CALIFORNIE : GEORGE LUCAS AFFOLE SES VOISINS ● L’ADIEU À GEORGES DUBŒUF ET PIERRE GALET ● SOULAGES ET LE VIN

BORDEAUX
80 cuvées gourmandes
et bon marché

DOMAINE
larvf.com
LEFLAIVE
Un grand
bourgogne
RÉCHAUFFEMENT affronte
CLIMATIQUE l’oxydation
Comment de ses blancs
ont vieilli
les 2003 ?

Dossier spécial
Jean-Marc
Révolution Grussaute

orange
Le pilier
de Jurançon IKSMH=^U\WU\:??a@a@qq@@nn@@jj@@aa";";
M 08279 - 639 - F: 7,20 E - RD
M 08279 - 639 - F: 7,20 E - RD
3’3’::HHIKSMH=^U\WU\:

Pourquoi les vins de macération

plaisent aux jeunes et aux nouveaux amateurs
 UN T E RROIR L EG ENDAIRE .

www.closdeslunes.com

L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION

 Edito
Denis Saverot
L’orange, couleur de liberté
C
’est le génie du vin de s’adapter au temps et aux
époques, de se transformer pour mieux nous sur-
prendre. Boisson sacrée des Grecs qui le servaient lors
d’offices religieux, le vin est devenu le compagnon des ouvriers
bâtisseurs de cathédrales parce qu’il était sain, le fortifiant des
Poilus dans l’enfer d’Ypres et de l’Argonne, avant – c’est moins
exaltant – que les meilleurs flacons ne soient commués en
objets de spéculation sous l’effet de la mondialisation.
L’ultime avatar de ce cycle millénaire apparaît sous nos
yeux : c’est le boom des vins bio, biodynamiques, “nature”,
oranges. Le mouvement du balancier qui oscille sous nos
yeux est considérable. Au moment précis où les châteaux
bordelais attisent la convoitise de compagnies institution-
nelles, où certains bourgognes atteignent des prix inacces-
sibles, où les objectifs financiers prennent de plus en plus le
dessus sur la passion, voilà que se dresse une vague puissante
et salvatrice, la vague naturelle.
Bien sûr, l’accouchement des vins
“nature” et oranges n’a pas été sans dif-
ficultés, pour les vignerons pionniers
comme pour les vaillants amateurs
qui s’efforçaient de les servir à table.
La Revue du vin de France a longtemps
pointé les défauts qui disqualifiaient
certaines tentatives conduites au nom
du dogme du vin sans soufre, ces vins
qui, mal maîtrisés, remuglent vite le
poulailler ou l’écurie. Qui n’a pas été
éberlué en voyant dans le verre cer-
« Une odyssée
gustative,
une ode à
l’émancipation »
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 3
tains breuvages issus de raisin fermenté changer de couleur
en dix minutes ?
Mais depuis quinze ans, il faut reconnaître que bien des pro-
grès ont été accomplis. D’abord dans la maîtrise des vinifica-
tions qui, en mode “nature”, réclament une hygiène absolue
mais aussi lors de la mise en bouteilles, du transport et de la
conservation de ces vins par définition plus fragiles. Bien des
tenants du “nature” ont par ailleurs accepté de renoncer au
dogme du sans soufre pour protéger leur vin, même de façon
infime, ce qui souvent change tout.
Le bénéfice principal de cette révolution “nature” est
pourtant ailleurs : la montée en puissance des vins naturels
a permis de conquérir un nouveau public, plus jeune, moins
connaisseur, moins argenté aussi sans doute, des jeunes gens
et des jeunes femmes sans cave enterrée ni carnets de chèques
fournis, qui sans cela se détourneraient du vin au profit d’autres
boissons plus accessibles comme la bière, voire les cocktails.
Pour saluer cette évolution, La Revue
du vin de France est fière de vous pré-
senter ici une dégustation de fond
dédiée aux vins oranges, conduite par
Pierre Citerne. Une odyssée gustative
inédite qui vous conduira de l’Alsace à
la Méditerranée. Une ode à l’émancipa-
tion aussi puisque, comme l’écrit Pierre,
« le vin orange représente la liberté dont
chacun semble plus que jamais assoiffé dans
une société où la surveillance de la parole
et des goûts va crescendo vertiginoso… ».
Bonnes découvertes.
T. de Crisnay
 Sommaire
Mars 2020

Le vigneron Jean-Marc Grussaute,

chez lui, à Lasseube.

Grand Entretien
8 Jean-Marc Grussaute
Figure emblématique du Jurançon, le vigneron du domaine Camin Larredya
nous dévoile sa vision du vin d’identité.

En direct dans le vignoble

12 Les actus du vin
Étiquetage des vins : pourquoi la réforme patine

J. Baudouin
À San Francisco, la NBA s’offre un temple du vin
Pékin, Beaune, Beyrouth… les “Cités du Vin” font florès
Beethoven était-il alcoolique ?
Alexandre de Lur Saluces : «  C’est Sauternes qu’on abîme ! » Comment les vins issus de la canicule de 2003
ont-ils évolué ? Le verdict de nos dégustateurs.
30 L’invité
Lassaâd Metoui, artiste calligraphe, met en images les poèmes d’Omar Khayyâm

32 Le courrier des lecteurs

Les dossiers
34 Les vins issus de la canicule
de 2003 ont-ils bien vieilli ?
L’année 2003 fut la première à battre tous les records de chaleur, et la vigne fut
mise à rude épreuve. Nos dégustateurs jugent l’évolution de ces vins.

Shutterstock
50 Faire du vin,
ça coûte combien ? Il n’y a pas que des vins inaccessibles à Bordeaux.
La preuve avec le délicieux Château Moulin de la Souloire
Densité de plantation, pente, rendements… Quels coûts
d’Eugénie (à g.) et Diane Degas. La félicité pour 5 € !
de production se cachent derrière une bouteille de vin ?

Art de vivre
49 Vu d’ailleurs Par Pascaline Lepeltier
57 Accord minute Par Olivier Poussier
58 Grand accord
Lynch-Bages et gratin de macaronis à la truffe
avec Julien Dumas, au Lucas Carton, à Paris

63 C’est comme ça Par Sébastien Lapaque

D. R.

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 5

RAVINET D‘ARC
HIGHLINE
Tél.: 01 47 38 37 46 FA IT MA I N ET
info@ravinetdarc.fr
www.ravinetdarc.fr SOUFFLÉ BOUCHE
Retrouvez-nous sur
www.spiegelau.fr

Les qualités de l‘Authentis alliées à la légèreté du soufflé bouche!

 Sommaire
Mars 2020
Art de vivre
64 Balade à Anvers
avec le baron Maurice Velge Le restaurant
‘t Fornuis,
68 Spiritueux à Anvers, dans
une maison
Dix armagnacs très tendance !
flamande

D. R.
du XIXe siècle.

De vigne en cave
70 Vie de château
Domaine Paetzold, dans le Roussillon

76 Une appellation, deux styles

Rieslings Grands crus Pfingstberg et Saering des domaines Dirler-Cadé
et Valentin Zusslin

80 Les dessous du terroir Michael

Picpoul de Pinet, cépage rare et terroir maritime Paetzold tire
la quintessence

85 Trésors de vos caves de ses vignes

centenaires

D. R.
Par Angélique de Lencquesaing du Roussillon.

Les Dégustations
Vinification, goûts,
styles : les vins
oranges bousculent
le monde du vin.

92 La révolution
des vins oranges
Tour de France en 53 cuvées des blancs de macération
qui enflamment la planète vin

104 Bordeaux accessibles

Les appellations Bordeaux et Bordeaux Supérieur recèlent
une multitude de rouges à prix serrés

113 Dernière emplette

114 Domaine Leflaive
Que vaut son Grand cru Chevalier-Montrachet ?

117 Les coordonnées des producteurs

118 Vins oxydatifs
Ces vins rebelles font preuve d’une modernité passionnante

121 Les 100 bouteilles mythiques

Vouvray Goutte d’Or 1990 du domaine du Clos Naudin

122 Débat autour d’une bouteille

T. Legay

IGP Lot Néphèle 2018 du domaine Laroque d’Antan

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 7

 Grand entretien

Jean-Marc Grussaute
« Ma vision esthétique du vin
est le fruit d’un long travail »
Figure emblématique de Jurançon, le vigneron est aussi un porte-voix du Béarn
et plus largement du Sud-Ouest. Il nous dévoile sa vision du vin d’identité.
Propos recueillis par Jérôme Baudouin et Alexis Goujard

Pour cet entretien, vous avez choisi un vieux millésime de
jurançon. Que représente-t-il à vos yeux ?
Ce 1988 est mon premier millésime, juste après la reprise des
vignes de mes parents qui fournissaient la cave coopérative.
C’est un petit manseng moelleux aux notes très truffées. Je
n’ai jamais refait un vin aux arômes aussi puissants de truffe.
À l’époque, les vignes étaient cultivées de façon convention-
nelle, le matériel en cave était très sommaire : un pressoir et
quelques barriques anciennes. Le raisin était martyrisé avec
des levures et du soufre, mais le vin est toujours en forme.
Que signifie le nom de votre domaine, Camin Larredya ?
“Camin” signifie chemin en béarnais et Larredya, l’endroit où
l’on fabriquait des bardeaux de châtaignier. Le nom a été réper-
torié au XIVe siècle lorsque le prince Gaston Phœbus identifiait
les fermes du Béarn pour faciliter le prélèvement de l’impôt.
Le Béarn est votre terre, le nom de vos vins Virada, Au Capcéu,
L’Iranja le revendiquent. Est-ce important pour vous ?
C’est une chance pour moi de vivre à l’endroit où je suis né. La
terre, les gens, la langue et la société rurale m’ont construit. Je
suis fier de mes racines pyrénéennes et de participer, par mon
travail, à l’activité rurale locale et au rayonnement du Béarn.
Vous avez longtemps joué au rugby à la Section Paloise, le
club de Pau, capitale du Béarn. Que vous a apporté ce sport ?
C’est un élément constitutif de mon environnement. J’étais
très introverti quand j’étais jeune et le rugby m’a permis de
trouver ma place au sein du clan pour défendre le clocher. Je
n’étais pas leader, mais je me sentais à ma place dans le groupe.
J’étais l’aîné de quatre enfants. C’était un devoir de reprendre
le domaine familial. Le sociologue Pierre Bourdieu, Béarnais
et originaire de la commune de Lasseube, explique cette
forme de transmission, cette crise de la société paysanne en
Béarn dans Le Bal des célibataires. Durant les premières années,
c’était un asservissement pour moi d’être vigneron. Il m’a fallu
un long cheminement pour trouver du sens à ce métier.
Les vignerons de Jurançon vous ont-ils alors épaulé ?
Oui, dans les années 90, j’ai marché sur les traces des figures
incontournables de Jurançon, comme Henri Ramonteu
du domaine Cauhapé et Charles Hours du Clos Uroulat. Je
faisais bien mon travail pour vivre de ma production, mais
j’élaborais des vins académiques, sans y trouver un sens
profond. Quelques années plus tard, à une période où je
songeais à arrêter ce métier, deux personnes m’ont considé-
rablement aidé à m’émanciper : Elian Da Ros, vigneron en
Côtes du Marmandais, et Matthieu Cosse du domaine Cosse-
Maisonneuve, à Cahors. Ils m’ont ouvert les yeux sur une autre
manière de faire du vin.
Cette rencontre a-t-elle été un tournant dans votre vie ?
Ces deux hommes m’ont aiguillé vers une réflexion profonde
pour donner un sens vital à mon métier de vigneron, qui ne
se résume pas à faire du vin. J’ai entamé un long travail pour
mettre en harmonie ma vie de famille, mon sol, mon territoire
et mes raisins avec une vision esthétique du vin. Je ne parle pas
d’aventure mais de choix précis pour construire méthodique-
ment ce biotope personnel. Ma vie a pris une autre dimension
à ce moment-là.

Était-ce une évidence pour vous de reprendre la suite de vos Est-ce dans ce même esprit que vous vous êtes initié à la
parents au domaine ? viticulture biologique puis biodynamique ?
Mon père nous a quittés lorsque j’avais 15 ans. Je ne voulais pas À mon installation en 1988, je faisais du vin en suivant une
être vigneron. La sociologie rurale a dicté mes choix de vie. recette toute faite. Je ne me rendais pas compte que je mettais

Jean-Marc Grussaute. Né le 25 février 1967 à Pau. Un temps conseiller général des Pyrénées-Atlantiques,
le propriétaire du domaine Camin Larredya a toujours gardé un pied dans le monde politique local. Son plus grand vin
dégusté : le riesling Grand cru Rangen de Thann 2001 du domaine Zind Humbrecht.

8 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Fier de ses racines béarnaises,
Jean-Marc Grussaute est
passionné par l’éclosion
des arômes de truffe dans le vin.
Photos de J. Baudouin
 Grand entretien
Jean-Marc Grussaute
très jeunes mais je crois à l’immense potentiel
de ce secteur abandonné par l’homme car trop
difficile à travailler.

Ces deux cépages anciens mériteraient-ils

d’être développés dans l’appellation ?
Ce sont des merveilleux cépages dans les
assemblages de blancs secs. Leur faible degré
d’alcool (12,5°) et leur discrétion aromatique
permettent d’assagir et d’apporter des nuances
aux mansengs, bien plus exubérants.

Il y a deux ans, votre cuvée L’Iranja 2015 a été

le premier vin du Sud-Ouest noté 20/20 dans le
Guide des meilleurs vins de France de La RVF.
Comment l’avez-vous ressenti ?
Je me suis dit d’un air le plus détaché qui soit :
je crois que Camin Larredya, c’est devenu du
sérieux ! Il s’agissait d’un coup d’essai. Une
cuvée que j’ai faite avec beaucoup d’intui-
Le vigneron n’a pas hésité à réintroduire de vieux cépages comme le camaralet et le lauzet. tion. Je voulais expérimenter un vin blanc
avec des sucres résiduels, macéré plusieurs
le terroir en mode passif. J’ai tout essayé en matière d’œno- mois en amphores de terre cuite avec des petits mansengs
logie, même les copeaux, à titre expérimental. Mais je restais récoltés en surmaturité. Au-delà de cette note, ce qui m’a vrai-
prudent. Au tournant des années 2000, Mathieu et Elian m’ont ment frappé, c’est la suite de cette histoire dans La RVF où je
expliqué qu’on faisait de meilleurs vins avec une approche bio. découvre le courrier d’un lecteur et la réponse de votre dégus-
Cela a été un bouleversement total dans ma vie. À la même tateur Romain Iltis qui avait attribué la note (La RVF n° 626,
époque, je suis devenu papa. Très vite je suis passé en biody- novembre 2018). Son explication est une démonstration sen-
namie pour mieux gérer l’usage du cuivre. Et si aujourd’hui sible et structurée. Elle s’est avérée très gratifiante pour moi.
je pratique la biodynamie, c’est que je suis certain que cela Peut-être plus que la note. Maintenant, il faut rester au niveau !
apporte une plus-value à la pureté de mes vins et leur confère
une plus grande tenue dans le temps. Tout ce chemin de vie De nombreux vins de Jurançon offrent des arômes thiolés
a été pour moi une conquête permanente de confiance en et exubérants pour séduire le plus grand nombre. Ces blancs
soi. Le métier de vigneron est la meilleure manière de mettre nient-ils leur terroir ?
l’homme en accord avec son environnement. On ne peut pas nier que ces blancs très expressifs, fabriqués
avec certaines levures et intrants œnologiques
Vos vinifications ont également évolué ? ont permis de faire connaître Jurançon. J’y ai
Grâce à ces pratiques, je me suis rendu compte « Je crois que d’ailleurs contribué à mes débuts. Mais nous ne
que je pouvais aller beaucoup plus loin sur les Camin Larredya, pouvons rivaliser avec les Côtes de Gascogne
vinifications douces, que mes jus résistaient c’est devenu emmenées par des marques comme Tariquet
mieux à l’oxygène et puis je ne regardais plus et Uby qui produisent ce type de vins. Avec le
les thiols dans les vins. Je constate aujourd’hui du sérieux ! » relief du vignoble de Jurançon, la faible densité
qu’il est mille fois plus facile de vinifier avec des de pieds de vigne à l’hectare et les rendements
levures indigènes. Je ne peux pas l’expliquer, mais mes levains plus faibles, le coût de revient d’une bouteille est bien plus
sont extrêmement sains et mes vinifications beaucoup plus élevée chez nous. Pour attirer des consommateurs de vins de
simples, moins interventionnistes. plus en plus ouverts à la découverte, nous, vignerons, devons
aspirer à une identité plus forte des vins par des méthodes
Nous dégustons votre cuvée Costa Blanca 2018. Un blanc moins interventionnistes.
sec, profond et d’un incroyable raffinement minéral, proba-
blement, le plus lumineux de Jurançon. Quel est ce projet ? Depuis sa création, l’appellation Jurançon est réputée pour
Ce projet vient de mon désir d’écrire ma page d’histoire à ses moelleux. Quels éléments clés favorisent leur production ?
Camin Larredya. J’ai déniché un coteau calcaire, très pentu, Il y a trois grands paramètres à prendre en compte. D’abord, la
situé dans la commune de Lasseube à trente kilomètres du météo douce, plus influencée par l’océan que par les chaleurs
domaine. C’est un calcaire blanc, tendre, très différent de nos sudistes. Nous ne connaissons pas d’été caniculaire violent.
terroirs de poudingue de la Chapelle-de-Rousse. En 2013, j’y Les raisins bénéficient d’une maturité lente. Ensuite, le petit
ai planté des vignes en sélections massales de petit manseng et manseng est un cépage très tardif. Sa peau épaisse et sa haute
des vieux cépages, camaralet et lauzet. Les vignes sont encore acidité lui permettent de se concentrer sereinement en sucres.
10 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Grand entretien
Jean-Marc Grussaute
Avec son association de vignerons du Sud-Ouest, A Bisto De Nas,
Jean-Marc Grussaute a vinifié le mythique Clos Joliette en 2016 et 2017.
Enfin, le vignoble rencontre fréquemment l’effet de foehn. Ce
phénomène se produit en novembre lorsque des vents forts
venus d’Espagne subissent un réchauffement par compres-
sion en descendant les Pyrénées et permettent un passerillage
parfait des raisins.
Jurançon subit-elle une baisse de la demande de ses moel-
leux comme la plupart des appellations françaises ?
Paradoxalement, non. La production est répartie depuis long-
temps entre deux tiers de moelleux et un tiers de secs. Je pense
que l’équilibre fringant des moelleux de Jurançon, sans excès
de sucre et d’une grande acidité, est fédérateur. Les volumes
de secs montent petit à petit. À Camin Larredya, le moelleux
ne représente qu’un tiers de la production. J’ai une idée très
précise de la maturité pour récolter les petits mansengs en
novembre, parfois en décembre, à une qualité parfaite. Tous
les millésimes ne le permettent pas malheureusement.
Il n’existe pas de mention demi-sec à Jurançon, comme c’est
le cas à Vouvray. Est-ce un handicap ?
Pour revendiquer l’appellation Jurançon sec, les vins doivent
contenir moins de 4 grammes de sucre par litre. Les moelleux
sont tenus d’afficher au minimum 40 g/l. Mais entre les deux,
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 11
c’est le vide juridique : les vins ne
peuvent pas prétendre à l’appel- « C’est grâce à
lation. Le vigneron doit donc s’en- Didier Dagueneau
gager dans une course aux sucres que j’ai franchi
résiduels. Cela passe parfois par
une utilisation outrancière de un cap »
levures. Un vin de profil demi-sec pourrait être tellement plus
pur qu’un blanc trituré en cave pour le rendre sec.
Didier Dagueneau aux Jardins de Babylone en 2002,
l’homme d’affaires canadien Michel Boutin aux châteaux
Jolys et de Jurque et la famille Perrodo au domaine Guirardel…
Comment percevez-vous l’arrivée de ces nouveaux acteurs ?
C’est rassurant de voir que les vignes de Jurançon donnent
envie aux investisseurs. L’arrivée de Didier Dagueneau dans
la commune d’Aubertin a décomplexé et inspiré plusieurs
vignerons. Il a montré qu’on pouvait produire de grands vins
différemment, à l’image d’un blanc sec fait avec notre cépage
ancien le camaralet. C’est grâce à lui que j’ai franchi le cap pour
planter de la vigne sur le coteau pentu de Lasseube. Enfin,
en regardant le travail remarquable accompli par la famille
Perrodo au château Labégorce à Margaux, tout laisse à penser
qu’ils mettront les moyens pour faire rayonner Jurançon.
Vous avez également, avec quelques vignerons de l’asso-
ciation des vignerons du Sud-Ouest A Bisto De Nas, cultivé
la célèbre parcelle du Clos Joliette en 2016 et 2017. Racontez-
nous cette histoire.
Il s’agit d’une parcelle mythique pour les Béarnais de 1,85 ha
de poudingues à galets avec une veine ferrugineuse qui donne
une envergure exceptionnelle au petit manseng. Depuis la
mort de son dernier propriétaire, le caviste parisien Michel
Renaud en 2010, le vignoble était à l’abandon. Avec l’asso-
ciation des vignerons du Sud-Ouest, nous avons eu le privi-
lège d’entretenir les vignes et de vinifier le millésime 2016 et
d’acheter une partie des stocks. Mais la transmission entre les
enfants Renaud est très compliquée (ils ont confié un prêt à usage
des vignes et de la cave au négociant du Sud-Ouest, Lionel Osmin, ndlr).
Vous êtes un confident bienveillant pour plusieurs jeunes
de Jurançon. Comment voyez-vous l’avenir de l’appellation ?
Ces jeunes ont baroudé, voyagé, se posent les bonnes ques-
tions, ont les bons gestes. Il y a de très belles personnalités
parmi ces jeunes. Je pense à Maxime Salharang au Clos
Larrouyat. Il a roulé sa bosse au domaine de Souch avant
de s’installer avec sa femme Lucie sur leurs trois hectares
conduits en biodynamie. Et puis, il y a le besogneux Mathieu
Lacanette du domaine Naba qui a planté cinq hectares sur un
coteau d’Estialescq. Ils sont très attachés au territoire avec des
valeurs fédératrices.
Vous ne produisez que des vins blancs. N’êtes-vous pas
tenté de planter du rouge sur les coteaux de Jurançon ?
Après plus de vingt ans de vinification de blanc, j’en ai très
envie ! Il me reste un bout de parcelle sur mon coteau calcaire
de Lasseube. J’envisage d’y planter du cabernet franc. Après
tout, ce cépage vient de chez nous ! •
 En direct
Dans le vignoble

D. R.
Associations de consommateurs et écologistes réclament toujours plus d’informations et de transparence sur les étiquettes. Jusqu’où ?

Étiquetage des vins :

pourquoi la réforme patine
La valeur énergétique du vin pourrait bien figurer bientôt sur les étiquettes des bouteilles… En revanche,
l’affichage du détail des composants du vin est a priori renvoyé à plus tard, au grand dam des écologistes.

D
es étiquettes de vin plus infor-
matives et transparentes  :
l’idée avance doucement.
Jusqu’à présent, les boissons alcoolisées
n’avaient pas l’obligation d’informer
le public sur leur composition. Au
contraire de tous les autres aliments, de
la boîte de petits pois-carottes à la bou-
teille d’eau minérale.
Cette sorte d’exception culturelle
a pris fin en 2015, lorsque les lobbys
anti-alcool et anti-obésité britanniques
ont fait voter un rapport d’initiative au
Parlement européen. Leur but : faire
apparaître le taux de calories sur les bou-
teilles, afin que les consommateurs sou-
cieux de leur ligne renoncent à un verre
de cognac, de vin ou de bière… Une idée
qui a vite hérissé le poil des producteurs.
Après plusieurs tentatives pas toujours
abouties de réglementation de l’étique-
tage des alcools (1982, 1992, 1997, 2002,
2011…), la Commission européenne a
décidé de passer à l’action, tout en lais-
sant aux représentants des filières bière,
spiritueux et vin le soin de décider entre
eux. À Bruxelles, on appelle cela une
« autorégulation ».
LE QR CODE, UN CACHE-SEXE ?
Inutile de dire qu’en France, les autorités
du vin ont traîné les pieds. « Le nombre de
mentions légales a explosé sur nos étiquettes
en trente ans. Pourquoi rajouter une couche
de complexité, cela entretient la suspicion
dans l’esprit des gens », analyse Thierry
Montagne, le président des Vignerons
indépendants. Mais comment lutter
12 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
contre la demande de transparence ?
Les hautes sphères du vin ont fini par
abdiquer. « Si nous refusons la transparence,
des sites marchands le feront à notre place de
manière non contrôlée », explique Jean-
Marie Barillère, président du Comité
européen des entreprises viticoles.
Tandis que les filières bière et spiri-
tueux trouvaient assez vite un com-
promis, quatre ans de négociations
byzantines ont suivi dans la filière vin, à
partir de 2015. Après des tergiversations,
un accord est trouvé en avril 2019. Les
producteurs s’offrent la possibilité d’in-
former le consommateur sur les calories
et la composition du vin.
Sauf que pour les militants de la
transparence, cet accord n’est pas assez
contraignant. D’une part parce ● ● ●

●●● que les producteurs de vin se
sont laissés la liberté de décider ou non
d’apporter ces informations à leurs
clients. D’autre part, parce que plutôt
que de faire apparaître les calories ou les
ingrédients sur les étiquettes, la filière
recommande de les « dématérialiser ». En
clair, un QR Code pourra être apposé
sur chaque bouteille. Seuls les consom-
mateurs les plus motivés (et les mieux
équipés) pourront “flasher” l’étiquette
avec leur smartphone pour retrouver
les informations sur Internet.
OFFENSIVE À STRASBOURG
Pourtant, cet accord a minima obtenu de
haute lutte est déjà menacé. Un député
européen, Éric Andrieu (PS), pourtant
né à Narbonne, propose dans un rap-
port de rendre obligatoire l’affichage des
calories sur les étiquettes. En le suivant,
on quitterait donc le monde du volonta-
riat pour celui de la contrainte…
Au grand soulagement des vigne-
rons, les travaux d’Éric Andrieu ont été
retardés par l’installation du nouveau
parlement et de la nouvelle commis-
sion. Mais le Narbonnais est tenace : il
veut faire voter son texte en assemblée
plénière au Parlement de Strasbourg en
juin. Si son équipe compte bien obtenir
l’obligation d’indiquer la valeur éner-
gétique sur les étiquettes dès 2021, elle
est plus pessimiste sur l’affichage des
composants. Personne ne s’entend sur
la définition de ce qu’est un ingrédient
pour le vin…
LA RECETTE DU VIN, CE MYSTÈRE
Pour les producteurs, seuls les éléments
mesurables au moment de la mise en
bouteilles doivent être mentionnés. Ce
qui exclut, par exemple, la filtration sur
batonite, le collage, les levures, l’acide
ascorbique… Pour les tenants de la bio-
dynamie, le public doit aussi connaître
l’usage de certaines techniques qu’ils
qualifient de «  dénaturantes  » telles
la flash-pasteurisation ou l’osmose
inverse, mais aussi les auxiliaires tech-
nologiques et les additifs. Les tenants du
vin “nature” vont encore plus loin, exi-
geant que la teneur en sulfites et en pes-
ticides soit indiquée… De beaux débats
en perspective. Quand le consomma-
teur saura-t-il ce qu’il boit ? On n’en sait
toujours rien. Fabien Humbert
En direct
Dans le vignoble
À San Francisco, la NBA
s’offre un temple du vin
On en rêve en France : la nouvelle salle des Golden State Warriors
propose aux spectateurs de déguster du vin pendant les matchs.
Les vignerons de Napa servent leurs vins dans l’enceinte sportive du Chase Center, à San Francisco.
L
es fans des Golden State
Warriors, l’équipe de basket pro-
fessionnel de San Francisco, sont
vernis. Leur équipe a participé aux cinq
dernières finales du championnat amé-
ricain et en a remporté trois !
Pour célébrer cette réussite, une
superbe salle flambant neuve de plus
de 18 000 places a été inaugurée en 2017,
le Chase Center, du nom de JP Morgan
Chase, l’une des banques les plus puis-
santes des États-Unis, pour un coût
estimé à environ 1,4 milliard de dollars.
Mais ce qui fait l’originalité de ce
nouvel écrin, c’est que le vin y est roi :
Ainsi, les 27 stands de restauration de
l’enceinte servent des vins au verre, en
bouteille et même, on est en Californie,
en canette.
La salle a été inaugurée en 2017 avec un
concert du groupe Metallica. Mais que
ce soit pour des matchs de basket ou des
concerts, 750 verres de vins, 375 canettes
de vins et plus de 50 bouteilles sont
vendus en moyenne par événement.
Soit l’équivalent de 2 100 verres de vins
par soirée !
On peut donc croiser dans le Chase
Center des spectateurs en train de
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 13
D. R.
déguster un verre de vin tranquillement
assis à leur place, tout en savourant des
yeux le spectacle d’un match de basket
ou d’un concert. Une scène totalement
impossible au Stade de France où, en
vertu de la loi Évin, seuls les privilégiés
installés en loge ont le droit de siroter un
verre de champagne.
QUE DES VINS CALIFORNIENS
Mais attention, il ne s’agit pas de n’im-
porte quel vin ! Au Chase Center, ce sont
les productions locales qui sont mises à
l’honneur et, à l’exception notable du
champagne, les vins servis proviennent
quasi exclusivement de Californie.
Ce patriotisme est poussé encore plus
loin puisqu’à chaque événement, un
viticulteur de la Napa Valley, la région
viticole la plus proche de San Francisco,
est mis en avant et a la possibilité de
vendre et de faire déguster ses cuvées
dans le stade.
En 2020, 55 viticulteurs de Napa pour-
ront chacun à leur tour faire découvrir
leurs vins au public, notamment dans les
loges VIP de l’enceinte où sont installés
les people de la Silicon Valley.
Jean-Baptiste Thial de Bordenave

Georges Dubœuf
Grand dégustateur et visionnaire
Décédé le 4 janvier, l’artisan du succès mondial du beaujolais nouveau et pionnier de l’œnotourisme a
marqué le vignoble. Il fut longtemps le seul Français dans le top 10 des vins français importés aux États-Unis.
A
vec la mort de Georges
Dubœuf, décédé à 86 ans chez
lui, à Romanèche-Thorins, le
Beaujolais a perdu beaucoup plus qu’un
homme : sa figure tutélaire.
Né en 1933, peu avant la création des
AOC, dans une famille vigneronne de
Chaintré,en Mâconnais, il aura traversé
toutes les époques qu’un vignoble puisse
connaître : d’abord laborieuses, ensuite
glorieuses mais aussi plus sombres sur
la fin. Sa réussite de négociant, avec les
excès du beaujolais nouveau, a parfois
occulté ce qu’il a peut-être le mieux
réussi dans sa vie : la promotion des
vignerons du Beaujolais.
C’est sous le titre d’embouteilleur à
façon que Georges Dubœuf est enre-
gistré pour la première fois au registre
des métiers. Il imposera son nom en
s’approvisionnant et en travaillant en
direct avec 400 vignerons et une ving-
taine de caves coopératives pendant
les années florissantes, à partir des
En direct
Dans le vignoble
années 60. On le sait peu, mais c’est seu-
lement en 2002 que la maison Dubœuf
ouvrira son propre site de vinification.
Grand dégustateur – il fut membre
du comité de dégustation de La RVF au
début des années 80 – Georges Dubœuf
connaissait parfaitement le vignoble du
Beaujolais et ses lignées de vignerons. « Si
je n’avais pas eu des vignerons me fournissant
de bons vins, je n’aurais jamais obtenu ce que
j’ai obtenu. Notre fonds de commerce est là »,
nous confiait-il au début du millénaire.
QUE FLEURISSENT 1 000 ÉTIQUETTES
Fort de ses liens avec la génération de
chefs sortis de leurs cuisines, Paul Bocuse
en tête, il aura longtemps réussi l’exploit
d’incarner le “vin de copains” mais il a
aussi milité pour la distinction de cer-
tains crus du Beaujolais et du Mâconnais.
Il fut un artisan de l’essor et du succès
du beaujolais nouveau. Son nom restera
pour le grand public de France, mais
aussi d’Angleterre, des États-Unis ou
14 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Avec l’aide
son fils Franck,
Georges Dubœuf
n’a cessé
de promouvoir
le vignoble
du Beaujolais à
travers le monde.
D. R.
encore du Japon associé aux étiquettes
fleuries qui débarquent tous les troi-
sièmes jeudis de novembre. Georges
Dubœuf voyait dans le beaujolais nou-
veau « un vin d’initiation ». Mais avec le
succès mondial du beaujolais nouveau
vint une certaine facilité et la suite ne
lui a pas donné raison. Le débat sur les
dégâts causés par ce vin primeur sur
l’image du vignoble, et sur les crus en
particulier, hante toujours la région.
Son intuition sur l’avenir de l’œnotou-
risme est, elle, unanimement saluée. En
1993, l’ancienne gare de Romanèche-
Thorins devenait le “Hameau du vin”.
Un succès qui a inspiré nombre de
domaines et de régions en France.
Qui lui succèdera à la tête du groupe ?
S’il avait fini par confier tardivement la
direction générale à son fils Franck en
2018, le nom de son petit-fils, Adrien
Dubœuf-Lacombe, fils de sa fille
Fabienne, est régulièrement cité.
Vincent Lesage
 En direct
Dans le vignoble

Le père de Star Wars Bernard Magrez,

en guerre contre ses voisins propriétaire
à Châteauneuf-du-Pape
Le propriétaire de Pape Clément réalise
Par peur d’être envahis par les fans de Yan Solo, les habitants du Comté un vieux rêve : il a racheté il y a quelques
de Marin s’opposent à l’extension du vignoble californien de George Lucas. mois à la maison Ogier (groupe Advini)
un vaste bâtiment d’habitation compre-
nant des chambres d’hôtes dans la cité
de Châteauneuf-du-Pape. Il compte
y domicilier l’une de ses marques de
négoce historiques. Le magnat borde-
lais du vin va-t-il maintenant signer
des contrats d’approvisionnement en
raisins ou réussir à racheter des vignes à
Châteauneuf ? Affaire à suivre.

Un toit-terrasse

Photos : D. R.
à La Tour d’Argent
C’est dans ce paisible paysage de grasses prairies du territoire de Nicasio, en Californie, Le projet excite particulièrement le
que George Lucas voudrait créer son nouveau vignoble de 252 hectares. directeur général Yannick Branchereau :
un toit-terrasse avec une vue époustou-

L
a Force aurait-elle abandonné touristes et de fans de la princesse Leia. flante à 360 degrés sur Paris va bientôt
George Lucas ? Le milliardaire Les râleurs envisagent donc de contester être aménagé au dernier étage de La Tour
américain, célèbre producteur en justice l’autorisation d’extension agri- d’Argent, le célèbre restaurant du quai de
et père de Star Wars, fait face à la fronde cole accordée à l’été 2019 par le Comté de la Tournelle à Paris.
inattendue d’une mystérieuse associa- Marin à la société Skywalker Vineyards
tion de propriétaires du territoire cali- (aussi propriétaire du château Margüi
fornien de Nicasio  (*), manifestement en Provence). Une semaine vin
tombée du côté obscur de la Force. et fromages à Paris
George Lucas est vigneron depuis SUR LES TRACES DE COPPOLA
une trentaine d’années, notamment Ces derniers veulent bien, à la rigueur, Il avait inventé le Cheese Day, mais le
dans le Comté de Marin, au nord de d’un nouveau vignoble Lucas, mais ail- communicant Jean-François Hesse
San Francisco, où il a bâti le fameux leurs, bien caché dans un coin de l’im- (agence Transversal) voit encore plus
Skywalker Ranch et planté mense propriété du réali- grand en 2020 et lance le premier Paris
des hectares de vignes pour sateur. Problème : comme Cheese & Wine Week, du 7 au 13 sep-
produire son propre vin l’a souligné l’avocat des vins tembre. Objectif : inviter des restaura-
(des chardonnays et pinots Skywalker, l’emplacement teurs, artisans, hôtels, grands magasins
noirs commercialisés sous choisi, sur la bien nommée et médias à célébrer les vertus du fro-
le label Skywalker). Mais Lucas Valley Road, ne l’a pas mage pendant sept jours.
voilà que son projet de été au hasard. Il serait idéal
créer un nouveau vignoble pour la culture d’un grand
de 624 acres (252 ha) au George Lucas doit négocier pinot noir. Le créateur de
bord d’une route du terri- avec ses voisins.
Dark Vador veut en effet Taxes Trump :
toire de Nicasio, à quelques kilomètres marcher dans les pas de son ami Francis les premiers effets
du ranch, se heurte à la bronca des char- Ford Coppola et développer une gamme
mants habitants des alentours. de vins prestigieux. se font déjà sentir
Selon le Marin Independent Journal, Les autorités locales, l’entreprise Les taxes sur les vins français imposées
l’association jugerait « inesthétique » la Skywalker et l’association ont entamé par Donald Trump secouent le négoce
plantation de vignes et invoquerait des des discussions pour parvenir à un bordelais, notamment les profession-
menaces environnementales sur un accord raisonnable avant le 31 mars. nels les plus exposés aux États-Unis
paysage de chênes-lièges et de grasses Cher George, bienvenu dans le monde comme le négoce Twins, maison fondée
prairies fleurant bon l’Ouest américain. de la vigne et du vin ! Benoist Simmat par Alain Moses, très investi de l’autre
En fait : ils redoutent une invasion de (*) Nicasio Land Owners Association côté de l’Atlantique.
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 15

Le vin au régime dans
les hypermarchés
Les professionnels ne parlent que de ça :
les ventes de vin sont en baisse dans la
grande distribution. Du coup, chaque
enseigne cherche des parades. Chez
Auchan, on envisage de diviser par deux
le nombre de références proposées
au rayon vin. Sachant qu’un magasin
moyen vend jusqu’à 650 vins différents,
les producteurs vont devoir jouer des
coudes pour conserver leur place.
Cantenac Brown,
un margaux chez Urgo
La vente s’est déroulée discrètement
fin décembre 2019. La famille Le Lous,
propriétaire du groupe pharmaceu-
tique Urgo, a acquis le château Cantenac
Brown, troisième cru classé de Margaux.
Originaire de Chenôve en Bourgogne, la
famille voue une passion pour les grands
vins de Bordeaux et entend moderniser
rapidement l’outil de production afin de
développer le travail parcellaire.
Michel Chapoutier :
cap sur le social
Michel Chapoutier passera en 2020 la
présidence d’Inter Rhône à Philippe
Pellaton, président des vignerons des
Côtes du Rhône et homme fort de la
cave de Laudun Chusclan. Jamais à court
d’idées, le patron de M.Chapoutier veut
investir dans l’action sociale, notamment
en faveur des familles monoparentales.
LE CHIFFRE DU MOIS
90 000
C’est, en tonnes, le volume de pesti-
cides utilisés en France en 2018.
Un chiffre en hausse spectaculaire :
21 % par rapport à 2017 alors que
le plan national de réduction des pro-
duits phytosanitaires, Écophyto, visait
à réduire de 50 % l’usage des pesticides
de synthèse en 2025. Cette hausse
signe naturellement l’échec de ce plan.
En direct
Dans le vignoble
Pékin, Beaune, Beyrouth…
Les “Cités du Vin” font florès
Le concept de “cité du vin” séduit les investisseurs du monde entier.
Sur le modèle bordelais, plusieurs projets devraient bientôt voir le jour.
L
e projet est impressionnant :
18 000  m² de scénographies
consacrées à tous les vignobles
du monde, des animations multi-sen-
sorielles, un auditorium, des espaces
gastronomiques et de dégustation, des
lieux d’expositions temporaires, un
budget d’une soixantaine de millions
d’euros, environ un demi-million de
visiteurs à l’année…
Non, il ne s’agit plus de la désormais
célèbre Cité du Vin de Bordeaux, mais
du futur Musée universel du vin. Un
ensemble considérable qui doit ouvrir
l’an prochain en Chine, dans le district
de Fangshan, à quarante kilomètres de
Pékin. Les Bordelais sont d’ailleurs les
accompagnateurs-partenaires de ce
projet ambitieux, financé à 100 % par
la capitale chinoise, qui a ordonné aux
architectes d’élever des bâtiments s’ins-
pirant… du village médiéval de Saint-
Émilion !
DES LIEUX D’APPRENTISSAGE
Ce nouveau pôle œnotouristique
majeur en Asie est d’abord le rêve d’un
businessman chinois, Weixing Tang.
Francophile et vigneron lui-même
depuis trente ans dans son pays natal, il
16 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Le futur Village
international
du vin de Pékin
regroupera
un musée et
des zones
commerciales.
D. R.
entend surfer sur l’irrésistible demande
chinoise, qui ne consiste plus seulement
à déguster du vin (notamment borde-
lais), mais à en assimiler la culture et les
codes. « Ces cités à vocation universelle sont
des lieux d’histoire et d’apprentissage, leurs
objectifs sont éducatifs et ludiques », résume
Jean-Marc Menant, du groupe de Tang
(BVF), et directeur général du futur
Village international du vin de Pékin.
Celui-ci comprendra le “musée” mais
aussi des zones d’activités commerciales
ou hôtelières, ainsi qu’une pépinière de
start-up et même un vignoble bio !
UNE CITÉ DU VIN À BEYROUTH ?
Comme à Bordeaux, Pékin veut doper le
business autour non de la simple consom-
mation du vin mais de ses aspects “civili-
sationnels”. La future Cité des vins et des
climats de Bourgogne (Beaune, Chablis
et Mâcon), dont les travaux démarrent
ce printemps, s’inscrit évidemment
dans ce paradigme. D’autres suivront,
ce nouveau segment de marché a le
vent en poupe. Des projets sont discutés
jusqu’à… Beyrouth, les vins de la Bekaa
étant considérés comme les plus fameux
de la région depuis l’Antiquité.
Benoist Simmat

Le janvier noir (et sec)
du vin à Paris
La grève contre la réforme des retraites
a impacté le marché du vin à Paris. Les
restaurateurs qui affichent des baisses
de CA de 30 à 40 % ont coupé les com-
mandes et les cavistes ont vu leurs
chiffres plonger pendant les fêtes, cer-
tains d’entre eux étant dans une situa-
tion très précaire. Si on ajoute à cela le
Dry January, janvier 2020 est l’un des
pires mois jamais vus dans le secteur.
La famille Perrodo
s’entiche de Jurançon
Après l’acquisition des châteaux
Labégorce, Labégroce Zédé, Marquis
d’Alesme Becker et La Tour de Mons
à Margaux, la famille Perrodo, riches
pétroliers bretons, investit les coteaux
de Jurançon en achetant le domaine
Guirardel. Ce magnifique vignoble de
cinq hectares en bio se situe à Monein,
non loin du site industriel de Total à Pau.
Brad Pitt va faire
du rosé en Champagne !
Après le succès du rosé Miraval en Côtes
de Provence, Brad Pitt, accompagné par
Marc Perrin du château de Beaucastel,
prépare un coup d’envergure mondiale :
un champagne rosé sous la marque
Miraval. Le vinificateur Rodolphe Péters
(Champagne Pierre Péters) va ciseler
pour eux une cuvée à dominante de
chardonnay structurée par une saignée
de pinots noirs de Vertus. 15 000 flacons
de ce premier tirage sont attendus en
2023. Le prix n’est pas connu.
De Boisseyt : les bonnes
ondes de Romain Decelle
Deux ans et demi après la reprise des
11 hectares du domaine De Boisseyt à
la famille Chol, Romain Decelle signe
un 2019 prometteur en Saint-Joseph
et Côte Rôtie. Seul aux commandes du
domaine depuis le retrait de son ex-as-
socié Pierre-Jean Villa, le fils d’Olivier
Decelle apporte déjà sa touche, avec une
récolte de raisins légèrement avancée
qui donne plus de tension aux vins.
En direct
Dans le vignoble
Hommage à Pierre Galet
Le plus grand ampélographe du XXe siècle s’est éteint à presque 100 ans.
Il avait reconnu plus de 10 000 cépages et publié des dizaines d’ouvrages.
Q uel professionnel de la vigne
et du vin n’a pas dans sa biblio-
thèque au moins un ouvrage de
Pierre Galet ? Lorsqu’il débute sa car-
rière comme contrôleur de la protection
des végétaux, les travaux sur l’ADN n’ont
encore pas vu le jour. Son esprit scienti-
fique s’appuiera sur la seule observation
physique et sur la botanique pour porter
à son plus haut niveau la science de l’am-
pélographie. Il deviendra la référence
absolue de ce domaine de la viticulture
et mettra en lumière l’excellence de
cette école française née au XIXe siècle
avec les travaux de Jules Guyot.
EXPERTISE IRREMPLAÇABLE
Ses mesures codifiées des feuilles,
formes, dentelures, longueurs et angles,
lui ont permis de classifier une myriade
de variétés, un seul coup d’œil lui suffi-
sait pour identifier un cépage, une sorte
de reconnaissance faciale avant la lettre.
L’intelligence artificielle sera-t-elle
capable un jour de remplacer son exper-
tise ? Sa cinquantaine de livres, dont
Cépages et vignobles de France, Précis d‘am-
pélographie pratique, Dictionnaire encyclo-
pédique des cépages et de leurs synonymes,
ont été édités dans le monde entier et
son enseignement au diplôme national
18 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Pierre Galet :
l’excellence
de l’école
française
E. Perrin
d’ampélographie.
d’œnologue de Montpellier a été suivi
par des générations d’étudiants. On peut
à ce propos s’inquiéter de la désaffection
actuelle pour cette discipline exigeante.
Son successeur Jean-Michel Boursiquot
vient de prendre sa retraite.
Outre la reconnaissance de quelque
10 000 cépages, il détaillera 100 variétés
dans la famille des pinots. Cet homme
curieux a arpenté tous les vignobles du
monde mais s’est aussi attaché à réper-
torier les vignes sauvages ou spontanées,
à l’origine de nos pieds de vignes actuels.
Il en enrichira les collections culturales
comme celle du domaine de Vassal.
Expert international, il précisera
qu’un certain pinot californien ne pou-
vait être que le melon de Bourgogne.
C’est lui qui mettra en garde contre la
faible résistance au phylloxéra du porte-
greffe utilisé dans l’ouest des États-Unis,
avant que ne se déclenchent à nouveau
les ravages du puceron, un comble au
pays des vignes indigènes résistantes.
Pierre Galet nous a quittés juste avant
ses 100 ans mais il ne va pas pour autant
arrêter ses recherches. Grâce à lui, nous
avons une bonne chance de connaître
enfin l’encépagement des vignes du
Seigneur.
Pierre Casamayor
 En direct
Dans le vignoble

L’HISTOIRE Championnat de dégustation avec Spiegelau

L’émulation Le duo Rotiers / Berger
par l’étiquette ! survole l’épreuve champenoise
Rencontre au sommet à Ville-sur-Arce. Impressionnants, les champions
L’un des héritiers de château belges surclassent leurs adversaires et décrochent un nouveau record.
Talbot propose des bouteilles
interactives via sa société
Maison Corbie.

S i vous achetez un cahors, un beaujo-

lais ou un vin de Pays d’Oc de la jeune
maison Corbie (entre 9 et 12 euros pièce)
chez le caviste, voici ce qui risque de se
passer. En scannant l’étiquette interac-
tive, la modeste bouteille va vous faire
entrer dans un jeu vous initiant à l’art de
la dégustation.
« Nous voulions non seulement vendre du
vin, mais surtout éduquer les amateurs à ses
subtilités en favorisant une vertueuse émula-
tion entre eux ! », résume Gustave Bignon,
26 ans, issu d’une lignée bordelaise (pro-
priétaire de château Talbot, cru classé de
Saint-Julien), qui a créé son affaire pari-
sienne fin 2019 avec François Delaporte,

D. R.
un camarade d’études à l’Essec.
Les deux compères ont démarré Les cinq équipes qualifiées pour la finale posent avec Clotilde Colla, de Chassenay d’Arce.
avec un stock de trois mono-cépages

simples à appréhender (malbec, gamay,
cabernet-sauvignon) et espèrent passer
rapidement à des cuvées plus racées,
par exemple issues de pinot noir ou de
syrah. Le jeu va se corser !
Gustave Bignon (à g.) et François Delaporte
ont créé leur société l’an dernier.
L
a deuxième étape du cham-
pionnat de France 2020 avait
lieu le 7 décembre, accueillie
par le champagne Chassenay d’Arce
B. S. à Ville-sur-Arce, dans la Côte des Bar.
Cinquante-huit équipes étaient en lice
pour décrocher une place en finale
nationale, le 6 juin. Il y avait du talent au
mètre carré : les champions du monde
français (2019) et belges (2018) étaient là.
Olivier Rotiers et Philippe Berger ont
survolé l’épreuve devant leurs coéqui-
piers en équipe nationale, le colonel
Henri Rossignol et Philippe Haid,
pulvérisant au passage le record de
points. Trois autres équipes ont assuré
leur qualification et se retrouveront à
Châteauneuf-du-Pape en juin prochain.
Un grand merci à la cave de Chassenay
d’Arce et aux vignerons dont les vins ont
été dégustés. Rendez-vous le 7 mars à
Vouvray. Philippe de Cantenac
Inscriptions et renseignements  :
championnat.degustation.rvf@gmail.com
D. R.
Le classement :
1ers : Olivier Rotiers / Philippe Berger
2e : Henri Rossignol / Philippe Haid
3e : Sabine Merdinoglu / Hakim Mireau
4e : Guy Bosseler / Jules Hoffelt
5e : Christophe Boyet / Emmanuel Olive
Les vins dégustés :
Champagne blanc de blancs 2008,
Chassenay d’Arce ; chablis Les Vénérables
2015, La Chablisienne ; saint-joseph rouge
Clef de Sol 2018, domaine Jolivet ; alsace
riesling Grand cru Altenberg de Bergbieten
Cuvée Henriette 2017, domaine Frédéric
Mochel ; vin de France La Carrée 2015,
domaine Henri Milan  ; saint-amour
La Folie 2017, domaine des Pins ; saint-
nicolas-de-bourgueil Origine 2018,
domaine des Valettes ; marsannay 2016,
Jean-Claude Boisset ; cahors Les Acacias
2017, Mas del Périé ; saint-estèphe 2015,
château Capbern ; vacqueyras La Canta-
relle Vieilles vignes 2017, domaine
La Garrigue ; jurançon moelleux Caubeigt
2017, domaine Castera.

20 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 En direct
Dans le vignoble

Grands Prix 2020 de La RVF

Un podium à couper le souffle
É
toile mondiale de l’ultra-trail et vigneron en Beaujolais,
l’athlète François D’Haene a reçu son prix de “Personnalité
de l’année” sous les acclamations des 370 invités réunis
dans la magnifique salle de réception de la mairie du Ve arrondis-
sement de Paris, le 7 janvier dernier.
Dominique Hauvette avait oublié quelques heures ses quarante
chevaux et les Alpilles pour être fêtée “Vigneronne de l’année”. Puis
Photos : R. Grman
vint le tour de Jean-Marie Guffens, de Bastien Jolivet, vigneron à
Saint-Joseph et brillamment présenté par Olivier Poussier,
d’Olivier Labarde, caviste à La Part des Anges à Nice, d’Arnaud
Lesgourgues du château de Laubade, de Jean-Louis et Andrée
Trapet, de l’équipe du champagne Nicolas Feuillatte…
Les douze personnalités de l’année se sont ensuite mêlées à la
foule pour trinquer au champagne Vintage 2012 de Pol Roger.

De gauche à droite : Arnaud Lesgourgues (château de Laubade), Philippe Bardet et Marie-Catherine Dufour (SME Bordeaux), Julien
Desplans (maison Verget), Marie Chantereau et Michel Seidel (restaurant La Gare), Denis Saverot, le champion François D’Haene, “Homme
de l’année”, Dominique Hauvette, Christophe Juarez (Champagne Nicolas Feuillatte), Frédéric Vital, Florent Ettinger et François Hervé
(Auchan Cloche d’Or), Jean-Louis et Andrée Trapet, Bastien Jolivet (domaine Jolivet), Olivier Labarde (La Part des Anges) et Olivier Poels.

La maire du Ve arrondissement de Paris, Florence Berthout,

fervente ambassadrice de l’art de vivre à la française.
La “Vigneronne de l’année”, Dominique Hauvette avec
François Morinière (ex-patron de L’Équipe et président
du directoire du groupe Labruyère) et Denis Saverot.

