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EL MEKKAKI AHMED
Professeur de droit public
COURS DE
DROIT INTERNATIONAL PUBLIC II
CINQUIEME SEMESTRE
1
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
MOT D’ACCUEIL
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
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immédiatement par l'expression "Bien reçu".
Merci pour votre collaboration et bon courage.
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
I- Notion de droit international public
II- Evolution et champ d’application du droit international public
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
Manuels :
- ALLAND (D.), Manuel de droit international public , Paris, puf, 2ème éd.
2015 ;
- D. CARREAU et F. MARRELLA, Droit international, 11ème éd., Paris, Pedone,
2012 ;
- COMBACAU (J.) et SUR (S.), Droit international public , LGDJ, 11ème éd.
2014 ;
- P. DAILLIER, M. FORTEAU et A. PELLET, Droit international public (Nguyen
Quoc Dinh†), LGDJ, Paris, LGDJ., 8ème éd. 2009 ;
- E. DECAUX et O. de FROUVILLE, Droit international public, 9ème éd. Paris,
Dalloz, 2014 ;
- P.-M. DUPUY et Y. KERBRAT, Droit international public, 12ème éd., Paris,
Dalloz, 2014 ;
- BEDJAOUI (Mohammed), (rédacteur général), Droit international: Bilan et
perspectives, Paris, A. Pedone, U.N.E.S.C.O., 1991,2 volumes ;
- CASSESE (Antonio), Le droit international dans un monde divisé, Paris,
Berger-Levraut, 1986 ;
- Cot, J.P, Pellet, A., La Charte des Nations Unies - Commentaire article par
article, Economica, 2ème éd. 1991 ;
- DUPUY (René-Jean), Le droit international, PUF, Paris, Que-sais-je?, éd.,
1993 ;
- MANIN (Paul), Droit international public, Paris, Masson, 1979 ;
- REUTER (Paul), Droit international public, Paris, Thémis, PUF, 4e édit., 1973 ;
- REUTER (Paul), Institutions internationales, Paris, Thémis, PUF, 4e édit.,
1975 ;
- ROUSSEAU (Charles), Droit international public, Paris, Dalloz, 1987, 10e édit.
- ROUSSEAU (Charles), Droit international public, Paris, Sirey, 5 vo1., 1970 à
1983.
- RUZIE (D.), Droit international public, Paris, Dalloz, 16ème éd., 2002 ;
- TUNKIN (Grigory) , Droit international public. Problèmes théoriques, Paris,
Pédone, 1965 ;
- J. Verhoeven, Droit international public, Bruxelles, Larcier, 2001.
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Webographie sélective :
- Le droit international à l'aube du XXlème siècle - Alain Pellet
www.alainpellet.eu/.../PELLET%20-%201997%20-%20Cours%20Bancaj...
- Le Recueil des cours | L'Académie de droit international de ...
https://www.hagueacademy.nl/publications/le-recueil-des-cours/?lang=fr
− Commission du droit international - Nations Unies
(http://www.un.org/law/ilc/), dont la page d’accueil est en anglais mais qui
donne accès aux documents dans leur version française.
- www.un.org/fr/aboutun/structure/ilc.shtml
-www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/.../qu-est-ce-que-etat.html
− Legifrance (http://www.legifrance.gouv.fr/) pour un accès aux traités
internationaux liant la France, ainsi qu’aux principales organisations
internationales (OIT, OMC, OCDE, UE, CoE, OEA, UA, etc.) ;
− Nations Unies (http://www.un.org/fr/) et leur système d’information
bibliographique, donnant accès aux traités :
http://treaties.un.org/Home.aspx?lang=fr ;
- www.bibliotheque.auf.org/doc_num.php?explnum_id=420
- www.n.u-cergy.fr/IMG/Plan_Droit_international_public_special.pdf
- http://www.lawscape.ch/doc/dipu/Droit_International_Public.pdf
- http://www.cpuniv.com/Ouvrage/sommaire/TDMRI.pdf
- http://www.genevedecouverte.ch/fr/doc/dossier_6_famille.pdf
- Sur les droits de l’homme v. NATIONS UNIES
www.un-ngls.org/IMG/pdf/Des_cles_pour_agir.pdf
- https://books.google.com/books?isbn=280440630X
- Joe Verhoeven - 2000 - Law
www.bibliotheque.auf.org/doc_num.php?explnum_id=420
- www.world-governance.org/.../pdf_Dossier_Reformes_des_Nations_Uni..
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Introduction
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Toutefois, cela ne signifie pas que toutes les normes juridiques procèdent directement de l’Etat, car les coutumes,
par exemple, sont produites par les sociétés elles-mêmes et les contrats sont des engagements que les personnes souscrivent
entre elles. Néanmoins, l’Etat demeure le garant de la validité et de l’application de toutes les règles quelle que soit leur
source, et il en fixe la hiérarchie à travers son « ordre juridique ».
2
) V. René-Jean DUPUY, Le droit international, PUF, Paris, Que sais-je?, 9e éd., 1993, p. 3; Jean COMBACAU et
Serge Sur, Droit international public, Montchrestien, Paris, 1993, pp. 1 et s ; D. Ruzié, G. Teboul, Droit international public,
Dalloz – Mémentos, 25e éd., 2019, pp. 1 et.
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
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En effet, au cours de l’histoire, les entités étatiques (empires comme les cités antiques) ont souvent connu des
moments de confrontation militaire (guerre) et de paix obéissant à certaines règles juridiques imposées ou consenties, des
alliances militaires et des traités de paix, des échanges d'ambassades et des accords de commerce, des formes d'arbitrage.
4
L’apparition du droit international est donc consubstantiellement liée à l’émergence d’une société internationale
composée d’Etats au sens moderne du terme, c’est-à-dire des entités politiques se définissant comme souveraines à l’intérieur
et dans les limites d’un territoire terrestre.
5
Concept qui se fonde sur la distinction établie en droit romain entre le jus civile, droit applicable aux citoyens de
Rome, et le jus gentium, qui désigne les règles s’appliquant à tous, citoyens comme étrangers. V. Le ius gentium : entre
usages locaux et droit romain - Perséehttps://www.persee.fr › doc › ista_0000-0000_2014_act_...
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V. MM. N. Q. DINH, P. DAILLIER et A. PELLET, Droit international public, Paris, LGDJ, 4e éd., 1992, pp. 31-
32.
7
R.J. DUPUY, Le droit international, op. cit. , p. 3; Pierre VELLAS, Droit international public, Paris, LGDJ,
1967, p. 10; P.M. DUPUY, op. cit. ,p. 1; Paul REUTER, Droit international public, 4e éd., 1973, p. 22 ; Raymond
RANJEVA et Charles CADOUX, Droit international public, Paris, EDICEF, 1992, p 13.
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- Par ses fonctions, en ce sens qu'il a pour finalité de "régler les rapports
internationaux » en vei1lant à ce que chacun des Etats respecte la souveraineté
de l’autre, c’est-à-dire son indépendance. Le droit international constitue alors
tout à la fois un « ordre normatif » et un « facteur d'organisation sociale ». Il n’a pas
donc pour objet de dépasser la souveraineté des États, mais au contraire, il a pour
fonction de la protéger.
12
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
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v. P. VELLAS, op. cit, p. 10 ; N. Q. DINH, P. DAILLIER et A. PELLET, Droit international public, op. cit., p.
33.
11
C’est donc la présence de cet élément d’extranéité qui va déclencher ces conflits et ce sont les règles du
droit international privé qui vont trancher laquelle des lois nationales est applicable et laquelle des juridictions nationales
est compétente pour trancher tel ou tel litige..
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Espagne), ou qui ont affaire avec un Etat étranger (un Marocain séjourne en
Belgique), de la question de saisine de la juridiction compétente. En l’occurrence,
il revient normalement au droit international privé positif de trancher en la
matière.
12
V. Jules Basdevant, Dictionnaire de la terminologie du droit international, Paris : Sirey, 1960, p. 395.
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n'est pas une source d'obligations juridiques. Elle s'adresse avant tout à la
conscience humaine et sa violation par les gouvernements n’entraîne finalement
aucune sanction juridique. Parmi les normes morales on peut citer, à titre
d'exemple, celles qui incitent les Etats à fournir de l'aide à d’autres pays en cas de
famine, de maladies contagieuses, de calamités naturelles (sécheresse,
tremblement de terre, inondations, etc.).
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
la totalité des actions des Etats, qui sont à la fois créateurs et destinataires
principaux des règles juridiques internationales17.
17
Ce principe de droit partiel a été formulé par la CPJI dans son arrêt de 1927 relatif à l'affaire du Lotus. Il découle
de la non présomption de la limitation de la souveraineté des Etats: les limitations de la souveraineté ou de l'indépendance ne
se présument pas. Chaque fois que dans un domaine déterminé, on ne peut déceler l'existence d'une règle de droit (traité ou
coutume) venant limiter la souveraineté des Etats, ceux-ci agissent comme ils veulent.
18
En fait, l’enseignement du DIP dans les facultés de droit est relativement récent, car il date du début du XIXe
siècle. Ainsi, en France, la chaire du droit des gens n’a été créée à la Faculté de Paris qu’en 1829. Mais il n’a été rendu
obligatoire pour tous les étudiants de droit qu’avec la réforme de la Licence en droit opérée par la décret du 27 mars 1954
Pour plus de détails sur le processus de formation du DIP, v. P. Daillier, M. Forteau, A. Pellet, Droit international
public (Nguyen Quoc Dinh†), LGDJ, Paris, 8 ème édition, 2009.
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Ce n'est donc pas un hasard s'il a été divisé en plusieurs branches portant
chacune sur un domaine particulier de la vie internationale (doit de la guerre,
droit international humanitaire, droit des organisations internationales, droit de la
mer, droit de l'espace, droit international économique, droit du développement,
droit international des télécommunications ou des transports, droit international
de l'environnement, etc.).
17
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Première Partie
19
books.google.fr/books?isbn=280440630X...
20
Selon P.M. Dupuy, la notion d’ordre juridique désigne un ensemble coordonné de normes, dotées de force
obligatoire à l’égard des sujets déterminés et dont la méconnaissance entraîne certaines conséquences définies, in Droit
international public, Paris, D., 1995, p. 10. V. aussi François Crépeau et Jean-Philippe Thérien, PENSER
L'INTERNATIONAL, Presses de l’Université de Montréal, Chapitre 2. La société internationale et son droit - OpenEdition
...https://books.openedition.org › pum
21
C.I.J., avis consultatif du 1l avril 1949, Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, Rec. 1949,
p. 179. En conséquence, une entité ne sera sujet de droit international que si elle possède la personnalité juridique
internationale (titulaire de droits et obligations internationales).Rappelons à cet égard que les deux expressions « personnes
juridiques internationales » et « sujets du droit international » sont considérées comme synonymes et entièrement
substituables. Elles indiquent le statut légal dont jouissent certains acteurs des relations internationales et qui leur permet de
jouir de la capacité de bénéficier des droits et de contracter des obligations en droit international. Cependant, être sujet de
droit international n’empêche pas d’être sujet de droit interne. Par ailleurs, comme l'a relevé la Cour internationale de Justice,
dans le même avis consultatif : «[I]es sujets de droit, dans un système juridique, ne sont pas nécessairement identiques quant
à leur nature ou à l'étendue de leurs droits» Ibid., p. 178.
22
Simone Dreyfus, Droit des relations internationales: Eléments de droit international public, Paris, Cujas, 1981,
p. 71 ; Bin CHENG in M. Bedjaoui (rédacteur général), Droit international: Bilan et perspectives, p. 23.
