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ce que la vie signifie pour moi

Jack London
Traduction de l’anglais par Moea Durieux
Préface de Francis Combes

••••••••••• collection •••••••••••


CE QUE LA VIE SIGNIFIE POUR MOI
Préface

Dans cette « confession d’un enfant du siècle », Jack London ne


s’apitoie pas sur son sort ; il ne se cherche pas des circonstances
atténuantes et ne se plaint pas d’être mal né, en un temps et un lieu
qui auraient été mal choisis par le destin.
Son tempérament n’est pas celui d’un rêveur passif, enclin à la
contemplation et au spleen, mais celui d’un lutteur, voire d’un
bagarreur. C’est qu’il n’est pas venu au monde avec une cuiller
d’argent dans la bouche. « Je suis né dans la classe ouvrière. »
Voilà la première phrase de cette autobiographie morale. Issu des
quartiers populaires de San Francisco, il n’a pas connu une enfance
douillette et surprotégée. Son père, qui était astrologue (mais n’avait
probablement pas lu dans les étoiles l’avenir de son fils), préféra
quitter sa femme plutôt que d’élever ses enfants. Et le jeune garçon
reçut en héritage le nom de son beau-père, London, qui, en anglais,
est aussi le nom de la capitale d’un empire dont il découvrira plus
tard les bas-fonds grouillants et « le peuple des abîmes ».
Depuis l’enfance, Jack London est habitué à se battre. Il sera tour
à tour ouvrier dans une conserverie, chef de bande et pilleur de
parcs à huîtres, garde-côte, chasseur de phoques, chauffeur de
chaudière dans une centrale électrique, concierge et homme de
ménage, étudiant et employé d’une blanchisserie, vagabond,
prisonnier, chercheur d’or (qui, sur la route du Klondike, n’aura pas
trouvé le précieux métal, mais le scorbut)… Et, très tôt, et surtout, il
se révélera un écrivain exceptionnel, capable de transposer dans
ses récits les expériences multiples de sa vie pleine d’action et de
rencontres.
Sans doute, l’une des raisons essentielles de son succès comme
« marchand d’histoires » tient à cette expérience vécue, qui devait
paraître (et paraît toujours) singulièrement captivante et exotique à
ses lecteurs, enfants bien élevés des couches moyennes, jeunes
filles romantiques éprises d’aventures imaginaires et public cultivé…
Jack London fut ainsi, de son vivant, mais après sa mort aussi,
l’objet d’une méprise. Pour la plupart des lecteurs, il reste surtout
l’auteur de L’Appel de la forêt, de Croc-Blanc et de tous ces romans
d’aventure qui lui ont donné une image de Kipling des contrées
sauvages, des étendues enneigées ou des mers du Sud. Ses récits
plus directement politiques étant souvent laissés de côté. Ainsi, en
France, pendant plusieurs décennies, il n’était plus possible de
trouver Le Talon de fer, ce grand roman visionnaire qui a pourtant
joué un rôle de premier plan, non seulement dans la formation des
militants ouvriers américains, mais aussi pour la notoriété
internationale de son auteur.
Quel est donc le sens de la vie pour Jack London ? Quel est son
idéal ? Être un individu exceptionnel, un aventurier héroïque, ou bien
un militant dévoué à la cause commune, qui trouve son bonheur
dans le combat pour une vie meilleure ?
Le bref récit qui suit répond à ces questions. Jack London y
raconte comment, enfant, il rêvait de s’extraire de sa classe et de la
situation misérable qui était la sienne pour accéder à la vie des
hautes sphères, une vie qui lui paraissait enviable, tant pour la chair
que pour l’esprit. Car ce jeune homme a de l’appétit, une véritable
fringale de vivre. Adolescent, il lisait les récits de la Seaside Library,
la « Bibliothèque des Bords de mer », dont il écrira plus tard que
c’était une « curieuse série littéraire, d’un genre à part, destinée à
répandre chez les travailleurs des idées fausses sur la nature des
classes aisées ». Un peu comme la presse people de nos jours…
Et comme bien des jeunes des banlieues d’aujourd’hui, il
s’imaginait que pour grimper les échelons de la société, il fallait,
dans ce monde où règne la vie sauvage et où les hommes « s’entre-
déchirent comme des loups », se montrer le plus fort et savoir se
transformer soi-même en capitaliste, en exploitant et en volant son
prochain. Mais sa carrière dans les affaires lui montra vite qu’à ce
jeu-là les vrais capitalistes sont les plus forts. Et à peine grimpé sur
