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Blog Note(S)

La lettre de Conservatoires de France


N° 39 - Février 2011

EDITO

Trop de solfège… Encore ?


question du journaliste : « on Mais à travers cette façon lapidaire
pourrait savoir pourquoi l’art n’est de résumer la situation de l’ensei-
eptembre 1981, Le Monde pas enseigné à l’école ? », sa réponse gnement musical en France, se

Sommaire n° 39
S de la Musique-Télérama :
«N’ayez plus peur du
solfège !»
tombe comme un couperet : « trop
de solfège… » « Et pourtant c’est in-
dispensable, on est bien d’accord …»,
profilent aussi d’importantes
questions de fond :

Image de couverture : sur un ajoute-t-il immédiatement. • Quelle place occupe réellement


1 EDITORIAL
vieux plancher, une petite souris aujourd’hui la formation mu-
2 TERRITOIRES s’apprête à grignoter un morceau Rappelons-nous : en 1981, la sicale dans nos établissements ?
Apprendre à parler avant
de gruyère posé sur un piège. Sous réforme du « solfège » avait été
d’apprendre à lire : une cet animal au destin prévisible, le officiellement décrétée depuis • Quelles résistances doit-elle
piste pour l’apprentissage titre de l’article qu’il illustre : quatre ans. Dans les écoles de affronter ? Pourquoi, malgré
instrumental « N’ayez plus peur du solfège ! ». musique, on pouvait -devait- l’évolution indéniable de la disci-
Pour appuyer cette accroche sug- désormais, en lieu et place de cette pline dans la plupart de nos
4 MÉTIER gestive, le morceau de fromage est discipline poussiéreuse, faire enfin établissements, l’ombre d’un
Notre test : Face à la estampillé de deux portées mu- de la « formation musicale ». « solfège » poussiéreux ressurgit-
formation musicale, sicales (les premières dictées à elle toujours avec obstination ?
quel(le) directeur(trice)
trous ?).
êtes-vous ?
S’étalant sur les deux premières Ces questions tiennent une place
6 DOSSIER pages de l’article : un avant-bras, Qu’en est-il importante, parfois centrale, dans
Du solfège à la formation une main, et un doigt pincé dans la vie de nos établissements et
musicale : une valse de le fameux piège à souris… quelque 30 ans dans nos préoccupations de direc-
trente temps… Nous y sommes : « L’écueil principal après ? teurs. C’est donc un numéro
de l’enseignement de la musique, la spécial que nous leur avons
16 NOUVELLES
bête noire, c’est le solfège. En France Un ministre de la culture s’exprime consacré, en donnant la parole à
• Publications
tout particulièrement, où la péda- sur les ondes. Venant d’un respon- des enseignants, professeurs de
• Le collectif de réflexion gogie officielle est conservatrice. » sable qu’on suppose informé sur formation musicale ou d’instru-
sur les enseignements les questions qu’il aborde pu- ment, à des responsables pédago-
artistiques
anvier 2010, sur France-Inter : bliquement, le propos agace :

J
giques, à des directeurs d’établis-
• Tribune libre : Inventer «Trop de solfège ! » Frédéric aurait-on oublié de lui citer tous sements. Pour montrer que la
l’avenir
Mitterrand, ministre de la les conservatoires où la réforme situation n’est pas toujours noire…
• 3-4 février : Journées culture et de la communication, initiée par le ministère qu’il dirige ni blanche !
d’études de CdF
évoque la nécessaire « redynamisa- a été à l’origine de changements
• Bulletin d’adhésion 2011 tion ou réorganisation du système de parfois radicaux dans les dispositifs A lire, à déchiffrer et à analyser…
20 REGARD l’éducation musicale en France à d’apprentissage ? A qui la faute si
La spécialisation d’une travers les conservatoires et peut-être cette réforme n’a pas été partout Sophie KIPFER, directrice de
musicienne généraliste même à travers les écoles ». A la appliquée ? l’Atelier musical de l’Oise

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE


TERRITOIRES
TERRITOIRES

Apprendre à parler ava


une piste pour les débuts de
David Lacroix est compositeur,
professeur de guitare et de
musique d’ensemble au
conservatoire à rayonnement
communal de Bondy. Il a choisi
de fonder exclusivement sur
l’oralité l’apprentissage de la
guitare aux élèves débutants.
Enfants, adolescents ou
adultes, ceux-ci abordent
ILLUSTRATION : LAURE DEL PINO

l’instrument le plus longtemps


possible sans aucun support
écrit. Un choix qui se révèle
positif pour tous les élèves…
comme pour le professeur.

Expliquez-nous votre démarche Qu'est-ce qui change de global : une période, une phrase, un
Notre travail est entièrement basé sur fondamentalement ? modèle rythmique. C'est ce ressenti et
l’oralité. Il n'y a aucun support écrit et En tant qu'enseignant, j’ai plus encore cet imaginaire tangible qui leur permet-
ce, le plus longtemps possible. Ce « tout pris conscience des questions de posture tent d'avancer avec l’instrument.
oral » pour les débutants est parti d’un dans le mouvement, de la façon dont le
travail avec un binôme d’élèves de corps répond ou non pendant le jeu Quel travail alors de mémoire ?
guitare dont l'un avait des problèmes de instrumental lui-même. Il y a plusieurs phases dans ce travail de
compréhension liés à la langue et l’autre L'élève est libéré des consignes par mémoire qui ne sont pas chronolo-
était très scolaire et appliqué, différant rapport à la partition, habituellement giques : mémorisation par le chant,
tout ce qui pouvait lui faire jouer de la placée entre le professeur et l'élève. mémorisation de la pulsation, mémori-
guitare. Il fallait que je trouve entre eux Parlée ou jouée , la consigne s’adresse sation des gestes, mémorisation des
un terrain commun d'exploration pour directement à l'élève en train de jouer, notes. On se promène et on découvre
qu’ils continuent à travailler ensemble : sans qu’il soit question d’une restitution qu’il y a plusieurs mi, plusieurs sol, etc. :
j’ai supprimé cahiers, papier musique et « idéale » d'un texte représenté sur un ils apprennent les positions, la différen-
partitions. Cette première expérience support extérieur. Le sens que l'élève ciation des registres.
initiée il y a trois ans a été très positive et trouve à ce qu'il fait devient prioritaire.
a modifié mon regard sur les élèves. Et la partition ?
L’échange avec eux est plus intense Quels sont alors vos supports ? On complète le travail sur les chansons
humainement et musicalement. J'ai Le support vient de la mémoire. Du par une mémorisation de morceaux que
constaté aussi que les élèves se coup, j’ai tendance, à leur faire chanter j'invente pour eux ou tirés d’un ouvrage.
tournaient plus facilement vers eux- ce qu'ils jouent avant et pendant le jeu. Avant de se servir d'une partition pour
mêmes de cette façon, acceptaient Les bases s’acquièrent comme ça ; ils ont déchiffrer, ils vont découvrir dans le livre
mieux de se regarder, de s'écouter. alors une notion vécue de quelque chose des morceaux qu’ils ont déjà joués. Ils

2 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


TERRITOIRES
TERRITOIRES

ant d’apprendre à lire :


