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Carnets de captivité
suivi de
Écrits sur la captivité
et
Notes philosophiques diverses
Volume publié sous la responsabilité de
Rodolphe Câlin et de Catherine Chalier
Établissement du texte, annotation matérielle, avertissement
par Rodolphe Câlin
Préface et notes explicatives
par Rodolphe Câlin et Catherine Chalier
BERNARD GRASSET/IMEC
Le comifé scientifique réuni pour la publication
des Œuvres d’Emmanuel Levinas
est coordonné par Jean-Luc Marion, de l’Académie française.
ISBN 978-2-246-72721-7
seront respectés, chaque fois que Levinas s'y est engagé lui-même
sans ambiguïté. Mais d'autres recueils plus arbitraires pourront être
démantelés pour replacer leurs composants dans l'ordre chronolo
gique. On pourra aussi recourir exceptionnellement à une double
publication du même article : d'abord dans le volume où chrono-
logiquemènt et conceptuellement il est requis (ainsi « L'ontologie
est-elle fondamentale ? » pour Totalité et Infini), ensuite dans le
recueil validé par Levinas (ici Entre not{s, Grasset, 1991).
L'édition tiendra évidemment compte des inédits, tout en
sachant qù'ils ne seront pas tous immédiatement accessibles,
puisque leur classement dans le dépôt qui a été fait à l'IMEC n'est
pas achevé (bien que leur numérisation le soit). Ces inédits seront
édités dans une section spéciale, dont lies volumes seront publiés
soit avant (par exemple pour les Carnets de captivité), soit après la
reprise des ouvrages publiés du .vivant de Levinas, en au moins
trois volumes.
Sous, réserve'de l'accord final des éditeurs de l’œuvre anthume,
l'édition des textes publiés du vivant et Sous l'autorité directe de
Levirfas se fera en les regroiipant^elon un ordre à la fois chronolo
gique, mais également, quand il sera plus expédient, thématique
(ainsi pour les écrits .dé critique littéraire, les Leçons talmudiques et
les Entretiens).
Chacun de ces volumes sera composé (sur le modèle de l'édi
tion des Husserliana à Leuven) de deux types de textes : d'abord
les textes publiés par Emmanuel Levinas, ensuite le dossier des
articles et des“conférences préparatoires, des recensions contem
poraines et des inédits pouvant concerner l'époque et laiquestion,
à titre à*Annexes et documents
L'édition de chaque volume sera* confiée à un nu plusieurs
responsîtble(s), choisi(s) chaque ibis par le comité scientifique, et
qui valide(nt) le manuscrit final.
Jean-Luc Marion
VIII Carnets de captivité
Le plan général des Œuvres se< présente, à l'automne 2009,
comme suit.
Section I. Les inédits.
Tome L Carnets de captivité. Écrits sur la captivité. Notesphilosophi
ques diverses. Responsables : Rodolphe Câlin et Catherine Chalier.
Tome II. Conférences inédites au collège philosophique deJeaq Wahl
et autres textes. Responsables : Rodolphe Calm et Catherine
Chalier.
TomeTII. Autres inédits.
Section 2. Les textes publiés par Emmanuel Levinas
Tome IV. Philosophie 1.
- La Théorie de Vintuition dans la phénoménologie de Husserl, Alcan,
1930 (avec les compléments).
- De Vévasion (repris de la Revue philosophique, 1935), augmenté
des articles de la période.
- De Vexistence à Vexistant, éditions de la revüe Fontaine, 1947,
repris par J. Vrin, 1947 et 1981.
- « Le Temps et TAutre », in Jean Wahl (éd.), Cahiers du Collège
Philosophique, Arthaud, 1947.
- En découvrant'lexistence avec Husserl et Heidegger, J. Vrin, 1949,
1967, 1974.
Tome V. Philosophie 2 .
-Totalité et Infini. Essai sur Vextériorité, M/Nijhoff, 1961, suivi
d’un dossier.«
- Autrement quatre ou au-delà de Vessence, M. Nijhoff, 1974, avec le
dossier des textes préparatoires.
- De Dieu qui vient à l idée,J. Vrin, 1982,‘avec un ensemble de textes.
Tome VI. Judaïsme. Politique. Critique littéraire.
Tome VII. Entretiens. Varia.Il
Il va sans dire que ce projet subira, à mesure de l’avancement
de sa réalisation, des modifications.
Avertissement
Carnets de captivité
Écrits, pour l'essentiel, durant ses cinq années de captivité,
mais commencés en 1937 et poursuivis jusqu’en 1950, composés
de notations sur des thèmes et des objets d’apparence fort divers,
ces carnets fie sont pas, comme on s’y attendrait, seulement ni
même principalement l’oeuvre d’un philosophe. Ils sont aussi et
d’abord celle d’un romancier, du moins d’un écrivain qui n’am
bitionne pas seulement d’accomplir une œuvre philosophique,
mais tout autant - comme Sartre,? - une œuvre littéraire, plus
précisément, romanesque. Un fragment du Carnet 3 le dit sans
détour : « Mon œuvre à faire : Philosophique ! . ..) Littéraire {»..}
Critique* » ; suivent, sous chaque rubrique, des titres ou l’ihdiea-
tion de thèmes d’œuvres projetées. C’est de cette œuvre, dans sa
triple dimension, qu’il est question dans ces Carnets. C’est dire que
les fragments qui les composent ne sont pas divers, voire disso
nants parce qu’ils aborderaient de multiples sujets, mais d'abord
parce qu’ils parlent sur dés modes très différents.
Et cependant, malgré cette diversité, ils forment un tout. Que
LevinaS'ait jugé bon d'y consigner encore, durant les années de
l'immédiat‘après-guerre, fut-ce, sur deux pages par année, des
a. Carnet 3, p. 32. Toutes les références aux Carnets de captivité sont données suivant la pagina
tion du manuscrit, indiquée entre crochets obliques dans notre transcription.
14 Carnets de captivité
notations, qui n’eussent pas trouvé ailleurs leur place, suffirait à
l’attester. Or, ce qui donne à ces Carnets leur unité, c’est la captivité
elle-même. Non-pas seulement à titre de situation dans laquelle ils
furent, pour l’essentiel, écrits, ou dont ils nous feraient le récit au
jour le jour. Un tel récit en est absent, et des épisodes, des situa
tions vécus, lorsqu’ils sont évoqués, le sont souvent de manière très
épurée : ainsi cette scène au cours du travail quotidien en forêt :
« La méchanceté —deux équipes scient. W. est engueulé - Il est
dépité - mais demain son dépit passera. - Lui dire les méchancetés
dès aujourd’hui. Demain ce sera trop tarda ». C’est d’une manière
moins triviale ou moins évidente que la captivité unifie le propos
des pensées ici rassemblées. C’est au sens où elle entre en résonance,
parfois très forte, avec les trois types d’écriture - philosophique,
critique et romanesque - que mêlent ces Carnets, dont elle devient,
pour cette.raison, parfois le thème explicite.
Commençons par l’écriture littéraire. -L’ambition de devenir
romancier n’aura pas habité Levinas uniquement pendant les
années de guerre, c’est-à-dire ces années où son œuvre de philo
sophe est encore inchoative, «mais, ce qui est plus significatif, au
moins jusqu’au début des années I 960, au moment où il publie
Totalité et Infini, dans lequel sa «philosophie trouve, une ¿première
exposition complète. On lit en effet dans les archives Levinas deux
romans inachevés, le premier intitulé La Damesde chéZ Wepler, le
second, Eros. C’est le second qui nous retiendra ici. Eros, dont
on peut approximativement dater au moins 4’une des campa
gnes d’écritureb-est Lien en effet le romaa^ —ou du moins l’un
des romans, mais il est vrai, celui dont il est le plus fréquem-
a. Carnet 2, p. 19.
b. Le roman est écrit d’abord sur un cahier d’écolier dont les dernières pages sont laissées
vierges et repris ensuite au verso dé morceaux de feuillets volant& (souvent des imprimés datant du
début des années I960), feuillets qui ne se suivent pas toujours. S’il est difficile dq dater l’écriture
sur cahier —il s’agit d’un cahier de mauvaise qualité qui pourrait être ancien ou avoir très rapide
ment vieilli*-, certains éléments nous conduisent à penser que ce rôman a connu au moin^ deux
campagnes d’écriture, et qu’un temps relativement long s'est écoulé entre elles. C’est le fait, d'une
part, que Levinas a changé de support d’écriture, cependant que toutes les pages du cahier n’ont
pas été utilisées, et, d’autre part, que la première phrase que l’on peut lire sur le premier feuillet
volant prend, nous a-t-il semblé, trop ostensiblement l’immédiate suite du cahier.
Préfaçe 15
a. Le*titre de ce roman n’est pas certain. Il ne figure en effet que surie feuillet cartonné plié en
deux à l’intérieur duquel se trouvent le cahier et les feuillets volants {cf. la précédente note). Or,
certains feuillets au verso desquels Levinas a écrit son roman sont des manuscrits philosophiques
portant notamment sur Yeros, thème important, on le sait, de l’œuvre lévinâssiènne. On ne peut
exclure que ce feuillet cartonné ait servi, lors d’une première utilisation, à ranger un manuscrit
philosophique sur l'eros. Une“autre raison peut être avancée : si Yeros, plu$ précisément ici, l’éro
tisme, sont une dimension importante du roman, il n’en est pas, du moins nous a-t-il semblé, le
coeur. C’çsc pourquoi, si rien ne nçus autorise à attribuer à ce romap qui n’est autre que celui qui
s’esquisse à maintes reprises dans les Carnets, le titre qu’il reçoit dans ces derniers, à savojr Triste
opulence - Levinas âyant évidemment pu changer de titre entre-temps —, rien ne nous interdit de
mettre en doute le titre Eros. Par conséquent, chaque fois qu'il en sera question, dans notre pré
face comme dans ies notes d’édition, nous le ferons suivre d'un point d’interrogation placé entre
parenthèses.
b. La D am de chez Wepler se passe également pendant la guerre (l’action se situe précisément
à la fin du^mois de mai 1940), mais celle-ci n’en constitue pas le thème central ; il y est question
de l’obsession du héros pour une prostituée aperçue trois ans plus tôt, dans le hall de l’hôtel
Georges V, et qu’il n’a pas osé approcher, parce qu’il n’a pu à ce moment-là, lit-on, « se détacher
du monde des-responsabilités ». Sans être du tout un roman « érotique », ce roman aborde, dans
des descriptions qui ne surprendront pas le lecteur de Levinas, « l'abîme, y lit-on, qui sépare le
respect du sexüel ».
c. C’est la première partie du roman que l’on peut lire sur le cahier d’écolier. La suite se trouve
sur les feuillets volants {cf. les deux avant-dernières notes).
d. Rennes oh Levinas commença sa captivité, l'Allemagne où, après avoir connu d’autres camps
de prisonniers en France, il la poursuivit et l’acheva. C f infra notice sur les Carnets de captivité.
16 Carnets de captivité
un personnage .nommé Jules*.) Que ces Carnets rédigés pendant la
captivité soient notamment le lieu d'élaboration d'un roman sur
la captivité mérite que l'on s’*y*attarde. Cela signifie en effet que
la captivité n'y est pas seulement réelle, mais également d'em
blée fictionnelle, et que si LeVinas n’entend pas en faire le récit
objectif, c’est parce qu'il entend dès l'abord en écrire le romanb.
Sans doute* est-ce làd'aspect le plus frappant et le plus troublant
de ces Carnets, que des personnes réelles avec qui Levinas a partagé
cette captivité et des scènes de vie captive y soient, dans le même
temps, des personnages et des situations d'un roman sur la capti
vités Que la dure réalité de la captivité y soit dès le début tenue
à distance, déréalisée pour devenir cèlle du roman. Mais cette
déréalisatiQn n'a rien d'accidentel, comme on le voit si l'on veut
bien se pencher, un instant, sur l'expérience qui est au cœur du
roman, et que décrivent déjà de nombreux fragments des Carnets
de ce qui s'intitule encore Triste opulence.
Cette expérience, c’est la défaite de la France, ou, selon l’image
récurrente dans le roman, la chute de la draperie, c’est-à-dire de
l’officiel. Cette cassure du monde de l’officiel, ou plutôt du monde
en tant que, souligne Levinas, il comporte toujours de l’officiel, est
la situation, précise-t-il, non pas « du renversement des valeurs
[...] - du changement d ’autorité - mais de la nudité humaine
de l’absence d’autoritçc ». Cette, sitqation fut certes décrite par
d'autres témoins de la débâcle. Mais elle prend 'chez Levinas
de nouvelles dimensiorfs et une signification plus radicale. Cet
anéantissement de la patrie gagne aussi les choses elles-mêmes,
et, au bout du compte, signifie la fin du sens : « Les draperies qui
a. Même hésitation dans La Dame de chez Wepler. Lors d’une campagne de corrections, Levinas
a écrit « M. Simon » à la plume en surcharge de la première occurrence de « Roland Ribérat »
(écrit, comme la quasi-totalité du roman, au crayon à papier) - les autres occurrences ne sont pas
corrigées.
b. En 1955, Levinas écrivait, à propos du récit de Zvikalitz, Yossel Rakover s’adresse à Dieu, qui
se présente comme le témoignage d’un combattant du ghetto de Varsovie, mais qui est en réalité
une fiction : « Nous venons de lire un texte beau et vrai, vrai comme seule la fiction peut l’être »,
Difficile liberté, Paris, Albin Michel, 1976, p. 189.
c. Page 1 du bifeuillet inséré dans le Carnet 5.
Préface 17
qui tout en étant dans le réel est au-delà du réela », notion sur
laquelle reviennent à plusieurs reprises les Carnets, notamment
au* contact d’Edgar Poe, s’impose ici incontestablement. Et ce,
d’autant que le faiitastique y est reconnu Comme le ressort du
style descriptif du roman tel que le conçoit ’Levinas : dans un frag
ment* où il détaille ses procédés littéraires, Levinas écrit notam
ment : « La situation réelle est décrite sobrement. {On y accède
à travers une porte -largement ouverte.} Mais une petite image
finale, sur laquelle il ne convient jamais d’insister, {comme un
vasistas qu’on entrouvre pour un instant}, y fait {circuler} comme
un courant d’air rapide du fantastique. Toute la “situation réelle”
apparaît au-dessus d’un* précipice. » La captivité apparaît dans
ces Carnets comme la situation fantastique par excellence, et les
Carnets ne sont dès lors -rien d’autre *qu’un roman fantastique de
la captivité.
Il ne sera pas nécessaire d’insister autant sur- les- passages
philosophiques des Carnets, qui surprendront moins le lecteur
de Levinas. Concernant l’ëcho qu’est susceptible d’y rencontrer
la captivité comme épreuve même de la cassure du monde, on
rappellera que c’est sur le thème du « monde cassé » que s’ouvre
le premier chapitre de De Vexistence à l’existantŸ ouvrage •qui fut
justement rédigé en grande partie en captivité, comme-le précise
son avant-propos, rédaction dont les Carnets contiennent de
nombreuses traces.-C’est ce thème du monde cassé, qui, à titre de
moment limite, révèle le fait même de l’être, ou encore Vil y ay
notion centrale dans les'premiers écrits de Levinas, véritable point
de départ de sa réflexion. « Dans la situation de la fin du monde se
pose la relation première qui nous rattache à l’êtreb. » Il est donc à
peine besoin de souligner que la captivité* bien qu’elle ne soit pas,
mis à part dàns *l’avant-propos, évoquée dans cet ouvrage, fut-ce à
titre d’exemple, entre en résonance avec la pensée qui s'y déploie.
a. Carnet 6, p. 3.
b. De l'existence à l'existant [1947], Paris, Vrin, 1978, p. 26.
20 Carnets de captivité
On peut d'ailleurs mentionner, le fait que l’une des chemises
dans lesquelles se trouvent rangés quelques feuillets manuscrits
préparatoires à De l'existence à Vexistant contenus datls les archives
Levinas porte simplement le*titre de.« monde caSsé,», attestant
ainsi l’importance, voire le caractère central d’un thème qui, à lire
le début .du premier chapitre de De l'existence à Vexistant, pourrait
donner l’impression de seryir de simple amorce ,à l’élucidation du
fait mêmede l’exister: Ce qui alors devient significatif, c’est le fait
que Levinas, durant les années de guerre, aura tenté de décliner à
la fois dans, L’écHture philosophique et dans l’écriture romanesque
une même expérience de la cassure du monde. Qu'il y soit finale
ment parvenu en philosophe atteste «ans doute qu’avoir quelque
chose à dire exige encore de lui trouver un langage approprié >4mais
cela ne doit pas faire négliger les tentatives littéraires, ni, surtout,
le concert qu'elles forment avec le propos philosophique. Car la
chose à dire en question s'enrichit incontestablement du fait de
se trouver mêlée à des. tentatives romanesques qui en fournissent
l’illustration, ce qui n'étonnera pas chez un penseur soucieux de
ne jamais-dissocier un concept - ici celui de monde cassé et donc
à'il y a —.des situations concrètes qui l’illustrent —ici lajcapti-
vité.-, au, motif,que la recherche de la <$,“condition des situations
empiriques », doit laisser' «' aux. développements dits empiriques
où*la possibilité conditionnante s’accomplit — à la concréti
sation - un rôle ontologique qui précise le'sens de la possibilité
fondamentale, sens iavisible dans .cette condition“ ».
Au sujet du contenu des fragments, philosophiques des Carnets
de captivité, on soulignera deux, aspects. Les Carnets témoignent
évidemment de la genèse de De l'existence*à l'existant : une majo
rité des fragments philosophiques qu’ils contiennent-en abordent
les thèmes essentiels. Toutefois, les Carnets ne sont pas le lieu
où cette œuvre s’élabore principalement, et ils n’offrent rien de
comparable aux nombreuses pages manuscrites de De l'existence à
l'existant qu’on peut lire dans les archives, et qui permettent assez
a. Totalité et Infini. Essai sur l'extériorité, La Haye, Nijhoff, 1961, p. 148.
Préface 21
qui est d’embiéç fils de Dieu et qui ne se pose que dans la filialité3.
Quoi quil en soit des questions soulevées par la « concurrence »
de ces deux points de départ, le « je » et « l’être-juif », que nous ne
pouvons aborder ici, on voit que le fait de considérer le judaïsme
comme catégorie ontologique revient à faire du judaïsme le lieu
d’une nouvelle interprétation de l’homme et de sa subjectivité. Et
c’est bién ce qui est en jeu aussi dans ces Carnets et qui se cherche,
par exemple, au contact, non d’un philosophe, mais d’un écrivain,
Léon Bloy :»« Exemple de ce qu’est le christianisme dans l’inter
prétation de l’humanité deJ’homme. Tout l’homme est logé dans
les catégories *du catholicisme. Mais tandis que nous autres nous
restons à'ia surface de ces catégories, lui [L- Bloy} en dégage le
sens de feu erde sang, ce sens mystique et transcendant, et il loge
tout ce qui;est humain à ce niveau des catégories^- Même.travail à
entreprendre pour le J<udaïsme>b. ».
C’est d’une manière en apparence plus extérieure que nous
évoquerons la captivité en abordant pour terminer le troisième
type d’écriture à l’œuvre dans*ces Carnets, à savoir la critique litté
raire. Cela ne signifie pas qtfe la captivité ne soit pas intimement
mêlée aux considérations sur la littérature, car l’insistance sur son
caractère* fantastique .s’éclaire-aussi à partir des divers fragments
dans lesquels'Levinas, notamment au contact de Poe ou de Pouch
kine, thématise la notion même du fantastique ; mais elle constitue
d’abord un lieu et une période qui, étonnamment, furent propices
à. la 'lecture et à l’étude : « Toute cette-captivité —avec des longs
loisirs qu’elle a procurés, les lectures qu’on n’aurait jamais faites
a. /2 f Carnet 7,p. 25.
b. Carnet 6, p. 5. Cette critique de Heidegger à partir du judaïsme qui se formule dans les
Carnets de'captivité rie va pourtant pas sans difficulté, comme le souligne la note 20 appartenant^
la liasse D des Notes philosophiques diverses, notjr difficile à dater mais sans doute largement posté
rieure aux Carnets de captivité : « Heidegger - prolongement de la pensée grecque - Lui opposer
le judaïsme ? Mais sa pensée est entièrement christianisée. Lowith lui oppose le monde grecque
(grec). Mais Heidegger se dit prolongement de la pensée grecque. Quels que soient les concepts à
l’aide desquels on voudrait discuter avec Heidegger, Heidegger les dénoncerait comme dépourvus
de pensée parce que encore non révisés à la lumière de sa pensée. - Ce qu’il faut, c’est un point de
vue nouveau. »
24 Carnets de captivité
- comme une période de collège où les hommes mûrs se trouvent,
où l’exercice devient l’essentiel, où l’on découvre qu’il y avait beau
coup de choses superflues —dans les relations,» dans la nourriture,
dans les occupations. La vie normale pourrait donc elle-même être
organisée-autrement. La crise de notre vie d’avant-guerre appa
raît dans cette simplicité4. » Les camps de prisonniers pouvaient
comporter d’abondantes bibliothèques où les prisonniers avaient la
possibilité d!occuper leurs maigres loisirsb. Levinas, astreint pour
tant, comme les autres prisonniers juifs, à des travaux parmi les
plus pénibles de ceux qui furent imposés aux prisonniers, trouvait
les ressources pour y occuper les siens - c’est-à-dire pour y pour
suivre son oeuvre multiforme. L’exigence d’avoir une oeuvre à faire
l’habite profondément, comme le montre ce fragment où il parle*
simplement, de son « envie » pour ceux « qui n’ont pas l’inquiér
tude du temps perdu comme moi ; le souci d’une œuvrec ». C’est
là qu’il fait d’abondantes lectures et qu’il lit, pour la première fois,
ainsi qu’il l’écrit à sa femme, Raïssa, La Divine Comédie de Dante,
ou encore le Rolandfurieux de l’Arioste dont les Carnets de captivité
parlent assez précisément à plusieurs reprises. Si la Phénoménologie
de Vesprit de Hegel constitue sa principale lecture philosophique;
les lectures littéraires sont en revanche extrêmement variées. De ces
multiples lectures ou relectures, et des réflexions qu’elles suscitent,
parfois sur le vif, il faut évidemment mentionner celle de Proust, le
« poète du social », sur lequel Levinas à l’époque projette l’écriture
d’un essai (cf. Carnet 3, p. 32), qui paraîtra en 1947 dans Deuca-
liony et qui s’esquisse dans les Carnets. On retiendra également* la
lecture des Lettres à sa fiancée de L. Bloy, importante ne serait-ce
que par l’abondance des citations de ces lettres dans le Carnet 6.
C’est évidemment, chez Bloy, la conception de la Femme (Levinas
dira du féminin) qui intéresse Levinas, conception à laquelle il se
référera d’ailleurs, explicitement, mais en passant, dans Le Temps et
a. Carnet 2, p. 23.
b. Cf. Y. Durand, Prisonniers de guerre dans les stalags, les oflags et les kommandos, 1939-1945,
Paris, Hachette Littérature [1987], 1994, pp. 186-187.
c. Carnet 2, p. 50.
Préface 25
Conventions éditoriales
—Notre transcription est linéaire et continue, à l’exception
de certains passages donrii n’était pas possible de modifier la
topographie sans prendre le risque d’en altérer le sens. Pour ceux-
là, nous respectons la disposition du manuscrit. De même, nous
avons scrupuleusement respecté le retrait ou l’absence de.retrait
au début du texte en alinéa» j
-^Soucieux de ne pâs paralyser la lecture, nous nous sommes
permis quelques interventions, en ce qui concerne la ponctuation
et certaines incorrections orthographiques. Les fautes d’ortho
graphe sont tacitement corrigées lorsque la correction ne laisse
aucun doute. Nous n'avons ôté aucun signe de ponctuation,.mais
nous nous sommes parfois permis, tacitement, d’en ajouter.
—Les corrections interlinéaires d’Emmanuel Levinas, ses ajouts
interlinéaires ou marginaux sont entre accolades ({}).
-L es ratures, lorsqu'elles*traversent horizontalement un mot
ou plusieurs lignes, sont reproduites dans le corps du texte ; lors
qu’un paragraphe ou plusieurs lignes d’un paragraphe sont- barrés
par une croix de Saint-André, ou par une cancellation en croix,
nous l’indiquons en note.
42 Carnets de captivité
- Les mots ajoutés par nous sont placés entre crochets obliques
(< >).
- Les mots dont le déchiffrement demeure incertain sont suivis
dun point d’interrogation et mis entre crochets obliques (ex. :
<présent ?>) ; lorsque deux lectures sont possibles, la moins
probable se trouve en second, séparée de la première par une barre
oblique (/) (ex. : <affamé/afïairé ?>).
- Les mots que nous n’avons pu déchiffrer sont représentés par
des x (le nombre de x correspond au nombre présumé de lettres)
et placés entre des crochets obliques (<xxx>). Lorsqu’un mot n’est
plus visible à cause de l’altération du feuillet, nous l’indiquons
par un espace blanc entre crochets obliques : < >.
- Une indication factuelle erronée ou encore la substitution
d’un autre mot au mot du texte original dans une citatioti sont
laissées et corrigées de la façon suivante : crecte : ...>.
- Lorsque le texte s’interrompt brusquement, nous le signa
lons, entre crochets : <interrompu>.
- Les passages en langue étrangère (à l’exception des langues
qui utilisent un alphabet autre que l’alphabet latin) ainsi que les
titres d’ouvrages sont mis en italique. Tous les soulignements
sont de Levinas.
Annotations matérielles
La lecture d’un manuscrit a ses exigences propres : au texte
lui-même viennent s’ajouter des éléments signifiants d’ordre non
textuel, que le lecteur intègre pourtant dans sa lecture au même
titre que les signifiants linguistiques (par ex. le changement d’ins
trument d’écriture qui lui indique éventuellement que le texte a
pu être complété ou retouché lors d’une seconde campagne d’écri
ture ; la déchirure visible d’un feuillet, qui lui évite la surprise
d’y lire dans Yincipit la fin d’une phrase dont le reste se trouvait
sur la partie du feuillet qui a été ôtée). La difficulté que rencontre
toute transcription est celle de la restitution de ces éléments
Notice éditoriale 43
a. Faut-il lire « absolue » ? Levinas semble bien ici opposer une évasion relative - qui s’ac
complit encore « sur terre » - à une évasion absolue, comme il le faisait déjà dans Di l’évasion, où
il opposait l'élan vital de Bergson et {'évasion : « Dans l’élan vital nous allons vers l’inconnu, mais
nous allons quelque part, tandis que dans l’évasion nous n’aspirons qu’à sortir » (De l'évasion, op.
dfc, pp. 72-73).
b. Le graphisme est ici incertain. Il est également possible de lire le tiret entre « curiosité » et
« amour » comme un trait d’union, et donc de lire « curiosité-amour des choses » comme un mot
composé ; de même, le mot « affranchissement » peut être lu comme précédé d’un trait d’union,
de sorte que nous aurions le mot composé « curiosité-affranchissement ».
60 Carnets de captivité
Relation de la Wiedergeburt à l’égard de ce <p. 31 > dont il ¿ese est
rené - n’e st pas .elle-même existentielle ou historique. Les criti
ques que Heidegger en ferait valent uniquement de l’évasion dans
l’éternel.
L’entrée dans le monde est l’entrée dans l’être - dans ce fait qu’il y
a - ’naissance*-, Naissance de tous les instants. Recommencement
dans le temps. Interprétation de la création continue. Naissance
- dans la paresse d’être. Paresse d’être n ’est pas la cpeine ?> de
vivre*comme doùceur - la paresse du <découragement ?> même
de la vie.
< — --------------- >
a. Levinas passe au masculin alprs que le pronom renvoie semble-t-il aux,« physionomies ».
Remarque similaire à propos du pronom réfléchi « d’elle-même », qu’ifconvient sans doute de
mettre au pluriel.
b. « au-delà » en surcharge de « au-devant ».
c. 'Au début de la note, « C. » ou alors un crochet ouvrant.
d. Même-remarque que dans la précédente nôte.
66 Carnets de captivité
<p. 12 > Le système s'organise :
Le je à la fois le définitif du présent - c'est par le je que le présent
évanescent se survit mieux que dans* la mémoire (la mémoire
suppose le je). Cet aspect du je : la présence du'moi pour le soi.
- Mais le « je » aussi le non définitif du définitifs- ce-par quoi le
présent doit être réparé - ce par quoi il y a espoir et*espoir pour le
présent. Dès lors la dialectique du salut - la dialectique du je qui
s'affranchit de son intimité. .L'intimité avec autrui. Non pas qu'il
y ait là « fusion avec autrui » - précisément il y ardualité du je. Et
cette dualité sera décrite précisément dans la concupiscence char
nelle —'que l'on prend à tort pour un désir comme un autre. La
sexualité comme origine du social. Parce qu'H y a « intimité » du
sexuel, il y a le phénomène du social qui est plus que la « somme
des individus ».
<p. 13> La caresse et l'accomplisseme' par le corps apparaissent
ainsi. Par l'amour aussi éclaircir le problème de la mort. Nouvelle
lumière projetée sur le couple « mort-amour ». Du sang, de la
mort et de la volupté. C'est aussi sur le plan interpersonnel que se
pose la notion de l'idéal et de l'accomplissement. Vivre « à la face
de Dieu ». L'accomplissement - suppose drame - suppose dualité
de personnes. —Lien dualité et le drame du temps s'éclaircira à
partir de la dualité sociale c’est-à-dire sexuelle. Le Bien - dépasse
l'être.
Quand je pose le sexuel à la base du social - je ne mets pas à
la base de tout le système : le plaisir sexuel, {ou} la libido dont
Freud ne dit rien de plus que kb-reeherc « recherche du plaisir ».
Mais un ordre de relation que l'on peut découvrir dans cette rela
tion spécifique entre personnes qu'est <p. 14> l’amour sexuel.
Edgar Poe. Sous le titre de Deux contes publiés dans Mercure de
France, 16.II. 1911, un conte intitulé Perte dïhaleine, conte qui n'est
ni dans ni hors de « Blackwood ». Traduit par M. D. Calvocoressi.
Dans la partie supprimée par l'auteur dans l'édition définitive
parue dans BroadwayJournal (car d'après le traducteur, il exprime
Carnets de captivité 67
du pur Edgar Poe qui détonait* dans un conte-parodie de Carlyle
et d’Emerson) le passage suivant pages 804-805 du Mercure :
« Ceci donc, méditait mon esprit, cette obscurité qui est palpable
et opprime d’un sentiment de* suffocation ceci —ceci - est -
véritablement la mort. Ceci est la mort - la tetrible mort - la
sainte mort. Ceci est la mort subie par Régulus - et aussi par
<p. 15 > Sénèque. C est ainsi —c’est ainsi que moi aussi je resterai
toujoùrs - toujours - je resterai toujours. La raison est'folie/la
Philosophie un mensonge. Nul'ne connaîtra mes sensations, mon
épouvante —mon désespoir. JSt*pourtant les'hommes1:continue
ront à raisonner, à philosopher, à faire les imbéciles*. Il n’y a, je
le vois bien, point de ci-après que ceci. Ceci —ceci —ceci ^ est la
seule Éternité ! - et quelle, ô Belzébüth"! - quelle Éternité - être
étendu dans ce vaste - ce redoutable^vide - à l’état dé hidéuse, de
vague, d’insignifiante anomalie - sans mouvement, mais désireux
de ipe mouvoir - sans puissance, mais avide d’être puissant -pour
jamais, pour jamais, pour jamais11 ! »
À noter les répétitions qui donnent plutôt le rythme de la situa
tion que des contenus. Mais cette situation n’est faite que de
rythme. {L’« il y a ».}*
< p /l 6 > La réification tju* il*y a toujours à dire : « être ce qu’^ n
est-».-Comme si le phénomène du je était une essence à réaliser.
« Réalisation » n’est toujours Vraie que de la res.
L’opposition même-du possible et de l’existant vient de-la philo
sophie des « res »/Le phénomène du « je » est d’un autre ordre.
Quel est cet ordre ? Solitude ou société; Enchaînement et liberté.
Être oub bonheur.
Je - Solitude. Être seul - seul au monde - solipsisme qui ne
découle pas « de la relativité de no&sensations » et de L’idéalisme.
a. Ne faut-il pas plutôt lire « détonnait » ?
b. « ou » en surcharge de « et ».
68 Carnets de captivité
C’est en posant Ja soKtudeen termes spécifiques du « je » que l’on
peut découvrir le Sens de Ja « collectivité ».
« Ce serait comme on dit porter des vases à Samos, <p. 17 > dès
chouettes à Athènes et des crocodiles en Égypte. » L’Arioste,
Rolandfurieux, chant 4 0 ,112.
La relation de jertu n’est pas si simple —d’où la difficulté du
tutoiement. Les stades dialectiques : tu - enfantin, {de familia.-
rité, de condescendance} ; vous {de respect et d’indifférence}, tu de
l'amitié ou de-lafamiliarité et de l’amour, de l’amour paternel.