23
Bin CHENG, ibid, pp. 32 et s.
18
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Sujets originels du droit international public depuis 1815, les Etats vont
devoir coexister avec d’autres nouveaux sujets, apparus juste au lendemain de la
seconde guerre mondiale. Il s’agit notamment des organisations internationales.
En effet, dès 1949, la Cour internationale de justice (CIJ) a reconnu explicitement
que l’Organisation des Nations Unies était un sujet de droit international 25. Par la
suite, cette qualité de personnalité juridique internationale fut étendue à
l'ensemble des OI (devenues capables de conclure des traités, d’assumer des
obligations, d’adopter leurs propres actes)26. Il y a même, actuellement, une
tendance doctrinale très favorable à la reconnaissance d’une certaine
personnalité juridique internationale des personnes physiques27 et de certains
acteurs des relations internationales tels que les mouvements de libération
nationale, les sociétés transnationales et les organisations non
24
CPJI Rec., série A, n° 10, p. 18.
Les faits: Le navire français le "Lotus" avait abordé en haute mer le navire charbonnier turc "Boz-Kourt". Ce
dernier coula et il y eut de nombreuses victimes. A l'occasion d'une escale du navire français à Constantinople, l'officier qui
était de quart au moment de l'incident fut arrêté, jugé et condamné par les autorités turques. Le différend fut soumis à la CPJI
par un compromis Franco-turc. La question était de savoir si les tribunaux nationaux sont compétents pour connaitre d'un
délit commis en haute mer par un étranger.
Thèse française : loi du pavillon. Thèse turque: compétence universelle lorsque la victime est turque. Rejet de la
thèse française.
25
En effet, dans son avis consultatif du 11 avril 1949, relatif à la réparation des dommages subis au service des
Nations Unies, la CIJ déclare que:" les sujets de droit dans un système juridique ne sont pas nécessairement identiques quant
à leur nature ou à l'étendue de leurs droits, et leur nature dépend des besoins de la communauté".V. Rec. CIJ, 1949, pp. 178-
179. Elle précise encore :" Le développement du DI au cours de son histoire a été influencé par les exigences de la vie
internationale, et l'accroissement progressif des activités collectives des Etats a déjà fait surgir des exemples d'actions sur le
plan international par certaines entités qui ne sont pas des Etats".
26
Les ex-Etats socialistes ont d’ailleurs longtemps refusé de reconnaître les Communautés européennes.
L’explication se trouve notamment dans la doctrine soviétique pour laquelle les organisations internationales ne sont pas
sujets de droit international . Niant la personnalité juridique des Communautés, ces Etats ne pouvaient évidemment pas en
reconnaître l’opposabilité. V. S. B. KRYLOV, « Les notions principales du droit des gens (La doctrine soviétique du droit
international) », RCADI, 1947, t. 70, p. 439.
27
En fait, jusqu’à nos jours, l’individu n’est pas encore considéré comme un sujet immédiat du DIP, mais il en est
plutôt un bénéficiaire indirect. Cependant, il est reconnu, à titre exceptionnel, comme sujet du droit pénal international
(Anne-Laure Vaurs Chaumette, Les sujets du droit international pénal : Vers une nouvelle définition de la personnalité
juridique internationale ?, Ed. Pedone, 2009). Il en est de même en droit européen (v. Rondu J., L’individu, sujet du droit de
l’Union européenne, Bruylant, 1re édition 2020). Mais, dans tous les cas, les individus n'ont pas la capacité juridique de
conclure des traités, à moins qu'ils ne soient les représentants d'une personne morale de droit international (Etat ou OI).
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gouvernementales28. Cependant, une telle évolution ne doit pas faire illusion, car
la structure de la société internationale n’a pas changé fondamentalement.
28
V. J. BERBERIS, « Nouvelles questions concernant la personnalité juridique internationale », RCADI, 1983 (I),
pp. 145-304 ; H. MOSLER, « Réflexions sur la personnalité juridique en droit international public », Mél. Offerts à H. Rolin,
Paris, Pedone, 1964, pp. 228-251 ; M. Bedjaoui (rédacteur général), Droit international: Bilan et perspectives, pp. 107 et s. :
Nguyen Quoc Dinh et al., Droit international public, Paris, L.G.D.J., pp. 611 et s ; P.M. Dupuy, Droit international public,
Paris, D., 1995.
Nota : Les États fédérés peuvent avoir cette qualité dans la mesure où cela est prévu par leur constitution fédérale,
comme la Belgique, etc. Ce n'est pas le cas des organisations non gouvernementales, exception faite de la Croix-Rouge qui
possède un statut particulier.
20
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
CHAPITRE I
Si l’idée d’Etat est très ancienne, puisqu’elle remonte loin dans l’histoire
(l’Antiquité, par exemple, a connu la « polis » ou la Cité-Etat, telles Thèbes,
Sparte, Athènes, Rome, etc.), ce n’est qu’à partir du XVIe siècle que la notion
moderne de l’Etat (avec E majuscule) s’est introduite dans le vocabulaire
politique européen. Elle vient du latin status rei publicae (mot-à-mot : état de la
chose publique) qui signifie « la forme de gouvernement » (Stato : en italien,
Staat : en allemand et State : en anglais)29. Elle désigne désormais la structure
institutionnelle qui régit la vie d’une population vivant sur un territoire
géographique donné, qui la contraint et qui l’administre, se caractérisant par une
souveraineté interne et externe. Il est la première des institutions politiques et le
seul sujet du droit qui bénéficie d’un attribut fondamental, à savoir la
souveraineté ou l’indépendance. De ce fait, il est considéré comme étant le seul
sujet originaire du droit international public, les autres étant des sujets dérivés
qui doivent leur existence et leurs compétences à l’Etat.
29
Etymologiquement, elle est dérivée du verbe stare qui signifie au sens premier « se tenir debout », et au sens
figuré « la position». Au XVIIIe siècle, l'état signifie également la condition d'une personne, son « état civil ».
30
Cependant, ailleurs, la plupart des Etats se sont formés soit par accession à l’indépendance de peuples
anciennement colonisés, soit par séparation d’avec un Etat préexistant, soit par son éclatement en plusieurs Etats nouveaux.
En droit international public, ces divers processus sont régis par ce que l’on appelle le droit de la succession d’Etats tel qu’il
a été codifié par les deux Conventions de Vienne : celle de 1978 relative à la succession d’Etats en matière de traités (entrée
en vigueur le 6 novembre 1996) et celle de 1983 relative à la succession d’Etats en matière de biens, archives et dettes d’Etat
(n’est pas encore entrée en vigueur).
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Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Toutefois, malgré leur extrême diversité, les Etats constituent une catégorie
juridique unique. En effet, quelle que soit sa taille, sa forme ou sa puissance
économique ou militaire, du point de vue juridique, l’Etat apparaît toujours
comme une entité abstraite, une personne morale de droit public. Il se présente
comme une institution juridique, détentrice du pouvoir politique et au nom de qui
ce pouvoir est exercé. Il se matérialise par la réunion de trois éléments
constitutifs, à savoir : une population, un territoire et un gouvernement, et se
distingue des autres collectivités territoriales par le critère de la souveraineté.
C’est d’ailleurs en sa qualité d’entité souveraine que l’Etat exerce ses
compétences, tant internes qu’internationales et qu’il est reconnu par les autres
Etats en tant que membre de la communauté internationale et sujet principal du
droit international. Ce qui nous ramène à étudier, d’une part, les conditions
d’existence de l’Etat (les éléments constitutifs de l’Etat et la souveraineté) (Section
1) et, d’autre part, les conséquences juridiques découlant de cette existence
(reconnaissance, acquisition de la personnalité juridique, compétences,
succession, immunités, responsabilité internationale, etc.) (Section 2).
31
Actuellement, on estime que le nombre des Etats dans le Monde se situe aux alentours de 200. Cependant, ils
sont très différents quant à leur population, leur territoire, leurs institutions politiques, leur degré de développement, etc. A
titre d’exemples : USA: 9,15 Mkms2, 267 millions, Vanuatu : 12 000 kms2, 200 000 hts, Monaco : 195 hectares, 5070
monégasques, 29 000 hts. V. la progression du nombre des Etats Membres des Nations-Unies de 1945 à nos jours,
www.un.org › sections › member-states › growth-unite
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A. La population
32
Définition formulée par la commission d’arbitrage pour la Yougoslavie le 29 novembre 1991 , Avis n° 1,
RGDIP, 1992, p. 264.
23
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Jadis, lien personnel unissant des sujets à leur roi, ce lien abstrait rattache
désormais les individus à l’Etat, qui l’octroie unilatéralement selon ses règles
33
La compétence personnelle de l’Etat est celle dont peut user chaque Etat sur ses nationaux (qui lui sont rattachés
par un lien juridique particulier : la nationalité) où qu’ils se trouvent (sur le territoire ou non du dit Etat). Elle comprend la
compétence exercée par un Etat sur les personnes physiques, les personnes morales, mais également les véhicules. Elle est
donc intimement liée à la nationalité.
34
En effet, la population d’un Etat ne correspond pas toujours à une seule et même nation (population homogène).
Il peut, pour des raisons historiques ou autres, englober plusieurs nations dont les membres ont pourtant la même nationalité
(Etats multinationaux): ce fut le cas dans le passé de l’ancien Empire ottoman, de l’ancien Empire austro-hongrois, de l’ex-
URSS, de l’ex-Yougoslavie, c’est le cas encore de la Russie, de la Chine, de la Suisse, de la Belgique, etc.).
35
L’idée d’appartenance à une nation est très récente, puisqu’elle est apparue avec la formation des Etats
modernes en Europe à partir du XVIe siècle. Pendant l’Antiquité grecque et romaine par exemple, on ne connaissait ni
nations ni nationalités mais seulement des cités avec des hommes libres, des esclaves et des étrangers. Et parmi ceux-ci, seuls
les premiers avaient d’ailleurs la qualité de citoyens, avec les privilèges juridiques et civiques qui s’y attachaient, comme la
participation à l’élection des magistrats de la cité.
24
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
36
En ce sens, la Cour internationale de justice, dans un arrêt Nottebohm du 6 avril 1955, précise : « [La nationalité
est] un lien juridique ayant à sa base un fait social de rattachement, une solidarité effective d'existence, d'intérêts, de
sentiments, joints à une réciprocité de droits et de devoirs. Elle est, peut-on dire, l'expression juridique du fait que l'individu
auquel elle est conférée, soit directement, soit par la loi, soit par un acte de l'autorité, est, en fait, plus étroitement attaché à
la population de l'État qui la lui confère qu'à celle de tout autre État. » Cette définition souligne les deux dimensions de la
nationalité : verticalement, la nationalité relie l'individu à l'Etat, lui imposant un certain nombre d'obligations (loyauté,
service militaire…) ; horizontalement, la nationalité fait de lui le membre d'une communauté qui jouit seule de l'ensemble des
droits (droits civiques, libertés publiques, droits civils et professionnels…) qui lui sont attachés.
37
H. BATIFFOL, P. LAGARDE, Droit international privé, Paris, LGDJ, I, 8e éd., 1993, p. 95, n° 59, cité par
Eleanor Cashin Ritaine, « Nationalité étatique : un état des lieux juridique »,
https://www.lalive.law/data/publications/Cashin_Ritaine_Nationalite_etatique.pdf
38
José Francisco REZEK, Le droit international de la nationalité, RCADI 1986, vol. 198, III, p. 333, 341.