l’échelle, l’exploiteur en herbe a glissé du premier barreau où il
s’était juché pour retomber aussitôt en dessous de sa classe, parmi
les hobos qui font la route et les mendiants.
Poussant plus loin sa critique de la success story américaine, il
montre non seulement qu’il y a peu de chances de tirer le gros lot,
mais aussi que le jeu n’en vaut pas la chandelle…
La vie des grands est une vie sans grandeur. Une vie sans vie. On
peut y croiser des gens « bien », voire très bien, mais ils ne sont pas
« vivants ». En tout cas, beaucoup moins que les prolétaires qu’il a
connus.
Ayant « réussi » comme « marchand de cerveau », c’est-à-dire
« prolétaire intellectuel », et fréquentant les gens d’en haut, il
découvre que la vie ordinaire des riches n’est pas vraiment enviable.
La vraie vie, celle qui est riche d’aventures, riche d’humanité,
d’héroïsme, la vie « merveilleuse et glorieuse » à laquelle il aspire,
elle se trouve parmi ses compagnons, ouvriers, professeurs,
militants révolutionnaires, épris d’idéalisme moral et portés par leur
foi dans le genre humain.
On a souvent pris Martin Eden pour un roman autobiographique,
pour cette raison qu’il est très largement inspiré de la vie réelle de
son auteur. Mais comme celui-ci l’a indiqué lui-même, Martin Eden
est un « individualiste ». Alors que Jack London est un socialiste
révolutionnaire, un écrivain engagé et un militant, un orateur qui
prend la parole au coin des rues – ce qui le conduit à plusieurs
reprises au poste… En fait, dans Martin Eden, Jack London
l’aventurier entend critiquer l’individualisme. Il veut se démarquer de
la philosophie de Nietzsche, qu’il définit ainsi, dans une note du
Talon de fer : « Philosophe fou du XIXe siècle de l’ère chrétienne, qui
entrevit de fantastiques éclairs de vérité, mais dont la raison, à force
de tourner dans le grand cercle de la pensée humaine, s’enfuit par la
tangente1. »
Contre l’individualisme du héros, qui ne peut conduire qu’à la
solitude et au désespoir (voire au suicide, comme dans le cas de
Martin Eden), Jack London affirme la noblesse de la vie solidaire. Où
l’existence de l’individu prend plus de sens à être reliée à un combat
collectif… Il nomme cela « la conscience de classe », terme
aujourd’hui peu en vogue, même à gauche, où l’on ne jure plus que
par « l’individu »… Il est en effet de bon ton de nos jours de s’en
prendre, avec une belle confusion, à tous les
« communautarismes », mais surtout à ceux qui sont le fait des
« classes dangereuses ».
Il y a peu d’écrivains aujourd’hui pour défendre la valeur humaine
de ce sentiment : la « conscience de classe ». Mais il faut noter en
revanche sa réapparition remarquable dans certains textes de rap et
de chansons, où se reconnaît une jeunesse en rébellion. Les gens
sages et savants auront beau jeu de noter que le récit de Jack
London a quelque chose de volontariste. Il y réécrit sa vie et la
réordonne pour lui donner un sens et en faire une manière de
parabole. Mais le Jack London réel n’a pas échappé à ses
contradictions. Le penseur social avait le goût de l’aventure, le
prolétaire a couru les salons, l’homme d’action a été parfois terrassé
par ses démons, en particulier celui de l’alcool, et l’optimiste
révolutionnaire a aussi connu des moments d’abattement, voire de
désespoir. À la suite de trahisons ou de revers. Par exemple après
l’échec de la révolution russe de 1905, ce qui colorera d’un certain
pessimisme l’écriture du Talon de fer, dans lequel il imagine qu’après
l’échec de la révolution à Chicago, le talon de fer de l’oligarchie (ce
que nous nommerions aujourd’hui la « globalisation ultra-libérale »)
règne sur le monde pendant trois cents ans… Et en 1916 (un an
avant la révolution en Russie), tout comme Martin Eden, Jack
London se suicide, ayant absorbé des pilules de morphine…
Cela n’empêche pas qu’il est l’un de ces rares écrivains (tels
Whitman, Hugo ou Vallès) pour qui l’écriture n’est pas un but en soi,
mais une façon de chercher et de dire le sens même de la vie
individuelle et collective. C’est sans doute aussi pour cela qu’il nous
est si précieux.
Que Jack London ait succombé à ses angoisses n’invalide pas le
sens, pour lui et pour les autres, de son autobiographie.
Même si le boxeur finit par s’effondrer sur le ring, il n’en est pas
moins grand.

