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Voyage de Humboldt et

Bonpland ; 1-3. Voyage aux


régions équinoxiales du
Nouveau Continent : fait en
1799, 1800, 1801, [...]

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Bonpland, Aimé (1773-1858). Auteur du texte. Voyage de
Humboldt et Bonpland ; 1-3. Voyage aux régions équinoxiales du
Nouveau Continent : fait en 1799, 1800, 1801, 1803 et 1804.
Tome 1 / par Al. de Humboldt et A. Bonpland ; rédigé par Al. de
Humboldt. 1814-1825.

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'~J'~
VOYAGE
AU

NOUVEAU CONTINENT.
DE L'IMPRIMERIE DE SMITH.
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J~ 'ke' J~Mt~ Jt)bec<xH~ne c~tc

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~M~M~M~Q~M~M~M~M&
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iî~M!MMMM~
JL~~UZE
années se sont écoutéesdepuis que je quittai
l'Europe pour parcourir rintérieur .du. nouveau continent.
Livré, dès ma premt~e ~uaesse, àFëtuderde la natu~~
sen~iMe à la beauté agces~tB d'un so~ hep~é~ d~ ïncatag~es
et couvert d'antiques ~rêts, ai trouvé daus ce voyage ~des
jouissances qui m'ont dédommagé des privation~ attachées
à une vie tajbèrieuse et souvent agitée. Ces jouissances, que
j'ai essayé de faire partager à ïnes lecteurs dans mes Cbh~t-
dérations sur &e~e~ et dans1' ~M~ &ï Physionomie
des ~c~aM.c~ n'ont pas été Ïe seul fruit d'une entreprise
formée dans le dessein de contribuer aux- progrès des sciences
physiques. Je m'étois préparé depuis long-temps aux obser-

t
vations qui étoient le but ppincipatdemonvoyagealazone
torride;j'étois muni dinstrumens d'un usage prompt et facUe,
et exécutés par les artistes tes p~s dis~ngués; je jouiissôis
de la protection particutière d'un gouvernement ~t, loin de

Z
mettre des entraves à mes recherches, m'a honoré constam-
d"té', Atet
de marques d'intérêt
meat-de
ment .t ddedecon~ance -.1 par
co~a~e j'etois secondé par
un ami courageux et mstruit, et, ce qut est un rare bonheur
Relation &MttM?ya~ Tbttt.
pour le succès d~un travail commun, dont le zèle et Fé~alitë
de caractère ne se sont jamais démentis, au milieu des fatigues
nous e~O~s qu~uOfois exposes.
et des dangers auxquels
Dans des circonstances si favorables, parcourant des
régions qui, depuis des siècles, sont restées presque incon-
nues à la plupart des nations de l'Europe, je pburrois dire
à l'Espagne même, nous avons récueilli; M. Ponpiand et
moi, un nombre considérable de matériaux dont la publi-
cation sembloit offrir quelque intérêt pour l'histoire des
peuples et la connoissance de là naturey~s rechercher
ayant été dirigées vers des objets très-varies, nous n'avons
pu en présenter les résultats sous la forme ordinaire d'un
journal nous les avons consignés dans plusieurs ouvrages

B
distincts, rédiges dansie même esprit, et liés entre eux par
la nature dès pt~pnomènes qui y sont discutes. Ce genre de
rédaction, qui ïait découvrir plus facilement 1 imperfection
des travaux partiels, n'est pas avantageux pour l'amour
propre du voyageur mais il est préférable pour tout ce qui
a rapport aux sciences physiques et mathématiques, parce
que les dHïerentes branchés de ces sciences ~ont rarement
cultivées par la ~ïlême classé Qeljecteurs."
Je m'étois proposé un double but dans le voyage dont
je publié aujoùrd'huï la relation historique. Je dësirois fatré
connôîtrë les pays que j'ât vistté;, et recueMlir des faits
propres à rë~andre du jour sur ~ne science q~i est a peine `
~$'
'0~plus ?!?
et quelles ~~esde~
parut le
'é~ s '~i~~ ~Y ets r~e

nos pecherches a~ou~rotent de nouvelles espèces à celles qui


sont déjà d~rîtes mà!s ~['e~raïtt tou~urs
,.9P;,de
.r~el'. ~e

connoiss~nc~
des ~its tsotés, quoï~e Bouvèaux, ceUe de reaehàîneïïient
~ne

des <mt!5 oE~ervés dep~s ~ioag-~mps, la découverte d'un genre


inconnu me paroïssoit bien mû'tns in!tépessante qu une obser-
Vation sur tes rapports geogra~Mq~s des végétaux, sur les
migrations des plantes ~o~~c~~ sur la limite de hauteur à
laquelle s élèvent leurs di~reMes tribus vers la cime des
Cordillères.
Lessciences physiques se Mennent par ces mêmes liens
qui unissent tous les phënoïnèn~s de la nature. La classi-
ncation des espèces ~ue l'on ~oiti~ë~rder comme la pat'tte
fondamentale de la ~~n~ue, et dont l'ëtudeestdeveauepi~
attrayante ~t plus ~nsMe par ~rintroduc~ondes méthodes natu-
relles, est à la ~ireo~ra~hie des yégëtaux ce que la mineralogte
descripttveestà~in~cationdespo~hesquicons~tuentlacr~
extepieure du globe Pour saisîr les lois que suivent c~jpoches
dans leur gisement, pour determti'ier Tage de teur ËM'ma~on
successive et leur iden~të dans les cëglons~ptusélo~
le géûlogue doit conno~.re avant to~t les &s~Hes Simples qui
composent la maase des montagnes~ l'oïyctpgnQsî~
f
enseigne les~earactères et la Nomenclature. M en est ~e même
de cette partie de la physique 'du monde qui trotte des
rapports; qu'ont lés rplantes'soiit e~tre elles, soit,avec le
sol qu'elles habitent, soit avec Ta:ir qu'elles respirent
et; modiSent. Les progrès dp la géographie des végétaux
dépendent en grande partie de ceux de la botanique descrip-
tive, et ce seroit nuire ~à l'avancement des spienpes que
de vouloir s'élever à desf idées générales, en négligeant la
CQnnoissance des faits, patrilcuners.
Ges considérations m'o~tt: guidé dans le cours de mes
recherches elles: ont toujours,été présentes à mon esprit à
1 époque de mes études préparatoiï'es. Lorsque je commeneai
à lire le grand nombre de voyages qui composent, une
partie si intéressante de la'littérature moderne je regrettai
que lesvoyageurs les plus. instruits dans des branches
isolées de l'histoire~ natureUe?;eussent rarement reum des
connoissances assez variées; pour jprpj&ter. de tous les. avan-
tages~ qu'oNroit leur position.~Il me:sembloit que l'impoE-
tance dés résultats obtenus, jusqt~à~e jour, ne répondoït
pas entièrement aux~immenses progrès que.plusieurs sciences,~
et nommément la géolegie', ~histoire; des <modinçati<cms de
l~~ios~hère, la physiologie des animaux, et des plant<ës,
ayoient' faits a la im du: dix hmtieBEseLsiècle.~ Je voyois ayec~
peine', et tous: les sa vans ont, partagé ce :senttment avec moi,,
de
que, tandis que le nombre ~J~
jour en ~our, nous ignorions encote~é~évatï~~
tant de montagnes et de pl~teaux~ les psciUations p~odtqnes
de l'océan aérien, la lïmtte d~s neiges p~rpétu~elles sous le
cercle pplaire et sur les bords de la zone t~rride, l'intensité
variable des forces magnétiques et tant d'autres phénomènes
également Importans,
Les expéditions maritimes, les voyages autour, du monde
ont justement illustré les noms des naturalistes et des
astronomes que les gouvernemens ont appelés pour en
partager les périls; mais tout en donnant_des notions exactes
sur la configuration extérieure des terres, sur l'histoire
physique de l'océan et sur. les productions des îles et'des
côtes, ces expéditions paroissent moins propres à avancer
la géologie et d'autres parties de la physique générale, que
des voyages, dans l'intérieur d'un continent. L'intérêt des
sciences~ naturelles y est subordonné à celui de la géo-
graphie et de l'astronomie nautique. Pendant 3. une navi-
années, la terre ne se présente que
~>
gation. de plusieurs,
rarement, à l'observation du.voyageur; et, lorsqu'il la
,.r
rencontre~ après de. longues attentes, il la trouve souvent
dénuée de ses plus belles productions. Quelquefois, au-delà
dunejCÔte stérile, il aperçoit un rideau de montagnes cou-
vertes, de verdure, mais~que leur éloignement soustrait à ses
rechet:ches;et ce spectacle ne fait qu'augmenter ses regrets.
~.es voyages de terre p~ent de grandes dtniçultés~
le transport des instru~ena; et des coHections; n~ais
diRicultes sont compeïfsées par des avantagés peels dont
il seroit inutile de ~re id~l'énumération. ~e n~est poMtt
en parcourant les cotes que l'on peut reconnoîtrel~irecHon
des chaînes dé montagnes e~ leur constitution g~olbjg~que,
le climat propre à chaque zone et son influence sur ~es
formes et les habitudes des êtres organises. Plus les conti~ens
ont de largeur, et plus on trouve développée, à la sur~c~du
sol, la richesse des productions animales et végétales; plus le
montagnes est éloigné des bords de l'océan,
noyau central des
et plus on observe, dans le sein de la terre~ cette variété de
couches pierreuses, dont la succession régulière nous révèle
l'histoire de notre planète. De même ~ue chaque être con-
sidéré isolément est empreint r d'un type particulier, on en
reconnoït également un dans l'arrangement des matières
brutes réunies en roches, dans la distribution et les rapports
mutuels des plantes etdes animaux. C'eist le grand problème
de la physique <lu monde, que dé déterminer la forme de
ces types, les lois de ces rapports, les liens éternels qui
enchaînent les phénomènes de la vie et ceux de la nature
inanimée.
En énonçant les moins qtii m'ont engagé à entrep~~dre
un voyage dans l'intérieur d'un <~n~nent, je ne JÎais
qu indiquer la direction générale de mes idées à u~ âge
ou l'on n'a ppint encore une j~ste mesura d~ s<!S ~Mcc~.
Les plans 4e ma prem~re jeunesse n'ont .ét~,e~~es.qu~'
n'a poi~t
tres-tncon~é~men~
l'étendue que j~ (~ï~p~ en partit pour
l'Amérique méridionale il n'a pas &M~W nom p~u& le
nombfe de résultats généraux que j'ayo~s espéré pouvoir
recuettHr. La cour de Madrid m'avoit accordé, en 179~
la permission de m'embarquer sur le galion d Acapulco et
de visiter les îles Marianes et Philippinesy après avoir par-
couru les colonies du nouveau continent. Javois Ibrmé
alors le projet de revenir en Europe par te grand archipel
d'Asie, le golie persique et la route de Bagdad. J'aurai
occasion d exposer dans la suite les raisons qui m'ont
déterminé à hâter mon retour. Quant aux ouvrages que nous
avons publiés, M. Bonpiand et moi, nous nous nattons que
leur imperfection qui ne nous est pas inconnue ne sera
attribuée ni à un manque de zèle pendant le cours de
nos recherches, ni à u)a trop grand empressement dans la
publication de nos travaux. Une volonté I~rte et une per-
sévérance active ~ne suSisent pas toujours pour surmonter
les obstacles.
Après avoir rappelé le but général que je m'étois pro-
posé dans mes courses~ je vais jeter un coup-d'oeil rapide
sur 1 ensemble des collections et des observations que nous
avons rapportées, et qui sont le double fruit' de tout voyage
scientifique. Comme pëndatrt notre séjour en Amënque, ta
guerre maritime rendbit tres-incertaïnes les cdmmm~catiôhs
avec l'Europe, nous nous étions vus forces~ pour diminuer
la chance des pertes, de former trois collections diSerentes,
dont la première fût expédiée pour l'Espagne et la France,
et la seconde pour les Ëtats-Un!s et 1 Angleterre. La troisième,
la pi us considérable de toutes, resta presque constammentsous
nos yeux eue fbrmoit vers la Rn de nos courses quarante-deux
caisses renfermant un herbier de 6000 plantes equinoxiales,
des graines des coquilles, des insectes, et ce qui n avoit
point encore été porté en Europe, des ~M<~ geoÏogiqu~es du
C!iimbora~o, dé la NouveUe-Grenadé etdes rivés de l~mazone.
Après le voyage à t~rénoque, nous déposâmes une partie de
ces objets àTîle de Cuba, pour tes reprendre à notre retour
du Pérou et du Mexique. Le reste nous a suivis pendant
1 espace de cinq ans, sur la chaîne des Andes, comme à

Parm! les végétaux q«e noas avens imtcodmts daa~s les dMËrNtS jiiBrjitM de t'En~ope,
je citerai ici, comme dignes de t'.afMentioa des Botamstes, les espèces SMÎvamtës I~&etîa
Mgeas, L~sp!endeM!, CaIdMtahe~ophyBa~BMphndMt geNMBtNont,C~v.a)MK'dia
anthifriMBora, GyrocarpM amencana, Jacq., Czsatpuua MSMoMM, Sai~ia efBSMt,
Cyperas nodosm, Fagao'a !en!isoMM, HeSotMpmm dMnopodiotdes, C<M)T<~TotM
bogoten~, C. atbMescems, !pom<Ba to~BBora, SoÏMHHM HamboHti, W3!d~, JMxAoodta
argentea, PiteainM~~B&n-~ce~ÇasaapemMa, C. nMUts~wa, C. pfo~Ea<a,C.casptdate,
Eoph<M~Hambotdtt,Wmd,, RNt~R)~S!sy~t&iamtMaMMm/StdaooMaMt,
S. tMangubns, ~aseatasheteMphyNas,G~dee ptetatMia, G. s~g~M~, ~~Me~t Meo~r,
Psoratea ~~nca~), Mynca me~Mana,A. tHp!ex Rn!MM, tnga mMMmhyHa,AcMM dtptma,
A. BexMosa, A. patula, A. bMchyaMsmitha, A. oR~, A. atM~hMs, A. petovmna,
A. edatis et phmeMM vaNét~ de Geot~MS. (Voyez ~t~He)MMf Rtsat. ~&Mt Aa~.
1809.)
travée de la Nouvelle-Espagne depuis tes côtes de l'Océan
PaciSque juscm~a celles de la mer des Antres. Le :transport
de ces objets et les soins <mnu<ieux qu'ils exigent, nous ont
causé des embarrasdont ïl est imposstbie de se faire une idée
exacte, même après avoir parcouru les parties les moms cul-
tivées de l'Europe. Notre marche a été ralentie par la triple
nécessité de traîner avec nous, pendant des voyages de cinq à
six mois, douze, quinze et quelquefois au-delà de vingt mulets
de charge, d'échanger ces animaux tous les huit à dix jours,
et de surveiller les Indiens qui servent à conduire une si nom-
breuse caravane. Souvent, pour ajouter à nos collections de
nouvelles substances minérales', nous nous sommes vus
forcés d'en abandonner d'autres que nous avions recueillies
depuis long-temps. Ces sacrifices n'étoient pas moins pénibles
que les pertes que nous urnes accidentellement. Une fâcheuse
expérience nous apprit assez tard qu'à cause de la chaleur

Les substances minérales et végétâtes que nous avons rapportées de nos courses, et
dont plusieurs étoient inconnues jusqu'alors, ont été soumises à l'analyse chimique par
MM-Vauquelin, Haproth, Descotils, AMen etDrapier, qui les ont décrites dansdes mémoires
particuliers. Je rappellerai ici deux nouvelles espèces minérales le FeUer-Opat ou Quarz
resinite miellé du Mexique ~iMapnxA~ e~'M. Unters. der Min. 7~ 7~ p. i56.
~oaae~eA~M~~e~c~ der~ ~<MgM~. uQ.jtTaMtenmM. Tabellen, 1808~.26, 88)
et Fatgent mutmté conchoïde du Pérou, muscbliches Hornerz ~~&y?r. 7~ to. A~aMt.,
p. Go, gy..M~zM der jPey~ ~t&t~ l, i58~ la mine d'argent -P«cb de Pasco
(f~~ le cuirre gris antimonié, Graugiltig-Erz, de Tasco C~ 77~ y~), le fer
météorique, Meteor.Eisen, deDnrango C~A 7~, t0t~~ la chaux carbonatée ierriiere,
stang!icher Braunspath, de Guamaxuato, dont les cristaux réunis en barres forment des
triangles équiangles ~90)~ les Obsidiennes de la Montagne des Couteaux de
Moran et la pierre perlée de Cinapecuaro (Descotils, ~nna~ de CA~/e~ LIII, 260)
~MztMMt &M<O~He, Tom. 7.
humide du climat et des chutes:éq~entes~ c~~

somme, nous ne pouvions conserver'.m:'Ies.;peaux,a~t~


préparées à la hâte, ni les poissons et les reptiles p~~
des flacons remplis d'alcool. J'ai cru devoir entrer q~ïis ces
détails, très-peu intéressans en eux-mêmes, pour prouver
qu'il n'a pas dépendu de nous de rapporter en nature plu-
sieurs objets de zoologie et d'anatomie comparée, que nous
avons fait connoître par des descriptions et des dessins.
Maigre ces entraves et les frais causés par le transport des
collections, j j'ai eu, à me féliciter de la résolution queavois
prise avant mon départ, de ne faire passer successivement
en Europe que les doubles des productions que nous avions
recueillies. On ne sauroit assez le répéter lorsque les mers
sont couvertes de bâtimens armés en course, un voyageur né
peut compter que sur les objets qu'il garde avec lui. De tous
les doubles que nous avons expédiés pour l'ancien continent,

l'étain oxidé concrétionnë, Holz-Zinn, du Mexique ("P~eo~ ~MM. LIII, a6&)~ la mine
brune de p!omb de Zimapan ('Pe.K'ot/Z~ ~n~. ZZ/7, ~68J/ te sulfate de Strontiane de
Popayan et la Wafelite; une pepite de Ptatme du Choco d'un poids de 1088 ~grains, et
dont la pesanteur spécinqueestdei8,947~a~ey!~g6)jla MoyadePetileo, substance
volcanique combustible renfermant du feldspath CJC~7~, a8~J)~ le, Guano des îles du
Pérou contenant de l'urate d'ammoniaqueC~. 7~ 299; JFbMrc~' et ~aM~Me& Af~M.
~e /Y/<. 369~ le Dapiché du Rio Terni, espèce de caoutchouc Manc que l'on
trouve à une demi-toise de profondeur dans un terrain humide ~&a~ JoM/Tt,
XVII,
P~
le Tabashetr des Bambousiers de l'Amérique, différent de celui d'Asie
(/~MyM~ Mém. de /VM~ ~7, S82)} le Cortex Angosturœ, écorce du Boaplandia
trifoliata, de Carony; le Cinchona condamiaea de Loxa~t plusieurs autres espèces de
Quinquina que nous avons recueillies dans les forêts, de la Nouveue-Grenade f~<!M<rMC&t.
~Z/i5~.
seulement a'~etë'sa~
;)Ï~
~t~inot~~OU! .~0
pe)E'sëïm~ .car~
maio~ de
iiavire'est~o~dËË~
;f'j~.c~pé~itnoÜ1}jré

lorsqu'un
d~is$es'reli-
fermant des pta~tës ~ches ou des roches, loin d'être transmises
aux savans a qui elles sontadressées, restent abandonnées à
Foubli. Que~Neis-uties de nos coHeqtiohs gëoïo~îques prisés
dans la mer du Stïd, ont eu cependant un sort pÏus heureux.
Nous devons leur consërvatïon à la généreuse activité du
chevalier Bants, président de la Société Royale de Londres,
qui, au milieu des agitations politiques de l'Europe, a
travaille sans relâche à resserrer les liens par lesquels se
trouvent unis les savans de toutes les nations.
Les mêmes causes qui ont entravé nos communications,
ont aussi opposé, depuis notre retour, beaucoup d'obstacles à
la publication d'un ouvrage, qui, par sa nature, doit être
accompagne d'un grand nombre de gravures et de cartes.
Si ces diHicultës se sont fait sentir quelquefois dans des
entreprises faites aux frais et par la munificence des gouver- lt
11
nemens, combien ne doivent-elles pas être plus grandes pour
de simples particuliers? Il nous auroit été impossible de les
vaincre, si le zèle des éditeurs n'avoit été seconde par
l'extrême bienveillance du public. Plus des deux tiers de
notre ouvrage sont déjà publies. Les cartes de rOrenoque,
du Cassiquiare et de la rivière de la Madeleine, fondées sur
la INT~ODr~SM<m
astronomitt~es, et placeurs centaines de
..L'
mes observations
t 8 t.'
plantés gravées au simple trait, sont prêtes à paroltre, et je
ne quitterai pasrEurope~po~ vt~yage en
Asie, avant d'avoir ofÏert au public l'ensemble des résultats
de ma première expédition~
Dans les mémoires destines à approfondir les divers objets
de nos recherches, nous avons tâche, M. Bonpland et moi,
de considérer chaque phénomène sous diNerens aspects, et
de classer no~ observations d'après les rapports qu'elles
enrôlent entre elles. Pour donner une~ juste idée de la
marche que nous avons suivie, je vais présenter succinctement
lénumération des matériaux que nous possédons pour faire
connoître les volcans d'Antisana et de Pichincha, ainsi que
celui de Jorullo sorti de terre dans la nuit du 20 sept. i~So~,
et élevé de a65 toises au-dessus des plaines environnantes
du Mexique. La position de ces montagnes remarquables
a été déterminée en longitude et en latitude par des obser-
vations astronomiques. Nous en avons nivelle les diSerentes
parties à l'aide du baromètre; nous y avons déterminé
l'inclinaison de l'aiguille aimantée et l'intensité des forces
magnétiques. Nos collections renferment les plantes qui
couvrent la pente de ces volcans, et les diSerentes roches
superposées les unes aux autres qui en constituent l'enveloppe
extérieure. Des mesures suffisamment précises nous mettent
en état d'indiquer, pour chaque groupe de végétaux et pour
cMque Fpche v~cani~ue, la Iiauteuc j).a~ t~ tpottv~
au-dessus du niveau de l'<~c~~ nous ~rent
des séries d'observa~ é,
électrique ~t~~ de
iL.'te, ..r4P,

chargé ~air aux


bords des cratères de Pichineha et de Jorullo. On y trouve
aussi les plans topographiques et les pronis géologiques de ces
montagnes.fbndés en partie sur la mesure de bases verticales
et sur des angles de hauteur. Chaque observajtion a été
calculée d'après les tables et les méthodes que l'on regarde
comme les plus exactes dans l'état actuel de nos connois-
sances et, pour pouvoir juger du degré de confiance que
méritent les résultats, nous avons conservé tout le détail des
opérations partielles.
Il auroit été possible de fondre ces divers matériaux dans
un ouvrage destiné uniquement à la description des volcans
du Pérou et de la Nouvelle-Espagne. En oHrant le tableau
physique d'une seule province, j'aurois pu traiter sépa-
rément ce qui a rapport à la géographie, à la minéra-
logie et à la botanique mais comment interrompre, soit la
narration d'un voyage, soit des considérations sur les mœurs,
l'aspect de la nature ou les grands phénomènes de la
physique générale, par rénumération fatigante des pro-
ductions du pays, par la description de nouvelles espèces
d animaux et de plantes ou par le détail aride des obser-
vations astronomiques? En adoptant un genre de rédaction
qui auroit réuni dans un même chapitre tout ce qui a été
observé sur un même point du globe ~j'aurois~ composé im
ouvrage d'une longueur excessive, et surtout dénué de cette
clarté qui naît en grande partie de la distributionméthodique
des matières. Malgré les eSbrts que j'ai faits pour éviter
dans cette relation de mon voyage les écueils que j'avois à
redouter, je sens vivement que je n'ai pas toujours réussi
à séparer les observations de détail de ces résultats généraux
qui intéressent tous les hommes éclairés. Ces résultats em-
brassent à la fois le climat et son influence sur les êtres
organisés, l'aspect du paysage, varié selon la nature du
sol et de son enveloppe végétale, la direction des montagnes
et des rivières qui séparent les races d'hommes comme les
tribus de végétaux; enfin ces modifications qu'éprouve Fêtât
des peuples placés à différentes latitudes et dans des circons-
tances plus ou moins favorables au développement de leurs
facultés. Je ne crains pas d'avoir trop multiplié des objets
si dignes d'attention car un des beaux caractères qui dis-
tinguent la civilisation actuelle de celle des temps plus reculés,
c'est d'avoir agrandi la masse de nos conceptions, d'avoir
fait mieux sentir les rapports entre le monde physique et le
monde intellectuel, et d'avoir répandu un intérêt plus général,
sur des objets qui n'occupoient jadis qu'un petit nombre de
savans, parce qu'on les considéroit isolés et d'après des vues
plus étroites.
.t*puv~ ~g~l'
't't~t.
––
ËXe~l'a~ntt0~.d~pl~
c~u, j~,fa~s;~îtrë:
g~ràa~cl:, aan~are ~de :,le~ateurs~qû.e:.

nMs.rechercheSc~
le'detaâ~'d~.mes~~erv~~J~~

Nomvelle-~spagne~
de la
<? que

rappeler Mt les travaux que nou~


M, Bonpiand et moi. Lorsque plusieurs ouvrages sont
étroitement IMS entre eux, il est de quelque intérêt pou~ le
lecteur de coanottre les sources auxquelles il peut puiser
des renseignemens plus circonstanciés. Dans le voyage de
M. Pallas, qui est si remarquable parl'exactitudeet la profondeur
dés recherches, le même Atlas onre des cartes géographiques,
dès costumes de diSerens peuples, des restes d'antiquités,
des figures de plantes et d'animaux. D'après le plan de
notre ouvrage il a fallu distribuer ces planches dans des
parties distinctes on les trouvera réparties dans les deux
Atlas géographiques et physiques qui accompagnent la Rela-
tion du Voyage et l'Essai politique sur le royaume de la
Nouvelle-Espagne, dans les Vues des Cordillères et monu-
mens des peuples indigènes de l'Amérique, dans les Plantes
Ëquinoxiales, la Monographie des Melastomes, et le Recueil
d'observations zoologiques. Comme je serai obligé de citer
assez souvent ces diSerens ouvrages, je vais indiquer en

titres.
note lés abbréviations dont je me suis servi pour en rappeler
les
~cMet/ J'o~er~~o~
t. Recueil a~~MOM~MM~ ~'p~
J'o~er~~o~ a~~oM~MM~
~~o~OMté~~M~ et NtC.M~*e~
~'p~
~ro~e~y~~J j~z~
/acM-
~0!/ï< le cours r~OM~~M~C~M~ ~M
nouveau, co~tMeM~'j en t~So~.
Getpuvrage~ auquel
on a joint des recherches historiques sur la position de
plusieurs points importais pour~es navigateurs, renierme
i.° les observations originales que j ai faites depuis les 12° de
latitude australe jusqu'aux ~i" de latitude boreate, comme
passages, du soleil et des étoiles par le méridien, distances
de la lune au soleil et aux étoiles, occultations de satellites
éclipses de soleil et de lune, passages de Mercure sur le
disque du soleil, azimuths, hauteurs circumméridiennes de
la lune pour déterminer la longitude par ~ë moyen des diSé-
rences de déclinaisons, recherches sur l'intensité relative de
la lumière des étoiles australes mesures géodésiques, etc.
3.° Un mémoire sur les réfractions astronomiques sous la
zone torride, considérées comme effet du décroissement du
calorique dans les couches superposées de Taîr; 5." le
nivellement barométrique de la Cordillère des Andes, du
Mexique, de la province de Venezuela, du royaume de
Quito et de la Nouvelle-Grenade, suivi d'observations

0~r.
tête de
en deux volumes m- J'ai discuté, dans l'Introduction ptacée à la
cet ouvrage, le choix des instrumens les plus propres à employer, dans des
voyages lointains, le degré de précision que l'on peut atteindre dans les diaërensgenres
d'observations, le mouvementpropre de'quelquèsgrandës~toïles de- l'hémisphère austral,
et plusieurs méthodes dont l'usage n'est pas assez répandu parjni les navigateurs.
géoïogïq~é~n~miantl'mdtc~
t~s ha~teuips~calcutees ~pj~l~ &rnau~ Iâa ~~e et
BOuveà~ coëSM~M~~ï~~ 4-l1,n';t)Jjleau,dè ,près
de sept cents positions géographiques c!°u' nouveau continent,
dont deux cent trente-cinq ont été déterminées par mes
propres observations, selon les trois coordonnées de longi-
tude, de latitude et de hauteur,
H. jP&tM~M eyM<Mo.yM:~M recMC~~ au jMc.r~MC dans
l'tle <~ Cuba, dans ~s~o~Mce~ de C~FYïca~~ de Cumana
et de j9arcc~oytc~ aux Andes de la ~VoM~e~e-C~eM~e~
Je~M~o du ~eroM~ et sur &o~ JM Rio ~Vc~ro~
de fOr~fM~Me et de ~ï rivière des ~TMa~oMe~ M. Bon-
pland y a donné les.Ëgures de près de quarante nouveaux
genres 2 de plantes de ~a zone torride, rapportées à leurs
familles naturelles. Les'descriptions méthodiques des espèces
sont à la fois en francois et en latin, et accompagnées
d'observations sur les propriétés médicales des végétaux,
sur leur usage dans les arts et sur le climat des contrées
où ils se trouvent.
Itl. JMoMO~ra~te des ~eZa~o~M~ Rhexia et autres

J' équin., en noir.


deux volumes in-folio, ornés ae plus de t5o planches gratées au
burin et tirées en
Nous ne citeronsici que les genres Ceroxylon, Marathrmn, Cassupa, SacceHium,
Cheirostemon, RhetiniphyUum, Machaonia,HmnocharM, Berthole'tia, Exostema,
Vanquelmia, Guardiota,Turpinia,Salpianthas,Hermesia, Ctadostyles, Liteea, Culcitium,
Espeletia, Bonptandia, P!atyeàrpum,Gyaeriam, Eadema~T~eBarda, Andromachia,
Kunthia, Rhaptostytum, Menodora, Gaylussacia, Podopterus,Leucophyllum, Angelonia.
~e~FS~ <~ ce~ or<~ Cet ouvrage est destïne à &ïre
coHMoître plus de cent cinquante espèces de Melastomacées
que nous avons recueillies pendant le cours dé ïio~F~ expé-
dition et qu~ font un des~ plus beaux ornetAens de là
végétation des tropiques. M. ~Bonpiand y a joint les plantes
de la même famine que, parmi tant d'autres richesses d~his-
toire naturelle, M. Richard a rapportées de son intéressant
voyage aux Antilles et a la Guyane francoise, et dont II
a bien voulu nous commumquer les descriptions..
FV. ~t ~Mr ~o~e ~M ~Zsy~M~ accoM/M~Tte
~~MM ~&~<ïM ~MC < C~MÏMOJ!*M~e~ J~M~S ~M~
J~ /Ke~Mr<?~ e.yécM<ce~ Je~MM le <~e~Mte degré de &x~M~e
boréale jusqu'au di~iérne
~orea~e yM~yM~M degréde.1,titud~
J~ytéme ~egrë ccûstraZe.
<~ &ï~jfMJc aM~/y~.
essayé de reunîr dans un seul tableau lensen~ble des
J'ai J',
phénomènes physiques que présente la partie du nouveau
continent comprise dansia zone torride, depuis le niveau de
la mer du Sud jusqu'au sommet de la plus haute cime des
Andes; savoir la végétation, tes animaux, les rapports
géologiques, la culture du sol, la température de Tair, lès
limites des neiges perpétuelles, la constitution chimique

Geo~r. ~<~<"&, un volume in avec une grande planche coloriée. Cet ouvrage,
imprimé pour la première fois en 1806, sera réimprimé avec des additions, et formera
la cinquième partie de la collection complète, ayant pour titre .P~H~Me gCMen!?e. J'ai
exposé les premièresidées sur la ~o~~Ate <CM~&M!<< sur leurs aMMM~MM M<M~/e$
et /~M<o/re ~e &-MM M~ra<MM, dans ma JPYo~a .f~e~MMM ~&tn<<t.f ~M~ c~«~<tM<caf
yywMraw ~M~/vaKe~~ CMt otcee~M/t< ap&on$M< e~c ~~MO~M c&eNMM ~&t~fMo<.
(2?e/w~ ~79~')
soEt~
.~ztj~
de~nosphe~ t~e~sxor~ ~aé~ec;tr~qu~e=~sa°:t.ïsivri~-
~métr~qu~le'décroiss~~
la coulear
les ré&'aet~h~~rM:
pendant'
r
d~
~=
~a
~arc~
g~av~ïtïd~

à diSerenteshau~urs. Quatorze échelles disposées à côte


d'un proni des Andes, tndï~ueQtïes mûdincations que
~te ~1~

subissent ces ph~nocaènss pap i'inâuence de l'etévàtion du


sol au-dessus du mveau de ~'ocëan. groupe de
végétaux est placé à ta hauteur que ta nature lui a assignée,
et l'on peut suivre la prodigieuse variété de leurs formes
depuis la région des palmiers et des fougères en arbres
jusqu'à celles des .Johannesia (Chùquipaga~ Joss.),'des
graminées et des plantes licheneuses. Ces régions forment
les divisions naturelles de l'empire végétal; et, de même
que les neiges perpétuelles se trouvent sous chaque climat à
une hauteur déterminée, les espèces fébrifuges de Quinquina
(Cinchona) ont aussi des limites fixes que j'aiindiquéessur
la Carte botanique qui accompagne cet Essai Sur la Géogra-
phie des plantes.
V. Recueil ~o~e~a~K~ .MO~TC J~K~o~MM
coTMparee'. J'ai réuni dans cet ouvrage l'histoire du Condor;

O&À zoo~. en deux volumes in 4 dont te premier a paru en eMier, avec 5o planches,
la plupart coloriées. .1
des expériences sur l'action électrique des Gymnotes'; un
mémoire sur le larynx des Crocodiles/des quadrumanes et
des oiseaux des tropiques; la description de plusieurs hou-
velles espèces de reptiles~ de poissons, d'oiseaux, de singes
et d'autres mammifères peu connus. Un savant illustre dont
la' constante amitié m'a été si honorable et si utile depuis
un grand nombre d'annëes, M. Cuvier, a enrichi ce recueil
d'un mémoire très-étendu sur l'Axolotl du. lac de Mexico et sur
les Protées engénéral. Le même naturaliste a aussi reconnu
deux nouvelles espèces de Mastodontes et un véritable élé-
phant, parmi les os fossiles de quadrupède& que nous avons
rapportés des deux Amériques~. La description des insectes
recueillis par M. Bonpiand, est due à M. Latreille dont les
travaux ont tant contribué de nos jours aux progrès de l'ento-
mologie. Le second volume de cet ouvrage renfermera les
figures des crânes Mexicains, Péruviens et Atures que nous
avons déposés au Muséum d'histoire naturelle de Paris,
et sur lesquels M. Blumenbaçh a déjà publié quelques
observations dans le D<?c<M ~MM~ cr~/HO~M~ Jt~e~arM~t
~e~MMt.
VI. Essai politique ~MF* royaume de la ~VoM~e~e-jE~-

Ces expériences se lient à celles


que j'ai publiées, avant mon départ pour l'Amérique,
dans le second volume de mon Essai
sur l'irritation de &t~~ MMMM/a<e et He~etMe,
et sur l'action chimique qui entretient la vie dés <!KMMtM: et <&M~/<Ht~. 1706.
Muséum d'hist. nat.,T. VIII, pag. 57 et
pag. 4t2 et 4t5, p}.
2,
et~
6g.
p~~ ~CC M~ /?~~M~ g~M~J J~M~P
~MF J~ O~CFy~OM~ ~/MMO'~t~Me~ M~M~C~ ~O~O-
Me~M~ e< J~ ~c~~M~ ~a~c'<M<?~ ~et cnxvra~e,
&)ndé sur un ~and no~~t'e de mémoires o~Siciéts, ûSre en six
divisions des considérations sur Détendue et raspect physique
du Mexique, sur la population, les mceurs des habitans, leur
ancienne civilisationet la division politique dupays. ïl embrasse
e
à la fois l'agriculture, les richesses minérales, les manufac-
tures, le commerce, les finances, et la défense militaire de
cette vaste contrée. En traitant ces difïerens objets de l'éco-
nomie politique, ) j'ai tâché de les envisager sous un point de
vue général;, j'ai mis en parallèle la Nouvelle-Espagne, non
seulementavec les autres colonies espagnoles et la confédération
des Ëtats-Unis de 1 Amérique septentrionale, mais aussi avec

~VoM'.Esp. en deux volumes m 4." et un Atlas de 20 planches in-folio. Ma Carte


~ene/vtA* du ro,r~untedelczNouvellt;-Espa~ne,
générale <A< ~o~aMMe~e&t~VoMfe~-jE'~agMe, <&ieMec
dnessés se~rrl~s obsetvations a~OKOM~Mc~,
M<r<&K! o~cn'a&OM~ aslmnomiyucs,
et sur l'ensemble des ma~MtME qui existoient à Mexico CM 180~, a été copiée par
M. Arrowsmith, qui se l'est appropriée en la publiant sur une plus grande écheHe en i8o5
(avant que la traduction angloise de mon ouvrage eût paru à Londres, chez Z.<Mt~M<M/
J
~M~< et 0~<e), sous le titre de New Map of Mexico, co~t/eJj~w o~/M/
documents by ~ry~w~MAA. n est facile de'reconnoitre cette carte par beaucoup de fautes
chateo~raphiques, par l'explication des signes qu'on a oublié de traduire du françois
en anglois, et par le mot Océan que l'on trouve inscrit au milieu des montagnes, dans
un endroit où l'Originat porte Ze~&ttMM de Toluca < e&fe de t/;oo toises au-dessus
du niveau de foe~M. Le procédé de M. Arrowsmith est d'autant plus blâmable,
MM. Dairympie, RenneU, d'Arcy de la Rochette, et tant d'autres exceUens geooraphes
que
que possède t'Angteterre, ne lui en ont donnél'exempte ni dans leurs cartes ni dans
les analyses qui les accompagnent. Les réclamations d'un voyageurdoivent paroître justes,
lorsque de simptes~opies de ses travaux se répandent sous des noms étrangers.
les possessions des Anglois en Asie; j~ai comparé l'agriculture
des pays situés sous la zone torride à celle des citmats tem-
pères; j j'ai examiné la quantité de denrées coloniales dont
l'Europe a besoin- dans l'état actuel de sa civilisation. En,
traçant la description géognostique des districts des mines les
plus riches du Mexique, j'ai présenté le tableau du produit'
minéral, de la population, des importations et des expor-
tations de toute l'Amérique espagnole; en&n, jai abordé
plusieurs questions qui, faute de données exactes, n'avoient
pu être traitées jusqu'ici avec toute la profondeur qu'elles
exigent, comme celles sur le Bux et le
reflux des richesses
métalliques', sur leur accumulation progressive en Europe et
en Asie, et sur la quantité d'or et d'argent que, depuis la

Le voyage récent du Major Zc&MZon Montgomery Pike dans les provinces septen-
trionales du Mexique (~ccoM~t of <7K'J?a'pe<&t/on~to the sources o/<Ae ~MMM~c'taM~ to
the interiorparts of ~e<<' ~a/a, ~'&/&K/e&<ÂM, 1810) renferme des notions précieuses
sur les rivières La Ptatte et Arkansaw, ainsi que sur la haute chalne de montagnes qui
s'étend au nord du Nouveau-Mexique vers les sources de ces deux riviëtest mais les
nombreuses données statistiques que~ M. Pike a recueillies chez une natton dont il jgnoroi~
la langue, sont le plus souvent très-inexactes. Selon cet auteur, la monnoM dé Mexico
fabrique annuellement SomUtionsde piastres en argent et i~ miMions en or; tandis qu'il
est prouvé, par les tableaux imprimés annuellement par ordre de la Cour, et pnHiés
dans mon ~M<M/to&~M~ que l'année où l'exploitation des mines mexicaines a été la
plus active, le monnoyagene s'est élevé qu'à :5,8o6,oy4pMsh~ en argent et à i,55o,8t4
piastres en or, M. Pike a déployé un noble courage dans une entreprise importante pour
la connoissance de la Louisiane occidentale; mais dépourvu d'instrumens et sévèrement
surveUlé pendant la route de Santa-Fe à Natchitoches, il n'a pu rien {aire pour le
perfectionnement de la géographie des /MwMe~M internas. Les cartes du Mexique qui se
trouvent annexées à la relation de son voyage, sont des réductions de ma grande ea!'te de
taNouveIle'Espagne, dont une copie étoit restée, en i8o4< àlaSecrétairene d'jÊtatde
Washington.
d~G~uv~tedel'~mérïquejusq~
a reçue du nouveau. L'in~duction gëôgrap~ a
la tête de cet ouv~ge ~nÏSsrme ~n~lv~ des m~atériau~ <~i
ont servi à rédigea
VH. ~Mc~ ~r~~c~
indigènes ~M MûM~<!M coM~MCMi!'
ë~J~
l'j~x~~
~r ~eM~M
Cet ouvrage est destmë à
la fois à faire connoîtpe quelques-unes ~es grandes Scènes que
présente la' nature dans ïeshautescnaines des Andes, et à jeter
du jour sur t'ancienneciviUsattondes AmertcainS) par l'étude
de leups ïnonumens d architecture, dé leurs hiéroglyphes;
de leur culte reUgieux et de leurs rêveries astrologiques.
Jy ai dëcrit la construGtion des téocallis ou pyratnides
mexicaines, comparée à celle du temple de Bélus, les ara-
besques qui couvrent les ruines de ~litia, des idoles en basalte
ornées de la Calantica des têtes d'Isis, et un nombre consi-
dérable de peintures symboliques représentant la femme au
serpent, qui est l'Eve mexicaine, le déluge de Coxcox, et les
premières migrations des peuples de race aztèque. J'ai tâche
d y démontrer les analogies frappantes qu'onrent le calen-
drier des Toltèques et les èàtastérismes de leur zodiaque,
avec les divisions du temps des peuples tartares et tibétains,
de même que les traditions mexicaines sur les quatre régé-

JMbBM~ ~~er. un volume In-folio, avec 60 planches, en partie coloriées et


accompagnéesde mémoires explicatif. Cet ouvrage peut être considéré comme FAttas
pittoresque de la Relation historique du Voyage.
néfattons du globe, avec ies pralayas des Jtjundoux et les
quatre âges d'Hésiode: j'y ai consigné aussi, outre les peintures
hiéroglyphiques que j'ai rapportées en Europe, des fragmens
de tous les manuscrits aztèques, qui se trouvent à Rome,
à Veletri, à Vienne et à Dresde, et dont le dernier rappelle,
par des symboles linéaires, les kouas des Chinois. A côte de
ces monumens grossiers des peuples de l'Amérique, se trouvent
dans le même ouvrage les vues pittoresques du pays mon-
tueux, que ces peuples onthabité, commecelles de la cascade
du Tequendama, du Chimborazo, du Volcan de Jorullo et
du Cayambé dont la cime pyramidale, couverte de glaces
éternelles, est placée immédiatement sous la Itgne équatorialë.
Dans toutes les zones la conSguration du sol, la,physionomie
des végétaux et l'aspect d'une nature riante ou sauvage influent
sur les progrès des arts et sur le style qui distingue leurs
productions; et cette influence est d'autant plus sensible, que
l'homme est plus éloigné de la civilisation.
J'aurois pu ajouter à cet ouvrage des recherches sur le
caractère des langues, qui sont les monumens les plus
durables des peuples j'ai recueilli sur celles de l'Amérique
beaucoup de matériaux, dont MM. Frédéric Scblegel et
Vater se sont servis, le premier dans ses <~yMK~~o/M ~Mr
les ~t/î~oM~, le second dans la continuation du jM~rM~e
J'Jf~M/ï~ dans le jM~M~ e~MogvapAt~Me et dans ses
~ec~erc~ sur la ;oo/M~Kw du MOM~M!M coM~e~. Ces
.maté~au~sè l~ro<<~nt a~jourd~~h~
frè~illaume~H~~
fpè~é,1\f~GtlilI~uœ)~l~qUi~'?r~!1~~nt[~yl)ges
,qui~,
en i~j~~e~ et~pendan~ formé ~a pluss
v~`~g~s ses
~~n~~ns~mon

ncl~collectio&de~~oca~~ qm
existe. Gomme il a des connoissances étendues sur les tangues
ait jamais

anciennes et modernes~ il a ëté en état de ~ire des rapproche-


mens très-curieux sur cet objet important pour l'étude phi-
losophique de l'histoire de l'homme. Je me flatte qu'une
partie de son travail trouvera place dans cette relation.
De ces dînerons ouvrages dont je viens de faire ici l'énu-
mération, le second et le troisième ont été rédigés par
M.BonpIand, d'après des observations qu'il a consignées
sur les lieux même dans 'un journal botanique. Ce journal
contient plus de quatre mille descriptions méthodiques de
plantes équinoxiales, dont un neuvième seulement ont
été faites par moi elles paroîtront dans un ouvrage parti-
culier, sous le titre de JVoMï~e/ïera et species plantarum.
On n'y trouvera pas seulement les nouvelles espèces que
nous avons recueillies, et dont le nombre, d'après les re-
cherches d'un des premiers botanistes du siècle, M.Willdenow,
paroît s'élever à quatorze ou quinze cents mais aussi les
observations intéressantes que M. Bonpiand a faites sur des

Une partie considérable de ces espèces se trouve déjà indiquée dans la seconde
division de la quatrième partie du Species plantaruni de Linnée, 4.* édition. Des Eryn-

y
gium que nous avons rapportées de notre voyage, onze espèces nouvelles ont été gravées
dans la belle Monographie de ce genre, publiée par M. de la Roche.
Y?~– ~rr~
végétaux imparfaitement décrits jusqu'à ce jour. Cet ouvrage,
dont les Rguresseront gravées au simple trait, sera exé-
cuté d'après la méthode suivie dans le ~~c~e'M /MMt
:/Vo~ j~o~ïMJ/<p de M. Labillardière, qui offre un modèle
de sagacité dans les recherches, et de clarté dans la ré-
daction. n
(.
Les observations astronomiques, géodésiques et baromé-
triques que j'ai faites de i-y~a à i8o4?o~ été calculées d'une
manière uniforme, en employant des observations correspon-
dantes et d'après les tables les plus précises, par M.Oltmanns,
professeur d'Astronomie et membre de l'Académie de Berhn.
Ce savant laborieux a bien voulu se charger de la publica-
tion de mon .ToM~/M~ a~o~M~M~MCj q~'il a enrichi des résul-
tats de ses recherches sur la géographie de l'Amérique, sur
les observations des voyageurs espagnols, françois et anglois,
et sur le choix des ~méthodes employées par les astronomes.
J'avois calculé, pendant le cours de mon, voyage, les deux
tiers de mes propres observations, dont les résultats ont
été consignés en partie, avant mon retour, dans la Cb~MOM-
.M~ce des temps, et dans les Z~&emey'M~M.~ M. de Z~c~.
Les diQerences peu considérables qui se trouvent entre ces
résultats et ceux auxquels s'est arrête M. Oitmanns, pro-
viennent de ce que ce dernier a soumis à un calcul' plus
rigoureux l'ensemble de mes observations, et qu'il s'est servi
des tables lunaires de Bürg et d'observations correspondantes
Les observat~ns q~
de (~rèenwich) tandis que je n~~is employé e[oe la Connots*
sance des temps calculée d'ap~s les tabl~d~
1"iriclin~iso~. de l'ai-
guille aimantée, l'tntë~M des ~orGes magnétiques et les
petites vaNat)ons horaires de la déclinaison, paroitront dans
un mémoire particulier, qui sera joint à mon Essai sur la
JPa~ra~te~eo~o~ty~.Ce dernier ouvrageque j'ai commencé
à rédiger à Mexico en i8o3, offrira des coupes qui indiquent
la superposition des roches dont nous avons observé le type,
M. Léopold de Buch et moi, dans les deux continens, entre
les 13" de latitude australe et les ~1° de latitude boréale. En
profitant des lumières de ce grand géologue qui a parcouru
l'Europe, depuis Naples jusqu'au Cap-Nord en Laponie, et
avec lequel j j'ai eu le bonheur de. faire mes premières études à
l'école de Freiberg, j'ai pu étendre le plan d'un ouvrage
destiné à répandre quelque jour sur la construction du globe
et sur 1 ancienneté relative des formations.
Après avoir distribué dans des ouvrages particuliers tout
ce qui appartient à l'Astronomie, à la Botanique, à la
Zoologie, à la description politique de la Nouvelle-Espagne
et à l'Histoire de l'ancienne civilisation de quelques peuples
du nouveau continent, il restoit encore un grand nombre de
résultats généraux et de descriptions locales que j'aurois pu
réunir dans des mémoires particuliers. Pendant le cours de
mon voyage j'en avois préparé plusieurs sur les races
d'hommes de. l'Amérique méridionale, sur les missions de
l'Orénoque, sur les obstacles que le climat et la force de la
végétation opposent aux progrès de la société dans la zone
torride, sur le caractère du paysage dans la Cordillère des
Andes comparé à celui des Alpes de la Suisse, sur les rapports
que l'on observe entre les roches des deux hénnsphères, sur
la constitution physique de l'air dans les régions équi-
noxiales, etc. J'avois quitté l'Europe dans la ferme résolution
de ne pas écrire ce que l'on est convenu d'appeler la relation
historique d'un voyage, mais de publier le fruit de mes
recherches dans des ouvrages purement descriptifs. J'avois
rangé les faits,
non dans l'ordre dans lequel ils s'etoient
présentés successivement, mais d'après les rapports qu'ils ont
entre eux. Au milieu d'une nature imposante, vivement occupé
pe
des phénomènes qu'elle offre à chaque pas, le voyageur est
peu tenté de consigner dans ses journaux ce qui a rapport
à lui-même et aux détails minutieux de la vie.
J'ai composé un itinéraire très-succinct pendant le cours
de ma..navigation sur les fleuves de l'Amérique méridionale
ou dans de longs voyages par terre; j'ai aussi décrit assez
régulièrement, et presque toujours sur les lieux mêmes, les
excursions vers la cime d'un volcan ou de quelque autre
montagne remarquablepar son élévation mais la rédaction de
j
mon journal a été interrompue chaque fois que ai séjourné
dans une ville, ou que d'autres occupations ne me permettoient
atînuar un
pas d~- contînuer
d'un intérêt'
au~a~
~T.~D:t~FM~
i~vai~
un travait~q~
seco~aiM.s~t~~
pour:y~.ai--que
1~n'~P~is .d'~utre
~9
que

but que de consérver~qu:elj~~s-u~ ces idées tarses qui


seprésénten~~àtUM'~ph~~ )>l~ue,t()'~t~Jà:~i~s~i'Pl\$se

en plein air, de rennir provisoiretnent une multitude de


faits que je n'a vois pas le temps de classer, et de décrire les
premières impressions agréables ou pénibles qu<3 je recevois
de la nature et des hommes. Jétois bien éloigné alors de
croire que ces pages écrites avec précipitation feroient un
jour la base d'un ouvrage étendu que j'oHrirois au public;
car il me sembloit que mon voyage, tout en fournissant quel-
ques données utiles aux sciences, otïroit cependant bien peu
de ces incidens dont le récit fait le charme principal d'un
itinéraire.
Les dilïicultés que j'ai éprouvées depuis mon retour, dans
la rédaction d'un nombre considérable de mémoires destinés à
1
faire connoître certaines classes de phénomènes, m'ont fait
vaincre insensiblement mon extrême répugnance à écrire la
relation de mon voyage. En m'imposant cette tâche, je me
suis laissé guider par les conseils d'un grand nombre de
personnes estimables qui m'honorent d'un intérêt particu-
lier. J'ai même cru m apercevoir que l'on accorde une
préférence si marquée à ce genre de compositionf que des
savans, après avoir présenté isolément leurs recherches sur
les productions, les mœurs et l'état politique des pays qu'ils
ont parcourus, ne semblent avoir aucunement satisfait a
leurs engagemens envers le public, s'ils n'ont pas écrit
leur itinéraire.
Une relation historique embrasse deux objets très-distincts:
les événemens plus ou moins importans qui ont rapport au
but du voyageur, et les observations qu'il a faites pendant
ses courses. Aussi l'unité de composition qui distingue les
bons ouvrages d'avec ceux dont le plan est mal conçu, ne
peut y être strictement conservée, qu'autant qu'on décrit
d'une manière animée ce que l'on a vu de ses propres yeux,
et que l'attention principale a été fixée, moins sur des obser-
vations de sciences que sur les mœurs des peuples et les
grands phénomènes de la nature. Or le tableau le plus fidèle
des mœurs est, celui qui fait connoître le mieux les rapports
qu'ont les hommes entre eux. Le caractère d'une nature
sauvage ou cultivée se peint, soit dans les ob~acles qui
s'opposent au voyageur, soit dans les sensations qu'il éprouve.
C'est lui que l'on désire voir sans cesse en contact avec les
objets qui l'entourent, et son récit nous intéresse d'autant
plus qu'une teinte locale est répandue sur la description du
paysage et des habitans. Telle est la source de l'intérêt que
présente l'histoire de' ces premiers navigateurs, qui, moins
guidés par leur science que par une noble intrépidité, lut-
tèrent contre les élémens, en cherchant un nouveau monde
dans des mers inconnues. Tel est. le charme irrésistible qui
tNT~O.M~TION. 3t
nous attache au~sort homme entreprenant' qui, Ibrt
u~sort de cet JbpMïne tort

4~
de son enthousiasme et de sa voloate~ pen~~
centre de l'Afrique ponr~
s~ dans le
au milieu d~ la bar-
barie des peuptes, les traces d'~neancienne~c~
A mesure que les voyages ont été faits par des personnes
plus instruites, ou diriges vers des recherches d'histoire natu-
relle descriptive, de géographie ou d'économie politique,
les itinéraires ont perdu en partie cette unité de com- v

position et cette naïveté qui distinguoient~ceux des siècles


antérieurs. Il n'est presque plus possible de lier tant de
matériaux divers à la narration des événemens, et la partie
qu'on peut nommer dramatique est remplacée par des mor-
ceaux purement descriptifs. Le grand nombre de lecteurs qui
préfèrent un délassement agréable à une instruction solide
n a pas gagné à cet échange, et je crains qu'on ne soit très-
peu tenté de suivre dans leurs courses ceux qui traînent avec
eux un appareil considérable d'instrumens et de collections.
Pour que mon ouvrage fût plus varié dans les formes, j'ai
interrompu souvent la partie historique par de simples
descriptions. J'expose d'abord.les phénomènes dans l'ordre
où ils se sont présentés, et je les considère ensuite dans
l'ensemble de leurs rapports individuels. Cette marche
a
été suivie avec succès dans le voyage de M. de Saussure,

M. Mungo Park.
5a INTRODUCTION.
~t<anv qui,
livre précieux
t!tr~~ ftti! plus ~1[<1 atl/*tt<~ autre,
T~tttC Qu'aucun ant) a contribue à
l'avancemenfdes sciences, et qui, au milieu ~discussions `
souvent arides sur la météorologie, renferme plusieurs
tableaux pleins de charme, comme ceux de la vie des mon-
tagnards, des dangers de la chasse aux chamois, ou des Sen-
sations qu'on éprouve sur le sommet des Hautes-Alpes.
Il est des détails de la vie commune qu'il peut être utile
de consigner dans un itinéraire, parce qu'ils servent à régler
la conduite de, ceux qui parcourent les mêmes contrées après
nous. J'en ai conservé un petit nombre: mais j'ai supprimé
la plupart de ces incidens personnels qui noSrent pas un
véritable intérêt de situation, et sur lesquels la perfection
du style peut seule répandre de l'agrément.
Quant au pays qui a fait l'objet de mes recherches, je ne
me dissimule pas les grands avantages qu'ont sur les voya-
geurs qui ont pafcouru l'Amérique, ceux qui décrivent la
Grèce, l'Égypte, les bords de Ï'Euphrate et les îles de l'Océan
Pacifique. Dans l'ancien monde, ce sont les peuples et les
nuances de leur civilisation qui donnent au tableau son carac-
tère principal; dans le nouveau, l'homme et ses productions
disparoissent, pour ainsi dire, au milieu d'une nature sauvage
et gigantesque. Le genre humain n'y offre que quelques
débris de hordes indigènes peu avancées dans la culture,
ou
cette uniformité de mœurs et d'institutions qui ont été trans-
plantées sur des rives étrangères par des côlons européens. Or
ce qui ~ent à I'h)st<~re de notre espèce~ aux formes
variées
des gouvernemenS) aux monumens de% arts, à ces,s!~3's qui
rappeMent de grands souvenirs, nous louche Mon vive-
ment q~e ta description de ces vastes solitudes qui ne paroissent
destinées qu'au développement de ta vie végétale et à l'empire
des animaux. Les sauvages de l~AmerIque qui ont été rob~et
de tant de rêveries systématiques, et sur lesquels, de nos jours,
M. de Volney a publié des observations pleines de sagacité et
de justesse, inspirent moins d'intérêt, depuis que des voyageurs
célèbres nous ont fait connoitre ces habitans des îles de la
mer du Sud dont le caractère offre un mélange frappant
de douceur et de perversité. L état de demi civilisation dans
lequel on trouve ces insulaires, donne un charme particulier
à la description de leurs mœurs; tantôt c'est un roi qui,
accompagné d'une suite nombreuse, vient ourir lui-même
les fruits de son verger, tantôt c'est une fête funèbre qui se
prépare au milieu d'une forêt. Ces tableaux ont sans doute
plus d'attraits que ceux que présente la morne gravité des
habitans du Missoury'ou du Maranon.
Si l'Amérique n'occupe pas Une place distinguée dans
l'histoire du genre humain et des anciennes révolutions qui
l'ont agité, elle offre un champ d'autant plus vaste aux
travaux du Physicien. Nulle part ailleurs la Nature ne l'appelle
plus vivement à s'élever à des idées générales sur la cause
des phénomènes et sur leur enchaînement mutuel. Je né
citerai pas cette force de la végétation, cette fraîcheur
1
éternelle de ta vie organique, ces climats disposes par étages
sur la pente des Cordillères, et ces Neuves immenses qu'un
ccrivain célèbre* nous a peints avec une admirable Rdélité.
Les avantages qu'ofïre le nouveau monde pour l'étude
de la géologie et de la physique générale son~ reconnus depuis
long-temps. Heureux le voyageur qui peut se Natter d'avoir
profité de sa position et d'avoir ajouté quelques vérités nou-
velles à la masse de celles que nous avons acquises!
Il est presque inutile que je rappelle ici ce que j'ai déjà
indiqué dans la Géographie des p&ïK~ et dans le discours
préliminaire placé à la tête des Plantes cy~~o~a~~ qu'unis
par les liens de l'amitié la plus intime tant pendant le cours
de notre voyage que pendant les années qui l'ont suivi, nous
publions en, commun, M. Bonpland et moi, tous les ouvrages
qui sont le fruit de nos travaux. J'ai tâché d'exposer les faits
tels que nous les avons observés ensemble; mais cette relation
ayant été rédigée d'après les notes que j'ai écrites sur les
lieux, les inexactitudes qui peuvent se prouver dans mon récit
ne doivent être attribuées qu'à moi seul.
Les observations que nous avons faites pendant le cours de
notre voyage, ont été distribuées en six sections la première
embrasse la Relation historique; la seconde, la Zoologie et
l'Anatomie comparée; la troisième, l'Essai politique
sur le
'M. dé Chateaubriand. 1
royaume d~ la ~o~lïe-~jpagne~
J~~i~e e~ J~ ~(~
la cinquième~ la e~¡la;c'si:tjiœe,a
Description des plantes noMV~Hesrécueulies dans tes deux
Amériques. Les édKeurs ont dévoyé un zcle louable pouc
rendre ces ouvrages plus dignes de rindulgence du public. Je
téte~de
ne saurois passer sous silence le ironti&pice placé à ta
cet Itinéraire. M. Gérard, avec lequel j'ai le bonheur d'être
lié depuis quinze ans, s'est plu à dérober pour moi quelques
momens à ses travaux je sens tout le prix de ce témoignage
public de son estime et de son amitié.
J'ai cité avec soin dans cet ouvrage les personnes qui ont
bien voulu me communiquer leurs observations c'est dans
l'Introduction même que je dois consigner l'expression de
ma reconnoissance pour MM. Gay-Lussac et Arago, mes
confrères à l'Institut, qui ont attaché leur nom à des travaux
importans, et qui sont doués de cette élévation de caractère
à laquelle devroit toujours conduire un amour ardent
pour
les sciences. Ayant l'avantage de vivre avec eux dans l'umon
la plus étroite, j'ai pu les consulter journellement
avec fruit
sur des objets de chimie, de physique et de plusieurs branches
des mathématiques appliquées. J'ai déjà eu occasion de citer,
dans le Recueil de mes observations astronomiques,
ce que
je dois à l'amitié de M.Arago qui, après avoir terminé la
mesure de la méridienne d'Espagne, a été exposé à des
dangers si multipliés, et qui réunit les talons de l'astronome,
du géomètre et du physicien. C'est avec M. Gay-~ussac
que j'ai disGuté plus particullèipement, au moment de mon

retour, les diSërens phénomènes de météorologie et de


géologie physique que pai recueillis dans mes voyages.
Depuis huit ans nous avons presque Constamment habité
sous le même toit en France, en Allemagne ou en Italie
nous avons observe ensemble une des plus grandes éruptions
du Vésuve; quelques travaux sur l'analyse chimique de
l'atmosphère et sur les variations du magnétisme terrestre
nous ont été communs. Ces circonstances m'ont mis dans le
cas de profiter souvent des vues -profondes et ingénieuses de ce
chimiste, et de rectifier mes idées sur des objets que je traite
dans la Relation historique de mon voyage.
Depuis que j'ai quitté l'Amérique, une de ces grandes
révolutions qui agitent de temps en temps l'espèce humaine,
a éclaté dans les colonies espagnoles; elle semble préparer de
nouvelles destinées à une population de ouatorze millions
d'habitans, en se propageant de l'hémisphère australà l'hémi-
sphère boréal, depuis les rives de la Plata et du Chili jusque
dans le nord du Mexique. Des haines profondes, suscitées par
la législation coloniale et entretenues par une politique déËante,
ont fait couler le sang dans ces pays qui jouissoient, depuis trots
siècles, je ne dirai pas du bonheur, mais d'une paix non inter-
rompue. Déjà ont péri, à Quito, victimes de leur dévouement
pour la patrie, les citoyens les plus vertueux et les plus éclairés.
Sn.. d~cri~ant des réjB'Ions dont le souvéaïp~ si
cMer; je rencontre àchaqu~iD~~u~
la perte de quelques ~inM!.
Lorsqu'on réuéchit sur les grandes agitations politiques du
nouveau monde, on observe que les Espagnols Américains ne
se trouvent pas dans une position aussi &vorable que les
habitans des États-Unis, préparés à l'indépendance par la
longue jouissance. d'une liberté constitutionnelle peu limitée.
Les dissensions intérieures sont surtout à redouter dans des
régions ou la civilisation n'a pas jeté des racines très-pro-
fondes, et où, par l'influence du climat, les forêts regagnent
bientôt leur empire sur les terres défrichées, mais abandonnées
à elles-mêmes, tl est à craindre aussi que, pendant une longue
suite d'années, aucun voyageur étranger ne puisse parcourir
l'ensemble des provinces que j'ai visitées. Cette circonstance
ajoute peut-être à l'intérêt d'un ouvrage qui présente l'état de
la majeure partie des colonies espagnoles au commencement
du dix-neuvième siècle. Je me flatte même, en me livrant à
des idées plus douces, qu'il sera encore digne d'attention,
lorsque les passions seront calmées, et que, sous l'influence
d'un nouvel ordre social, ces pays auront fait des progrès
rapides vers la prospérité publique. Si alors quelques pages
de mon livre survivent à l'oubli, l'habitant des rives de
l'Orénoque et de l'Atabapo verra avec ravissement que des
villes populeuses et commerçantes, que des champs labourés
par des ïnams iîb~s coupent ces me~es~
de mon voyage~ on ne troa~oi~ que des &M~ts imp~n~rab~es
ou des terrams mondes.
Paris, au mois de février ï8ï2.
VOYAGE
AUX REGIONS EQ~INOXIALES

NOUVEAU CONTINENT.

LIVRE PREMIER.

CHAPITRE PREMIER.

PRÉpARATIFS.-INSTRUMENS.-DÉPARTD'ESPAGNE.–RELACHE AUX
ISLES CANARIES.