39
Ici, c’est généralement la considération de la nationalité parentale lors de la naissance de l’individu qui détermine
la nationalité d’origine (filiation). Souvent les législations consacrent la préséance de la paternité sur la maternité. Ainsi, en
vertu de l’article 6 du DAHIR n. 1-58-250 portant Code de la nationalité marocaine (B.O. 12 sept. 1958, p. 1492) : « Est
Marocain 1°-l'enfant né d'un père marocain ; 2°-l'enfant né d'une mère marocaine et d'un père inconnu ». Toutefois, depuis
l’entrée en vigueur du Dahir n°1.04.22 du 3 février 2004 - 12 hija 1424- portant promulgation de la loi n° 70.03 portant Code
de la famille, Moudawana, le droit est accordé aux enfants nés de mères marocaines d’accéder automatiquement à la
nationalité marocaine (Article 6 du Code).
40
En fait, la nationalité française peut résulter soit d’une attribution ("droit du sang" ou "droit du sol"), soit d’une
acquisition. Ainsi, depuis le 1er septembre 1998, tout enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité
25
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
française à sa majorité si, à cette date, il a en France sa résidence et s'il a eu sa résidence habituelle en France pendant une
période continue ou discontinue d'au moins 5 ans, depuis l'âge de 11 ans. V. https://www.dalloz.fr › documentation ›
Document › O...
41
En effet, outre la manifestation de volonté du demandeur de la nationalité, de nombreuses législations exigent le
respect de certaines conditions (résidence, la preuve d’une bonne conduite, de revenus suffisants, de possessions
immobilières dans l’Etat requis, ou de la connaissance suffisante de la langue du pays et de sa culture, etc. V. Eleanor Cashin
Ritaine, « Nationalité étatique : un état des lieux juridique »
https://www.lalive.law/data/publications/Cashin_Ritaine_Nationalite_etatique.pdf
42
V. Eleanor Cashin Ritaine, « Nationalité étatique : un état des lieux juridique »:
https://www.lalive.law › data › publications › Cas... V. par exemple, la Convention européenne sur la nationalité,
Strasbourg, 6.XI.1997 : https://rm.coe.int › ...
26
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
B.- Le territoire44
En effet, s’il peut exister des territoires sans Etat (« terrae nullius » ou «
territoires sans maître » de jadis, tels l’Antarctique pour des raisons scientifiques45
43
Seuls les nationaux ont un droit « général et absolu » à entrer, séjourner et demeurer sur le territoire national. Le
droit international reconnaît en effet à chacun « le droit d'entrer sur le territoire de l'État dont il est le ressortissant » (art.2
du Protocole n° 4 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales) et de ne
pas « être expulsé, par voie de mesure individuelle ou collective, du territoire de l'État dont il est le ressortissant » (Ibid.,
article 3.). De même, la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 énonce : « Toute personne a le droit de quitter
tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays ». Et l'article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques stipule : « [···] 2. Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien. [···] 4. Nul ne peut être
arbitrairement privé du droit d'entrer dans son propre pays ».
Au contraire, les étrangers ne bénéficient pas de ces mêmes droits, car ils se trouvent placés dans une situation
différente de celle des nationaux qui, eux, ont, en principe, un « droit général et absolu » d'entrée et de séjour dans leur pays
conformément aux règles pertinentes du droit international public.
44
Julio Barberis, « Les liens juridiques entre l'Etat et son territoire : perspectives théoriques et évolution
du droit international », AFDI, Année 1999 45 pp. 132-147 ; Thibaut Fleury Graff « Territoire et droit
international »,dans Civitas Europa 2015/2 (N° 35), pages 41 à 53 : https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-
2015-2-page-41.htm
27
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
45
L'Antarctique est continent situé autour du pôle Sud. C’est un territoire sans population dont la situation juridique
est gelé par le Traité Washington (signé en décembre 1959 et entré en vigueur en 1961) pour 50 ans. Aucune revendication
territoriale n'est donc possible pendant cette période et il doit rester un territoire neutre (non militarisée et non nucléarisée),
entièrement voué à la recherche scientifique. Un protocole additionnel à ce traité (signé à Madrid en 1991) gèle de nouveau
les revendications étatiques pour 50 ans à venir. D’autres conventions environnementales ont été également signées pour
préserver la faune et la flore.
46
V. Article II du Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de
l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, adopté le 5 décembre 1979, ouvert à la signature
le 18 décembre 1979, entré en vigueur le 11 juillet 1984. https://www.unoosa.org/pdf/publications/STSPACE11F.pdf
47
Cependant, malgré cette proclamation, ce n’est qu’en 2009 que cette Autorité présenta un programme
d’édification de l’Etat qui recueille un large soutien international et ce n’est qu’en 2011 que le Président palestinien,
Mahmoud Abbas, présenta une demande d’admission de la Palestine à l’ONU. Certes, au cours de cette même année, la
Palestine fut admise en tant que membre à part entière au sein de l’UNESCO, mais il faut attendre le 29 novembre 2012 pour
que cet « Etat »se voit accorder le statut d’Etat non membre observateur auprès de l’Organisation des Nations Unies
(Résolution 67/19 de l'Assemblée générale des Nations unies, adoptée par138 voix contre 9 et 41 absentions).
48
En effet, ce sont les célèbres traités de Westphalie (XVIIe siècle) qui ont amorcé le morcellement
progressif de l’Europe en Etats souverains. Il en fut de même avec la décolonisation en Amérique latine, au
début du XIXe siècle, tout comme la décolonisation générale du continent africain dans les années 1960, qui ont
produit les mêmes effets : la naissance d'« États nouveaux » exigeant la délimitation d'un territoire « stable et
limité ».
28
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
humaines sont fixées sur le sol49 et l'espace terrestre est pratiquement réparti
entre les quelques 200 Etats qui existent actuellement. Cette portion territoriale,
qui se compose généralement de plusieurs éléments (terrestre, maritime et
aérien), est toujours délimitée par des frontières50.
a- Le territoire terrestre
Le territoire est d’abord terrestre. Il comprend non seulement les terres
délimitées par les frontières, mais également le sous-sol, les mers et eaux
intérieures (lacs, ports, rades, havres, golfes). Evidemment, c’est ce territoire qui
matérialise l’Etat et exprime la fixation au sol, quelque part sur la surface du
globe, de la collectivité nationale, sans exigences particulières en droit, en
termes de taille ou de continuité notamment. Il peut ainsi être très étendu, comme
la Russie, les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, le Brésil, etc., ou de dimension restreinte
comme Monaco, le Liechtenstein, Saint Marin, etc.51
Le territoire national peut aussi être d’un seul tenant ou discontinu, comme
c’est le cas des archipels, de la France avec les départements et régions d'outre-
mer et collectivités d'outre-mer (DROM-COM – tels que : la Guadeloupe, la
Martinique, la Guyane, La Réunion et Mayotte), des Etats-Unis avec l’Alaska et
Hawaï. Il peut également être enclavé : ainsi le Lesotho est enclavé dans la
République d’Afrique du Sud, la Gambie est enclavée dans le Sénégal, Saint
Marin est enclavée dans l’Italie.
49
Maurice Hauriou ne considérait-il pas que : « dans l’histoire de l’humanité, la fixation des
populations au sol a été un événement immense qui a permis, indirectement, la formation des nations et par suite
des « Etats » », in Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 1967, p. 97.
50
Du point de vue historique, ce sont les traités de Westphalie (1648) qui ont amorcé le morcellement
du Saint-Empire germanique en Etats souverains en Europe. Mais, par la suite, la création de nouveaux Etats
était la conséquence du phénomène de la décolonisation (Amérique latine au début du XIXe siècle, Asie et
Afrique au cours de la deuxième moitié du XXe siècle),dont les territoires étaient généralement délimités par
des frontières internationales fixes et continues, héritées du colonialisme sur la base du principe de l'uti
possidetis juris (« vous posséderez ce que vous possédiez déjà »).
51
En fait, si le droit international public exige un espace terrestre stable et délimité par des frontières pour qu’il y
ait un Etat, il est indifférent quant à l’étendue de cet espace.
29
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
b - L’espace maritime
Le territoire des Etats côtiers comporte aussi un espace maritime. Si
pendant longtemps la doctrine défendait le principe selon lequel la mer comme
l’air ne sauraient constituer des territoires et était régie uniquement par le
principe de la liberté des mers et par des règles coutumières, à l’époque
contemporaine, les espaces maritimes des Etats côtiers sont régis par le droit
international, notamment le droit de la mer qui regroupe l’ensemble des règles
relatives à la définition et à l’usage des espaces maritimes telles qu’elles ont été
codifiées par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982
(CNUDM), dite Convention de Montego Bay (Jamaïque)54. En effet, de nos jours,
c’est cette convention qui définit les espaces maritimes sous souveraineté ou
juridiction des Etats côtiers et précise leurs droits et devoirs dans ces espaces.
Partant du littoral vers la haute mer, on distingue les espaces maritimes suivants :
52
En effet, aux termes de paragraphe 4, article 2 de la Charte des Nations Unies : « Les Membres de l'Organisation
s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité
territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations
Unies ».
53
Marcelo G. Kohen, Possession contestée et souveraineté territoriale. Paris, P.U.F. (collection de l’Institut
universitaire de hautes études internationales), 1997, xxv+582 p. Paul Guggenheim Prize 1997,
https://books.openedition.org/iheid/1308?lang=fr
54
Cette convention, dénommée en anglais: « United Nations Convention on the Law Of the Sea / UNCLOS) » a été
conclue et signée le 10 décembre 1982 à Montego Bay (Jamaïque) 1982, en vertu de la résolution 3067 (XXVIII)
l’Assemblée générale de l’ONU du 16 novembre 1973. Elle est entrée en vigueur le 16 novembre 1994, après ratification ou
adhésion de 60 États. Au total, 168 États, côtiers ou non, ont ratifié la Convention. Elle fut ratifiée par le Maroc le 31 juin
2007. Elle comporte 320 articles et prévoit la création de trois instances internationales: le Tribunal international du droit de
la mer, la Commission des limites du plateau continental (CLCS) et l’Autorité maritime internationale. Les deux conférences
précédentes sur le droit de la mer s'étaient tenues en 1958 et en 1960 à Genève .
30
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
la mer territoriale (à ne pas confondre avec les eaux intérieures d'un Etat55), la
zone contiguë et la zone économique exclusive incluant le plateau continental56.
- La mer territoriale est définie comme étant une zone maritime adjacente
aux côtes de l'Etat riverain. Sa délimitation obéissait à l’origine à une
préoccupation essentiellement sécuritaire (défense du territoire terrestre) et sa
largeur était délimitée en fonction de la portée des canons en usage à l'époque,
soit 3 milles marins (5,556 km). Mais sous la pression des pays du tiers monde,
notamment ceux d’Amérique latine, cette largeur a été fixée par la Convention
des Nations Unies sur le droit de la mer (1982) à 12 milles marins ((22,224 km)57,
mesurée à partir de la ligne de base qui correspond à la laisse de basse mer,
c’est-à-dire la limite atteinte par la mer à marée basse (art. 5 de la Convention)58.
55
Les eaux intérieures d'un Etat sont celles qui sont situées en deçà de la ligne de base et sur lesquelles celui-ci
possède tous les droits souverains. Elles comprennent outre les lacs et les cours d'eaux, les ports, rades, estuaires, ainsi que le
sol et le sous-sol de ces zones et l'espace aérien surjacent. Assimilées au territoire terrestre de l'Etat côtier par l'art. 2 § 1 de la
Convention de Montego Bay celui-ci y exerce normalement les mêmes prérogatives que sur la terre ferme. Néanmoins, ces
eaux demeurent soumises au droit d'accès à la mer des Etats sans littoral et à la liberté de transit (titre X de la convention).