Ils boivent et courent tous les deux : l’utra-traileur

La cérémonie des Grands Prix de La RVF est sponsorisée par :
François D’Haene, “Personnalité de l’année”,
et Olivier Poussier, Meilleur sommelier du monde.
 En direct
Dans le vignoble

Les Champenois Anne et Antoine Malassagne (A.R. Lenoble) Deux stylistes du cabernet franc de Loire : Leur maison d’hôtes à Gevrey est l’une des meilleures adresses dans le vignoble : bravo
et une fan de belles bulles, Karine Valentin (La RVF). Benoît et Yannick Amirault, avec Olivier Poussier. à Jean-Louis et Andrée Trapet , ici avec Marie Barthelmé (à g.) et Caroline Furstoss.

David Biraud, chef-sommelier

du Mandarin Oriental, a trinqué avec
l’Alsacien Félix Meyer (Meyer-Fonné).

Les cadors des blancs de Loire : Jacky Blot

Une brochette de fins palais : Jean-Dominique Vacheron, Philippe Bardet (maison Loron),
(La Taille aux Loups), père du Triple Zéro, Louis-
Jacques Devauges (Clos des Lambrays), Thierry Germain (domaine des Roches Neuves),
Benjamin Dagueneau et sa compagne Johanna.
Vincent Goumard (Mas Cal Demoura) et Jean-Pierre Chevallier (château de Villeneuve).

Il a emballé la salle : Jean-Marie Guffens

(maison Verget), “Négociant de l’année”,
et Alaric de Portal (Vente à la propriété). Charline Drappier et Didier Gimonnet
(Gimonnet et fils) : le mariage de
la Côte des Bar et de la Côte des Blancs !
Deux valeureux vignerons du Muscadet,
Marie et Pierre-Marie Luneau (Luneau-Papin),
aux côtés de Denis Saverot.
Catherine Jolivet peut être fière de son fils
Bastien : vigneron à Saint-Joseph,
il est notre “Découverte de l’année”.

La vaillante Gascogne et le puissant Béarn :

Dominique Andiran, Jean-Jacques Lesgourgues
(ch. de l’Aubade, prix du “Spiritueux de l’année”) On n’oublie pas la Côte des Blancs ! Pierre et Sophie Larmandier (Larmandier- Fuissé, Mauves et Rully : Denis Jeandau,
et Jean-Marc Grussaute (Camin Larredya). Bernier) étaient là, ici avec Aurélien et Jessy Suenen (champagne Suenen). Jérôme Coursodon et Vincent Dureuil avec le jeune
caviste qui monte à Paris, Louis Renauld (228 litres).

Nicolas Feuillatte, groupement de vignerons 2020 !

Ici, le talentueux chef de cave Guillaume Roffiaen
(écharpe), Anne-Laure Domenichini, la présidente Anthea Martinenghi, la caviste de La RVF,
Véronique Blin et le directeur Christophe Juarez. récompense Olivier Labarde (La Part Amalric Poncet (éditeur de La RVF) et Jérôme Baudouin, Patrice Duclos (Maserati)
des Anges, à Nice), “Caviste de l’année”. nouveau rédacteur en chef de la Revue (à d.). et Thomas Herson (La RVF).
 En direct
Dans le vignoble

LE LIVRE DU MOIS L’IMPROBABLE DU PROFESSEUR FABRIZIO BUCELLA

Liber Pater,
la BD des vanités
Beethoven
était-il alcoolique ?
N
ous célébrons le 250e  anni-
versaire de la naissance de
Beethoven, mais tout et son
contraire a été dit à propos de sa mort.
Le rapport d’autopsie, commandé par
testament par Beethoven lui-même, a
été traduit du latin vers l’anglais, puis de
l’anglais vers le français.
Techniquement, Beethoven serait
mort d’une défaillance du foie sur cir-
rhose alcoolique, compliquée d’une
D’où venait le plomb trouvé dans le
corps de Beethoven ? On a évoqué sa
vaisselle. Mais l’usage de ses carafes et
assiettes ne peut à lui seul expliquer les
concentrations mesurées.
L’autre hypothèse, plus sérieuse, est
que le compositeur ingérait du plomb
dilué dans… le vin, dont il raffolait.
Longtemps pauvre, le fameux musi-
cien buvait des vins médiocres, souvent
fortifiés au litharge (ou monoxyde de

C et album est une bande dessinée.

Les éditions Glénat ne prennent pas
le train en marche puisque le catalogue
péritonite, la pancréatite pouvant s’ex-
pliquer par l’abus d’éthanol.
Le maître était-il alcoolique ? Même
plomb) afin de les adoucir et de retirer
leur piquant. Interdite, la pratique était
usuelle. Le journaliste Jacques Dupont la
de BD de la maison comprend déjà une s’il n’est plus là pour nous en vouloir, il décrit dans son ouvrage Choses bues.
soixantaine d’albums dédiés aux vins ! serait gênant de le faire passer pour un Le saturnisme peut créer un cycle
Peut-être les lecteurs se sou- buveur pathologique alors qu’il n’était auto-entretenu : l’excès de plomb induit
viennent-ils, c’est un peu ancien, peut-être qu’un buveur raisonnable. des crises d’agressivité, des migraines et
qu’en 2011, La Revue du vin de France a Plus récemment, on a proposé une un état dépressif que Beethoven soula-
décerné le prix “Découverte de l’année” explication nouvelle et insolite, celle de geait par du vin… chargé en plomb.
à un certain Loïc Pasquet, vigneron l’intoxication au plomb. Des analyses À côté de son lit de mort, on a trouvé
dans les Graves, élaborateur, inventeur, récentes des cheveux et des os montrent des bouteilles de vin de Mayence. Les
devrait-on dire, d’un vin (rouge) spécial que le compositeur mort à Vienne en voyant, Beethoven aurait murmuré :
baptisé Liber Pater. 1827 était atteint de saturnisme, le dieu « Hélas, hélas… trop tard ». Ses derniers
Plus récemment, cette chronique était Saturne étant le symbole du plomb pour mots. Fabrizio Bucella
titrée : “Le livre le plus important depuis les alchimistes du Moyen Âge. Professeur à l’Université libre de Bruxelles
l’invasion phylloxérique”. De quoi s’agis- Selon des travaux récents, Beethoven a pu s’intoxiquer en buvant du vin fortifié au litharge.
sait-il ? Toujours de Loïc Pasquet et de
son vin Liber Pater (lire La RVF n° 626,
novembre 2018).
Après avoir regardé et lu la bande des-
sinée, vous saurez tout sur Loïc Pasquet,
un écolo new style déterminé à devenir
célèbre, sur ses combats contre l’Inao,
un organisme qui se veut moderne mais
qui est archaïque, parfois despotique.
Vous saurez tout sur la vie en province
quand vous devenez quelqu’un et sur
l’art de la vigne et du vin.
Une information ne figure pas dans
le livre : « Quel est aujourd’hui le vin le plus
cher du monde ? », se demandent sou-
vent les curieux. Eh bien ce n’est plus la
Romanée-Conti mais… Liber Pater. Il a
fait du chemin, Loïc le conquérant !
Bibliothèque du Congrès

Michel Dovaz

Liber Pater, le goût du vin retrouvé

Corbeyran et Horne, 21 x 29 cm, 120 p.,
24 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

Michel et Nicolas Maillart, père et fils, partagent la même passion pour les voitures anciennes.
Hotchkiss Coupé Basque
L’inestimable trésor de Michel Maillart
Le vigneron champenois a mis dix ans pour restaurer son rarissime
coupé de 1935 carrossé par Chapron et ayant appartenu au prince Murat.
L
e terroir d’Écueil, sur la
Montagne de Reims, recèle des
trésors de bulles dorées aux
arômes subtils et délicats. Comme chez
les Maillart, vignerons depuis 1753,
avec leurs champagnes Mont Martin
ou Chaillot Gillis Premier cru dont la
richesse permet de se contenter d’un
très faible dosage en sucre (2 g). Mais une
des remises du domaine abrite un autre
trésor. Il n’y en a plus que trois de la sorte
en France : une Hotchkiss Coupé Basque
de 1935 carrossée par Chapron. Michel
Maillart père l’a déniché en 1991. Sa res-
tauration a pris dix ans.
DÉGRIPPÉE AU COCA-COLA
« Cette belle auto avait naguère appartenu
au prince Murat. Avant de connaître sa
déchéance par sa transformation en camion-
nette ! Et devinez avec quoi j’ai décoincé le
moteur qui était grippé ? Du Coca-Cola ! »
En direct
Dans le vignoble
P. Genet
Son attirance pour cette vieille marque
française remonte chez lui à l’enfance.
« Dans les années 50, notre voisin s’était acheté
d’occasion une Hotchkiss d’avant-guerre qui
me faisait rêver. Pour moi, les carrosseries les
plus élégantes sont celles des années 30. Et la
plus belle est ce coupé 2 250 cm3 4 cylindres
que j’ai longtemps cherché. »
Ses deux passions, vins et vintage, il
les a aussi transmises à son fils Nicolas
qui a pris la relève sur le vignoble de
16 hectares en 2003 après avoir bour-
lingué en Afrique du Sud, en Espagne et
dans l’Oregon pour parfaire sa forma-
tion à Bordeaux et Montpellier. Depuis,
l’export représente 50 % des ventes du
domaine qui est monté en gamme avec
des cuvées parcellaires très affinées. Et
le garage s’est enrichi de quelques nou-
velles voitures anciennes. Pour le père,
et le fils.
Philippe Genet (vinsetvintage.fr)
26 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
L’AVIS DU JURISTE
Bordeaux, terre
d’élection des
marques pièges ?
L
e 12 décembre 2019, le tribunal
correctionnel de Bordeaux a
condamné pour pratique com-
merciale trompeuse à 200 000 euros
d’amende la société Les Notables de
Maucaillou, ainsi que son président
Pascal Dourthe, par ailleurs proprié-
taire du château Maucaillou (Moulis-en-
Médoc), à 20 000 euros d’amende, dont
10 000 avec sursis.
L’objet du litige ? La commerciali-
sation, entre 2015 et 2019, d’un vin de
négoce d’appellation Bordeaux supé-
rieur, Le Bordeaux de Maucaillou, ne
provenant pas des parcelles du château
Maucaillou mais dont la présentation
pouvait, selon les magistrats, laisser
croire le contraire aux consommateurs.
L’étiquette reprenait en effet un uni-
vers visuel proche de l’étiquette du
Château Maucaillou, avec notamment
la reprise de la gravure du château, une
typographie identique ainsi qu’une forte
mise en avant du nom Maucaillou par
rapport aux termes “Le Bordeaux de”.
Les juges ont ainsi considéré que « le
consommateur normalement informé et
raisonnablement attentif s’attend à ce que le
“Bordeaux de Maucaillou” vienne du châ-
teau Maucaillou ». Bien que ce dossier
soit loin d’être terminé, il faut noter que
la marque litigieuse a d’ores et déjà été
modifiée et que le produit se nomme
aujourd’hui “Le B de Maucaillou” avec
un graphisme nettement différent.
Cette décision, après les récentes
affaires Clinet / Ronan By Clinet, Pétrus /
Pétrus Lambertini ou encore Figeac /
Cormeil Figeac, souligne la complexité
et les risques qui peuvent exister lorsque
l’on souhaite décliner un nom de châ-
teau, notamment dans le Bordelais. La
prudence s’impose donc en la matière.
D’autres propriétés sont d’ailleurs
aujourd’hui concernées par cette pra-
tique et plusieurs décisions devraient
être rendues dans le courant de l’année.
Jean-Baptiste Thial de Bordenave
Juriste - directeur de DLLP Wine

D. R.
Une fois n’est pas coutume, l’artiste a choisi le bleu pour illustrer l’étiquette de Mouton Rothschild 1976.
Pierre Soulages
Quand le maître de l’Outrenoir
se souvient de la vigne et du vin
Régisseur d’un domaine durant la guerre, le peintre travailla dans la vigne.
P
ierre Soulages a eu 100 ans. Le
Louvre, en partenariat avec le
Musée Soulages de Rodez, lui
consacre une exposition exception-
nelle. Un événement rare pour un artiste
vivant. Considéré comme l’un des plus
célèbres peintres et graveurs français
des XXe et XXIe siècles, ce maître de l’abs-
trait n’aura eu de cesse d’évoluer et de
magnifier la couleur noir au point de lui
inventer un mot : l’Outrenoir. Un noir de
résine qui irradie sur d’immenses toiles.
La puissance qui se dégage des œuvres
de Soulages s’accorde à la taille de leur
créateur, 1 m 90. Une carrure de rug-
byman propice aux travaux de la vigne.
INSPIRÉ PAR LE JUS DU MANSOIS
Pierre Soulages est né le le 24 décembre
1919 à Rodez, dans l’Aveyron. Son père
carrossier est fabricant de charrettes.
Il grandit dans le quartier de la rue
Combarel, où il observe le travail des
artisans. Sa créativité artistique s’est
nourrie de ces gestes d’antan et des
matériaux qu’il affectionne, le cuir et la
cire du cordonnier, les effets auburn du
brou de noix dont sont maculés les vête-
ments des charpentiers… et les outils du
tonnelier. Car en ces années 20, les vins
de l’Aveyron prospèrent. Les spectres du
phylloxéra, de la Première Guerre mon-
diale et de l’exode rural ne planent pas
encore sur ce vignoble où s’épanouit le
mansois, l’autre nom du fer servadou.
En direct
Dans le vignoble
Son jus presque noir a probablement
marqué l’esprit de l’artiste.
Aux Beaux-Arts de Montpellier, Pierre
Soulages rencontre sa femme, Colette.
Montés à Paris, ils vivent dans une cer-
taine misère. Heureusement, l’envoi
mensuel d’un baril de 30 litres de vin par
le père de la jeune femme leur permet de
troquer quelques bouteilles contre de la
viande chez le boucher du quartier.
HAUT-BRION A SA PRÉFÉRENCE
Fuyant le STO en 1942, il passe le reste
de la guerre près de Montpellier. Des
vignerons le cachent, il devient régis-
seur du domaine viticole de La Valsière.
Son voisin, l’écrivain héraultais Joseph
Delteil, réfugié dans sa propriété de
La Tuilerie de Massane, se souvenait
qu’« un jour, au beau milieu d’une vigne, je
le vois. Il s’approche. […] Et nous avons sym-
pathisé ». Mis en confiance, l’artiste lui
montre ses travaux : « Des arbres l’hiver,
proches d’une sculpture abstraite ».
Pierre Soulages est un vrai connaisseur
de la vigne et du vin, il en maîtrise tous
les aspects techniques. Quant à livrer ses
vins préférés, il faudra une rencontre
avec l’écrivain Jean-Luc Schilling, auteur
de l’Éloge immodéré du vin de Bordeaux,
pour qu’il avoue aimer le vin de château
Haut-Brion. Un cru de légende digne
d’un grand homme, d’un grand artiste.
Corinne Lefort
www.louvre.fr/expositions/soulages-au-louvre
28 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
L’AGENDA
4 dates
à ne pas manquer
Par Claudine Abitbol
Du 22 février au 1er mars
Salon international
de l’Agriculture à Paris
Le Concours général agricole des vins
accueille les AOC et IGP exclusivement
issues des régions viticoles françaises. À
Paris Expo, Porte de Versailles.
Site : www.salon-agriculture.com
Du 28 février au 30 mars
Salon Vins et Gastronomie
Ce salon itinérant réunit les petits et
grands vignobles français et présente
les spécialités culinaires de chaque
région. Parmi les nouveautés, un espace
de restauration : le food court (crêperie
bretonne, chalet alsacien, comptoir des
champignons, bar à huîtres…). Mais
aussi un village à bières, un parcours
dédié aux produits certifiés bio… Du
28 février au 1er mars à Metz, du 14 au
16 mars à Vannes, du 20 au 23 mars à
Caen et du 28 au 30 mars à Quimper.
Site : www.salons-vins-gastronomie.fr
Du 9 au 13 mars
Les Grands jours de Bourgogne
Les 84  appellations de Bourgogne
célèbrent le millésime 2018. Les visiteurs
pourront participer à douze dégusta-
tions itinérantes, de Chablis à la Côte
chalonnaise. Ce parcours permettra de
découvrir près de 6 000 vins en cinq jours
et de fêter les 20 ans de l’AOC Irancy.
Site : www.grands-jours-de-bourgogne.fr
Les 27 et 28 mars
Le Salon des Vins d’Abbayes à Paris
Cet événement rassemble les vins
d’abbayes tous issus de terroirs histo-
riques travaillés depuis le XIIe siècle. Les
abbayes proposeront aussi des bières,
huiles d’olive et miels. Des master class
seront animées par les vignerons. 5, rue
de l’abbaye, dans le quartier de Saint-
Germain-des-Prés. Entrée 5 €.
Tél. : 06 63 06 67 39
www.lesvinsdabbayes.fr
www.lesvinsdabbayes.com
 En direct dans le vignoble
Tribune

C’est Sauternes qu’on abîme !

Par Alexandre de Lur Saluces
Les liquoreux se vendent mal, Sauternes cherche des solutions
et brise les codes. De nouveaux propriétaires tels Silvio Denz
(Lafaurie-Peyraguey) ou Robert Peugeot (Guiraud) soutiennent
le service du sauternes sur glace ou en cocktail. Encore plus
perché, Dérek Rémy Smith invite à déguster son Rayne Vigneau
au sommet d’un arbre. Cette créativité débordante agace
au plus haut point la figure tutélaire de Sauternes, Alexandre
de Lur Saluces, propriétaire du château de Fargues, longtemps
aux commandes du légendaire château d’Yquem. La rédaction
sélectionner les raisins attaqués par la pourriture du
champignon botrytis cinerea. Ce parasite existe dans tous les
vignobles du monde mais à Sauternes il permet d’obtenir
un vin exceptionnel.
Elle a choisi la route la plus contraignante parce que
c’était celle qui avait le plus d’avenir. Avec les crus voi-
sins d’Yquem, elle a préféré la voie la plus difficile. On dit
aujourd’hui « innovante ». Plus de travail, moins de vin. La
loi limite nos rendements à 25 hectolitres à l’hectare. Mais
pour obtenir la meilleure qualité, les crus les plus recher-
chés ne parviennent, ces dernières années, qu’à environ

«V ous venez d’arriver dans cette appellation 17 hl/ha quand la nature et la météo sont généreuses, soit
mythique, et c’est une bonne chose que cet 2 266 bouteilles de 0,75 litre par hectare. Sur vingt ans, pen-
intérêt. Mais vous semblez convaincus qu’en dant lesquels sont inventoriées toutes les catastrophes,
l’état, elle n’a aucun avenir. Que ce vin appartient au passé. gel, grêle, sécheresse, maladies, je table à titre personnel
Vous voulez donc l’améliorer par diffé- sur 1 200 bouteilles avec 6 500 pieds de
rents subterfuges : des glaçons dans les vigne à l’hectare. Un verre par pied de
verres, des zestes d’orange ou de citron, vigne.
de l’eau pétillante… Votre argument alors est de dire que
Votre idée n’est pas nouvelle. Déjà, le prix de la moindre bouteille revient
avant la Première Guerre mondiale, ce à un chiffre que les amateurs n’en-
vin affrontait une crise qu’on a cherché tendent pas débourser.
à conjurer en… “champagnisant” le jus Vous avez raison notre vin est cher à
récolté en Sauternais. Échec et mat ! produire. Comme une montre d’ex-
Vous savez donc ce qui arrivera à votre ception, un bijou rare, le caviar, l’eau au
expérience malgré tous les « Oui mais milieu du Sahara… Et là, il y a un autre
nous… ». obstacle que vos cocktails ne permet-
En réalité, vous n’avez pas cru néces- tront pas de franchir. C’est un obstacle
saire d’apprendre l’histoire du sau- commercial et un problème de promo-
ternes, vous êtes pressés. tion. C’est aussi un choix.
Avec un peu d’observation, vous Votre obstination à croire que le
sauriez comment Yquem et ceux qui sauternes doit être dégusté avec des
l’entourent, les Premiers et Seconds additifs pour l’améliorer, alors qu’il le
V. Bengold

crus de Sauternes, les devanciers des dénature, serait mieux utilisée à la pro-
XIXe et XXe siècles, avaient choisi une motion de la vérité du vin de Sauternes,
Alexandre de Lur Saluces
politique de sélection rigoureuse pour le vrai, l’authentique, l’original qui a été
élaborer le vin qui a pris le nom de cette commune. Cette très mal transmise ces dernières années.
très exigeante façon de récolter a inspiré les décrets défi- Vos interventions médiatiques sont un camouflet pour
nissant l’appellation auxquels mon prédécesseur à Yquem, tous ceux qui nous accompagnent et travaillent dans nos
Bertrand de Lur Saluces, alors président de l’Union des vignes, nos chais, qui vivent le sauternes, qui vivent du sau-
syndicats des vins de Sauternes et Barsac, avait travaillé. ternes, qui habitent le Sauternais. Il y a de l’arrogance à pré-
Par contre, avec la “mixologie”, terme qui recouvre des tendre « améliorer » notre vin de Sauternes. Comment, par
artifices, vous vous mettez sur une voie de garage avec une exemple, attendre de nos vignerons, de nos vendangeurs
énergie qui sera terrible à la rencontre du mur. Votre répu- de s’investir pour que coule des pressoirs un jus sélectionné
tation risque d’être atteinte. avec tout le temps et le soin nécessaires s’ils soupçonnent
Sans doute pensiez-vous à un choc comme moyen mar- qu’en définitive, leur travail servira à faire du vin chaud
keting pour secouer le consommateur. Je vous en souhaite pour calmer la toux hivernale.
bonne chance. Il n’est pas si idiot et ne se laissera pas mani- Mieux écouter les amateurs, les vrais, avant de savoir ce
puler. Il reviendra au vin d’origine, issu du choix qu’avait qu’il faut leur offrir. Le vin de Sauternes ne mérite pas une
distingué Françoise-Joséphine de Lur Saluces d’Yquem. amélioration mais une protection, celle qu’on accorde aux
Elle a eu l’intuition de demander à ses vendangeurs de témoins d’une civilisation. »

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 29

 En direct dans le vignoble
L’invité
Initié très tôt à
la calligraphie,
Lassaâd Metoui
a su la faire
évoluer en alliant
tradition
et modernité.
« Je voyage dans le vin
à travers l’odorat »
Comment avez-vous relevé le défi de « peindre l’ivresse »,
sous-titre de votre livre, vous qui ne buvez pas d’alcool ?
C’est une question qui me passionne depuis longtemps.
Comprendre pourquoi le vin est sacré dans les traditions
persanes et égyptiennes notamment. Au VIIIe siècle, dans
ces régions, il est une source poétique. Quant à l’ivresse, ma
mère dit que je suis né ivre, mais de femmes et de peinture !
Vous ne buvez pas de vin, mais vous adorez
le sentir.
Je cherche à voyager à l’intérieur de la matière
à travers l’odorat. Dès que j’en ai l’occasion,
lors de dîners avec des amis, dans des caves
viticoles, je prends plaisir à sentir le vin. J’ai
eu le privilège de réaliser l’expérience avec
de grands vins, comme ceux des châteaux
Haut-Brion, Cheval Blanc et du domaine de
la Romanée-Conti.
Plusieurs calligraphies du livre se nomment
d’ailleurs Parfums (photo ci-contre).
Je me représente le vin comme un parfum. Le parfum
est lié à la nature, à la sérénité de l’esprit, à une forme de
méditation, mais aussi à une part de magie, d’attachement
à l’autre, à l’espace et au temps.
Vous arrive-t-il d’acheter du vin pour le sentir ?
J’achète beaucoup de vin pour l’offrir. J’aime la compagnie
des gens qui boivent du vin. Avec mes amis Alain Rey (lin-
guiste et lexicographe, ndlr) et Amélie Nothomb, nous passons
du temps à parler de vin. Il y a une grande élégance chez les
gens qui aiment le vin, dans leur manière de tenir le verre,
de parler, de goûter. Ils donnent le sentiment de parler
avec l’âme.
30 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Lassaâd
Metoui
Dans Vin, Amour,
Volupté (*), l’artiste
calligraphe franco-
tunisien met en images
les poèmes d’Omar
Khayyâm, mathémati-
cien et poète persan
du XIe siècle, grand
amoureux de vin.
Propos recueillis
D. R.
par Baptiste Charbonnel
Le vin vous sert aussi d’encre !
La première fois que j’ai utilisé le vin, j’étais étudiant. Dans
un restaurant, à Lyon, une serveuse me demande de calli-
graphier son nom. Je n’avais pas de matériel, je lui ai donc
demandé un morceau de cageot pour fabriquer un calame
(une plume de calligraphie, ndlr), deux fonds de bouteilles
de vin pour l’encre et un stylo. Le résultat m’a beaucoup
marqué.
Que représente le vin selon vous dans
l’œuvre d’Omar Khayyâm ?
Pour lui, le vin est le paradis invisible. Tout ce
qu’il dit sur le vin au XIe siècle est incroyable.
Il n’y a pas d’équivalent.
Certains commentateurs affirment qu’il a le
vin triste. Ce n’est pas votre avis.
Il est très optimiste, il considère que boire
du vin est une forme de liberté, une façon de
voyager. Moi-même, je suis un bon vivant,
mes créations sont joyeuses, c’est pourquoi j’ai beaucoup
mis en scène le rouge, couleur de l’énergie vitale, et le bleu,
couleur de la rêverie, de l’élévation.
Comment avez-vous découvert les poèmes d’Omar
Khayyâm ?
Je connais ses textes depuis que je suis gamin. Ses poèmes
sont écrits en perse, mais ils ont été traduits en arabe par
de grands poètes égyptiens et chantés par les plus grandes
chanteuses égyptiennes. J’ai donc accédé à ses poèmes
sur le vin à travers des chansons. Un peu plus tard, j’ai pris
conscience de leur incroyable puissance et sensibilité. •
(*) Éditions Trédaniel, 261 pages, 36 euros.
 « J’ai choisi un bouchon restituant
toute la qualité du vin et ayant un
impact neutre sur l’environnement »
Frédéric Kast - Domaine L’alternative bis
en AOP Terrasses du Larzac

dtasted
blin
w. .c

om
93
RLD w

BY BEST
WO
E

S
O
M
ME pts
pts TH
LIER OF

www.vinventions.com

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération.


Une cave défaillante
changée grâce à La RVF
Suite à la parution du témoignage de
monsieur Brulefert, intitulé “Caves à
vins : les déboires des clients Avintage”
dans le courrier des lecteurs de La Revue
du vin de France (n° 638, février 2020),
nous tenons à préciser les points sui-
vants. Sitôt informés du problème,
nous avons pris le sujet en main et le
client a rapidement été contacté par
notre équipe et satisfait de la solution
apportée. Ce dernier a été victime d’un
dysfonctionnement via le service après-
vente de notre distributeur sur lequel
nous n’avons pas la main, mais que nous
ne souhaitons pas incriminer pour
autant. La situation a été réglée début
novembre 2019.
Didier Grychta
Directeur général Avintage, Groupe Frio
Je veux travailler dans le commerce des bulles
Passionné de vins et champagnes, j’ai
débuté ma carrière au sein d’un com-
merce (cave et bar à vins), puis comme
représentant et enfin animateur com-
mercial pour les CHR (cafés, hôtels et res-
taurants, ndlr) et la grande distribution.
Je compte revenir très prochainement,
dans cette activité. En effet, depuis dix-
huit ans, je suis agent commercial dans
la transaction immobilière profession-
nelle en Haute-Savoie et Savoie. Je côtoie
donc de nombreux professionnels de
l’hôtellerie-restauration, des entre-
prises, des commerçants, des artisans…
C’est pour cela que je souhaite revenir
dans la représentation des vins, en étant
exclusivement spécialisé dans les effer-
vescents, quelle que soit la clientèle que
l’on me confiera (CHR, BtoB, particu-
liers). Actuellement en recherche de
“bulles” à représenter et lecteur assidu
de La RVF, je sollicite vos conseils : avez-
vous publié un dossier spécial vins effer-
vescents que je n’aurais pas dans ma
collection ? De plus, que pensez-vous
des crémants et mousseux du domaine
Saint-Landor, près de Saumur, et des
Vignerons d’Aghione, en Corse ? Avez-
Courrier
des lecteurs
La RVF. Cher M. Grychta, nous
saluons la réactivité de la société
Avintage qui a su trouver
une solution au problème rencontré
par monsieur Brulefert.
Le souci, dans cette affaire, vient de
la gestion de la garantie par le reven-
deur, qui doit contractuellement
assurer le suivi auprès des clients.
Il est regrettable que le fabricant
de la cave, Avintage, n’ait été informé
des déboires de M. Brulefert qu’une
fois alerté par La Revue du vin
de France. Heureusement, l’affaire
se termine bien pour notre lecteur :
Avintage est intervenu et a rapide-
ment trouvé une solution
au problème de M. Brulefert.
Jérôme Baudouin
Shutterstock
Les “bulles” sont décidément à la mode,
chez les vignerons comme chez nos lecteurs !
vous goûté le Rose en Folie du domaine
du Château de la Valette, à Charentay ?
Le crémant du GIE Étoiles en Beaujolais,
à Fleurie ?
Nicolas Burie
Praz-sur-Arly (74)
Tél. : 06 47 87 78 53
E-mail : nicolas.burie@wanadoo.fr
32 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Alerté en
direct par
La RVF, le
fabricant
Avintage a
vite traité le
problème de
notre lecteur.
D. R.
La RVF. Cher monsieur Burie,
nous n’avons pas eu l’occasion
de goûter dernièrement les vins
que vous citez, mais nous allons
regarder. Outre notre dossier
annuel dédié aux champagnes,
notre dernier “Tour de France des
bulles” a été publié en novembre
2018, dans le numéro 626
de La Revue du vin de France. Nous
évoquions différents styles de
bulles que nous aimons, dénichées
un peu partout en France : dans les
huit régions productrices de
Crémant jusqu’à la Clairette de Die,
en passant par les méthodes ances-
trales de Loire et de Gaillac. Plus
récemment, dans le numéro 633 de
La RVF (octobre 2019), la somme-
lière Pascaline Lepeltier abordait
dans sa chronique “Vu d’ailleurs” la
folie de pétillants naturels à New
York en citant quelques exemples
de bonnes bouteilles. De plus
en plus de vignerons produisent
de belles bulles, nous y reviendrons
dans le courant de l’année 2020.
Alexis Goujard

Une vision claire du rosé
C her Sébastien Lapaque, enfin un
article pour évoquer le vrai rosé ! (La RVF
n° 637, décembre 2019 / janvier 2020). Si
certaines appellations ont toujours fait
du rosé “clair”, beaucoup d’autres ont
vite sombré dans l’effet mode (du blanc
ou du rosé) ou, comme disait mon beau-
père, du « vite bu, vite pissé ». Le goût étant
aussi discret que la couleur, ils ont vite
opté pour les “méthodes thiols” dont le
secret reste bien gardé pour ne pas faire
fuir les clients (les thiols sont des produits
sulfurés qui, révélés par des levures lors de
la fermentation, donnent à certains vins des
arômes exotiques, de pamplemousse, fruits
de la passion, etc., ndlr). Je vous remercie
Mon Yquem est-il du Yquem ?
J’ai eu la chance de recevoir à Noël un
flacon de Sauternes n° 4, mis en bou-
teilles au château d’Yquem dont je vous
envoie des photos (ci-contre, la contre-éti-
quette et l’étiquette de cette bouteille, ndlr). Ce
vin a une robe très sympathique, mais
c’est la seule information dont je dis-
pose : il n’est pas millésimé. Je suppose
qu’il s’agit d’un second vin d’Yquem,
mais je ne parviens pas à en savoir plus…
Pouvez-vous m’aider ?
Thomas Monpioux
thomas.monpioux@gmail.com
La RVF. Cher M. Monpioux, ce vin
n’est pas le grand Château d’Yquem.
Il s’agit d’un simple sauternes
produit sur la propriété mais destiné
uniquement au personnel de LVMH,
Œnologues : appelons un chat un chat
Chère RVF, c’est avec grand intérêt que
j’ai lu votre article sur l’évolution des
vinifications, des élevages et de la dis-
tribution des vins de Bourgogne pro-
duits par les négociants (La RVF n° 635,
octobre 2019). Suite à cette lecture, je
voulais vous faire part de précisions
concernant la catégorie professionnelle
des œnologues. Le titre d’œnologie, pro-
tégé par une loi, est strictement réservé
aux titulaires du Diplôme national
Courrier
des lecteurs
donc de votre article qui contribue à
rétablir la vérité sur le rosé de tradition.
Je suis vigneron dans les Côtes du Rhône
et j’ai toujours fait du rosé de macéra-
tion (raisins une nuit en cuves), je tire
le jus le lendemain. Mon rosé est très
apprécié des connaisseurs et boudé par
les commerciaux, mais cela ne me gêne
pas car je vends facilement ma produc-
tion. Si vous passez dans la région, venez
déguster mes côtes-du-rhône rosés et
blancs, ainsi que ma production princi-
pale, les vinsobres rouges.
Denis Vinson
Domaine du Moulin, 26110 Vinsobres
denis.vinson@wanadoo.fr
propriétaire d’Yquem. Destiné à une
consommation rapide, ce vin n’est
pas vendu auprès du grand public.
Roberto Petronio
d’œnologue (sauf cas exceptionnels de
personnes “titrées” de par leur haute
qualification scientifique). Il appa-
raît donc inutile d’indiquer « œnologue
diplômé » comme cela figure dans votre
article, notre confrère étant œnologue.
Le titre d’œnologue et le qualificatif
winemaker sont parfois utilisés avec une
certaine confusion. Le second signifie
vinificateur, terme sans doute plus
approprié pour certains des acteurs
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 33
On ne parle pas
assez de l’Ardèche
et de la Savoie !
Je trouve peu de notices sur les vins
d’Ardèche, notamment ceux du sud du
département. Or, j’y ai découvert des
domaines qui méritent, me semble-t-il,
un peu d’intérêt : le château de la Selve
et le domaine de Bournet à Grospierres,
la Cave La Cévenole et son fameux
Chatus à Rosières et la Cave de Ruoms,
entre autres. Par ailleurs, je suis surpris
de ne pas trouver, dans votre Guide des
meilleurs vins de France, le domaine
Jean Vullien & Fils et ses superbes vins
de Savoie. Vous ne pouvez distinguer
tous les vignerons de France, mais
celui-ci le mérite.
Georges Fratucello, Viuz-la-Chiésaz (74)
Tél. : 04 50 77 52 39
La RVF. Cher Monsieur, merci pour
vos recommandations en Ardèche,
nous les partageons volontiers avec
nos lecteurs. Concernant la Savoie,
son réveil est spectaculaire, porté
par une génération de vignerons
plus ambitieux. Notre Guide vert
s’efforce d’en rendre compte et
la place dédiée à la Savoie grossit.
Du domaine Jean Vullien, j’ai aimé
il y a peu le délicat et parfumé pinot
noir cuvée Jeannine en 2017 et 2018.
Moins les mondeuses. Si la cuvée
Saint Jean de la Porte 2018 se montre
prometteuse, la cuvée Château Saint
Philippe est, dans les derniers millé-
simes, trop marquée par le bois. Une
production à suivre avec intérêt.
mentionnés dans votre article. En
France, nous aimons appeler un chat…
un chat !
Christine de Mianville
Lhomme (72)
La RVF. Chère madame,
merci pour votre remarque.
Nous tâcherons à l’avenir d’éviter
cette confusion hélas fréquente.
Jean-Emmanuel Simond
 Réchauffement
Les 2003 issus de la canicule
ont-ils bien vieilli ?
L’année 2003 fut la première à battre tous les
records de chaleur, et la vigne fut mise à rude
épreuve. Comment les vins ont-ils évolué ?
Une dégustation pilotée par Pierre Casamayor
L
es canicules se multiplient, le changement climatique
va bon train. Il faudra nous habituer aux vendanges
sous un soleil ardent et aux vins généreux qui en
découlent. La précoce, soudaine et intense canicule de 2019,
où tous les records ont été battus et où l’on a vu périr des vignes
accablées de chaleur, nous a alertés. Elle suit un millésime 2015
ultra solaire et, bien entendu, l’année de tous les dangers, 2003
et sa cohorte de catastrophes sanitaires.
Il ne faudrait cependant pas oublier que les années de feu
ne datent pas de ce siècle ; 1945, 1947 et 1959 ont ainsi plongé
34 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
les vignobles dans la fournaise alors que l’on ne savait pas à
l’époque que le réchauffement allait s’emballer. Ces millé-
simes chauds de l’après-guerre ont d’ailleurs engendré des
vins de légende, personne ne s’en plaindrait.
UNE CONDUITE ADAPTÉE
Une canicule se présente comme une suite de jours où les tem-
pératures diurnes dépassent 35° C, avec des nuits où le ther-
momètre ne descend pas sous les 25° C. L’accumulation de ces
conditions, associée à la sécheresse, induit des dégâts impor-
tants sur les végétaux qui ont du mal à respirer.
Originaire du Moyen-Orient, la vigne est une plante accli-
matée au pourtour méditerranéen, elle est armée pour
résister à la chaleur et à la sécheresse. À condition que sa
Shutterstock
conduite soit appropriée : densité de plantation adaptée aux
sols et à la pluviométrie (10 000 pieds par hectare en Médoc,
 En année caniculaire,
le couple grand terroir et vieilles
vignes à enracinement profond
est la clef du succès.

2 500 en Languedoc) pour bien gérer la compétition entre les sont en revanche une bénédiction pour “sécher” le mildiou,
pieds ; taille judicieuse, souvent fondée sur une longue tradi- les traitements ultérieurs en seront réduits.
tion (palissage au nord contre gobelet en zone aride). Il ne faut donc pas s’étonner si les vins issus de ces millésimes
Le facteur essentiel, celui qui fait la différence en année extrêmes présentent souvent des sécheresses tanniques,
caniculaire, c’est la capacité des racines à s’alimenter en eau. les polyphénols n’ont pas atteint leur maturité alors que les
Il faut pour cela un terroir qui possède des réserves (mèches sucres galopaient et les acidités s’effondraient. Ajoutez à cela
de calcaire, argiles, horizons imperméables qui retiennent les la panique du vigneron qui a vendangé en catastrophe avant
nappes phréatiques) et que ces mêmes racines plongent assez maturité complète et vous comprendrez les profils de beau-
profond pour les atteindre. Le couple grand terroir et vieilles coup de vins de 2003 : des rouges soit surmaturés et secs, soit
vignes à enracinement profond est la clé du succès. Il faut par marqués par de la verdeur, et des blancs lourds ou végétaux
conséquent bannir les racines superficielles exposées à tous et, cerise sur le gâteau, des vins corrigés en acide tartrique ou
les dangers et raisonner en fonction des conditions locales, le sur-couverts en SO2, ce qui n’arrange pas leur moelleux.
travail du sol plus ou moins profond ou gérer l’enherbement.
Il faut également conserver du feuillage pour protéger les TIRER PARTI DES CONDITIONS EXTRÊMES
grappes du soleil direct. Ces vins ont-ils de réelles capacités de garde ? Les facteurs d’un
bon vieillissement sont connus, mais leur importance relative
LA VIGNE EN SOMMEIL mal comprise. Parmi ces facteurs, l’alcool, mais les grands mil-
Malgré ces précautions vigneronnes, il arrive un moment où lésimes médocains du début du XXe siècle titraient à peine 11° ;
la vigne a trop chaud ! Sa réaction est de se mettre en sommeil, l’acidité, mais les grands hermitages blancs vieillissent admira-
de fermer les stomates de ses feuilles à tout blement avec des pH élevés. Ce qui importe
échange avec l’extérieur. Il s’ensuit un blocage le plus, c’est bien l’équilibre au départ, avec
de la maturation, en particulier des polyphé- Il y a seize ans… des élevages respectueux. L’apport excessif
nols. Cet arrêt ne peut être annihilé que par Le millésime 2003 a connu une de la sucrosité du boisé qui peut faire illu-
des pluies d’orage, un schéma fréquent dans canicule exceptionnelle qui a sion en vin primeur peut sécher une belle
les vignobles méridionaux. À moins que l’irri- duré deux semaines à partir du matière qui n’en demandait pas tant.
gation ne soit autorisée, mais ceci est un autre 4 août. Ce fut l’été le plus chaud J’ajouterai une couverture raisonnable
débat ! Mais il y a des limites à la résistance depuis 1950 ! Des records ont été en SO2, au risque de faire hurler les petits
de la vigne. Dans des conditions extrêmes battus (44° C dans le Gard !) et génies du vin “nature” !
comme en juin ou juillet 2019, les feuilles les minima ne sont pas Cette dégustation porte donc sur le mil-
peuvent être brûlées à mort, avec une perte descendus en dessous de 23° C. lésime 2003, franchement caniculaire,
totale de récolte. Les périodes de sécheresse avec des records de température et de
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 35
 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
durée. À l’époque, beaucoup de producteurs privilégiaient les
extractions appuyées, souvent épaulées par des élevages mar-
qués. Mais les bons vignerons ont su tirer parti des conditions
exceptionnelles. Les vignobles sudistes ont bénéficié d’une
meilleure tolérance aux fortes chaleurs des cépages locaux et
de l’expérience des vignerons qui ont l’habitude de ces coups
de chaud. Les zones plus au nord ont été surprises et parfois
débordées. On sent parfois des vendanges précipitées qui se
traduisent par des accents végétaux, un paradoxe pour des
années chaudes. La différence se fait sur la qualité des tanins,
secs lorsque les blocages ont persisté, veloutés et gras lorsque
l’on a pu attendre la maturation complète. La belle surprise
de cet exercice fut l’excellente tenue des vins blancs, avec des
réussites exceptionnelles, là aussi dans les zones méridionales.
Comme quoi l’acidité ne fait pas tout ! De plus, la tradition d’as-
semblage de plusieurs variétés est un atout incontournable
pour équilibrer les vins, objectif plus difficile avec un mono-
cépage.
À titre de comparaison dans l’approche des vins par le
comité de La RVF, nous reproduisons ici les commentaires
des dégustateurs de l’époque sur les vins de 2003 publiés dans
le numéro Spécial Millésime de juin 2004 (La RVF n° 482). On
notera quelques divergences, il est vrai qu’à part Olivier Poels,
Olivier Poussier et moi-même, la composition de ce comité a
été entièrement renouvelée. P. C.
Les conditions de la dégustation :
Les vins ont été goûtés à l’aveugle en mai 2019 dans les bureaux
parisiens de Patrick et Caroline Teycheney (Vignobles Jade). Ils sont
présentés dans leur ordre de dégustation.

Le verdict de la dégustation,
l’avis des experts
Les vins rouges
La maturité juste
Raffiné, ce grenache est
en grande forme !
Domaine de la Janasse,
châteauneuf-du-pape Vieilles vignes
(vin proposé par Olivier Poussier)
Issue de quatre terroirs complémentaires, un de galets pour « Beaucoup de
la puissance, un autre de sables pour la fraîcheur, un autre
argileux pour la structure et le dernier sablo-calcaire pour la rouges présentent
finesse, cette cuvée de vieilles vignes de grenache et de mour- des arômes cuits,
vèdre en majorité, certaines centenaires, présente un équi- les bouches
libre d’école où la générosité du millésime est compensée par se délitent »,
une fraîcheur sous-jacente. La démonstration que la canicule
Photos : R. Grman

Olivier Poussier
sied bien aux terroirs sudistes.
L’avis de nos experts : un nez encore jeune (thym, cuir,
truffe), riche et mature, sans excès. La bouche pleine, encore
en grande forme, affiche une texture raffinée. La chaleur du
millésime est bien contenue, avec des tanins veloutés et
épicés. OPls lui trouve de la distinction, c’est un superbe gre- Ce beaujolais très mûr
nache pour OP, très noble pour JES, très gourmand pour JBT.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Soyeux, gourmand et géné-
doit être bu sans tarder
reux ».
Château Thivin, côte-de-brouilly Cuvée Zaccharie
Grande unanimité, des notes de 17,5 à 18,5/20. Moyenne : (vin proposé par Guillaume Baroin)
17,38/20 Sur un grand terroir en forte pente, riche en pierres bleues,
avec des vignes âgées, la Cuvée Zaccharie, élevée sous bois, est
36 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Réchauffement
L’avis des experts
Ils ont participé à la dégustation (debout, de g. à d.) : Yohann Castaing (YC), Olivier Poussier (OP), Laurie Matheson (LM), Pierre Casamayor (PC),
Jean-Emmanuel Simond (JES), Caroline Furstoss (CF), Jean-Baptiste Thial de Bordenave (JBT), Olivier Poels (OPls), Guillaume Baroin (GB),
Pierre Citerne (PCi) et (assis, de g. à d.) Alexis Goujard (AG), Karine Valentin (KV), Robin Lenfant (RL) et Denis Saverot (DS).
un assemblage des meilleures parcelles. Elle se distingue par
un style plein et fruité, avec une belle constance au fil des mil-
lésimes.
L’avis de nos experts : vin plus évolué en couleur qu’au
nez. Le fruité est très mûr, avec de la cerise noire confite.
L’ensemble aromatique garde de la jeunesse, même si des
accents languedociens pointent leur nez. La bouche se
montre dense, avec un encadrement tannique un peu sec ;
le boisé est encore marqué. Digeste et aérien pour GB, il
fait vieux vin pour OP, il est à boire pour LM. De toute évi-
dence, le vin est à boire pour l’ensemble du comité, mais le
consensus sur la qualité n’est pas atteint.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Un vin concentré, avec un
fruité bien exprimé ».
Des notes divergentes de 11 à 16,5/20. Moyenne : 14/20
Ce rully vigoureux
a encore du fond
Domaine Vincent Dureuil-Janthial,
rully 1er cru Chapitre Vieilles vignes
(vin proposé par Christian Martray)
Chapitre est un Premier cru au centre de l’appellation Rully, en
bas de coteau. C’est un terroir exposé sud-est, plutôt solaire et
précoce, planté de vignes de 60 ans d’âge. Avec leur fraîcheur
préservée, les vins de Céline et Vincent Dureuil-Janthial
témoignent du savoir-faire de cette famille vigneronne.
L’avis de nos experts : de la complexité, avec des notes
d’herbe séchée, de fruit compoté et une pointe truffée. La
bouche est expressive, avec de la mâche et des tanins très
épicés. Le vin possède encore du fond et de la vigueur, mais
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 37
la finale présente des accents herbacés. Alcool marqué pour
PCi. Ce rouge est à maturité pour GB, il manque de peps
pour DS. Le comité est d’accord pour dire que le vin a encore
de la présence, mais il faut le boire.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Un joli vin au corps souple ».
Des notes homogènes de 14 à 16/20. Moyenne : 15,8/20
Un Bourguignon
voluptueux
Domaine Jean & Jean-Louis Trapet,
latricières-chambertin Grand cru
(vin proposé par Jean-Emmanuel Simond)
Latricières-Chambertin est le Grand cru le plus proche de la
Combe de Grisard qui laisse pénétrer l’air frais du plateau.
Ce terroir argilo-calaire et siliceux est le mieux armé pour
affronter les années chaudes. En 2003, la vigne a résisté à la
sécheresse pendant les dix jours de canicule, et les vins ont
conservé de la fraîcheur. On y sent la patte d’un vigneron
talentueux.
L’avis de nos experts : nous sommes là dans un registre
tertiaire, avec des notes champignonnées. La bouche est
svelte pour le millésime, avec une belle palette aromatique
truffée, une chair voluptueuse mais une pointe de séche-
resse en finale. Ce vin est bien dans son millésime pour GB,
encore trop boisé pour OPls, à boire pour l’ensemble.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : le chambertin du domaine était
noté « racé, tendu et minéral ».
Notes groupées de 13 à 16/20. Moyenne : 14,73/20
 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
Cette grande syrah
en a sous le pied !
Clusel-Roch, côte-rôtie
(vin proposé par Yohan Castaing)
Sur les lieux-dits Champin, Le Plomb, Montmain et Viallière,
Guillaume Clusel bénéficie d’un terroir de micaschistes fer-
reux ; il y applique une viticulture bio à des vignes issues de
sélections massales ( syrah et 3 % de viognier). Dans ces années
chaudes, les vins ont gardé de la fraîcheur et de l’éclat aroma-
tique, récompense d’un travail du sol au treuil ou à la pioche
pour favoriser un enracinement profond.
L’avis de nos experts : le nez est marqué par des notes lar-
dées, avec un fruité compoté, du tabac, du poivre. La bouche
arbore une belle carrure encore empreinte de gras, avec de
la densité. Ce 2003 n’a pas encore tout dit grâce à son attaque
fraîche. AG souligne son bouquet sauvage, GB sa belle
“rétro”. Il est compact pour OPls, JES le juge remarquable.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.

Notes convergentes de 15,5 à 18/20. Moyenne : 16,38/20

C. Grilhé
Pour Yohan Castaing, « les bordeaux rouges 2003 sont les plus à point ;
Un cornas énergique, les vins du Rhône sont un peu en dessous, sauf Côte Rôtie » (photo).

puissant et viril racines du mourvèdre peuvent se faufiler et chercher au plus

Alain Voge, cornas Les Vieilles Fontaines
(vin proposé par Alexandre Ma)
Joyau du domaine, la parcelle des Vieilles Fontaines recèle une
source, un environnement bénéfique pour les vieilles vignes
de 80 ans cultivées en bio qui ont plongé au plus profond et
puisé une fraîcheur qui équilibre la richesse du millésime.
L’avis de nos experts : le nez dévoile une palette aroma-
tique subtile, avec des notes de sous-bois, de vernis, de rose
fanée et de cacao. Il est entré dans la phase ter-
tiaire. La bouche est pleine, arrondie, géné-
reuse mais encore pleine d’énergie, avec une
belle finale réglissée. AG relève sa densité et sa
chaleur, il est encore juteux pour OPls, puis-
sant et viril pour JES. Un 2003 qui ne sèche pas
estime DS, mais sans identité assène PCi.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.
profond une alimentation en eau salutaire en période de cani-
cule. Ajoutez de faibles rendements, une viticulture bio et des
vinifications respectueuses de la matière et vous aurez ici des
vins très représentatifs de ce terroir.
L’avis de nos experts : une ouverture aromatique très
sudiste, avec des notes de laurier, cannelle, tabac, fruits
secs et une belle dynamique. La bouche présente une évo-
lution classique, avec encore de la fraîcheur, une générosité
contenue, et une belle finesse de tanins. Il est à boire sans se
presser pour OPls, LM le trouve très digeste. Pour RL, il est
encore vivant. PC met en garde contre le dépôt.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Subtilement fruité, bouche
délicate ».
Beau tir groupé avec des notes de 15,5 à 17/20. Moyenne :
15,96/20

Les notes sont dispersées de 12 à 18,5/20. Un languedoc bien dans

Moyenne : 15,6/20
son millésime
Sa fraîcheur nous Mas Haut-Buis, terrasses-du-larzac Costa Caoude
(vin proposé par Caroline Furstoss)
enthousiasme Sur des terroirs calcaires, éboulis du plateau du Larzac, le
vignoble du Mas Haut-Buis bénéficie de l’altitude du lieu. La
Domaine de Terrebrune, bandol Costa Caoude est un lieu solaire comme son nom l’indique,
(vin proposé par Alexis Goujard) avec des vieilles vignes de grenache et carignan âgées de 70 ans.
Le domaine de Terrebrune bénéficie d’un Une viticulture bio, des vinifications et des élevages raisonnés
D. R.

sous-sol de calcaires fissurés dans lesquels les en tirent le meilleur parti.

38 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 une Famille, un Clos, un Premier Cru

L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION

Mon domaine familial est une propriété à part qui produit des vins atypiques et plein
de personnalité. Depuis plusieurs généra�ons, nous avons appris à connaître, respecter
et accompagner le terroir qui est nôtre. Nous laissons chaque millésime écrire sa propre
histoire et nous nous adaptons en fonction de son tempérament.