-LtORSQTJ'CN gouvernement ordonne une de ces expéditions maritimes qui


contribuent à la connoissance exacte du globe et à l'avancement des
sciences physiques, rien ne s'oppose à l'exécution de ses desseins. L'époque
du départ et la direction du voyage peuvent être nxées, dès
que
l'équipement des vaisseaux est terminé et que l'on choisi les astronomes
a
et les naturalistes destinés à parcourir des mers inconnues. Les îles et les
côtes, dont ces voyageurs se préparent à examiner les productions,
ne sont
point soumises à l'inauence de la politique européenne. S'il arrive que des
guerres prolongées entravent la liberté de l'Océan, des passeports sont accordés
mutuellement par les puissancesitelligérantes;les haines particulières
se taisent
quand il s'agit du progrès des lumières, qui est la cause
commune de tous
les peuples.
n'en est pas de même lorsqu'un simple particulier entreprend àses&a!~
Il
un voyage dans l'intérieur d'un continent sur lequel l'Europe a étendu son
système de colonisation. Le voyageur a beau méditer un plan qui lui paroît
convenable, et pour l'objet de ses recherches, et pour l'état politique des
contrées qu'il veut parcourir; il a beau réunir tous les moyens qui; loin de
sa patrie, peuvent lui assurer pour long temps une existence indépendante
souvent des obstacles imprévus s'opposent à ses desseins au moment même
qu'il croit pouvoir les mettre en exécution. Peu de particuliers ont eu à
combattre des duncultés plus nombreuses que celles qui se sont présentées
à moi avant mon départ pour l'Amérique espagnole; j'aurois préféré n'en
point faire le récit, et commencer cette relation par le voyage à la cime
du Pic de TénérIGe, si mes premiers projets manqués n'avoient Innué sensi-
blement sur la direction que j'ai donnée à mes courses depuis mon retour de
l'Orénoque. J'exposerai donc avec rapidité ces evénemens qui n'offrent aucun
Intérêt pour les sciences, mais que je désire présenter dans leur vrai jour.
Comme la curiosité publique se porte souvent plus sur la personne des
voyageurs que sur leurs ouvrages,
on a dénguré d'une manière étrange 1:
ce qui a rapport aux premiers plans que je m'étois tracés.
J'avois éprouvé, dès ma première jeunesse, le désir ardent d'un voyage
dans des régions lointaines et peu visitées par les Européens. Ce désir
caractérise une époque de notre existence où la vie nous paroit comme
un horizon sans bornes, où rien n'a plus d'attraits pour nous que les fortes
agitations de l'ame et l'image des dangers physiques. Elevé dans un pays qui
n'entretient aucune communication directe avec les colonies des deux tndes,
habitant ensuite des montagnes éloignées des côtes, et célèbres par de
nombreuses exploitations de mines, je sentis se développer progressivement
en moi une vive passion pour la mer et pour de longues navigations. Les
objets que nous ne connoissons que par les récits animes des voyageurs, ont
un charme particulier: notre imagination se platt à to~ ce qui est vague
et Indéfini; les jouissances dont nous nous voyons privés paroissent préférables

Je dois faire observer, à cette occasion, que je n'ai jamais en connoissance d'un onTM~e enMfeïamM
qui a paru chez Vothmer & Hambourg, sous te titre bizarre de Voyage mitouf m<M<<te et dMMt,
t'Amërique méridionale, par A. de Humboldt. Cette relation faite eu mon nom, a été f~}igee &ce ~(
paroit, d'après des notices publiéesdans les journaux,et d'aprèsdes mëiMurëtrMotet qne )'a!tiM &tt~)fen5~M
classe de MustitM. Le compilateur, pour &)terraMent!om <htp)thM<& cru pONVott donner & anV~y~e
dans quelques parties d~i nouveau continent le titre plus attrayant de Voyage MttMtT da monde.
à celtes que nous éprouvoas journellement dans le cercle étroit de la vie
sédentaire. Le goût des herborisations, l'étude de la géologie, une course
rapide faite en Hollande, en Angleterre et en France, avec un homme célèbre,
M. George Forster, qui avoit eu le bonheur d'accompagner le capitaine
Cook dans sa seconde navigation autour du globe, contribuèrent à donner
une direction déterminée aux plans de 'voyages que j'avois formés à l'âge de
dix-huit ans. Ce n'étoit plus le désir de l'agitation et de la vie errante, c'étoit
celui de voir de près une nature sauvage, majestueuse, et variée dans ses
productions; c'étoit l'espoir de recueillir quelques faits utiles aux progrès des
sciences, qui appeloient sans cesse mes vœux vers ces belles régions situées
sous la zone torride. Ma position individuelle ne me permettant pas d'exécuter
alors des projets qui occupoient si vivement mon esprit, j'eus le loisir
de me préparer pendant six ans aux observations que je devois faire dans
le nouveau continent, de parcourrir différentes parties de l'Europe, et
d'étudier cette haute chaule des Alpes, dont j'ai pu dans la suite comparer
la structure à celle des Andes de Quito et du Pérou. Comme je travaillois
successivement avec des instrumens de différentes constructions, je fixois mon
choix sur ceux qui me paroissoient à la fois les plus précis et les moins
sujetsse briser dans le transport; j'eus occasion de répéter des mesures
qui avoient été faites d'après les méthodes les plus rigoureuses, et j'appris
à connoitre par moi même la limite des erreurs auxquelles je pouvois
être exposé.
J'avois traversé une partie de l'Italieen ~5, mais je n'avois pu visiter
les terrains volcaniques de Naples et de la Sicile. Je regrettois de quitter
l'Europe avant d'avoir vu le Vésuve, Stromboli et l'Etna; je sentois que,
pour bien juger d'un grand nombre de phénomènes géologiques, surtout
de la nature des roches de formation trapéenne, il falloit avoir examiné
de près les phénomènes qu'oSrent les volcans qui sont encore
en activité. Je
me déterminai donc à retourner en Italie au mois de novembre iy<)7. Je fis
un long séjour à Vienne, où de superbes collections de plantes exotiques
et t'amitié de MM. de Jacquin et de M. Joseph Van der Schott me furent
si utiles pour mes études' préparatoires; je
parcourus, avec M. Léopold de
Buch qui, depuis, a puMié un excellent ouvrage sur là Lapponie, plusieurs
cantons du pays de Salzbourg et de la Styrie, deux contrées également
intéressantes pour le géologue et pour le peintre paysagiste mais,
au
~e~s<M<t AM<<M~H~ Zbm. f. 6
entière me forcèrent de re~oncef au pMjet d'aHer à&
moment de passer !es A!pes du Tyroï~ ie&gnerres q<M agitoient alors ThaHe

Peu de temps avant, un BomnteqtH~t~tpast!onnié pour ïes beaui


arts, et qui pour en observer les monamens, avcit vMté les côt~s de
l'Illyrie et de !a Grèce, m'avait proposé <b! accompagner dans un voyage
de la Hautes-Egypte. Cet~ exc~nio~ ne devoït durer que huit mois
munis d'instrumens astronomiques~ et accompagnes d'habiles dessinateurs,
nous devions remonter le NU jusqu'à AssOMan, en examinant en détail la
partie du 6aïd comprise entre Te~tyris et !<Bs Gatara'otes. Quoique mes vues
n'eussent pas été fixées jusque là sur nae région située hors des Tropiques,
je ne pouvois résister à la tentation de visiter des contrées si cétèbres dans
les fastes de la civilisation humaine.aocep!:ai les proptasitions qui m'ëtoient
faites, mais sous la condition expresse que, de retour à Alexandrie, je resterais
tibre de continuer seul mon voyage par !a Syrie et la Petestine. Je donnai
dès-lors à mes études une direction qui étoit eonSttme à ce noM~eaM projet)
et dont j'ai profité dans la stnte, en ~xasannantïes rapporM qu~onrejtt les
monumens barbares des Mexicains avec ceux des peuples de l'ancien monde.
Je ~ae croyois très près du moment où je in'embarquerets pour l'Egypte,
quand les événemens politiques me Rfent abandonner un p!am qui me
promettoit tant de jouissances. La situation de l'Orieïït ëtoit tetle, qu'un
simple particulier ne pouvoit espérer de suivre des travaux qui, même dans
des temps plus paisibles exposent souvent le voyageur à la menance des
gouvernemens.
On. préparoit alors ~n France une expédition de découvertes dans h mer
du Sud, dont le commandement devoit être confié au capitaine Baudin. Le
premier plan qu'on avoit trace étoit grand, hardi, et digne d'être exécute par
un chef plus ectairé. L'expédition devoit visiter les possessions espagnol de
l'Amérique méridionale, depuis 1 embouchure du Rio de ta Plata jusqu'au
royaume de Quito, et à l'igthme de Panama. Après avoir parcouru t'At'chipei
du G)fand-<~céan et reconnu tes cotes de la NouveHe-HoSande, depuis ïa
terre de Oiemen jusqu'à celte de Nuyts, Ie$ dieux corveMes devotent reiâcher
à Madagascar et revenir par le cap de Bonne ~Espérance. jTétois arrive à
Paris au moment ou l'on commençMt ~es préparatifs de ce voyage. J'avois
peu de confiance dans le caractère persona~ du capitaine Bandin, qui avoit
donné des motifs d& mécontentement à ta cour de Vienne, lorsqo'i! étoit
chargé de conduire au Brésil un de
mes amis, Le jeune botaniste M.Y.m der
Schott: mais'comme je ne pouvois espérer de faire, par mes propres cao~eo~
un voyage aussi étendu, ét de voir une si Jbette partie du
globe, je résoina
de courir les chances de cette e~pedMoa. J'obtins !a perm~sion de M'em-
barquer, avec les instrumens que ;0ts féunis, sur uae des corvettea
destinées pour la mer du Sud, je me ré&ervai la liberté de me sépare)*
du capitaine Baudin lorsque je le jugeroM oonvenabte. M, Michau~, qm
déjà avoit visité la Perse et une partie de i'Aménque septentrionale, et
M. Bonpland, avec lequel je contractai les liens qui nous ont unis depuis,
étoient destinés à suivre cette expédition comme naturalistes.
Je m'étois bercé pendant plusieurs mois de l'idée de partager des travaux
dirigés vers un but si grand et M honor§Me~ lorsque la guerre qui se ralluma
en Allemagne et en Itatie détermima le Gouvernement françois à retirer les
fonds qu'il avoit accordés pour ce voyage de découvertes, et à l'ajourner à un
temps indéfini. Cruellement trompé dans mes espérances~ voyant se détruire
en un seul jour les plans que j'avois formés pour plusieurs années de ma
vie, je cherchai, comme au hasard, le moyen le plus prompt de quitter
Europe, et de me jeter dans une entreprise qui pût me consoler de la
peine que j'éprouvois.
Je fis la connoissance d'un consul de Suède, M. SMofdebrand~ qui, chargé
par sa cour de porter des présens au dey d'Atger, passoit par Paris pour
s'embarquer à Marseille. Cet homme estimable avoit résidé long-temps sur les
côtes dAfriquc comme il jouissoit d'une considération particulière près du
Gouvernement d'Alger, il pouvoit me procurer des ~acHités pour parcourir
librement cette partie de la chaîne de l'Atlas qui navoit point été l'objet des
intéressantes recherches de M. Destontaines. tt cxpédioit annuellement un
bâtiment pour Tunis, sur lequel s'embarquoient les pélerins de la Mecque,
et il me promit de me faire passer, par la même voie, en Egypte. Je n'hésitai
pas un moment à profiter d'une occasion si favorable, et je me croyois
à la veille d'exécuter un plan que j'avois formé avant mon arrivée en
France. Aucun minéralogiste n'avoit encore examiné cette haute chaîne de
montagnes qui, dans l'empire de Maroc, s'éteve jusqu'à la limite des neiges
perpétuelles. Je pouvois être sûr qu'après avoir fait quelques travaux utiles
dans la région alpine de la Barbarie, j'épr<ouverois, en Égypte, de la part
des savans illustres qui se trouvoient depuis quelques mois réunis dans
l'Institut du Caire, ces mêmes marques d'intérêt dont j'avois été comblé
pendant mon séjour à Paris. Je complétai à la hitc la collection d instmmens
que je possédois, et je ns l'acquisition des ouvrages qui avoient rapport aux
pays que j'attois visiter. Je tue séparai d'un frère qci.par ses conseita et parr
exemple, aveit exercé une grande influence sur la direction de mes pensées.
son
11 approuvait tes motifs qui me déterminoient & m'éloigner de l'Europe;
une voix secrète BONS disoit que nous nous reverrions. Cet espoir, qui n'a
pas été trompé, adoucissoit la douleur d'une longue séparation. Je quittai
Paris dans le dessein de m'embarquer pour Alger et pour ~l'Egypte: et, par
l'effet de ces vicissitudes qui tiennent à toutes les choses de la vie, je revis
mon frère en revenant du fleuve des Amazones et du Pérou, sans avoir
touché le continent de l'Afrique.
La frégate suédoise, qui devoit conduire M. Skiôtdebrand à Alger, étoit
attendue à Marseille dans tes derniers jours du mois d'octobre. Nous nous
y rendimes, M. Bonpland et moi, vers cette époque, avec d'autant plus de
célérité que, pendant le voyage, nous étions sans cesse agités de la crainte
d'arriver trop tard, etae manquer notre embarquement. Nous ne prévoyions
pas alors les nouvelles contrariétés auxquelles nous nous trouvâmes bientôt
exposés,
M.otdoldebrand
étoit aussi impatient que nous d'arriver au lieu de sa
destination. Nous visitâmes plusieurs fois par jour ta montagne de Notre-Dame
de la Garde, d'en l'on jouit d'une vue étendue sur la Méditerranée. Chaque
voile que l'on découvroit à l'horizon, nous causoit une vive émotion mais
après deux mois d'inquiétudes et de~ vaines attentes, nous apprîmes par les
journaux que la frégate Suédoise qui devoit nous conduire, avoit beaucoup
souffert dans une tempête sur les côtes du Portugal, et que, pour se radouber,
elle avoit été forcée d'entrer dans le port ,de Cadix. Des lettres particulières
confirmèrent cette nouvelle, et nous donnèrent la certitude que le Ja~MM.f
( c'étoit le nom de la frégate) n'arriveroit pas à Marseille avant le commencement
du printemps.
Nous ne nous sentions pas le courage de prolonger notre séjour
en Provence
jusqu'à cette époque. Le pays, et surtout le climat, nous paroissoient délicieux,
mais l'aspect de la mer nous rappeloit sans cesse nos projets~nanqués.Dans
une
excursion que nous~mes àHyèresetàToalon, bous trouvâmes dans dernier
ce
port, appareillant pour l'île de Corse, la frégate ~.BûM<~?M~ qui avoit été
commandée par M. de Bougainvittedans son voyage autour du monde. Cet illustre.
navigateur m'avoit honoré d'une bienveillance particulière pendant mon séjour
à Paris, lorsque je me préparois à suivre l'expédition du capitaine Baudin. Je
ne
saufois dépeindre l'Mnp)S:6sion que me & la vue do I)~Ment~
Commersondans les îles de la mer du Sud. H est ~s dMpo~ïe ~an'e dans
lesquelles un sentiment douloureux se tKele à toat ce qMe.?coa8'r<)uvons.
Nous persistâmes toUTOUradansL~dée~~
et peu s'en fallutque cette persévérance ne no~ .devînt'funeste. Il avoit ,t~ cette
époque, dans le port de Marseille,un petit bâtiment ragusoisprêt faire voile pour
Tunis. Il. nous parut avantageux de proRter d'une occasion qui nous ~approcholt
dé l'Egypte et de ~a Syrie. Nous convînmes avec le capitaine- du p~Ix de notre
passage te départ fut nxé aulendemam.maisune circonstance peu importante
en elle-même retarda heureusement ce départ. Les ammaux qui devoient
nous servir de nourriture pendant la traversée, etoient logés dans la grande
chambre. Nous exigeâmes que 1 on St quelques arrangemens Indispensables
pour la, commodité des voyageurs et pour la sûreté de nos instrumens.
Pendant cet intervalle, on fut informé à Marseille que le Gouvernement de
Tunis sévissoit contre les François établis en Barbarie~~t que tous les indi-
vidus venant d'un port de France étoient jetés dans les cachots. Cette
nouveUe nous fit échapper à un danger Imminente nous nous vîmes forcés
de suspendre l'exécution de nos projets, et nous résolûmes de passer l'hiver
en Espagne, dans l'espoir de nous embarquer au printemps prochain, soit à
Carthagène, soit à Cadix, si l'état politique de l'Orient le permettoit.
Nous traversâmes la Catalogue et le royaume de,Valence pour nous rendre à
Madrid. Nous visitâmes les ruines de Tarragone et celles de l'ancienne Sagonte
nous fimes de Barcelone une excursion au Mont-Serrat 1 dont les pics élancés
sont habités par des bermites, et qui, par le contraste d'une végétation
vigoureuse et de masses de rochers nus et arides, offre un paysage d'un
caractère particulier. J'eus occasion de fixer, par des moyens astronomiques,
la position de plusieurs points Importons pour la géographie de l'Espagne

M. Guillaume de Humboldt, qui a parcouru tonte l'Espagne pen de temps après mon départ
d'Europe, a donné la description de ce site dans les ~)~m~rM<~<~ogropA~Het de Weimar, pour 1803.
<?'. <)* T ï. ~ntnx&M'<MMt, p. xMv-TmTt), et Liv. t, p 5-33. A cette époque, la tatitode
de Valence étoit encore meertaine de plusieurs minutes. Je trouvai pour la cathédrale ( que Tofifio
place par les !!§" 96 So ) tatitnde. Sg" 28 4a et !ong!tode, o*' 11 o ,5. Quatre ans plus tard )e baron
de la Puebla et M. Mechain fixèrent ce point par des hauteurs zen~t~~a~es prises avec un cercle répétiteur,
et par dee occultations d'étoHes, à 9;)° 28 3~ ,<! en btitnde, et à <~ 11* o en hm~itnde. A Murriedro
(l'ancienne Sagonte), je déterminai la position des ruines du temple de Diane, près du couvent
:des Trinitaires Ces ruines sont par les 3;)'* 4o a6* de latitude, et tes oh t0 34 de longitude.
je dét€fm!nai, a t'aide du baromètre~ !? hauteup du ptatean centrât et le ns
quetquès observations sur t'mc!ina!s0n de raigniHeaitnaintéeet sor ~'intensité des
forces magnétiques.Les résultats de eés observations ont été pobtiés séparément,
et je n'entrerai dans aucun détail sur l'histoire physique (Kun pays dans tequet je
n'ai séjourne que six mois, et qui, récemment, a été parcouru par tant de
voyageurs inst~uitSt
Arrivé à Madcid, j'eus bientôt occasion de me féliciter de la résolution que
nous avions prise de visiter la péninsule. Le baron de Forell, ministre
de
la cour de Saxe près de celle d'Espagne/me témoigna Hne amitié qui me
devint infiniment utile. tl réunissait des connoissances étendues en miné-
ralogie à l'intérêt le plus pur pour des entreprises propres à favoriser le
progrès des lumières. H me fit entrevoir que, sous l'administrationd'un ministre
éclairé, le chevalier Don Mariano Luis de Urquijo, je pouvois espérer
d'obtenir la permission de visiter mes frais t'intériear de t'Amérique espagnole.
A près toutes les contrariétés que je.venois d'éprouver~ je n'hésitai pas un instant'

de suivre cette idée. `

Je fus présenté a la cour d'Aranjnez, au mois de mars ï799. Le roi


daigna m'accueiUir avec bonté. Je lui exposai les motifs qui m'engageoient à
entreprendre un voyage au nouveau continent et aux i!es Philippines, et je
présentai un mémoire sur cet objet à la secrétairene d'état. Le chevalier
d'Urquijo appuya ma demande, et parvint à aplanir tous les obstacles. Le
procédé de ce ministre fut d'autant plus généreux que je n'avois aucune
liaison personnelle avec lui. Le zèle qu'il a constamment montré pour l'exé-
cution de mes projets, n'avoit d'autre motif que son amour pour les sciences.
C'est à la fois un devoir et une satisfaction pour moi de consigner dans cet
ouvrage le souvenir des services qu'il m'a rendus.

Voyez ma Notice sûr la configuration du sol de l'Espagne, dans l'Itinéraire de M. de La Borde T.ï,
a6 pouces a,4 lignes,
p. cxt,vti. D'après M. Bauza, la hauteur moyenne du haromètre, à Madrid, est de
d'oh résulte, selon la formule de M. Laplace, et le nouveau coëfBcient de M. Ramond, que la capttatp
de l'Espagne est élevée de 3og toises ( 6o3 "') an-dessus du niveau de l'Océan. Ce résultat s'accorde
assez bien avec celui <ja'* obtenu Don Jorge ijttan, et que M.deLatemdeaa publié, et d'aptes lequel la
hauteur de Madrid an-desens du niveau de Baris est <le TM)4 tehes. ( ~Mat. <&' /<:<M< t?76, t48.~ Le
montagne la plus élevée de: toute la pétmMale n'est pas le Mont-~erdn,'comme on l'a .cm )<Mqa'ici,
mais le ~tt&~acen qui Mt~rtie delaSiBrraNevada de Grenaoe. Ce Pic d'aptes le aiveUemeM~jéo-
désique de Don Clemente Roxas, a t8a4 toises de baatenr absolue, tandis qtteieMhnt'fertht~ (tae*te<t
Pyrénées, n'a que ty63 toises. Près du Mmlahacen se trouve-situé le ~co th ~e<e<at (Nete ~[e
tj'8t toises.
J'obtins dcax passeports, i'un da prenuer secrétaire d'état, l'autre du
,coaseil des Indes. Jamais permission plus étendue N'avait été accordée a an
voyageur; jamais étfaager B'avpit~ honoré de p!<M de
oonS~nce dp la part
du gouvernement espagnol. P<Mr dissipëf tous les doutes ~ae les V~ee~rcis ou
les capitaines généraux, Mptéteatanti'autiOtité royale en Améfiq~e, pourvoient
élever sur la nature de mes trav~ax, ïe passeport de la ~Mt~<?M; ~c~f~~M
e~fa~o portoit <:pM j'étois autorisé & me servir librement de mes
« mstrumeas de
physique et de géodésie; que je pouvois faire, dans toutes
« les possessions
espagnoles, des observations astronomiques;mesurer la hauteur
«
des montagnes; recueillir les productions du sol, et exécuter toutes les
<'
opérations que je jugerais utiles à l'avancement des sciences 1. Ces ordres
de la cour ont été strictea~ent suivis, même après les evenemens qui ont forcé
M. dUrquijo de quitter le miaistére. De mon côte j'ai tâché de répondre à des
marques d'un intérêt si constant. J'ai présenté, pendant mon séjour en
Amérique, a<!x gouverneurs des provinces, ta -copie des matériaux que j'avois
recueillis et qui pouvoient intéresser la métropole en répandant quelque
lumière sur la géographie et la statistique des colonies. Contbrmément à
l'offre que j'en avois faite avant mon départ, j'ai adressé plusieurs collections
géologiques an CaMmet d'histoire naturelle de Madrid. Contme le but de
notre voyage étoit purement scientifique nous avons réussi, M. Bonpiand
et moi, à nous concilier à la fois la bienveillance des colons et cellé des
Européens chargés de l'administration de ces vastes contrées, Pondant les
cinq ans que nous avons parcouru le nouveau continent, nous n'avons pas
aperçu le moindre signe de dénance. !t tn'est doux de rappcter ici, qu'au
milieu des privations les plus pénibles, et luttant contre des obstacles qui
naissent de t'état sauvage de ces pays, nous ~'avons jamais eu à nous plaindre
de l'injustice des hommes.
Plusieurs considérations aarolent dAaons engager à prolonger notre séjour en
Espagne. L'abbé Cavanilles, aussi remarquaMe par la variété de ses connoissances

Ordena & Ttf. a /ot capitanes ~tMMt&< comandanme, ~o&erHedoMt, y)t«t:<&n<et, <'off~<dbfw<
y ~ema~ ~Me<KM no tnyM&t)t ~)0f nMg~B nM<tfo la conduccion ~e ~M inatrumentos <&stctt~ quimica,
astronomia y moMmaiftea~, ni el Aaeer en <Of&M &M posessionea tt&ram<trtna< &M o&<eMc<tCMtMt y
experimentos que /!M~ue !«R~, eoxtO ~xmpoco el <'o!<ee<ctr ~remen<B ~<<Mt<<t<~ ~Mtma&<j «Mt«<M
y nnnefM~M~ ~M<&r /<t <t~<M f<e <M mott<es, eff<<mtt<tf &t tM<Mn!t<M<t de ~e<f<t y ~eoe'' o&*en'<Mm'Mt
astrononcicaa.~ descubrincentqs
<M<<f<no!ntcatj' utiles /)<!ra
<&<ctt&nnMH<ct M~t/M para ede//<~o~r<MO <& lus
progrraso de /ct~ çiergciae,:
CM~tfMM jNtet~ef.e~cetttrftfK!
pues por~ ed can6rurio quiere
ottMre ed
.Re~ ~Me <otf<!< las p~Mna~ a ~NtenM eorre~pomi'c, den J9. <<eJKtm&e/6f<&«&) t/ favor, aM~t&o
y jDro~cfïoM que neceasite. (JOe ~ran/u~Sj 7 de ma~'o 1799 )
que par la ûnesse de son ~esprit,M. Née, qm~ conjointement avec M. Haenke
avoit suivi comme botaniste l'expédition de Maiaspina, et qui lui seul a formé
~un dea plus grands herbiers que l'on ait jamais vus en Europe~ Don Casimir
Ortega, t'abbé Pourret.et les savans auteurs de la Flore du Pérou, MM. Ruiz
et Pavon, nous ouvrirent sans réserve leurs riches collections. Nous examinâmfs
une partie des -plantes du Mexique, découvertes par, MM. Sesse, Moci&o et
Cervantes, et dont les dessins avoient été envoyés au Muséum d'histoire
naturelle de Madrid. Ce grand établissement, dont la direction étoit confiée
à M. Clavijo, auteur d'une étégante traduction des ouvrages de Buffon, ne nous
offrit, il est vrai, aucune suite géologique desF Cordillères; mais M. Proust,
si connu par l'extrême précision de ses travaux chimiques, et un minéralogiste
distingué, M. Hergen, nous donnèrent des renseignemens curieux sur plusieurs
substances minérales de l'Amérique, tl auroit été utile pour nous d'étudier
plus long-temps les productions des pays qui dévoient être le but de nos
recherches,. mais nous étions trop impatiens de profiter de la permission
que la cour venoit de nous accorder pour retarder notre départ. Depuis
un an j'avois éprouvé tant de dinicu!tés que j'eus de la peine à me persuader
que mes ~ceux les plus ardens seroient enfin remplis.
Nous quittâmes Madrid vers le milieu du mois de mai Nous traversâmes
partie
et ta
une de la vieille Castille, le royaume de Léon Galice, et nous
nous rendîmes à la Corogne, où nous devions nous embarquer pour l'ile de
Cuba. L'hiver ayant ét~ très-rude et très-protongé, nous jouîmes pendant le voyage
de cette douce température du printemps qui, sous une latitude si méridionale~
n appartientordinairement qu'aux mois de mars et* d'avri!. Les neiges cduvroient
encore les hautes cimes granitiques de la Guadarama; mais dans les vattées pro-
fondes de la Galice qui rappellent les sites tes plus pittoresques de la Suisse, et du
Tyrol, des Cistes chargés de fleurs, et des bruyères arborescentes tapissoient
tous les rochers. On quitte sans regret le plateau des Castittes, qui presque
partout est~énué de végétation, et sur lequel on éprouve un froid assez rigoureux
en hiver, et une chaleur accablante en été. D'après les observations peu nom-
breuses que j'ai pu faire par moi-même, t'intérieur de l'Espagne forme une
vaste plaine qui, élevée de trois cents toises (584 ") au-dessus du niveau de
l'Océan, est couverte de formations secondaires, de grès, de gypse, de sel
gemme et de la pierre calcaire du Jura. Le climat des Castines est beaucoup plus
froid que celui de Toulon et de Gènes; car sa température moyenne s'étève à
peime &ï5" dothermomètre centigrade '.On est étende de voM~e,Mm$. h
n~e~Fe, t~ ~aa~ ne
latitude de h Calabre~de !a ThessaUe etcentrât
de FAs:~
viennent point en p!eih air Le, plateatt est entoa~ d'Mhe ~one ha~e et
étroite, végètent,
o& saPptusieampo~ta,~n&M~
Chamaerops~ te Dattier, h Ganne a suer~, te Bananier et beaucoo~ p!afnt~
cotûmunes à t'Espagne et
a r~qae Mptentrionate. Soaa !es~
~o deg~~ de:
latitude; ta temperatMre moyenne de cettezone est de t~ à ao degrés; et) 'pa~ÛMe'
reunioa de cireoastances qu'il seroit trop !ong de dévetopper ici, cette région
heureuse est deveaue le siège principal de !'mdustne et de !a cuhnre intet-
lectue!!e.

Charme <b!i' que, dttMceton~M~, te contraire n'ett pMetpMi*ét!tent:n<tiqne, te* variation*de ta


températnretontetprmtée*d'âpre* l'éoheUecenttgradedttAermometreametcnre;mai*, pooréviterte*
la
erreoM qui peuvent nattrede* réduction*des dMeren~* échelle* et de sappre**ion~éqaente des fraction*
décimate*, }'a! fait impnimer te< o!Merv«i<HM pturdeMe* teMea que les a donnée* nmtmmentdont je
me suis, tem. J'M cru devoir suivre, Mm ce rapport, la marche adoptée par t'iUaMre auteur de ta
Bas, <&t m~tr~tM.
N~tt~MM °
Comme dam le cours de cette Matton historique!t est souventquestionde nnBM'nce de la température
moyenne sur le développementde la végétation et te* produit* de t'agrioattnre, it sera utile de con-
signer ici les données suivantes, fondées sur de* obtervationB préchet et, propre* a&tnrnirdet
termes de comparaison.J'ai a~onté un astéritqoe am noms des villes dont le climat est singulièrement
modifié mit par leur élévation au dessus du niveau de l'Océan, soit par d'antre* circonstance*

Umeo.
indépendante*de la latitude.

Upsat.
Pétersboarg
Lftt. 63' 5o'
69° 56'
59' St'
Ot
Temp. moy. o*,7
3*,8
5°,5
( Nsezen et Bnch ).
(Eoter).P«Mt:ontretonenttte.
(Buch).
Stookh~hm.
Copenha~e. 59° 9o' ~,7 (WM~emtin).

Bertim.
Ptri)). 5& 4t'
Sa* gt's
7° ,6
B'
(Bn~ge).
).

Genève* 48° 5o'


46' ta'
'o"t7 (Bonttrd), moyenne de teptaiM.
to* Haut.,3g6'°
Tonton*
Rome.
MameNe 43°
43'>
t?'
3'
t4*~
t7*,S
SMnt-Jacqne~.
DetmontagneftMnord.

Napte!).
Maarid'
4t'*S3'
4o' 5o'
4o' a5'
tS'7
t8',o
(GmUMmedeHnmbotdt).

tS',0 HMt.,6o3"-
Haut., 9977"
Vem-Cntt*
Meuco

ÉqtNtem'tmu~ttndet'OcéMt.
to'*
ta*
0*0'
95'
tt'
t7*o
95°,4
~7*t0
CAtearide.Sabteo.

Qmto o* t4' t5°,o Hant.,ano8*


Cette table dMRre Mg~ementde eeHe que j'M donnée dane Plntrodnction de la Chimie de T~onMot~
T ï. P 991 et qnt m'a pae été «OMtttttte mr des observations égtttement pT&a«a.
M remontant dans ie M~aœ~e <M VaM~) tt~s j)or~ M JMedtt<en~a<<e
ver& tes
hautes~ptames~ de~ ~BAe.et de~ ~a~ croit reconpo~tre <brt en
~daB~
avant dans les des
péniosute. Ce.:pM~i~x~Rp~
e~~me~ fancienn~e côte de !a'
tradi~M ~eo Samoth''aces, et
!e8
d'autres téa~~aa~ hMtQriqu~ap~a~ an ,atJppoaè.<JP~"}~~l'fUption
des eaux pax ~an~Ne~ en agrawHssaBt te hassia de ht Méditaf~anée,a
déchiré et eagteuti la partie aMStpaïe de fSM~pe. Si t'on aAmet qtïe ces
tfaditioas doivent tcuf origine, aon a de simples r~verijss géologiques, mais
au souvenir d'une ancienne catastrophe, on voit Je plateau central d~
l'Espagne résister aux ei&ts de ces grandes inondations, jusqu'à ce que
l'écoutement des eaux par le détroit, formé entre les colonnes d'Hercute,
ait fait baisser progressivement te niveattde ta Méditerranée, et reparoftre,
au-dessus de sa Sur&ce, d'un c~té ïa Basse-Egypte, et de !'autre les
plaines )!crti!jcs de Tarragone, de ~a~ace et de Murcie, Tout ce qui tieat
à la &rmationdecette B~c', doat ïe%Mtence a iB&ué si puis~nument sur
la première civilisation de l'espèce hinaaine, oSre unL intérêt paBticutier. On
pourroit croire que t'~pagoe~&rtaa~tun promontoire au miHeu des mer~,
a du sa .conservation ph~ique à Aa hauteur d~son sot; ]maM, pour donuer
du poids ces idées systéïBatiques, il faudroit éctaircir !es doutes qu'on a étevés
sur la rupture de tant de dtgues transversaïes; il taudrott discuter !a probabUité
que la Méditerranée ait été di~s~e jadis en plusieurs bassins séparés, dont la Sicile
etl'tte de Candie paissent marquer ~es auciennes Umites. Nous ne hasarderons
pas ici de résoudre ces proMèaMs, et nous nous contenterons d'appeler l'attention
sur le contraste happant q<aoSre la coa6guration du sol dans les extrémités

.mo~or. N4(~e~. ~~e~, ~~«~Atm., t?~, Lib. ÏV, c. t9, p. 336. Lib. V, c. 47, p. 369.
Dion~. ~n~tcant.~ <f!. 0.tOM., t?p4,t~)b.ï,c.6t, p. <o. ~M<o<. Opp. ent~e< CtM'm&.ZM~Mn., t5go.
jMe<eoro&)~. Uh. Ï, ç. T. p. 336. J?. &M6& Ceog! eA 7%om~M jRt&'oner. OMn. tSo?, T. 1,
p. 76 et 83. ( 7b«r~~e~ ~<y<Mt<'ft ,Levant; p. ta4..Pa~&M~ ~<y<t~a e~ ~!t<Mte,T. V, p. t<)$. C~OM~M~-
CoM~r,~oyj(t~~<~o! t~,p. tjt6.BMMa«<~ ~~it/t;j, G~o~ntpAM~AyM~e~e~merAToM-~
p. !5y, ig6 et 34t. tWfK~ Voyage ~yerm, T. M, p. t3o. ~Mne~! t~M- NKe ~<Mc~t&n&!f<en <~r
Afen<pAMna<t<~n,p.n8). Pa,B~ ias E~gMphes anciens, t~nM~ comme Straton, Eratosthenet etStrf~pn,
pensoient que t&M~er)fan~e, e?Be< par les eaM fttt Ponjt-~oïin, des Pa!us Méotidea, de.met
Caspienne et dutac Ar~, h~ I<M colonnes d'HefcnIe; tes ~~a,es~ comme Fompomiu~ Me)~,
admettaient que t'irruption s'etmt faite, parles eaux de t'Ocea~. Dans ia première de ce~hyp~b~~ttt
hauteur du sol etttre ta mer ~ou~ et la Baltique, et e~tre tes po~ts de C~ëMe et de Bordeaux, détermina
limite que l'accumulationdes eanx peut avoir atteinte avant !a réunion de ta iner Noire, de ta Méditerranée

de la Lune..
et de t'Ocean~ tant au nord des pardaneUes qu'à t'est de cette tan~ne déterre qui an~sptt jadis t'Europp &
ta Mauntanie, et dont, dt temps deStrahon, It existoit encore des vestiges dans tes ites de ,fnnon
`
et
~se~d~s~
~i~
orientai et occïd~Mt~deï~ropet~t~~t1a.Dier:MJire,'lè~in
est aujourd'hui ~~peiHe''e~
tandis q~ !e phte~n
Bo~then'e.ngUteroïtcOmmë~&gr&npe'de
~Maaeh~jp!
et
8~ est iatépessant dê'ppater~csetrqaf p~v~i~~t~
H'~est~ns-'sÛr~
suMace
de aotfe p!anète~
prëseBtentauxmesareaiètàt'bbsèrva~ion du physicien
D'AMotga Ïa (trogne, surtout depuis Luge, ~es montagnes s'êïèvent
gradueHement. Les formations seconAaires <Ëspar<M<sent peu à pétt, et les
tochee de transition qui leur succèdent ànBOQceat la proximité des tettains
primitifs. Noas trouvânMs des montagnes -considérables composées de ce grô<
ancien, que les minë~togistesde ïTÊceie de Freïhë~ déstgaent par tes noms
de Grauwakke et de GrsM~a~en~cAt~n J'ignore si tette formation, qui
n'est pas fréquente dans te midi de ï'Europe, a dé)& été découverte dans
quelque autre partie de l'Espagne. Des 6'agmensanguleux de pierre !ydiqne ëpars
dansas vanees sembloient nous annoncer que le schiste de transition sert de base
aux couches de G~rauwaktte. Près de la Corogne même s'ë!èvent des cimes
granitiquesquise ptotangentjusqu'au ~apOrtegai.Ces~ranits, qui paroissent avoir
etë contigus ~adi~à ce~x de ta Bre~gae et de CornouaSte, sont peut-être tes
débris d'une tha~e de montagHes déttuites et submergéespar les uots. Be grands et
beaux ~Staux de Mdspath cm'Mterisent cette roche la mine d'etain commune
s'ytt'oa~e disséminée, et devient, pourHes habitansde Gatice, l'objet d'une
expteitationpéaiMeetpeûtacrattve.
Arrivés à ta
Côregne, nous tfouvàmes ce port bloqué par deux frégates
et un vaisseau angtois. Ces b&time)~s ~toient destinés à interrompre la com-
munication ent~ la m~trepe~e et tes cotonies de t'Amérique car c est de h
Corogne, et non de Cadix, que pa~toïent, a cet~e époque, tous les mois, un
JM~H~-&M ( c<Mveo ~MtM)6f<Mo~ pao~ ta Havane, et ~ous les deux mois un autre
pour Buënos-AyreS, ou fembouehNne ~ttt Rio de la Plata. Je donnerai dans
la suite <Mte notion exacte de létat des postes dans ~e nouveau continent. H
suffit de remarquer ici que, depuis ieeMBistêretdncomte Florida-Blanca, le service
des cear~pM tc~
a été si bien organisé, que par <ux seuts un habitant du
Paraguay~ou de la proWMMse de Jaen de Bracamoros peut correspondre assez
féguHèrement avec un habitant du Nouveau-Mexique ou des c6tes de la
<
Sur te!) ttvejt de t'AmMeme.
a
~ouyelle-Califbrnie, sur une distance égale à~~ qu'il y de Paris & Si~n
ou de Vienne au cap de Bonne-Espérance. De même, une lettre connëe à la
poste, dans une, petite ville de l'Aragon~ attire ~u Chili ou dans les missions
de l'Orépoque, pourvu qu'on indique d'une panière bien précise te nom
du cor<?gwH<?~o ou district qui comprend le viUage indien auquel cette lettre
doit parvemr. On se platt à rappeler des institutions que l'on peut regarderr
comme un des plus, grands -bienfaits delà civilisation moderne. L'éta-
blissement des courriers maritimes et celui des courriers de l'intérieur, ont inis
les colonies dans une relation plus intime entre elles et avec la mère-patrie;
La ei~cutation des idées est devenue plus rapide; les plaintes d~s colons
se sont fait entendre plus facilement en Europe, et l'autorité suprême a réussi
quelquefois a réprimer des vexations qui, parl'eloignementdes lieux, lu! seroient
restées'à jamais inconnues.
Le ministre, premier secrétaire d'état, nous avoit recommandés très-parti-
culièrement au, brigadier Don Rafael Clavijo qui depuis peu étoit chargé de'
la direction générale des courriers maritimes.Cet officier, avantageusement connu'
par son. talent pour la construction des vaisseaux, étoit occupé à établir de
nouveaux chantiers à la Corogne. Il ne négligea rien pour nous rendre agréable
le séjour que nous fîmes dans ce port, et il nous conseilla de nous embarquer
sur la corvette 1 le Pizarro, qui étoit destinée pour la- Havane et le Mexique.
Ce, bâtiment, changé de la correspondance du mois de juin, devoit taire
voile conjointement avec l'~CM~M!,Iepaquet-botdu mois de mai, qui, à cause
du blocus, étoit depuis~trois semaines retenu dans le port. Le Pizarro
n'étoit pas réputé grand marcheur; m~is, favorisé par un hasard heureux,
il avoit échappé à la poursuite desb~timens anglois, dans la longue navi-
gation qu'il venoit d'exécuter du Rio jde la Plata à la Corogne. M. Clavqo
ordonna qu'on fît, à bord de cette cornette, les arrangemens convenables pour
placer nos instrumens,. et pour nous faciliter les moyens de tenter, pendant la
traversée~des expériences chimiques sur l'air. Le capitaine du Pizarro reçut
ordre de s'arrêter à TénériSe, le temps que nous jugerions nécessaire pour
visiter le port de l'Orotava~ et pour monter à la chnedu Pic.
Nous n'eûmes àattendre notre embarquement que dix jours, et ce délai
nous parut encore bien long. Nous nous occupâmes, pendant cet inter-
valle,, à, préparer les plantes recueillies dans les belles vallées de la Galice, «

D'âpre la terminologie espagnole, le Pizarro étoit une frégate légère'(.aM ~<M).'


'qu~aëia'a.n~~ ~'avoit encore visitées ~nb~~examt~~es'Ïës~
mollusques que là grosse Iner du Nord-Onèst'jette' au:~ed du
rocher eËcarpé sur lequel est construite ~vig~ ~de'at'Tour~Her~të(~
appelée aussi la ~Mr~2%r, à été r~ta~réeen~
vingt-douze pieds ses Mt<rs oat <~tre~p~ et sa construc-
tion prouve Incontëstabtement qu'elle est Toù~ des Romaïns. tJne inscription
trouvéeprès de ses fondemens, et dont je dois là copie à l'obligeance de M. dé
Laborde, nous apprend que ce phare a été construit par GàiusSevius Lupus,
architecte de la viI!ed'~M~~?ofMt(<Chaves), et qu'il étoit dédié à Mars.
Pourquoi la Tour de Fer portë-t-elle dans ce pays le nom d'Hercule? Les Romains
l'auroient-ils bâtie sur les ruines d'un édince grec ou phénicien ? Strabon ailirme
en eSet que !a <Galice, le pays des CaIIaeci, avoit été peuplée par des colomes
grecques. D'après une notice tirée de la géographie d'Espagne d'Asctépiades !e
Myriéen, une tradition antique portoit que les compagnons d'Hercule s'etoient
ëtaMis dans ces contrées'.
Je ns les observations nëcessaires pour constater !a marche du garde-
temps de Louis Berthond/ et je vis avec satisfaction qu'I! n'avoit pas
changé son retard diurne, malgré les secousses auxquettes il avoit ëte expose
pendant le trajet de Madrid à la Corogne. Cette circonstance étoit d'autant
plus Importante, qu'il existoit beaucoup d'incertitudesur la véritable' longitude
du Ferrol, viHe dont le centre se trouve de t0~ 20" à l'est de ta Tour
d'Hercule de ià Corogne. Une occultation d'AIdebaran, et une longue suite
d'ëcupsesde satellites de Jupiter, observées par l'amiral Mazarredo et calculées
par Mécham, sembloient prouver que, dans l'Atlas maritime deTo&no, qui est
d ailleurs si exact pour l'Indicationdesdistances partieHes, les positions absolues de
la Corogne et du Ferrol étoient fausses de deux à trois lieues marines. Mon
garde-temps ajouta à ces doutes en déposant contre les opérations de Tonno. Je
à
trouvai~ l'observatoirede la marine du Ferro!, de o~ 4~ s 1 l'ouest de Paris. La

&mtto~ «A GtMMt. ~tt<e<. ~'<tr., i6ao, Lth nï,


p. i57. Les PhênicieM et tes Grecs vMtoient
les c&tet de la GaMoe ( Ga&ceM), à cause At commerce de l'étain qu'ils tirpient de cepayt comme
des Ne) Camitendet. ~tMt&o, Mt. m, p. t4/. f<m., Mh. XXXtV, cap. t6.
0&MTC. <t<<wt* At<M«~p.NtXTt, T. ï, p a4 et 33. ~pmoM, JMemofMM <o6~a&M e&Mn<tcM)M<
c<~)B. AecA<m /)or &)< not~<M<<'< e~xtBo~ 1803, T. t, p. a3. Si l'on suppose que mon chronomètre
m'a pas mgmenté son retard diurne pendant le voyage de Madrid à la Corogne,
ce qui sero!t
contraire au~expénences directes faites & Marseille, la longitude du Ferrol sera encore de a3°
en
temps plus grande que celle à laquelle s'est arrêté M. ToSno.
moyenne de tontes les obsenàtions; ~aiMîs pardesastrohomes espagnoia, et pttb!!ee)t
récemment par M. Espmosa, do~ne ~4~ 2ï~,5. J'ai dëja &it obsërv
ailleurs que, beau~oapd'expedttion~ étant f~Mes de ce dBrniier port, ïâ hausse
position qui lui a ~te àarib~ee,a in&nedesavantage~ement~npÏèt longitudes
de plusieurs viÏlps de fA~eriqMe, d~ternuaees, non par diee obseirvationit
absolaes, mais par le seul transport du temps. Les mona~t~rînea, tout
coatMbateat
en étendant la masse de nos connaissances geograpluqnes, soavent
à propager l'erreur dont est aCectëe !a tongitade du point de <Mpaft, parce
qn'eHes rendant dépendant de ce seul ipoMt ie gisement (ks <otes tkaa les
rëgions tes plus Soignées.
Le port du Ferroï et Ge!ui de !a Cofogne EQtamoNMpMata~ec une même
baie, de sprte <;u'<m bâtunent qui par Mn ma<M~H$ tejB~~ ~st cbafgc sur
la terre, peut B)6Hl!!er dans !'un ou ï'aatrs de iees pc~ts, aeton que le vent
~c M permet. Cet avantage est inappréeiab!e 4~ ~es pa~ges OM Ja mer est
presque constamment grosse et houleuse, coBMae~nt~)!e cap Ortegd ~t le cap
finisterBe qui sont les pfOtnontoijRes T~M<J~b''Mm' d~ g&agraphes
anciems. Un canal ~troit.~tde de ~~e~~g~ coupés a pic, coadnit
au vaste bassin du ~C~ ~Europe entière n'o~pe pas un moaiBage ai
cxtraeBdiaaire, Sj&MS le ~ppe~t de sa positifon aTancee dans ~'in~rtem' jdes
terres. On diroit que cette pae~eëtroits et tortneuse, par staquelteies vaisseaux
entrent dans le <.aott, a ~ë on~rte, soit par yirr~tjta'n des Rota, soit par
les secousses répétées des tf~bleïneas de terre les plus MmleM. Etansie nonveau
monde, sur 'les côtes la
D~ea~elte-~dalcusie,~a J~a~MM <M O~M~'Oj
~ae de f~~M<?~ oSM exactement la même forme que le port du FerMË. Les
phénomènes g~logiquesles plus curieux se trouvent rëpëtes a de gt-aades distances
sur la surface des (~ootinens et les physiciens qui ont eu occasion id'exMainet'
diverses paMies du g!obe~ sont trappes de la ressemblance extr~ne que l'on
observe dans le déchirement dos cote~, dans les sinuosités des yallees,
dans l'aspect des montagnes, et dans leur distribution par groupes. Le
concours accidentel des mêmes causes a du produire partout les mêmes
e<rets; et, au milieu de cette variété que p~setïte la nature,.une.analogM
de structure et d&<o<m~ s'observe éatMi'at~angemèntd~ MatièreabrMtea
comme dans l'organisation interieoce~des~la~es~d~Mumau~

~nMe/t6t8,p.3t.)
G<
PteMm~e cite le port JM A~brM M.. Ht ~p 6. (N~~ 'Ma.. zMampit.
Pendant la traverse de la CQrogne au Ferro!, snrnn bais~tond près<in ~TMZ
&~e dans la baie qui, ~eloa d'AnviUe, est !e ~<M~<~ M<~nM dea anciens,
nous Bmes, au moyen d'une sonde thermométri<pM à tonpapea,
qnctquesi
expériences sur la température de t'Ocean et suc le décroissementdSa caloriqoe
dans les couches d'eau superposées les unes aux antres. L'instrument montra~
sur le banc, à la surface t2",5 à !3",3 centigrades, tandis que partont
ailleurs où la mer étoit très-profonde, le thermomètre marquoit ï5" ou
t5°,3, l'air étant à ïa",8. Le' céjtèbre FranUin et M. Jonathan WiUiams,
auteur de l'ouvrage qui a paru à Philadelphie, sous le titre de TVa~-
gation thermométrique, ont fixé les premiers l'attention des physiciens sur
les phénomènes qu'offre la température de t'Océan, au-dessus des bas-fonds
et dans cette zone d'eaux chaudes et courantes, qui, depuis le golfe du
Mexique, se porte an banc de Terre-Neuve et aux côtes septentrionales de
l'Europe. L'observation, que la proximité d'un banc de sable est indiquée
par un abaissement rapide de la température de la mer à sa surface,
n'intéresse pas seulement la physique, elle peut aussi devenir très-importante
pour la sûreté de la navigation. L'usage du thermomètre ne doit certaine-
ment pas faire négliger celui de ta sonde; mais des expériences que je citerai
dans le cours de cette Relation, prouvent sufj&samment que des variations
de température, sensibles pour les instruméns les plus imparfaits, annoncent
le danger, long-temps avant que le vaisseau se trouve sur les hauts-fonds. Dans
ce cas, le refroidissement de l'eau peut engager le pilote à jeter la sonde
dans des parages où il se croyoit dans la plus parfaite sécurité. Nous exami-
nerons, dans un autre endroit, les causes physiques de ces phénomènes
compliqués; il suffit de rappeler ici que les eaux qui couvrent les hauts fonds,
doivent en grande partie la diminution de leur température à leur mélange
avec les couches d'eau inférieures qui remontent vers la surface sur les acores
des bancs.
Une grosse mer du nord-ouest nous empêcha de continuer, dans la baie du
Ferrol, nos expériences sur la température de l'Océan. La grande élévation
des lames étoit l'effet d'ua vent impétueux qui avoit souHIé au large, et par
lequel les vaisseaux anglois avoient été forcés de s'éloigner de la côte. On voulut
profiter de cette occasion pour mettre dehors; on embarqua sur-le-champ
nos instrumens, nos livres et le reste de nos eSets; mais le vent d'ouest,
qui fratchit de plus en plus, ne nous permit pas de, lever l'ancre. Nous
profitâmes de ce délai pour écrire à nos amis en Allemagne et <*n France.
Le moment où, pour ta première fois, onquitte l'Europe, a.quelque chose
d imposant. On a beau se rappeler la fréquence des communicattonsentre,
les deux mondes, on a beau rénéchirsur l'extrême facilite avec taquelte~ par
le perfectionnement de la navigation, on traverse l'Atlantique, qui, comparée
au Grand-Océan, n'est qu'un bras de mer de peu de largeur; ~sentiment
qu'on éprouve en entreprenant un premier voyage <te long cours, n'en est
pas moins accompagné d'une émotion profonde. Il ne ressemble à aucune
des impressions que nous avons reçues dès notre première jeunesse. Séparés
des objets de nos plus chères aBccttdns, entrant pour ainsi dire dans une
vie nouvelle, nous gommes forcés de nous replier sur. nous-mêmes, et .nous,
nous trouvons dans un isolement que nous n'avions jamais connu.
Parmi Ic& lettres que j j'écrivis, au moment de notre embarquement, il y en
eut une dont l'influence a été très-grande sur la direction de nos voyages
et sur les travaux auxquels nous nous sommes livrés dans !a suite. Lorsque
je quittai Paris dans le dessein de me rendre sur les côtes d'Afrique, l'expé*
dition de découvertes dans la. mer du Sud sembloit ajournée pour plusieurs
années. J'éiois convenu avec le capitaine Baudin que si, contre son attente,
son voyage avoit lieu à une époque plus rapprochée, et que la nouvelle'pût
m'en parvenir à temps, je tâcherois de passer d'Alger à ,un port de France
ou d'Espagne pour rejoindre l'expédition. Je réitérai cette promesse en partant
pour le nouveau continent. J'écrivis à M. Baudin que si 1e gouvernement
pérsistoit à lui faire prendre la route du cap de Horn, je chercherois les
moyens de le trouver, soit à Montevideo, soit au Chili, soit à Lima, partout
où il relàcheroit dans te& colonies espagnoles. Fidèle à cet engagement, j'ai
changé le plan de mon voyage dès que les journaux américains ont annoncé,
en t8o!, que l'expédition françoise étoit sortie du Havre pour faire le
tour du globe de l'est à l'ouest. J'ai frété une~ petite embarcation pour
me rendre du Batabano dans l'ne de Cuba à Portobelo, et de là, en tra-.
versant l'isthme, aux côtes de.la mer du Sud. L'erreur d;un journaliste nous
a fait faire, à M. Bonpiand et à moi, un chemin de plus de huit cents lieues
dans un pays que nous n'avions pas le projet de traverser. Ce n'est qu'à
Quito, qu'une lettre de M. Detambre~ secrétaire perpétuot de la première
classe de l'Institut, nous apprit que le capitaine Baudin prenoit la. route du
cap de Bonne-Espérance, sans toucher les côtes orientales ou occident-ates de
~Amérique. Je ne me rappelle pas sans regret une expédition qui est Hée à
plusieurs événemens de ma vie, et dont l'histoire vient d'être tracée.
par un
S~~nt'a~sMMagaàpaf te nom&re d~d~nvëctesattacM~ at son non* que
par le noble et courageux dévouement qn'it a déployé dans sa carr!ère an
mnieu des privations et des, souffrances, les pins cruelles.
En partant pour l'Espagne, je n'avoispn emporter !a collection complète
de mes instrumëns de pnyMque, de géodésie et d'astronomie j'en avoM
déposé les doubles à MaraeîUe, dans le dessein de les faire expédier direc-
tement pour Alger ou pour Tunis, dès que j'aurois trouvé une occasion de
passer sur tes côtes de Barbarie. Dans les temps calmes, on né sanfoit assez
engager les voyageurs à ne pas se charger de l'ensemble de leurs instrumens;
il vaut mieux les faire venir successivement pour remplacer, après quelques
années, ceux qui ont le plus sauSert par l'usage et par te transport. Cette
précaution est surtout nécessaire lorsqu'on est obligé de déterminer un grand
nombre de points par des moyens purement chronométriques. Mais à l'époque
d'une guerre maritime, la prudence exige qu'on ne se sépare pas de ses
instrumcns, de ses manuscrits et de ses collections. De tristes expériences,
dont jai déjà parlé dans l'introduction de cet ouvrage, m'ont confirmé la
justesse de ce principe. Notre séjour à Madrid et à la Corogne avoit été trop
court pour que je nsse venir de Marseille l'appareil météorologique que j'y
avois laissé. Je demandai en vain qu'on me l'expédiât pour la Havane, après
notre retour de TOrénoque; ni cet appareil, ni les lunettes achromatiques et
le garde-temps d'Arnold, que j'avois demandés à Londres, ne me sont parvenus
en Amérique. Yoici 1a liste des instrumens que j'avois réunis pour mon
voyage, depuis l'année t~ et qui, à l'exception d'un petit nombre, faciles
à remplacer, m'ont servi jusqu'en t8o4.
J~fe des instrumens Je ~A~~M<? et <f<M<yw!o~Me.
Une montre,à &M~tfMd<? de Louis Berthoud, n. 27. Ce garde-temps avoit
appartenu au célèbre Borda. J'ai publié le détail de sa marche dans l'intro-
duction de mon Recueil d'observations astronomiques;
Un demi-chronomètre de '?e~ert~ ser~'ant pour le transport du temps dans
de courts intervalles `

Une lunette <!C~nMK<t~Me de J?o~H<~ de trois pieds, destinée à l'observation


des satellites de JupLter;

t
M. PerMt, ën!tv~ !M*t sciencM t'Agede trente cmq ans, apr~ uae maladielongne et<ion!onre<ue.
T~e~ ~ne Notice mtéretSMUe sur la vie de ce Toyegeut, par M. Deleaze, dans les ~nn<t&< f&t
~f~j! T. XVU.
Une ZHit<?M<? dé ChhM~<~ d'une moindre ditdensioa, avec un appareit propre
d'arbre daa~ les ~r~ )"
à fixer l'instrumenta un ~tronc
Une /M/!<?M<? J'Mfc, munie d'un MerotaètM~'av~ sur werre paf M~RôMer)
astronome à Dresde. Cet appareil, p!acé sûr !e ptetieau de t'horî~on arti&ciet,
sert à niveler des bases, à mtesarer tes pjrôgr~s d'une ectjtpM du soleil
ou de la tune, età déterminer ïa valeur des angles très-~ petits seo~ iesqueb
paroissentdes montagnes très-éïoignées;
Un .te-rfcMf de ~M~eM~ de to pouces de Tayon, avec un limbe d'argent
et des lunettes qui grossissent douze & seize fois;
Un ~cj*~nf fo&c"?~ ~MM~%<M7-~e.ptzn<~ d!p ?tiM~A<on~ de a pouces de
rayon, muni d'un vemier divise tte~aimM~em minute, de lunettes qui
grossissent quatre fois, et d'un hcnzen atFtinciet de cristat. Ce petit ins-
trument est très-utite aux voyageurs qui se trouvent (brces de retevcr
en canot les sinuosités d'une rivière~ ou qui veutent prendre des angles sans
descendre de chevat;
Un cercle /WcMr a!r~?<?a*MM Je j~e ~ot~ de t~ pouces ~e diamètre,
muni dun grand miroir en ptatine
Un f~odbZ~c dè ~fMT~r, dont le ce)'ete a~imuthal avoit 8.ponces de diamètre;
Un ~b/t~on or~ctcZ C~nM?~~ a Verre ptan,, de 6 ponces de dtamètre,
mnni d'un niveauàbu!!e d'air, dont tes divisions équiva~!entà deux secondes
sexagésimales
Un <ytMt~ de ceK'~ ~7~~ d'un pied de rayon, a double division du
timbe en go et g6 degrés, ta vis microméttique indiquant deux, secondes
sexagésimales, et la perpendicuturité du plan pouvant être déterminée; au
moyen d'un fil d'aplomb et d'un grand niveau à butte d'air;

t4.
Un gYM/~oMefre~AMM~en, placé sur une tanne, munid'mne aiguille aimantée
et d'une méridienne âtaire servant a~ prendre des azimuthstnagaétiques;
Une &otM~o/e ~'MC~tM~MOM, de ta pouces de diamètre, construite: d'après
tesprinctpes de Borda, par M. Ze ~Vo~. Cet-instrument, d'une exécution
très-parfaite, m'avoit été cédé, iors de mon départ, par ~e burean;des
longitudes de France, Il se trouve nguré dans ta retation du voyage, de
d'Entrecasteaux', doMtta parUe astr&aomique est due au~isoias d'un
savant navigateur, M. de Rossel. Un cercle azimuthat sert pour trouver le

J'a< comparé, dans un autre endroit, les avantages et les désavantages Qu'offrent, dans des voyages
Je terre, les mstrumeosà rénexionet tes cerclesré~tttearsastrotMm~aM.(i0~<t-«.<!«r., /nif< T. ï, p. :nrij.)
T. U, p.
pian dm Bt~ridien magnétique, soit; par des Indinaisons correspondantes,
ooservamt le minimn~ des mcUaa~so~. On y~r~
retournement et IBM chang!eanttes~po!es;
~M~oa
par
soit en cherchant ta pasition dans taqueMe l'aiguH!e est veriicate, soit en
!e0

Une ~o~~o~
de Lambert~ garnie
deuxen deaxLminutea;
d'uaem~ ~`tlaü'e.e; étoit
d'après !es prinetpes
divisé de

Une<HgHeMcde ta ponces de longnem'.mnnie de pipnutes, et suspendue à un


fil sans tot~ion, d'après la méthode de Gonlomb. Cet appareit, semMaMe
à ta &<ncM<? aimantée de ~w~
m'a servi à determicer tes petites variations,
horaires de la déclinaison magnétique, et riatËOaitcdjes forces, qui change
avec les tatitades. Les oscillations de la grande aiguille d'inctinajtson de
M. Le Noir offrent aussi une mesure très-exacte de ce dernier phénomène;
Un ~M!g7:~MM~p Saussure 1, construit par M. Paul, à Genève, avec
un limbe qui correspond à un arc de 3 pieds de rayon;
Un /M*n~M&? invariable, construit par M. Megaië~ Madrid
Deux &<ïnMM~/<?~ de Ramsden;
Deux appareils barométriques 2, à l'aide desquels on trouve la hauteur moyenne
du baromètre, en ptongeant successivement dans une cuvette plusieurs tub~s
de verre que l'on transporte remplis de mercure, fermes à une de leurs
extrémités par une vis d'acier, et placés dans des étuis de métal;
Plusieurs thermomètres de Paul, de ~nM~c/t~ de ~cgM~ et de Fortin;
Dfnx ~~rOMefw~ ~'<ït~~Mr<'ef<ifc Dc~MC~ à cheveux et à baleine;
Deux ~pcf/wnc~M de jNc~n~ et de Saussure, à feuilles d'or battu et à moeUe
de sureau, munis de conduéteurs de 4 pieds de haut, pour réunir, d'après
la méthode prescrite par M. Volta, l'électricité de i'atmosphère, au moyen
d'une substance enflammée qui répand de la fumée;
Un c~afMMne~ de -Paul., Pour me mettre à même de comparer avec quelque
précision la teinte bleue du ciel, telle qu'elle se présente sur le dos des
Aipcset surcemidesCordiuères, M-Pictetavoit bien voulu faire colorier
ce cyanomètre d'après celui dont M. de Saussure s'étoit servi à la cime du
Mont-Blanc et pendant son séjour mémoraMe au Col du Géant;

Ce magnétometre, que j'ai tronvé très-peu exact, le téodoUte et le cercle à réflexion, sont les
seuts tnstrumèns que je n'ai pu embarquer avec moi à la Corogne.
J'ai décrit ces appareils dans te Journal de Phy.iqme, T. XLVU, p. 468, et dans
mes O&mw.
<M<re)t., T. ï, p. 366.
Un eM<~oM<~n? dë i~~n~ ga~ ~itMtt~. S~ns ~~n~
combien de parties dé ce gaz <pB<: Bécet~ires pour ~tnrer une paM~~
d'oxygène, oQ p~t encore détenniBefav~pr~cMoah~
la pureté ds l'aire ?? employant, oatre
atmosphérique, et par coaséqMent
lé -gaz nitreux; l'acMe moriatique oxygéné la
dÏssolution du sulfate dé
fer. L'eudiomètre de Volta, le plus exact de tous, est embarraMant pour
les voyageurs qui parcourent des pays humides, à ~au&e de ta petite
décharge électrique qu'exige l'inflammation des gaz oxygène et hydrogène.
L'appareil eudiométrique le plus portatif, le plus prompt et le plus
recommandable à tous égards, est celui que M. Gay-Lussac a <ait connoitre
dans les mémoires de la' société d'ArcueH';
Un eM~/OM~f~c à phosphore de Reboul. D'après les, belles recherches de M. The-
nard, sur le carbone mété au phosphore, il est prouvé que tactioo lente de cette
base acidinable donne des résultats moins exacts que )a combustion vive
Un appareil de jPaM~ propre à déterminer avec une extrême précision le
de l'eau bouillante à différentes hauteursau-dessus d~ niveau~ de l'Océan.
<
Le thermomètre à double vcrnier avoit été construit d'après l'appareil, que
M.jde Saussureaemployé dans ses courses;
Une sonde, ~c/7Kom~f7'~Me <~2)MMohe~ consistant dans un vase cylin-
drique muni de deux soupapes coniques, et renfermant un thermomètre,
Deux ~h~MeffiM de Nicholson et de Dollond;
Un microscope c<)~&~ ~e J~o~Mannj décrit dans l'histoire des Cryptogames
de M. Hedwig; un étalon métrique de Le Noir; une c~o~ ~'a~y~nteM~
une balance ~e.M<H* un hyétométre; des ~M&c~o~~ propres à,
indiquer de petites quantités d'acide carbonique ou d'oxygène, an moyen
de i'ëau de chaux ou d'une dissolution de sulfure de potasse; des .appareils
~ec~/YMco~MM des vases destinés à mesurer la quantité de l'~<ï-
poration des liquides à l'air libre; un Ao~on or~CM~à mercure; de petites
bouteilles de Leyde, propres à être chargées par frottement; des appareils
galvaniques; des réactifs pour tenter quelques essais sur la composition
chimique des eaux minérales, et un grand nombre de petits outils nécessaires
aux voyageurs pour raccommoder les instrumens qui se trouvent dérangés
par les chutes fréquentes des bêtes de somme.
'T. n, p a35. Voyez aussi le Mémoiresur la compositionde )'air, que j'ai publié conjointement avec
M. Gay-Lussac dans te Journal de .P~M~, T LX,
p '29, et mes 0&.<w. MO/ T. ï, p. a~6.
.Bu~Mt f~ &)ci~jDAt/onM<t~tte~t8ta, n.° 3?, p. qS.
S~~s 4e m~s ît~r~eas qu~ étoie~ à bord de!a~eorvette, npns spass&mes
encoredeux j~urs & ta Corogne. Bne brumer épaisse qui cbuvroit l'horizon
ahnonçoit à ta Rn te changement de temps si vivem~tt désiré. Le 4 juin
an soir, le vent tourna au nord-esty direction qui, sur tes côtes de la
Gatice~ est regardée comme très-constante pendant la belle saison. Le
5,
Piza7!I'fJ appareilla:' en eft'etde quoiqu'on e&t eu, peu d'heures avant
la nouvelle qu'une escadre angloise avoit été signalée à la vigie de Sisarga,
et qu'eMeparoissoit faire. route vers l'embouchure du Tage. Les personnes
qui virent lever l'ancré à notre corvette disoient tout haut, qu'en moins
de trois jours nous serions pris, et que, tbrcés de suivre le bâtiment sur
lequel nous nous trouvions, nous serions conduits à Lisbonne. Ce pronostic
nouscausoit d'autant p!us d'inquiétude, que nous avions connu à Madrid
des Mexicains qui, pour retourner à la Vera-Cruz, s'étoient embarqués
à trois reprises à Cadix, et qui, ayant été pris chaque fois presque au
sortir du port, étoient rentrés en Espagne par la voie du Portugal.
Le~PM~mo étoit sous voile & deux heures de l'après-midi. Le canal par
lequel on navigue pour sortie du port de ta Corogne est long et étroit
comme la passe s'ouvre vers le nord, et que le vent nous étoit contraire,
nous eûmes à courir huit~ petites bordées, dont trois étoient à peu près
perdues. Un virement de bord ne se fit qu'avec une lenteur extrême, et pendant
quelques instans nous fûmes en danger au pied du fort Saint-Amarro, le
courant nous ayant portés ttès-près des récifs sur lesquels la mer brise avec
violence. Nos yeux restèrent 6xés sur te château Saint-Antoine, où infortuné
Malaspina, gemissoitators dans une prison d'état. Au moment de quitter
l'Europe pour visiter des contrées que cet illustre voyageur avoit parcourues
avec tant de (ruit, j'aurois désiré occuper, ma pensée d'un objet moins
attristant.
A six heures et demie nous passâmes la Tour d'Hercule, qui est le Phare de la
Corogne, dont nous avons parlé plus haut, et sur laquelle ~depuis les temps
les plus reculés, on entretient, un feu de charbon de terre pour diriger tes
vaisseaux. La clarté de ce feu ne répond pas à ta belle construction d'un
si vaste -édifice; elle est si foible que les bâtimens ne t'aperçoivent que
lorsqu'ils se trouvent déjà en danger d'échouer sur la côte. Vers t'entrée
de la nuit, la mer devint très-rude et le vent fraîchit beaucoup. Nous fîmes

J~Mt~t<t~tM<Hr&'jKM~'«'~T. p. 338. 0&M-<K<nMt.~ T. ï, p. xmiv.


route aù nord-Ouest'pour éviter !a rencontre des frëgatasacglOiitesqae ton
supposoit croiser dans ces parages. Vers les <neuf heures, nous vnnes la
lumière d'une carbanëde pécheurs de Sisarga c'était le dernier objet que
nons offroient' lès cotes de l'Europe. A mesure que nous nous éloignions~
cette foibte tùnnère se confondoit avec celle des étoiles qui se levotent sur
l'horizon, et nos regardsy festoient involontairementattachés. Ces impressions
ne s'eSacent point de la mémoire de ceux qui ont entrepris des navigations
lointaines à un âge où les émotions de l'âme sont encore dans toute teur forcer
Que de souvenirs réveille dans ~imagination un point lumineux qui, au
milieu d'une nuit obscure, paroissant par intervalles au-dessus des flots
agités, désigne la côte du pays natal.
Nous fûmes forcés de courir sur les basses voiles. Nous filâmes dix neeuds,ï
quoique la construction de la corvette ne tut pas avantageuse pour la marche. v
Le 6 au matin, le roaRs devint si vif qu'il brisa te petit m&t de perroquet. Cet
accident n'eut aucune suite fâcheuse. Comme notre traversée de la Gopogne aux
îles Canaries dura treize jours, ette rut assez longue pour ~Mus exposer, dans
des parages aussi fréquentés que te sont tes côtes du Portugal au danger
de rencontrer des bâtimcnsangtois. Les premiers trois jours, aucune voite ne
parut à l'horizon, ce qui commenca à rassurer l'équipage qui n'étoit pas en
état de soutenir un combat.
du
Le nous coupâmes le parallèle cap Finistère. Le groupe de rochers
granitiques, auquel appartient ce promontoire, dé mémcqUecetuideTonanca
et le Mont de Corcubion, porte te nom de ta Sierra de Tonnona. Le cap
Finistère est plus bas que les terres voisines; mais ta Torinona est visible
au large à 17 lieues de distance, ce qui prouve que l'élévation de ses plus
hautes cimes n'est pas moindre de 3oo toises (58a"'). Les navigateurs espagnols
prétendent que, dans ces attérages, ta décHnatson magnétique diBere extraor-
dinairement de cette que l'on observe au large. En effet, M. Bory', dans
l'expédition de la corvette t'~nM~M~c, a trouvé, en i~S!
que la variation
de t'aiguille, déterminée à terre au cap même, étoit de 4 degrés plus petite
qu'on ne pouvoit' le supposer d'après les observations faites à la même
époque te long de ces côtes. De même que le granit de la Galice fondent
de la mine d'étain disséminée dans sa masse, celui du cap Finistère
renferme peut-être du fer micacé. Les montagnes du Haut-Palatinat offrent
en

J)~mo;~ cfe f~M~eMte des sciences iyG8, p. a8o. ~Mn'ftt, ~cy<r~ <~ f/tM~ T. t~. 9aS.
effet des rocher granitiques dans lesquelles des cristaux de fer micacé rem~
placent le mica commun.
Le 8, au coucher du soleil, on signala, du haut des mât&, un convoi
anglais qui rangeo~t ta côte vers le sud-est. Pour l'éviter, nous fîmes fausse
route pendant la nuit. Dès ce moment it ne nous fut plus permis
d'avoir
de ta lumière dans ta grande chambre, de peurd'être aperçus de loin. Cette
précaution, employée à bord de tous les bàtimens marchands, et pres~
crite dans tes réglemens des paquet-bots de la marine royale, nous a causé
faites dans le cours de
un ennui mortel pendant les traversées que nous avons
cinq années consécutives. Nous avons été constamment forcés de nous servir de
fanaux sourds pour examiner la température de l'eau de la mer, ou pour lire la
division du limbe des instrumens astronomiques. Dans la zone torride, où le
crépuscule ne dure que quelques minutes, on se trouve réduit à l'inaction des
six heures du soir. Cet état de choses m'a contrarié d'autant plus que, par
t'euet de ma constitution, je n'ai jamais connu le mal de mer, et que je sens
une ardeur extrême pour le travail pendant tout le temps que je me trouve
embarqué.
Un voyage des côtes d'Espagne aux Mes Canaries, et de ta à l'Amérique
méridionale, n'offre presque aucun événement qui mérite de fixer l'attention,
surtout lorsqu'il a lieu pendant la bette saison. C'est une navigation moins
dangereuse que ne l'est souvent la traversée des grands tacs de la Suisse. Je
me bornerai par conséquent à exposer dans cette Relation les résultats
généraux des expériences magnétiques et météorologiques que j'ai faites dans
cette partie de l'Océan, et à ajouter quelques notions propres à intéresser
les navigateurs. Tout ce qui concerne les variations de ta température de l'air
et de celle de la mer, l'état hygrométrique de l'atmosphère, la couleur bleue
du ciel, l'inclinaison et, l'Intensité des forces magnétiques, se trouve réuni
dans le Journal de route placé à ta fm du troisième chapitre. On verra, par
le détail et par le nombre de ces expériences, que nous avons tâché de tirer parti
des instrumens que nous avions embarqués. H seroit à désirer que ces mêmes
observations pussent être répétées dans les mers d'Afrique et d'Asie, pour

grand bassin des mers. °


faire connottre avec précision la constitution de l'atmosphère qui couvre le

Le g Juin, nous trouvant par les 3~° 5o' de latitude et les 16" ïo~ de
longitude à l'ouest du méridien de l'Observatoire de Paris, nous commençâmes
à sentir l'effet du grand courant qui, des îles Açores, se dirige sur le détroit
de Gibraltar et sur tes Hes bananes. Jc.n comparant te potntdédutt de la mardM
de la montre manne de Louis Berthoud à celui de t'estime dea pilotes, j'~tois
en état de découvrir tes ptns petits chàngemens dans ta direction et la vttesse
des courans. Depuis tes3~° jusqu'aux 3o" de latitude, te vaisseau fut porté
quelquefois, en vingt-quatre heures, de ï8 à 26 mittes à t'est. La direction
du courant étoit d'abord E.i S. E.; mais, plus près du détroit, elle devient
directement Est. Le capitaine Mastdntosh, et l'un des navigateurstes plus instruits
de notre temps, Sir Erasmus Gower, ontobservé les modifications qu'éprouve
ce mouvement des eaux dans les différentes saisons de t'année. Beaucoup de
pilotes qui fréquentent les ttes Canaries, se sont vus sur tes cotes de Lancerotte,
quand ils s'attendoient à faire leur attérage sur t'ne de Tënériue. M. de
Bougainvitte', dans son trajet du cap Finistère aux iles Canaries, se trouva,e
à la vue de Hte de Fer~ de plus à test que son estime ne te lui indiquoit.
On attribue vulgairement le courant qut se fait sentir entre les iles
Açores, les côtes méridionales, du Portugal et tes ttes Canaries, cette
tendance vers rest, que le détroit de Gibraltar imprime aux eaux de l'Océan
Atlantique. M. de Fleurieu, dans les notes ajoutées au voyage du capitaine
Marchand observe même que la Méditerranée, perdait par l'évaporation
plus d'eau que les fleuves ne peuvent en verser, cause un mouvement dans
1 Océan voisin, et que l'influence du détroit se fait sentir au large dans un
éloignement de six cents lieues. Sans déroger aux sentimens d'estime qne je
conserve pour un<' navigateur dont les ouvrages justement célèbres m'ont fourni
beaucoup d'instruction, il me sera permis de considérer cet objet important
sous un point de vue beaucoup plus générât.
Quand on envisage d'un coup d'cei! t'Attantique ou cette vattée pro-
fonde qui sépare les côtes occidentales dp l'Europe et de l'Afrique des côtes
orientales du nouveau continent, on distingue une direction opposée dans le
mouvement des eaux. Entre les Tropiques, surtout depuis les côtes du Sénégal
jusqu'à la mer des Antilles, te courant générât, et le plus anciennement connu
des marins, porte constamment d'orient en occident. On te désigne sous le
nom de coM~~t ~o'ttj[Mo~M~. Sa rapidité moyenne, correspondant 4 différentes
latitudes, est à peu près la même dans t'Attanttque et dans la mer du Sud. On
l'
peut lévatùer ï p milles en vingt-quatre heum,
évaliler 99 ou 19 heures, par conséquent à 0,59
o,5o ou

~iy~s <n«oar <&t monde, Vpl, ï. P- 'P.