Chez Jankélévitch le fait de L’il y a apparaît uniquement comme
le poids de l’existence à la personne - commeT^ennui. Ce qui est
important-chez moi, c’est le plan même d c l’iLy a. Ce n’est pas
l’inexplicabilité ded’existence -» la Geworfenheit13 —mais'l’imposr
sibilité de mourir14.
-Pour Jankélévitch, toute complaisance de la conscience dans
<p. 18> son malheur - est quelque chose de vain —presque de la
vanité, du snobisme - c’est se rendre intéressant pour s'admirer.
Mais n’y a-t-il vraiment rien de plus profond dans la complai
sance dans la souffrance. L’essehtiel n'est-il pas dans le fait que
l’on souffre à la face de J3ieu - .D'ailleurs n ’y a-t-il rien d'autre
que de la vanité - dans le désir de « se <rendre> intéressant ».
Est-ce toujours « paraître intéressant » et jamais « être intéresr
saht ». D'<xx> Différence entre le paraître intéressant ou impor
tant pour les choses .relatives qui est de la vanité, et de l'orgueil* çt
être intéressant pour l’élection divine qui est peut-être le salut.
* C’est dans le désespoir que sont les plaisirs les plus ardent?
surtout*‘quand on a conscience <p. 19> de ce désespoir... »,
Dostoïevski, LEsprit souterrain, p. 165. Traduction E. Halpérine
et Ch. Morice, Éditions Plon15.
Carnets de captivité 69
{Vesoul16}
Respect - perception de la, personne.* Çe qui est .essentiel, c’estde
mystère supposé par le respect. Des êtres,entré eujc —des hommes
—,qui ne se gênent pas pour « leurs J>espins *, qui se connaissent
comme êtres « naturels » avec cetCe soi-disant sobriété, ,« nous
connaissons ce qu’est l’homme » —« on sait que nous avons un
corps, etc. » — ne se connaissent quç comme des êtres matériels
ayant des besoins - Ils reconnaissent leurs droits - droijs a d’indi
vidus ». « Untel a soif », « untel 'a faim, a Insuffisance foncière
de l’homme démocratique - le droit de l’individu ¿ans respect..
<p. 20 > Le charme de la chanson réaliste : un moyen inattendu dè
sincérité..Les sentiments usés,.décolorés de l’existence bourgeoise
- retrouvent comme leur essence.première - dans l’existence qui
semble les avoir entièrement profanés. Une espèce A\Aufbeburig,
Usûre des formes spirituelles et dérivées.
La-bonté du temps, avoir du temps. Si l’éternité est soustraite
à la mort - son définitif a quelque chose de mort,-.de cadayé-
rique. Mais le temps n’est pas seulement la possibilité de réparer
- et par conséquent quelque*chose par rapport au mal, -'mais la
joie'positive du loisir. C’est autre chose.que la possibilité d’éviter
l’alternative —d’avoir.des possibles riches à la.place des réalités
définitives-et pauvres**C’est le honheur même de yivre, de-fairê
une histoire, de vivre une <p. 21 > histoire. Flâner, aller, revenir
sur ses pas. Le bonheur de vivre n’est pas le bonheur *d’etre. L’être
est cadavre. Il y a une profondeur dans la conception romantique
de la vie. Ambiguïté du mot mort : ce qui n’est plus. - ce qui
est immuable. Le bonheur du mouvement, de la flânerie - et au-
dessus —de l’âpre goût-de la vie/qui n’a rien de commun avec la
dialectique du possible et du réel de Jankélévitch17. Commandé
par': avoir du temps.
Claudel vient expliquer l’enfer : <xxx> <xxx> et sens (feu) —par
l’arrêt de l’être corrompu, dans l’éternité dont il est le prisonnier
70 Carnets de captivité
et où il n’a plus le temps de se réparer. Ver - ver rongeur - faim
métaphorique de Dieu. <Sens ?> <p.j 22 > ouvert —ses sens allant
de l'extérieur vers l’intérieur-ét tiré pat Dieu du repos <où> il se
consume. Cela devient feu-et vers célestes, métaphoriques. N ’y
a-t-il pas*, autre chose dahs 1’« intention * de là brûlure et de ha
« faim » ?
Pour l’arlâlyse de Vetvs. Les1sentiments indirects : souffrir de la
souffrance d’âutrui; se réjouir de ses joies. Réflexion sui genefis. Et
caractère infini de cette réflexion.
Martyre. Ce n’est pas seulement le sacrifice de sa vie. Ce qui
importe, c’est la fidélité jusqu’à la mort. On n’ose pas dire que
le malheur est à son comble, que l’abandon par Dieu est total et
que l’heure de la'malédiction est venue car- <p. 23 > on-a encore
le temps. Le martyre est au-delà de cette*fidélité —esttt la fidélité
dans la mort - là où il ne peut plus y avoir de miracle. Et en même
temps lersalut pour le présent*et non pas une simple récompense
dans l’avenir.
Toute cette Captivité —avec les longs loisirs qu’elle a procurés,
les lectures qu’on n’aurait jamais* faites —comme*une période de
collège où les hpmmes mûrs se- trouvent, où l’exercice devient
l’essentiel,* où- l’on découvre qu’il y avait beaucoup de choses
superflues - dans les-relations, dans la nourriture, dans les occu
pations. La’vie normale'pourrait donc* elle-même être organisée
autrement. La crise 'de notre vie d’avant-guerre apparaît dans
cette simplicité.
<— :-------->
<p. 24> Allemagne18
Aspect des prisonniers en Allemagne. Vie monacale ou morale.
Même les vieux ont quelque chose d’innocent et de pur.
a. « est » est répété deux fois.
Carnets de captivité 71
<p. 54> La mise en scène peut tirer quelque chose des pièces de
Labiche. La complexité des situations devient par elle-même une
féerie. Gaston Baty et le Chapeau de paille d’Italie^.
L importance de ’ïïn47. Toute la scène où Samuel ne peut pas
comprendre que Dieu lui parle et où -il va voir Éli : « M’as-tu
appelé ? »
Ivresse n est pas seulement effet du vin. Il y a cè stade du« déta
chement, de la sortie de la vie que l’on peut connaître dans toute
espèce d'excitation. Au Kommando le dimanche soif. La facilité
de tout parce qu'on est détaché de tout.
«aJe Vous interromps ? <p. 55> —Nom C'est-à-dire on inter
rompt toujours.
La plaisanterie d’Anatole France <On espère toujours une sagesse
derrière la plaisanterie. Chez A. F. où la cherche - en vain. Une
plaisanterie qui est pour elle-même. Qu'est-ce qui est sérieux
poür J'âbbé Coignard48 ? Le manger, le boire, les filles, les livres.
Paysage hivernal —plus ' abstrait. Blanc —noir. Dessin plutôt que
peihture. Peut-être plus émouvant pour cette raison. Simplifié,
oneiï Voit les grandes lignes.-Dessin. Surtout le fond des arbres,
droits et noirs avec un blanc trait de neige —et sur fond de neige.
<p.56> La mer et la terre <xx>b paraît que la terre est apparaît
comme un immense scintillement.
La lassitude reposante du bateau. Est-ce la mer ou au contraire le
détaçhement de la terre ? Le caractère insulaire de l'existence. Le
à. ‘Le guillemet fermant manque,
b. Mot effacé ou simple tache ?
84 Carnets de captivité
paradis est un bateau ou une île. Le moment paradisiaque est dans
la barque de Charon.
L’homrtie c’est ce qui ne lutte pas pour la vie. C’est, du moins
le christianisme dans son interprétation de Tolstoï. La notion de
travail qui remplacejcelle de la lutte. « L’idée de lutte ou travail ».
Animaux ne travaillent pas.
Dans la vision blanc noir - l’être le noir. L’absence de lumière
- être.
<p. 57> 1943
1er janvier - Bal musette - Qqch. de creux et de fêlé. Pauvre W.ft
tout petit chétif, avec sa coiffe bretonne. Frénésie —Embrassade
- communion - Joie.
Philosophie - réelle en tant que travail. Le, rôle du travail dans
l’économie de l'être. Travail plutôt qué prophétie.
L’urne est critiquée d’un point de vue auquel la politique apparaît
comme compétence, art ou science. Mais la politique est-elle cela ?
Ni science, ni volonté générale. Mais expression d'un savoir mystique.
« La voix du peuple est la voix de Dieu. » Dès lors l’essentiel <p. 6S>
du scmtin <ce> sont les impondérables et non pas ses moments
clairs. Le nombre = mystère statistique. Toutes les « absences » dans
la décision individuelle. Vraiment opération mystique.
Comme l’animal qui en fuyant précisément laisse sur la neige
immaculée les traces qui permettront de le retrouver.
a. « W. » peut-être pour Weill, personnage d’Eros (?). Notre prudence s'explique par le fait
qu’il est question, dans le Carnet 3, p. 10, d'un certain « Wiech », dans une situation dans laquelle
pourrait fort bien se trouver le personnage d’Eros (?). On ne peut donc exclure que ce personnage
se soit d’abord appelé « Wiech » (sur les hésitations de Levinas à propos du nom des personnages
de ses romans, cf. la préface de ce volume).
Carnets de captivité 85
Les différentes classes st® <me ?^> abstraites les unes aux autres».
Un cordonnier. Un professeur. Impénétrabilité des milieux. [Une
histoire - la connaissance] ЗНаК0МИТЬСЯ5°]ь. Écrire d’une
manière où ces abstractions seraient surmontées. Chaque milieu
a sa hiérarchie - ses mutations, nominations, carrières - où les
autres se réfléchissent cpmme des abstractions.
Les qualités des choses sont des relations. Odeurs, goûts certain1
- Peut-être couleurs. <p. 62 > Ce qui caractérise la chose - c’esrla
continuité. Point de vue philosophique apparaît avec la disconti
nuité et le temps. {Discrétion et secret.}
Navon51 qui me parle de Paris et de son train-train quotidien
comme d’une ville inventée. La réalité pour lui était la petite ville
turque dont il venait était venu il y a 60 ans.
Le lecteur non prévenu de la Bible voit la réalité dans les paroles
et les actes des prophètes. Il lui est presque incompréhensible que
la vraie réalité historique soit dans les actes des rois qui apparais1
sent comme suspendus au-<p. 63 >dessus d’un abîme par leurs
péchés.
Uhomme aux souris blanches qui s’arrête dans une auberge. <xx>
au départ multiplication de*souris dans l’auberge. Souris blanches
aux yeux rouges. Très méchantes. Pour leur extermination appel
à un spécialiste.
Js.c comme catégorie52 : où le salut individuel devient collectif
- n’a qu'une forme collective. Le « je » dans le « nous ».
a. « st » en surcharge de « sociales ».
b. Le crochet ouvrant manque.
c. « Js. » sans doute pour « Judaïsme ».
Carnets de captivité 87
a. « I et V » pour Ille-et-Vilaine.
Carnets de captivité 91
Mme Sirjacq
24, rue des Fossés
Rennes
Croix-Rouge de Rennes
3, rue St-Hélier
Tél : 54-78
Frédéric Haas
6, rue de Paris
Rennes
<p. 73> M. Gustin
7, rue des Moulins
Paris
M. Vandal
Chez M. Lhomault
Place de l’Églisë
Reuilly
(Indre)
<p. 74> Pilotin Félix
63, bd Kellermann
Paris 13e
Duglué
Campel
(I-et-V)
Tleu Duong
Coiffeur
Dynamite
St-Martin-de-Crau
(Bouches-du-Rhône)
92 Carnets de captivité
Devez
Rue du M arais-de-l'Épaix
Valenciennes
M m e Gruel
2 0 , rue de N antes
Rennes
M ichel P ilotin
8 6 , rue Olivier-de-Serres
Paris 1 5 e
Georges Vion
3 5 , passage Bellivet
Caen (Calvados)
Faucher
7 4 , rue V asco-de-Gam a
Paris 1 5 e
Tam buté
Chez M m e Calvet
8 0 , rue de Chézy
N euilly s/Seine
Jean Asselin
Suresnes (Seine)
2 7 , rue D anton
M aurice P erm
9 7 , m e M eurin
à Lille (N ord)
<Placzak ?>
Carnets de captivité 95
<F redy ?>
< xx> < x x x x x x > a
M ax D orât
B ain-de-B retagne
Rennes
(I-et-V )b
a. Il esc difficile de dire si, dans ce fragment, les mots sont raturés ou alors soulignés. Par
ailleurs, les trois premiers noms figurant sur cette page sont barrés d’un trait en zig-zag et l’en
semble de la page l'est par une croix de Saint-André.
b. Cette dernière adresse est écrite dans le sens de la largeur de la page.
<CARNET3>8
’a. Carnet réglé de format 10,5 x 14,5 cm, dont la couverture et certains feuillets ont été arra
chés. L’ensemble est écrit au crayon à papier, sur lequel Levinas a parfois repassé au stylo plume à
encre noire. On note cependant une rature au stylo bille à encre rouge et un mot écrit au craytfn à
papier sur lequel Levinas a repassé avec le même stylo rouge. Le carnet se présentait dans les archives
en deux morceaux, placés l’un à la suite de l’autre, le premier comprenant ies pages 1 à 4 et 21 à
24 de l’actuel ensemble, le second les pages 5 à 20. D’un point de vue matériel, ces deux morceaux
appartenaient manifestement au même carnet ; sur le plan syntaxique et sémantique, les pages 4
et 5 se suivent manifestement ; il semble que ce $oit également le cas des pages 20 et 21, mais on ne
peut l’affirmer catégoriquement, car le dernier mot de la page 20 se laisse difficilement déchiffrer
b. Ce fragment, écrit au crayon à papier, est barré par plusieurs traits obliques écrits au stylo
bille à encre rouge.
98 Carnets de captivité
— les terribles instants « et après ? » - im possibilité de m ourir
— les joies de la vie et l'esclavage. - La jeune fille revient - l'at
tente jalouse — <p. 2 > la caresse sur les cheveux — oh ! la seule la
presque chaste - quand elle dort ou fait sem blant de dorm ir - la
liberté de septem bre 1 9 3 8 -
La guerre — Tout se perd - L'am our pervers de la vie - plus fort
que la m o rt - la volupté de la passivité - D ieu - Rêve de sa propre
fille sous les traits de la jeune fille - la m ère qui veut connaître
l'im age de la jeune fille quand on y a renoncé cependant.
O n ne peut tou t de m êm e pas dire que tou t est connu par l’inté
rieur. L’hom m e envieux, l’hom m e m échant - ne peut être connu
dans,sa m échanceté que de l’extérieur. L’hom m e de rien aussi. Les
hom m es sont en grande partie ce qu’ils sont pour l’extérieur.
Eros devient am our dans la <p. 5 > souffrance par la souffrance (de
l’autre).
h
Souffrance morale - très beau, confortable. Il y a dignité, etc.
Mais^physique est la vraie souffrance — sans blagues.
Roman*
L ajn aison avec l ’entrée de service e t l’autre entrée - парадный
ХОДЪ8 - fermée à l ’aide d ’un verrou de bois — une.grande anti
cham bre froide —on ne sait jamais si la porte a été verrouillée —on
v it par la porte et dans l’espace de service. Le reste est réservé —
pour qui ? pour quand ? La sonnette tournante. — L’appartem ent
quidonge la cour - où l ’enfant nfe descend pas - Les.habitants de
la côur : photographe - M . Sayète avec sa canne et ses deux sœurs
— le tailleur - les divers escaliers de service visibles de la сбит — le
passage qui conduit dehe dans la rue - la vie .des enfants dans la
cour —le balcon sur la rue avec les grands m arronniers —. M on rêve
là-dedans - des hom m es qui rentrent - ils laissent sortir et pour
suivent. L’un d ’entre eux prévient quelqu'un dans l’escalier — et il
ne se passe rien cependant - Il <p. 9> <descend ?> d ’escalier ?>
<, >ft < xxxxxxxxx> que si la porte d ’en bas est fermée j e ‘casserai
les* petites vitres de la p orte d ’entrée ■*- mais aucun em pêchem ent
— il y avait juste.une grande <peur ?> , et lfes hom mes disent tou t
cela pour vous ram ener à vous-m êm e, à vos intérêts réels.
— ------------- - ?
Rom an.
U ne existence où il n’y a pas d ’enracinem ent dans la terre mais
où la vie se passe au m ilieu de courants chauds ou froids, d ’ém o
tions. Telle figure vous ramène à telle région, vous plonge dans tel
courant. L’existence com m e installée dans une région où passent
ces effluves — les êtres vous approchent ^d’abord e em avec leur
nuage d ’atm osphère, com m e une m usique. C om m e un leitm otiv
wagnérien.
a. « Fira » en surcharge de « le ».
Carnets de captivité 103
parente, une juive, tellem ent am ie, qu’on découvre dès la gare
m êm e-où Гоп va justem ent sans décision préalable) - peut-être
disparues® tragiquem ent. Mais c ’e s tF ira qu’on doit revoir encore.
Les réfugiés qui partent avec des charrettes les plus absurdes
- incapable de p artir seul, de rester seul. C om m e la lim ace qui
porte sa Coquille.
Les villes qui ressemblent à <p. 15 > des cirques qui partent.
Garnets de captivité 105
Il ne reste plus rien de la F.b, sauf une adm inistration qpi en assure
la continuité. Discours de Laval du mois de juillet 1 9 4 3 15. Rien,
plus de territoire libre, plus d'arm ée, plus d'em pire, plus de flotte.
Mais <des/les ?> bureaux poussiéreux — les chefs de bureau, les
appariteurs {unijam bistes} - les toiles d'araignée.
V alette avec <ses ?> <chaussures ?> neuves le jour de son départ
< x x > a l’Allem agne.
a. Le mot est illisible, mais il faut peut-être lire « en ». C'est du moins en ce sens que cette
situation sera à nouveau évoquée dans Eros (?).
Carnets de captivité 107
V or<. ?> lui-m êm e porte une telle casquette - les m œurs — enfin
c ’e stçn tré dans les mœ urs. - Le prestige de l’avant la guerre »“ —le
m êm e pour l’ordre npuveau, pour ses distinctions, ses honneurs, ses
fonctions, ses situations. Ah avoir été professeur sous le tsar — ah
avoir été officier sous le tsar - E t voilà brusquement l’ordre nouveau
devient cet avant-guerre prestigieux, apporte ses points fixes pour
la référence —Vor lui-m êm e porte une telle casquette »b.
P our nous les événem ents c ’est vraim ènt la base — de la vie. C ’est
notre vie intérieure.
Triste opulence -
le soir à Alençon -
la hiérarchie s’écroule -
les teintures tom b en t —
les masques pâlissent
les costum es tom b en t21.
a. Cet ajout se trouve en fait sur la page opposée. Il est relié par une flèche au précédent
ajout.
b. L’ensemble du texte de cette page, excepté les deux derniers mots et le nombre « 80 », est
écrit tête-bêche par rapport aux autres pages du carnet, et barré par une croix de Saint-André.
110 Carnets de captivité
Courtois — baraque 16 —
A rgent : hom m e de confiance
P etillot
Lames — peigne — bloc
<x x x x > Tabak
<3qqqcx> 8 0
<300000 20
<3000
A thée-sur-C her
<CARNET4>8
<p. 1> Tram el <penché ?> sur la bruyère <xxk> - voix ém ue,
pleurnicharde - Le chauffeur < xxxx> qui ctieille des fleurs
de bruyère pour sa fem m e et qui dans son effort d accrocher le
Boùquet <autour ?> de la voiture conduit d'une seule main. Le
bouquet qui tom be à plusieurs reprises. La remorque du tracteur
qüi <saute ?> avec les prisonniers derrièrelb.
a. Carnet rçégl^ de format 8 x 1 3 cm. L’ensemble est écrit au crayon à papier. Quelques mots
bu quelques suites de mots sont parfois repassés, soit au stylo plume à encre noire, soit au stylo
bille àrencfë noire.
b. L’ensemble de ce fragment est barré par une croix de Saint7André.
c. « W. » peut-être pour Weill, personnage d'Bros (?).
cl. Mêmé remarque quê dans la précédente note.
112 Carnets de captivité
Réaction étrange devant la vérité qui peut être choquante. Le livre
de Rom ain Rolland sur Gandhi4. Le chapitre sur les sévices des
Anglais <xx> Indes. La vérité de ce choc. <xx> éprouver cela devant
les su p p licatio n s ?> <p. 3> de pas mal de justes malheureux.
La draperie qui tom be. Le monde qui apparaît dans ses contours
<nus ?> - Le monde toujours com porte de T« officiel » - la
draperie de 1’« officiel » — c ’est cela la patrie. La chute de la
draperie - la défaite. D écrire dajis la scène d ’A lençon le rythm e de
cette chute. Il n ’y avait plus d ’officiel. R ien n’était plus officiel.
Théorie du besoin
La relation avec les choses - est se réfère au besoin. Ce n'est pas
le m aniable, mais l ’utilisable. D ès lors le L’utilisable - n'est pas
a. Un trait traverse, plus qu’il ne souligne, les cinq mots qui précèdent et qui occupent toute
une ligne flans le manuscrit. Il ne s’agit sans*doute paç d’un soulignement, ni d’une rature, mais
plutôt d’un trait de séparation marquant la fin de ce fragment dont Levinas aurait finalement
décidé de prolonger*l’ècriture.
120 Carnets de captivité
Som m et - vision - embrasse un large horizon - Profondeur
- source nourricière - abîm e. M ystère existentiel — opposé à la
lum ière de la vision.
{1 9 4 4 }
Le rêve de lévitation. Les gouffres traversés par un effort de
volonté. C ç n'est pas le vol — m ais une toute-puissance à l'égard
de l'espace.
a. « un » en surcharge de « 1* ».
Carnets de captivité 123
La possession— c est la <p. 5 5 > m ain qui prend, m ais c est aussi
le bras qui étreint.
Exem ple d'un pari avec D ieu : verglas - retour chez soi - il reste
quelques m ètres à parcourir - j'ai tous les moyens — indépend* de
D . d ’arriver - glisserai-je ?
Phantom es4 - ils <p. 61 > accom plissent les gestes dans la réalité
sans réalité — non seulem ent absence d ’objets mais absence de
progrès, d'accom plissem ent.
L'année de captivité — les gestes quotidiens sont cela. Vision de
toutes ces forêts, de toutes ces maisons délabrées, habitées par
nous - blagues de < xxxxx x > Jo jo et R oro - Frühstuck < xx> Mittag
— outils, etc.
< recto > Il existe un tem ps calqué sur l’espace. C ’est le tem ps dû
travail - il se mesure par l’intervalle à parcourir pour prendre.
Que le besoin soit autre chose qu’un manque — cela découle aussi
du fait que se nourrir est < f.2 , verso > autre chose qu’absorber des
calories.
<------------- >
<feuillet isolé 3 C>
a. Carnet réglé de format 10,5 x 14,5 cm. Le texte est écrit au crayon à papier, à l’exception
d’une rature, qui est au feutre bleu.
132 Carnets de captivité
tache à une m ultip licité de sens. Alors il fonctionne com m e le fait
nu de signifier sans signifier un objet déterm iné. C e s t le vague du
poèm e. Par là le m ot se rapproche du son m usical - Mais on peut
aller plus loin encore : le récit, l'im age, la m étaphore - peuvent
se détacher de leur signification objective et fonctionner en tant
que <p. 4 > fonctionnant. — O n peut aller m êm e plus loin : le
concept philosophique peut aussi se dém atérialiser de la sorte et
devenir com m e l’art lui-m êm e une connaissance profonde. - Ce
détachem ent de la signification objective donne à l'art le caractère
de jeu. Les événem ents objectifs n’ont pas de valeur propre. Toute
l’œuvre est en quelque m anière sans conséquence.
Paix m ieux et plus que 1’am our —p aix p e u r être <p. 15 > la forme
supérieure de l'amour. L'am our c ’est la vie'de la paix. Ce par quoi
paix n ’est pas inertie. Ê tre avec les autres - avec leur m ystère
- sans lutter.
Scène d ’Alençon : le -let tres papier à lettres qui sert à faire une
om elette.
<p. 1 6 > Le bureau de tabac - avec l’ordonnancement des paquets
et-la sensation spéciale de fraîcheur qui lui est propre — transporté
dans les ru e s... Le pillage des,vitrines — les gens qui em portent ce
qui n’a aucun sens : un paquet de papier à lettres — court embar
rassé - se trouve ridicule dans la mêlée. A u m ilieu de tou t cela le
notaire' R oger qui va à l’essentiel : la brosse qui pourra servir, la
poêle qui seça utile, e tc.8
<p. 19> C om m e {les couleurs} sur le cou de la colom be, les âges
variaient sur la figure de la fem m e qui passait.
Lim ites du sociàlisme. Tout le <problèm e ?> <p. 2 0 > de l’am our
— ne pas jouir des biens < xxxxx> - pour abolir la lutte. Seiis
profond de l’ascétism e. Se dépouiller en vue de la contem pora
néité pure.
<p. 21 > Insister dans tou t m on travail sur le rem placem ent de la
relation de possession par la relation de participation. La posses
sion est déjà dans la substance ayant.des accidents.
La. m ain de fem m e, <p. 31 > cette toute p etite m ain qui forme
le chez soi d ’une façon définitive ' {lui doûne une souvefaineté}
- iL devient le m onde et il est fermé sur le monde. La source du
bonheur privé, la puissance du bonheur privé.
Le critique - celui qui par essence peut dire autre chose que
{répéter} cette œ uvre m êm e (= essence de Kartiste).
a. Plus des deux tiers du feuillet ont été déchirés dans le sens de la hauteur. Levinas a écrit sur
la partie restante.
b. Le guillemet fermant manque.
142 Carnets de captivité
Dans ma* philosophie,* <p. 4 l > étude de la signification de" Ta
sensation : vision —lum ière —raison ; ouïe voix —verbe ; toucher
- caresse - am our ; goû t (odorat) - m anger - besoin. E t cepen
dant à côté de *o u t cela demeure la sensation dans sa m atérialité
pure, objet de l’esthétique ; vision — couleur, ouïe - .son, verbe
- rythm e, etc.
N ouvelle lettre d ’E ssia17 < x x x x x > a 7 m ois — Elle est tellem ent à
lui - Jalousie — Sentir la carte - chercher le parfum - pas le sien
- mais un parfum de femme.
« Le cre cte : U n > cygne d ’autrefois seft souvient que < c ’est> lui
M agnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n ’avoir pas chanté les cre cte : la> régions où vivre
Quand du stérile hiver <a> resplendit l’ennui » ,
M allarm é18.
C ’est la m o rt - dans le sens de l’instant — de tte m a philo.
a. « se » en surcharge de « c’est ».
Carnets de captivité 145
Q uand je dis que Proust est un poète du social et que toute son
œuvre consiste à m on trer ce qu’est une personne devant l’autre,
je ne veux pas évoquer sim plem ent l’ancien thèm e de la solitude
fatale de chaque être (Cf. Solitudes d’Estaunié19) - la situation est
<p. 5 2 > différente : à un être tou t de l’autre est caché — mais
il n’en résulte pas une séparation — c ’est précisém ent ce fait de
se cacher qui est le ferm ent de la vie sociale. C ’est m a solitude
qui intéresse autrui et tou t son com portem ent est une agitation
autour de m a solitude. M arcel et Albertine - c ’est cela. L’œuvre si
large de Proust aboutit à ces deux thèm es d'A lbertine prisonnière
et possédée qui n’est pas distinct d ’A lbertine disparue et m orte.
.<p. 5 3 > Son tourm ent qui fait son lien avec elle, c ’est qu'il y a
tan t'd e choses d ’elle - de choses simples, attitudes, gestes, pose
- qu’il ne connaîtra jamais. E t ce q u ’il connaît d'elle est dom iné
par ce q u ’il ignore à jamais - puisque toutes les évidences objec
tives d'elle sont moins fortes que les doutes qui resteront à jamais
en lui - et qui sont sa relation avec A lbertine.
<p. 2> Le m ystère — qqch. qui n’est pas de l’être et qui n’est pas
du néant. La nuit - l’éclairage des étoiles - en quoi consiste le
myséère dont il enveloppe la réalité ?
<p. 3> L’encom brem ent du m oi : la com édie que le soi joue pour
le m oi. Situation des Faux-monnayeurs de Gide.
R om an
La jeune fille d ’autrefois - annonce son enfant de trois mois.
Tendresse infinie. Filialité.
a. Carnet réglé de format 10,5 x 17 cm. Le texte est écrit au crayon à papier.
b. Guillemet incertain.
c. Phrase diffiçile à reconstituer en raison des ajouts, surcharges et rafures parfois incertaines. Il
faut peut-être lire : « Ces secousses qui venaient du fond de moi me devenaient étrangères, comme
si elles n’avaient pas pu partir de rfioi confine de leur centre. »
150 Carnets de captivité
Les états de conscience ne sont pas états, ni m êm e intentions
- mais m ouvem ents : savoir, {foi} englobe, com prend le doute
- il est le m ouvem ent dont le doute fait partie {dans le désespoir
du savoir, il y a < xxxx> < savoir ?> } ; am our com prend <p. 2>
impossibilité d ’amour, etc.
Le chien Bobby est sym pathique parce qu’il nous aim e sans arrière-
pensée, en dehors de toutes nos distinctions et règles sociales1.
a. « j. * pour « judaïsme ».
b. Il convient de ne pas lire ce mot.
152 Carnets de captivité
{B loy}
Exem ple de cette interprétation de sa vie à l’aide de catégories
chrétiennes. « Le boulevers* énorme <p. 7 > qui m e rendait hier
quasi insensé n'existe déjà presque plus. La tem pête va s’apaiser
et le Seigneur Jésus pourra m archer dans sa gloire sur les flots de
m on âm e to u t à fait dom ptée8. » L ettre qui suit celle du 8 /9 / 8 9
et qui est datée dim anche m atin , cinq heures — « A h ! la dignité,
la D ign ité des âmes m édiocres, il y a longtem ps que je la connais,
cette sinistre dérision de m on R édem pteur crucifié9 ! », 2 4 /9 /8 9
- « par respect p o u rv o s admirables plaies10 », 5 / 1 0 / 8 9 - « M on
adorable Sauveur Jésus, qui êtes crucifié, par m oi, pour moi,- en
m oi, depuis deux m ille ans11. . . » , 5 / 1 0 / 8 9 .
Bloy
« J e suis triste naturellem ent, com m e on est p etit ou com m e on est
< p ..l.l> blond. J e ^ u is <né> triste, profondém ent, horriblem ent
triste ¿et si je suis possédé du désir le plus violent de la joie c'est en
vertu de la loi mystérieuse qui attire, les contraires*.. M algré L’a t
traction puissante exercée sur m oi par l ’idée v agu e,d u bonheur,
ma. nature plus puissante encore m ’incline vers la douleur, vers
a. « un » en surcharge de « T ».
b. « un » en surcharge de « le ».
c. Il faut sans doute lire « elle ».
154 Carnets de captivité
la tristesse, peu t-être vers le désespoir... Ce seul m ot de m alheur
m e transportait d'enthousiasm e. J e pense q u e je tenais cela d e m a
mère dont l’âm e espagnole était à la fois- si ardente et si som bfe et
le principal attrait du christianism e a été pour m oi l'im m ensité
des douleurs du C hrist, la grandiose, la transcendante horreur cfe
la <recte : sa> Passion. Le rêve inouï de cette amoureuse de Dieti
—qui dem andait <p. 12 > un paradis de tortures*;'qui voulait souf
frir éternelle1 pour J . Ch: et qui concevait ainsi la béatitude me
paraissait alors et me paraît encore aujourd’hui la plus sublime de
toutes les idées hum aines16 >>,* L ettre du 21 X I 8 9 .
& Ce q u ’il y a de plus dur pour l’âme c ’est de souffrir, je>ne dis
pas pour les autres, mais dans les autres. Ce* fut* la plus terrible
agonie du Sauveur. Par-dessous l’effroyable Passion Visible du
C hrist, au-delà de cette procession de tortures et d ’ignominfes
dont nous avons déjà tant de peine à <p. 25 > nous form er uñe
vagué idée, il y avait sa Compassion q u ’il nous faudra l’Éternité
pour com prendre - compassion déchirante, absolum ent ineffable
qui éteignit le soleil et fit chanceler les constellations, qui lui fit
suer le sang avant son supplice qui lui fit crier la soif et dem andêr
grâce à son Père pendant le <recte : son > supplice. S’il n’y avait pas
eli cette compassion épouvantable, la Passion Physique n 'e û t été
peuf-ûtre pour N otre Seigneur q u ’une longue ivresse de volupté;
quoiqu’elle ait été, e tc.32 » — « C onsidère‘que J . souffrait dans son
cœ u r avec tte la science d ’un D ieu et que dans sdn cœ u r il y avait
tous les cœ urs humains avec ttes leurs <p. 2 6 > douleurs depuis
A dam jusqu’à la consom m ation des siècles. A h ! oui, souffrir poûr
les autres cela peut être une grande joie quand on a l’âm e géné
reuse, mais souffrir dans les-autres, voilà ce qui s’appelle vraim ent
souffrir33 », 7 /1 2 /8 9 -
« Il est toujours bon de voir la m o rt et je suis heureux que cette
vue t'a it rem plie de la présence de D ieu. C ’est un signe pour
reconnaître les âmes supérieures. Les chrétiens doivent être co n ti
nuellem ent inclinés sur les abîm es34 », 1 1 /1 2 /8 9 -
« J e suis très m alheureux, ^sans doute, mais j’ai, quand m êm e,
tant d ’espérance et puis, qui sait ? p eu t-êtrre q u ’il se m êle, sans
que je le sache, à l’expression de mes chagrins, un peu de littéra
ture33 », 9 /1 /9 0 .