56
Ainsi, dans le cadre de la mise en conformité de nos frontières maritimes avec l'évolution du droit de la mer , le
Parlement marocain a adopté les lois n° 37.17 modifiant et complétant le dahir portant loi n° 1.73.211 du 2 mars 1973 fixant
la limite des eaux territoriales, et n° 38.17 modifiant et complétant la loi n° 1.81 instituant une zone économique exclusive de
200 miles marins au large des côtes marocaines. Elles ont été publiées au Bulletin officiel du lundi 30 mars 2020. Ainsi,
désormais, cet espace s'étend de Tanger à Lagouira et se compose des zones maritimes suivantes: la mer territoriale (12 MM),
la zone contiguë (24MM), la zone économique exclusive (200 MM) incluant le plateau continental (de 350 MM au
minimum). Certes cet l'élargissement de nos eaux territoriales s’est effectué en vertu d’actes unilatéraux - textes de loi-, mais
en droit de la mer, lorsque les espaces maritimes de deux Etats riverains se chevauchent (cas du Maroc et de l’Espagne), ces
Etats sont tenus de procéder à une délimitation de leurs espaces maritimes respectifs par voie de négociations (acte
conventionnel), sinon recourir à une procédure de règlement pacifique des différends (art. 15 de la Convention). C’est la Cour
Internationale de Justice (dont le siège est situé à La Haye), Tribunal International du Droit de la Mer (dont le siège est
situé à Hambourg en Allemagne) ou un tribunal arbitral ad hoc qui statue.
57
Cette délimitation de la mer territoriale était directement liée à l’acceptation de l’établissement de
zones économiques exclusives de 200 milles et de la reconnaissance du droit de passage en transit à travers les
détroits internationaux. Jean-Pierre LÉVY , « Les Nations Unies et la convention des Nations Unies de 1982 sur
le droit de la mer», Revue belge de droit internationale, 1995/1 ~ Éditions BRUYLANT, Bruxelles.
58
Toutefois, aux termes de l’article 15 de cette convention : « Lorsque les côtes de deux États sont
adjacentes ou se font face, ni l'un ni l'autre de ces États n'est en droit, sauf accord contraire entre eux, d'étendre
sa mer territoriale au-delà de la ligne médiane dont tous les points sont équidistants des points les plus proches
des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale de chacun des deux États.
Cette disposition ne s'applique cependant pas dans le cas où, en raison de l'existence de titres historiques ou
d'autres circonstances spéciales, il est nécessaire de délimiter autrement la mer territoriale des deux États ».
31
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
59
En fait, compte tenu des droits d'exploitation exclusifs des ressources qu'elle contient, la ZEE est devenue un
enjeu géopolitique majeur pour de nombreux pays côtiers, et une source de conflits pour son contrôle. On peut citer l'exemple
du Maroc qui a adopté deux lois (janvier 2020) délimitant son espace maritime, y compris celui des provinces du Sud
marocain. Ce qui a provoqué une crise diplomatique et territoriale entre notre la Maroc et l’Espagne. Mais, aux rtermes de
l’article 59 de la CNUDM : « Dans les cas où la Convention n'attribue de droits ou de juridiction, à l'intérieur de la zone
économique exclusive, ni à l'État côtier ni à d'autres États et où il y a conflit entre les intérêts de l'État côtier et ceux d'un ou
de plusieurs autres États, ce conflit devrait être résolu sur la base de l'équité et eu égard à toutes les circonstances
pertinentes, compte tenu de l'importance que les intérêts en cause présentent pour les différentes parties et pour la
communauté internationale dans son ensemble ».
32
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Outre ces trois espaces maritimes, les Etats côtiers ont droit à un plateau
continental au large de leurs côtes. Celui-ci se présente en tant que prolongation
naturelle de leur territoire terrestre sous la surface de la mer pouvant s’étendre
jusqu’à 200 milles marins des lignes de base. Il comprend les fonds marins et le
sous-sol jusqu'au rebord externe de la marge continentale ou talus continental (art
76 de la cnudm)60. Il confère aux Etats concernés des droits essentiellement
économiques (exploration des ressources naturelles en vue de leur exploitation)
sans, toutefois, « porter atteinte à la navigation ou aux autres droits et libertés
reconnus aux autres États par la Convention, ni en gêner l’exercice de manière
injustifiable » (art. 78 de la cnudm).
c - L’espace aérien
L’espace aérien est généralement défini comme étant la zone qui surplombe
le territoire de l’Etat (terrestre et maritime62), en deçà de l’espace extra-
atmosphérique63. Il est devenu un élément vital pour les Etats, notamment suite
aux progrès de l’industrie aéronautique au cours de la Première Guerre
mondiale. Ainsi, dès 1919, ils ont solennellement reconnu l’extension de leur
souveraineté complète et exclusive sur l’espace aérien au dessus de leur territoire
60
Lorsque deux Etats sont adjacents ou se font face, la jurisprudence internationale retient alors la règle de
l’équidistance, tout en prenant en compte les «circonstances pertinentes » liées au cas d’espèce afin de parvenir à un résultat
équitable.
61
V. Rés. 48/263 du 28 juil. 1994.
62
La convention de Montego Bay précise à cet égard que « la souveraineté de l’Etat côtier s’étend à
l’espace aérien au-dessus de la mer territoriale » (art. 2, § 2).
63
Le droit de l'espace extra-atmosphérique est régi par le Traité de l’Espace. Néanmoins, la limite
verticale entre l'espace aérien et l'espace extra-atmosphérique n'a jamais été défini par une convention
internationale. Ce serait probablement 100 km, qui définit la limite de l'espace selon la Fédération aéronautique
internationale.
33
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
a- La notion de frontière
La notion de frontière (comme ligne continue et fixe) est relativement
récente66. Son apparition coïncide avec celle du concept d’Etat moderne. En
Grèce antique, par exemple, il n’existait ni ligne douanière, ni ligne militaire. De
même, à Rome, le limes romain (frontières de l’Empire) se présentait comme des
frontières-espace et où s’exerçait la vigilance des légions (l’armée de défense) 67.
Il fallait alors attendre le XVIe siècle pour que les travaux cartographiques en
Europe, rendus possibles par le renouveau des études géographiques et
mathématiques, inspirent l’idée de la délimitation des frontières étatiques68.
64
Il s’agit de la Convention internationale portant règlementation de la navigation aérienne : conclue le
13 octobre 1919 et entrée en vigueur en 1922. Entre autres, il en est découlé la création de la Commission
internationale de navigation aérienne, la CINA.
65
http://www.cesa.air.defense.gouv.fr/IMG/pdf/PLAF_No6_Col_Dupont.pdf
66
Le mot « frontière » apparaît en français au 13eme siècle. C'est alors un « adjectif dérivé de front »,
terme qui se définissait comme mode d’organisation de l’espace séparant deux armées lors d’un conflit armé.
D’ailleurs, jusqu’alors, les royaumes européens n’avaient que des fins, des confins, des marches mouvantes et la
largeur de leurs espaces évoluait en fonction des rapports de force en présence.. Febvre (Lucien), « Frontière : le
mot et la notion », Bulletin du Centre international de synthèse, Paris, XLV, juin 1928, p. 31-44.
67
Le « limes romain », qui représentait la ligne frontière de l’Empire romain à son apogée au IIe siècle apr. J.-C.,
s’étendait sur 5 000 km depuis la côte atlantique au nord de la Grande-Bretagne, traversant l’Europe jusqu’à la mer Noire et,
de là, jusqu’à la mer Rouge et l’Afrique du Nord, pour revenir à la côte atlantique. Il est marqué par des vestiges de murs
bâtis, de fossés, de forts, de forteresses, de tours de guet et d’habitations civiles. V. Frontières de l'Empire romain -
UNESCO World Heritage Centre,
68
En effet, les frontières sont une invention des Etats européens. Leur apparition a accompagné les progrès de la
cartographie et l’affirmation du sentiment national comme ligne de démarcation. Par la suite, a été exportée hors d’Europe,
dans des aires de civilisation où les structures étatiques ne correspondaient pas au modèle européen.( 6) Depuis, ce type de
frontière s’est imposé comme la forme la plus lisible, la plus achevée d’une souveraineté qui finit par faire converger les
principales discontinuités territoriales qu’elles soient politiques économiques ou sociales. Ce type de frontière est associé à
un système de contrôle plus ou moins explicite dont le premier objet est de protéger mais aussi de laisser circuler en filtrant et
en prélevant. V. Karoline Postel Vinay. La frontière ou l’invention des relations internationales. Durand MarieFrançoise,
Lequesne Christian. Ceriscope Frontières, Sciences Po - CERI, pp.1-9, 2011. ffhal-01042237
34
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
territoires relevant respectivement de deux États voisins »69. En fait, ce sont les
traités de paix de Westphalie (province occidentale de l'Allemagne), signés à la
fin de l'été 1648 par les grands Etats d'Europe, qui ont consacré pour la première
fois le tracé des lignes de partage territoriales entre les Etats européens.
Ce sont donc ces traités qui ont donné un sens nouveau aux frontières
internationales en affirmant le principe de souveraineté absolue des Etats-nations
sur leurs propres territoires nationales. Mais c’est l'épanouissement du « principe
des nationalités » hérité de la Révolution française et l’émergence d’Etats-nations
indépendants à travers le continent européen durant le XIXe siècle, (Allemagne,
Italie et les États balkaniques issus de l’Empire ottoman : Grèce, Roumanie,
Bulgarie, Serbie) qui ont fait que la notion de « frontières » désigne désormais une
ligne continue et fixe séparant deux espaces territoriaux sur lesquels s’exercent
des souverainetés distinctes70. Ces frontières internationales sont établies soit par
un acte de droit interne conforme aux règles pertinentes de droit international,
soit par un acte conventionnel, ou encore par un acte juridictionnel.
Les frontières entre Etats peuvent être soit naturelles, soit artificielles. Elles
sont qualifiées de naturelles quand leur tracé est appuyé, à grande échelle, sur
69
V. Dictionnaire de la terminologie du droit international, Sirey, 1960, p. 132.
70
Proposé par le Président américain Wilson Figurant dans son programme de paix en 14 points à la fin de la
Première Guerre mondiale (discours du 8 janvier 1918 devant le Congrès américain), ce principe des nationalités conduit à la
création de plusieurs États indépendants sur les ruines des Empires centraux : Tchécoslovaquie, Finlande, pays Baltes,
Yougoslavie et Pologne reconstituée.
35
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
71
L’Europe constitue à cet égard un excellent exemple. Ainsi, même si les traités de Westphalie de 1648 sont les
premiers à établir le principe de souveraineté des États (on parle de frontière westphalienne) et à instaurer les premiers
principes de tracés des limites à ces États, la moitié des tracés de frontières qui existent actuellement en Europe datent d’après
1945 et plus d’un quart d’après 1990 (éclatement de l’ex-URSS, etc.). V.
72
En effet, la Conférence d’Addis-Abeba a décidé, pour éviter les conflits territoriaux, le maintien des
frontières telles qu’elles avaient été arrêtées entre les puissances coloniales à la Conférence de Berlin (novembre
1884 - février 1885, organisée par le chancelier Bismarck afin d'établir les règles qui devaient présider à la
colonisation de l'Afrique.
