Vous êtes sur la page 1sur 228

Histoire

de l’olivier

Catherine Breton,
André Bervillé,
coordonnateurs
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire
de l’olivier
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Éditions Quæ
RD 10
78026 Versailles cedex
www.quae.com

© Éditions Quæ, 2012


Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ISBN : 978-2-7592-1823-3

Le code de la propriété intellectuelle interdit la photocopie à usage collectif sans autorisation


des ayants droit. Le non-respect de cette disposition met en danger l’édition, notamment
scientifique, et est sanctionné pénalement. Toute reproduction même partielle du présent
ouvrage est interdite sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie
(CFC), 20 rue des Grands-Augustins, Paris 6e.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire
de l’olivier
L'arbre des temps

Catherine Breton,
André Bervillé
Coordonnateurs
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les auteurs
Stéphane Angles
Maître de conférences, Université Paris Diderot, Paris 7 – stephane.angles@free.fr
Christian Argenson
Directeur de l’Afidol, Aix-en-Provence – christian.argenson@afidol.org
Jacques Artaud
Professeur de chimie, Université Marseille 3 – jacques.artaud@univ-amu.fr
André Bervillé
Ancien directeur de recherche Inra, Montpellier – berville@supagro.inra.fr
Laurent Bouby
Centre de bio-archéologie et d’écologie, CNRS-Université Montpellier 2, Institut de Botanique –
laurent.bouby@univ-montp2.fr
Catherine Breton
Chercheur, Montpellier 2-CNRS – catherine.marie.breton@gmail.com –
catherine.breton02@univ-montp2.fr
Michel Calleja
Ingénieur de recherche, Montpellier-SupAgro – calleja@supagro.inra.fr
Colette Charlot
Conservatrice du musée de la Pharmacie, Université Montpellier 1 – theriaca34@orange.fr
Dominique Coutinot
Entomologiste, expert environnemental à l'European Biological Control,
Laboratory (EBCL)-USDA-ARS, Montpellier – dcoutinot@ars-ebcl.org
Aline Durand
Chercheur, laboratoire d’archéologie médiévale méditerranéenne, CNRS-Maison méditerranéenne
des Sciences de l’Homme, Université Aix-Marseille I – adurand@msmsh.univ-aix.fr
Mariette Gerber
Ancienne directrice de recherche à l’Inserm, Montpellier – mariette.gerber@sfr.fr
Sarah Ivorra
Centre de bio-archéologie et d’écologie, CNRS-Université Montpellier 2, Institut de Botanique –
ivorra@univ-montp2.fr
Lucette Laurens
Professeur, Université Montpellier 3 – lucette.laurens@supagro.inra.fr
Nathalie Moutier
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Ingénieur Inra, Rennes – nathmoutier@laposte.net


Claire Newton
Centre de bio-archéologie et d’écologie, CNRS-Université Montpellier 2, Institut de Botanique
Laboratoire d'Archéologie et de Patrimoine. Université du Québec à Rimouski. 300,
allée des Ursulines. Rimouski (Québec) G5L 3A1, Canada – clairennewton@gmail.com
Denis Ollivier
Directeur DGCCRF (Direction générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression
des fraudes), Marseille – denis.ollivier@scl.finances.gouv.fr

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les auteurs
Alexandra Paris
Responsable économie et communication, Afidol, Nyons – alexandra.paris@afidol.org
Christian Pinatel
Directeur du Centre technique de l’olivier, Aix-en-Provence – c.pinatel@ctolivier.org
Bernard Poinso
Maître de conférences, BGPI (Biologie et génétique des interactions plantes-parasites),
SupAgro-Montpellier – poinsobernard@yahoo.fr
Jean-Frédéric Terral
Professeur Université Montpellier 2, Centre de bio-archéologie et d’écologie, CNRS-Université
Montpellier 2, Institut de Botanique – terral@univ-montp2.fr
Pierre Villemur
Professeur honoraire, ancien Professeur d’arboriculture, SupAgro-Montpellier – villemurp@gmail.com
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Le verger d'olivier. Bois Gravé. © Louis Jou. Reproduit avec l'autorisation de la Fondation Louis Jou

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Sommaire
Les auteurs 5

Remerciements 10

Avant-Propos 11

L’olivier dans l’histoire :


symbole et religion, médecine et pharmacie 13
L’olivier et la religion 15
L’olivier et la thérapeutique 18

Les tendances de l’oléiculture :


l’olivier social, culturel et gastronomique 29
L’olivier social 30
L’olivier culturel, des utilisations
imbriquées dans la vie quotidienne et spirituelle 33
La vie autour de l’olivier : confréries et fêtes 37
Une histoire culinaire mouvementée 40
Les atouts et usages en cuisine 41

L’histoire de l’olivier
reconstituée à partir de données génétiques 47
Le dogme à propos de l’histoire de l’olivier 48
Quelle est l’histoire du taxon « olivier »
et quelle est celle de l’oléastre ? 49
L’ADN de l’oléastre, sa répartition géographique 52
Populations ancestrales et zones refuges 53
Comment retracer l’histoire
des variétés cultivées ? 57
Les variétés d’olivier cultivé et leur diversité moléculaire 58
De l’origine génétique à la localisation géographique des variétés 60
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Adaptation de l’olivier
aux microclimats et au changement climatique 68
Sélection et diffusion mondiale 68
La pollinisation de l’olivier
du point de vue de la génétique 69

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée
nord-occidentale révélée par l’archéobiologie 73
L’hypothèse d’une domestication autochtone
et de l’existence de foyers indépendants,
et l’émergence de l’exploitation de l’olivier dès le Néolithique 76
En Méditerranée nord-occidentale, l’olivier est domestiqué
2 000 ans avant l’intervention des sociétés antiques 80
L’irrigation médiévale de l’olivier
mise à jour par de l’éco-anatomie quantitative 84

Paradoxe entre goût et qualité 89


Qu’est-ce que le goût ? 90
L’objectivité : comment décrire le goût ? 94
Les normes : l’objectivité dirigée 98
Le fruité noir : une spécificité française 101
Subjectivité : mise en pratique 103
Quelques données objectives… 105

Les huiles d’olive vierges françaises : définition,


dénominations et caractérisation 107
Huile d’olive vierge et huile raffinée 108
Caractéristiques des huiles d’olive 109
Composition chimique des huiles d’olive 113
Authenticité des huiles d’olive vierges 115

L’huile d’olive : un aliment santé ? 123


Les recherches sur les relations entre une maladie
et la présence d’un régime comportant de l’huile d’olive 124
Effet sur la santé 128

De l’édification de l’arbre à la production d’olives 131


Comment pousse un olivier ? 132
Objectif fruit 136
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Le fruit, une drupe, l’olive 146


Croissance ou fructification : un véritable casse-tête 148

Un bio-agresseur de l’olivier : la mouche de l’olive 155


Description, biologie, répartition 156
Les méthodes de lutte contre la mouche de l’olive 157

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier :
peu de traitements, car peu de maladies ? 163
La course aux traitements dans l’agriculture moderne 164
Ancienneté des parasites de l’olivier 165
Principales affections de l’olivier 166
Conclusion sur les maladies 175

Économie : la production de l’olivier


en Méditerranée et dans le monde 177
Répartition des surfaces 178
Production d’huile d’olive 179
Production d’olives de table 180
L’oléiculture européenne 180
La situation oléicole en France 181

Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ? 185


Le verger et la production oléicole française 186
L’olivier dans l’histoire en Languedoc-Roussillon 188
Place des arbres, place de l’olivier 190
De l’arbre agricole à la diversité
des réalités sociales de l’oléiculture 191

L’olivier et les territoires méditerranéens 195


L’oléiculture, une activité très présente
dans les territoires méditerranéens 196
Un nouveau moteur
de développement agricole ? 200
L’olivier, un patrimoine porteur de projets territoriaux 204

Conclusion 213

Cahier couleur
L’olivier symbole du Bassin méditerranéen 215
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Remerciements

N ous sommes très reconnaissants à Bernard Poinso, Roland


Poss et Pierre Villemur qui nous ont apporté leur aide par leur
lecture et leurs remarques enrichissantes. Nous avons également sol-
licité des chercheurs spécialistes de l’olivier, tels Guillaume Besnard,
Hédia Hannachi et Bouchaib Khadari ; leurs connaissances sur cette
espèce ont été précieuses pour compléter cet ouvrage, nous les citons
en références. Nous remercions Claire Jourdan-Ruf des Éditions
Quæ qui n’a pas ménagé ses efforts pour améliorer l’ouvrage et le
rendre accessible à tous.
De nombreux collègues et amis nous ont aimablement répondu
et fourni des illustrations, qu’ils en soient très chaleureusement
remerciés : Pierre Aurousseau (Agrocampus-Ouest, unité mixte
de recherche sol-agro-hydrosystème-spatailisation), Arnaud
Blanchet (EBCL-USDA-ARS, Montpellier), Anaïs Boura (docteur
­ès-xylologie, Université Pierre et Marie Curie, Paris), Eric Coffinet,
Guy-Georges Guittonneau (Professeur honoraire à l’Université
d’Orléans, Société botanique de France), Pascale Inzerillo (service
communication de l’Inra), Robert Montagut, Adéla Olmedilla (Phd
Consejo Superior de Investigaciones Cientificas, CSIC, Granada,
Espagne), Sophie et Frédéric Pinatel de Salvator, J.-D. Strich (CNRS).
Nous souhaitons saluer également la participation de plusieurs insti-
tuts à la valorisation des documents et photos, nous les remercions
d'autoriser la reproduction gratuite de ces documents : l’Afidol
(Institut du monde de l’olivier à Nyons), la fondation Louis Jou,
l'Office du tourisme du pays de Nyons, la médiathèque et la biblio-
thèque de SupAgro-Montpellier pour la valorisation des ouvrages
du fonds ancien, la photothèque de l’Inra (Paris) et le musée de la
Pharmacie de Montpellier.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

10

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Avant-Propos

E ncore un ouvrage sur l’olivier ! Mais qu’a-t-il donc d’original


par rapport aux précédents ? Peu d’espèces d’arbres ont eu un
tel succès au cours de leur évolution. La culture de l’olivier a diffusé
dans toutes les régions à climat méditerranéen et l’espèce couvre
naturellement la zone intertropicale et méditerranéenne.
Cet ouvrage mêle les sciences sociales, biologiques et techniques
pour raconter l’histoire et les usages d’un arbre qui a sans cesse inter-
féré avec l’homme, à travers les religions, l’alimentation, l’agriculture
et l’économie. Sa présence est emblématique des paysages méditer-
ranéens et l’olivier est porteur de symboles que l’on retrouve dans
de nombreux textes anciens. Bien que d’importance économique
marginale en France, l’olivier est attaché à de nombreux sites tou-
ristiques de Provence et de la région Languedoc-Roussillon, où cer-
tains terroirs deviennent célèbres par la notoriété des appellations
des produits. Depuis quelques années, une science se développe
autour des produits, de leur caractérisation, de la dégustation et des
fraudes éventuelles. Cet ouvrage s’intéresse également aux régimes
alimentaires dits « méditerranéens », dont l’une des composantes
est l’huile d’olive. L’olivier a marqué tous les paysages naturels et
agricoles de la Méditerranée et, à présent, il est également mis en
valeur dans les villes.
Chercheurs en pharmacie, génétique, biologie, chimie, géogra-
phie, biologie, archéologie et botanique, les auteurs de cet ouvrage
nous dévoilent les origines de l’olivier et reconstituent pour nous son
histoire. Les auteurs présentent leurs résultats, les hypothèses de re-
cherche en cours de discussion et les doutes qui peuvent persister, les
techniques et outils qui permettent de remonter dans l’histoire des
variétés ou de contrôler l’authenticité des produits. Les interrogations
actuelles des chercheurs sont exprimées dans le but d’expliquer au
lecteur en quoi réside l’intérêt scientifique de cette espèce – alors que
la mode est aux plantes modèles dont le génome est séquencé –, mais
aussi quelles sont les pistes de recherche engagées et qu’il faudrait
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

encourager pour soutenir la production et la qualité des produits.


La confrontation des points de vue donne ainsi au lecteur un
aperçu de la complexité de cet arbre méditerranéen.
L’olivier, au fil des chapitres, traverse tous les temps et devient
l’arbre des temps.
André Bervillé et Catherine Breton

11

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

L’olivier dans l’histoire :


symbole et religion,
médecine et pharmacie
Colette Charlot
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

D
ans toutes les cultures,
l’arbre a une ­signification
symbolique extrêmement puis-
sante. En effet, l’arbre sacré
incarne la création qui unit le ciel
et le monde souterrain ; l’arbre
cosmique forme l’axe du monde.
Dans l’Antiquité, l’olivier était aussi
un arbre sacré et un arbre fruitier,
symbole de vie et d’abondance.
Planche de l’Olea tirée du Toutes les parties de l’olivier
Dictionnaire des drogues seront utilisées : feuilles, rameaux,
simples de 1716 de Nicolas
Lemery, complément de la bois, fruits, huile. Par son caractère
Pharmacopée Universelle. sacré, l’huile d’olive est utilisée dans
Dictionnaire universel
des Drogues simples contenant des rites religieux, par ses vertus médici-
leurs noms, origine, choix,
principes, vertus, étymologie
nales dans la thérapeutique.
et ce qu’il y a de particulier Le chamanisme est considéré par les uns comme une religion,
dans les animaux, les végétaux
et les minéraux : ouvrage pour les autres comme une magie ou une sorcellerie et pour l’an-
dépendant de la Pharmacopée
Universelle par feu monsieur thropologue comme un mode d’organisation des expériences
Nicolas Lemery de l’Académie
royale des sciences, docteur en
du chaman. Le prêtre magicien entre en communication avec les
médecine. Troisième édition esprits de la nature en utilisant les techniques de l’extase et de la
revue, corrigée
et beaucoup augmentée.
À Paris, MDCC XLVIII.
Collection du musée
de la Pharmacie de Montpellier Des arbres sacrés dans toutes les cultures

Ainsi l’arbre sacré des scandinaves est l’yggdrasil ou frêne ; dans la


Chine ancienne c’est le pêcher ; pour les Égyptiens le sycomore. Le
platane était l’arbre sacré de la ville de Sparte mais aussi l’arbre sous
lequel méditait le médecin Hippocrate à Cos. Quant au chêne, attri-
but du roi des dieux, Zeus, il était pour les druides l’arbre sur lequel
ils cueillaient le gui, leur plante sacrée. Le chêne représente pour
la Chine la forme fragile car, sous les bourrasques de vent, il casse
sans ployer tandis qu’en Europe il symbolisme l’héroïsme et la péren-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

nité. Le pin par la persistance de ses aiguilles symbolise l’immortalité


alors qu’au Japon il représente la force de caractère et l’énergie vitale.
Illustration page précédente :
Le figuier est l’arbre sous le feuillage duquel méditait le Gautama
Rameau d’Olea.
Planche tirée de l’Histoire
Bouddha et symbolise pour cela l’illumination, c’est-à-dire le grand
générale des drogues, simples réveil de Bouddha. De même, lorsqu’Adam et Ève furent chassés du
et composées - Atlas, par le Paradis, ils cachèrent leur nudité par des feuilles de figuier – et non
sieur Pierre Pomet, marchand,
épicier et droguiste. À Paris,
de vigne comme l’affirme la croyance populaire.
1735. Collection privée.

14

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

transe. Cette tradition millénaire permet de connecter les esprits


humains avec ceux de la nature c’est-à-dire de pénétrer le monde
autre. En somme, c’est la spiritualité la plus anciennement connue
dans les sociétés traditionnelles depuis l’ethnie Toungouse de la
Sibérie orientale jusqu’aux amérindiens de l’Amérique latine. Dans
la mythologie scandinave, l’immense frêne à trois racines (relié à
la source, à la fontaine et au puits) est l’Arbre-Monde. Son nom
Yggdrasil signifie « destrier du Redoutable », c’est-à-dire du dieu
Odin qui décrypta le sens des runes, représentation symbolique du
langage secret. L’évolution des religions au cours des siècles, passant
du polythéisme au monothéisme, est aussi à la base du symbolisme
accordé à l’arbre comme l’olivier.

L’olivier et la religion
L’olivier est relié à la symbolique et au sacré… Arbre sacré aux yeux
des cultes et des religions méditerranéens, son élixir l’est tout autant.
Il sert ainsi dans les onctions de la religion chrétienne, mais aussi, Le chandelier
depuis de nombreux siècles, comme combustible d’éclairage des à huit branches
de la fête des Lumières,
lampes des temples et d’autres lieux religieux. Encore aujourd’hui, Hanoukka.
l’olivier est un élément vivace des représentations des cultures des Collection privée.
régions méditerranéennes. Chaque civi-
lisation du pourtour méditerranéen s’est
approprié l’olivier comme partie intégrante
de sa société.
L’olivier y est ainsi souvent lié à des per-
sonnages importants qui en ont fait don à
l’humanité (Athéna en Grèce, Minerve
à Rome…), qui ont propagé sa culture
(Héraclès ou Hercule) ou qui, tout simple-
ment, ont eu des moments de leur vie liés
étroitement à l’olivier (Romulus et Remus,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Ulysse, Jésus…).
Pendant très longtemps, on a cru que
l’oléastre était originaire du Moyen-Orient,
et de là s’était répandu dans le bassin médi-
terranéen, ainsi ont été créés, dans diffé-
rents pays, les mythes qui ont été répandus
pour expliquer l’apparition de cultivars.

15

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Symbolisme de l’arbre
La mythologie permet de comprendre le choix du nom de la capitale
grecque. Le duel, imposé par les dieux de l’Olympe entre Poséidon
et la déesse Athéna pour savoir à qui appartiendrait la région, fut
gagné par Athéna. Elle proposa l’olivier comme étant l’invention la
plus utile à l’homme puisque ce végétal peut à la fois être un aliment,
riche en saveur et porteur d’énergie et un médicament. Donc rien
d’étonnant si l’olivier croît en abondance dans ce pays méditerra-
néen et si les auteurs de l’Antiquité le citent très souvent dans leurs
écrits. Dans l’Odyssée d’Homère, le héros, Ulysse, parle de l’olivier
dans son énumération des arbres : « Ces arbres, soit l’été, soit l’hiver
étaient éternellement chargés de fruits, tandis que les uns sortaient des
boutons, d’autres mûrissaient à la constante haleine du Zéphir : la jeune
olive bientôt à son automne, faisait voir l’olive naissante qui la suivait ; la
figue était poussée par une autre figue… » (Chant vii). Dans Œdipe
à Colone : « Il est un arbre dont je n’entends pas dire qu’ai germé son
pareil, soit en terre d’Asie, soit dans la grande île dorienne de Pélops :
arbre invaincu, arbre qui renaît de lui-même, terreur des lances de l’en-
nemi ; il croît surtout en ce pays : c’est l’olivier aux feuilles pâles, nourri-
cier des enfants… ». Virgile, poète latin, dans sa description de l’hiver
écrit ceci : « C’est aussi le moment, alors, de cueillir les glands de chêne,
et les baies du laurier, et l’olive et la myrtille sanglante… tandis qu’une
neige épaisse couvre la terre et que les fleuves charrient des glaçons ».
Dans l’Islam, prôné par le prophète Mahomet, les deux arbres
sacrés de l’Éden sont l’olivier et le figuier. Dans les traditions kabyles,
l’olivier est au centre de nombreux rituels, et en Afrique du Nord,
chaque cimetière de village possède « son arbre des morts » autre-
ment dit, l’olivier.
Symbolisme de l’huile d’olive
Les civilisations de la Méditerranée avaient fait de l’huile, tirée de la
drupe c’est-à-dire du fruit de l’olivier, une substance sacrée. Le saint
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

chrême est un mélange d’huile d’olive pure, de baume et d’épices,


décrit ainsi dans la Bible : « Yahvé parla à Moïse et lui dit : procure-
toi des parfums de choix, la myrrhe vierge (résine odorante tirée d’un
arbre d’Arabie), la cinnamone odoriférante et le roseau odoriférant…, la
casse… et l’huile d’olive…, ce sera un saint chrême ». Dans la religion
chrétienne, le saint chrême sert à l’administration des saints sacre-
ments. D’ailleurs, le Messie est nommé Maschiach Oint, en hébreu.

16

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

Cette huile sert à l’onction des rois mais aussi des malades, sur les
petites urnes en argent contenant l’huile du sacrement on peut lire
« O.I. », olea infirmatur, ou huile des malades.
La flamme de la lampe à huile représente la vie et la lumière spi-
rituelle, la sagesse et le savoir car la lumière est le symbole universel
de la divinité et de la spiritualité. Dans le judaïsme, l’huile d’olive est
sacrée car elle alimente les lampes du shabbat et des fêtes rituelles
comme Hanoukka, la fête des Lumières. Le chandelier juif à huit
+ une (neuf) branches porte les bougies qui sont allumées au cours
des huit nuits successives pour célébrer la victoire de Mathatias
contre le tyran Antiochus iv, gouverneur syrien de la Judée en l’an
168 av. J.-C. Quand les hébreux entrent dans le temple de Jérusalem
détruit pour célébrer Dieu, il ne reste presque plus d’huile pour les
lampes, miraculeusement l’huile est renouvelée les huit jours sui-
vants. Chaque année, en décembre, les juifs remercient Dieu en allu-
mant chaque jour une lampe d’un chandelier à huit + une branches :
la neuvième bougie appelée shamash permet d’allumer les autres,
une par jour en partant de la droite vers la gauche, ce chandelier est
placé devant une fenêtre. La menora, ou chandelier à sept branches,
est devenue le symbole du judaïsme.
De même dans la religion chrétienne, la Bible rapporte le rêve
de Jacob : il s’aperçoit en train d’enduire d’huile la pierre de l’autel.
Symbolisme du rameau d’olivier
La Bible parle du Déluge et nous enseigne comment l’Arche de Noé
fut prévenue de la fin des pluies. C’est un oiseau, une colombe qui
porte dans son bec un rameau d’olivier, signifiant à Noé la fin du
déluge et le retour de la paix avec Dieu. Dans l’ancienne Rome il
figurait la déesse de la paix ; les couronnes d’olivier récompensaient
les vainqueurs des jeux mais aussi les soldats triomphants.
Aujourd’hui, ce symbolisme est repris dans l’emblème de l’orga-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

nisation des Nations Unies : le globe terrestre est entouré de deux


rameaux de feuilles d’olivier.
Après leur installation en Palestine, les Hébreux, en souvenir de
l’Exode, commémoraient la fête des Tentes : « Allez dans la mon-
tagne et rapportez des rameaux d’olivier, de pin, de myrte, de palmier
et d’autres arbres feuillus pour en faire des huttes, comme il est écrit »
(Néhémie 8,15).

17

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Des taxes religieuses concernaient les produits de l’agriculture.


Ainsi, dans le Livre de Tobie est citée une dîme sur « le vin, le blé,
les olives, les grenades et autres fruits ». L’olivier est l’arbre de la Bible,
que se soit par son bois, ses rameaux, ses fruits ou son huile : sur le
Mont des Oliviers Jésus-Christ sera arrêté après avoir passé une nuit
de prière, comme l’olivier vit très vieux, on pense que ce sont les
rejets de ces mêmes oliviers qui y poussent aujourd’hui ; de même,
la croix de la crucifixion était en bois d’olivier.

L’olivier et la thérapeutique
Il est nécessaire, là encore, de distinguer l’huile d’olive, les feuilles
fraîches ou les feuilles sèches de l’olivier. L’huile d’olive agit par ses
qualités propres mais sert très souvent de solvant pour
la préparation des huiles officinales et d’autres formes
galéniques. Les feuilles fraîches ou sèches sont utilisées
en phytopharmacie ou sous forme de teinture mère en
homéopathie.
Ce liquide gras est considéré comme une matière pre-
mière qui doit répondre à des critères très précis avant
d’être utilisé pour les préparations pharmaceutiques.
C’est donc une drogue d’origine végétale de la « matière médi-
cale » (d’après De Materia medica, Dioscorides). L’huile d’olive offi-
cinale est définie dans la Pharmacopée française de 1937 de la façon
suivante : « c’est l’huile extraite du péricarpe du fruit de l’olivier cultivé
Feuilles et fruits de l’olivier.
Olea europaea L. Liquide transparent absolument liquide, ne déposant
Planche tirée
de l'Atlas complément pas au départ à la température de 15 °C, peu colorée pouvant varier du
de l'Histoire générale des Drogues,
simples et composées par le sieur jaune verdâtre pâle au jaune d’or. Sa saveur est douce et agréable. Elle est
Pierre Pomet, Marchand Épicier
et droguiste. Nouvelle édition,
complètement soluble dans l’éther, le chloroforme, le sulfure de carbone, le
corrigée et augmentée des doses benzène et l’éther de pétrole en donnant des solutions limpides ». C’est
et des usages par le sieur
Pomet fils, Apothicaire. la toute première définition physique de l’huile d’olive officinale,
À Paris, MDCC XXV, 1735.
Collection privée.
l’acidité étant le premier critère.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

L’huile d’olive comme drogue de la matière médicale


L’huile d’olive est connue depuis des temps immémoriaux. Les ath-
lètes grecs et les soldats romains s’en enduisaient la peau afin de lut-
ter contre la fatigue et les ardeurs du soleil. Son emploi fut d’abord
empirique, puis le bien-fondé de ces pratiques a été confirmé par la
mise en évidence de vitamines (E et provitamine A), de sels miné-
raux et d’acides gras (saturés et insaturés), poly-insaturés (acide

18

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

les constantes physico-chimiques de l’huile

Ces constantes figurent dans le Codex de 1937, ouvrage de réfé-


rence pour les pharmaciens. Ce spécialiste est responsable des pro-
duits qu’il délivre et il doit pouvoir vérifier le produit par des essais
d’identité et de pureté inscrits dans le même ouvrage officiel. Dans
les ouvrages antérieurs, seul le nom du végétal reconnu par les spé-
cialistes était mentionné. L’introduction de paramètres scientifiques
montre l’évolution du Codex dans le temps.
• Densité 0,913 à 0,915 à 20 °C
• Indice de réfraction 1,4681 à 1,4695
• Indice de saponification 188 à 195
• Acidité en acide oléique doit être inférieure à 0,5 g/100 g d’huile
• Indice d’iode 79 à 84
• Insaponifiable inférieur à 1 %
• Déviation polarimétrique sensiblement nulle.

Chevrette en émail blanc


d’Oleum lumbri de la fin
linoléique et linolénique) et mono-insaturés comme l’acide oléique du xviie siècle.
Cette huile de vers de terre
(taux moyen : 70 %). Cette huile est riche en anti-oxydants ce qui était utilisée pour traiter
ralentit le vieillissement des cellules. Elle est employée en cosmé- les rhumatismes et la goutte.
Formule encore inscrite
tologie dans les savons et les crèmes, pour traiter le cuir chevelu, au codex au début du xviiie siècle.
Reproduction avec
les gerçures des mains et les érythèmes (rougeurs des téguments), l’aimable autorisation
pour éliminer les parasites de l’homme (teigne, pou de corps, lente, de Robert Montagut
(fiche n° 15 dans sa collection).
insecte du conduit auditif).
L’huile est reconnue comme cholagogue et laxative, elle
favorise les sécrétions de la bile. Elle équilibrerait les graisses
dans le sang et aurait une action protectrice sur l’appareil diges-
tif. Grâce à sa richesse en acides gras mono-insaturés (acide
oléique, acide hydroxy-palmitique), elle diminuerait les
risques de thrombose en assurant une fluidité plus grande
du sang par diminution de l’agrégation des plaquettes. Elle
aurait un effet hypoglycémiant par ralentissement de la
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

vidange gastrique et favoriserait la digestion. L’étude des


relations entre l’apport alimentaire en acides gras mono-
insaturés et les maladies cardiovasculaires a mis en avant le
rôle du fameux régime crétois à base d’huile d’olive.
Depuis très longtemps, l’huile d’olive fut utilisée comme
médicament, on parle d’« huile médicinale ». Au xviiie siècle,
Nicolas Lemery traite dans la « Pharmacopée Universelle » des

19

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

médicaments contenant les compositions qu’on applique extérieu-


rement, les huiles en général, qu’il définit ainsi : « suc onctueux ou
substance graisseuse tiré par expression des olives ou oleum qui est le
nom latin, vient d’olea qui signifie oliviers ou olives ».
L’huile d’olive officinale
Lemery distingue les huiles naturelles comme le liquidambar, la
térébenthine ou le pétrole et les huiles artificielles comme celles
qu’on tire par expression ou distillation. Il cite alors l’huile d’olive
comme la plus commune qu’on prépare par expression et il ajoute
que l’huile vierge est la meilleure. Cette définition s’est ensuite affi-
née : les huiles médicinales sont des médicaments officinaux à usage
externe généralement, qui résultent de l’action dissolvante des huiles
sur une ou plusieurs substances, soit végétales, soit animales (dans
le Dorvault de 1945. L’Officine, répertoire général de pharmacie pra-
tique, 18e édition-bis illustrée, entièrement refondue et revue d’après
le Codex de 1937). Les principales matières que les huiles peuvent
dissoudre sont les huiles volatiles, les résines, la cire, la chlorophylle,
les matières colorantes, quelques alcaloïdes comme l’atropine, la
quinine, la cinchonine, des oxydes métalliques (oxydes de zinc et
de cuivre), des halogènes comme l’iode et le bromure mais aussi la
cantharidine. Leur conservation est précisée : «…dans un lieu frais et
à l’abri de la lumière, dans des vases bien bouchés. On doit les renouveler
tous les ans ».

Autres végétaux utilisés


en pharmacie pour donner
l’huile de ben, d’arachide
et d’amandes.
Planche de l’Atlas
de Pierre Pomet.
Collection privée.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

20

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

L’huile est émolliente, anodine, résolutive, détersive, propre pour


la dysenterie, pour la colique. Elle sert de solvant au même titre que
l’huile d’amande douce pour la préparation des autres huiles médi-
cinales, c’est-à-dire pour dissoudre certains principes actifs à l’aide
d’un liquide qui ajoute ses propriétés propres.
Autres usages de l’huile d’olive en pharmacopée
L’huile d’olive sert aussi d’excipient pour préparer les formes galé-
niques suivantes : huiles officinales, baumes, onguent puis pom-
made, cérat, emplâtre et liniment.
Pour l’huile officinale, utilisée comme médicament, il faut pré-
ciser l’espèce botanique « Olea europaea L. » et la façon dont elle
est obtenue : «… huile de première expression à froid, soigneusement
clarifiée ». L’huile d’olive est non siccative c’est-à-dire qu’elle ne
s’épaissit pas à l’air avec le temps. L’huile d’olive est obtenue à par-
tir des olives noires parvenues à maturation et est toujours inscrite
Pot canon de pharmacie du
au Codex français. Avant de citer quelques préparations pharma- xixe siècle, portant
ceutiques décrites dans des pharmacopées anciennes et d’énu- l’inscription : « Onguent
de la Mère ».
mérer leurs propriétés thérapeutiques, nous avons relevé dans la Collection du musée
« Pharmacopée Universelle » de Nicolas Lemery quelques formules de la Pharmacie
de Montpellier.
curieuses comme celle de l’huile omphacine.
L’huile omphacine. « Cette huile ne peut se préparer même à la
façon des Anciens qui prétendaient l’obtenir des olives vertes par expres-
sion. C’est ce qui lui a fait donner le nom de omphacinum à cause
des olives vertes ressemblant aux raisins verts qu’on appelle en latin
omphacium qui veut dire cru et astringent ». Pour cet auteur cette
huile est une chimère. Lemery est pourtant un chimiste reconnu du
xviiie siècle et un apothicaire privilégié, c’est-à-dire qui a acheté sa
charge auprès du Roi. Il est inscrit dans le livre matricule des compa-
gnons apothicaires de Montpellier car c’était alors le temps du com-
pagnonnage. Lemery dit bien qu’après avoir écrasé les olives vertes,
il n’obtenait qu’un jus visqueux, donc il échoue à préparer cette
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

huile à la façon des Anciens. Il est à noter que cette huile ompha-
cine est déjà citée dans la pharmacopée locale « Pharmacopoea
Monspeliensis » de 1572, rédigée par le chancelier de médecine de
Montpellier, Laurent Joubert. Cette huile omphacine est également
citée dans la « Pharmacopée royale, galénique et chymique » de
Moïse Charas de 1676 « supposée plus astringente et rafraîchissante
que l’autre obtenue à partir des olives mûres ».

21

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Préparation des huiles


par macération, digestion ou décoction

On prépare les huiles médicinales par macération, digestion ou


décoction.
Macération : on utilise le véhicule et la substance mis en contact à
froid et plus ou moins longtemps pour dissoudre les principes de la
substance.
Les huiles peuvent être faites avec des fleurs fraîches comme les roses
pâles, les roses de Provins, des pétales de lys ou avec des fleurs sèches
(camomille, mélilot…) et sont obtenues par macération. On laisse
les fleurs en contact plusieurs jours à la chaleur du soleil ; on passe
par expression et on recommence l’opération puis on sépare l’huile
de son dépôt et on la conserve selon l’usage. Un exemple est celui
de l’huile rosat : il faut 1 500 grammes de roses pâles pour deux litres
d’huile d’olive. Ses qualités sont les suivantes : elle tempère les cha-
leurs des reins et de la tête, résout les fluxions, fortifie et raffermit en
adoucissant. Les huiles de lys, de camomille ou de roses rouges sont
préparées de la même façon. Le lys ne cède pas à l’huile son odeur
ni sa saveur, la camomille abandonne la matière verte colorante de
l’huile volatile, les roses rouges ne colorent pas l’huile car le principe
colorant n’est pas soluble dans cette « menstrue ».
Expression : on enlève à l’aide d’une machine mécanique (pressoir à
mains) d’une substance molle ou solide les liquides qu’elle contient.
On opère à froid ou à chaud. Parfois, il suffit de tordre le linge où se
trouve la substance pour en extraire le jus.
Digestion : une substance est placée dans un véhicule maintenu à
une certaine température, sans aller jusqu’à ébullition, pendant un
laps de temps défini selon la drogue utilisée.
On traite par digestion dans l’huile les matières sèches qui renferment
des principes qu’une chaleur modérée ne peut dissiper. Prenons
comme exemple l’huile de cantharides. Les cantharides (Lytta ve-
sicatoria L.) sont réduits en poudre grossière. Ces insectes coléop-
tères d’un vert métallique à reflets mordorés, sont très toxiques car ils
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

contiennent de la cantharidine. La poudre est soluble dans les huiles


grasses d’où l’emploi de l’huile d’olive pour en obtenir des fractions
qui constituent l’huile concrète jaune et l’huile concrète verte. L’huile
verte est l’huile de première extraction, plus riche en principe actif (ici
la cantharidine), elle est utilisée en friction comme vésicant. L’huile
jaune est l’huile de deuxième extraction.
¯¯ ´

22

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

Décoction : action de faire bouillir un corps dans un liquide. Cette


opération était jadis très employée, mais aujourd’hui tombée en dé-
suétude, car l’extraction était trop aléatoire.
On prépare par coction les huiles d’hypericum (millepertuis), de jus-
quiame, de ciguë de morelle, de vers de terre. Les principes, dont
l’huile peut se charger, se dissolvent après dissipation de l’humidité.
L’huile de concombres sauvages était appliquée sur les engelures et
les gerçures de seins ; celle d’euphorbe pour les douleurs hémorroï-
dales ; celle de fourmis en friction contre la paralysie, etc. Leur nombre
était conséquent dans les premiers formulaires mais diminua au fur
et à mesure des avancées scientifiques. Ainsi dans le Codex de 1937,
sur les dix huiles conservées, seules quatre sont fabriquées avec de
l’huile d’olive, dont l’usage est en effet est restreint probablement en
raison de son prix élevé.

L’huile des Philosophes. Dans le « Cours de chymie » de


Nicolas Lemery, sont rapportés d’autres usages de l’huile d’olive,
comme l’huile des Philosophes ou l’huile de brique. On empreint
les briques de cette préparation et on les fait ensuite distiller (voir
encadré).
L’huile des petits chiens. Les anciens formulaires de Dorvault
(L’Officine ou répertoire général de pharmacie pratique, 1867) ou
le Répertoire général de pharmacie pratique donnent la composi-
tion de l’huile des petits chiens ou Oleum catellorum à base d’huile
d’olive, sa formule est décrite dans la pharmacopée de Nicolas
Lemery : « faire cuire jusqu’à consomption trois chiens nouveaux-nés
dans l’huile d’olive puis ajouter des plantes médicinales (origan, serpo-
let, pouliot, marjolaine, millepertuis) et passer à travers un linge après
quinze jours de repos ». Cette huile était prescrite pour traiter la para-
lysie et les rhumatismes. Fort heureusement, cette formule barbare
sera vite oubliée et ne figurera plus dans les pharmacopées officielles
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à partir du xixe siècle.


L’huile camphrée. Pour préparer l’huile camphrée on se sert
de l’huile d’olive neutralisée et stérilisée pour des préparations
injectables hypodermiques. D’après le Codex, la préparation se fait
en deux temps : il faut calculer dans un premier temps la quantité
d’acides libres que l’on exprime en poids d’acide oléique contenu
dans l’échantillon à examiner – ceci pour connaître la quantité de

23

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Préparation de l’huile des Philosophes

Extrait du Cours de Chymie de N. Lemery : « Il faut faire rougir les mor-


ceaux de briques entre les charbons ardents et les éteindre en les je-
tant dans une bassine d’huile d’olive que l’on couvre aussitôt. Il faut
laisser infuser une dizaine de jours ou jusqu’à ce que l’huile ait bien
pénétré la brique, les séparer, les pulvériser grossièrement, les mettre
dans une cornue de grès ou de verre lutée qui soit grande en sorte
qu’un tiers en demeure vide. On va placer la cornue dans un four à
réverbère et lui adapter un grand ballon ou récipient de verre. Luter
exactement les jointures de façon à ce qu’elles soient bien étanches
et donner au commencement un petit feu pour échauffer la cornue.
On augmentera le feu peu à peu jusqu’à ce que des vapeurs sortent.
On délute les jointures et on retire le récipient. On recueille l’huile que
l’on mélange avec de la poudre sèche de brique. Il se forme une pâte
dont on formera plusieurs boules. Ces boules seront introduites dans
une cornue de verre que l’on placera sur un bain de sable. Après avoir
luté les jointures on fera un feu gradué pour rectifier toute l’huile que
l’on versera dans une fiole ».
« C’est un bon remède appliqué extérieurement pour résoudre les
tumeurs de la rate, pour la paralysie, pour l’asthme, les suffocations
de matrice. On peut même en prendre par la bouche ou en mettre
quelques gouttes dans l’oreille ». N. Lemery commente cette prépa-
ration, il dit qu’on ne fait qu’exalter l’huile d’olive afin « qu’étant plus
ouverte par le feu, elle puisse agir sur les tumeurs » et il ajoute que
« la brique n’apporte aucune vertu, étant un corps sec et dépourvu
de tout principe actif ». Les Anciens chimistes (alchimistes) ont donné
l’épithète de philosophique à toutes les préparations où on fait en-
trer la brique : « la raison qu’on peut en donner, c’est que comme ils
se font appeler les véritables philosophes ou les philosophes par ex-
cellence, ils ont cru qu’ils devaient faire rejaillir les influences de ce
beau nom jusque sur les briques à cause qu’elles servaient ordinai-
rement de matériaux pour construire les fourneaux avec lesquels ils
travaillent à ce qu’ils appellent le Grand Œuvre ou la Pierre philoso-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

phale, car ils prétendent que par ce travail ils atteindront à la véritable
Philosophie ». On retrouve les idées sur la chimie qui circulaient au
xviiie siècle et notamment l’action du feu sur le produit. Dans la Phar-
macopée de Montpellier, cette préparation porte le nom d’« huile
des carrons ou des philosophes ». L’usage de l’huile d’olive dans cette
préparation est fort curieuse mais n’explique en rien ses propriétés.
Lemery écrit qu’elle est retirée du péricarpe du fruit de l’olivier.

24

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

sel CaCO3 (Carbonate de calcium) nécessaire pour neutraliser ces


acides libres, ce poids peut être égal à deux fois et demie le poids en
acide oléique calculé. Puis on chauffe l’huile à 45 °C. Pour la stérili-
sation, on porte la température à 135 ou 145 °C.
Cosmétologie
En cosmétologie, le livre de pharmacie pratique de Dorvault (1945)
présente de nombreuses formules à base d’huile d’olive comme
l’huile des Célèbes contenant de la cannelle, du santal citrin et de
l’essence du Portugal. Cette huile est utilisée pour la chevelure.
L’huile d’olive n’est pas la seule huile utilisée comme solvant en
pharmacie mais c’est la plus ancienne. On trouve :
– l’huile d’amandes qui est obtenue à partir d’amandes de diverses
Amygdalacées (amandier, abricotier, pécher) ;
– l’huile d’arachide fabriquée à partir des cotylédons d’Arachis
hypogaea ;
– l’huile de ricin provenant des graines de Ricinus communis L. ;
– l’huile d’œillette ;
– l’huile de ben (Morenga oleifera) ;
– l’huile de croton (Croton geayi) ;
– l’huile de foie de morue ;
– l’huile de chaulmoogra (Hydnocarpus ou Taraktogenos Kurzii), etc.
Des spécialités de phytothérapie renferment de l’huile d’olive
comme excipient, et plusieurs médicaments se présentent sous
forme de capsules, d’ampoules ou de gouttes buvables. L’huile
d’olive, seule ou additionnée d’autres aromates, est utilisée contre
les rhumes, la constipation, les cors aux pieds, pour blanchir les
dents, etc.
Les pommades. Ce sont des médicaments à usage externe, de
consistance molle ayant pour base une ou plusieurs substances
médicamenteuses associées à un corps gras dont l’huile d’olive. Les
pommades sont très employées en pharmacie pour frictionner la
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

peau ou pour panser les plaies. On trouve ainsi de nombreuses for-


mules pharmaceutiques qui entrent dans la catégorie de l’hygiène.
Les onguents. Le mot vient du latin ungere qui veut dire oindre.
L’onguent des 12 apôtres contient douze drogues avec de l’huile
commune ou huile d’olive, il est inscrit dans la Pharmacopée univer-
selle de Nicolas Lemery de 1761. L’onguent est l’ancienne forme galé-
nique à base de résines et de divers corps gras comme l’axonge ou la

25

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

vaseline, le beurre, le suif, la cire jaune, la poix noire, et aussi l’huile


d’olive. Celle-ci entre dans la composition de l’onguent basilicum
ou onguent suppuratif. L’huile d’olive est aussi utilisée dans l’on-
guent de la Mère à base de litharge et dont la
formule existe dans la première Pharmacopée
officielle de 1818 écrite en latin, emplastrum
fuscum vulgo unguentum Matris encore appelé
« onguent de la Mère Thècle » du nom de
celle qui l’a mis au point. Les onguents dif-
fèrent des pommades et des cérats par leur
excipient résineux.
Les baumes. Le baume du père tran-
quille que l’on trouve dans la « Pharmacopoea
Parisiensis » de 1748 est une préparation à
base d’huile d’olive, de feuilles fraîches et de
Un vieux médicament.
Collection du musée de la
fleurs sèches de plantes médicinales au nombre de vingt à laquelle
Pharmacie de Montpellier. on ajoute trois crapauds. Dans la « Pharmacopée française » de
1937 l’huile d’olive est remplacée par l’huile d’œillette, le nombre
de plantes a diminué (9) et le baume s’appelle désormais « huile de
jusquiame composée ». Cet exemple montre l’évolution des prépa-
rations au cours du temps. Il existe de nombreuses formules comme
le baume du Christ contenant de la liqueur de momie et utilisé
comme vulnéraire dans les anciennes pharmacopées régionales,
écrites sous l’Ancien Régime. Les baumes ont une consistance plus
épaisse que les onguents.
Les emplâtres. L’emplâtre Manus Dei contenant de la litharge
d’or et de l’huile d’olive était utilisée pour ramollir les plaies et per-
mettre la cicatrisation. Les emplâtres sont à base de savon ou de
mélange de corps gras ou de résine. De même l’emplâtre brun de la
Mère est à base de résine et contient de la litharge, de l’huile d’olive,
il est très utilisé comme maturatif et suppuratif. C’est un type d’em-
plâtre brûlé, la coloration brune révélant une altération pyrogénée
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

des corps gras (beurre, axonge, suif, cire jaune ou poix noire). Il est
présent dans la Pharmacopée française de 1837.
Les cérats. Ils sont préparés à base de cire, d’huile et de blanc
de baleine.
Au fur et à mesure des avancées scientifiques, le nombre des
onguents diminua dans les pharmacopées officielles pour laisser la
place aux pommades. Les baumes ne figurent plus dans la VIIIe édi-

26

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Symbole et religion, médecine et pharmacie

tion du Codex1. Quant à l’huile d’olive elle figure tou-


jours dans la Pharmacopée nationale et européenne.
Dans la Pharmacopée européenne (vie édition, 2007,
supplément 6-2), il ne subsiste plus que deux défini-
tions, celle de l’huile d’olive vierge (olivae oleum virgi-
nale) et celle de l’huile d’olive raffinée, suivies de leur
composition en acides gras et en stérols. La densité est
de 0,913, l’huile se trouble à 10 °C et se solidifie en masse
vers 0 °C ; la définition s’est donc affinée au fur et à me-
sure des connaissances scientifiques.
Les feuilles utilisées en phytothérapie
Les feuilles d’olivier sont reconnues, notamment par
Pline l’Ancien, comme facilitant la cicatrisation et cal-
mant les ennuis intestinaux.
Considérées pendant longtemps comme l’un des
meilleurs succédanés du quinquina, les feuilles ont joui
de la réputation de fébrifuge et servaient à combattre les
fièvres intermittentes. Puis, après avoir délaissé leur usage
au cours d’une longue période. on met en évidence aujourd’hui que Ouvrage de M. J.-B. Chomel,
Docteur Régent en la faculté
les feuilles de l’olivier révèlent un potentiel médical extrêmement de Médecine de Paris, 1715.
intéressant : elles présentent actuellement le plus grand intérêt théra- Extrait : Olivier - « …l’arbre qui
peutique par rapport aux autres produits issus de l’olivier. La feuille fournit des fruits dont on tire
par expression une huile qui est
contient des sécoiridoïdes et notamment un hétéroside, l’oleuropéo- emolliente, resolutive, adoucissante
et d’un usage aussi commun dans
side également présent dans le fruit vert. Cette observation renvoie la Pharmacie qu’elle est utile dans
à la fameuse huile omphacine des Anciens obtenue par expression la cuisine, soit pour assaisonner
les salades, soit pour appreter le
à partir des olives vertes. L’oleuropéoside a des effets hypotenseurs, poisson… Les olives dont on tire
la meilleure huile et la plus douce
hypoglycémiants et diurétiques ; cette molécule est vasodilatatrice par la saveur et par son odeur
des coronaires, régulatrice du rythme cardiaque et peut agir sur sont les Picholines qu’on cultive
dans la Provence, l’Italie et les
le diabète léger. De plus, les feuilles ont des vertus diurétiques et Païs chauds… L’huile qui sort la
première est appellee huile vierge,
fébrifuges. À l’analyse, les feuilles contiennent une matière acide elle est preferable aux autres pour
colorante, l’acide gallique, de la matière grasse, de la chlorophylle, les aliments et les remedes… L’huile
qu’on employe si communement
de l’acide malique, de la gomme, de la fibre végétale, des triterpènes dans les emplâtres et dans les
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

onguents, est la plus vieille… L’huile


et des flavonoïdes. Pour les usages en phytothérapie, les feuilles omphacine recommandee par les
sont récoltées au moment de leur plein développement, avant la Anciens pour les hemorragies se tirait
selon eux des olives vertes… »
formation des boutons floraux (mars, avril). Elles sont séchées, frag- Collection privée.
mentées et utilisées en infusion, sous forme d’extrait ou de teinture

1. La Pharmacopée va prendre le nom de Codex, cet ouvrage gouvernemental officiel


évoluera au cours du temps avec la mise à jour des médicaments.

27

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

mère. Ces feuilles sont utilisées en spécialités pharmaceutiques en


phytothérapie sous forme de comprimés par exemple.
Les feuilles fraîches ou sèches sont utilisées en décoction à rai-
son de 30 g pour 1l d’eau, que l’on fait bouillir de 20 à 30 minutes.
Elles sont utilisées pour diminuer une glycémie légère, pour traiter
l’hypertension, l’obésité ou le vieillissement du système vasculaire
du sujet âgé ou augmenter la diurèse. Elles font partie des médecines
alternatives, appelées médecines douces, telles que l’homéopathie,
la phytothérapie, le gemmothérapie.
Pollen et allergie
Cependant, le pollen de l’olivier peut être allergène chez les per-
sonnes sensibles, provoquant rhume, asthme et conjonctivite.

Pour en savoir plus


Chandon, 1941. Contes et récits tirés de l’Illiade et de l’Odyssée. Nathan, Paris.
Charas M., 1676. Pharmacopée royale, Galénique et chymique. Paris, M. DC. LXXVI.
Codex ou Pharmacopée française, VIIIe édition.
Dorvault F., 1867. L’Officine ou Répertoire général de pharmacie pratique,
7e édition, Paris.
Dorvault F., 1945. L’Officine ou Répertoire général de pharmacie pratique, 18e bis édition,
Vigot frères, Paris.
Joubert L., 1592. Pharmacopoea monspeliensis. J. Hugyetan, Lyon, 863 p.
Lemery N., 1761. Pharmacopée Universelle. D’Houry, M. DCC LXI, 5e édit., Paris.
Lemery N., 1716. Le Cours de chymie. Paris.
Pharmacopée européenne, 2007. VIe édition et supplément 6-2.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

28

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

Les tendances de l’oléiculture :


l’olivier social,
culturel et gastronomique
Alexandra Paris
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

D ans le Midi comme ailleurs, l’olivier est synonyme de soleil


et de convivialité. Arbre ancré dans le pourtour méditerra-
néen, il en est l’un des symboles, évoquant l’esprit des populations
présentes depuis des millénaires autour de cette étendue maritime.
Peu importe la langue, la culture ou la religion, l’olivier est univer-
sel. Partout, les conversations qui s’y rapportent sont passionnées,
reflets de l’amour que lui portent tous ceux
qui l’approchent. Son élixir comme ses fruits
sont des mets de choix aux goûts multiples qui
contribuent à propager cet attrait pour la bonne
chère et le partage autour de la table au-delà des
frontières de la Mare Nostrum.
Et même s’il est aujourd’hui un élément
important de l’économie agricole, l’olivier reste
cet arbre sacré, symbole de paix et de longévité,
pilier du monde méditerranéen.
Oliveraie dans le Sud
de la France. L’olivier social
© Afidol – Alexandra Paris
Des oléiculteurs passionnés…
En France, l’olivier est implanté dans les départements du Sud-Est,
où il fait partie d’une agriculture plurielle, et selon les terroirs, il
accompagne la vigne, les arbres fruitiers, les plantes aromatiques, les
primeurs. Partout où il est présent, c’est un arbre chargé de symboles
et de passions.
Dans le monde, plus de 32 millions d’individus cultivent l’olivier.
Dans certains pays du pourtour méditerranéen comme la Tunisie ou
la Palestine, il occupe une place majeure car 20 à 50 % de la popula-
tion vivent de cet arbre. Pourtant, tous ne sont pas agriculteurs. La
culture de l’olivier a cette particularité d’être menée aussi bien au
sein d’une activité agricole que pour les loisirs ou bien pour apporter
des à-côtés financiers ou alimentaires.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Sur les quelque 25 000 oléiculteurs français, moins de 5 000 ont le


statut d’agriculteur. Les autres producteurs ont, la plupart du temps,
des oliviers pour le plaisir soit parce qu’ils en ont hérité soit parce
Photo page précédente :
Amphore à figures noires.
qu’ils ont souhaité s’investir dans cette culture pour pouvoir prépa-
La récolte des olives. rer « leurs » olives et « leur » huile d’olive, soit encore parce qu’ils
Vers 510 avant J.-C.
© RMN-Allemagne, Berlin,
ont souhaité planter quelques oliviers pour agrémenter leur jardin et
Antikensammelung. finalement sont très contents de récolter leurs olives.