FRANCIS COMBES
JE SUIS NÉ DANS LA CLASSE OUVRIÈRE. Très tôt, j’ai découvert l’enthousiasme,
l’ambition, les idéaux ; et les satisfaire devint le problème de mon enfance.
Mon environnement était primitif, dur et fruste. Je ne voyais nul horizon,
seulement de bas en haut. Ma place dans la société était tout en bas. Là, la
vie n’offrait que laideur et misère, aussi bien pour la chair que pour l’esprit.
Car la chair et l’esprit y étaient pareillement affamés et tourmentés.
Au-dessus de moi s’élevait l’édifice colossal de la société, et à mes yeux
la seule façon de m’en sortir était par le haut. Alors, j’ai résolu très tôt
d’escalader cet édifice. Aux étages supérieurs, les hommes portaient des
costumes noirs et des chemises impeccables, les femmes étaient habillées
de robes somptueuses. Il y avait des bonnes choses à manger, et beaucoup.
Ça, c’était pour la chair. Et puis il y avait les choses de l’esprit. Loin au-
dessus de moi, je le savais, régnaient la générosité de l’esprit, la pureté et la
noblesse de la pensée, l’éclat de la vie intellectuelle. Je savais tout cela
parce que j’avais lu les romans de la Seaside Library. À l’exception des
voyous et des aventurières, tous les hommes et les femmes y avaient de
belles pensées, s’exprimaient avec élégance, accomplissaient des actions
glorieuses. Bref, le fait que loin au-dessus de moi se trouvait tout ce qui
était délicat, noble et gracieux, tout ce qui donne décence et dignité à la vie,
tout ce qui la rend digne d’être vécue, tout ce qui récompense chacun de son
labeur et de sa souffrance, me paraissait aussi incontestable que la course du
soleil dans le ciel.
Mais ce n’est pas particulièrement facile pour quelqu’un de s’élever hors
de la classe ouvrière, surtout s’il est handicapé par des idéaux et des
illusions. Je vivais dans un ranch en Californie et je cherchais sans relâche
l’échelle qui me permettrait d’entreprendre mon ascension. Je me
renseignai d’abord sur le taux d’intérêt de l’investissement et je torturai
mon cerveau d’enfant pour tenter de comprendre les vertus et l’excellence
de cette remarquable invention de l’homme : les intérêts composés. D’autre
part, je m’informai des salaires courants pour les ouvriers de tous les âges et
du coût de la vie. De tout cela, je déduisis que si je me mettais
immédiatement à travailler et à économiser jusqu’à l’âge de cinquante ans,
je pourrais alors m’arrêter pour commencer à profiter pleinement des
délices et des bienfaits qui s’offriraient à moi plus haut dans la société. Bien
sûr, j’étais fermement décidé à ne pas me marier, et j’oubliai complètement
de prendre en compte ce désastreux écueil de la classe ouvrière : la maladie.
Cependant, ma vitalité exigeait bien davantage qu’une existence étriquée
d’épargne et de lésine. Si bien qu’à dix ans, je me fis crieur de journaux
dans les rues d’une ville, et je commençai à considérer ce qui se trouvait au-
dessus de moi d’un regard nouveau. Autour de moi, tout était toujours aussi
sordide et misérable, au-dessus de moi s’étendait toujours le même paradis
à conquérir, mais l’échelle sur laquelle je grimpais était différente. C’était
désormais celle des affaires. Pourquoi mettre de l’argent de côté et investir
mes économies dans des fonds gouvernementaux alors qu’en achetant deux
journaux pour cinq cents, je pouvais en un tournemain les revendre dix
cents et doubler ainsi mon capital ? Oui, mon échelle à moi était celle des
affaires, et je me voyais déjà tel un prince du commerce – un prince chauve
couronné de succès.
Que d’illusions ! À seize ans, j’avais bien gagné le titre de « prince ».
Mais il m’avait été donné par une bande de bandits et de voleurs qui
m’appelaient le « Prince des pilleurs d’huîtres ». À ce moment-là, j’avais
gravi le premier barreau de l’échelle des affaires. J’étais un capitaliste. Je
possédais un bateau et l’équipement complet du pilleur d’huîtres. J’avais
commencé à exploiter mes semblables. Je possédais un homme d’équipage.
En tant que capitaine et propriétaire, je prenais les deux tiers du butin et j’en
donnais un tiers à l’équipage. Pourtant, l’équipage travaillait aussi dur que
moi et risquait sa vie et sa liberté tout autant que moi.
Je ne montai pas plus haut sur l’échelle des affaires. Une nuit, je menai un
raid contre des pêcheurs chinois. Les cordages et les filets valaient des mille
et des cents. C’était du vol, je le reconnais, mais tel est précisément l’esprit
