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Le plurilinguisme en Algérie

KHERRA NAWEL
Résumé

La mondialisation des échanges économiques, l'évolution technologique et la mobilité


académique amènent de plus en plus les universitaires à communiquer à l'échelle planétaire, à
échanger avec les interlocuteurs issus de contextes linguistiques et socioculturels variés. Dans la
visée de répondre à la demande économique et sociale du marché du travail en termes de
compétences et à favoriser l'adaptation à l'environnement international, le ministère de
l'enseignement supérieure et de la recherche scientifique en Algérie a mis en place de nouvelles
réformes qui ciblent le domaine de l'enseignement linguistique. Cette réforme place au cœur de
l'institution la nécessité du développement et renforcement des stratégies d'acquisition des
langues étrangères ; en l’occurrence la langue français, qui est la langue véhiculaire de
l'enseignement de toutes les disciplines scientifiques et techniques et qui constitue une
compétence très importante, dans la mesure où elle se présente non seulement comme un outil
favorable à la compréhension du monde environnant, mais aussi un outil indispensable pour
l'accès aux informations et aux savoirs scientifiques et techniques, sous de nouvelles formes et de
nouveaux objectifs dans un milieu plurilingue. Nous tenterons lors de cette communication, de
tracer politique linguistique de l'Algérie face aux nouvelles exigences scientifiques et socio-
économiques. Mais aussi ; à partit d’une étude empirique menée au près des étudiants de la
faculté des sciences de l’ingénieur, montrer à quel point la maîtrise de la langue française est
indispensable pour la bonne transmission et acquisition des savoirs scientifiques et techniques au
niveau universitaire algérien.
Summary

The globalization of trade, technological and academic mobility lead more and more scholars to
communicate globally, to interact with interlocutors from diverse cultural and linguistic contexts.
In aiming to meet the economic and social demands of the labor market in terms of skills and to
promote adaptation to the international environment, the Ministry of Higher Education and
Scientific Research in Algeria has implemented new reforms that target the field of language
teaching. The reform at the heart of the institution the need for development and strengthening
strategies for acquiring foreign languages in this case the French language, which is the language
of instruction in all scientific and technical disciplines and is a very important skill, since it
presents itself not only as a tool conducive to understanding the surrounding world, but also an
indispensable tool for accessing information and scientific and technical knowledge, new forms
and new goals in a multilingual environment. We will try in this paper, trace language policy of
Algeria meet new demands scientific and socio-economic. But also, to set an empirical study
conducted by students of a Faculty of Engineering Science, shown how the mastery of French is
essential for the effective transmission and acquisition of scientific and technical level Algerian
university.
Riassunto

La globalizzazione degli scambi, la mobilità tecnologica e accademica condurre gli studiosi


sempre più per comunicare a livello globale, di interagire con interlocutori provenienti da diversi
contesti culturali e linguistici. In volto a soddisfare le esigenze economiche e sociali del mercato
del lavoro in termini di competenze e di promuovere l'adattamento al contesto internazionale, il
Ministero dell'Istruzione Superiore e della Ricerca Scientifica in Algeria ha messo in atto nuove
riforme che colpiscono nel campo dell'insegnamento delle lingue. La riforma al cuore

1
dell'istituzione della necessità di strategie di sviluppo e rafforzamento per l'acquisizione delle
lingue straniere in questo caso la lingua francese, che è la lingua di insegnamento in tutte le
discipline scientifiche e tecniche e è un'abilità molto importante, dal momento che si presenta non
solo come uno strumento corretto per la comprensione del mondo circostante, ma anche uno
strumento indispensabile per l'accesso alle informazioni e alle conoscenze scientifiche e tecniche,
nuove forme e nuovi obiettivi in un ambiente multilingue. Cercheremo in questo articolo, il
linguaggio della politica Algeria traccia di rispondere alle nuove esigenze scientifiche e socio-
economica. Ma anche, per impostare uno studio empirico condotto da studenti di una Facoltà di
Scienze Ingegneria, dimostrato come la padronanza della lingua francese è indispensabile per
l'efficace trasmissione e l'acquisizione di livello scientifico e tecnico algerino università.