30

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

Tous partagent la même passion pour un arbre


dont la culture est plusieurs fois millénaire : l’olivier. Ils
échangent parfois leur savoir-faire, plus rarement leur
matériel ! Une vingtaine de groupements et de syn-
dicats professionnels, généralement limités au terroir
ou au département, rassemblent soit uniquement des
oléiculteurs soit toutes les professions oléicoles du bas-
sin de récolte, à savoir les oléiculteurs, les mouliniers,
les confiseurs… Ces associations font vivre la filière,
sur le plan local, ou départemental, voire régional, et
sont représentées dans des instances administratives.
Elles font de la promotion sous diverses formes : site
Internet, manifestations oléicoles, animations. En unis-
sant des individualités autour d’un même produit, ces
structures créent ainsi une identité de la filière à l’éche-
lon local, et la font connaître dans d’autres régions.
Certes, les réunions du groupement et les manifes-
tations locales permettent de tisser des liens au sein de
la filière, mais tous les producteurs ne les fréquentent
pas. En revanche, il est un lieu où tous les oléiculteurs
se retrouvent chaque année lors de la livraison des
olives : le moulin.
Olivaison : récolte
mécanique des olives.
© Afidol – Alexandra Paris
Terroirs de l’olivier en France L’oléiculture en France :
c’est 50 000 hectares ; 5 millions
d’oliviers ; 25 000 oléiculteurs,
L’olivier est cultivé sur treize départements du Midi de la France : Alpes- dont environ 5 000 agriculteurs ;
de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Ardèche, Aude, Bouches-du- 250 moulins ; 50 confiseurs.
Rhône, Corse-du-Sud, Haute-Corse, Drôme, Gard, Hérault, Pyrénées- Sur les 250 moulins,
49 sont des structures
Orientales, Var, Vaucluse. privées ou coopératives,
Ces territoires très hétérogènes accueillent des modes de culture 200 sont des moulins privés ;
également très divers : ancienne plantation à flanc de coteau, nou- 70 % fonctionnent
en système continu : broyeur à
velle plantation en plaine, parfois en haie fruitière, oliviers épars…
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

marteaux + centrifugeuse,
Environ 20 % environ des oliveraies sont irriguées, mais avec des 20 % en système traditionnel :
variations importantes d’un département à l’autre, par exemple, 9 % meule de granit + presse
hydraulique.
en Ardèche, 34 % dans les Bouches-du-Rhône.
Plus de 24 800 oléiculteurs possèdent moins de deux hectares d’oli-
viers. Seulement 300 exploitations ont plus de 20 hectares d’oliviers ;
la plupart sont en polyculture avec de la vigne ou des arbres fruitiers.

31

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le moulin, lieu de vie…


Le moulin est un lieu de vie essentiel pendant la période hivernale,
lorsque tout le monde préfère rester à la maison. De fin octobre à
début mars, les familles prennent leur quartier d’hiver : on ne sort
que lorsque c’est nécessaire. Et cela est d’autant plus vrai dans les
campagnes. Au cœur de l’hiver – certes méditerranéen –, le moulin
devient un lieu de partage et d’échange.
L’activité du moulin arrive donc à point nommé. Il permet de
se retrouver, après la récolte, en fin de journée et ainsi d’échanger
quelques politesses, les dernières nouvelles du voisinage ou encore
quelques astuces sur les oliviers, les olives ou d’autres cultures. Il
devient, pendant quelques semaines, le lieu où se rassemblent et
discutent les dizaines d’oléiculteurs du coin. Toutes les générations
se rencontrent, oléiculteurs professionnels comme amateurs. Les
amis s’y côtoient comme les personnes qui ne se voient qu’une fois
ou deux par an, au moment d’apporter les olives ! C’est l’occasion
aussi de parler de la récolte, du nouveau matériel de ramassage, du
gel, de la vente, etc. Dans nombre de villages ou petites villes, le
moulin est encore aujourd’hui un lieu où se lient des personnes
d’horizons très divers.
Élément du moulin et du Hors saison de récolte, le moulin est souvent la vitrine de l’oléi-
pressoir. Dessin extrait du
Traité de l’olivier : mémoire culture locale. La plupart des moulins privés ou coopératifs mettent
complet sur la culture de en vente leur production et parfois des produits provençaux, des
l’olivier, la manière de le
tailler pour qu’il rapporte souvenirs, du vin, les touristes y découvrent ainsi toutes les saveurs
annuellement des fruits en de l’huile ou des olives de la région. Les moulins proposent égale-
quantité plus égale, 1783 par
l’Abbé Couture.
ment des expositions – voire des musées – et des animations (dégus-
© Inra tations, visites guidées, films) consacrées à l’olivier et à ses fruits.
Les oléiculteurs se retrouvent
également au moulin lorsqu’ils
viennent chercher leur huile, qui
constitue, pour bien des oléicul-
teurs amateurs, leur « pécule »
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

pour la consommation familiale.


L’huile sert également de cadeau
aux amis. Avec fierté, l’oléiculteur
fait ainsi partager son amour
pour ses oliviers et son huile
devient un élixir précieux !

32

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

Quelques moulins restent encore aujourd’hui seulement des


entreprises de service, dédiées à l’extraction de l’huile des olives
apportées par les oléiculteurs ; les producteurs assurant de leur côté
le stockage et la vente de leur huile. Ainsi, avec l’essor de l’oléiculture
depuis les années 2000, s’est développée la vente d’huile d’olive et
d’olives à la ferme. Ce commerce de proximité est souvent complété
par la vente d’autres produits de la ferme, souvent le vin, les fruits et
légumes… Certains oléiculteurs ont accès aux foires, aux marchés
ou aux salons. Ils parcourent ainsi le pays pour faire partager leur
amour pour l’olivier et faire goûter les produits du Sud de la France.
Aujourd’hui, quelques moulins et domaines participent à des salons
ou des foires en France et parfois à l’étranger. Ils deviennent alors
les ambassadeurs d’une culture typiquement méridionale et créent
une passerelle entre les visiteurs des salons et les régions oléicoles,
leurs habitants, leurs cultures, leurs produits… bien au-delà de
l’huile d’olive.
L’olivier contribue ainsi, à travers tous ces acteurs, à l’économie
des régions concernées en France comme ailleurs. Il est un com-
plément de revenu pour les agriculteurs qui, à l’exception des agri­
culteurs andalous, sont généralement en polyculture, mais aussi pour
les oléiculteurs non-agriculteurs qui mettent ainsi un peu « d’huile
d’olive dans leurs épinards ».
Au-delà de cet aspect économique et social, l’olivier reste l’un des
principaux symboles de la civilisation méditerranéenne.

L’olivier culturel, des utilisations imbriquées


dans la vie quotidienne et spirituelle
Un ancrage méditerranéen
L’oléiculture
L’olivier est une culture étroitement liée à l’histoire de l’agri­culture.
Originaire du Bassin méditerranéen, sa forme sauvage, appelée
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

oléastre pousse sur le pourtour de la Mare Nostrum. Les hommes


ont probablement toujours récolté les fruits de l’oléastre, puis du
fait de leur intérêt pour les produits de cette espèce, ils ont exercé
sur l’oléastre des pressions de sélection conduisant à une nouvelle
forme aujourd’hui connue sous le nom d’olivier. Ainsi, l’oléiculture
remonte à l’invention de l’agriculture. Au Néolithique, l’olivier a été
utilisé pour son feuillage comme aliment du bétail et pour son bois.

33

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Ensuite, vers l’âge du Bronze (1 500 av. J.-C.), s’est développée une
industrie autour de l’huile d’olive, notamment pour le support des
parfums.
L’extraction mécanique de l’huile d’olive
Datées de l’âge du Bronze au Moyen-Orient et en Crète, les traces de
procédés de fabrication de l’huile d’olive sont nombreuses et elles
marquent aussi les premiers pas de la mécanisation dans l’agriculture.
Avant l’âge de Bronze, l’huile était obtenue à l’aide d’un pilon de
pierre, ou bien en foulant les olives, et en les mélangeant à de l’eau
chaude pour faciliter la décantation. Une autre méthode, utilisée en
Égypte, consistait à mettre les olives dans un linge qui était tordu à
l’aide de deux bâtons placés chacun à une extrémité. Dans tous les
cas, la quantité d’huile recueillie était très faible. À l’âge du Bronze,
on pressait les olives avec des rouleaux en pierre maniés à la main ou
avec des bâtis en bois. L’apparition de la meule perpendiculaire date
du ive siècle av. J.-C. et a été localisée en Grèce. Les meules écrasaient
les olives contre la paroi du mortier, ce qui exigeait une construc-
tion bien ajustée. Généralement actionnées par des animaux ou,
parfois, par des hommes, elles étaient appelées « meules à sang ».
Les nouvelles sources d’énergie, telles que le système hydraulique
ou à vapeur, les moteurs à explosion ou l’électricité, vont peu à peu
remplacer l’animal. Toutefois, dans certains pays, des mules sont
encore utilisées pour actionner la meule. Au début de notre ère,
apparaît le pressoir : une pierre est pendue à une poutre, elle appuie
sur les olives triturées, qui ont été écrasées auparavant à la meule. Ces
pierres seront ensuite creusées pour y installer des sacs d’olives, ces
sacs sont appelés les scourtins en Provence.
Les techniques du pressoir et de la meule ont été répandues par
les Romains dans le Bassin méditerranéen, et ont été améliorées
jusqu’au milieu du xixe siècle.
L’huile d’olive, produit phare de la Méditerranée
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Dans l’Antiquité, l’huile d’olive est considérée comme « l’or li-


quide », par les Grecs notamment. Quasi indispensable dans de
nombreux domaines, jeux olympiques, sport, médecine, offrande
aux dieux, éclairage, etc., elle procure de la richesse aux producteurs
et devient un enjeu économique dans tout le pourtour méditerra-
néen. L’huile d’olive était alors l’une des seules matières grasses qui
pouvait être transportée sur de longues distances. Pour cette raison,

34

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

les peuples marchands, comme les Phéniciens, les Grecs et plus tard
les Romains, ont été de grands diffuseurs de la culture de l’olivier.
Des épaves en Méditerranée contiennent des amphores qui ont été
remplies (à l’époque) d’huile d’olive.
Contes, textes et légendes, sculptures, poteries,
hiéroglyphes, pièces de monnaie…, les supports artis-
tiques et culturels de l’olivier sont très nombreux et
prouvent l’attachement des peuples méditerranéens à
cet arbre qui sculpte leurs paysages.
Des usages quotidiens
Depuis l’Antiquité jusqu’aux premières lueurs de l’industrialisation, Savon à l’huile d’olive.
© Fonds de l’Institut
l’olivier est resté un arbre précieux pour les habitants du pourtour du monde de l’olivier – Afidol
méditerranéen.
L’olivier était cultivé pour ses fruits aux multiples utilisations. Les
olives et l’huile étaient des denrées nécessaires en cuisine. L’huile
était un produit indispensable à la vie de tous les jours, elle a été
utilisée tout d’abord comme combustible pour l’éclairage car elle a
la propriété de ne pas fumer – d’où le terme d’huile d’olive lampante
pour une huile impropre à la consommation. Elle a été également
préconisée pour les soins du corps sous l’Antiquité, pour adoucir la
peau et embellir les cheveux. Elle servait également à la conservation
des bois, de l’ivoire, du cuir, à la préparation des tissus et au graissage
des fils.
Ces multiples usages se sont maintenus pendant près de dix
siècles, de 500 avant J.-C. à 476 après J.-C. environ, puis ont été peu
à peu réduits avec l’arrivée des « peuples barbares » venus de l’Est
et du Nord et non familiers de la culture de l’olivier et des usages de
l’huile d’olive. Les premiers usages à avoir disparu sont ceux liés au
rituel du bain et aux soins du corps. Néanmoins, certains bienfaits
de l’huile d’olive ont été « redécouverts » et l’industrie cosmétique
emploie aujourd’hui l’huile d’olive comme base de nombreux pro-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

duits de beauté.
L’omniprésence dans les paysages méditerranéens
et dans la culture
L’olivier et ses bois tortueux dessinent les paysages du Bassin médi-
terranéen, et ce, depuis des siècles. La littérature et les légendes en
témoignent : dans l’Odyssée d’Ulysse, Athéna décrivant Ithaque

35

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

pour rassurer le voyageur égaré dit « là, l’olivier couronnant ce port de


son épais feuillage… » et c’est sous un olivier qu’elle aidera Ulysse à
prendre au piège les prétendants de Pénélope.
Depuis des siècles, le bois d’olivier, symbole de force, est d’une
grande valeur, car il croît lentement, mais reste productif pendant
très longtemps, par conséquent on l’arrache peu.
Et si la place sacrée de l’olivier s’est peu à peu perdue dans les
sociétés modernes, l’olivier a continué à bénéficier d’une place cultu-
relle très importante. Les paysages formés par l’olivier ont largement
inspiré de nombreux artistes peintres dont le plus célèbre est sans
aucun doute van Gogh. Exalté par les troncs torturés de l’arbre-roi,
qui reflétaient peut-être son âme, il a su transmettre les couleurs de
l’olivier et ses lumières comme aucun autre.
Des poètes et écrivains, Giono, Ronsard, La Fontaine, Hugo, ont
également été sensibles aux charmes de l’olivier et de ses paysages.
La littérature contemporaine fait aussi une bonne place à l’olivier,
pour expliquer sa culture ou décliner les utilisations de ces produits
en cuisine.
Symbole d’identité et de mémoire de l’histoire méditerranéenne,
l’olivier est un élément fondamental des paysages méditerranéens
aujourd’hui. Preuve en est son implantation quasi systématique,
des dix dernières années, sur les ronds-points de Provence et du
Languedoc, et sur bien des terrasses même parisiennes qui sou-
haitent ainsi évoquer un peu du soleil du Midi.

De Van Gogh à son frère, avril 1889

« Ah, si tu voyais les oliviers à cette époque-ci… Le feuillage vieil


argent verdissant contre le bleu. Et le sol labouré orangeâtre… Le
murmure d’un verger a quelque chose de très intime, d’immensé-
ment vieux. C’est trop beau pour que j’ose le peindre ou puisse le
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

concevoir ».

Sculptures en bois d’olivier


Le bois de cet arbre est clair, strié de veines plus sombres. Pour faire
ressortir les veines du bois il faut, pour le nettoyer, le frotter avec de
l’huile d’olive.

36

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

Le bois d’olivier est cité dans l’Odyssée, chant viii. Ulysse, de


retour à Ithaque, pour être reconnu de Pénélope, lui rappelle que
leur lit a été taillé par lui-même « dans le bois robuste de l’oléastre et
que mes mains ont incrusté d’or, d’argent et d’ivoire ».
Les pèlerins revenant de Jérusalem emportaient comme souvenir
un objet taillé dans ce bois. Autrefois, il servait à tailler des figurines
divines. Aujourd’hui, le bois d’olivier est valorisé par l’artisanat sous
diverses formes : saladier, couverts à salade, moulin à poivre, etc. Ces
objets sont vendus sur les marchés provençaux.

La vie autour de l’olivier : confréries et fêtes


Le folklore lié à l’olivier est également vivace à travers la multitude
de manifestations qui lui sont dédiées et à travers des confréries.
Les confréries
À gauche :
La première confrérie des chevaliers de l’olivier a été créée à Nyons La confrérie des chevaliers
en 1964 sous l’impulsion de Pierre Bonnet, ingénieur agronome spé- de l’Olivier de Nyons :
leur cape et leur emblème,
cialisé en oléiculture, et de René Duchet, ancien préfet et secrétaire un rameau d’olivier.
d’État et du général de Vernejoul, qui fut le premier grand maître de © Afidol – Alexandra Paris
la confrérie des chevaliers de l’olivier de Nyons. En effet, de nom- À droite :
breux oléiculteurs ou passionnés de l’olivier s’inquiétaient du déclin Dégustation d'huile d'olive
de l’oléiculture suite au gel de 1956 qui fut particulièrement destruc- lors du concours général
agricole à Paris.
teur, et ils ont souhaité sauvegarder ce patrimoine. © Christian Pinatel
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

37

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le serment de l’impétrant chevalier de l’olivier

Pour devenir chevalier de l’olivier, il faut être présenté par un parrain


et être agréé par la majorité des membres du Grand Conseil désigné
par l’Assemblée générale. L’intronisation du nouveau chevalier a lieu
au cours d’un chapître. L’impétrant doit d’abord prêter le serment de
défendre l’olivier et toutes les valeurs matérielles et spirituelles qu’il
représente. Conduit par son parrain, il goûte symboliquement une
olive et boit quelques gorgées de vin. Le Grand Maître de la confrérie
l’accueille par un petit discours de bienvenue et lui donne l’accolade
avec son rameau d’olivier. S’il se montre particulièrement méritant,
le nouveau chevalier peut ensuite être revêtu de la cape ; il devient
ainsi majoral. Il participe alors aux travaux du Grand Conseil. Chaque
année, une dizaine de personnes venant d’horizons les plus divers
viennent grossir les rangs de la confrérie.
« Avec joie j’accepte de faire partie de la confrérie des chevaliers de l’oli-
vier. Je promets par mes paroles, mes écrits, mes actes, de me conduire
en franc chevalier, de défendre l’olivier et toutes les vraies richesses, maté-
rielles et spirituelles qu’il nous apporte, de pratiquer les vertus qu’il repré-
sente, d’aider dans toute la mesure de mes moyens à la maintenance
et à la promotion de sa culture ; d’œuvrer pour l’olivier, nourriture et
lumière, pour l’olivier, symbole d’abondance, de sagesse et de paix, sym-
bole de vie ».

Ce type de confrérie a essaimé dans d’autres régions : aux Vans


en Ardèche en 1980, à Aix-en-Provence dans les Bouches-du-Rhône
en 1990, à Montpellier dans l’Hérault en 1992 et même à Baena en
Espagne en 2000.
Réunissant des professionnels de la filière comme des passion-
nés de l’olivier, les confréries contribuent à essaimer la culture de
l’olivier auprès du grand public lors des intronisations et des repré-
sentations diverses qu’elles organisent. Leur rôle est de promouvoir
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

l’olivier sur le plan national et international. Les nouveaux cheva-


liers viennent ainsi renforcer le réseau d’ambassadeurs et préserver
l’image de l’arbre mythique.
Les fêtes oléicoles
Aujourd’hui, plus d’une vingtaine de fêtes ou foires, au moins, sont
consacrées à l’olivier. Chaque bassin de production fête ainsi l’huile

38

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

nouvelle, les olives ou tout simplement l’olivier et invite profession-


nels comme amateurs de bons produits à découvrir les produits du
terroir.
Ces manifestations contribuent à l’animation des régions médi-
terranéennes notamment en automne ou en hiver. Elles attirent
curieux, touristes et passionnés, proposent des rencontres entre les
professionnels et le grand public, des marchés, des conférences, des
expositions, des concours d’aïoli, etc. Pour organiser ces manifesta-
tions, les municipalités, les associations culturelles et les confréries
sont souvent impliquées en collaboration avec les syndicats ou les
groupements de producteurs locaux.

Les fêtes de l’olivier

Janvier - L’olive et l’huile d’olive en fête à Buis-les-Baronnies (Drôme),


salon de la truffe et de l’huile d’olive du terroir à Pélissanne (Bouches-
du-Rhône), journée porte-ouverte des moulins des Alpes-Maritimes
Février - Fête de l'Alicoque à Nyons (Drôme)
Mars - Olivades à Lurs (Alpes-de-Haute-Provence), fête de l’olivier à
Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes), desta di Oliu Novu à Sainte-Lucie-
de-Tallano (Corse)
Avril - Fête de l’olive à Saint-Paulet-de-Caisson (Gard), les olivettes occi-
tanes à Clermont-l’Hérault (Hérault), foire de Brignoles (Var), journée de
l’olivier à Aups, fête de l’olivier à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence)
Mai - Foire du Paillon à Contes (Alpes-Maritimes)
Juin - Olivea à Grasse (Alpes-Maritimes), fête départementale de l’oli-
vier (Alpes-de-Haute-Provence)
Juillet - Fête de l’olivier aux Vans (Ardèche), fête de l’olive à Bize-
Minervois (Aude), les olivades à Nyons (Drôme)
Septembre - Fête de l’olivier à Ollioules (Var), fête de l’olive cassée à
Mouriès (Bouches-du-Rhône)
Octobre - Fête de la Lucques à Saint-Jean-de-la-Blaquière (Hérault),
fête de l’olivier et des moulins à huile à Caromb (Vaucluse)
Novembre - Fête de l’olivier à La Farlède (Var)
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Décembre - Fête de l’huile nouvelle de la Vallée-des-Baux à Mouriès


et fête de l’huile nouvelle AOP à Aix-en-Provence (Bouches-du-
Rhône), fête de l’olive piquée à Nyons (Drôme), fête de l’olivier
à Corconne et fête de l’huile de l’Avent (Gard), fête de l’huile de
Noël à Clermont-l’Hérault (Hérault), fête de l’huile nouvelle à Millas
(Pyrénées-Orientales).

39

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Dans certains terroirs, les habitants sont conscients de l’impor-


tance de la conservation des usages, des savoir-faire familiaux et de
l’histoire de l’agriculture et des techniques. Pour les sauvegarder, ils
proposent des itinéraires thématiques autour de l’olivier, comme
la route de l’olivier des Baronnies ou de la vallée des Baux, les sen-
tiers de randonnée…, ou des espaces muséographiques, comme les
musées de l’olivier à Nyons, à Volx, à Cagnes-sur-Mer, Les Mées ;
les vieux moulins à Nyons (qui présentent l’histoire familiale autour
de deux moulins du xviiie et xixe siècles et d’une savonnerie), la
scourtinerie à Nyons, la maison de la garrigue et des terroirs de l’oli-
vier à Marguerittes dans le Gard, la maison de l’olivier à Clermont-
l’Hérault. Tout cela contribue à tisser une toile culturelle et gour-
mande autour de l’olivier et ainsi faire perdurer toute sa symbolique.

Une histoire culinaire mouvementée


Dans l’Antiquité, la volonté des Grecs comme des Romains était de
se démarquer des « peuples barbares ». Cette volonté se retrouvait
dans l’alimentation fondée sur la convivialité, sur le choix des ali-
ments consommés et sur la diététique. Leurs aliments provenaient
des produits récoltés et transformés : le pain, l’huile d’olive, le vin.
Leur régime alimentaire était assez varié : céréales (blé, orge, millet),
légumes (fève, pois chiche, lentille, navet, pourpier…), condiments,
viandes (bovin, porcin, ovin, gibier, volaille), poisson, fromage, miel
et vin. Les Grecs comme les Romains étaient de grands consomma-
teurs d’huile d’olive.
Durant tout le Moyen Âge, l’huile d’olive était très utilisée,
comme matière grasse, dans tout le pourtour méditerranéen et
notamment par les Musulmans.
Jusqu’au xixe siècle, comme pour la plupart des autres aliments,
les matières grasses étaient de production locale, sauf exception
comme le commerce de l’huile d’olive en Méditerranée durant la
période antique. D’où une dualité dans la consommation entre l’Eu-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

rope du Sud, avec l’huile d’olive, et l’Europe du Nord, utilisant les


graisses animales et les huiles de lin ou de chanvre.
Au xixe siècle, apparaissent une cohorte de produits nouveaux.
Les huiles de graines importées, telles que l’huile d’arachide et de
coprah, concurrencent fortement les huiles traditionnelles comme
l’huile d’olive et l’huile de noix. Les margarines (fabriquées à partir
de plantes tropicales) et la végétaline sont souvent consommées à

40

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

la place du beurre et des graisses animales. Par ailleurs, la mise sur


le marché européen des huiles de graines a permis de répondre aux
besoins des industriels en quantité, puis aux exigences de prix pour
la fabrication de savons, lubrifiants des machines… Pour ces mêmes
raisons ont été introduites les huiles de palme et de coco.
Au début du xxe siècle, l’utilisation de l’huile dans l’industrie a
baissé, mais, parallèlement, la consommation d’huile pour la cuisine
a augmenté, notamment en friture, ou assaisonnement. En France,
cette hausse a profité à l’huile d’arachide. Dans le même temps, la
fraude sur l’huile d’olive était suspectée, et à ce propos une bou-
tade de Léon Say (ministre des Finances en 1872-1873) circulait :
« L’arachide, petite graine qui sert à produire de l’huile d’olive ».
Au cours du xxe siècle, la consommation alimentaire a été pro-
fondément modifiée avec l’intensification de la production agricole,
l’essor des industries agroalimentaires et le renouvellement culinaire
inspiré par la multiplication des voyages et les vagues d’immigration.
Ces modifications ont touché aussi les huiles végétales. Si l’arachide
est restée largement dominante sur le marché français jusque dans
les années 1970, l’huile de tournesol a occupé la première place des
huiles végétales pendant plus de vingt ans, avec plus de 70 % de part
de marché. Simultanément, la consommation d’huile d’arachide a
beaucoup baissé et ne représentait plus que 3 % du marché français
en 2010.
Après une lente diminution, la consommation d’huile d’olive s’est
accrue de manière exponentielle à partir du milieu des années 1980
grâce notamment à la redécouverte des bienfaits du régime médi-
terranéen dont elle est l’une des composantes essentielles. Ainsi, en
vingt ans, sa consommation est passée de 20 000 à 100 000 tonnes.
Elle est aujourd’hui consommée par 65 % des Français.
Dans des proportions moindres, la consommation d’huile d’olive
s’est également développée dans des pays non producteurs comme
la Grande-Bretagne, l’Allemagne ou les États-Unis.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les atouts et usages en cuisine


L’huile d’olive, un pur jus de fruit ! Parallèlement, l’image de
l’huile d’olive s’est peu à peu modifiée. Pur jus de fruit, elle est au-
jourd’hui considérée comme une matière grasse de qualité voire
un condiment. C’est la seule huile végétale, parmi les principales
commercialisées (tournesol, arachide, mélanges d’huiles de colza

41

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

et de tournesol, de pépins de raisin…) qui soit « vierge » c’est-à-


dire un pur jus de fruit, extrait sans aucun traitement chimique ou
thermique. L’huile d’olive, présente à l’état naturel dans les olives,
est simplement extraite, selon des méthodes anciennes, par pression
ou centrifugation. Ces techniques conservent toutes les propriétés
des olives et confèrent des goûts et des arômes différents à l’huile en
fonction des variétés utilisées, de leur maturité et des terroirs.
L’art de la dégustation. Le message traduisant la diversité
des huiles pourrait être : « pas une huile d’olive, mais des huiles
d’olive ». Avec plus de mille variétés répandues dans le monde, une
multitude de terroirs et de savoir-faire, les huiles d’olive offrent une
palette aromatique vaste.
C’est dans cet esprit que la dégustation de l’huile d’olive s’est
largement développée. En premier lieu, les professionnels ont créé
des jurys de dégustation, notamment dans le cadre des agréments
d’appellation d’origine protégée, mais également, dans les moulins
notamment, pour contrôler la qualité (voir « Paradoxe entre goût et
qualité », C. Pinatel). L’Association française interprofessionnelle
de l’olive (Afidol) –­ et avant elle le Comité économique agricole de
l’olivier – a ainsi mis en place des formations professionnelles pour
l’apprentissage et l’approfondissement de la dégustation des huiles
d’olive. Depuis l’année 2008, ces formations sont également propo-
sées pour la dégustation des olives.
Introduite par l’Institut du monde de l’olivier, l’initiation du
grand public aux différents goûts des huiles d’olive s’étend à travers
des « bars à huile », des ateliers du goût, des dégustations sur les
lieux de production… La plupart des moulins et des domaines pro-
posent, aujourd’hui, a minima une dégustation de leurs produits.
Au-delà des critères de choix d’une huile, la dégustation fournit
également aux consommateurs les différents modes d’emploi de
l’huile achetée.
Une place prépondérante en cuisine. Depuis quelques années,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

de nombreux chefs affichent leur préférence pour l’huile d’olive. Les


huiles d’olive du Midi de la France ne sont pas toujours très connues,
les huiles italiennes restant souvent une référence en matière de
qualité (ou un prix de référence bien plus bas ?). De grands chefs
défendent tout de même ce produit, comme Christian Étienne ou
Jacques Chibois. Peut-être qu’un jour, grâce à la promotion par l’Afi-
dol, la connaissance des huiles d’olive de France sera-t-elle ensei-

42

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

gnée dans les établissements hôteliers ? Des livres de recettes sont


publiés par de grands chefs étoilés, ambassadeurs de l’huile d’olive
ou de la cuisine méditerranéenne, ou de dignes anonymes. Au fil des
ans, les recettes se sont éloignées des sentiers battus et des typiques
ratatouilles ou autres plats provençaux pour explorer de nouveaux
domaines.
Arômes et goûts :
les ingrédients majeurs de l’huile d’olive
Les arômes essentiels sont le fruité mûr, le fruité noir et le fruité vert.1
Goût subtil – Fruité mûr. Arômes de fruit (sec, mûr…) ou flo-
raux avec de légères notes végétales et parfois une amertume et/ou
une ardence qui peuvent être de faibles à modérées.
Goût à l’ancienne – Fruité noir. Huiles généralement très
douces avec des arômes de sous-bois, de cacao, de champignons,
sans trace de végétal.
Goût intense – Fruité vert. Arômes herbacés et végétaux (to-
mate, herbe…) avec une amertume et/ou une ardence qui peuvent
être de faible à marquée.
Des produits d’exception
Des variétés d’oliviers spécifiques au sud de la France, des vergers
aux reliefs gorgés de soleil, cultivés par des oléiculteurs passionnés,
les huiles d’olive de France sont élaborées dans 250 petites unités de
productions artisanales. Ce sont autant de facteurs qui font de ces
huiles d’olive, des produits d’exception riches de mille et un arômes
comme autant de trésors pour ensoleiller notre cuisine.
Au sein de cette grande diversité se déclinent trois grandes
familles aux goûts très variés, mais dont l’identité commune est issue
de la passion et du savoir-faire d’artisans mouliniers.
Goût intense. Les huiles d’olive généralement issues d'olives
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

récoltées en cours de maturité ont le plus souvent des arômes her-


bacés et végétaux (tomate, herbe…) avec une amertume et/ou une
ardence qui peuvent être de faibles à marquées.
Goût subtil. Huiles d’olive généralement issues d'olives récoltées
à maturité qui présentent généralement des arômes de fruits (secs,

1. Thème approfondi par C. Pinatel : « Paradoxe entre goût et qualité ».

43

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

mûrs…) ou floraux avec de légères notes végétales et parfois une


amertume et/ou une ardence qui peuvent être de faibles à modérées.
Goût à l’ancienne. Huiles d’olive issues d’olives qui ont subi un
stockage avant extraction de l’huile qui entraîne un début de surma-
turation des fruits. Ces huiles sont généralement très douces avec
des arômes de sous-bois, de cacao, de champignons, sans trace de
végétal.
Choisir la bonne huile d’olive,
Pressoir. Traité de l’olivier :
mémoire complet sur la
c’est choisir l’huile d’olive que l’on aime
culture de l’olivier, la manière
de le tailler pour Qu’il L’huile d’olive s’utilise aussi bien crue que cuite et supporte très bien
rapporte annuellement des la chaleur. Elle sert à l’assaisonnement des salades, à la cuisson des
fruits en quantité plus égale,
1783 par l’Abbé Couture. œufs ou des frites comme à la confection de desserts. En plus, asso-
© Inra ciée aux aliments du régime méditerranéen, elle permet de garder un
corps en bonne santé. Chaque huile a une typicité qui
se marie mieux avec tel ou tel plat.
Les huiles fines et aromatiques (goût subtil) :
pour les salades, les légumes cuits, les mayonnaises,
les sauces fines.
Les huiles végétales et parfumées (goût intense) :
pour les féculents, les viandes, les poissons, la brus-
chetta (tranche de pain grillé avec des tomates et de
l’huile d’olive).
Les huiles d’olives maturées (goût à l’ancienne) :
pour les légumes crus, les crustacés…
Les huiles d’olive sont ainsi devenues un ingrédient
à part entière qui apporte sa personnalité dans l’élabo-
ration de plats faciles, – des œufs au plat ou une purée
à l’huile d’olive – ou plus difficiles à élaborer, mais tous
aussi gourmands !
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Comme ingrédient, l’huile d’olive est ainsi associée


à l’élaboration de la recette, elle ne sert plus simple-
ment de matière grasse pour la cuisson, mais de faire-
valoir aux autres ingrédients. L’huile d’olive étant un
ingrédient typiquement méditerranéen, c’est le plaisir
qui prime même si il est conseillé d’harmoniser la typi-
cité de l’huile avec celle des autres ingrédients.

44

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les tendances de l’oléiculture

Présentation globale des caractéristiques


sensorielles de quelques huiles du Sud de la France*

Les huiles d’olive ont des caractéristiques et notamment des arômes


particuliers, liés au terroir et à la variété, qui font de chacune une huile
d’olive typique et originale.
Aix. Huile d’olive d’Aix-en-Provence (AOP). Huile ardente avec des
arômes intenses d’artichaut.
Aglandau. Huile d’olive d’Aglandau (Région Provence-Alpes-Côte
d’Azur) ; huile légèrement ardente et amère avec des arômes d’artichaut
très prononcés.
Baux. Huile d’olive de la Vallée des Baux-de-Provence (AOP) ; huile légè-
rement ardente avec des arômes de poivre vert et d’artichaut cuit (léger
arôme de truffe et de vanille).
Corse. Huile d’olive de Corse, Oliu di Corsica (AOP) ; huile douce aux
arômes d’herbe fraîche, de légumes cuits, de fruits secs (principalement
noisette), de menthe voire de myrte et de ciste (odeurs du maquis) et
de pâtisserie.
Haute-Provence. Huile d’olive de Haute-Provence (AOP). Huile aux
arômes dominants d’artichaut cru avec des notes d’abricot et de ba-
nane et une amertume plus ou moins marquée.
Nice. Huile d’olive de Nice (AOP) ; huile assez douce avec des arômes
d’amande fraîche, d’anis et d’artichaut cru.
Lucques. Huile d’olive de Lucques (Languedoc-Roussillon). Huile douce
avec des arômes de camomille.
Nîmes. Huile d’olive de Nîmes (AOP). Huile d’olive aux arômes intenses
de fruits rouges, de prunes, d’ananas, avec une pointe d’amertume et
une ardence nette.
Nyons. Huile d’olive de Nyons (AOP). Huile douce avec des arômes prin-
cipaux de pomme verte type Granny Smith et de noisette et un aspect
beurré en fin de bouche.
Olivière. Huile d’olive d’Olivière (Aude, Hérault). Huile légèrement amère
avec des arômes de plant de tomate, de basilic.
Provence. Huile d’olive de Provence (AOP). Huile aux arômes herbacés,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

artichaut cru, pouvant être complétés par des arômes de banane, de


noisette, d’amande fraîche et de feuille de tomate. En fin de bouche, le
piquant peut être présent.

* ces caractéristiques sont précisées par les données objectives présentées


par C. Pinatel pages 105-106

45

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Pour en savoir plus


Généralités
Amouretti M.C., Comet G., 1998. Le livre de l’olivier. Edisud, Aix-en-Provence, 168 p.
COI, 1997. Encyclopédie mondiale de l’olivier. Madrid, C.O.I., 479 p.
De Barry N., 1999. L’ABCdaire de l’huile d’olive. Flammarion. Paris, 119 p.
Laurent A., Barnouin A., 2000. L’olive. Genève, Aubanel : 139 p.

Histoire
Brun J.P., 2004. Archéologie du vin et de l’huile. De la Préhistoire à l’époque hellénique.
Paris, Éditions Errance, 1 226 p.
Brun J.P., 2003. Le vin et l’huile dans la Méditerranée antique. Viticulture, oléiculture
et procédés de fabrication. Paris, Editions Errance, 238 p.
Padilla M., Oberti B., 2000. Alimentation et nourritures autour de la Méditerranée.
Montpellier, Karthala-CIHEAM, 262 p.
Verdié M., 1990. La civilisation de l’olivier. Michel A., 167 p.

Cuisine
Institut du monde de l’olivier, 2001. Huile d’olive vierge et gastronomie. Nyons, 36 p.
Psilakis M., Psilakis N., 2000. La civilisation de l’olivier et de l’huile d’olive. Le secret
de la bonne santé et conseils pour son utilisation correcte. Heraklion, Karmanor, 175 p.
Étienne C., 2000. La magie de l’huile d’olive. Aix-en-Provence, Edisud, 136 p.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

46

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

L’histoire de l’olivier
reconstituée à partir
de données génétiques
Catherine Breton et André Bervillé
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L ’olivier cultivé et l’oléastre coexistent aujourd’hui dans le Bassin


méditerranéen. L’oléastre (Olea europaea subsp. europaea
var. sylvestris) est la forme sauvage de l’espèce olivier (Olea europaea
subsp. europaea var. europae).

Le dogme à propos de l’histoire de l’olivier


Il s’est établi un dogme selon lequel l’olivier a son origine au Proche-
Orient, dans l’est de la Méditerranée, et donc qu’à l’Ouest l’oléastre
ne serait que féral, c’est-à-dire échappé puis ensauvagé depuis les
cultures. Des travaux récents prouvant une origine à l’ouest de la
Méditerranée ont remis en cause ce dogme.
Quel est ce dogme de l’origine unique à l’Est ? Pourquoi le
dogme est-il maintenant rejeté ?
L’olivier appartient au genre Olea formé d’un complexe d’espèces
et de sous-espèces. Une des sous-espèces de l’Olea est présente à
l’Est dans le Croissant fertile – région où le blé et les céréales ont
été domestiqués. Cette sous-espèce a reçu plusieurs appellations :
« olivier cuspide », O. cuspidata, car la feuille est pointue en forme
Photo page précédente :
Olivier lucques .
de corne ou « olivier ferrugineux », O. ferruginea, ou « olivier à
© Inra – Jean Weber feuilles jaunes », O. chrysophylla ou brown olive en anglais, du fait
de la couleur du dessous des feuilles. Le nom actuel de cette sous-
Oléastre à port juvénile espèce est O. e. subsp. cuspidata.
et oléastre à port adulte.
Planche tirée de Par analogie à l’histoire de la domestication des céréales, des
Petri Andrea Matthioli, botanistes ont écrit que l’olivier serait dérivé de l’Olea cuspidata,
senensis medici, Venise,
Officina Valgrisiana, 1565. et qu’il aurait alors progressé vers l’Ouest où il aurait évolué vers
des formes ensauvagées (ou férales) que
sont les oléastres. Ce paradigme est omni-
présent dans la littérature et sur les sites
Internet.
Pourtant, l’existence d’autres espèces
avait été signalée : Olea europaea subsp.
laperrinei a été observé au Sahara dans le
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Hoggar et l’Aïr. Très ressemblant à l’olivier


par le feuillage, il croît dans les montagnes
du Sahara dans des milieux caillouteux,
les gorges et les falaises. De plus, au sud du
Maroc, on trouve un olivier au feuillage plus
fin en populations denses, à floraison précoce
et dont les fruits sont plus petits et souvent en

48

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

grappe, il est nommé O. e. subsp. maroccana. Ces populations sont


entremêlées aussi avec l’oléastre.
L’origine de l’olivier a été clarifiée depuis quelques années à la suite
d’une étude dans l’ensemble du Bassin méditerranéen consistant à
appliquer à l’olivier la méthode de marquage moléculaire de l’ADN
extrait des feuilles. Un groupe de chercheurs espagnols, italiens et
français a participé à ce projet au cours des années 1995 et 2000.

Quelle est l’histoire du taxon « olivier »


et quelle est celle de l’oléastre ?
Que savait-on alors sur l’olivier à cette époque ?
L’oléastre était considéré jusqu’en 1995 comme un taxon sans inté-
rêt par les chercheurs et les oléiculteurs. Les origines des variétés
actuelles étaient totalement ignorées. Les restes archéologiques
trouvés au hasard des fouilles étaient peu nombreux et souvent mal
conservés, et les connaissances sur la domestication des plantes
étaient très limitées. La tendance des années 1990 était d’imaginer
que les usages actuels de l’olivier étaient les mêmes que dans le passé,
ignorant les objectifs de nos ancêtres, autres que pour l’usage alimen-
taire, pour le domestiquer. Or, les archéologues ont découvert dans
les vestiges archéologiques des traces d’olivier (noyaux, bois carbo-
nisés) beaucoup plus anciennes que la technologie de la préparation
de l’huile, qui elle est apparue à l’âge du Bronze (3 500 av. ­J.-C.). Il a
donc fallu reconsidérer la question de la domestication de l’olivier.

L’hypothèse des zones refuges


Dans les années 2000, les chercheurs ont prouvé la présence de nom-
breuses espèces forestières chênes, frênes, hêtre, au moment des
périodes glaciaires en Europe. Seuls avaient survécu les individus
localisés dans des zones aux températures plus clémentes, appelées
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

« zones refuges ». On se doute donc que pour l’olivier, espèce ther-


mophile, ces zones refuges étaient localisées dans des régions plus
méridionales que pour le chêne ou le hêtre. Ainsi, les régions du sud
du Maroc et du Maghreb étaient pressenties comme zones refuges
de l’olivier, mais, faute de données archéobotaniques, ce n’était
pas prouvé. Il fallait donc identifier les zones refuges de l’olivier, et
échantillonner des arbres dans toute la zone de l’oléastre.

49

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Taxonomie de l’olivier.
Le genre Olea est subdivisé en 3
sous-genres selon la répartition
géographique des espèces.
La section Olea comprend les
sous-espèces de l'Olea europaea
présentes dans le monde entier
(sauf en Amérique).
Elle comprend aussi les
espèces de l'Afrique du Sud,
de l'Afrique de l'Est
et de Madagascar.
(d'après C. Breton, thèse 2006)
Un échantillonnage complet,
dans toute la zone de l’oléastre
Pour retracer l’histoire de l’olivier « cultivé » et de l’oléastre sauvage,
il fallait donc s’appuyer sur un échantillonnage complet. Ainsi, les
échantillons du genre Olea, a priori de plants sauvages, ont été rassem-
blés au cours de prospections entre les années 1995 et 2000, en prove-
nance d’Iran, d’Afrique orientale et d’Afrique occidentale, d’Asie, des
pays méditerranéens, des jardins botaniques de Londres et de Madrid.
L’objectif était de connaître les relations de parentés, appelées relations
phylogénétiques, entre les taxa des individus prélevés.
Le genre Olea avait été classé selon la taxonomie botanique à
partir des différences morphologiques des fruits, des feuilles et
Répartition
des sous-espèces
du genre Olea
dans le monde.
Olea europaea est présente de la
Chine à l'Afrique
(voir correspondance avec la partie
droite de la figure "Taxonomie")
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

50

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

de leur localisation géographique. Or cette classification faite en


Angleterre sur des échantillons d’herbier s’est révélée insuffisante,
car elle ne prenait pas en compte de nombreux caractères de couleur
des feuilles, des fruits frais, des noyaux et du port des arbres.
Relations phylogénétiques,
emploi des marqueurs de l’ADN
Pour mettre en évidence des relations phylogénétiques, on compare
les longueurs, ou les séquences, de petits fragments d’ADN (appelés
marqueurs) des individus examinés. Si, chez chaque individu, les
deux marqueurs venant de chacun des parents sont différentiables,
ces marqueurs sont dits « co-dominants » ; si un seul d’entre eux
est identifié, il est dit « dominant » et l’on ne sait pas alors de quel
parent il provient.
Dans chaque cellule végétale, sont présents deux types d’ADN :
l’ADN du noyau qui provient pour moitié de chaque parent et les
ADN du cytoplasme, comprenant l’ADN des mitochondries (cen-
trale énergétique de la cellule) et l’ADN des chloroplastes (capteurs
de l’énergie lumineuse pour fabriquer des sucres qui seront respirés
par les mitochondries). Chez l’olivier, les ADN du cytoplasme pro-

Hérédité des ADN nucléaires et cytoplasmiques

Les marqueurs moléculaires dits dominants ne permettent pas


de savoir si un individu porte les deux allèles Dd des parents, ou
s’il est homozygote DD, car on ne voit que « D ». Par exemple, chez
l’homme, les individus à yeux bleus sont dd et donc les individus
à yeux noirs sont DD ou Dd. On est sûr qu’ils sont Dd si la maman
est aussi dd et si le couple a deux enfants dont l’un porte des yeux
bleus et l’autre des yeux noirs. Tout ceci pour faire comprendre que
si l’on classe les individus sur la couleur des yeux on ne constituera
qu’un groupe génétique homogène, celui aux yeux bleus dd, alors
que celui aux yeux noirs sera constitué soit d’individus Dd soit DD.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

On dit que les individus DD et Dd sont similaires et non identiques.


Cette notion de similarité est très importante car dans la plupart
des analyses faites avec des marqueurs dominants, les groupes sont
constitués sur la base de similarités. Certains groupes sont donc hété-
rogènes au niveau génétique et il faut donc être prudent sur les
conclusions issues de l’observation du phénotype.

51

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

viennent exclusivement du parent femelle, ils permettent de suivre


la filiation maternelle et donc les déplacements des fruits (noyaux)
et des boutures. L’ADN nucléaire reflète lui les flux de pollen. Les
marqueurs moléculaires sont donc importants pour reconstruire la
phylogénie des espèces du genre Olea mais aussi pour examiner leur
répartition en fonction de la localisation géographique des individus
collectés. La structure des populations reflète leur histoire de vie, elle
est donc un élément clé pour comprendre les événements anciens
qui ont pu se produire.

L’ADN de l’oléastre, sa répartition géographique


L’ADN du chloroplaste : des profils issus des marqueurs
Les marqueurs moléculaires du chloroplaste et de la mitochondrie
ont révélé chez l’oléastre du Bassin méditerranéen quelques profils
de l’ADN du chloroplaste : les répartitions géographiques de ces
profils d’ADN sont très hétérogènes entre l’est et l’ouest du Bassin
méditerranéen. La limite est-ouest passe entre la mer Tyrrhénienne
et la Cyrénaïque. À l’Ouest, certains des marqueurs ne sont pré-
sents qu’au Maghreb et dans les trois grandes îles, Corse, Sardaigne
et Sicile. À l’Est, il n’existe qu’un seul marqueur. Cette répartition
des marqueurs entre l’Est et l’Ouest démontre que l’oléastre est
bien ­autochtone à l’ouest de la Méditerranée et également à l’est,
mais que ce sont des formes génétiquement différentes. Cette diffé-
rence de cytoplasmes entre l’Est et l’Ouest était totalement ignorée
jusqu’aux conclusions de cette étude, il a fallu ensuite chercher des
explications dans l’histoire de vie de l’oléastre.
Ce résultat a été critiqué car l’échantillonnage des individus
avait été plus restreint à l’Est – pour des raisons géopolitiques –
qu’à l’Ouest, où les prospections avaient permis de recueillir des
échantillons de tous les pays et notamment d’Algérie, en Kabylie, et
de Sicile du fait de collaborations avec des collègues étrangers.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Évolution des techniques


et exigences de l’échantillonnage
Les progrès des techniques de marquage moléculaire ont permis de
délivrer des marqueurs co-dominants beaucoup plus simples à révé-
ler et plus informatifs pour la structure des populations. De plus, ces
marqueurs permettent d’établir des relations génétiques entre indi-

52

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

vidus et de reconstituer leur ancêtre le plus probable. Ces techniques


ne constituent généralement pas le facteur limitant des recherches,
et, le plus souvent, c’est l’étape de la récolte du matériel végétal dans
les forêts méditerranéennes qui est la plus délicate. Malgré les écueils
géopolitiques et financiers, environ 2 000 individus d’olivier et d’olé-
astre ont été collectés au cours d’une prospection entre 2002 et 2006,
pour l’ensemble du Bassin méditerranéen, dont quelques-uns avec
des fruits ; bon nombre d’entre eux ont été enregistrés en herbier
avec une fiche descriptive.

Populations ancestrales et zones refuges


Génotypage de 1 000 individus oléastres
Environ un millier d’individus ont été choisis à l’issue de ces deux
campagnes de prospection (1995-2000 et 2002-2006), ce sont des
oléastres a priori, c’est-à-dire prélevés dans un site naturel sans
traces d’anciennes cultures. Ils ont été caractérisés avec les mêmes
marqueurs codominants à une vingtaine de locus dispersés dans le
génome de l’olivier, on dit qu’ils sont « génotypés ». Cette étape
de génotypage est maintenant effectuée en routine par des robots,
alors que dans les années 2003-2005, elle était encore réalisée avec
des gels coulés et détectés à l’œil nu – dont la précision de lecture
était tout aussi bonne.
Populations ancestrales
et zones refuges de l’oléastre
Nous avons recherché si l’apparentement des individus permet-
tait de remonter à des « populations ancestrales » qui se seraient
déployées après la dernière glaciation. Les données des marqueurs
de chaque individu ont été analysées in silico sans a priori quant à
l’appartenance de l’individu considéré à une population ancestrale
quelconque, et sans prendre en compte le flux de gènes. Autrement
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

dit, le programme de calcul a regroupé les individus d’après leur


apparentement génétique sans tenir compte de leur proximité dans
une même population ou d’un fort éloignement géographique à
3 500 km l’un de l’autre. Le programme ne connaît pas a priori – et
l’observateur non plus – le nombre de groupes des « populations
ancestrales ». Le résultat attendu d’après les études sur les autres
espèces était de l’ordre d’une ou deux populations ancestrales – une

53

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

à l’Est et une à l’Ouest –, et le résultat obtenu donne


un optimum de 11 populations ancestrales. Les popu-
lations ancestrales ainsi définies rassemblent près de la
moitié des individus collectés, les effectifs de ces popu-
lations varient de 180 à 6 individus. Chacune de ces
populations ancestrales est composée d’individus
collectés dans un même site ou sur des sites proches ;
il y a donc une grande cohérence entre la locali-
sation géographique et chaque population ances-
trale, ce qui montre que les flux de gènes entre
les populations ont été faibles. Les autres indivi-
dus sont intermédiaires entre les i­ndividus de ces
Dessin extrait d’une planche trois populations.
d’Olea europaea, Cayet rouge.
Planche tirée du Traité À l’Est, trois populations ancestrales sont répertoriées.
des arbres et arbustes En Israël et en Palestine une seule population ancestrale a été
qui se cultivent en France
en pleine terre, par identifiée – comme on s’y attendait –, en revanche en Turquie et à
M. Duhamel du Monceau. Chypre, trois populations différentes ont révélé une diversité éle-
À Paris, chez H.L. Guérin
et J.F. Delatour, 1745. © Inra vée, supérieure à ce que l’on supposait. À l’Ouest, huit populations
ancestrales ont été caractérisées sur des zones très réduites géogra-
phiquement. La localisation des populations ancestrales montre que
les zones refuges sont très peu étendues au Maghreb, en Espagne, en
France continentale, en Corse et en Sicile. Alors que généralement,
pour une espèce végétale, il existe une ou deux zones refuges gla-
ciaires, pourquoi l’oléastre en a-t-il en si grand nombre ?
Une des hypothèses est qu’il est probable qu’avant les dernières
glaciations, l’oléastre occupait l’ensemble du Bassin méditerranéen
et, du fait de la longévité des individus, il a survécu en rejetant de
souche au moment des réchauffements. Par la suite, pour chacune
des populations ancestrales, s’est produite une élimination aléa-
toire des individus qui n’étaient pas dans la zone la plus favorable,
c’est-à-dire la plus chaude, ce phénomène s’appelle une « dérive
génétique ». Vraisemblablement très peu d’individus ont survécu.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les zones refuges les plus restreintes correspondent à des vallées


de Corse et de Provence, ce qui peut être expliqué par un niveau
de la mer beaucoup plus bas qu’actuellement (- 200 m) au Dryas
moyen (11 300 av. J.-C.), ainsi des fjords très encaissés bien exposés
pouvaient offrir des refuges efficaces. Il n’y a pas eu de flux de gènes,
car il n’y a pas de mélange détecté entre les individus provenant
de ces régions.

54

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Les données de la génétique


Résultats. Des espèces correspondant à des ADN cytoplasmiques
différents se retrouvent soit homogènes soit en mélange dans les
onze populations ancestrales. Les trois populations ancestrales de
l’Est (Turquie, Chypre, Liban, Israël) portent deux états cytoplas-
miques dont l’un est très fréquent alors que l’autre ne se retrouve
que dans une région de Chypre. Or cette île est connue pour abriter
une flore endémique du fait qu’elle a été une zone refuge lors des
glaciations cycliques au Tertiaire, dont seule la dernière glaciation a
marqué la diversité de l’oléastre.
Une hypothèse. Bien avant les glaciations, au cours des temps
géologiques, en liaison avec les grands changements de climat en
Méditerranée, ont prospéré des espèces d’Olea europaea différentes
des espèces actuelles. Elles devaient porter des ADN cytoplasmiques
assez différents de ceux de l’oléastre actuel. Comme elles étaient
très minoritaires, elles n’ont laissé comme traces de leur existence
dans le génome de l’oléastre que des ADN cytoplasmiques à la suite
des croisements successifs avec l’oléastre. On les retrouve à l’Est à
Chypre, ou à l’Ouest en Sicile, en Corse et au Maghreb. Ce méca-
nisme appelé hybridation introgressive est commun chez les arbres
forestiers dont les formes pionnières sont peu à peu éliminées par
les formes définitives, mais les pionnières laissent leur ADN cyto-
plasmique en héritage.
Les traces de ces reliques d’Olea europaea différentes des formes
actuelles sont nombreuses dans les tufs (roches comprenant de

Comment interpréter les données ?