Carnets de captivité 159
{1945 }
S1 Paul, É p ître aux Rom ains.
D ieu qui réveille les m orts et donne un nom à ce qui n'est pas
côm m e si cela existait46.
Q ’c ~
Il y a des réalités q u ’on ne peut <p. 3 6 > pas em porter avec soi
quand on m onte. Ce qui ne veut pas dire q u ’elles sont inférieures.
Dans les contes fantastiques d 'E d gar Poe - l'essentiel de son art
- le genre de beauté qu'il a trouvé com m e dirait Proust - e e s t
au niveau de la sensation. Ce qui est fantastique ce sont certains
aspects im m édiats de la perception : le cœ u r qu'on angoissé4 qu'on
entend battre com m e une m ontre dans du coton ( <Le> Cœur révé
lateur), lab
Capitaine N azare-A ga
3 , avenue Pierre-de-Serbie
Paris 1 6 e
R aïa 8 . IL 4 4 <xx>
R aïa 8 . IL 4 4 <xx>
Çarnets de captivité 165
David Paul M.
Toulon
2 , place Louis-Pasteur
(Var) France
Suzanne Stockm an
< xx> rue Trufïaultb
E. Lewy
Brooklyn 1 9 , N .Y .
1 3 5 1 - 4 6 Street
U SA
René Verduron
Paris 1 7 eA rr
5 1 , rue La Condamine
H abib
2 5 , rue du Rhône
à Genève
Krause X X X V I I I 6 . II. 4 5
H abib X X X I X 2 0 . IL 4 5
R a ïa X L 2 7 .1 1 .4 5
Colis N ational
Essia X L I 2 7 . IL 4 5
R aía X L II 6. III. 4 5
Colis de l'H om m e de Confiance49
Colis N ational
H abib 2 5 . III. 4 5
<p. 1> L Ê tre n'est pas seulem ent un verbe — c'est le Verbê.
D istinction entre verbe et action, verbe et m ouvem ent, verbe
et devenir. Tout cela est l’analogon de l'être. D evenir le plus
rapproché — mais habituellem ent conçu en vue du term e. — Ce
qui n'est pas analogon — m ais être m êm e — c'est le fait qu'il est
verbe -- Le verbe c'est le son — Le son en tan t que retentissem ent
- vibration - ce qu'il y a d ’action dans la vibration - se m aintenir
— une certaine am plitude - '
D ’où différence entre voir - com prendre et entendre - *15
a. Carnet non relié composé de dtfux feuillets doubles et d'un feuillet simple de format 10,5 x
15 cm insérés les uns dans les autres.
Carnets de captivité 167
Philosophie M orale
L'idée du bonheur est coextensive de l’idée de l’individualité*.
C ’est la fin de la notion de l’espèce. C ’est par là que le bonheur
est q q ch : de plus que l’être. Aecom pliss1 — et être: Avec l’idée du
<p. 6 > bonheur - la socialité ne peut 'plus être l’espèce - et lés
relations de l’espèce deviennent elles-mêm es eom pf chargées de
significations subjectives. Si la participation dépasse cependant
la raison - ce n’est donc jamais com m e l’impersonnel,’ l’éternel -
168 Carnets de captivité
mais com m e le transpersonnel. - Synthèse de l ’un et du m ultiple
- D ’autre part le problème de la subjectivité - de l’hypostase tel
que je lavais dégagé — est le problèm e m êm e du bonheur en tant
q u ’il dépasse l'être (Introduction).
<p. 7 > D istinction entre être et acte —entre acte et contem plation
(il ne suffit pas de baptiser la contem plation - acte) - perm et de
voir dans la philosophie — qui est initialem ent m orale — con tem
plation = destinée c.-à-d . philosophie = destinée.
Le chat perd toute dignité quand on lui m arche sur la queue. C)n
pensait que c ’est un appendice décoratif, com m e la traîne d ’une
robe, ou le m ousqueton d ’un centurion. E t voilà q u ’il y a ’ là des
nerfs. E t que le chat cet anim al m ystérieux sorcier, - le chat de
Baudelaire crie com m e une vieille femme.
{O deur = 1m oi - so i!.}
L’impossible intim ité m oi-soi. Dès que j ’arrive quelque part —
dans la nouvelle am biance - il y a déjà m on odeur - pas m on
clim at. Les choses sont déjà arrangées d ’une certaine façon.
<CARNET 7>*
R éalité — hallucinante.
<---------------- >
< p v2 > U n hom m e pour un autre n'est jamais {sim ple} « ohjet
extér{ç\ir ». N on seulem ent parce qu'on le sait (par la sympathie)
anim é et hom m e, {et qu’on « se m et à^ sa place » }, mais parce
que l’extériorité d ’un être hujnain, l’extérieur d ’un m oi fait-p artie
a. Carnet réglé de format 11 x 17 cm avec une couverture rigide. L’ensemble est écrit soit au
stylo plume, à encre bleue ou noire, soit, plus rarement, au crayon à papier sur lequel Levinas a
parfois repdssé au stylo plume ou au stylo à bille à encre noire.
172 Carnets de captivité
se situe sur un autre plan. Quelque chose d exaltant de voir un
m oi du dehors. C om m e la contem plation d'une nudité. Com m e
l'am our sexuel. O rigine du social.
Parm i toutes les choses q u ’on possède - l’alim ent e st une posses-
sion q u ’on peut consom m er. O n voudrait m anger ce q u ’on possède.
M anger - forme exceptionnelle de l’appropriation. C ’est dans ce
sens qu’am our sexuel peut être accom pli. Là aussi <p. 1 7 > il y
Carnets de captivité 177
Patriotism e. Parm i toutes les notions je n’en adm ets qu’une seule
m atérielle : terre. Relation avec la terre quelque chose d'unique. On
peut posséder propriété cojnm e on possède actions, argent. Mais
d^ns.la relation du paysan à la terre relation spécifique. Quelque
chose qui dépasse possession ordinaire. Connaturalicé. Famille
dispersée 4e Pearl B uck6 : terrç plus ou <p. 1 8 > moins vieille. Elle
contient plus ou moins de cadavres d ’ancêtres. Fusion.
« Le Masque » , Baudelaire7.
II. y? a dans Proust quelque chose d ’unique qui n ’est ni son style,
ni*sa théorie du tem ps, ni la .finesseet la précision de son analyse
psychologique. C 'est la, qualité aristocratique de ses sensations.
Il arrive à faire com prendre sa vie intérieure — où nous retrou
vons toujours du connu et qui'a quelque chose d ’universel com m e
{dans} les analyses d ’un excellent psychologue — com m e quelque
chose d ’unique, un frémissement <p. 2 4 > inim itable. Com m e
un paysage intérieur absolum ent sans exem ple, éclairage qui ne
transform e pas les proportions des choses ; mais qui est de l’éclai-
ragerpur qui leur donne une âm e n e » propre. Il donne si* on peut
dire l’âm e de son âme. Ce n ’est pas l’inattendu de ses réactions qui
en Fait l ’essentiel — mais leur g oû t qu'elles ont — elles si sem bla
bles au x nôtres m algré tou t. M o i.. .a
T--------------------------
a. « Au » en surcharge de « le ».
b. « la » en surcharge de « le ».
Carnets de captivité 183
a. « la * en surcharge de « elle ».
Carnets de captivité 185
<p. 4 5 b> 1 9 4 6
<p. 4 6 > 17rmn nnDW —la joie d'avoir la Thora. O n lit le Cantique
min nn
des cantiques. Toutes ces beautés, toutes ces profondeurs — on en
est ! m .
H istoire sainte —une liturgie qui ne devient pas com édie ni m ysti
fication. U ne liturgie toujours neuve. Pas de gestes. Toujours des
événèfnents.
1947
M érite et valeur
pnr-pnx p P'TS
n p r i- H jr o n p pm
A u point de vue m érite 7}py1 - supérieure à pnx\
Mais la prière de pFÏÏP plus efficace18.
En dem andant on allègue - pas seulem ent le m érite, car alléguer
le m é r i t e - c ’est être lim ité à soi. Alléguer le 19JVDÎ- c ’est <p. 5 6>
alléguer avec m odestie. La modestie est orgueil - si une partie du
m oi n ’est pas extérieure au m oi.
Le'm oi,;extérieu rà m oi - c ’est le père.
i
Le sens* du 20l?lDl?D la seule chose impossible au m érite c ’est la
m odestie. E t la m odestie suppose le père : mais com m e structure
du m oi.
<---------------- >
<p. 5 7 > Ce rêve de la captivité qui dure toujours - Depuis long
tem ps les autres en sont sortis et ont des problèmes d ’hommes
libres - et m oi toujours encore je m e soude de la libération. Les
disques de Rennes continuent à tourner. Les parties de crapette.
< p .l> O n dém énage. Lits démontés avec leur inscription. O n les
remQnte. Confusion. Personne n ’est dans le lit qui porte son nom .
L’étonnant c ’e s r q u ’U n te L - est dans son lit.
<p. 9> « Bien que je sois encore si imparfaite après tant d'années
passées en religion, je sens toujours la m êm e confiance audacieuse
de devenir u n e grande sainte. J e ne com pte pas sur mes mérites
n’en ayant aucun ; mais j'espère en Celui qui est la vertu, la sainteté
m êm e. C ’est Lui seul q u i se contentant de mes faibles efforts; m 'élè
vera jusqu'à Lui, m e couvrira de ses mérites et m e fera sainte24. »
a. « a » en surcharge de « esc ».
b. « du » en surcharge de « dans le ».
Carnets de captivité 19 5
<p. 15 > M acbeth - lui aussi com m e H am let est effrayé du fait
que la m o rt n'existe peu t-être pas - qu’elle ne résout rien. Son
effroi en voyant Banco est dans ce sens le p o in t culm inant de la
M aître et esclave — relation qui n'est pas sans liberté - carb elle lac
suppose — esclave est un être libre asservi.
R om an <juif ?>
<ciném a ?> <poùr ?>
< xx> < xxx x x x > .
<Borger ?> J . J .
N unspeetlaan 9 3
La H aye
H ollande
II
Ecrits sur la captivité
r
et
Hommage à Bergson
CAPTIVITÉ*
a. Double "dactylographié comportant des corrections manuscrites. L’article a paru, mais sous
une forme tronquée par le rédacteur, dans Le Magazine de France, « Cinq ans derrière les barbelés »,
Paris, Programmes de France, 1945, p. 20. La version que nous publions est donc inédite. Il ne s'agit
d'ailleurs probablement pas de la version envoyée au Magazine, car le texte publié, bien que tronqué,
contient un .morceau de phrase ainsi qu’uile phrase entière qui n'apparaissent pas dans le double
dactylographié. Il est peu probable que ces phrases aient été ajoutées par le rédacteur du Magazine..
D’ailleurs, Levinas, dans une lettre adressée au Magazine juste après sa parution se plaint que son texte
fôt tronqué, mais non pas réécrit.
Voici la transcription de cette lettre donc nous possédons le double dactylographié. Cette
lettre a bien1été envoyée (Levinas a conservé l'accusé de réception), mais elle n’a peut-être pas reçu
de réponse - du moins Levinas ne l'a pas conservée.
206 Carnets de captivité
C ette chose pour laquelle avant la guerre n'existait dans aucun
registre officiel français de rubrique spéciale, l a rem pli brusque
m ent jusqu'au bord. H abitu é depuis longtem ps à se considérer
com m e appartenant à la C om m unauté française il a connu la
grande douleur d'en être exclu, m ais acculés à son judaïsme il y
a puisé autre chose que l'am ertum e de l'outrage et de la honte.
L'hum iliation reprit la saveur biblique de l'élection.
Ce qui donnait à cette expérience'son pathétique c'est le fait de
participer aux épreuves subies par tous les Israélites dans les pays
occupés par l'Allemagne. De bonne heure la nouvelle des persé
cutions raciales, des déportations, des chambres à gaz et des fours
Em m anuel Levinas
2 9 , rue Lem ercier
LA V O IX D’ISRAËL1
A udition du 2 5 septembre 1 9 4 5
a. Il est difficile de savoir à quelle radio eut lieu cette audition. Il ne s’agit pas de la radio israé
lienne Kol Israël, qui n’a pris ce nom qu’au moment de la création de l’État d’Israël. Kol Israël fut
également le nom d’une radio clandestine de la Haganah apparue en 1940/ mais il fut abandonné
presque aussitôt et, surtoyt, cette radio cessa la même année d'émettre. On nq peut exclure l’hy
pothèse d’une émission sur les ondes de ce qui s’appelait alors la Radiodiffusion française (RDF),
mais nous n‘avons pu la vérifier. Une ém ission, semble-t-il irrégulière, appelée «’ La voix d’Israël »,
aexisté, mais l’Ina n’en a pas conservé de traces avant 1946. Par ailleurs, el|e n’a pas non plus de
traces d’une intervention de Levinas avant 1955.
b. Nous disposons de 'deux versions - deux doubles dactylographiés avec corrections manus
crites - de ce texte. Nous considérons comme version de référence, et transcrivons, celle dont le
texte dactylographié tient compte des corrections manuscrites portées sur l’autre version. Nous
signalons, en notes de bas de page, les quelques différences entre les deux versions (U version de
référence et celle que nous appelons conventionnellement la première version).
210 Carnets de captivité
et d ’exclusion raciales, rejoindre un ordre universel, retrouver la
dignité de l’être humain.
E t cependant, m algré to u t ce que la captivité créait d ’égalité,
elle avait été à tou t m om ent pour l’israélite une expérience du
judaïsme. C ette chose pour laquelle avant la guerre il n’existait
dans aucun registre officiel français de rubrique spéciale, il en
débordait. A u x tristesses q u ’il avait en partage avec ses cam a
rades non-juifs, elle p rêtait une signification propre. C ’était une
conscience du judaïsme ai'guë com m e une crispation.
D e bonne heure, la nouvelle des persécutions que subissaient
les Israélites dans tous les pays occupés avait attein t les cam ps.
Des lettres adressées à un parent, à une fem m e, a une sœ ur reve
naient avec la m ention « parti sans laisser d ’adresse »- O n com pre
nait l’euphémisme. Le jour du courrier devint jour d ’angoisse.
Mais on a su en Allem agne bien plus tô t q u ’en France le sort -de
tous ces « partis sans laisser d ’adresse ». O n savait l’exterm ination
en masse des Israélites en Europe orientale. O n ne s’est jamais
désolidarisés. D evant une volonté systém atique d ’exterm ination’,
que pouvait valoir à l’heure suprême la Convention de Genève, ce
chiffon de papier. Les Ju ifs prisonniers se sentaient les sursitaires
de la m o rt qui planait sur leurs travaux et sur leurs rires com m e
une om bre familière. Dans les Kom m andos spéciaux où ils étaient
groupés, pour la plupart en quelque point perdu d ’une forêt, ils
se trouvèrent à la fois séparés des autres prisonniers et de la popu
lation civile. Tout se passait com m e si quelque chose se préparait
pour eux, mais s’ajournait toujours.
Il en résultait pour les petits groupes ainsi disséminés* en A lle
m agne une solitude morale qui com m uniquait à tous les actes et
à toutes les pensées une gravité spéciale. Depuis sa Bar-M itzw a,
le prisonnier avait désappris le langage religieux et jamais sans
doute n’aurait-il consenti à appeler religieuse son existence et,
cependant, elle en avait le caractère. U ne condition sans monde
a. Nous ajoutons le mot « de », oublié dans la version de référence, mais présent dans la pré-
mière version.
Écrits sur la captivité et Hommage à Bergson 213
a. Dans la première version, Levinas avait d’abord écrit « Jésus », mot sur lequel il a repassé
à la machine à écrire pour lui substituer « Jonas ». Il a ensuite, en raison de son peu de lisibilité,
barré « Jonas », pour le récrire finalement, à la main, dans l’interligne.
b. Dans la première version, « passivité », écrit à la main, corrige « passion ».
c. On lit « Qu’est donc » dans la première version.
214 Carnets de captivité
Les choses o n t changé dans le m onde. Ce q u ’on avait à peine
espéré devenait réalité. Les forces du m al reculaient partout'. Le
com m uniqué allemand n’enregistrait que des défaites. Débar
quem ent allié en Afrique du N ord , Stalingrad, invasion. E t voici
que les prières du soir reprenaient une autre signification. Après
tant de détours, elles rejoignaiént leur sens littéral. O u iy Dieu
a aimé Israël d ’un am our éternel - oui, il nous a sauvés de la m ain
de tous les tyrans - oui, la puissance de rPharaon ses chars et ses
troupes sont au fon d 'd e l’O céana {la m er}. O ui,, les ailes p ro tec
trices de D ieu s’é te n d a n t sur nous - oui, la tente de p aix s’étend
sur nous, sur tou t Israël et sur J é f ^ Jérusalem . Penser que "tous
ces m ots doivent être pris- tels qu*ils sont dits, qu’ils sont vrais
de leur vérité élém entaire, de leur vérité pour enfants, scolaire et
séculaire, de leur vérité populaire, de leur vérité vulgaire, singu^
lière ém otion !
Lire un texte archaïque et>pouvoir le prendre à la lettre sans lui
adapter une interprétation, sans lui chercher un sens symbolique
ou m étaphoriqué !
E t cette vérité elle-m êm e, cette vérité enseignée dès l’enfance
que l’injuste et le fort succom bent, que le faible et le pauvre
sont sauvés et triom phent apparut merveilleuse dans sa sim pli
cité. Après bienc des années où le bien et le niai changèrent de
place et où l'on com m ençait à s’y habituer, après des années «de
w agnérism e, de nietzchéanism e, de gobiriism e, dont on a é t é soi«
m êm e m inéd, reven ir à la vérité de ses six ans, la voir confirmée
par les événem ents m ondiaux — cela vous coupe6 le souffle, cela
vous prend^ à la gorge.* Le Bien redevient5 Bien, le M al, M al. La
mascarade lugubre est finie.
Em m anuel Levinas
a. Dans la première version, « la renaissance du mal, la défaillance des hommes. Tour sera... »
corrige, à la main, « . . . que le mal n’a pas disparu —que les hommes n’onc pas changé, que tout
esc... ».
b. « l’actuel » en surcharge de « l’actualité » (qu’on lit dans la première version).
c. Dans la première version, « Les événements venaient couronner » corrige, à la main, « elles
venaient combler ».
d. On lit « Les événements » dans la première version.
e. La première version offre à lire « dans ».
<Hommage à Bergson>a
‘
Il y î cinq ans. le 4 janvier 1 9 4 1 , s’éteignait à Paris à 1 age de
8 2 ans; l’un des plus grands génies philosophiques de tous les
tem ps, H enri Bergson. Les titres tem porels qu'il acquit au cours
de sa carrière - Professeur au Collège de France, M em bre de l'Ins
titu t et de l'A cadém ie Française, M em bre de nombreuses sociétés
savantes étrangères, P rix N obel - pâlissent devant sa gloire réelle.
Il entraide son'vivant dans la com pagnie des esprits de prem ière
grandeur: A u Banquet éternel de P laton, de Descartes,* de Spinoza,
de K an t, ils s'assey ait en pair.
Il arriva à un m om ent où la pensée humaine après les m agni
fiques conquêtes des 1 8 e et 1 9 e siècles, se trouvait débordée de ses
propres« richesses. Les merveilles que la science avait mises à la
disposition de l'hom m e, l'hom m e ne savait plus en faire d ’autre
usage que l’application technique. La civilisation, c'étaient des
machines, beaucoup de machines. Cela com m ençait à devenir
encom brant, mais cela ne m anquait pas d'être prestigieux. O n
se dem andait si le prestige des techniques n'était pas l'autorité
mêm e ¿du Vrai, si l'hom m e n’était pas un m écanisme au m ilieu
d'autres m écanism es, petite horloge reproduisant le b attem ent
a. Double dactylographié avec corrections manuscrites. Ce texte, écrit en 1946, comme l’in
dique son tncipit, ne comporte pas de titre et ne donne pas d’indication concernant sa destination.
À notre connaissance, il n'a pas été publié.
b. « s’asseyait » en surcharge de « s’asseyent ». Levinas a oublié de mettre au singulier le pro
nom qui précède.
218 Carnets de captivité
du tem ps astronom ique et qui ne pouvait s’en écarter que pour
m arquer une fausse heure. Il y avait certes en Europe en cette
.fin du 1 9 e siècle des croyants et des poètes qui parlaient de leur
âme. Ils retardaient. C ’était un spiritualism e en quelque manière,
privé, à peine avouable. C ’est que jamais encore la liberté de
l’hom m e ne sem blait plus contestable, jamais le m atérialism e
n ’était davantage entré dans les m œ urs et dans les consciences. On
était convaincu que les notions avec lesquelles opérait la science,
étaient le cadre m êm e du monde. La notion du tem ps uniforme et
inhum ain - Saturne dévorant ses enfants — dom inait l’univers.
R ééditant le geste divin de Ju p iter, Bergson a osé l ’attaquer.
Il a été le prem ier à lever la m ain sur le tem ps froid de la science
devant lequel tous les philosophes, jusqu’à lui s’inclinaient. À
ce tic-ta c universel où se succédaient des instants impassibles,
semblables aux points de l’espace et où l’hom m e disparaît darfs
une poussière de secondes, Bergson a opposé les données im m é
diates de la conscience, le devenir m êm e de. notre vie, to u t om
chatoiem ent, le jeu précieux de qualités nuancées, la continuité
de notre durée concrète. Dans ces instants, qui, tou t en prolon
geant à leur façon le passé, et qui, déjà gros d ’avenir, conservent
une irréductibilité totale - il a reconnu la liberté. Il a revendiqué
pour cette durée et pour les richesses, jusqu’alors insoupçonnées
qu’elle con tien t, l’autorité m êm e qui s’attache aux notions sciem
tifiques. Il a su m ontrer que le tem ps des horloges et la fatalité
n’étaient qu’une façon dont la durée concrète se déforme, lorsque
q u ittant les profondeurs de notre vie spirituelle, nous agissons. La
vraie connaissance consiste à retrouver com m e l’artiste au m om ent
de sa création, com m e le m ystique à l’heure de l’extase, com m e
le savant à l’instant de l’invention, le rythm e libre de la durée
concrète. E t cette connaissance — qui est aussi liberté — Bergsôn
l’appela intuition. Avec elle la vie intérieure se trouva réhabilitée.
Elle est sortie du dom aine privé, est {devint} à nouveau base de
vérités universelles. La philosophie ressuscita4.
a. Signalons que le format A4 n’apparaît qu’en 1972. C’est à cette date que l’Organisation
internationale de normalisation (Iso) a harmonisé les formats des feuilles de papier fabriquées
industriellement éh 11 formats.
224 Carnets de captivité
nouvel ensemble) ; 3) enfin, variante du cas précédent, pour isoler
un texte rédigé sur la partie vierge d ’une page ou au verso vierge
d ’un feuillet m anuscrit, dactylographié ou im prim é recto.
N ous avons donné à l’ensemble de ces notes le titre de Notes
philosophiques diverses, puisque c ’est à peu près le titre
qui appa
raît sur la chemise de la Liasse A , « notes diverses de philoso
phie en recherche, notam m ent m étaphore » , les autres chemises
ne com portant aucune m ention. Afin d ’in titu ler les liasses, ainsi
que les carnets, il n’était évidem m ent pas question d ’indiquer un
thèm e, puisqu’il s’agit de notes diverses, ni de m entionner les
dates de début et de fin d ’écriture, puisque nous ne pouvons les
dater avec une telle précision. N ous avons opté pour une désigna
tion m atérielle, suivie d ’une lettre*. Enfin, nous avons attribué
un num éro à chacune des notes, en respectant scrupuleusem ent
l’ordre dans lequel nous les Rivons trouvées.
Le critère qui a présidé à la constitution de ces ensembles de
notes par Levinas, soit dans des carnets, soit sous forme de liasses,
est difficile à indiquer, sauf, p eu t-être, dans le cas de la Liasse C.
Il est en effet fort possible que la grande m ajorité des notes de
cette liasse soit préparatoire à Totalité et Infini, bien que Levinas
ne les ait pas désignées com m e telles, cependant que d ’autres
liasses de notes sont décrites par lui com m e préparatoires à telle
ou telle œuvre. C ’est d ’ailleurs la raison pour laquelle les notes de
la Liasse C figurent dans ce recueil de notes diversefb. Les notes dç
cette liasse, à la différence de la plupart de celles que l’on trouve
dans les autres liasses, sont en outre classées, puisque certains
feuillets indiquent le thèm e des notes rédigées sur les feuillets
qui suivent. E n ce qui concerne les autres ensembles de notes, .en
particulier les autres liasses A , B et D , on peut penser que Levinas
les a constituées parce q u ’elles porten t la trace de ses recherches
a. Les inédits antérieurs à ceux que nous publions ici (qui vont de la fin des années 1930 au
début des années I960) ne comportent pas de notes diverses. Les inédits de la période postérieure
en contiennent sous forme de liasses ou de cahiers. Il sera donc aisé, lorsqu’ils paraîtront, de les
désigner, en poursuivant l’ordre de l’alphabet, d’après le même critère.
b. Sur ce qu’il faut entendre par « notes diverses », cf. l’avertissement de ce volume qui pré
sente les différents types de notes que l’on trouve dans le fonds d’archives Emmanuel Leviijas.
Notes philosophiques diverses 225
a. Nous en donnerons deux exemples. D’abord les « Fiches de l’époque de Totalité et Infini »,
soie la première moitié des années I960. Sur les 24 fiches que comporte la liasse, 23 - il s’agit
de cartes d’invitation - sont des imprimés datés : sur ces 23 fiches, deux sont datées de 1938,
les autres de 1960-1964. Second exemple : parmi les 17 fiches imprimées datées d’une liasse qui
porte le ‘titre de « Fiches utilisées » (soit environ la moitié de l’ensemble des feuillets de cette
liasse), fiches qui tant sans doute préparatoires à l’article « La substitution » paru en 1968, on
en trouve sept pour 1967, six pour 1966 et une pour chacune des années suivantes : I960, 1962,
1963,1964.
226 Carnets de captivité
des années 1 9 4 9 - 1 9 5 0 , les seize autres des années 1 9 5 6 - 1 9 6 2 ;
sur les trente-quatre feuillets im prim és datés de la Liasse B , vsoit
environ la m oitié de l'ensemble des feuillets, v in g t-h u it datent
des années 1 9 5 0 - 1 9 5 5 , les six autres de 1 9 5 6 - 1 9 6 6 ; en ce qui
concerne la Liasse C , sur les cent quarante-trois feuillets im prim és
datés, soit plus de la m oitié de l'ensemble des feuillets, soixante-
six datent de 1 9 4 8 - 1 9 5 5 , soixante-dix-sept de 1 9 5 6 - 1 9 6 0 ¡'enfin,
les six feuillets im p rim ée datés de la Liasse D , soit environ un
quart de l'ensemble, couvrent une période qui va de 1 9 5 6 à 1 9 6 3 .
O n peut donc avancer, certes avec prudence, dans la mesure où les
im prim és datés constituent une partie seulem ent de l’ensemble
des feuillets de ces liasses, que la plupart des notes ici publiées
datent des années 1 9 5 0 et du début des-années I 9 6 0 , com m e leur
conteriu invite d ’ailleurs à le penser4.
R . C.
a. En ce qui concerne les deux carnets de notes diverses, le Carnet A et le Carnet B, c’est sur
la base de leur seul contenu que nous avons pris le risque de considérer qu’ils relèvent également
de cette période.
Liasse Aa
< l > b-
a. L’ensemble des noces ici rassemblées se trouvait à l’intérieur d’une chemise sur la cou
verture de laquelle Levinas a écrit : « Notes diverses de philosophie en recherche. Notamment
ImétaphoreL »
b. L’ensemble comprend 12 feuillets manuscrits recto verso, à l’exception du feuillet 10, donc
seul le recto est rempli. Il est écrit sur des supports divers mais.^emble-t-il, avec la même plu
me à encre noire. L’un des feuillets esc un morceau d’enveloppe dont le cachet porte la date du
« 21 IX I960 ». Ce texte, présenté par nos soins, a paru une première fois dans Emmanuel Levinas
et les territoires de la pensée, D. Cohen-Levinas et B. Clément (dir.), Paris, PUF, 2007, pp. 26-40.
Nous avons, dans la présence édition de ce texte, corrigé les quelques erreurs de déchiffrement
qui s’étaient glissées dans la précédente et soumis notre ancienne transcription aux conventions
éditoriales de la présente.
228 Carnets de captivité
tionnalité nouvelle par rapport à celle de la sim ple pensée (en quoi
consisterait-elle alors ?) ou la m ise en signification revient-elle à
une mise en relation grâce à la syntaxe et au vocabulaire — nœuds
objectivem ent fixés de références et règles de leurs combinaisons
— algèbre propre à chaque langue — mais où le parler n'ajouterait
aucune intention nouvelle au penser, sinon une lim itation et un
choix du cham p offert par l'héritage d'un système de signes qui
— langue historiquem ent constituée — infléchirait le penser dans
une certaine direction en faisant faire le choix de certaines rela
tions entre objets de préférence à d'autres. A u trem en t d it parler,
est-ce sim plem ent <f. 1 verso> com m uniquer une pensée toute
faite et fournir des jalons pour analyser le cham p offert à la pensée
ou parler - est-ce aller plus loin que la pensée sim plem ent fixant
l'objet ?
3 ° L'effort de M . Ponty - choisir le deuxièm e term e de l’alter
native : le langage pas une entreprise annexe et secondaire pou f
m ieux débrouiller l ’écheveau de la pensée. Il fait partie de fonc*
tion symbolisante du corps sans laquelle — pas de relation avçc
l ’objet laquelle est toujours basée sur la perception. Car accueillir
l'objet ce n'est ni la passivité du sens, ni l’activité synthétique
de l’intelligence, mais activité culturelle — c.-à-d . créatrice dp
l'expression. L'intentionnalité spécifique du langage - tisser la
m édiation culturelle nécessaire à l ’intellection m êm e de l'objet.
Le m ot n'est pas un nœud de références, mais une nouvelle façon
de se référer - pas com m e signe mais com m e expression.
4 ° M étaphore : évocation de ressemblances entre objets ou situa
tions : m ontagnes, vagues pétrifiées ; forêt, cathédrale ; situation
sans issue ; transgression d'une loi. Le langage ne fait que traduire
une situation qui est visée par l’intention de la pensée. Ressemr
blances entre réalités du m êm e ordre. Ressemblances ou corres
pondances ? La m étaphore fait <f. 2 recto > éclater des structures
signifiantes qui ne vont pas toujours de l'hum ain au cm atériel ?>
pour hum aniser le naturel, mais qui vont vice versa : la résistance
d ’une cohorte à une attaque se com pare à un rocher résistant à
la m er, à la structure pétrifiée de la résistance ; com m e inverse
Notes philosophiques diverses 229
a. « effet » en surcharge d’un mot illisible ; l’adjectif qui précède, « pur », que nous avons
corrigé, est au féminin dans le manuscrit.
b. « au » en surcharge de « de ».
c. « évoquée » en surcharge de « évoquées ».
230 Carnets de captivité
dieux, com porte déjà une deuxièm e intention.) N on pas quelle
m o t im ite par sa m atérialité de m o t une propriété quelconque
de l'objet, mais il nom m e en se référant à des significations qui
présentent une ressemblance avec la signification évoquée dans
la prem ière intention. La ressemblance est alléguée com m e la
relation entre signification objet et la signification qui perm et de
l'évoquer (E st-ce sûr ?).
Il se produit en tou t cas tou t autre chose que l’évocation d'une
deuxième signification éclairant la première.-Pourquoi la deuxième
ferait-elle plus que la prem ière ? La deuxième n'est pas là pour
indiquer en tant que quoi la première vise soii objet. L'en tant qüfe
quoi fait partie < f. 2 verso> de la première intention (vainqueur
de Iéna ou vaincu de W aterloo). Place dans un système objectif
est nécëssaire à l'intellection au sens prem i< er> de l'intention
première. Mais ce n’est pas par là que la signification est m étapho
rique. Le pouvoir métaphorique du m o t est dans le rapprochement
de la signification et® d ’une autre signification dont elle est com m e
une pelure. Correspondance qui n’a plus rien de com m un avec- le
système où latéralement la signification se place. Participation
d ’une signification à une autre, com m e si les significations s'envo
laient dans toutes les directions àpartir d’un fond qui leur est com m un
non pas com m e un concept, mais com m e un < trope ?> co m m u n »
génération d ’un particulier à partir d'un particulier.