Pour faire face à un monde en pleine mutation et répondre à la demande


économique et sociale du marché du travail en termes de rythme et compétences ainsi
qu’à favoriser l’adaptation, le développement et l’intégration du système de
l’enseignement et de la formation universitaire dans l’environnement international, le
ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique en Algérie
accorde, au cours de cette dernière décennie, un intérêt très important au développement
de la formation dans le secteur universitaire.
En effet, s’inscrire dans ce contexte de mondialisation, impose du ministère de
l’enseignement supérieur, d’instaurer un système d’enseignement d’autres valeurs,
d’autres principes adaptant : efficacité, compétitivité, prise en compte de la psychologie
des apprenants, respect des différences entre les apprenants, différence au niveau des
rythmes et des styles d’apprentissage, prise en charge des lacunes et des besoins et la
mise en place de nouveaux outils et techniques de transmission des savoirs. Parmi ces
outils, la maitrise des langues étrangères ; en l’occurrence le français, constitue une
compétence très importante, dans la mesure où ces langues se présentent non seulement
comme un outil favorable à l’ouverture et la compréhension du monde environnant,
permettant ainsi d’ériger des contacts et recherches au niveau des stands internationaux,
mais aussi un outil indispensable pour l’accès aux informations et savoirs scientifiques
et techniques.
Sous cette perspective, l’avancée d’un enseignement sur objectifs spécifiques ; qui
vise à concevoir des cours de français sous de nouvelles formes et de nouveaux
objectifs et à enseigner le français comme langue de travail et de communication
professionnelle et institutionnelle et non uniquement en qualité d’outil d’intégration
culturelle et de renforcement linguistique, semble nécessaire et prometteur au niveau de
la formation supérieure en Algérie, car « on n’apprend plus une langue pour développer
un savoir sur une langue mais pour agir avec cette langue »1.
Au secteur universitaire algérien ; où nous nous trouvons dans une situation de
plurilinguisme, les étudiant ; ayant effectués l’intégralité de leurs études en arabe
classique durant 12 années et ont eu contact avec le français qu’en qualité de langue
étrangère à raison de 3 heures par semaine, se trouvent tenus d’assimiler des
1
RICHER J.J., 2008, « Le français sur objectifs spécifiques (F.O.S), une didactique
spécialisée ? » in Synergie Chine n°3.

2
enseignements supérieures dispensés aux facultés des sciences et techniques en langue
française. Le recours à cette langue étrangère et à la langue de spécialité se fait sentir
d’une manière ardue que ce soit sur le plan de la structure linguistique que sur le plan
discursif. Son utilisation comme langue de communication, de transmission de
nouvelles connaissances disciplinaires mais aussi comme outil de rédaction des travaux
académiques rend l’apprentissage des étudiants difficile. Les étudiants ont du mal à
faire face à la rupture linguistique et technique qu’ils rencontrent dès leur passage du
cycle secondaire au niveau supérieur.
Ainsi, dans ce contexte, où la maîtrise de cette langue est primordiale pour une
meilleure poursuite des études supérieures, il importe d’envisager un élargissement du
français dans le cadre de la formation universitaire et professionnelle en se basant sur sa
place dans la réalité actuelle. Il s’agit de concevoir des programmes de formations en
français sur objectifs spécifiques répondants aux besoins réels et urgents des étudiants
en fonction des différentes situations de communication.

Le Paysage linguistique d’une Algérie plurilingue


Parlant des langues, il est clair, qu'en Algérie aujourd’hui, nous vivons une situation
de plurilinguisme, d'un point de vue sociolinguistique, c'est une situation relativement
aisée en présence de deux familles de langues natives, d’une part ; et de deux langues
internationales. Cette situation est marquée par la présence de l’arabe dialectal et du
berbère comme langues vernaculaires, exclusivement orales, l’arabe classique, comme
langue officielle et nationale ainsi que le français et l'anglais comme langue dites
étrangères.
Ce paysage linguistique s’est imposé depuis l’indépendance et s’est nourri de
courants idéologiques venant surtout de l’extérieur « Les langues européennes ont
marqué de leur empreinte les parlers algériens, ce fut, notamment, le cas de l’espagnol
dans l’ouest du pays (en raison de la présence d’une forte proportion de colons
d’origine espagnole, de réfugiés de la guerre civile de 1936 ; de plus la ville d’Oran a
été occupée par les Espagnols pendant trois siècles), puis l’italien à l’est du pays pour
des raisons identitaires (présence de colons d’origine italienne et vieux contacts
commerciaux le long de la côte orientale avec les ports italiens. Mais c’est le français
(…) qui a acquis un statut particulier dans la société algérienne »2. Ainsi l’Algérie
indépendante fait promouvoir le français langue étrangère (F.L.E) dans le pays comme
langue de communication professionnelle mais surtout langue d’acquisition des savoirs
scientifiques et techniques à l’université.
Ceci dit, l’utilisation de la langue française dans les situations formelles
universitaires est toujours en alternance avec l’arabe dialectal qui, constitue le point
essentiel dans les échanges discursifs en classe de cours, de TD ou à la bibliothèque.