Les recherches génétiques ne permettent pas de dater les événe-


ments qui ont conduit à la structure de la diversité génétique actuelle,
en revanche, les résultats de la génétique démontrent que l’événe-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ment s’est bien produit. Cependant, ils doivent être confirmés par
des données archéologiques et paléobotaniques. C’est ce que nous
avons recherché pour préciser l’histoire de l’oléastre. Évidemment
de nombreuses questions restent en suspens et il faut se garder de
vouloir y répondre trop rapidement car nous n’avons qu’une connais-
sance très partielle des conditions climatiques et floristiques du Dryas
moyen à la fin du Mésolithique (7 000 av. J.-C.).

55

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

nombreux fossiles) de différentes régions, par exemple ceux de


Roquevaire dans la région de Marseille. Néanmoins, ces traces ne
permettent pas de caractériser les espèces ; de ce fait tous les restes
archéologiques sont classés en Olea europaea et on ne sait pas à
quelle filiation ils appartiennent.
Que retenir de la présence de l’oléastre ?
Au moins une dizaine de zones refuges de l’oléastre ont existé dans le
Bassin méditerranéen. Des traces de l’Olea europaea présentent une
diversité cytoplasmique antérieure au Quaternaire, c’est-à-dire avant
la constitution de ces zones refuges. Ces individus portaient une
diversité suffisamment importante et environ la moitié des o­ léastres
prélevés récemment s’y rattachent. Les autres individus sont hy-
brides entre plusieurs zones refuges ou bien ont reçu du pollen (flux
de gènes) des variétés locales introduites, qui n’ont probablement
pas la même origine que les oléastres. Au cours de ses migrations
historiques, l’homme aurait donc déplacé des variétés d’olivier qu’il
avait domestiquées, notamment de l’Est vers l’Ouest, de l’Asie vers
l’Europe et de la Méditerranée orientale vers l’Occident.
L’hypothèse est la suivante : une espèce colonisatrice a fourni
l’ADN du chloroplaste et une espèce implantée plus tard a subi un
backross par l’espèce colonisatrice (ou hybridation introgressive),
ce qui explique que l’on retrouve des traces d’ADN cytoplasmique
provenant d’autres espèces.
La structure génétique de la population a son importance : la dis-
tribution des fréquences des marqueurs (20 loci) permet de différen-
cier des populations ou des groupes. Par ailleurs, au sein de chaque
population, la fréquence d’un marqueur a une certaine variabilité.

Présence et répartition de
l'olivier et de l'oléastre sur le
pourtour méditerranéen
(gris foncé).
Répartition circum
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

méditerranéeenne de l’oléastre
associée aux zones de cultures
de l’olivier sur le pourtour du
Bassin méditerranéen (d’après
Zohary et Spiegel-Roy, 1975 ;
Zohary et Hopf, 1994
et Loussert et Brousse, 1978)

56

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Répartition des chlorotypes


de l'oléastre dans le Bassin
méditerranéen.
La distribution géographique des
chlorotypes de la forme sauvage
(oléastre) est différenciée selon un
gradient d'Est en Ouest du Bassin
méditerranéen. Ainsi, à L'est, on
ne trouve que 2 chlorotypes
(rectangle gris clair et ovale rayé
blanc). Tandis qu'à l'Ouest, on a
trouvé de nombreux chlorotypes
dont 7 sont représentés (avec
des figurés différents). Parmi les
chlorotypes trouvés à l'Ouest, on
Chlorotype de l'Est (CE1, Moyen-orient, Chypre, Grèce) en trouve un présent à l'Est, les
autres sont spécifiques de l'Ouest
Chlorotype de l'Est (CE2 trouvé à Chypre) Chlorotype de l'Est
On peut donc affirmer que l’olivier
a des origines différentes à l’Ouest
et à l’Est du Bassin méditerranéen
avant les glaciations.
Le lecteur aura donc compris que ce détour par l’oléastre était
nécessaire pour comprendre l’origine de l’olivier. Nous allons voir .

la conséquence de tout ceci sur la forme cultivée à laquelle nous


réservons le terme « olivier ».

Comment retracer l’histoire


des variétés cultivées ?
L’olivier cultivé dérive de l’oléastre exclusivement, car les autres es-
pèces n’ont pas contribué au génome de l’olivier. En effet olivier et
oléastre présentent les mêmes marqueurs cytoplasmiques du chlo-
roplaste et de la mitochondrie, alors que chez les autres sous-espèces
(cuspidata, maroccana, laperrinei) ces marqueurs sont différents.
Généalogie des variétés cultivées
Tout d’abord, il a été constaté que, malgré une diversité morpho-
logique et une diversité moléculaire élevée, les variétés cultivées
d’olivier (c’est-à-dire les cultivars) forment un groupe homogène.
Néanmoins, il n’apparaît pas de répartition géographique (autre-
ment dit de structure génétique) évidente, que les variétés soient
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

classées selon la langue de leur nom le plus courant, leurs usages


(table, huile ou mixte), ou le type de fruits. Leur généalogie est éga-
lement inconnue et l’emploi des marqueurs dominants ne permet
pas de retracer les filiations.
Cependant, les résultats des marqueurs de cytoplasme montrent
qu’il y a eu des flux de gènes entre les variétés de l’Est et celles de
l’Ouest. Du fait du déplacement d’individus (commerce, échanges),

57

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

il y a eu une pollinisation d’oléastres à l’Ouest, puis création de nou-


velles variétés. Ainsi, le gradient des marqueurs de l’olivier de l’Ouest
vers l’Est était connu, mais jusqu’aux études récentes, il n’était pas
expliqué.
Comme on supposait que les variétés étaient originaires de
l’Est, il était logique que le gradient de fréquence allèlique (car les
allèles se diluent avec la distance depuis le lieu d’origine) suive le
gradient de diffusion. C’est un moyen de vérifier le bien-fondé de
cette hypothèse.
Clés fondées sur les fruits, fleurs, indications géographiques.
À l’aide des descripteurs des fruits, des feuilles, des indications géo-
graphiques et de l’architecture de l’arbre, plusieurs clés d’identi-
fication des variétés ont été construites. Mais certains caractères
choisis variant en fonction de l’environnement, des variétés peuvent
être confondues ou bien on a pu attribuer des noms différents à des
arbres d’une même variété selon le lieu.
Identifier des variétés sans faille. L’objectif de la recherche de
marqueurs moléculaires a été d’identifier les variétés sans faille avec
des marqueurs indépendants des effets environnementaux.
Les variétés sont des clones. Les premières analyses avec les
marqueurs moléculaires ont révélé que la plupart des variétés sont
des clones, c’est-à-dire des descendances d’un individu unique par
multiplication non sexuée, issus de la multiplication végétative, de
bouturage ou de greffage, la tête de clone étant unique. Quelques
rares variétés sont des populations, car tous les individus sont diffé-
rents, et ont été obtenus par exemple par semis de noyaux.
Héritage. L’étude de l’un des croisements a permis d’établir de
façon formelle que les ADN cytoplasmiques de l’olivier sont hérités
par la mère car tous les descendants de Olivière ♀ × Arbequina ♂
portent les ADN cytoplasmiques de la variété Olivière. La sté-
rilité mâle de l’olivier est aussi héritée par la mère, elle est dite
cytoplasmique.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les variétés d’olivier cultivé


et leur diversité moléculaire
Génotypage de 1 000 individus d’oliviers cultivés
Le génotype d’environ un millier d’individus d’oliviers cultivés
de provenances diverses dans le Bassin méditerranéen (issus de la

58

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

deuxième prospection des années 2002-2006) a été décrit avec les


mêmes marqueurs que ceux utilisés pour les oléastres. À l’aide de
l’analyse des ADN cytoplasmiques, ont été repérés les individus qui
portaient des ADN des oléastres de l’Ouest et ceux qui portaient les
ADN des oléastres de l’Est.

Marqueurs et élaboration de carte génétique

Les marqueurs moléculaires discriminent les individus différents et


les individus identiques – avec un risque d’erreur. En effet, une dif-
férence de longueur entre deux allèles peut être significative, mais
parfois insuffisante et donc, il faudra considérer les deux individus
comme non différents.
Les marqueurs moléculaires ont aussi un intérêt pour construire des
cartes génétiques sur la descendance de deux clones croisés entre
eux. Les cartes génétiques ordonnent les marqueurs selon leur taux
de recombinaison. Elles ont un intérêt majeur afin d’établir les liai-
sons entre les marqueurs et les caractères ; plus la liaison est statis-
tiquement forte plus on pourra substituer le marqueur pour pré-
dire et sélectionner le caractère, cette information est donc cruciale
pour sélectionner un clone qui ne produira des fruits que plusieurs
années après.

Marquage Est-Ouest
À l’Est nous n’avons pas trouvé de cultivars avec les ADN cytoplas-
miques de l’Ouest. À l’Ouest, 80 % des variétés portent des ADN
cytoplasmiques de l’Est : des cultivars de l’Ouest ont donc bien des
ancêtres à l’Est.
Par conséquent, l’affirmation « les Phocéens ont introduit
l’olivier à Massilia il y a 2 500 ans », doit être reformulée en « les
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Phocéens ont introduit leur culture de l’olivier, mais l’olivier existait


déjà autour de Marseille ».
Uniquement à partir des cultivars, neuf groupes ou populations
ancestrales ont été dénombrés. Pour une espèce il y a généralement
un événement de domestication, ici ce nombre correspond à celui
des populations ancestrales d’oléastre, ce qui implique plusieurs évé-
nements de domestication.

59

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Comparaison des populations ancestrales


d’oléastres et des cultivars d’olivier
Nous avons donc analysé simultanément les individus des onze
populations ancestrales d’oléastre et les variétés des neuf popula-
tions ancestrales des cultivars. Nous avons constaté que cela condui-
sait à neuf populations ancestrales communes aux oléastres et aux
cultivars, coïncidant avec les mêmes zones géographiques. Ce qui
traduit le fait que l’homme a domestiqué l’olivier dans neuf zones
différentes autour de la Méditerranée. Parmi ces zones, sept sont
à l’ouest du Bassin méditerranéen. En revanche, on n’a pas trouvé
(dans la limite des prospections effectuées) de descendants cultivés
pour deux des onze populations ancestrales.
On est donc cette fois bien loin de l’affirmation que l’olivier a été
domestiqué à l’Est puis diffusé vers l’Ouest lors des migrations et
des échanges commerciaux.
Décrypter l’origine géographique des variétés
Pour aucune autre espèce végétale, il n’y a autant de centres de
domestication (ou encore de zones refuges des populations ances-
trales), et rattacher les variétés aux centres est complexe car les varié-
tés n’indiquent pas l’origine géographique du fait des synonymies de
noms entre différents pays et dans les différentes langues.
C’est parce que chaque variété a une parenté génétique avec une
population d’oléastres sauvages que l’on est en mesure de fixer une
origine géographique aux variétés. Mais, comme chaque variété
porte l’ADN nucléaire et les ADN cytoplasmiques hérités indépen-
damment, on est donc parfois en mesure d’attribuer une origine
géographique différente au noyau et au cytoplasme, ce qui traduit
des croisements entre variétés et oléastres locaux.
De plus, nous avons vu que les deux allèles du noyau d’une
variété peuvent tracer des histoires différentes. Dans quelques cas
l’ADN du noyau pourra indiquer d’où viennent les deux parents, par
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

exemple de l’est et de l’ouest de la Méditerranée.

De l’origine génétique à la localisation


géographique des variétés
Chaque pays est fier de quelques variétés phares qui font sa répu-
tation et génèrent un commerce actif. Certains craignent que cette

60

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

notoriété soit perturbée si ces variétés phares n’avaient pas leur ori-
gine dans le pays en question.
Pour notre part, nous ne pensons pas que le consommateur
délaissera une huile d’excellente qualité produite en France, en
Espagne ou en Italie, sachant que la variété phare a été introduite à
une date que la génétique ne peut pas donner – donc très ancienne –,
mais que l’histoire pourrait expliquer. Cette connaissance ne chan-
gera en rien nos goûts pour l’huile d’olive de chacune de ces variétés.
Ainsi, les résultats obtenus sur l’origine génétique des variétés
d’olivier ont été controversés. Une grande partie de la commu-
nauté scientifique les a critiqués, arguant des retombées écono-
miques négatives qu’ils étaient susceptibles d’engendrer auprès des
consommateurs.
Collection de référence et échantillonnage
En outre, dans quelques pays, les équipes de recherche, ne dispo-
saient pas de collection de référence suffisante pour relier les origines
aux variétés. Pour rassembler autant d’échantillons, il faut plusieurs
années de prospection et des moyens financiers assez élevés, et nous
avons pu bénéficier de services pour effectuer ces prélèvements. Tronc de l’olivier millénaire
de Monpeyroux. Hérault.
Comment identifier les origines d’une variété ? © Catherine Breton

Globalement, les données des ADN nucléaires et des


ADN cytoplasmiques permettent de retracer l’his-
toire des variétés d’olivier, même s’il y a encore de
nombreuses inconnues.
Les données sur l’olivier sont, par exemple, bien
moins précises que les données disponibles sur les
cépages de vigne : ainsi, dans la plupart des cas le
cépage maternel est connu, il reste à identifier le
cépage paternel possible ; le traitement informatique
des données des marqueurs co-dominants conduit
rapidement à des pères potentiels, puis ensuite à pré-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ciser exactement le cépage paternel.


Dans le cas de l’olivier, le plus souvent, la mère
n’est pas connue, excepté dans le cas d’une sélection
récente, mais ces variétés récentes ont encore une
faible diffusion, donc peu d’intérêt commercial. Or,
en utilisant une vingtaine de marqueurs, on dénombre
quelques dizaines de mères et de pères potentiels. La

61

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

tâche d’identification de l’origine est donc énorme – d’autant que


toutes les variétés ne sont pas encore répertoriées. Pour chaque
variété examinée, il est donc possible de déterminer si elle appartient
à une des neuf populations ancestrales ou si elle est hybride entre des
individus appartenant à deux ou plusieurs populations ancestrales.

Origine globale de quelques variétés connues

Picholine. Nous avons vu que la majorité des variétés ont des ori-
gines à l’Est comme Picholine dans le Gard, mais elle a des ADN cyto-
plasmiques de l’Ouest, ce qui lui attribue un ancêtre dans les olé-
astres de l’Ouest. Où et quand se sont produits les croisements qui
ont conduit à Picholine ? Cela reste de la pure spéculation.
Olivière. La variété Olivière réputée pour son huile douce et fine
dans l’Hérault et dans l’Aude a aussi des origines à l’Est mais ses ADN
cytoplasmiques indiquent une origine au Maghreb, que l’on peut
situer en Kabylie.
Cailletier n’a que des origines à l’Est : Liban, Israël et Turquie.
Arbéquina en Catalogne est une variété qui a des origines à l’Est
exclusivement comme Frantoio d’Italie. En revanche, Picual d’Anda-
lousie a la même histoire que Picholine.
Dolce Agogia en Italie a des origines à l’Est et en Corse, alors que
Moraiolo est issue d’hybridations multiples entre un ancêtre de
Turquie, d’Espagne, du Liban et Israël et de Corse.
Zarazi en Tunisie a des origines dans l’oléastre de Tunisie et un
ancêtre de l’Est.
Chemlal en Algérie a des origines en Espagne.
Négrette de l’Hérault a des origines en Tunisie et en Turquie.
Pour Verdale de l’Hérault le hasard de l’échantillonnage a fait que l’on
a étudié un individu d’un site médiéval daté de l’an 1030, Le Castellas,
Le Barry, à Montpeyroux (Hérault). Le site est typique avec des arbres
plantés à 6 mètres entre des murs de pierre de plus d’un mètre de
largeur et de hauteur. La terre arable avait donc un prix élevé ! Il se
trouve que tous les individus sont génétiquement différents : ce sont
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

donc des populations de semis. Parmi eux se trouve Verdale de l’Hé-


rault qui est donc l’arbre souche (ou tête de clone) de la variété.
L’analyse détaillée de cette population serait à faire ainsi que celle
d’autres populations médiévales aussi répertoriées au Cirque de
Navacelles et dans le Gard, car elles contiennent probablement
d’autres origines de variétés.

62

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Les usages anciens et leurs incidences


sur la sélection de l’olivier cultivé
L’olivier a dû exercer un attrait considérable sur les peuples autoch-
tones, car il a été domestiqué avec succès dans une dizaine de ré-
gions. Des cas de domestication multiples ont été mentionnés sur
d’autres cultures comme le riz et les ignames.
L’usage alimentaire, évident, est presque exclusif maintenant,
alors que, au Mésolithique, les peuples autochtones avaient pro-
bablement bien d’autres raisons de domestiquer l’olivier. À cette
époque, la principale source de matière grasse abondante était la
graisse animale, l’huile était employée surtout pour l’onction du
corps et pour les lampes. Les branches coupées servaient égale-
ment l’hiver à l’alimentation du bétail. L’oléastre est rarement dense
en forêt.
Actuellement, il se trouve en peuplement dense lorsque les autres
espèces ont été éliminées comme à Moulay Idriss au Maroc ou à
Ichkeul, près de Bizerte en Tunisie. La récolte des branches et des
fruits exigeant un transport pénible, les hommes ont donc cherché
sans doute à rapprocher les arbres du campement, vraisemblable-
ment par une sélection massale des meilleurs individus producteurs
de fruits et de branches.
Nos ancêtres avaient sans doute observé l’effet favorable de la
taille sur la mise à fruits, car elle a été pratiquée dès 7 000 av. J.-C. en
Estremadura portugaise et probablement ailleurs. Cette aptitude a
dû être fortement sélectionnée et une fois le peuplement d’olivier
établi près des habitations, la récolte des fruits a servi à confection-
ner des galettes avec des céréales. La quantité d’huile produite a
dû être un facteur déterminant et donc faire l’objet d’une sélection
massale forte.
Ce schéma s’est sans doute reproduit dans les différents lieux
avec des variantes liées à des pratiques chamaniques, puis religieuses.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Propagation et fixation des variétés


Des variétés ont donc été obtenues ainsi, et elles ont montré une forte
dérive par rapport à la population ancestrale qui s’est maintenue.
La propagation de l’olivier par marcottage et bouturage permet
de fixer très rapidement les avantages génétiques dans un clone.
Vers 1 000 av. J.-C., les Phéniciens ont diffusé leurs variétés vers
la Cyrénaïque et Carthage puis jusqu’en Espagne et au Portugal où

63

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

une colonie était établie. Ainsi, il est probable que Chétoui – variété
phare de Tunisie – et Galéga – variété phare du Portugal –, qui
portent les ADN cytoplasmiques de Chypre, soient des descendants
des variétés de Chypre. En Grèce, Amygdalolia, en Italie, Giarrafa
et Biancolila et, dans les Pyrénées-Orientales, Poulo, qui portent
chacune les mêmes ADN cytoplasmiques de Chypre, ont la même
origine d’introduction.
Les Romains ont grandement contribué à la diffusion de l’olivier
dans leurs colonies aussi bien de l’Est vers l’Égypte et la Palestine, le
Maghreb et en particulier le Sud de la Tunisie. Ainsi, en Libye et au
Sahara, des milliers d’arbres persistent datant de l’époque romaine.
Un agronome latin, Columelle, recense dix variétés d’olivier dési-
gnées par des origines géographiques : « Je pense que le nombre des
espèces d’olives n’est pas moins grand que celui des espèces de raisins ;
mais il n’en est parvenu que dix à ma connaissance : la pausie, l’algienne,
la licinienne, la sergie, la névie, la culminie, l’orchis, la royale, la circite
et la murtée ».
La difficulté de retrouver la filiation des variétés réside dans la
rareté des traces biologiques des arbres alors que l’histoire des mou-
lins à huile est beaucoup mieux connue, car leurs ruines sont main-
tenant souvent protégées et visitées.
La diversité considérable des variétés actuelles de l’olivier
provient de la dizaine de centres de domestication (ou zones
refuges), conservateurs d’une variabilité génétique exceptionnelle.
Aujourd’hui, seule l’analyse génétique permet de classer les culti-
vars d’après les origines : soit un cultivar provient directement d’un
centre de domestication, soit il provient de l’hybridation d’individus
appartenant à plusieurs centres. Nous ignorons tout de la façon dont
les variétés ont été diffusées, avant l’époque romaine, et pourquoi et
comment elles ont traversé le Bassin méditerranéen.
L’étude des vestiges archéobiologiques et de leur ADN devrait
renseigner sur la nature des échanges, tels le commerce, la colonisa-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

tion, le pillage, etc. La domestication est une entreprise d’un peuple,


dont les orientations sont guidées par la religion, le chamanisme,
etc., il est donc important de comprendre ces pressions sociales qui
ont pu régner à diverses époques. De plus, il faudrait connaître les
mécanismes de l’adaptation des variétés au milieu, afin de les relier
à l’existence d’appellations d’origine contrôlée pour des variétés
d’olivier.

64

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Quelles sont les hypothèses pour l’origine


des variétés Tanche, Lucques, Arbequina,
Chemlali, et Chétoui ?
La variété Tanche dans le Nyonsais a été introduite à une date in-
connue, nul ne connaît les variétés cultivées auparavant dans cette
région, mais un arbre obtenu, importé ou issu d’hybridation natu-
relle et donc féral d’origine, a été propagé malgré une déficience en
pollen (stérilité mâle partielle) jusqu’à représenter 95 % des arbres.
La Tanche a été sélectionnée pour la qualité des fruits et de l’huile
qui s’expriment dans le microclimat du Nyonsais (absence de vent :
mistral, mais gelées fréquentes, soleil intense). Peu à peu elle s’est
imposée, et l’appellation contrôlée a renforcé sa prévalence.
La variété Lucques en Languedoc (Bize-Minervois et Saint-Jean-
de-la-Blaquière) est une variété difficile à cultiver. Sa fertilité femelle
capricieuse est due à sa floraison précoce qui ne coïncide qu'avec
un seul polliniseur. Néanmoins, la qualité des fruits (taille, forme,
craquant) l’a imposée comme la reine des olives de table. Comment
s’est faite l’adéquation entre la variété Lucques et la région du
Languedoc ? Cela reste un mystère.
Dans certain cas, l’origine étrangère de la variété est avérée
comme pour Arbequina. À Les-Borges-Blanques près de Leidà
(Espagne), au Parc thématique sur l’olivier, un tableau représente
l’origine de Arbequina d’un plant rapporté par un chevalier sur son
destrier, on ne sait d’où bien sûr ! Mais, c’est bien là le mythe de la
naissance d’une variété qui doit rester intact.
On pourrait se poser les mêmes questions avec les variétés
actuelles de Tunisie Chemlali et Chétoui : ont-elles prospéré du
temps de Carthage ? Ont-elles été importées en Tunisie par les
Phéniciens ?
Diversité variétale et origines multiples. Dans certains pays ou
certaines régions, les oléiculteurs voudraient que leur variété ait une
origine locale. Ainsi, deux variétés italiennes très connues, Moraiolo
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

et Frantoio, sont mâtinées entre des origines en Turquie et en Corse,


ce qui ne convient pas à la promotion souhaitée.
Quelques variétés sont spécifiques à une région française, et cela
conduit à un grand nombre de variétés et à une diversité importante.
Prenons par exemple, dans le département du Var en France, 53 va-
riétés sont recensées ce qui est un nombre considérable par rapport
aux régions limitrophes. Quelques-unes (5–6) ont une origine locale

65

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

car elles sont apparentées à des oléastres locaux, mais la plupart sont
introduites d’Espagne, de Tunisie, et de l’Est de la Méditerranée : un
groupe s’apparente aux variétés espagnoles, deux groupes sont étran-
gers mais on ne peut dire d’où ils viennent, un groupe s’apparente aux
oléastres des îles (Bagaud, Porquerolles, Levant) et de la côte.
Le département des Pyrénées-Orientales offre aussi une large
gamme de variétés, environ une vingtaine, ce qui est plus que dans
la plupart des autres départements français. Cette diversité pour-
rait provenir d’autres régions de Catalogne, au temps des royaumes
d’Aragon.

Les questions génétiques


d’actualité chez l’olivier

La différenciation répond à la question : Es-tu différend de ? Quand


on compare deux individus une seule différence génétique suffit
pour dire qu’ils ne sont pas identiques : c’est la différenciation, elle
est certaine. Une différence morphologique n’est pas suffisante pour
conclure.
L’identification répond à la question : es-tu untel ? Pour identifier on
compare un individu I1 à la référence R pour une série de caractères
ou marqueurs. On ne sait jamais si un caractère non utilisé ne sera pas
distinctif, on peut donc toujours conclure trop vite à l’identité et donc
se tromper. Les marqueurs moléculaires facilitent la différenciation
des variétés et dans une moindre mesure l’identification variétale.
Si des variétés d’olivier sont identifiées avec des marqueurs molécu-
laires, les résultats doivent toujours être validés par des garants indé-
pendants de la signification des résultats.
Qu’est ce que l’adaptation ? L’adaptation est une notion complexe.
L’olivier occupe une aire plus large que celle de l’oléastre dont il
dérive car l’homme a sélectionné des formes d’olivier capables de
vivre et de produire des fruits dans des environnements où l’oléastre
n’aurait pas survécu (montagne, bords de mer, déserts). Globalement
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

la richesse génétique de l’olivier a augmenté, mais chaque forme


capable de vivre dans un environnement marginal a perdu des fonc-
tions, ce qui ne lui permet plus de vivre naturellement dans l’environ-
nement initial de l’oléastre. C’est donc le paradoxe de l’adaptation.
Actuellement, les appellations d’origine protégée sont concentrées
dans des aires marginales.
¯¯ ´

66

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Le fait que l’olivier soit multiplié en clone permet de vérifier l’affirma-


tion suivante : un arbre X choisi dans le milieu généraliste a été un jour
bouturé puis transplanté par un oléiculteur dans son milieu : si l’arbre
ne produit pas de fruits, c’est que le milieu ne lui convenait pas et l’oléi-
culteur n’aura pas d’autre information. S’il en produit, alors l’oléiculteur
pourra juger ses fruits et/ou son huile par rapport à d’autres varié-
tés introduites dans la région, antérieurement ou postérieurement à
l’arbre X. S’il trouve les produits de cet arbre à son goût, il le multi-
pliera, fera goûter les produits à d’autres oléiculteurs, et l’arbre sera la
tête de clone de la variété X. Ainsi, le processus de l’adéquation entre
une variété et un milieu a conduit à la spécialisation de variétés pour
des milieux de plus en plus marginaux des montagnes aux déserts.
Les variétés Tanche, Lucques, Olivière, et Picholine ainsi que beaucoup
d’autres doivent leur existence à des oléiculteurs qui ont multiplié ces
arbres.
Puis quand les Phocéens ont introduit l’olivier à Massilia, le même pro-
cessus s’est produit pour leurs arbres (P1,… Pn) avec des critères de
jugement que nous ignorons, mais qui ont assuré le succès des varié-
tés importées. Des descendants naturels de ces arbres (dits féraux)
ont reçu du pollen des oléastres locaux et ont fécondé des oléastres
locaux, puis ils ont fait l’objet d’un même suivi pour évaluer leurs pro-
duits. Existe t-il donc des gènes spécifiques qui favorisent le succès des
descendants des oléastres et des arbres P ? La réponse est évidemment
non. Le rôle de chaque oléiculteur a été spécifique et tous ces oléi-
culteurs n’ont pas exercé les mêmes pressions sur toutes les variétés.
Chaque variété a donc une histoire différente, et se trouve aujourd’hui
dans un milieu plus ou moins différent de celui de l’oléastre.
Quelques centaines d’années après les Phocéens, d’autres oléi­culteurs
ont emporté les variétés pour les introduire dans d’autres pays (Afrique
du Sud, Australie, États-Unis) où elles ont été évaluées par rapport aux
goûts et coutumes des nouveaux oléiculteurs. La majorité de ces
variétés ne convient pas à ces nouveaux milieux – ce qui est logique
puisqu’elles avaient déjà subi une sélection pour l’adaptation (donc
des restrictions de fonctions) à produire dans le milieu spécifique. Ainsi,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

il n’est pas étonnant que les variétés introduites n’aient pas satisfait
les consommateurs de ces pays. Depuis, la recherche d’arbres féraux
locaux avec des produits plus satisfaisants a été entreprise en Australie,
aux États-Unis et en Afrique du Sud. L’Argentine teste aussi des croise-
ments entre variétés introduites en espérant trouver des descendants
plus satisfaisants.

67

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Adaptation de l’olivier aux microclimats


et au changement climatique
Anticiper le réchauffement climatique et préparer les variétés de
demain est l’un des objectifs de recherche sur l’olivier. Il faudrait
donc connaître les mécanismes de l’adaptation pour concevoir les
meilleures variétés adaptées aux nouvelles conditions climatiques
dans les milieux actuels mais aussi dans la future aire biologique de
l’espèce. En effet, l’adaptation est un problème difficile propre aux
plantes puisqu’elles ne peuvent se déplacer : soit elles meurent sans
se reproduire, soit elles font une descendance qui aura une probabi-
lité faible mais non nulle d’être mieux adaptée.
Dans le passé, l’importation de boutures devait être coûteuse et
risquée et les traditions locales strictes désavantageaient les nou-
veautés variétales, mais, il devait y avoir des expérimentateurs qui
se risquaient à la nouveauté et des oléiculteurs qui adoptaient le
nouveau matériel.
Actuellement, sont importées dans le Midi de la France des varié-
tés d’Espagne, d’Italie et de Grèce pour constituer des vergers de
production.

Sélection et diffusion mondiale


L’intense sélection exercée par l’homme sur l’olivier indique donc
l’importance sociale et économique que cet arbre représentait, bien
que les relevés de production soient rares, probablement du fait qu’il
n’y avait pas d’impôts sur la culture de l’olivier.
Depuis son origine à la variété actuelle d’olivier, la distance dans
le temps est faible : depuis le Mésolithique, on compterait environ
300 à 400 générations, au lieu de 10 000 par exemple pour les espèces
annuelles. En fait, l’olivier n’est pas sélectionné comme une autre
espèce, puisque le cycle de reproduction dépasse celui de la vie du
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

sélectionneur. L’homme sélectionne un individu pour divers critères


et en fait un clone (muliplié par greffe ou souchet) qui sera ensuite
considéré comme une nouvelle variété.
L’expérimentation sur les variétés mineures souvent cultivées
dans des microclimats et des sols typiques révèle qu’elles expriment
peu leurs caractères une fois transplantées dans des conditions dif-
férentes de climats et de sols. On dira que leur adaptation est faible.

68

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Quelques variétés ont eu une diffusion mondiale car elles


conservent mieux leurs caractéristiques sur d’autres continents
que l’Europe, il s’agit de Arbequina, Picholine, Picual, Frantoio,
Moraiolo. Ces variétés ont donc une bonne capacité d’adaptation
dans des milieux différents, mais peut être au détriment de la typicité
et de la qualité organoleptique.
Les oléiculteurs passionnés soignent aussi les arbres féraux dans
l’espoir qu’ils révéleront des caractéristiques nouvelles. À l’époque
où les variétés étaient une population, les populations étant issues de
semis au Moyen Âge, les différences entre individus étaient grandes
et la variabilité morphologique était bien supérieure à ce qu’elle
est aujourd’hui. La sélection pouvait donc être intense et les nou-
velles variétés étaient éprouvées longuement avant leur diffusion.
Actuellement, le progrès génétique en olivier est très marginale-
ment valorisable, il a donc peu d’intérêt économique. En revanche,
certains caractères sont fortement recherchés, par exemple les résis-
tances aux principales maladies fongiques et aux insectes qui pro-
lifèrent au détriment de l’olivier, ainsi que les caractères de faible
vigueur pour cultiver en haie fruitière, donc en haute densité, et
l’exploitation très intensive des vergers.

La pollinisation de l’olivier du point de vue


de la génétique
Chez la plupart des espèces végétales des mécanismes existent pour li-
miter l’autofécondation car la consanguinité est néfaste à la vigueur de
la descendance. On désigne par auto-incompatibilité les mécanismes
qui empêchent une plante de donner une descendance viable par auto­
fécondation. Si le pollen d’une fleur est reconnu par le stigmate de la
même fleur, c’est que le pollen porte un déterminant que le stigmate
reconnaît et leur rencontre empêche la germination du pollen.
On estime que globalement les problèmes de pollinisation et de
fécondation font perdre 20 à 30 % de la production chez l’olivier. Tous
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

les oléiculteurs connaissent les difficultés pour composer des vergers


dans lesquels la pollinisation ne serait plus un facteur limitant.
Généralement, chez l’olivier le pollen apporté par le vent permet
d’obtenir suffisamment de fruits. Outre le phénomène d’alternance
(production une année sur deux), certaines variétés comme Lucques
fécondent difficilement, et si une période pluvieuse survient durant
la pollinisation, la production de fruits est réduite.

69

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Certaines variétés, comme Lucques et Olivière, ne produisent pas


de pollen (elles sont mâles stériles), Tanche produit peu de pollen
et est inefficace en autofécondation. Néanmoins, l’apport de pollen
d’olivier ne suffit pas pour déclencher la mise à fruit, et il faut le
pollen d’une variété bien spécifique adapté à ces variétés, on le dit
alors compatible, pour obtenir des fruits. Les autres variétés Picholine,
Aglandau, Cailletier, nécessitent aussi l’apport de pollen compatible.
L’oléastre fait partie des espèces qui possèdent un système
d’auto-incompatibilité et l’olivier en a hérité car l’homme ne savait
pas détecter les formes auto-compatibles. Ce n’est que lorsque les
Croisements de variétés
d’olivier portant les 6 améliorateurs ont mis des sacs sur les inflorescences d’olivier dans les
combinaisons par paires années 1970 qu’ils ont constaté que les autofécondations étaient rares.
de 4 allèles-S.
La grille des croisements étudiés
Il a fallu rechercher les meilleures variétés à utiliser comme
par l’Inra permet d’attribuer les polliniseurs sur les variétés phares de chaque pays. Les pollinisateurs
allèles d’auto-incompatibilité
aux variétés étudiées. sont les vecteurs (insectes notamment) qui transportent le pollen
Certains des croisements sont
intercompatibles dans une
sur le stigmate et il faut donc répartir des polliniseurs dans les
direction alors que le vergers. Pour Lucques (France), Tanche (France), Meski (Tunisie),
croisement réciproque est
auto-incompatible. Amygdalolia (Grèce), Leccino et Moraiolo (Italie), Arbequina et
Le modèle sporophytique
explique que les croisements
Manzanilla (Espagne), Souri (Liban), des moyens importants sont
ne réussissent que dans un seul encore consacrés à la recherche de polliniseurs de ces variétés.
sens : si le pollen ne porte qu’un
des deux allèles du parent mâle L’étude de la pollinisation de l’olivier devrait réconcilier les
dans son noyau, sa paroi est
imprégnée des protéines des
chercheurs, les oléiculteurs et les pépiniéristes afin de constituer des
deux allèles du parent mâle, vergers prolifiques non limités par une pollinisation insuffisante. Les
ce qui permet au stigmate de les
détecter et de rejeter le pollen chercheurs ont encore beaucoup à apprendre des conditions réelles
qui porte la même protéine
que l’une des deux du stigmate.
de terrain pour comprendre les mécanismes de l’auto-incompatibilité
Ce système est très efficace, chez l’olivier et tout est encore ignoré chez la forme sauvage.
mais les deux allèles du pollen
ont des relations de dominance
dans l’anthère : un allèle domine
l’autre – et de ce fait, il le masque.
Si un grain de pollen ne porte
plus la protéine de l’allèle Manzanilla R1R2 R3R4 Amellau
masqué (dit récessif ), il peut alors Amygdalolia
germer et le tube pollinique
ne sera pas reconnu comme
incompatible par le stigmate.
Les variétés qui portent les allèles
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

dominants seront difficiles à


féconder car ces allèles ne seront
jamais masqués et le pollen Picholine R1R3 R2R4 Bouteillan
qui les porte sera rejeté chez tout Arbequina VerdaleH
individu dont les deux allèles Olivière
s’expriment dans le stigmate.
Avec seulement 6 allèles-S, Succès attendu et observé
une variété porte l’une des dans les 2 directions du croisement
15 combinaisons d’allèles-S Succès attendu et observé
dans la direction de la flèche.
deux à deux, ce qui conduit Échec attendu dans l’autre direction
Cayon Lucques
à 225 combinaisons Échec attendu et observé Corniale R1R4 R2R3 Tanche
dans les 2 directions du croisement
possibles de variétés.

70

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’histoire de l’olivier reconstituée à partir de données génétiques

Dessins des souchets (1-2)


et des divers types de
pousses issues des souchets.
Extrait du Traité de l’olivier,
1783, par l’Abbé Couture.
© Inra
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

71

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Pour en savoir plus


Besnard G., Khadari B., Baradat P., Bervillé A. 2002. Olea europaea (Oleaceae)
phylogeography based on chloroplast DNA polymorphism. Theor. Appl. Genet.,
104 : 1353-1361.
Breton C., 2006. Reconstruction de l’histoire de l’olivier (Olea europaea subsp. europaea)
et de son processus de domestication en région méditerranéenne, étudiés sur des bases
moléculaires. Thèse doctorat biologie des populations et écologie,
Université Paul Cézanne, France.
Breton C., Besnard G., Bervillé A., 2006. Using multiple types of molecular markers to
understand olive phylogeography. In Zeder M.A., Decker-Walters D., Bradley D.,
Smith B., editors. Documenting Domestication : new genetic and archaeological paradigms.
Californian Press.
Breton C., Médail F., Pinatel C., Bervillé A., 2006. De l’olivier à l’oléastre : la diversité
permet de remonter le temps jusqu’aux événements de domestication et à l’origine de
l’Olea europaea. L. Cahiers Agricultures 15, 4 : 329-336.
Breton C., Médail F., Pinatel C., Bervillé A., 2006. L’histoire de l’oléastre et de la
domestication de l’olivier. L’Alberra terre de passage, de mémoires et d’identités
Actes du colloque de Banyuls-sur-Mer 3-4 mai 2005. Coll études Institut Franco-catalan
transfrontalier, Presses Universitaires de Perpignan, p. 267-285.
Breton C., Tersac M., Bervillé A., 2006. Genetic diversity and gene flow between the wild
olive oleaster, Olea europaea L. and the olive : several Plio-Pleistocene refuge zones in the
Mediterranean basin suggested by Simple Sequences Repeats analysis. J. of Biogeog
33 : 1916-1928.
Breton C., Souyris I., Villemur P., Bervillé A., 2009. Oil accumulation kinetic along
ripening in four olive cultivars varying for fruit size. OCL, 16 : 58-64.
Breton C., Pinatel C., Tersac M., Médail F., Bonhomme F., Bervillé A., 2008. Comparison
between classical and Bayesian methods of investigation into the history of olive cultivars
(Olea europaea L.) using SSR-polymorphisms. Plant Science 175 : 524-532.
Breton C., Bervillé A., 2012. New hypothesis elucidates self-incompatibility in the olive
tree regarding S-alleles dominance relationships as in the sporophytic model. C. R.
Biologies 335 : 563–572.
Carrion Y., Ntinou M., Badal E., 2009-2010. Olea europaea L. in the North Mediterranean
Basin during the Pleniglacial and the Early-Middle Holocene.
Quat Sci Rev. 2010 ; 29 :952-968.
Green P.S., 2002. A revision of Olea L. Kew Bull. 57 : 91-140.
Loussert R., Brousse G., 1978. L’Olivier. Techniques agricoles et production
méditerranéennes. Maisonneuve et Larose.
Zohary D., Hopf M., 1994. Domestication of plants in the Old World. Oxford Clarendon
Press, Second edition, p. 137-142.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Dessin extrait d’une planche d’Olea europaea,


Cayet blanc. Planche tirée du Traité des arbres
et arbustes qui se cultivent en France
en pleine terre, par M. Duhamel du Monceau.
À Paris, chez H.L. Guérin et J.F. Delatour, 1745. © Inra

72

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

La domestication
de l’olivier en Méditerranée
nord-occidentale
révélée par l’archéobiologie
Jean-Frédéric Terral, Claire Newton,
Aline Durand, Laurent Bouby et Sarah Ivorra
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Ci-dessus :
Mise à fruit. Ribes, Ardèche.
© Thierry Ruf
L a domestication de l’olivier a eu lieu indépendamment, en
de nombreuses régions et non exclusivement depuis un unique
foyer proche-oriental. Il apparaît tout de même que les origines de
À droite : sa culture et de sa domestication sont bien antérieures à l’Antiquité.
Oliveraie et mazets. Elles émergent cinq millénaires avant notre ère, avec de nouvelles
Saint Jean-de-la-Blaquière,
Hérault. © Catherine Breton variétés, des savoirs et des techniques provenant de nombreuses
contrées de la Méditerranée. Les approches éco-anatomiques sur bois
et morphométriques sur les noyaux d’olive reconsidèrent l’« histoire
dogmatique » de l’olivier selon laquelle les civilisations antiques
introduisirent l’olivier en Méditerranée occidentale. Les résultats
ne remettent toutefois pas en cause l’importance de l’influence des
Photo page précédente :
Phéniciens, des Étrusques, des Grecs et des Romains sur le rayonne-
À Sousse, en Tunisie, ruines
ment de l’olivier, à travers les âges et le Bassin méditerranéen, et par
et olivier. © Catherine Breton ailleurs, ils sont en accord avec les données de la biologie moléculaire.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Principales voies de
diffusion de l’oléiculture en
Méditerranée datées d’après
les sources archéologiques
(AEC : avant l'ère commune).

74

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

Une histoire et des scénarios amplement débattus

L’histoire de l’olivier, en particulier des origines (géographique et


chronologique) de sa culture, de sa domestication et de sa diffusion
en Méditerranée a toujours été un sujet sensible et controversé.
La « thèse classique » de la domestication de l’olivier
La « thèse classique » de la domestication de l’olivier situe en
Palestine du Chalcolithique (période de la protohistoire appelée
aussi, mais de manière trop restrictive, « âge du Cuivre »), au qua-
trième millénaire avant l’ère chrétienne ou l’ère commune (AEC), le
passage de l’olivier sauvage à l’olivier cultivé (Zohary et Spiegel-Roy,
1975). La mise en évidence de restes d’oliviers (bois carbonisés et
noyaux d’olive) dans une région où l’arbre n’était pas indigène per-
mettait indirectement de dater les origines de sa mise en culture.
Depuis le Proche-Orient, une lente diffusion de formes domesti-
quées, de savoirs et de pratiques s’ensuit, d’abord vers l’Égée au troi-
sième millénaire AEC puis vers la Méditerranée centrale et occiden-
tale. Sa présence est attestée à l’âge du Bronze final vers 1200-1000
AEC, en Italie et en Espagne, et finalement au cours du premier mil-
lénaire AEC dans le sud de la France. L’introduction de l’olivier est
datée par la palynologie (étude du pollen) entre le iiie et le iie siècle
AEC en Provence et entre le ie siècle AEC et le iie sièclede l’ère com-
mune (EC) en Languedoc en raison de l’augmentation significa-
tive de la fréquence en pollen fossile d’Olea par rapport aux autres
espèces forestières. L’extension depuis le foyer proche-oriental de
domestication est favorisée par les mouvements de navigation,
d’échanges et de migration qui caractérisent les civilisations proto-
historiques et antiques, notamment des Phéniciens, des Étrusques,
des Grecs et des Romains.
La controverse
Les données paléoécologiques attestent que l’olivier est bien indi-
gène à l’ouest de la Méditerranée (Terral, 1996 ; Terral et al., 2009),
mais l’arbre emblématique reste pour nombre de spécialistes,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

inféodé aux cultures antiques. Depuis des décennies et jusqu’à


aujourd’hui, il est en effet répété que les populations autoch-
tones ne connaissaient pas l’olivier avant son introduction en
Méditerranée nord-occidentale lors de la création de comptoirs
commerciaux ou la fondation de colonies. Cette histoire est large-
ment répandue dans les publications.

75

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Les données paléobotaniques

Les archéobotanistes et les paléoécologues ont reconstitué les fluc-


tuations géographiques des végétations passées avant et après
les glaciations, notamment d’après les données obtenues sur des
charbons de bois (discipline appelée anthracologie) conservés dans
quelques sites. Les sites de localisation de quelques-unes des popu-
lations ancestrales (Péninsule ibérique et Proche-Orient) coïncident
avec des sites archéologiques qui ont été datés, ce qui conforte l’hy-
pothèse de deux grandes zones refuges pour l’oléastre. Pour cer-
taines populations, il n’y a, en l’état actuel des recherches, pas de
coïncidence avec un site archéologique ou un gisement paléobota-
nique, par exemple en Provence ou en Corse.
L’oléastre était donc présent à l’est et à l’ouest du Bassin méditerra-
néen bien avant les glaciations. Lorsque le réchauffement s’est mani-
festé, les fruits des différentes populations d’oléastres de chaque
zone refuge ont été dispersés essentiellement par les oiseaux. Les
espaces entre populations (formation ou renforcement de corridors
écologiques) ont donc été colonisés. Les données paléobotaniques
montrent que l’oléastre s’est propagé le long des zones côtières tout
autour de la Méditerranée dès 8 000 AEC.

L’hypothèse d’une domestication autochtone


et de l’existence de foyers indépendants,
et l’émergence de l’exploitation de l’olivier
dès le Néolithique
Compte tenu de l’indigénat de l’olivier en Méditerranée occidentale,
la mise au jour de charbons de bois et de noyaux d’olives lors de
fouilles archéologiques à des périodes bien antérieures à l’introduc-
tion de l’oléiculture, l’hypothèse d’une protoculture et d’une exploi-
tation de l’olivier antérieure à l’Antiquité fut posée (Terral, 1996).
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Cependant, il était impossible de tester et de valider cette hypo-


thèse car on ne disposait pas des méthodes permettant de distinguer
l’olivier sauvage (ou oléastre) de l’olivier cultivé. Jusqu’à la fin du
xxe siècle, les recherches archéobotaniques étaient isolées par zone
géographique, par période chronologique ou encore sans référen-
tiel actuel, et ne pouvaient donc pas embrasser la complexité des
déterminismes abiotiques ou biotiques impliqués dans la variabi-

76

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

lité morphologique ou anatomique des vestiges étudiés. Grâce aux


progrès de l’analyse d’image, l’éco-anatomie et la morphométrie
permettent non seulement une étude conjointe et comparative de
matériels actuel et archéologique mais également l’observation à un
niveau de résolution inégalé (voir pour revue Marguerie et al., 2010).

Notions d’éco-anatomie

La croissance et le développement du bois, tissu de soutien et de


conduction, sont influencés par tous les événements, intrinsèques
et extrinsèques, qui interviennent dans la vie des végétaux ligneux.
Le climat et les activités humaines sont des facteurs dont l’incidence
sur le fonctionnement cambial et donc sur la structuration du bois,
sont majeurs.
L’analyse fine de la structure anatomique du bois, consistant en la
mesure des éléments vasculaires du bois et de leurs variations, à
l’échelle du cerne (dendrochronologie) ou à un niveau de résolution
intra- et interannuel (éco-anatomie quantitative), permet de révéler
les contraintes au développement

Procédure simplifiée de
l’analyse éco-anatomique
de bois carbonisés d’olivier
(Terral, 1996 ; Marguerie
et al., 2010).
Pour qu’ils soient comparables
à des charbons de bois
archéologiques, les échantillons
prélevés sont séchés puis
carbonisés à 450 °C en conditions
réductrices jusqu’à réduction
de taille et enrichissement
maximal en carbone.
Des caractères anatomiques
préservés à la carbonisation
sont mesurés en section
transversale des charbons
de bois à l’aide d’un système
d’analyse d’image.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

¯¯´
77

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

De plus, l’arbre est soumis à un ensemble de forces (poids des


branches, vent par exemple) qui détermine son état de contrainte
mécanique. Si ces forces sont intenses, il réagit en produisant un
bois que l’on qualifie de bois de réaction. Les cellules du bois formées
chaque année prennent leur structure définitive et subissent la matu-
ration cellulaire ou phase de lignification. Au cours de cette phase de
maturation, les cellules ont tendance à se déformer. Ces déforma-
tions sont appelées déformations de maturation. Ces phénomènes
sont observés dans le bois émis par le tronc, mais surtout dans le bois
des branches qui ont une direction de croissance oblique ou hori-
zontale. C’est à partir de ces déformations que peut être tentée la dis-
crimination des bois entre ceux provenant de branches jeunes (bois
immature), de branches charpentières ou de troncs (bois mature). Sur
des échantillons archéologiques, des pratiques telles que la taille et
l’émondage peuvent alors être mises en évidence.

Résultat de plusieurs missions scientifiques, une collection de réfé-


rence comprenant des centaines d’échantillons d’arbres de régions
différentes poussant sous diverses conditions écologiques a été éta-
blie au Centre de Bio-Archéologie et d’Écologie (Montpellier). Dans
cet ensemble, à l’aide des analyses d’éco-anatomie quantitative on a
pu différencier l’oléastre de l’olivier cultivé. Les individus sauvages
possèdent des cernes de croissances étroits, les individus cultivés
des cernes plus larges, en réponse à des conditions de croissance
plus propices, et un nombre de vaisseaux par groupe significative-
ment plus faible. Cette caractéristique anatomique a été interpré-
tée comme une réponse aux conditions écologiques de croissance :
produire des vaisseaux groupés en files radiales confère à l’arbre une
sécurité de conduction élevée. En effet, les conditions estivales du
milieu méditerranéen caractérisées par un déficit hydrique impor-
tant peuvent induire la pénétration de fines bulles d’air obstruant le
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

réseau conducteur de sève pouvant mener à la mort de l’arbre ou de


la partie innervée (phénomène de cavitation appelée aussi embolie
gazeuse) ; or les vaisseaux connectés radialement assurent des relais
en cas de d’embolie : si un vaisseau se bouche, la sève sera réorientée
vers les vaisseaux contigus. Ainsi, le bois des individus cultivés, en
réponse à des conditions de croissance facilitées, privilégie l’efficacité
plutôt que la sécurité de conduction de la sève. C’est pour cela qu’en

78

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

moyenne, les bois des oliviers cultivés possèdent moins de vaisseaux


accolés que le bois des oléastres.

Modèle éco-anatomique
de référence établi sur des
échantillons actuels révélant
la discrimination des oliviers
en fonction de leur statut
sauvage ou cultivé.
Cette représentation
schématique des deux
premiers axes d’une analyse
discriminante montre que les
critères « largeur de cernes »
et « nombre de vaisseaux
par groupe » permettent de
discriminer les deux groupes
d’olivier avec un taux supérieur
à 95 % et fournit un référentiel
permettant d’identifier
le statut des charbons de bois
archéologiques d’olivier.

L’existence d’une exploitation différentielle de l’olivier au cours


du temps et de l’émergence de sa culture au Néolithique a été révélée
grâce à la connaissance des variations anatomiques du bois d’oliviers
modernes et à l’analyse comparée de matériel archéologique de dif-
férentes périodes (Terral, 1996).
Dans certaines régions de Méditerranée occidentale (en Espagne,
au Portugal et en France), la sédentarisation et l’acquisition de l’agri-
culture coïncident parfaitement avec le déclin des formations végé-
tales mises en place au début de l’Holocène, dominées par les chênes
caducifoliés et sempervirents et corrélativement avec l’extension de
l’olivier. Ainsi, l’ouverture de la forêt à des fins agricoles aurait-elle
induit une compétition entre les végétaux de recolonisation (essen-
tiellement des espèces fruitières) et les plantes cultivées jusqu’à
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

l’intégration au sein du système agricole de certains ligneux dont


l’olivier.
Ce processus, initié dès le Néolithique (environ 6000 AEC) et
présidant aux destinées de l’olivier, se subdivise en deux phases. La
première correspond à la période du Néolithique au Chalcolithique.
Elle est marquée par une exploitation intensive de l’olivier pour son
bois très probablement utilisé comme combustible. D’un point de

79

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

vue paléo-écologique, cette phase correspond à l’expansion de for-


mations végétales méditerranéennes à olivier les plus adaptées à un
climat chaud. La seconde phase, couvrant le Chalcolithique et l’âge
du Bronze, période durant laquelle les végétations à olivier sont bien
installées, semble caractérisée par un changement de mode d’ex-
ploitation de l’olivier (Terral et al., 2009). L’exploitation de l’arbre
devient raisonnée, assimilable à une pratique de taille. Cette gestion
maîtrisée aurait pu contribuer au maintien d’arbres cultivés à matu-
rité sexuelle, producteurs de fruits.
Finalement, l’augmentation de la fréquence en pollen d’Olea,
considérée auparavant comme une preuve formelle de l’origine de sa
culture, témoignerait plutôt de nouvelles pratiques agricoles intro-
duites par les peuples antiques. Les données palynologiques date-
raient la mise en place d’oliveraies, c’est-à-dire l’avènement d’une
oléiculture intensive.