Hervé Lhuillier, propriétaire vigneron

Contact : Tél 05.57.84.48.01 | herve.lhuillier@fleurhautgaussens.com
www.chateaufleurhautgaussens.com

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération

 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
L’avis de nos experts : la première bouteille manquait de
netteté, mais la seconde s’ouvre sur des notes de garrigue « Les vins de
chaude, avec un fruité compoté, des notes de fenouil. La certains terroirs
bouche offre du moelleux en attaque, mais se serre sur des comme Bandol
tanins très extraits qui commencent à sécher. La chaleur
remonte en finale. Un vin bien dans le millésime. De l’avis
et Saint-Émilion
général, il n’ira pas plus loin. YC le qualifie de rustique, KV sont d’une fraî-
regrette son manque de précision, AG le compare à une cheur épatante »,
boule de feu. Karine
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté. Valentin
Divergence d’appréciations avec des notes oscillant
entre 13 et 16,5/20. Moyenne : 14,21/20

De la fraîcheur et
du fruit dans ce cahors
Clos de Gamot, cahors
(vin proposé par Romain Iltis)
C’est le domaine historique de l’appellation, lové dans une
boucle du Lot sur des sols argilo-calcaires siliceux. L’âge des
vignes de malbec – certaines sont plus que centenaires – fait
ici la grande résistance aux extrêmes climatiques, d’autant
que les vins sont vinifiés et élevés sur leur pureté originelle.
L’avis de nos experts : notes végétales au nez, avec des
touches animales et mentholées. La bouche présente une
certaine austérité, mais se rattrape en finale. Il y a encore
beaucoup de fruit, avec une trame serrée. Le vin a gardé
de la fraîcheur mais les tanins commencent à sécher. ce vin évolue très lentement. Les tanins sont civilisés pour
Massif et rustique pour OP, il est automnal pour OPls et il AG, ce vin est écrasé par le bois pour OPls, KV estime qu’il a
a conservé de la tenue pour DS. encore de l’avenir.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté. Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Bouche charnue avec des
tanins bien construits ».
Un jury partagé entre classiques et modernistes, avec
des notes de 12 à 16,5/20. Moyenne : 14,35/20 Ce vin divise fortement le jury, les notes s’étalent de 10 à
16/20. Moyenne : 12,92/20

Ce madiran boisé
évolue très lentement
Château Bouscassé,
madiran Vieilles vignes
(vin proposé par Karine Valentin)
C’est le vignoble familial d’Alain Brumont, planté sur
des sols argilo-calcaires et argiles marbrées posés sur
un sous-sol de grep. Les vieilles vignes de tannat y
trouvent une alimentation en eau régulière, même en
période de sécheresse. Le caractère très tannique du
cépage impose d’attendre la bonne maturité phéno-
lique, mais la fraîcheur est toujours au rendez-vous.
L’avis de nos experts : un fruité noir confit, encore
enrobé de bois grillé, avec des touches graphitées.
D. R.
Un lalande-de-pomerol
bien décevant
Château La Fleur de Boüard,
lalande-de-pomerol
(vin proposé par Pierre Vila Palleja)
Une belle croupe au sous-sol graveleux sur le pla-
teau de Néac, plantée en majorité de merlot, avec des
vignes d’âge moyen, La Fleur de Boüard bénéficie d’un
cuvier par gravité pour extraire le meilleur de la récolte
avec des méthodes issues de la philosophie en usage à
Angélus. Une récolte précoce, trop peut-être, a réussi à
préserver la fraîcheur des vins.
L’avis de nos experts : un nez aux arômes de pru-

La bouche est très extraite, structurée, avec une neau, d’épices douces et vanillées, avec des notes de
grande masse tannique. La finale est encore toastée, sous-bois, de cuir et une certaine verdeur étonnante
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 41
 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
« Les rouges peu
boisés ont moins
séché et offrent
beaucoup plus
de plaisir »,
Pierre Citerne
pour le millésime, poivron et eucalyptus. En bouche, il y a
encore de la richesse mais les tanins commencent à s’user.
Ce 2003 n’est pas typique d’un millésime chaud pour
OP, il offre de la finesse pour JES, il accuse une certaine
sous-maturité pour JBT.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Complexité, netteté, espé-
rance d’une grande réussite ».
Peu d’unanimité sur ce vin, avec des notes de 10 à
14,5/20. Moyenne : 12,35/20
Racé, généreux,
l’avenir lui appartient
Château Figeac, saint-émilion
Premier Grand cru classé
(vin proposé par Pierre Citerne)
Sur un terroir plus médocain que libournais, avec une
superbe croupe de graves güntziennes, Figeac tire parti de
ses vieux cabernets francs et sauvignons pour tempérer les
surmaturités du merlot en année très chaude. Ce qui nous
vaut dans ce millésime un vin parfaitement équilibré, riche
et séveux. Un très grand vin apte aux longues gardes.
L’avis de nos experts : un nez complexe, avec des arômes
de menthe, de fleurs séchées, de fruits rouges rôtis et de
havane. La bouche très charnue, ouverte, dévoile une
trame tannique bien fondue, une belle allonge où l’équi-
libre du cru et sa fraîcheur compensent la générosité du
42 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
millésime. De la race pour PCi, d’un grand équilibre pour
PC. AG lui prédit encore un avenir radieux, OPls apprécie
sa superbe allonge, il sèche un peu pour LM.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Arômes nobles qui demandent
à se préciser, corps ferme et plein, tanins un peu dissociés ».
Des notes élevées, de 15 à 19/20. Moyenne : 17,77/20.
Tout l’éclat d’un grand
vin de la Rive gauche
Château Sociando-Mallet, haut-médoc
(vin proposé par Olivier Poels)
C’est la dernière belle croupe de graves au nord du Médoc, un
vrai terroir de cru classé. Le sous-sol argilo-calcaire permet
aux vieilles vignes de puiser eau et minéraux, pour des vins
qui rivalisent souvent avec des crus plus capés. Comme tous
les grands vins de la Rive gauche, il faut cependant les attendre
pour en découvrir toute la race, les vins jeunes peuvent
paraître un peu austères.
L’avis de nos experts : belles notes tertiaires de vieux claret,
avec un végétal noble. Une bouche racée mais en sous-ma-
turité, encore dense, avec des tanins qui ont gardé de l’éclat.
Allonge complexe. Belle construction pour AG, un médoc
à l’ancienne pour JBT, élégant pour YC, très racé pour PC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Grand vin complexe, vinosité
exceptionnelle ».
Un grand écart de notes, de 14 à 19/20. Moyenne : 15,27/20
Ce saint-estèphe partage
les dégustateurs
Château Meyney, saint-estèphe
(vin proposé par Jean-Baptiste Thial de Bordenave)
Ce cru bourgeois bénéficie d’un grand terroir proche de celui
de Montrose, en bord de fleuve et sur une belle croupe grave-
leuse au sous-sol d’argiles bleues. Cette situation lui permet de
lisser les aléas du millésime grâce à la régularité de l’alimenta-
tion hydrique.
L’avis de nos experts : nez aux arômes évolués, avec du
fruit compoté, des notes un peu sauvages, de sous-bois et
de truffe. Bouche concentrée, avec des tanins puissants, une
générosité perceptible, une finale un peu rustique, bien
dans ce millésime solaire. L’extraction est trop poussée pour
PC, son profil est surmûri pour AG.Il est doté d’une jolie tex-
ture pour OP et d’une belle allonge pour YC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Superbement fruité, savou-
reux, harmonieux et long ».
Pas d’unanimité des notes de 13,50 à 18/20. Moyenne :
16,23/20
 Réchauffement
L’avis des experts

Les vins blancs Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Velouté et finesse de grain,
d’une grande gourmandise ».

Des 2003 d’une On constate des divergences d’appréciation du jury,

très belle tenue ! avec des notes de 13 à 18/20. Moyenne : 16,20/20.

Ce sancerre n’a pas dit La signature de Chablis

son dernier mot
Domaine Vacheron,
sancerre Les Romains
(vin proposé par Alexis Goujard)
Sur le lieu-dit Les Romains, très solaire à dominante de silex, la
famille Vacheron pratique les méthodes biodynamiques pour
des vins qui expriment au mieux la minéralité de chaque par-
celle, à l’image de la Bourgogne où la jeune génération a été
formée. Qualité du terroir et âge avancé des vignes expliquent
l’équilibre de ces vins, même en années très chaudes.
L’avis de nos experts : des notes de miel, de cire, rafraîchies
par la minéralité. Bouche dense et ronde, très aromatique,
une finale complexe, une ampleur pralinée, tonique et
épicée, une finale suave. Il peut encore aller loin. Une évo-
lution noble pour AG, GB aime sa finale salivante, LM son
style bourguignon, PC sa belle complexité.
est intacte
Jean-Paul & Benoît Droin,
chablis 1er cru Côte de Léchet
(vin proposé par Jean-Emmanuel Simond)
Il est issu de fermentations en cuves inox. Il exprime au mieux
la fraîcheur et la minéralité des marnes kimméridgiennes. Si
la canicule a enrichi les matières, la qualité du terroir a permis
de conserver des équilibres et la précision minérale.
L’avis de nos experts : le nez exhale des notes d’encaus-
tique, épicées, de safran, avec des accents de pierres
chaudes. La bouche est un peu alanguie, ronde et grillée,
avec du gras, des notes de beurre fondu, mais la minéralité
du terroir et la signature Chablis reprennent le dessus en
finale. CF salue sa belle matière et son énergie, OPls sa très
grande allonge, OP regrette son support en alcool impor-
tant. JES loue son tonus, LM sa puissance et son panache.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.

Convergence moyenne avec des notes de 14 à 17/20.

Moyenne : 16,04/20

Sur ce pouilly, le jury

fait le grand écart
Domaine Guffens-Heynen,
pouilly-fuissé 1er Jus des Hauts de Vignes
(vin proposé par Christian Martray)
C’est un domaine majeur du Mâconnais. Cette cuvée est issue
de plusieurs parcelles aux sols calcaires et argilo-calcaires. Ici,
on ne recueille que les premiers jus du pressoir, ce qui donne
des vins très purs. À noter, les élevages sous bois ont évolué
entre 2003 et 2015 vers un fruité mieux mis en valeur.
L’avis de nos experts : nez aux notes grillées, beurrées,
de moka, miellées, de fleurs séchées, de noisette. Rond et
ample, ce blanc délivre beaucoup de gras, qui penche un peu
vers la lourdeur. PCi relève un boisé dominant, il est riche
« Les 2003 sont et pâtissier pour OPls, il conserve encore une belle énergie
des vins plaisir, en pour OP, tandis que PC trouve qu’il manque de tonus.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Grande densité, un vin tendu
grande majorité et minéral ».
à boire »,
Laurie Matheson Un style qui divise, avec des notes étalées de 10 à 17/20.
Moyenne : 14,43/20

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 43

 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
« Les blancs du
Sud-Ouest, d’Alsace et
de Chablis surprennent
agréablement, avec
un vrai coup de cœur
pour Palette »,
Caroline Furstoss
Un riesling un peu fané
malgré sa finale précise
Domaine Mader,
alsace riesling Grand cru Rosacker
(vin proposé par Robin Lenfant)
À l’ombre du massif vosgien avec ses sols profonds de cal-
caire dolomitique et son exposition sud/sud-est, le Grand
cru Rosacker est plutôt tardif, il induit des maturations lentes
et des fraîcheurs qui permettent aux raisins de résister aux
fortes chaleurs. Le domaine Mader, conduit en bio, exprime
au mieux les qualités du riesling sur ce terroir.
L’avis de nos experts : le nez est frais et complexe, avec des
notes mentholées, terpéniques, de naphte et d’amande. La
bouche large, avec du gras, termine sur une finale précise,
à l’amertume fine. Il est un peu mou pour AG, austère pour
GB, un peu lourd pour KV, un peu fané pour DS.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.
Des notes divergentes de 12 à 17/20. Moyenne : 14,5/20
44 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Un Geisberg encore dur,
sans grand charme
Domaine Kientzler, alsace riesling
Grand cru Geisberg
(vin proposé par Caroline Furstoss)
Le Grand cru Geisberg, exposé plein sud sur des sols cal-
caro-gréseux, est entièrement voué au riesling. Les vins y
prennent une certaine austérité, il faut savoir les attendre.
L’avis de nos experts : nez très pétrolé, sans grand charme ;
bouche mince, à l’amertume prononcée. PCi le juge austère,
LM puissant et salin, il est encore dur pour AG.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.
Une certaine convergence, mais dans le négatif, avec des
notes de 10 à 14/20. Moyenne : 12,3/20
L’élégance de ce Grand
cru chavire les esprits
Domaine Zind Humbrecht, alsace riesling Rangen
de Thann Grand cru Clos Saint Urbain
(vin proposé par Laurie Matheson)
Une pente forte, une exposition sud, des sols volcaniques, le
Grand cru Rangen de Thann possède une forte personnalité.
La proximité des Vosges et son altitude lui permettent de com-
penser la chaleur des années de canicule. En 2003, le vin est
issu des seules vieilles vignes. Cultivées en biodynamie, elles
donnent naissance à des vins d’une exceptionnelle minéralité,
avec une droiture qui impose de longues gardes.
L’avis de nos experts : robe très dorée, le nez est opulent :
cire, miel, épices douces, des terpènes élégants. La bouche
dévoile une belle ampleur, avec une richesse expressive.
On est à la limite de la vendange tardive, mais la tension et
l’amertume sont bien là pour un équilibre réussi. Très com-
plexe pour AG, un très grand vin pour GB, d’une belle étoffe
pour OP, plein et harmonieux pour RL, superbe pour YC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Peu ouvert, belle matière mais
vin retenu ».
Belle unanimité, avec des notes de 16 à 19/20. Moyenne :
17,82/20
Un irouléguy admirable,
solaire et très accompli
Domaine Arretxea, irouléguy Hegoxuri
(vin proposé par Karine Valentin)
Sur les pentes schisteuses et gréseuses de ce piémont pyré-
néen, gros et petits mansengs associés au petit courbu
donnent des vins précis, très aromatiques, tendus par une
 Réchauffement
Les 2003 ont-ils bien vieilli ?
« Certains blancs sont
parfois tombés dans
l’excès inverse, avec
de la sous-maturité »,
Pierre Casamayor
belle vibration. Si ce vignoble est le plus arrosé de France, il
aime ces années chaudes et plus sèches, les vins y prennent de
l’étoffe sans jamais se départir de leur tension.
L’avis de nos experts : des notes cirées et épicées, de
mangue. La bouche est encore jeune, aromatique, marquée
par de belles notes truffées et une tension intacte. Admirable
pour PCi, il se montre solaire et lumineux pour GB, robuste
mais usé pour JES, exubérant pour KV, très accompli pour
DS, d’une grande identité pour RL.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Beurré et miellé, ample.
Nervosité bien tempérée, avec de l’éclat ».
Notes assez divergentes de 14 à 18,5/20. Moyenne :
16,50/20
Un jurançon disqualifié
par une forte oxydation
Clos Lapeyre, jurançon sec Vitatge Vielh
(vin proposé par Pierre Casamayor)
Le secteur de la Chapelle de Rousse est un terroir majeur à
Jurançon, avec ses fortes pentes limono-argileuses et ses sols
46 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
morainiques. Les vins secs, droits et stricts dans leur jeunesse,
avec des acidités parfois tranchantes, prennent du fond et
surtout de magnifiques arômes truffés à la garde. Les années
chaudes donnent plus de rondeur aux gros et petits mansengs,
pour des vins qui se dévoilent plus tôt.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Belle ampleur sur des notes
épicées ».
Vin non noté, les deux bouteilles étaient fortement
oxydées.
Boisé lactique, pureté…
Ce Bordelais divise
Château Hosten-Picant,
sainte-foy-bordeaux Cuvée des Demoiselles
(vin proposé par Pierre Vila Palleja)
Au cœur de l’appellation Sainte-Foy-Bordeaux, à l’est de Saint-
Émilion, le château Hosten-Picant bénéficie d’un terroir
modelé en croupes, sur des sols argilo-calcaires et silex pour
le sauvignon, plus limoneux pour le sémillon et la muscadelle.
Les vins blancs y sont fins et subtils, les années chaudes leur
apportent plus de richesse.
L’avis de nos experts : le nez évolue sur la cire, le miel, les
épices. La bouche apparaît ample, à la limite de la lourdeur,
le boisé est encore marqué. De la longueur mais l’alcool est
présent. CF boude son boisé lactique. Riche et crémeux
pour AG, GB est séduit par sa longueur et sa pureté. Il offre
de la rondeur pour YC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.
Pas de convergence, les notes s’étagent de 10 à 16/20.
Moyenne : 13,50/20
La Cuvée Caroline
ne convainc pas
Château de Chantegrive, graves Caroline
(vin proposé par Jean-Baptiste Thial de
Bordenave)
Ce domaine majeur des Graves est assis sur un ter-
roir de graves et de galets roulés. Son sous-sol cal-
caire garde la fraîcheur nécessaire à une bonne
maturation. Avec cette Cuvée Caroline, un vin issu
de sauvignon et sémillon pour moitié, élevé en fûts,
Chantegrive avait pris la tête du peloton des blancs
secs de la région. Après une période un peu creuse,
le domaine évolue désormais vers un style mûr, avec
un mariage fruit/bois plus équilibré.
L’avis de nos experts : nez de miel, d’épices, de
fruits blancs blettis, avec des notes torréfiées.
D. R.
La bouche offre du gras, de l’ampleur, mais elle
manque de tonus et le boisé est encore marqué.
 Réchauffement
L’avis des experts
GB le trouve plat, OPls le juge court et boisé. Pour OP, il est
évolué et pesant. JBT souligne une jolie aromatique et KV
apprécie sa belle amertume.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Agrumes, fumée ; bouche
grasse, avec une bonne vivacité ».

Notes très dispersées de 9 à 15/20. Moyenne : 11,79/20

Discret, Malartic garde

de la tenue
Château Malartic Lagravière, pessac-léognan
(vin proposé par Olivier Poels)
Un terroir de grande qualité, avec une superbe croupe de
graves et des vignes qui ont atteint l’âge de la maturité. La
cave est à la pointe de la technique et les élevages prennent
le chemin de la modération. Mais ces deux vins dénotent des
difficultés dans la gestion des années chaudes.
L’avis de nos experts : le nez peu évolué semble bloqué
par le SO2, avec des notes de fleurs séchées. La bouche est
pleine mais sans grande expression, avec un boisé encore
marqué. Il manque de charme pour AG, pâtissier pour JES,
pour OPls, il garde de la tenue. Sa bouche est pleine mais
discrète pour PC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Complexité, moelleux et fraî-
cheur ».
Divergences des notes de 9 à 14/20. Moyenne : 12/20
Précis et apaisé,
ce châteauneuf séduit
Clos des Papes, châteauneuf-du-pape
(vin proposé par Yohan Castaing)
C’est ici une belle démonstration de la complexité de l’assem-
blage à parts égales de grenache, clairette, roussanne, picpoul,
bourboulenc et picardan. Les vieilles vignes cultivées sur les
sols argileux de l’appellation sont le gage de sa fraîcheur pré-
servée, même en année caniculaire. La vinification ne voit que
l’inox. Le vin est élevé sur ses lies et la “malo” est évitée dans ces
années extrêmes pour garder du tonus. Le résultat : des vins
d’une fraîcheur renversante.
L’avis de nos experts : le nez fin exhale des notes complexes
et élégantes d’évolution : miel et truffe. La bouche est riche,
elle développe des accents balsamiques, avec de la structure.
Ce vin a encore de l’avenir. D’une pureté minérale pour GB,
il garde de la tension pour OPls. Il est resté très jeune pour
JES, superbe et apaisé pour DS, de la densité et de la préci-
sion pour YC.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : non dégusté.
« Gras et finement
amers, les blancs
du Sud excellent
dans ce millésime
chaud »,
Alexis Goujard
La race de Château
Simone a conquis le jury
Château Simone, palette
(vin proposé par Pierre Casamayor)
Le secret de Château Simone blanc : de vieilles vignes de
clairette, bourboulenc, grenache blanc, ugni blanc égayées
par une pointe de muscat, plantées sur une pente d’éboulis
calcaires exposée au nord, des vinifications et des élevages
respectueux grâce à toute l’expérience de la famille Rougier.
C’est “la référence” pour tous les vins de Provence et du Sud
en général.
L’avis de nos experts : un nez d’une folle complexité,
avec des notes de fleurs séchées, de rose fanée, de miel, de
truffe blanche. La bouche se montre dense, prégnante, très
fondue, avec un grand équilibre. Le côté solaire est com-
pensé par la puissance épicée. Un grand vin du Sud pour
PC, très original pour PCi, d’une vraie race pour RL, mais
un boisé sec pour LM.
Ce qu’en disait La RVF en 2004 : « Deux échantillons avant
assemblage, l’un frais et longiligne, l’autre avec du volume et un
fruité rigoureux ».

Notes étalées de 14 à 19/20. Moyenne : 17,11/20 Notes partagées entre 12 et 18/20. Moyenne : 17,07/20

LA RVF N°639 - MARS 2020 - 47

 ABONNEZ-VOUS
à La Revue du vin de France
1 AN
200%RVF
99
seulement
+ de
€
%
47
remise
de

3 SUPPORTS D’INFORMATION
Le magazine + Le site de larvf.com
+ l’Application Et Recevez La carafe
Hybride Spiegelau

12 numéros par an dont :

• 2 numéros spéciaux
• 2 hors-séries La carafe Hybrid est issue d’une
rencontre entre le design de la
collection Hybrid et de la technologie
UN ESPACE DÉDIÉ AVEC EN CONSULTATION ILLIMITÉE : de Spiegelau. D’une transparence
cristalline, d’une légèreté
• Les articles réservés en exclusivité aux abonnés
incomparable, sa forme élégante
• L’accès à l’application de la Revue du vin de France assure toute son ouverture au vin.
• Plus de 100 000 vins notés et commentés Contenance : 1,8l - Hauteur : 27cm - Diamètre : 16,4cm
• L’accès à 40 ans d’archives du magazine, soit plus de 300 nos Valeur : 37,50€ Retrouvez l’offre
directement sur notre site
• L’accès à tous les Guides RVF

B U L L E T I N D ’A B O N N E M E N T
PAR INTERNET PAR TÉLÉPHONE PAR COURRIER
site officiel d’abonnement à compléter et à retourner avec votre règlement :
www.magazines.fr/larvf 01 84 888 222 prix d’un appel local LA REVUE DU VIN DE FRANCE - Service Abonnements
Code express 639WP +331 84 888 222 appel depuis l’étranger 26 bis rue des Pommiers CS 30075 - 93501 Pantin

Oui je profite de votre offre et je choisis : MES COORDONNÉES

Prénom :

1 AN au magazine + l’accès au site Internet et à l’application en illimité Nom :

Adresse :
+ la carafe Hybrid Spiegelau pour 99 € au lieu de 187,50 € 639WP1
Code Postal : Ville :

Pays : Tél. :
1 AN au magazine seul (12 nos) pour 69 €
> POUR OBTENIR VOTRE ACCÈS À LARVF.COM, IL EST INDISPENSABLE D’INDIQUER VOTRE EMAIL
Europe : 84 € Hors Europe : 99 € 639WP2
E-mail :

JE RÈGLE PAR : Date et signature obligatoires

1 AN au site internet seul larvf.com pour 59 € 639WP3
Chèque libellé à l’ordre de La Revue du vin de France

JE DEMANDE UNE FACTURE Carte bancaire N°

Bloc de trois chiffres
Je souhaite recevoir les offres des partenaires de La Revue du vin de France Date d’expiration Cryptogramme au verso de votre carte
Offre valable 3 mois. Vous pouvez acheter séparément chaque numéro de votre magazine à son prix de vente au numéro + 2,50€ de frais de port ainsi que la carafe Hybrid Spiegelau pour 37,50 € + 5 € de frais de port (France métropolitaine uniquement). Vous recevrez le premier numéro de votre abonnement dans un délai de
3 à 4 semaines à compter de la réception de votre règlement et votre carafe séparément dans la limite des stocks disponibles. Le cas échéant, un produit d’une valeur équivalent ou supérieure vous sera proposé. Les informations qui vous sont demandées sont destinées à la société La Revue du vin de France SAS. Elles sont col-
lectées et utilisées à des fins de traitement de votre abonnement. Votre adresse mail sera utilisée pour suivre votre abonnement et vous envoyer les communications dont vous bénéficiez en tant qu’abonné. En application de la règlementation en vigueur, vous disposez des droits d’accès, de rectification, d’effacement, d’opposition,
à la portabilité des données et à la limitation des traitements. Pour exercer vos droits, veuillez contacter le Groupe Marie Claire (GMC) par mail à dpo-rvf@gmc.tm.fr ou par courrier à Groupe Marie Claire-DPO –10, boulevard des frères Voisin - 92130 Issy Les Moulineaux, en justifiant de votre identité. Vos données postales sont
susceptibles d’être transmises à nos partenaires commerciaux. Si vous ne le souhaitez pas, merci de cocher cette case ou de nous en informer à l’adresse ci-dessus. Pour toute information complémentaire, consulter notre Politique de Confidentialité sur le site www.magazines.fr.
 Art de vivre
Vu d’ailleurs
Piquette !
P
iquette. Pour l’amateur étymologiste comme pour
la 9e édition du Dictionnaire de l’Académie française,
ce terme désigne un très mauvais vin, ou une
boisson aigrelette de bien piètre qualité. Eh bien, aux États-
Unis, c’est la tendance qui est en train d’exploser. Pour
beaucoup, producteurs, consommateurs, journalistes,
2020 se présente comme l’année de la piquette !
En 2017, lorsque Todd Cavallo met sur le marché sa pre-
mière “piquette”, il ne pense sans doute pas créer un phé-
nomène. Ayant quitté Brooklyn en 2016 pour la Vallée de
l’Hudson afin de créer une ferme viticole biodynamique en
permaculture socialement responsable, il commercialise
ses premières bouteilles de vin “nature” quand un ami lui
montre un passage de The Red & the White : The History of Wine
in France and Italy in the Nineteenth Century de Léo Loubère,
historien américain spécialiste de la viticulture française.
L’auteur parle de la légitimité historique de la piquette
comme de la boisson des ouvriers viticoles, le vin étant
réservé aux riches acheteurs. Cela fait tilt. À la dimension
écologique qu’offre la réutilisation du marc (autre que la
distillation), Todd peut associer une dimension démocra-
tique : dégager des revenus soutenant le développement
indépendant de sa structure tout en mettant sur les étals
une boisson financièrement accessible à tous.
Mais malgré ses origines paysannes, faire une bonne
piquette n’est pas chose aisée et s’avère très technique.
Finalement, grâce à une recette trouvée dans un cours
d’agriculture du XVIIIe siècle, beaucoup d’attention pour
éviter les déviances bactériennes, des marcs de qualité et
un soupçon de moût pour créer une effervescence en bou-
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 49
« La nouvelle poule
aux œufs d’or du vin
aux États-Unis ? »
Par Pascaline Lepeltier
Sommelière-associée
du bistrot-gastro
Racines NY à New York.
Meilleur ouvrier
de France (MOF).
teille, 2017 Riesling-Traminette par Wild Arc Farm voit le
jour. Le succès est immédiat. La production se vend quasi
instantanément à New York.
Avec la demande grandissante pour les wine-coo-
lers (sodas à base de vin et de jus de fruit) ou autres bois-
sons moins alcoolisées, avec le goût pour les sour beers et
pét’ nat’ et la volonté de consommer mieux à tout point
de vue, la piquette, produit de “recyclage” à 7 % d’alcool,
surette et légèrement pétillante, trouve un marché mûr.
Désaltérante, fun, sans prétention et peu chère, elle touche
un public large. Pour les producteurs, ce n’est que du
bonus. En 2018, Wild Arc Farm en a produit quatre, suivi
par une dizaine de producteurs des Finger Lakes au Texas
en passant par le Maryland et l’Australie avec notamment
Lucy Margaux. Tout a été vendu. Cette année, New York
attend les piquettes de deux grands noms du vin, la “pin-
kette” 2019 de Pax Mahle, déjà servie avec succès à la pres-
sion dans sa tasting room, et celle du sommelier-star devenu
vigneron Patrick Cappiello, à base de colombard, char-
donnay et chenin. Et ce n’est que le début.
Verra-t-on reconquérir la France ? Il y a peu de chance,
car si légalement on peut la produire, il est interdit de la
commercialiser sans dérogation, historiquement pour
éviter les fraudes et protéger le consommateur. Si vous
êtes chanceux, vous pouvez en goûter d’excellentes chez
Illustration : Stéphane Manel
quelques vignerons audacieux tel Julien Guillot (domaine
des Vignes du Maynes, en Mâconnais). Mais peut-être
devra-t-on bientôt changer la définition du dictionnaire
et donner à la piquette des lettres de noblesse. La nouvelle
poule aux œufs d’or du vin aux États-Unis ?
 Enquêtes et révélations

Les dessous de la barrique

Faire du vin,
ça coûte combien ?
Quels coûts de production se cachent derrière une bouteille de vin, qu’il soit produit en viticulture
conventionnelle ou en bio ? Plusieurs paramètres entrent en jeu, comme la densité de plantation,
la pente, les rendements ou encore le mode de production. Voici, en détail, le vrai coût d’un bon vin.
Une enquête de Jérôme Baudouin

D
ans la chaleur estivale, les ouvriers viennent de dans la région, notamment auprès des restaurateurs », poursuit la
quitter l’ancienne grange après avoir coulé la chape vigneronne. Elle lâche son activité de jardinière-paysagiste
de béton de la future cuverie de Katia Coutelier- pour devenir vigneronne à plein temps. Après analyse des
Ollivier. Son projet devient peu à peu réalité. La vigneronne coûts de production, elle investit dans quelques cuves pour
de Pécharmant, près de Bergerac, imagine déjà ses cuvées, res- vinifier environ 50 hectolitres. Une partie est vendue en petits
pectant le parcellaire de son vignoble de 8 hectares. Dehors, lots de vrac pour des cavistes de la région, le reste, environ
l’ancienne maison de ses grands-parents se transformera 4 000 bouteilles, est réparti en trois cuvées de vins rouges aux
bientôt en chambres d’hôtes. Plus qu’un agrandissement, c’est assemblages différents (merlot, cabernets franc et sauvignon),
une véritable métamorphose que vit son domaine Le Martinat dont une cuvée haut de gamme élevée en amphores ! « J’avais
depuis trois ans. « Mes parents ont fait le partage des terres de leur envie de me faire plaisir et je n’aime pas trop la barrique. Et en termes
vivant en 2004 et j’ai hérité de 60 ares de vignes dont je ne savais pas de coût, cela revient moins cher sur le long terme », confie-t-elle.
quoi faire. Si bien que j’ai porté les raisins à la cave coopérative. J’ai suivi Car si l’investissement dans une amphore est beaucoup plus
une formation, et j’ai planté des vignes au fil des ans sur les autres terres élevé au départ (environ 1 900 euros pour une contenance de
que j’avais pour parvenir à un peu plus de 8 hectares », raconte cette 400 litres, contre 700 euros pour une barrique de 225 litres), il
femme énergique. Pendant toutes ces années, elle conserve n’est pas nécessaire de la changer au bout de trois vins, comme
une double activité, jardinière-paysagiste la semaine, viti- cela se fait pour les barriques. Bien entretenue, une amphore
cultrice le week-end, apportant son peut même durer des décennies.
raisin chaque année à la coopérative. Les vins de Pécharmant, à l’est de Bergerac,
sont très prisés par les restaurateurs de la région.
PETIT SALAIRE ET GROS LABEUR
LE PARI DE L’INDÉPENDANCE «  La cave coopérative m’a permis de
En 2016, à l’âge de 50  ans, Katia m’assurer un revenu stable, de dormir
Coutelier-Ollivier décide de se lancer tranquille et d’élever mes enfants, et je
dans la production de son propre vin me dégageais un salaire de 1 000 euros
sur 1,40 hectare de vignes, livrant pour financer mes plantations de vignes.
toujours le reste à la cave coopé- Aujourd’hui, malgré les investissements,
rative. Une façon de tenter l’aven- je vais pouvoir me rémunérer environ
ture tout en conservant une marge 1 700 euros et m’offrir une assurance contre
de sécurité avec le revenu tiré de la les accidents climatiques », rappelle la
vente des raisins à la cave. « Il y a un vigneronne qui n’a pas récolté en 2017
véritable marché pour le pécharmant à cause du gel.
50 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 LE VRAI PRIX D’UNE BOUTEILLE DE VIN
1 LA CULTURE DU RAISIN

2 LA VINIFICATION

3 L'EMBOUTEILLAGE ET LE CONDITIONNEMENT

COÛTS DE
PRODUCTION

4 LES FRAIS DE COMMERCIALISATION

5 LES CHARGES ANNEXES

CHARGES
ANNEXES
Illustration : L. Timon / D. R.

PRIX DE REVIENT
 Enquête
Le vrai coût de production du vin

J. Baudouin
À 50 ans, Katia Coutelier-Ollivier est passée de la coopération au statut de vigneronne indépendante avec audace et en maîtrisant ses coûts.

Katia Coutelier-Ollivier a fixé un prix de vente d’environ la plupart des régions viticoles de France. Bien des paramètres
9 euros hors taxe la bouteille, un tarif relativement élevé par viennent toutefois perturber ces coûts. Pour cette enquête,
rapport à la moyenne régionale (autour de 7 euros) qui lui nous nous sommes fondés sur les études économiques des
permet de financer son chai, ses chambres d’hôtes et du maté- Chambres d’agriculture qui éclairent sur ces différents points.
riel viticole. Aujourd’hui, le prix de revient de ses bouteilles Chaque année, quelques-uns de ces services comptables
est d’environ 3 euros hors taxe, sans les prêts, éditent des référentiels économiques qui per-
mais elle fait tout toute seule : la vigne, la vinifi- 3 euros, mettent aux vignerons de cerner leurs coûts de
cation, l’embouteillage et même la commerciali- c’est le prix production. Ces référentiels sont établis sur la
sation, notamment sur les marchés du Périgord de revient base des bilans comptables d’un panel de plu-
le dimanche ! Car elle n’a pas encore les moyens sieurs milliers de propriétés. Ici, on ne parle pas
d’embaucher quelqu’un pour l’épauler à la vigne. moyen d’une de grands crus classés, mais de vignerons indé-
bouteille de pendants, de coopérateurs, de Gironde, du Val de
DES STATISTIQUES PARLANTES vin en France Loire, du Roussillon, de la Vallée du Rhône ou de
En passant de la coopérative à la cave particulière, Champagne. L’ensemble des coûts sont passés au
Katia Coutelier-Ollivier a suivi le chemin de dizaines de mil- crible, de la culture de la vigne jusqu’à la mise en bouteilles.
liers de vignerons en France. Son exemple est assez représen- Certaines régions, comme le Bordelais, détaillent même ces
tatif de la viticulture hexagonale. Certes, certains domaines coûts selon des critères plus pointus encore, comme la viticul-
parviennent à atteindre des coûts beaucoup plus faibles, de ture biologique, mais aussi les densités de plantation. « Nous
l’ordre de 1 à 1,50 euro la bouteille, dès lors que les densités de réalisons ce type d’étude économique depuis l’an 2000 et nous le met-
plantation sont faibles (3 000 à 4 000 pieds par hectare) et que tons à jour tous les deux ans depuis une dizaine d’années afin d’aider les
les surfaces sont grandes afin de faire des économies d’échelle, vignerons dans les appellations qui se valorisent le moins à mieux com-
et que des produits chimiques sont employés au détriment de prendre leurs coûts et où ils se situent », explique Philippe Abadie,
la mécanisation. Mais le prix de revient de son vin, à environ de la Chambre d’agriculture de Gironde, qui pilote ce référen-
3 euros hors taxe, est représentatif de ce que l’on constate dans tiel économique.
52 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Enquête
Le vrai coût de production du vin
Dans les faits, chaque domaine viticole eux aussi directement. En premier lieu,
est presque un cas particulier, tant les la difficulté du terrain planté. Des vignes
facteurs de charges sont nombreux. Un en terrasses de Côte Rôtie, d’Alsace ou de
jeune vigneron qui s’installe n’a pas les Banyuls ne coûtent pas le même prix à
mêmes contraintes financières qu’un travailler qu’une vigne de plaine. D’autant
voisin sur le point de partir à la retraite que sur ces terroirs spectaculaires, les
et qui a déjà tout payé. « De même, dans des rendements sont également plus faibles.
appellations de forte densité, comme le Médoc, Comme ils ne sont pas mécanisables, le
planté à 10 000 pieds/ha, il ne suffit pas de faire coût en main-d’œuvre explose ! Il n’est
le prorata avec un vignoble à 5 000 pieds, on ainsi pas rare de voir, dans certaines
observe que cela nécessite des investissements zones, les coûts de production doubler,
beaucoup plus importants en matériel et en voire tripler si la vigne est particulière-
personnel », précise Philippe Abadie. ment difficile à cultiver.
Même chose si l’on évoque les coûts de À Banyuls ou à Condrieu, il ne faut pas
production des vins liquoreux. Dans une seulement cultiver les vignes, mais aussi
appellation qui ne produit que ce type être maçon pour consolider les murs et les
de vin, comme Sauternes, par exemple, sentiers afin de préserver les cultures en
où le rendement dépasse rarement les terrasses. Des coûts parallèles rarement
15 hectolitres par hectare, les coûts de comptabilisés dans les statistiques des

D. R.
production à la vigne s’envolent ! Chambres d’agricultures qui engendrent
Au-delà du coût de la main-d’œuvre,
Philippe Gard (Coume del Mas, à Banyuls)
pourtant des centaines d’heures de tra-
ET LE BIO DANS TOUT CELA ? pointe la difficulté de trouver du personnel. vail chaque année. « C’est vrai que c’est une
Souvent pointée du doigt pour ses coûts partie du travail qui est rarement comptabilisée ;
de production, semble-t-il, beaucoup plus nous réparons les murs lorsqu’il y a moins d’im-
élevés, la viticulture biologique est également mesurée par pératifs à la vigne »,observe Philippe Gard, du domaine Coume
les comptables de la Chambre d’agriculture de Gironde. C’est del Mas. Lui-même reconnaît que dans le cru de Collioure,
d’ailleurs l’une des rares à réaliser ce comparatif (lire le tableau
ci-contre). Nous observons ainsi que sur deux propriétés de
taille similaire (15 hectares) et plantées en vignes étroites Faire du bio, ça coûte plus cher
(5 000 pieds/ha), le coût de production à la bouteille est de Ce tableau présente les différences de coûts de production
3,05 euros en agriculture conventionnelle et de 3,76 euros en du vin à Bordeaux, en culture biologique et en conventionnel.
viticulture biologique. Soit un écart de plus de 20 % ! Vin bio Vin issu
En réalité, cette différence de coût se produit surtout à cause en bouteille. de viticulture
Rendement conventionnelle.
des rendements. La Chambre d’agriculture établit un rende- décennal : Rendement
ment moyen, sur dix ans, de 40 hl/ha pour le bio et de 50 hl/ 40 hl/ha décennal :
ha pour le vignoble en conventionnel. « En fait, nous observons 50 hl/ha
à Bordeaux que dans une bonne année, les rendements sont similaires Vignes Vignes
entre les deux modes de production, mais que sur une année difficile, étroites 15 ha étroites 15 ha
la variabilité est beaucoup plus grande en bio. D’où cette différence de Approvisionnements 1 537€ 1 260 €
20 % entre nos deux modèles », souligne Philippe Abadie. Il est
Mécanisation 3 065 € 1 998 €
Source : Référentiel économique 2018 de la Chambre d’agriculture de Gironde
vrai que si, en 2019, les rendements en bio ont été similaires
à la viticulture conventionnelle, la baisse était de l’ordre de Main-d’œuvre 3 444 € 3 008 €
50 % en 2018 pour le bio. Une situation que l’on retrouve dans Coût technique de vigne (€/ha) 8 046 € 6 266 €
d’autres régions viticoles au climat humide, comme la Vallée Fermage 209 € 209 €
de la Loire, la Champagne et la Bourgogne.
Amortissement du vignoble 1 256 € 1 274 €
Sur l’arc méditerranéen, la situation est bien moins
contrastée. Dans le Vaucluse, la Chambre d’agriculture a réa- Aides à la restructuration du vignoble - 400 € - 400 €
lisé une étude similaire sur différentes appellations, comme Assurance climat (aides PAC déduites) 110 € 110 €
Ventoux, en bio, et Luberon. Dans ce cas précis, la pression Autres charges et frais administratifs 782 € 782 €
climatique n’étant pas aussi importante qu’à Bordeaux, les
Coût complet vigne (€/ha) 10 003 € 8 241 €
coûts entre deux vignobles similaires, l’un en conventionnel
et l’autre en bio, sont très proches. Et cela se vérifie dans tous Coût de vinification (€/ha) 3 017 € 3 017 €
hors élevage barriques
les vignobles méditerranéens.
Coût complet du vin 13 020 € 11 258 €
avant la mise en bouteilles (€/ha)
L’INFLUENCE DE LA PENTE
Si le climat joue des tours aux rendements et aux coûts de Coût complet pour 75 cl 2,44 € 1,69 €
avant la mise en bouteilles
production, d’autres facteurs tout aussi importants influent
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 53
 Enquête
Le vrai coût de production du vin
difficilement mécanisable, le coût de la main-d’œuvre est environ 2,30 euros pour un vin élevé à 100 % en barriques
très important.« De plus, c’est un poste incompressible. Il n’y a neuves et environ 1,50 euro avec un tiers de barriques
pas d’économie d’échelle envisageable et lorsque l’on veut progresser neuves. Il faut ajouter les coûts de mise en bouteilles et
pour passer en agro-écologie, les coûts augmentent encore », ana- d’étiquetage, qui s’élèvent en moyenne à 1,15 euro par
lyse le vigneron, qui poursuit : « D’ailleurs, ce n’est pas seulement bouteille. Et si le vigneron veut utiliser des bouchons haut
une question de coût, la difficulté est aussi de trouver du personnel, de gamme, des bouteilles gravées au nom de son domaine
qui se raréfie ». et de belles étiquettes, les prix peuvent très vite s’envoler.
Afin de mieux comprendre les coûts de production, la
Fédération des vignerons indépendants du Roussillon LE CAS DU CHAMPAGNE
a fait réaliser, en 2014, une étude à partir des données S’il est un vignoble dont les coûts de production sont
comptables de 31 propriétés du Roussillon réparties particulièrement élevés, c’est bien la Champagne.
entre la plaine, la Vallée de l’Agly et les secteurs de Ces coûts ne sont pas à mettre au crédit du vigneron,
Banyuls et Collioure. Résultat : le coût de la culture de mais plutôt de l’élaborateur. En effet, l’essentiel
la vigne passe de 4 719 euros l’hectare par an pour un de la production de champagne est réalisé par les
vignoble en plaine à 8 068 euros l’hectare par an pour négociants et caves coopératives à partir de raisins
la même surface dans la zone vallonnée de Collioure cultivés par des “apporteurs de raisins”. Dans ces
et Banyuls ! Entre ces deux secteurs, le prix de revient deux cas, le coût du kilo de raisin acheté représente
d’une bouteille passe ainsi de 4,30 euros hors taxe une part très importante du coût de production
pour un vin produit en plaine à 6,81 euros hors taxe pour un champagne d’entrée de gamme, comme
pour le même type de vin produit à Banyuls. Car en par exemple Demoiselle de Vranken ou Tsarine de
plus de la pente et de l’impossibilité de mécaniser ces Chanoine Frères, vendues environ 25 euros.
vignobles spectaculaires, les rendements sont plus Le raisin coûte 7,20 € Pour élaborer une bouteille de 75 cl de ce type de
faibles, ce qui amplifie encore l’écart de prix. pour élaborer champagne, il faut 1,2 kg de raisin, dont le prix pour
cette cuvée Tsarine. les vendanges 2018 s’établissait à environ 6 euros
LE COÛT DE L’ÉLEVAGE EN BARRIQUES le kilo en moyenne. Soit, pour une bouteille, un
Si les coûts sont très variables à la vigne, c’est nettement moins coût de 7,20 euros de raisin. À titre de comparaison, un kilo
vrai du côté de la vinification. Quelle que soit la région, vini- de raisin en Alsace pour élaborer du crémant s’échange à
fier 100 hectolitres coûte globalement la même chose. Sans environ 1,50 euro. À cela, il faut ajouter les coûts de vinifica-
compter l’élevage en barriques ! À lui seul, ce dernier coûte tion et d’élevage, mais aussi le stockage des vins, puisque ce

Non mécanisable car implanté sur d’étroites terrasses, le vignoble de Côte Rôtie (Vallée du Rhône) impose des coûts de production à la vigne très élevés.
D. R.

D. R.

54 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Enquête
Le vrai coût de production du vin
champagne non millésimé est élaboré avec une part de vins de
réserve qui ont été stockés (avec un coût fiscal en prime). Mis
bout à bout, ces différents coûts de vinification représentent
environ 0,80 euro par unité. S’additionnent ensuite la mise en
bouteilles et l’étiquetage, qui s’élèvent à environ 1,20 euro. Ce
qui représente un coût de production d’environ 9,20 euros par
bouteille de champagne.
Ce prix n’intègre toutefois pas la partie marketing qui, en
Champagne, est tout aussi primordiale que l’achat de raisin. Les
marques dépensent des sommes considé-
Les droits rables en publicité, mais aussi en salons,
de succession en soirées dégustation, en formation des
vendeurs aux quatre coins du monde
pénalisent pour imposer leur marque. Ce qui repré-
l’équilibre sente facilement 5 euros pour une marque
économique comme Tsarine ou Demoiselle. La bou-
teille revient donc à environ 14,20 euros.
de certains Si elles sont affichées à 25 euros, elles
vignobles sont très souvent en promotion autour
de 21 euros, desquels il faut déduire la
TVA (3,50 euros), soit un prix hors taxe de 17,50 euros. Reste
une marge brute de 3,30 euros par bouteille, à laquelle il faut
encore ôter les impôts et taxes, les agios et les prêts. Ce qui ne
laisse pas beaucoup de marge au final. D’où l’intérêt pour une
marque de mieux valoriser ses cuvées haut de gamme.
LA VALORISATION DES TERRES
Dans le calcul du prix de revient d’un vin, deux points ne sont
pas pris en compte : la valeur foncière et les droits de succes-
sion. Or, dans des régions où la pression foncière est très forte
et augmente rapidement, cela peut devenir un casse-tête pour
les familles de vignerons. En Bourgogne, par exemple, l’hec-
tare de vigne dans un village prestigieux se négociait 200 000
à 300 000 euros au début des années 2000 ; aujourd’hui, sa
valeur a été multipliée par dix. Mais le prix des vins n’a pas
évolué aussi rapidement. Et si les vignes appartiennent à la
même famille depuis plusieurs générations, ce sont les droits
de succession qui peuvent se révéler pénalisants. Surtout si,
dans le patrimoine foncier du domaine, on compte des par-
celles de Grands crus. Bien souvent, la vente des bouteilles
ne suffit pas à combler ces droits. D’autant que les familles se
sont morcelées au fil des générations et que tous les enfants ne
souhaitent par reprendre l’exploitation. C’est la raison pour
laquelle on voit de plus en plus de familles vendre tout ou
partie de leur vignoble pour éponger les droits de succession.
La Champagne subit le même sort. Par le biais du partage
familial, on constate une disparition progressive des domaines
de moins de 5 hectares au profit de propriétés comptant
moins d’un hectare. En 2017, Maxime Toubart, président du
Syndicat général des vignerons de la Champagne, avait inter-
pellé le gouvernement afin que des dispositions soient prises.
« De plus en plus coûteuse, la transmission des exploitations devient
un vrai sujet en Champagne. Il faut en effet actuellement trente ans à
l’héritier d’un hectare de terrain pour simplement rembourser les frais
de succession s’il le met en fermage », estime Maxime Toubart. Ces
micro-exploitations (la Champagne en compte près de 9 000)
ne générant pas un revenu suffisant pour permettre d’en
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 55
Qu’entend-on par “prix de revient”
d’une bouteille de vin ?
Le prix de revient d’une bouteille correspond à l’ensemble des
charges qui ont été nécessaires à son élaboration et sa commer-
cialisation. On peut répartir ces charges en cinq groupes :
Les coûts de production du raisin : elle englobe les travaux
de la vigne de la taille jusqu’aux vendanges, les engrais, les trai-
tements, les frais de mécanisation, la main-d’œuvre, l’amortis-
sement de la plantation, du matériel et des bâtiments agricoles,
les travaux effectués par les entreprises extérieures s’il y a lieu,
l’entretien des plantations et les frais de vendanges…
Les coûts de vinification : ce sont les produits œnologiques,
les analyses et labels auprès des laboratoires, la main-d’œuvre,
l’amortissement du matériel de cuverie (pressoir, pompes,
cuves…), les frais d’élevage en barriques…
Les coûts d’embouteillage et de conditionnement :
il comprend les coûts de filtration et de mise en bouteilles,
les matières sèches (bouteilles, bouchons, étiquettes, capsules),
les frais de stockage et l’amortissement des bâtiments…
Les frais de commercialisation : ce sont les coûts marketing,
les déplacements, charges du personnel commercial ou encore
l’amortissement du caveau de vente s’il y en a un…
Les charges annexes : elles englobent les frais généraux,
administratifs, comptables, mais aussi les charges sociales.
Les quatre premiers ensembles forment le coût de production.
En ajoutant les charges annexes, on obtient le prix de revient.
Mais ce dernier n’intègre pas les charges fiscalement non incor-
porables : emprunts, découverts, agios des fournisseurs, charges
exceptionnelles, impôts et taxes. J. B.
Shutterstock
vivre, elles risquent à terme de disparaître au profit de la réali-
sation de lotissements… Cette situation s’observe dans tous les
vignobles où le foncier viticole est élevé : dans les appellations
communales de Bordeaux, en Vallée du Rhône, en Provence,
dans le Sancerrois, en Alsace et bien sûr en Bourgogne.
Au final, chaque domaine viticole est un cas particulier en
termes de rentabilité et de coûts de production. Il est donc
presque impossible de quantifier tous les coûts liés à une bou-
teille de vin en regardant simplement son prix et son appella-
tion d’origine.•
Vous avez manqué un numéro ?
Vous pouvez le télécharger sur votre smartphone ou tablette
 Art de vivre
Accord minute
Le pâté pantin
Un blanc ample est son meilleur allié
A
près le vol-au-vent en février (La RVF n° 638),
nous évoquons ce mois-ci un autre monument
de la cuisine française : le pâté pantin. La recette
originale est un pâté en croûte de viande de veau, gorge de
porc, lard et œufs, servi chaud. Mais il en existe de mul-
tiples déclinaisons qui offrent une belle variété d’accords
avec les vins. Le pâté pantin est plein d’entrain : il réclame
de la puissance et de la persistance pour faire un mariage
heureux. Les blancs amples et généreux sont les bien-
venus. Ne boudons pas les rouges pour autant, à condition
que leur structure et leur vinosité soient capables d’af-
fronter la mâche et l’intensité des saveurs du pâté.
Avec la recette à base de filets de volaille et d’une fine
farce de porc enrobée d’une pâte feuilletée, le choix d’un
blanc s’impose, l’acidité du vin s’oppo-
sant à la texture beurrée du feuilletage.
Prenez un grand chardonnay né sur
les prestigieux terroirs de Meursault
et de Chassagne-Montrachet. Je vous
recommande tout particulièrement
le chassagne-montrachet Abbaye
de Morgeot 2015 signé Pierre-Yves
Colin-Morey. Ce magnifique Premier
cru sublimera votre pâté pantin. Car
dans ce millésime solaire, la largeur du
vin est immédiate, son cœur de bouche
est bien rond mais sans mollesse, la fer-
57 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
« Finement beurré
et doté d’une
belle tension,
ce chardonnay
néo-zélandais
fait mouche
avec le pâté »
Par Olivier Poussier
Meilleur sommelier
du monde 2000
meté de sa finale et sa fine acidité contrastent idéalement
avec le gras du pâté et le beurre de son feuilletage.
Vous pouvez aussi opter pour un châteauneuf-du-
pape blanc. Le 2011 d’Isabel Ferrando, au domaine
Saint Préfert, est une petite merveille. Après huit ans de
bouteille, la clairette a pris le dessus sur la roussanne. Elle
recentre le vin et lui confère une harmonie et une trame
plus longiligne. Un pur délice avec notre pâté pantin !
Hors de nos frontières, je vous emmène en Nouvelle-
Zélande, chez Felton Road. Situé dans la partie la plus
fraîche de l’île du Sud, le domaine de Nigel Greening livre
un chardonnay vinifié et fermenté sous bois, la cuvée
Block 2. Classique, le millésime 2017 associe maturité et
fraîcheur. L’élevage est ici géré avec beaucoup de finesse.
Finement beurré et doté d’une belle ten-
sion, ce blanc fait mouche avec le pâté.
Mais si vous préférez servir un vin rouge,
nappez votre pâté pantin d’un jus de
volaille assez gras pour lui donner encore
plus de caractère et faciliter l’accord. Le
Illustration : Stéphane Manel / D.R.
régnié La Haute Ronze 2016 de Nicolas
Chemarin fera un partenaire idéal. Ce
gamay issu de vendange entière se montre
juste avec ses notes de framboise et sa
touche florale si délicate. Sa jolie matière
peu extraite et sa belle acidité donnent du
peps au pâté. Un régal !
 Art de vivre
Grand accord

Lynch-Bages,
La rencontre
entre deux
seigneurs
s’est tenue
dans un lieu
d’exception.
Un Château
gratin de macaronis
Lynch-Bages 1986
et la truffe sous
la houlette
à la truffe
de Julien Dumas,
le chef du Lucas
Carton, place
Par le chef
de la Madeleine
à Paris.
Julien Dumas
Par Olivier Poels,
photos : Fabrice
Leseigneur

D
urant de longues années, le Lucas Carton fut
le théâtre d’homériques et prodigieuses séances
de travail autour des accords mets et vins avec
l’équipe de La Revue du vin de France et l’immense chef
Alain Senderens, alors maître des lieux. Revenir en ces murs
quinze ans plus tard pour se livrer, avec le nouveau chef
Julien Dumas, à cet exercice aussi passionnant que pointu,
lorsqu’on veut tutoyer l’excellence, met donc un peu
de pression. Le salon qui nous accueillait jadis a été rafraîchi,
mais le lieu demeure inspirant et le chef a très envie
de jouer… Ça tombe bien, nous aussi. Dans notre escarcelle,
plusieurs millésimes du château Lynch-Bages, un cru
de Pauillac que l’on ne présente plus.
Première leçon, les trois millésimes servis, 2001, 1995 et
1986, se montrent ce jour-là un peu mutiques à l’ouverture.
Ils peinent à se révéler. Ce n’est que quelques minutes
plus tard, bien aérés, qu’ils donnent la pleine mesure
de leur potentiel. Les hostilités commencent donc avec
un 2001, millésime désormais prêt à boire, entre jeunesse
et début d’évolution, mais avec beaucoup de tenue
et de volume. Juteux, il appelle une viande. Un pigeon,
propose le chef, dont la chair et surtout le travail autour
des abats, à la façon d’une bécasse, épouse le côté sanguin
du vin. Un accord qui fait aussi mouche avec le 1995. LE RESTAURANT
Ce dernier, très en forme également, est confronté
à une détonante création autour du champignon de Paris,
Le Lucas Carton à Paris
travaillé en différentes textures. Le plat est grand, mais Cette vénérable institution a ouvert ses portes place de la Madeleine
l’accord butte… Reste le 1986, droit dans ses bottes, à Paris en 1839 ! D’abord baptisé Taverne de France, le lieu est l’un des
plus courus de la capitale. Il prend le nom de Lucas en 1880 puis, acquis
que nous avons accordé avec une superbe truffe tuber par monsieur Carton entre les deux guerres, devient le Lucas Carton.
melanosporum cuisinée de manière gourmande et surtout Alain Senderens, qui y fit son apprentissage, le reprend en 1985 et le
très simple, avec un gratin de macaronis. Une merveille. propulse au sommet. Il appartient depuis 2013 à Paul-François Vranken.