Vol. H, p. 9 et t~.
a o,65 pieds ;,par~conde ces paragea, j~s. ;eoùt'ent ~ra l'ouest
Dans
avec.~Hoe~teMc.,éga%' an quart de ceHe de ja'pl~pa.rt.. des grandes
r!vi~~ ~.de'~iEurope~ 'Le mouvemënt.e~~l'~eéaC'oppp&é!& la
rotatM)Bt du globe,n'~st vraisemb~bl'smeat )ié a ce dernier phënoMcne
qu'autant <~e !a rotatï~ change~
basses régions de l'atn~osph~re~ ta
pohires ,quï; ,d4~s
les froid des hautes latitudes
vers l'équateur* C'est & l'impulsion générale qtte ces vents alizés donnent à
la surface des mers qu'on doit attribuer le courant équinoxial, dont les

la rapidité.
variations locales de l'atmosphère no modiSent pas sensiblement la force et

Dans le canal que l'Atlantique a creuse entre la Guyane et la Guinée, sur le


méridien de 20 ou 23 degrés, depuis les 8 ou p jusqu'aux 2 ou 3 degrés de latitude
boréale, ou les vents alizés sont souvent interrompus par des vents qui soudent
du sud et du sud-sud-ouest, le courant équinoxial est moins constant dans sa
direction.Vers les eôtesd'A&ique,les vaisseaux se trouvent entraînés au sud-est,
tandis que, vers la baie de tous les Saints et vers le cap Saint-Augustin, dont
lesattérages sont redoutés par les navigateurs qui se dirigent sur l'embouchure
du Rio de la Plata, le mouvement général des eaux est masqué par un courant
particulier. Les enets de ce dernier courant s'étendent depuis le cap Saint-Roch
jusqu'à l'ue de la Trinité H porte dans le nord-ouest avec une vitesse
moyenne dun pied à un pied et demi par seconde.
Le courant équinoxial se fait sentir, quoique foiblement, même au delà du
tropique du Cancer, par les 26 et 28 degrés de latitude. Dans le vaste bassin de
l'Océan Atlantique, à six ou sept cents lieues des côtes d'Afrique, les vaisseaux
dEurope,destinés aux î!es Antilles, trouvent leur marche accélérée avaùt qu'ils
parviennentla zone torride. Plus au notd, sous les 28 et 35 degrés, entre les paral-
lèles de TénériSe et de Ceuta, par les 46 et 48 degrés de longitude,
on ne remarque
aucun mouvement constant car une zone de i~o lieues de largeur sépare le cou-
rant équiooxial, dont la tendance est vers l'occident, de cette grande masse d'eau

En r&t0!s!amt les obserrations que j'M encccaston de faire dans tes deux hênmpheres ayee
cetle* qui sontràpporteesdans les V oyages de Co<A, Lapéronse d'Entrecasteaut, Vancouver, Macartnay,
KtaseMte)'n et Marchand, je trouve que la r!teœe du courant général des Troptqnes Tarte dé 5
t< mtMtem TH)gt-f[uatre heures, on de o,3 t,a pieds par seconde.
.Na~ en <&a eatMe of <&! ~aMfa~ <?'<h)!e tfttM&, dans les .M~. ?t<t7M. for <Ae ye<tr t~S~, p. 58.
Daltom, ~Me<eon!&)~MŒ/J?jp. dnd J~Mfty<, t~oS, p. 8g. tjaplaee, jEjrp<Mt<Mn du ~<~nM du nton<&
p. a~. Les linates des vents ~é< ont été déterminées pour la première fois par Damplerre en t666.
qui se dirige vers l'orient, et se distingue par sa température singulièrement élevée.
C'est sur cette masse d'eau, connue sous le nom de <?M~~M~t'~ que les belles
observations de Francktin et de Sir'Charles Btagden ont appeté l'attention des
physiciens, dès l'année t~6. Comme sa direction est devenue fécemment un
ob)ct important de recherches parmi les navigateurs américains et ahgtots, nous
devons remonter plus haut pour embrasser ce phénomène dans sa générabté.
Le courant équinoxial pousse les eaux ce l'Océan Atlantique vers tes côtes
habitées par les Indiens Mosquitos et vers celles de Honduras. Le nouveau
continent, prolongé du sud au nord, s'oppose comme une digue à ce courant.
Les eaux se portent d'abord au nord ouest et, passant dans le golfe du
Mexique, par le détroit que forment le cap Catoche et le cap Saint-Antoine,
eH''s suivent les sinuosités de la côte mexicaine~ depuis la Vera-Cruz jusqu'àà
l'embouchure du Rio det Norte, et de là aux bouches du&Mississipi et aux
bas-fonds situés à l'ouest de l'extrémité australe de la Floride. Après ce grand
tournoiement à l'ouest, au nord, à l'est et au sud~ le courant se porte de
nouveau au nord, en se jetant avec impétuosité dans le canal de Bahama.
J'y al~observé, au mois de mai t8o4) sous les 26 et ay degrés de latitude,
une entérite de 80 milles en vingt-quatre heures, ou de 5 pieds par seconde,
quoiqu'à cette époque le vent du nord soufflât avec une force extraordinaire.
Au déhouquement du canal de Bahama, sous le parallèle du cap Canaveral le
G M~tr~/Tt ou courant de la Floride se dirige au nord-est. Sa vitesse ressemble
à celle d'un torrent: elle y est quelquefois de cinq milles par heure. Le pilote
peut juger, avec quetque~certitude, de l'erreur de son point d'estime et de la
proximité de son attérage sur New-York, sur Philadelphie ousurChartestown
dès qu'il atteint le bord du courant: caria température étevée des eaux, leur
forte salure, leur couleur bleu-indigo, et les traînées de varech qui en couvrent
la surface, de même que la chaleur de l'atmosphère environnante, très-sensibte
en hiver, font reconnoître le G'M~~aM. Sa vitesse diminue vers le nord
en même temps que sa largeur augmente et que les eaux se refroidissent.
Sir Francis Drat~e remarqua déj& ce mouvementextraordinaire des eaux, mais il ne cotnMtMMt pas leur
température élevée
c
Le courant de la Floride s'éMgne de plus en plus des cAtes des Ëtats-UnM, mestu-equ':t avance
vers le nord. Sa position étant assez exactement indiquée sur les nouvelles cartes marines le ~t~igatenr
trouve la longitudedu vaisseau avec la précisiond'un demi-degré, lorsque, sur le borddo courant ou com-
mence le Eddy ou Contre-Courant,it obtient une bonne observationde tatiiude. Cette méthode est pratiquée
par un grand nombre de capitaines de bàtimens marchands qui font le trajet d'Europe à i'Amennue
septentrionale.
ËntM Cayo Biscaino te banc
n et le banc dedeBàttamà
Babama cette cette~~
Ïareeur m'est tme de que
t5 lieues, tandis que soSsIes a8 degrés et demi de latitude elleest déjà ~e ~.et
sur le parallèle
de Ghar!e8town,Yts.vIsdu~
rapidité du courant at~httrols~ci~~là rivière est le plus
étroite elle n'est plus qu~ d'~ i~le~~ vem le Nord t'es eaux du
golfe mexicain~entra~néesavec S~rce au nord-est, conservent à tel point leur
haute température, que, sous les 4o et ~t degrés de latitude, je les ai encore
trouvées de 2a°,5 ( t8" R.), quand, hors du courant, la chaleur de l'Océan,
à sa surface, étoit à peine de ~5
(~t 4° R.). Sur le parallèlede New-York et
d'Oporto, la température du GM~~frca~n égale par conséquent celle que ies
mers des Tropiques nousoSrent par les 18 degrés de latitude, c'est-à-dire sur
le parallèle de Porto-RIco et des iles du cap Verd.
A l'est du port de Boston, et sur le méridien de Halifax, sous les 4i°
latitude et les 8~° de longitude, le courant atteint près de 80 lieues marines de
largeur. C'est là qu'il se dirige tout d'un coup a l'est, de manière que son bord
occidental, en se recourbant,devient lalimite boréale des eaux courantes, et qu'il
rase l'extrémité du grand banc de Terre-Neuve, que M. de Volney appeUe très-
ingénieusementla barre de l'embouchure de cet énorme fleuve marin*. Les .eaux
froides de ce banc qui, selon mes expériences, ont une température de 8°,7 à t0"
( ~° ou 8° R.), oSrent un contraste frappant avec les eaux de la zone torride,
poussées au nord par le CM~f~Mm~dont la température est de 21° à 22°,5
(i~° aï8" R.). Dans ces parages, le calorique se trouve réparti dans l'Océan
d'une manière étrange les eaux du banc sont de g",4 plus froides que la
mer voisine, et cette mer est de 3" plus froide que le courant. Ces zones ne
peuvent se mettre en équUibre de température, parce que chacune d'elles a une
source de chaleur ou une cause de refroidissement qui lui est propre, et dont
l'influence est permanente

J<H<m<~o~n<&wjM'co«jCommtMtonero/'t~e ï7nt<e~.SMM./o''<~<!rntUM~' ~e&oMm~Hy on ~e


Ohio and Missisipi,
OAto <HM< ~tMM~ptj 1803, p. 260.
tSo3, p. H,draulie .aml_t.
a6o..N~rattRo obser, on the
otnt~aaat. o&<ef. <Ao ..4tlantic
~/an<tc Oce<M ty GoII,
Ocean, by Poú!nall.
Gof. ~'ox'n<t/~
(t~ond. 1787).
?b&&au <&< c&tMt «<&< sol f&!< jÉ<a<<t-t7nM~ T. ï, p. a3o..Homme, ?!tMKK< c?M fen&~ <&t
ttMt~M et dea eot<nMN, T. t,
p. aa3.
a En tMMmt h temp~mtnre de t'Oceam, N faut distmgner avee soin qoatre phéuomenet tres-
de
dHKreM; SMoir: ).* la tempëraterede t'eamàm sof6'ce corretpondantB à diverses huttnde:, t'Ocean
étant constdéfé en Mp<n; a.° le décroNsement du catonqne dans Jea couches d'eam saperposees les
unes am Mtret 3.° Met des bas-fonds an- la tempéfatere de rOcéam 4. ta temper&tcredes couraM
'p! bnt paeser, avec cne viteMe acqmse, les eaxx d'une zone à travers les eaM unmoMesd'une autre zone.
Depuis le banc de Terre-Neuve, ou depuis Ics~a degrés de longitude jusqu'aux
îles Açores, le Gul,f.ftream continue à se porter vers l'est et l'est-sud-est. Les
eaux y conservent encore une partie de l'impulsion
qu'elles ont reçue près de
mille lieues plus loin dans le détroit de la Floride, entre Me de Cuba et les
bas-fonds de la Tortue. Cette distance est le double de la longueur du cours
de la rivière des Amazones, depuis Jaën ou le détroit Manseriche au
Grand-Parà. Sur le méridien des îles de Corvo et de Flores, les plus occi-
dentales du groupe des Açores, le courant occupe une étendue de mer de
160 lieues de large. Lorsque, à leur retour de l'Amérique méridionale en
Europe, les bàtimens vont reconnoître ces deux îles pour rectifier leur point
sud-est.
en longitude, ils ressentent constamment le mouvement des eaux au
Par les 33 degrés de latitude le courant équinoxial des Tropiques se trouve
extrêmement rapproché du GM~~MM. Dans cette partie de l'Océan, on
peut entrer dans un seul jour des eaux qui courent vers l'ouest dans celles
qui se portent au sud-est ou à lest-sud-est.
Depuis les îles Açores, le courant de la Floride se dirige vers le détrott
de Gibraltar, l'île de Madère et le groupe des ues Canaries. L'ouverture des
colon d'Hercule a accéléré sans doute le mouvement des eaU~ vers l'est.
Sous ce rapport, on peut dire avec raison que le détroit par lequel la Méditer-
ranée communique avec l'Atlantique fait sentir son effet à une grande distance;
mais il est probable aussi que, sans l'existence de ce détroit, les vaisseaux
qui font voile à~Ténér~Reseroient poussés au sud-est par une cause qu'il
faut chercher sur les côtes du nouveau monde. Tous les mouvemenssepropagent
dans le vaste bassin de9t mers comme dans l'Océan aérien. En poursuivant
les courans jusqu'à leurs sources les plus éloignées, en réfléchissant sur leur
célérité variable, tantôt décroissante comme entre le canal de Bahama et le banc
de Terre Neuve, tantôt renforcée comme dans le Voisinage du détroit de
Gibraltar et près des îles Canaries, on ne saiaroit douter que la même cause
qui fait tournoyer les eaux dans le golfe du Mexique, me les agite aussi près
de l'île de Madère.
C'est au sud de cette île que Il on peut poursuivre le courant dans sa direc-
tion au sud-est et au sud-sud-est yers les côtes de l'Afrique, entre le cap Cantin,
et le cap Bojador. Dans ces parages, un vaisseau resté en calme se trouve engagé
sur la côte quand il s'en croit encore très-éloigné, d'après l'estime non corrigée.
Si le mouvement des eaux étoit causé par l'ouverture du détroit de Gibraltar,
pourquoi au sud de ce détroit ne suivroit-il pas une direction opposée? Au
eoritraire, par les a5 et les a6 degrés de latitude, te coarant se difige d'abord
directement au sud et puis ad~ud-ouest. Le cap Blanc qui, après le cap Verd, est
le promontoire le plus saillant, paroît influer sur cette direction~ et c'est suf son
parallèle que les eaux dont nous avonssuivUecom's depuis les côtes d'Hondura
msqu'à celles d'AMque se mêlent au grand courant des Tropiques pour recom-
mencer te tour d'orient en occident.Nous avons observé plus haut que, plusieurs
centaines de lieues à l'ouest des Mes Canaries, le mouvement qui est propre aux
eauxéquinoxialesse fait déjà sentir dans la zone tempérée dès le& 28 et 29 degrés
de latitude noï'd.mais~sur le méridien del'ne de Fer, les vaisseaux avancent
au sud jusqu'au tropique du Cancer, avant de se trouver par l'estime à l'est
de leur véritable position~.
J~ai cru donner quelque intérêt à la Carte de 1 Océan Atlantique boréal que
j'ai publiée 1 en y traçant, avec un soin particulier, la direction de ce.
courant rétrograde qui, semblable à un fleuve dont le lie s'élargit graduellement,
parcourt la vaste étendue des mers. Je me flatte que les navigateurs qui ont étudié
les Cartes de Jonathan Williams, du gouverneur Pownall, de Heather et de
Stricktand trouveront dans !a mienne plusieurs objets dignes de leur atten-
tion. Outreles observations que j'ai faites pendant six traversées, savoir: d'Espagne
à Cumana, de Cumana à la Havane, de l'tie de Cuba à Cartbagène des Indes,
de la Vera~ruz à la Havane, de ce port à Philadelphie, et de Philadelphie
aux côtes de France, j'y ai réuni tout ce qu une curiosité active m'a fait
découvrir dans des journaux de route, dont les auteurs ont pu employer des
moyens astronomiquespour déterminerl'effet des courans. J'ai indiqué en outre les
parages dans lesquels le mouvement des eaux ne se fait pas sentir constamment
car, de même que la limite boréale du. courant des Tropiques et cette des vents
alizés sont variables selon tes saisons, le Gulf-stream change aussi de place
et de direction. Ces changemens deviennent très-sensibles depuis les 38 degrés
de latitude jusqu'au grand banc de Terre-Neuve. On les remarque de même
entre les <~8 degrés de longitude occidentale de Paris y et le méridien des iles
Açores. Les vents variables de la zone tempérée, et la fonte des glaces du

CetteCarte, que j'ai commencé àtracer en ~6o4, offre, outre- la température de l'eau de-la mer,
des observations sur t'incHttai~om de t'aiguitM aunantée, les Hgnes sans décUnaison, l'intensité dea
forces magnétiques, les bandes de varech flottant, et d'autres phénomènes cai intéressent la géographie
physique.
~mer. ~'raM., Vot tt, p. 3a8
Vol. M, p. 82 et tg4; Vol. T, p.. go et un Mémoire intéressant
turtescourans, par M. JDetamétherie, yottra. <~e /<]«., t8o8,T.6y, p 9~.
horé&I. d'où reflue, dans les mois de juillet et d'août, ~jne
pote boréal,
nAte grande quantité
une eraode<ruant!t~
d'eau douce vers le sud, peuvent être regardés comme les causes principales
qui modifient, dans ces hautes latitudes, la force et la direction du GM~ccFM.
Nous venons de voir qu'entre les parallèles de ti et de ~3 degrés, les eaux
de l'Océan Atlantique sont entravées, par les courans, dans un tourbilloà
perpétuel. En supposant qu'une molécule d'eau revienne la même place
d'où elle est partie, on peut évaluer, d'après nos connoissances actuelles sur
la vîtesse des courans, que ce circuit de 38oo lieues n'est achevé que dans
l'espace de deux ans et dix mois. Un bateau qui seroit censé ne pas recevoir
l'impulsion du vent, parviendroit en treize mois des Mes Canaries aux côtes
de Caracas. Il lui faudroit dix mois pour faire le tour du golfe du Mexique~
et pour arriver à la sonde de la Tortue, vis-à-vis le port
delà Havane;
mais quarante à cinquante jours sumroient pour le porter de l'entrée du
détroit de la Floride au banc de Terre-Neuve. 11 est difBcile de nxer la
rapidité du courant rétrograde, depuis ce banc jusqu'aux cotes d'Afrique; en
évaluant la, vitesse moyenne des eaux à sept ou huit milles en vingt-quatre heures,
on trouve, pour cette dernière distance, dix à onze mois. Tels sont les effets
de ce mouvement lent, mais régulier~ qui agite les eaux de l'Océan. Celles de
la rivière des Amazones mettent à peu près quarante-cinq jours pour parvenir
de Tomependa au Grand-Para.
Peu de temps avant mon arrivée à Ténérine, la mer avoit déposé sur la
rade de Sainte-Croix un tronc de Cedrela odorata couvert de son écorce. Cet
arbre américain végète exclusivement sous les Tropiques ou dans les régions
qui en sont les plus voMnes. Il avoit été, arraché sans doute soit à la
côte de la Terre-Ferme, soit à celle d'Honduras. La nature du bois et les
lichens qui en couvroient l'écorce prouvoient assez que ce tronc n'avoit
pas appartenu à ces forets sous marines que d'anciennes révolutions du
globe ont déposées dans les terrains de transport des régions polaires. Si le
Cedrela, au lieu d'avoir été jeté sur la- plage à TénériSç, avoit été porté
plus au sud, il auroit probablement fait le tour entier de l'Océan Atlan-
tique, en revenant dans son pays natal à la faveur du courant général
des Tropiques. Cette conjecture est appuyée par un fait plus ancien, rap-
porté dans l'histoire générale des Canaries de l'abbé V iera. En ï~o, un petit
bâtiment, chargé de blé et destiné à passer de l'île de Lancerotte à Sainte-
Croix de Ténériffe, fut poussé au large dans un moment où pas un homme de
l'équipage ne se trou volt à bord. Le mouvement des eaux d'orient en occident
le porta en Amérique où il échoua sur les côtes de ta Guayra~ prêt de
Caracas"
Dans un temps où l'art de la navigation ëtoit encore peu avance~ te CM~
stream a fourni au génie deCbristopheCelemb des indices certains de l'existence
des terres occidentales. Deux cadavres, dont tes traits annonçoientune race
d'hommes inconnue, furent jetés, vers la fin' du quinzième siècle, sur les
côtes des Mes Acores. Presque & laf même époque, le beau-trère de Colomb,
Pierre Correa, gouverneur de Porto-Santo, ramassa, sur une plage de cette
île des morceaux de bambou d'une -grosseur énorme que les courans et
les vents d'ouest y avoient portés Ces cadavres et ces bambous fixèrent
l'attention du navigateur génois il devina que tes uns et les autres venoient
d'un continent situé vers l'ouest. Nous savons aujourdhui que, dans la zone
torride, les vents alizés et le courant des Tropiques s'opposent à tout mouve-
ment des flots dans le sens de la rotation de la terre. Lès productionsdu nouveau
monde ne peuvent parvenir à t ancien que par des latitudes, très-étevées et en
suivant la direction du courant de la Floride. Souvent des fruits de plusieurs
arbres des Antilles sont jetés sur les côtes des iles de Fer et de la Gomere.
Avant la découverte de l'Amérique, les Canariens regardoient ces fruits comme
provenant de t'ue enchantée de Saint-Borondon qui, d'après les rêveries des
pilotes et d après quelques tégendp! étoit ptacée vers ouest dans une partie
inconnue de l'Océan que l'on supposoitenseveHe dans des brouillards perpétuels.
En traçant ici le tableau des courans df 1 Atlantique, mon but principal a
été de prouver que le mouvement des eaux vers te sud-est, depuis le cap
Saint Vincent jusqu'aux îles Canaries est l'effet du mouvement général
qu'éprouve la surface de l'Océan à son extrémité occidentale. Nous n'indi-
querons donc que très-succinctement le bras du Gu~f~o/M qui, par
les ~5 et 5o degrés de latitude, près du banc du Bonnet Flamand,
se
dirige du sud-ouest au nord-est vers les cotes de l'Europe. Ce courant partiel
acquiert beaucoup de force lorsque les vents ont souSIé long-temps du tôté
de l'ouest. Semblable à celui qui rase les îles de Fer et de Gomere, il dépose,
annuellement, sur tes/côtes occidentales de l'Irlande et de la Norwège, les
fruits des arbres qui sont propres la zone torride de l'Amérique. Sur les
plages des fies Hébrides, on recueille des graines de Mimosa scandens, de

~eea~~c.tp.a.
~'ttnt, ~?~. ~nero/ dé <M
JM~nct,
~&M
tMwo mMn~, Lib. H,
Canarias, T. 11, p. tBy.
t4. ~rnen Co&n~ ft<&t &~ ~&)ttr<t)!<o,cap. 9, .Ni-Mto,
Doliehos urens, de GunàndinabC)nduç,.et de plusieurs autres plantes de h
Jamaïque, de l'ue de Cuba et du continent voisin". Le courant y apporte
beaucoup de tonneaux de vin de E'Kâhce,jbIen conservés, restes du charge-
ment des vaisseaux nau&agés dans la tner .des Antilles~ ces
exemples de
migrations lointaines des végétaux, se lient d'autres faits propres à frapper
l'imagination. Les débris du vaisseau anglois ~e ÏI~
incendié près de
l'ue de la Jamaïque, ont été trouvés sur les côtes de l'Ecosse. Dans ces
tetjtps arriver plusieurs espèces de tortues
mêmes parages, on voit de temps en
qui habitent la mer des Antilles. Lorsque les vents de l'ouest sont de longue
durée, il s'établit dans les hautes latitudes un. Courant qui porte directement
vers l'est-sud-est, depuis les cotes du Groenland et du Labrador jusqu'au nord de
l'Écosse. Wauacé rapporte qu'à deux reprises, en ï682 et ï68~,des sauvages âme-.
ricains de la race des EsMmaux,poussés au large dans leurs canots de cuirs, pendant
une tempête, et abandonnés la force des courans, sont, arrivés aux îles
Orcades 3. Ce dernier exemple est doutant plus digne d'attention qu'il prouve
en même temps comment, à une époque ou l'art nautique étoit encore dans
1 enfance, le mouvement des eaux de l'Océan a pu contribuer à répandre les
dineren~es
races d'hommes sur la surface du globe.
Le peu que nous savons jusqu'à ce jour sur la position absolue et la largeur
du Gulf-stream, de même que sur sa prolongation vers les côtes de l'Europe
et de l'Afrique, a~été observé accidentellement par un petit nombre de
personnes instruites qui ont traversé l'Atlantique en diuérentes directions. Comme
la connoissance des courans est de la plus haute importance pour abréger les
navigations, il seroit aussi utile pour la pratique du pilotage, qu'intéressant
pour la physique,.que des vaisseaux, munis d'excellens chronomètres, croisassent
tout exprès dans le golfe du Mexique et dans l'Océan septentrional, entre les
3o et les 54 degrés de latitude, pour déterminer à quelle distance se trouve le
G~M~- stream dans différentes saisons et sous l'influence de diSereM vents
au sud des bouches du Mississipi et à l'est des caps Hatteras et Codd. Lès
mêmes navigateurs pourroient être chargés d'examiner si te grand courant de
la Floride rase constamment l'extrémité australe du banc de Terre-Neuve, et

» Pennant,
~nnant~ ~o~a!~
Foyage <o <Ae Hebrides,
to tlie 1772,232.,
~fe&ndee, t~a, p. a3a. GMnneM Icta ~M&'OMe!MM,T.
Cunneri>~e<o 'Nid~odensia,T. ïï~ JI..p.
.p. 4ia.
414.
Noane, <&[M &M ?V<MM. /!A<7., n." aaa,p. 3~8, J~tn~~ ~mon. ncoe!. Vot. VH, p. 4y/.
° ~Vecter,€oup-tt'oeK sur la nature dans les lles Hébrides~dans la ~tM. britt., Vol. 43, p. go.
J<Hmee /~aN<!cc(o/tnhf<),<tccom!<o~'<Ae/~&H«&o/'Ontne~,1700, p. 60. Fischer, dans7*a~M,
Noue NordischeB~ra~e, B. 3, p. 32o. Les CreeuIandeM ont été aperçus vivans aux îles EdaetWestram.
sur quel parallèle, entre
tes 32 et 4o degré: de longttudp occidentale, les ea<
qui coulent de resta l'ouest se trouvent le plus près d<; celles qui suive;
une direction contraire. Ce dernier problème est d'autant plus important.
résoudre, que les parages que nous venons d'indiquer sont. traverses par
plupart des bàtimens qui retournent en Europe, en venant des iles Antille
ou du cap de Bonne-Espérance. Outre la direction et la vitesse des couram
cette expédition pourroit servir à faire connoftre la température de la mer à
surface, les lignes sans variation,l'inclinaison de l'aiguille aimantée et l'intensi
des forces magnétiques. Des observations de ce genre deviennent extrememo
précieuses, lorsque la position du lieu où-elles ont été faites a été détermin<
par des moyens astronomiques. Dans les mers les plus fréquentées par 1
Européens, loin de la vue des terres, un navigateur habile peut encore
livrer à des travaux importans. La découverte d'un groupe d ftes inhabitées offi
moins d'intérêt que la connoissancë des lois qui enchaînent un grand nomb)
de faits isolés.
En réfléchissant sur les causes des courans, on reconnoît qu'elles sont beaucou
plus multipliées qu'on ne le croit généralement; car les eaux de la mer peuvet
être mises en mouvement soit par une impulsion extérieure, soit par m
diSérence de chaleur et de sature, soit parla fonte périodique des glaces polaire
soit enfin par l'Inégalité de l'évaporation qui a lieu à diverses latitudes. Tanti
plusieurs de ces causes concourent au même effet, tantôt elles produisent des eSe
opposés. Des vents foibles, mais agissant, comme les vents alizés, sans inte~
ruption sur une zone entière, causent un mouvement de translation que no<
n'observons pas dans les plus fortes tempêtes, parce que ces dernières soi
circonscrites à une petite étendue. Lorsque dans une grande masse deat
les mo!écu!es placées à la surface acquièrent une pesanteur spécifique dinërent<
il se forme un courant superficiel qui est dirigé vers le point où se trouNje l'ea
la plus'froide ou celle qui est la p!ùs chargée de muriate de soude, de sulfa)
de chaux et de muriate ou de sulfate de magnésie. Dans les mers des Tropique:
on trouve qu'à de grandes profondeurs, le tbe~nometre ne se soutient qu
ou 8 degrés centésimaux. C'est le résultat des nombreuses expériences d
commodore EHIs et de celtes de M. Peron. La température de l'air ne baissât
jamais dans ces parages au-dessous de 19 à 20 degrés, ce n'est pas à
surface que les eaux peuvent avoir acquis un degré de froid si voisin du poit
de la congélation et du maximum de la densité de l'eau. L'existence de c<
couches froides dans les basses latitudes, prouve par conséquent un courai
qui se porte des pôtes vers ~ëquateur
inférieur an! prouve aussi que les substances
féquateur il prouve st
salines qui altèrent la pesanteur spécinque de l'eaM, sont distribuées dans l'Océan
de manière' à ne pas anéantir l'effet produit parles diSerence~de température.
En considérant la vitesse des molécules variables selon les parallèles, à
cause du mouvement de rotation du globe, on pourroit être tenté
d'admettre
que tout courant, dirige du sud vers le nord, tend en même temps vers
l'est, tandis que des eaux qui se portent du pote vers l'équateur tendent, à
dévier vers l'ouest. On pourroit penser aussi-que ces tendances diminuent, jusqu'à
un certain point, la vitesse du courant des Tropiques, de même qu'elles altèrent
la direction du courant polaire qui, aux mois de juillet et d'août, se fait sentir
régulièrement,'pendant la fonte des glaces, sur le parallèle du banc de
Terre-Neuve, et plus au nord. Des observations nautiques, très-anciennes, et
te
que j'ai eu occasion de cpnnrmer en comparant la longitude donnée, par
chronomètre avec celle que les pilotes obtenoient par l'estime, sont contraires
à ces idées théoriques. Dans les deux hémisphères, les courans polaires, lorsqu'ils
se font sentir, déclinent un peu vers l'est: et nous pensons que la cause de ce
phénomène doit être cherchée dans la
constance des vents d'ouest qui dominent
dans les hautes latitudes. D'ailleurs les molécules d'eau ne se meuvent point avec la
même rapidité que les molécules d'air, et les courans de l'Océan, que nous regardons
<<
En effet, si la salure moyenne de la mer etoit de o,oo5 plus forte sous l'équateur que dans la,
zone tempérée, comme beaucoup de physiciens le prétendent, il eu résulteroit à la profondeur un
courant de l'équateur vers le pote car nn demi-centième produit une différence de densité deo.oot?;
tandis que, d'après les tables de HaUstrom, un refroidissementdet6° centésimaux, entre ao et 4 degrés,
ne cause encore, dans le poids spécifique,qu'unchangement deo,ooot5. En examinant attentivement te*
résultats des expériences de Bladh, réduits par M. Kirwan & ta température de t6°, je trouve, terme
moyen, la densité de l'eau de mer
de o° à t4° de latitude de t.oa~a
de 15° s5°
t5° àa 25° de Y,oz8~
t.oaSa
de 30° à 44" de ),o278
de 54" a 60° de ijOa/t.
Les proportions de sel corresponttMttesa ces quatre zones sont, d'après M. Watson, o,o3~4
o,oXg4, o,o386 et o,o3/a. Ces nombres prouvent sufEsammeat que les expériences puMIées jusqu'ici
ne justifient aucunement l'opinion reçue que la mer est plus satée Sous l'équateur que sons les
3o et 44 degrésde latitude. Ce n'est donc pas une ptus grande quantité de substances salines tenues en
dissolution qui s'oppose à ce courantinférieur, par lequel l'Océan équinoxial reçoit des moléculesd'eau
qui, pendant l'hiver des zones tempérées, sont descendues vers le fond de la mer, sous les 3o à 44 degrés
de latitude boréale et australe. Baumé a analysé l'eaa de mer recueillie par Pages, sur dinerens parallèles
il a trouvé cette eau d'un demi-centième moins salée à 1° t6'.de latitude qu'entre les a5 et 4o degrés
(~trH'an,C<o~.jEM~,p.35o.a~<ya~e<tt«ot<r<&<!M~e,T.U,p.6et97&).
comme les plus rapides,
!~nt
nont qu'une
au'une vitesse de 8 à~ ~ed& par
à o pïed& par seconde: il est
par conséquent très-probable que l'eau, en passant par les~iSerens parallèles,i
acquiert peu à peu lavttessequi leur correspond, et que là rotation de la terre
ne change pas la direction des courans.
Les pressions variables qu'éprouve ta surface des mers, par les changement
du poids de l'air, sont une autre cause de mouvement qui mérite une attention
particulière. Il est connu que tes variations barométriques n'ont généralement
pas tien simultanément sur deux points éloignés qui se trouvent au même
niveau. Si, dans un de ces points, !e baromètre se soutient de quelques lignes
plus bas que dans l'autre, l'eau s'y élèvera à cause de la moindre pression de
l'air, et cette intumescence locale durera jusqu'à ce que, par l'effet du
vent, l'équilibre de t'ait soit rétabli. M. Vaucher pense que les marées
du lac de Genève, connues sous le nom de ~etcA<?~ tiennent à cette
même cause. Sous la zone torride, les variations horaires du baromètre
peuvent produire de petites oscillations à la surface ~les mers, le méridien
de 4h, qui correspond au minimum de la pression de l'air, se trouvant ~ttué
entre les méridiens de 2! et de n~ sur lesquels la hauteur du mercure est la
plus grande; mais ces oscillations, si toutefois elles sont sensibles, ne seront
accompagnées d'aucun mouvement de translation.
Partout où ce dernier mouvement est produit par l'Inégalité de la pesanteur
spécifique des molécules, il se forme un double courant, dont le supérieur
a une direction contraire à l'intérieur. C'est ainsi que, dans la plupart des
détroits, de même que dans les mers des Tropiques qui reçoivent les eaux
froides des régions boréales, toute la masse d'eau est agitée jusqu'à de grandes
profondeurs. Nous ignorons s'il en est de même lorsque le mouvement de
translation, qu'il ne faut pas confondre avec l'oscillation des vagues, est l'effet'
d'une impulsion extérieure. M. de Fleurieu, dans la relation du voyage de l'Isis
cite plusieurs faits qui rendent probable que la mer est beaucoup moins calme
au fond que les physiciens ne l'admettent généralement. Sans entrer ici dans
une discussion dont nous nous occuperons dans la suite, nous observerons
seulement que si l'impulsion extérieure est constante dans son action,
comme celle des vents alizés, le frottement qu'exercent les molécules d'eau
les unes sur les autres doit nécessairement propager le mouvement de
la surface, de l'Océan jusque dans les couches inférieures. Aussi les navigateurs

~'<t~~tMt/Mren~e<&< roi en ty68 et !769~)oM'~o!<f<'r~~or&)~tnorme~T.t~ p. 5t3.


admettent-Ils depuis long- temps ;cette propagation dans le GM~c'~t.'
ils croient en reconnoïtre les eSets dans la grande profondeur que la mer
a partout où elle est traversée par le courant de la Floride~même au milieu
des bancs de sable qui entourent les côtes septentrionales des Etats-Unis.
Cette immense rivière d'eaux chaudes, après avoir parcouru en cinquante
jours, depuis les 24 jusqu'aux' ~5 degrés de latitude, une longueur de
450 lieues, ne perd pas, malgré les rigueurs de l'hiver dans la zone tempérée,
3 à 4 degrés de la température qui lui est propre sous les Tropiques.
La grandeur de la masse et le peu de conductibilité de l'eau pour le
calorique empêchent un refroidissement plus prompt. Or, si le GM~t~MWt
s'est creusé un lit au fond de l'Océan Atlantique, et si ses eaux sont en mou-
vement jusqu'à des profondeurs considérables,elles doivent aussi conserver dans
leurs, couches Inférieures une température moins basse que celle que l'on observe
sur le même parallèle, dans une portion de la mer dépourvue de courans et de
bas-fonds. Ces questions ne peuvent être éclaircies que par des expériences
diMEtes faites avec des sondes thermométriques.
Sir Exasmus Gower observe que, dans la traversée d'Angleterre aux îles
Canaries, on entre dans le courant qui entraine les vaisseaux vers le sud-est,
depuis les 3g degrés de latitude. Pendant notre navigation de la Corogne aux côtes
de l'Amérique méridionale, l'effet de ce mouvement des eaux se fit sentir
encore plus au nord. Du 3~ au/3o." degré, la déviation fut très-inégale l'effet
diurne moyen étoit de 12 milles, c'est-à-dire que notre corvette se trouva poussée
vers l'est, en six jours, de '%75_milleg. En coupant le parallèle du détroit de
Gibraltar, à 1~0 lieues de distance, nous eûmes occasion d'observer que, dans
ces parages, le maximum de la vitesse ne correspond pas à l'ouverture du
détroit même, mais à un point plus septentrional, qui se trouve sur le
prolongement d'une ligne qui passe par le détroit et le cap Saint Vincent.
Cette ligne est parallèle à la direction que suivent les eaux, depuis le groupe
des îles Açores jusqu'au cap Cantin. Il faut observer de plus, èt ce fait n'est pas
sans intérêt pour ceux qui s'occupent du mouvement des fluides, que dans cette
partie du courant rétrograde, sur une largeur de 120 à t~o lieues, toute là masse
d'eau n'a pas la même vitesse, et qu'elle ne suit pas exactement la même
direction. Lorsque la mer est parfaitement calme, il paroit à sa surface des
bandes étroites, semblables à de petits ruisseaux, et dans lesquelles les eaux
courent avec un bruit très-sensible pour~l'orellle d'un pilote expérimenté.
Le 13 juin, par les 34" 36~ de latitude boréale,
nous nous trouvâmes au
.milie~-i~~g~nd:
~dïB~a~~jt~~etUw~e' ;c~r~e~t; :.d'auïr~s ~.1'est-
uris~portôi~nt ~,pi~diq~t~é:pafi:.la'o~paraison
quoique~:letna~verneat général'd:è.l`Ucéàn,

del'esticïe~detalon~
l,
<L,i9i,Lr,C,t,
nQrd~st~qu~uele~~
,Il ,I~ê'.l!~êêa1f,lucliq~êipahl~!cp~paralson
commun de voir un~~ma~~a~i'n~~ des fûets d'ea~~a'
courent dans
àla surface de noslacs
di~rent~sdirëctions~
mais il est plus rare de trouver des mou
imprimés par des causes locales a de petites portions d'eaux au milieu d'une
rivière pétagique qui occupe un espace immense, et qui se meut dans une
direction constante, quoiqneavecune vitesse peu considérable. Dans le confht
des courans, comme dans l'oscillation des vagues, notre imagination est frappée
de ces mouvemens qui semblent se pénétrer et dont l'Océan est sans cesse agité.
Nous passâmes le cap Saint-Vincent, qui est de formation basaltique,à plus de
80 lieues de distance. On cesse de le voir distinctement lorsqu'on en est éteigne de
plus de ï 5 lieues; mais !a montagne granitique appelée laFoyadeMonduque,
située près du cap, se découvre, à ce que prétendent tes pilotes, jusque 26 heues
en mer Si cette assertion est exacte, la Foya a une élévation de 700 toises(1363.*°)
e)te est par conséquent de n6 toises (~25.'°) plus haute que le Vésuve. On est
surpris que le gouvernement portugais n'entretienne pas de feu dans un endroit
qui doit être reconnu par tous les vaisseaux qui viennent du cap de Bonne-
Espérance ou du cap de Horn; c'est l'objet dont ils attendent la vue avec
le plus d'impatience. Entre le Ferrol et Cadix, il n'y a qu'un seul phare,
celui du cap La Rocque, qui puisse guider !e navigateur sur des côtes dont
l'accès est très-dangereux. Les feux de la Tour d'Hereute et du cap Spichel sont
si fbibtes et si peu visibles au loin que l'on ne peut les citer. D'aIMeurs le couvent
des capucins qui domine le cap Saint-Vincent seroit un des endroits les plus
propres à établir un fanal giratoire semblable à ceux de Cadix ou de t'embou-
cbure de !a Garonne.
Depuis notre départ de la Corogne jusqu'aux 36 degrés de latitude, nous n'avions
aperçu, à l'exception des hirondelles de mer et de quelques dauphins, presque
aucun être organisé. Nous attendions en vain des fucus et desdansjta mollusques. Le
iï juin nous fume~. frappés d'un spectacle curieux, mais qui suite s'est
répété souvent pour nous dans la mer duSud-Nous entrâmes dans une zone

JE&men<<'< afe JVtH~aeton de Don DKHMmo jMacsf~~p, 4~. Bas&gB de &t .Mofe, VoL I,
p. Sg, planche U. ZM~ «.Bo/mfMHMeg~ ~o~eenT'on~~it~ T. U,p. ta8; T. tU, p. 3a3.
où toute la mer étoit couverte d'une prodigieuse quantité de mëdase*. L&
vaisseau étoit presque en calme, mais les .mollusques $eportoient vers le
sud-est avec une rapidité quadruple de celle du couraof. Leur passage dar~
près de trois quarts d'heure. BientAt nous ne vhnes plus que quelques individus
épars, suivant de loin la foule, comme s'ils étoient lasses du voyage. Ces
animaux viennent-Us du fond de ta mer qui, dans ces parages, a peut-être
plusieurs milliers de toises de profondeur? ou font-ils, par bandes, des voyages
lointains? On sait que les mollusques aiment les bas-fonds; et si les huit roches
à fleur d'eau, que le capitaine Vobonneaf&rme avoir vues en t~Sa, au nord
de l'ue de Porto Santo, existent effectivement on peut admettre que cette
innombrable quantité de méduses en a été détachée car nous n'étions qu'à
28 lieues de cet écueil. Nous reconnûmes, outre le Medusa,aurita de Baster et le
M. pelagica de Bo&c, à huit tentacules (Pelagia denticulata, Peron), une troisième
espèce qui se rapproche du M. bysoc6l!a, et que VandeUI a trouvée à l'embouchure
du Tage. Ellese distingue par sa couleur d'un brun-jaunâtreet par ses tentacules qui
sont plus longues que le corps. Plusieurs de ces orties demeravoient pouces de
diamètre leur reflet presque métallique, leurs couleurs chatoyantes en violet
poarpre, contrastoient agréablement
et en avec la teinte azurée de l'Océan.
Au milieu de ces méduses, ML Bonpiand observa des paquets de Dàgysa.
notata, mollusque dune structure bizarre que Sir Joseph Banksa faitcon-
noître le premier. Ce~ont de petits sacs gélatineux, transparens, cylindriques,
quelquefois polygones, qui ont 13 lignes de long, sur 2 à 3 lignes de
diamètre. Ces sacs sont ouverts aux deux bouts. A l'une de ces ouvertures, on
observe une vessie hyaline marquée d'une tache jaune. Les cylindres sont'
longitudinalement collés les uns aux autres comme des cellules d'abeilles,
et forment des chapelets de 6 à 8 pouces de longueur. J'essayai en vain
l'électricité galvanique sur ces mollusques elle ne produisit aucune contraction.
11 paroît
que le genre Dagysa, formé à l'époque du premier voyage de Cook,
appartientaux Salpas (BiphoresdeBruguière) auxquels M. Cuvier a.réuni le Thalia
de Brown et le Tethis vagina de Tilesius: Les Salpas voyagent aussi par
groupes
en se réunissant en chapelets, comme nous l'avons observé dans le Dàgysa
Le t3 juin, le matin, par les 3~° 33~ de latitude, nous vîmes
encore
passer de grands amas de ce dernier mollusque, la mer étant parfaitement calme.
Nous observâmes pendant la nuit que des trois espèces de méduses
que nous
Relation Yoyages mtreprM par crdre de & Br~on~tfe, 1789, T. ni, p. a6t. ~nn<~M du
.M~Mm, T. IV, p. 36o..
avions recueillies aucune ~he répandoit de lueur qu'an moment d'un choc très-
léger. Cette propriéténappartientdonc pas exclusivementan Medasa aoctitucàque
Forskael a décrite dans Sa Fauna ~Egyptiaca, et que Gnietin a rapportée à la
Médusa pelagica de Ldeâing, malgré ses tentacules rouges et les tubérosttés
brunâtres de son corps. En plaçant uae méduse trës-Irritabte sur une ass~
d'étain, et en frappant contre l'assiette avec un métaL quelconque, les petites
vibrations de l'étain suffisent pour faire luire ranima!. Quelquefois en galva-
nisant des méduses, la phosphorescence paro~ au moment que la chaîne
se ferme, quoique les excitateurs ne soient pas en contact immédiat avec les
organes de l'animal. Les' doigts, avec lesquels on t'a touché, restent luisans
pendant deux on trois minutes, comme on t'observe aussi en brisant la
coquille des Pholades. Si l'on frotte du bois avec le corps d'une méduse, et
que l'endroit frotté ait déjà cessé de luire, la phosphorescence renait si l'on
passe la main sèche sur le bois. Quand la lumière s'éteint une seconde fois,
on ne peut plus la reproduire, quoique l'endroit frotté soit encore humide et
visqueux.-De quelle manière doit-on envisager l'effet du frottement on celui
du choc? C'est une question difncile à résoudre. Est-ce une légère augmentation
de température qui favorise la phosphorescence, ou la lumière renaît-elle parce
qu'on renouvelle la surface, en mettant en contact, avec l'oxygène de l'air
atmosphérique, les parties animales propres à dégager de l'hydrogène phos-
phore? J'ai constaté, par des expériences publiées en ï~gy, que le bois luisant
s'éteint dans le gaz hydrogène et dans lé gaz azote pur, et que sa lueur
reparoit dès que l'on y mété la plus petite bulle de gaz oxygène. Ces faits,
auxquels nous en ajouterons plusieurs autres dans la suite, conduisent à découvrir1
les causes de la phosphorescence de la mer et de cette influence particulière
que le choc des vagues exerce sur la production de la lumière.
Lorsque nous nous trouvâmes entre l'ite de Madère et les côtes d'Afrique,
nous
eûmes de petites brises et des calmes plats, très-favorables aux observations
magnétiques, dont je m'occupoisdans cette traversée. Nous ne pouvions nous lasser
d'admirer la beauté des nuits rien n'approche de la transparence et de la sérénité du
ciel africain. Nous fumes frappés de la prodigieuse quantité d'étoiles filantes
qui tomboient à chaque Instant. Plus nous avancions vers le sud, et t~us
ce
phénomène devenoit fréquent, surtout près de& îles Canaries. Je crois avoir
observé pendant mes courses, que ces météores ignés sont en général plus
communs et plus lumineux dans certaines régions de la terre que dans d'autres.
Je n'en ai jamais vu de si multipliés que dans le voisinage des volcans de
Quito, et/dans cette partie
la province de Quito, partte de la mer Sm qui baigne les
mer du Sud
côtes volcaniques de CrNatimala. L'In&uence, que les lieux, les climats et
les saisons paroissent avoir sur les étoiles niantes, distingue cette classe de
météores de ceux qui donnent naissance aux aérotithes, et qui vraisembla-
blement existent hors des limites de notre atmosphère. D'après les observations
correspondantes de MM. Benzenberg et Brandes beaucoup d'étoiles filantes
vues en Europe n'avoient que 3oooo toises de hauteur. On en a même
mesuré une dont létévationnexcédoit pas ï~ooo toises ou cinq lieues marines.
Ces mesures, qui ne peuvent donner que des résultats par approximation,
mériteroient bien d'être répétées. Dans les climats chauds, surtout sous les
Tropiques, les étoiles filantes laissent fréquemment derrière elles une traînée
qui reste lumineuse pendant 12 ou ï5 secondes d'autres fois elles paroissent
crever en se divisant en plusieurs étincelles, et généralement elles sont
beaucoup plus basses que dans le nord de l'Europe. On ne les voit que par
un ciel serein et azuré; peut-être n'en a-t-on jamais aperçu au-dessous d'un
nuage. Souvent les étoiles' filantes suivent une même direction pendant
quelques heures, et cette direction est alors celle du vent Dans le golfe
de Naptes, nous avons observé, M. Gay-Lussac et moi, des phénomènes
lumineux très-analogues à ceux qui ont fixé mon attention pendant un long
séjour à Mexico et à Quito. Ces météores sont peut être modifiés par la
nature du sol et de ~'air, comme certains effets du mirage et de la réfraction
terrestre propres aux côtes de la Calabre et de la Sicile.
Nous ne vîmesdans notre ttavigation ni les îles Désertes ni Madère. J'aurois désiré
pouvoir vérifier la longitude de ces îles, et prendre les angles de hauteurs des
montagnes volcaniquesqui s'élèvent au nord de Funchal. M. de Borda3 rapporteque
ces montagnes se voient à 20 lieues de distance, ce qui ne prouveroit qu'une
hauteur de ~i~ toises (8o6.*°) mais nous savons, par des mesures récentes,
que la cime la plus élevée 4 de Madère a 5t6a pieds anglois, ou 807 toises. Les

Gt&er<. ~nna/M de .PA)'.M~ Th. XJI, p. 368.


C'est le résultat des nombreuses observations de M. Arago qui, lors de la prolongation de la
méridienne en Espagne, a pu suivre la direction des météores pendant des nuits entières sur le TbM~
j montagne du royaume de Valence.
<f7?fK'tzM<~
s ~oya~e <<zFlore, T. I, p. 65. Le Salvage est ~isiMea 8 Menés les petites iles Désertes le sont t
12 lieues de distance. Borda, T. 1, p. 67 et 70.
ï,
< SmKA, Tour ofthe Co~tnen~ Vol. p. aoo. 7~A TV~M., Vol. Vin,p. ta4. D'après Heberdeen
le Pic Rmvode Madère est élevé de 595 toises au-dessusde la plaine qui environne base. ~r'Mntt~'ftyt~
sa
de Cook, T. t., p. ~9.
petites iièsDesertesetle ~lvage,sur lequel on recueille dëï'Ch'seiUeet duMesem-
bryànthemum crystalluMun) n'ont pas aoo toises de hauteur perpendiculaire.
Je pense qu'il est utile de Rxer l'attention des navigateurs sur ces déterminations,
parce que, d'après une méthode dont cette Relation offre plusieurs exemples
et que Borda, Lord Mulgrave, M. de, Rossel et Don Cosme Churruca,
ont employée avec succès dans leurs expéditions, on peut, par des angles
de hauteur pris avec de bons instrumens à réflexion, connoitre avec une
précision sufnsante la distance à laquelle le vaisseau se trouve d'un cap ou
d'une île hérissée de, montagnes.
Lorsque nous nous trouvâmes à ~o lieues dans l'est de l'tte de Madère, une
hirondelle vint se placer sur te hunier. Eue étoit si fatiguée qu'elle se laissa
prendre aisément. C'étoit l'hirondelle des cheminées Qu'est-ce qui peut engager
un oiseau, dans cette saison et par un temps calme, à voler si loin? Dans l'expédition
de d'Entrecasteaux, on vit également une hirondelle de cheminée à 60 lieues
de distance du cap Blanc; mais c'étoit vers la fin d'octobre, et M. LabUlardière
la crut nouvellement arrivée d'Europe. Nous traversions ces parages au mois
de juin, à une époque où, depuis long temps, la mer n'avoit pas été agitée
par des tempêtes. J'insiste sur cette dernière circonstance, parce que de petits
oiseaux, et même des papillons, sont quelquefois jetés au large par l'impé-
tuosité des vents, comme nous l'avons observé dans la mer du Sud, étant à
l'ouest des côtes du Mexique.
Le Pizarro avoit ordre de toucher l'ile de Lancerote (Z.<M~7iofe), une des sept
grandes îles Canaries, pour s'informer si les Anglois bloquoient la rade de Sainte-
Croix de Ténériffe. Depuis le t5 juin on étoit inquiet sur la route que l'on
devoit suivre. Jusque-là, les pilotes, à. qui l'usage des horloges marines n'étoit
pas très-familier, avoient montré peu de confiance dans la longitude que
j'obtenois assez régulièrement deux fois par jour, par le transport du temps, en
prenant des angles horaires le matin et le soir. Ils hésitèrent de gouverner au sud'est,
de peur d'attaquer le cap de Nun ou du moins de laisser l'ile de Lancerote
à l'ouest. Enfin, le t6 juin, à neuf heures du matin, lorsque nous nous
trouvions déjà par 2()° 26~ de latitude, le capitaine changea de rumb et
fit route à l'est. La précision du garde-temps de Louis Berthoud fut bientôt
reconnue à deux heures de laprès-midi, nous eûmes la vue de la terre,
qui paroissoit comme un petit nuage fixé à l'horizon. A cinq heures, le soleil

~Kftfn~a nM<te<t, Lin.


étant plus bas, de Lancerote 'se présenta Si distinctement que )epM
!le
prendre l'angle de hauteur d'une montagne conique qur domine majestueusement
sur les autres cimes, et que nous crûmes être le gt'and\vo!can qui avoit
fait tant de ravages dans la nuit du ï." septembre ty3o.
Le courant nous entrama vers ta côte plus rapidement que nous ne te
désirions. En avançant, nous découvrîmes d'abord l'ite de Fortaventure (Forte-
ventura), cétèbre par le grand nombre de chameaux' qu'elle nourrit; et, peu
de temps après, nous vhnes la petite île de Lobos, dans le canal qui sépare Forta-
venture de Laneerote. Nous passâmes une partie de la nuit sur le tillac. La lune
éctairoit les cimes volcaniques de Lancerote, dont les pentes, couvertes de
cendres, réflétoient une lumière argentée. Antarès brilloit près du disque
lunaire, qui <i'étoit élevé que de peu de degrés au-dessus de l'horizon. La
nuit étoit d'une sérénité et d'une fraîcheur admirables. Quoique nous fussions
très-peu éteignes des cotes d'Afrique et du bord de ta zone torride, le thermomètre
centigrade ne se soutenoit cependant pas au-dessus de ï8°. La phosphorescence
de l'Océan paroissoit augmenter la masse de lumière répandue dans faire
pouvois lire, pour la première ibis, te vernier d'un sextant de Troughton de
deux pduces, dont la division étoit très-nne, sans éctairer le limbe par une
bougie. Plusieurs de nos compagnons de voyage étoient Canariens comme
tous les habitans des îles, ils vantoient avec enthousiasme la beauté de leur
pays. Après minuit, de gros nuages noirs s'élevant derrière le volcan couvrirent
par intervalles la tuu~ et la belle constellation du scorpion. Nous vimes du feu
que l'on portoit çà et là sur le rivage. C'étoient vraisemblablement des pécheurs
qui se préparoient à leurs travaux. Nous nous étions occupés, pendant toute la
route, à lire les anciens voyages des Espagnols, et ces lumières mouvantes
nous rappeloient celles que Pedro GutierreZ, page de la reine ïsabette, vit
à l'île de Guanahani, dans la nuit mémorable de la découverte du nouveau
monde.
Le t~, au matin, l'horizon étoit brumeux, et le ciel légèrement couvert de
vapeurs. Les contours des montagnes de Laneerote en paroissoient d'autant

Ces chameaux, qui servent a<n labours et dont le peuple mange quelquefois la chair mMe m'y
aistoient pas avant que les Bethencourts Basent la conquête des îles Canartes. Au seizièmeMeo!e, let
ânes s'étoient tellement mu]tip!iés dans l'lie de FbrtaTentare, qu'ils étoteht devenus sauvages, et qu'il
fallut leur donner la-chasse. On en tua plusieurs milliers pour sauver les récoltes. Les chevaux de
Fortaventure sont d'une beauté remarquable et de race barbaresque. Ac<tcKM <& la historia g)'n<!M<<
M&t< Canarias, por Don ~OM ~Tem, T. !t, p. 436.
meme~
ptns~ra~~é~Mhm~~
ont!o<~ts~ Noos pas~mes,
ceux
~transj~areaace:,
qui
de

es endroits
faixs' semble ey

de
vott~eha~p;'d~a')~
ta ~nain, ~p&s~~jqu~
d~ù fo&
ta
C~ra.us'exa~na~
sonde a
de Laneerote,
et qui sodt- si ~i Ë~rës~dans carted'aïlleurs
M.deFteurIeu, que dans celle qui est jointe au voyage de la. frégate la
Ftore.La carte de l'Océan Atlantique publiée en t~SS, par ordre de M. de
Castries, offre les marnes erreurs. Comme les courans sont extrêmement
rapides dans ces parages il est important, pour la sûreté de la navigation,
d'observer ici que la position des cinq petites îles Alegranza Clara, Graciosa,
Roca det tSste et. !<t&emo ne se trouve indiquée avec exactitude que dans
la carte des iles Canaries de M. de Borda et dans l'Atlas de Tonuo, fondé
pour cette partie sur les observations dj6 Don Jose Varela, qui sont assez
conformes à celles de la frégate la Boussole!!–––
Au milieu de cet archipel qui est rarement traversé par les vaisseaux
destinés pour Ténériffe, nous fumes singulièrement frappés de la configuration
des côtes. Nous nous crûmes transportés aux Monts-Euganéens dans le
Vicentin, ou aux rives du Rhin près de Bonn La fbnne~des êtres organises
varie selon les climats, et c'est cette extrême variété qui rend si attrayante
l'étude de ta géographie des plantes et des animaux; mais tes roches, plus anciennes
peut-être que tes causes qui ont produit la diSerence~des climats.sur le globe, sont
les mêmes dans les deux hémisphères Les porphyres renfermant du feldspath
vieeux et de t'amohibote, les phonolites 3, les grunsteins, les amygdatoïdes
et les basaltes affectent des formes presque aussi constantes que les matières
simples cristallisées. Aux îles Canaries, comme en Auvergne, dans le Mittel-
gebirge en Bohême, comme au Mexique et sur les bords du Gange; ta
formation de trapp s'annonce par une disposition symétrique des montagnes,
par des cônes tronqués, tantôt isolés, tantôt accouplés~, par des plateaux
dont les deux extrémités sont couronnées d'un inamelon.

Se6Mge6i& d&intpmM. Nose.


~ont<m. ~BMr.t p. tM.
.Po)p&yfM~M/<'r de Werner.
~tbatt~tmeNt~ Zt<"NHt~N&ergB.
Toute la partie occiâeBtale de Lancerote, que nous~mes de près, porte
le caractère d'un paysrécemment bouleversé par des feux volcaniques. Tout
est noir, aride, et dénué de terre végétale. Nous distingaâmea,avec ta lunette,
du basalte stratifié en couches assez minces et fortement inclinées. Plusieurs
collines ressemblent au Monte-Novo, près de Naples, ou à ces monticules
de scories et de cendres que la terre entr'ouverte a élevés dans une seule
nuit au pied du volcan de Jorullo, au Mexique. En eSet, l'abbé Vtera I
rapporte qu'en ï~3o, plus de la moitié de l'île changea de face. Le Grand
~o/c~M~ dont nous avons parlé plus haut, et que les habitansappellent le volcan
de Temanfaya, ravagea la région la plus fertile et la mieux cultivée: neuf
villages furent alors entièrement détruits par le débordement des laves. Un
violent tremblement de terre avoit précédé cette catastrophe, et des secousses
également fortes se firent sentir pendant plusieurs années. Ce dernier phénomène
est d'autant plus remarquable qu'il se présente rarementà la suite d'une éruption~
lorsque les vapeurs élastiques ont pu se, faire jour par le cratère, après
l'écoulement des matières fondues. La cime du grand volcan est une colline
arrondie, qui n'est pas entièrement conique. D'après les, angles de hauteur
que j'asi pris à diSérentes distances, son élévation absolue ne paroît. pas
excéder de beaucoup 3oo toises. Les monticules voisins et ceux de l'AIegranza `
et d'Isla Clara ont à peine i oo à 120 toises. On est surpris de ne pas trouver
plus élevés des sommets qui, vus de la mer, offrent un spectacle si imposant.
Mais rien n'est plus incertain que notre jugement sur la grandeur des angles,
que
soutendent les objets tout près de l'horizon. C'estd'après désillusions de ce
genre, qu'avant les mesures faites par MM. de Churruca et Galeano, au
cap Pilar~ les navigateurs ont regardé comme extrêmement élevées les mon-
tagnes du détroit de Magellan et celles de la Terre de Feu.
L'île de Lancerote portoit jadis le nom de Titeroigotra. Lors de l'arrivée
des'Espagnols, ses habitans se distinguoient des autres Canariens par les
traces d'une civilisation plus avancée. Ils avoient des maisons construites en
pierre de taille, tandis que les Guanches de TénériSe, en vrais Troglodytes,
demeuroient dans les cavernes. A Laneerote, régnoit alors. une institution3
\.<.
~M-ro, T. H, p. 4o4.
=- Churruca, ~M&o a la Relacion <M ~M~ al .Mo~snM, 1793, p. 76.
~ra, T. ï, p. t5o, t/t,
tQi. Du jHaMe, DeM~. la Chine, T. ÏV, p. 46t. Au Tibet, la
polyandrie est cependant moins commune qa'on
ne le pense, et réprowee par le ctersé. ~tttjtMM
dans~'o&M, Neue Nordische Bet<e, B. 01, p. a8a.
très-singulière, et dont 0!~e trouve d'exemple que chez ie~Tibétains. Une femme
avoit plusieurs maris qui jouissoient alternativement des prérogatives dues
à an chef de famille. Un mari n'étoit regardé comme têt que pendant une
révolution lunaire; et, tandis que ses droits étoient exercés par d'autres, U
restoit confondu avec les domestiques de ta maison. On doit regretter que
les religieux qui ont accompagné Jean de Béthencourt, et qui ont trace l'histoire
de la conquête des Canaries, ne nous aient pas donne plus de renseignemens sur
les mœurs d'un peuple chez lequel on trouvoit des usages si bizarres. Au quinzième
siècle, lue de Lancerote renfermoit deux petits états distincts et séparés par une
muraille, genre de monumens qui survivent aux haines. nationales et qui se
retrouvent en Écosse au Pérou et en Chine.
Les vents nous forcèrent de passer entre les iles Alegranza et Montana
Clara. Comme personne, à bord de la corvette, n'avoit navigué dans cette
passe, il fallut jeter la sonde. Nous trouvâmes fond à vingt-cinq et trente-
deux brasses. Le plomb rapporta une substance organique, d'une structure si
singulière, que nous restâmes long temps indécis si c'étoit un Zoophyte ou
une espèce de Fucus. Le dessin que j'en ai fait sur les lieux est gravé dans
le second volume de nos Plantes équinoxiales Sur une tige brunâtre,
de trois pouces de long, s'élèvent des feuilles rondes, lobées et crénelées
au bord. Leur couleur est d'un vert tendre elles sont membraneuses et
striées comme les feuilles des Adiantes et du Ginkgo biloba. Leur surface est
couverte de poils roides et blanchâtres; avant leur développement, elles sont
concaves et enchâssées les unes dans les autres. Nous n'y observâmes aucun ves-
tige de mouvement spontané, aucun signe d'Irritabilité, pas même en appliquant
l'électricité galvanique. La tige n'est pas ligneuse, mais d'une substance presque
cornée, semblable à l'axe des Gorgones. L'azote et le phosphore ayant été
trouvés abondamment dans plusieurs plantes cryptogames, il auroit été inutile
d'en appeler à la chimie pour décider si ce corps organisé appartient au règne
végétal ou au règne animal. La grande analogie qu'il onre avec quelques plantes
marines à feuilles d'Adiante, surtout avec le .genre Caulerpa de M. Lamoureux,
dont le Fucus prolifer de Forskai est une des nombreuses espèces, nous a engages
à le ranger provisoirement parmi les varechs ou goémons, et à lui donner le nom
de Fucus vitifblius. Les poils, dont cette plante est hérissée, se retrouvent dans

.K.~KH! T. H, p. 8, pl. I.XtX.


beaucoup d'autres Fucus '.La feuille, examinée au microscope~ à l'Instant oH
l'on venoit de la retirer de l'Océan, ne présentoitpas, H est vrai, ces glandes
conglobées ou ces points opaques qui renferment les parties de la (ructincation
dans les genres Ulva et Fucus~ mais combien de fois ne trouve-t-on pas des
varechs dans un état tel qu'on ne distingue encore aucune trace de graines dans
leur parenchyme transparenta
Je ne serois pas entré dans ces défaits,qui appartiennent à l'histoire naturelle
descriptive, si le, Fucus à feuilles de vigne n'oSfoit pas un phénomène phy-
siologique d'un intérêt plus générât. Fixée sur un morceau de madrépore,
cette algue marine végétoit au fond de, l'Océan, à une profondeur de ipa pieds,
et cependant ses feuilles étoient aussi vertes que celles de nos graminées~
D'après des expériences de Bouguer la lumière est aRbibtie après un trajet
de t8o pieds, dans le rapport de ï
à t~y,8. Le varech de l'Alegranza
présente par conséquent un nouvel exemple de plantes qui végètent dans
une grande obscurité sans être étiolées. Plusieurs germes, encore enveloppés
dans Ie& bulbes des Liliacées, l'embryon des Malvacées, dés Rhamnoïdes, du
Pistacia, du VIscum et du Citrus,, tes branches de quelques plantes souterraines,x
enfin des végétaux, transportés dans des mines où l'air ambiant contient de
t hydrogène ou une grande quantité d'azote, verdissent sans lumière. D après ces
faits, on est tenté d'admettre que ce n'est pas seulement sous l'influence des
rayons solaires que se Corme, dans les organes des végétaux, ce carbure d'hy-
drogène dont la présence Mt paroftre le parenchyme d'un vert plus ou moins
foncé, selon que le carboneprédomine dans le mélange 3.
M. Turner, qui a si bien fait connoître la, famille des varechs, et beaucoup
d'autres botanistes célèbres, pensent que la plupart des Fucus que
nous
recueillons à la surface de l'Océan, et qui, par les a3 et 35 degrés de latitude
et les 3a° de longitude, offrent au navigateur le spectacle d'une vaste prairie
inondée, croissent primitivement au fond de la mer, et ne voyagent
que
Fucus lycopodioides, et F. hirsutes.
7~~ d'Optique, p. a56, s64 et 34~' Le Fucus vitiMIu~ ne peut avoir été éclairé, à trente-
deux brasses de profondeur, que par une lumière ao3 fois plus forte
que cette de la lune, et par

~&e~
conséquentégale à la moitié de la lumière que répand une chandelle
vue à un pied,de distance. Or, d'apreo
mes expériences directes, le Lepidiumsativum ne verdit presque pas sensiblementà la tam:ere vive de deux,
lampes d'Argand. Voyez aussi Lambert, jF'Ac<f)me<rM,
p. aa3.

f~
&T.
Ces idées se trouvent en partie exposées dans
( Journal
( ~~MM,
XL, p. ,54), et dans mes
p. 179. ) Voyez aussi 7~
mon mémoire sur les phénomènes de t'étiotement

<~ <~ Irish ~ea~ Vol. Vm, p. a6o.

'i ?
dans l'état adulte, lorsqu'il sont arrachés par le mouvement des Aots. Si cette
opinion est exacte, il fau~convenir que la famille des algies marines présente
degrandesdintcultésaux physiciens qui persistent à croire que toute absence
de lumière doit produire un étiolemënt car comment admettre que tant d'espèces
d'tJivacées et de Dictyotées & tiges~et~a feuilles vertes, qui nagent sur ta surface
de l'Océan, aient végète sur des rochers presque à fleur d'eau?s
D'après des notions puisées dans un vieux routier portugais, le capitaine
du Pizarro crut se trouver vis-à-vis d'un petit fort situé au nord de Teguise,
capitale de l'île de Lancerote. On prit un rocher de basalte pour un château:
on le salua en arborant pavillon espagnol, et l'on mit le canot à l'eau pour
qu'un des officiers allât s'informer, près du commandant de ce prétendu
fort, si des bâtimens anglois eroisoient dans ces parages. Notre surprise fut
assez grande, lorsque nous appnmes que la terre qu'on avoit regardée comme
un prolongement de la côte de Lancerote étoit la petite He de la Graciosa,
et qu'à plusieurs lieues à la ronde il n'y avoit pas un endroit habité.
Nous profitâmes du canot pour reconnottre la terre qui fermoit l'en-
ceinte d'une large baie. Rien ne sauroit exprimer l'émotion qu'éprouve un
naturaliste lorsqu'il touche pour la première fois un sol qui n'est pas européen.
L'attention est fixée sur un si grand nombre d'objets qu'on a de la peine à se
rendre compte des impressions que l'on reçoit. A chaque pas on croit trouver
une production nouvelle; et, dans cette agitation, on ne reconnoit souvent pas
celles qui sont les plus communes dans nos jardins de botanique et dans nos
collections d'histoire naturelle. A cent toises de la côte nous aperçûmes
un homme qui péchoit à la ligne. On dirigea le canot sur lui mais il
prit la fuite, et se cacha derrière un rocher. Les .matelots parvinrent avec
peine à le ramener. La vue de la corvette, le canon tiré dans un endroit
solitaire, mais quelquefois visité par dés corsaires barbaresques, le débar-
quement du canot, tout avoit intimidé ce pauvre pécheur. Il nous apprit que
la petite île de la Graciosa à laquelle nous venions d'aborder, étoit séparée de
Lancerote par un canal étroit appelé El Rio. Il nous proposa de nous conduire
au port de Los Colorados pour y prendre des informations sur le blocus de
Ténérine mais comme il assura en même temps n'avoir aperçu, depuis plu-
sieurs semaines, aucun bâtiment au large, le capitaine résolut de continuer
sa route pour Sainte-Croix.
La petite partie de l'île de la Graciosa que nous parcourûmes ressemble
à ces promontoires de laves que l'on observe près de Naples, entre Portici
et Torre del Greco. Les rochers sont nus, dénués d'arbres et d'arbustes )!e
plus souvent sans trace de terreau. Quelques plantes Itcheneusescrustacee~,
des Vanolaires, des Lepraria et des Urcéolaires' se
trouvant éparséssapt~
basalte. Les laves qui ne sont pas couvertes de cendres volcaniques, restent des
siècles sansaucune apparence de végétation. Surle sol africain', TexcëM~
et de longues sécheresses ralentissent le développement des plante cryptogames.
Les basaltes de la Graciosa ne sont pas colonnaires, mais divisés par
couches de 10 à t5 pouces d'épaisseur. Ces couches sont inclinées sous un
angle de 80 degrés au nord-ouest. Le basalte compacte alterne avec des
couches de basalte poreux et de marne. La roche ne contient pas d'amphibole,
mais de grands cristaux d'olivine lamelleuse, qui ont un triple clivage*. Cette
substance se décompose très-difEcilement.M. Haûy la regarde comme une variété
du pyroxène. Le basalte poreux, qui fait transitionau mandelstein, a des cavités
alongéesde deux jusqu'à huit lignes, de diamètre, tapissées de calcédoine, et
enchâssant des ft'agmens de basalte compacte. Je n'ai pas observé que ces cavités
fussent dirigées dans un même sens, ni que la roche poreuse lut superposée sur
les couches compactes, comme cela arrive dans les courans de laves de l'Etna
et du Vésuve. La marne 3, qui alterne plus de cent fois avec le basalte, est
jaunâtre, friable par décomposition, très-cohérente dans l'intérieur, et souvent
divisée en prismes irréguliersanalogues aux prismes trapéens. Le soleil décolore
leur surface comme il blanchit plusieurs schistes en débrulant un principe hydro-
carburé qui paroît combiné avec les terres. La marne de la Graciosa contient
beaucoup de chaux, et fait'vivement enisrvescence avec l'acide nitrique, môme
sur des points où elle se trouve en contact avec le basalte, Ce fait est d'autant
plus remarquable que cette substance ne remplit pas les fentes de la roche,
mais que ses couches sont parallèles à celtes du basalte on doit en conc!ure/
que les deux fossiles sont d'une même formation et ont une origine commune.
Le phénomène d'une roche basaltique, renfermant des masses de marne endurcie
et fendillée en petites colonnes, se retrouve d'ailleurs dans le Mitt~gebirge
en Bohéme, En visitant ces contrées, en 1~92, M.Freiesleben~ et moi,
Nou.) reconnûmes les LeeMea (
atrovirens, Urcoolaria' ocelhtt, U. diamarta laqMUeM. Acharina
rapporte le Lichen Komigii de ma Flore de Freiberg), Farmeliapanetinà, P. teneBà (Uohem hiipMnt
Willd. ) P. atra, Leeidea f)MCO-atra,~t phtsiems autres espèces qu'on avoit em )aMM~ appartenir
eMitNtvement au nord de l'Europe. (~cA<H-. ~etAo~tM ~tcAonttnt, T. I, p, t~a.)
a&Kr~r Olivin.
Mergel.
BfT~Mm<Mf;eAe~ Journal, '79<; p. a'5.
Stiefdberg l'empreinte d'u
pous avons mène reconnu dans lamarne du
plante voisine du Cerastium oa de l'Alsine. Ces couches de marne q
renferment les montagnes trapéennes, sont-~elles dues à des éruptions boneu
on doit-on tes considérer comme des dépôts aqueux qui alternent avec <
dépôts volcaniques? Cette dernière hypothèse paro!t d'autant plus fbre~
que, d'après les recherches de Sir Jamei; Hall sur l'influence que la pressi
exerce dans les fusions, l'existence de l'acide carbonique dans des snbstan<
que renferme le basalte, h'onre rien -de surprenant. Beaucoup de laves
Vésuve présentent des phénomènes analogues. Dans ta Lombardie, en)
Vicenza et Abano, où le calcaire du Jura contient de grandes masses
basalte, j'ai vu ce dernier faire effervescence avec les acides là où il touc
la roche calcaire.
Nous n'eûmes pas te loisir d'atteindre le sommet d'une colline très-remarquabl
en ce que son pied est formé de bancs d'argite sur lesquels reposent des coud
de basalte, exactement comme dans une montagne de4a Saxe qui est deven
célèbre par les disputes des géologues volcanistes et neptuniens. Ces basaltes étoie
recouverts d'une substance mametonée que j'ai vainement cherchée au Pic
TénériSe, et que l'on désigne sous les noms de verre volcanique, verre
Müller ou Hyalite elle fait le passage de l'opale à la calcédoine. Nous
détachâmes avec peine quelques beaux échantillons il fallut laisser intac)
des masses qui avoient 8 à ïo pouces en carré. Je n'ai jamais vu en Euro
de si belles Hyalites qu'à file de la Graciosa et sur le rocher porphyritiq
appelé el ~eno~ de &M &«Mo~ au bord du lac de Mexico.
Il y a sur le rivage deux sortes de sable l'un est noir' et basaltiqu
l'autre blanc et quartzeux. Dans un endroit exposé aux rayons du sole
le premier nt monter le thermomètre à 5t°,2 (4i"R.), et le second à 4
(32° R.). La température de l'air, observée à l'ombre, étoit de a~
on de ~<5 plus élevée que celle de l'air de mer. Le sable quartzeux contie
des fragmens de feldspath. Il est rejeté par la mer, et forme, pour ainsi dir
à la surface des rochers, de petits flots sur lesquels végètent. des niantes grass
et salines. Des fragmens de granité ont été observés à Ténérine l'Me de
Gomère, d'après des renseignemens qui m'ont été fournis par M. Broussonnt
renferme un noyau de schiste micacé le quartz, disséminé dans le sable q

NcAetAente~r .Ntf~.
nous avons~ trouvé sur !es plages de la Graciosa, est'une substanceétrangère aux
iav~es et auxporphyres~rapéensquiont tant derapportsaveetes produitsvo!ca-
Btques. L'ensemble de~ces faits paro~t prouverqu'auxMes Canaries, comme dans
les Andes de~Quito,! en Auvergne, en Grèce et dans la majeure partie du globe,
les feux souterrains se sont'fait jour a travers des roches de formation primitive.
En indiquant dans lasuite un grand nombre de sources chaude~ que nous
avons vu sortir du granité, du gneiss et du schiste micacé, nous aurons
occasion de revenir sur cet objet qui est un des plus Importans de l'histoire
physique d~ globe.
Rembarques au coucher du soleil, nous marnes à la voile avec une brise
trop foible pour continuer notre route à Ténérine. La mer'étoit calme; une
~vapeur roussàtre couvroit l'horizon et sémbloit agrandir les objets. Dans
cette solitude, au milieu de tant d'Hots inhabités, nous jouîmes pendant
long-temps de t'aspeet d'une nature sauvage et imposante. Les montag&es
noires de la Graciosa presentoient des murs taillés à pic de cinq ou six cents
pieds de hauteur. Leurs ombres, projetées sur la surface ~e!'0céan, donnoient
au paysage un caractère lugubre. Semblables aux débris d'un vaste; édifice,
des rochers de basalte sortoient du sein des eaux. Leur existencenous
rappeloit cette époque reculée où des votcans sous-marins donnèrent naissance à
de nouvelles îles ou déchirèrent les continens. Tout ce qui nous environnoit
de près sembloit annoncer la destruction et la stéritité; mais au fond de ce
tableau les côtes de Lancerote offroient un aspect plus riant. Dans une gorge
étroite, entre deux collines couronnées de touffes d'arbres épars,sepro!ongeoit
Les derniers
un petit terrain cultivé. rayons du soleil éclairoient des Mes
prêts à être moissonnés. Le désert même s'anime dès qu'on y reconnoît Jes
traces de la main laborieuse de l'homme.
Nous essayâmes de sortir de cette anse par la passe qui sépare l'Aïegranza
de Montana Clara, et par laquelle nous étions entrés sans dimculté, pour
débarquer à la pointe septentrionale de la Graciosa. Le vent ay~nt molli
beaucoup, les courans nous portèrent très-près d'un éçueil sur lequel la mer
brisoit avec force, et que les cartes anoiennes désignent sous le nomd'jE'r
ou Infierno. Comme nous aperçûmes ctftéçuell à deux encablures de l'avant
de la corvette, nous reconnûmes que c'est une butte de lave de trois à quatre toises
de hauteur, remplie de cavités et couverte de scories qui ressemblent
au coo~
ou à la masse spongieuse de la houille désoufrée On peut supposer que le
rocher de Hnnerno que les cartes plus récentes appellent la HocAcjd<* Z'OiM~t
(7)[<M'a <!fcZ ~e~te)~ a ëté soateyë par te feu volcaa!qae. H M peu~
qu'il ait été jadis beanconp plus eteyé; car l'JBe ~cnpa dtes A~opMy qa'on a
vu sortir deIameràplusieM'srepNses~eni[638ett~ï~, avoit atteint jasqa'à
354 pieds (it5.") de haa~ur'iofsqn'die disparut entièrement en t~a3,~qae
l'on trouva quatre-vingts brasses de ~ndal'endKtit qu'elle avoit occupe. L'Mëe
que j'énonce sûr l'origine de la butte basaltique de l'Innerno, se trouve
conRrmée par un phénomène qui a été observée vers le milieu du dernier
siècle, dans ces mêmes parages. Lors de l'éruption du volcan de Temanfaya,
deux collines pyramidales de laves lithoïdes s'élevèrent du fond de l'Océan, et
se réunirent peu à peu à l'île de Lancerote.
La foiblesse du vent et les courans ne nous permettant pas de débonqaer
par le canal de l'Alegranza, on résolut de, passer la nuit à courir des bordées
entre l'Ma Clara et la Roche de l'Est. Cette résolution manqua de nous
devenir funeste. ïl est très-dangereux de se trouver en calme près de ce dernier
rocher, vers lequel le courant porte avec une ~brce extraordinaire. A minuit,
nous commençâmes à sentir les effets de -ce courant. La proximité des masses
pierreuses, qui s'élèvent perpendiculairementau-dessus des eaux, nous ôtoit
le peu de vent qui souffloit la corvette ne gouvérnoit presque. pas, et à
chaque instant on craignoit de toucher. Il est difficile de concevoir comment
une butte basaltique, isolée au milieu de la vaste étendue de t'Océan, peut
causer un mouvement si considérable dans les eaux. Ces phénomènes, bien
digues de l'attention des physiciens, sont cependant très-connus des marins: on
les observe d'une manière très-effrayante dans la mer du Sud, surtout dans le
petit archipel des i!es Galapagos. La différence de température qui existe entre
le fluide et la masse des rochers ne peut expliquer ia direction qu'aSectent ces
courans; et comment admettre que l'eau s'engouffre à la base de ces écueils qui
souvent ne sont pas d'origine volcanique, et que c'est par cet engouffrement
continuel que les molécules d'eau tendent à remplacer le vide qui se <brme~?.