En Méditerranée nord-occidentale,
Noyaux archéologiques
l’olivier est domestiqué 2 000 ans
antiques datés de 275-350 EC avant l’intervention des sociétés antiques
(Puits du site de la Roquette,
Cavillargues, Gard). Malgré les problèmes de conservation des restes végétaux en
© J.-D. Strich
(UMR CEPAM, CNRS)
contexte archéologique (décomposition, fragmentation ou défor-
mation des échantillons), de nombreux noyaux d’olive carbonisés
en parfait état ont été mis au jour lors de fouilles archéologiques de
sites divers (Espagne, Italie, France).
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Procédure de l’analyse
morphométrique géométrique
(étude de la forme)
du contour de noyaux d’olive.

80

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

Méthodologie

La distinction des individus sauvages et des individus cultivés d’une


même espèce est souvent impossible par simple observation ou par
la mesure de ses dimensions. S’il est vrai que les mensurations des
fruits et des graines varient en fonction du statut sauvage ou cultivé
et de la position taxonomique de la plante (sous-espèce ou variété
botanique), la dimension des graines est tributaire de paramètres
écologiques, anthropiques, pathologiques et liés au développement.
Ces facteurs que l’on peut tester sur du matériel vivant ne sont pas
toujours contrôlables sur le matériel archéologique. La distinction
des formes sauvages et des formes domestiquées exige donc des
méthodes appropriées et performantes que fournit la morphométrie
géométrique. Un des intérêts majeurs de ces méthodes réside dans
la possibilité de caractériser la géométrie (ou forme) d’une struc-
ture quelconque, en nous affranchissant ou non de ses dimensions.
L’analyse de cette composante morphologique, indépendamment
des mensurations, permet ainsi un contrôle optimal des facteurs liés
au développement et des paramètres environnementaux de varia-
bilité morphologique.
La variabilité d’un caractère peut être expliquée par trois compo-
santes essentielles : génétique, environnementale et ontogénétique.
La composante ontogénétique est elle-même dépendante des deux
premières, elle correspond à la croissance et au développement. À
l’aide de tels critères géométriques et, à condition que l’indépen-
dance entre la forme, l’environnement et le développement soit
démontrée, la comparaison de plusieurs individus en terme de dis-
tance morphologique (appelée aussi divergence morphologique ou
déviation phénotypique) revient approximativement à étudier les
relations de parenté entre ces individus. Cette analyse abordant donc
le déterminisme génétique de la variabilité de caractères potentiel-
lement héritables est néanmoins à nuancer, car elle est traduite par
l’expression de systèmes de gènes qui est souvent inconnue.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Aucun argument scientifique ne permettait d’affirmer s’ils pro-


venaient d’oliviers sauvages ou de formes domestiquées. Dans le but
de répondre à une telle interrogation, une approche morphologique
à haute résolution a été engagée.
Étude des noyaux. Les analyses morphométriques de plus de
3 000 noyaux d’olives de populations sauvages, de variétés cultivées
d’origines diverses et de noyaux issus de plusieurs sites archéolo-

81

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

giques (Espagne, Italie, France) apportent des résultats importants


aux différentes échelles taxinomique, géographique et chronolo-
gique (Terral, 1996 ; Terral et al., 2009).
Les oléastres se distinguent des cultivars par des critères mor-
phométriques fondés sur la structure géométrique des noyaux avec
un taux de discrimination supérieur à 90 %. Depuis les origines de
la domestication, les pressions de sélection furent telles qu’elles
ont grandement affecté la structure morphologique du noyau.
Originellement, le noyau est plutôt de petite taille (< 1 cm), ce qui
est un critère non exclusif, et surtout relativement global.
D’un point de vue géographique, les divergences morpholo-
giques entre les populations sauvages (individus spontanés) occi-
dentales (voir figure groupe 1) et orientales (voir figure groupe 2)
témoignent d’une différenciation antagoniste, probablement liée
à une ségrégation de leur distribution géographique en deux zones
distinctes et donc, la rupture des flux géniques entre l’est et l’ouest.
Fondée sur des facteurs climatiques, écologiques, historiques et
socioculturels, le Bassin méditerranéen peut être divisé en une zone
orientale et une zone occidentale de part et d’autre d’un axe reliant la
mer Adriatique au désert libyque (Blondel et Aronson, 1995). Cette
concordance entre la différenciation morphologique des oléastres
mise en évidence et leur situation biogéographique apparaît com-
parable aux résultats d’études entreprises sur le polymorphisme de
l’ADN cytoplasmique à l’échelle de la Méditerranée ou régionales.
Les convergences et divergences de forme du noyau entre popu-
lations sauvages et cultivars d’origines diverses témoignent de la
complexité des échanges entre les populations humaines à l’origine
de la diffusion de la culture de l’olivier dans le Bassin méditerranéen.
Cependant, certains groupes morphologiques possèdent une unité
géographique, comme les oliviers du groupe 3 (voir figure) (Terral,
1996).
Du fait de leur proximité morphologique par rapport au groupe
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

constitué d’oléastres occidentaux et, de par leur divergence mor-


phologique vis-à-vis des oléastres et des cultivars de Méditerranée
orientale, il est donc très probable que les cultivars du groupe 3 (voir
figure) dérivent d’un pool génétique occidental, indépendamment
du pool oriental. La convergence morphologique de cultivars de
l’est et de l’ouest semble quant à elle s’opposer à un modèle bio-
géographique de ségrégation des populations sauvages entre l’est et

82

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

l’ouest. Cette convergence résulterait donc des migrations humaines


qui, au fil du temps, ont favorisé le croisement entre formes orien-
tales et formes occidentales, modèle corroboré par les approches
génétiques.
Les noyaux archéologiques de 21 sites archéologiques sont
confrontés au modèle de différenciation morphologique (selon
une procédure statistique multivariée comparative et décisionnelle).
Leur affiliation au groupe phénotypique le plus convergent permet
de dater les origines de la domestication de l’olivier et de retracer
l’histoire biogéographique de la diversification variétale de l’olivier
en Méditerranée nord-occidentale.
Les premiers échantillons appartenant à une forme domestiquée
proviennent d’un site chalcolithique espagnol daté à 2300-2000
avant notre ère. Ils sont mis au jour sous la forme d’un morpho-
type (groupe 3) composé de cultivars originaires de Méditerranée
occidentale. En Espagne, du Chalcolithique à la période romaine, il
semble que de nouveaux types morphologiques d’olivier domesti-
qué apparaissent graduellement, en commençant par des formes très
probablement affiliées d’abord au monde colonial phénicien puis à
l’Empire romain.
Au regard des données acquises, l’âge du Bronze semble donc
être une période clé dans l’histoire de l’olivier. La domestication a

Structuration de la diversité
morphologique de l’olivier
saisie à partir de l’analyse de
noyaux d’oliviers spontanés
(ou subspontanés)
et de variétés cultivées
d’origine diverses.
Les résultats mettent en lumière
une ségrégation « est - ouest »
des formes sauvages et la mise
en évidence en Méditerranée
nord-occidentale de formes
cultivées présentant
une affinité géométrique
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à des formes occidentales, dès le


Chalcolithique et l’âge du Bronze.

83

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

commencé avec la sélection de caractères remarquables, tel le calibre


des fruits ou leur quantité d’huile, jusqu’à ce que des populations
migrantes introduisent en Méditerranée occidentale de nouvelles
variétés cultivées et des modes agricoles plus performants au milieu
du dernier millénaire avant notre ère. La domestication aurait donc
débuté bien plus tôt que ce qui a été admis jusqu’au début des années
2000 par les archéologues et historiens.

L’irrigation médiévale de l’olivier mise à jour


par de l’éco-anatomie quantitative
La mise au jour de charbons de bois d’olivier datés du Moyen Âge
présentant des vaisseaux d’un diamètre très élevé suggérait, en réfé-
rence au modèle éco-anatomique explicité précédemment, une dis-
ponibilité élevée en eau dans le sol.
Comme aucune donnée textuelle ou paléoclimatique n’a été
découverte sur la survenue au Moyen Âge central d’un épisode
humide, l’hypothèse d’une intervention humaine fut posée.
La littérature agronomique médiévale est effectivement féconde
sur les pratiques culturales héritées de la civilisation romaine et du
monde arabo-musulman, la taille, la greffe et l’irrigation par exemple.
L’irrigation, documentée indirectement au travers des actes de la
pratique et des cartulaires médiévaux, est décrite de manière détail-
lée dans les traités savants (Durand, 1998). Bien que les informa-
tions transcrites soient très précises d’un point de vue technique
et pratique, on ne sait pas si les paysans de l’époque ont appli-
qué les recommandations agronomiques. Les conseils prodigués
concernent l’ensemble des arbres fruitiers et des recommandations
spécifiques à des arbres comme l’olivier sont exceptionnelles. Par
exemple, P. de Crescent, agronome bolonais du xiiie siècle suggérait
d’utiliser l’eau de pluie ou de citerne pour irriguer l’olivier plutôt que
l’eau de rivière. Ibn Al’-Awwâm proposait d’arroser tardivement les
oliviers récemment greffés. L’hypothèse de la présence historique
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

d’une culture irriguée de l’olivier était donc à tester.


Le référentiel établi pour la recherche de critères quantitatifs de
discrimination entre olivier sauvage et olivier cultivé a été amendé à
l’aide d’échantillons modernes prélevés sur des individus sauvages
poussant en condition ripicole et sur des individus cultivés irrigués
exclusivement de manière traditionnelle, c’est-à-dire au moyen de
techniques gravitaires. Le modèle obtenu après les analyses éco-ana-

84

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

tomiques, les calculs de conductivité hydraulique et les traitements


statistiques affiche un pouvoir de discrimination supérieur à 90 %.
Il différencie, quel que soit le statut, sauvage ou cultivé, les oliviers
poussant sous influence hydrique de ceux en conditions de séche-
resse. Dans les zones semi-arides comme dans le sud de l’Espagne
et en Afrique du Nord, les oléastres peuvent être rencontrés sur les
rives de cours d’eau temporaires (oueds dans le Maghreb ou barran-
cos dans la péninsule ibérique). Cette situation écologique atypique
offre aux arbres un apport d’eau leur permettant, au printemps, de se
développer dans des conditions optimales. L’été, les cours d’eau sont
totalement asséchés et, la croissance des arbres est stoppée.
Les oliviers mis en culture croissent plus rapidement que leurs
congénères sauvages. Même s’ils sont cultivés en sec, un espace-
ment des individus et l’élimination des compétiteurs ou des amen-
dements suffisent à expliquer des différences de cinétique de crois-
sance. Néanmoins, les régions sèches et semi-arides dépendent de
l’irrigation en vue de garantir une production agricole suffisante.
Dans d’autres régions où les conditions climatiques sont moins dras-
tiques, l’irrigation peut être tout de même employée dans le but
d’augmenter la productivité, le rendement et la qualité des récoltes.

Modèle éco-anatomique
de référence établi sur des
échantillons actuels révélant
la discrimination des oliviers
en fonction de leur statut
sauvage ou cultivé
et de la disponibilité
en eau du milieu.
Il s’agit de la représentation
schématique des deux premiers
axes d’une analyse discriminante
(Durand et Terral, 2005-2006).
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

85

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

D’un point de vue biologique, une relation significative entre


les caractéristiques anatomiques et la disponibilité de l’eau dans le
milieu est mise en évidence, à la fois chez l’olivier sauvage et chez
l’olivier cultivé. La conductivité hydraulique, liée directement au
caractère de la surface des vaisseaux conducteurs du bois augmente
fortement en réponse à un apport d’eau. Il semble donc qu’une sur-
face de vaisseaux élevée et donc de conductivité hydraulique, peut
être interprétée comme une réponse éco-physiologique de l’arbre à
une meilleure disponibilité en eau. Ces changements correspondent
donc à une grande efficacité de transport de sève.
La confrontation des résultats des mesures pratiquées sur les
charbons médiévaux au modèle éco-anatomique de discrimina-
tion vérifie notre hypothèse de départ, à savoir que l’irrigation était
appliquée aux cultures d’olivier depuis la période carolingienne en
Languedoc (Lunel-Viel), puis en Corse et en Catalogne espagnole à
la fin de la période médiévale. En effet, la grande majorité des char-
bons de bois archéologiques sont classés dans le groupe des spé-
cimens cultivés (Durand et Terral, 2005-2006). Quelques indivi-
dus toutefois appartiennent au groupe des oliviers sauvages, sans
que l’on puisse dire si ces arbres sont réellement sauvages ou si ce
sont des individus féraux ou issus d’un verger abandonné. Parmi le
groupe des oliviers cultivés, hormis un nombre non négligeable de
charbons de bois non identifiables possédant des caractéristiques
anatomiques intermédiaires, la plupart sont affiliés au groupe des
oliviers cultivés irrigués.
Pour la première fois, grâce aux analyses éco-anatomiques, l’exis-
tence de la pratique de l’irrigation de l’olivier est attestée au Moyen
Âge. Les résultats montrent qu’en Méditerranée nord-occiden-
tale, cette pratique est courante, au moins dès le début ou après le
xiie siècle. L’irrigation ne doit plus être considérée comme une pra-
tique culturale mineure pour cet arbre. L’irrigation de l’olivier ne
peut être considérée comme un palliatif ; elle participe sans aucun
doute à accroître le rendement et la qualité de production. Ainsi,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

sous de telles conditions, la culture de l’olivier au Moyen Âge ne


doit plus être considérée comme extensive aux marges des terroirs,
mais comme une oléiculture maîtrisée et parfaitement ancrée dans
la tradition de l’arboriculture médiévale.

86

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La domestication de l’olivier en Méditerranée nord-occidentale

Pour en savoir plus


Blondel J., Aronson J., 1995. Biodiversity and ecosystem function in the Mediterranean
Basin : human and non-human determinants. In Mediterranean-type Ecosystems. The
function of biodiversity, G. W. Davis and D. M. Richardson (ed.), p. 43-119. Berlin,
Springer-Verlag.
Durand A., 1998. Les paysages médiévaux du Languedoc (xe-xiie siècle). Toulouse, France,
Presses universitaires du Mirail.
Durand A., Terral J.-F., 2005-2006. Regarder autrement le charbon de bois
archéologique : l’exemple de l’irrigation des plantations d’oliviers (ixe-xve siècle).
Archéologie du Midi médiéval, 23-24 : 75-92.
Marguerie, D., Bernard V., Bégin Y., Terral J.F., 2010. Anthracologie et dendrologie.
In Payette S., Filion L. (eds.) Dendroécologie, concepts, méthodes et applications.
Presses de Laval, Canada, p. 311-346.
Terral J.F., 1996. La domestication de l’olivier (Olea europaea L.) en Méditerranée nord-
occidentale : approches morphométriques et implications paléoclimatiques.
Thèse de doctorat, Université Montpellier 2.
Terral J.-F., Durand A., Newton C., Ivorra S., 2009. Archéo-biologie de la domestication
de l’olivier en Méditerranée occidentale : de la remise en cause d’une histoire
dogmatique à la révélation de son irrigation médiévale. In : Le retour de l’olivier, l’olivier de
retour. Numéro spécial de la revue Études sur l’Hérault (éditée par le conseil général de Jarres de stockage de l’huile
l’Hérault), coordonné par P. Laurence et A. Rossel. p. 13-26. d’olive. Moulin du xviiie siècle,
Zohary D., Spiegel-Roy P., 1975. Beginning of fruit growing in the Old Word, Science, chez Autrans à Nyons.
187: 319-327. © Inra – Jean Weber
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

87

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe
entre goût et qualité
Christian Pinatel
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

P arler du goût est difficile à plus d’un titre. Le goût est considéré
comme subjectif : « chacun ses goûts », « tous les goûts sont
dans la nature ! », etc. Mais d’un autre côté, les personnalités célèbres
s’affichent dans les publicités et déclarent utiliser des produits précis
afin qu’ils soient imités par les consommateurs ; un article dans un
magazine de mode pour tel vin ou telle huile fera grimper les ventes,
quelle que soit la notoriété du critique gastronomique.
La question inévitable est : « Quelle est la meilleure huile ? »
Apparemment, il y a un paradoxe.

Qu’est-ce que le goût ?


Le sens commun et le sens physiologique
Le terme de « goût » lui-même est source de confusion. On l’ap-
plique à toute sorte d’objet, comme le goût pour les voitures an-
ciennes ou le goût pour aménager sa chambre. Mais même dans son
domaine premier, le goût des aliments, il y a deux sens distincts : le
sens commun et le sens physiologique. Le premier permet de dire
normalement que tel vin a un goût de bourgeons de cassis, en fait ce
sont des arômes perçus par le sens de l’olfaction par voie rétronasale.
Le second dit que les goûts sont les sensations perçues exclusive-
ment par les papilles de la langue qui perçoivent l’acide, le salé, le
sucré et l’amer. Par le nez, ce sont des odeurs, par la bouche et la voie
rétronasale, ce sont des arômes.
Pour simplifier ici, « le goût » inclut les sensations gustatives au
sens strict ainsi que les sensations perçues par voie rétronasale et qui
relèvent donc du système olfactif.
Subjectivité et diversité des huiles d’olive
Mais revenons à la question de la subjectivité. Chacun a des goûts
bien à soi, chacun revendique ses préférences, malgré cela il y a un
engouement pour la sélection de produits alimentaires, qu’il s’agisse
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

de concours ou de recommandations de personnes ayant une in-


fluence. L’huile d’olive est ici un excellent exemple.
La subjectivité a à voir avec la diversité : l’huile d’olive offre une
grande diversité de goûts. Les régions d’origine, les variétés, les pro-
Photo page précédente : cessus d’élaboration conduisent à différentes sortes d’huiles. Les
Variété Lucques
en cours de maturation.
comparer entre elles relève de la subjectivité. On peut préférer le
© Catherine Breton fruité vert au fruité noir, l’huile d’Olivière à celle d’Aglandau, ou

90

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

celle de la vallée des Baux-de-Provence à celle de Nyons. Mais aucun


spécialiste ne s’avancera à donner des préférences générales sur ces
différentes sortes d’huile. Tout ce qu’il pourra faire, s’il doit donner
des renseignements à ce sujet, c’est les décrire objectivement.
Les défauts
Dans chaque type, chaque groupe d’huiles d’olive, une hiérarchie
peut être établie en recherchant des « mauvais goûts » : lorsqu’ils
ont une identité, une cause connue, on les nomme « défauts ». Ils
proviennent en général d’un processus d’élaboration défectueux,
d’une conservation dans de mauvaises conditions ou trop prolon-
gée. Mais il peut s’agir aussi d’attributs non conformes pour un
genre d’huile donnée : par exemple, si des arômes de fruits rouges
sont détectés dans une huile présentée comme une huile de Nice,
il s’agit d’un défaut car une olive produite dans les conditions de
l’AOP Nice ne présente pas ces arômes. Cet attribut peut indiquer
que les olives utilisées ne proviennent pas de la région. De même
une amertume excessive peut représenter une non-conformité au
profil de l’appellation.
Cette sélection par les défauts est la plus facile. Certains sont
rédhibitoires dès que leur présence est établie, comme les arômes
de fruits rouges dans l’huile de Nice. Certains sont à interpréter en
fonction de leur intensité, comme les défauts de fabrication tel le
moisi ou le rance. Si l’intensité de l’un de ces défauts se situe entre 0
et 3,5, l’huile sera déclassée de « vierge extra » à « vierge », au-delà
de ce seuil l’huile sera classée en catégorie lampante, indépendam-
ment du critère de l’acidité. C’est la sélection négative.
La sélection positive
Il s’agit de classer les huiles plutôt par leurs qualités que par leurs
défauts. Du point de vue réglementaire, pour être admise en caté-
gorie « vierge extra », une huile d’olive ne doit pas avoir de défaut,
et doit avoir « du fruité », sans aucune autre exigence. Le fruité doit
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

être perceptible. Rien n’est dit sur son intensité ni sur ses caractéris-
tiques. Ceci n’est pas l’affaire de la réglementation.
Pour les huiles d’appellation d’origine protégée (AOP), les exi-
gences sont plus serrées. Une huile doit présenter certains attributs
correspondants à la qualité requise. Cela peut être uniquement le
fruité, mais aussi l’amertume et l’ardence selon les aires de produc-
tion. De plus, le fruité doit présenter les arômes qui conviennent.

91

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Si, par exemple, une huile produite dans l’aire de l’AOP Haute-
Provence ne présente pas les arômes spécifiques d’artichaut ou de
banane verte dans son fruité, caractéristiques de la variété Aglandau
cultivée dans ce terroir, alors elle sera écartée.
Mais c’est surtout dans la sélection des meilleures huiles que la
sélection positive devient difficile. Il faut non seulement faire appel
à la conformité à un modèle, mais aussi valoriser les productions
exceptionnelles. C’est ce type de sélection qui ne peut être réalisé
que par des dégustateurs de haut niveau, connaissant parfaitement
les modes de production et les terroirs, dans le cadre de concours.

Le système olfactif humain

Le système olfactif humain est une machinerie extrêmement per-


formante, modelée par au moins 500 millions d’années de sélection
naturelle.
L’ensemble du système nerveux central est destiné à assister l’orga-
nisme dans de nombreuses tâches nécessaires à sa survie, en parti-
culier s’alimenter, se reproduire, et gérer des déplacements à partir
d’un système de détection des molécules environnantes.
Au début de sa vie, l’individu n’aurait aucune préférence innée parmi
les différents arômes qui peuvent se présenter. Une sensation olfac-
tive est enregistrée comme un tout, indépendamment de ses com-
posantes. Une perception olfactive n’est pas associée à un nom,
mais à un environnement, ou à l’état de bien-être qui suit la prise de
contact. Ainsi se construisent les conditionnements aversifs qui per-
mettent à l’individu de ne pas consommer à nouveau des aliments
qui l’ont rendu une fois malade. Dans le sens positif, les condition-
nements sont moins forts mais conduisent à un grand nombre de
nos préférences. La recherche de l’identité d’une odeur passe par
la recherche de la situation dans laquelle l’odeur a été enregistrée.
La meilleure description de ce cheminement cognitif est le célèbre
passage « de la madeleine de Proust » dans « À recherche du temps
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

perdu ». L’ensemble des préférences est donc une construction à la


fois individuelle et sociale, car les mets meublant la mémoire affec-
tive sont les mets habituels de notre enfance. Mais si c’est la culture
sociale qui donne les premières préférences gustatives aux individus,
c’est ensuite la culture individuelle qui permet de s’en affranchir et
d’envisager d’apprécier les nouveautés.

92

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

L’importance des concours


Ce sont les concours qui pourront nous donner une telle
sélection.
Nous avons en France plusieurs concours d’envergure
nationale ou régionale : le concours général agricole, lors
du salon de l’agriculture à Paris, le concours régional de
Provence-Alpes-Côte d’Azur, à Marseille, le concours de
Corse, qui se déroule lors de la foire de Montegrosso en
Haute-Corse, et le concours du Languedoc-Roussillon,
organisé de façon itinérante dans la région chaque année.
Lors de ces concours, les huiles de chacune des AOP
sont comparées entre elles. On ne mélange pas une AOP
d’Aix-en-Provence avec une AOP de Nîmes. Vouloir les
comparer entre elles reviendrait à vouloir comparer un
Jurançon avec un Sancerre.
Dégustateur d’huile d’olive.
Au cours d’un jury mettant en lice des huiles de Provence, par © Afidol – Alexandra Paris
exemple, les dégustateurs devront se poser la question suivante :
quelle est celle qui illustre le mieux la spécificité du terroir de
Provence ? Comme il s’agit de dégustateurs qui connaissent l’ap-
pellation, qu’ils sont plusieurs et que le résultat est un consensus,
les préférences personnelles, subjectives, s’effacent devant les juge-
ments argumentés selon les références du terroir.
Le caractère exceptionnel d’une huile pourra être établi pour sa
mise en valeur supérieure des caractères du terroir, pour l’harmonie
de ses différents attributs, ou pour une touche d’originalité qui la
distingue tout en restant conforme au profil de l’appellation.
En dehors des huiles d’appellation, l’originalité est bien plus faci-
lement retenue comme caractère positif discriminant. La porte est
ouverte aux créations les plus intéressantes, dans la mesure où les
dégustateurs y voient un intérêt gastronomique. L’intensité du fruité
reste toutefois un élément décisif. C’est l’attribut fondamental des
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

huiles d’olive par rapport à toutes les autres huiles ; les composants
du fruité, ainsi que ses composants mineurs qui lui confèrent amer-
tume et ardence, sont l’apanage de l’huile d’olive vierge face à ses
concurrentes. Mais c’est avec des huiles aux attributs intenses que
les dégustateurs ont le plus de difficultés, car l’amertume et l’ardence
rendent la dégustation ardue et empêchent de percevoir le fruité à
sa juste valeur.

93

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Subjectivité ou objectivité ?
Nous y sommes donc. Il y a bien une subjectivité du goût : chacun
peut chercher où va sa préférence entre le fruité noir et le fruité mûr,
ou entre une huile de variété Olivière ou une huile corse. Mais per-
sonne ne peut prétendre « savoir » quelle est la meilleure. C’est
la diversité. Et il y a bien une objectivité des jugements : d’abord
la sélection négative, qui permet d’écarter les huiles qui ne sont
pas conformes à leur dénomination, puis la sélection positive des
concours qui permet d’identifier chaque année les meilleures huiles.

L’objectivité : comment décrire le goût ?


Décrire le goût de quelque chose n’est pas facile. Ce n’est pas très
compliqué si l’on veut décrire un goût à quelqu’un avec qui on par-
tage souvent des mets, et dont on connaît les goûts.
On peut parler en termes hédoniques : « L’huile du moulin
Tartempion est excellente ». Mais cette information n’est utilisable
que par quelqu’un qui sait que celui qui l’a dit a les mêmes préfé-
rences que lui.
Il y a aussi des termes qui ne sont pas hédoniques, mais n’ont
guère d’intérêt quand on ne connaît pas le locuteur : « L’huile du
domaine des Clapas est forte ». Cela ne veut rien dire si on ne sait
pas ce que ce locuteur a trouvé de fort dans cette huile. Est-ce que
c’est l’ardence, l’amertume, le fruité ? Ou bien un autre goût que le
dégustateur a l’habitude d’évaluer de léger à fort ?
Un système de description doit donc être construit dans l’ob-
jectif de permettre une plus grande communication entre les per-
sonnes. Le seul descripteur qui peut être utilisé assez facilement est
l’amertume.
Descripteurs du point de vue du cheminement
sensoriel
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Comme pour tous les aliments, il y a trois sortes de descripteurs du


point de vue du cheminement sensoriel : en provenance du sens
gustatif (au sens physiologique strict), ou de l’ensemble des sensa-
tions détectées sur la paroi buccale et relayées par le nerf trijumeau
(sensations tactiles, chaleur, froid…), et du sens olfactif.
Le sens gustatif ne fournit qu’un seul type de sensation avec
l’huile d’olive : l’amertume. Les trois autres goûts habituellement

94

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

listés, à savoir l’acide, le salé et le sucré ne sont jamais présents dans


l’huile, ils ne peuvent se trouver que dans des aliments comportant
une phase aqueuse. On note ici que l’« acidité », mesure chimique
bien connue de la qualité d’une huile, ne se détecte pas au goût en
tant que telle.
Le nerf trijumeau transmet au cerveau des sensations que
l’on appelle kinesthésiques, relevant du sens du toucher. L’huile
d’olive « possède » ici une sensation spécifique, que l’on appelle
« ardence ». C’est elle qui relève les plats, comme le poivre
ou le piment, en provoquant une sensation d’échauffement.
Malheureusement ce terme utilisé depuis longtemps pour l’huile
d’olive est souvent remplacé par « piquant », car c’est ainsi qu’est
dénommée cette sensation dans les textes réglementaires. C’est en
effet la traduction la plus simple de « piccante », utilisé dans les
documents originaux en espagnol. L’oléocanthal, possédant des ver-
tus anti-inflammatoires, est en partie la cause de cette sensation. On
la perçoit parfois en fond de gorge. L’amertume et l’ardence sont des
attributs présents dans la plupart des huiles d’olive. Ces sensations
sont très majoritairement causées par des anti-oxydants, qui sont des
composés phénoliques, qui contribuent à la bonne conservation de
l’huile et à son intérêt diététique.
Le sens de l’olfaction, finalement, fournit la plupart des descrip-
teurs qui nous intéressent, notamment ceux qui permettent de carac-
tériser le fruité et les défauts.
Le triangle du goût.
Ce triangle est une tentative
de représentation du panorama
aromatique de l’huile d’olive.
L’idée principale du triangle
du goût est la dimension
supplémentaire qu’apporte
la fermentation. Avec elle,
nous n’allons pas « au-delà du
mûr », mais bien dans une autre
direction. Qu’il s’agisse d’olives
vertes ou d’olives mûres,
elles donneront du fruité noir
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

si leur fermentation est bien


conduite.

95

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Les descripteurs techniques et les descripteurs


analogiques
Les descripteurs techniques correspondent à des processus réperto-
riés par les techniciens de l’huile d’olive. La plupart sont les défauts
(voir paragraphe suivant), et correspondent à des phénomènes de
dégradation. Chaque descripteur technique a été sélectionné pour
sa pertinence. Le Conseil oléicole international fournit des échantil-
lons de référence afin de conserver une bonne reproductibilité de la
méthode réglementaire d’analyse organoleptique de l’huile d’olive.

Fruité vert et fruité mûr

Le fruité des huiles d’olive vierges extra se répartit en deux grandes


familles en fonction des sensations aromatiques dominantes : le
fruité vert et le fruité mûr. Si les arômes herbacés dominent, il s’agit
d’un fruité vert, si ce sont les arômes évoquant les fruits mûrs qui
dominent, il s’agit d’un fruité mûr.
Il n’y a pas de frontière nette entre ces deux types, bien au contraire :
de nombreuses huiles sont intermédiaires, elles comportent à la fois
des notes olfactives se rapportant au fruité mûr et des notes olfac-
tives se rapportant au fruité vert. Il est donc fréquent que des huiles
ne puissent pas être classées dans l’une ou l’autre de ces catégories.
Voici les définitions que donne le règlement européen 2 568/1991
à ce sujet :
- L’attribut fruité est qualifié de vert lorsque les sensations olfactives
rappellent celles des fruits verts, caractéristiques de l’huile provenant
de fruits verts.
- L’attribut fruité est qualifié de mûr lorsque les sensations olfactives
rappellent celles des fruits mûrs, caractéristiques de l’huile provenant
de fruits verts et mûrs.
Il y a deux choses importantes à noter dans ces définitions. Tout
d’abord, les sensations à prendre en compte sont les sensations four-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

nies par le système olfactif. Il s’agit, en effet, uniquement du fruité


dont il est question. Les autres sensations, à savoir l’amertume et
l’ardence, n’entrent pas en jeu. Une huile ardente et amère dont le
fruité est dominé par des notes de fruits mûrs et dans lequel ne pré-
dominent pas les notes herbacées est donc indéniablement un fruité
mûr. De même, on parlera de fruité vert pour une huile dominée par
des arômes de verdure même si elle est douce.
¯¯
´

96

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

Ensuite, il est clairement dit que le classement dépend des sensations


olfactives, et non de la couleur des olives elles-mêmes. Ce petit détail
a son importance, car pour chaque variété d’olive la relation entre le
goût des olives et la couleur des fruits est différente. Il existe en effet
des variétés d’olives qui peuvent donner du fruité mûr lorsqu’on les
récolte encore vertes, et d’autres qui donneront du fruité vert alors
qu’on les a récoltées noires. Dans les textes qui nous intéressent ici, le
terme « vert » est un adjectif relatif à la maturité, et non à la couleur.
Cela n’est pas particulier à l’olive : par exemple certaines variétés de
pommes sont consommées vertes, car elles sont tout autant mûres
que des pommes rouges d’autres variétés. À l’inverse, ceux qui ont
goûté des mûres rouges savent bien qu’elles sont vertes, car pour
être mûres il faudrait qu’elles soient noires.
On ne doit pas confondre la fraîcheur d’une huile avec des notes de
fruité vert. En effet, le caractère mûr ou vert d’un fruité est quelque
chose de durable : la réglementation permet de l’écrire sur l’étiquette,
ce caractère a été établi par un jury compétent. Or, pendant quelques
semaines après l’extraction, toutes les huiles faites avec des olives
fraîches offrent à l’olfaction une sensation végétale caractéristique.
Celle-ci disparaissant ensuite rapidement, elle n’est pas prise en
compte pour la caractérisation du fruité.
Le fruité noir, quant à lui, est tout à fait sur un autre registre. Il n’y a pas
de continuité entre le fruité noir d’une part, et le fruité vert ou le fruité
mûr d’autre part. Le fruité noir résulte d’une décision de provoquer
une fermentation, et non d’une évolution naturelle et inévitable des
fruits. La limite entre fruité vert et fruité mûr est arbitraire et autorise
tout fruité intermédiaire, mais la décision de mettre les olives en fer-
mentation ne peut pas être prise à moitié.

Les descripteurs analogiques sont les termes qui font référence à


des choses connues ayant une ressemblance dans l’arôme de l’huile.
Ils peuvent servir à décrire le fruité, mais aussi certains défauts. Par
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

exemple, le descripteur analogique « terre » correspond au descrip-


teur technique « moisi ». Pour la description du fruité, nous utili-
sons communément 45 descripteurs. Mais certains sont rarement
détectés. Par exemple, le descripteur « pamplemousse » n’apparaît
qu’avec les huiles de la variété Grossane. Avec un minimum d’atten-
tion, ces descripteurs peuvent être utilisés soit pour interpréter une
description ou bien pour en élaborer une. Pour établir le profil ana-

97

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

logique d’une huile, d’une façon la plus fiable possible, ou un profil


réglementaire, nous réunissons un jury de huit personnes. À chaque
descripteur est attribuée une fréquence en fonction des identifica-
tions des dégustateurs.

Profil analogique de la variété Olivière.

Profil analogique de la variété Verdale de l’Hérault.

Les normes : l’objectivité dirigée


L’originalité de l’huile d’olive :
un règlement en normalise le goût
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Le goût de l’huile d’olive est réglementé par une norme du Conseil


oléicole international, adoptée dans un règlement européen (règle-
ment n° 2568/1991). Cette norme ne traite pas que du goût, elle pré-
cise aussi toutes les caractéristiques chimiques qu’une huile d’olive
doit présenter pour être conforme à sa dénomination de vente.
Cette normalisation sur le goût prend naissance en 1966 avec un
premier règlement, qui a été amendé à plusieurs reprises.

98

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

Liste des arômes analogiques

Caractère Descripteur
Amande
Fruité vert et mûr Camomille
Noyau de cerise
Fleurs blanches
Mûre
Noisette fraîche
Pamplemousse
Pèche
Poire
Pomme
Prune
Tomate
Amande verte coque
Plutôt caractéristiques de fruité vert Artichaut cru
Banane, banane verte
Basilic
Foin frais
Herbe, feuille, verdure
Menthe
Poivre vert
Amande fraîche
Plutôt caractéristiques de fruité mûr Ananas
Banane très mûre
Beurre frais
Cassis
Céréales
Fleur de genêt
Fruits exotiques
Fruits rouges
Noix fraîche
Pâtisserie
Vanille
Artichaut cuit
Spécifiques du fruité noir Cacao
Champignon
Confiture / Fruits confits
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Foin sec
Fruits secs
Maquis
Olive noire
Pain au levain
Propolis
Pruneau
Sous-bois
Truffe

99

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le règlement n° 136 de 1966 énonce en effet :


– l’huile d’olive vierge extra est une huile d’olive au goût parfaite-
ment irréprochable ;
– l’huile d’olive courante est une huile d’olive de bon goût. La caté-
gorie huile d’olive courante a disparu de la réglementation euro-
péenne, on ne la retrouve plus que dans la réglementation du Conseil
oléicole international (COI) ;
– l’huile d’olive lampante est une huile d’olive de goût défectueux.
En cas de litige, les difficultés pour faire valoir devant la justice
qu’une huile avait un goût suffisamment bon pour être irréprochable
ou insuffisamment bon pour être défectueux étaient évidemment
conséquentes. Un groupe composé de spécialistes de divers pays
(Franca Camurati, Michel Choukroun, Bahri Ersoy, José Gouveia,
Francisca Guttiérez Rafael Gutiérrez Gonzalez-Quijano, Mazuecos
Morada, José Maria Orozco, Mario Solinas, Paula Vasconcelos) a été
chargé, à la demande du Conseil oléicole international, de trouver
comment rendre cette méthode d’appréciation objective.
De leurs travaux naquit une méthode d’analyse sensorielle
de l’huile d’olive, dont on peut trouver la version originale dans
l’annexe xii de la version initiale du règlement n° 2568/91. Cette
méthode fournit les directives pour évaluer, à l’aide d’un jury de
dégustateurs, la valeur organoleptique d’une huile d’olive, en par-
ticulier à partir de l’importance des défauts organoleptiques. Cette
note s’échelonne de 1 à 9, et des valeurs sont définies, comme pour
les caractéristiques chimiques, afin de délimiter les catégories régle-
mentaires. Mais la notation n’étant pas reproductible, cette méthode
a suscité de nombreuses manifestations de mécontentement dans
la profession. Par la suite, des modifications ont été proposées et
discutées par des responsables de jury de dégustation. Il en résulte
la méthode actuelle présentée dans le règlement n° 2568 en vigueur.
Les catégories
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

La méthode actuelle n’est plus fondée sur une évaluation de la valeur


organoleptique (comme dans les premiers règlements), mais sur
une évaluation de la défectuosité du goût. Elle est représentée par
l’intensité du défaut maximal, mesurée sur une échelle allant de zéro
à dix par un jury compétent.
Ainsi les huiles peuvent être classées selon cette valeur :
– catégorie huile d’olive vierge extra si aucun défaut détectable ;

100

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

– catégorie huile d’olive vierge si aucun défaut ne dépasse 3,5 sur 10 ;


– catégorie huile d’olive vierge lampante si un défaut dépasse
3,5 sur 10.
Ces limites doivent bien sûr être appliquées de la même façon
que les caractéristiques chimiques, à savoir que l’huile est déclassée
dès le premier critère non conforme. Globalement, est considéré
comme un défaut toute manifestation sensorielle d’une altération
du goût naturel de l’huile d’olive, tel qu’il sort de l’olive. L’amertume
et l’ardence, qui sont naturellement présentes dans de nombreuses
huiles d’olive, ne sont pas des défauts.
Il y a trois sortes de défauts :
– les modifications de goût qui viennent d’un manque de soin ou
d’accidents avant la trituration (moisi, vineux1, gelé…) ;
– les modifications de goût résultant d’une dégradation de l’huile
pendant sa conservation (rance, lies2…) ;
– les goûts étrangers (fumée, métallique…).
La valeur organoleptique
La compétence des jurys pour classer les huiles selon leurs caracté-
ristiques organoleptiques est contrôlée chaque année par le Conseil
oléicole international. La reproductibilité est garantie par la rigueur
du contrôle.
L’évaluation organoleptique est beaucoup plus restrictive que
les mesures chimiques. Sur un ensemble d’huiles parmi lesquelles
90 % sont admises en catégorie huile d’olive vierge extra à partir du
critère de l’acidité (0,8 % en équivalent d’acide oléique), seulement
50 % sont retenues si l’on observe aussi les critères organoleptiques.
La dénomination de vente d’une huile d’olive ne véhicule donc
pas seulement une indication sur ses caractéristiques chimiques,
mais aussi une indication sur ses caractéristiques organoleptiques.

Le fruité noir : une spécificité française


Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Avant l’apparition des systèmes d’extraction continus (avec un sys-


tème de centrifugation à axe horizontal), dans les années 1970, la
pression était le seul moyen d’extraire l’huile, et cela depuis plusieurs

1. Vineux : sensation rappelant le vin tourné au vinaigre.


2. Lies : sensation provenant de la dégradation des fonds de décantation, rappelant
le fromage.

101

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

milliers d’années. Les systèmes continus par décantation centrifuge


sont apparus initialement en vue de réduire la main-d’œuvre, mais
ont rapidement montré une plus grande polyvalence vis-à-vis des
olives à triturer. Ils permettent d’extraire l’huile des olives au degré
de maturité choisi, indépendamment du rendement en huile et de
la facilité d’extraction. Le profil organoleptique peut ainsi être placé
comme une priorité.
La pression est une méthode qui donne de très bons résultats,
parfois encore inégalés. Sur des olives bien mûres et riches en huile,
en fin de saison, le rendement de la presse est imbattable. Mais dans
certains cas, on ne peut pas faire d’huile avec les presses, par exemple
si les olives ont une forte teneur en eau en début de saison, ou pour
certaines variétés qui ont toujours une teneur en eau élevée. On peut
attendre que les olives mûrissent ou sèchent sur les arbres. Mais, il y
a les risques de pertes par le gel, les oiseaux, le vent, les moisissures.
On peut aussi récolter les olives et les mettre à sécher. L’extraction
est ensuite très facile mais généralement des moisissures se déve-
loppent pendant ce séchage.
Une autre stratégie est de récolter les olives, puis de les mettre
au grenier. Le système utilisé historiquement en Provence est de
les entreposer en tas sur un à deux mètres de hauteur pour les faire
« maturer ». Ainsi, les olives ne moisissent pas, et à l’intérieur des
tas se développent des fermentations qui font légèrement monter la
température et qui rendent les olives beaucoup plus faciles à triturer.
L’huile obtenue ainsi a une acidité faible, elle est peu amère et peu
ardente. Elle a un goût d’olive noire prononcé.
Au début des années 1990, les utilisateurs des presses et ceux des
systèmes continus s’opposaient sur l’authentique goût de l’huile
d’olive. Les premiers revendiquaient un respect du goût tel qu’il a
toujours été, les autres revendiquaient une approche plus fidèle de
l’huile contenue dans le fruit. Les deux groupes avaient raison, mais
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

il n’y avait qu’une seule place pour le bon goût, et personne ne pou-
vait être impartial. La solution a donc été de créer une dénomina-
tion spécifique, et le terme « fruité noir » fut retenu pour les huiles
subissant un processus de fermentation, seul responsable des diffé-
rences de goût. Depuis, la croyance relative au fait que les différences
de goût sont liées au type de matériel d’extraction s’est estompée.
La maîtrise du processus de fermentation-maturation est devenue

102

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

l’étape clé pour produire un bon fruité noir, qui maintenant se fait
en palox opaques, avec un contrôle de la température.
Bien que la mise en fermentation ne soit pas un processus défec-
tueux, puisqu’elle est délibérément choisie, elle conduit, de fait, à la
présence d’un « défaut » organoleptique sur le plan réglementaire,
le « chômé ». Celui-ci correspond à tout signe de fermentation des
olives. L’objectivité du jugement consécutif à la norme écarte donc
subjectivement tout un ensemble d’huiles d’olive, a fortiori les meil-
leures au sein de ce type, de la première catégorie des huiles d’olives,
la catégorie « vierge extra ». Il faut imaginer ce que par exemple
deviendrait le paysage fromager français si un règlement énonçait
le « moisi » comme un défaut pour tout fromage… La France est
le seul pays à avoir choisi l’option de maintenir la fabrication des
« huiles d’olives maturées », malgré ce handicap. La défense de la
diversité et le souhait de conserver des goûts authentiques ont été
les principales motivations pour accepter et développer le « fruité
noir ».

Subjectivité : mise en pratique


Il ne faut pas perdre de vue les choses essentielles : le but de la
dégustation est bien de trouver quelles sont les meilleures huiles à
consommer. Cela n’est pas aussi évident qu’il n’y paraît.
Savoir déguster une huile d’olive demande un entraînement
approprié. Il faut en effet acquérir certaines références mais surtout
savoir contourner les sensations hédoniques immédiates qui n’ont
que très peu de rapport avec la valeur organoleptique de l’huile.
Les huiles qui sont agréables en bouche peuvent se révéler insipides
dans un plat, et inversement des huiles qui peuvent surprendre à la
dégustation par une amertume ou une ardence élevée, peuvent être
bien plus profitables en assaisonnement si le fruité est à la hauteur.
La dégustation de l’huile d’olive est une opération assez compliquée
car c’est un condiment, on ne la déguste pas du tout de la même
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

façon qu’on l’utilise.


Le dégustateur doit faire l’extrapolation liée au fait que l’huile
est un condiment, mais aussi faire abstraction de ses préférences
personnelles. S’il s’agit d’une dégustation dans le cadre du règle-
ment n° 2568, le dégustateur devra décrire en utilisant uniquement et
exhaustivement les termes prévus par la feuille de profil. Le résultat
du jury permettra le classement de l’huile dans la catégorie appro-

103

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

priée. Pour une dégustation de contrôle d’une huile en appellation


d’origine, les défauts seront ceux de l’AOP, qui peuvent être diffé-
rents de ceux de la réglementation européenne. Le « chômé », par
exemple, fait partie du profil normal d’une huile issue d’olives matu-
rées, et d’un défaut dans le règlement européen. Selon l’appellation
d’origine, tel caractère sera considéré comme un défaut ou comme
un attribut positif. L’amertume, par exemple, est bienvenue dans une
huile de Nîmes, alors qu’elle atteint vite la valeur maximale dans une
huile de Nice ou dans un fruité noir.
Le dégustateur doit en permanence mettre à l’épreuve ses juge-
ments, c’est-à-dire faire des tests en situation réelle, utiliser les huiles
en assaisonnement sur des plats et faire des comparaisons, bien évi-
demment en aveugle.
On pourra ainsi apprendre à contourner la difficulté d’apprécia-
tion de l’intensité du fruité, qui est très sujette aux interactions avec
la sensation d’amertume. Celle-ci ne se perçoit pas du tout au même
degré en dégustation qu’en utilisation, et les rapports d’intensité avec
le fruité sont modifiés, ce qui change totalement l’intérêt d’une huile.
On trouvera aussi quels sont les arômes qui permettent d’occuper
des « fenêtres aromatiques » dans les plats. Certaines huiles com-
portent des arômes assez intenses, mais qui ne sont pas mis en valeur
dans les plats. Inversement, certaines huiles présentent des arômes
à des intensités banales, mais qui ajoutent immédiatement une note
particulière dans un plat, en complétant son paysage aromatique par
l’originalité de leurs arômes. Les huiles qui ont acquis une grande
renommée sont souvent les huiles qui provoquent cet effet dans une
grande diversité de plats.
S’il y a une règle d’utilisation ultime, c’est l’équilibre. Une huile
insipide s’accordera avec n’importe quel met. Une huile qui a du
caractère devra trouver sa place parmi les autres ingrédients du plat,
sans dominer ni se laisser dominer, c’est au cuisinier que revient le
dernier mot.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Mais l’huile d’olive ne fait pas qu’apporter des arômes, elle


rehausse les sensations issues de l’aliment, même si celui-ci est déjà
gras. Il suffit par exemple d’ajouter un filet d’huile d’olive sur une
viande en sauce pour s’en convaincre. Le plat assaisonné va per-
mettre de ressentir le goût de l’huile, mais aussi des détails de goût
initial qui n’apparaissaient pas auparavant. La composition n’en sera
que plus complexe.

104

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Paradoxe entre goût et qualité

Quelques données objectives…


Depuis l’existence de la réglementation relative au goût de l’huile
d’olive, la profession oléicole française (Afidol, Centre technique
de l’olivier) dispose d’un jury de dégustation agréé par le Conseil
oléicole International et accrédité Cofrac (Comité français d'accré-
ditation). Nous donnons ci-dessous quelques-unes des descriptions
obtenues au cours des dix dernières années sur les huiles françaises.
Pour chaque appellation d’origine ou variété, sont mentionnés les
arômes dominants ainsi que les intensités du fruité (IF), de l’amer-
tume (Am) et de l’ardence (Ard).
Ces indications permettent de s’orienter à partir des mentions
que peut comporter une étiquette, et d’exercer ainsi ses préférences
parmi les appellations et les variétés françaises. Il existe cependant
près d’une centaine d’AOP dans les autres pays producteurs, ainsi
que quelques IGP, que nous n’avons pas pu mentionner ici faute de
renseignements disponibles.
Appellations d’origine
Aix-en-Provence : Artichaut cru, Herbe, Feuille, Amande, Foin frais ;
IF : 4,3 à 6 ; Am : 0,9 à 3,5 ; Ard : 1,7 à 3,7
Aix-en-Provence - Olives maturées : Pain au levain, Olive noire, Cacao,
Sous-bois ; IF : 2,7 à 5,5 ; Am : 0 à 0,8 ; Ard : 0 à 1.
Corse : Amande fraîche, Artichaut cru, Foin frais, Amande (1) ;
IF : 2,6 à 5 ; Am : 0 à 3,3 ; Ard : 0,6 à 3,3.
Haute-Provence : Artichaut cru, Banane, Banane verte, Herbe, Feuille,
Pomme ; IF : 4,5 à 5,7 ; Am : 1,3 à 3,3 ; Ard : 2,2 à 3,4.
Nice : Amande fraîche, Artichaut cru, Foin frais, Amande ; IF : 3,5 à 5,6 ;
Am : 0 à 2 ; Ard : 0 à 3.
Nîmes : Prune, Foin frais, Artichaut cru, Amande ; IF : 3,7 à 6,3 ;
Am : 1,3 à 4,6 ; Ard : 1,7 à 3,3.
Nyons : Foin frais, Pomme, Noisette fraîche, Amande ; IF : 3,2 à 4,7 ;
Am : 0 à 2,5 ; Ard : 0,3 à 2,3.
Provence : Artichaut cru, Herbe, Feuille, Foin frais, Amande ;
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

IF : 3,7 à 5,2 ; Am : 1,1 à 3,2 ; Ard : 1,7 à 2,9.


Provence - Olives maturées : Olive noire, Cacao, Pruneau ; IF : 3,1 à 5,5 ;
Am : 0 ; Ard : 0 à 0,5.
Vallée des Baux : Artichaut cru, Amande fraîche, Noisette fraîche,
Amande ; IF : 3,5 à 5,3 ; Am : 0 à 2,2 ; Ard : 0,5 à 2,9.
Vallée des Baux - Fruité noir : Cacao, Olive noire, Pain au levain,
Sous-bois ; IF : 2,6 à 4,3 ; Am : 0 ; Ard : 0.

105

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Variétés
Aglandau : Artichaut cru, amande, banane ; IF : Moyenne à intense ;
Am : Moyenne ; Ard : Moyenne à intense.
Arbéquine : Amande fraîche, Amande, Foin frais, Pomme ; IF : 4,1 à 4,5 ;
Am : 0,3 à 3,1 ; Ard : 1,2 à 2,9.
Bouteillan : Banane, verdure ; IF : Moyenne à intense ; Am : Modérée ;
Ard : Moyen à intense.
Brun : Artichaut cru, Amande, Pomme ; IF : Moyenne ; Am : Moyenne à
intense ; Ard : Moyenne à intense.
Cayon : Tomate, amande ; IF : Plutôt léger ; Am : Faible ; Ard : Faible.
Clermontaise : Noisette ; IF : Légère à Moyenne ; Am : Faible ;
Ard : Faible.
Lucques : Tomate, Pomme ; IF : Légère à Moyenne ; Am : Faible ; Ard :
Faible.
Menudal : Tomate, Noisette ; IF : Légère à Moyenne ; Am : Faible ;
Ard : Faible.
Négrette : Artichaut cru, Pomme, Herbe, Feuille, Amande ; IF : 3,8 à 5,2 ;
Am : 0,7 à 4,2 ; Ard : 2 à 4,3.
Olivière : Tomate, Herbe, Feuille, Amande, Foin frais ; IF : 3,3 à 4,8 ;
Am : 0,3 à 2,6 ; Ard : 1,5 à 2,4.
Petit Ribier – Ribeyro : Artichaut cru, Framboise, Amande fraîche ;
IF : Moyenne ; Am : Modérée ; Ard : Plutôt intense.
Picholine : Prune, Herbe, Feuille, Foin frais, Artichaut cru ; IF : 4,1 à 5,2 ;
Am : 3,2 à 4,8 ; Ard : 2,5 à 3,7.
Rougette de l’Ardèche : Artichaut cru, Amande, Herbe, Feuille,
Foin frais ; IF : 3,7 à 4,5 ; Am : 2 à 4,7 ; Ard : 2,3 à 3,7.
Salonenque : Noisette, Pomme ; IF : Moyenne ; Am : Faible ;
Ard : Faible.
Tosca – Urano : Amande fraîche ; IF : Moyenne à intense ; Am : Légère ;
Ard : Moyenne.
Verdale de l’Hérault : Noix fraîche, Verdure ; IF : Légère à Moyenne ;
Am : Faible ; Ard : Faible.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Pour en savoir plus


Pinatel C., Petit C., Ollivier D., Artaud J., 2004. Outil pour l’amélioration organoleptique
des huiles d’olive vierges. OCL, 11(3).