2
(Taleb-IBRAHIMI K., 2000, L’Algérie : histoire, société et culture, Alger, Editions
Casbah, pp. 61-73

3
Même si le français qui est les plus utilisé, l’arabe dialectal n’y est pas exclu car les
étudiants y ont recours pour se faire comprendre de leurs enseignants.

La structure linguistique du module de la langue de spécialité (LS) en sciences de


l’ingénieur
Face aux difficultés des étudiants, le ministère de l’enseignement supérieur dispense
des cours de français connu sous l’appellation « langue de spécialité », dans la visée
d’aider les étudiants à suivre aisément leur formation en développant leurs compétences
linguistiques et communicatives.
Le module de français est prévu que pour les deux premières années, à raison d’une
séance d’une heure et demie par semaine Les enseignements sont répertoriés dans une
sorte d’inventaire à quatre volets correspondant, chacun d’eux, à un semestre de
l’année. Les cours sont faits sous forme d’ateliers, du moins pour une grande partie
d’entre eux. Les cours s’articulent autour de plusieurs axes principaux qui sont : la
compréhension de documents spécialisés oraux et écrits et la production des textes
répondant à des techniques bien précises, à savoir : le résumé, le compte rendu, la
synthèse de document, l’exposé, etc., mais aussi à de la terminologie scientifique et
technique.
Comme les objectifs et contenus des cours proposés se fondent sur la binarité :
objectifs / besoins du public visé. Nous avons pris en considérations trois facteurs l’or
de l’élaboration de nos cours : Le cadre et conditions de l’apprentissage, le profil de
notre public ainsi que les spécificités du domaine de formation. Les objectifs formulés
vont de pair avec les activités pédagogiques proposées, qui ciblent un comportement
linguistique favorisant l’intégration dans un monde bien particulier, celui des sciences
de l’ingénieur par le biais de la compréhension/production tout en tenant compte des
besoins réels des étudiants.

La démarche d’analyse des besoins des étudiants


Pour mener à bien notre recherche sur terrain, nos positionnements théoriques
s'appuient sur les travaux de FOS et LANSAD, ainsi que sur le développement des
compétences plurilingues et interculturelles. Nous avons tenter de répondre aux
interrogations suivantes : Quelles sont les difficultés tributaires de la compréhension et
la production d’un texte de type scientifique/technique en langue étrangère pour des
étudiants arabophones? Et quelles sont les solutions que déploient les étudiants pour
faire face à leurs besoins et les enseignants pour aider leurs étudiants ? Il s’agit ici de
tenter de proposer, d’un point de vue didactique et cognitif, des explications à un certain
nombre de problèmes que rencontrent les étudiants en compréhension écrite dans un
contexte plurilingue. Nous présenterons les différentes situations de communication et
les besoins de formation urgents et immédiats de l'ère de la mondialisation que nous
avons traités au près des étudiants de la faculté des sciences de l’ingénieur.

4
Pour répondre à ces interrogations, nous avons appliqué sur terrain les principes de
la démarche FOS basée sur les travaux de MANGIANTE &PARPETTE (2007) ainsi
que ceux CARRAS C (2009). Mais aussi comme dans cette démarche, il est nécessaire
de prendre en compte les contextes des étudiants : contexte pédagogique, culturel et
linguistique du fait qu’ils influent sur la construction des connaissances et donc sur la
compréhension des textes, nous avons pris en compte les recherches de THOMPSON,
SKOWRONSKI, LARSEM et BETA (1996); Le gros, Baudet et DENHIERE (1994).
Notre perspective au cours de cette étude de nature didactique ne va pas dans le
sens d’une formulation de prescriptions ou de propositions didactiques découlant de
savoirs théoriques, sans expérimentation sur le terrain. Il s’agit de relever les besoins
des étudiants et d’analyser leurs productions dans leur contexte de réalisation.

