ces rapports, pour un motif qui Un tel événement s'accorde avec la
nous est inconnu , par respect peut- courte durée d'une année que Manéthon
être pour un ancêtre ou pour un grand donne au règne de Menthésouphis. Ap-
roi; ce qui multiplia ainsi la désinence pelée à lui succéder, par la loi comme
chérès, et les deux bras élevés en signe par le vœu public, N itocris ne voulut ce-
d'adoration, qui en sont le signe gra- pendant pas laisser sans châtiment les
phique dans les cartouches des rois des instigateurs du crime dont Menthésou-
plus anciennes dvnasties, et ensuite phis venait d'être la v ictime. Occupée
dans ceux de la XVI e et de la XVII-. a faire éleverdivers édifices publics, elle
On remarque de même dans les cartou- attira dans une galerie souterraine les
ches provenant des rois d la XVIII e ,

coupables qu'elle voulait punir, et pen-
le signe du monde, le scarabée, six dant les joiesd'un repas que la reine leur

Digitized by Google
L'UNIVERS.
avait fait servir, les eaux du Nil, con- le sontdans l'histoire, qui les entiot m
duites par un canal inconnu, les y noyè- tous les cinq en une seule ligne.
rent tous. N itocris se fit aussi construire Il paraît que cette longue successi
une pyramide pour lui servir de tom- de rois fainéants pendant deux siée
beau. Hérodote ajoute à son récit, que compromit les plus grands intérêt*
cette reine se donna la mort en se pré- l'État, excita les craintes et le patr
cipitant dans une chambre remplie de tisme des principales classes , et La
cendres, échappant ainsi à la ven- la patience de toutes, line famille dq
geance des partisans de ses ennemis. velie, étrangère à Memphis, et ven
La durée du règne de cette femme il- du nome de Hnès, dans l'Ëgypte moytf
lustre est portée à 12 ans dans les ne, le nome Héracléopolite des Grex
listes de Maneihon. Sa figure était, se- monta sur trône, et donna 4 rois q
le
lon les uns, d'une rougeur éclatante; régnèrent cent ans. Le portrait qi
selon d'autres, elle avait le teint jaune Manéthon a tracé du "premier de c
e
et les joues d'un rouge incarnat. Kt si princes (IX dynastie) nous donne l'kj
l'histoire écrite nous a transmis ce d'un homme capable de se faire roi p
fait et cet éloge, c'est sans doute parce son courage et par son caractère |«
que cette rubicondité devait être un se nommait Achthoès; mais, parvee
rare mérite et un avantage très recher- au trône, il se livra à ses inclinât ioi
che dans un climat où la race blanche violentes , tyrannisa ses sujets* et su
qui l'habitait se colorait constamment passa tous ses prédécesseurs qui s'4
d'un rouge cuivré. Les monuments taient fait un renom de cruauté ; enûi
nous montrent sous cet aspect tout le frappé de démence, il fut dévoré pa
nu des ligures d'hommes; les figures un crocodile.
de femmes sont en jaune, et cette cou- I ne autre famille d'Héracléopolis («
leur indique pour elles, par sa teinte occupa le trône après le troisième suc
{)lus douce, 1'etïet des voiles, des om- cesseur d' Achthoès; elle forma la X
>rclles et de la retraite, qui les expo- dynastie, composée de 19 rois, qui ré
saient moins aux effets de l'ardeur du gnèrent moi ns de dix années chacu n , 1 Si
climat. Jl reste toujours que la reine ans seulement tous ensemble. Cette der
N itocris fut considérée par les Égyp- nière donnée n'est point indigne d'at-
tiens comme la plus belle femme 'de tention, car elle révèle hautement dt
son époque. fréquents changements de règne, signes
Les séditions qui se passèrent à Mem- certains de désordres dans l'Etat ou de
e
phis, et qui mirent lin a la VI dynastie, troubles dans la nation. Une famiJJe
après une durée de 203 ans, approchè- nouvelle, et d'une autre origine , suc-
rent du troue et y firent monter, après céda en effet aux deux dynasties d'Hé-
Nitocris , une autre famille memphi- racléopolis.
te; eile fournit 5 rois qui ne régnèrent En résumant les indications numé-
que 75 ans , et composèrent la MI" dy- riques consignées jusqu'ici dans ce
nastie. On ne connaît pas même leurs précis historique, on trouvera que ce
noms; l'obscurité de leur vie royale tableau si succinct des dix premières
est même très-ancienne, car les prêtres dynasties égyptiennes, comprend 90 rè-
égyptiens, malgré leur piété envers gnes successifs, qui embrassent un es-
leurs rois, dirent à Hérodote que les pace de 2i05 années, ce qui donne un
premiers successeurs de N itocris ne terme moyen de 23 ans et quatre mois
nrent d'ailleurs aucune entreprise re- et demi pour chaque règne.
marquable. Memphis fut pendant tout ce temps
Il parlait aussi sans doute de ceux le séjour des familles royales, et cette
qui, au nombre de cinq, formèrent la ville, la capitale civile et militaire de
e
VIII dynastie, également oriijinairesde (*) Dans le tableau qui est à la page 269,
Memphis ; ils régnèrent cent ans en on a imprimé deux fois héfiopolite, au lieu
tout, et disparurent de la terre, ina- de héracléopolite : le lecteur est supplié
perçus vraisemblablement, comme ils de s'en souvenir.

Digitized by Google
ÉGYPTE. 287

l'empire, acquit successivement par la meilleurs esprits de l'Orient moderne,


munificence des rois et le concours de homme doue de science et de bon sens,
la nation, une splendeur qui en fit disait des ruines de Memphis, après
l'ému lt- et la rivale de Thèbes toute les avoir vues : « Malgré l'immense
sacerdotale. Des édifices tels que les étendue de cette ville et la haute anti-
pyramides, accessoires fuuéraires de quité à laquelle elle remonte, nonobs-
Memphis, disent assez ce que devaient tant toutes les vicissitudes des divers
être, dans la même ville, les demeures gouvernements dont elle a successive-
royales, et celles des classes domi- ment subi le joug, quelques efforts
nantes s'empressant d'imiter le souve- que différents peuples aient faits pour
rain pour l'embellissement de la princi- l'anéantir, et en faisant disparaître
pale cité.Elles'agranditen même temps, jusqu'aux moindres vestiges, effaçant
et rivalisa sous ce rapport avec les plus jusqu'à ses plus légères traces, trans-
grandes villes de notre Europe; quand portant ailleurs les pierres et les ma-
elle fut ravagée par Cambyse, sa circon- tériaux dont elle était construite, dé-
férence égalait celledeParis. Après avoir vastant ses édifices, mutilant les figures
brillé du plus vif éclat, la destinée de ui en faisaient l'ornement; enfin, en
cette ville opulente fut de rester ense- épit de ce que quatre mille ans et plus
velie et ignorée pendant une longue ont dû ajouter à tant de causes de
série de siècles : il y a à peine cin- destruction , ses ruines offrent encore
quante ans que l'Europe savante a re- aux veux des spectateurs une réunion
trouve les ossements de ce vaste co- de merveilles qui confond l'intelli-
losse. Mais tandis que les ruines de gence , et que l'homme le plus éloquent
Tirèbes inspirent encore l'enthou- entreprendrait inutilement de décrire.
siasme et l'admiration aux peuples et Plus on la considère, plus on sent
aux soldats, et que ses temples et ses augmenter l'admiration qu'elle inspire;
palais s'élèvent très-haut au-dessus du et chaque nouveau coup d'œil que l'on
sol et le dominent comme dans les donne a ses ruines , est une nouvelle
plus anciens âges , les ruines de Mem- cause de ravissement. A peine a-t-elle
phis n'offrent plus, au contraire, que fait naître une idée dans l'âme du spec-
l'aspect d'une tombe violée et négli- tateur, qu'elle lui suggère une idée
gemment recouverte d'un peu déterre : encore plus admirable; et quand on
le sol est nu, brûlé, uni, et les mon- croit en avoir acquis une connaissance
ticules de débris qui y surfissent de parfaite, elle vous convainc au même
place en place, y sont isoles de tout instant que ce que vous aviez conçu
plan général, et n'en laissent deviner est encore bien au-dessous de la vé-
aucun ,tant l'arrasemeut de cette ca- rité.
pitale a élé profondément opéré par a Du nombre des merveilles qu'on
la barbarie. II est vrai qu'elle eut à admire parmi les ruines de Memphis,
subir toutes les invasions venues de est la chambre, ou niche, que l'on
l'Asie; la position plus méridionale de nomme la chambre verte. Elle est
Thèbes ,préserva de quelques con-
la faited'une seule pierre de neuf cou-
quérants. La fondation d'Alexandrie dées de haut sur nuit de long et sept
porta à Memphis le dernier coup ; le de large. On a creusé dans le milieu
S'il a couvert les ruines de son limon de cette pierre une niche, en donnant
et le sable du désert les a ensuite ense- deux coudées d'épaisseur , tant a ses
velies d'un double linceul. Mais, sem- parois latérales qu'aux parties du haut
blable à une de ces grandes images et du bas : tout le surplus forme la ca-
d'hommes qui nous viennent de l'an- pacité intérieure de la chambre. Elle
tiquité , et que notre esprit admire et est entièrement couverte , par dehors
vénère àvla fois , l'image de Memphis, comme par dedans, de sculptures en
il y a six cents ans, inspirait encore creux et en relief, et d'inscriptions en
ces mêmes sentiments aux Arabes qui anciens caractères. Sur le dehors, on
les visitaient. Abdailatif, l'un des voit la figure du soleil dans la partie

Digitized by Google
28S L*U N V ERS.
du ciel où
se lève , et un grand nom-
il Tyr et de Babylone, qui rut si hoi
bre de figures d'astres, de sphères, pi'talière pour Abraham et Jacob, fi
d'hommes d'animaux. Les hommes
et la fortune de Joseph et en éduquan
,

y sont représentés dans des attitudes Moïse donna un législateur aux Hé


et des postures variées. breux : illustration presque sans égale
« Quant aux figures d'idoles que Ton nui protège encore les ruines la cifc de
trouve parmi ces ruines, soit que l'on de Menés , consacre à jamais à la vené
considère leur nombre, soit qu'on ait ration des hommes le génie fonda du
égard à leur prodigieuse grandeur, teur de la monarchie égyptienne, e
c'est une chose au-dessus de toute des- la munificence de ses successeurs du
cription et dont on ne saurait donner rant les dix plus anciennes dynasties
une idée; mais cequiest encore plusdi- Comme nous l'avons dit, "la e
dv XI
gne d'exciter l'admiration, c'est l'exacti- nastie fut originaire de la plus vieifli
tude de leurs formes, la justesse de capitale de l'Egypte, de Thèbes , flo-
leurs proportions et leur ressemblance rissantes maigre la magnificence di
avec la nature. Nous en avons mesuré Memphis 4 et chef-lieu de la hiérarchie
une qui , sans son piédestal , avait plus religieuse séjour de la caste sacerdo-
,

de trente coudées. Sa largeur , du côté tale quiétait riche de ses propres


droit au côté gauche, portait environ biens et des offrandes pieuses des ci-
dix coudées, et du devant au derrière toyens de l'Égvpte entière. Ce ne se-
elle était épaisse en proportion. Cette rait peut-être "pas trop s'écarter de la
statue était d'une seule pierre de granit vérité au sujet des causes "de ce nou-
rouge. Elle était recouverte d'un vernis veau changement dans l'origine des dy-
rouge, auquel son antiquité, semblait nasties que de l'expliquer par la riva-
,

ne faire qu'ajouter une nouvelle fraî- lité des deux villes capitales. Depuis
cheur Il y a quelques-unes de ces l'établissement du pouvoir monarchi-
figures que Ton a représentées tenant que civil, aucune famille purement
dans la main une espèce de cylindre thebaine n'avait occupé le trône ; Mem-
d'un empan de diamètre, qui parait phis et ses environs, pays nouveau
être un volume... La beauté du visage relativement à la Thébaïde, avaient
de ces statues, et la justesse de pro- au contraire donné sept dynasties sur
portion qu'on y remarque, sont ce que les dix qui s'étaient élevées depuis fa
l'art des hommes peut faire de plus même époque ; Thèbes et la caste sa-
excellent, et ce qu'une substance telle cerdotale n'avaient pas renonce libre-
que la pierre peut recevoir de plus ment à leur ancienne influence , et
parfait. Il n'y manque que l'imitation devaient s'efforcer de la ressaisir :

des chairs et du sang... J'ai vu deux tout changement était favorable à ces
lions placés en face l'un de l'autre, à graves desseins, mOris dans le si-
peu de distance; leur aspect inspirait lence du sanctuaire, et favorisés par
la terreur. On avait su , malgré leur l'opinion d'une vaste cité presque des-
grandeur colossale et infiniment au- cendue au second rang, après avoir si
dessus de la nature, leur conserver longtemps occupé, seule, le premier.
toute la vérité des formes et des pro- Elle réussit enfin à réaliser ses désirs;
portions; ils ont été brisés et couverts et , après un veuvage du trône qui du-
de terre. * ( Abdallatif traduit de
, rait depuis près de deux mille ans , elle
Carabe en français , par M. le baron l'occupa de nouveau par une de ses
de Sacy.) familles qui donna un assez grand
Il est douteux que les monuments nombre de rois. On le porte jusqu'à
décrits par Abdallatif remontent par 17 , quoique l'ensemble de leurs règnes
leur antiquité aux premiers temps de n'ait embrassé que 69 ans. Ce résultat
l'existence de Memphis; trop d'infor- extraordinaire fait penser que îles évé-
tunes alors avaient frappé cette ville nements qui le furent aussi , suivirent
célébrée dans les annales de tous les ce changement de dynastie ; dans les
peuples policés de l'Orient, rivale de temps des discordes civiles, des riva-

Digitized by Google 1

I
ÉGYPTE. 289
Citésdes provinces et des villes princi- nomment ensuite pour %• roi de cette
pales, surtout dans les États forte- dynastie, un Sésostris, qui régna 48
ment organisés, où les classes de la ans , et qui serait , si les textes sont
population sont intimement agglomé- fidèles Sésostris l'ancien, souvent con-
.

rées par l'influence de la loi , de leurs fondu , par l'analogie de leurs grandes
trovances ou de leurs préjugés, les divi- actions, avec le prince de même nom de
e
faoiis s'opèrent par grandes masses; la XVIII dynastie. On donne à Sésos-
chacune d élies se considère comme la tris l'ancien une taille colossale; on
plus puissante, comme le centre na- dit qu'il conquit toute l'Asie dans l'es-
tional , fait des lois ou exalte des chefs pace de neuf années , et qu'il pénétra
que les autres s'empressent d'abolir; même en Europe par la Tnrace , lais-
et, après un petit laps de temps, le sant partout , inscrits sur des colonnes
pays, rentré sous l'autorité des lois de pierre, les souvenirs de ses vic-
légitimes, apprend qu'il a été gou- toires. Labarès succéda à ce Sésostris;
verné par une foule de souverains éphé- et c'est à ce prince qu'on attribue la
mères dont il n'a pas même connu les construction du célèbre labyrinthe
noms. (appelé labarinthe par les anciens
Tels furent peut-être les 16 pre- écrivains français), (suprà, page 36);
miers rois de la XI e dynastie égyp- Labarès et ses deux successeurs , Am-
tienne, dont les règnes ne durèrent mérès et Amménémès , régnèrent cha-
que 43 ans , moins de 31 mois cha- cun 8 ans ; une femme , Scenniophrès,
cun, et dont les annalistes de l'Egypte sœur du dernier Amménémès , lui
n'ont pas pris la peine de conserver les succéda , mais ne régna que durant
I noms. Ces annalistes ont fait plus pour quatre années.
leur successeur : ils nous apprennent Malgré les incertitudes qui existent
qu'il se nommait Amménémès, et qu'il sur le nom et les actions de ce pre-
reiina pendant 16 ans. mier Sésostris , il est cependant avéré
Ce laps de temps put permettre à ce qu'a cette époque les arts s'étaient dé-
prince de rétablir l'ordre en Egypte et veloppés en Égypte ; que cette monar-
de se distinguer par quelques services chie était puissante ; que de beaux et
n'iinalés: car c'est, dans l'histoire égyp- vastes édifices, enrichis par la pein-
tienne un fait constant et oui se re-
, ture et la sculpture , ornaient ses villes
nouvelle à toutes les périodes de sa principales; que les rois de cette épo-
durée, que les événements les plus que, notamment Sésochris, Améné-
mémorables, l'élévation des plus grands mès et Aménémôph, firent avec succès
édifices l'origine des institutions les
. de grandes entreprises militaires au
plus utiles , et toutes les actions il- dehors; enfin on a reconnu, dans les
lustres appartiennent à des règnes ruines des plus anciens monuments
''ont la longue durée s'étendit au delà de Thèbes , où sont employés
ils
du terme commun à tous les autres comme matériaux
de construction
règnes. Les trois rois qui succédèrent des débris d'édifices portant, sculpté,
e
à Amménémès en fournissent une nou- le nom d'un des rois de cette XII dy-
velle preuve; chacun d'eux régna près nastie. Dès cette même époque, en
de 40 ans ; et les temps de la gran- effet , et quelque reculée qu'elle soit en
deur et de la prospérité de l'Egypte se arrière des origines de nos annales occi-
renouvelèrent sous leurs règnes. dentales , les monuments contempo-
e
Ils appartiennent à la XII dynas- rains, où sont inscrits les noms de ces
tie, originaire aussi de Thèhes. &ésô- vieux rois , surgissent des entrailles de
hris, jfils d' Amménémès, en fut le
(1
la terre, et viennent, de leur antique
premier roi ; il régna 46 ans. Un autre autorité, corroborer et mettre hors
Amménémès, ou Amménémôph, suc- des atteintes du doute, les monuments
céda à Sésochris, et occupa le trône des temps postérieurs où ces mêmes
pendant 38 ans; il périt assassiné par rois sont inscrits par les mêmes noms
ses eunuques. Les listes de Manéthon et pour les mêmes époques ; succes-
e 19
19 Livraison. (Égypte.)

Digitized by GoOgL
200 L'UN IV ERS.
êion admirable de témoignages origi- dynasties qui succédèrent à la
naux en faveur de l'identité des hom- Celle-ci eut plusieurs rois , on
mes , des temps et des événements. connaît pas exactement le nombre
Tous les textes des listes de Mané- régnèrent pendant 250 ans. i On
thon s'accordent à donner soixante rois aussi ce qui se passa pendant
e
à la XIII dynastie et à fixer la durée
, règne , et il dut être calme et nu
de leurs règnes réunis a 453 ans. Mais puisque l'histoire n'en a recuei
les abréviateurs de ces antiques an- cun événement digne d'être tr
nales ont négligé de nous conserver l'avenir.
les noms des rois de cette troisième Il est très-vraisemblable que la
famille thébaine; il paraît toutefois supérieure de la table hi
que l'obscurité de leurs actions a jus- généalogique d'Aydos (voy- pli
tement enveloppé à jamais leur nom contient, rangés de la gauche
et leur vie. Diodore de Sicile a dit de droite, les cartouches- prénoms
uelques autres souverains égyptiens rois de cette XVe
dynastie : Vexa
alement demeurés inconnus « Ces : attentif de ce précieux monument, t
rois vécurent tous dans une profonde comparaison avec d'autres docum
oisiveté, et ne s'occupèrent que de semblables qui ont permis de le co
leurs plaisirs. Aussi, les chroniques ter en partie, ont fait reconnaître erî
sacrées ne nous transmettent sur leur fet que la ligne intermédiaire se t<
compte le souvenir d'aucun monument nait à droite , quand le ba.s-relief
magnifique , ni d'aucune action digne entier, par la suite des noms des rû
de trouver place dans L'histoire. » Mais îccessiw
de la XVII' dynastie, et successiw
il est vraisemblable que l'Égypte jouit, ment par ceux des rois de la XV*
pendant cette longue succession de qu'ainsi la série des rois de 1la XV
i

rois , d'une paix profonde ; l'obscurité trouvait à la ligne supérieure e ,, le dei


de la vie de ces princes fut la véritable nier cartouche à gauche étant cek
cause du bonheur des peuples. du dernier roi de cette XV* dvnastîe
La XIV e dynastie fut originaire de Les noms et prénoms du roi qui û
Skôou (Xoïs), grande ville de la basse sculpter ce précieux bas-relief (SésoS
Égvpte , et qui enleva momentanément tris) , occupent , plusieurs fois repétés
à tfhèbes l'honneur d'être le berceau la ligne intérieure toute entière. Ains
de la famille régnante , si toutefois il les annales écrites par Mancthon , et

y eut quelque honneur à fournir une les listes qui en furent extraites pa»
longue série d'hommes inconnus, quoi- ses abréviateurs qui nous les ont con-
que devenus rois ; car on ne retrouve servées, entrent déjà en communauté
plus, dans les annales écrites, ni leurs de témoignages pour l'histoire, avec
noms ni le plus fugitif souvenir des
, les monuments des arts ; double et pré-
actions de leur vie ou de leur règne : cieux avantage peu commun dans les
misérable condition pour des êtres hu- annales de l'antiquité, même pour Ie5
mains , que d'être élevés par le hasard temps bien postérieurs à l'époque égyp-
au premier rang, pour s'y dissiper tienne où nous sommes parvenus.
comme de vains fantômes privés de En supposant comme des analo-
,

sens , de pensée et de mouvement. On gies nous y autorisent, que les 250


années de la XV dynastie furent ré-
e
porte à soixante-seize le nombre de
ces ombres de rois qui traînèrent , pen- parties entre sept rois au moins , nous
dant 484 ans, leur nullité sur le trône connaissons , encore subsistant de nos
d'Égypte. jours, un monument contemporain
La aV* dynastie fut thébaine, et la d'un des rois de cette même dynastie,
ville sacerdotale s'assura dès lors , pour du VII e , tel qu'il est inscrit dans
près dequinze siècles, l'avantage qu'elle la table d'Abydos. Ce monument se
venait de reprendre sur Xoïs ; ce fut voit sur la route de Cosséir , sculpté
de Thèbes , en effet que sortirent aussi
,
sur un des rochers qui la bordent;
les familles dont se formèrent les cinq c'est un bas-relief soigneusement tra-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 291

vaillé; l'enseignedu roi, surmontée décorées de ces tableaux militaires', on


de Tépervier mitré en occupe , le mi- voyait un sanctuaire pour l'adoration
lieu ; et à droite et à gauche est son des dieux, un promenoir, une bibliothè-
prénom , précédé de son litre de roi et que intitulée : Remède de l âme ; enfin,
des autres qualifications honorifiques le tombeau même du roi : et toutes ces
dont le protocole égyptien fut habi- notions topographiques sur le tombeau
tuellement assez prodigue ; le vœu vi- d'Osymandyas ont porté les derniers
,

vant à toujours y complète les pieux voyageurs en Égypte à reconnaître les


honneurs rendus à ce roi il se nom- • analogies les plus frappantes entre le
mait Mérenrhès. plan du Rhamesséum , encore subsis-
Ce fait, qui intéresse l'histoire des tant à Thèbes (connu aussi sous la dé-
hommes à un si haut degré n'est pas , nomination inexacte de Memnonium,
absolument isolé, quoique apparte- puisqu'il a été élevé par Rhamsès m,
nant à une époqne ou il n'y a pas en- Sésostris), et le tombeau d'Osyman-
core d'histoire ni peut-être d'existence dyas décrit dans l'ouvrage de Diodore
sociale pour les plus anciennes et les dë Sicile ; les proportions du Rhames-
plus illustres nations de l'Occident. séum sont seulement inférieures en
On a recueilli en effet ,
auprès des py- tout point à celles qu'on donnait au
ramides, dans les vallées sépulcrales tombeau d'Osymandyas.
de Thèbes, sur les côtes de la mer C'est sur le sommet de ce même édi-
Rouge, dans les grottes des lieux nom- fice que ce roi avait fait placer le fa-
més El -Tell, Zaoyet-el-Maïetin, et meux cercle d'or, de 365 coudées de
dans d'autres localités, des noms de circonférence (environ 600 pieds), et
rois et de reines gravés sur des mo-
, dont chacune de ses divisions, affec-
numents contemporains, antérieurs à tée à un jour de l'année , portait écrite
l'époque du septième roi de la e
dy- XV l'indication de l'heure du lever et du
nastie ; et même aux six rois connus de coucher des astres , ainsi que les pro-
e
la XIV ; toutefois ces noms antérieurs nostics sur les variations de l'atmos-
ne se troavent point parmi ceux qui phère : indications plus oiseuses en-
subsistent encore sur la table d'Aby- core que les mesures d'un tel ouvrage
dos. Mérenrhès de la XV e dynastie
, en or massif; puisqu'un tel cadran an-
vécut vers l'an 2500 avant l'ère chré- nuaire eût été complètement inutile
tienne. en raison de l'absence de tout rapport
C'est dans la même dynastie qu'on vrai de ses divisions , avec la longueur
doit placer le règne du roi Osyman- réelle de Tannée solaire et le mouve-
dvas, dont Diodore de Sicile, d'après ment des astres ; ce qui fait supposer
l'historien grec Hécatée , a décrit les à cette narration de l'histoire quelques
actions si merveilleuses, et le tom- exagérations, ou dans les écrivains
beau plus digne encore du nom de qui l'ont tracée, de l'inexactitude on
merveille par son étendue, par les de l'ignorance.
sculptures et les peintures dont il fut Il ne reste rien de ces merveilleuses

orne , et qui en feraient l'un des plus constructions, si toutefois elles ont
magnifiques édifices de la magnifique jamais existé ; et jusqu'ici on n'a pas
Thèbes. On v avait représenté les été plus favorisé a l'égard des monu-
campagnes de ce roi contre les Bac- ments originaux de la XV* dynastie;
triens le siège d'une ville défendue
, on en connaît bien peu qui puissent lui
de tous côtés par une rivière, le roi être attribués avec toute certitude.
combattant lui-même du haut de son Un de ses rois est cependant nommé
char, et secondé par son lion appri- dans le tombeau du prêtre Othoès
voisé ; enfin toutes les circonstances creusé auprès des grandes pyramides ;
d'une grande campagne heureusement Othoès étant au service personnel de
entreprise par une armée de quatre ce roi , dont le nom se trouve aussi
cent mille hommes, conduite par un rappelé dans la table royale du temple
chef valeureux ; à la suite des salles de Karnac : c'est le quatrième cartouche
19.

Digitized by Google
L'UNIVERS.
de la première rangée inférieure , sur rables actions , sont également pam
la partie droite du temple. nus jusqu a nous , et , comme l'oh
Ces* souvenirs historiques de la XV e
lisque d Héliopolis, doivent servir
dynastie nous rapprochent de la grande faire placer au rang des princes »

époque des annales égyptiennes, de lustres par leurs hauts faits , à la \è


celle où une invasion de barbares ar- d'une nation puissante par sa parlai:
rêta et détruisit presque de fond en civilisation plus de vingt-trois sièrii
comble la civilisation de l'Égvpte , eten avant l'ère vulgaire, Osortasen lu
dessécha pour trois sièclesles germes des derniers rois de la XVI* dvna
les plus précieux. . tie.
Cela arriva aux temps de la XVI* Son nom est inscrit dans les tabh
dynastie , originaire de Thèbes , com- généalogiques du temple de Karnac
posée de plusieurs rois dont les règnes Thèbes ; il a disparu de celle d'A bydej
successifs durèrent 190 ans. Les chro- où il se serait trouvé le deuxième a
nologistes qui ont pu lire l'ouvrage de droite du cartouche qui borne la liai
Manethon, n'y ont pas recueilli "pour intermédiaire du côté fragmenté. ÏM
nous les noms des princes de cette dy- stèles funéraires isolées, élevées d3i
nastie ; mais des monuments élevés du- les tombeaux de particuliers de classi
rant leur règne, nous ont révélé les diverses, et dont quelques-unes soi
noms de quelques-uns de ces rois , et remarquables par la beauté du trava
l'ordre de leur succession , suppléant ou par leur volume, portent les àatt
ainsi , en partie , au silence absolu des des années 13 , 17 , 25 et 43 du rè.nr
historiens. d'Osortasen; sur l'une d'elles, le pei
Il paraît qu'un roi nommé Osorta- du roi est nommé, c'était Ptahav te\

sen , l'un des derniers de cette dynas- lue nom du roi se lit aussi sur des nu
tie, fut aussi un prince illustre, et numents de plus petite proportion
que son règne dura près d'un demi des scarabées , des figurines : mai
siècle, circonstance favorable aux bons cette série de témoignages, malgr
vouloirs de la fortune et à la fécon- leur intérêt évident, n'est plus qu'u
dité du génie. Osortasen éleva l'obé- utile accessoire du monument princi
lisque qui est encore debout à Hélio- pal qui nous reste de ce règne et d
polis (voy. pl. 74). Son prénom royal ce roi.
(le cartouche supérieur) et son nom Les ruines de l'antique ville égyp
propre (le cartouche au-dessous du tienne deBéhéni, aujourd'hui occupée
premier) se lisent sur les quatre faces par le village arabe de Ouadi-Halînh
de l'obélisque, et font partie des quatre en Nubie près de la seconde cataraet
,

inscriptions, en l'honneur d'Osortasen, du Nil au midi de l'Égypte, se coin


qui décorent ce monument; le car- posent des restes de plusieurs édifice
touche-prénom est répété au bas de publics. La position de cette ville étai
l'inscription, et les caractères alpha- importante pour l'Egypte, toujours in
bétiques qui composent le nom propre téressée à maintenir dans Pobéissaun
(cartouche au milieu de la hauteur), les populations fixées entre les detn
se lisent OSRTSN ; ailleurs ce même cataractes. C'est là que le roi Osorta

nom est écrit Osortsn. Nous avons sen fit édifier un temple en l'honnem
dit plus haut (page 274) comment il de grande divinité de l'Egypte, d<
la
nous semble que peut s'expliquer l'exis- Ilorammon, ou Ammon générateur
tence actuelle de ce précieux monu- Cette antique origine donnait au*
ment élevé par un roi qui régna avant ruines de ce temple une importance
l'invasion et les affreux ravages des sans égale; Champollion le jeune les
Hyksos. fouilla religieusement; il reconnut que

D'autres monuments originaux , con- les murs qui subsistent ont été cons-
temporains de ce môme roi , datés des truits en grandes briques crues; que
années de son règne, consacrés à sa l'intérieur était soutenu par des piliers
mémoire, ou rappelant ses mémo- ou des colonnes en grès , ouvrages du

Digitized by Google
, ,

ÉGYPTE. 293

règne d'Aménophis de la XVIII e


II , dynastie, succéda un autre roi qui
dynastie; que ce temple fut enrichi senomma Amen hem hé; il est égale-
er er
par Rhamsès 1 et Ménephtha 1 ,
ment inscrit dans les listes royales de
princes de la même dynastie; et une Karnac ; il se trouve aussi dans le texte
stèle historique , arrachée de ces ruines d'un monument contemporain sculpté
par notre voyageur , et déposée par lui sur le milieu de la route de Cosséir;
au Musée du Louvre, contient la liste enfin sa légende complète se lit dans
des dons et des offrandes faites à ce un des antiques tombeaux de Bèni-
temple par ces deux rois. Mais il re- hassan - el - Qadin ; les inscriptions
connut aussi que cet édifice religieux dont cette légende n'est qu'une partie,
avait été primitivement fondé par Osor- font dire au roi Amenhemhé qu'il a
tasen de laXVI e dynastie , et il en re- entrepris plusieurs guerres , notam-
cueillit lapreuve en arrachant aussi ment contre les Éthiopiens. Il paraît
de ces mêmes ruines, et de la place ainsi que cette partie des frontières de
qu'occupait d'abord le sanctuaire du l'Egypte ne cessait d'exciter la sollici-
temple, une autre stèle encastrée au- tude du gouvernement égyptien, et
trefois dans ce sanctuaire même, mo- l'histoire prouve assez, par le succès
nument sans prix par son antiquité, de quelques invasions éthiopiennes en
par son importance historique, égale- Egypte, que cette sollicitude devait
ment recueilli avec un zèle patrioti- être permanente comme le danger qui
que pour le Musée du Louvre, mais la faisait naître.
que d'occultes manoeuvres ont dirigé Les voisins de l'Egypte à l'orient
à l'étranger. semblaient plus tranquilles, peut-être
Le champ de cette stèle est occupé parce qu'ils étaient plus divisés, ou
par un bas-relief; le roi Osortasen, qu'unecivilisation plus analogue, etsur-
armé de la masse et coiffé en Ammon tout de grands intérêts commerciaux
est debout devant le dieu Month, qui réciproquement avantageux , portaient
lui livre, avec l'emblème de la vie ces voisins orientaux a des relations
stable, les peuples de la Libye, dont les pacifiques. Le peuple hébreu, illustre
noms sont inscrits dans des cartels branche de la grande famille arabe,
placés auprès de douze figures d'hom- n'habitait pas loin de l'Egypte. Encore à
mes , et ces figures sont attachées à des l'état de pasteurs, soumis au gouver-
liens dont le dieu réunit les extrémités nement patriarcal à l'autorité de l'an-
,

dans ses mains. C'est la représentation cien, campant sous la tente, dans de
en style religieux, de la conquête de la gras pâturages avec leurs troupeaux,
Nubie par Osortasen qui fit ainsi ren-
, Bédouins primitifs pieux et hospita-
trer sous le joug les peuplades révoltées liers, les Hébreux connaissaient les ri-
* _f_

entre les deux cataractes. « Je te livre, chesses de r Egypte, et ne semblaient pas


dit le dieu, toutes les contrées de la lui porter envie. Ils s'unissaient en ma-
terre de Kenous; » et dix noms, d'au- riage avec les Égyptiens; Agar, femme
tant de ces peuplades, sont encore li- d'Abraham, était née en Egypte, et
sibles sur le monument. Dans le texte elle choisit pour l'épouse de "son fils
de l'inscription, le roi est qualifié de une autre femme de la même nation.
taureau blanc, qui a mis en fuite les Ils y descendaient quand la famine
peuples de Phot (les Libyens); et ce frappait leur pavs. La famine y con-
monument, d'une victoire utile à la duisit Abraham, âgé de soixante-qui nze
sécurité de l'Egypte, était religieuse- ans, et cet événement, le plus ancien
ment déposé dans le sanctuaire du de ceux que la Bible mentionne à
temple de Béhéni , qui eut pour fonda- l'égard de l'Egypte, se passa, d'après
teur le même roi dont la stèle enlevée les époques connues de l'histoire sain-
à la France a transmis jusqu'à nous, à te, pendant le règne d'un des rois de la
travers plus de quarante siècles, le XVI e dynastie.
nom et la gloire. La Bible raconte comment Abra-
A Osortasen, vers la fin de la XVI e ham ,
ayant avec lui Sara , et craignant

Digitized by Google
294 L'UNIVERS.

Se beauté de sa femme ne portât


la l'Égypte, ils choisirent un d'entre em
Égyptiens à le tuer pour la lui
i nommé Salât bis, et ils le rofirent
ravir, rengagea à se dire sa sœur. Sara Salathisse rendit maître de Mei
fut enlevée et conduite au palais du sépara par la la haute Égypte
roi , mais Abraham fut très-bien traite ; basse, leva des impôts, plaça des
les Egyptiens lui donnèrent des brebis, nisons dans les lieux convenables,
et des boeufs, et des ânes, et des es- fortifia particulièrement la partie orî
claves , et des servantes et des flnesses
, taie du pays. Méditant une entrep
et des chameaux. Bientôt la maison de contre les Assyriens, alors très-pu
Pharaon fut frappée de la main de sants, Salathis se rendit dans Je noi
Dieu ; le roi fit venir Abraham « Pour- : IMéthraïte, releva une ancienne
quoi , lui dit-il , as-tu annoncé que Sara située à l'orient de la branche l>u
était ta sœur, afin que je la prisse que du Nil, nommée Aouaris, la ferma
pour épouse? Voilà ta sœur, prends- de fortes murailles, et il y rassembla
la et va-t'en; » et Abraham se retira deux cent quarante mille hommes;
il
avec tout ce qu'on lui avait donné, et les visitait dans saison ; il les
la belle
remonta en Chanaan, possesseur de nourrissait, les comblait de présents,
beaucoup d'or et d'argent dites va/de, ; et les exerçait aux manœuvres miJÂ-
dit la Bible, in possession* auri et ta ires, afin d'inspirer le respect et la
argenti; nouveau témoignage de la crainte aux nations étrangères. Salathis
prospérité de l'Égypte aux temps de mourut après avoir régne pendant dix-
#
la XVI dynastie. neuf ans. »
Le
dernier des rois de cette famille Tel est le récit de Manéthon. I^e roi
est appelé Timaos par Manéthon ; l'his- Timaos fut le témoin des premières
torien juif Josèphe nous a conservé, entreprises de ces barbares; il tenta
au sujet de ce roi , quelques fragments vainement de leur résister; son cou-
du récit de l'annaliste égyptien; il rap- rage lui coûta la vie; il la perdit après
porte textuellement un "court extrait six années de rèfzne, vers l'année 2082
de la seconde partie de l'histoire de avant l'ère chrétienne.
Manéthon, dans laquelle se trouvait la Alors finit la XVI e dynastie, et la
narration de l'événement mémorable XVII e commença. Les étrangers qui
qui changea subitement la face des avaient envahi Egypte et la tenaient
1

choses en Égypte : une barbarie farou- courbée sous leur joug sanguinaire et
che y remplaça l'habitude des lois, et dévastateur, sont désignés par Mané-
la civilisation de l'Egypte aurait été thon sous le nom de Hyksos; on les
entièrement détruite, si elle avait re- appelle dans notre langue les Pasteurs,
posé sur de débiles fondements; mais et l'usage a accrédité cette dénomina-
elle résista à deux siècles et demi tion. Leur origine n'est pas connue
d'inouïes calamités. Laissons parler avec certitude; Josèphe, pour exalter
Manéthon. les antiquités de sa nation, les consi-
« Sous le règne de Timaos Dieu fut , dère comme des Juifs, et il en conclut
irrité , on ignore pourquoi et des hom- , que les ancêtres de sa race ont ainsi
mes de race ignoble, venant à l'impro- régné sur TÉçypte, en brigands ar-
\iste des régions orientales , envahirent mes il est vrai , mais Josèphe ne ré-
JEgypte, pénétrèrent dans la contrée Iiudie pas ces souvenirs. D'après ce que
et s'en emparèrent en peu de temps, es monuments nous apprennent de
presque sans combat; ils opprimèrent ces hordes incuites et farouches, on
les chefs du pays, brûlèrent les villes voit qu'elles appartenaient, par leur
avec fureur, et* renversèrent les tem- constitution physique, à la race blan-
ples des dieux. Ils se conduisirent en che, que les individus étaient en géné-
ennemis cruels contre les habitants de ral d une taille haute et grêle; on a
l'Égypte, réduisirent en esclavage une cru y retrouver les traits principaux
partie des femmes et des enfants; et, de la race scythique, et l'on sait que
ce qui mit le comble aux malheurs de ses incursions armées sur les pays ri-

Digitized by Google
ÉG YPÏE. 295
ches , parce qu'ils étaient civilisés , da- dre , et des grands édifices de l'Égypte,
tent (Tune très-haute antiquité dans aucun ne fut épargné.
l'histoire de l'Asie. Il paraît qu ils pénétrèrent jusqu'à
Après la mort de Timaos (nommé la cataracte de Syène, limite méridio-
aussi Concharis), les principales fa- nale de l'Égypte; car jusque-là les deux
milles du pays, fuyant devant l'en- rives du Nil, sur toute la longueur de
nemi, se retirèrent dans la haute la vallée, sont également dépourvues
Égypte, en Nubie, au-dessus de la de traces de monuments antérieurs à
firemière cataracte, et sur les cotes de l'autorité des Pasteurs ou Hyksos.
a mer Rouge où l'Égypte possédait Mais dès que la prévoyance de leur
d'importants établissements. Timaos premier roi Salathis eut fait du lieu
eut des successeurs tirés du sang nommé Aouaris , dans la basse Égypte
royal, légalement revêtus, par droit un camp retranché ou une enceinte for-
d'nérédite, de la souveraineté, mais tifiée, qui devint Je séjour habituel de
qui d'abord n'eurent vraisemblable- l'armée, le chef de ces hordes dut se
ment que peu d'occasions de l'exercer tenir à leur portée, pour les visiter
avec avantage. Ils s'établirent dans la fréquemment, comme le dit Mané-
haute Égypte. thon; car sur cette armée reposait
Il y eut donc alors deux royaumes réellement son pouvoir. Le lieu qu'elle
en Égypte et deux autorités contem- occupait assurait naturellement la dé-
poraines et rivales: les Pharaons, sou- fense de l'Égypte, qui était exposée,
verains légitimes, résidant dans la paj* le chemin que ces conquérants ve-
haute Égypte; et les Pasteurs, bar- naient de faire, aux entreprises des
bares conquérants, occupant Mem- grandes monarchies de l'Asie, dès
phis, la moyenne et la basse Égypte. longtemps les rivales de l'Égypte.
C'est ainsi que la XVII* dynastie égyp- L'année à Aouaris et le gouvernement
tienne se compose de deux listes de rois à Memphis, Saiathis gardait tout à la
oui furent contemporains, et dont fois les avenues de l'Égypte à l'est et
1 existence, à peu près d'une durée au nord, et surveillait lé midi, qui ne
égale, est un synchronisme historique devait pas lui donner de craintes fon-
incontestable, quoique fondé sur des dées , quoique les Pharaons s'y fussent
preuves différentes; car les textes réfugies.
écrits ont conservé l'histoire des Pas- Les successeurs de Timaos surent en
teurs , et les monuments des arts celle effet se maintenir dans la Thébaïde, et
des Pharaons : la barbarie n'écrit ses les autres dépendances de l'Égypte sous-
annales sur les édifices qu'en les dé- traites à l'occupation des Hyksos; les
truisant par le fer et la flamme. Pharaons ne purent toutefois y exercer
Les Pasteurs s'y appliquèrent avec qu'une autorité très-précaire, et pres-
un déplorable succès, et de tous les que nominale; ils songèrent d'abord à
monuments élevés en Égypte avant maintenir leurs droits par ces droits
leur invasion, il en reste a peine un eux-mêmes, par la fidélité de leurs ser-
seul encore entier, tout le reste a été viteurs les plus dévoués, par l'adhésion
détruit, et il a fallu, singulière desti- aussi de la population tout entière,
née une nouvelle série de catastrophes
! des castes supérieures surtout, dont
et de destructions, pour qu'il nous ait tous les intérêts avaient péri du même
été donné de rencontrer dans les rui- coup qui avait frappé à mort le der-
nes des monuments élevés sur le sol de nier roi de la XVI e dynastie.
Thèbes et de Memphis par les grands On ne peut s'empêcher de remar-
rois de la XVI1P dynastie, les ruines quer, avec quelque surprise, que, de
toutes historiques des monuments tous les abréviateurs de Manéthon qui
élevés par les ancêtres de ces grands ont copié ses listes des dynasties et des
rois avant l'invasion des Pasteurs : rois, aucun n'a inscrit, pour la XVII*
Juifs ou Scythes, ils détruisirent tout dynastie, les noms des souverains de
ce que leur fureur aveugle put attein- droit, des Pharaons; que tous, au

Digitized by Googl
<

296 L'UNIVERS.
contraire, portant à six le nombre des l'un et l'autre de la XVIIe dynastù
règnes de cette dynastie, y ont inscrit sont mentionnés dans les înscriptioi
les noms des rois Pasteurs occupant de ce monument. D'autres stèles po(
l'Égvpte de fait en l'accablant de cala- tent des dates de la 3% de la 14
mites, et qu'ils ont ainsi abandonné à de la 19 e , et de la 29* année du régi
l'oubli les noms et les actions des sou- de cet Aménemdjôm, qui est le 1
verains de la race égyptienne, qui ne de ce nom. A Beni-Hassan-el-Q<
cessèrent de lutter contre les barba- la légende entière du même roi
res , et qui , après deux siècles et demi trouve deux fois dans les
de combats, purgèrent enfin le sol de du tombeau de Névôth, avec lâ
la patrie de ces immondes vainqueurs. de l'an 9 de son règne; enfin on vo
La surprise que cette remarque a fait au musée de Genève une autre stè
naître cessera en se rappelant l'origine qui est relative à une campagne entr
de ces abréviateurs de Manéthon et de prise par ce même roi, en Pan 19 i

leurs listes. Le plus ancien de tous est son règne, contre les Éthiopiens. D
le Juif Josèphe; il considérait les Pas- les antiques époques, les ennemis h
teurs comme les ancêtres de sa nation ; plus menaçants pour l'Égvpte furei
il les inscrivit de préférence dans sa a ses frontières du midi : a" chaque r
liste des rois d'Rpypte; il en rejeta les gne, on voit se renouveler les tent
Pharaons, les véritables rois; et les tives pour les repousser ou les cont
chroniqueurs venus après Josèphe ont nir ; Aménemdjôm II eut aussi i

copié ses listes, quoique étrangers devoir à remplir; la durée du règne


à des intérêts, à des préjugés, et à des ce roi , le premier de la XVII e dyna
rétentions que l'histoire n'a pu jus- tie, fut au moins de 29 ans.
S fier. Il eut pour successeur un aui
Il en est tout autrement dans la Osortasen, qui fut ainsi Osortasen
table d'Abvdos et dans les autres mo- Son prénom est sur la table d'Ad vdo<
,

numents de la piété des rois et des à la gauche de celui de son prédécei


peuples de TÉgypte immédiatement
: seur ; trois autres monuments conten
avant le prénom royal du premier porains font connaître son nom pre
prince de la XVIII e dynastie on trouve
, pre, écrit des mêmes signes que cel?
les cartouches de six Pharaons de la du premier Osortasen. On a vu a
XVIP. Dans les monuments égyp- musée du Louvre une jolie statuett
tiens, les Pasteurs ne sont rappelés de ce roien cornaline, avec cette ins
,

que sous des formes propres à entre- cription le roi Osortasen, fils du n
:

tenir la haine universellement vouée à Aménemdjôm. Une belle stèle en ca


cette race d'impurs, la véritable plaie caire blanc porte la date de la 2* anne
de l'Egypte. de son règne. Les tombeaux de Beni
On compte six règnes de Pharaons Hassan renferment aussi la Jégend
entre la mort de Timaos et l'expul- entière de ce roi ; un scribe royal nrtî
sion des barhares; ces Pharaons for- sente à son supérieur une tablette aon
mèrent la XVII* dynastie qui régna l'inscription porte la date de Tan 6 di
260 ans. Le cartouche du premier règne d'Osortasen II : ce règne eu
roi est le premier, de droite à gauche, donc au moins cette durée.
de la ligne intermédiaire de la table Il paraît toutefois qu'elle fut courte

d'Abydos; d'autres monuments ont car Osortasen II eut pour successeu


fait connaître la légende entière de son frère, qui porta aussi le non
ce roi ; il se nommait Aménemdjôm. d'Osortasen. Son cartouche prénon
Plusieurs stèles, dont quelques-unes est à son rang dynastique sur la tablt
sont peintes, et d'autres se distinguent d'Abydos , et la légende entière de c<
par une exécution soignée, portent des roi existe encore sur un grand nombn
dates tirées du règne de ce roi. Une de monuments contemporains. Dan*
de ces stèles est datée de l'an 3 , et le l'inscription de l'un d'eux, les signes
roi Aménemdjôm I er , et uu Osortascn, du cartouche-prénom sont précédés du

Digitized by Google
EGYPTE. 297

titre de fils de roi. C'est dans la Nubie table d'Abvdos comme dans celle de
principalement que les souvenirs d'O- Karnac , sûr une stèle funéraire de la
sortasen III se sont conservés sur les bibliothèque royale, un amulette en
monuments. Dans le temple de Sein né, terre émaillée de la galerie de Flo-
au-dessus de la seconde cataracte, la rence, et une autre stèle où se lit la
légende de ce Pharaon est sculptée dans date de l'an 25 de ce roi. D'autres mo-
le sanctuaire, et les tableaux qui or- numents encore , revêtus du plus haut
nent ce lieu représentent le roi adoré caractère historique, concourent à
en mêmetemps que le Nil; ce qui a compléter ces données sur cet ancien
fait supposer, non sans vraisemblan- Pharaon , et ne permettent pas de dou-
ce, que ce souverain était le roi Nilus ter qu'il ne fût resté le maître des pos-
des nistoriens; on le voit, en effet, sessions égyptiennes en Arabie. De
adoré comme une divinité, et placé riches mines de cuivre existaient à El-
parmi les dieux, dans une des stèles Magarah, dans cette province; Sa-
sculptées à Masehakit, lieu situé au bout-el-Kadim y était également si-
sud d'Ibsamboul. Dans le même temple tué ; et l'on a retrouvé dans ces deux
de Semné, le roi îVlœris, de la XVIII e lieux des stèles sculptées sur les ro-
dynastie, rend ses hommages au dieu chers mêmes , et qui portent des dates
Nil et à Osortasen III en même temps. des années 3, 31 , 41, 42 et 44 du
Un autre bas-relief du même temple règne d'Amènemdjôm III.
représente ce même roi portant les On ne connaît de son successeur,
titres Le fils du soleil qui l'aime f
: après son prénom royal inscrit à son
Osortasen vivificateur, et figuré en rang dans les tables royales d'Abvdos
pied, revêtu du costume d'Osiris, et et de Karnac, que quelques monu-
assis dans un naos sur la barque du ments isolés, sur lesquels ce même
soleil; enfin une inscription du même prénom est figuré, deux scarabées, et
temple prouve que cet édifice fut dédié une stèle funéraire qui existe à Paris.
au dieu Nil et au roi Osortasen divi- Mais aucun d'eux ne nous donne ni
nisé , circonstances plus que suffisantes le nom que porta ce roi ni la durée
,

pour que cette communauté d'adora- de son règne; espérons dans les monu-
tions et d'hommages ait établi une ments pour faire cesser notre igno-
communauté de dénomination entre le rance.
dieu et le roi. Ce prince n'a pas été Le sixième roi de la XVII e dynas-
oublié dans la table royale de Karnac tie se nomma Ahmôs(le fils du dieu
à Thèbes; on y lit son nom au rang Lime), dont les Grecs ont fait Amosis;
?|ui lui était assigné. On ignore quelle son prénom signifiait le soleil sei-
ut la durée de son règne. gneur de la vigilance. Avant de dire
Le successeur d'Osortasen III fut comment il justifia ce beau titre, et
e
un autre Amènemdjôm, de ce le III accomplit les devoirs qu'il lui imposait
nom; et si nous avons oublié de le envers sa patrie, revenons aux Pas-
faire, c'est à l'occasion des princes teurs que nous avons laissés maîtres
oui viennent d'être nommés que nous ,
de Memphis, soumettant toute la con-
devons rappeler l'usage adopté de toute trée à leur brutale autorité , et régula-
antiquité en Égypte , et dont les monu- risant en quelque sorte l'odieux exer-
ments égyptiens <lv tous les temps cice de leur pouvoir, en déférant à
fournissent des exemples , celui de l'un de leurs chefs , à Salathts , le titre
donner habituellement le nom du de roi.
grand-père au petit-fils; c'est pour ce Tout ce que nous savons de ses suc-
motif sans doute que les Osortasen et cesseurs dans la lignée des barbares
les Amènemdjôm se succèdent si régu- c'est leurs noms et la durée de leurs
lièrement dans la liste des princes de règnes , grâce à la vaniteuse attention
e
la XVI* et de la XVII dynastie. Le de .fosèphe pour ces étrangers qu'il
prénom d' Amènemdjôm III se trouve voulait bien considérer comme ses an-
sur beaucoup de monuments : dans la cêtres en Israël. 11 nous en donne cette

Digitized by Google
298 L'UNIVERS
liste après Salathis qui régna 19 ans,
: torien, qu'en effet c'est à l'état de
les Pasteurs eurent pour chefs Boeon captif qu'on avait figuré ces étrangers
44 ans; Apachnas, 36 ans 7 mois; sur les temples des dieux en Égypte:
Apophis,61ans; Anan,50ans mois; 1 l'étude des monuments confirme plei-
Assès ou Assèth 49 ans 2 mois total
, ; nement l'assertion de Manéthon ; la
pour le règne des 6 rois pasteurs , 2Ô9 figure des Pasteurs enchaînés y fut
ans 10 mois. très -fréquemment reproduite par la
On ne doit chercher ni dans les ma- peinture et la sculpture c'était une
:

nuscrits ni dans l'histoire de l'Egypte, idée nationale que le gouvernement


les noms ou les actions de ces préten- s'appliquait à entretenir dans toutes
dus rois, d'origine inconnue: il ne ; toutes
les classes avaient sous leurs
resta d'eux , dans le pays , que la haine yeux des tableaux multipliés des ac-
profonde qui anima , à toujours toutes , tions les plus funestes à leurs intérêts :

les classes, lis n'édifièrent rien; l'écri- les femmes et les hommes trouvaient
ture sacrée ne pouvait pas conserver partout cette leçon sous leurs yeux.
leurs noms sur le frontispice des tem- Ce fut aussi durant le règne de ces
ples, ils rejetèrent la religion natio- étrangers que Joseph , fils du patriar-
nale; ui sur les palais, ils habitaient che Jacob, parut en Égypte , d'abord
les camps et détruisaient les cités. Ils comme esclave acheté par un des prin-
permettaient la culture des champs, cipaux ofliciers du roi , et successive-
afin d'en tirer des tributs onéreux au ment comme intendant de la maison
peuple asservi, mais suffisants pour de cet otticier; ensuite condamné aux
l'entretien de l'armée, les besoins des fers comme ravisseur; plus tard, ho-
chefs, et les exigences de la guerre. noré comme devin interprète des
C'est donc un fait d'une grande singu- songes , et enfin premier ministre et
larité, que le nom d'un des rois pas- favori du roi.
teurs se trouve dans un texte égyp- D'après le texte de la Bible , gui con-
tien, écrit à la gloire d'un des Pharaons, tient la naïve narration de la vie ou de
proche descendant de celui qui les la légende de Joseph , les marchands
chassa; le nom d'Apophis , tracé dans ismaélites qui l'avaient acheté de ses
le cartouche consacré , et précédé du malheureux frères, l'emmenèrent en
cartouche- prénom dont le premier Égypte, et le vendirent à un Égyptien
signe est aussi le disque du soleil , se nommé Putiphar. Ce nom, ramené à
trouve dans un manuscrit en écriture sa véritable orthographe, Pétéphré ,
hiératique, relatif au règne et aux vic- est en effet un nom égyptien qui si-
toires de Sésostris. gnifie celui qui appartient à Phré ( le
Josèphe convient que tous ces rois dieu soleil) , et il est analogue à d'au-
nouveaux ne cessèrent de ravager le tres noms égyptiens, tirés aussi de
pays par leurs incursions et leurs pil- ceux de divinités , telsque Pet-Ammon
lages, s'efforçant avec persévérance de et Pet-Isis. On sait comment, par la
détruire la râce égyptienne tout en- malice de la femme de Pétéphré, Jo-
tière. Il avoue aussi que la première syl- seph investi d'abord dé la confiance
,

labe du mot Hyksos par lequel on les dé- entière de ce chef des troupes égvp-
signait, exprime, en langue égyptienne, tiennes , fut bientôt après jeté dans
l'idée de captif; et la venté de cette éty- une prison , où , comme par l'effet
mologie (*) indique, sans nul doute, que d'une certaine prédestination au gou-
cette dénomination , modifiée par Josè- vernement des hommes, le geôlier lui
phe en celle de Pasteur, leur fut donnée remit une partie de son autorité et la
par les Égyptiens. Manethon, à qui l'his- surveillance de tous les autres prison-
torien des Juifs emprunte ces curieuses nier>. Parmi eux se trouvaient le pan-
données, ajoute, selon le même his- netier et le sommelier du roi : ils
eurent des songes, Joseph les expli-
(*) ?HK > en égyptien ,
signifie, en effet,
qua , et les prédictions de Joseph se
lié, attaché, captif. réalisèrent.

Digitized by Google
ÉGYPTE. 399

Deux années après , le roi d'Égypte du règne d' Apophis l'élévation de Jo-
eut aussi des songes, que ses devins seph au gouvernement de l'Égypte.
ni les savants du roi n'expliquèrent Les dates historiques , tirées des mo-
pas. Sur Favis du pannetier, qui avait numents originaux précédemment ex-
été réintégré dans sa charge, comme posés nous paraissent convenir avec
,

Joseph jeune Hébreu


l'avait prédit, le ces mêmes indications nous devons :

fut tiré de la prison; et, après lui au lecteur de le rendre juge de ce sen-
avoir coupé les cheveux et changé d'ha- timent.
bit, on le conduisit auprès du roi. Jo- Selon le tableau des dynasties égyp-
seph expliqua ses songes , et n'épargna tiennes , qui se trouve a la page 269
pas au Pharaon de sages conseils : « Il de ce précis, la 17* année du règne
faut , lui dit-il , que le roi donne à un d'Apophis répondait à l'an 1967 avant
homme habile et probe l'administration l'ère chrétienne : Joseph était alors
du territoire de l'Égypte; que ses dé- âgé de 30 ans ; si à ce dernier nom-
,

légués dans toutes les" provinces lèvent bre, on ajoute 91 ans pour l'âge de Ja-
pendant les sept années de fertilité qui cob à la naissance de Joseph , 60 ans
vont se succéder, un cinquième des pour l'âge d'Isaac à la naissance de
récoltes; que ces approvisionnements Jacob, et les 25 ans dont la venue
soient fermés dans les greniers publics d'Abraham en Égypte précéda la nais-
et qu'ils y restent, dans toutes les sance d'Isaac, on aura un total de
villes , sous l'autorité royale : on pré- 206 années qui, ajoutées à l'an 1967
e
parera ainsi les ressources nécessaires 3ui réuondaità la 17 année d'Apophis
contre les sept années de stérilité qui e la XVir dynastie, donnent l'année
doivent frapper l'Égypte. » Ce conseil 2173. Or, cette année 2173 , d'après le
plut au Pharaon ; et ce roi fut assez même tableau précité , appartient à la
Heureusement inspiré pour confier XVI e dynastie égyptienne; et c'est en
l'exécution de ce sage dessein à l'homme effet durant le règne de cette même
qui l'avait conçu. Il donna à Joseph dynastie que nous avons déjà indiqué
1administration supérieurede l'Égypte; (nage 293) la venue d'Abraham en
lui remit l'anneau royal , le revêtit de Égypte : les temps de Joseph, premier
la tunique de byssus, et du collier ministre du Pasteur Apophis, s'ac-
d'or; changea son nom hébreu en ce- cordent ainsi très-bien avec les temps
lui de sauveur du monde , selon la lan- d'Abraham et avec l'ordre générale-
gue égyptienne ; le présenta au peuple ment reconnu des dynasties d'Égypte
assis a ses côtés dans son char royal pour les époques qui précédèrent* son
et le maria avec la fille d'un prêtre invasion.
d'Héliopoiis, nommée Asséneth, autre Il en est de même pour les temps
nom égyptien d'une étymologie très- oui la suivirent; aux sept années de
régulière. Joseph , qui était d'une belle fertilitésuccéda, en Egypte et dans
figure et d'une physionomie agréable les contrées voisines, une famine gé-
avait 30 ans quand il fut conduit au- nérale. Les frères de Joseph se ren-
près du roi : il se passa à peine un jour dirent en Egypte pour acheter des
entre son abjecte prison et son élé- grains; la seconde année de la famine,
vation à la plus éclatante fortune. ils amenèrent Jacob auprès de leur
Les écrivains grecs, commentateurs frère qui s'était fait connaître; et 17
de la Bible , et parmi eux les plus sa- ans après Jacob mourut ; Joseph
vants , reconnaissent unanimement comptait alors la 56' année de son
que les malheurs et le triomphe de âge, et Apophis la 43 e de son rèpe.
Joseph en Egvpte se passèrent pen- Ce roi parvint jusqu'à la 61"; et, a sa
dant le règne du roi Apophis, le qua- mort, l'an 1922 avant J. C, Joseph
e
trième de la XVII dynastie, de celle était âgé de 74 ans. Or , qu'on pro-
des Pasteurs, qui avaient fait de Mem- longe sa vie jusqu'à 110 ans, comme
phis le lieu de la résidence royale- Ces le disent les écrivains bibliques, ou
mêmes écrivains lisent à la 17 e année qu'on lui donne âge d'homme comme

Digitized by Google
300 L'UNIVERS
à tous les hommes ses contemporains aux Pasteurs une guerre continuelle
dans l'histoire , le règne des deux rois et poussée avec vigueur ; qu'après de
pasteurs qui succédèrent à Apophis longs efforts, un de ces Pharaons, à
dépassera toujours de près d'un siècle force de succès , réussit à expulser
la durée de la vie de Joseph ; et, dans ces étrangers des divers points de l'E-
ces mêmes supputations , Joseph aura gypte qu'ils occupaient , et à les enfer-
pu voir les petits - fils de ses fils mer dans leur ville ou camp retranché
Éphraïm et Manassès ; enfin , de la d'Aouaris, dont il entreprit de faire le
mort de Joseph jusqu'à l'Exode, ou la siège.
sortie des Hébreux de l'Egypte sous Ce Pharaon fut Ahmosis ; ses cam-
la conduite de Moïse, la suïte des an- pagnes contre Pasteurs furent pé-
les
nées suffira pour placer dans un ordre nibles et multipliées. L'inscription fu-
régulier de succession tous les événe- néraire d'un de ses officiers de marine
ments que la Bible raconte à la suite de nous apprend qu'il entra au service de
la mort de Joseph celle de ses frères
: ce roi au moment où le Pharaon se
de sa parenté, la multiplication des trouvait à Tanis ; que plusieurs com-
Israélites, et l'avènement de ce roi bats sur l'eau furent livrés : qu'un
nouveau, qui selon la Bible, ignorant
, corps de troupes dont cet officier fai-
,

et Joseph et sa renommée, opprima sait partie , fut dirigé contre l'ennemi


le peuple d'Israël, et le soumit à la vers le Sud; que ces guerres duraient
plus dure servitude. C'est ainsi que les encore dans la 6 e année du règne
annales de l'Egypte, dressées d'après d' Ahmosis; et que, dans les années
l'autorité des monuments originaux suivantes, le roi se rendit en Éthiopie
se prêtent exactement aux relations pour lever des tributs.
synchroniques des annales des peuples Il Délaissait point, pour cela, de pous-
qui la connurent, et que la concor- ser l'ennemi principal dès qu'il l'eut
dance de ces rapports pour les temps enferme dans Aouaris; mais Ahmosis
et les lieux produit, pour ces annales mourut sur ces entrefaites, avant d'a-
diverses, rédigées dans des intérêts voir terminé cette guerre sacrée.
mutuellement inconnus les uns aux Son fils, le roi Aménophis Theth-
autres des certitudes mutuelles.
, mosis , dit Manéthon , continua le siège
On ne sait rien du règne des deux de cette place ; et n'ayant pu la for-
,

derniers rois pasteurs, depuis la mort cer ni l'enlever, après des tentatives
de Joseph. On dit que ce fut le dernier infructueusement renouvelées, il en-
de tous, Assèth , qui ajouta cinq jours tra en négociation , et , par l'effet du
au calendrier égyptien, et qui fixa traité qui fut conclu, les Pasteurs
ainsi la durée de Tannée solaire à 365 quittèrent l'Egypte avec leurs trou-
jours; mais des monuments encore peaux, leurs familles, tout ce qu'ils
subsistants indiquent à une époque possédaient, et se rendirent en Assyrie
bien antérieure au règne d'Âssètb cette par la route du désert.
importante réformation {voy. page 234 Telle fut la fin , en Egypte , de cette
ci-dessus). D'ailleurs les habitudes des horde conquérante, après en avoir oc-
barbares ne se tournent pas d'ordi- cupé souverainement une grande par-
naire vers le perfectionnement des ins- tiependant 260 ans. Le prince qui con-
titutions publiques. tribua le premier à en délivrer le pavs
Pendant que tous ces événements fut Ahmosis, le 6 e roi de la XVII e dy-
se passaient à Memphis et dans la nastie, le soleil seigneur de la vigi-
moyenne et la basse Egypte , les Pha- lance, que nous avons déjà nommé
raons au midi de Thèbes ne cessaient ( page 297). Le sixième cartouche de
de penser et d'agir contre ces étran- la table d'Abydos( ligne intermédiaire)
gers maîtres d'une partie de leurs est celuide son prénom royal et ce ;

États. Josèphe , dans son livre contre prénom accompagné de son nom pro-
,

Apion , rapporte d'après Manéthon ,


, pre n'est pas très-rare sur les monu-
,

que les rois de la Thébaïde faisaient ments. On les trouve sur uue stèle et

Digitized by Google
ÉGYPTE. 301

sur un cercueil de momie du Musée de colonies égyptiennes , enfin à des con-


Turin, dans un manuscrit qui contient quêtes plusieurs fois renouvelées en
les litanies des rois, au temple de Afrique et en Asie. Et, comme si l'écla-
Sn n ne dans la haute Nubie et dans
, tant triomphe obtenu enfin sur les
un des tombeaux deThèbes. Deux au- barbares avait agrandi la puissance
tres monuments essentiellement histo- des esprits, les ressources publiques,
riques , rappellent encore le nom et les et multiplié les inspirations du génie
actions du roi Àhmôsis : ce sont deux et du goût , la splendeur de l'Égypte
stèles sculptées à même dans les deux parvenue dès lors au plus haut point, se
plus vastes carrières de la montagne de révèle dans tous les ouvrages de cette
Massarah ; les inscriptions de ces stèles époque, et les témoignages historiques,
annoncent que ces carrières ont été temples, palais, colosses, obélisques,
ouvertes l'an 22 du règne d'Ahmôsis , s'offrent encore à nos yeux dans des
et que les pierres qui en ont été ex- proportions grandioses comme le siè-
traites ont été destinées à la répara- cle qui les a produits , et comme les
tion des temples de Phtha , d'Apis et rois qui le dominèrent. Nous n'aurons
d'Ammon à Memphis : souvenirs mé- ainsi, dans l'histoire des arts, que des
morables de la piété d'Ahmôsis qui, ve- merveilles à décrire , et les actions des
nant de délivrer Memphis de l'occupa- hommes ne resteront pas au-dessous
tion des Pasteurs, et de les refouler de ces admirables productions.
dans leur camp retranché, relève Aménophis, le premier de ce nom,
aussitôt les temples des dieux , et les ouvre la liste des princes de cette
implore pour qu'ils protègent ses nou- XVIII e dynastie. Manéthon nous ap-
veaux efforts contre les impies. Cette prend que ce roi régna 25 ans et 4
date, la seconde connue du règne de mois, après que les Pasteurs eurent
ce roi, remonte versM'an 1825 avant quitté l'Égypte; indication qui porte
er
Tère chrétienne. la durée dû règne d' Aménophis 1 à
La femme d'Ahmôsis est aussi dési- près de trente années. Le même Ma-
gnée dans les inscriptions de Massa- néthon nous dit , en effet , qu'après la
rah ; elle s'appelait Ahmôs-Nofré-Atari, mort d'Ahmôsis, Aménophis, à la
et son nom est accompagné des titres: tête d'une armée de 480 mille hom-
la royale épouse principale, royale mes , continua à pousser vivement la
mère, la dame du monde. Une autre guerre contre les Pasteurs renfermés
femme du même nom est mentionnée dans Aouaris; qu'il essaya vainement
dans le même monument, avec les d'emporter cette place d'assaut , et
qualifications de fille de roi et saur qu'il n'en reconnut l'impossibilité que
de roi; ce fut la sœur du roi Ahmôsis par d'infructueuses tentatives plusieurs
qui est l'Amosis des listes de Mané- lois renouvelées un traité mit fin à
:

thon , le dernier de la XVII e dynastie cette guerre et à cette cruelle inva-


des rois égyptiens. sion.
Après les glorieux succès de ce Le trône national fut dès lors re-
grand prince, les actions des rois de levé l'Égypte entière et toutes ses dé-
;
e
la XVIII dynastie, régnant sur PÉ- pendances se trouvèrent de nouveau
gypte délivrée d'une odieuse invasion, réunies sous l'autorité protectrice d'un
seront encore remarquables dans les seul prince, descendant des anciens
fastes historiques. De mémorables rois, et ramenant avec lui dans le pays
événements s'accomplirent alors en les anciens dieux et les anciennes lois
Egypte , et l'on ne refusera pas cette de la monarchie. La restauration fut
qualification à l'expulsion complète des opérée dans toutes les branches de
Pasteurs, à la restauration de l'antique l'administration publique; tous les ef-
monarchie , à la construction des plus forts furent réunis pour rétablir les
beaux édifices de Thèbes et de la Nu- lieux saints, les édifices publics, la
bie, à la sortie des Hébreux conduits police des cités, l'influence des cou-
par Moïse, à l'émigration en Grèce des tumes et des croyances nationales , et

Digitized by Google
305 L'UNIVERS
particulièrement les anciennes règleg cipale, dame du monde, tutrice de la
d'aménagement du fleuve sacré, le région d'en haut et de la région d'en
père nourricier de l'Egypte ; car l'in- bas ( la haute et la basse Égypte). Son
curie des rois pasteurs a l'égard des nom fut aussi conservé dans les actes
canaux du Nil suffît pour expliquer la d'adorat ion ad ressés à la mémoi re de son
famine qui fît la fortune de Joseph. mari par les rois et les reines qui leur
r
Le règne d'Aménophis T fut d'en- succédèrent sur le trône. Notre planche
viron 30 ans; il nous reste de ce prince 67 donnera une idée de ces pieuses
de nombreux monuments contempo- pratiques : une reine, nommée Nofré-
rains , et un plus grand nombre en- Ari , est à genoux en acte d'adoration
core consacrés à sa glorieuse mémoire
, devant le roi Aménophis II , à côté de
par les rois ses successeurs, qui l'ho- qui est assis le prince son fils ; au-des-
norèrent d'un culte prescjue divin. Son sus d'eux sont assis Thouthmosis m,
nom est inscrit dans les litanies royales, Mœris , la tête casquée; puis en avant,
dont des manuscrits sur papyrus nous Thouthmosis II , coiffé en dieu Socka-
ont conservé le texte; sur une foule ris; et à droite, sur deux sièges sépa-
de bas-reliefs, l'image de ce Pharaon rés, Aménophis I er et sa femme Ah-
est placée au milieu de celles des divi- mos-Nofré-Ari , dont la tête est ornée
nités de l'Égypte, et associée aux d'une coiffure divine. Les noms de
actes de piété, qui sont accompli par tous ces personnages sont inscrits
des rois , des princes ou des person- dans des cartouches auprès de leurs
nages de diverses castes. Une statue images.
d'Aménophis I er , divinisé, en calcaire On pourrait aussi penser, d'après
blanc , est au Musée de Turin ; au Mu- un tableau qui se voit dans un des
sée égyptien de Paris , on voit , sur tombeaux de Gournah à Thèbes , que
,

er
des monuments de formes et de ma- le roi Aménophis I aurait eu une se-
tières diverses, ce même Pharaon com- conde femme, nommée Ahôthph, et
battant contre des peuples étrangers de race blanche ; elle a les titres de
ennemis de l'Égynte, ou bien porté royale fille, royale épouse, royale
sur un palanquin a côté de la déesse mére ; elle ne fut peut-être que la fille
Thméi, la justice et la vérité, qui le d'Aménophis; et l'on voit au Musée
couvre de ses ailes ; enfin recevant en du Louvre une statuette de cette prin-
même temps que le dieu Osiris les of- cesse, dont les deux derniers titres
frandes de fruits et de fleurs, présen- peuvent être des qualifications reli-
tées par une famille du pays. gieuses.
er
La reine sa femme est habituelle- Le tombeau d'Aménophis I n'a pas
ment associée aux honneurs du roi. étéreconnu dans la vallée funéraire de
Elle se nommait Ahmos-Nofré-Ari, Biban-el-Molouk où les dynasties thé-
,

Y engendrée du dieu Lune , la bienfai- baines choisirent leur dernière de-


sante Ari ; on pourrait s'autoriser de meure; c'est dans la vallée de l'Ouest
quelques données monumentales pour que le chef de la XVIII* dynastie avait
croire qu'elle fut Éthiopienne ; et le sé- lait creuser son tombeau ainsi a,ue ,

jour en haute Égypte des rois de la ses premiers successeurs; mais d'im-
e
XVII dynastie, d'Aménophis lui- menses déblayements , opérés au pied
même pendant sa jeunesse, explique- des grands rochers à pic dans lesquels
rait cette alliance du fils d'Ahmôsis ces tombeaux furent creusés , seraient
avec la de quelque personnage
fille nécessaires pour rendre ces sépultures
puissant en Éthiopie. La reine Nofre- royales aux arts et à l'histoire : il nous
Ari est aussi inscrite dans les litanies reste assez d'autres monuments de
royales ; une statuette en bois peint l'illustre renommée d'Aménophis T r ,

du Musée de Turin, représente cette qui mourut après avoir tiré la monar-
reine; et l'inscription tracée sur la chie égyptienne des mains impies des
base lui donne les titres de rovale barbares.
épouse d'Ammon , royale épouse prin- Son fils lui succéda ; il se nomma

Digitized by Google
• • - » t
• • I • « 4«
t » • « 4

• ' «

- • t

k • * • •

Digitized by Google
ÉGYPTE m
Thôthmès, te fils de Thôth; c'est un de troisième cour du même édifice.
la
des Thouthmosis des écrivains grecs. Dans le temple d'EI -Assasif , on
Son prénom est le onzième cartouche voit, dans un bas-relief, ce même Pha-
de la table d'Abydos {planche 47), raon accompagné de la reine sa femme;
ligne intermédiaire , en commençant elle se nommait Ahmôs , et portait les
par le premier cartouche à gauche. titres de royale sœur, royale épouse
La construction des grands édifices principale, dame du monde; et, au-
de Médinet-Habou , à Tlièbes, remonte près du couple royal , se voit leur jeune
jusqu'au règne de ce Pharaon; il s'oc- fille, nommée Sotennofré. D'autres
cupa , comme son père , à relever pieu- monuments nous ont conservé le nom
sement les temples des dieux du pays. d'un prince ou gouverneur d'Éléthya
La partie la plus ancienne de ces édi- attacné au service personnel de la reine
fices, monument qui présente à la fois Ahmôs, et celui d'un officier supérieur
le double caractère de temple et de pa- de la marine de Thouthmosis I* r : ce
lais, consiste en un sanctuaire envi- roi mourut après un règne de treize
ronné de galeries formées de piliers ou ans.
de colonnes, et de huit salles de di- Il eut pour successeur son fils , qui

mensions diverses. Toutes les parties s'appela aussi Thouthmosis , et fut le


sont chargées de sculptures en relief, deuxième de ce nom de la XVIII*
remarquables par l'exacte correction dynastie. Comme ses prédécesseurs, il

du style et par la finesse du travail : ce s'occupa particulièrement de relever


sont la des travaux de la plus belle épo- les monuments religieux dans la Capi-
que de l'art en Egypte. On voit à Ibrim tale et les grandes villes de l'Égypte.
en Nubie , lieu nommé Primis par les Il existe encore à Esnèh , en beau gra-
géographes grecs , un Spéos , ou temple nit rose , des débris des édifices qu'il
creusé dans le rocher, exécuté pendant y avait fait construire , et qui portent
le règne de ce Thouthmosis , le pre- son nom. Il contribua aussi à la déco-
mier des princes qui portèrent ce nom. ration de la partie la plus ancienne du
Le fond de ce Spéos est occupe par palais de Médinet-Habou à Thèbes,
quatre figures assises, dont deux sont principalement des six dernières salles ;
celles de ce Pharaon qui est placé entre et ces ouvrages sont également remar-
le dieu seigneur d Ibrim (une des quables par leur belle exécution. Sa
formes du dieu Thôth, à téte d'éper- piété s'étendit sur les édifices même
vier) , et la déesse Saté, dame de Nu- de la Nubie ; et ceux de Semné et de
bie. Dans le temple d'El-Assasif, non Contra-Semné conservent encore les
loin du Rhamesséum de Thèbes, ce preuves de sa munificence. Le nom de
Pharaon est adoré par ses successeurs ce roi est plusieurs fois tracé au mi-
qui lui font les mêmes offrandes qu'aux lieu de leurs sculptures , et les titres
dieux. Sur d'autres monuments il est de dieu gracieux , seigneur du monde
rr
associé au culte d'Aménophis I , son chef des biens, sont plusieurs fois
père. Une magnifique statue colossale mêlés aux signes qui expriment pho-
er
de Thouthmosis 1 orne le Musée de nétiquement le nom de Thouthmosis;
Turin ; et, sur ce bel ouvrage en granit enfin il se trouve à son rang dynas-
noir à taches blanches , on a inscrit tique dans les litanies royales. Il ré-
ses titres de dieu gracieux , soleil grand gna vingt ans et sept mois , selon les
du monde, etc., aimé d'Ammon, vi- listes de Manéthon. k

vificateur à toujours, fils du soleil La reine sa femme porta le nom


Thôthmès, chef semblable au soleil d'Amon-Maï, et les titres ordinaires
aimé d'Ammon-Ra, roi des dieux , etc.; de royale royale épouse princi-
fille ,

il ajouta aussi à ces divers titres la pale, dame du monde,


tutrice de la
qualification particulière d'image du haute et de la basse Égypte. Le nom
soleil ; et ce Pnaraon est ainsi désigné de cette princesse se retrouve dans
sur le premier obélisque du palais de une des excavations funéraires de la
Karnac à Thèbes , et dans les tableaux vallée des Reines à Thèbes ; il se lit

Digitized by
304 L'UNIVERS.
aussi dans les inscriptions peintes sur originaux, par Champollion le jeuw
une des momies de Turin , et enfin à «La vallée d'El-Jssafif, située *
Éléthya, si toutefois ce n'est pas une nord du Rhamesséum, se termir
autre reine du même nom que men- brusquement au pied des rochers ca
tionne le monument de ce lieu. Des caires de la chaîne iibyque : là existe
amulettes en terre émaillée portent les débris d'un édifice au nord du tod
sur l'une de leurs faces le prénom beau d'Osymandyas. Mon but spedi
royal du roi , et sur l'autre le titre de était de constater l'époque encore ii
chéri d'Amon-Ra il ne faut pas, à
: connue de ces constructions, et d*<
l'imitation de ceux qui débitent par assigner la destination primitive;
habitude les plus aventureuses inter- m'attachai à l'examen des sculptur
prétations , voir dans ce dernier titre et surtout des légendes hiérogiyph
le nom même de la reine au revers de ques inscrites sur lés blocs isolés "et \\
celui du roi ; la reine se nommait pans de murailles épars sur un as*
Amon-Maï et on lit sur les amulettes,
; , grand espace de terrain.
Amon-Ra-Maï le chéri d'Ammon-Ra
, ,
« Je fus d'abord frappé de la fines

qualification ordinaire des rois, et du travail de quelques restes de ha


signe constant de l'efficace protection reliefs martelés à moitié par les pn
que leur accordait le grand dieu de miers chrétiens ; et une porte de mi
Thèbes et de l'Égypte. rose encore de bout au milieu de c
Avec le règne du successeur de ruines en beau calcaire blanc, i

Thouthmosis II, surgissent les pre- donna certitude que l'édifice enti
la
mières difficultés qui procèdent d'un appartenait à la meilleure époque <

désaccord manifeste entre les données l'art égyptien. Cette porte , ou pot
tirées des écrivains anciens, et les no- propyloii , est entièrement couverte <
tions non moins précises que fournis- légendes hiéroglyphiques. On a scuin
sent les monuments historiques ; entre sur les jambages , en relief très-bas
les listes de Manéthon et les monu- fort délicat, deux images en pied <
ments; entre les monuments eux- Pharaons revêtus de leurs insigr.e.
mêmes attentivement comp.irés. Toutes les dédicaces sont doubles
D'une part, la table d'Abydos, la faitescontemporainement au nom i

liste royale du Rhamesséum celle de deux princes : celui qui tient constat
Médinet-Habou et les tombeaux de
, ment la droite ou le premier rang ,

Gournah donnent pour successeur à


, nomme Améneotbé ; l'autre ne marcl
Thouthmosis II, le roi dont le car- qu'après, c'estThouthmosis III*", non
touche est immédiatement placé à la mé Mœris par les Grecs.
gauche du sien. Dans ces listes généa- « Si j'éprouvai quelque surprise c

logiques, ce cartouche est reconnu, voir ici et dans tout le reste de l'ed
sans opposition, pour être celui de lice, le célèbre Mœris orné de tôuti
Thouthmosis III. les marques de la royauté céder aini ,

D'un autre côte, les monuments le pas à cet Ainénenthé qu'on cherra
d'EI-Assasif , les propylons et l'obé- rait en vain dans les listes royales
lisque de Karnac, nomment évidem- dus m'étonner encore davantage , à
ment troispersonnages royaux, qui lecture des inscriptions, de trouva
existèrent et régnèrent entre Thouth- qu'on ne parlât de ce roi barbu , et c
mosis II et Thouthmosis III; enfin costume ordinaire de Pharaon quV ,

Manéthon rapportait que Thouthmo- employant des noms et des verbes a


sis H avait eu pour successeur immé- féminin, comme s'il s'agissait d'un
diat la reine Amcnsé sa sœur, fille, reine. Je donne ici pour exemple I

er
comme lui, de Thouthmosis I , et dédicace même des pronylons.
qu'elle régna vingt-deux ans. « L'Aroëris soutien des dévoués , I

Voici toute l'explication de ces roi seigneur, etc., soleil dévoué à I

énigmes historiques, explication tirée vérité! {Elle) a fait des construction


de l'examen même des monuments en l'honneur de son père (le père lïelk,

Digitized by Google
EGYPTE. 305

Amon-Ra, seigneur des trônes du Il résulte de la combinaison de tous


monde; elle lui a élevé ce propvion les témoignages fournis par ces divers
(qu'Ammon protège l'édifice !) en pierre monuments, et qu'il serait hors de
de granit : c'est ce quelle a l'ait (pour propos de développer ici :

1° Que Thouthmosis 1 er
être) vivifiée à toujours. » succéda im-
L'autre jambage porte une dédicace médiatement au grand Aménothph l rr ,
e
analogue , mais au nom du roi Thouth- le chef de la XVIII dynastie, l'une
mosis IIP, ou Mm ris. En parcourant des Diospolitaines ; 2° Que son fils
le reste de ces ruines, la même singu- Thouthmosis II occupa le trône après
larité se présenta partout. Non-seule- lui , et mourut sans enfants ; 3° Que
ment ie retrouvai le prénom d' Amé- sa sœur Amensé lui succéda comme
nenthé précédé des titres le roi sou- fillede Thouthmosis T r , et régna 22
veraine du monde f mais aussi son ans en souveraine ; 4° Que cette reine
nom propre lui-même à la suite du eut pour premier mari un Thouthmo-
titre la fiue du soleil. Enfin dans tous , sis, qui comprit dans son nom propre
les bas -reliefs représentant les dieux celui de la reine Amensé son épouse;
adressant la parole à ce roi Aménen- que ce Thouthmosis fut le pere de
thé , on le traite en reine comme dans Thouthmosis III ou Mœris, et gou-
la formule suivante : verna au nom d'Amensé; 5° Qu^a la
« Voici ce que dit Amon-Ra, sei- mort de ce Thouthmosis, la reine
gneur des trônes du monde, à sa fille épousa en secondes noces Aménenthé,
chérie , soleil dévoué à la vérité L'é- : qui gouverna aussi au nom d'Amensé,
difice que tu as construit est semblable et qui fut régent pendant la minorité
à la demeure divine. » et les premières années de Thouthmo-
De nouveaux faits piquèrent encore sis III ou Maris; 6° Que Thouthmo-
plus ma curiosité; j'observai surtout sis III, le Mœris des Grecs, exerça
dans les légendes du propylon de gra- le pouvoir conjointement avec le ré-
nit, que
les cartouches - prénoms et gent Aménenthé, qui le tint sous sa
noms propres d'Aménentlié , avaient tutelle pendant quelques années.
été martelés dans les temps antiques, • La connaissance de cette succession
et remplacés par ceux de Thouthmo- de personnages explique tout naturel-
sis III , sculptés en surcharge. lement les singularités notées dans
Ailleurs, quelques légendes d'Amé- l'examen minutieux de tous les restes
nenthé avaient reçu en surcharge aussi de sculptures existant dans l'édifice
e
celles du Pharaon Thouthmosis II . de la vallée $El-Assasif. On com-
Plusieurs autres enfin offraient le pré- prend alors pourquoi le régent Amé-
nom d'un Thouthmosis encore in- nenthé ne paraît dans les bas - reliefs
connu, renfermant aussi dans son que pour y recevoir les paroles gra-
cartouche le nom propre de femme cieuses que les dieux adressent à la
Amensé, le tout encore sculpté aux reine Amensé, dont il n'est que le re-
dépens des légendes d'Aménenthé, présentant; cela explique le style des
préalablement martelées. Je me rap- dédicaces faites par Aménenthé, par-
pelai alors avoir remarqué ce nouveau lant lui-même au nom de la reine,
roi Thouthmosis, traité en reine dans , ainsi que les dédicaces du même genre,
le petit édifice de Thouthmosis 111 à dans lesquelles on lit le nom de Thouth-
Médinet-Habou. mosis, premier mari d'Amensé, qui
C'est en rapprochant ces faits et ces joua d'abord le premier rôle passif,
diverses circonstances, de plusieurs et ne fut, comme son successeur
observations du même genre, premiers Aménenthé, qu'une espèce de figu-
résultats de mes courses dans le grand rant du pouvoir royal exercé par la
palais etdans le propylon de Karnac reine.
que je suis parvenu a compléter mes Les surcharges qu'ont éprouvées la
connaissances sur le personnel de la plupart des légendes du regent Amé-
première partie de la XVIir dynastie. nenthé, démontrent que sa régence
20* Livraison. (Égyptf.) 20

Digitized by Go
306 L'UNIVERS.
fut odieuse et pesante pour son pu pi le dans ces listes, qui étaient
génêalt
Thouthmosis III. Celui-ci semble Sues par générations, et non ijj
les
avoir pris à tâche de condamner son ynastiques parles règnes succrKsi
tuteur à un éternel oubli. C'est en ces listes devaient donc iiommerThotj
effet sous le règne de Thouthmo- mosis III immédiatement après Tt
sis III que furent martelées presque mosis II, parce que la reine A trierai
toutes les légendes d'Amenenthé , et sœur du dernier roi , ne formait ai
qu'on sculpta à la place soit les lé- lui qu'une seule génération ,
gendes de Thouthmosis III. dont il règles de tout temps adoptées par
avait sans doute usurpé l'autorité, soit généalogistes. Mais Manéthon , m
celles de Thouthmosis premier mari
, donnait la liste successive des règrw
d'Amensé, le père même du roi ré- n'eut garde d'oublier celui «le la reij
gnant. J'ai observé destruction sys-
la Amense ; il le place au quatrième ral
tématique de ces légendes dans une dans Tordre de ceux de la XVI II'
foule de bas - reliefs existant sur di- nastie, comme on le voit dans la
vers autres points de Thebes. Fdt-elle pie des listes conservée par Ji
Pouvrage immédiat de la haine per- l'Africain; et comme Eusèbe a oi
sonnelle de Thouthmosis III, ou une ou bien oublie ce même règne d'i
basse flatterie du corps sacerdotal ? mensé, le Syncellene s'est pas dispen
C'est ce qu'il nous est impossible de de relever cette méprise de l'évêque
décider; mais le fait nous a paru assez Césarée.
curieux pour le constater. (Voyez Let- La durée du règne de la reii
tre xv*.) Amensé un ans
est fixée à vingt et i

Cette curieuse explication d'une neuf mois, ou vingt-deux années e


difficulté à la fois historique et généa- nombre rond ce qui vient d'être d.
:

logique , est tirée d'une lettre deChnm- de la vie de cette princesse, revêtu
pollion le jeune, datée de Thèbes, le du pouvoir souverain, porte l'histo
18 juin 1829, et rendue publique peu rien à diviser la durée totale de a
de temps après: néanmoins, il s'est règne en deux portions distinctes, le*
trouvé quelqu'un , en 1832, qui, par temps du premier mariage de cette
une habitude de plagiat , protégé de- reine, et les temps du second.
vant la !oi , mais non p is devant l'hon- Quelques monuments nous portent
neur, par une frontière étrangère, à croire que la fille du roi Thouthmo-
r
s'est approprié cette explication sans sis I" ne régna que bien peu de temps
en nommer le véritable auteur dans , avant son premier mariage: ce règne
un livre il est vrai , où sont fréquem-
, en effet ne dura que vingt-deux ans , et
ment remarqués de pareils oublis que le fils d'Amensé Thouthmosis-Mœris
,

nous aurons bientôt l'occasion d'indi- parait sur un monument élevé durant
quer à l'équité publique. ce règne, à El-Assasif, dans une cé-
En reprenant notre narration , de- rémonie religieuse, où il est accom-
laquelle nous nous sommes détournés pagné d'un jeune enfant que l'inscrip-
en cédant a un impérieux devoir, nous tion dit être sa fille.
voyons que , à sa mort , le Pharaon Ces détails paraîtront peut-être bien
Thouthmosis II n'ayant pas laissé de minutieux , mais ils ne sont pas inu-
successeur en ligne directe, la consti- tiles pour nous éclairer avec certitude
tution politique appela au trône la ligne sur l'état véritable de quelques-unes
collatérale, dont le chef fut la prin- des plus importantes institutions pu-
cesse Amensé, sœur du roi défunt, bliques de l'Égypte, la succession a la
er
fille, commè lui, de Thouthmosis I : couronne royale , et aussi sur les signes
et, si l'on se représente quel est le ca- officiels que la loi avait consacrés
ractère sjiéeial des listes royales d'A- comme marques de l'autorité suprême*
bydos,du Khamesséum et de Médinet- Amensé, à son avènement, adopta le
ïlabou on comprend aussitôt pourquoi
, prénom royal soleil dévoué à la vé-
,

la reine Amensé ne fut pas rnentiounée rité ; et le second cartel renferma son

Digitized by Google
ÉGYPTE. SOT

propre : Àmensé {la fille dA- de la minorité du jeune roi. Nous ne


to»). donnerons donc m à l'un ni à l'autre
Elle épousa , en premières noces, un le titre de roi ; et , avant nommel houth-
"houthmo-is oui fut peut-être de la
, naosis II le frère de la reine Amensé,
imUIe royale de ce nom , un parent nous reconnaîtrons, comme le troi-
e la reinê. Ce Thouthmosis prit le sième roi de ce nom , le jeune roi , fils
renom royal de: soleil grand du d'Amensé et de son premier mari , et
lOQcle ; et dans le second cartel de la
, Mu ris restera le Thouthmosis III,
^ende royale, il inscrivit à la fois le comme l'a dit M a net bon.
«m de sien, Ameusé-
la reine et le Le nom de la reine Amensé se lit au-
'houthmosis ; c'est dans cet état que dessous de son image qui est peinte sur
es deux cartouches subsistent encore le premier cercueil d'une belle momie
Médinet-Habou. Enûn, Amensé ayant du musée royal de Turin On voit , à
ootracté un second mariage, son nou- Oml>os , les restes d'un petit propylon
f3u mari n'eut pas d'autre prénom qu'elle avait fait construire, et "que
m que celui de la reine même, so- l'inscription qualifie de « Porte de la
til dévoué à vérité; et son
la nom reine Amense, conduisant au temple
propre, A mènent lié, n'est inscrit, dans deSévek-Ka. » La même divinité avait,
les monuments, qu'au second rang, dans la vilie d'Êlethya , un autre tem-
après le cartel de la reine. pie construit et décore par la même
IIy eut une différence sensible dans reine, qui y avait associe au culte du
h condition comparée des deux maris Saturne égyptien, celui de la déesse
de Va reine; et ce qu'il y a de plus Sowan ou Luciue. Dans le temple de
Bevé, de plus royal en quelque sorte Médinet-Habou, les témoignages de
1ns ceile du premier, s explique par sa pieté envers les grandes divinités
a naissance d un Kls qui, devant suc- de Thèbes, subsistent encore; on les
'nier à la reine Amensé, donna à retrouve dans la port ion la plus an-
rhonthmosis le premier mari la qua-
, , cienne des vastes édifices de ce lieu.
tté et le privilège de j»ère du roi. Il La plupart des bas-relifs qui la dé-
aralt que le droit de légende royale corent portent le nom de la reine , et
tait un de ces privilèges* mais, pour sont remarquables par leur parfaite
eia, faut -il inscrire ce Thouthmosis exécution ; il en est de même des sculp-
ans la liste des rois de la III' dy- XV tures exécutées par l'ordre d'Amense,
astie? Nous ne le pensons pas, puis- dans les dernières salles du palais de
ue c'est dans la personne de la reii»e ce même quartier de Thèbes , de Mé-
ue résidait le droit d'hérédité de la dinet-Habou.
luronne , qu'elle en conféra quelques S'il était possible d'en juger avec
îrconstances honorifiques seulement certitude par le plus grand nombre de
»u |>ère de l'enfant-roi a qui elle venait monuments subsistants , on serait au-
W transmettre ce droit avec la vie, et torisé à croire que Thouthmosis mou-
î"e Thouthmosis son père, qui n'avait rut peu de temps après son mariage
Ju un titre au pouvoir royal , ne put avec la reine, ci après la naissance de
Jouir que des honneurs secondaires leur fils , le nom au second mari , qui
déférés au père du roi , qui n'était pas se nomma Aménenthé, se trouvant
roi. Ce Thouthmosis ne peut donc pas bien plus fréquemment que celui du
ftre inscrit dans la liste des rois d É- premier, sur ces monuments de divers
Dpte; aussi c'est le nom d'Amensé ordres, et toujours associé au prénom
«lui se lisait dans les annales sacrées royal de la souveraine : on les voit
consultées et copiées par Manélhon, l'un et l'autre inscrits dans la légende
et elles attribuèrent à cette reine les royale qui décore une belle stèle du
*ingt-deux années entières de son rè- Vatican, et sur un amulette en terre
gne, quoique ce règne comprît tout le émaillée du Cabinet du roi. à Paris.
temps quelle vécut a\ec son premier On sait aussi que les édifices d'KI-
*t avec son second mari , celui même Assasif furent l'ouvrage de cette reine
20.

Digitized by GoogI
808 L'UNIVERS.
pendant son second mariage : cela ré- d'Amensé. Mais les grands obélisques
sulte en effet des inscriptions encore du temple de Karnac à Thèbes doivent
subsistantes, où le prénom royal de la être considérés comme les plus beaux
princesse et le nom du régent A mè- monuments qui nous restent du règne
ne nt ht- se trouvent souvent répétés; le de cette reine , comme sont aussi
ils
jeune Thouthmosis III y est aussi au nombre des plus admirables pro-
nommé quoique encore mineur ; et les ductions de l'art égyptien.
dédicaces qui subsistent dans des salles Celui de ces deux* obélisques qui est
moins maltraitées, par le temps ou par encore sur pied , est le plus beau de
les hommes, que Pedifice intérieur, an- tous ceux oui subsistent sur le sol de
noncent que cet édifice était un temple l'Egypte ; 11 est en granit rose , haut
consacré à la grande divinité de Tnè- de 90 pieds au moins, et d'un seul
bes , à Amon-Ra, le roi des dieux, bloc , comme le sont tous les obélisques
mf on y adorait sous la figure spéciale égyptiens antiques. Cet obélisque fut
de Amon-Ra seigneur des trônes et érigé par la reine Amensé en l'honneur
du monde. Ce temple , d'une étendue d'Amon-Ra et à la mémoire de soe
considérable, était décoré de sculp- père Thouthmosis I er ; le régent Ame-
tures du travail le plus précieux , pré- nenthé est nommé dans le texte rela-
cédé d'un dromos , vraisemblablement tif à l'érection du monolithe. Les
aussi d'une longue avenue de sphynx ; images de la reine, de son mari, et de
il s'élevait au fond de la vallée cl'EI- son fils Mœris, se voient dans les
Assasif, et son sanctuaire pénétrait scènes des offrandes , et le monumer.;
dans les rochers à pic de la montagne. n'a reçu aucune addition postérieure,
Des offrandes faites aux dieux ou aux à l'exception de la figure d'un des rois
ancêtres du Pharaon fondateur du successeurs de Mœris, qui s'y trouve
temple, sont les sujets des tableaux représenté en acte d'adoration devant
sculptés dont cet édifice religieux est le dieu auquel l'obélisque est consacre
crne. On y voit aussi le jeune Thouth- Il repose sur une base ornée de belles

mosis-Mœris rendant de pieux hom- inscriptions dédicatoires , dont le texte


mages à son père qui ne fut pas roi s'exprime au nom de la reine désignée
et a son oncle le Pharaon Thouth- par cette phrase remarquable : le roi
mosis II. Les plafonds de quelques- du peuple obéissant (soleil dévoué a
unes de ces salles sont remarquables la vérité), la fille du soleil (Amé-
ayant la forme d'une voûte; enfin, nemhé): nouvelle preuve de la condi-
c est dans une de ces salles que l'on tion singulière des reines exclues
voit un grand bas-relief peint, occu- comme femmes de certaines attribu-
pant toute la paroi de gauche, dans tions expressément dévolues à leur
lequel on a (iguré la grande bari sa- mari , quoiqu'ils ne jouissent pas de
crée , ou arche d'Amon-Ra. Ce dieu du l'autorité royale.
temple est adoré par le régent Amé- L'autre obélisque, malheureusement
nenthé, marchant avant son pupille renversé et brisé , était aussi un ma-
Thouthmosis - Mœris , qui est suivi gnifique monument de la piété de la
d'une très-jeune enfant , richement pa- reine Amensé : dans les tableaux du
rée , nommée Rannofré , et que l'ins- pyramidion , c'est encore, le régent
cription qualifie de fille du roi. En Aménemhé aux pieds d'Amon-Ra ; et,
arrière de la bari sacrée, et comme dans ces tableaux religieux , on recon-
recevant une portion des offrandes naîtrait sans le secours des inscriptions,
faites par les deux rois agenouillés, la figure de ce même régent , tant l'art
sont les images en pied du Pharaon égyptien a su faire ressemblantes celles
Thouthmosis I er , de la reine Ahmosis de ce personnage qui se voient encore
et de leur fille Sotennofré ; l'histoire et sur l'édifice d'El-Assasif , et sur cet
écrite n'avait pas conservé les noms obélisque de Karnac. Le jeune roi
des trois princesses qui figurent dans Mœris y est aussi représenté, associe
ce riche tableau de l'époque et du règne aux offrandes faites par son tuteur; et

Digitized by Google
Digitized by Google
,

EGYPTE. 309

érieurement un autre Pharaon, lerait-elie aussi dans la renommée im-


qui faire quelques ouvrages dans ce
fît mortelle de ce grand prince , ami de
même temple s y est substitué dans
, la paix etdes arts ?
les images et les inscriptions, aux per- L'Égypte et la Nubie sont encore
sonnages nommés primitivement dans couvertes de magnifiques ruines pro-
cet obélisque : Maris lui-même , de- venant des belles constructions élevées
venu roi , n'y épargna pas non plus le durant le règne de Mœris ; et de riches
prénom royal du second mari de sa villes modernes , Rome elle-même , en
mère : il remplaça par son nom celui ont recueilli des débris qui dominent
d'Aménemhé (ou Aménenthé) qui fut encore par leur éclat les chefs-d'œuvre
martelé. des arts renouvelés.
On ignore si ce même Aménemhé Parvenu à la suprême puissance,
survécut à la reine Amensé : dans tous Mœris donna d'abord ses soins à faire
les cas , ses honneurs' durent finir avec terminer les ouvrages publics com-
la vie de la reine, dont le tombeau mencés pendant le règne de sa mère ;
existe encore dans la vallée funéraire il en haïssait le second mari, Amé-

deThèbes. Elle mourut vers Tan 1736 nemhé , dont la tutelle avait pu lui être
avant l'ère chrétienne. incommode ou oppressive ; et , comme
Son Gis lui succéda immédiatement, pour le punir d'une usurpation , Mœris
et porta le nom de Thouthmosis , l'en- fit marteler soigneusement, sur tous
gendré de Thôth, surnommé Maris les édifices publics, le prénom et la
[Mai-ré , qui aime Phré, le dieu so- figure en pied de son beau-père, y subs-
leil ) ; on
lui donne aussi d'autres sur- tituant quelquefois les siens à côté de
noms bienfaiteur des mondes (à Kar-
: celle de sa mère. L'obélisque de Kar-
nac) ; serviteur du soleil , président de nac, les édifices d'EI-Assasif et de
la première des dix régions ( sur un Médinet-Habou portent encore les
obélisque de Rome) ; approuvé par le traces de ces royales récriminations.
soleil ( obélisaue de Cons%ntinople); Mœris fut plus respectueux envers son
modérateur de justice (Amada). Son père : il s'occupa d'assurer la conser-
renom royal , forint? de trois signes vation de ses honneurs presque sou-
K
disque dû soleil , le mur crénelé , le verains; et, dans quelques salles du
scarabée, et signifiant soleil stabili- Salais dont il commença la construc-
teur de l'univers , est quelquefois aug- on à Médinet-Habou,* il fit inscrire,
menté d'un quatrième signe, la ligne dans deux cartouches accolés , le nom
brisée écrite avant le scarabée on le ; de Thouthmosis son père à côté de son
voit ainsi sur les monuments de la cartouche royal.
Nubie ; et dans les listes en écriture Mœris construisit ensuite la plupart
hiératique , le prénom de ce Thouth- des édifices sacrés qui s'élevèrent en
mosis III contient toujours quatre jÊgypte et en Nubie après l'expulsion
signes des Pasteurs , effaçant ainsi , avec une
Le règne de Mœris n'eut pas une pieuse persévérance, les traces pro-
longue durée; il fut de moins de treize fondes de la barbarie. La ville d'Élé-
années (12 ans et 9 mois) ; mais il dut thva ne fut pas oubliée; il orna Esnèh,
être glorieux ; il y a peu de souverains ville importante en ce temps-là , d'un
égyptiens dont il reste autant de mo- temple au dieu Chnouphis, le seigneur
numents, dont l'antiquité ait autant du pays , créateur de l'univers , prin-
exalté la gloire et proclamé le renom. cipe vital des essences divines, soutien
Tous ces souvenirs, tous ces tra- de tous les mondes; il associa au
vaux du règne de Mœris sont empreints grand dieu les deux autres person-
d'iin caractère particulier : tous les nages qui complétaient la triade du
monuments de sa piété sont édifiés à nome d Esnèh, Nèith, et le jeune Haké,
des dieux de la paix ; toutes ses grandes représenté sous la forme d'un enfant;
actions sont des faits d'administration et la dédicace de ce temple au nom de
civile ; la sagessse de PÉgypte se révé- Mœris était encore, du temps des

Digitized by Go
910 %
L'UNIVERS.
Ptolémées , au nombre des fêtes com- de la vie. Le roi des dieux , A mon-P .1

mémorntives célébrées dans ce temple. assis, trace avec un pinceau le nomd


A Edfou , Mœris éleva un temple au Thouthmosis sur l'épais feuillage d
grand dieu Har-Hat,qui était aussi le cet arbre , en disant : « Mon fils , stj
seigneur liturgique du lieu. A Ombos, biliteur de l'univers, je place ton noi
il contribua à la construction du mur sur l'arbre Osent, dans le palais d
général d'enceinte; une porte, ornée de soleil. » Cette scène se passe devar
son nom, subsiste encore. Il éleva les les vingt -cinq divinités seconda îrt
propylées du grand temple de Mem- adorées à Thèoes, rangées sur rien
pl lis et Diodorede Sicile assurequ'ils
, files; une inscription les annonce en et
surpassaient en magnificence tous les termes : Voici ce que disent les autre
autres ouvrages de ce genre. A Élé- grandes divinités d'Opht (Thèbes'
pbantine, un mur du quai, de cons- « >os cœurs se réjouissent à cause d

truction romaine , renferme des débris bel édifice construit par le roi sole
des édifices consacrés aux dieux de stabiliteur de l'univers. » Les homme
cette v ille par Mœris. Tbèbes surtout et les dieux célébrèrent ainsi la gloir
nous montre témoignages de son
If s du roi Mœris.
inépuisable munificence un palais à
: Les ruines historiques de la Nubi
Medinet-Habou , une grande partie des en rendent encore témoignage. I>* plu
immenses constructions de Kamac, le grand des temples construits à Ouadl
temple d'EI-Assasif terminé, en ont Halfa, l'antique Béhéni , auprès de 1

consacré le souvenir. C'est en effet seconde cataracte au sud de Thèbes


par les soins de Mû ris que la plus an- fut aussi un ouvrage de Mœris. Il fu
cienne partie 4e l'édifice de Medinet- construit en briques , orné de piliers
Habou reçut sa décoration. Les dédi- colonnes d'ordre dorique primitif, e
caces portent son nom ; et celle gui se de portes en grès; il était dédié aw
lit encore sous la galerie de droite dieux Amon-Ra et Phré. A ïbrim, un
s'exprime ainsi « La
: vie! PHorus spéos ou chapelle creusée dans la mon
puissant aune de Phré, le souverain
, tagne , remonte au règne de Mœris ; sa
de la haute et de la basse région, statue , assise entre celles du dieu sei-
grand chef de toutes les parties du gneur d'Ibrim et de la déesse de Nu-
monde, l'Horus resplendissant, grand bie , occupe la niche du fond ; et et
par sa forme, celui qui a* frappé les speos a été creusé par un prince nom-
neuf arcs (les peuples nomades); le mé Nabi , qui prend le titre de gouver-
dieu gracieux, seigneur du monde, neurdes terres méridionales ( la Subie}.
soleil stabiliteur de l'univers, le fils Ce prince est debout devant le roi as-
du soleil, Thouthmosis, bienfaiteur sis sur un trône, et accompagné de
du monde, vivifié aujourd'hui et à tou- plusieurs autres fonctionnaires pu-
jours. Il a fait exécuter ces construc- blics ; il présente à Mœris les tributs
tions en l'honneur de son père Amon- en or, en argent et en grains, prove-
Ka, roi des dieux; il lui a érigé ce nant des terres méridionales dont il
grand temple dans la partie occiden- a le gouvernement.
tale du Thouthmoséïum d'Amon, en Les bas -reliefs du sanctuaire du
belle pierre de grès : c'est ce qu'a fait temple d'Amada nous apprennent que
le roi , vivant toujours. » La plupart cet édifice fut aussi le fruit de la piété
des bas-reliefs qui décorent les gale- de Mœris et le nom du roi se lit en-
,

ries et les chambres, représentent ce core dans le texte des dédicaces ainsi
roi Mœris rendant d*s hommages aux conçues: «Ledieu bienfaisant, seigneur
dieux , ou recevant d'eux des dons et du monde , de l'uni-
le roi stabiliteur
des grâces. Sur la paroi de gauche de vers, du soleil, Thouthmosis,
le fils
la grande salle ou sanctuaire, ce Pha- modérateur de justice , a fait ses dé-
raon casqué est conduit par la déesse votions à son père le dieu Phré, le
Athôr et par le dieu A mon. qui se dieu des deux montagnes célestes, et
donnent la main , vers l'arbre mystique lui a élevé ce temple en pierre dure;

Digitized by Google
1
' t. •

K« •

» « V
I?

»•« 4 »« «

> »

Digitized by Google
h
II
M' »

* •
*
*
-

• • • •

» •
» ».
•. »a

• « « . v<V*£ •• * • i
•**.
« • • »
v ••*
2''*..«\
k
« »•->,
v
• /;
*4 • « *t * ** »
%

p> 4 * 41 t* m « *• • > »• /

• #
» »*. r o -> ' ^ . r r .

.f* T S *•

y; ' * - ^ r>
4» t- >•*<»•£• ?

£» î. * 4$

•rj » * ^ *«« §v
>•**».• t *
. , ,- • ^

v <•
U ft?» ^'a^.' •
'
. • . • * * *


t

ï
• •• •'
:I .v? - « I

/ v ;
4
1
I

--r ... ,»
;
« 4
j

• . «
# •

>
t
'.

<

I
»

Digitized by Google
. * - -

« • ê
• *

• -

« »
» •

• « -
> - < •

Digitized by Google
EGYPTE. 811

il l'a fait pour


être vivifié à toujours.» chacune est de quinze personnages;
Mœris mourut avant que cet édifice fût mais, dans chaque file, les huit pre-
terminé ; ses premières vues de restau- mières figures regardent le sud-est, et
ration s'étaient naturellement portées les septsuivantes le nord-ouest : à ces
sur l'Égypte : la Nubie n'en était qu'une deux points opposés le roi Mœris est
dépendance, et ne tenait que le se- debout, devant le premier personnage
cond rang dans Tordre des fondations de chaque file ; une table chargée d'of-
pieuses ordonnées parée roi. F suisse et frandes s'élève entre le roi et la pre-
Se m né , autres villes de Nubie, eurent mière figure; leur pose et leurs in-
aussi leur part dans ses bienfaits. signes annoncent que ce sont des rois ;
L'obélisque de Saint-Jean de Latran le cartouche-prénom qui est à côté de
a Rome run des plus considérables
. chaque figure ne laisse aucun doute à
monuments de cet ordre, l'obélisque cet égard ce riche et précieux Ta-
:

d'Alexandrie, et celui de Constantino- bleau nous représente donc le roi


pîe , sont aussi au nombre des admi- Mœris faisant des offrandes et des
rables ouvrages d'art du règne de prières à soixante rois , ses prédéces-
Mreris ; et c'est à lui qu'il faut faire seurs sur le trône d'Egypte. On re-
on éternel honneur de la plus vaste et connaît dans cette longue série plu-
de la plus |iardie entreprise d'utilité sieurs des princes de la XVIT et de
e
publique , que le génie de I homme ait la XVI dynastie, qui sont déjà nom-
jamais 'conçue et exécutée , le lac qui més à leur place dans notre précis
porte son nom , et qui maîtrisait pour historique; mais le plus grand nombre
ainsi dire, selon l'intérêt de l'État, des noms de la Table royale de Karnac
les prodigieuses inondations du plus s'élève à des époques où la critique his-
grand fleuve de la terre. (Voyez à la torique n'a pas encore pénétré. Mœris
page 12, la Description du lac Mœris.) consacra ce monument à la mémoire
Une statue colossale de Mans , en de ses ancêtres, vers l'année 1725
granit noir, à tacites blanches, est au avant l'ère chrétienne.
musée de Turin. Plusieurs stèles du C'est au règne de ce même roi , et à
musée égyptien de Pans rappellent l'année 1732 avant la même ère, qu'ap-
des actions ou des époques du règne partient le plus ancien manuscrit égyp-
de ce grand roi; et son nom royal tien connu avec une date précise : ce
est te plus fréquent de tous sur les manuscrit existe au musée de Turin;
bijoux et les amulettes. c'estun contrat daté de la cinquième
Enfin, ce prince honorait ses an- année du règne de Mœris.
cêtres à l'égal des dieux , selon la foi Dans les bas-reliefs du temple de
du pavs; il a laissé de ce respect un Medinet-Haboti , le roi associe à ses
monument non moins utile à l'histoire offrandes lareine sa femme; elle porte
qu'a sa propre gloire. C'est Mœris en les titres ordinaires de royale épouse
effet qui orna le palais de Karnac de principale , et a le nom de Rhamaïthé.

la Table historique et généalogique des Dans le tombeau d'Amensé, mere du


rots qui , avant lui , occupèrent le trône roi , on le voit accompagné de sa jeune
d'Égvpte. Les voyageurs modernes fille, nommée Réuinofré, soleil des
ont donné le nom' de salle des rois à bienfaits. Mœris eut aussi de ce ma-
one de celles de ce temple , laquelle est riage un fils qui lui succéda, et il mou-
remarquable par sa décoration et sa rut après un règne trop court , tout
destination également singulières, com- rempli de grandes et de lionnes actions
parée aux autres parties analogues dans dont les témoignages éclatants subsis-
les édifices de l'Egypte. Les trois cô- tent encore. Les plus célèbres histo-
tés sud-est , sud-ouest et nord - o icst riens de l'antir)uité grecque en ont, à
de cette vaste salie sont occupés par l'envi , célébré la aloire; et ils en ont
Quatre files de ligures assises, placées raconté des merveilles que l'autorité
1 une derrière I autre ; les files sont des monuments a fait inscrire parmi
sculptées l'une au-dessus de l'autre; les vérités de l'histoire.