106

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

Les huiles
d’olive vierges françaises :
définition, dénominations
et caractérisation
Denis Ollivier, Christian Pinatel, Jacques Artaud
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L es huiles alimentaires sont généralement obtenues, à partir de


graines oléagineuses : tournesol, soja, colza, arachide, mais
aussi à partir de fruits, plus ou moins gras, tels que l’avocat, l’olive, la
noix de coco. L’huile de ces fruits ou de ces graines est extraite par
des opérations de pression ou d’extraction.

Huile d’olive vierge et huile raffinée


Extraction de l’huile d’olive vierge
Une huile vierge est obtenue uniquement par des procédés phy-
siques mettant en œuvre une pression à froid ou une extraction, à
l’exclusion de tout produit chimique. L’huile conserve ainsi le maxi-
mum de composés issus de la plante (antioxydants, vitamines) et a
de meilleures qualités nutritives qu’une huile raffinée.
Raffinage de l’huile d’olive
Photo page précédente :
Huile d'olive sur un marché Lors de l’obtention d’une huile vierge, la totalité de la matière grasse
Provencal. © Denis OLLIVIER
contenue dans le fruit n’est pas extraite, et certains pays, pour obtenir
une huile raffinée, pratiquent une deuxième d’extraction par des
Moulin à huile en Avignon. solvants sur les tourteaux ou grignons. Une huile d’olive raffinée est
© Christophe Maître obtenue soit à partir d’une huile vierge ou brute non consommable
en l’état (huile d’olive vierge lampante), soit à par-
tir de l’huile de grignons, issue de sous-produits
d’une première extraction, à l’aide de solvant. Les
étapes de raffinage peuvent, notamment, com-
porter une neutralisation (élimination de l’acidité
de l’huile), une désodorisation (suppression des
mauvais goûts ou des mauvaises odeurs de l’huile
par traitement à la vapeur d’eau) et un décirage
(élimination des cires par wintérisation, c’est-à-
dire refroidissement de l’huile afin d’éliminer un
trouble dans l’huile à température ambiante, phé-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

nomène désagréable pour le consommateur).


Une grande diversité de l’huile d’olive
L’intérêt des consommateurs pour le régime médi-
terranéen et la communication importante sur les
bienfaits de l’huile d’olive sur la santé ont créé un
renouveau de l’oléiculture française : des planta-

108

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

tions nouvelles avec des variétés diverses dont certaines étaient peu
exploitées, des moulins rénovés dotés d’une technologie récente
et des cuvées d’huiles spéciales ou monovariétales correspondent
à une demande récente de consommateurs avertis. Toutefois, la
France reste un petit pays producteur d’huile d’olive vierge avec une
production qui représente environ 0,15 % de la production mondiale.
Il n’existe pas une huile d’olive mais des huiles d’olive dont les
compositions chimiques et les caractéristiques organoleptiques sont
fonction des variétés et des terroirs. La France possède une grande
diversité variétale avec près de 200 variétés d’oliviers dénombrées
actuellement. Les particularités des huiles d’olive vierges françaises
résident dans la diversité de leurs caractéristiques organoleptiques
représentatives de différents terroirs, dans leur authenticité et dans 1

la recherche continue de l’accroissement de leur qualité. Ainsi, huit


appellations d’origine protégée (AOP) ont été créées ces dernières
années : Aix-en-Provence, Corse, Haute-Provence, Nice, Nîmes,
Nyons, Provence et Vallée des Baux-de-Provence. Sept d’entre elles
(Aix-en-Provence, Corse, Haute-Provence, Nice, Nîmes, Nyons et
Vallée des Baux-de-Provence) ont été reconnues comme appella-
tions d’origine protégée (AOP) sur le plan européen.

Caractéristiques des huiles d’olive


Historique
Depuis l’Antiquité, les huiles sont différenciées en fonction de
plusieurs critères, notamment organoleptiques. Dans l’Empire de
Rome, des classifications fondées sur l’état de maturité et de conser-
vation des olives étaient utilisées ; plus proche de nous, le Code civil
avait prévu la dégustation de l’huile avant son achat.
En 1823, à la suite du traité de Chevreul « Recherche chimique sur
les corps gras », les analyses physico-chimiques ont été appliquées
à la différenciation des diverses huiles issues de l’olive ainsi qu’à la
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

recherche de mélange. La littérature rapporte que l’huile d’olive ser-


vant aux Saintes huiles pouvait être coupée. Dans « Mémoires de
l’olivier », Gérard Rossini évoque des coupages ou des assemblages
faits par les négociants ou les revendeurs pour s’adapter aux goûts
et au pouvoir d’achat du consommateur. En effet, historiquement,
dans des régions qui ne connaissaient pas de grands crus, l’huile de
première pression à froid pouvait être mélangée avec des huiles de

109

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

pressions successives afin d’augmenter la marge du producteur. Dès


le début du xixe siècle, des huiles locales étaient assemblées avec
des huiles d’Afrique du Nord, d’Espagne ou d’Italie, produites à
moindre coût. Pour atténuer un goût trop fort ou trop fruité, l’huile
d’olive était coupée avec une huile raffinée de type arachide, l’huile
obtenue ainsi était appelée huile de table olivée.
Dans la première moitié du xxe siècle, alors que la mesure de
l’acidité est un moyen objectif d’évaluer la qualité des huiles, ce sont
souvent les origines des huiles qui constituent le premier critère de
qualité. Dans chaque région, la qualité des huiles produites résulte
des variétés, des méthodes de récolte et du processus d’extraction.
Les caractéristiques, dépendant des conditions locales, évolueront
très peu tant qu’il n’y aura pas d’apport technologique. Au fil du
temps, un équilibre optimal du rapport entre la qualité et le ren-
dement lié au lieu et au climat s’est constitué dans chaque grande
région de production. Il débouche sur une hiérarchie des notoriétés,
connue dans les milieux commerciaux, le critère de l’acidité ne fait
que confirmer cette hiérarchie.

Acidité d’une huile

L’analyse de l’acidité fournit le pourcentage d’acides gras libres conte-


nus dans une huile. L’acidité s’exprime conventionnellement en pour-
cent d’acide oléique. Le résultat donne une indication sur la qualité
des olives avant trituration et sur la qualité des huiles obtenues après
traitement technologique et au cours du stockage.

Au milieu du xxe siècle, les premières tentatives d’homogénéisa-


tion des définitions relatives à des termes qualitatifs comme « extra »
ou « fine » sont proposées, alors que la notoriété de la provenance
est encore une valeur sûre. L’acidité apparaît comme un moyen
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

simple et fiable d’évaluer la qualité et ce critère sera décisif pour déli-


miter les catégories. Les producteurs d’huile d’olive l’adoptent faci-
lement pour gérer leur production au point de vue qualitatif.
Les dénominations actuelles
Le consommateur peut acheter différentes catégories d’huiles : huile
d’olive vierge extra, huile d’olive vierge, l’huile d’olive (composée

110

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

d’huile d’olive raffinée et d’huile d’olive vierge) et l’huile de gri-


gnons d’olive. Le professionnel, pour le commerce de gros, peut
utiliser comme matières premières toutes les catégories précédentes
ainsi que de l’huile d’olive vierge lampante, l’huile d’olive raffinée et
l’huile de grignons brute et raffinée.
Huile d’olive vierge
L’huile d’olive vierge est l’huile obtenue du fruit de l’olivier (Olea
europaea subsp. europaea L.) uniquement par des procédés méca-
niques ou d’autres procédés physiques dans des conditions, notam-
ment thermiques, qui n’entraînent pas d’altération de l’huile, et
n’ayant subi aucun traitement autre que le lavage, la décantation, la
centrifugation et la filtration.
Il existe différentes dénominations d’huile en fonction de leurs
caractéristiques physico-chimiques et organoleptiques définies par
le Conseil oléicole international. Si l’on se fonde particulièrement
sur l’acidité, il existe trois catégories d’huiles d’olive vierges.
Huile d’olive vierge extra
L’huile d’olive vierge extra doit avoir une acidité libre, exprimée Huile d’olive prête à consommer
en acide oléique, inférieure ou égale à 0,8 g/100 g d’huile. Elle est © Institut du monde
de l’olivier-Afidol
caractérisée par un fruité et l’absence de défauts organoleptiques.
Huile d’olive vierge
L’huile d’olive vierge doit avoir une acidité libre, exprimée en acide
oléique, inférieure ou égale à 2 g/100 g d’huile. Elle est caractérisée
par des qualités organoleptiques comme la présence d’un fruité et la
présence possible de défauts légers (médiane des défauts inférieure
à 3,5, voir annexe xii du règlement).
Huile d’olive vierge lampante
C’est une huile d’olive vierge dont l’acidité libre, exprimée
en acide oléique, peut être supérieure à 2 g/100 g d’huile.
Elle est caractérisée par des qualités organoleptiques
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

médiocres ou mauvaises comme l’absence d’un fruité


ou la présence de défauts importants (médiane des
défauts supérieure à 3,5, voir annexe xii du règlement).
Cette huile est qualifiée d’impropre à la consom-
mation et doit être destinée au raffinage, qui a pour
but d’éliminer l’acidité excessive et les substances res-
ponsables des défauts organoleptiques.

111

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Huile d’olive : huile d’olive composée d’huile d’olive


raffinées et d’huile d’olive vierge
Le raffinage de l’huile d’olive vierge lampante conduit à une huile
d’olive raffinée. Celle-ci est ensuite assemblée avec de l’huile d’olive
vierge pour être consommée. Cette huile a longtemps porté la déno-
mination générique « huile d’olive », ce qui risquait d’entraîner une
confusion chez le consommateur non averti. Elle a été commer-
cialisée jusqu’en 1991 souvent sous le vocable « huile d’olive type
Riviera », assemblage commercial contenant 70 % d’huile d’olive
raffinée et 30 % d’huile d’olive vierge. Cette catégorie d’huile a tou-
jours été assez peu commercialisée en France. En revanche, dans des
pays comme l’Espagne, le Portugal, l’Italie et les pays du Maghreb,
la consommation de cette « huile d’olive » a pu représenter jusqu’à
80 % du total consommé (Sources : Commission des Communautés
Européennes). L’ajout d’huile d’olive vierge à de l’huile d’olive raf-
finée permet d’apporter des antioxydants naturels, des composés
aromatiques et des colorants naturels absents ou faiblement présents
dans l’huile d’olive raffinée.
Depuis le 1er novembre 2003, la simple dénomination « huile
d’olive » ne peut plus être utilisée et c’est la dénomination « huile
d’olive composée d’huile d’olive raffinée et d’huile d’olive vierge »
qui doit être employée. Cette précision, portée sur l’étiquetage des
produits manufacturés, devrait permettre au consommateur de
reconnaître la qualité du produit qu’il est susceptible d’acheter. Son
acidité libre exprimée en acide oléique est au maximum de 1 g/100 g
d’huile et ses autres caractéristiques correspondent à celles pres-
crites pour cette catégorie.
Huile de grignons d’olive
L’huile de grignons d’olive est obtenue par traitement des grignons
d’olive avec des solvants ou d’autres procédés physiques. Elle doit
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

être exempte d’huiles obtenues par des procédés de ré-estérification


et de tout mélange avec des huiles d’autre nature. L’huile de grignon
brute est ensuite raffinée, puis additionnée d’huile d’olive vierge
pour apporter des antioxydants naturels, des composés aromatiques
et des colorants naturels absents ou faiblement présents dans l’huile
raffinée. Cette huile sera commercialisée sous la dénomination huile
de grignons d’olive. Son acidité libre, exprimée en acide oléique, doit

112

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

être au maximum de 1 g/100 g d’huile et ses autres caractéristiques


correspondent à celles prévues pour cette catégorie.

Composition chimique des huiles d’olive


Une huile d’olive, vierge ou raffinée, est constituée de 97 % à 99 % de
triglycérides, de 1 à 3 % de composés mineurs dont la composition
varie en fonction des variétés. Les huiles possèdent quatre triglycé-
rides principaux : la trioléine (OOO) qui est majoritaire dans toutes
les huiles, la dioléylpalmitine (POO), la dioléyllinoléine (OLO) et
la linoléyloléylpalmitine (PLO) (voir Encadré). Les acides gras au
nombre de quatorze sont principalement représentés par les acides
palmitique (16:0), oléique (18:w9) et linoléique (18:2w6).
Les composés mineurs appartiennent à un ensemble de familles
chimiques parmi lesquelles on trouve des hydrocarbures (squa-
lène), des tocophérols (vitamine E), des composés phénoliques

les triglycérides et les acides gras

Les triglycérides sont des triesters d’acides gras et d’un trialcool, le


glycérol. Les acides gras estérifient le glycérol de telle sorte que plus
de vingt triglycérides sont présents dans les huiles d’olive.

Acide gras
3<R<23
R : chaîne aliphatique
des acides gras

Triglycéride Glycérol

Les acides gras (AG) sont des acides monocarboxyliques à chaîne linéaire
ou ramifiée comportant un nombre pair (ultra-majoritaire) ou impair
(minoritaire) d’atomes de carbone. Ils peuvent être saturés, mono-insa-
turés, di- ou tri-insaturés. La stéréochimie des doubles liaisons est Z (cis).
La structure des chaînes carbonées poly-insaturées est de type malo-
nique. Leur dénomination consiste à donner le nombre d’atomes de
carbone de la chaîne carbonée suivi du nombre de doubles liaisons pré-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

sentes dans la chaîne avec la position de cette double liaison à partir du


groupement méthyle terminal (nomenclature w). Ainsi, l’acide oléique,
principal acide gras de l’huile d’olive, s’écrit 18:1w9 ce qui signifie que
l’acide oléique possède 18 atomes de carbone, une double liaison qui
se situe entre le 9e et le 10e carbone, comptée à partir du groupement
méthyle terminal de la chaîne carbonée. ´ ¯¯

113

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Les acides gras sont analysés par chromatographie en phase gazeuse


sous forme d’esters méthyliques suivant les méthodes normalisées
NF EN ISO 5508 et NF EN ISO 12966-2.
Les triglycérides sont désignés par des lettres correspondant aux abré-
viations des noms des chaînes carbonées des acides gras qui sont
fixés sur le glycérol. Les abréviations des noms des acides gras sont :
P : palmityl ; Po : palmitoléyl ; S : stéaryl ; O : oléyl ; L : linoléyl ; Ln : linolényl.
Ainsi, le triglycéride OOO s'appelle la trioléine. Les triglycérides sont
analysés par chromatographie en phase liquide.

Acide palmitique (16 :0)

Acide oléique (18 :1w9)

Acide linoléique (18 :2w6)

Trioléine (OOO)

dont certains sont des antioxydants puissants (alcools phénoliques,


acides phénoliques, flavonoïdes, sécoiridoïdes, lignanes…), des
phytostéroïdes (β-sitostérol, campestérol, ∆5-avénastérol…) et des
composés responsables des goûts et des odeurs (aldéhydes, esters,
alcools…). La fraction des composés mineurs est beaucoup plus
riche dans les huiles vierges, ce qui explique leur plus grand intérêt
nutritionnel.
Caractéristiques physico-chimiques
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

des huiles d’olive vierges


Les caractéristiques physiques et chimiques constituant les critères
de qualité des huiles d’olive et permettant de définir les différentes
catégories d’huiles d’olive, ont été fixées, en 1991, par le règlement
européen n° 2568/1991. Il définit 11 paramètres à mesurer pour clas-
ser une huile d’olive. Le tableau ci-dessous les résume pour chaque
catégorie d’huile.

114

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

Caractéristiques des huiles d’olive

Catégorie Acidité Indice de K232 K270 ∆K ∆ECN42 Acides Stimas- Solvant Cires Panel test
(%) peroxyde gras tadiènes halogéné (mg/kg)
(mEqO2/kg) Position 2 (mg/kg) (mg/kg)
Huile d’olive ≤0,8 ≤20 ≤2,50 ≤0,20 ≤0,01 ≤0,2 ≤1,3 ≤0,10 ≤0,20 ≤250 MF>0
vierge extra MD=0

Huile d’olive ≤2,0 ≤20 ≤2,60 ≤0,25 ≤0,01 ≤0,2 ≤1,3 ≤0,15 ≤0,20 ≤250 MF>0
vierge MD≤3,5

Huile d’olive ≤3,3 ≤20 ≤2,60 ≤0,25 ≤0,01 ≤0,2 ≤1,3 ≤0,15 ≤0,20 ≤250 MD>3,5
vierge
lampante
Huile d’olive ≤1,0 ≤15 ≤3,30 ≤1,00 ≤0,13 ≤0,3 ≤1,5 - ≤0,20 ≤350 -

Huile de ≤1,0 ≤15 ≤5,30 ≤2,00 0,20 ≤0,5 ≤2.0 - ≤0,20 ≤350 -
grignons d’olive

K232 et K270 : Extinction spécifique en UV ; ∆K= K270-(K270-4 + K270+4)/2 ; AG : Acides gras


MF : médiane du fruité
MD : médiane des défauts

Ces déterminations permettent de connaître la qualité de l’huile


et de détecter des opérations frauduleuses éventuelles : mélanges
avec des huiles d’olive de catégories inférieures, de l’huile de gri-
gnons, de l’huile raffinée, des huiles de graines…
Toutefois ces déterminations ne sont pas suffisantes pour détec-
ter des fraudes de plus en plus sophistiquées. Aussi, depuis 1991,
le règlement a été souvent modifié et complété afin de s’adapter à
l’évolution des connaissances (schéma 1).
L’accroissement du nombre d’analyses de plus en plus complexes
a entraîné un coût sans cesse croissant. En 2010, le coût d’une analyse
d’huile d’olive vierge selon la réglementation en vigueur peut varier
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

de 1 500 à 2 000 € selon les laboratoires. L’évaluation organoleptique


de l’huile représente environ 30 % de la somme totale.

Authenticité des huiles d’olive vierges


D’une façon générale, en matière de contrôle de la qualité des huiles
d’olive, on parle souvent de « recherche d’adultération » alors qu’en
fait on réalise une recherche plus large sur l’authenticité du pro-

115

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
figure 7-4

Histoire de l’olivier

Schéma 1
Évolution du règlement européen
fixant les caractéristiques de l’huile d’olive

1991 Caractéristiques Acidité ; Indice de peroxyde ; Solvants halogénés ; Alcools aliphatiques,


de base Acides gras saturés en position 2 sur le glycérol ; Erythrodiol et Uvaol ;
Trilinoléine, Stérols ; Acides gras, extension spécifique en UV ;
Analyse organoleptique.

Recherche d'huile d'olive raffinée


et d'huile de graines alimentaire raffinée
1992 dans l'huile d'olive vierge + Acides gras trans

Recherche d'huile de grignons d'olive


1993 dans l'huile d'olive vierge + Cires

Recherche d'huile d'olive raffinée et


d'huile de graines alimentaire raffinée
1995 dans l'huile d'olive vierge + Stigmastadiènes < 0,15
puis 0,10 mg/kg en 2011

Recherche adultération d'huile d'olive vierge + ∆ ECN42


1997 par des huiles de graines < 0,24

Recherche d'huile de grignons d'olive + si 300 < cires < 350 mg/kg
2003 dans l'huile d'olive vierge
si érythrodiol + uvaol > 3,5 %
Alors analyse des alcools aliphatiques
si > 350 mg/kg alors
huile de grignons d'olive

2007 Recherche d'huile ré-estérifiée +2-glycéryl


dans l'huile d'olive vierge monopalmitate
< 0,9 % si C16:0 ≤ 14 %
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

< 1,0 % si C16:0 >14 %

2011 Qualité des olives + Alkyl esters


Recherche d'huile désodorisée < 150 mg/kg
ou lampante dans l'huile d'olive vierge

116

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

duit. Les huiles d’olive peuvent être sujettes à différentes opérations


frauduleuses dont les dénominations correspondent à des pratiques
précises.
Le frelatage consiste à accroître la qualité d’un aliment en ajou-
tant des substances étrangères afin de masquer ou de modifier les
défauts, par exemple ajouts de colorants dans des huiles comme
décrits dans les « Mémoires de l’olivier », ou ajouts de substances
pour masquer le raffinage de l’huile.
L’adultération consiste à ajouter des matières premières de qua-
lité inférieure ou à éliminer des ingrédients de bonne qualité pour
augmenter le volume de la production de denrées alimentaires ou
pour récupérer des ingrédients coûteux. Cela peut consister à ajou-
ter une huile de graine type soja, colza, tournesol, lin, noisette, dans
l’huile d’olive vierge ou un ajout d’huile de grignons, d’huile d’olive
lampante, d’huile d’olive raffinée dans une huile d’olive vierge de
qualité.
La falsification consiste à vendre des produits alimentaires de
moindre qualité à la place d’un produit ayant une qualité plus impor-
tante : par exemple, la substitution de l’huile d’olive par une huile
de graine.
La contrefaçon est un type particulier de falsification qui consiste
à substituer la dénomination ou la marque d’un produit. En matière
d’huile d’olive, cela peut concerner toutes les indications d’origine
ou de variétés.
La grande différence de prix entre les huiles et notamment les
huiles d’olive vierges et les huiles alimentaires raffinées peut entraî-
ner des tentations de frelatage, d’adultération, de falsification et de
contrefaçon. Dans le commerce de détail, le prix des huiles d’ara-
chide, de maïs, ou de tournesol varie entre 1,05 et 2,5 €/L (en 2012).
Le prix des huiles de moindre coût comme celles de colza ou de soja,
oscille entre 0,76 et 1,22 €/L, alors que le prix des huiles vierges varie
entre 2,5 et 30 €/L.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Le prix de revient à la production d’une huile d’olive vierge fran-


çaise était, pour la campagne 2009-2010, compris entre 8 et 16 €/L,
dans le cas d’oliveraies traditionnelles. Il n’est donc pas possible de
trouver des huiles françaises au niveau du commerce de détail à des
prix inférieurs à 12 €/L. Le prix moyen en grande distribution était
en moyenne de 5,7 €/L en juin 2009 (sources : Afidol, d’après l’étude
Ernst & Young de 2009-2010).

117

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Traçabilité
La notion de traçabilité devient essentielle pour les produits agro­
alimentaires et notamment pour les huiles d’olive vierges ; elle doit
rendre compte de toute la filière de production oléicole depuis la
matière première, les olives, jusqu’au conditionnement de l’huile en
passant par le traitement technologique appliqué pour la produire.
L’identification des variétés dans les parcelles et des variétés d’olives
apportées au moulin, la connaissance du processus technologique
utilisé pour la production d’huile, la composition chimique et les
caractéristiques organoleptiques de l’huile conditionnée participent
à la traçabilité de l’huile.
Caractérisation de l’origine
Après s’être assuré qu’une huile répond à l’ensemble des critères
en vigueur, en appliquant toutes les analyses de la réglementation,
il faut franchir une étape supplémentaire qui consiste à caractéri-

Traçabilité fondée sur la caractérisation


de l’ADN d’une huile d’olive

Comme chaque variété d’olivier est identifiée par une signature ADN,
cette dernière est recherchée dans l’huile pour vérifier son origine
variétale. La méthode n’est pas agréée par les instances de contrôles
du fait de l’absence d’un protocole standard à suivre pour préparer
l’ADN de l’huile et d’une répétitivité insuffisante entre laboratoires
pour identifier le cultivar. Il faudrait une base de données unique et
disponible pour toutes les équipes.
Cependant, la méthode est valable pour les huiles monovariétales.
Mais dès qu’il y a mélange de variétés, la proportion de chacune ne
peut être déterminée avec précision. Les raisons en sont techniques,
faute de marqueurs moléculaires adaptés à l’ADN de l’huile, car celui-
ci a été très dégradé durant le processus d’obtention de l’huile et
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

le stockage des bouteilles souvent à la lumière. L’identification par


l’ADN caractérise la variété à l’origine de l’huile plus sûrement que les
méthodes biochimiques, mais ces dernières restent indispensables
pour définir et contrôler les origines des terroirs. La méthode fondée
sur l’ADN est onéreuse et ne peut s’appliquer que sur des lots com-
merciaux douteux.

118

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

ser l’origine variétale ou géographique des huiles afin d’éviter des


contrefaçons.
Plusieurs méthodologies différentes, appliquées à l’huile, peuvent
permettre de répondre dans de nombreux cas à la détermination
de l’origine : l’analyse biomoléculaire, l’analyse spectroscopique ou
l’analyse chimique.
L’analyse biomoléculaire, fondée sur des marqueurs biomolécu-
laires adaptés à l’ADN de l’huile, permet l’identification des huiles
monovariétéales (voir Encadré).
L’analyse spectrale utilise principalement la spectroscopie dans
le proche ou moyen infrarouge. Les informations contenues dans les
spectres sont extraites par des traitements chimiométriques (ana-
lyse statistique de données) qui permettent à partir d’une banque
de données la prédiction des origines variétales ou géographique
(AOP) des huiles.
L’analyse chimique, fondée sur l’analyse des acides gras et des tri-
glycérides, associée à de la chimiométrie, permet de la même façon
de déterminer les origines variétales et géographiques des princi-
pales variétés et appellations d’origine protégée (AOP) françaises.
La mise en œuvre des traitements chimiométriques demande
des logiciels dédiés et des utilisateurs formés à ces techniques. Aussi,
nous avons développé une méthodologie originale, qui permet une
interprétation visuelle des compositions en acides gras et en triglycé-
rides d’une huile et de les comparer à des compositions de référence.
Les morphogrammes ne sont pas corrélés à la qualité, ils permettent

Analyse en composantes
principales réalisée
sur les compositions
en acides gras et en
triglycérides qui distingue
cinq variétés françaises
et l’AOP Vallée
des Baux-de-Provence.
Cinq variétés françaises d’intérêt
général Aglandau (A),
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Cailletier (C), Picholine (P),


Salonenque (S), Tanche (T)
et de l’AOP Vallée des
Baux-de-Provence (B).

119

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

seulement la recherche de conformité à partir des acides gras et des


triglycérides.
Les méthodes décrites, appliquées aux huiles et associées aux
méthodes traditionnelles de caractérisation basées sur l’observa-
tion des arbres, des feuilles et des fruits, viennent compléter l’arse-
nal disponible pour déterminer l’origine variétale ou géographique
des huiles.

Morphogramme et morphotype

Une représentation graphique radiale (morphogramme), réali-


sée à partir d’un tableur Excel®, est fondée sur l’écart des variables
(acides gras et triglycérides) par rapport à une moyenne détermi-
nant l’origine (0 %) des mêmes variables issues d’une base de don-
nées (FATG-BD02). Cette base de données a été établie à partir des
compositions en acides gras et en triglycérides provenant d’huiles
d’olive vierges de 46 variétés françaises, de cinq AOP françaises
et d’huiles d’olive vierges provenant de six pays méditerranéens
(Espagne, Italie, Grèce, Tunisie, Maroc, Turquie) totalisant 2 500 échan-
tillons d’huiles. Chaque axe donne pour l’AOP représentée, la posi-
tion moyenne centrée (moyenne sur 50 % des valeurs centrales) des
différentes variables ainsi que le premier et le 3e quartile qui limitent
l’ensemble des huiles d’olive vierges prises en compte pour le calcul
de la moyenne centrée. Les positions sont représentées en pourcen-
Morphogrammes tage par rapport à la variation maximale observée sur l’ensemble des
des acides gras (à gauche) huiles de la base de données.
et des triglycérides (à droite)
de l’huile d’Aglandau.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

120

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les huiles d’olive vierges françaises

Pour en savoir plus Utilisation des


morphotypes pour une
Conseil oléicole international, 2011. Huile d’olive vierge : Norme commerciale applicable aide à la détermination de
à l’huile d’olive et à l’huile de grignons d’olive. T.15. Principe de Vergara, Madrid, l’authenticité d’une huile
Espagne. d’olive de l’AOP Nyons.
Le morphotype de la
Ducauze C., 2003. Fraudes Alimentaires, approche réglementaire et méthodologie analytique. composition en acides gras
Éditions Tec et Doc, Lavoisier, Paris. de l’AOP Nyons est représenté
Galtier O., Dupuy N., Le Dréau Y., Ollivier D., Pinatel C., Kister J., Artaud J., 2007. (à gauche). Une huile d’olive
revendiquait l’AOP Nyons.
Geographic origins and compositions of virgin olive oils determinated by chemometric
L’analyse de sa composition
analysis of NIR spectra. Analytica Chemica Acta, 595: 136-144. en acides gras (à droite) conduit
Moutier N., Pinatel C., Martre A., Roger J.P., Khadari B., Burgevin J.F., Ollivier D., Artaud à un morphogramme très
J., 2004. Tome I et 2011, Tome II. Identification et caractérisation des variétés d’olivier différent du morphotype de
cette AOP.
cultivées en France. Naturalia Publications, France. Il s’agit d’un exemple de
Ollivier D., Artaud J., Pinatel C., Durbec J.-P., Guérère M., 2003. Triacylglycerol and fatty contrefaçon caractérisée
acid compositions of French virgin olive oils. Characterization by chemometrics. Journal de l’AOP Nyons.
of Agricultural and Food Chemistry, 51: 5723-5731.
Ollivier D., Artaud J., Pinatel C., Durbec J.P., Guérère M., 2006. Differentiation of
French virgin olive oil RDOs by sensory characteristics, fatty acid and triacylglycerol
compositions and chemometrics. Food Chemistry, 97 : 382-393.
Pinatel C., Petit C., Ollivier D., Artaud J., 2004. Outils pour le suivi de la qualité de l’huile
d’olive vierge et son amélioration. OCL, 11(3) : 217-219.
Pinatel C., Ollivier D., Ollivier V., Artaud J., 2011. Banque de données AGTG 33.
Règlement (CEE) européen n° 2568/91 de la Commission du 11 juillet 1991. Relatif aux
caractéristiques des huiles d’olive et des huiles de grignons d’olive ainsi qu’aux méthodes
y afférentes. J.O.C.E. du 5 septembre 2003.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Rossini G., 1999. Mémoires de l’olivier. Éd. Équinoxe, Barbentane, France.

121

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’huile d’olive : un aliment santé ?

L’huile d’olive :
un aliment santé ?
Mariette Gerber
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L a culture de l’olivier était présente dans les pays méditerranéens


depuis la Haute Antiquité, comme en témoigne les bas reliefs
du tombeau de Ramsès iii en Égypte. On peut penser que sa par-
ticipation à l’alimentation humaine remonte à la même époque.
L’alimentation méditerranéenne dont a toujours fait partie l’huile
d’olive est très différente des pays d’autres continents et même de
l’Europe du Nord.
Dans les années 1960, il a été mis en évidence que les pays d’Eu-
rope du Sud qui consommaient une alimentation méditerranéenne
traditionnelle présentaient de meilleurs indicateurs de santé que
les pays d’Europe du Nord. Les acteurs de la santé publique ont
donc mis en œuvre des études épidémiologiques pour rechercher la
preuve de ces effets santé bénéfiques et la part que pouvait y prendre
l’huile d’olive, et les scientifiques, des études mécanistiques in vitro et
in vivo pour en rechercher la plausibilité biologique (voir Encadré).

Les recherches sur les relations entre


une maladie et la présence d’un régime
comportant de l’huile d’olive
Nous avons volontairement restreint le choix des affections dans les-
quelles l’huile d’olive pourrait jouer un rôle à celles pour lesquelles
des études valides permettent d’attribuer un rôle spécifique à l’huile
d’olive : soit les maladies cardiovasculaires, certains cancers, le syn-
drome métabolique et l’arthrite rhumatoïde, sachant qu’au travers de
l’alimentation méditerranéenne, l’huile d’olive peut aussi contribuer
à d’autres affections, par exemple d’autres maladies métaboliques
associées au syndrome métabolique (obésité, diabète), et l’ensemble
des maladies neurovégétatives liées à l’âge.
Maladies cardiovasculaires. Principale cause de mortalité
dans les pays occidentaux l’augmentation de ces maladies est liée
à la présence de l’obésité et du diabète dans la plupart des pays du
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

monde, maladies métaboliques et facteurs de risque des maladies


cardiovasculaires.
Ce sont d’abord des chercheurs nord-américains qui ont fait pro-
Photo page précédente : gresser la connaissance sur les bénéfices sur la santé de l’alimenta-
Flacon d’huile d’olive. tion méditerranéenne et de l’huile d’olive en montrant l’avantage de
Moulin Autrans,
Nyons (Drôme).
ces pays en termes de concentration plasmatique de cholestérol et
© Inra – Jean Weber de mortalité par affection cardiovasculaire. Pour Keys, ce qui expli-

124

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’huile d’olive : un aliment santé ?

Les études épidémiologiques et mécanistiques

Les études épidémiologiques reposent sur des observations qui


montrent que la consommation d’huile d’olive s’accompagne d’une
réduction d’événements pathologiques. Il peut s’agir d’études cas-
témoins, où l’on compare la consommation d’huile d’olive chez des
personnes en bonne santé et celle de patients (études transver-
sales ou rétrospectives) ou d’études prospectives dans lesquelles
la consommation de cohortes est relevée au temps « 0 ». Cette
population est suivie pendant plusieurs années durant lesquelles,
on enregistre l’incidence de diverses affections ou la mortalité. Ces
études prospectives évitent certains biais dans l’évaluation de la
consommation (biais de mémoire, on y interroge sur la consomma-
tion actuelle versus la consommation passée dans le cas des études
cas-témoins). Cependant, il est difficile d’éviter en épidémiologie
nutritionnelle les facteurs de confusion issus de corrélations dans
les habitudes alimentaires : par exemple, dans les populations
méditerranéennes, la consommation d’huile d’olive est corrélée à
la consommation de légumes et de poisson. Mais ces corrélations
expriment une réalité qu’ont saisie les épidémiologistes en analy-
sant les typologies alimentaires. Quoiqu’il en soit, une seule étude
épidémiologique, quelle qu’en soit la qualité méthodologique, ne
permet pas d’établir une relation causale, c’est pourquoi des critères
ont été proposés pour établir des niveaux de preuve (convaincant,
probable, possible, insuffisant), le plus important d’entre eux étant la
reproduction de résultats dans différentes cohortes. Quand on dis-
pose de marqueurs de risque biologiques (cholestérolémie, triglycé-
ridémie) ou clinique (hypertension artérielle, obésité abdominale),
on peut réaliser des études d’intervention ou des études cliniques
qui permettent mieux de déceler une relation de cause à effet entre
l’huile d’olive, par exemple, et le marqueur de risque. L’existence
d’une relation dose effet (test de tendance significatif ) ajoute de la
robustesse au résultat.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les études mécanistiques sont un élément non négligeable parmi


les critères permettant d’établir le niveau de preuve. Elles permettent
de démontrer la plausibilité biologique de l’effet observé sur des
modèles animaux ou des cultures cellulaires. Cependant, elles
s’exercent le plus souvent avec des doses élevées, non nutritionnelles
et en dehors de la complexité biologique d’un organisme humain.

125

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

quait le mieux cette différence des pays méditerranéens d’avec les


pays d’Europe ou d’Amérique du Nord, était le rapport acides gras
mono-insaturés (AGMI) sur acides gras saturés (AGS), il est supé-
rieur ou égal à « 1 » dans les pays méditerranéens, grâce à l’huile
d’olive, alors qu’il était inférieur à « 1 » dans les autres pays de par
l’apport des graisses saturées animales. Pourtant, quand on étudiait
l’effet des AGMI dans des populations autres que méditerranéennes,
leur relation à l’incidence des maladies cardiovasculaires est très peu
différente de celle des AGS. Ceci est bien montré dans une étude
réunissant les résultats de plusieurs cohortes prospectives conduites
aux Etats-Unis et en Europe. Ce résultat suggère que la partie insa-
ponifiable de l'huile d'olive, en particulier les composés phéno-
liques, joue un rôle, illustré par l'effet de l'huile d'olive sur différents
marqueurs de risque cardiovasculaire. On peut dire que l'intérêt de
l'huile d'olive réside d'abord dans sa substitution aux graisses ani-
males, sa partie lipidique ne se traduit pas par une augmentation du
cholestérol, mais par un maintien du cholestérol HDL (lipoprotéine
à forte densité). Elle apporte, en outre, le potentiel bénéfique de sa
fraction insaponifable, et notamment, l’hydroxytyrosol, oleuropéine

La mortalité toutes causes


et par maladies
cardiovasculaires
dans l’étude de
pays d'Europe et du Japon.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

126

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’huile d’olive : un aliment santé ?

Incidence pour 100 000


habitants des maladies
coronariennes, étudiée
dans sept pays d’Europe.

et l’oléocanthal. C’est donc bien l’aliment huile d’olive qu’il faut


considérer, aliment issu d’un fruit, riche en composés phénoliques,
faisant partie d’une alimentation pauvre en graisses animales et riche
en produits végétaux que l’huile d’olive agrémente et enrichit de
ses qualités organoleptiques, l’alimentation méditerranéenne. Ces
résultats innovants dans les années 1960 sont maintenant commu-
nément admis.
Cancers. Les modifications de l’environnement et de l’alimenta-
tion jouent un rôle dans l’augmentation du nombre de cancers. Si la
prévention par les fruits et légumes des cancers des voies aérodiges-
tives supérieures apparaît convaincante, elle est considérée comme
faible pour les cancers hormonodépendants (comme ceux du sein
et de la prostate). On en est donc venu à considérer que ni un nutri-
ment, ni un aliment isolés ne pouvaient être signalés en termes de
prévention, et que devait être pris en compte l’ensemble des habi-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

tudes alimentaires. L’alimentation méditerranéenne a ainsi montré


une réduction de risque sur l’ensemble des cancers, et notamment
sur le cancer du sein. Il est encore prématuré d’affirmer que l’huile
d’olive apporte un plus à l’effet bénéfique de l’alimentation méditer-
ranéenne dans la prévention des cancers, mais il est raisonnable de
dire que sa consommation, dans la limite de l’équilibre énergétique,
fait partie du bénéfice apporté par l’alimentation méditerranéenne.

127

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Syndrome métabolique. Il s’agit d’un ensemble de symptômes


signant des désordres métaboliques, au premier rang desquels l’obé-
sité abdominale, l’hypertension artérielle, l’insulino-résistance,
l’hypertriglyceridémie et une altération des paramètres lipidiques.
Ce syndrome peut évoluer vers des maladies caractérisées, telles le
diabète, les maladies cardiovasculaires et certains cancers. L’huile
d’olive peut contribuer à l’effet favorable de l’alimentation médi-
terranéenne sur le développement du syndrome métabolique en
se substituant à l’apport de graisses saturées, mais son apport doit
rester dans les limites de l’équilibre énergétique.
Arthrite rhumatoïde. Il s’agit d’une maladie auto-immune qui
affecte entre 0,3 % et 1 % de la population générale des pays euro-
péens. D’anciennes études ont déjà évoqué le rôle bénéfique de
l’huile d’olive dans la prévention ou l’amélioration du pronostic de
l’arthrite rhumatoïde. On peut proposer plusieurs mécanismes pour
l’effet bénéfique potentiel de l’huile d’olive sur l’arthrite rhumatoïde.
L’un d’entre eux porte sur la voie métabolique des eicosanoïdes liée
à l’acide oléique résultant en la synthèse du leucotriène A3 inhibi-
teur du leucotriène B4, procytokine. L’huile d’olive peut aussi agir
sur la fonction immunitaire et les réactions auto-immunes notam-
ment en diminuant la prolifération lymphocytaire et l’expression des
molécules d’adhésion dans les vaisseaux. Enfin, l’oléocanthal, dont
l’activité est comparable à celle de l’ibuprofène, pourrait trouver ici
sa cible majeure.

Effet sur la santé


Il a été longtemps difficile d’évoquer la possible spécificité de l’effet
santé lié à l’huile d’olive. Tout d’abord parce qu’elle est partie inté-
grante d’une alimentation, l’alimentation méditerranéenne, qui ap-
porte nombre d’aliments (tous les fruits et légumes), de nutriments
(les acides gras w 3 des poissons notamment), de micronutriments
(vitamines A, B, C et D), de microconstituants (composés phéno-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

liques) doués de potentialités bénéfiques en terme de santé. Ensuite


par la complexité de sa composition liée au fait qu’elle est issue d’un
fruit. L’acide gras essentiel, l’acide oléique, a d’abord occupé la scène,
notamment en regard des maladies cardiovasculaires. Mais, comme
l’avait remarqué Ancel Keys, il est efficace quand il domine large-
ment l’apport en acides gras saturés (AGS), et cela est typiquement
le cas dans une alimentation caractérisée par un faible apport d’ali-

128

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’huile d’olive : un aliment santé ?

ments issus de mammifères terrestres (produits laitiers et viande,


essentiellement de bovins) et un large apport d’huile d’olive. L’acide
oléique peut cependant avoir gardé une spécificité d’action dans le
syndrome métabolique, grâce à sa capacité à maintenir un niveau
élevé de cholestérol HDL. Les composés phénoliques particuliers
ont été largement évoqués à propos des effets santé, notamment
l’hydroxytyrosol, l’oleuropéine et l’oléocanthal, antioxydants sans
doute, mais aussi capables de réguler les enzymes de détoxication,
et surtout d’induire des effets anti-inflammatoires. C’est cette com-
position complexe qui permet de penser que l’huile d’olive peut
avoir un rôle bénéfique qui lui est propre, même s’il sera difficile de
le confirmer par des études épidémiologiques.
En tout état de cause, les recommandations de santé publique
sont en accord avec les habitudes alimentaires méditerranéennes
dans lesquelles l’usage quotidien de l’huile d’olive pour les salades
aussi bien que la cuisine est une caractéristique centrale.

Pour en savoir plus


Benetou V., Trichopoulou A., Orfanos P., Naska A., Lagiou P., Boffetta P., 2008.
Conformity to traditional Mediterranean diet and cancer incidence : the Greek EPIC
cohort. British J. Cancer, 99 : 191-195.
Gerber M., 2004. Santé et alimentation méditerranéenne au quotidien. Edisud, Equinoxe.
Hoffmann A., Gerber M., 2011. The Mediterranean Diet : Health and Science. 414 p.
Keys A., Aravanis C., Blackburn H.W., Van Buchem F.S., Buzina R., Djordjevic B.D., 1966.
Epidemiological studies related to coronary heart disease : characteristics of men aged
40-59 in seven countries. Acta medica Scandinavica, 460 : 1-392.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

129

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

De l’édification de l’arbre
à la production d’olives
Nathalie Moutier, Pierre Villemur, Michel Calleja
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

V ous voyez cet arbre majestueux, vieux de plus


de 500 ans ? Difficile de croire qu’au début de
sa vie, ce n’était qu’un tout petit bout de bois, issu
de la croissance d’un bourgeon pas plus gros qu’une
tête d’épingle. Et puis ce bourgeon a travaillé sans
relâche et a donné d’autres bourgeons qui, à leur
tour, ont construit des rameaux, des feuilles etc. Et
c’est ainsi que ce géant s’est construit, qu’il a grossi
petit à petit, et qu’il continue à croître et produire
régulièrement.
L’olivier de Monpeyroux.
© Catherine Breton Comment pousse un olivier ?
Le bourgeon constructeur
Le bourgeon terminal est un bourgeon nu, comme chez beaucoup
d’espèces issues de régions intertropicales. C’est une zone embryon-
naire qui initie des branches et de nouvelles feuilles, plus rarement
une inflorescence, et qui passe par des phases d’activité et de repos.
À la fin du repos hivernal, en mars-avril, le bourgeon terminal
déploie successivement de six à douze paires de feuilles, déjà pré-
sentes dans le bourgeon l’hiver précédent sous la forme d’ébauches
foliaires. À cette partie préformée peut succéder, lors de la crois-
sance, une partie néoformée selon la localisation et l’intensité des
vagues de croissance. L’ensemble de ces deux parties correspond au
rameau de l’année ou pousse de l’année.
Coupe longitudinale
de bourgeon terminal
Le rameau de l’année
(d’après F.J. de Almeida).
Le rameau se construit par successions d’entre-nœuds. À chaque
Dans le prolongement de l’axe
du rameau le bourgeon terminal nœud se trouve une paire de feuilles disposées l’une en face de
comprend la première paire
d’ébauches foliaires extérieure l’autre.
avec les bourgeons axillaires.
Il n’y a pas d’écailles protectrices,
À l’aisselle de chaque feuille se trouvent deux bourgeons comme
c’est un bourgeon nu. La chez d’autres Oléacées. Le bourgeon le plus volumineux accolé à la
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

deuxième paire dans le plan


perpendiculaire au rameau est à feuille est le bourgeon axillaire avec quatre ébauches foliaires qui
peine visible.
formeront les jeunes feuilles ; le bourgeon surnuméraire est situé au-
dessus, minuscule et proche du rameau, protégé par deux ébauches.
Au nœud suivant, apparaît une nouvelle paire de feuilles avec
ses bourgeons, dans un plan perpendiculaire à la paire de feuilles
Photo page précédente :
Nettoyage des olives.
du nœud précédent, etc. La disposition des feuilles sur le rameau
© Sophie Pinatel de Salvator (ou phyllotaxie) de l’olivier est du type opposé et décussé : opposé,

132

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

car les deux feuilles d’un même nœud se situent l’une en face de
l’autre ; décussé, car deux paires de feuilles successives forment un
angle droit.
Le bourgeon terminal sans écailles contient toutes les ébauches
de feuilles qui se transformeront en feuilles normales, le passage d’un
rameau à celui de l’année suivante n’est donc pas visible sur le bois.
Les caractéristiques morphologiques indiquant le passage à l’année
suivante sont la présence d’entrenœuds plus courts, de feuilles plus
petites et de bourgeons de teinte plus claire au printemps.
Au printemps, les feuilles ont une expansion rapide, elles
atteignent leur taille maximale en deux semaines. Les feuilles sont
dites persistantes. La feuille d’olivier tombe au cours de la troisième
année, son pétiole très court se rompt, généralement au cours de la
croissance printanière ou plus rarement à l’automne.
L’évolution différenciée des bourgeons
axillaires et surnuméraires
Chaque feuille porte à son aisselle un complexe de deux bourgeons :
le bourgeon axillaire et le bourgeon surnuméraire.
Le bourgeon axillaire ne se développe pas la première année. Il
peut ensuite évoluer de trois façons :
– soit rester latent, comme « au repos », toute sa vie, on le qualifie
de bourgeon latent. Ce bourgeon tombe lors de la chute de la feuille
adjacente la troisième année ;
– soit produire un rameau latéral l’année suivante, on le qualifie de
bourgeon végétatif ; Stomates et trichomes.
– soit produire une inflorescence l’année suivante, on le qualifie de © Anaïs Boura (MNHN)
bourgeon florifère. À la face inférieure des feuilles, les
stomates, orifices microscopiques
Cependant, à la base du rameau de l’année, le bourgeon axil- bordés de deux cellules, sont au
nombre de 400 à 500/mm2, ils
laire peut manifester une croissance immédiate, donnant le rameau servent aux échanges gazeux.
anticipé des arboriculteurs, avec un premier entrenœud très long. Les stomates sont recouverts
par de nombreuses cellules en
Les bourgeons surnuméraires restent le plus souvent latents, jusqu’à éventail disposées sur des poils
très courts. La forte densité de
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ces poils en ombelles (trichomes


peltés), permet de réduire
les pertes en eau des feuilles,
on en compte 30 à 40 pour
100 stomates. Ils participent ainsi
à la résistance de l’olivier à la
sécheresse. Le feuillage argenté
de cet arbre est facilement
reconnaissable : l’air interposé
entre les poils et l’épiderme de la
feuille donne cet aspect argenté
au dessous des feuilles.

133

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

la troisième année où ils donnent des rameaux surnuméraires, qui


assurent ensuite le renouvellement de la ramification. À la base du
rameau surnuméraire, on observe les deux premiers bourgeons for-
més, minuscules, opposés et perpendiculaires à l’axe du rameau.
La croissance des rameaux
Le déroulement de la croissance du rameau s’effectue sous des
contraintes mécaniques et physiologiques, comme la flexion des
branches sous l’action de la gravité et du poids des fruits, la compé-
tition spatiale vis-à-vis de la lumière, la compétition entre la pousse
végétative et les fruits. Dès la deuxième année, les rameaux en crois-
sance peuvent se courber sous leur propre poids et celui des rameaux
latéraux.
L’unité initiale de croissance, végétative, évolue en unité de pro-
duction (UP) à la suite de la mise à fleur et à fruit. L’arcure de l’unité

Empilement des unités


de production et des unités
de renouvellement dans
la couronne de l'arbre,
(d’après A. Vernet).
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

134

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

favorise l’émission de rameaux assurant la formation d’une nouvelle


structure : sur la courbure des rameaux fructifères apparaissent des
unités de renouvellement (UR) ou réitérations.
Les réitérations font que les rameaux s’empilent dans l’arbre en
unités d’autant plus petites qu’elles se situent à la périphérie dans la
couronne de l’arbre. Elles sont constituées de rameaux longs, courts
ou très courts selon le cycle de développement.
La couronne d’un olivier adulte (c’est-à-dire un olivier qui est
entré en pleine production et a atteint sa taille maximale, donc âgé
de 8 à 15 ans) est donc formée de rameaux d’autant plus courbés
qu’ils sont âgés. L’augmentation de leur nombre et de leurs dimen-
sions conduit aussi à leur sénescence en conditions d’éclairement
défavorables.
La croissance en épaisseur,
caractéristiques du tronc et du bois
Le développement en longueur du rameau est suivi, plus ou moins
rapidement, de son accroissement en diamètre, assuré par le cam-
bium (assise cellulaire qui produit le bois en interne et le liber en
externe). Le tronc est droit, circulaire et lisse chez le jeune olivier,
puis au fur et à mesure, il se déforme, devient noueux, crevassé.
Le bois d’olivier est lourd, dur, homogène et qualifié par les
ébénistes de très gras en raison des oléorésines qu’il contient. Les
variations de densité, de 0,85 à 1,15, sont à relier à la diversité des
provenances. En comparaison, le bois de chêne vert a une densité
variant de 0,85 à 0,95.
Racines, souchets, rejets
Sur les arbres âgés, des racines puissantes assurent une plus forte
croissance au cambium des zones en alignement (en continuité
immédiate) des branches charpentières du tronc, lui donnant cet
aspect cannelé, appelé « cordes », alors qu’un réseau de racines
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

superficielles se développe en étroite relation avec la souche.


Ces racines participent, à la base du tronc, à cette croissance
secondaire du cambium qui forme d’épais tissus corticaux, ce sont
des excroissances appelées généralement souchets, sur lesquels se
développeront des bourgeons adventifs qui donneront de jeunes
pousses juvéniles et vigoureuses, les rejets (voir dessin page 71). Il
n’y a pas de drageons chez l’olivier car les racines n’émettent jamais

135

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

de bourgeons. Cette capacité des souchets à proliférer permet


de reconstituer des arbres détruits à la suite des gels centenaires,
comme le dernier en date en Provence et Languedoc-Roussillon,
avec des gels de -12 à -20 °C en février 1956.
Ces souchets ont été utilisés pour propager des arbres remar-
quables par tous les peuples de la Méditerranée, des temps les plus
anciens à nos jours. Les jardins de Sfax (Tunisie) en sont un exemple,
avec l’extension d’une forêt d’oliviers sur des milliers d’hectares
d’une densité de 12 à 17 arbres par hectare, au début du xxe siècle.
Selon les caractéristiques du sol, les racines peuvent atteindre six
mètres de profondeur et douze mètres latéralement, à la recherche
d’eau, notamment dans les plantations de Sfax sur les sables éoliens
entrecoupés de fins horizons d’argile.

Objectif fruit
La métamorphose du bourgeon florifère
et la vernalisation
Le cycle de reproduction commence juste après la formation du
rameau de l’année. Issus le plus souvent des bourgeons axillaires, les
bourgeons florifères donneront les inflorescences (grappes florales
en panicule) l’année suivante. Cette métamorphose des bourgeons
florifères commence donc l’année même de leur formation : l’induc-
tion florale a lieu en juillet et l’initiation florale débute aux premiers
froids de l’automne en novembre et se poursuit au cours de la deu-
xième année, jusqu’en février.
La différenciation florale a lieu en février et mars. Dans le bourgeon,
le point végétatif s’élargit, l’axe de l’inflorescence se forme, s’allonge,
porte les premières ébauches de fleurs. Puis en avril, les jeunes inflo-
rescences s’accroissent, et l’olivier fleurit de mai à juin en France.
Le froid a une action prépondérante, conférant l’aptitude à fleurir
à l’olivier. Ce phénomène de vernalisation a été démontré dans les
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

années 1950 et 1960. Néanmoins, cet effet est « réversible » et des


températures « trop » douces peuvent interrompre ce processus.
L’aire de l’olivier correspond à celle du climat méditerranéen,
climat de transition entre les climats tempérés et tropicaux. À l’extré-
mité de cette zone, des hivers doux occasionnent des floraisons erra-
tiques, anormales, fin décembre, par exemple dans les basses plaines
du sud-ouest de l’Iran (Khuzestan).