36
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
En fait, le tracé des frontières n’est pas toujours une opération paisible, car
il ne se réduit pas à un tracé sur le sol, il concerne aussi les espaces maritimes et
aérien. C’est pour cela qu’il engendre parfois des contestations ou des incidents.
Il peut même être à l’origine de conflits armés localisés ou généralisés 73. Pour
éviter cela, il faut donc, qu’une fois définies par un acte juridique international
(traité international, ou décisions judiciaires, sentences arbitrales...), les
frontières soient reconnues et respectées par tous les Etats, voisins ou tiers.
C.- Le gouvernement
Pour qu’il y ait Etat, il ne suffit pas d’avoir une population établie sur un
territoire déterminé. Encore faut-il que cette population et ce territoire soient
soumis à une forme particulière de pouvoir politique, c’est-à-dire un
gouvernement (pris ici dans son sens large et non pas seulement le pouvoir
73
On citera notamment, pour l’Afrique, les querelles frontalières entre le Maroc et l’Algérie à propos de
Tindouf et Colomb Bechar, entre L’Ethiopie et la Somalie en Ogaden, entre le Tchad et la Libye pour la bande
d’Aozou.
74
V. http://www.venice.coe.int › webforms › documents
37
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
exécutif). Il s’agit là du troisième critère auquel une entité doit satisfaire pour être
considérée comme un Etat. Et si le droit international fût pendant longtemps
indifférent à sa forme, il tient compte de son effectivité (principe qui implique
l’exercice effectif de ses droits souverains et exclusifs sur l’ensemble de son
territoire).
1. L’effectivité du gouvernement
On ne peut pas parler d’Etat s’il n’y a pas de gouvernement effectif,
capable d’assumer les fonctions internes et externes de celui-ci. C’est d’ailleurs
ce pouvoir politique qui incarne l’Etat et qui lui permet d’affirmer son autorité,
d’exprimer sa volonté et de la mettre en œuvre sur l’ensemble du territoire
national. Il lui incombe également d’assurer la sécurité de l’Etat et celle de ses
ressortissants contre tout danger intérieur ou extérieur. Il dispose à cet effet de
l’Administration ainsi que de la force armée (gendarmerie, police, armée).
38
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
75
V. Véronique Huet, « L'autonomie constitutionnelle de l'État : déclin ou renouveau ? », Revue
française de droit constitutionnel 2008/1 (n° 73), pages 65 à 87.
https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2008-1-page-65.htm
39
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
§ 2.- La souveraineté
D’un point de vue proprement juridique, l’Etat peut se définir comme une
personne morale titulaire de la souveraineté. Il revêt donc une double qualité :
d’une part, il est une personne morale de droit public (par opposition à une
personne physique) ; d’autre part, il est une personne juridique souveraine. Mais
ici, nous parlerons uniquement du principe de souveraineté qui est inhérent à la
qualité d’Etat.
76
V. CIJ, Avis consultatif du 16 octobre 1975, Rec., 1975, p. 12.
Dans son arrêt relatif aux Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci du 27 juin
1986, elle a estimé que : « Les orientations politiques internes d’un État relèvent de la compétence exclusive de
celui-ci pour autant […] qu’elles ne violent pas le droit international. Chaque État possède le droit fondamental
de choisir et de mettre en œuvre comme il l’entend son système politique, économique et social ». V.CIJ, Arrêt
du 27 juin 1986 (fond), affaire des Activités….
77
Ainsi, les NU ont pris fait et cause en 1994, pour la 1 ère fois dans une crise purement interne, en
exigeant la restauration de la démocratie à Haïti, après le coup d’Etat militaire qui avait déposé le « président
légitimement élu » (Rés. 940 du CS du 13 aout 1994). Par ailleurs, elles prônent l’application par les Etats des
principes démocratiques contenus dans de nombreux instruments internationaux.
40
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
droit interne, seuls les Etats en tant que tels sont souverains. C’est d’ailleurs dans
la souveraineté que réside la caractéristique juridique essentielle de l’Etat.
Cependant, étant donné que la notion de souveraineté présente une certaine
complexité, il convient d’en déterminer d’abord la signification (A), avant de
parler de ses corollaires (B) et de ses limites (C).
A. – La notion de souveraineté78
41
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Considéré par la C.I.J., comme le principe sur lequel “repose tout le droit
international”82, la souveraineté est l'apanage exclusif de l'État moderne, c’est-à-
dire qu’elle lui appartient en propre, en exclusif, et aucun autre sujet de droit que
lui ne peut la revendiquer. Il en découle que, sur le plan international, la
souveraineté de l’Etat suppose aussi, comme sur le plan interne, que celui-ci
n’est soumis à aucune autorité légale qui lui soit supérieure. L’Etat a alors, en tant
que souverain, une existence indépendante83. D’ailleurs, la jurisprudence
internationale assimile systématiquement souveraineté et indépendance. Ainsi
comme l’affirme Max Huber dans sa sentence arbitrale du 4 avril 1928, relative à
l’affaire de l’île de Palmas (qui opposait les Etats Unis aux Pays Bas au sujet de la
souveraineté sur cette île) : « La souveraineté, dans les relations entre Etats, signifie
l’indépendance. L’indépendance, relativement à une partie du globe, est le droit d’y
exercer à l’exclusion de tout autre Etat, les fonctions étatiques »84.
82 3 C.I.J., arrêt relatif aux activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci,
paragraphe 263.
83
Cette existence indépendante de l'État lui permet, entre autres, d’être doté d'une personnalité juridique
internationale. En perdant sa souveraineté, il perd également sa personnalité juridique : il en est ainsi par
exemple lorsqu'il y a intégration à un autre État, disparition de son existence matérielle, ou scission en plusieurs
composantes politiques ayant chacune sa propre souveraineté. De même, dans le régime du protectorat ou en cas
d'occupation étrangère, la souveraineté de État concerné peut être limitée voire même gelée.
84
Dans cette sentence, Max Huber donna finalement gain de cause aux Pays-Bas car ce pays exerçait
effectivement des fonctions étatiques sur l’île. V.
V. CPA, Affaire de l'île de Palmas (ou Miangas) – RSA, vol. II, p. 227 ...
www.pca-cpa.org/showfile.asp?fil_id=1143
42
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
ce sens que s’est exprimée déjà la CPJI en 1931 (Affaire de l’Union douanière
austro-allemande), en estimant que par indépendance (ou souveraineté) de l’Etat,
il fallait entendre que ce dernier « reste seul maître de ses décisions aussi bien
dans le domaine économique que dans le domaine politique, financier ou autre »85.
85 Avis consultatif du 5 septembre 1931, Recueil CPJI, série A/B, n° 45, p. 45. Dans son aspect positif, la
souveraineté de l’Etat signifie donc que ce dernier dispose d’une pleine et entière autonomie de volonté ; mais
dans son aspect négatif, elle signifie que l’Etat n’est soumis à la volonté d’aucune autre autorité légale qui lui
soit supérieure. De la sorte, l’Etat fédéré, soumis qu’il est aux décisions de l’Etat fédéral, n’est pas un l’Etat
souverain.
86
Nguyen Quoc Dinh et al., Droit international public, op. cit., pp.; P.M. Dupuy, Droit international public,
op. cit., p. 21 , COMBACAU et SUR, Droit international public, op. cit., p.227.
43
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
87
En effet, aux termes de ce texte : « Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations
internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou
l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations
Unies ». Par ailleurs, la RES 1514 (XV) de l’AGNU, du 14 déc. 1960 affirme que «La sujétion des peuples à une
subjugation, à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de
l'homme, est contraire à la Charte des Nations Unies et compromet la cause de la paix et de la coopération
mondiales».
88
V. Rés. AGNU, 2131 (XX) 1965 "Charte de la non-ingérence" "Déclaration sur le caractère
inadmissible de toute intervention dans les affaires intérieures des États et la protection de leur indépendance et
souveraineté"
44
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
89
CPJI, Affaire du Lotus, arrêt de 1927, série A, n° 10, p. 18. Dans cette affaire, un navire français le
"Lotus", a abordé en haute mer le navire charbonnier turc "Boz-Kourt" à la suite d’une faute de navigation. Ce
dernier coula et il y eut de nombreuses victimes. A l'occasion d'une escale du navire français à Constantinople,
l'officier qui était de quart au moment de l'incident fut arrêté, jugé et condamné par les autorités turques. Le
différend fut soumis à la CPJI par un compromis Franco-turc. La question était de savoir si les tribunaux
nationaux sont compétent pour connaitre d'un délit commis en haute mer par un étranger. Thèse
française : loi du pavillon. Thèse turque: compétence universelle lorsque la victime est turque. Rejet de la thèse
française.
45
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
46
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
91
Le droit à l'autodétermination : développement ... - CETIM
www.cetim.ch/fr/documents/cristescu-rap-fra.pdf
92
Ces textes reconnaissent à tous les pays, le droit inaliénable d’exercer leur souveraineté permanente
sur leurs ressources naturelles dans l’intérêt de leur développement national, conformément à l’esprit et principes
de la Charte des Nations Unies. Mais c’est la seconde résolution qui précise davantage les conditions de
l’exercice de ce droit, on peut citer : la mise en valeur des ressources naturelles, quant à l’exploitation et la
commercialisation, doit résulter du choix du pays concerné, et quand l’exploitation est assurée par des capitaux
étrangers, la participation du pays à la gestion, aux avantages et aux bénéfices de cette exploitation doit être
accrue. De même, les investisseurs étrangers devraient participer à la formation du personnel local ; et d’une
manière plus générale, les Etats développés devraient aider au développement économique des pays intéressés afin
qu’ils puissent exploiter et commercialiser eux-mêmes leurs ressources naturelles.
93
Il s’agit de la résolution 2200 A (XXI) qui renferme: le Pacte international sur les droits civils et
politiques (PIDCP) et le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). Ainsi, ce dernier
stipule dans son article 1:
« 1.Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut
politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.
2. Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources
naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe
de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de
subsistance ».
94
Ce NOEI devait être fondé, selon la résolution 3201 (S-IV) de l’GNU : « sur l’équité, l’égalité souveraine,
l’interdépendance, l’intérêt commun et la coopération entre tous les Etats, indépendamment de leur système économique et
social, qui corrigera les inégalités et rectifiera les injustices actuelles, permettra d’éliminer le fossé croissant entre les pays
développés et les pays en voie de développement ». La Charte des droits et devoirs économiques des Etats (résolution 3281
(XXIX) a également ouvert, par ses recommandations, de nouveaux horizons à une souveraineté entière et permanente sur
leurs ressources et richesses naturelles (art. 2), le droit de se grouper en organisation de producteurs de base (art. 5), le droit
47
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
de participer en tant qu’Etats juridiquement égaux aux décisions économiques, financières et monétaires mondiales (art. 10),
le droit d’avoir part aux avantages du progrès et des innovations de la science et de la technique (art. 13), etc.
48
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Certes le Pacte de la SDN ne l’avait pas mentionné d’une manière explicite, mais
la Charte des Nations Unies lui a réservé une place importante en l’intégrant dans
plusieurs de ses dispositions95. Elle en a même fait le premier principe devant
servir à la réalisation des buts des Nations Unies (art. 2, § 1).
a- Affirmation du principe
Depuis son affirmation par la Charte des Nations Unies, le principe de
l'égalité souveraine des Etats a été repris et consacré par de nombreux
documents juridiques internationaux (traités internationaux, actes constitutifs et
résolutions d’organisations internationales, etc.). Il est même devenu un principe
de base des relations internationales contemporaines. Certes son contenu a déjà
fait l’objet de discussions internationales lors de la rédaction de la Charte des
Nations Unies et a été précisé dans les travaux préparatoires96 ; cependant, c’est
la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations
amicales et la coopération des Etats (RES/2625 (XXV) de l’AGNU) qui l’a bien
développé. Elle proclame à cet égard :
« 1.Tous les États jouissent de l'égalité souveraine. Ils ont des droits et des
devoirs égaux, et sont membres de la communauté internationale nonobstant les
différences d'ordre économique, social, politique ou autre.