Digitized by Google
312 L'UNIVERS
Le fils et le successeur de Mœris Aménophis II continua le temple com-
(Tan 1723 avant J. C.)se nomma Amé- mence par Mœris son père ; il fit sculp-
nophis; il est le second roi de ce nom ter les quatre salles à la droite et à la
dans la XVIII e dynastie; son prénom gauche du sanctuaire ; et ce roi fit ins-
royal (le 8* de la ligne intermédiaire crire , sur une grande stèle placée au
de la table d'Abydos, de gauche à fond du sanctuaire , le détail des ou-
droite) signifiait :* le soleil grand des vrages exécutés par ses ordres.
mondes. On voit encore à Ibrim un spéos du
On ne peut s'abstenir de remarquer règne d'Aménophis II ; alors les terres
gue le nom d'Aménophis II se lit plus du midi, la Nubie, étaient adminis-
fréquemment sur les monuments de trées par un prince nommé Osorsaté.
la Nubie que sur ceux de l'Égypte : Sur la paroi droite du spéos , le roi

comme ce prince s'était appliqué à


si assis reçoit d 'Osorsaté et d'autres
continuer l'exécution des projets de fonctionnaires, les tributs de ces terres
son père, qui, après avoir élevé en méridionales et des productions natu-
Égypte d'abord de grands édifices
si rellesdu pays, y compris des lions,
put a peine , à cause de la courte du- 40 lévriers et 10 chacals vivants: la
rée de son règne, voir commencer statue du roi était placée au milieu de
ceux dont il voulait orner la Nubie. celles des divinités locales. Enfin, à
Aménophis II concourut cependant à Ouadi-Halfa , près de la seconde cata-
accroître les splendeurs de Thèbes; racte, Aménophis II dédia un temple
son nom se lit sur le troisième pro- à Horammon; la fin de l'inscription
pylée et les colosses de Karnac. dédicatoire se lit encore sur les débris
A Snem ( Beghé ) , Aménophis II érigea de la porte antique , et les colonnes en
un temple en l'honneur de Chnoupnis pierre de l'intérieur du temple sont
et de la déesse Athôr; un des pylônes du style dorique , taillées à pans très-
de l'édifice était décoré d'une statue réguliers et peu marqués , type incon-
colossale de ce roi. testable des ordres grecs, et qui re-
En pénétrant dans la Nubie , nous monte évidemment au règne de notre
trouvons à Calabschi , l'ancienne Tal- Aménophis II. On a aussi retrouvé des
mis des Grecs, les restes d'un temple souvenirs de son règne à Sabout-el-
qu'Aménophis II y avait élevé en l'hon- Qadim , vers les côtes de la mer Rouge
neur du dieu Malouli jeune dieu qui
,
ou l'Egypte possédait alors des établis-
formait, avec Horus, son père, et sements commerciaux ou industriels.
Isis femme et mère d'Horus la triade
, , Une statue colossale de ce roi orne
finale du système religieux de l'E- le musée royal de Turin ; elle est de
gypte, dont Ammon Mouth et Rhons
, granit rose et monolithe comme tous
composaient la triade initiale. Ce même les colosses de l'Égypte.
temple, détruit par le temps ou par Aménophis II mourut après avoir
les guerres , fut relevé par un des rois régné 25 ans et 10 mois ; son tombeau
Ptolémées ; et , après une nouvelle est perdu avec celui des autres pre-
destruction , réédiûé encore par les miers rois de la XVIII e dynastie, dans
Romains, commencé par Auguste, la vallée de l'ouest, où il n'a pas été
continué par Caligula, par Trajan ; mais découvert.
son état actuel annonce qu'il ne fut Un autre Thouthmosis, le 4 e de cette
jamais terminé. Ce temple fut à toutes même dynastie , fut le successeur d'A-
ces époques dédié au même dieu ; il ménophis II, son père. Il continua
était le seigneur suzerain du lieu, sa aussi et termina le temple d'Ainada,
divinité locale il n'y a pas d'exemple
: en y ajoutant le pronaos et les piliers;
hors de l'Égypte de cette persistance les architraves sont occupées par des
dans le même culte, dans la même re- inscriptions en l'honneur de ce roi;
ligion, malgré les invasions ennemies une d'elles est ainsi conçue « Voici ce
:

et la mobilité des croyances humaines. dit le dieu Thoth, le seigneur des


Sue
Dans une autre YilledeNubie, à Amada, ivines paroles aux autres dieux qui
,

Digitized by Google
EGYPTE 313

résident dans Thyri : Accourez et con- lante , dont les merveilles ont ému les
templez ces offrandes grandes et pures, plus vulgaires esprits.
faites pour U
construction de ce tem- La naissance même de cet Améno-
ple par le roi Thouthmosis , à son père' phis eut aussi ses miracles ; et nous
kdieu Phré, dieu grand, manifesté dans avons déjà rapporté (page 56) les cir-
le firmament. » La sculpture de ce constances religieuses de l'annoncia-
temple montre partout la belle époque tion , de la naissance et de l'éducation
de l'art en Égypte. Le nom de Thouth- de ce roi. Thebes et les villes princi-
mosis TV se voit aussi sur une frise pales de l'Égynte sont encore couvertes
dans les débris des édifices de Ouadi- des restes et a es preuves de sa magni-
Halfa. ficence: nous avons aussi donné (page
Le règne de ce Pharaon fut troublé 76 et suiv.) une idée de l'ensemble au
par les soins de la guerre; les fron- palais de Thebes qui porte son nom
tières méridionales de l'Egypte étaient connu dans les relations anciennes et
constamment menacées par les peu- modernes sous la dénomination de
plades insoumises de la Libye : Thouth- Memnonium, et qui a dans ses in-
mosis IV fut contraint de les com- scriptions celle d Aménophium. Le
battre vers la fin de son règne ; et il grand palais de Louqsor fût aussi l'ou-
existe encore, sur les rochers de vrage d'Aménophis III , il en jeta les
Phila?, une inscription commémora- premiers fondements : écoutons le
tive d'une victoire qu'il remporta sur voyageur qui en a donné , le premier,
ces Libyens, le 8 du mois phaménoth, la description historique :

l'an 7 <ie son règne, 1691 ans avant « Le fondateur du palais de Louq-
1ère chrétienne. sor, ou plutôt des palais de Louqsor,
Deux stèles du règne de ce roi , d'un a été le Pharaon Aménophis-Memnofi
très-beau travail , sculptées et peintes, (Amenothphlirde la XVIU'dynastie).
sont dans le musée de Turin ; et le bel Cest ce prince qui a bâti la série d'é-
obélisque de Saint-Jean de Latran, à difices qui s'étend du sud au nord , de-
Rome , porte aussi le nom de Thouth- puis le Nil jusqu'aux 14 grandes co-
mosis IV ; il est dans les colonnes la- lonnes de 45 pieds de hauteur, et dont
térales des quatre faces du monolithe, les masses appartiennent encore à ce
et ellesnous apprennent que ce Pha- règne. Sur toutes les architraves des
raon avait ajoute de grandes construc- autres colonnes ornant les cours et les
tions à un des temples d'Amon-Ra à salles intérieures, colonnes au nombre
Thèbes fondé par un de ses prédéces-
, de 105 , la plupart intactes, on lit , en
seurs, vraisemblablement par Thouth- grands hiéroglyphes d'un relief très-
mosis III, qui y avait fait ériger cet bas et d'un excellent travail , des dédi-
obélisque , transporté depuis dans la ca- caces faites au nom du roi Aménophis.
pitale du monde romain. Le pré- Je mets ici la traduction de l'une
nom royal de Thouthmosis IV signi- d'elles, pour donner une idée de toutes
fiait le soleil stahiliteur des mondes ;
les autres , qui ne diffèrent que par
H prit aussi le titre de chef des chefs. quelques titres royaux de plus ou de
Le portrait de la reine sa femme se moins. »
trouve dans les tombeaux de Kourna « La vie! l'Horus puissant et mo-

àThèbes , mais sa légende est détruite. déré , régnant par la justice , l'organi-
Ce Thouthmosis mourut après un reçue sateur de son pays , celui qui tient le
de 9 ans et 8 mois , vers Tannée 1687 monde en repos, parce que, grand
avant l'ère chrétienne. par sa force, il a frappé les barbares;
Il eut pour successeur un des princes le roi seigneur de justice, bien aimé
les plus illustres parmi les races royales du soleil, le fils du soleil, Aménophis,
égyptiennes, et des plus connus parmi modérateur de la région pure(l'Égypte),
les populations occidentales il se : a fait exécuter ces constructions con-
nomma Aménophis III ; c'est le Mem- sacrées à son père Amon , le dieu sei-
non des Grecs , le roi à la statue par- gneur des trois zones de l'univers,

Digitized by Google
314 L'UNIVERS.
dans l'Oph du midi ; il les a fait exé- par Amon), le fils du soleil , seigneur
cuter en pierres dures et bonnes , afin des diadèmes, Alexandre, en l'hon-
d'ériger un édifice durable; c'est ce neur de son père Amon-Ra, gardifn
qu'a fait le fils du soleil Aménophis, des régions de Oph ( Thèbes); il a fait
chéri d'Amon-Ra. » construire le sanctuaire nouveau en
Ces inscriptions lèvent donc toute pierres dures et bonnes à la place de
espèce de doute sur l'époque précise celui qui avait été fait sous la majesté
de la construction et de la décoration du roi Soleil, seigneur de justice, te

de cette partie de Louqsor. fils du soleil Aménophis, modérateur


Les bas-reliefs qui décorent le palais de la région pure.
d' Aménophis sont, en général, rela- Ainsi , ce second sanctuaire remonte
tifs à des actes n ligieux faits par ce seulement à l'origine de la domina-
prince aux grandes divinités de cette tion des Grecs en Égvpte,au règne
portion de Thèbes, qui étaient 1* Amon- d'Alexandre, fils d'Alexandre le Grand,
Ra, le dieu suprême de l'Egypte, et comme le prouve la figure enfantine
celui qu'on adorait presque exclusive- du roi : et l'on ne trouve que cette
ment à Thèbes sa ville éponyme 2° sa
, ; partie moderne dans le magnifique
forme secondaire, Amon-Ra-Généra- palais d' Aménophis.
teur,Hnystiquement surnommé le mari Au IMemnomum plusieurs statues
de sa mère y et représenté sous une colossales furent érigées en l'honneur
forme priapique; c'est le dieu Pan de ee roi ; les bas-reliefs où se mon-
égyptien . men ionné dans les écrivains
1
trait la protection des dieux pour ce
grecs; 3° la déesse Thamoun ou Ta- grand prince, ornaient toutes les par-
mon, c'est-à-dire Amon femelle, une ties de l'édifice ; et deux grandes ins-
des formes de Neïth, considérée comme criptions annonçaient la dédicace du
compagne d'Amon générateur; 4° la Memnoninm aux dieux de Thèbes par
déesse Mouth, la grand' mère divine, ce roi reconnaissant.
compagne d'Amon-Ra; 5° et 6° les La forme et la rédaction de cette
jeunes dieux Khons et Harka, qui dédicace sont d'un genre tout spécial;
complètent les deux grandes triades on en juuera par une courte analyse.
adorées à Thèbes , savoir : Celle consécration du pal.u's est rap-
Pères. Hfères. Fils. pelée d'unt manière dramatique; c'est
Amon-Ra. Mouth. Khons. d'abord le roi Aménophis qui prend
Amon générateur. Thamoun. Harka. la parole dès la première ligne et la
Le Pharaon est représenté faisant des garde jusqu'à la treizième. « Le roi
offrandes, quelquefois très - riches , à Aménophtli a dit: Viens, 6 Amon-
ces différentes divinités , ou accompa- Ra, seigneur des trônes du monde,
gnant leurs bari ou arches sacrées toi qui résides dans des régions de
portées processionnellement par les Oph (Thèbes)! contemple la demeure
prêtres. que nous t'avons construite dans la
L'une des dernières salles du palais contrée pure . elle est belle : descends
d'un caractère plus religieux que toutes du haut du pour en prendre pos-
ciel
les autres , et qui a dû servir de cha- session » Suivent les louantes du dieu
!

pelle royale ou de sanctuaire , n'est mêlées à la description de l'édifice dé-


décorée que d'adorations aux deux dié, et l'indication des ornements ft
triades de Thèbes par Aménophis ; et, décorations en pierre de grès en gra- ,

dans cette saPe , dont le plafond existe nit rose, en pierre noire, en or, en
encore, on trouve un second sanctuaire ivoire et en pierres précieuses
,
que le
emboîté dans premier, et dont voici
le roi y a prodigués, y compris deux
la dédicace qui en donne très-claire- grands obélisques dont on n'aperçoit
nient l'époque tout à fait récente en , plus aujourd'hui aucune trace.
comparaison de celle du grand sanc- Les sept lignes suivantes renfer-
tuaire « Restauration de l'édifice faite
: ment le discours que tient le dieu
par le roi (chéri de Phré , approuvé Amou-Ra , en réponse aux courtoisies

Digitized by Googl
;
ég PTE. 311»

do Pharaon. « Voici ce que dit Amon- deux statues ornant probablement la


fta , le mari de sa mère , etc. : Appro- porte latérale nord de l'Aménophium ;
che, mon ûh , soleil seigneur ae vé- ce qui peut donner une juste idée de
rité, du germe du soleil, enfant du l'immense étendue de ce palais dont il
soleil, Aménothph! entendu tes
J'ai reste encore de si magnifiques vestiges.
paroles et je vois les constructions que C'est cet Aménophis III que représen-
tu as exécutées; moi qui suis ton tait la statue vocale dont des témoins
père , je me complais dans tes bonnes nous ont certifié les miraculeuses ver-
œuvres etc. , etc. , etc.
, tus. Nous avons tout dit sur cette mer-
Enfin vers le milieu de la 20' ligne veille (à la page 70), sur la description
commence une troisième et dernière de la statue (aux pag^s 71 à 77), pour
harangue; c'est celle que prononcent l'histoire de l'antique miracle , diver-
les dieux en présence d'Amon-Ra, sement eNpIiqué.
kur seigneur, auquel ils promettent Il nous reste encore d'autres monu-
de combler de biens Aménothph son ments propres à jeter quelques lu-
fils chéri, d'en rendre le règne joyeux mières sur les circonstances princi-
en le prolongeant pendant de longues pales du règned'Aménophis III : nous
années, en récompense du bel édifice en devons au lecteur un résumé som-
qu'il a élevé pour leur servir de de- maire
meure, palais dont ils déclarent avoir Une inscription quiexisteaujourd'hui
pris possession après l'avoir bien et sur un des rochers des environs de
dûment visité. Philsc, rappelle, dans une relation de
du Memnonkim des Grecs
L'identité quatorze lignes de texte, que le Pha-
et de l'Aménophium égyptien n'est raon Aménophis III passa dans ces
donc plus douteuse ; il l'est bien moins contrées et y tint une panégyrie, dans
encore que ce palais fût une des plus la cinquième année de son règne, au
étonnantes merveilles de la vieille ca- retour d'une guerre dans laquelle il
pitale. Des fouilles en grand, exécu- venait de soumettre les Éthiopiens.
tées par un Grec nomme Iani, ancien Ces guerres d'Kthiopie étaient fré-
agent de M. Sait, ont mis à découvert auentes, et amenées par la nécessité
one foule de bases de colonnes, un e maintenir par la force les popula-
très-grand nombre de statues léonto- tions nomades répandues sur les rives
céphulcs en granit noir; de plus, deux du Nil supérieur.
magnifiques sphinx colossals et a tête Le nom d'Aménophis HT se re-
humaine , en granit rose du plus beau
, trouve aussi dans d'autres inscrip-
travail, représentant aussi le roi Amé- tions , monuments isolés mais con-
,

nophis UT. Les traits du visage de ce temporains de son règne: dans l'île
pnuce poi tant une empreinte de phy- delîeghé, l'ancienne Snem, près de
sionomie un peu éthiopienne , sont Ptiilar , on lit encore un proscynéma ,
absolument semblables a ceux que les ou acte d'adoration adressé a notre
sculpteurs et les peintres ont donnés Phnraon par un basilico-grammate
à ce même Pharaon dans les tableaux nommé Aménémoph, l'un des com-
des stèles du Memr.onium , dans les mandants des troupes du roi; un
bas- reliefs du palais de Louqsor, et prince éthiopien , nommé Mémosis
dans les peintures du tombeau de ce empkyé aussi au service du roi, lui
rince dans la de l'Ouest à Bi-
vallée adresse les mêmes hommages. L'in-
E
an-el-Molouk : nouvelle et millième tendant du domaine royal d'Améno-
preuve que les statues et bas reliefs phis s'appelait Aménothph; il était en
égyptiens présentent de véritables por- même temps urand prêtre de la déesse
traits des anciens rois dont ils portent Anouke il fit aussi un pèlerinage dans
;

les légendes. nie siiinte de Snem; et sa supplique


A une petite distance du Rhames- aux dieux de l'île pour en obtenir tous
séum existent les débris de 2 colosses les bienfaits dont ils peuvent disposer,
en grès rougeâtre : c'étaient encore existe encore en ce lieu.

Digitized by Google
,

316 L'UNIVERS.
Aménophis un tem-
III avait élevé fice, et dans son voisinage , que les
ple au grand dieu Chnouphis dans une tombeaux des nombreux officiers char-
autre île, celle d'Éléphantine ; mais il gés de sa garde ou de son service.
a été récemment détruit ; une caserne On voit , dans les riches portefeuilles
et des magasins ont été construits des du musée de Turin , un contrat ma-
antiques matériaux de cet édifice reli- nuscrit daté de l'an 24 du règne d'A-
gieux. ménophis-Memnon , et au Vatican,
Ce prince éleva de grands édifices une statue léontocéphale qui porte le
Subi es i ; il paraît que ce fut par l'effet cartouche de ce roi , qui est ici une
e cette pieuse munificence que les époque de son règne.
belles et vastes carrières de Silsilis, Dans la haute Nubie, à Sohleb, les
sur la rive orientale du Nil, furent derniers voyagenrs ont retrouvé les
ouvertes. Deux stèles, qui s'y voient ruines des grandes constructions que
encore de nos jours, nous donnent, ce grand prince y avait élevées; les
par leurs inscriptions, la plus ancienne édifices portaient fréquemment répé-
date certaine des exploitations succes- tée la commémoration des victoires
sives de ces riches carrières , qui ont cl Aménophis; les noms de quarante-
presque suffi à tous les monuments trois peuplades vaincues et soumises
de la Thébaïde édifiés, depuis le regue se lisent encore sur ces tableaux his-
d'Aménophis-Memnon. toriques; sur les débris des colosses
Quand Sésostris voulut orner son de PAménophium de Thèbes on lit

grand temple d'Amon-Ra, à Thèbes, aussi dix-sept noms de peuplades con-


du tableau généalogique de ses an- quises , presque tous différents de la
cêtres, il se garda d*y oublier Améno- grande liste de Sohleb, appartenant
phis III, dont le règne glorieux par très-vraisemblablement à une contrée
des victoires au dehors, et de grands différente , et à des pays où , pour la
établissements au dedans, avait été plupart, la barbe était en usage.
comme le précurseur prophétique du On peut, du reste , se faire une idée
sien. La statue d' Aménophis s'y montre des monuments publics destinés, en
à suite de celles des Menés, des
la Égypte, à célébrer la gloire des rois
Amosis , des Thouthmosis, et d'autres conquérants, en jetant les yeux sur
grands rois prédécesseurs de Sé- les restes d'un colosse de ce même
sostris. Aménophis III , qui décorent le musée
Ce que nous avons déjà rapporté de Paris. Ces restes, tirés de l'Amé-
des magnificences du Memnonium nophium même de Thèbes, ne con-
(YAménophium ou palais d'Améno- sistent que dans pieds et la base
les
phis-Memnon) à Thèbes {supra t pages de sa statue colossale en granit rose.
60, 70, 7 et 3 4), de la statue partante
1 1 Mais on voit, sur les côtés de cette
de ce Memnon (idem), ne peut suffire à base, sculptés en relief dans le creux,
en donner une idée bien complète : les une série de captifs, les mains liées,
ruines modernes en révèlent encore la agenouillés, et dont tous les traits
grandeur. L'Aménophium était un des portent l'empreinte de la physionomie
plus importants édifices de la ville africaine, ou nègre, très - prononcée.
royale. Il égalait en étendue l'immense Leur téte est ceinte d'un diadème, et,
palais de Karnac et quelques débris , auprès de chaque figure, se trouve un
s'élèvent à peine aujourd'hui au-des- bouclier renfermant le nom de la con-
sus du sol En exhaussant celui de la
! trée où commandait chacun de ces
plaine par ses inondations, le Nil a chefs vaincus par le roi. Ce sont là
tout enseveli, la brèche, le granit, les autant de noms de régions de la vieille
noms des dieux et des hommes ; les Afrique où Aménophis-Memnon |>orta

barbares ont converti en chaux toutes ses armes victorieuses : ces noms y
les constructions susceptibles de subir sont au nombre de vingt-trois; ceux
cette éternelle transformation. Il ne de la Nubie et de l'Ethiopie s'y lisent
reste d'entier de ce magnifique édi- sur la face antérieure , et Ton ne re-
.

Digitized by Google
- , •

• t .

* - • #

- •

' - » .

by Google
I
F OYPTE

Google
ÉGYPTË. 317
trouve que deux ou trois de ces noms cienne que l'espèce humaine , les en-
dans la nomenclature bien plus nom- fants mâles participant, en général,
breuse de Sohleb. des traits physiques de la mère , et les
Assez loin des colosses de l'Améno- filles plus généralement de ceux du
phium de Thèbes (supra page 70) du , , père. Voilà donc un témoignage bien
côté de la montagne libvque , et vers antique à l'appui de cette observation
la limite du désert , gisent renversées physiologique ; et , quant à l'union d'un
deux grandes stèles historiques {supra roi d'Kgypte a vec une femme africaine
page 70) , d'environ trente pieds de hau- il y en a d'autres exemples dans les

teur, et de même matière que ces gi- annales et dans les monuments pha-
gantesques statues. La partie cintrée raoniques.
(le haut) des stèles est occupée par des Ici, dans les stèles de Thèbes, la
scènes religieuses. Dans la première, flatterie sacerdotale a ingénieusement
le grand dieu de Thèbes , Amon • Ra découvert un moyen de se faire jour;
tient par la main le roi Aménophis, elle a donné à la reine , femme d'Amé-
et lui pose très -près de sa bouche le nophis , une phvsionomie un peu afri-
symbole de la vie pure et de toutes caine aussi , quoiqu'elle ne filt pas de
lés joies pour chaque jour. Le roi est cette race; les prêtres en ont revêtu
accompagne de la reine sa femme, jusqu'au dieu lui-même : le profil d'A-
coiffée en déesse A thôr, la tête ornée mon-Ra est exactement modelé sur
de plumes; dans la seconde scène, celui d'Aménophis, il est peut-être
et
c'est le dieu Phtha-Socharis qui re- fort heureux pour dieu que ce roi ne
le
nouvelle le même don au roi , suivi de l'ut ni borgne ni bossu. On voit , à la

la reine dans le même costume. Une bibliothèque royale de Paris, un por-


grande inscription de 24 lignes, en trait de ce roi, peint en profil, à
partie mutilées, complète ce tableau; fresque , et qui a été tiré de son propre
et le travail de sculpture de ce beau tombeau. Des figures de sa mère et de
monument est d'une élégance et d'une sa femme accompagnent souvent celle
perfection très-remarquables. de ce roi , ou ne tonnent qu'un groupe
De ces deux grandes stèles , celle de avec elle; les colosses du Memnonium
droite brisée, et une partie de
est sont ainsi composes.
l'inscription a disparu : mais une cir- La légende royale d'Aménophis III
constance particulière donne au bas- s'exprimait en ces termes : a Le dieu
relief de ce monument un intérêt du gracieux , le lion des rois , le roi du
premier ordre, nui touche par plu- peuple obéissant, soleil seigneur (le
sieurs points à l'antique histoire de vérité (prénom royal), le chéri de
l'Orient On a rappelé plus haut que
. Phré, le bien-aimé de Socharis, sei-
dans les sculptures historiques et reli- gneur de Schoti , le fils du Soleil , le
de l'Aménophium, les traits
ieuses dévoué aux dieux, Aménothph ( nom
5 u visage d'Aménophis sont ceux de propre) , le bien-aimé d'Amon-Ra , roi
la race éthiopienne. Dans les deux des dieux. Or, cette légende existe sur
stèles que nous venons de décrire , ce les débris du colosse d'Aménophis, au
roi a les mêmes caractères de Ogure musée du Louvre.
très - prononcés , tirant visiblement On voit , dans le même musée , des
vers ceux de la race nègre. Or, les statuettes funéraires , en serpentine et
monuments ont prouvé que la mère en basalte , représentant le même Pha-
d'Aménophis III , femme de Thouth- raon , et qui ont été recueillies dans sa
raosis IV, nommée Tinau-Hemva, catacombe royale, à Thèbes; et les
était noire et originaire d'Abyssiniç : souyenirs historiques d'Aménophis-
il n'v a donc plus lieu de s'étonner Memnon sont répandus dans tous les
que le fils de cette femme porte sur sa lieux dedomination égyptienne; les
la
usure les marques de cette origine rochers de granit des environs de
africaine, d'après une loi de la nature, Svène portent encore la représentation
qui est vraisemblablement aussi an- dès hommages rendus par des princes

Digitized by Google
318 L'UNIVERS.
éthiopiens au roi Aménophis, à sa sièrement peint et dans lequel on a
,

femme, et à son chiffre royal. déposé le sarcophage du roi , à peine


Le tombeau de ce prince justement ébauche. Cela prouve invinciblement
célèbre a été découvert vers le com-
, que ces rois ordonnaient de creuser
mencement de ce siècle par un mem- leur tombeau en montant sur le trône ;
bre de la commission des sciences et et si la mort venait les surprendre
des arts, qui partagea la gloire de avant qu'il lut terminé, les travaux
l'armée française en Égypte. Chain- tombeau deiueu-
étaient arrêtés et le
pollion te jeune a visité ce même tom- rait incomplet. On peut donc juger à
beau , et nous en a laissé les notions coup sur de la lougueur du règne de
suivantes : chacun des rois, par Taclièveinent ou
Tous les tombeaux des rois de
• par l'état plus ou inoins avancé de
Thèbes, situés dans la vallée de Biban- l'excavation destinée à sa sépulture.
el-Molouk et dans la vallée de l'Ouest, Ilest a remarquer à ce sujet, que les
sont décorés , soit de la totalité , soit règnes d'Aménophis III, de Khamsès
seulement d'une partie des tableaux le Grand et de Hhamses V, furent , en
consacrés, selon que ces tombeaux eîfet, s Ion Manéthou, de plus de 30
sont plus ou moins vastes et surtout ans chacun , et leurs tombeaux sont
plus ou moins achevés. aussi les plus étendus.
« Les tombes roya*es véritablement De nombreux amulettes, en ma-
achevées et comp êtes , sont en très- tières diverses, quelquefois très-ricnes,
petit nombre; celle d'Aménophis III portent le nom et les titres d'Améno-
(Memnon) est de ce nombre, mais sa phis III. On voit , au museedu Louvre,
décoration est presque entièrement un certain nombre de scarabées ornes
détruite : elle existe dans la vallée de de ce nom. Lin de ces scarabées, qui
l'Ouest. appartient à un musée public, porte
« Quelques parois conservées de ce la date de l'an douze de ce roi. Enfin
tombeau sont couvertes d'une simple il existe aussi des figurines , des amu-

peinture, mais exécutée avec beaucoup lettes et des scarabées de la reine


de soin et de linesse. La grande salle épouse de ce Pharaon.
contient encore une portion de la Llle est représentée auprès du, roi
course du soleil dans les deux hémis- dans les divers' tabteaux religieux et
phères mais cette composition est
; les cérémonies publiques où le mo-
peinte sur les murailles sousla forme narque occupe le premier rang. Cette
d'un immense papyrus déroulé, les reine se nommait Taîa.
figures étant tracées au simple trait Son tombeau existe encore dans la
comme dans les manuscrits , et les lé- vallée des tombeaux des reines à
gendes, en hiéroglyphes linéaires, Thèbes, dans la montagne libyque.
arrivant presque aux formes hiéra- L'avenue qui lui sert d'entrée est à
tiques, u cielouvert ; les décorations de la porte
L'examen attentif de ce tombeau a ont été détruites, il n'en reste que
mis en évidence une observation digne certaines parties. Dans les représenta-
de l'intérêt des historiens modernes. tions intérieures, la reine, en rapport
Il n'y a qu'un petit nombre de ces avec diverses divinités , accomplit en
catacombes royales qui soient réelle- leur honneur les cérémonies prescrites
ment terminées; celles des plus cé- par le rituel , joue du cistre en leur
lèbres Rhamsès par exemple. Toutes
,
présence, leur fait des offrandes, et
les autres sont incomplètes. Les unes les invoque avec tous les signes du
se terminent à la première salle , chan- respect.
gée en grande salle sépulcrale ; d'au- Des dates des années 24 et 27 du
tres vont jusqu'à la seconde salle Des règne d'Aménophis-Memnon existent
tombeaux complets; quelques-unes sur des monuments parvenus jusqu'à
même se terminent brusquement par nous , et confirment assez directement
un petit réduit creusé à la bâte , gros- l'opinion des annalistes de l'antiquité

Digitized by Google
• • • • .

• • - • ê • . »
» • • • •

• * .

ff • • •

• • » .

• • • •

* • • • .

x) by Google
Digitized by Google
I
ÉGYPTE. SI9

de Manéthon,detous, le plus digne l'ouvrage de Pharaon Horus , ont été


; roi en cette matière , qui fixent la couverts de mortier par des chrétiens
irée Ju règne de ce roi a 30 ans et qui, sur cette frêle surface, sous la-
îelques mois. quelle se trouvaient ensevelis les ta-
U eut plusieurs enfants : une stèle bleaux de l'ancienne religion , peigni-
i musée de Florence , qui porte en rent des sujets de la nouvelle, les
Été la légende royale d'Aménophis 111, grandes actions des saints, et surtout
mis fait connaître une fille de ce roi de saint George le cavalier. Cest en
omoit Amenset;
des person-
l'un détruisant ce badigeon nage qu'on a
3$es qui figurent dans ce monument retrouvé ces bas- reliefs primitifs, et
porte, en effet, le titre de royal sur tous le nom du roi Horus.
:ribe de la maison de la fille rovale Le temple était dédié à Thô'th, le
.menset : c'était sans doute Padifli- dieu des sciences et des lettres. Un
istrateur ou l'intendant des biens et de ses bas -reliefs représente le roi
-\ en us de la princesse. Horus entant, allaité par la déesse
Aménophis Memnon laissa aussi un Anouké, en présence du dieu Chnou-
1s qui lui succéda à la couronne phis à téte de bélier. Le prénom
ovale : c'est le roi li rus des listes de royal et le nom propre du roi font
lanéthon et des monuments. partie des inscriptions qui accompa-
Le roi Horus monta sur le trône à gnent cette scène mythique. Dans un
a mort de son père, vers Tan 1650 autre bas -relief, une divinité pro-
vant l'ère chrétienne. Ce roi porta le tectrice présente le roi Horus enfant
10m du dieu fils d'Isis et d Os iris la ; au dieu Horus son homonvme, qui
»eté des simples particuliers les en- lui remet le signe de la vie divine.
cueait assez communément à se mettre Dans une autre scène, malheureuse-
ous d'une des divinités lo-
la tutelle ment incomplète, le même roi figu-
a)e< en adoptant son nom , ou des
, rait avecjes dieux Thôth à téte d'ibis,
jiialiuYations dont ces noms étaient le et Horusa téte d'épervier.
trait principal. ISous avons donné plus haut (page
Le cartouc he- prénom du roi Horus 153) la description détaillée du grand
r
rst le 5 de la hjme intermédiaire de spéos de Silsilis, consacré à la grande
la table d'Abydos (voyez notre planche divinité de Thebes, Amon-Ra.au dieu
47 de gauche a droite) , et ce prénom
, Nil, et à Sévek, crocodilocephale, et
parait exprimer les idées Soleil direc- oui , par la suite des temps et par la
teur des mondes, approuvé par le diversité des monuments, est devenu
*oleil.Le nom propre se lit A mon- M en une sorte de musée historique pour
llôr Xem-Seb. Le serviteur d Amon, les annales de la XVIII e et de la XIX#
Horus... Le texte arménien de la ehro- dynastie.
nique d'Knsèbe assure que ce prince Horus contribua aussi à orner la
tut à la fois le successeur et le lils partie du palais de Louqsor, qui fut
iA ménophis- Memnon, et aucun té- édifiée par son père Aménophis-Mem-
moignage historique ne contredit cette non; plusieurs des grandes colonnes
tradition écrite. sont ornées de bas -reliefs qui por-
Comme tous ses prédécesseurs , la tent le nom du roi Horus. Son nom
pieté du roi Horus se manifesta par et son image furent religieusement
de magnifiques édifices élevés pour le placés par Sésostris dans le tableau
service des dieux ; et sa munificence de ses illustres ancêtres. Le temple
rovale s'étendit même au delà de l*É- d'Amon-Ra, dans la vallée d'EI Assa-
gvpte: à Ghébel-Addeh, en Nubie, sif a Thebes, fut aussi l'objet des
on en voit encore les restes. C'est un soins de ce roi ; on y lit, pendant son
petit temple creusé dans le roc. Par règne , des embellissements et des res-
une grande singularité, que l'histoire taurations.
doit soigneusement annoter, la plu- Mais les plus beaux , les plus pré*
part des bas-reliefs du temple , qui fut cieux monuments historiques du règne

Digitized by Google
320 L'UNIVERS.
du Horus sont réunis dans le
roi Ra. Cette légende royale est répéta
riche musée égyptien de Turin. Nous à droite et à gauche du trône qui porl
en donnons l'exacte description à nos le souverain des dieux , ainsi que dar.

lecteurs, qui y trouveront une preuve un grand tableau carré (B), gravé su
de plus de l'application constante de le encadre
dossier de ce trône. Cet
tous les monarques égyptiens à mul- ment renferme deux colonnes perpet
tiplier en leur honneur , comme à la diculaires de très-beaux hiéroglyphe
gloire des dieux et des ancêtres, les exprimant les idées suivantes : lie n
monuments des arts : comme s'ils du peuple obéissant, seigneur de l'un
avaient pensé à multiplier les preuves vers, le soleil directeur des inondes
de leur grandeur, et les documents l'approuvé par Phré , le lils du soleil
de leur propre histoire, que tant de dominateur des régions, le chéri d'An
munificence seule pouvait faire parve- mon Hôr-Nem-rseb, vivificateur comm
nir jusqu'au sein de la civilisation le soleil pour toujours. Le roi Horu

moderne, pour y séduire l'esprit et prend, dans ces diverses légendes, I

la raison , pour y exciter à la fois titre de chéri d'Ammon, parce qu


l'intérêt et l'admiration, pour y faire se trouve la en rapport avec ce dieu
chercher avec fruit les annales cer- comme, sur les statues de la déess
taines des premiers temps de V intelli- Sardienne, il prenait le titre de cha
gence humaine. e cette déesse.
Le premier des deux monuments Le second monument du musée roy;
du roi Horus , que nous avons à dé- de Turin que nous devons faire con
crire, est un groupe de deux figures, naître, est non moins intéressant qu
de pierre calcaire blanche cristallisée le premier sous le rapport de fart , e

(voyez notre planche 85 , n° 1 ). La l'est davantage pour la science. Il es

figure principale est celle du dieu Amon- en granit noir, et ses proportion:
Ha; quoique assise, elle n'avait pas étaient de six à" sept pieds avant qui
moins de huit pieds de hauteur. Le fût gravement oifeuse à son sommet
roi des dieux est figuré avec une tète C'est aussi un groupe de deux ligures
humaine dont les traits, pleins de l'une représente aussi le roi iloru:
grandeur, sont exécutés avec une ad- assis sur un trône; une femme esl
mirable finesse de travail. Sa poitrine assise a ses côtés. La main gauche er
est ornée d'un collier à huit rangs repos porte le signe de la vie divine
terminé par des grains en forme de et son bras droit relevé contre sa poi-
perles. Les deux bras , portant des bra- trine , porte son sceptre, symbole
celets , reposent sur les cuisses ; et de la vigilance des dieux et des roU
de la main gauche, ce dieu tient le sur les choses humaines. La coiffure
signe de la vie divine. de la femme caractérise cette ligure
A côté du trône du dieu , et debout, comme étant celle d'une reine; elle a
est le Pharaon Horus, taillé dans la son bras gauche sur l'épaule du roi;
même masse, et n'avant que quatre un vautour, les ailes pendantes, cou-
pieds de hauteur ; mais cette figure est vre la tête de la princesse , jadis ornée
exécutée avec la même finesse. Le bras aussi de deux longues plumes : coiffure
droit du roi repose sur l'épaule gauche et insignes particuliers à toutes les
d'Ammon ; la coiffure royale est dis- reines d'Égypte figurées sur les temples
tinguée par l'Urœus, symbole delà et les palais. On voit ainsi caractérisée
Siiissance suprême; une ceinture sou- la reine Taïa, mère du roi Horus, sur

ent le vêtement court et léger qui le les monuments d'Éléphântine, offrant


couvre , et un cartouche horizontal des (leurs et des fruits au dieu Chnou-
placé en forme d'agrafe (A) , sur le phis; à Philaî, la reine Cléopdtre,
milieu de la ceinture, contient les titres femme de Ptolémée Ësergète H, et

et les prénoms du prince le dieu vivant


: à Dendérah une impératrice romaine:
et gracieux, soleil directeur des mon- c'est la coiffure consacrée à la déesse

des, approuvé par Phré, chéri d'Amou- Athyr.

Digitized by Google
Digitized by Google
• t
• • «

-
* 1 I » ».

» k - t I • • . « •
• • . s * •
• •.*•*
. ». . « * » . • »

Digitized by Google
* «

» •

» • •.

».

»

• • « „

Digitized by Google
EGYPTE. 321

La légende hiéroglyphique gravée sur pas moindre pour la philologie; car


e devant du trône , à côté de la statue ses formules principales rappellent
lu roi Horus, a disparu en entier; immédiatement à l'esprit le texte de
mais il reste de celle qui est du côté l'Inscription de Rosette, et les deux
Je la reine dix-neuf signes parmi les- décrets nous donnent l'idée des mêmes
quels se trouve heureusement son nom honneurs rendus à deux roisd'Égypte,
propre. Cette princesse, qualifiée de à douze cents ans de distance, au roi
chérie dlsis, la puissante mère divine, Horus et à Ptolémée-Épiphane témoi-;

ie nommait Tmahumot, la mère de gnage mémorable de la perpétuité des


j grâce , oumère gracieuse.
la usages de l'Egypte, jusqu'au moment
Le derrière du trône sur lequelces où elle ne fut plus qu'une province du
A eux figures sont assises était orné grand empire et où elle disparut , avec
,

[Tune-grande scène sculptée qui occu- I ancien Orient tout entier, devant la
pait tout le haut du dossier; il n'en civilisation nouvelle et secondaire, fon-
subsiste plus que des fragments. Au- dée et propagée par Pépée romaine.
dessous de ce bas-relief est une longue Les signes qui se rapportent à la
inscription hiéroglyphique, composée figure defemme du mène groupe
la
de 26 lignes et sculptée avec un très- nous ont appris qu'elle se nommait
grand soin. Les premières lignes de ce Tmahumot, la mère de la grâce; as-
décret rendu par une autorité publique sociée ici aux honneurs royaux rendus
contiennent les louanges du roi sei- au Pharaon Horus, elle dut, par sou
gneur de r uni vers, soleil directeur des rang, avoir quelques droits à cette su-
mondes, approuvé par Phré, fils du prême distinction : or, Manéthon nous
soleil, chéri a Amon-Ra, Hôr-Nem-Neb apprend que le roi Horus eut pour suc-
( le roi Horus) , qui a reçu des dons de cesseur immédiat sa propre fille, qui
Ncîth , sa puissante mère , et d'Amon- régna pendant douze ans après lui. La
Ita , roi des dieux. Ce Pharaon est en figure de femme du groupe de Turin
outre qualifié d'image d'Harsiési , qui est donc celle de cette reine , fille d'Ho-
Va dirigé; et le dieu Horus lui donna rus; son nom est inscrit dans le car-
la souveraineté sur la région infé- touche royal qui se lit dans le bas-relief
rieure. On énumère ensuite les bien- sculpté sur un des côtés du mêmt
faits du roi Horus envers l'Egypte; groupe.
on le compare aux dieux Phré , Thôth Ainsi Tmahumot succéda au roi
et Phtha. On ordonne aussi de pla- Horus son père, et, après avoir été as-
cer dans un lieu distingué des temples sociée à ses honneurs; Manéthon lui
la statue de ce roi , ainsi que celle accorde douze années de règne; on
<le*a ftUe, la reine Tmahumot, image croit que le successeur de cette reine
(le la grande mère (Néïth) , et dont fes était son frère, fils aussi du roi Horus :
louanges paraissent mêlées à celles des on peut donc conjecturer que Tmahu-
dresses Saté , Sonteb , Bouto , Isis et mot monta sur le trône parce que le
aNephthys. On institue de grands hon- jeune âge de son frère ne lui permet-
neurs à rendre au roi Horus, parmi tait pas de porter la couronne. On as-
lesquels on indique les panégyries liées signe trente-huit ans et demi aux deux
a celles du dieu Phré; les titres décer- règnes successifs d'Horus et de sa fille.
nes au roi et qui doivent accompagner La belle coudée du mqsée royal de
ses images sont relatés dans la suite Turin , habilement décrite par le savant
du texte; il est ordonné d'inaugurer Gazzera, remonte au règne d'Horus,
de semblables images dans les temples et tire un nouveau prix de sa haute an-
de l'Kgypte, et divers ordres de prê- tiquité par rapport aux institutions
tres sont chargés du service de ces modernes.
images royales, consacrées à des céré- Rhamsès 1 er fut le successeur d'Ho-
monies religieuses dont elles doivent rus, son père, et de sa sœur Tmahu-
être l'objet : texte important par ses mot; il monta sur le trône vers l'an
dispositions, et d'un intérêt qui n'est 161» avant l'ère chrétienne. La table
e
21 Livraison. (Kgvpte.) 21

Digitized by Google
py L'UNI r
ERS
royale d'Abydos et les autres monu- cette date se lit en tête du monumen
Cette inscription historique est cou
ments analogues placent immédiate-
posée de sept lignes, et j'en ai sousl
ment après le cartouche royal du roi
yeux la traduction suivante de la mai
Horus, un autre cartouche qu'on re-
de mon frère, qui en a aussi restito
trouve, sur beaucoup d'autres monu-
plupart des lacunes.
ments, constamment accompagne du la

nom propre Rhamsès : ce fut le pre- Texte de l'inscription


mier des princes de ce nom, dont quel-
ques-uns ont été placés par l'histoire
Ve ligne. L'an II , le 22 du mois é
méchir, vivant le dieu puissant,
au nombre des plus grands rois de le seigneur d
commandant des rois,
l'antiquité.
la région supérieure et de la régitf
Rappelons en passant que la reine
inférieure, dominant en roi comme.,
Tmahumot ne fut pas inscrite dans ces
tables rovales et ne dut pas l'être ces
, :
= 2* le roi stable et vigi
soleil
lant de Harsiési (dieu qui ré
(chéri)
tables généalogiques par génération
appelaient le nom du fils à la suite de
side dans Behni (*)... =
3' domina*
Tmahumot et Rhamsès sur le trône du dieu de la vie connu,
celui du père :
son père le dieu Phré, supérieur à tout
ne formaient qu'une seule génération;
Voici que Sa Majesté étant dan
Rhamsès y fut donc inscrit après son
Ibrim (**) accomplit divers actes de..
père Horus.
r
Le cartouche de Rhamsès I* est le
= e
4 piété envers le père Amon-li:'
Phtha qui préside au mur du midi sei
quinzième de la ligne intermédiaire de
,

gneur de la vie du monde terrestn


la Table d'Abydos; on le voit aussi dans
(et envers) tous les dieux de TÉgypte
les tableaux du Rhamesséum et de Mé-
c'est pourquoi ils lui accordèrent que..
dinèt-Habou, et ce prénom royal si-
gnifie soleil stable et vigilant. On le
= e
5 soumis dans le cœur... pour J\i
dorer; que toutes les parties de la tern
retrouve à Louqsor, à Karnac , à Ouadi-
entière lui servent toute espèce d'ot-
Halfa, et dans son propre tombeau,
frandes; que le> Neuf-arcs fussent ren-
suivi du nom propre Rhamsès.
Son règne n'eut pas une longue du-
versés (sous les sandales)... 6 e et = il

fut ordonné de servir Sa Majesté le roi


rée; cependant il nous est parvenu plu-
soleil stable et vigilant, \e vi-
sieurs témoignages de la piété de ce
vifié, qui a gracieusement présenté des
prince. Les quatre dernières grandes
offrandes à son père Horammon qui
colonnes du temple de Louqsor furent
terminées et décorées par Rhamsès I ,
er réside (dans Behni)... 7 e dans son =
temple, des liqueurs précieuses (d'au-
et les bas-reliefs qui s'y sont conservés
tres offrandes sont désignées avec leur
portent son prénom royal et son nom
quantité en chiffres) et en même temps
,
propre.
(il a comble de biens) les propliètes et
La Nubie égyptienne participa aussi
les prêtres, remplissant le trésor du
aux bienfaits ou prince le temple cons-
:

dieu d'hommes de femmes de race


et
truit par Aménophis II, l'un des pré-
rr pure, pris parmi de Sa Ma-
les captifs
décesseurs de Rhamsès I à Ouadi-
,
jesté le roi soleil stable et vigi-
Halfa et dédié à Horammon (Annnon
,

générateur), éprouva les effets de sa lant, vivifié aujourd'hui comme (à


toujours).
munificence. En fouillant dans les rui-
nes de cet édifice, les voyageurs fran- La date égvptienne de ce monument
remonte à l'année 1618 avant l'ère
çais trouvèrent, engagée dans une
muraille en briques de ce temple, une chrétienne.
er
Le nom de Rhamsès I se retrouve
frande stèle sur laquelle sont écrits
acte d'adoration des divinités du tem- aussi sur des scarabées et plusieurs
ple, et la liste des dons oui lui sont
,r
faits en même temps par Rhamsès l . (*) Nom égyptien de la ville de Ouadi-
Cela se passa le 20 du mois de mec hir llalfj.

de la deuxième année de son règne : (*•) Lieu >oisin dcBclini.

Digitized by Google
ÉGYPTE. 323

autres objets portatifs exécutés durant fils, héritier de la couronne royale par
son règne. sa naissance. Jl monta sur lé trône
Nous avons dit cpj'il eut une courte vers 1610 avant l'ère chrétienne.
durée; il ne dépassa pas neuf années, Son prénom royal est le seizième
et , au défaut d autres renseignements cartouche de la ligne intermédiaire de
pius directs, on aurait pu déduire cette la table d'Abydos : dans la table royale

courte durée de Pétat du tombeau de du Memnonium ou Rhamesséum, Sé-


ce Pharaon. Il existe dans la vallée de sostris a fait placer ce cartouche le
Biban-el-Molouk à Thèbes. Creusée premier dans la série de ceux de ses
dans le roc comme toutes les autres prédécesseurs. Dans le tableau de Mé-
catacombes rovales, celle de Rham- dinet-Habou, le prénom royal de
sès I"
était enfouie sous les décombres Ménephtha I" a le même rang, et, dans
de la montagne. Mon frère la Gt dé- les trois listes, le cartouche royal de
btover au mois de mai 1829, et il re- son père le précède immédiatement :
connut qu'elle ne consistait qu'en deux ces filiations et l'époque du règne du
er
corridors sans sculptures , se terminant fils de Rhamsès I ne sauraient donc
par une salle peinte seulement, mais être plus certainement déterminées.
encore d'une étonnante conservation. Le plus célèbre monument du règne
Cest dans cette salle unique qu'est de Ménephtha c'est son tombeau : bien
placé le sarcophage du Pharaon. Ce des personnes encore se souviennent
sarcophage est en granit, mais il n'est d'en avoir vu, à Paris, le modèle dans
orné que de peintures Rhamsès I er : les proportions du monument même;
régna trop peu de temps pour que son il lut découvert par l'infortuné Bel-
tombeau pût être décoré par les sculp- zoni , mort victime de son zèle pour
tures. Nous avons déjà averti que la les découvertes historiques : c'est lui
magnificence des sculptures royales qui en avait reproduit les principales
dans les tombeaux est toujours propor- salles au rez-de-chaussée d'une maison
tionnée à la durée des règnes; le pre- de Paris, au moyen du moulage en
mier édifice qu'ordonnait un roi, au plâtre des bas-reliefs de ce tombeau,
moment où il montait sur le trône, dont les empreintes coloriées repré-
c'était son tombeau. sentaient toutes les sculptures origi-
On ne connaît pas le nom
de la reine nales.
femme de Rhamsès V;
en eut une il Les critiques modernes, à l'exemple
cependant, puisque son successeur était des premiers investigateurs des noms
son fils ce fait historique est mis hors
: royaux des souverains égyptiens, ont
de doute par une courte inscription donné plusieurs prénoms a ce même
généalogique eopiée par M. Wilkinson, prince, selon la diversité des monu-
et qui se lit : le soleil gardien de la ments où son nom se trouvait repro-
térité approuvé par le soleil (Rham- duit avec quelques signes différents.
sès III), fils du soleil stabilitevr de Champollion le jeune le nomma d'a-
justice (Ménephtha I« r ),jto du soleil bord Ousiréi. et lui supposa un frère,
stable et vigilant (Rhamsès I er ); mo- qui, usant du même cartouche pré-
nument d'un très-haut intérêt, qui se nom, lui succéda, et se nomma Man-
traduit par le tableau généalogique douél. Le savant français fut conduit
suivant, donnant quatre rois et trois à cette supposition : 1* par la confor-
générations d'une incontestable filia- mité des cartouches prénoms unis à des
tion. cartouches noms propres différents;
er
RHAMSÈS I . 2° par l'autorité même de M a net lion,
I . qui , dans ses listes, telles qu'elles nous
MÉNEPHTHA 1". sont parvenues, donne deux frères,
tous deux nommés Therrès ou Acher-
RU A MM s II, RHAMSÈS III. sès, pour successeurs a Rhamsès 1 ,
er

est donc hors de doute que le suc-


Il accordant à chacun d'eux douze années
er
cesseur de Rhamsès 1 fut aussi son successives de règne. Mais l'examen
21.

Digitized by Google
h . L L l « L t
314 L'UNIVERS.
attentif des grands monuments de la sage de Y Itinéraire inédit de Cham-
Thébaïde a reconnaître que ces
fait pollion le jeune, qui a, le premier,
cartouches noms propres , quoique va- reconnu et décrit celte intéressante lo-
riables dans quelques-uns de leurs li- calité.
gnes, et unis constamment au même « 6 novembre 1828. —
Notre travail
prénom royal, n'appartenaient qu'à dans les hypogées de Beni-Ha&san-el-
un seul et même prince, et que l'arran- Oadim étant terminé, j'ordonnai de
gement le plus ordinaire des* signes qui faire voile sur Beni-Hassan-el-Aamar,
composent son nom propre, le fait lire où nous arrivâmes à onze heures du
Phtahmen-Boréî, et plus euphonique- soir pour mouiller dans un bras du
ment Ménephthah-Boréi , le serviteur Nil, au milieu de deux rives couvertes
de Phtha. Le nom d'Osiris se trouve de palmiers, qui donnaient à cette lo-
aussi dans les cartouches sculptés, soit calité l'aspect d'un lac environné de
dans le tombeau du prince, soit sur plantations. Le village se cacbe dans
d'autres édilices; on y lit aussi le nom ce fouillis de palmiers , et on le nomme
d'Ammon à la place de celui du dieu Beni-Hassan-el-Aamar, Ben i- Hassan le
Phtha, quand ce prépom est écrit sur les nouvel habité, parce que c'est un vil-
temples de Thèbes , et c'était presque lage nouvellement bâti après la des-
une obligation imposée par la hiérarchie truction et l'incendie du Beni-liassan-
divine. Le nombre des variantes de ce el-Gadim {le vieux), par les ordres
nom propre s'élève jusqu'à cinq; mais d'Ibrahira-Pacha, qui voulait détruire
Je cartouche prénom , consacré par la ce repaire de brigands; aussi ce pars
religion, celui qui faisait foi dans les est aujourd'hui aussi sûr que le reste
annales sacrées, est invariable le so-
: de l'Égypte.
leil stabiliteur de justice. Ce même «« J'avais fait amarrer les mâasch
souverain adopta plusieurs légendes devant ce village, dans le dessein de
pour ses enseignes : celle qui est sculp- visiter un monument curieux qu'on
tée sur le> piliers du Spéos-Artemidos nous avait dit exister dans la monta-
le qualifie de Uaroéris, le puissant Î;ne. Nous partîmes donc de bonne
vivificateur du monde. leure, le 7, à pied, en nous diri-
L'histoire écrite ne nomme pas geant droit à l'est sur la montagne
même ce prince, dont le règne paraît arabique, et vers l'ouverture d'une
avoir été illustré par des faits mémo- vallée que nous apercevions devant
rables ; elle se tait sur son nom comme nous. Quittant bientôt le terrain cul-
sur ses actions; le langage des monu- tivé nous entrâmes dans le désert
,

ments peut heureusement suppléer à et après vingt minutes de marche sur


er
ce silence : Méncphtha I mérita par la droite nord) du ravin, ou Ouadi,
lui-même une place honorable dans qui sort de la vallée, on nous montra
les annales égyptiennes, et, de plus, deux grands emplacements dans les-
il fut le père de Sésostris. quels on trouve une quantité incroyable
Les monuments du règne et de la de momies de chats, enveloppées une à
puissance de Ménephtha subsistent une, ou plusieurs à la fois, dans de sim-
encore dans toutes les parties de l'em- ples nattes. On reprit le chemin de la
pire égyptien , dans la basse et dans la vallée en repassant sur la rive gauche
haute Êgypte, sur la mer Rouge ainsi du Ouadi, et nous arrivâmes en peu
que dans la Nubie, et quelques grandes de temps à son entrée qui est fort pit-
villes de l'Europe sont ornées des dé- toresque, quoiqu'elle présente un çrand
bris de la magnificence de ce grand tableau de sécheresse et d'aridité.
roi. C'est du désert tout pur, et des mu-
C'est aussi à l'exploration des sa- railles de roches fort élevées, percées
vants français que l'histoire est rede- ù jour sur la droite par les nombreux
vable de la connaissance d'un des plus hypogées et les puits qu'on y a creu-
intéressants monuments du règne do ses, non pour recevoir des momies
Ménephtha I er . Je transcris ici le pas- humaines, mais des momies de chats

Digitized by Google
*
- « - *

» « « « *
«
« » t

• « * . # •
* « • «

• .
,

# « *

• » • i

• « i < « • . •

»...

Digitized by Google
-
» * # i
*
f
• « » «

» # « »
s t * m
*

» # « «
* * * »
* •

• • *
» **a
••A
«...
» « * « « é «

»...
. »

)igitized by Google
.V
«/ c• «.
• > - «

- •
4

-
»

« % «

• •v •
4
"*
»

)igitized by Google
Digitized by Google
EGYPTE. 835

et de quelques autres quadrupèdes. La de débris de momies de cette espèce


montagne formant le cote gauche de la d'animal.
allée est aussi percée de quelques « Mous ne rentrâmes au mâasch qu'à
grottes, mais qui n'offrent aucun in- la nuit close, et après souper on partit
térêt; .celles de droite ne porient au- pour Antinoé, où nous arrivâmes dans
cune sculpture ni inscription, si l'on la nuit. »
en excepte la porte d'un grand hypogée Ce spéos, dédié à la déesse Pascht
de chats qui a été décorée sous le
y
ou Bascht ( Bubastis , A rte m s , Diane)
i

règne d'Alexandre, d'Alexandre le


fils creusé dans la montagne, fut donc com-
Grand, c'est-à-dire de 317 à 21)7 avant mencé par le Pharaon Thouthmosis IV,
l'ère chrétienne. continué, décoré et terminé par Mé-
• C'est a une courte distance de cet nephtha I er . Il est orné de beaux bas-
hypogée, et du même côte de la mon- reliefs coloriés, dont les sujets rappel-
tagne, après avoir tourne une roche lent le culte de cette déesse, à laquelle
qui avance sur la vallée, qu'on trou\e le chat était consacre comme son em-
une grande excavation soutenue par blème vivant. Dans un tableau sculpté
huit piliers en partie détruits, décorés et peint, le roi Ménephtha est l'objet
de sculptures peintes et de grandes ins- spécial de la protection de la déesse :
criptions hiéroglyphiques. C'est un elle leprésente au dieu Ammon , et lui
temple dédié à la déesse Pascht (Bu- départit en plusieurs scènes tous les
bastis), et dont les ornements ont été dons que les dieux pouvaient accorder
commences par le roi Thouthmosis IV, aux rois. Les inscriptions attribuent la
et continués sous son descendant, le construction finale du temple à Mé-
Pharaon Ménephtha, dans le nom du- nephtha, qui consacra aussi un sanc-
quel, ici comme ailleurs, on a effacé tuaire aux dieux seigneurs du lieu :

une figure, qui est restée très-visible toutes les dédicaces portent le nom de
dans le dernier cartouche à gauche de ce roi.
la frise décorant la paroi ouest du cou- A Silsilis, sur la rive gauche du Nil,
loir. Cette grotte n'est autre que Ja on voit encore une chapelle creusée
localité même nommée Speos-Artemi- dans le rocher sous le règne de ce
dos , grotte de Diane (Bubastis), ap- prince, et il en reste deux bas-reliefs
pellation donnée par les géographes ui témoignent, par leur finesse et leur
anciens à une position occupant la léganee, de l'avancement et du per-
place de l'une des Beni-Hassan d'au- fectionnement de l'art à l'époque de
jourd'hui. Ménephtha.
« La journée entière se passa à des- Le palais de Kourna, à Thèbes, fut
siner les bas-reliefs et les inscriptions fondé par ce roi, édifié en partie par
de ce lieu sacré, et à développer une lui , terminé par Sésostris, et ce palais
foule de momies de chats et de chiens. est, sous le rapport de l'art, un des
Je suis persuadé que tous les trous et édifices les plus remarquables de l'É-
excavations pratiqués dans cette mon- gypte.
tagne s'ont eu pour objet que la con- Quoique très-inférieur par l'étendue
servation et le dépôt des momies de aux grands édilices de Thèbes (le
Panimal consacré a Bubastis, le chat, Rhamesséum et les masses de Médinet-
qu'on y trouve en si grande abondance. Habou), le palais de Kourna, nommé
Le fond de la vallée, entre le Ouadi âfénephthéum, du nom de son fonda-
et la grotte de Pascht, est encore une teur, mérite cependant un examen par-
nécropole de chats disposés par bancs ticulier, puisqu'il appartient aux temps
et plies pour la plupart dans des nat- pharaoniques et remonte à l'époque la
tes , les chats d un rang élevé étant plus glorieuse des annales de la monar-
renfermés dans les nombreux hypogées chie égyptienne. Son ensemble présente
creusés dans la montagne, et en par- un aspect tout nouveau , et si son plan
ticulier dans celui
1
du temps d Alexan- général réveille l'idée d'une habitation
dre, dont sont encombrés
les couloirs particulière et semble cacher la forme

Digitized by Google
326 L'UNIVERS.
d'un temple, la magnificence de la dé- lorsqu'il s'agit d'époques bien anté-
coration, la profusion des sculptures, la rieures aux premiers essais des maîtres
beauté des matériaux et la recherche immortels qu'a produits l'inépuisable
dans l'exécution prouvent que cette génie des Grecs.
habitation fut jadis celle d'un souve- Nous résumons ici, sur cet impor-
rain riche et puissant. tant sujet, les observations et le juge-
Ce qui reste de ce palais occupe seu- ment de Champollion le jeune : nous
lement l'extrémité d'une belle façade, lui empruntons aussi la suite de la des-
sur laquelle existaient aussi jadis d'au- cription du Ménephthéum.
tres constructions liées sans doute avec Sur les quatre faces du dé des cha-
l'édifice encore debout. Sur le même piteaux du portique existent, sculptées
axe que ces arrachements de construc- avec beaucoup de recherche, les le-
tions rasées, au milieu de bouquets de tendes royales de Ménephtha ou celles
Ealmiers et de masures modernes en e son fils les noms et prénoms de
:

riques crues, s'élève un portique ces deux Pharaons sont également ins-
ayant plus de cent cinquante pieds de crits sur le fût des colonnes, mais ac-
long, trente de hauteur, et soutenu colés et renfermés dans un tableau
par dix colonnes, dont le fût se com- carré; témoignage précieux de la pieté
pose d'un faisceau de tiges de lotus, obséquieuse de R ha m ses le Grand en-
et le chapiteau des boutons de cette vers Ménephtha son père.
même plante tronqués pour recevoir le Le rapprochement de ces deux noms
dé. Cet ordre, qui n'est point parti- royaux trouve son explication natu-
culier aux constructions civiles, puis- relle dans la double légende dédica-
qu'on le retrouvait dans les temples toirequi décore l'architrave du portique
d'Éléphantine et d'Élethya, appartient sur toute sa longueur : cette inscrip-
sans nul doute aux vieilles époques de tion est ainsi conçue: « L'Aroéris
l'architecture égyptienne , et ne le cède puissant, ami de la vérité, le seigneur
sous le rapport de l'antiquité, qu'aux de la région inférieure, le régula-
seules colonnes cannelées , semblables teur de l'Egypte , celui qui a châtfé les
au vieux dorique grec dont elles sont contrées étrangères, l'epervier d'or,
le type évident, et que l'on trouve soutien des armées , le plus grand des
presque exclusivement employées' dans vainqueurs , le roi soleil gardien de la
les plus anciens monuments de l'É- vérité, l'approuvé de Pnré, le fils du
gypte. d'Ammon, /îkm^5, a
soleil, l'ami
La sculpture n'était pas moins per- exécuté des travaux en l'honneur de
fectionnée sous le règne de Méneph- son père Amon-Ra, le roi des dieux ,
tha 1 er ; les bas-reliefs de ce temps sont et embelli le palais de son père, le roi
remarquables par la simplicité du style, soleil stabiliteur de justice, le Gis du
la finesse d'exécution et l'élégante pro- soleilMénephtha- Borei. Voici qu'il a
portion des figures. Un peu plus tard, ( crande lacune) les pro-
fait élever...
sous le règne de Sésostris, fils de Mé- pylons du palais, et qu'il l'a entouré
nephtha, la sculpture, traitée avec de murailles de briques, construites à
moins de soins, annonce la prochaine toujours : c'est ce qu'a exécuté le fils
décadence de l'art le Ménephthéum
: du soleil , l'ami d'Ammon Rhamsës.

favorise ce rapprochement , cette com- Cette dédicace annonce sans incerti-
paraison, cette déduction, et elle se tude que le palais de Kourna fut
révèle surtout par la différence qui fondé et construit par Ménephtha I er ,
existe entre les bas-reliefs de la salle et que ce fut Sésostris qui le termina.
hypostyle et ceux de la première salle Plusieurs des bas-reliefs qui décorent
de droite, et en général par toute la l'intérieur du portique et l'extérieur
partie du palais a droite de la salle des trois portes par lesquelles on pé-
hypostyle décorée durant le règne de nètre dans les appartements du palais,
Sésostris. Ces faits importent beaucoup représentent en effet le roi Ménephtha
à l'histoire de l'art en général , surtout rendant hoiuinage à la divinité thé-

Digitized by Google
- •
••••
•••
• • •• •
•••• ••••
• • • • •
•• • •
••••
• • •

• • • «

•••••
...
• * • • •

• • ••
• • • •

Digitized by Googl
EGYPTE 327

bai ne aux autres divinités de l'E-


et fleurs, ou l'image de son prénom
gypte , ou recevant de la munificence mystique à la triade thébaine , et par-
des dieux les pouvoirs royaux, et des ticulièrement au chef de cette triade
dons précieux qui doivent embellir et Amon-Ra, sous sa forme primordiale
prolonger la durée de sa vie mortelle. et celle de générateur. Les parois,
La porte médiale du portique con- moins étendues, à droite et à gauche
duit dans une salle d'environ quarante- de la porte principale , sont couvertes
huit pieds de long sur trente-trois de de bas-reliefs représentant les mem-
large ; c'est la plus considérable du bres de cette triade adorés par un
j liais : six colonnes, semblables à autre roi , l'un des successeurs de Mé-
celles du portique, soutiennent le pla- nephtha.
fond , subsistant encore en très-grande A Karnac , les souvenirs de la gloire
partie; deux longues inscriptions, de Ménephtha sont aussi retracés dans
toutes deux au nom de Ménephtha I er , une foule de bas-reliefs concernant les
servent d'encadrement aux vautours guerres de ce roi en Asie ; monuments
ailés oui décorent ce plafond. L'inscrip- au moins aussi parfaits de style et d'exé-
tion de droite exprime la dédicace gé- cution que ceux d'Ibsamboul même, et
nérale du palais faite par son fonda- qui rendent témoignage de la sollici-
teur à la plus grande des divinités de tude de ce prince pour le perfection-
TKgypte : nement des arts en les protégeant.
«... Le seigneur du monde, soleil Il consacra aussi un temple au dieu

stabiliteur de justice, a fait ces cons- Phré dans le lieu nommé aujourd'hui
tructions en l'honneur de son père Wadi-el-Moyé, situé à deux journées
Amon-Ra, le seigneur des trônes du du Nil dans le désert , sur la route de
,

monde, et qui réside dans la divine Bérénice.


demeure du fils du soleil Mènephtka- Le quai moderne d'Éléphantine est
Borel à Thèbes , sur la rive gauche : construit avec des débris d'antiques
il (ce roi) a fait construire Y habita- monuments, parmi lesquels se trou-
tion des années en pierre
(le palais) vent des fragments des édifices élevés
de près blanche et bonne , et un sanc- dans cette île par Ménephtha I rr Une .

tuaire pour le seigneur des dieux. » stèle de Sabout-el-Kadim est datée du


er
Et l'on apprend , par cette inscrip- 1 tôbi de la VII* année du règne
tion , le nom même de ce grand éai- de ce roi ; et à Silsilis , un temple mo-
fice de Kourna : les habitants de Thèbes nolithe porte la date de l'an XXII*
rappelèrent la demeure de Ménephtha, de ce même règne.
ou Ménephthéum , du nom de son fon- On voit au musée du Vatican une
dateur, et elle explique le double ca- statue d'Amon-Ra dédiée par Mé-
ractère de temple et de palais qu'on nephtha 1 er , dont le nom se lit à la
remarque dans cet édifice, qui, par base du monument.
la disposition de son plan, annonce Le magnifique obélisque de la place
l'habitation d'un homme, et, par ses du peuple , à Rome , est aussi un ou-
décorations , celle d'une divinité. vrage de Ménephtha. Le cartouche
La seconde inscription de ce même nom propre Ménephtha - Borei , est
plafond , celle de gauche , avertit que conservé intact dans les bas-reliefs du
cette grande salle fut le manôskh y la bas des faces septentrionale et occi-
salle d'honneur, le lieu où se tenaient dentale; mais la figure assise, à bec
les assemblées religieuses et politiques crochu , qui termine ce nom propre et
où siégeaient les tribunaux de justice: précède les deux feuilles, est martelée
c'est aux salles de cet ordre qu'on a sur trois faces de l'obélisque; toute-
donné le nom vulgaire de salle hypo- fois elle y est encore visible. Cette sin-
stvle. De nombreux tableaux scuîptés gularité a été remarquée aussi sur
décorent celle du Ménephthéum le : d'autres monuments de ce même roi
fondateur du palais se voit dans tout existants encore en Egypte ; l'image de
ces bas-reliefs, offrant des parfums, des •
ce même dieu, gravée sur des mouu-

Digitized by Google
328 L'UNIVERS
mcnts d'époques diverses en a été an-
, montagne , et dont la direction était
ciennement effacée c'est un fait re-
: opposée à celle de l'entrée véritable
marqué jusque dans les lieux les plus du tombeau. Belzoni a publié eu un
dignes de respect , les tombeaux no-, grand atlas les principaux sujets sculp-
tamment dans celui du roi Ménephtha tes et peints dans ce tombeau , dont
lui-même. l'étendue donne une assez longue du-
Ce tombeau existe dans la vallée de rée au règne de Ménephtha I* r ; on
Biban-el-Molouk ; il attire principa- peut la porter, en effet , jusqu'à 32
lement l'attention du voyageur par années et 8 mois.
l'étonnante fraîcheur des peintures et C'est aussi dans le tombeau de ce
er
la finesse des sculptures qui le dé- roi (Ménephtha I ) que Champollion
corent. Il fut découvert par le vova- le jeune observa et recueillit la plus
geur Belzoni , et nous avons déjà ancienne représentation d'un fait as-
donné (page 30) un extrait de la des- tronomique et civil d'un très-haut in-
cription de cette magnifique sépulture térêt dans l'histoire des institutions
royale , où l'on a recueilli des données égyptiennes : la représentation , dans
positives sur les connaissances que les les peintures du plafond, de l'intime
Égyptiens avaient, à cette époaue re- liaison du lever heliaque de l'étoile Sy-
culée , des peuples étrangers plus ou rius, avec le premier iour de l'année
moins éloignés de P Égypte. égyptienne ( le 1 er thôth); témoignage
Un des nombreux bas-reliefs colo- important d'une coïncidence et d'un
riés de ce tombeau en a été détaché, usage qui donnent à la science moderne
et enrichit le musée égyptien du Lou-
il la clef de toutes les difficultés que lui
vre. Il existe aussi , dans les cabinets présentait , à l'égard de l'antique
des curieux, comme dans ce même Égypte, l'ensemble des règles admises
musée, un grand nombre de statuettes pour la division du temps dans les
funéraires de ce roi , en bois ou en usages civils, et la source originaire
porcelaine , recueillies dans son tom- de ces règles {suprà, page 236).
beau. On voit aussi , à Turin , un contrat
Quand Belzoni en fit la découverte, en écriture hiératique, daté du 16 de
il jugea, -à la difficulté d'en retrouver choïak , de la Yannée du règne de ce
l'entrée et de la rendre praticable, mie roi.
ce tombeau était intact, et il espéra Les monuments nous apprennent
retrouver enfin un roi d'Egypte en que ce roi eut deux femmes , dont l'une
repos dans la dernière demeuré que lui se nomma Tsiré, et l'autre Twéa. La
avait assurée la piété de sa famille et première est mentionnée dans les ins-
de ses peuples. La première salle était criptions du tombeau du roi , avec ces
en effet intacte ; un long couloir ve- titres : L'osirienne (la défunte) épouse
nait après, et encore hermétiquement royale, Pépouse divine, la royale mère,
fermé à son extrémité; cette ouver- la grande dame du monde, tutrice
ture pratiquée de nouveau , un puits de la haute et de la basse Égypte,
très - profond la séparait de plusieurs Tsirk.
autres salles, également peintes et De la seconde , Twéa , il nous reste
d'une parfaite conservation : enfin , le plusieurs monuments intéressants ; on
voyageur parvint à la salle du sarco- voit , à Rome , au Capitole , une statue
phage, la plus spacieuse de toutes; colossale en basalte noir, qui est une
mais le sarcophage avait été violé; le image de cette reine : l'inscription gra-
couvert violemment jeté à terre , y gi- vée sur le colosse la qualifie en ces
sait en deux morceaux; l'intérieur termes : « La reine du peuple obéis-
était vide, et une crevasse dans un sant , mère d'un roi du peuple obéis-
des coins du sol annonçait qu'on avait sant , la royale mère de l'Horus , fort,
très-anciennement pénétré dans cette dominateur du monde, seigneur du
salle par un souterrain dont on ne monde, soleil gardien de la vérité,
pouvait pas suivre les traces dans la approuvé par le soleil, seigneur du

Digitized by Google
EGYPTE. 329
monde , Amoti-Mai Rhamsès, vérifi- se termine , à gauche , la ligne inter-
cateur, la divine épouse, la royale médiaire de la Table d'Abydos. Ce
épouse principale, la dame du monde, même prénom royal se retrouve dans
Twéa. » l'inscription verticaledela même Table
Cette reine fut donc la mère de Sé- royale ; et elle désigne ce roi Rhamsès
sostrîs , et cette circonstance peut ai- comme le successeur immédiat de
der à fixer avec quelque certitude le Ménephtha I er .

ranç des deux reines , femmes de Mé- Cependant ce cartouche ne se voit


T
nephtha T . En considérant, en effet, ce même rang de succession dans
que la reine Tsiré est mentionnée avec rà table royale du Rhamesséum de
vt titre d'osirienne (défunte) dans le Thèbes, ni dans des figures de
la série
tombeau du roi son mari , qui doit Médinet-Habou.
ainsi lui avoir survécu, que Sésostris, D'autre part, les monuments histo-
dont le règne dura 68 ans, dut par- riques du roi Rhamsès, dont le prénom
venir au trône
fort jeune , et que ce- , fut soleil gardien de la vérité, et les
pendant ne fut que le second suc-
, il cartouches où ce prénom est inscrit,
cesseur de son père , on peut considérer sont nombreux et d'une grande auto-
la mère de Sésostris , la réine Twéa rité par le sujet, l'étendue et l'exécu-
comme la seconde femme de Méneph- tion de ces monuments, comme par
tha , comme ayant survécu à ce roi les faits historiques du premier ordre
et ayant même' vu les premiers temps que leur sujet rappelle.
<iu règne de Sésostris, puisque la sta- Mais l'omission du cartouche pré-
tue colossale du Capitole est un mo- nom royal de ce roi dans les tables du
nument de la piété de ce prince envers Rhamesséum et de Médinet-Habou s'ex-
sa mère , et que la légende gravée sur plique par la nature même de ces ta-
le monument indique une reine encore bles : il est prouvé, sans contestation,
vivante, et jouissant des titres et des que ce Rhamsès II et son successeur
honneurs de la royauté. La reine Tsiré Rhamsès III (Sésostris) furent frères,
fut donc la première femme de Mé- tous deux r
fils de Ménephtha I* , et ils
nephtha I", et Twéa la seconde. ne forment à eux deux qu'une seule et
Dans les sculptures de l'intérieur du même génération. Dans ces tahles par
Khamesséum de Thèbes , on retrouve génération , on n'a donc inscrit qu'un
des groupes où Sésostris est repré- seul des deux frères, Sésostris, le
senté entre sa mère Twéa et la reine plus célèbre des deux, celui dont le
sa femme. règne jeta le plus d'éclat par les évé-
On connaît aussi , par la statue co- nements contemporains comme par sa
lossale du Capitole, qui vient d'être durée; et si le nom de Rhamsès II se
citée ,une fille de la même reine , qui lit sur la table d'Abydos, quoique
dut être la sœur de père et de mère également généalogique, c'est parce
de Sésostris, et fille, comme lui, de Qu'elle a été dressée de l'ordre même
rr
Ménephtha son image est sculptée
I ; e Sésostris ,
qui , dans la liste de ses
sur le colosse de la mère, et l'inscrip- prédécesseurs, ne pouvait omettre son
tion qui l'accompagne signifie: la royale propre frère.
fille , la royale épouse Hont-Réché, vi- Le roi Ménephtha I tr eut donc pour
v ante
; elle eut au moins le rang et les successeur son fils aîné, qui porta le
honneurs d'une reine il dépendait de : nom de Rhamsès et fut le deuxième de
son frère de les lui déférer. ce nom.
Ménephtha I rr eut pour successeur Le lecteur a déjà eu sous les yeux,
son fils aîné, que les monuments nous à la page 152 de cet ouvrage, la des-
font connaître par le nom et le rang cription détaillée des monuments du
de Rhamsès II. règne de Rhamsès II, qui subsistent
par son cartouche prénom sa-
C'est encore à Reit-Oually en Nubie, qui rap-
kU gardien de la vérité, et par son pellent les entreprises militaires de ce
nom propre Amon-Ma\ Rhamsès, que roi et ses v ictoires en Asie et en Afri-

Digitized by Google
830 L'UNIVERS
que, et dont tableaux historiques
les terminé et érigé par son successeur.!
représentent le riche butin qu'il en A Silsilis, une des chapelles qrijn
rapporta, soit en animaux rares et cu- sont creusées dans le roc Ta été ansa |i
rieux, soit en productions et métaux par l'ordre de Rhamsès II. Les t*l
de grand prix. bleaux qui décorent les parois de droite
]
Rhamses II ajouta à la décoration et de gauche cous fout connaître il
du Ménephthéum de Kourna, àThèhcs, Quelle divinité ce petit édifice avait été!
élevé par son père; les petites parois à éflié par le Pharaon. Il y est repré»!
droite et à gauche de la porte prin- senté adorant d'abord la triade thé-I
cipale de la salle hvpostvle sont cou- baine , les plus grands dieux de rKgypte,!
vertes de bas- reliefs représentant l'a- Amon-Ra, Mouth et Khons, cem|
doration de la triade thébaine par ce qu'on invoquait dans tous les temples,
|
Pharaon, et le bas-relief inférieur, à parce qu'ils étaient le type de tous la
la gauche de la même porte, représente autres; plus loin , il offre le vin au diei
]
son sacre après la mort de son père Phré, àPhtha, seigneur de justice, etj
Ménephtha r
Le jeune roi, présenté
I* . au dieu Nil, nommé dans l'inscriptioi ]
ar la déesse Mouth et le dieu Khons, hiéroglyphique Hapi-moou le pèrevM ,

échit le genou devant le souverain de vifiant de tout ce qui existe. C'est u


l'univers, Amon-Ra; le dieu suprême cette dernière divinité que la chapelle
lui accorde les attributions royales et de Rhamsès II fut particulièrement
les périodes des grandes panêgyries, consacrée; cela est constaté par ukI
c'est-à-dire un très-long règne, en pré- très- longue inscription hiéroglyphique
sence de Ménephtha, pere du nouveau datée de « l'an IV, le 10 e jour de mf
roi , et qui, représente debout derrière sori, sous la majesté de l'Aroéri puis-
le troue d'Ammon, tient à la fois les sant, ami de la vérité et fils du soleil,
emblèmes de la royauté terrestre qu'il Rhamsès, chéri d'Hapi-moou, le pere
vient de quitter, et l'emblème de la vie des dieux. » Le texte qui contient les
divine dont il jouit déjà dans la com- louanges du dieu Nil (ou Hapi-moou
pagnie des dieux. l'identifie avec le Nil céleste A>/i-/«o<w,
Plus loin, on a figuré l'enfance de l'eau primordiale, le grand Nilus,qi;5
Khamsès II; le jeune roi est embrassé Cicéron dit être le père des principales
f>ar
Mouth, la grand' mère divine qui divinités de l'Egypte, même d'Ammon,
ui offre lé sein. La légende qui accom- ce qui est attesté ailleurs par des ins-
pagne cette scène s'exprime ainsi : criptions monumentales. II était égale-
Voici ce que dit Mouth, uame du ciel : ment naturel que Jes chapelles de Sil-
« Mon fils qui m'aime, seigneur des silis fussent dédiées à Hap-moou (le
diadèmes, Rhamsès chéri d'Ammon, Nil terrestre), parce que cest le lieu
moi qui suis ta mère, je me complais de l'Egypte où le fleuve est le plus res-
dans tes bonnes œuvres; nourris-toi serré, ét qu'il semble y faire une se-
de mon lait. » conde entrée, après avoir brisé les
Les dés et les ornements de la base montagnes de gres qui lui fermaient
des colonnes de cette même salle sont ici le passage, comme il a brisé les ro-
ornés des cartouches nom et prénom chers de granit de la cataracte pou:
de Khamsès II, mêlés avec ceux de son faire sa première entrée en Égypte.
père, et les architraves portent plu- Les souvenirs historiques du même
sieurs inscriptions dédicatoires, mais Rhamsès II se retrouvent encore sur les
au nom de Ménephtha qui fonda l'édi- monuments de Calabschi, en Nubie,
fice, et les autres au nom de Rham- et dans la salle hypostyle du palais
sès II, qui en acheva la docoration. Karnac, à Thèbe's, et Ton n'aura pas
C'est au règne de ce même prince de peine à reconnaître dans son nom
qu'appartient l'obélisque égyptien de Y Armés ou YJrmésès, que les listes
Paris; on a deja vu (pages 81 et sui- de Manéthon donnent pour le frère
vantes) quelle part il prit a l'édification d'un autre Rhamsès (Rhamsès III Sé-
de ce magnifique monument, qui fut sostris), qui régna plus de soixante

Digitized by Google
ÉGYPTE. 331

M tandis qu'elles n'attribuent au Ce Rhamsès fut le troisième de ce


Nme de Rhamsès II que cinq années nom; il est plus généralement connu
è durfc. sous le nom de
Sésostris ou Rhamsès
Les monuments connus sont d'ac- le Grand, et à ce nom seul tous les
ord avec cette indication, et la seule grands souvenirs de l'Egypte se pré-
bte qui subsiste de ce règne est de sa sentent, à la fois, à l'esprit de I histo-
piatrieme année; elle est à Silsitis; rien : à ce nom , en effet , et au règne
lous r avons textuellement rapportée, du grand roi qui le porta, est irrévo-
* c'est avec une fausseté évidente, et cablement attachée l'époque de la plus
{finde soutenir d'absurdes systèmes haute splendeur, de la plus grande
u de voiler d'indignes plagiats, qu'un puissance de l'Egypte. Quand Sésostris
rrivain étranger à la France porte succéda à sou frère (vers l'an 1571
rite date de Silsilis jusqu'à Tan XIV avant l'ère chrétienne), l'Égypte était
lu règne de Rhamses, parce qu'il a engagée dans des guerres extérieures,
«soin de donner, contre la vérité de que le soin de sa défense ou de lé-
'histoire, quatorze ans de durée à ce gitimes intérêts avaient rendues inévi-
néine règne. Les listes de Manéthon tables. Les tableaux historiques de l'é-
Jans tous ses abréviateurs, et le texte dilice du Beit-OuaUy retracent les
les monuments donnent unanimement victoires de Rhamsès II, et Rham-
ànq années seulement au règne de sès III. encore prince, y figure lui-
Rhamses IL il mourut vers l'an 157 même comme ayant* pris une part
ivant l'ère chrétienne. active à ces actions : on l'y voit, dans
D'après certaines données monu- le costume de prince, présenter au roi
mentales, il aurait été marié à la reine un groupe de prisonniers arabe* asia-
Nofré-Teri, de laquelle il aurait eu deux tiques. Dans une autre scène, pendant
ils dont on a recueilli les noms; mais que le roi sur son char poursuit les
k sort de ces trois personnages nous Arabes, le prince frappe avec une
serait resté inconnu, celui des deux hache la porte d'une ville ennemie, et
filsparticulièrement, qui étaient les il emmène ensuite de nouveaux prison-

luccesseurs légitimes de leur père. Ce niers. Ainsi Sésostris, avant d'être


fet, au contraire, leur oncle qui régna roi , aurait pris une part active et digne
après lui : c'est ce fait incontestable de mémoire à la défense de la patrie
nu domine au milieu de ces incerti- et à ses triomphes.
tudes sur la fin du règne de Rham- Il nous reste encore un autre mo-
sès II. nument de jeunesse de Sésostris :
la
Après sa mort inopinée, qui arriva ces souvenirs d'un prince illustre doi-
ivant le terme ordinaire de la vie hu- vent être attentivement recueillis par
maine, et qui interrompit de grandes en- l'histoire. On les retrouve sur une pe-
treprises, laissant inachevés de grands tite stèle du musée égyptien de Paris;
édifices, son frère, le second fils de elle est à double face : d'un côté, un
Menephtha I er , monta sur le trône jeune enfant est assis sur un coussin;
dtgypte, et prit, comme l'avait fait sa téte est ornée d'une riche coiffure
Ion prédécesseur, le nom de Rbamsès, royale, et son corps à demi couvert
d'après l'usage égyptien déjà rappelé d'une tunique en étoffe transparente
plus haut, qui faisait donner au petit- par sa linesse; son bras gauche est ap-
fils le nom du çrand-père; et la dix- puyé sur ses genoux, et il porte à sa
huitième dynastie égyptienne nous en bouche un des doiets de la main droite.
fournit un nouvel exemple par les cinq Un cartouche prénom est gravé près
rois qui se succédèrent immédiatement, du personnage, et ce cartouche est
portant alternativement, à chaque gé- celui de Sésostris on voit donc ici
:

nération, le nom de Rhamsès et de une représentation de ce roi enfant


Méotphtha : Rhamsès r r , Méneph- dans le costume ordinaire de Horus,
tha I
\ Rhamsès II, Rhamsès III (les et assimilé à ce dieu dans une des cir-
deux frères), Ménephtha II, etc. constances de sa naissance; car les

Digitized by Google
132 L'UNIVERS.
mystères sacrés de l'Egypte disent que la vie de Sésoosis, d'après lesÉgyp-l
le dieu Horus, comme le dieu Phré, tiens au* si, les deux écrivains gréera
son père, naquit en portant le doigt à ont écrit l'histoire du même roi, im
la bouche. L'objet de notre stèle est néralement connu sous le nom de Sè#n
donc de rappeler la même tradition à sostris, le Rhamsès III des listes otjj
l'égard de Sésostris. Les mêmes mys- Manéthon et des monuments. L'ider> I
tères disaient aussi qu'à la naissance tité des deux relations dans leurs ciw|
de ce roi, son père avait vu en songe constances principales conOrme h3ute-|
le dieu Phtha qui lui prédit que cet ment celle des deux noms désigna ri]
enfant serait le maître de toute la le même personnage. Les deux histoj
terre. Les monuments prouvent aussi riens ont donc retracé à grands traita
la particulière dévotion de Sésostris de Sésostris : la science m*-i
l'histoire
pour ce dieu Phtha. Les temples de derne a fourni à ces deux textes ^recsJ
alemphis sont redevables à ce roi de précieux commentaires; et ils soiijl
d'immenses et magnifiques accroisse- écrits dans les nombreux monument»
ments; m lin, au revers de la stèle de du règne de Sésostris, où ont éteconjj
Sésostris enfant, est aussi une adora- temporairement retracées les actioctjl
tion au dieu Phtha par un personnage mémorables de sa vie. Remettons sourt
dont le nom a disparu de ce curieux les veux du lecteur les traits principauïj
monument. de fa narration des historiens, rappro*
La longue durée du règne de Sésos- chée des témoignages analogues
tris, et fes glorieuses actions qui en monuments; et, à la faveur d'une trot
marquèrent Tes diverses époques en , rare concordance de telles autorité!
ont inscrit le souvenir dans les annales historiques, évoquons du domaine àt
humaines en traits ineffaçables : dans la fable, et inscrivons au nombre des!
l'ordre moral, la vie d'un grand roi faits les plus certains dans l'ensemble
demeure, comme le font dans l'ordre des annales humaines, la vie et fac-
e
physique, les traces d'un grand phé- tions d'un grand roi qui , au XVI sieck
nomène naturel, indélébiles à la sur- avant l'ère chrétienne, remplit l'Orient
face de la terre. Hérodote et Diodore du bruit de ses victoires , menaça notrt
de Sicile ont donné une large place, Occident encore barbare, et enrichit
dans leurs récits historiques, à la vie sa patrie de bonnes lois, d'institutions
et aux actions de Sésostris; leurs nar- nouvelles, des tributs de vingt peuples
rations suffiraient pour immortaliser soumis, et d'immortels monuments
sa renommée; l'autorité plus impo- dignes encore de notre admiration.
sante encore des monuments contem- Sept générations après Mœris, Sé-
porains s'unit aussi intimement à leurs sostris fut roi : c'est Diodore de Sicile
assertions pour la célébrer. C'est un ui s'exprime ainsi. Or, en remontant
devoir pour nous de prouver la véra- 3 e quelques pages dans notre récit, on
cité des deux historiens grecs et celle s'assurera sans peine qu'après M (pris
des mémoires qu'ils avaient consultés, ou Thouthmosis III , Sésostris est en
par l'heureux accord de ces écrits avec effet la septième génération, les ro;>
les monuments du règne même de Sé- Aménophis Thouthmosis IV, Ame-
II ,

sostris, qui subsistent encore. nophis III, Horus, Rhamsès I er et


Le plus simple rapprochement du Ménephtha I*r formant exactement les
texte de Diodore de Sicile de celui six générations intermédiaires.
d'Hérodote convaincra la critique la Le même historien voulant ne rap-
plus difficultueuse que, lorsque Héro- porter, de ce qu'on dit de Sésostris,
dote rapporte (livre second, chap. 102 que ce qui lui paraîtra le plus croyable
et 103, 106 à 109) ce que les prêtres et le plus conforme aux indices qui fli
de l'Égypte, qu'il a consultés, lui ont subsistent encore dans le pays, rap-
dit de Sésostris, et quand Diodore de pelle d'abord que, à la naissance de ce
e
Sicile raconte (livre premier, 2 partie, prince, son père rassembla tous les
chap. 53 à 57^ les faits mémorables de enfants mâles nés en Égypte le même

by Google
I

TE. 333

ur que son fils, et ordonna qu'ils l'Inde jusqu'à l'Océan et dans le pays
,

issent tous élevés avec les mêmes des Scythes jusqu'au Tanaïs; successi-
)ins, a lin que, habitués à vivre fami- vement, il s'empara des Cyclades,
èrement ensemble, ils fussent d'ex- entra en Europe, et pénétra dans la
ellents compagnons d'armes à la Thrace, qui fut le terme de son expédi-
«uerre, soumis et dévoués à son fils. tion. Partout le roi se montra humain
I débuta par une guerre contre les et modéré, n'imposant aux nations
irabes ; tous ses compagnons l'y sui- soumises que des tributs annuels pro-
irent, et, malgré les dures privations portionnés à leurs ressources. Cette
n'ils eurent à souffrir, et auxquelles expédition fut terminée dans l'espace
ur mâle éducation les avait préparés, de neuf années 9 et, dans les diverses
s revinrent vainqueurs, après avoir contrées qu'il avait soumises, Sésos-
orté la désolation parmi ces peuplades tris avait fait élever des colonnes et
t les avoir soumises à un joug qui ne d'autres monuments commémoratifs
sur avait pas encore été impose. De de son passage et de ses victoires.
Hour de cette campagne, Sésostris Que disent les monuments d'ana-
e rendit en Libye par Tordre de son logue à ce récit? D'abord le manuscrit
«re, et , quoique tres-jeune, il soumit Sallier déjà décrit (suprà, page 169),
a plus grande partie de cette contrée relate les victoires de Sésostris en
iiricaine. Asie, en Afrique, en Europe; il a sou-
Les entreprises militaires du père de mis les Ioniens, les Syriens, les Éthio-
sésostris sont représentées sur les di- piens, les Arabes, les Scythes, et Bac-
*erses parties de son magnifique palais tres, leur établissement principal, et
e Thèoes, le Ménephthéum; son lils ces victoires étaient accomplies dès la
t'y figure pas particulièrement, les neuvième année de son règne. Le ma-
onvenances de la royauté ne pouvaient nuscrit porte en effet cette même date,
Jàs permettre; mais les victoires
le qui est celle que Diodore a-recueillie
le Ménephtha en Asie et en Afrique et nous a conservée. De plus, le mo-
'ournissent le temps et le lieu pour nument qui subsiste encore à Beïrouth
4acer les hauts faits de son fils Sésos- en Syrie (suprà, page 61 ), est un de
tris, tels que Diodore de Sicile nous les ces monuments commémoratifs de ses
) transmis. victoires, que Sésostris faisait élever
Bientôt après, parvenu au trône dans les contrées étrangères qui se sou-
l'Egypte, il convoita celui de la terre mettaient à ses armes.
habitable; il s'occupa des soins néces- De retour dans ses États , Sésostris
saires pour s'assurer du dévouement de selon les mêmes historiens, orna les
>cs compagnons et de la fidélité de la temples de l'Egypte d'offrandes ma-
îation; il se montra prodigue de biens §niliques, y consacra les prémices des
?t de grâces pourvut à quelques points
,
épouilles des nations soumises; l'K-
^portants de l'administration publi- gypte entière fut enrichie des fruits de
ée, et leva une armée qu'on portait cette grande expédition, et toutes les
six cent mille hommes de pied , vingt- pensées du héros se tournèrent, dès
|uatrc mille cavaliers et vingt-sept nulle lors , vers le bien intérieur du pays.
hdrs de guerre. Il soumit d'abord les Il entreprit des ouvrages, admirables
Uhiopiens voisins de l'Egypte, et leur pour la pensée , prodigieux pour la dé-
mposa un tribut annuel de bois d'é- pense; ils ont assuré à ce prince une
Jène, d'or et de dents d'éléphant. Il gloire immortelle, et à l'Égypte la
envoya ensuite sur la mer Rouge une sécurité et le bonheur. —
Il reste peu

flotte de trois cents vaisseaux, qui de traces reconnaissables de ces institu-


Compara de toutes les îles et des pays tions; mais les ouvrages admirables
situes sur la côte jusqu'à l'Inde; et, ou prodigieux subsistent encore en
Jans ce même
temps, il soumit, à la partie; le nom de Sésostris se retrouve
tétede son armée, l'Asie entière; il dans tous les lieux de l'Égypte qui
passa ensuite le Gange, s'avança dans eurent de son temps quelque impor-

Digitized by Google
334
»
L'UN fERS.
tance; et ce sont là autant de témoi- entrée; et l'intérieur, creusé dans
gnages en faveur des assertions des montagne, est digne par son étem
deux historiens grecs. et la profusion des ouvrages d'à
11 fit bâtir, continuent-ils , il fit bâtir de ce frontispice merveilleux. Le p<
dans chaque ville un temple à la divi- temple, dont la face est décorée de
nité principale du lieu ; détenditd'y em- autres colosses, fut dédié à la dée
ployer aucun Égyptien , et imposa ces Athôr par la reine femme de Sésosti
travaux aux prisonniersqu'il avait ramè- Ce prince fit élever par les inén
nes. — Le nombre des anciennes villes moyens des chaussées exhaussées ;

de PÉgypte où subsistent encore des dessus des inondations du TV îl , et


édifices plus ou moins ruinés , évidem- y fit transporter les villes dont
ment élevés, fondés ou agrandis par sol était att élut par ces eaux. I —
Sésostris , est considérable ; les voya- observations modernes s'accorde
geurs en ont reconnu dans les trois aussi en ce point avec les rappoi
contrées principales de l'Égypte, ainsi de l'histoire. L'état variable du
que dans la Nubie : les deux anciennes de l'Egypte et son exhaussent
capitales, Memphis etlhèbes, furent annuel se révélèrent bientôt à l'a
redevables à ce roi des principaux édi- ministration publique, et elle 2
fices, témoignages de leur antique pourvoir à cette nécessité en faisa
splendeur: outre les travaux immenses élever des chaussées, des monticul
exécutés au temple de Phtha , à Mem- factices, pour asseoir les villes et
phis , par Rhamsès le Grand , un autre construire les palais et les temple
temple en calcaire blanc, orné de co- L'examen des lieux dans leur état a
lonnes à pilastres accouplées et en gra- tuel ne permet aucun doute sur c
nit rose, y fut construit par son ordre, deux points, ni sur la prévoyance <

et dédie a Phtha et à Athôr , les deux Sésostris le palais de Thèbes qui por
:

grandes divinités de ce lieu. A Thèbes, son nom, le Khamesséum , est cou


le Khamesséum seul aurait suffi à la truit sur une butte factice très-sens
gloire d'un grand roi : mais la pieuse blement élevée encore aujourd'hui ai
munificence de Sésostris se retrouve dessus du niveau de la plaine de Thébe
encore écrite dans les constructions de après l'exhaussement que le sol a rec
Karnac , le temple , les colosses et les depuis que Sésostris y employa ai
obélisques de Louqsor, les tableaux travaux publics les prisonniers qu'
historiques de K ou ma , et sur divers avait ramenés de l'Arabie, de Bah}
autres points des restes de cette ville lone ou des plages africaines.
immortelle. Partout ailleurs, toutes L'historien ajoute : Sésostris sillonn
les ruines nomment encore Sésostris; la basse Égypte de canaux , facilitar
àTanis, Aouara et Bubaste, à Den- ainsi le transport des denrées, rer
déra comme à Éléphantine, dans les dant les relations des habitants plu
carrières de Silsilis comme sur les ro- promptes et plus commodes , portan
chers voisins de Syène. La Nubie n'est l'eau potable dans tous les lieux, «
pas moins fav orable à la renommée de rendant aussi le pays, ainsi coupé
Sésostris; son nom est partout comme inaccessible aux ennemis; il ferm;
un jalon propice au voyageur dans ce "Egypte orientale par une grande mu
désert si fertile pour l'histoire; et il le raille qui traversait le désert depui
retrouve à Beit-Oually, Ghirsché, Peluse jusqu'à Héliopolis. —
Les ra
Ouadi - Esséboua , Dcrri, Ihrim et naux de la basse Egypte sont en efïe
Ibsamboul. Ce dernier lieu témoigue les véritables sources de sa fertilité
plus qu'aucun autre de la munificence l'existence de l'Égypte dépend de leuj
de Sésostris : le grand temple est une entretien régulier, de leur attentif
merveille qui conserverait tout son surveillance cette vérité était don(
:

prix au milieu même decellesde Thèbes; reconnue du temps même de Séso*


quatre colosses assis, monolithes de tris : l'Égypte a péri dès qu'une admi*
60 pieds de hauteur, décorent son nistration" imprévoyante a négligé cette

Digitized by Google
ÉGYPTE. 335
pce première de sa prospérité, terre, circonstance qui a garanti sa
pésostris , continue l'historien , dé- Kirfaite conservation ; il représente
au grand dieu de Thebes, Amon- hamsès le Grand, coiffé du claft
une bari sacrée en bois de cèdre , strié surmonté du pschent. Son cou
,

ue de lames d'or à l'extérieur de , est orné d'un collier à sept rangée*


d'argent à l'intérieur, et d'une qui se terminent par un rang de perles.
ur considérable. Sésostris éleva Deux cordons soutiennent un riche
des obélisques très-remarquables pectoral dont la corniche est surmon-
fors dimensions. Il Ht faire de tée d'un rang d'uréus, la téte ornée
*nd$ travaux au temple de Vulcain, du disque. Le centre du pectoral
lemphis, et il l'orna de plusieurs est occupé par une composition ana-
rues monolithes ; la sienne et celle glyphique montrant le prénom de
ila reine avaient trente coudées de Rhamsès spécialement protégé par le
nieur.— Les monuments subsistants dieu Phtha et la déesse Pascht, leonto-
Ifirment encore cette partie de la rela- céphale. La ceinture est serrée par une
rocreeque; plusieurs obélisques de agrafe qui porte aussi les nom et pré-
5o<tris sont encore debout; celui nom du prince; et un grand et beau
* France oublie à Louqsor, et
la poignard , ou glaive court , dont la
loi qui, enlevé des mêmes ruines à poignée est décorée de deux têtes d'é-
lèbes s'élève aujourd'hui sur la
, pervier adossées, est passé dans la
de la Concorde, à Paris; les ceinture et dans une position très-in-
Risques Flaminien, de Saint- Jean clinee : la lame paraît renfermée dans
-Latran, de la Rotonda et de la villa un fourreau orné de baguettes , et qui
•aUei , a Rome; un petit obélisque de se termine par un bouton en fer de
lorence , sont aussi des ouvrages du lance. Ses poignets sont ornés de bra-
Ane Pharaon , et servent à confir- celets fort simples , et le roi tient un
** la véracité des deux historiens papyrus roulé dans sa main gauche. »
|KS, Nous ne craignons pas d'importuner
A Memphis , tout se retrouve con- le lecteur ni d'offenser le bon goût en
nue aux renseignements donnés à inscrivant ici la proportion détaillée
iffodotepar les prêtres de l'Égypte. de cette antique statue , dont la ma-
voit dans les carrières de Silsilis tière est un calcaire blanc cristallisé :
*s preuves des grands travaux exécu- Hauteur totale, dans son état ac-
> par l'ordre de Sésostris pour en tuel , 34 pieds G pouces ; du bord de la
ftraire les matériaux employés à plu- coiffure a la naissance de la barbe,
^rs des grands édifiées construits 4 pieds 5 pouces; longueur du cou,
«on règne. Le grand temple de 1 pied 5 pouces; des clavicules au nom-
Ha Vulcain ) , à Memphis , est de
r
bril , 7 pieds 1 pouce; longueur du nez,
h '\ plus célèbre : les rois étaient
le 1 pied 9 pouces; du bas du nez au bord
^res dans ce riche et magnifique édi- de la lèvre, 5 pouces 4 lignes ; du bord
10 I*a
plupart des statues dont Phis- de la lèvre inférieure au-dessous du
f
n>n grec dit que cet édifice religieux menton 8 pouces ; longueur de la
,

* orné par Sésostris , subsistent en- barbe pied 6 pouces ; bouebe ou-
, 1
01
*; ces statues , dit Hérodote , sont verte 1 pied 6 pouces 6 lignes ; lon-
,
j

monuments de sa reconnaissance gueur de l'œil, 10 pouces 6 lignes;


* de sa piété. Et quant à la statue largeur, 4 pouces; longueur du bras,
de ce grand roi , voici ce que de l'épaule au poignet, 12 pieds 8 pou-
5>mpollion le jeune en a vu , et il ces; longueur de la main jusqu à la
clique comme l'a fait Hérodote première phalange, 1 pied 6 pouces;
''«•même, oui a vu aussi cette statue première phalange, 1 pied 3 pouces
monolithede Sésostris : a Ce colosse G lignes ; longueur du pouce , 2 pieds
5 ^
a fait
magnifique sculpture, et dont 4 pouces 6 lignes; ongle du pouce,
I
i
dessiner avec soin la tete et 4 pouces G lignes; largeur de la main,
,es
détails, était renversé la face contre 2 pieds 7 pouces; largeur d'une épaule,

Digitized by Google
I/UNIVERS.
4 pieds 2 pouces; oreille, 1 pied 8 front; au-dessus de celte visière,
pouces ; largeur de l'oreille , 1 1 pouces. lève l'insigne royal, Yurœtis, do
Le Pharaon était coiffé du claft strié corps forme d'abord plusieurs
et au-dessus s'élevait le pschent qui lements, et s'étend ensuite e
esta moitié détruit; il manque aussi droite vers la partie la plus
une petite portion des jambes, les casque.
pieds et la plinthe de la statue. Dio- « La face de cette statue , trai
dore de Sicile savait que la statue mo- comme toutes les autres partir*
nolithe de Sésostris, éfevée devant le un soin extrême, est d'une perfd
temple de Memphis , avait de hauteur que je ne m'attendais point à ren
trente coudées, environ 45 de nos pieds, trer dans un ouvrage égyptien
et le colosse de Memphis, mesuré par ancien style. L'expression en
Champollion le jeune , a encore 34 fois douce et hère , et un ex an
pieds 1/2, maigre les mutilations de la rapide suffit pour convaincre
coiffure, d'ordinaire très -élevée, et là un véritable portrait. Les
celles de la base de ce monolithe. L'ap- d'une grandeur moyenne , sont
pui de la statue du roi était orné de la saillants que ceux de la plupart
figure de sa femme et de celle de son très statues; les soumis sont le
fils. Plusieurs autres colosses , en gra- ment marqués; 1 angle externe
nit rose, mais de plus petites dimen- yeux n'est point exagéré comme à
sions, existent encore sur le même dinaire; le nez est long et aquiii
emplacement. Le musée du Louvre la bouche petite, quoique les I

possède, de ce même roi, une belle soient toujours un peu fortes,


statue en albâtre oriental , et de grandes joues pleines et un menton
proportions quoique assise ; parmi
,
donnent à l'ovale de la face une
celles qui ornent le musée de Turin gance et une grâce dignes de reman
il y en a une qui mérite aussi une Les oreilles, d'une excellente for
grande attention comme production mais dont l'extrémité supérieure
de l'art et comme monument histori- passe toujours la ligne de l'œil , cai
que Champollion le jeune en a donné
: tère essentiel de toute figure de vérifc
la description suivante : style égyptien, sont percées con
« Ce chef - d'œuvre dela sculpture pour y suspendre quelque ornem
égyptienne, provenant de laxollection précieux. Rtiamsès le Grand est s
Drovetti arriva a Turin brisé en plu-
. barbe, ainsi que l'est son aïeul sur I
sieurs pièces (il a été rétabli depuis des bas-relief de Médinet-Habon.
dans son intégrité primitive); il est en « Un riche collier, à six divisii
granit noir, et de 6 à 7 pieds de hau- terminées par une rangée de per
teur. Le roi est représenté en habit pendantes , couvre la poitrine du PI
militaire et assis sur son trône : c'est raon : l'artiste l'a représenté habi
le costume des rois guerriers assis sur d'une ample et longue tunique a ian
leur char au milieu des champs de manches , rayée et plissée , et de
bataille. La téte de la statue de Ji/tf mi- toutes les ouvertures ainsi que le t
sés le Grand porte le casque royal sont brodés et ornés de franges
armure qui d'après la couleur verte
, c'est là sans doute cette célèbre espe
qu'on lui applique dans les bas -reliefs de tunique égyptienne connue sous
peints , devait être en bronze orné de nom de calas'iris. La manche droit
métaux plus précieux des sortes de
: relevée au-dessus du coude, don
chus ou de petits disques en relief, passage au bras qui , replié contre

semblables au caractère figuratif qui poitrine, soutient le sceptre en forr


dans les textes hiéroglyphiques, ex- de crochet , aussi souvent placé dai
prime l'idée soleilj couvrent toute la la main des rois que dans celle de et
surface du casque, à l'exception d'une taines divinités ; le bras gauche étend
espèce de rebord ou plutôt de visière le long du flanc et reposant sur
qui fait saillie sur tout le contour du cuisse , est recouvert presqu'en entii

)igitized by Google
<

ÉGYPTE. 387

rla manche de
la tunique, dont les descendant jusqu'au bas de la tunrque,
nges descendent jusque vers le poi- ne nous dirait point que c'est là en
ft main fermée tient un corps
; la effet l'image du dieu rivant et bienfai-
indrique , tout à fait semblable a sant, le représentant d*4 m mon, de
rouleau de papyrus déprimé par Mars, du soleil dans la haute région,
ïort des doigts qui le serrent. Des gardien de la vérité,
le roi soleil,
lussures imitant , jusque dans les approuvé par Phré le directeur et
,

is petits détails, ces


sandales en le gardien de l'Êeypte, l'enfant des
lilles de palmier, si finement tres- dieux , le fils du soleil , le chéri d'Am-
fs, qu'on trouve encore dans les hy- mon, Rhamsès, vivificateur éternel.*
gées , sont fixées aux pieds de la sta- Dureste, des statues de Sésostris
ff» qui sont d'ailleurs d'une très-belle existent dans toutes les collections eu-
•me et d'une juste proportion. L'exé- ropéennes, et le nombre, qui nous est
tion des mains ne laisse rien à dé- parvenu , des monuments en tous gen-
•er sous ces mêmes rapports. Je res de son règne ou de ses actions, est
rai remarquer aussi que l'artiste, dans une proportion telle que devaient
mme pour exprimer que les pieds la produire la supériorité du génie
i Pharaon reposent sur une natte , de ce héros à la fois guerrier et légis-
tracé au-dessous et au simple trait lateur, et la durée de son règne. Notre
ir la surface du marchepied du trône, narration en a rappelé fréquemment
î longues feuilles de plantes analo- les circonstances principales, et nous
gies a celles de certains roseaux.
Enfin y avons déjà parlé des tableaux sculptés
droite et à gauche des jambes de la qui représentent l'institution royale de
^tue, sont deux figures de plein -re- Sésostris (page 56), sa présence aux
**apr>uyées contre le devant du trône panégyries (page 68), les honneurs
t taillées
dans sa masse : l'une repré- qu'il a rendus à ses ancêtres (iWem),
fnte une reine parée des insignes h marche de son armée sous ses or-
1
-wyr, et Vautre un jeune homme dres, ses victoires, ses triomphes, et
osturoé comme le dieu Horus et por- les actions de grâces qu'il en rend aux
l
l'emblème de la Victoire; deux
"t
dieux (pages 58, C8, 151, 160, 101),
'olonnes d hiéroglvphes gravées près ses entreprises maritimes (pape 205),
,

* cette dernière 'statuette nous ap- , les relations commerciales qu'il établit
prennent que le colosse a été dédié avec l'Inde (page 162), les grands édi-
«rie fils du roi qu'il aime. La lé- Thèbes , le Rhames-
fices qu'il éleva à
ffnde qui accompagne la statuette de séum (pages 68, 154 243 , 249), le
,
emme, consiste seulement en ces palais de Louqsor (57, 79), les embel-
JjjHjî Sa royale et puissante épouse lissements de Karnac, les construc-
pi l'aime; elle
se rapporte sans doute tions d'Ibrim (page 164), les merveilles
w reine , femme de Rhamsès et
1

d'Ibsamboul (page 151 ), et nous avons


J«e d'Jmonhé... : ces deux figures résumé (pace 83) l'opinion de l'anti-
n Pled de
nauteur ct chaussées de ' nuité, et celle des temps modernes sur
nt t
Prîtes sandales comme le colosse, la vie et les travaux de ce prince il-
t d'un travail très -fin et très-soi- lustre.
f>
Sne.
eut deux femmes, vingt-trois en-
Il
.
*Le nom propre Rhamsès, gravé sur fants mâles et septfilles au moins : ces
3
^inture de la grande statue , le pré- renseignements sont fournis par des
° m particulier de Rhamsès le Gr ami, monuments authentiques. La première
..^on n om
propre, sculptés, l'un sur épouse de Sésostris, celle qui se voit
j^nt-bras droit, l'autre sur l'avant- souvent aux côtés du roi dans les mo-
JJJ
gauche , prouveraient assez que numents des premiers temps de son
l ie belle statue représente
le plus règne, se nommait Tmaoumen-Nofré-
£
es con( llérants égyptiens, Ari, la servante de Mouth, No/ré'
CnX*même
? l
une longue inscription, /tri. Ce nom se lit dans diverses loca-
J
Jetant de l'agrafe de la ceinture et lités, au Rhamesséum, à Ibsamboul,
& livraison. (Égyptb.) 22

Di gitized by Google
L'UNIVERS.
et notamment sur le temple élevé par il est vrai , mais qui ne doit point sur-
cette reine dans ce même lieu de la prendre si l'on considère d'abord que
Nubie, et consacré par elle à la déesse Rhamsès eut, à notre connaissance,
Athôr. Sur les monuments des temps au moins deux femmes légitimes, les
postérieurs, le nom de la reine est reines Njfré-Ari et Isénofré, et qu'il
Isénofré(/*w bienfaisante). Ou voit à est, de plus, très - probable que les
Silsilis, auprès d'un prince oui est en enfants donnés au conquérant par des
compagnie de Sésostris et de sa se- concubines ou des maîtresses prenaient
conde femme, cette inscription : Le rang avec les enfants légitimes , usage
royal fils du soleil gardien de la dont fait foi l'ancienne histoire orien-
VÉRITÉ, APPROUVÉ PAR LE SOLEIL, tale tout entière. Quoi qu'il en soit, on
né de la royale épouse principale a sculpté au-dessus de la téte de chacun
Isbmofrr i ce prince se nommait Scho- des princes , d'abord le titre qui leur
hemkémi, et il présida aux panégyries est commun à tous, savoir : le fils du
dans les dernières années de son père. roi et de son germe; et pour quelques-
Avec eux est aussi une jeune princesse uns (les trois premiers et les plus âgés
nommé Ha thianti ,
qui paraît avoir été par conséquent), la désignation des
la Glle chérie, la benjamine de la vieil- hautes fonctions dont ils se trouvaient
lesse de Sésostris. revêtus à l'époque où ces bas-reliefs
Les souvenirs historiques de Nofré- furent exécutes. Le premier se trouve
Ari, première femme de Sésostris, ainsi qualifié ; porte-éventail à la gau-
surnommée quelquefois Ahmosis-No- che du roi, le jeune secrétaire royal
fré-Ari (l'enfant de la lune), sont plus ( basilico-grammate) , commandant
nombreux que ceux de la seconde; elle en chef des soldats (l'armée), le pre-
prend part a la dédicace que Sésostris mier-né et Je préféré de son germe.
fait du Hhamesséum de Thèbes au Amenhischopsch; le second, nommé
grand dieu Amon-Ra. Rhamsès comme son père, était porte-
Les enfants de Sésostris et des deux éventail à la gauche du roi, et secré-
reines ses épouses sont mentionnés et taire royal commandant en chef les
parfois figurés sur plusieurs monu- soldats du maître du monde ( les trou-
ments, dans des combats, et notam- pes composant la garde du roi); et le
ment sur les colonnes du temple d'A- troisième, porte-éventail à la gauche du
thdr à Ibsainboul, élevé par la reine roi, comme ses frères (titre donné en
JNofré-Ari. A Derri , subsiste aussi une général à tous les princes sur d'autres
liste, par rang d'âge, des fils et des monuments), était de plus secrétaire
lilles de Sésostris , très-utile pour com- royal, commandant de la cavalerie,
pléter celle d'Ibsamboul. Le plus inté- c'est à-dire, des chars de guerre de
ressant de ces tableaux et le plus com- l'armée égyptienne. On se dispense de
plet en même temps est celui qui existe transcrire ici les noms propres des vingt
encore au Rhamesséum, dans la salle autres princes; on ajoute seulement
hypostyle, au-dessous des deux grands que les noms de quelques-uns d'entre
tableaux sculptés qui s'y sont conservés eux font certainement allusion, soit
jusqu'à ce jour. aux victoires du roi, au moment de

Le soubassement de ces deux ta- leur naissance, tels que Nébenschari
bleaux est occupé par la série, figurés (le maître du pays de Schari), Nében-
en pied et dans un ordre rigoureux de thonib (le maître du monde entier),
primogéniture, des enfunts mâles de Sanaschtenamoun (le vainqueur par
Rhamsès le Grand. Ces princes sont Ammon); soit à des titres nouveaux
revêtus du costume réservé à leur le protocole de Rhamsès
adoptés dans
rang; ils portent les insignes de leur leGrand, comme, par exemple, Pa-
dignité, le pedum et un éventail formé tavéamoun (Ammon est mon père), et
d'une longue plume d'autruche fixée à Set peu ri (approuvé par le soleil;, titre
une élégante poignée, et sont au nom- qui se retrouve dans le prénom du
bre aie vingt-trois: famille nombreuse, roi.

Digitized by Google
ÊGYPTE.
Sur une autre partie du soubasse- de l'âge de Sésostris, porte à croire
ment de la même salle hypostyle, on peu fidèle le nombre d'années indiqué
a représenté de Sésostris; il
les tilles Diodore de Sicile, comme celui de
ae reste que la mention de six , le reste
rrdurée du règne de Sésostris. Darius
du tableau ayant été détruit. Élégam- régna 36 ans; et quel que fût sou âge lors-
ment vêtue, chacune d'elles porte un qu il prononça ces paroles , la durée du
sistre à la main , et son image est pré- règne de Sésostris , portée à 33 ans-, ne
cédée de ce titre : La fille du roi , née pouvait pas être pour lui l'objet d'un
de son germe et qu'elle aime. Parmi vœu, ni exprimer la pensée d'une assez
leurs noms, on remarque ceux de longue suite d'années, pour qu'il eût le
Hem - men -Tmaou , Isenofré, Amen- temps d'accomplir les grandes actions
t-mai, que portèrent aussi d'autres qui avaient illustré le règne de Sésos-.
princesses égyptiennes. tris. C'est donc avec une grande ai*
L'antiquité classique nous a con- parence de certitude que les listes de
servé sur Sésostris quelques particula- Manéthon, dans Eusebe, portent la
rités dont les monuments ne peuvent durée de ce règne jusqu'à 68 ans.
pas contrôler
la véracité. Ainsi elle Les monuments confirment pleinement
nous dit que Sésostris, à son retour cette indication : les papyrus hiéra-
de sa grande expédition t rencontra à tiques du musée de Turin donnent des
Péluse son frère, qui, tout en fêtant dates de la 3' et de la 4* année de ce
son retour, entreprit de le faire périr règne; les 29 athyr, 3 méchir et 4
en incendiant le palais, et que le roj mésori de l'an 8; le papyrus d'Aix porte
échappa à ce péril ainsi que sa femme
, une date du 5 paym de l'an 9 ; un au-
et ses entants, par la protection du tre papyrus de Turin , celle de l'an 14;
dieu Phtha; et selon quelques criti- les stèles sculptées à Silsilis, les années
ques, ce frère de Sésostris serait le 30 et 34 ; le 3 de tobi de Tan 35 est
Danaus qui conduisit les colonies égyp- écrit dans le grand temple dTbsatn-
tiennes dans la Grèce au XV 9 siècle boul ; l'an 37 à Silsilis encore ; Tan 38
arant Père chrétienne, époque en effet dans le même temple d'Ibsamboul;
presque contemporaine du règne de les années 40 et 44 à Silsilis aussi ;
Sésostris. Diodore ajoute à son pre- enûn l'aimée 62 se lit sur une stèle du
mier récit, que Sésostris ayant perdu la musée de Florence : voilà des dates
vue, se donna volontairement la mort authentiques et contemporaines; on
après un régne de trente-trois années. peut donc adhérer avec confiance au
Nous aimons mieux croire aux paroles sentiment des critiques modernes, qui
suivantes du même écrivain : ont fixé à 68 ans et 2 mois la durée du
• La gloire de ce roi fut telle et sub- règne de Sésostris.
sista si longtemps dans la postérité, Son tombeau existe dans la vallée
qua la suite d'un grand nombre de des rois à Biban-el-Molouk , à Thèbes ;
générations ,
étant tombée
l'Egypte c'est le troisième à droite dans la val-
sous la puissance des Perses, et Da- lée principale (voyez pl. 71); mais la
rius, père de Xercès, voulant faire sépulture de Sésostris a été en butte
placer à Memphis sa propre statue au- à la fois aux ravages , à la cupidité des
dessus de celle de Sésostris, le grand barbares, et à l'invasion des torrents ac-
prêtre, dans le collège sacerdotal, cidentels qui l'ont comblée presque jus-
s'opposa à cette prétention, et se qu'aux plafonds. Il a fallu , aux der-
fonda sur ce que le roi de Perse n'a- niers voyageurs français , faire creuser
git pas encore surpassé les grandes un boyau au milieu des éclats de pierre
actions de Sésostris. Loin de s'irriter et des décombres qui remplissent ce
de cette opinion hardie , Darius y prit tombeau, pour parvenir, en rampant
pLi>ir , et se "borna a dire qu'il s'effor- et sous le poids d une extrême chaleur,
cerait, s'il vivait autant que Sésostris, jusqu'à la première salle seulement.
^ ne pas rester au dessous de lui. » Cet hypogée, d'après ce qu'il est pos-
Cette remarque de Darius au sujet sible J'en voir, fut exécuté sur un

22.