58 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Au Lucas Carton
depuis 2013, Julien Dumas
a été initié aux accords
mets et vins par son
illustre prédécesseur,
Alain Senderens.
 Art de vivre
Grand accord

LE CHEF
Julien
Dumas
Né en 1979 à Grenoble,
Julien Dumas arrive en 2013
au Lucas Carton. Voyant en lui
un successeur digne
de porter haut les couleurs
de ce lieu mythique,
Alain Senderens, qui avait
prévu de partir en retraite,
accepta de rester une année
supplémentaire pour
épauler le jeune chef et lui
insuffler l’esprit du lieu.
Ce dernier, passé par
la brigade du grand Jacques
Maximin et de Jean-François
Piège, avait déjà un solide
pedigree et surtout beau-
coup de talent. Ce qui
se confirme aujourd’hui
avec une cuisine engagée,
responsable et travaillée,
entre modernité et grand
classicisme.

LE VIN
Château
Lynch-Bages
1986
Le millésime de forte réputation
a engendré des vins au profil assez
austère, dotés à leur naissance
de tanins fermes qui se détendent
petit à petit. Ce 1986 n’y échappe pas,
il demeure ferme en finale malgré
un cœur de bouche velouté.
Il commence à basculer dans
un registre évolutif, avec des notes
de thé fumé, de truffe et de cèdre.
Le passage en carafe s’impose.
60
LES CLÉS
DE L’ACCORD
L’astuce de l’accord consiste à apporter
de la gourmandise au vin, de lui “graisser”
la finale toujours un peu serrée et austère.
Le moelleux du plat, sa note lactique,
le gras du parmesan font merveille, le vin
semble gagner en ampleur, il s’épanouit
en bouche, les tanins s’arrondissent.
La truffe, quant à elle, parfait l’accord
dans un esprit de ton sur ton, déployant
ses saveurs et apportant surtout
beaucoup de persistance.
- LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Art de vivre
au Lucas Carton

LA RECETTE
Gratin de macaronis
à la truffe

Les ingrédients Déroulement vrir du mélange lait, truffe et

pour 4 personnes Cuire les macaronis dans le lait avec l’ail
200 g de macaronis fendu. Réaliser un beurre de truffe avec
50 g de truffe les parures (env. la moitié de la truffe).
1 gousse d’ail Égoutter les macaronis et récupérer
500 cl de lait entier le lait. Le faire réduire de moitié.
50 g de beurre demi-sel Ajouter le parmesan et les trois quarts
25 cl de jus de viande du beurre de truffe. Disposer les maca-
10 g de parmesan ronis dans un plat à gratin et les recou-
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 61
parmesan. Enfourner 8 mn à 180° C.
Dressage
Poser du gratin de macaronis au centre
d’une assiette, verser un peu de jus
de viande réchauffé et monté avec
le reste du beurre de truffe. Râper
le reste de truffe par-dessus.
 ABONNEZ-VOUS 1 AN 69
seulement
€

+ de
ET RECEVEZ 0%ise
4rem
de

Le tire-bouchon BarWise
de Joseph Joseph
UNE NOUVELLE GAMME
D’ACCESSOIRES DE BAR
QUI COMBINE INNOVATION,
DESIGN ET CARACTÈRE
FONCTIONNEL.

12 numéros LE TIRE-BOUCHON
(valeur kiosque 91 €) MANIVELLE
par an dont Forme unique à manivelle
• 2 numéros spéciaux pour retirer les bouchons
• 2 hors-séries facilement en un mouvement,
le guide garantit
un positionnement parfait,
le tire-bouchon avec
UN ESPACE DÉDIÉ AVEC EN CONSULTATION ILLIMITÉE :
revêtement antidérapant
• Les articles réservés en exclusivité aux abonnés s’insère facilement dans
• Plus de 100 000 vins notés et commentés tous les types de bouchons,
• L’accès à 40 ans d’archives du magazine, soit plus de 300 nos coupe capsule intégré.
• L’accès à tous les Guides RVF Coloris : Bleu pétrole
Retrouvez l’offre valeur 59€ Dimension : 6 x 13,5 x 3,2 cm
directement sur notre site Valeur : 24,99 €

B U L L E T I N D ’A B O N N E M E N T
PAR INTERNET PAR TÉLÉPHONE PAR COURRIER
site officiel d’abonnement à compléter et à retourner avec votre règlement à :
www.magazines.fr/larvf 01 84 888 222 prix d’un appel local LA REVUE DU VIN DE FRANCE - Service Abonnements
Code express 639JJ +331 84 888 222 appel depuis l’étranger 26 bis rue des Pommiers CS 30075 - 93501 Pantin

Oui, je m’abonne à La Revue du vin de France MES COORDONNÉES

et je recevrai le tire-bouchon Joseph Joseph Prénom :
je choisis ma formule : Nom :

Adresse :
Le magazine pendant 1 AN = 69 € au lieu de 115,99 € 639JJ1
Code Postal : Ville :
larvf.com pendant 1 AN = 69 € au lieu de 83,99 € 639JJ2
Pays : Tél. :

Le magazine + larvf.com = 99 € au lieu de 174,99 € 639JJ3 E-mail :

JE DEMANDE UNE FACTURE Je souhaite recevoir les offres des partenaires Date et signature obligatoires
de La Revue du vin de France
Offre valable 3 mois. Vous pouvez acheter séparément chaque numéro de votre magazine à son prix de vente au numéro + 2,50€ de frais
de port ainsi que le tire-bouchon Bar Wise de Joseph Joseph dans la limite des stocks disponibles au prix de vente indiqué + 5€ de frais de
port. Les informations qui vous sont demandées sont destinées à la société La Revue du vin de France SAS. Elles sont collectées et utilisées JE RÈGLE PAR :
à des fins de traitement de votre abonnement. Votre adresse mail sera utilisée pour suivre votre abonnement et vous envoyer les commu-
nications dont vous bénéficiez en tant qu’abonné. En application de la règlementation en vigueur, vous disposez des droits d’accès, de Chèque libellé à l’ordre de La Revue du vin de France
rectification, d’effacement, d’opposition, à la portabilité des données et à la limitation des traitements. Pour exercer vos droits, veuillez
contacter le Groupe Marie Claire (GMC) par mail à dpo-rvf@gmc.tm.fr ou par courrier à Groupe Marie Claire-DPO –10, boulevard des frères Carte bancaire N°
Voisin - 92130 Issy Les Moulineaux, en justifiant de votre identité. Vos données postales sont susceptibles d’être transmises à nos parte- Bloc de trois chiffres
naires commerciaux. Si vous ne le souhaitez pas, merci de cocher cette case ou de nous en informer à l’adresse ci-dessus. Pour toute infor- Date d’expiration Cryptogramme au verso de votre carte
mation complémentaire, consulter notre Politique de Confidentialité sur le site www.magazines.fr.
 Art de vivre
C’est comme ça et pas autrement
Nul n’est prophète en son pays
E
n 2015, lorsque Michelin a publié la première
édition du guide Rio de Janeiro & São Paulo, j’ai été
frappé de constater que de nombreux restaurants
honorés d’une étoile proposaient des vins naturels fran-
çais pour accompagner par exemple un plat de morue
au chorizo ou un tartare de picanha. Car en France, on
rencontre toujours des sommeliers de grandes maisons
qui se bouchent le nez à l’évocation des vins sans soufre.
Qui le croira ? Ces vins voyagent. Ils sont capables de
faire 9 000 kilomètres des bords de Loire au quartier de
Botafogo, à Rio de Janeiro, pour accompagner la cui-
sine explosive d’Alberto Landgraf au restaurant Oteque
(rue Conde de Irajá, 581). Après avoir gagné une étoile au
Michelin à l’époque où il tenait le restaurant Epice à São
Paulo, le chef natif de Cornélio Procópio, dans l’état rural
du Paraná, a posé ses bagages à Rio, sur les rives de la baie de
Guanabara, ouvert un nouveau restaurant en février 2018
et récupéré le précieux macaron dans l’édition suivante du
Guide rouge à la mode du Brésil.
Au restaurant Oteque, le plus inventif du Brésil selon ses
nombreux inconditionnels, la cuisine d’Alberto Landgraf
est inspirée, concentrée, intelligente, joyeuse et sur-
tout très brésilienne. Le chef fait partie de cette nouvelle
génération qui a accompli une véritable révolution gas-
tronomique au Brésil en proposant des plats débordant
d’inspirations autochtones, caipira, gaúcha, mineira ou
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 63
« Ce qui m’a
laissé sans voix,
c’est le choix
du sommelier
auquel j’avais
laissé carte
blanche »
Par Sébastien
Lapaque
Écrivain,
chroniqueur
littéraire
et solide buveur
amazonienne. À la fois grâce aux produits travaillés et à la
façon de les déguster, crus ou cuits, avec une recherche de
la nostalgie du grillé et du fumé qui caractérise la cuisine en
plein air, la cuisine du sertão.
Ce qui m’a laissé sans voix à Oteque, c’est le choix du
sommelier auquel j’avais laissé carte blanche. Après un
joli saké et un jerez manzanilla parfait sur une huître
pochée, il ne m’a servi que des vins naturels français. Le
vouvray demi-sec La Dilettante 2017 de Catherine Breton
avec le porc à la patate douce, le millésime 2017 du chenin
Le pressoir de Saint-Pierre que Renaud Guettier pro-
duit au domaine La Grapperie avec les crevettes en sauce
pirão, le sancerre rouge Les Quarterons 2016 de Sébastien
Riffault avec le filet de vivaneau au tucupi, la cuvée Y’a Bon
the Canon 2016 de Jean-François Ganevat avec le canard
aux légumes, le sancerre blanc Skeveldra 2014 de Sébastien
Riffault avec le fromage et le jurançon Clos Lapeyre de
Jean-Bernard Larrieu pour accompagner un dessert à base
de pêches. Mâtin quel festin !
Le chenin était à la fête, mais pas seulement lui. D’un
plat à l’autre, j’ai dégusté des vins décalés avec une cuisine
Illustration : Stéphane Manel
décalée. Je n’en croyais pas mes papilles. J’ai songé aux
sommeliers français qui font encore la fine bouche devant
ces vins que l’on s’arrache à l’autre bout du monde. C’est
comme ça, et pas autrement, que je me suis souvenu que
nul n’était prophète en son pays.
 Art de vivre

Balade à Anvers
avec Maurice Velge

Célèbre pour son immense port maritime et son quartier des diamantaires, la ville flamande fourmille de lieux typiques, à la fois raffinés et attachants.

64 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Art de vivre

Y ALLER
Située au croisement de grandes
autoroutes européennes, il est
très facile de se rendre à Anvers
en voiture. Comptez 3 h 30 depuis
Paris, 50 mn depuis Bruxelles.
La ville est aussi desservie par
Propriétaire du château de Côme le Thalys en 2 h 05 depuis la gare
à Saint-Estèphe, le baron Velge est un du Nord. Pour ceux qui ont le pied
amoureux d’Anvers, sa ville. Il nous confie marin, deux ports accueillent les
ses adresses favorites et nous entraîne bateaux de particuliers. L’office de
tourisme propose de nombreuses
à la découverte de la cité flamande qui a su idées de circuits et balades en ville.
se faire une place à part en Europe dans visitantwerpen.be
l’univers de l’art et de la gastronomie. NOTRE GUIDE Grote Markt 13, 2000 Anvers.
Par Béatrice Delamotte Esthète, passionné de grands vins, Tél. : +323 232 01 03
gourmet raffiné, le baron Maurice
Velge a passé sa vie dans l’univers
SON COUP
D
epuis plus de vingt ans, le baron Maurice Velge portuaire, plus particulièrement
fait la navette entre Anvers et la pointe du Médoc, celui d’Anvers, sa ville, qu’il a dirigé DE CŒUR
là où il a acheté deux crus bourgeois, les châteaux pendant trente ans. Mais Maurice ① Le port maritime
de Côme et Clauzet. Une sorte de double vie qui ne l’empêche Velge est aussi un grand amateur Les plus grands navires du monde
pas d’être un amoureux inconditionnel de la ville belge d’art, ce qui lui a valu de présider, naviguent presque jusqu’au cœur
où il aime tant se retrouver. « Versailles n’est qu’un palais, mais en 1993, la capitale européenne d’Anvers, à 80 km à l’intérieur des
Anvers est une civilisation, disait Victor Hugo. C’est sans conteste de la culture : « La plus belle terres ! Véritable ville dans la ville,
la villebelge la plus complète, la plus vivante, dynamique année de ma vie ! ». le port anversois est impression-
et cosmopolite », s’enthousiasme Maurice Velge. Il faut dire nant ; c’est là aussi que se trouve
que c’est aussi une cité marquée par la présence française, la plus grande écluse au monde.
depuis le XVIe siècle. C’est là que Christophe Plantin déve- Et comme souvent ici, l’art n’est
loppa la première imprimerie industrielle peu avant 1550. pas loin : l’artiste graffitiste Cazn a
Ce sont aussi des Français qui ont marqué l’architecture travaillé dix semaines dans l’écluse
anversoise : « En 1830, un architecte nommé Pierre Bourla pour y peindre une fresque murale
réalisa un ravissant théâtre d’esprit classique et, en 1905, Louis de 300 m de long, régulièrement
de la Censerie imagina la gare centrale, véritable cathédrale du rail immergée au rythme des marées.
classée parmi les cinq plus belles d’Europe », précise Maurice Velge. Ne ratez pas le Museum aan
Un patrimoine architectural auquel il convient d’ajouter de Stroom (le “MAS”), d’où l’on jouit
le bâtiment signé Zaha Hadid qui abrite, depuis 2016, d’une vue époustouflante sur
le nouveau siège de l’autorité portuaire. Car Anvers est aussi la ville et le port.
le premier port français : le volume de marchandises
de l’Hexagone y passant est plus important que dans
n’importe quel port de France. Et le baron Velge sait
de quoi il parle : il a présidé la fédération du port pendant
Photos : D. R. / Claire Le Meil

de nombreuses années. Sans oublier le quartier

des diamantaires qui fait d’Anvers la capitale de la pierre
précieuse, grâce à une découverte technique faite
au XIXe siècle : la taille “brillant” qui donne aux diamants
un éclat incomparable. « Anvers, la ville que j’aime », résume
Maurice Velge, le regard pétillant.

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 65

 Dernière édition
Le Guide
des meilleurs vins de France 2020

LE NUMÉRO 1 DES GUIDES

D'AUTEURS CONSACRÉS
AU VIN EN FRANCE
DEPUIS 1996 PROPOSE
SON ÉDITION 2020
100 % RENOUVELÉE.
Notre sélection impartiale et
indépendante des meilleurs
vignerons, la notation et la
description de plus de 6 250
vins, nos coups de cœur
et toutes les informations
indispensables.

NOUVEAU !
150 cuvées pour une cave
idéale
Le Guide des meilleurs vins
Photos non contractuelles

de France 2020, référence des

amateurs, est l'outil indispen-
sable pour constituer sa cave,
dénicher des pépites et acheter
en toute confiance. 28€ Frais de port
OFFERTS !

JE COMMANDE MON GUIDE

PAR INTERNET www.magazines.fr/boutique-rvf
PAR COURRIER en retournant ce bulletin et votre règlement à La Revue du vin de France - Service Abonnements 26 bis rue des pommiers CS 30075 - 93501 Pantin
PAR TÉLÉPHONE 01 84 888 222 (prix d’un appel local)

OUI, je profite de votre offre et je commande MES COORDONNÉES ❒ Mme ❒ M.

QTÉ P.U Prénom : Nom :
Le guide des meilleurs vins de France 2020 28 € Adresse :
FRAIS DE PORT UNITAIRE FRANCE OFFERTS
Frais de port Europe/Hors Europe 5€ CP :

TOTAL DE MA COMMANDE Ville : Pays :

Tél. : E-mail :
Date et signature obligatoires :
Je commande sur ❒ Je souhaite recevoir les offres des partenaires de La Revue du vin de France
www.magazines.fr/boutique-rvf
avec le code VPC20
JE RÈGLE PAR
Vous recevrez vos guides dans les 3 semaines suivant l’enregistrement de votre règlement. Offre valable 1 an dans la limite des stocks disponibles. Frais de port
offerts en France métropolitaine uniquement. Les informations qui vous sont demandées sont destinées à la société La Revue du vin de France SAS. Elles sont ❒ Chèque libellé à l’ordre de La Revue du vin de France ❒ Carte bancaire Visa/Mastercard
collectées et utilisées à des fins de traitement de votre dossier. Le cas échéant, votre adresse mail sera utilisée pour suivre votre abonnement et vous envoyer
les communications dont vous bénéficiez en tant que client. En application de la réglementation en vigueur, vous disposez des droits d’accès, de rectification,
d’effacement, d’opposition, à la portabilité des données et à la limitation des traitements. Pour exercer vos droits, veuillez contacter le Groupe Marie Claire (GMC) n°
par mail à dpo-rvf@gmc.tm.fr ou par courrier à Groupe Marie Claire-DPO –10, boulevard des frères Voisin - 92130 Issy Les Moulineaux, en justifiant de votre
identité. Vos données postales sont susceptibles d’être transmises à nos partenaires commerciaux. Si vous ne le souhaitez pas, merci de cocher cette case ❒
ou de nous en informer à l’adresse ci-dessus. Pour toute information complémentaire, consulter notre Politique de Confidentialité sur le site www.magazines.fr. Expire fin : Clé : 3 derniers chiffres au dos de votre carte

BONNES TABLES
② ‘t Fornuis
« Exceptionnel dans son atmos-
phère de vieille maison flamande
du XVIIe siècle où classicisme et
originalité se marient. Le chef
Johan Segers est le “parrain”
de la gastronomie anversoise.
Très bon saucier et jolie cave. »
À partir de 75 €.
Reyndersstraat 24, 2000 Anvers.
Tél. : +323 233 62 70
③ Le Vin d’Où
« Un élégant hôtel de maître
du XIXe siècle, avec une terrasse
ensoleillée pour les beaux jours.
On y trouve un raffinement et
une variété incroyables entre les
poissons et les viandes. Le turbot
est particulièrement délicieux… »
À partir de 90 €.
Terlinckstraat 2, 2600 Berchem
Tél. : +323 230 55 99
Site : vindou.be
④ Het Nieuwe
Palinghuis
« La tradition de la cuisine
flamande au top, au milieu
de marines et photos anciennes.
Ne ratez pas l’anguille au vert ! »
Menus à partir de 44 €.
Sint-Jansvliet 14, 2000 Anvers
Tél. : +323 231 74 45
Site : hetnieuwepalinghuis.be
Art de vivre
Les bonnes adresses d’Anvers
⑤ L’Amitié
« Une décoration contemporaine,
une formule de petits plats
à partager et surtout la cave d’un
amateur. À ne pas manquer pour
mieux connaître l’Anvers contem-
porain. » Plat à partir de 5 €.
Vlaamse Kaai 43, 2000 Anvers
Tél. : +323 257 50 05
Site : lamitie.net
⑥ Bar(t)-à-Vin
« Dans le quartier des abattoirs,
cette ancienne charcuterie aux
mosaïques évocatrices abrite
cette adresse attachante.
Les tables entourent l’îlot central
où le chef concocte des plats
copieux et très sympathiques. »
À partir de 25 €.
Lange Slachterijstraat 3-5,
2060 Anvers
Tél. : +324 74 94 17 86
Site : bartavin.be
NUITS
DOUILLETTES
⑦ De Witte Lelie
« Dans la vieille ville, cet hôtel offre
la combinaison parfaite entre le
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 67
charme historique et la meilleure
qualité actuelle. » Seulement dix
chambres et suites à la décoration
raffinée. À partir de 265 € la nuit.
Keizerstraat 16, 2000 Anvers
Tél. : +323 226 19 66
Site : dewittelelie.be
⑧ Hilton Antwerp
Old Town
que se trouve la Diamantclub
van Antwerpen, la principale
bourse de diamants bruts et taillés
au monde. Ne manquez pas
« Dans un ancien grand magasin de faire un tour au DIVA (Antwerp
début XXe siècle », cet hôtel Home of Diamonds) pour admirer
surplombe la place historique des trésors précieux présentés
du centre-ville et les plus beaux dans un univers interactif.
spécimens de l’architecture belge. Suikerrui 17-19, 2000 Anvers
À partir de 224 € la nuit. Tél. : +323 432 02 71
Groenplaats 32, 2000 Anvers Site : divaantwerp.be
Tél. : +323 204 12 12
Site : hiltonhotels.com ⑪ Musée Mayer
van den Bergh
⑨ Hotel Matelote Il abrite une collection unique d’art
belge et étranger réunie par Fritz
Mayer van den Bergh, un riche
homme d’affaires anversois
du XIXe siècle.
Lange Gasthuisstraat 19,
2000 Anvers
Tél. : +323 338 81 88
Site : museummayervandenbergh.be
« Près du musée Plantin et de
l’Escaut, une adresse conviviale et
très abordable » qui associe le luxe
d’aujourd’hui à l’architecture
du XVIe siècle. À partir de 90 €.
Haartstraat 11a, 2000 Anvers
Tél. : +323 201 88 00
Site : hotel-matelote.be
À DÉCOUVRIR
⑩ Quartier
des diamantaires
Situé au pied de la gare centrale,
ce quartier qui existe depuis le
XVe siècle voit passer 70 % de la
production de diamants. C’est ici
 Art de vivre
Spiritueux

Dix
Traditionnelle et
artisanale, la famille de
l’armagnac n’en est pas
moins en mouvement.

armagnacs Elle bouge et vibre grâce

à une poignée de cuvées
à la fois innovantes et
rafraîchissantes.

très tendance ! Par Cyrille Mald

et Alexandre Vingtier

L
ongtemps cantonné aux cadeaux d’anniversaire,
en raison de ses cuvées millésimées, et aux fins
de repas dans les restaurants gastronomiques,
1 LAUBADE
Le Plant de Graisse 2006,
Les curiosités de Laubade,
Bas-Armagnac, 46,3 %
l’armagnac fait d’importants efforts pour se réinventer. Alors que près des deux tiers
Prenant exemple sur d’autres univers, ceux du whisky, du vignoble d’Armagnac est planté
du cognac et du rhum notamment, les acteurs de l’armagnac d’ugni blanc, certains producteurs
se tournent vers les cépages mino-
s’autorisent une marge d’innovation pour répondre aux ritaires, comme le très confidentiel
nouvelles tendances. Une partie d’entre eux, très talentueux, plant de graisse. Fragile, il ne repré-
y parvient avec brio, comme le montre notre sélection. sente que 16 hectares dans
Après avoir mis en lumière le grand retour aux embouteil- le monde, dont 1,45 hectare
lages à forts degrés qui séduisent les amateurs de single malt (3 800 pieds) planté en 1997 par
la famille Lesgourgues. Déguster
(La RVF n° 609, mars 2017), nous vous proposons ce mois-ci le plant de graisse non assemblé est
d’accéder aux cuvées qui ouvrent la voie aux cépages rares, donc un privilège rare. Arrivée
aux assemblages originaux, aux différents types de barriques, à maturité après douze ans de vieil-
à l’amphore et même au bio ! lissement, cette cuvée offre densité
Ces flacons sont disponibles dans les boutiques en ligne et finesse, avec une dominante
fruitée (coing, abricot, amande)
des producteurs ou sur les sites marchands armagnac.com, et finement florale (rose), dont
myarmagnac.com et plaisirsdegascogne.com. la tension épicée (thé noir pu’er,
poivre noir) capte la persistance
du rancio intermédiaire (abricot)

2 LA DISTILLERIE
GÉNÉRALE
Réserve Cathédrale Single Cask,
et s’oppose à son charnu.
55 € les 50 cl,
364 bouteilles disponibles
Armagnac, 49,3 %
Les embouteillages de La Distillerie
Générale, qui appartient à Pernod
Ricard, ont pour mission de mettre
en avant quelques-uns des trésors
du groupe. Œuvre des maîtres de chai
3 JEAN CAVÉ
L’Expérience, Blanche d’Armagnac, 64 %
L’incontournable maison Jean Cavé livre ici
une eau-de-vie d’ugni blanc et de colombard
successifs de la maison Marquis non diluée, à un degré probablement jamais
de Montesquiou, cette pépite est commercialisé auparavant dans l’appella-
un assemblage de très anciennes tion. De quoi ravir les amateurs du genre,
eaux-de-vie, auquel ont été ajoutés ainsi que les mixologues en herbe. Avec
des millésimes de 1962 à 1987, et ce une telle concentration, c’est également
en plusieurs étapes depuis 1991 ! une superbe base pour des macérations.
Dans le verre, un véritable maelström À déguster frappée pour en apprécier toute
de cuir, griotte, jasmin, pruneau, noix, la rondeur et les arômes fruités et floraux :
Photos : D. R.

cacao et miellat, avec un rancio fumé la poire, le raisin blanc, le litchi, la figue de
d’une rare profondeur. Preuve s’il en barbarie, les fleurs blanches. Et une jolie
est qu’il existe une alternative aux finale sur la noisette.
vieux millésimes dans l’appellation ! 61 € les 70 cl, 571 bouteilles disponibles
105 € les 35 cl,
830 bouteilles disponibles

68 - LA RVF N°639 - MARS 2020

 Art de vivre
Spiritueux

4 LABALLE
Résistance 100 % Cépage Maurice Baco 22A,
Bas-Armagnac, 43 %
On assiste au retour sur le devant de la scène
des cépages hybrides, comme le fameux
Baco 22A, croisement de la folle blanche
5 ROUNAGLE
20 ans, Armagnac Ténarèze, 42 %
Domaine d’une vingtaine d’hectares
désormais sous la coupe d’Hugues Amesland,
et de l’américain noah. Il a longtemps été le seul ancien directeur de Samalens et Larresingle,
autorisé en Europe et a d’ailleurs failli être banni. c’est l’étoile montante de la Ténarèze.
Résistance est donc une référence non seule- Ce 20 ans regorge de gourmandise avec
ment au phylloxéra mais aussi à la singularité des arômes de noisette, de cerise et de réglisse,
de l’histoire de l’armagnac. Une expression née avec de jolis accents floraux (violette, jacinthe).
de l’assemblage des millésimes 2009, 2010 et Indéniablement une parfaite expression
2012, vieilli en partie en barriques neuves de ce terroir !
de chêne noir gascon. Poudré, subtil et élégant, 75 € les 70 cl
sur la fleur d’oranger, légèrement miellé
(buisson d’ajonc), pomme verte, cet armagnac
de Cyril et Julie Laudet offre une persistance sur
la réglisse douce. 49 € les 70 cl

6 CHÂTEAU DE SANDEMAGNAN
Eau des Anges 2013, Blanche d’Armagnac, 43,5 %
Marque ultra confidentielle, présente exclusive-
ment ou presque dans les établissements du chef
Michel Guérard, propriétaire de cette superbe
distillerie qui mérite le détour ! Cette exceptionnelle
blanche a séjourné plusieurs années dans des jarres
7 DARROZE
Biologic 2000, Bas-Armagnac, 48 %
La mythique maison de négoce
en terre cuite. Une merveille de rondeur à servir du Bas-Armagnac landais lance
givrée pour accompagner un caviar ou un dessert sa gamme bio. On y trouve le plus
au chocolat et aux fruits de la passion ou pour ancien armagnac millésimé certifié
réaliser le fameux homard ivre du chef ! bio : le 2000, qui privilégie le cépage
25 € les 70 cl à la distillerie folle blanche. Cette expression gagne
en vivacité du fait de sa structure
aromatique où chaque facette renvoie
à la fois à sa dominante florale (fleur

8 DARTIGALONGUE
Dry-Cellar, Armagnac, 43,4 %
Cette vénérable maison met ici
d’amandier, aubépine), à son fruité
(raisin blanc, anone, quetsche,
pruneau) mais également à sa fraîcheur
(chlorophylle, menthe poivrée) qui
en avant le concept de chai sec, se marient pour offrir une vraie tenue
que l’on connaît déjà dans en bouche.
le Cognaçais, notamment pour 80,50 € les 70 cl
les cuvées “cigare”. Sous les toits,
les barriques subissent de très
fortes chaleurs en été et une
grande amplitude thermique
durant l’année. L’eau-de-vie
extrait alors des arômes origi-
naux du chêne tout en préser-
vant son fruité :
la pêche et la prune s’associent
à la vanille et aux notes boisées.
Idéal en cocktail.
39 € les 70 cl
10 UBY
Oak, Organic Triple Casks, 40 %
Uby est un producteur à la marque
forte, hors des codes, qui offre

9
cette expression bio et jeune, issue
RABASTAS des cépages baco et ugni blanc, aux
Blanche d’Armagnac, 42 % notes étonnamment douces (caramel
Rabastas est une marque créée par l’Argentin César mou, pain d’épices), épicées (poivre,
Kuberek pour la scène cocktail européenne. Pour baie rose) et vanillées. Sa maturation
sa blanche, Elle pratique la distillation à repasse, comme s’effectue une année en fûts neufs
il était d’usage à l’origine de l’armagnac au XVIIe siècle. de chêne gascon, suivie de deux ans
Désormais, seule une poignée de producteurs utilise en fûts de chêne des Vosges,
ce procédé, dont Delord Frères, pour cette eau-de-vie et d’une finition en fûts de chêne
100 % colombard. Des notes asséchantes et herbacées sessile français. Pour amateur
laissent place à des arômes floraux (eau de rose) de rhums de mélasse !
et délicats (fève de tonka, poudre d’amande douce). 42 € les 70 cl
La noisette conclut le tout. À vos shakers ! 26 € les 70 cl

LA RVF N°639 - MARS 2020 - 69

 Domaine
Paetzold
ou l’art du vin “sous verre”
À Bénesta, dans un coin reculé du Roussillon,
Michael Paetzold expérimente l’élevage de vins sous globes
de verre pour tirer la quintessence de ses vignes centenaires.
Reportage et dégustation de Pierre Casamayor

70 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 De vigne en cave
Vie de château
I
maginez un œnologue doublé d’un entrepre-
neur inventeur, avec une activité de conseils
et travail à façon dans les technologies les
plus avancées de la vinification (près de 40 brevets
déposés), ayant comme clients les plus grands crus
du Bordelais et d’ailleurs. Imaginez un homme pas-
sionné qui trouve son Graal dans un coin reculé du
Roussillon et décide d’y faire naître son propre vin, axé sur son
terroir et ses gènes naturels. Imaginez que ces deux hommes
n’en font qu’un et vous avez Michael Paetzold ! Est-il Janus ?
Docteur Jekyll et Mister Hyde ? Cet homme a deux visages.
Nous allons vous décrire celui qui a pris une teinte verdoyante,
matinée de couleurs catalanes.
Fils de brasseur, il tombe un jour de 2005 en arrêt devant un
paysage de bout du monde, une ligne de crête entre les val-
lées de la Têt et de l’Agly. Sur cette arête, de vieilles parcelles
de vignes laissées à l’abandon. Il les rachète et les fait revivre,
avec l’aide de Didier Raynald, ancien vigneron qui connaît le
moindre caillou de ce territoire et gère toute la partie viticole
du domaine. Ce sont désormais une vingtaine de parcelles,
dont douze plantées avant 1905, qui composent le domaine
Paetzold. Elles s’étagent entre 200 et 400 mètres d’altitude,
chacune avec sa personnalité, sur un total de 19 hectares.
UN SCÉNARIO IDÉAL POUR LE BIO
Le terroir est singulier, il repose sur des sols de gneiss, de gra-
nits, d’argilo-calcaires caillouteux et pauvres en matière orga-
Photos : D. R.
En 2005, Michael Paetzold tombe en arrêt devant ce paysage de bout du monde : une ligne de crête entre les vallées de la Têt et de l’Agly.
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 71
nique, établis en terrasses, dans de fortes pentes.
Nous sommes en Roussillon et la tramontane fait
partie du terroir, avec ses vents tempétueux froids
et secs qui assainissent le vignoble et rendent fous
les vignerons. Les influences marines qui apportent
douceur et humidité sont ici atténuées. Un scénario
idéal pour une culture en bio. Autre atout non négli-
geable, une présence exceptionnelle en eau, issue d’une rivière
souterraine. Ce vignoble n’a jamais souffert de la sécheresse,
même si les pluies ici se font plutôt rares. Le premier travail fut
de refaire vivre les sols, avec griffage, trois fois par an. On laisse
les herbes jusqu’en mars, ensuite on gère la concurrence.
L’encépagement comprend carignan, syrah, grenache et
carignan blanc. Les vieilles parcelles peuvent être complan-
tées. On a replanté de nouvelles vignes à 4 000 pieds par hec-
tare, avec des bois issus de sélections massales dans les vieilles
parcelles, greffées en place sur R110, en particulier une parcelle
de carignan blanc sur versant nord à 370 mètres d’altitude, très
prometteuse. Carignans et grenaches sont conduits en gobelet
traditionnel à quatre bras et deux yeux, des gobelets bien aérés
pour favoriser la maturation. Les syrahs sont palissées en
cordon. Les grenaches s’étagent entre 200 et 400 mètres avec
des personnalités très différentes. Les carignans occupent les
hauts et les expositions nord, sur les terrains les plus frais. On
retrouve cette fraîcheur à la dégustation.
Les amendements sont effectués avec des composts. Les
traitements, dans la ligne bio évidemment, comportent cuivre
 De vigne en cave
Roussillon

Les perles de Paetzold

La cuvée Mastrio Mastrio rouge (100 % carignan noir)
(qui signifie
“mas à trois”, 2018 Encore en cuve. Beau nez framboisé, belle alliance fruit/minéralité,
notes de terre chaude, de romarin. En bouche, fruité pur et intense,
le nom originel 17/20 matière profonde et tanins déjà assouplis, finale allongée. Séducteur.
du domaine)
est issue de très 2017 Le nez mêle fruits noirs rôtis, épices douces et minéralité. Belle am-
pleur en bouche, fruité très mature, du gras, une qualité phénolique
petits rende- 18/20 accomplie. Tanins veloutés. Finit long et épicé, en pleine forme.
ments de vignes
de carignan 2016 Les notes secondaires apparaissent, sans rusticité : havane, feuille
morte, fruits compotés. Bouche dense, expression aromatique qui
âgées de 120 ans. 16,5/20 se complexifie. Finit sur des tanins gras et une fraîcheur minérale.
2015 Partiellement élevé en globes. Fruité très mûr, le millésime solaire
parle, avec des épices, des herbes aromatiques. Bouche riche, velou-
17/20 tée, tanins fondus. Finale allongée, sur des fruits rôtis aux épices.

2014 Le nez est plus évolué, avec des fruits secs, des notes de sous-bois.
La bouche est plus légère, elle commence à présenter des signes
13/20 d’usure. Un vin à boire rapidement.

2012 Premier millésime vinifié dans le nouveau chai. Fruits noirs, cailloux
chauds, fraîcheur mentholée. Bouche un peu rigide, tanins architec-
15/20 turés un peu austères, on sent une extraction poussée. Attendre.

Notes tertiaires, montée du tabac, du cuir noble, du cacao. La truffe

2011 apparaît. Beau nez de carignan complexe. Bouche équilibrée entre
17/20 force et fraîcheur, tanins encore debout, épicés. Style plus sudiste.

2010 Nez sur les fruits noirs rôtis, les épices poivrées, notes de cacao
et de sous-bois. Bouche structurée, matière expressive, tanins
16/20 encore un peu serrés. Finit sur le poivre blanc et la minéralité.

Mastrio blanc (100 % carignan blanc)

2018 Encore en cuve. Nez encore fermentaire, fruit blanc vif, intenses
notes florales, touches anisées. Bouche ample et grasse, soutenue par
17,5/20 un tonus vibrant. Finit sur une fine amertume, presque tannique.
2017 Nez très fin, complexe, fruit blanc mûr, fleurs blanches et épices
discrètes. Grand équilibre entre fruit et fraîcheur, une énergie cris-
19/20 talline se dégage. Finale très allongée, poivrée. Belle personnalité.

2016 Nez de zestes d’agrumes, tisane, anis. La bouche est expressive,

bien tendue, avec du volume. La finale est tout aussi complexe,
18/20 persistante, avec toujours une grande personnalité.

2015 Des notes miellées, de fruits jaunes rôtis, de tilleul. Bouche ample,
riche, peut-être un peu moins tonique. Le vin finit sur des herbes
16/20 aromatiques amères, avec une minéralité saline.

2014 Le nez est un peu sur sa retenue, le fruit blanc et les herbes
se partagent la palette. Bouche citronnée, avec une matière plus
14/20 étroite, une finale raccourcie. Un petit millésime.

2013 Un nez fumé, très minéral, avec des notes de graphite, de fruits
blancs grillés. La bouche est svelte, droite, un peu austère. Un vin
15/20 plus simple.

Beau nez fin et délicat, fleurs sauvages, zestes de mandarine, fenouil.

2012 Palette encore très jeune. Bouche épanouie, expressive, tonus qui
18,5/20 allie nervosité et épices. Finit long, sur des notes poivrées et truffées.
72 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 De vigne en cave
Domaine Paetzold

Michael Paetzold
Né en Allemagne
dans une famille
de brasseurs, il a
étudié les sciences
du vivant et l’œno-
logie à Bordeaux.
Il y fait une thèse
sur la filtration puis
crée sa propre
entreprise de pres-
tations œnolo-
giques qui devient
vite incontournable
dans le monde des
grands vins. Il n’a pu
s’empêcher de faire
son propre vin dans
ce coin reculé
de la Catalogne, en
passant de la tech-
nique à la nature.

et soufre, aucun herbicide, pesticide ou molécule de synthèse. d’obtenir une oxydation la plus ménagée et homogène pos-
« Le carignan est très sensible à l’oïdium, il faut parfois poudrer au jour sible. L’étape suivante était de supprimer l’oxygène ! « J’avais
près », nous dit Didier Raynald. La confusion sexuelle complète remarqué que le vin se refermait après la phase de fermentation. J’ai
le tableau. Les rendements s’étagent entre 15 et 25 hectolitres voulu que les arômes s’expriment sans rupture. J’avais abandonné la
par hectare. Comme toujours à l’époque, il y barrique qui marque trop les vins et où l’apport
avait des carignans blancs mélangés dans les Le domaine d’oxygène est difficile à contrôler. Je ne voulais
parcelles de rouge. Michael Paetzold a eu la en détail pas de cuves inox, qui sont des cages de Faraday,
curiosité de les ramasser et de les vinifier à part. avec oxygénation. J’ai opté pour le verre, le maté-
Le résultat fut une révélation, ce qui l’a incité à Appellations : IGP Côtes riau le plus neutre possible, avec une structure
acquérir d’autres parcelles où ce cépage était Catalanes, Côtes du Roussillon moléculaire très serrée qui ne peut retenir aucune
destiné à l’arrachage. Villages Caramany. bactérie, contrairement aux amphores. » Neutre
Les vendanges manuelles durent un mois, Surfaces par cépage : 9,5 ha certes, mais perméable aux ondes élec-
c’est le dernier vignoble de la région à être de carignan noir, 1,5 ha de cari- tro-magnétiques et imperméable à l’oxy-
récolté. Jusqu’en 2010, les vinifications se sont gnan blanc, 3,3 ha de syrah, gène. Car l’idée de Michael Paetzold repose
déroulées dans un chai de fortune, des opéra- 3,1 ha de grenache noir. bien sur l’influence de ces ondes naturelle-
tions un peu acrobatiques jusqu’à la construc- Âge des vignes : 9 ha ont plus ment présentes dans notre environnement.
tion des bâtiments fonctionnels aux portes de 100 ans, 5,5 ha ont entre 30 « J’ai beaucoup étudié l’influence de ces ondes
de Belesta, en pleine nature. C’est Vincent et 60 ans, 1,5 ha a 15 ans, 1 ha grâce aux travaux des Télécoms initiés par le déve-
Chassignol, œnologue, qui est le permanent a 5 ans. loppement des réseaux pour téléphone portable.
et régisseur du domaine. Sols : gneiss, sables granitiques De faible énergie, elles sont capables de rendre les
caillouteux. molécules vibratoires. Elles peuvent décoller l’élec-
NI BOIS, NI INOX… MAIS DU VERRE Altitude : entre 250 et 450 m. tron du noyau, chaque onde se comporte comme
Michael Paetzold, ce diable d’homme, ne pou- Viticulture : bio. une clé pour chaque molécule aromatique. »
vait pas en rester là. Le naturel de cet inven- Vinifications : vins rouges : Ce vinificateur iconoclaste se passe donc
teur est revenu au galop, sous forme de globes éraflage, préfermentaire, d’oxygène pour tirer la quintessence de
de verre pour élever son vin. Tout est venu levures indigènes, élevage sous son terroir, dans toute sa pureté. Certes, il
d’une réflexion entamée lors de ses essais de verre ; vins blancs : pressurage faudrait examiner sa théorie à l’aune d’une
nano-oxygénation, technique par laquelle direct, fermentation et élevage démonstration scientifique : de quelles fré-
il injecte dans les moûts ou les vins, non pas sous verre. quences parle-t-on et l’énergie est-elle suf-
de l’oxygène mais un mélange appauvri, afin fisante pour bousculer la molécule ? Mais il
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 73
 De vigne en cave
Domaine Paetzold
faut bien avouer que le résultat est là, la dégustation qui suit
constitue un début de preuve. Si le spectre visible ne semble
pas avoir d’incidence, il n’apparaît pas de goût de lumière, il
serait intéressant de vérifier si un wine-globe proche d’un
relais de télécoms est plus impacté qu’un autre installé en zone
blanche. On peut aussi imaginer que l’on puisse identifier la
longueur d’onde qui rendrait un vin plus floral ou plus fruité.
Mais ceci est une autre histoire, à moins que ce ne soit de la
science-fiction !
Pour élever ses vins Michael Paetzold a fait le choix du verre,
un matériau neutre mais perméable aux ondes électro-magnétiques.
Les ondes électro-magnétiques,
de quoi s’agit-il ?
Les ondes électro-magnétiques sont formées d’un champ électrique
et d’un champ magnétique orthogonaux, oscillant à la même
fréquence et se déplaçant à la vitesse de la lumière dans le vide. Elles
transportent de l’énergie sans transporter de matière, cette énergie
est inversement proportionnelle à la longueur d’onde. Elles sont
d’origine naturelle (soleil, cosmos, orages, radioactivité naturelle,
rayonnement terrestre) ou émises par l’activité humaine (radar,
radio, TV, micro-ondes, GSM, Wi-Fi, objets connectés, lignes
électriques, sources radioactives, etc.). Leur spectre est très large.
Si on le décrit en partant des longueurs d’ondes les plus courtes,
0,01 nanomètre, on passe des rayonnements ionisants comme les
rayons gamma ou X à l’ultra-violet, puis au spectre visible (l’œil
humain ne peut voir que les longueurs d’ondes comprises entre 0,4
et 0,8 micron), ensuite à l’infrarouge. Entre un millimètre et un
mètre, on trouvera les ondes radar ou hyperfréquences, au-delà
on parle d’ondes radio. La théorie quantique a introduit la nature
corpusculaire de ces ondes, avec définition du photon.
74 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Pour l’instant, ces wine-globes de 200 litres sont fabri-
qués en Europe centrale. Le gène d’entrepreneur de notre
homme ne pouvait rester muet : il va lancer une fabrication
maison à Cadaujac, avec un objectif de mille globes par an. Il
y a aujourd’hui 25 essais de ces contenants chez des vignerons
désireux de magnifier leur terroir.
DES CUVES MOBILES DANS LE CHAI
Détaillons les processus à la cave. Les raisins rouges arrivent en
caissettes au chai. Ils sont triés, éraflés, sans foulage. Les grains
entiers sont envoyés par gravité dans de petites cuves inox
fermées de 12 hectolitres, inertées à l’azote dès le remplissage.
Ces cuves sont mobiles dans le chai, rien n’est figé. Les raisins
subissent une macération préfermentaire pendant quatre
jours à 4° C, nous ne sommes pas loin d’une semi-carbonique.
La fermentation démarre sur levures indigènes, il n’y a ni
remontages, ni pigeages. La température est stabilisée autour
de 26° C, gage d’un fruité important. La cuvaison est courte,
une semaine, les vins sont ensuite pressurés et assemblés. La
malolactique s’effectue en cuves avant un élevage sous globe
de verre pendant six mois. Les vins sont filtrés sur terre et
membrane avant mise en bouteilles, avec ajustement du SO2.
Pour les blancs, pressurage direct, une pré-oxydation pour
éliminer les substances qui pourraient s’oxyder plus tard.
On levure si nécessaire. Débourbage et fermentation dans
les wine-globes pendant un mois, on laisse la malolactique
se déclencher. Retour en cuves pour mettre au propre et fin
d’élevage en wine-globes, sur lies fines.
LE STYLE DES VINS
Plusieurs cuvées monocépages sortent du domaine. Louxar,
100 % grenache, avec le fruité de ce cépage lorsqu’il est cultivé
en altitude, égayé par une fraîcheur tonique. Nagello, 100 %
syrah, très aromatique avec des tanins soyeux. Elles sont
complétées par Le Cazotte, une cuvée qui rassemble les trois
cépages issus de vignes plus jeunes (ici, 50 ans est l’âge d’une
jeune vigne !). Mais c’est bien Mastrio, pur carignan, en blanc
comme en rouge, qui retient toute notre attention. Il faut dire
que l’âge canonique (120 ans) de ces vignes impose le respect.
Nous trouvons là toutes les qualités et la personnalité de ce
cépage tardif à maturation lente sans ses défauts habituels, à
savoir réduction et rusticité.
Pour le rouge, la rupture de style avec l’usage des wine-
globes – 2015 est partiellement élevé sous verre – montre un
fruité de plus en plus pur, avec une minéralité affirmée qui
se traduit par une salinité rafraîchissante. Il n’y a aucun signe
de réduction dans les vins jeunes, et surtout une qualité phé-
nolique idéale, un toucher de tanins très élégant. Mais cette
recherche de pureté absolue ne se fait-elle pas au détriment
de la complexité ? Il n’en est rien, le vin prend peu à peu des
accents de tabac, de fruits rôtis, de feuille morte, sans les notes
sauvages habituelles. Le carignan blanc est exceptionnel, une
véritable révélation du caractère de ce cépage, avec une force
florale étonnante, une minéralité profonde et une aptitude
aux longues gardes. Il faut dire que ces vins sont issus de très
petits rendements, que la juste maturité préside à leur ramas-
sage et que le vinificateur les traite avec respect. •
 la maison

table et chambres d’hôtes du

domaine TRAPET
à Gevrey-Chambertin
message@trapet.fr

MODÉRATION.
AVEC
CONSOMMER
À
SANTÉ.

BLANCHE
LA
POUR

est le juste reflet du style tout en finesse de la Maison :

DANGEREUX

un Chardonnay, Millésimé (2012 !), faiblement dosé

(Extra-Brut), 100 % Avize Grand Cru.

