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Le cadre juridique embryonnaire du


capital-investissement dans l'espace
OHADA
La création récente d'associations de capital-investissement en Afrique
de l'ouest (A2IC en Côte d'Ivoire, projet au Sénégal) et du Club Afrique de
l'Association Française des Investisseurs en Capital (AFIC), témoignent
de l'intérêt et du potentiel du capital-investissement en Afrique
francophone subsaharienne. Dès lors, il apparaît essentiel de
s'interroger sur l'aptitude du droit OHADA, à répondre aux besoins du
capital-investissement, au regard de sa mission première de garantir la
sécurité juridique des investissements.

Neil Robertson, associé et Astrid Dessi-Foulon, avocat du cabinet Bignon Lebray


24 Nov 2017, 15:49
:
Astrid Dessi-Foulon, avocat du cabinet Bignon Lebray et Neil Robertson, associé. (Crédits : DR)

Le secteur bancaire ne peut actuellement pas faire face en Afrique aux besoins
en financement croissant des micros, petites et moyennes entreprises (MPME)
du continent. A cela, deux raisons parmi d'autres : un faible taux de bancarisation
(entre 5% et 15%) et une prégnance du secteur informel conjuguée à un
environnement des affaires compliqué. Le capital-investissement apparaît dans
ce contexte comme un mode alternatif de financement de ces entreprises
africaines.

Le capital-investissement en Afrique
subsaharienne
Le métier de capital-investisseur en Afrique est apparu à la fin des années 80 en
Afrique du Sud et au Maroc au début des années 90. En Afrique subsaharienne
francophone, il est encore plus récent et s'appuie sur des investisseurs
institutionnels (BAD, CDC Group, BEI...) et privés (Helios, ECP, I&P...), intéressés
par les taux de croissance élevés de certaines économies africaines favorisant
l'émergence de classes moyennes urbaines, et par un regain d'attractivité de
marchés vus comme pré-émergents.

Bien que multisectorielle, la pratique du capital-investissement dans la plupart


des pays reste limitée au capital-développement s'adressant aux PME bien
établies ou aux grandes entreprises. Les risques restent réputés plus élevés que
les gains.
:
Dès lors, est née une nouvelle forme de capital-investissement, l'« investissement
d'impact » qui vise à financer des projets d'entreprises sociales « ODD orientés »
(du nom des objectifs de développement durable de l'Agenda 2030 des Nations-
Unies) dans des domaines comme la santé, l'éducation ou l'environnement,
cherchant à obtenir un impact social et/ou environnemental en plus d'un retour
sur investissement. Là encore, malgré la volonté des principaux investisseurs
d'impact (fondations et institutions financières diversifiées -IFD-) d'augmenter
leurs investissements dans la région de l'Afrique subsaharienne, l'investissement
d'impact s'adresse marginalement aux petites entreprises et se concentre sur les
pays d'Afrique subsaharienne anglophone.

Un cadre juridique encouragé par les unions


monétaires
Pour pallier ces réticences, il est nécessaire que les pays membres de l'OHADA
créent un environnement juridique et fiscal incitatif pour le capital-investissement,
sous toutes ses formes.

L'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) composée


uniquement de pays membres de l'OHADA a adopté, en 2006, une loi uniforme
relative aux entreprises d'investissement à capital fixe et édicté en 2011 une
directive pour un traitement fiscal de faveur, exonérant ces sociétés d'impôts de
droits et de taxes lors de leur constitution et de leur dissolution ou pour leurs
opérations de modification du capital. Cette loi uniforme a pour objet la
promotion des entreprises d'investissement à capital fixe qui ont un impact
majeur sur la création, le développement ou le redressement des petites et
moyennes entreprises et des sociétés non cotées en bourse.

A ce jour, seuls le Bénin, le Sénégal, le Togo, le Burkina Faso et le Mali ont


transposé en droit interne les dispositions de la loi uniforme de l'UEMOA et/ou de
la directive. Dans les autres états membres de l'UEMOA, comme la Côte d'Ivoire,
les textes applicables au capital-investissement découlent de la loi uniforme de
l'UEMOA portant réglementation bancaire ou de l'acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUSDGIE).

Il apparaît aujourd'hui nécessaire, pour le développement du capital-


investissement dans l'espace OHADA, que les états membres de l'organisation
élaborent des dispositions communes homogènes sur les structures et l'activité
:
de capital-investissement afin d'encourager ce nouveau métier pour lequel les
expertises locales sont peu nombreuses.