Digitized by Google
L'UNIVERS.
plan très-vaste, et décoré de sculptures Nous la tirerons du récit même de
du meilleur style, à en juger par les Moïse ; il a dit , dans son livre intitulé :

petites portions encore subsistantes. Exode ou Sortie {c/iap. xii, v. 41


Des fouilles en grand permettraient et 42), mie la durée de la demeure des
de pénétrer plus avant, et peut-être enfants d'Israël en Égvpte fut de quatre
jusqu'à la salle du sarcophage de l'il- cent trente années, et que ce lut le
lustre conquérant , sans espoir toute- jour même où ce nombre d'années s'ac-
fois d'y retrouver des corps religieu- complissait, que l'armée du Seigneur
sement embaumés : les Perses ont sortit de la terre d'Égvpte. Elle y était
fouillé et dépouillé tous les tombeaux entrée avec le patriarche Jacob, et ses
qu'ils ont pu découvrir , et la succes- enfants y avaient grandi et miraculeu-
sion des cupides eut reprises a engen- sement multiplié. Quand Joseph , mi-
dré celle des brutales profanations : il nistre du roi Apophis, accueillit son
ne reste de Sésostris que son nom, père, ses frères, sa race et sa nation
sa gloire, et les magnifiques monu- en Egypte, il en dirigeait déjà l'admi-
ments des arts qui les proclament nistration depuis 9 ans, et Apophis
e
d'une voix qui ne peut jamais s'é- comptait la 26 année de son règne,
teindre. qui répondait à l'an 1958 avant l'ère
Le règne de cet illustre Pharaon se chrétienne. C'est de là que date réelle-
rattache aussi à l'undes plus grands évé- ment la demeure des Israélites en
nements de l'histoire hébraïque : Moïse, Égvpte ; ils en sortirent donc vers l'an
la plus ancienne 1528 avant l'ère chrétienne, après un
aui a écrit la partie
e ces annales , fut le héros et l'histo- séjour de quatre cent trente années
rien de ce fait mémorable. Le peuple partagées en périodes diverses de li-
hébreu était dans l'état de servitude en berté et d'esclavage. Sésostris était
Egypte depuis que, par l'effet de l'heu- alors à la 43* année de son rèune : c'est
reuse expulsion des Pasteurs, l'an- le temps même où il consacrait ans
cienne race des rois égyptiens était re- dieux les merveilleux ouvrages d'Ib-
montée sur le trône' des ancêtres. samboul. Les riches carrières de grès
Moïse assure que le nouveau monar- à Silsilis annoncent encore , par leurs
que , redoutant la nombreuse popula- inscriptions, que, dans ce même
tion Israélite , qui était plus forte que temps, Sésostris en faisait extraire
la population égyptienne , résolut de des matériaux pour les nombreux édi-
la soumettre à dé dures lois , de l'op- fices dont il orna les villes principales
primer par l'effet d'une police atten- de l' Êgypte : c'était le temps des grands
tive et sévère; il craignait que, si une ouvrages publics ordonnés par ce grand
nouvelle invasion étrangère menaçait prince, et celui aussi où les Israélites,
l'Égypte, l'ennemi ne trouvât, dâns plus accablés par ces ouvrages , par les
les Israélites, des auxiliaires et des al- travaux descarrières, la fabrication des
liés. Les Israélites passèrent par les briques, la construction des buttes
Éus cruelles vicissitudes de l'esclavage ; factices, plus opprimés en un mot,
s travaux les plus fatigants et les durent être plus désireux du repos et
plus abjects leur turent réservés ; leurs de la liberté. Les exigences du maître
enfants mâles étaient frappés de mort donnèrent de la résolution aux esclaves :

à leur naissance : Dieu , enfin , or- le génie de Moïse coordonna ces deux
donna à Moïse de délivrer les Hébreux grands moyens d'action, et les Hf-
de cette servitude , et Moïse les dé- breux sortirent heureusement de l'E-

livra.
^*
On a déjà relaté (suprà, page 17), Quelques critiques ont fait cette re-
les circonstances les plus marquantes marque : la relation de Moïse ne parle

de cet événement; les lieux où il se plus de Sésostris, de ce grand roi qui


passa , où il s'accomplit , ont été si- lit la conquête de l'Orient tout entier,

gnalés : c'est ici que nous devons en sans jamais rencontrer les Hébreux
indiquer l'époque. sur ses pas. ï^es textes hébreux et les

Digitized by Google
I

EGYPTE. 311

monuments égyptiens satisfont à cette sens que le premier cartouche, au


observation qui renferme en elle-même moyen de l'analogie mystique du dieu
un doute historique selon les Hé-
: Chnouphis avec l'esprit, le souffle créa-
breux, Moïse, sorti d'Egypte, se ren- teur des dieux.
dit dans le désert de Sinaï,*et ce dé- Ménephtha II fut le treizième fils
sert ne se trouva point sur la route de de Sésostris. Nous avons informé le
Sésostris , oui n'eut pas , ainsi , à pen- lecteur que les sculptures du soubas-
ser aux Hébreux, et ne les rencontra sement de la salle bypostyle du Rha-
pas. De plus , les Hébreux demeurè- messéum de Thèbes sont occupées par
rent pendant quarante ans dans ce des tableaux sculptés où sont représen-
désert; ils y étaient inconnus à Sésos- tés en pied , et dans un ordre rigoureux
tris, à l'Egypte entière qu'ils n'inquié- de primogéniture , les enfants de Sésos-
taient pas. Enfin , les monuments égyp- tris; nous ajoutons que l'on observe
tiens nous apprennent que les grandes dans ce tableau , composé des images
entreprises militaires de Sésostris s'o- des fils de ce roi , qu'on y a caractérisé
pérèrent dans les premières années de d'une manière tres-significative celui
son règne , et alors les Hébreux étaient de ses vingt-trois fils qui monta sur
courbés sous le poids de ses lois, sur le trône après lui. Ces caractères sont
le sol même de l'Egypte. Ils s'en échap- attachés au nom et à la figure du trei-
pèrent vers la 43* année de son règne; zième dans l'ordre du tableau. Tous
et, dès cette époque, on ne connaît les princes y sont figurés avec le cos-
de Sésostris que les effets de sa vigi- tume réservé à leur rang; le costume
lance pour l'ordre , la police intérieure du treizième personnage était en tout
de ses États ceux de sa pieuse mu-
, et semblable à celui des autres , qui ap-
nificence qui orna l'Égypte de tant de partiennent à la même série; mais
monuments dignes encore de notre après l'exécution de ce tableau, des
admiration; et, si Sésostris fit pour- modifications visibles ont été faites au
suivre les Hébreux emportant les vases costume de cette treizième figure; sa
précieux et d'autres richesses qu'ils courte sabou a été changée en une lon-
avaient frauduleusement empruntées gue tunique royale; 1 uracus a été
des Égyptiens , il put trouver quelque ajouté sur son front, et à côté de sa
satisfaction à savoir confinée dans le primitive inscription, portant: Je royal
désert d'Arabie une peuplade toujours fils de son germe Phthamen ou Mé-
suspecte et toujours offensive tant nephtha, on a inscrit le cartouche
qu'elle demeura sur le sol de l'Egypte. royal signifiant soleil esprit aimé des
Elle n'avait pas encore quitté ce désert dieux : union de prénom royal et de
quand Sésostris mourut, environ vingt- nom propre qui se retrouve sur les
cinq ans après qu'elle s'y fut réfugiée. monuments de ce même roi, et que ce
Le successeur de Sésostris (année tableau nous démontre avoir été le
1503 avant Jésus - Christ ) ne con- treizième fils et le successeur de Sé-
nut pas non plus les Hébreux. La sostris. C'est le Ménephtha II de la
liste royale de Médinet-Habou, à Thè- liste de Médinet-Habou, d'accord en
bes , nous donne le prénom royal de ces deux points essentiels avec les ta-
ce nouveau roi , le fils de Sésostris. bleaux de la famille de Sésostris,
Ce prénom signifie soleil aimé d'Amon- sculptés au palais de Kourna.
Cbnouphis , et il est joint sur les mo- Les monuments du règne et de la
numents à un cartouche où se lit le piété de Ménephtha II ne sont pas
nom propre Méuephtha c'est Mé- : rares en Égypte; ses nom et prénom
nephtha II qui a porté le nom de son
,
se lisent sur Je beau groupe monolithe
grand-père Ménephtha I er , selon un de Tanis. On voit à Silsilis une petite
usage déjà constaté par plusieurs exem- chapelle dédiée à ce roi par l'intendant
ples. Une variante du cartouche- pré- du nom Ombite, et qui porte la date de
nom, qui signifie soleil esprit aimé Tan 2 de son règne; une stèle, dont la
des dieux , revient toutefois au même date est effacée, est dédiée par le même

Digitized by Google
842 L'UNIVERS.
intendant nommé Pnahasi. et constate Mais avant le règne de ce roi, les

a tiré des carrières de Silsilis les


pierres qui devaient servir à la cons- d'un autre personnage du nom de
truction du palais de ce roi à Thèbes, Siphtba-Ménephtha, le fils de Phtha
palais dont il ne reste aucune trace serviteur de Phtha, et qui fut l'époux
connue, ou plutôt que la courte durée de la reine Thaoser. 11 est vrai que la
du règne de ce roine permit pas de liste rovale de Médinet-Habou n'inscrit
construire. Une autre stèle du même pas le nom de ce roi dans la série des
lieu, avec la date aussi de Tan 2 du règne successions rovales; mais on trouve à
de Ménephtha II, du S 9 jour du mois Biban-el-Moloùk , parmi les tombeaux
de mésori , rappelle qu'on n tiré de ces des rois, celui d'une reine Thaoser.
mêmes carrières les matériaux de ce qui est représentée suivie, en seconde
palais, et pour les additions ou répa- ligne, par son mari, nommé Siphtha-
rations faites au Ehamesséum de Sé- Menephtha. A Silsilis , le cartouche de
sostris son père. On trouve encore à ce Siphtha-Ménephtha est inscrit entre
Kl-Assasif les preuves que ce mène roi deux bas-reliefs, dont le supérieur est
concourut a emnemssemeni au tem-
i du roi Horus, et l'inférieur de Sésos-
ple d'Amon-Ra, dont les ruines sub- tris. A Kourna , on voit sur deux
sistent dans ce lieu. stèles le même Si phtha rendre des
Ménephtha II n'oublia pas son aïeul hommages à quelques rois ses prédé-
Ménephtha I* r , et il honora sa mémoire cesseurs, et Sésostris est du nombre
par quelques ouvrages ajoutés au Mé- de ces rois défunts ; enfin un autre roi
nephthéum de Thèbes une Sésostris 3u'on sait être le dernier de la XVIir
avait fait terminer. Les légendes roya- ynastie , usurpa le tombeau de Thao-
les du petit-fils de Ménephtha se V' ser et de son mari Siphtha, le fît cou-
lisent sur l'épaisseur des portes ou sur vrir de stuc, et y fit sculpter ses noms
leur soubassement , à la suite de celles à la place de ceux de ses prédéces-
de Sésostris. Le fils et le petit-fils as- seurs; mais le temps ayant causé la
socièrent successivement leurs pieux chute du stuc appliqué sur les sculp-
hommages envers leur illustre prédé- tures primitives de certaines parties du
cesseur. tombeau, on distingue sur la porte
Le tombeau de Ménephtha II sub- principale les légendes d'une reine
siste non loin de celui de son père, au nommée Thaoser, et le temps faisant
fond d'un embranchement de la vallée; aussi justice de la couverte dont on
une petite chapelle en l'honneur de avait masqué les premiers bas- reliefs
Sésostris se voit dans une salle isolée. de l'intérieur, a mis en évidence des
Ce tombeau est très-soigné, mais il tableaux représentant la reine faisant
n'est pas terminé. Le règne de ce prince les mêmes offrandes aux dieux, et re-
dut être court, c'est ce que porte à cevant des divinités les mêmes pro-
croire l'état de cette excavation funé- messes et les mêmes assurances que
raire; c'est aussi ce que prouvent les les Pharaons eux-mêmes dans les bas-
monuments, qui ne portent pas la reliefsde leurs tombeaux, et occupant
durée de son règne au delà de trois la même place que ceux-ci. Il devient
ou quatre années nous la portons
: donc évident que c'est une catacombe
jusqu'à cinq , en raison des travaux creusée pour recevoir le corps d'une
dont les traces subsistent encore. reine, et d'une reine ayant exercé par
On apprend par la stèle de Silsilis, elle-même le pouvoir souverain, puis-
déjà citée, que Ménephtha II eut pour que son mari quoique portant le titre
,

épouse la reine Isénofré, et qu'ils eurent de roi, ne paraît qu'après elle dans
trois fils. L'aîné se nommait Phtha- cette série de bas-rehefs , la reine seule
men, d'après cette même liste : ce fut se montrant dans les premiers et les
le troisième Pharaon du nom de Mé- plus importants, et Ménephtha-Siph-
nephtha, fils et successeur de son tha est le nom de ce souverain.
père. Il résulte de toutes ces données que

Digitized by Google
EGYPTE.
le règne de la reine Thaoser précéda la catacombe, formée de trois longs
e
celui du roi de la XVIII dynastie qui corridors et de deux salles, a été seu-
usurpa son tombeau , et le précéda au lement tracée en rouge, et l'on ren*
moins d'un règne il : n'aurait pu violer contre enfin les débris au sarcophage du
ainsi sépulture de son prédécesseur
la Pharaon, en granit rose, dans un très*
immédiat. Fondé Sur c**s faits, sur ces petit cabinet dont les parois à peine
considérations sur le silence de la table
, dégrossies sont couvertes de quelques
de Médinet-Habou, qui ne mentionne mauvaises figures de divinités dessinées
pas la reine Thaoser, parce que cette et barbouillées à la hâte. Le règne de
reine ne constitue pas une génération, ce roi fut cependant de dix-neuf an-
nous la considérons comme la fille de nées, d'après les listes de Manéthon.
Ménephtha tl et la sœur de Méneph- On expliquera facilement et la durée
tha III, qui est inscrit sur cette même de ce règne et l'imperfection de son
liste. Les tables royales fournissent tombeau par le règne même de sa sœur
lusieurs exemples parfaitement sem- Thaoser, qui est confondu dans les
lables à l'appui de notre explica- dix-neuf années accordées à Méneph-
tion. tha III, et qui, de fait, ne régna pas
Ménephtha II eut donc pour succes- assez longtemps pour faire convena-
seur immédiat (Pan 1498) sa fille, à blement terminer sa sépulture : ces
cause sans doute du bas âge de son fils deux considérations s'appuient réci-
aîné : cette fille porta le nom de Thoo- proquement.
ser , se maria a Siphtha-Menephtha Les listes de Manéthon nomment ce
qui fut son mari sans être roi. On roi comme le dernier de la XVIII* dy-
trouve à Silsilis quelques traces de ce nastie. La liste de Médinet-Habou, qui
règne de peu de durée , et le monument a bien plus d'autorité, porte à cette
le plus considérable qui nous en reste, place le cartouche d'un autre Pharaon,
c'est le tombeau déjà mentionné. dont le titre royal était : Soleil gardien
Ménephtha III, qui paraît avoir été des chefs, aimant Ammon; son nom
le frère de ta reine Thaoser, fut le fils propre, qui est écrit avec plusieurs
de Ménephtha II , et le seizième roi de variantes, se lit communément Rha-
la XVIII* dynastie égyptienne. Son méri : il monta sur le trône vers Tan
cartouche- prénom suit immédiatement 1479 avant l'ère chrétienne. C'est ce
celui de Ménephtha II son père dans la roi qui avait usurpé le tombeau de la
liste rovale de Médinet-Habou, et ce reineThaoser et deSiphtha-Ménephtha.
cartouche signifie soleil gardien des Rhamérî , au lieu de se faire creuser un
mondes, aime d'Ammon; son nom pro- tombeau , trouva plus simple de s'at-
pre se lit Ousireï-Ménephtha. On le tribuer celui d'un des rois ses prédé-
retrouve sur une partie des édifices de cesseurs , catacombe voisine de celle de
Karuac, qui d'abord avait paru anté- Ménephtha III , et à laquelle il ajouta
rieure à toutes les portions de ce tem- cependant deux corridons et sa salle
ple édifiéespar les rois de la XVIII* sépulcrale, afin de ne pas troubler les
dynastie, opinion rectifiée par l'examen cendres de ses deux ancêtres. Mais
des lieux, et qui avait fait attribuer au lieu d'une usurpation rélléchie
ces ouvrages à Osymandias. Les souve- le court rècne de Hhaméri peut ex-
nirs gravés sur le temple de Louqsor pliquer cet empiétement, surtout s'il
rappellent aussi Ménephtha III et sa s'opéra sur le tombeau d'une reine sa
piété envers les dieux. Son tombeau a parente, sa tante, qui ne fut pas comp-
été visité par plusieurs savants voya- tée, dans les annales sacrées, parmi
geurs; il est le dernier au fond de la les générations de rois. Dans ce tom-
vallée de Biban-el-Molouk; il est resté beau qu'on peut qualifier de palim-
,

dans un état complet d'imperfection. pseste, l'image deRhaméri est substi-


Les premiers bas-reliefs sont achevés tuée à celle dé la reine Thaoser, qu'on
et exécutés avec une finesse et un soin y a affublée d'un casque, de vêtements
admirable : la décoration du reste de et d'insignes convenables seulement à

Digitized by Google
844 L'UNIVERS.
un roi, mais les discours s'adressent mations ont un mérite réel , et peut-
toujours à une reine. Cette précipita- être suffisant.
lion ne laisse pas une longue durée au Toutefois , nous nous sommes sou-
règne de Rhaméri. On ne lui attribue mis dans nos appréciations chronolo-
en effet que quelques années ( 5 ans giques, à l'autorité des monuments
S mois). On croit qu'il fut marié à pour chaque règne, comme à celle des
la reine Ahmos-Nofrrï; elle est figu- écrivains anciens pour le nombre
rée dans un bas-relief où le roi et la des souverains qui composèrent cette
reine font l'offrande du vin aux divi- XVIII e dynastie, porté à dix - sept
nités de Thèbes. d'après le" texte même de Manétbon ,
Du reste, Pincertitude qui résulte du conservé par Josèphe, et pour la durée
silence des monuments au sujet de la totale de leurs règnes , portée à 348
durée réelle de ce dernier règne de la ans , comme Pont dit Eusèbe et d'au-
XVI IT dynastie, nous autorise à lui tres chronologistes.
attribuer approximativement lesô an- La certitude suffisante de toutes ces
nées et 3 mois qui complètent , avec indications chronologiques, et l'anti-
les règnes précédents, la durée totale quité des temps auxquels elles se rap-
de cette XVIII e dynastie , fixée à 348 portent, nous engagent à mettre sous
années. Le lecteur jugera, comme nous, les yeux du lecteur le tableau suivant
que , en pareille matière, les approxi- qui les résume en quelques lignes.

TABLEAU DE LA XVIII e DYNASTIE.


RÈGNES NOMS ET FILIATIONS.
DUREE
soecMSiM on lie»

1
er Gis d'Amosis 30 •os. 7 l'an 1822*.
! ,

Reine Akmot- Nojrit-Ari.


2 1", ionf.li 13 I79IV
jdhmot.
3 Thonthmosis II, son SU 30 1778*.

4 (reine régnante, sa sœur) 21 1767*


Thoulhmosts , I er mari.
AiRf ntntht , a man«
I III , Marris, fila d' Ameuté 12 9 1736V
H/tamatté , fmnine de Marris.
6 » II. fils de Maris 26 10 1723V

7 Thoulhinotis IV, son fils. 8 1607*.


Tkmm
8 lia III , MemnoD , sou fils. 5 1687*.
Tatm.

0 38 5 1657*.
Tiaahumot , fille d'Horus.
10 Kh.msèsl", fils d'Horus. 9 I619V

II Ménepbtha I" 32 8 16 10*.


i" Tsirt.
a* 7>#a.
12 Rhamsés II , son fils 5 6 *
1577V
Nofrt- Tèri.
Rbainsès III, Sésostris, fils de Ménepbtha I", et de
13 Twé» 2 1571».
t tm Nofrt 'An.
a* Iiénofrt.
14 Ménephtha II , son fil* 5 1503*.
îsenopht.
15 Thaoser. sa fille
Siphtha-Mcnephiha, mari dr la rrine. 19 0 1198*.
10 Méneplitha III, fils de Mènrphiha II
17 S 3 1479*.
Ao/rec.

3iY
U XIX* djiuslic l'an.. 1474V
i

Digitized by Google
EGYPTE
Ladix-neuvième dynastie fut, comme nier de la XVIII* dynastie, régna bien
*s précédentes, originaire deThèbes. peu d'années; les Pasteurs l'avaient
Le premier roi de la XIX* était le (ils chassé de son trône; à sa mort, il
4u dernier de la XVIII* il y a quel-
: n'avait pas de tombeau ; il fut placé
ques incertitudes sur les motifs qui dans celui de ses ancêtres sou sé-
:

suidèrent les Égyptiens dans la dis- jour forcé en Éthiopie explique natu-
tinction des dynasties , et ce mot pa- rellement cette circonstance remar-
rait avoir eu "pour eux et pour leurs quable de la vie de ce roi.
annalistes une acception différente de Le second passage de Manéthon est
celle que les écrivains de nos temps relatif à un événement d'un autreordre.
lui ont unanimement donnée. Les meil- Ce même Pharaon Séthos avait réuni
leures autorités fixent à six le nom- de grandes forces de terre et de mer.
bre des rois de la XIX e dynastie; le Il entreprit de lointaines conquêtes;
premier de tous porta le nom de et, en partant, il laissa à son frère
Rhamsès ; il fut surnommé Méiamoun, Armais l'administration de l'Egypte,
Rhamsès aimant Amon. Soncartouche- lui déléguant l'autorité royale, a la
prenom se lit en effet Soleil gardien
: condition toutefois de ne pas ceindre
de vérité , aimant Amon. le diadème royal, et avec la recom-
De graves événements troublèrent mandation expresse de respecter la
te premières années du règne de ce reine, mère de ses enfants, et les
prince, dont, toutefois, la durée fut autres femmes du palais. Le roi cin-
extraordinaire , et il fut illustré par gla vers Chypre , attaqua ensuite la
ûe. grands succès dans de grandes en- Pbénicie, les Assyriens, les Mèdes,
treprises militaires. et , enhardi par d'éclatants succès , il
Les écrivains grecs des premiers se dirigea vers les nations de l'Orient.
sièclesdu christianisme nous ont con- Il apprit alors par des lettres du grand
servé quelques passages textuellement prêtre, que son frère Armais avait mé-
extraits de l'ouvrage de Manéthon, prisé tous ses ordres, et était en ré-
où ces événements étaient consignés. volte ouverte contre son autorité.
D'après un de ces passages , l'Egypte Séthos retourna en Égypte, y rentra
fut de nouveau envahie par les Pas- par Péluse , et reprit la couronne et le
teurs durant le règne d'un Aménophis pouvoir; Armais s'enfuit devant lui,
père de Séthos , appelé aussi Rnam- et cet Armais se nommait aussi Da-
ses. Aux premières menaces des Pas- naus.
teurs, le roi pourvut d'abord à la Ces circonstances conviennent en-
sûreté de son (ils encore en bas âge ; core au règne de Rhamsés-Méiamoun;
<t bientôt après
, incapable de résister ce prince fut un grand conquérant;
aux efforts des barbares , il se retira les monuments subsistants nous en
*n Ethiopie. Il fut contraint d'y de- instruisent sans équivoque; les seuls
meurer pendant 13 ans; Séthos gran- tableaux historiques où figurent des
dit, leva une forte armée, la mena en entreprises navales , des combats sur
Ksypte, il avait alors 18 ans; il vain- mer, sont aussi de son règne; enfin,
W l'ennemi, le chassa de nouveau
*ers la Syrie, et il jouit dès lors sans
si l'on compte dans le régne de ce
prince les 13 années passées en Éthio-
trouble de l'autorité royale. phie (puisqu'on ne les comprend pas
Pour appliquer au règne de Rham- dans le règne de son père, qui n'a été
ses-Méiamoun cette narration de Ma- porté qu'à 5 ans et 3 mois), et qu'on
néthon, il suffit de considérer que ce roi
y ajoute quelques années pour le temps
Porte dans les listes de ce même Mané- de ses campagnes sur terre et sur mer,
thon ce même nom de Séthos , et sur les son rèmie ayant commencé en l'année
Monuments celui de Rhamsès >double 1474 avant l'ère chrétienne, la fuite
dénomination par laquelle Manéthon d'Armais-Danaus sera fixée vers l'an-
désigne ainsi le prince dont il raconte née 1450, et c'est le temps même où
Nustoire. Le père de ce prince , le der- l'antiquité classique place la venue en

Digitized by Google
L'UNIVERS.
Grèce des colonies égyptiennes de Da- tions; mais toutes les sculptures de
naus. façades supérieures, sud et nord
Rhamsès-Méiamoun fut le quatrième furent ordonnées par Rhatnsès-Më§|
de ce nom ; depuis qu'il avait été illus- moun ; et il paraît que ce roi se
tré par le plus glorieux des règnes posa , par ces travaux , de lier le
celui de Rhamsès le Grand , ce nom de Mœris avec le grand palais
fut adopté par les rois thébains qui lui couvrit la butte de Médinet-Hî
succédèrent. Os m vues nombreuses , civiles , ml
Aucun autre édifice de l'Egypte n'é- taires et religieuses , tableaux où 11
gale en étendue le gigantesque palais toire égyptienne est écrite à grai
de Médinet-Habou ( Thèbes) , élevé par traits et se manifeste à tous les yei
le rni Rhamsès-Méiamoun. I^e lecteur ont été décrites dans les sections où
a déjà eu sous sés yeux la description variété de leurs sujets avait ruarqi
de quelques parties de cette merveil- leurs places.
leuse construction (voy. ?upru , pages C'est aussi à ces admirables ta
68,59, 156 à 158, et 241). Autour de bleaux qu'on doit rapporter ce pas
ce grand monument s'étaient groupes sage des Annales de Tacite (liv. il,
les édi lices élevés par des rois posté- ch. 60).
rieurs : les siècles s'y étaient groupés « Germanicus se rendit en Égypt<
aussi et les arts y trouvent retracée
, pour en examiner les antiquités... Dt
toute leur histoire dans une réunion Canope il arriva bientôt à Thèbes, et
d'ouvrages d'époques très -diverses, en contempla les immenses vestiges:
comme le sont , sur le même sol et des inscriptions en caractères égyp-
dans un espace circonscrit , un temple tiens, gravées sur de grands édifices,
de l'époque pharaonique la plus bril- rappelaient l'ancienne opulence de IÊ-
lante; un immense palais de la pé- pte. Il en demanda l'interprétation
riode des conquêtes; un édifice de la fl'un des anciens parmi les prêtres,
première décadence sous l'invasion qui lui dit « que ces inscriptions an-
éthiopienne; une chapelle élevée par nonçaient que l'Égypte avait eu autre-
un des princes qui avaient secoué le fois sept cent mille hommes en état
joug des Perses; un propylon de la de porter les armes ; que le roi Rham-
dynastie grecque; des propylées de sès , à la tête de cette armée , avait
l'époque romaine, et, comme pour subjugué Libye, l' Ethiopie, les
la
réunir les deux points extrêmes de Mèdes, les Perses, la Bactriane et la
cette chaîne chronologique, dans une Scythie, et tenu sous sa domination
des cours du palais pharaonique, des l'Arménie, la Cappadoce qui en est
colonnes qui jadis soutenaient le faite voisine, ainsi que la Bithvnie d'un
d'une église chrétienne; ajoutons à côté et la Lycie de l'autre, sur
tant de confusions de temps et de les deux mers. On v lisait, dans
noms, que les propylées élevés par l'em- l'état des tributs imposés à ces
pereur Antonin, et les propylons de nations, le poids en or et en ar-
Ptolémée - Soter II, sont construits gent, le nombre d'armes et de che-
avec les débris retournés du palais de vaux , la quantité d'ivoire et de par-
Sésostris, démoli par les Perses, et que fums pour les temples , celle des grains
le nom du roi éthiopien Tarnka y a été et autres objets que chacune d'elles
martelé par l'ordre du Pharaon Piec- devait payer, et ces tributs égalaient
tanèhc ; ainsi les nations et les hom- ceux qui sont imposés aujourd'hui ou
mes s'y sont successivement éliminés : par les armes des Parthes ou par la
éphémères triomphes dont un peu de puissance romaine. »
temps montre toute la misère ! Germanicus ajoute Tacite, vit. aussi
,

Les plus anciennes constructions de d'autres merveilles, la statue de Menv


Médinet-Habou remontent au règne non,4es Pyramides, le lac (Mœris)et
de Thouthmosis 1 pr Mû ris fit exécu-
. les canaux , réceptacles des supertiui-
ter la plus grande partie des décora- tés du Htt| enfin Élépuantine et

Digitized by Google
KGYPTE. 347

Sveue, limites alors de l'empire ro- constances de son histoire avec celles
et ces merveilles de l'ftgypte du
; de la vie de Sésostris ce que l'anti-
:

de Germanicus excitent encore, quité a rapporté de l'un et de l'autre


dix -neuf siècles, l'admiration les pince également au premier rang
peuples modernes: privilège à tou- parmi les plus grands hommes des pre-
jours assuré aux chefs-d'œuvre de la miers temps.
pensée et à ceux
des beaux-arts. Le tombeau de Rhamsès-Méiamoun
La construction de l'incomparable est le plus grand et le plus magnifi-
édifice de Médinet-Habou fut dirigée quement orné des tombeaux qui exis-
par le basilico-grammate Phori; cet tent encore dans la vallée de Biban-el-
officier en a consigné le souvenir Molouk ; mais aujourd'hui le temps ou
dans une des inscriptions religieuses la fumée a terni l'éclat des couleurs
do spéos de Silsilis. Trois autres ins- qui le recouvrent; il est remarquable
criptions en caractères sacerdotaux, aussi d'ailleurs par huit petites salles
tracées dans ce même lieu annon- , percées latéralement dans le massif des
rr
cent que le même olBcier s'est rendu parois du l et du 2* corridor , cabi-
àSiUilis au mois de paschom, de la nets ornés de sculptures du plus haut
S* année du règne de Rhamsès-Méia- intérêt. L*un de ces petits boudoirs
moun; il venait diriger l'exploita- contient, entre autres choses, la re-
tion des carrières pour les construc- présentation des travaux de la cuisine;
tions de Médinet-Habou. Dans un un autre celle des meubles les plus
rand bas-relief du même spéos , le roi riches et les plus somptueux ; un troi-
vu même fait ses adorations au dieu sième un arsenal complet d'armes de
Phtha et à la déesse Pascht ( Bubastis). toute espèce et d'insignes militaires
Enfin une grande stèle représente ce des légions égyptiennes : ailleurs on a
même Pharaon adorant les dieux de sculpte les barques et les canges royales
Silsilis ; et ce monument fut exécuté avec toutes leurs décorations. L'un
par Tordre du basilico- çrammate d'eux aussi nous montre le tableau
fhorî qui prend les qualités de sur-
, symbolique de l'année égyptienne,
intendant des bâtiments de Rhamsès- figurée par six images du fi\\ et six
Meiamoun , intendant de tous les pa- images de l'Egypte personnifiée, al-
tois du roi en Êgypte, et chargé de la ternées , une pour chaque mois et por-
construction du temple de Phré, bâti à tant les productions particulières à la
Memphis par le Pharaon. division de l'année que ces images re-
H existe aussi quelques traces d'édi- présentent. Dans l'un de ces jolis ré-
llces élevés par le même prince non duits sont les deux fameux joueurs de
loin du Rhamesséum de Sésostris, à harpe copiés par tous les voyageurs.
Louqsor; et à Kourna, une inscrip- D'anciens Grecs visitant ce tombeau, y
tion royale où son nom est trace; à ont gravé sur les murs leurs noms et
Karnac", il est écrit sur un autre tem- les motifs de leur visite : c'est ce qu'at-
ple. Il existe encore à Qous l'ancienne , testent plusieurs anciennes inscrip-
Apollinopolis-Parva , les restes d'une tions grecques ericore subsistantes dans
er
stèle datée du 1 pnoni, de la 16* an- ce tombeau.
née du règne de ce Rhamsès , et rela- Son entrée est à ciel ouvert sans
tive à son retour d'une expédition mi- sculptures, et à l'extrémité de ce cou-
litaire il conduit des captifs dont il
: loir le plafond est soutenu , à son
va faire hommage aux dieux. Enfin origine, par guatre piliers à tête de
on remarque parmi les papyrus du taureau, de face, en demi -relief et
musée de Turin , des actes portant des peintes. Quelques plafonds sont peints
dates des années 6 10 et 24 du règne
, en bleu et parsemés d'étoiles blanches;
de Méiamoun. Ce prince fut un des des inscriptions sont tracées en bleu
plus illustres;il fit de vastes con- sur un fond jaune; les scènes religieu-
quêtes en Asie , et ses grandes actions ses y sont variées et nombreuses; la
ont fait quelquefois confondre les cir- longue durée du règne de ce roi permit

Digitized by Google
348 L'UNIVERS
de compléter et d'orner sa dernière Il remarquable que les contoc
est
demeure. de montagne, indiqués sur les de
la
Cette vaste catacombe a donné lieu plans, se rapportent encore parfai
à une observation singulière. Elle a été ment; et ce (jtii mérite encore pl
levée par des ingénieurs de l'expédition d'attention, c'est que chaque coulo
d'Egypte, et Champollion le jeune en chaque chambre du plan sur papyr
a reconnu un plan antique parmi les porte une inscription hiératique, sûi
papyrus du musée de Turin. Voici la de chiffres donnant des nombres u
relation de ce fait unique dans les an- variés: ce sont là sans doute I-

nales de l'archéologie : mensions de chaque partie de IV


« J'ai remarqué parmi tous ces pa- tion royale, et la commission a\
pyrus des fragments chargés de lignes levé ces mêmes détails exprima
tracées dans diverses directions; ie mètres, on a ainsi un nouvel éJé
n'en voyais pas d'abord le sujet. Apres de la grande question des inesui
avoir rapproché tous les morceaux , qui égyptiennes. »
font une grande feuille de plus de deux Mais quelque intérêt que presen
pieds, j'y ai reconnu sans nul doute le cet antique dessin le lecteur en acee
,

pian lavé d'une catacombe royale; le dera encore davantage au sarcopha


revers est presque entièrement écrit. même de Rhamsès-Méiamoun , qui c
Le dessin est très- proprement fait, et aujourd'hui un des ornements du m
l'on y distingue quelques repentirs sée égyptien du Louvre : il y est ent
d'une couleur très-pâle, comme avec avec la collection Sait, dont il fais;
un crayon de plomb. Cette catacombe partie. C'est un magnifique monolitl
est celle du roi Rhamsès-Méiamoun, et en granit rose, de sept pieds de hautci
en voici la preuve. La commission sur quatorze de longueur, d'une In
d'Égypte a levé le plan de plusieurs geur proportionnée, creusé pour reo
tombeaux, et l'un de ceux qu'elle a voir la momie royale enfermée dar
publiés se rapporte exactement avec plusieurs riches cercueils, et couvei
celui que donne ce papyrus; c'est le de sculptures sur toutes ses surfaci
cinquième de Biban-el-Molouk, à l'ouest intérieures et extérieures. Le cou verci
de Thèbes, et les bas-reliefs de ce tom- de ce beau sarcophage, en granit ro<
beau offrent un grand nombre de fois également, était aussi orné de sculj
le nom de ce Rhamsès-Méiamoun; de tures et d'inscriptions ; trois figures e
plus, on sait en Angleterre que des bas-relief occupaient la partie supériei
inscriptions grecques tracées sur les re ; le nom du roi est souvent répété su
parois de cette catacombe annoncent toutes les parties du monument. L
que diverses personnes sont venues sarcophage est à Paris et le couvercl
visiter ce tombeau de Rhamsès-Méia- en Angleterre; il appartient à Vum
moun; enfin la grande salle du plan versité de Cambridge. Il ne reste au
sur papyrus présente le dessin à vol cune trace de la momie du roi; soi
d'oiseau d'un sarcophage très -bien tombeau est de ceux qui ont été ou
peint en granit rose ; le couvercle est verts très-anciennement. Le musée d(
orné de trois personnages portant des Louvre possède aussi plusieurs figu
attributs divers: et c'est encore là tout rines funéraires du même roi ; elle:
juste la forme, par la pose, les pro- sont en granit rose, en bois peint 01
portions et les détails, du couvercle en bronze.
en granit rose aussi, tiré de ce même Rhamsès IV Méiamoun mourut aprèi
cinquième tombeau de l'ouest, rap- un règne de cinquante-cinq ans. &
porté par Belzoni , et qui porte en effet femme se nommait Isis; elle lui sur
les noms et prénoms de ce Rhamsès- vécut. Le tombeau de cette reine fut
Méiamoun. Le rapprochement du plan l'effet de la pieuse attention de son Gis
sur papyrus avec celui de la commis- aîné.
sion d'Égypte, offrira quelques obser- Ce prince se nomma aussi Rhamsès
vations qui ne seront pas sans intérêt. (le cinquième de ce nom); il succéda à

i Google
Google
t I
• * • • » » -

• «

**
v.v
• w

< ».

m • V•

- •

Digitized by Google

- »
. * » • • • • •

. • • »

••v
• • • •

• • •

•• # •
- - - «

• •« •
• • •
:V

Digitized by Google
ÉGYPTE. 349

>n père vers Tannée 1419 avant l'ère par Ammon, suividu cartouche nom
îrétienne. propre Rhamsès, et accompagnés de
Rhamsès IV avait laissé une nom- quelques titres particuliers, tels que
reuse lignée elle est, on peut dire,
: ceux de semblable au soleil pour tou-
gulîèrement enregistrée dans le tem-
;
jours, modérateur de la vérité se lit
,

e de Médinet-Habou. On a déjà vu encore sur quelques monuments, sur


>age 157) la mention des tableaux où une porte votive en bois de sycomore,
s dix fils du roi sont figurés en pied l'une des plus belles pièces du musée
i costume de prince (voy. pl. 25, de Turin; sur des stèles déposées dans
a 3 ) , dans leur ordre de primogé- d'autres musées; dans les inscriptions
iture, et les inscriptions qui accom- du temple de Chnouphis à Elephan-
agnent ces figures coloriées indiquent tine; sur quelques parties de Karnac.
•s noms et les qualités de chacun de Ce roi figure aussi , n'étant encore que
s princes au nombre de dix. prince, dans les pompes triomphales
C est sur ces précieux tableaux que de son père à Médinet-Habou. La
'posent toutes les certitudes de l'his- figure de Rhamsès V se voit dans la
)ire à l'égard de la descendance et de salle hypostyle de Karnac, dans les
isuccession royale de Rhamsès IV, à bas-reliefs des grandes colonnes; il y
e
égard même de la XIX dynastie tout est représenté en pied , faisant à Amon-
ntière. Les listes des abreviateurs de Ra l'offrande de son propre prénom
fanéthon contiennent pour cette épo- royal seigneur gardien de la vérité.
:

ue peu de renseignements intelhgi- Le tombeau de Rhamsès V a été re-


les. Les tableaux de Médinet-Habou connu dans la vallée de Biban-el-Mo-
suppléent avec une incontestable au- louk il est un des plus complets, des
:

orite : il suffira de les décrire pour en plus riches (preuve évidente de la lon-
onner au lecteur l'intime conviction. gue durée du règne de ce roi ) et nous
,

Il est en effet arrivé pour le fils de en avons donné la description détail-


thamsès IV ce qui s'était passé pour lée, pages 51 à 54, au treizième para-
e fils de Rbamsès III. Ce fils fut le graphe relatif à l'état de la famille
reizième de ses enfants, celui qui par, royale. C'est dans ce tombeau que se
e hasard des événements, succéda au trouve la confession négative à laquelle
oi son père; il était figuré à son rang, l'âme était soumise en présence des
lans le tableau des vingt-trois fils de ministres de Dieu. On y voit aussi,
iésostris; et, lorsqu'il eut été appelé parmi les scènes symboliques relati-
iu trône, on le signala dans ce même ves à la marche du soleil dans les deux
ableau, en changeant son costume de hémisphères, image de la vie de
>rince en habit royal, en gravant à l'homme, à la seconde heure, apparaî-
ïôté de son nom de famille le cartou- tre les âmes des rois, ayant à leur téte
che qu'il adopta quand il fut roi. On en celle de Rhamsès V lui-même, allant
î agi de même à l'égard des fils de au-devant de la bari, ou barque sacrée
Rhamsès IV; à côté du nom et de la de Dieu, pour adorer sa lumière; et
igure de chacun des quatre premiers, aux quatrième, cinquième et sixième
3n a gravé un cartouche royal prénom heures, le même Pharaon prendre part
du nom propre, parce que ces quatre aux travaux des dieux, qui font la
fils occupèrent successivement le trône guerre au grand serpent Apophis ca-
après la mort de leur père. Sur les six ché dans les eaux de l'Océan. C'est
rois qui composèrent la XIX dynas-
e
aussi parmi ces peintures qu'on recon-
tie, les tables de Médinet-Habou en naît un tableau des constellations et
nomment ainsi cinq à l'histoire. de leurs influences, pour toutes les
Le règne du fils aîné, qui est le heures de chaque mois de l'année, sur
Rhamsès V
de nos listes,' fut long, les diverses parties du corps humain
mais il en reste peu de souvenirs his- qui étaient placées dans leur dépen-
toriques. Son cartouche-prénom, so- dance.
leil gardien de la vérité, approuvé Le tombeau de Rhamsès V est un

Digitized by Google
3S0 L'UNIVERS.
des plus complets de tous ceux qui sième et a* tant au quatrième, il
existent dans la vallée de Riban-el- résulterait que la mort du dernier
Moiouk et dans la vallée de l'ouest : il rait arrivée quatre-vioet-onze ans
est comme un type auquel on peut celle âge de
du père, mort à I

comparer tous les autres. ans, ce qui ne suppose pas au derr


Les listes de Manéthon donnent à de ses lils une longévité extraoi
e
ce second roi de la XIX dynastie plus na ire il faudrait aussi porter le
;

de soixante aus de règne. Ce fut lui du dernier roi de cette dynastie à


qui assura a sa mère les honneurs d'un rante-huit ans. Mais les autorites n<
tombeau royal. 11 faut conclure de la manqueut pour accréditer ce System
longue durée de sou règne qu'il naquit
peu d'années avant la mort de son père
Rhamsès -Méiamoun, et qu'Isis, sa quand il s'agit de l'homme, ne peul

mère, ne fut peut-être pas la première fonder sur des exceptions aux lois (
femme de ce roi elle lui survécut. Le
: nérales de la nature.
nom de son mari ne se lit pas dans Dans cet ensemble de doutes , no
son tombeau on n'y trouve que celui
; n'avons à indiquer ici que les 001
de son fils Rhamsès V. des successeurs de Rhamsès V; I

Dans les listes de Manéthon déjà trois premiers furent ses frères,
publiées, le successeur de Rhamsès- portèrent aussi le nom de RhauuM
e
Méiamoun est nommé Rapsis ou Rap- et ce sont les VI% VII et VllV de
sakes; mais un manuscrit de la biblio- nom. Leur successeur, le sixième \
de la XIX dynastie, fut aussi
e
thèque royale le nomme positivement ;

Rhamsès, et ce manuscrit est d'accord Rhamsès (Rhamsès IX); il s'uppt


avec les monuments ; c'est le Rham- Thoûoris, selon les listes de Mau
sès V de nos listes. Il eut pour succes- thon.
seur un autre prince du même nom, Il nous reste peu de monuments <

qui futRhamsès VI. règne de Rhamsès VI. Avant qu'il f


Frère du précédent et second Ûls de roi | il remplit les fonctions de athl
Méiamoun, parvint à la couronne
il phore à gauche du roi, basilio
la
vers l'année 1358 avant l'ère chrétienne. grammate commandant de cavaleri
Rapproché des listes de Manéthon, ajoutant à l'indication de ces cbargi
le tableau des dix iils de Méiamoun, militaires les titres de lils du roi , ei
dont les quatre premiers portèrent fant de son germe et le chérissan
successivement la couronne, ne peut Son prénom royal signifiait soleil ça
point être mis d'accord avec ces listes. dien de vérité, ami d'Ammon. On
Elles donnent, en effet , soixante et une trouve au-dessus d'une porte, dans <

anuées au règne du lils aiué, quatre* deuxième cour du palais de Karnac,


vingt-cinq ans a celui des trois autres Thèbes, sur les débris d'un obélisque
frères suivants, et il en résulterait que sur la fleur de lotus qui surmonte u
le dernier aurait cessé de vivre et de sceptre appartenant au cabinet du roi
régner cent quarante-six ans après la à Paris, sur une stèle de Sabout-e
mort de leur pere commun. Il y a donc Kadim et très-fréquemment dans so
,

du désordre et des erreurs dans la série propre tombeau.


des noms et dans les chiffres des listes Ce tombeau existe dans la vallée de
qui nous sont venus des copistes de rois , à Riban-el-Molouk ; son entre
Manéthon, et l'ordre naturel de la vie est à ciel ouvert; il est creusé à un
des hommes y commande de sensibles petite hauteur au-dessus du fond de 1

rectifications. En
prenant pour règle,
le vallée, dans une masse calcaire d'un
sans trop nous écarter des chiffres couleur jaunâtre. Ce tombeau est ui
consignés dans la diversité de ces lis- des plus conserves; les peintures abon
tes, et accordant au lils aîné, Rham- dent en sujets astronomiques reli
sès V, soixante et un ans de règne, deux les courses du soleil , les heure:
:

vingt ans au second , cinq ans au troi- du jour et de la nuit, les luttes contn

Digitized by Google
ÉGYPTE. S5t
i redoutable Apophis, des tables de pour inscrire les levers et les influences
r?er et d'influence des constellations, des constellations sont tracées, mais
es scènes de métempsycoses, des li- le texte n'y a pas été écrit. Le plafond
inies en l'honneur du roi, la félicité de la salle principale est taillé en ber-
es lions, les châtiments des méchants, ceau , et la sépulture du roi existe dans
sont figurés en des tableaux mul ci- 5a salle funéraire; toutefois ce n'est
liés, qui ne permettent pas de refuser qu'un énorme monolithe en granit rose,
11 règne de ce roi une durée appro- ayant la forme d'un couvercle,- tra-
ftant de celle qui nous a paru comme vaillé à la hâte, posé seulement sur le
idiquée par les considérations préeé- sol, qui a été creusé pour recevoir la
emment exposées. momie royale. L'inscription funéraire
Rhamsès VII fut
quatrième roi de
le de Posirien roi y est grossièrement tra-
iXIX* dynastie; ce rang lui est as- cée, nouveau témoignage de la courte
igné par le tableau de la famille de durée de son règne.
Ihamsès IV, à Médinet-Habou, A u troi- Son quatrième frère lui succéda : ce
ième de ses fils est en effet affecté le fut Rhamsès VIII. Son cartouche-pré-
artouche-prénom qui signifie soleil nom est tracé auprès de sa figure en
ardien de vérité chéri d'Àmmon et
, pied, dans le tableau de Biban-el-Mo-
pprouvé par le soleil. Ce cartouche- louk , et ce cartouche contient, comme
rénom était constamment uni au nom ceux de ses frères, les premières qua-
ropre Rhamsès, divin modérateur, lifications de soleil gardien de la vé-
ui ne lit auprès de la figure en pied rité, etc. Dans son cartouche nom
e ce même prince dans ce tableau, propre, il est qualifié de Rhamsès,
îe Rhamsès est inscrit au même rang chéri par Phré, et par une autre di-
t sous ce même nom dans les listes vinité jusqu'ici inconnue. On a re-
te Manéthon. trouvé les noms de ce roi sur deux
Le tombeau de ce roi est presque le stèles du musée de Berlin , mais avec
eul monument qui nous reste de sa une variante dans les signes, qui an-
ie et de son règne. Il est creusé dans nonce la protection des dieux. Ce prince
e flanc des montagnes de Biban-el- fut le dernier des fils de Rhamsès-
>folouk, non loin de celui de son frère Méiamoun, qui composent cette ex-
thamsès VI c'est le premier qu'on
: traordinaire succession de quatre fils
encontre en venant de Kourna: il est à leur père: ces deux générations, qui
i gauche, au fond d'un petit vallon. vécurent cent cinquante et un ans,
>on avenue est à ciel ouvert, d'une comprenant cinq individus, peuvent
argeur remarquable elle avait été stu-
; avoir occupé le trône d'Égypte durant
|uée avec soin. L'inscription tracée cent quarante-six ans. L histoire des
tur le listelqui surmonte le bandeau de temps modernes n'a recueilli nulle part
'entrée contient deux fois le prénom le souvenir d'un semblable phénomène:
royal et le nom propre du roi, dans deux il a pu toutefois se réaliser dans les li-

\Trtouches tels que ceux qui viennent mites des lois naturelles.
l'être décrits. L étendard royal orne Le dernier roi de la XIX* dynastie
les jambages de la porte; mais cette fut aussi un Rhamsès (Rhamsès IX),
nscription est peinte et coloriée, et mais on ignore à quel degré de parenté
aon sculptée, premier indice du court et à quel titre il succéda à son prédé-
règne de ce roi. Les tableaux qui dé- cesseur sur le trône: toutefois% de bons
corent cette catacombe sont, pour la motifs de critique historique ont assi-
plupart, semblables à ceux du tombeau gné à ce roi la place qu'il a dans notre
de Rhamsès V. Ces scènes symboliques relation. Son nom se lit sur des monu-
de la puissance du soleil, symbole lui- ments de Thèbes et à des places qu'il
,

même de puissance des rois , étaienj


la n'occupe que parce que des rois re-
consacrées par la religion, et se repro- connus pour ses prédécesseurs les ont
duisaient comme des types nue l'im- laissées libres, ou bien sur des por-
piété seule aurait pu altérer; les tables tions d'édifices construites d'ordinaire

Uigitizeci by Google
352 L'UNIVERS.
les premières, et dont les portions cette riche et inépuisable mine ài
suivantes sont signées du nom des époque où l'atmosphère, quoique
princes postérieurs à la dynastie. fort échauffée, est cependant ent
Le prénom de ce roi exprimait les supportable. Notre caravane s'yi
-
idées de soleil modérateur de justice, donc établie le jour même, et *
approuvé par Ammon, et son nom occupons le meilleur logement et
Rropre se lisait Ammon-Maï-Rhamsès; plus magnifique qu'il soit possible
accompagné de deux plumes,
est trouver en Égynte. C'est un roi Rhs
symboles ordinaires de la justice et de ses de la X1X dynastie qui nous d<M
l!

là vérité quelquefois ce préuom et ce


: l'hospitalité, car nous habitons %
nom propre se trouvent abrégés sur son magnifique tombeau , le second!
quelques monuments. l'on reucontre à droite en entrant d
Champollion le jeune a publié un de Biban-el-Molouk. Cet
la vallée 1

registre de recettes sacrées faites dans pogée, d'une admirable conservât»


un temple de Thèbes, pendant le règne reçoit assez d'air et assez de lumi
de Rhamsès IX. Ce registre est dis- pour que nous y soyons logés à m
tribué par années, et le nombre des veille; nous occupons les trois p
années entières, dans cet antique pa- mières salles qui forment une longu<
pyrus, ne s'élève pas au delà de six. de soixante-cinq pas; les parois,
Les listes de Manéthon indiquent aussi quinze à vingt pieds de hauteur, et
à la septième année la fin du règne du plafonds sont tout couverts scu de
sixième roi de la XIX* dynastie. tures peintes, dont les couleurs ce
Son nom se retrouve cependant sur servent presque tout leur éclat ; c*<
plusieurs ediGces de Thèbes, sur le une véritable habitation de prince,
sanctuaire du temple du dieu Khons, l'inconvénient près de l'enu lad e c
sur diverses portions des édifices de pièces; le sol est couvert en entier
Karnac, et dans la salle hypostyle. nattes et de roseaux; enfin les de
Quelques amulettes portent aussi ce kaouas (nos gardes du corps) et I

nom. Knfin le tombeau de ce roi existe domestiques couchent dans deux tent
encore dans la vallée de Biban-el-Mo- dressées a l'entrée du tombeau. Tel c
louk , à Thèbes ; c'est le second à droite notre établissement dans la vallée d
en entrant dans le vallon; il est situé rois, véritable séjour de la mort, pui
sur le penchant de la montagne, à peu qu'on n'y trouve ni un brin d'herfo
de hauteur au-dessus du tond de la ni êtres vivants , à l'exception des ch
vallée. cals et des hyènes. *>

C'est dans ce tombeau que Cham- L'avenue de ce tombeau est à ci


pollion le jeune se logea et s'établit ouvert; les parois furent dressée. 4

rendant les trois mois qu'il consacra mais non polies; un mur supérieur e
l'exploration de cette vallée des tom- pierres sèches prévient les éboulemenl
beaux des rois. Il écrivait de ces lieux partiels. Une grande porte de beiJ
mêmes, le 25 mars 1829, ce qui suit : proportion y donne entrée, et, comm
« Nous passâmes sur la rive gauche dans tous les autres tombeaux qui n
du N il , le 23 mars , et , après avoir en- sont pas du premier rang par leu
voyé notre gros bagage a une maison étendue, on trouve dans celui-ci un
de Kourna, nous avons tous pris la partie des représentations religieuse
route de la vallée de Biban-el-Molouk qu'on observe dans les autres sépu/
où sont les tombeaux des rois de la tures royales. La figure du roi s'j
XVIII e et de la XIX* dynastie. Cette trouve de proportions colossales, I:
vallée étant étroite, pierreuse, cir- tête ornée de la coiffure de divers
conscrite par des montagnes assez éle- dieux; il remplit envers eux les devoirs
vées et dénuées de toute espèce de prescrits par le rituel, et les légendes
végétation, la chaleur doit y être in- le disent chéri de tous. La salle sépul-
supportable aux mois de mai , juin et crale est soigneusement ornée des pein-
juillet; il importait donc d'exploiter tures consacrées; le sarcophage en oc-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 353

5 le milieu. Cecercueil est en granit chronologistes à de Troie, est


la prise
î: son couvercle est encore en contemporaine du dernier roi de cette
e, mais brisé; sa partie supérieure XIX e dynastie, et Pline dit formelle-
ornée de la figure du roi couché; ment que ce roi , contemporain de la
inscriptions et des sujets sculptés prise de Troie, se nommait Rhamsès :
rrent le restedu monument; mais c'est bien notre Rhamsès IX de notre
ont d'un travail grossier et peints XIX e
dynastie.
vert. Les parois d'un des corri- Toutefois les noms de ces rois, selon
I principaux sont occupées par la les monuments et selon les listes de
fession négative du roi; il n'est Manéthon , sont assez variables ou
pable d'aucun des péchés qui le pri- même différents. Nous ne répéterons
aient de la miséricorde des dieux, pas à ce sujet des explications généra-
/état de ce tombeau suppose un lement admises : les rois d'Égypte
Qe d'une durée plus longue que celle avaient plusieurs surnoms, et d'après
;le papvrus de Turin et les listes de cet usage ces surnoms, différents dans
néthon'accorderaient au roi Rham- les divers écrivains , n'en désignent pas
IX. On voit aussi que le nombre moins le même personnage. Pour la
irois de cette XIX e dynastie ne pou- XIX e dynastie, nous nous sommes
it être porté au delà de six, leur guidés à la lumière des monuments;
rte totale s' étant élevée à cent qua- nous invoquerons le même secours au
^ingt-quatorze années, et les cinq sujet de la dynastie suivante , la XX*.
îmiers rois ayant employé les cent Elle fut aussi originaire de Thèbes,
aranie-six en reste
premières,
il et reposa dans les sépultures thébaines.
arante-huit pour
sixième. L'eten-
le Ses tombeaux se retrouvent encore pour
l'élégance et la belle construction la plupart dans les vallées réservées
tombeau de Rhamsès IX nous por- aux catacombes royales , et les rois qui
it à croire ce nombre d'années de les occupent sont tous encore des
n règne approximativement exact-. Rhamsès de , la grande famille à jamais
LaXlX* dynastie, qui occupa le trône illustrée par Sésostris.
ndant cent quatre-vingt-quatorze Ces indications sont ici d'un grand
pees, finit donc de régner vers l*an- Ïtrixpour l'histoire d'une dynastie dont
* 1279 antérieure à l'ère chrétienne. es abréviateurs de Manéthon ont in-
Les écrivains grecs rapportent aux diqué le nombre des rois, douze, et la
rops de cette même dynastie deux durée totale de leurs règnes réunis,
énements importants pour l'his- cent soixante et dix-huit ans, sans
'ire renouvellement du cvcle so-
: le ajouter à ces deux chiffres aucun autre
uque et la chute de Troie'. Il est renseignement.
Estant, par les résultats des travaux Dans ce silence de l'histoire écrite,
K mathématiciens anciens et modèr- et, d'autre part, dans l'abondance des
es qu'un renouvellement de ce cycle,
i monuments originaux, la critique se
* de la période de 1460 ans (voyez guide par de sages analogies : ici l'on
h uaee 237 ci-dessus) s'opéra le' 20 en trouve dans les dénominations , dans
,

de l'année 1322 avant l'ère chré-


u,, iet
les titres royaux consacrés par la re-
£nne, et cette année appartient eo nommée des ancêtres, dans le lieu oc-
g* XIXe dynastie. Selon notre
a la cupé par des tombeaux dont le voisi-
st e,
'
un Rhamsès régnait alors, et nage et la réunion font considérer leur
[
heon le
mathématicien, qui parle de ensemble comme le tombeau commun
* .Nouvellement du cycle, nomme ce d'une nombreuse famille.
?J
Ménophrès. Ce nom est bien égvp- On a donc attribué à la XX e
dynastie
signifie le serviteur de Phré
I
les princes dont la formule, soleil grar-
e soleil);
^
ce fut, sans doute, le sur- dien-de la vérité, est inscrite la pre-
^jn du Rhamsès qui régnait alors. mière, parmi quelaues autres, dans
11 est
constant aussi que l'époque la leur prénom royal ; dont le nom propre
N généralement assignée par les est Rhamsès ou Raraéri avec divers
W Livraison. (Egypte.) 23

Digitized by Google
*Ô4 L'UNIVERS
surnoms, cette formule et ces noms de leurs successeurs , surnommé Ni las
e
propres étant communs dans la XVIII se soit fait quelque renommée dai
et la XIX' dynastie; enfin les princes l'histoire pour les grands travaux
dont la sépulture est mêlée à celle des venus indispensables, sur les canai
rois de la XVIII et de la XIX- dynas-
e
du Ml, qu'il fit exécuter durant
tie, ce qui les fait supposer leurs des- règne. Une telle incurie et les
cendants et leurs successeurs; et si Ton de sont des malheurs
l'oisiveté
ne trouve point à Thèbes les tombeaux quand les rois s'en rendent coul
des rois ae la dynastie suivante, la en Egypte, ces vices cruels port
XXI e , ce fut sans doute parce qu'elle avec eux leur châtiment; la famille
était étrangère aux trois précédentes : Rhamsès, dégénérée de son génie e
elle tira en effet son origine de la viUe de ses vertus, perdit le trône, et ftà
de Tanis. On peut donc inscrire dans remplacée par une famille nouvelle.
laXX e
dynastie les souverains dont les Les listes de Manethon portent i
monuments nous révèlent les douze le nombre de ces derniers Rham»
placés dans les circonstances qui ses, formant la
e
XX
dynastie. Le*
nent d'être exposées. chroniqueurs des anciens temps ont dé
Pour l'époque contemporaine de la daigné de transcrire leurs noms : ils ouf
fin de la XIX dynastie et de l'élévation
e
été excusables , si leur silence est tu
de la XX e
, Diodore de Sicile et Héro- jugement. Douze rois qui passent sut
dote racontent quelques merveilles , en- un trône sans y laisser la trace cTucm
tre autres les immenses richesses de bonne action ou d'un grand service,
Rhamphisou Rhampsinite (premier roi méritent au moins d'être oubliés.
de la XX e
dynastie,et successeurde Pro- Il reste cependant de quelques-uns
tée-Thouoris, notre Rhamsès IX sous d'entre eux quelques rares souvenirs,
le règne duquel Troie fut prise par les et ils sont presque tous tirés de leurs
Grecs), et les tours surprenants de deux tombeaux , triste commémoration bien
voleurs qui puisaient à pleines mains digne de l'inutilité de leur vie : leur
dans les trésors accumulés par le roi ordre même de descendance, leur place
et dont les aventures seraient plus di- dans leur propre famille, les noms de
gnes de la plume des conteurs arabes leurs pères et de leurs enfants nous
que de celle des deux grands écrivains seront inconnus.
grecs. Mais il y a dans cette narration Nous indiquerons donc ici leurs
une confusion d'époques telle, que des noms (c'est tout ce qui nous reste de
personnages des beaux siècles de la lit- leur fugitive existence), dans le seul
térature grecque s'y trouvent contem- objet de ne pas laisser une lacune dans
porains de la construction des pyra- l'histoire.
mides. Diodore de Sicile dit vrai quand Nous appellerons Rhamsès le X
il ajoute : a Les rois qui succédèrent à souverain dont le tombeau, situé à
Rhampsis pendant l'espace de sept gé- Riban-el-Molouk , porte des cartouches
nérations vécurent tous dans une pro- qui se lisent : Soleil bienfaiteur des
fonde oisiveté, et ne s'occupèrent que offrandes, approuvé par le soleil, fils
de leurs plaisirs. Aussi les chroniques du soleil , dominateur de la région de
sacrées ne nous transmettent sur leur pureté et de justice, chéri d'Ammon,
compte le souvenir d'aucun monument Rhamsès. Ces titres se lisent aussi dans
magnifique, ni d'aucun acte digne de une inscription hiératique, sur une
trouver place dans l'histoire; » et il est partie des édifices de Karnae, et dans
juste d'ajouter que les travaux archéo- fe tombeau d'un membre de la classe
logiques des modernes confirment les sacerdotale, à Etetuya, mort dans la
rapports de Diodore sur cette série de quatrième année du rèçne de ce roi.
rois fainéants qui occupèrent pendant Un autre roi du même nom sera
près de deux siècles le trône d'Êçypte, notre Rhamsès XI c'est celui dont le
:

et qui négligèrent assez les soins de tombeau existe aussi a Biban-el-Mo-


l'administration publique pour qu'un louk , et dont les nom et prénom royaux

Digitized by Google
EGYPTE.
unifient : Soleil de vérité dans le Rhamsès. Sa légende rovale se retrouve
nrmde terrestre, approuve par Phré, dans le sujet d'une petite stcle des
«fils du soleil, Ammon..., Rhamsès. carrières de Silsilis.
ht tombeau de ce roi est le troisième A mon - Mai Rhamsès fut le nom
tans le second embranchement de gau- propre du Rhamsès XIV, dont le pré-
rhe de la vallée de Biban-el-Molouk. nom officiel signifiait soleil gardien de
L'avenue est spacieuse; à l'entrée, le vérité , approuvé par Phré : imitation
roi fait ses adorations, étant casqué intentionnelle des titres et du nom du
tt agenouillé; mais les applications de grand Sésostris , par un de ses descen-
ituc se sont détériorées dans le pre- dants les plus inconnus , et dont le
mier et le deuxième corridor; les nom n'est conservé , avec la date de
sculptures ont été détruites également; Tan 83 de son règne , que par un frag-
et ce tombeau n'a jamais été achevé. ment gisant sur le sable dans les envi-
Pauvre roi ,qui fut enterré comme il rons oes murailles de K a mac.
mit vécu , en toute hâte. Le septième roi de la XX* dynastie
Son successeur, Rhamsès XII es- , fut plus heureux ou moins fainéant :
pérait être plus heureux. Son tombeau quelques monuments recommandantes
qui existe dans l'embranchement à de son règne sont parvenus jusqu'à
gauche de cette même vallée des rois nous. Son cartouche -prénom signi-
morts , avait été entrepris sur de vastes fiait : soleil stabiliteur de la vérité,
plans; l'excavation est des plus éten- approuvé de Phtha et son nom pro-
,

dues, grandiose dans son ensemble, pre , le dominateur dans la région de


mais elle est entièrement dénuée d'or- pureté, le chéri d'Amon, divin modé-
nements et de sculptures ; les tableaux rateur d* la région... Rhamsès Ra-
furent tracés en rouge sur la muraille; meri. Ce sera Rhamsès XV. Son sou-
tout fut préparé pour le ciseau ou la venir subsiste dans un des temples de
brosse : la mort du roi fit laisser ina- Thèbes, celui du dieu Khons, qui
chevée cette spacieuse sépulture. On y avait été fondé par Rhamsès IX, et
reconnaît à peine son nom figuré par qu'on appelle vulgairement le grand
les traits fugitifs du crayon ; ce Rham- temple du sud. La salle hypostyle, celle
sèsse disait soleil établi par Thmeï et qui précède le sanctuaire, fut décorée
Phtha , approuvé par Nèïth , fils du so- par les, soins de notre Rhamsès XV.
leil, dominateur de la région de vé- Cette salle est soutenue par huit co-
rité, chéri d'Amon , dieu modérateur, lonnes dont les quatre de la rangée du
Rhamsès. milieu sont plus hautes que celles des
Le souverain inhumé dans un autre deux rangées de droite et de gauche.
tombeau voisin de ceux qui viennent Celles du milieu sont à chapiteaux en
d'être indiqués, le quatrième à gauche, forme de campane ou de houppe de pa-
intitulait soleil établi des ,
ap- pyrus loti l'orme et les autres à chapi-
,

prouvé par Phré, le fils du soleil, teaux à bouton de lotus tronqué. Les
Amenmses, modérateur, etc. Ce se- titres du roi ornent les jambages de la
un nouvel Aménemsès, nom déjà
rait porte , et se lisent dans les dédicaces
connu dans les listes thébaines , et le gravées sur les architraves , ainsi que
quatrième roi de la XX* dynastie. On sur les dés et les corniches. Dans les
aremarqué dans son tombeau la men- tableaux qui ornent cette salle, lt
tion de sa mère Tascha, et ceHe de la Pharaon accomplit ses devoirs envers
reine son épouse, qui lui survécut; les dieux , et leur fait des offrandes
die est figurée rendant au roi des hon- notamment au grand dieu de Thèbes
neurs funéraires. son protecteur.
Le cinquième roi de celte même dy- En sortant de la salle hypostyle,
nastie fut encore un Rhamsès , et le dans la direction de la porte principale
tJJl* du nom. Il se qualifia de soleil de ce temple de Khons , on se trouve
gardien de vérité, soleil du monde, le dans le pronaos et on s'aperçoit bien
,

&s du soleil , chéri d'Amon qu'il aime, vite , à sa décoration , qu'elle est l'effet
23.

Digitized by GoOgL
L'UNIVERS.
de la piété d'un souverain autre que fants du pontife -roi sont en scè»
notre Hhainses XV, surnommé Ra- ayant chacun la qualification de rov
meri ; et , comme il est constant que enfant de son germe. Ces divers pi
l'accroissement soit des constructions, sonnages accompagnent une processif
soit de la décoration des édifices reli- dans laquelle on porte les baris
gieux , avait lieu en Égypte en com- barques sacrées d'Amon-Ra , Moi
mençant par le sanctuaire , et se et Khons. La figure en grand de
succédait par les salles continues, il roi, tirée du bas-relief d'une des
en résulte que le roi qui a décoré la lonnes du pronaos ,nous a donné
salle hypostyle qui vient après le sanc- portrait*
tuaire , vint aussi après le roi qui avait Une autre circonstance est digne <J

terminé ce sanctuaire, partie primi- remarque dans ce même pronaos : si


tive de l'édifice; et les inscriptions les parties les moins apparentes , o
nombreuses qui décorent le pronaos voit la figure et le nom d'un auti
nous apprennent que ce roi fut un pontife se qualifiant d'abord de nrêti
grand prêtre d'Amon nommé Pahôr- principal d'Amon-Ra , roi des dieux
Amonse; ce nom est écrit dans son Pihmé ; ensuite s'offre , sur un autr
deuxième cartouche, et le premier point, une enseigne royale où ce wêm
contient seulement la qualification de Pihmé se donne le titre de roi ; enûi
prêtre principal d'Amon. sur la troisième colonne de la deuxièm
Ces circonstances nous révèlent aussi rangée de droite, ce même grjm
un fait remarquable dans les annales prêtre est désigne par les deux cartou
royales de l'Égypte , un grand prêtre ches royaux; ils se lisent, soleil domi
ceignant le diadème , et cumulant ainsi nateur du monde , approuvé par A mon
des titres et des fonctions depuis bien le (ils du soleil, lecheri d'Amon, Pihme

des siècles attentivement distinctes les et ils sont accompagnés de toutes Ici
unes des autres. autres formules royales. Pihmé fut
Nous ignorons entièrement lescauses donc encore un grand prêtre qui de-
de cette singulière révolution dans le vint roi , et après Pahôr- Amonsé qui
gouvernement égyptien; elle ne fut occupe les places honorables dans 1<
que temporaire ;* mais elle révélait pronaos du temple. Toutefois, le mé-
un relâchement dans l'administration lange des ouvrages ries deux pontifes
civile, qui favorisa les vœux toujours dans cette même salle permet de les
rancuniers de la caste sacerdotale , et inscrire tous deux parmi les rois in-
le grand prêtre monta sur le trône des connus de notre XX' dynastie ils en :

rois. Pahôr- Amonsé. est représenté furent vraisemblablement les derniers.


dans les tableaux historiques dont le Ils portent à dix le nombre des rois
pronaos du temple de Khons est dé- de la XX' dynastie. Deux des souve-
coré, faisant ses offrandes aux dieux, rains de cette famille nous demeurent
et accomplissant envers eux tous les donc inconnus. La durée totale de son
devoirs prescrits aux rois ; ce pontife autorité fut de cent soixante et dix-huit
couronné n'avait garde de manquer à ans.
aucune des obligations de son titre : Son existence politique n'a laissé au-
dans tous les temps l'usurpation fut cune trace dans l'histoire; on ne la
une source de zèle et un grand véhi- connaît que par sa chute du trône: et
cule à l'exactitude. Amonsé paraît ceci nous porte à remarquer qu'il J
tantôt avec le costume de pontife, re- avait peut-être quelque chose d'admi-
couvert de la peau de panthère, et tan- rablement conçu, de profondément
tôt en costume civil, avec tousses in- combiné, ou d'heureusement inspiré
signes , mais la tête entièrement rasée dans l'établissement monarchique d'une
comme le prescrivait le rituel. La reine puissante nation, où la perte de la
sa femme figure dans les cérémonies ; couronne était l'effet inévitable de l'in-
elle se nommait Ahmôs-Nofré-Atari; capacité ou de l'incurie de la famille
dans un autre tableau , plusieurs en- qui l'avait reçue du vœu public. Une

Digitized by Google
,,
,

ÉGYPTE. *57
famille thébaine la conserva pendant remarquable par sa belle exécution , et
treize siècles consécutifs, et fournit provenant d'Abydos; elle est consa-
six dynasties qui donnèrent plus de crée à la mémoire d'un nommé Aasen,
cinquante rois : les premiers subirent simple particulier sans qualité aucune;
les invasions étrangères, et accom- et la personne qui consacra ce pieux
plirent la pesante mission de conser- monument est un Pharaon, un roi
ver la transmission de la couronne, de d'Égypte dont les qualifications et le
•estaurer ensuite toutes les branches nom propre, environné du cartouche
îe l'administration publique, de réta- royal ,, remplissent la première ligne
Wir les temples , les ouvrages d'utilité tracée en haut de la stèle , et qui se
lénérale; ils créèrent de nouveau lit: La vie divine! l'Aroeris bienfai-
Hièbes, Memphis, les cités princi- teur du monde, seigneur de la région
pales , le Inc Mer ris et les canaux de d'en haut et de la région d'en bas , le
ta basse Égvpte; eux et leurs succes- bienfaiteur du monde , roi du peuple
seurs portèrent leurs armes victorieuses obéissant , le fils du soleil Mandouftep,
sur les terres et sur les mers lointaines ; toujours vivant. Le défunt Aasen assis
le génie des arts grandit sous les ailes à côté de Hapévé , son épouse , reçoit
de la victoire; la prospérité publique les offrandes funéraires ae ses enfants
sembla s'accroître en proportion de ou petits-enfants au nombre de cinq;
kmt d'héroïques efforts , et la famille et , parmi les enfants, le roi Mandouf-
reenante devenir plus puissante et tep lui-même est désigné par ces mots:
mieux affermie par tant de grands tra- Son fils uui l'aime, Mandouftep; il est
vaux. L'inaction succéda un jour à tant le second dans l'ordre de la naissance;
de zèle ; dix rois se montrèrent sans son frère, l'aîné, se nomme Osorta-
gloire sur le trône; les derniers en fu- sen; et son autre frère, le troisième,
rent chassés par les prêtres ; la consti- Mandousé.
tution , favorisée par la force des cho- Cette stèle nous apprend donc que
lei , pourvut à ce désordre : une fa- le roi Mandouftep, le deuxième iils
mille nouvelle fut appelée à régner. d'Aasen , parvint au trône sans que son
Elle était originaire de Tanis , ville père eût joui des honneurs royaux,
bâtie sur ja rive orientale du Mil dans, qu'il fut un chef de dynastie nouvelle
h basse Egypte , et dont l'origine re- et l'on peut reconnaître en lui le Men-
monte aux plus anciens temps de l'his- dès ou Smendès des listes de Mané-
toire d'Egypte. Moïse l'a mentionnée thon , chef de la XXI* dynastie.
dans son histoire de l'Exode , à propos Un autre beau monument du musée
des espions qu'il avait envoyés pour de Turin , provenant également d'Aby-
reconnaître la terre sainte. Tanis avait dos , se classe à côté de celui qui vient
«ne étendue considérable; son en- d'être décrit; ces deux stèles se prêtent
ceinte renfermait des monuments im- un mutuel appui. Celle de Turin porte
portants, et leurs ruines nous montrent une inscription de la 46 e année du
encore les restes de sept obélisques, règne du roi soleil , seigneur grand
de volumineux monolithes , de co- fils du soleil , Aasen. Or, le successeur
asses et d'éditices de grandes dimen- de Mandouftep, dans les listes de Ma-
sions. néthon , est appelé Psousennès , avec
Selon les listes de Manéthon , la nou- les variantes Phunesès et Phusénès; il
e
ille dynastie , la XXI , originaire de
n'est pas diflicile d'y reconnaître le roi
Tanis , fut composée de sept rois qui Aasénès ou Aasen de notre stèle , qui
régnèrent ensemble cent trente années ;
fils de Mandouftep, aura, selon un
son élévation arriva vers l'an 1100 antique usage déjà remarqué , porté le
a*ant l'ère chrétienne. nom de son aïeul Aasen. l)ne autre
Un monument apporté d'Égypte à coïncidence est non moins difme d'at-
avec un ordre singu-
Paris, se classe tention : J.Africain fixe, d'après Mané-
lier dans cette série de circonstances thon, la durée du règne du Pharaon
Historiques. C'est une stèle funéraire, Phusénès à 46 ans ; et la stèle que nous

d by Google
L'UNIVERS.
citons est précisément datée de Tan 46 ginaire de Bubastis, chassa du tri
du règne a Aasen. Ta famille de Tanis : hélas ! de tels
Du reste , le nom propre Mandouf- nements annoncent bien huit le
tep se retrouve dans une inscription sordre des affaires publiques , et
gravée sur les rochers de la route de des causes secrètes minent les
Cosséir, et sur le circuit d'une momie cipes de la vie du corps social : qu:
du musée de Berlin. une nation se divise en deux cam
Mandouftep et Aasen sont les seuls qui se disputent par des révoluti
rois , le 1
er
et le r
, de la XXI e
dy- successives la possession du pouvoî
nastie dont nous connaissions jusqu'ici le jour ne tarde pas d'arriver où
quelques monuments ; leurs cinq suc- saçes des deux partis s'aperçoi
cesseurs ne nous sont révélés que par ?u*ila ont travaille mutuellement
les listes de Manéthon, savoir: Ne- avantage d'un commun ennemi.
pherchérès, qui règne 4 ans; Amé- Le chef de la nouvelle dynastie h ,

nophthis, 9 ans; Osochôr , 6 ans; XXII*, s'éleva dans la ville de Buba»


Psinachès, 9 ans, et Psousennès ou tis , Tune des plus anciennes de celle!
Aasen II , 30 ans. Cette dynastie vé- de la basse Égvpte. Ce chef se nom-
cut et mourut sans gloire ; on ne cite mait Scheschoiik, dont les Grecs firent
rien de digne de ces sept princes ; leur Sésonchis : c'est ainsi que ce nom est
nom ne se trouve sur aucun monu- écrit dans les listes de Manéthon. Soa
ment de l'Égvpte : le dernier mourut cartouche- prénom signifiait soleil du
vers l'an 970 avant Père chrétienne. monde méridional, approuvé par le
On voit sur un des rochers de granit soleil ; et son cartouche nom propre «
de l'île de Philae, une inscription hié- lit: A mon -Mai (le chéri d'Amon)
roglyphique, acte d'adoration à la Scheschonk.
déesse Néïth et au dieu Mandou pour Ces deux cartouches se trouvent
la conservation du Pharaon Manaouf- dans les inscriptions de deux statues
tep de la XXI 0 dynastie. léontocéphales dont une appartient au
Quelques personnages connus par musée égyptien de Turin , et l'autre au
l'histoire sainte furent contemporains musée de* Paris ; dans une inscription
de cette même dynastie : le roi David ; des carrières de Silsilis de l'an 22; et
le jeune Adad quf,deridumée,se sauva son nom propre est quelquefois abrégé
en Egypte pour échapper aux fureurs 3uand il est écrit sur des monumeuts
du saint rot et qui s y maria avec la
, e petites proportions.
sœur de la reine , femme du Pharaon ; Ce même Pharaon Scheschonk est
enfin, si l'on y croit, c'est d'un des nommé Schischak et Sisac dans les di-
e
rois de cette "XXI dynastie que Sa- vers textes de la Bible. Il exerça une
lomon épousa une fille". Les pays sou- grande influence sur les destinées poli-
mis a l'autorité du fils de David tou- tiques de la Judée. Ce fut auprès de
chaient aux frontières de l'Égypte ; le lui, en effet, que chercha un protec-
temple et les murs de Jérusalem n'é- teur et un refuge léroboam , menacé
taient pas encore élevés; mais, bientôt par Salomon. Salomon, dit la Bible
après , les fondements du temple furent (liv. IIIdes rois, et Parai ipomènes),
jetés, et l'édifice fut terminé dès la voulut tuer léroboam , qui se leva
onzième année du règne de Salomon. s'enfuit en Écypte auprès de Schis-
On a remarqué ailleurs l'analogie des chak, roi d'Égypte, et il y demeura
formes du temple du Seigneur avec tant que vécut Salomon.
celles des temples de l'Egypte, La Avant appris sa mort, léroboam
Syrie prenait aussi ses modèles en quitta l'Égvpte, se fit le compétiteur
Egvpte. L'histoire des rois de Juda de Roboam et de cette
, lutte provin-
va se mêler avec celle des Pharaons. rent le démembrement des États de
L'incapacité de ces Pharaons ouvrit David et la création du royaume d'Is-
encore la voie à un nouveau changement raël. Roboam et léroboam ne cessè-
de dynastie. Une famille nouvelle, ori- rent de se faire la guerre. Le Pharaon

Digitized by Google
EGYPTE.
fcheschonk ne resta pas neutre ; il se furent contemporains dans la plus
Jéclara pourréfugié qu'il avait favo-
le grande partie de leur durée. Sésonchis
rablement accueilli; et, dans la cin- mourut vers l'an 948 avant l'ère chré-
fuième année du règne de Roboam, le tienne.
loi d'Égypte se présenta devant Jérusa- On ne peut pas fixer la durée de son
lem, s'en empara, et enleva les trésors règne à moins de' 22 ans; cette date
de ia maison deJéhovah, ceux de la mai- se lit dans une grande stèle de Silsilis,
ion du roi , et tous les boucliers d'or qui nous apprend en même temps que
qu'avait faits Salomon. Roboam régna ce prince y fit faire de grandes exploi-
sur la tribu de Juda , et Iéroboam sur tations destinées è des constructions
Il reste d'Israël. Le roi d'Égvpte con- dans la grande demeure d'Amon,
duisit en Judée une armée de douze constructions (juel'on reconnaît encore
cents chars, de soixante mille cava- dans celles qui forment le côté droit
liers , et d'une foule innombrable de de la première cour de Karnac, à Thè-
fantassins éçyntiens, libyens , troglo- bes, près du second pylône : monu-
dytes et éthiopiens. ment qui est en effet du règne de Sé-
Les monuments égy tiens encore sub- sonchis , et que ses successeurs les
ifirment hautement ces ré- Bubastites s'occupèrent de terminer.
cits de la Bible : la première cour du On connaît par les monuments un
grand palais de Karnac à Thèbes , est fils de ce roi , qui l'accompagne dans
en partie , ornée de bas-reliefs. L'un des les représentations figurées sur les
plus étendus représente un roi de pro- bas-reliefs de Karnac; ce prince porte
portions colossales, menaçant de ses les titres de prêtre d'Amon -Ra , chef
armes un groupe de prisonniers étran- des archers , et se nomme Ouschiopt
gers qu'il tient par les cheveux , d'une roval lils du seigneur des mondes
3e ses mains. Le même roi conduit Scliescbonk ; mais ce prince ne se voit
aussi devant la trinité thebaine les nulle part revêtu des attributions
chefs de plus de trente nations qu'il a royales. Les listes de Manéthon nom-
taincues ; ils sont liés nar le cou , et ment Osorthôn le successeur du chef
e
chacun d'eux a près de lui un bou- de la XXII dynastie ; les monuments
clier crénelé, dans lequel son nom lui donnent erî effet le nom plus régu-
est inscrit. Or, un de ces princes de lier de Osorchon.
ces peuples vaincus, à barbe pointue L'ordre des travaux d'embellisse-
et à physionomie asiatique, est nommé ment de la grande cour de Karnac
dans son bouclier louda Hamalek, nous montre le nom de ce Pharaon
te royaume de Juda et le roi qui Ta
, Osorchôn placé immédiatement à la
soumis à ses armes porte , dans
,
suite de celui de Sésonchis; et, en ce
cette même scène , le nom de Sches- point, les listes et les monuments se
chonk ; c'est le Sésac vainqueur de Juda trouvent en un parfait accord. Le car-
à Jérusalem , et le Sésonchis des listes touche-prénom signifie soleil gardien
de Mancthon. de vérité , approuvé par Amon , et le
Le mauvais état de la grande ins- cartouche nom propre: Amon-Maï,
cription qui accompagne ce tableau, (lechéri d'Amon), Osorchôn;il est sou-
véritable monument Historique , ne vent répété sur les bas-reliefs de la
permet pas d'assigner, dans la durée |)remière cour de Karnac ; sur les co-
du règne de Sésonchis, à quelle an- onnes et les murs du grand temple de
née de ce règne répondait la cinquième Bubastis, ville natale de la XXlr dy-
de Roboam , année où ceci se passa nastie, la légende entière de ce roi se
et la chronologie comparée est par lit : l'Aroëris puissant , ami de la vé-

la privée d'un important synchronis- rité , le soleil gardien de vérité , ap-


me de l'histoire sainte avec l'his- prouvé d'Amon, vivificateur, le fils du
toire égyptienne. Roboam régna à soleil, l'aimé d'Amon , Osorchôn , sem-

Jérusalem 17 ans ; Iéroboam 22 ans, et blable au soleil.


Sésonchis 22 ans aussi : ces trois règues Le nom de ce Pharaon se lit aussi

Digitized by Google
L'UNIVERS.
dans les restes d'un manuscrit sur pa- roi
,
qui se nomma Scheschonk, futtt
pyrus publié par le baron Denon : ma- vêtu des fonctions de grand prétr
nuscrit qui est une partie du rituel fu- d'Amon, et le petit -fils fut nomni
néraire , ornée de dessins, et portant Osorchôn , et revêtu aussi du mêm
plusieurs fois répétée la légende du dé- sacerdoce.
funt dont il accompagnait la momie. Ces deux grands prêtres furent re
Celle-ci reçoit entre ses bras étendus vêtus de ces fonctions sacerdotales
le dieu créateur Phtha caractérisé par
, f>arceque le rang de primogénitureii
un scarabée placé sur sa téte. Cette es appelait pas au trône qui était l*;ipa
momie reparaît vers l'extrémité oppo- nage des premiers- nés ; mais ces faiû
sée du rouleau coucbée dans une es-
, historiques nous démontrent aussi qui
pèce de sarcophage ou de cercueil sur , l'époque de ces rois, on n'avait pas
lequel repose l'image symbolique d'une oublie en Egypte que la monarebk
âme mâle ( l'épervier "à téte numaine avait été fondée sur les ruines du gou-
barbue); à coté de la momie et de vernement théocratique , qu'il étaîl
l'âme sont une enseigne sacrée et un utile de prévenir toute réaction d'une
de ces grands et longs éventails portés caste puissante et nombreuse , et qu'e»
en signe de suprématie autour des conséquence décès principes, leshautel
dieux et des rois figurés sur les bas- dignités sacerdotales étaient dévolues
reliefs égyptiens. A côté, et sur un aux plus proches parents du roi : nou-
riche piédestal en forme d'entre-colon- velle preuve de la fausseté de l'opinion
nement, est couché un chacal noir, des écrivains qui présentent les Pha-
emblème ordinaire du dieu Anubis, raons comme perpétuellement courbes
un des ministres d'Osiris son père sous l'autorité des pontifes.
dans l'Amenthi. Au-dessus de la momie Osorchôn ne fut pas inconnu aux
on lit cette légende Le prêtre d'Amon-
: Hébreux ; et d'habiles critiques re-
Ra, roi des dieux, Osorkôn, fils de trouvent en lui Zoroch de la
le roi
Scheschonk. Une autre inscription du Bible , qui vint camper à Maresa avec
même papvrus, est plus explicite en- une armée très - nombreuse, sous le
core au sujet de ces personnages ; elle règne d'Asa, petit -Gis de Roboam.
porte: Le prêtre d'Amon-Ra, roi des Ces deux personnages furent du moins
dieux , Osorchôn défunt , (ils du grand- contemporains.
prétre d'Amon-Ra, roi des dieux, Le nom d'Osorchôn se lit aussi sur
Scheschonk défunt , royal fils du sei- un magnifique vase en albâtre orien-
gneur du monde, Amon-Maï-0.sor- tal, du cabinet des antiques de Pans.
cliôn, vivificateur comme le soleil, Il porte sur sa panse une inscription

pour toujours. dédicatoire à Amon-Ra par le roi


Ces inscriptions nous apprennent Osorchôn. Dans des temps postérieurs,
donc que le grand prêtred'Amon Osor- ce vase fut apporté dï^gypte à Rome,
chôn était fils du grand prêtre d'Amon où il fut destiné à renfermer les cen-
Scheschonk, qui était fils d'un roi dres d'un membre de l'illustre famille
nommé Osorchôn or, d'après l'usage
: Claudia : Tépitaphe de ce patricien est
égyptien , qui faisait passer l'appella- gravée en grandes lettres latines sur
tion des grands -pères aux petits-fils, la partie de la panse opposée à la pince
le roi Osorchôn , père du grand prêtre qu'occupe l'inscription hiéroglyphique,
Scheschonk , devait être le fils d'un et ce vase est, par le double usage auquel
roi nommé Scheschonk : ce sont là en le destina le prix de la matière dont il

e
effet la généalogie des rois de la XXII est fait, un monument doublement
dynastie , et leur ordre de succession historique. Le roi Osorchôn mourut
selon les listes de Manéthon : le pre- après un règne de quinze ans.
mier roi eut pour successeur son fils Il eut pour successeur son fils nom-

Osorchôn, et les monuments nous mé comme son père Scheschonk; et ce


font connaître cette race jusqu'à la qua- nom indique à la fois sa descendance
trième génération ; le fils du deuxième et sa place dans la liste des rois. Ses car-

Digitized by Google
ÉGYPTE.
miches existent encore dans la grande Cette femme de Takelôthès se nomma
sur du palais de Rarnac: lecartouche- donc Tampedj et leur tils occupa se-
, ,

fténom se lit : Soleil gardien de vérité, lon l'usage , un des premiers emplois
tpprouvé par le soleil et son car- , du sacerdoce. Mais un autre monu-
ouche nom propre, Amon-Mat Si- ment qui subsiste à Rarnac nous fait
Pascht - Scheschonk c'est - à - dire le
, connaître une autre femme et un autre
îheri d'Amon, fils de Pascht Sches- fils de Takelôthès et ce fils qui porte
; ,

?bonk; c'est leSésonchisIlde la XXII» des titres de fonctions civiles et mili-


dvnastie. La déesse Pascht était la taires, succéda à son père au trône
grande divinité de Bubaste; elle de- d'Égypte : il s'ensuit que la femme
vait être honorée par la famille royale mère du jeune prince qui devint roi
originaire de cette ville, et Seson- fut la première femme de Takelôthès
chis II était un des princes de cette et son fils leur premier-né, puisqu'il
famille ; il régna 29 ans au moins ; porta la couronne royale ; et que l'autre
l'inscription précitée de Rarnac porte prince fut le fils d'une seconde femme,
cette date : c'est tout ce qu'il est pos- et destiné au sacerdoce, ne pouvant
sible jusqu'ici de savoir de sa vie et pas être roi , ce titre étant dévolu au
de son règne. premier-né. Ce premier- né se nom-
Les listes de Manéthon lui donnent mait aussi Osorchôn, et sa mère la
deux successeurs qu'elles ne nomment chérie de Mouth , Keromamas. L'ins-
pas ; les monuments ne fournissent au- eription précitée de Rarnac porte une
cun indire de leur existence ; la durée date de la 25* année du règne de
r
totale des règnes de la XXII dvnastie, Takelôthès.
^pres avoir laisse à Scheschonk II les Son (ils Osorchôn II lui succéda ; on
29 ans que l'inscription de Rarnac lui trouve les légendes de ce roi dans les
assigne irrévocablement, exclut la sup- décorations de la grande cour du tem-
position de leur existence : on peut donc ple de Rarnac, dans les parties que
considérer le roi nommé après Osor- ses prédécesseurs ne firent pas termi-
chôn, dans la liste de Ma néthon, comme ner : le cartouche-prénom signifie so-
le successeur de Scheschonk II. leil gardien du monde, approuvé par
Selon ces listes , ce roi porta le nom le soleil ; et son nom , le chéri d'Amon-

de Takelôthès. C'est à Rarnac encore, Osorclïôn. On voit aussi la légende


dans la cour à juste titre nommée des complète de ce roi dans les ruines du
rois Bubastites, puisque les monu- grand temple de Bubaste. Les rois de
ments de la piété de ces rois y abon- la XXII e dynastie n'avaient pas oublié
dent , qu'on trouve la mention de Ta- que cette ville était leur berceau , et
kelôthès. Il est figuré faisant des ils l'avaient ornée
de grands édifices.
offrandes àAmon-Ra; son prénom Selon de Manéthon , Osor-
les listes
signiûe : le soleil du monde méridio- chôn II aurait eu' deux successeurs :
nal, approuvé par Amon ; et son nom elles ne donnent pas leurs noms , et ils
propre se lit : l'aimé d'Amon et dTsis sont d'ailleurs inconnus à toutes les
Takelôt. Les monuments de son règne sources de l'histoire. Eusèbe avait, on
sont très-rares, et les souvenirs de ne sait pourquoi, réduit à trois le
ses actions plus rares encore. Il nous nombre des rois de cette dynastie que
est parvenu un tableau peint sur bois Jules l'Africain porta à neuf.
de sycomore dont une partie se voit
. Nous avons retrouvé sur les monu-
r
au musée de Turin, et l'autre au Vati- ments les trois princes que ces deux
can , à Rome. On y a représenté un ahréviateurs de Manéthon nomment
jeune prêtre , rase et la tunique
la téte également; nous y avons reconnu
couverte de peau de panthère; il est
la aussi deux autres rois qu'ils ne nom-
en acte d'offrande , et la légende écrite ment pas , et que leurs noms et leur
auprès de sa figure annonce qu'il est placent sans difficulté dans
filiation
le roval fils de Takelôt et de Tampedj cette mêmedynastie; elle fut donc
fille de l'aimé des dieux Horus défunt. composée au moins de cinq rois ; la

Digitized by Googl
ses L'UNIVERS.
durée connue de leurs règnes réunis nolithe de Tanis , ville qui fut la patri
e
ne s'élève qu'à 91 ans ; celle de la dy- de la XXI II dynastie, les cartouche
nastie entière est portée à 120 ans d'un roi dont aucun autre moriumen
dans la liste de l'Africain; il faut donc n'assigne ailleurs la place, et qui si
supposer deux ou trois rois inconnus lisent : Soleil esprit aimé des dieux , U
pour la lacune de 30 ans que le silence fils du soleil, Ptahavtep; et le prennes

- des monuments ne nous permet pas nom des listes de Manéthon est Peta-
de remplir : la XXII" dynastie cessa bastis.
donc de régner après une durée de 120 Sur deux belles stèles du musée du
ans, vers 1 année 851 avant l'ère chré- Louvre, on retrouve un Osortasen,
tienne. filsde Ptahavtep et un Amen-Hem- ,

Si , comme il paraît , Osorchôn II Djam ou Djom fils d' Osortasen : et


,

eut un ou plusieurs successeurs, ils les mêmes listes de Manéthon disent


furent de ces pauvres rois qui perdent que Petubastis eut pour successeur re
les dynasties : le silence de l'histoire roi Osorthôn et celui-ci le roi Psara-
,

est peut-être à leur égard un haut té- mus; noms fort analogues, Osorthôn
moignage d'indulgence, s'il ne l'est à Osortasen , et k\ m en irm-DJam
I

d'un grand mépris: il est certain qu'a- Psamm ou Pjamm, devenu Psainmous
près ces pauvres rois il s'éleva une fa- pour les Grecs et les Latins. Enfin une
mille nouvelle qui forma la XXIII* statue d'une collection de Rome porte
dvnastie : elle était originaire de la le nom de la reine Ranofré , femme du
ville de Tanis. roi Amen-Hem-Djom.
C'est un fait bien digne de remar- C'est au règne d'un de ces rois Osor-
que : après la fln de la e
dynastie XX tasen que remonte le bel hypogée de
Thèbes et la haute fcgypte paraissent Béni -Hassan qui s'annonce par un
épuisées : elles ne produisent plus ni portique en colonnes doriques , modèle
rois ni merveilles des arts , et la vieille antique de cet ordre de l'architecture
capitale théocratique ne conserve pres- grecque. Ce tombeau est celui d'un
ue plus d'autre privilège que celui chef militaire nommé Amentéh. Les
a es grandes cérémonies. La b^sse inscriptions sculptées sur les jambages
Égvpte semble en même temps croître et bandeau de la porte sont du
le
et s'élever en intelligence et en auto- règne de cet Osortasen.
rité : ses villes principales , Tanis , Bu- La XXIV e dynastie s'éleva à Saïs,
baste, Sais , Rendes , Sébennytus , en- autre grande et "célèbre ville de la basse
gendrent les familles royales; mais la Égypte. Mais elle ne put fournir qu'un
puissance de l' Egypte semble comme seul roi, nommé Bocchoris: les dé-
attachée par son origine aux sources sordres publics multipliaient les fa-
du Nil ; elle s'affaiblit et s'abaisse milles nouvelles, portaient la division
comme les forces d'un vieillard qui dans les esprits , affaiblissaient le pa-
s'éteint, à mesure que
le fleuve s'ap- triotisme , favorisaient l'anarchie , et
proche de mer
qui l'engloutit.
la ouvraient la voie à tous les malheurs
La XXIII e dynastie fut originaire publics. Le temps des invasions étran-
de Tanis , composée de 4 rois qui ré- gères et celui de la complète décadence
gnèrent ensemnle 89 ans. Voila tout de l'Égypte était arrivé : la destinée
ce qu'il est possible de savoir de ces commune aux institutions humaines
temps-là de l'histoire égyptienne : c'est s'accomplissait : l'empire égyptien tou-
tout ce que nous ont dit les abrévia- chait à sa vieillesse, intérieurement
teurs de Manéthon. miné par les maux précurseurs de ia
On peut, toutefois, attribuer au mort.
premier roi de cette dynastie et à ses Diodore de Sicile rapporte que le roi
descendants, quelques monuments oue Bocchoris était d'une taille et d'une
. la critique archéologique a interprétés figure tout à fait abjectes , mais supé-
avec certitude. rieur, par la pénétration de son esprit
t
On voit en effet sur le célèbre mo- et par sa prudence , à ceux qui l'avaient

Digitized by Google
EGYPTE.
te trône Ses grandes i Aussi les édifices religieux de l'E-
peuvent être prouvées par son gypte conservent-ils encore les témoi-
au trône , sur lequel il se gnages du soin que Sabacôn et ses
Itt a comme chef d'une dynastie nou- successeurs se donnèrent pour les ré-
g
velle .et par la longue durée de parer ou les embellir.
son règne : mais les malheurs des temps A Louqsor, par exemple, où tout
furent plus puissants que lut : l'Ethio- révélait la munificence ue Sésostris,
pie se leva contre l'Egypte, l'en valu t on reconnaît des restaurations faites
et s'en empara : Bocchoris fat pris et par l'ordre de l'Éthiopien Sabacôn.
brûlé vif après un règne de 44 ans. il paraît que, du temps de ce roi,
Le chef éthiopien , maître de l'É- l'ancienne décoration de la grande
zypte , se nommait Sabaoôn : il fut porte, située entre les deux massifs du
Fê fondateur d'une dynastie nouvelle, pylône , était en mauvais état , et les
la XXV* , dite des Ethiopiens. niasses entières furent alors refaites à
On ne comment accorder sa
sait neuf; mais les anciens bas -reliefs de
cruauté à l'égard de Bocchoris , selon Sésostris furent remplacés par des
Manéthon, avec sa piété envers les nouveaux, et Sabacôn s'y mit à la place
dieux et sa bienfaisance envers les de Rhamsès le Grand. On l'v voit
hommes , qui , selon Diodore de Sicile, encore faisant les offrandes d'usage
distinguèrent ce roi éthiopien des rois aux dieux du palais et de la ville de
auxquels il succédait. C'est à ce roi Thèbes ; et ouoique le nom de ce roi
que le même historien fait honneur de ait été postérieurement martelé, ces
l'abolition de la peine de mort, ainsi bas-reliefs n'en sont pas moins d'un
rrae de grandes chaussées , de nom- très-grand intérêt par leur style : les
breux canaux , et d'autres vastes tra- figures en sont fortes et très-accusées;
vaux d'utilité commune. Toutefois, il leurs muscles vigoureusement pronon-
est facile de croire à cette dernière cés , mais sans avoir rien de la lour-
partie do récit: les désordres intérieurs deur des ouvrages des temps posté-
entraînaient la ruine des établisse- rieurs. Le roi y est figuré dans des
ments publics, et quand Tordre re- proportions colossales. Il adopta les
naissait par la présence d'un monarque nom et prénom royaux usités par les
sage ou puissant , sa première pensée Pharaons ; ses cartouches se lisaient :
devait être de les réparer : l'état de Le roi , soleil bienfaisant des offrandes
l'Egypte après son invasion imposa ce le fils du soleil, le chéri d'Amon, Scha-
devoir au vainqueur, et Sabarôn ne bak. On retrouve sa légende royale sur
le négligea point. Du reste, l'Ethiopie une des portes du palais de Karnac,
n'étaitpas assez étrangère à l'Êgvpte sur un des monuments de Thèbes
pour qu'un chef éthiopien ignorât l'état avec la date de l'an 12 , où M. >Vilkin-
de l'administration publique de ce der- son l'a recueillie le premier; enfin le
nier pays : il y avait, entre la population nom propre du roi, Sabacôn, se
desdeux contrées, confraternité d'origi- trouve aussi sur la base d'une statue
ne, identité de race , et plus d'un usage en plasme d'émeraude, d'un pied en-
caractéristique devaient être communs viron de hauteur, et d'un bon travail,
aux deux régions : des rois de l'Ethio- représentant ce roi assis morceau pré-
;

pie, contemporains de la dy- XXV e


cieux qui orne un des appartements
nastie égyptienne formée aussi de supérieurs de la villa Albani, à Rome.
rois éthiopiens, élevaient dans leur Ce nom se lit encore, comme date, sur
pays des monuments à des dieux qui quelques amulettes et autres monu-
étaient les mêmes que ceux de l'E- ments de petites proportions du musée
gypte, en style égyptien, et les ins- du Louvre. Sabacôn mourut après un
criptions de ces monuments étaient règne de douze années.
tracées dans le même idiome , dans la Les listes de Manéthon lui donnent
même écriture que l'étaient les ins- pour successeur un autre Ethiopien
criptions des monuments de l'Egypte. qu'elles nomment Sévéchos; et l'on

Digitized by Google
,,

364 L'UNIVERS.
trouve à Abydos le cartouche d'un roi soigneusement le nom de l'Éthiopiei
qui se Sévékowtph. Deux stèles du
lit Tahraka, leur prédécesseur : le non
musée égyptien du Louvre portent le de Sahacôn reçut le même affront su
même nom propre précédé du cartou- les édifices de Louqsor;et ce pend an
che : Soleil , gardien régulateur du l'Éthiopien avait donné a ses sucées
monde. Mais ces deux monuments, seurs des exemples d'une piété ino
ainsi que le véritable nom de ce roi deste qu'ils n'imitèrent pas dans leur
sont restés jusqu'ici inconnus; et c'est fastueuses dédicaces: Tahraka n'avai
par erreur que certains critiques, peu mis que ces mots dans celle du pyloro
sévères dans leurs déductions , ont cru qu'il avait élevé: « La vie! le ro
reconnaître ce nom dans d'autres mo- Tahraka, le bien-aimé d'Amon-Ra
numents qui appartiennent réellement seigneur des trônes du monde. »
au prédécesseur de Sévéchos. On lui attribue toutefois, mais î

La plus grande des deux stèles du n'en reste pas de tradition écrite, l
musée royal , et un autre monument conquête de toute l'Afrique septen
du même genre, du musée de Vienne, trionale, jusqu'aux colonnes d'Flercuie;
nous font connaître plusieurs personnes sur les bas-reliefs de Médinet-Habou,
delà famille du roi Sévéchos, sa femme, ce roi est en effet symboliauemen!
deux de ses filles, sa mère , ses fils et figuré de proportions "colossales , te-
son petit-fils. Il nous reste peu de sou- nant, d'une main robuste, les cheve-
venirs historiques de son règne ; on lui lures réunies en groupe de plusieurs
rapporte toutefois, ce que dit la Bible
, peuples vaincus qu'il menace de sa
du roi d'Israël, nommé Osée, qui. masse d'armes. Son nom se lit au<*i
pour résister au roi d'Assyrie Salma- sur les monuments voisins du mont
nasar, implora le secours et l'alliance Barkal, dans la haute Nubie; on le
d'un roi d'Egypte que la Bible nomme trouve, enfin, sur plusieurs amulettes
Sua ; et si l'on a remarqué que le nom du musée royal.
de ce roi est emprunté de celui d'une M. Cailliaud a copié aussi le nom de
divinité nommée indifféremment Sew la reine, épouse de ce roi ; elle se nom-
ou Sevk , on ne trouvera plus une ab- mait Amentéh ; on connaît aussi deux
solue différence entre le nom du roi de leurs filles. On ignore s'ils eurent
d'Égypte nommé par la Bible , et notre des descendants mâles; mais on sait
Sévéchos : ce fait historique se passa avec certitude que le règne de Tahraka
d'ailleurs, selon la Bible, peu de temps finit après une durée de vingt ans : les
avant le règne d'un roi nommé Tan- listes de Manéthon nous l'apprennent,
raka et les listes de Manéthon nom-
; et les inscriptions de Barkal confirment
ment ainsi le successeur de Sévéchos. leur témoignage : ces inscriptions sont
On trouve en effet sur plusieurs en effet datées de la vingtième année
monuments de l'Egypte les cartouches de Tahraka.
d'un roi , qui se lisent : Soleil Atmou La Bible, dans l'histoire des rois,
bienfaisant , le fils du soleil Tah- rapporte que, lorsque Sennachérib,
raka : ils sont ainsi sur un édifice roi des Assvriens, attaqua Ézéchias,
qui fait partie des constructions de roi de Juda, l'Éthiopien Tahraka,
MédineMiabou à Thèbcs; pylône de allié d'Ézéchias , conduisit une armée
médiocre étendue, dont les massifs, à son secours: l'Assyrie et l'Egypte
d'une belle proportion , ont souffert nourrissaient d'antiques rivalités, mu-
dans plusieurs de leurs parties. Le tuellement haineuses, et les régions
nom le prénom
, , les titres, les louan- intermédiaires des deux grands royau-
5es de Tahraka avaient été le sujet mes étaient le théâtre habituel de leurs
es bas-reliefs et des inscriptions qui dissensions armées : l'Assyrie ne pou-
décoraient les faces des deux massifs vait se mouvoir vers les bords orien-
et la porte qui les sépare; mais, plus taux de la Méditerranée sans que l'E-
tard , des rois d'origine égyptienne gypte s'avançât à sa rencontre poijr
firent marteler ces décorations , et plus l'en tenir écartée ; c'est ainsi que l'E*

Digitized by Google
ÊGYPTE. 165
gypte se trouvait Palliée naturelle des raka ,un période d'anarchie , ni un
ni
peuples et des Tilles de la Svrie et de gouvernement composé d'un conseil
la Palestine. Hérodote dit " quelques e douze rois , que Psammétichus abo-
mots de Sennachérib ; mais il confond lit à son avautage personnel en Em-
les temps et les lieux ; il paraît n'avoir parant seul de la royauté.
recueilli sur ces circonstances que d'in- Nous nous arrêterons toutefois à
certaines traditions. La Bible ne dit une autre circonstance qui pourrait
FDint que Sennachérib alla attaquer nous porter a croire que la dynastie
Ésypte; il fut défait par l'ange du éthiopienne d'Égypte ne fut pas sup-
Seigneur dans les environs de Jérusa- plantée et remplacée sur le trône
lem , et il ne descendit pas jusqu'à Pé- par une famille nouvelle, sans que
luse, comme le suppose le récit d'Hé- l'Egypte en fût troublée. Cette fa-
rodote. Il dit, d'ailleurs, que ceci se mille nouvelle était originaire de Sais.
passa sous le règne d'un roi nommé Le premier de ses rois se nommait
S thon , prêtre de Phtha , divinité qui Stéphinatès, selon les listes de Mané-
fit pour ce roi un grand miracle, car thon , conservées par Jules l'Africain ;
le dieu suscita une innombrable quan- niais , selon ces mêmes listes , d'après
tité de rats des champs , qui se répan- Eusèbe le règne de Stéphinatès pre-
,
,

dirent pendant lanuit dans le camp mier roi de la dynastie saïte , aurait
ennemi , et rongèrent si bien les cordes été précédé de celui d'un quatrième
des arcs, carquois, et jusqu'aux
les Éthiopien , nommé Ammerris. On
attaches des boucliers, que l'armée, trouve en effet, sur les monuments
privée de toute espèce d'armes, fut de style égyptien des environs du mont
contrainte de prendre la fuite dès le Barkal les cartouches prénom et nom
,

lendemain. En mémoire de cet événe- propre, en caractères hiérogly phiques,


ment , ajoute Hérodote , on plaça , dans d'un roi Amonasô, précédés du titre de
le temple de Phtha , une statue du roi fils du soleil , et de tous les signes ho-

Séthon , tenant un rat dans sa main , et norifiques du protocole égyptien. Ces


avec cette inscription : « En me voyant noms se lisent sur le piédestal d'un
apprenez à révérer les dieux. » lion en granit rose ; cet Amonasô ré-
Si Ton pouvait s'en remettre aux gna en Éthiopie quand les Éthiopiens
lécits d'Hérodote, la mort du troi- furent rejetés hors de PÉgypte par les
sième roi de la dvnastie éthiopienne Sa ï tes qui leur succédèrent ; Amonasô
aurait été suivie de troubles qui au- put ainsi aller continuer son règne dans
raient fait succéder l'anarchie à l'auto- sa patrie; et la liste d 'Eusèbe nous con-
rité royale : mais cette partie du récit serverait la tradition de ce règne de
d'Hérodote abonde tellement en con- peu de durée, auquel mit fin l'avéne-
fusions de temps et de noms , elle est ment du premier Saïte. On connaît
si contraire, dans ses circonstances aussi par les monuments du mont
les plus clairement exprimées, aux in- Barkal deux autres rois d'Éthiopie,
dications tirées et des abréviateurs nommés Piônchéi , et Asplt ou Asplirt;
de Manéthon et de l'autorité des mo- mais il est difficile de déterminer pré-
numents, qu'il est difficile à l'historien cisément l'époque à laquelle ils régnè-
éclairé par toutes ces lueurs de la cri- rent. On peut toutefois considérer
de l'élégant
tique, cP adopter la relation leur existence comme la suite de l'oc-
wrivain d'Halicarnasse. Selon lui , le cupation du trône d'Égvpte par des
Toi Psammétinhus était le fils du roi Éthiopiens qui durent d'abord réunir
Séchos,que l'Éthiopien Sabacôn avait sous un sceptre commun l'Éthiopie et
fait mourir; maîs, selon Manéthon et PÉgypte, être relégués ensuite dans
les monuments , ce Psammëtichtis était l'Ethiopie seule , et y régner tant qu'un
fils du roi Néchao qui fut le cinquième roi égyptien ne la soumit pas de nou-
successeur de Sabacôn , au lieu d'en veau à son autorité : nous verrons
être le prédécesseur. Nous n'inscri- d'autres exemples de ces vicissitudes
rons donc pas, après le règne deTali- dans l'existence politique de l'Ethiopie

Digitized by Google
3G« L'UNIVERS
habituellement rangée sous l'autorité 15 pouces de lonç, 7 de large, et <

des rois d'Égypte, et quelquefois tem- d'épaisseur. C'était aussi une nécro
porairement indépendante, se don- pôle , et cela nous expliqua une chos
nant des rois qui inscrivaient leurs jusqu'ici assez embarrassante , savoir
noms sur des monuments en langage ce que faisaient de leurs momies le
et en style de l'Egypte , la métropole villes situées dans la basse Egypte c
de l'Êthiopie. loin des montagnes. Cette seconde n<!
Quoi qu il en soit , l'Egypte , qui de- cropole de Sais , dans les débris colos
vait ne supporter qu'avec amertume saux de laquelle on reconnaît encor
une raceétrangèresurle trdne de ses plusieurs étages de petites chambre
anciens rois , fit d'heureux efforts pour funéraires (et il devait y er. avoir m
les en chasser, et y réussit par l'in- nombre infini) , n'a pas moins de 1,-KN
fluence d'une famille originaire de la pieds de longueur, et près de 500 di
ville de Sais. largeur. Sur les parois de quelques
Cette cité célèbre par la somptuosité unes des chambres, on trouve encori
de ses édifices et par le collège de un grand vase de terre cuite , qui sa-
prêtres que les philosophes de la Grèce vait à renfermer les intestins des morts
venaient si religieusement visiter , cette et faisait l'office des vases nommés ca
cité , berceau même d'Athènes , selon nopes. On trouve du bitume au fon<
les traditions grecques , n'est plus au- de quelques-uns de ces vases.
jourd'hui qu'un amas de ruines , mais « A droite et à gauche de cette né

de ruines monumentales par leur im- cropole existent des monticules, sui
mensité. Champollion le jeune jes a l'un desquels nous avons trouvé de)
étudiées et décrites en ces termes : débris de granit rose, de granit gris
«Le 16 septembre (1828), à six de beau grès rouge, et aussi du mar-
heures du matin, nous nous trouvâmes bre blanc, dit deThèbes. Des légende
amarrés dans le voisinage de Ssa-el- de Pharaons sont sculptées sur ce mar
Hagar ; je voulus visiter les ruines de bre blanc, matière rare en Égvpte.
l'antique Sais. « Les dimensions de la grande en-
« Nos fusils sur l'épaule, nous ga- ceinte qui renfermait ces édifices sonl
gnâmes le village qui est à une demi- véritablement étonnantes. Le parallé-
heure du fleuve. Nous nous dirigeâmes logramme , dont les petits côtes n'ont
sur une grande enceinte que nous aper- pas moins de 1,440 pieds, et le*
cevions dans la plaine depuis le matin. grands 2,160, a ainsi 7,000 pieds de
L'inondation qui couvrait une partie tour. La hauteur de cette muraille peut
des terrains nous obligea de faire être estimée à 80 pieds , et son épais-
quelques détours, et nous passâmes seur, mesurée, a été trouvée de 54
sur une première nécropole égyptienne pieds : on pourrait donc y compter les
bâtie en briques crues. Sa surface est briques par millions.
couverte de débris de poterie , et j'y « Cette circonvallation de géants me
ramassai quelques fragments de figu- paraît avoir renfermé les principaux
rines funéraires : la grande enceinte édiGces de la ville de Sais. Tous ceux
n'était abordable que par une porte dont il reste des débris étaient des né-
forcée tout à fait moderne. Je n'essaye- cropoles; et, d'après les indications
rai point de rendre l'impression que fournies par Hérodote, l'enceinte que
j'éprouvai après avoir dépassé cette j'ai visitée renfermerait les tombeaux
d' A pries et des rois saïtes de la XXVI
e
porte , et en trouvant sous mes yeux
des masses énormes de 80 pieds de dynastie , ses ancêtres. De l'autre côté
hauteur , semblables à dts rochers dé- serait le monument funéraire d'Ama-
chirés par la foudre ou par des trem- sis. La partie de l'enceinte vers le Nil
blements de terre. Je courus vers le a pu aisément contenir le temple de
milieu de cette immense circonvalla- Nèïth la grande déesse de Sais.
,

tiou , et reconnus encore des construc- « A


quelques centaines de toises de
tions égyptiennes eu briques crues , de l'angle voisin de la porte forcée, exis-

Digitized by Google
EGYPTE.
lentdes collines qui couvrent une troi- vert, représentant ce roi, et appar-
sieme nécropole. Elle était celle des tenant au cabinet des antiques à Paris;
srandes familles, et on en a tiré un sur un petit naos du musée de Mar-
îrand sarcophage en basalte vert, qui seille; dans les inscriptions d une sta-
fiait celui d'un gardien des temples tue naophore, en basalte vert, du
sous le roi Psammétichus. » musée du Vatican, et sur un vase canope
Hérodote et Strabon , qui ont vu de Florence, comme sur plusieurs sca-
cette ville avant sa décadence don- , rabées et autres monuments de petites
nmt des monuments publics dont elle
, proportions.
eUit ornée , des descriptions qui nous Les édilices de Thèbes et d'autres
en laissent une grande opinion. Le lieux de TÉgypte conservent aussi les
temple de Nèïth était le plus somptueux souvenirs historiques du rè-ne de
de ces édifices ; son frontispice était Psammétichus. On les trouve sculptés
décoré de grands obélisques, et un sur les grandes colonnes de la première
îaste bassin , revêtu en pierres, était cour du palais de Karnac; dans l'ile
tout auprès. Une grande féte annuelle de Snem , près de Philae: ses légendes
y attirait un grand concours de monde: royales rappellent , soit que ce prinoe
c'était celle des lampes ardentes , qui se rendit dans cette île, soit qu'il fit
se célébrait pendant la nuit, et gui était faire, dans les belles carrières de gra-
fwédée par de grandes cérémonies nit rose de cette localité, de grandes
religieuses. Le.; Grecs disaient que Cé- exploitations pour servir aux édifices
crops était originaire de Sais. quïl construisit ou qu'il répara. On
La dynastie que cette ville vit sortir voit aussi dans les carrières de grès à
de son sein fut composée de neuf rois, Thorrah, près de Memphis, un mono-
il nous reste de leur règne des mo- lithe tracé h l'encre rouge sur les pa-
numents nombreux et variés. Ces rois, rois , avec une finesse extrême et une
qui succédaient à une dynastie de con- admirable sûreté de main ; la corniche
quérants étrangers semblaient s'effor-
, de ce monolithe, qui n'a existé qu'en
cer démultiplier les monuments.comme projet, porte la légende rovale de
pour manifester leur ardent amour du Psammétichus. Le musée des Studi , à
pavs, sentiment né de leur origine Naples , possède un beau morceau de
iiirrne, granit , portant les cartouches de Psam-
Le premier des rois de cette XXVI* métichus : c'est un fragment de la base
dynastie, celui qui en fut le chef, est de l'obélisque de Monte Citorio. Il y a
nommé Stéphinatis dans les listes de aussi , au Vatican , un papyrus doté
Manéthon: il parvint au trône vers de la 20* année du règne de ce roi ;
Tannée 674 avant Père chrétienne. plusieurs figurines portent aussi le
Son règne dura sept années , voilà tout nom de ce roi.
ce qu'il nous est possible de savoir de Le reene de Psammétichus est fort
son existence. Il en est de même de ses célébré ( ians les écrivains de la Grèce
deux successeurs Néchepsôs et Méchaô ; parce qu'il fut le premier des rois d'fc-
le règne du premier est porté à six an- gyptequi, s aff ranchissant du joug des
nées, celui du second à huit dans ces anciennes coutumes , rendit l'accès Je
mêmes listes de Manéthon. ce pays plus facile aux étrangers. Se-
L'histoire, par les faits, de cette lon les relations d'Hérodote, Psam-
XXVI e dynastie ne commence qu'avec métichus accueillit les Cariens et les
If règne de Psammétichus. Ses car- Ioniens qui se rendirent en grand nom-
touches prénom et nom propre se bre dans ses États; il leur donna des
lisent sur plusieurs monuments ; le terres , les traitant à l'égal de la caste
premier signifie : Soleil bienfaiteur militaire dont il les prit ppur auxiliaires;
du cœur, et le second Psamétik. Cette il leur donna de jeunes Egyptiens à éle-

légende royale se voit sur l'obélis- ver, afin que ces enfants apprissent la
que de Monte Citorio, à Rome, sur langue grecque et servissent d'inter-
'a ceinture d'une statue en basalte prètes aux deux nations : c'est depuis

Digitized by Google
r
3G8 L'UN r ERS.
cette époque, ajoute Hérodote, que des alliances avec les Athéniens
nous autres Grecs , dans nos relations quelques autres peuples de la Grée
commerciales avec les Égyptiens , avons qu'il reçut et traita très-fa vora blême
pu nous instruire exactement , par le les étrangers qui venaient visiter 1'

secours de ces interprètes, de his- I gvpte: qu'affectionnant les Grecs p:


toire d'Egypte à dater du règne de ticulièrement , il fit donner à s<
Psammetichus , et sous les rois qui lui fils une éducation toute grecque,

ont succédé ; car ces Grecs sont les qu'il fut le premkr des rois d'Égvp
premiers étrangers qui, parlant une qui ouvrît aux étrangers des comptoi
langue différente de celle du pays, l'ont dans diverses parties de ses Etat'
habité librement. donnant les plus essentielles garanti*
Psammétichus fit construire les pro- aux navigateurs qui y abordaient.
pylées méridionaux du temple de Phtha, Par dételles alliances Psam met ichi
a Memphis, ainsi que le promenoir du nous semble prévoir déjà les intentior.
bœuf Apis. Ce promenoir était situé des Perses, vouloir les prévenir, etsepn
en face du péristyle ; le mur d'enceinte parer à les faire avorter en s'associai
était couvert de sculptures, et au lieu de avec les peuples qui devaient 1rs redou
colonnes , on y avait employé des sta- ter aussi : mais la nation égyptienne
tues colossales de VI coudées de hau- qui ne comprit pas la portée de ce
teur. alliances murmura contre son roi e
,

Psammétichus fit aussi la guerreaux le desapprouva : la nouvelle invasio.


nations voisines de l'Égypte; Héro- étrangère n'était pas alors imminent
dote prétend qu'il assiégea, durant à tous les yeux.
vingt-neuf ans consécutifs, une ville Du reste, l'art, sous le rèiine d<
de Syrie qu'il nomme Azotus. Le règne Psammétichus, recouvra quelque chost
de ce roi fut en effet très-loug; les de s^on antique perfection; ce roi cou-
listes de Manéthon et le texte d'Hé- tribua à cette renaissance par les
rodote le fixent également à cinquante- grands ouvrages qu'il lit exécuter ; ce
quatre ans. qui nous est parvenu de cette époque
Cet historien et Diodore racontent justifie pleinement notre assertion :

presque dans les mêmes termes une c'était au VIP siècle avant l'ère ciiré-
grande émigration de troupes égyptien- tienne,et on ne connaît rien de bea u pou r
nes en Éihiopie ; ils en portent lé nom- ces temps-là chez les Grecs alors pres-
bre à deux. cent quarante mille hom- que inconnus dans l'histoire des arts.
mes, mais les motifs de leur mécon- Hérodote nous dit que Nécos , fils de
tentement sont diversement expo- Psammetichus, succéda à son père. En
sés : la préférence que le roi montra effet, les listes de Manéthon nomment
pour les troupes grecques fut un de Néchaô H
comme successeur de Psam-
ces motifs ; un autre provenait de ce métichus l rr ; de plus , deux belles stèles
Î|uc Psammétichus avait négligé de re- de l'ancienne collection de M. d'Anas-
ever les Égyptiens des garnisons méri- tasi nomment ce roi Néchaô et le qua-
dionales après le terme iixé par l'usage. lifient de fils de ce Psammétichus. Ces
Ce fut en vain que le roi , par ses gé- stèles commencent par cette inscrip-
néraux et par ses propres exhortations tion : « Dans l'année l r % du mois d'e-
rr
pressa ces troupes de rentrer; elles piphi le l jour, sous le sacerdoce du
s'établirent en Éthiopie; le chef du roi soleil... du cœur, le fils du solei/,
pays leur donna des terres , et la con- Néchaô y
etc. »
trée en prit le nom de pays des trans- Les deux cartouches du roi se retrou-
fuges égyptiens. vent, avec deux variantes remarqua-
Diodore , qui a pris le récit d'Héro- bles , dans un dessin fait à Rosette, en
dote pour guide , ajoute que Psammé- l'année 1777, par un nommé Cloquet,
tichus , de retour en Égypte , se livra et appartenant depuis longtemps au
aux soins de l'administration assura
, cabinet des estampes de la bibliothèque
la perception de ses revenus , contracta royale de Paris. Champollion le jeune