du capitalisme. Le capitaliste s’empare des possessions de ses semblables
au moyen du rabais, ou de l’abus de confiance, ou en corrompant sénateurs
et juges de la Cour suprême. J’étais simplement plus brutal. C’était la seule
différence. J’utilisais un revolver.
Mais, cette nuit-là, mon équipage était composé de l’un de ces
incompétents contre lesquels le capitaliste a l’habitude de fulminer parce
que, à la vérité, ils augmentent les dépenses ou réduisent les dividendes.
Mon équipage fit les deux. Par négligence, il mit le feu à la grand-voile, qui
fut entièrement détruite. Cette nuit-là, il n’y eut pas de dividendes, et les
pêcheurs chinois s’enrichirent des filets et des cordages que nous n’avions
pas pris. J’étais en faillite, incapable alors d’acheter une nouvelle grand-
voile à soixante-cinq dollars. Je laissai donc mon bateau à l’ancre et
m’embarquai sur un bateau pirate de la baie pour un raid sur la rivière
Sacramento. Pendant mon absence, un autre gang de pirates de la baie
s’attaqua à mon bateau. Ils le dépouillèrent de tout, même de ses ancres.
Plus tard, je récupérai sa carcasse à la dérive et la vendis vingt dollars.
J’avais glissé de l’unique barreau que j’avais réussi à gravir, et jamais plus
je n’empruntai l’échelle des affaires.
Dès lors, je fus exploité sans pitié par d’autres capitalistes. J’avais les
muscles, ils en tiraient de l’argent, et moi à peine de quoi vivre. J’ai été
matelot de gaillard d’avant, débardeur, manœuvre. J’ai travaillé dans des
conserveries, des usines, des blanchisseries. J’ai tondu les pelouses, nettoyé
les tapis, lavé les vitres. Et jamais je n’ai obtenu le produit intégral de mon
labeur. Je regardais la fille du propriétaire de la conserverie passer dans sa
voiture, et je savais que c’étaient mes muscles qui, en partie, faisaient rouler
cette voiture sur ses pneus de caoutchouc. Je regardais le fils du propriétaire
de l’usine se rendre à l’université, et je savais que c’étaient mes muscles
qui, en partie, lui permettaient de se payer du vin et du bon temps avec ses
copains.
Cependant, je n’éprouvais aucune amertume. Tout cela faisait partie du
jeu. C’étaient eux les puissants. Très bien, moi aussi j’étais puissant. Je me
fraierais un chemin pour prendre place parmi eux et gagnerais de l’argent
grâce aux muscles des autres. Le travail ne me faisait pas peur. J’aimais
travailler dur. Je relèverais mes manches, je travaillerais plus dur que
jamais, et je finirais par devenir un pilier de la société.
Juste à ce moment-là, comme si la chance me souriait, je rencontrai un
patron qui était dans le même état d’esprit. Je désirais travailler, il désirait
encore plus que je travaille. Je pensais apprendre un métier. En réalité, il
avait viré deux hommes pour me mettre à leur place. Je pensais qu’il ferait
de moi un électricien. En fait, il gagnait cinquante dollars par mois sur mon
dos. Les deux hommes que je remplaçais touchaient chacun quarante
dollars par mois, je faisais le travail de ces types pour trente.
Ce patron me tua presque à la tâche. Un homme peut aimer les huîtres,
mais s’il en mange trop, il en sera dégoûté. C’est ce qui m’arriva. Trop de
travail m’écœura. Je ne voulais plus entendre parler de travail. Je tournai le
dos au travail. Je devins un vagabond, mendiant de porte en porte de quoi
continuer mon chemin. Je sillonnai les États-Unis de long en large, suant
sang et eau dans des taudis et des prisons.
J’étais né dans la classe ouvrière et je me retrouvais, à dix-huit ans, sous
mon point de départ. J’étais au fond, dans la cave de la société, au fond,
dans les profondeurs souterraines de la misère dont il est ni plaisant ni
convenable de parler. J’étais dans le trou, dans les abîmes, dans la fosse
d’aisance humaine, dans les abattoirs et le charnier de notre civilisation.
C’est la partie de l’édifice de la société que la société a décidé d’ignorer. Le
manque de place m’oblige ici à l’ignorer aussi, et je dirai seulement que ce
que j’ai vu là m’a causé une peur terrible.
J’avais peur de penser. Je voyais les principes crus de la civilisation
compliquée dans laquelle je vivais. La vie était affaire de nourriture et
d’abri. Pour trouver nourriture et abri, les hommes vendaient des choses. Le
marchand de chaussures vendait des chaussures, le politicien vendait son
expérience, le représentant du peuple, à quelques exceptions près bien sûr,