Pourquoi ne pas adopter un acte uniforme relatif au capital-investissement et à


ses structures juridiques, en se préservant toutefois de la multiplication des
véhicules d'investissement qu'on observe ailleurs dans l'espace francophone,
notamment en France ?

Cet acte uniforme relatif au capital-investissement d'application direct et


obligatoire permettra, à l'instar des actes uniformes découlant du Traité OHADA,
de gagner la confiance des investisseurs en capital et s'attèlera à compléter les
insuffisances de la loi uniforme de l'UEMOA. Il s'agirait notamment de prévoir des
modalités de gestion et de contrôle propres aux sociétés de capital-
investissement et de permettre leur constitution sous forme de société par action
simplifiée, désormais prévue par l'AUSDGIE et privilégiée pour la souplesse de son
fonctionnement.

L'encadrement des prises de participation par le


droit OHADA
Dans l'attente de la transposition des lois uniformes sur les entreprises
d'investissement à capital fixe ou d'un acte uniforme relatif au capital-
investissement, les modalités juridiques de l'opération d'investissement sont
relativement encadrées par l'AUSDGIE dans sa nouvelle mouture.

En effet, l'AUSDGIE révisé le 30 janvier 2014, présente une réelle opportunité pour
les investisseurs et contribue au développement du capital-investissement dans
la zone OHADA.

Rappelons que toute prise de participation par le capital-investisseur est


précédée de la collecte d'informations sur la société cible dans le cadre de l'audit
d'acquisition ou due diligence, permettant de mieux connaître la cible, de limiter
les risques de l'investissement et de négocier les garanties. Cette étape cruciale
va être facilitée, au moins pour les due diligences juridiques et financières, grâce
à l'informatisation du RCCM qui permettra de recueillir des informations sincères
et sécurisées. Cette innovation est en cours et a été mise en place à ce jour dans
certains pays de l'espace OHADA, tels que le Mali, le Burkina Faso, la Guinée
Bissau et le Congo.
:
Concernant la prise de participation, celle-ci peut être réalisée par la détention de
valeurs mobilières offrant un accès immédiat ou différé au capital de la société
financée.

S'inspirant du modèle français qui a abandonné les actions de priorité en 2004,


l'OHADA à introduit la possibilité d'émettre des actions de préférence à côté des
actions ordinaires, qui peuvent être mises en place lors de la constitution de la
société, ce qui est encourageant pour le capital-risque, ou en cours d'existence
lors d'une augmentation de capital. De plus, des droits de toute nature attachés
aux actions de préférence peuvent être statutairement aménagés (droits de vote
double ou droit à dividende prioritaire) ; les actions pouvant être émises avec ou
sans droit de vote, simple ou double, à titre permanent ou temporaire.

L'AUSGIE révisé prévoit également l'émission par les sociétés par actions de
valeurs mobilières donnant accès à terme au capital, sous quelle que forme que
ce soit, qui peuvent être utilisées pour récompenser le risque pris par le capital-
investisseur en lui conférant le droit d'acquérir ultérieurement des titres. En outre,
et en plus des actions gratuites également introduites par la réforme de l'AUSGIE,
le capital-investisseur aura le loisir d'utiliser des valeurs mobilières composées
pour inciter les managers de la société financée. Il peut s'agir d'actions à bons de
souscription d'actions ordinaires ou de préférence (ABSA) pour l'investisseur ou
de bons de souscription d'actions (BSA) pour les managers. Il s'agit là pour les
investisseurs d'un réel atout qui leur permet d'attirer des professionnels qualifiés
dans la société financée quand l'intéressement des salariés n'est pas assez ancré
dans la culture des entreprises africaines.

Enfin, les capital-investisseurs dans l'espace OHADA trouveront dans la société


par actions simplifiée l'opportunité d'aménager librement, par exemple, le
fonctionnement de la société financée, d'encadrer les décisions importantes qui
ne pourront être prises sans leur accord, se protégeant ainsi de tout abus de
majorité et des risques de mauvaise gestion. Si pour d'autres raisons ils optaient
pour une autre forme de société, leurs relations avec les associés historiques ou
l'entrepreneur pourront être aménagées au sein d'un pacte d'actionnaires dont la
validité est consacrée par l'article 2.1 de l'AUSGIE. Ce pacte ne pourra toutefois
pas déroger aux dispositions impératives de l'AUSGIE.

Neil Robertson, associé et Astrid Dessi-Foulon, avocat du cabinet Bignon Lebray


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