7 ° Le phénomène de la m étaphore n ’est pas sim plem ent le fait
q u ’une chose signifie autre chose, que toute signification se d it à
l'aide d ’une autre signification. La merveille : une signification a
pu se transform er en une autre, com m e si tou t était dans to u t, non
pas que tou t forme système avec to u t, mais com m e si to u t était
germ e de tou t, toute chose porte en elle le dessinb <f. 3 recto> de
toutes les autres. C ’est cette germ ination qui est ht signification
et nôti pas une <préférence ?> quelconque au pour0 le signifié et
un passage vers lui à partir du signifiant.
a. « et » en surcharge de « avec ».
b. « dessin » en surcharge de « dessein ».
c. « pour » en surcharge d'un mot illisible.
Notes philosophiques diverses 231
a. S’agit-il d’un numéro bis ou alors d’une erreur d’inattention dans la numérotation ?
b. « aütre » en surcharge de « <de ?> ».
c. « ce » en surcharge de « cet ».
232 Carnets de captivité
1 2 ° La m étaphore - c’est ce que je substitue à l’idée du nom . -Parler,
n’est pas, le fait de, nom m er, d ’associer un signe, une indication ^ux
choses, qualités, <f. 4 verso> actions (verbes), relations.
Parler, c ’est donner un sens-figuré, désigner au-delà de ce qui pst
désigné, transm uter, en sublim ant. Ce qui n’im plique pas autjui
uniquem ent com m e prototype de la hauteur. C om m ent encore ?
P artir de l’idée que la parole donne le monde. Généraliser = ,$e
dépouiller pour ançrui. E t alors ? N e pas concevoir la m étaphoie
com m e objectivation d ’un pensé : ceci est com parable à cela ; ceci
est com m e cela. Plus encore ! < D ’emblée ?> tou t ceci est « en
tan t que » cela. Parole d it l’être - parole est m étaphore.
1 3 ° L’idée de l’être n’est pas le plus haut - compréhension de
l’être - fondem ent débouté compréhension (H eidegger) --L ’onto
logie com m e idéalisme — L’être lui-m êm e ne peut s’affirmer dans
son altérité que com m e culture.
6 ° Q uand dans un jugem ent <f. 7 verso> bâti autour d'un verbe
— où opère la m étaphore : l'oiseau chante, l'hom m e se promène
— un participe + verbe auxiliaire (l'oiseau est chantant, l’hom m e
est m archant) - on dérange la m étaphore du verbe.
6 oa Les m ots resteraient toujours des signes, mais ils seraient de
simples noms des choses — ils signifieraient les significations des
choses. G râceb aux significations les choses ne sont pas disposées
dans l'espace géom étrique sans se cacher les unes les autres, mais
selon une perspective : une ligne de force de l'ensemble précède
l'u n ité des objets.
7 ° M étaphore rend-elle seule accessible le sur-hum ain ? N 'e st-
ce pas alors écrire m étaphore = symbole ? Le surhum ain dans le
langage à cause de la m étaphore ?
a. S’agit-il d’un numéro bis ou alors d’une erreur d’inattention dans la numérotation ?
b. « Grâce » en surcharge de « <Que ?> ».
c. « Autrui » en surcharge de « autrui ».
d. Le guillemet fermant manque.
236 Carnets de captivité
le <f. 8 verse» regard se lim iterait ainsi mais parce qu'il e s tlu i
précisém ent une lim ite d'un m ouvem ent de m ontée — m ouve
m en t infini - o ù la lim itation du regard introd uit un term e, un
aboutissem ent, un être ?
3 ° La m étaphore par excellence est Dieu.
4 ° a) D ieu —l ’Infini —n'est pas un existant parce qu'il serait source
d'existants? Il n'est pas signifiant com m e conditionnant la pensée
de l'existan t, mais en tan t que créateur. La création est au tre chose
qu’une condition transcendantale.
b) Mais ce surplus du C réateur sur E xistant déborde aussi, la
« pensée objectivante ». Il est par la pensée qui par son pouvoir
m étaphorique décrit une sphère qui esr au-delà de l’Ê tre.
c) Le pensé4 n ’est pas un moins que l ’Ê tre , mais cet A u tre que
l'Ê tre , lequel n ’est pas sim plem ent un superlatif de l’Ê tre , ni
m êm e un autre être.
d) D ieu n'est pas un être parfaitem ent être, ni m êm e un étant
existant»autrem ent que l’être. D ire qu'il est pensé, c'est dire qu'il
est autrem ent que l'être et non seulem ent qu'il'est autrem ent.
D ieu et .qui ne peut être com m e telle prétendue par «d'humain ?>
(p. 213?)* Percée de l’espritdium ain par l'esprit saint. Elle serait
com m é telle im possible sauf si elle com m ence par ordonner —par
m ettre en question«-Elle est possible com m e «cmorale ?> qui est
a in siJa source de m étaphore. Elle devient.philosophiquem ent
com prise après coup. Rôle du tem ps. Pour le souvenir il n'y a pas
de m iracle. Tout s'arrange. Mais il y a la place de tou t discours
indirect - de tou t souvenir - dans le discours direct.
3 ° C om m ent la* parole de D ieu peut-elle être entendue par un
pécheur ? B arth aperçoit le problème : il faut que D . parle'à partir
de son incarnation. Mais com m en t une révélation est-elle possible
si la parole n'est com prise que dans une correspondance. Il faut
donc éclaircir le rapport du langage spécial de la parole < chré
tienne ?> avec les capacités de la pensée et du langage humain.
Le xroncépt de « Ansprechen » dem eure lui-m êm e infructueux.
Schlink »dans Kerygma und Dogma prétend que la parole de Dieu
brise le courant habituel : . . . Die Selbstverständlichkeiten seines. . .
Existentbewustseins und das Gehäuse seiner Umwelterkenntnis und
- bemächtigung werden ihm zerschlagen4. » E st-ce particulier à la
lecture*de l'Évangile ? À la place du sujets-objet, appel, ordre de.
Mais c ’est aussi œuvra1de philosophie.
<f. 11 v e r s o La m étaphore
<2>a
a. « de » en surcharge de « du ».
b. « sa » en surcharge de « la ».
Notes philosophiques diverses 247
<3 >
<4>
M oi = responsabilité
<5>a
a. Huit morceaux de feuillets manuscrits recto, saufles feuillets 1 et 5, manuscrits recto verso.
Levinas a“écrir au stylo bille à encre bleue, sauf sur les feuillets 1 recto et 5 verso, qui sont rédigés
au stylo plume à encre noire. Certains ajouts sont au stylo bille à encre violette. Le papier est le
même pour tout ce manuscrit. Certains morceaux de feuillet laissent deviner un texte plus long
qui a été coupé. Ces éléments matériels permettent de supposer que Levinas a extrait ces feuillets
d’un ensemble plus vaste, et qu’il leur a ajouté deux développements (f. 1 recto et f. 5 verso) afin
de reconstituer uîi tout.
b. « sa » en surcharge de « leur ».
254 Carnets de captivité
<f. 2> Judaïsm e invulnérable à la critique biblique*
a. litre ajouté avec le stylo plume à encre noire qui a servi à remplir les feuillets 1 recto et 5 verso.
b. « Selon » en surcharge de « selon ». La majuscule en surcharge de ce mot ainsi que la rature
du mot précédent sont écrites avec le stylo plume à encre noire qui a servi à remplir les feuillets
1 recto et 5 verso.
Notes philosophiques diverses 255
<6>a
<f. 1 > se précisém ent la distance : savoir que la face que l’obstade
m ’offre ne résume pas l’obstacle - c ’est-à-dire le pouvoir de parler
à quelqu’un de l’objet au lieu de buter contre lu i.‘Dans cè sens
le travail, est travail en com m un. La force de la volonté est faite
d ’union de volontés — elle est d ’ores et déjà sociale.
Mais le travail, c ’est-à-dire la conscience n’est possible que p
on est entièrem ent séparé - athée < sic> . L’être séparé, se sépare
dans le bonheur, mais il ne peut travailler que, dans son m ilieu,
il à conscience <sic>. C om m ent cependant la conscience est-elle
possible dans un monde où nous logeons ? C om m ent se faitr-il que
nous n ’aimions pas seulem ent la vie, mais que nous travaillions"?
Il faut pour cela que la vie dans sa séparation et son athéism ê,
entretienne une relation avet un point fixe hors de soi qui ne fasse
pas partie du <f. 2 > chez soi — que nous puissions en quèlque
façon décoller de notre condition. D écoller - cela ne signifie
nullem ent se transporter hors de chez soi — mais chez soi rencon
trer un être qui n ’existe pas en vue de m oi ou contre m oi, mais en
soi et par rapport à qui le m onde d ’ores et déjà fait contre lequel je
a. Quatre feuillets d'un même papier manuscrits recto, que Levinas a rassemblés dans une
chemise. Ils sont manifestement extraits d’un plus vaste ensemble, car Yincipit du manuscrit est la
suite d’une phrase qui commençait sur un autre feuillet qui n’a pas été conservé et, d’autre part, le
manuscrit s’interrompt brusquement.
Notes philosophiques diverses 257
m e bute n'est pas tou t ce qu'il est pour m oi. Il faut que le monde
soit pour moi autre chose qu'une nourriture ou un chez soi - qu'il
devienne thèm e. Pour cela il faut que je puisse parler à quelqu'un.
La relation que présuppose ce passage à la théorie est par-dessus la
séparation et l’athéism e la relation avec autrui telle qu'elle puisse
enlever à l'être séparé sa position centrale dans l'univers.
La volonté n ’est donc pas la liberté d ’un être causa suiyni l’ascen
sion aua <f. 3> rang de causa sui.
C ’est ce par quoi un être qui n'est
pas cauja sui est en société, parle à autrui, est capable de questions
et de réponses, est responsable. La responsabilité, ne repose pas sur
la liberté-, elle fonde la-liberté sous la seule forme possible à un être
en relation et qui demeure absolu au sein de la relation. Vouloir,
ce n’est pas nier Dieu, mais refaire le monde, sortir du monde tout
fait, civiliser. L’indépendance de la .volonté ne doit pas être prise
pout. lutte, violence et négation. E t c ’est parce que la volonté ne
peut être comprise que com m e condition de la parole qu'on a vçulu
l’identifier avec la volonté de l’universel. L’essence de la parole elle-
m ême a été située dans l'universalité de la pensée com m e ce par
quoi l’être particulier se dépouille de sa particularité substantielle.
C ’est que le rationalisme ne peut adm ettre une m ultiplicité paci
fique, ne voit entre particuliers que de la violence et les rapports
pacifiques entre individus <f. 4 > ayant abdiqué leur individualité.
Il n'a pas vu dans le langage la relation entre absolus, antérieure à
l'interaction de libertés. L’indépendance de l'être dépendant n’est
pas un concept construit, c'est k volonté. Elle est le mode d'être par
lequel se fait la séparation. Elle n'est pas le fait d'un être seul, mais
d'un être sortant du système pour parler. O n peut appeler créature
un être qui par la volonté affirme l’indépendance de l’existence dont
il n'est pas l'origine. Dans ce sens, seul l’être créé est volorité. Dans
ce sens seul l'être créé est en société. Dans ce sens la création est la
seule possibilité de k m ultiplicité. Dans ce sens seul l’être créé est
métaphysicien. La créature ne consiste pas à avoir une cause exté
rieure à soi, mais à être indépendant dans cette dépendance.
<7>a
a. Les ratures, ajouts et surcharges de cette page sont au stylo bille à encre bleue.
b. «De » en surcharge de « de ».
c. « Le » en surcharge de « le ».
d. « se pose » en surcharge de « s’oppose ».
e. On hésite ici entre un soulignement et une biffure.
f. Les ratures, ajouts et surcharges de cette page, à quelques exceptions près que nous signalons
en note, sont au stylo plume à encre noire.
g. Suite d’une phrase qui se trouvait sur la partie supérieure du feuillet qui a été déchirée.
h. « du » en surcharge de « de ».
i. Les parenthèses sont au stylo bille à encre bleue.
260 Carnets dexaptivité
négation dea individus {substances} m u ltip les {to u te extério
rité} (si ce n ’est pour l'im agination) dè volontés m u ltip les:b-q t»
{Q r celles -ci} sont- inséparables, en t a i t , de -notre ’exp érience*de
la vo le n té et de la réflexion sur la Volont é: {et par conséquent de
toute m ultip licité dans l'hêtre. N ous -ver-fOns Tout le monde sait
que cela est contraire à notre expérience <em p-?> de la v o l o n t é s
certainem ent Spinoza aussic.}
Si nous nous tournons, en effet, m aintenant vers notre expé
rience de la volonté, nous aboutirons à des élém ents totalem ent
opposés à ceux que nous venons de rappeler. L'expérience de la
liberté que nous avons à travers la volonté, non seulem ent n 'ex
clu t <pas> læ m ultiplicité, mais trouve en elle sa condition*1.
<f. 5 > e C om m ençons- par une {Rappelons la} définition de la
volonté, teHe-que {par} Descartes { .} f la- donne dans-les- M éd ita -
t-tons. -Voüft-ce -qui- est d it dans la Méditation IV : « La volonté
consiste seulement en ce que pour affirmer ou nier, poursuivre ou
fuir les choses que l’entendem ent nous propose, nous agissons de
telle sorte que nous ne sentons point qu'aucune force extérieure
nous y contraigne7.
{---------}
D e cette définition, nous voulons retenir deux points :
1) La volonté est saisie à partir de l'œ uvre de la vérité. {L'essence®
de la} volonté dont dépend l’action hum aine et par conséquent
l'histoire humaine est saisiessable par11 D escartes de la m anière la
plus originelle à p artir de la vérité. La* vérité se trouve ainsi être
a. « de » en surcharge de « d’ »
b. « . » en surcharge de « , ».
c. Paragraphe barré d'une cancellation en croix. À gauche de ce paragraphe, dans la marge,
on lit l’ajout suivant : « Vouloir c’est donc être de teHe manière à supprimer son opposition aux
autres en entrant dans comme <interrompu> ». Dans cet ajout, « entrant » est en surcharge de
« rentrant ».
d. À gauche de ce paragraphe, dans la marge, on trouve l’ajout suivant, en partie barré au stylo
bille à encre bleue : « Vouloir qqch. ne diflcre pas formellement de désirer qqch. »
e. La première rature et la première correction sont au stylo plume à encre noire ; les autres
ratures, corrections, ajouts et surcharges de cette page sont au stylo bille à encre bleue.
f. Il convient de ne pas lire le point, qui n’aurait sans doute pas dû être ajouté.
g. « L’essence » en surcharge de « La ».
h. « par » en surcharge de « pour ».
Noies philosophiques diverses 261
a. « des * en surcharge de « d’ ».
b. L’ensemble du paragraphe esc barré par une croix de Saint-André.
c. La suite se trouvait sur le tiers inférieur du feuillet que Levinas a déchiré.
d. Rature au stylo bille à encre bleue.
e. Les ratures, ajouts et corrections de cette page sont au stylo bille à encre bleue.
262 Carnets de captivité
ne peut pas présenter ce conflit com m e ùne lutte de deux forces,
deux forces {quand elles n’anim ent pas deux personnes, ou deux
volontés} ne lu tten t jam ais, m ais donnent un résultat. Interpréter
la volonté co m m e lu tte de forces, c ’est en faire une illusion. C ’est
la m êm e personne qui est en conflit avec elle-m êm e, c ’est-à-dire,
dans une certaine mesure est en dehors, d ’elle-m êm e. La volonté
suppose ce décollem ent à l’égard de soi. Vouloir, o’est se voir du
dehors.
O n peut certes parler ici de l’apparition de la raison, com m e
d ’un Deus ex machina.* Mais la présence d ’autrui fournit la possi
bilité concrète de se voir du dehors. Vouloir, c ’est com m e si on
avait parlé à autrui. D ’où tous les développements qui identi
fient volonté et discours, mais la plupart du tem ps il s’ag it d ’un
discours non pas entre interlocuteurs, m ais du discours au sens
de logosimpersonnels qui rendrait possible toute interlocution ;
autrem ent d it, identifier discours et volonté, c ’est identifier
volonté et intelligence
Cela n’est pas conforme à l ’expérience de la volonté. Certes elle
nous apparaît com m e une-con train te ,- com m e [ a c c e ptation-d -’une
loi qui nous dépasse {nous dépassant}. Mais dans la volonté, nous
sommes au plus < in t e r r o m p e
<8>ft
Sens et signification
a. Rédigé sur les pages vierges d'une carte d'invitation double (1954).
Notes philosophiques diverses 263
< 9>
<10>b
< 11>
Durée bergsonienne et durée de la filialité.
< 12>
a. Souligné au stylo bille à encre bleue. Tout le reste de cette note est écrit au stylo bille à
encre violette.
b. Rédigé au verso d’un morceau d’imprimé portant la date de 1955-
266 Carnets de captivité
<13>
< 14 >
< verso > Le m erveilleux c'est que Lerm ontov a traduit en om et
tan t la différence de genre Fichtenbaum Palmelb —
la relation devient entre être —
au-delà de l'érotique -
(ou en deçà)
<15>
< 16 >
La source du verbe qui nom m e dans le verbe qui crée.
<17>a
Catégories
<18>
<19>
<20>b
C ette déception constante dans une œuvre qui, cheç les modernes
du moins, s’adresse à nous, mais ne tolère pas de questions, parlp
com m e pour soi - constitue com m e le plaisir propre et la m agie de
l’œ uvre-d’art. C ette aube de sens qui n’arrive pas à se faire soleil,
< c’est/cette ?> Galatée qui est prête à parler, mais ne parle pas.
< 21 >
<22>b
< 2 3 > ft
D ire que le oui et le non ne sont pas les premiers m ots - c'est ¿ire
que le dialogue est initialem ent parole sur quelque chose et sur
« lui ».
<2 4 > b
<25>c
<26>
< 2 7 > ft
<28>
<29>b 1
<30>b
Sens
a. Ajouté au début de l’interligne suivant dans le manuscrit. Tout comme le nom de Hegel
plus loin, celui de Brunschvicg doit sans doute être mis entre parenthèses.
b. Rédigé au verso d’une carçe d'invitation (1953).
272 Carnets de captivité
les besoins, les particularités deviennent besoins eux-m êm es et
divisent. Les nationalismes dom inent les économ ies. Les langues
diverses sont souhaitées p ou r elles-m êm es.
<31>a
Prendre
<32>c
Ê T R E et D IE U .
if y aurait donc une lutte sans m erci entre les positions reli
gieuses fondées sur une relation avec Tabsolum ent <f. 4 verso>
A utre et la philosophie qui étend sa juridiction à l’expérience
religieuse elle-m êm e pour en retenir la signification im m anente
et pour-rejeter com m e insuffisamment pensé (c'est-à-dire com m e
un non-sens ou com m e illusions) tou t ce qui serfible, de prim e
abord, excéder l'im m anence.
<33>c
a. Au bas de cette page, « TSVP », pour indiquer qu'il faut se reporter au recto imprimé de ce
feuillet sur lequel Levinas a ajouté le développement qui suit.
b. Il faut sans doute lire « que ».
c. Feuillet manuscrit recto verso, écrit, à.deux exceptions près que nous signalons, au stylo
bille à encre bleue.
d. Souligné trois fois, les deux derniers traits de soulignement sont au stylo bille à encre
violette.
e. Guillemets incertains.
Notes philosophiques diverses 275
<35>
<36>
a. Sous les sept derniers mots de cette phrase, écrit au stylo plume àfencre bleue, ce qui semble
être up filet typographique, sans doute de séparation, invitant à faire passer à la ligne la suite du
paragraphe. On trouve plusieurs exemples de l’usage de ce signe de correction typographique - qui
n’est pas conforme au code typographique de rimprimerie nationale - accompagné de la mention
« à la ligne », dans les corrections que Levinas a portées sur quelques'pages (pp. 182 à 184) du
chapitre VII de son exemplaire de La Théorie de l’intuition dans la phénoménologie de Husserl, Paris,
R Alcan, 1930, conservé dans son fonds d’archives. (Il ne s’agit d’ailleurs pas à proprement parler
dans ce cas de corrections, mais de retouches, en vue d’une réutilisation de certains passages du
livre pour un autre écrit.)
b. Ajout manuscrit, au stylo plume à encre bleue, qui probablement recopie la fin de la phrase
qui se trouvait sur le feuillet suivant dans l’ensemble d’où a été extrait ce feuillet.
278 Carnets de captivité
<37>
<38>a
<39>
<40>b
< 4l> a
<42 >
<43 >
Ignore-toi — toi-m êm e.
<44>
< 45^
<47 >
<48>b
<49 >
<5Q*
Jalousie - le fait que l'autre est aussi. Pourquoi cela ne m 'est pas
indifférent ? Parce que je suis lui - J e suis lui parce que son père
est m oi.
282 Carnets dexaptivité
La haine de la fraternité est surm ontée dans un É ta t. Les frères
qui surm ontent la haine de la fraternité sans devenir.des étrangers
dans un É ta t = Israël.
Les frères ne sont pas, les uns avec les autres, dans un rapport de
libertés qui se com b atten t.
<51>
Études
E. W*. Il n’y a pas de liberté tan t qu'il y a un autre qui lim ite
m a liberté — l'autre est la violence. Violence = entrave à la liberté,
hostilité = un autre en face du m êm e : l'en face = contre.
Il ne m enace pas m on être, m ais m a liberté (je suis p rêt à m ourir
pour la liberté).
a) Il m e m enace par son existence
M a liberté n ’est donc pas com plète puisque elle n'ignore pas
l’existence de l'autre.
M a liberté est donc la définition de m on existence.
L autre ne lim ite {pas} m a liberté parce q u ’il existe car m ais son
existence n ’est pas une existence con tre, mais une existence sans
relations - (absolue) - visage -
M ais quel q u ’est-ce qui en m oi n ’est pas lim ité mais aurait pu
être lim ité par l’autre ? M a volonté — en -tan non pas en tant que
liberté coïncidant avec m on être causa sui (liberté com m e signe
de l’existence) mais volonté non héroïque : être (p rotég eant voué
à l’hégém onie} habitant jouissant des éléments menacé par eu x
dans leur avenir mais ayant le tem ps - conscient - se représentant
- m ais m enacé en quoi ? E n sa volonté, en sa conscience m êm e,
dans sa possibilité de faire à sa guise ? — non, non —J e veux dire :
le visage est-il sim plem ent ce qui ne heurte pas m a liberté par
ôpposition à autrui - force qui < » « > la heurterait ? La différence
n’est-elle pas dans la relation et le visage un simple résidu d ’une
relation ? -
L’essentiel de la relation — n’est-ce pas le fait q u e lle n’est pas
réversible - C ’est un autre type de relation : autrui est le faible, le
pauvre, la veuve et l’orphelin - ou autrui est le fort, le puissant, le
secourable. Pas rapport simple avec <m a/une ?> liberté. C ’est le
propre du visage — d ’apparaître ainsi dons Chose en soi, kocô’cxùtô
--'n ’est que la structure formelle de ce rapport. L’idée d ’une oppo
sition de volontés - n ’est pas <l’essentiel ?> . Volonté - possibi
lité pour m oi de réfléchir - à ce qui n ’a <xx>
<52>a
a. Rédigé au verso ainsi que sur une partie du recto imprimé d’une carte d'invitation (1957).
b. Écrit, dans le sens de la largeur, dans la partie supérieure droite du recto : « Le monde on
L’intelligibilité ».
284 Carnets de captivité
<53>a
<54>b
<55>
<56>
<57>
<58>‘
Lés thèm es
La tyrannie de l’É ta t -
Le sentim ent.
Le m édecin.
La sexualité et son dépasse1.
<59>
Création
1) Dans m on vouloir, j’ai voulu ce qui peut avoir une autre
signification pour d ’autres -
Ê tre créé = être voulant et produisant des œuvres = m ultipli
cité d ’êtres.
2) Ce qui a un sens avant moi.
3) Ce qui rend possible l’athéisme.
4 ) L’Infini s’accom m odant d ’une existence séparée.
<60 >
<62>
<63>b
<64>c
<65>d
Rappeler que chez P laton : l'am bition peut se traduire dans l'ar
g en t com m e l’argent dans l’am bition (catégorie du nom bre27).
<66>
<67>*
<68>b
<69>
<70>c
<71>
<72>a
<73>b
- Bonjour.
- J e ne vous connais pas.
- Rebonjour.
- J e ne vous connais pas.
- Pardon je suis celui à qui vous fl^avez.avez d it to u t à l’heure je
ne vous connais pas.
<74>
< 75 >a
É ta t Ju stice
« Dans un É ta t; c'est-à-dire dans une société où il y a des lois,
la liberté ne peut consister qu'à pouvoir faire, ce que l'on doit
vouloir, et à n’être pas cre cte : point> contraint de faire ce que
l'on ne doit pas vouloir.* »
M ontesquieu, Esprit des Loir,
XI*, III.
<76>
Platon 1*hedre%
2 3 8 e -2 3 9 a
(b C 'est le discours de Socrate adoptant sans y croire (?) la thèse
de Lysias
« O r, celui dont ^esprit est malade se plaît à tou t ce qui ne le
contrarie pas, tandis qu’il déteste ce qui lui est supérieur et m êm e
égal. D onc un am oùreux /ie tolérera pas de bon g ré, chez, ses
am ours, ni supériorité, ni égalité, mais toujours il travaille à le
rendre inférieur et plus dénué31. »
< 7 7 >c
a. Ajout qui commence dans l’interligne pour se poursuivre dans la partie Inférieure de la
marge de gauche. Inclus dans le trait qui entoure cet ajout, situé juste au-dessous de la dernière
ligne, un signe également entouré et peu lisible (le chiffre « 2 » ou peut-être la lettre « B »)> écrit
au stylo bille à encre violette.
b. Tout ce qui précède dans cet ajout est barré par un trait en zig-zag.
c. La topographie de cet ajout - écrit au stylo bille à encre violette - est assez complexe. Il
commence au milieu de la marge de gauche et se poursuit dans le corps du texte, dans l’interligne,
Notes philosophiques diverses 291
<78>
<79>
Transcendance
Sortir de soi ne signifie pas une apothéose quelconque, un
dépassement de sa condition ou l’éclatem ent de sa définition,
mais la possibilité d ’une relation avec autre chose que soi-m êm e.
puis en travers de la marge de droite, d’abord, nous a-t-il semblé, dans sa partie supérieure, puis
dans sa partie inférieure, pour se terminer en travers de la marge de gauche, partie supérieure - la
partie de l’ajout se trouvant en travers de la partie inférieure de la marge de droite étant reliée par
une flèche à celle qui figure en travers de la partie supérieure de la marge de gauche. Nous avoos
distingué ces quatre parties de l’ajout en les séparant parles barres obliques.
a. La totalité du paragraphe est barrée par un trait oblique.
b. Ce paragraphe est précédé d’un signe peu lisible entouré d’un trait (peut-être la lettre « C *)
écrit au stylo bille à encre violette.
292 Carnets de captivité
<80>a
<81>b
<82>c
<83>
<84>d
< 8 5 > ft
<86>b
É crits
Liberté'conGrète et institutions.
M ai£ les institutions reposent sur des écrits. La réalité qui s'ouvre
à un être réellem ent libre est prise dans les textes qui l'organi
sent. Textes législatifs, littéraires ou scientifiques. Le m onde de la
liberté repose sur d esiivres ¡c h a rte , statuts. L ittératu re d'un pays
qui i^ouvre sur sac tiature et'sesd m œ urs à chaque individu habi
tant ; les livres de science qui rendent possible la connaissance
rendent le m onde habitable c'est-à-dire l'hom m e libre.
P ar les écrits l’histoire diffère d ’une simple m ém oire : l'hom m e
peut se rapporter à un passé qu’il n'a jamais vécu com m e
présent.
numéroter ses pages). Toutefois, le numéro se trouvant ainsi disposé, et compte tenu du fait que
l’ençre des mots traversés est, semble-t-il, au-dessus du crayon, i) a pu être écpt avant même que
la note ne soit rédigée ; on ne peut donc considérer avec certitude que cette note faisait partie d’un
ensemble plus vaste. Ajoutons que la note 167 (rédigée également au stylo bille à encre bleui,
au verso d'un autre exemplaire de la carte d’invitation qui a servi à la présente note) comporte le
nombre « 140 », écrit, là aussi, tête-bêche et au crayon de couleur rouge. Mais ces deux notations
n’ont semble-t-il pas de lien thématique entre elles.
a. Rédigé au verso d’un morceau de carte d’invitation (1953).
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1953).
c. « sa » en surcharge de « la ».
d. « ses » en surcharge de « les ».
294 Carnets de captivité
< 8 7 > ft
<88>c
a. Rédigé au verso ainsi qu’au recto imprimé d’une carte d’invitation (1953).
b. Au bas de cette page, « TSVP », pour indiquer qu’il faut se reporter au recto imprimé de
cette carte d’invitation sur laquelle Levinas a ajouté le développement qui suit.
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1953).
Notes '■ philosophiques diverses 295
<89>a
J'a i quelque soupçon que l'Ê tre de l'étant demeure le corrélatif d'un
berger qui garde son troupeau pour lui, que l'être de l'étant perpétue
l'unité d'une économie, un ordre d'échanges et de calculs53.
<90>b
<91>c
<92>d
Le Trans-historique et l'École
Vouloir sortir de l'histoire, ce n'est pas proclam er une existence
libre sans possibilités institutionnelles - mais indiquer une insti
tution plus forte que l'histoire. C ontester le prim at de l'histoire
sans origine ni fin com m e moyen de comprendre l'hom m e et sa
vérité — il faut trouver une institution dont la structure historique
vire en une stru ctu re qui dépasse l'histoire. Partir* de l’im portance
de l'É c rjt et de la nécessité d ’apprendre la lecture des écrits.
<94>b
<95>
<96>
<97> 4
a. « un » en surcharge de « la ».
298 Carnets de captivité
Il était serviteur de la pensée qui a pefisé la «finalité d u sa g e ou
les séries causales. Cf. Cratyle
: le langage n'est pas simple usten
sile* résultat d'une convention, il a*un rapport avec la réalité q u 'il
im ite ;.m ais chez le législateur qui institue le langage, celu i-ci est
subordonné à la science, à la yision des Idées ; il sert, dans l'ensei
gnem ent, à provoquer la m ontée vers les Idées.
2 Mais si le sens = contenu de la pensée, est-il possible ? Le
penseur dans le monde <se> dérobe à lui-m êm e en vue de l'en
semble. Pas de réflexion totale ! Il faudrait pour que le sens reste
contenu de la pensée, une attitu d e nouvelle à l'égard du m onde,
sans que le*m on de réagisse sur le penseur, il faudrait u n e .a tti
tude vraim ent libre : s'élever au-dessus du m onde pour qu'il soit
autre chose q u ’une histoire à laquelle l'historien appartient ! — E t
cependant le m onde ne doit pas être dans cette attitu d e réalité
dépassée, com m e dans l'idéalism e*qui le construit ou dans une
philosophie de l'histoire où il est toujours passé et dépassé. Saisir
le sens = saisir le monde com m e ce en quoi nous ne sommes pas
engagés et com m e ce qui est en haut, pas dépassé. Connaître &
maîtriser.
<verso> Connaître = être élève.
N on pas m étaphoriquem ent com m e « élève d'une expérience »
mais au sens réel « élève d'un m aître »
= La réalité acquiert un sens dans l'enseignem ent. Le rapport avec
A utrui com m e m aître rend possible le sens d'une vérité réalité.
Rôle de la parole. Rôle d'enseignem ent.
L'essentiel de la parole - ni service de la pensée à exprim er
(à im iter), ni recours aux signes pour les com m uniquer à A utrui ;
mais dans l'intentionnalité vers A utrui com m e enseignant.
C 'est l'inégalité — M aître-élève - dans leur rencontre qui est l’es
sentiel de la parole. P rim at de la parolé entendue.
D im ension de la parole = rencontre d 'A utrui = R encontre du
M aître (pas m aître-esclave !) - pas de violence.
Notes philosophiques diverses 299
<98>a
<99>c
C élébrer - fêter -
poèm e d ’<été ?>
< 100>
< 10 1 >
A rtifice, m aniérism e dans l'art -
— m usicocratie
èkevOepoç réxvctçd
<102>e
L'écrit ne répond pas —est sans appel —et devient loi. Toute parole
sans appel ne devient pas loi, mais c'est dans cette dimension que
la loi s'inscrit.
<104>
<105>
La parole et la philologie
bTTP
Il faut lire
raa ’ *yr k lias?pr40
<108>c
<109>
H abitation et demeure'1.
<110>'
< lll> f
<112>b
Le sens n ’est pas sim plem ent une finalité. Car la finalité est une fin
du sens. À la fois m ouvem ent {incessant} et orientation - respon
sabilité d*Autrui — voilà le sens. Ce n’est pas ce qu’on entend par
« sens de l’histoire ».