136

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

L’inflorescence et la fleur
La fleur d’olivier est petite, de trois à six millimètres. Elle est
constituée de quatre sépales, quatre pétales, deux étamines
(organes mâles) et un pistil (organe femelle). Comme elle
porte à la fois les organes mâle et femelle, elle est hermaph-
rodite. Les sépales sont soudés et constituent un calice per-
sistant. Les quatre pétales blancs sont soudés à leur base aux
deux étamines à filets courts dont les anthères volumineuses
d’une longueur de plus de deux millimètres surmontent la fleur.
Le pistil est constitué d’un stigmate bifide, d'un style
court et avec deux carpelles soudés en un ovaire libre,
biloculaire, dont chaque loge comprend deux ovules.
La floraison a généralement lieu en position latérale au
rameau d'un an, mais, elle peut aussi rarement apparaître
en position terminale sur des rameaux courts (par exemple
Picholine et Bouteillan).
Une fleur hermaphrodite,
pas toujours fonctionnelle
La propension de l’olivier à fleurir sur des rameaux de l’année pré-
cédente singularise cet arbre à feuilles persistantes parmi les autres
espèces fruitières, les fruitiers appartenant aux Rosacées (pommier, Inflorescence sur rameau
d'un an. Gravure extraite
du Traité de l’olivier. 1783 par
l’Abbé Couture. © Inra
L’inflorescence est une panicule
(fleurs pédonculées en grappe)
portant généralement
15 à 40 fleurs réparties
sur 4 à 6 ramifications
secondaires opposées décussées.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Coupe transversale d’une fleur.

137

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

poirier) fleurissent sur du bois de deux ans et plus. Tout bourgeon


à l’aisselle d’une feuille d’un an pouvant donner une inflorescence,
le nombre de bourgeons de la pousse annuelle conditionne la quan-
tité de fleurs, il y a donc une relation forte entre la floribondité et le
rythme de croissance. La floribondité élevée de l’olivier est toutefois
pondérée par une fertilité inégale des fleurs.
Les fleurs staminées, c’est-à-dire les fleurs exclusivement mâles,
celles dont le pistil a avorté à un stade précoce de différenciation
florale, sont parfois nombreuses, ce qui réduit d’autant le nombre
de fleurs aptes à donner un fruit. Cet avortement peut être plus mar-
qué au cours de la croissance de l’inflorescence en avril s’il y a un
stress hydrique.
Les fleurs staminées joueraient un rôle dans la pollinisation glo-
bale de l’espèce et leur proportion n’hypothèquerait pas la récolte.
En outre, chez quelques variétés les anthères ne libèrent pas
de pollen fonctionnel à l’anthèse (ouverture des anthères à matu-
rité), les fleurs sont exclusivement femelles. Ces variétés, telles que
Lucques et Olivière en France, sont dites mâles stériles. Cette sté-
rilité mâle est liée à un blocage pendant la formation des grains de
pollen (microspores).

Exemple de la répartition des fleurs hermaphrodites et staminées


d’inflorescences de la partie moyenne des rameaux d’un an
(moyenne de trois années consécutives d’observations)

Nombre moyen Nombre moyen Nombre moyen


% de fleurs % de fleurs
Variété de fleurs par de fleurs de fleurs staminées
hermaphrodites staminées
inflorescence hermaphrodites (femelle-stérile)
Picholine 22,6 16,4 72,6 6,2 27,4

Tanche 15,5 11,0 71,0 4,5 29,0

Aglandau 16,9 11,0 65,5 5,9 34,5


Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Bouteillan 24,3 10,7 44,1 13,6 55,9

Olivière* 19,7 7,2 36,5 12,5 63,5

Verdale de l’Hérault 17,8 6,2 35,8 11,6 65,2

Lucques* 21,8 2,7 12,4 19,1 87,6

*variétés mâle-stériles

138

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Le pollen, un incroyable voyageur


La formation des grains de pollen est rapide chez l’olivier, elle
débute 15 à 25 jours avant la floraison, au stade d’apparition des
pétales lorque les anthères ont une longueur de 1,3 à 1,6 millimètres.
À terme, chaque cellule mère donne 4 grains de pollen de 20 microns
de diamètre environ.
La production de pollen est de l’ordre de 2 à 4 millions de grains
par inflorescence chez les variétés à fruit de table et peut atteindre
8 millions chez les variétés à huile. Les variétés à huile ont un plus
grand nombre de fleurs par inflorescence et un plus grand nombre
de grain de pollen par fleur. La pollinisation de l’olivier est anémo-
phile : le pollen, très léger, est transporté par le vent sur de longues
distances. Il n’est pas nécessaire d’apporter des insectes pollinisa-
teurs (abeilles) dans les vergers pour assurer la pollinisation.
Grain de pollen.
En microscopie photonique
et électronique.
De forme générale sphéroïdale,
il présente 3 sillons et une
ornementation en réticule,
à mailles larges et murs épais.
© Michel Calleja

La pollinisation est sensible aux conditions atmosphériques :


aux périodes de froid, de fortes chaleurs, de brouillard, et aux pluies
qui lessivent l’atmosphère. Le plus souvent la floraison est homo-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

gène, mais certaines années la floraison peut s’étaler sur plusieurs


semaines, notamment lorsque les conditions climatiques sont défa-
vorables. La production de pollen totale fluctue entre les années
dans un rapport de 1 à 6. Ces fluctuations, qui se répercutent sur la
production, sont en grande partie imputables à la compétition nutri-
tive entre la charge en fleurs et en fruits de l’année et la croissance
végétative, gage du nombre de bourgeons de la future récolte.

139

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

le pollen : marqueur du réchauffement climatique

Les grains de pollen émis par les plantes dans l’atmosphère


témoignent, par leur seule présence ou par leur abondance, des évé-
nements biologiques et climatiques à une échelle régionale.
Une base de données des mesures du contenu pollinique de l’atmos-
phère a été constituée depuis les années 1970, par l’unité de paly-
nologie de Montpellier SupAgro. Les observations phénologiques
issues de cette base reflètent parfaitement la pollinisation de l’olivier
à l’échelle régionale. Ainsi, pour la semaine du maximum des émis-
sions polliniques, qui correspond à la pleine floraison (50 % des fleurs
ouvertes), on observe pour la période 1974-2010 :
- une variabilité interannuelle importante. L’écart maximum entre
la date de pleine floraison la plus précoce et la plus tardive est de
35 jours (date du maximum des émissions polliniques le 175e jour
en 1984 et le 140e jour en 1997). Cette variabilité est attribuable aux
conditions climatiques qui prévalent depuis l’automne de l’année
N-1 jusqu’à la floraison de l’année N. La variabilité interannuelle est
également importante pour une même ville : la date de floraison de
l’olivier peut varier de plus de 20 jours d’une année à l’autre. Ce sont
donc principalement les températures des premiers mois de l’année
qui vont fixer la date de floraison de l’olivier.
- à cette variation interannuelle de date de floraison de l’olivier se
superpose une date de floraison plus précoce d’une quinzaine de jours
au cours des dernières décennies, que l’on peut attribuer au réchauf-
fement climatique. Au début des années 1970, la date moyenne du
maximum des émissions polliniques était le 158e jour (début juin), en
2010, elle se situe au 143e jour (deuxième quinzaine de mai).
Les modélisations générées à partir de ces mesures suggèrent une
forte dépendance entre les dates de floraison et les températures de
début d’année, les besoins en chaleur expliquent près de 80 % de la
variance des dates de pleine floraison. La prise en compte des besoins
en froid permet d’améliorer légèrement les modèles phénologiques.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Dessin extrait d’une planche d’Olea europaea, Cayet rouge.


Planche tirée du Traité des arbres et arbustes qui se cultivent
en France en pleine terre, par M. Duhamel du Monceau.
À Paris, chez H.L. Guérin et J.F. Delatour, 1745. © Inra

140

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Capteur de pollen Méthode aéropalynologique


de type COUR. de prévision de récolte.
Une girouette porte-filtre permet Des filtres de gaze hydrophile
d’exposer face au vent des filtres enduite d’huile de silicone
de 20 cm de côté, recueillent le pollen (A). Après
durant des périodes traitement chimique (B) qui
de trois ou quatre jours. ne peut détruire l’exine, très
résistante, le résidu constitué
de grains de pollen est mesuré
et analysé. L’analyse consiste
à reconnaître et à compter (C)
les grains de pollen d’olivier
en microscopie optique. Les
données anémomètriques (A2)
de la station météorologique
permettent de calculer la
quantité de pollen contenue, en
moyenne, par mètre cube d’air
durant la période d’exposition
des filtres.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Évolution de la date de
maximum de floraison à
Montpellier de 1973 à 2008.

141

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le pollen : un bon indicateur de récolte

La prévision de récolte, au cours d’une campagne agricole, est un


facteur capital de la gestion des marchés. Ce besoin est d’autant
plus marqué que l’on s’adresse à des marchés très spéculatifs comme
celui des produits oléicoles, où la prévision du volume de la récolte
à venir est une préoccupation qui motive constamment l’ensemble
des partenaires de la filière, tant pour des enjeux économiques que
techniques (maîtrise des rendements, organisation de la récolte, ges-
tion de la qualité du produit).
La quantité de grains de pollen présents dans l’atmosphère lors de
la floraison est un très bon indicateur du volume de la récolte oléi-
cole à venir. Il traduit le nombre de fleurs présentes (floribondité) et
les conditions climatiques de la floraison qui seront plus ou moins
favorables à la fécondation.
Une méthode de prévision de récolte à partir du dosage du pollen de
l’atmosphère a été mise au point au début des années 1980. Depuis
1993, l’unité de palynologie de Montpellier SupAgro, en collabora-
tion avec l’Institut de l’Olivier à Tunis, a mis en place un réseau de six
capteurs qui réalisent chaque année des prévisions de récoltes par
bassin de production dès la fin de la floraison, soit six mois avant la
récolte. Les résultats obtenus permettent de modéliser les facteurs
qui contribuent à l’élaboration du rendement. Au Portugal, la prise
en compte des précipitations et d’un indice phytopathologique per-
mettent d’améliorer le modèle pollinique et d’expliquer 97 % du ren-
dement d’olives à l’échelle régionale.

Relation entre la production


totale d’olives en Tunisie et
un indice pollinique calculé
à partir d’un réseau de 6
capteurs de pollen
(source : Mongi Msallem,
Institut de l’olivier, Tunis).
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

142

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Allergie et olivier

Le pollen de l’olivier est redouté car très allergisant, il est dispersé


par le vent. En Méditerranée, cette allergie touche de nombreuses
personnes notamment en Espagne, en Italie, en Grèce et dans l’en-
semble du Maghreb. Plusieurs études réalisées dans l’aire méditer-
ranéenne traduisent une sensibilité cutanée importante au pol-
len d’olivier pouvant atteindre dans le sud de l’Espagne 80 % des
patients qui souffrent de rhinite allergique. En France, le nombre de
personnes sensibilisées serait de l’ordre de 15 % mais les réactions
allergiques restent encore rares. Une diffusion des oliviers dans les
espaces publics et un regain d’intérêt pour l’oléiculture risquent de
se traduire par une augmentation de cette pollinose.
La pollinose à olivier (ensemble des manifestations cliniques induites
par l’allergie aux grains de pollen) est provoquée par la présence de
11 allergènes dans le pollen. Cette maladie, qui se traduit le plus
souvent par une inflammation allergique des muqueuses du nez
mais aussi des sinus, des yeux et parfois des bronches, affecte plus
ou moins de personnes selon l’intensité des émissions polliniques.
C’est dans le sud de l’Espagne (Andalousie) où l’oléiculture est la plus
développée en Europe, mais aussi dans les grand pays oléicoles du
pourtour méditerranéen, que l’allergie au pollen d’olivier est la plus
fréquente. Dans le bassin méditerranéen, la pollinisation de l’olivier
se déroule d’avril à juin selon la région (la floraison étant fonction de
la latitude et de l’altitude) avec des émissions polliniques journalières
pouvant dépasser 10 000 grains par mètre cube d’air dans les zones
de plus fortes productions. Les grains de pollen sont préférentielle-
ment libérés entre 8 h et 14 h avec un maximum entre 10 h et 12 h,
mais ils sont présents toute la journée lorsqu’ils sont transportés sur
de longues distances par les vents dominants. On les trouve jusqu’au
nord de l’Europe, où les concentrations sont toutefois beaucoup plus
faibles que dans les zones de production. Dans le sud de la France,
la floraison de l’olivier est centrée sur les mois de mai et de juin avec
des concentrations polliniques journalières généralement inférieures
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à 200 grains de pollen par mètre cube d’air.

La fécondation :
une étape critique pour la production
Pour qu’il y ait fécondation et formation d’une olive, le pollen libéré
par les étamines doit atteindre le stigmate du pistil de la fleur à fécon-

143

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

der et doit germer. Ensuite le tube pollinique doit descendre dans le


style jusqu’à l’ovaire contenant quatre ovules.
Généralement, il n’en féconde qu’un seul. On observe l’avor-
tement d’une loge de l’ovaire puis dégradation de l’un des ovules
de l’autre loge. Les tissus de l’ovaire formeront la pulpe du fruit
et le noyau qui contiendra l’embryon issu de l’ovule fécondé. Cet
embryon, entouré de l’albumen, est constitué d’une radicule et
d’une gemmule avec deux cotylédons foliacés.
Les conditions de germination du pollen sur le style sont déter-
minantes pour la fécondation. Celle-ci a pour exigence un stigmate
fonctionnel au moment du dépôt du pollen et des ovules réceptifs
au moment où le tube pollinique les atteint, d’où une croissance
suffisamment rapide du tube pollinique (deux jours) pour atteindre
des ovules viables. La période effective de pollinisation est définie
comme la durée pendant laquelle l’apport de pollen sur le stigmate
permet la fécondation.
La longévité de réceptivité des ovules est considérée comme
le principal facteur limitant de la fécondation, alors que la récep-
tivité du stigmate et la vitesse de croissance des tubes polliniques
ne semblent pas prépondérantes. Les variétés Lucques et Picholine
ont des comportements très différents : une période effective de
pollinisation de l’ordre de huit à dix jours chez Picholine semble suf-
fisante pour obtenir une fructification importante ; par contre, chez
Lucques, l’aptitude à la fécondation est faible, car la période effective
de réceptivité des ovules est limitée à quatre jours. Chez Lucques,
ce facteur se conjugue à un taux important d’avortement des pistils
des fleurs de l’inflorescence, près de 80 % de fleurs staminées selon
les conditions climatiques de l’année et les types de rameaux. Au
final, seules deux à trois fleurs pistillées par inflorescence assurent
la fructification.
À la recherche du partenaire idéal
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Chez la plupart des variétés d’olivier, le pollen d’une variété ne peut


féconder les ovules de la même variété, c’est-à-dire qu’il existe un
fort taux d’auto-incompatibilité pollinique chez cette espèce. Le
recours à des variétés pollinisatrices compatibles est donc souvent
indispensable pour assurer la fécondation et donc la production
de fruits.

144

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Pour qu’il y ait pollinisation, la variété polliniseur et la variété


à polliniser doivent fleurir en même temps. De plus, l’ouverture
des fleurs d’un même arbre est étalée dans le temps, il faut donc
plusieurs jours de concordance de floraison des deux variétés pour
améliorer les chances de fécondation. Ainsi, sur plusieurs années, le
stade de pleine floraison de Picholine se situe entre le 30 mai et le
12 juin à Montpellier et le synchronisme de huit variétés n’excède pas
dix jours sur quelques années d’observation.
Pour être efficace, il faut également que le polliniseur soit com-
patible avec la variété à polliniser c’est-à-dire que son pollen puisse
germer sur les stigmates de celle-ci, ce qui est rarement le cas. On a
d’abord recherché des polliniseurs efficaces pour les variétés mâles
stériles. Ces variétés n’ayant pas de pollen fonctionnel, elles ont
obligatoirement besoin du pollen d’une autre variété pour pouvoir
fructifier. La recherche des compatibilités polliniques a ensuite été
étendue aux principales variétés françaises d’olivier comme c’est le
cas chez les autres espèces fruitières fortement auto-incompatibles,
telles que le cerisier ou l’abricotier. Ces essais ont été menés au sein
d’un réseau de producteurs du Sud de la France afin de tenir compte
des effets du milieu.
Les études de pollinisation croisée en testant les polliniseurs un
par un sur chaque variété, en isolant les rameaux fleuris au moyen

Variabilité interannuelle
de la date de floraison
1976-1982. Collection Inra
Montpellier-SupAgro.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

145

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

de sacs en papier sulfurisé, ont permis de trouver des variétés pol-


liniseurs efficaces pour la quasi-totalité des variétés étudiées. Les
résultats obtenus sont utilisés par les oléiculteurs dans le choix des
différentes variétés à associer dans leurs vergers pour obtenir une
pollinisation efficace et donc une bonne production.
Plus récemment, de nouvelles techniques basées sur l'analyse de
l'ADN de l'embryon d'olive ont été utilisées. Elles permettent de
repérer les allèles correspondant à l'ovule et ceux correspondant au
grain de pollen. Il est alors possible de connaître les combinaisons
polliniques qui fonctionnent sans avoir à tester les variétés pollini-
satrices une par une au moyen de manchons.

À gauche :
Le fruit, une drupe, l’olive
Manchons utilisés pour
l’étude des compatibilités De la fécondation de l’ovule par le grain de pollen concordant et
polliniques entre les variétés.
© Nathalie Moutier compatible va naître le fruit, de type drupe, qui se développera du-
À droite : rant quatre à six mois avant d’être récolté.
Fruits en cours de maturation. La composition génétique d’un fruit est identique pour tous les
© Catherine Breton fruits d’un même arbre, ou d’un clone, car c’est celle de la mère.
Seule la graine c’est-à-dire l’embryon entouré de l’albumen a une
constitution hybride, unique pour chaque fruit. Le patrimoine géné-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

tique de l’embryon appartient pour moitié à l’arbre qui le porte et


pour l’autre moitié au grain de pollen ayant fécondé l’ovule.
Le développement de l’olive est lent (de 180 à 200 jours). En
comparaison, d’autres drupes comme les cerises, les abricots, ou les
pêches mûrissent en trente à soixante jours. Le fruit est sphérique
à allongé. La première phase de multiplication cellulaire va de la
nouaison à la sclérification de l’endocarpe, lorsque le noyau devient

146

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

De la pollinisation
à la fécondation.
La fécondation déclenche
une série d’événements
de morphogenèse pour
atteindre les stades du
jeune fruit au fruit mûr.

dur, en juillet. Puis avec l’augmentation de la taille des cellules de


la pulpe débute l’oléogenèse. L’accumulation d’huile commence au
cours de la deuxième ou la troisième semaine de juillet pour une
maturité du fruit d’octobre à décembre selon les variétés.
L’accumulation d’huile exprimée en grammes par fruit suit une
courbe linéaire dans le temps. Les variétés à petits fruits, par exemple
Arbequina, ont un taux d’huile élevé ; en comparaison des variétés
à fruits de grande taille, comme Olivière, qui présentent une accu-
mulation d’huile plus faible.
L’olive tout d’abord verte, passe par une couleur violacée, c’est
« l’olive tournante », puis devient noire à maturité. Les formes des
fruits et des noyaux sont caractéristiques de chaque variété et per-
mettent de l'identifier.
La drupe contient l’huile principalement dans la pulpe et un
peu dans la graine. Le rapport de poids entre la pulpe et la graine
est de l’ordre de 50/1. La pulpe contient de 10 à 25 % d’huile selon
les variétés. Les études histologiques dans le fruit en maturation
montrent que les petites gouttelettes d’huile dans les cellules de
la pulpe encore verte, fusionnent progressivement en une énorme
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

goutte d’huile qui occupe toute la cellule et rejette le cytoplasme et


le noyau de la cellule contre les parois, à maturité. L’endocarpe est
un noyau très dur qui contient généralement une seule graine. Dans
la graine, l’huile est stockée dans des organites, appelés oléosomes.
La composition de l’huile de la pulpe et des graines est très dif-
férente. L’huile de la pulpe est plus riche en acide oléique, celle de
l’embryon contient plus d’acides linoléique et linolénique.

147

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Croissance ou fructification :
un véritable casse-tête
Le cycle de développement de l’olivier, bisannuel, se compose d’une
séquence végétative et d’une séquence fructifère se succédant dans
le temps, mais toutes les deux sont présentes sur le même arbre.
Au cours d’une année N, deux cycles biologiques consécutifs se
superposent :
– au printemps, la différenciation florale et la floraison du cycle N-1
ont lieu en même temps que la phase de croissance végétative du
cycle N ;
– au début de l’été, la nouaison et la croissance des jeunes fruits de
l’année N-1 se produit en même temps que l’induction florale du
cycle N ;
– à l’automne et en hiver, la fin de la croissance et de la maturation
des fruits du cycle N-1 a lieu en même temps que la deuxième vague
de croissance végétative et l’initiation florale du cycle N.
De ce fait, une compétition importante pour les éléments nutri-
tifs a lieu entre la fonction de croissance végétative et la fonction
de reproduction. Cela explique en grande partie les fluctuations
annuelles de production, avec une alternance de productions forte
et faible, régulièrement observée.

Cycle de développement sur


ANNEE N
deux années consécutives. Janv Fév Mars Avr Mai Juin Juill Août Sept Oct Nov Déc

Initiation florale Différentiation florale et Nouaison puis croissance


Cycle N-1 et vernalisation croissance des inflorescences
Floraison
des fruits
Maturation des fruits

Sclérification du noyau

Repos végétatif
Induction (croissance végétative
Cycle N Repos végétatif Croissance végétative de printemps
florale d'automne)
Initiation florale et vernalisation
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ANNEE N+1
Janv Fév Mars Avr Mai Juin Juill Août Sept Oct Nov Déc

Repos végétatif
Différentiation florale et Nouaison puis croissance
croissance des inflorescences
Floraison
des fruits
Maturation des fruits Cycle N
Initiation florale et vernalisation

Sclérification du noyau

Induction (croissance végétative Initiation florale


Repos végétatif Croissance végétative de printemps
florale d'automne) et vernalisation
Cycle N+1

148

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Des différences variétales importantes


Si ce schéma de croissance et de fructification est valable pour tous
les oliviers, il existe cependant de grandes différences d’expression
entre les variétés, et ce, dès le plus jeune âge des arbres. Ainsi, dans
des conditions similaires de culture, les variétés ont des degrés
différents de rapidité d’entrée en production et d’alternance de
production.

Différences de croissance et d’entrée en production


en fonction des variétés : Arbequina, Cornicabra,
Grossane, Lucques, Olivière et Picholine

L’Inra de Montpellier a effectué une recherche approfondie sur la


façon dont l’olivier s’édifie puis fructifie, lors des premières années
après la plantation, en prenant en compte la variabilité des culti-
vars. Les variétés Arbequina, Cornicabra, Grossane, Lucques, Olivière
et Picholine furent étudiées dans une parcelle expérimentale de 0,7
hectare plantée en mai 1997. Aucune taille n’a été pratiquée sur leur
frondaison pendant toute la durée de l’étude (1997-2005), ce qui
a permis de connaître le comportement naturel des variétés étu-
diées. Le diamètre à la base du tronc, le volume des arbres ainsi que
la production totale par arbre ont été mesurés chaque année et ont
révélé un comportement différent des variétés au niveau des uni-
tés de croissance de l’année et de l’arbre entier, lors de la période
improductive suivant la plantation, au moment de l’apparition des
premiers fruits et à l’âge adulte.
La croissance des jeunes arbres deux ans après plantation :
établissement de la charpente de l’arbre
Les jeunes arbres, au cours de leurs premières années de croissance,
mettent en place une architecture qui se différencie selon le rythme
de développement propre à chaque variété.
Ainsi, la croissance en longueur et la ramification au cours des pre-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

mières années après plantation sont très différentes d’une variété à


l’autre.
Olivière est la variété la plus vigoureuse avec une hauteur de plus
de 2 m, deux ans seulement après plantation alors que Grossane,
Cornicabra, Arbequina et Picholine mesurent environ 1,70 m et
Lucques, 1,30 m. ´ ¯¯

149

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le nombre de ramifications latérales apparaissant sur le tronc est


faible chez Grossane, moyen chez Cornicabra et élevé chez les quatre
autres variétés.
Ces premières pousses vont constituer le tronc puis les charpentières
sur lesquelles va venir se construire toute la frondaison de l’arbre.
La rapidité d’entrée en production trois ans après plantation
Après la mise en place de la charpente de l’arbre (le tronc et les char-
pentières), les premiers fruits apparaissent. Dans notre panel variétal
toutes les variétés, à l’exception de Lucques, ont commencé à pro-
duire des fruits à l’automne 1999 sur les rameaux ayant poussé en
1998, soit en fin de 3e année de croissance après plantation.
Le dispositif a permis d’observer la rapidité d’entrée en production
des unités de croissance annuelle ayant poussé en 1998 et fleuri en
1999, ainsi que leur capacité à former des rameaux latéraux qui por-
teront les fruits l’année suivante.
Arbequina se distingue par son importante floraison en 3e feuille
avec 26 inflorescences par unité de croissance et son taux de nouai-
son de près de 2 fruits par inflorescence fructifère. Pour les variétés
Cornicabra, Grossane et Picholine, on observe environ 10 inflores-
cences par unité de croissance et 1,3 fruit par inflorescence fructifère.
Olivière, avec une faible floraison, présente le taux de fructification le
plus élevé, avec 2,7 fruits par inflorescence fructifère. Lucques a une
floraison très faible.
Pour ce qui est de la capacité des variétés à former des rameaux laté-
raux qui porteront les fruits l’année suivante, Picholine et Grossane
se démarquent avec 3,5 et 2,5 rameaux latéraux contre 1,5 pour
Arbequina et des productions végétatives latérales quasiment nulles
pour Cornicabra, Lucques et Olivière, ce qui est complètement diffé-
rent de ce que l’on avait pu observer sur le tronc en deuxième année
de croissance (nombre de ramifications latérales apparaissant sur le
tronc faible chez Grossane, moyen chez Cornicabra et élevé chez les
quatre autres variétés). Il semble donc que l’arrivée de la fructification
entraîne de profondes modifications dans la capacité des rameaux à
produire des ramifications latérales.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Ces observations permettent d’établir une première typologie fon-


dée sur des critères végétatifs et fructifères de la ramification.
La rapidité de mise à fruits de l’arbre entier
La tendance observée au niveau des unités de croissance annuelle
peut pratiquement être globalisée et les variétés sont classées selon
leur rapidité de mise à fruits à l’échelle de l’arbre :
¯¯ ´

150

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

Rapide, en 2e ou 3e année après plantation (Arbequina, Olivière et


Picholine) ; rapide à moyenne, en 3e ou 4e année après plantation
(Cornicabra et Grossane) ; tardive, en 5e année ou plus après planta-
tion (Lucques).
Le développement de l’arbre à l’âge adulte
Après l’apparition des premiers fruits, l’arbre continue à pousser, avec
des différences importantes entre les variétés. En développement
libre, c’est-à-dire en l’absence de taille, en huitième année après plan-
tation (2004), il a été possible de classer les variétés selon leur vigueur
générale appréhendée par le volume de la frondaison, la hauteur des
arbres et le diamètre à la base du tronc.
Les résultats sont les suivants :
- volume de frondaison : inférieur à 30 m3 (Arbequina) ; 30 à 50 m3
(Cornicabra et Grossane) ; 50 à 80 m3 (Lucques et Picholine) ; plus de
100 m3 (Olivière).
- hauteur des arbres : 3 m (Arbequina), 4 à 5 m (Cornicabra, Grossane,
Lucques et Picholine) et près de 6 m (Olivière).
On constate donc de grandes différences de développement des
arbres à l’âge adulte. Certains, comme Arbequina, restent « nains »
tandis que d’autres, tels Olivière, occupent, à l’âge adulte, un très
grand volume.
La régularité de production
Les arbres n’ayant reçu aucune taille de production, nous avons pu
observer la tendance naturelle à l’alternance de production bisan-
nuelle de chaque variété : forte pour les variétés Cornicabra, Picholine,
Lucques et Olivière ; faible pour Arbequina et Grossane.

Conséquences pour l’oléiculture


Sur la gamme variétale testée (Arbequina, Cornicabra, Grossane,
Lucques, Olivière et Picholine), la relation entre la vigueur des varié-
tés et la production est plutôt faible et négative. Ainsi, la variété la
moins vigoureuse, Arbequina, est en réalité la plus productive. Il
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

semblerait que dans le cas de cette variété la production précoce et


régulière de fruits entraîne une limitation du développement végéta-
tif de l’arbre, la croissance étant cependant suffisante chaque année
pour assurer la production de fruits l’année suivante.
Puisque la vigueur des arbres est différente selon les variétés, on
devrait réaliser des plantations avec des densités différentes. De plus,
puisque les modes de croissance et de ramification sont différents

151

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Typologie du rameau
d’un an d’arbres âgés
de 3 ans selon des critères
végétatif et fructifère.

Alternance de production
d’arbres en forme libre,
c'est à dire sans aucune taille.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

152

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
De l’édification de l’arbre à la production d’olives

selon les variétés, il faudrait adapter la stratégie de taille au type de


développement de chaque variété.
Au cours des dernières décennies le machinisme agricole a réa-
lisé d’importants progrès afin de réduire les coûts de la récolte et de
la taille. L’assistance à la récolte à l’aide de vibreurs de tronc ou de
branche a parfois évolué vers une récolte totalement mécanisée. Ces
machines à récolter sont utilisées dans de nouvelles plantations en
haie fruitière avec la variété Arbequina à axe central chez les catalans
et le monocone chez les Italiens, à raison de 1 000 à 1 250 arbres par
hectare. Cette haute densité réduit le choix variétal à quelques varié-
tés et la forme des arbres à l’axe central ou la palmette libre.
De nouvelles voies portent sur la recherche et l’étude de géno-
types de faible vigueur (variétés et/ou porte-greffes nanisants) pour
faciliter les travaux de taille et de récolte. Il faudra cependant mainte-
nir le haut niveau de qualité et la typicité des huiles et évaluer la résis-
tance aux maladies, à la verticilliose et à l’œil de paon (Cycloconium
Oleaginum ou Spilocea oleaginea).

Pour en savoir plus


Almeida F.J., 1940. Safra e contra-safra na oliveira. Bul. Minist. da Agr. Portugal 7.
Domergue M., Legave J.M., Calleja M., Moutier N., Brisson N., Seguin B., 2004.
Abricotier, pommier, olivier : réchauffement climatique et conséquences sur la floraison.
L’Arboriculture fruitière 578 : 27-33.
Hartmann HT., 1950. Olive flower bud formation. California, Agriculture, November, 4 p.
Lauri P.E., Moutier N., Garcia G., 2001. Edification architecturale de l’olivier :
conséquences pour la conduite des vergers. Olivæ 86 : 38-41.
Mezghani M.A., El Hadj S.B., Labidi F., Jabari A., 2008. Structure du bourgeon végétatif
et relation avec le résultat de la croissance chez l’olivier (Olea europaea L.) :
mise en évidence d’une préformation hivernale et estivale. Biotechnol. Agron. Soc.
Environ. 12 : 259-266.
Moutier N., Garcia G., Féral S., Salles J.C., 2001. La pollinisation de l’olivier : conditions à
respecter et choix des pollinisateurs. Le Nouvel Olivier 19 : 30-33.
Moutier N., Garcia G., Lauri P.E., 2004. Shoot architecture of the olive tree :
effect of cultivar on the number and distribution of vegetative and reproductive organs
on branches. Acta Horticulturae 636 : 689-694.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Moutier N., Terrien E., Pécout R., Hostalnou E., Margier J.F., 2006. Un groupe d’étude
des compatibilités polliniques entre variétés d’olivier. Le Nouvel Olivier 51 : 8-11.
Moutier N., 2008. Etude de la production de 12 variétés d’oliviers en développement
libre. Le Nouvel Olivier 63 : 20-24.
Ricard J.M., Moutier N., 2010. L’olivier en haie fruitière - des pistes pour maîtriser la
vigueur des arbres. Infos Ctifl 262 : 28-31.
Villemur, P., Musho, U. S., Delmas, J. M., Maamar, M., A. Ouksili, 1984.
Contribution à l’étude de la biologie florale de l’olivier (Olea europaea L.) :
stérilité mâle, flux pollinique et période effective de pollinisation. Fruits, 39 : 467-473.

153

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Un bio-agresseur de l’olivier : la mouche de l’olive

Un bio-agresseur de l’olivier :
la mouche de l’olive
Dominique Coutinot
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L ’olivier est soumis régulièrement à l’attaque de nombreux


organismes nuisibles, plus particulièrement de la part d’in-
sectes. Les principaux insectes bio-agresseurs de l’olivier sont le
psylle de l’olivier, la cochenille noire de l’olivier, la teigne de l’oli-
vier, et le plus problématique la mouche de l’olive. Les attaques de
ce diptère peuvent concerner jusqu’à 30 % de la production mon-
diale et 100 % pour certaines oliveraies, provoquant une altération
et dépréciation de la qualité de l’olive et de son huile. Les méthodes
de lutte contre la mouche de l’olive font appel à des produits conven-
tionnels autorisés sur les parties aériennes de l’olivier, des appâts, des
substances naturelles, des pièges, des substances appliquées comme
un microfilm de protection de l’olive, et des auxiliaires agents de la
lutte biologique.

Description, biologie, répartition


Voir page 219 La mouche de l’olive est de petite taille de quatre à six millimètres
de longueur, de couleur noire avec des taches blanches sur l’écusson
et le thorax, quelques variations de couleur marron orangé selon les
écorégions où elle est présente. Une tache de couleur noire est pré-
sente à l’extrémité des ailes, caractéristique des mouches des fruits.
Les adultes peuvent être présents toute l’année selon les condi-
tions climatiques. Après l’accouplement et une période de matura-
tion des œufs de six à dix jours, la femelle perfore l’olive et dépose ses
œufs dans « une chambre » dans les jeunes fruits sous la cuticule.
Chaque femelle peut déposer de 200 à 250 œufs durant son cycle
de vie. Après une incubation de trois à cinq jours et après éclosion,
les larves passent par trois stades larvaires dans la pulpe du fruit,
et effectuent une nymphose, sous forme de pupe dans le fruit ou
Photo page précédente :
Trou de sortie de Bactrocea
au sol selon les générations. Le cycle complet d’une génération est
olea (ou mouche de l’olive). en moyenne d’un mois. Selon le lieu et le climat, trois à cinq géné-
La mouche de l’olive pond rations peuvent se succéder sur une année aux dépens de l’olive.
de préférence ses œufs
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

sur les variétés précoces En Grèce, on observe trois à quatre générations, en Israël quatre
comme la Boube, variété des
Alpes de Haute-Provence,
générations avec un cycle de trente à quarante jours, en Sardaigne
utilisée pour placer des la mouche de l’olive est présente toute l’année, en France, on relève
pièges à mouches. Ici, est
visible le trou de sortie de
trois générations par an, et dans certaines régions du littoral italien
l’insecte, attestant qu’il a cinq générations. Les températures élevées de l’été peuvent avoir un
fini sa nymphose et n’est
plus à l’intérieur de l’olive.
impact favorable sur les larves de deuxième et troisième génération,
© Christian Pinatel en accélérant leur développement.

156

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Un bio-agresseur de l’olivier : la mouche de l’olive

Mouche de l’olive, Bactrocera oleae

La mouche de l’olive, Bactrocera oleae (Gmelin), appartient à l’ordre


des diptères et à la famille des Téphritides. Les mouches sont des
insectes de taille variable, avec une paire d’aile antérieure membra-
neuse et deux ailes postérieures réduites formant des balanciers, les
pièces buccales sont de type suceur (pour certaines espèces de type
suceur et piqueur). Elles s’alimentent sur des matières en décom-
position, du tissu végétal, de la pulpe de fruit, du nectar et du sang
humain ou animal. Un grand nombre d’espèces de mouche sont
nuisibles aux végétaux et plus particulièrement aux fruits.

Toutes les espèces dans le genre Olea sont concernées y compris


l’olivier sauvage (oléastre).
La mouche de l’olive est présente dans toutes les zones de
production :
– en Afrique : Afrique du Sud, Algérie, Égypte, Éthiopie, Îles
Canaries, Kenya, Lybie, Maroc, Soudan, Tunisie ;
– en Europe : Espagne, Croatie, France, Géorgie, Grèce, Portugal,
Suisse, et l’ensemble des îles méditerranéennes ;
– au Moyen-Orient : Israël, Jordanie, Liban, Palestine, Syrie,
Turquie ;
– en Asie : Inde, Pakistan
– et récemment introduite accidentel­lement en Amérique du Nord :
Californie.

Les méthodes de lutte contre la mouche


de l’olive
Les méthodes « classiques »
Sur les parties aériennes, les substances autorisées pour lutter
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

contre la mouche de l’olive sont la lambda-cyhalothrine, l’hydro-


lisat de protéines, le diméthoate, et la deltaméthrine et le thiaclo-
pride. Les doses et les conditions d’emploi des différents produits
phytopharmaceutiques autorisés sont accessibles dans le catalogue
des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages des matières
fertilisantes et des supports de culture homologués en France (voir
le site du ministère de l’Agriculture et de la Pêche).

157

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Vers une nouvelle philosophie phytosanitaire

Pour l’Union européenne la publication de la directive 2009/128/CE


du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant
un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des
pesticides compatible avec le développement durable est une révolu-
tion philosophique phytosanitaire à venir. L’objet de cette directive est
de réduire les risques et les effets des pesticides sur la santé humaine
et sur l’environnement et d'encourager le recours à la lutte intégrée
contre les ennemis des cultures et à des méthodes ou techniques de
substitution telles que les moyens non chimiques alternatifs aux pesti-
cides. Il est à noter que certains points de la directive mettent l’accent
sur la lutte intégrée contre les ennemis des cultures ; une formation
appropriée, y compris aux méthodes biologiques ; la préférence à
donner aux méthodes biologiques, physiques et aux autres méthodes
non chimiques durables par rapport aux méthodes chimiques, si elles
permettent un contrôle satisfaisant des ennemis des cultures. Tous les
États membres de l’Union européenne devront déposer leurs plans
d’action nationaux à la Commission et aux autres États membres au
plus tard le 14 décembre 2012. En France, le plan Ecophyto 2018 vise à
réduire de 50 % l’usage des pesticides dans les dix prochaines années
tout en maintenant un niveau élevé de la production agricole (quan-
tité et qualité), en réduisant la dépendance des exploitations agricoles
aux produits phytopharmaceutiques.

En appât, un produit est homologué en France pour lutter contre


la mouche de l’olive, constitué d’un attractif alimentaire et d’une
molécule d’origine naturelle issue d’une bactérie Saccharopolyspora
spinosa Mertz & Yao. Dans les oliveraies où la pression de popula-
tions de la mouche est faible, il doit être appliqué sur la face sud et sur
la partie supérieure des arbres, en début de saison après observations
des populations de la mouche, en quatre applications si nécessaire.
Des pièges alimentaires de type gobe-mouches avec une
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

solution de phosphate d’ammoniaque diluée dans de l’eau sont


utilisables.
Les pièges chromatiques sont constitués d’une simple plaque
de couleur jaune recouverte de glu.
Les pièges sexuels comprennent un piège à glu et une capsule
qui diffuse la phéromone sexuelle de la femelle ; ce type de piège
n’attire que les mâles.

158

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Un bio-agresseur de l’olivier : la mouche de l’olive

Un microfilm à base de kaolin, autorisé pour un usage sur


pêcher pour lutter contre les pucerons et sur poirier et cognassier
contre les psylles, est autorisé sur olivier depuis le mois de mai 2012.
Dans des tests, 85 à 90 % des vergers traités ne sont pas infectés, mais
l’inconvénient est la persistance d’un film blanc après le lavage et le
brossage des fruits.
La lutte biologique
En Europe, du début du siècle dernier à nos jours, de nombreuses
introductions du parasitoïde agent de lutte biologique Psyttalia (ex.
Opius) concolor Szépligeti (Hymenoptera : Braconidae) en pro-
venance d’Afrique du Nord et d’Afrique du Sud ont fait l’objet de
lâchers pour faire diminuer la pression exercée par les populations
de la mouche de l’olive. Sous l’impulsion de l’entomologiste italien
Filippo Silvestri, cette espèce a été introduite en grand nombre dans
les oliveraies italiennes à partir de 1917, plus de 60 millions de P. conco-
lor ont fait l’objet de lâchers dans le cadre d’un programme de lutte
biologique contre la mouche de l’olive en Sicile en 1968. En France,
les lâchers de la même espèce ont été effectués au début du siècle
dernier, puis dans les années 1960, P. concolor a été produit et lâché en
plus grand nombre. En Europe, les résultats sont jugés plus ou moins
satisfaisants selon les pays ou les zones géographiques des lâchers.
P. concolor est acclimaté dans certains cas, mais avec une action limi-
tée sur les populations de la mouche de l’olive.

La lutte biologique

La lutte biologique est définie comme l’« utilisation d’organismes


vivants ou de leurs produits pour empêcher ou réduire les pertes
ou dommages par des organismes nuisibles aux productions végé-
tales » par l’Organisation internationale de lutte biologique (OILB,
1971). Pratiquée à travers le monde, la lutte biologique est interna-
tionalement reconnue comme une méthode de lutte respectueuse
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

de l’environnement. Les agents de lutte biologique utilisés peuvent


être des insectes, des acariens et des nématodes (macro-organismes)
ou des bactéries, des champignons et des virus (micro-organismes).
Différentes stratégies de lutte biologique peuvent être envisagées
pour contrôler ou limiter les populations d’un organisme nuisible
(animal, végétal ou pathogène), exotique ou indigène. ´ ¯¯

159

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

C’est une lutte biologique classique qui a été mise place en Europe
pour lutter contre la mouche de l’olive avec l’importation et le lâcher
d’ennemis naturels exotiques en vue de leur acclimatation.
L’évaluation préalable des risques avant le lâcher d’agent de lutte
biologique doit permettre à toute autorité d’anticiper, de limiter, et
d’évaluer la pertinence de la méthode envisagée. En France, toute
personne qui, à des fins agricoles, piscicoles, forestières ou pour
des motifs d’intérêt général, se propose de procéder à l’introduc-
tion dans le milieu naturel d’animaux ou de végétaux appartenant
à des espèces figurant sur des listes établies (art. L411-3 du code
de l’environnement) doit disposer d’une autorisation délivrée sous
conditions (art. R. 411-31). En France, la Loi portant Engagement pour
l’environnement a été publiée en juillet 2010, l’entrée sur le terri-
toire et l’introduction dans l’environnement d’un macro-organisme
non indigène utile aux végétaux dans le cadre de la lutte biologique
sont soumis à une autorisation préalable (L-258 du code rural), le
décret n° ­2012-140 du 30 janvier 2012 fixe les conditions d’autorisa-
tion d’entrée sur le territoire et d’introduction dans l’environnement,
l’arrêté du 28 juin 2012 relatif aux demandes d’autorisation précise les
différents éléments qui doivent composer les dossiers de demande
d’autorisation d’entrée et/ou d’introduction. L’ensemble de ce nou-
veau dispositif est entré en vigueur au 1er juillet 2012.

Les souches d’une autre espèce d’agent de lutte biologique


Psyttalia lounsburyi Silvestri (Hymenoptera : Braconidae), originaire
d’Afrique du Sud, de Namibie et du Kenya, ont fait l’objet de nou-
velles études scientifiques depuis le début des années 2000 et de
lâchers de cette espèce en Californie et en France. Les résultats pré-
liminaires de ces nouveaux programmes de lutte biologique contre la
mouche de l’olive mettent en évidence une acclimatation de P. louns-
buryi en Californie.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

160

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Un bio-agresseur de l’olivier : la mouche de l’olive

Pour en savoir plus


Code de l’environnement. Partie législative. Livre quatrième. Titre Ier : Protection de la
Faune et de la Flore. www.legifrance.gouv.fr
Code rural et de la pêche maritime. Livre II. Titre V : La protection des végétaux,
Chapitre VIII. www.legifrance.gouv.fr
Groussier-Bout G., Thaon M., Auguste-Maros A., Treuvey N., Frank B., Gratraud C.,
Maignet P., Jones W., Bon M.C., Blanchet A., Ris N., Fauvergue X., Malausa J.-C., 2009.
Lutte biologique contre la mouche de l’olive. Introduction en France d’un nouvel auxi-
liaire, Psyttalia lounsburyi. Le Nouvel Olivier, 72 : 3-7.
IOBC, 2008. Internet Book of Biological Control. J.-C. van Lenteren (ed.). http://www.
iobc-global.org/publications_iobc_internet_book_of_biological_control.html
Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l’Aménage-
ment du territoire. Le plan Ecophyto 2018 : http://agriculture.gouv.fr/ecophyto-2018,510
Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l’Aménage-
ment du territoire. Le catalogue des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages
des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en France. http://e-phy.
agriculture.gouv.fr/
Silvestri F., 1918. The use of african insects against the olive fly. Boll. soc. nazionale olivicol-
tori, 12: 16-18.
Suty L., 2010. La lutte biologique. Vers de nouveaux équilibres écologiques. Collection
Sciences en partage. Coédition Quae-Educagri, 324 p.
Union Européenne, 2009. Directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil
du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une uti-
lisation des pesticides compatible avec le développement durable. http://europa.eu.int
White I.M., Elson-Harris M.M., 1994. Fruit flies of economic significance : their identification
and bionomics. CAB International, 601 p.

Oliveraie. Les Salces,


Saint-Privat (Hérault).
© Catherine Breton
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

161

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

Les maladies de l’olivier :


peu de traitements,
car peu de maladies ?
Bernard Poinso
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L ’olivier ne fait pas exception parmi les plantes cultivées et


possède son lot de maladies, dont quelques-unes lui sont spé-
cifiques. Les parasites, comme les déprédateurs évoqués dans le cha-
pitre sur la mouche de l’olive, sont une source de fluctuation des ren-
dements en quantité et en qualité. Or, la culture intensive moderne
vise à obtenir une production abondante et de bonne qualité qui soit
la plus régulière possible d’une année à l’autre.
Les fluctuations de rendement ont des origines multiples, étu-
diées en divers chapitres de cet ouvrage. Mais s’il est très difficile
d’atténuer les causes climatiques ou physiologiques, on peut, en
revanche, lutter efficacement contre les parasites, dans les limites
économiques propres à chaque exploitation arboricole.
On se préoccupera donc ici de l’impact actuel de la pathologie
sur la culture de l’olivier en essayant d’extrapoler à des conditions
de production intensive.

La course aux traitements


dans l’agriculture moderne
Le recours fréquent à des produits phytopharmaceutiques a deux
sources : l’intensification de la culture ou bien l’introduction de nou-
veaux parasites à l’occasion d’un essor des échanges entre régions
primitivement isolées les unes des autres.
Risques liés à l’intensification de la culture
L’intensification de la production fruitière, que l’on a promue depuis
les années 1960, a touché tous les aspects d’une culture : par exemple
pour le pommier, un mode de conduite en plantations plus denses
(avec la haie fruitière remplaçant les arbres de plein vent), une ferti-
lisation plus abondante, une irrigation systématique, et des variétés
plus productives. Cette révolution technique, qui a permis de rendre
les fruits accessibles à un maximum de consommateurs, a cependant
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

minimisé, à ses débuts, l’importance des parasites. Or, l’amélioration


de la production, par les changements de mode de conduite que l’on
vient de citer favorisait une végétation luxuriante générant un micro-
Photo page précédente :
Symptôme
climat favorable aux parasites. La valeur de la récolte augmentait,
de Spilocaea oleaginea ou mais les dégâts potentiels des parasites croissaient parallèlement. La
œil de paon
sur feuilles d’olivier.
lutte chimique est rapidement devenue économiquement justifiée et
© Frederic Suffert - Inra souvent indispensable.

164

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

Une des leçons à tirer de l’exemple du pommier est d’observer


une grande prudence dans l’intensification d’une culture.
L’olivier risque-t-il de se retrouver dans le cas du pommier ? Est-
il affecté par des maladies aussi graves que celles du pommier ? Les
projets d’intensification de la culture sont-ils poussés aussi loin ?
Risques d’introduction de nouveaux parasites
L’introduction récente d’un parasite puissant menaçant la survie
de l’arbre est a priori exclue mais la question reste posée pour des
parasites limitant la récolte. Autrement dit, le cortège parasitaire de
l’olivier a-t-il été modifié récemment ou ressemble-t-il, selon toute
vraisemblance, à ce qu’il était autrefois ?
Aujourd’hui, tous les efforts d’une protection raisonnée visent à
tenir compte de la biologie et de l’épidémiologie du parasite et, peut-
être plus encore, des progrès en matière de produits fongicides, pour
réduire le nombre de traitements au strict nécessaire dans le cadre
économique d’une exploitation.

Ancienneté des parasites de l’olivier


Pour avoir une description scientifique des maladies, il a fallu at-
tendre, pour la plupart d’entre elles, le développement de la myco-
logie au xixe siècle. Mais ce siècle a vu aussi de nombreux échanges
de parasites entre continents. La première description d’un orga-
nisme ne nous renseigne donc pas sur l’ancienneté de l’organisme
en question. Par exemple, en 1845, Castagne décrit sur olivier l’agent
de l’œil de paon. Bien entendu, la maladie existait avant sa descrip-
tion officielle et il est intéressant d’essayer de retrouver sa trace dans
la littérature ancienne. À la rubrique « Olivier » du dictionnaire
d’agriculture de l’abbé Rozier (1804) rien ou presque ne concerne
les maladies. La question des dégâts de froid est omniprésente et la
seule préoccupation de pathologie semble être la carie des troncs liée
à l’invasion de blessures de taille par des Polyporales. On comprend
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

d’ailleurs cette préoccupation de l’époque, car d’après les données


météorologiques (Météo-France) quatre des hivers parmi les plus
froids que la France ait connus en deux cent cinquante ans sont sur-
venus entre 1789 et 1799.
Pline l’Ancien au ier siècle de notre ère mentionne quelques affec-
tions de l’olivier. Cependant, il est difficile d’identifier les maladies
qu’il nomme : la « mousse rouge » est-elle la carie ? Le « clou » est-

165

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

il un carpophore d’Armillaria mellea ? Mais, on peut retenir comme


certaine l’existence de problèmes de pourridié à la plantation sur
défriche de chênes et ensuite, la présence très probable de l’œil de
paon à travers la description de défoliations tardives de printemps,
attribuées à une action différée du froid en zones humides.
Quels étaient les dégâts constatés à cette époque ? On trouve
chez Columelle, contemporain de Pline, que « L’olivier est, de tous
les arbres, celui qui occasionne le moins de dépense. Négligé durant
plusieurs années, il ne cesse pas, comme la vigne, de donner des
productions ; il continue de produire pendant ce temps même et,
si l’on recommence à le cultiver, une année suffit pour lui rendre sa
fertilité. »
De nos jours, le comportement de l’olivier est très similaire
à cette description. Le cortège parasitaire actuel de l’olivier a les
mêmes conséquences sur la culture qu’au début de notre ère. Nous
avons donc de bonnes raisons de penser qu’il est le même depuis au
moins deux mille ans et que l’olivier montre vis-à-vis de ses parasites
un degré de tolérance élevé et stable dans le temps.

Principales affections de l’olivier


Des représentants de toutes les catégories d’agents pathogènes, virus,
phytoplasmes, bactéries, champignons sont recensés chez l’olivier.
Infections latentes par des virus et sélection sanitaire
Quelques viroses sont très répandues. Les clones infectés ne pré-
sentent que rarement des symptômes (infections dites latentes) mais
la présence d’un virus peut avoir des répercussions sur la vigueur ou
la mise à fruit de l’arbre. La lutte contre ce type d’affections consiste
à éviter d’introduire les agents potentiellement pathogènes dans les
parcelles cultivées en fournissant aux producteurs des plants sains.
La sélection de clones pratiquée au sein de chaque variété d’olivier a
pour but de fournir aux oléiculteurs les meilleurs clones issus des va-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

riétés anciennes et fiables sur le plan sanitaire. L’obtention de clones


indemnes des infections latentes actuellement connues exige la mise
au point de tests de détection spécifiques fiables pour chaque agent
pathogène dont on souhaite l’élimination. De surcroît, en plus des
cinq virus considérés comme les plus fréquents en culture, le schéma
prévoit l’élimination d’organismes qui, à côté de nématodes et co-
chenilles, comptent Pseudomonas savastanoi et Verticillium dahliae.