À déguster en son terroir à l’occasion d’une visite du

EST

Champagne Waris-Hubert, ou auprès de ses partenaires

(liste sur demande).
D’ALCOOL
L’ABUS

14 rue d’Oger, 51190 Avize - France • Tél. : +33 (0)3.26.58.29.93

contact@champagne-waris-hubert.fr • www.champagne-waris-hubert.fr
 De vigne en cave
Une appellation, deux styles
Domaines Dirler-Cadé
et Valentin Zusslin
Saering et Pfingstberg,
deux sacrés caractères
Deux Grands crus du sud de l’Alsace, conduits
en biodynamie, se donnent ici la réplique.
Face à la fougue des rieslings du Pfingstberg,
le Saering oppose la finesse de ses vins.
Texte et photos : Roberto Petronio
M
agnifique vignoble aux paysages à couper le souffle,
l’Alsace dispose d’une multitude de terroirs excep-
tionnels. Sa géologie tumultueuse a façonné des
crus nés sur des substratums et des sols très variés. Cette
richesse pédologique se traduit par des vins au caractère
contrasté mais toujours passionnants.
Dans cette région, de multiples vignerons se sont convertis à
une viticulture fondée sur les principes de la biodynamie (lire
La RVF n° 625, octobre 2018). Certains la pratiquent depuis
plus de vingt ans, tels les domaines Valentin Zusslin et Dirler-
Cadé qui ont opté pour ce mode cultural dès 1997. Pour cette
rencontre, ils nous ont présenté deux très beaux Grands
crus en riesling : le Saering pour le domaine Dirler-Cadé et le
Pfingstberg pour le domaine Valentin Zusslin. Situés au sud de
Colmar, ces deux crus sont distants de quelques kilomètres.
LE SAERING TOUT EN NUANCES ET DÉLICATESSE
Pour cette dégustation, ce sont les femmes – épouse (Ludivine
Dirler) et sœur (Marie Zusslin) – qui nous ont reçus tandis que
les hommes terminaient la vinification de leurs 2019. Marie
Zusslin connaît bien ses vins, elle aime les servir dans des
Zalto. Ces verres font merveille avec son Pfingstberg au style
puissant. Il tempère sa fougue et laisse ressortir avec plus de
justesse les nuances du cru, quel que soit le millésime. À l’in-
verse, dès le premier millésime, le Saering affichait un certain
mutisme dans le verre Zalto. Par chance, Marie Zusslin dis-
posait d’un jeu de verres Schott. Un contenant dans lequel le
Saering s’est épanoui sans que cela n’entrave sa finesse.
Nous avons donc poursuivi notre dégustation avec ces deux
types de verres. Cela nous a permis de mieux cerner la person-
nalité de ces deux crus opposés tant par leur tempérament que
par le style impulsé par les domaines.
76 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Le Grand cru Saering repose sur un sous-sol marno-gré-
seux, riche en argile et en calcaire. Bien que le vignoble soit
planté en terrasses, le domaine Dirler-Cadé, implanté à
Bergholtz, dans la partie sud de l’Alsace, possède une parcelle
au pied du coteau exposée sud/sud-est, là où l’on retrouve du
sable. Ce sable confère toute sa finesse aux vins du domaine.
Pour Ludivine Dirler, il ne peut y avoir qu’un chef d’or-
chestre dans ce domaine, son mari, Jean, même si, ensemble,
ils échangent sur le goût de leurs vins et sur les assemblages. La
finesse prime dans leur Saering d’une grande pureté de fruit.
Tandis que sa colonne vertébrale se construit autour d’une
belle acidité propre à ce terroir. Elle s’est amplifiée grâce à leur
mode cultural. Nous avons beaucoup aimé ces rieslings, peu
épais mais intenses, tout en nuances et en délicatesse.
LE PFINGSTBERG A BESOIN DE TEMPS POUR SE RÉVÉLER
Le Grand cru Pfingstberg s’appuie, quant à lui, sur un coteau
pentu orienté sud/sud-est au sous-sol marno-gréseux. Les
Zusslin ont toujours vendangé cette parcelle très en altitude,
avec une maturité des raisins souvent tardive, en dernier. Si
Jean-Paul (le frère) supervise le travail dans la vigne et en cave
et Marie les taches commerciales et administratives, les choix
en matière de vin se font à deux. « Je suis autant vigneronne que
chef d’entreprise », revendique Marie.
Dans ce domaine situé sur la commune d’Orschwihr, ils éla-
borent des vins de matière et profonds. Le Pfingstberg a besoin
de temps pour se révéler, car il naît avec une matière serrée
mais pleine en bouche. Vin de mâche, presque tannique jeune,
il doit ainsi pouvoir calmer sa fougue, même s’il gagnerait en
sérénité avec un rien de délicatesse en plus.
Domaine Dirler-Cadé Domaine Valentin Zusslin
Agriculture : biodynamie Agriculture : biodynamie
Bouteilles : 90 000 Bouteilles : 90 000
13, rue d’Issenheim, 57, Grand rue,
68500 Bergholtz 68500 Orschwihr
Tél. : 03 89 76 91 00 Tél. : 03 89 76 82 84
Site : dirler-cade.com Site : www.zusslin.com
 Très impliquées dans
l’élaboration des vins
de leur domaine,
Marie Zusslin (à g.)
et Ludivine Dirler
possèdent
une connaissance très
fine de leurs Grands crus.

Le face-à-face de deux
grands blancs d’Alsace
Millésime 2018
DOMAINE DIRLER-CADÉ
Riesling Saering Grand cru
Nez de pierre froide,
anis étoilé, amande
amère et camomille. La
finesse domine dans
ce riesling au fruit pur,
intense et persistant.
On imagine le grain
de sable du terroir
avec en contrepoint
une touche iodée et
de poivre blanc. Élevé en
cuves inox, ce Saering s’ex-
prime mieux dans le verre
Schott.
DOMAINE
VALENTIN ZUSSLIN
Riesling Pfingstberg Grand cru
Vendangé à haute
maturité, ce riesling en
début de vie charnu
s’affirme par sa puis-
sance. Il montre ses
muscles, mais sa
matière est dense.
Servi dans le verre
Zalto, il développe
plus de finesse, tandis
que dans le Schott, la
puissance domine. Ici, l’éle-
vage long sur lies se fait en
foudres. À oublier dix ans en
cave.
Millésime 2016
DOMAINE DIRLER-CADÉ
Riesling Saering Grand cru
Pour ce millésime généreux,
il a fallu contenir les rende-
ments. Ici, le verre Schott
s’impose. Il élargit le vin
tandis que le Zalto le durcit.
Grâce au Schott, le vin déve-
loppe un parfum d’herbes et
de menthe poivrée et dévoile
toute son élégance.
De vigne en cave
Une appellation, deux styles
DOMAINE VALENTIN ZUSSLIN
Riesling Pfingstberg Grand cru
Dense et serré, avec une sali-
nité persistante, ce riesling
conserve son caractère
musclé, son tempérament
massif, mais avec une den-
sité de matière plus pleine
que dans le Saering. Si avec
le verre Schott, le fruit paraît
plus avenant, les amers res-
sortent avec le Zalto.
Millésime 2015
DOMAINE DIRLER-CADÉ
Riesling Saering Grand cru
Au nez, il bascule vers les
épices. Le fruit prend une
tonalité de poire juteuse. On
ressent ici une maturité pro-
fonde. Vendangé le 29 sep-
tembre, il a conservé 30 g de
sucre résiduel. Ils sont inté-
grés dans un fruit qui livre à
l’air un parfum de pample-
mousse. Avec le verre Zalto,
le sucre paraît plus prégnant.
DOMAINE VALENTIN ZUSSLIN
Riesling Pfingstberg Grand cru
Avec le verre Schott, le pre-
mier nez embaume le beurre.
Avec le Zalto, le caractère
minéral s’affirme davantage.
Malgré la richesse du mil-
lésime, le terroir préserve
son tempérament musclé
(amers intenses et plaisants).
On retrouve cette matière
profonde en bouche. Avec
le Zalto, le vin s’étire un peu
plus, comme si ce verre tem-
pérait sa fougue naturelle.
Millésime 2012
DOMAINE DIRLER-CADÉ
Riesling Saering Grand cru
Le nez exhale des arômes
d’herbes et une touche de
78 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
menthe. À l’air, des notes de
camomille signent une belle
identité olfactive. La bouche
livre une matière ciselée, au
fruit épuré. Sa colonne ver-
tébrale est construite autour
d’une belle acidité (touche de
citron). Avec le verre Zalto,
l’amertume est projetée en
avant. Le vin se durcit.
DOMAINE VALENTIN ZUSSLIN
Riesling Pfingstberg Grand cru
Ce vin au tempérament fort
développe des notes d’infu-
sion mais en binôme avec une
sensation de fruit bien mûr.
Les épices prennent le relais,
secondées par une touche de
miel. Salin, toujours puissant
et dense, il gagne en douceur
dans le verre Zalto avec un
fruit plein en bouche.
Millésime 1998
DOMAINE DIRLER-CADÉ
Riesling Saering Grand cru
Parfum de thé à la bergamote
avec une touche racinaire et
de sureau. Si la bouche res-
titue son élégance, elle le doit
à son sol de sable. Un resling
distingué, plus d’attaque que
de fin de bouche.
DOMAINE VALENTIN ZUSSLIN
Riesling Pfingstberg Grand cru
C’est le premier millésime du
domaine issu de vignes culti-
vées en biodynamie. Le nez se
montre riche avec une note
de fumée. Le fruit s’aventure
vers une note de pomme au
four. Il paraît trop évolué, nous
ouvrons une seconde bou-
teille. Le nez délivre des arômes
plus frais, la bouche vive s’ap-
puie sur le citron confit au
sel. Après 20 mn, le vin trouve
toute son énergie. •
Regards croisés
Marie Zusslin
parle du riesling
Saering 2014
du domaine
Dirler-Cadé :
« Ce riesling possède du fond, de la
concentration et de beaux amers,
une densité accrue par rapport
aux millésimes plus jeunes, sans
ces notes de plantes médicinales
qui ressortaient. Plus sphérique
et enveloppée, sa matière le rap-
proche plus de nos vins. J’apprécie
également son caractère exotique.
Toujours d’une grande délicatesse
mais avec un bel équilibre volume/
structure. Il est posé et prêt à boire. »
Ludivine Dirler
parle du riesling
Pfingstberg 2014
du domaine
Valentin Zusslin :
« Ce fut un millésime complexe
à cause des drosophiles. Je trouve
ce Pfingstberg épanoui mais avec
moins de notes d’amande amère
qu’il n’en livre dans les millésimes
plus jeunes. J’aime son profil charnu
et enveloppé. Avec son évolution,
sur des notes empyreumatiques,
il se déguste au bon moment
tout en conservant sa densité
et son toucher de bouche solide
et reconnaissable. »
Conditions
de la dégustation
Les vins ont été dégustés
au domaine Valentin Zusslin
par Roberto Petronio pour
La Revue du vin de France,
Marie Zusslin pour le domaine
Zusslin et Ludivine Dirler pour
le domaine Dirler-Cadé.
 ABONNEZ-VOUS 1 AN 69
seulement
€

+
à La Revue du vin de France

LA RELIURE
La Revue du vin de France

Idéale pour conserver

une année d’abonnement
et consulter vos
numéros à loisir.
Reliure toilée bordeaux
et dorure sur le dos.
Dim. 29 x 22 x 9 cm

12 numéros par an dont :

• 2 numéros spéciaux
• 2 hors-séries
versions numériques incluses

Retrouvez l’offre
directement sur notre site

B U L L E T I N D ’A B O N N E M E N T
PAR INTERNET PAR TÉLÉPHONE PAR COURRIER
site officiel d’abonnement à compléter et à retourner avec votre règlement à :
www.magazines.fr/larvf 01 84 888 222 prix d’un appel local LA REVUE DU VIN DE FRANCE - Service Abonnements
Code express 639RELIURE +331 84 888 222 appel depuis l’étranger 26 bis rue des Pommiers CS 30075 - 93501 Pantin

Oui je profite de votre offre et je choisis : MES COORDONNÉES

Prénom :
1 an d’abonnement (12 nos) = 69 € au lieu de 91€
639RE1 Nom :
Europe : 84 € Hors Europe : 89 € Adresse :

Code Postal : Ville :

Je commande en plus la reliure pour 7 € au lieu de 12 € 639RE2
Pays : Tél. :
JE DEMANDE UNE FACTURE
E-mail :
Je souhaite recevoir les offres des partenaires de La Revue du vin de France
Date et signature obligatoires
Offre valable 3 mois. Vous pouvez acheter séparément chaque numéro de votre magazine à son prix de vente au numéro + 2,50€ de frais de port (France JE RÈGLE PAR :
métropolitaine uniquement). Vous recevrez le premier numéro de votre abonnement et votre reliure séparément dans un délai de 3 à 4 semaines à compter
de la réception de votre règlement. Les informations qui vous sont demandées sont destinées à la société La Revue du vin de France SAS. Elles sont collectées
et utilisées à des fins de traitement de votre abonnement. Votre adresse mail sera utilisée pour suivre votre abonnement et vous envoyer les communications Chèque libellé à l’ordre de La Revue du vin de France
dont vous bénéficiez en tant qu’abonné. En application de la règlementation en vigueur, vous disposez des droits d’accès, de rectification, d’effacement,
d’opposition, à la portabilité des données et à la limitation des traitements. Pour exercer vos droits, veuillez contacter le Groupe Marie Claire (GMC) par mail Carte bancaire N°
à dpo-rvf@gmc.tm.fr ou par courrier à Groupe Marie Claire-DPO –10, boulevard des frères Voisin - 92130 Issy Les Moulineaux, en justifiant de votre identité.
Vos données postales sont susceptibles d’être transmises à nos partenaires commerciaux. Si vous ne le souhaitez pas, merci de cocher cette case ou de Bloc de trois chiffres
nous en informer à l’adresse ci-dessus. Pour toute information complémentaire, consulter notre Politique de Confidentialité sur le site www.magazines.fr. Date d’expiration Cryptogramme au verso de votre carte
 De vigne en cave
Les dessous du terroir

Picpoul de Pinet
Cépage rare
et terroir maritime
Découvrir le terroir
de Picpoul de Pinet,
c’est rencontrer
lt
au

des vignerons amoureux

ér
L’ H

de leurs paysages et de Vers

Mas de
l’Olivier
leur cépage. Bien décidés Montagnac
à valoriser leur précieux Castelnau- La Coulette
e
de-Guers ain
patrimoine, ils font de plus rom
oie
en plus parler leurs vins… Pioch
nn
ev
Gares cie
qui ont des choses à dire ! An Les Cadastres
Vers
Par Sophie de Salettes Mèze

N
A9

L
orsque le collectif fonctionne, il
donne des ailes. Les vignerons
de Picpoul de Pinet en sont une
belle illustration. Fiers de leur appella-
tion, ils avancent ensemble pour pro-
gresser et mettre en lumière leurs vins.
Et le succès est au rendez-vous, parti-
culièrement à l’export, notamment au
Royaume-Uni où part plus de la moitié
de la production.
Picpoul de Pinet, le terroir. Piquepoul,
le cépage (1). Un cépage languedocien qui
dans les années 60 servait encore de vin
de base pour les vermouths élaborés
à Marseillan. Ce n’est qu’à partir des
années 70 que les vignerons décident de
vinifier leur piquepoul en vin blanc sec,
alors que le tourisme crée une nouvelle
demande.
1 000 m
Vers Félines
Source : Association
climatologique de l’Hérault Narbonne Pinet
Carte des sols de
l’AOC Picpoul-de-Pinet Vers
Calcaires marneux rouges Florensac
Calcaires marneux bruns Pomérols Picpoul-
Conglomérats rougeâtres de-Pinet
Marnes rouges du Pliocène
Marnes rouges du Pliocène en
alternance avec des colluvions
grappes sont courtes, souligne Virginie l’appellation : le piquepoul reste seul en
Berthuit, directrice technique de la scène. « Notre cépage est un trésor !, lance
cave coopérative Ormarine (2). Par ail- la vigneronne Anaïs Ricôme (La Croix
leurs, il est sensible à l’oxydation, la vendange Gratiot). Son acidité est précieuse, son poten-
mécanique la nuit est donc une bonne alter- tiel passionnant. Il est longtemps resté parqué
native. » « Autrefois, on avait peur de récolter dans son image de vin de l’année, très simple,
ce cépage tardif après le 20 septembre car mais les choses changent. » Les vignerons
la vendange manuelle prenait du temps. tiennent à leur cépage et travaillent pour
Aujourd’hui, on peut être à la fois précis et le préserver. Pour preuve, le conserva-
Cartographie : Alexandre Nicolas

réactif », ajoute le vigneron Marc Cabrol toire génétique du piquepoul créé en

UN CÉPAGE FRAGILE ET TARDIF
Le cépage est certes fragile, mais la
thermorégulation et la machine à ven-
danger ont fait leur apparition. « Le
piquepoul est très difficile à vendanger à la
main. Les grains tombent et les queues de
(domaine des Lauriers).
Suivant cette dynamique, 1985, la créa-
tion de l’AOC Coteaux du Languedoc
Picpoul de Pinet ; 2013, la naissance de
l’AOC Picpoul de Pinet à part entière. Et
une chose est sûre pour les vignerons de
80 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
1994 : 240 clones y sont répertoriés, dont
cinquante sélectionnés pour leurs qua-
lités agronomique et organoleptique.
Par ailleurs, des recherches sont en
cours pour créer une variété de pique-
poul résistant.
 De vigne en cave
Picpoul de Pinet

Les profils
1954 : VDQS.
1985 : AOC Coteaux du Languedoc
Picpoul de Pinet.
2013 : AOC Picpoul de Pinet
(révision du parcellaire, baisse
du rendement de 60 à 55 hl/ha).
Surface : 3 000 hectares
dont 1 400 ha de vignes sur les
communes de Pinet, Pomerols,
Florensac, Mèze, Castelnau-de-
Guers et Montagnac.
Production annuelle : environ
80 000 hectolitres (les trois quarts
des vins blancs AOC du Languedoc).

Les sols
La majorité des sols de l’AOC pré-
sentent une texture légère sableuse
à sablo-limoneuse, une grande
profondeur utilisable, un bon drai-
nage, une faible pierrosité, mais
souvent une forte proportion de
petits éléments. Dans la partie sud,
les sols du Pliocène sont profonds,
peu caillouteux, avec une bonne
réserve en eau. Leur texture est
souvent sableuse avec des argiles
ou des limons. La réserve utile
Photos : D. R.

parfois importante et l’humidité

de l’air compensent la faiblesse
Des bosquets de pins et de chênes verts ou kermès parsèment le paysage, des précipitations.
surtout dans la partie nord de l’aire d’AOC. Il s’agit du noyau d’origine de l’ap-
pellation, particulièrement adapté
Le lien entre le cépage
piquepoul et le terroir de
Le lien entre homogène sur une grande
profondeur. Pour autant, la
aux cépages blancs tardifs. Dans la
partie nord, les substrats marneux
l’appellation est très fort. le cépage fertilité doit être limitée. Les ou molassiques des zones basses
« Le terroir de Picpoul de Pinet piquepoul et parcelles choisies doivent sont assez profonds. Les textures
correspond à une réalité géo-pé- le terroir de aussi être ouvertes à l’in- sont sableuses, sablo-limoneuses,
dologique et climatique qui offre fluence marine pour que la voire limoneuses. Localement,
au cépage piquepoul un équilibre l’appellation vigne bénéficie de l’humi- les poudingues et grès donnent des
optimal entre la faiblesse des est très fort dité de l’air marin, de la fraî- sols sablo-argileux à galets.
précipitations locales, le bilan cheur et des brumes noc-
thermique, la relative profondeur des sols et turnes de la fin d’été. Le cépage
les influences marines », résume Jacques Le climat est une donnée essentielle de Le piquepoul blanc
Laffont, ingénieur territorial à l’Inao de l’identité de l’AOC. L’humidité apportée (il peut aussi être
Montpellier. par la mer est indispensable à la vigne car noir ou gris) est un
la pluviométrie annuelle n’est ici que de cépage rare qui couvre
LES BÉNÉFICES DE L’AIR MARIN 600 mm (la plus faible du département), environ 1 700 ha en
Ainsi, pour que le piquepoul révèle tous avec des sécheresses estivales très mar- France, essentiellement
ses atouts, l’Inao a sélectionné des sols quées. L’évapotranspiration de la plante dans le Languedoc et en
ne craignant pas les excès d’eau au prin- est ainsi réduite et le risque de stress grande majorité dans l’AOC
temps, mais permettant un enracine- hydrique limité. Les brises marines Picpoul de Pinet. Tardif,
ment profond pour résister à la séche- modèrent aussi les pics de chaleur (3). il se distingue par son acidité,
resse estivale. Il s’agit de sols à la texture L’influence directe du littoral décroît mais aussi par sa fragilité.
sablo-limoneuse à sablo-argileuse et lorsque l’on s’en éloigne. Mais il pleut
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 81

Les vignes de l’aire d’appellation Picpoul de Pinet sont plantées entre 15 et 95 mètres d’altitude.
La transition entre
le noyau historique et la
zone des collines se fait
progressivement
d’autant plus que l’on va vers l’intérieur
des terres : 697 mm par an en moyenne
à Pézenas, contre 617 à Florensac et 572 à
Marseillan.
ET AU MILIEU FILE LA VIA DOMITIA
Quelque 1 800 hectares de vignoble sont
classés au nord de l’étang de Thau. Au
sud de la voie romaine, la Via Domitia,
le vignoble, assez homogène, se trouve
sur des collines douces dont l’altitude
décline de 50 à 20 m en direction de la
mer. Les sols sont issus de dépôts conti-
nentaux ou lagunaires du Pliocène :
grès rouges ou ocres, sables, graviers,
molasses à esquilles calcaires. Ils sont
profonds, avec une bonne réserve
hydrique.
La transition entre le noyau historique
(Pinet, Pomerols, dans une moindre
mesure Florensac et Mèze) et la zone
des collines, au nord de la voie romaine
De vigne en cave
Languedoc
(Castelnau-de-Guers et Montagnac), se
fait progressivement. Les sols, souvent
rougeâtres, sont alors issus de dépôts
fluviatiles et lacustres : conglomérats,
grès, marnes et calcaires du Crétacé,
Paléocène et Éocène. On trouve aussi
des sols bruns issus de dépôts marins :
marnes, molasses calcaires, grès et
marnes sableuses du Miocène.
Peu à peu, l’influence marine s’atténue
et le paysage se ferme. Le vignoble est de
plus en plus imbriqué entre pinèdes et
garrigues. Le relief est plus accidenté
avec un mélange de collines, vallons,
barres rocheuses et combes. Les pics de
chaleur et les amplitudes thermiques
sont plus marqués, particulièrement
dans les combes protégées des flux d’air.
Le type de sol, l’ouverture du pay-
sage et la distance de la mer marquent
le caractère des diverses parcelles du
vignoble. Virginie Berthuit gère le
suivi de 600 hectares de vignes pour
Ormarine. « Les années pluvieuses, le vin
de la zone des garrigues est plus qualitatif que
celui de la plaine dans laquelle les raisins sont
plus sensibles au botrytis », constate l’œno-
logue, en poste depuis quatorze ans. En Laurent Gaujal (domaine Gaujal) pousse les maturités
revanche, la partie haute craint davan- de ses raisins et élève certaines de ses cuvées sous bois.
82 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

Les travaux tage le manque
d’eau, décrit-elle.
de l’Inao Selon le profil
pourraient du millésime,
permettre de Virgine Berthuit
faire évoluer sélectionne des
parcelles plus
les limites de ou moins hautes
l’aire classée et caillouteuses
pour donner nais-
sance aux différents vins de la gamme.
Comme Carte Noire au profil très frais et
citronné ou Duc de Morny, plus rond et
exotique. « L’âge des vignes joue aussi. Ainsi
que l’élevage sur lies qui permet d’orienter le
style du vin. Cela nous permet de garder une
typicité régulière d’un millésime à l’autre »,
précise l’œnologue.
Anaïs Ricôme (La Croix Gratiot) tra-
vaille 6 hectares de jeunes vignes au
Mas de l’Olivier et 6 hectares de vieilles
vignes aux Cadastres : « La cuvée classique
vient des Cadastres, mais j’assemble des rai-
sins vendangés assez tôt avec d’autres récoltés
une semaine plus tard et élevés sur lies ». Le
résultat : de la tension et de beaux amers
qui donnent de l’allonge au vin, mais
aussi du volume. La cuvée premium,
Bréchallune, à l’équilibre très réussi,
vient pour sa part des jeunes vignes du
Mas de l’Olivier : « Cela peut paraître sur-
prenant, mais ce sont mes raisins les plus aro-
matiques ! 20 % du vin est élevé en jarres, le
reste en inox, le tout six mois sur lies ».
L’ENVOL DES CUVÉES PARCELLAIRES
Pour sa part, Marc Cabrol travaille des
parcelles (20 ha) dans les trois grands
secteurs de l’aire d’appellation. « Dans
la partie nord, les terres argileuses donnent
des vins qui ont du gras et des notes de pêche
jaune et d’abricot, indique le vigneron du
domaine des Lauriers. Les zones intermé-
diaires donnent des vins équilibrés entre gras
et tension, aux notes de citron confit, par-
fois floraux quand les sols sont plus sableux,
comme ici dans le lieu-dit Pensiarou. À Pioch
Gares, les sols sont couverts de galets, c’est une
parcelle précoce qui donne des vins salins. Les
années chaudes, ils apportent de la fraîcheur
au Prestige Jaune, mon vin le plus gras. Les
années froides, ils apportent chaleur et gour-
mandise au Classic, mon vin le plus frais ».
De même, Claude Jourdan (domaine
Félines Jourdan) produit un vin issu
des trois terroirs de l’AOC (25 ha) : « À la
Coulette, dans le nord de l’aire, les sols sont
De vigne en cave
Picpoul de Pinet
Anaïs Ricôme (La Croix Gratiot) explore avec passion la personnalité du cépage piquepoul
pour en exprimer le meilleur.
assez argileux et frais, mais riches en galets. raient aussi permettre de faire évoluer
Leur bonne capacité de réserve hydrique est les limites de l’aire classée. « À partir de
essentielle, car l’air est chaud dans ce secteur 2023, la zone pourrait être étendue d’environ
peu ventilé et plus éloigné de l’étang. Les vignes 130 hectares, notamment sur la commune de
des Cadastres (23 ha) craignent Florensac, note Frédéric Sumien, pré-
un peu plus le manque d’eau. sident du syndicat de l’AOC. Pour autant,
À Félines, nos 2  hectares nous restons attentifs au contexte écono-
de vignes sont au bord de mique, Brexit oblige, et à l’évolution de nos
l’étang. Les sols sont assez marchés. L’idée est de continuer à valoriser
profonds. Il n’y a pas de stress nos vins, pas de grandir à tout prix ». •
hydrique grâce aux embruns
(les “mouillées”), surtout en (1) Ses raisins tombaient facilement et étaient picorés
septembre. Les raisins des par les gallinacés, d’où son nom.
Félines sont plus acides que (2) Les caves coopératives produisent environ 80 %
les autres, je les vendange des vins de Picpoul de Pinet.
plus tard ». (3) Les moyennes annuelles de température sont de
La bonne connais- 14,3° C à 14,5° C à Marseillan et Pézenas.
sance du terroir
permet à Claude
Jourdan et quelques À déguster en priorité
vignerons de La Croix Gratiot : Le Syndical 2019,
donner naissance Bréchallune 2018
à une cuvée pre- Ormarine : Duc de Morny 2018,
mium (parcellaire Prestige 2018
et élevée sur lies) Domaine des Lauriers :
qui illustre la per- picpoul de pinet 2018, Prestige Jaune 2018
sonnalité du pique- Domaine Félines Jourdan : picpoul de pinet
poul sur son terroir 2018, Féline 2018
d’origine. Les tra- Domaine Gaujal : LG 2018, Excellence
vaux de caractérisa- de Ludovic 2017
tion de l’Inao pour-
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 83
 Une nouvelle façon d’apprendre le vin :
découvrez, ressentez, savourez
Des formations d’excellence en œnologie fondées sur les différentes
techniques de dégustation : intuitives et géo-sensorielles
La dégustation intuitive permet d’accéder intimement au message du vin, de le comprendre avec
tous ses sens. Elle est complétée par la dégustation géo-sensorielle qui associe le vin à son terroir.

NOS FORMATIONS CERTIFIANTES

NIVEAU 1 NIVEAU 2 NIVEAU 3

Les fondamentaux de la dégustation Approfondissement des Formation Expert en œnologie
intuitive et géo-sensorielle techniques de dégustation (formation professionnalisante)

MASTER CLASS Maîtriser les

Découverte de la dégustation intuitive ACCORDS METS ET VINS

NOS FORMATIONS PROFESSIONNELLES

Le titre professionnel de Sommelier Caviste Ambassadeur en Gastronomie

Titre reconnu par l’Etat RNCP N°26998

Eligible au Compte Personnel de Formation

Formations ouvertes aux amateurs et professionnels

DES CYCLES DE FORMATION QUI DÉBUTENT TOUT AU LONG DE L’ANNÉE

Contactez-nous : 09 51 44 21 01
contact@rvfacademy.com

L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION


La tendance du marché
Par Angélique de Lencquesaing
Carruades de Lafite : l’Asie
n’a pas dit son dernier mot !
D
ans un marché des vins de
Bordeaux en léger retrait
– l’indice iDealwine Bordeaux
a perdu 1,03 % en 2019 –, certaines signa-
tures tirent encore leur épingle du jeu, à
l’instar de Château Mouton Rothschild,
particulièrement recherché dans le mil-
lésime 2000 : un lot de six flacons a été
adjugé en toute fin d’année 10 214 €, soit
1 702 € la bouteille.
Mais l’un des phénomènes notables
de ces derniers mois est le retour
au premier plan des Carruades de
Lafite, second vin du château Lafite.
Contrairement aux apparences, l’attrait
qu’exerce cette étiquette sur le marché
asiatique n’a pas disparu, loin de là. Le
millésime 2000, qui renoue avec les
sommets, a ainsi été adjugé 249 € (+ 8 %).
Parmi les autres années recherchées,
citons 1996 (235 €, + 14 %), 2001 (233 €,
+ 23 %), 1995 (225 €, + 9 %), 1998 (221 €,
Certaines signatures bordelaises restent prisées : c’est le cas de château Lynch-Bages.
D. R.
De vigne en cave
Les enchères
+ 21 %) ou encore 2005 (219 €, + 5 %). Les
acquéreurs de ces flacons sont majo-
ritairement basés à Hong Kong ou en
Chine continentale, une zone qui avait
fait flamber le cours du Premier cru
classé de Pauillac et de son second vin
durant la première décennie 2000. Si le
grand vin du château Lafite est lui aussi
majoritairement acquis aux enchères
par des amateurs asiatiques, son prix
s’est stabilisé dans la plupart des millé-
simes (2005 : 693 €, - 10 % ; 1990 : 669 €,
+ 4 % ; 1995 : 608 € et 1998 : 600 €, - 1 %).
Parmi les autres étiquettes à forte
notoriété sur le marché mondial, les
grands millésimes de Château Lynch-
Bages gardent la cote (1989 : 284 €, + 16 % ;
1990 : 270 €, + 11 %). Certaines grandes
réussites d’une propriété sont deve-
nues des icônes que le marché valorise,
à l’instar de Château Montrose 1990
(466 €) ou Château Palmer 1983 (385 €).
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 85
LA COTE DU MOIS
Jacky Truchot décolle
15 ans après sa retraite
Au sommet des enchères des Grands
crus de la Côte de Nuits trône invaria-
blement le triptyque Romanée-Conti,
Georges Roumier et Armand Rousseau.
Des signatures cultes parfois talonnées
par des flacons collectors de domaines
disparus. Le domaine Jacky Truchot, à
Morey-Saint-Denis, a cessé son activité
en 2006, lors du départ en retraite du
vigneron, après 26 millésimes produits.
David Duband a alors acquis les 7 hec-
tares de vignes, dont certaines plantées
au XIXe siècle. C’est ainsi qu’un magnum
de Clos de la Roche 2005 (dernier millé-
sime du domaine) s’est envolé à 5 229 €,
acheté par un amateur américain.
D. R.
Les dernières
ventes marquantes
Collector : hermitage blanc 1955 de
Chave : 2 852 €.
Prieuré-Roch  : clos-vougeot 1999  :
800 €, 2015 : 744 €, 2016 : 620 € ; nuits-
saint-georges Le Clos des Corvées 2004 :
459 € ; nuits-saint-georges 1er cru Vieilles
vignes 2005 : 424 €, nuits-saint-georges
1er cru 2002 : 434 €.
Analyse réalisée à partir des ventes de
Villefranche-sur-Saône (14/12/2019,
Richard), La Varenne (14/12/2019, Lombrail-
Teucquam), Toulouse (16/12/2019, Fournié),
Paris (26/12/2019, IWA - iDealwine), Boulogne-
Billancourt (18/12/2019, Boulogne Enchères),
Mantes-la-Jolie (22/12/2019, HV Mantes-la-
Jolie), Cannes (28-30/12/2019, Besch).
Les ventes à venir
•
27/02/2020 : Paris, Artcurial 5/03/2020 :
•
Paris, IWA-iDealwine 17/03/2020 : Lyon,
•
de Baecque 26/03/2020 : Besançon,
•
Dufrêche 29/03/2020 : La Varenne,
Lombrail-Teucquam.
 De vigne en cave
Les enchères
Par Angélique de Lencquesaing

Les grands crus de Pauillac sur vingt-cinq ans

Les seconds vins bousculent 1855
I
l y a vingt-cinq ans, avec le mil- Entre-temps, le prix des Premiers crus a trième positions, désormais à des cours
lésime 1990 (évalué en 1994), le été multiplié par quatre. supérieurs à celui du Château Pichon
palmarès des vins de Pauillac En 2009 justement, les seconds vins Comtesse, deuxième cru classé.
était dominé par le Château Latour. Ce des crus classés font leur apparition dans On constate donc que, pour la pre-
Premier cru classé, racheté par la famille le palmarès des vins les plus recherchés. mière fois dans l’histoire des crus classés,
Pinault en 1993, est détrôné quinze ans Et en 2019 ? Château Latour ayant décidé les marques développées dans le sillage
plus tard, en 2009, d’une courte tête de quitter la place est sorti de notre clas- des premiers crus classés prennent l’as-
(638 € contre 636 € pour le millésime sement (le millésime 2015 n’est toujours cendant sur les historiques deuxièmes
2005) par un Château Lafite alors au pas sur le marché). Du coup, les seconds crus. Qui a dit que le classement de 1855
firmament sur les marchés asiatiques. vins se hissent en troisième et qua- était immuable ?

L’évolution des grands crus de Pauillac

Cote iDealwine mesurée plusieurs années après la sortie de chaque millésime à partir des ventes aux enchères

en 1994
(la cote du millésime 1990)
638 € 636 € en 2009
(la cote du millésime 2005)
626 €
en 2019
(la cote du millésime 2015)
542 €

450 €

276 €
242 €
209 €

129 € 100 € 129 €

78 € 72 €
46 € 46 €

Latour Lafite Mouton Pichon Pichon Lafite Latour Mouton Les Forts Carruades Lafite Mouton Carruades Petit Mouton Pichon
Rothschild Rothschild Longueville Longueville Rothschild Rothschild de Latour de Lafite Rothschild Rothschild de Lafite Longueville
Baron Comtesse Comtesse
de Lalande de Lalande

Quelques belles enchères relevées ces derniers mois

Prix d’adjudication Prix d’adjudication Cote iDealwine Variation/
du lot unitaire 31/01/2020 cote iDealwine

Whisky The Balvenie 50 Years Old Single Malt

Scotch Whisky Distillery Banffshire
Paris (26/12/2019, IWA-iDealwine) 18 240 € 18 240 € 18 240 € -
1 bouteille

Musigny 2001, domaine Leroy

Cannes (28-30/12/2019, Besch) 17 360 € 17 360 € 13 020 € + 33 %
1 bouteille

Chartreuse VEP Cuvée Olympique Grenoble 1968

Toulouse (16/12/2019, Fournié) 3 844 € 3 844 € 1 612 € + 138 %
1 bouteille

Château Lafleur 2005

La Varenne (14/12/2019, Lombrail-Teucquam) 1 500 € 1 500 € 1 155 € + 30 %
1 bouteille

Musigny 2005, domaine G. Roumier

Villefranche-sur-Saône (14/12/2019, Richard) 11 780 € 11 780 € 8 060 € + 46 %
D. R.

1 bouteille

86 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Exceptionnelle vente aux enchères publiques
GRANDS VINS ET SPIRITUEUX
Jeudi 27 et Vendredi 28 Février 2020 à 10:00 et à 14:15
Grands Vins de Bourgogne :
Sept caisses d’assortiments du Domaine de la Romanée-Conti
Magnums de Romanée-Conti, Bouteilles de Montrachet DRC

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.

La Tâche, Richebourg, Romanée Saint Vivant, Echézeaux,
Grands Echézeaux, Vosne-Romanée Duvault-Blochet,
Corton Prince Florent de Mérode à l’unité
Une rare bouteille de Musigny du Domaine Leroy
Domaine Armand Rousseau - Domaine Georges Roumier
et autres Grands Vins des Grands Domaines
Grands Vins de Bordeaux des Châteaux :
Ausone, Cheval Blanc, Haut-Brion, Lafite Rothschild, Latour
Margaux, Mouton Rothschild, environ 70 bouteilles de Pétrus, Yquem.
Dont nombreux millésimes anciens, certains nmdc
et autres Grands Vins de Bordeaux.
Grands Vins du Rhône et de la Loire
Alcools et Grands Champagnes
Frais vendeur pour les grands vins 0% - Anonymat garanti pour les allocataires
Vente retransmise en Live sur DrouotDigital et InterencheresLive

Maître Frédéric DELOBEAU Emilie & Robert GORRETEAU

Commissaire-Priseur Experts en vins non marchands
Arcadia ovv 2002-254 T. : 095 078 1855  Fax : 095 578 1855
237 rue Jean Moulin  80000 AMIENS Site : www.cabinex.eu
T. : 03 22 95 20 15  Fax : 03 22 95 15 06 email : cabinex@cabinex.eu
Prochaines ventes en Avril et en Juin

Réserves climatisées à Amiens et à Nanterre

Estimations gratuites de vos vins, sans engagement

LOMBRAIL - TEUCQUAM
MAISON DE VENTES AUX ENCHÈRES
21, avenue Balzac - 94210 La Varenne Saint-Hilaire
Tél. 01 43 97 91 29 - Fax 01 42 83 68 48
E-mail : LT-1@orange.fr
Site : www.lombrail-teucquam.com

EXPERT EN VINS & ALCOOLS

M. CLAUDE MARATIER
Tél. 01 55 12 01 62 - Fax 01 42 83 34 48
Mail : maratier@aol.com
Site internet : www.claudemaratier.com

Depuis 30 ans
SPÉCIALISTES
DES VENTES AUX ENCHÈRES
DE GRANDS VINS
ESTIMATION GRATUITE
ET CONFIDENTIELLE
DE VOTRE CAVE
VENTE DE PRESTIGE
EN PRÉPARATION
VENDREDI 27 ET
Agrément n°2002-152

SAMEDI 28 MARS 2020

POUR INCLURE DES VINS
ET ALCOOLS DANS NOTRE VENTE
PRENDRE CONTACT AVEC
NOTRE BUREAU OU CELUI DE
NOTRE EXPERT.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.
 Jeu
Concours
La bouteille qu’il fallait
LA BOUTEILLE SECRÈTE découvrir en février
Par Philippe de Cantenac
Vacqueyras La Perdrière 2017
du domaine Chamfort
G agner six bouteilles d’un grand vin en répondant à une
énigme ! Voilà le principe de ce jeu ouvert à tous. Pour
gagner, rien de plus simple : il faut envoyer sa réponse et être
Le domaine Chamfort, aux pieds des Dentelles
de Montmirail, est dirigé par Vasco Perdigao et
tiré au sort ! Attention, enregistrez bien notre nouvelle adresse Sonia Léorat depuis 2010. Ici, les interventions au
pour nous faire parvenir votre réponse complète (avec vos vignoble sont essentiellement mécaniques, et les
coordonnées, adresse, téléphone et date de naissance) : apports de fertilisants se limitent à des engrais
bouteille.secrete.rvf@gmail.com. bio. Grenache 65 %, mourvèdre 20 % et syrah
Date limite des réponses le 5 mars à minuit. Dès le 6 mars, 15 % composent cette cuvée La Perdrière,
suivez les résultats sur notre forum, rubrique bouteille secrète, avec des vendanges en trois temps afin de
sur le site larvf.com. Bonne chance à tous ! respecter les maturités de ces trois cépages.
Les vins sont assemblés après six mois d’éle-
L’énigme du mois de mars vage. Ce vacqueyras se livre sur des notes
Sans crier gare, reviens à la fin du de petits fruits noirs avec des tanins fins et
veloutés et une longue finale épicée. Il se
XVIe siècle pour assister à la création conservera une bonne dizaine d’années.
de mon domaine, dans ma famille
depuis 1919. Sept cépages entrent dans
mon assemblage. Et de 9 pour Roger.
Les principes du concours. Se distraire tout en testant ses connaissances, voilà l’esprit

D. R.
de “La bouteille secrète”, le concours proposé par La RVF, en collaboration avec Spiegelau. Comment
participer ? À partir des indices présentés, tentez d’identifier notre ”bouteille mystère“. Rédigez lisible-
ment votre réponse (nom de l’appellation, du producteur, du domaine et millésime) sur le coupon-ré-
ponse ci-dessous (ou bien sur papier libre) ou par e-mail, en précisant vos nom et prénom, votre date de
naissance et votre adresse (ainsi que votre numéro de téléphone), qui fera office d’adresse de livraison.
Âge minimum pour participer : 18 ans. Attention : pour être prise en compte, votre réponse doit être
adressée au plus tard le 5 mars 2019, le cachet de La Poste faisant foi. Un tirage au sort déterminera six
gagnants. Ce jeu est gratuit et sans obligation d’achat. Que gagne-t-on ? Chaque mois, six cartons de
six bouteilles du vin mystère sont en jeu et attribués aux six gagnants tirés au sort. Répartition des lots :
un carton de six bouteilles pour chacun des six gagnants. Quand seront communiqués les résultats ?
Le nom de la bouteille secrète, son vigneron et la liste des gagnants seront publiés dans le prochain
numéro de La RVF. Les gagnants tirés au sort, parmi ceux ayant trouvé la bonne réponse, recevront
directement le carton de six bouteilles du vin mystère. À vous de jouer !
Le règlement du concours est disponible sur simple demande par courrier à l’adresse suivante :
Concours La RVF “La bouteille secrète”, BP 126, 38504 Voiron cedex. Frais d’expédition des cour-
riers-réponses remboursables au tarif en vigueur sur simple demande par courrier à l’adresse suivante :
La Revue du vin de France, 10, bd des Frères-Voisin, 92130 Issy-les-Moulineaux.
Ce numéro contient trois encarts d’abonnement jetés sur l’ensemble de la diffusion kiosque :
deux encarts d’abonnement 2 pages sur l’ensemble de la diffusion kiosque France et étranger
et un encart Wine Paris sur une sélection d’abonnés. Offres d’abonnement en pages 48, 62 et 79.

Depuis 1927, le meilleur du vin en toute indépendance

DIRECTION DE LA RÉDACTION
Directeur de la rédaction : Denis Saverot (dsaverot@gmc.tm.fr).
Assistante éditoriale : Véronique Géral-Marrast
(01 41 46 87 05, vgeralmarrast@gmc.tm.fr).
Adresse : 10, bd des Frères-Voisin, 92130 Issy-les-Moulineaux. Site : larvf.com
Photo de couverture : Thierry Legay
Rédacteur en chef : Jérôme Baudouin
Rédacteurs en chef adjoints : Béatrice Delamotte (bdelamotte@gmc.tm.fr), Baptiste Charbonnel
(larvf.com, 82 06, bcharbonnel@gmc.tm.fr)
Grand reporter dégustateur : Olivier Poels (opoels@gmc.tm.fr),
Secrétaire général de rédaction : Claude Trousseau (80 03, ctrousseau@gmc.tm.fr)
Journaliste dégustateur : Alexis Goujard (80 04, agoujard@gmc.tm.fr)
Première secrétaire de rédaction : Adeline De Fabiani (80 06, adefabiani@gmc.tm.fr)
Rédacteur graphiste : Gilles Grman (82 16, ggrman@gmc.tm.fr)
Comité de dégustation : Guillaume Baroin, Pierre Casamayor, Pierre Citerne, Caroline Furstoss,
Alexis Goujard, Romain Iltis, Alexandre Ma, Cyrille Mald, Christian Martray, Laurie Matheson,
Roberto Petronio, Olivier Poels, Olivier Poussier, Jean-Emmanuel Simond, Jean-Baptiste Thial
de Bordenave, Karine Valentin, Pierre Vila Palleja, Alexandre Vingtier
Journaliste multimédia : Geoffrey Avé (89 68, gave@gmc.tm.fr)
Caviste : Anthea Martinenghi (85 99, lacavervf@gmc.tm.fr) avec Hongchen Meng
Ont participé à ce numéro : Claudine Abitbol, Guillaume Baroin, Fabrizio Bucella, Philippe de Cantenac,
Pierre Casamayor, Yohan Castaing, Baptiste Charbonnel, Pierre Citerne, Michel Dovaz, Philippe Genet,
Fabien Humbert, Thomas Lambelin, Sébastien Lapaque, Corinne Lefort, Angélique de Lencquesaing,
Pascaline Lepeltier, Vincent Lesage, Cyrille Mald, Roberto Petronio, Olivier Poussier, Sophie de Salettes,
Benoist Simmat, Jean-Baptiste Thial de Bordenave, Alexandre Vingtier
Pour contacter votre interlocuteur, composez le 01 41 46 suivi des 4 chiffres correspondant au poste
Éditeur délégué : Thomas Herson (83 75, therson@gmc.tm.fr)
Directeurs de clientèle : Raffaello Torricelli (87 98, rtorricelli@gmc.tm.fr.),
Florian Muller (80 92, fmuller@gmc.tm.fr)
Chef de publicité : Aurélia Chauvin (80 39, achauvin@gmc.tm.fr), avec Corentin Bureau
Coordination technique : Marie-Hélène Dargouge (87 96, mhdargouge@gmc.tm.fr)
Directeur général délégué du Groupe Marie Claire : Amalric Poncet
Directeur de la fabrication : Benoît Carlier
Chef de fabrication adjoint : Catherine Bricout (cbricout@gmc.tm.fr)
Responsable E-commerce : Laurence de Girardier (ldegirardier@gmc.tm.fr)
E-shop : www.sotrendoo.com, rubrique œnologie
Directrice de la diffusion France et export : Dominique Darçon
Responsable produit : David Belkowski
Abonnement, marketing, diffusion : Ingrid Cambour (01 41 46 88 87, icambour@gmc.tm.fr)
Tarifs d’abonnement : 1 an (10 numéros + 2 hors-séries) : France métropolitaine 69 € (TVA 2,10 % incluse).
Europe 84 €, hors Europe 99 €, frais de livraison inclus
Tarifs anciens numéros : 5,90 € (spéciaux 7,50 €) + 5 € de frais d’envoi par exemplaire commandé,
à commander auprès du Service clients abonnés
Service clients abonnés + anciens numéros : La Revue du vin de France, 26 bis, rue des Pommiers,
CS 30075, 93501 Pantin. Tél. : (+33) 1 84 888 222 • e-mail : leserviceclient@magazines.fr
La Revue du vin de France est éditée par Revue du vin de France SAS, au capital de 1 537 500 €,
395 077 068 RCS Nanterre. Siège social : 10, boulevard des Frères-Voisin, 92730 Issy-les-Moulineaux,
tél. : 01 41 46 88 88
Président et directeur de la publication : Arnaud de Contades
Principaux actionnaires : Holding Évelyne Prouvost
Commission paritaire n° 0317K81425, ISSN 1634-7625
Impression : Walstead Central Europe
Dépôt légal à parution © 2020, Revue du vin de France SAS
Conception graphique : Claude Maggiori.
Origine du papier : Allemagne (Augsburg)
Taux de fibres recyclées : 63 %
Certification : PEFC. Eutrophisation : Ptot 0.003 kg/tonne
HORS ENCARTS

88 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

Par jugement du 9 juillet 2019, le Tribunal de grande instance de Bordeaux
a dit que :

• en faisant usage du signe « TARRIT » pour commercialiser des bouteilles

de vin blanc d’IGP Côtes de Gascogne la société SAVAS – SAVEUR DES VINS
DE FRANCE – DISCOUNT VINS a commis des actes de contrefaçon de la
marque semi-figurative « TARIQUET » n° 98740280 dont est titulaire la
SCV CHÂTEAU DU TARIQUET,

• la société SAVAS – SAVEUR DES VINS DE FRANCE – DISCOUNT VINS a

commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la
SCV CHÂTEAU DU TARIQUET.

La société SAVAS a relevé appel de ce jugement.

Afin d’éviter d’engager de nouveaux frais en Justice et conscientes de

l’intérêt que présente pour chacune d’elles une solution amiable au conflit
qui les oppose, les parties se sont rapprochées et ont décidé de mettre
un terme au litige moyennant un accord sur le montant des dommages et
intérêts dus par la société SAVAS et la diffusion de la présente publication.
La société SAVAS a donc acquiescé aux principales dispositions du jugement
rendu le 9 juillet 2019 par le Tribunal de grande instance de Bordeaux qui
est désormais définitif.
 Croisière œnologique
au cœur de la mer Égée

Pour cette première édition, la rédaction de La Revue du vin de France

vous invite à embarquer à bord d’un des prestigieux yachts de la
compagnie PONANT.
Cette croisière inédite de 10 jours vous mènera
vers des sites d’exception au départ d’Istanbul
pour sillonner la mer Égée à la découverte de
la Grèce et de ses célèbres îles : les Cyclades et
les îles du Dodécanèse.
Champagne Roederer, Château Pichon
Longueville Comtesse, Château Giscours et
Château du Tertre... Les vignerons de ces
domaines interviendront à bord pour vous
faire partager leur passion.

Vivez des moments uniques entre visites Les experts de la Revue du vin de France et
culturelles et découvertes œnologiques plus particulièrement Denis Saverot, directeur
exceptionnelles : dîner de gala composé de la rédaction accompagné d’Olivier Poels,
autour de grands crus classés, ateliers journaliste et dégustateur, auront également
de dégustation, conférences, création le plaisir de vous accompagner durant votre
d’un jury de passagers-dégustateurs... croisière pour échanger avec vous, que vous
Soyez parmi les juges retenus ! soyez amateur ou fin connaisseur. Denis Saverot, Olivier Poels,
Directeur de la rédaction Journaliste et dégustateur

ISTANBUL
Île de Limnos TURQUIE

Mer Égée
GRÈCE
ATHÈNES
Syros Patmos
Bodrum
Sifnos Kos
Amorgos Symi

Croisière La Revue du vin de France

Istanbul - Athènes, 10 jours / 9 nuits
Du 19 au 28 juillet 2020,
à partir de 5 210 € (1) par personne
(1) Tarif par personne sur base occupation double, taxes portuaires incluses. Plus d’informations sur www.ponant.com. L’abus d’alcool est dangereux pour
la santé, à consommer avec modération. Droits réservés PONANT. Document non contractuel. ©PONANT - P. Plisson - F. Lefebvre / iStock - Poike / T. Legay.
IM013120040.

Contactez votre agent de voyage ou appelez le 09 77 43 11 42 www.ponant.com

 Cahier spécial

Les Dégustations
92
La révolution
Pierre Citerne
Docteur
des vins oranges Olivier Poels
Journaliste
Olivier Poussier en préhistoire
Tour de France en 53 cuvées des blancs
Jean-Emmanuel
Meilleur de macération qui enflamment la planète vin Simond
sommelier Importateur
du monde 104 de vins

Bordeaux accessibles
Les appellations Bordeaux et Bordeaux Supérieur
recèlent une multitude de rouges à prix serrés
Roberto Caroline Furstoss
Petronio Sommelière
Romain Iltis Journaliste et
photographe
113 Pierre
Meilleur Vila Palleja
sommelier Leur dernière emplette Restaurateur
de France et sommelier
114
Domaine Leflaive
Tout sur le reconditionnement du mythique
Alexis Goujard Grand cru Chevalier-Montrachet ? Karine Valentin
Journaliste
Journaliste
Pierre
Casamayor 117 et vigneronne
Jean-Baptiste
Thial de
Œnologue
et écrivain
Les coordonnées des producteurs Bordenave
Juriste du vin
118
Vins oxydatifs
Surprenants, obscurs ou inoubliables, ces vins
Alexandre Ma
rebelles font preuve d’une savoureuse modernité Formateur
Christian
à Bordeaux
Guillaume
Baroin
Martray
Sommelier 121 Alexandre
Expert en fûts
Les 100 bouteilles mythiques Vingtier
Expert
Vouvray Goutte d’Or 1990 du domaine du Clos Naudin en spiritueux

122
Débat autour d’une bouteille
IGP Lot Néphèle 2018 du domaine Laroque d’Antan,
Laurie
de Lydia et Claude Bourguginon Matheson
Cyrille Mald Experte
Expert en ventes
en spiritueux aux enchères
Les dégustateurs associés : Axel Marchal, Michel Dovaz, Philippe Faure-Brac,
Robert Vifian, David Biraud, Isabelle Bachelard, Fabrizio Bucella,
Philippe de Cantenac, Florence Bal, Jérôme Baudouin et Sylvie Augereau.