2. En particulier, l'égalité souveraine comprend les éléments suivants:
a) Les États sont juridiquement égaux.
b) Chaque État jouit des droits inhérents à la souveraineté.
c) Chaque État a le devoir de respecter la personnalité des autres États.
d) L'intégrité territoriale et l'indépendance politique de l'État sont inviolables.
e) Chaque État a le droit de choisir et de développer librement son système
politique, social, économique et culturel.
f) Chaque État a le devoir de s'acquitter pleinement et de bonne foi de ses
obligations internationales et de vivre en paix avec les autres États ».
95
V. art. 2, § 1 ;
96
En effet, à la suite des appréhensions exprimées par certains délégués, le Rapporteur du Comité 1/1 de la Conférence
de San Francisco a fait observer que l’expression «égalité souveraine » comprenait quatre éléments, à savoir: 1) que les
États sont juridiquement égaux ; 2) que chaque État jouit des droits inhérents à la souveraineté ; 3) que l'intégrité
territoriale de l'État doit être respectée ; 4) qu’un État doit remplir loyalement ses obligations internationales ». V. Kéba
MBAY, commentaire de l’art. 2, § 1 de la Charte, p. 85.
49
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
97
Cela se manifeste généralement par un certain nombre d'attitudes et de comportements entre les États. Sur le plan
diplomatique, par exemple, l'égalité des États se traduit par l'égalité des voix et la signature au rang alphabétique dans les
conférences internationales, de même que par les usages protocolaires. Dans le domaine des échanges économiques et des
communications, l'égalité de traitement entre les États est également reconnue, à moins que des conventions n'en disposent
autrement.
98
Roland Drago et Georges Fischer, « Pondération dans les organisations internationales », Annuaire Français de
Droit International Année 1956 2 pp. 529-547
https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1956_num_2_1_1269
50
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Comme nous l’avons déjà souligné, dire qu’un Etat est souverain, c’est
affirmer que sur son territoire, l’Etat exerce seul et d’une manière discrétionnaire
les compétences étatiques. Dès lors, aucun autre acteur des relations
internationales, Etat ou organisation internationale, n’a le droit de se mêler de ses
affaires intérieures. Ce devoir de respecter l’exclusivité des compétences
étatiques est consacré par divers instruments internationaux. Il implique, sur le
plan juridique, deux conséquences distinctes : la non-ingérence dans les affaires
relevant de la compétence nationale et la non intervention.
51
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
52
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
disposition de la présente Charte n'autorise les Nations unies à intervenir dans des
affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État ni
n'oblige les membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de
règlement aux termes de la présente Charte ; toutefois, ce principe ne porte en rien
atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au chapitre VII »105.
Cette conception évolutive (et relative) du domaine réservé, n’a jamais été
démentie ni par la jurisprudence de la Cour internationale de justice, ni par la
pratique des Nations Unies.
105
Toutefois, comme on peut le constater, les textes de l’article 2 §7 de la Charte des Nations unies et de l’art. 15,
§ 8 du Pacte de la SDN ont été rédigés en des termes différents. Ainsi, le premier texte se distingue du second sur trois
points : d’abord, l’art. 2, § 7 de la Charte ne se réfère plus au droit international en tant qu’étalon de mesure du domaine
réservé aux Etats et ne prévoit plus que les organes de l’Organisation exerceront un contrôle des allégations des Etats ;
ensuite il ne s’adresse pas seulement au Conseil, mais à tous les organes des Nations Unies (y compris la CIJ) ; enfin il
introduit le mot vague « essentiellement », au lieu de l’expression « compétence exclusive », ce qui donne une dimension
plus grande au domaine réservé et restreint celui des activités des Nations Unies. Par ailleurs, à la différence du Pacte de la
SDN où le problème du au domaine réservé a été soulevé d’une manière incidente dans le cadre du système de règlement des
différends, la Charte le traite en tant que principe servant la réalisation des buts des Nations Unies. La nuance est
d’importance car, sur le plan de la logique, l’exception occupe une position de second degré par rapport au principe.
D’ailleurs, cette interprétation est corroborée par l’usage de l’adverbe « essentiellement ». Bref, dans la Charte, le caractère
opposable de la compétence nationale semble avoir une portée absolue.
106
En effet, la CPJI affirme dans cet avis consultatif que : « La question de savoir si une certaine matière rentre ou
ne rentre pas dans le domaine exclusif d'un Etat est une question essentiellement relative : elle dépend du développement des
rapports internationaux. C'est ainsi que, dans l'état actuel du droit international, les questions de nationalité sont en principe
de l'avis de la Cour, comprises dans ce domaine ». (CPJI, Avis consultatif du 7 février 1923, Différend franco--britannique
des décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc, série B, n° 4, p. 24). Elle précise encore que, cette théorie du
« Domaine réservé » : « … comprend les matières dans lesquelles l’Etat est libre d’obligation internationale de tout genre
étant donné que seulement pour ces matières il est le maitre exclusif de ses décisions ». Cela confirme donc la thèse suivant
laquelle la compétence exclusive n’est pas absolue mais relative et qu’elle n’existe que dans la mesure où elle n’est pas
limitée par des règles juridiques internationales.
53
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
107
V. www.univ-reims.fr/site/editions-et-presses-universitaires-de-reims/.../40909.pdf
108
On a eu tendance à réserver le terme de non-intervention aux hypothèses où il y avait une menace d’emploi de la
force armée et à utiliser le terme de « non-ingérence » à propos des autres hypothèses (ex : Etat ou organisation se prononcent
sur la situation intérieur d’un autre Etat). Cette distinction ne présente qu’un intérêt limité pour 2 raisons :
- en pratique, la frontière entre intervention et ingérence est mince (ex : militaires qui apportaient de l’aide
humanitaire)
- ingérence humanitaire apparaît comme un prolongement logique de l’intervention (militaires puis humanitaires)
54
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
109
Ainsi, au début du XXe siècle, Tobar , le ministre des Affaires étrangères de l’Equateur n’avait-il pas proposé de
subordonner la reconnaissance des nouveaux gouvernements par les Etats à leur succession au pouvoir par des moyens
démocratiques (ayant obtenu une légitimité constitutionnelle par approbation populaire), doctrine consacrée par une
convention centre-américaine du 20 décembre 1907 et renouvelée par la Convention de Washington de 1923, mais tombée en
désuétude à partir de 1934, par suite de dénonciation de cette convention.
110
En effet, cette dernière déclare dans son article 19 : « Aucun Etat ou groupe d'Etats n'a le droit d'intervenir
directement ou indirectement, pour quelque motif que ce soit, dans les affaires intérieures ou extérieures d'un autre Etat. Le
principe précédent exclut l'emploi, non seulement de la force armée, mais aussi de toute autre forme d'ingérence ou de
tendance attentatoire à la personnalité de l'Etat et aux éléments politiques, économiques et culturels qui la constituent ».
111
Ce traité avait présenté d’une manière systématique les Cinq Principes sur lesquels devaient s’établir les rapports
entre les deux Etats, qui devinrent la base de la politique étrangère de l’Inde par la suite. Il s'agit des principes suivants: 1. du
respect mutuel envers l’intégrité du territoire et la souveraineté de chacun, 2. non-agression mutuelle, 3. non-interférence
mutuelle, 4. égalité et bénéfice mutuels, 5. coexistence pacifique. Ces cinq principes, présentés parfois sous leur désignation
indienne des « principes de l’accord de Panchsheel » , ont eu une large audience et ont été repris par nombreux traités
internationaux, déclarations bilatérales ou plurilatérales, communiqués communs, etc.
55
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
mais aussi toute autre forme d’ingérence ou toute menace, dirigées contre la
personnalité d’un État ou contre ses éléments politiques, économiques et culturels,
sont condamnées ».
112
V. également la résolution 31/91 du 14 décembre 1976
113
V. Résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970)
114
Résolution AG No. 2625 (XXV) du 24 octobre 1970
56
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
115
Les interdictions prévues par la Charte des Nations unies vont donc au-delà des interventions militaires directes
entre États, pour englober des actes qui sont moins graves qu’une attaque armée directe. Cette interprétation fut confirmée
par la CIJ dans son arrêt (Nicaragua c/ Etats-Unis d’Amérique) en date du 27 juin 1986 en estimant que : «l'appui fourni par
les Etats-Unis, jusqu'à fin septembre 1984, aux activités militaires et paramilitaires des contras au Nicaragua, sous forme de
soutien financier. d'entraînement, de fournitures d'armes, de renseignements et de soutien logistique, constitue une violation
indubitable du principe de non-intervention.» (§ 242). Il n’en va pas de même, selon la Cour, des mesures économiques
décidées par les Etats-Unis à l’encontre du Nicaragua (en particulier l’interruption de l’aide économique, réduction brutale du
quota d’importation de sucre ou de l’embargo commercial décrété le 1 er mai 1985). (§ 245).
En 1957 déjà, l’Assemblée générale, dans sa résolution A/Res/1236 (XII) sur les relations pacifiques et de bon
voisinage entre États, parlait de «non-intervention dans les affaires intérieures» des États comme l’un des fondements des
relations interétatiques. Voir également la Charte des droits et devoirs économiques des États (résolution 3281 (XXIX)); la
Déclaration concernant l’instauration d’un nouvel ordre économique international (résolution 3201 (S-VI)); et les résolutions
31/91 (Déclaration de 1976), 32/153, 33/74, 34/101 et 35/159 sur la non-ingérence dans les affaires intérieures des États;
39/210, 40/185, 41/165, 42/173, 44/215, 46/210 et 48/168 sur les mesures économiques en tant que moyen de coercition
politique et économique à l’encontre des pays en développement; et 52/181, 54/200, 56/179, 58/198, 60/185 et 62/183 sur les
mesures économiques unilatérales utilisées pour exercer une pression politique et économique sur les pays en développement.
116
V. Résolution AG No. 2625 (XXV) du 24 octobre 1970
117
Historiquement, ce principe est apparu avec la doctrine Monroe, avec le discours du Président Monroe au
Congrès le 2 décembre 1823, dans lequel il considère que toute intervention des puissances européennes en Amérique Latine
(dans des pays dont USA ont reconnu l’indépendance) comme inamicale à leur égard. Réciproquement, les USA
s’engageaient à ne pas intervenir dans les zones d’influence européennes.
57
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
118 Parmi les cas d’intervention, on peut citer les interventions de l’URSS en Hongrie (1956), en Tchécoslovaquie
(1968), en Afghanistan (1979) ; des États-Unis au Guatemala (1954), en République dominicaine (1965), au Vietnam (de
1964 à 1973), à Grenade (1983), des États-Unis et du Royaume-Uni en Irak (2003) ; de la France et de la Grande-Bretagne en
Egypte (1956).