Je Borda, ~<<tge Plore, T. t,


Yoyage de la jPïoM~ I, p.
p. 386., Bory-Saira~Yincent, ~M:
3$6., Bo'y-&Mn<tneen<, .Essai M~
sur /<M tles ~r<t<n~M,
!es Mft Fortunéesr, p.
p, ao.
Je dois faire observer ic! que cet écaeil se tfOnve déj~ marqué sur la célèbre carte ïénitienne
d'Andrea B!amco, mais que te nom tt'/t;emo y est donne, comme dam t& utns ancienne carte de
PicigMHO, l'île de TenérifEB, sans doute parce que les Goanehes regardoient le Pic comme
l'entrée de t'jEn/~r. ·
En t~ao, cette ile étoit visible à 7 ou 8 lieues de distance. M~nt. de f~e~~mte~ 17~2, p. ia.
~ïeMrMM~ ~o~a~e de fZsM, T. I) p. 565. Dans ces même: parages, une île reparut
en )8tt.
3 On est sorpris de lire dans d'mUeurs h es-utile qui se trouve entre les mains de tous les
un ouvrage
Le vent ayant fr~chi un peu le t8 au matin, nous réusshnes à passer par
le canal. Nous nonsapprochâmes beaucoup une seconde fois de t2/~er/<o, et
nous reconnûme& de grandes crevasses par tesqueHes les Suides gazeux se sont
probablement &it )onr tors du soulèvement de cette butte basaltique. Nous
perdimes de vue lea petttesMe& de rAt''granza,Montana Clara et Graciosa,
qui paroissent n'avoif~amais été habitées par tes Guanches.On ne tes jfréquente
aujourdhui que pour y recueiUir de l'orseitte; cette production est cependant
moins recherchée depuis que tant d'autres plantes ticheneuses de l'Europe boréale
oifrt'nt des matériaux precieuxponr ta teinture. Montana Clara est célèbre par
les beaux serins qu'on y trouve. Le chant de ces oiseaux varie par peuplades,
comme celui de nos pinçons qui sou vent n'est pas le même dans deux
cantons voisins. Montana Clara nourrit aussi des chèvres, ce qui prouve que
l'intérieur de cet not est moinsaride que les côtes que nous avons observées.
Le nom d'Alegranza est ~rmé sur celui de La Jo~eM~e, que donnèrent à
cette terre les premiers conquérans des Canaries, deux barons normands,
Jean de Béthencourt et <&ad<&T de SaHe. €'ët<Mt ic premier point auquel
ils avoient abordé. Après~ avoir demeuré plusieurs jours à la Graciosa, dont
avens examiné
nous une petite partie, its conçurent le projet de s'emparer
de t~e voisine de Lancerote, ou Guadarna, !e souveram des Guanches, les
accueiHit avec cette même hospitalité que Cortez trouva dans ïe palais de
Montézuma. Le roi pasteur, qui n'avoit d'autres richesses que ses chèvres~
fut aussi !âchement trahi que le sultan mexicain.
Nous longeâmes les cotestde Lancercts, de rNe Lobos et de Fortaven-
ture. La seconde de ces nés paroît avoir tenu anciennement aux deux autres.
Cette hypothèse géotogtque a déjà été énoncée au dix-septième siec!e, par
nn religieux &anciscai;9~ Juan Galindo. Cet écrivain supposa même qne le roi
Jubanavoit nommé que six iles Canaries-, parce que, de. son temps, trois
d'entre elles étoient contiguës. Sans admettre cette hypothèse peu probabte, de
savans géographes ont cru reconnoître, dans Farchipel des Canaries, les deux Mes
Junonioe, la Ni varia i'Ombrios, la Canaria et ta Capraria des anciens
L'horizon étant brumeux, nous ne pûmes, pendant toute la traversée de
Lancerote à TénériOe, découvrir la cime du Pic de Teyde. Si la hauteur de
ce
marins, dans la neuvième édition du ~'n!c<too< Navigator de B<tm<&om ~Mbom, p. Mo,
que c'est ptfreSht
de l'attraction des masses ou de la gravitationnniverseUe,qu'un vaMsetm s'~oigne ttuBeiiememt des Cûtea
et que la cbaloupe d'une frégate 'est attirée par la ffegate même.
Go~e/M, ~ïe~A. Mr Géogr. des Anciens, T. t, p. i46, t66, 163.
volcan est de tgoS to!se~ comme l'indiqme d~e
l'indicme la dernière meMU'etrigpnométriqMe
m€MFetnaonométr!qMe
de Borda, sa cime doit être visible & une distance de 43 l'eaes mannes,
en supposant l'ceil au niveaodel'Oeéan et uneïéfracOiont égale a 0,079
de
la distance. On a révoqué en .docte* que le Pic ait jamais été aperçu dans
le canal qui sépare LanceFOte de ~ortaventare~, et qui est éloigné du volcan,
d'après la carte de Varela, de a" ~9~, ou de près de 5o lieues. Ce phénomène
paroit cependant avoir été vérifié par plusieurs officiers de la marine royale
d'Espagne j'ai eu entre les mains, à bord de la corvette le. Pizarro, un
journal de route dans lequel il étoit marqué que le Pic de Ténériffe avoit été
relevé à t35 milles de distance, près du cap méridional de Lancerote, appelé
Pichiguera. Son sommet se présenta encore sous un angle assez considérable
pour faire~croire à l'observateur, Don Manuel Baruti, que le volcan auroit pu être
visible 9 milles plus loin. C'étoit au mois de septembre, vers le soir, et par un temps
très-humide. En comptant ï5 pieds pour l'élévation de l'ceil, je trouve que,
pour rendre compte de ce phénomène, on doit supposer une réfraction égale
à 0,158 de l'arc, ce qui n'est pas très-extraordinaire pour la zone tempérée.
D'après les observations du général Roy, les réfractions varient en Angleterre
de à;; et s'il étoit vrai que sur les cote~ d'Afrique elles atteignissent ces
limites extrêmes, ce dont je doute beaucoup, le Pic, dans de certaines circon-
stances, pourroit être visible sur le pont d'un vaisseau, jusqu'à la distance
de 61 lieues marines.
Les navigateurs qui ont beaucoup fréquenté ces parages, et qui réfléchissent
sur les causes physiques des phénomènes, sont surpris que le Pic de Teyde
et celui des Acores soient quelquefois visibles de très-loin, quand d'autres fois
on ne les découvre pas à des distances beaucoup moins grandes, quoique le
ciel paroisse serein, et que l'horizon ne soit pas embrumé. Ces circonstances
sont d'autant plus dignes de fixer l'attention du physicien, que plusieurs
bâtimens, à leur retour en Europe, attendent avec impatience la vue de ces

~oya~e <& la. Flore, T. I, p. 3So. Mon chronom&tre m'a donné, la côte nord-ouest de Lancerote,
det5°5a'to at'OMStthttnéridtendeParis.
La hanteur deceP!cest, d'après FIeuneu, de noot.; d'apreaFeirer~de ta3<t t.; d'après ToMOt de
ta6o t. mais ces mesuresne sont que des éTatoattoM par approximation. Le capitaine du Pizarro Don
Mannet Cagigal m'a prouvé, par son )0omal~ qu'il a relevéle Pic des Acores à 3y lieues de distance, à une
époque o& il étoit sûr de sa latitude, au moins à deux minutes près. Le volcan fat retevé au S. 4** E.
de sorte que l'erreur en longitude ne pouvoit influer qu'insensiblementsur l'évatnationde la distance.
Cependant !'aagle que soutendoit le Pic des Açorés étoit si ~anA que M. €agigal pense que ce volcan doit
être visible à plus de 4o ou 42 lieues. La distance de 3y lieues suppose une élévation de t43t toises.
montagnes pour rectifier leur point en longitude, et qu'ils s'en~ro!ènt plus éloignés
qu'ils ne le sont eSectivement, lorsque par un'temps clair ils ne les aperçoivent
pas à des distances auxquels-tes angles soutendttsdevroiënt: déjà être très-
considérables. La constitution de l'atmosphèrefinjftue sing~ïi~ement sur !a
visibilité des objets iélbignés. On peut admettre en gêneraique Pic dé
Ténérine s'aperçoit assez rarement~detrès -loin 'par les temps éhauds et secs
des mois de juillet et d'août, et qu'au contraire on te découvre à des distances
extraordinaires dans les mois de janvier et de février, quand te ciel est
légèrement couvert, et immédiatement après une pluie abondante, ou bien peu
d'heures avant. Il paroît que la transparence de l'air augmente prodigieusement,
comme nous gavons déjà remarqué plus haut, lorsqu'une certaine quantité d'eau
est uniformément répandue dans l'atmosphère. D'ailleurs il ne faut pas être surpris
que le Pic de Teyde soit plus rarement visible de très-loin, que les sommets
des Andes que j'ai eu occasion d'observer si long-temps. Ce Pic, moins
élevé que les parties de l'Atlas auxquelles est adossée la ville de Maroc,
n'est pas, comme elles couvert de neiges perpétuelles.Le Piton, ou jP~M de
Sucre, qui
couleur termine le Pic, réfléchit sans doute beaucoup de lumière, à cause de la
blanchâtre
de la pierre ponce rejetée par te cratère, mais la hauteur de ce
petit cône tronqué ne forme qu'un vingt-deuxièmede la hauteur totale. Les flancs
du volcan sont couverts ou de blocs de laves noires et scorinées, ou d'une végé-
tation vigoureuse, d~nt les masses renvoient d'autant moins de lumière, que
les feuilles des arbres sont séparées les unes des autres par des ombres d'une
étendue plus considérable que celle de la partie éclairée.
Il résulte de là, qu'abstraction faite du Piton, le Pic de Teyde appartient
à ces montagnes que, d'après l'expression de Bouguer, on ne voit, a dégrands
éloignemens, que d'une /MaRM~ négative, parce qu'elles interceptent la
lumière qui nous est transmise des limites extrêmes de l'atmosphère, et que
nous nous apercevons de leur existence seulement à cause de la dif~rencc
d intensitéqui subsite entre la lumière aérienne qui les entoure et celle qu& ren-
voient les molécules d'air placées entre la montagne et l'cell de l'observateur
En s'éloignant de l'tle de Ténérine, le Piton ou Pain de Sucre se voit assez

D'apresHaeMet.~tMn,~efOM~<o/'<AeempM-eo~Kbn)eeo,p.43.
Tra~ ~qp~ue,p. 365. Il suit des expériencesdu même auteur que, pour qoe cette dISerence déjeune
sensible pour nos organes et que la montagne puisse se détMher distinctement Mr te Ctet, Utte des
lumières doit être au moins d'un soixantième pins forte que l'autre.
po~fe. parce qu'il ré&éc~it une lumière blan
ré&éc!tit âne Haa-
long-temps d'une MM/M<~Mï<~ ~o~fe~
chAtre et qu~l se d~tSghe du;cid en narce <fï'H
cône ~'ay~nt que 80 toises
d'élévation, surX~o toisés de largeur à son sommet, on a agité récemment la
question de savoir si par !a petitesse dé sa masse il peut être visible à des
distances qui excèdent ~olienefr, et s'il .n'est pas plutôt probable que les
navigateurs ne distinguent le Pic, comme un petit nuage au-dessus de
l'horizon, que lorsque la. base du Piton commence à s'y montrer. Si l'on
admet que la largeur moyenne du Pain' de 'Sucre est de io0 toises, on
trouve que le petit cône, à ~o lieues de distance, soutend encore, dans le sens
horizontal, un angle de plus de trois minutes. Cet angle est assez considérable
pour rendre un objet visible; et si la hauteur du Piton excédoit de beaucoup
la largeur de sa base, l'angle, dans le sens horizontal, pourroit être plus petit
encore; sans que l'objet cessât de faire une impression sur nos organes
car des observations micrométriques ont prouvé que la limite de la vision n'est
d'une minute que lorsque les dimensions des objets sont les mêmes dans tous
les sens. Oa distingue de loin, à la simple vue, des troncs d'arbres isolés dans
une vaste plaine, quoique l'angle soutendu soit au-dessous de a5 secondes.
Comme la visibiuté d'un objet qui se détache en brnn .dépend des
quantités de lumière que t'oeit rencontre sur deux lignes dont l'une aboutit
à la montagne, et 4ont l'autre se prolonge jusqu'à la surface de l'Océan aérien,
il en résutte que plus on s'éloigne de l'objet, et ptns aussi devient petite la
différence entre la lumière de 1 atmosphère circonvoisine et celle des couches
d'air placées devant la montagne. C'est pour cela que des cimes moins élevées,
lorsqu'elles commencent à parohre au -dessus de l'horizon, se présentent
d'abord sons une ceinte plus obscure que les cimes que l'on découvre à de
très-grands étoignemens. De même la visibilité des montagnes qui ne s'aperçoivent
que d'une manière négative, ne dépend pas uniquement de l'état des basses
régions de l'air, auxquelles se bornent nos observations météorologiques,mais
aussi de sa transparence et de sa constitution physique dans les parties les

to..
plus élevées car l'image se détache d'autant mieux que la lumière aérienne
qui vient des limites de l'atmosphère a été originairement plus intense, ou bien
qu'elle a éprouvé moins de perte dans son trajet. Cette considération explique
jusqu'à un certain point pourquoi, par un ciel également serein, l'état du
thermomètre et de l'hygromètre étant exactement le même dans l'air qui
avoisine !a terre, le Pic est tantôt visible, tantôt invisible aux navigateurs qui
en
~tyo~e~ejtfttn'&an~ T.IT, p.
sont également éloignés. Il'est même probable que la chance d'apercevoirce volcm
ne seroit pas plus grande, si le cône de cendre au sommet duquel se trouve
l'ouverture du cratèreéga!oit, comme an Vésuve, le quart de !a hauteur totale~
Ces cendres, qui sont delà pierre ponce réduite en poussière) ne réûéchMsent
pas autant de lumière que la neige des Andes. Elles font que la montagne, vue
de très-loin, sans se détacher en clair, se détache beaucoup plus fbiblement
en brun. Elles contribuent, pour ainsi dire, à égaliser les portions de lumière
aérienne dont la différence v,ariable rend l'objet plus ou moins distinctement v
visible. Des montagnes calcaires, dénuées de terre végétale, des sommets
couverts de sable granitique, les hautes savanes des Cordillères', qui sont
d'un jaune doré, se distinguent mieux sans doute à de petites distances
que les objets qui se voient d'une manière négative, mais là théorie indique
une certaine limite au delà de laquelle ces derniers se détachent plus distincy
tement sur la voûte azurée du ciel.
Les cimes colossales de Quito et du Pérou, élevées au-dessus de la
limite des neiges perpétuelles, réunissent tous les~ avantages qui peuvent les
faire apercevoir sous des angles très-petits. Nous
avons vu plus haut que le
sommet~rrondi du Pic de Ténéri~e n'a
que près de cent toises de, diamètre.
D'après les mesures que j'ai faites à Riobamba, en t8o3, le dôme du
Chimborazo t53 toises au-dessous de sa cime, par conséquent dans
un point
qui est de i3oo toises plus élevé que le Pic, a encore 6~3 toises ( i3ta°*-) de
largeur. De plus, la zone des neiges perpétuelles forme le quart de la hauteur
de la montagne; et la base doucette zone, vue du côté de la'mer du Sud,
occupe
une étendue de 3~3~ toises ( 6700 °* ). Mais, quoique le Chimborazo soit
de plus élevé que le Pic, on ne le voit cependant, à cause de la courbure
de la terre, que de 38 milles et un tiers plus loin L'édat duquel brillent
ses neiges, lorsqu'au port de Guayaquil, à la 'fin de la saison des pluies,
il se montre à l'horizon, peut faire supposer qu'on doit l'apercevoir de très-
loin dans la mer du Sud. Des pilotes très~ dignes de foi m'ont assuré l'avoir
vu près du rocher du Muerto, au sud-ouest de l'île de la Punà~ à une distance

Z~ot Pajonales, depaja, paHle. C'est le nom de la n~<cn <&-< gr<MMo~es qui emtwe la
zone des
neiges perpétuelles. Géogr. p. 70.

Mont-Blanc (i. Mo toises) à 2" 13' o', et le Cbimborazo~o toiser


supposée de n'augmente cette distance, pour le Chimborazo,
que
a' 3t,t~
Sans avoir égard à la réfraction, le Pic de Ténériae ( <9o4 toises)
est visible à t* N7' aa'- le

de t4miUes.
refraction moyenne
de 4? Mères

exacte.
Chaqne~is qu'il a été vu de p!us loin, les oÏMefvateÛM,
incertains de leur longitude, dont pas été en état de Garnir <me donnée

La lumière aérienne projetée sM les montagnes, augmentera visibilité de


celles qui se voient positivement; son énergte diminue au contraire là viSiMit~
des objets qui, comme le~Pic~e TénériSe et ce~; j~aAcores,se détachent eh
:y.
brun. Bougner, en se fondant sur des considérations théoriques, a trouvé que,
d'après la constitutionde notre atmosphère, tes montagnes, vues négativement;
ne peuvent s'apercevoir à des distances qui excèdent 35 lieues I! est important
de faire observer ici que ~expérience est, contraire à ces calculs. Le Pic de
Ténériffe a été souvent vu de 36, de 38, et même de ~o lieues. De plus, dans les
attérages des Mes Sandwich, la cime de Mowna-Roa à une époque Ou elle étôit
dépourvue de neiges, a été aperçue rasant l'horizon, dans un éloignement de
53 lieues. C'est l'exemple le plus frappant que l'on connoisse jusqu'ici de la
visibUIté d'une montagne; et ce qui est d'autant plus remarquable, c'est un
objet vu négativement qui offre cet exemple.
J'ai cru devoir réunir ces considérations à la fin de ce chapitre, parce qu'en
touchant de près un des problèmes de l'optique les plus importans, celui de

D'après les cartes du .Cepo~o ~H&og~co de Madrid. En admettant i3' 3a* pour la dIHerence
desméridieMde&oaytquitetdeQuito, teUe que je l'ai trouvée (0~. <M< T. U,p.298, 357 et 433),
le Muerto est un peu moins étoigmedm ChunhorMO.
Si, d'aprex la théone de Bongtter ( K-<!t<~ <.<*t~<tp<e~p. 36b), t'intensité de la couleur aérienne, que
réfléchit la totalité de l'atmosphèrevers l'horizon, dans une direction déterminée, est égale
l'intensité, après ni trajet de 3o lieues marines, seroit n~ Cette quantité diBere de
a~
l'autre
q.,
d'un
q.
peu plus de tandis qu'après un trajet de 45 lieues, t'intensité dB la couleur aérienne est déjà de q.
ce qui dIBere trop peu de q. pour que la dMerenee puisse être semsiHe pour nos organes. D'après ces
données, on trouve, par interpolation, que la visibilité devroit déjà cesser à 35 lieues de distance.
3 La hauteur dé Mowna'&oa est, d'après Marchand, de plus de a5g8 toises; d'après King, elle est de
3677 toises; mais ces mesures, malgré leur accord accidentel, ne se fondent pas sur des moyens très-
précis. C'est un phénomène assez extraordinaire que de voir se dépouiUer entièrement de ses neige*
une cime placée par tes 19° de latitude, et dont t'étévatiom excèdeprobablement aSoo toises. La forme tres~
aplatie de Mowua-Roa, la Mesa des anciennescartes espagnoles son isolement au milieu de l'Océan, et la
fréquence de certains'vents qui, modinés par le courant ascendant,soument obliquement, peuvent en être
les causes principales. Il est difficile de croire que le capitaine Marchand se soit trompé de beaucoup dans
t'évatuationde la distanceataqnettcitvit,te to octobre 179',te sommet de Mowna. Roa. ttn'avoit quitté
Hte d'O-Wbyhee que le 7 au soir; et, d'après le mouvement des eaux et tes observationslunaires du ) 9,
il est probableque la distanceexcédoitmême 53 tieues.D'aitteurs un navigateurexpérimenté, M. de Fteurieu,
rapporteque, dans nn éMgnement de 35 ou 36 lieues, le Pic de Ténérine est visible, même par un temps
qui n'est pas parlement e!air.(~<t~t<<JM~~m~ T.I, p. 408 et 437, T. M, p. to et 78). ).
l'anblbussement de!a lumière par son. passage travers les couches de l'atmos-
pnère, eHes Curent en même temps quetque~utiutë pratique. Les volcans de
TënériHe et des Açores, la Sierra Nevada de Sainte-Marthe, te Pic d'Orizaba,
la SI!]a de Caracas, Mowna-Roa et le Mont-<Saint-~ie~ is~és dans la vaste
étendue des mers, ou placés sur les cotes des continens, servent dejba!iaes pour
diriger le pilote qui est dépourvu de moyens propres à déterminer la position
du vaisseau par l'observation des astres; tout ce qui a rapport la ~isibHite
de ces ba!ises naturelles Intéresse ïa sûreté de la navigation.
CHAPITRE IL

SÉJOUR A TÉNÉRIFFE.-VOYAGE DE SAtNTE-CROïX A I/OROTAVA.–


EXCURSION A LA CIME DU PIC DE TEYDE.

DEPUIS
notre départ de la Graciosa, l'horizon resta si embrumé que, malgré
la hauteur considérable des montagnes de Canarie nous n'eûmes connoissance
de cette île que le f8 juin au soir. C'est le grenier de l'archipel des fies
Fortunées; et ce qui est un phénomène bien remarquable pour une région
située au delà des limites des Tropiques on assure que, dans quelques
cantons, on y obtient deux récoltes de' froment par an, l'une en février et
l'autre en juin Canarie n'a jamais été visitée par un minéralogiste instruit;
cette île en seroit cependant d'autant plus digne, que la physionomie de ses
montagnes, disposées par chafnes parallèles, m'a paru différer entièrement de
celle que présentent les cimes de Lancerote et de TénériBe. Rien de plus
intéressant pour le géologue, que d'observer les rapports dans lesquels se
trouvent, sur un méme point du globe, les terrains voicanisés avec les terrains
primitifs et secondaires. Lorsque les îles Canaries auront été un jour examinées
dans toutes les parties qui composent le système de ces montagnes, on
reconno~ra qu'ou s'est trop hâté en regardant le groupe entier comme soulevé
par l'action des feux sous-marins.
Le t<) au matin, nous découvrnnes la pointe de Naga 3; mais le Pic
de TénérifTe resta encore invisible. La terre se dessinent mal une brume
épaisse en enveloppoit toutes les formes. A mesure que nous approchâmes
de la rade de Sainte-Croix, nous remarquâmes que cette brume, poussée
par le vent, s'approcholt de nous. La mer étoit fortement agitée, comme
elle l'est presque toujours dans ces parages. Nous mouillâmes après avoir
sondé plusieurs fois; car le brouillard étoit si épais qu'on distinguoit avec

Ts&t de la Cran Canaria.


Ledru, Yoyage T~n<M~ T. I, p. 3y.
~'Hn~ft de A<~<t~ ~noga oa ~Vft~o.
peine les objets, à quelques câbles de distance; mais au moment ou l'on
commença à saluer la place, la brume se dissipa totalement. Le Pic de
Teyde se montra alors dan~ une éclaircie au ~dessus des nuages; les premiers
rayons du soleil qui n'étoit point encore levé pour nous, éelaîfoientle sommet
du volcan. Nous nous portâmes vers la proue de ta corvette poar jouir de ce
spectacle majestueux, lorsqu'au même instant on signala quatre vaisseaux anglois
qui se tendent en panne tout près de la poupe. Nous les avions ranges sans en
être aperçus; et la même brume qui nous àvbit dérobé la vue du Pic,
nous avoit soustraits au danger d'être ramènes en Europe. Il aùroit été bien
pénible pour des naturalistes d'ayoir vu de loin les côtes de TénériNe sans
pouvoir toucher un sol bouleversé par des volcans.
Nous relevâmes aussitôt l'ancré, et le Pizarro approchaautant qu'il étoijt possible
du fort pour être sous sa dépense. C'est sur cette plage que, dans le débar-
quement tenté par les Anglois, deux ans avant notre arrivée l'amical Nelson
eut le bras emporté par un boulet. Le gouverneur-général des Canarien envoya
l'ordre au capitaine de la corvette de faire. déposer de suitea terre les dépêchess
de la cour pour les gouverneurs des colonies, l'argent embarqué et la corres-
pondance du public. Les vaisseaux anglois s'éloignèrent de la rade, ils avoient
donné chasse la veille au paquet-bot l'CM~M~ qui étoit parti peu de jours
avant nous de la Corogne. Il s'étoit vu obligé de relâcher au port de Paltnas,
dans l'île de Canarie; et plusieurs,°passagers, qui alloient, dans une chaloupe
à Sainte-Croix de TénériSe, avoient été faits prisonniers.
La position de cette ville ressemble beaucoup à celle de la Guayra, le
port le plus fréquenté de la province de Caracas. La chaleur est excessive
dans les deux endroits, et par les mêmes causes; mais l'aspect de Sainte-Croix
est plus triste. Sur une plage étroites et sablonneuse, des maisons d'une
blancheur éclatante, à toits plats, et a fenêtres sans vitrage, se trouvent
adossées à~jm mur de rochers noirs taiMés a picet dénués de végétation. Un
beau môle, construit en pierre de taille, et la promenade publique, plantée
en peupliers, sont les seuls objets qui interrompent la monotonie'du paysage.
La vue du Pic, tel qu'il se présente au-dessus de Sainte-Croix, est beaucoup
moins pittoresque que celle dont on jouit au ,port de l'OrOtava. Là, une
plaine riante et richement cultivée contraste avec l'aspect sauvage da volcan.

Au mois de juillet 1797;


Don Andrès de Perlasca.
Depuis les groupes de palmiers et de bananiers qni bordent la côte, jusqu'à
larégion des Arbutus des lauriers et des pins, la roche volcanique y
est couverte d'une végëtationvigoureuset On conçoit comment même des
peuples qui habitoient sous le beau climat de la Grèce et de ntalie~y
ont cru reconnottre~ une des Nés Fortunées dans la partie occidentale de
Ténérioe. La côte orientàle,ceH€ de Sainte~Groix, au contraire, porte partout
le caractère de la stérilité. Le sommet du Pic n'est pas plus aride que le
promontoire de laves basaltiques qui se prolonge vers la pointe de Naga, et
sur lequel des plantes grasses, fixées dans les- fentes du rocher, commencent
à peine à préparer du terreau. Au port de l'OrOtava, la cime du Piton soutend
un angle de hauteur de plus de seize degrés et demi; tandis qu'au môle de
Sainte-Croix cet angle excède à peine 36~.
rMalgré cette différence, et quoique, dans le dernier endroit, le volcan
s'élève au-dessus de l'horizon, à peine autant que le Vésuve vu du môle de
Naples, l'aspect du Pic est encore très-majestueux lorsque, mouillé dans la
rade, on le découvre pour la première fois. Le pitQtL seul étoit visible pour
nous; son cône se projetoit sur un fond du bleu le plus pur, tandis que des
nuages noirs et épais enveloppoient le reste de la montagne jusqu'à 800 toises
d'élévation. La pierre ponce, éclairée par les premiers rayons du soleil, reRétoit
une lumière rougeâtre, semblable à celle qui teint souvent les sommets des hautes
Alpes. Peu à peu cette lumière devint du blanc le plus éclatant; et, trompés,
comme la plupart des voyageurs, nous crûmes que le Pic étoit encore couvert de
neiges, et que nous aurions bien de la dURculté à parvenir au bord de son cratère.
Nous avons observé, dans la Cordillère des Andes, que les montagnes coniques,
comme le Cotopaxi et le Tungurahua, se présentent plus souvent dégagés de
nuages que les montagnes dont la crète est hérissée de beaucoup de petites
inégalités, comme l'Antisana et le PIchincha mais le Pic de TénériSe, malgré sa
forme pyramidale, est, une grande partie de l'année, enveloppé dans les vapeurs,
et l'on reste quelquefois pendant plusieurs semainesdans la rade de Sainte-Croix
sans l'apercevoir une seule fois., Sa position à l'ouest d'un grand continent, et son
isolement au milieu des mers, sont sans doute les causes de ce phénomène. Les
navigateurs savent très-bien que même les îlots les plus petits et les plus
dépourvus de montagnes rassemblent au-dessus d'eux et retiennent les nuages.

Les distances obliques de la cime du volcan à FOrotava et à Sainte-Croix, tont à peu près de
8600 toises et de aaSoo toises.
En outre, le décroissement du ca!oriqne est différent au-dessus des plaines de
l'Afrique et au-dessus de la surface de t'Oc&tn et tes couches d'air, amenée~
mesuresqu'etles avancent
par les vents alises, se refroidissentà vers t'ouest. Si tau*
a été d'une sécheresse extrême au-dessus des sables brulans du désert, il s'est
saturé rapidement des qu'il est entré en contact avec ta surface de la mer ou
avec l'air qui repose sur cette surface. Il est donc aisé de concevoir pourquoi les
vapeurs deviennent visibles dans des couches atmosphériques qui, éloignées du
continent, n'ont plus la même températureà laquelle elles se sont saturées d'eau.
De plus, la masse considérable d'une montagne qui s'élève au milieu delAt-
lantique, oppose un obstacle aux nuages que les vents poussent au large.
Nous attendîmes long-temps, et avec impatience, que le gouverneur de la
place nous donnât la permission de descendre à terre. J'employai ce loisir à faire
les observations nécessaires pour déterminer la longitude du môle de Sainte-
Croix, et l'inclinaisonde l'aiguille aimantée. Le chronomètre de Louis Berthoud
donna, pour la première, t8°33~ 10~. Cette position diSere de 3 à 4 minutes
en arc de celle qui résulte des anciennes observations de Flenrieu, 'Pingre,
Borda~ Vancouver et La Peyrouse. M. Quenot~ avoit cependant aussi obtenu
j8° 33~ 36~, et l'infortuné capitaine Bligh, t8°3~/ 20". La précision de mon
résultat a été confirmée, trois ans plus tard, par l'expédition du chevalier
Krusenstern, dans laquelle on a trouvé Sainte-Croix de 16° t2~ ~5~ à l'ouest
de Green\vich, et par conséquent de 18° 33' o" à l'ouest de Paris. Ces données
prouvent que les longitudes que le capitaine Cook attribuoit à Ténérifle et
au cap de Bonne-Espérance sont de beaucoup trop occidentales Le même
navigateur avoit trouvé l'inclinaison magnétique, en !799, de 61° Sa~.
Nous 1 observâmes, M. Bonpiand et moi, de 62° a~, résultat conforme
à celui qui a été obtenu, en t-~t~ par M. de Rossel, dans l'expédition de
d'Entrecasteaux~. La déclinaison de l'aiguille varie de plusieurs degrés, selon
qu'on l'observe au môle ou sur plusieurs points au nord, le long du rivage.
On ne sauroit être surpris de ces changemens dans un lieu entouré de roches
volcaniques. J'ai observé, avec M. Gay-Lussac, que, sur la pente du Vésuve
et dans l'Intérieur de son cratère, l'Intensité des forces magnétiques est modifiée
par la proximité des laves 4.
Obs. fM<r.. T. ï, p. 126.
Ga/e<tno~ ~M~e a/ .M/tgo~Htex, p. 8, JEr«MM<ent, ReMe um die ~e&. Th. 1, S. 78, et met
0~. astr., T. 1, p. xxxvn, et p. 27 et 33.
~tyc~ à la re<7;prf/;B~ La Peyrouse, T. H, p. aot..
~~m. de la Société ~re<M~, T. 1,
p. 9.
Apres avoir été fatigués, par les questions mnItiplïéësdeÈj personnes qui
visitoient notre bord pour recueillir des nouvelles politiques~n<~s descendîmes
enfin à terre. Le canot fut aussitôt Festoyé vers là corvette,peur que ïè
ressac, qui est très-dangereux dahs cette rade, ne le brisât contre le mo!e.
Le premier objet qui frappa nos regards, ëtoit une femme d'une taille
élancée, extrêmement basanée et mat Vêtue, qu'on appeloit !a Capitana. Elle
étoit suivie de plusieurs autres, dont le costume n'étoit pas plus décent
toutes demandoient avec instance de pouvoir aller à bord du Pizarro, per-
mission qui naturellement ne leur fut pas accordée. Dans ce port, si fréquente
par les Européens, le dérèglement des mœur~ prend les formes de l'o~'drc~
La Capitana est un chef choisi par ses compagnes, sur lesquelles elle exerce
une grande autorité. Elle empéche ce qui poutroit nuire au service des vais-
seaux elle engage les matelots à retourner à leur bord aux heures qui leur
sont prescrites. Les ofBciers s'adressent elle lorsqu'on craint que quelque
personne de l'équipage ne se cache pour déserter.
En entrant dans les rues de Sainte-Croix, nous sentimes une chaleur
suffocante, quoique le thermomètre ne s'élevât pas au-dessus de 25 degrés.
Quand on a long-temps respiré l'air de la mer, on souffre chaque fois qu'on
débarque, non parce que cet air contient plus d'oxygène que l'air de terre,
comme on i'a faussement avancé, mais parce qu'il est moins chargé de ces
combinaisons gazeuses que les substances animales et végétales, et le terreau
qui est le résultat de leur décomposition, versent continuellement dans
l'atmosphère. Des miasmes, qui échappent à l'analyse chimique, agissent
puissamment sur nos organes, surtout lorsque ces derniers n'ont'pas éprouvé
depuis long- temps le méme genre d'irritation. i

Sainte-Croix de Ténériue, l'~fHO~a des Guanches, est une ville assez jolie,
et dont la population s'élève à huit mille âmes. Je n'y ai pas été frappé de
ce grand nombre de moines et d'ecdésiastiques séculiers que les voyageurs
s<* croient obligés de voir dans tous les pays soumis à l'Espagne. Je ne
m'arrêterai pas non plus à décrire les églises la bibliothèque des Dominicains,
qui s'élève à peine à quelques centaines de volumes, le môle où les habitans
s'assemblent le soir pour chercher la fraîcheur, et ce fameux monument de
marbre de Carare, de trente pieds de haut, dédié à 2Vbtrc-D<ïyHe de la

'JVMff.-&'p.,T.n,p.78y.
Can<M~'M~ en mémoire de l'apparition miraculeuse qu'elle nt, en ïSga, à
Chimisay, près de Guimar. Le port de Sainte-Croix peut être considère °

comme un grand caravanserai, situé sur la foute de l'Amérique et de l'Inde.


Presque toutes les relations de voyages commencent par nne description de
Madère et de TénériCe; et si- l'histoire physique de ces Mes onrë encore un
champ immense à exploiter, il faut convenir que la topographie des petites
villes de Funchal, de Sainte-Croix, de la Laguna et de l'Orotava, ne laisse
presque rien à désirer*.
Les recommandations de la cour de Madrid nous procurèrentaux Canaries,
comme dans toutes les autres possessions espagnoles, la réception la plus
satisfaisante. Le capitaine général nous nt délivrer dabord la permission
de parcourirTt'Me. Le colonel Armiaga, chef d'un régiment d'infanterie, nous
logea chez lui et nous combla de politesses.Nous ne pûmes nous lasser d'admirer,
dans son jardin, cultivés en plein air, le Bananier, le Papayer, le Poinciana
pnlcherrima et d'autres végétaux que jusqu'alors nous n'avions vus que dans les
serres. Le climat des Canaries n'est cependant ~as~asse~~haud pour mûrir le
véritable Platano arfon~ à fruit triangulaire,
demandant
de
à 8 pouces de longueur,
et qui, une températuremoyenne de près de 3~. degrés centésimaux,
ne vient pas même dans la/vallée de Caracas. Les Bananes de Ténériuesont
celles que les Colons espagnolsdésignent par les noms de Camburis ou GMMCO~
et d&D<MH!/Mc<M. Le, Camhuri, qui sounre le moins du froid, est même cultivé
avec succès à Malaga~; mais les fruits que l'on voit de temps en temps- à Cadix
viennent des des Canaries par des vaisseaux qui font le trajet en trois ou
quatre jours. En général, le Musa, connu de tous les peuples de la zone
torride, et que jusqu'ici on n'a trouvé nulle part à l'état sauvage, varie dans
ses fruits, comme nos pommiers et nos poiriers. Ces variétés~, que la plupart
des naturalistes confondent, quoiqu'elles exigent un climat très-diSerent, sont
devenues constantes par une longue culture.
Nous fîmes le soir une herborisation vers le fort de PasSo -Alto, le long des
rochers basaltiques qui ferment le promontoire de Naga. Nous fumes très-peu
contens de notre récolte; car la sécheresse et la poussière avoient pour ainsi
Borda, Yoyage de &t jHb~ T. p. 86. Fiera, .KMcMt AH<MttfM~ T. 0, p. '34; B<My de
&Kn<Mcen~Essai sur <M MM ~br<tt)t~M, p. 23o; ~.e~nf, ~'o~!ge mM «« de KMn~ e< t de J"<
9.
torico, T. t, p. 3~ Milbert, ~<yage ~«to~jjfHe d M!e-<&Wmce., T. t, p. ~o~e <b~M<t~<n<y,
T.ï,p.7~.
La température moyenne de cette ville n'est que de t8°.
~VccK.<p., T. n, p. 36a.
dire détruit la végëtatien. Le CacaHa K~e'nia., !'J~p]h<H~!& canartensis }et
plusieurs autres ptantes grasses ~ui tirent leur npurri~r~ ptot~t de t'air que
du sol sur taquet eMes AOnt Axées, nous jKtppettMent par Heur port que ce
groupe d'nes appartient à t'ique, et même à !a partie la plus aride
dececontinent. ~?'~
Quoique le: capitaine de la Corvette eût ordre de s'arrêter assez long-
temps à TénériBe, pour que nous pussions monter a la cime du Pic, si
toutefois les neiges !e permettoient, on nous avertit, à cause du btocus
des vaisseaux anglois de ne pas compter sur un délai de plus de quatre à
cinq jours. Nous nous hâtâmes par conséquent de partir pour Je port de
rOrotava, qui est situé sur la pente occidentale du Voican, et dans,lequel
nous devions trouver des guides. Je ne pus découvrir personne, à Sainte-Croix,
qui eût gravi le Pic: je n'en fus pas surpris. Les objets les plus curieux nous
intéressent d'autant moins qu'ils sont ptus rapproches de nous, et j'ai connu
des habitans de !a ville de Schafbouse, en Suissëy ~ui~ n'avoient jamais vu
de près la chute du Rhin.
Le 20 juin, avant le lever dm sote!~ nous nous numes en route pour
monter à ta ViMa de la Laguna, élevée de 35o toises au-dessus du port de
Sainte-Croix.~ous ne pûmes vérifier cette détermination de hauteur; car le
ressac de la mer ne nous avoit pas permis de retourner, pendant la nuit, à notre
bord, pour chercher les baromètres et la boussole d'inclinaison. Comme nous
prévoyions que notre voyage au Pic seroit très-précipité, nous nous consolâmes
facilement de ne pas exposer des instrumens qui dévoient nous servir dans des
contrées moins connues des Européens. Le chemin par tequet on monteà la Laguna
est sur la droited'un torrent ou &o~W!co qui, dans ta saison des pluies
forme de belles cascades: il est étroit et tortueux. On m'a .assuré, depuis
mon retour, que M. de Pertasca est parvenu à faire tracer une nouvelle
route sur laquelle peuvent rouler des voitures. Près de la ville nous rencon-
tràmes des chameaux blancs qui paroissoient très-peu chargés. L'emploi
principal de ces animaux est de porter des marchandises de la douane
aux magasins des négocians. On les charge,ordinairement de deux caisses
de sucre de la, Havane, qui pèsent ensemble goo livres mais
on peut
augmenter cette charge jusqu'à t3 quintaux où 5s arrobes de Castille.. Les
chameaux ne sont guère communs à Ténériffe; tandis qu'ils existent
par
Cette ~Tatuation n'est qa'approximaUve.Voyez la note a ta Cm <ht troisième chap:tre.
mHtiërs dans les deux nés de Lancerote~et de Fortaventure. Ces denueres;
plus rapprochées de rAtrique, ont aussi un climat et une végétation plus
analogue celle deee continent. !1 est bientextraordinaiMqNe cet animal
utile, qui se propage dans l'Aïaérique métidionale, ne le fasse presqaejamais
à TénériSe. Seulement dans le district fertile d'Adexe,ou[Ies plantations de
la canne à sucre sont les plus considérables', on a vu les chameaux se
multiplier quelquefois. Ces bêtes de somme, de mente que les chevaux, ont
été Introduites aux i!es Canaries, au quinzième siècle, par les conquérans
normands. Les Guanchesnelesconnoissolentpas, et ce'fait paroît s'expliquer
très-bien par la dHncalté qu'oûre le transport d'un animal de si forte taille
dans de frêles' canots~ sans qu'on ait besoin de regarder les Guanches comme
un reste des peuples de l'Atlantide, et comme de race différente de celle
des Africains occidentaux;
La colline sur laquelle est placée la ville de San Christobal de la, Laguna
appartient à ce système de montagnes de basalte qui, indépendantes du
système de roches volcaniques moins anciennes, forment une large ceinture
autour du Pic de Ténériffe. Le basalte sur lequel nous marchions étoit d'un
brun noirâtre, compacte, à demi-dëcomposë, et exhalantausoufne une odeur
argileuse. Nous y reconnûmes de l'amphibole, de l'olivine' et des nyroxènes~ 3
translucides, à cassure parfaitement lamelleuse, d'un vert olive peu ~oncé
et souvent cristallisé en prismes à six faces. La première de ces substances
est extrêmement rare à Ténériffe; je ne l'ai jamais trouvée dans les !aves du
Vésuve: ceHes de l'Etna seul~slaf contiennent abondamment. Malgré le grand
nombre de blocs que nous nous arrêtâmes à casser, au grand ennui de
nos guides, nous ne pûmes découvrir ni népheline, ni leucite*, ni feldspath.
Celui-ci, qui est si commun dans les laves basaltiques de Me d'tschia, ne
commence à paroître à TénériSe que lorsqu'on s'approche du volcan même.
La roche de la Laguaa n'est pas colonnaire, mais divisée en bancs de peu
d'épaisseur, et inclinés à l'est sous un angle de 3o à ~o degrés. NuHe part
elle n'offre l'aspect d'un courant de laves sorti des flancs du Pic. Si le volcan
actuel a donné naissance à ces basaltes, il faut supposer que, semblables aux

Elles ne produisent cependant aujourd'hui pas aa delà de 3oo qnintaM de sacre tert< par an.
Fendot grannKfornte, Haoy.
Augit, Werner.
Amph'g~ne, Haay.
substances qui composent la Soinma, adosse au Vésnve, ~s sont l'eCet d'un
épaBehemmt sous-marin dans lequel la masse liquide a iormé de yéritable&
couches. Quelques Euphorbes arborescentes, le Cacalia IHeiaïa et des raquettes
( Cactus ), qui sont devenues sauvagesaux Ses Canaries, comme dans t'Enrope
australe et dans tout le continent de l'An'ique, sont les seuls végétaux que
l'on observe sur ces rochers arides. Nos mulets glissoient à chaque instant sur
des lits de pierre fortement inclinés. Nous reconnûmes cependant les restes
d'un ancien pavé. Dans ces colonies on découvre à chaque pas quelques traces
de l'activité que la nation espagnole a déployée au seizième siècle.
A mesure que nous approchâmes de la Laguna nous sentîmes la température
de l'atmosphère s'abaisser graduellement. Cette sensation est d'autant plus
douce que rair de Sainte Croix est très-suSbcant. Comme nos organes sont
plus affectés par les impressions désagréables, le changement de température
devient encore plus sensible quand on retourne de la Laguna au port on
croit alors approcher de l'ouverture d'une fournaise. On éprouve la même
chose lorsque, sur les côtes de: Caracas, on descend de la montagne d'Avila
au port de la Guayra. Selon la loi du décroissemcnt du calorique, trois cent
cinquante toises de hauteur ne produisent, sous cette latitude, que trois à
quatre degrés de différence de température. La chaleur, qui accable le voyageur
en entrant à Sainte Croix de Ténériffe où à la Guayra, doit par consé-
quent être attribuée à la réverbération des rochers auxquels ces villes sont
adossées.
C'est la fraMtCur perpétuelle que l'on trouve à la Laguna qui la fait
regarder, aux Canaries, comme un séjour délicieux. Située dans une petite
plaine, environnée de jardins, dominée par une colline qui est couronnée
d'un bois de lauriers, de myrthes et d'arbousiers, la capitale de Ténériffe a
en effet une exposition des plus riantes. On se tromperoit si, d'après le récit
de quelques voyageurs, on la croyoit placée au bord d'un lac. Les eaux de
pluie y forment de temps en temps un marais étendu; et le géologue qui
voit partout plutôt l'état passé que l'état présent de la nature, ne peut
douter que toute la plaine ne soit un grand bassin desséché. La Laguna,
déchue de son opulence, depuis que les éruptions latérales du volcan ont
détruit le port de Garachico, et que Sainte-Croix est devenue le centre du
commerce de ces îles, ne compte plus que gooo habitans, parmi lesquels il y a
près de 4~0 moines répartis en six couvens. Quelques voyageurs ont assuré que
la moitié de la population portoit le froc. La ville est entourée d'un grand
nombre de moulins à vent, qui annoncent la culture <!u Jfroment dans ce~
contrées élevées. J'observerai à cette occasion quelestgramiaées céréales étoient
connues des Guanches. Ils appeloïent le blé, à Ténénfïe, t~o~ à Lancerote,
tr~j~ l'orge, à l'Me Canane, portoit le nom d'~MtMo~noyMc et a Lanccrote
celui de ~~o~n. La farine d'orge torré6é(g~o) et le lait de chèvre
étoient la nourriture. principale de ce peuple, sur l'origine duquel, on a fait
tant de rêves systématiques. Ces alimens indiquent assez que les Guanches,
~tenoient aux peuples de l'ancien continent, peut-être même à ceux de la
race du Caucase, et non, comme le reste des Atlantes aux habitans du.
nouveau monde; ces derniers, avant l'arrivée des Européens, ne connoissoient
ni céréales, ni lait, ni fromage,
Un grand nombre de chapelles, que les Espagnols nomment ennitas,
entourent la ville de la Laguna. Ombragées par des arbres toujours verts,et
placées sur de petites eminenees, ces chapelles ajoutent ici, comme partout,
à l'effet pittoresque du paysage. L'intérieur de la ville ne répond pas à son
extérieur. Les maisons sont d'une con'.trn''t!nn soHde, ma!& très-antique, et
les rues paroissent désortes. Un botaniste ne doit pas se plaindre de cette.
vétusté des édinces. Les toits et les murs sont couverts du Sempervivum
canariense et de cet élégant Trichomanes dont tous les voyageurs ont parlé
des brouillards fréquens alimentent ces végétaux.
M. Anderson, le naturaliste de la troisième expédition du capitaine Cook,
conseille aux médecins de l'Europe d'envoyer leurs malades à Hie de TénérICe,
non sans doute par les motifs qui'font préférer à quelques gens de l'art les
eaux thermales les plus éloignées, mais à cause de, l'extrême douceur et de
l'égalité du climat des Canaries. Le sol del ces Mes s'élève en amphithéâtre, et
présente à la fois, comme le Pérou et le. Mexique, quoique sur une petite
échelle, tous les climats, depuis les chaleurs de l'Afrique jusqu'au froid des
hautes Alpes. Sainte-Croix, le port de l'Orotava, la ville du. même nom et
celle de la 'Laguna, offrent.quatre endroits dont les températures moyennes
forment une série décroissante. Dans l'Europe australe, le, changement des~
saisons est encore trop sensible pour qu'elle puisse présenter les mêmes avantages.,
Ténériffe, au contraire, située pour ainsi dire à l'entrée des Tropiques,quoiqu à

Sans entrer ici dans aucune discussion sur l'existence de t'AtIamtide, je rappellerai t'opinton de
Diodore de SIctte, d'après lequel les Atlantes ignoroient l'usage des. céréales, parce qu'ils avoient été
séparés du reste du genre humain avant que ces graminéM fassent cutttv4et, JU<o~. ~c~ T. Hf~
pag. Wessei. i3n.
peu de journées de navigation de t'Espagne, participe aux beautés que la
nature a prodiguées dans les régions équinoxiales. La végétation y développe
déjà quelques-unes de ses formes les plas belles et les plus imposantes, cènes
des bananiers et des palmiers. L'homme sensible aux beautés de la nature
trouve, dans cetteue délicieuse, des remèdes encore plus puissans que le climat.
Aucunséjournemep~ro~tplus propre à dissiper la mélancolie, et à rendre
la paix à une âme douloureusement agitée, que celui de TénériSe et de
Madère. Ces avantages ne sont pas uniquement l'effet de la beauté du site et
de la pureté de l'air; Us sont dus surtout à l'absence de l'esclavage, dont l'aspect
est si révoltant aux Indes et partout où les Colons européens ont porté ce
qu'ils appellent leurs lumières et leur industrie.
En hiver, le climat de la Laguna est extrêmement brumeux, et les habitans
se plaignent souvent du froid. On n'y a cependant jamais vu tomber de la
neige, ce qui pourroit faire croire que la température moyenne de cette
ville doit être au-dessus de ï8",y (ï5" R.), c'est-à-dire qu'elle excède
encore celle de Naples je ne donne pas cette conclusion comme rigou-
reuse car, en hiver, le refroidissement des nuages ne dépend pas autant de
la température moyenne de l'année entière que de la diminution instantanée
de chaleur à laquelle un district est exposé par sa situation locale. La tempé-
rature moyenne de la capitale du Mexique, par exemple, n'est que de t6°8
( t3°,5 R. ) cependant en cent ans on n'y a vu tomber de la neige
qu'une seule fois, tandis que, dans l'Europe australe et en Afrique, il neige
encore dans des endroits dont la température moyenne est au delà de
!<) degrés.
C'est le voisinage de la, mer qui rend la Laguna plus tempérée
en hiver
qu'elle ne dcvroit l'être, à cause de son élévation au-dessus du'niveau de
l'Océan. J'ai même été étonné d'apprendre que M. Broussonet a planté,
au milieu
de cette ville, dans le jardin du marquis de Nava, des arbres à pin (Artocarpus
incisa et des canneUiers ( Laurus Cinnamomum ). Ces productions précieuses de
la mer duSud et des Grandes-Indes s'y sont acclimatées aussi bien qu'à l'Orotava.
Cet essai ne prouveroit-il pas que l'arbre à pin pourroit végéter
en Calabre
en Sicile et en Grenade? La culture du caffier n'a pas également réussi à la
Laguna, quoique ses~nuits mûrissentàTegueste,comme entre le port de l'Orotava
et le village de Saint-Jean de la Rambla. Il est probable que quelques circonstances
locales, peut-être la nature du sol et les vents qui soufflent lors de la floraison,
sont la cause de ce phénomène. Dans d'autres régions, par exemple aux
environs de Naples, le cai&er produit assez-abondamment,quoique ïa température
,moyenne s'élève à peine au-dessus de ï 8 degrés centigrades.
Personne n'a déterminé/aMte de Ténérine, ta moindrehauteur a laque!!e
on voit tomber annuellementde !a neige. Cette détermination, facile à exécutée
par des mesures barométriques, a été en générât négligée jusqu'Ici sous tOMtcs
les zones; etie est cependant d'un. grand intérêt pour t'agricntture des colonies
et pour la météorologie, et tout aussi Importante que la mesure de la limite
inférieure à taquelte se maintiennent les neiges perpétuelles. Mes observations
m'ont fourni les données que je vais réunir dans le tableau suivant:

MomomE HACMCtt HMtTE DIMEBK~CB ~EMPiBATOBB


t-AT'tTCD~ taqMeUe iitHneure de) ntijjM des deux eotennet
iltombedelaneige. per~ëtueites. precedcotta, MOYM~E,
BOREALE.
en toises. en ottr* en toitet. en mètres. tm toi*M. en mètres. tet)ti6'- R<n)tr.
o" ao4o ~976 a't6o 4794 4ao St8 a~" 2t°,6G

ao" t55o 3oao a36o 4598 8to ~78 a4°,5 ~6


~I

40° o o tMo 3ooi t54o 3oot t7° t3°,6!

Cette table ne présente que l'état moyen de lu nature, c'est-à-dire les


phénomènes têts qu'on les observe "annuellement. 11 existe des exceptions
fondées sur des localités particulières. Ainsi, il neige quelquefois, quoique
très-rarement, à Naples, à Lisbonne et même à Malaga, par conséquent jusqu au
3~ degré de latitude; et, comjme nous venons de l'observer, on a vu tomber
de la neige à Mexico, ville dont l'élévation au-dessus du niveau de la mer
est de !i~3 toises. Ce phénomène, qui ne sétolt pas présenté depuis plusieurs
siècles, eut lieu le jour de l'expulsion des Jésuites, et fut naturellement
attribué par le peuple à cet acte de rigueur. Une exception plus frappante
encore nous a été offerte pour le climat de Valladolid, capitale de la province
de Méchoacan. D'après mes mesures, la hauteur de cette ville, située par
les ig" de latitude, n'est que de mille toises; et cependant peu d'années
avant notre arrivée à la Nouvelle-Espagne, les rues y ont été couvertes de
neige pendant quelques heures.
On en a vu tomber aussi à TénérIBe dans un terrain situé au-dessus de
l'Esperanza de la Laguna, tout près de la ville de
ce nom, dont les jardins
~textf~o~naife~
trè&~s.~r~~rboreâ.t~~
fenfermsatt'arbMa p:n~e
par des gens
nesounrirentpas de ~të neigea =

Bans les pays chauds, j~p~ est


en est
ptein aiy. Cette obseipvatioh intéressante pour la physiologie végétale.

qn'it
moins nuisible, pourvuJ'ai soit de cotïrte durée. vn <cuttiver, à t'ite de
Cuba,te Bananier dans des sites on te thermomètre descend à centésimaux, y
et quelquefois très près du point de ta congélation. En Italie et en
Espagne, !es orangers et les dattiers ne périssent pas, quoique le froid
pendant la nuit soit de deux degrés au-dessous d~ zéro. En générât, les
cultivateurs observent que les arbres qui croissent dans un sot fertile sont
moins délicats, et par conséquent moins sensibles a de grands abaissemens de
température, que ceux qui végètent dans un terrain duquel ils ne peuvent
tirer que peu de sucs nourriciers*.
Pour passer de la vitte de h~ Laguna au port de t'Orotava et à la côte
on traverse d'abord
occidentale de TénéïjSe, une région montueuse couverte
d'un terreau noir et argileux, dans lequel on trouve quelques petits cristaux de
pyroxene. Les eaux détachent vraisemb)ab!ementces cristaux des rochers voisins,
comme à Frascati près de Borne. Malheureusement des couches de terres ferrugi-
neuses dérobent le sol aux recherches du géologue. Ce n'est que dans quelques
ravins que l'on découvre des basaltes coibnnairesun peu courbés, et au-dessus d'eux
des brèchestrès-récentes et analogues aux tufs volcaniques. Ces brèches enchâssent
<tcs fragmens du même basalte qu'ettes recouvrent, et, à ce que l'on
assure,
on y observe des pétrifications pélagiques te m~rne phénomène se répète
dans!e Vicentin, près de Montechio-Maggiore.
En descendant dans la va)!ée de Tacoronte on entre dans ce pays délicieux,
dont les voyageurs de toutes les nations ont parte avec enthousiasme. Jai
trouvé, sous la zone torride, des sites ou ta nature est plus majestueuse, plus
riche dans te développement des formes organiques; mais après avoir parcouru

Ce bd arbomiet,MpporM par M. Broussonet, est bien 3HMrent de t'Arbutus !aoriM!t avec lequel
il a été confonttn, et qui appartient à la Flore de t'Ameritjue septentrionate
'Les MAners, cn!ttT<~ dans les terrains maigres et saMonneM des pays limitrophes de ta mer
Baltique, offrent des exemptes de cette foiMesse d'p~gantmtion. Les gelées tardires tenr font beaucoup
plus de mat qu'aux mAners du Piémont. En Itatie, un Ë-old de~° au-dessous du pom~ de coneétation
ne fait pas périr des orangers robustes. Selon M. Ga~MM, ces arbres, moms déUeats que les limons
ette!tcMrats,neg!Bntqe'a–to°centésimaux.
les rives de l'Orénoqne, les Cordillères du Pérou et les belles va!!ée& du
Mexique, j'avoue n'avoir vu nulle' part un tableau plus varié, plus attrayant,
plu~ harmonieux par la distribution des masses de verdure et de rochers. `
Le bord de la mer est orné de dattiers et de cocotiers. Plus haut, des
groupes de Musa contrastent avec les dragoniers, dont on a justement comparé
le tronc au corps d'un serpent. Les coteaux sont cultives en vignes qui
étendentleurs sarmens sur des treillages très-élevés. Des orangers, chargés de fleurs~
des myrthes et des cyprès entourent les chapelles que la dévotion a élevées sur
des collines isolées. Partout les propriétés sont séparées par des clôtures formées
d'Agave et de Cactus. Une Innnmbrable quantité de plantes cryptogames,
e
surtout de fougères, tapissent les murs, humectés par de petites sources d'une
eau limpide. En hiver, tandis que le volcan est couvert de neige et de glace f
on jouit dans ce canton d'un printemps continué!. En été, au déclin du jour,
les vents de mer y répandent une douce fraîcheur. La population de cette
côte est très-considérable; e!!e paro~t l'être encore davantage, parce que les
maisons et les jardins sont~ éloignés les uns des autres, ce qui augmente la
beauté du site. Malheureusement le bien-être des habitans ne répond ni aux
eBbrfs de leur industrie, ni aux avantages dont la
nature a comblé ce canton.
Les cultivateurs ne sont généralement pas propriétaires le fruit de leur travail
appartient à la noblesse, et ces mêmes institutions féodales qui, pendant
long-temps, ont, répandu la misère sur toute l'Europe, entravent encore le
bonheur du peuple dans les îles Canaries.
Depuis Tegueste et Tacoronte jusqu'au village de San Juan de la Rambla,
qui est célèbre par son excellent vin de Malvoisie, la côte est cultivée comme
un jardin. Je la comparerois aux environs de Capoue ou de Valence, si la
partie occidentale de Ténériffe n'étoit infiniment plus belle à cause de la
proximité du Pic qui offre à chaque pas des points de vue nouveaux. L'aspect
de cette montagne n'intéresse pas seulement par sa masse imposante il occupe
vivement la pensée en la faisant remonter à la source mystérieuse de l'action
volcanique. Depuis des milliers d'années, aucune flamme, aucune lueur n'ont
été aperçues au sommet du Piton, et cependant d'énormes éruptions latérales,
dont la dernière a eu lieu en ï~p8, prouvent l'activité d'un feu qui est loin
de s'éteindre. Il y a d'ailleurs quelque chose d'attristant dans la vu& d'un cratère
placé au centre d'un pays fertile et bien cultivé. L'histoire du globe nous apprend
que les volcans détruisent ce qu'ils ont créé dans un long espace de siècles. Des
îles, que l'action des feux sous-marins a fait paroître au-dessus des flots,
se
paMnt peu & et riante ve~ure; mais soitV~Btces terres nouvelles
peu d'utK! riche
sont dédMrées par l'action des mentes forces qui ont Mulevé le ;:fond de
~céan~ Peut-être des flots, qui n'onrent aujourd'hui que des marnas de scories
et de cendres volcaniques, ont été jadis aussi fertiles que les coteaux de
Tacoronte et du SauzaL Heureux les pays ou l'homme n'a pas à se défier du
sol qu'il habite!
En suivant notre route au port de l'Orotava, nous passâmes par les jolis
hameaux de Matanza et de Victoria. Ces noms se trouvent réunis dans
toutes les colonies espagnoles; ils contrastent désagréablement avec les sen-
timens de paix et de calme qu'inspirent ces contrées. Matanza signifie
~OMcAe~e ou <M~?Mg~ et le mot seul rappelle à quel prix la victoire a été
achetée. Dans le nouveau monde, il indique généralement la défaite des
indigènes; à TénérISe, le village de Matanza à été fondé dans un lieu 1
où les Espagnols furent vaincus par ces mêmes Guanches que, bientôt après,
on vendit comme esclaves dans les marchés de l'Europe.
Avant d'atteindre l'Orotava, nous nous rendîmes au jardin de botanique
situé à une petite distance du port. Nous y trouvâmes M. Legros, vice-consul
François, qui avoit visité souvent le sommet du Pic et qui fut pour nous un
guide très-précieux. Il avoit suivi le capitaine Baudin dans une expédition aux
Antilles, qui a beaucoup contribué à enrichir le jardin des Plantes à Paris.
Une horrible tempête, dont M. Le Dru a donne des détails dans la relation
de son voyage à Portorico, força le bâtiment de relâcher à TénériNe la beauté
du climat de cette île engagea M. Le Gros de s'y établir. C'est lui qui a
fourni aux savans de 1 Europe les premières notions exactes sur la grande
éruption iatérate du Pic, que l'on a nommée très-improprement l'explosion
du volcan de Chahorra.2.
L'établissement d'un jardin de botanique à Ténériffe est une conception
extrêmement heureuse à cause de la double influence que ce jardin peut exercer
sur tes progrès de la botanique et sur l'Introduction de végétaux utiles en
Europe. La première idée en est due au marquis de Nava 3, dont le nom
mérite d'être placé à côté de celui de M. Poivre, et qui, guidé constamment
par l'amour du bien, a fait un noble emploi de sa fortune. C'est avec des

L'ancien Acantejo.
Le 8 juin t~gS.
Marqnis de VtHanoeva del Prado.
<&~4s <M(a~eaae< qu'il est ipar~en~ A a~~Maf ja tO~Hae du thuaMO, qu*.
8'~lèM an amphitMâtre et jaA tm ~tamttt&ms omt jEommencée«n t
? <de Na~a.a p<N~~eie6 <~n~pac~ doucew~ tdmMft et
ph~p~
par leur poeitton g~oaphiqae, ~tÏ~ient ï'end~ ie
~o>Kr
accttmatier jes pMdn~I<)M~ deux ïades, et
pour MfVtr ~'aatfepôt aux
végétaux qui doivent s'accoutumer graduellement à tatempératat'e ptos froide
de l'Euro~ a~stfale. Em effet, les plantes de t'Asie, <:eMe6~ l'~nque <? de
l'Amérique méndioBaie pemveMt amiver ~tci!emeMt au cardia de l'On~ava;
et, pour !tatMdu)re rarbre duQuinqmaa' iea SIcMe, en Ptutugaï <Mt<n'GreBade,
il faudroit le planter d'abord auDmirasao au à !a Laguaa, ~et transporter
ensuite ea Euro~ tes tejetoas du Qutaqmaa des CanaNes. Daas des tempt
plus heureux, lorsque les guerres ma<i<Mnes a'enttawe~oat plus les communica-
tions, Je jardin de TéaieriSe pouri'a arn~i devenir tres-atHe pour Ïe grand
nombre de plantes que l'on envoie des tndes en Ëatsope. Avant d'atteindre nos
côtes, elles périssent souvent à cause de la tongaeur d'une navigation pendant
laquelle elles nespirent am mr charge demonsal'Ée. Ces végétaux tfouveroient
à l'Orotawa les aoms et climat nëeessaires à'ieur eonservatioB. L'entretien
du jardin de bo~nique <Ievenant d'année en année phts coûteux, le marquis
de Nava l'a cède au gouveEneme~N~s y trouvâmes um jardinier instruit,
élève de M. ALtûa, directeur du pEdin ttoyai de &ew. Le terrain est
élevez en forme de, terrasses et anrose par une s~HM~ natuï'etIe.On y jouit
de la vue de l'ue de Palma, qui s'élève comme un château au milieu
de. l'Océan. Nous trouvantes cet établissement peu riche en plantes on
avoit suppléé aux gBm-es qui manqatMent, par des étiquettes dont les noms
sembloient pris au hasard dans le ~tc/Mc ~cgc~M<M~ de Linné. Cette
distribution des végétaux, d'après les classes du système sexué!, que l'on
retrouve jnalheureusemeRt aussi dans plusieurs jardins de l~urope, est très-
contraire à la culture. Au Duraano, des Prêtées, le Goyavier, le Jambosier,
la Chirimoya du Péron des Mimoses :et des Hëlicoma végètent en

Je parle des espèces de Quinquina qui, au Pérou et dans le royaume de la Nouvelle-Grenade,


végètent sur le dos des GordUHres, etttre tooo et tScotobes de hauteur dans !es eudro!M ou le
thermomètre se soutient le jour entre 9 et to degrés, et la nuit entre et 4 degrés. Le QuÎMquinaL
orangé ( Cinchona lancifolia ) est beaucoup moins déUcat que te Quinquina rouge ( C. ohlonmfoua ).
~'M le Mémoire sur les forêts de Quinquina, que j'ai publié en t6oy, dans le .Mi~<MM <~ A~<KrA<t<M~
B. 7,p.n8.
~n~ona Cherimolia, Lamarck.
~t~de~I~EM~
pl'e~us!~.1'1"~iltfQtès'des.eti.t.W'U~c:e,8
Mt~mpamB~ -ca!tiv~a~
s~tes;de~M~'t~~ ,¡,
sus~e~q~d~~
'Nous~ar~v~~s~s~ ,'1'"
~r
k

une rade dans taquëlte les bàl~ïnens sont obt~s de mettre ~ja voile! Im~qae
le vent saWCleaivec violence du Bord~ouiest. est impossible de parler de
1 Orotava, sans rappeler aux ami~ des sciences le nom de ]? Cologam doat
la maison, de tout temps, été ouverte aux voyag~Bts de toutes les nations.
PlusiemS membres de cette tamuif! respectable ont été etevës & Londres et à
Paris. Don<BetBafdo C<!t~an )0tnt a des coBBOMsmBessolides et vanëes
te z&te le ptoa ardeM pou!' te bteo de sa patrie. Om est a~ëaMemeat surpris
de tfo~er, dans un gpQUped'ttess~ta~es près des eiâtes de' fABn~e, cette
amaMitë ~oetate, ce goût pour t'instruction~ ce seQtmteÏM; des arts qa'on
croit app&pteotrexelustvemeBt à âne -petite partie de t Europe.
Nous aurions désiré pouvoir ~ouraer quelque temps ~tans ta maison de
M. Cotogan, visiter avec tui, près de l'Or&tava, les sites délicieux de
et~
San Juan de la Rambla et de Riatexo de Abaxo J~ais dans un voyage comme
celui que je venois d'entfepreBdre, on jouit peu du présent. Tourmente
sans cesse de ta crainte de ne pas exécuter les projets du tendemam, on vit
dans une iaquietude perp4tueUe, Les personnes qui aiment passionnément
la nature et tes arts, éprouvent ces mêmes sensations en parcourant la
Suisse ou t'ttatie. Ne pouvant voir qu'une petite partie des objets qui les
attirent, ils sont troubles dans leurs jouissances par les privations qu'ils
s'imposent à chaque pas.
Le 3t juin au matin, nous étions déjà en route pour le sommet du
volcan. M. Le Gros, dont nous ne pouvons assez louer la petitesse prévenante,
M. Lalande, secrétaire du consulat françois à Sainte-Croix de TénériSe, et le
jardinier anglois du Dnrasno~~partagèreot -les ia~~ues de cette excursion. La
journée n'étoit pas tres-beHe; et le sommet du Pic, qui est généralement visible
à 1 Orotava, depuis le lever du soleil jusqu à dix heures, étoit couvert de
chemin conduit
nuages épais. Un seul au volcan par la ~jNa <~e Ofoto.f~,