<113>c
<117>c
<118>
<M 9>a
a. Morceau d'un feuillet dactylographié recto (lui-même vraisemblablement extrait d'un en
semble plus.vaste, parce qu’il est la suite d’un feuillet qui n’a pas été conservé et qu’il comporte,
en outre} urr numéro de page, en partie illisible) que Levinas a dééhiré proprement afin d’en isoler
ce fragment textuçl. Il a entouré le fragment d’un trait en çxdpant les deux preqiiers /nots qui
sont la fin de la phrase qui commençait sur un autre feuillet. Il a ensuite barré ce fragment d’une
cancellation én croix.
b. Titre ajouté au stylo plume. La première lettre du titre est en surcharge d’un numéro de
page en partie illisible.
c. Ajout interlinéaire, au crayon à papier, qui peut se rapporter à la fin de la phrase qui précède
ou au début de la phrase qui suit : « en face d’Autrui ».
d/^'Se »7 écrit au*stylo plume, en surcharge d’un mot illisible.
e. Ce mot «st écrit au stylo plume, dans Un espace laissé vide dans le dactylogramme.
f. Même remarque que dans la note précédente.
306 Carnets de captivité
La notion m êm e d'im m anence est fondée sur cette banalité
foncière de la réalité qui se donne dans la connaissance. Quelle
différence entre naturel et surnaturel ? N atu rel = ce qui peut être
connu. O n ne dûit pas p artir de la nature humaine pour* décou
vrir le surnaturel qui en déjoue les lois. C 'est ^ co n n aissan ce qui
détient la nature et l'im m anence hum aine. Connaître le transcen
dant est contradictoire dans les term es.
La séparation -
Sainteté*
< 122>
N otion d'accom plissem ent
<123>
M éthode
La signification des événem ents est dans leur instant, dans leur
« tem ps m ort » et non pas dans leur contexte tem porel. Dans leur
instant : leur initiation à l ’être, leur manière d'accueillir l’aven
ture de l'existence.
a. Il peut s’agir de l’indication du thème d’un ensemble de notes, mais ce feuillet serait alors
mal classé ou aurait été déclassé, car ce qui suit n’aborde pas ce thème. Il est difficile d’indiquer
les notes qui s’y rapporteraient.
Notes philosophiques diverses 307
<12 4>
»S'il xi y avait pas de d ’ejnseignement - c ’est-à-dire du plus
entrant dans le moins — il n’y aurait pas eu de tem ps — mais l’éter
nité des essences - étant chacune face ou des monades se reflétant
la m êm e vérité.
<125>a
Cynism e -
ne pas adorer le produit de ses mains.
<126>b
Poésie à la fois
penser sans savoir ce que l ’on pense et penser ce non-savoir
pour le m ettre en valeur -
ce rêve éveillé est, une extrêm e lucidité p o u r... la forme.
<127>c
Phosphorescence -
est l’œ uvre d ’êtfe
Allergie
<128>
<130>
IL Y A
<131>
Platon
« Suis-je u n-ûftimol -plus-p a par hasard quelque bête plus com pli
quée et bien plus enfumée par l’orgueil que n’est Typhon ? Suis-
je un anim al plus paisible, sans autant de com plications et qui,
de nature, participe à une destinée divine où n’entrent point les
fumées de l'orgueil ? », Phèdre 2 3 0 a37.
<132>c
Platon Phèdre 2 2 9 e - 230 a
<133>a
<134>b
<135>
<137>b
<138>
<139>
<140>
Les hom m es s’unissent et form ent une société non pas pour
vaincre, mais pour retarder la m o rt. O n appelle cela à juste titre
vivre, car, dans l’intervalle de durée qui sépare la naissance du
a. les notes 136 à 155 sont rassemblées dans un feuillet double cartonné.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1933).
Notes philosophiques diverses 311
<141>-
< l42> b
<143>C
< l44> d
Propriété agraire
P'3
39k s - d
< l4è>
Autrui - celui qui peut mentir - Parce que présent il peut m entir
- s-’il n'était qu apparence il ferait faux mais ne pourrait pas mentir:
Le mensonge suppose autrui néant dans l'être. Autrui — Personne
Angoisse - expérience de l'A utre
<147>
<148>
possibilité de l'équivoque
ordre
Verbe vœ u
prière
m ythe
<149>
*1 5 D >
<1$1>
<152>a
< i53> b
<154>
<155>
<I56>
Ce qui com pte dans une institution - c ’est q u ’elle se trouve dans
le m onde com m e si elle avait cependant ce m onde pour objet.
O r, c ’est sur l’É crit en tant qu'il d it le M onde - m oi y com pris -
qu'est fondée l’institution. L’institution, à cause de l'É crit - A b
solu - point d ’A rchim ède - nécessaire à la liberté.
< 1 5 7 >a
Expérience et Dieu
Expérience religieuse ? Il ne peut y avoir d ’expérience sur
naturelle que l'expérience du Diable. La résistance systématique
à l'ordre du M êm e — c ’est le M alin génie lui-m êm e. D ieu doit
absolum ent s'entendre - il n'est pas l'ennem i, m êm e s’il est
l'autre.
<158>
- Ayec les m égots de sa* pensée ils font une fumée de locom otive.
- Si la charité s'éteint faute de m isère, il n y a que les aumônes
pour en être fâchées.
a
< l60> b
<161>C
E xistence am phibie.
< 1 6 3 > ft
<164>
a. Les notes 163 et 164 sont chacune un fragment textuel d’une page manuscrite, obtenu par
la déchirure d’un feuillet manuscrit recto. Les deux morceaux de feuillet sont d’un même-papier
et le texte est, dans les deux cas, rédigé au stylo bille à encre violette, les ajouts et surcharges étant
écrits au stylo plume à encre noire. S’il est peu probable qu’ils soient les deux morceaux d’un même
feuillet, ils sont néanmoins extraits d’un même ensemble, comme l'attestent l’unité thématique
des textes qui y figurent et, matériellement, l’identité du support et de l’instrument d'écriture.
b. « est » en surcharge de « elle ».
c. « L’État » en surcharge de « l’état ».
d. Ce qui suit est écrit au stylo plume.
e. Mot illisible en raison de la détérioration du papier. Les deux premières lettres du -mot
encore lisibles suggèrent la lecture de « défini ».
Noies philosophiques diverses 317
<165>4
<!66>b
< Î67> *
Crise de l'A m ou r
1) pas sortie véritable - (am our extériorité au sein de l'habita
tion)
a. Morceau d’un feuillet dactylographié que Levinas a déchiré proprement afin d’en isoler ce
fragment textuel, qu’il a en outre entouré au stylo bille à encre bleue.
b. Rédigé-au verso d’une carte d’invitation (1958).
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1953).
318 Carnets de captivité
2 ) solitude à deux
3) V olupté = élémental
4 ) Infidélité4
5) O bscénité
Surmontée dans la famille :
1) juridique
2 ) enfant
6) Inégauxb
< 168>
< l6 9 > d
< 1 7 0 > ft
< 171>
<172>c
<174>b
La parole - visage.
Mais le fait de se tourner vers m oi - se qualifie - sa misère et
cependant sa non-relativité (misère c ’est sa m anifestation et son
entrée dans m on m onde - chose en soi - sa non-relativité : M isère
à la fois relativité et en soi (€ r i e r {crier} justice).
<176>d
<177>‘
<178>b
a. Morceau d’un feuillet manuscrit recto verso. Le texte figurant au recto esc tronqué. Il est
écrit au stylo bille à encre bleue ; les ratures, surcharges et ajouts du premier alinéa sont au stylo
bille à encre violette. Le texte figurant au verso est écrit au stylo bille à encre violette. Ces deux
pages n’ont semble-t-il pas de rapport entre elles, et l'on peut penser, le texte écrit au recto étant
tronqué, que la note que Levinas souhaitait conserver est celle qui figure au verso.
b. Morceau d’un feuillet manuscrit recto verso, au stylo bille à encre bleue (l'encre du recto est
d’un bleu plus clair, la même, semble-t-il, que celle du recto du feuillet de la précédente note). Ces
deux pages n’ont visiblement pas de rapport entre elles, et il est possible, le recto étant tronqué,
que la note que Levinas souhaitait conserver soit celle qui figure au verso. Signalons par ailleurs
que le feuillet sur lequel figure cette note ainsi que celui sur lequel on lit la précédente sont d’un
même papier, quê les textes qui figurent ai> recto de ces feuillets sont probablement écrits àvec le
même stylo bille’à encre bleue, et qu’enfin ils ont pôur thème la volonté. Ces deux feuillets appar
tenaient sans doute à un même ensemble.
c. En haut de cette page, ces notations barrées, visiblement antérieures à la rédaction de cette
note (elles sont rédigées au stylo bille à encre violette, le reste du texte est au stylo bille à encre
bleue) :»« 23 févfier —vxxxxy -------— *------- 585 ---------------------- u ^157 ».
322 Carnets de captivité
<179>a
<f. 1> Que les m ots ne se bornent pas à refléter des idées,
qu’ils jouent dans l’esprit un rôle p ositif — dem eure la vérité du
nom inalisme. Quel est ce rôle ? Il est facile de rappeler q u ’en
parlant nous dépassons constam m ent notre pensée, car nous
utilisons un outil chargé d ’une puissance d ’évocation déposée
en lui par l’histoire et par la société et que des significations
harmoniques résonnent dès que le m o t est proféré ; que m algré
les cadres sociaux du langage, le m o t prononcé se déforme
dans le langage individuel de chacun. Évocation des harm oni
ques - à la fois obstacle et instrum ent de la parole. Car voici
la parole devenue artiste : dans le systèm e des signes verbaux
<f. 2 > rdont elle dispose, elle perçoit un clavier et le thèm e simple
qu’elle avait à traduire tou t d ’abord s’enrichit de symphonies
possibles.
< 180>
< 1 8 1 >b
a. Il s’agit de deux morceaux de feuillets manuscrits recto que Levinas a déchirés proprement
afin d’en isoler ces quelques lignes, et qui manifestement se suivent. Le papier ainsi que l’instru
ment d’écriture de ces deux feuillets (stylo plume à encre bleue) sont identiques.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1953).
c. En travers de la marge de gauche, écrit au stylo plume à encre noire (le reste est au stylo bille
à encre violette) : « TRU 72-27 ». Il s’agit probablement d’un ancien numéro de téléphone.
Notes philosophiques diverses 323
< 1 8 2 > ft
<183>b
« Sie müssen mich fragen und nicht sich, wenn Sie mich verstehen wollen » ,
L éttre de Joh ann G eorg H am ann à K an t de déc. 1 7 5 9
Éditions Cassirer, Tome 9 , p. 1 9 45.
<18 4 > c
<185>e
<186>
<188>*
<189>
< 190>
a. Morceau d’un feuillet manuscrit recto verso. Le texte figurant au recto, qui n’a, semble-t-il,
aucun rapport avec celui qu’on peut lire au verso, a été tronqué lors de la déchirure du feuillet par
Levinas.
b. Levinas a encadré ce qui suit, mais le bas du cadre a été interrompu par la déchirure du
feuillet.
Notes philosophiques diverses 325
< 1 9 1 > ft
*192> b
D ire que le monde est raisonhable - ce n’est pas simple1 dire qu’il
est structuré (structure suppose raison) -
Mais qu’ùn effet attribué à la raison — p. ex. la paix, est possible
en féalité — et que la réalité qui y contribue -
<193>c
<194>d
Courage :
com bat contre la peur et la souffrance
contre les désir
plaisir
<196>a
Phèdre 2 3 0 d
« Les champs et les arbres ne consentent à rien m ’enseigner, tandis
que c ’est ce que font les hom m es qui sont dans la ville48. »
<197>
<198>*
H aulser.le tem ps49
<199>b
<200>c
L’idéal suprême de la lim itation et de la destruction des désirs
n’est, pas concevable com m e mode co llectif d ’existence. Dans
cette im possibilité il n’y a pas seulement le mépris de la foule,
mais aussi une contestation de l’universalité de cet idéal.
< 202>
Lois 6 2 8 b
L’Athénien
a. Le texte est écrit obliquement sur une carte d'invitation (1955). Trois traits horizontaux
séparent les deux remarques.
b. Rédigé au verso d’un faire-part de mariage (1955).
c. Rédigé au verso d'une carte d’invitation (1955).
328 Carnets de captivité
Ce qui à coup sûr est le m ieux, ce n'est ni la guerre, ni la sédi
tion, et c est une chose détestable de les désirer ; m ais ce qui est le
m ieux c ’est à la fois la paix entre les hom m es et une bienveillance
m utuelle de sentim ents - et il va bien de soi aussi, sem ble-t-il
bien, que la victoire rem portée par un É ta t sur lui-m êm e ne doit
pas être mise au nom bre des choses qui valent le m ieux, mais de
celles qui sont une nécessité51 !
<203>a
<204>b
<205>c
Chez H eidegger
S. u Z. - m onde du travail et des objets (Zuhandenes) dans les
œuvres ultim es.
Le paysage - la cm on tag n e ?> , la forêt, la mer.
<207>a
N otre m onde repose sur les écrits, sur les textes. L’hom m e
a un m onde à cause des écrits où il se tien t. À cause des écrits, le
monde qui est pour nous est au préalable ce par rapport à quoi
nous sommes.
<208>
M étaphore
<209>
<210>a
1° Touté m étaphore reste dans l'im m anence -car Lab pensée est la
définition m êm e de l’im m anence — ce que l'on ne peut étonner =
pensée. E t en effet : étonnem ent = com m encem ent de la philoso-
<1>
D ialectique de la violence
<2 >
< 3>
Il n’est pas vrai que le jugem ent n égatif n ’a pas de force sugges
tive positive.
Les attrib u ts négatifs ne sont pas sim plem ent lim itatifs.
Force m éta-phorique de la négation.
<4>a
<recto> 1 9 J . 6 1
U ne personne vivante parle. Ce qu'elle d it est sténographié et,
dans l’écrit, s’intégre à un con texte culturel impersonnel. A déjà
été d it par d ’autres ; est contestable ou verbal. Pourquoi le discours
a. Feuillet manuscrit dont le recto est rédigé au stylo plume et le verso (qui en est manifeste
ment la suite, mais relevant peut-être d’une autre caitïpagne d’écriture) au crayon à papier.
Notes philosophiques diverses 335
<5>b
<6>c
a. Le recco comporte un ajput écrit en travers de la marge de gauche, mais ne lui assigne
aucune place dans le corps du texte : « Le fait qu’autrui pense cela, esc plus important que cette
pensée elle-même. Tout le mystère du Maître est le fait que l’enseignement est irremplaçable. »
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1954).
c. Note rédigée sur une carte d’invitation double (1966) dont les pages 1 et 4 sont imprimées.
Levinas a écrit, dans le sens de la largeur, sur les pages intérieures vierges ainsi que sur l’une des
deux pages imprimées. Nous foisons commencer la note par la page qui comporte un titre souligné
indiquant le thème général de l’ensemble du propos. Nous signalons chacune des pages remplies
par Levinas en suivant la pagination du bifeuillet : le texte commence donc à la page 3 et se pour
suit aux pages 2 et 1.
336 Gamets de captivité
tout silence et toute eschatologie et toute interruption en parlant
à l'interlocuteur. Il ne parle ra s à lui-m êm e. (Mais est-ce pour cela
que Platon parle d'un discours silencieux - m ais l’âme silencieuse
pense-t-elle.) *E rm êm e en enveloppant tou t cela par le présent
discours je n e l’interrom ps pas en écrivant. T aut- {Le dialogue, le
discours recherche l’unité — <3eeae> mais il la*demande en inter
rogeant et par là m êm e la brise. Si la pensée ne se sépare pas
du discours, elle a* déjà perdu la to talité.'T o u t} discours est brisé,
dérangé de par cette contradiction ultim e.
Q ui le* brise l’êtreTou D ieu ?
<p. 2 du bifeuillet> Le discours philosophique qui énonce sa
propre rupture ou sa propre impuissance, est-il le m êm e que celui
qui vient de se rom pre ou de s ^ r ê te r ? S’il est le* m êm e, c'est que
le conditionné et le conditionnant sont contem porains (structure).
Mais le discours est aussi libération à l'égard de sa condition.
Le discours philosophique est un discours qui se rom pt — qui
se retire de la parole qui m arm onne im personnellem ent - (qui se
parle) - p eu r il s'en retire pour parler du discours où tou t à l'heure
il parlait.
Mais le discours qui énonce sa propre rupture — ou sa propre
impuissance - n ’est pas le m êm e que celui qui vient de se rom pre
ou de s’arrêter. Il a réfléchi sur l’interruption. Il n'y <p. 1 du
bifeuillet> a pas d ’unité du discours, mais une histoire faite de ses
interruptions et de la descente à un nouveau niveau, R ep li sur des
positions préparées à l'avance ? U ne descente qui est la m arche
vers le discours absolu à p artird u q u el toute cette histoire et toute
cette descente est visible.
O u n’est-il pas encore en question — en tan t qu’il s’adresse à un
A utre. {Tout Discours est quête. Mais l’interrogation du j e ... m e
demande est déjà discours avec un A u tre4.}
a. Ajout écrit en travers de la marge de gauche, entouré et relié par une flèche à ce qui pré
cède.
N ôtes philosophiques diverses 337
<7>
Discours et interruption
Soit le discours est plus que présent ou non présent et est, par
lüi-m êm e, logos décidant de norm e, pensée distincte de toute
intention — qut dont on sait a priori qu'il est cela m êm e qui
ne peu t se laisser rom pre et qui est prêt à dire en soi toutes les
ruptures, à les consom m er com m e origine silencieuse ou com m e
eschatologie. C ’est en lui - en g rec - ¿jùe se produisent encore
toutes les interpellations de l’Étrànger.
O n ne peut parler de rupture que dans un *discours de type
philosophique qui ne peut à la lim ite se m ettre en question qu’en
s’affirmant, qu’en se confirm ant lui-m êm e. Pour lui dire l’A utre,
il faut parler g rec aux G recs1, ce qui est déjà lui donner raison.
<8 >
<9>
<10>a
< 11>
Différence entre sensibilité et intelligence : m usique, peinture
- cela ne passe pas par la traduction - cela coule en vous com m e le
manger. La pensée = signes à traduire. Cela passe par la tête.
< 12 >
<13>b
L’hum anité surm ontant l’anim alité dans la 3rn 3 “1B - car l ’ani
m alité a un sens. Les diverses directions que la niDHE em prunte
n’im posent pas un changem ent de direction.
a. Rédigé sur un morceau de cane d'invitation reproduisant une œuvre du peintre Hosiasson
datée de 1966.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1954).
Notes philosophiques diverses 339
< 14 > a
<16 >c
c l ’hypotypose ?>
m onothéism e ; nourrir des hom m es — la voilà la tâche sacrée
sur laquelle s’ouvfe Messire G aster le prem ier m aître ès arts du
m onde, m algré l’hum ilité du siège qu’en fin de com pte lui accorde
Rabelais5.
<i6>J
<18>‘
<19>b
<20>c
- -L 'É ta t qui satisfait à tous les besoins’ ne peut être guidé sans
philosophie : il faut que quelqu'un regarde au-delà des besoins.
<2 1 >
<2
La conscience est une méfiance de la liberté à l'égard d'elle-
m êm e.
<23>
<24>
<25>
< 26 >
U ne Jérusalem céleste et jum elée avec la terrestre. Mais les
choses ne se passent pas com m e chez P laton où celle d ’en bas
im iterait celle d ’en haut. D ieu ne peut venir dans la Jéru salem
céleste tan t que la m échanceté des hom m es l’em pêché d ’entrer
dans la Jérusalem terrestre.
5a 8rv>a3?n
<27>
<28>
< 2 9 > ft
<30>b
<31>b
<32>c
<33>
<34 > a
<35>b
<36>d
Es entsteht so, gewiss immer in Fühlung mit der Ethikt aber doch
scharf von ih r unterschieden, eine neue Lehre vom Menschen, eben vom
a. Feuillet arraché d’une carte d’invitation qui comportait visiblement trois volets, sur lesquels
Levinas avait peut-être écrit, puisque la note conclut manifestement un développement antérieur.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1961).
c. « sa » en surcharge de « la ».
d. Note manuscrite au verso d’un morceau de feuillet dont le recto également manuscrit ne
contient plus que des fins de ligne, raison pour laquelle nous ne le reproduisons pas.
346 Carnets de captivité
Menschen m it Gott u n d vor Gott, der doch zugleich erst der wirkliche,
gegenwärtige Mensch ist, der sich nicht in die Menschheit der Z ukunft
auflosen IcissPund keine “Vogelscheuche des Sittengesetzes” sein w ill. 2 2 1
Zweistromland10.
<37>a
<38>
<39>b
M éthode
Souffrance = im possibilité de fuir la souffrance.
M oi — attachem ent à soi.
a. Rédigé au verso d’un morceau de feuillet cartonné manuscrit recto (document scolaire rela
tif à une « épreuve d’hébreu du 29 juin 1956 »)•
b. Note manuscrite au verso d’un morceau de feuillet dont le recto également manuscrit ne
contient plus qu’une fin de ligne, raison pour laquelle nous ne le reproduisons pas.
Noterphilosophiques diverses 347
<40 >
<4 1>
<42 >*
<recto> rem plit la vie. C 'est {dans} ce deuxièm e sens que nous
disons q u ’on v it de son travail.
N ous avons d it que « vivre d e ... » ne revient pas à puiser de
l ’énergie ailleurs q u ’en nous-m êm e, que la vie consiste non pas
dans la consom m ation de cette énergie fournie par la respiration
et la nourriture, m ais, si l ’on .peut dire dans la consom m ation
m êm e. N ’em pêche--que {si} la vie m arque june certaine dépen
dance à l’égard de ce qui n ’est pas elle, Be cependant en -insistant
sur- cet t e- dépendance?- op nég lig e {il faut com p ter sur} l'apport
positif de la dépendance à ,l’être dépendant. Ce d ont nous vivons
ne < interrom p u >
a. Morceau d’un feuillet, manuscrit recto verso. Le recto est écrit au stylo plumç à encre bleue,
le verso au stylo bille à encre bleue. Le texte qui figure au recto débute par la fin d'une phrase qui
commençait sur un autre feuillet, la suite se trouvait sur la partie inférieure du feuillet qui a été
déchirée. Il est donc antérieur à celui que l’on peur-lire au verso, avec lequel il n'a pas de rapport,
et appartenait sans doute à un ensemble plus vaste —peut-être l’une des versions manuscrites de
Totalité et Infini.
348 Carnets de captivité
<verso > Visage - com m e par excellence expression - pas une
chose ouverte - mais l’ouverture en général.
<43>
<44>a
<45>b
< 4 6 >b
<47 >
1931e
Le vide et le néant présentés en guise de concept fondamental,
ne sauraient peu t-être jamais recevoir une définition, positive.
25 ans de m éditations heideggeriennes n’ont certes pas été plus
fructueuses à cet égard que les 2 5 siècles qu'elles prolongent.
a. Ce qui suie esc écrit au stylo bille à encre bleue et recopie probablement la fin de ce paragra
phe qui se trouvait sur un autre feuillet.
b. Rédigé au versç d’une carte d’invitation (1954).
c. La date - à moins que nous ne la déchiffrions pas correctement - est fautive, puisque la carte
d’invitation au verso de laquelle est rédigée celte notation porte la date de 1954.
350 Carnets de captivité
Im possibilité d aboutir — radicale. L'être — l ’exister — est oublié
aussitôt qu'il est révélé. M ais c'est un oubli,, ce n'est pas une
absence pure et simple de relation, pas une séparation radicale
avec cet événem ent ineffable. Aussi la recherche ontologique est-
elle inextinguible, m algré ses échecs. Elle consiste à dénoncer cet
oubli. L u tter avec cette am nésie, est la seule façon de dem eurer
en rapport avec l'être. C ontre les sarcasmes qui s'attach ent au fait
qu'après le départ glorieux de Sein u nd Z eit à la découverte de
l'être, H eidegger se trouve sur les Holztvege où il. erre après les
longues recherches de l'Ê tre.
. Ce qui est cependant rem arquable, c ’est que la connaissance
repose en fin de com p te sur un oubli.
<48 >
M étaphore
1° La proposition d it l’être. L’unité de langage est un énoncé sur
l’être, puisque la copule est aussi l'expression de ce qu'il en est
d e ... D e sorte que l ’essentiel du langage a pu être présenté com m e
révélation de l’être.
2° Mais langage « direction vers l'inte,rlocuteur auquel cette
révélation de l'être est apportée. Tout langage est direct. M êm e
le discours indirect est enveloppé dans un discours direct. Ce
m ouvem ent qui porte le discours au-delà de celui qui le tierft
- nous l'appelons m étaphore [L'exposition du langage à A utrui
est donc plus transitive que l'exposition des essences].
3° L'intention propre de la m étaphore n'est pas Ta rencontre d'un
contenu nouveau quelconque. Elle est dans les « guillem ets »
q u elle perm et d'ajouter, dans le fait de se hausser sur la pointe des
pieds, dans une espèce de lévitation - dans l’affirmation et un sens
« autre ». -L e q u e l ? Vide de cette intention incapable de découvrir
un contenu nouveau et qui pousse jusqu'au bout — à l'infini - ce
que vise la pensée pensant une signification. Idée au sens kantien
du term e. Le m ot fait faire ce rnouv1 métaphorique.
Notes philosophiques diverses 351
< 4 9 > ft
<50>b
aim ant D ieu, D ieu aim ant l'hom m e, l'hom m e aim ant l'hom m e,
pour le judaïsme .c'est du dernier <sic> qu'il faut partir. C ’est
dans m a révolte contre la misère de m on prochain que j’a i aimé
D ieu. [*« N e < v e r s o te dérobe pas devant ta chair » —on connaît
le chapitre 5 8 d'Isaïe où le vrai culte revient à rendre leur dû aux
pauvres. Leur dû et non pas la charité ! E t rendre leur dû aux
pauvres, rendre justice - c ’est aim er. Le p g f t re est notre chair - le
m o t chair fait écho à l’exclam ation d 'A q H qui aperçoit pour la
prem ière fois Ève (Genèse). D ieu aim antT e pauvre et l’étranger
duj D eutéronom e — ce n’est pas dire son attribut* mais le définir
essentiellem ent - E t le Psaum e 1 1 9 fait* é ch o .à ces textes : « J e
suis étranger sur la terre, ne m e cache pas tes com m andem ents ! »
D ieu m 'aim e en m e révélant ses ordres. Le m onde ne devient m a
patrie que p ar m a pratique de la justice.
<51>,
a. Le crochet fermant manque sur le verso. Il figurait peut-être sur la partie inférieure du
feuillet qui a été déchirée (cf. la note précédente).
354 Carnets de captivité
soustraite à toute récompense - à tou te contem poranéité - et par
conséquent un D ieu irrévélé ou révélé dans l'in gratitu d e : visage
d 'A utrui. Q uant à D ieu, trace, passé, éternité.
<52>a
<53>c
< S 4 > ft
Phénom énologie
<55>
Phénom énologie
<5$>c
Phénom énologie
a. Les notes 54 à 39 se trouvent à l’intérieur d’un feuillet plié en deux, sur lequel est écrit :
« Fiches phénoménologie ». La présente note est rédigée au verso d’une carte d’invitation (1953).
b. Il faut manifestement lire « étant ».
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1955).
d. Ce qui précède est écrit au stylo plume à encre bleue ; ce qui suit, qui se trouve tassé au bas
du feuillet, et qui fut sans doute ajouté postérieurement, est rédigé au stylo bille à encre bleue.
356 Carnets de captivité
H eidegger - nous avons perdu le concret - bien que cette perte
nous ramène au concret. {Seul un m oderne peut revenir au préso-
cratism e.} Chez H egel - histoire aboutit.au concret.
<57>
Phénom énologie
D istinction entre le pour soi et l'en soi dans les deux phéno
ménologies.
15* o w n a s r p k V i km
A ctivité technique ou poétique - qu'il faut rapporter à l'absolu.
<58>
<59>‘
<60>a
a. Noce rédigée au verso de cinq feuillets imprimés recto. Elle est écrite au stylo bille à encre
violette, à l’exception d’un passage que nous signalons, rédigé au crayon de couleur bleu. Ces im
primés ¿ont vraisemblablement extraits de deux bulletins d’information hebdomadaires de la léga
tion d’Israël à Paris. L’un des imprimés est la première page du bulletin daté du 6 mars 1932.
358 Carnets de captivité
Mais ne p ou rra-t-on com prendre Tessence du langage - en
p artant de ce m ouvem ent : on verrait en to u t cas {aussi} q u ’il ne
consiste pas à com m uniquer.
C om m ent dans le m ouvem ent question-réponse - p eut-on
distinguer le phénomène du visage6 ?
Visage —une forme ouverte ? pas ouverture qui fait ressortir une
autre forme. Ouverture qui fait ressortir une autre forme = lumière,
ouverture de l’éclairage. Visage - ouverture qui fait ressortir une
substance sans attributs, un Absolu ; aussi la connaissance ne
continue-t-elle plus - mais le com m erce commence. Il consiste à se
trouver au-dessus de la connaissance, à parler de quelque chose.
Parler de quelque chose — intentionnalité ne serait possible que
sur le plan du com m erce. Sans cela nous demeurons dans le « avoir
besoin de ». La contradiction sujet de la nature et partie de la nature
- penser et exister - se résout par la <pes ?> distinction entre moi
et parole. La transcendance - hors du monde = visage. <Par ?> le
visage. Parole - négation du monde en parlant du monde.
< f.3> La m orale - c ’est la parole pure — la possibilité <le voir
un visage derrière tous ses masques. Différence radicale de-^ d ’un
enseignem ent i6iVttP3in et de l ’enseignem ent publicb — universalité
de la société durckheim ienne. Raison com m e rapport personnel
- opposé à la raison com m e universalité.
<6l>a
a. Dix feuillets manuscrits recto, à l’exception des feuillets 7 et 10, manuscrits recto verso. Le
papier des feuillets 1 à 7 est identique, les feuillets 8 à 10 sont des morceaux de lettres reçues dacty
lographiées. Les feuillets 1 à 7 (recto) sont écrits au stylo plume à encre bleue, mais les corrections,
ajouts et ratures sont au stylo bille à encre violette ou au crayon à papier.' Les feuillets 7 (verso) à
10 (recto) sont rédigés au crayon à papier. Le feuillet 10" (dernière ligne du recto et intégralité du
texte figurant sur les marges du verso imprimé) est au stylo bille à encre violette. Enfin, signalons
que les feuillets 8 et 9 sont les deux morceaux d’une lettre reçue dactylographié^ datée du 12 juin
1950, ce qui nous donne un terminus a quo%au moins pour l’écriture de ces feuillets. Ces éléments
matériels permettent de supposer que les feuillets 1 à 7 (recto) appartenaient à un ensemble plus
vaste - d’ailleurs, le numéro ainsi que le titre de paragraphe barrés au début du premier feuillette
confirment - et que Levinas a recomposé un tout en y ajoutant trois nouveaux feuillets.
b. Écrit au stylo bille à encre violette.
Notes philosophiques diverses 361
a. Ces quatre mots auraient sans doute dû être barré^ eux aussi.
b. Cet ajout; écrit tu stylo bille à encre violette entre les lignes du passage barré *qui, lui, est
écrit au stylo plume à encre bleue, avait été, d'abord, semblerait, rédigé au crayon à papier dans la
marge de gauche^puis en partie récrit, toujours au crayon, mais avec quelques modificatiqns, entre
les dernières lignes du passage barré. Si la première vérsion au crayon de l'ajout est identique à
l’ajout final, la seconde, que Levinas a barrée, présente quelques différence^, c'est pourquoi nous la
reproduisons en note : « En quoi cependant la compréhension heideggerienne “ -si-on ne veut pas'
s’attacher à kxx* aux souvenirs intellectuels au parfum «interrompu:». *
c. Ce mot aurait sans doute dû être barré.
36 2 Carnets de captivité
Dans le-déve üem ent. Le caractèr e intellectuel de ^ c o m p r éhension
réside dons « n e opposition de* {Certes les fortes pages de Heidegger
dans Holzwege sur l'oubli de l'être au se ia de la révélation,« et l'his
toire com m e fondée dans cet' oubli — fournissent un commentaire
plus complet de la proposition mystérieuse de l'essence de la vérité.
Mais irréflexion de M . Koyré vaut p ar elle-même. Le caractère intel
lectuel de la compréhension réside dans une opposition de} ,<f.3>
l'être doué de compréhension au tout âu sein duquel cette compré
hension s'accomplit. L'histoire commence avec la révélatioh de l'être
si histoire signifie une possibilité pour la partie d e se comporter dan»
le tout autrement que com m e une partie de ce tout.
Mais pour concevoir cet t e-opposm on- l'oritologie, m odem e -ne
dispose plus d ’ {M ais e e s t M . M uller1® qui explique le m ieux le
sens de la form ule : le dévoilem ent com m ence l'histoire : l'être
n ’est pas un absolu intem porel, mais essentiellem ent se révèle par
l’histoire - et le dévoilem ent - c'est-à-d ire le fait que le caché se
révèle, se dévoile,, n ’est intelligible qu'à p artir d'un exister histo
rique - être historique et se dévoiler - c'est la m êm e chose - la
v en te 1'essence de la vérité = vérité de l'essence = histoire. Pour
s’opposer - on n'a pas à chercher} un point d'appui en-dehors de
cette totalité. Le pied que l'âm e platonicienne a dans le m onde
des Idées, lui assurait par là m êm e une distance à l’égard de l'être.