166

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

Les clones considérés comme sains, sont multipliés à l’abri de


nouvelles contaminations pour aboutir à la certification sanitaire des
plants qui seront mis à la disposition des oléiculteurs. La multipli-
cation à l’abri des contaminations est une phase délicate de la sélec-
tion sanitaire et la mise au point de méthodes de micro-propagation
est efficace pour limiter le nombre d’étapes de multiplication avant
l’indispensable passage final en pépinière.
Maladies aux symptômes visibles au champ
Les maladies le plus communément rencontrées au champ sont
décrites ci-après : il s’agit d’une bactériose et de quelques mycoses.
On remarquera que seules deux affections sont justiciables de traite-
ments chimiques qui, pouvant être effectués avec des sels de cuivre,
ne sont pas incompatibles avec l’agriculture biologique. Pour toutes
ces maladies, une iconographie importante est disponible sur dif-
férents sites internet, entre autres celui de l’Inra : http://www.inra.
fr/hyp3/index.html ou celui de l’université de Davis (Californie) :
http://www.ipm.ucdavis.edu/PMG/crops-agriculture.html
Maladies traitées par prophylaxie
La carie du tronc contribue à l’image d’immortalité donnée par
ces vieux oliviers au tronc creux dont la couronne de feuillage n’est
plus alimentée que par un petit reste d’écorce vivante qui la relie aux
racines à travers une masse de tissus morts. Avec le temps, les parties
mortes, rougeâtres tant qu’elles sont encore fermes, se délitent en
un amadou très friable. L’olivier n’est pas réellement malade mais,
n’étant plus soutenu, s’effondre sur lui-même pour des raisons méca-
niques. La cause de cette affection réside dans la colonisation par des
Polyporales de zones mortes résultant de blessures importantes sur
le tronc ou les charpentières. Ce type de blessures est généralement
associé aux efforts de restauration des arbres après des dégâts de
froid. La carie pourrait devenir une rareté puisqu’il n’est plus néces-
saire, aujourd’hui, de conduire l’olivier en haute tige. Ce mode de
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

conduite était indispensable autrefois, car les vergers étant pâturés


en hiver, il fallait préserver feuilles et fruits de la dent des troupeaux.
Le pourridié-armillaire est causé par Armillaria mellea (Vahl. :
Fries) Quélet. Les chênes méditerranéens, Quercus pubescens et
Q. ilex, hébergent très souvent ce champignon sur leurs racines
et sont à l’origine de l’inoculum qui attaquera l’olivier planté sur
leurs défriches. C’est ce qui explique les observations de Pline et

167

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

­ olumelle sur l’incompatibilité entre chêne et olivier. Les jeunes


C
plantations peuvent être entièrement détruites en deux à trois ans.
Dans les olivettes en cours de réhabilitation après abandon pendant
plusieurs années et envahissement par la flore locale, en particulier
des chênes, on observe des symptômes de dépérissement, parfois
mortels, sur les vieux oliviers. Sur ces arbres âgés, sur les racines
et sur la base du tronc, sous l’écorce, le mycélium du champignon
apparaît sous forme de placages de couleur blanc-jaunâtre qui font
diagnostic. Le champignon fructifie rarement mais, lorsque c’est
le cas, ses fructifications, carpophores au chapeau couleur de miel,
apparaissent en touffes contre ou à quelque distance de l’arbre.
Les fumagines recouvrent les branches, rameaux et feuilles de
l’olivier d’une couche noire. Il s’agit d’un ensemble de champignons
microscopiques qui poussent en saprophytes sur le miellat de coche-
nilles. Plusieurs organismes contribuent à former cette couche noire.
Le genre Fumago, qui a donné son nom au symptôme, est rarement
présent. On trouve essentiellement Alternaria, Stemphylium, Cla-
dosporium… La défoliation généralement importante associée à la
couche noire de fumagines est l’œuvre exclusive des cochenilles. Ce
sont ces dernières qu’il convient de combattre.
Voir page 219 La verticilliose est due à Verticillium dahliae. La maladie est très
répandue dans les vergers modernes en particulier sur les jeunes
arbres placés dans les meilleures conditions possibles de croissance
et qui, en conséquence, étendent rapidement leur système racinaire.
Elle se manifeste généralement au printemps et se traduit par des
dessèchements brusques de rameaux entiers, quelquefois par la mort
de jeunes oliviers. Le symptôme s’explique par l’envahissement des
faisceaux vasculaires par V. dahliae suite à l’infection de racines par
un inoculum constitué de microsclérotes conservés dans le sol et
qui germent lorsque les racines de l’arbre arrivent à leur voisinage.
À la coupe transversale de la tige, on observe un brunissement au
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

niveau des faisceaux vasculaires. Les cultures précédentes, surtout


les cultures maraîchères, ou des mauvaises herbes sont à l’origine de
cet inoculum car le parasite n’est pas spécifique de l’olivier. Comme
pour la plupart des maladies conservées dans le sol, les moyens de
lutte sont limités. Des différences de sensibilité sont signalées entre
variétés d’olivier mais n’ont pas encore été exploitées. Les mono-
cotylédones n’hébergent pas V. dahliae, ce qui, théoriquement du

168

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

moins, pourrait être mis à profit, lorsque la situation s’y prête, dans
la préparation d’une parcelle avant plantation.
Maladies justiciables d’une lutte chimique
La lutte chimique n’est autorisée que contre deux maladies de l’oli-
vier : une bactériose, la tuberculose, et une mycose, l’œil de paon.
Autorisation de lutte signifie que des produits sont officiellement
homologués pour l’olivier vis-à-vis de ces maladies.
Tuberculose de l’olivier (en anglais, Olive knot ; en italien,
Rogna, Tubercolosi) est une bactériose due à Pseudomonas savastanoi
pv. savastanoi. Elle est assez rare dans le verger français.
Son diagnostic au champ est simple car l’infection se traduit par
des tubercules, c’est-à-dire des tumeurs plus ou moins globulaires,
de taille généralement comprise entre un et cinq centimètres de dia-
mètre en corrélation avec la taille de l’organe atteint (tronc, branche,
brindille ou feuille). Les arbres attaqués ne meurent pas mais sont
affaiblis par la maladie. L’agent pathogène est présent au niveau
des tumeurs et chaque épisode pluvieux est pour lui une occasion
de dissémination. L’infection par la bactérie demande une porte
d’entrée qui lui est offerte par les multiples blessures que reçoit un
olivier, d’abord lors de la taille et de l’élagage des rejets des troncs
et branches, puis lors de la cueillette où les cassures de feuilles et
rameaux sont nombreuses.
On ne connaît pas de variétés résistantes à la tuberculose et la
lutte va consister, d’une part, en l’application de mesures prophy-
lactiques visant principalement à aérer le feuillage et, d’autre part,
en une protection chimique par traitements avec des bouillies à base
de cuivre. Il est généralement conseillé de traiter tout de suite après
les deux opérations à l’origine de blessures : la récolte et la taille,
soit un traitement d’automne et un de printemps. Notons que des
mesures prophylactiques doivent être impérativement observées
aux abords d’un arbre infecté qui devra être taillé après les autres et
immédiatement traité aux sels de cuivre. Les outils de taille sont à
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

désinfecter à l’eau de Javel.


Maladie de l’œil de paon ou tavelure de l’olivier (en anglais, Voir page 219
Olive scab, Peacock spot. ; en espagnol, Repilo del olivo ; en italien,
Occhio di pavone, Vaiolo)
La maladie est répandue sur toute l’aire de culture de l’olivier. Elle
est causée par Spilocaea oleaginea (Cast.) Hughes, décrit sous le nom
de Cycloconium oleaginum par Castagne, en 1845, sur feuilles d’olivier

169

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

récoltées dans la région de Mar-


seille. Sa position sysytématique
est : Venturiaceae, Pleosporales,
Pleosporomycetidae, Dothideo-
mycetes, Ascomycota, Fungi.
Les membres des Venturiaceae
sont agents de tavelures. Le nom
de genre Spilocaea indique que
l’on est en présence de la forme
conidienne, ou asexuée, d’un As-
comycète appartenant aux Ven-
turiaceae, famille qui regroupe
les agents de tavelures. On ne
connaît pas la forme sexuée du
champignon.
Verger d’oliviers Symptômes. La maladie est visible sur les deux faces des feuilles,
Luques en terrasses.
Saint-Jean-de-la-Blaquière, les pédoncules de fruits et, rarement, les fruits eux-mêmes. Elle se
Hérault. caractérise sur les feuilles par des taches circulaires, parfois entourées
© Catherine Breton
d’un halo jaune, mesurant entre 2,5 et 12 millimètres. Avec le temps,
les taches montrent des stries concentriques qui leur donnent l’appa-
rence d’ocelles, ce qui a donné son nom à la maladie. Ce symptôme
remarquable est le résultat de la progression centrifuge du parasite à
partir du point d’infection entre la cuticule et l’épiderme de la feuille.
Plus tard, le mycélium s’enfonce dans le parenchyme. En début de
symptôme, lorsque l’on aperçoit une tache noire circulaire, c’est le
champignon lui-même, plaqué sur les cellules épidermiques, qui est
visible à travers la cuticule de la plante. Les ocelles sont le résultat
d’alternances de périodes de croissance du mycélium. Les feuilles
atteintes jaunissent et finissent par tomber. De fortes attaques, lors
d’une année à périodes prolongées de pluies, se traduisent par une
impressionnante chute groupée des feuilles qui se solde par une
dénudation presque complète des rameaux. Ces défoliations sont
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

observables aussi bien en fin d’automne qu’au printemps.


Dégâts. Les pertes dues à la maladie ont longtemps été minimi-
sées, sans doute par la difficulté que représente un chiffrage précis,
car elles sont essentiellement indirectes en conséquence de la chute
de feuilles et souvent confondues avec des dégâts d’origine clima-
tique. Les défoliations importantes diminuent visiblement la florai-
son et la mise à fruit. Elles provoqueraient également, d’après des

170

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

observations faites en Italie, un retard de maturation et une baisse


du rendement en huile.
Biologie et épidémiologie du parasite. La conservation du para-
site ne peut s’envisager que dans la culture elle-même, sur feuilles
vivantes ou mortes. En effet, la spécificité de S. oleaginea à l’olivier est
maintenant admise. Le problème de la conservation du champignon
ne se pose que pour la saison chaude. Le parasite arrête toute activité
à partir de 25 °C, donc sur toute la période estivale. Sa présence pré-
férentielle sur la partie basse de l’arbre laisse supposer que les fortes
chaleurs exercent un effet de thermothérapie. En période hivernale,
sur une plante à feuillage persistant, le froid ralentit l’activité mais ne
constitue pas une menace pour la survie de S. oleaginea.
Cycle élémentaire de l’agent pathogène. En absence de forme
sexuée, le cycle du parasite est facile à décrire : le mycélium placé
sous la cuticule déchire cette dernière en produisant des spores
asexuées ou conidies qui, à l’occasion des pluies, sont dispersées
sous l’impact des gouttes ou par le ruissellement de feuille à feuille.
Les conidies germent en produisant un filament germinatif qui perce
la cuticule et infecte l’hôte. La production de conidies est maximale
à 15 °C pour une humidité relative saturante (100 %) tandis que ger-
mination et infection sont possibles pour une durée d’humectation
du feuillage de 12 à 24 heures à des températures comprises entre 5
et 25 °C. Après infection, un mycélium se développe entre cuticule et
épiderme. L’optimum de température pour la croissance mycélienne
se situe entre 16 et 21 °C. L’infection est suivie d’une période de la-
tence dont la durée, fonction de la température, est d’environ deux
semaines à l’optimum de température. Les conidies, formées sur des
conidiophores très courts, sont émises en force par déchirure de la
cuticule. Un nouveau cycle commence alors. La période de latence
est une donnée importante en épidémiologie car elle représente la
durée minimale du cycle de reproduction, c’est-à-dire une généra-
tion du parasite : de la conidie initiale en germination à la première
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

conidie-fille formée.
L’activité du champignon est très ralentie en-dessous de 5 °C
et complètement arrêtée au-dessus de 25 °C. L’épidémie concerne
donc le printemps, l’automne et une partie de l’hiver en zone médi-
terranéenne. La gravité de la maladie dépend du nombre de cycles
de reproduction du champignon. Celui-ci dépend, à son tour, des
conditions climatiques de l’année dans une zone géographique

171

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

donnée. Il est bien évident que ce sont les zones de culture les plus
humides et les plus fraîches qui seront les premières concernées par
l’œil de paon.
Résistance variétale au parasite. Les variétés d’olivier présentent
entre elles de fortes différences de sensibilité à S. oleaginea, comme
le montrent les observations de fortes attaques défoliantes sur une
collection de variétés de l’Inra rassemblée sur le domaine expéri-
mental annexé à sa station de Montpellier. Chaque variété diffère
de sa voisine par la visibilité, le nombre et l’extension des taches,
la répartition des jaunissements, l’intensité de la défoliation. Cette
variabilité renforce l’hypothèse d’une longue coévolution de l’hôte
et de son parasite et indique qu’une sélection de l’olivier pour la
résistance à S. oleaginea est du domaine du possible.
Lutte contre l’œil de paon. L’inoculum initial est considéré
comme provenant du verger lui-même. Dans des parcelles nouvel-
lement plantées, la maladie met généralement plusieurs années avant
de devenir suffisamment importante pour être facilement visible. Or,
les épidémies notables ne concernent que des parcelles où le para-
site est bien installé. Lors d’épidémies importantes sur une même
variété, le niveau d’attaque est souvent très différent d’un arbre à
l’autre, ce qui montre que les transmissions latérales sont faibles.
Retarder l’invasion d’une parcelle est donc possible par prophylaxie
au moment de la taille et, indirectement, par les traitements phyto-
sanitaires effectués en cours de cycle de culture. Schématiquement
et dans des proportions variant selon les différentes zones géogra-
phiques méditerranéennes, l’épidémie présente deux pics d’activité,
en fonction des températures et de la pluviométrie : l’automne qui
coïncide avec la présence des fruits et le printemps qui coïncide
avec la croissance de l’arbre. Elle est ralentie aux moments les plus
froids de l’hiver et subit une coupure, sans doute une régression,
avec les chaleurs de l’été. Sur un plan épidémiologique, une lutte
intelligente est à mener essentiellement au printemps, en protégeant
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

contre les infections les organes nouvellement formés. Si cette lutte


est suffisamment efficace, grâce à des traitements effectués au bon
moment avec des produits fongicides au mode d’action adapté, on
peut espérer ne pas avoir à intervenir en début d’automne. En au-
tomne, on remarquera que, d’une part, la croissance de la plante est
nulle à cette saison-là et que, d’autre part, le parasite recommence à
sporuler à partir de vieilles taches formées au printemps. Il faut aussi

172

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

Mode d’action des trois types de fongicides

Fongicides de contact. Pour les produits homologués sur olivier, ce


sont les sels de cuivre et les dithiocarbamates dont le mancozèbe est
un représentant. Ces produits restent donc à l’extérieur de la plante
sans pénétrer les organes traités. Leur action sur les infections est uni-
quement préventive.
Fongicides pénétrants. Leur substance active est capable de péné-
trer dans la plante et de diffuser à travers plusieurs couches cellulaires
d’un même organe. Ces substances se fixent donc aux organes trai-
tés et ne sont que peu ou pas soumises au lessivage par les pluies. Le
krésoxim-méthyl est à compter parmi ces produits car, selon l’obten-
teur (BASF) il est fortement adsorbé au niveau de la cuticule et diffuse
ensuite par voie translaminaire.
Fongicides systémiques. Après absorption par la plante, ils suivent les
courants de sève brute (le plus fréquent), ou de sève élaborée, ou les
deux. Aucun de ces produits n’est actuellement homologué sur olivier
en France. Pour agir postérieurement à l’infection, sur un parasite déjà
installé dans les tissus d’une plante, il faut atteindre l’agent pathogène
là où il se trouve. C’est ce que permet un produit systémique.

garder à l’esprit que la présence de fruits proches de la maturité est


susceptible d’interdire tout traitement en automne. On doit donc
centrer la lutte sur la diminution de l’inoculum initial et l’inhibition
des infections sur les pousses formées au printemps.
Fongicides homologués sur l’olivier
L’œil de paon est la seule mycose de l’olivier pour laquelle des fongi-
cides sont homologués, ce qui est une façon de reconnaître la néces-
sité, dans certaines situations, de combattre cette maladie.
Les trois matières actives fongicides entrant dans la composi-
tion des spécialités commerciales homologuées en France sont les
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

sels de cuivre, le mancozèbe et, depuis déjà quelques années, le kré-


soxim-méthyl. Seuls les sels de cuivre sont utilisables en agriculture
biologique pour lutter contre l’œil de paon. Ils présentent quelques
caractéristiques originales (voir « Emploi du cuivre en protection
des cultures »). Des informations complètes sur les pesticides s’ob-
tiennent dans « l’Index phytosanitaire » édité chaque année par
l’ACTA (Association de coordination technique agricole) ou sur le

173

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

site officiel du ministère de l’Agriculture : http://e-phy.agriculture.


gouv.fr/.
Le petit nombre de matières actives s’explique sans doute très
prosaïquement par des considérations commerciales. L’homologa-
tion est une démarche très coûteuse qui doit se justifier par l’exis-
tence d’un marché suffisamment important. En outre, au-delà des
considérations économiques, on discerne désormais des préoc­
cupations concernant l’environnement et la santé. La plus grande
prudence est de mise pour l’homologation de fongicides organiques
de synthèse destinés à être pulvérisés sur une culture oléagineuse
dont la récolte est souvent tardive.

Emploi du cuivre en protection des cultures

Précautions
L’accumulation du cuivre dans les sols est un fait dûment constaté. De-
puis le 1er janvier 2006, les apports annuels de cuivre sont limités à 6 kg
par hectare de culture pérenne. Il faut tenir compte de cette contrainte
pour la protection de l’olivier.
Le cuivre agit sous la forme de son ion cuivrique Cu++. Il n’est donc actif
qu’en solution, il sera efficace pour inhiber la germination de conidies
de S. oleaginea germant dans l’eau liquide lorsque le végétal est hu-
mecté par la pluie.
Le cuivre agit uniquement par inhibition de la germination des spores
de champignons. Son action sur les filaments germinatifs ou les mycé-
liums est faible à nulle.
Mise en pratique
La décision de traiter est sous la responsabilité exclusive de l’oléiculteur.
Cependant, la gravité de l’épidémie de l’année en cours ne peut vrai-
ment être estimée que par comparaison, d’une part, avec les observa-
tions des années précédentes et, d’autre part, avec des observations
contemporaines de parcelles de zones géographiques régionales dif-
férentes. Cette information est fournie à partir de données météorolo-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

giques et phytosanitaires régionales modélisées, par les bulletins tech-


niques émis par la Fredon (Fédération régionale de défense contre les
organismes nuisibles), syndicat professionnel agricole agréé par le mi-
nistère de l’Agriculture. À partir de ces données globales et en fonction
d’un seuil de maladie observable préalablement fixé, l’oléiculteur est à
même de prendre sa décision de traiter ou non contre l’œil de paon.

174

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les maladies de l’olivier

L’action du cuivre et du mancozèbe est uniquement préventive


par inhibition de la germination des spores des champignons. Ce
type d’action ne peut que freiner une épidémie mais cela semble
suffisant en période automnale et hivernale.
Le krésoxim-méthyl, fongicide plus récent du groupe des stro-
bilurines, est doté d’une action préventive et aussi d’une action
curative. Par action curative, on entend que le produit est capable
d’éliminer un parasite qui a pu germer, percer la cuticule de son hôte
et entamer plus ou moins largement la période de latence. Théori-
quement, avec un produit à action curative, on peut espérer arrêter
une épidémie, du moins à ses débuts. Pour les raisons données ci-
dessus, il serait logique de réserver l’utilisation du krésoxim-méthyl
à la période printanière et d'éviter son emploi en automne.

Conclusion sur les maladies


Les traitements ne sont pas systématiques sur l’olivier. L’œil de paon
lui-même n’est pas toujours traité et l’on constate que le seuil de
déclenchement des traitements adopté par la Fredon-Corse est fixé
à 10 % de feuilles portant des taches de tavelure. Le fait de pouvoir
fixer un seuil est déjà rare en pathologie végétale, à cause du déve-
loppement explosif des mycoses, mais le niveau de ce seuil est parti-
culièrement élevé. On peut donc envisager assez sereinement, pour
les variétés dont on dispose actuellement, une intensification de la
culture sans recours exagéré aux produits phytosanitaires. Les sels de
cuivre ayant une certaine efficacité, il n’y a pas d’obstacle, sur le plan
pathologique du moins, à la culture biologique de l’olivier.

Pour en savoir plus


Acta, 2009. Index phytosanitaire 2010. Association de Coordination Technique Agricole
(ACTA), Paris. 752 p.
Afidol, 2008. La réduction des doses de cuivre : une nécessité pour l’oléiculture de
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

demain. Infolea, 2020, n° 2.


BASF, 2010. ®Krésoxim-méthyl, fiche technique.
http://gpd.basf-agro.fr/fiches/technique/stroby_df.pdf
CABI, 2010. Index fungorum. http://www.indexfungorum.org/Names/Names.asp
Castagne L., 1845. Catalogue des plantes qui croissent naturellement aux environs
de Marseille. Nicot et Pardigon, Aix-en-Provence, 263 p.
Columelle (AD4-ca. AD70). De Re Rustica. Tome premier. Livre v, viii-ix.
Trad. nouvelle par M. Louis Du Bois. C. L. F. Panckoucke, 1844. Bibliothèque latine-
française. http://remacle.org/bloodwolf/erudits/columelle/livre5.htm

175

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Faggioli F., Ferretti L., Albanese G., Sciarroni R., Pasquini G., Lumia V., Barba M., 2005.
Distribution of olive tree viruses in Italy as revealed by one-step RT-PCR.
Journal of Plant Pathology, 87: 45–51.
Ferguson L., Vossen P.M., 2008. Olive Armillaria Root Rot (Oak Root Fungus).
UC ANR Publication 3452 http://www.ipm.ucdavis.edu/PMG/r583100211.html
Ferguson L., Vossen P.M., 2009a. Olive Verticillium Wilt. UC ANR Publication 3452
http://www.ipm.ucdavis.edu/PMG/r583100111.html
Ferguson L., Vossen P. M., 2009b. Olive Peacock Spot. UC ANR Publication 3452
http://www.ipm.ucdavis.edu/PMG/r583100311.html
Fredon-Corse, 2010. Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles.
http://www.fredon-corse.com/maladies/maladie-oeil-de-paon.html
Graniti A., 1993 Olive scab: a review. EPPO Bulletin, 23: 377-384.
Laviola C., 1968. Aspetti biologici ed epifitologi di Spilocaea oleagina (cast.)
Hugh. in Italia. Annali della Facolta di Agraria dell’Universita di Bari 22 : 345-360
Martelli G.P., 1999. Infectious diseases and certification of olive: an overview.
Bulletin OEPP/EPPO Bulletin, 29 : 127–133.
Météo-France, 2008. Températures sur Paris par hiver le plus froid.
http://www.alertes-meteo.com/vague_de_froid/paris_250ans.htm
Miller H.N., 1949. Development of the leaf spot fungus in the olive leaf.
Phytopathology, 39: 403-410.
Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité
et de l’Aménagement du territoire. Le catalogue des produits phytopharmaceutiques
et de leurs usages des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en
France. http://e-phy.agriculture.gouv.fr/
Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité
et de l’Aménagement du territoire. Le plan Ecophyto 2018 :
http://agriculture.gouv.fr/ecophyto-2018,510
Obanor F.O., Walter M., Jones E.E., Jaspers M.V., 2008. Effect of temperature, relative
humidity, leaf wetness and leaf age on Spilocaea oleaginea conidium germination on olive
leaves. Eur. J. Plant Pathol., 120: 211-222.
OEPP/EPPO, 2001. Norme OEPP PM 4/7 (2). Schéma pour la production de végétaux
sains destinés à la plantation. Exigences pour les établissements de certification.
Bulletin OEPP/EPPO Bulletin, 31 : 441–444.
Petri L., 1934. Le malattie dell’olivo. Manuale pratico. Federazione Nazionale dei Consorzi
per l’Olivicoltura. Roma. Biblioteca dell’olivicoltore. Nuova serie n° 1, 27 p.
Pline l’Ancien (AD23-AD79). Histoire naturelle, livre XVII. Paris, Dubochet, 1848-1850.
Édition d’Émile Littré. http://remacle.org/bloodwolf/erudits/plineancien/livre17.htm
Texte latin original :
http://penelope.uchicago.edu/Thayer/L/Roman/Texts/Pliny_the_Elder/17*.html
Rozier (Abbé), 1804. Dictionnaire d’agriculture et d’économie rurale. Rubrique Olivier.
Tome second. À Nismes, chez Gaude, imprimeur-libraire. An xii.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Vossen P.M., 2006. Foliar Diseases on Olive Trees. First Press, University of California
Cooperative Extension Sonoma County, 1(2) 1.
Wilson E.E., Miller H.N., 1949. Olive leaf spot and its control with fungicides.
Hilgardia, 19: 1-24.

176

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Économie : la production de l’olivier en Méditerranée et dans le monde

Économie :
la production de l’olivier en
Méditerranée
et dans le monde
Christian Argenson
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L ’olivier cultivé, originaire de tout le Bassin méditerranéen,


longtemps considéré comme l’arbre de la Méditerranée dans
laquelle il a imprégné une civilisation au cours des siècles, a étendu
sa conquête un peu partout dans le monde.

Répartition des surfaces


L’olivier est aujourd’hui présent sur les cinq continents et occupe
une superficie estimée aujourd’hui à 11 millions d’hectares selon des
données établies par le Conseil oléicole international. L’olivier est
une espèce spécifiquement cultivée en sec, sur plus des trois quarts
des vergers d’oliviers, compte tenu des climats au sein desquels elle
est cultivée. La culture en sec conduit depuis longtemps les produc-
teurs à adapter la densité de plantation de leur oliveraie au climat
local. Ainsi, pour des hauteurs de pluies annuelles comprises entre
Photo page précédente : 140 et 300 millimètres, la densité ne dépasse pas 60 oliviers par hec-
Récolte d’olives Tanche.
© Office du tourisme
tare, alors que pour des plantations conduites en haie fruitière avec
du pays de Nyons irrigation, la densité de plantation atteint 1 200 arbres par hectare.

Répartition des superficies globales dans le monde. (Source : COI, 2010)

Surface en x1000 ha %
Superficie en production 9 175 87

Superficie non productive 1 321 13

Cultures irriguées 2 266 22

Cultures en sec 8 229 78

Répartition des surfaces


en olivier par pays et par
continent en 2010-2011.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

178

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Économie : la production de l’olivier en Méditerranée et dans le monde

L’olivier est une espèce qui fait aujourd’hui l’objet de pro-


grammes de plantations, ayant plusieurs objectifs :
– la stabilisation des sols soumis à l’érosion, par exemple en zones
de montagne en Haute-Provence et en Espagne ;
– l’exportation des produits oléicoles, donc l’apport de devises. La
Tunisie est l’exemple même de cette ambition ;
– l’installation en milieu rural, notamment en Provence ou dans le
Lubéron, de populations attirées par une vie a priori confortable ;
– la fourniture de produits issus de l’oléiculture pour répondre aux
besoins des marchés, tous les pays méditerranéens plantent encore
des oliviers.
La production d’huile d’olive est le premier débouché de cette
culture, elle représente 15 à 17 millions de tonnes d’olives cueillies
par an dans le monde. La production d’olives de table et d’autres
produits dérivés représente 2 millions de tonnes.

Production d’huile d’olive


Globalement, production et consommation s’harmonisent au ni-
veau mondial, autour de 2,8 millions de tonnes. Une augmentation
de la consommation est surtout remarquée au sein des pays non
producteurs nouveaux consommateurs, tels que la Russie, l’Inde et
dans une moindre mesure, la Chine. Aux États-Unis, la consomma-
tion annuelle d’huile d’olive est passée en vingt ans de 15 000 à plus
de 250 000 tonnes en 2012.
Évolution de la production
mondiale d’huile d’olive
depuis cinquante ans.
La production mondiale
a triplé au cours des cinquante
dernières années passant
de 1 à 3 millions de tonnes
d’huile d’olive.
Cette augmentation est liée
certes à une augmentation
des superficies mais également
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à une meilleure technicité


dans la culture des oliviers.

179

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Ci-dessus :
Floraison d’un olivier.
© Catherine breton
En haut à droite :
Évolution de la production
en Europe.

Ci-contre :
Répartition
de la production mondiale.
C’est en Europe, en Espagne en
particulier, que la production
d’huile d’olive a le plus évolué,
passant de 700 000 tonnes au
milieu des années 1980 à près de
1,4 million de tonnes aujourd’hui.

Production d’olives de table


Les olives de table ont deux vocations très distinctes. Dans les pays
producteurs où elles sont un aliment de base, elles contribuent à
l’équilibre alimentaire, par exemple en Égypte ; dans les pays expor-
tateurs, elles apportent des devises, comme au Maroc.
L’équilibre entre la production et la consommation des olives de
table ne soulève pas de difficulté majeure, néanmoins, elles souffrent
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

d’un manque de notoriété.

L’oléiculture européenne
L’oléiculture européenne contrôle l’essentiel du marché des huiles
d’olive avec un pays producteur devenu dominant, l’Espagne qui en
produit plus de 60 %. En deuxième place, l’Italie produit environ
20 % et la Grèce près de 15 %. En comparaison, les productions de la

180

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Économie : la production de l’olivier en Méditerranée et dans le monde

France, du Portugal, de Chypre sont très faibles, à moins de 1 %, pour


une production totale européenne en 2009-2010 de 224 600 tonnes.
En olives de table, la production européenne est aussi la plus
importante en Espagne (492 600 tonnes). L’Italie en produit environ
59 000 tonnes, alors que dans les autres pays du Bassin méditerra-
néen, la production est importante en Syrie (142 000 tonnes), au
Maroc (100 000 tonnes) et en Égypte (200 000 tonnes).

La situation oléicole en France


Le verger oléicole français a énormément fluctué au cours du temps.
Au xixe siècle, l’importation des huiles d’olive des colonies d’Afrique
du Nord a remis en cause l’économie des produits oléicoles de la
métropole, puis la concurrence des huiles d’arachide et de coprah
en provenance d’Afrique a sérieusement entamé la notoriété des
huiles d’olive. Enfin, les gelées très importantes de l’année 1930 et
surtout de 1956 ont presque totalement anéanti la production fran-
çaise d’huile d’olive. Depuis les années 1980, de nombreux plans de
relance et d’encouragements à la culture de l’olivier ont permis de
retrouver une production oléicole en France.
La production d’olives de table est assurée avec les variétés
Lucques, Picholine, Salonenque et Belgentieroise pour les olives
vertes ; Grossane, Tanche, Cailletier spécialement pour les olives
noires. En 2010, la France produit 2 000 tonnes d’olives de table pour
50 000 tonnes d’olives consommées.

Répartition régionale
et départementale
de la production
d’huile d’olive en France.
Sur les quelque 29 000
oléiculteurs français,
moins de 5 000 ont le statut
d’agriculteur. La transformation
et la production d’huiles d’olive
en France est très dispersée,
dans environ 243 ateliers
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

de production, dont 180 moulins


privés ; 49 coopératives oléicoles
et 50 Oliverons. La production
d’huile d’olive vierge en France
est en progression régulière,
mais son handicap réside
dans le prix de vente inhérent
à un prix de revient élevé.

181

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

La production d’huile d’olive est favorisée par la mise en valeur


de manière positive du régime méditerranéen, cette communica-
tion a relancé la consommation d’huile d’olive en France, deuxième
marché des huiles, le premier en valeur. Les Français consomment
actuellement un peu plus de 100 000 tonnes d’huile d’olive dont
plus de 95 % de qualité vierge extra. La production française est de
6 000 tonnes d’huile d’olive dont 2 000 sont autoconsommées.
Une politique française d’identification
des produits oléicoles
Les oléiculteurs s’intéressent de plus en plus à la culture de l’olivier
qui constitue, avec ses produits, une source de diversification appré-
ciée. Est-ce qu’il faut promouvoir de nouvelles plantations en haies
fruitières avec quelques variétés internationales ou bien maintenir
et développer le verger actuel ? C’est cette seconde orientation qui
a prévalu au sein de la profession pour bien respecter la biodiversité
et s’appuyer sur les notions de terroir.
Les ateliers de production sont également des vulgarisateurs de
l’image et de l’intérêt des différentes huiles d’olive du Midi de la
France dont la palette aromatique répond aux besoins d’une cuisine
méridionale de très bon goût.

Appellation Année
Huile d’olive Nyons 1994
Vallée des Baux-de-Provence 1997
Aix-en-Provence 1999
Haute-Provence 1999
Nice 2001
Nîmes 2005
Provence 2007
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Olives Olives noires de Nyons 1994


Olives cassées de la vallée des Baux-de-Provence 1997
Olives noires de la vallée des Baux-de-Provence 1997
Olives de Nice 2001
Olives de Nîmes 2005
Pâte d’olives Nice 2001

182

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Économie : la production de l’olivier en Méditerranée et dans le monde

Les 14 appellations (AOP) en France

À partir du début des années 1990, les revendications de terroir, de


tradition et de savoir-faire ont abouti à la revendication d’appella-
tion d’origine protégée prévue à l’origine pour les vins et spiritueux.
Depuis 1994, 14 appellations d’origine protégée (AOP) ont été accor-
dées reconnaissant l’oléiculture de huit territoires avec des notions
très spécifiques. La plupart sont déjà reconnues au niveau euro-
péen. Une demande d’appellation est en cours pour l’huile d’olive
en Roussillon et pour les olives vertes en Languedoc.
En 2011, les produits oléicoles en appellation d’origine en France
comprennent huit AOP huile d’olive, cinq AOP olives de table et une
AOP pâte d’olive.

Perspectives de l’oléiculture en France


L’oléiculture en France est rentable du fait d’une exploitation de
niches très étroites (régions touristiques, proximité des villes) se
démarquant des huiles étrangères, au prix plus faible. Cependant,
pour l’olive de table, la désamèrisation à la soude les empêche d’avoir
un label de « produit issu de l’agriculture biologique ». De plus, la
concurrence, avec le Maghreb notamment, asphyxie le marché de la
concurrence française par les olives d’importation de basse qualité
face aux appellations olives de Nyons ou Picholine de Nîmes, l’oléi-
culture française reste donc une activité économique mineure.
L’huile d’olive valorisée par les AOP est consommée par 1 à 2 ‰
de la population française, mais elle est concurrencée par les huiles
étrangères labellisées (DOP, IGP) d’excellente qualité. Les huiles de
graines, neutres (dépourvues de qualités organoleptiques), d’un prix
plus bas, conditionnent les consommateurs à des produits fades sans
aucune typicité, à l’opposé des huiles d’olive issues d’appellation.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les huiles d’olive sans appellation sont un peu plus largement


consommées par 1 à 2 % de la population mais, du fait de leur manque
de typicité, elles ne sont ni attrayantes ni valorisantes. Leurs prix sont
relativement élevés, car de bonne qualité chimique, et elles concur-
rencent les huiles AOP, bien qu’elles n’aient aucune typicité. Ces
huiles sont souvent à l’opposé des produits biologiques, notamment
celles issues de culture en haute densité de peuplement, ­poussée

183

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

avec l’arrosage, des engrais et des traitements chimiques, mais l’éti-


quette ne le précise pas. De plus, le bénéfice santé de la consomma-
tion d’huile d’olive vierge est subjectif face aux campagnes portant
sur la qualité des acides gras w3/w6 soutenues par les huiliers pour
l’huile de colza et parfois de tournesol.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

184

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ?

Quel est le rôle de l’olivier


dans l’urbanité ?
Lucette Laurens
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L ’olivier a depuis très longtemps rempli plusieurs rôles qui


n’étaient pas tous économiques. Cela transparaît dans la diver-
sité des termes utilisés, notamment olivier, oliveraie et olivette.
Historiquement, les données statistiques comptabilisaient des
arbres. Localement, on parle d’olivette en Languedoc, d’oullière
en Provence pour nommer des terres où sont associées plusieurs
cultures. La modernisation agricole associée à des événements éco-
nomiques et à des aléas climatiques a engendré le déclin de la culture
de l’olivier notamment en Languedoc. Le terme d’oliveraie est
employé depuis peu pour décrire les plantations actuelles qui struc-
Photo page précédente : turent de nouveaux paysages dans les régions méditerranéennes.
Olivier dans un L’olivier peut-il contribuer à l’émergence d’une identité des lieux
environnement urbain.
Gallargues, Hérault.
dans lesquels il est implanté ? En quoi sa présence explique-t-elle
© Catherine Breton l’intérêt porté à ces lieux ?

Le verger et la production oléicole française


À l’image des autres départements français, le verger héraultais a
connu un recul notoire au cours du xxe siècle, qui n’a fait que prolon-
ger la tendance observée depuis le milieu du xixe siècle. Il y avait un
Évolution des surfaces et million d’oliviers en 1939 dans le département de l’Hérault, 644 000
des productions des vergers avant le gel de 1956 et 246 000 en 2002. Le gel a accéléré la tendance
oléicoles en France
de 1989 à 2009. qui était au déclin de cette production. Jusqu’en 2006, la croissance
Source : Ministère du verger ne s’est pas traduite systématiquement par une augmenta-
de l’Agriculture
La production oléicole reste
tion de la production, mais depuis les années 2010 un saut quantitatif
confidentielle en France, a été repéré. En effet la production demeure fortement aléatoire et
elle ne représente que 0,2 %
de la production mondiale montre une très grande variabilité interannuelle.
d’huile d’olive. Cependant,
les statistiques du ministère
de l’Agriculture montrent
une progression au cours
des dernières années. Ces
données n’offrent qu’une vision
partielle de la réalité car elles
ne comptabilisent que les
exploitants agricoles déclarés,
soit une toute petite partie
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

des producteurs. Le verger


oléicole national est passé
de 15 000 hectares en 1989
à 19 000 hectares en 2009.
Cette progression résulte en
partie du soutien financier
apporté par l’État et l’Union
européenne, et de l’engouement
des propriétaires ou d’autres
personnes pour remettre en
état des oliviers et des oliveraies
abandonnés.

186

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ?

Répartition des surfaces


en oliviers dans les régions
Provence-Alpes-Côte d’Azur,
Languedoc-Roussillon,
Rhône-Alpes, Corse.
Source : ministère de
l’Agriculture.

Les exploitations agricoles ne regroupent qu’une partie du ver-


ger. En Languedoc-Roussillon, l’ensemble des exploitations agricoles
gère 2 598 hectares soit environ 77 % du verger régional, cette surface
est répartie entre 3 104 exploitations, la taille moyenne du verger est
très réduite, de moins d’un hectare. Si cette dispersion est extrême
en Languedoc-Roussillon, elle se retrouve partout en France. Pour
l’année 2000, 73 % des exploitations (soit 19 000) déclarant des oli-
viers en France disposaient d’une surface oléicole inférieure à un
hectare. De fait, l’oléiculture est une activité productive combinée à
d’autres au sein des exploitations. Sur ces 3 104 exploitations, un peu
plus d’un tiers sont des exploitations professionnelles, c’est-à-dire
suffisamment importantes pour assurer à l’agriculteur une activité
principale et subvenir aux besoins de sa famille, soit 44 %.
Dans le département du Gard, le verger est réparti entre 3 800
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

producteurs dont plus de la moitié ont entre 1 et 50 arbres et 2 % ont


plus de 500 arbres. Cet exemple nous montre que cette production
n’est assurée qu’à la marge par des agriculteurs, elle est souvent due à
des amateurs, des passionnés ayant des statuts divers. Cette diversité
sociale est une force car elle est le gage d’une moindre sensibilité
aux fluctuations du marché et aux variations climatiques, car peu de
familles dépendent des revenus oléicoles. C’est aussi un élément de

187

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

faiblesse car il paraît difficile de parvenir à une structuration de la


filière dans cette configuration sociale.

L’olivier dans l’histoire en Languedoc-Roussillon


Bien qu’il n’ait jamais été dominant, l’olivier a connu une mobilisa-
tion de l’État soit pour soutenir la production dans des périodes défi-
citaires, soit pour accompagner les producteurs lors d’épisodes gélifs
exceptionnels, notamment au xxe siècle et dans la première moitié
du xxe siècle. L’État s’est efforcé de dresser l’inventaire des pertes de
façon à soutenir financièrement les producteurs, ainsi nous dispo-
sons de statistiques originales reflétant la réalité du verger régional.

Histoire de l’olivier dans l’arrondissement de Montpellier

Une image réaliste du verger oléicole du département de l’Hérault et de


la région a été recréée à partir du dépouillement de données partielles.
Ainsi dans l’arrondissement de Montpellier en 1917, 5 470 propriétaires
d’oliviers avaient déclaré des arbres donnant droit à prime. Ils avaient
déclaré 300 758 arbres en oliveraies pleines et 95 124 arbres isolés ou
plantés en bordure. La superficie donnant droit à prime était de 7 409
hectares dont, d’après mes estimations, 1 074 hectares seraient des oli-
veraies pleines. L’importance de l’olivier mais aussi sa grande fragilité
expliquent la forte mobilisation du début du xxe siècle pour créer des
coopératives oléicoles et des moulins à huile, que l’on considère comme
nécessaires pour assurer le maintien de la production. Lors de la créa-
tion de la Société coopérative oléicole de Béziers entre 1912 et 1923, le
ministre de l’Agriculture, dans une lettre au préfet de l’Hérault en 1913,
pointait cette nécessité : « La culture de l’olivier dans le Languedoc tra-
verse actuellement une crise. L’huile d’olive étant très recherchée dans
cette région, il serait facile de remédier à cette situation s’il existait des
moulins à huile en nombre suffisant. Ceux-ci pourront d’ailleurs devenir
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

plus nombreux grâce à la création de coopératives » (Archives dépar-


tementales de l’Hérault, 7M135). Plusieurs coopératives verront le jour
dans les années 1920 (Aniane, Claret, Clermont-l’Hérault, Lodève, Saint-
Jean-de-la-Blaquière, vallée de l’Orb) et jusqu’aux années 1940 pour
Pignan. Seule la coopérative de Clermont-l’Hérault poursuivra ces acti-
vités après le gel de 1956.
¯¯ ´

188

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ?

Avant même 1956, le nombre de producteurs et d’arbres a commencé


à décliner. En 1938 dans l’Hérault, on recensait 7 684 producteurs et
566 999 oliviers déclarés et des chiffres équivalents en 1939 : 7 678
producteurs et 604 203 oliviers. À l’occasion de l’épisode gélif de 1956,
nous disposons de données statistiques intéressantes. En juillet 1956,
l’administration considérait que le verger du département comptait à
la veille du gel de février, 650 000 oliviers dont 450 000 en production.
Les dégâts sur les oliviers sont dits très graves puisque l'on a admis que
le gel avait affecté entre 40 et 80 % des arbres, et que 60 % des oli-
viers devront être recépés. Quelques courriers accessibles aux archives
départementales précisent la situation dans certaines communes : à
Montagnac, 20 % des oliviers sont à arracher, 75 % à régénérer et 5 %
pourront être récoltés ; à Cambon, les oliviers semblaient être détruits
à 100 % ; dans le canton d’Olonzac, 40 % seront à arracher ou à recéper
à la base, 60 % devront être régénérés par rabattement sur les char-
pentières et seul 1 % pourra être récolté.

Nous connaissons ainsi mieux l’ampleur de cette évolution cau-


sée par ce gel de l’année 1956, accentuée par un abandon déjà notoire Mazet et arbres de la
garrigue : amandier et olivier.
auparavant. L’olivier était étroitement inséré dans les pratiques © Catherine Breton
sociales et familiales de l’époque.
Par ailleurs, dans la littérature, dans des récits histo-
riques, dans des travaux de recherche locaux, l’olivier est
présent comme un arbre accompagnant certaines pra-
tiques sociales. Dans l’histoire récente, l’olivier est à la
fois un objet de travail et de loisir : si sa marque dans les
paysages est diffuse voire discrète, son inscription dans
la société est forte.
L’olivier est ainsi historiquement associé à des pra-
tiques sociales, comme auprès des mazets. Du fait de
son intégration dans l’entité mazet, l’olivier contribuait
à la structuration de cette urbanité que les mutations
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

récentes ont complètement transformée sans pour autant


la faire disparaître. Sans cela, on ne peut pas comprendre
l’engouement immobilier voire spéculatif actuel pour
ces parcelles ; ces tendances vont modifier radicalement
les pratiques sociales de ces espaces. Les éléments et les
objets qui les caractérisaient reculent, disparaissent, au
profit de l’urbanisation ou bien sont remobilisés avec

189

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Le mazet des jardins ouvriers de la garrigue nimoîse


de 1830 à 1930

« la garrigue et les masets étaient un lieu de jardinage utile et de


délassement bon marché pour le dimanche. Le maset est lié au jar-
din et aux arbres qui l'entourent et constituent une entité spécifique :
« le maset doit son attrait au jardin qui l’entoure : avec une vigne, des
oliviers, des amandiers, des herbes médicinales ou culinaires, un bout
de potager. C’est un complément sensible pour le budget familial.
Les oliviers ont peut-être été déterminants, puisqu’ils fournissaient
l’huile pour le ménage. La garrigue et ses masets formaient ainsi un
immense jardin ouvrier ».
Cette entité maset et jardin constituait un lien entre le temps de la
ville et le temps de la campagne, entre le travail et le loisir. On peut y
décrypter une forme d’urbanité aussi bien présente dans l’exemple
de Clarensac que dans celui des jardins à proximité de Nîmes.
Rémy Allain définit cette urbanité comme un lieu qui « implique une
capacité à susciter la rencontre collective spontanée ce qui signifie
deux formes adaptées à la convergence, à la promenade, à la flâne-
rie, au côtoiement, à la pause, (rue, forum, place…) mais aussi une
certaine pluralité des fonctions et des sens possibles ».

des objectifs complètement différents. Quelles sont les relations du


paysage aux nouveaux espaces périurbains et quelle place y occupe
l’olivier ? Assiste-t-on à l’indifférence vis-à-vis des oliviers aban-
donnés ou au contraire à une forte mobilisation pour leur défense ?
Observe-t-on des stratégies d’appropriation de ces espaces ou une
volonté de faire de ces espaces des lieux ouverts, accessibles ?

Place des arbres, place de l’olivier


Les arbres sont un élément constitutif des systèmes agricoles dans le
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

temps long. Ils sont donc de fait un élément indissociable des espaces
et donc des paysages agricoles. Le système de cultures complantées
n’a pas résisté à la modernisation agricole et les oliviers de bordure
de parcelle ont largement disparu. Ces paysages agricoles arborés
sont aujourd’hui menacés et l’olivier qui n’est plus seulement un
arbre agricole, devient un arbre d’ornement, implanté dans d’autres
contextes géographiques et sociaux. C’est un arbre emblématique

190

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ?

du Sud et de la Méditerranée, utilisé pour véhiculer l’identité médi-


terranéenne du vin héraultais par exemple, ou d’autres productions
locales, et pour créer des modèles paysagers dans les jardins et les
espaces publics urbains. L’olivier sert à construire un référentiel pay-
sager qui le coupe de ses origines agricoles.
Si l’olivier a reculé dans les paysages agricoles, il s’est déplacé dans
l’espace pour devenir un arbre d’ornement voire un arbre urbain, il
n’en demeure pas moins fortement présent voire omniprésent dans
l’espace régional au point que l’on ait de plus en plus de mal à com-
prendre pourquoi il suscite un tel engouement. Il devient de fait
un arbre auquel on prête des fonctions multiples, son implantation
est décidée par des acteurs très divers, avec des pratiques (choix
de la variété, de la taille, de l’entretien, de la localisation…) et des
attendus divergents. Le point de convergence de tous ces utilisateurs
serait d’inscrire l’olivier dans l’espace de façon à structurer une iden-
tité spatiale pour chacun de ces lieux.
À partir des années 1980, l’urbanité des lieux est reconnue et
l’aménité des lieux est mise en avant. Une vaste palette d’acteurs
valorise cet arbre qui doit devenir pluriel. L’olivier ne ferait que révé-
ler les tensions et les contradictions d’une société urbaine qui ne
sait pas quelle place elle doit laisser et accorder à l’agriculture et à
l’espace agricole.

De l’arbre agricole à la diversité des réalités


sociales de l’oléiculture
Quelques exemples en Languedoc mettent en évidence les tensions
autour de l’olivier, entre des démarches de structuration d’une filière
oléicole et des outils utilisant la sensibilité patrimoniale et identitaire
de l’olivier. L’espace périurbain de la région fourmille d’exemples.
L’olivier a été mobilisé pour apporter une alternative ou pour
gérer un risque : incendie de forêt dans la région nîmoise, installation
d’un grand équipement à l’ouest de Montpellier, tout en captant
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

une plus-value économique possible. Ces deux risques deviennent


de moins en moins acceptables en raison de la très forte croissance
démographique régionale (700 000 à 800 000 habitants supplémen-
taires sont attendus en Languedoc-Roussillon d’ici 2030) et d’une
demande toujours plus forte d’espaces ouverts naturels.
À l’échelle d’un territoire dans le département du Gard, l’enjeu
est « de maintenir et renforcer les zones agricoles existantes mena-

191

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

cées par la déprise agricole et l’extension de l’urbanisation ». Trois


expériences ponctuelles sont mises en œuvre : projets pédagogiques
et éducatifs du domaine de l’Escattes à Nîmes, de la Maison de la
garrigue et des terroirs de l’olivier et de la combe des Bourguignons
à Marguerittes. Ces opérations sont labellisées Terra Olea (Terre
d’oliviers), elles visent à conserver notre patrimoine naturel et à faire
découvrir au plus grand nombre un terroir sur lequel nous vivons et
qui est aussi une idée de bien vivre que nous défendons.

Domaine d’Escattes dans le quartier Courbessac à Nîmes

Le domaine d’Escattes est un ancien domaine agricole de 100 hec-


tares, à Courbessac à l’Est de Nîmes. Il a été acquis par la commune
en juin 1997. En 2000, la ville a confié à l’association pour la création
d’un centre international de l’olivier à Nîmes, la mission d’exploiter
75 hectares du domaine, par la mise en valeur du patrimoine natu-
rel et bâti de garrigue et de l’ancien domaine agricole, avec notam-
ment la relance de l’activité oléicole. Elle expérimente de nouvelles
techniques d’exploitation et la présentation de collections variétales.
On y dénombre 370 oliviers plusieurs fois centenaires régénérés
entre 1998 et 2008, qui justifient l’approche patrimoniale de l’opéra-
tion. 700 oliviers permettent au domaine de contribuer à la produc-
tion d’olive et d’huile d’olive de Nîmes, dont l’AOP a été obtenue en
2004. Une parcelle expérimentale de 450 oliviers de trois variétés
plantés en quatre densités différentes a été créée, en partenariat avec
les techniciens oléicoles du département. Le domaine d’Escattes pré-
sente les différentes fonctions de l’olivier avec une dimension péda-
gogique. En effet, l’association propose aussi sur ce site des anima-
tions pour les scolaires, des démonstrations de taille de l’olivier, etc.,
en relation étroite avec les autres associations oléicoles locales.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Dans le cas du Mas Dieu, il s’agissait pour les élus locaux de


trois communes périurbaines, des associations locales de défense du
cadre de vie de s’opposer à l’installation de la décharge de déchets
ultimes de l’agglomération de Montpellier en trouvant et construi-
sant une alternative. Dans ce contexte, on est passé d’un domaine
d’élevage extensif d’ovins traditionnel des garrigues languedo-

192

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Quel est le rôle de l’olivier dans l’urbanité ?

ciennes à la culture de l’olivier et de la vigne, transformant radica-


lement le paysage, et le mode d’exploitation de ces terres. À ce jour,
cette alternative est avant tout agricole puisqu’elle s’est traduite par la
création d’un verger oléicole (50 ha), d’une surface viticole (70 ha)
et d’une surface dédiée à un troupeau d’ovins (240 ha). L’agriculture
s’est révélée être le meilleur rempart contre le projet de grand équi-
pement, rejeté localement. La dimension économique est l’argu-
ment premier puisque le verger oléicole a permis la rencontre entre
une dizaine de producteurs individuels et la coopérative oléicole de
Pignan qui y a vu la possibilité d’accroître son volume d’olives.
La place de l’olivier est bien en tension entre les deux logiques
patrimoniale et économique : la logique patrimoniale est celle de la
défense d’un héritage, par les paysages, les variétés et le patrimoine
bâti associé à la culture de l’olivier ; la logique économique est celle
de la contribution à une production estampillée de qualité comme
l’AOP, à une production localisée de proximité, ou d’intensification
et de choix de nouveaux modes de culture.
Par le biais de ces deux exemples, on comprend les liens qui se
tissent entre l’olivier, les lieux, les paysages et l’urbanité. L’olivier
demeure toujours très proche de la ville bien que ces liens soient
différents de ceux qui existaient auparavant. On est moins dans le
registre d’un lien privé qui impliquait avant tout la famille élargie,
mais plus d’un lien public dans lequel les élus locaux et des associa-
tions réfléchissent à des alternatives de gestion de l’étalement urbain.
L’urbanité change de nature et d’échelle puisque l’olivier, l’olivette
voire l’oliveraie sont intégrés dans des politiques publiques de ges-

Maison de la garrigue et des terroirs de l’olivier

La mairie de Marguerittes a créé la Maison de la garrigue et des ter-


roirs de l’olivier en 2005. Cette maison contient un petit musée dédié
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à l’oléiculture ainsi que des dégustations d’huile d’olive. Cet outil


est complémentaire de l’aménagement du site de la Combe des
Bourguignons. Ces aménagements font suite à l’incendie de 1989
qui a constitué un véritable traumatisme et prise de conscience, en
témoigne l’extrait d’un dépliant de Terra Olea intitulé « Le pays des
pierres qui poussent après la pluie ».