l’apprentissage instrumental
vont voir comment cela s’écrit, comment écrites dans leur vie personnelle et court à l’échec, sauf peut-être dans le cas
cela marche dans la codification : ils professionnelle qu'il est difficile pour d’élèves extrêmement scolaires, spéciale-
auront appris à parler avant d’apprendre eux de quitter cette habitude. Pourtant, ment « appelés » par l'écriture ou très
à lire. J'aurai utilisé –et leur aurai fait ils progressent très vite en faisant acculturés à l’écrit -ce qui est de moins en
utiliser– le nom des notes, les mots fonctionner leur mémoire auditive, et la moins le cas pour nos élèves qui viennent
« chanson », « poésie », « image », « fond», mettent en relation avec leur culture. du monde entier. En inculquant parfois
« film au ralenti », « premier plan », trop tôt la codification solfégique
« phrase », « paragraphe », « période », Qu'est-ce qui est le plus occidentale, on a l'illusion de gagner du
« respiration », « rythme »… Je me sers impressionnant ? temps. Mais on se rend compte –trop
beaucoup de leurs habitudes d’appren- Les élèves chantent tout le temps et tard !– que l’apprentissage du détail de
tissage et leur façon d’utiliser la surtout ils apprennent à écouter. C’est la codification retarde la prise de
mémoire à l’école primaire. Tout ce qui tout à fait spectaculaire. Un des défauts conscience globale.
est spécifiquement musical est ainsi reçu fréquents chez les petits guitaristes est
d'abord par imprégnation et certaines qu’ils ne soutiennent pas le son : une fois Certains résistent ?
choses difficiles à appréhender par l'écrit joué, le son est oublié au profit du Oui bien sûr, certains ont du mal à
avec une autre approche, deviennent suivant, tout est haché. En apprenant sans accepter ce travail de mémoire. Alors,
une simple formalité dans la transmis- partition, on rencontre moins ce problè- j’explique que « sur la planète, 5 % des
sion orale. Quand je rentre dans l’expli- me car ils se concentrent sur le son : ils musiciens pratiquent la musique en la lisant,
cation du code, celui-ci représente ce ferment les yeux, ils essaient de faire des 95 % la pratiquent de mémoire, y compris
qu’ils savent déjà jouer et pas l’inverse. différences, d'améliorer, l’oreille est le pour des musiques très complexes comme
Le livre est, durant cette première année moyen de contrôle privilégié. Même les musiques indienne ou arabe » ! Je
de découverte, un pense-bête et non la chose pour la pulsation, pour la conduite retarde le moment de parler de l’écrit, le
base de l’apprentissage. d’une petite phrase : ils se rendent beau- moment viendra lorsqu’ils sauront déjà
coup mieux compte, ils sont plus libres parler en musique.
Quel que soit l'âge ? d'écouter le résultat sonore de leur jeu.
Je fais le même travail avec les ados et les En conclusion ?
adultes : on aborde directement des Quel serait votre « idéal » ? Il nous reste des séquelles de nos vieux
morceaux assez évolués sur le plan des Retenir quelque chose de vivant pour apprentissages ... Ainsi, on serait toujours
gestes (opposition grave–aigu par avoir une compréhension de son geste, « bête » jusqu’à ce qu’on devienne un
exemple). Cette démarche nouvelle dans de sa phrase : un arpège de trois notes « maître », il nous faudrait posséder un
ma pédagogie m’a fait quitter une c’est très joli, une opposition d’un grave certain bagage technique, un certain
routine ; on aborde les gestes oralement et d’un aigu c’est très joli aussi et simple vocabulaire avant d’accéder à la possible
car on n’a plus le problème du « deux à faire : lire cela d'emblée prendrait un mais toujours hypothétique « maîtrise », ce
voix » à lire : la phase didactique concer- caractère de difficulté inversement qui renvoie aux calendes grecques toute
nant l’apprentissage des cordes à vide, proportionnel à la simplicité du geste chance de réussite ! Bien des musiciens
de la codification des doigtés, est mise musico-instrumental nécessaire. Mon sont alors complexés toute leur vie,
de côté : on rentre immédiatement dans idéal serait de pouvoir fonctionner le plus convaincus plus ou moins consciemment
un apprentissage global du jeu instru- longtemps possible avec la mémoire, et que ce paradis de la maîtrise serait
mental, les deux mains ensemble, cela va d'aborder le code seulement une fois que réservé à des individus exceptionnels.
sans dire ! Cela marche très bien pour les les élèves sont capables de le réaliser Alors qu’à tous les stades de son appren-
adolescents aussi ; avec eux j’invente des musicalement. Celle-ci pourra alors tissage on peut donner un sens à ce qu'on
pièces basées sur un monde modal et devenir presque « naturellement » un joue et être vraiment musicien, avec
stylistiquement influencées par la support pour découvrir de la musique confiance : là réside peut-être la véritable
musique hongroise ou espagnole. Avec qu’on ne connaît pas, et même pour en maîtrise ?
les adultes c'est moins « direct » : ils sont inventer en l'écrivant. Si l'enseignement Propos recueillis
tellement habitués à des consignes de la codification est un préalable, on par Rebecca Miqdel

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MÉTIER
MÉTIER

NOTRE

Face à la formation musicale,

S
i certain(e)s directeurs(trices)
trouvent que les professeurs
de «solfège» ont du mal à
Vous avez rendez-vous avec un parent dont l’enfant
souhaite « arrêter la musique à cause du solfège » faire évoluer leur discipline, d’autres
Vous pensez : s’appuient au contraire sur les
❍ Il fait du chantage, les parents ne devraient pas céder professeurs de formation musicale pour
▼ Vraiment, le solfège est un problème dans mon faire bouger leur établissement. Ici, ils se
établissement battent pour l’emploi du mot «formation
■ Et bien, qu’il arrête, ce n’est pas plus mal musicale». Ailleurs ils continuent à parler
✦ Vous pensez parfois comme ci, parfois comme ça,
de «cours de solfège», par scepticisme ou
ou autrement
par ignorance, par habitude ou sim-
Un professeur d’instrument se plaint : « mais qu’est- plement par commodité (deux syllabes à
ce qu’ils font en solfège ? » prononcer contre six !).
Vous répondez :
Et vous, quelle attitude adoptez-vous ?
■ Le solfège n’existe plus, vous le savez bien. On peut le
regretter, sans doute…
✦ Avez-vous assisté à des cours de formation musicale ?
▼ Et vous, vous ne faites pas de solfège avec vos élèves ?
❍ Vous dites tout ça (selon le cas) ou rien de tout ça

Vous avez quelques heures de formation musicale à


attribuer…
▼ Vous cherchez à recruter un enseignant titulaire du DE
ou du CA de FM
❍ Vous confiez les heures au professeur de tuba
■ Vous confiez les heures à un dumiste
✦ Vous faites comme vous pouvez (ou rien de tout ça)

Vos professeurs de FM souhaitent que les élèves


apportent et utilisent leur instrument…
Vous pensez :
❍ Il va falloir aménager les salles et trouver une solution
pour que les élèves puissent quand même écrire
ILLUSTRATION : LAURE DEL PINO

■ Mais comment les professeurs vont-ils pouvoir accorder


tous les instruments ?
✦ C’est très bien, du moment qu’ils apprennent quand-
même à lire la musique
▼ Vous pensez tout ça ou rien de tout ça

4 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


MÉTIER
MÉTIER

TEST !

?
quel(le) directeur(trice)
êtes-vous
…/… Vous avez encore un « professeur de solfège »
▼ Vous attendez patiemment l’âge de sa retraite
❍ Vous mettez en place des stratégies pour « limiter
Un de vos professeurs de FM n’utilise pas de manuel les dégâts »
■ Vous craignez que ses élèves n’aient pas le même niveau ✦ Vous mettez en place des dispositifs d’échanges
que les autres pédagogiques avec ses collègues
▼ Vous lui demandez s’il souhaite que l’école achète des ■ Vous faites tout ça ou rien de tout ça
partitions de poche à étudier en cours
❍ Vous vérifiez les supports écrits dont disposent ses élèves Malgré un dispositif de FM instrumentale déjà ancien
dans votre établissement, l’évaluation des élèves en
✦ Vous pensez ou faites tout ça ou rien de tout ça
FM ne porte que sur des éléments solfégiques
Les professeurs aimeraient utiliser un nouveau Vous estimez
manuel plus attractif ✦ Que c’est le moyen de constituer des groupes de
✦ Vous considérez que derrière un habillage ludique, le niveaux « homogènes »
fond n’a pas changé ▼ Qu’il est temps de réunir les enseignants concernés
❍ Vous profitez de l’occasion pour supprimer les manuels pour revoir les critères et contenus d’évaluation
▼ ■ Vous analysez ensemble plusieurs manuels et prévoyez ■ Qu’une autre forme d’évaluation risquerait de prendre
une expérimentation trop de temps
❍ Qu’on peut y réfléchir si on n’a pas d’autres priorités
Le ministre de la culture déclare que les conserva-
toires sont mal adaptés aux besoins parce qu’il y a
« trop de solfège »
❍ Cela vous fait rire ■ ▼ ❍ ✦ : Après votre lecture du dossier, refaites le test !

✦ Cela vous étonne auxquels elles renvoient tentent différents éclairages.


■ Cela ne vous surprend pas ✦ Les pages qui suivent et les articles ou témoignages
▼ Cela vous étonne sans vous surprendre, cela vous fait rire ❍ Peut-être même est-ce la nuance qui les caractérise…
mais au fond vous fâche musicale » sont rarement simples, jamais univoques.
sement, les rapports avec la discipline « formation
Un élève de votre établissement qui souhaite ▼ Car si une chose est claire, c’est qu’au sein d’un établis-
poursuivre son cursus dans une école plus impor- dans une typologie forcément réductrice.
tante craint de ne pas avoir « assez de bases » réponses, ni l’envie d’enfermer l’un ou l’autre collègue
✦ Vous lui indiquez quelques manuels à potasser tout seul pour établir des portraits-robots en fonction des
■ Bravo, mais en fait, nous n’avons ni les compétences
▼ Vous lui faites prendre conscience des bases qu’il a déjà
acquises
Vous avez une majorité de ■, de▼, de ❍ ou de ✦ …
❍ Vous en parlez à son professeur pour qu’il le « prépare »
■ Vous faites tout ça et vous le prévenez néanmoins qu’il REPONSE
sera peut-être pris « dans un niveau au-dessous »

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DOSSIER

Du solfège à la form
une valse
1977, la « réforme du solfège » : qui s’en souvient ?