L’intellectualism e de la philosophie classique n'était que la trans
cendance m êm e de l'âm e par rapport à l’être - une p osition d'où
elle le dom inait. Encore que pour la connaissance des Idées elles-
mêmes la distance impliquée par“ la connaissance demeure <f. 4 >
inintelligible et que la situation de la m é au sein de l'infini carté-,
sien au-delà des idées elles-m êm es - c ’est-à-dire une âme volonté
et liberté et non seulem ent entendem ent - est indispensable pour
assurer la notion de l'intellect. {Le dévoilem ent est autre chose
que cette dom ination à p artir de l'É tern el.}
Dans l’ontologie moderne qui m et en question cette position
d'où l'âm e dom ine l’être - il existe égalem en t {se retrouve cepen-
a. « : » en surcharge de « , ».
b. « Liberté » en surcharge de « liberté ».
c. « le » en surcharge de « de ».
d. « laquelle » renvoyairà « l’idée », mot qui a été barré. Il faut donc lire « lesquels ».
e. « qui » en surcharge de « que ».
f. « assure ».en surcharge de « s’assure ».
364 Carnets de captivité
en le com prenant, que com m e une structure 'dépassée, dialectr-£
quem ent enrobée dans l’isolem ent suprême.
L’idée du pouvoir qui rem place la' notion» de contem plation
réunit le caractère d ’engagem ent qui participe'de* la catégorie
de réciprocité et l’idée d ’opposition*-à la totalité contenue dans
la traditionnelle idée du sujet4. C ette opposition au sein m êm e
<f. 7 recto> de l’engagem ent - c ’est J a vision. E t pour que Renga
gem ent dans la réalité puisse conserver ce caractère d ’opposition
— il faut que le pouvoir ait un horizon au-delà du poin t précis où ,
il s’applique, qu’il ait déjà parcourub la totalité d e l’être {. La to ta
lité des êtres -»■n ’est pas leur som m e} - q u e dans ¿(La som m e est- un
fû p p o< rt> . Le total c o m m e som m e » atta ch e eaeo repné <sort- ?>
pas d u rapport; Voir e- L’horizon Dessiner un horizon c ’est dans}
le monde des êtres il ne soit {n ’être q u ’c} aux prises q u ’avec le fait
m êm e d ’être de leur’être. C ’est ainsi- que Led pouvoir de m ourir
{rend possible l’horizon} est- l’essence de to u t pouvoir et rend
possib le {et par conséquent} l’opposition à la to ta lité que contient
sou te-connaissance {le concept traditionnel de la connaissance. Il
est originellem ent dévoilem ent.}6 Voilà donc la source xle cette
évidence {prem ière vérité} qui dès le départ nous a paru inéluc
table : toute connaissance des étan t’s suppose au préalable la
compréhension de l’être en général.
Mais le pouvoir s’il doit être autre chose qu’une force dans un
monde d ’actions et de réactions n’est possible que dans un être fini.
La révélation de l’être com m e condition de tou tf < interrom pu >
<f.7 verso > Le total {com m e som m e} suppose un processus
indéfini de leur dénom brem ent :
Leur dénom b rem ent Inde Son caractère indéfini - {ne signifie}
constitue précisém ent {rien d'autre} {le fai}: que e n {le fait
q u o n }.n 'en a jamais fini — et,que par conséquent on {chem ine}
toujours englobé dans au m ilieu des êtres qui nous englobent.’
S’op'poser -aux être Parcourir la totalité des êtres - c'est précisé
m en t p rendre à leur égard n'aper s'opposer à eu x le ur se trouv les
situer dans un horizon — {e t c'est pour cela précise1 que l'horizon
est une structure irréductible dua < n etfe ?> rapport} qui n'est
pas fait de leur particularité1" mais qui du fait m êm e mais qui est
le fait m êm e d'être
.L 'h orizon ...
O n exp f
< 62 > a
M éthode
D éduction de la vision
a. Note rédigée au verso d’un feuillet imprimé recto du service d’information de la légation
d’Israël à Paris, annonçant les programmes de la radio israélienne Kol Tsione La Gola (« La voix de
Sion » à destination de la diaspora) du 26 novembre au 2 décembre 1950.
Noies philosophiques diverses 367
<63>a
M éthode
<64>b
<65>b
<66>c
a. « de » en surcharge de « du ».
b. « l’objet » en surcharge d’un mot illisible.
c. Note rédigée au verso d’un feuillet imprimé recto dont le tiers supérieur a été déchiré.
L’imprimé est extrait d’un bulletin d’information de la légation d’Israël à Paris datant vraisem
blablement de 1950.
Notes philosophiques diverses 371
<67 >
,a. Tout ce qui précède dans cette note est écrit au stylo plume à encre bleue, tout ce qui suit
au stylo plume à encre noire.
372 Carnets de captivité
sion n’est pas signe extérieur, sym bolisant un intérieur. Mais
rapport irréductible : n irsigne, ni symbole. Visage = expression
= dévêtem ent. Form e - objèt - dévoilem ent. Expression n ’est
pas un m ode de conscience - p artant d ’un objet, com pris com m e
symbole — supposant par conséquent un fonctionnem ent indé
pendant et neutre de la conscience, qui peut devenir conscience
d ’une expression, com m e elle peut être conscience d ’un signe.
L’expression - et la com préhension de l ’expression - caractérise
l’acte lui-m êm e de la compréhension - fait la Bewusstheit mêrrïé de
ce Beivusstsein - qui dès lors h ’est pas vision, mais audition. C ’est
la parole q u i'étab lit la relation et non p as’la conscience visuelle
d e cette parole.
D évoilem ent très d istin ct de dénudem ent. Ce n’est pas la surface
de quelque chose‘d ’éclairé et par conséquent de ferm é (démidem
(dévoilem ent), mais l’ouvertù're elle-m êm e en tan t q u ’ouverture
et non pas en tan t que surface de cette ouverture. P ar conséquent
essentiellem ent un m ouvem ent en profondeur. « Vision » dans
l’ouvert +>- - qui est précisém ent l’ouvert com m e m e visant. Le
creux - le vide - la fenêtre - l’infini - la profondeur.
Q u ’est-ce que viser - ce qui vise (visage) —aller dans la profon
deur de l ’ouvert - im possibilité éthique du m eurtre au sein d ’une
tentation de m eurtre.
Visage et le fém inin ??
<68>a
a. Note rédigée au verso d’un feuillet imprimé du service d’information de la légation d’Israël
à Paris annonçant les programmes de Kol Tsione La Gola du 5 au 11 novembre 1950.
Notes philosophiques diverses 373
<69>*
a. Note rédigée au verso dun feuillet imprimé du service d'information de la légation d'Israël
à Paris extrait du bulletin hebdomadaire de la légation daté du 19 février 1951.
b. Levinas avait semble-t-il d’abord écrit « le vocatif ».
c. « ce » en surcharge de « le ».
d. « ce » en surcharge de « le ».
e. 'Cette phrase est sans doute un ajout ou encore une note de bas de page relative au passage
374 Carnets de captiviti
<70>B
R encontrer un être, c ’est ne pas pouvoir sur lui. C ’est lui parler.
Tu ne tueras pas est le sens du discours.
Si le pouvoir politique es t un mode d ’existence où autrui est
dom iné, la dém ocratie est un retour à la relation éthique non pas
parce que le parlem ent représente les libertés individuelles. L’alié
nation des libertés est de l’essence de l’organisation politique. Si
la dém ocratie est un régim e éthique, c ’est qu’au parlem ent, le
pouvoir est parlé à celui qui le subit. N on pas parce que le sujet
est législateur, mais parce que la loi est dite au sujet. Le parle
m ent est moins le lieu où le peuple parle que le lieu où on parle
au peuple.
<71>b
qui se trouve un peu plus haut, dans lequel il est question du souci d'universalité qui découle dti
vocatif.
a. Note rédigée au verso d'un imprimé de la légation d’Israël à Paris, vraisemblablement ex
trait d’un bulletin hebdomadaire de la légation, probablement daté de 1951.
b. Note rédigée au verso d’un imprimé de la Sociécé des études juives daté de mars 1951.
Noies philosophiques diverses 375
horizon plus vaste (quoique fini) qui est la totalité —laquelle n’est
pas donnée à la conscience au prem ier sens du term e, mais à l^ou
l’existence et tou t particulièrem ent à l’extase de l’avenir - par la
m ort.
<72>ft
Le discours d ’après H eidegger
a. Note rédigée au verso de quatre feuillets imprimés recto. Ces imprimés sont vraisembla
blement extraits d’un bulletin d'information de la légation d'Israël à Paris que l’on peut dater de
l'année 1951.
37 6 'Carnets de captivité
« D as Aufzeigen der Aussage vollzieht sich a u f dem G rande des im
Versteben schon Erschlossenen bzw. 'Urnsichtig Entdeckten.» (S. u Z ,
156)21.
Certes H eidegger pose la contem poranéité du parler silencieux
avec la Befindlichkeit et le Versteben {D ie Rede ist mit Befindlicbkeit
und Versteben existenzial Gleichursprünglich, S .u Z ., I 6 l 22) mais sa
fonction propre consiste à articuler la com préhension — elle est
originellem ent l'articulation m êm e de la com préhension. A u x
significations articulées s ajoutent des m ots — forme mondaine
d'être, ayant le caractère de Zuhandenheit. L'articulation du monde
-r voilà le p oint qui pour H eidegger déterm ine to u t le reste. E n tre
l'articulation et l'utilisation de l ’appareil sonore et de l’appareil
sém antique - l'intention de1' l'appel direct à autrui ne joue aucun
rôle constitutif. Le rapport avec un visage ne joue aucun rôle dans
la parole. M êm e chez M erleau-Ponty le langage com m e condi
tion de la pensée — joue le rôle attribué au corps propre dans la
perception. Ce qui est sim plem ent Zuhandenheit chez H eidegger
- devient corps chez M erleau-Ponty - pas instrum ent, mais corps,
incarnation de la pensée. Toutefois aucun soupçon de la relation
avec autrui. A utrui - c'est le monde dans lequel je suis plongé,
une société où je suis engagé, com m e je suis engagé dans m on
corps. J e suis déjà engagé dans les autres pour parler avec les
autres. - Ce que" j'oppose à cette conception - c'est l'appel m êm e
à autrui dans le langage qui constitue la société. L'utilisation de
l’appareil social de la linguistique est rhoins im portant.
Enfin chez H eidegger et chez M erleau-Ponty il y a le problèm e
« Q ui parle ? » quand « je parle ». Le logos ? Parler n ’est-ce pas
originellem ent écouter ? Problèm e qui pour moi; se résout préci
sém ent par le fait que l'on parle devant un visage et que l'unité de
l'écouter et du parler s'accom plit dans la rencontre du visage — et
que c'est précisém ent par là, qu'écouter ne se confond pas avec le
voir — avec la compréhension et le pouvoir.
a. « de » en surcharge de « d'un ».
Notes philosophiques diverses 377
<73>a
„ a. L’ensemble est écrit au verso de six feuillets imprimés recto de provenances diverses, à l’ex
ception du cinquième feuillet, dont le recto imprimé comporte également quelques notes manus
crites do Levirias. Tous les feuillets sdnt écrits au stylo trille à encre‘noire | excepté le cinquième
feuillet verso qui, à partir de la quatrième ligne, est rédigé au stylo plume à encre bleue. Enfin,
signalons que tous les imprimés comportant une date indiquent celle de I960.
b. « ?» en surcharge de « - ».
378 Carnets de captivité
indépendam m ent du langage ? Il sem ble que oui., N ous pouvons
parler d’une .signification d ’un objet et d ’une situation. N ous
pouvons parler d ’une signification à laquelle nous accédons en
dehors des signes. La signification diun objet, c ’est par exemplè
l’usage auquel il est destiné. Com prendre un objet c ’est savoir
s’en servir — c ’est donc se tenir au préalable dans une attitude
active, c ’est-à-dire être d’une façon ou d ’une autre dans le besôïti,
fiv tendre à quelque chose qui m e manque. {Ce qui d ’une façon ou
d ’une autre est susceptible de servir à m e satisfaire - a une signi
fication.} Ce qui m e manque - le pain quand j’ai faim , l’eau
quand j’ai soif, la décoration quand je suis vaniteux - aurait une
signification au sens ém inent du terrtie. La signification consiste
rait donc dans la relation des objets aux besoins. Le parfaitem ent
inutile se x x m anquerait absolum ent de signification.
< f.3> Toutefois la relation directe d ’un besoin avec ce qui le
satisfait, n ’est plus la com préhension d ’une signification. L’air ne
prend de signification p o u r nous que quand il nous m anque, les
vêtem ents « e u quand ils nous m anquent, etc. L’absence de signi
fication — et l’absence de conscience coïncident. Ce qui sem ble
être un truism e, puisque tou te relation disparaît avec l’extin ction a
de la conscience. Mais ne faut-il pas inverser la situation : c'est
l’absence de signification .qui dém olit la conscience. La significa
tion ainsi serait la condition de la conscience. Mais vue de ce biai$
elle constituerait la distance entre l'être qui conçoit une significa
tion et cette signification m êm e. Avoir {une} signification reviens
drait à être à distance de l’être. Le besoin, dans la m esure où il est
toujours à distance de sa satisfaction, serait source de sa* signifi
cations. La signification serait par essence une-dé€ m oins que la
présence de l’être - laquelle se produirait précisém ent dans la coïn
cidence avec lui, dans la jouissance. L’être aurait une signification
dans la mesure où il se dérobe encore à nous mais où cependant
il n ’est pas purem ent et sim plem ent absent, mais déjà se dessine
en creux dans le besoin qui en conserve com m e le souvenir {ou
a. Ce qui précède sur cette page est écrit avec, semble-t-il, le stylo bille à encre noire qui a
servi à remplir tous les autres feuillets de cette note ; la suite de la |jage est rédigée au stylo plume
à encre bleue. S’agit-il d’un feuillet extrait d’un ensemble plus vaste que Levinas aurait inséré dans
le présent ensemble, en y ajoutant la fin de la phrase qui commence sur le précédent feuillet ?
380 Carnets de captivité
le signifiant. La réflexion philosophique ab ou tit cependant à la
suppression de cette dualité : le sensible p u r serait un m ythe.
L’entendem ent pénètre la sensibilité et rien ne saurait être donné
s’il n ’est pas com pris au-préalable. Seul le signifiant est donné.
Q u ’est-ce qu’être signifiant ? Avoir une signification, c'est être
en relation. Le fait a une signification du fait qu’il se présente à F in
térieur d ’un système. Le renvoie à autre chose que soi serait donc
la signification. La totalité donnerait donc un sensauparticulier.
Finalité
Relation À cela s’oppose langage com m e condition du signe
Signe
<74>
<75>
a. Ce qui suit commence A la page 4 du bifeuillec sur lequel est écrite cette note. En haut de
cette page, Levinas avait écrit au stylo plume à encre noire, puis barré au stylo plume à encre bleue
qui lui a servi à rédiger l'ensemble de cette note :
« Chesten
de l'Agence ^Selphide
Séparation 1
de kxjucxs ».
Notes philosophiques diverses 383
<l>
<2>a
La vraie universalité <ce> sont les religions et non pas les nations
- dans la discussion de N ew Delhi l'absurde id é e :b les. religions
divisent1.
<3>c
ï. Écrit au crayon à papier, au verso d’une carte d’invitation (1957). Levinas a repassé au stylo
plume à encre bleue sur les cinq derniers mots et modifié légèrement la phrase à cette occasion
(çf. la note suivante).
b. « : » en surcharge de « que ».
c. Feuillet arraché d’un cahier d’écolier, manuscrit recto verso. Le texte, souvent illisible en
raison de la détérioration du feuillet, est écrit au crayon à papier.
386 Carnets de captivité
est obtenu par la position — m on trer dans sa m atérialité cette
m oralité.} Les lim ites de cette conception : m a misère ne trouve-
t-elle pas place dans cet univers. M a m isère, m a lassitude. {Il ne
s’agit pas dans toute cette conception de retourner la relation - la
considérer com m e réciproque : l’abdication de la souveraineté du
m oi doit se faire en face de Q uelqu’un. C ’est la place particulière
d ’un concept com m e D ieu. Il ne se définit donc pas par l’Ê tre
— mais par quelque chose de plus que la Personnalité — plus que
la souveraineté du m oi — P atern ité. A u trem en t d it : il faut à côté
d ’autrui com m e pauvre - un autrui infiniment plus riche que
<m oi ?> {O u p lu tôt : A utrui com m e riche — gloire du dehors}.
Mais non très crich e ?> m atériellem ent en < x x x x x x x x > pouvoir
de donner. C ’est cela la Paternité / < xxxxx> l ’être < x x xxxxxx>
< xx> < x x x x x x x > . E t c ’est cela : à < x xxxxx> la m édiation du Père
qu’autrui < >a / conception de < xxxxx> est incom plète
- car elle n ’englobe pas < > relation avec le Père tsvpb.}
a. Une partie importante de cette phrase n’est plus lisible car le bord droit du feuillet est
déchiré en plusieurs endroits.
b. Cet ajout commence en bas à gauche du recto et se prolonge dans la marge inférieure, puis
dans la marge de droite, enfin, nous a-t-il semblé, dans la marge supérieure. Nous avons distingué
par des barres obliques ces trois parties de l’ajout. Par ailleurs, la détérioration du papier ne per
met pas de savoir où aboutit la flèche indiquant l’emplacement de l’ajout suivant, qui se trouve
en bas à droite : « Retournement de la maîtrise héroïque. Ne pas <xxxxxxx> cette notion. Donner
matériellement et misère matérielle. Le riche - le pauvre. La dignité de la souffrance morale. Et
<xxxxxxx> <xx> <xx> torture. »
Noies philosophiques diverses 387
<4>a
<5>b
<6>c
Fécondité*1
<7>
< 8>
<9>
<10>a
Solipsisme - non pas : m oi seul j’existe mais les autres sont des
« étrangers » absolum ent étrangers. Homo homini lupus- hostilité
sans.h^ine.
Pas négation de la liberté d ’autrui, mais dom ination de cette
liberté. L u tte, travail et lutte - Civilisation.
\ 9
<ll>b
<12>a
a. Rédigé au verso d’un morceau de faire-part de mariage (1958). Cette note ainsi que les deux
précédentes sont écrites sur les morceaux du même faire-part.
b. « le ».en surcharge de « un ».
c. « état » est à lire avec une majuscule.
Notes philosophiques diverses 391
<13>a
Fécondité et pluralisme
Le tem ps n'est pas une simple projection, mais l'exister
m ultiple lui-m êm e.
< l4 > b
Eros — dualité.
Sensation bicéphale —dans ce sens déjà le fils —m ais, en réalité,
conception du fils seulement.
Le fils com m e m oi libéré de soi.
< E t ?> <interrom pu>
<15>
<16>C
<17>
<18>‘
A pologieb
<19>
<20>c
<21>
Le scnsa
< 22 >
<23>d
La parole est rapport avec le visage - E t cela signifie q u elle
prend reçoit sa signification non seulem ent à p artir du discours
en général® - mais dans l'absolu de celu i è d ’une relation irréduc-
a. Écrit» une seconde fois, en travers de la marge de gauche. Indique le thème des notes 22 à
32.
b. Phrase ajoutée au stylo bille à encre bleue, le reste de la page est écrit au stylo bille à encre
violette.
c. Ajout écrit au stylo bille à encre bleue (rf. la note précédente).
d. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1932).
e. Ce qui précède est écrit au stylo bille à encre violette, ce qui suit au stylo bille à encre
bleue.
394 Carnets de captivité
tible à autre chose qu elle-m êm e - absolum ent résistante à toute
psycho-analyse — R approchem ent entre le discours cohérent
(objectif) et psychanalyse.
A u discours cohérent : j'oppose non pas la subjectivité capri
cieuse — mais l'individuel com m e absolu — c ’est cela le visage.
< 2 4 > tt
<25>b
<26>c
Q u'est-ce que cela veut dire : le réel est raisonnable.
E . W .a d it : il est structuré.
Mais l’idée de structure suppose la raison.
Le réel est raisonnable —cela veutrdire : e n-peu t —le juste connaîtra
le-be nheur. {peut-être o o o a e o heureux).
<27>b
A u tru i —
Son être = ses avoirs.
Par l’avoir son être est trahi.
<28 >
<29>c
J ’en viens à renverser l’ordre. Ce n'est pas ce qui est infini qui
est extérieur, mais ce qui est extérieur qui est infini. L e tr e * - c ’est
se rapporter à l ’extérieur.
Le rapport avec l’extérieur - le rapport m oral —est la condition
de la liberté. La com m unication des individus est la source de la
conscience.
<31>b
<32>
L’idée d ’accom plissem ent, c ’est le fait que l’être a un sens par
rapport à ce qui l’a « préparé ». Dans ce sens la subjectivité m êm e
est un sens, puisque je dom ine m on être.
<33>
Chez soic
<34>
<35>
P ou r le < xxxx>
<36>
<37>
a. Dans le coin inférieur droit de cette page, écrit tête-bêfche, au stylo bille à encre bleue (le
reste est rédigé au stylo plume à encre noire), un mot, semble-t-il de quatre lettres, qüe nous ne
déchiffrons pas.
398 Carnets de captivité
<38>4
<39>b
Le fou et le malade.
Le malade va chez le m édecin, il dispose d'u n terrain solide dans
son aliénation. Le fou est conduit chez le m édecin par un autre
- il coïncide avec son aliénation.
<40>
<41>C
La tenue de l'être.
Le pas encore.
<42 >
< 4 3 >a
< 4 4 >b
< 4 5 >c
Le thèm e :
de toutes les exigences pour Soi — aucun vertu récompensée
pour autrui.
<46>d
<48>b
<49>
<50>
<51>c
<52>d
La question rhétorique ?
<54>a
<55>b
<56>c
<57>
<58>a
La guerre n'est pas une violence com m e une autre. Elle détruit
tou t l'ordre de la morale — elle est m oralem ent le désordre pur.
Elle trace aussi une lim ite à la sim plicité de la bonne volonté et
de la prédication installées dans l'ordre, m êm e <si ?> <elles ?>
consentent le sacrifice suprême. Elles ne peuvent entrevoir cette
lim ite sans perdre tou t au m oins leur innocence, sans faire surgir
la question de savoir s'il faut au nom de la morale risquer l'ordre
m êm e où la m orale trouve ses conditions (p. ex. l'existence d'une
patrie ou d'une civilisation où 4a m orale naît et fleurit), s'il ne faut
pas, au contraire, faire du m al au m al (p. ex. lim iter la liberté e t le
droit de ceux qui profitent de la liberté pour l'étouffer <)> ce qui
ne serait pas s'attacher au Bien inconditionnellem ent ; ou enfin si
l'hypocrisie n’est pas la seule conciliation des attachem ents désor
mais antagonistes au Bien et au Vrai.
<59>b
<60>c
Les formes des choses rem placent les choses dans le jeu des
enfants : les jouets sont des fausses choses m êm e quand ils fonc
tionnent - ils sont arrachés à la finalité. Illusion. E t cependant les
a. Rédigé sur le verso vierge et le recto imprimé d’une carte d’invitation (1959).
b. Rédigé au verso d’un faire-part de mariage (1959).
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1955).
404 Carnets de captivité
formes c ’est ce que m on tren t la peinture e t la sculpture. Elle* n’est
pas cependant fabrication de jouets e t d ’illusion. La fo rm eest-elle
visage ? U n m onde sans peau ? E n to u t cas le visage est une forme
qui ouvre l’intérieur — qui p erm et d ’accéder. U n m e n é
<6l>b
<62 >
<63>d
M ots précieux
O stentation con tact et tangence
A ttirail — <Zeug ?>
O bruption6
Synecdoque battologie
Anaphylaxie
intrication
E n tra c te im pétuosité
Saisissement être capté, longueur d ’onde — pour accès
Allergie
L'opération de la grâce
La foi opère des miracles
O pérer le salut
La grâce a opéré dans son ‘âme
synoptique
osculation
<64>a
La décence
<65>*
é co u te r (N égativité)
< 67 >
Langage11
<68 >
<69 >
<70>
tique alors que dans le rom antism e les fantômes apparaissent dans
un monde à contours réels.
Influence des « M ystères » de H am sun, du « P ortrait >► de
G ogol, « N evski prospect » ?
La réalité se déroule com m e un rêve. La fluidité des choses et
d e l'espace. Les paroles ex les gestes .frappent, mais non pas par ce
qui est frappant en eux.
< 7 1 > ft
C 'est dans une philosophie qui part <du> travail et des néces
sités de la vie m atérielle qu'il y a com plet accord avec soi - une
synthèse de tou t. D ire que toute m a vie spirituelle sort du travail
et de m on existence m atérielle - c'est éviter le dualism e des spiri
tualistes qui font sim plem ent la part de la m atière — hypocrisie.
Le socialiste seul est entièrem ent d'accord avec sa vie, avec sa
pensée.
M arquer l’im portance du travail dans toutes les thèses sur d 'i n s
tant ?> et les perspectives socialistes.
<73>a
O rigine - création
<74>
Théorie de la connaissance
<75>
<7 6>
<77>b
<78>c
<79>
a. Les quacre dernières lettres de ce mot ainsi que tout ce qui suit sont écrits au stylo plume à
encre noire ; tout ce qui précède est rédigé au stylo plume à encre bleue.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (I960).
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (I960).
Notes philosophiques diverses 411
< 80 >a
< 81 >
a. Les crois notes qui suivent sont rédigées sur crois fiches d’emprunt de la Bibliothèque de
1*Alliance Israélite Universelle. Levinas emprunte, le 20 mai 1955, le TraitéKiducbin du Talmud
de Babylone ; ce même craicé, en allemand ; enfin, Halakbot Rav Alpas.
412 Carnets de captivité
<82>
La façon dont le successif peut être sim ultané sans que l’on s’a c
croche à un infini, à un parfait.
<83>a
Sim ultanéité -
U n goû t d ’absolu en elle.
Toute négation de la vérité est impossible car elle affirme-une
vérité - d'où privilège de la vie intellectuelle et de la raison. A n ti
intellectualism e, retourne en intellectualism e. Énoncer une vérité
dans le tem ps, c ’est se placer en dehors du tem ps. A uto-divinisa
tion - anticréationism e — athéism e.
A nti-intellectualism e = englué dans le tem ps, incapacité
cfan e de saisir la sim ultanéité du successif. Mais la conscience;
sans se placer hors du tem ps, ne peut-elle pas rendre sim ultané
le successif ? En le narrant. Par la fable. Ê tre conscient = est la
fabulation de la succession. Le réel = le « fable ».
<84>b
< 8 5 >*
<86>b
JLa relation de la parole - celle qui fait sortir de l’ordre de l’in
carnation ; tou t.acte se déroule dans un corps et va sur la m atière.
Dans la parole - qui part d ’un corps - se révèle une idée séparée
de son incarnation. La parole est dans ce sens principe de l’abs-
<87>
<88>a
<89>
<90>
C f. m eta
nostalgie
<91>a
<92>b
<93>c
La polarité
de toute intentionnalité. M êm e affective ou active.
D ieu en
dehors
de la polarité.
K an t a rendu possible l'idée d'une conscience sans polarité, en
m ontrant une conscience constituant l'objectivité de l'objet, par
synthèseb.
<95>c
<96>
<97>d
<98>a
Philosophie et religionb
<99>c
<100>d
< recto > « Ce qui distingue avant tou t la race humaine de
la race anim ale, c ’est précisém ent que l’hom m e a la faculté et
le pouvoir d ’exploiter l’hom m e. O ui certes et heureusement,
l’hom m e défriche son semblable com m e il défriche une terre.
N ous nous exploitons tous les uns les autres ; la nature elle-m êm e
nous exploite et nous exploitons la nature. »
Salvador, Paris, R om , Jérusalem , Tome II, p. 2 7 0 / 7 1 11.
Il fait ensuite la différence entre l’exploitation féconde et stérile.
r
<101>a
À m on trer com m en t la notion religieuse (chrétienne) dé D ieu est
nécessairement m ythique et idolâtre. D ieu et idole coïncident.
<103>b
Postériorité de l'ontologie
<104>
< 1 0 5 > ft
<106>b
<107>c
A Ilergieb
<109>c
< 110>
< lll> d
Lois I, 6 2 6 a
Clinias
« Il y a toujours, pour tous les É tats contre tous les É tats, un état
de guerre, non proclam é par la voix du héraut ! »
« R ien de tou t le reste, n i biens de fortune, ni occupations, n’est
d ’aucurle u tilité, à moins <en sbm m e> que l’on n ’ait le dessus par
la g u e rre .. : 6 2 6 b 12.
<113>a
Clinias
« Dans la vie publique, tou t hom m e est pour tou t hom m e un’
e n n e m i'e t... dans la vie privée, chacun, individuellem ent, en est
un pour lui-m êm e », 6 2 6 d 13.
< 1 1 5 >c
Tempsd
<117>
<118>c
a. Rédigé sur la page vierge ainsi que sur la page imprimée d’une carte d’invitation (1955).
b. Ce paragraphe est barré par une croix de Saint-André.
c. Rédigé au verso d’une carte d'invitation (1955).
Notes philosophiques diverses 423
pas encore entièrem ent être® — la structure du temps —ce par quoi
il est foi - c ’est que nous sommes toujours dans le THmD (anté
riorité).
Mais par là aussi le temps est condition de la conscience com m e
jouissance —par là il y a le « surplus d ’être » qui est bonheur.
<119>
Séparationb
<120>c
д Л лэ’ х
<121>d
Maisons*
a. Tout ce qui précède et qui occupe les quatre premières lignes de ce feuillet manuscrit est
barré par une croix de Saint-André.
b. Indique le thème de la note suivante.
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1959).
d. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1956).
e. Indique le thème de la note suivante.
424 Carnets de captivité
<122>a
<123>
Économ ieb
<124>c
<125>d
<126>
Le présent8
<127>
< 128>
< recto > Le présent est contentem ent. N on pas que tout soit satis
faisant dans cette présence et dans ce présent de la représentation.
Mais le besoin et la souffrance - dans le défaut où ils se tiennent -
anticipent une plénitude de choses à venir ou à réaliser - un progrès.
Le monde conserve sa plénitude, m êm e s’il lui-manque quelque
chose présentement. Des choses vont suppléer aux choses grâce
à nos pratiques, à nos opérations techniques, médicales, politiques
ou religieuses. Des choses soutiennent des choses com m e les trois
éléphants qui portent la terre sans que l'on ait à se demander qui
soutient <ces/les ?> éléphants. Des choses fondent et expliquent les
a* On lit aussi « présent », en travers de la marge de gauche. Indique le thème des notes 127
et 128.
426 Carnets de captivité
choses - la représentation est positiviste. Elle est, auprès des choses
mêmes, étrangem ent indifférente à leur principe, elle se com plaît
et se contente dans l’horizon du présent. La représentation est cette
complaisance m êm e, cette jouissance dont le contentem ent ^est la
règle. Se représenter c ’est jouir ou opérer - ce n’est pas penser. La
représentation n’est pas compréhension, car elle vide le présent ou
elle immobilise l'objet, de cette m onstruosité qu’est l’im plicite. Le
passé et l’avenir ne sauraient apparaître en lui que com m e représen
tations de l’avenir et du passé. < verso> Sans traverser la série infinie
du passé à laquelle se réfère cependant m a journée d ’aujourd’hui, je
goûte cette journée en toute réalité et tiens m on être m êm e à partir
de ses instants fugitifs. K ant en m ontrant que l’entendement peut
poursuivre son oeuvre théorique sans répondre à la Raison, a mis en
lumière l’éternelle essence du réalisme empirique qui se passe d ’un
principe inconditionné.
<129>
N éan t et A u tru i“
<130>
<131>
D ésirb
<132>a
<133>
*134> b
<135>
<137>a
I. Le D ésir est le propre d ’un être co m p let. L’am our n ’est pas
pouvoir - ni réalisation de possible, ni puissance contre ce qui m e
heurte - marques de l ’incom plet.
IL Le retour de m oi à soi - vieillissem ent et ennui - caractérise
l ’être des pouvoirs issu de la position.
III. Le Désir est Désir du D ésir et, par là, paternité.
IV. Le Moi du D ésir - en tant que M oi devant le Tendre - n ’est
pas- le com m e suscité par l’A utre. D écrire ce M oi qui est avant
tout soi-m oi de la bonté.
V. C om m ent Le visage est-il fondé dans la' fécondité ? ÜEros
suppose A u tru i. {Le fém inin - le visag e synthèse-du visage et de
la fécondité.} Mais la m oralité ne peut s’opposer à l’histoire que
si elle peut contester une fin de l’histoire — fécondité est exigible
dans la relation avec l’A utre.
<138>b
<139>*
<140>
Apologieb
<141>C
<142>
< l44> b
La société en tant que instituant l'ordre où se concilient 1’être-
un-autre, avec l'être-le-to u t, avec la séparation du m oi —est l'ordre
de l'être par-delà la sphère im m obile de Parm énide.