Puerto de la Cruz. Le seul beau port des îles Canaries est celui de Samt Sebastien, dans l'tte
dett Gomere.
Le dernier de ces deux villages est placé au pied de la haute montagne de Tymysa.
la y7<i<M~ JpJ Genets et le .M~c~estceM qu'ont suivi le përeF~~
Borda, M. Labittardière, Barrow, et tous les v~oyageurs qui n'ont pu séjounter~e
peu de temps à TénériSe. ïl en est de l'excursion au Pic comme de celles
qu'on fait communément dans la vallée de Chamonni~t àiacimè de l'Etna, o~
l'on est forcé de suivre ses guides partout on ne voit que ce qui déjà a été vu
et décrit par d'autres voyageurs.
Nous fumes agréablement surpris du contraste que la végétation de cette.
partie de TénérISe oSroit avec celle des environs de Sainte-Croix. Sous
l'influence d'un climat frais et humide, le sol y étoit couvert d'une belle verdure;
tandis que, sur le chemin de Sainte-Croix à la Laguna, les plantes, ne présentoient
que des capsules dont les graines étoient déjà tombées. Près du port de la
Cruz, la force de la végétation entrave tes 'recherches géologiques. Nous
passâmes au pi"d de deux petites collines qui s'élèvent en forme de cloche.
Des observations faites au Vésuve et en Auvergne font croire que ces

appelée la Montanita <


mamelonsdoivent leur origine à des éruptions latéralesdu grand volcan.'La colline
Pilla paron. en eSet avoir jeté jadis des laves; selon
les traditions des Guanches, cette éruption eut lieu en 143o. Le colonel Franqui
assura~ à Borda qu'on di~tinguoit encore l'endroit où les matières fondues
étoient sorties, et que les cendres qui couvroient le terrain voisin n'étoientpoint
encore productives Partout où la roche paroît au jour, nous découvrîmes
de l'amygdatoïde basaltique recouverte d'une argile endurcie qui enchâsse
des rapilli ou fragmens de pierre ponce. Cette dernière formation ressemble
au tud du Pausitippe et~aux couches de pouzzolane que j'ai trouvées dans
la vallée de Quito, au pied du volcan de Pichincha. L'amygdaloïde a des
pores très-alongés, comme les couches supérieures des laves du Vésuve. On
croit y reconnoitre faction d'un fluide éiastique qui a percé la matière en
fusion. Malgré ces analogies, je dois répéter ici que, dans toute la région basse du

tiré d'un manuscrit intéressant conMrTé anjoojpi'hut a Paris, an i~pi~ des Car<e< <&
Ce fait est
la Marine. H porte le titre de A~Mt<! des opérations de la compare de la BotMM& (em t776)~joour
déterminer positions ~t)g)-<w< des cdtes ~spa~ne et de Portugal sur l'Océan, d'une partie
des cd<ei oecMfen<a/M de /rt'yMe et-des ~M Canaries, par &«'Aef<<&er <<e Borda, C'est le manuscrit
dont parle M. de Fleurieu dans les notes qu't) a ajoutées au ~<y<~BdeJMar<:&~tM!,T. tï,n. tt, et
que
M. de Borda m'avoit déjà commnni<~éen partie avant mon départ. Comme j'en ai extMit de* observations
importantes, qui n'ont jamais ëté pubUees, )e le citerai dans cet ouvrage sous le titre du Manuscrit
du ~<)<.
B<tso!&ar<t~)- .M~m~/steta, cerner.
Btm~M-Ccn~merot,
Pic de Ténenê~ du c~te de l'Orotava~ je n~t reconnu~~ de laves,>1
aucun courant dont les limites MsseM bten trancR&s. Ëës to~~ et leaf
Inonda!tMns changent 'Id surface du globe; et lorsqn'nh grand nombre de
coulées de laves se réunissent et s'épanchent dans une pla!ne~ comme je l'ai
vu au Vésuve, dans T~t~o ~<M ~M!~ eltes semblent se confbndrë les
unes avec les autres, et prennent ~apparence de véritables couches.
La de Orotava S'annonce agréablement de loin, par la grande
abondance des eaux qui en traversent les rues principales. La source d'~g~M!
mansa recueillie en deux bassins spacieux sert à mettre en mouvement
plusieurs moulins, et est distribuée ensuite aux vignobles des coteaux voisins.
On jouit à la ~Y~ d'un climat encore plus frais qu'au port de La Gruz,@,
la- brise y soufrant avec force depuis dix heures du matin. L'eau qui a été
dissoute dans l'air, à une température plus élevée, se précipite fréquemment
et rend le climat très-brumeux. La Villa est à peu près élevée de 160 toises
(312.") au-dessus de la surface de l'Océan, par conséquent deux cents toises de
moins que le sol sur lequel est construite la Laguna; aussi observe-t-on que
les mêmes espèces de plantes fleurissent un mois plus tard dans ce dernier
endroit.
L'Orotava, l'ancien Taoro des Guanches, est placée sur la pente très-rapide
d'une colline les rues nous ont paru très-désertes; les maisons, solidement cons-
truites, mais d'un aspect lugubre, appartiennentpresque toutes à une noblesse que
l'on accuse de beaucoup d'orgueil, et qui se désigne elle-même sous le nom fastueux
de Jo~c casas. Nous longeâmes un aquéduc très-élève et tapissé d'une infinité de
belles fougères. Nous visitâmes plusieurs jardins dans lesquels les arbres fruitiers
de l'Europe septentrionale sont mêlés aux Orangers, aux Grenadiers et aux
Dattiers. On nous a assuré que ces derniers portent tout aussi peu de fruits
ici qu'a la Terre-Ferme, sur les côtes de Cumana. Quoique nous connussions,
par le récit de tant de voyageurs, le Dragonnier du jardin de M. Franqui,
nous n'en fûmes pas moins frappés de son énorme grosseur. On assure que
le tronc de cet arbre, dont il est question dans plusieurs documens très-
anciens', comme désignant les limites d'un champ étoit déjà aussi monstrueux
au quinzième siècle, qu'il l'est aujourd'hui. Sa hauteur nous parut de 5o à
60 pieds; sa circonférence près des racines est de ~5 pieds. Nous n'avons pas
pu mesurer plus haut; mais Sir Georges Staunton a trouvé que, 10 pieds
au-dessus du sol, le diamètre du tronc est encore de ï2 pieds anglois, ce
qui s'accorde bien avec l'assertion de Borda, qui trouva la grosseur moyenne
de 33 pieds 8 pouces. Le tronc se divise en un grand nombre de brancher
qui s'élèvent en forme de candélabre, et qui sont terminées par des bouquets
de feuilles, comme dans le Yucca qui orne la vallée de Mexico. C'est <!ette
division qui lui donne un port bien diSerent de celui des Palmiers
Parmi les êtres organisés~ cet arbre est sans doute avec l'Adansonia on
Baobab du Sénégal un deSthabitans les plus anciens dé notre globe. Les Baobabs
excèdent cependant encore la grosseur du Dragonnier de la Villa dO~ptava. O~t
en connott qui, près de la racine~ ont 34 pieds de diamètre, quoique leur hauteur
totale ne soit que de 5o à 60 pieds Mais il faut observer que les Adan-
sonia,. comme les Oehroma et tontes les plantes de la famille du Bombax,
croissent beaucoup plus rapidement que le Drajgonnier, dont la végétation
est très-tente. Celui du jardin de M. Fraaqui porte, encore tous les ans des
fleurs et des fruits. Son aspect rappelle vivement cette jeunesse étemelle 4
de la nature quiest. une source intarissable de mouvement et de vie.
Le Dracsena, que l'on n'observe que dans des endroits cultivés aux Mes
Canaries, à Madère et a Porto Santo, offre un phénomène curieux sous le
rapport de la migration des végétaux. M n'a point été trouvé dans l'état sauvage,
sur le continent de l'Afrique 5, -,et les Indes orientales sont sa véritable patrie.
J'ai donné, dans l'Atlas pittoresque qui accompagnecette relation ( Pl. 58), la figure du Dragonnier
de Franqui, d'après une esquisse faite en ) ~~6, par M., d'Ozonne, lors de t'expéditioH de MM. de
Borda et Varela.
Adanson est surpris que les Baobabs n'aient pas été citée par d'autres voyageurs. Je trouve, dans
le Recueil de Gryna'us, qu'Aloysio Cadamosto parle déjà du grand Age de ces arbres monstrueux qu'il vit
en t5o4, et dont il dit très-bien K~mMentM tt/tt~fefmM non ytMf&Mt nM~tt&K&tM. Cadam. Navig.,
cap. 4a. Au Sénégal et près de Praya, au~ îles du cap Verd MM. Adanson et &tanmtom ont obsen'~ des
Adansonia dont le tronc avoit 56 a~ 60 pieds de cit~conférence. ~'o~'c~x au ~n~ T. t, p. 54. tje
Boababde 34 pieds de diamètre a été vu par M. Golberry, dans la vaHée des deux Gagnac~. ~nMftMM
d'un Yoyage en Afi-iiue, T. II, p. 09.
Il en est de même des Platanes (Platanus occidentalis ) que, M. Michaux a mesurés à Marietta,
sur les bords de t'Obio, et qui, ao pieds au-dessus du sol, conservoient encore un diamètre de
t5~ pieds. (~o~tgBa ~oMe~ des jMoatf-~&~Aft~~ i8o4, p. ~3). Les ta~us~ tes cbatatgners, les
ebénes~ tes platanes, les cyprès chauves, les Bombax, tes Mimoses, les Ca*salpinia, tes Hymena'a et
les Dragonniers me paroissent tes végétaux qui, sous les <Mërens clintats, et&ent lés exemptes de
1 accroissementle plusextraordinaire. Un chêne, trouvé conjointement avec (tas casques gantois en t8og
dans tes tourbières de la Somme près du village d'Yseux a y lieues d'Abbeville, M le cède pas
en grosseur au Dragonnier de l'Orotava. Selon la nottce donnée par M. TrànUée, le tronc de
ce chêne avoit t4 pieds de diamètre.
4 ~rM<o<. de Longit. ~t<o'~ cap. 6 (éd. Casaab., p. 44i)).
M. Scuousboe, dans sa Flore de Maroc (~sMte ~'t<fentta)&e!tt!~)Str~~r,B. ~,p. 4, ne
l'indique pas seulement parmi tes plantes cultivées, tandis quil.fait mention du Cactus, de l'Agave et du
Yucca. La forme du Dragonnier se retrouve dans différentes espèces du genre Dracœna, au cap de
Par icpjtdte M<Me iceOi.ar~M a<t~ ~tra~à,ep~ gaèpe
catamw~Som ~~taaee~oN~te~ne'~oqt~a'eMl~as <*nMjM:hes
aat:<e<! <tM'ïMppO!"<s ta~c~'MtEe<peMpt~i<o)R<g~
'~Eni soetaNt de h'i~tOta)Mt~ t<nh ~er
~roit et p!et*reax MOM eoa*
dmsit,àtMwersMne~eMe~ta<
Mte:<pM .e~teanv~~tde.'b~~sMM~M.'de'tp~ tannets 'et.xte.tit
un <6te

brayère eR aAre. ~ie ?000 de ceMe~demiefe p!a«te attatat ici une <!paiMeur
extraordiaaiEe et les âeare dont eMe eftt~hargée pendant âne grande partie de
l'année, contrastent agreaMenMnt avec eeMes de l'tfypetienm canariense, qut
est ttès'fféqtteat à cette hauteur. Ncas Mas at~Êt&mee, ?OMf <at<-e moM'e
prov~SKta d'eao, s<Mt< mR beaa sapia isoté. CeMt station est eonaue <tans le
pays aeus te inomL du J~no <M ~e~vM~o.a haatem', d après ta mesure
barotnétnqae de M* die Borda *est de Saa toises. <0n y jouit d'une vue
mago~t6qa6) de ta mer et de toute la partie septentrionale de l'ile. Près du
Pino dcl Dornajito, un peu à droite du t~emin, ~aii!it une source assez
abondante; BONS y p~o~~geâ!ïMS un ~ermontètre <pn descendit a ï5<
A cent toises de dïstaBce de cette *sotH'ce il yen a tne autre également limpide.
Si l'on admet ~ue ces eaux iadiquent à peu près la chaleur anoyenne du
Heu où eMes se montrent, ~n trouve pour l'élévation absolne de la station,
Sao toises, en supposant la température moyenne de la côte de 21", et un

Bonne-Espérance, en CMne et à la NootreUB-Zétande mais <h!M le n<H'veaH <<M~Mtt j elle est remplacée par
la forme du Yucca; car Je DMe-cMa boteitH~ d'Alton ~st un ConfaHar~ dpnt il a aussi tout te port. Le
suc astringent, connu dans le commerce sous le nom de sang de Dragon, est, selon les recherches que nous
avons 6utes sur les lieux, le produit de ptaMeansv~getanx américains qui n'appartiennentpas au même
genre, et dont qae!qne<MMM sont des !iftnes.;M~ Laguna, on <abnqae, dans de«:0)M'ensde religieuses,
des cure-dents teiuts du sM dmDr~mnier, et doMonmotM a vanté l'usage comme tres-utJLte
pour ta
conservation des ~enciYjes.
Manuacritdu ~0<, <Mptt~te coAte~ p. t5. J'ai calculé les hauteurs que j'indiquedans le te~te, d'après
la formule de M. 'Laplace et Ieeoëmc:ent de M. Ramond. Dans le manuscrit, on trouve 5i6 toises,
d'après la formate ce !Muc. Il Be~aut~tas ~on~mdre'le ~'tH~<~ DenM~t~ca~ec la station du Pino de la
Afme'M& <!itee yar Kde~<et!e p~re FeuiUee, pt élevée de ~ptusde San toMes au-<dessus du niveau de
l'Océan, Çette dernière station se trouve entre C'oraf~tt et le .f'o~t~o. Voyez, sur l'ensemble de
ces mesures, la note ajoutée à la th du Journal de rott<e.
Pour prouver que ces suppositionsse fondent sur des observationsprécises, je rappeHerai ici que !a
température moyennedes régions basses de t'Me de Madère, qui est un peu au nord de TénérMfe, est de M'
et que mes observations,faites sous la zone torride, donnent, pour le décroissementdu calorique, 98 toises
par degré eentésitua!; tandis que les résultats reeueUMs par M. Ramond, sous la zone tempérée, par
les 45° de latitude, donnent 84 toises ïyapres<:ea extrêmes, il jcésuhe pour le Doma}ito,ou S48 toises
ou 4~0 toises. M. de Borda trouva, en '776, la température de l'air près de la source de ~° plus
degré de décroissement du calo~que <corfespondant~ï sous cette ZQne<, S
o3 toises. ïl~ne faudroit pas être surpris si cette source se maintenoit tm
peu au-dessous de la chaleur moyenne de l'air~ parce qu'elle se forme prob~
blement dans .un point pijus élevé du Pic, et qu'elle communique peut-étfe
même aux petits glaciers souterrains dont nous parlerons dans la suite.
L'accord que nous venons d'observer entra les mesures barométriques et
thermométriques est d'autant plus frappant qu'en générât, comme je l'ai
exposé ailleurs dans les pays montagneux, à pentes rapides, les sources
indiquent, un décroissement de calorique trop grand, parce qu'elles réunissent
de petits courans d'eau, qui s'infiltrent à différentes hauteurs, et que leur
température est par conséquent la moyenne entre les températures de
ces courans. "Les eaux du Dornajito sont célèbres dans le pays; ce sont
les seules que Ion connût à lépoque de mon voyage dans le chemin qui
conduit à la cime du volcan. La formation des sources exige une certaine
régularité dans la direction et l'inclinaison des couches. Sur un sol vol-
canique, les roches poreuses et fendillées absorbent !es eaux pluviales et
les conduisent à de grandes profondeurs. De là, cette aridité dans la plupart
des itesJCanaries, malgré la hauteur considérable de leurs montagnes et la
masse de nuages que les navigateurs voient sans cesse amoncelés au-dessus
de cet archipel.
Depuis le Pino du Dornajito jusqu'au cratère du volcan, on continue
de monter sans traverser une seule vallée; car les petits ravins ( &oyM/!Co~ )
ne méritent pas ce nom. ~Aux yeux du géologue, toute !'t!e de Ténériffe
n'est qu'une montagne dont la base presque elliptique est alongée vers
le nord-est, et dans laquelle on distingue plusieurs systèmes de roches vol-
caniques formées à des époques différentes. Ce que dans le pays on regarde
comme des volcans isolés, tels que CXaAornat oti Méntaiia CbZoFls<~ et &ï C~
ne sont que des monticules adossés au Pic et qui en masquent la forme
pyramidale. Le grand volcan, dont les éruptions latérales ont donné naissance
à de vastes promontoires, n'est cependant pas exactement au centre de l'ne,

froide qu'au port de l'Orotava, ce quI semble prouver que te décroissement que j'en supposé de
93 toises, n'est pas trop lent. Phil. T'tWM., Vol. XXXXVJI,p. 358. ~ta~MMM~ .M~nt. Sur la ~'br<!M<&
tcyom. p. t8g. r
O~r~. astr. Vol. I, p. )3a. C'est ainsi que dans tes Montagne* Bleue* de la JanMtq'M, M. Hunter
a trouvé les sources constamment plus froides qu'eUes ne devroient Mtfe d'après !t hautotrlaquelle-elle
Murdissent.
etsc~e paMÎBu!acité dé~t~~
~ap~s
qae, les observationsd'un mméralogistedistingue ce n'est peut-et
pas te petit ct~tère dtt ~iton qui a ~oaë le rôle prindpat dans les rév~utio)
qu'a éprouvées l'~e de'Bénéri~e.
A la région des bruyères Brborescenjtes, appelée J~nte~i
des fougères. Nulle part, sous la zone tempérée, je n'ai vti cette abondam
de Pteris, de Blechnum et d'AspIenIum cependant aucune de ces pentes n'a
port des fougères en arbre qui, à cinq- ou six cents toises de hauteur, foi
lentement principal des tbrets deTXmérique équinoxiale. La raeine du Pter
aquilina sert de'nourriture aux habitans de Pahna et de Gomera; ils la réduise)
en poudre, et ils y metent un peu de farine d'orge. Ce mélange grillé s'appel
gofio;,'i usage d un aliment si grossier annonce 1 extrême misère du bas-peup
dans les Mes -Canaries. 9<
Le Monte-Verde est entrecoupé par plusieurs petits ravins (c<~a<~M
très-arides. En sortant de la région des jtbugères on traverse un bois de genévrie
(c~~o) et de sapins qui a beaucoup souSert parla violence des ouragan
C'est dans cet endroit désigné par quelques voyageurssous le nom i de
Gï/'acc/o~ que M. Edens prétend avoir ~u de petitesuammes que, d'après
physique de son temps, il attribue des exhalaisons sulfureuses qui s'cnûan
ment d'eUea-'mêmes. Nous continuâmes de monter jusqu'à la Roche Je i
Gayta et au Portillo; c'est en traversant ce passage étroit entre deu
collines basaltiques, qu'on entre dans la grande \P~o~c des Genets 3. Lors c
l'expéditionde Lapérouse, M. Manneron avoit réussi à niveler le Pic, depuis ~e po
de l'Orotava jusqu'à cette plaine éievée de près de quatorze cents toises au-dessi
du niveau de la mer, mais le manque d'eau et la mauvaise votonté des guid<
l'empêchèrent de continuer le nivellement jusqu'à la cime du volcan. L
résultats de cette opération, qui a été terminée aux deux tiers, n'ont malhet
reusement pas été envoyés en Europe, et c'est un travail à recommenc<
depuis la côte.
Nous mfmes près de deux heures et demie à traverser la Plaine di
Genêts qui n'offre à la vue qu'une, immense mer de sable. Malgré l'élévatio

M. Cordier.
Le voyage se Ct an mois d'août t~S. Mt<. T~FM., Vol. XX!X, p. Sty. C<c-o6e&! est le no
d'une embarcation à voile latine. Les pins du Pic servoient jadis pour la mature des vaisseaux, et la mari)
royaJefaisoit ses coupes ( cortes de matent ) dans le Moate-Verde.
j~os Llanos del Retama.
de ce site,
site. le thermomètre centigrade s'élevoit à l'ombre, vers le coucher
centïerade s'etevott
du soleil, à !3°,8, c'est-à-dire à 3~ de plus que vers le .milieu du
}our dans le Monte-Verde. Cette augmentation'de chaleur ne pouvoit
être attribuée qu'à la réverbération du sol et à l'étendue du plateau. Nous
souffrimes beaucoup de ia poussière suffocante de pierre ponce, dans
laquelle nous étions sans cesse enveloppés. Au milieu de ce plateau s'élèvent
des tounes~ de Retama qui est le. Spartium nubigenum d'Alton. Cet
arbuste charmant, que M. de Martinière conseille d'introduire en Languedoc
où le combustible est rare, acquiert jusqu'à neuf pieds de hauteur il est
couvert de fleurs odoriférantes, dont les chasseurs de chèvres, que nous
rencontrâmes sur la route, avoient orné leurs chapeaux de paille. Les chèvres
du Pic, qui ont le poil d'un brun très-foncée sont regardées comme un
met déHcieux elles se nourrissent des feuilles du Spartium, et sont sauvages
dans ces déserts depuis un temps immémorial. On les a même transportées
à Madère où elles sont préférées aux chèvres venues d'Europe.
Jusqu'à ta Roche de la~Gayta, bu à l'entrée du vaste plateau des Genets,
le Pic de Ténériffe est couvert d'une belle végétation rien n'y porte le caractère
d'une destruction récente. On croiront gravir la pente d'un volcan dont le feu
est aussi anciennement éteint que celui du Monte-Cavo, près de Rome.
A peine arrive-t-on dans la plaine couverte de pierre ponce, que le paysage
change d'aspect; à chaque pas on rencontre d'immenses blocs d'obsidienne
lancés par le volcan. Tout y annonce une solitude profonde; quelques
chèvres et des lapins parcourent seuls ce plateau. La partie stérile du
Pic occupe plus de dix lieues carrées; et comme les régions inférieures
vues dans l'éloignement se rétrécissent Hte paroît un immense amas
de matières brûlées, autour duquel la végétation ne forme qu'une lisière
étroite.
En sortant de la région du Spartium nubigenum, nous, parvtnmes, par
des gorges resserrées et par de petits ravins que les torrèns bnt creusés très-
anciennement, d'abord à un plateau plus élevé (cZJMb~on de ?Y-~o), puis
à l'endroit où nous devions passer la nuit. Cette station, qui a plus de !&3o toises
d'élévation au dessus des côtes, porte le nom de la ~<ï/~e des ~ng~OM,
Estancia de los Ingleses sans doute parce que jadis les voyageurs
r

Un des botanistes qui ont pért dans t'expédition de l~apërous~.


Cette dénominationétoit déjinuitee au commencement du de)-nM!rs:ecte.M. Eden<,qni corrompt tous
x
anglois étoieat ceux~ qui visitoient lete ptus MqùeanneiNt le
ptus fréqùennneiNt ïè Pic. Deûx
rochers inclinés forment une sorte de caverne qui oSre abri contre te
vent. C'est jusqu'à ce point, de~à plus élevé que te commet du Ganigoo,
que l'on peut monter & dos de mulets; aussi beaucoup de curieux qui
en partant de l'Orotava, ~voient cru parvenic jasqu'an botd du cratère,
s'arrêtent-ils à cet endroit. Quoique an ~rt dé l'été et sous le beau ciel~dé
l'Afrique, nous sonm'fmes du froid pendant la nuit. Le thermomètre baissa
jusqu'à 5". Nos guides firent un grand feu avec des branches sèches de
Retama. Dépourvus de tente et de manteaux, nous nous étendîmes sur un
amas de roches brûlées, et nous fumes singulièrement incommodés par la
flamme et la fumée que le vent chassoit sans cesse vers nous. Nous avions
essayé d'établir une sorte de paravent avec des draps liés ensemble
mais le feu prit à cette clôture, et nous ne nous en, aperçûmes que
lorsque la plus grande partie en étoit consumée par les flammes. Nous
n'avions jamais passé la nuit à une si grande élévation, et je ne me
doutois pas alors que, sur le dos des Cordillères nous habiterions
un jour des villes dont le sol est plus élevé que la cime du volcan que
nous devions atteindre le lendemain. Plus la température diminuoit, et plus
le Pic se couvroit de nuages épais. La nuit interrompt le jeu du courant
ascendant qui, pendant le jour, s'élève des ptaines vers les hautes régions
de l'atmosphère, et t'air, en se refroidissant, perd de sa force dissolvante
pour l'eau. Le vent du nord chassoit avec beaucoup de force les nuages; la
lune perçoit de temps en temps à travers les vapeurs, et son disque*
montroit sur un fond d'un bleu extrêmement foncé l'aspect du volcan
donnoit un caractère majestueux à cette scène nocturne. Tantôt le Pic étoit
entièrement dérobé à nos yeux par le brouillard, tantôt il paroissoit dans
une proximité enrayante; et, semblable à une énorme pyramide, il projetoit
son ombre sur les nuages placés au-dessous de nous.
Vers les trois heures du matin, à la lueur lugubre de quelques torches de
pm, nous nous mîmes en route pour la cime du Piton. On attaque le
volcan du côté du nord-est, où les pentes sont extrêmement rapides

les mots ~spagneh, comme font encore de nos jours la plupart des voyageas, l'appéUe ta N<ane&t.
c'est la &a<Mn des .RocAer~ de M. de Borda, comme le prouvent les haoteurs barométriques qui
y ont été
observées. Ces hauteurs étoient, d'après M. Cordier, <m i8o3, de tg pouc. 9,5 lig., et, d'après MM. Borda
et Varela, en 1776, de tg pouc. 9,8 lig. te baromètrese soutenant t FOro~tva, a une ligne près,
à la même élévation.
et nous parvînmes, après deux heures, à un petit plateàu'qùi, cause de à
sa situation Isolée, porte !e nom d'M
~M~. C'est aussi !a station des
Neveros, c'est-à-dire des indigènes qui font le métier dé chercher de !a
glace et de la neige qu'ils vendent dans les villes voisines. Leurs mulets, p!us
accoutumés à gravir les montagnes que ceux que l'on donne aux voyageurs,
l'~a ~t~,
arhivent à et les 2V<?~c~~ sont obligés de porter jMsquë-Ia les
neiges sur leurs dos. Au-dessus de ce point commence le
mination par laquelle on désigne ici, comme au Mexique, au Pérou et partout
.déno'
où il y a des volcans, un terrain dépourvu de terre végétale et couvert de
fragmens de laves.
Nous fîmes un détour vers ta droite pour examiner la Cia~eTMC de glace, placée
à 1728 toises de hauteur, par conséquent au-dessous de la limite où commencent
les neiges perpétuelles sous cette zone. Il est probable que le froid qui règne
dans cette caverne, est dû aux mêmes causes qui perpétuent les glaces dans les
crevasses du Jura et des Apennins, et sur lesquelles les opinions des physiciens
sont encore assez partagées '.La glacière naturelle du Pic n'a cependant pas deces
ouvertures perpendiculaires par lesquelles l'air chaud peut sortit, taindis que
l'air froid demeure immobile au fond. Il paroît que la glace s'y conserve à cause
de son accumulation, et parce que sa fonte est ralentie par le froid que produit une
évaporation rapide. Ce petit glacier souterrain se trouve dans une région
dont la température moyenne n'est vraisemblablement pas au-dessous de 3",
et il n'est pas, comme les véritables glaciers des Alpes, alimenté par des eaux
déneige venant du sommtt des montagnes. Pendant l'hiver, la cave se remplit
de glace et de neige; et comme les rayons du soleil ne pénètrent pas au delà
de l'ouverture, les chaleurs d'été ne sont pas suffisantes pour vider le
réservoir. L'existence d'une glacière naturelle dépend,par conséquent, moins
de l'élévation absolue de la crevasse et de la température moyenne dé la
couche d'air dans laquelle elle se trouve, que de la quantité de neige qui
y entre en hiver e~ du peu d'action -des vepts chauds qui'sonnient cnété.
L'air renfermé dans l'intérieur d'une montagne est diSicilemeht déplacé, comme
le prouve le Monte-Testaceo Rome, dont la température est si différente de

&MMMn~ Fo~a~efafM <<M.~M~ t4o6-t4t4, T'Mfo~t, <&t ca~brt~tMM~onBan~ p. <09-4M. Dans


la plupart
plupart des cavea
MMM de eh glace
g~MM, par exemple dans cette
exempte dans eritre Niort
Saint-George etH-e
cellg de Saimt-George, Niortet Rolle,
Rôtie,une
une couehe
couche
mince de glace limpide se forme même en été snr les parois du rocher calcaire. M. Pictet a observé
qn'a cette époque le thermomètre ne descend pas, danst'eird&4acave~au-êesMusde a à 3 degrés, de
sorte qu'il faut attribuer la congélationune évaporation locale et extrêmement rapide.
celle,de l'air environnait. Nous verrons par la suite qu'an GÏumborazo,d'énormes
monceaux de glaces se trouvent couverts de saMes, et, de même
qu'au Pic,
bien au-dessous de la limite inférieure des neiges perpétneHes.
C'est près de la cave de glace (<?Me~Nï<?Zo) que, dans l'expédition de
Lapérouse, MM. Lamanonet Mongèsontfait leur expérience sur la température de
l'eau bouillante. Ces physiciens l'onttrouvée de 88°,7, le baromètre se soutenant
à !() pouces 1 ligne. Dans le royaume de la Nouvelle-Grenade, à la chapelle
de la Guadeloupe, près de Santa-Fe de Bogota, j'ai vu bouillir l'eau à 89°,9
sous une pression de 19~ i ',9. A Tambores, dans la province de Popayan,
M. Caldas a trouvé la chaleur de l'eau bouillante de 89",5, le baromètre se
soutenant à t8'* tt',6. Ces résultats pourroient faire soupçonner que, dans
l'expérience de M. Lamanon, l'eau n'avoit pas tout-à~ait atteint le maximum
de sa température'.
Il commençoit à faire jour lorsque nous quittâmes la caverne de glace. Nous
observâmes alors, pendant le tcrépuscule, un phénomène assez commun sur
les hautes montagnes, mais que la position du volcan sur lequel nous nous
trouvions rendit singulièrement frappant. Une couche de nuages blancs et
floconneux nous déroboit la vue de l'Océan et celle des basses régions de l'île.
Cette couche ne paroissoit élevée que de 800 toises; les nuages étoient si unifor-
mément répandus, et se soutenoient dans un niveau si parfait, qu'ils offroient
l'aspect d'une vaste plaine couverte de neiges. La pyramide colossale du Pic, les
cimes volcaniques de Lancerote, de Fortaventure et de l'île de Palma s'élevoient
comme des écueils au milieu de cette vaste mer de vapeurs. Leurs teintes noirâtres
contrastoient avec la blancheur des nuées.
Tandis que nous gravissions sur les laves brisées du Malpays, en nous
aidant souvent des mains, nous aperçûmes un phénomène d optique très-
curieux. Nous crûmes voir du côté de l'est de petites fusées lancées dans
l'air. Des points lumineux, élevés de 7 à 8 degrés *au dessus de l'horizon,
paroissoient d'abord se mouvoir dans le sens vertical; mais peu à peu
leur mouvement se convertissoit en une véritable oscillation horizontale,
qui duroit pendant huit minutes. Nos compagnons de voyage, nos guides
même furent surpris de ce phénomène, sans que nous eussions besoin
de les en avertir. Nous pensâmes au premier coup d'ceil que ces po&tts

Le calcul fait d'après les tables de M. Dalton, donne pour la Cneva,89" 4, et pour la Guadeloupe, 8q°,5.
lumineux, qui vottigeoientcàet là) étoiént t'indice de quelque nouvelle éruption
du Grand Votcandel~ancerote. Nous nous rappetAmes que Bouguer et La
Condamine, en montant sqr le volcan de PiBMnch&~avcncnt été témoins de
l'éruption du Cotopaxi~ mais l'Ulasion cessa bièntét, et cous reconn&thef!
que les poinfts lumineux étoient les imagés de plusieurs étoiles agrandies
par les vapeurs. Ces images festoient immobilea par intervalles) puis elles
sembloient s'élever perpendiculairement, se porter de côté en descendant,
et revenir au point d'où cites étoient parties. La durée de ce mouvement étoit d'une
ou de deux secondes. Quoique dépourvus de moyens assez précis pour mesurer
la grandeur du déplacement latéral, nous n'en observâmes pas moins distinc-
tement la marche du~point lumineux. M ne paroissoit pas double par nn
effet de mirage, et il ne taissoit aucune trace !umincuse derrière lui. En mettant,
dans !a lunette d'un petit sextant de Trougbton, tes étoiles en contact avec le
sommet é!ancé d'une montagne de Laneepote, j'observai que l'oscillation étoit
dirigée constamment vers le même point, c'est-à-dire vers la partie de l'horizon
où le disque du soleil devoit, paroitre, et que, faisant abstraction du mouvement
de l'etoiie en déclinaison, l'image revenoit toujours à la même place. Ces
apparences de réfraction latérale cessèrent long-temps
avant que la clarté
du jour rendit les étoites entièrement invisibles. J'ai rapporté fidèlement ce
que nous avons vu pendant le crépuscule, sans entreprendre d'exp!iquer un
phénomène si extraordinaire, que j'ai déjà fait connonre, il y a douze ans, dans
le journal astronomique de M. de Zach, Le mouvement des vapeurs vésicutaires,
causé par le lever du %otei!, le mélange de plusieurs couches d'air dont la
températureet la densité sont très-dinérentes, contribuoient sans doute à produire
un déplacement des astres dans le sens horizontal. Nous voyons quelque chose
d'analogue dans tes fortes ondulations' du disque solaire lorsqu'il rase t'horizon
mais ces ondulations excèdent rarement vingt secondes, tandis que le mouvement
latéral des étoiles, observé au Pic, à phisde !8ootoises de hauteur, se distinguoit
facilement à la simple vue, et paK<issoit excéder tout
ce que l'on a cru
pouvoir regarder jusqu'ici comme un euet de la réfraction de la tumière des
astres. Sur le dos des Andes, à Antisana, je me suis trouvé, au lever du
soleil et pendant une nuit entière, à 21 code hauteur, mais je n'ai rien
aperçu
qui ressemblât à ce phénomène.
Je dësirois pouvoir observer exactement l'instant du lever du soleil à
une
élévation aussi considérable que celle que nous avions atteinte
au Pic de
Ténérioe. Aucun voyageur, munid'instrumens, n'avoit encore fait
une tell
observation. Tavois~dB lunette et un chronomètre dont cdnnoissois je
la marche avec beaucoup de précision. Dans la partie où le diaque do soleil
devoit parottre, l'horizon étoit dégagé de vapeurs. Nous aperçûmes le
premier bord à 4° 48' 55~ en temps ytai~et~ ce qui est assez remarquablei
le premier point lumineux du disque se tMavoit Immédiatementen contact avec
la limite de l'horizon; par conséquent mous v~mea le véritable horizon~
c'est à -dire une partie de. la mer, éloignée de plus de ~3 lieues. Il est
prouvé par le calcul que, sous le même parallèle, dans la plaine, le lever
auroit dû commencer à 5** 5o~4 oun~ 5t~3 plus tard qu'à la hauteur du
ï'
Pic. La diSérence observée étoit de ta' 55", ce qui provient sans doute de
l'incertitude d<Ss réfractions pour une distance au zénith où l'on manque
d'observations
Nous fumes surpris de l'extrême lenteur avec laquelle le bord inférieur du
soleil paroissoit se détacher de l'horizon. Ce bord ne devint visible qu'à
4'' 56~ 56~. Le disque du soleil, très-aplati, étoit bien terminé; il n'y eut,
pendant le lever, ni double image, ni alongement du bord inférieur. La
durée du lever du soleil étant triple de celle à laquelle nous devions nous
attendre à cette latitude, it faut croire qu'un banc de brume très-uniforme~
ment répandue cachoit le véritable horizon, et suivoit le soleil à mesure que
cet astre s étevoit. Matgré le balancement des étoiles 3, que nous avions observé
vers l'est, on ne sauroit attribuer la lenteur du lever à une réfraction
extraordinaire des rayons que nous renvoyoit l'horizon, de la mer; car c'est
justement au lever du soleil, comme Le Gentil l'a observé journellement à
Pondichéry, et comme je l'ai remarqué plusieurs fois à Cumana, que l'horizon

On a supposé dans le calcul, ~o"f ~t" 54' de distance apparente au zénith 67' 7° de réfraction.
Le soleil levant paroit plutôt au Pic de TenériSe que dans la plaine du temps qu'il lui faut pour
parcourir un arc de t° 54'. La grandeurde cet are n'augmente nue de 4t' pour le sommet de Chimborazo.
Les anciens avoient des idées si e~gér~es sur t~eceteratibn du lever du soleil à la cime des hautes
montagnes, qu'ils admettoient que cet astre était visible au Mont-Attxts trois heures plus tôt que sur
tes côtes de la mer Egée. (Strabo, ft&. ~&n<&)fe< Lib. VM, p. 5to.) Cependant l'Atbos, d'après
M. Delambre, n'a que ~3 toises d'eté~ation. CAot«M/ Coi~cr, ~o)'«.<<eAt Grèce, T. !f, p. t4o.
La durée apparente fut de 8' t", au lieu de 2' 4t. Quoique mes journaux renferment près
de quatre-vingts observations du j~ver et du coucher du soleil, faites, soit pendant la navigation, soit
sur les cotes, je,u'ai jamais vu un retard tres-sensiNe.
Un astronomecélèbre (Mon. Corres., t8t)o, p. !!g~6) a comparécephénom~ned'un balancement apparent
desétoi)es&cehu décrit dans tes GÉorgiques(Lib. ï, v. 365) Mais ce passage n'a rapport qu'aux
étoiles titantes que los anciens, de même que nos marins, regardoient comme uu pronostic du
vent. Le
poète latin parott avoir muté les vers d'AraMH. /)Mwm. j v. 9,~6, ~eE<. B<tA<et, p. ao6. (~«-M<. H,
v. i't3).
s'abaisseà cause de l'étévation~de température qu'épiXonvex la couche d'au'
JpMrepose Immédiatement sur la surface jde~~céan.
La route que nous .fumes obitgés de nous frayer à ttrayers; le Malpays,
est extrêmement fatigante. La montée est rapide, et les Mocs de laves
fuyoient sous nos pieds. Je ne puis comparer cette partie du chemin
qu'à la moraine des Alpes ou à cet amas de pierres roulées que Ion trouve
à l'extrémité Inférieure des glaciers au Pic, les débris de laves ont les
arrêtes tranchantes, et laissent souvent des creux dans lesquels on risque de
tomber à mi-corps. Malheureusement la paresse et la mauvaise volonté de
nos guides contribuolent beaucoup à nous rendre cette montée pénible;. Ils
ne ressemltloient ni à ceux de la vallée de Chamouni, ni à ces Guanches
agiles dont on rapporte qu'ils prenoient un lapin ou une chèvre sauvage à
la course. Nos guides canariens étoient d'un flegme désespérant; Ils avoient
voulu nous persuader la veille de ne pas aller au delà de la station
des Rochers ils s'asseyoient de dix en dix minutes pour se reposer ils
jetoient à la dérobée les échantillons d'obsidienne et de pierre ponce que
nous avions recueillis avec soin, et nous découvrîmes qu'aucun deux n'étoit
encore allé à la cime du volcan.
Après trois heures de marche, nous arrivâmes, à l'extrémité~du Malpays, à
une petite plaine appelée la Rambleta c'est dans son centre que s'élève le
Piton ou Pain ~c~MC~e.Du côté deTOrotava, la montagne ressemble à ces pyra-
mides à gradins que l'on retrouve dans le Féjoum et au Mexique car les
plateaux du Retama et Je la Rambleta forment deux étages, dont le premier
est quatre fois plus étevé que le second. Si l'on suppose la hauteur totale du
Pic de 1904 toises, la Rambleta est élevée de 1820 toises au-dessus du
niveau de la mer. C'est là que se trouvent les soupiraux que les indigènes
désignent sous le nom des Narines <?u Pic Des vapeurs aqueuses et
chaudes sortent par intervalles de jplusieurs fentes qui traversent le
sol; nous y~ vîmes monter le thermomètre à
43°~ = M. LabiHardière
avoit trouvé la température de ces vapeurs, huit ans av~M nous, de
53°,y; dISérencc qui ne prouve peut-être pas autant une diminution
d'activité dans le volcan, qu'un changement tpcal dans Téchauuement

Biot, ,R<'e/ sur r~ac~ont extraordinaires, p. at8, xa3 et aaS.


*A~n'e<t~e/jP<co.
denses parois. Les tapeurs n'ont aucnne odeur et parement de l'e&u pare.
Peu de temps avant b grande érnption dd '~Vésav&en t8~, fiions avons
observé aussi, M. O~y-Lussae et moi, que l'ean dégagée sous ~fbrme de
vapeurs, dans l'intérieur du cratère, ne rongissdit point le papier ~teint en
tournesol. Je ne saurois admettre cependant l'hypothèse hardie de plusieurs
physiciens, d'après laquelle les j~tit~MjPïc doivent être considérées comme
les ouvertures d'un immense appareil distillatoire, dont le fond est placé au-
dessous du niveau de l'Océan. Depuis que l'on étudie M volcans avec plus de
soin, et que l'amour du merveilleux se fait moins remarquer dans les ouvrages de
géologie, on a commencéà jeter des doutes très-fondés sur ces communications
directes et constantes entre les eaux de la mer et les foyers du feu volcanique'.
On peut trouver une explication très-simple d'un phénomènequi n'a rien de bien
surprenant. Le Pic est couvert de neiges une partie de l'année; nous-mêmes nous
en trouvâmes encore dans la petite plaine de la Rambleta de plus, MM. Odonell
et Armstrong ont découvert, en t8o6, une source très-abondante dans le
.Ma~M~, à cent toises au-dessus de la caverne des glaces, qui elle-même est
peut-ârealimentée en partie par cette source. Tout, par conséquent, fait présumer
que le Pic de Ténérice, comme les volcans des Andes et ceux de l'île de Luçon,
renferme dans son intérieur de grandes cavités qui sont remplies d'eaux atmos-
phériques, dues à la simple infiltration. Les vapeurs aqueuses qu'exhalent les
Narines et les crevasses du cratère, ne sont que ces mêmes eaux chauffées par
les parois suw lesquelles elles coulent.
Il nous restoit à gravir la partie la plus escarpée de la montagne, le Piton,
qui en forme la sommité. La pente de ce petit cône, couvert de cendres
volcaniques et de fragmens de pierre ponce, est tellement inclinée qu'il seroit
presque impossible d'atteindre la cime, si l'on ne suivoit un ancien courant
de laves qui paroft être sorti du cratère, et dont les débris ont résisté
aux injures du temps. Ces débris forment un mur de roches scorihées,
qui se prolonge au milieu des cendres mobiles. Nous montâmes le Piton en

Cette question a été examinée avec beaucoup de sagacité par M. Bretsiat, dans son ~t<nK~tM«:
aNo Geo&~m, T. H, p. 3M, 3a3 et 347. Le Cotopaxi et le Fopocatepett, que j'ai va jeter de
fomée et des cendres en t8o4, mat plus éloignés du Grand-Océan et de la mer des Antilles que Grenol
ne l'est de la Méditerranée, et Orléans de l'Atlantique. Il ne faut pas considérer comme pnrem<
accidentel le fait que l'on n'ait point encore découvert un volcan actif, éloigné de plus de 4o lie
marines des côtes de l'Océan; mais je regarde comme très douteuse P~ypothèse que les eaux de
mersontahaptbée<,dMtiltéesetd~écomposBespMles~olcMM.
nous accrochant à ces scories doat
JesaN~tesMBUraaehantes~ctqu~ademi-
tMcoHtposëes, nous restoieat souv~jt à la Main.tjNous emptoyàmcs près d'une
demi heure à gravir tmecaHioe dont ia hauteur perpendiculaire est à peiae
de quatre-vingt-dix toises< ]Le Vésuve qui est trois fois plus bas que le
volcan de TénériSe, est terminé par un cône de cendres presque trois fois
plus étevé, mais doM la pente est plus douée et plus aceessiMe. De tous
les volcans que j'ai visités, il n'y a que celui de JoruHo, au MexiqtM, qui
offre de plus grands ttbstac!es que le Pic, parce que la montagne eottère est
couverte de cendres mobiles.

D'après les ittewres tarptn~t~ues ~jM nous tvoKs &itM, M~ t<é«pot<I de Bach, M. G«y-L)MMC
et moien )8e5, le Vésuve a dunintté de banteMdu c~edusttd-oneM, depuis t'anmée '794, où une
partie du cône s'écronta deux jours après que les cendres avoient été tancées. Saussure avoit trouvé
le VésuTe, en 177; de 6og toises à une époque ou les bords du cratère eonservoient partout à peu prés
la même élévation. Shnekb"rgh mesura, en '776, nne coUine placée aumilieu du gonfEre; elle avgt
6t5 toises de hauteur etteeMstoità petne lors du voyage de Saussure, et elle disparut dttns t'éroption
de 1773. C'est t'éruption de 1794 qui a causé la grande inégalité des deux bords du cratère cette inégaUté
éto!t, en t8o5,de7t toises. M. Poli trouva le Vésnve, peo de temps avant, de ~06 toises d'étération.
Shuckburgh donne à la pointe le !&m é~ée de la Somma, cette del ~t<e~, ~84 toises. Cette observation ne
s'accorda trop bien
pas avec la hauteur que M..Gay'Lussac assigne au bord le plus étevé du cratère car,
en 1865, cette partie du bord sembloit avoir ta même élévation que la ft<n<<t <M ~'t<e~o. J'ignore ou
Shuckburgh a placé son instrument au pied du c&ne de cendres car it ne donne a ce point que
3i6 toises d'élévation absolue. Voici le détait des mesures faites par un temps très-calme avec un
baromètre portatif de Ramsden

MESURE FAITE PAR M. GAY-LUSSAC SEUL.

4mm®mmu maim~ ,““““


Baromètre Thermomètre
Bamraètr. HAUTEUBS
ao-dtMMdn
JtuttetiNoS. UBM.
LIBUX. M de nivMu
lignea: R~r.
Riaumnr. 4e la mer;

~e28,â7heurMdmotr.anborddeIa<ner. 558,5 aa** CesbaptenraettetMtitftatM


<mt<!MM~aXtt<i'op)rt<tt<t
à
S~ad.r.
te heur. du soir chez ftermoe de San
5t6,3 iS~ 3f~
rMrmn)e de M. Laplace. Un
a supposé la température du
mt)tor<esateàc<'Medet'a)r
Le29.4~h.d.itn<t. M~. xr/
5,6,4 ,tt.h.uten,<).i-.pMrM-
à 5 hemr. du mat. M bord inKriear da cra- °'~°' de 'n"'e StoMM

à 5 heures
tèrc.daM
jr<tf<n.
h chemin..
ère, dans le chemin.. 5oe,o
3oo,o
0
3oo,5
.5*
1.5°
15.j3o M-dMMM petit plateau
dm
de9at<S<t)Mder.Oaai«Mr'
po)e<Mhatt<!ttr)<:urrM))ou-
dMt<!t<tt)h<M'<tmttm<ttd)t
athtmt.etdemic.'MbordMptnaeteTe
duerottre. :95,4 t4~4 606
thtrmomttft.

à? henr. et demie. au commencement do


cAnedecendret. Sn,5 t8° 515

iiîiîiffl-
ânheor.etdeHneehczPhermite. 5~7~ M**
Quand ie Pain ~e ( el ~~7t) e~ couv~~de
Sucre (eZ~~Tt)
de Sacre est
couvert de ~ge,e~~ à ~ge, e<à
centrée de ï'hiver, !a rapidité de sa pente peut me~~ile~~ageu~
ptus grand danger. ?4 lae <~os n~as ~~Btm re~reM ie eapttMac
Baudin avoit maa~tté de perif hM's de son voyage à nM d~v!~ TM~~
Cet o~c!er avoit eu !e cottMt~e~ d'~aeFepKBdre, 'coa~oictement a~ec ï~
naturalistes' Advenier, MaugeF et RiBd!e, une exeorMon a la e~e da v~ci~a,
vers la Rn de décembre de Fanneo ï~gy. Pathreau aïa moitié de ta ha~tettp
du cône, il fit une chute, et il roula jusqu'à la petite plaine de la RamMeta;
heureusement un monceau de !aves, couvert de neiges, t'empêcha de descendre
ptus bas avec une vitesse accétéréë. On m'a assuré avoir trouva en Suisse~ un
voyageur qui a été sttNbqaé en roulant sur ta pente du cot de Batme, tapissée
du gazOn serré des Aipes.
Arrivés au sommet du Piton, nous fumes surpris d'y trouver à peine asse~
de place pour nousasseôir *ar notre aise.;Nous fumes arrêtés par un petit mur
circulaire de laves porphyriques à base de pechstein ce mur nous déroboit

_g. Aoùtt8o5.
Ao$t t8o5,
n. MBSUM FA!TE PAtt

ecsns.
LiECx.

[.<)4,~SheM.<tNB<eun,eetitp)Mm'«t<t'httm'-
t<tge(teSNa8a)*edm.

t~e.
~5htM.45mimat.N))nmtncanentdncAmt.
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A5h.etdtmit~n'm.P");uci.
~,5

557)0
Mt
'S°

16°
°"
~ph~.t.qut~M.t.MM
pt..t.Mt.t9,U.

t~h.))rttmitii J<~m. 557.0 ~4"

M. detaJumétiere assure, dans une notice imprimée dans le Moniteur, avoir trouva, p!Mr dit me-
surer géométriques, la hauteur du Vésuve de Soy toises. Il seroit à désirer que l'on connut le détail
de ses opératioms. Nos mesures donnent: pour le bord le plus étevé du cratère, 606 toises (tt8t mè-
tres) pour te bord Inférieur, 535 toises ( to4a mètres) pour le pied du corne de cendres, 370 toises
(?at mètres) pour t'hennitage de San Salvador, 3oa toises (588 mètres). Tel était l'état du Vésuve
peu de tempsavantl'érup~onde l'année t8o5, dans laqaeUe
ta lave a fait une brèche au bord du cratère
du coté de Torre del Greco.
la voedu cratère Le vent d'ouest soufHoit avec tant de violence, que nous
avions de !a poneànouNl-enir sur nos jambes. H étoit huit heures du ntaMn~
etinous étions transis de~troid, quoique le thennomètre se sp!mt!nt un.peu au-
dessus dupointde tacoagétatipn~ Depuis long-temps ~ous étions accoutumés
une tempénttare trè8~é!evée, et le vent sec augmemoit!a sensation du
froid, parce qu'it emportoit à chaque instant ta petite couche d'air chaud
et humide qui se fbrmoit autour de nous par l'effet de la transpiration
cutanée.
Le Cratère du Pic ne ressemble point, par son bord, à.ceux de la plupart
des autres volcans que j'ai visités, par exemple, aux cratères du Vésuve, de
Jorullo et de Pichineha. Dans ceux-ci, le Piton conserve sa figure conique
jusqu'au sommet; toute leur pente est inclinée de la même quantité de degrés,
et couverte unitbrtnément d'une couche de pierre ponce extrêmement divisée:
lorsqu'on parvient a ta cime de ces trois volcans, rien n'empêche de voir le fond
du gouffre. Le Pie de TënériQe et te Cotopaxi, au contraire, ont une structure
très-différente; ils présentent, à leur sommet, une crête pu un mur circulaire
qui environne le cratère:de loin, ce mur paroît un petit cylindre placé sur
un côpe tronqué. Au Cotopaxi cette construction particulière se distingue à
la simple vue, S une distance de plus <ie 2000 toises; aussi jperspnne n'est
jamais parvenu jusqu'au cratère de èe volcan. Au Pic de Ténériffe, la crête
qui environne le cratère comme un parapet, est si élevée qu'elle empécheroit-
entièrement de parvenir à la C~M~r~ si, du côté de l'est, il ne se trouvoit
une brèche qui paroît leBet d'un épanchement de laves très-anciennes. C'estf
par cette brèche que nous descendîmes vers le fond de l'entonnoir dont !a
figure est elliptique; le grand axe en est dirigé du nord-ouest au sud-est,
à peu près N. 35° 0. La plus grande largeur de l'ouverture nous parut de~
3oo pieds, ta plus petite de 200 pieds. Ces 'nombres s'accordent assez avecf
les mesures de MM. Verguin, Varela et Borda 3; car ces voyageurs assignent
4o et 3o toises aux~deux axes

J~ft CaMerM ou c&<tM<Mfe du Pic, dénommadon qui rappelle tes Ou/es des Pyrénées. Ramond
~o~a~e au ./K<M<efa~. p. a35,
~/a<~t«orM~Me~PLï.
3 ~cynge de la Flore, T. p. 9~ ~«MMerK~ D~pd< de ~rme, cahier.y, p. i5. ~<y<~)e de
Marchand, T. JI, p. n.
M: Cordier, qui a visité la cime du Pic quatre ans après moi, ératue le grand aM a 66 toises,
(Jonrn.dePhys-, T.LVH,p. 62). Lamanon le croit de ~0 toises, mais M. Odonell assigne au cratère
55o fam< ( 936 toises ) de circonférence.
Il est aisé de concevoir que ta grandeur d'un cra~re ne dépend pa~,
uniquement de la hauteur et de la masse de !a menthe doJCtt il
&rme le
soupirail principal. Cette ouverture est m~e tarenient en Mpport direct~ a~
l'intensité du feu volcanique, ou avec l'activité do volcan~ Au Vésove, qui
n'est qu'une colline en comparaison du Pic de Tén~rine, le diamètre du cratère
est cinq fois plus grand. Quand on réûéchit que les volcans très-élèves
vomissent moins de matières par leur sommet que par des crevasses, latérales,
on pourroit être tenté de croire que plus les volcans sont bas, et plus aussi,
leur force et leur activité étant égales, leurs cratères devroient être considérables.
Il existe en effet d'immenses volcans aux Andes qui pont que de très-petites
ouvertures, et l'on pourroit établir comme une loi, géologique que les mon-
tagnes les plus colossales n'offrent à leurs sommets que des cratères de peu
détendue, si les Cordillères ne présentoientpas plusieurs exemplesdu contraire.
J'aurai occasion, dans la suite de cet ouvrage, de citer un. grand, nombre de faits
propres à jeter quelque jour sur ce que l'on peut appeler la structure extérieure
des volcans. Cette structure est aussi variée quelles phénomènes volcaniques eux-
mêmes et, pour s'élever a des conceptions géologiques dignes de la grandeur
de la nature, il faut abandonner t'idée que tous les volcans sont formés d'après
le modèle du Vésuve, de Stromboli et de l'Etna.
Les bords extérieurs de la Caldera sont presque taillés à pic leur' aspect
est analogue à celui qu'oQre la Somma, vue depuis i'Atrio dei Cavalli. Nous
descendimes au fond du cratère sur une traînée de laves brisées qui aboutit
à la brèche orientale de l'enceinte. La chaleur n'étoit sensible que sur quelques
fissures desquelles se dégageoient des vapeurs aqueuses avec un bourdonnement
particulier. Quelques-uns de ces soupiraux ou crevasses se trouvent au-dehors de
l'enceinte, sur le bord extérieur du parapet qui environne le cratère. En y
plongeant le thermomètre, nous le vîmes monter rapidement à 68 et ~5 degrés.
Il indiquoit sans doute une plus haute température; mais nous ne pouvions
observer l'instrument qu'après l'avoir retiré, de peur de nous brûler les mains.
M. Cordier a trouvé plusieurs crevasses dont la chaleur égaloit celle de l'eau bouil-
lante. On pourroit croire que ces vapeurs, qui se dégagent par bounees
contiennent de l'acide muriatique ou sulfureux; mais~ condensées contre un
corps froid, elles ne présentent aucun goût particulier; et. les essais que

Les grands volcans de Cotopaxi et de Rucupichincha ont des cratères dont les diamètres, d'après
mes mesures, s'élèvent à plus de quatre cents et de sept cents toiser.
BlusieuM physiciens ont &(its avec des réaoti&y piEouyent que les, in~a-*
rôles du Pie n'exha~nt q~ de l'eau pnre:ce phénon~ne,;an~it~qu@¡l'~

muriatîqae abonde dans piMpart des yo~~)


a même décoavie~ dans tes laves porpl~riques du SarcQuy en
et

J'ai esquissést~~ lieu~ta vue dubord intérieM du cratère,


q~ M.

présente ea. descendait par la brèche orientale. Rica de plus Jappant que
A
observé dans le cratère, du .toraHoy mérite d'autant pÏUiS d atteation, qo~ ~acide
Yauf~a~
têt qu'il se

la superposition de ces couches de laves, qui oSrent-les sinuosités de ta


roche calcaire des Hau~s-.AIpes. Tantôt horizoataux~ tantôt lacUnés et ondulés
1
ces bancs énormes rappellent t'atMiiemM Buidité de la masse emtièce et la
réunioa de phtSteuEs causes porh~batrices qui ont déterminé la dM~ecttom
de
de chaque
chaqcie. ceïttée. y,act~t~
caa~lée: 1~ d,
_:cr~e: dN mur circulaire p~sente
m:ur, eirct~laire pFés~nte, ces
se~ tami&catioos
rara0.~cativns
bizarres ~ae toB obser~ae dans !e charbon de terre désordre. Le bofd
septentrional est le ph~ élevé; vers te sad-ouest, l'eaceinte est coasidéra-
blement a~tissée, et âne éBO~tne masse de laves seoci~ees y paro~t coHeé
à rextrémité du bord~ A i'onest, ïe roeher est pefcé )om'y tKM large
tente laisse voir fhorize~ de la mer. Cest pea~étce la ~brce des vapeurs
élastiques qui formé cette
a ouverture au Montent d'an débordement de laves
sorties du cratère.
L'intérieur de cet entonnoir annonce un votcam qui, depttis des milliers
d'années, n'a vonu du teM que par les flancs. eettë assertion, ne se fonde
pas sur le manque de grandes ouvertures que t'en pourroit s'attendre à
trouver dans le fond' de<Ja CaMera. Les physiciens qui ont étudié la nature par
eux-nt~mes, savent que beaucoup de volcans, dans tes intervalles qui séparent
une éruption de l'antre, paroissent comblés et presque éteinte; mais qne, dans
ce& mêmes montagnes, le gou~re volcanique présente des couches de scories
extrêmement âpres, sonorest et Msantes. On y distingue de petites coM<oe8,d'es
bouMoaftm'es causées par l'action des vapeurs élastiques, des.cônes de~ sBories
menues et de cendres, soas lesquels des soupiraux sont 'cachés~ Aucun de
ces phénomènes ne caractérise te cratère du, Pic de Téoérine~ son fond
n'est pas resté dans l'état qui résulte de la &n d'une éruption. Par le. laps
des temps et par l'action de& vapeurs, les. parois se sont détachées et ont
couvert le bassin de grands blocs de laves IMtOïdes.
On parvient sans danger au fond de la C~M<?~. Dans un volcan dont

~cya~ de Lapérouse, T. lU, n. a.


y

~</a< /)tMfr., PL nv,


l'acttvHése dirige p~meipatement vers te sommet comtnë dans le Véa~vè,
ta profondeur du cratère varie avant tt aptes chaque érupttciB}Tn!tatsa<ïPic
de 'Eénériue~ cette pro~ndeur paroift et~ reeti~ ia meme~d~ l~ol~t~trt~'s:
Edens, eu t~tS, t'évalua de ttSpieds;M.<Sordier,en i8o3, de ïtbpieds. Aoà
juger d'après ta simple vue, ~'aaro~eMl~tonno~ moins pr0~ndeacore<~N
état actuel est celui d'une soI~tare;i~o~M plutôt un ~bjetd&
curieuses qu'un aspect imposant. La majesté du site consiste dans son éléva-
tion au-dessus du niveau de tOeéan, dans la solitude profonde de ces
hautes régions, dans l'étendue immense que Tceil embrasse du sommet de
la montagne.
Le mur de laves compactes qui forme l'enceinte de la Caldera est d un blanc
de neige à sa surface. Cette même couleur règne dans l'intérieur de la solfatare
de Pozzole. Lorsqu'on brise ces laves que l'on prendroit de loin pour de
la pierre calcaire, on y reconnoît un noyau brun-noirâtre. Le porphyre à base de
pechstein est blanchi extérieurement par l'action lente des vapeurs de gaz
acide sulfureux. Ces vapeurs se dégagent abondamment~ et ce qui est assez
remarquable, par des crevasses qui semblent n'avoir aucune comnunication avec
les fumarotcs que traversent les vapeurs aqueuses. On peut se convaincre de la
présence de l'acide sulfureux, en examinant les beaux cristaux de soufre que
l'on trouve déposés partout entre les fentes des laves. Cet acide, combiné
avec l'eau dont le sol est imprégné, se transforme en acide sulfurique par le
contact de i'oxigène de l'atmosphère. En générât, dans le cratère du Pic, l'humi-
dité est plus à craindre que la chaleur, et l'on trouve ses vétemens rongés
si l'on reste long-temps assis sur le sol. L'action de l'acide sulfurique
se porte
sur les laves porphyriques, l'alumine, la magnésie, la soude et les oxides
métattiques sont emportés peu à peu, et il ne reste souvent
que la silice
qui se réunit en plaques mamelonnées opaliformes. Ces concrétions siliceuses' I,
que M. Cordier a fait coamottre le premier, sont analogues à celles que l'on
trouve à t'Me d'tschia dans les volcans éteints de Santa Fiora et dans la
solfatare de Puzzote n n'est pas facile de se faire une idée de l'origine de
ces incrustations. Les vapeurs aqueuses, dégagées par les grandes fumaroles

~f~t~&~er. Le j~A~MMdes~tMS~tede France oont.ent,<I'apresM Klaproth,


0,73 de silice et o,at d'eau, et se rappMche jp&r là de t'c~te que M. RaMten considère
silice hydratée. JMtn<r. ?MeNeM~ t8oo, p. comme une
BreM&tot, 7n<MM<. <t&t Geo~M, T. Il, p. 238.
ne contiennent pas
d'alcali en dissoÏutioa, comme les eaux du Geyser en
Islande 1; peut-être la sonde renfermée dans !es I&vesdu Pic joue-t-eMe un
rôle important dans la formation de ces dépôts de suice. Peut-être existë-t-it
dans le cratère de petites crevasses dont les vapeurs ne sont pas de la même
nature que celles sur lesquelles des voyageurs, occupés à la fois d'un grand
nombre d'objets, ont fait des expériences.
Assis sur le bord septentrional du cratère, je creusai un trott de quelques
pouces de profondeur; le thermomètre, placé dans ce trou, monta rapide-
ment à ~2°. On peut conclure de là quelle doit être la chaleur qui rè~ne
dans cette solfatare à une profondeur de trente ou quarante toises. Le soufre
réduit en vapeurs se dépose en beaux cristaux qui n'égalent cependant pas en
grandeur ceux que te chevalier Dotomieu a rapportés de Sicile 2 ce sont des
octaèdres demi-diaphanes, très-éclatans à leur surface, et à cassure conchoïde.
Ces masses qui feront peut-être un jour un objet d'exploitation, sont constam-
ment mouillées d'acide sulfureux. J'eus l'imprudence de les envelopper pour les
conserver; mais je m'aperçus bientôt que l'acide avoit rongé, non seulement te
papjer qui les renfermoit, mais malheureusement aussi une partie de mon
journal
m!néra!ogique. La chaleur des vapeurs qui sortent des crevasses de la
Caldera n'est pas assez grande pour combiner, le soufre, extrêmement divisé,
avec l'oxigène de l'air ambiant et, d'après 1 expérience que je viens de citer
sur la température du sol, on peut supposer que l'acide sulfureux se forme
à une certaine profondeur dans des creux où l'air extérieur a un libre
accès.
Les vapeurs* d eau chaude qui se portent sur les fragmens de laves
éparses dans la Caldera, en réduisent quelques parties à un état pâteux. En
examinant, après mon arrivée en Amérique, ces masses terreuses et friables,
j'y ai trouvé des cristaux de sulfate d'alumine. MM. Davy et Gay-
Lussac ont déjà énoncé t'idée ingénieuse que deux corps éminemment

Blacit, dans les Phil. Th~M., t~4, p. a4.


Ces cristaux ont quatre à cinq pouces de longueur..P~e, Cat. <fmt.MM~<mmt!M&~tM~ at.
Un observateur, d'ailleurs très-exact, M. Breidact, an!nme ( Geo&)gts,T.H, p. a5a) que t'acide
muriatique prédomine toujours dans tes vapeurs du Vésuve. Cette assertion est contraire à ce que nous
avons observé, M. Gay-LnsMc et moi, avant la grande éruption de t8o5, et pendant que la lave sortoit
du cratère. L'odeur de l'acide sulfureux, si facile à reconnoître, se faisoit sentir de très-loin et quand
le volcan lançoit des scories, il se méloit & cette odeur' celle du pétrole.
Davy, on the ~eeo)npM!f<;M o/t~ a~a& (M<7: Tr. ~8o8,PL t,p.44). ).
ipûammables, les Métaux de la soude et de lapotasse~ jouent proba~~
un r~le important dans l'action volcanique; or la potasse, nécessaire à ïa
formation du sulfate d'alumine, se trouve, non seulement dans ieMdspath,
le mica, la pierre ponce et l'aagite, mais aussi dans les obsidiennes ".Cette
deraière substance est très-commune & TénénjBe.ouelle fait la base de la plupart
des laves téphriniques ~Tous ces rapports par lesquels te cratère du Pic res-
semble à la solfatare de Puzzole, paroitroient sans doute encore plus nombreux~
si le premier étoit plus accessible et s'il avoit été fréquemment visité par des
naturalistes.
Le voyage au sommet du volcan de Ténérine n'est pas seulement intéressant
à cause du grand nombre de phénomènes qui se présentent à nos recherches
scientifiques; il l'est beaucoup plus encore par les beautés pittoresques qu'il
offre à ceux qui sentent vivement la majesté de la nature. C'est une tâche
difficile à remplir que de peindre ces sensations elles agissent d'autant plus
sur nous, qu'elles ont quelque chose! de vague, produit par l'immensité de
l'espace comme par la grandeur, la nouveauté et la multiplicité de~ objet:
au milieu desquels nous nous trouvons transportés. Lorsqu'un voyageur doit
décrire les plus hautes cimes du globe, les cataractes des grandes rivières,
les vallées tortueuses des Andes, il est exposé à fatiguer ses, lecteurs: pat
l'expression monotone de son admiration. !1 me paroît plus conforme au
plan que je me suis tracé dans cette Relation, d'indiquer le caractère parti-
culier qui distingue chaque zone. On fait d'autant mieux connoïtre la phy-
sionomie du paysage, qu'on cherche à en désigner les traits individuels.
à les comparer entre eux, et à découvrir, par ce genre d'analyse, les source:
des jouissances que nous offre le grand tableau de la nature.
L'expérience a appris aux voyageurs que les sommets, des montagnes
très élevées présentent rarement une vue aussi belle et des effets pitto-
resques aussi variés que les cimes dont la hauteur n'excède pas celles du
Vésuve, du Rigi et du Puy-de-Dôme. Des montagnes colossales, comme
le Chimborazo, l'Antisana ou le Mont-Rose, ont une masse si considérable
que les plaines, couvertes d'une riche végétation, ne sont. aperçues qu<
dans un grand éloignement, et qu'une teinte bleuâtre et vaporeuse esi

Collet Descotils, dans tes ~M<t&! de Chimie T. LUÏ, p. 260. Sur les traces de potasse dan
t'augne, voyez Klaproth, Bettnt~Bj B. '5, S. tSg, t62 et t66.
Zam~erte, JMn~nt&~M~ T. H, p. 533; et yoMnMt~ <& fA~M~ue, 1806, p. toa.
unitbftnément répandue sur le paysage. Le Pi-c de Te~M~e, par sa torme
ébncée et sa position locale, réanit le& avantages qu'o~eat les sommets
moins élevés à ceux qui Baissent d'une très-grande hauM~jNon seulement
on découvre de sa cime un Mmmease horizon de mer qm~'é~v~ au-dessus
des
plus hautes montagnes des ues adjacentes, mais on voit aussi, les forets de
TénériSe et la partie habitée des côtes, dans une proximité propre à pro-
duire les plus beaux contrastes de forme et de conteur. On diroit que le
volcan écrase dç sa, masse la petite île qui lui, sert de base: ~s'élance du
sein des eaux a une hauteur trois fois plus grande que celle à taqueHe se
trouvent suspendus tes nuages en ~te. Si son cratère, à detnt-éteint depuis
des sièc!es, tancolt des gerbes de feu comune celui de Stromboli dans ie~
îles Éprennes, te Pic de TenëeiCe, semblable à uo phare, dirigeroit le navi-
gateur dans ujt circuit de plus de 260 lieues.
Quand nous f~nes assis sur le bord extérieur du cratère, nous dingeâmes
notre vue vers le nord-ouest, où les côtea sont ornées de villages et
de hameaux. A nos .pieds, des amas de vapeurs, ~onstaHHBent agites par
les ve~ts, oSroient le spectacle le plus varié. Une couche uniforme de
nuages, la m~ne dont nous avons parlé plus haut, et qui nous séparoit des
basses régions de l'ile, a voit été percée dans plusieurs enduits par l'eH~t
des petits courans d'air que la terre échaui~e par le soleil commençoit à
renvoyer vers aous. Le port de l'Orotava,. ses vaisseaux à l'ancre, les jardins
et les vignes, dont la ville est environnée, se présentoient à travers une
ouverture qui sembloit ~agrandie à chaque instant. D~ haujt de. ces régions
solitaires, no& regards plongeoient sur un monde habité nous~ jouimes
du contraste frappant qu'offrent les flancs décharnés du Pic~ ses pentes
rapides couvertes de scories, ses plateaux dépourvus de végétation,, avec
l'aspect riant des terrains cultivés nous vîmes les plantes divisées par zone,
selon que 1& température de l'atmosphère diminue avec la hauteur du sitet Au-
dessous du Piton, de& lichens commencent à couvrir les laves scofinéesetà surface
lustrée; une violette voisine du Viola decumbens, s'élève sur la pente du
volcan jusqu'à ï y~o toises de hauteur elle devance, non seulement !es autres
plantes herbacées, mais aussi les. graminées qui, dans les Alpes et suf le dos
des Cordillères, touchent immédiatement aux végétaux de la famille des
Cryptogames. Des touRes de Rétama, chargées de Neuis, ornent les petites

'VIoIachdranthifoU~~o~!emMPb'nMséqmiBMiat<a,Vo!.ï,p.ttt,PLxx~M
vallées que les toréas ont creusées, et qui sont encombrées par lèNët des
érNpt!bns latérales; au-dessous du Rétama vient h région des ~bngèrea bordée
de celle des bruyères arborescentes. Des iorets de lauriers~ de RMontis et
d'arbousiers séparent les Erica des coteaux plantés en vignes et en arbres traitîCM.
Un riche tapis dé verdure s'étenddBpuis la Plaine des Genets et la zoNë
des plantes alpines jusqu'aux groupes deDatiofs et de Musa, dont l'Océan
semble baigner le pied. Je ne fais qu'indiquer ici les traits principaux de'
cette carte botanique: je donnerai dans la suite quelques défaits sur la géographie
des plantes de Me de TénériSe.
L'apparence de proximité dans laquelle on voit, du sommet du Pic, les
hameaux, les vignobles et les jardins de la côte, est augmentée par la
prodigieuse transparence de l'atmosphère. Malgré le grand éloignement, nous
ne distinguions pas seulement les maisons, la voiluré des vaisseaux et le tronc
des arbres, nous voyions briller aussi, des plus vives couleurs, la riche végétation
des plaines. Ces phénomènes ne sont pas dus uniquement à la hauteur
du site; ils annoncent des modifications particulières de l'air dans les climats
chauds. Sons toutes les zones, un objet placé au niveau de la mer et
renvoyant les rayons dans une direction horizontale, paroit moins lumineux
que lorsqu'on l'aperçoit du sommet d'une montagne, où les vapeurs arrivent
à travers des couches d'air d'une densité décroissante. Des différences éga-
lemènt frappantes sont produites par l'in&uence des climats; la surface d'un
lac ou d'une large rivière brille moins lorsqu'on la voit à égale distance de la cime
des hautes Alpes de la Suisse, que lorsqu'on l'aperçoit du sommet des Cordillères
du Pérou ou du Mexique. Plus l'air est pur et serein plus la dissolution des va-
peurs est parfaite, et moins la lumière est éteinte à son passage. Lorsquedu côté
de la mer du Sud on arrive sur le plateau de Quito on sur celui d'Antisana, on
est frappé, les premiers jours, de la proximité dans laquelle on croit voir des
objets éloignés de sept à huit lieues. Le Pic de Teyde n'a pas l'avantage d'être situé
dans la région éqtnnoxiale, mais la sécheresse des colonnes d'air qui s'élèvent
perpétuellement au-dessus des plaines voisines de l'Afrique, et que les vents d'est
amènent avec rapidité, donne à l'atmosphère des îles Canaries une transparence
qui ne surpasse pas seulement celle de l'air de Naples et de Sicile, mais peut-étfe
aussi la pureté du ciel de Quito et du Pérou. Cette transparence peut être
considérée comme une des causes principales de la beauté du paysage sous la
zone torride c'est elle qui relève l'éclat des couleurs végétales, et contribue à
l'effet magique de leurs harmonies et de leurs oppositions. Si une grande
masse de lumière, qui circule autour (attgue, pendant une
des objets,
partie du jour, les sens extérieurs, 1'haBItant des climats méridionaux est
dédommagé par des jouissances morales. Une clarté brillante dans les con-
ceptions, une sérénité intérieure répondent à la transparence del'air environnant.
On éprouve ces impressions sans franchir les limites de l'Europe; j'en
appelle aux voyageurs qui ont visité les pays illustrés par les prodiges 'de
l'imagination et des arts, les climats heureux de la Grèce et de l'Italie.
En vain nous prolongeâmes notre séjour sur le sommet du Pic, pour
attendre le moment où nous pourrions jouir de la vue de tout l'archipel des
{les Fortunées Nous découvrîmes à nos pieds Palma, la Gomère et la
Grande Canarie. Les montagnes de Lancerote, dégagées de vapeurs au lever
du soleil, furent bientôt enveloppées de nuages épais. En ne supposant
que l'effet d'une rétraction ordinaire, l'ceil embrasse, par un temps serein,
de la cime du volcan, une surface du globe de S~oo lieues carrées, égale
au quart de la surfacede t'Espagne. On a souvent agité la question s'il est possible
d'apercevoir la côte d'Alriqne du haut de cette pyramide colossale mais
les parties de cette côte !es plus proches sont encore éloignées de TénériSe
de a" ~9~ en arc, ou de 56 lieues; or le rayon visuel de l'horizon du Pic
étant de 1° 5~, le cap Bojador ne peut être vu qu'en ~ui supposant
une hauteur de 206 toises au-dessus du niveau de l'Océan. Nous ignorons
absolument l'élévation des Montagnes Noires voisines du cap Bojador,
de même que cette du Pic appelé par les navigateurs jPcnoK grande,
et placé plus au sud de ce promontoire. Si le sommet du volcan de
TénériSe étoit plus accessible, on y observerolt sans doute, par de certains
vents, les effets d'une réfraction extraordinaire. En parcourant ce que les
auteurs espagnols et portugais rapportent sur l'existence de l'f!e fabuleuse de
San Borondon du Antitia, on voit que c'est surtout le vent humide de
l'ouest-sud-ouest qui produit dans ces parages des phénomènes de mirage
nous n'admettrons pas cependant avec M. Viéra <' que le jeu des réfrac-

la sente qui ne peut pas etM Tte,


1 De toutes les petites iles Canaries, la. Roche tte l'Est est
même par nn temps serein, Au haut du Hc. Sa distance est de 3" 5', tandis que celte. du Salage
n'est que de a° i'. L'ile de Madère, éloignée de 4° a~ ne seroit visible que si set montagnes
avoient plus de 3ooo toises d'élévation.
La refraction da para todo. ') ~Vf'ttCKM &M<f)rM!<M, T. t, p. io5. Nous avons déjà indiqué plus
haut que les fruits de t'Amériqne, jetés fréquemment par la mer sur les côtes des Met de Fer et de
Gomère, étoient attribues jadis amt végétatm de l'Ne de San Botonden. Cetteterre, 'que le peuple
tions terrestres peu~~endre visible, aux habitans des Ciaaanai, tes S~ ds
cap Vert et même les montagnes Apalaches de rAménque.
Le froid que nous -éprouvâmes sur la cime du Pic étoittr&s-considérable
pour ta saison dans laquelle nous nous trouvions. Le thermomètre 'centigrade
éloigné du sol et des fumaroles qui exhalent des vapeurs chaudes, descendit,
à t'ombre, à a°, Le vent étoit ouest, et par conséquent: opposé & celui qui
amène à TéuérISe, pendant une grande partie de l'année, l'air chaud qui
s'élève au-dessus des déserts brulans de l'Afnque. Connne la température de
l'atmosphère, observée au port de l'Orotava par M. Savagi, étoit de 22°,8;
le décroissement du calorique étôit d un degré par 94 toises. Ce résultat
s'accorde parfaitement avec ceux qui ont été obtenus par Lamanon et par
Saussure aux sommets du Prc et de l'Etna, quoique dans des saisons très-
différentes La forme élancée de ces montagnes offre l'avantage de pouvoir
comparer la température de deux couches de l'atmosphèrequi se trouvent
presque dans un même plan perpendiculaire;et~ sous ce rapporta les observations
faites dans un voyage au volcan de Ténérine, ressemblent à celles que
présente une ascension aérostatique. Il faut remarquer cependant que l'Océan
à cause de sa transparence et de son évaporation, renvoie moins de calorique
dans les hautes régions de l'air que ne le font les plaines aussi les cimes qui
sont environnées de la mer sonKiles plus froides en été que les montagnes qui
s'ctèvent au milieu des terres; mais cette circonstance influe peu sur le décrois-
sement de- la chaleur atmosphérique la température des basses régions se
trouvant également diminuée par la proximité de l'Occan.
Il n'en est pas de même de 1 influence qu'exercent la direction du vent, et la
rapidité du courant ascendant ce dernier augmente quelquefois d'une manière
surprenante la température des montagnes les plus élevées. J'ai vu monter le ther-
momètre, sur la pente du volcan d'Antisana, dans le royaume de Quito à in°

disoit gouvernée par un arcbevéque et M évequet, et que le père Fei;oo croit être t';maee de
File de Fer, reBéchie sur un banc de brume, fut cédée
au seMH:m<{ siècle, par le roi de Portugal, à
Louis Perdigon, au moment où ce dernier se prépara à en faire la conquête.
MM. Odonell et Armstrong observèrent, le a août t8o6, à huit heures du matin, sur ta cime
d~Pic, le thermomètre à l'ombre, à t3°,8, et au soleil a :M'5. Différence ou force du-soteit
6°,~ degrés centésimaux.
L'observation de LamMon donne 99 toises par degré du thermomètre centigrade, quoique
la
température du Piton diNrat de 9° de cette que nous observâmes.A l'Etna, le décMisjtement obsédé
par Saussure fut de 9~ toises.
lorsque nous nous trônâmes ~aSS~t~'sesd~ Mf LabIMardicM l'a vu
se soutenir, au bord dw cratère du Pic de Ténér~4 qaoiqu'll ei~
imaginâmes
employé toutes les précautioas pour éviter reSet des, causes
accideateUes. La K~p~tMre de la rade de Sainte-Croix savant ~lors à a8",
la di~rence, entre l'aide la cote et,le sommet du Pic, étottde 9",3 au
lieu de ao" qui eonfespondenta un d~cMussem~nt de calorique de 9~ toises par
degré. Je trouve, daas le journal de route de l'expédtHon de d'~tMcasteaux,
qu'à cette époque le ve~t, à Sanute-Croix, etoit sud-sud-est. Peut-être ce même
vent; souBloit-H plus impétueusement dans les hautes régions de l'atmosphère;
peut'eUe faisoit-U reuuer, dans une direction oblique, l'air chaud du con-
tinent voisin~ vers !a cimedn Piton. Le voyage de M. LabIHardièpe eut
d'aUkurs~ieu~le t? octobre ï~
et, dans les Alpes de la Suisse, on
a observé -que la diSMrence de température entre les montagnes et les plainM
est moins grande en aut~ïmme qu'en 4té. Toutes ces variations'de la rapidité
avec taque~e décroit le calorique, n'mOuent ~sur les mesures faites à l'aide du
baromètre, qu'autant ~ue le décroissement n'est pas uniforme, dans les couches
intermédiau'eS) et
([u'H ~'éteigne de la progression arithmétique ou JtMrmo-
nijpt~ que supposent les formules employées.
Nous ne pûmes nous lasser d admirer, sur le sommet du Pic, la couleur
de la voûte azurée du ciel. Son intensité au zénith nous parut correspondre
à du cyanometre. On sait, par les expériences de Saussure, que cette
intensité augmente avec la rareté de l'air, et que le même instrument indiquoit

~<y<~A&t F-ef~vAe A ~<y~«!Me, Vet.t, p. s3; Vol. H, p. S5.