En souhaitant que le « solfège » soit remplacé par la « formation


musicale », le ministère de la Culture s’appuyait sur plusieurs
constats (1) :
• le cloisonnement de la discipline, « à l’origine
associé aux études instrumentales »,
• l’absence de « substance musicale »,
création
• « la connaissance très partielle des rm e co ïnci dait avec la
Le texte de
la réfo mier CA
langages musicaux » offerte par le at io n musicale », pre
rs de fo rm rmais les
d’un « concou q u i re m plaçait déso
matériel pédagogique utilisé. dans cette d
isciplin e, de méthodes
de solfège et
rs (2) distincts
deux concou
actives. récisant le
Par ailleurs, il fallait trouver une é d ’u n document p n
Il était acco
mp ag n de formatio
troisième voie entre les pratiques des ro g re ss io n des études nt e q ui
la p gie viva
contenu et sant l’esp ri t de pédago e.
« spécialistes » du solfège et celles des éfinis de cette disci
plin
musicale et d nseignement
si der à l’e ances de
partisans des méthodes actives. devait p ré
is e en place d’inst
t enfin la m l’organi-
Les premiers, « tout en pratiquant, Il préconisai se m en t, et annonçait
s chaque étab
lis ion et de
réflexion dan n , d e stag es d’informat
dans le meilleur des cas, une pédagogie chaque régio rs déjà en po
ste.
sation, dans l’u sa g e des professeu
en t à
permettant l’acquisition d’une haute perfectionnem
technicité solfégique », avaient « oublié la
finalité essentielle de cet enseignement ».
Les seconds, malgré « la valeur réelle technique et philosophique
de ce nouvel esprit pédagogique », n’étaient pas à l’abri des
« incompétents » utilisant « une pédagogie “riante” mais ne
comportant aucun prolongement sérieux ».

Car au fond, comme le rappelle alors le document, « le but à


atteindre » est bien « la connaissance et l’apprentissage de la
musique », lesquels ne peuvent s’accomplir qu’en partant de la
musique même, et non à travers « une étude analytique abstraite,
élément par élément, desséchante par définition ».

1) Les citations en italiques sont extraites du texte de la réforme du solfège, document ministère
de la Culture, 1977. Document en ligne sur le site Internet de Conservatoires de France
2) A l’époque il ne s’agissait pas d’examens, mais bien de concours.

6 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


ation musicale :
Dossier réalisé par
Jean-Marcel et
Sophie Kipfer

de trente temps
Le dispositif actuel de formation mis en
place dans les établissements spécialisés
d’enseignement artistique repose sur un
trépied : la formation instrumentale, les
pratiques collectives, la formation musi-
cale générale. L’articulation entre les
trois disciplines procède d’un équilibre
difficile dont l’élève, voire les profes-
seurs, ne perçoivent que difficilement la
cohérence.

Problématique…
La formation musicale permettrait, selon
certains, de « préparer » les jeunes élèves
à la formation instrumentale grâce à un
apprentissage systématique de la lecture
et des notions théoriques.
Pour d’autres, la diversité des approches
des pratiques instrumentales, notam-
ment dans les domaines de la lecture, du
répertoire etc., requiert nécessairement
la participation du professeur d’instru-
ILLUSTRATION : LAURE’ DEL PINO

ment.
Les pratiques collectives, quant à elles,
viennent se greffer, généralement dès la
deuxième ou troisième année d’étude,
sur ce dispositif bipolaire initial, avec,
entre autres, comme conséquence
immédiate, un 3e aller-retour maison/
La formation musicale conservatoire pour les parents des élèves.

dans les conservatoires Comme tout dispositif, celui-ci est


perfectible, et les dysfonctionnements
par Stéphane Forlacroix, conseiller aux études au CRR de Poitiers qu’il ne manque pas de générer (démoti-
vation des élèves, manque de cohérence
ommes-nous conscients que notre que et des «machines», ont drainé une entre les cours…) sont dénoncés tantôt

S dispositif d’éducation en matière


de musique repose sur des
schémas obsolètes, se demande Stéphane
modification des pratiques culturelles, des
besoins et des demandes de formation.
Autant de bouleversements qui nous
par les professeurs eux-mêmes, tantôt
par les parents (pour d’autres raisons
sans doute) et par les élèves enfin.
Forlacroix. Pour cet ancien professeur de invitent à revisiter voire repenser les
formation musicale, les progrès technolo- contenus de nos apprentissages et l’orga- Il est pour habitude d’attribuer la cause
giques des moyens de diffusion et de nisation pédagogique au sein de nos de ces dysfonctionnements allant jusqu’à
communication, l’avènement du numéri- établissements. la démission de certains élèves au cours

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DOSSIER

de formation musicale (sous le vocable musicales offertes dans nos établisse- L’ouverture du champ esthétique de nos
« solfège », maintenu avec insistance ments, se révèle une véritable fracture. enseignements (trop longtemps limités
dans le vocabulaire usuel), considéré On oublie trop souvent que l’orientation au champ restreint de notre « musique
comme démotivant, sans relation avec esthétique de nos enseignements est, la classique ») vers les musiques extra–
les autres pratiques suivies au conserva- plupart du temps, bien loin du champ européennes, les musiques amplifiées,
toire. Avec l’expérience, nous pouvons d’expérience des élèves. Plus encore que l’électroacoustique… a déjà eu lieu.
dénoncer cette charge facile. Le cours de la notion de champ esthétique, leur Mais combien de nos établissements
formation musicale, bouc émissaire façon de vivre le « musical », via You Tube proposent de commencer les études
lorsqu’il s’agit de justifier un musicales en abordant le son
échec, n’est pas ce cours insipide plutôt que la note (un peu comme
que certains, par ignorance, fusti- Il serait temps que les professeurs de si les premiers cours de danse
gent. Bien au contraire, dès le commençaient par étudier les
formation musicale s’approprient les
début des études, il s’agit souvent positions avant de travailler sur
du cours où l’on pratique la nouveaux moyens technologiques de une conscience du corps) ?
musique dans sa globalité (3). diffusion, d’enregistrement et de prise de Combien ont pris la mesure de
cette évolution en reconsidérant
son, d’écriture et de composition, d’édition
Il est vain d’accuser un cours ou un les contenus et les moyens
autre d’être responsable du que manipulent souvent nos élèves. pédagogiques qu’ils mettent en
découragement de certains de nos œuvre ?
élèves. En revanche, l’inadéqua-
tion des contenus entre les différents et Internet ou un lecteur Mp3, est bien Parce que le rapport nouveau à la
cours est indiscutablement un des loin de notre conception d’adultes musique induit aujourd’hui des compé-
facteurs responsables de cette trop musiciens. Les innovations technolo- tences très diversifiées, parce que nous
fréquente démobilisation. Entre la giques induisent indubitablement un sommes dans une civilisation du zapping
pratique instrumentale et les pratiques rapport à la musique nouveau. et que s’insinue une forme de « lissage »
collectives, la liaison se fait naturelle- des cultures dûe à la mondialisation,
ment, grâce à l’instrument. Quant au Là où régnait la sacro-sainte œuvre notre rôle d’enseignant n’a sans doute
cours de formation musicale, malgré une musicale déferlent des hordes de compo- jamais été aussi passionnant. Notre
perpétuelle recherche de cohérence et siteurs en herbe, autodidactes, dont les responsabilité semble également s’être
d’unité, il ne peut répondre aux préoccu- logiciels permettent un travail sur le son accrue, et c’est bien là que des réponses
pations spécifiques de chaque instrumen- qui va parfois bien au-delà de l’expé- méritent d’être apportées.
tiste. Il faut donc admettre y apprendre rience même de leurs futurs professeurs.
des choses qui ne serviraient pas à l’ins- Les méthodes et les outils pédagogiques
trument ! Or c’est justement ce qui est n’ont d’autre choix que de s’adapter.
impossible pour un enfant. « Cela te
servira plus tard ». Cette projection est celle COUP D’ŒIL
des adultes, pas celle de nos élèves ! De l’éducation
Une autre piste de réflexion, sans doute artistique Des livres de solfège d’hier (7)
moins aisée mais selon moi plus féconde, L’éducation artistique est le lieu privi- genre « Bescherelle » …
est l’hypothèse selon laquelle les légié de l’expression personnelle, de la • Solfège des solfèges
dysfonctionnements dans le dispositif réalisation de soi. Dans un monde en
• Manuel pratique de l’étude
pédagogique proviendraient moins de quête de repères, elle recèle les germes
des clés
l’interaction au sein de ce triptyque d’une construction d’un système de
formation musicale, formation instrumen- valeurs sans lequel le vivre ensemble ne • Etude du rythme
tale et pratiques collectives que du contenu serait plus possible. (vol.1 : mesures simples,
même des enseignements et des vol 2 : mesures composées,
supports d’apprentissage. J’évoquais plus haut le nouveau rapport vol 3 : mesures simultanées)
à la musique de nos jeunes élèves. • Méthode rythmique
Entre l’attente de l’élève, souvent relayée Musique « objet » que l’on consomme à • Solfège intégral
avec force par les parents, et la réalité vélo, en faisant ses courses ou pendant
• Manuel pratique de lecture
des apprentissages et des pratiques son footing, format Mp3, format
horizontale et verticale
piraté…
3) L’immédiateté du geste vocal, contrai- S’ils veulent remplir leurs missions, les
rement au geste instrumental dont la établissements spécialisés d’enseigne-
technicité implique un apprentissage
ment artistique ne peuvent ignorer cette 7) Certains sont toujours des
préalable, permet d’emblée de se
ouvrages édités
trouver en situation musicale. évolution sociétale.