Digitizedt>y Google
EGYPTE/
».nserration de Memphis , entra en dant deux ans, un autre prince que
npngne , poursuivit vivement Phar- les listes de Manéthon nomment Téos
ba<e, général en chef des Perses; ou Tachos. Occupé aussi de la défense
l'inondation périodiaue du Nil les de l'Éirvpte contre les Perses , il res-
imodaiit sur tous les points, ils serra l'alliance avec les Lacédémoniens,
>nt obligés de se rendre après avoir qui lui envoyèrent une armée sous les
lu beaucoup de monde. L'Êgypte ordres d'Agesilas, à qui Tachos avait
ainsi de nouveau délivrée.' promis le commandement suprême de
Quelques années après le roi Agé- , toutes les forces réunies de terre et
es se rendit en Égypte à titre d'am- de mer. Mais le roi d'Égypte , jugeant
fesadeur; il venait demander à Nec- malheureusement Agésilas , non d'a-
tnebe , de la part des Lacédémoniens près sa renommée mais sur la sim-
,

es secours contre les Thébains qui plicité de ses habits et de ses manières,
s avaient réduits aux dernières ex- ne lui donna que le commandement
rernités. des troupes de terre , laissa à Chabrias
La suite du règne de Nectanèbe fut celui de la flotte, et se réserva le titre
oisible; et il reste de nombreux té- et les droits de généralissime. Contre
ooi^nages des soins qu'il donna à l'ad- l'avis d'Agésilas qui voulait attendre
uimstration et aux affaires do son les Perses en Égypte , Tachos alla les
toyaume. » attaquer en Phénicie.
On voit parmi les débris d'ouvrages Des qu'il eut franchi les limites du
tzyytiens amassés à la citadelle du royaume , les Égyptiens se soulevèrent
Cure, un bas-relief représentant le roi contre lui , et proclamèrent pour leur
Nectanèbe faisant une offrande aux roi un autre Nectanèbe, son neveu.
^vix;àKeft, l'ancienne Coptos,dans Dans ces conjonctures difficiles , Agé-
une église copte bâtie avec les restes silas , pour se venger
peut-être de Ta-
d'édifices égyptiens , la légende royale chos, se déclara pour Nectanèbe II :
à? ce même prince; à Médinet-Habou, il ne resta au roi détrôné qu'à chercher

un édifice d une exécution assez élé- un refuge auprès du roi de Perse; il


gante, qu'il y a fait élever, et dont s'y rendit en traversant l'Arabie. On ne
te bas-reliefs le représentent adorant trouve de Tachos aucun souvenir sur les
k dieu Amon-Ra , et recevant les dons monuments éçytiens connus.
*t bienfaits des autres dieux de
les Bientôt se leva un compétiteur de
ïliebes; à Philœ, un petit temple dé- Nectanèbe II, un chef issu de la ville
dieà Hathôr, et un propylon engagé de Mendès, secondé par une armée
tans le premier pylône" du temple nombreuse. Agésilas engagea le roi n
dlsis. dissiper les rebelles par une attaque
D'autres monuments isolés appar- vigoureuse, avant qu'ils eussent le
emment aussi au même règne une : temps de se former en armée régu-
Mie figurine funéraire en terre émail- lière mais ce conseil parut suspect ;
:

lee, brisée, trouvée à Pompeî, et dépo- bientôt après le roi fut contraint de
se au musée des Studi. à Naples porte , s'enfermer dans une de ses villes prin-
k légende royale de .Nectanèbe; cette cipales , et il y fut assiégé par les re-
légende a été aussi copiée sur un mono- belles. Agésilas ne fit rien pour le se-
lithe qui existe à Sceft, l'ancienne Ta- courir. Toutefois, dans un moment
casarta. Enfin , il existe à Rome une opportun , il lui conseilla de faire
s *ele
d'un grand intérêt pour l'histoire une sortie; elle fut couronnée de suc-
du règne de ce roi , qui dura 10 ans cès; les assiégeants furent repoussés;
se 'on certains textes, et 18 selon d'au- et bientôt après, poursuivis par Agési-
tres la stèle décide cette importante
: las, ils furent complètement défaits;
question ; elle porte In date de l'an XIII leur chef fut fait prisonnier, et Necta-
du règne de Nectanèbe , et accrédite nèbe II rentra enfin dans la paisible
*DWÎ le nombre 18 des textes anciens. possession de l'autorité royale.
Apres Nectanèbe V
régna , pen- Dans la douzième année de son
25' Livraison. (Egypte.) 25

Digitized by Google
386 L'UNIVERS.
règne , il fit une alliance avec les Si- patrie , et Mentor profita de <
doniens et les Phéniciens : les Perses fection nour occuper ta basse
les mettaient dans un comniun péril, y répandre ses troupes, avec l'afis^
et les obligeaient à une commune dé- la part du roi de Perse, de la
fense. Les Perses furent arrêtés dans pleine et entière à tous ceux qui
leur marche contre l'Egypte par la soumettraient, et de Texterminatk
guerre de Phénicie. Nectanèbe y avait de tout coupable de résistance. La
envoyé un corps de quatre mille Grecs humble soumission se manifesta
qu'il avait a sa solde , et commandés tout côté; les Grecs d'Égypte et
par le Rhodien Mentor. Les Cypriotes Égyptiens naturels rivalisèrent d*!
se mirent aussi dans l'alliance mais : miiité devant les lieutenants du roi
le roi de Perse, irrité de la défaite de Perse : il ne resta d'autre ressoun
ses lieutenants, se mit lui-même à la Nectanèbe , battu , trahi et dëtrôi
tête de l'expédition contre l'Egypte. que de s'enfuir avec son trésor en Éthu
Alors effrayé parla grandeur de ses pré- pie , d'où il ne revint jamais. IJ fut
paratifs militaires, le Rhodien Mentor dernier roi de la XXX
e
dynastie égvj
passa du coté de celui qu'il considéra tienne, le dernier roi de race é#
comme le plus fort , le roi de Perse. tiennequi régna surrÉgypte,et I";
Darius -Ochus l'accueillit comme un vissement de cette grande et il
transfuge à qui était bien connu le pays telle nation à un sceptre étranger dt
qu'il allait attaquer. encore depuis les malheurs de Ned
Nectanèbe prépara aussi les moyens nèbe II , c'est-à-dire, depuis vingt et ur.
de défense nécessaires contre un si siècles complets : la nouvelle occupa-
puissant ennemi il se mit à la tê'te
: tion de I* Egypte par les Perses date de
d'une armée composée de vingt mille Tan 338 avant l'ère chrétienne.
Grecs, vingt mille Libyens et soixante Ce fut Darius-Ochus qui rétablit
mille Égyptiens; les principaux pas- l'autorité des Perses en Egypte. Elle
sages et les places les plus importantes avait échappé à ce joug des barbares
étaient gardés par de bonnes garni- pendant soixante-cinq ans. Cet inter-
sons : Peluse renfermait cinq mille valle est exactement donné par les
hommes. Diophante d'Athènes et La- , listes des règnes des rois de Perse, et
mias de Lacédémone secondaient Nec-
, par celles des rois égyptiens assez heu-
tanèbe de leur prudence et de leur reux pour leur avoir résisté avec un
valeur. Mais d'autres Grecs guidaient plein succès. Le Pharaon Amyrtée ré-
aussi les Perses. Leur premier corps tablit en effet l'administration égyp-
était commandé par Lacharis le Thé- tienne à la mort de Darius IL A ce
bain ; le second , embarqué sur la flotte, prince succédèrent sur le trône de Perse
par Nicostrate, et le troisième- par le Artaxercès II , dont le règne fut de 46
déserteur Mentor. Nicostrate remonta ans selon le canon des rois, placé en
le Nil bien en avant dans le pays, dé- tête de la Grande Composition dePto-
barqua ses troupes et s'y retrancha. lémée, et Ochus, qui rétablit l'auto-
e
Clinias, de l'île de Cos, rassembla toutes rité persane en Égypte dans la 20 année
les garnisons égyptiennes du voisi- de son règne , ce qui arriva quelques
nage , attaqua Nicostrate, et fut tué et mois après l'accomplissement de la
battu dans ce combat opiniâtre où cinq 65" année depuis la mort de Darius II
mille Égyptiens restèrent sur la place. et l'avénement d'Amvrtée : or, Amyr-
Nectanèbe, à cette nouvelle courut à , tée et ses successeurs, formant la
la défense de Mempbis, qu'il craignait XXVIII e , la XXIX e et la XXX' dynas-
de voir attaquée et prise par Nicos- tie égyptienne, ont régné ensemble
trate. Sur l'avis du aépart de Nicos- 65 ans et 4 mois. Les rapports remar-
trate des environs dePéluse, les Grecs, quables de ces deux supputations exi-
en garnison dans cette ville, se croyant gent que le règne du dernier Pharaon
abandonnés et |>erdus , se renûirent à qui occupa le trône d'Egypte, Nec-
"iition d'être transportés dans leur tanèbe II , soit porté à 18 ans , comme

Digitized by Google
KGYPTE.
Je feulent les listes de Manéthoo , se- suprématie, et son origine
lon Jules l'Africain. Ce roi avait nale semblait avoir imprimé à son carac-
•dopté le cartouche -prénom de ÎSecta- tère, comme à son
courage la vigueur
,

I", considérant son règne comme


1

sebe et du climat des lieux qu'il


l'a prêté
^continuation de celui de son deuxième habitait. La Macédoine gouvernait la
prédécesseur dont il portait le nom , et Grèce; et , au génie politique de Phi»
m tenant pas grand compte du règne lippe, avait succédé i'épée valeureuse
jtphemerede Tachos , oblige de s'enfuir d'Alexandre. Ce jeune héros ne
tn Perse : la différence tranchée des pour bornes à ses victoires que les
lignes employés à écrire le nom propre mers impraticables ou les déserts. 11
des deux Nectanebe les fait facilement traversa toute l'Asie et pénétra dans
distinguer, malgré l'identité du car- l'Inde : il détruisit l'empire des Perses
touche-prénom. et en hérita. L'rtgypte fut pour lui
Vainqueur de Nectanèbe II à la ba- une conquête facile: l'Egypte, sou-
taille de Péluse , Ochus remit les trou- mise à un sceptre de fer, au despo-
pes persanes en possession de l'Égypte, tisme intolérantde l'Asie, reçut Alexan-
et lui donna Ferendate pour satrape; dre comme un libérateur : il y établit
illa dépou la de ses r icliesses et en
i I son autorité en l'an 332 avant l'ère
posa le trophée de sa victoire. Le chrétienne. Huit années après, en Tan
du roi perse, écrit Okouch , existe 324, Alexandre mourut a Babylone,
néanmoins dans une inscription hiéro- au centre de ses conquêtes : les dieux
glyphique avec une date qui, dépassant qui l'avaient comblé de tous les biens,
h 20* année , est évidemment comptée de toutes les gloires humaines , ne le
de son avènement au trône de Perse. préservèrent pas du poison c)es hom-
Il l'occupait en effet depuis vingt
ans mes ou de celui de l'interné
lorsqu'il remit l'Égypte sous son obéis- la domination de fait ou de droit des
e
sance; cette 20 année fut la première Perses dura, en Égypte, autant de
de son règne en Égypte; il mourut temps que l'empire de Cyrus dans les
l année d'après : Manethon n'a donc mains de ses successeurs depuis Cam-
,

dtl donner que deux ans au règne byse jusqu'à la mort de Darius III.
d'Ochus en Égypte. Manétiion nomme Les effets de cette domination en-
comme son successeur Arses, son nemie se révèlent encore aux yeux de
fiis qui régna aussi deux années, et
, l'observateur attentif à l'interpréta-
dont les monuments égyptiens , a notre tion des grands faits archéologiques
connaissance, n'ont fait aucune men- consignés sur le sol antique et dans les
tion. Il en est de même du
dernier roi ouvrages de l'rtgypte. Depuis Thèbes
de» Perses , de l'infortuné Darius III ; jusqu'à Dakkéli en Nubie, sur une
régna 4 ans sur l'Egypte comme sur ligne de plus de soixante lieues, les
le reste
du vaste empire des Perses. édifices élevés par les Ptolémées et par
Mais cet empire s'écroulait de toutes les Romains sont fréquents; et, de
parts Alexandre le Grand étant dési-
: ceux des Pharaons, il n'en reste que
ré par la Providence comme le ven- des ruines : ceci s'explique par les ra-
deur des peuples subjugués par le grand vages des Perses remontant la vallée
tynii i et comme son héritier, mais du Nil pour se rendre en Éthiopie,
temporaire. abandonnant le fleuve à la hauteur de
Les successeurs de Cyrus avaient Sébou.1 , et prenant en ce point la route
connu la Grèce , et appris par elle de du désert, plus courte que celle du
Huoi était capable une nation euro- Nil qui était d'une difficile pratique
péenne peu nombreuse, mais animée pour une armée, à cause de ses fré-
du. pluspur amour de la patrie, se- quentes cataractes. C'est cette même
Stodee par les nobles inspirations et route que suivent de nos jours les ca-
• conseils industrieux de la civilisa- ravanes et les voyageurs. Ainsi le tem-
is. En Grèce, un des peuples de la ple bâti parMœris à Amada, un peu
toniedération était arrivé a son tour de au midi de Sebouâ , existe encore; et»

Digitized by Google
388 L'UNIVERS.
au nord de ce lieu , jusqu'à Thèbes , il système non pas rationnel dans ses suc-
n'y a que des édifices élevés ou relevés cessives formations , mais de forma*
1>ar les Grecs ou les Romains , effaçant tion arbitraire qui a voulu que les
,

es traces des ravages des Perses. Et combinaisons variées d'un seul et uni-
si les monuments pharaoniques de que signe ayant la forme d*un coin,
Ghirsché et de Bet-Oualli subsistent représentassent toutes les voix et les
encore, comme exception à ce qui articulations nécessaires pour expri-
vient d'être dit , ce ne fut pas la faute mer par la parole les mots de la langue.
des Perses; ces temples sont des spéos Les deux écritures se mêlèrent quel-
creusés dans des montagnes qu'ils ne quefois par l'effet d'un caprice plutôt
pouvaient pas démolir : ils se conten- que par besoin sur des cylindres égyp-
:

tèrent de mutiler ces deux temples. tiens, en terre cuite, portant des ins-
Le gouvernement des Pharaons, criptions égyptiennes on a ensuite ,

modère à la fois et par contre-


le ajouté des inscriptions cunéiformes.
poids des castes et par la douceur des Les deux langues différaient radicale-
moeurs, qui naissait de l'aisance géné- ment l une de l'autre. L'idiome per-
rale , fut remplacé par le despotisme san , comme la nation qui le parlait
oriental , hiérarchie de satrapes de tout n'avait de primitif, était une
rien
rang , exerçant , chacun dans sa sphère branche d'une puissante famille : ta
la plus absolue autorité, et foulant langue égyptienne n'a jamais laissé de-
ainsi, chacun à son tour, le sol con- viner son origine ; elle existait parce
quis et sa population ; ainsi l'Égypte qu'elle existait.
n'était plus qu'une province du grand Les Perses conservèrent leur cos-
empire perse, occupée et pressurée tume national en Egypte; les Égyp-
militairement. tiens ne paraissent pas avoir été trou-
Les mages, prêtres d'une doctrine blés dans la conservation de celui qui
religieuse qui n'était pas celle des Égyp- leur était propre : on n'a trouvé au-
tiens, n'élevèrent à leurs propres dieux cune figure persane sur les monuments
nia leurs génies aucun temple sur le sol égyptiens mais des Medes sont repré-
:

de l'Egypte ; mais ils firent détruire sentes dans les triomphes des plus an-
les temples des dieux égyptiens , et ne ciens Pharaons.
laissèrent à la piété relfgieuse des ha- Aucun des successeurs de Cvrus ne
bitants d'autre refuge que leur foi et mourut et ne fut enterré en Ègvpte :

les oratoires de famille. Les propriétés on croit avoir reconnu leurs tom-
de la classe sacerdotale ne durent pas beaux dans les dépendances du palais
être épargnées par le lise conquérant ; de Persépolis. Le respect des Perses
et les fausses divinités de l'Égypte pour le selon les préceptes tradi-
feu ,

durent subir de fortes amendes au profit tionnels Zoroastre, leur faisait


de
des véritables dieux qui sont toujours inhumer corps de leurs rois, et les
les
ceux des vainqueurs. Du reste, ni le plan détournait de l'usage de les briller. La
ni l'architecture des temples, ni les sym- loi exigeait aussi qu'ils eussent leur sé-
boles des deux cultes n'avaient entre eux pulture dans la Perse même , quelque
aucun rapport dans les formes. Les écri- part qu'ils finissent leurs jours. Cam-
tures des deux peuples étaient essentiel- byse fit transporter le corps de Cyrus
lement différentes, dans leur origine à Parsagada , où Alexandre le visita:
comme dans leurs formes. L'Égypte Alexandre fit aussi enterrer Darius
avait créé la sienne par l'effet d'inven- auprès de ses ancêtres. Comme les
tions successivement perfectionnées, Égyptiens, et peut-être à leur exem-
conduites de la figure d un objet qui en ple , les tombeaux de ces rois furent
donnait l'idée à l'esprit, jusqu'aux creusés dans une montagne qui en
signes alphabétiques oui en exprimaient avait pris le nom de montagne royale,
le nom par la parole : les Perses avaient A l'imitation encore de l'Égypte, Da-
adopté celle des Mèdes, qui l'avaient rius 1" ordonna de son vivant les tra-
empruntée des antiques Babyloniens, vaux nécessaires pour son tombeau et ,

Digitized by Google
EGYPTE. 389
il l'aurait visité si les devins ne l'en La domination per-
destruction de la
eussent détourné. sane ouvre dans l'histoire de l'Égypte
La civilisation paraissait proport ion- une ère nouvelle: la conquête qui suc-
tellement répandue dans les diverses céda aux Perses fut plus légère à l'É-
castes égvptiennes : chez les Perses , à gypte; la nation la plus spirituelle
l exception de la tribu noble des Ache- devait facilement s'entendre avec la
ménides, le reste de la «population plus sage de ces vieux temps : d'an-
était inculte et barbare, presque sans ciennes alliances les avaient déjà réu-
développement intellectuel, ignorant nies; la culture des arts et de la philo-
les arts et le luxe , ne connaissant que sophie, qui a produit de part et d autre
le service militaire et ne pratiquant tant d'admirables ouvrages, était pour
que la guerre. Cyrus devança par les elles un lien de plus et une cause d'in-
mêmes moyens lé triomphe de Gengis- times rapprochements.
Kban ; il avait aussi à ses ordres ses Alexandre, roi de Macédoine, vain-
hordes de Mongols aguerris , toujours queur à la bataille d'Issus , qui fut si
prêts à marcher à des conquêtes qui fatale à Darius IIIsouverain de l'em-
,

n'étaient réellement que des migrations pire perse, marcha vers la Phénicie,
de peuplades vers de meilleurs climats. pritTyr, Gaza, pénétra dans l'Egypte,
La forme perfectionnée du gouver- et l'occupa tout entière. Ses historiens
nement égyptien dut exciter l'attention nous ont conservé le souvenir de sa
des principaux personnages de la cour modération. Toute la politique du con-
deCambyse; cette remarque peut faire quérant, tout son système se révèle
considérer comme moins extraordi- par cette courte phrase de son histo-
naire la délibération et les discours des rien latin Quinte-Curce : Parvenu par
conjurés contre le faux Smerdis , au la voie du Nil jusqu'à Memphis, il
sujet de la formede gouvernement à don- s'avança dans l'intérieur du pays, et,
nera la Perse. L'un des orateurs propo- en ayant réglé l'administration de telle
sait une monarchie pure, l'autre une sorte qu'il ne fut rien changé aux an-
aristocratie , et le troisième une démo- ciens usages des Égyptiens , il se diri-
cratie toute populaire. Du reste, la divi- gea vers I oracle de Jupiter Ammon.
sion de l'empire en satrapies par Darius Alexandre voulut en effet le consul-
er
I , à l'imitation peut-être de l'Égypte ter; il se rendit donc à l'Oasis de ce
divisée en nomes, où l'action de l'auto- nom : les prêtres le reconnurent et le
rité suprême pénétrait si facilement proclamèrent le fils d'Amon-Ra, la
partout par le concours des fonction- grande divinité de l'Égypte, dont le
naires de divers rangs, fut le premier temple principal était à Thebes , d'où
acte qui donna une organisation régu- l'emblème du dieu avait été transporté
lière aux possessions persanes, et en dans le sanctuaire de l'Oasis. Il n'y
soumit l'administration à une loi gé- subsiste aujourd'hui aucune trace du
nérale , première base d'un gouverne- vovaçe du vainqueur. •

ment civil et politique, séparé du gou- Il lut frappé de la belle disposition

vernement militaire. d'un isthme formé par le lac Marœo-


Enfin , s'il fallait faire ressortir les tis et la Méditerranée à l'ouest du Nil
avantages que conservèrent les nations et il le destina à remplacement d'une
les plus civilisées conquises par les ville donna son nom. Sur
à laquelle il

Perses, sur leurs propres conquérants, ce même emplacement


se trouvait une
nous dirions que la civilisation ne cessa bourgade égyptienne nommée Rha-
de miner les plus solides fondements cotis; elle fut comprise dans l'enceinte
de cette conquête , et que le grand em- de son nom au quar-
la ville; elle donna
pire despotique des Perses périt, mal- tier qui lui succéda. AJexandre traça
gré les cinq millions d'hommes armés lui-même le plan de la nouvelle cite;
par Xercès , par l'effet des révoltes de il lui donna la forme de la chlamyde

I Ésvpte
et de l'héroïque résistance de macédonienne. La farine destinée à
UGrece. l'approvisionnement du soldat servit

Digitized by Google
L'UNIVERS.
à marquer place des murailles ; l'en-
la à l'ancien monde les lumières qu'elle
ceinte n'eut pas inoins de quatre-vingts en a reeues.
stades fie diamètre; l'architecte D Mar- La mortsurprit Alexandre au mi-
que fut chargé de diriger l'exécution lieu de ses conquêtes , lorsque l'As»
de ce vaste plan. Alexandre désigna soumise l'admirait comme homme, et
lui-même l'emplacement des places l'adorait presque à l'égal d'un dieu*
publiques, celui des temples à cons- Vivant et vainqueur, son autorité de»
truire , soit pour des divinités grec- vait lui garantir la fidélité ou du inoins
ques, soit pour des divinités egyp- la soumission des peuples subjugues.
tiennes, témoignage remarquable de A sa mort , le prestige cessait de lui-
tolérance, qui n'était pas venu à l'es- même, et les droits acquis par la force
prit des Perses; une haute civilisation périssaient avec celui qui s'était fait
pouvait seule l'inspirer. Ces temples un jeu de violer les plus légitimes in*
aux dieux de l'Egypte étaient néces- dépendances : jeu cruel que la Provi*
saires dans la nouvelle ville; le fonda- dente a puni quelquefois dans*
teur la peupla eu y appelant une par- même qui se complurent à s
tie de la population des autres villes redoutables.
égyptiennes. Il y laissa une garnison Alexandre ne laissa pas auprès de
macédonienne, permit à un grand son trône un héritier qui pdt de suite
nombre de Grecs et d'Asiatiques de succéder, sinon à sa toute- puissance,
s'y établir, l'ouvrit à tous les peuples, du moins à l'empire qu'il avait reçu
et il en lit dans sa pensée comme dans de Philippe, et dont la possession ne
la réalité l'entrepôt nouveau de tout pouvait lui être contestée. Alexandre
le commerce entre l'orient et l'occi- avait un frère, (ils, comme
lui, d«
dent de la terre. Alexandre laissant en Philippe, nuis qui était né d'une dan-
Egypte Cléomène pour gouverneur, seuse nommée Pnilline; il laissait aussi
remonte en Syrie, poursuit le cours de Barsine, tille de Darius, un fils
de ses conquêtes , pénètre aux confins nommé Hercule; enfin Roxane sa
de l'Asie, retourne à Babylone malgré veuve, fille du roi de la Bactriane,
les prédictions des devins", y reçoit des était enceinte , le terme même de sa
députations de presque tous lès peu- grossesse très -avancé; elle pouvait
ples de la terre , et les honneurs fu- donner le jour à l'héritier si nécessaire
nèbres qu'il fait rendre à Hephaestion pour l'accomplissement des projets
ne sont que les préludes de ceux qu'il d'Alexandre.
va recevoir. Il meurt du poison ou d'in- Mais T incapacité d'Aridée son frère
tempérance, le 24 mai de l'an 324 avant l'inexpérience du fils de Harsine , Tin-
l'ère chrétienne. certaine espérance d'obtenir d'une
Le nom d'Alexandre le Grand ne se autre un rejeton du sang royal, enfin
lit sur aucun de l'Kgypte; le
édifiée la faiblesse d'une régence pouvaient-
seul monument qui reste de lui en elles suffire aux graves circonstances
ce pays, c'est la ville qui porte son où la mort prématurée du vainqueur
nom , et qui n'a pas cessé de réaliser de tant de rois plaçait ses peuples et
les vues et les espérances de son ton* son armée? Pour conserver son em-
dateur elle est encore le lien essentiel
: pire, il edt fallu un second Alexan-
du commerce de l'Europe, de l'Afri- dre ; l'union intime de tous ses géné-
3ue et de l'Asie. Un autre conquérant* raux pouvait rendre l'état des choses
ont le nom est aussi immortel , avait moins périlleux sans doute, mais de-
préparé de plus hautes destinées à cette vait-on l'attendre de leur ambition?
ville , et la renaissance de son antique Tous distingués par leur naissance ou
gloire sous l'égide de la France: le d'éclatants services, ils joignaient à la
temps , sur les traces de l'intelligence, noblesse des formes corporelles , l'élé-
parait devoir bientôt réaliser les gran- vation des sentiments et la puissance
des pensées d'Alexandre et de Napoléon; de la sagesse et de la raison ; c'étaient,
H 1 Europe reconnaissante va rendre parmi plusieurs autres, B

Digitized by Google
>TE. 391

Léonnat, Antipater, Lysimaque, Py- Cléomène, par Alexandre en


laissé
thon , Peuoeste Ptolémée.
, ftgvpte en qualité de trésorier, y réu-
Le lendemain de la mort d'Alexan- nit celle de lieutenant du gouverne-
dre, ils se reunirent autour de son ment , et l'exerça jusqu'à l'arrivéede
trône, sur lequel on avait placé ses Ptolémée.
insignes et ses armes. Perdiecas se dé- L'époque précise n'en est pal con-
clara pour le Gis que Roxane pouvait nue; mais l'intérêt que Ptolémée de-
mettre au inonde ; Néarque pour celui vait mettre naturellement à jouir d'un
de Barsine, et Ptolémée contre l'un titre auquel il pouvait déjà peut-être
et l'autre. « N'aurions-nous vaincu les rattacher de plus hautes espérances,
« Perses , dit-il
,
que pour les placer sur dut l'amener sans retard dans la capi-
• le trône de Macédoine? » et il pro- tale de ses provinces. Sa libéralité,
posa de déférer le gouvernement a un sa justice et la douceur de son auto-
conseil formé des principaux lieute- rité attirèrent bientôt , de toutes parts,
nants d'Alexandre. Mais un? voix s'é- ceux que la guerre et les dissensions
leva de la foule dont l'assemblée était publiques éloignaient des pays qui en
environnée, et proclama roi le frère étaient le théâtre.
du roi , Aridée, sous le nom de Phi- Le titre de sous -gouverneur donné
ape, nom
chéri des Macédoniens, à Cléomène qui était en Egypte depuis
îléagre, soutenu de toute l'infante- sa conquête par Alexandre, permet
rie, s attacha h son parti. En vain néanmoins de supposer l'absence tem-
Perdicfcas , secondé par Leonnat , et poraire du gouverneur lui-même. Il
par Ptolémée à la tête de la garde paraît que Ptolémée passa quelque
royale , essaye de s'y opposer , appuyé temps encore à Bahvlonc où sa pré-
par les troupes à cheval. Aridée se sence pouvait être nécessaire pour ré-
montre revêtu des ornements royaux, Î;ler, selon ses vues et les nouveaux
et il est salué roi par la'' majorité du ntéréts qu'il venait de se créer, beau-
peuple et de l'armée. Les gouverne- coup dedifficultés que l'état des affaires
ments des provinces , ainsi que les devait faire naître; et comme la fin
charges de la cour, furent distribués de l'été , dans ces régions asiatiques
aux officiers ou aux favoris les plus ré- favorisait, bien mieux que les mois
putés, et l'on s'occupa enfin de faire de juin et juillet, le long voyage d'un
embaumer le corps d'Alexandre dé- personnage nécessairement accompa-
laissé jusque-là et privé de soins et gné de beaucoup de monde, ce dut
d'honneurs , quoique depuis sept jours être vers l'automne que Ptolémée
déjà il eût cessé de vivre. quitta la Chaldee pour se rendre en
Ce fut ce même jour et dans le même Egypte, vraisemblablement vers le
conseil que le gouvernement de l'E- mois d'octobre qui suivit la mort d'A-
gypte, de la Libye et de la portion de lexandre.
l'Arabie limitrophe de PÉgypte, fut Ses premiers soins eurent pour but
donné à Ptolémée. Ce gouvernement de mériter l'affection des habitants de
devint ensuite le royaume d' Egypte, l'Egypte, et il se la concilia par la
et n'éprouva aucun démembrement. douceur de son administration. Bien-
Quelques possessions éloignées, telles tôt instruit que Perdiecas formait se-
que Chypre et la Cyrénaïque y furent
, crètement le dessein de lui ravir par
réunies par la guerre, et .la guerre les armes un titre qu'il devait à la foi
aussi les en détacha quelquefois. Mais des traités, il se prépara à le défendre.
le royaume proprement dit, et tel Il leva par ses agents une eontributioii
qu'il subsista pendant trois siècles, se de huit mille talents , et mit une arméè
trouva renfermé dans les limites na- sur pied. En même temps il contracta
turellesde l'Egypte. une alliance avec Antipater déjà engagé
Ptolémée songea bientôt à se rendre dans une guerre contre les Grecs que ,

dans son gouvernement. Pendant le le rappel des exilés par Alexandre à


temps qu'il passa encore à Babylone, son retour de l'Inde, avait sourde-

Digitized by Google
«92 L'UN VERS.
ment excités contre lui, et que sa fiantpeut-être dans les prophétie*
mort arma aussitôt contre Antipater, d'Aristandre , qui promettaient un
gouverneur de la Macédoine et de la bonheur éternel à la contrée qui H
Grèce pour Aridée, successeur d'A- posséderait. Polémon , lieutenant d<
lexandre. Perdiccas, tenta de s'opposer aux pro-
Après cette alliance, et pendant jets d'Arrhidée, mais celui-ci réuss i

qu'Antipater opposait ses forces et malgré lui a se réunir à Ptolémée qu


celles de ses alliés , sur terre et sur se rendit en Syrie avec des troupes
mer, aux Grecs confédérés pour échap- pour honorer la mémoire du roi dil f

per au joug macédonien , Ptolémée Diodore de Sicile, mais plutôt poui


donnant tous ses soins au gouverne- protéger Arrhidée contre les projet}
ment de l'Egypte , s'attachait de plus de Perdiccas. Ceci se passait au prin-
en plus ses habitants , et jetait ainsi temps de l'année 322.
les fondements de sa future souve- L'été suivant , l'entreprise de Per-
raineté. Une circonstance que sa poli- diccas contre l'Égypte, et les prépara-
tique sut s'approprier, rangea la Cy- tifs d'Antipater secondé par Antigone
rénaïque sous ses ordres en l'année
, et Cratère, étaient déjà parvenus à et
323. point de maturité qui annonce un pro-
Au commencement de Tannée sui- chain dénoûment. Eumène fut heureui
vante, Antipater, Cratère et Antigone et repoussa avec succès les efforts de
résolurent d'envoyer un message à ces trois chefs alliés , pendant que Per-
Ptolémée, pour rengager dans une diccas parvenait à Damas à la tète
alliance où leurs communs intérêts et d'une armée nombreuse soutenue et
i'imminente obligation de résister à rendue plus dévouée par la présence
Perdiccas devaient sûrement le faire des deux jeunes rois. Perdiccas tra-
entrer ; et Ptolémée n'hésita pas à s'y verse la Syrie, se dirige sur Péiuse et
engager. Perdiccas, de l'avis de ses établit son camp près de cette ville
généraux , envoya Eumène sur l'Hel- la clef de l'Égypte vers l'Orient. Ayant
Jespont , pour arrêter Antipater et Cra- imprudemment fait repurger un" an-
tère s'ils tentaient de passer en Asie. cien canal du Nil , une subite irruption
Il partit de la Pisidi< pour attaquer des eaux du fleuve détruisit ses ou-
l'Égypte dont la conquête devait le vrages militaires et mit le décourage-
laisser sans inquiétude sur ce point ment et la désertion parmi ses troupes.
lorsqu'il entreprendrait celle de la Ma- Il essaya de les ramener par des dé-
cédoine. monstrations de bienveillance, par des
Mais cet espace de temps qui s'était discours que la hauteur et la dureté de
écoulé depuis la mort d'Alexandre , et son caractère pouvaient démentir , et
nue ses généraux ont consumé à se il donna l'ordre de se tenir prêt à mar-

disputer par les armes les provinces cher. A l'entrée de la nuit il leva ie
de son empire , Arrhidée , l'un d'eux camp; on se mit en marche et on ar-
qui fut ensuite gouverneur de la Phry- riva vers la pointe du jour sur le Nil,
gie, l'avait consacré tout entier à de non loin d'une petite ville nommée le
plus honorables soins , à l'accomplisse- Mur des Chameaux, que Perdiccas
ment d'un pieux devoir, en faisant fit attaquer. Il essaya vainement de la

construire le char funèbre d'Alexan- prendre de force Ptolémée qui avait


:

dre et transporter son corps en Égypte. tout prévu et s'était même défait de
Ces soins l'occupèrent deux années, et Cléomène qu'il croyait attaché à Per-
ia magnificence du char mortuaire du diccas, se trouva là à la tête d'un
triomphateur, si l'histoire ne l'a point corps de cavalerie pour défendre la
exagérée , ne dut pas demander moins ville. Convaincu de l'inutilité de son

de temps. Arrhidée partit de Babylone entreprise, Perdiccas y renonça sur le


et se rendit en Égypte par Damas. soir, et profita de la nuit pour se diri-
Perdiccas ne voulait pas laisser à Pto- ger vers une île que formait le Nil du
lémée ces précieuses dépouilles , con- côté opposé à Memphis , vraisembla-

Digitized by Google
ÊGYPTE. 393

Menant Hle de Myecphoris formée par tigoneen Asie , lui donnant l'assurance
la branche de Péluse , un peu à l'orient que Ptolémée seconderait son entre-
de Bubaste. Il tenta bien malheureuse- prise. Mais Polysperchon , tuteur des
ment le passage des eaux , deux mille jeunes rois pour rendre leur alliance
,

hommes y perdirent la vie : la sédition illusoire, voulut pouvoir compter sur


s'empara de tous les esprits, et Per- celle des républiques grecques , et , de
diccas fut égorgé dans sa tente. Pto- l'avis des plus considérables person-
lemee s'empressa de traverser le Nil nages de la cour, il lit porter un dé-
et de se rendre au camp macédonien cret qui leur rendait à toutes leur li-
auprès des jeunes rois , de leur offrir berté avec la jouissance des lois et
des présents et ses hommages, et de coutumes qui les régissaient avant leur
fournir aux plus pressants besoins de conquête par Philippe ou par Alexandre.
l'armée, de protéger même les plus En même temps qu'il proclamait la
intimes amis de Perdiccas contre ie liberté des villes grecques , Polvsper-
ressentiment des soldats. chon en appelait à la fidélité d'Eu-
Ce fut alors que Ptolémée reçut en mène, mettant à sa disposition de
Êgypte les deux jeunes rois dont il lui l'argent et des troupes , et tachait , par
jurait été facile de se faire donner la toutes sortes de prévenances , de ra-
tutelle ; mais il la jugea au moins inu- mener à la cour Olympias, mère d'A-
tile à ses projets sur l'Êgypte , et il la lexandre, qui s'en était éloignée du
fit accorder a Python et Arrhidée , le vivant d'Antipater.
même qui lui avait livré le corps d'A- Eu mène se voua courageusement à
lexandre. la défense de la cause des jeunes rois
Les deux rois continuèrent leur quitta la Phrygie , passa le mont Tau-
route vers la Macédoine; ils firent alors rus, entra en Ci line et chargea ses
une nouvelle distribution des gouver- amis les plus intelligents et les plus
nements. Ptolémée conserva celui de dévoués de faire des levées d'hommes
Egypte, qu'il eût été difficile d'ailleurs et d'argent chez les Pisidiens , dans la
Je lui enlever, tant son courage et Lycie et en Chypre. Quelques-uns même
l'esprit de justice de son administra- parvinrent jusqu'en Célé-Syrie et dans
tion lui en assuraient la possession. la Phénicie , dépendantes du gouver-
Dans cette dernière distribution des nement de Ptolémée.
gouvernements, Laomédon de Mity- Celui-ci se rendit dès lors avec sa
lene avait obtenu celui de la Syrie ; il flotte à Zéphyrion en Cilicie, vis-à-vis
y fut attaqué par Ptolémée qui avait de l'île de Chypre , et tenta sans suc-
résolu de réunir à l'Egypte la Célé-Sy- cès d'ébranler la fidélité des chefs qui
ïieet la Phénicie. Nicanor, l'un de ses suivaient la fortune d'Eumène. Mais
généraux chargé de cette expédition et Ptolémée fut bientôt rappelé de ces
de cette conquête , y réussit complète- parages par l'entreprise d'Eumène con-
ment , emmena même Laomédon pri- tre la Pnénicie soumise à Ptolémée.
sonnier en Égypte , après avoir mis En attendant, la reine Olympias
garnison dans toutes les villes des pro- cherchait à reprendre à la cour de
vinces conquises. Jérusalem fut de ce Macédoine l'influence que lui don-
nombre. Ainsi , à la fin de la troisième naient son nom , son rang et le res-
année de son gouvernement , Ptolémée pect profond qu'inspirait encore tout
avait réuni à l'Egypte , Cyrène , la Sy- ce qui touchait de près à la mémoire
rie, la Celé- Syrie et la Phénicie. d'Alexandre.
Cassandre cherchait à mettre Pto- Polysperchon entreprit de recon-
lémée dans ses intérêts ; il lui dépécha duire en Macédoine la reine Olym-
dans même temps un messager sûr,
le pias et le fils d'Alexandre. Eurydice,
pour lui demander, avec son alliance, femme du roi Philippe Aridée, redou-
qu'il envoyât sa flotte de la Phénicie tant l'influence d'Olympias osa sollici-
,

dans l'Hellespont. Il s'y rendit lui- ter contre elle Cassandre qui était sur
même, et de là il passa auprès d'An- l'Hellespont, et se porta elle -même

Digitized by Google
394 L'UNIVERS.
avec des troupes à Eria sur les fron- lexandre le Grnn4 fut proclamé dans
tières de la Macédoine, pour en dé- tous ses États d'Europe et d'A^e; ce
fendre l'approche à la reine les deux : fut son fils Alexandre, né de Roxane.
armées étaient près d'en venir aux Dans ces mêmes temps, la rein*
mains; mais le vieux respect des Ma- Olympias se vengeait d'Antipater mort
cédoniens pour le sang d'Alexandre sur ses amis vivants, non pas comme
remporta sur tout autre engagement, un roi, dit Justin, mais bien comme
et ils se déclarèrent pour Olympias. une femme, et Eumène passait l'hiver
Aridéc fut fait prisonnier; Eurydice, dans la Babylonie. Deux années après,
qui était retournée à Amphipopolis Olympias et Eumène n'existaient plus:
avec Polyclès, l'un de ses affidés, fut tous deux avaient péri assassinés, l'un
bientôt prise aussi, et l'un et l'autre par les ordres de Cassandre, l'autre
furent mis à mort par Tordre d'Olym- par ceux d'Antigone.
pias, Aridce, successeur immédiat Antigones'était ensuite rendu dans
d'Alexandre, ayant régné six ans et la Babylonie, gouvernée par Séleucus,
quatre mois. qui le reçut avec magnificence. Mais
Ainsi mourut le premier roi macédo- Antigone 'devenu plus exigeant, trouva
nien successeur d'Alexandre le Grand ;
enfin quelque résistance dans Séleucus.
l'Egypte le reconnut fidèlement; ses Celui-ci cependant , par la crainte d'être
monuments en font foi, notamment traité comme tant d'autres person-
le premier et le deuxième sanctuaire nages éminents dont Antigone avait

du grand édifioe de Karnacà Thèbes on ; mis une attention réfléchie à se dé-


y lit cette légende royale L'approuvé : faire, se décida des lors à se rendre
et le chéri d'Ammon et de Phré , le fils en Egypte. Ptolémée n'y avait jamais
du soleil , Philippe {Phtipos). A Aseh- refusé un asile à ceux que les caprices
mounéin l'ancienne Hermopolis-Ma-
, de la fortune et les malheurs de ces
gna , cette légende se trouve deux fois temps d'anarchie amenaient auprès de
sur le temple de cette ville; le nom lui.
propre y est écrit Pheiletpos. Ce n'est Séleucus était en Éçypte au com-
pas que'Philippe Aridee fut présent en mencement de la neuvième année du
Egypte lorsque les ouvrages de Karnac gouvernement de Ptolémée. Ce chef ha-
et d'Hermopolis - Magna , qui portent bile avait été jusque-là presque simple
encore son nom , furent exécutés : spectateur des débats sanglants élevés
mais ce roi était l'autorité suprême entre les autres généraux d'Alexandre.
légale en Egypte, et j'ai sous les yeux Séparé du théâtre de leurs malheureux
un contrat, en écriture démotique, daté exploits par la mer et les déserts, H
de Pan cinq, du règne de ce prince, ne songeait qu'à affermir son pouvoir
car Ptolémée n'était que le gouver- en évitant avec soin de le compromet-
neur de l'ftgyute sous l'autorité du tre, et à préparer une heureuse résis-
roi : il fut fidèle à sa mission subor- tance à des attaques dont sa prudence
donnée ; mais il est juste toutefois de lui faisait prévoir la possibilité. Sa jus-
lui rapporter les bienfaits de ces res- tice et sa modération lui avaient acquis
taurations, preuve patente de l'em- la confiance des peuples qu'il gouver-
pressement de Ptolémée à réparer les nait; sa grandeur d'âme lui avait fait

ravages commis par les Perses , et de des amis de tous ceux qui s'étaient
son attention à flatter ainsi l'opinion, commis à sa foi. Séleucus ne devait
les vœux et les croyances des fcgvp- pas être moins heureux.
tiens, captant par fa de plus en plus Ainsi s'accomplissaient les immua-
leur affection et leur confiance. bles décrets de la Providence. De nou-
Après la mort de Philippe Aridce, veaux trônes s'élevaient sur les débris
vers le mois d'octobre de l'année 3! de ceux que la fougue d'Alexandre avait
avant l'ère chrétienne, la septième du renverses; et, de tous ses généraux,
gouvernement de Ptolémée en fcgypte, quelques uns seulement étaient desti-
un second successeur au trône "d'A- nes à s'y asseoir, vainqueurs des an>

)igitized by Google
4

ÉGYPTE.
lntions rivales de la leur. Léonnat, II le fit proclamer l'ennemi de l'État,

Pvthon, Perdiccas, Antipater, Eu- s'il ne rendait la liberté à Roxane et au


nîène, Polvsperchon , n'avalent déjà jeune roi son fils qu'il tenait enfermés,
plus d'intérêt dans ces suprêmes dis- ets'il ne reconnaissait Antigone comme
sensions : ils avaient cessé d'exister. régent du royaume. Pour se faire en-
Parmi ceux qui leur survivaient, An- core de plus nombreux partisans, il se
tigone restait alors le plus puissant. déclara le protecteur de la liberté des
Tous autres devaient le redouter i
les villes grecques, renvoya Alexandre,
ils liguèrent contre lui. C'étaient
se fils de Polvsperchon , d'ans le Pélopo-
Oassandre , qui , en assassinant la mère nèse , et avant reçu des galères de
, le
I i

et en épousant la nièce d'Alexandre, de Rhodes", il cerna la ville de Tvr du


se rapprochait de plus en plus du trône côte de la mer.
de la Macédoine où il commandait ainsi Ptolémée reconnut aussi la liberté
nue dans la Grèce; Lysimaqtie, chef des villes grecques, ayant pour but*
de troupes aguerries et des peuplades sans doute, de les désintéresser dans
3 demi sauvages de la Thraee; Ptolé- une lutte ou leur intervention pouvait
mée, maître de l'Égypte, de Cvrène, efficacement servir le parti qu'elles se
de la Syrie et de la Phénicie; Seleucus décideraient à soutenir*
enfin, qui ne renonçait pas à son gou- En attendant, un autre Cassandre,
vernement de Bahylone : ces quatre gouverneur de la Carie, s'était déclaré
chefs signèrent contre la puissance pour Ptolémée, et avait envoyé à
d'Antigone une alliance qui devait y Chvpre des troupes commandées par
mettre On. Poîyclitus. Celui-ci se réunit d'abord
Au printemps de l'année 315, An- à Seleucus, soutint heureusement plu-
tigone reprit sa marche par la Cilicie, sieurs combats contre les navarques
et, parvenu dans la haute Syrie, il y d'Antigone, retourna à Chypre, et se
fut joint par les envoyés de Cassandre, rendit à Péluse en Kgypte, où Pto*
de Lysimaque et de Ptolémée , chargés lémée le combla d'honneurs et de pré*
de lui demander le partage des pro- sents.
vinces et de l'argent qui étaient le fruit Parmi les prisonniers de marque
d une guerre à laquelle ils avaient con- faitspar Polyclitus était Périlaùs, l'un
couru. Ces propositions furent mal des généraux d'Antigone, qui sollicita
rerues par Antigone, qui se mit en sa délivraflce et celle de plusieurs au-
mesure de soutenir par les armes un tres officiers. Ptolémée les lui rendit,
refus aussi formel, en cherchant des et eut alors, même avec Antigone, une
alliés et des secours à Chypre, à Rho- entrevue à Écregma où il ne refusa
des, faisant ses dispositions en Cap- pas de se rendre, toutefois sans obte-
padoce et sur l'Hellespont, se portant nir ce qu'il espérait d'Antigone.
en Phénicie, campant devant Tyr, et Au commencement de l'hiver sui-
établissant dans ses mers trois points vant, Antigone, pour s'opposer à Cas-
de réunion pour la flotte qu'il pensait sandre de Carie, fut surpris par les
à construire. Mais les chefs ligues neiges en traversant le mont Taurus.
contre lui ne préparaient pas leur at- Dans l'été de l'année julienne 314,
taque avec moins de soins, avec moins Cyrène, reunie depuis quelque temps
de promptitude, et bientôt Séleucus, aù gouvernement de Ptolémée, cher-
courant Fa mer de Svrie avec cent vais- chait a s'y soustraire et à chasser la
seaux, vint attiédir le zèle des parti- garnison qui occupait la citadelle. Pto-
sans d' Antigone. Celui-ci chercha à le lémée tenta de ramener Cyrène à l'o-
soutenir, én leur annonçant que dans béissance par des envoyés qu'elle ne
Tété même il tiendrait la mer avec une respecta pas. Il chargea Agis de la
flottede cinq cents voiles. soumettre, et ses vues furent heureu-
Antigone se porta aussi pour allié sement remplies. L'exemple de Cyrène
des défenseurs du troue de Macédoine, agitait Chypre, et Pygnaalion, son
contre les entreprises de Cassandre. gouverneur, communiquait avec Anti-

Digitized by Google
L'UNIVERS
gone. Ptoléméc s'y rendit en personne, corps de troupes avec lequel il devait
punit exemplairement l'infidèle gouver- tenter de rentrer dans son gouverne-
neur, le remplaça par Nicocréon, dé- ment de Babylone. Il y réussit en peu
truisit Marium, en transporta les ha- de temps : la douceur de son adminis-
bitants à Paphos, se dirigea ensuite tration pendant les quatre années de
sur les côtes de Syrie , où il débarqua sa durée était son plus utile auxiliaire.
son armée, prit Posidium ainsi que En même temps Ptolémée, étant par-
Potamos, et, poussant jusqu'en Cili- venu jusqu'en Célé-Syrie, apprit que
cie, arriva dans Mallos, ravagea les Démétrius, de retour de la Cilicie,
contrées voisines, et rentra enfin à campait dans la Syrie supérieure. Il
Chypre. Cette expédition était déjà ter- chargea le Macédonien Cillés de Fv at-
minée lorsque Démétrius, qui l'apprit taquer; mais Démétrius, profitant de
en Syrie, arrivait en Cilicie pour s'y l'imprévoyance de ce général, le sur-
opposer. C'était trop tard, et Démé- prit lui-même à Myounta et le fit pri-
trius alla reprendre sa station en Syrie, sonnier avec son armée. Antigone était
pendant que Ptolémée rentrait en alors en Phrygie; il y apprend ce succès
Égypte. de Démétrius, traverse de nouveau le
Dans l'automne de la même année mont Taurus , et opère sa jonction avec
314, Tvr se rendit aux troupes d'An- son fils.
tigone ,'après avoir été bloquée par mer Ptolémée ne trouva pas prudent de
pendant quinze mois. se mesurer avec des forces aussi supé-
L'hiver suivant, celui de l'an 313, rieures, et, de l'avis de ses généraux,
Ptolémée était rentré en Égypte. Sé- il resolnt de retourner en Égypte. 11

leucus s'y trouvait, et l'excita pour quitta donc la Syrie, démantela les
attaquer Démétrius qui l'observait tou- villes principales qu'il abandonnait,
jours dans ses cantonnements de Syrie. Acès, Joppé, Samarie, Gaza, et,
Cédant à ces insinuations, Ptolémée chargé d'un immense butin, il rentra
réunit une armée nombreuse, quitte dans son gouvernement il se prépara
:

Alexandrie, se rend à Péluse, et de là à s'y défendre.


se dirige vers Gaza. Instruit de ses Bientôt après, Cassa mire, Lysima-
desseins, Démétrius rappelle ses trou- que et Ptolémée, firent avec Antigone
pes de leurs quartiers d'hiver, et leur une paix qui ne fut pas de longue du-
assigne Gaza pour le lieu du rendez- rée : Cassai id rv devait commander en
vous. Europe, Ptolémée en Égypte et dans
Contre l'avis des généraux les plus les contrées voisines, Lysimaque en
expérimentés, Démétrius engagea la ïhrace, Antigone à toute l'Asie; mais
bataille à Galama, en avant de Gaza; les prétextes ne manquèrent pas pour
il fut vaincu et alla en toute hâte rompre le traité. Cassandre plus qu'au-
prendre position sous les murs de la cun autre pouvait le désirer, car son
ville avec sa cavalerie; mais le désordre pouvoir et son influence devaient bien-
fut tel que le soir même les troupes de tôt décroître , cesser peut-être entière-
Ptolémée entrèrent à Gaza. Démétrius ment par la prochaine majorité du
se retira par la*Syrie jusqu'à Tripolis; jeune Alexandre, fils d'Alexandre le
de là, il envoya demander du secours Grand et son successeur au trône de
à son père Antigone qui ayait passé la Macédoine, et déjà ses habitants
l'hiver dans la Propontide, et, en at- demandaient hautement que le nou-
tendant, il se renforça de quelques veau roi fût proclamé. Cassandre con-
troupes venues de la Cilicie, et des voitait ce trône; il ne pouvait y par
garnisons qu'il rappela de quelques venir que par des crimes : il chargea
places fortes éloignées. donc Glaucias, jusque-là gardien du
Ptolémée s'occupa de poursuivre ces jeune Alexandre et de Koxane sa mère,
remiers succès, s'avança dans la de les égorger secrètement et de faire
s yrie
, prit Sidon , occupa Tvr, et donna disparaître leurs dépouilles. Ce forfait
à Seleucus, qui l'avait secondé, un rendit pour Cassandre le trône de M*

Digitized by Google
ÉGYPTE.
cédoine d'un plus facile accès, et les à l'intérieur, faisant ses adorations aux
autres généraux, Lysimaque, Anti- triades de Thèbes. Dans un de ces bas-
gone, Seleucus, Ptolémée, libres de reliefs, la déesse Thamoun est rem-
toute dépendance, se trouvèrent in- placée par la ville de Thèbes, person-
vestis des lors de la suprême autorité nifiée sous la forme d'une femme, avec
dans leur gouvernement. cette légende :
Tel était l'état des choses aux pre- « Voici ce que dit Thèbes (Oph), la
miers jours de Tété de Tan 31 1 de l'ère grande tutrice du monde : Nous avons
vukaire, treize ans après la mort mis en ta puissance toutes les contrées
d'Alexandre. (les nomes) ; nous t'avons donné Kéme
Son second successeur venait de (l'Egypte), terre nourricière.» C'est
périr victime de l'ambition effrénée des au jeune roi Alexandre que la déesse
chefs qu'il avait élevés par ses bien- adresse ces paroles; Ammon, généra-
faits. Ptolémée ne s'était point détaché teur, dit en même temps au prince :
de la fidélité qu'il devait au jeune roi « Nous accordons que les édifices que
Alexandre, et c'était en son nom qu'il tu élèves soient aussi durables que le
avait exercé en Égypte son autorité firmament. »
secondaire; les monuments en font foi. Tous ces monuments déposent du
A Béni-Hassan se trouve l'ancien spéos respect de Ptolémée pour l'autorité
de Diane, la Bubaste des Égyptiens. des rois qu'il représentait en Égypte ;
Ce temple est cerné par des hypogées c'est en leur nom , et quoiqu'ils né fus-
où furent déposés les chats 'sacrés, sent point présents en Égypte, que tous
animal qui fut le symbole de la déesse, les monuments publics étaient élevés
et un de ces hypogées, visité par ou restaurés.
Champollion le jeune, le 6 novembre Dans les ruines des deux temples
1828, porte la légende royale de cet d' Élephantine, il reste celles d'une
Alexandre, fils d'Alexandre le Grand. porte en granit, dédiée au nom du
Le cartouche prénom est le même que même prince, aux dieux du lieu,
celui de son prédécesseur Philippe Chnouphis, Saté et Anouké.
A ridée, le roi chéri d'Amon-Ra, ap- Bientôt après la mort du jeune roi,
prouvé par Phré, le fils du soleil les hostilités entre Antigone et Ptolé-
Alexandre {Alksantrs). On trouve tou- mée recommencèrent. Le traité conclu
tefois quelques variantes dans son pré- entre quatre généraux avait re-
les
nom à Élephantine. A Louqsor, un connu l'indépendance des villes grec-
sanctuaire, habilement exécuté en gra- ques, et cependant Antigone mettait
nit, fut construit dans le temple par des garnisons dans quelques-unes
Tordre et avec le nom du même roi. d'elles. Ptolémée le desapprouva et
Ce second sanctuaire est emboîté dans chargea Léonis de faire une invasion
le premier élevé par le Pharaon Amé- en Cilicie. En même temps il engageait
nophis; il porte I inscription suivante : Cassandre et Lysimaque à se réunir à
• Restauration de l'édifice faite par le lui , afin de s'opposer a l'accroissement
roi chéri de Phré approuvé par Am-
,
de la puissance d'Antigone. Celui-ci
mon, le fils du soleil, seigneur des envoya son second fils Philippe sur
diadèmes, Alexandre, en l'honneur de l'Hellespont et Démétrius à la aéfense
,

son père Amon-Ra, gardieu des ré- de la Cilicie. Léonis, lieutenant de


gions de Oph (Thèbes). Il a fait cons- Ptolémée, fut vaincu; dans le même
truire le sanctuaire en pierres dures temps, Ptolémée, à qui Chypre obéis-
et bonnes à la place de celui qui avait sait, informé que Nicoclès,qui régnait
été fait sous la majesté du roi soleil, à Paphos, avait de secrètes intelli-
seigneurde justice, le fils du soleil, gences avec Antigone, chargea Calli-
Ameuophis, seigneur de la région crate et Argée de le faire mourir.
pure. Et le jeune roi , au visage en-
>» Ménélas, qui commandait en Chypre,
fantin , est représenté sur les sculptu- leur donna des troupes, et le résultat
res du sanctuaire, à l'extérieur comme de cette expédition fut la destruction

Digitized by Google
L'UBIVERS.
totale de la race royale de Paplios. de Ptolémée dans l'Archipel y avait
Ptolémée, apprenant bientôt aprèf attiré toutes les forces des combat-
les revers éprouvés en Cilicie, réunit tants. Démet rius, qui avait poursuivi
une flotte et une armée, va débarquer les généraux de Ptolémée dans la Ci-
à Phaselis, et, côtoyant la Lycie, s'em- licie, arriva bientôt devant Athènes,

nde Xanthe, ensuite de Caune et


a citadelle, successivement d'Hé-
défendue par Denys, qui commandait
à Muuychia , et par Démétrius de 1
'

raclée, enfin de l'île de Cos, occupée 1ère, gouverneur de la ville depuis dix
par un autre Ptolémée, neveu d'Anti- ans. Les succès du ûls d'Antigone ren-
gone, parenté qui ne le rendit pas plus dirent Athènes à la liberté, et Démé-
dévoué, et ne l'empêcha pas de se jeter trius de Phalére se retira d'abord à
dans le parti de Ptolémée d'Éuypte. Thèbes de Béotie, ensuite en Égypte,
Celui-ci , partant ensuite de Myndus en auprès de Ptolémée (l'an 307).
Carie, et parcourant l'Archipel avee Démétrius reçut a Athènes, d'An-
une flotte considérable , réduisit la gar- tigone, son père, Tordre d'attaquer
nison d'Andros, et, arrivant dans l'île de Chypre et de l'enlever à Ptolé-
l'isthme, s'empara de Sicvone et de mée. Pour l'exécuter, il se rendit d'a-
Corinthe; Il prit enfin M égare, où il bord en Carie, et engagea les Rhodieus
chercha , :\ r des présents, à s'attacher
\
mais sans succès, à se déclarer contre
Stilpon le philosophe, qui préféra se Ptolémée. Parvenu ensuite en Cilicie,
retirer à vfcgine. Le but de Ptolémée, où il trouva des soldats et des vais-
dans cette expédition, était de laisser seaux, il alla débarquer à Chvpre,
moins d'alliés au parti d'Antigone à ayant trois mille hommes sous ses or-
mesure qu'il rendrait plus de villes dres, pendant qu'Antigone occupait la
grecques à l'indépendance. Il fut en Syrie supérieure. Démétrius fut heu-
cela d'accord avec Cassandre, convint reux dans cette entreprise. Ménelas,
avec lui que chacun d'eux garderait les commandant en Chypre pour Ptolé-
villes qu'il occupait, et il retourna en mée, essuya plusieurs échecs et se
Egypte. x renferma dans Salamis; Démétrius en
Peu d'années s'étaient écoulées de- entreprit le siège. Ptolémée, oui était
puis que Ptolémée avait ramené Cyrène en Egypte, ayant appris la fâcheuse
sous son obéissance; Ophella y com- position de Menélas a Chypre, s'em-
mandait pour lui depuis la mort de pressa d'arriver à Paphos , sur un point
Thimbron. Les dissensions qui divi- de l'île opposé à Salamis, avec une
saient ies généraux d'Alexandre, et flotte nombreuse et des forces consi-
surtout leur exemple, faisaient naître dérables. Il envoya trois mille fantas-
le désir de l'indépendance dans chaque sins à Ménélas, et, après l'avoir iu-
chef qui gouvernait des provinces iso- formé de son plan d attaque, il se
lées. Ophella, commandant de la Cyré- rendit à Citium, peu distant de Sala-
naïque pour Ptolémée, avait aussi mis. Bientôt la bataille s'engagea sur
conçu le projet de s'élever à une plus mer et sur terre; elle eut pour résultat
haute fortune. Agathocle de Syracuse la défaite totale de Ptolémée, son re-
faisait alors la guerre contre fes Car- tour en Egypte, et l'occupation de l'île
thaginois ; il lui envoya quelqu'un , qui entière par Démétrius.
Je flattant d'une future domination sur Antigoue, en apprenant d'aussi
l'Afrique, l'entraîna dans une alliance grands succès, ne douta plus du pro-
bien fatale. Arrivé après deux mois de chain accomplissement de ses v ues , et
niarche ét de fatigues inouïes auprès ne reconnaissant point de puissance
d' Agathocle, Ophella fut traité en en- qui lui filt supérieure, il prit le titre
nemi attaqué et tué dans le combat.
, de roi et le donna aussi à son (ils Dé-
Cyrène, sans défense, rentra facile- métrius. Ptolémée vaincu ne croyait
ment sous les ordres de Ptolémée. pas y avoir moins de droits qu'Anti-
La guerre, sans changer de but, gone triomphant il ne voulut pas con-
:

avait changé de théâtre l'expédition


f sacrer eu quelque sorte sa défaite, en

Digitized by Google
EGYPTE. 399
laissant son rival prendre seul un titre qu'il récompenserait ceux qui l'aban-
qu'il n'ambitionnait pas moins que lui donneraient. Ces promesses produi-
et il se le donna comme lui. Séleucus, saient leur effet; la désertion était dans
Lysimaque et Cassandre n'hésitèrent l'armée. Antigone disposa sur les bords
pas à l'imiter; mais, tant qu'il res- du canal du iN il des archers et des
tait un héritier d'Alexandre, ils s'abs- frondeurs pour en défendre l'approche
tinrent tous de revêtir les ornements aux agents de Ptolémée, et il se diri-
et les insignes du pouvoir royal. gea avec les vaisseaux qui étaient ar-
,

Dans Tannée suivante (Tan 306 rivés tard, vers le lieu nommé Pseih
avant l'ère vulgaire), Antigone, qui dostoma (fausse embouchure), où il
résolut enfin d'attaquer l'Egypte, rap- avait l'intention de placer un poste.
pelaauprès de lui Démétrius alors à L'ayant trouvé fortifié, l'approche de
Chypre, et lui assigna pour rendez- la nuit le força de se retirer; il recom-
vous la ville d'Antigonia, qu'il avait manda aux navarques de se guider par
fondée dans la Syrie supérieure sur les feux du vaisseau principal , et il se
l'Oronte. Il prend le commandement dirigea vers l'embouchure de la bran-
de l'armée de terre, et donne celui de che phathmétique (la branche du mi-
la flotte à Démétrius : sous leurs or- lieu).
dres se trouvaient reunis quatre-vingt Mais Ptolémée, ayant eu le temps
mille fantassins, huit mille hommes d'en être averti, se kl ta de conduire
de cavalerie, quatre-vingt-trois élé- des renforts à ses troupes et s'établit
phants, cent cinquante galères avec avec son armée sur le rivage même.
cent vaisseaux de transport. Il se di- Démétrius, jugeant le débarquement
rige par la Olé-Syrie, après avoir impossible, la plage du Nil voisine du
nrdonné à la (lotte de côtoyer le rivage point qu'il occupait étant naturelle-
et de régler sa marche sur celle de ment défendue par des lacs et des ma-
iarmée. INéanmoins, les navarques rais (les marais de Thennési, qui sont
avant dit qu'il fallait avoir égard au devenus le lac Menzaleh), se retira
coucher des Pléiades, qui devait avoir avec toute la flotte. Un vent du nord
lieu huit jours après, il blâma haute- la surprit, et jeta à la côte d'Egypte
ment leur prévoyance qu'il taxait de plusieurs vaisseaux qui furent pris par
timidité, et porta son camp à Gaza, Ptolémée; le reste parvint à rejoindre
voulant y prévenir l'arrivée des forces ceux d'Antigonn. Ptolémée avait for-
de Ptolémée. tifié toutes les embouchures du fleuve

Les troupes de terre, munies de et réuni une grande quantité de ba-


provisions pour dix jours, s'avancèrent teaux prêts à porter du secours sur tous
par le désert. La flotte sortie de Gaza les points; ces dispositions contra-
tint heureusement la mer pendant riaient fort Antiiione, car la bouche de
quelque temps, mais l'influence des Péluse étant défendue, les forces de
Pléiades se bientôt sentir; les vents
lit nier lui étaient inutiles, et les forces
du nord se levèrent, et un certain de terre, empêchées par la largeur du
nombre des plus grandes galères fut fleuve, restaient inactives.
jeté sur la cote de Raphia. Les vais- Le temps s'écoulait, et les provi-
seaux de transport furent submergés sions étaient près de manquer. Anti-
ou contraints de rentrer à Gaza; les gone réunit ses généraux pour décider
mieux gouvernés parvinrent jusqu'à si l'on devait continuer la guerre ou
Cisium, non loin du Mil, mais d'un se retirer en Syrie, y préparer plus
difficile accès. Antigone arriva bientôt convenablement une nouvelle expédi-
avec l'armée, opéra sa jonction avec la tion attendu que pendant ce temps les
,

flotte, et campa à deux stades du Nil, eaux du fleuve baisseraient. Ce. dernier
c'est-à-dire, de la branche de Péluse. Earti fut jugé le meilleur, et l'armée et
Ptolémée avait fortilié les pla i flotte retournèrent en Syrie. Ptolé-
principales de l'Égypte inférieure. Il fit mée remercia les dieux de ce nouveau
-
répandre parmi les soldats succès , s'empressa d'en informer Lysi-

Digitized by Google
I
400 L'UNIVERS.
maque, Séleucus et Cassandre, et ren- Alors Ptolémée avait obtenu sur son
tra dans Alexandrie (Tan 306). puissant rival Antigone des succès
Antigone entreprit alors son expé- éclatants; sa formidable expédition
dition contre l'île de Rhodes, et en contre l'Egypte avait été pour Ptolemec
confia l'exécution à son (ils Démétrius, une grande occasion de prouver qu'il
qui réunit à cet effet plus de deux cent pouvait la défendre. Antigone avait
voiles et de quarante mille hommes. reconnu les effets de sa puissance de-
Les Rhodiens se préparèrent à résister vant Rhodes même qu'elle avait sauvée.
à cette attaque; eu même temps ils Des trois héritiers du nom et de la
demandèrent du secours à Lysimaque, couronne d'Alexandre, il n'en existait
à Cassandre et à Ptoléméê. Celui-ci plus un seul ; trop d'intérêts , trop d'im-
leur envoya cinq cents hommes, parmi probes ambitions conspiraient contre
lesquels se trouvaient plusieurs Rho- leur vie pour qu'ils pussent la conser-
diens déjà à son service. Ce renfort ver. Philippe Aridée, Alexandre, fils
arriva après les premiers succès obte- de Roxane, avaient été assassinés par
nus par les habitants de i*île contre les Cassandre; il avait aussi acheté de Po-
attaques réitérées de Démétrius. Il lysperchon la vie d'Hercule, fils de
n'avait pas réussi dans ses manœuvres Barsine; et les autres généraux, non
par mer, et il résolut de prendre la ville moins ambitieux que lui, profitant
du côté de terre. Ptolémée eut le soin comme lui du défaut d'héritier légitime
de l'approvisionner, et lui envoya d'a- de l'empire, se trouvaient associés a
bord trois cent mille mesures de tous les succès de Cassandre , sans l'être
grains. Cassandre et Lysimaque imi- à ses forfaits.
tèrent l'exemple de Ptolémée, qui, peu Les Perses avaient détrôné la race
de mois après, fournit de nouveaux ap- légitime des rois d'Egypte : Alexandre
provisionnements en grains, et quinze avait conquis ce trôné sur les Perses,
cents hommes commandés par le Ma- et Alexandre n'était plus. Les titres
cédonien Antigone : en même temps il que deux siècles avaient pu faire aux
donnait aux Rhodiens le conseil secret successeurs de Cambyse n'étaient re-
de ne pas laisser échapper l'occasion de clamés par personne, bans les circons-
faire la paix avec Démétrius. Antigone tances où se trouvait l'Égvpte, la
avait envoyé les mêmes avis à son fils, nation n'entreprit pas de placer la
et le traite fut conclu à cette condi- couronne royale sur la tête d'un
tion, entre autres, que les Rhodiens homme de son choix. Depuis la mort
seraient les alliés d' Antigone, excepté d'Alexandre, l'Égvpte n'avait connu
dans la guerre contre Ptolémée. Dé- que Ptolémée; il avait été son maître
métrius se dirigea ensuite vers h ini- 1 et son protecteur; elle payait de son
tie, après avoir été retenu devant affection et de son dévouement les
Rhodes pendant une armée. bienfaits d'une administration régu-
Cette dernière indication deDiodore lière et bienveillante Ptolémée était
:

de Sicile nous porte aux premiers mois en Egypte le père du peuple, il en de-
de la quatrième année de la cxvm* vint le roi; il eo prit le titre, en re-
olympiade, à l'automne de l'an 305 vêtit les insignes, les consacra par les
avant l'cre vulgaire, dix-neuf ans com- cérémonies de la religion, se fit cou-
plets après la mort d'Alexandre. ronner à Alexandrie, et sans doute
Les Rhodiens reconnaissants accor- introniser à Memphis, selon l'an-
dèrent de grands honneurs a Ptolémée cienne coutume des rois du pays; il lit
( l'an 30f>) , consultèrent l'oracle d'Ain- frapper des monnaies à son nom, à
mon pour savoir s'ils ne devaient pas son image, et, rattachaut à la mort
l'adorer comme un dieu, lui dédièrent même d'Alexandre l'origine d'un pou-
un bois sacré, un portique, et, s'il voir dont cette mort avait été la source,
faut en croire Pausanias lui décernè-
, il se considéra comme roi depuis cette
rent le surnom de Soter, Sauveur, que époque mémorable, et Tannée même où
l'histoire lui a conservé. il prit la couronne fut comptée comme

Digitized by Google
TE. 401

la vingtième de son règne : il l'inscri- ressemble davantage, et l'on sait en-


vit sur ses premières monnaies. core qu'une Arsinoé, fille de Méléngre,
Cela se passait a la fin de l'été ou au fut unie a Ptolémée, surnommé La-
commencement de l'automne de l'an gus , et qu'elle accoucha d'un fils qui fut
"05 avant l'ère vulgaire, entre le mois le chef de la race royale des Lagides.
de mai et le mois de novembre juliens Ptolémée, fils de* ce Lagus, naquit
lie la même année à Eordée, petite ville de la province de
Ainsi s'ouvrit encore une ère nou- Mygdone en Macédoine, dans la cm*
velle pour r Egypte une dynastie d'o-
: olympiade. On ne sait rien sur son
rigine grecque venait s'asseoir sur le éducation; mais la faveur même dont
trùne des Pharaons, revêtir leurs insi- il jouit d'abord à la cour de Philippe

gnes royaux, continuer leur autorité donne quelque fondement à la tradi-


>ous l'égide des mêmes lois , des mêmes tion qui rapporte qu'il n'était pas
coutumes, sous la proteetion des étranger à ce roi. Il tut exilé ensuite,
mêmes dieux. Remontons à l'origine soupçonné de trop de dévouement à
du chef heureux de cette nouvelle dy- Alexandre, qui était devenu suspect à
nastie, qui fut la XXXir, et voyons Philippe après la répudiation de la
dans un court résumé les noms la suc- , reine Olympias. Ptolémée, à la nou-
cession et le caractère des princes de velle de "la mort de Philippe, se hâta
Cette race royale qui devait continuer de se rendre auprès d'Alexandre, qui,
l'œuvre du plus grand des héros de devenu roi, le plaça au nombre des
l'antiquité. sept lieutenants qu'il nommait ses
Le nom patronymique des rois suc- gardes, compta au nombre de ses
le
cesseurs immédiats d'Alexandre au plus aflfidés compagnons, l'associa aux
trùne de l'Egypte, et qui l'occupèrent vastes entreprises où lui-même devait
ju>qu'à l'asservissement du royaume trouver une mort prématurée, et le
par Auguste, fut celui de Ptolémée. favori une couronne qu'il n'espérait
Chacun d'eux eut encore un surnom pas. C'était ainsi que le fils de Lagus
rliculier; ils composèrent ensemble se préparait aux soins de la royauté
!:;'
%
famille royale des Lac, ides, déno- par les travaux de la guerre
ses rares:

mination dérivée du mot grec Lagos, qualités et d'éclatants exploits avaient


qui fut le surnom que porta le père du rendu sa personne et son nom plus
premier des Ptolémées. digues du diadème.
Étant originaire de la Macédoine, le Sa race fut puissante, compta de
nom et le surnom de cette race royale nombreux descendants et d'illustres
doivent appartenir à la langue et au alliances. Elle ne prépara pas sa perte
dialecte qui furent en usage dans cette par sa propre ambition; ce fut assez
contrée. Le nom de Ptolémée avait la de celte de Rome, favorisée par des
signification de guerrier, belliqueux. dissensions intestines qui firent arriver
La flatterie ne manqua pas d'envi- comme médiateur un peuple qui,
ronner de prodiges et de mensonges bientôt, voulut rester comme maître.
l'origine de cette famille. Ptolémée, le Uue femme qui porta toutes les pas-
premier des rois lagides, fut donc à sa sions à l'excès, et fut douée d'un cou-
naissance, et comme par une prophé- rage viril, ne put pas réparer, par la
tique inauguration,. élevé sur un bou- force de son caractère, les brèches que
clier d'airain; un aigle prit soin de le le temps et la fausse politique de quel-
garantir de l'ardeur du soleil, de l'in- Î|ues rois ses prédécesseurs avaient
clémence de l'atmosphère, et des ani- aites à cette puissante monarchie
maux nuisibles; il déchirait ses proies grecque , et cette monarchie périt après
pour le nourrir de sang au lieu de lait. avoir subsisté près de trois siècles dans
Voilà ce qu'on a raconté de lui lorsque une contrée ou rien cependant n'était
sa lignée fut puissante et redoutée. grec, ni la langue, ni la religion, ni les
On n'a cependant pas entièrement mœurs, ni les opinions, ni les préju-
étouffé la vérité, ce qui du moins lui gés. Sous tous ces rapports, l'Egypte
f
2S livraison. (Égïpte.) 36

Digitized by Google
462 LTJNIYERS.
resta libre de la domination macédo- femme et la mère de la première, ne
nienne établie par Ptolémée, fils de lui avant point donné d'enfants.
Lagus. Bérénice, fille de Magas, roi de la
Après un très-long règne et âgé de Cyrénaîquc et de la Libye, avait été
plus de quatre-vingts ans , celui-ci s'oc- mariée à Ptolémée Évergète, et de ce
Xde se douner un successeur au
qu'il avait conquis. L'ordre de
mariage naquirent plusieurs enfants;
le premier-né des deux princes succéda
succession à la couronne de Macédoine à son père , qu'il aima beaucoup , si son
constaté par les historiens, prouve surnom de Philopator est une preuve
que les fils du roi en étaient les héri- de son affection. Philopator épousa sa
tiers de droit selon l'ordre de pri- sœur Arsinoé, et fit mourir son frère
mogéniture, et qu'au défaut de maies Magas' dont il redoutait l'influence.
les femmes héritaient de la couronne. Il eut assez tard d'Arsinoé un en-

Si Ton examine ce qui s'est passé à cet fant unique, et mourut bientôt après.
égard parmi les successeurs du fils de A peine âgé de cinq ans, ce fils loi
Lagus , on y trouvera la véritable cause succéda au trône, en butte aux dissen-
des dissensions qui troublèrent cette sions intestines et aux ambitions étran-
famille, et mirent fin à l'empire égyp- gères. Le fils de Philopator leur ré-
tien en la précipitant du rang suprême. sista, et régna vingt-quatre ans avec le
Ln tableau sommaire de la succession surnom d'Epiphane, ou Illustre, qu'il
royale dans cette race mettra cette as- portait déjà, quoiqu'à peine âge de
sertion dans tout son jour. quatorze ans.
Le premier des Ptolemées , qui porta En mourant, il laissa de sa femme
le surnom de Soter, Sauveur, eut Cleopâtre de Syrie; qui Jui survécut,
Suaire femmes et onze enfants. Il deux fils et une fille, tous trois en bas
misit pour lui succéder le (ils qui na- âf,e. L'aîné, appelé au trône, reçut le
quit le premier de la quatrième, nom- surnom de Philométor, et il le mérita,
mée Bérénice, et il le lit asseoir sur s'il reconnut par les témoignages de sa

son trône, qu'il quitta deux années tendresse les services que fui rendit sa
avant de mourir. Eurydice, en effet, mère, qui, en qualité de régente du
d'Antipater, avait donné plusieurs
fille royaume, l'administra pendant huit
cnfauts à Ptolémée avant qu'il épousât ans avec une sagesse dont l'histoire a
Bérénice. Le fils aîné d'Eurydice pro- voulu conserver le souvenir. Après sa
testa contre le choix du fils de Béré- mort, des tuteurs inconsidérés enga-
nice, revendiqua ses droits et prit les gèrent Philométor dans une guerre
armes pour les faire valoir. Céraunus, contre Antiochus Épiphane, Toi de
c'était son nom, perdit la vie dans un Syrie, guerre dont le résultat fut tres-
combat. Un second frère de Ptolémée, funeste au roi, qui fut fait prisonnier
fils de Soter, né comme lui de Béré- la onzième année de son règne. Son
nice, mais d'un autre père, fut accusé frère, qui prit lesurnomd'Évergètell,
de conspiration et mis à mort, et le connu aussi sous celui de Physcon à
nouveau roi, qui combattit ses deux cause de son excessif embonpoint, oc-
. frères et les vit mourir, porta le sur- cupa le trône vacant, appelé par les
nom de Phiiadelphe, comme s'il les vœux des Égyptiens. Six années se pas-
avait tendrement chéris. sèrent dans la plus grande confusion.
Il eut pour successeur le fils qui lui Antiochus, qui, en faisant prisonnier
était né d'Arsinoé, fille de Lysimaque, Ptolémée Philométor, avait ouvert à
roi de Thrace , laquelle , étant fille d'une son trère Évergète II le chemin du
soeur du roi Ptolémée, était tout à la trône, entreprit une nouvelle guerre
fois sa nièce et sa femme. Aucune dis- pourenchassersonprotrgé.Philometor
sension ne vint troubler l'élévation au t'occupa de nouveau, le partagea quel-
trône de ce (ils connu par le surnom que temps avec Évergète, jusqu'à ce
d'Évergète, la seconde femme du roi, qu'une décision des envoyés de Rome
qui tut tout a la fois aussi sa sœur, sa rit rentrer Évergète dans la Cyrénaî-

Digitized by Google
,

ÉCTPTE. 40'i

que, dont ils lui avaient assigné la pâtre, femme répudiée de Soter II,
possession, et Philométor régna seul venait de quitter en épousant Antio-
encore pendant dix-huit ans. Il mourut chus Philopator. Mais la haine de la
laissant deux tilles deja mariées, et un reine mere ne cessa de poursuivre So-
tiis en bas âge sous la tutelle de sa ter II, et son ambition lui faisant tout
mère Cléopâtre, sœur et veuve du roi. espérer de la condescendance qu'elle
Évergète II, surnommé encore Ca- supposait dans son second fils Alexan-
kergétes à cause de son improbité, dre, elle parvint à le placer sur le
instruit de la mort de Philométor, son trône, en soulevant la populace contre
frère, se hâta de quitter Cyrène, et Soter, qui se sauva sur un vaisseau
de venir, à la téte d'une armée, deman- après dix années de rè^ne, et se retira
der la tutelle du jeune roi fcupator,et la à Chypre seul, sépare de Sélène, sa
régence du royaume. Il obtint l'une et femme dont il avait déjà deux enfants
,

l'autre, à la condition d'épouser la et que Cléopâtre donna ensuite en ma-


reine mère, qui était de plus sa sœur. riage au même Antioehus Épiphane de
Il célébra son hymen par l'assassinat Syrie, déjà veuf de Tryphœne.
du jeune prince, et devint, par un Alexandre couronne trompa les cou-
crime, possesseur du sceptre et de la pables projets de sa mère Cléopâtre.
couronne. Il eut de Cléopâtre , sa sœur, Il se sépara d'elle d'abord pour aller à
un Gis né à l'époque de son inaugura- Chypre, d'où Soter était parti; mais,
tion à Memohis, et de là appelé Mem- rappelé peu après, Alexandre prit,
ptaite; il le ht tuer et répudia la reine selon les ordres de sa mere, le com-
sa femme, pour épouser une autre mandement de la flotte, et la conduisit
Cléopâtre, fille de celle-ci et de Philo- en Phénicie, pendant qu'elle-même at-
métor, sou frère. Il en eut deux fils et taquait avec son armée la v ille que son
trois filles, Triphœne, mariée à An- fils Soter était venu défendre. Mais ces
liochus Épiphane, roi de Syrie, Cléo- dissensions, intimement liées à celles
pâtre née la seconde, et Selène née la qui divisaient la famille royale de
troisième. Un autre fils, ne d'Irène, Svrie, sYtant calmées par la rentrée
s.i concubine de Soter II à Chypre, Cléopâtre fut
, eut la Cyrénaïque pour

apanage. tout entière à son ardent désir de ré-


I-e fils aîné de Cléopâtre la jeune, gner seule elle tramait la mort de son
:

seconde femme d'Kvergète II, déjà fils Alexandre au moment où celui-ci


marie a Ciéopatre, qui était sa sœur la prévint en la faisant périr, dix-huit
M père et de mère, relégués l'un et ans environ après l'expulsion de Soter.
I
autre dans l'île de Chypre, y apprit Mais le peuple, irrité par tant de
la mort de son père Évergète II. Par crimes, tourna naturellement les yeux
*on testament, ce roi avait transmis la vers celui qui en avait été la première
couronne à la reine, sa veuve, et à victime, et rapnela Soter II au trône;
celuide ses deux fils qu'elle désigne- il venait d'en chasser Alexandre, qui

nt. Klle aurait préféré voir sur le périt bientôt après dans un combat
trône son second fils, qui lui était plus na\al, laissant un fils retiré alors à
dévoué; mais l'ordre de succession ne Co, et plus tard, connu, comme son
favorisant pas ses vœux , elle appela de père, par le surnom d'Alexandre.
File de Chypre le fils ainé, que l'usage Apres un nouveau règne de sept années
disait l'héritier légitime de la cou- et demie, Soter II mourut, ne laissant
ronne, et lui imposa l'obligation de de ses deux femmes qu'un seul enfant,
répudier sa femme Cléopâtre pour Bérénice, qui lui succéda, à l'exclusion
s'unir à Sélène, la plus jeune de ses des deux fils et d'une autre fille, non
sœurs. A ces conditions, Ptolémée, légitimes, qui survécurent aussi au
9m prit le surnom de Soter II, fut roi.
inauguré, selon l'usage du pays, à Mais le jeune Alexandre, fils de Pto-
Memphis. Son jeune frère Alexandre lémée Alexandre, s'était jeté entre les
s'établit aussitôt à Chypre, que Cléo- bras de Mithridate, roi de Pont, et
Î6.

Digitized by Google
404 L'UNI ERS.
bientôt après dans ceux de Sylla , qui placée son mariage avec Antiochus
le prit sous sa protection , et a ce titre Épiphane, voulut faire reconnaître les
le conduisit à Rome. Instruit de la droits qu'elle avait au trône de l'E-
mort de Soter II, le dictateur voulut gypte, et envoya ses deux fils à Rome
placer son pupille sur le trône des pour chercher dans le sénat quelques
Ptolémées , et le lit passer en Égvpte défenseurs. Les tentatives des Jeux
entouré d'un cortège royal. Bérénice princes syriens furent sans succès;
régnait seule depuis six mois , lorsque, Ptolémée Denys les prévint en tout
à la satisfaction générale, elle reçut point , et resta' paisible possesseur de
Alexandre II pour époux et pour roi. la epuronne, oubliant les devoirs de la
Il paya les généreuses résolutions de royauté pour obtenir d'ignobles triom-
la reine par un crime; il la lit assassi- phes dans l'art de jouer de la fldte,
ner dix-neuf jours après l'avoir épou- d'où lui vint le surnom iï Aulétès qu'on
sée, et régna seul dès lors quelques lui donna. Avec de l'argent, il sait
années encore. Les lils de Sélene, faire que Jules César, devenu consul,
sœur et seconde femme de Soter II , et ne soutint plus la validité du testament
par là tante d'Alexandre II, élevèrent de Ptolémée Alexandre II, dont Jules
des prétentions au trône de l'Egypte, César, édile , avait demandé l'exécution.
étant, comme cet Alexandre, neveux Effrayé néanmoins des hostiles dispo-
de Soter et germains de Bérénice, sa sitions de ses sujets , excitées par ses
fille, héritière de l'empire. En même constantes exactions, Denys quitta
temps les Alexandrins, irrités contre l'Égypte, alla s'exposer aux sévères
Alexandre II, et ne pouvant lui par- dédains de Caton , envoyé comme ques-
donner la mort de Bérénice leur reine,
, teur et préteur à Chypre, et courut à
se soulevèrent contre lui et le chassè- Borne solliciter la pitié publique. Igno-
rent du trône. Il se réfugia à Tyr, où rant son départ pour l'Italie et le
il mourut, et, disposant d'une cou- croyant mort, les Alexandrins douè-
ronne qui ne lui appartenait pas, il la rent le gouvernement de l'Égvpte a
légua, par son testament, au peuple l'aînée des enfants du roi fugitif, Bé-
romain. rénice, qui appela, pour le placer avec
Les Égyptiens, peu empressés de elle sur le trône, Antiochus de Syrie,
hâter l'époque d'un asservissement dont on ignorait la mort, et après lui
qu'ils ne devaient pas éviter, et que son frère Séleucus, tous deux Gis de
réparait leur recours trop fréquent à Sélène, fille de Ptolémée Évergète II,
S
e fallacieuses protections, cherchèrent les mêmes qui avaient déjà cherclte a
à prévenir les effets du testament d'A- récupérer le trône de leurs aïeux ma-
lexandre IL Ils appelèrent dune les ternels. Séleucus arriva en Égypte,
deux fils illégitimes de Soter II, pla- épousa Bérénice, qui , impatiente Je la
cèrent le premier sur le trône de l'E- sordide avarice du roi, l'étrangla bien-
gypte, et donnèrent Chypre au second. tôt après. Elle épousa ensuite Arche-
Le nouveau roi d'Egypte prit le sur- laus, compagnon de Gabinius, pro-
nom de Néos Dionysos, nouveau De- consul en Syrie, qui se donna auprès
nys ou Bacchus , et Borne n'hésita pas d'elle pour le fils de Mithridate Eupa-
à le reconnaître, refusant la couronne tor. Six mois après, Archélaus mourut
que lui léguait le testament de Ptolé- dans le combat qu'il livra pour défendre
mée Alexandre II, parce qu'elle aurait sa couronne contre Marc- Antoine, ra-
dû la conquérir par les armes, et n'ac- menant, sous les ordres de Gabinius,
ceptant que les trésors réunis à Chypre commandant en Syrie , Ptolemee Denys
qu'il ne fallait que faire transporter en en Égypte. Ce roi remonta sur le
Italie. Mais Selene, comme seconde trône après une absence de plus de
femme de Ptolémée Soter II, et plus deux années, pendant lesquelles Béré-
encore comme fille d'Évergète II et nice avait régné jusqu'au retour de son
petite-fille de Philométor, chassée par père; il la punit de ce succès en la fai-
Tigrane du trône de Syrie, où l'avait sant mettre à mort, régna trois ans

Digitized by Google
\

ÉGYPTE. 405
encore, et mourut, laissant pour lui ce prince dgé de onze ans , ne fut ni
,

succéder quatre enfants, Cléopâtre, époux ; Cléopâtre s'en défit bien-


ni roi
Taliiée de. tous, et avec laquelle de- tôt et resta seule enfin maîtresse d'un
vaient ûnir l'empire et la race des La- trône qui devait cesser d'exister avant
gides; une autre fille qui porta le nom Su'elle cessât de vivre. La jeunesse et
d'Arsinoé, et deux fils plus jeunes l minorité des deux rois qu'elle avait
qu'elles. Il désigna pour lui succéder vus mourir, ayant laissé a Cléopâtre
les premiers-nés de ses deux fils et de seule , pendant tout le temps de leur
ses deux qui devaient s'unir en-
filles, existence, les soins de l'administra-
semble, et, dans le testament qui con- tion de l'empire, Cléopâtre fut reine
tenait ses royales volontés, Rome était en effet depuis la mort de Ptolémée
encore appelée à protéger leur exécu- Denys, son père.
tion. Mais il devait arriver que Rome, qui
Cléopâtre monta sur le trône avec avait si souvent réglé les destinées de
Ptolémée son frère aîné , qu'on croit l'Egypte, verrait les siennes propres
avoir porté le surnom de Denys; mais décidées en Egypte même. La guerre
leur accord ne fut pas de longue durée. civile qu'alluma la mort de Jules Cé-
Les secrets conseillers de Ptolémée sar porta souvent sur cette contrée les
encore mineur, l'entraînèrent à une regards des triumvirs. Cléopâtre ne
rupture, et le conduisirent à Péluse s'en inquiétait point; elle espérait d'en
où le grand Pompée réclama sans bon- triompher, confiante moins dans ses
heur sa protection , quoiqu'elle dût lui armées de terre ou de mer, dans sa
être assurée par les services qu'il avait politique ou dans ses trésors , que dans
autrefois rendus à Ptolémée Denys, la puissance des charmes accomplis
père du jeune roi , lorsqu'il implorait dont la nature l'avait libéralement
a Rome l'assistance du sénat. Jules dotée. Elle avait vu à ses pieds le fils
César, qui poursuivait Pompée, des- aîné du grand Pompée; Jules César
cendit à Alexandrie, et au nom du auprès d'elle avait oublié pendant plu-
peuple romain , exécuteur testamen- sieurs mois et sa gloire et ses devoirs;
taire nommé par Ptolémée Denys, il enfin (e triumvir Antoine qui avait
entreprit de régler les différends qui mandé la reine à Tarses, subjugué a
divisaient les enfants de ce souverain, son tour, courut bientôt après sur ses
en reconnaissant pour rois d'Egypte traces à Alexandrie, laissant son ar-
Cléopâtre et son frère l'aîné. Mais les mée prendre les quartiers d'hiver en
chefs de la faction populaire, excitée Phénicie. Rappelé à Rome par ses dif-
en faveur du jeune Ptolémée contre sa férends avec Octave , il les termine en
sœur Cléopâtre , restèrent à la téte des épousant Octavie, la sœur de son ri-
insurgés; Arsinoé, sœur de Cléopâtre, val mais, ramené bientôt par les sou-
-,

vint soutenir par sa présence les ef- venirs de Cléopâtre, il retourne en


forts de ces rebelles qui la déclarèrent Orient, et semble ne faire combattre
reine d' Egypte, et bientôt après de- les armées de Rome que pour accroître
mandèrent' le jeune roi , promettant les possessions de cette reine. Vaincu
de se soumettre s'ils l'obtenaient. en Arménie, moins peut-être par les
Jules César, qui ne pouvait mécon- armes des Partîtes que par les regrets
naître tout ce que cette demande avait que lui causait son éloignement de
de favorable à ses secrètes préférences Cléopâtre, et cédant à leur entraîne-
pour Cléopâtre, livra le jeune roi qui ment, il s'enfuit en Syrie, va aussitôt
périt bientôt, après trois ans et quel- oublier en Egypte ses nouvelles réso-
ques mois de règne, à la suite d'un lutions sur l'Arménie, et ne se décide
nouveau combat engagé malgré leurs a marcher contre Artabaze , son roi
promesses par les insurges. Cléopâtre que lorsque Cléopâtre se résout aussi
triompha, et César la proclama de à l'accompagner. Bientôt elle voit ame-
nouveau reine d'Egypte, lui associant ner à ses pieds ce roi couvert de
Ptolémée le jeune, qu'elle épousa. Mais chaînes qui ,
pour être d'argent , n'é-

zed by Google
40G L'UNIVERS.
taîent pas moins humiliantes, et cette de Lagus, surnommé Sdter, qui ftf
femme ,toutes» les passions
livrée à en Égypte l'héritier des conquête
humaines, y mit enfin le comble en d'Alexandre le Grand.
osant se revêtir des ornements de la Dès la première année de son sn
divinité, et prendre le nom de nou- nement considérant
, les deux règne
velle Isis. Mais Antoine pava bientôt qui séparaient d'Alexandre comm
le
de sa vie un dévouement qui ne fut es- nominaux, et comme incortHos
timé que tant qu'il fut profitable : Oc- l'Egypte, si ce n'est dans les vaine
tave pouvait-il en connaître les effets formules du protocole, il rattacha l'ori
sans qu'Antoine fut expose aux suites gine de son autorité rovale à la mor
de son jaloux ressentiment? Au nom même du héros dont îl avait été li

de l'intérêt public Octave excita le sé- lieutenant : et, de fait, l'Égvpte n'ei
nat contre Cléopâ'tre la guerre lui fut
: avait point connu d'autre.
déclarée, et Antoine sacrifia les inté- Ptolémée Soter fit donc frapper de«
rêts de sa patrie à une femme qui monnaies d'or, d'argent et de bfonz*
n'hésitait pas de le sacrifier lui-même à son nom , à son effigie ; et il y fil

à sa stlrete. Cléopfltre le seconda mal inscrire la vingtième année de "sot


à Actium; et, assez téméraire pour règne.
croire au succès de ses artifices a l'é- Le calendrier égyptien était du nom-
gard d'Octave vainqueur, elle le flatta bre des institutions publiques que k
par des présents secrètement envoyés, génie d'Alexandre avait protégées. O.
et ne consola point d'un seul regret calendrier, d >ns sa forme antique, ne
la mémoire d'Antoine qui se donna la cessa pas d'être en usage pendant
mort, croyant qu'elle Pavait déjà re- toute la durée de la domination de*
çue. Elle rie lui survécut que peu de Ptolémées. Nous avons déjà dit qu'il
jours trompée dans ses espérances sur
: représentait line année vague de 3Cô
Octave, qui voulait l'attacher à son jours (supra, page 234). C est d'après
char de triomphe et non lui obéir, ce calendrier que les années des régnes
elle ne supporta pas l'idée de l'humi- sont comptées; et, pour la durée en-
liation , et lui préféra une mort vo- tière de ces règnes des Lagides , pen-
lontaire. Avec elle finit l'empire des dant près de 300 ans, il ne se trouve
Lagides, les que laissa Cléopâtre
fils qu'une différence de 74 jours successi-
n'ayant succédé m a son nom ni a son vement absorbes par le rapprochement
rang. Le premier-né fut nommé Césa- des dates selon le calendrier Julien.
rion , de Jules César dont on le disait Les dates des monnaies des Ptolé-
le fils il avait porté le titre de roi des
; mées offrent encore cette singularité :

rois , mais il ne fut jamais roi et , à l'avènement d'un prince, on comp-


mourut assassiné. Deux autres fils, et tait la première année de son règne du
une fille nommée Cléoptftre comme sa jour même de cet avènement; et la
mère, nés tous les trois du triumvir deuxième année dès le renouvellement
Antoine, conduits à Rome parmi les de l'année quelque rapproché qu'il
,

dépouilles de l'Égvpte, ornèrent avec fût du iour de l'avènement On voit


elles le triomphe 3 Octave. Ce royaume par là qu'une médaille portant la date
fut inscrit au nombre des provinces
ro- de la deuxième année d'un règne, peut
maines, qui venait enfin de
et celui avoir été frappée peu de mois ou \>vu
l'asservir en méprisa assez les derniers de jours après que le prince dont elle
rois pour refuser de voir leurs froides porte l'effigie est réellement monté
reliques, n'accordant cette marque de sur le trône. Cette règle singulière fut
respect qu'à la mémoire et aux dé- constamment pratiquée pendant toute
pouilles d'Alexandre, comme lui vain- la durée des règnes de Ptolémée Se ter
queur de l'Egypte, et comme lui ré- et de ses successeurs.
glant, mais non pour toujours, son Ce Ptolémée. en se plaçant enfin
sort et ses destinées. sur le trône d'Egypte, voyait autour
. Telle fut la lignée de Ptolémée , fils de lui des héritiers qui pouvaient en

Digitized by Google
ÉGYPTE. *7
perpétuer la possession dans sa des- uartiers d'hiver, et Ptolémée, parti
cendance. I! avait épousé en troisièmes 3 e l' Égypte avec une armée nombreuse
noces Eurydice, fille d'Antipater, et avait occupé les principales villes de
quelques temps après Bérénice, venue la Syrie et de la Célé-Syrie. Sidon ré-
en Égypte en même temps qu'Eurydice. sistait, et il en faisait le siège lors-
Il avait, entre autres enfants , un fils qu'on lui annonça qu'à la suite d'une
d'Eurydice, surnommé Céraunus, et grande bataille Séleucus et Lysimaque
de Bérénice, celui qui lui succéda et vaincus par Antigone , s'étaient retirés
qui porta le surnom de Philadelpbe : à Héraclée, et qu'Antigone s'avançait
ce sont les seuls dont les noms se avec une armée considérable vers la
rattachent à l'histoire d'Égvpte, le Syrie. Trop confiant dans ce rapport
sort .des autres, au nombre de neuf, qui était sans fondement, Ptolémée fit
ne l'intéressant point spécialement. avec S'don une trêve de quatre mois
Ainsi le ûls de Lagus , Ptolémée Soter, laissa des garnisons dans les villes
réunissait alors en lui tout ce qui peut qu'il avait prises, et rentra précipitam-
assurer le succès d'une entreprise aussi ment en Égypte où il passa aussi
importante que la fondation d'une dy- l'hiver.
nastie souveraine un nom illustré par
, C'était celui de Tannée 301 avant
de grandes actions militaires, une ré- l'ère vulgaire. L'état où étaient alors
putation de sagesse éprouvée par de les affaires des généraux d'Alexandre
•raves circonstances vingt ans d'une
, se disputant l'héritage de sou empire,
administration essentiellement bien- annonçait, pour le printemps qui sui-
veillante et protectrice, la conOance vrait le dénoûment de cette sanglante
,

des corps de l'État, l'amour du peu- traçedie: c'étaient cinq gouverneurs


ple, enfin plusieurs héritiers qui ne militaires qui s'étaient faits rois, et
laissaient aucune incertitude sur la qui , sur cette scène de crimes et de
transmission de la couronne royale. malheurs, entraînaient presque tous
En attendant, Démétrius parcourait les peuples de l'Europe et de l'Asie,
l'Archipel, et attaquait Sieyone cardée non comme spectateurs désintéressés
par les troupes de Ptolémée , qui capi- mais comme acteurs involontairement
tulèrent et retournèrent en Égypte. associés à la fortune du chef qui les
Cassandre ne voyait pas sans effroi avait conquis.
les succès de Démétrius; et il tenta La journée d'Ipsus décida du sort
de s'associer Lysimaque, en lui faisant d'Antigone. Ce fut auprès de la ville
partager les craintes qu'inspiraient la de ce nom en Phrvgie , qu'il livra aux
,

puissance et l'ambition d Antigone. quatre rois alliés là oataille où il per-


Lysimaque ne s'y refusa pas, et, d'un dit la vie de la main même de Séleu-
commun accord, ils proposèrent à cus ; son armée fut détruite , et Démé-
Ptolémée et à Séleucus de se réunir trius sou fils alla , avec une poignée
à eux, dans l'intérêt même de leur de soldats , chercher à Éphèse , ensuite
couronne que menaçaient également h Chypre une retraite et des ressources
,

les projets d'Antigone; car, s'il par- nouvelles contre cette catastrophe in-
venait au trône de Macédoine , se con- attendue.
sidérant dès lors comme le successeur Les provinces et les villes où ils
d'Alexandre, il voudrait réunir sous avaient commandé devinrent le prix
sa domination toutes les provinces de de la victoire, et les quatre rois son-
l'ancien empire. Séleucus et Ptolémée gèrent à se les diviser; mais leurs
consentirent à cette alliance , bien con- prétentions particulières pouvaient-
vaincus qu'elle serait funeste à Anti- elles laisser espérer qu'ils régleraient
gone qui jusque-là avait été vainqueur. aimablement ce partage? Leur intérêt
A la suite d'événements et de succès commun les avait réunis contre Anti-
divers en Asie et en Europe, Séleucus gone, leur commune ambition les di-
s'était avancé de la Babvfonie, s'était visa ;sort des armes devait encore
le
porté eu Cappadoce où il avait pris ses en décider. Séleucus s'unit a Dénié»

Digitized by Google
408 L UH
trius qui trouva un secours inespéré paix pour embellir Alexandrie et j
dans cette alliance ; un traité associa faire construire plusieurs temples.
Lysimaque à Ptoléméc et de nouvelles
, Lorsqu'il voulut les cousacrer, un sonçe
guerres furent le résultat de ces nou- mystérieux d'abord négligé, écouté en-
veaux succès. suite à cause des circonstances ef-
Ptolémée pensa dès lors à reprendre frayantes qui l'accompagnaient, le dé-
l'île de Chypre à s'assurer la posses-
, termina à envoyer consulter Apollon
sion de la Syrie qtK; ses troupes occu- Pythien et à demander au roi de Sv-
paient en partie depuis près d'une an- nope les infliges du dieu qu'il avait m
née , enfin à remettre aussi sous son en songe; il lui fit offrir en même
obéissance Cyrène qui , depuis quelque temps de riches présents. Trois ans se
temps, méconnaissait son autorité. passèrent sans que cette négociation
Démétrius, contre son attente, vit eût un résultat ; elle avait commencé
ses affaires se relever ; Séleucus épousa dans la trente -cinquième année du
sa Stratonice; et il retourna à
fille règne de Ptolémée.
Antioche. Déidamie , Tune des femmes Sur ces entrefaites , Démétrius avait
de Démétrius., étant morte, Séleucus réuni une armée de cent dix mille hom-
lui fit accorder par Ptolémée la main mes et une flotte de cinq cents vais-
de Ptolémaïs, Tune de ses filles. Démé- seaux; on en construisait encore 2
trius, bientôt après, attaqua Athènes, Chalcis , à Corinthe , à Pellà , et leurs
qui souffrit une cruelle famine, quoi- dimensions n'étonnaient pas moins
que Ptolémée lui eiît envoyé cent cin- que leur nombre. Effrayés par de si
quante galères pour la soutenir. Mais grands préparatifs, Lysimaque, Sé-
Démétrius en avait déjà réuni trois leucus et Ptolémée jugèrent que ce ne
cents venues du Péloponèse ou de serait pas trop de leur alliance pour
Chypre qu'il tenait encore; la flotte de résister à Démétrius : ils la contrac-
Ptolémée se retira et Lacharès ayant
, tèrent et y entraînèrent Pyrrhus Ils 'e
abandonné Athènes, Démétrius y en- chargèrent de surveiller la Macédoine;
tra. Il attaqua ensuite la Laconie", dé- Ptolémée parcourut la Grèce avec une
litArchidamas à Mantinée, et poussa nombreuse flotte pour s'v faire des al-
droit à Lacédémone. Ce fut alors qu'il liés; et bientôt Démétrius perdit !e
fut informé que Séleucus avait pris trône de Macédoine après l'avoir oc-
plusieurs de ses villes d'Asie, et que cupé sept années.
Ptolémée occupait Pile de Chypre, à Ce fut après ces événement» que la
l'exception de la ville de Salamis où négociation de Ptolémée avec le roi
étaient ses enfants et leur mère. de Synope traînant trop en longueur
Bientôt après , Démétrius apprit que au gré du dieu qui en était le sujet, le
Ptolémée renvoyait comblés de
les lui dieu quitta lui-même brusquement son
présents et d'honneurs. temple monta sur une galère , mit en
,

Tel était l'état des choses dans ces mer, et. après une traversée qui ne
contrées, la trentième année après la dura que trois jours , entra dans le
mort d'Alexandre. A cette époque, port d'Alexandrie à la grande satisfac-
Ptolémée avait repris possession de tion de Ptolémée. C'était Apis.
l'île de Chypre, de Cyrène, et com- L'année suivante, la trente-neuvième
mencé la construction du phare dans de Ptolémée, fut aussi la dernière de
l'île qui porta ce nom. son règne; ce fut dans le courant de
Deux ans après, Ménandre, fils de cette année que Ptolémée déjà très- ,

Diopithès, cessa de vivre : une inscrip- avancé en fige, s'occupa d'assurer à sa


tion grecque trouvée à Rome , dit que
, famille la jouissance d'une couronne
cela arriva dans la trente - deuxième qu'il avait conquise par sa valeur et
année du règne de Ptolémée Soter, et méritée par sa sagesse. Il voulut , de
sous l'archontat de Philippe à Athènes. son vivant , placer lui-même son suc-
Ptolémée, tranquille possesseur de cesseur sur le trône qu'il se décidait à
l'Égypte, profitait des loisirs de la quitter. Tout secondait ce noble projet:

)igitized by Google
I

....

• * #

• « • - - - » -
• « • «

• • .

. - • »

• • -t * *

. » ^
-

Digitized by Google
EGYPTE

Digitized by Google
-


- » -

* - - *

i « *

-
t. «

~ * '
*

Digitized by G
Digitized by Google
ÊGYPTE. 409

Ptolémée était en paix avec ses an- et du concours empressé de toutes les
ciens compagnons d'armes qui avaient classes. Sous son règne, l'Égypte avait
échappé à quarante années de guerres reconquis son antique splendeur, et
etde malheurs dés traités ou des al-: les arts de la Grèce avaient uni leurs
Hanees de famille l'attachaient à Lysi- riches produits à ceux des arts natio-
niaque , à Séleucus, a Pyrrhus même; naux. Les preuves de la magnificence
Démétrius, que ses hauts faits ren- de Ptolémée, de sa pieté envers les
d aient le plus redoutable, expiait sa dieux du pays, de son active attention
gloire prisonnier de Séleucus auquel à encourager les arts et les lettres,
il s'était volontairement livré ; Ptolé- * subsistent encore sur les monuments
niée jouissait enfin des fruits de son et dans les témoignages de l'histoire,
courage, de sa prudence et de sa mo- Nous ne pouvons les indiquer ici que
dération. Constant , dès le premier bien sommairement , tant ces preuves
tour de son gouvernement en Egypte, sont multipliées,
a ne s'occuper que de cette riche con- On croit avoir reconnu le nom de
trée, il songea non pas à acquérir, Ptolémée Soter et celui de la rebe Bé-
mais à posséder. Attaqué dans TÉ- rénice , sa femme , dans quelques par-
gypte , il sut la défendre et la préser- ties des édifices religieux de Karnac à
ver de toute invasion. L'attachement Thèbes, et sur le couronnement du
et la reconnaissance des peuples affer- temple de Bohbaït, l'ancienne Isidis-
mirent sur sa téte la couronne, royale, Oppidum. La légende royale de Ptolé-
et , comme s'il ne devait rien faire mée est renouvelée des Pharaons; ce
d'inutile à sa gloire, il n'ajouta pas roi grec y est aussi approuvé d' mon4
moins à sa renommée en cédant volon- et de Ph'ré, le gardien de la vie, Pto-
tairement la couronne à son fils , qu'il lémêe vivant à toujours et chéri de
n'en avait acquis en la prenant. Phtha. Le nom de la reine Bérénice
Des deux femmes que Ptolémée avait est sculpté à coté de celui du roi , avec
épousées depuis qu'il était le maître de le titre de dominatrice du monde. Il
l'Égvpte , il lui restait alors trois fils : faut , sans doute , accuser le temps et
uu d'Eurydice , que la violence de son les événements, de la rareté desmonu-
courage avait fait surnommer Cérau- ments signés du nom de Ptolémée
nus , et deux de Bérénice, dont le nre- Soter ayant ceint le diadème royal
:

nier fut surnommé Philadelphe, dont vingt ans après la mort d'Alexandre
le second Argaeus mourut quelque
, , le Grand , et jusque-là n'ayant inscrit
temps après soupçonné de conspira-
,
sur les monuments que les légendes
tion contre le roi. de l'autorité légitime , possédée par le
Ptolémée consulta ses amis sur le frère et le fils du conquérant , il n'eut
choix d'un héritier, qu'il se proposait aussi, et pour les mêmes motifs , à pla-
de faire avant de mourir. L'usage dé- cer son propre nom que dans la dédicace
signait le fils d'Eurydice , parce qu'il des édifices publics qu'il fit construire
était l'aîné des trois. Démétrius de ou réparer après s'être déclaré roi.
Phalère le dit au roi qui lui préféra le Lephareëtait une haute tourenpier-
premier-né des enfants de Bérénice; res blanches et à plusieurs étages, élevée
il le proclama son successeur à la cou- dans l'île de Pnaros , que Ptolémée
ronne d'Égypte, et cette exception à réunit à Alexandrie, par une chaussée,
la règle généralement suivie oans ces Ce phare, qui devait faciliter la naviga-
temps , dut contribuer à la détermina- tion dans le voisinage du port d'Alexan-
tion que prit Ptolémée de descendre drie, est un des plus utiles monuments
du trône , pour v affermir par sa pré- entrepris par Ptolémée Soter. Chaque
sence l'héritier de son choix qu'il ve- étage allait en se rétrécissant et avait
,

K
nuit d'y placer. une galerie extérieure prise sur la fa-
L'autorité de Ptolémée Soter avait brique de dessous. On dit qu'il eut
été constamment secondée de l'assen- d'abord mille coudées de haut; il n'en
tiraent public , de l'amour des peuples reste plus rien aujourd'hui de visible.

