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:
l’apprentissage de la langue-culture pour
la poursuite d’études universitaires en France
Abstract : This paper presents a French as a foreign language program in a Chinese university
setting. Every year since 2005, twenty learners have attended this 10-month program in order
to prepare themselves for an exchange year in France. Starting from the beginning level, they
become, at the end of this French course, intercultural speakers able to continue their studies in
France. The article aims to explain this initiative by presenting various elements to contextualize
this language-teaching program, such as the objectives and organization of the course, the main
teaching approach and the teaching material used. Specifically, we present different cultural
elements of this material and their use in the classroom. In addition, we discuss the motivation
factors of the students. In the light of the overall evaluation of this program, we finally offer some
pedagogical ideas in order to better prepare Asian university students to participate in an exchange
program in France.
Keywords : French as a foreign language, language and culture teaching, Chinese students,
intercultural competence
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Introduction
Contexte d’enseignement
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afin qu’ils poursuivent leurs études en France. Cette initiative s’inscrit dans la
volonté du gouvernement chinois d’envoyer, chaque année, un grand nombre
d’étudiants en France, « un des pays où les sciences et les techniques sont les
plus développées au monde » (Wang Ming Li, 2005 : 10). Selon le Ministère des
affaires étrangères et européennes de France (2010), environ 20 000 étudiants
chinois apprennent le français comme langue étrangère dans 175 établissements
supérieurs en Chine. Par ailleurs, le nombre de départements universitaires de
français en Chine a bondi depuis le début des années 2000, passant de 30 en
2002 à plus de 90 en 2010. Le Ministère avance également que l’« on recense
environ 800 professeurs et environ 200 lecteurs ou experts de français recrutés
directement par les universités » (p.4). Il s’agit là de statistiques qui rendent
compte de la vitalité exceptionnelle de la langue française en Chine.
En plus des cours universitaires liés à leur discipline d’étude, ces étudiants ont
choisi de prendre des cours de français langue étrangère dans le cadre d’un
programme spécial offert par l’Université. Ce programme, d’une durée de dix
mois, comporte vingt heures de français par semaine. Il s’agit donc d’un cours
de français intensif en plus du programme régulier suivi par ces étudiants en
ingénierie. Afin de ne pas empiéter sur l’horaire de leur cursus principal, les
cours de français ont lieu le samedi, le dimanche ainsi qu’une soirée en semaine.
Au total, quatre heures de cours sont dispensés par un professeur chinois et
seize heures de cours sont donnés par un professeur étranger francophone.
Les étudiants chinois ayant suivi cette formation en français se rendent donc
par la suite en France dans le cadre d’un projet d’échange dont les modalités
varient. Ils peuvent participer à un stage de fin d’études (trois mois), à un
échange académique (un an/deux semestres), ou encore décider de continuer
leurs études en France dans le but d’obtenir un double diplôme, c’est-à-dire
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2. Approches d’enseignement
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Publishing (Ma Xiao Hong et Liu Li, 2007), Le français, qui constitue un des
manuels de français les plus utilisés en Chine, et qui a déjà connu plusieurs
éditions revues et corrigées depuis une quarantaine d’années.
Je pense que la grammaire de l’enseignant chinois était très bien enseignée, et que
j’ai beaucoup bénéficié des connaissances humaines et du vocabulaire transmis par la
lectrice francophone. (Lisa)
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chinois comme une référence en ce qui concerne son pays de séjour, le système
éducatif qui y prévaut ou encore les éléments culturels propres à la société
chinoise.
Ces cours m’ont permis d’avoir un savoir, comme la nourriture, les paysages,
le transport, la culture, etc. Je comprends la France et les Français en France,
notamment leur vie, la politique, les coutumes et leur tempérament. Je me souviens,
ce qui était mentionné dans les manuels scolaires et quand je suis allé en France,
tout était positif. Par exemple, les manuels scolaires ont introduit un grand nombre
de fromages célèbres, et je les ai essayés en France après. Donc avec ce cours, j’ai
beaucoup appris concernant la situation culturelle de la France. (Lisa)
Le manuel Reflets m’a aidée à comprendre les cultures en France. (Claire)
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langue, pour atteindre leur objectif. Très enthousiastes, ils sont conscients des
sacrifices liés à leur démarche (par exemple, suivre des cours le soir et le week-
end en plus de la charge de travail régulière de leur cursus en ingénierie) mais
estiment que cela leur permettra d’apprendre une nouvelle langue et de vivre
une expérience enrichissante d’étude et/ou de travail en France.
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Les apprentissages pour ma vie en France cette année-là ont jeté une base solide.
(Juliette)
Si je n’avais jamais pris ce cours, je n’aurais pas pu me lancer si aisément dans une
vie totalement différente. (Pauline)
Évidemment ces cours m’ont beaucoup aidé. Ils m’ont donné les règles simples
pour commencer à parler le français et la culture fondamentale pour m’adapter
rapidement à la vie en France. (Antony)
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Certains étudiants sont cependant plus nuancés que d’autres dans leurs propos.
Tout en reconnaissant l’impact positif indéniable qu’a eu le programme de
français sur leurs projets futurs, ils sont plutôt d’avis que c’est le fait de vivre
en France qui leur a permis de bien intégrer la langue française ainsi que les
éléments culturels propres à leur société d’accueil.
Les cours de français et le contact avec les enseignants ont aidé à l’apprentissage
de la langue et à la compréhension du français, mais je pense que c’est encore très
limité. La vie réelle en France après cet apprentissage est le plus important. (Manon)
Je suis arrivée en France avec beaucoup de termes de la vie quotidienne, par exemple
pour demander des directions, acheter un billet de train, acheter du pain ou encore
des vêtements. Fondamentalement, je n’ai pas de problème à m’intégrer à la
vie quotidienne française. Mais pour le travail français et suivre des cours et des
conférences en français, ça peut être un problème. (Lisa)
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Conclusion
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En plus de réaliser leur objectif personnel, ces étudiants auront alors atteint
un des objectifs principaux de l’enseignement/apprentissage des langues :
promouvoir la capacité à faire face à la rencontre interculturelle (Kramsch,
1993). Dans le contexte présenté par cet article, cette rencontre a lieu par le
biais des différentes approches utilisées, du matériel qui est préconisé ainsi que
du contact avec un enseignant-locuteur natif. Il nous semble ainsi primordial
de privilégier la contextualisation interculturelle de l’enseignement du français
langue étrangère dans l’optique de séjourner en France, et, conséquemment,
de jouer un rôle principal dans la préparation de cette rencontre avec l’altérité.
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Notes
1
La Chine compte présentement quinze Alliances françaises, dont dix ont ouvert leurs portes depuis
l’an 2000 (http://www.afchine.org).
2
Afin de préserver l’anonymat des participants, des pseudonymes leur ont été attribués. Il est à
noter qu’à leur demande, les étudiants se choisissent eux-mêmes un prénom français au début de
ce programme de français.
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