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DU SOLFÈGE À LA FORMATION MUSICALE

Des réponses… pratiques pédagogiques peut ouvrir sur plus grande diversité des langages, des
tous les types d’expériences musicales. cultures.
Dans le dispositif de formation actuelle- Loin d’être un écueil, ce cours de FM, Il serait temps que les professeurs de
ment en place dans nos établissements, particularisme français, constitue plus formation musicale s’approprient les
quel(s) cours, mieux que le cours de que jamais, pour les raisons que j’ai nouveaux moyens technologiques de
formation musicale, peu(ven)t prétendre développées plus haut, un atout indiscu- diffusion, d’enregistrement et de prise
répondre aux enjeux précédemment table dans notre dispositif pédagogique. de son, d’écriture et de composition,
décrits ? Mais sa conception obsolète, qui nous d’édition que manipulent souvent nos
Le cours de pratique instrumentale est, renvoie sans cesse au cours de solfège, élèves.
par définition, centré sur la maîtrise du masque l’opportunité qu’il représente. Si Il serait temps que nos établissements
savoir-faire… instrumental. Le professeur nous considérions un instant, que ce spécialisés se donnent les moyens de se
spécialiste, le plus souvent, limite son « solfège » dont on parle (4), ne repré- doter de ces matériels afin d’en banaliser
enseignement aux territoires esthé- sente qu’une petite partie de la réalité de l’usage dans les pratiques pédago-
tiques, géographiques et culturels ce qui est de « l’ordre musical », alors, giques.
délimités par son propre instrument. Les nous serions à même d’entrevoir les Qu’est-ce qui est si motivant pour un
pratiques collectives instrumentales formidables ressources que peut repré- élève de 1er cycle (ou de 2nd cycle)
réduisent encore le champ culturel senter ce cours. lorsque le professeur vient avec un micro
abordé, par la nature même des forma- et un ordinateur ?
tions envisagées (consorts, orchestres Point d’allégeance à quiconque, le cours Ce n’est pas seulement parce que l’élève
d’harmonie ou symphoniques, ensem- de formation musicale participe à la se retrouve en terrain plus ou moins
bles de jazz, groupes de musiques construction de l’élève musicien en lui familier, mais surtout parce que l’objet
actuelles…). faisant aborder, par la pratique (5), la micro/ordinateur agit comme objet
médiateur entre l’élève et son désir.
Seul le cours de formation musicale 5) Le chant collectif, dès le début des
Là où le cours de formation musicale,
propose un lieu où la diversité des études permet ce rapport direct avec pénalisé par l’absence de l’objet
de multiples expériences culturelles, Instrument (lors des premières années
esthétiques ou de langages diffé- d’études), perd son attrait, voire de son
4) Est-il besoin de rappeler que la rents. Le travail sur le son (timbre,
lecture, notamment au début des intensité, attaques…) notamment
sens, se substituent d’autres outils de
études de musique, est un domaine avec l’aide d’un dispositif électroa- recherche de plaisir et de découverte
dont l’apprentissage est générale- coustique élémentaire (micro/ordina- conformes à l’attente des élèves.
ment pris en charge par le profes- teur), suscite un engouement
seur d’instrument ? immédiat chez les jeunes élèves.
S’il ne suffit pas d’avoir à disposition des
« machines » pour garantir la qualité ou
la pertinence des contenus d’un cours,
celles-ci laissent entrevoir de réelles
A titres indicatifs… perspectives pédagogiques.
La formation des futurs professeurs de
formation musicale, doit tenir compte
… aux manuels de formation musicale d’aujourd’hui : des évolutions technologiques et
des titres pour rassurer, amuser, intriguer, séduire proposer dans ces domaines de
• Ma 1re (2e, 3e…) Année de formation musicale véritables modules de formation.
Au-delà de leurs compétences habi-
• L’Heure de formation musicale
tuelles, il est nécessaire qu’ils soient
• La formation musicale par le répertoire vocal formés à l’utilisation des logiciels de
• Du Solfège sur la FM 440 traitement du son (6), aux nouvelles
• On aime la FM lutheries et aux innovations techniques
• Planète FM touchant leur domaine.

• Prends ton tempo


Aujourd’hui encore, l’évaluation en
• De l’élève à l’artiste formation musicale se focalise sur la
• 1,2, 3, Soleil. De l’initiation à la formation musicale vérification de compétences solfégi-
• Hector l’apprenti musicien ques : lectures rythmiques spécifiques,
dictées à parties manquantes, relevés de
• La Magie de la musique
toutes sortes… Rien à ma connaissance
• Mille et une ouïes
• De l’opus à l’oreille 6) Logiciels souvent gratuits, téléchar-
geables sur Internet.

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 9


DOSSIER

La forme,
La formation musicale dans les
conservatoires (suite de la page 9)

dans l’évaluation de « l’intelligence

le fond …
musicale » de nos élèves ne met en jeu
des savoir-faire liés aux technologies
nouvelles !

Les compétences jugées hier secon-

et le nom
daires, aujourd’hui transversales (prati-
que complémentaire du clavier, du
chant, de la direction d’ensemble, initia-
tion au traitement du son, etc.) demain,
je l’espère, constitueront le fond des
savoir-faire des professeurs de formation Plus de trente ans après la réforme du solfège,
musicale.
François Branciard, coordinateur pédagogique au CRC
Enfin, et pour rappeler l’urgence de de St-Herblain, s’interroge sur les raisons de son échec
cette « révolution » de nos conceptions, il à s’accomplir pleinement. Il tente d’apporter des
n’y a pas plus grands débouchés que
ceux en rapport avec cette notion large éléments de réponse en examinant les points suivants :
de la formation musicale dans les la forme, le fond… et le nom.
métiers de la musique auxquels prépa-
rent (ou devraient préparer…) les études
menant au diplôme national supérieur Premièrement importantes de cette réforme, qui
professionnel de musicien (DNSPM). aboutit aux discours que l'on connaît,
la forme : d'une part des professeurs d'instrument
En conclusion Avant la réforme, l’élève venait à un qui s'écrient « Mais qu'est-ce que vous leur
« cours individuel d'instrument, un cours apprenez en solfège ? Mes élèves ne sont
La tentation de résoudre les difficultés collectif de solfège, et (peut-être) à un cours pas capables d'aligner quatre notes sur le
engendrées par notre dispositif pédago- d'ensemble ». Après la réforme l'élève rythme “noire - deux croches - noire” ! Ils ne
gique en supprimant le cours de forma- vient à un « cours individuel d'instrument, savent pas qu'une blanche vaut deux temps
tion musicale peut être séduisante. La un cours de formation musicale, et (peut- et que 4/4 désigne une mesure à quatre
principale objection que l’on pourrait être) à un cours d'ensemble » ! Les profes- temps ! », et d'autre part des élèves ou
faire à cette proposition, c’est qu’elle ne seurs, comme les élèves ou les parents parents d'élèves qui, face aux discours
résout rien, et surtout pas la question d'élèves, ne sont ainsi pas incités à divergents entre professeurs d'instru-
cruciale de la formation musicale au sens mesurer et à appliquer l'ampleur de ce ment et de formation musicale, prennent
général. changement puisque la forme des cours position contre la formation musicale,
reste identique ! soit parce que le solfège est ennuyeux,
La plus grande révolution à faire n’est soit parce que justement on n'apprend
pas celle qui consiste à « couper des Il est donc d'autant plus facile de dire : plus à lire les notes en solfège.
têtes », mais bien celle de nos concep- « Une réforme de plus ! C'est une habitude,
tions pédagogiques. Le temps des cours une mode de toute nouvelle personne au Deuxièmement le
de solfège ne peut plus être. Ce sont les pouvoir. Tout nouveau ministre doit
réactions à cette évidence qui perpé- proposer sa réforme, ça change le vocabu- fond : pourquoi
tuent ce « mal vivre » de l’enseignement laire mais en pratique on se contente de continue-t-on à
musical dispensé dans les conservatoires. parler des mêmes choses avec d'autres
parler de « cours de
Qu’on ne me parle pas de cours de mots ». Résultat : 33 ans après, les élèves
culture, d’analyse… avant le temps de la comme les professeurs parlent encore du solfège» en 2010 ?
spécialisation. C’est bien dans une « cours de solfège ». La réponse est une question : qu'est-ce
globalité dans laquelle se fond une que la « formation musicale », ou encore
diversité de contenus que doit se situer Le professeur d'instrument quant à lui la « formation musicale générale » ? Si
l’acte pédagogique à destination de nos peut continuer ses pratiques pédago- l'on considère les compétences souhai-
(jeunes) élèves. giques comme auparavant car la forme tées en formation musicale à la fin des
que prend cet enseignement de la trois cycles de l'enseignement spécialisé,
Stéphane Forlacroix, conseiller formation musicale ne le sollicite pas rédigées par l'Institut de pédagogie
aux études au CRR de Poitiers directement. C'est là une des failles musicale et chorégraphique en 1993, on