Digitized by Google
410 L'UNIVERS.
Des On a donné le nom école à « &
conduisaient dans de nombreux appar- centre de toutes les études , de touî
tements; des bétes de somme pou- les progrès dans la culture de toute
vaient y monter , tant les pentes étaient les sciences. Non-seulement elle ajouta
artistement ménagées. Au douzième au domaine général de l'intelligence
si ec le de notre ère, il restait encore cent par de nouvelles découvertes, mais
cinquante coudées des constructions encore elle prit soin de conserver les
du phare. Il est figuré sur plusieurs conquêtes déjà faites, en donnant de
médailles; les poètes célébrèrent cette nouvelles éditions des écrits les plus
merveille des arts; en élevant le phare remarquables : des fragments d'Ho-
— - -
/<I,,.,J. mÀ.A des
.1... „*~m^:*. Amm
,1
d'Ostie, Tempereur Claude prit pour mère, I «
livres d'astronomie, des
modèle celui d'Alexandrie. compositions poétiques , écrits sur pa-
Ptolémée ne dédaigna pas les pro- pyrus, recueillis en Égypte et portés
ductions de l'art égyptien ; il donnait a Paris, rappellent les travaux des cri-
par là une satisfaction à l'opinion na- tiques grecs de cette école.
tionale ; les restes de l'antique Alexan- Toutes les branches des sciences y
drie rendent témoignage de cette at- furent cultivées : la cosmographie, les
tention. Un des obélisques encore mathématiques, l'histoire naturelle,
debout dans les ruines de la ville la médecine et la grammaire : la philo-
grecque, avait été d'abord érigé par sophie eut aussi son tour, quoiqu'un
un Pharaon devant un des temples de peu plus tard ; et il suffira à 1 éter-
la ville d'Héliopolis ; il fut transporté nelle gloire de celte école de citer
dans la ville nouvelle. parmi ceux qui l'illustrèrent, Déme-
Mais le plus mémorable établisse- trius de Phalère, Zénodote et Aris-
ment pour lequel l'humanité doive le tarque pour la critique grammaticale;
plus se montrer reconnaissante envers Héroplule et Érasistrate pour la mé-
Ptolémée Soter, c'est l'école savante decine ;Ti marque, Aristide, Hipparque
oui porte encore le nom iïécole d'A- et Ptolémée pour l'astronomie; Eu-
lexandrie. clide, Apollonius de Perga , Diophante,
Au milieu des exigencesde la guerre,. pour la géométrie; Ératosthène et
Ptolémée avait du temps à donner aux Strabon pour la géographie; Cnési-
jouissances de la paix. 11 savait la puis- dème, Sextus l'empirique, Potamon,
sance des arts et des lettres sur lupros- Ammonius Sakkas parmi les philo-
périté des empires : il les appela auprès sophes; enfin l'influence durable de
de lui de toutes les régions où ils flo- cette école s'étendit par la suite des
lissaient, de la Grèce surtout , la pa- t temps sur les Juifs, les chrétiens et
trie du génie et du bon goût , déjà les Grecs d'Alexandrie tout à la fois
riche de tant de chefs-d'œuvre de l'in- Aristobule et Philon font honneur à
telligence: il réussit à former une in- l'école judaïque; saint Pantene et saint
time et durable union entre eux et l'é- Clément d'Alexandrie à l'école chré-
tude des plus riches productions de la tienne. La poésie et l'histoire n'ajou-
nature, dont l'Égypte était si féconde. tèrent rien de marquant aux chefs-
Ptolémée y attira les savants de la d'œuvre que les Grecs avaient déjà
Grèce et Alexandrie devint la nou-
, produits.
velle patrie des lettres et le sanctuaire La destinée de cette admirable ins-
de la science. Le roi ouvrit son pa- titution fut celle de toutes les créations
tais aux philosophes , cultiva leur humaines sa gloire brilla ou s'obscur-
:

société, et fit amasser pour eux cit commecelle des rois grecs qui se
une immense bibliothèque. Les hom- succédèrent sur le trône d'Égypte.
mes les plus distingues de tous les Sous trois premiers Ptolemées,
les
pays affluèrent en Égypte, et Alexan- l'éclat de leurs règnes rejaillit sur
drie conserva pendant six siècles le l'école qu'ils avaient fondée par leur
titre de métropole des sciences et des munificence et agrandie par leurs bien-
lettres faits. Les trois règnes suivants furent

Digitized by Google
EGT PTE. 411

puraste ; et à Phi r tas de Cos , poète


moins heureux , l'école déclina et la
1

imité par Théocrite, l'éducation dé


Grèce, plus calme, offrit aux maîtres
et aux disciples un théâtre plus
digne son fils Ptolémée Philadelphe : de telles
leçons fructifièrent ; le rèçne de Phila-
de leur science et de leurs efforts.
delphie est un de ceux qui ont jeté le
Bientôt après, les désordres publics .

plus d'éclat dans l'histoire ; et , tout en


inquiétèrent les Muses amies du repos
Faisant une juste part aux exagérations,
et de la sérénité; les savants d'Alexan-
des poètes , il reste encore assez de
drie s'exilèrent et allèrent enseigner à
sérieux témoignages des soins de ce
Hhodes, en Grèce et en Syrie. Les
causes qui ruinèrent le trône des Pto-
grand prince pour la prospérité et la
gloire de son empire.
lemée* ruinèrent aussi l'existence de
l'école d'Alexandrie. Ptolémée Pkuadelphe succédait à
Du reste , Ptolémée Soter était un son père encore vivant. Après avoir
quitté le trône, Ptolémée Soter jouis-
prince lettré; il passe pour avoir com-
sait en quelque sorte des honneurs ré-
posé une relation des conquêtes .d'A-
servés a sa mémoire; il voyait sa
lexandre : il se plaisait à la fréquenta-
tion des poètes et des philosophes; il
propre apothéose, son image et son
avait destiné une portion de son palais nom associés dans les cérémonies pu-
bliques à ceux du graud Alexandre:
à leur logement : il l'avait comme con-
Muses, en lui donnant le préludes du culte dont il devint l'objet
sacrée aux
qui est venu jusqu'à et qui lui fit consacrer des autels, des
nom de Musaeuin
chapelles et des prêtres. Il assista avec
dous , et il renfermait les collections
les plus utiles au progrès de toutes les
Bérénice, sa femme, mère de Phila-
sciences, et notamment les principaux
delphe, à la magnifique cérémonie qui
composes en Grèce, en Asie et fut comme l'inauguration du règne de
écrits
Les savants qu'il ne pou- leur fils. Cette fête publique, que rien
en Afrique.
il les recher-
n'égala jamais dans notre Occident, et
vait attirer près de lui ,

chait par ses bienfaits, et plusieurs où l'Égypte avait comme accumulé


d'entre eux éprouvèrent les effets de toutes les richesses de l'Asie, de l'A-
sa muniûcence. entretenait une cor-
Il
frique, est connue du lecteur par la
respondance suivie avec le célèbre description qui a été mise sous ses
Théophraste. C'est Ptolemée qui réalisa yeux.
Cette fête eut lieu au milieu de
lesvues d'Alexandre sur Alexandrie : il
l'hiver qui suivit l'abdication de Pto-
fonda la puissance de cette grande cité
et lui donna une importance qui dure
lémée Soter, au commencement de
encore. l'orna aussi de magnifiques
11
l'année 284 avant l'ère vulgaire.
édifices , dont il ne subsiste plus que
Dès que le choix fait par Ptolémée
peu de ruines : tant de maîtres se sont Soter fut déclaré, Céraunus, son fils,
depuis succédé dans cette ville Pto- !
né d'Eurvdice, appelé au trône par
attentivement
avait l'ordre de primogeniture, ne voulut
lémée Soter lui
ouvertou entretenu les plus fructueuses pas rester dans une cour où ses droits
voies commerciales avec le monde en-
venaient d'être si publiquement mé-
tier. Les astronomes secondaient, connus il quitta l'Egypte et se retira
:

éclairaient les navigateurs: il nous


auprès de Lysimaque, roi de Thrace,
reste encore quelques-unes des obser-
dont le fils, Agathocle, avait épousé sa
vations faites à "Alexandrie par Timo- sœur Lysandra, née comme lui d'Eu-
charis, notamment celles de plusieurs rvdice. Mais Lvsimaque, déjà avancé
étoiles principales et des Pléiades dans en Age, avait aussi épousé une fille de
les années 295 , 294 , et 283 avant l'ère Ptolemée Soter et de Bérénice, Arsi-
chrétienne; antiques observations très- noé, sœur de Philadelphe. Celle-ci crai-
utUes aux supputations comparées des gnant, disent les historiens, que ses
observateurs modernes. enfants, après la mort de Lysimaque,
ne devinssent les sujets d'Açathocle,
Ptolemée Sotejr avait confié au phi-
losophe Stratou, disciple de Théo- trama la perte du jeune prince son

Digitized by Google
412 L'U NI VERS.
beau-fils. Elle réussit à devenir crimi- abdication, ce qui porte sa mort vers
nelle sans que Lysimaque s'occupât de la fin de l'an 283.
l'empêcher, et Lysandra, sœur ne Cé- C'est à l'époque de l'avènement de
raunus, veuve a'Agathocle, effrayée sou fils que durent être frappées les

d'un tel attentat, courut chercher un monnaies qui portent les têtes acco-
refuge non pas à la cour de Ptolémée lées de Soter et de Philadelphe, avec
Philadelphe, son frère de père, devenu celle de Bérénice au revers.
roi d'Egypte, mais auprès de Séleu- Philadelphe était né dans l'île de
cus, entraînée d'ailleurs par les con- Cos, lorsque Soter, son père, fit une
seils de Céraunus qui ne la quitta pas, expédition dans les Cvclades, et f épo-
et qui raccompagna, ainsi que ses en- que en a été fixée à Tannée 308 avant
fants, un autre frère de Céraunus, l'ère vulgaire. Théocrite, qui a décrit
appelé Méléagre, et Alexandre, fils de en poète la naissance de Philadelphe,
Lysimaque, né d'une femme odry- dit que Bérénice fut surprise dans cette
sienne. île par le terme de sa grossesse, ce qui
Arrivés à la cour de Séleucus, ce roi nous apprend qu'elle accompagnait
refusa de seconder leurs vues ou leurs Soter dans cette expédition militaire,
détentions sur l'Égypte; ses traités le se croyant neut-être plus eu sûreté au
f
iaient avec Ptolémée Soter: mais il se milieu des hasards de la guerre qu'a la
décida à faire la guerre à Lysimaque. cour même d'Alexandrie, si Eurydice
jCelui-ci se hâta de passer en Asie y était restée. Ce fut donc après vîn^t-
pour prendre lui-même l'offensive; il trois années entières, et lorsque Phi-
perdit la vie dans une bataille qu'il ladelphe était parvenu à la vingt-qua-
avait engagée, et qui se livra auprès trième de son Age, qu'il fut appelé au
de Coroupedion, dans la grande Phry- trône d'Egypte par abdication volon-
1

gie. Cette victoire rendait Séleucus le taire de Soter, au mois de novembre


maître du trône de Macédoine, et il de l'an 285.
pensait à s'y asseoir. Il ne restait plus Dès qu'il fut informé que son frère
que lui des anciens compagnons d'A- Céraunus avait quitté la cour de Lysi-
lexandre : Ptolémée Soter avait cessé maque, il envoya demander en ma-
de vivre. riage, à ce roi, "sa fille Arsinoé.
Séleucus céda donc ses États d'Asie Aussitôt après la mort de Ptolémée
à son fils Antiochus, et se mit en Soter, Philadelphe, qui n'avait point
marche pour la Macédoine à la tète oubliétjue Démétrius de Phalère, con-
d'une armée composée de troupes grec- sulté par son roi sur le choix d'un suc-
ques et de troupes étrangères. Ptolé- cesseur, n'avait pas hésité d'unir sa
mée Céraunus l'accompagnait et secon- voix à ce que prescrivait l'usage, qui
dait son entreprise avec un zèle que la appelait à la couronne Ptolémée Cé-
bienveillance de Séleucus pour ce prince raunus, exila ce sage conseiller dans
fugitif ne devait pas faire soupçonner une province, où il traîna quelque
d'infidélité. Cependant, parvenu à Ly- temps encore une vie languissante.
simachia avec son armée, Séleucus lût Dans la même année, la 282' avant
trahi par Ptolémée Céraunus, qui lui l'ère vulgaire, Arsinoe, fille de Lysi-
donna la mort, abandonna aux soldats maque, se rendit en Egypte et devint
le pillage du trésor royal, s'empara du l'épouse de Philadelphe.'
royaume de Macédoine, et le gouverna Alors Sostrate de Guide termina la
comme roi jusqu'au moment de son construction de la tour du phare près
invasion par les Gaulois, qui le tuèrent d'Alexandrie, qu'il avait commencée
dans un combat. par l'ordre de Soter. Sa construction
Lysimaque, Séleucus et Ptolémée, dura douze années entières, et ce ma-
périrent presque en même temps, et gnifique édifice fut célébré dans les
survécurent peu à Ptolémée Soter .Tous hymnes des poètes. On raconte que le
les historiens sont d'accord que ce rôi ne voulant pas permettre que Sos-
prince vécut deux ans encore après son trate mit son nom sur l'édifice, l'ar-

Digitized by Google
EGYPTE. 413
chitecte, bien avisé, l'y grava profon- elle aucune affection : il la répudia et
dément, et couvrit ensuite l'inscription l'exila à Coptos , dans la Thébaïdc, en
d'un stuc qui le cachait, espérant que, ayant déjà trois enfants, deux fils et
lorsque le temps aurait détruit le stuc, une lille, et il épousa Arsinoé, sa sœur
son nom serait connu de la postérité, de père et de mère, ce qui était con-
Des poètes contemporains honorèrent traire aux lois des Macédoniens,
cependant publiquement Sostrate et C'est à cette même époque du règne
son ouvrage. de Philadelphe que se place ce que Ton
Deux années plus tard, Céraunus, a dit delà traduction grecque des livres
maître du trdne de Lysimaque par des Hébreux, si longtemps attribuée à ce
l'assassinat de Séleucus, tenta de s'en roi. Le grand nombre de Juifs amenés
assurer la possession en captant les fa- successivement en Égypte, ou qui y fa-
veurs populaires, et dans le dessein rent attirés par la douceur du gouverne-
d'obtenir la bienveillance de Philadel- ment de Soter, leur mélange avec les
lie, son frère, il lui envoya des am- Macédoniens, dont il leur devint néces-
(

bnssadeurs chargés de lui faire cou- saire de connaître la langue, qui était
naître que par respect pour la mémoire
, aussi celledu gouvernementdurent ren-
de leur père, il oubliait l'offense qui dre indispensable la version de ces livres
lui avait été faite en le privant de la hébreux en langue grecque. Si l'on s'en
couronne. Mais il n'eut vraisemblable- rapporte à la lettre attribuée à Aris-
ment pas le temps de connaître les ré- téas, ce fut Ptolemée Philadelphe qui,
ponses de Philadelphe, car neuf mois d'après l'avis de Démétrius de Phalère
après il perdit la vie dans un combat et sur les pressantes sollicitations
contre les Gaulois, ainsi que nous ve- d' A ristéas, ordonna d'en faire une tro-
uons de le dire, duction complète. Josèphe, l'historien
Céraunus, en prenant la couronne des Juifs, n'a élevé aucun doute sur
de Macédoine, avait simulé un grand l'authenticité de cette lettre; Philon,
attachement pour Arsinoé, veuve de autre Juif, raconte à ce sujet des
Lysimaque, et pour ses deux (ils; mais choses analogues; mais la chronique
il les avait fait égorgeT en célébrant samaritaine tfAboul-Phatach attribue
son hymen avec Arsinoé, et celle-ci aux Samaritains tout ce que la lettre
s'était retirée dans l'île de Samothrace. d'Aristéas dit des Juifs , et ajoute que
Après la mort de Céraunus, Plolémée la traduction à laquelle concoururent
Philadelphe s'empressa d'appeler au- les Samaritains fut faite dans la dixième
près de lui Arsinoé, sa sœur. année du règne de Philadelphe.
Toutefois, ce prince, Philadelphe On peut remarquer sur ce sujet que
{qui aime ses frères), ne justifia pas puisque, ou rapport de Plutarque, Dé-
ce surnom par un heureux accord avec métnus de Phalère engagea Ptolémée
ceux de ses frères qui vivaient encore Soter à recueillir les livres de législa-
alors. Le plus jeune de tous, Argœus, tion connus chez divers peuples et
né comme lui de Bérénice, accusé de dans diverses contrées, ceux des Juifs
conspiration contre le roi, fut mis à ne purent pas être oubliés,
mort par son ordre; Méléagre, qui II faut remarquer aussi que des la
e
était à Chypre, éprouva le même sort 3 année de son règne, Philadelphe
pour avoir pousse à l'insurrection les avait exilé le philosophe Démétrius de
habitants de cette île. Philadelphe ne sa cour, où il ne pouvait plus se trou-
traita guère mieux sa femme Arsinoé, ver sept années plus tard,
fille de Lysimaque, soit qu'elle eût Philadelphe ne donna pas moins
conspiré contre lui, excitée par la ja- d'attention à se faire de bonnes rela-
lousie que lui inspirait la présence de tions au dehors, à contracter de puis-
Pautre Arsinoé, veuve de Lysimaque santés alliances, et il rechercha celle des
son père, et sœur de Philadelphe, soit Romains : leur réputation militaire,
que, vaincu par les charmes de sa leurs guerres avec divers peuples de la
sœur, Philadelphe ne conservât pour grande Grèce, et surtout celle qu'ils

Digitized by Google
414 L'UNIVERS.
venaient de soutenir avec succès contre dans son entreprise contre ntgrptej
Pvrrhus, roi d'Épire, que le père de mais Ptolémée la rendit encore sans
Pliiladeljme 8Vdit replace peu d années succès en jetant ses propres troupes
avant sur son trône, contribuèrent à dans les provinces d' Antiochus les
l'y déterminer; il envoya des ambas- moins bien défendues. Cependant 11>
sadeurs à Hume; le sénat romain en- gas fit proposer la paix à Pbiiadelpbe,
voya aussi à Pbiiadelpbe quatre dépu- et voulut la cimenter par une alliance
tés, et Talliance fut conclue. de famille. L'union de Bérénice frile ,

Elle fut la première relation directe unique de Magas, avec le fils unique
entre le gouvernement d'Alexandrie et de Pbiiadelpbe, fut convenue, et la
celui de Rome : il eiU mieux valu pour Cyrénaïquc se trouva par cette union
l'Egypte qu'elle eût toujours été igno- de plus en plus attachée à l'Egypte.
rée "des Romains, car elle devait re- Magas étant mort , A pâmé , sa veme.
douter les effets de ces alliances. qui n'avait nas consenti à ce projet
Dans Tannée suivante, la treizième d'union , tâcha de la rompre en appe-
du règne de Pbiiadelpbe, Timocharis lant de la Macédoine Démetrius, frère
s* occupait à Alexandrie des deux ob- du roi Antigone; mais ce prince dv
servations de Vénus, qui furent faites plut tant et sitôt par son orgueil à la
les 12 et 16 octobre de l'an 272. famille de Magas , au peuple et à l'ar-
Deux années après sa défaite en Ita- mée qu'il fut la victime des embûches
,

lie, Pyrrhus perdit la vie devant qu'on lui tendit , et Bérénice devint la

Argos. remme du jeune Ptolémée qui réijna


Après la mort de Pyrrhus, Anti- ensuite sous le nom d'£vereete.
gone menac.ait la Grèce entière de sa Les soins que Philadelpbe donnait
toute-puissance. Athènes et Laeédé- au gouvernement ne laissèrent pas une
moue se liguèrent contre lui et deman- année de sa durée sans qu'elle ne >it
dèrent du secours à PL b inée Pbiia- naître quelque institution utile, fon-
delpbe, uni envoya une flotte sous le der quelque établissement public, éle-
commandement de Patrocle, laquelle, ver un monument aux arts encoura- ,

si eu croit Pau sa nias, ne fut pas


l'on ger ceux qui les cultivaient. Mais,
fort utile aux Athéniens; néanmoins quoique le souvenir en soit conserve,
ils donnèrent à une de leurs tribus le l'époque en est toujours ignorée, et
nom de ce Ptolémée. c'est ici qu'il est permis de renouveler
Bientôt après, l'un des enfants que le regret qu'excite si vivement le si-
Bérénice avait eus avant qu'elle fût la lence des médailles , quoique cependant
femme de Soter, Magas , frère de mère leurs dates marquent les années du
avec Pbiiadelpbe , et depuis plusieurs règne de Pbiiadelpbe selon une ère qui
années gouverneur de Cvrène, y avaii remonte à la première année de Soter
pris un tel empire sur Tes habitants, comptée depuis la mort d'Alexandre,
qu'il les poussa à la révolte envers leur ère qui , si elle eût été conservée, au-
roi Pbiiadelpbe, et les conduisit contre rait fourni un guide certain pour le

l'Egypte. Pbiiadelpbe leur opposa des temps des Lagides.


forcés suffisantes, parmi lesquelles se Hais son usage ne fut pas immua-
trouvaient quatre mille Gaulois Ma- : ble ; il s'opéra à cet égard un change-
gas fut bientôt ramené à Cyrène par ment qu'il entre dans notre plan d'in-
l'insurrection de quelques peuplades diquer d'abord , afinde l'expliquer s'il
de la Libye, et Pbiiadelpbe dut re- est possible.
noncer à le poursuivre parce qu'il fut Soter, en prenant la couronne d'É-
informé que les troupes étrangères gypte, avait fait marquer sur ses
qu'il avait à sa solde conspiraient monnaies les années de son règne,
contre lui. Il les fit enfermer dans une dont la première remontait a celle de
îledu Nil où périrent toutes.
elles la mort d'Alexandre. Pbiiadelpbe lui
Magas parvint ensuite à entraîner son succéda de son vivant même et il con- ,

beau-pere Antiochus. roi de Syrie, tinua de marquer ses monnaies selon

Digitized by Google
ÉGYPTE.
i'èrcqui remontait à la première an- respondantes , transportées sur le ca-
née du règne de son père. Ainsi , on a lendrier Julien , montrent en effet que
des médailles de Ptolemée Soter avec de Denys continence au solstice
l'ère
le nombre 36 celles qui portaient les
: immédiatement l'a vé-
d'été qui précéda
nombres 37, 38 et 39, ne sont pas nement de Philadelphe et il y a entre
,

connues. La première, frappée pour le solstice et l'avènement (du 24 juin


Ifiiiadelpbe dut porter le nombre 40
, ; au 2 novembre] un intervalle de 130
elle manque aussi : mais celle qui fut jours environ. Si l'on suppose que De-
frappée Tannée suivante , la 41' de Père nys ayant composé son ère a voulu lui
de Soter, qui était la 2* du règne de donner une époque radicale historique,
Philadelphe, nous est parvenue. Elle la premiere^nnee du règne d'uu prince
présente d'un coté la tête jeune et dia- qui faisait tout pour encourager les re-
(temée du deuxième Ptolémée, et au cherches savantes , pour les astro-
revers son nom avec un aigle debout nomes surtout, se présentait naturel-
sur un foudre; dans le champ de la lement a son esprit. De plus , on ne
médaille la date de Tan 4 Cette ma-
1 . peut pas croire que Denys ait établi
nière de dater ses monnaies fut con- son ère avant le règne de Philadelphe,
tinuée par Philadelphe jusqu'à Tannée puisqu'il eût fallu en prédire le com-
*4 de l'ère, et même, jusqu'à l'année mencement.
56. Après, viennent les monnaies de Peu d'années après la 24 e du règne
,

Philadelphe avec des dates qui se rap- de Philadelphe, Antiochus Tbéos suc-
portent a une autre ère, et dont le céda à son père Antiochus Soter. Sa
premier nombre connu est 19. Ce chan- sœur Apame , veuve de Magas obtint ,

gement dans la manière d'inscrire les sur lui plus d'ascendant que sur son
•innées de son règne sur ses monnaies, père Soter qu'elle avait en vain solli-
introduit dès lors par Philadelphe, a cité de renouveler la guerre contre
ete expliqué avec toute raison par la Philadelphe. Antiochus Théos l'entre-
volpnté du roi de se faire une ère prit avec des forces immenses , et le
d'après l'époque même où il était par- résultat fut pour lui l'obligation de ré-
venu à la couronne, de la compter du pudier sa femme Laodioe, d'épouser
commencement de son règne , et non Bérénice, fille de Philadelphe, et d'as-
plus de
celui de Soter. Cette explica- surer aux enfants qui en naîtraient la
tion n'est pas nouvelle; elle a été ad- couronne de Syrie.
1

mise par tous ceux qui ont voulu rendre Mais les soins de la guerre n'empê -
raison de ce changement dans la ma- chaient pas Philadelphe de protéger
nière selon laquelle les années de Phi- les arts de la paix. 11 augmenta de beau-
ladelphe sont comptées sur ses mon- coup la bibliothèque déjà très-considé-
rable que Soter avait fondée à Alexan-
Quelle fut l'occasion d'un tel chan- drie , et qui offrait les plus sûrs et les
gement ? plus vastes moyens d'étude au grand
C'est l'établissement de l'ère diony- nombre de savants que les Lagides y
sienne, ainsi appelée du nom de son avaient attirés par la plus libérale pro-
auteur, Denys l'astronome. tection. Elle lit d'Alexandrie , pendant
Cette ère était purement astrono- plusieurs siècles, le centre commun de
mique et composée d'années solaires toutes les connaissances et le foyer
fixes chacune de douze mois portant
, ,
unique des lumières que répandirent
les noms des douzesignes du zodiaque. pour toujours sur le monde l'étude
Il est généralement connu que l'époque des scieuces , la culture des lettres et
radicale de cette ère était l'avènement celle des arts. Avant cette époque , Phi-
de Philadelphe à la couronne d' Egypte ; ladelphe avait deja donne un témoi-
et les huit observations astronomiques gnage public de son vif attachement
datées selon l'ère de Denys, conser- pour Arsiuoé sa sœur, qui était aussi
vées dans l'Almageste , étant , au sa femme, en permettant qu'il lût
moven de leurs dates égyptiennes cor- frappé des monnaies d'or, d'argent tl

>

Digitized by Google
416 L'UNIVERS.
de bronze, qui portaient le nom et cher à grands frais, et il en ornai
l'image de la reine; et cela fut fait ou ses jardins ou ses musées. Il vi
dans la 33 e année du règne de Pbila- que le goût de la poésie dramatique
delphe, inscrite sur une de ces mon- s affaiblissait , et il institua les J
naies. d'Apollon pour le ranimer. Enfn
Plusieurs autres établissements uti- l'école d'Alexandrie prit son essor pa
lesfondés par Philadelpbe recomman- l'associ:ition dans un but de progrès
,

dent son nom à la mémoire et à la sous la protection royale, des savant


reconnaissance des savants. les plus distingués qui étaient allés Si
Pbiladelphe régna 38 ans , et mou- fixer dans cette nouvelle capitale d<
rut vers la lin de l'été de l'an 247 l'empire égyptien; c'est sur le so
avant l'ère vulgaire. égyptien quête formèrent les nouveau?
I/éclat du règne de Ptolémée Phi- disciples de Platon , d'Aristote , de Ze
ladelpbe répondit à sa longue durée, non et de Pytbagore les écoles dfl :

et fut digne de son illustre origine. 11 géomètres dés astronomes et des pco
,

forme une des époques les plus mé- graphes y luttaient d'une heureusi
morables dans l'histoire de la philoso- rivalité avec celles des philosophes.
phie. Alexandrie, a-t-on dit, grande, Les preuves de la munificence d<
riche et puissante, devint la cité des Ptolémée Pbiladelphe subsistent en-
Grecs de toutes les régions , le centre core sur les monuments de l'Égypte
du commerce des trois mondes, l'asile Ce roi fit construire le grand teinpl<
commun des lettres et des arts. Le d 'Isis à Phi la» , et en commença à faire
poète Théocrite , l'un des ornements èxécuter les sculptures. C'est là qu'or
de la littérature grecque, composa a trouvé les preuves d'une coutume
un hymne en l'honneur de Ptolémée égyptienne , qui consistait à donnei
Pbiladelphe. 11 y célèbre à la fois la au dieu du temple les traits de la figure
gloire de son père Ptolémée Soter, les du roi qui le faisait bâtir. Sur celui
grâces et la beauté de sa mère Béré- de Philae , la déesse Isis est le portrait
nice, enfin les suprêmes mérites de de la reine -Arsinoé , femme de Pbila-
son héros Ptolémée Pbiladelphe, qu'il delphe.Le même prince fonda le petit
éçale aux dieux. Le poète s'exprime temple du sud, dans la même île,
dans le stvle le plus noble ; il proclame consacré à la déesse Athôr, et en (il
Pbiladelphe illustre à la fois dans la construire le sanctuaire et les salles
paix et dans la guerre, par sa magni- adjacentes. Le nom de la reine Arsi-
ficence envers les dieux auxquels il noé est associé à celui du roi dans les
élève des temples ornés de statues d'or nombreuses inscriptions de ces édifices.
et d'ivoire; par sa générosité envers On les voit aussi inscrits sur l'édifice
les poètes et les artistes qu'il attira d'Kdfou, où ils ne sont qu'une pieuse
auprès de lui ; enlin par sa piété en- commémoration par leur troisième
vers son père et sa mère, auxquels il successeur Ëpiphane. Parmi les autres
consacra des temples , des autels et monuments contemporains du règne
des prêtres. Les prospérités inouïes de de Pbiladelphe , il faut citer une belle

l'Égypte sont décrites dans ce poème statue colossale de ce roi , en granit


avec un poétique enthousiasme; le rose , qui se voit au musée du G»pi-
nombre des villes qui la couvrent y tole , dans le cortile dei ( onsercatori,
est porté à 33,339 : enfin , indépendam- où Champollion le jeune l'a, le premier,
ment de l'Égypte, la Libye, l'fithio- indiquée. I ne autre statue se voit à
la Syrie, la Phénicie, Chypre et la / il/a Albani, et les inscriptions
r)ie,
es Cyclades la Lycie
, la Carie et la
, contiennent le prénom royal et le nom
Pamphylie , sont rangées sous le sceptre propre du roi. Du reste, les noms de
de Philadelpbe. Ce roi étudia l'histoire Ptolémée Pbiladelphe, des deux Arsi-
naturelle etla botanique. Il fit amener noé ses deux femmes, ne sont pas très-
à Alexandrie les animaux rares des rares sur les monuments égyptiens:
pays étrangers ; il les y envoyait cher- une inscription du musée d u Louvre

Digitized by Google
EGYPTE. 417

nentionne une des reines ; et quant Des monuments encore subsistants


ux monuments d'origine grecque, portent nom
de ce roi courageux
le
utre les belles médailles en or de ces et prouvent en même temps
qu'en ré-
irincesses, qu'il est facile de discer* duisant l'ordre sacerdotal au service
1er Tune de l'autre par les traits des temples et du cuite public , il n'ou-
le leur visage, on peut rappeler que blia pas ses devoirs envers les. dieux
îtratonice , (ille de Démétnus, roi de du pays. On voit encore à Dnkkèh, en
Uacédoine, consacra une statue à la Piubie, les restes d'un temple dont la
eine Arsinoé, Olle de Soter el de Bé- partie la plus ancienne a été construite
rénice, soeur et femme de Phiiadelphe: et sculptée par Ergamène. De pareilles
me inscription du musée de Naples notions sur ce prince existent aussi
xnis apprend cette curieuse particu- sur le temple de Dèboud : dans les ins-
larité historique; mais on ignore quel criptions de ces monuments éthio-
notif porta Stratonice à cet hommage piens, on retrouve le système d'écri-
îavers Arsinoé. Les médailles de Pto- ture hiéroglyphique égyptienne sans
lémée Phiiadelphe et des deux Arsi- aucune variation; le nom d'Ergamène
noé , particulièrement celles qui sont est accompagné des titres de toujours
frappées en or, sont remarquables par vivant, cheri d'Isis, d'approuvé par le
leur style et leur belle exécution : on soleil nouvelle conGrmation des rap-
:

n'y a observé jusqu'ici aucune trace ports de l'antiquité classique sur l'uni-
Jes symboles religieux particuliers au formité des principales institutions
culte égyptien. publiques , du culte et de l'écriture, en
C'ot au règne de Phiiadelphe qu'ap- Egypte et en Éthiopie. Le temple de
pat tient un des événements mémo- Dakkèh fut dédié au dieu Thoth par le
rables de l'histoire des contrées méri- roi d' Éthiopie.
dionales voisines del'Éçypte. Diodore A Dèboud, autre lieu de la Nubie,
de Sicile rapporte, parmi les singulières un autre roi éthiopien, nommé Atbar-
coutumes des Ethiopiens, celle-ci le : rammon , éleva un temple à d'autres
collège des prêtres, séant à Méroé, dieux de l'Égypte, à Amon-Ra, sei-
envoyait, quand il le jugeait à propos, gneur de Deboud , à la déesse Athor,
au roi régnant Tordre de quitter le et aussi à Osiris et à Isis : prince d'ail-
trône et ue se donner la mort. Cet leurs inconnu dans l'histoire, qui fut
ordre émanait des dieux , et nul mor- peut-êtreun des prédécesseurs d'Er-
tel n'avait le droit de s'y soustraire. gamène, ou son successeur immédiat
Du temps de Ptolémée Phiiadelphe et durant peu d'années, puisque Pto-
l'Ethiopie ne dépendait plus de l'E- lémée Évergète réunit de nouveau l'E-
gypte ; nous avons avancé qu'elle s'en thiopie à l'Égypte, l'ayant conquise
Hait séparée très -vraisemblablement par les armes.
d<*s l'avènement des Perses; et il pa- Ce Ptolémée Évergète, qui porta le
rait que l' Ethiopie avait repris son an- premier ce surnom dont le sens exprime
cienne forme ue gouvernement tout ridée de la bienfaisance, était le (ils
lltéocratique. Le roi contemporain de uniquedePtolemeePhiladelphe etd'Ar-
Phiiadelphe se nommait Ergamène : il sinoé sa première femme la fille du ,

se ressouvint peut-être de l'exemple roi Lysimaque. Quand Phiiadelphe eut


donné en Égypte par Ménès ; et , au pris sa sœur Arsinoé pour sa seconde
lieu d'obéir à l'ordre des prêtres qui femme celle-ci adopta Ptolémée Éver-
,

lui demandaient le trône et la vie , il gète , fils de son mari ce fut donc sans
:

se mit à la tête de ses troupes , mar- obstacle que le nouveau roi succéda à
cha contre le Temple d'or, situé sur son père.
une hauteur presque inaccessible, s'en Le règne d' Évergète I er fut très-
empara , (it mettre 5 mort tous les glorieux pour l'Égypte, et assura
prêtres , et établit par son triomphe le au pays de nouveaux avautages. De
gouvernement civil qui dura quelque grandes expéditions militaires portè-
temps après lui en Ethiopie. rent au cœur de l'Asie sa renommée
17* Livraison. (Égipte.) 27

Digitized by Google
418 L'UNIVERS.
et les armes égyptiennes : Évergète frappées dans cette ville selon l'opinion
renouvela les entreprises de Sésostris des uumismatistes , et qui portent la
et avec un égal succès. Les événements date de la 7' année de son règne : à
de son règne furent nombreux et écla- cette époque , son expédition en Asie
tants ; l'antiquité classique nous en a était terminée.
transmis Quelques détails : ils sont Ce fut vraisemblablement à son re-
consignés dans les ouvrages des écri- tour de cette expédition qu'Évercète
,

vains du premier rang , ainsi que sur passant à Jérusalem v fit des sacrifices
des monuments également utiles à con- dans le temple des Juifs , si Ton en
sulter par Tait et par l'histoire. croit leur historien. Peu de temps
Évergète fut appelé en Syrie, à la après il s'était déclaré le chef de la
trte d'une armée considérable , par un ligue achéenne, à la tête de laquelle
intérêt de famille qu'un prince puis- était alors Aratus de Sicyone. Aratus
sant ne pouvait point négliger sans avait pris Corinthe et Mécare que gar-
quelque honte. daient les troupes du roi de Macédoine
On sait que le roi de Syrie, A nt in- (Antigone G ouatas). Trézène avait eu
chus Théos , avait épousé en secondes le même sort que Mégare , et de là
noces Bérénice, fille de Ptolémée Phi- Aratus s'était rendu en Attique, et
ladelphe, et sœur d' Évergète I". Après avait obtenu laHiancc d'Éverçete qui
la mort d'Antiochus, sa première fut , en effet , déclaré le chef de la ligue
femme Laodice voulut se venger de sur terre et sur mer.
Béréuice qui , restée à Antiochc de Pendant ce temps, Séleucus avait
Syrie, s'y renferma en vain dans voulu punir les villes de l'Asie qui
Daphné. Ce ne fut point pour elle un s'étaient déclarées contre lui , cédant
asile inviolable; elle y fut assassinée à l'horreur que leur avait inspirée l'as-
avec le jeune enfant qu'elle avait eu sassinat de Bérénice et de sou fils. Il
d'Antiocnus. avait armé contre elles une flotte nom-
Le roi Ptolémée Évergète était ac- breuse, qui fut dispersée par la tem-
couru de l'Egypte au secours de sa pête. Les villes d'Asie rentrèrent
sœur : il arriva trop tard ; mais il ven- d'elles-mêmes sous son obéissance, et
ea sa mort en portant la guerre dans il alla porter la guerre sur les posses-

es États de Séleucus , s' emparant suc- sions mêmes de Ptolémée Évergète.


cessivement des provinces de l'empire Vaincu , chercha un refuge dans An-
il

d'Asie situées sur la rive droite de tioche, d'où il appela son frère Antio-
l'Euphrate; et passant ensuite ce chus Hiérax à son secours. Pour
fleuve, il parcourut en conquérant la n'avoir pas deux ennemis à repousser
Babylonie, la Susione, la Perse, et à la fois , Ptolémée conclut avec Sé-
poussa même jusqu'à la Bactriane, leucus une trêve de dix années. Mais
soumettant les peuples et leurs chefs Hiérax, croyant l'occasion favorable
leur imposant des tributs , et repre- pour s'emparer du trône de Syrie,
nait en Perse un grand nombre d'images combattit son frère avec des Gaulois
des dieux que Cambvse avait enlevées qu'il avait à sa solde; Séleucus fut
à l'Egypte. Rappelé dans son royaume vaincu , et les Gaulois tournèrent leurs
par des dissensions domestiques, ii armes contre le vainqueur même, qui
rapporta de son expédition un im- les ramena à leur devoir à force d'ar-
mense butin , et ramena son armée en flent , et qui eut aussitôt après à se
Égypte. Il laissa de bonnes garnisons défendre contre Eumène roi de Per-
,

dans la Syrie, à Séleucie mène qui game, ambitieux aussi de régner sur
était encore occupée par les troupes l'Asie. Il vainquit Antiochus Hiérax à
égyptiennes lorsque plus tard Antio- Sardes , et mourut bientôt après pres- ,

chus le Grand fit la guerre à Ptolémée qu'en même temps qu'Antigone de Ma-
Philopator. Tripolis de Syrie resta cédoine.
ses ordres , comme le nrou- Pendant que les deux fils d'Antio-
l'Évergètequi furent chus Théos se disputaient par les arme*

_ 0

Digitized by Google
ÉGTPTE. 41*

ipossession de la couronne de Syrie ; de Syrie. Trois rois cessèrent de vivre


u Antiochus Hiérax, vaincu à son dans la cxxxix* olympiade f l'an 222
>ur par Séleucus, se livrait de lui- avant l'ère chrétienne.
léme à Ptolémée Évergète , celui-ci De toutes les actions remarquables
ranquille sur son trône, s'occupait du règne de Ptolémée Évergète , au-
e l'administration intérieure de ses cune ne fut plus agréable aux Égvp-
, ou plutôt des jouissances que tiens que l'attention religieuse que ce
rangrendait plus faciles. Il
lui roi apporta à reprendre en Perse , et à
onna beaucoup de soins àla chasse renvoyer triomphalement en Éçypte
es éléphants, qu'il élevait ensuite pour les images des divinités égyptiennes
1 guerre, soins tout à fait paisibles, que Cambyse avait enlevées ; ce serait
t qui ne prouvent point la réalité des même de là , selon quelques auteurs
;randes conquêtes que Ton a supposé qu'aurait été tiré le surnom que portt
voir été faites par ce roi bien loin au le troisième des Ptolémées opinion
:

nidi de l'Égypte et dans des régions peu fondée , si le surnom officiel était
»resque inconnues. D'ailleurs cette donné aux rois d'Égypte à l'époque
tpimon n'a pour fondement que le même de leur sacre à Memphis.
«xte d'une inscription étrangère à Évergète réunit de nouveau à PÉ-
Évereète et qui quoique trouvée dans
, , gvpte une portion de l'Éthiopie jusqu'à
e même lieu , est aujourd'hui recon- Ibrim ; et il laissa dans cette contrée
nue pour n'avoir jamais fait partie de conquise des marques de sa pieuse mu-
celle d'Adulis dont nous avons donné nificence, en y faisant construire ou
le texte (suprà , page 67). terminer des édifices religieux. C'est
En Grèce, Aratus, chef de la liçue ainsi qu'il fît continuer le temple de
achéenne, avait été défait par Cléo- Dakkèn commencé par les rois éthio-
,

mène. Le vaincu entraîna dans son piens Ergamène et Atharrammon. Fn


parti Antigone, régent de la Macé- Égypte, les ruines du temple situé au
doine, qui se hâta de se rendre dans noru d'Esnèh offrerit encore plusieurs
Ve Péloponèse. Après avoir passé l'hi- bas-reliefs dont quelques-uns portent
ver à Argos , il en sortit au commen- les noms de Ptolémée Évergète et de
cemeot du printemps et marcha sur la reine Bérénice. Le nom de la reine
les frontières de l'Argolide vers les- , se lit aussi sur quelques portions des
quelles Cléomène se dirigeait. Parve- édifices de Philae : les inscriptions pro-
nues à Sellasia, les deux armées se clament « le seigneur du monde, les

rencontrèrent en vinrent aux mains ;


, dieux frères , le fort par Ammon
celle de Cléomène fut complètement l'approuvé du soleil , le gardien de la
battue , et lui-même, s'étant re-
le roi vie , le seigneur des dominateurs , Pto-
tiré d'abord à Sparte qui était derrière lémée toujours vivant , chéride Phtha
lui, s'embarqua dès le lendemain à et la dame du monde , Bérénice y femme
Gythium , et se rendit en Égypte au- et sœur du fils du soleil Ptolémée. » On
près de Ptolémée Évergète. trouve aussi , dans les monuments de
Le roi d'Égypte le traita avec beau- Thèbes , le souvenir écrit de ces deux
coup d'égards"; par là il eut occasion souverains.
fc connaître et n'apprécier les qualités Cette Bérêtiice est une des reines les
éminentes qui le distinguaient; il lui plus célèbres parmi celles de l'Égypte:
promit de le replacer sur le trône de la poésie l'a célébrée et nous a trans-
Lacédémone ; mais la mort ayant sur- mis son nom environné de gloire. Ce
fris Évergète déjà vieux , sa bienveil- fut cette Bérénice qui voua sa belle
lance pour Cléomène fut pour ce roi chevelure pour l'heureux retour du roi
m* aucun résultat. Antigone , en ef- son époux , qui faisait la guerre en
fet,après avoir assisté aux jeux TSé- Asie, et pour 1 entière conquête de cette
toéens, rentra en Macédoine, et vaste contrée. Cette chevelure fut dé-
y
mourut: en même temps Antiochus posée dans le temple de Vénus Zéphy-
Accéda à Seleucus , son frère , au trône rite ; elle en fut enlevée , et le gemer

27.

Digitized by Google
4*0 L'UNIVERS.
de la poésie proclama , sur la foi de des plus habiles. Il soutenait le mou
l'astronome Conon de Samos ,
qu'elle veinent de ta terre, opinion qui ta-
avait été ravie au lirmament pour y pota à une accusation d'irréligion
brillerparmi les étoiles , où elle forme Apollonius de Perge faisait, en inémi
encore auprès de la constellation du
, temps , presque oublier ses prédéces
Lion , celle qu'on nomme plus com- seurs dans la culture des mathéma
munément la Gerbe, et aussi de son tiques tant de progrès à la fois flat
:

véritable nom de chevelure de Béré- taient le goût et les intentions A


nice. Callimaque, poète grec de Cy- Ptolémée Evergète , qui les honorait e
rène , avait chanté cette fiction ; il ne les encourageait. Il mourut au mUiei
nous reste de son ouvrage que l'imita- de tant de prospérités littéraires , après
tion latine de Catulle. un règne de 25 ans.
On sait aussi , par une inscription Ptolémée Philopator (qui aime sor
Sravée sur une plaque d'or, mince, père), lils unique de Ptolémée E vergeté
rr
exible et luisante , trouvée dans les î , en montant sur le trône, avait auprès
ruines de Canope , que « le roi Ptolé- de lui sa mère Bérénice, sa sceur Arsh
- mée , fds de Ptoléméc et d'Arsinoé noé et Magas son frère. La voix publique
• dieux Adelphes , et la reine Béré- accusa Philopator d'avoir empoisonne
« nice sa sœur
, et sa femme , élevèrent son père, et la cruauté de son carac-
« un temple à Osiris » dans cette tère put servir, plus tard , à confirmer
même ville de Canope.
verrons IS'ous ce soupçon infamant. Diaprés les con-
bientôt que cette même reine Bérénice seils de Sosihe, l'un de ses ministres
recevait , dans les temples de l'Egypte, les plus aflidés, il lit d'abord mourir
un culte particulier, et que des pré- Magas, dont il craignait l'influence sur
tresses spéciales étaient chargées de les troupes mercenaires. Bientôt après,
ce culte sous le titre d'Athlophores ; Bérénice, sa mère, perdit aussi la vie
titre qui , désignant les insignes de la par ses ordres. Cléomène enfin, à qui
victoire , a fait rappeler que Bérénice Ptolémée Évergète avait accordé une
aimait à faire élever des chevaux pour honorable hospitalité, ne devait pas
concourir dans les jeux Olympiques de échapper à ses atroces "Volontés. Au-
la Grèce. , p tant Evergète témoignait d'intérêt au
Les solennités de la Grèce n'étaient roi de Sparte fugitif et lui avait accorde
plus étrangères à l'Egypte, à Alexan»- d'égards, autant il en recevait peu de
drie surtout , ville toute grecque par Philopator livré à tonte la fougue des
ses établissements littéraires , dont la passions les plus criminelles. Cleomene
prospérité avait été portée au plus haut le pressa néanmoins d'accomplir les
point sous le règne de Philadelphc, promesses d'Évergète, qui devait le re-
et qu'Évcrgète s'elforca de maintenir à placer sur son trône il devint suspect
:

la même perfection. Ce prince éclairé et fut mis sous la garde de quelques


et libéral lit chercher les livres avec affidés. Pendant que Philopator assis-
passion , et les lit acheter à tout prix. tait aux grandes cérémonies du cuite
Callimaque, Lycophron, Apollonius de Sérapis à Canope , Cléomène tenta
lui restaient des poètes du reçne pré- de s'évader et de soulever les Alexan-
cédent , et avec eux Conon , Anstarque drins contre leur roi; ce projet ne
et Aristophane de Byzance , distingués réussit pas , et Cléomène avec ses par-
comme savants. Ce dernier avait suc- tisans ne trouvèrent d'autre reluge
cédé à Zénodote dans les fonctions de que la mort. Elle n'assouvit pas tout
bibliothécaire à Alexandrie; il eut lui- à fait la vengeance que Philopator vou-
même Ératosthène pour successeur ou lut tirer de cette coupable tentative;
pour collègue: Aristiile, Conon, Ti- il fit mettre en croix le cadavre de
mocharis, cultivaient en même temps ^Cléomène, et égorger à ses pieds la
et avançaient l'étude et la science des femme la mère et les enfants de ce
,

astres : Aristarque donna pour cette roi malheureux. Ceci se passait sc z«i
;

étude des méthodes ditiues du suffrage ans après que Cléomène était parvenu

Digitized by Google
ÊGYPTE 491

à la couronne, la seconde année- du rante jours environ, et arriva à Apol-


règne de Ptolémée Philopator, la 219 e lonia,où il défit entièrement l'armée de
avant l'ère vulgaire. Molon , qui se tua. En même temps
Dès Tannée suivante , ce surnom se qu'il obtenait ces grands succès, An-
Ksait sur ses monnaies ; mais on n'en tiochus reçut aussi la nouvelle de la
était pas plus convaincu de sa ten- naissance d'un Gis dont la reine était
dresse pour son père, et le peuple lui accouchée. Restait Artabazane dont
donnait , avec plus de raison peut-être les intentions étaient très - suspectes ;
le surnom de Trvphon. Ses monnaies et le roi voulant s'assurer de lui , con-
portèrent toujours celui de Philo- duisit son armée contre la province
pator. qu'Artabazane gouvernait. Celui-ci
Pendant que cela se passait en Egypte, traita aux conditions dictées par le roi,
Antiochus, qui fut surnommé le Grand, qui consentit ensuite à se défaire d' Her-
s'occupait à reprendre la Syrie surPto- mias par un assassinat, rentra aussi-
lémée. Antiochus était parvenu au tôt après à Séleucie sur l'Euphrate, et
trdne presque en même temps que le envoya ses troupes en quartiers d'hiver.
roi de l'Égypte. Il passa la première Au commencement du printemps sui-
année de son règne à régler les af- vant, Antiochus réunit ses forces dans
faires des diversesprovinces du royau- Apamée, et l'attaque de Séleucie (sur
me; et, quoique les gouverneurs de la la mer) y fut résolue. Depuis les pre-
Médie et de la Perse, Molon et Alexan- mières années de Ptolémée Évergete
dre , se fussent déclarés indépendants, cette ville maritime était occupée par
Antiochus, suivant les conseils d'Her- une garnison égyptienne. Antiochus
mias, se résolut à attaquer Ptolémée, s'y rendit,et y eiitra bientôt après
dont la mollesse et les dérèglements par la trahison 'de quelques officiers
promettaient à son entreprise un suc- subalternes; un autre traître, Théo-
ces presque certain. Antiochus se ren- dote , général au service de Ptolémée
dit a Séleuciesur l'Euphrate, où arriva lui fit aussi la proposition secrète de
bientôt, avec Diognètes et la flotte, livrer la Syrie. Antiochus cependant ,
la Clle de Mithridate , qui lui était pro- suivant la "même route qu'il avait déjà
mise en mariage et qu'il épousa. Il faite dans sa première campagne, re-
passa Quelque temps dans cette ville, monta la rive gauche de Oronte et I

donna la régence de ses États à là reine parvint aux gorges du Liban et de


et se dirigea ensuite sur Antioche. Il y r Anti-Liban , dont les soldats de Pto-
apprit les succès de Molon , qui avait lémée tentèrent en vain de lui fermer
passe le Tigre et marchait vers Séleu- le passage. Les ayant franchies il alla ,

cie. Antiochus pensait à abandonner aussitôt occuper Tyr et Ptolémaïs , où


l'entreprise contre la Syrie et à courir il s'empara des vaisseaux et des ap-

sur Molon ; mais Hermias l'en dissuada provisionnements qui s'y trouvaient
et l'engagea de continuer sa marche réunis.
sur la même rive de l'Oronte. Le roi En attendant , Ptolémée
qui avait ,

se rendit à Apamée, ensuite à Laodi- enfin quitté Memphis rendu à


, s'était
cée (Cabiosa) ; et, parvenu à l'entrée Péluse avec son armée, avait fait ou-
de la gorge du Liban , il y trouva Théo- vrir les canaux et inondé les environs
dote général de Ptolémée , qui lui en de cette place de guerre. Informé de
fermait le passage en tenant G erra, ce moyen de défense, Antiochus re-
place qu' Antiochus ne jugea pas devoir nonça au projet d'attaquer Péluse , se
tenter de prendre d'assaut. Instruit contenta de ravager les pays environ-
alors des nouveaux succès de Molon, nants et d'amener sous son obéissance
qui était venu jusqu'en Mésopotamie , par la force ou par l'adresse, les villes
û renonça à son projet contre la Syrie de la Syrie qu'il lui restait à occuper.
retourna' sur l'Euphrate marcha au
, Ptolémée ne pouvait pas les secourir ;
nord-est jusqu'à Antioche de Mvgdo- son imprévoyance, ou plutôt celle d'A-
aie , s'arrêta dans cette contrée qua- gathocle et de Sosibe qui gouvernaient

Digitized by Google
L'UNIVERS.
réellement le royaume et le
ne leur roi, d'abord à dix stades , ensuite à cinq
que de propo-
laissa d'autre ressource seulement de Ptolémée perdit la ba-
,

ser une trêve à Antioehus; et celui-ci, taille et s'enfuit à Antioche , d'où il en-
obligé de renoncer au siège de Doura, voya demander la paix au roi d'E-
voyant que l'hiver s'approchait, fit gypte ( l'an 217). Ptolémée la lui accorda
faire aussi de son coté des propositions pour une année , et chargea Sosibe d'en
a Ptolémée , consentit à quitter la Syv régler les conditions. Satisfait de re-
rie, à se retirer à Séleucie (sur la mer), prendre la Syrie et la Phénicie , Pto-
et il s'y rendit en effet, laissant des gar- lémée passa trois mois dans ces pro-
nisons dans quelques-unes des places vinces pouf en régler l'administration
de cette province qu'il avait déjà prises. séjourna à Jérusalem dont il fut em-
Les négociations pour une paix défini- pêché de profaner le temple, et rentra
tive ayant été sans résultat, dès le bientôt après à Alexandrie avec sa
printemps suivant Antioehus réunit de sœur Arsinoé qui ne l'avait pas quitté,
nouveau ses troupes , et Ptolémée ren? même sur le champ de bataille.
força celles de Mcolaos, qui comman- Polvbe a décrit dans tous leurs dé-
dait pour lui dans les environs de tails tous ces événements des premières
Gaza. Celui-ci s'avança de quelques années d' Antioehus, lesquelles furent
marches, pendant qu' Antioehus, cô- aussi les premières de Ptolémée Phi-
toyant la mer, quittait Séleucie, descen* lopator.
dait à Berytus, prenant ou brûlant les A près que celui-ci fut rentré à Alexan-
villes qu'il trouvait sur sa route, et drie il reçut les envoyés des Rhodiens
,

venait enfin en présence de l'armée qui demandaient les secours du roi


égyptienne. La bataille s'engagea , et pour réparer les ravages occasionnés
Nicolaos vaincu dut chercher un refuge un grand tremblement de terre
dansSidon. Antioehus ne«ongea point
Krlilopator leur accorda une forte
;

a une attaque sérieuse oontre cette somme d'argent , des ouvriers de toutes
place, s'occupa des villes voisines de les professions des bois, des corda-
{
l'Arabie , qu'il soumit Tune après l'au- ges, et une très-grande quantité de
tre, et enfin de Ptolémaïs , où il établit blé (l'an 216).
ses quartiers <l hiver. Peu de temps après arrivèrent des
Vers le même tem ps ar r va u ne écl pse
i i ambassadeurs de Rome , offrant à Pto-
de lune mentionnée par l'historien Po- lémée des secours contre Antioehus.
Jybeice fut celle du 12 septembre 218; La fin de la guerre dispensa Philopator
et bientôt après, au commencement de les accepter. C'est pendant son règne
du printemps , la campagne s'ouvrit. queguelques auteurs disent que Marcus
Ptolémée avait profité de Ta trêve con- Attilius et Marc jus Acilius furent en-
clue avec Antioehus, et de l'éloigne- voyés par le sénat romain pour renou-
ment de celui-ci , qui avait passé près veler 1 alliance avec le roi d'Egypte :
d'une année à la conquête de l'Arabie, mais Tite-Live, qui rapporte ce lait,
pour se préparer à soutenir la guerre donne à la femme du roi d'Êgvpte le
avec succès. Il partit d'Alexandrie à la
'
nom de Cléopâtre; celle de Philopator
tête de soixante et dix mille hommes était sa sceur Arsinoé, et Cieopâtre,
soutenus par cinq mille cavaliers et fille du roi de Syrie, fut celle de Pto-

soixante et treize éléphants. Antioehus lémée Épiphane, fils et successeur de


l'attaquait avec soixante -deux mille Philopator. Ce ne fut donc que durant
fantassins, six mille cavaliers et cent le règne suivant que se fit le renouvel-
deux éléphants. Ptolémée se rendit lement des traités avec les Romains.
d'abord à Péluse , distribua des provi- Tranquille dans sa capitale, Philo-
sions a son armée, la fit avancer par pator s'y livrait à tous ses goûts pour
le mont Casius et les Baratra , et cinq les plus honteuses dissolutions. Ce roi
jours après jusqu'à cinquante stades soumis aux volontés d'Agathocle et de
de Raphia au nord-est de Rhinoco- Sosibe, ne savait rien taire par lui-
rura. Antioehus dépassa Raphia, campa même qu'assouvir ses brutales pas-

Digitized by Google
>
TE. 4)8

lions ; ne s'apercevait pas même du


il la prolongation de la tutelle du prince
malheureux état et des murmures de ne faisant que l'aggraver, il fut cou-
ses sujfts. ronné à Memphis, quoiqu'il n'eût pas
Cependant Arsinoé, jusque-là sté- encore atteint cet âge de sa ma-
rile, mit «mi tin un fils au monde. Jus- jorité.
tin dit qu'il naquit cinq ans ou la 5* Pour satisfaire au rapport formel
année avant la mort du roi selon d'au- ; de Polybe, en se servant aes dates pré-
tres auteurs , le jeune prince n'aurait cises que donne l'inscription de Ro-
été âgé que de 4 ans lorsque Philopa- sette, la naissance d'Épiphane doit
tor cessa de régner et de vivre. Mais être indiquée au 30 mésori d'une année
le canon des rois placé en téte de
,
qui, comptée jusqu'au 18 méchir de
lAlmageste, Polybe et l'inscription de celle de son couronnement, laquelle
e
Rosette , fournissent à ces doutes une était la 9 de son règne , donne cepen-
explication qui donnera une date pré- dant à ce prince moins de 14 ans à
cise à la naissance du fils de PhiJopator, cette époque.
n dont il nous sera permis d'exposer Il suffit pour cela , 1° de remonter,

ici les éléments, comme une nouvelle* depuis la date de l'inscription , de huit
preuve de l'importance chronologi- années entières à compter du ta mé-
que des monuments exactement expli- chir, qui est le premier jour de la 9'
qués. année du règne de Ptolémée; 2° de
Dans le canon des rois ce fils, qui cinq années entières à compter de ce
régna sous le nom d'Épiphane est ins- dernier jour, et de là jusqu'au 30 mé-
,

er
crit à compter du 1 thoth de l'an 544 sori le plus prochainement antérieur,
de l'ère de Nabonassar, année qui com- qui sera nécessairement celui de sa
mença le 13 octobre de l'an 205 avant naissance.
l'ère' chrétienne il faut en conclure
: Or, le canon des rois en comptant
e
nécessairement que Ptolémée Philopa- la 644 année de Nabona«sar à Épi-
tor mourut avant ce jour, puisque phane, enseigne que Philopator était
Kpiphane, qui lui succéda, régnait mort dans l'année précédente 543;
déjà alors. l'inscription de Rosette en donne le
L'inscription de Rosette dit qu'à jour, qui est celui de l'avènement d'É-
l'époque ou le décret qu'elle conserve piphane; Philopator mourut donc le
fut porté, l'usage s'était déjà établi 18 méchir de la 643* année égvptienne
dans toute l'Rgvnte d'appeler du nom de Nabonassar.
d'Épiphane (ou jour éponvme) le 30 En remontant de cinq années , on
du mois de mesori qui était celui de ,
arrive au 18 méchir 538 et le 30 mé- ,

la naissance du roi Épiphane. La même sori le plus prochainement antérieur


e
inscription dit encore que le 18 du est celui de la 537 année de la même
mois égyptien méchir était le jour où ère c'est donc à ce jour même que doit
:

Épiphane avait reçu la couronne de être fixée la naissance de Ptolémée Épi-


son père. phane; car cette date remplit toutes
Le décret que cette inscription con- les conditions qu'exigent les rapports
serve est daté du même jour 18 méchir, de Justin , de Polybe, et les dates de
et a été rendu à l'occasion du couron- l'inscription de Rosette.
9
nement d'Épiphane à Memphis , la 9 On trouve en effet :
année de son règne. Du 3o mé*ori 537, jour de la naissance d'Épi-
Polybe enfin nous apprend qu'à
, , phane au 18 méchir 543 jour de la mort de Phi-
, ,

l'égartl de Ptolémée Épiphane il fut dé- fopalor 5 ans 5 mois i3 jours.


• . . . .

Plus, 8 année» entières de-


rogé à l'usage qui en Égypte , fixait
,
puis ce 18 méchir jusqu'à
la majorité des jeunes rois à 14 ans, celui qui fut le premier
et qui ne permettait de les couronner jour de la 9* année du ré*
eue d'Épiphane , et qui est
qu'a cet Age ; nue cette exception pour
la date du décret 8 » »
Ptolémée Épiphane fut motivée parl'é-
tatfâcheuxdesaffairesduroyaume ;que Total iJoni I mois a 3 jours.

Digitized by Google
424 L'UNI
Et ce résultat satisfait à ce que Po- leur avenir; car, à la faiblesse et aux
lvbe entendre que Ptolémee Épi-
fait desordres de la régence, s'unissaient
phane n'avait pas encore 14 ans lors- encore les certitudes d'une guerre
qu'il fut couronné à Memphis, et à ce étrangère : Antiochus, enhardi par
que dit Justin, que, lorsque Philopa- l'incurie de Philopator, avait conçu le
tor mourut , il laissa son fils âgé seu- projet de reprendre la Syrie.
lement de 5 ans. On ne saurait mettre Les guerres presque continuelles que
plus heureusement en rapport des élé- Ptolémée Philopator eut à soutenir
ments aussi précis que les ternies de durant son règne, les désordres inté-
Polytie et de Justin , aussi absolus que rieurs du palais , qui tiraient leur pre-
les dates données par l'inscription de mière origine de la fougue invincible
Rosette et appliquées à la recherche des mauvaises passions du roi, mirent
des certitudes historiques. fin pour l'Egypte à la succession des
Épiphane vint donc au monde le 30 règnes glorieux dans la famille des
mésori de Tan 537 de l'ère de Nabo- Ptolémées. Les turbulences de la cour
nassar, et ce jour répond au 9 octobre s'introduisirent dans la nation, privée
de l'an 212 avant l'ère vulgaire. de paix à l'extérieur, d'ordre et de
La naissance de ce (ils si désiré bonne administration à l'intérieur. Les
n'attacha pas davantage Philopator à sources de la prospérité publique s'af-
sa femme Arsinoé ; s'abandonnant faiblirent, et dès lors se formèrent,
même de plus en plus aux excès que pour croître et grandir, ces germes de
lui inspirait une passion désordonnée décadence qui mirent l'Egypte à la dis-
pour Agathoclée, il fit mettre à mort crétion de l'ambition romaine.
Arsinoe, et se livra entièrement aux Ptolémée Philopator attacha cepen-
directions que lui donnèrent le frère dant son nom à quelques édifices pu-
de cette courtisane, et. Sosibe, qui blies : les plus méchants princes ne
avait toujours sur l'esprit et les volon- sont pas ceux qui s'abstiennent le plus
tés du roi l'empire le plus absolu. des démonstrations de la piété envers
Si en croit Appien on pensa
l'on , les dieux. Philopator fit construire à
un instant à cimenter la paix entre Akhmin (l'ancienne Panopolis) un
Antiochus de Syrie et Philopator, par temple dédié à Ammon générateur, as-
le mariage de Cleopùtre,, fille du roi similé au dieu Pau dans les mythes se-
de Syrie, avec ce roi d'Egypte; mais condaires. Philopator fit continuer
ce projet ne s'accomplit pas, et bien aussi le temple de Dakkèh , en Nubie,
peu d'années après 1 assassinat d' Ar- commencé par le roi Krgamène, et
sinoé, Ptolemée Philopator mourut, dédié à Thoth, l'Hermès deux fois
peu regretté, le 18 e jour du mois de grand % Sous le rapport mytholo-
méchir de la 543 e année égyptienne de gique , ce monument offre un "intérêt
Nabonassar, comme le prouvent les particulier par ses bas-reliefs où sont
dates précitées de l'inscription de Ro- représentées les diverses transfigura-
sette; et ce jour, selon le calendrier tions de ce dieu , qui s'y voit en intime
égyptien, correspond au 29 mars de liaison avec sa propre forme primor-
Tan 205 avant l'ère vulgaire , ce qui diale, le dieu Har-llat, le grand Her-
donne au règne de Philopator dix-sept mès trismégiste, ou trois fofs très-
années presque complètes. grand , et qui était la personnification
La mort de ce prince fut tenue de la sagesse divine , l'esprit même de
quelques jours secrète par les compa- Dieu. Thôth, le second Thoth, ou
gnons de ses dérèglements , qui en pro- l'Hermès deux fois grand , est lui-même
fitèrent pour piller le trésor royal et se la pensée ou raison.la
diviser gouvernement du royaume;
le Ar Edfou où s'élève un des plus
, lieu
mais la nouvelle étant parvenue enfin à beaux édifices subsistant encore en
la connaissance du peupled' Alexandrie, Egypte, on voit aussi les preuves de
il se vengea bientôt des maux qu'il avait ce que put faire pour les dieu* le roi
soufferts, mais sans s'assurer un meil- Philopator. La partie la plus ancienue

Digitized by Google
s'

Digitized by Google

» mm « - »
». » i • w «a •
» v ».

» a » •

w * •
• -
-
»

• *

» - - •
ta b « » 0 • »
• • _ «. *
. • • • t. • <


« "

Digitized by Google
Google

• • . •
• •
• • • • • • » •

• • • •

V.
• • • •
• • •
• • •
• . •

• *
• • • •
* • • •
• ». • •

. • • •
»» » -
PTE. 425

des décorations du grand temple d'Ed- l'honneur de sa mère Hathôr, la tu-


fou , l'intérieur du naos et le côté trice de l'Occident. »
dFoît extérieur , sont du règne de ce Presque toutes les sculptures de ce
roi ; le reste du temple est à ses succes- premier sanctuaire remontent au règne
seurs. Philopator ne négligea pas non de ce même roi qui s'y trouve figuré,
plus les édifices pharaoniques. Le accompagne de la reine Arsinoé, ado-
Rhamesséum de Louqsor conserve les rant les deux déesses : c'est à la déesse
traces de quelques réparations qu'il y Hathôr qu'est plus particulièrement
lit faire. Il y fit remplacer trois pierres consacré le sanctuaire de 3 roite, et cette
d'une architrave et le chapiteau de la puissante divinité y est représentée,
première colonne gauche du péristyle. sous o>s formes variées , recevant les
Une inscription en caractères hiéro- hommages de Ptolémée Philopator.
glyphiques rappelle et constate ces tra- Tels sont les témoignages de sa piété
vaux en ces termes : « Restauration envers ces deux grandes divinités , Ha-
de l'édifice , faite par le roi Ptolémée thôr et Thméï, à cause du rôle que
toujours vivant, chéri d'Isis et de celle-ci jouait dans l'Amenthi ou enfer
Phtha , et par la dominatrice du monde, égyptien; la scène du jugement de
Arsinoé, dieux Philopators aimés par Pâme devait se trouver dans son tem-
Amon-Ra, roi des dieux. » ple, comme elle y est en effet dans le
Dans le petit temple, d'une conser- sanctuaire de gauche : et c'est celle re-
vation parfaite, qui se voit aujourd'hui présentation qui avait, mal à propos,
derrière l'Aménophium de Thèbes, et fait considérer ce temple comme un
qui est précédé d'un petit propylon tombeau.
en grès, les souvenirs de Ptolémée On trouve aussi la mention de Pto-
Philopator ne sont point effacés. Le lémée Philopator sur un édifiée au
naos de oe temple est divisé en trois nord d'Esnèh et sur une porte d'en-
,

salles contigués , qui forment trois vé- ceinte de l'édifice à gauche du grand
ritables sanctuaires. Celuidu milieu temple de Karnac.
ou leprincipal, entièrement sculpté, Le nom de la reine Arsinoé se lit
contient des tableaux d'offrandes à aussi sur les monuments de Dakkèli
tous les dieux adorés dans le temple en Nubie , et d'Antéopolis en Égypte.
aux deux triades, celle de Thèbes, Les monuments nous ont encore con-
Amon-Ra, Mont h et Chons, et celle servé un autre fait remarquable, relatif
d'Herraonthis , ville voisine , Mandou à Ptolémée Philopator; ils nous in-
Kitho son épouse, et leur fils Har- duisent, en effet, à penser que ce
phré, et principalement aux déesses prince porta aussi le surnom de Eu-
Hathôr et Thmeï, qui paraissent dans pat or. Ce surnom , dans le contrat de
presque toutes les scènes. Ces deux Ptolémaïs, dont le protocole est tout
divinités sont seules nommées dans la à fait analogue à celui du décret de
dédicace du sanctuaire; et ces dédicaces, Rosette , est donné à une reine Arsi-
inscrites sur la frise de droite et sur noé , que son rang désigne comme la
celle de gauche , ne portent que le nom femme de Philopator. Il en résulterait
de Ptolémée Philopator : on y lit, pour qu'une inscription grecque de Paphos
ce roi grec , toutes les parties du vieux se rapporterait à ce même roi.
protocole des Pharaons : « L'Horus La pierre sur laquelle cette inscription
soutien de l'Égypte, celui qui a em- est gravée faisait partie de la base d'une
belli les temples comme Thôth deux statue , ou bien était placée au-dessous
fois grand le seigneur des Panégyries
, d'un bas-relief; le texte complet de
comme Phtha, le chef semblable au l'inscription porte: « La ville de Paphos
soleil le germe des dieux fondateurs,
, honore par ce monument le roi Ptolé-
l'éprouvé de Phtha , etc. ; le fils du so- mée, dieu F.upator, et le consacre à
leil, Ptolémée toujours vivant, bien Vénus. » On voit, par cette interpréta-
aimé d'Isis, l'ami de son père (Philo- tion que j'emprunte au savant ouvrage
pator), a fait cette construction en où M. Letronne n consigné tant de

>

Digitized by Google
L'UNIVERS.
précieuses notions pour servir à l'his- tor ne porta-t-il pas l'attention jusqu'à
toire de l'Egypte pendant la domina- prévoir ces malheurs? HeureusemVot
tion des Grecs et des Romains que ,
pour l'Egypte que l'ambition d'un
c'est la ville même de Paphos qui ho- homme la délivra en partie du mal qui
nora Ptolémée qui le consacra à Vé-
,
résultait dç l'imprévoyance du roi.
nus; et c'était un usage, bien connu Tlepolème , jaloux de la* fortune d'Aga-
de l'antiquité de déposer dans un tem-
, thocle, excita, favorisa le soulève-
ple et de dédier à la divinité la statue ment du peuple ; et , après trois jours
de celui qu'on voulait honorer. des plus grands désordres, le jeune
Ainsi ce roi grec d'Egypte , Ptolé- Épiphane, qu'Agathocle avait enferme
mée i
fidèle à la fois à la religion de avec lui dans l'arsenal du palais , fut
sa patrie originelle et à celle du pays livré à la populace d'Alexandrie : elle
qu'il gouvernait , agréait la protection le plac.a sur un tribunal et lui fit pro-
des dieux de la Grèce , pendant qu'il noncer la condamnation à mort d'Ag.i-
élevait sur les bords du Nil des tem- thocle et de ses affidés. Sa sœur et sa
ples aux dieux de i'Égypte, dont il invo- mère devinrent aussi les victimes des
quait aussi la bienveillance. La religion fureurs populaires.
était profondément mêlée aux idées Tlépofème fut successeur d'Aga-
le
aux institutions égyptiennes , et à un thocle dans la du jeune roi ; il
tutelle
degré tel qu'il fut peut-être sans exem- était propre aux choses de la guerre,
ple et sans imitation dans les autres mais le plus inepte des hommes pour
États de l'ancien monde. En Égypte l'administration civile. Sosibe n'avait
les gouvernements étrangers que la pas cessé d'être chargé des sceaux de
conquête y transporta furent dans l'État ou de l'anneau du roi : son fils,
l'obligation ou de pratiquer publique- de retour d'une mission auprès de Phi-
ment le culte national, comme le lippe, roi de Macédoine , tacha d'exci-
firent les Lagides , d'après les conseils ter l'opinion contre Tlepolème. Mais
et l'exemple d'Alexandre, ou de dé- celui-ci triompha de ses insinuations,
truire les temples et la caste sacerdo- et obtint en même temps que Sosibe
tale comme les Perses tentèrent de le lui remît l'anneau royal , ce qui plaça
faire d'abord , se courbant ensuite sous tout le gouvernement dans ses mains.
la loi commune à tous les rois étran- ïlépolème n'était pas né pour de si
gers à l'Égypte, comme le prouvent importants devoirs; et bientôt, dit
les monuments déjà cités, ou Darius encore Polybe, non-seulement il se
et Xerxès sacrifient à Ammon et aux perdit lui-même, mais encore il mit
autres dieux du pays. en péril l'existence de la monarchie.
Ptolémée Èpiphane, fils unique de On lui substitua pour tuteur du jeune
Ptolémée PhHopator, Agé seulement foi ou régent du royaume, Aristo-
de cinq ans et demi fut appelé au trône
, mene , Acarnanien de naissance l'un ,

d'Egypte par l'ordre de succession en des anciens amis d'Agathode, et qui


usage dans ce royaume. En faisant vécut jusqu'après l'époque où cessa la
connaître la mort de Philopator, Aga- minorité du roi , Epiphane lui ayant
thocle annonça en même temps qu'il accordé longtemps encore beaucoup
avait été nommé par lui tuteur du de confiance et beaucoup d'attache-
jeune roi à la faveur de cette supposi-
; ment , le respectant presqu'à l'égal
tion , cherchant à se rendre l'armée
et d'un père. Aristomène régent fit mou-
favorable par le rétablissement de sa rir Scopas immédiatement avant le
solde, il se livra de nouveau à toute la couronnement d'Epiphane.
fougue de ses passions son orgueil : Ainsi la minorité du jeune roi , qui
ses exactions allaient croissant chaque dura huit années depuis la mort de
jour, et le mécontentement général Philopator jusqu'à l'éjKMpiede son cou-
cherchait sur qui reposer ses vœux et ronnement, fut gouvernée par trois
ses espérances. régents qui se succédèrent : Agathocle
. Pourquoi, dit Polybe, le roi Philopa- d'abord , ensuite Tlepolème , enlin

Digitized by Google
ÉGYPTE. 427

A ristourne quiplus heureux que ses


,
ce même hiver en Asie, attaqua en-
de uft prédécesseurs, ne perdit pas la suite les possessions d'Attalus , y re-
vie en cessant ses fonctions. nonça bientôt sur l'invitation du sénat
Pendant ce temps, Antiochus, roi romain, et d'autant plus volontiers
de Syrie , fit , contre l'Egypte , de nou- qu'il venait d'apprendre que Scopas
velles entreprises. avait profité de ce temps pour repren-
Philopator ayant cessé de vivre , dit dre la Célé-Syrie.
Justin, Antiocnus, enhardi par la mi- Scopas se jeta dans Srdon avee dix
norité du jeune roi d'Égypte , entreprit mille nommes, et Antiochus vint l'y
une nouvelle expédition contre ce attaquer. Trois généraux et des troupes
royaume , et s'empara des villes de la- accoururent vainement d'Ëgvpte pour
Phénicie et de celles de la Syrie qui le secourir : il capitula , à la seule con-
étaient soumises aux Egyptiens. dition de la vie sauve.
Il parait qu'ils n'avaient opposé Antiochus, poursuivant ses succès,
qu'une inutile résistance aux troupes soumit les principales villes de la Sy-
<f Antiochus jusqu'au moment où Sco- rie ; enfin , Samarie et Jérusalem. Si
pas , mécontent de ce que les Etoliens le témoignage de Josèphe est fidèle,
ne lui avaient pas continué la préture, Antiochus, maître de cette dernière
arriva à Alexandrie , fit agréer ses ser- ville, y publia un édit qui accordait
\ices et repartit pour aller faire une quelques privilèges à ceux qui y fai-
levée de troupes chez les Étoliens saient leur résidence ou qui viendraient
mêmes. Agathocle ramena en Egypte, l'y fixer avant la fin de l'année. La

l'an 203, dans l'année suivante, six Syrie fut réoccupée par Antiochus vers
mille lK>mmes qu'il avait levés dans l'été de l'année 200, et dès l'automne
l'ÉAolie. de cette même année, Antiochus avait
Presqu'en même temps arriva la dé- repris toutes les villes de la Celé-Syrie
putation de Rome, où se trouvait et de la Palestine.
M. Lepidus, annonçant la
.ÏJiuliiis Ce roi , engagé dans d'autres entre-
défaite d'Annibal et ayant aussi pour prises contre Philippe et Rome , con-
but de s'assurer des dispositions de la sentit à traiter avec les tuteurs du roi
cour d'Alexandrie à l'égard des entre- d'Egypte. Il promit sa fille Cléopàtre
prises que Home méditait contre Phi- pour femme au jeune Ptolémée, et
lippe de Macédoine ; car on ne remer- pour dot lui assigna les provinces
ciait le jeune roi des services qu'il même qui avaient été le sujet de la
n'avait pas rendus, que pour s'assu- guerre terminée par ce traité. Saint
rer tous ceux que l'on pouvait en at- Jérôme assure que ce mariage fut con-
tendre. clu dans la 7 e année du règne d'Épi-
L'été et l'automne de la même année phane, c'est-à-dire dans l'année 199
202 furent donnés aux dispositions avant l'ère chrétienne.
nécessaires à la grande campagne qui L'état malheureux de l'É^ypte, at-
était préparée contre Antiochus, et ce taquée au dedans par les vices d'une
fut pendant l'hiver que Scopas se mit administration dévastatrice , et au
en marche. Scopas , en effet , prit aussi- dehors par un roi puissant, n'avait
tôt un grand nombre de villes de la cependant pas entièrement détourné
Palestine et de la Célé-Sycie. de leurs études et de leurs travaux les
Mais Antiochus, pour réparer les philosophes que l'école d'Alexandrie
pertes qu'il venait d éprouver sur ce y avait rassemblés. Hipparque y conti-
point se hata de renoncer à son en-
, nuait ses immortelles recherches sur
treprise contre Attalus, et au prin- les lois de l'univers , et inscrivait dans
temps suivant il reprit l'offensive en- ses tablettes les faits astronomiques
vers Scopas , le rencontra bientôt sur sur lesquels il devait établir ses théo-
les bords du Jourdain, lui livra ba- ries. 11 observait l'éclipsé de lune qui
taille auprès de la ville de Pauia , et le arriva le 22 septembre de l'an 201
battit complètement. Antiochus passa avant l'ère vulgaire; celle du 19 mars

L Digitized by V^OOQlC
468
suivant, qui appartiennent Tune et n'ayant rien appris de ce qui est d
e
l'autre à la 5 année du règne <T Kpi- l'art de la guerre, à cause de l'injust
phane ; enfin celle du 12 septembre de orgueil de Polycrate , et cependant :

e
l'an 200, qui arriva au milieu delà 6 était alors âge de 25 ans. »
année du règne de ce prince, avant Ce Polycrate avait reçu de Philopa
de paix conclu avec Antio-
le traité tor, père d'Épiphane, le gouverne
chus. ment de l'île de Chypre; il avait et
Les malheurs de cette guerre et les assez heureux dans ces temps de dis
désordres de la régence n'avaient pas cordes pour conserver cette fie as
peu contribué à troubler l'intérieur du jeune roi et pour y amasser une somm
royaume. Épiphane cependant , ou ses considérable d'argent qu'il lui apporta
tuteurs , avait cherche à combiner les et il ne vint à Alexandrie qu'à epoqu I

effets de la clémence avec l'appareil même de la séditionde Scopas, la


militaire ; il avait accordé des amnis- Suelle fut l'occasion du couronnemen
ties , et placé aussi sur divers points u jeune roi. Polycrate contribua beau
du royaume des forces de terre et de coup par lui et les siens à foire devan
mer oui devaient assurer la tranquil- cer majorité d'Ëpiphane , ce qui fi
la
lité générale. La ville de Lvcopolis était qu'il acquitun très-grand crédit auprèi
devenue un foyer de rébellion ouverte; ou roi après son couronnement.
le jeune roi alla en faire le siège; et, Celte sédition de Scopas éclata at
coimne une crue extraordinaire du Nil sein même de la cour du roi toujours
pouvait en détruire les ouvrages , il lit mineur. Ce chef insoumis tenait de se-
fortifier les ouvertures des canaux pour crètes conférences auxquelles assis-
en prévenir les effets; bientôt après il taient ses nombreux amis. Aristomène,
prit la ville de vive force et fit mettre régent du royaume, l'accusa de cons-
a mort les chefs de la sédition. Cela piration, de désobéissance aux ordre5
se passa dans la 8* année de son règne, du roi , et le lit mettre à mort. Dica?or-
comme le dit textuellement le décret que partagea la destinée de Scopas
inscrit sur la pierre de Rosette , dont et les Étoliens furent licenciés. Les
le texte entier a été déjà rapporté dans écrivains de l'antiquité rapportent que
cet ouvrage {suprà, page 61). le sort des Étoliens étant re«lé, ceux
Polybe ajoute que lorsque Ptolémée qui dirigeaient les affaires de l'Etat
assiégea Lycopolis, les principaux habi- s'occupèrent du couronnement du roi
tants , frappés de terreur, se confièrent non pas qu'il eût atteint l'âge où il de-
d'eux-mêmes à sa clémence, et qu'il vait prendre la couronne, mais parce
n'en usa pas moins sévèrement à leur que l'on espéra que lorsque le roi gou-
égard. Polybe ajoute ensuite : «Quelque vernerait par lui - même , l'état des
chose de semblable à ce qui s'était choses pourrait s'améliorer et l'admi-
passé dans cette occasion arriva aussi nistration publique avoir une plus sdre
lorsque Polycrate soumit les rebelles. » direction; en conséquence on fit les
« Il restait encore des plus considérables, préparatifs nécessaires pour que cette
dit-il, Athinis, Pausiris, Chésouphos grande cérémonie eut heu avec toute
et Irobaste qui , cédant à la force des la magnificence convenable. Le com-
e
choses , vinrent à Sais se mettre d'eux- mencement de la 9 année du règne
mêmes entre les mains du roi ; mais du jeune roi approchait , et le désir de
Ptolémee, abjurant toute clémence, profiter de cet anniversaire dut aussi
les fit attacher nus à des chars , et s'en contribuer à faire hâter l'exécution de
vengea en les faisant ainsi mourir. » ce projet.
* « Le roi , continue encore Polybe , s'é- Le roi fut couronné en effet le pre-
tant rendu de Sais à ÏNauoratis avec mier jour de la 9 r année, lequel ré-
son armée , et Aristonicus lui amenant pondait au 27 mars de la 197 e année
pour le secourir des troupes merce- avant l'ère chrétienne.
naires de la Grèce, il descendit par C'est à l'occasion de cette solennité
eau à Alexandrie pour les y attendre tout à la fois civile et religieuse pour

Digitized by Google
ÉGYPTE. 429

"Egypte, que nous devons faire re- la frise du temple d'Antœopolis , ins-
lurquer le nouvel usage introduit par cription où Ptq'émée Pbilométor, Gis
* prince , imité quelquefois par ses de Ptolémée Epiphane, est désigné
successeurs , de prendre deux surnoms comme le fils de Ptolémée et de Cleo-
îu lieud'un seul, comme Pavaient fait pâtre y dieux Èpiphanes et Eucha-
lesrois ses ancêtres. On remarque, ristes. Il est vrai que cette inscription
ians l'inscription de Rosette , que le a été restituée du temps des empereurs
mot Êpiphane, surnom de ce Ptolé- Antonin et Verus, qui firent réparer à
mée, v est toujours et immédiatement la même époque l'entrée ou la toiture
suivi àe l'adjectif Euchariste. On a pu de ce même temple; mais, en plaçant
rroire d'abord que ce dernier mot avant leur nom celui du roi Pbilomé-
n'était que l'une des épithètes honori- tor, les deux empereurs romains ne
fiques dont les prêtres de l'Egypte, au- firent sans doute que respecter ce qui
teurs de cette inscription y ont envi- ,
existait avant eurà cet égard. Pbilo-
ronné le nom
de ce roi, que renferme métor avait consacré le temple égyp-
cette longue formule bien souvent ré- tien d'Anta^opolis au dieu Antée; cette
pétée , le roi Ptolémée, toujours vivant consécration fut constatée selon l'usage
(immortel), le bien-aimê de Phtha par une inscription; des dégradations
dieu Llpiphane , très - gracieux , et survenues dans cette partie du temple
c'est ainsi qu'elle a été traduite par le furent réparées par les ordres des em-
savant commentateur de cette inscrip- pereurs Antonin et Verus; ils voulurent
tion , qui a donné au mot Euchariste aussi faire constater ces soins religieux,
le sens généralement ailleurs.
qu'il a et ils placèrent leur nom à la suite de
Mais si Ton attention que ce mot,
fait celui de Pbilométor : c'est ce que font
(Jjiis les six passages du décret où on assez voir la forme et le lieu de l'ins-
le trouve , n'est jamais séparé de celui cription d'Antxopolis. Elle justifie
à'Ëpiphane, surnom du roi , que le donc ce qui vient d'être dit sur les
reste de la formule au contraire est mots Epiphane- Euchariste , considé-
plus ou moins complet dans ces mêmes rés comme les surnoms du
roi fils de
passages, que l'ordre des qualifications Pbilopator, de la même
manière que
n'y est pas régulièrement le même, l'inscription de Rosette justifie à son
que les litres toujours vivant, te bien- tour, sur ce point, l'inscription d'An-
uimé de Phtha, s'y trouvent indiffé- taeopolis. L'une et l'autre servent à
remment après ou avant le nom /Vo- 1>rouver que Ptolémée Épiphane donna
limée , eu le titre de roi , on peut con- c premier l'exemple de prendre deux
clure de la constante réunion du mot surnoms, et qu'il porta ceux de Épi-
Euchariste au mot Epiphane, que, phane-Euchanste. On verra qu'il fut
dans l'intention des auteurs du décret imité par ses successeurs.
le premier a un sens analogue à celui Délivré de sa tutelle par son cou-
du second , et qu'ils forment ensemble ronnement, Épipbane, selon Diodore
le surnom royal que porta Ptolémée de Sicile, gouverna d'abord ses sujets
(ils de Philopator. Cette opinion est de manière à mériter leur reconnais-
fortifiée par cette autre considération, sance; mais bientôt corrompu par la
que le mot dieu précède toujours les flatterie et les désordres de la cour,
su moins Épipluine-Euch uriste comme on lui inspira une telle baine contre
pour les consacrer, et l'inscription de Aristomene qu'il avait dans les pre-
Rosette, ainsi que toutes celles qui miers temps nonoré comme un père,
nous restent des autres Ptoléinées, qu'il le condamna à mourir par la
nous font voir que ce mot dieu n'y est cigué.
employé que pour caractériser le sur- Peu après le couronnement d'Êpi-
nom de ces princes, et de la même pbane , le temps arriva d'accomplir les
manière qu'il I est ici. Enfin toute sorte conditions du traité fait en son nom
de doute à ce sujet doit céder à l'auto- avec Antiocbus , et tl épouser sa lille
rité de l'inscription grecque tracée sur Cléopâtre. Antiocbus la ût venir à Ra-

Digitized by Google
m L'UN
phia , et conduire en Éçypte où elle voir avaient lassé la patience de la na-
s'unit à Ptolémée. II était alors dans tion ; plusieurs provinces avaient cessé
la 19° année de son âge, vers le mois d'obéir, et Pon en était venu à ce point
de janvier 192. Dès la même époque, indiqué par Diodore , où le roi , deve-
Ptolémée reprit possession des pro- nant chaque jour plus cruel et plus
vinces syriennes qu'Antiochus lui ren- absolu, avait attire sur lui toute la
dait comme dot de sa fille. haine de son peuple et couru le risque
La politique du roi de Syrie deman- de perdre la couronne.
dait que PÉgypte restât neutre dans C'est ce qu'explique cet autre frag-
ses différends avec Rome; mais, dès ment de Polybe, déjà connu . qui nous
que la guerre eut été déclarée , Ptolé- apprend que, pour apaiser les insurrec-
mée, sans égard pour ses liens de fa- tions, le roi fut contraint de mettre
mille avec Antioehus, envoya offrir une armée aux ordres de Polycrate, de
au sénat romain des secours de tous se rendre à Sais , ensuite a ftaucratis
genres contre le roi de Svrie , et cela d'où il revint à Alexandrie pour rece-
se passa sous le consulat de M. Acilius voir les troupes mercenaires qu'ame-
Glabrio et P. Cornélius Scipio. nait de la Grèce Peunuque Aristonicus
Le consul Acilius avait réuni ses qui , élevé à la cour du roi , lui fut tou-
troupes à Brindes pour le 15 du mois jours très-dévoué. Ces insurrections
de mai suivant; et peu après, dans furent apaisées la 25 r année de l'âge du
e
Tété de la même année Antioehus
, roi., ce qui porte à la 20 de son règne.
fut complètement défait par Acilius Épiphane vécut encore quatre ans,
aux Thermo| \ les, sa flotte prise ou eut un second Gis de Cléopâ'tre, renou-
détruite en même temps auprès d'An- vela l'alliance avec les Achéens , et il
dros par Atilius, amiral romain, qui faisait des préparatifs secrets contre
conduisit à Athènes les vaisseaux pris Séleucus, roi de Syrie, lorsque, sa
dans ce combat; et cela arriva Tété cruauté et ses exactions ne laissant
de Pan 191 avant Père vulçaire. plus de sûreté pour personne , il devint
Après la défaite totale d Antioehus, la victime de ses propres fureurs et
qui eut lieu à Magnésie l'année sui- périt par le poison, à peine parvenu à
r
vante, Épiphane, rassuré contre lui, la 29 année de son âge et à la 24' de
s'occupa de renouveler les traités qui son règne , à la On de l'hiver de Pau
existaient avec les Athéniens. Bientôt 181 avant chrétienne.
l'ère
après Antioehus cessa de vivre et laissa C'est saint Jérôme qui nous apprend
la couronne à son fils Séleucus Philo- que ce roi mourut au milieu des pré-
pator, dans la 16 e année du règne d'É- paratifs de guerre qu'il faisait contre
piphane. Séleucus.
Deux années* après ou environ Malgré les effets, si calamitcux pour
Cléopâ'tre mit au monde un fils qu'on l'Égypte , des désordres qui caractéri-
croit être celui dont parle l'historien sèrent profondément le règne de Pto-
Josèphe. A
l'occasion de sa naissance, lémée Epiphane, un nombre remarqua-
les villesde la Svrie envoyèrent des ble d'édilices publics furent construits
députes à Alexandrie pour complimen- ou réparés ils ont conservé jusqu'à
:

ter le roi et lui offrir des présents. Si nos jours le nom et les souvenirs offi-
l'indication que l'on peut tirer du pas- ciels d' Épiphane honorant attentive-
sage He Josephe est exacte, la nais- ment les dieux , et affligeant en même
sance du fils du roi se rapporterait à temps son pays de tous les malheurs
u
la 18* année de sou règne. 3 'engendrent les mauvaises passions
A cette époque, et d'après le té- es princes.
moignage de Polybe, consigné dans A Esnèh, la porte, le fond de la
un fragment précédemment cité, le cella et leportique du grand temple,
royaume ne jouissait pas d'une paix métamorphosé aujourd'hui en magasin
profonde; une mauvaise administra- de coton , en sont la partie la plus an-
tion et de trop fréquents abus de pou- cienne ; elle fut construite par l'ordre

Digitized by Google
ÉGYPTE. 431

de Ptolémée Épiphane. À Edfou égale- mée toujours vivant, dieu aimé de


ment , la partie la plus ancienne et la Phlha, chéri d'Amon -Ra, l'ami du
moins incorrecte en même temps parmi bien... » (le reste est détruit.)
les sculptures de décoration du grand On lit sur la partie de gauche
temple , est l'ouvrage du même roi. Le (V e ligne) «Le fils du soleil Ptolémée
:

grand temple d'Ombos fut aussi com- toujours vivant , dieu aimé de Phtha,
mencé durant le même règne. A Phila? chéri des dieux et des déesses mères
les sculptures du grand édifice consacré bien-aimé d'tiathôr, a fait exécuter
à Isisfurent de même commencées sous cet édifice en l'honneur de sa mère
Ptolémée Philadelphe, et continuées par la tutrice de l'Occident , pour être vi-
l'ordre oV Épiphane; elles portent tous vifié à toujours. (2 e ligne) : La royale
1rs caractères de ce temps de décadence épouse Cléopàtre,bien-aiméedeThméï,
de Kart. On voit aussi dans le même tutrice de l'Occident, a fait exécuter
lieu, entre les deux pylônes de ce cet édifice... • (le reste manque.)
grand temple, et placés à droite et à Les bas-reliefs encore existants sur
gauche, deux beaux édifices d'un genre les parois de droite et de gauehe du
particulier.Celui de gauche est un pronaos, ainsi que sur la façade du
temple périptere, dédié à la déesse temple formant le foud de ce même
Hatnôr et à la délivrance d'Isis qui pronaos , appartiennent tous au règne
tient d'enfanter Horus; la plus an- d Épiphane . et tous se rapportent aux
tenne partie de ce temple est aussi de déesses Hathor et Thméï, ainsi qu'aux
Ptolémée Épiphane. grandes divinités de Thebes et d'Her-
Ce fut aussi sous le règne de ce roi monthis. On voit aussi dans ce sanc-
que fut faite la dédicace du petit temple tuaire deux tableaux sculptés où figure
élevé derrière rAmenophion de Thebes. l'image de Ptolémée Épiphane. Son
Le pronaos de cet édifice est formé de nom se retrouve aussi à Rarnac, à
deux colonnes et de deux piliers ornés Dendéra; à Philrc il est qualifié de roi
de têtes symboliques de la déesse Ha- semblable au soleil , chéri des dieux
iWr, à laquelle ce temple fut consacré. aimé d'imouth , fils de Phtha, et ap-
Les tableaux qui couvrent le fût des prouvé par Phtha. Le monument de
talonnes représentent des offrandes PhiUe porte aussi une insoriptiou
faites à cette déesse et à sa seconde grecque au nom du roi et de la reine
forme Thméï|, ainsi qu'aux dieux annonçaut la consécration du temple
Amon-Ra, Mandou, Tnmou (Escu- à Escuiape. Lne autre inscription
tape) , et plusieurs formes tertiaires de grecque , relative à Ptolélnée Épiphane
la déesse Hathôr, adorée par le roi nous fait connaître d'autres particula-
Ptolémée Épiphane, nommé dans la ritésde son histoire ; elle est gravée
dédicace du temple. sur une plinthe de basalte vert, et
Cette déd icace consiste dans une gran- elleporte ce oui suit «Lacommunauté
:

de inscription hiéroglyphique sculptée des Lyciens honore par ce monument


sur toute la longueur de la frise du (un cippe ou une statue) Ptolémée,
pronaos ; cette formule dédicatoire est commandant des gardes du corps,
eu deux parties affrontées, selon l'usage grand veneur, fils de Ptolémée, un
égyptien , méthode propre a l'écriture des premiers amis et grand veneur , à
hiéroglyphique et à elle seule , les signes cause de sa vertu et du dévouement
se rangeant indifféremment dans les qu'il manifeste sans cesse envers le
deux directions opposées. La partie de roi Ptolémée, la reine Cléopâtre sa
,c
droite de la dédicace porte ( 1 ligne) : sœur, dieux Épiphanes et Euoharistes,
1 Le roi dieu Épiphane, que Phtha- et leurs enfants, et envers la commu-
Thoré a éprouvé, image vivante d'A- nauté des Lyciens.» On voit par là que
mon -Ra, le chéri des dieux et des la Lycie reçut de grands services de la
déesses mères, le bien-aimé d'Amon- part du roi d' Egypte , dont elle honore,
Ra , etc. , pour être vivifié a toujours. par un monument public , un des prin-
{V liqne)i La divine sœur de Ptolé- cipaux officiers. Cet officier porte le

Digitized by Google
432 L'UNITERS.
titre de grand veneur , et Ton se rap- cTor, à cause des riches mines de ce
pelle, à ce sujet, que Polybe nous ap- métal qui existaient dans son voisinage,
prend que Ptolémee Épiphane fut un que les Ptolémées Grent exploiter.
chasseur ardent et habile ; il voulut être La Bérénice de la Thébaîde était un
représenté sur ses monnaies avec f)ort sur Arabique, à la même
le golfe
l'arme dont il se servait contre les bétes atitude que Syène ; elle fut fondée par
féroces. Ptolémée Philadelphe, qui lui donna
Le lecteur a pu remarquer , au sujet le nom de sa mère; ville importante
des reines femmes des cinq premiers où abordaient les marchandises de
Ptolémées, qu'elles portèrent toutes l'Arabie heureuse et celles de l'Inde,
l'un des trois noms de Bérénice , Ar- transportées de là à Coptos. C'est aussi
sinoé ou Cléopflfre , outre le nom pa- dans le voisinage de cette ville qu'exis-
tronymique de Ptolémée. On sait aussi taient les riches mines d'émeraudes ex-
que dans les nomenclatures de la géo-
, ploitées par les rois d'Egypte, et qu'a
graphie ancienne de i'Orient , il se récemment cherchées, par l'ordre du
trouve un assez grand nombre de noms vice-roi Méhémet- Ali , et heureuse-
de lieux tirés de celui de la famille ment retrouvées M. Cailliaud , qui a
même ou de ceux de ces reines ; et il vu sur place les outils et les usten-
est naturel de penser nue ces noms ont siles employés dans les antiques ex-
étédonnésà ces villes, fondées ou agran- ploitations.' La quatrième ville de Bé-
dies , dans l'intention d'honorer les per- rénice existait dans la Cyrcnaïque.
sonnages qui les portaient. Une province entière'de l'Égypte,
Ainsi le lieu nommé Theôn Sôterôn le nome du Fayoum, porta le nom de
Portus, le port des dieux sauveurs, la reine Arsinoé, et fut nommée nome
dans la troglodytique , parait avoir Arsinoïte; la ville principale porta le
reçu ce nom de Ptolomée Philadelphe nom d'Arsinoé. Une autre ville de ce
pour honorer la mémoire de son père nom était située au fond du golfe 11e-
et de sa mère , surnommés les dieux roopolite. C'est là que venait aboutir
sotères ou sauveurs. le canal des deux mers que Ptolemre
Ptolémaïs , dans la même contrée Philadelphe fit terminer, et il y fonda
fut fondée par l'ordre du même roi cette ville en l'honneur de l'une des
Philadelphe, et surnommée Épi - The- deux reines qui portèrent ce nom.
ras pour la chasse , à cause de la des-
,
Plus tard, cette ville, restaurée ou
tination de eu lieu qui devait être le agrandie par la dernière Cléopatre,
centre de la chasse aux éléphants , or- porta aussi le nom de Cléopàtris. Une
donnée par ce prince. autre Arsinoé était en Cyrénaïque sur
Il y eut aussi trois autres villes nom- la mer on donna
; ce nom à l'an< ienne
mées Ptolémaïs, l'une située au sud Tuchira; enfin Pile de Chypre eut
de Panopolis, sur la rive gauche du aussi une ville du nom d'Arsiuoê : on
Kil, et qui, avant, porta d'abord le croit même que ce nom fut commun à
nom égyptien de Psôi; une autre dans plusieurs lieux de la même île, qui fut
la Cyrénaïcjue dépendance de l'Egypte ;
,
une des dépendances de l'Egypte , et le
et la troisième en Syrie, célèbre dans sejourhabituel, volontaire ou forcé, de
l'histoire moderne sous le nom de plusieurs princes de la race des La-
Saint-Jean d'Acre. gides.
Il y eut aussi quatre villes nommées Nous avons dd rappeler ici ces sou-
du nom de Bérénice : celle oui était venirs essentiellement historiques , qui
située sur le détroit par lequel le golfe se sont, pour la plupart, conservés
Arabique communiquait avec la mer sur les lieux jusqu'à nos jours, et qui
Érythrée, et qui fut surnommée Épi- d'ailleurs trouvent des analogies dans
Déra du nom du promontoire de
, les annalesdes pays voisinsde l'Egypte:
Déra , dont la ville était voisine. L'au- ces sept ou huit villes &.4ntioche et les
tre Bérénice, sur le golfe Arabique, Séieucie, non moins nombreuses , prou-
était surnommée Pauchrysos, toute vent aussi que la famille des Séleucides

Digitized by Google
i

?TE. 369

a consigné cette remarque importante, de quinze lieues; le canal traversait


et expliqué ces variantes dans son ma- ensuite les lacs amers par une inflexion
nuscrit sur les dynasties égyptiennes, au sud-est , sur huit à neuf lieues d'é-
et son illustre plagiaire n'a pas hésité tendue; enfin, par une autre inflexion
il s'emparer de cette remarque comme vers le sud , et cinq lieues de longueur,
Tayant faite lui-même à Rosette. Que il atteignait le golfe Arabique : ce ca-

repondrait-il à un honnête homme qui nal avait donc vingt-cinq lieues de dé-
le prierait de lui indiquer le lieu, la veloppement, et la navigation totale
roccia, où ces deux cartouches exis- du Nil au golfe Arabique était de
tent, stanno scolpitif Une note écrite trente-trois lieues , y compris le trajet
sur le dessin dit qu'ils étaient sur un des lacs. Hérodote ajoute que la tra-
bloc de pierre isolé; et qu'est devenu versée exigeait quatre journées , ce qui
ce fragment depuis l'année 1777? fait supposer qu'elle se faisait à la
Je trouve aussi dans le même ma- rame ou à la cordelle. La largeur du
nuscrit de mon frère le dessin et la canal était variable selon la nature du
traduction d'une stèle funéraire qu'il a terrain ; sa profondeur ne devait pas
vue à Alexandrie, dans laquelle le roi être moindre que celle qu'exigent des
Néchaô est nommé, et dont les dates bâtiments tirant de dpuze à quinze
et les nombres seront d'une utilité pieds d'eau , et sa pente devait être plus
immédiate pour l'ordre chronologique considérable durant les hautes eaux du
des rois de la XXVI e
dynastie égyp- Nil que dans l'état ordinaire du fleuve.
tienne. Voici le texte de fa portion im- Il reste , toutefois , queluues doutes sur

portante de ce précieux monument : la complète exécution de ce canal dès


« Le prêtre Psammétichus naquit le temps des Pharaons, et les' traditions
heureusement l'an III, le 1 er jour du sont diverses sur ce point important.
mois de paôni , sous le règne du fils Aristote rapporte que les Pharaons dis-
du soleil Néchaô. La durée de sa vie continuèrent les travaux de ce canal
fut de LXXI
ans, IV mois et VI jours après qu'ils eurent été informés que la
et il mourut Pan XXXV, le 6 jour du
e
mer Rouge était plus élevée que les
mois de paôni du règne du ûls du so- terres d'Egypte ; et , sur cet avis
leil Amasis. » l'entreprise n'aurait été conduite que
Cette date de la troisième année du jnsqu'aux lacs amers. La mer Rouge
règne de Néchaô est la plus élevée que est , en effet, plus élevée de trente pieds
l'on connaisse; il est porté à huit an- au moins que la Méditerranée : les ni-
nées dans les listes de Manéthon. Hé- vellements exécutés par les géomètres
rodote attribue à Néchaô les premiers de l'expédition française en Egypte
travaux pour établir le canal de com- ne laissent subsister aucun doute sur
munication entre les deux mers, la ce sujet : que ceux qui voudront l'ap-
Méditerranée et la mer Rouge. profondir s'éclairent, comme nous ve-
L'importance commerciale et poli- nons de le faire , aux savantes investi-
tique de ce canal fut connue de l'anti- gations de M. l'ingénieur Le Père:
quité: cet ouvrage fut plusieurs fois nous y avons cherché les vestiges de
entrepris et plusieurs fois abandonné. la grande entreprise attribuée par Hé-
Selon Hérodote, Néchaô y aurait vu rodote au Pharaon Néchaô II.
périr cent vingt mille hommes em- Il est certain que ce même roi porta

ployés à le creuser. Il fut ouvert sur le la guerre en Syrie; il l'y prépara en


point où se trouve la moindre distance faisant d'abord construire des vais-
entre le Nil et la mer Rouge. Il tirait seaux ; les traces de ses chantiers sub-
son origine de la branche pélusiaque sistaient encore quand Hérodote visita
du fleuve , dont il était une dérivation l'Égypte. Néchaô conduisit ensuite son
près de Rubaste, se dirigeant de là, à .armée par terre, et défit les Syriens
l'est, jusqu'à l'entrée de l'Ouady actuel ; près de Magdole, ou plutôt Mageddo
le cours de l'Ouady en était la prolon- selon la Bible. On lit en effet, dans le

gation , aussi à l'est , sur une


longueur quatrième livre des Rois , que du temps
e
24 livraison, (Egypte.) 24

Digitized by Google
370 L'UNIVERS.
de Josias, de Juda, Néchaô ayant
roi phis, et les matériaux de l'édifice pha-
marché contre le roi d'Assyrie Vers raonique ont servi à la construction de
l'Kupbrate, Josias alla au-devant du la citadelle arabe du Caire; on y voit
Pharaon et fut tué à Mageddo; que son encore un bas-relief représentant Psam-
Gis Joachaz fut élu roi à sa place. métichus II faisant la dédicace de ce
A peine Joachaz régnait depuis trois propylon ; d'autres blocs épars prove- ,

mois, qu'il fut détrôné par Néchaô, nant aussi de Blemphis, offrent cette
qui lui substitua Éliachim, autre fils particularité vraiment historique, de
de Josias, et envoya Joachaz prison- porter encore une légende royale gra-
nier en Égypte, après avoir mis à con- vée dans une aire carrée et creuse,
tribution Jérusalem et le royaume de annonçant sous quel roi le bloc a été
Juda. Éliachim,t nommé aussi loacim, tiré de la carrière, et pour quel édifice
demeura tributaire de l'Égypte, jus- il était destiné plusieurs de ces blocs
:

qu'à l'époque où le roi d'Assyrie se sont signés du rè^ne de Psamméti-


substitua, par la force des armes, au chus II. Des inscriptions de l'île de
roi d'Egypte dans la perception de ces Snem, à l'extrémité méridionale de
tributs et ceci arriva selon les pro-
, , l'Egypte, contiennent le nom de ce
phéties de Jérémie, dans la quatrième même roi ; il se voit aussi sur un beau
année du règne de loacim. sarcophage, sur une figure thalamo-
La courte durée de celui de Né- pnore er sur la oase u une autre figure
chaô II , qui n'est porté qu'à six années en bronze du musée du Louvre; on l'a
dans les listes de Manéthon, s'accor- aussi recueilli dans quelques tombeaux
dera- t-elle avec les indications chrono- des environs de Memphis. L'obélisque
logiques de la Bible? Aucun doute ne de la Minerva, à Rome, fut élevé en
peut s'élever à ce sujet; car Néchaô Égypte par Psammétichus II. Ce roi tut
attaqua Josias, et celui-ci perdit la vie honoré d'un sacerdoce ; une statuette en
dans cette rencontre. Joacnaz succéda basalte vert porte une inscription qui se
à son père mais il ne régna nue trois
, lit Aménowthph, fils d'Horus prêtre
:
,

mois. loacim vint après, et cest à la de Nèïth et de Psammétichus, chéri


quatrième année de son règne mie de Nèïth, né de l'adoratrice de Néïth
Néchaô perdit sa conquête en Syrie, dame de la région de Sésaw, Tsanisis.
par suite d'une bataille donnée sur Une autre figure en basalte noir, qui
l'Euphrate, et gagnée contre lui par était à Florence, porte la date sui-
Nabuchodonosor, qui le repoussa dans vante Tan XI, de phaménoth ter',
?

la frontière ordinaire de l'Êgvpte : ces du roi soleil, etc., Psammétichus. Plu-


rapports historiques se corroborent sieurs recueils archéographiques font
donc réciproquement. connaître d'autres monuments isolés
A Néchaô succéda Psammétichus îl. du même règne, et le nom de ce roi
Les rapports de la Grèce avec l'Êgvpte n'est pas rare sur les scarabées et les
étaient devenus de plus en plus fré- amulettes; on le voit même accompa-
quents; les Éléens y envoyèrent des gné d'une inscription en caractères cu-
députes chargés d'étudier ses institu- néiformes (de Babylone) sur nn cylin-
tions publiques comparées avec celles dre : un prêtre est à genoux devant le
de la Grèce. Ils reçurent de sages con- cartouche royal.
seils des prêtres égyptiens. Le règne de Psammétichus II fut de
Les nom et prénom du second Psam- dix-sept ans selon tous les textes d'Eu- '

métichus se trouvent sur un assez sèbe tirés de Manéthon; Hérodote,


grand nombre de monuments encore qui nomme ce roi Psammis , et la liste
subsistants. Le nom y est écrit avec de Jules l'Africain, ne lui assignent
les mêmes caractères que celui de son que six années; on verra, par quel-
aïeul ; mais le prénom roval diffère par ques chiffres tirés de quelques stèles
un signe , et il signifie soleil se réjouis- égyptiennes , que le nombre 17, donné
sant dans le cœur. Il avait élevé un par Eusèbe , est confirmé par les nio-
pvopylon pour un des temples de Mem-

Digitized by Google
KG YPTK. 871

tes restes de Médi net - Habou , à les rois sesprédécesseurs , pendant une
Tbèbes, et les excavations <TE1-Assa- partie de son règne. Il fit la guerre
sîï*, fournissent plusieurs renseigne- contre Sidon , vainquit les Tyriens sur-
ments sur la famHIe de Psammétichus. mer ; il obtint les mêmes succès sur
H paraît , d'après ces renseignements, les Cypriotes et les Phéniciens réunis
•rne le nom de N'rtocris ( Nèïth victo- si l'on s'en rapporte à l'assertion de
rieuse) fut adopté pour les femmes de Diodore de Sicile. Apriès prêta aussi
cette race royale ; il fut porté en effet quelque secours à îSédéeias, roi de
par l'époose de Psairtmétichus I er , par Juda, contre le roi d'Assyrie et ses
celle de Psammétichus II , et peut-être Chaldéens ; mais ces secours ne furent
anssi par une de ses filles, comme on point efficaces; le roi de Juda perdit la
pourrait le conclure de réparations vie , Jérusalem fut prise , le temple du

faites aux colonnes protodoriques du Seigneur dépouillé de ses richesses en


palais de Médînet-Habou sous le Pha-
, or et en bronze ; et libre un instant au
raon A?oris, au moyen de pierres pro- sein de ces calamités, le peuple des
venant d'un petit édifice élevé par cette Juifs s'enfuit en Egypte, maigre les la-
princesse, qui est nommée avec son mentations et les menaces de Jérémie.
père à El-Assasif. On trouve aussi le Du reste, le prophète annonça que
nom de la iNitocris, femme de Psam- Dieu avait mis Apriès dans les mains
métichus II, sur un amulette de por- de ses ennemis, de ceux qui cher-
celaine émaHIée, ayant la forme d'un chaient son ame. Les succès d'Apriès,
cartouche rovaî , et sur les débris d'une en effet, touchèrent bientôt à leur
statuette de bronze, l'un et l'autre ob- terme.
jets appartenant au musée royal de Il avait pris pour prénom un car-

Paris. Les deux cartouches de cetie touche qui peut signifier soleil qui se
reine se lisent : La mère dame des réjouit dans le cœur, et pour nom
grâces, la chérie de Mouth, Nitocris. propre le cartouche-prénom de Psam-
Kous aurons bientôt l'occasion de par- métichus II , son père. On trouve ces
ler d'une de ses filles, qui devint la signes onomastiques et royaux dans
femme de l'usurpateur Amasis; et une inscription de l'île de Philae où ,

c'est en rappelant quelques circons- ils ont été recueillis par le savant voya-
tances du règne de ce dernier, que geur anglais Wilkinson; on les voit
nous retrouverons le lieu d'indiquer aussi réunis ou isolés sur une statue
avec quelque certitude, la durée du thalamophore du musée royal du Lou-
règne de Psammétichus II, et de celui vre, sur un fragment de revêtement
de son successeur. en bronze d'une antique porte en bois
Les listes de Manéthon nomment ce ornée d'un mufle de lion, remarquable
successeur Vaphris, Vaphrès; la Bible par la perfection du travail; on les lit
Chophra ou Hophra , et Hérodote de même sur deux faces de l'obélisque
Apnès, en le disant fils de Psammé- de la Minerva à Rome, qui porte aussi
tichus II. Diodore de Sicile n'est pas les noms du père de ce Pharaon. Les
moins formel à l'égard du rang que cartouches d'Apriès existent de même
cet Apriès doit occuper daus la dynas- parmi les nombreuses inscriptions com-
tie des Saïtes, lorsqu'il le comprend mémoratives gravées sur les rochers
(lins les quatre règnes (Saïtes) qui de l'île de Snem , près de Phila? ; enfin
er
suivirent la mort de Psammétichus I ; sur les débris de constructions égyp-
Apriès fournit le troisième de ces tiennes employés par le grand Saladin
règnes, e( Amasis le quatrième, qui fut, pour élever la citadelle du Caire.
d«* fait, le dernier, Cambyse occupant Tous ces monuments appartiennent
déjà une portion de PÉgypte à la mort aux temps où les affaires du roi Apriès
d'Amasis. prospérèrent. Ces succès rengagèrent
Hérodote dit aussi que le Pharaon a porter une armée contre Barce et la
Apries fut, après Psammétichus II, Cyrénaïque; elle fut défaite. Ce qui
son bisaïeul , le plus heureux de tous survécut vit dans cette entreprise uue
54.