Les besoins des étudiants en sciences de l’ingénieur


Grâce à une « approche pragmatique » nous avons essayé de repérer les obstacles
qui entraveraient l’acquisition des données de cours d’architecture pour les étudiants
nouvellement arrivés à l’université. Par un travail de questionnement, les résultats
démontrent que 20 % des questionnés déclarent ne pas comprendre totalement la langue
française, face à 45 % qui ne la comprennent que moyennement et une minorité de
35 % déclarent la comprend parfaitement. Mais aussi, sur les 200 étudiants inscrits en
première année, les attentes s’inscrivent d’avantage en compréhension et en expression
écrites, respectivement dans l’ordre 47.5 % et 20 %, qu’en compréhension et en
production orale (respectivement 14 % et 18 %). Nous expliquons cela par le fait que la
transmission des savoirs techniques en faculté des sciences de l’ingénieur s’opère plus
avec des polycopiés pour les CM et par des contenus écrits au tableau ou dictés lors des
TD, c’est ce qui constitue la trace écrite des contenus des cours qui doivent être compris
et interprétés par les étudiants, dont 48.5% de nos enquêtés déclarent ne pas les
comprendre.
Ainsi, les difficultés sont plus sur le plan de l’incompréhension du vocabulaire
scientifique et technique mais aussi le lexique de la langue standard. Car les étudiants
rencontrent des difficultés dès la première séance non seulement avec les mots les plus
techniques mais aussi de la langue usuelle. Mais aussi, des difficultés à intégrer le sens
polycopié et d’un texte scientifique long.
Nous déduisons que les difficultés rencontrées par les étudiants sont engendrées par la
non maîtrise de la langue usuelle, c’est ce qu’ont déclaré 58 % des étudiants. Par
ailleurs 42 % d’entre eux n’arrivent pas à assimiler le sens des mots techniques de leur
spécialité.
Ces difficultés de décodage que rencontrent les étudiants en première année
d’architecture, les obligent à adopter des stratégies diverses pour les contrecarrer et les
dépasser. La traduction constitue l’une de ces stratégies. Un passage évident pour ne
pas dire obligatoire. Les étudiants optent pour la traduction qui n’est qu’une autre forme
de décodage, afin d’exprimer en d’autres termes une information ou une idée donnée.
Sur les 200 étudiants, 79.5 % des questionnés ont recours à cette méthode qui constitue
pour eux le comportement langagier le plus fiable pour saisir le sens des textes

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scientifiques/techniques. Cette traduction et ce recours à la langue arabe permet aux
étudiants en architecture de dépasser au moins deux types de difficultés inhérentes à la
compréhension du texte scientifique en contexte plurilingue:
 Les difficultés d’ordre linguistique liées à la langue L2, cela par la gestion du
flux d’informations et la signification des mots monosémiques.
 le recours à la langue 1, favorise l’activation des connaissances construites
dans le contexte linguistique de l’étudiant.
Ceci dit, il est à signaler que malgré ce recours à la langue les étudiants éprouvent
toujours du mal à comprendre parfaitement le contenu de leurs cours. C’est ce qu’a
souligné 49 % de nos enquêtés, qui déclarent ne pas comprendre à 100 % leurs cours
même après avoir traduit les mots qu’ils n’ont pas compris.
Cela peut s’expliquer par le fait de :

1. un abondent des mots polysémiques, des différences entre le sens ou les sens
proposés par le dictionnaire et le sens que le mot prend en contexte sont
différents,
2.un terme n’existe et ne fait sens que dans un ensemble notionnel et
conceptuel, une traduction mot à mot est nécessairement insuffisante. C’est
pourquoi d’ailleurs des dictionnaires contextuels ont été élaborés pour
certaines disciplines notamment à des destinations des étudiants ou
professionnels étrangers, mais pas dans le cas de l’architecture.
3. des difficultés dans le choix des mots spécialisés, des difficultés à utiliser
les acceptions spécifiques liées à la science ou à la discipline concernée.

Pour conclure, Nous retenons alors que pour améliorer le traitement des informations
du texte d’architecture sur le plan de la compréhension, il semble nécessaire, de
proposer des aides didactiques efficaces à activer les processus cognitifs permettant le
transfert en L2 des connaissances antérieures développées en L1. Ainsi, le bilinguisme
est nécessaire mais il doit être construit en fonction des cursus, des formations et des
besoins. Cela, en développant des stratégies efficaces de traduction (De la terminologie
à la phraséologie). Mais aussi, une analyse de la macrostructure textuelle signification
globale est nécessaire pour passer de la surface des mots au contenu sémantique et à la
sélection des informations les plus pertinents. Un programme d’aide et de soutien en
langue française est nécessaire, qui devra tourner autour de la consolidation des
compétences, directement liées à la formation de ces étudiants présents et futurs, des
compétences de compréhension et d’expression orale et écrite.

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