10 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


DU SOLFÈGE À LA FORMATION MUSICALE

constate que leur six champs – percevoir, pour le moins inappropriée ? Il est pour objectifs la formation musicale a besoin
discerner, pratiquer, nommer, lire et eux plus facile d'envisager des compé- de recourir à des pratiques assez diverses
écrire – forment un domaine très vaste, tences isolées, or en gardant à l'esprit (chant, instruments, percussions, écoute,
complet, qui reprend une grande partie l'immortel solfège, ils se satisfont de lecture, écriture, acquisition de connais-
des compétences souhaitées de manière l'objectif unique qu'est la maîtrise de sances culturelles, etc.), d'où l'interroga-
globale, tous enseignements confondus. l'interprétation des signes, sans pouvoir tion de l'élève : qu'est-ce que précisé-
Finalement, il s'agit de tout ce qu'on en déduire toutes les compétences ment la formation musicale ? Et plus
souhaite qu'un élève maîtrise globale- préalables ou complémentaires qu'elle encore à quoi ça sert, puisqu'on y
ment pour être un bon musicien, dont implique. pratique des activités qui par ailleurs
une grande partie peut d'ailleurs se peuvent faire l'objet d'un cours plus
déduire de textes plus anciens comme Troisièmement le spécifique ? En fin de compte, ce que le
les conseils aux jeunes musiciens rédigés cours de F.M. partage le moins avec
par Robert Schumann en 1848. nom : que veut dire d'autres, ce qui lui est le plus propre,
formation musicale ? c'est le solfège, donc pour les élèves, la
Pourquoi cette globalité, cette somme de manière la plus directe et la plus concise
compétences acquises globalement A priori, ce terme devrait désigner la de définir cet enseignement, c'est de
– dont on prône justement une évalua- somme des enseignements que reçoit un l'appeler « cours de solfège », ce dernier
tion globale – ferait-elle l'objet d'un élève tout au long de son cursus dans un terme, lui, étant clair, précis et sans
cours spécifique ? Il y a de toute évi- établissement d'enseignement musical. équivoque.
dence contradiction entre le fond, le Donner ce nom à un cours spécifique,
contenu de la formation musicale qui est avec ou sans l'adjectif « générale», le Il est inconcevable de poursuivre notre
global, et sa forme, qui est un cours vide de son sens. L'élève peut sans doute enseignement en fermant les yeux sur ce
spécifique isolé des autres, plaçant un mieux saisir ce qu'il va apprendre dans malentendu qui perdure, tant entre
groupe d’une douzaine d’élèves le plus des cours d'histoire de la musique, de professeurs et élèves qu'entre profes-
souvent assis derrière des tables, devant lecture à vue, d'analyse musicale, de seurs eux-mêmes, et de continuer d'uti-
un professeur – si possible pianiste. commentaire d'écoute, d'ensemble liser ce terme trop imprécis de formation
Comment un élève ou un parent d'élève vocal, d'improvisation, d'orchestre ou musicale dont chacun comprend ce qu'il
pourrait-il envisager les objectifs encore de musique de chambre. Car il peut ou veut en comprendre.
pédagogiques si étendus de ce cours envisage les enseignements en termes
alors qu'ils n'en voient que la forme de pratiques : or pour atteindre ses F. B.

VOCABULAIRE
« Formation musicale »,
ce terme trop imprécis…
Prêtons-nous au petit jeu de taper « forma- Soit ! Allons donc voir « solfège »… Les occurrences sont
tion musicale » sur un moteur de recher- évidemment bien plus nombreuses.
che bien connu. En première page, et c’est « Apprendre le solfège en s’amusant » et « le Solfège
déjà un signe, seuls le site de l’association pour les nuls » sautent à l’œil dès la première page,
des professeurs de formation musicale et mais l’article de Wikipédia sur le « solfège (ou formation
un article Wikipédia (7) correspondent à ce musicale) » est essentiellement constitué de renvois à
que nous recherchons... des notions plus détaillées. De quoi comprendre que le
Réduit à deux courtes phrases, ce domaine est vaste et qu’on est loin d’en avoir fini !
dernier définit la formation musicale La définition proposée ne manque toutefois pas
comme : d’intérêt : « Dans la musique occidentale, le solfège (ou
• un ensemble de musiciens, —> voir formation musicale) est l'étude des éléments permet-
ensemble musical. tant de lire, écrire, jouer ou chanter une partition. Le
• l'éducation à la pratique de la musique, but ultime du solfège est de pouvoir entendre une
principalement le solfège. œuvre musicale, son orchestration et son interpréta-
tion, sans autre support que son audition intérieure.»
CQFD ?

7) Nom d’une encyclopédie réalisée par les Internautes, révélatrice de leurs centres d’intérêt… et de leurs connaissances.

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 11


DOSSIER

Formation musicale
et instrumentale :
le choix du cours unique
Au CRR de Nantes comme au CRI des Coëvrons ou au Si le dispositif varie d’un conservatoire à
CRC de Saint-Herblain, on a choisi la globalité. l’autre, leur point commun est la prise en
charge conjointe et simultanée d’un
Petit tour d’horizon sur ces dispositifs appelés, selon groupe d’élèves instrumentistes par des
les écoles, « cours global de musique », « cours unique » professeurs d’instrument et de formation
musicale. Ceux des Coëvrons se sont mis
ou encore « ensemble débutants ». d’accord sur un certain nombre de
principes : « imaginer une formation
« a particularité de ce cours, explique « Au conservatoire de Nantes, explique globale de l’élève musicien, impliquant les
L François Branciard, coordinateur
pédagogique au CRC de St-Herblain, est
Rémi Corbière, ce schéma s’impose aujour-
d’hui comme le cursus « normal » d’appren-
professeurs d’instrument au-delà d’un rôle
de technicien ; partir de la manipulation, de
de réunir les objectifs pédagogiques de tissage de la musique et de formation du la pratique instrumentale pour aller vers la
plusieurs enseignements cumulés : ceux de jeune musicien. Une formation musicale au théorisation ; laisser venir les questions qui
la musique de chambre, du cours d'instru- sens large (chant, F.M. par ”famille d’instru- indiquent que l’enfant est prêt à entendre
ment et de la formation musicale, laquelle ments” […], formation instrumentale) basée les réponses ; imaginer des contenus en
n'a plus besoin d'être nommée puisqu'elle sur la recherche d’un “ beau son” et le plaisir terme de savoir faire, contenus moins
ne fait plus l'objet d'un cours à part entière, de jouer ensemble (par l’orchestre, le cumulatifs (éviter le catalogue de notions) ;
encore moins que le solfège. » chœur ou la musique de chambre). » travailler sur l’autonomie de l’élève, en lui

Détaché ou lié ? permet à l’élève d’élaborer peu à peu la globalité de sa


pratique.
L’organisation traditionnelle des enseignements en sépare
les différentes composantes, les cloisonnant (ou les Partir d’un contexte musical « global » contenant en lui-
détachant) dans des lieux, des espaces et des contextes même tous les « atomes » d’une pratique musicale semble
(individuel/ collectif) distincts : les pratiques collectives, le induire des démarches d’apprentissages autres. Il s’agira,
cours d’instrument, le cours de FM. Le fractionnement se en partant du « tout », d’apprendre peu à peu à en
prolonge à l’intérieur même de ces apprentissages : les discerner les éléments, à les isoler, à les perfectionner,
exercices, les études, le morceau, la lecture (de notes, de avant de les re-réunir dans une forme globale qui sera de
rythme), l’analyse (auditive, écrite)… donnant lieu, si l’on fait modifiée.
n’y prend garde, à une approche « atomisée », dont un
Ces deux directions qui semblent opposées sont en fait
quelconque contenu artistique sera de fait difficilement complémentaires, la globalité relevant d’une conception
perceptible.(8) Le constat de cette atomisation a pu conduire artistique et pédagogique (qui aura d’autant plus de force
à l’exploration de différents dispositifs d’apprentissage, où qu’elle sera collective), au sein de laquelle la constitution
apparaissent les notions de lien et de globalité. progressive de liens deviendra un élément moteur de
l’apprentissage.
On peut assimiler la démarche de création de liens à un
processus de « construction » où on cherchera à relier des
« objets » distincts qui, rattachés, prendront un nouveau 8) Ce fractionnement peut se révéler lors d’évaluations, qui
soit contiendront de multiples épreuves cherchant à re-
sens (une nuance/un geste instrumental, un son/une fléter chaque parcelle abordée, soit s’orienteront vers une
polyphonie, une esthétique/une interprétation etc.). globalisation artificielle, à travers par exemple «un mor-
Multiplier et renforcer les liens entre ses apprentissages ceau où il y a tout », c'est-à-dire souvent pas grand-chose.