<145>C
C 'est par le tem ps que devient possible une relation telle que
l'union et la séparation de ses term es ne se fasse plus écho - et
que le pluralism e ne soit ni une m u ltip licité de term es isolés, ni
une m u ltip licité de parties dans un tou t. Le tem ps va à la m o rt,
mais se retire de la m o rt qu'il ajourne. Il est refus de la totalité où
cependant il conduit l'être séparé (volonté) ; il refuse la totalité où
il conduit l'être séparé par l'avenir de la fécondité.
<146>
É crit et Orald
a. Écrit une seconde fois, en travers de la marge de droite. Indique le thème des notes 144 et
145.
b. Rédigé au verso d'un faire-part de mariage probablement daté de 1958.
c. Rédigé au verso d'une carte d’invitation (1954).
d. Écrit une seconde fois, et alors souligné, en travers de la marge de droite. Indique le thème
de la note qui suit.
Notes philosophiques diverses 431
< l4 7 > a
<148>
L a m o rtb
< 149>
L’u tilité est absurde puisqu’on m eurt. Il n’y a d 'u tilité que
relative — pour un tem ps.
L’absolu est l’instant privilégié - ou vie éternelle — ou ce qui
est extérieur à m oi.
<150>
< 152>
< recto > Le visage — est l’en soi au m ilieu d ’autres hom m es. Il est
la société oùa à côté du je-tu —existe le il. C ’est pourquoi le visage
est parole — il parle du troisièm e hom m e —e t
Parole à . .. et parole d e ... quelque chose et de quelqu’un. —Ju s te
m ent le contraire de l’am our — société à deux — silencieuse.
< verso > La parole pour tous — expression — enseignem ent —
<153>b
<154>c
a. « où » en surcharge de « Je ».
b. Rédigé au verso d’une carte d'invitation (1957).
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1959).
Notes philosophiques diverses 433
<155>
Inconscient*
<156>b
Schéma
Innocence — péché - pardon =
= Création - sujet — l’A utre.
<157>
<158>c
Le M oi rationaliste
M oi = intériorité de la raison —t
E n m oi — je retrouve tous les autres.
a. Écrit, une seconde Fois, en travers de la marge de gauche. Indique le thème des notes 157,
159 et 160. Ce feuillet a peut-être été mal classé ou déclassé.
b. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1954).
c. Rédigé au verso d’une carte d'invitation (1954).
434 Carnets de captivité
Difficultés : 1) C om m ent se rejoignent pensée raisonnable et vie
individuelle.
2 ) C om m ent rendre com pte de l'intériorité de la honte où se pose
le m oi sans création et où il exclut les autres et peut m entir.
<159>a
Inconscient
< l6 0 > b
Le cogito est ébranlé dan par l’inconscient - (l’état 'F n’est pas ce
q u ’il, est) et par l’idée m arxiste de la m ystification (l’état n’est
pas {en soi} ce qu’il est pour soi).
É cou ter0.
< l62> a
<163>
<164>
< l 6 5 > b?
Le Moi - ce n'est pas être ce qu'on n'est pas, mais être en dehors
de la puissance e t de l'im puissance = condition de la créature.
Mais pourquoi renvoi au créateur ? Sans cela, Geworfenheit.
< 166> “
Penser - s'entendre - élém ent du son - rupture du m onde soli
taire : relation de soi avec ce qui en m oi est avant m oi - penser =
se surprendre.
Ce qui en m oi est avant m oi — création. Pensée = stru ctu re de la
créature. Pensée relation avec le passé qui n'est pas rém iniscence,
mais ? ... prière ?
<l67>b
annan na anna
sur - sur les filles de Zelofhad - page 6 de rP33ttl17
l'hom m e la suprême bénédiction au-delà du Bien.
<169>#
<170>c
Im portance de la M atière.
<172>b
<173>
Différence entre
j'ai et tu as
(donné) (reçu)
<17 4 > c
J e = je donne à l'autre.
La fameuse neutralité de l'esprit co lle ctif m asque l'injustice
sociale et les devoirs où le m oi se constitue.
<175>
<176>
La souveraineté du m oi —
c'est celui qui donne, qui a p itié com m e s'il n 'était pas
pitoyable lui-m êm e.
< 177>
<178>a
N ousb
<179>
a. Rédigé sur les marges de la page imprimée d'une carte d’invitation (1959).
b. Écrit une seconde fois en travers de la marge de gauche. Indique le thème des notes 180 à
183 (la note 179 a sans doute été mal classée ou déclassée).
440 Carnets de captivité
L’idée directrice :
l’A u tre n'apparaît pas dans l'am our, mais en société.
E n société, l'A utre est décent.
La décence, c ’est précisém ent le discours et son universalité.
N on pas l'universalité des term es (concepts) ; mais universalité
= discours à tous.
Le propre du discours : il m e parle et parle de m oi ; à tous et de
tous. Ce dont on parle = ceux à qui on parle (lim ite de la réifica^
tion par thém atisation).
Le problèm e : com m en t introduire la justice com m e principe
impersonnel ? Loi ? In stitu tion ?
a. Ce qui précède esc écrit au stylo plume à-encre bleue, ce qui suit au crayon à papier.
b. Rédigé au verso d'une carte d’invitation (1959).
c. Rédigé au verso d’une carte d’invitation (1954).
Notes philosophiques diverses 441
<182>a
Le N ous qui n’est pas relatif —sim ultanéité qui n ’est pas fusion
- c ’est cela le pluralisme.
Tel le nous de Y Bros (< A m o u r ?> ) et le nous de la Création
(Créateur et Créature).
<183>
<184>b
Justification de la liberté0
Seul peut com m ettre une injustice celui qui est susceptible de
la subir.
<186>b
<187>c
<188>a
C réation et pouvoir
C om m ent la recherche philosophique elle-m êm e cesse d ’être
vision et pouvoir ? C om m ent se saisit-elle de l ’origine sans la
fausser ?
C ’est pourquoi on ne peut pas philosopher seul. Philosophie
com m e discussion et enseignem ent.
<189>b
C ondition et Création
O n part du conscient pour aller non pas vers sa condition mais
vers sa création —
N égation , retournem ent, paradoxe.
<190>c
N égation et C réation
La négation du pour soi chez Sartre - suppose le néant.
Chez moi elle suppose la création - un en-deçà de l'origine,
une existence en autrui.
<191>d
Révélation —
qqch. de donné que je ne m e suis pas donné.
N e peut pas être d it en termes d ’expérience qui demeure
puissance et m aîtrise et qui assume dans la lumière.
<192>a
A utrui à travers les pouvoirs :
esclave à posséder
ennemi à vaincre
collaborateur autour d ’une tâche com m une.
<193>b
<194>c
< 1 9 5 >a
H onte
Caractéristique d'un être pleinem ent responsable - souverain,
héroïque, ayant renié son père, existant.
E xistant en tan t que créé qui voudrait cacher sa souveraineté
injustifiée quand elle est absolum ent séparée de l’origine.
La honte suppose la dualité du souverain et du créé.
Innocence - ê t r e créé qui n ’a pas pris la responsabilité
d ’exister.
<197>
Inconscient et Création.
Ê tre profond = inconscient = (pas pouvoir et cependant
personnel) = se retirer en soi = reposer en Dieu = dorm ir.
D orm ir la vraie relation avec l ’obscur.
D orm ir - tellem ent en soi q u ’on n ’est plus en soi, mais en
sécurité, en Dieu.
<199>
Création et sexualité
Le M oi profond sort de soi
soit vers l’origine, vers le C réateur par l'audition (retour de
m oi à soi, mais non pas identification - dualism e 1 <)>
soit vers l'avenir — sexualité.
Ê tre profond : créé et sexué.
Ê tre profond - inconscient - m ode d ’être d istinct du pouvoir et
cependant personnel. Se retirer en soi = reposer en D ieu = dorm ir.
D orm ir la vraie relation avec <1’> obscur.
<200>b
<201>
Le tragique de la liberté
<202>a
C réature 6
<203>c
<204>d
Lui —
quand il apparaît entre deux, dans leur intim ité.
Création et innocence
<207>a
Gloire de la créature
<2Ô8>b
Création et gloire
<209>a
Seul un être créé peut avoir la liberté de ne pas être asservi à soi.
1) Sortir de l’ennui de l’identité — sortie aspiration insensée d ’être
l’autre (négation du pouvoir com m e principe de la conscience,
dans laquelle je serais enfermé).
2 ) N e pas être asservi à soi ^ assumer son origine, ce qui est impos
sible. C ’est avoir un fils. Créé com m e fécond, le m oi est créé libre.
Mais pourquoi fécond ? E st-ce en tan t que créé ? Ê tre créé ^ être
causé, mais avoir reçu son moi (pas clair, E . Lb).
<210>c
<211 >
À travers la m édiation du Père qu 1autrui peut recevoir - car Dieu
n ’est pas un Moi (celui qui donne), mais celui qui assume m on
être et notre être -
Fraternité.
<213>b
< 2 l4 > d
< 2 1 5 >a
<2I6>C
<218>
< 219>
Ê tre sim plem ent né, ne signifie pas être chose — mais agir.
1) L'activité est essentiellem ent naïve. 2 ) L'activité est puissance.
<x x x x x x > et dans ce sens encore le fait d'un être né. Car avoir
de U puissance c'est avoir renié l'origine = être né. Avoir renié
< 220>
L'être créé
<222>a
<223>
<224>
<225>a
Liberté finie ?b
<226>c
<227>d
<228>-
H onte —
honte de son infériorité -
mais on n’a pas honte de son infériorité, que parce qu'on est
supérieur
honte de son corps
mais on n’a pas honte de son corps - queb parce qu’on l’a
choisi.
Cela ne peut pas s’unir dans l’idée de « liberté finie » - mais
parce que le m oi se trouve dans un ordre où il y a justification hors
de moi et où je suis injustifié par m oi-m êm e - où je suis devant
un idéal moral - ce qui, d ’après m oi, n ’est pas une existence au
m ilieu des valeurs, mais en face d ’A utrui.
< 229>
Le savoir livresque n ’est pas seulem ent ce qui n ’a pas été repensé
par soi-m êm e, mais ce qui n'a pas été enseigné par un m aître.
Le m aître plus que la pensée et condition ne la pensée. Penser
— c ’est penser à deux (ce qui ne veut pas dire dialoguer — dénivel
lem ent !).
N écessité d ’interprétation (c ’est du H eidegger), mais par un
m aître (ce n’est pas du H eid eg g er< )> .
<232>b
Transcendance et vérité 0
<233>d
<234>
V érité
Sens rationnel - son critère : lum ière qui surm onte l'horreur du
sacré et de l'il y a.
<235>a
Pour m oi aussi l'être est dans sa vérité. Mais non pas dans la
splendeur de la m anifestation, mais dans la grâce rendue à lui par
autrui, grâce rendue par l’action ou par l'attitud e à l’égard des
hom m es - par la vérité dite ainsi de lui.
<236> b
<237>c
<238>a
< 239>
L’essence du langage :
U ne pensée reçue du dehors -
Le dehors est l’essentiel et non pas l’universalité -
ni m êm e le fait que je peux le com m uniquer à une raison.
(?)
<240>b
<l>
< 2>
a. Alors que les autres liasses de notes diverses ont été transcrites dans leur intégralité, celle-
ci résulte *d’un choix que nous avons opéré à l'intérieur d’un ensemble plus important de notes
écrites sur des cartes d’invitation ou des morceaux de feuillet. Cet ensemble comprend trois sous-en
sembles bien distincts : d’abord une série de notes de cours de philosophie de terminale (on y trouve
par exemple des définitions de notions traditionnelles telles que le déterminisme, le jugement, etc.) ;
ensuite, des notes pour un exposé sur la notioq^du mïdracht, écrites sur des feuillets que Levinas a
foliotés ; enfin, les vingt notes que nous avons retenues, pour deux raisons : d’une part, à la différence
de la première partie de l’ensemble, Levinas y expose sa philosophie, d’autre part, il s’agit, contraire
ment à la seconde partie, de notes philosophiques portant sur/les thèmes divers et qui..n’ont pas de
destination précise, c’est-à-dire de « notes diverses de philosophie en recherche * (sur les différents
types de notes distingués par Levinas, voir l’Avertissement de ce volume).
b. En haut à gauche de cette page (il s’agit d’un morceau d’une carte d’invitation), écrit au
stylo bille à encre bleue (le reste est au stylo plume à encre bleue), le nombre « 17 », qui est sans
doute un numéro de folio. Nous n’avons pas retrouvé l’ensemble dont cette note faisait éventuelle
ment partie, et il nous a semblé quelle pouvait être lue comme une note isolée.
462 Carnets de captivité
<3>
<4>a
< 5>
a. Cette note ainsi que la suivante sont rédigées chacune sur un morceau de feuillet cartonné.
Ces deux morceaux provenaient peut-être du même feuillet.
Notes philosophiques diverses 463
< 6>
’< 7 > a
<9>b
<f. 2 verso> tyJDWXI 7WV2 ou miDOH X^X npyn xin ttm n X1? expri
m en t la priorité de l'attitu d e sur la catégorie. P ou r rendre possible
cette priorité - le concept d 'être ne suffit pas, il faut D ieu. La
théologie est l'opposé p ar excellence de l ’ontologie. Dès qu’il y a
D ieu, il est impossible de se retourner sur soi.
<f. 1 recto> D e m êm e exégèse - connaissance de D ieu. Ce n'est
pas le cercle qui com p te, m ais le fait d'accepter le texte.
< 10 >
<ll>a
-L 'il y a par lui-m êm e, n'est pas tem porel. C ’est par le je qu'il
acquiert un présent.
<12>b
< 4 3 > d-
<14>
Le visage est une abstraction - le visage d u prem ier venu.
(M ais pas dans la c n u it ?> )
H ors l'histoire
<15>
Laurel et H ardy
<I6>
N oté en 1 9 5 2
<17>
< 1 8 > ft
<19>b
<20>
<x x x x x x x > Le livre est une chose - pour être enseignem ent il faut
q u ’il y ait une personne qui parle. A utrui est donc la condition
m êm e de l’enseignem ent. Sans cela la pensée n’est qu’objet. Elle
peut être objet - m a pensée - et enseigné A utrui <p. 3> ce qui
distingue savoir et histoire.
a. Carnet de format 10,5 x 17 cm de 22 pages dont seules les pages 1-3 et 7 sont remplies. La
page 7 contient une liste de courses, que nous ne reproduisons pas. Dans la partie supérieure de la
couverture, on lit : « PAIN » ; en bas à droite de la couverture : « Mme <Jeannine ?> * ; sur les
troisième et quatrième de couverture, quelques additions.
Carnet 5 a
a. Noces manuscrites rédigées sur des morceaux de papier de même format (15 x 19,3 cm)
déchirés proprement, dont une page sur deux seulement, excepté dans un cas, est écrite. L’en
semble, qui forme un carnet non relié, comprend six doubles feuillets insérés les uns dans les
autres, ainsi que cinq feuillets simples (quatre sont inséras dans' les feuillets doubles, lè cinquième
est à part). Notre transcription suit l’ordre des pages du carnet, mais notre indication des feuillets
fait ressortir la place de chaque feuillet dans le carnet ainsi que sa nature.
b. Le texte de cette page est écrit au stylo bille à encre bleue, à l’exception de la dernière
phrase, écrite au crayon à papier. Certains mots sont repassés au stylo plume à encre bleue.
c. Mot repassé au stylo plume à encre bleue.
d. Le tiret ainsi que le mot « est » sont repassés au stylo plume à encre bleue.
e. Le texte de cette page est écrit au stylo bille à encre bleue.
472 Carnets de captivité
La notion de Y A utre que je veux prom ouvoir n ’est pas le M itei-
nandersein. L’A utre se trouve pour m oi non pas à côté de (com m e
associé à) m on œ uvre de vérité ou de rapport avec l’être — mais
derrière cet être. C ’est dans autrui {au sein} du rapport avec autrui
— que j’aperçois l’être.
Toute créature est certes une existence finie par rapport à l’In
fini du Créateur. Mais ce par quoi la créature n’est pas la finitude,
c ’est par son pouvoir d ’ouvrir une autre dim ension que celle où
s’inscrivent les relations entre le Fin ib <et> l’Infini. Le rapport
social par exem ple. L'essentiel de la créature doit donc s’inter
préter à partir de ces relations nouvelles dont la finitude n ’est
qu’un accident ou une condition. La finitude est transcendée.
a. « à » en surcharge de « en ».
b. « ne » répété deux fois.
c. Le texte de cette page est écrit au stylo bille à encre bleue.
Notes
Les quelques passages en russe ont été traduits par Simone Sentz-Michel. La traduc
tion des passages en hébreu et les notes sur le judaïsme sont de Catherine Chalier. Les
autres notes sont de Rodolphe Câlin.
Notes du Carnet 1
1. Sur ces indications de temps et de lieu, cf. supra la notice sur les Carnets de cap
tivité.
2. Henry de Régnier, L e M iroir des heures, 1 9 0 6 -1 9 1 0 , Paris, Mercure de France,
1910, p. 18.
3. Expression husserlienne qui interroge l'intentionnalité de la conscience : « Où
veut-elle en venir ? » Levinas a commenté à plusieurs reprises cette expression. Cf. Théo
rie de Vintuition dans la phénoménologie de H usserl, op. cit., p. 177 et A ltérité et Transcendance,
Montpellier, Fata Morgana, 19 9 5 , p. 37 sq. Il faut rapprocher ce fragment de celui qui
se trouve au début du Carnet 1, qui évoque une autre formule husserlienne — « w ie
liegt es drin » - , qui a également pour objet de mettre au jour l ’intentionnalité de la
conscience (cf. Carnet 1 , p. 1, et notre note 1).
4. Racine, Phèdre, acte IV, scène V I, v. 1 2 7 5 -1 2 7 8 .
5. Racine, Phèdre, acte IV, scène V I, v. 1 2 3 8 -1 2 4 2 .
6. Racine, Phèdre, acte IV, scène V I, v. 1 2 5 2 -1 2 5 6 .
7. C f. l ’Arioste, R olan d fu rieu x, chant X I , strophes X X I I sq.
8. C f. l’Arioste, R olan dfu rieu x, chant III, strophe X IX .
9. C f l’Arioste, R olan d fu rieu x, chant X III, strophes X L IX -L .
10. C f l’Arioste, R olan dfu rieu x, chant XV, strophe X III.
11. C f. E. Poe, D eux contes, trad. M .-D . Calvocoressi, in M ercure de France, n° 32 8 ,
t. L X X X IX , 16 février 19 1 1 , pp. 7 8 7 -8 1 1 .
12. Levinas cite l’édition suivante : Arioste, R olan d fu rieu x , t. IV, trad. fr. F. Rey-
nard, Paris, A. Lemerre, 1 880, pp. 7 7 -7 8 .
13. Notion développée par Heidegger dans Être et Temps, § 2 9. « Heidegger fixe par
le terme de G ew orfenkeit ce fait d ’être jeté et de se débattre au milieu de ses possibilités
et d’y être abandonné. Nous le traduirons par le mot déréliction », Levinas, « Martin
Heidegger et l’ontologie », article paru en 1932 dans la Revue philosophique, repris dans
En découvrant Vexistence avec H usserl et H eidegger, op. cit., p. 68.
14. Levinas se réfère à L A ltern ative, Paris, Alcan, 1938. Le chapitre 3 de ce livre,
ici visé par Levinas, sera repris avec quelques retouches comme chapitre 2 de L ’Aven-
ture, l ’.ennui, le sérieux, paru en 1963 [réédité dans Philosophie m orale, Paris, Flammarioir,
1998. Nous indiquons successivement la pagination de L A ltern ative et de LA venture,
l’ennui, le sérieux, dans l’édition de 19 9 8 }. Bien que le terme d’« ¡1 y a » ne se trouve
pas dans L A lternative, les descriptions de l ’ennui comme « le “plein du vide”, l ’être du
Rien » (p. 153, p. 9 0 5 ) rejoignent en effet la notion d’« il y a » au sens où l ’entend Le
vinas. On lira également la page 182 (p. 9 23 de L Aventure, l ’ennui, le sérieux), qui associe
l’ennui et l ’insomnie, insomnie par laquelle Levinas tentera d’approcher F« il y à » dans
Le Temps et l ’A utre [1 9 4 8 ], Paris, PUF, « Quadrige », 1 983, p. 27.
15. Th. Dostoïevsky, L ’Esprit souterrain, traduit et adapté par E. Halpérine et
Ch. Morice, Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1886. Le titre de cet ouvrage —Z ap iski iz pod-
p o lia - a varié au gré des traductions françaises. La plus récente s’intitule Les Carnets du
sous-sol, trad. A. Markowicz, Paris, Actes Sud, 1992.
16. Sur cette indication de lieu, cf. supra notice sur les Carnets de captivité.
17. Allusion au premier chapitre de L ’A lternative, op. cit., de Jankélévitch.
Notes 481
18. Sur cette indication de lieu, cf. supra notice sur les Carnets de captivité.
19. M. Proust, À la recherche du temps perdu, t. V II, A lbertine disparue, I, Paris, éd. de
la N ouvelle Revue française^ 1 925, p. 15.
20. La .phrase de Proust se trouve en réalité sur la page 16 de l’édition citéê par
Levinas (cf. la note précédente).
21. Proust, op. cit., p. 22.
22. Proust, ibid. y p. 24.
23. Proust, ib id .y p. 17.
24. Proust, ibid, y p. 9.
25. S ’agit-il du théoricien na2i Alfred Rosenberg ? Rappelons qu’à l ’époque Levi
nas avait déjà présenté « Quelques réflexions sur la philosophie de l’hitlérisme », dans
Esprit y 1934, n° 2 6 , novembre, pp. 1 9 9 -2 0 8 (article repris dans Les Imprévus de Vhistoirey
Montpellier, Fata Morgana, 1994, pp. 2 7 -41).
26. C f. dans ce xñéme carnet, la p. 4 2 , et notre note 36.
27. C ’est en ces termes que sera décrit W eill, personnage à'Eros (?). En ce qui
concerne ce roman, on se reportera à la préface de ce volume.
28. L’idée du judaïsme comme « catégorie » se réfère à la pensée de Franz Rosen-
zweig. Levinas l ’explicite en effet dans deux articles ¿onsacrés à ce philosophe. C f. « En
tre deux mondes (la voie de Franz Rosenzweig) » in D ifficile liberté [1 9 6 3 ], Paris, Al
bin Michel, 2 0 0 6 , p. 237 : « L’existence juive est une catégorie de l ’être » ; et « Franz
Rosenzweig : une pensée juive moderne » in H ors sujet, Montpellier, Fata Morgana,
1987, p. 82 : « Création, Révélation et Rédemption entrent dans la philosophie avec la
dignité de catégories. »
29- Il s’agit d’une citation non littérale du roman de M. Chadoume. Voici l’ensemble
du passage auquel il est fait référence, qui n’est pas sans résonances dans la pensée de Le
vinas : « Il voudrait dire : “Cécile, comprenez-moi comme j ’essaie moi-même de me com
prendre. Il n’est qu’un amour, celui’qui me délivre de l’égoïsme qui m ’enserre, m ’élargit,
me fait échapper à ma prison, celui qui m ’unit à toute souffrance ou toute joie et libère ma
pitié. J e me découvre. Toute douceur est pitié. J ’ai connu cette douceur, cette pitié. J e sais
qu'il n’est pas d’autre amour. J e le sais... Et il m ’échappe... À vous maintenant, à mon
secours... Aidez-moi” », Marc Chadoume, Cécile de la fo lie, Paris, Plon, 1930, p. 273.
30. Balzac, H onorine, in L a Comédie hum aine, t. II, Paris, Gallimard, « La Pléiade »,
1 976, p. 571.
31. Allusion au roman d ’Anatole France, M onsieur Bergeret à P aris, Paris, Calmann-
Lévy, 1900.
32. A. de Vigny, Œuvres complètes, t: II, texte présenté et commenté par F. Baldens-
perger, Paris, Gallimard, « La Pléiade », 19 4 8 , p. 9 4 5 .
33. Vigny, Œ uvres complètes, t. II, édition d’Alphonse Bouvet, Paris, Gallimard, « La
Pléiade », 19 9 3 , p. 4 9 8 .
34. C f. Vigny, Stello, chap. 32.
35. Sim hat Torah est la fête de la joie de la Torah. Cette fête se passe en automne,
après le Nouvel An, le Jo u r du Grand Pardon et la fête des Tentes (Souccot) ; elle clôt le
cycle annuel de lecture de la Torah 41e Pentateuque) et entame un nouveau cycle. Les
rouleaux de la Torah sont sortis de l’arche sainte et les fidèles dansent en portant ces
rouleaux.
482 Carnets de captivité
36. Il sera également question, dans le Carnet 3, p. 6, de Ju les, que le rire j. empêche
de dormir. Il est difficile de savoir de qui il s’agit. Signalons, cependant, si surprenante
soit, dans ce contexte, cette référence, que Ju les est aussi le nom d’un personnage d'Eros
(?). Dans un passage de ce roman, que malheureusement son contexte n’éclaire pas,
Levinas écrit : « J u les Le sommeil de Ju les. Le grand G est [.. .}L e sommeil de M. Jules
et son rêve » (Levinas écrit bien ici « G » et non « J . »).
37. C f le livre d’Esther dans la Bible. Mardochée est l ’oncle d’Esther, déporté à Ba-
bylone. L’histoire racontée dans le livre se passe à la cour du roi Assuérus. Mardochée et
Esther jouent un rôle essentiel pour sauver les juifs menacés d’extermination par Aman,
le premier dignitaire du royaume.
38. C f. I Samuel 3, 4 -1 0 . L’Éternel appelle Samuel, celui-ci croit que c ’est Héli qui
l'appelle, l'épisode se répète trois fois et Héli comprend que' c ’est en fait l’Éternel qui
appelle Samuel. Il lui dit alors de répondre désormais : « Parle, ton serviteur écoute. »
L’expression ’ïïn (hinneni) signifie « me voici ». C ’est d’abord la réponse d'Abraham à
l’appel de Dieu, et c’est ensuite celle de tous ceux qui répondent à cet appel. Levinas se
réfère souvent à cette expression dans son œuvre pour parler de la structure prophétique
de la subjectivité.
39. S’agit-il du roman d’Irène Némirovsky, D avid G older, Paris, Grasset, 1929 ?
40. Dans Eros (?), cette réplique de Tramel intervient juste après l ’évocation du
chien Bobby. C f. à propos de ce dernier, Carnet 6 , p. 2, et notre note 1.
41. Les éditions Plon ont réédité de nombreuses fois cet ouvrage, sans respecter
la pagination de la première édition [Gobineau (comte de), L a Renaissance. Savonarole,
C ésar B orgia, Ju les II, Léon X , M ichel-A nge, scènes historiques, Paris, Plon, 1877} ; nous
n’avons pu consulter toutes les rééditions et retrouver celle à laquelle se réfère proba
blement Levinas. On pourra lire le passage cité dans Gobineau, Œ uvres, t. III, Paris,
Gallimard, « La Pléiade », 19 8 7 , p. 7 3 9 .
42. « na-iznankou » signifie « à l’envers ».
4 3 . Il s’agit d’un nom propre.
4 4 . Sur la n o ù o n d ' A ufmachung, cf. le Carnet 3, p. 9 , et notre note 9. Si le film dont
il est question est celui du G ran d M eaulnes, Levinas ne vise pas l’adaptation cinémato
graphique du roman d’Alain Fournier, qui n’aura lieu qu’en 19 6 7 , mais il considère
le roman lui-même comme un film, au sens où il y voit la mise en œuvre de ce qu’il
appelle YAufmachung.
4 5 . « partent devant nous », au sens, sans doute, où, à travers les points de vue, les
plans et les gros plans qu’en fait le cinéma, le paysage perd sa continuité ; des morceaux
s’en détachent et ressortent dans leur particularité et leur étrangeté (cf. notre note 9
du Carnet 3 sur la notion d ’Aufm achung). U n passage d’un chapitre de D e l ’existence à
l ’existant, qui décrit la manière dont l’art moderne fait apparaître les objets, nous en
donne un équivalent « À un espace sans horizon, s’arrachent et se jettent sur nous
des choses comme des morceaux qui s’imposent par eux-m êm es... » (D e l ’existence à
l ’existant, op. cit., p. 91).
4 6 . Il s’agit de la pièce d’Eugène Labiche, Un chapeau de p a ille d ’Ita lie, mise en scène
par Gaston Baty (1 8 8 5 -1 9 5 2 ) en 1 9 3 8 à la Comédie-Française.
47. « hinneni » signifie « me voici ». Cf. supra, notre note 38.
48 . Allusion au livre d’Anatole France, Les Opinions de M . Jérôm e C oignard;
Notes 483
recueillies par Jacques Tournebroche et publiées par Anatole France, Paris, Calmann-
Lévy, 1893.
49 . Ce passage nous demeure obscur, mais il s’agit sans doute de Robert Dreyfus
(1 8 7 3 -1 9 3 9 ), auteur notamment de L a Vie et les prophéties du comte de G obineau, Paris,
Cahiers de la quinzaine, 19 0 5 , et des Souvenirs sur M arcel Proust, avec des lettres inédites
de Marcel Proust, Paris, Grasset, 1926.
50. « znakom it’sia » signifie « faire la connaissance de (quelqu’un) ».
51. Il s'agit sans doute de A. H . Navon (1 8 6 4 -1 9 5 2 ), n atif de Sinopoli en Turquie.
Écrivain, il fut également directeur de l’École normale israélite orientale.
52. C f. supra dans ce carnet, p. 3 5 , et notre note 28.
53- Il pourrait s’agir d’une réplique de W eill, personnage d'Eros (?). Dans le roman,
en effet, celui-ci déclare, de façon proche, en français : « J e sais jouer aussi du classique.
D ’ailleurs je préfère renchérissait W. complètement saturé de gloire et recouvrant par
elle sa nudité de timide. S
54. Ce verbe, que l’on peut lire dans L e Q uart L ivret Rabelais, Œuvres complètes, Paris,
Gallimard, « La Pléiade », 19 5 5 , p. 6 2 7 , est défini dans la B riefve déclaration : « cory-
bantier, dormir les oeilz ouvers », ib id ., p. 7 4 2 .
55. On trouve plusieurs listes de correspondants dans ces Carnets. Il ne s’agit pas
seulement de simples correspondants, mais aussi de donateurs, de personnes de connais
sance (ou alors de personnes auprès desquelles Levinas avait été recommandé par un
tiers) qui s’étaient proposés d’envoyer des colis, et auxquels Levinas devait pour cela
adresser au préalable dei étiquettes ou formulaires de colis (au sujet de ces étiquettes,
cf. Carnet 4 , p. 13, et notre note 10).
Notes du Carnet 3
Notes du Carnet 4
1. Cette scène sera reprise dans Eros (?), qui la situe au printemps 1942.
2. Description de W eill qui sera reprise dans Eros (?).
3. Mérite remarque que dans la note précédente.
4. Romain Rolland, M ahatm a G an dhi, Paris, Stock, 1923.
5. « Dofuhr » est sans doute une abréviation pour Kommando fiib rer. Ce chef du
commando est évoqué dans Eros (?) et présenté comme étant exterminateur de rats
CRattenfänger) dans le civil.
6. Cette scène sera reprise dans Eros (?), comme' une scène à laquelle assistent les
prisonniers, massés sur la remorque d’un tracteur.
” 7. Allusion au chapitre 9 du livre 11 (quatrième partie) des Frères K aram azov de
Dostoïevski, qui s'intitule : « Le diable. Le cauchemar d’Ivan Fédorovitch ».
'8 . Levinas cite Plotin d’après Ennéades, 1.1 , texte établi* et .traduit par E. Bréhier,
Paris, Les Belles Lettres, première édition, 1 9 2 4 ,p . 8 4.
9. Le chapitre 53 d’Isaïe est connu sous le' nom de chapitre du « serviteur souf
frant » ; il a reçu des interprétations messianiques tant par les juifs que par les chré
486 Carnets de captivité
tiens. Levinas s’y réfère à plusieurs reprises dans son œuvre pour parler de la souffrance
pour autrui. C f par exemple, Humanisme de Vautre homme, Montpellier, Fata Morgana,
1972, Le Livre de Poche, p.^53 : « Le M oi, écrit Levinas, est dans sa position même de
part en part responsabilité ou diaconie, comme dans le chapitre 53 d’Isaïe. »
10. Les étiquettes sont des formulaires de colis. Les prisonniers ne pouvaient re
cevoir de colis qu’à la condition d’expédier aux donateurs une étiquette à leur adresse
que leur remettait le camp. En raison du nombre lim ité des colis auxquels avait droit,
chaque mois, tout prisonnier, les étiquettes pouvaient faire l ’objet d’un rachat, d’un
échange, ou, com ité ici, sem ble-t-il, devenir une mise au jeu.
11. Cette situation sera évoquée, un peu différemment, dans Eros (?). Les prisonniers
passent régulièrement en camion devant une baraque de jeunes Allemandes appartenant
à l’armée et « admirent » un pull ou une paire de bas qui sèchent, ou encore aperçoivent
une fois à travers une fenêtre ouverte une fille qui se peigne ( t f, également, le Carnet 3,
p. 3). Levinas s’attarde alors sur la signification de l'érotisme de cette situation.