vendait la confiance qu’on lui portait ; presque tous vendaient leur honneur.
Pareil pour les femmes qui, sur le trottoir comme dans les liens sacrés du
mariage, avaient tendance à vendre leur chair. Tout était marchandise. Tout
le monde achetait et vendait. La seule marchandise que le travailleur avait à
vendre était ses muscles. L’honneur du travailleur n’était pas coté sur le
marché du travail. Le travailleur avait des muscles à vendre, rien que des
muscles.
Mais il y avait une différence, une différence vitale. Les chaussures, la
confiance, l’honneur pouvaient se renouveler. Il y en avait des stocks
inépuisables. Les muscles, eux, ne se renouvelaient pas. Au fur et à mesure
que le marchand de chaussures vendait des chaussures, il reconstituait son
stock. Mais il n’y avait aucun moyen de renouveler le stock de muscles du
travailleur. Plus il en vendait, moins il lui en restait. C’était sa seule
marchandise, et chaque jour son stock diminuait. Finalement, s’il ne
mourait pas avant, il n’avait plus rien à vendre et fermait boutique. Il avait
fait faillite, et il ne restait plus à ce failli du muscle qu’à descendre dans la
cave de la société et à y périr misérablement.
Je découvris ensuite que le cerveau était une marchandise comme les
autres. Mais lui aussi était différent du muscle. Un vendeur de cerveau, à
cinquante ou soixante ans, était dans la fleur de l’âge et son salaire au plus
haut. Alors qu’un travailleur se retrouvait lessivé ou hors service à
quarante-cinq, cinquante ans. J’avais été dans la cave de la société et je
n’aimais pas y habiter. Les tuyaux, les canalisations y étaient en mauvais
état, et malsain l’air qu’on y respirait. Si je ne pouvais pas vivre à l’étage
noble de la société, je pouvais au moins faire un essai au grenier. Là, il est
vrai, c’était la portion congrue, mais au moins l’air était pur. Je décidai donc
de ne plus vendre de muscles et de devenir marchand de cerveau.
Alors commença une poursuite frénétique du savoir. Je retournai en
Californie et j’ouvris des livres. Tandis que je me préparais ainsi à devenir
marchand de cerveau, il était inévitable que je me mette à fouiller du côté
de la sociologie. Je trouvai là, dans une certaine catégorie d’ouvrages et
formulés de façon scientifique, les concepts sociologiques simples que
j’avais déjà forgés pour moi-même. Avant ma naissance, d’autres esprits
plus grands que le mien avaient découvert tout ce que j’avais pensé, et bien
plus encore. Je compris que j’étais socialiste.
Les socialistes étaient révolutionnaires : ils luttaient pour renverser la
société d’aujourd’hui afin de construire sur ces ruines la société de demain.
Moi aussi, j’étais socialiste et révolutionnaire. Je rejoignis les groupes
d’ouvriers et d’intellectuels révolutionnaires, et entrai pour la première fois
dans la vie intellectuelle. Là, je rencontrai des intelligences percutantes et
des esprits brillants : des membres de la classe ouvrière qui, en plus de leurs
mains calleuses, avaient une tête solide et alerte ; des prédicateurs
défroqués au christianisme trop ouvert pour faire partie d’une quelconque
congrégation d’adorateurs de Mammon ; des professeurs brisés par
l’asservissement de l’université à la classe dirigeante, exclus pour avoir
tenté un peu vite de mettre leur connaissance au service des affaires
humaines.
Là, je trouvai aussi une foi absolue dans l’humain, un idéalisme
rayonnant, les douceurs de la générosité, du renoncement et du martyre –
tout ce qu’il y a de splendide et de stimulant pour l’esprit. Là, la vie était
propre, noble et animée. Là, la vie se réhabilitait, devenait merveilleuse et
glorieuse ; et j’étais heureux d’être vivant. J’étais en contact avec des âmes
nobles qui plaçaient la chair et l’esprit bien au-dessus des dollars et des
cents, et pour qui le gémissement ténu d’un enfant affamé des bas quartiers
avait plus d’importance que tout le faste et l’ambition de l’expansion
commerciale et de la suprématie mondiale. Tout autour de moi, il n’était
question que de la noblesse de la cause et de l’héroïsme de l’effort, et mes
jours et mes nuits étaient lumière du soleil et des étoiles, feu et rosée. Et
devant mes yeux, à jamais brûlant et flamboyant, se tenait le Saint-Graal, le
Graal du Christ, l’humanité chaleureuse, depuis si longtemps souffrante et
maltraitée, qu’il fallait secourir et finalement sauver.
Et moi, pauvre idiot, je me disais que tout cela n’était qu’un avant-goût