12 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


DU SOLFÈGE À LA FORMATION MUSICALE

Et pour les élèves, quels sont les


atouts de ces dispositifs globaux ?
« Implication », « plaisir », les professeurs
sont unanimes sur l’impact psycholo-
gique de cette organisation. Un impact
qui rejaillit en termes de comportement
(écoute, participation, curiosité), et
d’acquisitions (oreille, précision rythmi-
que). Parallèlement, la pratique de styles
et de répertoires diversifiés nourrit leur
expression musicale et élargit leur
culture artistique. On est en droit de
penser que ces bénéfices compensent
largement pour la majorité des élèves
une « moins bonne aisance à l’écrit » et une
lecture des clés « non satisfaisante ».

Les questions posées restent cepen-


dant nombreuses :
• Le cours unique est-il le seul moyen
pour que le professeur d’instrument
s’implique dans l’apprentissage musical
général d’un élève et pour que le profes-
seur de formation musicale fasse « aussi »
de la musique ?

ILLUSTRATION : LAURE DEL PINO


• Tous les professeurs éprouvent-ils le
besoin et l’envie de s’investir dans un tel
donnant le temps pour chercher et trouver Malgré cette contrainte, les professeurs de fonctionnement ? En ont-ils nécessaire-
le chemin vers la solution. formation musicale mettent facilement en ment les moyens ?
avant le bénéfice personnel qu’ils retirent • S’agit-il réellement d’un enseignement
La notion de temps est capitale dans ces de cette forme de cours. «Sortir de l’isole- global ou principalement d’un moyen
dispositifs : pour les élèves, « qui deman- ment», «travailler en équipe», pour Rémi pour établir du lien entre différentes
dent de plus en plus un minimum de cours Corbière, c’est l’identité même de l’ensei- disciplines ? Dans ce dernier cas, le
hebdomadaires , remarque François gnant qui est en jeu : «ne plus être seule- dispositif « cours unique » est-il le mieux
Branciard, il s’agit néanmoins de prendre ment considéré par les enfants comme le
adapté ?
le temps d’explorer, d’expérimenter, avant “prof de solfège”, alors que le collègue prof
de théoriser. » d’instrument est lui le “prof de musique”». • Le passage d’un tel fonctionnement,
« Le cours unique est aussi un lieu où on Le positionnement change aussi pour le fréquemment mis en place à titre expéri-
accepte de perdre du temps, précise professeur d’instrument qui, comme le mental (souvent pour pallier des diffi-
Christine Barrère, directrice du CRI des souligne Christine Barrère, «est là en tant cultés) à un fonctionnement plus
Coëvrons. Pendant ce cours, peu de que ”musicien-pédagogue”, au même titre « classique » est-il nécessaire ? Si oui,
notions différentes sont abordées, mais les que le professeur de formation musicale, et quand et comment s’opère-t-il ?
enfants peuvent expérimenter, bidouiller, non en tant que ”spécialiste”». S. K.
triturer les notions (les accords, les gammes,
les rythmes...), jusqu’à ce que cela prenne
sens. Ainsi, bien souvent, les professeurs
attendent les questions, plutôt que ne les
TEXTES INTÉGRAUX sur www.conservatoires-france.com
devancent. » Vers un nouvel enseignement de la musique au conservatoire de
Nantes , par Rémi Corbière, professeur de formation musicale au
Du côté des enseignants, cette collégia- CRR de Nantes.
lité de l’enseignement exige un temps
Pour l’abolition du cours de formation musicale, par François
non négligeable de concertation et de
Branciard, coordinateur pédagogique au CRC de St-Herblain.
préparation : il faut en effet redéfinir
réellement les notions importantes, Les cours uniques dans les Coëvrons, par Christine Barrère,
construire les contenus, les cours, et directrice du CRI des Coëvrons.
imaginer les supports.

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 13


DOSSIER

« Ateliers de culture et de p
pour les cycles 2 et 3
Professeur diplômée our Laure Bénac, trois principes sont L’analyse musicale tient une place
de formation musicale, P fondamentaux et nécessaires :
• La qualité de la transmission : il s’agit
fondamentale. En liaison étroite avec les
travaux d’écriture et d’improvisation,
Laure Bénac enseigne de transmettre l’essence des choses dans elle permet de proposer des directions
au conservatoire la gaieté de l’échange pédagogique. de travail que les élèves peuvent s’appro-
départemental de • La connaissance globale des élèves : prier dans une pratique autonome.
j’ai systématiquement assisté à leurs Enfin, quatre thématiques de culture
l'Aveyron (9), où elle prestations instrumentales dans et hors musicale sont choisies chaque année en
accueille les élèves de des murs [et] complété pour mon propre 3e cycle, en relation avec la saison
deuxième et troisième compte leur « profil musical ». musicale. C’est une obligation qu’on se
• La construction d'une évaluation orale donne de transversalité « musique et…»,
cycles. Après trente ans en fin de cycle sous forme de prestations etc. Autour de ces thématiques, c’est une
d'expériences et de musicales publiques qui se déroulent quarantaine d’extraits qui sont écoutés,
pratiques pédagogiques dans un véritable lieu de diffusion. commentés, replacés dans leur contexte.

diverses « en fonction des Les ateliers : « l'essence des choses L’évaluation, reflet des principes et
postes occupés, des plus que des contenus » des contenus
collègues avec lesquels L'oreille : l’exigence première est le Les chants individuels, chants poly-
développement de l’oreille harmonique phoniques : du plaisir partagé de
elle a eu le plaisir et la familiarité avec les accords. J’utilise chanter la même chanson avec le nom
d’échanger, des contextes des supports musicaux variés, plus des notes assis à des tables d’écolier, on
géographiques et souvent le jazz et la variété en début de est passé à la participation gratifiante à
travail car l’harmonie peut y être simple une prestation avec orchestre ou simple-
socioculturels des et claire. En complément du travail ment à un quatuor a capella écouté dans
établissements, et dans pratique d’oreille harmonique, nous un silence où l’émotion est palpable.
une moindre mesure des apprenons par cœur des chansons Les polyrythmies consistent en des
polyphoniques de la Renaissance, à restitutions de travaux : prosodies écrites
textes de cadrage », elle a dominante harmonique ou, à l’inverse, à pour l’occasion, slams ; transcriptions et
réorganisé les contenus dominante rythmique. arrangements à partir du répertoire
des « cours de FM » et Le travail rythmique est axé sur la mise (« classique », jazz, musique brésilienne),
en place d’ensembles et la familiarisa- ou encore percussions corporelles.
changé leur nom pour plus tion avec des systèmes rythmiques très L’invention : quand bien même si elle
de clarté : les élèves peu abordés dans les ensembles instru- est difficile à formaliser, ambiguë dans
viennent à des « ateliers mentaux. les conditions de son évaluation et que
Le travail vocal est centré sur la relation les élèves y sont laissés dans une
de culture et de pratique texte/musique, la recherche de l’investis- autonomie quasi complète (rejoignant
musicales », ce qui a le sement personnel dans l’interprétation. en cela le concept de projet personnel),
mérite de préciser Le rapprochement avec les classes de elle passionne étudiants et enseignants
chant et de chant choral en a été inten- et impressionne les parents qui s’y
objectifs et contenus. sifié. Les élèves de culture et pratique intéressent.
musicales ont accès au travail avec « Il est demandé, dans le cadre d’une
l’accompagnatrice des classes de chant composition personnelle ou d’une reprise,
et participent ponctuellement à des d’apporter des éléments inventés, témoi-
9) Dans le vaste département de
l’Aveyron, le CRD comporte 15 projets des classes de chant et de chant gnages d’autonomie et de maîtrise
antennes et 18 lieux de cours choral. musicales. Souvent bien moins inhibés que