Je réomirat ici tes résultais'de toutes tee observation~ thennometnquet &itesec Fie de Ténériffe et
qui sont propres à 6Mf le nombrede totset yu corre~)on<tent& am abaissetttent d'un deg~e cemt!grt<de )s
t.° ï)ortht(aamoMdetejtMmhre),
jusqn'attPtnd<tDo)'nBJito,to4toises{matut);
jnsqtt'it la Station des Rochers, ioy totset (mir);
)Msqt'& la glacière naturelle, t~g toises (matin);i
}<Mt[n'M pied du Mtom,t~ tuises~jttatt~);
jusqu'à la cime du Pic, )L3ytojses(matin);
2.° Lamanon (au moM d'août),

d'aYnt),
jusqu'à la cime, ~9 toises ( matin)
3.* Cordier ( an mOM

toises.

jusqu'à la Station des Rochers, taa toises ( soir )
jusqu'à la cime 115 toises (otatm);
4.°NotreYoyage(aumoisd~)mn), ·
jusqu'à la cime
à h même époque 3~° au pr~urë de Chamoaai, et b ~&
du Mont*
Btatic. Cette dernière montagne est de 5~o toises pïos é!évëé qae le voleMt
de TéneriSe~ et si y malgré cette dit~reaeë) CM y voit le tae~ d~tme MiMe~
bleue mains ~aneée~ il faut attribuer ce pb~notcè&e à ta eec~er~eë de
l'air africain et ataproximité de ~t zone torcMe.
Nous recueilumes de l'air au bord du cratère pour en faire l'analyse pendant
notre navigation en Amérique. Le flacon resta si b!en boucher qu'en l'ouvrant,
après un espace de d!x jours, !*eau y entra avec'forcé. Plusieurs expertences, faites
au moyen du gaz nitreux dans le tube étroit de t'eudiometre de Fontana, parois-
soient prouver que l'air dû cratère eonteno!t neuf centièmes d'oxygène de moins
que l'air de ta mer; mais j'ai peu de confiance dans ce résultat obtenu par un
moyen que nous regardons aujourd'hui comme assez inexact. Le cratère du Pic
a si peu de profondeur, et l'air s'y renouvelle avec tant de fa~ciute, qu'il n'est
guère probable que ta quantité d'azote y soit plus grande que sur les côtes.
Nous savons d'ailleurs, par les expériences de MM. Gay-Lussac et Théodore de
Saussure, que, dans les plus hautes régions de l'atmosphère et dans les plus
basses, l'air contient également 0,2 ï d'oxygène
Nous ne vîmes, au sommet du Pic, aucune trace de Psora, de Lécidée, ou
d'autres plantes cryptogames~ aucun insecte ne voltigeoit dans les airs. On
trouve cependant quelqueshyménoptères collés sur des masses de soufrehumectées
d'acide sulfureux, et tapissant l'ouverture des fumaroles. Ce sont des abeilles
qui paroissent avoir été attirées par les fleurs du Spartium nubigenum et que
des vents obliques ont portées dans ces hautes régions, comme les papillons
trouvés, par M. Ramond, à la cime du Mont-Perdu. Ces derniers périssent
de, froid, tandis que les abeilles du Pic sont grillées en s'approchant impru-
demment des crevasses auprès desquelles elles sont venues chercher de la
chaleur.
Malgré cette chaleur que l'on sent aux pieds, sur le bord du cratère, le
cône de cendres reste couvert de neige pendant plusieurs mois de l'hiver.
Il est probable que, sous, la calotte de neige il se forme de grandes

Pendant le séjour que nom avons fait M. Gay~usac et t&o!, a t'hosp.ce & Bf~nt-Cents,
a;
mois de mars t8o5, ne)M avons recueilli de l'air au milieu. d'an {brtement étectn~ue. Cet
nuage air
anatysé dans l'eudiomètre de Volta, ne contenoit
pas d'hydrogène, et sa puteté ne différoit pas d<
o,oo2 d'oxygène de l'air de Paris que nous avions porté avec nous dans des flacons hermétiquement
qui
fermés. Sur l'air a été recueilli 3 3405 toisesde bautenc,
voyez ~M. de C~tm~, T. LU, p. 9a.
voûces, semblables à celles que Hon trouve sous les glaciers de la Suisse,
dont la température est constamment moins élevée que celle du sol. ~ur
lequel ils, reposent Le vent impétueux et froid qui souilloit depuis le
lever du soleil, nous engagea à chercher un abri au pied du Piton. Nous
avions les mains et le visage gelés, tandis que nos bottes étoient brûlées
par le sol sur lequel nous marchions. Nous descendîmes, en peu de minutes,
le Pain de Sucre que nous avions gravi avec tant de peine, et cette rapidité
étoit en partie involontaire, car souvent on roule sur les cendres, Nous
quittâmes avec regret ce lieu solitaire, ce site dans lequel la nature se montre
dans toute sa majesté; nous nous flattions de revoir'un jour les îles Canaries,
mais ce projet, comme tant d'autres que nous formions alors) n'a pas
été exécuté.
Nous traversâmes lentement le Malpays le pied ne repose pas avec sûreté
sur des blocs de laves mobiles. Plus près de la Station des Rochers, la
descente devient extrêmement pénible le gazon, court et serré, est si
glissant, que pour ne pas tomber il faut continuellement pencher le corps en
arrière. Dans la plaine sablonneuse du Retama, le thermomètre s'élevoità a2°,5/
et cette chaleur
nous parut suffocante en la comparant à la sensation du froid
que l'air nous avoit fait éprouver au sommet du volcan. Nous étions absolument
dépourvus d'eau; nos guides, non contens de botre à la dérobée la petite provision
de vin de Malvoisie que nous devions à la bonté prévoyante de M. Cologan,
avoient aussi brisé les vases qui renfermoient l'eau. Heureusement ils avoient
laissé intact le flacon d))ns lequel nous avions recueilli rair du cratère.
Nous jouîmes enfin d'un peu de fraîcheur dans la belle région des fougères
et de l'Erica arborescent. Une couche épaisse de nuages nous enveloppoit; elle
se soutenoit à six cents toises de hauteur au-dessus du niveau des plaines
En traversant cette couche, nous eûmes occasion d observer un phénomène
qui, dans la suite, s'est présenté souvent à nous sur la pente des Cor-
dillères. De petits coùraus dair poussoient des traînées de nuages avec Une
vitesse Inégale et dans des directions opposées. Il nous sembloit voir des filets d'eau
qui se meuvent rapidement, et en tous sens, au milieu d'une grande masse d'eaux
dormantes. Les causes de ce mouvement partiel des nuages sont probablement
très-variées; on peut les chercher dans une impulsion venue de très-loin,
dans de légères inégalités du sol qui réfléchit plus ou moins le calorique

Voyez l'excellent ouvrage deM~de Stapter, ~c~BjMMore~Me<&) ~O&tr&mf~ p. 6t.


rayonnant, dans une dinerence de température entretenue par quelque action
chimique, ou enfin dans une forte charge électrique des vapeurs vésiculaires.
En nous approchant de la ville de t'Orotava, nous rencontfâïOes de grandes
bandes de Canaris Ces oiseaux, si connus en Europe, étoient d'un vert assez
uniforme; quelques-uns avoient sur le dos une teinte jaunâtre leur chant etoit le
même que celui des canaris domestiques on observe cependant que ceux qui ont
été pris à t'fle de Gran Canaria et au petit flot de Monte-Clara,près de Lancerote,
ont la voix la plus forte, et en même temps la plus harmonieuse. Sous toutes les
zones, parmi les oiseaux de la même espèce, chaque bande a son langage par-
ticulier. Les canaris jaunes sont une variété qui a pris naissanceen Europe;etceux
que nous vîmes dans des cages, à t'Orotâva et à Sainte-Croix de Ténériue, avoient
été achètés à Cadix et en d'autres ports d'Espagne. Mais, de tous les oiseaux des
îles Canaries,celui qui a le chant le plus agréable est inconnu en Europe c'est le
Capirote qu'on n'a jamais pu apprivoiser, tânt il aime sa liberté. J'ai admiré son
ramage doux et mélodieux, dans un jardin près de t'Orotava, mais je ne l'ai pas
vu d'assez près pour prononcerà quel genre il appartient. Quant aux perroquets
que l'on croit avoir aperçus lors du séjour.du capitaine Cook à Ténériue, ils
n'ont jamais existé que dans le récit de quelques voyageurs qui se copient les uns
les autres. Il n'y a ni perroquets ni singes dans les îles Canaries; et, quoique,
dans le nouveau continent, les premiers fassent des migrations jusqu'à la Caroline
septentrionale, je doute que dans l'ancien on en ait rencontré au nord du
28. degré de latitude boréale.
Nous arrivâmes vers la fin du jour au port de t Orotava, où nous trouvâmes
la nouvelle inattendue que le Pizarro ne mettroit à la voile que la nuit du
2q au 25. Si nous avions pu compter sur ce retard, nous aurions ou
prolongé notre séjour au Pic, ou entrepris une excursion au volcan de

Fringitta Canaria. La Caille rapporte, <]ans!aI<e!at!ondemnTnyageauCi)p,qu'a rite du Salvagc,


ces serins sont si abondant que dans une certaine saison on ne peut y marcher sans briser les epufs.
Comme beaucoup de voyageurs, qui abordent a Sainte-Croix de Tenériffe n'entreprennent pas
l'excursion au Pic, parce qu'ils ignorent le temps qu'il faut y employer, it sera utile de consigner
ici les données suivantes En se servant de mulets jasqu~a ta Station des Angtois, on met, de
l'Orotava pour aller au sommet du Pic et revenir au port, 21 heures; savoir, de tOrotavn au
Pino del Dornajito, 3 heures; du Pin ? la Station des Rochers, 6 heures; et de cette Station a ta
Catdera, 3 heures et demie. Je compte <) heures pour la descente. Il ne s'agit, dans ces évaluations
que du temps employé à la marche, et ancnnementde celai qui est nécessaire pour examiner les pro-
ductions du Pic, ou pour prendre du repos,. Une demi-journée sufut pour se transporter de Saintl-
Croix de Ténérilfe à l'OrotaYa.
7!e/c<M/t /<M<o<<7Me~ yn/y. I. jn
Chàhorra. Nous passâmes la journée du lendemain à visiter les environs, de
l'Orotava, et à jouir de la société aimable que mous onroit la maison de
M. Cologan. Nous sentîmes alors que le séjour de TénériNe n'est pas seulement
intéressant pour ceux qui ~'occupent de l'étude de la nature on trouve &
l'Orotava des personnes qui ont goût des lettres et de la musique, et qui
ont transplanté, dans ces climats lointains, l'aménité de la société de t'Europc.

espagnoles.
Sous ces rapports, à l'exception de la Havane, les Mes Canaries ressemblent peu
aux autres colonies
Nous assistâmes, la veille de la Saint-Jean, à une fête champêtre au jardin
de M. Little. Ce négociant, qui a rendu de grands services aux Canariens
lors de la dernière disette de grains, a cultivé une colline couverte de, débris
volcaniques. Ha formé, dans ce site délicieux, un jardin angtois; on y jouit
d'une vue magnifique sur la pyramide du' Pic, sur les villages de la côte
et sur file de Palma qui borde la vaste étendue de t'Océan. Je ne saurois
comparer cette vue qu'à celles des golfes de Gènes et de Naples mais
l'Orotava l'emporte de beaucoup pour la grandeur des masses et pour la richesse
dej)a végétation. A l'entrée de la nuit, la pente du volcan nous offrit tout-
a-coup un aspect extraordinaire. Les pâtres, fidèles à une coutume que sans doute
les Espagnolsont introduite, quoiqu'elle date de la plus haute antiquité, avoient
allumé les feux de la Saint-Jean. Ces masses de lumières éparses, ces colonnes
de fumée chassées par les tourbillons contrastoient avec la sombre ver-
dure des forêts qui couvrent les flancs du Pic. Des cris d'allégresse se faisoient
entendre de loin, et sembloient seuls interrompre le silence de la nature
dans ces lieux solitaires.
La famille de M. Cologan possède une maison de campagne plus rapprochée
de la côte que celle que je viens de décrire. Le nom que lui a donné
le propriétaire, désigne le sentiment qu'inspire ce site champêtre. La maison
de La Paz avoit d'ailleurs pour nous un intérêt particulier. M. de Borda, dont
nous déplorions la mort, l'avoit habitée pendant sa dernière expédition aux
îles Canaries. C'est dans une petite plaine voisine que ce savant avoit mesuré
la base à l'aide de laquelle il détermina la hauteur du Pic. Dans cette triangu-
lation, le grand dragonnier de l'Orotava servoit de signal. Si quelque voyageur
instruit vouloit un jour entreprendre, avec plus de précision et au moyen de
cercles répétiteurs astronomiques, une nouvelle mesure du volcan, il faudroit
mesurer la base, non près de l'Orotava, mais près de los Silos dans un
endroit appelé jy<M~~on M, Droussonoet, il n'y a pas ds plaine ra~pMchée
du Pic, qui offre plus d'étendue. En herborisant pfës de,
J~az, nous trou-
vâmes abondamment le Lichen roccella sur les rochers basaltiques baignés
par les eaux de la mer. L'orseUIe des Ganafiëa est une branche de commerce
très-ancienne; on tire cependant ce Licheonloins de l'Me deTénértSe que
des }les désertes duSaIvag€,deIaGraciosa,de l'Alegranza, et mémedeCanane
et de .Hierro.
Nous quittâmes le port de l'Orotava, le 3~ juin au matin;-nous dm&mes,
en passant par la Laguna, chez le consul de France, Il eut la complaisance
de se charger des collections géologSque& que nous avions faites et que
nous destinions au cabinet d'histoire naturelle du roi d'Espagne. En sortant
de la ville et en fixant les yeux sur la rade de. Sainte-Croix, nous fumes
alarmés par la vue de notre corvette te Pizarro qui étoit sous voile.
Arrivés au port, nous apprimes qu elle louvoyoit à. petites voiles pour
nous attendre. Les vaisseaux angtois, qui étoient en station devant l'île de
TénériSe, avoient disparu, et nous n'avions pas un moment à perdre pour
quitter ces parages. Nous nous embarquâmes seuls; car nos compagnons de
voyage étoient Canariens, et ne nous suivoient pas en Amérique. Nous
regrettâmes, parmi eux, Don Francisco Salcedo, fils du dernier gouverneur
espagnol de la Louisiane, que nous retrouvâmes à lue de Cuba après notre
retour de l'Orénoque.
Pour ne pas interrompre la relation du voyage à la cime du Pic, j'ai
passé sous silence les observations géologiques que j'ai faites sur la structure
de cette montagne colossale, et sur la nature des roches volcaniques qui
la composent. Avant de quitter l'archipel des Canaries, il sera utile de
nous
arrêter encore un moment pour réunir, sous un m<~ne point de vue, ce qui
a rapport au tableau physique de ces contrées.
Les minéralogistes qui pensent que le but de la géologie des volcans est de
classer des laves, d'examiner les cristaux qu'elles renferment et de les décrire
d'après leurs caractères extérieurs, sont ordinairement très-satisfaits lorsqu'ils
reviennent de la bouche d'un volcan enflammé. Ils en rapportent des collec-
tions nombreuses qui sont l'objet principal de leurs désirs. Il n'en est
pas de
même des savans qui sans confondre la minéralogie descriptive avec la

M. Hergen les a décrite!) dans les Annales de ciencias naturales qu'il pnbHées
a avec t'atbé Ca~an.Ues.
0'yc~nosM.
géognOsie, tendent à s'élever à dés idées d'un Intérêt gênera!, et cherchent,
dans l'étude de la nature, des réponses aux questions suivantes
La montagne conique d'un volcan est-elle entièrement formée de matières
liquéfiées et amoncelées par des éruptionssuccessives, ou feoferme~t-elledans son
centre un noyau de roches primitives recouvert de laves qui sont ces mêmes
roches altérées par le feu? Quels sont les liens qui unissent les productions
des volcans modernes aux basaltes, aux phonolites et à ces porphyres à base
fetdspathique qui sont dépourvus de quartz, et qui recouvrent les CordH)ères
du Pérou et du Mexique, comme le petit groupe des Monts-Dorés, du Cantal
et du Mézen en France? Le noyau central des volcans a-t-il été chauffé en
place, et* soulevé, dans un ',état'de ramollissement, par la force des vapeurs
élastiques, avant que ces fluides eussent communiqué, par un cratère, avec
l'air extérieur? Quetté est la substance qui, depuis des milliers d'années,
entretient cette combustion, tantôt si lente, tantôt si active? Cette cause
inconnue agit-eiïe à une profondeur immense, ou l'action chimique a-t-cue
lieu dans les roches secondaires superposées au granité?i'
Moins
ces problèmes se trouvent résolus dans les nombreux ouvrages publiés
jusqu'ici sur l'Etna et sur le Vésuve, et plus le voyageur désire voir de ses
propres yeux. Il se flatte d'être plus heureux que ceux qui l'ont précédé; il
veut se former une idée précise dès rapports géologiques entre le volcan
et les montagnes circonvoisines; mais, que de fois il est trompé dans
son espoir lorsque sur les limites du terrain primitif, dénormes
bancs de tuff et de pouzzolanes rendent impossible toute observation de
gisement et de superposition. On parvient dans l'intérieur du cratère avec
moins de difEcuttés qu'on ne le supposoit d'abord on examine le cône
depuis son sommet jusqu'à sa base; on est frappé de la différence qu'offrent les
produits de chaque éruption, et de l'analogie qui existe cependant entre les
laves d'un même volcan mais, malgré le soin avec lequel on interroge la nature,
malgré le nombre d'observations partielles qui se présentent à chaque pas,
on revient de la cime d'un volcan enflammé, moins satisfait qu'on ne l'ëtoit
en se préparant à y aller. C'est après qu'on les a étudiés sur les lieux que les
phénomènes votcaniqr'es paroissent plus isolés, plus variables, plus obscurs
encore qu'on ne se les figure en consultant les récits des voyageurs.
Ces considérations se sont présentées à moi en revenant du sommet
du Pic de TénériSe, le premier volcan actif que j'aye eu occasion de
visiter; elles m'ont frappé de nouveau chaque fois que, dans l'Amérique
méridionale ou au Mexique, j'ai eu occasion d'examiner des montagnesvol-
caniques. En réfléchissant sur le peu de progrès que les travaux des minéra-
logistes et les découvertes en chimie ont fait faire à la géologie physique
des volcans, on ne sauroit st: défendre d'un sentiment pénible il
l'est surtout
pour ceux qui, interrogeant la nature sous les climats divers, sont plus occupés
des proMèmes qu'ils n'ont pu résoudre que du petit nombre de résultatsqu'ils
ont obtenu.
Le Pic d'Ayadyrma ou d'Echeyde' est une montagne conique~ isolée,
placée dans un ilot d'une très-petite circonférence. Les savans qui ne consi-
dèrent pas à ta fois la surface entière du globe croient que ces trois
circonstances sont communes à la plupart des volcans. Ils citent, <t l'appui
de leur opinion, l'Etna, le Pic des Açores, la soufrière de la Guadeloupe,
les Trois-Satazes de l'ile de Bourbon, et cet archipel de volcans que renferment
la mer de l'Inde et le Grand-Océan. En Europe et en Asie, autant que
l'intéri eur de ce dernier continent a été reconnu, aucun volcan actif n'est
situé dans une chaîne de montagnes; tous en sont plus ou moins éloignés.
Dans le nouveau monde, au contraire, et ce fait mérite la plus grande
attention, les volcans les plus imposans par leurs masses font partie des
Cordillères mêmes. Les montages de schiste micacé et de gneiss du Pérou
et de la Nouvelle Grenade touchent immédiatement aux porphyres volca-
niques des provinces de Quito et de Pasto. Au sud et au nord de ces contrées,
dans le Chili et dans le royaume de Guatimata, les volcans actifs sont groupés
par rangées. Ils continuent pour ainsi dire la chaîne de roches primitives
et si le feu volcanique s'est fait jour dans une plaine éloignée des Cordillères
comme dans le Sangay et le Jorullo on doit regarder ce phénomène comme
une exception à la loi que la nature semble s'être imposée dans ces régions.
J'ai dû rappeler ici ces faits géologiques, parce qu'on a opposé ce prétendu
isolement de tous les volcans à l'idée que le Pic de Ténériffe et les autres
cimes volcaniques des îles Canaries sont les restes d'une chaîne de montagnes
submergée. Les observations qui ont été faites sur l'agroupement des vol-
cans en Amérique prouvent que l'ancien état de choses représente dans

Le mot ecbeydequi signiEe enfer dans la langue des Guanches a été transformé parles Européens
eu Teyde.
Deux vptcans des provinces de QmiMs et de Méchoacan, l'un de l'hémisphère austral, et t'antre
t
de hémisphère boréal.
la carte co~/<?ctMraZc /on~<?j de M. Bory de Saint-Vincent', n'est
que rien
aucunement contraire aux lois reconnues delà nature, et ne s'oppose
à admettre que les cimes de Porto Santo, de Madère et dès îles Fortunées
peuvent avoir forme jadis, soit un système parttculier de montagnes primi-
tives, soit l'extrémité occidentale de la chaîne de l'Atlas.
Le Pic de Teyde forme une masse pyramidale comme l'Etna, le Tungurahua
et !e Pppocatepec. H s'en faut de beaucoup que ce caractère physionomique
soit commun à tous les volcans. Nous en avons observé idans l'hémisphère
austral qui, au lieu d'offrir la forme d'un cône ou d'une cloche renversée, sont
prolongés dans un sens; ayant la croupe tantôt unie, tantôt hérissée de
petites pointes de rochers. Cette structure est particulière à l'Antisana et au
Pichincha, deux volcans actifs de la province de Quito; et l'absence de la
forme conique ne devra jamais être considérée comme une raison qui
exclut l'origine volcanique. Je développerai dans la suite de cet ouvrage
quelques-uns des rapports que je crois avoir aperçus entre la physionomie
des volcans et l'ancienneté de leurs roches. Il suffit d'observer ici en général
que les bimcs qui vomissent encore avec le plus d impétuosité, et aux
époques les plus rapprochées, sont des ~PzC~ ~Mc~t à forme conique; que
les montagnes à c~OM~e-y prolongées et héqtsées -de petites masses pierreuses
sont des volcans très anciens et près de s'éteindre, et que les sommités
arrondies en forme de dômes ou de cloches renversées annoncent ces porphyres
problématiques qu'on suppose avoir été chaudes en place, pénétrés par des
vapeurs, et soulevés dans un état ramolli, sans avoir jamais coulé comme de
véritables laves lithoïdes. Au premier de ces types appartiennent le Cotopaxi,
le Pic de Ténérine et celui dOrizava au Mexique; le second 3 est commun
au Cargueirazo et au Picbincha, dans la province de Quito, au volcan de
Puracé, près de Popayan, et peut-être aussi à l'Hecla en Islande, Le troisième a
et dernier de ses types se retrouve dans la forme majestueuse du Chimborazo,
et, s'il est permis de placer à côté de ce colosse une coMtne de l'Europe,
dans le Grand-Sarcouy en Auvergne.
Pour se former une idée plus exacte de la structure exteriedfe des
vo!cans, il est important de' comparer leur hauteur perpendiculaire à leur
circonférence. Cette évahiation n'est cependant susceptible de quoique pré-
cision, qu'autant que les montagnes sont isolées. et placées sur une plaine
qui se trouve à peu près au niveau de la mer. En calculant la circon-
férence du Pic de TénëriQe d'après une courbe qui passe par le port de
l'Orotava, par Garachico, Adexe et Guimar, et en, faisant abstraction des
prolongations de sa base vers la forêt de la Laguna et le cap Nord-Est de
l'iïe~ on trouve que ce développement est de plus de 5~ooo toises. La hauteur du
Pic est par conséquente de la circonférence de sa base. M. de Buch a trouvé
ce rapport de– pour le Vésuve, et, ce qui peut-être est moins certain, de –
pour l'Etna Si la pente de ces trois volcans étoit uniforme depuis le
sommet jusqu'à la base, elle seroit inclinée au Pic de Teyde de t2° 2Q'; au
Vésuve, de !2° ~t~;et à l'Etna de i oo t3~, résultat qui doit surprendre ceux
qui ne réfléchissentpas sur ce qui constitue une pente moyenne. Dans une montée
très-longue, des terrains inclinés de trois à quatre degrés alternent avec d'autres
qui sont inclinés de a5 à 3o degrés, et ces derniers seuls frappent notre imagi-
nation, parce que l'on croit toutes les pentes des montagnes plus rapides qu'elles
ne le sont effectivement. Je puis citer, à l'appui de cette considération, l'exemple
que présente la montée depuis le port de la Vera-Cruz jusqu'au plateau du
Mexique. C'est sur la pente orientale de la CordiHère qu'est tracé un chemin qui,
1
depuis des siècles, n'a pu être fréquenté qu'à pied ou à dos de mutet. Depuis l'En-
cero au petit village indien de las Vigas, il y a ~5oo toises de distance horizontale;i
et l'Encero étant, d'après mon nivellement barométrique, de 746 toises plus
bas que las Vigas, il ne résulte, pour la pente moyenne, qu'un angle
de 5°4o'.

Gilbert, ~MM<e/: der 7*~M~, B. 5, p. 455. Le Vésuve'a & t3;ooo palmes ou t8 milles marins
de circonférence. La distance horizontale de Résina au cratère est de 3~oo toises. Des minéralogistes
îtaliens ont évalué la circonférence de l'Etna de 84o,ooo palmes ou de no milles. Avec cette donnée
1
le rapport de la hauteur à la circonférence ne seroit que de y; mais je trouve, en traçant une courbe
par Catania, Paterno, Bronte et Piemonte, 6a mittes de circonférence, d'après des cartes les plus
exactes. Le rapport de augmente par Mt jusqu'à La base tombe-t-elle hors de la courbe que
j'indique?
J'ai réuni, dans une planche~ les pronts duPtede TénériSe, du
même
Cotopaxiet du Vésuve. Jaurois volontiers substitué à ce dernier l'Etna, parce
forme est ptu~natoguè à celle dés deux volcans d'Amérique et d'Afrique;
que sa
mais je n'ai vontu tracer que te contour des montagnes que j'ai visitées et
mesurées moi-même; et, quant à l'Etna, j'aurois manqué de données pour les
hauteurs intermédiaires. Je dois taireobserver encore que, dans les trois profils, les
échcttesde distances et de hauteurs ont les mêmes rapports. Les distances ont été
déterminées d'après les cartes de Zanoni, de Borda et de La Condamine. Le
lecteur, versé dans les opérations de nivellement ne sera pas étonné de la pente
très-douceque paroissent présenter ces profils. Dans )a nature, un plan incliné
sous un angle de 3S" paroit l'être de 5o". On ose à peine descendre en
voiture une pente de sa* et les parties des cônes volcaniques inclinées de
40° à 42° sont déjà presque inaccessibles, quoique le pied puisse former des
gradins en enfonçant dans tes cendres. Je réunis, dans une note particulière,
les expériences que j'ai faites sur les diCicuités que présente ta déclivité des
terrains montagneux
Les yotcans Isolés offrent, dans les réglons les plus éloignées, beaucoup
d'analogies dans leur structure. Tous présentent, à de grandes hauteurs, des
plaines considérables au milieu desquelles s étève un cône parfaitement arrondi.
C'est ainsi qu'au Cotopaxi les plaines de Suniguaicu s'étendent au-dessus de la
maiterie de Pansache. La cime pierreuse d'Antisana, couverte de neiges éter-
nelles, forme un îlot au milieu d'un immense plateau dont la surface est de

Dans des endroits où il y avoit à la fois des pentes concertes de gazon touBa et des sables mon-
vans, j'ai fait les mesures suivantes
5°, pente d'une inc)inaisomdéjà très-marquée. En France, les grandes routes ne peuvent pas, selon
la loi excéder 4° 46'
tS", pente très-rapide, que t'on ne peut pas descendre en voiture;
3~°, pente presque inaccessible à pied, si !e sol est un roc nu ou un gazon trop serré pour
qu'on puisse y former des gradins. Le corps de l'homme tombe 'en arrière lorsque le
tibia fait avec la plante du pied un angle plus petit que 53";
42°, pente la plus ineKnëe qu'on puisse gravir a pied dans un terrain sablonneux ou couvert de
cendres volcaniques.
Lorsque la pente est de 44°, it est presque impossible de )a gravir, quoique le terrain permette
d'y former des gradins en enfonçant le pit d. Les cônes des volcans ont une inclinaison moyenne
de 33 à 4o°. Les parties les plus rapides de ces cônes du Vésuvc, soit du Pic de TnneriBe, du volcan
de Pichincha et de Jorullo, sont de 4o" a 4a°. Une~ente de A5" est tout~a-fatt IuacoessiNc:vue
d'en haut, on la juge de ~5°.
douze Meaes carrée~ et dont ta hauteur surpasse de deux cents toises celle
du sommet du Pic de TénériSe. Au Vésuve, à trois cent soixante-dix
toises d'élévation, le cône se détache de la PMine de l'Atrid dei Cavalli.
Le Pic de TénériSe présente deux de ces plateaux dont supérieur est le
très-petit, et se trouve à la hauteur de HEtna, immédiatementan pied du
Piton, tandis que le second, couvert de touSes de Rétama (Spartium
nubigenum) s'étend jusqu'à l'jE~tanCM de los Tng~jc~. Celui-ci s'élève
au-dessus du niveau delà mer presque autant que la ville de Quito et le
sommet du Mont-Liban.
Plus une montagne a vomi par son cratère, et plus son cône de cendres est
élevé en raison de la hauteur perpendiculaire. du volcan entier. Rien de plus
frappant, sous ce rapport, que la différence de structure qu'offrent le Vésuve, le
Pic de TénériSe et le Pichincha. J'ai choisi de préférence ce dernier volcan,
limite inférieure des neiges perpétuelles.
parce que sa cime 1 entre à peine dans la
Le cône du Cotopaxi, dont la forme est la plus élégante et la plus régulière
que l'on connoisse, a 5~0 toises de hauteur, mais il est impossible de décider
si toute cette masse est couverte de cendres.

Hj~TEM TOTALE' RAISON DC CONE


NOMS DES voi-CANS..
entotses.
couvert a la
hauteur totate.
de cendres,

Vésuve. 606' t. 200' 1. y


––?"–'––––––––––––––––––––––"–
Pic de TénértNe.. tgo~' 84' `~ `'

Pichif~ha. s4<)o 1. s~o r?o

Ce tableau semble indiquer ce que nous aurons occasion de prouver plus


amplement dans la suite, que le Pic de TënériSe appartient à ce groupe de
grands volcans qui, comme l'Etna et t'Antisana, ont plus agi, par les flancs

J'ai mesuré le sommet de Pichincha, c'est-à-dire le monticule couvert de cendres, aa-desms du


tjano del Vulcan, au nord de l'Alto de Chuqmra. Ce monticule n'a cependant pas )a &rtne regutiere
d'un c6ne. Quant au Vésuve, j'ai indiqué la hauteur moyenne du Pain de Sucre, à cause de la
grande différence que présentent les deux bords du cratère.
que par le sommet. Aussi !é cratère place ai extrémité du Piton, cehnq~e
l'on désigne sous le nom de la Caldera, est-il singulièrement petit; et cette
petitesse avoit même déjà Trappe ?.
de Borja et d'autres voyageurs qui ne
s'occupoient guère de recherches géologiques.
Quant à ta nature des roches qui composent te sol de TénérISe, il faut
d'abord distinguer entre les productions du volcan actuel, et le système des
montagnes basaltiques qui entourent le Pic, et qui né s'élèvent pas au delà de
cinq à six cents toises au-dessus du niveau de l'Océan. Ici comme en Italie,
comme auMexique et dans les Cordillères de Quito, les roches de la formation
trapéenne 1 restent éloignées des coulées de laves modernes; tout annonce que
ces deux classes de substances, quoiqu'elles doivent leur origine à des phénomènes
analogues, datent cependant d'époques trës-diSerentes, Il est important, pour
la géologie, de ne pas confondre les conrans de laves modernes, les buttes
de basalte, de grünstein et de ph~no!Ite qui se trouvent dispersées sur les
terrains primitifs et secondaires, et ces masses porphyroïdes à base de feldspath
compacte qui n'ont peut-être jamais été parfaitementliquéfiées, mais qui
n'en appartiennent pas moins au domaine des volcans.
Dans l'fle de TénérISe, des couches de tuff, de pouzzolane et d'argile
séparent le système des collines basaltiques des coulées de laves lithoïdes modernes
et des déjectionsdu volcan actuel. De même que les éruptions de l'Epomeo dans
Itle dïschia et ctnes de Jorullo au Mexique ont eu lieu, dans des terrains
couverts de porphyres trapéens, de basaltes anciens et de cendres volcaniques,
le Pic de Teyde s'est e!evé au nulieu des débris de volcans sous marins.
Malgré la différence de composition qu'offrent les laves 'modernes du Pic,
on y reconnoit une certaine régularité de gisement qui doit frapper les
naturalistes les moins instruits en gébgnosie. Le grand Râteau des Genêts
sépare les laves noires, basaltiques et d'un aspect terreux, des laves vitreuses
et feldspathiques dont la base est de l'obsidienne, du pechstein et de la pho-
nolite. Ce phénomène est d'autant plus remarquable qu'en Bohême et en

Th~p-/brm<!<t<Mt renfermant les baltes, les griMM<MO, les porphyres trapéens, les phonolites ou
jforp/t~rsc/M'e/er~ etc.
Ces masses petrosiliceuses' enehasent des eristaux de feldspath vitreux souvent frittes, de
l'amphibole, des pyroxènes 1 un peu d'olivine et presque jamais de quartz. A cette formation très-
proNématique appartiennent les porphyres trapéens dn Chimborazo et de RIobamba en Amérique;
i
ceux des Monts t~uganéens en Italie, et du Siebergebirge en AUemagne, de même que les <<omt<eo
du Grand-Sarcuy, du Puy-de-Dôme, du Petit-Cteirsou, et d'une partie du Puy-Chopine en Auvergne.
d'autres parles de l'Europe, le ~o~p~~e~t~r à base de phonoHte recouvre
aussi les sommets bombés des montagnes basaltiques.
Nous avons déjà fait observer plus haut que, depuis le niveau de la mer
jusqu'au Portillo et jusqu'à Fentrée duPtateau des Cenets, c'est-à-dire sur deux
tiers de la hauteur totale du voléan, le sol est tellement couvert de végétaux
qu'il est difficile de faire des observations géologiques. Les coûtées de laves que
l'on découvre sur la pente du Monte-Verde, entre la belle source du Dornajito et
la Caravela, offrent des masses noires, altérées par la décomposition, quelquefois
poreuses, et à pores trës-atongés. La base de ces laves inférieures est plutôt de la
wakke que du basalte; lorsqu'elle est spongieuse, elle ressemble aux amygda-
ioïdes de Francfort-sur-le-Mein: sa cassure est généraiement inégale partout où
elle est conchoïde; on peut supposer que le~refroidissemcnt a été plus prompt,
et que la masse a été exposée à une pression moins forte. Ces coûtées ne
sont pas divisées en prismes réguliers, mais en couches très-minces et peu
régulières dans leur inclinaison;'eues renferment beaucoup d'olivines, de petits
grains de fer magnétique, et des pyroxènes dont la couleur passe souvent
du vert poireau foncé au vert olive, et que l'on pourroit être tenté de prendre
pour du péridot olivine cristatiisé, quoiqu'il n'existe aucun passage de
l'une à l'autre de ces' substances~. L'amphibole est en général très-rare à
TénérISe, non seulement dans les laves Mthoïdes modernes, mais aussi dans les
basaltes anciens, comme l'a observé M. Cordier, celui de tous les minéralogistes
qui a séjourné te plus long-temps aux îles Canaries. On n'a point encore vu au
Pic de Ténériffe de la népheline, des leucites, de tidocrase et de la mejonite car
une lave gris-rougeâtre, que nous avons trouvée sur la pente du Monte-Verde,
et qui renferme de petits cristaux microscopiques, me paroit être un mélange
intime de basalte et d'anatcime~. De même la lave de la Scala avec laquelle
la ville de Naples est pavée offre un mélange intime de basalte, de néphetine

.f/tn~m!~ Werner.
/i~ftitMKM<tgBr Mandelstein de la Steinkaute.
-S~e~ctM, ~tn<<&McA dér O~yt/o~oitMj T I, S. 3G4. Les cristaux que noms avons fait conno!tre,
M. Freiesleben et moi, sous la dénomimaHon d'Olivine feuiUetée (6&[<<rtger 0/~tn), appartiennent,
d'après M. Karsten, au Pyroxène Augite. /o«.r<M~ des mines de Freiberg, 1791, p. at5.
Cette substance~ que Dolomieu a découverte dans les amygdaloïdes de Catanea en Sicile, et qui
accompagneles stilbites de Fassa en Tyrol, forme, avec la èbabasie de Haüy, le genre cnbidte de Werner.
M. Cordier a trouvé à Ténériffe de la zéolithe dans une amygdatoMe qui est superposée aux basaltes
de la Punta de Naga.
et de leucite. Quant à cette derOtère substance, qui na encore e'e ouservee
qu'au Vésuve et dans les environs de Rome, eHe existe peut-être au Pic de
Ténériffe, dans des coulées anciennes qui sont recouvertes par des déjections
plus récentes: Le Vésuve, pendant une longue suite d'années a aussi vomi des
laves dépourvues de leucites et s'il est vrai, comme M. de Buch fa rendu
extrêmement probable que ces cristaux ne se forment qué dans les courans
qui sortent soit du cratère même, soit très-pré~ de son bord, il ne faut pas être
surpris de ne pas en trouver dans les laves du Pic qui sont ~presque toutes dues
à des éruptions latérales, et qui, par conséquent, ont été exposées à une énorme
pression dans l'intérieur du volcan.
Dans la Plaine des Genets, les laves basaltiques disparoissent sous des
amas de cendres et de ponces réduites en poussière. De là jusqu'au sommet,
de i5oo jusqu'à ïgoo toises de hauteur, le volcan ne présente que des laves
vitreuses à base de pechstein 3 et d'obsidienne. Ces laves, dépourvues d'am-
phibole et de mica, sont d'un brun noirâtre qui passe souvent au vert d'olive
le plus obscur. Elles enchâssent de grands cristaux de feldspath qui n'est pas
fendUté et qui est rarementvitreux. L'analogie que présententces masses décidément
volcamques
avec les porphyres résinites 4 de la vallée de Tribisch en Saxe,
est très-remarquable; mais ces derniers, qui appartiennent àtune formation
de porphyres métallifères~ très-répandus, contiennent souvent du quàrz qui

Par exemple en 1760, t~g4 et !8o5.


Leopold von BucA, Cco~nos<A'eBeo& T. n, S. aat. Gilbsrts, Annalen, T. 'Vt~ S. 53. L'eM-
tence des leucites ( amphygënes ) à t'Arendat, en Norwège en Ecosse, aux Pyrénées, en Trsmsytvimte
et au Mexique, n'est fondée sur aucune observation exacte.
3 Petrosilex résinite, Haüy.

~'ecA~em-otp~f, Werner.
5 On peut distinguer aujourd'hui quatre formations (7ïaMp<nMt&T~'en)<teporphyres la première
est primitive et se trouve en couches subordonnées dans le gneiss et dans le schiste tnicacé ( Isaac de
Freiberg); la seconde alterne avec la syenite, elle est plus ancienne que la Grauwa~e et appartient
vraisemblablementdéjà aux montagnes de transition, t/ete~an~ Ge&trgB. Elle renferme des couches
de pechstein et d'obsidienne, et même du calcaire grenu, comme nous en voyons t'exempte près de
Meissen en Saxe elle est tres-mëtaUif%ce,et se trouve au Mexique (Guanaxuato,Regta,etc.), en Norwege
en Suède et à Schemnitz en Hongrie. Le porphyre de Norwege couvre, près deS~eet~, (tetagrauwimke

le
roche
et de t'amygdaMde; il enchâsse des cristaux de quartz. Près de Hohnestrandt, une couche tte hasa!te
qui abonde en pyroxène, se trouve intercalée dans le porphyre de de Schetnnitz
Saxnm metalliferum de Perher et de Bbm) qui repose sur le thdnschteter~ est dépourvue de
quartz, et renferme de t'ampMhote et du feldspath commun. C'est cette seconde formation de por-
phyre qui paro!t avoir été le centre des plus anciennes révotntionsvolcaniques. La troisième formation
i,
manque dans les laves modernes. Lorsque la base des laves du Malpays fait
transition du pechstein & l'obsidienne, la couleur en est plus pâte et mélangée
de gris dans ce cas, le feldspath passe par des nuances insensibles du commun
au vitreux. Quelquefois les deux variétés se trouvent réunies dans un
même fragment, comme nous l'avons aussi observé dans les porphyres
trapéens de la vallée de Mexico. Les laves feldspathiques du Pic, beaucoup
moins noires que celles de l'Arso dans l'ue d'Ischia, blanchissent au bord du
cratère par l'effet des vapeurs acides mais leur Intérieur n'est aucunement
décoloré comme celui des laves feldspathiques de la Solfatare de Naples, qui
ressemblententièrement aux porphyres trapéens du pied du Chimborazo. Au
milieu du Malpays, à la hauteur <le la cave de glace, nous avons trouvé,
parmi les laves vitreuses à base de pechstein et d'obsidienne, des blocs de
véritable phonolite gris verdâtre ou vert de montagne, à cassure unie, et
séparés en plaques minces, sonores et à bords très-aigus. Ces masses sont iden-
tiques avec les porphyrschiefer de la montagne de Bilin
en Bohême; on y
reconnoît de très-petits cristaux alongés de feldspath vitreux.
Cette disposition régulière des laves lithoïdes basaltiques et des laves vitreuses
feldspathiques est analogue aux phénomènes que présentent toutes les

appartient an grès ancien (?M'M-~<-nf&), qui sert de base à la pierre calcaire alpine ( Alpen-
Kalkstein ou Zfchstein); elle renferme les amygdaloïdes agathiferes d'Oberstein dansle Palatinat,
et
recouvre quelquefois (eu Tburinge) des couches de houille. La quatrième formation des porphyres
est trapéenne, dépourvue de quartz, et surtout en Amérique, souvent mêlée d'olivine et de pyroxène; elle
accompagne les basaltes, les grimstem et les phonolites ( Ctumborazo, province de los Pastos, Dracbenfets
près de Bonn, Puy-de-Dôme). La classification des porphyres présente de grandes diaicuttës
le
granite, !e gneiss, le schiste micacé, le thonschiefer, le chloritbschiefer forment
laquelle chaque roche est liée à cette qui la précède. Les porphyres une série dans
au contraire se trouvent comme Isolés
dans le système géologique; ils offrent des transitions entre
eux, mais non aux substances sur lesquelles
ils reposent (S~A, ~o~M<. Beo& T. I, S. 56).,Comme dans le
reste de cet ouvrage it est souvent
question de porphyres volcaniqueset uon volcaniques, il m'a
paru indispensablede présenter le tableau
générât des formations tracé par t'ittustre chef de t'éeote de Freiberg, d'après
ses propres observations,
d'après celles de MM. de Buch, Esmark et Freiesleben, et d'après les miennes. Ces
grandes divisions,
susceptibles de beaucoup de perfectionnement, sont indépendantes de
toute hypothèse t'origine des
porphyres il ne s'agit ici que des rapports dé gisement, de superposition d'ancienneté sur
et relative. On peut

trapéens (7~). (~p~),


désignerles quatre formationsque nous venons de décrire,
de porphyres de transition
par les nomsde porphyres primitifs(
de porphyres secondes (f/p~)
En confondant la seconde et la quatrième de ces formations
t~c~yre)
et de porphyres
de laves porphyriques, on rejette la géognosie dans le sous le nom commun
vague duquel elle est à peine sortie il vaudra
autant embrasser le gneiss, le schiste micacé et le thonschle&r sous le
Mm général de roches feuiUctéei
et schisteuses.
montagnes trapéennes elle rappelle ces phonohMS reposant sur des
basaltes très-anciens,, ces mélanges intimes de pyroxenes et de feldspath
recouvrant des collines de wakke ou d'amygdaloïdes poseuses mais pour-
quoi les laves porphyriques ou feldspathiques du Pic ne se trouvent-
elles qu'ai la cime du volcan? ou doit on conclure de leur gisement
qu'elles sont d'une formation plus récente que les laves'Mthoïdes basal-
tiques qui renferment l'olivine et le pyroxène? Je ne saurois admettre
cette dernière hypothèse car des éruptions latérales ont pu couvrir le
noyau fetdspathique une époque où le cratère du Piton avoit cessé
d'agir. Au Vésuve aussi on n'observe de petits cristaux de feldspath vitreux
que dans les laves très-anciennes qu'offre le cirque de là Somma. Ces
laves, aux leucites près ~ressemblent assez aux déjections phonolitiques du Pic
de Ténénue. En général, plus on s'éloigne des volcans modernes, et plus les
coûtées, tout en. augmentant de masse et d'étendue, prennent le caractère de
véritables roches, soit dans la régularité de leur gisement, soit dans leur
séparation en couches paraUèles, soit <!n&n dans 4eur~~ndépeadanee de la
forme ~ctueUe du sol.
Le~ic de Ténérine est, après Lipari, le volcan qui a produit le plus
d'obsidienne. Cette abondance est d'autant plus frappante que, dans d autres
régions de la terre, en Islande, en Hongrie, au Mexique.'et dans !e royaume
de Quito, on ne rencontre les obsidiennes qu'à de grandes distances des volcans
actifs; elles sont tantôt dispersées sur les champs en morceaux anguleux comme
près de Popayan dans l'Amérique méridionale; tantôt elles forment des
rochers isotés, comme au Quinche près de Quito; tant6t; et ce gisement est
très-remarquable, elles sont disséminées dans la pierre perlée ( le perlstein
de M. Esmark ),
comme à Cinapecuaro dans la province de Méchoacan et
au Cabo de Gates en Espagne. Au Pic de Ténériffe, les obsidiennes ne se
trouvent pas vers la base du volcan qui est recouverte de laves modernes
cette substance ne devient fréquente que vers le sommet, surtout depuis la
Plaine des Retama, où l'on peut en recueillir de superbes échantiltons. Cette
position particulière, et la circonstance que les obsidiennes du Pic ont été
lancées par un cratère qui, depuis des siècles, n'a pas vomi de flammes,
favorisent l'opinion que les verres volcaniques, partout où on les rencontre,
doivent être considérés comme de formation très-ancienne.

A l'ouest de la ville de Mexico.


L'obsidienne, le jaoe et la pierre lydtque sont trois minéraux que; de tout
temps, les peuples qui ne connoissent pas l'Usage du bronzent du fer, ont
employés pour fabriquer des armes tranchantes. Dans les parties les plus éloignées
du globe, le besoin a fixé le choix sur les mêmes substances~nous voyons'
des hordes nomades tratner avec elles, dans des courses lointaines, des pierres
dont les minéralogistes n'ont pu jusqu'ici découvrir te gisement nature!. Des
haches de jade, couvertes d'hiéroglyphes aztèques, que j'ai rapportéesdu Mexique,
ressemblent, quant à leur (orme et à leur nature, à celles dont se servoient
les Gaulois, et que nous retrouvons chez les habitans des nés de l'Océan
Pacifique. Les Mexicains exploitoient l'obsidienne dans des mines qui
occupoient une vaste étendue de terrain ils en faisoient des couteaux,
des lames d'épées et des rasoirs. De même les Guanches, qui désignoient
l'obsidienne sous le nom de 7~&<MM~ en fixoient des éclats aux bouts
de leurs lances. Ils en faisoient un commerce considérable avec les îles
voisines et, d'après cet usage et la quantité d'obsidiennes qu'il falloit
casser avant d en tirer parti on doit croire que ce minéral est devenu
plus rare par la suite des sièdes. On est'surpris de voir un peuple atlantique
remplacer, comme les Américains, le fer par une lave vitrifiée. Chez l'un et
t'autre de ces peuples, cette variété de lave ét0!t employée
comme objet
d'ornement les habitans de Quito faisoient de superbes miroirs d'une obsidienne
séparée en couches parallèles.
Les obsidiennesdu Pic présentent trois variétés. Les unes forment des blocs
énormes de plusieurs toises de long et d'une forme souvent sphéroïde on croiroit
qu'elles ont été lancées dans un état ramolli, et qu'elles ont subi un mouvement
de rotation. Elles contiennent beaucoup de feldspath vitreux d'un blanc de neige
et du plus bel éclat de nacre. Ces obsidiennes sont cependant peu translucides
sur les bords, presque opaques, d'un noir brunâtre, et d'une cassure qui
n'est pas parfaitement conchoïde. EUes font transition au peehstein, et
on peut 1
les regarder comme des porphyres à base d'obsidienne. La seconde variété
se
trouve en fragmens beaucoup moins considérables; elle est généralement
d'un noir verdâtre, quelquefois d'un gris de fumée, très-rarement d'un
noir partait, comnie les obsidiennes du Hecla et du Mexique. Sa cassure
est
parfaitement conchoïde, et elle est éminemment translucide
sur les bords.
Je n'y ai reconnu ni amphibole ni pyroxène, mais quelques petits points
blancs qui paroissent du feldspath. Toutes les obsidiennes du Pic
sont
dépourvues de ces masses gris de perle ou bleu de lavande,
rayonnées
et à pièces séparées cunéiformes, qu'enchâssent les obsidiennes de QuitQ,
du Mexique et de Lipari et qui ressemblent aux lames fibreuses des
cristallites de nos' verreries sur lesquelles Sir James Hall, le docteur
Thompson et M. Fleurieu de BeUevue ont publié réGemment des observations
très-curieuses
La troisième variété des obsidiennes du Pic est ïa plus remarquablede toutes
à cause de ses rapports avec les ponces. Elle' est aussi d'un noir-verdâtre,
quelquefois d'un gris de fumée, mais ces lames très-mincesalternent avec des
couches de pierre ponce. Le superbe cabinet de M. Thompson, à. Naples,
offre des exemples analogues de laves lithoïdes du Vésuve, divisées en feuillets
très-distincts et qui n'ont qu'une'ligne d'épaisseur. Les fibres des pierres ponces
du Pic sont assez rarement parallèles entre elles, et perpendiculaires aux couches
de l'obsidienne le plus souvent elles sont Irrégulières,asbestoïdes,semblables à une
écume filamenteuse de verre au lieu d'être disséminéesdans l'obsidienne, comme
des cristaHites,elles se trouventsimplementadhérentesà une des surfaces extérieures
de cette substance. Pendant mon séjour à Madrid, M. Hergen m'avoit montré
de ces.échantillons dans la collection minéralogique de Don Jose Clavijo, 'et
depuis long-temps les minéralogistes espagnols les regardoient comme des
preuves incontestables que la pierre ponce tire son origine d'une obsidienne
décolorée et boursouflée par le feu volcanique. J'ai partagé jadis cette
opinion, qu'il faut restreindre à une seule variété de ponces; j'ai même
pensé, avec beaucoup d'autres géologistes, que les obsidiennes, bien loin
d'être des laves vitrifiées ~appartenoient aux roches non volcaniques, et que
le feu, se faisant jour à travers les basaltes, les roches vertes, les phonolites
et les porphyres à base de pechstein et d'obsidienne, les laves et les pierres
ponces n'étoient que ces mêmes roches altérées par l'action des volcans. La
décoloration et le gonflement extraordinaire que subissent la plupart des
obsidiennes à un feu de forge, leur passage au petrosilex résinite, et leur
gisement dans des régions très éloignées des volcans actifs, me paroissoient 2
des phénomènes très-difficiles à concilier, lorsqu'on considère les obsidiennes

.BtM. B.«ftmn., T. XV,~4o; T.'XXVH,p. t47..E< '~r<HMtc<i[o<M, Vo!. V, H. t, n.*5. ~Mtf7!~


de 7~y< an ta ~orAt~, et an i3 prairial. On a donné le nom de c~<<:N<M aux lames oristaHisÉes
qu'enchâsse le verre refroidi lentement. M. Thompson et d'autres naturalistes désignent, par le mot
verre glastenisé, la masse totale d'un verre qui, par un refroidissement lent, s'est <&M<r{~ et a pris
l'apparence d'une roche ou d'un véritaHe glas-stein.
~nn. du Mus. c!rt<!<. nat., T. III, p. 3g8.
comme des verres
volcaniques. Une étude plus approfondie de la nature, de
nouveaux voyages et, des observations faites sur les produits des volcans
enflammés, m'ont fait abandonner ces idées.
Il me parott aujourd'hui extrêmementprobable que les obsidiennes et les
porphyres à base d'obsidienne sont des masses vitrifiées dont le refroidissement
,a été trop rapide pour qu'eues se fussent
converties en laves lithoïdes. Je regarde
mêmele peristein comme une obsidienne dévitriâée,carparmiîesminéranx déposes
à Berlin, au cabinet du roi de Prusse~IIse trouye des verres volcaniques de
Lipari, dans lesquels on voit des cristallites striées, gris de perte et d'un aspect
terreux, se rapprocher graduellement d une lave lithoïde grenue, analogue à la
pierre perlée de Cinapecuaro au Mexique. Les bulles alongées qu'on observe
dans les obsidiennes de tous les continens, prouvent incontestablement
leur ancien état de fluidité ignée; et M. Thompson, à Palerme, possède des
échantillons de Lipari, qui sont très-instructifs sous ce rapport, parce qu'on
y trouve enveloppés des fragmens de'porphyre rouge ou de laves porphy-
riques qui ne remplissent pas entièrement les cavités de l'obsidienne. On
diroit que ces tragmens n'ont pas eu le temps de se dissoudre en entier
dans la masse liquéfiée; ils contiennent du feldspath vitreux et des pyroxènes,
et sont identiques avec les fameux porphyres colonnaires de 1 Me de Panaria
qui, sans avoir fait partie d'un courant de laves, paroissent soulevés en forme
de buttes, comme tant de porphyres en Auvergne, aux Monts-Euganéens et
dans les Cordillères des Andes.
L'objection contre l'origine volcanique des obsidiennes,tirée de leur prompte
décoloration et de leur gonflement a un feu peu actif, perd de sa force par
les expériences ingénieuses deSIr James Hall. Ces expériences prouvent qu'une
roche qui n'est fusible qu'à 38" du pyromètre de Wedgwood donne un verre
qui se ramollit dès les ï~< et que ce verre, refondu et dévitrifié (g/<M~!M~1,
ne se trouve de nouveau' fusible qu'à 35° du même pyromètre. J'ai traité au
chalumeau des ponces noires du volcan de l'île de Bourbon qui au plus
léger contact de la flamme, blanchissoient et se fondoient en un émail
blanc.
Mais que les obsidiennes soient des roches primitives sur lesquelles le feu
volcanique a exercé son action, ou des laves refondues à plusieurs reprises
dans l'intérieur du cratère, l'origine des ponces qu'elles enveloppent
au Pic
de Ténériffe n'en est pas moins problématique. Cet objet mérite d'autant
plus d'être traité ici, qu'il intéresse en général la géologie des volcans
et
qu'un excellent minéralogiste, après avoir parcouru avec fruit l'Italie et tes
Nés adjacentes, afnrme* qu'il est contretoute vraisemblance que les ponces soient
dues au gonflement de l'obsidienne.
En résumant les observations que j'ai eu occasion de faire en Europe,
aux iles Canaries et. en Amérique, je conclus que le motjMerre ponce ne
désigne pas un fossile simple, comme le font les dénomiaatioasde calcédoine oa
de pyroxène, mais qu'il indique seulement un certain état, une forme capillaire
fibreuse ou filandreusesous laquelle se présentent plusieurs Substancesrejetées par
les volcans. La nature d~ ces substances est aussi différente que l'épaisseur, la
ténacité, la flexibilité le parallélisme ou la direction de leurs fibres. On peut,
par conséquent, révoquer en douté si les ponces doivent trouver place dans un
système d'Oryctognosie ou si, de même que les roches composées, elles ne
sont pas plutôt du ressort de la Créognosie. J'ai vu des ponces noires dans les-
quelles on reconnoît facilement des pyroxènes et de l'amphibole; elles sont
moins légères, d'une contexture bulleuse, et plutôt criblées que divisées en fibres.
On seroit tenté de croire que ces substances doivent leur origine à des laves
basaltiques je les ai observées au volcan de Pichincha, de même que dans les tufs
du Pausilippe, près de Naples.- D'autres ponces, et ce sont les plus communes,
sont blanc-grisâtres et gris-bleuâtres, très-fibreuses et à fibres parallèles.
On y trouve disséminés du feldspath vitreux et du mica. C'est à cette classe
qu'appartiennent la~plupart des pierres ponces des îles Éoliennes, et. celles que
j'ai ramassées au pied du volcan de Sotara, près de Popayan. Elles semblent
avoir été primitivement des roches granitiques, comme Dolomieu' l'a reconnu
le premier dans son voyage aux îles de Lipari. Réunies en blocs énormes,
elles forment quelquefois des montagnes entières qui sont éloignées des volcans
actifs. C'est ainsi que les obsidiennes se présentent entre Llactacunga et
Hambato, dans le royaume de Quito, occupant un terrain d'une lieue carrée, et
en Hongrie, où M. Esmarck les a examinées avec soin. Ce gisement singulier a fait
penser au minéralogistedanois qu'elles appartenoientà des formationssecondaires,
et que le feu volcanique a percé les couches de ponces comme les obsidiennes
et les basaltes qu'il regarde également comme d'origine non volcanique. Une troi-
sième variété de ponces est celle ànbresfragHes,un peu épaisses, translucides
sur les bords, et d'un éclat presque vitreux qui offre le passage de la pierre

M. Fleuriau de Bellevue .P~T.


(Journ. de LX, p. 45i et 46t).
~o/age aux îles & Lipari, p. 67..M. ~MOt~ sur les lles Ponces,
p. 89.
ponce granitique au verre filandreux ou capillaire. Cest cette variété. qui est
adhérente aux obsidiennes vertes et grisâtres du. Pic de TéoériCe, et qui
semble produite par l'action du feu sûr des matières déjà vitnRées.
Il résulte de l'ensemble de ces considérations, qu'il est aussi peu exact
de regarder toutes les ponces comme des obsidiennes boursouflées, que d'en
chercher exclusivement l'origiue dans des granites devenus fissiles et fibreux
par l'action du feu ou par celle des vapeurs acides. H se pourroit que
les obsidiennes eUes-mêmes ne fussent que des granites liquéfiés'; mais il
faut distinguer, avec Spallanzani, entre les ponces qui naissent immédiatement
des roches primitives et celles qui, n'étant que des produits volcaniques altères,
e
varient comme eux dans leur composition Un certain état auquel passent
plusieurs substances hétérogènes ou le résultatd'un mode d'action particulier, ne
sumsent pas pour établir une espèce dans la classification des minéraux simples.
Les expériences de M. Da Camara et. celles que j'ai faites en 1802 viennent
à l'appui de l'opinion que les pierres ponces adhérentes aux obsidiennes du
Pic de Ténériffe n'y tiennent pas accidentellement, mais qu'elles sont
produites par l'expansion d'un fluide élastique qui se dégage des verres
compactes. Cette idée avoit occupé depuis long-temps à Quito un homme
aussi distingué par ses talens que par son caractère, et qui, sans connottre
les travaux des minéralogistes d'Europe, s'étoit livré avec sagacité à des
recherches sur les volcans de sa patrie. Don Juan de Larea, un de ceux que
la fureur des factions a immolés récemment, avoit été frappé des phéno-
mènes qu'offrent les obsidiennes, quand on les expose à la chaleur blanche. H
avoit pensé que, 'partout où les volcans agissent au centre d'un pays recouvert
de porphyres à base d'obsidienne, les fluides élastiques* doivent causer un
boursouflementde la masse liquéfiée, et jouer un rôle important dans. les trem-
blemens de terre qui précèdent les éruptions. Sans partager une opinion qui
semble hasardée, j'ai (ait, avec M. de Larea, une suite d'expériences sur le gonfle-
ment des verres volcaniques de Ténériffe et sur ceux qui se trouvent au Quinché,
e
dans le royaume deQuito. Pourjuger de l'augmentation de leur volume, nous avons
On reconno!t quelquefois, mais très-rarement, du mica dans les obsidiennes; etDotonuea croit
avoir trouvé non seulement le feldspath et le mica, mais encore du quarz dans les
ponces granitiques.
Yoyage aux îles .Poncer p. tM; ~o~B <tM~ îles de Z.~Mn, p. 83.
Le mot lave est plus vague encore que celui de pierre ponce. « II est tout aussi
peu philosophique de
demander une description extérieure de la lave comme espèce oryctognostique qu'il l'est de demander
les caractères généraux de la masse qui remplit les Oons.
« ~(~oM de jBt<c~ Geom<M<. Beo& <
Vol. 11, p. 173.
mesuré des morceaux exposés à nh feu de forge médiocrementactif, par, le moyen
du déplacement de l'eau dans un verre cylindrique, et en enveloppant la masse
devenue spongieuse d'une couche de cire très-mince. D'après nos expériences, les
obsidiennes se gonflent très-Inégalement ceHes du Pic et tes variétésnoires du
Cotopaxi et du Quinché augmentent près de cinq fois leur volume. Le gonflement
est, au contraire, peu sensible dans les obsidiennes des Andes, dont la coulenrest
d'un brun tirant sur le rouge. Lorsque la variété rougeâtre est mé!ée, en tantes
minces, à l'obsidiènne noire ou gris-noirâtre, la masse striée ressemble à ta ther-
mantide porcellanite 1, et les parties opaques résistent long-temps à l'action du
feu, tandis que celles qui sont moins riches en oxidé de fer se décolorent et se
boursouflent. Queiïe est cette substance dont le dégagement réduit l'obsidienne à
l'état d'une ponce blanche, tantôt fibreuse, tantôt spongieuse et à cellules alongées?
Il est facile de se convaincre qu'il se fait une véritable perte d'un principecolorant,
et que la décoloration n'est pas purement apparente, c'est-à-dire qu'elle n'est
pas due à l'extrême, ténuité à laquelle sont réduites les lames et les fibres du
verre volcanique. Peut-on admettre que ce principe colorant ? est un hydrure
de carbone, analogue à celui qui existe peut être dans les silex pyromaques si
faciles' à blanchir
par le feu? Quelques expériences que j'ai faites à Berlin, en
i8o6, conjointement avec MM. Rose et Harsten, en traitant les obsidiennes
de Ténériffe, de Quito, du Mexique et d'Hongrie dans des cornue& de porce-
laine, n'ont pas donné des résultats satisfaisans.
La nature emploie probablement des moyens très-différens pour produire
les ponces spongieuses e~ vitreuses de Ténériffe, les ponces à fibres parattètes
des îles Éoliennes et de Llactacunga 3, et les verres capillaires de l'tle de
Bourbon qui ressemblent quelquefois à de la toile d'araignée On peut
admettre que ces différences consistent principalement dans le degré de
chaleur du feu volcanique, dans la pression sous laquelle ce feuagit et
dans la nature des roches qui en sont modifiées. C'est la pression surtout
qu'éprouvent les obsidiennes dans leur fusion qui peut expliquer pourquoi ces
substances, à l'exception de quelques variétés que j'ai recueillies près de

Porzellan-Jaspis de Werner.
Il est remarquable que ce principe n'est pas toujours ëgale<nent To!atH. M. Gay-L)Msao a tn
récemment des obsidiennes de Faroë ne pas blanchir à un degré de chaleur qui décotoroit totalement
des obsidiennes du Mexique, quoique d'après les caractères extérieurs il eut été duEcUe de distinguer
ces substances les unes des autres.
3 Mntre Quito et Riobamba.

~Bo~~&n<mMn<oya~aM;t~<f~~Me,T.ïn,p.5o.
Popayan, ne se trouent presque jamais Manches. Parmi tes ponceS) ceues qui
paroissent se former à de grandes pro~ndeurs, sont ï~eases, à éclat
soyeux, qui abondent plus en mica qu'en Mdspath~e~d~B~testpteUeS)aux
Andes, sur des blocs de 8, à ïo toises de tong, les j5bfes sont exactement
parallèles entre eUes, et perpendicutaires a ht direction des couches. Aussi beau-
coup de volcans ne rejettent pas du tout de pie~M pon<5e, et ceux qui en lancent
par leur cratère ne le font qu'après l'écoulement des laves. Plusieurs minéralogistes
pensent que des roches primitives grenues peuvent être changées progressi-
vement et en place, soit par le feu, soit par une pénétration de vapeurs
chaudes et acides, en masses porphyroïdes, feuilletées ou fibreuses. Cette
opinion parott appuyée par l'existence des feldspaths fendillés et fibreux que
Ion trouve dans les porphyres trappéens de Quito:.ces cristaux ressemblent
à des fragmens rhomboïdaux de pierre poncée disséminés dans une domite
décolorée.
La couleur des pierres ponces du. Pic donne lieu à une autre observation
assez importante. Cette mer de cendres blanches qui entoure le Piton et qui
couvre la vaste Plaine des Genêts j est une preuve certaine de l'ancienne activité
du cratère; car, dans tous les volcans, lors même qu'il y a des éruptions
latérales, les cendres et les rapilli ne sortent, conjointement avec les vapeurs,
que de l'ouverture qui se trouve au sommet de la montagne. Or, à Ténériffe,
les rapilli noirs s'étendent au pied du Pic jusqu'au bord de la mer, tandis
que les cendres blanches, qui ne sont que des ponces broyées et parmi
lesquelles j'ai reconnu, à la loupe, des fragmens de feldspath vitreux et de
pyroxène, occupent exclusivement la région voisine du Piton. Cette distri-
bution particulière paroit confirmer l'observation faite depuis long-temps au
Vésuve, que les cendres blanches sont lancées les dernières, et qu'elles
annoncent la 6n de l'éruption. A mesure que l'élasticité des vapeurs diminue,
les matières sont projetées a une moindre distance, et les rapilli noirs qui
sortent les premiers, lorsque la lave a cessé de couler, doivent nécessairement
parvenir plus loin que les rapiili blancs. Ces derniers paroissent avoir subi
Faction d'un feu plus actif.
Je viens d'examiner la structure extérieure du Pic et la composition de
ses produits volcaniques depuis la région des côtes jusqu'à la cime du Piton
j'ai tâché de rendre ces recherches intéressantes, en comparant les phénomènes
que présente le volcan de Ténériffe, avec ceux que l'on observe dans
d'autres régions dont le sol est également miné par des feux souterrains.
Cette manière d'envisager la nature dans l'universalité desestapports, nuit
sans doute à la rapidité qui convientà an itinéraire; mai& j'ai pensé que, dans
une rietatidh dont le but principal est te progrès des connoissances physiques,y
toute autreconsidérationdevoitêtre subordonnée à, celles de ï'instraction et de
futilité. C'est en isolant les faits que des voyageurs, d'ailleurs estimables~ ont
donné naissance à tant .de fausses idées sur les prétendus contrastes qu'onre la
nature en Afrique, dans la Nouvelle- Hollande et sur le dos des Cordillères.
H en est des grands phénomènes géologiques comme de là forme des plantes
et des animaux. Les liens qui unissent ces phénomènes, les rapports qui existent
entre les formes si diverses des êtres organisés, ne se manifestentque lorsqu'on
a l'habitude d'envisager le globe dans son ensemble, et que l'on embrasse
d'un même cbup-dceil la composition des roches, les forces qui les altèrent,
et les productions du sol dans tes régions les plus éloignées.
Après avoir fait connoitre les matières volcaniques de l'fte de Ténérine, il
nous reste à résoudre une question qui est intimement liée aux recherches
précédentes, et qui, dans ces derniers temps, a beaucoup occupé les minéra-
logistes. L'archipel des îles' Canaries renferme-t-il quelque roche de formation
primitive ou secondaire, ou n'y observe-t-on aucune production qui
ne soit
modifiée par le feu? Ce problème intéressant a été examiné par les naturalistes
de l'expédition de Macartnéy et par ceux qui ont accompagné le capitaine Baudin
dans son voyage aux Terres australes. Les opinions de ces savans distingués
se trouvent diamétralement opposées et une contradiction de ce genre est
d'autant plus frappante, qu'il ne s'agit pas ici d'un de ces rêves géologiques
que l'on a coutume d'appeler des systèmes, mais d'un fait très-positif et
facile à vérifier.
Le docteur Gittan~ selon le rapport de Sir George Staunton', crut observer,
entre la Laguna et te port del'Orotava, dans des ravins très-profonds~ des lits
de roches primitives. Cette assertion, quoique répétée par beaucoup de voyageurs
qui se sont copiés les uns les autres, n'en est pas moins inexacte. Ce que M. Gillan
nomme, un peu vaguement, des montagnes <fa~c~M7ic ef~/n~MCtMCj
n'est qu'un terrain de transport que l'on trouve au pied de tous les volcans.
Les couches d'argile accompagnent les basaltes, comme les tufs accompagnent
les laves modernes. Nulle part à Ténérine, M. Cordier et moi, n'avons observé
une roche primitive, soit en place, soit lancée par la bouche du Pic, et

~oyog~ de Lord ~Macar~n~~ T. ï, p. t5.


l'absence de ces rognes caractérise presque toutes tes ttes de pett détendue
qui ont un volcan acti~ Nous ne savons rien de positif sur tes montagnes
des ~les Açores; mais il est certain que l'ne de la Réunion, de même que
TénériSe, n'oSre qu'un amas de laves et dë~ basaltes. Aucane roche votcanique
ne paroit au jour, ni dans le Gros-Mome', ni -dans le volcan de
Bourbon,
ni dans la pyramide colossale du Gimandef, qui est peut-être plus élevée
que le Pic des Canaries.
On assure cependant que des laves enveloppant des fragmens de granite ont
été trouvées dans le plateau du Rétama. M. Broussonet m'a mandé, peu de temps
avant sa mort, que, sur une colline au-dessus de Guimar, on avoit rencontré
des morceaux de schiste micacé contenant de belles lames de <er spéculaire.
Je ne puis rien affirmer sur l'exactitude de cette dernière observation, qui
seroit d'autant plus importante à vériner que 'M. Poli, à Naples, possède un
fragment de roche lancé par le Vésuve 3, que j'ai reconnu pour un véritable
schiste micacé. Tout ce qui nous éclaire sur le site du feu volcanique et sur
le gisement des roches soumises à son action <st du plus grand intérêt pour
la Géologie.
Il se pôurroit qu'au Pic de TénériSe, les fragmens de roches primitives,
rejetés par la bouche du volcan, fussent moins rares qu'ils ne le paroissent, et
se trouvassent amoncelés dans quelque ravin qui n'auroit point encore été visité
ttar les voyageurs. En effet, au Vésuve, ces mêmes fragmens ne se rencontrent
que dans un seul endroit, à la Fossa G~M~c, où ils sont cachés sous une
couche épaisse de cendres. Si, depuis long-temps, ce ravin n'avoit fixé l'attention

Des blocs degranite, lancés probablement par l'ancien volcan du Gros-Morne, se trouvent
près de la source des Trois-Rivières; et ce fait mérite d'autant plus d'attention que les iles voisines,
connues sous le nom des Sechelles, sont forméesde roches granitiques. Bo*y <& Notn<<ceenf~ ~oy<j~e
aux îles ~r~<M, T. t, p. 338 T. ÏI, p. 35, T. ÎH, p., t45 et a46.
~oty de &tM<ïncen<, JEMauM'~eo</e< ~%r<tfn~M~p. 278.
3 Dans le fameux cabinet de M. Thompson qui a séjourné à Naples jusqu'en i8o5, on trouve un
fragment de lave renfermant un véritaMe grànite qui est composé de feldspath rougeâtre et chatoyant
comme t'adutaire, de quart, de mica, d'amphibole, et, ce qui est très-remarquable,de lazulite; mais
en générât les masses de roches primitives connues, je veux dire celles qui ressemblent parfaitement
à nos granités, nos gneiss et nos schistes micacés, sont très-rares dans les laves les substances
que l'on désigne communément sous le nom de granites lancés par le Vésuve, sont des mélanges
de népheline, de mica et de pyroxène. Nous ignorons si ces mélanges constituent des roches sui
~ene~M, placées sous le granite, et par conséquent plus anciennes que lui, ou si elles forment
simplement, soit des couches interposées, soit des filons, dans l'intérieur des montagnes primitives,
dont les cimes paroissent à la surface du globe.
des naturalistes, lorsque
cles pluvMes
iorsqf~ les eaux pluvialesmettent à découvert des
des ntâisMa
mâSMa
de calcaire grenu ou d'autres roches primitives, on anroit cm celles-ci aussi
raresau Vésuve qu'elles le sont, du moins en apparence, au Pic de TénériS*
Quant aux fragmens de granité, de gneisset de schiste micacé, quel'onrencontre
sur les plages de Sainte-Croix et de l'Orotava, iisneviennentpasdescôtes opposées
de l'Afrique, qui sont calcaires ils sont probablement dus au lest des vaisseaux.
Ils n'appartiennent pas plus au sol sur lequel ils reposent que les laves
feidspathiques de !'Etna, que l'on observe dans le pavé de Hambourg et
d'autres villes du Nord. Le naturaliste est exposé à mille erreurs s'il perd de
vue les changemens que les communications des peuples produisent sur' la
surface du globe. On diroit que l'homme, en s'expatriant, veut que tout
change de patrie avec lui, Ce ne sont pas seulement des plantes, des insectes,
et différentes espèces de petits mammifères qui le suivent à travers t'Océan son
active industrie couvre encore les rivages de roches qu'il a arrachées au sol
dans des climats lointains.
S'il est certain qu'aucun observateur instruit n'a trouvé jusqu'ici à TénériSe
des couches primitives, ni même de ces porphyres trappéens et problématiques,
qui constituent la base de l'Etna et de plusieurs volcans des Andes, il ne
faut pas conclure de ce fait isolé que tout l'archipel des Canaries soit le
produit des feux sous-marins. L'tle de la Gomere renferme, des montagnes
de granite et de schiste micacé et c'est sans doute dans ces roches très-

Le chevalier Gioeni qui, cdtnme plusieurs minéralogistes d'Allemagne et de France, distingue


les basaltes des laves modernes, regarde t'Etna comme une montagne de porphyre surmontée de
basaltes colonnaires qui servent, a leur tour, de base aux laves fetdspathiqueo. Il n'y
a que ces
dernières qui paroissent dues au volcan actuel. Les basaltes et les porphyres appartiennent à un
système de montagnes plus anciennes, et qui recouvrent une grande partie de la Sicile. Les porphyres
de l'Etna sont volcaniques, sans doute mais toute roche qui doit sa composition et sa forme à
l'action du feu et des vapeurs, n'a pas fait partie d'un courant de laves. Ces éclaircissemens m'ont
paru d'autant plus nécessaires que quelques nunératogistes très-distingués ont affirmé récemment que
le Pic de TénériBe et le Vésuve étoientdes montagnes de porphyre d'origine neptunienne, et minées
par les <eu& souterrains. On n'a pas hésité de décrire comme une roche particulière, sous !e nom de
Graustein, la lave cMa&N~, quoiqu'elle soit sortie du cratère à une époque très-connue,en 1631; on
est atté plus loin encore on a supposé que la Somma présemtott le noyau intact du Vésuve, quoique sa
masse stratiEée, et traversée par des Nous remplis d'une lave plus récente, soit identique avec h roche
évidemment fondue qui constitue le cratère actuel. La Somma onre tes mêmes leucites qui abondent
dans la plupart des laves du Vésuve, et ces cristaux sont enchâssés dans une phonolite qui ressemble a
cette de lacune du Pic de Téhérimë.
Note manuscrite de J!roMMone<.
antennes qu'il faut chercher ici, comme sur toutes les parties dû globe le
centre de Faction voîcanique. L'amphibole, tantôt pure et formant des strates
interposés, tantôt mélëe au granité, comme dans !e basanite qu basalte des
anciens, peut, à elle sente, fournir tout le fer que conti$nnent les laves
lithoïdes et noires. Cette quantité ne s'éleye, dans le 'basaltedes minéralogistes
modernes, qu'à o,ao, tandis que dans l'amphibole elle excède o,3o.
Ces granites et ces schistes micacés de ta (cornera étoient-ils anciennement
réunis à la chaîne de l'Atlas, comme les montagnes primitives de la Corse
paroissent être le noyau central de la- Bocheta et des Apennins? Cette
question ne pourra être résolue qu~ lorsque des minéralogistes auront visité
les iles qui entourent le Pic et les montagnes de Maroc, couvertes de
neiges éternelles. Quel que soit un jonr le résultat de ces recherches,
nous ne saurions admettre, avec M. Peron « que, dans aucune
des îles
Canaries, on -ne rencontre de vrais granites, et que tout l'archipel étant
exclusivement volcanique, les partisans de l'Atlantide doivent supposer, ce qui
est également dénué de vraisemblance, ou un continent entièrement volca-
nique, ou bien que les seules parties volcaniques du continent ont été respectées
par la catastrophe qui t'a englouti.
D'après le rapport de plusieurs personnes instruites auxquelles je me suis
adressé, il y a des formations calcaires à la Grande-Canarie à Fortaventure et à
Lancerote 3. Je n'ai pu déterminer la nature de cette roche secondaire; mais
il paroit certain que l'île de TénérISe en est totalement dépourvue, et qu'elle
n'offre, parmi ses terrains d'alluvion, que des tufs argito-calcaires qui alternent
avec des brèches volcaniques, et qui, selon M. VIéra~, renferment, près du
village de la Rambla, à las û~er~ et près de la Candelaria, des végétaux,
des empreintes de poissons, des buccinites et d'autres
corps marins
fossiles. M. Cordier a rapporté de ces tufs qui sont analogues à
ceux des
environs de Naples et de Rome, et qui contiennent des fragmens de

.Co&)mM'M, dans teTbttr):. de -M/ t7<)S, p. 4t4..