12. La scène sera reprise dans L a D am e de chez W epler. Les sœurs Blumenfeld, coutu
rières, qui tiennent une boutique au rez-de-chaussée de l’immeuble où habite Ribérat,
expriment à ce dernier leur peur lors des alertes dans les premières journées de la guerre.
«< Ce sale, cet instinctif attachement à la vie » qu’exprime cette peur, plus que le man
que de courage, lui inspire alors le dégoût.
13. L’expression « sa vigne et son figuier » est biblique. C f. Zacharie 3, 10 « En
ce jour, dit l ’Éternel Cebaot, vous vous convierez l’un l’autre sous la vigne et sous le
figuier » ; II Rois 18, 31 : « N ’écoutez pas Ézéchias, car voici ce que propose le roi
d’Assyrie : manifestez à mon égard des sentiments pacifiques, rendez-vous auprès de
moi, et chacun mangera les produits de sa vigne et de son figuier, et chacun boira l’eau
de sa citerne. » L’expression fait allusion à un idéal pacifique ; dans la dernière citation,
il s'agit d’une tentation proposée par le roi d’Assyrie.
14. C f. Deutéronome 2 8 , 10 : « Et tous les peuples de la terre reconnaîtront que
le nom de l’Éternel est associé au tien » ; également Zacharie 2, 15 : les nations « se
rallieront à ¡ ’Éternel ».
15. Jean Giraudoux, 0ndinet Paris, Grasset, 1939.
16. « T ahat » signifie « à la place de, sous ».
17. Levinas cite l’édition de 1916.
18. Levinas se réfère à Jankélévitch, U A lternative, op. cit. (lire en particulier pp. 4 et
58). C f. Carnet 2 , p. 1 7 -1 8 , et notre note 14.
19. Levinas se réfère peut-être à nouveau à Jankélévitch, L ‘A lternative, op. cit.,
p. 64.
20. « p la tk i » signifie « fichu ».
21. Ces citations sont extraites du livre premier des Caves du V atican. Manifeste
ment, c ’est à la langue de Gide, et, à travers elle, sans doute, à la langue française - qui,
rappelons-le, n’était pas sa langue maternelle — que Levinas est ici attentif. Précisons
que l’avant-dernière citation, « elle a empêché [ . . . ] a glissé », est inexacte. Gide écrit,
à propos de Ju liu s de Baraglioul : « La distinction foncière de sa nature et cette sorte
d’élégance morale qui respirait dans ses moindres écrits avaient toujours empêché ses
désirs sur la pente où sa curiosité de romancier leur eût sans doute lâché la bride », Ro
mans, récits et soties, œuvres lyriques, Paris, Gallimard, « La Pléiade », 1 9 5 8 , p. 689.
Noies 487
22. Levinas évoque sans doute le roman, de Raymond Guérin, L'Apprenti, Paris,
Gallimard, 1946. Cette évocation peut surprendre, car ce fragment appartient à une
suite de notations datée par Levinas de 1944. Mais R. Guérin fut également prisonnier
au stalag X I B et écrivit ce roman durant sa captivité. Bien que nous n’ayons d’autres
éléments pour l ’étayer, il n’est pas impossible que Levinas et Guérin se soient fréquentés
et que ce dernier lu i ait montré le manuscrit de son roman.
23. Axel Munthe, L e Livre de San M ichèle [1 9 2 9 ], trad. fr. P. Rodocanachi, Paris,
Albin Michel, 1 9 3 4 . Dans une lettre à sa femme datée du 22 février 1944, Levinas lui
recommande le livre d’Axel M unthe, qu’il vient de lire.
24. Pierre Arnoult, R im baud, Paris, Albin Michel, 1943.
25. Jean-Paul Sartre, Les Mouches, Paris, Gallimard, 1943. Levinas évoque cet ouvra
ge ainsi que le suivant dans une lettre à sa femme datée du 7 août 1943.
26. Thierry Maulnier, Lecture de Phèdre, Paris, Gallimard, 1943. Nouvelle édition
revue et augmentée en 1967.
Notes du Carnet 5
1. Ces scènes qui ont lieu au moment de la débâcle seront en partie reprises dans
Eros (?). C f dans ce carnet, in fra , p. 16, et notre nôre 8.
2. Il s’agit d’Élie Fondaminsky Bounakov (1 8 8 0 -1 9 4 2 ). Intellectuel ju if russe, il
meurt à Auschwitz en 1942.
3. Nicolas Berdiaeff, philosophe russe (1 8 7 4 -1 9 4 8 ).
4. Jean W ahl, philosophe français (1 8 8 8 -1 9 7 4 ). Il fonde notamment en 1946 le
Collège philosophique où Levinas donnera de nombreuses conférences.
5. Jean Schlumberger (1 8 7 7 -1 9 6 8 ), romancier et essayiste, cofondateur de la Nou
velle Revue fran çaise.
6. Henry de M ontherlant, Service inu tile, Paris, Grasset, 1935.
7. C f Bernanos, Jo u rn a l d'un curé de campagne, in Œuvres romanesques, Paris, G alli
mard, « La Pléiade », 1961, pp. 1 0 5 1 -1 0 5 2 .
8. Levinas évoquera à nouveau dans Eros (?) cette « frénésie » et cette « facilité de
posséder » qu’illustrent les pillages au moment de la débâcle, dans lesquelles il ne voit
qu’une « triste abondance ».
9. Il s'agit de la scène sur laquelle se termine le manuscrit inachevé L a D am e de chez
Wepler. Elle se situe à la fin du mois de mai 1940, juste avant que le héros ne rejoigne
une unité avancée. Ce dernier ne porte cependant pas dans le roman le nom de Rondeau
(qui est aussi celui d’un personnage de Triste opulence et à ’Eros [?]), mais celui de Roland
Ribérat (auquel Levinas, lors d’une campagne de corrections, substituera d’ailleurs celui
de Simon).
10. La découverte d’une voiture abandonnée par celui qui en a rêvé pendant toute sa
jeunesse est une scène que reprendra Eros (?) au moment d’évoquer les pillages lors de la
débâcle. C f p. 16 du présent'Carnet, et notre note 8.
11. Nous ne savons pas de quel lieu « B » est l’initiale. La capitale d'Essia désigne sans
doute la ville de New York, où avait émigré Essia, sœur de la femme d’Emmanuel Levinas.
12. Il s’agit d'un extrait de Vadim, de Lermontov : « La femme, seulement quand
elle a perdu l’espoir, peut perdre la pudeur, ce sentiment inné, incompréhensible,
488 Carnets de captivité
cette conscience involontaire chez la femme de l ’inviolabilité, du caractère* sacré de ses
chants. » C f. Lermontov, Œ uvres, t. IV, éd. de l’Académie des sciences, Moscou, Lenin
grad, 1 9 6 2 ;p. 122.
13. Levinas cite fort probablement A urélia ou le Rêve et la vie d’après l ’édition Gau
tier et Houssaye des œuvres de Gérard de Nerval qui a en effet pour titre, donné par
les éditeurs, L e Rêve et la Vie, Paris, V. Lecou, 1 8 5 5 , p. 71 [Gérard de Nerval, Œuvres
complètes, t. III, Paris, Gallimard, « La Pléiade », 19 9 3 , p. 7 1 7 ]. Dans le texte de Levi
nas, « Le rêve et la vie » indique plutôt en effet le titre de cette édition que le sous-titre
d’Aurélia.
14. Il s’agit vraisemblablement d’une première version d’un passage de L a D am e de
chez Wepler. Le roman précise que cette guerre, qui ne signifie pas encore une « fin de
monde », est la drôle de guerre, « cette guerre paisible d’avant le 10 mai » 1940.
15. H. Rider Haggard, R ed Eve, Hodder & Stoughton, 1911.
16. Romain Rolland, M ahatm a G an dhit Paris, Stock, 1923. C f Carnet 4 , p. 2.
17. Sur Essia, cf. supra notre note 11.
18. Levinas cite probablement de mémoire la deuxième strophe du poème de M al
larmé, « Le vierge, le vivace et le bel aujourd’hui ».
19. Édouard Estaunié, Solitudes, Paris, Perrin et Cie, 1917.
20. Levinas cite Genèse 2 5 , 22 : « comme les enfants s’entre-poussaient dans son
sein ». Rébecca attend des jumeaux qui seront Ésaü et Jacob. Selon une interprétation
traditionnelle juive, si Jacob, qui deviendra Israël (Gn 32, 29), est l’ancêtre des juifs,
Ésaü serait celui des chrétiens.
21. Levinas fait allusion au zoroastrisme pour lequel il y a un dieu de lumière (Or-
muzd) et un dieu des ténèbres (Ahriman).
22. Ce mot signifie un « J e » de majesté. C/, en particulier, Exode 20, 2 : « J e
Canokhi) suis l ’Éternel, ton D ie u ... »
23. Levinas fait ici allusion à Friedrich Sieburg, B lick durchs Fenster, Aus zehn J a -
hrert Frankreich und England, Societâts Verlag, 19 3 9 , p. 4 6 sq. ; D e via fenêtre, trad. fr.
A. Coeuroy, Paris, Grasset, 1942, p. 4 6 sq.
Notes du Carnet 6
1 . C f * Nom d’un chien ou le droit naturel », in D ifficile liberté, op. cit.t pp. 199-
202. C f aussi Carnet 2 , p. 4 7 , et notre note 4 0 .
2. Levinas cite vraisemblablement ce passage du discours de Zarathoustra intitulé
« Le chant de la nuit » dans la traduction d’Henri Albert, A insi p a rla it Z arathoustra,
Paris, Société du Mercure de France, 18 9 8 , p. 144.
3. Léon Bloy, Lettres à sa fiancée (août 1889-m ars 1 890), Paris, Stock, Delamain et
Boutelleau, 1922. Réédition, conforme à l ’édition originale, avec une préface de Max
Genève, Paris, Le Castor Astral, 1990. Il est peut-être opportun de* rappeler la faveur
dont jouissait L. Bloy auprès des écrivains russes, comme en témoigne par exemple
N . Berdiaefî. Dans un passage de « L’Orient et l’Occident » où il décrit l ’Orient tel que
le conçoit la Russie, il écrit : « M ais c ’est un Orient qui se souvient que ses origines
les plus profondes sont la Bible et Jérusalem. Tout récemment encore, vous aviez, vous
Français, un écrivain remarquable qui avait cette vérité présente à l’esprit et qui était
Notes 489
proche des motifs russes, bien qu’il fut un latin typique. Mais vous l’avez peu apprécié.
J e parle de l’homme de l'Apocalypse, de Léon Bloy », « L’O rient et l’Occident », in
C ahiers de la quinzaine, neuvième cahier de la vingtième série, 5- juin 1930, p. 18.
4 . Bloy, op. cit.y p. 7 7. Pour l’ensemble des citations de l ’ouvrage, nous avons ajouté
un m ot oublié ou rectifié un m ot fautif entre crochets obliques, mais nous n’avons pas
rétabli les italiques ni les abréviations.
5. Bloy, ib id ., p. 4 3 .
6. Bloy, ib id ., p. 12.
7. Bloy, ibid. y p.*15
8. Bloy, ibid, y p. 20.
9- Bloy, ibid, y pp. 2 3 -2 4
10. Bloy, ibid, y p . 34.
11. Bloy, ib id ., pp. 3 3 -3 4 .
12. Blôy, ibid, y p . 39.
13. Bloy, ib id .y p. 52/
14. C f. par exemple, P antagruel, chap. X V III.
15. Il s’agit en fait de Bridoye. Levinas lui substitue, sem ble-t-il, le nom du person
nage de la pièce de Beaumarchais, L e M ariage de P igarof appelé Brid’oison et imaginé en
effet d’après celui du juge de Rabelais. Au sujet de Bridoye, qui /décidait des procès au
sort des dés, cf. Rabelais, Le Tiers L ivre, chap. X X X I X .
16. Bloy, op. cit.y p. 89.
17. « etc. » ajouté par Levinas.
18. Levinas résume le, passage qu’il a coupé.
19. Bloy, op. cit.y p. 75.
20. Bloy, ibid, y p. 76.
21. Bloy, ibid, y pp. 7 6 -7 7 .
22. Bloy, ibid, y p. 78.
23. Bloy, ibid., pp. 7 8 -7 9 .
24. Bloy, ibid, ypp. 7 9 -8 0 .
25. « a raison » en petites majuscules dans Bloy.
26. Bloy, ibid, y pp. 8 0 -8 1 .
27. Bloy, ibid, y p. 81.
28. Bloy, ibid, y p. 83.
29. Bloy, ibid, y p. 84.
30. Bloy, ibid, y p. 85.
31. Bloy, ibid, y p. 81. Voici l’intégralité de la phrase de Bloy, afin d’éclairer un peu
ce passage obscur : « Je brûle de dire enfin un peu de vérité profonde au milieu de tant
de mensonges littéraires et de dramatiques rengaines. »
32. Bloy, ib id ., pp. 8 6 -8 7 . « etc. » ajouté par Levinas.
33. Bloy, ibid, y p . 87.
34. Bloy, ibid, y p. 91.
35. Bloy, ibid, y p. 106.
36. Bloy, ibid , y p. 109.
37. Bloy, ibid, y p . 111.
38. Bloy, ib id .y p. 117.
490 Carnets de captivité
39. Bloy, ib id ., p. 117.
40 . B loy ,'ibid ., p. 120.
41 . Bloy, ibid ., p. 121.
4 2 . 'Bloy, ib id ., p. 124.
4 3 . Bloy, ibid\, p. 136.
4 4 . Bloy, ib id ., p. 137.
45 . Bloy, ib id ., p. 140.
46 . Épître aux Romains, 4 , 17.
4 7 . Le vinas évoquera encore à deux autres reprises, dans ses Notes philosophiques
diverses (Liasse A, notes 41 et 164), cette thèse que Carlyle a développée dans la cin
quième conférence des Héros, le culte des héros et l'héroïque dans l'histoire. Soulignant
l'im pact que l'im prim erie, qui a rendu plus facile l’accès aux livres, a eu sur l ’ensei
gnem ent, Carlyle écrit : « En réalité, tout ce qu’une université, si prestigieuse soit-
elle, peut vraiment faire pour nous en ce domaine [la prise en compte de l ’existence
des livres im prim és] est la continuation de ce que nous ont donné nos précepteurs
dans notre enfance : nous apprendre à lire. Car nous y apprenons à déchiffrer, souvent
dans plusieurs idiomes, le langage propre aux différentes branches de la connais
sance ; ce qui revient, en somme, à apprendre l’alphabet et les lettres des m ultiples
catégories de livres qui existent ! Mais la connaissance, même théorique, c ’est dans les
livres eux-mêmes que nous la trouvons. La forme qu’elle prend en nous, sa profondeur
dépendent des livres que nous lisons et de l ’attention avec laquelle nous les lisons,
mais nous l ’acquérons de toute façon après que tous nos professeurs nous ont donné
les clefs de la lecture. Les vraies universités sont aujourd’hui les grandes bibliothè
ques », Les H éros, trad. F. Rosso, Paris, Maisonneuve et Larose, Éd. des Deux Mondes,
1998, pp. 2 1 6 -2 1 7 .
48. Il peut s’agir d’un fragment du roman qui s’ébauche dans ces C arnets, sous le
titre de Triste opulence, car le roman contient une « scène d’Alençon » évoquée à de m ul
tiples reprises dans les Carnets.
49. Les hommes de confiance, désignés par les prisonniers de guerre pour les repré
senter à l’égard des autorités militaires et des puissances protectrices, ont notamment
pour tâche de recevoir et distribuer les envois collectifs (çf. la convention relative au
traitement des prisonniers de guerre, Genève, le 27 juillet 1929, art. 43).
50. « Prorok », « le prophète », poème de Pouchkine. On peut le lire, notamment,
dans Poésie russe, Anthologie du xvm* au XXe siècle présentée par Efim Etkind, Paris, La
Découverte/Maspero, 1983, pp. 6 8 -6 9 .
Notes du Carnet 7
du § 52 des Idées directrices pour une phénoménologie, 1.1, qui souligne Terreur consistant à
considérer que les catégories telles que « force, accélération, énergie, atome, ion, etc. *
( Idées directrices pour unephénoménologie, trad. P. Ricœur, Paris, Gallimard, « Tel », 1950,
p. 174), paf lesquelles la physique détermine ses objets, seraient, en raison de leur
manque d’intuitivité, à décrire comme les « représentants symboliques » d’une réa
lité cachée qu’une intelligence mieux pourvue serait à même de convertir en intuition
simple, Husserl écrit : « Même une physique divine ne peut convertir en intuitions
simples les déterminations de la réalité que la pensée réalise par ses catégories, pas plus
que l’omnipotence divine ne peut faire qu’on puisse peindre ou jouer au violon des
fonctions elliptiques » {ib id .%p. 177).
5. Levinas cite sans doute de mémoire ce dernier y ers du poème « De profundis
clamavi », qui dit exactement : « Tant l'écheveau d u temps lentement se dévide ! »,
Baudelaire, Œuvres complètes, 1.1, Paris, Gallimard, « La Pléiade », 1 975, p. 33.>
6. Référence au roman de Pearl Buck; L a Terre chinoise, t. III, L a F am ille dispersée
{1 9 3 5 ], trad. S. Campaux, Paris, Payot, 1935.
7. Baudelaire, Œuvres complètes, 1.1 , op. cit., p. 24.
8. Ib id ., p. 94.
9. Ibid. y p. 6 6.
10. Ib id ., p. 73.
11. Ib id .t p . 130.
12. Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, t. V, Sodome et Gomorrhey II, 1, Paris,
éd. de La Nouvelle Revue française, 19 2 2 , p. 152.
13 .C f. Maurice Baring, L a Princesse B lanchet trad. fr. Mme Faisans-Maury, préface
de Charles du Bos, Paris, Librairie Stock, 1930.
14. C f. la note précédente.
15. Il s’agit du livre du D r Alexis Carrel, L'Homme, cet inconnu, Paris, Librairie Plon,
1935. Les citations qui suivent ne sont pas littérales, et renvoient particulièrement à
la p . 137.
16. C f. Carnet 4, notre note 13.
17. « Simhat Torah ». C f Carnet 2, notre note 35.
18. Isaac est un juste, fils de juste (Abraham). Rébecca est une juste, fille de mé
chant (Bathuel) ; à ce titre, elle aurait davantage de mérite qu’Isaac, mais la prière de
celui-ci serait plus efficace car il implore l ’Étem el au sujet de .Rébecca qui était stérile
et « l’Étem el accueillit sa prière » (Genèse 2 5 , 21).
19. « Z ehkout » signifie « le mérite ».
20. « P ilpou l » : (de « p ilp el », poivre), il s’agit d’un mode de discussion talmudique
destiné à clarifier des questions particulièrement difficiles. Il est aussi utilisé1comme
exercice pour développer le raisonnement logique.
21. Expression dont la signification nous demeure obscure.
22. M illen B ranci, The Outward Room, New York, Simon and Schuster, 1937.
23. Levinas parlera plus explicitement dans D ifficile liberté de l’émotion qu’il a
éprouvée « dans un stalag, en Allemagne, [ . . . ) lorsque, sur la .tombe d’un camarade
ju if que les nazis voulaient faire enterrer comme un chien, un prêtre catholique, le
père Chesnet, a récité des prières qui étaient dans le sens absolu du terme, des prières
sémites », op. cit.t p. 27.
492 Carnets de captivité
24. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face, H istoire d?une âme écrite
p a r elle-même. Lettres. Poésies, Bar-le-Duc, Impr. Saint-Paul, 1 8 9 8 , p. 53 {Sainte Thé
rèse de l ’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face, Œuvres complètes : textes et dernières paro
les, Paris, Cerf-D D B, 1 9 9 2 , p. 120]. Levinas cite sainte Thérèse d’après des éditions
qui, jusqu’à 1956, étaient incomplètes et surtout très infidèles au texte des manuscrits,
quelles n’hésitèrent pas à tronquer et souvent à réécrire. En ce qui concerne l ’histoire
des éditions des œuvres de sainte Thérèse, çf. P. François de Sainte-Marie, M anuscrits
autobiographiques de sainte Thérèse de l ’Enfant-Jésus, 1.1 , Introduction, Carmel de Lisieux,
1956, p .'25 sq.
25 . Ce texte fait partie des D erniers entretiens £Œ uvres complètes, op. rit., p. 1 0 5 4 ].
Précisons cependant que, sous la forme sous laquelle le cite Levinas, il s’agit en fait de
cette même parole de sainte Thérèse, telle q u ’elle avait été déjà utilisée et en partie
retouchée par l’éditrice dans le chapitre 12 d'H istoire d'une âm e (elle se trouve p. 2 3 0
de l ’édition de 1 8 9 8 ) qui fait notamment le récit des derniers instants de la sainte.
C ette parole ne sera restituée dans sa littéralité q u e‘dans les N ovissim a verba, D erniers
entretiens de sain te Thérèse de l ’E n fant-Jésus, m ai-septem bre 1 8 9 7 , Bar-le-D uc, Impr.
Saint-Paul, 1 9 2 7 , p. 8 9.
26. Citation d’un passage de la lettre de sainte Thérèse à sa sœur Céline du 8 mai
1888, H istoire d ’une âm e, op. cit., p. 2 6 5 . Dès la première édition d ’H istoire d ’une âm e,
en 1898, on trouve, en appendice, des « fragments » de 18 lettres de Sœur Thérèse
de l’Enfant-Jésus à sa sœur Céline, auxquels viendront s’ajouter d’autres lettres dans
les éditions suivantes. Non seulement les lettres authentiques ont été tronquées, mais
elles ont été en partie retouchées. Il en va ainsi du passage que cite ici Levinas, qu i est
entièrement de la m ain de l ’éditrice de sainte Thérèse, et qui disparaîtra dans la première
édition (quasi) complète des lettres de sainte Thérèse en 1948 {Lettres de sainte Thérèse de
l ’Enfant-Jésus, Bar-le-Duc, Impr. Saint-Paul, 1948).
27. Levinas cite à nouveau les D erniers entretiens de sainte Thérèse, N ovissim a verba,
op. cit., p. 122, Œuvres complètes, op. cit., p. 1081. Dans ces deux éditions, le texte dit
exactement « ne compter que sur le bon Dieu ».
28. Levinas cite les Derniers entretiens d’après les N ovissim a verba, op. cit. , p. 37 ; préci
sons que « je trouverais que j ’ai les mains vides » ne figure plus dans les Œuvres complètes,
op. cit., p. 1018.
29. « tik h ij oujas » signifie « calme terreur » (expression destinée à renforcer l’idée
de terreur).
30. Sur cette notion, cf. le passage du Carnet 3, p. 9 , oh elle est également présente,
et notre note 9 qui s’y rapporte.
31. Faut-il lire « Platon » ?
1. Sanctification du Nom.
2. Il faut la présence de dix adultes pour réciter certaines prières dans le judaïsme.
C’est ce qu’on appelle un m inian.
3. « Maariv » désigne la prière du soir, et « chacherith » la prière du matin.
Notes 493
N o te s de la Liasse B
en quatre classes. Il y en a qui vont à l’école, mais n'étudient pas ; ils ont au m oin* le
mérite de l ’assiduité. D ’autres étudient chez eux, mais ne fréquerttent pas les écoles ; ils
ont du moins le mérite d’avoir travaillé. Celui qui fréquente les "écoles et travaille avec
zèle, est un hoirlme pieùx.-Celui qui ne va pas écouter les leçons du maître, qui ne
fait non plus rien chez lui, est impie. »
7. Descartes, Œuvres et Lettres, textes présentés par A. Bridoux, Paris, Gallimard,
« La Pléiade », 1953 [AT, I X , 110}.
8. Traité du Talmud de Babylone.
9. Chouchani, personnage énigmatique qui fut le maître du Talmud de Levinas.
10. Citation extraite de F.-Rosenzweig, Zweistrom land, kleinere Schriften zur Religion
und Philosophie, Berlin, Philo, 19 2 6 , p: 22-1 [F. Rosenzweig, D er Mensch und sein W erk,
Gesammelte Schriften, 3, Zw eistrom land, kleinere Schriften zu G lauben u n d Denken, N ij-
hoff, 1984, pp. *2 0 6 -2 0 7 }. Ce que l’on peut traduire comme suit : « Ainsi est née,
et, certes, toujours en contact avec l’éthique, mais tout en étant strictement distincte
d’elle, une nouvelle doctrine de l ’homme, une doctrine, précisémeht, de l’homme avec
et face à dieu - lequel est bien avant tout, en même temps, l ’homme effectif, présent,
qui ne se laisse plus dissoudre dans l’humanité à venir et qui ne veut plus être ’’l’épou
vantail de la loi morale”. »
11. Pascal, Pensées, fragment 3 9 6 de l ’édition Lafuma, in Œuvres complètes, Paris,
Seuil, 1963, p. 548.
12. Ce fragment évoque-t-il T otalité et In fini, alors en cours d’écriture ? Le plan évo
qué correspond à* celui de la troisième section de ce livre.
13. Il s’agit d’une critique de la notion leibnizienne de pluralité dans l'unité, ex
posée notamment dans la M onadologie. Levinas, dans T otalité et'Infini, entend définir un
pluralisme libéré de l’unité du nombre ou de la référence à une totalité, c’est-à-dire
remettre en question le « privilège ontologique » de l ’unité, ou encore le fait qüe la
philosophie occidentale pense * l’être en tant qu’être* [comme} monade » (T otalité et
In fin i, op. cit., p. 2 51. C f. aussi pp. 30 et 53).
14. Référence au poème de Baudelaire « Le voyage », in Les Fleurs du m al.
15. « Il prophétisait sans savoir qu’il prophétisait », commentaire de Rachi, sur
Genèse, 451, 18.
16. « betsniout » signifie « avec modestie ». Ce m ot insiste sur ce qui ne doit pas être
montré en public.
17. C f A. Koyré, « L’évolution philosophique de Heidegger », C ritique, n° 1-2,
ju in-juillet 1946, Paris, éd. du Chêne, p. 168. Article repris dans Études d h istoire de la
pensée philosophique, Paris, A. Colin, 1961.
18. Levinas «e réfère sans doute à Max Müller, Existenzphilosophie in geistigen Leben
der G egenw art, Heidelberg, F. H . Kerle Verlag, 1 949, en particulier aux pp. 50 à 57.
L’ouvrage, augmenté d ’un autre écrit de l ’auteur, est paru en français sous le titre C rise
de la métaphysique, situation de la philosophie au xx* siècle, trad. M. Zemb, C. R . Chartier,
J. Rovan, Paris, D D B , 1953 ; çf. pp. 42 à 47.
19- C f. notre note 22 de la Liasse A.
20. Bien que ^Levinas renvoie à H olzwege, Frankfurt am Main, Klostermann, 1949
(Chemins qu i ne mènent nulle p art, Paris, Gallimard, 1962) et à Erläuterungen zu H ölderlins
D ichtung, Frankfurt am Main, Klostermann, 1951 (Approche de H ölderlin, Paris, Galli-
498 Carnets de captivité
mard, 1962 et 1973 pour la nouvelle édition augmentée), rappelons que c ’est aux § 32
et 33 de Être et Temps, ouvrage que Levinas cite juste après, qu’est mise au jour la struc
ture du « etwas als ewas », du « quelque chose comme quelque chose », qui signifie que,
dans notre relation avec le monde, les choses ne sont jamais saisies dans leur nudité,
mais toujours comme ceci ou comme cela. Cette structure prélangagière est constitutive
du sens, et c’est sur elle que repose touténoncé, qu’il soit compris comme prédication
ou encore comme communication.
21. Heidegger, Sein und Z eit, Erste Hälfte, Zweite Auflage, M. Niemeyer, Halle
a. d. S., 1929 (édition de l’exemplaire de Levinas, conservé dans ses archives). « La mise
en évidence de l’énôncé s’accomplit sur la base de l ’étant déjà ouvert - ou circons-
pectivement découvert - dans le comprendre », Être et Temps, trad. fr. E. Martineau,
Authentica, 1 985, p. 126.
22. Sein und Z eit, op. cit., p. 161. « Le p arler est existentialem ent cooriginaire avec l ’affec
tion et le comprendre », Être et Temps, op. cit., p. 129-
23. Sein und Z eit, op. cit., p. 162. « Ce dont il est parlé dans le parler est toujours
“abordé” par lui d’un certain point de vue et dans certaines limites », Être et Temps,
op. cit., p. 129.
N otes de la Liasse C
1. Il peut s’agir d'une allusion aux discussions qui eurent lieu lors de la troisième
assemblée du Conseil oecuménique des Églises à New Delhi en 1961.
2. Psaume 2, 11 : « Réjouissez-vous avec tremblement. »
3. C f supra Carnet-2, notre note 13.
4. « B ilaam » : c f Nombres, chapitre 22 : Bilaam est un prophète païen auquel le
roi Balak demande de maudire les Hébreux, mais il ne peut le faire, Dieu lui disant que
ce peuple est béni.
5. S ’agit-il d'un « passage » de T otalité et In fin i, alors en cours d’écriture ?
6. Lévitique, 1 1 , 2 : « Voici les animaux que vous pouvez manger. » Levinas donne
des références de commentaires à ce verset : le Midrach Tanhoum a, le Midrach K aba, et
le commentaire de Rabbenou Nissim sur le traité du Talmud H olin 8 1.
7. Traité du Talmud sur l ’idolâtrie.
8. C f Platon, Théétète, lA S e s q .
9. Levinas pense peut-être en particulier à Aristote, Éthique à N icom aque, 1143 a 32-
1143 b 5.
10. Sur YEntschlossenheit (résolution), cf. Heidegger, Être et Temps, § 6 0.
11. J. Salvador, P aris, Rome, Jéru salem ou la question ^religieuse au xix* siècle, t. II,
deuxième édition, entièrement revue et augmentée, Paris, Calmann-Lévy, 1880,
pp. 2 7 0 -2 7 1 .
12. Platon, Œuvres complètes, t. II, op. cit., p. 6 3 7 .
13. Platon, Œuvres complètes, t. II, op. cit., p. 6 38.
14. Le mot signifie « vestibule ». Levinas fait allusion à une comparaison tradi
tionnelle dans le judaïsme entre ce monde-ci et un vestibule préparant l’entrée dans le
monde futur.
Notes 499
15. « “Même les chacals présentent leurs mamelles et allaitent leurs petits : la fille
de mon peuple, elle, est devenue cruelle comme l’autruche du désert", Lamentations,
4 , 3 (traduction du Rabbinat). Commentaire de Rachi : bien qu’ils soient cruels (les
chacals) présentent leurs mamelles quand ils voient venir à eux leurs petits afïàmés ; ils
dégagent leurs mamelles car ils ont une réserve en eux et ils leur en donnent. La fille
de mon peuple est devenue cruelle [souligné par E. L.J : elle voit ses enfants crier pour
demander du pain et elle ne leur en donne pas car sa vie passe avant celles de ses enfants
à cause de la faim (qu’elle éprouve aussi). »
16. Montaigne, Essais, I, 2, in Essais, texte établi et annoté par A. Thibaudet, Paris,
Gallimard, « La Pléiade », 19 5 0 , p. 33.
17. « Celui qui a fait pécher les autres », commentaire de Rachi sur Bémidbar
(Nombres), 2 7, 3, où les filles de Zelofhad font valoir que leur père est mort pour son
péché ; Rachi souligne qu’il n’a pas fait pécher les autres. Taanit est un traité du Talmud.
18. Ce fragment évoque-t-il l'écriture, en cours, de Totalité et Infini ?
19. « ... l ’homme étant le seul être animé qui par sa nature ait en partage des sen
timents d’honneur et de retenue, le seul qui ait une tendance à rechercher les liaisons
qui aboutissent à la société humaine, le seul qui soit attentif, dans tous ses actes et dans
toutes ses paroles, à éviter que rien ne procède de lui qui ne soit pourvu de beauté mo
rale et de d ig n ité... », Cicéron, Des termes extrêmes des biens et des maux , t. II, texte établi
et traduit par Ju les Martha, Paris, Les Belles Lettres, pp. 6 4 -6 5 .
20. « Listim » signifie « brigands ».
21. Allusion à la « Première Élégie », dans Les Élégies de Duino de Rilke.
22. Il peut s’agir de la note 77 de la présente Liasse C.
23. Psaume 3 0, 2 : « La poussière rendra-t-elle grâce à ta vérité ? »
N otes de la Liasse D
N otes du C arnet B
1. « Celui qui étudie mais qui n’enseigne pas n’a pas part au monde à venir. »
2. « betsniout », cf. supra notre note 16 de la Liasse B .
Com posé p ar IG S -C P à A ngoulêm e
cet ouvrage a été achevé d ’im p rim er en août 2 0 0 9
dans les ateliers de 5P6sr G rafica V eneta S .p.A .
№ d ’é d itio n : 1 5 7 1 6
D épôt légal : octob re 2 0 0 9
Im p rim é en It a lie