des délices que je trouverais plus haut dans la société. J’avais perdu bien
des illusions depuis l’époque où je lisais les romans de la Seaside Library
dans un ranch de Californie. Il était écrit que j’allais perdre beaucoup de
celles qui me restaient.
Comme marchand de cerveau, j’eus pas mal de succès. La société
m’ouvrit ses portes. J’entrai directement à l’étage du salon, et mes
désillusions gagnèrent rapidement du terrain. Je dînai à la table des maîtres
de la société, avec les épouses et les filles des maîtres de la société. Les
femmes étaient magnifiquement habillées, j’en conviens ; mais je fus
naïvement surpris de m’apercevoir qu’elles étaient faites de la même argile
que toutes les autres femmes que j’avais connues au fond de la cave. « La
femme du colonel et Judy O’Grady sont sœurs sous leurs peaux* » – et sous
leurs robes.
Toutefois, ce fut leur matérialisme qui me choqua le plus. Certes, ces
femmes magnifiques, magnifiquement habillées, papotaient à propos
d’adorables petits idéaux et de chers petits principes moraux ; mais, malgré
leurs papotages, la clé de voûte de leur vie était matérialiste. Et elles étaient
si sentimentalement égoïstes ! Elles participaient à toutes sortes d’adorables
petites œuvres de charité et le faisaient savoir à tout le monde, alors que la
nourriture qu’elles mangeaient, les magnifiques robes qu’elles portaient
étaient payées avec des dividendes tachés par le sang du travail des enfants,
par la sueur du travail, par la prostitution elle-même. Quand je mentionnais
ces faits, naïvement persuadé que ces sœurs de Judy O’Grady se
dépouilleraient sur-le-champ de leurs soieries teintes de sang et de leurs
bijoux, elles s’énervaient, se mettaient en colère, et me lisaient des prêches
sur le manque d’esprit d’économie, la boisson et la dépravation innée qui
étaient cause de toute la misère dans la cave de la société. Lorsque je
répondais que je ne voyais pas très bien comment le manque d’esprit
d’économie, l’intempérance et la dépravation faisaient travailler un enfant
de six ans à moitié affamé douze heures chaque nuit dans une filature du
Sud, ces sœurs de Judy O’Grady s’attaquaient à ma vie privée et me
traitaient d’« agitateur » – comme si, en vérité, cela mettait un point final à
la discussion.
Je ne m’en suis pas mieux sorti avec les maîtres eux-mêmes. Je m’étais
attendu à trouver des hommes propres, nobles et vivants, dont les idéaux
seraient propres, nobles et vivants. Je me suis retrouvé au milieu d’hommes
assis sur les plus hautes marches de la société – les prédicateurs, les
politiciens, les hommes d’affaires, les professeurs, les hommes de presse.
J’ai mangé de la viande avec eux, j’ai bu du vin avec eux, je me suis baladé
en voiture avec eux, et je les ai étudiés. C’est vrai, j’en ai trouvé beaucoup
qui étaient propres et nobles, mais, à de rares exceptions près, ils n’étaient
pas VIVANTS. Et je crois vraiment que je pourrais compter ces exceptions sur
les doigts des deux mains. Ceux qui ne tiraient pas leur vitalité de la
pourriture, leur vivacité d’une vie malpropre, ressemblaient à des morts non
enterrés – propres et nobles comme des momies bien préservées, mais pas
vivants. Dans cette catégorie des morts vivants, je fais une place d’honneur
aux professeurs que j’ai rencontrés, des hommes qui s’en remettaient à cet
idéal universitaire décadent qu’est « la poursuite sans passion de
l’intelligence sans passion ».
J’ai rencontré des hommes qui invoquaient le nom du prince de la Paix
dans leurs diatribes contre la guerre, et qui mettaient des fusils dans les
mains de détectives privés afin qu’ils abattent les grévistes dans leurs
propres usines. J’ai rencontré des hommes bouleversés d’indignation par la
brutalité des matches de boxe et qui, en même temps, étaient complices du
frelatage des aliments tuant chaque année plus de bébés que le sanguinaire
Hérode lui-même.
J’ai parlé avec des capitaines d’industrie dans des hôtels, des clubs, des
maisons particulières, des compartiments de chemin de fer, sur des ponts de
paquebot, et j’ai été ébahi du peu de chemin qu’ils avaient parcouru dans le
royaume de l’esprit. En revanche, j’ai découvert que, dans le domaine des
affaires, leur esprit était anormalement développé. J’ai découvert aussi que,
dès qu’il s’agissait d’affaires, leur moralité était nulle.
Tel gentleman aux traits délicats et à l’allure aristocratique était un