~<y~e <& ~cottfer&MOmjt?'emM ~<M~a~M, T. 1, p. a4.
A Laucerote, on calcine la pierre catc~re
avec le feu atunenté par l'~M~g~ nonTeUe fiip~ee
de Sonchus ép!oeM. et arborescent.
~V.«e.~ AM<omMM/T. 1, p. 35. Ette de France, qui s'éteTe
en pyramide, et qui dans h
disposition de ses coUinesTotcamques,a beaucoup de rapports
avec TénérM~ a une plaine neptunienne
dans le quartier des Pamplemousses. Lècàtcairey
T. I, p. 207.
est rempli de madrépores. ~o~~e&<M<~MM~,
roseaux. Aux Mes Salvages, que <-<apeto<M~ jmt de totm potN* un amas ae
scones.on trouve m~me du gypftje~)~~
J'avois vu, en herborisant entre lé port de yOrotava et te jardin de !â
Paz, des amas de pierres calcaires grisâtres, & cassureintpartaitement conchoïde,
et analogues à )a formation du Jura et de t'Apeanin. <? m'avoit a
que ces pierres étoienttirées d'une carrière près de la RamMa, et
qu'it y en
avoit de semblables près de ~ealejo et à la montagne de Roxas, aa-dessus
d'Adexa. Cette indication, probaMement peu exacte, m'induisit en erreur.
Comme !es côtes du Portugal prësentent des basaltes superposes à la roche
calcaire coquIHère, je pensai qu'une même formation trappéenne, sembtabte à
celle du Vicentm en Lombardie.etduHarudje en Afrique, s'ëtendolt depuis
les bords du Tage et le cap Saint-Vincent jusqu'aux îles Canaries, et'
que les basaltes du Pic recouvroient peut-être un calcaire secondaire. J'énonçai
ces idées dans une lettre-qui n'ëtoit pas destinée à être publiée; elles m'ont
exposé à la critique sévère d'un physicien selon loquet toute île volcanique
n'est qu'une aecamutation de laves et de scortës~ <i qui n'admet aucun fait
contraire à sa théorie des volcans
Quoique Ténériffe appartienne à un groupe d'Mes d'une étendue assez con-
sidérable, lé Pic offre cependant tous les caractères d'une montagne placée
dans un Mot solitaire. Comme à Sainte-Hélène, la sonde ne découvre pas dé
fond dans les atterages de Sainte-Croix, de l'Orotavà et de Garachico:
FOcéan, de même que les continens, a ses montagnes et ses plaines; et,
Andes, tes cônes volcaniques
à l'exception des se forment partout dans les
basses régions du globe.
Comme le Pic s'est élevé au milieu d'un système de basaltes et de laves anciennes,
et que toute la partie qui en est visible au-dessus de la surface des eaux présente
des matières brûlées, on a supposé que cette immense pyramide est l'effet

Examen de quelques opinions géologiquesde M. de Hnmbotdt,


par M. G. A. Dehc (~oHn*. de
T. L, P. I, p. n 4 ). Ce mémoire, dans leouet on reconnoit excellent o~Mrvetem'~eMla continottMn d'un
un
Mémotre dingé contre M. Bnrwam, qui peate qne les !tTes du Vésuve reposent Mr le eateaire de
l'Apennin. A~ T. XLIX, p. a3. D'après 'la Théorie ~c&-dn<, mpasee par M. Mèt.uc, il
et tmpMMMo qu'une vérit«Ne lave renferme des débris de substancesvégétâtes. Cependant
nos cabinets
offrent des morceaux de troncs de pauniers, enveloppés et pénétrés de la lave U~-tiqmde de l':te de
Pourbon.VoyezleMéimo:remtéressantdeM.deFlenriau~.c.,T.LX~p.44j.
''r<ya~M~T.Ï,p.a87.~<y<t/e~)~rcAon~,T.Ï,p.54a.
d'âne acc<ïm)d&ti&n~p!rog)'esMvede Ïàves, oti qu'ettere&ferme dans son
centre un noyau de roches primittvBB. L'une et t'aMcë de ee$ suppositions
me pafoissent déaaée de ~raMembIance~ Je pense que J& o& neu$ vcyoM
aujourd'hui tes cimes du Pic~dnVesave et de l'Etat~ U a eiuate toutt
aussi peu des montagne de granité, de ~aeissom de càtca.re prtn~ii!i~'qa&
dans la ptaine où, presqNe de nOtretempS) s'est formé le volcan de Jorutto
qui a plus que te tiers de l'élévation du Vésuve. En examinant les circonstances
qui ont accompagné !a formation de la nouvelle lie de l'archipel des Acores
en lisant avec soin le récit détaillé et naïf que le jésuite Bourguignon
a donné de t'apparition lente de l'ilôt de ta Petite Kameni, près de SantorinO)
on reconnott que ces éruptions extraominaires sont généralement précédées
d'un soulèvement de, ta croûte ramollie du globe. Des rochers paroissent
au-dessus des eaux avant que les flammes se fassent jour et que la lave puisse
sortir du cratère; il faut distinguer entré le noyau soulevé et les amas de
laves et de scories qui, successivement) en augmentent tes dimensions.
Il est vrai que, dans toutes les révolutions de ce genre, qui ont eu lieu
depuis les temps historiques, la hauteur perpendiculaire du noyau pierreux
ne paroit jamais avoir excédé sent cinquante à deux cents toises, même en
faisant entrer en ligne de compte ta proibndemr de la mer dont le fond a
été soulevé .mais torsqu it s'agit des grands effets de la nature et de
l'intensité de ses forces, ce n'est pàs le volume des masses qui' doit arrêter
le géologue dans ses spéculations. Tout nous annonce que les <:hangemens
physiques, dont la tradition a conservé le souvenir, ne présentent qu'une
foible image de ces catastrophes gigantesques qui ont donné aux montagnes
leur forme actuelle, redressé les couches pierreuses et enfoui des coquilles
pélagiques sur le sommet des hantes AÏpes. C'est sans doute dans ces
temps reculés, qui ont précédé l'existence du genre humain, que la croûte

&t&mto AA~n~. Voyez la tettre du ttptMtme TïBat'd & Sir Joseph Bantt. ~M. ThtM. ~)r t8t9,
p. t5a. A l'île Sabriua, près de t'ite Saint-Michel, !e cratère s'ouïrit au pied d'un rocher solide et
de forme presque cubique. Ce rocher, terminé par un petit plateau parfaitement uni, a plus de
aoo toises de targenr. Sa formatimi est antérieure a ceHe du critère dtM teqeet, peu ~e jouM apre<
son ouverture, la mer fit une h~rmptmn. AL Kameni, la fumée ne fut même visible que TiBttt-tix jours
après l'apparition, des rochers soulevés. ~& Tram., Vol.. XXV! p. 69 et aoo; Vol. XXVH,
p. 353. Tous ces phénomènes, sur tesqnek M. HawMtM a recueilli des observations précieuses pendant
son séjour Santerino, ne favorisent pas tMee qu'on se forme tntgairementde t'ODpne des tBontagnes
volcaniques, par une accumulation progressive de mattères liquénees et par des epauohcmetM de laves
sorties d'une bouche centrale.
soulevé globe aa*produit
soulevée du globe produit dômes cesporphyrestrappeecs, ces
de porphyres
dômes de
buttes de basaltes isolées sur de vastes, plateaux, ces .noyaux solides
qui sont revêtus des laves modernes dn Pic, de l'Etna et du Cotopaxi.
Les révolutions volcaniques se sont succédées après de longs intervalles et
à des époques très-dinerentes. Nous en voyons les vestiges dans les montagnes
de transition, dans les terrains secondaires et dans ceux d'alluvion. Les
volcans plus anciens que les grès et les roches calcaires,sont éteints
depuis des siècles; ceux dont l'activité dure encore, ne sont généralement
environnés que de brèches et de tufs modernes mais rien n'empêche
d'admettre que l'archipel des Canaries puisse présenter de véritables roches
de formation secondaire, si l'on se rappelle que les feux souterrains s'y
sont rallumés au milieu d'un système de basaltes et de laves très-anciennes.
Ce seroit m'écarter trop long-temps de l'objet principal de mes recherches
que de poursuivre une carrière dans laquelle les conjectures remplacent
les faits géologiques. De ces temps obscurs où les élémens~ assmétis aux
mêmes lois, navoient pas encore atteint leur équilibre actuel, je reviens
à une époque moins tnmnituense, plus rapprochée de nous, et sur laquelle
la tradition et Ibistoire peuvent fournir des éctairpissemens. En vain cher-
chons-nous dans les Périples dHannon et de Scylax les premières notions
écrites sur les éruptions du Pic de TénériCe. Ces navigatenrjs se traînoient
timidement le long des côtes; rentrant tous tes soirs dans une baie pour y
mouiller, ils n'eurentaucuneconnnoissanced'unvolcan qui est éloigné de 56 lieues
du continent de rAfrIquA Cependant Hannon rapporte qu'il vit des torrens
lumineux qui sembloient se jeter à la mer; que, toutes les nuits, la côte
étoit. couverte de feux, et que la grande montagne, appelée le C&ar <~
Dieux, avoit paru lancer des gerbes de flammes qui s'élevoient jusqu'aux nues.
Mais cette montagne placée au nord de l'ue des Gorilles formoit l'extrémité
occidentale de la chaîne de l'Atlas; et il est en outre très incertain si
les embrasemens aperçus par Hannon étoient l'effet de quelque éruption

C'est dans cette Me que t'amu'at ~arthagmoit) vit, pour k première fois, une espèce de grands
singes anthropomorphes, les Gorilles. Il les décrit comme des femmes a corps entièrementveht et très-
méchantes, parce qu'elles se défendoient des ongles et des dents, Il se vante d'en avoir ecorthé trois pour en
conserver les peaux. M. Gosselin- place l'ile des Gorilles à l'embonchnrede la rivière de Nun mais
d'après ce rapprochement, t'étang où Hannon vit paitre une multitude d'étépbans se trouveroit sous les
35 degrés et demi de latitude presque à t'extrémité septentrionale de t'Afrique. ~ec~. sur la Géogr. des
~Cte~!<, T. I, p. /4 et 38.
volcanique, ou s'il ~ut les attnbner à l'babitnde qu'ont tant de peuples de
mettre le feu aux forets et à Therbe sèche des savanes. De nos jours,
des
doutes semblables se sont présentes à l'esprit des naturalistes qui, dans
l'expédition du contre amiral d'Entrecasteaux, ont va Me d'Amsterdam
couverte d'une fumée épaisse'. Sur la côte de Caracas,
des tratnées de
feu rougeâtre alimenté par de l'herbe enflammée, m'ont oSert, pendant
plusieurs nuits, l'aspect trompeur d'un courant de laves qui descendoit des
montagnes et se partageoit en plusieurs branches.
Quoique les journaux de route d'Hannon et de Scylax, dans l'état où
ils nous sont parvenus, ne renferment aucun passage que l'on puisse
raisonnablement appliquer aux îles Canaries, il est pourtant très-probable
que les Carthaginois et même les Phéniciens ont eu connoissance 2 du
Pic de Ténérine. Du temps de Platon et d'Aristote, des notions vagues
en étoient parvenues aux Grecs, qui regardoient toute la côte d'Afrique, située
au delà des colonnes d'Hercule, comme bouleversée par le feu des volcans 3.
Le site des Bienheureux, qu'on avoit cherché d abord dans le Nord, au
delà des Monts Riphées, chez les Hyperboréens 4, et puis au sud de la
Cyrenaïque, fut placé dans des terres qu'on se fignroit vers l'ouest, là on
nnissoit le monde connu des anciens. Le nom d'nes Fortunées eut long-temps
une signification aussi vague que celui du Dorado chez les premiers
conquérans de l'Amérique. On se figuroit le bonheur à l'extrémité de la
terre, comme on cherche les jouissances les plus vives de l'esprit dans un
monde idéal au delà des limites de la réalité.

~<yogB de ZaK&nicMre T. 1, p. n a. Voyage de <fjE'!<rf<'<M<eaM;r, T. I, p. 45.


Voyez une notice de M. Ide!er, ineêrée dans mM ThMmM de &t jVa<t<re T. 1, p. 14 ), et CoMe&'m
/!efA.,T.t,p.t35-t53. Un des savans tes plus illustres de l'Allemague M. Heeren, pense que les îles
(
Fortan~e~de Diodore de Sicile sont Madère et Porto Santo, .~f/mta, T. 1, p. 04. ~a&e-BrMn, ~M<.
de la Géogr. p. y6, go et tgt. )
3 Arist. Mirab. Auscultat. (ed. C<M<M<&.), p. 704. Solin dit de l'Atlas, tW<M' Mmpfr <ttMi/M &<ee<
noctMrnM ~nt&M<; mais cet Atlas qui, semblableà la montagne Merh des Hindoux, oSre un mélange d'idées
positives et de fictions mythologiques, M'étoit pas situé sur une des îles Hespérides, comme l'admettent
t'abbeVtéra,etapresMptnsieursyoyagen!'6quiontdecrit'IePicdeTénér!tfe(/~Tent, T. t p. aa5
B6ty<<eNam<t':een<,p.3n5). ). Les passages ~aivans ne laissent.aucun doute à cet égard. ~en)d' IV, )84
~ato, XVU (~Fh~eon~ T. Il p. ttG~); Meta, nI, io; Pline, V, t, &att, a4, et m~me
\0;ot<.&e~.m(~e.!M/.T.I,p.a2)).
.~Mnert, Geogr. der Grieclaen, T. IV, S. Sy. Mdée du bonheur, de la grande civilisation et
de la richesse des habitaas du Nord étoit commune aux Grecs, aux peuples de l'Inde et
aux Mexicains.
M Ne taut pomt être surpns quavant~rtStOM on ne tcottve um~nw ~c~
graphes grecs aucune action exacte sur luîtes Canaries et les votcana qu'elles
renierment.LeseKlpeapIedontlesNav~gatMnssesoieBtetendue&ver&l'ouestctle
nord, les Carthaginois, avoit de l'Intérêt à ~eteruayoHe mystérieux sar ces
réglons teintâmes. Le Sénat de Carthage ~'opposant à toute emigration
partielle, désigna ces ~les comme an lieu de rétuge dans des temps de troubles
et de malheurs publics elles devoient être pour les Carthaginois ce que le
sol libre de l'Amérique est devenu pour les Européens~ au milieu de leurs
discordes civiles et religieuses..
Les Canaries n'ont été mieu~ connues des Romains que quatre vingts ans
avant le règne d'Octavien. Un simple particulier voulut exécuter le projet
qu'une sage prévoyance avpit dicté auSénat de Carthage. Sertorius, vaincu
par Sylla, fatigué, du tumulte des armes, cherche un asyle sur et paisible.
Il choisit.les îles Fortunées, dont on lui trace un tableau attrayant sur les
côtes de la Bétique. Il réunit avec soin les notions qu'il peut acquérir par
les voyageurs; mais dans le peu qui nous a~été~ transmis de ces notions
et des descriptions plus détaillées deSebosus et de Juba, il n'est jamais ques-
tion! de volcans et d'éruptions volcaniques.A peine y reconnoît-on l't!e de TénériNe
et les neiges dont le~sommet du Pic est revêtu en hiver,, dans le nom de
~Vït~r~ donné à l'une des îles Fortunées. On pourroit conclure de là, que le
volcan ne lançoit pas de flammes à cette époque, s'il étoit permis, d'interpréter
le silence de quelques auteurs, que nous. ne connoissons que par de simples
fragmens ou par d'arides nomenclatures. Le physicien cherche en vain dans
l'histoire les documens des premières éruptions du, Pic; il n'en trouve
nulle part que dans la langue des Guanches, dans laquelle le mot Echeyde I
désignoit à la fois l'Enfer et le volcan de TénériSe.
De tous les témoignages écrits, le plus ancien que j'aie trouvé de l'activité
de ce volcan date du commencement du seizième siècle. ït est conMhu dans
la relation du voyage d'Atoysio Cadamusto, qui àborda aux Canaries

La même montagne porta le nom d'~M~mM, dans lequel Hotn(<~ O~~t)~. ~m<fWc.,p. t5g
et i85 ) croit r~c<Htno!hre 'l'ancienne dénomination de l'Atlas, qui d'apte Straboa, Ptine et So!in
étoit /~rM. Cette ëtymotogie est assez dMMe<me; mais, en n'accordant pas pt)M ~'{Mperttnce aux
voyelles qu'eUes n'en ont chez les penptea de t'Onent, on retfnuve presque <n eiattef .Z~fM dans le mot
Daran, par lequel les géographes arabes daignent la partie orientatednMent-AUas.
Kec silendum puto de insula TeneriBr quœ et e~imie colitur et inter orbis instdas est eminentior.
Nam cocto sereno eminoscompic'tnr, adeo ut qui absunt ab ea ad teneas hispanas seMg!nta vêt
sep-
en t5o5. Ge voyager lae
fat tëmom d'aucune érapMon;ntaM il amrme
positivementque, semblable à l'Etna, eeMe nMatagne br&te sans~ ;nter-
ruptian, et que le &a en & été aperça par des Ght~tteae letenas comme
esclaves par les Guaocbes de TénériSe. Le Pie n'ëto~ done pomt alors
dans cet état de repos dans lequel nous le voyons aojoard'hm car il est
certain qu'aucun navigateur et aucun habitant de TeBérUte n'ont vu sortir
de la bouche du Pic, je ne dirai pas des flammes mais seulement une
fumée qui fut visible de loin. Peut-~tre seroit-it à désirer que le soupirai!
de la Caldera s'ouvrit de nouveau; les éruptions latérales en seroient
moins violentes, et tout le groupe diles auroit moins à craindre les eSeta
des tremblemens de terre
J'ai entendu, à FOrotava, agiter la question, si l'on peut admettre
que, par la suite des siècles, le cratère du Pic recommencera à agir. Dans
une matière aussi douteuse, l'analogie seule peut servir de guide. Or,
d'après te rapport de Braccini, l'intérieur du cratère du Vésuve étoit couvert
d'arbustes en t6tï. Tout y annonçoit la plus grande tranquittitë; et cependant,
vingt années après, le même gou~ïre, qui paroissoit se transformer en un
vallon ombragé, lançoit des gerbes de feu et une énorme quantité de
cendres. Le Vésuve redevint aussi actif en i63i qu'il t'avoit été en ï5ob.
Il seroit possible de même que le cratère du Pic changeât de face un jour.
C'est une solfatare semblable à la solfatare paisible de Pouzzole; mais elle
est placée à la cime d'un volcan encore actif.
Les éruptions du Pic ont été très-rares depuis deux siècles, et ces
longues intermittences paroissent caractériser les volcans extrêmement élevés.
Le plus petit de tous, Stromboli, est presque perpétuellement en activité.
Au Vésuve, les éruptions sont déjà plus rares, quoique encore plus
fréquentes que celles de l'Etna et du Pic de TénérUïe. Les cimes colossales des
Andes, le Cotopaxi et le Tungurahua, vomissent à peine une fois par siècle.

tuaginta non difeculteream intueantur. Quod cernatur a longe Mt efficit acuminatus lapis adamantunM,
instar pyraipidisin medio. Qui metiti sunt lapidem ahmt altitudine leucarum quindecim mensuram Mce-
dere ab imo ad summmn verticem. ïs tapis jugiter Nagrat, instar ~tn<6 montis; id aSnnant nostri Chrit-
tiani qui capti atiquando ha'c animadvertere. ~~Mt Ca<<anMM<t~V<tf~<t<M) ad <Brr<M Mco~tf~tM c. 8.
A TénénBe, les secousses ont été jusqu'ici peu considérables, et de ptus limitées à de petites
étendues de terrain. On observe la même chose à l'île de Bourbon, et presque partout au pied des volcans
actifs. A Naptes,les tremblemensde terre précèdentles éruptions du Vésuve; ils cessent lorsque la lave
s'est fait jour et its sont en générât très-foibles en comparaisonde ceux que fon épronve la
sur pente
des Apennins calcaires.
On diroit que, dans les volcans actifs, la fréquence des éruptions est en raison
inverse de la hauteuret de la masse. Aussi le Pic avoit paru éteint pendant
quatre-vingt-dou~e ans, lorsqu'on 798 il
6t sa dernière éruption .par une
ouverture latérale formée, dans la montagne de Chahorra. Dans cet intervalle,
le Vésuve a vomi seize ibis.
J'ai exposé, dans un antre endroit', que toute la partie montueuse du
royaume de Quito peut être regardée comme un immense volcan qui occupe
plus de 700 lieues carrées de surface, et qui jette des flammes par dinérens
cônes désignes sous les/dénominationsparticulières de Cotopaxi, de Tungurahua
et de Pichincha. De la même manière, tout le groupe des îles Canaries est
placé, pour ainsi dire, sur un même volcan sous-marin. Le feu s'est fait
jour tantôt par l'une, tantôt par l'autre de ces îles. Ténériffe seule renferme
dans son centre une Immense pyramide terminée par un cratère, et vomis-
sant de siècles en siècles des laves par ses flancs. Dans les autres nés.,
les diverses éruptions ont en lieu en diSérens endroits~ et l'on n'y trouve pas
de ces montagnes isolées auxquelles les effets volcaniques sont restreints.
La croûte basaltique, formée par d'anciens volcans,y semble minée partout;
étales coulées de laves
que l'on a vu paro~tre à Lat~cerote et à Patma
rappellent, sous tous les rapports géologiques, l'éruption qui eut lieu, en i3oi,
à nie d'Ischia, au milieu des tufs de l'Epotneo.
Voici le tableau des phénomènes volcaniques. dont les, historiens des îles
Canaries ont conservé la mémoire depuis le milieu du seizième siècle

ArmEE !558.

Le i5 avril, époque à laquelle l'île de Ténériffe fut ravagée pour la


première fois par la peste Importée du Levant. Un volcan s'ouvre dans l'tte
de Palma, près d'une source, dans le Partido de los Llanos. Une montagne
sort de terre; il se forme un cratère à la cime, qui vomit un courant de laves
de cent toises de largeur, et de plus de aSoo toises de longueur. La lave se
jette à la mer, et, en élevant la température de leau, elle fait périr les
poissons à de grandes distances à l'entour.

GAt~r. f<~< p. t3o.


Ce même phénomène a eu lieu en t8[t, près des Açores, lorsque le volcan de Sabrina s'onvrit
dans le fond de l'Océan. Le squelette calciné. tl'an reqnin fat ttoaré dans te cratère inonde et
éteint.
'<?
–' A.[)N)ÉËï6t;ë.

Le ï3 novembre, une bouche s'ouvre dans Mie de F~?M<t~ près de Tigalate.


Deux autres se forment au rivage de la mer. Les laves~ sortent de
JFueate Santa,
ces crevasses Cent tarir la fameuse source de Foncaliente ou 1
dont les eaux minérales attiroient les matades qui s'y rendoient méaie de
l'Europe. Selon une' tradition populaire, l'éruption cessa d'une manière assez
étrange. L'image de Notre-Dame-des-Neiges de Sainte-Croix fut portée a
l'ouverture du nouveau volcan, et soudain il tomba une si énorme quantité
de neige, que le feu en fut éteint. Dans les Andes de Quito, les Indiens croient
avoir observé que l'abondance des eaux de neige inSItrées augmente l'activité
des volcans.
ANNÉE ï6~.
Troisième éruption à Hie de Palma. La montagne de las Cabras jette
des scories et des cendres par une-multitude de petites bouches qui se forment
successivement.
ANNEEl~O~.

Le 3i décembre. Le Pic de T~n~~e fait une éruption latérale dans la


plaine de los Infantes, au-dessus d'Icore, dans le district de Guimar. D épouvan-
tables tremblemens de terre ont précédé cette éruption. Le 5 janvier ï~o5,
une seconde bouche s'ouvre dans le ravin d'Ahnercbiga, à une lieue d'lcore.
Les laves sont si abondantes que toute la vallée de Fasnia ou d Areza en est
comblée. Cette seconde bouche cesse de vomir le ï3 janvier. Une troisième
se forme, le 2 février, dans la Canada de Arafb. Les laves divisées en trois
courans menacent le viltage de Guimar, mais elles sont retenues dans la
vallée de Melosar par une arrête de rochers qui leur oppose un obstacle
Invincible. Pendant ces éruptions, la ville d'Orotava, séparée des nouvelles
bouches par une digue très-étroite, ressent die fortes secousses.

ANNEE ï~o6.

Le 5 mai. Autre éruption latérale du Pic de T~n~T~e. La bouche s'ouvre


au sud du port de Garachico qui étoit alors le port le plus beau et le plus
fréquenté de l'ile. La ville, populeuse et opulente, étoitMUe an bord d'une foret
de lauriers, dans un site très-pittoresque.Dëuxcourans de laves la détrutStreht
aucun edince ne resta sur pied. Le port, qui avoit déjà
en peu d'heures:
souffert en j645 par les atternssemens qu'avoit causes une grande inondattôn,
fut comblé au point que les laves accumulées formèrent un promontoîre au nHIien
de son enceinte. Partout, dans les environs de GaracbicO, la surface du terrain
changea d'aspect. Des monticules s'élevèrent dans taplainej les sources dispa-
rurent, et des rochers, ébranlés par de fréquenstremblemensde terre, restèrent
nus, sans végétation et sans terreau. Les pêcheurs seuls conservèrent l'amour
du site natal. Courageux, comme les habitans de Torre del Greco, ils recons-
truisirent un "pettt village sur des amas de scories et sur le roc vitrifié.

<
ANNÉE 1730.

Le i.~ septembre. Une révolution des plus eSrayantes bouleverse la montée


de File de Zonccrotc.Un nouveau volcan se forme à Temanfaya. Les laves
qui enjlécoulent et les tremblemens de terre qui accompagnent l'éruption,
détruisent un grand nombre de villages, parmi lesquels se trouvent les trois
anciennes bourgades gnanches de TIngafa, Macintate et Guatisca. Les secousses
durent jusqu'en t~Sô~ et les habitans de Lancerote se sauvent en grande partie
à l'tle de Fuertaventura. Pendant cette éruption, dont nous avons déjà parlé
dans le chapitre précédente on voit sortir de la mer une colonne de fumée
épaisse. Des rochers pyramidaux s'élèvent au-dessus de la surface des eaux, et,
en s'agrandissant, ces nouveaux écueils se réunissent peu à peu à l'ue m~me.

ANNÉE 1~9~.

Le g juin. Éruption latérale du P~c de y~T~,parIeSaacde:Iatmontagne


de Chahorra ou Vengea, dans un lieu entièrement meutte, an sud d'tcod,
près du village de Gma, l'ancien Ïsora. Cette montagne, adossée au Pic, a été
de tout temps regardée comtnè un volcan éteuit. Quoique formée de matières
solides, elle est, par rapport au Pic, ce que le Monte-Rosso élevé en ï66ï,
ou les Boche nuove ouvertes en ï7~4, sont à l'Etna et au Vésuve. L'éruption

La pente de la montagne de Venge, sar laqueMe se fit Mntptton, s'appelle GtMajaEe. Voyez
.KTco&M &<n(<o de JRrctnyMt, dans Cocont~M y B?rge~ ~M&e de historia 7!a<«t«<, T. 1, p. agX.

"f
de Chaberra dura ~rois mois et s}x jours. Les laves jet les scènes durent lancées
par quatre bouches placées sur même ligne. La lave amonceléeà trots
une
ou quatre toises de hauteur s'avança de trois pieds par heure. ,Cette éruption
n'ayant précède que d'un an mon arrivée à TénénnB, l'impression en étoit encore
très-vive parmi les haMtans.Je via chez M. Le Gros, au Dumsno, un dessin
des bouches de Chahorra, qu'il avoit fait sur les lieux. Don Bernardo Cologan
avoit visité ces bouches huit .jours après leur ouverture, et il avoit décrit
les principaux phénomènes de cette éruption dans un mémoire dont il jne
remit une copie pour linsérer dans la Relation de mon voyage. Treize
années se sont écoulées depuis cette époque; et M. Bory de Saint-Vincent
m'ayant devancé dans la publication de ce mémoire, je renvoie le lecteur à
son intéressant Essai sur les <&M J~b~Mn~c~ Il ne me reste ici qu'à donner
quelques écJaircissemens sur la hauteur à laquelle des fragmens de roches très-
considérables furent projetés par les bouches de Chahorra. M. Cologan 2 compta
12 à t5 secondes pendant la chute de ces pierres,c'est-à-dire en commençant
à compter du moment où elles avoient atteint le maximum de leur hauteur.
Cette expérience curieuse prouve que la bouche lança des roches à plus de
trois mille pieds de, hauteur.
Toutes les éruptions marquées dans ce résumé chronologique appartiennent
aux trois îles de Palma, de Ténérine et de Lancerote II est probable
qu'avant le seizième siècle, les autres îles ont aussi éprouvé les effets du feu
volcanique. On m'a donné quelques notions vagues d'un volcan éteint qui
est situé dans le centre de l'tle de Fer, et d'un autre dans la Gran Canaria,
près d'Arguineguin. Mais il seroit curieux de savoir si l'on trouve les traces

Bory de &tMt~tneen<, p. 396.


Trois de ces pten~s, dit M. Bory, demeurèrent douM quuMe secondes pour s'étever jusqu'à
perte de vueet pour retomber à terre." S!tBMeétoit!'o!MeFmtKni deM.Mngan, le résuttat du calcul
seroit dirent de celui que j'ai donné. Mais l'observateur dit tout etpr&a, dans le manuscrit que je
conserve: «De noehe se observ& con re!ot en numo y a muy corta distancia de la tercera bocca det
.yotcan de Chahorra el tiempo que desde en mas alto punto de eteraeion hasta perderlas de vista en sm
caida, gastaban las piedras mas facites de distimgatry de très conque se bizo la expenencia, dos cayeMn en
die!! segondos cada ona y ta otra en quinze. » M. Cotogan observe
que ta durée de la chute étoit même un
peu au dèlà de quinze secondes, parce qu'il ne put suivre les pierres jusque leur contact avec la terre.
Çe, genre d'observation est susceptible d'une grande exactitude, comme je m'en suis assuré dans des
expériencesanalogues que j'ai faites pendant t'ëmption du Vésuveen t8o5.
~a ~vo~Mt., T. n, p. 4o4 T. 1M, p. t5t, a38, 35~ ,556 et 5i6.
de feux souterrains dans les fonnàtions calcaires de Fuertaventure oadant~ÏiM
gravites et les schistes micacés de la GomèM. é `'
L'action purement latérale du Pic de Ténérifïe est un phénomène gëolo-
gique d'autant plus remarquable qu'elle contribue à faire pâroitre isolées les
montagnes qui sont adossées au volcan principal. H est vrai que dana
l'Etna et le Vésuve, les grandes coulées de laves ne viennent pas non
plus du cratère même, et que l'abondance des matières fbndnes est ~éiRéra-
lement en raison inverse de la hauteur à laquelle se 'fait la crevasse! qui
vomit les laves. Mais, au Vésuve et à l'Etna~ une éruption latérale finit
constamment par un jet de flammes et dé cendres qui se fait pari le cratère
c'est-à-dire par le sommet même de la montagne. Au Pic de TénériSe, ce phé-
nomène ne sest point manifesté depuis des siècles. Encore récemment dans
1 éruption de ~798, on a vu le cratère dans la plus grande inaction. Son fond
ne s'est point aBaissé, tandis qu~au Vésuve comme l'observe ingénieusement
M. de Buch, Ja profondeur plus ou moins considérable du cratère est un
indice presque infaillible de la proximité d'une~ouvelle éruption.
Je pourrois terminer ces aperçus géologiques en discutant quel est le
combustible qui entretient, depuis des milliers d'années, le feu du Pic de
Ténériffe; je pourrois examiner si ce sont le Sodium et le Potassium, ou les
bases métalliques des terres, ou des carbures d'hydrogène, ou le soufre pur et
combiné avec le fer qui brûlent dans le volcan; mais voulant me borner à ce qui
peut être l'objet d'une observation directe, je ne me hasarderai pas à résoudre
un problème sur lequel ndus manquons encore de données suffisantes. Nous
ignorons s'il faut conclure de l'énorme quantité de soufre que contient le cratère
du Pic, que c'est cette substance qui entretient la chaleur du volcan, ou si
le feu, alimenté par un combustible d'une nature inconnue, opère simplement
la sublimation du soufre. Ce que l'observation nous démontre c'est que dans f

les cratères encore actifs, le soufre est très-rare, tandis que les volcans anciens
finissent tous par être de véritables soufrières. On diroit que dans les premiers
le soufre se combine avec l'oxygène, tandis que dans autres il est purement
sublimé car rien ne nous autorise jusqu'ici à admettre qu'il se forme dans
l'intérieur des volcans comme l'ammoniac et les sels neutres. Ijprsqu'on ne
connoissoit encore le soufre que disséminé dans le gypse muriatifère et dans
la pierre calcaire alpine, l'on étoit. presque forcé de supposer que dans toutes
les parties du globe le feu volcanique agissoit sur des roches de formation
secondaire; mais des observations récentes ont prouvé que le soufre existe
abondamment dans c~ mènes roches primitives que tant de phénomènes
désignent comme le centre de l'action yolcaniqae.Pre~d'Alausi,sur le dos des-
Andes de Quito, j'en ai trouvé itne immense quantité dans une couche de qttarz
interposée à des couches de schiste micacé et ce fait est d'autant plus impor-
tant qu'il se lie très-bien à l'observation de ces fragmens de'roches anciennes
qui sont rejetés intacts par les volcans.
Nous venons de considérer l'île de Ténénne sous des rapports purement
géologiques; nous avons vu s'élever le Pic au milieu des couches fracturées de
basalte et d'amygdaloïde examinons maintenant comment ces masses fondues
se sont revêtues peu à peu d'une enveloppe végétale, quelle est la distribution
des plantes sur la pente rapide on volcan, quel est l'aspect ou la physionomie
de la végétation dans les Mes Canaries.
Dans la partie septentrionale de la zone tempérée, ce sont les plantes cryp-
togames qui couvrent les premières la croûte pierreuse du globe. Aux lichens
et aux mousses qui développent leur feuillage sous la neigea succèdent
les graminées et d'autres plantes phanérogames. Il n'en est point ainsi sur les
bords de la zone torride et dans les pays renfermés entre les Tropiques. On y
trouve, il est vrai, quoi qu'en aient dit quelques voyageurs, non seulement sur
les montagnes, mais aussi dans les endroits humides et ombragés, presque
au niveau de la mer, des Funaria des Dicranum et des Bryum ces
genres, parmi leurs espèces nombreuses, en offrent plusieurs qui sont com-
munes à la Lapponie, au Pic de Ténérine et aux montagnes bleues de la
Jamaïque cependant, en général, ce n'est pas par les mousses et les lichens
que commence la végétation dans les contrées voisines des deux Tropiques.

ïl faut distinguer en géognosie sept formations de soufre, qui sont d'une ancienneté relative très-
dIHerente- La première appartient au schiste micacé (Cordillères de Quito) la seconde, au gypse de
transition ( Bex en Suisse ) ta troisième, aux porphyres trappéens ( Antisana en Amérique, Montserrat
dans l'Archipeldes petitesAntilles, Mont-d'Or en Frasée); la quatttème, à la pierre calcaire alpine (Sicite)
la cinquième, au gypse mnr!atifere, placé entre le grès et le calcaire alpin (Thuringe) la sixième, au
gypse qui est plus récent que la craie (Montmartre, près Paris); et la septième, aux terrains d'alluvion
argileux(Venezuela, Bas-Orénoque, Mexique). Ilest presque inutile de faire remarquerici que, dans cette
enumération. il n'est point question de ces petites masses de soufre qui ne sont pas contenues dans des
couches, mais dans les Ctons qui traversent des roches de diverses formations.
Ce fait extraordinaire, sur lequel nous reviendrons par la suite, a été observéd'abord par M. Swart.
Il s'est trouvé eonErmé par l'examen soigneux que M. Willdenow a fait de nos herbiers, surtout de la
collection de plantes cryptogames que nous avons recueillies sur le dos des Andes, dans
une région
du monde oud'aUleuM les êtres organisés dictèrent totalement de ceux de l'ancien continent.
Aux îles Canaries, comme en Guinée et sur les côtes rocheuses du Pérou, les
.premières plantes qui préparent le terreau sont les plantes grasses, dont les
feuilles munies d'une infuuté d'ori&ces et de vaisseauxcutanés enlèvent à l'an*
rochers~volca-
ambiant l'eau qu'il tient en dissolution. Fixées dans les fentes des
niques, elles forment pour ainsi dire cette première couche végétale dont
sont scorifiées
se revêtent les coulées de laves lithoïdes. Partout où ces laves
et où elles ont une surface lustrée comme dans les buttes basaltiques placées au
nord de Lancerote, le développement de la végétation est d'une lenteur
extrême, et plusieurs siècles suuisent à peine pour y faire naître des arbustes.
C'est seulement lorsque les laves sont couvertes de tufs et de cendres, que les
îles volcaniques perdent cette apparence de* nudité qui les caractérise dans
leur origine, et qu'elles se parent d'une j~ehe et brillante végétation.
Dans son état actuel, l'île de Tén~mne~ le <C%t'<c~ des Guanchès, offre
cinq zones de plantes que l'on peut distinguer par les noms de Région
des Vignes, Région des ~Lauriers, Région des Pins, Région du Retama
et Région des Graminées. Ces zones sont placées, comme par étages, les
unes au-dessus des autres, et elles occupent, sur la pente rapide dû Pic,
une hauteur perpendiculaire de i ~5o toises, tandis que quinze degrés plus au
nord, dans les Pyrénées, les neiges descendent déjà jusqu'à treize ou quatorze
cents, toises d'élévation absolue. Si les plantes, à, TënérISe, n'atteignent pas
le, sommet du volcan, ce n'est point parce que des glaces éternelles 4 et !e froid
de l'atmosphère ambiant leur posent des limites qu'elles ne peuvent franchir

Les pores corticaux de M. De CandoUe, découvertspar Gleicnen et figurés par Hed~ig.


De C/tMef/e, les Européens ont fait, par corruption T~Atne~e et ï~n~rt~i'.
3J'ai tracé en partie ce tableau de la végétationdes Canaries d'après des notes manuscritesde M. Brous-
sonet. Lorsque je publiai mon premier Essai Mtr la ~o~t~Ate des plantes <omttoXMt&< du !t«t«'<'<N<
consent, je priai ce cél~renatnraUste, qui aToitr&idétong-temps& à Mogador dans t'empire
de Maroc et à Sa!n)e-Çroix de T~nérif~, de me communiquer ses idées sur la distribution géographique
des végétaox dans ces contrées. n céda à ma prière avec cette prévenance et cette amabilité ~u'it a
constamment déployées dans ses relations avec les savans étrangers.
Quoique ]e Pic de TénériBe ne <e couvre de neiges que pendant les moM d'hiver, il se pourroit
cependant que le volcan atteignît ta limite des neiges perpétuelles, qoi correspond à sa latitude, et
que l'absence totale des neiges en été ne fût due qu'à la position isolée de la montagneau milieu des
mers, à !a fréquence de veuts ascemdans tres-enauds, ou a <la température élevée des cendres du Piton.
Il est impossible de lever ces doutes dans l'état actuel de nos connoissances. Depuis le parallèle des
montagnes du Mexique jusqu'à celui des Pyrénées et des Alpes, entre les ao° et les 45' la courbe
des ueiges perpétuelles n'a été déterminée par aucune mesure directe; et,
une innnité de ces courbes
pouvant être tracées par le petit nombre de points mu nous .sont connus sous les o* ao°, 45°,6a°et yt" de
laves
Mes
?
.scor!6ëes du ~~M~
.Mï&'oy~ les ponces broyées andësdu
brbyëes et andes du et
ce sont, les et ponces
Piton qui empêchent la migration des végétaux vers les bords du cratère.
La ~remt~'e zone, celle des Vignes, attend depuis le rivage, de la mer
jusqu'à deux ou trois cents toises de hauteur: c'est celle qui est la plus habitée,
et !a seule où lesolsoncultivéavecsoin. Dans ces basses régions, au portde

latitude boréale, le calout supplée~et-MnpMMMmentat'observation.~nSavancer rien de


la
dire qu'il est probableque, par les a8° 17
~e~
limite des neigesse trouve au-dessus de t 900 toleM.Depuis t'équa-
teur, ou les neiges commencentà a46o toises, c'est-à-dire peu près à la hauteurdu Mont-Btanc,jusqu'aux
so° de latitude, par conséquent jusqu'auxlimites de la zone torride les neiges ne descendent que de cent
toises or, doit-on admettre que huit degrés plus loin, et dans un climat qui porte presque encore tout
te caractère d'un climat des Tropiques, cet abaissement soit déjà de quatre cents toises? En Supposant
même un abaissement en progressionarithmétique deputs les ao aux 45 degrés de latitude, suppositionqui
est contraire aux&its observés (.Rm. ~'0&<M<ron., Vol. t, p. t34), les neiges perpétuelles ne com-
menceroient sous le parallèle duPIcqu'aaoSo toises de hauteur au- dessus du niveau de l'Océan, par
conséquent55o toises plus haut qu'aux Pyrénéeset enSuisse. D'autres considérationsviennentà l'a ppui de ce
résultat. La température moyenne de là couche d'air, avec laquelle les neiges sont en contact pendantl'été;
est, aux Alpes, de quelquesdegrésau-dessous,et, sous t'équateur, de quelquesdegrés au-dessus du point de
la congélation(L. e., p. tSy). En admettant que, sous les a8 degrés et demi, cette température soit zéro,
ou trouve, d'après la loi du déeroissementdu calorique en comptant 98 toises par degré centésimal,que
les neiges doiventse conserver à ao58 toises de hauteurau-dessus d'une plaine dont la température moyenne
est de a~ degrés, et par conséquent égale à celle des cotes df! Ténérine. Ce nombre est presque iden-
tique avec celui que donne la supposition d'un abaissement en progression arithmétique. Une des
hautes cimes de la Sierra Nevada de Grenade, le Pico de Veleta, dont la hauteur absolue est de
iy8t toises, est perpétuellement couvert de neiges; mais la limite inférieure de ces neiges n'ayant pas été
mesurée, cette montagne, placée sous les 3y° t0 de latitude, ne nous apprend rien sur le problème que
nous tachons de résoudre. Quant à ta positiondu volcan de TénériBe, au centre d'une ile de peu d'étendue,
il ne paroit pas que cette circonstance puisse causer un relèvement de la courbe des neiges perpétuelles.
Si, dans les Mes les hivers sont moins rigoureux tes étés y sont moins chauds, et ce n'est
pas autant
de la température moyenne de l'année entière que de celte des mois d'été que dépend la hauteurdes neiges.
A l'Etna, les neiges commencentdéjà à. i5oo toises et même un peu au-dessous, ce qui est
assez extraor-
dinaire pour une cime placée sous les 3y degrés et demi de latitude. Vers le cercle polaire, où les ardeurs de
t'été sont diminuées par les brumes qui s'élèventconstamment au-dessus de l'Océan, la différence
entre
les îles, ou les côtes et l'Intérieur du pays, devientextrêmement sensible. En Islande,
par exemple,, sur
l'Osterjoctmtl, sous les 6y de latitude, les neiges perpétuelles descendent à Matoises de hauteur tandis
qu'en Norwège, par les 67° loin des cotes, dansdes sites où les hivers sont beaucoup plus rigoureux
et oit par
conséquent la température moyenne de l'année est plus petite qu'en Islande, les neiges descendent qu'à
ne
600 toises (LéopolddeBuchdans tes~nna~M de Gilbert, t8ta, T. H, p. 5y et 43 ). D'après
ces rapnro-
chemens, il paroit assez probable que Bonguer et Saussure se sont trompés quand ils
ont admisquele
Pic de Ténérine atteint le terme Intérieur constant des neiges ( T'Ï~Kn. de la terre,
p. xt-Vtn, et ~em.-re
dans les ~M, T. IV, p. ]o3). On trouve ce terme pour 28° de latitude, au moins toSo toises de
hauteur, même en la calculant par interpolation entre l'Etna et les volcans du Mexique. Cette
matière
sera entièrement éctatrcie lorsqu'on aura mesuré la partie occidentale de l'Atlas qui, près de Maroc
les 3o degrés et denti de latitude, est couvert de neiges perpétuelles. sous
i'Orotava et partout où les vents Oot un accès libre, le thertnpmètrë centigrade
se soutient en hiver, aux tnois de janvier et de février, à midi, entre
ï5 et
!y degrés les plus fortes chateurs de l'été n'excèdent pas a5 ou 26 degrés:
elles sont parconséquentde5à6 degrés au-dessous des extrêmes que le
thermomètre atteint annuellement à Paris, à Berlin et à Pétersbourg. Ces
résultats sont tirés des observations faites par M. Savaggi, depuis 'S jusqu'en
nf)Q. La température moyenne dfs côtes de Ténériffe parott au moins 5"!ev€r
à 2i°(!6°,8R.), et leur climat tient le milieu entre fe climat de Naples et
celui de la zone torride. A l'fle de Madère, les températures moyennes des
mois de janvier et d'août sont, d'après Heberden, de t~°,~ et de 23",8, tandis
qu'à Rome elles s'élèvent à 5°,6 et 26",2. Mais, malgré l'analogie extrême que
l'on observe entre les climats de Madère et de Ténérine, les plantes de la
première de ces îles sont généralement moins délicates à cultiver en Europe
que les plantes de TénériSe. Le Cheiranthus longifolius de I'Orotava, par
exemple, gèle à Montpellier, d'après l'observation de M. De Candolle, tandis
que le Cheiranthus mutabilis de Madère y passe l'hiver en pleine terre. Les
chaleurs d'été sont moins prolongées à Madère qu'à Ténérine.
La Région des Vignes offre, parmi ses productions végétâtes, huit espèces
d'Euphorbes arborescentes, des Mesembryanthemum, qui se trouvent muiti-
pliés depuis le cap de Bonne-Espérance jusque dans le Péloponnèse, le
Cacalia Ktemia, le Dragonnier et d'autres plantes qui, dans leurs troncs nus
et tortueux, dans leurs~feuiHes succulentes et leur teinte d'un vert bleuâtre,
offrent les traits qui distinguent la végétation de l'Afrique. C'est dans cette
zone que l'on cultive le dattier, le bananier, la canne à sucre, le figuier
d'lnde, l'Arum colocasia, dont la racine oSre au bas-peuple une fécule nour-
rissante, l'olivier, les arbres fruitiers de l'Europe, la vigne et les céréales. Les
blés y sont moissonnés depuis la fin de mars jusqu'au commencement de mai,
et l'on y a essayé avec succès la culture de l'arbre à pain d'Otahiti, celle du
cannellier des îles Moluques, du cafier de 1 Arabie et du cacoyer de l'Amérique.
Sur plusieurs points de la côte, le pays prend tout le caractère d'un paysage des
Tropiques; et l'on reconnoit que la Région des Palmiers s'étend au delà des
limites de la zone torride. Le Chamaerops et le dattier viennent très-bien dans
les plaines fertiles de Murviedro, sur les côtes de Gênes, et en Provence près
d'Amibes, sous les 3g et 44 degrés de latitude: quelques arbres de cette dernière
espèce, plantés dans l'enceinte de la ville de Rome, résistent même à des froids
de a°,5 au-dessous du point de la congélation. Mais si l'Europe australe participe
ne
encore que tonnent aux dons que la nature a répan<I"s dans taiZOpe des
Palmiers, ~le de TénériSe,placée sous le paraMèle de l'J~ypte, de la Perse
méridionale et de la Flonde, est déjà ornée de plupart ~esjfbnnes végétales
qui relèvent la majesté des sites dans les régions voisines de l'équateur.
En parcourant les différentes tribus de plantes indigènes, on jregrette de ae
pas y trouver des arbres à petites feuilles pennées et des Graminées arbo-
rescentes. Aucune espèce de la famille nombreuse des Sensitivesn'a poussé
ses migrations jusqu'à l'archipel des îles Canaries, tandis que sur les deux
contitiens on en a découvert jusqu'aux 38 et 40 degrés de latitude. En
Amérique, le SchrancMa uncinata de WIHdenow s'avance jusque dans
les forêts de la Virginie; en Afrique, l'Acacia gummifera végète sur les
collines de Mogador~en Asie, à l'ouest de la mer Caspienne, M. de
Biberstein a vu les plaines du Chyrvan couvertes de l'Acacia stephaniana.
En examinant avec plus de soin les végétaux des îles de Lancerote et
de Fortaventure, qui sont les plus rapprochées ~es côtes de Maroc on
trouvera peut-être quelques Mimoses parmi tant d'autres plantes de la Flore
africaine.
La ~cc~TM~e .zone~ celledes Lauriers, renferme la partie boisée de TénériGe
c'est aussi la région des sources qui jaillissent au milieu d'un gazon toujours
frais et humide. De superbes forêts couronnent les coteaux adossés au volcan
on y recotHioft quatre espèces de lauriers un chêne voisin du Quercus
Turneri 3 des montagnes du Tibet, le Visnea Mocanera, le Myrica Faya des
Açores, un olivier indigène (Qlea excelsa) qui est le plus grand arbre de
cette zone deux espèces de Sideroxylon dont le feuillage est d'une rare
beauté, l'Arbutus callycarpa et d'autres arbres toujours verts de la famille
des myrtes. Des liserons, et un lierre très-difKrent de celui d'Europe
(Hedera canariensis), tapissent les troncs des lauriers:à leur pied végètent une
innombrable quantité de fougères 4, dont trois espèces seulement descendent

Mimosa borritMa, Michanï.


° Laoms indica, L. f<Btens, L. noMKs et L. Til. Avec ces arbres se trouvent mêlés ArdhMteMetM,
Rhamnus gtandutosos, Erica arborea, E. Teto.
3 Quercus canamensis, Broussonet ( Willd. Enum. plant. hort. Beroi, l8og p. 0~5 ).
Woodwardia radicans, Asplenium pa!mat<nn, A. canariense, A. latifolium, Nothattemt schcordata,
Trichomanescanariensis, T. specMMmnet Davallia cananensis.
Dettx Acrostichumet l'0p))yog1osum tusitanicam.
jusqu'à ta région des Vignes. Partout le sol, couvert de mousses et d'une
herbe fine, brille des fleurs du Campanutaaurea du Chrysanthemum
pinnàtifidum, du Mentha canariensis et de plusieurs espèces frutescentes
d'Hypericnm Des plantations de châtaigniers sauvages et greffés forment

la plus agréable de toutes..


une large ceinture autour de la région des sources qui est la plus verte et

La ~~)MtfMC~o?!e commence à neuf cents toises de hauteur absolue, là où


paroissent les derniers groupes d'Arbousiers, de Myrica Faya et de cette belle
bruyère que les' indigènes désignent par le nom de Texo. Cette zone, large
de quatre cents toises, est occupée en entier par une vaste forêt de pins auxquels
se mêle le Juniperus Cedro de Broussonet. Ces pins ont les feuilles extrême-
ment longues, assez roides et réunies quelquefois deux à deux, le plus souvent
trois à trois dans une gaine. Comme nous n'avons pas eu occasion d'en
examiner les fruits nous.ignorons si cette espèce, qui a le port du pin d'Ecosse,
est effectivement différente des dix- huit espèces de pins que nous connoissons
déjà dans l'ancien continent. Un botaniste célèbre qnt, par ses voyages, a
rendu de grands services à la géographie botanique de l'Europe, M. De
Candotle, pense que le pin de Irénérine est également distinct du Pinus
àtlantica des montagnes voisines de Mogàdor, et du pin d'Atep* qui appartient
au bassin de la Méditerranée et ne paroit pas franchir les colonnes d'Hercule.
Nous avons rencontré sur la pente du Pic les derniers pins, peu près à douze
cents toises de hauteur au-dessus du niveau de l'Océan. Dans les Cordillères
de la Nouvelle-Espagne,sous la
zone torride, les pins mexicains s'élèvent
jusqu'à deux mille toises. Malgré l'analogie d'organisation qui existe
entre
les diGérentes espèces d'un même genre de plantes, chacune d'elles exige,
pour
son développement, un certain degré de température et de rareté de l'air
ambiant. Si, dans les climats tempérés et partout où il tombe de la neige, la chaleur
constante du sol est un peu au-dessus de 'la chaleur moyenne de l'atmosphère~
il est probable qu'à la hauteur du Portillo, les racines des pins tirent leur

'Hyper:cumcananense,H.BoribundumetH.gtantMoSMt).
rmushalepensis. M. De Candolleobserve que cette espèce, qui
manque en Portugal, et qui se trouve dans
le versant méditerranéen de la France et de l'Espagne,
en Italie, dans t'Asie. Mineure et dans la Barbarie,
seroit mie~ nommée Pinus mediterranea. Elle fait le foud des forêts de pins dans le sud-est de la France
ohGouan et Gérard l'ont confondue avec le Pinussylvestris. ;EUe èompreticl le PiMshaIepensM, MIU.
Lamb. et Desfont. et le Pinus maritima, Lamb.
nottN'Ita~e d'au tert~in dans lequel, a'~ne certaine profbadeMï', Ïe thermoïB&tr~
s'élève tOHt au plus à g où jo degrés.~ '=

c~MMmë~
La ~M<!tr?eM!e et la les régions du Rétama et des Gram!"
nées, occupent des buteurs ~i~égalë~ce!~ cimes les plus inaccessibles
des Pyrénées. C'est !a partie d~rte~d~e~o~de8~pierre "pon~e,
d'obsidiennes et de laves brisées mettent des entravesà la végétation. 'Nous
avons déjà parlé plus haut de ces tonnes fleuries de genêts alpins (Spartium
nubigennm) qui forment des Oasis an milieu d'une vaste mer de, cendres.
Deux plantes herbacées, leScrophulariag!abrata et le Viola cheiranthifolia;
s'avancent plus loin jusque dans le .M~. Au-dessus d'un gazon brù!é par
l'ardeur du soteit africain, le Çladonia paschaHs couvre des terrains arides; les
pâtres y mettent souvent le feu qui se propage à des distances considérables.
Vers le sommet du Pic, des vUrcéolaires et d'autres végétaux, de la famille
scorinées.
des Lichens travaillent à la décomposition des matières C'est ainsi
que, par une action non interrompue des forces organiques,l'empire de Flore
s'étend sur les îles bouleversées par des volcans.
En parcourant les différentes zones de la végétation de Ténéri<ïe, nous
voyons que l'tle entière peut être considérée comme une forêt de lauriers,
d'arbousiers et de pins, dont les hommes ont à peine défriché la lisière, et
qui renferme dans son centre un terrain nn, rocaiUeux, également impropre
à la culture et au pâturage. M. Broussonet observe qu'on peut diviser
l'archipel des Canaries en deux groupes d'ues. Le premier renferme Lancerote
et Fortaventure, le second, TénénSe, Canarie, La Gomère, Fer et Palma.
L'aspect de la végétation dinere essentiellement dans ces deux groupes. Les
îles orientales, Lancerote et Fortaventure, offrent de grandes plaines et des
montagnes très-peu élevées on n'y rencontre presque pas de sources, et ces
îles, plus encore que les autres, portent le caractère de terrains séparés du
continent. Les vents y souillent dans la même direction et aux mêmes
époques l'Euphorbia mauritanica, l'Atropa irutescens et des Sonchus arbo-
rescens y végètent dans des sables mobiles, et servent, comme en Afrique,
de nourriture aux chameaux. Le groupe occidental des Canaries présente un
terrain plus élevé, plus boisé, plus arrosé par des sources.
1 Quoique l'archipel entier renferme plusieurs végétaux qui se retrouvent en
Portugal en Espagne, aux îles Acores et dans le nord-ouest de l'Afrique,
Nous avons reconnu, M. WiUdenow et moi, parmi les plantes du Pic de TénenCe, le beau Satynum
dipbyUmn (Orchis cordata, Wilid.) décowfert en Portugal. Les Canaries ont de
que M. L;nk &
un grandnombred'espèces,et même quelques genres, sont propres à Tëidérnte,
à Porto Santo et à Madère. Tels sont le Mocanera, le PIocàma, le Bosea, le
Canarina, le Drùsa et te Pittosporum. Une forme que l'on pourroit appeler
boréale, celle des Crucifères est déjà beaucoup plus rare aux Canaries
qu'en Espagne 'et en Grèce. Plus au sud encore, dans la région équinoxiale
des deux continens, où la température moyenne de l'air s'élève au-dessus de
22 degrés, les Crucifères disparoissent presque entièrement.
On a agité de nos jours une question qui intéresse vivement l'histoire du
développement progressif de l'organisation sur le globe, celle de savoir si
les plantes polymorphes sont plus communes dans les ties volcaniques? La
végétation de Ténériffe ne favorise point l'hypothèse d'après laquelle .on
admet que la nature dans des terres nouvelles se~ montre moins asservie à des
formes constantes. M. Broussonet, qui a résidé si long-temps aux Canaries,
assure que les plantes variables n'y sont pas plus communes que dans l'Europe
australe. Né doit-on pas admettre que les espèces polymorphes qu'offre si fré-
quemment l'ile de Bourbon, sont dues plutôt à la nature du sol et au climat
qu'alla nouveauté de la végétation?
Je viens d'esquisser le tableau physique de l'île de TénériSe j'ai tâché de
donner des notions précises sur la constitution géologique des Canaries,
sur la géographie des plantes propres à cet archipel, et .sur leur agroupement
à différentes hauteurs au-dessus du niveau de l'Océan. Quoique je me flatte
d'avoir répandu quelque lumière sur des objets qui tant de' fois ont été
traités par d'autres voyageurs, je pense pourtant que l'histoire physique de
cet archipel offre encore un vaste champ à exploiter. Les chefs des expédi-
tions scientifiques, dont l'Angleterre, la France, l'Espagne, le Danemarck
et la Russie ont donné des exemples si brillans, se sont généralement trop

commun avec la Flore des Açores non te DicksoniaCntcita, !a seule fougère arborescente que l'on trouve
sous les 39 degrés de latitude, mais i'Asptennttn patmatum et le Myrica Faya. Cet arbre se rencontre en
Portugal, à t'état sauvage M. de HoBmannseggen a vu des troncs très-anciens; mais it reste douteux
s'il est indigène on introduit dans cette partie de notre continent. En réucchissant sur les migrations
des plantes et sur la possibilité géologique que des terrains submergés aient réuni jadis le Portugal,
les Açores, les Canaries, et la chaine de t'Attas, on conçoit que t'exis~ence du Myrica Paya dans
l'Europe occidentale est un phénomène pour le moins aussi frappant que le seroit t'existence du pin
d'Alep aux îles Açores.
Parmi le petit nombre d'espèces de CruciC'rfs que renferme la Flore de Ténérifte, nous citerons
ici Cheiranthus longifolius, t'Herit. Ch. fructescens, Yent., Ch. scoparius, Brouss. Erysimutn bicorne,
Aiton; Crambe strigosa, C. hevigata/BrouM.
hâtés de qaitter les Canaries. Us se sont imaginés qnece~ Mes dévoient être
exactement décrites,parce qu'elles sont très-rapprôchées de l'Europe ils ont
oublié que, sous le rapport de ta géologie, l'intérieur de la Nouvelle-
Hollande n'est pas plus inconnu que ne le sont les roches de Lancerote et de
la Gomère, celles de Porto Santo et de Terceira. Nous voyons annuellement
un grand
nombre de savans parcourir, sans but déterminé, les partiés
les plus fréquentées de l'Europe. H faut espérer qu'il s'en trouvera
parmi eux qui, guidés par un véritable amour~pour la sdence, et capables de
poursuivre un plan de plusieurs années, voudront examiner à la fois l'archipel
des Âçores, Madère, les Canaries, les îles du cap Vert et la côte nord-ouest
de l'Afrique. C'est en réunissant des observations faites sous le même point
de vue, dans les t!es Atlantiques et sur le continent voisin, que l'on parviendra

plantes..
à des connoissances précises sur la géologie et sur la géographie des animaux
et des
Avant de quitter l'ancien monde pour passer au nouveau, il
me reste à
parler d'un objet qui offre un intérêt plus général, parce qu'il tient à
l'histoire de l'homme et à ces révolutions funestes qui ont fait disparonrè des,9
peuplades entières de la surface du glooe. On se demande, à l'île de Cuba,
à Saint-Domingue et à la Jamaïque, où'sont restés les habitans primitifs de
ces contrées on se demande à TénériBe que sont devenus les Guanches,
dont les momies seules, enfouies dans des cavernes, ont échappé à la des-
truction. Au quinzième siècle, presque toutes les nations commerçantes
surtout les Espagnols et les Portugais cherchoient des esclaves aux îles
Canaries, comme on en cherche aujourd'hui sur la côte de Guinée La
religion chrétienne jmi~–dans son origine, a favorisé si puissamment la
liberté. des hommes, servoit de prétexte à la cupidité des Européens. Tout
individu~ fait prisonnier avant d'avoir reçu le baptême, étoit esclave. A
cette époque on n'avoit pas encore essayé de prouver que les noirs sont
une race intermédiaire entre l'homme et les animaux le Guanche basané
et le nègre africain étoient veridus à la fois au marché de Séville, sans que l'on
agitât la question si l'esclavage doit peser seulement sur des hommes à peau
noire et cheveux crépus.
L'archipel des Canaries étoit divisé en plusieurs petits états ennemis les

Les MstorieM espagnols citent des expMMoM faites par les Hngnenott de la RocheUe
pour
enlever des esclaves guanches. Je doute de ces expéditionsqui murMent ~té poetëneuresàjannéetMo
des autres. Sot! vent unemême île étoit sujette à deux années indépehdans~
ttas
comme cela arrive dans, les îles
de la mer du Sud, et partout où la société
n'est point encore ~ès-avancée. Les nations commerçantes, guidées par cette
politique astucieuse qu'elles suivent encore aujourd'hui sur tes côtes d'Afrique~
entretinrent les guerres intestines. Un Guanche devint alors la propriété d~un
autre Guanche, qui le vendoit aux Européens; plusieurs préférèrent la mort
à la servitude, et se tuèrent eux et leurs entans. C'est ainsi que la population
des Canaries avoit déjà considérablement souffert par le commerce des esclaves,
par les enlèveméns des pirates, et surtout par un carnage prolongé, lorsque
Alonso de Lugo en acheva la conquête. Ce qui restoit des Guanches périt
en grande partie en t ~p~ ) dans la fameuse peste appelée la ~o~ory~, que l'on
attribuoit à la quantité de cadavres que les Espagnols avoient laissés exposés à
l'air, après la bataille de la Laguna. Lorsqu'un peuple, à demi-sauvage et
dépouillé de ses propriétés, se voit forcé de vivre dans une même contrée
avec une nation policée, il cherche à s'isoler dans les montagnes et dans les
forêts. Ce refuge est le seul. quepeuvent choisir des insulaires aussi cette
belle nation des Guanches étoit pour ainsi dire éteinte au commencement du
dix-septième siècle;onn'en trouvoit plus que quelques vieillards à la Candelaria
et à Guimar.
Il est consolant de penser que les blancs n'ont pas toujours dédaigné de
s'allier aux indigëdes; mais les Canariens d'aujourd'hui, que les Espagnols
désignent sous le simple nom d'jMe/MM~ ont des motifs très-puissans pour
nier ce mélange. Le tempis enace, dans une longue suite de générations, les
marques caractéristiques des races; et, comme les descendans des Andaloux
établis à Ténériffe ont eux-mêmes le teint assez rembruni, on conçoit que le
croisement des races ne peut pas avoir produit un changement sensible dans
la couleur de la peau des blancs. Il est bien prouvé qu'il n'existe aujourd'hui
dans toute l'île aucun indigène de race pure, et quelques voyageurs d'ailleurs
très-véridiques, se sont trompés lorsqu'ils ont cru avoir xu pour guides au
Pic, de ces Guanches à taiile svelte et légers à la course. Il est vrai que
quelques familles de Canariens se vantent de leur parenté avec le dernier roi
pasteur de Guimar mais ces prétentions ne reposent pas sur des fondemens
très-solides elles se renouvellent de temps en temps, lorsqu'il prend envie à
un homme du peuple, plus basané que ses concitoyens, de solliciter un grade
d'officier au service du roi d'Espagne.
Peu de temps après la découverte de l'Amérique, lorsque l'Espagne étoit
parvenue au plus h~ut degré df~ sa splendeur, on se pMsoit a Zébrer la douceur
de caractère des Guanches, comme on a célèbre de nos jours l'innocence des
habitans d'OtahitI. Dans l'un et l'autre de ces tableaux,le cotoris paro~ moins
vrai que brillant. Quand les ~peuples, &ttgués des jouissances de l'esprit, ne v
voient plus dans te le
raSnement des mœQw~ae la dépravation, ils
sont flattés de ridée que, dans une région lointaine, a la première aurore de
!a civilisation, des sociétés naissantes jouissent d'un bonheur pur et constant.
C'est à ce sentiment que Tacite dut nne~partie de son succès lorsqu'il retraça
aux Romains, sujets des Césars, te tableau des mœurs germaniques, ce même
sentiment donne un charme inexprimable au récit des voyageurs qui, depuis
la fin du dernier siècle, ont visité les îles du Grand Océan.
Les habitans de ces Mes, trop vantés peut-être, et jadis anthropophages,
ressemblent, sous plus d uc rapport, aux Guanches de TénériSe. Nous
voyons gémir les uns et les autres sous le joug d'un gouvernement féoda!.
Chez les Guanches, cette institution, qui (acilite et perpétue les guerres,
étoit sanctionnée par la religion. Les prêtres disoient au peuple « Le Grand-
Esprit, Achaman, créé d'abord les nobles, les Achimenceys, auxquels il
a distribué toutes les chèvres qui existent sur ta terre. Après les nobles,
Achaman a créé les plébéiens, Achicaxnas; cette race plus jeune, eut le
courage de demander aussi des chèvres; mais t'Être-Suprême répondit que
le peuple étoit destiné à servir les nobles, et qu'il n'avoit besoin d'aucune
propriété. » Cette tradition étoit faite sans doute pour plaire aux riches
vassaux des rois pasteurs. Aussi le Faycan ou grand-prêtre exercoit le droit
d'anoblir, et une loi des Guanches portoit que tout Achimencey, qui s'avi-
lissoit à traire une chèvre de ses-mains, perdoit ses-titres de noblesse. Cette
loi ne rappelle pas la simplicité des mœurs du siècle homérique. On est
étonné de voir condamnés au mépris, dès le commencement de la civilisation
les travaux utiles de l'agriculture et de la vie pastorale.
Les Guanches, célèbres par leur taille élancée, étoient les Patagons de
t'ancren monde, et les historiens exagéroient la force musculaire des
Guanches, comme, avant les voyages de Bougainville et de Cordoba, on attri-
buoit une stature colossale à ta peuplade qui habite l'extrémité méridionale de
t'Amérique. Je n'ai vu des momies guanches que dans les cabinets de l'Europe~
à l'époque de mon voyage ettes étoient très-rares à Ténérine; oh en trouveroit
cependant en grand nombre si, par le travail des mineurs, on tâchoit d'ouvrir
tes cavernes sépulcrales qui sont taillées dans le roc sur ta pente orientale du
Pic, entre Arico et Güimar. Ces momies sont dans un état de dessiccation M
extraordinaire que les corps entiers, munis de leurs integumens, ne pèsen!:t
souvent que six à sept livres, c'est-à-dire un tiers de mpins que le squelette
d'un individu de la même grandeur, dépouillé récemment de la chair muscu-
laire. Le crâne offre, dans sa conformation, quelques légers rapports avec celui
de la, race blanche des anciens Égyptiens, et les dents incisives sont émoussées
chez les Guanches comme dans les momies trouvées sur les bords du Nil. Mais
cette forme des dents est due à fart seul; et, en examinant plus soigneusement
la physionomie des anciens Canariens, des anatomistes habiles'ont reconnu,
dans les os zygomatiques et la mâchoire inférieure, des diflerences sensibles
avec les momies épyptiennes. En ouvrant celles des Guanches on y trouve des
restes de plantes aromatiques, parmi lesquelles on distingue constamment le
Chenopodium ambrosioïdes souvent les cadavres sont ornés de cordelettes
auxquelles sont suspendus de petits disques de terre cuite qui paroissent avoir
servi de signes numériques, et qui ressemblent aux quippos des Péruviens, des
Mexicains et des Chinois.
Comme en général la population des tlës est moins exposée aux changemens
qui sont l'effet des migrations, que ta population des continens, on peut sup-
poser que, du temps des Carthaginois et des Grecs, l'archipel des Canaries étoit
habité par cette même race d'hommes qu'y trouvèrent les conquérans normands
et espagnols. Le seul monument propre à répandre quelque lumière sur
l'origine des Guanches, est leur langue; mais malheureusement II ne nous en
est resté à peu près que~cent cinquante mots, dont plusieurs expriment les
mêmes objets selon te dialecte des différentes îles. Outre ces mots, qu'on
a recueillis avec soin, il existe encore des fragmens précieux dans les dénomi-
nations d'un grand nombre de hameaux, de collines et de vallons. Les
Guanches, comme les Basques, les Uindoux ~Jes Péruviens et tous les peuples
primitifs, avoient nommé les lieux d'après la qualité du sol qu'ils cultivoient,
d'après la forme des rochers, dont les cavernes leur servoient d'abri, d'après
la nature des arbres qui ombrageoient les sources.
On a pensé longtemps que la langue des Guanches ne présentoit aucune
analogie avec les langues vivantes; mais, depuis que te voyage de Horoemana
et les recherches ingénieuses de MM. Marsden et Venture ont fixé t attention
des savans sur les Berbers qui, comme les peuples slaves, occupent une

B/tutM~tacA Decas ytwta Co~c<. MMp Craniorum ctiverearum g~nMa~t t~M~r., t<to8, p. 7.
t~measeétendue de~rrain
mots gnanches ont des
dans
'n-am~na~AM~e

Gebau 'Nous ~~Mro~~<ÉO!)MM~<xe:


1'~
hotéale. .ôn'
racines~c~
a redoitttu- qoe plYi~ieûrs
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.deÍ,lIJorsae. 'dialectes' CJúIW1
~ue~p~

Lait.A<
M
.C!d,'en.gaaBc~b~~
Orge. 2~m~en.
Panier.
~cAo.
Tomzeen.