Tous les vins dégustés à La Revue du vin de France sont servis dans des verres

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 91


T. Legay / T. Vatin / Spiegelau
Blancs de macération
La révolution orange
enflamme la planète vin
Par Pierre Citerne
E
n 2014, nous évoquions dans ces
colonnes (La RVF n° 583, juillet/
août 2014) l’essor de cette nouvelle
couleur du vin. Six ans après, la situation a
bien changé. D’underground, les vins oranges
sont presque devenus mainstream… En 2019,
parcourant les travées de certains salons,
on a l’impression que tous les vignerons se
sentent obligés de s’y essayer. Les cavistes
les plus au fait de la tendance leur réservent
un rayonnage spécifique et même les
médias généralistes en parlent ! Le moment
Les Dégustations
En couverture
semble donc opportun de saisir à nouveau
un instantané de ce remuant panorama,
de voir comment cette renaissance (car
il s’agit davantage d’une renaissance que
d’une mode) venue de Géorgie et d’Italie
a essaimé en France, avec des dynamiques
diverses selon les régions.
LE VIN ORANGE, DE QUOI S’AGIT-IL ?
Précisons d’emblée ce qu’est un vin orange,
même si le terme et les objets qu’il désigne
sont plus familiers aux œnophiles qu’il y
92 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
a six ans ! Un vin orange est un vin issu de
raisins blancs et vinifié comme un rouge,
avec macération des parties solides, d’où le
terme aussi employé de “blanc macéré”.
Quels sont les paramètres responsables
de la grande diversité de formes et de goûts
rencontrés au sein de cette famille ? Tout
d’abord la durée de macération, qui va de
peu de jours à de nombreux mois. Précisons
que les effets dans l’extraction de la couleur
et des tanins ne sont pas linéaires. Ensuite
vont influer les actions mécaniques (égrap-

Les vins oranges offrent une grande
diversité de formes et de goûts.
page, foulage, pigeage, remontage…) qui,
comme pour un vin rouge, peuvent être
pratiquées ou non pendant la vinification.
Vient ensuite le choix du contenant.
Tout est possible en la matière, tant pour
la fermentation que pour l’élevage, même
si dès novembre 2011 (La RVF n° 556), nous
soulignions le lien privilégié unissant les
jarres de terre cuite et la macération de rai-
sins blancs, association traditionnelle en
Géorgie. Ce lien fort ne s’est pas démenti, au
contraire. L’éventuelle association avec des
lots vinifiés en pressurage direct modifie
aussi le profil de la cuvée. Le vin orange peut
ainsi être un vin d’assemblage. Mais comme
pour tout autre vin, le paramètre principal
réside dans le raisin lui-même : cépage, ori-
gine, degré de maturité et état sanitaire !
E. Perrin
ORANGE, LA COULEUR DE LA LIBERTÉ
Le vin orange représente la liberté, dont
chacun semble plus que jamais assoiffé
Les Dégustations
Les vins oranges
(ce qui n’est pas anormal dans une société arc pour exprimer le sens de leur travail,
où la surveillance de la parole et des goûts apporter du plaisir.
va crescendo vertiginoso…). Liberté pour La macération n’a pas besoin d’être
les vignerons : de rompre avec la routine, visible, il n’est pas nécessaire de crier la
avec le carcan des appellations. La majorité méthode d’élaboration du vin sur les toits !
des vins oranges sont déclarés en Vin de Certains producteurs, après avoir expé-
France. Liberté pour l’amateur : rimenté le vin orange (parfois
de se constituer de nouveaux Le vin brillamment), l’ont depuis
repères, en s’affranchissant des abandonné. Nettement percep-
grands crus institutionnalisés, orange reste tible en Italie, ce phénomène
des mariages gastronomiques le terrain de de décrue laissera en France la
convenus, des notes sur 100, des macération là où elle s’intègre à
prescripteurs d’arrière-garde… chasse des un processus pensé et pérenne,
Même si l’on trouve désor-
mais des vins oranges plus
amateurs làjugés où elle donne des résultats
excellents, qui créeront de
consensuels, plus faciles d’accès, aventureux nouvelles traditions.
la catégorie reste le terrain de Même s’il y a de beaux rosés,
chasse des amateurs aventureux, prêts à se quelques très rares grands rosés (comp-
mesurer à des tannicités fortes, des acidités tons-les sur les doigts d’une main…), le vin
volatiles souvent puissantes et des gammes orange possède à notre sens un tout autre
aromatiques sauvageonnes. Producteurs potentiel. Il est bien plus qu’une anec-
comme consommateurs, au travers du vin dotique quatrième couleur du vin. Cette
orange, nous cherchons tous sans doute à dégustation en témoigne par la diversité
retrouver un vin arcadien, primordial, bien des goûts, des approches vigneronnes, des
entendu fantasmé (lire l’encadré p. 99). suggestions – la gourmandise ou la sévérité,
le ciel ou la terre, l’éthéré ou l’organique –
APPORTER DU PLAISIR qu’elle permet d’entrevoir, plus encore que
Tout nouveau, tout beau, le fantasme n’a par les hautes notes que certaines cuvées
qu’un temps. Passé l’effet de surprise, on ont obtenues. Plus que jamais, nous vous
peut enfin considérer le blanc de macéra- souhaitons de belles découvertes ! P. Ci
tion comme un vin à part entière, porteur
d’un message complexe : du fruit, du ter- Conditions
roir, de l’homme. Le spectre est large. Si de la dégustation
certains possèdent des niveaux de tanins Les vins ont été dégustés par Pierre Citerne à
qui les apparentent aux rouges, d’autres se La RVF du 18 au 20 décembre 2019, étiquettes
goûtent davantage comme des blancs “clas- découvertes, ainsi que tout au long de l’année sur
siques”. Les meilleurs vignerons ont com- le terrain. Certaines cuvées intéressantes que nous
pris que la macération des raisins blancs n’avons pas pu regoûter en 2019 sont mentionnées
était une corde supplémentaire à leur dans la catégorie “Et aussi…”.
En quête de nouvelles expériences, Lionel Gauby appartient à cette génération
de vignerons que le vin orange a séduit très tôt.
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 93
 Les Dégustations
En couverture

53 beaux blancs macérés

qui incarnent la diversité “orange”
19/20 Mămărutá, Vignoble du Rêveur,
Philippe Chatillon, vin de France Trafalgar 2018 12 € alsace Artisan 2018 19 €
arbois Savagnin Amphore 2017 48 € Christelle et Gilles Wicky,
vin de France Jurassique 2018 13 € 14,5/20
18/20
Barouillet,
Camin Larredya, 15,5/20
Domaine de Courbissac, vin de France O’Ranch 2018 17 €
vin de France L’Iranja 2017 42 €
15 € Château Moulin de Peyronin, vin de France
Domaine Gauby, L’Orange 2019
Domaine Finot Frères, IGP Isère Coteaux du L’Orange du Moulin 2018 25 €
IGP Côtes Catalanes La Roque 2011 N. C.
Domaine André et Mireille Tissot, Grésivaudan Macération Cugnète 2018 19 € Clos de l’Élu, vin de France
arbois Savagnin Amphore 2018 45 € Les Terres Promises, Le Baiser d’Alexandrie 2019 26 €
L’Oiseau Rebelle, IGP Sainte-Baume Analepse 2018 23 € Domaine Christian Binner,
vin de France VVNT 2014 66 € Riberach, vin de France Si Rose 19 €
Prieuré-Roch, vin de table Le Blanc 2014 60 € IGP Côtes Catalanes Parenthèse 2018 18 € Domaine Jorel,
vin de France Champ Nouveau 2018 8€
17/20 15/20 Grand Guilhem, vin de France
Matassa, Hugues Béguet, arbois Orange was the color Le Pointilliste Orange 2017 29 €
vin de France Alexandria 2018 22 € of her dress 2018 N. C. Les Petites Parcelles, vin de France
Domaine Laurent Bannwarth, Le Bruit du Silence 2019 24 € (cavistes)
16,5/20 alsace Synergie Qvevri 2015 30 € Mas Coutelou,
Georges Descombes, Domaine Danjou-Banessy, vin de France OW 2016 24 €
vin de France L’Orange 2017 25 € vin de France Supernova 2018 16 € Éric Texier, côtes-du-rhône Saint-Julien
Domaine Laurent Bannwarth, Domaine Haut-Campagnau, en Saint-Alban vieille marsanne 2017 25 €
alsace Gewurztraminer Qvevri 2016 32 € vin de France Pince-moi ! 2014 70 € 14/20
Domaine de Clovallon, Domaine de la Sénéchalière,
IGP Pays d’Hérault Les Aurièges 2016 N. C. Domaine de Sulauze,
vin de France 13ème Heure 2018 20 € vin de France Pétrolette 2017 20 €
Domaine de l’Écu, Causse Marines,
vin de France Faust 2018 45 € Domaine Villet,
vin de France Sy Rose 2018 17 € arbois Cuvée Orange 2018 15 €
Vignoble du Rêveur, l’Octavin,
alsace Un Instant sur Terre 2018 27 € Les Sablonnettes,
vin de France Reine de la Nuit 2017 25 € vin de France Zeste 2018 18 €
Le Soula, Le Rocher des Violettes,
La Macération du Soula n° 16 26 € David Reynaud,
vin de France Chenin Orange 2017 18 € vin de France L’Inattendu 2016 15 €
16/20 Les Cigales dans la Fourmillière,
Domaine Pierre Frick, alsace gewurztraminer vin de France Céleste 2018 30 € 13,5/20
Grand cru Eichberg Pur Vin 2018 22 € Mas del Périé, Domaine de Sulauze,
Domaine Gauby, vin de France Orange Voilée 2017 31,50 € vin de France Super Schluck 2018 11 €
IGP Côtes Catalanes La Jasse 2018 108 €
Domaine de la Tournelle,
Ambre de Savagnin 2017 25 €
Domaine de la Pinte,
vin de France Sav’Or 2018 16,50 €
Domaine des Roches Neuves,
saumur Terres 2018 50 €
Domaine Turner-Pageot,
vin de France Les Choix 2016 26 €
Domaine Viret, vin de France
Dolia Paradis Ambré 2016 35 €
Fons Sanatis,
vin de France Mémé Jeanne 19 €
L’Oiseau Rebelle,
vin de France P’tit Rebelle 2017 33 € Le vignoble du Roussillon est aux avant-postes en matière de vin orange.
D. R.

94 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Les Dégustations
Les vins oranges
16,5/20
De la Loire aux rives de la Méditerranée VIGNOBLE DU RÊVEUR
Alsace Un Instant sur Terre 2018
Notre tour de France Le domaine produit plusieurs
cuvées macérées. Celle-ci offre

des vins oranges un éclat volubile d’une intensité

remarquable. La rose séchée
domine. Beaucoup de richesse et
Inspirée par les exemples géorgien et italien, la vague du vin orange s’étend, s’amplifie dans les vignobles de mâche en bouche, soutenue
par une tannicité marquée.
hexagonaux qui renouent ainsi avec la pratique ancestrale des blancs de macération.
27 € // Bouteilles/an : 1 500

L’Alsace et fin de fermentation. Robe étonnante pour le cépage, 16/20

gagnée par
la fièvre orange
On assiste en Alsace à une véri-
table épidémie de vin orange !
Le gewurztraminer en est la
première victime… Comme
le muscat dans le Roussillon,
ce cépage aromatique devenu
mal aimé, difficile à interpréter
et à vendre, voit dans la macé-
ration un salut. Elle lui donne
un élan et renouvelle son
empreinte aromatique.
La jeune génération, qui veut
des gewurztraminers secs, s’y
lance. Stéphane Bannwarth,
pionnier du genre en Alsace,
insiste sur l’avantage tech-
nique des vins oranges, rare-
ment mis en avant : « Je ne suis
pas étonné par la montée en
puissance de ces vins, car ce
mode de production permet de
mieux finir les fermentations ».
Nous sommes pour l’heure
moins séduits par les autres
ambrée, légèrement voilée.
Richement nuancée, l’expres-
sion aromatique témoigne
d’une haute maturité du raisin :
figue sèche, datte, rose…
La bouche montre une vigueur
Stéphane Bannwarth, à Obermorschwihr
Ses cuvées sont plus vivantes
et plus entières
une sève puissante soulignée
par une volatile haute mais
intégrée au corps du vin. Assise
et tension : c’est un gewurztra-
miner étonnant, exigeant.
32 € // Bouteilles/an : 1 630
D. R.
DOMAINE PIERRE FRICK
Alsace gewurztraminer Grand
cru Eichberg Pur Vin 2018
Issu d’une macération courte
d’une semaine en grappes
entières, ce vin affiche une robe
vieil or. Les arômes variétaux
sont identifiables mais plus per-
cutants que de coutume, le litchi
est bien là, mais accompagné
d’une forte dose de zeste
de citron… La bouche confirme.
Le vin est sec, tonique. La chair
grasse et un peu salée est élec-
trisée par un arc tannique subtil.
22 € // Bouteilles/an : 2 200
15/20
DOMAINE
LAURENT BANNWARTH
Alsace Synergie 2015
Cette cuvée réunit riesling,
pinot gris et gewurztraminer,
qui macèrent pendant huit mois
en qvevri. Au nez, une expression
discrète mais complexe
se développe, marquée par des
suggestions de terre humide.
En bouche, le vin se révèle vif,
alerte malgré une puissance
alcoolique certaine. Fidèle
à son modèle géorgien, il attend

cépages : les rieslings sont des nourritures riches et

souvent austères et les pinots
gris pas encore au niveau des
très belles cuvées macérées
Voilà dix ans que Stéphane Bannwarth élabore des vins oranges.
savoureuses !
M arqué par l’exemple géorgien, qu’il découvre lors
d’un voyage en 2007, Stéphane Bannwarth est un pionnier,
ici en France, du vin de macération vinifié en jarres de terre cuite.
30 € // Bouteilles/an : 2 088

de ce cépage produites
en Italie ou en Slovénie. P. Ci
16,5/20
DOMAINE
LAURENT BANNWARTH
Alsace gewurztraminer
Qvevri 2016
Six mois de macération en qvevri
(jarre de terre cuite géorgienne),
avec foulage à la main en début
15/20
Le vigneron alsacien est interpellé par les premiers vins VIGNOBLE DU RÊVEUR
qu’il produit ainsi en 2011 « entièrement différents de ce que je faisais Alsace Artisan 2018
jusqu’alors, autant dans l’esthétique, le goût, la couleur… ». Avec presque Le nez suggère les fruits rouges,
une décennie de recul et d’expériences, il s’est forgé une vision la rose séchée et aussi une
approfondie du vin de macération. Si la macération apporte nuance terrienne. La saveur
davantage de texture aux vins, et de stabilité, ce qui est très vineuse répercute ce cortège
important à ses yeux, aboutissant à des cuvées « plus complexes, aromatique avec aplomb, réma-
plus vivantes, avec de fortes individualités, des vins entiers ! », il insiste nence, mais aussi une certaine
sur le fait que le vin orange n’est pas un choix de facilité, sécheresse qui confère à la finale
qu’il implique une exigence accrue quant à la qualité des raisins, une réelle austérité.
qui devront travailler « par eux-mêmes ». P. Ci 19 € // Bouteilles/an : 5 000

Les coordonnées des domaines en page 117

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 95


14,5/20
DOMAINE
CHRISTIAN BINNER
Vin de France Si Rose
La formule est presque alchi-
mique : terroir du Bildstoecklé,
65 % de gewurztraminer, 35 %
de pinot gris ; 30 % de 2017
macérés huit mois, 70 % de 2018
macérés huit jours. Le vin qui en
résulte ne manque pas de relief.
Fruit intense, touches confites
et nuances de cire d’abeille,
encaustique. La bouche est plus
aérienne, avec une pointe vola-
tile haut perchée qui se résout
en une finale un peu abrupte.
19 € // Bouteilles/an : 8 000
Et aussi…
Domaine Trapet, VDF Ambre
(gewurztraminer).
Domaine Rietsch, Coquette
(macération en grappes entières
de riesling et gewurztraminer),
Quand le Chat n’est pas là (pinot
gris), Demoiselle (gewurztra-
miner) et Murmure (muscat).
Vincent Stoeffler, Tout feu
tout flamme (gewurztraminer)
et Le Beurot (pinot gris, rosé
de macération).
Julien Meyer, gewurztraminer
Les Pucelles, pinot gris Macéra-
tion, pinot blanc Les Terres
Chaudes et muscat Petite Fleur.
Bourgogne
et Beaujolais
hésitent encore
En matière de vin orange,
la Bourgogne semble
hésitante par rapport
au Jura. On peut cependant
goûter quelques cuvées de
chardonnay macéré très perti-
nentes, voire bouleversantes
(Prieuré-Roch). D’autant que
la tannicité apparaît comme
un potentiel facteur d’équilibre
pour les terroirs les plus riches.
Goûtera-t-on bientôt un meur-
sault-charmes ou un bâtard-
montrachet de macération ?
Nous l’espérons ! P. Ci
Les Dégustations
En couverture
Et aussi…
Quel goût le vin orange a-t-il ? Benoît Camus, VDF La Clef des
Sols (chardonnay du Beaujolais,
secteur des Pierres Dorées,
macéré cinq jours).
Recrue des Sens, Les Grands
Ponts Blancs (aligoté macéré
une vingtaine de jours).
Domaine de Chassorney, saint-
romain Combe Bazin macé-
ration (et toute une gamme de
cuvées de négoce macérées sous
la dénomination Skin Contact).
Viti Vini Vinci, VDF Sauvignon
Macération.
Shutterstock
Jura,
Les blancs de macération développent des arômes d’agrumes, de mangue… le pionnier
I ssu des mêmes cépages blancs, qu’est-ce qui différencie au goût
un vin orange d’un vin de pressurage direct ? Une structure
tannique d’abord, plus ou moins apparente, qui va de l’impercep-
Né de la dynamique créée par
les producteurs “bio et nature”,
tible suggestion à une réelle astringence. Davantage que les blancs porté par l’intérêt international,
de pressurage direct ce sont de ce fait des vins qui appellent le blanc macéré trouve dans
le compagnonnage étroit de la nourriture. Ensuite un registre le vignoble jurassien
aromatique original qui des fruits blancs ou jaunes glisse vers l’une de ses places fortes.
les agrumes, les zestes frais, séchés ou confits, l’abricot, la mangue,
le kaki… Les notes épicées et racinaires sont aussi souvent Le savagnin se prête admira-
de la partie. Si la pigmentation et le goût sont liés par l’action blement à l’exercice.
globale des flavonoïdes, n’oublions pas l’importance primordiale Les variantes sont nombreuses,
de la perception chromatique dans la dégustation (démontrée les propositions parfois osées.
par les chercheurs Brochet, Morrot et Dubourdieu) ! P. Ci Notre préférence va aux cuvées
issues de macérations longues
sur des raisins très mûrs.
18/20 On oublie le support tannique Les chardonnays macérés sont
PRIEURÉ-ROCH tant l’expression est fine, chan-
plus rares, mais, comme
Vin de table Le Blanc 2014
Chardonnay issu de Boncourt-
geante, lancinante, troublante.
60 € (cavistes) // Bouteilles/an : en Bourgogne, certaines
le-Bois, dans la plaine au sud de
Vosne-Romanée, longtemps
4 800 cuvées laissent entrevoir de
belles promesses, la possibilité
cette cuvée fut commercia-
lisée par le domaine comme
16,5/20
GEORGES DESCOMBES
d’une expression variétale
renouvelée, capable de retrans-
Bourgogne Grand Ordinaire. Vin de France L’Orange 2017 crire les différents terroirs.
Cette version macérée, en ven- Ce chardonnay macéré provient La tradition étant faite de
dange entière comme les autres de Liergues, dans les Terres
nouveautés réussies autant
cuvées du domaine, voulue par Dorées du Beaujolais. Élevé
Henry-Frédéric Roch dès 2011, six mois en fûts, le vin présente que de souvenirs revivifiés,
résonne au palais comme un une belle teinte rousse… D’abord le Jura est en passe de devenir
hommage à la vista de ce singulier réduit, il se livre à l’air, avec emblématique du blanc
personnage bourguignon, dis- une saveur profonde, originale, macéré comme il l’est
paru en 2018. La couleur est net- une très belle qualité tactile, aujourd’hui du blanc élevé sous
tement ambrée, le vin riche en un caractère velouté (14°) et voile levurien. Ourobouros,
dépôt… Le nez captive, avec des vigoureux, grâce aux petits éternel retour, car sous le nom
notes décadentes de pièce d’eau tanins et à l’acidité volatile.
de “vin cuvé”, le vin orange est
automnale, de bouquet oublié, Les notes florales et de groseille
des effluves qui se résolvent en évoquent un pinot en vendange une vieille pratique jurassienne,
essence florale et minérale. Peu entière. Redoutablement qui concernait les raisins
alcoolisée (12°), la matière ser- bien vu ! très mûrs et avant tout
pente sur une grande longueur. 25 € // Bouteilles/an : 3 000 le savagnin. P. Ci
96 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Les Dégustations
Les vins oranges
Reine de s’amuser à isoler le gingembre,
la Nuit 2017 le galanga, la cruche humide ou
de l’Octavin :
encore le musc… Porté par un
nous avons
fil d’acidité volatile qui s’intègre
aimé
sa franchise. à la richesse de la chair, il laisse
derrière lui un sillon vibrant de
terre et de soleil. Svelte, un peu
plus austère, le 2016 affiche une
expression voisine, toujours sur
une longueur remarquable.
45 € // Bouteilles/an : 2 700
16/20
CHRISTELLE
ET GILLES WICKY
Vin de France Jurassique 2018
Très original chardonnay en
Stéphane Tissot, à Arbois
Il a ressuscité un grand vin !
D. R.
macération carbonique (onze
jours avec une saignée quo-
tidienne pour éviter que les
rafles ne macèrent dans le jus).
Le parfum est entraînant, la
saveur très abricotée, guillerette,
agile, lâchée, davantage dans
l’impact aromatique que dans la
structure. Les plus aventureux
s’intéresseront à la Cuvée 380,
chardonnay macéré 380 jours,
mémorable bien qu’un peu
durcie par l’acidité volatile,
cuivrée, aux notes de cire et de
cuir frais qui évoquent les blancs
macérés du Collio frioulan.
13 € // Bouteilles/an : 1 000
16/20
DOMAINE
DE LA TOURNELLE
Ambre de Savagnin 2017
L’acidité volatile est soutenue,
rentre-dedans… le vin aborde
le dégustateur sans ménage-
ment. On est ensuite étonné
par la finesse de la chair, sa vibra-
tion harmonieuse et le déroulé
des saveurs, zeste d’orange,
racines (gingembre, ou plutôt
galanga). La longue macération,
six mois, illustre une fois de plus
le paradoxe d’une tannicité
qui s’affine avec le temps
de macération.
25 € // Bouteilles/an : 2 000
16/20
DOMAINE DE LA PINTE
Vin de France Sav’Or 2018

Vinifié sans soufre et cuvé douze

jours avant d’être élevé six mois
en cuves, ce savagnin arboisien
va droit à l’essentiel, constituant
une très belle introduction
19/20 à la typologie si prometteuse du
PHILIPPE CHATILLON savagnin macéré. Malgré la briè-
Arbois Savagnin Amphore 2017 veté de la macération, la couleur
Parmi les interprétations, toutes est orangée et la gamme aroma-
très personnelles et originales tique très caractéristique, épices
du savagnin que propose douces et zestes d’agrumes
Philippe Chatillon, la version confits. La générosité solaire du
“amphore” atteint le sublime millésime 2018 rayonne. La chair
en 2017. Vendangés tardivement, douce et mûre est relevée par le
fin octobre, égrappés, les raisins rappel tannique de la finale.
sont cuvés cinq mois dans 16,50 € // Bouteilles/an : 800
une jarre italienne, pressés puis
remis sept mois dans le même 15/20
contenant. La robe n’est que HUGUES BÉGUET
légèrement orangée, le nez Arbois Orange was the color
complexe, enjôleur, sublime… of her dress 2018
avec des suggestions de manda- Très longue macération de
rine fraîche, de rose et d’épices savagnin issue de deux parcelles
D. R.

douces. La longueur et la tension
de la matière s’affirment en
exquise finesse. 2018 possède
la même chair somptueuse mais
apparaît encore brouillon.
48 € // Bouteilles/an : 300
18/20
DOMAINE ANDRÉ
ET MIREILLE TISSOT
Arbois Savagnin Amphore 2018
Déjà très expressif, ce vin macéré
cinq mois en jarres, raisins
égrappés et sans soufre, offre
une gamme complexe et pro-
fonde de parfums,où l’on peut
Avec leur savagnin orange longuement macéré en jarres, situées à Mesnay et Pupillin. Les
Stéphane et Bénédicte Tissot réinterpètrent le grand cépage du Jura. tanins sont vigoureux, dyna-
miques, avec une acidité volatile
S téphane Tissot est un précurseur, mieux, il a ressuscité un
grand vin ! Après avoir goûté un “cuvé” millésime 1985 chez
un vieux vigneron, il s’essaie dès 1992 à une macération de deux
soutenue. Ils dominent l’expres-
sion d’un vin plus viril que ne le
laisse penser le nom de la cuvée.
semaines sur un vin jaune. Le savagnin longuement macéré N. C. // Bouteilles/an : 2 000
en jarres et mis en bouteilles rapidement viendra plus tard.
Sauvage à ses débuts, ce vin s’affine avec le temps, comme 15/20
le démontre le radieux 2009, épicé, organique, subtilement L’OCTAVIN
racinaire. Cette interprétation du grand cépage jurassien semble Vin de France
pouvoir parvenir aux mêmes sommets d’intensité et d’harmonie Reine de la Nuit 2017
que le vin jaune. Comme ce dernier, le savagnin macéré est Cet assemblage chardonnay/
exigeant, il n’atteint la splendeur qu’au travers de raisins très savagnin n’est pas systématique-
mûrs, et de grande origine. La cuvée de Stéphane Tissot est issue ment vinifié en macération. Cela
de la vigne En Spois du climat Les Bruyères. P. Ci illustre bien l’évolution de la pra-

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 97


tique, qui de curiosité devient un
paramètre technique que l’on
ajuste en fonction du raisin, du
millésime. Le 2017 a macéré trois
mois. Vif, tannique, il emporte la
sympathie par sa franchise. Sa
saveur est osée, un peu sauvage,
entre abricot sec et fromage fort.
25 € // Bouteilles/an : 1 000
14/20
DOMAINE VILLET
Arbois Cuvée Orange 2018
Issu de chardonnay et de sava-
gnin vendangés tard et macérés
quinze jours, le temps de la
fermentation alcoolique, cet
assemblage jouit de la générosité
du millésime. Sa saveur riche,
encore brute, prend des accents
de marc et de raisins secs.
15 € // Bouteilles/an : 2 000
Et aussi…
Les Pieds sur Terre,
côtes-du-jura chardonnay
Champ d’Aubert (douze jours
de macération).
Domaine de la Loue, VDF Cuvée
Raphaëlle (savagnin).
Domaine des Bodines, VDF
Orange Mécanique (savagnin).
Domaine Bornard, arbois-
pupillin Savagnin Macération
Pelliculaire.
La Loire
à l’avant-garde
Ce grand vignoble a tardé à se
mettre au vin orange mais il est
maintenant en pointe, comme
le Sud-Ouest ! Le chenin
répond bien à la macération,
avec des vins que l’on a envie de
voir évoluer dans le temps. La
dégustation corrobore l’expé-
rience de Thierry Germain, du
domaine des Roches Neuves
à Saumur, qui avec le recul de
sept millésimes pense que la
vinification du chenin en jarres
offre plus de perspectives que
celle du cabernet franc. Le Pays
nantais n’est pas en reste,
avec des vins hauts en couleur
et en saveur. P. Ci
Les Dégustations
En couverture
16/20
Quelle place pour les blancs DOMAINE
DES ROCHES NEUVES
macérés dans les AOC ? Saumur Terres 2018
Plutôt pâle malgré les quatre
mois de macération du raisin
égrappé, ce chenin né sur
calcaire à silex propose un fruit
(beaucoup de poire) canalisé
et vivifié par des nuances
de terre cuite humide.
Il conserve un magnifique
tranchant dans le contexte
du millésime, une tension
et un grain singulier mais sans
dureté. Premier millésime
vinifié de la sorte par Thierry
Germain, la cuvée Terres 2013
(huit mois de macération) est
revenue vers une expression
saumuroise très classique,
une forme tendue, étirée, dont
le nez déjà biscuité retrouve
de la fraîcheur à l’oxygénation.
Le support tannique est discret
mais présent.
50 € // Bouteilles/an : 1 200
15/20
DOMAINE
DE LA SÉNÉCHALIÈRE
D. R.
Vin de France
Jean-Philippe Granier est prêt à signer pour un languedoc historique orange. 13ème Heure 2018
La teinte évoque de vieilles
C ertaines appellations ont d’emblée ouvert la porte aux blancs
macérés, considérant que du moment que le cahier des
charges était respecté quant aux cépages, l’origine pouvait être
dorures, le nez affiche
une exubérance dont
on ne pensait pas le melon
revendiquée. C’est notamment le cas de l’Alsace et de la Savoie.
Les nombreux “oranges” languedociens sont en revanche
de Bourgogne capable !
La matière expressive, enjouée,
produits hors appellation, la plupart en Vin de France. approfondit les arômes de poire
Jean-Philippe Granier, l’historique directeur technique et d’abricot, avec une rondeur
des Coteaux du Languedoc, n’exclut pourtant aucune évolution. (celle d’un millésime solaire)
« Quand c’est bien fait ça peut être superbe ! s’enthousiasme-t-il. Les vins soulignée par un grain de tanin
oranges sont encore rares, on manque de recul, mais pour moi ce sont et une pointe de volatile.
des vins de garde. Pourquoi pas un languedoc historique orange ? » 20 € // Bouteilles/an : 2 000
Le mot historique est important, car le blanc macéré n’est
finalement qu’un retour aux sources, gallo-romaines notam- 15/20
ment. Racines si prégnantes en Languedoc ! P. Ci LE ROCHER
DES VIOLETTES
Vin de France
16,5/20 aujourd’hui assez pâle. Défini, Chenin Orange 2017
DOMAINE DE L’ÉCU frais et pas du tout variétal, le Deux semaines en fûts ouverts
Vin de France Faust 2018 spectre aromatique s’intègre pour ce chenin tourangeau
Il s’agit de l’un des vins les plus parfaitement à une texture (Saint-Martin-le-Beau) :
réussis parmi les nombreuses à la fois grasse et savoureuse, un temps de macération assez
cuvées expérimentales qui s’étire pour culminer en court mais un vin à la robe
imaginées par Frédéric Niger. une longue finale qui laisse le à l’orangé soutenu, au caractère
Ce chardonnay sur orthogneiss palais sur l’allant tonique d’une fruité généreux, oscillant entre
du Pays nantais est issu impression de peau de manda- les arômes de poire, d’agrumes
d’une macération de neuf mois rine. Très belle tenue à l’air. et même de fruits rouges.
en jarres. Laiteuse, la robe reste 45 € // Bouteilles/an : 800 La matière généreuse,
98 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
 Les Dégustations
Les vins oranges
nourrissante et peu acide 14/20 VDF Skin MMXVII (sauvignon L’Iranja 2017
est tenue par l’amertume et la LES SABLONNETTES sancerrois macéré neuf mois de Camin
fermeté tannique. Cette matière Vin de France Zeste 2018 en jarres). Larredya : ce
enrobe le palais. Puis elle Macération de chenin en Saget La Perrière, petit manseng
se complexifie à l’aération, grappes entières pendant VDF Le Génie Orange (chenin). vieillira
avec une pointe de cuir frais un mois. Des tanins marqués, Sylvie Augereau, à merveille.
et de graphite. une pointe granuleuse qui VDF Peaux (chenin).
18 € // Bouteilles/an : 300 donne de l’élan à ce vin franc, Sébastien Riffault,
dru, évoquant le sucre d’orge sancerre Auksinis Macération.
14,5/20 et, comme son nom le suggère,
CLOS DE L’ÉLU le zeste d’orange… Il a besoin
Vin de France
Le Baiser d’Alexandrie 2019
de répondant, de nourritures
substantielles.
Le Sud-Ouest
Ce grolleau gris, macéré neuf
mois en amphores avant
18 € // Bouteilles/an : 3 000 et l’Aquitaine
d’être pressé, nous emmène Et aussi… réinventent
aux frontières du rosé, comme Domaine Béatrice et Pascal
en atteste sa très jolie robe Lambert, VDF Ligeris Dolium le vin orange
saumonée. L’expression est (chenin et pinot macérés et
très proche du raisin, parfumée, élevés en jarres). Vignobles de l’Adour, Cahors,
originale, presque muscatée. Domaine de l’Écu, Gaillac, Bergeracois…

La bouche conjugue ce charme
aromatique à une vraie accroche
tannique.
26 € // Bouteilles/an : 1 000
L’âme des vins oranges
menacée par le succès
VDF Céleste (chardonnay La possibilité d’accentuation
et folle blanche macérés des forts particularismes
un mois, élevage en jarres).
des différents vignobles
Domaine Fouassier,
et de la diversité des cépages
endémiques a été saisie par
les vignerons du Sud-Ouest.
Avec une liberté, une audace
sans doute unique ! Les vigne-
rons du Sud-Ouest ne faisaient
pas partie des pionniers du vin
orange. Si les propositions sont
encore clairsemées, non
seulement la macération est
ici adoptée, elle est même
réinventée... Même Bordeaux
s’y met ! Il faut dire que, très
différente dans ses attendus
et sa technicité, la macération
pelliculaire préfermentaire
à froid, mise au point par
l’œnologie moderne et
popularisée par le professeur
Denis Dubourdieu dans les
D. R.
J. Baudouin
passerillés est la même que celle
de la cuvée Capcéu de Jean-Marc
Grussaute. Somptueuse robe
cuivrée, bouquet captivant,
où l’exubérance exotique
du petit manseng rencontre
de fines notes oxydatives.
On navigue entre la mandarine
confite, la mangue séchée,
la noix grillée, la figue sèche,
la tourbe… Le sucre résiduel est
admirablement intégré dans
la richesse du vin, intimement
associé à l’élan des tanins.
La saveur se développe jusqu’à
une finale très quinquina,
orange amère, qui évoque
presque un vin du Roussillon.
Cette merveilleuse intuition,

Des gros faiseurs comme la maison Rigal produisent désormais du vin orange. années 80, témoignait déjà ce pari osé d’un vin de vendanges
d’une volonté de faire passer tardives macéré se complexifie

L es vins oranges se démocratisent. S’il demeure associé à des

pratiques vigneronnes très artisanales, le concept est désor-
mais repris par de gros faiseurs, comme la biodynamie ou le sans
les vertus du solide dans
le liquide. P. Ci
encore au vieillissement, comme
en atteste le somptueux 2015.
42 € // Bouteilles/an : 600
soufre… On trouve des “vins oranges” à moins de 8 euros, tel le
Gros Manseng Vin Orange 2018 (10 000 cols) de la maison cadur- 15/20
cienne Rigal (AdVini). Quant aux cuvées haut de gamme, elles 18/20 DOMAINE
existent aussi, même si la production française est encore timide, CAMIN LARREDYA HAUT-CAMPAGNAU
notamment par rapport à l’Italie. Ni bobos, ni indus, ni prestiges, Vin de France L’Iranja 2017 Vin de France
pas encore récupérés par les omnipotents intermédiaires du vin, Pur petit manseng vinifié en Pince-moi ! 2014
il existe encore sur certains rivages et îles de la Méditerranée jarres puis élevé en barriques : Difficile d’aller plus loin…
de vrais “vins oranges paysans”. Le bonheur de rencontrer ces la base de raisins vendangés Dominique Andiran a laissé
cuvées ethnographiques est réservé aux voyageurs curieux. P. Ci tardivement, naturellement macérer des raisins entiers

Les coordonnées des domaines en page 117

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 99


pendant trois ans. En résulte
un vin très sec, percutant,
dont la force vient des notes
oxydatives davantage que
de la tannicité. Exercice de style
haut en couleur, plus proche
des vins élevés sous voile
que des vins oranges malgré
(ou peut-être à cause de…)
la longueur de la macération.
70 € // Bouteilles/an : 400
15/20
MAS DEL PÉRIÉ
Vin de France
Orange Voilée 2017
Chenin du causse calcaire
cadurcien, fermenté puis élevé
un an en jarres de terre cuite,
cette cuvée Orang e Voilée
fait montre d’une réelle
originalité, mais surtout
d’une subtilité inattendue.
Derrière la teinte légèrement
orangée de sa robe, le caractère
noix verte/écorce d’orange
s’associe harmonieusement
au support tannique,
qui charpente le vin sans
l’alourdir, qui suggère la forme
davantage qu’il ne la corsète.
31,50 € // Bouteilles/an : 3 000
15/20
CAUSSE MARINES
Vin de France Sy Rose 2018
Macération de mauzac rose
coloré par une touche de syrah.
Est-ce encore un vin orange ?
Vin mutant, vin transgenre…
Plaisir majuscule en tout cas !
Un vin très parfumé, floral
et grenadine, joyeux, gazeux.
Sa gourmandise est aiguillonnée
par une fine astringence.
Les Dégustations
En couverture
14,5/20
CHÂTEAU
MOULIN DE PEYRONIN
Vin de France
L’Orange du Moulin 2018
Sauvignon gris de l’Entre-deux-
Mers macéré seize jours. Après
une entrée en bouche géné-
reuse, son développement
peut sembler un peu trop bref.
Demeure sa jolie saveur,
finement musquée, qui fait
sentir le grain de la peau
de pêche.
25 € // Bouteilles/an : 500
14,5/20
LES PETITES PARCELLES
Vin de France
Le Bruit du Silence 2019
Très près du raisin, du moût,
on ne peut plus “nature”, ce jus
produit dans le sud des Graves,
à Langon, possède un charme
Ces vins que l’on pourrait
croire oranges
difficile à verbaliser, rassérénant,
un toucher pulpeux et léger, naïf,
qui va au-delà de la robe brune,
laiteuse, et des arômes un peu
blets. Une forme de vérité
primordiale…
24 € (cavistes) // Bouteilles/an :
1 900
Et aussi…
Clos Lapeyre,
VDF Amaròs (gros manseng
de Jurançon fermenté en
grappes entières puis élevé plu-
sieurs mois au contact du marc).
Causse Marines,
VDF Zacm’Orange (mauzac
gaillacois macéré trois
semaines).  de Jean-Yves Péron en Savoie,
Barouillet, VDF Truculence
(sauvignon, macération courte).
Château Lafitte, VDF Orange
(petit manseng macéré trois
semaines, élevage en jarres).
D. R.
Du Rhône aux
Alpes, la greffe a
du mal prendre
Les cuvées oranges demeurent
rares en Vallée du Rhône,
même au sud, malgré
l’exemple précoce et probant
du domaine Viret. On aimerait
goûter des viogniers macérés,
notamment à Condrieu…
L’exemple précoce de Philippe
Viret dans le Rhône trouve
un écho dans le travail
où la macération transfigure
la timide jacquère. P. Ci
16/20
DOMAINE VIRET
Vin de France
Dolia Paradis Ambré 2016
Philippe Viret est un des précur-
seurs à la fois du vin orange et de
la vinification en jarres de terre
cuite. Assemblage de sept
cépages (viognier, grenache gris,
vermentino, muscats, clairette
rose et le rare aranel, un croise-
Dolia Paradis
Ambré 2016 du
domaine Viret :
beaucoup
de saveurs
et d’énergie.

17 € // Bouteilles/an : 2 500

14,5/20
BAROUILLET
Vin de France O’Ranch 2018
Cette cuvée O’Ranch est
un assemblage bergeracois
des cépages ondenc et musca-
delle macérés quatre mois
en amphores. À la fois
tannique et “terrien”, avec
un parfum typique de cruche
mouillé, c’est un vin parfaite-
ment sec, grenu, savoureuse-
Certains blancs issus de pressurage direct ressemblent à des vins oranges .
C ertains vins oranges apparaissent plus clairs et moins tan-
niques que des vins de pressurage direct, pourquoi ? Lors
de pressurages très longs (surtout dans des pressoirs verticaux),
une macération peut avoir lieu. Une fermentation sans débour-
bage et un élevage avec toutes les lies peuvent aussi influencer
le vin, sa couleur, sa tannicité, sa richesse aromatique, jusqu’à lui
conférer des airs de vin de macération, surtout quand le raisin est
richement doté. Citons les jurançons du Clos Joliette et les vins
du domaine Bru Baché ou les remarquables blancs languedociens
de Marlène Soria au domaine Peyre Rose (Oro) et de Pierre
Quinonero au domaine de la Garance (Les Claviers). Comme
T. Legay

ment rustique et plein d’allant. les meilleurs vins oranges, leurs cousins finalement, ce sont
17 € // Bouteilles/an : 900 des vins de grand caractère et de grande garde ! P. Ci

100 - LA RVF N° 639 - MARS 2020


D. R.
Dans la Drôme, le domaine Viret est un précurseur en matière de vin orange et d’élevage en jarres de terre cuite.
ment du grenache gris avec le
saint-pierre doré) macérés neufs
mois en jarres, cette cuvée
impressionne par la richesse
confite de ses arômes, l’évoca-
tion “orientalisante”de dattes,
d’orange cloutée, de fleur
d’oranger, de thym, d’origan…
La bouche exprime une tannicité
soutenue mais harmonieuse.
Le vin reste svelte, peu de gras,
du feu, beaucoup de saveurs
et d’énergie. Assemblant deux
millésimes, 2017 et 2018, la cuvée
Horus, moins tannique, moins
riche, propose une version plus
accessible de ce profil aroma-
tique et tactile.
35 € // Bouteilles/an : 5 000
15,5/20
DOMAINE FINOT FRÈRES
IGP Isère Coteaux du Grésivaudan
Macération Cugnète 2018
On retrouve dans cette jacquère
cuvée trois mois puis élevée
un an en fûts le tranchant et
l’insistance minérale du cépage,
considérablement densifié par
la macération. Profil charnel,
touche abricotée, patine de l’éle-
vage, profondeur et allonge…
une jacquère singulière,
ambitieuse, presque sculptu-
rale ! Poivrée, herbacée, plus
ligneuse, la version 2017 offre
moins de charme.
19 € // Bouteilles/an : 1 500
Les Dégustations
Les vins oranges
14,5/20
ÉRIC TEXIER
Côtes-du-Rhône
Saint-Julien en Saint-Alban
vieille marsanne 2017
Un mois de macération carbo-
nique avant pressurage, puis
élevage en jarres et fûts. Difficile
de déceler la macération lors
de la dégustation : l’expression
oscille, classiquement pour
une marsanne, entre le miel
et l’amande fraîche, avec une
touche de menthe poivrée.
Le profil en bouche est lui aussi
classique, mais opportunément
tonifié par un grain tannique
en finale. Même analyse pour
le Brézème 2015, pure rous-
sanne, gras et biscuité, mais doté
d’une fin de bouche très alerte.
25 € // Bouteilles/an : 1 200
14/20
DAVID REYNAUD
Vin de France L’Inattendu 2016
Une vision radicale mais atta-
chante du vin orange. Après
égrappage, la marsanne (et 5 %
de roussanne) de Beaumont-
Monteux (Crozes) macère un an
en jarres de terre cuite.
En découle un vin trouble,
laiteux, jaune d’or, au nez pro-
fond, sensuel, évoquant le miel,
l’orge, les racines (panais…),
la terre humide. La bouche est
encore très gazeuse, avec des
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 101
tanins, une présence de vin
rouge, une finale un peu durcie
par l’acidité volatile. Difficile
de faire plus “nature”. Il lui faut
de la nourriture.
15 € // Bouteilles/an : 650
Et aussi…
Jean-Yves Péron, VDF (Savoie)
Les Barrieux (roussanne
et jacquère) et La Grande
Journée (altesse).
Domaine des Côtes Rousses,
savoie Troublant (jacquère).
Vignobles de
Méditerranée,
la terre promise
En France, l’abondance et
la diversité des propositions
font du pourtour méditerra-
néen, tout spécialement
du Roussillon et du sud
du Languedoc, le vivier le plus
actif en matière de vin orange.
Cette effervescence pour
l’heure advient hors des cadres
définis par l’Inao. Elle pourrait
cependant (elle devrait,
pensons-nous) être mise
à contribution pour définir
le futur du grand blanc
méditerranéen (lire encadré
p. 98). Des expériences
précoces ont parfois été
porteuses de mouvements
de fond (comme celui des
muscats macérés, initié en
Roussillon, notamment par
Tom Lubbe du domaine
Matassa), parfois sans lende-
main, comme cette extraordi-
naire clairette macérée
produite en 2007 dans
le secteur de Pézenas par
Basile Saint-Germain
du domaine des Aurelles. P. Ci
18/20
DOMAINE GAUBY
IGP Côtes Catalanes
La Roque 2011
La famille Gauby a abandonné
cette grande cuvée de muscat
macéré au profit de la seule (et
remarquable) cuvée La Jasse,
beaucoup plus abordable.
Restent de mémorables
bouteilles qui en évoluant
témoignent de l’intuition de
Lionel Gauby. Robe ambrée, nez
tourbillonnant, profond, voya-
geur méditerranéen, datte,
orange confite, lavande, thym et
menthe pouliot, au milieu de
notes évolutives de miel, de cire,
de cuirs exotiques… Saveur

cohérente et grande profondeur
font de ce muscat macéré
un vin de haute gastronomie,
à tenter avec les mets contra-
riants, comme l’asperge
ou la poutargue.
N. C. // Bouteilles/an : 1 200
18/20
L’OISEAU REBELLE
Vin de France VVNT 2014
Issue de grenaches blanc et gris
très mûrs, conjuguant macéra-
tion très longue (deux ans
et demi…) et pressurage direct,
cette cuvée dépasse les frontières
typologiques. Richesse, inten-
sité de l’acidité et de l’extrait sec
sont tels que le vin finalement
n’évoque que lui-même (et son
cadre, les terrasses de la Côte
vermeille). Hélichryse et fenouil
sauvage, on peut parler à la fois
d’évocation et d’invocation
du caractère méditerranéen,
thaumaturgies dont la macéra-
tion n’est qu’un outil.
66 € // Bouteilles/an : 700
17/20
MATASSA
Vin de France Alexandria 2018
Magnifique suggestion
aromatique qui donne des
ailes au muscat d’Alexandrie :
bergamote, thé grillé, touches
florales. La sapidité reprend et
approfondit les arômes, avec
cohérence et grâce. Associant
parfois cépages rouges, blancs
et gris, les cuvées de Tom Lubbe
(La Olla, grenaches noir et gris,
macabeu ; Tattouine, grenache
gris) explorent de passionnantes
frontières entre rouge très clair,
rosé et “orange”. Des vins d’une
grande originalité qui partagent
les œnophiles entre admirateurs
inconditionnels et réprobateurs.
22 € // Bouteilles/an : 3 800
16,5/20
LE SOULA
La Macération du Soula n° 16
Associant différents millésimes
de 2009 à 2017, cet “orange”
d’une grande originalité offre
un profil nuancé, patiné,
une sorte de sagesse terrienne
qui évoque les grandes réussites
de Géorgie ou du Frioul.
Les Dégustations
En couverture
macération carbonique (douze
Blancs de macération, jours) puis élevé six mois en bar-
l’histoire d’une résilience riques usagées. Très frais, jeune,
savoureux et chlorophyllien,
L a France avait peu ou prou abandonné la pratique
de la macération des raisins blancs. Même si des expériences
ponctuelles ont toujours eu lieu, il n’y avait écho ni médiatique
avec de ravissantes notes de
bergamote au nez autant qu’en
bouche, qui confèrent au vin
ni commercial. Jean-Paul Jamet, célèbre vigneron rhodanien, piquant et fraîcheur. Saveur
à la fin des années 90 vinifiait une cuve de viognier en macération et rondeur, sans aucune
pour prouver que le cépage n’apportait rien à la syrah de sa côte- sous-maturité (13°), caracté-
rôtie ! L’intérêt est revenu par la Géorgie, via l’Italie, où cette risent la cuvée de Marc Castan,
pratique, regardée de haut par l’œnologie officielle, “progres- qui reste tonique et taquine !
siste”, n’avait pas complètement disparu. Ce sont des vignerons 12 € // Bouteilles/an : 3 500
et importateurs italiens qui ont relancé cet intérêt, couplé
à l’essor du “vin nature”, en faisant connaître les vins traditionnels 16/20
géorgiens, héritiers d’un savoir plusieurs fois millénaire FONS SANATIS
et ayant eux-mêmes résisté au rouleau-compresseur collectiviste Vin de France Mémé Jeanne
de 70 ans de communisme. P. Ci Voici un petit manseng passion-
nant, non pas béarnais mais
héraultais (Saint-Jean-de-Fos),
La tenue en bouche est remar- 16/20 cuvé 45 jours sans pigeage ni
quable, tout comme l’harmonie DOMAINE GAUBY remontage. Grande originalité
de la trame tannique. IGP Côtes Catalanes dès le nez, poivré, balsamique
26 € // Bouteilles/an : 4 500 La Jasse 2018 et chlorophyllien, comme cer-
Coloré, très parfumé, direct, tains rouges issus des secteurs
16,5/20 pétulant mais sans raideur, dès les plus frais des Terrasses du
DOMAINE DE CLOVALLON sa prime jeunesse le muscat Larzac ou des Hautes Corbières.
IGP Pays d’Hérault macéré de la famille Gauby On devine le poivre blanc, l’an-
Les Aurièges 2016 exprime une remarquable gélique confite, le genièvre…
Assemblage original (char- complexité, avec un toucher de Puissant évocateur de garrigue,
donnay, viognier, riesling, petit bouche riche et nuancé qui en le vin campe sur une tannicité
manseng et petite arvine) issu de fait un compagnon de table (et affirmée, tout en se développant
la zone très fraîche de Bédarieux, même d’apéritif) très versatile. sur une très belle longueur.
derrière Faugères, cette cuvée 108 € // Bouteilles/an : 6 000 19 € // Bouteilles/an : 2 500
n’est pas toujours vinifiée en
macération. Ce fut le cas en 2016 16/20
et le résultat est admirable, avec DOMAINE TURNER-PAGEOT
un allant gracieux rare dans les Vin de France Les Choix 2016 Alexandria 2018
blancs du Languedoc. Derrière Voici un pionnier parmi les vins de Matassa :
une jolie robe camomille, on oranges sudistes, dans la forme la grâce
trouve une floralité charmeuse, comme dans l’ambition. Cette du muscat
charnelle, entre jasmin, mimosa marsanne du secteur de Pézenas d’Alexandrie.
et fleur d’oranger. Très fin, le a macéré deux mois avant d’être
grain tannique apporte beau- élevée deux ans en barriques
coup de fraîcheur à l’ensemble. usagées. Sobre et profonde, ori-
Un exemple à suivre. ginale, elle développe un spectre
N. C. d’arômes très proches de la gar-
rigue. La patine beurrée de l’éle-
16/20 vage s’intègre au corps intense.
L’OISEAU REBELLE Le gras de la marsanne fait ici
Vin de France P’tit Rebelle 2017 place à une réelle structure,
Ce muscat macéré pendant comme celle d’un grand rouge
un an s’avère parfumé et savou- sudiste mais frais (Bandol ?),
reux, très digeste. Dans le même appelant les mêmes accords.
esprit la cuvée P’tit Rebelle GG 26 € // Bouteilles/an : 2 400
(grenache gris) manifeste une
grande générosité de chair, 16/20
large, bien mûre, sans agressivité MAMARUTÁ
tannique malgré (ou grâce à…) Vin de France Trafalgar 2018
D. R.
la très longue macération. Muscat à petits grains des
33 € // Bouteilles/an : 1 100 Corbières maritimes vinifié en
102 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

15,5/20
RIBERACH
IGP Côtes Catalanes
Parenthèse 2018
Grenache gris, grenache blanc et
macabeu sont macérés 21 jours,
offrant une cuvée pointue,
tonique, guillerette (11°) mais
sans verdeur, avec au contraire
une très originale suggestion
de fruits rouges apportée par
le grenache gris.
19 € // Bouteilles/an : 5 300
15,5/20
DOMAINE DE COURBISSAC
L’Orange 2019
Macération en grappes entières
de différents cépages (marsanne,
terret bourret, muscat et com-
plantation de cépages endé-
miques), élevage bref
en cuves béton ovoïdes. Dans
sa jeunesse, le fruit s’exprime
sans démonstration aromatique
ni extractive, avec harmonie et
cohérence. Le muscat (10 % de
l’assemblage), tantôt manifeste,
tantôt évanescent, joue une sorte
de cache-cache aromatique avec
la fleur de genêt et l’ananas.
Le vieillissement développe
la vinosité de cette cuvée très
adaptée aux mets terre/mer,
renforçant dans le 2015 les tona-
lités résineuses, balsamiques,
poivrées, que l’on retrouve dans
les rouges de ce domaine
du Minervois historique.
15 € // Bouteilles/an : 2 500
15,5/20
LES TERRES PROMISES
IGP Sainte-Baume
Analepse 2018
Pur carignan blanc macéré trois
semaines puis élevé un an
en foudres. Belle teinte or franc,
légèrement laiteuse. Réduit,
peu expressif à l’ouverture,
cet “orange” provençal gagne
en profondeur et en conversa-
tion avec l’aération. Les tanins
sont sérieux, couplés avec la belle
acidité du cépage, ils donnent
un vin vigoureux et distingué,
qu’on a envie de voir évoluer
dans le temps et de mesurer
à une belle volaille rôtie
ou braisée.
23 € // Bouteilles/an : 2 500
Les Dégustations
Les vins oranges
15/20
DOMAINE
DANJOU-BANESSY
Vin de France Supernova 2018
Toujours très parfumé, direct,
ce vin défend le parti pris
d’un muscat d’Alexandrie cueilli
très tôt, qui suggère le thé vert
et les agrumes : citron vert,
bergamote et même kumquat…
Tonique, pointue, rafraîchis-
sante, c’est l’une des belles
réussites des frères Danjou.
16 € // Bouteilles/an : 5 000
15/20
LES CIGALES
DANS LA FOURMILLIÈRE
Vin de France Céleste 2018
Encore un beau muscat macéré
languedocien, richement doté,
très savoureux. On en oublie
l’animalité et la volatile présente,
tant la matière possède de carac-
tère et d’allant. Moins intense,
moins aromatique, mais tout
aussi enlevée, la cuvée Le Blanc
2018 associe au muscat
le grenache blanc. Pur grenache
blanc, Mata Hari 2016, serrée
et tannique, regorgeant
de caractère, appelle les accords
audacieux et de forte mâche.
30 € // Bouteilles/an : 1 600
14,5/20
MAS COUTELOU
Vin de France OW 2016
Couleur soutenue. La macéra-
tion du muscat d’Alexandrie
éraflé a duré un mois, avec
quelques pigeages et remon-
tages. Le premier abord n’est pas
facile, avec des notes de cuir,
un fond phénolé, un peu de
sucre résiduel. Ses tanins un peu
secs, extraits, s’adoucissent
à l’aération, ce qui permet
de retrouver le bel élan méditer-
ranéen du vin (notes classiques
de thym et de lavande du muscat
évoluant).
24 € // Bouteilles/an : 700
14,5/20
GRAND GUILHEM
Vin de France
Le Pointilliste Orange 2017
Macabeu du sud des Corbières
(Cascastel, terroir schisteux)
macéré quatre mois en jarres.
Les coordonnées des domaines en page 117
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 103
Analepse 2018
des Terres
Promises : un
pur carignan
vigoureux
et distingué.
T. Legay
De teinte orangée soutenue, c’est
un vin qui débute sur l’amande
grillée, dans une suggestion oxy-
dative à laquelle est prompt le
cépage. La bouche témoigne en
revanche d’une très appréciable
fraîcheur, avec un grain subtil,
bien dans le sens de la dégus-
tation. On l’imagine très bien
accompagnant des charcuteries
relevées ou des anchois frits.
29 € // Bouteilles/an : 800
14,5/20
DOMAINE JOREL
Vin de France
Champ Nouveau 2018
Assemblage de malvoisie,
grenaches blanc et gris, pique-
poul, bourboulenc et gros
manseng, cépages macérés indi-
viduellement entre 5 et 15 jours,
cette cuvée légère en alcool
issue du terroir des Fenouillèdes
manifeste beaucoup de fraî-
cheur. Très désaltérante.
8 € // Bouteilles/an : 1 000
14/20
DOMAINE DE SULAUZE
Vin de France Pétrolette 2017
Venu de Provence, voici
un exemple d’originalité dans le
processus de vinification
et d’élevage ! Ugni blanc et
clairette macérés deux mois
à basse température en cuves
inox, puis élevés en demi-muids
deux ans, la deuxième année
sans ouillage, sous voile.
Échevelé mais séduisant, pour
les amateurs de l’expérimental,
le résultat oscille entre sugges-
tion de parmesan et d’abricot
sec, avec une longueur certaine,
à la fois revigorée et durcie par
l’acidité volatile.
20 € // Bouteilles/an : 800
13,5/20
DOMAINE DE SULAUZE
Vin de France
Super Schluck 2018
Vermentino égrappé, macéré
onze jours, élevage en cuves.
Très jolie robe jaune bouton d’or.
Les arômes, proches du fruit,
évoquent la compote de pomme,
voire le cidre, la nèfle ou le kaki.
Le jus fait valoir un grain frais
très agréable, avec encore
beaucoup de CO2 et une alacrité
de vin de comptoir gai, facile.
11 € // Bouteilles/an : 1 360
Et aussi…
Domaine Le Conte des Floris,
Vin Orange 2015 (80 % carignan
blanc et 20 % roussanne macérés
un mois, élevés un an en jarres
puis un an en barriques usagées).
Carterole,
VDF HjV (vermentino de la Côte
vermeille macéré quatre mois).
Domaine du Traginer,
VDF L’Orange du Traginer
(un mois de macération, élevage
en vieux foudres).
Domaine Léon Barral,
VDF blanc (terret bourret,
roussanne et viognier).
Clos du Gravillas,
VDF à Fleur de Peau (muscat
à petits grains, quinze jours
de macération, terroir calcaire
de Saint-Jean-du-Minervois).
Kreydenweiss,
VDF Or Ange (cofermentation
de sept cépages sudistes
et alsaciens).
Vignobles Bonfils, Château
l’Esparrou, VDF Solaris
(vermentino, viognier et muscat
vinifiés en vendange entière).
 Les Dégustations
Bordeaux

D. R.
Le château Haut Peyrat, à Cambes, livre un vin élégant et complexe, d’un équilibre parfait, pour moins de 10 euros.