Digitized by Google
372 L'UNIVERS,
trahison ; cette opinion s'accrédita, et trop évidentes sur quelques monu-
les troupes égyptiennes se mirent en ments notamment sur une stèle où
,

pleine révolte.' Le roi , pour les apai- parmi plusieurs rois nommés oo trouf e
,

ser et les ramener au devoir, dépêcha immédiatement avant le nom d'Ama-


vers elles Amasis, homme considéré sis celui d'un prince qualifié de Rë-
parmi les Égyptiens. Amasis haran- mesto , mot qui emporte étymoloçi-
guait les troupes mutinées ; il remplis- quement l'idée de haine profonde. Le
sait ce devoir, mais sans succès; un même cartouche se retrouve sur une
soldat qui se trouvait derrière lui pen- statue naophore du Vatican ; et , corn me
dant qu il discourait , lui mit un casque la stèle est d'une époque postérieure
sur la téte, en s'écriant: Qu'il soit au règne même d'Amasis , et date du
notre roi Et la volonté d'Amasis se
! règne de Darius , on a présumé que ce
trouva tout aussitôt d'accord avec ce cartouche outrageant pour le roi A priés
vœu confirmé par l'assentiment géné- avait été substitué au cartouche con-
ral. Amasis fut salué roi par Parmée; sacré durant sa prospérité , et adopté
ce fut en vain qu'Aprics tenta par ses dans les inscriptions publiques : les
envoyés de le rappeler au devoir et à rois perses n'avaient aucune inclina-
la soumission : l'objet de la contesta- tion à protéger l'honneur des rois égyp-
tion fut remis à la force des armes. Les tiens saïtes.
soldats égyptiens se réunirent sous les Le règne d'A pries fut de 19 ans se-
enseignes " d'Amasis : les mercenaires lon Jules l'Africain, et de 25 ans selon
cariens et ioniens vendirent leurs se- Eusèbe et Ijlérodote. La même incer-
cours à Apriès ; ils furent vaincus dans titude subsiste à l'égard de la durée
un combat livré près de Momemphis, du règne de Psammetichus II , portée
la Manouf-Elseflly, ou Manouf l'infé- à 17 ans par les uns, et à 6 années
rieure , des nomenclatures arabes. seulement par d'autres critiques. De
Amasis triomphant entra dans Sais précieux monuments vont décider de
résidence des rois saïtes ses prédéces- tous ces doutes , et compléter nos ren-
seurs , et s'établit dans leur palais. Il seignements sur l'état, les actions et
y conduisit avec lui Apriès, qui conti- les règnes de la XX\T dynastie. Le
nua d'habiter cette demeure royale où lecteur verra , par un exemple , quelle
il fut quelque temps fort bien* traité. est la valeur historique des monuments
Mais clameurs populaires imposè-
les égyptiens , de ceux même des moyennes
rent à Amasis une rigoureuse résolu- castes, quand les inscriptions égyp-
tion ; il fallut livrer Anriès à la popu- tiennes qui nous les expliquent ren-
lace qui l'étrangla. Il fut ensuite, par ferment des dates clairement expri-
les soins d'Amasis sans doute, inhumé mées.
dans les tombeaux royaux de sa fa- On a vu plus haut la traduction de
mille. quelques lignes de la stèle funéraire
Hérodote dit que ces tombeaux exis- d'un prêtre nommé Psammetichus
taient dans l'enceinte de l'Hiéron de qui naquit le r r paôni, de la 3* année
fteïth , auprès du principal édifice , le du règne de Nécnaô II, mourut le 6
temple proprement dit, a main gauche de paophi , de la 35" année du règne
en entrant. On a vu, par la descrip- d'Amasis, ayant vécu 71 ans, 4 mois
tion de l'état actuel des ruines de Sais, et 6 jours.
que la vaste étendue de la grande en- J'ai sous les yeux le dessin d'une
ceinte suffisait à tous ces édifices, et autre stèle de la "même famille: c'est
qu'une attentive restauration y mar- encore un Psammetichus qui naquit
rr er
quait distinctement la place de chacun. le l épiphi de l'an 1 du règne de
Telle fut la fin du Pharaon Apriès. IS'échao II; mourut le 28 pharmouthi
e
Ilparaît que la haine publique s'atta- de la 27 année du règne d'Amasis,
cha à sa mémoire, que l'humanité ayant vécu 65 ans, 10 mois et î
d'Amasis ne put pas l'en préserver; et jours.
l'on a cru en reconnaître les preuves La première stèle a déjà été men-

Digitized by Google
ÊGYPTE. 373

tionnée, et même expliquée par un doitse fixer pour la durécdes règnes suc-
écrivain italien qui explique tout har- cessifsde Psammétichus II et Apriès ;
diment , et qui ne s'est pas toutefois et comme la liste d'Eusèbe, dans ses di-
aperçu qu'il y a un déficit de cinq jours vers textes , s'accorde à fixer la durée
dans'la somme de la durée de la vie du règne de Psammétichus II à 17 ans,
du défunt Psamméticbus; car les plus nous adopterons ce nombre , et nous
simples notions du calendrier égyptien laisserons une durée égale au règne
démontrent que 71 ans, 4 mois et 6 d'Apries, qui n'est porté qu'à 19 ans
jours donnent 26,041 jours, et qu'il y dans les listes de l'Africain.
a réellement cinq jours de plus au l* r Nous nous abstenons d'examiner ici
jour du 10* mois égyptien de la 3 e lesnotions précises que ces deux dates
année de Néchaô , au 6* jour du 2* renferment sur l'état du calendrier
mois de la 71* année suivante, oui égyptien au sixième siècle avant l'ère
était la 35* d'Amasis. Le biographe chrétienne, et particulièrement sur la
égyptien a oublié de compter les cinq manière alors en usage de compter les
jours complémentaires, qui, après la années du règne des rois , notions du
71* année révolue, se trouvèrent entre plus haut intérêt pour la supputation
le f pnôni
r
où commençait la 72% et
, de la chronologie égyptienne nous :

le 6 paôphi que mourut Psammétichus ; n'avions en vue que d'eclaircir les dif-
et le savant italien n'en a pas moins ficultés qui subsistaient encore sur
trouvé la parfaite explication de ce quelques points de l'histoire des rois
nombre erroné. La seconde stèle est de la XXVI* dynastie.
exacte dans ses déductions : elles nous Amasis en fut réellement le dernier,
apprennent, par leur commun témoi- l'enfant qui lui succéda de droit ayant
gnage, qu'il s'était écoulé 65 années à peine touché aux marches du trône.
entières entre la 1" du régne de Né- Amasis était originaire de la petite
e
chaô Il et la 27 du règne d'Amasis ville de Siouph , dans le voisinage de
et aussi qu'un intervallede 71 années en- Sais. Son origine plébéienne ne le mit
tières la 3* année de ce même
séparait pas d'abord en grande considération
Néchaô de la 35 e de ce même Amasis.
, parmi ses sujets ; il sut se relever par
Si donc , sur les 65 ans du premier sa prudence et son habileté il se com-
:

compte, on soustrait 5 ans pour le para, dans une occasion solennelle, à


reste du règne de Néchaô , et les 26 un vase d'or, employé d'abord à de
déjà écoulés du règne d'Amasis, il res- vulgaires usages, et qui, changé en
tera :n ans pour les deux règnes suc- statue de dieu , fut en grande vénéra-
cessifs de Psammétichus II et Apriès, tion parmi les Égyptiens. Il passait
et sera dès lors difficile d'accorder
il pour savoir concilier les plaisirs et le
à l'un 1 7 ans , et à l'autre 25 selon commerce familier de ses amis avec
9
Ëusèbe, ou bien de ne donner aux les devoirs et la dignité de son rang.
deux règnes réunis que 25 ans , selon Comme tous les rois nouveaux ve-
Jules l'Africain. nus Amasis déploya une grande ma-
,

Si encore, sur 71 ans de l'autre


les gnificence, fit élever ou réparer un
stèle , nous laissons à Néchaô II 3 ans grand nombre d'édifices , orna les tem-
pour le reste de son règne , et à Ama- ples de riches ouvrages , et l'histoire
sis les 34 années déjà révolues , il nous écrite a rapporté coin me véridique
resteraencore 34 ans , comme par les tradition que jamais l'Egypte ne fut
supputations de l'autre stèle , pour les dans un état aussi florissant qu'elle
deux règnes successifs de Psamméti- l'était sous le règne d'Amasis ; que le
chus II et d' A pries. fleuve ne fut jamais si bienfaisant, ni
C'est donc à ce nombre, tiré de la terre plus féconde on y comptait
:

deux monuments que leur espèce place jusqu'à vingt mille villes , toutes ha-
au nombre des plus authentiques,
comme leur texte au nombre des plus Memphis et Sais furent les deux villes
précieux , c'est à ce nombre 34 qu'on plus particulièrement embellies par

Digitized by Google
374 L'UNIVERS.
'A masi s. Dans la première . il éleva un sis fut un ami sincère des arts; et, si

temple à Isis ,
remarquable par sa l'on veut juger de l'efficacité de ses ef-

grandeur et sa magnificence; il fit pla- forts et de son influence pour pré-


cer devant le temple de Phtha un co- venir leur décadence, il suffira de
losse couché, de 75 pieds de longueur, comparer, au Louvre, le monolithe
et deux statues en granit rose de ?0 d'Amasis qui vient d'être indiqué, avec
pieds de hauteur. A Sais , les propy- un ouvrage du même genre tiré de
lées du temple de Néîth furent son ou- Philas et exécuté du temps des Pto-
vrage et l'antiquité les signala pour
,
iémées. Cest donc sans en être sur-
leur magnificence. Hérodote pensait pris qu'on lit sur les rochers graniti-
que ces propylées surpassaient en élé- ques des environs de Philae, le nom
vation et en étendue tous les autres d'Amasis parmi ceux des Pharaons qui
monuments du même genre, particu- les firent exploiter pour les édifices pu-
lièrement par la masse et la qualité blics qu'ils élevèrent.
des pierres. Amasis y ajouta des colos- Les monuments de son règne ne sont
ses de proportions extraordinaires , des pas rares dans les collections d'Europe.
sphynx à téte humaine également co- Une statue en basalte noir de la villa
lossals ; et les matériaux de ces belles Albani, à Rome, conserve encore les
constructions furent tirés ou des car- traces du nom de ce roi. Au Vatican
rières en face de Memphis (les car- le même nom se lit sur une statue
rières de Thorrah), ou des environs naopliore , en basalte noir : c'est l'image
d'Éléphantine (les carrières de gra- d'un chantre du roi Amasis. Celle d'un
nit): Saladin les employa aussi a sa des prophètes , autre classe de prêtres,
citadelle du Caire, ou la science mo- du même roi , existe à Florence ; die
derne reconnaît ces blocs doublement est aussi naophore, en basalte vert.
historiques, au nom d'Amasis qui est Un vase, dit canope, se voit dans la
gravé dans une aire en creux sur une même ville portant aussi le prénom
,

de leurs faces intérieures. royal du même roi. On reconnaît ce


Amasis fit aussi tirer des carrières nom sur un grand nombre de scarabées,
de Syène le célèbre naos monolithe d'amulettes et d'ouvrages de petites
qu'il consacra à la déesse Nèïth dans proportions. Sa légende complète se
son temple de Sais. On mit, dit Hé- lit a Ëléphantine et les lies voisines;

rodote, trois années à le transporter; et le cartouche nom propre se compose


deux mille mariniers y furent em- indifféremment de trois ou de quatre
ployés; ses dimensions étaient de 21 signes. Dans ce dernier cas , la figure
coudées (11 mètres) en longueur; 14 de la chouette s'y trouve le troisième si-
( 7 mètres i ) en largeur, et8 (4 mètres \) gne; il est ainsi composé dans la légende
en hauteur. Le même historien a vu royale d'Éléphantine, et sur un sarco-
ce temple d'une seule pierre à la porte phage du musée britannique; mais plus
du gnunl temple; on ne l'avait pas ordinairement le prénom roval se com-
placé dans l'intérieur; l'entreprise avait pose du disque du soleil , d'un vase à
été interrompue par des circonstances une seule anse vu de profil , et du vase
sur lesquelles l'histoire s'est diverse- à deux anses vu de face. Le cartouche
ment exprimée de plus grandes masses
: nom propre se lit Se-ré Aohm s, le fils
de granit ont été extraites , transpor- du soleil A hmasis, ou bien Nt-ceJams,
tées et employées dans la basse Éçypte le fils de Nèïth Ahmasis : cesdeux varian-
par les Égyptiens. On voit aussi , au monuments
tes sont constatées par les ;

musée royal de Paris , un magnifique et Amasis ajoute quel-


à ces titres
naos monolithe en granit rose, ou a quefois celui de modérateur du monde:
vécu l'oiseau sacré de Nèïth ( la chouette) un scarabée du musée de Turin en fait
dans le temple même de Sais , ouvrage foi.
admirable par sa masse comme par Amasis laissa un fils qui lui succéda;
l'excellence du travail et des sujets mais l'histoire n'avait pas conservé le
mythologiques dont il est orné. Ama- nom de la reine son épouse : Cham-

Digitized by Google
EGYPTE. 175
pollion le jeune l'a retrouvé dans les Ceux qui ont recueilli le sarcophage de
ruines de itarnac à Tbèbes , où il est la reine ont remarqué que ce puits avait
pavé sur un petit édifice situé hors de été violé très-anciennement; que le
& grande enceinte, entre la porte sarcophage avait été ouvert, que la
élevée par le roi Ménephtha et le pro- momie en avait été arrachée et brûlée
pylon du nord. La reine est figurée près du sarcophage même , où exis-
dans la frise sculptée qui orne ce mo- taient encore des débris d'ossements
nument ; le roi Amasis , son époux , fait charbonnés, dont quelques-uns con-
son pendant dans le même sujet de servaient des traces de dorure.
cette frise. Les deux cartouches de la Tous ces outrages au corps em-
reine contiennent son nom Onk-nas, baumé d'une reine révèlent une fureur
les signes du cartouche prénom de impie; et les souvenirs de l'histoire
Psammétichus r r , et l'indication qu'elle désignent Cambyse, roi de Perse,
est sortiede sa royale race. Si ce té- comme s'en étant rendu coupable. On
moignage unique avait laissé quelques sait que ce conquérant, maître de
doutes sur la généalogie et état de 1 Sais , fit retirer du tombeau la momie

cette princesse , un autre monument d'Amasis, la fit battre de verges et


récemment découvert, servirait à les percer de coups d'aiguille; il voulut
détruire. aussi qu'on lui arrach.1t les cheveux et
Le voyage fait à Thèbes par le bâti- qu'elle fût brûlée. Dans l'année d'après
ment français le Luxor avait fait dé- maître de Thèbes, il viola les tom-
couvrir par un officier de l'équipage, beaux voulut voir les corps qu'ils ren-
,

derrière le Rhamesséum de Sesostris. fermaient, et il n'oublia pas celui de


et au fond d'un puits funéraire creusé la femme du roi dont il avait profané
dans le roc à 125 pieds de profondeur, les restes à Sais : tel fut le sort de la
un sarcophage du plus beau basalte dépouille mortelle de cette reine , dont
vert , couvert d'inscriptions hiérogly- le sarcophage , déposé momentanément
phiques et de sculptures sur toutes ses à Paris a passé dans le musée royal
,

faces extérieures et intérieures; son de Londres. Les historiens parlent


couvercle est également chargé d'ins- d'une autre femme d'Amasis , native
criptions, le dessus étant occupé par la de Cyrène, nommée Ladicè, que
figure en relief de la déesse Athyr. Ce Cambyse trouva encore vivante, et
sarcophage est celui de la reine Onk- renvoya honorablement à sa famille :
îîas; elle y est nommée comme fille mais les expressions d'Hérodote et le
d'un roi Psammétichus et d'une reine silence des monuments ne permettent
Nitocris ; et le témoignage des monu- pas de reconnaître dans la Grecque de
ments nous fait reconnaître dans ce Cyrène une seconde femme d'Amasis.
roi Psammétichus II. Ce prince avait On cite , il est vrai , les Cyrénéens
donc eu de reine Nitocris deux en-
la parmi les peuples dont Amasis recher-
fants , A priés , qui lui succéda , et une cha l'alliance : leur voisinage de l'É-
fille nommée OnK-Nas, qui fut l'épouse gypte rendait nécessaires de pacifiques
d'Amasis , usurpateur de la couronne relations entre ces deux peuples. Du
rovale sur Apries; le même Amasis, reste, Amasis continua de favoriser
maître du trône, épousa la sœur du les Grecs; il leur accorda la ville de
roi détrôné, n'oubliant pas que les
'
Naucratis pour résidence, leur con-
filles succédaient à la couronne à dé- céda des enceintes consacrées , et la li-
faut d'enfants mâles , et se garantis- berté d'y adorer leurs dieux; les villes
sant ainsi des embarras éventuels des grecques les plus commerçantes s'asso-
prétendants. La reine Onk-Nas mourut cièrent pour y élever un Hellénium ;
pendant les temps prospères du règne d'autres villes consacrèrent des temples
d'Amasis, qui la fit inhumer à Thèbes, à des divinités particulières ; et Ama-
où la profondeur du puits funéraire ne sis, s'identifiant de plus en plus avec
devait cependant pas la garantir des les intérêts de la Grèce, contribua
outrages d'un conquérant étranger. pour mille talents à l'édification du

Digitized by Google
1
3TG L'UN
nouveau temple de Delphes. Il donna historiens et les listes de Manétbon le

lui-même plusieurs statues et des ou- nomment Psammachérites, Psammé-


vrages de prix à divers temples de la nite, et les monuments Psammétique,
Grèce: Hérodote nous affirme les avoir comme ses aïeux. Son cartouche pré-
vus lui-mime dans ces temples. Il dit nom qui signifie soleil
, vivificateur des
aussi que pour la première fois Pflfl
, , offrandes, se trouve, suivi de son
de Chypre fut soumise et réunie à l'E- nom propre, sur un des édifices de
gypte "par Ainasis. Karnac, sculpté à côté de celui de son
Rien n'est plus connu, parmi les père Amasis. Mais l'histoire ne rap-
faits singuliers de l'antiquité , que l'his- porte de ce prince que les infortunes
toire de l'anneau de Polycrate, tyran qui signalèrent son règne, presque
de Samos. Il était le plus heureux des inaperçu de six mois. Alors les des-
,

hommes et entretenait ses relations


, tins de l'antique royaume des Pha-
d'affection , et vraisemblablement aussi raons s'accomplissaient ; Cambyse ar-
de politique, avec Amasis. On a con- mait contre Étfypte : le torrent dé-
I

servé copie d'une lettre que le roi


la vastateur allait déborder sur elle et l'en-
d'Égypte écrivit au chef samien, pour gloutir. La XXVI e dynastie avait fait
l'engager à se défier de la fortune et son temps après une durée de 1.50
à se préparer à ses revers , en s'impo- années, pendant lesquelles huit rois
sant lui-même les plus pénibles priva- s'étaient succédé sur le trône. On était
tions. Selon ce sage conseil , Polycrate à l'an 525 avant l'ère chrétienne.
lit jeter dans la mer cet anneau qu'il Il y avait alors à peine douze années
aimait par -dessus tout, et la fortune qu'une peuplade de l'Asie occidentale,
le lui rendit : il avait été avalé par un presque inconnue et presque incuite,
magnifique poisson qui fut juge digne quittant inopinément les bords de
de la taule de Polycrate, et Vanneau I Araxe, et entraînant avec elle d'in-
fut retrouvé en le préparant pour son nombrables auxiliaires plus incultes
repas. Le temps des revers arriva ce- encore et tirés des régions limitro-
pendant pour Polycrate et pour Ama- phes, s'avançait, invincible, vers le
sis. nord-ouest de ce vaste continent,
L'histoire grecque a aussi fait con- conduite parCyrus déjà chef de toutes
naître les relations de Solon, l'un des les tribus et suivi de ses mages, et
sept sages de la Grèce, avec le roi commandée par les princes Achmé-
d'Égypte. *nides et la caste privilégiée des Pasar-
Ce roi , qui s'est fait dans la mémoire çades. Le Tigre et l'Euphrate avaient
des hommes une juste renommée, mou- été franchis; Suse, Babvlone et les
rut après un règne de 44 ans, selon les vastes provinces dont ces splendides
témoignages historiques les plus digues cites furent l'ornement, étaient sou-
de foi , accrédités directement par un mises et occupées ; la Syrie , dont le
bas-relief égyptien, qui porte pour date Satriotisme mercantHe, natîvementin-
de ce règne ce même nombre d'années : ifféreiit sur la personne du maître,
Amasis fut inhumé dans le tombeau avait acheté du vainqueur, à assez bon
qui lui avait été préparé dans l'en- prix , la permission de continuer en
ceinte de l'Hiéron de Nèïth à Saïs. Ce paix ses trafics et son lucre avefr l'Eu-
tombeau était situé dans la cour exté- rope et l'Asie, avait aussi accepté sans
rieure du temple; il consistait en une murmure le titre de satrapie persane,
très-grande salle soutenue par des co- et ses rois celui de vassaux tributaires
lonnes à chapiteau imitant le palmier; de la nouvelle puissance. Ainsi les
un naos fermé par deux portes conte- Perses étaient à la porte dé l'Égypte
nait le sarcophage et la momie du roi. lorsque Cyrus mourut.
Amasis eut pour successeur son fils Cambyse , son fils , continua son
Î[ui porta le nom de son aïeul maternel règne l'exécution de ses vues et ses
,

eroi Psammétichus il fut le Psammc- : conquêtes. Les historiens grecs ont


tichus III de la dynastie saïte. Les cherché et recueilli avec grand soin les

Digitized by Google
pte. m
causes de l'invasion de PÉgypte par a dit comment l'insensé Cambyse osa
Cambyse; et ils racontent à ce sujet, , de sa victoire.
un certain nombre d*anecdotes, réelle- Ce chef persan fut le premier roi de
e
ment indignes de la gravité de l'his- la XXVII dynastie : il occupa et gou-
Cambyse aurait demandé au Pha-
toire. verna PÉgypte militairement ; la bar-
raon Amasis sa fille pour épouse, et barie y fit une guerre ouverte à la ci-
Amasis lui aurait envové la fille d'À- vilisation , et le fanatisme des mages
priès , engageant ainsi le roi de Perse de la Médie porta la désolation dans
dans une inégale alliance. Cambyse les sanctuaires de PÉgypte. Psammé-
avait demandé un habile oculiste ; et le nite , dépouillé de la royauté, fut ex-
chirurgien envoyé par Amasis, consi- posé à toutes les douleurs , à toutes les
dérant sa mission comme un exil , au- humiliations de sa cruelle condition ;
rait séduit Cambyse à marcher contre il vit sa fille réduite au service des es-

PÉgypte. Cambyse serait aussi le petit- claves, son fils conduit au supplice;
f
Bis d A priés, et serait venu venger son mais il ne s'en émut pas : ces mal-
grand -père contre l'usurpateur Ama- heurs domestiques, disait -il, étaient
sis et sadescendance. Cambyse, enfin trop grands pour être pleurés. Sa noble
aurait voulu venger sa mère à laquelle contenance intéressa un moment Cam-
Cyrus, son père, avait préféré une es- byse et ses Perses ; et des historiens
clave égyptienne : ces historiettes n'ont pnt cru que Psamménite en aurait ob-
d'autre mérite que celui , si c'en est tenu le gouvernement de PÉgypte, s'il
un , de nous prouver qu'il y avait aussi n'avait préféré la mort en essayant
dans l'antiquité des bons esprits dispo- de lui rendre l'indépendance, au "mi-
sés à tout croire : l'histoire du beau sérable honneur d'en être le satrape.
caniche de la duchesse de Malborough Convaincu de patriotisme, c'est-à-dire,
n'est peut-être pas bien moderne. de complot et de tentatives de révolte
L'invasion de PÉgypte par les Perses envers les Perses , il fut condamné à
ne fut que la conséquence nécessaire boire du sang de taureau , et il en mou-
de la marche d'une peuplade barbare, rut sur-le-champ.
passant de la vie nomade à la vie con- Dans l'enivrement de sa toute-puis-
quérante; se portant, comme toutes sance , Cambyse se rendit de Memphis
les invasions des nomades asiatiques à Sais, pour se donner le plaisir d'in-
de l'est à l'ouest , et rencontraut PÉ- sulter aux restes d' Amasis, qu'il fit ar-
gypte riche et puissante sur son che- racher du tombeau. Héliopolis ne fut
min. Cambyse avait succédé à Cyrus point épargnée; le Perse en ravagea
depuis cinq' ans. par le ier et par le feu les édifices sa-
il avait pour auxiliaires des Perses crés ; il les mutila avec une féroce at-
un corps d'Ioniens et un corps d'Éo- tention. Strabon vit encore de ses
liens qu'il regardait comme les esclaves yeux les traces manifestes de ces ra-
de son père. Un traité avec les Arabes vages. La grande capitale de l'Égvptc
le préserva de tous les inconvénients en révélak de non moins profondes :
du désert, et il s'avança vers Péluse. la plupart de ses édifices publics furent
Psamménite s'y était établi avec l'ar- maltraités. A Memphis, la célébration
mée égyptienne; elle fut défaite, et de féte d'Apis occasionna la mort
la
courut én désordre se jeter dans Mem- dés magistrats de la ville; ses prêtres
phis. Des parlementaires envoyés par furent battus de verges ; et , pour prou-
Cambyse furent massacrés mais , après
; ver que le boeuf Apis n'était pas un dieu,
un assez long siège, les Égyptiens n eu- Cambyse le frappa de son poignard.
rent d'autre ressource que de se ren- Contre l'usage des Perses, Cambyse
dre : Memphis et son château furent épousa deux de ses propres sœurs. Il
livrés aux Perses, et Psamménite des- entreprit à la fois trois expéditions ;
cendit du trône après un règne de l'une contre Carthage elle échoua par
:

six mois : PÉgypte fut dès lors sou- la désobéissance d une partie de la
mise à l'étranger vainqueur; l'histoire flotte; Pautre contre les Éthiopiens

Digitized by Google
L'UNIVERS.
. macrobiens qui déjouèrent ses projets
,
leiempiê , s'exprime ainsi : « Perpè
en ne se méprenant point sur la véri- bourg que Cambyse détruisit par i
table mission des ichthyophages d'Élé- feu. »
. phantine , parlant la langue des Éthio- Ontrouve cependant sur quelque
Sieni,qui étaient chargés des présents monuments égyptiens le de Cam nom
e Cambyse; la troisième expédition, byse tracé en caractères sacrés (voyc
par terre , fut dirigée de Thèbes contre notre planche 87 , cartouche, isolé i

l'Oasis d' Ammon ; et l'bistoire rapporte droite) : on le comprend , son règn*


. que les soldats de cette expédition ne était un fait , et son nom devenait un<
revirent jamais l'£gypte, ayant été en- date. C'est à ce titre qu'il se lit dan*
sevelis dans le sable du désert soulevé l'inscription d'une statue naopnore di
par un vent tempétueux du midi. musée du Vatican : ce est écritnom
Cambyse envova à Suze une co- Kmboth ou Kmbath, et il est pré-
lonie de six mille Égyptiens : ainsi cédé du titre royal égyptien , le roi du
l'Égypte éprouva toutes les calami- peuple obéissaut. On cite aussi le nom
tés que pouvait engendrer une inva- de Cambyse dans une inscription gra-
sion de barbares, fanatisés par l'igno- vée sur un rocher, dans la route de
rance et par une intolérante crédu- Qéné à Cosséïr; nous aurons l'occa-
lité. La Perse n'avait pas triomphé sion de revenir sur cette inscription.
sans combats et sans paver ses succès Quand la Providence eut mis un
du sang de ses soldats. Hérodote visita terme à la vie et aux fureurs insensées
le champ de bataille près de Péluse , et de Cambyse, dont la cruauté n'avait
il y vit amoncelés séparément les osse- pas épargné ses plus proches, le de-
ments des hommes qui y avaient péri sordre régnait dans les pays soumis à
de part et d'autre. C'est là qu'il re- son autorité. Un mage se donnant
marqua ces singuliers caractères phy- pour Smerdis , frère de Cambyse , dont
siques qui différenciaient les Perses il portait par hasard le nom, s'était

des Égyptiens : les crânes des pre- emparé du trône de Perse, et il l'oc-
miers, minces et sans résistance, cupa pendant quelques mois encore.
pouvaient être facilement percés en les Durant cette usurpation , l'Egypte fut
frappant légèrement avec un caillou f;ouvernée par un autre mage dont
tandis que les crânes des Égyptiens 'autorité dura , dit-on , pendant sept
étaient si durs qu'on parvenait péni- mois : le succès de la conjuration à la
blement à les fendre en y employant tête de laquelle se mit Darius , le fils
une grosse pierre : et l'on expliquait d'Hystaspe, gouverneur de la Perse,
ce phénomène par l'usage de la tiare rétanlit l'autorité royale, et PÉgypte
qui, dès leur enfance, enveloppe et eut un nouveau roi. Ce fut le premier
garantit de l'air la tête des Perses, essai et le premier fruit de la rivalité
tandis que les Égyptiens, au sortir de et des efforts des Mèdes pour repren-
l'enfance, se faisant raser la tête, elle dre la supériorité sur les Perses leurs
était exposée à l'air et à la chaleur vainqueurs.
qui la durcissent. L'examen des mo- C'est du règne de Darius que l'his-
mies a fait récemment reconnaître que toire date l'établissement de quelque
les os des têtes égyptiennes étaient ordre dans l'administration des vastes
épais, solides et très-durs. pays dont Cyrus et Cambyse venaient
Le règne de Cambyse sur PÉgypte de* faire la conquête en moins de vingt
ne dura que trois années : Aryandès années. Darius les divisa en vingt sa-
en avait été nommé gouverneur; mais trapies ou gouvernements ; et il s'oc-
ce règne y laissa de bien longs souve- cupa particulièrement d'enrichir son
si
nirs et la haine nationale lésa rendus
. trésor, que les Perses l'avaient sur-
durables jusque dans les temps moder- nommé le banquier, parce qu'il savait
nes. Un des chrétiens coptes , dont les tirerde l'argent de tous, donnant à
écrits nous sont parvenus, parlant d'un Cambyse l'énithète de maitre. et à
lieu de la haute Égypte qu'il nomme Cyrus celle Je père. L'Égypte, la por-

Digitized by Google
EGYPTE. 379

lion de Libye qui lui confine et les


la , ques. Aryandès, à qui Darius avait
provinces de Cyrène et de Barcè en continué le gouvernement de ITtfrypte
Afrique, réunies en un seul gouverne- auquel Cambyse l'avait élevé, imitant
ment , formaient la sixième satrapie : son maître , fit frapper des monnaies
elle était imposée à sept cents talents d'argent , et Darius le fit condamner
babyloniens ou d'argent ; les produits comme coupable de projets de révolte.
de là pêche du lac Mœris appartenaient Ces établissements de Darius lui ont
aussi au Gsc : ils étaient d'un talent par fait attribuer la volonté de faire ré-
jour pendant les six mois où le Nil gner l'ordre dans ses vastes posses-
entre dans le lac, et de vingt mines sions par l'influence d'une administra-
seulement durant le reste de l'année. tion régulière. On en a conclu que
De plus l'Égypte fournissait annuel- l'Égypte respira plus heureuse quoi- ,

lement la quantité de mesures de 2ue soumise et gouvernée par des rois


blé, qui était nécessaire pour nourrir trant*ers : elle subissait le sort com-
cent vingt mille hommes , Perses mun a tout l'Orient et dévorait, sans
,

ou auxiliaires, occupant le chdteau l'oublier, l'affront d'avoir été vaincue.


blanc de Memphis; quantité qui ne Des mages intolérants y professaient
devait pas s'élever au - dessous de une religion étrangère; et si le gou-
quinze cent mille boisseaux dont un
, vernement laissa aux Égyptiens l'usage
seul pouvait suffire à la nourriture public et privé de leur système d'écri-
d'un nomme pendant un mois. Après ture sacrée , lui et ses Perses se ser-
Babylone et l'Assyrie qui formaient le
,
vaient en Égypte même , de leur écri-
,

neuvième gouvernement, l'Égypte était ture nationale, ou devenue telle pour


aussile plus imposé de tous en argent. eux , quoique d'emprunt : des monu-
On peut conclure de plusieurs cir- ments en caractères cunéiformes . ori-
constances historiques, que la portion ginaires de l'antique Babvlone , a qui
de la Nubie sur laquelle les rois d'É- les Mèdes , instituteurs des Perses , les
gypte avaient conservé l'autorité, avaient aussi empruntés , ont été trou-
comme annexe de l'Egypte, s'en dé- vés en Égypte. On a même cru y lire
tacha lors de l'occupation des Perses. les noms de quelques-uns des rois
L'état des gouvernements du grand perses conquérants.
empire de Darius n'indique, en effet, Le règne de Darins I ,r fut heureu-
aucune partie de territoire au sud de sement d'une longue durée il compta :

l'île d'Eléphantinc; et le pavs des 36 années: il en reste, dans les ou-


Éthiopiens limitrophes de l'Égypte, vrages des Égyptiens, de nombreux
ne contribuait, comme la Perse elle- souvenirs. Ce roi est nommé dans les
même, aux charges de l'État, que par inscriptions de la statue naophore du
des dons volontaires. Les Éthiopiens Vatican déjà indiquée au sujet de Cam-
et les habitauts de Nyse envoyaient byse. Le musée de Turin possède cinq
tous les trois ans , deux boisseaux contrats en écriture démotique, datés
d'or natif, deux cents troncs de bois de l'an 5, au mois de pharmouti; de
d'ébène , cinq jeunes Éthiopiens et l'an 15, même mois; de l'an 16, mois
vingt défenses d'éléphant. Les mo- denaôphi;de l'an 81, moisdeméchir ;
numents des victoires des Pharaons enfin de 35, au mois de phamé-
l'an
nous prouvent que ces mêmes peuples noth, du règne du roi Darius. Des
payaient les mêmes tributs à Sesostris monuments religieux furent aussi éle-
et aux grands rois ses ancêtres et ses vés sous son règne aux dieux de l'É-
descendants. gypte : l'inscription suivante subsiste
Darius fit frapper à son nom des encore sur l'entablement des colonnes
monnaies en or, qui eurent cours dans du grand temple de l'Oasis d'KI-Khar-
tousses États; ce furent les premières djeh Le dieu bienfaisant, seigneur du
:

dont l'Égypte connut l'usage ; elles se monde, le chéri d'Amon-Ra, seigneur


nomment encore doriques, et on en de la région Héb-Osch, le fils du so-
voit dans les collections numismati- leil Nt-Triouch (Darius), toujours

gitized by Goo
380 L'UNIVERS.
vivant. Et , dans cette Oasis d'Àmmon du lit de ce canal que M. de Rosière

que Cambyse voulait ravager et qu'il a trouvé les débris d'un monument
ne lui fut pas donné d'atteindre, des orné d'une inscription en caractères
temples à A mon - Ras'élevèrent sous cunéiformes. La route de Cosséir dut
les auspices du même roi perse , dont devenir plus importante et l'objet de
,

le nom se lit encore sur les débris de l'attention particulière du gouverne-


ces édifices. Notre planche 87 nous ment dès que les travaux du canal
montre Darius faisant l'offrande du furent abandonnés.
feu (adoré par les Perses) , à plusieurs Du reste, Darius n'habitait pas en
des dieux de l'Egypte. Egypte. Les grandes vilks d'Asie
L'intolérance des mages se serait-elle étalent les lieux de sa résidence ordi-
montrée moins absolue pour les lies naire ; néanmoins il avait des Égyp-
des déserts de l'Égypte, et aurait-elle tiens pour médecins , d'après la répu-
politiquement, à cause des grandes tation que l'Égypte s'était acquise dans
voies suivies par le commerce , ménagé Fart de guérir.
les pratiques religieuses de leurs habi- Quand Darius , faisant sa retraite
tants f Quoi qu'il en soit , on n'a lu sur devant les Scythes , voulut repasser
aucun monument public de l'Égypte le Tlsther dont les Ioniens avaient retire
nom d'aucun des rois perses, ses con- une partie du pont , il se trouva dans
quérants. Ils s'emparèrent habilement l'armée persane un Égyptien fameux
de toutes les ressources qu'offraient par l'étendue et la force de sa vois.
au fisc royal les provinces occupées, Du rivage il appela Hysliée de Milet,
et ils s'appliquèrent à ne pas affaiblir qui l'entendit au premier cri , fit avan-
les sources des revenus publics. La cer les bateaux , rétablit le pont , et dé-

route de l'Égypte en Asie, de Coptos livra Darius de ses vives alarmes.


ou d'A pollinopolis-Parva à Cosséir, sur Darius avait aussi fait en Égvpte la
la mer Rouge, fut particulièrement guerre de la conquête, servant dans ks
entretenue; et il y reste encore écrites gardes de Cambyse. On connaît sa ren-
sur les rochers les preuves de l'atten- contre à Memptiis avec le Sa mien Svco-
tion que les rois perses donnèrent à son, couvert d'un manteau couleur de
l'entretien de cette communication feu, que Darius lui enviait. Le Grec
importante : les noms de Cambyse donna son manteau au Perse ; et celui-ci,
Darius et Xercès y sont gravés avec devenu roi, témoigna par sa générosité
des dates de leur règne : l'an 6 pour le envers Svcoson qui s'était rendu a
premier (la l r * année de son reine en Suze, qu'il n'avait pas oublié la poli-
Égypte) ; l'an 36 pour Darius, et l'an 12 tesse et le don qu'il en avait reçus,
pour Xercès. Strabon dit aussi : « Da- n'étant encore que simple garde du
er
rius I fit reprendre les travaux du roi.
canal du Nil a la mer Rouge , com- Mais , malgré la sévérité et l'omni-
mencé par Sésostris avant la guerre potence des satrapes, les peuples con-
de Troie , continué et non terminé par quis n'acceptaient pas leur joug Bas
Néchaô,ûls de Psammétichus. Darius retour. Non loin de la ville capitale,
abandonna aussi cette entreprise au demeure du roi , les Babyloniens pro-
moment de la mener à fin , cédant à clamèrent leur liberté , et la défendirent
la crainte sans fondement que la mer avec vigueur pendant un siège de vin.i
Rouge étant plus élevée que l'Égypte, mois : la ruse en triompha , et Dariu*
le pays ne lut submerge si l'isthme rétablit son autorité dans la splenditk
était rompu. » Hérodote , Diodore de Babvlone.
Sicile et Pline , comme Strabon , ren- L^Égypte imita l'Assyrie : elle tenta
dent témoignage des travaux ordonnés aussi de secouer le joug des Perses.
par Darius pour terminer ce canal; Hérodote dit que ceci arriva dans h
e
entreprise que l'impuissance de l'art, a 35 année du règne de Darius, qui
cette époque, ne pouvait pas sûre- mourut l'année d'après, en s'effor-
ment exécuter; et c'est dans le voisinage çant de rétablir son autorité en Égypte.

Digitized by Google
• • • •
• »
• • » •

• I •

• •
• • -

• * te

• ••• • • •

• « I

Digitized by Google
ÉGYPTE. 381
Le contrat précité, du mois de pha- dans l'ensemble des doutes qui envelop-
oénoth de an 35 de Darius , ne con-
1 pent encore les études qui ont pour objet
redit pas ce récit d'Hérodote; ce mois la connaissancedeséléments graphiques
îst le 7* de l'année; l'insurrection des divers alphabets en caractères cu-
:\ ptienne dut donc se déclarer dans néiformes. A Cosséïr, lôAom de Xercès
es cinq derniers mois qui pour ces , est précédé du titre de dieu bienfai-
*mps-la , selon le calendrier vague, sant t seigneur du mondé, expressions
ïtaient les mois de Tété et de l'au- du protocole qui ne peuvent témoigner
tomne, ceux mêmes où l'inondation ni de la félicité, ni de l'affection de
périodique du Mil couvrant la basse et l'Égypte pour cette autorité étrangère
la moyenne Égypte, opposait d'invin- et oppressive. La Gn du règne même
ciblesobstacles à la marche des ar- de Xercès est une preuve du contraire.
mées et à la facile communication des Dès que les Égyptiens apprirent sa
villes entre elles. mort , ils essayèrent encore une fois
Quand Darius mourut, l'Égypte n'é- de ressaisir leur indépendance cou-:

tait pas encore soumise son fils Xercès


: rageuse persistance qui prenait sa
lui succéda vers l'année 486 avant l'ère source dans l'amour de la patrie,
chrétienne. Peu de mois après son avè- l'amour de ses lois et des institutions
nement , il avait rétabli l'autorité per- nationales dans cette foi aux dieux
,

sane en Égypte il la punit de sa ré-


: et au culte du pays, qui, dans tous
volte par une complète oppression , et les temps , a fait des peuples de héros
lai donna son frère Achéménès pour prêts à tous les sacrifices; car l'his-
satrape. toire le proclame de toutes ses voix
L'Egypte étant soumise , Xercès em- il n'y a rien à attendre d'une nation

ploya quatre années à organiser son qui n'éprouve pas la vive et invincible
armée , et se mit en campagne l'année influence des convictions ou des pré-
suivante. Il fit faire en Égypte une très- jugés. La prédominance des intérêts
grande quantité de câbles en papyrus matériels n'a-t-elle pas ouvert à tout
pour la construction des ponts. Les ennemi qui apportait des bénéfices, les
Egyptiens établirent un pont de cette portes de toutes les villes où la bourse
matière qui joignit Abydos à la côte est le temple du dieu du pays?
d'Europe. A son avènement au trône de Perse,
Dans l'armée de Xercès, l'Égypte Artaxercès, fils de Xercès, dut d'abord
avait fourni deux cents vaisseaux ; les songer à rétablir son autorité dans
hommes qui les montaient avaient la l'Égypte insurgée. La Perse menaçait
tête couverte d'un casque en mailles la Grèce ;Grèce s'allia avec É-
et la 1

de fer, et leurs boucliers creux étaient gypte : de ses bords un


elle éloignait
entourés d'un très-grand cercle de fer; ennemi retoutable, en le chassant de
ils portaient pour armes des lances l'Égypte. Les Athéniens mirent leur
propres aux combats de mer , et des flotté en mer contre celle des Perses ;
haches de fer très-fortes. Le plus grand ilsenvoyèrent une armée alliée à celle
nombre avait des cuirasses et de lon- de l'Égypte , et leurs premiers efforts
gues épées. réunis furent couronnés d'un plein
On lit encore à Cosséïr le nom de succès. L'arméed' Artaxercès fut battue
Xercès, ainsi que sur un beau vase et se retira du côté de Memphis, où
d'albâtre du Cabinet des antiques de l'armée égyptienne poursuivit les vain-
Paris, où il se lit Schéarcha; une cus. Mais Artaxercès ayant réussi à
inscription en caractères cunéiformes séparer les troupes athéniennes de
est au - dessous de l'inscription égyp- celles des Égyptiens, vint plus facile-
tienne; le même nom du
roi s'y fit ment à bout des unes et des autres, et
aussi ; est résulté du rapproche-
et il l'autorité persane fut rétablie sur les
ment comparatif de cette inscription rives du rs il l'Égypte fut de nouveau
:

bilingue, publiée par Champollion le soumise à une dure condition ; Acné-


jeune en 1834, quelques certitudes ménès , frère de Xercès , lui fut donné

Digitized by Google
L'UNIVERS.
pour gouverneur, et )e jong du vain- thon soigneusement dressée pour
,

queur fut encore plus pesant* l'Égypte , aue sont mentionnés les
Les historiens les plus renommés règnes éphémères d'un Xercès II et
de ta Grèce sont presque contempo- de Sogdianus. Ce Darius II est qualifié
rains de ces événements et les narrent , de un! h us ou enfant illégitime.
,

avec leurs plus particulières circons- Il paraît que c'est au règne d'Ar-

tances : il paraît toutefois aue la suc- taxercès qu'il faut rapporter les nou-
cession des divers rois qui portèrent velles entreprises des Égyptiens allies
)e même nom , les Xercès et les Da- avec les Athéniens contre occupation I

rius, a jeté, dans le récit de ces his- persane. Thucydide et Ctésias nous
toriens , quelque confusion dans Tordre ont transmis tes détails les plus cir-
chronologique des faits ; on accorde- constanciés de ces nouvelles guerres
rait difficilement Hérodote et Thucy- auxquelles se mêla aussi , comme allié
dide sur ce qu'ils en rapportent ; Dib- des Égyptiens, un chef libyen, que
dore de Sicile y ajoute encore quelques ces nomment Inarus. La
historiens
variations : nous continuerons à pren- flotte des Perses fut détruite ou prise
dre pour guide l'annaliste le plus ins- par celle des Athéniens : les Grecs re-
truit des affaires de l'Egypte, .M a ne- montèrent le Nil et débarquèrent leurs
thon , dont les monuments accréditent troupes sous le commandement de
si positivement les témoignages. Charitimès. Achéménès, à la téte de
Après avoir rétabli son autorité en trois cent mille hommes, fut défait
Égypte, Artaxercès régna encore 38 par les alliés et perdit le tiers de son
ans (en tout 40 ans ) ; pour ce laps de armée ; lui-même périt dans ce san-
temps les écrits de l'antiquité ne re-
, glant combat. Le reste de l'armée se
latent aucun fait particulier retotif réfugia dans les fortifications de Mem-
à PÉgypte : elle était immobile et phis. Les Égyptiens les y assiégèrent
soumise comme l'esclave courbé sous pendant trois années, lès y tenant
le poids de ses fers. Le nom d'Ar- étroitement enfermés. Mais une se-
tax ereès fut cependant tracé en écri- conde armée persane s'avançait , com-
ture sacrée égyptienne ; h* existe encore mandée par Artabaze, satrape de la
avec le titre de roi f seigittur du mmi/fa, Cilicie, et par Mégabyze, qui l'était de la
Artakhschseeh , gravé sur les rochers Syrie. Battus par ces nouvelles forces,
oui bordent une partie de la route de malgré leur vigoureuse résistance , et
Qéné à Cosséïr. le chef Hbyen ayant reçu de graves
eut pour successeurs un Xercès II
Il blessures, les Égyptiens 'et les Athé-
qui régna deux mois; Sogdianus, sept niens se retirèrent dans nie de Proso-
mois , et Darius - Nothus , fils de Sitis , baignée par deux branches du
Xercès H,
qui régna 19 ans. fil : dans l'une d'elles , la flotte égyp-
Si l'on consulte la liste des rois de tienne et la flotte athénienne trouvèrent
te Perse , telle qu'elle a été adoptée un refuge et un abri. Les Perses les
et conservée par les chronologistes et attaquèrent, et les alliés s'y défen-
les astronomes de l'antiquité , on n'y dirent pendant une année et demie.
retrouvera ni ce Xerxès II , ni ce Sog- Mais les Perses mirent à sec la bran-
dianus. La table chronologique des che du Pîil où la flotte athénienne était
rois, placée en tête de l'Almageste de mouillée ; ces forces navales devinrent
Ptolémée , et dont les années des règnes mutiles , et les Perses s'ouvrirent un
servent à la date des observations as- chemin de terre dans l'île. Alors Inarus
nom que s, nomme pour l'intervalle
i se rendit avec les siens à la condition
temps qui s'est écoulé pour l'his- de la vie sauve; mais les Athéniens,
toire d'Épypte, depuis la mort de au nombre de six mille , mirent le feu
Psamménite jusqu'à ce point où nous à leurs vaisseaux , préférant la mort
sommes parvenus Cyrus , , Cambyse glorieuse du combat à l'ignominie o>
Darius Pr Xercès Artaxereès et" Da-
, , resekivage : des conditions honorabH
rius II. C'est dans la liste de Mané- offertes par les Perses sauvèrent ces

Digitized by Google
,,, .

KGYPTE. 9«9
: Athéniens ci' une mort prochaine.
raves ne commença qu'après que cet illustre
Une nouvelle Hotte envoyée par les Égytitn , à la suite de longs combats,
Athéniens fut attaquée et prise par les eut réussi à délivrer son pays de l'oc-
Frr*s, et leur triomphe tôt complet. cupation persane, laissa peu de temps
L Egypte fut encore une fois soumise; à ses soins réparateurs. Une famille
^rUmas lui fut donné pour gouver- originaire de la ville de Mendès luf
neur; et héroïque lnarus , conduit à
I succéda et forma la XX1X dynas-#

taze, y fut mis en croix contre la for tie , qualifiée de Mendésienne à cause
traités, lnarus passait pour être le de son origine.
d'un Psammétichus.
fcis Le premier roi se nomma Nou-
Us défaites ne lassèrent point le frôuthph , dont les Grecs ont fait Hé*
orageux patriotisme des Egyptiens : pnéritès. Son nom se lit sur les deux
Mis Darius -Nothus, ils arborèrent côtés du trône d'une statue de ee roi,
<ie nouveau la bannière de l'indépen- en basalte noir, haute d'un empan et
dance un Égyptien était à leur tête ;
. demi , dans la collection de Flnstitut
i'se nommait Amyrtée, originaire de de Bologne. Le nom de ce roi n'a pas
k ville sainte de Sais. D'après quel- été aperçu sur les monuments encore
ques témoignages fugitifs de l'histoire subsistants en Égypte; mais le mal-
Amyrtée aurait secondé» les premiers heur des temps et toutes les causes
«flbrts d lnarus; et, après sa défaite, de destruction qui se sont succédé
«e tenu en repos dans les con-
serait depuis, expliquent ce résultat négatif.
tréesmarécageuses de la basse Êgypte Ce roi d'Egypte ne cessait pas d'être
*ou I impatience de ses concitoyens menacé par le roi de Perse et par ses
lirait de nouveau rappelé pour la innombrables soldats. De son coté,
délivrance de la patrie. Néphéritès ne négligeait aucun des
Amyrtée résista aux troupes du lieu- soins qu'exigeait le salut du pays: à
tenant de Darius - Nothus ; et, à la cet effet, il conclut avec Sparte on
mort de ce dernier, Amyrtée se trouva traité d'alliance que cette cite grecque
« possession de toute l'Egypte : il y lui avait proposé contre l'ennemi com-
établit l'ancienne domination de* mun. Diodore de Sicile donne pour
Hwaons , avec les anciennes lois et époque à ce traité la première année
le culte des dieux du pays. de la quatre-vingt-seizième olympiade,
Ainsi la première dynastie des Perses, ou l'an 395 avant l'ère chrétienne
?oi forme la XXVII' dynastie égyp- IMépliéritès parvenu au trône dès Pan
,

tienne, s'éteignit après une durée de 398 , régnait en effet à l'époque assi-
'20 ans. gnée par Diodore de Sicile a ce traité.
Amyrtée, roi d'origine égyptienne, On trouve aussi son nom sur les ro-
t peut être de l'ancienne race royale, chers des environs de Philae, dans un
e
forma à lut seul la XXVIII dynastie. proseynéma ou acte d'adoration à Ho-
•I
régna que six ans , à compter de
ne rammon , à Saté et à Mandou , fart a
an 404 avant l'ère chrétienne. ces divinités pour le salut de ce rot
Sa première pensée eut pour objet Néphérôthph. Toutefois son règne ne
le réparer les desastres de l'oecupa- dura que six années.
>on étrangère, et de rétablir (es hon- Il eut pour successeur an roi nommé
neurs des dieux; les temples d'Éléthya Hakôr; les Grecs ont écrit ee nom
lédiésà Sévek (Saturne), et à Sowan Achoris. La durée de son règne est
Lucine), construits et décores sous portée à 13 années par les listes de
es règnes de la reine Amensé et Manéthon. Ce règne fut très- laborieux f
les rois Mans et Memnon , mut i- sans cesse menacée par la Perse, l'E-
cs par les Perses , furent réparés par gypte eut à s'occuper de sa défense,
es soins d* Amyrtée. D'autres monu- et elleforma, à cet effet, d'utiles al-*
ments de l'Écypte conservent encore liances.Achoris amena dans une ligue
s marques de ces pieuses restaura- défensive Evagoras, roi de Chypre,
ions. Le court règne d' Amyrtée, qui les Arabes, les Tyriens et les LhSyen*

Digitized by Google
3*4 L'UNIVERS.
de Barcè; un Égyptien oui avait passé A Achoris succéda , selon Manëth
au service des Perses, ôaûs, dont la un roi nommé Psammuthès, qui
famille avait été cruellement traitée réçna qu'une année. Le nom de
par Psammétichus , mécontent du chef prince se trouve cependant encore
perse sous les ordres duquel il se trou- les sculptures du palais de Karnn
vait dans l'expédition contre Chypre, Thèbes, et auprès de celui d'Achoi
déserta ce service, emmenant avec lui son prédécesseur. Sa légende roi
une partie de la flotte et de l'armée. Il signifie: Soleil gardien approuvé
se réunit à Achoris; les Lacédémo- Phtha , le fils du soleil , Psimouth :

niens entrèrent aussi dans cette al- existe aussi dans les ruines d'un p»
liance : la mort de Gaùs et de quelques édifice entredeux des propylées de K
autres chefs des alliés en amenèrent nac, où Champollion le jeune Va
la dissolution. piée le 23 novembre 1828.
Achoris en forma une nouvelle avec Ce roi eut pour successeur , se
plusieurs peuples de la Grèce qui se les listes de Manéthon dans 1 usèl
rendirent en Égypte sous le comman- Mutins, qui régna une année , et I
dement de l'Athénien Chabrias. De phéréus , qui ne régna que qua
leur côté , les Perses , occupés à de plus mois. Il ne reste du premier auc
grands desseins, poussèrent molle- souvenir sur- les monuments ; et
ment la guerre contre l'Êgypte : sur possède, du règne du second,
ces entrefaites, Achoris mourut. sphynx qui orne le musée royal
Les soins de la défense du pays ne Paris. Son cartouche prénom est ce
• l'avaient pas détourné de ceux qu'exi- d'un des anciens Pharaons, et son n<
geait la réparation des outrages faits propre se lit .Naïf roue. Un savant i
aux temples des dieux par les étrangers glais a aussi recueilli la légende de
dont l' Égypte était délivrée. On voit roi de quatre mois sur lesrestes d'
encore sur de Médinet-Habou,
l'édifice édifice éçvptien. Ce prince fut Je d«
à Thèbes , preuves des réparations
les nier de là XXIX' dynastie égyptien ri
3u'Achoris fit taire aux colonnes proto- laquelle ne subsista que pendant
oriques qui soutiennent les plafonds ans.
des galeries , et pour lesquelles on em- La XXX* dynastie fut originaire
ploya des matériaux d'un petit temple Sebennitus, autreville de la bas
édifié par Tordre de la princesse Nito- Égypte : de la haute n'étaie
les cités
cris,femme de Psammétichus II , et plus nommées dans l'histoire; ell
que la barbarie des Perses avait très- paraissaient alors ensevelies dans
vraisemblablement détruit. stupeur de l'esclavage et la douleur »

Achoris fit réparer aussi quelques- voir s'éteindre les antiques honneu
uns des dégâts qu'avait éprouvés le de la patrie.
temple d'Élethya : on voit encore dans Le règne de Nectanèbe, premier r
les carrières de Thorrah , près de Mem- de cette nouvelle dynastie, ne fut \

phis, que, dans la seconde année de plus paisible aue celui des rois ég\|
son règne Achoris en fit extraire des
, tiens, ses éphémères prédécesseur
matériaux employés dans les édifices Dès la seconde année de son autoritt
qu'il fit élever ou restaurer. Enfin le il eut à repousser les nouvelles tent

musée égyptien de Paris possède un tives d'invasion faites par les Perse
sphynx dont la base porte le nom de Leur armée et leur flotte se préser
ce roi en caractères hiéroglyphiques tèrent devant Péluse : Nectanèbe, qi
avec le titre de chéri de Clmouphis. avait réuni des moyens suffisants d
On a remarqué quelques variantes dans défense, résista avec succès. La dis
les signes des deux cartouches mais : corde se mit aussi parmi les Perses
ces signes variés sont toujours des ho- ils entrèrent toutefois dans la brandi
mophones ; et Champollion le jeune a mendésienne du Nil , après s'être em
donné de ces variétés des explications parés de la forteresse qui la défendait
que ses plagiaires se sont appropriées. Mais Nectanèbe , après avoir pourvu

Digitized by Google
EGYPTE. 4SS
c dédaigna pas ce genre de gloire ou de Magnésie; Séleu-
taire à la bataille
ïtte suprême satisfaction de la vanité cus, qui attaquait Philométor, trou-
umaine, bien rare dans les temps vait ainsi dans Aùmililll le vainqueur
lodcrnes, excepté^ parfois, dans les de son père cette circonstance put
:

entrées barbares nouvellement con- être un des motifs qui contribuèrent


u ses à la civilisation. L'état de l'O-
i à fixer sur M. jEmilius le choix du
ient fut, par ses richesses, plus favo- sénat.
le aux rois qui héritèrent des Séleurus fut surpris par la mort au
Duveraiuetés fondées par le courage milieu de ses projets : il cessa de vivre
t le génie de Séleucus et de Ptolémée. la 7* année du règne de Philométor;

Le cinquième des princes de ce nom Àntiochus Épiphane lui succéda et


ml parvinrent au trône, fut surnom- occupa aussitôt une portion de la Célé-
mé Épiphane - Euchariste ; il laissa Syrie.
« mourant, avec la reine Cléopàtre Peu de temps après, Cléopâtre,
a veuve, deux fils tous
et une fille, mère de l'enfant roi d'Egypte, rooty
es trois en bas âge. Le premier-né lui rut aussi et ce fut à l'eunuque Eu-
,

uccéda , et fut surnommé Pfiiiométor, laïus et à Leneus que sa tutelle fut


;urnom qui prouverait qu'il eut pour conOée.
a mère une bien vive tendresse. Les menaces d'Antiochus contre PÉ-
Le règne de Philométor, quoique gypte devenaient chaque jour plus sé-
'un de ceux qui eurent une plus lon- rieuses, méprisant la jeunesse du roi
gue durée, n'offre cependant qu'un et l'inertie de ses tuteurs. iNéanmoins,
petit nombre de faits
historiques d'une le roi de Syrie fit donner au sénat de
époque certaine. A peine âgé de cinq Rome des explications à ce sujet,
ans lorsqu'il parvint à la couronne à tandis que les tuteurs do Ptolémée fu-
litre de premier-né des deux fils d'Épi- saient a reprendre la Célé-Syrie. Selon
l
'liane , son père et son prédécesseur, le rapport de Tite-J jve , cela se passait
comme lui Philométor resta, pendant sous le consulat de Publius Licinius
ses premières années , sons la protec- Crassus et C. Cassius Longinus, nom-
tion d'une régence qui fut moins ora- més au mois de mai de l'an 171 avant
geuse que celle d'Épiphanc, parce Père vulgaire, et en même temps Pto-
qu'elle ne cessa d'être immédiatement lémée, qui avait atteint sa majorité,
dirigée par la sagesse de CléopAtre, était alors couronné. Il fit frapper des
mere du jeune roi d'Egypte. monnaies à son nom l'année même où
Cependant Séleucus, oui avait hé- sa minorité cessa , la 14 e de son âge,
rité du vif désir d'Antioehus son père et la 9* de son règne, qui est en effet
de posséder la Syrie, et qui ne se con- marquée sur les monnaies qu'on lui
tentait pas de la moitié des revenus attribue, et qui répond aux premiers
qu'il s'était réservée, faisait, pour re- mois de Pan 172 avant Pere chré-
conquérir cette province sur les enfants tienne.
de sa sœur, des préparatifs qui alar- Les tuteurs du jeune roi ne furent
mèrent PÉgypte. Ce dut être dnns pas doués de la sagesse de sa mère
cette circonstance que les ministres Cléopàtre à laquelle ils succédaient. Ils
rîu jeune roi reclamèrent la protection allèrent attaquer Antiochus dans la Sy-
iJe Rome; le sénat ne la refusa point, rie , acceptèrent une bataille qui se livra
et il députa, pour cet effet, MarcOS entre Péluse et le mont Casius, et
yEmilius Lepidus, qui connaissait la dont le résultat fut la défaite totale
cour d'Alexandrie où déjà il avait été de l'armée égyptienne, défaite qui mit
envoyé pendant la minorité mêmed'É- le jeune roi entre les mains d'Antio-
ptph.'inc , père de Philométor; et ce fut chus, lui ouvrit les portes de Memphis,
a cause de cette mission que M. /Enn- de la plupart des villes de PÉgypte,
lius fit inscrire sur un denier de sa fa- et même de Péluse : son humanité à
mille le titre de tuteur du roi (TVTOR l'égard des vaincus lui en facilita la
REG). Ce Romnin était tribun mili- conquête.
28' IJnraison. (f.Girrr.) 28

Digitized by Google
4M L'UNIVERS
Cette catastrophe arriva la 11 " année Philométor se réunit à Évergète; An-
du règne de Philométor. Il parait , d'a- tiochus , que cette réunion aurait dû
près Porphyre, que les Alexandrins, satisfaire s'il avait sincèrement désiré
aussitôt qu Antiochus fut le maître de replacer Philomctorsur le trône de ses
Memphis, où il retenait le jeune Phi- aïeux, en fut péniblement affecté, et
lométor âgé de 1G ans seulement, pla- lit contre les deux frères des prépara-

cèrent sur le trône son frère Evergète tifs plus formidables que ceux de la
afin de prévenir les incertitudes d'un précédente guerre. Il envoya une flotte
interrègne; que cette substitution de contre Chypre, et, des les premiers
roi dura pendant les années 11 à 15 jours du printemps, il se mit lui-même
du règne de Philométor; qu'a cette à la tête de son armée , marcha contre
époque Antiochus, ayant renonce à l'oc- l'Êgvpte, traversa la Celé-Syrie, arriva
cupation de l'Egypte, Philométor re- à Peiuse par terre et par mer, et se
vint à Alexandrie, et consentit a par- dirigea par les plus courts chemins sur
tager le trône avec son frère dont la Alexandrie. Parvenu à quatre milles
fresence avait certainement contribué de cette ville il rencontra C. Popilius;
le conserver ; qu'ils régnèrent ainsi et cet envoyé lui montra , en traçant
jusqu'à la 17' année comptée toujours son cercle, comment le sénat de Rome
de époque de Philométor; et que, par
I notifiait ses ordres à un puissant mo-
l'intervention des Romains, Évergète narque qui n'eut à répoudre que ce peu
cessant de partager le trône , il accepta de mots : Je ferai ce qui plaît au sé-
le gouvernement de la Libye , après nat. Antiochus quitta l'Égypte dans
quoi Philométor régna 18 ans encore, un très-court délai, à compter du jour
qui portent la totalité de sou règne à même de cette conférence.
35 ans. Il résulte de tous ces témoignages

Saint Jérôme ajoute qu'Antiochus réunis, que ce fut la onzième année de


niattre de Memphis, traita le jeune son règne que Philométor fut privé de
Ptolémée Philométor avec beaucoup la couronne par les conquêtes d* Antio-
d'égards; et
, sous
le prétexte spécieux chus qu'en son absence son frère Éver-
;

de le rétablir dans ses droits, mais gète fut placé sur le trône par les
avec l'intention réelle de s'emparer du Alexandrins, et qu'il l'occupa pendant
trône d'Egypte, il en occupa militai- 3uatre années; qu'il envoya demander
rement les villes les plus importantes. es secours à Rome; que, dans cet
Avant cependant éprouvé beaucoup de intervalle, Evergète essaya vainement
résistance , et même des échecs , il fit de traiter avec Antiochus qui refusa
un traité avec le jeune roi , repassa en de lui reconnaître le droit de faire In
Syrie, et, deux ans après, il revint as- paix, et vint l'assiéger dans Alexandrie
siéger les deux fils d'Épiphane, Philo- même; que, rappelé en Syrie par des
métor et Évergète II dans Alexandrie
, événements imprévus, il laissa Phi-
jusqu'à ce que les envoyés de Rome lométor à Memphis, Evergète dans
qui arrivèrent dans ces conjonctu- Alexandrie, espérant que les deux
res l'obligèrent à rentrer dans ses frères se feraient la guerre; que les
Etats. deux frères se réunirent, occupèrent
Tite-Liye dit aussi qu'Antiochus ensemble le trône pendant deux années,
ayant tenté mais sans succès de pren- et qu'alors, dans la 17' du règne de
dre Alexandrie, il laissa Philométor à Philométor, Antiochus venant de nou-
Memphis, lui promettant son assis- veau attaquer l'Egypte et assiéger
tance pour le replacer sur le trône Alexandrie, C. Popilius l'obligea, au
qu'Évergète occupait à Alexandrie. Il nom du sénat, à retourner dans ses
espérait sans doute que les deux frères propres Etats.
en venant aux mains il lui serait plus
, Ce fut donc C. Popilius qui vint dé-
facile de soumettre le vainqueur; il se livrer rÉçypte des armées et de la
retira donc en Syrie, laissant néan- présence d'Antiochus , régla aussi les
moins uns garnison à Péluse. Mais différends qui s'étaient élevés entre

Digitized by Google
,, , .

ÉGYPTK 433

»s deux frères rois , et les jugea selon assentiment à ce que le sénat venait
e qui était prescrit par les lois du de régler.
oyaume. En conséquence, Philométor Évergète attendit longtemps en Li-
esta seul possesseur de la couronne; bve l'issue de cette négociation ; il se
évergète reçut le gouvernement de la disposait a marcher à la tête d'une ar-
Âbye et de la Cyrénaîque , où les Ro- mée contre l'Egypte, lorsqu'il fut in-
tiams , peu de temps après l'obligè- , formé que les Cyrenéens venaient de
ent de rester. se révolter ; et , ne voulant pas risquer
Apeine Antiorhus fut-il de retour à l'acquisition incertaine de Chypre la
lans ses États qu'il y mourut, et la possession de Cvrène , il se dirigea sur
néme année de sa malheureuse e\ pé- cette province d'où les habitants, im-
tition contre les fils de sa sœur, all- patients de son gouvernement tyran-
iée qui fut comme le dit Porphyre
, nique, cherchaient à le repousser par
a onzième et la dernière de sop m: ne. la force des armes. Il venait d'éprou-
>es ambassadeurs étaient al.es a Rome ver un éc hec assez considérable lors-
M>ur déclarer au sénat combien l'ar- que Cn. Merula lui apprit que Philo-
rangement dicté par Popilius lui était métor refusait de consentir à la cession
)greable : ceux de Ptolémée témoi- de l'île de Chypre. Évergète envoya de
gnaient en même temps sa gratitude nouveaux ambassadeurs à Rome Phi-
envers le sénat et le peuple romain lométor y fit aussi défendre ses droits,
et ils exprimaient sans doute des sen- mais le sénat persista dans sa bien-
timents plus vrais que ceux que mon- veillance pour Évergète. On lui en
trait Antiochus. porta la nouvelle à Cyrène où il était
En attendant,
la discorde renaissait rentré ; et au moment où il préparait
,

entre Évergete et Philométor. Le pre- une attaque sérieuse contre Chypre


mier, peu satisfait de la décision qui il faillit d'être la victime de quelques
le faisait descendre du trône pour le embdehes auxquelles il n'échappa point

rendre a Philométor seul, et lui don- sans recevoir plusieurs blessures. 11


nait pour apanage la Cyrénaîque avec courut de nouveau à Rome, et Philo-
la Libye, se rendit à Rome pour de- métor y envoya de nouveaux ambas-
mander qu'elle fût réformée par le sadeurs. Ixî sénat refusa de les enten-
^nat. Il était à pied; il fut reconnu dre, chargea ses députés de conduire
<*n arrivant par Hémetrius , fils de Sé- Évergete a Chypre , et demanda aux
leueus ,
qui lui offrit les moyens d'en- allies de la Grèce de seconder cette
trer à Rome , et d y vivre d'une ma- expédition ; mais Philométor alla lui-
nière plus convenable à son rang et à même défendre cette île, livra bataille
& naissance. à son frère, l'enlerma dans la ville de
Évergète réclamait auprès du sénat Lapethus, où il l'assiégea et le réduisit
contre le partage qui avait été fait par à dernière extrémité : toutefois,
la
C Popiiius entre son frère et lui; il loin de se prévaloir de ce succès, Phi-
«posait qu'il ne lui suflisait pas de la lométor lui accorda une bonne capitu-
J%e et de la Cyrénaîque', et que l'île lation, lui rendit son gouvernement
de Chypre devait être ajoutée a son de Cvrène, et lui donna quelques villes
apmage. Le sénat y consentit; mais de Chypre avec un revenu annuel d'une
Philométor refusa d'exécuter sa déci- certaine quantité de blé.
sion, et des envoyés de Rome partirent Ainsi se termina cette guerre entre
afin de mettre Kvergete en possession les deux frères rois; elle dura quatre
le Chypre. Le sénat avait voulu que années , et jusqu'à la 22* du règne de
ttla sé fît sans employer de soldats Philométor, laquelle commença au
C
prévoyant pas l'opposition de Phi- printemps de la 1G0 année avant l'ère
"Dès qu'il la connut, les en-
!tor. vulgaire.
>)ésde Rome engagèrent Évergète Des que l'accord fut rétabli entre
se rendre en Libje pendant qu'ils eux, Philométor, tranquille sur son
fraient demander à" Philométor son trône, reprit l'occupation ordinaire
2S.

Digitized by Go(
43G L'UNIVERS.
des rois d'Egypte qui n'étaient point consacré ce temple. Rien n'indiqu
engagés dans de plus sérieuses entre- l'époque de cette dédicace ; mais I

prises. II attaqua sourdement le roi de nom de la reine Cléopatre , qui se li

Syrie Démétrius , entretint des intel- dans cette inscription, prouve toute
ligences dans la ville de Ptolémaïs oc- fois que la dédicac e qu'elle rappelle fu
cupée par les soldats syriens , encou- postérieure à la seconde invasion d'An
ragea la défection d Antioehe , et tiochus Épiphane en Egypte , pnfeqiM
favorisa enfin les prétentions au trône pendant la première, Clcouàtre re^t
de Syrie manifestées par Alexandre, dans Alexandrie avec Ptolemee Lvei
fils ôVAntiochus Èpipnane, qui fut gete II, tandis que Philométor étai
reçu à Ptolémaïs de Syrie comme roi. comme prisonnier retenu à. Meinphts
beux années après, vers l'an 149, et qu'après la seconde invasion et l'ai
Démétrius ayant été vaincu et tué, ce rangement fait par Popilius , Éverget
même Alexandre fut reconnu et pro- quittant le trône , Philométor l'oœuji
clamé roi de Syrie , la 30 e année du seul.
règne de Philométor. Ce fut alors qu'il s'unit à Cléopatr
Alexandre demanda que Philométor sa sœur, et dans la 17' année de sa
lui accordât sa (il!e Cléopatre en ma- règne, puisque treize ans après et i

riage; le roi d'Égypte y consentit, et 30' de ce même règne, il avait un


se rendit à Ptolémaïs où ce mariage fille qui devint la femme d'Alexandre

fut célébré. roi de Syrie. Ainsi la dédicace du lem


Ce fut vers le me*me temps que Onias, pie égyptien de Qouss ou Apollinoj>c
filsd'un grand prêtre juif de ce nom, lis-Parva fut postérieure à la i7
retiré depuis quelques années en fcgypte, année du règne de Philométor. Il es
entreprit de demander à Philométor la impossible d'arriver à une plus grand
fiermission d'affecter au culte des Juifs certitude sur l'époque de linscriptioi
e temple de Bubaste. Le roi n'hésita de Qouss. Il en est de même d'un
pas de la lui accorder , ce qui donne autre inscription gravée dans le sano
lieu de remarquer la singulière desti- tuaire du temple d'Ombos : elle cons
née des temples égyptiens qui, survi- tate aussi que Ptolémée Philometu
vant au culte même pour lequel ils et la reine Cléopatre qui était sa sa-m
avaient été élevés , furent successive- dédièrent ce sanctuaire a Apollon t
ment consacrés aux cérémonies des re- aux autres dieux honorés dans ce teui
ligions qui succédèrent en Egypte à pie. lai même incertitude fait donne
celle des Pharaons. Les Lagides éta- la intime époque approximative a l'infl
blirent les premiers cet usage que les cription du grand temple d'Antaeopo
Romains ne manquèrent uas d'imiter, lis , et qui énonce la dédicace que le
et ces lieux sacrés, destinés d'abord au mêmes souverains tirent de son pro
culte des dieux , le furent ensuite au pylee au personnage mythologique An
culte des hommes. tée. Enfin on ne peut pas mieux cou
Le règne de Philométor fournit des naître le temps d'une autre inscrtptioi
exemples de la dédicace des temples trouvée à Citium dans l'île do Chypre
égyptiens aux dieux de la G rèce : d'abord et qui rappelle que cette ville honor;
celui de la ville égyptienne de Kos- de ce monument l'un de ses citoyens
Rerbir dans la Thébaïde, ville que les Hégias, fils de Damothetas, à Vatist
Grecs nommèrent Apollinopolis-Micra de son dévouement au roi Ptolémée,
{parva), et à laquelle les Arabes ont à la reine Cléopatre sa sœur, diein
conservé son nom égyptien en l'appe- Philométors, et à leur descendance.
lant Qouss. Ce temple, qui existe en- Cette inscription est postérieure aussi
e
core, offre sur le listel du couronne- à la 17 année du règne de Philométor,
ment de la porte du sud , les traces et de quelques années, puisque leurs
lisibles de l'inscription grecque qui enfants y sont mentionnes.
constate que la reine Cléopatre et le Deux "ans après avoir placé sa fille
roi Ptolémée, dieux Philométors, ont Cléopatre sur le troue de Syrie, Phi*

Digitized by Go
ftGïPTE. 137

lométor s'engagea dans une alliance pylon dédié à Isis par le Pharaon Nec-
qui avait pour but de le rsvir à son tânebe, et l'existence de ce propvlon
mari. Le fils aîné de Démétritil re- prouve qu'avant le grand temple d'Isis
vendiqua des droits qu'il disait tenir actuel , il en avait été antérieurement
de son père dont la mort n'avait pu les édifié un autre sur le même emplace-
détruire : soutenu par les Cretois, il ment; les Perses de Darius-Occhus
se rendit en Syrie. Ptolémée, dans l'avaient vraisemblablement détruit, et
l'intention de secourir Alexandre, ar- c'est avec ses débris , eucore recon-
riva dans cette province avec des forces naissables, que certaines parties du
de terre et de mer, et en occupa les pronaos actuel du grand temple furent
tilles principales pour les maintenir édifiées. Le second pylône de ce grand
dans le devoir ; mais, ayant été exposé temple est aussi de Ptolémée Philomé-
a devenir la victimedW complot tramé tor , ainsi que le bel édifice de droite
contre sa vie à Ptolémaïs. convaincu qui se voit entre les deux pylônes. La
aussi qu'Alexandre en était l'instiga- galerie de gauche du grand temple
teur, il tourna ses armes contre lui, d'Edfou, de même que toutes les sculp-
les associa à l'entreprise de Démétrius, tures des deux massifs du pylône, re-
lui donna en mariage sa fille Cléo- montent aussi au règne de Philométor.
pàtre qu'il rappela de la cour de Svrie, Le grand temple d'Ombos fut élevé
et fit déclarer pour lui Antiocfie et par Ptolémée Épiphane, et continué
l'armée. Alexandre étant venu l'atta- par Philométor. Ce grand édifice , dont
quer auprès de celte dernière ville , sur les ruines ont un aspect tres-i m posant,
1 Oronte , Ptolémée mit son armée en présente cette singularité qu'il est dé-
déroute , secondé par Démétrius qui die à deux triades qui se partagent le
était devenu son gendre. Peu de jours temple, divisé longitudinalement en
après, Alexandre qui" avait cherché deux parties bien distinctes, l'une pas-
"n refuse en Arabie v trouva la mort
, sant presque toujours dans le massif
et sa tête fut apportée à Philomctor. de la construction. La partie de droite,
Ces événements, selon Josèplie et le la plus honorable , était consacrée à Sé-
premier livre des Machabees, prirent vefc-Ra , la forme primordiale de Sa-
" lissauce dans la 165* année des Sé« turne, Kronos , à tète de crocodile; à
Irucides , et cette guerre dut se faire la déesse Athôr et à leur fils Kuons-
lies le commencement de la 35' année Hdr. La seconde partie du temple était
«le Philométor . et se terminer à l'au- vouée à une triade moins élevée dans
tomne de la même année, celle de l'an la hiérarchie divine , a Aroëris , à la
H7 avant Jésus Christ. déesse Tsonéuoufré, à leur fils Pnevtho,
La mort de Philométor se rattache qui étaient les dieux seigneurs d'Om-
a celte même époque; car, ayant été bos; et voilà pourquoi les médailles
blessé d'une chute de cheval pendant romaines du nome ombite portaient
la bataille qu'il livrait à Alexandre, il la figure du crocodile , l'animal sacré
en mourut sur les lieux mêmes quel- du dieu principal du uame. Une ins-
ques jours après. Tous les chronolo- cription grecque en l'honneur de Phi-
gistes lui donnent 35 ans de règne. lométor se Ut dans le même temple;
Les monuments qui rappellent quel- c'est un hommage des troupes canton-
ques circonstances du règne de Ptolé- nées dans ce nome : l'inscription s'ex-
mée Philométor sont assez nombreux prime ainsi : « Pour la conservation
et ils nous sont fournis a la fois par les du roi Ptolémée et de la reine Cléo-
inscriptions grecques et les inscrip- pdtre sa sœur, dieux Philométors, et
tions égyptiennes, qui s'accréditent de leurs enfants, à Aroëris, dieu
mutuellement par leur autorité particu- grand, et aux divinités adorées dans
lière. Le premier pylône du petit le même temple, les fantassins, les
temple du sud à Phi la? fut construit cavaliers , et autres personnes station-
durant le règne de Philométor. On nées dans le nome.a Ombos, ont fait
encastra alors ce pylône dans un pro- ce séeos à cause de la bienveillance

Digitized by Google
r
438 L'UN] ERS.
de ces divinités envers eux. » Le nome sacrées par le protocole égyptien. Le
d'Ombos étant le plus méridional de grand temple d'Ombos porte aussi une
tous ceux de l'Kgypte; des troupes grande dédicace en écriture hiérogly-
nombreuses devaient y être établies phique , au uom de ce même roi ; et
chargées de garder ce côté des fron- comme si elle était pour l'illustre Sé-
tières du pays. A Antaeopolis, il existe sostris, elle dit: «La vie! le dieu
une seconde inscription grecque du bienfaisant, soleil seigneur du monde,
règne de Ptolemée Philometor; elle approuvé par Phtha, image vivante
constate, en ces termes, que ce roi d'Amon-Ra, chéri des dieux, aimé
fit élever le pronaos du temple de ce d'Aroëris, tuteur de la région... , dieu
lieu , et qu'il le consacra à Antee : grand , seigneur suprême , dieu puis-
« Le roi Ptolémée, fils de Ptoléinéeet sant dans... La vie le dieu gracieux ,
!

de CléopiUre, dieux Ëpiphanes et F.u- soleil seigneur des seigneurs, Ptolémee


charistes, et la reine Cléopàtre, sœur vivant toujours , aime de Phtha , chéri
du roi dieux Phiiométors, ont fait ce
, des dieux , et de Sewek , seigneur de
pronaos a Antée et aux dieux adorés la région d'or dans le disque solaire,
avec lui dans le même temple. » Il pa- bienfaiteur, etc. » Le musée royal du
raît que la corniche de ce pronaos Louvre possède des contrats originaux
éprouva de graves dommages, et elle sur papyrus, en écriture démotique,
fut réparée par les soins des empe- datés du règne d'Alexandre , tils d'A-
reurs romains, qui ajoutèrent cette lexandre , de la 22* année de Ptolémee
seconde inscription à la première qu'ils Evergète I rr , de la 7 e année de Philo-
restituèrent « Les empereurs Césars
: pator , de la 8"' et de la 21* année d'Épi-
Aurèle Antonin et Verus, Augustes, phane ; mais on n'y voit aucune de ces
en ont réparé la corniche, Tan 4 des transactions entre'particuliers, qui ap-
Augustes, le 9 du mois de pavni. »ln partienne au règne de Philometor.
édifice de Parembolé, en ^ibïe, porte Les pièces de ce genre ne sont cepen-
aussi cette commémoration de Ptolé- dant pas rares , et il en existe aussi de
mée Philométor, dans une dédicace l'époque romaine : comme la religion
ainsi conçue « Pour le salut du roi
: et le culte, les règles de l'administra-
Ptolemée et de la reine Cléopfltre, sa tion publique restèrent les mêmes dans
sœur et sa femme les dieux Philomé-
, l'Égvpte soumise à des souverains
tors, à Isis et aux dieux adorés dans d'origines diverses.
le même temple. » Dans une autre dé- Le protocole de ces contrats privés
pendance territoriale de l'Kgypte, l'île nous en donne la certitude; il nous
de Chypre, qui resta toujours sous apprend aussi qu'il existait à Alexan-
l'autorité de Philometor, malgré les drie un culte public en l'honneur d'A-
démarches de son frère Évergète au- lexandre le Grand , et que les Ptolémees
près du sénat romain , on a trouvé qui succédèrent au grand roi ne firent
aussi un souvenir officiel de Philométor faute de s'y faire associer. Ainsi , il y
et de l'attar hement que lui conser- avait à Alexandrie un prêtre d'Alexan-
vaient les habitants d'une des princi- dre , qui l'était aussi des dieux Soters,
pales cités de nie : on lit sur ce marbre des dieux Adelphes, des dieux fcver-
grec: « La ville (de Citium) honore getes , des dieux Philopators , des dieux
Hégias, de Crète, fils de Damothète, Kpiphanes, et ensuite du dieu Philo-
commandant des gardes du corps et metor, quand ce roi eut quitte la vie;
gouverneur de la ville pour sa vertu
, espèce d'apothéose religieuse dans la-
et pour son dévouement envers Ptolé- quelle les reines ne furent pas oubliées.
mée , la reine Cléopàtre sa sa ur , dieux On voit , en effet , pac le texte de l'ins-
Philometors , et leurs enfants ; et pour cription d'Adulis, de l'inscription de
ses bienfaits envers elle-même. » Rosette, du contrat de Ptolemaïs, et
Du reste, le roi grec Ptolemée Phi- des deux contrats du règne d'Épiphane
lometor ne se priva- d'aucune des for- que j'ai publics, qu'une prêtresse de
mules honorifiques et religieuses con- l ordre des canéphores avait été char*

Digitized by Google
ÉGYPTEi 439

gee du culte de la reine Arsinoé Phila- Pamonthis, de couleur noire, beau,


: une athlophore de celui de
m ph«*. lonj; de corps , visage rond , nez droit}
BeréniceÉvergète l* r , rt une prétresse, ainsi que Enachomneus, de couleur
d* Arsinoé Philopator. D'autres prêtres jaune aussi visage rond , nez droit ; et
,

étaient chargés de desservir les hon- Semmouthis Persinei , laquelle est de


neurs divins rendus à Ptolémée Soter, couleur jaune, visage rond, nez un
le fondateur de la dynastie, daus la peu aquilin, bouffie; et Melyt Persi-
ville de Ptolémaïs d*Égypte. nei , laquelle est de couleur jaune , vi-
On voit aussi , par ces protocoles sage rond , nez droit ; avec leur maître
que l'espèce d'invocation oe l'autorité Pamonthis, covendeur; tous quatre de
publique, comme symbole de protec- la corporation des Pétôliostes , parmi
tion , en téta des actes passés , pour les ouvriers en cuir memnoniens; »
des intérêts privés, par les officiers un fonds de terre nu , à eux apparte-
publics, remonte à une haute anti- nant dans la partie du sud du quartier
quité. Nous pouvons ajouter, qu'à tivs Memnoniens, un espace de cinq
cette même antiquité , l'usage de V en- mille cinquante coudées d'étendue : les
registrement de ces actes était établi; voisins du sud, la rue Royale; du
et que cette formalité donnait à ces nord et du levant . le fonds de.Pamon-
actes, comme elle le fait aujourd'hui, this et de Bokon-Ermios, son fcère,
une date certaine et une sanction lé- et les terres communales; du cou-
gale qui en garantissait l'exécution. chant, la maison de Taphis, uls de
L'antiquité alla encore plus loin : aux Chalomis, passant au milieu... Tels
noms , prénoms et qualités des parties sont les voisins de toutes parts; = a
contractantes, elle ordonna d'ajouter acheté le champ, Piéchoutis, petit,
leur signalement : voici, comme preu- de couleur jaune, agréable, visage
ve, d'une singulière curiosité, d'un long, nez droit , une cicatrice au mi-
tel usage , le texte traduit d'un contrat lieu du froht , six cent une pièces de
daté d'un des derniers jours du mois monnaie de cuivre : les vendeurs étant
de mai de l'an 106 avant l'ère chré- les courtiers et les garants de ce qui
tienne : est relatif à cet achat.= A accepté Né-
• Sous règne de Cléopàtrc et (le
le clioutis l'acheteur. ( Ici les signatures.)
Ptolémée son Mis, surnommé Alexan- On lit a la marge: En Tan \u qui est
dre dieux Philométors-Soters, en Tan
, aussi l'an îx , le 20... de pharmouthi,
lu qui est aussi l'an ix (le règne de Diocste? étant préposé aux contribu-
Cléopâtre ayant commencé 3 ans avant tions , Chotsemphis prépose en second ;
lassociatian de son uls) , sous le prêtre, Héracléide contrôleur de l'achat; Nc-
qui est à Alexandrie, d'Alexandre, et choutis , petit , =un fonds de terre nu ,
des dieux Soters, et des dieux Adel- de 5050 coudées , situé dans la partie
phes, et des dieux Éver«etes, et des sud du quartier des Memnoniens , qu'il
dieux Philopators, et des dieux Épi- a acheté de Pamonthis et aussi d'Ena-
pfoanes, et du dieu Phiiométor, et du ehomneus, lequel a signé avec ses
dieu Eupator , et des dieux Éver- sœurs ; pour GOI pièces de cuivre , etc. »
getrs (II) : sous l'athlophore de Béré- etc. »
cr
nice Évergète(I ),et souslacanéphore On voit par le texte de ce contrat
,

d'Arsinoé Philadelphe et de la déesse que les formules actuellement pres-


Arsinoé Eupator, qui sont à Alexan- crites dans les actes des transactions
drie ; et à Ptolémaïs de la Thébaïde privées, sont aujourd'hui en uuelques
sous les prêtres (des deux sexes) de joints moins compliquées qu elles ne
Ptolémée Soter, lesquels et lesquelles f'étaient il y a près de deux mille ans;
sont à Ptolémaïs ; le 29 du mois de le contrat que nous venons de relater
tybî , sous Apollonius préposé a l'AgQr remonte à cette antique date ; il est de
ranomie pendant oc mois, pour l'ad- peu postérieur à l'époque de la mort
ministration des fonds de terre nus, de Ptolémée Phiiométor.
dans le nome Tathyrite, =
a vendu Ce roi, en cessant de vivre et de

Digitized by Google
440 Ll .NI\ KRS.
régner, bissait, avec la reine CféopA- dirent coupables de quelques plaisan-
tre sa veuve, deux filles et un (ils teries sur ses relations avec une femme
encore en très-bas Tige. nommée Irène. Aussi les Égyptiens se
Enhardi par cette circonstance, qui souvenaient-ils avec plus de soin et
ne devait lui faire craindre que cette f)lus de respect de la bienfaisance et
de
Inactive opposition propre aux temps a modération de Philométor, et celte,
où les rois sont en tutelle, et peut- comparaison qu'ils faisaient des deu\
être aussi par l'exemple récent de Dé- princes rendait plus vif encore leur
métrius, frère d'Antiochus le Grand, désir de se soustraire à tant de tyran-
qui lui avait succédé à l'exclusion de nie. Ptolémée avait pris le surnom
son (ils mineur Antiocluis Eupator, le Evergète ou Bienfaiteur; le peuple
frère de Ptolémée Philométor, qui prit le nomma avec plus de raison Aoker-
le surnom d'Évergète II, apprenant la gèle ou Malfaiteur. Rien d'ailleurs
mort du roi, s'empressa de quitter dans sa personne ne contribuait' à lui
Cyrène et de venir, les arnifs à la concilier la faveur publique : son corps
main, s'emparer de la couronne d'É- était aussi hideux que son caractère,
té au détriment du jeune fils de et Posidonius le Stoïcien , qui accom-
lometor. Incapable de résister, pagnait en Égvpte P. Scipion ^miiien.
Cléopâtre lui envoya des députés qui visitant avec Spur. Merula et L. Mem-
réglèrent avec lui 'qu'elle deviendrait mius les États des rois alliés, et qui
sa femme, et qu'Évergète prendrait la vit Évergète, a fait de sa conformation
tutelle du jeune roi. Il entra dans un tableau repoussant, ce qui a fait
Alexandrie avec ce titre, énonça la dire à Justin qu'Évergète II parut au-
reine mère, et, le jour même de son tant ridicule aux Romains qu'il était
union, il fit égorger le jeune héritier odieux à ses sujets; ils le surnom-
du trône dont il devint le possesseur maient aussi Physcon , le Ventru.
par ce crime. Le jeune prince avait été f
\*s envovés dé Rome arrivèrent en
reconnu comme roi il porta le sur-
; Égypte à l'époque où Évergète fut
nom d'Eupator, et il est mentionné forcé d'appeler, par des actes publics,
sous ce nom, et au rang dynastique des étrangers dans son royaume, tant
qui lui est assigné comme successeur les supplices ou la crainte d'y être ex-
légitime de son père, dans le contrat posé avait diminué la population d'A-
de vente dont le texte est ci-dessus lexandrie. Il ne renonça pas pour cela
rapporté. Son règne ne dura que quel- à ses funestes pratiqués, et la licence
ques mois, et il périt dans l'âge de qu'il tolérait dans les troupes merce-
l'enfance. naires ne fit qu'accroître encore le de-
Son oncle, Évergète II, préludait sordre.
ainsi aux atrocités dans lesquelles il Il moindre dans l'in-
n'avait pas été
sembla toujours se complaire. Bientôt du palais que dans l'intérieur
térieur
après, arrivé à Memphis pour son du royaume; car, épris de ia jeune
inauguration religieuse, la reine v mit Cléopàtre, fille de son frère et de sa
au monde un fils, qui, de cette cir- femme, Évergète avait répudié celle-
constance, rec.ut le nom de Memphite. ci pour épouser l'autre.
Cette naissance et l'inauguration du Cet état de choses dura quinze ans
roi eurent lieu vers In fin de la pre- à compter de la fin du règne de Philo-
mière année de son règne, peut-être métor, comme le rapporte Diodore de
même, et comme pour Rpiphane, le Sicile; mais à cette époque, jugeant
jour anniversaire de celui où il était tout à redouter d'un peuple
qu'il avait
parvenu au trône. que d'atroces injustices avaient poussé
Au milieu des fêtes célébrées à l'oc- à l'insurrection, le roi s'échappa d'A-
casion de la naissance d'un héritier de lexandrie et alla lever des troupesétran-
la couronne royale, le roi fit mettre à sères pour reconquérir son trône. Ceci
mort plusieurs Çyrénéens qui l'avaient se passait en l'an 132 avant lcre vul-
accompagné en Egypte, et qui se ren- gaire.

Digitized by Google
OYI'TFi

Digitized by Google

t t

• : • r : • r ••
.
*

Digitized by Google
ÉGYPTE 441

Aussitôt le peuple d'Alexandrie ren- dre monta sur le trône de Syrie.


rersa et détruisit les images du roi. Bientôt il oublia jusqu'à son bienfai-
Présumant que Cléopâtre la mère l'ex- teur, et menaça l'Égypte et son roi
citait a cette action, Évergète en était Éveri;ète II. Celui-ci, qui ne trouvait
plus porté à la vengeance, et bientôt aucune garantie dans les intentions du
après il marcha contre Alexandrie. 11 faux Alexandre, se réconcilia d*abord
Gt aussimettre à mort son jeune fils et avec Cléopâtre sa sœur et sa première
sans autre motif que l'inteution d'affli- femme, donna sa fille Tryphène à An-
ger sa mère, l'ayant emmené avec lui, tiochus, surnommé Grypus, l'un des
craignant qu'en son absence les Alexan- fils de Demétrius Suter, et, lui four-
drins pussent le placer sur le trône. nissant en même temps une nombreuse
Cléopâtre, secondée par les sujets armée, il le plaça sur le trône de Syrie,
du roi, se préparait a lui résister; elle où le faux Alexandre ne fit qu'appa-
avait réuni une armée sous le com- raître.
mandement de Marsyas, qui en vint •L'avénementd'Antiochus Grypus au
aux mains avec les troupes d'Évergète, trône de Syrie, en l'an 127, ramena la
commandées par Hégcloihus. .Marsyas tranquillité dans le royaume. Try-
fut faitprisonnier et conduit au roi, phène, Hi le d'Ê vergeté II, en était la
qui luipardonna, voulant, par ce pre- reine; cette alliance contribua aussi à
mier acte de clémence, faire oublier rendre à l'Égypte le repos dont elle
sa cruauté. avait besoin.
Dans ces conjonctures, Cléopâtre ftolémée Éverçète II, n'étant plus
demanda du secours au roi de Syrie distrait par la nécessité de défendre
Demétrius, qui était l'époux de" sa son royaume au dehors, s'adonna aux
filie. C'était au temps où il venait de lettres' et aux arts il prit le soin d'en
:

triompher d'Antiochus Sidétes chez les ranimer l'étude, que les ma heurs pu-
Parthes, et qu'il remontait sur son blics avaient fut négliger. Il appela de
trône après un interrègne de neuf an- nouveau les savants et les artistes à sa
nées, Tan 130. cour, protégea efficacement les insti-
Démet rius n'hésita pas d'embrasser tutions littéraires qui existaient à
la cause de Cléopâtre, et d'ordonner Alexandrie, et, disciple d'Aristarque
l'envoi d'une armée en Énypte; mais legrammairien, il se plaça lui-même
Antioche et plusieurs autres villes de parmi les auteurs de son siècle qui ré-
la Syrie venaient de de déclarer indé- digèrent de longs ouvrages. Il écrivit
pendantes de son autorité, ^'espérant des Commentaires en vingt-quatre li-
plus de secours en Égynte, Cléopâtre vres : la zoologie en fut le sujet spé-
la quitta, emportant de grandes ri- cial , si l'on en juge par les fragments
chesses, et se retira auprès de Démé- qui nous restent, et qui traitent de
trius même. En attendant, Ptolémée, quelques animaux ou curieux ou uti-
qui favorisait la défection des villes les, entre autres des poissons d'une
syriennes, suscitait aussi un compéti- rivière de Libve, du paon, du faisan,
teur a Demétrius; il soutenait de son etc. Ce goût Je Ptolémée pour les re-
crédit et de son armée les fourberies cherches savantes lui fit aussi donner
d'un jeune Égyptien qui se prétendit
, le surnom de Philologue, qu'il mérita
le fils adoptit' d'Antiochus Sidétès, et moins peut-être que celui de Raker-
qui prit le nom d'Alexandre. La haine gète.
que Demétrius avait inspirée à ses su- Ce prince approchait par son âge du
jets par son orgueilleuse domination terme de sa carrière, et la reine voulut
favorisa les prétentions du faux Alexan- prévenir les effets d'une mort inopinée :
dre. Le roi de Syrie se vit bientôt dé- des deux fils qui restaient a Ptolémée,
laissépar sa femme même et ses fils, elle haïssait profondément le premier-
qui se retirèrent à Plolémaïs; il cher- né, celui que l'usage appelait à succé-
clia vainement un asile dans le temple der à son pere. Llle eut assez d'ascen-
d« Tvr, il y fut mit à mort, et Alexan- dant fur le roi pour le déterminer à 1*
442 L'UNIVERS.
pour Plie de Chypre, espé-
faire partir truction. Il appartient au règne des
rant que son éloignement donnerait à Lapides , comme le prouve une double
Alexandre, son second fils, le temps et dédicace d'un travail barbare, sculptée
l'occasion de prendre la couronne lors- intérieurement autour du sanctuaire,
que la lin du règne et de la vie de leur et lesnoms royaux inscrits devant les

père serait arrivée. Klle eut lieu peu personnages figurant dans tous les ta-
de temps après, et dans la 29* année bleaux d'adoration.
du règne d'Évergcte II. « I^a dédicace annonce expressément

Malgré les continuelles agitations in- que le roi Ptolémée Evergète If, et sa
térieures et extérieures dont le règne de sortir la reine ( lêopàtre, ont construit
ce prince fut traversé, il en est peu cet édifice, et l'ont consacré à leur père
dans l'histoire d'Égypte dont il nous le dieu Thôth, ou Hermès Ibiocé-
reste aujourd'hui de'si nombreux et de phale.
si importants monuments, comme si C'est ici le seul des temples encore
«
les honneurs à rendre aux dieux, et l'a- existants en Egypte qui soit spéciale-
grandissement, l'ornement ou l'édifi- ment dédié au dieu protecteur de!»

cation des édifices sacrés, étaient mis sciences, à l'inventeur de l'écriture et

en Egypte hors de l'influence des plus de tous les arts utiles, en un mot a

sinistres événements, moins puissante l'organisateur de société humaine.


la
aue la pieté profonde dout la nation On retrouve son image dans la plupart
était animée. des tableaux nui décorent les parois dr
Un des plus curieux monuments de la seconde salle, et surtout celles du
cette époque est, sans contredit, le sanctuaire. On l'y invoquait sous sen
petit temple de Thôth, près de Médi- nom ordinaire de Thôth , que suivent
net-tlahou, à Thèbes, élevé par Pto- constamment soit le titre de sotem.
lémée Évergète II, et dédié en son qui exprime la suprême direction dr>
nom et en celui de Cléopàtre sa pre- choses sacrées, soit la qualification
mière femme. Nous mettons sous les Ho-en-llib, c'est-à-dire, qui a me
yeux du lecteur la description de ce face d'Ibis, oiseau sacré, dont toutes
curieux édifice, telle qu'elle a été ré- les figures du dieu, sculptées dans ce
digée sur les lieux, en 1829, par temple, empruntent la téte, ornée de
Champollion le jeune. coiffures variées.
« Dans le quartier sud -ouest de la « On rendait aussi dans ce temple
vieille capitale pharaonique s'élèvent un culte très-particulier à Kohémouo
deux édifices sacrés dignes d'intérêt ou Sohamouo , déesse que caractéri-
sous les rapports historiques et mytho- sent le vautour, emblème de la mater-
logiques. nité, formant sa coiffure, et l'image
« L'une de ces constructions s'élève d'un petit propylon s'élevant au-dessus
au milieu de broussailles et de grandes de la coiffure symbolique. Les légendes
herbes, en dehors de l'angle sud-est tt tracées à côté des nombreuses repré-
à une très-petite distance de l'énorme sentations de cette compagne du dieu
enceinte carrée, en briques crues, qui Thôth, qui, d'après son nom même,
environnait jadis le palais et les tem- paraît avoir présidé à la conservation
ples de Médmet-Habou. C'est un édi- des germes f l'assimilent à la déesse
fice de petites proportions, et qui n'a Saschfmotte , compagne habituelle de
jamais été complètement terminé; il se Thôth , régulatrice des périodes d'an-
compose d'une sorte de pronaos et de nées et des assemblées sacrées.*
trois salles successives, dont les deux « Ces deux divinités reçoivent, outre

dernières seulement sont décorées de leurs titres ordinaires, celui de Rési-


tableaux soit sculptés et peints, soit dant à MaNTHOm; nous apprenons
ébauchés, ou même simplement tracés ainsi le nom antique de cette portion
à l'encre rouge. Ces tableaux ne lais- de Thèbes où s'élève le temple de
sent aucun doute sur la destination du Thôth.
monument, ni sur l'époque de sa cons- « Le bandeau de la porte qui dono?

Digitized by Google
,

EGYPTE. 443

entrée dans la dernière salle du tem- chacun de ces personnages achèvent de


ple, le sanctuaire proprement dit, est démontrer que ces honneurs sont
orné de quatre tableaux représentant adressés aux rois et aux reines Lagi-
Ptolémée faisant de riches offrandes, des, ancêtres d'Évergète II en ligne
d'abord aux grandes divinités protec- directe; et, en effet, le premier bas-
trices de Thèbes , Amon-Ra> Mouth et relief de gauche représente Ptolémée
C/tons, généralement adorées dans Philadelphe, costumé en Osiris, assis
cette immense capitale, et en second sur un trône à côté duquel on voit la
Heu aux divinités particulières du tem- reine Arsinoé sa femme, debout, coif-
ple, Thôth et la déesse Sohamouo. fée des insignes de Mouth et d'Hathôr.
Dans l'intérieur du sanctuaire, on re- Éverçète II lève ses bras en signe d'a-
trouve les images de la grande triade doration devant ces deux époux, dont
thébaine, et même celles de la triade les légendes signifient Le divin père
:

adorée dans le nome d'Hermonîhis, desesj>ères, Ptolémée, dieu phila-


qui commençait à une courte distance delphe; la dirine vtère de ses mères,
du temple. Deux grands tableaux, l'un Ausînoé, déesse philadelphe.
sur la paroi de droite, l'autre sur la « Plus loin, Évergète II offre l'en-

paroi de gauche, représentent, selon cens à un personnage également assis


l'usage, la Bari ou Arche sacrée de la sur un trône et décoré des insignes du
,

divinité à laquelle appartient le sanc- dieu Socarosiris, accompagne d'une


tuaire. L'arche de droite est celle de reine debout, la tête ornée de la coif-
Thoth-Peho-e:* Hib {Thôth à face fure d'Hathôr, la Vénus égyptienne;
d'Ibis) , et l'arche de gauche celle de leurs légendes portent : Lepere de ses
Thoth Psotem (Thôth, le surinten- pères Ptolémée, dieu créateur; la
y

dant des choses sacrées). L'une et dirine mère de ses mères , Bérénice,
l'autre se distinguent par leurs proues déesse créatrice. On peut donc recon-
er
et leurs poupes décorées de têtes d e- naître ici soit Ptolémée Soter 1 , et sa
pervier, surmontées du disque et du femme Bérénice, fille de Magas, soit
er
croissant, à téte symbolique du dieu Ptolémée Évergète I , et Bérénice sa
Chons, le aîné d'Ammon et de
fils femme et sa sœur. L'absence totale du
Mouth, troisième personne de la
la cartouche prénom dans la légende du
triade thébaine, dont le dieu Thôth Ptolémée, objet de cette adoration,
n'est qu'une forme secondaire. autoriserait une ou l'autre de ces
I

• Ici, comme dans la salle précé- hvpothcses. Mais si l'on observe que
dente, on retrouve toujours le roi pto- ces deux époux reçoivent les homma-
lémée Évergète //, faisant des offran- ges d'Évergète II a la suite des hon-
des ou de riches présents aux divinités neurs rendus en premier lieu à Pto-
locales. Mais quatre bas-reliefs de l'in- lémée et à Arsinoé Philadelphes, on
térieur du sanetuaii'e, sculptés deux h se persuadera que le second tableau
gauche et deux à droite de la porte, concerne les enfants et les successeurs
ont fixé plus particulièrement mon at- immédiats de ces Lagides, c'est-à-dire,
tention. Ce ne sont plus des divinités Évergète I rr et Bérénice sa sœur. Le
proprement dites auxquelles s'adres- titrede Pther-mounk, dieu créateur,
sent les dons pieux du Lagide ici: dieu fondateur ou fabricateur, convien-
Évergète II comme le disent textuel-
, drait beaucoup mieux, il est vrai, h
er
lement les inscriptions qui servent de Ptolémée Soter I fondateur de la
,

titre à ces bas-reliefs, brûle Vencens domination des Lagides; mais j'ai la
fi
n l'honneur des pères de ses pères et pleine certitude que ce titre est prodi-
des mères de
ses mères. Le roi accom- gué sur les monuments égyptiens à une
pliten effet diverses cérémonies reli- foule de souverains autres que des
gieuses en présence d'individus des chefs de dynasties.
deux sexes, classés deux par deux, « Deux bas-reliefs, sculptés 5 droite
et revêtus des insignes de certaines de la porte, nous montrent Evergète II
divinités. Les légendes tracées devant rendant de semblables honneurs aux

Digitized by Google
444 L'L^

images de ses autres ancêtres et prédé- mer ainsi, son propre interprète. Il
cesseurs, et toujours en suivant la suflit , en effet, d'étudier quelques ins-

ligne généalogique descendante : ainsi tants les sculptures qui ornent le sanc-
dans le premier tableau, le roi répand tuaire de rédifiec situé à côte de
des libations devant le divin père de l'enceinte de Médinet-IIal>ou, la seule
son père, Ptolemee, dieu Philopa- portion du monument véritablement
tor, et la d'aine mère de sa mère, terminée, pour se convaincre aussitôt
ARsiNOÉ,</ee.vAePHiLOPAroiiE; enfin, qu'on se trouve dans un temple con-
dans le second tableau , il fait l'offrande sacre au dieu Thôth, construit sous le
du vin à son royal père Ptolemee, règiie d' Évergète II, et de sa sœur et
dieu Épi ph ane, et à la royale mère première femmeCléopàtre, mais dont
Cléopaïre, déesse Épiphane. Son les sculptures ont été terminées posté-
père et son aïeul sont figurés dans le rieurement à l'époque du mariage
costume du dieu Osiris; sa mère et son d'Évergete 11 avec Cléopàtre sa nièce
aïtule dans le costume d'IIathôr. et sa seconde femme, mentionnée dans
Quant aux titres Pliiladelphe, Philo- les légendes royales qui décorent le
pator et Épipliaue, ils sont placés à la plafond du sanctuaire.
suite des cartouches noms propres, et « Le style mou et lourd des bas-re-
exprimes par des hiéroglyphes phoné- lûfs, la grossièreté d'exécution des
tiques (représentant les mots coptes hiéroglyphes, et le peu de soin donné
équivalents). Ces quatre tableaux nous à l'application des couleurs sur les
donnent donc la généalogie complète sculn: ures, s'accordent trop bien avec
d' Évergète II, et l'ordre successii des les dates fournies par les inscriptions
rois de la dynastie des Lagides à partir dédicatoires, pour ne pas reconnaître
de Ptolémée Pliiladelphe. dans le petit temple de Thôth un pro-
« C'est toujours ainsi que les monu- duit de la décadence des arts é^vp-
ments nationaux de l'Égypte servent tiens, devenue si rapide aux dernières
pour le moins de confirmation aux époques de ta domination grecque. »
témoignages historiques puisés dans Les autres constructions du même
les écrits des Grecs; et cela toutes les règne rendent le même témoignage, et
fois qu'ils ne viennent point éelaircir il se vérifiera partout <>ù les traces des
ou coordonner les notions vagues et travaux ordonnés par Évergète II sub-
incohérentes que ce même peuple nous sistent encore : à Kdfou, sur la paroi
a transmises sur l'histoire égyptienne, droite du pronaos qui fut terminé par
surtout en ce qui concerne les an- ce prince; au mammési du même lieu,
ciennes époques L'usage constamment où sont représentées Penfapee et l\du-
suivi par les Égyptiens de couvrir cation du jeune Ilar-Sont-Tho, fils de
toutes les parois de leurs monuments Har-Hat d'Athôr, auquel la flatterie
et
de nombreuses séries de tableaux re- a associé Évergète II , représenté aussi
présentant des scènes religieuses ou comme enfant, et p rtageant les ca-
des événements contemporains, dans resses que les dieux de tous les ordres
lesquels ligure d'habitude le souverain prodiguent au dieu nouveau-né; a Om-
régnant à l'époque même où Ton sculp- bos. dont Évergète II fit agrandir le
tait ces bas-reliefs; cet usage, disons- grand et le petit temple; à Dakkèh en
nous, a tourné bien heureusement au Nubie, où le même roi fit continupr le
profit de l'histoire, puisqu'il a conservé temple de Thôth fonde par le roi éthio-
jusqu'à nos jours un immense trésor pien Lrgamène; a Phila\ au temple
de notions positives qu'on ehercherait d'Hathôr élevé par Ptolémée Épiphane
inutilement ailleurs. On peut dire, en et orné par son second fils, qui,
toute vérité, que, grâce à ces bas- re- toutefois, s'attribue les honneurs (Je

liefs et aux nombreuses inscriptions la dédicace dans les longues inscrip-


qui les accompagnent, chaque monu- tions de la frise. A El-Asassif, le sanc-
ment de l'Égypte s'explique par Jui- tuaire du temple d'Amon-Ra fut aussi
méme, et devient, si Ton peut s'expri- réparé par Évergète II , en son nom et

Digitized by Google
ÉGYPTE. 445

en de
celui CJéopâtre, répara-
la reine ment que 29 ans ; mais ayant été ap-
tions dont le stvle contraste par leur pelé un moment au trône* lorsque son
grossièreté avec l'élégance du style des irere Philométor fut détrôné par le
autres parties du monument fondé roi de Syrie, ce qui arriva 24 ans
par le Pharaon Thouthmosis I* r Le . avant son propre avènement , Éver-
temple d'Hathôr, situé derrière Tamé- gète II compta les années dej»on règne
nophium de Thèbes, fut aussi l'objet éphémère à la place de Philométor, et
des soins pieux d'Évergète II. Les se donna ainsi 53 années de règne,
inscriptions constatent encore aujour- quoiqu'il n'ait réellement régné que 29
d'hui qu'il en lit terminer une partie ans depuis la mort de son frère Phi-
des décorations, et ces inscriptions lométor, et y compris la courte exis-
s'expriment ainsi o Bonne restaura-
: tence de son neveu Eupator, assassiné
tion de l'édifice, exécutée par le roi par ses ordres. Les médailles de ce roi
germe des d eux lumineux, l'éprouvé connues jusqu'à ce jour, ne portent pas
par Phtha etc. , Ptolémée toujours vi-
, de date postérieure à Tan 27 de son
vant, et par sa royale sœur, la modé- règne. I) autres monuments en langue
ratrice souveraine du inonde, Cléo- grecque se rapportent aussi au règne
pâtre, et par sa royale épouse, la et à ( histoire d'Évergète IL
modératrice souveraine du monde, On lit sur les listes du pronaos du tem-
Cléopdtre, dieux grands chéris d'A- ple d'Hathôr à Phi lac, une inscription
mon-Ra. » Enfin à Medinet-IIabou le qui porte « Le roi Ptolémée et la reine
:

même prince lit restaurer les portes Uéopâtre sa sœur, et la reine Giéopatre
et une portion du plafond de la grande sa femme, dieux Évergètes, à Vénus. »
salle. Une autre inscription grecque était
L'un des plus précieux monuments gravée sur un des temples de Dakkèh
égyptiens qui nous restent du règne en Nubie, annonçant un vœu en l'hon-
de' Ptolemee Évergète II , est , sans neur du roi Ptolémée, et des reines,
contredit, la stèle en granit qui se vraisemblablement , dieux Évergètes.
voit, à côté de la porte, sur le pylône On a trouvé an Caire, sur une pierre
oriental du grand temple de Phila» ; ins- isolée, la mention d'un monument
cription en cara* tères hiéroglyphiques, élevé à Évergète II par un fonction-
qui contient Tarte d'une donation laite naire public du temps, comme Tan-
uu temple , et une date ainsi conçue : nonce le texte de l'inscription ainsi
L'an xxiv, au mois de peritios, qui conçue : « Apojlodore, lils d'Aétès, un
est , pour les Égyptiens , le mois d'epi- des 'premiers amis , éj istate et greffier
phi ; > renseignement d'un bien gfand du corps des cavaliers du pays , honore,
intérêtpour Fa concordance du calen- par ce monument, le roi Ptolemée,
drier macédonien auquel appartient
,
dieu Évergète, fils des dieux Épiphanes.»
le mois de peritios, avec le calendrier L'usage de ces honneurs rendus au roi
égvptien , dont le mois ri'épiphi est le régnant par leurs propres employés ou
onzième. L'inscription de Rosette four- par les corporations civiles et mili-
nit un exemple analogue, et on y trouve taires, paraît avoir été général en
de plus la concordance des jours «les Égypte pendant la domination des rois
deux mois. L'indication de la 24' année grecs. On en tire une preuve nouvelle
du règne d'Évergète 11 fixe la date de de l'inscription grecque découverte
cet acte de donation à Tannée L'3 avant
I près de la première cataracte qui con-
,

l'ère chrétienne. tient un hommage aux divinités locales


Le musée royal du Louvre possède pour les rendre favorables au roi, et
quatre contrats'en écriture démotique, qui s'exprime ainsi : « Pour la conser-

passes durant le règne de» Ptolemée vation de Ptolémée et de la reine Cléo-


Évergète II ; le plus ancien est de Tan frâtre sa sœur, dieux Évergètes, et de
28 de ce rèjme; deux autres portent purs enfants, Héroïde, Vus de Dé-
les dates de Tan 41 et de Tan 4ô. É ver- mophon , natif de Bérénice, comman-
gîte II, cependant, ne rcizna réelîe- dant des cardes du corps , et stratège,

Digitized by Google
4 ir> L'UNIVERS.
et les Basilistes qui tiennent leurs réu- Ptoîémées en Égypte, sous les rap-
nions à Sétis, Pile de Bacchus, dont ports religieux, civil et militaire,
Jes noms sont inscrits ci -dessous, d*'it Les prêtres égvptiens
v recueillir.
= àChnoubis, appelé aussi Ainmon;à de rfle de Phikn adressent au roi leurs
Satis, appelée aussi Junon; à Anucis, plaintes contre la plupart des fonction-
appelée atfssi Vesta; à Pétempamcntis, naires du pays et les troupes qui s'y
appelé aussi Bacchus; à Pctensetès, rendent , en ces termes « Au roi Pto-
:

appelé aussi Saturne ; à Petensénès ap- ,


lémee , à la reine (Iléop3tre sa sœur
pelé aussi Hernies, dieux grands, et à la reine Cléopâtre sa femme, dieux
aux autres divinités adorées à la cata- Évergctrs, salut: Nous, les prêtres
racte , am cousacrent cette stèle , et les d'Isib , adorée dans l' Abaton et à Phila?
sommes fournies par chacun d'eux déesse très-grande : considérant Que
pour les frais des sacrifices et libations les stratèges, les épistates, les thé-
qui auront lieu dans le synode, pen- barques , les greffiers royaux , les épis-
dant les premiers neuvièmes jours de tates des corps chargés de garder le
chaque mois, et pendant les autres pays, tous les officiers publics qui
jours éponymes ; Papias , fils d' Ainmo- viennent à Phi lac, les troupes qui les
nius, étant prostate, et Dcnvs, fils accompagnent, et le reste de leur
d'Apollonius, étant grand prêtre du suite , nous contraignent de leur four-
synode. » {Traduckm de M. Lettonne.) nir de l'argent ; et qu'il résulte de teJs
Les noms des Basilistes suivent le texte abus que le temple est appauvri , et
de cette inscription , où l'érudition a que nous courons le risque de n'avoir
recueilli avec avantage une précieuse plus de quoi suffire aux dépenses, ré-
assimilation de quelques divinités égyp- glées par les lois , des sacnîices et li-
tiennes à autant de dieux de la my- bations qui se font pour la conserva-
thologie grecque et lutine. tion de vous et de vos enfants , nous
Il y eut, du reste , quelque chose de vous supplions, dieux très -grands,
plus que le mélange des dieux dans les de charger, s'il vous plaît, Numéniu*,
rapports de l'Egypte avec la Grèce et votre parent et épistolographe , d'écrire
avec Borne. Évefgète II s'était fait des à Lochus, votre parent et stratège de
amis parmi les Romains, ou plutôt la Théhaïbe, de ne point exercer, à
s'était fait leur ami et leur client; et notre égard , de ces vexations, ni de
une autre inscription grecque, trouvée permettre à nul autre de le faire ; de
dans l'île de Délos , prouve qu'un Ro- nous donner, à cet effet, les arrêtes
main fut revêtu par Évergete II du et autorisations d'usage, dans les-
titre d'ami du roi ( titre d'une charge quelles nous vous prions de consigner
de cour) , et que le roi lui donna aussi la permission d'élever une stèle où
le, gouvernement d'une province de nous inscrirons la bienfaisance que
l'Egypte: cette inscription, en effet, vous aurez montrée à notre égard en
s'exprime ainsi : « Lucius Pedius et cette occasion, afin que cette stèle
Caius Pedius, (ils de Caius Pedius, conserve éternellement la mémoire de
Romains , ont honoré pour sa vertu , la grâce que vous nous aurez accor-
ses qualités éminentes et sa bienveil- dée. Cela étant fait , nous et le tem-
lance envers eux, Marcus Pedius, pa- ple en ceci , comme nous le sommes
,

rent du roi Plolémée Évergete et de en d'autres choses, vos très -obligés.


la reine CléopHtrc , et épistrutége. Ils Soyez heureux. » [Traduction de M. Le-
consacrent cette statue a Apollon et à trônne.)
Diane. « Les faits historiques abondent dans
En ii , un autre monument en lan-
li ce texte , et il a eu sur les études égyp-
gue grecque, du règne d' F. vergeté II, tiennes là plus haute influence w :

nous a été conservé , et il est , sans nul stèle que les prêtres se proposent d'éle-
doute, le plus curieux^ parmi tous ver en l'honneur du roi Ptolémée
les autres, par les faits importants fut en effet exécutée; cette stèle, <ju«

que l'histoire de l'administration des était un obélisque in écritur« hièro-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 447

glvphique, a été trouvée près de l'ins- blir dans ses droits au prix d'une
cription grecque; elle a ainsi mis à la guerre contre sa mère et contre son
disposition de la critique philologique frère.
un second texte hiéroglyphique se rap- Tel est tableau des événe-
le triste
portant à un texte grec, et analogue ments qui suivirent la mort de Ptolé-
en ceci au précieux texte de Rosette, mée Évergète II , et caractérisèrent le
Tun et l'autre contenant des noms règne de ses successeurs immédiats
propres absolument semblables : c'est durant trente-six ans , divisés en trois
ainsi que Champollion le jeune a pu rennes successifs Soter II, Alexan-
:

vérifier, par l'inscription de Philae, dre I ,r , et Soter II rappelé.


les déductions qu'il avait tirées de Soter II , à son avènement fut con-
,

l'inscription de Kosette, et l'alphabet traint par sa mère de répudier sa femme


des hiéroglyphes a été découvert. La Cléopâlre qui resta seule dans l'île de
stèle de Philae est en Angleterre; l'ins- Chypre.
cription grecque s'y trouve aussi : ce Alors les deux prétendants au trône
sont deux conquêtes du plus haut in- de Syrie, Antiocnus Grypus et Antio-
térêtpour la science , et qui serviront chus Cyzicenus, n'avaient pas encore
longtemps 5 le souvenir de
conserver termine leurs sanglantes querelles. Le
quelques faits intéressants du règne de Sçemier avait épousé Tryphène, fille
Ptolemée Évergète II. e Ptolémée Évergète II , et sœur de
Quand ce prince mourut, il laissa Cléopâ'tre qui gouvernait à Chypre.
la couronne a Cléopâtrc sa veuve , et Celle-ci quitta bientôt cette lie pour
à celui de ses deux (ils qu'elle choisirait s'unir à Antiocnus Cyzicenus, et lui
pour régner avec elle. La reine eût f>orta pour dot une armée qu'elle avait
préféré le plus jeune des deux , qu'elle evée et qu'elle conduisit en Syrie.
croyait plus dévoué à ses volontés; Chvnre étant alors sans gouverneur
mais Pusage encore l'emporta , et les par le départ de Cléopatre , Ptolémée
vœux publies avec lui placèrent le pre- Alexandre s'y rendit : cela arriva la troi-
mier-né sur le trône. Cléopatre le rap- sième année du règne de Soter IL
pela de l'île de Chvpre où il comman- Le souvenir de Cléopatre qui subit
dait; elle exigea de lui qu'il répudiât une si cruelle mort à Antioche, avait
sa sœur Cléoj âtre, à laquelle il était attaché Ptolémée Soter II aux intérêts
uni depuis quelques années, et qu'il d' Antiocnus Cyzicenus dont CléopAtre
épousât son autre sœur nommée Sé- avait été si peu de temps l'épouse ; et
lene. A ces conditions le fils aîné d'E- dans la guerre intestine que cet Antio-
vergète II monta sur le trône et prit chus soutenait contre son frère , Pto-
le surnom de Soter II, vers l'an 1 17 lémée, malgré l'opposition de Cléo-
avant Jésus-Christ. Mécontente de ce pAtre sa mère, avait envoyé à Cyzicenus
Fils, la reine Cléopatre excita contre un secours de six mille hommes. Mais
lui la populace d'Alexandrie , le sépara les sujets de ces rois n'étaient point
de Selène do t il avait deux enfants, dispensés d'être solidairement enga-
le força de déposer la couronne , et la gés dans ces colamiteuses controverses,
mit sur la tête de son second fils qui et ils s'en trouvaient tout a la fois les
prit le surnom d'Alexandre. Celui-ci défenseurs et les victimes. Les deux
épouvanté bientôt par les fureurs de filles d'Êvergète II s'étaient mutuelle-
sa mère , la quitta subitement et se re- ment égorgées dans l'intérêt de ces
tiraà Chvpre. Elle le rappela , en mé- prétentions; Soter II protégeait An-
ditant le projet de s'en défaire; mais tiochus Cyzicenus : c'en fut assez pour
son fils la prévint en la faisant assas- que Cléopâtre la mère prêtât son as-
Excité enfin par tant d'atrocités,
siner. sistance a Antiochus Grypus; elle fit
lepeuple d'Alexandrie chassa Alexan- davantage encore, et voulant à tout
dre du trône, et y rappela Soter II, prix se débarrasser de l'active opposi-
qui avait assez respecte les liens du tion de Soter II qui partageait le trône,
ung pour ne pas essayer de se réta- elle lui supposa l'intention de la faire

Digitized by Gc
448 L'UNIVERS
mourir souleva contre lui le peuple
, Néanmoins , Soter s'était rendu en
d'Alexandrie en lui montrant ses eu- Syrie appelé par les habitants de Pto-
nuques blessés à dessein, et le peuple lémaïs assiégée par Alexandre Jan-
crédule, se portant l'auxiliaire des fu- nœus , roi des Juifs. Josèphe rapporte
reurs de Cléopatre contre Ptolémée que les habitants de cette ville qui ne
Soter, obligea ce roi de chercher son voulaient pas se soumettre à ce roi
salut dans la fuite. Il se retira a Chypre, nouveau venu , ne pouvant pas attendre
d'où Ptolémée Alexandre fut rappelé de secours des deux Antiochus de Sy-
pour s'asseoir sur le trône avec sa rie , occupes à vider leurs propres que-
mère Cléopatre , qui réalisa enfin par relles par les armes, s'adressèrent a
cet attentat l'un de ses vœux les plus Ptolémée Lathurusqui , chassédu trône
chers. Kn même temps, et toujours d'Egypte par sa mère Cleopâtre , était
en haine de ce fils roi , elle sépara en- alors a Chypre.
core Cléopfltre Sélene de Soter son Soter se rendit donc en Syrie avec
mari, quoiqu'elle eût déjà de lui deux trente mille hommes, vers le printemps
enfants mâles, et la donna bientôt de
la 103- année avant 1ère vulgaire.
après à Antiochus Grvpus, le compé- En attendant , les habitants de Pto-
titeur d' Antiochus Cy'zicenus que So- lémaïs , ne doutant pas que Cléopatre
ter protégea t. i d'Égypte ne vint les attaquer parce que
Par cette criminelle intrigue, Soter Soter venait les défendre, hésitèrent à
fut donc chassé du trône, séparé de recevoir les troupes de Ptolémée, re-
Seiène sa femme et de ses deux fils, et fusèrent même son alliance. Mais les
son premier règne finit alors. Sa durée habitants de Gaza la recherchèrent
fut de dix ans entiers. aussitôt , et le roi des Juifs fut con-
L'année suivante commença avec traint d'abandonner son entreprise
l'été de l'an 108" avant l'ère vulgaire. contre cette ville. Il feignit dès lors de
Le second fils de Cléopatre fut alors désirer l'amitié de Ptolémée, tout en
placé sur le trône, et prit le surnom liant de secrètes intelligences avec
d'Alexandre. Les premiers soins de Cleopâtre. Ptolémée , qui crut un mo-
Cléopâ* re furent de poursuivre encore ment à ses trompeuses assurances, les
son autre fils Soter retiré à Chypre, rejeta bientôt après, entra dans la Ju-
sans que cette distance pût le délivrer dée, deux villes que Josèphe
prit
des cruels effets de sa haine; et la nomme Asochis de Galilée et Sempho-
guerre qui se ralluma plus active que ris, délit complètement sur le Jour-
jamais entre les deux Antiochus de Sy- dain l'armée de Jannœus , ravagea la
rie, fournit à cette passion un nouvel Judée et occupa enfin Ptolémaïs et
aliènent. Gaza.
Soter avait constamment secondé Il touchait aux frontières de l'E-
de ses moyens et de ses vœux Antio- gypte Cleopâtre s'en alarma , et en-
:

chus Cyzic'enus ; il quitta Chypre et se voya des corps nombreux de troupes


rendit en Syrie pour le soutenir contre en" Syrie et en Célé-Svrie, tandis que
Crypus; mais Cléop:Ure, aussi active son lils Alexandre faisait une expédi-
dans sa haine que Soter pouvait l'être tion maritime contre Ptolémaïs et la
dans ses affections, craignit aussi les Phénicie. Soter se porta inopinément
effets de l'alliance de Soter avec Cyzi- sur l'Egypte, d'où il fut repoussé et
eenus qui aurait pu le seconder un jour revint à Gaza où il passa l'hiver. La
,

pour remonter sur le trône d'Egypte; même année ii rentra à Chypre, et


elle voulut assurer de tous ses moyens presque en même temps Cléopatre,
le triomphe de leur ennemi commun ,
qui ne le voyait plus sur le chemin de
une alliance. Klle
et l'y intéresser par l ltgypte, ramena son armée dans ses
fournit donc a Grypus de puissants se- Etats , et y rappela celle de son fils
cours en hommes et en argent, et lui Alexandre.
lit épouser sa fille Sélene
,
qu'elle avait Peu d'années après, les fils d'Antio-
réparée de Soter II. rhus Grypus disputaient à Antiochus

Digitized by Google
EGYPTE. 449
Cyzicenus , leur oncle , la couronne de que , chassé bientôt après , cette proie
Syrie. Ptolémée Soter favorisa le qua- lui avait été inutile.
trième fils de Grvpus, Démétrius Eu- La spoliation du tombeau d'Alexan-
caerus; il l'emmena de Gnide à Da- dre dut avoir lieu dans le court espace
mas, et le proclama aussi roi de de temps pendant lequel Ptolémce ré-
Syrie. gna seul après avoir fait assassiner
*
Le respect que Ptolémée Soter ne Cléopàtre sa mère, et dans la 19 e et
cessa de témoigner à sa mère Cléo- dernière année de son règne.
pàtre, le portait a ne rien entreprendre Car l'attentat d'Alexandre ne resta
contre l'Êgypte, et il restait paisible- pas longtemps impuni. Bientôt après
ment à Chypre pendant que de nou- voyant son crime découvert , Alexan-
velles catastrophes se préparaient sour- dre prit la fuite pour se soustraire
dement à Alexandrie. Le caractère à la fureur du peuple, et aussitôt
entreprenant de Cléopdtre ne promet- les Alexandrins rappelèrent Ptolémée
tait pas une longue durée à son accord Soter.
avec son fils Alexandre, si des guerres Pendant que Soter reprenait le gou-
étrangères cessaient un jour de l'occu- vernement des affaires publiques et ,

per. Déjà la mésintelligence s'était ma- que le peuple témoignait la joie que lui
nifestée entre eux dans le temps que causait son retour en lui donnant le
Soter faisait son expédition de Syrie surnom de Désiré, Alexandre s'était
en faveur de la ville de Ptolémaïs; car réfugié dans l'île de Cos. Peu d'années
Alexandre , croyant avoir tout à redou- auparavant, et lorsque Soter, relégué
ter de l'ambition de sa mère, avait àChypre et faisant son expédition de
quitté Alexandrie et s'était réfugié à Syrie, menaça un moment l'Egypte,
Chypre; mais leur danger commun CÏéopikre avait envoyé dans cette île
les avait alors réunis de nouveau contre la plus grande partie de ses trésors,
Soter, et cela dura autant que ce dan- son testament et la famille d'Alexan-
ger parut imminent. Bientôt après, dre, son (ils. Celui-ci, après sa fuite
Cléopàtre, qui fut surnommée Cocce, d'Alexandrie, s'empara de cette île et
mécontente d'Alexandre, forma le pro- voulut faire servir les richesses qu'il v
jet de s'en défaire; elle pensait à l'exé- trouvait à se replacer sur le trône. \\
cuter, lorsqu' Alexandre lui-même sut tenta un débarquement à Alexandrie,
la prévenir, et la fit mettre à mort, mais il fut repoussé par Tyrrhus qui
dix-huit ans après l'association de Pto- était du sang royal; sur mer, il fut
lémée Alexandre au trône d'Egypte. battu par Clueréas, et il perdit la vie
Par l'assassinat de la reine sa mère, dans ce combat auquel sa famille ne
Alexandre resta seul maître de la cou- survécut pas. Il avait eu' plusieurs en-
ronne d'Égypte. C'est à lui que l'on fants de CléopAtre, fille de son frère
doit attribuer l'enlèvement du cercueil Soter; et un seul , bien jeune encore,
d'or qui renfermait le corps d'Alexan- qui avait été laissé à Cos, resta de
dre le Grand. cette catastrophe.
Strabon a conservé le souvenir de Les Thcbains avaient refusé de re-
cette profanation. Il dit à ce sujet, que connaître de nouveau Soter II, et ils
le corps d'Alexandre, ra\i à Perdiccas se révoltèrent contre lui. Mais Soter
par Ptolémée, fils de Lagusou Soter, qui les fit attaquer parvint à les rame-
qui le lit transporter et inhumer à ner a l'obéissance dans la 3* année de
e
Alexandrie, y était encore deson temps, leur rébellion , la 87 avant l'ère vul-
e
mais non pas dans le même cercueil; gaire, et la 31 de son règne total
que ce cercueil était alors de verre, compté de son- premier avènement.
et que celui dans lequel Soter avait Thèbes fut ravagée et ses monuments
,

fait placer, le corps d'Alexandre était éprouvèrent de grands dommages.


d'or; qu'un Ptolemee (ils de (Cléopàtre) Milhridate était alors en guerre avec
Cocce , et surnommé Parisactus , qui les Romains qui ne négligàient aucun
venait de Syrie, l'avait enlevé, mais moyen d'entrer enfin en possession de
29" Livraison. (Egypte.) 20

Digitized by Google
460 L'UN
tout l'empire d'Alexandre. Us occu* Les monuments du règne de Ptolé-
paient une partie de la Cyrénaïque mée Soter II d'Alexandre I* r
, et de
depuis uue Ptolémée Appion", flls il lé-, leur mère Cléopâtre, qui partagea long-
gitiine d'Évergète II , la leur avait lé- temps avec eux l'autorité royale, ne
sont pas fort nombreux. Lès sculp-
Suée par son testament. Les habitants
e cette contrée s'étaient révoltés tures du propylon qui subsiste encore
contre les Romains : Sylla , qui était dans les ruines d'Apollînopolis-Parva
dans la Grèce et qui assiégeait alors représentent les adorations adressées
Athènes prise par Mithridate. chargea au dieu Aroëris par la reine Cléopâtre,

I j in1 u s d aller ramener les Cyrénéens


1 1 gui fut surnommée Cocce, et par son
à l'obéissance. fils Soter II ; ils prennent Tun et l'autre
Plutarque rapporte que Lucullus le surnom de Philométor. La face su-
partit au milieu de l'hiver ; que durant périeure de ce même propylon est
la traversée sa flotte souffrit beaucoup l'ouvrage de Ptolémée Alexandre I" f

de cette saison; qu'il arriva enfin a qui prend le même surnom. Une ins-
Cyrène, en réorganisa l'administra- cription grecque, tracée sur un des
tion , et que s'étant de là rendu en murs du temple d'Isis à Phila? , rap-
Égypte les pirates inquiétèrent encore pelle un hommage religieux rendu à
sa marche. Parvenu à Alexandrie , il cette déesse par Ptolémée Alexandre.
y fut réçu par Ptolémée d'une manière On lit aussi sur le grand temple d'Om-
très-distinguée. Le roi fit pour lui ce bos et sur le Mammisi du même lieu,
ni n'avait jamais été fait à la cour ou petit temple les noms de Cléopàtrc
,

a 'Alexandrie pour aucun envoyé étran- et de son fils aîné Soter II ; ces mêmes
ger. L'ayant quittée après un court noms subsistent encore parmi les dé-
séjour, Lucullus fut comblé de pré- corations du mur d'enceinte du naos
sents, prmi lesquels se trouvait une du temple d'Edfou ; Alexandre I er y
bague de prix ornée du portrait du roi. est aussi désigné, ainsi que sa femme
Ce voisinage des années romaines Bérénice. Soter II seul est rappelé
devenait de plus en plus funeste à dans les tableaux du temple situé der-
l'Égypte qui n'avait plus à craindre rière l'Aménophium de Tlièbcs; au
que cet ennemi. La Syrie, presque grand pylône de Médinet-Habou la ,

tout l'Orient prenaient une nouvelle porte oont les faces sont couvertes de
face, et la Grèce éprouvait déjà les bas-reliefs religieux, représente des
terribles effets des armées romaines. sacrifices aux sept grandes divinités
Elle avait eu avec les rois d'Egypte élémentaires et aux dieux des nomes
des relations dont elle consacra plu- thébain et hermonthite c'est Soter II :

sieurs fois le souvenir par des monu- qui préside à ces sacrifices , et qui éleva
ments publics : Athènes en particulier ce majestueux édifice, mais avec les
orna l'entrée du théâtre, ou l'Qdéon, débris d'édifiées pharaoniques ravagés ,

des statues des Ptolémées; et cette par la fureur des Perses. Une inscrip-
ville, reconnaissante des bienfaits nom- tion , sculptée sur une partie du même
breux qu'elle avait reçus de Soter II, édifice, s'exprimait en ces termes:
lui érigea une statue en bronze, et « Cette belle réparation a été faite par

une autre à sa fille Bérénice; et l'on le roi seigneur du monde, le prand


est porté à croire que le décret par germe des dieux grands, celui que
lequel les Athéniens firent placer la Phtha a éprouvé, image vivante d'A-
statue de Soter II à l'entrée du théâ- mon-Ra , le fils du soleil , le seigneur
tre , fut postérieur à sa mort. des diadèmes Ptolémée toujours vi-
,

Elle arriva après que Soter eut régné vant le dieu aimé d'Isis , le dieu sau-
,

de nouveau pendant 7 ans et 6 mois , ce veur, en l'honneur de son pèreAmon-


nui fait un total de 35 années et demie Ra , qui lui a concédé les périodes des
depuis la mort d'Évergète II , et porte panégyries sur le trône d'Honis..On
e
la mort de ce roi à la 82 année avant voit, par ce texte contemporain, que
l'ère vulgaire. Ptolémée Soter II ne répugnait à an-

Digitized by Google
ÉGYPTE. 4ôi

eu n des titres que consacrait l'ancien ne du jeune prince, avait accumulées dans
religion de lÉgypte : la décadence de cette île. Peu de temps après, Sylla
l'esprit national les prodiguait sans ayant reçu du sénat le gouvernement
réserve à des rois de race étrangère. de l'Asie . se trouva cliargé de la guerre
Le nom de la reine Bérénice, femme contre Mithridate qui la ravageait. Il
de Ptolémée Alexandre I ,r , s'est con- s'y rendit, et le jeune Alexandre fuyant
servé sur les bas -reliefs du temple Mithridate chercha dans le chef ro-
d'Edfou, auprès de celui du roi son main un nouveau protecteur : Sylla
mari ; et il n'est pas rare de reconnaître s'empressa de l'accueillir , et il l'avait
auprès des cartouches de ces quatre emmené à Rome après la lin de la
personnages les signes phonétiques hié- Suerre. Des qu'il y apprit que la mort
roglyphiques, exprimant le mot égyp- e Soter II laissait la couronne d'É-
tien* Trnaumai , traduction exacte du gypte à une femme , il protégea ou-
surnom de Philométors que portèrent vertement le jeune Alexandre et entre-
les trois successeurs d* Ê vergeté II, sa- prit de le placer sur le troue. Alexandre
voir : sa -veuve Cléopâtre Coece, et ses se rendit en Égypte , et , pour prévenir
deux tils Soter II et Alexandre P r . les dissensions que sa présence et ses
Leurs dissensions et leurs crimes rem- projets pouvaient faire naître , il épousa
plirent l'Égvpte de troubles et de ca- Bérénice et fut ainsi associé à la sou-
lamités; l'autorité royale s'affaiblis- veraine puissance; mais bientôt, pressé
sait l'antique et puissant empire des
; d'eu jouir seul , il assassina Bérénice à
Pharaons périssait par l'effet des plus laquelle il devait la couronne, dix-neuf
misérables désordres suscités par les jours seulement après être devenu
plus misérables passions. époux et roi.
A la mort de Soter II, toute la fa- Le règne d'Alexandre II dans l'état
,

mille royale était réduite à une lilie où se trouvait l'Égypte, ne pouvait


de ce roi, héritière légitime de la cou- être illustré par aucun événement mé-
ronne, et au (ils d'Alexandre l rr ee : morable ; au dedans , les intrigues et
Gis avait été laissé très-jeune dans l'île les ambitions de la cour épouvantaient
de Cos, et survivait seul à son père, les peuples, et les cruautés qui en
à sa mère et à leurs autres enfants étaient la suite préparaient pour l'his-
morts dans le combat naval qu'Alexan- toire d'horribles souvenirs. Au dehors,
dre avait sou eu u contre l'Kgyptien l'Égypte , comme cernéepar les forces
Chaeréas. Il restait aussi deux fils et une romaines qui occupaient la Syrie, la
autre fille, toustroisenfants illégitimes Grèce, la Libye et Cyrène, voyait se
de Soter II, et qui cependant furent pla- rétrécir de plus en plus le cercle de son
ces par la suite sur le trône d'Egypte. ancienne puissance, et, refoulée sur
Bérénice succéda immédiatement à elle-même par ces Romains qui l'ho-
son père , et son régne commença dès noraient de leur fatale amitié, elle
l'instant de la mort de Soter II. Par semblait ne pouvoir plus exister que
là les destinées de l'empire égyptien sous leur protection. Au nom de Rome
qui déjà subissaient l'ambitieuse in- Sylla lui avait donné un roi qu'elle ne
fluencede Rome , se trouvaient com- cessa de repousser de tous ses vœux et
mises à une femme. de poursuivre de toute sa haine. Cette
er
Le jeune fils d'Alexandre I était haine s'exhala, plus active encore,
encore à Cos lorsque Mithridate s'en lorsque peu de temps après être monté
empara. Le roi de Pont s'intéressa au sur le trône le roi perdit le protecteur
jeune prince , le mit sous sa tutelle et qui l'y avait placé, et cela arriva vers
ordonna que son éducation fût faite la fin de la troisième année de son
d'une manière convenable à sa nais- règne. Appien rapporte que Sylla , quoi-
sance. Il s'appropria en même temps que dictateur, accepta le consulat de
et envoya dans son royaume une 1 année d'après celle où il avait placé
grande partie des richesses que Cléo- Alexandre sur le trône d'Égypte; que
pâtre, veuve d' Évergète II et grand'inère dans l'année sui v ante , s'étant dépouillé
29.