119
En fait, il est très difficile de déterminer avec précision les hypothèses d’intervention dans les affaires intérieures
ou extérieures d’un Etat, car il n’existe pas de définition générale communément admise en la matière. Mais, selon le
Dictionnaire de la terminologie du droit international, cette notion couvre « toute action impérative d’un ou de plusieurs
Etats pour désigner l'action impérative d'un ou de plusieurs Etats qui, par pression diplomatique, usage de force ou menace
d'en user, imposent ou cherchent à imposer leurs vues à un autre Etat dans une affaire relevant de la compétence de celui-
ci ».Dictionnaire de la terminologie du droit international, (1960), p. 347,
www.ohchr.org/Documents/HRBodies/HRCouncil/.../A-HRC-19-33_fr.p...
58
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
dans le cas d'une intervention utilisant la force, soit sous la forme directe d’une
action militaire, soit sous celle, indirecte, du soutien à des actions armées
subversives ou terroristes à l'intérieur d'un autre Etat ».120
Prohibée par la Charte des Nations Unies et par de nombreux autres textes
internationaux, l’intervention a également été condamnée par la CIJ en des
termes particulièrement vigoureux, en 1949, dans l’Affaire du Détroit de Corfou :
« le prétendu droit d'intervention ne peut être envisagé par la Cour que comme la
manifestation d'une politique de force, politique qui, dans le passé, a donné lieu aux
abus les plus graves et qui ne saurait, quelles que soient les déficiences présentes
de l'organisation internationale, trouver aucune place dans le droit international ».123
Au même titre, la CIJ a condamné dans son arrêt du 27 juin 1986 (Affaire
des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre lui),
l’encouragement et l’assistance à des activités paramilitaires au Nicaragua par les
Etats-Unis, ainsi que des actes d’intervention directe qui violaient l’interdiction du
120
CIJ, Activités militaires et paramilitaires, op. cit., par. 205.
121
Il constitue aussi le corollaire d'autres principes proclamés par la Charte des Nations unies : l'autodétermination,
l'égalité souveraine des États, l'interdiction du recours à la menace ou à l'emploi de la force (sauf en cas de légitime défense
individuelle ou collective contre une attaque armée, ou lorsqu'une action est décidée par le Conseil de sécurité pour répondre
à une menace contre la paix, à une rupture de la paix ou à une agression, ou encore lorsqu'il s'agit d'actions d'organismes
régionaux).
122
V. Doc. Off. De l’AGNU, doc. A/6230, § 291.
123
Affaire du Détroit de Corfou: En 1946, des navires britanniques naviguant dans les eaux territoriales albanaises
explosent sur des mines flottantes. Conséquemment, le RU décide de déminer le Détroit de Corfou sans autorisation de
l’Albanie. Celle-ci proteste et porte l’affaire devant la CIJ considérant que ce déminage constituait une violation du principe
de non-intervention. La CIJ considère que ce principe « interdit aux Etats d’intervenir directement ou indirectement dans les
affaires intérieures ou extérieures d’un autre Etat ». Cependant, dans cette affaire, la GB bénéficie de circonstances
atténuantes du fait du comportement de l’Albanie qui était censée prévenir les navires étrangers de la présence de ce danger
dans ce secteur.
CIJ Rec, Affaire du Détroit de Corfou, arrêt du 19 avril 1949, p. 35.
59
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
124
CIJ Rec, Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre lui, arrêt du 27 juin 1986 , §
212.
125
Ibid. § 202.
126
V. P-M. DUPUY, op. cit. p. 73.
Cependant, l'O.N.U. estime qu'elle a le droit d'intervenir pour assurer le respect de certaines normes fondamentales
(droit de l'homme, non-discrimination) ou du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, et que les Etats ont le devoir de
favoriser le respect de ces normes et droits ; les peuples dépendants, en particulier, ont le droit de chercher et de recevoir un
appui conforme aux buts et aux principes de la Charte (résolution précitée).
127
V. Nguyen Quoc Dinh et al, Droit international public, op. cit., p. 81.
60
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
quelle que soit leur origine et leur portée, elles sont généralement consenties par
les Etats eux-mêmes.
L’application des traités établissant des alliances militaires illustre bien ces
propos, car elle conduit souvent à reconnaître un statut privilégié pour les forces
alliées en stationnement à l’intérieur des Etats signataires129. Mais ne sont liés par
ces traités que ceux qui acceptent expressément de l’être et ne subissent les
limitations de souveraineté qui en résultent que ceux qui y ont consenti
expressément.
128
La Cour permanente de Justice internationale avait rappelé opportunément, dès son premier arrêt, que la
conclusion d’un traité constitue l’exercice de sa souveraineté par un Etat, même si le traité limite ses compétences. Cette
affaire concernait une cargaison de munitions destinée à la Pologne, alors en guerre contre la Russie, et transitant par le canal
de Kiel : “La Cour se refuse à voir dans la conclusion d’un traité quelconque, par lequel un Etat s’engage à faire ou à ne pas
faire quelque chose, un abandon de sa souveraineté. Sans doute, toute convention engendrant une obligation de ce genre
apporte une restriction à l’exercice des droits souverains de l’Etat, en ce sens qu’elle imprime à cet exercice une direction
déterminée. Mais la faculté de contracter des engagements internationaux est précisément un attribut de la souveraineté de
l’Etat” (CPJI, Wimbledon, arrêt du 17 août 1923, série A n° 1, p. 25). Notons que si la souveraineté de l’Etat qui adhère à une
organisation internationale est toujours respectée, puisqu’elle implique, par définition, une manifestation de volonté, en
revanche, elle peut ne pas l’être pour les Etats déjà membres de l’Organisation, si l’admission est décidée à la majorité et non
à l’unanimité, comme c’est le cas, par exemple, à l’ONU (art. 4, 18 et 27 de la Charte).
129
Pacte de Varsovie , le Traité de l’Atlantique Nord (OTAN)
61
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
130
Observations éparses sur les caractères de la personnalité ...https://www.persee.fr › doc › afdi_0066-
3085_2007_nu... ; https://books.openedition.org › iheid ; https://books.openedition.org › pum
131
Sixième rapport de la CDI sur les actes unilatéraux de l’Etat, A/CN.4/534, 30 mai 2003, § 39, p. 11
132
V. Dictionnaire de la terminologie du droit international, Sirey 1960, COMBACAU Jean,
COMBACAU Jean, Droit International Public, Editions Montchrestien, 1979, p : 211 ; Patrick Daillier, Alain
Pellet et Mathias Forteau, Droit international public, LGDJ, 2009, pp.550 et s.
https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1993_num_39_1_3118
133 Ainsi, selon l’article 14 de la Charte de l’OEA : « La reconnaissance implique l'acceptation, par
l'Etat qui l'accorde, de la personnalité du nouvel Etat avec tous les droits et devoirs fixés pour l'un et l'autre par
le droit international ».
62
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
A- La reconnaissance d’Etat135
134
Ainsi, selon un vocabulaire admis en droit international, la reconnaissance serait "l'acte par lequel un Etat,
constatant l'existence de certains faits (un état nouveau, un gouvernement, une situation, un traité, etc . . .), déclare ou admet
implicitement qu'il les considère comme des éléments sur lesquels seront établis ses rapports juridiques, cela avec les
modalités explicites ou implicites que peut comporter cette reconnaissance", (Dictionnaire de la terminologie du droit
international, Sirey 1960).
135
Joe Verhoeven, “La reconnaissance internationale, déclin ou renouveau ?”, Annuaire Français de Droit
International, Année 1993 39 pp. 7-40; rbdi.bruylant.be/.../RBDI%201992.1%20-%20p.%20226%20a%20239%...
63
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Selon cette définition, la reconnaissance d'Etats est donc l'acte par lequel
un Etat existant déclare qu’il considère désormais que tel groupement humain
possède la qualité d’Etat, au sens du droit international137, et qu’il s’engage à le
traiter comme tel dans les relations qu’il entretiendra avec lui à l’avenir. Mais,
parmi les sujets du droit international, seuls les Etats sont susceptibles de
reconnaître ou d’être reconnus. Les organisations internationales n’ont, à cet
égard, aucune compétence. Il n’existe pas, en principe, d’acte de reconnaissance
ayant une portée collective. Cela dit, la reconnaissance d'Etat soulève
généralement toute une série de questions ; mais ci-après nous nous contenterons
d’en traiter les caractères et les modalités d’exercice.
64
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
son avis n°10 du 4 juillet 1992: « un acte discrétionnaire que les autres Etats peuvent
effectuer au moment de leur choix, sous la forme qu’ils décident et librement ».138
Cela étant précisé, en tant que souverains, les Etats sont libres d’accorder
ou de refuser leur reconnaissance à un nouvel Etat, sans avoir à donner de
justifications juridiques à leur attitude. Ils pourraient également subordonner leur
reconnaissance à certaines mesures de sauvegarde de leurs intérêts141 ou encore
l’assortir d’une condition nouvelle de légitimité (d’ordre interne ou
international).142 C’est pour cela que la pratique internationale en matière de
reconnaissance d’Etat est extrêmement fluctuante d’un Etat à l’autre et même d’un
moment à l’autre pour chaque Etat, en fonction de ses intérêts nationaux et les
exigences de sa diplomatie143. Autrement dit, dans leur politique de
reconnaissance, les Etats n’attachent qu’une portée limitée à la condition
d’effectivité : certaines reconnaissances sont manifestement prématurées,
d’autres manifestement tardives.
138
.Avis n°10 du 4 juillet 1992 de la Commission d’arbitrage de la conférence pour la paix en Ex-Yougoslavie .
https://undocs.org › pdf
139
Ainsi, dans une décision du 1er août 1929, le tribunal arbitral mixte germano-polonais a considéré que « pour
qu’un Etat existe et puisse être reconnu, il suffit que ce territoire ait une consistance suffisamment certaine et que, sur ce
territoire, il exerce en réalité la puissance publique nationale de façon indépendante ».
140
V. Avis n°10 du 4 juillet 1992, § 4. Ibid.
141
La reconnaissance conditionnelle consiste, de la part de l'État qui reconnaît, à subordonner l'octroi ou le retrait
de sa reconnaissance à la réalisation de conditions autres que celles qui résultent de situations objectives. Il fait ainsi
dépendre sa reconnaissance d'un événement futur dont la réalisation est incertaine. Par exemple, la reconnaissance du Panama
par les Etats Unis sous condition d’observer les droits américains sur la construction du canal interocéanique.
142
Par exemple, en 1919, la reconnaissance par les Etats alliés des nouveaux Etats d’Europe centrale a eu pour
contrepartie l’engagement pris par ces dernier de respecter le système international de protection des droits des minorités
ethniques . De même, le 16 décembre 1991, la Communauté et ses membres ont adopté les « lignes directrices sur la
reconnaissance de nouveaux Etats en Europe Orientale et en ex-URSS », par lesquelles ils subordonnent leur reconnaissance
à plusieurs conditions (respect des dispositions de la Charte des Nations Unies et des engagements souscrits dans l’Acte final
d’Helsinki et la Charte de Paris, notamment en ce qui concerne l’État de droit, la démocratie et les droits de l’Homme). V.
www.leaders.com.tn/article/3112-etat-de-droit-et-droit-international
143
Cependant, si la reconnaissance est souvent considérée comme un acte unilatéral, « rien ne semble s’opposer à
ce que deux Etats décident, par un accord … d’établir des relations entre eux pouvant être interprétées comme une
reconnaissance mutuelle ». V. Sixième rapport de la CDI sur les actes unilatéraux de l’Etat, op. cit. note 4, § 29, p. 9
65
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Mais si les Etats ne sont pas tenus de reconnaître officiellement une entité
même lorsqu’elle satisfait objectivement aux critères de l’Etat, y a-t-il au contraire
une obligation internationale de non reconnaissance s’il s’avère que le nouvel
Etat s’est formé dans des conditions parfaitement attentatoires à certaines règles
fondamentales du droit international ? Autrement dit, la reconnaissance d’un État
issu d’un acte illicite serait-elle contraire au droit international ?