Bonnes affaires
Savourez ces très beaux bordeaux
et bordeaux supérieurs à prix serrés
Il n’y a pas que les crus classés à Bordeaux ! Pour moins de 15 euros,
vous trouverez dans ces deux appellations une multitude de jolis rouges
à déguster entre amis ou autour d’un bon repas. Par Yohan Castaing

C
’est une rodomontade rabâchée à tous les coins de rue :
« Ne me servez plus de bordeaux, cela m’ennuie ». Détester la
région bordelaise, la conspuer et la bannir des tables
des restaurants qu’elle a pourtant, souvent, contribuer à faire
connaître est devenu un sport national, une mode urbaine. À
l’anglaise – car la langue française ne saurait trouver grâce aux
yeux d’un monde du vin internationalisé –, on nomme cela :
le bordeaux bashing. Inutile d’expliquer les causes d’une telle
fâcherie, le dernier hors-série de La Revue du vin de France
(n° 37, novembre 2019) les analyse et donne la parole aux
intéressés. Un seul constat s’impose : les consommateurs du
monde entier n’ont plus le béguin pour Bordeaux.
RETOUR AUX FONDAMENTAUX
Une partie du vignoble a eu les yeux de Chimène pour des
néoconsommateurs plus fortunés, plus éloignés et a délaissé
les consommateurs traditionnels et les metteurs en marché.
Seulement, le néoconsommateur, par définition, n’est pas
totalement connaisseur et reste versatile. En se coupant de
leurs acheteurs historiques, les Bordelais se sont également
coupés de leurs bases et ont perdu leur âme.
Longtemps, il est vrai, Bordeaux a produit des vins des-
tinés aux critiques américains en oubliant ses fondamen-
taux. Les tentations commerciales étaient plus importantes
que les réalités du terrain. Le bois est venu masquer le fruit,
durcir les tanins. Les maturités tardives, abusives chez cer-
tains, ont dénaturé la précision du fruit tout en vieillissant
précocement les vins. Bordeaux a voulu travestir ses vins, les
couvrir d’un fard qui ne leur sied guère dans le seul espoir de
plaire aux critiques, de voir les prix monter et la demande
exploser. Lentement, sûrement, et sans vouloir regarder la
réalité, Bordeaux s’est ostracisé vis-à-vis des acheteurs tra-
ditionnels. Aujourd’hui, le réveil a sonné, mais le malade est
encore embrumé des vapeurs de la veille. Bordeaux a vécu en
autarcie, sans voir le monde évoluer. Désormais, le monde ne
s’inquiète plus de Bordeaux et la région souffre.

104 - LA RVF N° 639 - MARS 2020


Le lent déclin de cette rela-
tion amoureuse dénote pour-
tant avec la réalité du terrain.
Des vignerons, fiers de leur
production, présents dans
les circuits courts, inventifs,
passionnés et motivés, pro-
duisant des vins identitaires,
refusent de baisser les bras
et continuent à produire des
vins parfaitement représen-
tatifs de l’âme bordelaise. Des
jeunes, mus par la passion
de la viticulture et grâce aux
prix abordables des terres,
reviennent à Bordeaux.
Une nouvelle génération de
quadras, à la direction des
grands crus classés ou à la
tête des sociétés de conseils
en œnologie, si importants à
Bordeaux, amorce un chan-
gement salutaire, et de style
et de mentalité.
UN COMMERCE ATONE
Revenus sur des bases saines,
les vignerons bordelais
renouent avec la franchise du
fruit pour produire des vins
de soif, simples et élégants.
Ils développent des cuvées
parcellaires, croient en des
cépages oubliés comme le
petit-verdot, le carménère
ou d’autres, s’engagent dans
une viticulture plus durable
pour l’environnement et
n’hésitent plus, malgré les
conditions climatiques par-
fois délicates dans la région,
à développer une culture
biologique, voire biodyna-
mique. Alors que les syndi-
cats et les interprofessions
s’embuent dans des initia-
tives aussi délirantes les unes
que les autres, eux avancent.
Les choses bougent, les lignes
évoluent. Seul le commerce
reste atone.
Grâce à cela, la région bor-
delaise regorge d’excellents
crus au très bon rapport qua-
lité/prix. Des vins modestes
capables d’accompagner une
simple charcuterie, des vins
plus complexes pour une
viande rouge ou un plat plus
noble, voire des vins à la capa-
cité de vieillissement intéres-
Les Dégustations
Bordeaux à moins de 15 euros
sante, comme le prouvent
les millésimes à maturité de
notre sélection.
LE RÉVEIL BORDELAIS
Produits dans les aires d’ap-
pellations délimitées, les
bordeaux et bordeaux supé-
rieurs portent en eux cette
dynamique et ce nécessaire
réveil bordelais. De leur
zone géographique étendue
– administrativement l’en-
semble du département de
la Gironde, empiriquement
les sols aptes à la culture de la
vigne –, les bordeaux et “bor-
deaux sup” jouent la carte de
la diversité grâce à la mul-
tiplicité des terroirs, à leurs
différences, à la diversité
des cépages employés et aux
techniques de vinification.
Fini le temps des bordeaux
qui avaient le même nez et le
même goût. Place aux sen-
teurs florales ou fruitées,
aux tanins structurants ou
souples, aux élevages boisés
mieux dosés. Presque un
inventaire à la Prévert dans
lequel l’amateur trouvera le
vin le plus adapté à son palais
pour un prix étonnamment
tendre. L’heure de la recon-
quête bordelaise a sonné !
Sur 356  vins dégustés,
nous en avons retenu 89, que
nous avons répartis en trois
familles. Celle des “vins de
copains” regroupe les cuvées
fruitées et gourmandes que
l’on boit entre amis pour le
plaisir du moment. La famille
des “vins de gastronomie” se
compose de vins un peu plus
tanniques, plus traditionnels,
pour lesquels la table va per-
mettre une meilleure expres-
sion gustative. Enfin, les “vins
de garde” sont ceux que vous
pourrez attendre deux ans
en cave pour les déguster à
pleine maturité.
Conditions
de la dégustation
356 vins rouges ont été dégustés à
l’aveugle par Yohan Castaing à la
Maison des Bordeaux et Bordeaux
supérieur en octobre 2019.
En conversion bio Vin biologique
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 105
① Les bordeaux
de copains
Leur gourmandise nous ravit
16,5/20
CHÂTEAU LA BRANDE
Bordeaux supérieur 2015
Les frères Todeschini, vigne-
rons hédonistes de Saint-
Émilion (château Mangot),
revisitent les terroirs proches
de Castillon-la-Bataille. La
bouche, droite et pure, a une
dignité aérienne et une finale
sur la pivoine. Valeur sûre. 8 €
16/20
CHÂTEAU BASTIAN
Bordeaux Réserve 2016
Possédant aussi deux
propriétés à Pessac-Léognan,
la famille Savigneux propose
ici une cuvée à dominante de
merlot très fruitée et élégante.
La tension apporte fraîcheur et
finale aérienne. Un très beau
rapport qualité/prix. 6,60 €
16/20
CHÂTEAU BEYNAT
Bordeaux Le Mal’ by Beynat 2018
Posée sur un terroir argilo-cal-
Bordeaux
supérieur
du château
La Brande :
une valeur sûre.
D. R.
Vin biodynamique
caire proche de Saint-Magne-
de-Castillon, une parcelle
d’un hectare produit ce vin
biologique, sans soufre ajouté,
très énergique avec des notes
de violette. Bouche florale,
possédant une belle tension.
Un vin de plaisir. 6,90 €
16/20
CHÂTEAU DE BLEYZAC
Bordeaux supérieur 2016
Émanant du château de
Langalerie, château de Bleyzac
est une propriété appartenant
à Franck Noguiez, de Saint-
Quentin-de-Caplong. Bien
que légèrement timide, le
nez s’ouvre avec l’aération sur
les épices. La timidité du nez
s’oublie avec l’exubérance de
la bouche, suave et juteuse,
parfaitement en place. Un beau
rapport qualité/prix. 5,60 €
16/20
CHÂTEAU LAJARRE
Bordeaux supérieur
Cuvée Éléonore 2017
Médecin de son état, Grégory
Lovato (lire l’encadré p. 107)
se passionne très tôt pour
le vin, au point de prendre
la direction de ce domaine. Il y
produit des vins affûtés, justes,
épicés avec de douces notes
de graphite. La bouche tout
en délicatesse et en précision
est pleine de charme. 7 €
16/20
CHÂTEAU LA ROSE DU PIN
Bordeaux supérieur 2015
Un vin de la galaxie Ducourt,
défenseur des cépages résis-
tants et propriétaire de plus
de 450 hectares en Bordelais.
Pimpant et dynamique, très
frais, il est floral et bien
construit. Pour preuve
ses tanins déliés, précis et
sa texture juteuse. Beaucoup
d’énergie. 8,99 €

Bordeaux et Bordeaux supérieur
16/20
CHÂTEAU LARROQUE
Bordeaux supérieur 2016
Jérémy Ducourt met en avant
ici son seul domaine sur la
Rive gauche. Joli nez de fruits
noirs, de la gourmandise, une
bouche juteuse et moyenne-
ment dense. Un vin classique,
mais très bien réalisé. 6,99 €
16/20
CHÂTEAU LE BONALGUET
Bordeaux 2015
Agnès Jouglet-Sueur (lire l’en-
cadré ci-contre), originaire
de Picardie, et son époux
ont racheté ce domaine par
amour de la terre. Leur 2015
est bluffant de complexité avec
des notes de fruits noirs, de
menthol et d’épices pour une
bouche suave, à pleine matu-
rité et parfaitement construite.
Encore une belle affaire. 7 €
15,5/20
CHÂTEAU LABATUT
Bordeaux supérieur Prestige 2017
Avec une forte proportion de
cabernet franc (40 %), la cuvée
Prestige de ce domaine très
présent en grande distribution
est florale et charmeuse. Un
beau jus, une texture harmo-
nieuse et des tanins élégants.
Un beau vin. 5,30 €
15,5/20
CHÂTEAU
LA GRANDE GELLEYRE
Bordeaux supérieur
Private Blend 2015
Comme un lien entre les deux
passions de la famille Feyzeau,
le vin et le rugby, ce 2015 parfai-
tement à point offre délicatesse
du nez avec des arômes de
fruits frais et rondeur et moel-
leux de bouche. De la gour-
mandise à l’état pur. 6,90 €
15,5/20
CHÂTEAU GRAND JEAN
Bordeaux 2016
Au cœur de l’Entre-deux-
Mers, la famille Dulon possède
des vignobles depuis 250 ans et
produit des vins très contem-
porains, frais et fruités, gour-
mands avec la tension néces-
Les Dégustations
Château Le Bonalguet et Jérôme, guide et vigneron,
De la Normandie à Bordeaux, s’investissent autant dans le
vin que dans l’œnotourisme.
une reconversion réussie Leur énergie communicative
se répand à leur 2015. Friand et
gourmand, avec une énergie
rafraîchissante, une tension
qui lui sied à merveille. 8 €
15/20
CHÂTEAU DE BRAGUE
Bordeaux supérieur 2015
Sur ses 60 hectares dominés
par le merlot, la famille Trève
réalise des vins très classiques,
privilégiant les notes de pétales
de rose, de fleurs et de fruits
rondouillards. Parfaitement
enrobés, les tanins sont struc-
turants, le corps parfaitement
équilibré. 8 €
15/20
CHÂTEAU LE ROUDIER
Bordeaux 2018
D. R.
Fan de vélo, Patrick Chevrier
Agnès Jouglet-Sueur est en charge du chai, son mari s’occupe des vignes. habite à Maransin et se posi-
tionne en tête de peloton avec
A près une dizaine d’années passées en Normandie, où
elle travaillait auprès d’élus, Agnès Jouglet-Sueur rejoint
son époux Alexandre qui a acquis un hectare de vignes près de
un 2018 aux arômes de gra-
phite, presque zan. Serré, des
tanins magnifiques, un équi-
Bordeaux, par passion et pour faire plaisir à son grand-père. libre parfait. C’est un excellent
La passion pour le vin et la découverte d’un nouveau métier rapport qualité/prix. 5 €
la poussent à s’inscrire dans une formation viticole pour
parfaire ses connaissances. Le couple possède aujourd’hui 15/20
14 hectares de vignes autour de la commune de Saint- CHÂTEAU MINVIELLE
Germain-du-Puch. Il y produit des vins diablement fruités, Bordeaux 2016
parfaitement équilibrés, l’archétype des vins de copains. Y. C. Fanny Michaud et son époux
Pierre gèrent cette propriété
dans leur famille depuis 1805.
saire pour apporter fraîcheur, enchante des senteurs florales, Ils y produisent un bordeaux
pureté dans le toucher de presque lilas et d’une bouche élégant et complexe mêlant
bouche et gourmandise. 6,80 € gourmande, fraîche et épices et fruits noirs. Ronde et
aérienne. Une référence. 7,90 € suave, la bouche est charmeuse
15,5/20 tout comme le prix. 7 €
CHÂTEAU LESTRILLE 15/20
Bordeaux supérieur 2016 CHÂTEAU DE L’AUBRADE 15/20
La famille Roumage produit Bordeaux 2016 CHÂTEAU PEYCHAUD
cette cuvée de pur merlot aux En plein cœur de l’Entre-deux- Bordeaux supérieur 2015
accents de fruits noirs et de Mers, Jean-Christophe Lobre La famille de Fayet est présente
mûre, à la texture juteuse et produit des vins de plaisir. sur ce domaine d’Ambarès
savoureuse, à l’ensemble très Un nez de cassis, de fruits noirs. depuis le XVe siècle.
charmeur. 6,50 € Une bouche juteuse et franche Assemblage des trois cépages
pour cet excellent rapport qua- classiques, ce 2015 à parfaite
15,5/20 lité/prix. 5,20 € maturité est un concentré de
CHÂTEAU PENIN fruits. Cassis, mûre, myrtille…
Bordeaux Cabernet Franc by 2017 15/20 tout s’emballe. Fine et délicate,
On connaît Patrick Carteyron CHÂTEAU BOUTINE la bouche est aussi savoureuse
pour être régulièrement dans Bordeaux supérieur 2015 que le nez, avec une texture
le Guide vert. Avec cette cuvée Entre Libourne et Saint- juteuse qui apporte un supplé-
100 % cabernet franc, il nous André-de-Cubzac, Nathalie ment d’âme. Beau vin. 5,50 €
106 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

15/20
CHÂTEAU ROQUEFORT
Bordeaux 2016
Seulement 10 % de caber-
net-sauvignon, le reste en
merlot pour ce vin de la famille
Bellanger. Une complexité
aromatique doublée de belles
notes épicées se combine à une
bouche ronde et juteuse. 7,50 €
15/20
CHÂTEAU
SAINTE BARBE
Bordeaux Merlot 2015
Cette magnifique chartreuse
abrite la famille de Gaye qui
produit des vins tout en subti-
lité avec une trame aromatique
épicée et dominée par les fruits
noirs. Moelleux, rondeur et
une légère tension pour appré-
cier ce 100 % merlot. N. C.
Château Lajarre
Entre médecine et vigne,
il a choisi… les deux !
Les Dégustations
Bordeaux à moins de 15 euros
15/20
CHÂTEAU
TOUR DE BONNET
Bordeaux Grande Cuvée 2015
André Lurton, décédé en mai
2019, était un fin connaisseur
des terroirs bordelais. Il le
prouve une nouvelle fois avec
ce millésime 2015 qui laisse
sa timidité olfactive de côté
pour s’exprimer en bouche
avec une texture juteuse,
généreuse et des accents fruités
très agréables. 5,75 €
14,5/20
CHÂTEAU
FLEUR HAUT GAUSSENS
Bordeaux supérieur
La Bergeronnette 2016
La Bergeronnette est un petit
oiseau volubile et charmant
qui n’aime rien moins que
D. R.
gambader dans les vignes.
Ce vin est à son image, franc et
énergique, fruité avec une ten-
sion qui l’allonge et lui apporte
une finale aérienne. 15 €
14,5/20
CHÂTEAU
LAGRAVE PARAN
Bordeaux supérieur
Cœur de Cuvée 2015
Sur des croupes argilo-grave-
leuses, Pierre Lafon, de Saint-
André-du-Bois, réussit une
cuvée canaille, très florale et
délicate. Juteuse et franche en
bouche, elle s’élance en finale
pour s’étirer et apporter un
zeste de gourmandise. Le vin
plaisir par excellence. 9,50 €
14,5/20
CHÂTEAU REYNIER
Bordeaux supérieur 2016
Marc et Agnès Lurton sont
à la tête de ce domaine familial.
Oscillant entre rose et lilas,
Reynier 2016 est floral,
les tanins précis et enrobés,
l’ensemble singulier et
gourmand. 7,15 €
14/20
CHÂTEAU
BOIS DE FAVEREAU
Bordeaux supérieur 2016
Depuis quatre générations, la
famille Gallineau est installée
dans l’Entre-deux-Mers et pro-
duit des vins francs et directs,
à l’image de ce 2016, légère-
ment boisé, frais, très fruits
noirs. Parfait équilibre, texture
juteuse, rondeur de bouche et
puissance aromatique en font
un vin canaille. 7 €
14/20
CHÂTEAU
14/20
CHÂTEAU
BUISSON-REDON
Bordeaux 2016
Également propriétaire
d’un domaine en appellation
Fronsac, la famille Seze pos-
sède des vignes à Galgon. Avec
un bouquet classique, élégant
et somme toute gourmand, ce
2016 offre une bouche juteuse,
fruitée. Un vin de plaisir. 12 €
14/20
CHÂTEAU COMPASSANT
Bordeaux 2018
Composé uniquement
de merlot et produit sur
la commune de Génissac,
ce bordeaux possède un nez
appétant, une bouche florale et
énergique. Une vraie
gourmandise. 11 €
14/20
CHÂTEAU GRÉTEAU
Bordeaux 2017
Propriété appartenant à Marc
Médeville et faisant partie de la
galaxie des châteaux détenus
par ce dernier et sa famille, ce
vin est un classique bordelais
au nez tout en proposant de
la rondeur, beaucoup de fraî-
cheur et des tanins enrobés.
7,50 €
14/20
CHÂTEAU
HAUT-GAUSSENS
Bordeaux supérieur 2016
Dans le nord de la Gironde,
la famille Lhuillier réalise une
belle performance avec cette
cuvée à dominante de merlot
empreinte d’une belle dimen-
sion florale, d’une bouche
juteuse et ronde qui reste

gourmande et aérienne.
Grégory Lovato est aujourd’hui à la tête de 32 hectares de vignes. BRONDEAU DU TERTRE Un vrai vin de plaisir. 6,70 €
Bordeaux supérieur 2016

M édecin généraliste de son état à l’ascendance vigne-

ronne (ses grands-parents étaient vignerons), Grégory
Lovato n’hésite pas une seconde quand, en 2005, se pose
Deuxième “marque”
du château Goudichaud et
de la famille Glotin. Le vin
la question de la continuité du domaine familial. En repre- de ce domaine situé près
nant les rênes du château Lajarre, il fait appel à Stéphane de Libourne dévoile un nez
Toutoundji, œnologue-conseil et associé d’Œnoteam, pour frais et gourmand, alliant fruits
l’accompagner à produire des vins gourmands, frais et élé- noirs et fleurs. Texture juteuse,
gants. Toujours disciple d’Esculape, il jongle avec ses deux moelleuse avec des tanins
activités et produit des vins figurant dans notre panthéon équilibrés. Un vin canaille, de
bordelais des bons rapports qualité/prix. Y. C. bistrot gastronomique. 5,40 €
14/20
CHÂTEAU
HAUT GUILLEBOT
Bordeaux supérieur 2017
Une dominante de merlot avec
les deux cabernets sont les
cépages de cette cuvée florale,
gourmande, tout en rondeur
avec une texture juteuse
et harmonieuse. 3,50 €

Les coordonnées des domaines en page 117

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 107


Bordeaux et Bordeaux supérieur
② Les bordeaux de gastronomie
C’est à table qu’ils s’épanouissent pleinement
16,5/20
LA TOURBEILLE
Bordeaux supérieur 2014
John et Mary Sandifer, couple
franco-américain, cassent
les codes et s’affranchissent
du terme château pour cette
belle propriété doublée d’une
chambre d’hôtes (lire l’encadré
ci-contre). Leur 2014, millé-
sime pourtant pas toujours
facile, est épicé, légèrement
poivré et encore jeune. De
beaux tanins et une structure
dense qui appellent inévitable-
ment des viandes rouges. 5,75 €
16/20
CHÂTEAU DE CAZENOVE
Bordeaux supérieur 2016
Voisin de château Dauzac à
Margaux et ancienne propriété
de Nathaniel Johnston, illustre
négociant bordelais et proprié-
taire de Dauzac au XIXe siècle,
ce domaine est aujourd’hui
géré par Louis de Cazenove.
Avec des notes de cerise noire
et de fruits noirs al dente, le nez
est élégant, racé ; la bouche
enjouée, juteuse à souhait. 12 €
16/20
CHÂTEAU PEY LA TOUR
Bordeaux supérieur
Réserve du Château 2017
Propriété du négociant borde-
lais Dourthe. Grâce à un travail
remarquable au vignoble,
Frédéric Bonnaffous, l’œno-
logue maison, réalise des vins
fruités à dominante de cerise
noire et cassis. Sapide et juteux,
ce 2017 possède de très beaux
tanins. 12 €
16/20
LA BASTANE
Bordeaux supérieur 2018
Bastien et Anaïs reprennent
le domaine en février 2017 et
sont actuellement en conver-
sion biologique (lire l’encadré
p. 109). Avec des senteurs prin-
tanières, fraîches et florales,
Les Dégustations
Mers, ce vignoble de 10 hec-
tares produit cette cuvée
composée de 20 % de malbec,
10 % de cabernet-sauvignon,
le reste en merlot. Le nez est
un peu timide et ne se livre pas.
Bastane 2018 est un vin juteux net-sauvignon un peu boisée, La bouche, plus civilisée, offre
à souhait, plein d’énergie, très mentholée et fraîche. rondeur et moelleux des mer-
de gourmandise, de vie. Une légère tension apporte lots, puissance du malbec. 6 €
Un coup de cœur. 12 € une finale aérienne. Les tanins
s’assagiront à table. 10,20 € 15/20
15,5/20 CHÂTEAU DE BOUCHET
CAP ROYAL 15/20 Bordeaux supérieur
Bordeaux supérieur 2016 CHÂTEAU Magnificat 2015
Ce vin de marque élaboré par AMANIEU D’ALBRET Juste à notre limite de prix,
la Compagnie médocaine Bordeaux supérieur Quidam 2015 cette cuvée spéciale de Marc
des Grands crus, filiale d’AXA Dans le sud de l’Entre-deux- et Agnès Lurton ravit par sa
Millésimes, bénéficie des
conseils avisés du directeur
technique de château Pichon La Tourbeille
Baron (Pauillac), Jean-René
Matignon. Avec des notes de Une vision américaine
rose et de cerise noire, le vin est
juteux, rond et moelleux. 9 € en pays girondin
15,5/20
CHÂTEAU
LA MOTHE DU BARRY
Bordeaux supérieur
Cuvée Le Barry 2016
Joël Duffau, vigneron à
Moulon, est connu pour son
domaine qui produit des vins
toujours précis. Cette cuvée
issue de vieilles vignes est bien
bâtie, parfaitement équilibrée
avec des notes élégantes de
fruits noirs et d’épices. 14 €
15,5/20
CHÂTEAU
LAMOTHE VINCENT
Bordeaux supérieur Héritage 2017
Basés à Montignac, mais
possédant des parcelles très
bien exposées sur plusieurs
communes, les frères Vincent,
Christophe et Fabien, pro-
D. R.
posent un vin mentholé, fruité,
juteux et suave que les tanins John et Mary Sandifer aiment partager leur passion avec leurs visiteurs.
enrobés associeront
à merveille avec une viande. 9 €
15,5/20
À la mode américaine, John et Mary Sandifer possèdent
une winery proche des lacets de la rivière Dordogne
et du département éponyme. Ils y reçoivent leur famille et
CHÂTEAU les touristes de passage dans leur corps de ferme et sur leur
LA PEYRÈRE DU TERTRE magnifique terrasse surplombant les coteaux plantés de
Bordeaux supérieur vignes et laissent de côté la mention château. Passionnés et
Cuvée Jean 2016 passionnants, ils partagent leur vie sur leur site internet et
Sur les coteaux de Garonne, laissent entrevoir leur travail quotidien vers une recherche
Catherine Lucas réalise une qualitative axée sur la spontanéité, la joie de vivre et le plaisir
cuvée à dominante de caber- du partage, comme leurs vins francs et directs. Y. C.
En conversion bio Vin biologique Vin biodynamique
108 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

construction sur les fruits noirs
et les épices. Énergique, la tex-
ture est agréablement juteuse,
la finition longue, la pré-
sence tannique parfaitement
contrôlée. Un classique. 15 €
15/20
CHÂTEAU DE BRAGUE
Bordeaux supérieur
Plantier de la Reine 2015
À nouveau la famille Trève avec
une cuvée élevée en fûts neufs
pour un tiers, le reste en fûts
vieillis. Approche classique,
boisé très léger ne masquant
pas les fruits. Texture charnue,
une très belle tension en milieu
de bouche qui relance
des tanins polis et nobles. 9 €
15/20
CHÂTEAU
LA CROIX DE QUEYNAC
Bordeaux supérieur
Cuvée Queynac 2015
Paola et Stéphane Gabard ont
repris ce domaine depuis 1999.
Cette cuvée, moitié merlot et
moitié cabernet-sauvignon,
est vibrante avec des notes
de bourgeon de cassis, de rose,
de menthol. Onctueuse et
Les Dégustations
Bordeaux à moins de 15 euros
15/20 La Bastane
DOMAINE DU CARRELET
Bordeaux 2017
Frédéric Labatut, marin de son
Du “petit Yquem” au top
état, et son père reprennent du bordeaux supérieur
ce domaine de 2 hectares à
Saillans, près de Fronsac. Si le
style boisé n’est pas forcément
ce que l’on recherche dans un
bordeaux, l’équilibre, la fraî-
cheur et la puissance aroma-
tique d’ensemble nous invitent
à passer au-dessus. Un bel
ensemble. 7,50 €
14,5/20
CHÂTEAU
DES ANNEREAUX
Bordeaux Les Annereaux 2018
Situé en appellation Lalande-
de-Pomerol où il produit
de très beaux vins, Benjamin
Hessel possède une parcelle au
lieu-dit L’Âne Mort qui franchit
la limite de l’appellation. Ainsi,
son bordeaux offre-t-il un nez
classique, une bouche friande
et énergique sans se départir
d’une très belle fraîcheur.
9,10 €
14,5/20
CHÂTEAU GAILLOU
D. R.

juteuse, elle se complétera Bordeaux supérieur 2016

parfaitement avec des mets Possédant une propriété Bastien et Anaïs conjuguent leur passion en version biologique.
à base de viande. 7,90 € à Lalande-de-Pomerol et

15/20
CHÂTEAU LA LOUBIÈRE
Bordeaux supérieur 2018
La famille Techeney-Roux
gère ce domaine avec brio
depuis 1850. Le millésime
2018, agréable et fruité, offre
des notes de cassis et de mûre.
Bouche pleine et ronde,
moelleuse comme un merlot,
cépage unique de ce vin. 9 €
15/20
CHÂTEAU RECOUGNE
Bordeaux supérieur 2016
Également propriétaire du
château Boutisse, la famille
Milhade produit un vin à
dominante de merlot avec une
touche de carménère. Rose,
cassis et framboise pour un nez
élégant. Sapide et gourmande,
la texture est parfaitement
juteuse. 8,40 €
une autre à Montagne-Saint-
Émilion, dans la continuité de
laquelle se trouvent les vignes
du château Gaillou, Monique
Bedrenne et son fils Rémi
réalisent un bordeaux légère-
ment fumé, très pétale de rose
dans son approche. Enrobé et
appétant, le toucher de bouche
confirme le potentiel du nez.
6€
14,5/20
CHÂTEAU HOSTIN LE ROC
Bordeaux supérieur
L’Orangerie 2016
Originaires du Périgord, André
et Renée Boutinon se sont
installés à Nérigean en 1972.
Catherine et Jérôme Boutinon
ont repris le flambeau en 2015
avec l’énergie de la jeunesse.
Élevée en fûts de chêne, cette
cuvée légèrement fumée et aux
accents de réglisse possède des
B astien Pestourie et Anaïs Bernard se sont connus sur
les bancs de Bordeaux Sciences Agro. En février 2017, ils
reprennent le château de l’Espinglet (ancien nom de la pro-
priété), connu pour la qualité de ses vins blancs liquoreux, et
que l’on nommait dans la région, tant pour son architecture
que pour la qualité de ses vins, le “petit Yquem”. Résolument
tournés vers la culture biologique et biodynamique
(le vignoble est en conversion), ils produisent des vins d’une
fraîcheur remarquable, pleins d’énergie et de passion. Y. C.
tanins francs, directs et bien en de la souplesse et beaucoup de
place. Un peu de gastronomie gourmandise. Parfait pour un
assagira l’ensemble. 7 € repas champêtre. 4,80 €
14,5/20 14,5/20
CHÂTEAU JEAN DUGAY CHÂTEAU
Bordeaux 2016 LA FLEUR HAUT MOULIN
Possédant des vignes dans la Bordeaux supérieur 2016
très peu connue appellation Cuvée prestige du domaine
Graves de Vayres, Nathalie et de la Châtaignière, issue
Bruno Ballet produisent ce d’une parcelle dénommée
vin d’un classicisme bordelais La Gravière. Laurent Français
assumé avec toutefois des y réalise un vin légèrement
notes florales (violette, lilas), boisé, fumé avec une texture

Les coordonnées des domaines en page 117

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 109


Bordeaux et Bordeaux supérieur
charnue, des épaules rem-
bourrées et une finale sur l’al-
longe. Les tanins structurants
appellent inévitablement une
viande rouge. 7,50 €
14,5/20
CHÂTEAU
LA TUILERIE DU PUY
Bordeaux supérieur 2016
Comme son nom l’indique le
domaine est situé sur la com-
mune du Puy, à la limite du Lot-
et-Garonne. Monika et Jean-
Pierre Regaud y produisent des
vins francs, nets, très fruités.
Avec une bouche enrobée et
des tanins parfaitement polis,
c’est une bouteille parfaite
pour les repas amicaux. 8,80 €
14,5/20
CHÂTEAU
LE GRAND VERDUS
Bordeaux supérieur 2016
La famille Le Grix de la Salle,
habituée aux honneurs de la
presse et des concours, offre
dans cette cuvée classique
tout son savoir-faire. Fruitée
et gourmande, juteuse à sou-
hait et légèrement poivron,
la bouche est parfaitement
équilibrée. Un vin plaisir qui
pourra encore attendre pour
s’épanouir à table. 6,90 €
14,5/20
CHÂTEAU
LE PIN BEAUSOLEIL
Bordeaux supérieur
Petit Soleil 2016
Second vin du château et issu
d’une parcelle de jeunes vignes
de merlot, ce 2016 plein et
gracieux est très élégant tant
d’un point de vue aromatique
(fumé, grillé, épices) que du
toucher de bouche (structure
élégante et enrobée). Parfait
pour la table. 8 €
14,5/20
CHÂTEAU LES GRAVIÈRES
DE LA BRANDILLE
Bordeaux supérieur
Cuvée Prestige 2015
Frédéric Borderie reprend
le domaine familial en 2005
et se développe sur Lussac et
Lalande-de-Pomerol. Cette
Les Dégustations
Château
La Tuilerie
du Puy : une
bouteille parfaite
pour les repas
entre amis.
D. R.
Cuvée Prestige, 90 % merlot et
10 % cabernet-sauvignon, se
montre délicate et fraîche, avec
des notes de cerise, de prune,
de rose. Une texture idéale
pour la table avec des tanins
structurants et une rondeur
assumée. 12,50 €
14,5/20
CHÂTEAU
MAISON NOBLE
Bordeaux supérieur
Cuvée Prestige 2016
Jean-Bertrand Marqué, ancien
expert-comptable apparte-
nant à une vieille famille de
tonnelier, a repris ce domaine
en 2012 et produit un vin pro-
fond, très fruits noirs. Presque
charnue, la bouche est parfai-
tement équilibrée et les tanins
structurants appellent la table.
Encore un beau rapport qua-
lité/prix. 7,50 €
14,5/20
CHÂTEAU TAYET
Bordeaux supérieur
Cuvée Prestige 2016
Aux portes des grands crus du
Médoc, sur la commune de
Macau, ce domaine apparte-
nant à la famille De Schepper
(également Haut-Breton
En conversion bio Vin biologique
110 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Larigaudière à Margaux) pré-
sente une cuvée épicée, légè-
rement prune. Une bouche
enrobée à la texture juteuse et
à l’équilibre parfait. Un grand
classique. 12 €
14/20
CHÂTEAU DE BONHOSTE
Bordeaux 2017
Colette et Bernard Fournier
ont laissé la place à leurs
enfants Sylvaine et Yannick.
Cette belle propriété de Saint-
Jean-de-Blaignac produit un
vin vif, aux notes affirmées
de cerise noire et de cassis.
Friande et gourmande, la
bouche possède des tanins
encore jeunes qu’une viande
rouge viendra assagir. 7,30 €
14/20
CHÂTEAU CANEVELLE
Bordeaux supérieur
Jardin Secret 2017
40 % de malbec, 40 % de
cabernet franc et 20 % de
cabernet-sauvignon consti-
tuent cette cuvée au nez épicé,
presque cannelle. Bouche
enrobée et charnue, forte pré-
sence avec des tanins parfaite-
ment polis. Attendre un peu.
6,50 €
14/20
CHÂTEAU
GRAND FRANÇAIS
Bordeaux supérieur
Grande Cuvée 2016
En culture biologique depuis
plus de dix ans, ce domaine
situé sur la commune des
Églisottes produit un vin aux
notes de rose, de viande, de
fleurs. Ronde et moelleuse,
la texture est équilibrée. Plus
pour l’esprit bio que la puis-
sance d’ensemble. 14,50 €
14/20
CHÂTEAU
HAUT BEAUMARD
Bordeaux supérieur 2016
Encore une propriété d’Yves
Glotin située à Saint-Germain-
du-Puch. Nez de rose et de
cerise noire, une bouche s’af-
firmant sur la tension plus que
la rondeur pour un vin aérien
Vin biodynamique
et frais. Parfait pour les déjeu-
ners et les barbecues entre
amis. 5,40 €
14/20
CHÂTEAU
HAUT MOULEYRE
Bordeaux Élevé en fûts de chêne
2016
Propriété de Crus et Domaines
de France, une émanation de
Grands Chais de France, l’un
des plus importants groupes
viticoles de l’Hexagone, ce
château produit un vin épicé,
fruité (avant tout fruits noirs)
avec un équilibre subtil
et surtout un boisé délicat et
légèrement moka. 11 €
14/20
CHÂTEAU LES GRAVIÈRES
DE LA BRANDILLE
Bordeaux supérieur 2016
À nouveau la famille Borderie
avec ce bordeaux supérieur
agréable et spontané, un vrai
plaisir de fruits noirs avec des
notes de cerise. Rond et élé-
gant, son moelleux attendrira
les plats les plus roboratifs. 8 €
14/20
CHÂTEAU
LESTRILLE CAPMARTIN
Bordeaux supérieur 2016
Ce vin, élaboré par Estelle
Roumage, est plus connu pour
sa version en blanc. Pourtant,
le rouge, floral et délicat, rond,
moelleux et possédant une
belle intensité aromatique
et une tension assumée, est
un bel exercice de style pour
les amateurs de vins friands.
8,90 €
14/20
CHÂTEAU DE LISENNES
Bordeaux supérieur
Cuvée Tradition 2015
Jean-Luc Soubie engage son
domaine situé à Tresses dans
une démarche respectueuse
de l’environnement et obtient
une certification Terra Vitis.
Sa cuvée Tradition, labellisée
donc, offre charme et gour-
mandise avec des notes de rose
et de fruits frais. Rond, juteux,
parfait pour la table. 7,50 €
 Les Dégustations
Bordeaux à moins de 15 euros

③ Les bordeaux de garde 16/20

Ils seront à leur meilleur dans un à deux ans
16,5/20
CHÂTEAU BOLAIRE
Bordeaux supérieur 2016
Les héritiers de Vincent
Mulliez, ancien banquier d’af-
faires devenu vigneron, pour-
suivent son œuvre pour notre
plus grand plaisir. Très beau
nez de fruits noirs, de mûre,
de fleurs. Vivacité et fraîcheur.
Texture charnue, enrobage
parfait pour cet assemblage
mi-merlot, mi-petit-verdot.
16 €
16,5/20
CHÂTEAU BOUTILLON
Bordeaux supérieur
Anne-Sophie 2015
Anne-Sophie Pagès a repris le
domaine de son grand-père en
2014 (lire l’encadré ci-contre).
tanins nobles et précis. Ce vin
offre un excellent rapport qua-
lité/prix. 6 €
16/20
CHÂTEAU
DE FONTENILLE
Bordeaux 2016
Une dominante de merlot pour
un vin légèrement boisé, grillé
et à la persistance aromatique
très fruits noirs. Bouche ronde,
texture charnue et tanins
structurants. Très beau travail
de Stéphane Defraine. 9,60 €
Château Boutillon
Cette vigneronne passionnée
règne sur 17 hectares
16/20
CHÂTEAU
GRAND FERRAND
Bordeaux supérieur
Le K Malbec 2015
Appartenant à la société
Bordeaux Vineam, proprié-
taire de plusieurs châteaux
conduits en culture biologique,
le château Grand Ferrand pro-
duit une cuvée à dominante
de malbec très inspirée. Fruits
rouges, bouche poivrée et
charnue pour un vin à l’indé-
niable potentiel. 8,93 €
CHÂTEAU HAUT PEYRAT
Bordeaux supérieur Prélude 2016
Avec Jean-Luc Zuger, proprié-
taire du cru classé Malescot
Saint-Exupéry à Margaux,
Isabelle et Didier Gil réalisent
un vin élégant et complexe,
très fruits noirs et cerise noire
à l’aération. De la mâche, du
fond, un parfait équilibre. À la
fois un vin de garde moyenne
et de plaisir. Bravo ! 9,50 €
15,5/20
CHÂTEAU LA FREYNELLE
Bordeaux
Cabernet-Sauvignon 2016
Véronique Barthe, habitant
à Daignac, possède plusieurs
domaines dans la région. Cette
cuvée dédiée au cabernet-sau-
vignon retient l’attention par
ses notes de graphite, d’épices
et de fruits noirs. Bouche nette,
tanins structurants qui s’assagi-
ront avec le temps. 8 €

Cette cuvée, la première entiè- 15,5/20

rement réalisée par ses soins, CHÂTEAU LESCALLE
est un plaisir de fruits noirs. Bordeaux supérieur 2016
Charmeuse, la bouche est par- Dans les paluds du Médoc, à
faitement en place, les tanins Macau, ce domaine appartient
soyeux, la finale aérienne. à la famille Tessandier, égale-
Bravo ! 7,50 € ment propriétaire de château
Maucamps. Frais et alerte,
16,5/20 le vin s’exprime sur des notes
CHÂTEAU MARJOSSE épicées et légèrement fumées.
Bordeaux 2016 Bel enrobage de bouche, tanins
Propriété personnelle de savoureux et précis. 9 €
Pierre Lurton, le directeur
des châteaux Cheval Blanc et 15,5/20
d’Yquem, château Marjosse, CHÂTEAU
situé à Tizac-de-Curton, est MOULIN DE LA SOULOIRE
devenu en quelques années Bordeaux 2015
une référence. Ce 2016, plein, Diane et Eugénie (lire l’encadré
fruité, parfaitement équilibré p. 112) suivent désormais les
et aux tanins enchanteurs est pas de Marie-José Degas dans
une merveille. 9,50 € ce domaine familial qui pro-
D. R.

16/20
CHÂTEAU BARREYRE
Bordeaux 2016
Établi depuis 1646, ce domaine
est entré dans la galaxie de la
famille Gonfrier, connue pour
sa rigueur, en 2014. Alliant
cerise noire et douces notes de
cassis, le nez affiche ses ambi-
tions que la bouche confirme
par une texture enrobée, des
Anne-Sophie Pagès a grandi dans les vignes de son grand-père. pose, outre les vins, un jardin
botanique somptueux. Épicé
N e dites pas à Anne-Sophie Pagès que c’est une folie de
reprendre une propriété viticole en ces temps de crise.
Elle pourrait vous expliquer, avec sa voix douce, que vous
et boisé, ce 2015 ravira les ama-
teurs de vins denses et suaves
où le boisé disparaît au profit
êtes dans l’erreur. En 2014, elle a repris les rênes de la pro- du fruit après aération. 5 €
priété acquise par son grand-père dans les années 60.
Ex-brand manager pour une marque de cognac appartenant 15,5/20
au groupe LVMH, elle compte sur son sens commercial pour CHÂTEAU PENIN
développer les ventes. Sa passion, sa persévérance et son sens Bordeaux supérieur
du vin font le reste. Ses cuvées fruitées et gourmandes sont Les Cailloux 2016
d’excellents rapports qualité/prix. Y. C. De nouveau Patrick Carteyron

Les coordonnées des domaines en page 117

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 111


Bordeaux et Bordeaux supérieur
nous impressionne avec cette
cuvée 100 % merlot. Des notes
de mûre, de graphite avec une
bouche soyeuse, délicate, sou-
tenue par de très beaux tanins
élancés. Valeur sûre. 14,50 €
15,5/20
CHÂTEAU ROSSIGNOL
Bordeaux supérieur 2016
Qui a dit que les coopératives
ne pouvaient pas produire de
beaux vins ? Ce 2016, élaboré
par la cave de Sauveterre-
Blasimon-Espiet, recèle un
léger boisé grillé et fumé, un
bel équilibre d’ensemble et
une texture enrobée qui lui
apporte gourmandise et
rondeur. Un beau vin. 7,50 €
15,5/20
VIGNOBLES SIOZARD
Bordeaux
Ipsum Pur Carménère 2018
Jumeaux, Laurent et David
Siozard sont la sixième généra-
tion à la tête du domaine.
Cette cuvée, Ipsum, qui en latin
signifie “lui-même” est singu-
lière tant par sa composition,
uniquement de la carmenère,
que par son style sauvage, très
fruits noirs et épices avec
des tanins structurants, mais
parfaitement domptés.
Pour la garde. 11 €
15/20
CHÂTEAU DE CAZENOVE
Bordeaux supérieur 2015
Avant le 2016 très réussi, Louis
de Cazenove livrait ce 2015 de
toute beauté dédié aux notes
de cerise noire et de fleurs.
Bien enrobée, la bouche est
moelleuse, les tanins parfaite-
ment polis, ce qui profite
à l’élégance d’ensemble. 12 €
Les Dégustations
est élégante, florale avec de
très beaux amers et des tanins
veloutés. Légère garde. 7,50 €
15/20
CHÂTEAU
JALOUSIE BEAULIEU
Bordeaux supérieur
Cuvée Prestige 2015
Philippe Person, cinquième
génération à gérer ce domaine,
réalise un 2015 superbe.
Boisé grillé intégré, présence
tannique maîtrisée, volume,
emphase, caractère. Un poten-
tiel de garde indéniable. 8,50 €
15/20
CHÂTEAU LAUZANET
Bordeaux 2018
Situé en sud Gironde, proche
Château Moulin de la Souloire
La nouvelle génération
reprend le flambeau
de La Réole, ce domaine fami-
lial est géré avec détermination
par Patrick Forcato . Son 2018,
alerte et frais, offre une bouche
juteuse aux notes de cerise
noire. Traditionnel et gour-
mand. 5 €
15/20
CHÂTEAU MOULIN
DE PEYRONIN
Bordeaux 2016
Véronique et Franck Terral ont
racheté ce domaine en 2006 à
Claude Jouga qui, depuis 1975,
était en bio. Ce 2016 offre
un bouquet mentholé,
une bouche ronde et élégante
et de forts beaux tanins.
Un excellent rapport qualité/
prix. 7,80 €
D. R.
15/20
CHÂTEAU PIERRAIL
Bordeaux supérieur
Les Hauts de Naudon 2016
Cette sélection parcellaire à la
fois charmeuse et gourmande
exhale des notes de cerise
noire, de rose. Une texture
juteuse, presque charnue, du
fruit et de la tension. 8,50 €
15/20
CHÂTEAU VIRCOULON
Bordeaux 2018
À quelques encablures de
Castillon-la-Bataille, Patrick
Hospital dirige ce domaine
dédié à la viticulture depuis
1983. Le nez, classique et élé-
gant, est une ode aux fruits
noirs, tandis que la texture
juteuse apporte de la tenue.
Attendre un an. 5 €
14,5/20
CHÂTEAU ROUGIER
Bordeaux 2018
À Rimons, Jean-Christophe
Lobre veille sur ce domaine
créé par ses parents en 1974 et
produit un vin sensuel, char-
meur, très floral et fruits noirs
supportés par des notes épi-
cées. Bouche juteuse, savou-
reuse, ronde. 5,10 €
14,5/20
DOMAINE
DES MARÉCHAUX
Bordeaux supérieur 2016
Julien Mingot gère ce beau
domaine de Savignac-sur-
l’Isle. Timide, ce 2016 à domi-
nante de merlot laisse appa-
raître de belles notes de fruits
noirs. C’est en bouche que tout
se passe avec un bel enrobage,
des tanins structurants et une
tension aérienne. 6 €

15/20
CHÂTEAU HAUT RIGAL
Bordeaux
Cuvée Exceptionnelle 2016
Marielle Baissas a repris
la suite de ses parents après
une formation d’ingénieur en
agriculture et une expérience
dans l’agroalimentaire. Bien
lui en a pris tant cette cuvée
100 % cabernet-sauvignon
Eugénie (à g.) et Diane Degas ont pris la suite de leur grand-mère. 14/20
CHÂTEAU CANEVELLE
M arie-José Degas est une énergique vigneronne doublée
d’une jardinière passionnée et douée, qui a créé avec
son mari le Jardin de la Souloire, un havre de paix comptant
Bordeaux supérieur
La Réserve Natura 2016
En plein cœur d’une réserve
près de 2 500 plantes différentes. Côté vignes, ce sont désor- naturelle et surplombant la
mais ses deux petites-filles, Diane et Eugénie, qui reprennent Vallée du Dropt, ce domaine
la suite du domaine qu’elle a géré depuis le décès prématuré produit une cuvée aux doux
de son époux en 1984. Férues de viticulture, elles écrivent accents de graphite avec une
une nouvelle page en produisant des vins frais et fruités, pointe de réglisse, à la bouche
gourmands et parfaitement enrobés. Y. C. friande et gourmande. 5,50 €

En conversion bio Vin biologique Vin biodynamique

112 - LA RVF N° 639 - MARS 2020

 Les Dégustations
LEUR DERNIÈRE EMPLETTE
Bien sûr, nos dégustateurs ont le privilège de goûter de beaux vins
tout au long de l’année, mais il leur arrive aussi d’acheter à titre personnel des bouteilles
qui leur ont transmis une émotion particulière. Ils racontent.