directeur bidon, au service de compagnies qui volaient secrètement les
veuves et les orphelins. Tel autre, collectionneur d’éditions rares et mécène
remarquable de la littérature, cédait au chantage d’un chef de service
municipal à la mâchoire lourde et aux noirs sourcils. Tel homme de presse,
qui publiait dans son journal des réclames pour des spécialités
pharmaceutiques et n’osait pas imprimer la vérité sur ces produits par peur
de perdre une ressource publicitaire, me traita de gredin démagogue quand
je lui dis que sa politique économique datait de l’antiquité et sa biologie de
Pline.
Tel sénateur était l’instrument, l’esclave, la petite marionnette du chef
grossier et sans éducation d’un parti politique ; il en était de même de tel
gouverneur et de tel juge de la Cour suprême ; et tous trois voyageaient en
train avec des billets gratuits. Tel homme, qui parlait sobrement et
honnêtement des beautés de l’idéalisme et de la bonté de Dieu, venait de
trahir ses camarades dans la conclusion d’une affaire. Tel autre, pilier de
l’Église et soutien important des missions étrangères, faisait trimer ses
vendeuses dix heures par jour pour un salaire de misère et, de ce fait,
encourageait directement la prostitution. Tel autre encore, qui
subventionnait des chaires dans les universités, se parjura devant les
tribunaux pour une poignée de dollars. Et tel magnat des chemins de fer
trahit sa parole de gentleman et de chrétien lorsqu’il accorda une remise
secrète à l’un des deux capitaines d’industrie qu’il savait engagés dans une
lutte à mort.
C’était partout la même chose : crime et trahison, trahison et crime – des
hommes qui étaient vivants, mais ni propres ni nobles, des hommes qui
étaient propres et nobles, mais pas vivants. Au milieu, une grande masse
désespérante, ni noble ni vivante, mais simplement propre. Elle ne péchait
ni activement ni délibérément, mais par passivité et ignorance, en acceptant
l’immoralité ambiante dont elle tirait profit. Si elle avait été noble et
vivante, elle n’aurait pas été ignorante, et elle aurait refusé de partager les
profits de la trahison et du crime.
Je découvris que je n’aimais pas vivre à l’étage du salon de la société.
Intellectuellement, je m’y ennuyais. Moralement et spirituellement, cela me
rendait malade. Je me rappelai mes intellectuels et mes idéalistes, mes
prédicateurs défroqués, mes professeurs brisés, et les ouvriers avec leur
esprit propre et leur conscience de classe. Je me rappelai mes jours et mes
nuits sous la lumière du soleil et des étoiles, là où la vie tout entière était
une merveille sauvage et douce, un paradis spirituel d’aventure généreuse et
de romance éthique. Et j’aperçus devant moi, toujours brûlant et
flamboyant, le Saint-Graal.
Ainsi suis-je retourné à la classe ouvrière dans laquelle je suis né et à
laquelle j’appartiens. Je n’ai plus envie de monter. L’imposant édifice de la
société qui se dresse au-dessus de ma tête ne recèle plus aucun délice à mes
yeux. Ce sont les fondations de l’édifice qui m’intéressent. Je suis content
d’y travailler, la barre à mine à la main, épaule contre épaule avec les
intellectuels, les idéalistes et les ouvriers qui ont une conscience de classe –
et nous donnons de temps en temps un bon coup de cette barre à mine pour
ébranler tout l’édifice. Un jour, lorsque nous aurons un peu plus de bras et
de barres à mine, nous le renverserons, lui et toute sa pourriture et ses morts
non enterrés, son monstrueux égoïsme et son matérialisme abruti. Puis nous
nettoierons la cave et construirons une nouvelle habitation pour l’humanité.
Là, il n’y aura pas de salon, toutes les pièces seront lumineuses et aérées, et
l’air qu’on y respirera sera propre, noble et vivant.
Telle est ma vision. J’aspire à un temps où l’homme aura une perspective
plus haute et plus vaste que son ventre. Un temps où l’homme sera poussé
par un stimulant plus intéressant que le stimulant d’aujourd’hui, qui est
celui de son ventre. Je conserve ma foi en la noblesse et l’excellence de
l’être humain. Je crois que la douceur spirituelle et la générosité finiront par
avoir raison de la grossière gloutonnerie actuelle. Et, pour conclure, ma foi
va à la classe ouvrière. Comme le disait un Français : « L’escalier du temps
résonne à jamais du bruit des sabots qui montent et de celui des souliers
cirés qui descendent. »
NEWTON, IOWA, NOVEMBRE 1905
Biographie