144
Ainsi, en vertu de la « doctrine Stimson» (du nom du secrétaire d'État américain Henry Stimson qui
l’avait formulée la suite de l’annexion du Mondchoukou par le Japon,), le gouvernement américain avait
indiqué au Japon, dans une note diplomatique du 7 janvier 1932, qu’il « n’avait pas l’intention de reconnaître
une situation, un traité ou un accord quelconque qui aurait été obtenu par des moyens contraires aux
engagements et obligations découlant du pacte de Paris du 27 août 1928 » (ou Pacte Briand-Kellog).
66
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
de reconnaître un Etat créé par une action de force illicite, fut ensuite reprise (le
11 mars 1932) en des termes analogues par une résolution de l’Assemblée de la
SDN145. Cependant cette première tentative de limiter la compétence de
reconnaissance a échoué, puisque plusieurs Etats avait reconnu l’Etat fantoche de
Mandchoukouo.
- Le pacte Briand-Kellogg, ou pacte de Paris (signé le 27 août 1928), est un traité international par lequel
soixante-trois pays signataires « condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends
internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ».
Aristide Briand est le ministre des Affaires étrangères français, Frank Billings Kellogg est le secrétaire d'État
des États-Unis,
Mandchoukouo est le nom de la Mandchourie sous la domination japonaise (1932-1945). Occupée
par les Japonais (septembre1931), la Mandchourie est proclamée indépendante sous le nom de
Mandchoukouo (mars 1932). Mais celui-ci ne sera en fait qu’un protectorat nippon, et ce jusqu'en 1945
145
Selon cette résolution : «les membres de la Société sont tenus de ne reconnaître aucune situation, traité ou accord
par des moyens contraires au Pacte de la SDN ou au Pacte de Paris ».
146
Wilhelm WENGLER « L’interdiction de recourir à la force », http://rbdi.bruylant.be › content › files › Etudes, Éric
Pourcel, « Interdiction du recours à la force : où en est-on ? »,dans Revue Défense Nationale 2017/8 (N° 803), pages 47 à 55,
https://doi.org/10.3917/rdna.803.0047
147
En effet, dans cet avis, la Cour affirmé l’existence d’une obligation de ne pas reconnaître une entité étatique
créée en violation des résolutions en matière de mandats (Rec. CIJ 1971, § 121, p. 55 et § 133, 2), p. 58.) 2) « … les Etats
Membres des Nations Unies ont l'obligation de reconnaitre l'illégalité de la présence de l'Afrique du Sud en Namibie et le
défaut de validité des mesures prises par elle au nom de la Namibie ou en ce qui la concerne, et de s'abstenir de tous actes en
particulier de toutes relations avec le Gouvernement sud-africain qui impliqueraient la reconnaissance de la légalité de cette
présence et de cette administration, ou qui constitueraient une aide ou une assistance à cet égard ». Cette obligation de non-
reconnaissance fut également consacrée par le droit de la responsabilité : art.41§2 : « aucun Etat ne doit reconnaître comme
licite une situation créée par une violation grave au sens de l’article 40 » (normes fondamentales/impératives). Elle vient en
quelque sorte tempérer le caractère discrétionnaire : un Etat est libre de ne pas reconnaître, mais cette liberté est limitée dans
la mesure où il y a des hypothèses dans lesquelles il est obligé de ne pas reconnaître.
67
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
148
Avis no 10 du 4 juillet 1992, loc. cit. De même, selon l’article 41 al. 2 du Projet d’articles de la CDI sur
la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite (2001), texte adopté par la CDI et soumis à
l’Assemblée Générale dans le cadre de son rapport A/56/10 et Corr. 1.: « Aucun Etat ne doit reconnaître comme licite une
situation créée par une violation grave d’une obligation découlant de normes impératives du droit international, ni prêter
aide ou assistance au maintien de cette situation. »
149
Ainsi, dans une Lettre du Président de la République française, M. Nicolas Sarkozy, adressée à M. Fatmir Sejdiu,
Président du Kosovo, Paris, le 18 février 2008, il reconnaît explicitement l’Etat du Kosovo : « Les ministres des Affaires
étrangères des vingt-sept États membres de l’Union Européenne, prenant acte de cette réalité, ont confirmé aujourd’hui
l’engagement européen au Kosovo.
J’ai l’honneur de vous informer que la France, en plein accord avec cette déclaration de l’Union Européenne, et tirant
les conséquences de la résolution adoptée par l’Assemblée du Kosovo le 17 février 2008, reconnait dès à présent le Kosovo
comme un État souverain et indépendant »
150
Toutefois, toute visite d'un chef d'État reconnu à un chef d'État non reconnu n'est pas nécessairement le signe d'une
volonté de reconnaissance : le Président des États-Unis prit soin de déclarer lors de la reprise des négociations de son pays
68
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
avec l'OLP (1998) que son voyage diplomatique ne constituait en aucun cas une reconnaissance implicite de l’Etat
palestinien.
151
Parfois, les deux formes de reconnaissances peuvent se suivre, comme celle de l'Union soviétique par
le Royaume-Uni, intervenue de facto en 1921 puis de jure en 1924, ou la reconnaissance de facto de l'État
d'Israël par les États-Unis en 1948, précédant de 3 jours la reconnaissance de jure du même État.
69
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152
En effet, la personnalité juridique des organisations internationales est plutôt fonctionnelle et donc leur capacité
juridique demeure limitée à la réalisation de ses missions. En conséquence, la reconnaissance d’Etats et de gouvernements est
une décision qui relève exclusivement du domaine de la politique étrangère des Etats qui demeurent libres de reconnaitre ou
de ne pas reconnaitre.
Ainsi, lors de l’admission du Kosovo au FMI en 2009, 5 Etats membres (Russie, Serbie, Grèce, Royaume-Uni, Espagne)
ont expressément déclaré que cette admission ne saurait équivaloir à une reconnaissance du Kosovo comme Etat.
70
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
Il est donc claire que la reconnaissance de l’Etat nouveau n’est pas une
simple formalité, car elle permet à celui-ci d’intégrer la communauté
internationale et d’exercer les compétences juridiques qui sont inhérentes à tout
Etat155. Elle constitue en réalité le point de départ de l’exercice de sa
souveraineté internationale, avec toutes les conséquences juridiques que celle-ci
implique : établissement des relations diplomatiques avec les Etats
reconnaissants, conclusion de traités internationaux, admission au sein des
organisations internationales, légitime défense, etc. C’est ce qui explique le
besoin de tous les Etats nouveaux d’être reconnus par la communauté
internationale, notamment par ses membres les plus influents, car c’est cette
reconnaissance qui leur permet de parfaire leur personnalité juridique
internationale.
153
V. Avis n°8 du 4 juillet 1992 de la Commission d’arbitrage de la conférence pour la paix en Ex-Yougoslavie .
https://undocs.org › pdf
154
V. Patrick Daillier et al., Droit international public, op. cit., p.552, le Sixième rapport sur les actes
unilatéraux des États, op. cit.
155
Serge SUR, « L’inhérence en droit international », RGDIP 2014-4, http://www.afri-ct.org › uploads › 2015/05 ›
SUR...
71
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B. Reconnaissance de gouvernements
156
. Patrick Daillier et al., Droit international public, op. cit., p.553.
72
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157
Exemple de la Lybie après la guerre civile de 2011 où on était en présence de deux gouvernement : le Gouvernement
d’Union Nationale siégeant à Tripoli (dominé par les Frères musulmans et reconnu par la communauté internationale) et celui
de Tobrouk, dans l’est du pays, représentant les partis politiques de tendance nationaliste et soutenu par l’armée nationale
dirigé par le général Haftar. (Reconnaissance du Gouvernement
73
Pr Ahmed EL MEKKAKI : FSJP-K Cours de Droit international public II
158
Parmi ces doctrines, on peut citer la doctrine Tobar qui a été formulée le 15 mars 1907 par Carlos
Tobar, ministre des affaires étrangères de l'Équateur à l’époque. Elle interdisait la reconnaissance de tout
gouvernement dont l’accession au pouvoir ne s’est pas réalisée par des moyens démocratiques : ainsi
espérait-on prévenir les tentatives de conquête du pouvoir par le recours à la force . Cependant, cette
doctrine n’a connu un certain succès qu’en Amérique centrale allant jusqu'à être intégrée dans un traité du 20
décembre 1907, entre le Costa Rica, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Salvador et Équateur, avant de céder
la place à la doctrine Estrada (ministre des Affaires étrangères du Mexique) en 1930. Formulée dans un
document envoyé à tous les représentants du Mexique à travers le monde le 27 septembre 1930, cette
doctrine prétend que les politiques étrangères ne devraient pas juger, positivement ou négativement, les
gouvernements et les changements de gouvernement des autres pays. De telles actions supposeraient une
atteinte à leur souveraineté1. Cette politique était basée sur les principes de non-intervention, des
règlements pacifiques des différends et de l'autodétermination de tous les pays.
Cependant, depuis la fin de la guerre froide, il y a une tendance qui soutient la thèse selon laquelle un
gouvernement arrivé au pouvoir par un coup d’Etat ou une révolution n’est pas légal. Il ne peut donc être
reconnu tant qu’il n’a pas reçu une confirmation démocratique (par un consentement du peuple par
exemple)..
159
Appareil politique permettant à l’État d’exercer son autorité. L’État survit à un gouvernement qui disparaîtrait. La
reconnaissance de gouvernement n’est pas une condition de sa légalité mais de son effectivité . Les r e l a t i o n s
diplomatiques peuvent être rompues sans que cela affecte la reconnaissance.!
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164
V. La reconnaissance des nouveaux Etats et des nouveaux ...https://www.idi-iil.org › app › 1936_brux_01_fr
Jolicoeur, A. (1965). De la reconnaissance en droit international. Les Cahiers de droit, 6(2), 85–92.
https://doi.org/10.7202/1004153ar
165
Toutefois, dans la vie internationale l’Etat survit à un gouvernement qui disparaîtrait (Somalie). Par ailleurs, les
r e l a t i o n s diplomatiques entre Etats peuvent être rompues sans que cela affecte la reconnaissance.
166
Patrick Daillier, Alain Pellet, Droit international public, LGDJ, 6e éd. 1999, p. 562 ; Zakaria Daboné, « Les
groupes armés dans un système de droit international ... », https://international-review.icrc.org › default › files
76
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167
L.C.Green:" Le statut international des forces rebelles"; RGDIP 1962, pp. 5 et ss.
168
En fait, le principe des nationalités est issu de la Révolution française. Il met en avant le droit de
chaque nation à se constituer en Etat indépendant. C’est en vertu de ce principe certains Etats ont été créés en
Europe durant le XIXe siècle tels la Belgique en 1831, la Grèce en 1832, etc. Il a également justifié la création
de nouveaux États en Europe à l’issue de la Première Guerre mondiale, notamment les Etats balkaniques et les
États baltes. En revanche, lors du mouvement de décolonisation au cour des années 1960, ce principe a été
écarté. Mais, pour soutenir les revendications d’indépendance des peuples coloniaux, on a du recourir au
principe du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » ou « droit à l’autodétermination » consacrée par la
Charte des Nations Unies.
169
Patrick Daillier et Alain Pellet, Droit international public, op. cit,, p.564.
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