Alexandre Vingtier Christian Martray Alexis Goujard Karine Valentin

Un grand rosé aussi Un sociando-mallet Des bellets Un stimulant

fin qu’un saké de haute volée ! de plus de 20 ans
Au Chai 27, à Rouillac (16) Chez un particulier,
Déjà reconnu pour ses côte- à Bordeaux
rôtie et son chablis 1er cru, le Je me souviens d’une verticale
passionnant Antoon Jeantet- de 1995 à 2008 organisée en
Laurent produit aussi un rosé juin 2009 au château Sociando-
exceptionnel à Saint-Georges- Mallet, à Saint-Seurin-de-
d’Orques, en face du Pic Saint- Cadourne, avec le comité
Loup. Sa parcelle de galets de La RVF et Jean Gautreau, le
roulés est composée de vieilles propriétaire. Parmi mes coups
vignes (1919 à 1957) de mour- de cœur, le 2001. Lors d’un
vèdre et grenache noir, ven- voyage récent à Bordeaux
dangés de nuit à la main, avant je rencontre un membre d’un
d’être vinifiés et élevés neuf club de dégustation qui pro-
mois en fûts. Un rosé de grande pose ce 2001 à 32 €. Une occa-
classe, gastronomique, sion à ne pas manquer ! Une
tout-terrain à table comme manière de saluer ce vigneron
certains sakés japonais, attachant qui a comblé tant
et même de garde ! Je sors d’amateurs par la régularité
de la cave avec six bouteilles. de ses vins et leurs prix sages.
16,50 € chez le caviste 32 € dans un club d’amateurs
Aux enchères
sur interencheres.com
Surfer sur interencheres.com
est un bon moyen de se
détendre après une journée de
travail en parcourant les salles
des ventes de toute la France.
Au-delà de certaines bouteilles
intouchables, on peut sortir des
sentiers battus avec des réfé-
rences moins prisées mais tout
aussi intrigantes, tels ces six fla-
cons 1998 (trois blancs et trois
rosés) du château de Bellet,
sur les hauteurs de Nice. Le ver-
mentino (blanc) et le braquet
(rosé) peuvent surprendre au
vieillissement. Je suis impatient
de découvrir leur évolution.
13,80 € aux enchères
persan de Savoie
Chez Vin sur Vin,
à Chamonix (74)
Comme nous sommes produc-
teurs en Provence, plutôt habi-
tués aux vins chaleureux, lors
du réveillon de Noël, je pensais
offrir à ma famille l’originalité
d’un rouge à l’opposé du nôtre.
À Chamonix, j’ai déniché deux
bouteilles du domaine Saint-
Germain. Planté sur les éboulis
calcaires du Massif des Bauges
en Savoie, le raisin n’y couvre
que 73 ares, une infime partie
des 15 hectares de ce très vieux
cépage plantés dans la région.
Le persan fit à table un effet
bœuf servi sur une pièce de
l’animal aussi juteuse que le vin.
25 € chez le caviste

Languedoc Médoc Bellet blanc Vin de

Cuvée Rosé Château 1998 Savoie
Les En-Hauts Sociando- du château Persan 2017
du domaine Mallet 2001 de Bellet du domaine
Jeantet- Saint-
Laurent Germain
Photos : D. R.

LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 113

 Les Dégustations
Bourgogne

Photos : T. Lambelin
Associant puissance et élégance, le chevalier-montrachet du domaine Leflaive est considéré comme l’un des meilleurs vins de l’appellation.

Que vaut le chevalier-montrachet

du domaine Leflaive ?
Ayant connu des problèmes d’oxydation prématurée, le mythique domaine bourguignon
a reconditionné près de 18 000 bouteilles de ses vins blancs. Il a souhaité montrer la belle tenue
de son Grand cru Chevalier-Montrachet dans une verticale de 1989 à 2012. Par Guillaume Baroin

P
eu de grands domaines ont su se remettre en question
avec autant de courage que le domaine Leflaive, afin
de clore ainsi le débat sur l’oxydation prématurée des
vins blancs qui a longtemps mis à mal la réputation de ce cru
mythique, ainsi que de nombreux autres crus bourguignons,
dans les années 90 et 2000. Des vins fatigués dès leur jeunesse,
pointés du doigt par les grands amateurs du monde entier qui
avaient dépensé des fortunes pour ces étiquettes.
Neveu et successeur d’Anne-Claude Leflaive, décédée en
2015, à la présidence du conseil de gestion de cette propriété
viticole iconique de 51 hectares, Brice de la Morandière et son
bras droit, Pierre Vincent, qui officiait auparavant au domaine
de la Vougeraie, ont fait le tour de cette problématique et y ont
rapidement apporté des réponses concrètes. Selon eux, « le
problème de base des fameux “prémox” vient de la vigueur de la vigne et
du moût, notamment dans les 24-36 heures qui suivent la récolte. Puis
du vin lors de la phase de mise en bouteilles et du choix du bouchage ».
Même s’ils n’en sont pas les responsables, ils assument plei-
nement l’oxydation de ces cuvées produites par le domaine,
principalement dans les années 90, et comprennent parfaite-
ment la déception des amateurs de se retrouver face à un vin
blanc oxydé, malgré les prix faramineux des flacons.
Brice de la Morandière et Pierre Vincent reconnaissent les
problèmes de l’époque : déréférencement de restaurants
étoilés, retour des clients particuliers qui ne reconnaissent pas
les vins… Le domaine est d’autant plus critiqué qu’il est mon-
dialement connu. On peut dire aujourd’hui, avec du recul,
qu’il a servi localement de bouc émissaire à de nombreux
autres producteurs touchés par des problèmes similaires qui
expliquaient à leurs clients que « le domaine Leflaive aussi a les
mêmes soucis. Voire plus graves ! ».
20 000 BOUTEILLES PASSÉES EN REVUE
L’équipe en place a donc procédé à l’analyse de toutes les
bouteilles qu’elle avait en stock, n’hésitant pas à éliminer
les plus critiques. Le domaine a ainsi reconditionné 90 %

114 - LA RVF N° 639 - MARS 2020


Chevalier-montrachet du domaine Leflaive
des 20 000  bouteilles de
Grands crus et du puli-
gny-montrachet 1 er   cru
Les Pucelles (dans les millé-
simes allant de 1980 à 2009)
avec un bouchon technique
neutre, garanti 100 % sans
goût de bouchon ! On aurait
pu attendre qu’à l’instar
d’autres domaines presti-
gieux pratiquant la biody-
namie et qui, de fait, placent
le vivant au centre de leurs
préoccupations, le domaine
Leflaive choisisse comme
obturateur un bouchon de
liège naturel de haute qua-
lité. Mais il a préféré jouer la
sécurité.
Dans le même temps,
le domaine de Puligny-
Montrachet a investi des mil-
lions d’euros dans des instal-
lations techniques et a rénové
des caves de façon à stocker
dans des conditions idéales
100 000  bouteilles afin de
pouvoir les proposer à matu-
rité à ses aficionados.
UN NOUVEL ÉCLAIRAGE
Quatre ans après la dispa-
rition de l’emblématique
Anne-Claude Leflaive, le
domaine organisait l’an der-
nier une dégustation ver-
ticale (entre 1989 et 2012)
du Grand cru Chevalier-
Montrachet en petit comité
– seuls quatre dégustateurs
étaient conviés. Une mise au
point nécessaire qui a permis
d’apporter un nouvel éclai-
rage sur la tenue des vins du
domaine et leur capacité de
vieillissement.
Le prochain challenge de
l’équipe Leflaive sera de pro-
duire au même niveau d’exi-
gence des cuvées de pinot
noir qui ont été occultées par
la notoriété de ses grands vins
blancs.•
Conditions
de la dégustation
Les vins ont été goûtés par
Guillaume Baroin au domaine
Leflaive, à Puligny-Montrachet,
en avril 2019. Ils sont présentés
dans l’ordre dans lequel ils ont été
Les Dégustations
Grand cru Chevalier-Montrachet
La valeur du grand âge
Cette grande verticale, des millésimes 2012 à 1989, prouve que ce Grand cru n’a pas peur
de la maturité, elle lui confère même plus de force.
2012
Année où deux orages de grêle
coupent de moitié la récolte.
Un parfum de curry crémé
enveloppe le verre, puis les
petites fleurs des murets appa-
raissent à l’aération. Sa saveur
est ample, le grain de fruit
patiné. Il s’ouvre en triangle
avant de se resserrer dans une
salinité salivante, la clé de sol
du terroir. 16,5/20
2011
Le plus précoce millésime du
domaine (vendanges du 25 au
30 août) a accouché d’un vin
riche de soleil dont un rayon
semble s’être perdu dans le
verre. Si le nez nous guide vers
les sous-bois et les trompettes
de la mort, sa saveur est
traçante et fait parler le sel de
la terre. Sa finale iodée comme
une huître tend le Grand cru
en majuscule. 16/20
2009
Le plus beau mois d’août
depuis 2005 a livré un chevalier
au jus doré comme les blés.
Il offre des notes pures de cire
d’abeille. Sa trame patinée
rebondit dans une bouche
de miel frais. Sa salinité reste sa
Le domaine a rénové ses caves pour stocker quelque 100 000 bouteilles.
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 115
colonne vertébrale même s’il a
perdu de la tension. 15/20
2008
Éric Rémy remplace Pierre
Morey au poste de régisseur
juste avant les vendanges.
Un débourrement tardif et
un fort oïdium conditionnent
la récolte qui a lieu fin
septembre. Le vin présente de
fines notes d’aubépine en fleur.
On se régale d’un nectar
à l’éclat de roche chauffée
au soleil. Sa finale explose
en salinité. Il lui reste encore
le double de temps de vie.
17/20
2007
Un liquide doré étincelle dans
le verre. L’amande en fleur
explose dans un calice ouvert
sur la lumière du chevalier.
La bouche est charnue, grasse
comme une amande sèche.
Aujourd’hui à son apogée,
il fait penser à un corton-
charlemagne issu d’un secteur
froid.15,5/20
2006
Avec un mois d’août humide
comme un mois de septembre
et un mois de septembre chaud
comme un mois d’août,
les vendanges ont lieu entre le
20 et le 27 septembre. La matu-
rité touche à la surmaturité
dans ce flacon au doré intense.
Le nez explore un parfum sou-
verain de levure boulangère
avant de glisser vers le miel
d’acacia. Une fois en bouche,
il impose sa maturité douce
avec une sensation de sucre
résiduel, tout en conservant
une finale salivante. Il est prêt
à se découvrir. 15/20
2005
Les Grands crus du domaine
ont été vendangés en un jour
et demi afin de bénéficier
de la fructification de jours
fruits. Son doré ambré libère
la finesse aromatique d’un
acacia en fleur. Quelle surprise
après treize ans de bouteille !
Il évoque même un parfum
suranné de mouchoir de
Madère. Le jus est ample et
prend du temps pour se livrer.
À la moitié de sa vie, il peut déjà
s’apprécier. 16/20
2004
Son doré est très fort et
surprend par son parfum
d’asperge verte où l’oïdium
marque le vin. Malgré cela,
le jus reste frais et équilibré par
cette trame végétale. Sa salinité
est toujours là pour relancer
la finale. 13/20
2003
Dans le millésime le plus
atypique des années 2000,
le chevalier garde son rang.
L’or est devenu liquide.
Son parfum est d’une rare
complexité : fougère, menthe
poivrée, verveine. Sa saveur se
montre d’une richesse extraor-
dinaire tant il est à la fois frais
et mûr. Un vin qui n’en est
qu’au début de son chemin.
Un très long chemin. 18/20

Chevalier-montrachet du domaine Leflaive
Sous l’impulsion d’Anne-Claude Leflaive, le domaine a été certifié en biodynamie dès 1997.
2002
Dans une année des plus équi-
librées où les deux cépages sont
en phase, son jus or vif attire
le regard. Le miel toutes fleurs
rayonne dans un nez aérien. Sa
bouche est parfaitement équi-
librée par une saveur digeste.
La pointe de sel revient titiller
les papilles. 17/20
2001
Quelle surprise de découvrir
un tel vin dans une année
souvent qualifiée de “maigre” !
Drapé dans son habit de
lumière, il livre un premier nez
de camphre. La texture liquide
est fine comme une dentelle de
Calais. C’est un vin précieux au
parfait équilibre, à la finale de
caramel au beurre salé. « Il fallait
juste l’attendre… », note Brice
de la Morandière. 18/20
2000
Le doré du miel impose la dou-
ceur de son nez de fleurs mel-
lifères. Sa saveur mielleuse est
ample et facile d’accès. Il est à
ce jour au meilleur de sa forme.
13,5/20
1999
Lumineuse, sa robe est d’une
jeunesse remarquable ! Passé
une première réduction
Les Dégustations
grillée, le nez file sur la pierre
calcaire chauffée au soleil. Il
vous bluffe par sa fraîcheur
dans un millésime riche et
solaire. Déjà harmonieux, ce
“bébé” de 20 ans saura vieillir
en douceur. 17,5/20
1998
Le nez s’ouvre sur des notes
aromatiques que l’on ne trouve
pas ailleurs : safran et curry
partent vers la truffe blanche !
Malgré les difficultés du millé-
sime, sa texture livre une boule
de fruit mature qui évoque
un noyau d’abricot, entre son
amande et son fruit. Sa finale
en fait un vin racé au sommet
de sa forme. 19/20
1997
Son parfum un brin pous-
siéreux évoque le grenier
renfermé. Le jus est plat et
tombe sans rebondir. Avec sa
finale sèche, il lui manque du
relief. Ce chevalier a combattu
quelques années de trop.
12,5/20
1996
Le doré du jus est celui de son
âge. Au nez, le citron confit et le
gingembre expriment la singu-
larité de sa nature tonique. Au
palais, le pain d’épices prend
possession de la matière.
116 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Sa finale saline est impression-
nante. Il semble pouvoir tenir
encore cinquante ans. 17/20
1995
Ce vin est un reflet fidèle d’une
année compliquée marquée
par un printemps pluvieux
et une floraison précoce qui
engendrera du millerandage.
Derrière une robe surprenante
de jeunesse aux reflets verts,
une bouche large développe
une texture dense et effilée
comme une lame. Chevalier, il
l’est jusqu’à la pointe de l’épice.
18,5/20
1993
Sa robe brille comme un soleil.
Le nez exhale un bouquet
champêtre : sabot-de-vénus,
genévrier, verveine. Le jus
est intense et vineux. Dans
ce millésime froid, il trouve
sa maturité dans un verre frais.
La salinité revient réveiller
la mémoire du sol. 16,5/20
1992
Vêtu d’un habit de matador.
L’écorce d’orange du nez
tire vers la liqueur de Grand
Marnier. Sa trame révèle
sa noblesse d’amande avec
un côté plus pâtissier par
sa saveur de frangipane. Il s’im-
pose en majesté. 19/20
D. R.
1991
C’est le millésime vendangé
le plus tardivement de cette
verticale : le 30 septembre
(record en 1956 avec une ven-
dange le 14 octobre). Sa trame
évoque un miel de sapin.
La figue et le raisin de Corinthe
frais embaument le verre
de leur puissance sèche. Ample
et généreux, il souffle la finesse
du sol. Sa finale livre une
impression d’intensité et
de pureté. 17/20
1990
Le doré doux du jus reste
encore jeune. Le nez est frais,
distingué, avec des notes
de plantes fraîches. L’acidité
transparaît encore dans
une saveur épaisse presque
moelleuse. Un vin en phase
avec son millésime. 17/20
1989
Ce vin détonne par sa robe
d’une lumineuse jeunesse.
Le nez est magique. Sa palette
aromatique offre des parfums
de raisin sec et de safran qui
s’appuient sur une touche
sucrée de cannelle. Sa texture
parfaitement équilibrée distille
un plaisir intense. Sa finale
est fraîche comme la menthe.
17/20

Les coordonnées des producteurs
A-B
Amanieu d’Albret (ch.),
tél. : 05 56 62 03 75
Annereaux (ch. des), tél. : 05 57 51 03 01
Aubrade (ch. de l’), tél. : 05 56 71 55 10
Augereau (dom. Sylvie),
tél. : 06 21 38 27 27
Azienda agricola Barraco,
tél. : +39 389 795 535
Bannwarth (dom. Laurent),
tél. : 03 89 49 30 87
Barouillet (ch.), tél. : 05 53 58 42 20
Barral (dom. Léon), tél. : 04 67 90 29 13
Barreyre (ch.), tél. : 05 56 58 94 94
Bastian (ch.), tél. : 05 56 65 51 59
Béguet (dom. Hugues),
tél. : 03 84 66 26 39
Beynat (ch.), tél. : 05 57 40 01 14
Binner (dom. Christian),
tél. : 03 89 78 23 20
Bleyzac (ch. de), tél. : 06 30 05 49 78
Bodegas Alba Viticultores,
site : albaviticultores.com
Bodegas de Alberto,
tél. : +34 983 55 91 07
Bodegas Monovar,
tél. : +34 965 07 64 35
Bodines (dom. des), tél. : 03 84 66 05 23
Bois de Favereau (ch.),
tél. : 05 56 61 32 49
Bolaire (ch.), tél. : 05 57 88 19 79
Bonhoste (ch. de), tél. : 05 57 84 12 18
Bonnet (ch.), tél. : 03 85 36 70 41
Bornard (dom.), tél. : 03 84 66 26 14
Bouchet (ch. de), tél. : 05 57 43 18 02
Boutillon (ch.), tél. : 05 56 71 41 47
Boutinet (ch.), tél. : 06 85 79 56 96
Brague (ch. de), tél. : 05 57 84 41 01
Brondeau du Tertre (ch.),
tél. : 05 57 24 87 87
Buisson-Redon (ch.),
tél. : 05 57 74 30 06
C-D-E
Camin Larredya (dom.),
tél. : 05 59 21 74 42
Camus (dom. Benoît),
tél. : 06 68 50 91 21
Canevelle (ch.), tél. : 06 81 55 65 01
Cap Royal (Compagnie Médocaine
des Grands Crus), tél. : 05 56 95 54 84
Carrelet (dom. du), tél. : 06 98 63 39 28
Carterole (dom.), tél. : 06 73 22 19 88
Causse Marines, tél. : 05 63 33 98 30
Cazenove (ch. de), tél. : 05 57 88 79 98
Celler Balaguer I Cabré,
tél. : +34 626 17 50 77
Chassorney (dom. de),
tél. : 03 80 21 65 55
Chatillon (dom. Philippe),
tél. : 06 45 39 17 63
Clos de l’Élu, tél. : 02 41 78 39 97
Clos du Gravillas, tél. : 04 67 38 17 52
Clos Lapeyre, tél. : 05 59 21 50 80
Clovallon (dom. de), tél. : 04 67 95 19 72
Compassant (ch.), tél. : 06 71 63 14 99
Côtes Rousses (dom. des),
tél. : 04 79 25 66 90
Les Dégustations
Courbissac (dom. de),
tél. : 07 81 95 57 88
Crittenden Estate, tél. : +61 3 5987 3800
Danjou-Banessy (dom.),
tél. : 04 68 64 18 04
De Muller, tél. : +34 977 757 473
Descombes (dom. Georges),
tél. : 04 74 69 16 67
Dugay (ch. Jean), tél. : 05 57 74 83 17
Écu (dom. de l’), tél. : 02 40 06 40 91
Enclos des Braves (L’),
tél. : 06 08 30 27 81
Esparrou (ch. de l’), tél. : 04 68 73 30 93
F-G-H
Finot Frères (dom.), tél. : 04 76 13 45 57
Fleur Haut Gaussens (ch.),
tél. : 05 57 84 48 01
Fons Sanatis, tél. : 04 67 57 32 81
Fontenille (ch. de), tél. : 05 56 23 03 26
Fouassier (dom.), tél. : 02 48 54 02 34
Frick (dom. Pierre), tél. : 03 89 49 62 99
Gaillou (ch.), tél. : 05 57 51 46 75
Gauby (dom.), tél. : 04 68 64 35 19
Grand Ferrand (ch., Bordeaux
Vineam), tél. : 05 57 40 40 99
Grand Français (ch.),
tél. : 05 57 69 50 23
Grand Guilhem (dom.),
tél. : 04 68 45 86 67
Grand Jean (ch., Vignobles Dulon),
tél. : 05 56 23 69 16
Gréteau (ch.), tél. : 05 57 98 08 08
Grézille (dom. de la),
tél. : 02 41 59 34 63
Guirardel (dom.), tél. : 05 59 21 31 48
Haut Beaumard (ch.),
tél. : 05 57 24 57 34
Haut Gaussens (ch.),
tél. : 06 17 57 48 45
Haut Guillebot (ch.),
tél. : 05 57 84 53 92
Haut Mouleyre (ch.),
tél. : 05 57 98 07 20
Haut Peyrat (ch.), tél. : 05 57 80 47 27
Haut Rigal (ch.), tél. : 06 30 94 11 54
Haut-Campagnau (dom.),
tél. : 05 62 29 11 56
Hostin Le Roc (ch.), tél. : 05 57 24 14 26
J-K-L
Jalousie Beaulieu (ch.),
tél. : 05 57 74 30 13
Jorel (dom.), tél. : 04 68 59 19 31
Kreydenweiss (dom. Marc et
Emmanuelle), tél. : 04 66 20 60 09
La Bastane, tél. : 06 72 44 42 36
La Brande (ch.), tél. : 05 57 74 36 38
La Croix de Queynac (ch.),
tél. : 05 57 74 30 77
La Fleur Haut Moulin (ch.),
tél. : 06 85 52 26 88
La Freynelle (ch.), tél. : 05 57 84 55 90
La Grande Gelleyre (ch., Vignobles
Feyzeau), tél. : 06 09 32 19 42
La Mothe du Barry (ch.),
tél. : 05 57 74 93 98
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 117
La Peyrère du Tertre (ch.),
tél. : 05 56 65 41 86
La Rose du Pin (ch., Vignobles
Ducourt), tél. : 05 57 34 54 00
La Tourbeille, tél. : 06 11 85 26 86
La Tuilerie du Puy (ch.),
tél. : 05 56 61 61 92
Labatut (ch.), tél. : 05 57 40 51 84
Lagrave Paran (ch.), tél. : 06 89 33 20 20
Lajarre (ch.), tél. : 05 57 41 08 69
Lambert (dom. Béatrice et Pascal),
tél. : 02 47 93 13 79
Lamothe Vincent (ch.),
tél. : 05 56 23 97 72
Larroque (ch.), tél. : 05 57 34 54 00
Lauzanet (ch.), tél. : 05 56 77 81 00
Le Bonalguet (ch.), tél. : 05 57 24 06 03
Le Conte des Floris (dom.),
tél. : 07 68 51 29 49
Le Grand Verdus (ch.),
tél. : 05 56 30 50 90
Le Pin Beausoleil (ch.),
tél. : 05 57 84 02 56
Le Rocher des Violettes (dom.),
tél. : 02 47 23 52 08
Le Roudier (ch.), tél. : 05 57 74 62 06
Le Soula, tél. : 04 68 35 69 31
Leflaive (dom.), tél. : 03 80 21 30 13
Les Cigales dans la Fourmilière,
tél. : 06 51 22 10 02
Les Gravières de la Brandille (ch.),
tél. : 05 57 69 83 01
Les Petites Parcelles, e-mail :
lespetitesparcelles@gmail.com
Les Pieds sur Terre (Vincent Morel),
tél. : 03 84 52 62 55
Les Sablonnettes (dom.),
tél. : 02 41 78 40 49
Lescalle (ch.), tél. : 05 57 88 07 64
Lestrille (ch.), tél. : 05 57 24 51 02
Lisennes (ch. de), tél. : 05 57 34 13 03
Loubière (ch. de la),
tél. : 05 56 44 36 72
Loue (dom. de la), tél. : 06 14 70 19 53
M-O-P
Maison Noble (ch.), tél. : 09 53 25 44 35
Mamaruta (dom.), tél. : 06 83 24 90 92
Maréchaux (dom. des),
tél. : 05 57 84 22 29
Mario Roviro, tél. : +34 625 535 807
Marjosse (ch.), tél. : 05 57 55 57 80
Mas Coutelou, tél. : 06 64 62 12 57
Mas del Périé, tél. : 05 65 30 18 07
Mas Martinet, tél. : +34 977 27 91 87
Matassa (dom.), tél. : 04 68 64 10 13
Menade, tél. : +34 983 103 223
Meyer (dom. Julien),
tél. : 03 88 92 60 15
Minvielle (ch.), tél. : 05 57 84 55 01
Moulin de la Souloire (ch.),
tél. : 05 57 24 02 44
Moulin de Peyronin (ch.),
tél. : 05 57 40 79 34
Octavin (dom. de l’),
tél. : 06 86 02 42 88
Oiseau Rebelle (L’), tél. : 06 43 55 45 27
Penin (ch.), tél. : 05 57 24 46 98
Péron (dom. Jean-Yves),
tél. : 09 53 55 35 61
Pey La Tour (ch.), tél. : 05 56 35 53 00
Peychaud (ch.), tél. : 05 56 38 80 55
Pierrail (ch.), tél. : 05 57 41 21 75
Pinte (dom. de la), tél. : 03 84 66 06 47
Prieuré-Roch (dom.),
tél. : 03 80 62 00 00
R-S
Rancy (dom. de), tél. : 04 68 29 03 47
Recougne (ch.), tél. : 05 57 50 33 33
Recrue des Sens, tél. : 03 80 62 50 64
Reynaud (dom. David),
tél. : 04 75 84 74 14
Reynier (ch.), tél. : 05 57 84 52 02
Riberach (dom.), tél. : 04 68 50 30 10
Rietsch (dom.), tél. : 06 79 05 25 08
Riffault (dom. Étienne et Sébastien),
tél. : 02 48 79 32 57
Roches Neuves (dom. des),
tél. : 02 41 52 94 02
Roquefort (ch.), tél. : 05 56 23 97 48
Rossignol (ch.), tél. : 05 56 71 10 04
Rougier (ch.), tél. : 05 56 71 55 10
Rousset-Martin (dom.),
tél. : 03 84 25 95 12
Saget La Perrière (dom.),
tél. : 03 86 39 57 75
Sainte-Barbe (ch.), tél. : 05 56 77 49 57
Samuel Tinon , tél. : +36 47 358 405
Sénéchalière (dom. de la),
tél. : 02 40 06 24 30
Siozard (Vignobles), tél. : 05 57 84 54 23
Stoeffler (dom.), tél. : 03 88 08 52 50
Sulauze (dom. de), tél. : 04 90 58 02 02
T
Tayet (ch.), tél. : 05 57 88 94 17
Terres Promises (dom. des),
tél. : 09 64 45 12 72
Texier (dom. Éric), tél. : 04 72 54 45 93
Tissot (dom. André et Mireille),
tél. : 03 84 66 08 27
Tournelle (dom. de la),
tél. : 03 84 66 25 76
Traginer (dom. du), tél. : 04 68 88 15 11
Trapet (dom.), tél. : 03 80 34 30 40
Turner-Pageot (dom.),
tél. : 04 67 00 14 33
V-W
Vignoble du Rêveur, tél. : 06 63 18 54 58
Villet (dom.), tél. : 03 84 37 40 98
Vircoulon (ch.), tél. : 05 56 77 81 00
Viret (dom.), tél. : 04 75 27 62 77
Viti Vini Vinci, tél. : 03 86 42 38 77
Wicky (dom. Christelle et Gilles),
tél. : 03 84 25 10 96
Le grand accord
Lucas Carton
9, place de la Madeleine, 75008 Paris
Tél. : 01 42 65 22 90
lucascarton.com
 Les Dégustations

D. R.
Intuitions géniales ou vénérables traditions ressuscitées, de la France à l’Australie, les vins oxydatifs sauront vous surprendre.

Le réveil en fanfare
des vins oxydatifs
Surprenants, obscurs ou inoubliables, ces vins vieillis au contact de l’air font preuve
d’une modernité passionnante. Patinés par le temps et les éléments, ces rebelles dépaysent !
Par Pierre Citerne

L
es vins oxydatifs, des vins d’autrefois ? C’est bien au
contraire leur modernité – la modernité des choses
intemporelles – qu’entendent démontrer les enthou-
siastes organisateurs du salon Be Ranci ! dont la deuxième édi-
tion a eu lieu le 28 octobre 2019, réunissant à Perpignan pas
moins de 70 producteurs passionnés et passionnants. Tout
sauf un rendez-vous poussiéreux ! Sous-titré “Rencontres
européennes des vins oxydatifs secs”, Be Ranci ! est un clin
d’œil au rancio sec, le vi ranci catalan, officiellement reconnu
depuis 2011 (IGP Côtes catalanes et Côte vermeille).
Vins oxydatifs secs : l’acception est large – et c’est heureux.
Sur ce salon, nous avons aussi pu goûter de nombreux vins
élevés sous voile levurien, la crianza biológica des Espagnols, qui
ne sont pas à proprement parler des vins oxydatifs, mais plutôt
protégés de l’air… Parmi tous les vins que nous avons dégustés,
nous vous présentons ici nos vingt coups de cœur.
Au-delà des cuvées emblématiques du voile ou/et de l’oxy-
dation (château-chalon de Berthet-Bondet, vin de voile de
la famille Plageoles, xérès d’Emilio Hidalgo ou de Williams &
Humbert…), nous nous sommes ainsi laissés surprendre et
avons découvert des vins inoubliables, qu’ils soient obscurs,
qu’ils soient légendaires, intuitions improbables et géniales ou
vénérables traditions tombées dans l’oubli puis ressuscitées.
Un voyage gustatif en vingt étapes capiteuses, profondes (et
parfois austères) qui nous mène jusqu’en Australie ! L’Espagne
nous a particulièrement dépaysés ; ce fut l’occasion de décou-
vrir que le verdejo de la Rueda n’a pas toujours senti le fruit de
la passion, que le palomino fino en Andalousie n’est plus for-
cément muté à l’alcool, que le Priorat existait avant les rouges
modernistes et parkerisés du boom économique catalan.
À l’heure des “levures aromatiques”, de la cosmétologie
œnologique, des cuvées standardisées et “marketées”, ces
vins rebelles, patinés par le temps et les éléments, offrent,
paradoxalement, une véritable bouffée d’air frais. Bravo à
l’équipe organisatrice, soutenue par les instances collectives
du Roussillon (CIVR). Et longue vie au salon !

118 - LA RVF N° 639 - MARS 2020


Nos vingt cuvées “coup de cœur”
pour un exaltant voyage sensoriel
19,5/20
DOMAINE
PHILIPPE CHATILLON
Arbois Vin jaune 2010
France. Enclavée dans le
parcellaire du domaine de la
Pinte, la parcelle de savagnin
qui a engendré cet extraordi-
naire vin jaune a été arrachée.
Possédant toute l’ampleur
aromatique, toute la richesse
de texture des meilleurs vins
jaunes arboisiens, celui-ci
ajoute, grâce à l’éclat singulier
du millésime 2010, un tran-
chant cristallin éblouissant.
Grand vin d’émotion, malheu-
reusement très rare… 90 €
18,5/20
DANJOU-BANESSY
IGP Côtes Catalanes Vi Ranci 1965
France. Les frères Danjou
sont brillamment parvenus à
établir le lien entre les rancios
secs qu’ils produisent eux-
mêmes (le premier en 2002),
et le patrimoine légué par les
générations passées, tel ce 1965
à la teinte ambrée soutenue.
Grand rancio poivré, hautain,
aux exhalaisons d’encaus-
tique et d’encens… puissance,
vigueur, tranchant : la fierté
faite vin. env. 264 €
18,5/20
MAS MARTINET
Priorat Ranci de Mares Centenàries
Espagne. Mise en 2017. On se
perd dans la profondeur des
arômes dès le premier coup de
nez, avec d’infinies nuances
de tourbe, de menthol, de
mélasse, de brique chaude…
Très sec et très intense, inou-
bliable, mais moins violent que
la cuvée centenaire de Balaguer
i Cabré. env. 190 € (cavistes)
18/20
BODEGAS MONÓVAR
Alicant Fondillón Gran Reserva
50 años
Espagne. La teinte ambrée
Les Dégustations
Vins oxydatifs
claire laisse difficilement
deviner le cépage rouge à
l’origine de ce vin. Il s’agit du
monastrell (mourvèdre),
emblématique de la région
d’Alicante. Les arômes sont
d’une diversité fabuleuse ; on
navigue entre notes fumées,
marines (anchois), chloro-
phylliennes (menthe fraîche),
ligneuses… La bouche s’offre
sur une très grande longueur,
avec un soupçon de rondeur
qui vient amabiliser l’impact de
l’alcool (20,5°). Elle reste svelte,
très droite, sans toutefois pos-
séder l’autorité intimidante des
rancios du Priorat.
18/20
CELLER
BALAGUER I CABRÉ
Priorat Vi Ranci de mare de
100 anys Ca l’Andre Cabré i Bru
Espagne. Un rancio monu-
mental, presque intimidant,
violent, concentré par le
temps, quintessencié par
l’évaporation. Les papilles sont
assaillies par une amertume
de cachou, des éclairs cam-
phrés et minéraux… Acidité
surpuissante, finale ligneuse
et terreuse interminable, de
bâton de réglisse, de charbon.
Difficile de dire si c’est bon,
mais c’est extraordinaire ! N. C.
18/20
DOMAINE
ROUSSET-MARTIN
Château-Chalon V19
Sous Roche 1997
France. V19 comme 19 ans
d’élevage… Et le vin paraît
encore très jeune ! Beaucoup
de fruit dans une concentra-
tion presque huileuse, beau-
coup de fraîcheur, d’agrumes.
Encore austère, réducteur,
sans le moindre caractère oxy-
datif, ce vin magistral évoque
les grands château-chalon vini-
fiés par Marius Perron dans les
années 70.
VDF : vin de France - VDN : vin doux naturel
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 119
18/20
MAS COUTELOU
VDN Vieux Grenache
France. D’une moyenne d’âge
de 50 ans, les vieux grenaches
élevés en solera sur lesquels
veille Jean-François Coutelou
sont des vins exceptionnels.
Concentrés et patinés par le
temps, avec parfois quelques
sucres résiduels perceptibles
(ce n’est pas le cas de ce lot,
n° 47), perçants et caressants à
la fois, infiniment longs, inou-
bliables, ils vous embarquent
dans un entêtant voyage sen-
soriel. Nous ne sommes pour-
tant ni en Andalousie, ni dans
quelque orient fantasmé, ni
sur une île arcadienne, mais à
Puimisson, un peu au nord de
Béziers. 35 €
17/20
DE MÜLLER
Priorat Rancio Seco Don Juncosa
Solera 1939
Espagne. Fournisseur attitré
Tourbe,
menthol,
mélasse…
On se perd
dans la
profondeur
des arômes
de ce rancio
espagnol !
D. R.
des papes en vin de messe,
jusqu’à Jean XXIII, cette véné-
rable maison de Tarragone est
aussi spécialisée dans les vins
de liqueur et les rancios, avec
plusieurs soleras de vins secs
ou doux, dont la plus vieille a
été créée en 1851, année de fon-
dation de la société. Ce vin-ci a
débuté avec la fin de la guerre
civile espagnole, il est sec, tran-
chant, possède un grand nez
épicé, très intense, évoquant le
goudron et la noisette grillée.
L’alcool est autoritaire (21°) et
l’acidité vigoureuse ! On a envie
de l’essayer sur de la viande
séchée et fumée, telle la cecina
de León. env. 40 €
17/20
DOMAINE
GUIRARDEL/UGO
VDF Sans Voile
France. L’oxydation fine se
marie avec la très belle acidité,
vibration spécifique du petit
manseng béarnais ; les saveurs
de fruits exotiques séchés
se mélangent aux épices. Les
vins de l’historique domaine
Guirardel changent de nom.
Françoise Casaubieilh et Pierre
Coulomb poursuivent leur
chemin, original, inspiré et
exigeant. 29 €
16,5/20
BODEGAS
DE ALBERTO
Dorado de Rueda
Espagne. Rueda et Verdejo sont
aujourd’hui synonymes de
vins très aromatiques, thiolés ;
leur succès commercial est
indéniable. L’appellation
Vino Dorado de Rueda existe
pourtant encore, elle abrite de
rares cuvées élaborées “comme
avant”, c’est-à-dire avec éle-
vage oxydatif, comprenant une
exposition au soleil en dames-
jeannes. Cette cuvée est issue
d’une solera créée dans les
années 40. Elle offre un magni-
fique caractère, beaucoup
de velouté dans le toucher
et, même si le vin est sec, des
saveurs confites avec une nette
pointe exotique.
env. 25 € les 50 cl (cavistes)

16,5/20
DOMAINE DE RANCY
IGP Côtes Catalanes Macabeu
Rancio Sec
France. La rondeur au sein
même de la droiture, la
tension dans la richesse : le
rancio sec quand il est grand
devient oxymorique… La
solera de macabeu de la famille
Verdaguer est centenaire ;
beaucoup plus jeune (2006),
celle de carignan livre
un vin moins patiné, tranchant
comme une lame, tout aussi
emblématique. 16 € (50 cl)
16,5/20
SAMUEL TINON
Tokaji Szamorodni sec 2009
Hongrie. En partie botrytisé
mais sec, ce furmint est l’hé-
ritier d’une longue tradition.
Il fait indéniablement partie
de l’élite des vins élevés sous
voile. Dans sa droiture, le vin
conserve une réelle gourman-
dise : finesse et tension, très
belle touche fumée, beaucoup
de vivacité et une longue
rémanence sur des notes de
cire d’abeille. On souhaiterait
que le bel exemple de Samuel
Tinon soit suivi et l’élevage
sous voile réhabilité dans
le vignoble de Tokaji !
16/20
AZIENDA AGRICOLA
BARRACO
IGT Terre Siciliane Alto Grado 2009
Italie. Défini comme « pre-Bri-
tish » par Nino Barraco, voici un
grillo de Marsala récolté en sur-
maturité puis élevé en condi-
tions oxydatives. Saveur ronde,
noix grillée, facette saline, belle
tension. Moins oxydatif mais
offrant une captivante richesse
aromatique, faite de datte, de
figue sèche, de fleur d’oranger,
le Zibbibo 2017 (muscat
d’Alexandrie) se fait également
remarquer par son profil
à la fois sec et opulent.
16/20
BODEGAS
ALBA VITICULTORES
Manzanilla 2014
Espagne. Fernando Angulo
Les Dégustations
Vins oxydatifs
Sec, tranchant,
ce rancio
du Priorat
possède un
superbe nez
épicé, très
intense.
D. R.
est un jeune vinificateur qui
secoue la région conservatrice
de Jerez avec de nombreuses
cuvées audacieuses issues du
palomino fino, non mutées,
parfois débordées par l’acidité
volatile, joyeusement carac-
térielles… Cette manzanilla
illustre l’originalité du propos,
avec de subtiles tonalités
d’amande, de fleurs séchées,
de cuir frais, une chair vivante
et élégante, débarrassée
du corset de l’alcool.
16/20
CRITTENDEN ESTATE
Mornington Peninsula
Cri du Cœur 2015
Australie. Ce savagnin sous
voile australien nous est pré-
senté par Georges Dos Santos,
caviste lyonnais bien connu,
qui en assure la distribution.
Dégustée sur trois millésimes,
cette cuvée illustre la force
du cépage : son identité est
affirmée même aux anti-
podes. Le savagnin conserve
sa vigueur, sa fougue un peu
sauvageonne, cependant
tempérée par des tonalités lac-
tiques affirmées, une largeur
accrue et une pointe de dou-
ceur fort séduisante. 42 €
Les coordonnées des domaines en page 117
120 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
16/20
DOMAINE
HAUT-CAMPAGNAU
VDF Montis Regalis 2016
France. Trublion au cœur de la
Gascogne viticole, on connaît
de Dominique Andiran les bra-
vades, ou plutôt ses morceaux
de bravoure : Le Ruminant des
Vignes (oxydatif) et Pissenlits
(sous voile)… Des monuments
d’indépendance d’esprit, de
goût et d’intuition vigneronne.
On peut aussi se régaler de ce
chardonnay désormais “oxydé
par la lumière”, très parfumé,
exotique, à la fois rond, cha-
toyant et acidulé, une merveille
inattendue ! 14 €
16/20
L’ENCLOS DES BRAVES
VDF Tête en l’Air 2012
France. Il n’y a pas que le
mauzac qui prend le voile
à Gaillac ! Nicolas Lebrun
élabore un très intéressant
spécimen voilé à partir d’un
assemblage loin-de-l’œil et
sauvignon. Un vin riche, suave
quoique sec, aux contours
nets, paré de notes de noisette
fraîche et de biscuit chaud. 20 €
16/20
MARIO ROVIRA
Vino de la Tierra de Cadiz
Tosca de Lentejuela 2016
Espagne. Ce palomino fino
non muté (12,5°), élevé quinze
mois sous voile en barriques,
conjugue panache et esprit
de légèreté, avec un spectre
aromatique très séduisant, des
fruits exotiques à la camomille.
Plus simple, plus discrète,
mais extrêmement apéritive
et agréable, la cuvée Tosca
Cerrada élevée en cuves inox
est également remarquable.
Comme celle de Fernando
Angulo, cette production,
élaborée par un jeune œno-
logue de la région de Bierzo (en
partenariat avec la bodega de
Jerez Delgado Zuleta), marque
la résurgence du palomino
non muté, plus fragile car peu
alcoolisé, plus difficile à élever
sous voile que le fino
ou la manzanilla classiques.
15,5/20
DOMAINE
DE LA GRÉZILLE
Anjou La Galopinière 2003
France. Un chenin élevé
treize ans sous voile ? Mieux
qu’une curiosité, c’est un vin
riche en caractère, marqué
par le sotolon, avec de puis-
santes notes de noix grillée,
de fenugrec, d’infusion, de
foin… une matière concentrée,
solaire, riche en extrait sec,
de belle longueur, qui raconte
aussi son millésime. 35 €
15,5/20
MENADE
Vino de la Tierra Castilla y León
Sobrenatural 2015
Espagne. Cette bodega élabore
un remarquable Dorado de
Rueda (Adorado), issu d’une
solera créée en 1967. Elle s’est
en outre lancée dans une réin-
terprétation du verdejo, une
sorte de retour aux sources très
réussi, avec ce vin élevé trois
ans en conditions oxydatives,
fin et vif, évoquant le levain et
la pomme séchée, soutenu par
une fringante acidité. env. 50 €
Veloutée,
cette cuvée
de la Bodegas
De Alberto
révèle un
magnifique
caractère.
D. R.
 Les Dégustations
LES 100 BOUTEILLES MYTHIQUES
Domaine du Clos Naudin
Vouvray Goutte d’Or 1990
L’ambroisie vouvrillonne
n°8
L
e vin de Vouvray, et surtout celui qui est issu des clos
historiques de la commune, donne au chenin une
noblesse particulière. Le constat est ancien. À la
suite de Rabelais, on dit ce vin de taffetas. L’équilibre
demi-sec (jusqu’à 20 g de sucre résiduel par litre) serait
celui qui lui conviendrait le mieux. Fruits des années
généreuses, les moelleux (entre 15 et 45 g/l de sucre)
participent du même esprit. Filons encore la métaphore
textile, citons Paul de Cassagnac, qui en 1927 parlait
d’une liqueur contenue, qui « est dans le vin non point à dose
massive, mais comme un tulle léger, transparent, qui laisse aper-
cevoir tout son charme, et permet à l’arôme si complet, si délicat,
de se développer librement ». C’est remarquablement dit.
LA GRÂCE DU BOTRYTIS TOURANGEAU
Plus rares encore que les moelleux, les vins liquoreux
(au-delà de 45 g/l de sucre) conservent presque
miraculeusement le caractère aérien, la grâce
propre au cru tourangeau. C’est peut-être ici
que la thaumaturgie du botrytis atteint son
paroxysme. Certaines cuvées exceptionnelles
sont attendues comme le passage des comètes,
bien que leur périodicité soit beaucoup plus
aléatoire que celle des astres voyageurs !
Le terme “Goutte d’Or”, imagé au possible,
est parfois utilisé par les producteurs vouvril-
lons pour singulariser de tels avènements. Si
en Bourgogne les Gouttes d’Or sont devenues
un climat (célèbre Premier cru de Meursault),
le nom n’est en Touraine que commercial.
Venons-en au plus recherché des vins
de Vouvray, la Goutte d’Or du domaine du
Clos Naudin. La famille Foreau a produit ce
liquoreux (car avec plus de 300 g de sucre
résiduel ce nectar est bien un liquoreux et
non un moelleux comme le mentionne l’éti-
quette) pour la première fois en 1947. Il a fallu
attendre 1990 pour voir une deuxième incar-
nation, puis 2011, puis enfin 2015. Le miracle
n’est jamais certain. Si la grandeur des raisins,
souvent vendangés tardivement sans être
systématiquement issus de la dernière trie,
indique la route à suivre, et si le lot est vinifié à
part, la décision de « faire une Goutte d’Or » n’est
D. R.
prise qu’à l’issue de la fermentation.
LA RVF N° 639 - MARS 2020 - 121
Ceux qui ont goûté la Goutte d’Or 1990 ne peuvent pas l’ou-
blier. Sa concentration vertigineuse devient presque anecdo-
tique tant le vin rayonne, dans une vibration de saveur
totale qui va jusqu’aux fruits rouges, framboise ou
groseille, tout en restant Vouvray, avec ses notes carac-
téristiques de tuffeau, de coquille d’huître… Botrytis
extrême mais pureté séraphique, envol d’une expres-
sion qu’aucune note de “champignon” ne vient trou-
bler. Ce vin transcendant existe bel et bien, il n’a pas
été produit en quantité négligeable, comme peuvent
l’être certains grands liquoreux allemands. La produc-
tion dépasse les 6 000 bouteilles, soit trois fois plus que
les Goutte d’Or 2011 ou 2015, millésimes à l’équilibre
moins riche.
J’ai eu la grande chance de goûter cette merveille à
plusieurs reprises. Elle n’est nulle part aussi émou-
vante que dans les caves de la famille Foreau, sous
les vignes du premier coteau de Vouvray.
UNE MÉDITATION TROGLODYTIQUE
Tellurique, cette dégustation sollicite plusieurs
dimensions. D’abord celle de la richesse en
sucre, clef de voûte des terroirs septentrio-
naux. Certaines années ne permettent de
produire que des effervescents et des secs.
D’autres sont si favorables que les cuvées
liquoreuses se multiplient, comme l’extra-
vagant millésime 1947 qui a vu naître au Clos
Naudin, outre la Goutte d’Or, deux cuvées
parcellaires : Bonnet Rouge (parcelle mainte-
nant incluse dans Le Haut-Lieu du domaine
Huet) et Perruches. Car après sa variabilité,
ses caprices, vient la verticalité du temps : la
capacité des chenins de Vouvray à évoluer
au fil des décennies, à se patiner (pâte de
coing et épices), tout en restant eux-mêmes,
incomparables.
Sommet du labeur vigneron, cette cuvée
Goutte d’Or invite à une méditation troglo-
dytique sur la transmutation complexe des
vertus du sol par la vigne, des vertus du raisin
par le botrytis, des vertus d’un raisin botry-
tisé exceptionnel par l’homme, au fil des
générations.
Pierre Citerne
 Les Dégustations
DÉBAT AUTOUR D’UNE BOUTEILLE
Domaine Laroque d’Antan
Karine Valentin IGP Lot Néphèle 2018
Un cahors, tu plaisantes ?
L
es spécialistes des sols Claude et Lydia Bourguignon
ayant croisé Olivier Poels lui ont fait déguster une
bouteille de leur IGP Lot du domaine Laroque
d’Antan. Lorsqu’Olivier suggère à son tour à Karine Valentin
de goûter ce blanc pour en débattre, celle-ci n’hésite pas
une seconde. Elle l’avait d’ailleurs découvert l’an dernier,
dans la confidentialité d’un repli du terroir cadurcien.
D’entrée de jeu, l’expression juste de ce vin les réunit.
Karine Valentin. Je peux te poser une question Olivier :
pourquoi le Lot ?
Olivier Poels. J’ai une affection particulière pour cette
région de Cahors. À mes yeux, c’est un pays de cocagne…
KV. Tu penses au foie gras !
OPls. Et aux truffes, mais pas seulement. J’y suis allé
souvent pour la gastronomie, car on ne s’arrête
pas qu’au vin là-bas. On y mange bien, on y boit
remarquablement bien. Mais je dois dire qu’ici,
c’est l’histoire de ce vin, le projet un peu fou des
Bourguignon de créer ce domaine, qui m’a séduit
et impressionné. Il aura fallu à ces deux pion-
niers plus de quinze ans pour que sortent les
premières bouteilles.
KV. Tu me mets l’eau à la bouche. Parle-moi de
ce projet.
OPls. Claude et Lydia Bourguignon ont toute
leur vie ausculté et étudié les sols des plus
grands vignerons français. Un jour, ils se sont
dit : « Pourquoi pas nous ? ».
KV. Tu veux dire qu’ils ont eu envie de devenir
vignerons ?
OPls. Exactement. Arrivant dans le vignoble
de Cahors dans la foulée d’Alain Senderens
et d’Alain-Dominique Perrin, deux illustres
prédécesseurs, ils ont décidé de se lancer à leur
tour, de replanter et de tenter de produire là
un grand vin.
KV. Donc, ce n’est pas vraiment original ?
122 - LA RVF N° 639 - MARS 2020
Olivier Poels
OPls. Un projet comme celui-là, je n’en ai pas vu beaucoup
dans ma carrière. Il y a aujourd’hui six hectares plantés en
blanc et en rouge. Et après un premier millésime 2017 très
confidentiel, 2018 marque le véritable démarrage du projet.
Je leur tire mon chapeau.
KV. C’est vrai qu’il y a un côté émouvant face à ce type de
vins. Heureusement qu’il existe encore des vignerons
un peu fous pour se lancer de cette façon. Ils contri-
buent à savegarder la diversité des goûts de nos vins
français. As-tu aussi dégusté le rouge ?
OPls. Oui, je l’ai goûté en compagnie d’Érik Orsenna,
lui-même grand amateur de vins bien qu’auteur d’un
livre sur l’avenir de l’eau. Nous avons été bluffés. Le
blanc affiche une finesse incroyable, qui révèle ce beau
terroir calcaire. Le rouge est tout aussi remarquable.
KV. En quoi ces vins se distinguent-ils ?
OPls. Ils proviennent de sélections massales.
Mais pas n’importe lesquelles. Dans ce blanc,
cuvée Néphèle, les sauvignons blancs viennent
de chez Cotat, dans la Loire. Les Bourguignon
ont aussi choisi du sauvignon gris chez Elian
Da Ros, à Marmande. Les mauzac et verdanel
viennent de chez Plageoles, à Gaillac. Des
vignes plantées à haute densité et conduites
en biodynamie.
KV. Le sauvignon blanc entre pour moitié
dans l’assemblage, et pourtant : il ne marque
pas le nez. À l’aération, il ressemble même à
un grand chardonnay qui évolue de minute
en minute dans le verre. Les caractéristiques
d’un blanc né sur des calcaires fissurés très
drainants. Et même si l’on sent le passage
dans le bois, le vin reste droit. Dans la préci-
sion de son terroir de coteaux d’altitude, soit
300 mètres. Olivier, aurais-tu imaginé ce vin
à Cahors ?
OPls. Absolument pas. Je suis bien incapable
T. Legay / D. R.
de le situer à l’aveugle, il est si original en
termes de saveurs. On ne rencontre pas ce
nez-là souvent. Je suis content qu'il te plaise.