14 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


DU SOLFÈGE À LA FORMATION MUSICALE

« Et pourtant,
ratique musicales » c’est indispensable,
on est bien
d’accord…»
Analyse d’un court extrait
fonctionnement, il est ans cette conclusion du ministre
difficile d’évaluer de
façon scientifique l’im-
pact des ateliers sur la
D (voir édito), qu’est-ce qui est « indis-
pensable », sur quoi s’agit-il d’être
« d’accord » ?
fréquentation des cours.
Notons d’abord qu’affirmer qu’une chose
« Pour autant, constate, est « indispensable » pourrait signifier que
Laure Bénac, il y a l’on aimerait bien y déroger. La plupart
beaucoup d’élèves chaque des directeurs connaissent ces demandes
année en troisième cycle de dispense « exceptionnelle » qui pren-
et c’est une nouveauté ». nent parfois une allure de chantage.
Les évaluations publi- Mais il faut en passer par là, car pour faire
ques surprennent et de la musique, il faut des « bases ». C’est
intéressent également dans la conscience collective une chose
les parents, de plus en établie, a priori indiscutable. « Quand je
plus nombreux à y suis allé au conservatoire, on m’a mis en 1ère
ILLUSTRATION : LAURE DEL PINO

assister. année de 2e cycle, en me disant que c’était un


peu en-dessous de mon niveau mais que
En, ce qui concerne les c’était mieux pour consolider les bases ».
relations entre la forma- Difficile d’être cependant d’accord sur le
tion musicale et les caractère indispensable de quelque chose
autres cours, Laure qui n’a pas été cerné au préalable. Et nous
Bénac le reconnaît : savons qu’en ce qui concerne le cours de
FMG, les cheminements et les pratiques
leurs propres enseignants, [les élèves] « l’échange avec mes collègues professeurs
sont nombreux et parfois éloignés.
prennent très à cœur cette opportunité de d’instruments est quasi inexistant sur cette
se mettre en valeur et choisissent avec soin question précise.» Néanmoins, les liens se
On peut émettre
leurs partenaires, leurs sources d’inspira- renforcent : au-delà des réunions de
une autre hypothèse
tion, leur matériel. [Cette épreuve] est responsables de département, les
parfois, mais pas toujours, le prolongement relations avec les professeurs d’instru- Ne serait-ce pas sa fonction de repoussoir
qui rendrait le solfège indispensable ?
direct de travaux d’écriture, d’improvisation ment se tissent autour des projets
Pour citer René Girard, le solfège serait un
ou d’analyse réalisés en cours. Elle ponctuels de concerts/analyse, concerts « bouc émissaire », le cours que l’on
occasionne un dialogue de musicien à commentés, animations scolaires, que pourrait rendre responsable de toutes les
musicien avec le(s) enseignant(s), qui Laure Bénac propose assez systématique- difficultés et qui permettrait de masquer
dépasse la relation habituelle ”maître qui ment autour de la saison musicale. « C’est d’autres problèmes :
sait – élève qui apprend“ ». la façon la plus naturelle que j’ai trouvée • Chez les élèves, un moyen d’exprimer
pour leur faire connaître mon travail et une envie finalement modérée
L’impact des « ateliers de culture et partager ensemble des moments musicaux d’apprendre la musique « classique » ?
pratique musicales » et pédagogiques.» • Pour les parents l’explication des diffi-
Après seulement trois années de ce L.B. cultés ou de « l’échec » de leur enfant
dans son apprentissage ?
• Chez certains professeurs d’instrument,
un rempart pouvant servir à masquer
A LIRE sur le site http://www.conservatoires-france.com des lacunes pédagogiques, ou une
façon de conforter entre les disciplines
Le cours de formation musicale : un atelier de culture et de une forme de hiérarchisation ?
pratiques musicales ; pourquoi et comment ? par Laure Bénac, • Pour les collectivités enfin, un élément
professeur de formation musicale au CRD de l’Aveyron. de sélection dans des établissements
« ouverts à tous » mais dans l’incapacité
Culture et formation musicale, interview d’Anne-Gaëlle Chanon,
d’accueillir tous ceux qui voudraient y
professeur d’orgue et de culture musicale au CRD de St-Quentin. entrer, ou y rester ?

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 15


Nouvelles
DES

DE CONSERVATOIRES DE FRANCE
Publications
Cet ouvrage a pour
ambition d'analyser CdF et le collectif
les enjeux actuels et
les évolutions les
plus récentes de
enseignements ar
l’enseignement
artistique, tout Historique
en fournissant le Blog Deux membres du conseil d’administration de Conservatoires
maximum Note(s) de France participent, depuis le mois de septembre 2009, aux
d'informations pour travaux d’un collectif de dix fédérations d’horizons divers.

aider au pilotage des Blog Note(S) Cet « assemblage » est né à l’initiative de la FNCC (1) qui souhai-
établissements. se veut le tait réagir de manière collective avec tous les acteurs concernés, à
la réforme que l’Etat avait commencé à engager sur la formation
Il s'adresse aussi reflet d’une
supérieure en musique. L’Etat avait, à l’époque, entrepris de revoir
association qui
les dispositifs de formation sans réellement consulter les profes-
réfléchit sur
sionnels ni les employeurs que sont principalement les collecti-
l’avenir tout en
vités.
témoignant
du présent. Appuyée sur le rapport de la sénatrice Catherine Morin
Dessailly, la réflexion faisait état d’un besoin réel de concertation.
En effet, il paraissait urgent d’évaluer le travail des CeFEDeM (1),
Avec une
de ne pas brader la formation pédagogique au seul profit de la
rubrique
formation « disciplinaire » de ne pas réduire le champ des disci-
« Territoires »
plines enseignées, d’avoir une lisibilité dans la création et l’homo-
qui permet logation des pôles supérieurs, de participer à l’écriture des
d’accueillir nouveaux textes, de définir les besoins des employeurs, etc.
des témoignages
Le chantier était vaste. La première réunion rassemblait une
(les vôtres !),
quarantaine de participants dont de nombreux élus et des profes-
une rubrique
sionnels issus des CeFEDeM, de la FNAPEC, de CdF, des régions,
« Métier »
des départements, des CFMI, de la Fneijma, de Culture et dépar-
décrivant des tements ainsi que de la plateforme interrégionale d’échange et de
bien aux cadres situations coopération pour le développement culturel.
culturels des professionnelles,
A l’issue des premières réunions, le collectif s’est stabilisé
collectivités et des pages
autour d’une dizaine d’associations, représentées chacune par
aux élus qu'aux « Nouvelles »
une ou deux personnes. La plateforme interrégionale est devenue
personnels des consacrées à
porteuse de projet.
l’actualité de
conservatoires et
l’association, et,
écoles de musique,
dans les pages Les participants et l’organisation
de danse et de centrales un
◗ L’Association des Régions de France (ARF) et la FNCC assistent
théâtre. « Dossier » à aux réunions plénières.
thème.
Editeur : Territorial, ◗ ARTEFACT ; Collectif RPM ; Culture et Départements ; Plate-
à Voiron (Isère) forme interrégionale ; Arts Vivants et Départements ; Conseil
Collection : Dossiers
d'experts, n° 649
www.territorial.fr 1) Voir tableau des sigles ci-contre

16 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


Nouvelles
DES

DE CONSERVATOIRES DE FRANCE

de réflexion sur les


tistiques : point d'étape
des CFMI ; Conseil des CeFEDeM ; Conservatoires de France ;
FNAPEC ; FNEIJMA forment un collectif de moyens humains SIGLES
et financiers destinés à alimenter la réflexion, à proposer et
valider des moyens d’actions.
◗ Le groupe de travail restreint de cinq personnes formalise la ARF Association des
réflexion, définit les moyens d’action. Deux chargés de Régions de France
mission on été recrutés pour coordonner, produire synthèses
CdF Conservatoires de
et documents, et mettre en forme des actions.
France

CeFEDeM Centre de formation


L’objectif est à l'enseignement de
◗ de « s’associer de façon constructive à l’élaboration des la danse et de la
musique
nouvelles orientations en matière de politiques culturelles des
enseignements et des pratiques artistiques »,
CFMI Centre de formation
◗ d’organiser des espaces de réflexion et de débats entre les de musiciens
membres du collectif, intervenant à
l'école élémentaire
◗ de rendre public ces débats par l’organisation d’assises, et pré-élémentaire.
◗ d’être force de proposition en se rendant partenaire de l’Etat.
FNAPEC Fédération nationale
des associations de
parents d'élèves des
L’état des travaux conservatoires
Chaque association a produit un document précisant les points
incontournables auxquels elle est attachée dans son domaine FNCC Fédération nationale
d’action. Les constantes dégagées par le croisement des incon- des collectivités
tournables permettent de valider les consensus qui sont déjà pour la culture
apparus en réunions plénières, et de dessiner, à moyen terme et
FNEIJMA Fédération
en dehors des chapelles, une vision globale, cohérente et
nationale des écoles
porteuse de sens d’un paysage artistique idéal. d'influence jazz et
des musiques
actuelles

RPM Recherche en
pédagogie musicale

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 17


Nouvelles
DES

DE CONSERVATOIRES DE FRANCE

CdF, pour se parler… Tribune libre


Le e-groupe : pour poser ses questions sur ses préoc-
cupations au quotidien, et répondre à celles des autres

Inventer
(réservé aux adhérents)
Le site : www.conservatoires-france.com régulière-
ment mis à jour
Nous écrire : conservatoiresdefrance@yahoo.fr

✁ ✁
es quatre dernières décennies ont vu une

L
BULLETIN D’ADHÉSION 2011
grande évolution du paysage français des
Nom : Prénom
enseignements artistiques dans toutes ses
Directeur de : dimensions : politique (nationale, territoriale,
(si vous être membre de l’équipe de direction, précisez votre
fonction) : locale), artistique et culturelle, pédagogique,
Adresse professionnelle : partenariale…
CP : VILLE :
Tél.: Fax :
Bien que déstabilisante car nouvelle et inces-
E-mail : @ sante, cette évolution se déroulait dans un
cadre précis de service public, avec un soutien
Type d’établissement : CRR : ❐ CRD : ❐ CRC : ❐ CRI : ❐
Autre : ❐
financier incitatif et engagé qui garantissait
Statut de l’établissement (gestion territoriale directe, associa- une base solide et – nous le pensions alors –
tion, etc.) : une pérennité.
Nombre d’élèves : Nombre d’enseignants :