Digitized by Google
452 L'Oisive ns.
de ce titre imposant, il se retira à la Sorer II , qui demandaient le trône
campagne et qu'il y mourut dans les d'Egypte; Ptolémée Denvs ou Aulétes
premiers temps de ses successeurs y allait aussi pour se faire reconnaître
M. iEmilius Lepidus et Q. Lotatius roi par le sénat romain ; enfin , on fai-
Catulus , élus au mois de janvier de sait au sénat la proposition de se pré-
Tan 78 avant l'ère vulgaire. Dans valoir du testament d'Alexandre II. le
l'année même du second consulat de prince qui lui succédait n'étant pas
Sylla , Ptolémée Alexandre avait ob- fils légitime de l'un de ses rois, ce

tenu à Rome les titres d'ami et d'al- qui ne peut s'enlendre que de Pto-
lié du peuple romain, qui le proté- lémée Denys succédant à Alexandre;
geaient en Egypte. enfin , le se'nal refusait de donner suite
Mais la mort du dictateur encoura- à ce testament quant à l'Egypte , afin
gea en quelque sorte la résistance des de s'épargner le reproche qu'on pour-
Alexandrins aux volonlés du roi qu'ils rait lui faire de convoiter tous les
refusaient de reconnaître, même de royaumes , ceux de Cyrène et de Bi-
respecter , quoiqu'il ne négligeât aucun thynie venant d'être reunis à l'empire.
moyen de se rendre agréable à son Mais les Alexandrins avaient reconnu
peuple: il célébraitv avec une grande pour leur roi Ptolémée surnommé De-
magnificence toutes les fêtes dès long- nvs ou Bacchus, enfant illégitime de
temps consacrées par la religion des Soter IL
Égyptiens , et de préférence peut-être Le peirple romain était devenu l'ar-
à celles du culte macédonien. bitre suprême des dissensions des rois
Mais ces soins religieux ne faisaient et c'est devant lui que les fils de Sélène
pas oublier aux Égyptiens le meurtre allèrent plaider eux-mêmes leur propre
de la reine. Il paraît même ijue ce cause ; mais le roi élu par les Alexan-
crime ne fut pas le seul que l'on put drins y fit aussi défendre la sienne.
justement reprocher à Alexandre. his- V Dans le quatrième discours contre
toire l'a peint comme cruel , et a ex- Verrès , Cicéron indique le voyage des
liqué par la férocité de son caractère princes syriens à Rome comme un fait
'insurrection du peuple et de l'armée, récent. Ils y passèrent près de deux
ui le chassa du trône et d'Alexandrie. années, et l'un d'eux, en retournant
Il se réfugia par mer à Tyr, et il pen- en Syrie, voulut voir la Sicile où il
sait à réclamer du sénat de Rome les trouva le prêteur C. Verrès qui lui ex-
secours que le titre d'allié lui permet- torqua , par la ruse et la violence, entre
tait d'espérer, lorsque, surpris par autres meubles précieux, un candé-
une grave maladie, et n'ayant point labre enrichi de pierreries.
de successeur direct, il mourut après Le sénat n'accueillit pas la réclama-
un règne de 8 années complètes, et tion des princes de Syrie ; il ne le put
légua par un testament le royaume pas, et Cicéron dit aussi que ce fut à
d'Egypte au peuple romain. Cicéron, cause des circonstances où se trouvait
dans son discours sur la loi agraire, alors la république : vraisemblable-
contre Servilius Rullus, rappelle à ce ment la guerre contre Mithridate,
sujet qu'il est assez public qu'Alexan- contre Sertorius , et celle des esclaves
dre fit un testament en faveur du qui troublaient l'Italie.
pie romain , et que le sénat donna Ptolémée Denvs, appelé au trône
ru cet acte quelque sorte d'autorité, par les Alexandrins, et ne pouvant
lorsqu'après la mort de ce roi , il en- ignorer les tentatives des princes de
voya plusieurs personnes à Tyr avec Syrie à Rome , y faisait aussi solliciter
la mission d'y recueillir l'argent qu'A- pour être reconnu par le sénat; mais
lexandre y avait déposé. il ne l'était pas encore à l'époque
Vers ce même temps arrivaient à même où Cicéron accusait Verrès, l'an
Rome deux princes syriens, fils de 7 1 avant l'ère chrétienne.
Çléopôtre Séfène, fille de Ptolémée D'ailleurs, entre la demande des
Évergète II, et femme de Ptolémée princes syriens et celle de Ptolémée

Digitized by Google
EGYPTE. 458

Denys, se plaçait encore l'opinion de musiciens de profession : ce fut là l'oc-


ceux qui proposaient d'adhérer au tes- casion et le motif du surnom $Au-
tament d'Alexandre II, et de réunir létes qui lui fut donné.
FÉgypte à l'empire. Moins occupée au Mais Rome qui, on pourrait dire,
dehors et plus tranquille au dedans, avait transporte tous ses intérêts en
Borne n'aurait pas ajourné d'un demi- Orient , ne cessait de s'occuper de l'É-
siècle cette riche acquisition. Ceux qui gypte, et le testament du second
soutenaient la validité du testament Alexandre en était toujours le nouveau
d'Alexandre II, disaient qu'elle avait prétexte. Diverses tentatives pour la
été reconnue lorsqu'on avait envové rendre tributaire furent fuites dans le
prendre à Tvr les trésors de ce roi ; sénat, et l'une des plus actives fut celle
que, de plus, son successeur n'était du censeur M. Crassus. Heureusement
point de la famille royale : tel était pour Ptolémée, M. Crassus trouva une
l'avis formel du sénateur L. Philippus. aussi forte résistance dans la modéra-
Les troubles qui agitèrent le règne d'A- tion de son collègue Lutatius Catulus,
lexandre ne fui permirent pas d'en et l'asservissement de l'Égypte fut
écrire les souvenirs sur les monu- ajourné.
ments publics : le nom de ce roi ne En même temps, dans la même
subsiste, du moins évidemment , sur année et sous le même consulat, Jules
aucun édifice d'origine égyptienne. César, étant édile, secondait de toute son
Toutefois, quelques critiques ont cru autorité les propositions de M. Cras-
le reconnaître parmi les bas-reliefs du sus contre Ptolémée, en faisant faire
temple d'Edfou. Enfin, les monuments auprès du peuple romain les mêmes
grecs connus gardent un complet si- tentatives que M. Crassus faisait per-
lence sur ce prince cruel qui vécut sonnellement dans le sénat.
d'ailleurs dans des temps mauvais pour Jules César soutenait la validité du
l'Egypte. testament d'Alexandre II, et il fit de-
Â' Ptolémée Alexandre succéda Pto- mander par les tribuns un plébiscite
lémée, surnomme nouveau Raccluis qui lui conférât le gouvernement de
(ou Denys) , fils de Ptolémée Soter et I Egypte, se fondant sur ce que les
frère de l'infortunée Cléopâtre, fille et Alexandrins avaient chasse leur roi,
héritière de Soter II, que Pausanias, qui était l'ami et l'allié du peuple ro-
avec plus déraison, appelle Bérénice, main. Mais les tentatives de César au-
d'accord avec les médailles de cette près du peuple, comme celles de
princesse. M. Crassus auprès du sénat, n'eurent
Ptolémée ; nouveau Racchus ou De- aucun succès, et bientôt après César
nys, fut aussi surnommé Nothus à protégea lui-même de tout son crédit
cause de sa naissance, étant fils non le roi qu'il voulait alors dépouiller.
légitime de Soter II. Ces tentatives du censeur M. Cras-
A défaut d'autres descendants de sus et de Jules César, édile, remontent
Alexandrins l'appelèrent
leurs rois, les à l'année 66 avant l'ère vulgaire , à la
au trône d'Egypte. Ils donnèrent en 8 e et à la 9 f du règne de Ptolémée
même temps a son frère puîné le gou- Denys.
vernement de l'île de Chypre, dont un Deux années après et sous le con-
usage constant de la monarchie avait sulat de Cicéron, Ptolémée courut de
fait l'apanage des frères ou des fils des nouveau le danger d'être dépouillé de
roisd'Egypte. ses États, la loi agraire proposée par
Strabon place ce Ptolémée Denys au Rullus comprenant implicitement l'É-
nombre des plus méchants rois. Il lui gypte parmi les possessions romaines
reproche, entre autres défauts, sa pas- que cette loi devait livrer à l'arbitraire
sion pour la flûte, qui le portait jusqu'à des decemvirs; mais l'éloquence de
oublier la majesté royale pour soutenir Cicéron sauva Rome et l'Egypte de
e
devant sa cour des combats sur cet cette calamité: c'était la II année du
instrument et y disputer le prix à des règne de Denys,

Digitized by Google
454 L'UNIVERS.
Dans le même temps, Pompée com- fuicner, aprcsavoir lau exuer uceron,
mandait en Asie, et après avoir défait
,
fit porter la loi qui réunissait l'île de
complètement Mithridate, il se rendit Chypre à l'empire romain. Oluî qui
en Syrie et marcha sur Jérusalem, la gouvernait, Ptolémée, frère du roi
dont il s'empara. Pompée attaqua en- d'Egypte, tenta sans succès de résis-
suite et prit aussi quelques autres villes ter à cette invasion ; obligé de céder
de la Syrie, et toucha pour ainsi dire à la puissance de Rome, tl ne voulut
aux frontières de l'Égvpte, dont le roi pas survivre à la perte de son apanage,
lui envova plusieurs députés chargés et il se donna la mort. La même loi
de lui offrir des présents et des se- par laquelle Rome s'emparait de l'île
cours, beaucoup d'argent, et ce qui de Chypre en donna l'administration
était nécessaire pour habiller son ar- à Caton. Il fut chargé en même temps
mée. de ramener les exilés de Rvzance.
Pompée s'abstint toutefois d'entrer Mais, peu empressé de remplir l'im-
en Égypte; il résista même aux solli- portante mission qui lui était malgré
citations du roi, qui réclamait son as- lui déférée , Caton envoya d'abord Ca-
sistance contre les insurrections aux- nidius à Chypre, charge de déterminer
quelles son royaume était en proie; car Ptolémée à céder l'île sans combat, de
les germes dé la rébellion existaient lui persuader qu'il pouvait y consentir
toujours, et le peuple, qui avait plu- sans ignominie, lui promettant de lui
sieurs fois témoigné son mécontente- faire conférer par le peuple le titre de
ment au sujet des taxes extraordinaires prêtre de la déesse à Paphos. Caton se
que le roi employait à payer ses défen- rendit ensuite à Rhodes , et y attendit
seurs et ses agents à Rome, était resté l'issuede la négociation de Canidius.
constant dans sa haine et dans son Ptolémée Denys l'y trouva encore
opposition. On doit remarquer aussi lorsque, ayant quitté Alexandrie, il se
que les discussions hostiles qui avaient décida à se rendre à Rome; car les
heu dans le sénat à Rome et qui cha-
, Alexandrins, fatigués de ses exactions
que jour menaçaient de nouveau in- l qu'il employait à payer un créiiit illu-
dépendance de l'Egypte, ne contri- soire qui n'avait pu prévenir l'envahis-
buaient pas peu snnsdogte à maintenir sement de Chypre depuis longtemps
cet état si déplorable , et ordinairement l'un des apanages des princes de la fa-
si fécond en malheurs pour les princes mille royale, firent éclater leur mécon-
et pour les peuples. tentement ; et le ne pouvant les con-
roi ,

Diodore de Sicile visita l'Egypte dans tenir par la force, voulut se soustraire
ces mêmes temps, et, quoiqu'il ne par la fuite aux effets redoutables de
parle pas des troubles qui l'agitaient cette insu rrection 1 partit pour Rome
. 1

alors, ils n'en sont pas moins certains, se plaignit de l'insulte qu'il avait re-
{misque bientôt après le roi en éprouva çue , et demanda que le consul Spin-
es cruels effets. ther frit chargé de le ramener dans ses
Il faisait solliciter depuis longtemps États. Ptolémée comptait alors la 16*
à prix d'argent, les titres d'ami et allié année de son règne.
du peuple romain, et par tous les Il sollicita longtemps à Rome ceux
moyens qui pouvaient le conduire à les qu'il considérait comme ses amis, par-
obtenir, espérant les opposer avec fruit ticulièrement César et Pompée. Il ré-
à la malveillance de ses sujets. pandait aussi beaucoup d'argent; il en
Le consulat de Jules César lut fut empruntait de tous ceux qui voulaient
très -favorable. Ses deux envoyés, se confier à ses espérances , entre au-
Dioscoride et Sérapion , réussirent au- tres de C. Rabirius Posthumus , dont
près du consul. \je roi d'Egypte fut Cicéron voulut plus tard faire recon-
enfin honoré par le peuple romain de naître la créance.
ce titre d'allié qui lui fut conféré par Pendant que Ptolémée cherchait des
une loi et par un sénatus-consulte. Erotecteurs, les Alexandrins, ignorant
Dans l'année suivante , P. Clodius t parti qu'il ai ait pris et le croyant

Digitized by Google
EGYPTE. 455

reconnurent pour sénat. On décida de consulter les livres


deux fil 1rs Cléopitre ou Tryphène, et des Sibylles, et l'on y lut cette ré,
Bérénice. Elles régnèrent ensemble ponse non équivoque: « Si un roi d'É-
une année, et, après la tnort de Try- « gypte , dans le malheur, vient un jour
phène Bérénice régna seule deux an-
,
a vous demander des secours, ne lui
nées encore. Les
Alexandrins appe- « refusez pas votre alliance, mais ne
lèrent en même temps de la Syrie un » lui accordez point de soldats. * Les

certain Cybiosactès qui prétendait partisans de Ptolémée rendirent publi-


desrendre île ses rois , et qui était un que la réponse de l'oracle ; le tribun
des fils d'Antiochus Grypus. Ce prince C. Caton força les prêtres de la com-
syrien, iils d'Antiochiis Grypus, fut muniquer au peuple avant que le sénat
associé comme roi à la reine Bérénice l'eût permis; elle fut l'objet de diverses
par le peuple d'Alexandrie; mais il ne interprétations, et Ptolémée crut sa«
jouit pas longtemps de sa fortune, car tisfaire à ce qu'elle ordonnait en de-
Bérénice l'étrangla bientôt après, à mandant qu'il fût ramené par Pompée,
cause de la sordide avarice qui le do- suivi seulement de deux licteurs. Mais
minait, épousa plus tard Archélaûs, le sénat qui craignait d'accroître, par
compagnon de Gabinius en Svrie , qui cette importante mission , l'influence
se donna pour le Ois de Mithridate de Pompée, s'occupa plutôt de l'en
Kupator, et qui régnait encore en détourner, et le chargea de l'introduc-
Egypte au retour de Ptolémée Au- tion des blés à Rome. Pompée partit
létes. aussitôt pour l'Afrique , et Ptolémée,
Quoique informée du voyage de son désespère par cette subite résolution
père à Rome , Bérénice ne songea pas se rendit à Éphèse, pour y attendre
a lui rendre volontairement la cou- les décisions du sénat. Pendant ce
ronne ; elle envoya au sénat une dé- temps , Cicéron avait été rappelé de
putation qui fut' composée de cent son exil après une absence de seize
personnes dirigée par Dion , chargée
, mois.
d'accuser le roi devant le peuple ou le Dès les premiers jours de l'année
sénat, et de défendre les Alexandrins suivante, P. Cornélius Lentulus Spin-
contre ses insinuations, s'il y en avait ther, en sortant du consulat , ayant
qui leur fussent contraires. Mais le été nommé proconsul en Cilicie oîi
nombre des envoyés n'assura pas était enrore Gabinius .le sénat s'occupa
mieux le succès de cette ambassade: de nouveau du roi d'Egypte.
la plus grande partie de ces députés En quittant Rome, Ptolémée Denys
fut assassinée dans la route ou à Hpme y avait laissé Ammonius qui cherchait
même par les soins de Ptolémée; le publiquement des suffrages qu'il pût
reste fut gagné à force d'argent, ou acheter. Mais ceux qui favorisaient
frappé de terreur. Dion n'osa pas com- faiblement les yobux du roi d'Egypte,
paraître devant le sénat, qui voulait ceux surtout qui lui étaient opposés
obtenir de lui des renseignements exacts hésitaient à prendre un parti, affec-
sur ces assassinats dont M. Favonius tant un grand respect pour les conseils
demandait instamment la punition; de l'oracle. Au contraire, Cicéron et
enfin Dion lui-même périt bientôt après ses amis soutenaient avec chaleur que
victime des mêmes intrigues. Tel fut le roi devait être rétabli sur son trône;
à Rome l'état des choses tant que Pto- et, bien convaincus qu'il n'était pos-
lémée y demeura. sible d'y réussir que par l'assistance
La rivalité qui existait alors entre de l'armée , ils cherchaient les moyens
les principaux personnages de la répu- de concilier les défenses des dieux
blique, était peu favorable à un prompt avec cette nécessité. On lit encore dans
accomplissement des vœux de Ptolé- Cicéron le subtil accommodement qu'il
mée. La protection publique de Pom- proposait pour que l'armée de Corné-
pée lui conciliait des suffrages , mais lius Spintner, proconsul en Cilicie,
lui créait aussi des oppositions dans le pût être employée au

Digitized by Google
456 L'UMVERS
de Ptolémée sans pour cela offenser convient de faire. Notre avis serait
l'oracle , comme si dans les choses
, cependant que s'il vous parait que
divines ainsi que trop souvent peut-
, vous pouvez facilement occuper ce
être dans les intérêts humains, la royaume, il ne faut pas hésiter : s'il y
bonté de la forme pouvait sauver l'im- a le moindre doute , il ne faut pas l'en-
moralité du fond aussi , et par suite
: treprendre. »
du même système d'interprétations, Quelque incertaine que fût à cet
lorsque Gabinius, qui replaça Ptolé- égard la volonté du sénat , quelque po
mée sur le tronc de vive force et après sitive qu'eût été sa décision pour qu'il
avoir livré bataille aux Égyptiens , fut n'y fût point employé de troupes,
accusé de sacrilège devant le peuple Pompée, alors consul', n'hésita pas de
romain , Pompée , César et leurs affi- prendre sur lui d'en décider autre-
dés voulurent-ils faire décider que la ment. Il engagea le roi à partir et à
Sibylle avait entendu parler pour d'au- se rendre auprès de Gabinius , com-
tres temps et d'un autre roi que do mandant en Syrie : en même temps il
Ptolémée Denys. écrivit à celui "ci de ramener le roi sur
Cicéron mettait un intérêt particu- le trône à la tête de son armée , et de
lier à ce que la mission de réintégrer ne s'arrêter ni aux ordres du sénat ni
Ptolémée Denys fût confiée à Cornélius aux défenses de la Sibylle. Ptoléinée
Spinther. Il prononça pour ce roi un lit distribuer beaucoup d'argent aux

discours qui ne nous est point par- soldats , en promit encore davantage
venu , et qui dut contribuer au succès paya la coopération de Gabinius, et
de la cause qu'il défendait. Le sénat l'expédition fut entreprise. Gabinius
enfin prit une de ces résolutions si confia la Syrie à l'inexpérience de son
communes dans les discussions où des fils jeune encore, et partit avec son

partis opposés, mais également puis- armée. 11 arriva devant Péluse dont
sants , s'attaquent et se défendent avec les Juifs lui facilitèrent l'occupation ;
une pareille activité il consentit que
: et, secondé par le courage d'Antoine
Ptolémée fut replacé sur son trône; qui commandait la cavalerie, par sa
et après avoir exprimé cette seule vo-
,
modération même, car Antoine s'op-
lonté, il s'en remit au proconsul de posa aux vengeances de Ptolémée ren-
Cilicie pour son exécution, sans lui en tré à Péluse, Gabinius fut simultané-
prescrire aucunement le mode. Ainsi ment le maître de l' Egypte par terre
le sénat, qui ne disait pas d'y employer et par mer, avant, pendant que sa
l'armée, ne devenait pas sacrilège si flotte côtoyait le Nil et en maîtrisait
Lentulus Spinther s'en servait : il les embouchures, mis en fuite l'armée
s'abstint même de rendre un sénatus- égyptienne qui s'opposait à sa marche.
consulte, et se contenta de faire con- Archélaùs, le mari de Bérénice qui
naître son avis à Lentulus par une avait été placée sur le trône depuis le
simple lettre. Cioéron écrivit aussi au départ de Ptolémée, fut tué dans ce
proconsul ; il lui conseille de conduire combat ; et le roi signala sa réintégra-
d'abord le roi à Ptolémaïs ou dans quel- tion en faisant mourir sa fille qui avait
que autre lieu voisin, de se rendre en- usurpé la couronne et les plus riches
,

suite avec sa Hotte et l'armée à Alexan- des partisans qui l'avaient secondée,
drie, et, après y avoir ramené l'ordre afin de payer les siens aux dépens de
et placé une garnison , d'y rappeler le leur fortune. Ceci se passait l'an 55
roi : « Ce sera donc vous, ajoute-t-il avant l'ère vulgaire , et la 19 e du règne
Fui rétablirez le roi , ainsi que le sénat de Ptolémée Denys, qui fut ainsi éloi-
a d'abord voulu ; et comme il arri- gné du trône pendant plus de deux ans
vera sans troupes , les religieux obser- entiers.
vateurs des ordres de la Sibylle seront L'histoire n'a conservé le souvenir
satisfaits Votre voisinage de l'E- d'aucun événement remarquable qui
gypte vous permet d'ailleurs bien appartienne au reste du règne de Pto-
mieux qu'à nous de juger de ce qu'il lémée Denys trop lent pour rien en-
:

Digitized by Google
EGYPTE.
treprendre au dehors, son caractère Rome hâtèrent à Penvi l'époque de son
sombre que Ton avait
et l'expérience asservissement.
faîte de son gouvernement, ne per- Ptolémée Denys , qui avait vu sa fin
mettaient d'espérer de lui aucune ac- s'approcher, imita l'exemple de quel-
tion digne de louange ; il se vengea de ques-uns de ses prédécesseurs, et fit
ceux qui avaient abandonné son parti un testament par lequel il régla pour
sans récompenser ceux qui lui étaient ses enfants l'ordre de la succession au
restés fidèles; il ne reconnut même trône. Il en laissait quatre de vivants,
pas les services qu'il avait reçus , et deux filles , Cléopatre et Arsinoé , et
l'oublide la justice jusqu'à re- deux fils , tous deux plus jeunes qu'elles.
à C. Rabirius le pavement des L'aîné de ceux-ci et Cleopâtre la plus
sommes considérables qu'il lui avait Agée des deux filles, furent institués
empruntées pendant son exil. Gabi- héritiers de la couronne , et les deux
rtius, qui l'avait replacé sur le trône, autres h leur défaut. L'exécution de
n'était pas plus heureux : traduit deux ces volontés royales était recomman-
fois devant les tribunaux suprêmes dée à la foi et a l'amitié du peuple ro-
pour avoir outrepassé les ordres du main. On les respecta d'abord ; mais
sénat, il fut acquitté d'abord et puis des dissensions domestiques les firent
condamné à l'exil on ne se souvenait
: bientôt oublier, et les vingt-deux an-
de Ptolémée que par le malheur de nées pendant lesquelles l'empire égyp-
Tavoir connu. tien subsista encore, furent partagées
Il mourut années après son ré-
trois en plusieurs règnes successifs.
tablissement sur trône, et la îit 1 de
le '
Le fils aîné du roi mort et sa fille
son règne compté depuis la fin du aînée Cléopâtre montèrent paisible-
règne d'Alexandre II. Son nom ne sub- ment sur le trône. L'usage voulait que
siste sur aucun monument du stvle la minorité du jeune roi fût confiée
égyptien; maisdes inscriptionsgrecqùes aux soins d'un tuteur, et l'eunuque
le rappellent, et nous font connaître Pothinus fut choisi. Mais Cléopâtre,
qu'avec le surnom de nouveau Denys, qui avait sur son frère l'avantage d'être
ce roi porta aussi ceux de Philopator majeure , devait exercer dans l'admi-
et de Philadelphe. nistration de l'État une influence que
Ceci est prouvé par l'inscription son caractère , au défaut d'autre pré-
grecque que j'ai publiée en 1819, et texte, rendait inévitable. Elle prit le
qui s'exprime ainsi : « Au nom du roi titre de reine aussitôt après la mort
Ptolémee, dieu, nouveau Bacchus, de son père ; et , comme sur ce trône
Phiiopator et Philadelphe, et de ses où elle résista pendant vingt-deux an-
enfants, l'hommage religieux à notre nées à tant de catastrophes, elle ne vit
maîtresse Isis et aux dieux adorés que passagèrement s'asseoir avec elle
dans le même temple , a fait Théodote, le premier-né de ses frères et ensuite le
(ils d'Agésiphon , achéen de la ville de second ; comme elle sauva ce trône de
Patraî. » Cette inscription se lit, écrite l'ambition de César, qu'elle le fit res-
à l'encre rouge , sur le socle en granit pecter par Antoine, et du moins ne
de l'un des deux obélisques de Philac, survécut pas à sa perte sous Auguste,
et sur le propylon du temple d'Isis du c'est à elle seule que l'histoire donne
même lieu ; lé même roi et le même les vingt-deux dernières années des
hommage déesse sont rappelés
a la Lagides, ne nommant en quelque
dans deux autres épigraphes tracées sorte les deux rois ses frères que pour
sur le même temple. Il y a loin de ces nous apprendre que, même étant rois,
mesquins actes d'adoration aux grandes ils moururent sans régner.

et magnifiques constructions qui rap- Déjà l'Egypte était tellement ro-


pellent encore tant de glorieux règnes maine, que l'histoire des événements
en Egypte : celui de Ptolémée Denys qui se passèrent pendant ce dernier
fut avant-dernier de l'Égvpte indé-
l périodede son existence politique, l'in-
pendante ; ses enfante et l'ambition de téresse on pourrait dire moins que

Digitized by Google
458 L'UNIVERS.
Rome même. César et Pompée avaient du mont Casius , au jour même où il

rompu ouvertement, et disputaient, avait joui des honneurs du triomphe


avec les troupes de la république, à pour sa victoire sur Mithridate et sur
qui des deux le sort des combats lais* les Pirates.
serait le droit de l'asservir. Cléopâtre A peu de jours delà , César poursui-
et le jeune Ptolémée ne se trouvèrent vant Pompée qui n'existait déjà plus,
iis, dès leur avènement, sous le joug arriva en Égvpte; et, quoiquil n'eut
S
e la puissam e romaine. Pendant les à ses ordres que 8,200 hommes, il
deux premières années , ils en furent n'hésita pas à entrer dans Alexandrie.
assez libres pour laisser éclater entre Il évoqua aussitôt à son tribunal, eo
eux ces dissensious intestines qui, sa qualité de consul romain et au nom
depuis quelques générations ,
signa- du peuple exécuteur testamentaire des
laient en Égypte chaque nouveau règne. volontés de Ptolemée Denvs , les dif-
Ptolemée parvint a sa majorité, et férends qui divisaient les deux enfants
ceux qui jusque-là n'avaient été que successeurs de ce roi. L'eunuque Po-
ses tuteurs voulant être ses maîtres thinus qui ne voulait pas voir Cléopâtre
ils ne négligèrent aucun moyen de di- partager le trône d'Égvpte , déguisant
viser le frère et la sœur. Il paraît même d'ailleurs sa propre ambition sous les
que le caractère altier de Cléopâtre, apparences d un extrême dévouement
ambitieuse de porter seule la cou- à son roi , exagérait à dessein ce qu'il
ronne, seconda puissamment leurs se- trouvait d'inconvenant et d'offensant
crètes menées. Le peuple d'Alexandrie pour la majesté royale dans les préten-
fui encore appelé comme auxiliaire, tions de Jules César; en même temps
et , croyant s être associé aux vœux du il faisait avancer Achillas à la téte de

roi , il ne le fut qu'aux intrigues de ses l'armée égyptienne contre Alexandrie.


tuteurs. Cléopâtre fut chassée du trône César cependant communiquait par
et contrainte de fuir en Syrie; elle n'y ses envoyés avec le jeune roi qui se
resta pas oisive, et, impatiente dé livra à lui , et la guerre que ses an-
ressaisir un pouvoir qu'elle ne voulait ciens tuteurs soutenaient encore pre-
pas même partager, elle rassembla des uait des lors un caractère de sédition
troupes , se créa des partisans et Ut des qui laissa César plus libre de la com-
dispositions pour attaquer avec succès primer. Il y parvint diiiiciiement , quoi-
le roi son frère. qu'il eût appelé de l'Asie , et des îles
Il s'était rendu à Péluse avec son voisines, de nouveaux corps de troupes
armée pour observer Cléopâtre et s'op- et quelques galères. En lui résistant
poser à ses tentatives. Le grand Pom- la population de la basse Égypte croyait
pée fuyait alors des champs de Pharsale défendre les droits de son roi outragé
où la fortune avait si cruellement trahi par la présence de l'armée romaine;
ses espérances. Il croyait trouver au- et bientôt voulant unir la ruse à l'ap-

Crès de Ptolémée les secours auxquels pareil de la force « les Égyptiens pro-
li donnait tant d eilroi ts l'active protec- mirent de se soumettre si César lais-
tionqu'il avait accordée au père du jeune sait au jeune Ptolémée la liberté de se
roi, ramené par lui sur son trône. réunir a eux. César ne s'y opposa pas,
Pompée arriva sur les côtes d'Éeypte, et Ptolémée ne le quitta , malgré ses
et se fit annoncer au roi qui reçut très- promesses, que pour exciter davan-
bien ses envoyés. Il les chargea de con- tage le parti des tuteurs à la résistance.
duire auprès de lui des personnes qui Sur ces entrefaites, Mithridate de Per-
n'hésitèrent pas à tremper leurs mains game arriva de la Syrie où il avait levé
dans le sang de ce grand homme elles : un grand nombre de soldats , attaqua
l'égorgèrent dans la barque même qui et prit Péluse, et, pendant que le roi
devait le conduire sur une terre hos- se hâtait de s'opposer à sa marche sur
{ritalière. Pompée n'eut pas la conso- Alexandrie, César partait de cette ville
ation de la toucher, et il mourut sous pour la faciliter, line grande action se
les coups de ces traîtres a la hauteur trouva engagée entre les doux partis

Digitized by Google
EGYPTE. 459

ennemis ; les armées égyptiennes furent vincible ambition de Cléopâtre qui s'en
mises en fuite, et le jeune roi lui-même débarrassa par de criminelles menées,
périt dans ie Nil. dans la 8* année de son règne.
Ces événements retinrent César en Maîtresse alors du trône, sans par-
Éirypte pendant neuf mois ; ils étaient tage et sans opposition , Cléopâtre
accomplis au mois de mars de l'an -48 voyait ainsi s'accomplir ses vœux les
avant 1ère vulgaire. Alors mourut, plus ardents. Ce succès lui coûta des
après un règne de moins de quatre an- fautes et peut-être des crimes; mais
nées , le jeune Ptolémée oui porta seule enfin, et comme si son caractère
comme son père le surnom de Denys. avait dû sulfire aux grands événements
Après sa mort, son frère fut mis qui se préparaient, elle ne fut pas ef-
sur le trône par l'ordre de César. On frayée de son isolement. Ce fut comme
raconte en effet que Jules César, maître femme et non comme reine qu'elle es-
d'Alexandrie et de l'Egypte , au lieu de péra résister à la puissance de Rome,
s'en emparer au nom du peuple ro- et Ton peut dire que la monarchie
main , s empressa d'exécuter le testa- égyptienne n'aurait pas péri , si cette
ment du roi , père de CléopiUre qu'il, monarchie avait pu être sauvée par un
appela Ptolémée le jeune , l'unit à cette grand roi. Cléopâtre avait un fils qu'elle
reine et les plaon sur le trône pour ré- aimait et pour lui et pour son père.
gner ensemble/ Bientôt après il quitta Il porta , jeune encore, le titre de roi
l'Égvpte, n'emmenant avec lui qu'une des rois; cependant il ne régna jamais
seule légion , et y laissant ie reste de et mourut sans honneurs.
son armée en garnison. L'Egypte n'était plus qu'un camp
Quoique son frère et son mari romain les légions y étaient comme
:

disent les auteurs anciens, dut parta- en pleine campagne , et servaient suc-
ger le pouvoir royal , Cléopâtre, néan- cessivement aux entreprises dont les
moins, forte de la protection de Jules dissensions civiles portaient le théâtre
César, gouvernait par elle seule. Peu en Syrie ou dans d'autres contrées
de temps après son second mariage voisines de l'Egypte. Octave , Antoine
elle mit au monde un (ils qui fut nomme et Lénide se réunirent pour convenir
Césarion , comme pour perpétuer le du mémorable triumvirat que Publius
scandale de son origine. Il est vrai que Titius leur fit conférer par une loi. lis
les honneurs que César rendait à Cléo- se partagèrent le gouvernement de
pâtre , même a Rome , devaient natu- toutes les provinces , à l'exception de
rellement exciter de plus en plus son celles que Brutuset Cassius occupaient
orgueil et la rendre fiere de ses torts. encore, et qu'ils défendaient par la
César, en effet, l'associait en quelque force des armes contre les triumvirs
sorte au cuite de la divinité; et lors-
, même qui les firent attaquer. Dola-
qu'au jour de ses quatre triomphes, bella, attaché au parti d'Antoine, char-
Cléopâtre étant alors à Rome avec le gea Albienus de prendre en Égyute les
jeune Ptolémée son mari , César con- légions que Jules César y avait laissées,
sacra un temple à Vénus génératrice et de se rendre de là én Syrie; mais
il fit placer une statue de Cléopâtre à Gissius l'y surprit et le força de se reu-
côté de celle de la déesse ( Tan 47 ). nir à lui. Dolabella s'avançait vers
Dans la mène année de son règne l'Ionie, poussant vers l'Orient. Cassius
Cléopâtre faisait frapper des monnaies voulut, mais sans succès, s'opposer à
qui portaient son image, son nom et sa marche; il fut battu sur les côtes
le chiffre 6 qui en marquait l'époque; de Syrie et, pour réparer ses pertes,
,

mais rien n'v rappelle le roi qui parta- il exigea de nouveaux secours des îles,

geait le trône avec elle: peut-être des pavs voisins, et même de Cléo-
n'était-il pas encore majeur ni cou- pâtre. Cette reine favorisait Dolabella
ronné; du moins l'histoire nous le comme ancien ami de Jules César;
laisse ignorer. Elle nous apprend que elle avait une flotte nombreuse prête
ce jeune prince mourut victime de l'in- à partir pour le seconder : elle s'ex-

Digitized by Google
400 L'UMVERS
cusa donc de son refus auprès deCas- donna moins d'attention à la défense
sius sur les calamités qui ravageaient de la reine qu'aux charmes dont elle
l'Égypte, alors en proie à la pesle et
1 était douée ; et , cédant à leur puis-
à la famine. Cassius agréa ces motifs, sance, il ne put résister à aucune de

et , plus heureux dans un second com- ses volontés. Elle partit triomphante;
bat qu'il ne l'avait été dans le premier et aussitôt Antoine, après avoir en-
il battit Do'.abclla sur mer, prit ses voyé un corps de cavalerie sur Pal-
légions et la ville de Laodieée où il mvre, distribua le rpste de* l'armée
s'était établi. Cassius se disposait même dans les quartiers, laissa le comman-
à marcher sur l'Egypte, lorsqu'il fut dement de l'Asie à Plancus, celui de
instruit que Octave et Antoine, avec la Syrie à Saxa, et se rendit lui-même
une flotte considérable, s'avançaient en Egypte pour v passer l'hiver f l'an
eontre lui. Il dut préférer de se rendre 41).
en Macédoine pour combiner avec Bru- Pendant qu'Antoine oubliait auprès
tus l'emploi de leurs communs efforts, de Cléopâtre et Rome et l'Italie , Ful-
rendus nécessaires par leurs périls com- vie sa femme crut voir dans le renou-
muns. En attendant, Cléopâtre en- vellement des dissensions civiles un
voyait sa flotte pour seconder Antoine moven assuré de le ramener auprès
et Octave; Cassius qui l'apprit à d'elle.
Rhodes plaçait Murcus en station à la Antoine avait reçu en tfgypte les en-
hauteur du' promontoire de Ténare; voyés des colonies et il les avait rete-
*,

mais cette précaution fut inutile , une nus auprès de lui soit à cause de l'hiver,
tempête ayant dispersé et presque en- soit afin que ses desseins fussent plus
lièrement détruit la Hotte de Cléo- ignorés. Dès les premiers jours du
pâtre. Après diverses expéditions par- printemps il quitta l'Égypte , se rendit
tielles, les troupes des deux partis se a Tvr, ensuite à Athènes où il rencon-
réunirent dans les plaines de Philippes tra Fulvie qu'il n'hésita pas à blâmer,
où se livra la bataille qui assura la vic- ainsi que son frère Lucius , et Manius
toire au triumvirat et décida du sort surtout; il laissa Fulvie malade à Si-
de la république. Cela arriva pendant cyone ^ et , après sa mort survenue
le consulat de L. Munatius Plancus et peu de mois après, il épousa Octavie,
M. .Emiiius Lepidus II, l'an 42 avant sœur d'Octave , et ce mariage termina
e
l'ère vulgaire, dans la II année du leurs dissensions. Après ces événe-
règne de Cléopâtre. ments, Antoine distribua ses légions
En même temps, les triumvirs, re- en Illvrie, en Épire, en Afrique, et
connaissants des secours que Cléopâtre passa l'hiver à Athènes avec Octavie,
avait donnés à Dolabelia contre Cas- sa nouvelle épouse. Ce fut celui de
sius, consentirent que son jeune fils, l'an 40 avant l'ère vulgaire.
Ptolémée Césarion , portât le titre de L'histoire n'a conservé le souvenir
roi d'Egypte. d'aucun événement relatif à l'Egypte
Après la victoire de Philippes et la pendant cette première absence d'An-
mort de Brutus , Octave retourna en toine, si ce irest l'arrivée auprès de
Italie; Antoine se rendit en Asie, resta Cléopâtre de Hérode, fils d'Antipater,
quelque temps à Éphèse passa de là
, qui se rendit à Rome et fut reconnu
en Phrygie, en Cappadoce, et s'arrêta roi des Juifs par les soins et sous la
dans la Cilicie. protection d'Antoine.
Cléopâtre s'y rendit pour répondre La paix entre Octave, Sext. Pompée
aux accusations dont elle était le sujet. et Antoine, n'avait duré que peu de
Elle rappela au triumvir ce qu'elle avait temps dès la fin de l'hiver Antoine
:

fait pour Dolabelia, ce qu'elle avait se rendit à Tarente pour seconder Oc-
refusé aux ordres de Cassius qui le com- tave qui ne s'y trouva pas, et qui,
battait; elle parla aussi de la flotte ayant continué seul la guerre assez
qu'elle avait envoyée à Octave malgré malheureusement, fut obligé de solli-
la station de Murcus : mais Antoine citerde nouveau le concours d'A ntoine.

Digitized by Google
EGYPTE. 401

Celui-ci ne le refusa pas et employa il retourna en Egypte avec un butin


même Octavie à ramener vers lui Oc- immense, emmenant prisonniers le roi
tave qui lui témoignait peu de bien- d'Arménie, sa femme et ses enfants
veillance. qu'il lit marcher devant lui, avec d'au-
l^e triumvirat fut renouvelé pour tres captifs , lors de son entrée triom-
cinq autres années, et les guerres ne phante a Alexandrie. Antoine les lit
discontinuèrent pas. L'Egypte ne ces- aussi comparaître devant Cléopatre
sait pas d'être le centre dé ses opéra- assise sur un tribunal en présence du
tions militaires et, comme lïniluence
; peuple ; il proclama ensuite cette femme
toujours croissante de Cléopatre diri- reine des rois , et son fils Césarion roi
gea tous les desseins du triumvir An- des rois, soutenant qu'il était le fils
toine, c'est leur accomplissement qui légitime de Jules César, moins peut-
fournit les laits et les époques des der- être pour relever sa naissance que pour
nières années de la monarchie égyp- désobliger Octave cjui n'était que son
tienne; mais ces dernières pages de (ils adoptif. En même temps il con-

l'histoire politique d'un grand empire firma Cléopàtre et Césarion dans la


ne sont plus que la (in des aventures possession de l' Egypte et de Chvpre,
d'une femme passionnée. donnant aux enfanis quïl.avait eus de
Antoine lit la guerre en Arménie la reine le reste de ses conquêtes,
sans obtenir de succès bien marqués : c'est-à-dire tout le pays jusqu'à l'Eu-
l'hiver l'y surprit, et, se proposant de phrate à son (ils Ptolemee, à sa fille
continuer la campagne à l'entrée du Cléopatre la Cyrénaïque , et à l'autre
printemps, il plaça ses troupes dans Ptolemée. leur frère, l'Arménie et les
des cantonnements, leur distribua l'ar- contrées au delà de i'Euphrate jus-
gent que Cléopatre lui envoya, et se qu'à l'Indus, lorsqu'elles seraient con-
rendit aussitôt après en Egypte l'hiver
( quises.
de Tan 38). Antoine lit ensuite la paix Celte année, la I6 r de son règne,
avec le roi des Medes ; et , considérant fut, pour Cléopiitre, la plus mémo-
cette alliance comme très-favorable à rable de sa vie. Antoine avait soumis
ses projets sur l'Arménie, il tenta l'Arménie et plusieurs autres contrées
d'abord d'en attirer le roi en Egypte de l'Orient ; il elait en paix avec Octave
par des propositions amicales. Elles et avec Home ; son union avec Cleo-
furent suspectes, couséqiiemment sans pâtre devenait de jour en jour plus
succès, et Antoine rentra en cam- intime ; des fêtes brillantes et la pompe
pagne, annonçant une seconde guerre d'un triomphe militaire, à l'exemple
contre les Partîtes. 11 avait déjà quitté de ceux qui étaient en usage à Home,
l'Egypte lorsqu'il y fut ramené par la donnaient à Alexandrie un éclat jus-
nouvelle de la prochaine arrivée d'Oe- qu'alors inconnu ; toutes les passions
tavie qui venait de Home se réunir à étaient exaltées par la victoire; et
lui. Il réussit à la faire demeurer à Cléopatre, que ne satisfaisaient plus
Athènes , et passa le reste de l'année les hommages qu'elle recevait comme
en Égypte , occupé à reunir les moyens reine, voulut être honorée comme une
les plus faciles et les plus certains divinité. Elle pr»t en public le nom avec
pour s'assurer la conquête de l'Ar- les attributs d Isis, et sur la monnaie
ménie. qu'on lit à cette occasion , le titre de
Dès le printemps de l'année sui- nouvelle déesse; Antoine même y laissa
vante, Antoine quitta l'Egypte et se inscrire son nom à coté de celui de
rendit à iNicopolis. Sous de spécieux cette princesse , faisant douter par là
prétextes, il y attira le roi Artabaze, s'il était roi d'Egypte ou triumvir de

le chargea de chaînes qui furent faites la république romaine.


d'argent par respect |K>ur la majesté Antoine alors semblait n'avoir plus
rovale, s'empara du reste de l'Armé- rien à conquérir en Orient, ou du
nie par la persuasiou ou par les armes ; moins ne plus s'en occuper. Entière-
et , laissant ses légionsdansce royaume/ ment subjugué par Cléopâtre, il ne

Digitized by Google
469 L'UNIVERS.
pouvait se résoudre â la quitter; et, la guerre tout le temps que les jeux ti
•'il fut contraint d'entreprendre de les fêtes lui laissaient de libre. Enfin,
nouvelles campagnes, il obtenait d'être déguisant moins ses vues hostiles à
accompagné par la reine , de sorte que l'égard d'Octave et de tout ce qui lui
l'appareil et le luxe qui y présidaient appartenait, il envoya quelqu'un a Rome
en Taisaient plutôt des voyages d'agré- cliargé de faire sortir de sa maison sa
ment que des expéditions militaires. femme et ses enfants.
Livre a toutes les jouissances des Antoine fit demander aussi que le
cours dans une contrée où l'Afrique et sénat voulut confirmer tout ce qu'il
l'Asie étalaient alors toutes leurs sé- avait fait en Egypte; il espérait y réus-
ductions , Antoine ne se souvenait plus sir au moyen dé ses intimes relations
de Rome qui , pour lui était toute dans
, avec Cn.'Domitius Ahenobarbus et
Alexandrie. Mais sa femme Octavie C. Sossius qui lui étaient très-dévoués
délaissée et vivant , depuis son second et qui parvinrent au consulat des le
retour d'Athènes, dans une profonde mois de janvier suivant (l'an 32).
retraite , ne cessait toutefois d'accueil- Dès commencement de ce mois
le
lir avec distinction et de seconder de Sossius engagea publiquement cette
son crédit auprès d'Octave ceux qui mémorable discussion en demandant
de l'Egypte, venaient a Rome pour un édit contre Octave ; mais Octave se
les affaires publiques ou pour, leurs défendit devant le sénat , accusa hau-
intérêts privés; elle résista même a de tement Sossius et Antoine, et assigna
secrètes insinuations d'Octave , re- un jour pour soutenir devant eux ses
{>oussant avec une vertueuse fermeté accusations. Effravés par ce premier
'idée de consentir que , pour les inté- résultat , les consuls avec plusieurs sé-

rêts d'une femme , les Romains tour- nateurs sortirent secrètement de Rome
nassent encore leurs armes contre des et se rendirent auprès d'Antoine. Oc-
Romains. tave continua de l'accuser devant le
Octave cherchait des prétextes pour sénat et devant le peuple; il parvint
accuser Antoine; son ambition souf- même à le rendre odieux en iur suppo-
fraitde l'existence de cet heureux com- sant le projet de transférer le siège de.
pétiteur. Antoine le savait il se défen-
, l'empire romain en Éiiypte, et à le
dait par ses lettres ou par ses amis. faire priver du consulat pour lequel il
Un certain temps se passa dans ces était designé pour la troisième fois.
réciproques explications , souvent por- Enfin, sans faire proclamer Antoine
tées devant le sénat même, mais sans l'ennemi du nom romain , Octave réus-
espoir d'accommodement, car Octave sit à faire déclarer la guerre à Cleo-
et Antoine prévovant également une pâtre, bien certain par là d'obliger
guerre prochaine* s'y préparaient en Antoine à la quitter ou à combattre
secret. pour elle contre Rome qui ne décidait
Pour la faire avec plus de succès, rien contre lui.
Antoine quitta l'Egypte , se rendit dans On fit toutes les cérémonies reli-
l'Asie Mineure, et ue là en Grèce. Il gieuses usitées dans ces circonstances;
s'arrêta d'al>ord à fcphèse et vint en- Octave lui-même remplit les fonctions
suite à Samos qu'il indiqua pour ren- de (lamine fécial; on leva beaucoup
dez 7 vous de guerre à tous bps allies. d'argent et beaucoup d'hommes. Tous
Il
y appela aussi des musiciens et des les alliés, toutes les provinces, l'Italie,
histrions , y passa quelque temps dans la Gaule, l'Espagne, l'Afrique, la Sar-
les plaisirs , et arriva enfin à Athènes daigne, la Sicile, durent fournir leur
où il prit part, avec Cléopâtte qui ne contingent au parti d'Octave, tandis
l'avait pas quitté, à tous les jeux olym- que celui d'Antoine était défendu par
piques célébrés cette même année , la I Asie, la Thrace, la Macédoine, la
SS^ avant l'ère vulgaire. Grèce entière, Cvrène et l'Égvpte, les
Antoine , comblé d'honneurs par les îles voisines, les princes et les rois
Athéniens, donnait aux préparatifs de qui en Orient , étaient aussi les alliés
,

Digitized by Google
ÉGYPTE.
des Romains : il en chercha pour lui j chants de victoire. Antoine fit donner
avec de l'argent, jusque dans l'Italie. à Pinarius Scarpus, commandant l'ar-
Ce» immenses préparatifs occupaient mée d'Afrique, des ordres que ce chef
entièrement les deux chefs et ceux qui refusa d'exécuter , et ce contre-temps
s'étaient associés à leur fortune. An- l'engagea de se rendre en Égvpte ou,
toine , qui avait emmené les flottes et de concert avec Cléopâtre, il fit de
tes légions de l'Orient, qui disposait nouveaux préparatifs de guerre sur
des trésors et des soldats de Cléopâtre terre et sur mer, sollicitant encore une
et t prêt à commencer la guerre, ta nd is
.j î fois le concours de leurs alliés.
qu'Octave èn était réduit à craindre Octave, après la victoire d' Actium,
d'en venir aux mains dans l'été de vit l'armée d'Antoine passer sous ses
cette même année. La lenteur d'An* drapeaux; il put ainsi, n'ayant plus
toi ne servit efficacement Octave , et ce de résistance à craindre, s'emparer
ne fut que vers la fin de l'automne de la Macédoine et s'occuper de régler
qu'Antoine se décida à tenter une in- les affaires de la Grèce. Après avoir
cursion dans l'Italie. Arrivé à Corcyre, assisté a Athènes à la célébration des
on lui dit que des vaisseaux d'Octave mystères, il passa dans l'Asie, obser-
avaient paru à la hauteur des monts vant les démarches ultérieures d'An-
Cerauniens : ce n'était qu'une flottille toine. Mais bientôt rappelé par des
d'observation, nvhs Antoine la prit troubles survenus en Italie, Octave
pour les forées navales d'Auguste réu- s'y rendit au milieu de l'hiver.
nies , il se rendit dans le Péloponèse La présence d'Octave rétablit Tordre
et passa l'hiver à Patra?. à Rome : trente jours après son arri-
Au printemps suivant, les disposi- vée en Italie il en repartit, et fut de
tions militaires devinrent plus actives. retour en Asie avant même qu'Antoine
Octave réunit sa flotie a Tarente et à et Cléopâtre eussent été informés de
Brinues. 11 fit pro|)oser à Antoine de son départ.
venir combattre en Italie, et Antoine, Les préparatifs se continuaient de
à son tour, lui indiqua les champs de part et d'autre avec une égale ardeur.
Pharsale , même un combat soulier. Cléopâtre et Antoine firent proposer
En attendant, il courait la mer io- la paix à Octave, et tentèrent de cor-
nienne et réunissait toutes ses forces rompre son armée avec de l'argent. En
à Actium. Octave s'y rendit ; la bataille même temps Cléopâtre envoyait se-
s'engagea , et , lorsque le sort en était crètement son sceptre et sa couronne
encore incertain , on vit tout à coup à Octave; elle sollicitait sa bienveil-
Cléopâtre se retirer du combat , em- lance, et Octave la lui promettait à la
mener ses soixante vaisseaux et se por- condition de se défaire d'Antoine. Il
ter, par un vent favorable, vers le Pé- renvoyait à celui-ci ses premiers dé-
loponèse. Antoine , cédant à sa passion putés sans réponse; il recevait avec
plutôt qu'aux forces d'Octive, ne put te même dédain une seconde et une
voir partir Cléopâtre sans la suivre, troisième ambassade, refusant de ré-
et il abandonna à son rival une vic- pondre à Antoine et renouvelant ses
toire que ses amis , sa flotte et son ar- secrètes promesses à Cléopâtre, sous
mée disputaient encore après qu'il les les mêmes conditions. Il euvoya même
eut aussi ignominieusement quittés. à la reine l'affranchi Thyrsus , pour la
Tel fut le résultat de la bataille d'Ac- décider à ce qu'il souhaitait , et lui
tium, livrée le 2 septembre de l'an 81 persuader même qu'il était tout épris
avant l'ère vulgaire, la 22* année du de sa beauté.
règne xle CléopJitre. Les événements se hâtaient : An-
Antoine et la reine se retirèrent toine marcha sur Pane toi ri mn pour y
d'abord dans le Péloponèse. Divisés prendre de gré ou de force l'armée que
par la catastrophe qu'ils venaient de Cornélius Galius y commandait. Il
subir, Cléopatre se rendit seule en croyait trouver des* amis : mais il fut
fcgypte, déguisant sa défaite par des reçu et traité en ennemi , et il éprouva

iaitized by Google
404 L'UNIVERS
plusieurs échecs sur terre comme sur ne leur succédèrent pas. AthrUus et
mer. En attendant, Octave s'emparait Césarion furent mis à mort; les autres
de Péluse, soit faute d'avoir été suf- furent confiés par Octave a Juba. roi
fisamment défendue, soit que Cléo- de Mauritanie : l'histoire n'a plus rap-
pàtre, confiante clans les assertions de pelé leurs noms.
Thvrsus, facilitât les succès d'Oclave. L'Egypte devint une province ro-
En vain, accourant de Paractonium, maine dont Cornélius Gallus lut le
Antoine voulut couvrir Alexandrie; premier préfet*
rr
Octave prit cette ville le l du mois L'époque de son asservissement fut
d'août, et Antoine vaincu chercha inu- pour l'Égypte même celle d'une ère
tilement de nouveaux moyens ou un nouvelle , comme si cet asservissement
refuge dans la (lotte qui l'abandonna ; eût été un bienfait.
Cléopâtre même, toute occupée de sa Elle avait vu la dernière race de tes
conservation, s'enferma dans un tom- Pharaons attaquée et détruite par on
be an avec ses trésors, et fit répandre conquérant étranger. Accoutumée de-
à dessein la nouvelle de sa mort. An- puis à l'obéissance, l'Egypte écrivit sur
toine, qui ne voulut pas lui survivre, ses monuments et dans ses annales pu-
se blessa lui-mtfme assez dangereuse- bliques le nom d'Auguste et celui de
ment pour en mourir, mais non pas ses successeurs, à la suite des noms
sans avoir eu le temps et le regret de de Cambyse, de Darius, d'Alexandre
connaître l'affreuse supercherie de et des Ptolémées. Elle a vérifié ainsi,
Cléopàtre. même jusqu'à nos jours, une antique
La reine, quoique seule avec son cou- tradition qui ne lui laissait plus es- i

rage et sa renommée, croyait ferme- pérance de*voir sur son trône des prin-
ment qu'Octave lui laisserait la vie et ces d'origine égyptienne , tradition
la couronne; elle demandait des ga- conservée dans ces paroles d'Ezechiel
ranties pour l'une et pour l'autre, es- Et (lux de lerrà .Egypti non erit
pérant soumettre par ses charmes ce- ampli i< s.
lui qu'elle n'avait pu vaincre par ses La splendeur, la durée et les événe-
soldats. mentsdu règne de Cléopàtre permettent
Mais Octave voulait attacher Cléo- de supposer que cette grande reine ne
pàtre à son char de victoire, et bien- négligea rien de ce qui pouvait accroître
tôt elle reconnut la vanité de ses es- son illustration : les monuments qui
pérances. "Captive là où elle avait été couvrent encore le sol de l'Ésypte en
souveraine, eue ne voulut pas continuer portent de nombreux et d'éclatants
de vivre après avoir cessé de régner, témoignages ; et la tendresse de Cléo-
et se donna la mort, vers le lô du pOtre pour le fils de Jules César, quelle
mois d'août de l'an 30 avant l'ère vul- appelait nouveau César, s'y ma ni este
gaire, après un règne de 22 années presque partout. Le petit temple d'Her-
entières. , monthis fut construit en commémora-
Ce jour fut dernier de la race
le tion de la naissance de cet enfant ro-
royale des Lagides et des successeurs main; elle y est symbolisée en celle
d'Alexandre le Grand en Egypte. du dieu Harphré ne de la déesse Ritho
Ils v régnèrent depuis le 30 mai de et du dieu Mandou. La reine Cléopâtre
l'an 2Ï3, jusqu'au lô août de l'an 30 porte, dans les inscriptions de ce tem-
avant l'ère vulgaire. ple, ce titre fastueux : La modératrice
Cet intervalle contient 294 années souveraine du monde, Cléopàtre, déesse
juliennes et 78 jours, ou 294 années Philopatore; — l'Aroëris , puissante
égyptiennes et Iô2 jours. souveraine des biens, la présidente des
Il se divise en seize rois ou reines Panégyries, la souveraine du monde;
Îni occupèrent successivement le trône = la modératrice , la fille ainéedudieu
Egypte, et fournirent vingt et un rè- Sev (Saturne) , etc. Le jeune roi v est
gnes' différents. aussi nommé et qualifie Ptolémee Cé-
Les tils de Cléopdtre et d'Antoine sar, vivant toujours, aimé de Phtlw

• Digitized by Google
«
• »» .

• - « «

• • *

*

• V 1

• «

Digitized by Google
ÉGYPTE. 46*

et d'Isis; = Ptolémée, surnommé Cé- d'une société nouvelle , d'une civilisa-


sar, etc.; le seigneur du monde Pto- tion qui refit ses anciennes conquêtes
lémée, le fils du soleil, seigneur des et leur en ajouta de nouvelles»
diadèmes, César, dieu Philopator; et Nous avons déjà exposé les vues que
le travail de décoration de ce temple la politique d'Auguste réalisa pour
est demeuré imparfait. Auguste et ses l'administration de IL _;\ pte supra ; ,

successeurs, qui ont terminé tant d'edi- pages 49 et 50) , et sur quelles règles
fices commencés par les Lagides , ne elle fut assise. Il en nomma pour pre-
pouvaient pas être très - empressés mier préfet Cornélius Gallus, cheva*
d'achever celui qui rappelait la nais- lier romain de médiocre naissance, mais
sance d'un enfant-roi dont ils ne res- de mœurs douces et paisibles. Auguste
pectaient pas les droits. Aujourd'hui, le choisit lui seul , parce que l'fcgypte
ce monument si royal dans son ensem- était à lui , sa première conquête , et
ble et dans son objet, est occupé par elle resta province impériale lorsque
un cachef qui s'y est fait une maison l'empereur voulut bien partager l'em-
une cour et un pigeonnier, en mas- pire avec le sénat et le peuple. Il créa
quant et coupant le temple de miséra- pour TÉgypte une forme particulière
bles murs de limon blanchis à la chaux. d'administration ; aussi le préfet avait-il
La partie la plus ancienne du temple le titre de préfet augustal , réunissant
de Dendérah, à son extrémité, appar- tous les pouvoirs, et recevant de son
tient au règne de Cléopâtre et de Pto- maître toutes les directions pour les
lémée Césarion : ils y sont figurés de exercer. Aucun conseil pris dans le
proportion colossale, et les noms de pays ne fut appelé à y concourir, ce
Cléopâtre et de Ptolemée César ou Pto- préfet y tenant la place des rois , et ce
lémée surnommé nouveau César, qui royaume appartenant à l'empereur. Cet
se lisent dans les inscriptions qui ac- état de l'administration romaine en
compagnent ces tableaux historiques, Éizypte éprouva peu de changements
ne laissent aucun doute à ce sujet. jusqu'au siècle de Constantin.
Ce sont la les dernières reliques de Le préfet de l'Egypte, Cornélius
lu grandeur égyptienne ; elle se mani- Gallus, s'appliqua d'abord à réparer
festa au monde civilisé il y a aujour- les mail leurs nés des dernières dissen-
d'hui plus de six mille ans les noms
: sions et des dernières guerres : les ca-
de Souphis, de Mycérinus, nouvelle- naux du > il attirèrent surtout son at-
ment découverts dans les pyramides tention. Plusieurs villes se soulevèrent
même que l'antiquité tout entière sa- contre le nouveau régime; Gallus les
vait très-bien être les tombeaux de ces ramena à l'obéissance; Thèbes même',
deux rois , nous en donnent la convic- qu'il pilla , disent les historiens anciens,
tion : l'histoire de l'intelligence hu- qu'il épuisa, et d'où il détourna une
maine, légitimement orgueilleuse de grande quantité de choses précieuses.
son antiquité , enregistrera attentive- 11 parait que, enivré de son autorité
ment dans ses fastes de tels documents. et de ses succès, le préfet se laissa
Subjuguée par les Romains , l'É- traiter comme un Pharaon qu'il per-
,

gypte ne fournit plus aux annales mit qu'on lui élevât des statues, et que
humaines que son continrent des mal- ses exploits fussent gravés sur les mo-
heurs et des dures vicissitudes qui numents publics. Mais de tels succès
composent l'histoire générale des peu- ne furent pas de longue durée Corné- :

ples du monde romain : des guerres lius Gallus accueillit en Égypte un


intestines , des invasions étrangères grammairien disgracié par 'empereur
l
;

le mélange confus de toutes les idées et il fut révoqué, envoyé en exil, et il


de tous les principes, l'oubli des pré- s'y donna la mort.
ceptes de l'ancienne sagesse , le vrai et Pétronius lui succéda; les Alexan-
le faux , le passe' , le présent et l'ave- drins se révoltèrent , et furent bientôt
nir jetés pêle-mêle dans un creuset après soumis de nouveau. Auguste fit
brûlant d'où sortirent les éléments faire une expédition en Arabie, com-

30' Livraison. (Égyptb.) 30

Digitized by Google
I/CSIVERS.
mandée par ^lius Gallus à la tête qui ne lui furent pas moins sen-
d'une année romaine, renforcée de siblesque l'incendie de sa riche biblio-
cinq cents soldat* fournis par le roi tbe ue; la plupart de ses principaux
lier de qui les avait choisis parmi ses professeurs aile eut chercher a Rome
i

gardes. L'année roimiue triompha des la laveur des Césars. Toutefois, un


Arabes, mais elle lut vaincue par le nouveau musée s'était forme ; les em-
climat; après une année de fatigues, pereurs en désignaient les présidents
de privations et de maladies , elle ren- et les membres ; mais la faveur publi-
tra , misérablement réduite, en Éivpte, que ne s'attachait plus à leurs travaux;
sans avoir atteint le but marqué par depuis que la faveur royale les proté-
l'empereur, la possession des riches geait moins directement l'Egypte, :

contrées où naissaient les aromates, où avant tout , était le grenier de 'l'em-


étaient entreposées les plus précieuses pire; Alexandrie le foyer d'un grand
productions de l'Inde. commerce ; et le musée ne passait que
Les éthiopiens avaient profité de pour l'asile des sophistes de la Grèce.
l'absence des troupes habituellement Cette école continua cependant de pro-
stationnées dans la haute lig\ pte , pour duire des hommes utiles, dont les ou-
v taire une invasion. Leur mine Can- vrages sont encore étudiés, occupant
"dace s'empara de Svene, d'Éiéahan- une place distinguée dans l'histoire des
tine,de Philae; ravagea la Tlubaîde, sciences et de la littérature; et comme
et emporta un riche butin. Le préfet ils se rattachent aux travaux des pre-

Pétrouius songea aussitôt à punir tant miers docteurs chrétiens, ils sérient
d'audace pénétra dans Ethiopie, jus-
, I ainsi de lien entre les productions les
qu'à N.ipata capitale des États de la
, I
lus anciennes et celles des temps mo-
reine* et lui accorda la paix à la con- dernes. Du reste, il en arriva dans ces
dition de payer un tribut annuel , et temps de la domination romaine en
d'envoyer une ambassade à Auguste Egypte ce qui arrive à toutes les
pour en obtenir la ratification du traité. époques : l'étude des connaissances
Les nouvelles de ces événements par- humaines prospéra en Egypte en rai-
venues à P. (line avaient alarmé l'em- son de la protection qu'elle reçut de
pereur. Il partit aussitôt pour Égypte;
I l'autorité impériale.
mais il apprit à Samos les sucres de Auguste imita la politique d'Alexan-
Pétronius , y attendit les envoyés éthio- dre le Grand en ce qui concerne la re-
piens, et leur accorda la ratification ligion et le culte nationaux de l'Egypte.
du traité avec l'exemption du tribut On continua d'éloer, de réparer les
stipule par Pétrouius. Des son retour temples des dieux de chaque nome, en
en Egypte, ce préfet continua de don- Nubie comme en Egypte; et le nom
ner ses soins à ce qu'exigeait la pros- d'Auguste , qualifié d'empereur César,
périté du pays; les travail* sur les se lit sur les édifices de Talmis, Râ-
canaux du ISil furent conduits avec la bschè , Deboud , Dandour , Philx et
une telle intelligence que la crue du Dendérah. Dans ce dernier temple, si
fleuve jusqu'à douze coudées suffisait célèbre par ses deux zodiaques, après
pour assurer la plus grande fertilité; les constructions faites durant le règne
avant Pétronius, quatorze coudées de Cléopâtre et de son fils Ptoléinée
étaient nécessaires. Cesarion, on reconnaît que les bas-
Pétronius , après huit années d'ad- reliefs supérieurs sont du temps d'A»-
ministration , eut yElius Gallus pour 3 usie , ainsi quemurailles latérales
les
successeur comme pté.ct. Le nouvel u naos , de quelques pe-
à l'exception
administrateur visita la haute Égypte tites portions qui sont de l'époque de
ayant avec lui le géographe Straoon ; Néron ; le pronaos est tout entier cou-
et il était encore en fonctions à la mort vert de légendes impériales de Tibère,
d'Auguste. de Ciius, de Claude et de Néron; les
La conquête de l'Égypte par les Ro- sculptures de tout l'intérieur du naos
mains causa à l'école d'Alexandrie des et des édifices construits sur la terrasse

Digitized by Google
ÉGYPTE. 407

ne paraissent pas remonter an delà du Le nom de Tibère, successeur d'Au-


temps de Trajan et d'Antonin. Le guste, se lit souvent répété à Phi la? à .

propylon sud-ouest d'Antonin; le


est Esneh, et à Karnac de Thèbes. Les em-
grand propylon est couvert des images pereurs romains avaient aussi adopté
des empereurs Domitien et Trajan. les deux cartouches des Pharaons;
Knfin, le typhonium de Dendérah fut mais, au lieu d'un prénom religieux,
décoré sous Trajan, Hadrjen et Anto- on écrivait pour les empereurs leur
nin le Pieux. On voit, par ces détails, titre même, le mot grec autocratôr;
tous les soins donnes aux édiiiees de ils ajoutaient à leur nom propre les ti-

Dendérah par les empereurs romains; tres consacrés : toujours vivant, chéri
le grand temple était dédié à la déesse d'Isis et de Phtha; et
il est a remar-

Hathôr, la Vénus des Romains: il y quer qu'en général, à mesure que l'on
avait là une double dédicace dont s'ar- s'éloigna des temps anciens, des anti-
rangeait facilement l'orthodoxie ro- ques institutions, les noms des divi-
maine. Les carrières de Thorrah por- nités du premier ordre devinrent moins
tent des dates d'exploitation de la 4* communs sur les monuments comme
année du règn*) d'Auguste. Son nom se dans la pensée des hommes; et ceci se
lit aussi sur le temple d'Isis, au sud passa au proût des divinités du dernier
de l'hippodrome de Thèbes; l'image ordre, de celles qui, produit des der-
d'Auguste se voit aussi sur la plupart nières incarnations et revêtues des plus
de ces édifices, et l'empereur romain vulgaires attributions, étaient en quel-
y est figuré avec le même costume, que sorte plus populaires : ce qui pour-
accomplissant les mêmes cérémonies rait rendre raison de l'extraordinaire
envers les dieux de 1'Kgypte que les durée des noms d'Isis, d'Osiris et de
Pharaons eux-mêmes. Notre planche Typhon, qui ont en quelque sorte sur-
91 représente Tibère faisant ses of- vécu à toutes les générutions du pan-
frandes à trois divinités égyptiennes théon égyptien.
1

assises ; les deux cartouches tracés au- Tibère lit continuer la construction
ade sa coiffure se lisent autocratôr
rios Caesar. Ces indications mo-
du temple de Deboud en Nubie, la
Sculpture du portique couvert et d'une
numentales peuvent être considérées salle du grand temple de Thèbes. On
comme étant communes à tous les sait qu'il écrivit à .Kuielius Aulus,
souverains romains; le lecteur nous préfet d'Egypte, qui lui avait envoyé
dispensera donc de les reproduire. La au delà des taxes mises sur l'Egypte par
civilisation occidentale, armée de Cépée les règlements d'Auguste, qu'il voulait
romaine, s'introduisit ainsi dans les bien tondre ses brebis, mais non les
croyances de l'antique Orient, sous le égorger. Du reste, ce préfet eut plu-
costume des Pharaons et les couleurs sieurs successeurs du vivant même de
d Osiris et d'Ammon. Tibère. Parmi eux ligura quelque temps
A Dendérah, c'est sous le règne d'Au- le père de Séjan : ce fut alors que Ger-
guste nue le propylon du grand temple manicus visita l'Egypte supra, page
fut édifié :une inscription grecque 346), bannissant, dit Tacite , bannissant
(car, durant la domination romaiue, de, la grandeur suprême l'orgueil qui la
la langue grecque resta aussi la langue fait haïr, pour n en conserver que la
des actes publics) qui existe encore, et dignité qui la rend imposante.
que j'ai publiée il y a trente- trois ans, Des troubles sérieux se déclarèrent
nous apprend que, pour la conserva- à Alexandrie durant le règne de Cali-
tion de l'empereur César , (ils du divin gula; Avillius Flaccus fut en bute a la
César, dieu libérateur, Auguste, les naine des juifs; Philon, un de leurs
habitants de la métropole d nome (de
i écrivains, a tracé la narration, à sa
Tentyris) élevèrent ce propylon à Isis, manière, de ces démêlés; Flaccus périt
déesse très-grande, et aux dieux ado- misérablement après avoir été révoqué
rés dans le même temple, l'an 31 du de sa préfecture. Le nom de ce préfet
règne de César, au mois de thdth. se lit encore sur le prouaos de Den-

30.

Digitized by Google
L'UNIVERS.
dérah ,dans une inscription grecque pour préfet , lequel la combla de grâces
qui rappelle que sous Publius Aviliras et de bienfaits, particulièrement d'une
Flaccus les habitants de la métropole juste inondation du Nil, d'où les dons
et du nome élevèrent ce pronaos à du fleuve doivent s'accroître de plus en
Vénus , déesse très-grande, la . année
. . plus chaque année. On éleva donc une
de César Tibère. A la mort de Calcula stelc en l'honneur de Balbillus, de qui,
les juifs , heureux de ce nouveau règne, au surplus, Sénèque fait un grand
attaquèrent les Grecs dans Alexandrie. éloge. Il est vrai que Sénèque dît aussi
L'empereur Claude les apaisa en leur 3ue Néron était un amant passionné
rendant le droit d élire un ethnarque. e la vérité comme de toutes les autres
Les scienres reçurent aussi de grands vertus, et que ce fut en conséquence
services du nouveau chef de l'empire : de ces nobles sentiments qu'il fit faire
il fonda un nouveau musée, et l'école un voyage aux sources du Nil supra,
d'Alexandrie se trouva encore une fois page 8). Néron, du reste, s'occupa
dans une situation favorable a ses pro- assez particulièrement de l'Égypte pen-
grès; maïs le zele des savants ne ré- dant son règne. Il forma le projet de
pondit point à la munificence du la visiter, annonça par des officiers sa
prince. Les noms de Caius Caligula et prochaine arrivée, et l'Égypte lui pré-
de Claude se lisent encore sur les édi- para une réception digne de son rang;
fices publics de l'Egypte: celui du pre- elle fit construire pour l'empereur des
mier à Phike, à Dendéruh en Egypte, bains magnifiques; mais il mourut a
a Talmis en Nubie; celui de Claude la veille de son départ, non pas sans
dans les mimes lieux en Égypte, et avoir fait mettre à mort Tuscus, ûls de
aussi à Esneh, Edfou. Sa légende im- sa nourrice et préfet d'Égypte, qui
périale, composée de deux cartouches, s'était oublié jusqu'à se servir des bains
se: lit Tibère Claude, César-Auguste édifiéspour la bonne venue et l'usage
Germanicus, empereur. Cette légende de l'empereur.
affecte même parfois le style pharaoni- Les règnes deGalba, d'Othon et de Vi-
que, et le premier cartouche se lit : telhis, n'eurent aucune influence par-
L'éprouvé des dieux modérateurs, ticulière sur l'état de l'Egypte : aucun
l'empereur Tibère Claude, seigneur de événement marquant ne se rattache à
la région haute et basse du monde, le leur époque. Le nom d'Othon existe
fils du soleil, seigneur des chefs. encore sur neuf bas-reliefs de la déco-
Ces mêmes titres, si propres à ins- ration intérieure du grand propylon des
pirer le respect aux peuples, furent ruines au sud de l'hippodrome de Thè-
aussi portés par Néron, qui se disait bes; et l'existence de ce nom, qui fut
de plus l'aime de Phtha et d'Isis, le do- celui d'un empereur qui régna si peu de
minateur bienfaisant des régions supé- temps, ne doit point trop surprendre,
rieure et inférieure, le seigneur des puisque l'Égypte fut la première qui
mondes, l'éprouvé des dieux modéra- reconnut l'autorité d'Othon et frappa
,

teurs, le fils du soleil, seigneur des des monnaies à son nom (l'an G9 de
seigneurs, l'empereur Néron. Enfin l'ère chrétienne). Les noms de Galba
une inscription , copiée autrefois dans et de Vitellius ne subsistent pas en
le voisinage du sphynx des pyramides, Égvpte; mais celui de Vespasien se lit
et inhumée depuis,'donne a Néron, au fréquemment sur ses édifices.
nom de l'Égypte, le titre de nouvel A l'avènement de Vitellius, un juif
agathodémoh ( le bon génie). Cette égyptien , neveu de l'écrivain Philon et
inscription est un décret rendu au nom nommé Tibère Alexandre, était préfet
des habitants de la ville de Busiris. oui d'Égypte depuis trois années; il s'était
proclament dans un monument public associe aux secrets projets de Mucius
que Néron est l'agathodémon de la et de Vespasien; aussi est-ce dans
terre, qu'il a répandu de grands biens Alexandrie que Vespasien fut d'abord
*ur l'Égypte; que, pour prendre soin proclamé empereur par les soins de ce
de son bonheur, il a envoyé Balbiltus même Tibère Alexandre, qui le fit re-

Digitized by Google
ÉGYPTE,
connaître par ses légions. Peu d'années pvlon de l'édifice au sud de l'hippo-
après, ce préfet entreprenant n'existait drome à Tbèbes.
plus. Il eut pour successeur Lupus en Le nom de Nerva, successeur de
Tannée 71. Pendant que Titus achevait Domitien, ne se lit qu'une seule fois
la conquête de la Judée, des révoltes en Égypte, c'est à Syène, où cet em-
de juifs jetaient le trouble dans Alexan- pereur fit élever un petit temple dédié
drie; des partis qui s'élevaient contre aux dieux du pays et de la cataracte,
1*. torite de l'empereur étaient réduits Chnouphis, Saté (Junon et Anoukis
,

par force; les juifs furent inoins fa-


la (Vesta), et ce monument révèle déjà
vorisés à mesure qu'ils se montraient l'extrême décadence de l'art en Égypte.
plus rebelles; la mort et les confisca- Durant ces trois derniers régnes,
tions furent employées pour réduire l'histoire est muette à l'égard de l'E-
une nouvelle insurrection. Les grandes gypte. Fut-elle heureuse? On est dis-
qualités de Vespasien ne préservèrent posé à le croire. Le premier de ces
as 1* Égypte de beaucoup d'exactions; trois règnes fut celui de Titus, mais il
F empereur établit de nouveaux impôts, fut suivi de celui de Domitien.
et employa pour les percevoir des C'est dans ces temps là que le chris-
hommes indignes de sa confiance : il est tianisme jeta ses premières racines en
aussi accuse d'avoir répondu par d'o- Égypte. Saint Marc les arrosa de son
dieuses plaisanteries aux plaintes trop sang, et les patriarches de l'Église
fondées des habitants de l'Egypte. Son chrétienne d' Egypte, ou Église copte,
nom se trouve cependant sdr le por- se disent ses successeurs. Alexandrie
tique d'Esneh, sur un obélisque de fut d'abord le siège du patriarche de-
Rome, sur l'édifice au sud de l'nippo- puis saint Marc, qui a eu près de
d roi ne de Thebes. Le nom de Titus, soixante et dix successeurs; mais l'ap-
successeur de Vespasien, est plus fré- pauvrissement du nombre des chrétiens
quent encore sur les édifices qui sub- coptes a porte le patriarche à résider
sistent de nos jours en Égypte, sur un au Caire. Aucun évêque, aucun prêtre
pronaos d'Esneh, dans l'oasis de Dak- ne convoite ces fonctions : les princi-
nèh au temple de Deir-el-hadjar; enfin paux de la nation désignent trois per-
sur l'obélisque Pamphili à Rome avec sonnages parmi les plus recommanda-
le titre de divin que Domitien y donne
,
bles.Ceux qui se supposent inscrits dans
à son père et à son frère, quoiqu'il cette li>tede candidats, s'enfuient aus-
nourrit envers eux la haine la plus pro- sitôt dans le désert ; mais le pacha prête
fonde. Domitien fut leur successeur, des janissaires, fait saisir les fuvards et
et les édifices publics exécutés en Egypte les fait conduire au Caire, dans l'assem-
peudant son règne se reconnaissent blée, avec les fers aux pieds et aux
encore à son nom inscrit parmi leurs mains, dont ils ne sont délivrés qu'a-
sculptures sacrées. On le retrouve à près que l'élection est faite. A cet effet,
Phi la?, à Dendérah, et souvent à Esnèh, on écrit les noms des trois personnes
s'honorant des mêmes titres que les sur autant de billets sépares; on les
Pharaons , et souvent qualifié de ami de dépose durant trois jours consécutifs
lacon trée, en fa nt d u solei seigneu r des
I
, souS le calice pendant la messe, et
diadèmes, Ca?sar Domitien Auguste, chaque jour, après la consécration, un
aimé de Phlha etdTsis, vivant comme jeune garçon tire au hasard un de ces
le soleil, seigneur du monde, né du billets de "dessous le calice : celui des
soleil, directeur, seigneur des diadè- trois candidats dont le nom est venu
mes. L'obélisque Pamphili à Rome a deux fois pendant les trois jours est élu
été érigé en son honneur; les obélis- patriarche : titre de suprématie et d'hu-
ques de Bénévent portent aussi son milité tout à la fois, d'autorité et de
nom , et nous apprennent que Domitien privations, les moyens d'existence
fit construire dans cette ville d'Italie un étant extrêmement restreints, les de-
temple à la déesse Isis; enfin l'empe- voirs étant multipliés ; ayant pour siège
reur est figuré sur les tableaux du pro- d'honneur une simple peau de mouton ;

Digitized by Google
,

47ê L'UN
étant soumis a une abstinence conti- visitaitla Ôaule. Bientôt après H se
nuelle, et n'ayant pour tout inobilierque rendit lui-même en Éevjrte.
des plats de terre commune et des usten- Arrivé à Péluse, il fit restaurer et
siles en bois. Les commencements de embellir le monument funéraire de
cette religion remontei.t donc à Do- Pompée. Il visita toutes les parties de
niitien. l'Égypte; on frappa des monnaies de
Son successeur Nerva n'a rien laissé bronze commémorât ives de ce voyage.
dans son histoire qui interesse émi- On v voit la ville d'Alexandrie person-
nemment l' Egypte; son rèiine fut d'ail- nifiée, allant au-devant de l'empereur
leurs très-court. Il reste , au contraire qui arrive monté sur un quadrige; l'em-
sur les monuments égyptiens un grand pereur recevant les hommages de la
nombre de souvenirs du règne de Tra- ville; l'union de la ville et du prince,
jan, successeur de Nerva. Les juifs se donnant la main ; la pom|»e triom-
continuèrent â se montrer turbulents phale d'Hadrien dans Alexandrie, et
comme sous les deux règnes précédents; les sacrilices qu'il y fit aux dieux. Il est
ils luttèrent contre la force publique, représenté sur une autre de ces mé-
réussirent même à mettre en fuite le dailles voyageant sur le Nil, dans une
préfet Lupus , et Trajan se vit dans la galère dont la proue est ornée d'une
nécessité d'envoyer de Rome, avec des corne d'anondanec. D'autres monnaies
forces considérables, Martius Turbo, de ce prince portent l'effigie ou la
qui eut longtemps a lutter contre de figure rie l'impératrice Sabine, et leur
perpétuelles séditions et des guerres date est de la fin de l'an 14 et du com-
intestines, causes continues de déso- mencement de l'an 15 du règne d'Ha-
lation dans Alexandrie. L'inimitié ré- drien , compté selon la méthode égyp-
ciproque des Grecs et des juifs en était tienne, ce qui revient à la tin de l'été
toujours la source. Ils ne détournèrent de l'an 130 de l'ère chrétienne.
pas le gouverneur de l'Égypte de favo- ;Elius Spartianus raconte ce qui
riser la construction des nouveaux édi- suit : « Pendant sa navigation sur le
fices publics, ou de continuer celle Nil, Hadrien perdit son Antinous, et
des anciens. Le grand temple de Phi la il le pleura comme l'aurait fait une
porte les inscriptions de « l'empereur femme.» Antinous en effet se no}*a
César, Nerva , Trajnn , Auguste, tou- dans le Nil ; Hadrien lui fit décerner
jours vivant, aimé d'Isis; » a Ombos, des honneurs presque divins, et fonda
l'empereur prend de plus le titre de une ville en son honneur, nommée An*
Germanique et de Dacique ; son nom tinoé, construite et gouvernée selon
se lit aussi à Dendérah ; a Phiiae, il a de les usages des Grecs (voyez notre plan-
plus, sur un autre monument, les ti- che 36). Hadrien, ami des arls, laissa
tres uV soleil seigneur des deux mondes, en Egypte des traces nombreuses de
fils du soleil, seigneur des seigneurs, son godt et de la protection qu'il leur
aimé de Phtlia et d'Isis. accordait. Le prouaos du temple d'Es-
Le règne d'Hadrien (l'an 117) fut nèh; le temple au nord de cette ville;
bienfaisant pour l'Égypte; Martius les édilicesde Dendérah ; une des portes
Turbo termina la guerre des juifs; il de Mrdinet Habou â Thèbes; le sanc-
eut le rhéteur Héliodore pour succes- tuaire du temple au sud de l'hippo-
seur dans cette préfecture. L'esprit tur- drome; et l'obélisque qui est aujour-
bulent des Alexandrins remplaça les d'hui au Monte- Pincio à Rome, sont
juifs dans les enti éprises de désordre. des ouvrages de son règne; et cet
Les Égyptiens même ne furent pas obélisque porte à la fois le nom d'Ha-
toujours étrangers à ces causes de drien, celui de l'impératrice Sabine,
trouble. Un nouveau bœuf Apis fut et celui d'Antinous. A ces documents
découvert ; et les divergences d'opinion de l'histoire d'Égypte sous Hadrien,
au sujet du lieu où il devait être placé on peut en ajouter un autre non moius
occasionnèrent des séditions armées. curieux , et qui est une lettre écrite
Hadrien en fut informé pendant qu'il d'Égypte par l'empereur lui-même,

Digitized by Googl
ÉGYPTE. 4? 1

conservée, dit-on , dans les écrits de ravées sur cette statué certifient que
Phlégon son affranchi.
, i empereur et l'impératrice entendirent
Hadrien écrivait ou consul Servia- la voix harmonieuse du fils de l'Aurore.
ntis : « J'ai bien étudié, mon cher Le règne des Antonins fut tempéré
Servianus, cette Egypte que vous me pour l'Égvpte comme pour le reste de
vantiez, et je l'ai trouvée légère, in- l'empire. Néanmoins l'esprit turbulent
constante, empressée de toute espèce à l'excès des Alexandrins rendit pres-
de bruit. Ceux qtii adorent Sérapis que |>erpétuelles les séditions et les
sont chrétiens; ceux qui se disent désordres; ils assassinèrent le préfet,
les évêuufs de Christ sont aussi des et Antonio se rendit en fcgypte à la
dévots a Sérapis; il n'y a pas de chef tête d'une armée qui entra victorieuse
de synagogue juive , de pi être des chré- dans Alexandrie. Durant ce règne, la
tiens, de devins, d'aruspiees, de bai- construction ou l'agrandissement des
gneur qui n'adore Sérapis. On croit édifices religieux ne se ralentit pas.
même que lorsque le patriarche vient On voit encore parmi les sculptures
en Egypte il adore Sérapis; d'autres de la porte d'enceinte de Médinct-Ha-
disent le Christ. C'est ici une race hou, a Thèbes, la figure en pied de
d'hommes très-portée à la sédition , à l'empereur Antonin, représenté en
la vanterie , à l'injure ; la ville (Alexan- adoration devant la triade «le Thèbes
drie) est opulente, riche, productive, à droite, et devant la triade d'flermon-
et personne n'y est oisif. Il y a beau- thus à gauche , et la légende hiérogly-
coup de tisseurs de lin ; tous'prennent phique le désigne par ces mots : l'em-
et exercent une profession. Les gout- pereur Osar,Titus, .EIius,Hadrianus,
teux , les aveugles y sont occupés ; les Antoninus pius. Ce mur d'enceinte et
estropiés même n'y restent pas oisifs. les propylées de Médinet-Habou sont
Ils ont tous le même dieu , et les chré- en effet l'ouvrage d' Antonin. Son nom
tiens, et les juifs , et toutes les autres monuments de
est tres-fréquent sur les
peuplades. Pldt à Dieu que la ville en l'fcgvpte; retrouve à Dendérah,
on le
tdt mieux policée! digne toutefois, et Esnèh, Philrc, et à TOasis del Khar-
par son ensemble et par son étendue, djeh. Plusieurs inscriptions grecques
d'être la capitale de toute l'Egypte. d' Egypte datent du renne de ce prince.
Je ne lui ai rien refusé, je lui ai rendu L'une d'elles annonce que le secos et
ses anciens privilèges, j'en ai ajouté le pronaos du temple de Kasz-Zayan,
de nouveaux pour leur faire bénir le dans grande Oasis , ont été cons-
la
e
temps présent. Mais à peine en suis-je truits dans la 3 année de son règne.
sorti qu'il n'est sorte de propos qu'on Les noms des empereurs Marc- A u-
n'ait tenus sur mon fils Verus; et vous rèle et Lucius-Vérus se lisent aussi
devinerez facilement ce qu'on a pu sur quelques édifices égyptiens, no-
dire d'Antinous. Tout ce que je leur tamment sur la corniche du petit tem-
souhaite , c'est de se repaître de leurs ple de Phila?. Sous leur règne, des
poulets qu'ils fécondent d'une mnnière bandes armées troublaient la tranquil-
q'te j'aurais honte d'indiquer ici. Je lité de l'É'jypte; un homme intrépide,
vous ai envoyé des vases de couleurs nommé Isidore , secondé par un prêtre
diverses que m'a offerts le prêtre du égyptien, les conduisait, et elles ré-
temple, et que je destine expressé- pandaient partout le d( s >nlre et la
ment à vous et à ma sœur; je désire désolation. Elles attaquèrent même
que vous vous en serviez avec vos Alexandrie à force ouverte; mais Av>
conrives aux jours de fêtes. Prenez dius Cassius réussit à les vaincre et à
garde cependant que notre Africunus les exterminer. Fier de ses victoires,
n'en use trop à son aise. •»
et la fin de Marc-Aurèle approchant,
Hadrien parcourut toute l'Egypte; exeité même, dit-on , par l'impératrice
il alla voir et écouter la statue par- Faustine, Avidius se fit proclamer em-
lante de Memnon ;
l'impératrice Sabine pereur; mais il fut bientôt après mis 5
la visita aussi; et deux inscriptions mort, ainsi que son fils Métianus, gou-

Digitized by Google
475 L'UNIVERS*
verneur d'Alexandrie. La magnanimité même temps ( l'an 202) , les chrétiens
de Marc-Aurele ne put les sauver ; mais furent persécutés en vertu d'un édit
l'empereur pardonna à leurs partisans, du même souverain. Le père et des
et il fit brûler tous les actes de l'auto- disciples d'Origène y trouvèrent la
rité de ce rebelle , sa correspondance mort ;
Origène , comme chef de l'école
même, sans la lire. Arrivé à Alexan- d'Alexandrie, entama ses démêlés avec
drie, Marc-Aurèle se concilia le respect Démétrius qui en était le patriarche;
de tous par sa clémence et par sa sa- l'empire et l'Égypte en ressentirent les
gesse. Néanmoins l'état de l'tègypte cruels effets; et Aëtus et Aquila s'y
sous les Antonins ne fut pas un état succédèrent comme préfets.
de paix et de bonheur. Les douceurs Les deux fils de Septime-Sévère par-
de leurs règnes lui furent presque in- vinrent à l'empire; mais Géta fut im-
connues; I Egypte s'en priva par sa molé par son propre frère Caracalla :
propre turbulence. Le règne de Com- on trouve cependant à Esnèh , parmi
mode ne pouvait lui promettre plus de les sculptures du pronaos , les noms
bonheur; le nom de cet empereur se de ces deux souverains. Caracalla fit
retrouve cependant sur un petit tem- f>roscrire le nom de son frère dans tout
ple à Contra-La to, ainsi que sur la partie 'empire , et il ordonna que ce fut nom
postérieure du pronaos d'Esnèh. Dans effacé des monuments publics ; cet
ces mêmes circonstances , les chrétiens ordre s'exécuta en Egypte même : sur
se multipliaient, et ils obtenaient quel- le pronaos d'Esnèh le nom de Géta est
ue tolérance pour leur culie, quand martelé, mais il y est encore lisible au
'ailleurs l'antique religion égyptienne moyen des traces évidentes des signes
était encore la religion de l'État, la f)rimitivement sculptes. C'est, on doit
seule protégée, Isis et Osiris conser- e remarquer, le dernier empereur dont
vant leurs divines attributions dans le nom subsiste dans les inscriptions
l'Egypte habitée par les Grecs , les Ro- hiéroglyphiques. On en trouve encore
mains , les juifs , et les peuplades ve- la trace sur une inscription grecque
nues de toutes les parties de l'Orient. relative à l'ouverture de nouvelles car-
On ne sait rien des premiers succes- rières de granit près de Phi lac.
seurs de Commode qui puisse intéres- Du reste , le préfet ci Egypte n'avait
ser l'histoire de l'Egypte. On frappa à garde de désobéir aux édits de l'empe-
Alexandrie des monnaies à l'efligie de reur; il connaissait la fougue cruelle
Pertinax et de Tatiana sa femme; mais de son caractère. Caracalla se rendit
on n'en connaît point des chefs éphé- en Égypte, averti des epigrammes que
mères qui vinrent après lui , jusqu'à les Alexandrins débitaient contre lui;
Septime Sévère. et , à peine entré dans Alexandrie , il
Cet empereur, vainqueur de ses ri- livra la ville entière à la brutalité de
vaux , resta maître de l'empire ; Pes- ses soldats; un grand nombre de ci-
cennius Niger tenait cependant encore toyens sont égorgés dans un massacre
en Orient, et l'Egypte s'était déclarée qui dura une nuit et un jour (l'an 216).
pour lui. Alexandrie avait fait écrire Sous les règnes d'hommes tels que
sur ses portes : Niger est le maître de Macrin et Hélogabale, J'empire ne
cette ville. Septime-Sévère marcha en pouvait jouir d'aucune paix , d'aucune
personne pour la soumettre, et le peu- félicité. Les fureurs intestines redou-
ple d'Alexandrie alla au-devant de lui, blèrent d'ardeur. Le règne d'Alexan-
et s'écriant : Niger est le maître de dre-Sévère en suspendit temporaire-
cette ville, mnis tu es le maître de ment les effets ; aussi trouve-t-on son
Niger. L'empereur se contenta de ce nom dans une inscription grecque d' A n-
subterfuge; et, par une innovation tinoé qui nous annonce que le sénat
,

remarquable et contraire aux principes de cette ville, dont l'administration


établis par Auguste, il donna un séna- était toute grecque, a élevé une co-
teur pour préfet à l'Egypte, et à lonne en l'honneur de ce sage empe-
Alexandrie un sénat particulier. En reur, qu'elle qualifie de pieux, heu-

Digitized by Google
EGYPTE. 473

reu x , auguste , et à Julia Mamméa- -


chez les Égyptiens qu'une des nom-
Augusta , mère de l'empereur et des breuses preuves de leur opposition à la
invincibles armées. Les lettres et la phi- conquête romaine, et, faute de mieux,
losophie furent florissantes en Egypte ils secondaient toutes les usurpations

durant ce règne. sur l'autorité impériale. Ils s'associè-


Durant les règnes suivants, tous rent à Émilius et à Macrin; de pro-
éphémères il n'y eut de durable que
, fonds désordres, la guerre, la famine
les malheurs publics; ils naissaient et des maladies contagieuses , en furent
quelquefois de la persévérance des la conséquence; et, selon des recen-
Égyptiens dans leurs anciennes croyan- sements qui pourraient être authenti-
ces , et des efforts que faisaient les ues, le nombre des individus de l'âge
croyances nouvelles pour parvenir à la 3 e quatorze ans à quatre-vingts ans,
domination. Un prophète égyptien ex- dans la population réduite par ces
cita ses partisans contre les chrétiens; fléaux, ne dépassait pas le nombre des
et les maisons des chrétiens , déjà en individus de quarante à soixante et dix
grand nombre, furent pillées la villa : constaté dans l'ancienne population. La
d' Alexandrie en fut profondément trou- succession des petits tyrans à l'autorité
blée. De nouveaux désordres éclatèrent souveraine en Égvpte' ou sur l'empire
sous le règne de Décius (Tannée 250} ; même ajoutait a la violence de ces ca-
les chrétiens furent de nouveau persé- lamités. En l'année 209, la reine Zé-
cutes; ils se réfugièrent dans les dé- nobie favorisée par l'empereur Gallien,
,

serts de Thébaïde, et donnèrent


la s'essaya à de plus hautes destinées;
ainsi les premiers exemples de la vie elle entreprit la conquête de l'Égypte,
solitaire et monastique. Saint Denis secondée par les immenses richesses
évéque d'Alexandrie, a raconté lui- accumulées par elle et par ses sujets à
même des événements semblables, et Palmyre, devenue l'un des entrepôts
il en désigne pour auteur un archi- du commerce de l'Orient. L'Égypte,
synagoaue, un magicien ou chef de impatiente du joug romain, ne voulait
magiciens ; ce qui ferait.supposer l'asso- pas se prêter a être asservie par une
cia tion des Juifs et des Égyptiens contre nouvelle invasion, et tenta de résister
les disciples du Christ, et nous mon- à Zénobie. La reine vainquit l'armée
trerait l'autorité romaine favorisant égyptienne, s'empara d'Alexandrie, en
ces divisions qui la rendaient plus puis- fut bientôt après chassée, et y rentra
sante. de nouveau avec le secours d'une nou-
En attendant, quelques formes de velle armée amenée de Palmyre. Mais
gouvernement étaient changées en la reine, vaincue enfin par Aurélien
Egypte au gré des volontés du chef de dans sa propre capitale, servit à l'or-
l'État; il y eut un commandant en chef nement du triomphe.de l'empereur
et ensuite un comte d'Éçypte, le préfet (l'année 272). Bientôt après, un com-
subsistant toujours; mais ces créations mercant d'Alexandrie se déclara le chef
nouvelles devaient, par la suite, por- de l'Egypte, se vantant de pouvoir en-
ter à son autorité des atteintes qu'il est tretenir une armée avec les seuls béné-
difficile d'apprécier aujourd'hui. Du- fices de sa fabrique de papyrus. Son
rant les mêmes temps, la fureur reli- influence s'étendit sur toute l'Égypte;
gieuse des dévots à Isis et à Osiris ne les Blemmyes et les Arabes étaient
se ralentissait pas; on en a recueilli la étroitement liés avec lui par les rela-
preuve clans les inscriptions encore tions de commerce. Firmus prit donc
subsistantes, datées du règne des Gor- la pourpre, le titre d* Auguste, et
dien et des Philippe, et qui rappellent frappa des monnaies a son effigie : les
les actes d'adoration aux antiques di- Alexandrins le secondèrent; il les in-
vinités du pays, accomplis par des fa- surgeait au nom et par l'espoir de la
milles égyptiennes dans les temples de liberté; mais il se défeudit en vain dans
l'Égypte et dans ceux de la Nubie égyp- trois batailles, il fut vainc*, pris et
tienne. Ce sentiment religieux n'était mis à mort : l'Égypte rentra de nou-

Digitized by Go
474 L'UMVEftS.
eau sous les ordres de l'empereur. des sentiments plus humains, quand
Aurélius Probus y commanda en son son autorité fut partout reconnue,
nom, et il tacha de réparer les effets Dioctétien s'occupa du rétablissement
des dernières catastrophes, en rétablis- de l'ordre et des lois en Êcypte. Il ft
sant les édifices publics, et assurant [a un traité avec les Blemmyês, et leur
navigation du I\il par des travaux exé- céda une grande étendue de territoire
cutés par l'armée. Mais la haute \ pte
t au midi de Syène et de la première ca-
n'était pas encore pacifiée quand Auré- taracte; il leur promit une >olde à la

lien, et Tacite son successeur, furent condition qu'ils défendraient la fron-


assassines. Aurélius Probus prit la cou- tière de l'Égypte. Mais les persécutions
ronne impériale, réduisit la haute contre les chrétiens recommencèrent,
Égvpte a obéissance, punit exemplai-
I ?indique une certaine communauté d'in-
rement les villes deCoptoi et de Ptolé- ortime eût ralenti les haines mutuelles
maïs, et donna le commandement de que nourrissaient chrét ens et les
les
l'Orient à l'un «le ses généraux, Sextus sectateurs des croyances opposées , rap-
Julius Saturninus, originaire de la prochés, pour ainsi dire, par leur op-
Gaule. Aussitôt que Probus eut quitté position commune à l'autorité ro-
l'Egypte, Saturninus se proclama ou maine : on vit des dévots égyptiens
fut proclamé empereur par le peuple sauver les dévots chrétiens qui se con-
d'Alexandrie; mais il périt bientôt fiaient à leur foi. Cependant les dis-
après, laissant l' Egypte tout entière sions par les croyances religieuses s'en-
Soumise à l'autorité de l'empereur. venimaient par les discussions et les
Néanmoins Saturninus eut un succes- écrits des hommes instruits des dent
seur dans Achillee, préfet de l*Égypte. opinions; les supplices infligés au nom
Dioctétien et Maximien étaient par- de l'autorité im; ériale n'arrêtèrent pai
venus au trône, et l'Egypte, avec le les progrès du christianisme. Sur ces
reste de l'Orient, était échue au pre- mêmes entrefaites, et quand de nou-
mier de ces deux empereurs associés au velles carrières de granit furent ou-
trône. Dioctétien entreprit de réduire vertes à Syène, on en tira une colonne
l'Egypte, plaça le siège devant Alexan- de très-grandes proportions qu'on éri-
drie, coupa lès canaux du Nil qui ap- gea à Alexandrie en l'honneur de Dio-
provisionnaient cette immense,
ville ctétien, comme le nrouve l'inscription
et s'en rendit maître aprèsune tran- grecque tracée sur le piédestal de cette
chée ouverte pendant huit mois. Rien colonne c'est celle qu'on appelle vul-
:

n'égala jamais la cruauté du vain- gairement colonne de Pompée [fil. 84}.


queur : la ville fut soumise au fer et au Toutefois, le nouveau partage de l'em-
feu, ses habitants furent Inrés à la pire fait nar Dioclétien affaiblit de plus
fureur de la soldatesque , toutes les pro- en plus l'autorité souverainetés chefs
priétés au pillage et à la destruction. indépendants se montraient partout;
Un auteur chrétien raconte que Dio- les guerres intestines, les guerres étran-
cletien avait donné Tordre à ses soldats gères s'ajoutaient à toutes les autres
de ne faire cesser le carnage que lors- calamités, et les empereurs passaient
que son cheval aurait du sang jusqu'aux aussi sur le trône comme une autre
genoux. Heureusement, ajoute l'histo- sorte de calamité ajoutée à tant d'au-
rien, le cheval s'abattit, ses genoux tres. Ainsi s'écoulèrent les années de-
furent teints de sang et le carnage puis Dioclétien jusqu'à Constantin.
cessa. C'est du règne de Dioclétien que Celui-ci transport.» le siège de l'empire
date l'ère de son nom qui fut établie en à Byzance, qu'il nomma
Constautino-
Egypte, et qu'on appelle aussi l'ère des pie; modifia sensiblement le gouver-
il

martyrs : elle commença le 13 juin de nement de l'Égypte, comme il avait


l'un 284 de. l'ère chrétienne. moddle par ce grand acte de polit que
La victoire de Dioctétien sur Achillée le gouvernement de Rome et de l'em-
fut comiiîh une seconde conquête de pire. Les usages et le climat de l'O-
1 Egypte par l'aigle romaine. Reveuu à rient eurent la plus grande influence

Digitized by Google
ÉOYPTK 475

Mf cê$ changements. Le préfet du et réduit à se justifier devant un con-


prétoire de l'Orient avait lÉgvpte dans cile qui le releva de ces accusations
les attributions, mais ce préfet n'avait (Tannée 340). Mais le temps vint où
plus le commandement des troupes : ce ces dissensions dogmatiques dégénérè-
comm uviemeut appartenait à une des rent en anarchie, le peuple et l'armée
personnes placées auprès de l'empe- ayant été admis et même appelés à
y
reur. L'Égypte était une des provinces prendre part. Aussi l'éptscopat de Gré-
frontières ;* un eomte était chargé de goire le Cappadocien fui-il une suite
l'autorité sur ces frontières; les con- de calamités pour l'Égypte Grégoire :

tributions qu'on levait étaient parta- poursuivit pendant cinq années entières
gées entre le trésor public et le lise ou les partisans de saint Athanase. Les
trésor du prince; le préfet augustal doctrines de ce prélat furent condam-
n'avait presque plus a s'occuper que nées par le concile de Milan (en l'année
des travaux du Nil et du transport des tSI), et l'empereur Constance sévit
blés à Constantiuople. Les présidents contre les condamnés. L'Égypte devint
des provinces contrariaient plutôt qu'ils bientôt après la proie de tous les délé-
ne secondaient son autorité le prési-
: gués de l'empereur, et les chrétiens,
dent tie la Thébaïde fut bientôt l'égal après avoir échappé aux fureurs des
du préfet. On poussa l'esprit d'innova- païens, succombaient sous les coups
tion jusqu'à changer le nom des prin- de leurs propres frères on s'égorgeait
:

cipales contrée; l'Heptanomide fut ap- déjà pour de subtiles doctrines.


pelée Arcadie> d'Arcadius, fils de Un nouvel évéque fut envoyé par
Thêodose, et la partie orientale de la l'empereur; cet évéque se nommait
basse Egypte reçut le nom à\4ugus- George, et telle fut l'autorité dont il
lamnique; on multiplia ensuite le était investi , qu'il réussit à faire établir
nombre des provinces aûn de les gou- une taxe sur chaque maison d'Alexan-
verner plus facilement; mais on ne fit drie, parce que la ville, rebâtie par
que multiplier les movens d'exaction, Hadrien aux dépens du fisc, apparte-
et par la les motifs de mécontentement nait, disait- il, aux Césars. Cet évéque
général. se livra en même temps à de lucratives
Les scissions éclataient en même spéculations sur le salpêtre (le natron
temps dans l'Église chrétienne, et vraisemblablement) et sur les manu-
Arius, qui ne fut point élu à l'evéché factures de papyrus. Les opprimés n'a-
d'Alexandrie, fonda une doctrine qui, vaient pour consolation que la faculté
sous le nom d'Ariai.isme, troubla long- de consulter l'oracle d'Abvdos sur la
tem s la paix de l'Église; et, quand un durée probable de la vie de l'empereur;
concile fut assemble à Nicée (l'an 325) les plus curieux furent exilés et con-
pour examiner cette doctrine, près de damnés à mort.
cent évoques de l'Égypte ou de la Libye Le règne de Julien fut plus favorable
s'y t ornèrent réunis; mais l'état de f»our les Égypt ens demeurés fidèles à
confusion dans les affaires de l'Égypte 'ancien culte maternel, et le préfet
ne cessa pas pour cela, et quoique la d'Égypte annonça comme une heu-
conversion de Constantin eût donné reuse nouvelle, à l'empereur, qu'on ve-
plus d'influence au christianisme. Les nait, après de longues recherches, de
distributions publiques du blé étaient découvrir un nouveau bœuf Apis. La
presque devenues dépendantes de l'au- rel gion égyptienne était ouvertement
tonte des évéques, et elles 1rs assimi- favorisée par J ulien , et le christianisme
laient en quelque sorte aux préfets en ressentit une réaction oui lui fut
civils; mais les evéuues n'échappaient funeste. Julien témoignait de la dévo-
point à la peine d un tel privilège, tion pour Sérapis, et c'est par ce dieu
l'euvie et l'injustice les accusaient, et 2u'il jura, en écrivant au préfet Ec-
quelque part. alité de leur part envers ice, que si Athanase, qui était rentré
leurs fidèles put exciter aussi de justes à Alexandrie, n'en sortait pas sans
plaintes. Saint Athanase fut accusé, délai , les troupes aux ordres du préfet

Digitized by Google
476 L'UNIVERS.
payeraient une amende de cent livres voulut et prescrivit que la sentence de
d'or. l'évéque, en matière temporelle, fût
Durant lesrègnes suivants, toutes exécutée sans appel, comme l'étaient
les affairesde rflçypte ont la couleur les sentences du préfet du prétoire. Les
que devait leur donner la suite des dis- débris des temples égyptiens servaient
sensions religieuses qui agitaient cette à l'édification des édifices chrétiens;
contrée depuis tant de cruelles années quelquefois de simples bariigeonnages
êt qui se compliquaient par les faveurs suffisaient à cette métamorphose, et il

que les empereurs, qui se succédaient existe encore des chapelles d'Ammon
rapidement sur le trône, accordaient ou d'Osiris qui sont devenues des cha-
tantôt aux Ariens, tantôt aux catholi- pelles de la foi chrétienne, et ont ete
ques; les païens même eurent leur consacrées à saint George ou à d'au-
tour avec leur Sérapis, la seule des tres saints, au moyen d'une couche de
antiques divinités dont ils paraissent chaux passée sur lès anciennes sculp-
conserver encore le souvenir, le nom tures égyptiennes, et de la figure ou
et le culte. Du reste, les patriarches saint misérablement peinte sur le re-
chrétiens n'épargnaient pas les païens, plâtrage. Toutes les institutions deJ'E-
et si un pré et persécutait les moines gvpte prirent ain i les couleurs du
et les solitaires de la Thébaïde, un christianisme; le nilomètrc d'Alexan-
évéque chassait les prêtres de leur drie fut établi dans une église; les édi-
temple de Sérapis et taisait démolir le fices de Canope servirent au monastère,
temple de Canope. qui conserva l'antique droit d'asile que
Le règne de Théodose (379 à 395) les Egyptiens y avaient institué, et les
apporta quelques adoucissements à tant moines de Syrie et d'Egypte parcouru-
de maux divers; cependant [e nouvel rent les villes, dont jusqu'ici Centrée
empereur ordonnait de faire fermer les leur avait été interdite. On rapporte à
temples des dieux égyptiens , et l'Égy pte la même époque la cessation de l'usage
demandait un roi" pour elle seule; des anciennes écritures égyptiennes;
l'empereur lui envoyait des lois sévères elles ne furent plus pratiquées que par

Sour maintenir les* habitants dans le les Égyptiens encore fidèles a 1 ancien
evoir, en même temps qu'une certaine culte, et dont la race s'éteignit pour
tolérance, commandée par la nécessité, toujours au septième siècle Je l'ère
laissait quelque relâche aux prêtres chrétienne, ne laissant pour héritiers
d'Osiris et de Sérapis. Un nouvel évé- de leur science que des affiliés dans des
que, Théophile, patriarche d'Alexan- sociétés secrètes, peu fidèles eux-mêmes
drie, dominé d'un zèle ardenf, mais aux anciennes doctrines.
peu éclairé, s'alarma de cette tolé- Des désordres du Bas-Empire, qui
rance; il obtint un nouvel édit de l'em- affligèrent toutes les possessions impé-
pereur, qui ordonna la destruction des riales en Orient et en Occident, l'E-
temples égyptiens, et l'exécution en fut gypte en eut sa bonne part. Ce qui
conliée à Théophile seul , le préfet et le domine tous les faits de cette époque
comte étant, à cet effet, mis sous ses de transmutations politiques et reli-
ordres. L'autorité de Théophile se- gieuses, c'est le christianisme s'élevant
conda son zèle fanatique; les autres dominateur sur toutes les ancienues
évéques d'Egypte se livrèrent à la même croyances, s'insinuant peu à peu dans
opération dans leurs ressorts, et, du l'action de l'autorité civile, s'en empa-
même coup, l'ancienne religion de rant successivement, se substituant à
l'Egypte était plus persécutée, et les elle, et la faisant agir
enfin avec
évéques chrétiens obtenaient plus d'in- toute l'ardeur que donne conviction
la
fluence et d'autorité. Déjà, depuis de travailler pour la félicité publique.
Constantin, la police des mœurs leur Mais ce qui n'est pas moins digne de
avait été confiée; il fut ordonné aux remarque, c'est la persévérance des
magistrats de faire exécuter leurs sen- dévots égyptiens dans leur culte malgré
tences. En l'année 408, l'empereur les persécutions, l'exil et la mort: il

Digitized by Google
EGYPTE. 477
est juste de dire aussi que l'autorité rencontrant le préfet de l'empereur,
publique se montra temporisante, et l'accablèrent de pierres et l'obligèrent
attendit du temps ce que le temps à prendre la fuite ainsi que les hommes
seul pouvait réaliser. de sa suite, la plupart couverts de bles-
Après le portage de l'empire entre sures et de sang. Mais le peuple vola
Areadius et Honorius, lils de Théo- au secours du préfet; le meneur de la
dose, les désordres ne cessèrent pas, sédition fut arrêté et condamné; il ex-
parce que la tyrannie du Use entraînait pira sous les verges des licteurs, mais
avec ses déprédations toutes les autres saint Cyrille prononça publiquement
tyrannies; on avait beau l'aire de son éloge et l'honora du titre de
bonnes lois pour la police de l'Egypte, martyr.
l'administration des canaux du Nil; il Alors brillait de tout l'éclat d'une
fallait d'abord que la population frit rare beauté et d'un grand talent Hypa-
heureuse et par conséquent paisible, et thia, fille du mathématicien Theon,
elle ne pouvait être m l'un ni l'autre qui enseigna publiquement Aristote et
livrée comme elle Tétait aux exactions Platon aux écoles d'Athènes et d'A-
de toute nature une loi ordonnait de
: lexandrie, et sa vertu ne le cédait pas
briller vif quiconque serait convaincu à sa science. Les affidés de saint
d'avoir percé une des digues du Nil; Cyrille, les troupes auxiliaires fournies
mais, en même temps, l'empereur dé- par les corporations religieuses , s'at-
pouillait les habitants de leurs terres troupèrent un jour auprès du char
pour se faire des domaines impériaux. d'Mypathia, l'en arrachèrent de force,
Aux premières années du cinquième la mirent en pièces et jetèrent ses lam-
siècle, de grands esprits ravivaient par beaux tlans les flammes. Les parabo-
leurs écrits l'ardeur des controverses lans, séïdes de saint Cyrille, furent
religieuses. Alors luttaient entre eux les auteurs de cet horrible assassinat,
Théophile, saint Jean Chrysostôme, conduits par Pierre, lecteur de l'Église
*a\nt Épiphane, saint Jérôme , au sujet d'Alexandrie, et ce meurtre ne fut pas
des écrits d'Origène. Les théologiens vengé les lois et l'empereur restèrent
:

de Constantinopte se battaient contre muets; seulement, Jl fut défendu aux


ceux d'Alexandrie; on en venait aux clercs de prendre part aux affaires pu-
mains; des morts restaient sur le bliques; le nombre des paral>olans fut
champ de bataille; d'immenses ri- limité à cinq cents, et le préfet fut
chesses étaient dépensées dans ces dé- revêtu du droit de les nommer; con-
plorables contestations. cesMons de pure circonstance! Deux
Le pouvoir des evéques s'accroissait années après, la nomination de ces
néanmoins, et les empereurs y contri- clercs-soldats, capables de toutes les
buaient par leur condescendance pour violences et de tous les excès, fut
ces officiers ecclésiastiques. Les cor- rendue aux évéques (Tan 418).
porations qui se formaient sous leur Pour les temps postérieurs à l'épis-
protection étaient de puissants auxi- copat de Cyrille, le tableau de l'état de
liaires de leurs entreprises, et contre- 1É-typte rr*est pas moins affligeant; la
balançaient l'autorité du préfet et des vénalité était l'âme des conseils de
troupes à ses ordres. La jalousie écla- l'empereur, le brigandage était légale-
tait en proportion de ces avantages ment organisé dans les provinces; les
parmi les autres nations ou les autres querelles religieuses ajoutaient leur
croyances établies en Egypte le sang
: venin et leurs douleurs a tant d'autres
coulait dans Alexandrie, par suite de plaies publiques; Nestorius attaquait
combats et de guet-apens entre les saint Cyrilje et se faisait condamner au
chrétiens et les juifs, a cause d'un dan- concile d'Knhese (431); l'Église d'A-
seur du théâtre. Saint Cyrille chassa lexandrie s'endettait de quinze cents
les juifs de la ville, secondé par les livres d'or pour acheter ce jugement.
moines du désert , qui étaient accourus Avec successeur de saint Cyrille, la
le
comme troupes auxiliaires, et qui, chrétienté devenait sectaire d'fcutichès

Digitized by Google
471 L'UNIVERS.
en Égypte et était destinée à se main*
, sur la malheureuse Egypte : les M
usqu*à nos jours; le concile
tenirtellejusc 3ues ravageaient la Libye et une pai
d'Éphèse/par sa turbulence, recevait u territoire égyptien"; une
le tare de brigandage d'Éphese; Dio- traitants insatiables, a la té*te
dore, patriarche d'Alexandrie, défen- étaient les parents de Marin,
dait publiquement le ravisseur de la de l'empereur, exploita le pays;
femme d'un honorable sénateur; l'em- affreuse sécheresse se déclara ; les sai>
pereur Marcien déposait le patriarche; te relies, plus affreuses encore, rava-
et, pendant que ces affreux désordres gèrent la Palestine, et l'Egypte fui
ruinaient les affaires publiques à l'ul- chargée de payer les impôts que le fisc
térieur, les Sarrasins se jetaient sur la ne pouvait pas lever dans la Palestine;
Syrie, et les Blemmyes faisaient avec enun une famine et une peste su r\ ri- ;

succès de nouvelles incursions armées rent et durèrent jusqu'à la fin de ce


dans la haute Egypte : f ennemi exté- règne : et des séditions religieuses y
rieur venait ajouter par ses conquêtes ajout n-t nt leur cruel concours.
à cet ensemble de germes de desordre L avènement de Justin ne ralentit
et de destruction. Les Blêmîm es furent pas les effets de tant de maux ; il ou-
repousses, mais ils demeurèrent tou- vrit la voie à de nouvelles réactions;
jours menaçants et prêts à toute en- Justin, catholique déclaré, protegait
treprise contre l'Egypte, ouvertement les antagonistes d*£«-
La rapide succession des empereurs tychès; les émeutes et le meurtre en
sur le trône de Constantinople, et les furent toujours la suite, et cette ardeur
variations plus rapides encore qui en des disputes, trait carat téristique des
résultaient dans les principes de l'ad- Alexandrins, ne permet pas de leur
ministration publique à l'égard de i'eiu- refuser cette vivacité d'esprit qui est
I)ire
d'Orient en général; d'autre part, trop justiliee par leurs propres mal-
es inextinguibles querelles sans eesse heurs, et par eette particularité d'un
renaissantes à Alexandrie entre les édit de l'empereur Justin , qui , bannis-
partisans et les antagonistes des doc- sant les comédiens et les danseurs de
trines d'Eutychès, querelles soutenues toutes les \iiles d'Orient, en excepta
à main armée, révélaient assez haut la ville d'Alexandrie; et cependant
le malheureux état de l'Égypte durant c'était au théâtre que prenaient nais-
la seconde moitié du cinquième siècle. sance les disputes et les révoltes
Les empereurs s'efforçaient en vain de En nommant les empereurs succes-
ramener tous les Orientaux à la même seurs de Justin, et en rappelant la
croyance; leurs décrets d'union ne fai- plupart de leurs actions, on sera trop
saient que rendre plus profondes les souvent autorisé à les considérer
divisions et les haines; nulle part on comme ayant oublié leur autorite sou-
ne reconnut l'empereur pour l'arbitre veraine pour descendre au rôle abject
et le juçe de la foi : le nombre des sec- de chefs de s h tes religieuses.
tes différentes de l'hérésie des Acé- Durant le règne de Justinien, les
phales eutvehéens ne s'élevait pas à entreprises des Perses dans le voisi-
moins de dix Que dire ensuite des six
. nage de l'Égvpte, et les alliances de
prélats qualifies d'kéréttque* oui occu- l'empereur d'Orient avec le roi d'Éthio-
pèrent le siège d'Alex;«ndrie depuis le pie dans l'intention d'attirer à Alexan-
règne de Zenon, et de l'edt par lequel drie le commerce de la soie ; le cltoix
cet empereur avait porté à cinq cents de Narsès pour s'opposer en Libye
les cinquante livres d'or que l'Egypte aux incursions des Sarrasins et des
avait payées jusque-là annuellement? Blemmyes, font quelque diversion à
Son successeur Anastase perfec- la destruction du temple d'Isis à Pliilx
tionna la levée des impôts, c'est-à-dire par ordre du même empereur, aux
les rendit plus productifs pour le lise, violences exercées par son ordre contre
plus accablants pour le peuple. Des les prêtres de la déesse , à l'enlèvement
nouvelles fondirent à foisU de sa statue envoyée à Constautinople,

Digitized by Google
PTF.. 4îd

à la sévérité du forçant à s'exiler


fisc citoyen égyptien ; et cette qualification
les citoyens qui ne pouvaient satisfaire était comine un mot de ralliement
à des taxes exorbitantes, à lu suppres- contre toute autorité étrangère. Ces
sion de l'école de droit existante à Jacobites ou Coptes avaient conservé
Alexandrie, à l'incendie de la ville, Pantique langue nationale; leurs livres
ordonnée par Rarsès, parce que les liturgiques étaient écrits dans ret
corps de métiers les nobles et le peu-
, idiome, autre élément d'agrégation
ple refusaient de reconnaître pour qui devait puissamment fortifier leur
évêque Théodose protégé par Theo- union, et les séparer plus profondé-
dora , d'abord comédienne, et a ors ment des autres associations qui par-
impératrice et chef de secte. Cette pro- laient et écrivaient les langues grecque,
tection ne défendit cependant pas Théo- hébraïque ou syriaque , idiomes con-
dose ; il fut chassé , remplacé par Zule, sacrés |:ar la religion et l'usage. La
Qui fut chassé à sou tour, qui proposa population égyptienne par l'effet iné-
de paver quatorze cents marcs d'or sa vitable du temps, se retrouvait ainsi
réintégration , et qui eut pour succes- maîtresse de sou propre sol , et pouvait
seur Apollinaire, l'un des généraux y dominer par le nombre , la force et la
de Justiiiien, évéuue guerrier, qui en- richesse : elle pouvait facilement re-
tra à Alexandrie dans un appareil tout prendre son indépendance, et la con-
militaire; et, ôtant tout a coup son quérir sur la freie et caduque exis-
habit de chef des troupes, se montra tence de l'empire d'Orient: mais un
aussitôt revêtu de la robe de patriarche. autre maître survint, jeune et vigou-
Hué, assailli par la multitude, il la lit reux , qui déjà remplissait l'Orient Je
châtier par ses soldats, et se vengea ses succès , et qui priva pour longtemps
par la mort d'un grand nombre de l' Égypte des avantages de la liberté.

chrétiens égorges par ses satellites. Les Perses conquirent la Syrie (an
Justin II (Pan 56>), parvenu au trône, 614) : les fugitifs se rendirent à Alexan-
envoya son propre neveu comme pré- drie; et le patriarche, possesseur de
fet eu Égypte ; il le fit bientôt après sommes immenses perçues sur la piété
mettre à mort, soupçonné de conspira- des fidèles, possédait en outre quatre
tion. mille livres d'or, trouvées dans le tré-
Sous Tibère Constantin, la secte sor épiscopal lors de son exaltation;
des Jacobites s'établit définitivement, trésor dont l'origine remontait à la
destinée à survivre à toutes les autres spoliation des riches temples de l'E-
et à constituer l'Église réelle des chré- gypte égyptienne. Il envoya au pa-
tiens d'Égypte, qui subsiste encore de triarche île Jérusalem , qui manquait
nos jours/ de tout, mille pièces d'or, mille sacs
Son successeur Maurice rétablit sur de froment, mille sacs de légumes
le trône le roi de Perse qui devait , peu mille livres de fer, millf caisses de
d'années après, s'emparer de l'Egypte. poissons secs, mille vaisseaux de vin,
Porté sur le trône par le succès de et mille ouvriers. IMa s, deux années
;

ses crimes , Phncas rend un édit qui après , Perses s'emparèrent d'A-
les
exclut les Égyptiens des honneurs et lexandrie , secondés peut-être par les
des charges de l'État. Une sédition en juifs toujours secourables à ceux qui
fut la conséquence; mais l'empereur les payaient, et peut-être par les
fit baptiser par force tous les juifs Contes*, qui pensaient à se débarrasser
d'Alexandrie. d a nord de l'antique domination des
Héraclius lui. succéda sans rien di- Romains. Mais les deux peuples étran-
minuer de sa rigueur contre les juifs; gers à l'Égypte devaient l'avoir quel-
la secte jncobite était animée de l'es- que temps encore en partage.
prit égyptien , éminemment opposé à Néanmoins un Copte d'une noble
l'autorité romaine , et il servait de origine, et l'un des plus riches ci-
lien à toutes les résistances. Le Jaco- toyens , fut chargé du gouvernement
bite fut regardé comme le véritable de l'Égvpte : il se nommait Makaukas;

Digitized by Google
4*0 L'UNIVERS.
et , s'il était de la destinée de l'empire en Tannée 641 , et avec elle le reste de
de préparer lui-même la |>erte de cette TÉgypte devint du vainqueur.
la proie
province, rien ne pouvait mieux con- Reprise par les Grecs , la ville tomba
courir à ce résultat que de confier de nouveau au pouvoir des Arabes. Ce
FÉgvpte , dans ces circonstances , à un fut en vain que Constant II, fils de
Égyptien puissant parmi ses compa- Constantin, envoya en Egypte une
triotes. Ses entreprises ne réussirent flotte etune armée pour rétablir l'au-
pas d'abord ; mais Makaukas fut un torité impériale dans Alexandrie ; à la
des instruments de la nouvelle révo- vue de la flotte , les Grecs qui se trou-
lution qui s'opéra en Égypte. Vers vaient dans la ville prirent les armes
l'an 630 , le patriarche George mourut et en chassèrent les Arabes. Amrou
et fut remplacé par un prêtre nommé avait été remplacé par Abdallah; les
Cyrus, sectateur du monothélisme Coptes redemandèrent Amrou, comme
homme d'ailleurs inquiet et brouillon. seul capable de les défendre : ils avaient
Le patriarche des Jacobrtes fut cons- un pressant intérêt à ne pas retom-
tamment son rival , et ses brebis n'en ber dans les mains des Grecs. Amrou
furent pas moins portées à la rél>el- revint; Makaukas le reçut avec joie,
lion. Cyrus lia des intelligences secrètes réunit à l'armée arabe une multitude
avec Omar . le lieutenant de Mahomet ; de Coptes ; et les Arabes et les Coptes,
il avait pour but dVIoigner ce calife de musulmans et chrétiens alliés, atta-
1'Êgypte au moyen d'un tribut annuel quèrent Alexandrie, l'enlevèrent, en
dont Makaukas fournit le premier démolirent les fortiUcations , et l'isla-
payement envoyé à Médine. Héraclius misme s'établit souverainement en
s'indignait de telles menées. Égypte, où il domine encore par l'effet
L'empereur ne trouva d'autre expé- des mémorables victoires d'Amrou , se-
dient contre les malheurs qui le mena- condé par les Égyptiens qui pensaient
çaient , que celui de donner à ce même à rendre quelque indépendance à leur
Cyrus l'autorité suprême en Égypte. patrie, et ne lui donnèrent qu'un nou-
Makaukas y conservait son pouvoir, veau maître.
mais secondaire , étant à la tête de la L'occupation de TÉgypte entière par
population copte; Benjamin, patriar- les Arabes marque la lin de la tiche
che copte, ne naissait pas moins l'em- que je m'étais imposée. Elle embrasse
pire: Cyrus, Makaukas et Benjamin tous les temps historiques anciens, et
étaient, dans leur coeur, les allies des s'étend jusqu'à l'époque où le mélange
Arabes qui devaient les délivrer du confus, opéré par la main du hasard,
joug des Romains. de toutes les doctrines de la philoso-
Àmrou battit les troupes de r'em- phie ancienne , donna naissance à un
pereur, s'avança triomphant en Egypte, monde nouveau destiné , dans notre
et s'empara de la ville de Mesràh où Occident, à survivre à tous les éta-
Makaukas commandait. De ce lieu blissements du monde ancien , et à
Amrou lieutenant d'Omar, s'avança
, Rome elle-même, qui , concentrant en
vers Alexandrie : la population accou- soi tous les temps antérieurs, devait
rait fournissant des vivres , témoignant enfanter pour les temps à venir le type
toute sa joie, proclamant sa défec- de l'unité sociale qui est le véhicule et
tion. Les Grecs, iidèles à eux-mêmes la vie même de la civilisation moderne.
et abandonnés par les Égyptiens , ré- Notre planche 92 est un modèle de
sistèrent en desespérés. Ils subirent l'architecture arabe en Égypte; c'est

les horreurs d'un siège de quatorze une des principales portes de la ville

mois dans Alexandrie, qui fut prise du Kaire.