193

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

tion de l’espace. Ils ne relèvent plus d’une affaire privée, excepté


dans certains cas d’engouement d’un propriétaire pour la remise en
état d’anciennes olivettes, peu productives mais qui ont une valeur
paysagère reconnue et recherchée.
Quelles que soient la motivation et la logique de ces projets
urbains, ils aboutissent tous à la constitution ou au renouveau de
lieux. Espérons que les acteurs de ces projets sauront trouver une
alchimie particulière entre lieux, paysages et urbanité dans laquelle
l’olivier ne saurait être réduit à un simple arbre productif, qu’il n’a
jamais été dans le sud de la France.

Pour en savoir plus


Bousquet E., 2005. Le renouveau de l’olivier dans l’Hérault, entre ville et campagne, Mission
de recherche ethnologique pour le Conseil général de l’Hérault, 133 p.
Donadieu P., 2005, De l’arbre rural à l’arbre urbain : l’arbre peut-il devenir
multifonctionnel ? Les cahiers de la multifonctionnalité, 8 : 115-132.
Marcelin P., 1926. Contribution à l’étude géographique de la garrigue nîmoise. Les études
rhodaniennes, 2 : 35-180.
Marconot J.M., 2000. Le maset nîmois. In Brun B., Dufour A.H., Picon B., Ribéreau-
Gayon M.D. (éd) Cabanes, cabanons et campements. Travaux de la société d’écologie
humaine, p. 269-294.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

194

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

L’olivier et les territoires


méditerranéens
Stéphane Angles
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

L à où l’olivier renonce, finit la Méditerranée , cette citation


de Georges Duhamel illustre la place remarquable qu’occupe
cet arbre au sein des cultures et des territoires méditerranéens,
tout en étant le marqueur de la zone climatique méditerranéenne.
L’étroite symbiose entre l’olivier et ses territoires montre bien la part
symbolique et la représentation imaginaire qu’entretient l’arbre de
Minerve avec les régions et les sociétés du Bassin méditerranéen. En
évoquant l’olivier, on se situe clairement dans le champ idéal autant
que dans une réalité objective. L’olivier, symbole archétypique des
traditions agraires, se présente désormais au cœur des défis qui bou-
leversent les territoires méditerranéens.
On comprend donc aisément que l’oléiculture présente un très
fort ancrage territorial, l’olivier étant ainsi fréquemment au cœur
des questions et des enjeux de ces territoires. Quel est le rôle de la
culture de l’olivier dans les dynamiques qui animent ces régions ?
Appréhender les liens entre olivier et territoire permet de reposition-
ner les mutations territoriales dans des questionnements contem-
porains entre le local et le global, le traditionnel et le moderne ou le
rural et l’urbain.
Le renouveau de l’oléiculture au sein de ces territoires résulte
principalement de deux processus complémentaires : la mise en
patrimoine des paysages et des produits de l’olivier et leur valo-
risation auprès des sociétés. Ce changement s’est opéré depuis
quelques décennies principalement au sein des régions dans les-
quelles l’olivier constituait un élément symbolique d’identification
méditerranéenne et locale. L’oléiculture s’appuyait également sur
une réputation qualitative ancienne qui a été, par la suite, reconnue
sous la forme d’indications géographiques. Cette patrimonialisa-
tion a abouti à un maintien voire une extension des olivettes même
sous la pression urbaine et touristique. L’olivier devient ainsi un
vecteur de l’animation et de la dynamique de nombreux territoires
méditerranéens.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

L’oléiculture, une activité très présente


dans les territoires méditerranéens
Photo page précédente : Ubiquité et prégnance de l’olivier
Plantation d’oliviers.
Région de Meknès, Maroc.
La culture de l’olivier occupe près de 10 millions d’hectares dans
© Inra – Alain Beguey le Bassin méditerranéen avec une nette concentration des olive-

196

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

raies au sein de quatre pays (Espagne, Italie, Tunisie et Grèce) qui


regroupent les deux tiers des superficies oléicoles mondiales. Dans
les régions septentrionales du Bassin méditerranéen, l’oléiculture
n’occupe souvent qu’une place marginale et précaire en raison du
risque de gelées catastrophiques mais elle demeure bien présente
dans les paysages et bénéficie d’une mise en valeur remarquable avec
de multiples plantations d’oliviers dans les jardins ou dans le décor
végétal urbain. De cette façon, l’olivier devient le principal marqueur
d’identification méditerranéenne des territoires. La forme de l’arbre
et la teinte du feuillage ainsi que la position fréquente des olivettes
en bordure de parcelles ou sur des pentes permettent de distinguer
aisément les oliviers dans le paysage accentuant ainsi la perception
d’ubiquité oléicole.
Sur le plan économique, l’oléiculture représente une activité
très importante dans de nombreuses régions méditerranéennes
et demeure une des bases de l’agriculture en Andalousie, dans les
Pouilles italiennes, en Tunisie, en Crète ou dans le Péloponnèse grec.
En France, on relève de nombreux petits bassins oléicoles comme
le Nyonsais, les Baronnies ou les Alpilles dans lesquels l’olivier est
un des fondements de l’économie locale. Sur le plan social, l’impor-
tance accordée à l’olivier est largement renforcée par la multitude
de petites unités de production. L’oléiculture conserve donc un rôle
socio-économique majeur dans toutes les régions méditerranéennes
dans lesquelles elle assure des revenus et une source d’emplois consi-
dérables. La prégnance sociale de l’olivier est accentuée par le poids
culturel qu’il représente. L’olivier est porteur de nombreuses valeurs
véhiculées par un jeu complexe de représentations qui lui octroie
une place éminente et hautement symbolique par des références
mythologiques, religieuses, historiques, artistiques ou ancrées dans
les cultures populaires. C’est pourquoi l’oléiculture bénéficie d’une
forte valorisation et d’un caractère symbolique singulier.
L’ensemble de ces caractéristiques font de l’olivier un élément
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

emblématique qui l’enracine profondément au sein des territoires


méditerranéens. En premier lieu, c’est un symbole d’identité et de
reconnaissance de l’aire méditerranéenne qui illustre parfaitement
le creuset historique et civilisationnel du monde méditerranéen.
L’olivier symbolise également le milieu bioclimatique méditerra-
néen et il est particulièrement mis en valeur dans les bordures sep-
tentrionales du Bassin méditerranéen où il marque l’entrée dans

197

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

cette zone climatique. L’olivier montre aussi un fort ancrage régio-


nal en raison des nombreuses spécificités locales reposant sur les
réputations qualitatives des produits ou des paysages oléicoles. Les
témoignages anciens louant la finesse ou l’excellence de certaines
huiles d’olive comme celles du pays d’Aix en France, du Bas-Aragon
en Espagne ou de Ligurie en Italie abondent dans la littérature et les
paysages d’oliviers de Provence ou de Toscane ont depuis longtemps
été admirés. L’olivier, de par sa longévité et son caractère ancestral,
est ainsi considéré comme un témoignage flagrant d’une longue
historicité et des traditions agraires régionales : il symbolise donc
un rattachement à un passé rural et local. Tout ceci explique la forte
empreinte de l’oléiculture dans ses territoires qui dépasse largement
la place réelle qu’elle occupe. Aussi note-t-on une très forte mobi-
lisation de cet arbre emblématique dans les discours de promotion
des productions agricoles et de marketing territorial.
Les impacts croissants de l’oléiculture
dans les territoires méditerranéens
Par ses impacts sur les territoires méditerranéens, la culture de l’oli-
vier participe activement à l’animation et aux dynamiques de ces
régions. Les impacts sociaux sont majeurs en raison du très grand
nombre d’oléiculteurs qui se comptent par centaines de milliers
selon les pays : un million d’oléiculteurs en Italie, 840 000 en Grèce,
700 000 en Espagne. Même dans les pays où l’oléiculture n’est
qu’une activité très marginale, les exploitants oléicoles représentent
une population conséquente dans les zones de production : 3 000 en
Slovénie, confinés dans le mince liseré bordant l’Adriatique, 29 000
en France, concentrés en bordure de la Méditerranée et de la basse
vallée du Rhône, et 33 000 en Croatie, situés sur la côte dalmate. En
outre, les oléiculteurs représentent des profils très variés allant des
exploitants spécialisés dans la culture de l’olivier et disposant d’un
patrimoine oléicole important aux innombrables petits oléiculteurs
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

possédant quelques arbres mais soucieux d’apporter leurs olives au


moulin afin d’obtenir leur propre huile d’olive. Les petits exploitants
sont très largement majoritaires dans le secteur oléicole ; ainsi, les
domaines possédant moins d’un hectare d’oliviers représentent 73 %
des oléiculteurs en France et 97 % en Croatie.
L’olivier contribue largement à l’animation de réseaux socio-­
économiques de plus en plus étoffés et vivaces en raison de l’engoue-

198

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

ment suscité par cet arbre. En France, cette tendance est aisément
observable avec l’augmentation du nombre des moulins et la multi-
plication des manifestations et stages organisés pour l’apprentissage
de la taille ou de l’entretien des arbres. Tout cela favorise les mises
en réseaux au profit d’une population croissante d’amateurs et de
passionnés de l’olivier. Les relations familiales et amicales sont éga-
lement vivifiées par l’oléiculture grâce aux multiples échanges infor-
mels de produits oléicoles et à la participation à l’olivaison (saison
de la récolte) ou aux travaux d’entretien des arbres. Ces relations de
proximité jouent un rôle majeur dans le maintien voire l’augmenta-
tion des micro-exploitations oléicoles dont la viabilité est assurée par
l’entraide familiale ou amicale. Un olivier centenaire : un
Les impacts économiques de l’oléiculture reposent sur les reve- véritable patrimoine végétal.
La longévité de l'olivier
nus générés par cette activité agricole portée par une conjoncture et les stigmates de son
favorable depuis le milieu des années 1980. L’huile d’olive a béné- vieillisement lui donnent
un aspect tourmenté et
ficié d’un regain d’intérêt récent qui a permis une revalorisation une valeur historique
de l’oléiculture, longtemps considérée comme un secteur peu ren- qui participent à la
patrimonialisation
table et déclinant. Le retournement de tendance opéré dans cer- des vieux oliviers.
taines régions méditerranéennes depuis la décennie 1980 s’appuie © Inra – Daniel Renou
sur une patrimonialisation des paysages et des pro-
ductions oléicoles et participent à la synergie efficace
entre l’oléiculture et d’autres secteurs économiques
comme l’agriculture ou le tourisme. Les projets et la
gestion d’initiatives issues du secteur oléicole comme
les indications géographiques (AOP ou IGP), les poli-
tiques d’amélioration qualitative ou d’aménagement
territorial en lien avec l’oléiculture, constituent aussi
des actions qui animent les territoires par la mise en
relation de nombreux acteurs privés et publics réunis
autour des effets dynamiques de l’olivier.
Par le jeu de perceptions valorisantes, l’empreinte
des oliviers dans les paysages contribue très largement
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

à leur patrimonialisation et à l’accroissement des


aménités paysagères des territoires méditerranéens.
L’olivier ranime ainsi le caractère rural et agraire de
ces régions en s’inscrivant dans une diversité paysa-
gère considérée comme traditionnelle (petites oli-
vettes disséminées, arbres en bordure des chemins
ou des parcelles…) et en mettant en valeur un patri-

199

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

moine végétal (les vieux oliviers) et bâtis (terrasses avec leurs murs
en pierres sèches, cabanons, masets, anciens moulins…). Le rôle
paysager joué par l’olivier comme témoin d’une tradition agraire est
couramment mobilisé dans les territoires méditerranéens en proie à
une forte pression urbaine et à une banalisation des paysages.
L’oléiculture a également des impacts environnementaux favo-
rables vis-à-vis de la biodiversité observés dans les oliveraies, en
particulier dans les vergers extensifs avec un couvert herbeux. Cela
permet d’intégrer les olivettes conduites de manière extensive au
sein des trames vertes qui constituent désormais des enjeux écolo-
giques de première importance. Parallèlement, les oliveraies peuvent
participer à la lutte contre l’érosion des sols par la conservation et
l’entretien des terrasses, à la diminution des risques de propagation
des incendies en servant de pare-feux efficaces et en produisant des
matières énergétiques comme les grignons ou les rémanents de taille.

Un nouveau moteur
de développement agricole ?
Un développement récent de l’oléiculture
qui contraste avec le marasme antérieur
Avant la décennie 1980, la culture de l’olivier connaissait un marasme
général occasionnant la stagnation voire le recul des superficies oléi-
coles. En France, le nombre d’oliviers cultivés a chuté de 12 millions
en 1940 à 4 millions en 1980. De même, en Espagne, 200 000 hec-
tares d’oliveraies avaient disparu entre 1970 et 1990. Les causes de
cette crise sont multiples mais reposent essentiellement sur la faible
rentabilité de l’oléiculture en lien avec la faiblesse des rendements, le
coût de la main-d’œuvre et la concurrence des autres huiles alimen-
taires, moins chères et favorisées par un marketing puissant. L’image
passéiste attachée à l’olivier contribuait aussi à sa faible attractivité
et les aléas climatiques comme les gelées de 1929 et surtout de 1956
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ont précipité l’oléiculture dans un profond déclin dans les régions


méditerranéennes septentrionales.
Depuis le milieu de la décennie 1980, la culture de l’olivier est
sortie de cette crise et a enregistré un essor rapide concrétisé par
une augmentation des superficies oléicoles avec de nouvelles plan-
tations, une modernisation des modes de production et un net
accroissement des productions stimulées désormais par un marché

200

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

porteur. En effet, la demande d’huile d’olive a crû avec la reprise


de la consommation dans les pays méditerranéens et la croissance
rapide des ventes d’huile d’olive dans de nouveaux marchés en
Europe occidentale, en Amérique du Nord, en Océanie ou au Japon.
Les secteurs oléicoles positionnés sur des appellations d’origine et
bénéficiant d’une bonne réputation ont largement su profiter de
cette embellie et ont enregistré un essor remarquable. La situation de
l’oléiculture française est tout à fait révélatrice de cette conjoncture
avec l’augmentation et la modernisation des oliveraies en lien avec
la multiplication des appellations d’origine contrôlée pour des pro-
duits oléicoles : 1re AOC en 1994, 14 AOC1 obtenues en 2011. L’image
passéiste et ancestrale de l’oléiculture s’est désormais transformée en
un précieux atout en devenant une garantie d’authenticité et de tra-
dition unanimement appréciée. Dans les régions septentrionales du
Bassin méditerranéen où la patrimonialisation de l’olivier est la plus
flagrante, le regain d’intérêt pour l’oléiculture est très net comme
l’atteste son développement récent observé en France, en Croatie,
en Slovénie, dans les régions centrales de l’Italie (Toscane, Ombrie,
Emilie-Romagne) ou au Portugal. En effet, dans ces régions, la valo-
risation des paysages et des produits de l’olivier y est telle que les
prix de l’huile d’olive locale sont largement supérieurs aux cours
mondiaux et stimulent ce secteur beaucoup moins productif que
celui des grandes régions oléicoles que sont l’Andalousie, les Pouilles
italiennes ou la Tunisie. Ainsi la production française d’huile d’olive
a-t-elle enregistré une forte augmentation depuis les années 1990
passant de 1 800 tonnes en 1986-1990 à près de 5 000 tonnes en
2006-2009. Cette renaissance de l’oléiculture tranche nettement
avec les difficultés rencontrées par les autres secteurs agricoles
régionaux comme la viticulture, le maraîchage, les cultures fruitières
ou l’élevage.
Une production de plus en plus marquée
par une valorisation qualitative
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Les produits oléicoles ont toujours joui d’une bonne reconnaissance


pour leurs vertus sanitaires et leurs qualités gustatives et cette réputa-
tion a largement contribué au développement récent de la consom-
mation mondiale grâce aux bienfaits du régime alimentaire méditer-

1. Le terme AOC est remplacé par AOP (appellation européenne).

201

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

ranéen. Cette qualité de l’huile d’olive a été renforcée par les progrès
opérés dans les méthodes d’élaboration de l’huile d’olive avec la
généralisation des matériels modernes en système continu et par
le soin apporté aux olives livrées dans les moulins. Les appellations
d’origine protégée et des indications géographiques protégées pour
les huiles d’olive et les olives de table dans l’Union européenne ont
également participé à ce processus de valorisation. En effet, depuis
1972, date de la première appellation d’origine pour une huile d’olive
catalane (Borjas Blancas, devenue Les Garrigues), les indications
géographiques se sont multipliées au sein de l’Union européenne.
Les appellations d’origine protégée (AOP) et indications géogra-
phiques protégées (IGP) d’huile d’olive enregistrées dans l’Union
européenne en 2011 sont les suivantes : Espagne, 24 ; France, 7 ;
Grèce, 27 ; Italie, 41 ; Portugal : 6.
Ces indications géographiques représentent des aires de produc-
tion et des productions très dissemblables avec des découpages très
étendus en Espagne et au Portugal et, au contraire, des surfaces plus
réduites en France, en Grèce et en Italie. Les cahiers des charges
des AOP d’huile d’olive montrent une approche plus marquée sur
les caractéristiques physico-chimiques des produits en Espagne,
en Grèce ou au Portugal avec des spécifications souples pour les
variétés et le découpage des aires alors qu’en France ou en Italie, les
paysages oléicoles, la composition variétale des vergers, les modes
de culture et de récolte et la définition du terroir font l’objet d’une
attention plus soutenue. L’émergence et les attentes de ces indica-
tions géographiques affichent bien une volonté de développement
local fondé sur les labels oléicoles qui induisent une valorisation
supplémentaire pour les territoires concernés. La démarche de
labellisation participe au processus de patrimonialisation en pré-
servant les particularités des paysages et les typicités des produits
oléicoles et parallèlement, entraîne une attractivité majeure pour les
terroirs disposant de tels labels. Toutefois, il convient de relativiser
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

l’impact de ces appellations car cela ne valorise qu’une faible part


des productions d’huile d’olive (surtout dans les grandes régions
productrices comme l’Andalousie, la Sicile, les Pouilles, la Crète ou
le Péloponnèse) et que l’apport de valeur est très variable selon la
notoriété des labels. Malgré tout, les régions septentrionales comme
la Provence, la Catalogne, le Bas-Aragon, la Ligurie, l’Ombrie ou la
Toscane bénéficient d’appellations réputées qui offrent des prix de

202

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

l’huile d’olive largement supérieurs à ceux de produits équivalents


en dehors de ces terroirs.
Les « paniers de biens »
Cette amélioration qualitative s’intègre dans des stratégies éco-
nomiques qui visent à faire émerger un ensemble de biens et de
services bénéficiant d’une valorisation liée à l’attractivité du ter-
ritoire concerné. Ainsi les atouts des paysages de l’olivier et de la
renommée des produits oléicoles participent pleinement à cette
valorisation. Les régions françaises des Baronnies (Drôme), des
Alpilles (Bouches-du-Rhône) ou la Toscane italienne constituent
des exemples emblématiques de la valorisation des territoires dans
lesquels l’huile d’olive constitue un produit phare. Des situations
similaires émergent en Provence, en Corse, en Ombrie ou en Croatie
(dans les îles dalmates de Krk et de Brač). Une véritable synergie
se produit grâce à une association des productions oléicoles avec
d’autres biens (vins, produits alimentaires, cosmétiques…) ou ser-
vices (hébergement, animations culturelles, restauration…). Les
domaines viticoles qui se diversifient dans l’oléiculture et qui mettent
en relation leurs productions vinicoles et oléicoles pour une valori-
sation mutuelle sont désormais très nombreux en Toscane ou en
Provence. De même, plusieurs exploitations viticoles du Languedoc-
Roussillon ou de Provence, en proie au marasme de ce secteur, ont
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Réhabilitation
d’anciennes olivettes
en terrasses
par un exploitant
oléicole dans le Grand-Vallon
(commune de Roquevaire,
Bouches-du-Rhône).
© Stéphane Angles

203

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

récemment opté pour l’oléiculture avec de nouveaux vergers et,


parfois, une petite huilerie. Dans la Sierra Mágina en Andalousie,
l’association de développement rural a favorisé la naissance d’une
entreprise de cosmétiques étroitement liée à la production locale
d’huile d’olive qui bénéficie d’une AOP. Les boutiques des moulins,
les sites de vente directe sur Internet, les présentations dans les foires
internationales sont autant de témoignages de l’effet de synergie
qu’engendre l’oléiculture au profit du développement local.

L’olivier, un patrimoine porteur


de projets territoriaux
Les paysages de l’olivier, un patrimoine dynamisant
Depuis une trentaine d’années, les paysages de l’olivier font l’objet
de multiples initiatives qui visent à préserver ce qui est considéré
désormais comme une richesse patrimoniale. Ces actions relèvent
de projets publics provenant des collectivités territoriales avec des
soutiens financiers régionaux, nationaux voire européens mais plus
souvent d’initiatives privées (individus ou associations).
Le département des Alpes-de-Haute-Provence offre de nombreux
exemples d’initiatives paysagères avec la réhabilitation des olivettes
en terrasses du Mont d’Or à Manosque, à Lurs, à Moustiers-Sainte-
Marie ou à Entrevaux. Le pays d’Aubagne (Bouches-du-Rhône), le
conseil général de la Drôme pour les olivettes de Villeperdrix et de

L’oliveraie réhabilitée dite


« du bout-du-Monde »
à Estoublon
(Alpes-de-Haute-Provence)
© Stéphane Angles
La vallée de l’Asse dans
les Alpes de Haute-Provence
est exemplaire : à l’initiative
d’une association secondée
par les collectivités territoriales,
des olivettes abandonnées
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

ont été réhabilitées, une variété


d’olivier, l’estoublonnaise,
préservée, le projet d’un moulin
coopératif couplé avec une
boutique et l’animation du
territoire autour de la renaissance
de l’oléiculture locale.

204

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

Nyons ou le conseil général du Var pour les oliviers centenaires de


la Farlède ont également entrepris des actions de conservation et
de mise en valeur de paysages oléicoles traditionnels perçus comme
remarquables en raison de leur histoire, de leur esthétique et de
leurs agencements. Dans ces actions, les paysages de l’olivier sont
inclus dans un patrimoine agraire plus large qui comprend les ter-
rasses, le bâti traditionnel et les sentiers. Ces projets patrimoniaux
donnent lieu à des aménagements qui étoffent l’offre touristique
(sentiers agrémentés de panneaux d’information, routes de l’olivier,
panoramas…).
Quelques politiques vont plus loin que la simple réhabilitation
paysagère et tendent à s’appuyer sur la richesse que constitue l’oléi-
culture pour asseoir une véritable politique de développement local.
L’olivier dépasse ainsi largement le seul contexte agricole pour
se placer dans l’aire socioculturelle en occupant une place majeure
dans l’ancrage des populations dans une culture méditerranéenne
et locale. De ce fait, l’oléiculture participe d’une dynamisation des
territoires et des sociétés grâce à l’importance des associations cultu-
relles autour de cet arbre emblématique et à la multiplication des
manifestations qui mettent en exergue l’olivier et ses produits : fêtes
ou foires de l’olivier, de l’olivade ou de l’huile d’olive, organisation
d’expositions ou de dégustations, musées ou visites de moulins,
de scourtineries… Ainsi l’olivier joue désormais un rôle impor-
tant dans l’animation territoriale auprès d’un public local en quête
d’enracinement ou de préservation des traditions et vis-à-vis de la
clientèle touristique.
L’oléiculture, un facteur stimulant du tourisme
À partir de ce patrimoine oléicole très apprécié, les acteurs publics et
privés du secteur touristique mobilisent de plus en plus l’attractivité
suscitée par les paysages et les produits oléicoles afin d’accroître le
tourisme. Aussi de nombreux projets ont-ils été conçus pour asso-
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

cier olivier et tourisme en s’appuyant sur l’effet de synergie mutuelle.


L’oléiculture devient ainsi un acteur efficace pour le développement
du tourisme vert et de « l’agritourisme ». La région du Nyonsais
et des Baronnies dans la Drôme est exemplaire sur ce point car
l’ensemble des acteurs locaux (collectivités territoriales, acteurs pri-
vés) ont entrepris de multiples projets pour mettre en valeur leur
patrimoine oléicole, appuyé sur une appellation d’origine contrôlée,

205

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

dans le but d’étoffer l’offre touristique. Ont ainsi été mis en place la
route de l’olivier, l’aménagement des sentiers de l’olivier, l’Institut
du monde de l’olivier, des musées, la visite d’anciens moulins ou
d’une fabrique de scourtins, de nombreuses manifestations festives
(l’Alicoque, la fête des olivades…), des séances de dégustation,
des boutiques attrayantes au sein des moulins… Dans les Alpilles
(Bouches-du-Rhône), les acteurs touristiques ont aussi mobilisé
l’olivier afin de développer et diversifier leurs prestations : le Parc
naturel régional a créé une route de l’olive, des visites de moulins ou
d’oliveraies sont organisées dans la plupart des villages, des sentiers
ont été tracés par les municipalités. En Toscane, les démarches asso-
ciant les activités agricoles, dont l’oléiculture, et le tourisme sont éga-
lement très nombreuses et font de cette région renommée pour ses
paysages d’oliveraies et ses huiles d’olive un modèle pour le dévelop-
pement de l’agritourisme. L’exemple de Baena en Andalousie (pro-
vince de Cordoue) est éclairant car il montre les efforts tentés par
un ensemble de collectivités locales (Asociación para el Desarrollo
del Guadajoz y Campiña Este de Córdoba, municipalité de Baena,
province de Cordoue, Junta de Andalucía), le conseil exécutif de
l’appellation d’origine (Huile d’olive de Baena) et une entreprise de
renom (Nuñez del Prado) pour promouvoir un patrimoine oléicole
dans une région où l’huile d’olive est une production de masse et les
oliveraies un paysage banal et monotone. Grâce au musée de l’olivier
et aux visites guidées organisées dans le moulin de Nuñez del Prado,
Baena est parvenu à entamer un processus de valorisation patrimo-
niale qui repose sur une oléiculture de qualité et sur les richesses
architecturales du village. Dans la province de Jaén, principale zone
de production d’huile d’olive dans le monde, ce type de démarche a
été tenté mais n’a pas encore rencontré le succès ; le musée de l’huile
d’olive localisé dans un domaine isolé est peu fréquenté et les grands
pôles touristiques que sont les villes de Baeza et Ubeda n’appuient
guère leur attractivité sur leur richesse oléicole.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Ces différents exemples prouvent que les dynamiques touris-


tiques en lien avec l’oléiculture sont variables selon les contextes
en fonction du degré de patrimonialisation et de valorisation de
l’olivier. Dans les régions septentrionales du Bassin méditerranéen
(France, Italie du Nord, Catalogne, Croatie), ce processus est très
net en raison d’oliveraies moins étendues, de la réputation ancienne
des produits et du rôle de marqueur climatique que joue l’olivier,

206

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

l’olivier y constitue un réel support patrimonial et identitaire. En


revanche, les régions méridionales offrent une patrimonialisation
moins évidente en lien avec la banalisation des paysages de l’olivier
et la massification des productions d’huile d’olive.
L’olivier, au cœur de nouvelles dynamiques urbaines
Les régions méditerranéennes sont confrontées à des changements
considérables liés à une forte croissance démographique et à une
extension de l’urbanisation et des zones bâties. Cela est particu-
lièrement vrai en France (régions Provence-Alpes-Côte d’Azur,
Languedoc-Roussillon) mais aussi en Espagne (Catalogne, com-
munauté de Valencia, Madrid, agglomérations andalouses), en
Italie (Ligurie, Toscane, Latium, Campanie, Sicile), en Grèce (aire
athénienne, golfe de Corinthe) ou en Tunisie (agglomération tuni-
soise, région littorale entre Sousse et Sfax). Dans ce contexte, les
oliveraies subissent les effets de l’étalement urbain associé au déve-
loppement touristique qui aboutissent à une réduction des espaces
agricoles périurbains. Or, on note depuis une vingtaine d’années un
maintien voire une multiplication des oliviers dans de nombreuses
zones périurbaines méditerranéennes. Ainsi, les olivettes demeurent
nombreuses dans l’arrière-pays niçois (Drap, L’Escarène), dans l’aire
marseillaise (pays d’Aubagne) ou toulonnaise (région de Bandol ou
de La Londe-les-Maures). Le même phénomène est observé dans
les régions de Gênes et de Florence en Italie ou de Barcelone en
Espagne. En outre, on relève parfois une progression des oliveraies
dans des secteurs désormais urbanisés où il y avait peu d’oliviers
antérieurement comme dans les zones périurbaines d’Avignon ou
de Perpignan. Ce processus correspond à une réhabilitation d’an-
ciennes oliveraies abandonnées, au maintien des oliveraies et des
activités oléicoles existantes et à de nouvelles plantations dont les
dimensions varient de l’olivier isolé dans un jardin à la vaste olivette
installée dans une grande propriété. Les causes de cet engouement
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

pour l’olivier portent sur l’esthétisme et l’attrait des olivettes, la


volonté d’obtenir une production très appréciée, le choix de main-
tenir un héritage paysager considéré comme un patrimoine et une
valorisation immobilière du bien engendrée par les atouts paysagers.
Le maintien des paysages oléicoles malgré la pression urbaine se
rencontre également dans les zones touristiques quand les oliveraies
constituent un décor végétal et un témoignage agraire qui renforcent

207

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Paysage oléicole en zone


périurbaine à Drap
(Alpes-Maritimes)
© Stéphane Angles
Cette photo prise à Drap
dans l’agglomération niçoise est
révélatrice de cette oléiculture
périurbaine. Les versants
dominant le Paillon étaient
auparavant couverts d’olivettes
en terrasses et l’urbanisation de
ce secteur n’a pas fait disparaître
l’oléiculture mais, au contraire,
l’a maintenue en orientant sa
vocation vers une fonction
ornementale. Malgré le mitage
urbain, la plupart des oliviers ont
été préservés et une partie des
olives produites sont expédiées
dans les moulins
ou confiseries environnantes.

l’attractivité des lieux pour des visiteurs en quête d’identité méditer-


ranéenne et locale. De tels phénomènes s’observent en Provence, en
Italie centrale, aux Baléares ou en Croatie.
Toutefois, il existe aussi de nombreux exemples où l’étalement
urbain contribue à l’arrachage des oliviers de la même manière que
les autres espèces végétales. C’est le cas des oliveraies jouissant d’une
valorisation faible sans être considérées comme un patrimoine.
Ainsi, les olivettes centenaires qui ceinturent l’agglomération de
Séville, dans l’Aljarafe à l’ouest ou dans le secteur de Carmona et
de Dos Hermanas à l’est, reculent-elles inexorablement devant la
poussée urbaine. Une tendance similaire est observée dans les péri-
phéries des villes andalouses ( Jaén, Grenade, Cordoue…), tuni-
siennes (Sfax, Sousse), marocaines (Fès, Marrakech, Meknès) ou
dans l’agglomération athénienne. Le degré de patrimonialisation
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

des oliveraies y est encore bien faible et ne pousse pas les sociétés
locales à entreprendre des actions de sauvegarde ou de développe-
ment de l’oléiculture. Cependant, le potentiel pour de telles initia-
tives est présent et les paysages oléicoles commencent à devenir des
enjeux comme le prouvent les efforts pour conserver les anciennes
haciendas (anciens grands domaines oléicoles) près de Séville ou les
oliviers centenaires dans l’île tunisienne de Djerba.

208

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

Les indications géographiques


oléicoles dans le Bassin
méditerranéens.

Les indications géographiques


oléicoles en Espagne
et au Portugal.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

209

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

Les indications géographiques


oléicoles en Italie.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

210

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier et les territoires méditerranéens

Pour en savoir plus


Angles S., 2007. Les appellations d’Origine Protégée d’huile d’olive de l’Union
européenne : une analyse comparative (Espagne, France, Grèce, Italie et Portugal.
Méditerranée, 109 : 79-84.
Angles S., 2009. La diversité des paysages oléicoles : morphologie, valorisation et
perspectives (Sierra Mágina, Baronnies). In Asociación de Desarrollo Rural de Sierra
Mágina. El Olivar : Paisaje, Patrimonio y Desarrollo Sostenible, p. 57-74.
Durbiano C., 2000. L’oliveraie provençale, production de qualité et requalification
territoriale. Méditerranée, 3.4 : 17-27.
Garcia Brenes D., Fernandez Canero R., 2011. Ruptura de la sostenibilitad en la comarca
del Ajarafe (Sevilla). La dialectica olivar-urbanizacion. Scripta Nova. Revista electronica
de Geografia y Ciencias Sociales de la Universidad de Barcelona.
URL : http://www.ub.edu/geocrit/sn/sn-366.htm
Hirczak M. et al., 2008. Le modèle du panier de biens. Grille d’analyse et observations
de terrain. Économie rurale, 308 : 55-70.
Minvielle P., et al., 2009. La requalification des paysages oléicoles dans les Alpes du Sud :
l’exemple de la Haute Provence. In Asociación de Desarrollo Rural de Sierra Mágina.
El Olivar : Paisaje, Patrimonio y Desarrollo Sostenible, p. 75-92.
Pecqueur B., 2001. Qualité et développement territorial : l’hypothèse du panier de biens
et de services territorialisés. Économie rurale, 261 : 37-49.
Perrin C., 2009. La patrimonialisation des oliveraies florentines : un paysage à conserver
et à rntabiliser. In Asociacion de Desarrollo Rural de Sierra Magina.
El Olivar : Paisaje, Patrimonio y Desarrollo Sostenible, p. 93-116.
Ruiz Guerra I., 2011. Delimitación conceptual del aceite de oliva como recurso turístico.
Olivae, 115: 32-47.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

211

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Conclusion

A près quelques millénaires, l’histoire de l’olivier garde encore


des zones d’ombre. Depuis une trentaine d’années, pour notre
plaisir et notre santé, mais aussi pour des raisons économiques,
la culture de l’olivier a été encouragée et ses produits valorisés.
Les efforts de relance de cette production lui ont ainsi donné un
nouveau souffle.
Dans cet ouvrage, les auteurs ont souhaité mettre en lumière les
avancées les plus marquantes issues des recherches conduites depuis
les années 1990. Ainsi, les études conduites en archéobotanique et
en archéobiologie ont permis de mieux connaître les échanges com-
plexes des produits et des variétés dans le Bassin méditerranéen, et
des hypothèses ont été émises sur la différenciation des variétés et
leur extraordinaire diversité observée aujourd’hui. En parallèle, des
recherches génétiques ont abouti à la caractérisation des formes sau-
vages de cet arbre et des explorations ont donné de nouvelles pistes
pour comprendre le succès du genre Olea qui a colonisé l’Afrique
(y compris Madagascar et les Canaries), l’Asie jusqu’à la Chine,
et l’Australie.
Dans un autre domaine, celui de la biologie et de la physiologie,
l’olivier apparaît hors norme par rapport aux autres arbres fruitiers.
En effet, cultiver et faire produire des arbres centenaires, voire beau-
coup plus, est un défi. Ainsi, le décryptage de la complexité des inte-
ractions entre la croissance végétative et la mise à fleurs, qui condi-
tionne la mise à fruits, en est à ses balbutiements. La qualité et la
régularité de la production sont reliées à de nombreux phénomènes
qui restent inexpliqués : par exemple, la proportion de fleurs her-
maphrodites et mâles, le développement des fruits, la présence ou
non d’embryons dans le noyau, la chute de la plupart des fleurs pour
ne former qu’un à deux fruits par inflorescence, etc. Ces questions ne
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

seront résolues qu’en faisant collaborer différentes spécialités telles


que la physiologie, la chimie, l’agronomie et la génétique.
Sur le plan de la production, les divers types de culture – vergers
traditionnel, haie fruitière – sont à l’étude pour mieux conseiller
les oléiculteurs, professionnels et occasionnels, dans la conduite de
leur verger, par exemple en culture biologique, et pour répondre
aux attentes des consommateurs. Dans le domaine de la protection

213

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Histoire de l’olivier

phytosanitaire de l’olivier, l’expérimentation contre la mouche de


l’olive est longue et les résultats pour orienter la lutte biologique
contre la mouche sont encore en attente. Les pathogènes, pour
visibles qu’ils soient, sont relativement peu agressifs chez l’olivier
et de nouvelles méthodes de culture sont testées pour diminuer
l’impact des maladies. Les produits, huile et olives, seront d’autant
mieux valorisés qu’ils contiendront moins de résidus de pesticides,
et les services qui veillent à la conformité des produits doivent suivre
dès à présent une législation de plus en plus complexe.
La qualité des produits oléicoles est un élément majeur du suc-
cès de cet arbre. Des progrès importants ont été accomplis ces der-
nières années pour déterminer la composition chimique des huiles.
La caractérisation des composés actifs, des acides gras majeurs, des
composés phénoliques et des stérols mineurs devient possible tant
pour améliorer la qualité des aliments que pour identifier des molé-
cules issues de l’huile ou des feuilles actives en médecine. La mise
en œuvre de la traçabilité par la chimie permet également de lut-
ter contre les fraudes et contre l’adultération des produits, et cette
démarche pourra favoriser l’émergence et la reconnaissance de la
spécificité des appellations.
À une autre échelle, celle d’une région, l’impact de l’olivier
a beaucoup évolué : cet arbre devient un atout économique, tout
comme les produits oléicoles – huile, fruits, produits dérivés – dont
la gamme ne cesse de s’enrichir et la qualité de s’améliorer. Enfin,
l’image de cet arbre est mise en valeur dans les paysages, voire dans
les villes… Pour valoriser la culture de l’olivier, son rôle social,
son intérêt gastronomique et la production oléicole, il faut donc
se rapprocher des motivations des oléiculteurs, aux aspirations très
diverses, mais aussi de celles des consommateurs et de l’ensemble
des acteurs de la filière oléicole.
Les quelques exemples présentés dans cet ouvrage pour expo-
ser les recherches en cours et à venir sont choisis dans l’expérience
des auteurs. Ces thèmes ne sont ni limitants ni limités car cet arbre
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

accompagnera encore longtemps les peuples méditerranéens.


L’olivier reste en effet un arbre symbole, l’arbre des temps.

Photos page de droite, de haut en bas :


Fruits en cours de maturation. © Thierry Ruf
Capitelle dans un verger d'olivier. Saint-Privat, Hérault. © Catherine Breton

214

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier symbole du Bassin L’olivier symbole du Bassin méditerranéen

méditerranéen

L’olivier symbole
du
Bassin méditerranéen
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Fruits mûrs de l’hybride Olea cuspidata x Olea europea. © André Bervillé

L’histoire de l’olivier
reconstituée à partir
de données génétiques
L’olivier cultivé et l’oléastre coexistent aujourd’hui
dans le Bassin méditerranéen. L’oléastre est la
forme sauvage de l’espèce olivier. L’origine de l’oli-
vier a été clarifiée à la suite d’une étude par mar-
quage moléculaire de l’ADN extrait des feuilles. On
a pu ainsi d’examiner la répartition des espèces du
genre Olea d’après la localisation géographique des
individus collectés. De plus, les zones refuges de
l’olivier lors des périodes glaciaires ont été identi-
fiées et les arbres ont été échantillonnés dans toute
la zone de l’oléastre.

Tronc sinueux et tourmenté d'un olivier abandonné,


près du Monastère Santa Nicolaï, à Chypre.
© Catherine Breton

Fragments de feuille d’olivier fossilisés dans les lœss


de l’Huveaune à Marseilleveyre dans le département
des Bouches-du-Rhône. © Institut du monde de l'olivier.
Des traces de relique d’Olea europaea différentes
des formes actuelles sont nombreuses dans les tufs
(roches comprenant de nombreux fossiles) comme ceux
de Roquevaire dans la région de Marseille.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Oléastre de Luras en Sardaigne. © Pierre Arrousseau

216

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La localisation actuelle
des populations d’oléastres (olivier
sauvage) échantillonnées
et de leur chlorotype
(ADN du chloroplaste).
© Catherine Breton
Cette répartition montre une plus grande
diversité à l’ouest du Bassin méditerranéen
où l’on a identifé de nombreux chlorotypes
(ME1, MCK, COM,…) qu’à l’est où l’on a identifié
seulement deux chlorotypes (ME1, ME2). On
peut remarquer que le chlorotype COM1 est
très fréquent dans trois peuplements de Corse
et dans un peuplement du Maroc.

Proportion de populations issues de


zones refuges glaciaires (GRP) dans le
Bassin méditerranéen. © Catherine Breton

Ci-dessous, à gauche :
Olivier géant en Tunisie.
© Catherine Breton

À droite :
Oléastre à Chypre. © Catherine Breton
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

217

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Pétale

Anthère

Stigmate
Ovaire

Sépale

La fleur de l’olivier.
© Nathalie Moutier
Sur cette fleur agrandie, on distingue
du centre vers la périphérie : à la base
l’ovaire verdâtre, le style allongé,
au-dessus la surface réceptrice du
stigmate (vert). Les deux étamines
en déhiscence, le pollen libéré jaune,
les quatre pétales soudés qui
surmontent le calice velu.

Arbre pluricentenaire de la
région de Toulon.
De l’édification de l’arbre
© Nathalie Moutier à la production d’olives
De l’apparition du bourgeon sur le jeune rameau de l’année à la pro-
duction d’une olive mûre à l’automne de l’année suivante, que de
Fruit en coupe.
chemin parcouru ! Métamorphose du bourgeon en inflorescence,
© Nathalie Moutier rencontre de la fleur et du pollen et enfin fécondation dans des condi-
tions favorables pour aboutir enfin à un fruit.

Fruits à l’approche de la maturité. © Catherine Breton

Inflorescence
au stade « bouton blanc ».
© Nathalie Moutier
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

218

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Les stades repères de l’évolution de la fleur à la floraison.
© Adela Olmedilla

L’apparition des anthères succède au stade du bouton blanc bien visible à l’échelle de l’arbre.
Elle précède de quelques jours l’épanouissement des fleurs et l’anthèse (lors de l’ouverture des anthères libérant le pollen),
c’est le stade de la pleine floraison. À la chute des pétales débute le développement de l’ovaire, c’est la nouaison.
1. Fleur d’olivier en train de s’épanouir.
2. Fleur isolée grossie
3. Fleur avec les pétales excisés, laissant apparaître le calice blanchâtre, l’ovaire arrondi, le style blanchâtre
et le stigmate avec quelques grains de pollen
4. Le stigmate est chargé de pollen coloré desséché et l’ovule fécondé qui a fait gonfler l’ovaire (future drupe).

Bio-agresseur et maladies de l’olivier


Ci-dessous, de gauche à droite :
En France et en Californie, pour lutter contre la mouche de Adulte femelle de la mouche
l’olive, plusieurs lâchers du parasitoïde Psyttalia lounsburyi, de l’olive Bactrocera oleae.
De petite taille (4 à 6 mm), la mouche
agent de lutte biologique, ont été effectués. La lutte contre les de l’olive est noire avec des taches blanches
sur l’écusson et le thorax, une tache noire à
maladies du type bactériose consiste à éviter d’introduire les l’extrémité des ailes, caractéristique
agents potentiellement pathogènes dans les parcelles cultivées des mouches des fruits.

en fournissant aux producteurs des plants sains. Adulte femelle du parasitoïde


Psyttalia lounsburyi.
© Arnaud Blanchet (EBCL-USDA-ARS)
Verticilliose de l'olivier : déssèchement d'un côté
de la couronne de l'arbre après infection des
branches par le champignon parasite vasculaire
Verticillium dahliae. © André Vigouroux – Inra

L’œil de paon ou tavelure de l’olivier : symptômes sur feuille.


© Eric Coffinet
La maladie est visible sur les deux faces des feuilles et les pédoncules de fruits,
sous forme de taches circulaires, parfois entourées d’un halo jaune, mesurant
entre 2,5 et 12 millimètres, puis apparaissent des stries concentriques qui leur
donnent l’apparence d’ocelles, ce qui a donné son nom à la maladie.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

219

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’olivier dans l’histoire,
dans la culture et dans la société
Il est un lieu où tous les oléiculteurs se retrouvent chaque
année lors de la livraison des olives : le moulin. Aujourd’hui,
en France, plus d’une vingtaine de fêtes sont consacrées
à l’olivier. Chaque bassin de production fête ainsi l’huile
nouvelle et invite professionnels et amateurs à découvrir
les produits du terroir.

Animations touristiques
autour de l’olivier
et des moulins.
Ici un moulin traditionnel du
xviiie siècle chez Autrans
à Nyons (Drôme).
© Inra – Jean Weber

Premier blason de l’Ordre


National des Pharmaciens (milieu
du xxe siècle). La branche de
l’olivier portant ses fruits indique
l’usage très ancien de son l’huile.
(reproduction à l’aquarelle)
© Colette Charlot
Rappelons le lien entre le médicament
et l’aliment : l’aliment permet de
conserver la santé alors que le
médicament est là pour la rétablir.
Aussi rien de surprenant à ce que
le premier caducée de l’Ordre des
pharmaciens représente une branche
d’olivier qui entoure les deux plantes
majeures de la thérapeutique – la
digitale et le pavot –, les deux
appareils symboles de la pharmacie
– le mortier et pilulier – et les quatre Objet courant sculpté
écussons des premières villes où fut
dans du bois d’olivier :
créé l’enseignement spécialisé – Paris,
Montpellier, Strasbourg et Nancy. La mortier pour faire l’aïoli.
matière minérale, la matière organique © Colette Charlot
et végétale ainsi que l’eau y sont
représentées. Le serpent d’Esculape
et la coupe d’Hygie figurent au centre
de l’écusson avec la balance et l’épée,
symboles de la mission de l’Ordre de
faire respecter l’éthique et l’honneur.
La bromatologie ou science des
aliments est enseignée au même titre
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

que la science du médicament


Olives noires de table sur un marché. En février a lieu la fête de l’Alicoque
© Alexandra Paris – Afidol à Nyons dans la Drôme © Afidol

220

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
L’huile d’olive : la production, la récolte,
la qualité et la santé
L’intérêt des consommateurs pour le régime méditerranéen et la
communication importante sur les bienfaits de l’huile d’olive
sur la santé ont créé un renouveau de l’oléiculture française :
des plantations nouvelles, des moulins rénovés dotés d’une
technologie récente et des cuvées d’huiles spéciales, etc.
Il n’existe pas une huile d’olive mais des huiles d’olive
Sortie de l’huile d’olive
dont les compositions chimiques et les caractéristiques en fin de trituration.
organoleptiques sont fonction des variétés et des terroirs. © Christian Pinatel

Représentation de
l’équilibre de l’alimentation
méditerranéenne au fil
de la semaine. L’huile d’olive
placée au centre figure
son usage quotidien.
© Mariette Gerber
Les pays d’Europe du Sud qui
consomment une alimentation
méditerranéenne traditionnelle,
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

comprenant les olives et l’huile


d’olive, présentent de meilleurs
indicateurs de santé que les pays
d’Europe du Nord.

Verger d'oliviers anciens,


variété Aglandau.
Haute-Provence.
© Christian Pinatel

221

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Récolte manuelle d’olives, variété Aglandau. © Sophie Pinatel de Salvator

Effeuillage des olives au moulin.


© ChristianPinatel

Triage des olives. Huilerie-confiserie,


coopérative de Clermont l’Hérault.
© Inra – Jean Weber

Lavage des olives avant trituration au moulin. © Alexandra Paris – Afidol


Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Préparation des scourtins avant pressage dans un moulin traditionnel en Tunisie.


© André Bervillé

222

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La diversité des oliviers
dans les territoires méditerranéens
L’olivier cultivé a étendu sa conquête un peu partout
dans le monde. La culture de l’olivier occupe près de
10 millions d’hectares dans le Bassin méditerranéen
avec une nette concentration des oliveraies au sein
de l’Espagne, de l’Italie, de la Tunisie et de la Grèce
qui regroupent les deux tiers des superficies oléi-
coles mondiales.
En France, les huiles d’olive sont des produits d’ex-
ception riches en arômes : ce sont des variétés d’oli-
viers spécifiques, des vergers aux reliefs gorgés de
soleil, cultivés par des oléiculteurs passionnés, des
huiles élaborées dans 250 petites unités artisanales.

Vieil olivier à Djerba, Tunisie.


© Inra - Catherine Mazdak
Verger de lucques en terrasses.
Saint-Jean-de-la-Blaquière, Hérault © Catherine Breton

Olivier poussant dans les rochers,


dans le Parc Itchkeul en Tunisie. © Catherine Breton
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Oliveraie en Andalousie. Espagne


© Inra – Louis Vidal

223

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Édition, coordination éditoriale
Claire Jourdan-Ruf, Éditions Quæ

Infographie
Éditions Quæ

Maquette, mise en page et couverture


Didier Latorre

Impression
Bialec

Dépôt légal
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

décembre 2012

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.
La présence de l’olivier est un symbole actuel très marquant des paysages
méditerranéens et de leur attrait. Dans cet ouvrage, on apprend que l’histoire
de l’olivier est très ancienne, qu’elle est ancrée dans la religion et la médecine,
et que ses origines génétiques et sa domestication ne sont plus un mystère.
Le lecteur pourra s’intéresser également aux aspects culturels, au rôle social
et à l’intérêt gastronomique de l’olivier et de ses produits. Néanmoins, l’olivier
apparaît hors norme par rapport aux autres arbres fruitiers : cultiver des
arbres centenaires est un véritable défi. Ainsi, dans le domaine de la biologie
et de la physiologie, les dernières avancées de la recherche sont proposées
en particulier pour l’oléiculture, la production des fruits et la protection
des oliveraies. Sont considérés également les effets sur la santé et l’impact
économique de cette production qui connaît un nouveau souffle depuis une
trentaine d’années, car sa culture a été encouragée et ses produits valorisés.
La qualité des produits oléicoles est donc un élément majeur du succès de
cet arbre et de nombreuses appellations d’origine protégée ont vu le jour
en France et dans de nombreux pays du Bassin méditerranéen. L’image de
l’olivier est maintenant mise en valeur dans les paysages qu’il a transformés
et même dans les villes. Spécialistes de l’olivier, les auteurs nous font part
des résultats de recherche les plus récents et nous entraînent dans l’histoire
de l’olivier, l’arbre des temps.
Cet ouvrage intéressera les amateurs, qu’ils soient jardiniers, cultivateurs,
ou simplement touristes, et tous les professionnels de la filière oléicole
et des filières fruitières

Catherine Breton est chercheur en génétique au CNRS. Elle est spécialiste de l’évolution
des gènes liée à la domestication et des gènes déterminant les types de fleurs
chez la vigne, l’olivier et les composées. Elle travaille actuellement en génomique
des populations sur l’évolution des génomes par le séquençage haut-débit.
André Bervillé, ancien directeur de recherche à l’Inra, a étudié les relations génétiques
entre les formes sauvages et cultivées de plusieurs plantes (betteraves, tournesol)
et surtout de l’olivier. Ces recherches ont eu pour objectif de comprendre le processus
de domestication ainsi que les risques d’échappement des transgènes en agriculture.

En couverture : Planche d’Olea europaea, tirée du Traité des arbres et arbustes qui se cultivent en
Copyright © 2012. Quae. All rights reserved.

France en pleine terre, par M. Duhamel du Monceau. À Paris, chez H.L. Guérin et J.F. Delatour, 1745.

30 €
ISBN : 978-2-7592-1822-6

Réf. : 02343

Breton, Catherine, and André Bervillé. Histoire de L'olivier, Quae, 2012. ProQuest Ebook Central,
http://ebookcentral.proquest.com/lib/ensparis-ebooks/detail.action?docID=3398774.
Created from ensparis-ebooks on 2023-03-15 16:27:14.

Vous aimerez peut-être aussi