Adhésion à Conservatoires de France pour l’année 2011 Aujourd’hui la situation est différente : la
A titre individuel (47 € ) : ❐ Pour l’établissement (107 € ) : ❐ France, comme beaucoup d’autres pays, est au
Je règle la cotisation annuelle :
cœur de la tourmente. Il ne s’agit plus d’évo-
- par chèque ci-joint à l’ordre de « CdF» : ❐
- par mandat administratif : ❐
lution, ce sont des changements brutaux qui
(préciser le lieu d’envoi de la facture) bousculent nos repères, créent une impression
J’atteste sur l’honneur l’exactitude des renseignements
de vertige, une peur qui se traduit le plus
ci-dessus. souvent par des résistances.
Date :
Signature : Il y a pourtant, en ce qui nous concerne, un
double enjeu :
• continuer à s’appuyer sur les acquis des
quarante dernières années en les faisant
Bulletin d’adhésion évoluer pour inscrire l’enseignement initial
à retourner à dans notre pays de la façon la plus étendue,
Rédaction : CdF
Maurice LE CAIN
Conception éditoriale :
ouverte, qualitative et démocratique
Ecole de musique, MAJUSCULES ! possible ;
danse, théâtre du
Haut-Var - BP 4 Conception graphique & réalisation : • construire intelligemment notre offre
JM BOLLE 04 78 53 87 14
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18 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE


Nouvelles
DES

DE CONSERVATOIRES DE FRANCE

JOURNÉES
D’ETUDES de

l’avenir Conservatoires de France


3 et 4 février 2011
Maison des arts de St-Herblain (44)

Parcours personnalisés :
Cela induit – comme en escalade ! – à la
fois stratégie, vigilance et lâcher prise
pourquoi ? comment ?
dans un esprit d’entraide : accepter de Définitions, enjeux,
basculer en se faisant confiance. objectifs, mises en
Il y va de l’avenir des enseignements artis- 3 et 4 févrie r 20 11 œuvre
tiques, qui sera très différent du passé. Avec l’accroissement de
Je va is au x leurs fonctions et la
Nous sommes exactement à la charnière
journées d'étude s de diversification de leurs
de ces deux étapes. Et ce n’est pas pour ce publics, les établisse-
rien que l’AEC (Association européenne Conservatoires de Fran ments d’enseigne-
des conservatoires) a choisi comme thème ment artistique
principal de son congrès (Varsovie – 4 au doivent répondre à
des attentes toujours plus nombreuses. Ainsi, le principe d’un
6 novembre 2010) : la pérennité des
cursus unique reposant sur un modèle formaté par l’Histoire
conservatoires. semble devenir inadéquat. Dans ce contexte, s’est développée
l’idée – aujourd’hui inscrite dans les textes officiels – d’une
Il y va surtout de l’avenir de nos élèves et personnalisation de l’enseignement artistique : parcours spéci-
étudiants : loin d’être tout tracé, il est à fiques, modules, projets personnels…).
inventer dans un contexte incertain. Quels
Mais alors :
que soient les moyens dont nous dispose- • Comment maintenir la cohérence du projet artistique
rons et les problèmes auxquels nous et pédagogique ?
serons inévitablement confrontés, leur • Comment éviter que cette personnalisation n’engendre
donner les connaissances, les compé- de nouvelles formes d’inégalités ?
• Quelles nouvelles compétences pour les enseignants ?
tences, les outils, la confiance pour qu’ils
• Quelle organisation globale de l’établissement ?
réussissent à construire leur vie restera
notre premier devoir. Programme et bulletin d’inscription téléchargeables sur
www.conservatoires-france.com
Marie-Claude SÉGARD,
Parmi les intervenants
vice-présidente de Conservatoires de France,
directrice du CRR de Strasbourg • Jacques ANDRÉ, maître de conférences honoraire en
sciences de l'éducation à l'université de Poitiers • Yves
AUBIN, directeur de La Bibliothèque, ville de Saint-Herblain •
Alain BOULVERT, professeur de philosophie au lycée Aristide
Briand de Saint-Nazaire • Jean-Marie COLIN, directeur du
conservatoire de l’Aveyron • Ludovic POTIÉ, directeur du
conservatoire de la Roche-sur-Yon • Valérie LOUIS, profes-
seur associé en sciences de l’éducation au CNSMD de Lyon

ASSOCIATION DES DIRECTEURS D’ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE 19


REGARD
REGARD

La spécialisation d’une
musicienne généraliste
« Il n’y a plus de “cours de solfège ” dans les conservatoires généraliste et ouverte sur tout
depuis la réforme de 1977» s’exclame Aurélie Canac. type de musique.
D'une manière directe ou non,
1977 appartient à sa préhistoire. A 32 ans, « polyvalente et
je « réinjecte » dans mes cours
curieuse » dans ses domaines d’intervention comme elle se ce que je pratique par ailleurs.
définit elle-même, cette jeune artiste de Rhône-Alpes enseigne Pour bien enseigner, je pense
qu'un professeur doit continuer
la formation musicale au CRD de Bourgoin-Jallieu (Isère). Elle
à se former et s'épanouir artisti-
témoigne de son parcours, de ses choix artistiques et profes- quement par ailleurs, « se nour-
sionnels et, au-delà de la formation musicale, dessine les rir » pour ne pas s'enfermer
dans ses habitudes.
contours de la « réalité musicale » dans laquelle elle évolue.
Le cours de formation musicale
est un lieu de rencontres et
ianiste « classique » de

P
d'expérimentations où diffé-
formation, je m'étais rentes disciplines se croisent. Le
tout naturellement professeur de formation musi-
dirigée vers l'enseignement du cale doit pouvoir utiliser les
piano, obtenant le DE de piano spécificités de chaque élève
suite à une formation au (instrumentales, stylistiques)
Cefedem Rhône Alpes. A travers afin de donner une ouverture
cette formation et les multiples sur les différentes esthétiques
rencontres qu'elle génère, j'ai et faire acquérir les notions
pu élargir mon univers musical. théoriques à travers la pratique
Mon intérêt pour la dimension musicale (instrumentale, vo-
collective des pratiques cale, corporelle).
PHOTO DAVID STRICKLER.

musicales s'est affirmé, et suite


à ce constat, j'ai diversifié mes Pour Aurélie Canac, l’ensei-
pratiques artistiques (théâtre, gnement doit être ancré dans
musique afro-cubaine, jazz, une « réalité musicale » qui
musiques de scène, musique correspond aux compétences
expérimentale...) Aurélie Canac avec le groupe Clacson. Un ancrage qu'un musicien amateur ou
qu’elle estime nécessaire à son enseignement.
professionnel complet et
L’enseignement de autonome dans sa pratique
la formation musicale : musical, accompagnement, pluridisciplinaire de la forma- doit acquérir : savoir écrire,
d’un choix artistique FM, et même atelier claviers tion musicale m'est apparue arranger pour un groupe,
vers une spécialisation MAO. Au sein de ces structures, plus en adéquation avec mon interpréter une œuvre, se
de généraliste j'ai pu organiser avec l'équipe profil musical. J'ai donc entre- mettre en scène, improviser
Les structures associatives dans des projets transversaux mêlant pris d'approfondir mes compé- dans des cadres différents,
lesquelles j'ai débuté l'ensei- danse, musique, théâtre, arts tences dans ce domaine (DEM, instrumenter, repiquer... etc.
gnement (MJC et écoles associa- plastiques, très fondateurs pour DE, concours P.E.A.) A travers ces compétences,
tives de la région lyonnaise), la cohésion de l'équipe et la Aurélie décrit une réalité
m'ont permis de découvrir des dynamique de la structure. Deux mots-clé : la polyva- musicale qui lui ressemble,
fonctionnements pédagogiques Après plusieurs expériences lence et l’expérimentation jusque dans le « etc.». On
très différents. J'ai pu expéri- d'enseignements du piano et La polyvalence dans mes imagine bien qu’elle n’a pas
menter l'enseignement de disci- de la formation musicale, j'ai pratiques artistiques tient pour encore atteint les limites de sa
plines qui ne relevaient pas de réalisé les enjeux distincts liés à moi une place essentielle dans polyvalence et de sa curiosité.
mes compétences initiales : chacune de ces deux disciplines l'enseignement de la formation
direction de chorales, éveil et la dimension collective et musicale, discipline par essence Interview réalisée par J-M. K.

20 Blog Note(S) - N° 39 - FÉVRIER 2011 - LA LETTRE DE CONSERVATOIRES DE FRANCE

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