Digitized by Google
Google
Digitized by Google
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS L'ÉGYPTE.

A
Abdallatif, écrivain arabe, donne une A m ni on- R a, à tète de bélier, grand dieu
idée de la grandeur et des ruines de Mem- de l'Kgypte représente dans dei sculptures
phis 387
,
— a88 a. du temple d'Pm-Rey <la, 17 b.
Abraham, époque et cause de son vovage Année civile : les Égyptiens l'avaient faite
en 1gx pte comment, a\ec Ap.tr, son épouse,
;
sciemment plus courte que Tannée solaire^
il en est renvoyé par le roi, 3C)3 h, ?<)4 âT> a. (Y. l>iot).
Abyssinie; traita caractérisques des Abys- Auubis, quel était son emblème ordinaire,
sins, 0,7 a, h. 36oa. —
(V. aussi les articles Miuos, Reli-
Albuquerque, Portugais, veut ruiner l'É- gion.)
pypte en détournant le cours du Nil, m b. Apis (le bœuf) : un promenoir était cons-
Alexandre le Grand, arrive à l'oasis truit pour lui auprès du temple de Phtba
d" A ininnn, et y consulte l'oracle de Jupiter, à Merophis, 36S a (v. aussi les articles
;

t5 b , iC a; il enlève PÉgypte aux Perses, Miuos, Religion.) Cambyse le frappe de son


Y fonde Alexandrie et y laisse (lléomène poignard, 377 b; le culte d'Apis est réglé
pour gouverneur, 389 b, 3go a; son corps par le roi Choiis, 278 a; sous l'empereur
y est transporté, 3o-a a; spoliation de son Julien, on découvre un nouveau bœuf Apis,
tombeau par un des rois Lagides, 449 a, b. 475 b.
Alexandrie; les membres de la classe sa- Arislote a décrit le premier l'art de faire
cerdotale dexaient tons y foire chaque an » éclore les poulets dans des fours, igf» ».
née un voyage par eau, ng b — —
91 aTXe Aisinoé, nom donné à plusieurs xillcs,
/tltore, èle\e dans l'île de Pliai os, dexait ta^ leur situation. 43a b.
éditer la naxigalion dans le voisinage du Arts et métiers, industrie. V. Classe po-
port de la xille; description de cet édifice^ pulaire.
a l'imitation duquel un autre a été cons- .
Astrologie, astronomie. Parmi les pein -
truit par un empereur romain. >o'), 410; tures du tombeau d'un des Rbamsès, on
iMoléniéc-.Soter, fondateur de Yécole dÂ- reconnaît un tableau des conslellations~ët
h\taridrie , savants qui ont illu»lié celle de leurs influences, 349 b, 35ia; Ai istar-
école , causes qui en ont amené la ruine, quç soutient lv mouvement de la terre, 410,
4io a —
41 1 a, 4^0. * l>, 4»7 I». 4? H .1, a, h; date d'une éclipse de lune mentionnée

466 a, b; Alexandrie, premier séjour des par Polyue, 4aa a piusieui s autres sont ob -
;

|>alriarcbes de l'Église chrétienne d'Kgvpte, servées par Hipparque, 437 b, 428 a. Voy.
4'><) b; l'empereur Claude donne des encou^ les articles lîiot,Calendrier, Champullion
ragemenls a l'école d'Alexandrie, ;<>S a ; le jrtn.e Clavse sacerdotale, lonrier, Le^
,

Caracalla punit cruellement les épigrammcs lionne. Sinus, Timocharis.


débitées contre lui par h^ Ah xandi inT, Atliénè , Minerve, la déesse Nèith des
4>a b; Perses s'emparent d'Alexandrie
les Égyptiens, aS4 b —
a55 b.
l'an tit m' de 1ère chrétienne, 7 > a; Tes f
Auguste (l'empereur), et ses premiers suc -
GpBCl v soutiennent un lOOg Map Contre cesseurs : leur politique et leurs précau -
Ainroti1, chef des Arabes, piise de la xillc tions a l'égard de rÉgypte, Sna, ;t>5 b —
et soumission du rote
- de I Égypte, 4S0 a, 407 a ; i ta font tran.spui ter à Rome plu -
b. (V. Alexandre^ sieurs obélisques, 7» a. b; Alexandre Sc-

31* Livraison. (Égvpts.)

d by Google
•182 TABLE DES MATIERES.
vère et Diocîélien veulent priver les Égyp- de son atelier monétaire, a33 b; Auçu»"
tiens de quelques-uns de leurs livres, i33 h ; abolit l'usage de l'année vague des Egyp-
1rs noms de plusieurs empereurs romains tiens, et leur impose l'année fixe; delà
se trouvent sur les sculptures d'un temple 1ère d'Auguste, a3na,b; dans un |ietit
d'Esneh, 160 b; Germanicus reçoit des temple de Thèbes , les empereurs Hadrien
prêtres les plus âgés l'interprétation de si- et Othon ou ses successems sont rrpn-sea-

gnes hiéroglyphique* sur la puissance mili- tés faisant des offrandes aux divinités égyp-
taire de l'ancienne Egypte, 16a b, i6i a ; tiennes, a5o a —
a5t a; Auguste, <lâh>
une statue est élevée par les habitants de gula Trajan, continuent, sans la terminer,
,

Busirisà Balbiitus, préfet romain, pour quel l'édification d'un temple dans la Nubie,
bienfait, 188 b; Diocletien prive lÉgyple 3ia a.

B
Bacchus : ses principaux emblèmes sont Bérénice, nom donné à quatre villes, leur
figurés auprès d'Osiris, 1*7 a. situation, 43a a, b.
Bateleurs du Kaire : Us emploient dans Bichir, poisson du Nil, d'une forme sin-
leurs tours le lézard nommé tuftinambis du gulière, 1 S b.

désert, et la vipère hajé; forment une cor- Biot , cité sur les notions astronomiques
poration qui rappelle les aneiens psylles\ auxquelles sont armés les Égyptien*, sur
sont appelés pour purger de serpents les le rapport de leur année vague à l'année
habitations, animent les fêles du Kaire par vraie, sur la répartition des emblèmes in-
leur» tours ;
quelques - uns découvrent un terprétés par Champoliion le jeune, 97 a —
serpent dans le palais qui était habité par le 99 a ; a développé, dans un ouvrage spécial,
général Bonaparte ; par quel moy en, ly b. — l'opinion de Champoliion sur la date bV
ai b. du calendrier égvptieu , a re-
l'ïiittîtiition

Belzoni: importance de deux inscriptions connu la simplicité de la notation de leur


trouvée* à Hiilae, aa3 b; avait exé- année vague, de sou rapport avec les varia-
9ji'il a
cuté a Paris le modèle exact du tombeau tions du Nil, et en dèJuit plusieurs consé-
par lui découvert, de Ménephtba L", 3a * b ; quenecs, a4o a, 244 a.
ilen a publié eu un grand atlas les princi- Bubastis, ville remarquable par les ruines
paux sujets, sculptés ou peints, 3aS a, b. d'un grand temple quel» rois l'avaient or-
;

Béni-Hassan, lieu reniai quable par plu- née de grands edilices, 3th b.
sieurs hypogées, 166 b, 1 «7 a; un de ces Byssus (toiles de). La classe sacerdotale
monuments, à colonnes doriques, est le tom- en chaque année uue certaine quan-
livrait

beau d'uu chef militaire, 36a b. tité au royal, 90 a; servait a faite les
fisc

Bérénice, reine dont la chevelure forme bandelettes des momies, à l'habillement, sur-
une constellation, 419 b, 4ao a, Lirait éle- tout à celui des prêtres ; était probablement
ver des chevaux pour
pour concourir dans les lecotou ; les temples renfermaient saus doute
jeux Olympiques, ibid. des fabriques de ces tissus, 19a b, iq3 a.

Caîliaud (M.) s'est beaucoup rapproché Calendrier : poinjl de traces authentiques


des sources du Nil, 9b; recueille des œufe de son institution première en Égypt«î
de crocodile nui érlosent dans sa barque, usage dés la plus haute antiquité, d une
aa a; déj>eint les Berbers ou Barabras, ha- année de 365 jours, sa division; les Égyp*
bitants actuels de la Nubie, a; b; a décou- tiens savaient quelle partie du jour man-
vert et copié la plus célèbre des tables quait à leur année civile, et l'avaient pro-
gênèaloeiqucs , aG5 b; description, expli- bablement fait cou nai ire aux Grecs; nom*
cation de celte table, a;i a;a a; aa— des mois et leurs signes, a34 a a35 l'î —
retrouvé de riches mines d'éraeraudes, division de l'année et des travaux de ta
43? 6. culture en trois périodes égales d'après 1**
Calasirîes, Hermotybics , dénominations variations du Nil, a35 b, a36 a; période
des guerriers au temps d'Hérodote, 146 a. sothiaque ou cynique ou de 1460 ans, #

Digitized by Google
CONTENUES DANS L'ÉGYPTE. 483
qui y a donné lien; importance pour le Sésostris , 160, a , b
sou travail sur l'ins-
;

calendrier du lever héliaque de l'étoile Si- cription de Ri SLtte xaa b a? b sur la — \ ;

nus. ai6 a — *37 b; usage


d'une période notation graphique des mois et des jours
!
inaire; |>ériode de sept jours, période de
< complémentaires, ali a, b; sur la liaison
trente ans ou des grandes panégyries, b; du lever de 1 étoile Sirius et du commence-
coïncidence du premier jour de l'arm e va- ment de Tannée, 2M b, a3^ a; sur la
gue avec le premier jour de l'année fixe, date de 1 institution régulière du calendrier,
a 37 b —
233 b; ère de Nabonassar, ère alo a; sur cherche, dans /es monu-
la r\

d'Auguste; à quelle année remonte l'insti- ments, des traces dè la philosophie égyp-
tution régulière du calendrier égyptien; ou- tienne; sur la découverte qu'il ut, dans un
vrage spécial de M. Biot sur ces faits et temple de la Nubie, d'une nouvelle géné-
leur» conséquences, *38 b 240 a; calen- — ration de dieux , complément du cercle des
drier des fêtes religieuses; deux planches formes d'Amon, «Al b, 346 a; recueille
représentent toutes les expressions graphi- dans le lotul>eau d'un roi la plus ancienne
ques relatives aux mesuras, au calendrier, représentation relative au lever de l'étode
aux dates; un tableau expose les signes Sirius . 3a8 b ; explique une difficulté histo-
hiéroglyphiques des mois et ceux des cinq rique sur le règne de la ni.ie Amensé,
jours ce/estes; chaque mois et chaque 3o4 a —
3u6 a, découvre la grotte (spéos
jour placés sous la protection d'un person- Artémidos ) qui forme un temple souter-
nage divin ; 1rs personnages emblématiques rain, 3a4 a —
3a5 b; décrit sur les lieux,
des douze mois sont reconnus par Cham- en 1829, un petit temple de Thôlh (Her-
pollion; a \o a —
a44 a; sons quel roi a eu mès), 4£ a a et suiv.
lieu un certain renouvellement du cycle so- Clial , était consacré à la déesse Pascht ou
thiaque , 353 a. Ruha«tis (Diane); des momies de chats se
Callixène de Rhodes , dans son histoire trouvent en très grande quantité près du
d'Alexandrie, donne la description détaillée village Béui-Hassan-el-Aamar, 3?4 h
d'une fête qui y fut célébrée; époque et 3aa b.
objet de cette féte ; extrait de cette descrip- Chauves- souris : très • abondantes en
tion^ a 66 b. — Égyple; de huit genres distincts; celle qui
Cavalerie, n'entra pas dans la composi- est appelée roussette est susceptible d'édu-
tion de l'armée égyptienne, lIl! discus- cation, aJ a, b.
sion à ce sujet sur les paroles de Moïse, Chevaux, étaient d'une belle race,
ibid. if)6 ».
Cerbère, le même qne le Chien de Ty- Chine : n'était vraisemblablement pas in-
phon y placé par les Égyptiens dans l'Amen- connue à l'Egypte, 8;> a.
Ihi ( l'enfer), 1*2 a , b. Christianisme, ses premiers fondements
Chameau, paraît avoir été inconnu aux en Egypte , 469 b résidence du patriarche,
;

anciens Égvptieus pour leur service ,


d'abord à Alexandrie, puis au Caire; mode
i9<> a.% singulier de sou élection , 41*9 b, 430 a;
Champollion le jeune, cité dans la dis- sous quel empereur s'établît la secte qui
cussion sur la race des anciens habitants de constitue l'Église actuelle des chrétiens d'É-
l'Égvple, 22 b; sur la série de peuples fi- gypte. 47û b.
gurée dans plusieurs lias-reliefs des tom- Chronologie, divisée en deux parties :
beaux royaux, 3o a —
il b; sur les tom- historique ou fondée sur des monuments
beaux des rois, qu'il a vus en 18x9, ii b contemporains; systématique ou non ap-
— 57 b ; sur un tableau représentant les puyée de ces monuments , 264 a a65 b ; —
signes de l'astronomie et de l'astrologie, à l'appui de la première : la 'vieille chroni-
io3 b —
L£>6 a; sur un tableau représen- que de George le Syncelle, les listes deMa-
tant jugement de l'aine, l3q a; sur la
le néthon, les tables généalogiques d' Ahydos;
bibliothèque du Rhamesséïon de Thèbes, monuments divers; exposition et explica-
tii b; sur les Livres hermétiques, i3o b; tion de tous ces documents 264 a a?5 a ; ,

sur le Pi mander d'Hermès Ti ismégiste , calculs qui établissent la date de la nais-

i jo b; sur les spéos d'Ibrim et de Silsilis, sauce de Piolémée Épiphaue et ctlle de la


sur les monuments de Beit-Oually en Nu- mort de son pere Ihilopator, 4x3 a —
bie, sur les grottes de Reni-Hassau, 164 a k%k a.
— iJiû b; sur un papyrus qui contient, Circoncision prescrite par les lois égyp-
presque en son entier, un panégyrique de tiennes, 40 b — 41
,

a» ii3 a.

31.
table des matières
Classe des militaire*, devenue le premier nombreux corps de troupes , par quel motif.
ordre de l'État sou* Menés; était pourvue Ml a.
d'une dotation territoriale; forée de l'année Classe populaire, troisième ordre de Pttat;
au temps d'Hérodote 146 * *4? ; dis-, — jusqu'à quel point elle contribua primitive-
tribution du ; émigration d'un corps
service ment à l'élection des rois, question indécise;
de cent mille hommes et par rpiel motif, mais |
m noue un jugement sans appel sur
1 1

14? a, b, 170 b ; restes d'une enceinte aux les rois a pré» leur mort noms
; ma rtries dan*
environs de Thèbes , laquelle est présumée des monuments, 1 1 a 173 a; familles ha- —
avoir été un établissement militaire; taux bituellement nombreuses; habillement sim-
moyen de la force de l'armée, armes di- ple, race belle et saine, mais un peu prèle:
verses , manœuvres , le roi chef suprême ; habitations particulières, vastes, avec jardin;
usage de la cavalerie inconnu, explication, '
nourriture : pains de sorgho ou */oura 9
sur ce point , de la tradition de Moïse, 141 viandes, poissons, miel, fruits et diverses
b — i4q 1; intérieur des camps connu d'a- productions , vin J>ière de grain , 1 7 3 a
,

près les monuments; armures, disposition 1 7>> a ; pour boisson habituelle l'eau salu-
dans marches le* peinture* découvertes
les ; taire du Nil qu'ils clarifiaient par un pro-
dans tombeau d'un chef militaire repré-
le cédé usité encore de nos jours; description
sentent de nombreux objets d'armement ; de la façade d'une habitation, du jardin qni
forme des enseignes , 1 49 a , i5o b ; armes en était une dépendance ordinaire, décora-
conservées dans nos musées, 162a, b; puis- tion de la maison par des peintures à fres-
sance militaire de l'Égsplc attestée par une que, 176 a —
178 a; meubles ornés de
multitude de tableaux homériques qui retra- sculptures la classe la plus humble abon-
cent, eutre autres faits, la prise de Jérusa- damment pourvue du
;

nécessaire, 178 a —
lem, les victoires de Rhamscs le (irand ou 170 a; objets d'habillement, ustensiles Je
Sésostris , celles de son père du roi H or us,
, toilette, bijoux et objets de parure : orne-
les chefs de diverses nations faits prison- ments d'oreilles, colliers, anneaux et ba-
niers, une bataille navale; puis les campa- gues, bracelets, bijoux de formes carrées,
gnes de Rhamsès-Méïiimouu dm I» iJkt , — 179 a —
182 b; ustensiles domestiques : va-
b; nouveaux détails sur les conquêtes de ses ; meubles , L&a b ; i_H a ; instruments
Sésostris, récit qui en est fait à Hérodote et produits des arts et métiers: armes, ins-
par les prêtres , témoignages récemment dé- truments de musique; tissus, i83 a , b ; ob-
couverts, fruits de ses victoires, 100 b — jets relatifs aux jeux et aux amusements de
i63 b; monuments élevés par les anciens l'enfance, 18J b; description de tableaux
Pharaons au delà de Syène; dans la Nubie; peints dans le tombeau d'un personnage
spéoî d'Ibrim qui appartiennent à différents distingué et représentant, i° les détails ne
règnes; celui de SiUilis pour le roi Horus, sa vie intérieure, a° le service de l'extérieur,
iJil !> — iiili a ; autres monuments de faits 3° la maison de campagne avec un nom-
d'armes à Reit-Oually, en Nubie, à Beni- breux domestique; étal numérique de ses
Hassan , ii>i» a —
162 a ; les militaires ac- bestiaux 18^ a
,

8G a chasse , pêche 1 ;

complissaient les devoirs prescrits par la délassements , jeux , 1 86 b le N il , auteur ;

religion , i6_2 a ; le scarabée faisait le cachet de toute fécondité précautions pour l'entre- ;

de cette classe; le vautour et l'épervier tien et la conservation des canaux , honneurs


étaient l'emblème de la victoire; quels pré-
divins rendus à ce fleuve, iÈj a L&â b; —
sages fournissait vautour, 163 b; repré-
le labourage, semailles après .lesquelles ia terre
sentation d'un combat naval ; monuments de est foulée par quelques animaux; récolte;
deux officiers de la marine, 162 h, 168 a, rafraîchissement de l'eau du Nil; usage de
b; papyrus précieux qui contient surtout, la charme et de la houe; moisson, faucille
presque en son entier, un panégyrique de égyptienne; conservation du grain, l'usage
Sésostris, iû& b —
170 a; un roi, aban- des silos n'y a été probablement pas in-
donné des militaires qu'il avait privés de connu ; culture et récolte du lin ; le byssus,
leurs terres , est détendu par la classe des probablement le cotou, i_A8 b a; — 10J
marchands et des artisans, réflexion sur ce nourriture : lotus rry-mpftera, graine et ra-
fait , t_70 a , b ; les Cariens et les Ioniens se cine, tige du papyrus, noisson, légumes,
rendent en grand nombre auprès de l'sam- vin de diverses qualités , bière ou autres li-
n ie tir Ims, qui leur donne des tein s et les queurs fei meut» es, fruits très va liés, ail et
incorpore dans la classe des militaires 36? , oignon d'une saveur moins écre que les
b ; sous ce roi , émigration en Élhiopie d'un nôtres , 10J b —
io5 a ; le dattier, les pâtu-

Google
CO>TEKUES DANS I7ÉGYPTE
rages de
la basse Egypte, chevaux d*une Dendcrah et d'Esnèh 106 b fonc-
, — ma;
hrlle race, iq5 a —
196 a; poulets évlos tions et noms divers des prêtres , costumes
dans des fours, it>6 a — 197 a; perfection tète rase circoncision , tissus de Un, instru-
,

des tissas et des teintures, 19J b xi)8 b; — ments et ustensiles, in b ti4b; il v —


grands ouvrages d'architecture, mise en avait aussi des prêtresses, n5a, b; 34 t
œuvre des métaux, procédés chimiques, art statues de grands prêtres montrées à Héro-
de réniailleur, fabrication de la porcelaine, dote , i if» a —
113b; tradition des prêtres
du Ter r e coloré et non coloré, du stuc, sur h guerre de Troie , sur Péris et Hélène
dorure du bois et du bronze, mosaïque de n? b — 190b; quels furent leurs disciples
pierres ou d'émaux de couleur, mastic dur, parmi les Grecs; Moïse, 120b
11S a; —
appliqué eu relief et doré, *ases murrhius Rituel funéraire; Livre des manifestations
artificiels, bronze employé pour les usten- à la lumière; tableaux symboliques , a u I

siles et les armes, 199 a aox b; considé-— — ia6a; jugement de l'àme, les champs-
rations sur l'antique éclat des institutions Élysees, les récompenses et les peines,
égyptiennes, sur les prodiges de leur archi- métempsycose», Thoth , livres écrits par di-
tecture . de leur mécanique , sur l'état de vers hgvptiens, livres hermétiques, descrip-
lenr commerce et de leur marine, 2121 b — tion de quatre cercueils sacerdotaux, t?6 a
ai*» a ; routes qui rendaient à Tbebes et à — i45b; deux grands prêtres, à l'époque
Memplûs, aufi a, b; vicissitudes de gran- de ao e dynastie , montent sur le trône
la
deur et d'infériorité jusqu'à la fondai ion 356 , b
a deux (ils de rois , d'aboM grands
;

d'Alexandrie; témoignages de sa grandeur prêtres, portent ensuite la couronne, 3 60


dans un des tombeaux de Gouruah ; Fourier a,b; Fsammétichus II, honoré aussi d'un
cité sur ce sujet , ao(> b au b. — sacerdoce , 370 b.
Classe sacerdotale; ses attributions; pri- Clément d'Alexandrie (Saint), cité sur la
mitivement souveraine , elle cède eusuile le magnificence des temples égyptiens, 2G a ;

premier ranj; au roi ses possessions et reve-


, sur le prêtre nommé Horoscope, 99a, b;
nus ; un droit lui était payé pour les momies sur les cérémonies religieuses et les Uvres
déposées dans les tombeaux , Hfi b * g b — d 'Hermès, iàû a, 137 a.
pavait au fisc royal certains tributs 8^ b ,
— ;

Combats sur terre et sur mer : disposi-


00 h ; tout membre de cette classe était tenu tion des troupes de diverses armes ;
genre
de faire chaque année un voyage par eau à de manœuvre des vaisseaux ; quelle place
Alexandrie , 90 b ; le roi intronise et sacré occupait le loi îH l> ijj* a b. , , ,

dans une assemblé** générale de cet ordre, Costumes des rois dans leurs fonctions pu-
hérédité des fonctions établie par l'héritage bliques , 5J a.
de la terre ; mariage des prêtres leurs fils , Coudée seule mesure de longueur dout
,

sont fixés dans la classe concours des pré-


; nous ayons la grandeur, très - probablement
Ires dans toutes les affaires publiques, go I) certaine. V. Système numérique.
— g3a; professaient la médecine et la chi- Crânes des Fgyptiens, beaucoup plus
rurgie, o3a, b; avaient dans leurs attribu- épais et plus durs que ceux des Perses,
tions la momification des corps , 94 a — 3;8a.
o5 b; combien elle influait sur la salubrité de Crocodile: ce qu'en dit Hérodote; sa
l'air, ibid. étaient astronomes; d'après
; narration est rectifiée sur quelques points;
quelles planètes ils avaient nommé chacun habitudes du crocodile; ses ennemis, du-
des sept jours de la semaine, 96a, b; dis- reté de sa peau etc. ; cinq es|ièce«, a 1 b
,

cussion sur leurs notions astronomiques, a3a; celui de l'Égypte est plus timide que
mêlaient l'astrologie et l'astronomie ; jusqu'à celui des autres clouais 24 a. ,

quel point l'astrologie fut eu vogue dans Cuivre deux mines en ont été exploi-
:

l'empire romain <r a ,



loi b; ihème na- tées en Arabie sous l'autorité des Pharaons
tal de l'univers, loi a; exemple d'un autre 201 b.
thème natal , formulé sous le règne d'Auto- Culte. — Consécration par les Égyptiens
uni zdj b
, —
10a b; prodiges de la magie, de certains animaux et végétaux à des di-
10a b —
io3b; représentation des signes vinités diverses, »5 b —
a6 b; crocodiles
les plus apparents de l'astronomie et de l'as- sacrés ; avaient, d'après les récits faits à
trologie, iu_i a — Liik a ; les di\erses par- Hérodote, leurs toml>eaux dans la partie
tics du corps de l'homme mises sous la pro- souterraine du labyrinthe, 1: a; chaque
tection de diverses planètes, mû a; les particulier pouvait établir chez lui des cha-
zodiaques et la description des temples de pelles, i$4a; ordre des principales fêtes

Google
48<i TABLE DES MATIERES
célébrées dans le grand temple d'Esnèh , ca- colte du blé , celle du lin , le byssos ( pro-
lendrier sacré qui contient le tableau de bablement le coton) , i8Sh 19 5 a; divisée —
lotîtes les fêtes de l'année, il» b, a. Ui en trois époques d'après le temps cl le re-
Culture: variété des travaux et des ré- tour de inondation a3& b a3ô au
1 , ,

coltes , Li a , b labourage , semailles


;
ré- ,

D
Dattier, utile jusque dans ses dernier» fda- fants, sur ïastrohgiê cultivée par le» prê-
ments, ig5 b. tres égyptiens qui prédisaient l'avenir,no a.
Dendérah. —
L'extrémité de la partie la sur poèmes
les en l'honneur de Sésostris,
plus ancienne du temple appartient an règne i37_ b a séparé la mythologie des Égyptiens
;

de CléopAtre et de Ptolémée Césarion de leur histoire dont il n'a voulu expo<er


465 a, 466 b; plusieurs autres p. h s y m que les faits principaux 276 a, b; a men- ,

sont du temps d'Auguste d'autres exécu- , tionné, sans les nommer, plusieurs mis qm
tées sous divers empereurs, 466 b, 467 a ont vécu dans l'oisiveté, 290 a; a décrit les
(V. Zodiaques). actions d'Osymaodyas et son tombeau soi ,

Diane ou Artémis , la déesse Pascht ou a b; son texte sur Sésostris est certifié par
Baseht Wubastis) ; le chat lui était consa- les
,

monuments , 33a a 335 a ; n'est pas —


cré, 34'oa, b. assez précis sur la durée de sou rè^ne , 339
Diodore de Sicile, cité sur l'assertion a , b cité sur les derniers rois de la ro*
:

des Éthiopiens que l'Égypte est une de leurs dynastie, et les premiers de 1a so*, 35i
colonies, et sur la conformité des usages a . b ; sur le roi Bocchoris, 36a b , 303 a ;
chez les deux peuples, sS a; sur Je pou- sur Psammétichus , 366 , a ; b ; sur le pou-
voir des prêtres en Éthiopie , 3A b ; sur la voir des prêtres éthiopiens, dont le joog
loi contre les faux-monnayeurs , 39 a , b ; est brisé par le roi Rrgamène, 417 a,

sur les sacrifices humains en Égypte, 43 b; b; sur la mort d'Aristomène que Pfolc-
sur l'étude de l'arithmétique et de la géo- mée Épiphane fait mourir par la ciguë
métrie que les prêtres enseignaient aux en- jgfl b.

École d'Alexandrie (V. Alexandrie). taux, papyrus, si a — s5 b; population et

Écriture. V. Langue et Écriture, an b 36 b


variations à diverses époques -—•
ses

et suif. 38 a; gouvernement, d'abord tbéocratiqne,


Égypte sa situation, sa destination natu- puis monarchique, à dater de Menai ou
relle; doit
:

au Nil sa fertilité 1 , a , b ; l'obs-


,
Mènes, 33a —
35 b; état politique de la
curité couvre ses origines; gouvernement nation ; division des citoyens en classes et
d'abord sacerdotal, devenu monarchique; en professions, du royaume en préfectures
la nation divisée en classes; des révolutions ou nomes; assemblées générales de députés
intérieures donnent lieu à plusieurs dynas- de la nation dans le labyrinthe, 33 b, M b;

ties, idée générale des arts et de l'industrie,


lois , parmi lesquelles il en est une qui to-

2 a —3 b; état physique , division en rois l humains,


lère le vol, question d*»s sacrifices
— 5o b;
région*, montagnes; aspect div« ruOésuivant procédure, 35 b de la famille état
royale, monuments érigés aux rois, obé-
les trois saisons de l'année égyptienne;
cul-

ture cl plantes principales, 3 b j a; ex- — lisque de Louqsor, 5o b Sfi b; classe sa- —


haussement du sol île In basse Égypte, con- cerdotale, astronomie, astrologie, tradition

sidérations sur le commencement et la pro-


sur Moïse, rituel funé-
Pàiis et Hélène,

gression de ce phénomène, a; culture raire, d'Hermès, momies de divers


li\res

riche ei variée; climat généralement salubre,


prêtres, —
lM b classe des mili-
86 b ;

des vents nuisibles, taires, dotée de propriétés territoriale!;


mais sujet à la peste et à
i5«; oasis, leur situation, des- service , dans des stations ou dans des villes
14 a
plus célèbre, celle de Jupiter frontières, déféréaux divers corps; avait le
criplion de la
héros de l'an- roi pour chef suprême; tableaux, relations
Ammon visitée par plusieurs
,

Alexandre
tiquité et par le Grand, i_5 a — et monuments attestant les victoires de plu-

tfib; mer Rouge, lô b — 18 a; animaux sieurs rois, 146 a — 170 b; Classe popu-
qui lui sont particuliers , 18 a — aA a ;
végé- laire juge des rois après leur mort
, , iuterieur

d by Google
»

CONTENUES DANS L'ÉGYPTE. 487

de la famille, habitations, art* et métiers, Ère de Nabonassar , quel en fut le pre-


cottttre, commerce, antiquité de la civilisa- mier jour , a 39 a.
tion, 171a —
an b; langue et écriture, Ère dionysienne, son origine, sou point
an — b aa8 b; système numérique, sys- de départ 4 5 a b.
, t .

tème métrique, monnaie, calendrier. aaJIb Erçamène, roi d'Èlhiopie, duquel <Jn voit
— =^ *44 a; religion, renfermant trois points encore des monuments, renverse violem-
principaux : le dogme la hiérarchie, le
, ment le gouvernement théocratique de ce
<rar//e, a44*a — aôoa funérailles et pratiques
; pays, r±i2 a, b.
diverses pour l'embaumement des corps, Ethiopie , berceau de la population égyp-
afW> a —
n6\ a; chronologie, afU a — tienne 28 a et suiv. a donné à l'Ègyple le
, ;

a?5 a ; précis historique , a^5 a jusqu'à joug théocratique établi chez elle, 34 b;
la fin. dans plusieurs temples de la Nubie, élevés
Ëmeraudes (mines <V \ V. Cailliaud. par des rois éthiopiens, on trouve des traces
Empereurs romains; comment plusieurs de la conforiui du culte, de l'écriture
t

d'entre eux se sont montrés à l'égard des hiéroglyphique et des principales institu-
Kçyptiens. V. Augure, Précis historique. tions chez les deux nations, 4x2 D ( v «. Er~
Krato-thènes un des gardes de la biblio-
, gamèue ).
thèque d'Alexandrie, a donné des mesures Euchariste , second surnom donné à Épl-

sur une partie do cours du Nil S b. , phaue ,429 b r'e>t lui oui a introduit cet
;

Ère d'Auguste, a3o b. usage de deux surnoms, ibid.


Ère de Dioctétien ou des martyrs ,
1/« (1m l, a transmis une tradition sur la

474 ». destinée des dyuasties égyptiennes 464 b. ,

Fakaha, poisson du Nil; il fournit une y a même eu des prétresses , 1 il a, b ;"un


nourriture abondante; de sa peau gonflée roi de la a* dynastie les appelle a la succes-
les enfants se font un ballon pour leurs sion de l'autorité royale. 378 a; plusieurs
jeux , i_8 b, iq a. ont été reines (ve yez Précis historique:
Fayoum, province désignée par diffé- 6*. 1 a-, 18 e dynastie).
rents noms sous les (irecs et les Romains Fête célébrée à Alexandrie l'an 084
remarquable par le réservoir nommé lac avant le christianisme, pour l'inaugurai ion
du Fayoum ou Mtrris : de quel souve-
lac du règne de Ptolémée Pniladelphe, sa des-
rain il est l'ouvrage, 'son étendue, sa desti- cription détaillée, 64 a fifi b, in b. —
nation ; salure considérable de son eau Fourier, membre de la ermmission
19 b — 14
a; dans celle provii»ce élait d'Égyple. cité sur les antiquités astrono-
aussi le labyrinthe, 3*_ b — îâ b; formait miques observées en Égypte, 97 a; sur la"
le nome Arsinoïle, 43a b. puissance du sacerdoce 1 a t DJ sur l'état
,

Femmes — Leur condition civile ne pa- général et les époques principales de la


rait en rieu asoir été inférieure à celle civilisation égyptienne 209 b a 1 1 b.
,

des hommes, ',4a b, înh b 5j a, 164 b; il ,

George le SyncehV, nous a conservé la importé de TÉthiopie; puis monarchique


vieille chroniaue\ tableau qu'elle présente à ualcr de Menai ou Mènes , 33 a iff b. —
des diverses dynasties; discussion et com- Granit rose (belles carrières de) près de
paraison avec les listes de Manéthon a6ti , Philse. 362 b; une inscription grecque,
b — 268 b. relalite à une ouverture nouvelle de carriè-
Germanicus va examiner les antiquités res daus cet endroit porte le nom de Géta ,
,

del'l-gypte, il
y interroge les prêtres, 346- 477 b.
b, 347 a, 4*>7 *>- Grecs ioniens; quinze, hommes, femmes
Girafe, élait nu des animaux amenés par ou enfants paraissent avoir été figurés
,

les peuples vaincus ou tributaires, ao8 b. comme prisonniers dans une peintura qui
Gouvernement , d'abord théocratique, décore un tombeau, 166 b* 167 a.

Google
488 TABLE DES MATIERES

II

Hadrien (l'empereur) parcourt l'Egypte il est cité sur la fuite de Sennachértb


avec l'impératrice Sabine : iU y entendent 365 a ; n'est point d'accord avec Manéthon,
la statue parlante de Meinuon. Lettre ni avec les mouumeiits sur la fin de la dy-
d'Hadrien au consul Servianus sur l'opinion nastie éthiopienne, a, b; a donné une
3*65

qu'il a conçue de l'Egypte,*?! a, b. description de la ville de Sais qu'il avait


Héphaistos, Vnleain, ouvrier divin chez vue ataut sa décadence, 36 7 a; est cité sur
les Égyptiens, designé par le nom Phtha, les règnes de Psammét ichus.de son (ils Net os
a55 b, a 56 a. (Nécliao II suivant Manélhon), sur le canal
Hérodote, cilé sur les sources du Nil, de communication entre les deux mers,
8 a; sur les travaux pour le lac Mûris, i3 a; 36 7 b — 369 b; sur Psammétichns O,
j»iir la destruction de l'armée de Cambyse nommé par Psammis sur Apries
lui ,

jmr un veut brûlant; 14 b, i5 a, 3;8 a; 370 1) — 37a b; sur propylées construits


les
aur la fontaine du Soleil, i5 b et suiv. ; à Sais par Amasis, 374 a; sur les dons laits
sur le tupinamb'u qu'il appelle crocodile par Amasis au temple de Delphes, 376 a;
terrestre, 19 'b; sur le crocodile, ai b, sur la conquête que ce roi fit de Pile de
aa a ; sur la couleur de la peau des Égyp- Ch) pre , ib. ; visite auprès de Péluse , le.
tiens et leurs cheveux crépus , 26 b ; sur le champ de bataille où élaieut encore amon-
labyrinthe, 36 b, 3; a; sur l'introduction celés séparément les ossements des Perses
de de l'argent monnayé eu Egypte par
l'or et et ceux des Egyptiens , sou observation sur
les Perses, 3<) a; sur l'assertion que les la différence de dureté entre les crânes des
sacrifices humains avaient eu lieu en Egypte uns et ceux des autres, 378 a.
43 b, 44 MIT les prêtres du temple de Hippopotame, se voit dans les parties les
Phtha, à Memphis, 63 b; rapporte qu'il plus méridionales du Nil; n'attaque pas
n'y eut point de prétresses en Egypte ( as- l'homme , a 4 a.
sertion contestée par l'auteur ) ; donne des naturelle.
Histoire —
Plantes, fleurs et
détails sur leurs fonctions, leur manière de arbres remarquables, 6 a, b; le Nil et ses
vivre, leurs divers collèges, le poutife su- inondations (V. Nil); salure considérable
prême, la série chronologique des statues de l'eau du lac du Fayoum (lac Maris),
des grand* prêtres, ii5a —
117 b; ce qu'il 14 a productions, climat, vents nuisibles,
;

a recueilli des prêtres égyptien* sur la guerre 14 a —1 5 a comment le chameau se sous-


;

de Troie, sur le délwirquement à l'une des trait à leur influence, i5 a; auimaux par-
embouchures du Nil , de Paris et d'Hélène, ticuliers à l'Egypte : poissons ; oiseaux ; rep-
laquelle fut retenue seule en Egypte , etc., tiles; couleuvres et serpents; lézards et
etc., 117 b.— laob; Jsis et Usiri.% et ce crocodiles ibis; chau\e*-<ouris et roussette;
que les Egyptiens ont dit sur les transmi-
;

hyène et chacal; hippopotame, 18 'a —


grations de l'âme, 1 33 b, 1 3 a; Hérodote
.; a4 a; quelques lions paraissent y avoir été
a vu leurs annales nationales, i38 a ; les dit apprivoisés dans l'antiquité, celui du vice-
adonnés à l'astrologie, 99 b, 100b; donne roi actuel de l'Egypte reste habituellement
des renseignements sur la composition et auprès de lui, 14 a; quelques-uns ont ac-
la force de l'armée, 146 b, 147 a; sur les compagné les rois dans les combats , 148 b,
victoires de Scso>tris, 161 a, b; sur la fa- 291 a; plantes légumineuses, céréales; blé
cilité de la culture 188 b; sur l'emploi des
, barbu trouvé dans des tombeaux ; papyrus,
animaux pour fouler les grains ensemencés a5 a —
a5 b; byssus ( probablement le
189 a sur le montant de la dépense en lé-
; coton) , des toiles en étaient vraisembla-
gumes pour les ouvriers qui construisirent blement fabriquées dans les temples, 90 a;
une des pyramides, 195 a; sur la connais- conclusion sur la position constaute de
sance, établie chez les Égyptiens, de la dif- l'axe terrestre , d'après l'orientation de la
férence entre leur année vague et l'année grande pyramide, a8i a; grès, cette pierre
solaire,. a35 a; sur leur usage de placer se voit dans plusieurs constructions des plus
chaque mois et chaque jour sous la protec- anciennes, vya b, 3 10 b; servit à bâtir un
tion d'un personnage divin, a*3 a; sur la graud édifice à Kourna , 3 «7 a ; était la
croyance des Thébains en un dieu unique matière de deux colosses aujourd'hui brisés,
a44 b ; ce qu'il a rapporté sur Sésostris est 3 1 5 a; des montagnes de grès a SiiuUs
confirmé parles monuments, 33a a —
335 a ; semblent avoir été brisées par le Nil, 35o b ;

Digitized by Google
CONTENUES DANS L'ÉGYPTE.
I
y en avait des carrières à Thorrab , près histoire, 358 a —
359 b; de quel roi de
e Memphis , 367 b des
; lions, des lévriers, l'Éçyple Osée implore le secours, 364 a;
es chacals vivants étaient donnés en tri- Èzeêhias secouru par un roi de la dysnastie
ait par des pays situés au midi de l'Égypte, des Éthiopiens contre Seuuachérib; discus-
1 b
1 une observation physiologique, sur
; sion à ce sujet , sur la tradition de la Bible
1 ressemblance des enfants à leur père ou et sur le ré» il d'Hérodote , 3(>5 a ; Jérusa-
leur mère, reçoit son application d une lem et le royaume
0
de Juda tributaires de
culpture qui représente la mère d'Améno- Aéchaô, 3(J<) b, 370 a.
ihis Hl, ii; a, b; quelques fragments Hyène elle se trouve en Égypte; elle y
:

ious son: restés des commentaires de Pto- est peu redoutée, a3 b.


émée Evergùte II , spécialement sur la Hypathia fille du mathématicien Théon,
,

oolo^ie, 441 b. enseigne à Athènes et à Alexandrie la phi-


Histoire sainte: à quelle dynastie répon- losophie d'Arfctote et de Platon elle meurt :

lent le règne de David , celui de Salomon sous les coups d'assassins suscités par les
.1 quelques événements mémorables de cette parabulans , 447 b.

I
Ibis, oiseau de passage; deux espèces; a Invasion de l'Egypte par des barbares
été fréquemment embaumé par les Égyp- venus de l'Orient , durée de leur séjuur
e
tiens ; ne détruit point les serpents ; était 147 a. (Voyez le Précis historique, 17
r
consacré au dieu Thôth (Hermès) ; a donné, et i8 dyuaslie); seconde invasion, de peu
dit-on , l'idée du ely stère , a 3 a. de durée, 345 a , b; invasion par les Éthio-
e
Ibsamboul , lieu remarquable par un piens sous Sabàcon, fondateur de la a5
grand temple creusé dans nue montagne, dynastie, 363 a; invasion par les Perses
i5i b et suiv. ; par les colosses monolithes sous Cambyse, fondateur de la 27' dynastie,
qui en dérorent rentrée , 334 a par h?s li- » 376 b et suiv.; invasion d'Alexandre, sui-
e e
gures tracées sur les colonnes du temple vie de l'établissement des 3i et 3a dyuas-
d'Alhos, 337 b, 338 a. ties, 387 a et suiv.; invasion des Éthiopiens
Icbueumon , animal .susceptible d'éduca- réprimée par le préfet romain Pétronius,
tion ; ses habitudes; destructeur de plu- 466 a des Perses qui s'emparent d'Alexan-
;

sieurs auiman \ et des œufs du crocodile de ; drie, 749 a; enfin d'Amrou eu 641, 480
quelle manière au dire des anciens , il at-
, a, b.
taque les plus grands serpents , 23 b. Ipsus (la journée d'), décide du sort
Inde : elle avait des relations commer- d'Autigone, 4°7 h.
ciales avec l'Égypte, i6a b.

Joseph, fils de Jacob, premier minière tuellement un extrait de l'histoire de Ma-


d'un des rois pasteurs, fait du sol de l'É- néthon , 29M; ses listes ont été copiées
gypte la propriété du souverain, 4a b,
Kir les abréviateurs venus après
lui, d'où
43 a; à quelle époque il fut amené en >ubli des noms de plusieurs Pharaons.
Kvgpte et en obtint ensuite l'administration; 295 b 996 a : donne ceux des rois pasteurs
,

accord de l'époque de la venue d'Abraham et ia durée de leur dynastie, 297 b , 398 a;


eu Kçvnle, de l'âge de Joseph, du voyage avoue , d'après Manéthon , leurs incursions
de ses frères et de la mort de Jacob at)8 b et leurs pilllage*. 098 a; rapporte que les
— 3oo a.
,

rois de la Thébaïde leur faisaient uue


Josèphe , historien juif, a rapporté tex- guerre continuelle, 3 00 a, b.

K
hamac, remarquable par d'
lieu Kourna (palais de) à Thèbes, édifié en
coiislruci ious , d ues en grande pari ie à Mœris partie par Ménephtha Kr terminé par son fils,
,

3 10 a; qui a orné ce palais d'une table Sesoslris: monument des plus remarquables
des rois ses prédécesseurs 3 1 1 a , b. ; une >ous le rapport de l'art. 3a5 a et suiv. ( V.
foule de bas-reliefs y retracent les campagnes phlhéum ).

glorieuses de Ménephtha I er en Asie, 3a 7 b.

Digitized by Google
4m TABLE DES MATIÈRES
L
Labyrinthe, vaste édifice décrit par Hé- Larrey ( le docteur) après de curieuse*
,

rodote et par S ira bon ; destiné à la réunion recherches regarde les Abyssins , Herbert
,

des députes des provinces de l'Egypte, 36 b ou B ara bras , comme réunissant le* princi-
— 38 b ; imité à Cnosse par les Grec* ,38b; paux traits de conformation qui caractéri-
à quel roi en est attribuée la construction sent la race des anciens Egyptiens, 273 b.
a 89 b. Le» ro 11 ne , établit que l'astrologie ren
Lac Mœris, dans quelle partie de l'E- chez les Egyptiens, aus%i bien que Yi
gypte en restent les traces, son étendue, sa nomie, à une très-haute antiquité og a;
destination, à quel roi l'Egypte en fut re- cité sur le nom d'Ktipator, probablement
devable son nom actuel , uVgré de salure donné aussi à Ptolémce Philopator par la

;

de son eau , i3 a 1 4 a,3 1 a ; produit


1 ville dePaphos, ',26 b, 4*<> a; a donné L
de la pèche de ce lac sons la dominât iou des traduction de plusieurs inscriptions relati-
Perses, 379 a. ves à Evergète II, 4*5 b 446 b. —
Langue et écriture : origine inconnue; Lions ( plusieurs) contribuèrent à l'éclat
langue commune à l'Egypte et à l'Ethiopie; d'une tête célébrée à Alexandrie, 66 a; un
toujours la même jusque sous les empereurs lion éduqué pour les combats suivait ordi-
romains; au cinquième siècle de noire ère nairement ou précédait le char du roi,
traduction en langue égyptienne de l'Ancien 148 b (V. Histoire naturelle); dans le
et du Nouveau Testament ;dans notre dix- camp, était accroupé près de sa lente, et
septième siècle un prêtre chrétien en avait surveillé, 149 b.
encore quelque usage, 311 b —
ai3 b; la Livres utiles ou remarquables écrits par
langue copte est la langue égyptienne , quoi- divers Égyptiens, 137 b, i38 a b. ,

que écrite eu grande partie avec d'autres Lois égyptiennes, citées par les auteurs
caractères, ce qu'attestent plusieurs savants anciens sans une distinction suffisante des
cl la Grammaire égyptienne de Chatnpnllion époques; par exemple celle contre les faux-
le jeune; commeut la langue égyptienne a monnayeurs, 38 b, 3 9b; citation des princi-
employé des mots exotiques , ai3 b —
214 pales, surtout de celle d'après laquelle le
b; constitution de cette langue, trois prin- vol était toléré; époques auxquelles furent
cipaux dialectes; sa grammaire, même dans établies certaines lois, telles que la permis-
la langue copte, n a pas subi de notable sion du mariage entre le frère et la sceur,
changement; ouvrages écrits dans l'idiome celle de la dissolution du mariage; citation
copte, 214 b — 217 b; résolution qu'é- à ce sujet dt ce qui avait eu lieu chei des
prouva la langue par l'introduction du nou- rois antérieurs pour le drnil d'hérédité des
veau système graphique; écritures usitées enfants; 3g b—
4* b; changement de la
dans l'ancienne Egypte : hiéroglyphique* législation sous le gouvernement féodal des
hiératique , démo tique , 217 b —
121 a; rois Pasteurs, 42 b, 43 a; discussion sur
expression ou taletir graphique des signes l'existence présumée des sacrifices humains
divisée en figuratifs , symboliques, pho- <-ri Egypte, 43 a et suiv. ; administration
nétiques, élude fructueuse, par Cham- de la justice; exposé, d'après un papyrus,
pollion le jeune, de l'in*criptiou de Rosette d'un procès jugé à Thebes 117 ans avant
et de deux inscriptions découverte! par J. C, et du plaidoyer, 4 à b -
48 b; sup-
Behoni, 221 a — 224 a; antiquité de l'u- plique adressée a Ploiémée Evergète II,
sage de l'écriture en Egypte; l'alphabet 48b, 49 a; affaiblissement successif de la
complet est publié dans la Grammaire législation et de la puissance de l'Egypte,
égyptienne ; explication graphique et gram- 49 b — 5o b.
maticale de deux lignes d'une inscription Louqsor (obéi isque de), de quelles carrières
très ancienne, 224 a — 226 a; sur l'usage il a été tiré, 4 a ;
description détaillée de ce
de celte langue à diverses époques et les monument consacré à la gloire de Rhamses II
traces que on retrouve de quelques autres
I et de Rhamses 111 (Sesoslris) 79 a 8.f a;
,

langues de l'antiquité, sur l'introduction du vœu de l'auteur sur une inscription à v gra-
nouvel alphabet, sur la durée de la langue ver 84 a. b quel roi fut le fondateur des pa-

:

copte, «26 b 228 b; époque de la cessa- lais de Louqsor, ainsi que l'atteste une ins-
tion de l'usage des anciennes écritures égyp- cription traduite; détails sur les bas-reliefc
tiennes , 476 b , conservé seulement par les et les décorations qui s'y voient encore, 3i3
Jacobites ou Coptes, 479 b. b — 3i4 b; le roi Horus contribue aussi à

Digitized by Google
.

CONTENUES DANS L'ÉG YPTE. 491

orner une partie Je ces palais, 3 19 b; Lucas (Paul), à sou retour en 1704 de
Rharasès I e * en termine les quatre
quati dernières son premier voyage au Levant , fait un récit
grandes colonnes, et les bas-reliefs qui y fabuleux de la cataracte de Syèue; ce qu'il
sont conserves portent son prénom royal et avait déjà vu aussi dans ses autres voyages,
son uotn propre 3aa a. , 10 a, b.

M
Magistrature* et dignités en Égypte sous Menai ou Mènes , elle est fortifiée et devient

Ptolémée Évcrgcte II, plusieurs titres en la rivale de Thèbes, 35 a; les débris du


sont connus d'après une inscription grecque temple de Phtha y subsistant eucore, 63 a;
traduite par M. Leironne, 49 a, b. ses communications commerciales, 20Ô b;
Mammisi, petit édiûce élevé à côté de idée de sa grandeur et de ses ruines, 286 b
chaque temple, sa* destination; emblèmes et suiv.
figurés dans quelques-uns, a5? b a. — -t Menai ou Mènes , état du sol de la basse
Maru thon; quel était le contenu de ses Egypte lorsqu'il monta sur le trône, 11 b,
ouvrages, ce qui nous en reste, tableau, 12 a; il établit la royauté héréditaire, 34 b.
selon lui , des dynasties égyptiennes, ob- Ménephthéum ou palais de Kourna,
,

senraiions, 267 b 170 a. — '

commencé par Ménephtha l rr et terminé ,

Marbre blanc , rare en Égypte , 360 b. par son fils Sésoslris, découvert ei décrit
Marine régulière, employée comme force par Champollion le jeune, 3a4 a, 3*7 b.
de l'État, 168 a. Mer Rouge; sa position, sa direction,
Médailles. V. Monnaie. deux de ses bras forment une péninsule
Médecine et chirurgie, professées par les célèbre par plusieurs lieux mentionnés dans
prêtres, 9Î a, b; l'emploi et la composition l' histoire sainte, et par le séjour de Moïse

des remèdes, réglés par la loi, i38 b. et des Israélites; élévation de ses eanx au-
Médinel-Habou (palais de ) à Thèbes, dessus de celles de la Méditerranée; Napo-
grand édifice, trmple et palais, de la plus léon découvre le premier, dans le désert de
belle époque de l'art , 58 a , 59 , 1 55 1 58, — Suez, les traces du canal qui a joint ces
»4i, 3o1a, b; augmenté et décoré par deux mers, 16 b 18 a. —
Muwis, 309 b, 3 10; autour de ce monu- Mercure Thôth des Égyptiens , 1 19 a, b ;
,

ment s'élèvent ceux qui «ont dus à plu- l34 a et suiv.; inveutenr des poids et me-
sieurs rois postérieurs ; i quel règne en re- sures,a3o b.
montent les plus anciennes constructions, Mimaut (M.), a recueilli et transporté à
346 a, b; les tableaux qui y subsistent en- Paris le livre des races royales égvptienues,
core font connaître toute la XIX - dynastie, 271 b.
349 a —
353 a; sur quelques constructions Minos, Éaque, Rhadamante; chez les
est mentionné Tahraka, de la dynastie Égyptiens, llorus, Api, Anubi, 129 b.
éthiopienne, 36'» a , b. Mo? ris, date de son règne, gloire de son
Memnon (colosse, statue parlante de), administration, constructions et monuments
70 a — 71 a ; discussion sur le phénomène qui lui sont dus, 3oo, a —
3 f b.
des sous qu elle rendait ; de qui elle était Moïse entreprend de délivrer les Hébreux
réellement l'image, 71 a 77 a;3i3a,b, — de l'esclavage; par quels moyens il exécute
3i5 b, 3 16 a; est entendue par l'empereur son entreprise; quels lieux, parmi ceux
Hadrien et l'impératrice Sabine, 471 a, b. qu'il a nommé», sont encore rerounaissahles,
Memnonium , dans quel état sont les 17 a — 18 a; sa naissance, son éducation,
restes de ce monument 69 b et suiv ce jugement porté sur lui par plusieurs écri-
nom est une dénomination inexacte du
, ;

vains, soit païens , soit chrétiens , fit b —


Rhamesséum ou Aménophium encore , ras b; a reçu son éducation à Memphis,
existant à Thèbes, 291 b. if 3 b; en 288 b; sous quels rois eurent lieu la sortie
l'honneur de quel roi y furent érigées plu- de l'Égypte et le séjour dans le désert de
sieurs statues colossales, 3 \\ b; résultats Sinaï, i\o a —
34 1 a.
des fouilles qui y ont été faites, 3x5 a. Mokattam, petite chaîne arabique qui
Memphis, sa distance du bras droit rte la renferme les carrières de Thorrah et de
mer Rouge dans; cette contrée ont eu lieu Messarah, 280 a.
lespremiers événements de la délivrance Momies : il en a été apporté en France
des Hébreux par Moïse ,17a; fondée par plusieurs de crocodiles et d'ibis, t3 a ; quel-

Digitized by Google
TABLE DES MATIERES
quet momies royales étaient dorées et char* avec quelle arme Épiphane voulut être re-
géc* de bijoux, 55 a : les momies déposées présenté sur les siennes , 4 3a a ; à quelle
dans les tombeaux pavaient un droit aux année du règne dTÉvergete II s'arrêtent ses
prêtres, 89 b, a63 a," b; utilité de la mo- midailles à lions connues 445 b; les rooa- ,

mification , 04 a —
ij5 b noms donnés aux
; naies frappées par Clcopirrc n'indiquent
préires chargés deeel emliauinement, ma; aucun roi qui ait régné avec elle , 4^9*;
description de quatre cercueils sacerdotaux l'Egypte reconnaît la première l'autorité
conservés au Louvre, 144 a i{5 b; pré- — d'Olhon et frappe des monnaies à son nom,
paration des momies et détails sur les 4f»8 b; il en est frappé à l'effigie de Ha-
cérémonies funéraires qui se rattachaient à drien et de Sabine, d'autres le sont à l'oc-
cet usage, a6o a —
?f>4 a; description de casion de leur vovage en Egypte , 470 b;
dessins taisant paiiie d'un manuscrit sur pa- quelques-unes portent l'effigie de PertiiM\
pyrus, qui accompagnait une momie, 36<>a. et de Tatiana sa femme, 47a a; Firnuts ea
Monnaie et médailles. La monnaie métal- fait frapper à la sienne, 4;3 b.

lique parait avoir été inconnue à l'Egypte Moutagnev : deux chaînes encaissent h
3 a ; une seule espèce de pièce formait pro- vallée de lÉgvpte, leur nature, distance
bablement la petite monnaie ; pour le reste qui les sépare , % a b des montagnes de
, :

des anneaux d'or ou d'argent; monnaie in- gres, et d'autres de granit, paraissent avoir
troduite par les divers souverains étrangers, élé tres-anciennement brisées par le Nil
a3a b— a J3 b; particularité dans les datesdes ait a, 33ob. V. Mokattam.
monnaies frappées sous les premiers rois Mythologie grecque, évidence de son
Lagides 414 b —
416 a; les monnaies d'É- origine égyptienne, a54 a a56 b- V. —
vergète font présumer qu'il fut maître de Alliénc, hacchus, Cerbère , Diane , He-
Tripolis de Syrie, 4>N a; celles de Philo- phaistos, Mercure, Minos, Nuit (la), Per-
pator ont toujours porté ce surnom , 4a 1 a; sëphonè, Pluton.

N
Néron , fait faire un voyage pour la dé- vert un passage à travers une montagne gra-
couverte des sources du Nil , 8 b; une ins- nitique, a8 a; son eau, quoique tres-saln-
cription rapporte un décret rendu par les taire, a besoin d être clariliée, moyen
habitants de Busiris à la louange de cet employé pour cela parles anciens Égyptiens,
empereur, 46S a.' de nos jours; elle fait la !>oisson du
et aussi
Nil : ses sources encore inconnues ; in- Grand Seigneur à Conslantinople , 176 a b;
fluence de ses variations sur les vues des nature du limon du Nil; précautions pour
premiers législateurs de l'Egypte 1, a, b; l'entretien et la conservation des canaux;
explication d'une ancienne faille relative à honneurs divins rendus à ce fleuve, 187 a
la hauteur de ses accroissements, 5 a; ori- — 1 88 b; température de son eau, comment

gine de son nom, un culte particulier et les anciens Égyptiens b faisaient rafraîchir,
des prêtres lui étaient décernés ; représenté comment le font ceux d'aujourd'hui , 1 89 b,
de diverses manières, il recevait aussi des 190 a; le débordement du Nil, sa durée,
Égyptiens un nom particulier ; la célébrité avaient donné lieu au paitagede l'année en
de ses inondations et l'incertitude sur le trois saisons, a35 b, a3ti a; le Nil semble
lieu de sa .source existaient dès la plus haute avoir brisé des montagnes de grès àSilsilU,
antiquité , récit d'Hérodote sur ce point, 33o b; le roi Nilus acquiert quelque re-
tentatives faites pour connaître ses sources, nommée par ses travaux pour l'eut retien
es|K:rances sur la probabilité de leur décou- des canaux , 354 b ; habileté du préfet ro-
verte prochaine , 7 a —
9 b cinq cataractes
; main IVlronius daus la distribution des
état réel de celle de Syene méconnaissable eaux du fleuve, 4C6 a.
dans le récit de Paul Lucas; d'après quel Nubie : elle était intimement incorporée
motif a élé conservé cet obstacle à la navi- à l'Egypte , ainsi que l'attestent les spéos
gation; débordements annuels, leur cause, d'Ibrim et les monuments de Beit-Oually,
leur résultai ; salubrité de son eau; le por- i63 b — 166 a.
tugais Albuquerqiie veut détourner son Nuit (la),* Nyx chez les Grecs, est U
COUTi; 9 b —1a b. Ce fleuve, à une époque Ilouto des Egyptiens, a54 a, b. c
«l"e nous ue pouvons délermiuer, s'est ou-

Digitized by Google
CONTENUES DANS I/ÉGYPTE. 493

o
Oasis, de verdure au milieu des dé-
(les qui il description de l'obélisque
futéiigé;
serts : leur situation ; dans celle de Jupiter- brisé renversé qui correspond à ce pre-
et
Ammon, aujourd'hui de Syouah, était, mier; quels obélisques , transportés hors de
selon Hérodote, la Fontaine du Sdell et le l'Égypte, portent des noms donnés à Mœris,
temple du Dieu ; Alexandre le Grand, d'a- aoS a —
309 b; trois obélisques, à Rome,
près l'exemple de plusieurs héros , y va con- à Alexandrie, à Conslautinople, datent de
sulter l'oracle; diverses ruines et l'existence son règne, 3ii a, une singularité a été re-
de la fontaine al testent la vérité de ta tra- marquée sur l'obélisque de Ménephtha I**,
dition; utilité des oasis, i5 a —îG h. qui est à Rome, 3^7 b, 3a8 a; celui de
Ol>élisques égyptiens : sont tous mono- Motite-Citorio à Rome porte la légende
lithes; à quelle époque fut probablement royale de Psammétichus, 367 a; par quel
élevé le premier, 77 b, 78 a; combien il y roi fut élevé celui qui s'y voit sous le nom de
en a encore à Rome, villes où il en a été la Minena, 370 b; l'obélisque Pamphili à
transporté, 78 a, b; à quoi les Égyptiens Rome porte le nom de Titus avec le titre de
les destinaient, 78 b, 79 a; description de divin , les obélisques de Bénévent portent
l'obélisque qui est à Paris (Voyez Louqsor;; le même nom et citeut aussi Domitien,
par qui a été construit celui qui est encore 4G9 a.
debout à Héliopolis 1^1 a ; à Tlièbes est
, Oreilles — en mioi elles caractérisent
cnrore~su! pied le plus beau des obélisques toute figure de véritable style égyptien,
qui subsistent sur le sol de l'Égypte, par 336 b.

P
Palmier- don m (description du) 6 a, b. mourut ni ne fut inhumé en Égypte, 338
Papyrus ou byblos , plante autrefois très- b; ils s'emparent d'Alexandrie lau (i 16 de
commune dans la basse Égypte où elle est 1ère chrétienne, 479 a.
aujourd'hui trè*-rare, son usage des l'anti- Peste : parait être indigène en Égypte ;
quité la plus reculée jusqu'à une cerlaine les anciens Égyptiens s'en sont préservés,
époque de l'ère moderne; de beaux ma- 14 b; depuis quelle année elle s'est mani-
nuscrits de divers âges en sont eonsenés festée en Egypte, et par quelle cause, 94 b —
à Paris, 24 b —
aâvb; un des plus impor- 95 b.
tants, expliqué par Champolliou le jeune, PI 11 ton ou Adès, l'Osiris des Égyptiens,
est possédé par M. Sallier; il contient, pres-
que en son entier, un panégyrique de Population. —
Discussion de l'auteur
Sé*ostris, 169 a , b; la plante reste aujour- sur ce point : à quelle race humaine ap-
d hui dans l'Abyssinie, iy5 b; deux papy- partenaient les anciens Égyptiens ? Po- —
rus écrits eu phénicien ont été trouvés pulation descendue, d'apres toutes les
dans fa Thébaïde, b. probabilités, de l'Ethiopie; considérations
Pausauias, cité au sujet de la statue do sur les progrès de la civilisation pendant
M «miiiiou, 71 b, 76 a. ving- trois siècles avaut le regue d'Auguste,
Période sothijue, ou cynique, ou de 1460 aG b — 38 a.

ans : son origine, a 36 a , a 38 a, b. Poulets produits par l'incubation artifi-


Perséphonè chez les Grecs, Proserpine cielle, ainsi que d autres oiseaux domes-
chez les Latins, avait les mêmes fonctions tiques, description de ce qui se pratique
que Thoiéï chez les Égyptiens, 127 b. encore aujourd'hui, 196 a 197 a; nom- —
Perses (les), sous («ambyse, soumettent bre des poulets ainsi produits dans le
l'Égypte, y établissent uue dynastie qui siècle dernier, ibid.
comprend sept rois; en sont repoussés, Précis historique , depuis les époques les
et après de fréquentes attaques, eu expul- plus anciennes jusqu'à l'invasion des Arabes
sent le dernier roi de race égyptienne, conduits par Omar II, fondé sur les listes
Nectanèbe II, puis après y avoir encore de Manéthon et les monuments originaux ;
établi trois rois, dont le dernier est Da- résumé transmis par Diodore de Sicile. j~ï
rius III , ils sont dépouillés par Alexandre, a— 276 b; dynasties, suivant Manéthon:
376 b — 389 b; aucun de ces rois ne 1™ huit rois, pendant a5a ans; Mènes, le

Digitized by Google
494 TABLE DES MATIÈRES
premier de ce* rois, substitue le gouverne-
ment royal héréditaire à la théocratie, si- sont pas parvenus , 290 a. — i5' originaire
gnale son règne par d utiles travaux et par de Thebes: a régné ?5o ans; le nombre de
ses conquêtes; après lui sou (Ils Alhothis, et ces rois nous est incounii , 290 a , b ; des
six qui lui succèdent de père en fils Ccn- : monuments constatent seulement l'existence
eèues. Ouanéphis, Ousaphès, ISiéhaïs, de Mérenrhès, septième toi de rette dynas-
Mempsès ou Simempsis, 277 a, b. tie, celle d'Osymandyas qui en faisait par-
a" neuf rois, pendant 297 ans: Bôchos, lie, et duquel avaient été figurés les exploits,
Citons, Biophis, qui appelle les femmes à enfin celle d'un autre roi désigné dans i:a
la succession de autorité royale, lias,I tombeau, 290 b — 292 a. —
iti* plusieurs
Setliinès , Ncpherchéres Sésochris,
( ;ha?rès mis, pendant 190 ans; de ces rois nous sont
Chénérès, 277 b, 978 a.
,

3' huit rois, — ,

connus seulement : Ptaliaw trp Osortaseo, ,

pendant 197 ans, Néchérophès, sou» lequel son fils, illustre par ses exploits cl par le
l'Egypte est attaquée par les Libyens, Sésor- temple qu'il fit ele*er à Horammon; son
thos, très-habile en médecine et qui perfec- successeur Amenhembé, et le dernier de
tionna l'art de récriture, l'y ris, Mésorhris, tous, Timaos qui perdit la vie en combat-
Souplûs, Tosertasis, Aches et Séphuris, tant les rois Pasteurs; voyage d'Abraham en
Kernhérès, 278 a, b. 4* dix-sept rois, — Égy pie , 29a a —agi b. 1

7* la dvna-Jje
pendant 448 ans: Souphi, Sensaouphi, des rois Pasteurs ou Hyhos , occupant l'E-
Maitchérès. Sôris, Ratoeses, Bichcrex, Sc- gypte depui» Memphis jusqu'à la Méditer-
berchères, TainphtU, en sont les seuls nom- ranée, et en même temps celle des Plia taons
mé» ; dès le commencement de cette dynas- qui s'établirent dan* la haute Egypte : »ii
tie, construction des pyramides de Ghizé et mis Pasteurs, pendant 2^9 aus dix mois:
de plusieurs autres, leur description , 278 b Salathis, Roeon, Apachtia», A pop lus, Anao,
— 184 b. —
5' sortie d'Éléphant ne : neuf i Assés ou Asseth; administration de Joseph,
rois, pendant 748 ans Ouscrrheiès, Sé- : probablement sous le règne d'Apophis; six
phrés Néphereherès , Sisiris Obérés Ra-
, , , règnes de Pharaons, pendant les meniez aôo
tbouris, Meuchérès, Tanchérès, Ounos, an» : Aménemdjôm 11, Osortasen 11, son
284 b —
a85 a. —
6* originaire de Mem- frère Osortasen III, Aménemdjôut III, un
pbis: cinq rois et une reine, pendant 2o3 cinquième roi dont on ne connaît que te
ans Othoes, Phios, Méthousouphis, Phiôps,
: préuom roval, enfin Ahmôs (chez les Grecs
Menlhésoupbis la reine Niloeris sa sœur,
, Amo»is) qui vain(|itit les Pastfttrs, et en-
qui emploie l'artifice pour puuir les meur- ferma enfin le dernier de ces rois dans une
triers de «on frère , fin malheureuse de cette ville dont il entreprit de faire le siège, 294
reine célèbre par sa beauté, a85 b 286 — b — Sot a.— 1
8* dix-sept rois pendant 348
,

a. — 7* cinq rois pendaut 75 ans; leurs ans (voyez le tableau, p. 344). Départ des
noms sont restés inconnus, a86 a. 8 e cinq — rois Pasieurs, 3oi a, b; construction des
rois, pendant 100 ans; l'histoire ne nous en plus beaux édifices, 3o3 a et suiv.; sortie
a pas transmis les noms. 9* veuue du nome— des Hébreux 340 a
,

341 a ; établissement
Héracléopolile : quatre rois, pendant 100 dans la Grèce de colonies égyptiennes, 33q
aus: Achihoes, roi cruel, dévore par un cro- a et 345 b (19* dynastie) conquêtes en Ani- .

codile, a36 b. —
io- venue d'Heracléopolis :
,

que, en Asie et en Europe, 333a b; expu- ,

dix-neuf rois, pendant i85 ans; pendant cation d'une difficulté sur le règne de la reine
combien de temps Memphis fui le séjour des Amensé, J04 a; monuments remarquables
familles royales, idée de la magnificence de qu'elle a fait construire, où se voit encore
cette ville, a 86' b a88 b. — 1 1* originaire — son tombeau, ib. — J09 a; monuments du
de Thebes: dix-sept rois, pendant 5 9 ans; règne de Maris son fils, Sog a 3t 1 b; —
de ces rois, le dernier, Amménémès, nous Aménophis IJ, son fils, construit de nom-
est seul connu , 289 a. —
12 e six rois et une breux édifices dans la Nubie, 3 12 a, b; son
reine, pendant 160 ans: Sésochris, Ammé- successeur Touthmosis IV remporte sur le*
némès ou Amménémôpb, Sésostris (proba- Libyens une victoire attestée par une inscrip-
blement Sésostris l'ancien), Labarès, qui tion encore exilante, 3ta b, 3i3 a; son
construisit , dit-on , le labyrinthe, Amméres, successeur Aménophis III fut le fondatenr
un troisième Amménémès, la reine Scennio- des palais de Louqsor; était représenté psr
pbrès, 289 a aoo a. —
1 i* soixante roi» — la statue vocale de Memnou , remporta sur
re»tés sans nom 453 ans, 290 a.
: 14* ori- — les Éthiopiens une victoire attestée par les
ginaire de Skôou (Xoïs), soixante et seize restes d'un de ses colosses qui décorent 1-

Digitized by Google
CONTENUES DANS L'ÉGYPTE. 49&

musée de Paris, 3i3 a —


3ï7 a; Horus, 36x a, b — a4 # un seul - Rocchoris, pen- roi,
son successeur, a bissé aussi de nombreux danU 44 ans ; il est mis à môrt par les Étliio-
monument*, 3ig a —
3a i b; après Horus, piens qui envahissent l'Egypte. 36a b,363a.
sa fille Tmahumol règue douze ans, 3a i b; — a 5* dile des Éthiopiens : »
rr
roi Sa bacon
Rba ruses I succède à son pere et à sa sœur;
er qui règne 1a ans; après lui Sévéchos, se-
sou tombeau, qui subsiste encore, n'est orné lon Manétbon; puis Tahraka qui régna au
que de peintures, 3a i b — 3a3 a; Mé- moins vingt ans (narration d'Hérodote qui
nepbtha I* r sou fils, n'e»t connu que par
, nomme un roi Séthon, non admise par I au-
les moQiiments; description, par Champol- teur) enfin un quatrième roi éthiopien,
;

bon le jeune qui l'a découverte, d'une grotte A m me m s , selon Manétbon (Amoiiasd , se-
(speo* Ar'emidus) qui forme un temple sou- lon les monuments), deux autres , Pioa-
et
terrain terminé par ce roi 3a 3 a , 3a5 b; — chéi et Asplt (aussi selon les monuments)
palais de Konrna ou Mèneptlièum , sa des- auraient terminé cette dynastie au milieu
cription, 3a5 b —
3a7 b; Rrlzoni découvre des troubles de son expulsion par une fa-
le toml»cau de Ménephlha i rr 3a8 a , b; rè-
, mille nouvelle, originaire de Sais, 363 a —
gnes successifs de se* deux fiU Rhamsès II : 366 a. —
a6* neuf rois pendaiil i5o ani :
et Rhamsès III ou Sésostris. 3 au a 34 — Stépbinatis, Néchepsôs et Néchao (les trois
a; après Sé*o*tris, un de se* fils, Méneph- premiers suivant Manéthon). puis, d'après
tba II ; ensuite sa fille la reine Thaoser, quelle lis monuments Pvatnmcùchus qui rend
:

circonstance a fait découvrir son régne; puis plus facile aux étrangers rentrée en Egypte;
Meneplitha III, dont le tombeau n'est pas émigration considérable de troupes égyp-
achevé ; enfin Rbaméri, 3'»i a 344 b. — — tiennes en Ethiopie; grands ouvrages exé-
19* six rois (nombre probable) pendant 194 , cutés sous son règne; puis son fils Nécos,
ans; seconde invasion des Pasteurs repoussés Néehaô II selon Manelhon; travaux com-
par le premier roi Rhamsès IV, Méiamoun; mencé* pour le canal de communication
se4 exploits, importance des monuments entre les deux mers ; vainqueur en judée,
qu'il a fail construire; après lui, les K h mi- il est repoussé par Nabuchodoitosor, 367 a

sés V* VI*, VII*, Vlir et IX*, nommé — 370 a; Psauimétichus II rèj;ue 17 ans
J honoris par Manétbon, 345 a — 35 t b. — selon les monuments ; le nom de Nitocris
xo* dix rois, pendant 178 ans: les Rbam- est porté par plusieurs femmes de cette
sès X* XI -
, XII*; Aménemsès; puis les race royale; A priés son successeur, ayant
Rbamsès XIII*, XIV, XV
ou Rameri ; essuyé une défaite, est détrôué par les
Pahôr-Amonsé, grand prêtre d'Amon; Pih- Égyptiens qui le mettent à mort après avoir
mé, aussi granJ pi ètre; enfin deux souverains nommé roi Amasis, sous lequel I fcgvpte est
dont les noms nous sont inconnus, 35 i b — florissante ; épouse la fille d' À pries, dont
il

357 a. —
ai* sept rois, pendant i3o ans: la tombe, ainsi que la sienne même, est ou-
Mandoiifiep ( Mendes ou Smendès de Ma- tragée par Cambyse ses relations avec Po-
;

nélhon), Aaséuès ou Aasen (Psousennès lycrate et avecSolou; son fils Psa éti- mm
011 Phuneses ou Phuséuès de Manétbon), ons III ne règne que six mois, vaincu et
tous deux connus par de.* monuments; Mané- mis à mort par Cambyse, 370 a 377 b. —
tbon seul nomme leurs successeurs Nepher- : — a7 r . La dynastie des Perses, sept rois,
rliéres, Aménopbtliis, Osocbôr, Psinachès, pendant iaoans : Cambyse qui régne avec
Psousennès ou Aaseii; dynaslie contempo- cruauté, D.irius I' r , Xercès, Artaxercés,
raine du roi David et deplusieurs de ses suc- Xercès II, Sogdianus, Darius- Not bus ; les
cesseurs, 357 a —
358 b. —
aa e issue de l'gyptiens, soutenus par les Athéniens, com-
Rubastis : cinq rois nommés et probablement battent pendant plusieurs années, mais sont
deux ou trois inconnus, pendant tao ans : encore soumis ; enfin un Égyptien nommé
Scheschonk (Scbiscbak el Sisac dans la Bi- Amyrlée se met à leur tète, défait le lieute-
ble, Séchoncliis de ManéthonV, O»orrhôn nant de Darius-Nothus, ai rétablit les lois
Schesebouk II (Sésonchis II) , Takelôthès et le culte des Pharaons. Ce roi forme à
Osorcbôn II, puis ses deux successeurs se- lui seul la a 8° dynastie dont la durée est
lon Mauélhon qui ne les nomme pas, 358 b. de six ans, 376 a 383 b. —
au* dynas- —

36a a — e
a3 originaire de Tanis, quatre tie , composée de cinq rois dont les régnes
rois, pendant 89 ans trois seulement sont
: forment ai années : le premier, TVoufron-
indiqués par les monuments : Ptabavtep, thph ou. selon les Crées, Néphéritès, dont
Osortasen, Amen-Hem-l)jam (selon Mané- la famille, originaire de Mendes, a fait don-
thon : Petubastif, Osorlhôo, Psammus), ner à cette dynastie le nom de Mendé-

Digitized by Google
TABLE DES MATIÈRES
tienne; le second Hàkôr, selon les Grecs de ses quatre
Actions ; le troisième Psimotith, nommé du trône jusqu'à la défaite d'Antoine par
par Manélhon Psammuthès; enfin le qua- Octave; elle se donne la mort, et l'Egypte
trième, Mutliis; et le cinquième N'éphé- devient une des provinces romaines, 401 a
réus, 381 b —
384 b. —
3o' et dernière — 464 a; Auguste choisit lui seul le pré-
dynastie égyptienne, pendant près de 38 fet qu'il donne à 11 gypte avec une admi-
•lis, composée de trois rois Nectauèbe I rr,
: nistration particulière les Éthiopiens y
;

Téos ou Tarhos qui resserre l'alliance avec font une invasion, mais sont repousses;
les Laeédémonieus du temps d'Agésilas, en- divers temples retracent les noms et les
fin Nectanebe H, qui, vaincu par Darius images de plusieurs empereurs ; t roubles à
Ochus, se retire et reste en Ethiopie, 384 b Alexandrie pendant le règne de Caliguia :

— 386 — Domination
b. des Perses : Ochus c'estdans celte ville que Yespasien csî
pendant deux ans; son fils Arles aussi d'abord nommé empereur, 464 b; soas
pendant deux ans; enfin Darius III pen- Domilien le christianisme jette en tfgypi*'
dant quatre ans, 384 b — M?
a; 3i* dy- ses premières racines, et Alexandrie est
nastie : Alexandre, son frère Aridée, ses d'abord le siège du patriarche; sous Trajan
deux fils Alexandre et Hercule ;
interrègne l'inimitié entre les Grecs et le* Juifs donne
jusqu'à lavéïiement de Ptolémée Soler, lieu à de grands troubles; des séditions dé-
a? ans. Alexandre enlève 1 Egypte aux terminent Hadrien à se rendre en Egypte;
Perses el y fonde Alexandrie. Il laine Cléo- elles contiu uenl même sous le rè^ne des
mène pour gouverneur. Après la mort Antonius; Septime-Sévère , s'écarta nt àrs
d'Alexandre, Ptolémée, un de ses généraux, principes d'Auguste, donne un sénateur
leçoil en partage le gouvernement de l'E- pour préfet à l'Egypte, et y lance un édit
gypte, dans laquelle cependant est reconnu de persécution coulre les chrétiens; Cara-
pour roi Philippe Aridée, frère d'Alexan- calla punit cruellement les épigrammes des
dre, 387 a —
394 a; après lui la couronne Alexandrins ; après lui les dissensions de-
échoit à son Alexandre, ué de Koxaue;
fils viennent plus violentes; une colonne est
Cassandre tous deux à son am-
les sacrifie élevée en l'honneur d'Alexandre Sévère, sous
bition, ainsi que le jeune Hercule, (ils d'A- lequel l'Egypte jouit de quelque repos ; après
lexandre et de Raisiné; Ptolémée, après lui , les chrétiens persécutés par les É^vp-
avoir défendu l'Egypte contre plusieurs de tiens se réfugient dans les solitudes dé U
ses rivaux, en est reconnu roi, sous le nom Thébaïde ; la reine Zénobie s'empare d'A-
de Ptolémée Soter, l'an 3o5 avant l'ère vul- lexandrie 464 b
,

4 74 a ; Dioclétîen ctab/it
gaire, que ses monnaies indiquent comme' cruellement son autorité dans Alexandrie,
la vingtième de sou règne, 3o/» a
r
401 a — et persécute les chrétiens. Constantin com-
et 400' b.-— 3a dynastie, pendant ao4 ans, prend l'Egypte dans le royaume d'Orient;
treize rois ou reiues les laoihii ou Plo-
: troubles excités par la doctrine d'Anus; Ju-
létnées, distingués par les noms suivants: lieu favorise la religion égyptienne; conti-
Soter. Philadeiphe , Évergèlc T , Philopa-
r
nuation des dissensions religieuses ; le chris-
lor, Épiphane , Philometor, Enpalor, mort tianisme l'emporte peu à peu sur l'ancien
dans l'enfance, après uu règne de quelques culte, après de sanglants démêlés ; les Perses
mois, Évergète II, nommé aussi Physcoii et s'emparent d'Alexandrie; les Jacob. tes oit
quelquefois Cakergétes , Soter II détrôné Coptes forment une secte opposée à la do-
par Alexaudre V , lequel est détrôné à son mination romaine; enfin sous Héraclius
tour par Soter II qui règne de nouveau pen- commencent les démarches de deux patriar-
dant sept ans et demi ; une reine, Bérénice, ches, Cyrus et Benjamin, el du Copte Ma-
après avoir occupé seule le trône pendant kauLas, pour appeler à eux les Arabes et
six mois, reçoit pour époux el pour* roi se soustraire au joug des Romains. Amrou
Alexaudre 11, qui, chassé par ses sujets, envoyé par Omar, lieutenant de Mahomet,
lègue sa couronne au peuple romaiu ; De- s'empare d'Alexandrie, puis de l'Egypte
nys Quittés ou Nëos Dionysos, qui fuit de entière, où il établit l'islamisme qui y i/o-
l'Egypte; pendant son absence le trône est
occupé par sa
mine encore, 47 4 a —
480.
fille ai née, Bérénice, qu'il Psylles, hommes doués du don de charmer
revient mettre à mort ; il règne encore trois les serpents , etc. ; ceux de l'Egy pie paraissent
ans, el veui, par son testament, que Rome a\oir été les plus célèbres chez les ancien*;
protège l'ordre de succession qu'il a établi leur corporation est aujourd'hui représentée
Pour ses eufauts. Sa fille Cléopâtre, l'ainée par celle des bateleurs du Kaire, *o b—
ai b

Digitized by Google
CONTENUES DANS L'ÉGYPTE.
Ptolêmée t le* * ou rois Lagidi*. (T. Pré- sont les plus anciennes , 279b; description
ris historique), de la plus grande de celles de Ghizé ; ob-
Pyramides : leur destination , 26 î a ; relies serval ions criti<|ues ou historiques sur l'objet
de Memphis, les pyramides royales ne por- et l'époque de la construction des pyramides,
lent aucune irace d'écriture, aa4 b ; quelles 279 a — 284 b.

R
Religion mal interprétée par plusieurs
; la maguificence et la richesse; sous combien
peuples et par les premiers voyageurs grecs de formes était représentée une même divi-
mieux exposée par Porphyre, Hérodote et nité ; caractères généraux communs à toutes
Jamblique, iH a —
245 a; trois points à y les divinités; énumération, description des
distinguer: \e dogme, la hiérarchie, le culte; principales coiffures qui les distinguent,
quel tut le dogme d'après les faits et les opi- a 56 a —
a5o b ; sur l'emploi du sphinx
nions les mieux fondées, 245 a, b; la hié- dans les emblèmes, ibid. les momies, leur ;

rarchie établie sur une base reconnue par préparation ; parties du rituel funéraire
< hampollion dans un temple en Nubie sa- , trouvées dans les cercueils, stèles funéraires,
voir : une triade formée des trois parties a5 9 b -
2Ô2 b; où étaient déposées les mo-
a" Amon-Ra, xj5b, 246a; ensemble du mies , destination des pyramides ; prix da
système composé dune série de triades ; location payé pour le dépôt d'une momie
quelquefois un même édifice partagé à deux dans les tombeaux; momie du père donnée
triades; description d'un petit temple où en gage par le fils; présence, dans les re-
étaient adorées deux déesses dont chacune pas , d'un simulacre des ancêtres ; milliers
de son côte siégeait avec une triade, 246b de momies de divers animaux , explication

248 a à quelles triades ou à quels dieux de plusieurs planches relatives i l'appareil
;

étaient consacrés le temple d'Edfoo , celui funéraire, 26a b —


264 a. V. Précis histo-
d'Esoeh , celui de Dakkeh et le spéos de rique.
Beit-Oually , 348a, b; dans quelques ta- Rhamessétim , monument encore subsis-
bleaux se voient les dieux secondaires ve- tant à Thebes, par qui élevé, 291 b; pré-
nant adorer Amon-Ra, en compagnie des sente des analogies frappantes avec le tom-
rois, a49*» b; description d'un petit édi- beau d'Osyraandyas décrit par Diodore
fice non terminé , consacré à T'fuit , et où ibid.; porte aussi le nom d'Aménophion
ion adorait aussi la déesse Nahamouo, sa et sans fondement celui de Memnonium,
compagne ; dans le sanctuaire sont les images 3 15 a , b (voy. aussi Memnonium) ; deux sou-
de plusieurs divinités principales, et celles bassements de tableau y représentent les
de deux triades; dans un autre petit temple, vingt-trois de Rhamsès le Grand (Sésos-
fils

la plupart des tableaux sont du temps de tris) et de ses filles, 3 (H a


six 339a, et —
l'empereur Hadrien , qui y est représenté en 33 9 a et 341 b sur les particularités qui y
fils aîné (l'A mon distinguent celui qui lui succéda.
il
y figure aussi dans les
;

bat-reliefs inférieurs; consécration princi- Riz, parait avoir été inconnu à l'ancienne
pale à la divinité locale, celle de la bour- Égypte, i 9 5 a.
gade qui existait autour du temple, et en Roboam , roi de Juda , représenté peut- ,

même temps adoration des grandes divini- être eu personne , dam une des sculptures
tés du nome où était situé le temple, et d'un palais à Thèbcs , laquelle rappelle la
aussi du dieu du nome le plus voisin ; l'em- prise de Jérusalem par Sèsonchis i5i b , ,

pereur Othon ou ses successeurs y sont 273 a , 358 b.


aussi représentés faisant des offrandes à Isis Roi (le) : premier sujet de la loi, elle ré-
et aux deux grandes divinités du nome, glait pour lui l'emploi de toutes les heures

;

«49 b a 5i a; répartition pour ainsi dire deuil général à sa mort sépulture accordée
féodale de l'Egypte et de la Nubie entre les ou refusée d'après un jugement 5o b
;


M
,

dieux égyptiens ; temples consacrés chacun bt b; description des tombeaux de plu-


principalement • a5 1 a 2S2 b ; - sieurs rois de dynasties originaires de Thè-
,

destination des petits édi tires nommés Mam- bes, 5 1 b —


576 ; hommages , encens et
misi, emblèmes figurés dans quelques-uns, prières adressés par les rois à leurs ancêtre*,
a5 a b —254 a; origine égyptienne de quel- 67 b, 58 a; leurs fonctions en temps de
ques opinion» mythologiques de la Grèce, guerre , leur place dans les combats , céré-
i5\ a —266 a; culte: quelle a du en être monie de leur triomphe , 55 a 58 a 5g I», , —
32* Livraison. (Egypte.) 3!

Digitized by Go
TABLE DES MATIÈRES
148 a, b; leur |>alai», leur habitation inté- 91a; chef suprême de l'année, 1 48a ; Rk^
rieure , 5q h —
60 b l'inscription de Rosette
; sés-Méïamoun marche à Pentmemî la \-

atteste quels honneurs le sacerdoce a décer- nuc et les cheveux nattés, i58 b ; k- ;

nés à Plolémée Epiphane, 60 b 63 a; — dirigeant la charrue , ouvre le premier scia


description détaillée de la féte donnée sous de la nouvelle année rurale, 190 b ; se
Ptolomée Solcr, à quelle occasion, 64 a gage par serment à maintenir Tannée te
— 66 b; partie d'une inscription à la gloire qu'elle a été 6xèe par les anciens. *3t
de Ptoléniée Evergète, 67 b; les actions Rosette ( inscription de ) : consacre \

mémorables des rois étaient après les bien- honneurs qui sont rendus à Ptolomée Lf
faits des dieux, les sujets des monuments
,

{îhane , 60 b —
63 a donne des détails * ;

nationaux, comme l'attestent, entre autres 'administration de la classe sacerdotale


inscriptions, celle de l'obélisque de Louq- 89 a — 90; son importance, quel par
sor transporté à Paris , 67 b 83 b ; épo- — en a tiré Champollion le jeune, mmm b-
ques qui rappellent plusieurs rois de diverses aa3 b ; mentionne la prise de Nicopolis pi
dvnasties, et rapprochements entre les prin- Ptolomée Épi ph a ne , 418 a.
cipales monarciiies de l'antiquité et la sa- Rosière (M. de), membre de la comme
gesse de la législation égyptienne, 84 b uon d'Égypte cité sur l'aspect général à
,

—•86 b; était intronisé et sacré dans une pavs, 5 a 7 a —


sur les débordements *k
;

assemblée générale de Tordre sacerdotal

S
humains, ont-ils eu lieu daut
Sacrifices sur un précieux papyrus, 169 a , b; voy. Sût
l'ancienne Égypte? l'auteur prononce pour règne, 33 1 a 34 1 b. Son— tombeau.
la négative, 43 a 45 a. — 339 a, b.
Sais, ville célèbre, n'est plus qu'un Sinus: de quelle importance pour le ca

amas de ruines monumentales : leur descrip- lendrier égyptien était le lever héliaque tic
tion par Champollion le jeune, 366 a — cette étoile, a 36 a, b.
367 a. Sostrate de Gnide termine la constructiot
Scarabée ( le) était le cachet de la caste du phare d'Alexandrie; par quel moyen,
militaire, et pourquoi, 167 b. dit-on , il transmet à la postérité son nom
ScLakal d'Égypte (ou chàcal), aussi écrit, àl'insu du roi, sur l'édifice, 41a b,
hardi , aussi rusé que notre loup v.1 h , , 4i3 a.
emhJème ordinaire du dieu A nu bis, Sphinx monolithe ; sa description, coev
36o a. ment il formait une communication avec la
Sculpture époque de sa décadence , re-
, grande pyramide , a8a a b. ,

connue surtout dans un petit temple de Strabon , décrit le iabrrintfte ,37b; cite
Tboth (Hermès), 444 b. au sujet du colosse de Memnon, 75 a, b;
Scjtale ( le) des pyramides , serpent re- a vu à Héliopolis l'habitation des prêtres ;
doute, aoa. quelle était leur princijiale étude, 99 a ; cite
Semaine, comment les Égyptiens en ont sur la force de l'année égyptienne, *47 a;
nommé les jours, d'après certaines planètes, sur les verres que l'on fabriquait à Tbèbes
96 a , b. de son temps , 500 b ; sur la division de
Sémoum , vent brûlant , ainsi nommé Tannée, telle que les prêtres de Thèbes l'a-

dans KJiamsyn en Egypte com-


le désert et ; vaient établie, 2 i
; a, b ; cité sur l'enlève-
ment le chameau se soustrait a son in- ment du cercueil d'or qui renfermait le
fluence, 14 b, i5 a. corps d'Alexandre le Grand , 449 », b ; re-
Sésoslris(Rhamsès III), cité souvent proche plusieurs défauts à Ptolomée- Denys,
dans l'article Roi 5o b et suiv.
, ; voy. surtout surnommé Aulélès, 45a a , b; visite 1a haute
Lpuqsor ( obélisque de), 69 a et suiv. ; ta- Égypte avec le préfet .liais Gallus 466 a. ,

bleaux et bas-reliefs qui retracent ses vic- Succession au trône ordre établi parmi :

toires et celles de son père, i5i b et suiv,; les enfants, puis pour les parents et les pi-
les prêtres racontent à Hérodote ses victoi- rentes 34 b , 35 a ; exemples cités pour
,

res en Orient et dans l'Europe même quels des enfants, soit nés hors de mariage, soit
en out été les fruits , 161 a —
i63 a ; divers
;

d'un autre ht 4a a; la sœur de Thouthmo-


er
,

monuments eu ton honueur daus la Nubie, sis I occupe le trône après son neveu
sculptures sur* des rochers 1 03 a 1 65 a
, — ; mort sans enfants gouverne, quoique ma ,

aon panégyrique , presque en entier, se lit liée deux loi* et laisse le sceptre à son
,

Digitized by Google
CONTENUES DANS 1/ÉGYPTE.
tîls , 3o5 b; de l'égalité des
\
>i i .ibilité -mu de l'unité d'abord en trois grandes par-
droits entre tous les enfants, 338 li. ties puis en sous-mtritiples de trois ; à quoi
,

Syouah , ville qui donne aujourd'hui son se rapportaient les diverses mesures de lon-
nom à l'ancienne oasis de Jupiter- A mmon ; gueur; de la coudée : nous en possédons
nus d'un grand temple non loin de cette d'authentiques avec leurs divisions; époque
*ille , et fontaine célèbre dans l'antiquité, de l'une de celles qui nous sont parvenues
16 a , h. longueur de la coudée, >3o a, a3a a; de
Système numérique, système métrique. leurs poids un seul nous reste
, sa valeur
:
;

Les Égyptiens ont ignoré l'usage du zéro et i3a a, b; les divisions et subdivisions des
la valeur des chiffres d'après leur position ; mesures étaient placées sous l'invocation
chaque subdivision du système général d'é- d'une divinité, par exemple, celles de la
criture avait sa série de signes de nombre ; coudée, a4i b; la longueur en est détermi-
les quantièmes des mois étaient exprimés née, probablement avec exactitude, par les
des chiffres particuliers ; distinctiou des simulacres qui en ont été trouvés dans les
aa8 b — a3o a; tombeaux , ib.

Ta h h. ville mentionnée par Moïse, et signes les plus apparents de l'astronomie et


célèbre pnr un monolithe remarquable; de l'astrologie, sa description par Cham-
patrie de la ai* dynastie, 357 a, et de la pollion le jeune, io3 b — 106 a
tom- ; le
a3«, 36a a b. , beau d'Aménophis III décrit aussi nar ce
,

Thèbes; ses ruines attestent des cons- voyageur , est un de ceux qui ont été ache-
tructions de diverses époques, a a; leur vés; quelle conséquence on peut en tirer,
u intensité , leur magnificence, 6 b (voy.
i 3i8 a, b; tombeaux des reines, subsistent
er
Tombeaux), quelles routes y aboutissaient, encore à Thèbes, 3i8 b; celui de Rhamsès I
aoO a , b. qui régna peu d'années, n'est orné que de
Tbéocrite idée de son hymne en l'hon-
, peintures, 3a3 a; exploration en 1829 de la
neur de Ptolémée Philadelphe, 416 a. vallée où sont les tombeaux des rois de la
Thôt ou Hermès Hermopolis renferme : 18* et de la 19 e dynastie, 35a a 353 a; —
des de momies d'ibis, oiseau con-
milliers description du «lus grand et du plus magni-
sacré à ce dieu , a63 b ; de tous les temples fiquement orne de ces tombeaux, 347 b
encore existants en Egypte il n'en reste , 348 b; le sarcophage en granit en est dé-
qu'un spécialement consacré au dieu Thôtb, posé au musée du Louvre , ib.
249 b; une déesse y est sa compagne, ib. Tortue d'eau douce (la grande), ou
et a5o a; sa description sur les lieux par Trionyxy se trouve dans le Nil, 19 b.
Champollion le jeune, 44a a et suiv. Troie éprise de) , au temps de quel roi
Timocharis astronome dont il nous , reste on peut , d accord avec Pline , la rapporter,
quelques observations faites à Alexandrie 353 a, b.
411 à 414 a. Tupinambis du Nil , ou Monitor, lézard
Tombeaux de plusieurs rois de dynas- ennemi du crocodile, 19 b; et de l'ichneu-
ties originaires de Thèbes, leur description, mon , a3 b ; le tupinambis du désert, men-
Si b — 57 b, celle du Memnouium , 69 b tionné par Hérodote, est employé par les
— 71 a; un vaste tableau y représente les bateleurs du Caire, 19 b, ao a.

Vautour emblèmes con-


(le) et l'épervier, Strabon , un cercueil de verre avait rem-
sacrés à la caste militaire, quels présages placé le cercueil d'or dans lequel avait été
on en tirait ; quelle place occupe le vautour placé le corps d'Alexandre, 449 a , b.
dans les représentations de combats sur les Version des Septante ou traduction grec-
monuments, 167 b; emblème aussi de la que des livres des Hébreux, 4i3 b.
maternité, 349 b, a5o b. Vespasien, au dire de Tacite, guérissait,
Ténus, la déesse Athôr, 437 b, 4 4 3 b. par la grâce de Sera pis , les aveugles et les
Verre émail, faux jayet faïence , porce-
, , écloppes, 10a b, io3 a.
laine émaillée; la fabrication en était con- Vigne (la) rai e dans le reste de l*Égypte,
,

nue des Égyptiens et ils en faisaient un se voit dans le Fayoum , (i a.


grand commerce longtemps a\ant la domi- Viper* ccr as te, vipère hajé; cette dernière
nation romaine, aoo a - aoi b; selon est apprivoisée et dressée a un grand nombre

Digitized by Google
500 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS L'EGYPTE.
de tours par l<\s bateleurs du Kaire, 10 a b. , opinion sur la race des anciens habitant
Vol, toléré par une loi égyptienne; dis- de l'Égypte; discussion de l'auteur qui l
cussion sur lu» dispositions de cette loi, combat, a6 b et suiv.
4» a, b. Vukain, Hépbaistos, est le dieu Pi ah
Votney, énonce dans son l'orage son des Égyptiens , ta? a.

z
Zodiaques d'Esnéli et de Dendérah; à jeune; discussion sur les signes de ces zo
quelle époque on doit en placer la cous- diaques et sur leurs différences, 106 !> —
traction, 96 b ; leur description ; visite de ma.
ces deux teninles i»a Chauioollion 1 le

AVIS.
POUR LE PLACEMENT DES GRAVURES DE L' EGYPTE.

Numéro*. Page». Numéro*. Page»


1 Peuples connus «Je» Keyptien*.. 39, 3o, 3 1 5i Armes. Homme à cheval. 148,
1 Télés et cercueil de momie* 161 5i Vue dn palais de Karnaa. Ja«*. 3*7
3 Cataracte du Mil 3, 10 53 11. rieur d'une maison
I 1 - -

4 Ile 4e Philc 4 54 Maison, tribu», naine *.


"
5 Second Pylône (ile de Phihe) 4* 55 Jardin, k.io«k.e, arrosage. .......... . .

6 Portique du grand temple ibid. 56 Intérieur du temple de l'ouest. »


7 Palm- de Karnaa 3i o t 35g. 36i 57 Meubles et vases r~
S Colosses 70 58 Cbaasee.. . .M
9 Divers chapiteaux 199, aoJ 59 Musique et jeux ibtd
iu Pyramide» de Mempbi» cl sphiax. 35, 163,179 6*» Sphinx 179. »«>
11 Zodiaque circulaire 43, 96, 106, 119. 61 Scribe enregistrant le» tributs »c»g
il Carrières de Sitaî lia 35 tu TribuU des peuple* ibtd
1 i Roi «ur »on ebar S$ 63 Palanquins et voitures »«f
• 4 Obélisques de Ixmqsor 5 7 , 7!, 79, 8» 64 Spéos d'Atbyr (Thébes) 14-
15 Offrandes royale» 53 6j Coudée. Signes des date*. Poid». a 3**. a 3..
16 Roi sur lecbnrapde bataille... 55, 148, 167 a3a. i4i, »4i
17 Temple d'Kdfou 55, 4M 66 Signes numériques. Mois, liâtes. »3o, 1 4 a . *4a
8 Temple d'Hermoa tbis 5^ 67 Stèle royale funéraire.. i6>a, 3o> .

19 Spbmx et béliers *5o, Oit Thébes. Tombeaux près du Raineaséusn. a lu


>> Jugement de l'ime. 1 1h 116, 164 69 Appareil funéraire.
»1 Lac Morris i3 1 Plan d'un tombeau royal. 1 Fr
a» Alphabet égyptien **5
"*
%
.

13 Meublas . . . . • . . 55, 178 ,„,,«


14 Costumes 55, 19S Tombeau dorique à Béni-Hassan . .
164, 397
a5 Costumes 198, 349 7» Carrière» de Phila? 3i*j
16 Barques sacrées n3 74 Obéli»que d'Heliopoli* , ? 4. aua
S7 Intérieur ( Hedinet- \l>ou ) 3ng 75 Inscription en caract. cunéiformes. 179, t ft
aé Propylées ( Médtnet-Abou ) 3o3 76 Roi de Juda
'
a 9 Palais a M, dinet-Abou 59 . i5a. 3o3 77 Partie hiéroglyphique de l'inscription de
30 Edfou. Vue générale 4>4 Rosette 60-6J , aas , 119 44S
31 Agriculture «83. 1*9. igo 78 Cartou pour portraits.
3i Transport d'uncolotse et gymnastique. i4«) . 79 Sé>ostri» vainqueur.. .

33 CoifTures divines 157 aiu . Mo Guerrier mourant ....


34 Caricatures historiques 178 81 Tour des Romains et obélisque à Alexan-
35 Temple ( Autropoli») sol, 4 i* dre 4I «
36 Portique du théâtre ( Antiuoe ) 3*5 Sx Ruines d'Antinoé .

37 Pécbe et chasse aux uiscau» aquatique».. 1*6 8 i Arc de triomphe a Antiooi* ibid.
3a Fabrication du vin ibid. 84 Colonne de Pompée à Alexandrie ji<i

39 Meuipbis '79 85 Statua du Pharaon Horus et de la reine


40 Omboa . . i 10, 43" sa 611e ... 3 M
41 Petit temple. an 86 Triomphe du roi Horus 3it
4* Portique zodiaque
et (
Ksui) 96, «06 87 Darius officiant selou le culte égjptieu-
43 Chasse et pèche 1S6 Cambyse 31s
44 Vase» et barques 19». )<»» 88 Plolcmee et Cleopétre jj(
45 Arts et métier» «79 >9
46 Arts et métiers ibid. >,o Temple de Denderah ot

47 Table généalogique d' Abydos. jjo, 3o3, 319 • 11 Tibère fai»aut des offrande* au» dieu*
48 Transport delà téta de Me m no 70 égspliens » 463
19 Combat naval ï"4 <:* Porte arabe du Caire ,m
5o Attaque d'une forteresse loti

Digitized by Google
Digitized by Google
- 1

Digitized by Google
Digitized by Google
Digitized by Google
RETURN CIRCULATION DEPARTMENT
TO—» 202 Main Library
LOAN PERIOD 1

HOME USE

ALL BOOKS MAY BE RECALLED AFTER 7 DAYS


1 month loans may be renewed by calling 642-3405
6 month loans moy be rechorged by bnnging books to Circulation
Desk
Renewals and recharges moy be mode 4 days prior fo due dote

DUE AS STAMPED BELOW


DEC 13 1973

/3 /

ko. c* FEB 1 7 1979

NOV 02 199!

NGV 2 1,.

SENT ON ILL

APR 0 5 19.95

AUG171997
UNIVERSIÎY OF CALIFORNIA, BERKELEY
FORAA NO. DD6, 40m, 3/78 BERKELEY, CA 94720
Digitized by Google
IVERSITY Of CillfORNIt LIBfliRY Of THE UNIVERSITE (i F CA L 1 F 0 R

Vous aimerez peut-être aussi