LE 12 JANVIER 1876, à San Francisco, Flora Wellmann donne naissance


à un garçon. Le père, William Chaney, qui ne voulait pas d’enfant,
disparaît. Flora tente alors de se suicider. En septembre de la même
année, elle épouse John London, un veuf, père de deux enfants.
Celui-ci donne son nom au fils de Flora, qui devient Jack London.
Entre 1876 et 1889, la famille déménage à plusieurs reprises
autour de la baie de San Francisco. Flora est spirite, enseigne le
piano, John travaille la terre. Jack se passionne très vite pour les
livres. Ina Coolbrith, la bibliothécaire d’Oakland, guide ses premiers
pas de lecteur.
Mais l’argent manque dans la famille London. Jack quitte l’école en
1890. Pour aider ses parents, il travaille douze heures par jour dans
une conserverie. Puis, il enchaîne petit boulot sur petit boulot. Il
traîne régulièrement dans le port d’Oakland et découvre l’alcool. En
1891, il emprunte de l’argent à Mammie Jennie, sa nourrice noire,
pour acheter son premier bateau, le Razzle Dazzle. Jack London se
fait alors pilleur d’huîtres dans la baie de San Francisco. Mais son
embarcation brûle en 1892 et London s’engage alors dans une
patrouille de pêche.
Jack embarque en 1893 sur le Sophia Sutherland pour une
campagne de chasse aux phoques. Huit mois de voyage qui le
mènent à Hawaii, au Japon et dans la mer de Béring. Cette
expérience lui permet d’écrire son premier texte – Un typhon au
large du Japon–, grâce auquel il gagne le concours de rédaction du
San Francisco Call. Puis le nouvel écrivain travaille dans une
centrale électrique, avant de rejoindre, en 1894, « l’armée
industrielle des chômeurs » dans sa marche protestataire vers
Washington. Mais cette marche collective ne lui convient pas : il
préfère voyager seul. Ce qui lui vaut d’être arrêté à Niagara Falls
pour vagabondage et d’écoper d’un mois de prison.
Jack rentre à Oakland. En 1895, il décide de préparer l’entrée à
l’université de Berkeley : en un an, il assimile tout le programme du
secondaire et de l’examen d’entrée. Dans le même temps, il publie
son premier texte politique : Pessimisme, optimisme et patriotisme,
et devient membre du Socialist Labor Party. En 1897, il est admis à
Berkeley – qu’il décide de quitter au bout de trois mois. Après
quelques semaines de travail dans une blanchisserie, il embarque
en juillet 1897 pour le Klondike. C’est le début de la ruée vers l’or.
London n’en trouve pas. En revanche, il attrape le scorbut et est
rapatrié au printemps 1898. Cette expérience dans le Grand Nord,
parmi les chercheurs d’or, les trappeurs et les Indiens, le pousse à
écrire de nouveau. Huit récits sont publiés dans The Overland
Monthly. En 1900, il connaît le succès avec son premier livre, Le Fils
du loup, et se marie avec Elisabeth Maddern dont il aura deux filles.
En 1901, il est le candidat des démocrates socialistes à la mairie
d’Oakland : il ne récolte que deux cent quarante-cinq voix.
Jack London s’embarque en 1902 pour l’Angleterre, où il passe
deux mois dans les bas-fonds de Londres parmi les pauvres, les
sans-logis, les chômeurs, les déclassés de toutes sortes. De cette
descente aux enfers, il fait un livre : Le Peuple de l’abîme, intitulé
aussi Le Peuple d’en bas.
En 1903, il tombe amoureux de Charmian Kittrege et quitte sa
femme. S’ensuit une période de dépression, puis l’achat d’un second
bateau, le Spray, avec lequel il tire des bords dans la baie de San
Francisco. Il publie L’Appel de la forêt (ou L’Appel sauvage), qui
rencontre un énorme succès (six millions d’exemplaires vendus), et
écrit Le Loup des mers, qui paraîtra l’année suivante.
En 1904, Jack part pour la Corée comme correspondant de guerre
pour couvrir le conflit russo-japonais. Il soutient les révolutionnaires
russes et est expulsé par les Japonais.
De retour aux États-Unis, il organise de nombreuses conférences
pour défendre le socialisme. En 1905, nouvelle défaite électorale
pour l’écrivain. La même année, il épouse Charmian, achète un
ranch à Glen Ellen, en Californie, et publie La Guerre des classes et
Patrouille de pêche. Il travaille à Croc-Blanc, qui aura aussi un
immense succès.
Jack et Charmian partent l’année suivante en voyage de noces en
Jamaïque et à Cuba. À leur retour, Jack London reprend son
engagement politique. Puis il met en train la construction du Snark –
hommage à Lewis Carroll –, un voilier avec lequel il souhaite réaliser
un tour du monde de plusieurs années.
Le Snark est mis à l’eau en 1907. Jack et Charmian font route vers
Hawaii, puis s’arrêtent aux Marquises et à Tahiti. Quelques mois plus
tard, ils découvrent les Samoa, les Fidji, les Salomon. Mais Jack
tombe malade : il est hospitalisé à Sydney. Il y vend son voilier. Le
rêve, qui a manqué devenir cauchemar, est terminé. En juillet 1909,
c’est le retour aux États-Unis, la réinstallation à Glen Ellen et la
publication de Martin Eden.
Jack London agrandit son ranch et se lance dans l’agriculture et
l’élevage. Il entreprend la construction de la demeure dont il rêve
depuis longtemps : la Maison du Loup.
Ce qui ne l’empêche pas de continuer de boire toujours autant, de
continuer de courir après l’argent qui fait toujours défaut et d’écrire
ses mille mots quotidiens. Son recueil de textes politiques,
Révolution et autres essais, est édité.
En 1911, il prend parti pour la Révolution mexicaine. Puis, pendant
trois mois et en compagnie de Charmian, il sillonne l’Oregon. En
1912, les London se rendent à New York, avant de s’embarquer à
Baltimore sur le Dirgo, qui les mène jusqu’à Seattle en passant par
le cap Horn.
En 1913, quelques jours avant la fin des travaux à Glen Ellen, un
mystérieux incendie détruit complètement la Maison du Loup. Le
choc est rude : plus de demeure de rêve, mais, en revanche, des
dettes innombrables. John Barleycorn, son « autobiographie
d’alcoolique » comme il la définit lui-même, est publiée cette année-
là.
En 1914, Jack part pour Mexico. Il y est le correspondant du
magazine Collier’s et couvre l’intervention américaine à Veracruz. En
1915, après deux longs séjours à Hawaii en compagnie de
Charmian, il s’installe à nouveau à Glen Ellen. L’année suivante,
Jack démissionne du Socialist Labor Party, qu’il trouve trop timoré.
Le 22 novembre 1916, il meurt d’une crise d’urémie après avoir
absorbé une forte dose de morphine.

MOEA DURIEUX
1. Le Talon de fer, Éditions Le Temps des Cerises, 1999.
DANS LA MÊME COLLECTION :

Tendres rumeurs, Dominique Sigaud


Une histoire de tempête, Hubert Mingarelli
Depuis qu’elle est morte elle va beaucoup mieux, Franz Bartelt
Bon qu'à ça, Jirí Kylián
Sous-titres, Anton Corbijn
DU MÊME AUTEUR CHEZ LE MÊME ÉDITEUR :

Quiconque nourrit un homme est son maître


Construire une maison
L’Invasion sans pareille
© Les Éditions du Sonneur, 2015
Collection dirigée par Martine Laval

ISBN : 978-2-37385-019-2

Conception graphique de la couverture et de l'epub : Sandrine Duvillier

Les Éditions du Sonneur


5, rue Saint-Romain, 75006 Paris
www.editionsdusonneur.com

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