Eau. 7.~nMM.~T.
ÛMTKMMM. C~rMn.
~~MM.

JedoUtequecette analogie prouveune communauté d'origine; mais elle indique


des liaisons aaelennes entre les Guanches et les ~erbers, peuple montagnard,
dans lequel se trouvent retondus les Numidieps, tes Gëtctes et les Garàmantes,
et qui s'étend depuis rextremMônenta!e de l'Àt!as, par le Harud~é et le
Fezzan, jusqu'aux Oasis de Syuahet d'Audjelah. Les indigènes des îles Canaries
s'appeloient GaaniChes de guan, &<MM!tte, comme les Tongduses s'appeUent &~e
et <&)nA~ mots qui ont la même signincation que~M<ïn. D'ailleurs les nations qui
parlent la langue berbère ne sont pas toutes d'une même race et la description
que Scylax donne dans son ~ëripîè des habitans de Cerne, peuple pasteur
d'une taille etancée et à longue chevelure, rappelle les traits qui caractérisent
les &uaMhes Canariens.
Plus on étudie les langues sons un point de vue philosophique, et plus
on observe qu'aucune d'elles n'est entièrement isolée la languee des
Guanches le paroftroit moins encore si l'on avoit quelques données sur son
mécanisme et sa structure grammaticale, deux élémens plus importans que la
forme des mots et l'Identité des sons. H en est de certains idiomes comme de
ces ~tres organisés qui semblent se refuser à toute classification dans la série
des familles naturelles. Leur isolement n'est qu'apparent il cesse dès qu'en
embrassant un plus grand nombre d'objets, on parvient à découvrir les

~<«n~ ttm~ Yater, .MtAfK&ttM, T. BI, p. 60.


D'âpre les recherches de M. Vater, la hmgne guanche oBre les analogies suivantes avec les
langues de peaptes tree-eMgnés les uns des fMttret: cAMn, chet tes Barons MmérioMns, a,gMM<t<Mt/ chet
lés Guanches, agM~aM homme, chez les Pérar!ems, «tW, chez les Guanches, comn roi, chez
les Mandiugos africains, m<HMo; chez les Gnanches, BtOtMe~. Le nom de Mte de Gcmete se retrouve
dans celui de Gomer qui désigne une tribu de Berhers. (~<t<er, Cnttntm'A, ttter ~mertto, p. t~o.)
Les mots guanches, ot&!OMte, J~MM, et <t&)to~aM<t, <N~&, poroissemt d'une origine arabe; du moins
dans cette dernière tangue o&tMt&at-mmsigmSeMet~.
chaînons intermédiaires. Les savans qui VQMM des ~yptiens partout oû il
y a des momies, des hiéroglyphes ou des pyramides, penseront peut-être
que la race de Typhonétoitlléeaax Guànches par lès Berbers,
véritables
Atlantes, auxquels appartienneht les TIbbosetlesTuàrycks du désert *.Mais
il suffit de faire obséder Icî que cette hypothèse n'est appuyée par aucune
analogie entre la langue berbère et la langue copte, que l'on regarde avec
raison comme un reste .de l'ancien égyptien.
Le peuple qui a remplace les Guanches, descend des Espagnols, et en
très-petite partie desNormands~Quoique ces deux races aient été exposées
depuis trois siècles a)%meme climat, la dernière se distingue cependant par une
plus grande blancheurde la peau. Les descendansdes Normands habitent la vallée
de Teganana, entre Punta de Naga et Punta de Htdalgo. Les noms de Grandvijie
et de Dampierre se trouventencore assez Iréqueïnment dans ces cantons. Les
Cananens sont un peuple honnête, sobre et religieux; ils déploient moins
d'industrie chez eux que dans les pays étrangers. Un esprit inquiet et entreprenant
conduit ces insulaires, de même que les Biscayens et les Gatabns, aux
PbUIppines, aux MarianeSj en Amérique, partout où il y a des établissemens
espa~tots, depuisJeChili et La PIàta jusqu'au Nouveau-Mexique. C'est à
eux que sont dus en grande partie les progrèsde l'agriculture dans ces colonies.
L'archipel entier ne renferme pas ï6o,ooo habitans, et les lslenos sont
peut-être beaucoup plus nombreux au nouveau continent que dans'leur ancienne
patrie. Le tableau suivant offre tout ce qui a rapport à la statistique de ce
pays

~oyft~e~eJ5romenMM7t<&< Caire à .Mom-MM~ T. Ù, p. 4o6.


*tt~r<~<B<,T.ni,p.77.
FO~tt.AMON
ARCntFEL
G

des
d
acBMCB
~tiMtt
mariu..
/<~ por<n.ATto!tAMOt.Wt.
–.
relative.
Nombre
habitans par
Kt.BBCANABCE9. t.rf<tt. ~8. ~4S. ~68. t790.
lieue carrée
tn .790.

TénénBe. 7~ 49,n9 6o~t8


8 66,354 70,000 gSa

Fortaventure. 63 7,389 8,863 9,000 t4a

Grande Canarie. 60
–~–
2o,458 33,~4 41,o82
––––
50,000 833

Fatme. ~7 tS.Sga t7,58o '9.'9~ 23,600 837

Laocerote. a6 7,~t0 9,705 to,ooo 384

Gomère.
Fer.
ToïAt.
'4

370
7
4,373

~97
6,251

3,687

t36,tga
6,645

4,oM

t55,866
7,4oo

5,ooo

174,000
598

714

644

Les dénombremens de t678, t745 et ~68 ont été publiés par Viera. L'évaluation de 1790
est de M. Ledro. Population totale, d'après tord Macartney, 196,500, dont 10,000 à Ténériffe,
~0,000 à Canarie et 3o,ooo à Palme. Les surfaces ont été calculées pour la premtere fois, et
les cartes de Borda et de Varela. Récolte
avec un soin particulier, par M. Oitmanns', d'après
du vin à Ténérine, 2o à a4,oo& pipes dont 5ooo de Malvoisie. Exportation annuelle de vin,
8 à oooo pipes. Bécolte totale de l'archipel, en froment, 54,ooo~on~M à cent livres de poids.
Année commune, cette récolte est sufEsante pour la consommation des habitans qui se nourrissent
culture de la canne à
en grande partie de maïs, de pommes de terre et. de haricots ~yHtO/M. La
sucre et du coton est peu Importante, et les grands objets du commerce sont le vin, les eaux-de-vie,
l'orseille et la sonde. Revenu brut, y compris la ferme des tehacs, a4o,ooo piastres.

Je n'entrerai pas dans des discussions d'économie politique sur l'importance


des îles Canaries pour les peuples commerçans de l'Europe. Livré long-temps à
des recherches statistiques sur les colonies espagnoles, étroitement lié avec des
personnes qui avoient occupé des emplois importans à Ténériffe, j'avois eu

Étendre de la surface des Canaries exprimée plus exactement en lieues géographiques de t5 au


(!egré: TénérHfe, 4t~; Fortaventure, 35~, Canane, 33;; Palme i5~; Lancerote, i4~; et, en y
comprenant les petites Mes voisines, i5~;Comere, 8, et Fer, 3;: total, t53~. On peut être surpris
que M. Hassel, dans son excellent ouvrage sur la statistique de l'Europe, assigne aux Canaries une popu-
lation de 4ao,ooohabitans,et une étendue de 358m!Uesgéographiqnescarrés.(&<t<.t/<ttrtM./&/t.~S.) -)
occasion, pendant mon séjour à Caracas et & la Havane~ de recueillir beaucoup
d~édaircissemens sur le commerce de Sainte Croix et de l'Orotava. Mais
plusieurs savans ayant visité les Canaries après moi ils ont puisé aux même*
sources, et je n'hésite pas de retrancher de mon journal ce qui a été exposé,
avec beaucoup de précu-ion, dans des ouvrages qui ont précédé le mien. Je me
bornerai Ici à un petit nombre de considérations qui termineront le tableau
que je viens de tracer de l'archipel des Canaries.
II en est de ces îles comme de l'Egypte, de la Crimée et de tant d'autres
pays que des voyageurs qui désirent frapper par des contrastes, ont loués ou
blâmés à l'excès. Les uns, débarquant à l'Orotava, ont décrit TénériSe
comme le jardin des Hespérides; ils ont vanté la douceur du climat, la fertilité
du sol et la richesse de la culture d'autres, forcés de séjourner à Sainte-Croix,
n'ont vu dans les îles Fortunées qu'un pays nu, aride, habité par un peuple
misérable et stupide. !1 nous a paru que, dans cet archipel comme dans tous
les pays montueux et volcaniques la nature a distribué très-inégalement ses
bienfaits. Les îles Canaries manquent généralement d'eau; mais partout où il
y a d~s sources, des irrigations artificielles, ou des pluies abondantes, le sol y
est de la plus grande fertilité. Le bas peuple est laborieux, mais son activité se
développe plus dans des colonies lointaines qu'à TénénSe où elle trouve des
obstacles qu'une administration sage pourroit éloigner progressivement. Les
émigrations seront diminuées si l'on parvient à répartir entre les particuliers
les terres domaniales Incultes, à vendre celles qui sont annexées aux majorats
des grandes familles, et à abolir peu à peu les droits féodaux.
La population actuelle des Canaries paroit sans doute peu considérable,
si on la compare' à celle de plusieurs contrées de l'Europe. L'Me de Malte,
dont les habitans industrieux cultivent un roc presque dénué de terreau,
est sept fois plus petite que TénérISe, et cependant elle est deux fois plus peuplée
mais les écrivains qu~ se plaisent à peindre, avec de si vives couleurs, la
dépopulation des colonies espagnoles, et qui en attribuent la cause à la hiérarchie
ecclésiastique j oublient que partout, depuis le règne de Philippe V, le nombre
des habitans a pris un accroissement plus ou moins rapide. Déjà la, population
relative est plus grande dans les Canaries que dans les deux Castilles, en
Estramadure et en Écosse. Tout l'archipel réuni présente un terrain montueux
dont l'étendue est d'un septième plus petite que la surface de l'île de Corse, et
qui nourrit cependant le même nombre dTiabitans.
Quoique les îles Fortaventureet Lancerote, qui sontles moins peuplées, exportent
des~a~ns~~
par )
sa~~as~nt~t'o~ ,,il~ad. pas=
csl.nclure c~u~~ c~ani~
>2
le nombre ~d~~habitaM%n~~ui~
.en<]~l~
Les Mes Candies.. :.soQ%
population
tes
trop ~Ce)<<~t~et~ développe lés causes avec
défaut de snbsMtances.
maux qo'entra~ne une

tant de justesse et de aagacî~ misére du peuple a diminué considé-


rablement depuis qu'on a Introdmtia culture de la pomme de terre qu'onet
a commette~ senter pjttM de maïs qne d'orge et de jfroment.
Les habitans des Canaries oCrent tes traits qui caractérisent ~n peuple &
la fois montagnard et insulaire. Pour les bien apprécier, il ne stunt pas de
les ~oir daBsJtear patrie o& dé puissantes entraves s'opposent au développement
de l'industrie; il )!ant les étadier dans les steppes de la province de Caracas,
sur le dos des Andes, dans les ptainesbrûtantes des îles Philippines partout
où, iso!és dans des contrées inhabitées~ib ont eu occasion de déployer cette
énergie et cette activité qui sont les véritables richesses d'an colon.
Les Canariens se plaisent à considérer leur pays comme faisant partie de
l'Espagne européenne. Ils ont en enet augmenté les richesses de la littérature
castillane. Le nom de Clavijo, auteur du JP<Ht.MK&Mr~ ceux de Viera, d'Yriartc
et de Bétancourt sont honorablement connus dans les sciences et les lettrés
le peuple Canarien est doué de cette vivacité d'imagination qui distingue les
habitans de l'Andalousie et de Grenade, et l'on peut espérer qu'un jour les îles
Fortunées où l'homme éprouve, comme partout, les bienfaits et les rigueurs
de la nature, seront dignement célébrées par un poète indigène.

Tester et DeMmMy, sur l'agncalmredes CaMnes. (~m.Je f~t~<t<<, T. t, p. aSo et 979.


CHAPITRE lit
TRAVERSEE DE TÉNERÏFFE AUX CÔTES DEI.'AMÉRÏQUE MERïMOttAÏ.E.
-RECONNOISSANCE DE L'ÏSLE DE TABAGO.–ÀRRÏVEE A CUMANA.

Nous quittâmes la rade de Sainte-Croix le ~5 juin au soir, et nous dirigeâmes


notre route vers l'Amérique méridionale. H yentoit grand frais dju nord-est,
et la mer offroit de petites lames courtes et serrées, à cause de l'opposition
des courans. Nous perdîmes bientôt de~vue les'îles Canaries dont les montagnes
élevées étoient couvertes d'une vapeur roussâtre. Le Pic seul paroissoitde temps en
temps dans des éclaircies, sans doute.parce que le vent qui régnoit dans les hautes
régions de l'air, dispersoit par intervalles les nuages qui enveloppoientle Piton.
Nous~éprouvàmes, pour la première ibis, combien sont vives les impressions
que laisse l'aspect de ces terres qui se trouvent placées aux limites de ,la zone
torride, et dans lesquelles la nature se montre à la fois si riche, si imposante et si
merveilleuse. Notre séjour à Ténériffe avoit été de courte~durëe, et cependant
nous nous séparâmes de cette île comme si nous l'avions habitée pendant
long-temps. j
Notre traversée de Sainte Croix à Cumana, port le plus oriental de ta
Terre-Ferme, fut des plus belles. Nous coupâmes le tropique du Cancer
le 2~; et, quoique le Pizarro ne fut pas un vaisseau très-bon voilier,
nous parcourûmes, en vingt jours, l'espace de neuf cents lieues, qui sépare
les côtes d'Afrique de celles du nouveau Continent. Nous passâmes à
cinquante lieues à l'ouest du cap Bojador, du cap Blanc et des îles du cap
Vert. Quelques oiseaux de terre, que l'impétuosité du vent avoit poussés au
large, nous suivirent pendant plusieurs jours. Si nous n'avions pas connu
exactement, par les montres marines, notre point en longitude, nous aurions
été tentés de croire que nous étions très-près des côtes d'Afrique.
Notre route étoit celle que suivent tous les bâtimens destinés
aux Antilles,
depuis le premier voyage de Colomb. On diminue rapidement en latitude,
presque sans gagner en longitude, depuis le parallèle de Madère jusqu'au
tropique: parvenu à~Ia zone eûtes vents alisés sont ~stans, on parcourt
l'Océan de Test & l'ouest, .8ur,~e..m€r:-calnM.et~pais~
gateurs espagnols appellent le (~!& des Dames, 67 60~
la,r D~inas.
Nous éprouvâmes, comme ~usc~aXqutoat~ ces parage`s, qu'â mesure
que l'on avancevers l'occident~es vents alises, qui étoient d'abord est-nord-est,
senxeBtàl'est.
Ces vents, dont la théorie la plus généralement adoptée se trouve exposée
dans un mémoire célèbre de Hadiey*, sont un phénomène beaucoup plus
compliqué* que ne le pensentTun grand nombre~ dp physiciens. Dans l'Océan
Altantique, la position en longitude innue, comme la déctinaison du soleil,
sur la direction et sur les limites des vents alises. Du côté du nouveau continent,
dans l'un et l'autre hémisphère~ ces limites dépassent le tropique de 8 à
degrés, tandis que dans le voisinagede l'Afrique les vents variables règnent bien
au dëtà du parallèle des 28 ou 2~ degrés. est à regretter, pour les progrès de la
météorologie et de la navigation, que les changemens qu'éprouvent les courans
de l'atmosphère équinoxiale dans la mer Pacinqué, soient beaucoup moins
connus que les variations qu'loffrént ces mêmes courans dans un bassin de
mer plus étroit et initueocé par la proximité des côtes de la Guinée et du
Brésil. Les navigateurs savent, depuis des siècles, que, dans t'Océan Atlantique;
l'équateur ne coïncide pas avec la ligne qui sépare les vents alisés du nord-
est des vents généraux du sud-est. Cette ligne, comme Halley 3 l'a très-bien
observé, se trouve par les 3 ou 4 degrés de latitude nord; et si sa position
est l'effet d'un plus long séjour du soleil dans l'hémisphère boréal, elle tend à
prouver que les températures des deux hémisphères sont dans le rapport

Inexistence d'un courant d'air anpérieur qui porte constamment de l'équateur anx potes, et d'un
courant inférieur qui porte des pôles à t'ëqaatent, avoit déjà été reconnne, comme l'a fait voir
M. Arago, par Hooke. Les tdées du célèbre physicien anglois sont développées dans un discours sur les'
tremblemens de terre, rédigé en t686. «Je crois, ajoute-t-il, que plusieurs phénomènes que présentent
l'atmosphère et l'Océan, surtout les Tents, peuvent ~'etpHqner par des courans notaires. M ( Bonj&e'<
fM~A~moM /~brt< p. 364 ). Ce passage curieux n'est pas cité par Hadiey ( Phil. ThMM., Vol. XXX!X,
p. 58); d'un autre coté, Hooke, en parlant directement des vents ausés (Post. ~or~, p. 88
r

et 363), adopte la théorie erronée de Galilée qui admet une différence de vitesse entre le mouvement
de la terre et celui de l'air.
JMm. </e /e<M! t?6o, p. t8. D'Alembert, sur les causes gén. des vents, p. 5.
~*At7. 3}-atM.~ Vol. XVÏ,
p. t54. MH<m, Conversaciones,p. to8.
Prévost, sur les limites des vents alises; JottfT!. & .PAy<. T. XXXVIIT, p. 369. En supposant,
avec ~pmus, que l'hémisphère austral n'est que de plus froid que l'hémisphère boréal, le calcul
donne, pour la limite boréale des vents alisés E. S. E.e parallèle de t° a8'.
de ïï &a. Nous verrons dans la suite de cet ouvrage, en traitant de ta pattïe de
l'atmosphère qui s'étend sur la mer du Sud ) qu'à l'ouest de l'Amérique, les Venta
alisés du sud~st dépassent moins l'eqnateur qu'us ne le font dans l'Océan Atlan~
tique. En effet, la dinërence avec laquelle les couches d'air refluent des deux
potes vers l'équateur ne peut pas être la même par tous les degrés de longitude,
c'est-à-dire sur des points du globe où les continens ont des largeurs très-
dISérentes et où ils se prolongent plus ou moins vers les pôles.
Il est connu que, dans la traversée de Sainte-Croix à Cumana, comme dans
celle d'Acapulco aux ~les Philippines, les matelots n'ont presque pas besoin
de toucher aux voiles. On navigue dans ces parages, comme si l'on descendoit
une ri~lère~ et l'on peut croire que ce ne seroit pas une entreprise hasardeuse
de faire le voyage dans une chaloupe non pontée. Plus à l'ouest, sur les
côtes de Sainte-Marthe et dans le golfe du Mexique, la brise souffle avec
impétuosité et rend la mer très-houleuse
A mesure que nous nous éloignâmes des côtes d'Afrique, le vent mollit
de plus en plus il cal-moit souvent pendant plusieurs heures, et ces petits
calmer étoient ~gulièrement interrompus par des phénomènes électriques.
Des nuages noirs, épais et à contours prononcés~ se Ïbrmoient du côté de
l'est; on auroit dit qu'un grain de vent alloit forcer de serrer et d'amener
les huniers, mais bientôt la brise fraichissoit de nouveau il tomboit quelques
grosses gouttes dé pluie, et l'orage se dissipoit sans qu'on eut entendu le
tonnerre. Il étoit curieux d'observer, pendant ce temps, l'efïet de quelques
nuages noirs, isolés et très-bas qui traversoient le zénith. On sentoit
augmenter ou diminuer progressivement la force du vent, selon que de petits
amas de vapeurs vésiculaires approchoient ou s'éleigooient, sans que les électro-
mètres, munis d'une longue tige de métal, et d'une mèche enflammée, indi-
quassent un changement de tension électrique dans les couches inférieures de
l'a ir. C'est à la faveur de ces petits grains, qui alternent avec des calmes plats,
que
l'on passe, aux mois de juin et de juillet, des fies Canaries aux Antilles ou aux
côtes de l'Amérique méridionale. Dans la zone torride, les phénomènes
météorologiques se suivent d'une manière extrêmement uniforme, et l'année t9o3
sera long-temps mémorable dans les annales de la navigation, parce que plusieurs

Les marins esp~gnob désignent les ven« atMo, tr!a-&))&, à CMthtt(~ne ~MÏndes,
par le nom de
las ArM~t <& &MM Afort~a, et dans le golfe du Metiqne 1 par. la dénemtMttomde &M t~M MM&M.
Ces defnien vents sont accompagnés d'un ciel gris et nuageux.
Y~.MM~oant~dp..e~~x/r,.C~ra~~Bt.~ex~>panaë:
par ~° de ~ttudey..e.t' les .48~de~~ caM$e,d~~n~~t!fa!Et
qm sonCla pendant~plasienrs:/}OHr§;u~rd'~
extraordinaire ne, &nt-'H. p~ ~pp<t)~ns ie jeu des conrans aériens, poujr
expliquer un .ven~t.de.re)~QUs~.cqu~s~ ,auratroublé en même temps
!arégularijté,desoscHlajtionshorMr~dnbaKomètre!
l
n
Quelques navigateurs espagnols pnjL proposé recomment, pour aller aux
Antilles et aux côtes de la Terre-Eer~e, une route dinerente de celle qui avoit
été frayée par Christophe Colomb. Bs conseillent de ne pas gouverner direc-
tement aq sud pour chercher les vents anses, mais de changer de longitude
et de latitude à ta fois, sur une ligne diagonale, depuis le cap Saint-nGent
jusqu'en Amérique. Cette méthode, d'après laquelle on raccourcit son chemin,
en coupant te tropique, à peu près ao degrés a l'ouest du point où le coupent
a
ordinairement tes pilotes, été suivie plusieurs fois avec succès par l'amiral
Gravina. Ce marin expérimenté, qui a trouvé une mort glorieuse à la bataille
de TraMgar, arriva en ï8oa à Saint-Domingue, par la route oblique,
plusieurs jours avant la ûotte &ancoise, quoique des ordr~iâj~ la cour de
Madrid l'eussent forcé d'entrer avec son escadre dans le port du Férol, et
de s'y arrêter quelque temps.
Le nouveau système de navigation abrège à peu près d'un yingtième la route
de Cadiz à Camana mais comme on ne parvient au tropiq~ que par les ~o"
de longitude, on a la chance de lutter plus long-temps contre les vents
variables qui soutient tantôt du sud, tantôt du sud-ouest. Dans l'ancien
système, le désavantage de faire un chemin plus long est compensé par la
certitude de trouver plus tôt les vents alisés, et d'en jouir pendant une
plus grande partie de la traversée. Lors de mon sé}our dans les colonies
espagnoles, j'ai vu arriver plusieurs bâtimens marchands que la crainte des
corsaires avoit déterminés à choisir la route oblique, etj dont la traversée
avoit été extrêmement courte; ce ne sera ~'après des expériences réitérées
que l'on pourra prononcer avec certitude sur un objet pour le moins aussL
important que le choix du méridien par lequel on doit couper l'équateur dans
la navigation d'Europe à Buenos-Ayres ou au cap de Hom.
Rien n'égale la beauté et la douceur du climat; dans la région équinoxiale
de l'Océan. Tandis que le vent alise soufnoit avec force, le thermomètre
se
soutenoitlejour à zS et 34 degrés, et4anuit, entre aa et as,5 degrés. Pour
bien sentir tout le charme de ces heureux climats voisins de réquateur. il
faut avoir fait, dans une saison très-rude, la navigation d'Acapulcoou
des
côtes du Chili en Europe. Quel contraste entre les mers orageuses des latitudes
boréales et ces régions où le calme de la nature n'est jamais trouble Si le
l'Espagne
retour du Mexique ou de l'Amérique méridionale aux côtes de
étoit aussi prompt et aussi agréable que ta traversée de l'ancien au nouveau
continent, le nombre des Européens établis dans les colonies seroit bien moins
considérable que nous ne le voyons aujourd'hui. La mer, qui entoure les îles
Açores et les Bermudes et qu'on traverse, en revenant en Europe par de
hautes latitudes, est désignée, par les Espagnols, sous la dénomination bizarre
de Golfo de las Yeguas I. Des colons qui n'ont pas l'habitude de la mer, et
qui ont vécu long-temps isolés dans les forêts de la Guiane, dans les savanes
de Caracas'ou &ur les Cordillères du Pérou, redoutent le voisinage des Bermudes
plus que les habitans de Lima ne craignent aujourd'hui le passage du cap de
Horn. Ils s'exagèrent le danger d'une navigation qui n'est périlleuse que pendant
l'hiver. Ils remettent d'une année à l'autre l'exécution d'un projet qui leur
semble hasardeux, et la mort les surprend le plus souvent au milieu des pré-
paratifs qu'ils font pour leur retour.
Au.! nord des iles dn cap Vert, nous rencontrâmes de gros paquets de
goemons ou varecs flottans. C'étoit le raisin du Tropique, Fucus natans,
quii
jusqu'au ~o" de
ne végète sur des rochers soumàrins que depuis l'équateur
latitude australe et boréale. Ces algues semblent indiquerici, comme au sud-
ouest du banc de Terre-Neuve, la présence dés courans. Il ne faut pas confondre
les parages abondans en gœmons épars, avec ces bancs de plantes marines
que Colomb compare à de vastes prairies et dont la présence effrayoit l'équi-
page de la Santa-Maria par les ~2° de longitude. Je me suis assuré, en com-
parant un grand nombre de journaux/que dans le bassin de l'Océan
Atlantique septentrional il existe deux bancs d'algues très-différens l'un de
l'autre. Le plus étendu" se trouve un peu à l'ouest du méridien de Fayal,
une des îles Açores, entre les 25 et 36 degrés de latitude. La température
de 1 Océan, dans ces parages, est de ~~20 degrés, et les vents jdu nord-
ouest qui y soufflent quelquefois impétueusement poussent des îles flottantes

1 Golfe <&< Yunte/M.


U paro!t que des Mtimens pMntcteM sont venus « en trente jonrs de navigation et poussés par
le vent d'est jusqu'à la mer herbeuse que les Portugais et les Espagnols appellent ~<n' de Zo~Mo.
J'ai fait voir dans un autre endroit que le pacage d'AnsMte,~e~MH~M~ e< J0«f< p. tt~y, ne

x
de varec, dans de basses latitudes jusqu'aux pàràllèies d& a~ et même de
qui retournen e soit de Montevideo, soi
tes bâtimèns qui retournent en Europe, ,!tOît'cJ.el\fo.titevideo,
26 degrés. Les
2bdegrés. soit
du cap de Bonne-Espérance, traversent ce ba~c de fucus qUe les piloter espagnô!s
regardent comme également éloigné des Petites-Antilles et des ues Cananes:
il sert aux moInsinstntitsafectiËer leur longitude. Le second Banc dé
fucus est peu connu; il
occupe un espace beaucoup moins grand par les
l'ouest du méridien des Mes
22 et 26 degrés de latitude, 80 lieues marines à
Bahames. On le rencontre en allant des Caïques aux Bermudes.
Quoique l'on ait observé des espèces de varec dont les tiges ont près
de 800 pieds de long, et que ces cryptogames pélagiques prennent un
accroissement très-rapide, il n'en est pas moins certain que, dans les parages
que nous venons de décrire, les fucus, loin d'être attachés au
fond, flottent
en paquets détachés à la surface des eaux. Dans cet état, la végétation
ne peut guère continuer plus long-temps qu'elle ne le feroit dans une
branche d'arbre séparée de son tronc et, pour expliquer comment des
masses mobiles peuvent se trouver depuis des siècles dans les mêmes lieux, il
faut admettre qu'elles doivent leur origine à des rochers soumarins qui,
placés à quarante ou soixante brasses de profondeur, suppléent sans cesse à
ce qui est emporté par le courant équinoxial. Ce courant entratne le raisin
du Tropique dans les hautes latitudes vers les côtes de la Norwège et de
la France, et ce n'est pas, comme le pensent quelques marins, le GM~
stream qui accumule les fucus au sud des Açores Il seroit à désirer que
les navigateurs sondassent plus fréquemment dans ces parages couverts
d'herbes; car on assure que des pilotes hollandois ont trouvé une série de
bas-fonds depuis le banc de Terre-Neuve jusqu'aux côtes d'Ecosse, en employant
des lignes composées de fils de soie
Quant aux causes qui peuvent arracher les algues à des profondeurs où l'on
croit généralement la mer peu agitée, elles ne sont pas sumsamment connues.
Nous savons seulement, par les belles observations de M. Lamouroux, que si

peut guère s'appliquer aux côtes d'Afnqae, comme un passage, Mahtgue du Périple de Soyhit.
Tableaux de la Nat., T. 1, p. 98. En supposant que cette mer, remplie d'herbes, qui ratemtiMoit
la marche des vaisseaux phéniciena, étoit le 3f<M- de Zo~Mm, on n'a,pas besoin d'admettre que les
anciens aient traverse l'Atlantique au delà des 3o degrés de longitude occidentale du méridien de Paris.
Le haudreux des îles Malouines; Fucus giganteus, Forster ou Laminaria pyrifera, Lamour
Bo/TOM', ~<yoge A &! Co<-AtncXme, T. t, p. 93.
~Mo-MM, ~oj~e f~M T. t, p. 5a4. (La ~&ften!, ~<yoge T. I, p. 33t.)
les fucus adhèrent aux rochers avec la plus grande force avant le développement
de leur fructification, on les enlevé au contraire avec beaucoup dé facilita
après cette époque, ou pendant la saison qui suspend leur végétation comme
celle des plantes terrestres. Les poissons et les mollusques qui rongent tes tiges
des gœmonscontribuent sans doute aussi à les séparer de leurs racines.
Depuis les vingt-deux degrés de latitude, nous trouvâmes la -surface de la
mer couverte de poissons volans' ils sétançoientdans l'air à douze, quinze
et même dix-huit pieds de hauteur, et retomboientsùr le tillac. Je ne crains
point de revenir sur un objet dont les voyageurs font aussi souvent mention
que des dauphins, des requins, du mal de mer et de !a phosphorescence de
l'Océan. H n'y a aucun de ces objets qui ne puisse ~Srir encore pendant
long-temps aux physiciens des observations intéressantes, pourvu qu'ils en
fassent une étude particulière. La nature- est une source inépuisable de
recherches, et, à mesure que le domaine-des sciences s'étend, elle présente,
à ceux qui savent 1 interroger, des faces sous lesquelles on ne lavoit point
encore examinée.
J'ai nommé les poissons volans pour fixer l'attention des naturalistes sur
lénorme grandeur de leur vessie natatoire qui, dans un individu de 6,~ pouces,
a déjà 3,6 pouces de long et o,~ de large, et renferme 3 pouces cubes d'air.
Comme cette vessie occupe plus de la moitié du volume de t'animai, il est
probable qu'elle contribue à lui donner de la légèreté. On pourroit dire que ce
réservoir d'air lui sert phts pour voler que pour nager; car les expériences*
quje nous avons faites, M. Provenzai et moi, ont prouvé que, même pour
les espèces qui sont pourvues de cet organe, il n'est pas indispensablement
nécessaire aux mouvemens d'ascension vers la surface de l'eau. Dans un jeune
Exocet de 5,8 pouces de long, chacune des nageoires pectorales qui servent
d'ailes offroit déjà à l'air une surface de 3 pouces carrés. Nous avons
reconnu que les neuf cordons de nerfs qui vont aux douze rayons de ces
nageoires, sont presque trois fois plusgrosque les nerfs qui appartiennent aux
nageoires ventrales. Lorsqu'on excite, par rétectricité galvanique, les premiers
de ces nerfs, les rayons qui soutiennent la membrane de la nageoire pectorale
s'écartent avec une force quintuple de celle avec laquelle les autres nageoires

Exoccetas voHtana.
Rechercher sur la respiration des pOtMoma et mr la. vessie eMenne, dans les JtMm. <& &t ,Société
<f~MM<<, T. lï, p. 359.
se meuvent lorsque Ïe8~galvanise:p~m~ poisson
est-il capable de s'élancer
de toucher de~ nouveau~ la !SUr~d~<~V€C~l~~
horizontale!
Qn a très-bien comparé ce ~oU~~n~~ d'ùne .pierre plat~è -qui~ bondft
par ricochet
à un ou ~deu~~p~ds~u~ur-M-dessus ~s vagues.~ Malgré
l'extrême rapidité de ce B~ouVëment, on peut se convaincre que l'animât bat
l'air pendant le saut.c'est-à-dite
les nageoires pectorales. I~ même moavement~ la
qu'il étend et qu'il terme alternativement
Scorpènc
volante des rivières du Japon, qui renferme aussi une grande vessie aérienne,
tandis que la plupart des Scorpènes qui ne volent pas en sont dépourvues*. Les
Exocets, comme presque tous les animaux munis de branchies, jouissent du
privilège~ de pouvoir respirer indiCeremment, pendant assez long-temps et par
les mêmes organes, dans l'eau et dans l'air, c'est-à-dire de soustraire l'oxygène
à l'atmosphère, cOmme à l'eau dans laquelle il est dissous. Ils passent une
grande partie de leur vie dans fair, mais cette vie n'en est pas moins malheu-
reuse. Sus quittent la mer pour échapper à la voracité des Dorades, ils
trouvent dans Pair des Frégattes, des Albàtrosses et d'autres oiseaux qui
les saisissent an vol. C'est ainsi que/sur les bords de l'Orénoque, des trou-
peaux de Cabiai sortis de l'eau pour fuir les Crocodiles, deviennent, sur le
rivage, la proie des Jaguars.
Je doute cependant que les poissons volans s'élancent hors de l'eau unique-
ment pour se soustraire à la poursuite de leurs ennemis. Semblables à des
hirondelles, ils se meuvent par milliers en ligne droite et dans une direction
constamment opposée à celle des lames. Dans nos climats, au bord d'une
rivière dont les eaux limpides sont frappées par les rayons du soleil, on voit
souvent des poissons isolés, et n'ayant par conséquent aucun motif de crainte,
bondir au-dessus de la surface, comme s'ils trouvoient plaisir à respirer de
l'air. Pourquoi ces 'jeux ne seroient-ils pas plus fréquèns et plus prolongés
chez les Exocets qui, par la forme de leurs nageoires pectorales et par leur

397.
petite pesanteur spéciaque s, ont une extrême facilité à se soutenir dans l'air?i
J'Invite les naturalistes à examiner si d'autres poissons volans, par exemple

/.<!<<&~ J?t~<. !M«. <<M ~OtMOM, T. Ht, p. agO.


S. pMcmt, S.'scro&, S. dactytoptert. De&tmcAe~ ~nn. <&t JMtM.&tm, T. XIV, p. 189.
7mM. t!tfe~ ïï, T. p.
Cavia eapyhafa, t<.
~t.
Cuvier, dans tes <&t JKtM., T. XIV, p. t65; et
Décoche, tM., p. a6~ (acte).
l'Exoccetus exIHens, lé TrIgtavOtitans et le T. hirundp.ont la vessie aérienne
aussi grande que l'Exocet des Tropiques. Ce dernier suit tes eaux chaude du
Gulf-stream lorsqu'elles remontent vers le Nord; Les mousses s'àmusen<~a!ui
couper une partie des nageoires pectorales, et assurent que ces ailes se repro-
duisent; ce qui me pafoît peu conforme à des'faits observes dans d'autres
familles de poissons.
A l'époque où pavois quitté Paris, des expériences tentées à la Jamaïque,y
parle docteur Brodbelt sur l'air renfermé dans la vessie natatoire de l'espadon~,
avoient fait croire àquelques physiciens que, sous les Tropiques, dans les
poissons de mer, cet organe étoit rempli de gaz oxygène pur. Pjréoccupé de'
cette idée, j'étois surpris de ne trouver dans la vessie aérienne des Exocets
que 0,04 d'oxygène sur o,<~4 d'azote et 0,02 d'acide carbonique. La proportion
de ce dernier gaz, mesurée par l'absorption de l'eau de chaux dans des tubes
gradués 3, paroissoit plus constante que celle de l'oxygène, dont quelques indi-
vidus enrôlent des quantités presque doubles. D'après les phénomènes curieux
observés par MM. Biot, ConngHachi et De!aroche~, ott peut supposer que
l'espadon, disséqué par M. Brodbelt, avoit habité les couches Intérieures de
lOoéan où quelques poissons s présentent jusqu'à 0,92 d'oxygène dans leur
vessie aérienne.
Le i." juillet, par les t~° 4~ de latitude et les 34" 21' de longitude,
nous rencontrâmes<'les débris d'un vaisseau naufragé. Nous distinguâmes un
mât, recouvert de varec flottant Ce naufrage ne pouvoit avoir eu lieu dans
une zone où la mer est constamment belle. Peut-être ces débris venoient'-Us des

jOMMMtt't ~<7. of Medecine, t/gC, p. 3g3. ~VfcAo&ûn'~Journ. o/Vf«.~t7.,Vol.ï,p. a64.


Xtphias gladius, Lin.
3 Anthracomètres, tubes recourbés et munis d'une large boule. y~yM mes E<MM <t<r /'<!<)!M<'pMM,
Planche ï( ( en <!f<~mon~).
4 JM~t. <f~K-uet<, Vol. p. a57. ~nn. du Mus:, T. XIV, p. 184-917 et aM-aSg. COa/Sg~eAt
M~'ana/Mt <<e~'orM contenuta FM&t fMtea natatefMt. ~'efta~ i8og. Occupés pendant huit. mois
ttexpenenees sur la respiration des poissons, nous avons observé M. ProYenzatet mon, que les
poissons absorbent, non seulement t'oxygène, mais a)tmi de t'azote.et que la quantité de cet a~ote
absorbé diffère dans les individus de la même espèce. U s'en faut de beaucoup que t'oxygène Inspiré
soit représenté par l'acide carbonique qu'exhalent les poissons de toute la sur&cë de leur corps; et
ces faits tendent à prouver que les proportions d'oxygène et d'azote varient dans la vessie, selon que
l'action vitale des branchies et de la peau est modinée par la pression plus ou moins grande qu'éprouve le
poisson à différentes profondeurs.
ÏM~tt CMCM/&M.
me~:<Mt~~s~du~~d,Btoi~m~l~e
avoIt~é~entratB.é~~pa:F;,eCt:~amM~~n~~traer~
de.aBtique~'dans~llbM&nisp~
.etmx
pâint d,~ ~avi~e

.'Le. 3 <et le .nons.?ttK~e~tm~la, de l'Océan où les certes in-


diquent !e banc* du Naal~t~ers~~
ce danger, dont ~exisienee est aussi dioutcuse que celle des Mes Fonseco et
Sainte -Anne H auroit été plas prudent peut-être de continuer la même

route. Les cMtes anciennes sont tempUes de vigies dont quelques-unes


existent réëUement,n~ais dont Ja majeure partie est due à ces illusions
d'optique qui sont ptus&~quentes sur mer que dans t'interienr des terres.
La position des dangers réeis se trouve généralement indiquée comme ett
hasard; itsontétévuspar des pitotesqui ne connoissoient leur longitude
qu'à ptu6ieurs~degt!& près; et Ïep!us souvent on est assezsurde ne pas
rencontrer d'écue~s ou de brisans, sil'on se dirige vers les points où ils sont
marqués sur les cartes. En nous approchant du prétendu Maal-Stroom, nous
n'observâmes d'autre mouvement dans les eaux que l'effet d'un courant qui
portoit au nord-ouest, et qui nous empêchoit de diminuer en latitude autant
que nous le désirions. La force de ce courant augmente à mesure qu'on
approche du nouveau continent; il est modiné par la configuration des côtes
du Brésilet de la Guiane, et non par les eaux de l'Orénoque et de l'Amazone,
comme Je prétendent quelques physiciens.
Depuis que nous étions entrés dans la zone torride, nous ne pouvions
nous
lasser d'admirer, toutes les~uits, la beauté du ciel austral qui, à
mesure que
nous avancions vers le sud, déployoit à nos yeux de nouvelles constellations.
On éprouve je ne sais quel sentiment inconnu lorsqu'on s'approchant de

'jB<)n~Ty<~A&tjF&M,T.ÏÏ,p.3t4.
LMCMtetdete&rytetdeVM-Keetenmdiipent quatre :les qui 118 sont que des dangeM imagi-
na:re!es ~es (tMC&et Samte-A~ne~A l'<meotaMAsqre~Hte Verte (ht. 44° ton~aS" 3o'),
et t'ae aeFoBseco(!at. t3'' t5, tong. 57° tô'). Comment croure x l'existence de q'Mtreites<~nsAa
parages tMveMef par des m!U:eM de hât;ntem, !erM[<te sar tant de petits écueils et de bas-fonds,
annonces par des pt~tes eréddesdep~ NMe, il
un ne s'en est trouvé à peine que deux ou trois de
YentaHes? Qaaat&I~qoestton genêrate, qaetest le de6~de prebaHKte lequel ompeu~dmettre
qMt'oodecoovnra~aotMiMeanneMene de distatce~ entre t'JEnrope avec
et rAmériqne, on pourroit la
soumettre a m ca!eu! rigoureux, si l'on connoissoit, !e fnonthredes batimens qui parcourentannuellement
t'Attantiqae depOstromsiecies,et~n'on atoitegaKt ~ta ~partition mégate de cesbâtimeM
dans différens
parages: Siie MaaI-Stroomse tronvoit, comme t'admet Van-Xeden~ ~af tes t6° o' de htitnde
tes 39° 3o'de longitude, nous i'awions et
traversé le 4 juin.
1 équatear, et surtout en passant dun hénusphère àlautre~on yottsabatsser
progressivement et enfin dispaironje les étoiles que l'on ccmnoitt <Iès sa
première enfance. Rien ne rappelle plus vivement au voyageur la distance
immense de sa patrie, que l'aspect d'un ciel nouveau. L'agroupement des
grandes étoiles, quelques nébuleuses éparses, rivalisant d'éclat avec la
voie lactée, des espaces remarquables par une noirceur extrême donnent
au ciel austral une physionomie particulière. Ce spectacle frappe même
l'imagination de ceux qui sans instruction dans les sciences exactes, se
plaisent à contempler la voûte céleste comme on admire un beau paysage,
un site majestueux. On n'a pas besoin d'être botaniste pour reconnoître
la zone torride au simple aspect de la végétation; sans avoir acquis des notions
d'astronomie, sans être familiarisé avec les cartes célestes de Flamstead et de
La Caille, on sent qu'on n'est point en Europe lorsqu'on voit s'élever sur
l'horizon l'Immense constellation du Navire ou les nuées phosphorescentes de
Magellan. La terre et le ciel, to~t dans la région équinoxiale, prend un
caractère exotique.
Les basses régions de l'air étoient chargées dé
vapeurs depuis quelques
jours. Nous ne vîmes pour la première fois distinctement la Croix du Sud,
que dans la nuit du 4 au 5 juillet, par les ï6 degrés de latitude elle étoit
fortement inclinée, et paroissoit de temps en temps entre des nuages,
dont le centre, sillonné par des éclairs de chaleur, réflétoit une lumière
argentée. S'il est permis à un voyageur de parler de ses émotions person-
nelles, j'ajouterai que dans cette nuit je vis s'accomplir un des rêves de ma
première jeunesse.
Lorsqu'on commence à fixer les yeux sur des cartes géographiques et à lire
les relations des navigateurs, on sent, pour quelques pays, et pour certains
climats une sorte de prédilection dont on rie sauroit se rendre compte
dans \m âge plus avancé. Ces impressions exercent une influence sensible sur
nos déterminations; et, comme par instinct, nous cherchons à nous mettre
en rapport avec des objets qui ont eu, depuis long-temps, un charme secret
pour nous. A une époque où j'étudiois le ciel, non pour me livrer à l'astro-
nomie, mais pour apprendre à concoure les étoiles, j'étois agité d'une
crainte inconnue à ceux qui aiment la vie sédentaire. H
me paroissoit
pénible de renoncer à l'espérance de voir ces belles constellations vpi-
smes du pôle austral. Impatient de parcourir les régions équatoriales, je
ne pouvois lever les yeux vers la voûte étoilée sans songer à la Croix du Sud
,1
et sans me rappeler passage sublime du Bante," qae
plus célèbres ont appliqué à cette constellation

Io mi volsi a man destra e poH mente


les commentatears les

Alraltro polo e vidi quattro stëUe


Non viste mai fuor ch' alla prima gente.
;¿
Goder parea ta ciel diJtornammeUe;
0 settentnjonal vedovo sito
Poi che privato se' dimirar quelle!

La satisfaction que nous éprouvions en découvrant la'Croix du Sud, étoit


vivement partagée par les personnes de l'équipage qui avoient habité les colo-
nies. Dans la solitude des mers, on salue une étoile comme un ami dont on
auroit été séparé depuis long-temps. Chez les Portugais et les Espagnols, des
motifs particuliers semblent ajouter à cet Intérêt un sentiment religieux
les attache à une constellation dont la forme leur rappelle ce signe de la foi
planté par leurs ancêtres dans les déserts du nouveau monde.
Les deux grandes étoiles qui marquent le sommet et le pied de la Croix
ayant à peu près la même ascension droite, il en, résulte que la constellation
est presque perpendiculaire au moment où elle pas~e par le méridien. Cette
circonstance est connue de tous les peuples qui vivent au-delà du Tropique
ou dans l'hémisphère austral. On a observé dans quelle partie de la nuit,
en dISérentes saisons, la Croix du Sud est droite ou inclinée. C'est une hor-
loge qui avance très-régulièrement de près de quatre minutes par jour, et
aucun autre groupe d'étoiles n'onre, à'la vue simple, une observation du
temps aussi aisée à faire. Que de fois nous avons entendu dire à nos guides,
dans les savanes de Venezuela ou dans le désert qui s'étend de Lima à TruxIDo:
minuit est passé, la Croix commence à s'Incliner » que de fois ces mots
nous ont rappelé la scène touchante, où Paul et Virginie, assis près de
la source de la rivière des Lataniers s'entretiennent pour la dernière fois,
et où le vieillard, à la vue de la Croix du Sud, les avertit qu'il est temps
de se séparer!
Les derniers jours de notre traversée ne furent pas aussi heureux que
nous le faisoient espérer la douceur du climat et la tranquillité de l'Océan.
Ce n'étoient pas les dangers de la mer qui trouM6!ent nos jouissances, c'étoit
te germe d'une nèvre maligne qui se déyeioppoit à mesure que nous approchions
des nés Antilles. Les entreponts étoient excessivement chauds et très-encom-
brés. Depuis que nous avions passé le Tropique, le thermomètre s'y soutenoit
à 3~ et 36 degrés. Deux matelots, plusieurs passagers et, ce qui est assez
remarquable~ deux nègres de la côte de Guinée, et un enfant mutâtre,
furent attaqués d'une maladie qui paroissoit devenir épidémique. Les symp-
tômes n'étoient pas également alarmans chez tous les individus; cependant
plusieurs, et 'surtout les plus robustes, tomboient en'détire dès le second
jour, et ressentoient une prostration totale des forces. L'indifférence qui
règne à bord des paquet-bots/pour tout ce qui ne regarde pas la manœuvre
et la célérité de la traversée, empêcha le capitaine d'employer les moyens
les plus connus pour diminuer le danger qui nous menaçoit. On ne
faisoit aucune fumigation. Un chirtirgien galicien, 'ignorant et flegmatique,
ordonnoit des saignées, parce qu'il attribuoit la fièvre à ce qu'il appeloit
l'ardeur et la corruption du sang. II n'existoit p~as une once de quinquina
à bord; nous avions oublié d'en embarquer nous-mêmes, parce que, plus
occupés de nos instrumens que du soin de notre santé, nous avions cru
trop légèrement que l'écorce fébrifuge du Pérou ne pouvoit manquer à bord
d'un bâtiment espagnol.
Le 8 juillet, ua matelot qui étoit à toute extrémité, recouvra la santé par
une, circonstance assez digne d'être rapportée. Son hamac étoit suspendu
de manière qu'il ne re~toit pas dix pouces de distance entre son visage
et le pont. tl étoit impossible de lui donner les sacremens dans cette
position; car, d'après l'usage des vaisseaux espagnols, le viatique devoit être
porté à la lueur des cierges, et suivi de tout l'équipage. On transporta le
malade dans un endroit aéré, près de l'écoutUte, où l'on avoit formé un petit
appartement carré au moyen de voiles et de pavillons., H devoit y rester
jusqu'à sa mort, que l'on supposoit très-prochaine; mais, passant d'un air
excessivement chaud, stagnant et rempli de miasmes, dans un air plus frais, plus
pur et renouvelé à chaque mstant, il sortit peu à peu de son état léthargique.
Sa convalescence data du jour où il avoit quitté les entre-ponts; et,
comme
souvent en médecine les mêmes faits servent à étayer des systèmes diamétra-
lement opposés, cette convalescence fortifia notre médecin dans
ses Idées sur
l'inflammation du sang et sur la nécessité des saignées, des minoratifs et de
tous les remèdes asthéniques. Nous éprouvâmes bientôt les suites funestes de ce
iteaite~n~t' -MW~deaMôa~pIu~a~
piusieuMJoar~I~potnt 4~
mm~que, '–"
de
Depuis
laiongit~de qc$}'ohtën~
moins au -courant
mouvement
~le'i~ Ia'

gênerai',
particuUer qui, eRtra~a~ depuis les
qu'& ce ~e~
dés pilotes: s'étoit éloig~tlé

côtes du Brésil jusqu'aux petites AntiÏles, raccourcit les traversées de Cayenne.


à l'ile de la Guadeloupe Le~ t~ juillet, je crus pouvoir annoncer l'attérage
pour le lendemain avant le lever da soleil. Nous nous trouvions alors, d'après
longitude
mes observations, par les tO" 4~~ de latitude) et par les~o" 5~~ de
occidentale. Qnelqués~séries de distances lunaires confirmoient le résultat chro-
nometfique mais nous étions plus surs de !a position de la corvette que du
gisement des terres vers lesquelles se dirigeoit notre route, et qui se trouvent
si différemment placées sur les cartes ïrançoises, espagnoles et angloises. Les
longitudes déduites des observations précises dé MM. Churruca, Fidalgô et
Noguera n'etoient point encore puMiées à cette époque.
Les pilotes se noient p!us au !och qu'à ia marche d'un garde-temps; ils
sourioient à la prédiction d'un prompt attërage, et se croyoient éloignes des côtes
de deux,à trois jours de navigation. Aussi j'appris avec une externe satisfaction
que, le ï3, vers les six heures du matin, on voyoit du haut des mâts une
terre très-élevée., mais qui se dessinoit mal- à cause de la brume donteUe etoit
enveloppée. Il ventoit grand ~rais; la merétoit fortement agitée. Il pieuvoit par
intervalles .à grosses gouttes, et tout annonçoit un temps peu maniable. Le
capitaine du ~.Mt/ro avoit eu l'intention de passer par le canal qui sépare
l'île'de Tabago<te celle de la Trinité; et, sachant que notre corvette .étoit très-
lente à virer de bord, il craignolt de tomber sous le vent vers le sud, et de
s'approcher des Bouches du Dragon. Nous étions en effet plus sûrs de notre
longitude que du point de latitude n'ayant pas eu d'observation à midi
depus le ït. De doubles hauteurs que je pris dans la matinée, d'après la
méthode de Douwes~ nous plaçaient par les 11° 6~ So", par conséquent
au nord du point de l'estime. L'impétuosité avec laquelle la grande rivière de

U existe daM l'Océam -Attmt!<~e un parage 0& l!ean est constamment ta!teu~e, quoique la mer
y soit tt&s-ptofomde. Ce phénomène caneu~ se présente sur le parallèle de l'ile de la Dominique, &
peu près par les 5y degrés de longitude. Y auroit-il eu dans ~cet~indroîtquelque îlot Yotcaniqaesub-
mergé, j~taeonentet encore qtte!a,Barhade?
TOrenoque verse ses eaux dans t'Gcéan, peut augmenter sans doutey dans ces
de Ïà
parages, la force des courans; mais ce qu'on avance sur le changement
couleur et de la salure de l'eau, a 60 Menés de di6tance\de: l'embouchure de
l'Orénoque, est une JfaMe inventéepar les pilotes entiers. L'In~uence des âeù vêt
les plus célèbres de l'Amérique, tels que l'Amazone, la PIata, FOrénoque, le
Mississipi et la Madeleine, est restreinte~ à cet égard, dans des limites beaucoup
plus étroites qu'on ne le pense communément.
Quoique le résultat des doubles hauteurs du soleil prouvât assez que la
terre élevée, qui se dessinoit à l'horizon, n'étoit pas la Trinité~ mais Tabago,
le capitaine continuoit de gouverner att nord-nord-ouest, pour chercher cette
dernière <~Ie qui, même sur Is belle carte de l'Océan-Atlantique de Borda,
est placée de 5 minutes trop au sud. On a de la peine accroire que, sur des
côtes fréquentées par toutes les nations commerçantes, de si énormes erreurs de
latitude puissent se perpétuerpendant des siècles. Ayant discuté cette matière dans
un autre endroit il me suuit d'observer ici~ que même sur la dernière carte
des Indes occidentales que M. Arrowsmith a publiée, en t8o3, par conséquent
longtemps après les travaux de Churruca 1 les latitudes des différens' caps de
Tabago et de la Trinité sont encore en erreur de 6 à Tu minutes.
L'observation de la hauteur méridienne du soleil confirma pleinement la
latitude obtenue par la méthode de Douwes. Il ne resta plus aucun doute
sur la position du vaisseau, par rapport aux Mes, et foti résolut de doubler
le cap Nord de Tabago pour passer entre cette Me et ta Grenade et faire
route vers un port de la Marguerite. Dans ces parages nous risquâmes à chaque
instant d'être pris par les corsaires, mais heureusement popr nous Ïa mer
étoit très-mauvaise, et un petit cutter anglais nom dépassa sans même nous
hêler. Quant à M. Bonptand et à moi, nous redoutionsmoins cette contrariété,
depuis que, si près du continent de l'Amérique, nous étions sûrs de ne
pas
être ramenés en Europe.
L'île.-de. Tabago se présentesous un aspect très pittoresque. C'est
un
amas de rochers cultivés avec soin. La blancheur éblouissante de la pierre
contraste agréablement avec !a verdure de quelques bouquets d'arbres épars.
Des cierges cylindriques et très-élèves couronnent la crête des montagnes
et
donnent <m caractère particulier à ce paysage des Tropiques. Leur
vue seule suffit
pour rappeler au navigateur qu'il aborde une côte américaine; car lès Cactus
0~.<M<r.,T. Ï.P.35-39;et7~M~w<M~p.xMYiM).(Oa~<Ot-~t-~&Ht~Me~M~nM'~t<Mn.)
sont e9tcïaMvement propres au nouyean monde, comme fes bm~ërea te sont à
l'ancien 1. La partie nord-est de l*ne de Tabago est la pmSTMntueuse de toutes;
d'après des angles de hauteur pris avec te sextant, les cimes les pÏus élevées de
la côte ne paroissoient cependant pas excéder t~
à i5o toises de hauteur. Au
cap Sud-Ouest,
te terrain s'abaisse VeMia Pointe '(tes, 9%Mes, dont je trouvai
la latitude de ïO" ao< t3~, etTta longttude de 62~ 3o~. Nous aperçûmes
plusieurs rochers à fleur d'eau sur lesquets ïa mer brisoit avec force et nous
distinguâmes une grande régu!arité dans Finclinaison et la direction des couches
qui tombent ausud-est sous un angle--de 60°. Il seroit- à désirer qu'un minéra-
logiste instruit fît le tour des grandes et des petites Antilles, depuis la côte de
Paria jusqu'au cap de la Floridé pour examiner cette ancienne: chaine de
montagnes brisée par l'action des' courans, des trembtemens de terre et
des volcans.
Après avoir doublé le cap nord de Tabago et Ta petite He de Saint-GHes,
on signala, du haut des mâts, une escadre ennemie. A cette nouvelle nous
virâmes de bord, et l'alarme se répandit parmUes passagers, dont plusieurs
avoient placé leur petite fortune en, marchandises qu'ils comptoient vendre
aux colonies espagnoles. L'escadre paroissoit immobile et J'on découvrit bientôt
que ce que l'on avoit pris pour des voiles étoit une multitude de rochers
isolés
Nous traversâmes le bas-tond qui réunit Tabago à rite de la Grenade. La
coùteur de la mer n'oSroit aucun changement visible mais le thermomètre
centigrade, plongé dans l'eau à quelques, pouces de profondeur, ne s'élevoit
qu'à 23" tandis que plus à t'est au !arge~ suc le même parallèle, et également
à la surface, de la mer,. il se soutenoit à 25",6. Malgré les courans, le refroi-
dissement des eaux annonçait l'existence du bas-fond qui ne se trouve indiqué
que sur un petit nombre départes. Le vent mollit après le coucher du soleil, et les
nuages se dissipèrent *à mesure que la lune s'approcha du zénith. Le nombre
des étoiles filantes fut très-considérable cette nuit et les nuits suivantes elles
paroissoient moins fréquemment du côté du nord que vers le sud, au-dessus de
la Terre-Ferme, dont nous commencions à longer les côtes. Cette position
semble prouver iinfluence des causes locales. sur des météores dont la nature
ne nous est point encore sumsamment connue.

Essai sur la ptyMonomtedes végétfmx, dans mes 7~&&atMc de la Nature, T. 1, p. 4y.


Peut-étre les rochers appelésles .S<M-nMHKM, les &Bm-<.
!Let~,au levw~u ~eH~ nous pûmes relev~l~ Bouges du Bragon. Now
distinguâmesl'ile Chacachacan'eo~ ïa plus occidentale ~te celles qui soat placées
entre le cap Paria et te cap nord-ouest de la Trinitë. JE~reqtte nous ~urnee
éteignes de cinq Heues~de jta côte, nous épKtu~àmes, pfès de la jPMHta <~ &t
~aco,l'enet d'un coffrant particulier qui entra~noitïa couette vers le sud.
Le mouvement des eaux qui sortent par les B<Mches du Dragon, et Taction
des marées, occasionnent un courant de remous. On jeta la jsonde, et l'on
trouva trente-six à quarante-trois brasses d~eau sur un fond d'argile verte,
très-fine. D'après les règles établies par Dampier nous ne devions pas
nous attendre a une~i petite profondeur de la mer prèsd'une côte formée par
desmontagnestrès-élèvées.etcoupées à pic. Nous continuâmes à sonder jusqu'au
Cabo de .pM?~ et nous reconnûmes partout un fond ~e~ dont les
contours semblent Indiquer leprolongement de l'ancienne côte. Dans ces parages~
la température de là mer étoit de a3 à 2~ degrés., par conséquent de ï,5 à 2
degrés moindre qu'au. large,, c'est-à-dire au-delà des accoEes du banc.
Le cap desTrois-Pointes, auquel Colomb meme~ imposé ce ~em~,se trouve,
d'après mes observations, par les 65° 5~ de longitude. Il nous parut d'autant
plus étevé que des nuages nous déroboient la vue de ses cimes dentelées. La
physionomie des montagnes de Paria, leur couleur, et surtout leurs formes
gëncralemfnt arrondies, nous firent soupçonner que la côte étoit granitique mais
nous reconnûmes par la suite combien sont hasardés) même pour les personnes
qui ont passé leur vie à parcourir des montagnes., des jugemens portes sur la
nature de roches qui se présentent de loin.
Un calme plat., qui dura quelques heures, nous permit de déterminer avec
précision lintensité des forces magnétiques vis-à-vis le Cabo de tres ~*Mnt<M.
Cette intensité étoit ptus grande qu'en pleine mer, à t'est de Tite de Tabago,
2~9. Pendant le calme, le
en raison de a3~ à courant nous entraîna rapidement
vers l'ouest. Sa force étoit de 3 milles par heure~ elle'àugmentoit .à mesure
que nous approchions du méridien des T~.fttg~.ï amas d écueits qui s'élèvent
au milieu des eaux. Au coucher de la tune~ te ciel se couvrit de nuages, te vent
fratcbit de nouveau, et il tomba une de ces grandes ondées qui sont propres
à la zone torride, et auxquelles nous avons été si ~ouveat exposés pendant
nos courses dans l'intérieur des terres. ',iii
/~tya~ autour du monde, T. ïï~ p. 4y6.
3 Au mois d'août i5o8.
.aM~~î's'et0&~ve!bp~~ ~{~9~+;1,' t~t.p;d~~
depHi~qu~i~us/noQs~~ d~sn~~rès~de .é~t "i~JD~9)èt~"sc

de
peMt
a~
soutBhôit-régulïèremen~ e~tr~ ~~a.:ef~ ~3;dïeg,rés:.p~»dat~t ï~ j~u~~ ~1 montoit
A-' deg~~Le~~ô~
!a pMstrat~~d~~S~M~~,t~d~Yi~fe~~plu,s:~ta~II;
mai~ arrivés~ ~arainst~an~ BattttHM
que tous les malades ~cô~vrerotent~ sant~ dès qu'on pourroit les débarquée
à l'ile de la MàrgMarÏte~ou~ port de Gumana, connas~r~Ienï- grande salubrité.
Cet espoir ? lut pas entièrBméntréalisé. Le plus jeune des passagers, attaqué de
la Sèvte maligne, en ?1 la première, fieurensestent laséule;victimeoC'étoit
un Âsturîen, âgé de dix~eûP aNs ) Ëïs unique d'une veuve sans ~brtune~ Ptusieurs
circonstances Mndeient tâchante ta mttrt de ce jeune homme, dont les
traits aanon~îenttte !a sensibiHtë et nne extrême douceur de caractère. On
t'avoit embarque contre son gré; sa mère, qu'it espëroit secourir par !e
produit de s<Mt travai!y avait saca~ë sa tendresse et ses propres intérêts à
l'Idée ~'assurer là fortune de son &!s en4e &isant passer anx colonies,
auprès d*un riche pareatqairésidoit à n!e de Cuba: Le malheureux jeune
homme expira te troisième jour de sa maladie, étant tombe dès le commen-
cement dans un état léthargique interrompu par des accès de détire~ La Ëèvre
jaune ou le vomissemfnt noir, à la Vera-Cruz, n'enlèvent guère les malades
avec une rapidité plus cSrayante. Un autre Asturien, plus jeune encore ne
quitta pas nn instant le lit
du mourant y .et, c& qui est assez remarquable
il ne prit point ta maladie. Il devoit suivre son compatriote à Saint-Jacques
de Cuba pour être introduit par lui dans ta maison de ce parent, sur
lequel reposoient toutea teur~ espérances. C'étoit nn spectacle déchirant que
de voir celui qui survivoit à son ami, s'abandonner à une douleur profonde,
etmaudire tes conseils funestes qui l'avoient jeté dans un climat lointain, où il
se trouvoit isolé et sans appui.
Nous étions réunis sup te til!ae, et livrés à de tristes méditations. Il n'étoit plus
douteux quetanèvrequirégnoit ànotre bord avoitprisdansces derniers joursnn
caractère pernicieux. Nos regards étoient nxés sur une côte montueuse et déserte
que ta tune éetahoit de temps en temps à travers les nuages. La mer, doucement
agitée, brUtoit d'une foible lueur phosphorique. On n'entendoitque le eri monotone
de quelques grands oiseaux de mer qui sembioient chercher le rivage. Un
calme profond régnoit dans ces lieux solitaires, mais ce calme de la nature
<!ontrastoit avec les sentiméns douloureux dont nous étions agités. Vers les
huit heures on sonna lentement !a cloche des morts; a ce, signal lugubre,y
les matelots interrompiretït leur trayail et se ïntrent a genoux pour faice Mne
courte prière, cérémonie touchante, qut,tont~ temps où les
premiers chrétiens se regafdoient comme metnbres d'une nitém~ famine, semble
rapprocher les/hommes par le sentiment d'un matheur cO~nmnn. Dans la
nuit on porta !e corps de l'Asturien sur le pont, et 1~ pr~-re obtint qu'on
ne le jetât à la mer, qu'après le lever du soleil, pour qu'on pût, lui rendre
les derniers devoirs, s~on le rite de l'ég!ise romaine. Il n'y avoit pas Un
individu de l'équipage qui ne cômpattt au sort de ce jeune homme que nous
avions vu, peu de jours avant, plein de fratcheur et de santé.
L'événement que je viens de rapporter prouvoit te danger de cette fièvre
maligne ou ataxique, dont on pouvoit craindre que les victimes ne fussent
très-nombreuses, si des calmes prolongés ralentissoient le trajet de Cumana à
la Havane'. A bord d'un vaisseau de guerre ou d'un bâtiment de transport
la mort de quelques individus ne fait généralement pas plus d'impression
que l'aspect d'un convoi funèbre dans une ville,populeuse. H n'en est pas
de même à bord d'un paquet-bot dont l'équipage est peu nombreux,
et où dt s'établit des rapports plus. intimes entre tes personnes qui tendent
vers un même but. Les passager du Pizarro, qui ne ressentoient point
encore les symptômes de la maladie résolurent de quitter le navire à la
première relâche, <et d attendre l'arrivée d'un autre courrier pour suivre leur
route à Me de Cuba et au Mexique. Ils regardoient les entreponts de ta
corvette comme empestés; et, quoiqu'il ne me parût aucunement prouvé
que la fièvre fût contagieuse par
contact, je crusptus prudent de débarquer
à Cumana. Je formai le désir de ne visiter la NouveUe-Espagne qu'après
avoir fait quelque séjour sur les côtes de Venezuela et de Paria, dont
1 infortuné Lôning avoit examiné un très-petit nombre de productions.
Nous brûlions du désir de voir dans leur site natal les. belles plantes que
MM. Bose et Bredemeyer avoient recueillies pendant leur voyage à la Terre-
Ferme, et qui embellissent les serres de Schonbrunn et de Vienne. U nous

Typhus, Sauvages jRsMw tMTfMa, Franck.

Le matelot dont j'ai parlé plus haut, et qui échappa à la mort par un changement <a!r, n'étoit
que très-légèrement incommodé lorsqu'on l'embarqua à la Corogne; c'étott sans doute à CMSe de
la dispositionparticulière de ses organes, qu'il fut le premier attaqué de ta fièvre maligne lorsque nous
entrâmes dans la zone terride. °
'a~
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m~t~e~
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sor~Ie~o~s~
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possessîom portugaises.
Ià.~sa~don~~n~~avoBs~om ~ndant- long
équinoxia!<Sf v
Mit
pre~M~ ?9~~ b~ les
sont
ËUF~p~mc~
~ât:
~toa

00115 ,àœtte diiectio¡1, notre voyage

soas
~t~a~.,¡
l~ ant~tt ~u

~inwîtes
~t ot lune
,o~â~~s..At~, ,.i;i~ép~CfI'f3I
.Te.I1'~r'¡¡'ë,.',¡"ns".

séjottr dans les régions


plas grands dangers pendant les
a

le ciel brûlant, des Tropiques.


Ils se ~aMent eem<ne acclimatés tprsqn'Hs ont passé la saison des pluies
aux An~Mes,aIàVera-Gruxoa & Carthagène des Indes. Cette opinion est
asse &ndj~) qaoitptil existe des exemples de personnes qui, échappées à
une premi~e épidémie de la~vtë ~aonë, ont pcri vIctimes: de la même
ntaMie dans une des années subseqaentes. La faci!ité de s'acclimater paro~t
etjne en Eaison inverse de la diSerence qui existe entre !& tempërature
moy~Me d~la zone torridë et celle du pays dans lequel est né le voyageur
on le col<m qui change de climat, parce que l'irritabilité des organes et leur
action vitale sont puissamment modifiées par l'influence de la chaleur atmos-
phérique, tîn Prussien, nn Poionois, un Snëdois sont plus exposés en arrivant
aux îles ou à la Terre-Ferme) qu'un Espagnol, un Italien et même un habitant
de la France méridionale'. Pour les peuples du nord, la dinerence de
température moy~enne est de ï~ à at degrés, tandis que pour les peuples du
midi elle n'est que de, g à to. Nous avons eu le bonheur de passer le temps
où l'Européen récemment débarque court le plus de danger, dans le climat
excessivement chaud, mais très-sec, de Cumana, ville célèbre pour sa grande
sa!ubrité. Si nbus eussions continué notre voyage à la Vera-Cruz, nous~
aurions partagé peut-être le sort malheureux de plusieurs passagers du
paquet-botl'~CMtB~ quiarriva à la Havane avec le JP~amo~ à une époque
où le vomissement no<r faisoit de cruels ravages dans I'ï!e de Cuba et sur les
côtes orientales du Mexique.

'A'i)ftf.B~T.ïî,p.754.
Le !& au matin, à peu près par le travers du monticule de Munt~JoSepa~
nous <umes entourés d'une grande quantité de Tarée Nattai Se ( tiget étoient
munies de cesappèndicesextraordihaires en Corme de godets et dëpânaches,
que Don Hippolyto Ruiz a observés lors de son retour d( l'expédition
du Chili, et qu'il a décrits dan~ un mémoire particulier comme les organes
sexuels du Fucus natans. Un heureux hasard nous mit a même de'vériner
un fait qui ne s'étoit présente qu'une seule fois aux naturalistes. Les caquets
de varec recueillis par M. Bonpland, étoient absolument identiques a~ec les
échantillons que nous devions à l'obligeance des- savans auteurs de la~Ftore
du Pérou. En examinant les uns et les autres au microscope nous
avons reconnu que ces prétendues parties de la fructification ces étamines
et ces pistils, appartiennent à un nouveau genre de la famille des Céra-
tophytes. Les godets que M. Ruiz a pris pour les pistils naissent de
tiges cornées, aplaties, et si étroitement unies à la substance du Fucus,
qu'on seroit tenté de tes prendre pour r de simples nervures an moyen d'une
lame très mince, on parvient à les détacher sans téset le parenchyme.
Les tiges non articulées sont d'abord id'un brun-noirâtre,mais <:Hes deviennent,
avec te temps, par dessiccation, blanches et friables dans cet état elles
font effervescence avec les acides, comme la substance calcaire du Sertularia,
dont les extrémités ressemblent assez aux godets des Fucus de NI. Ruiz.
Nous avons retrouvé dans la mer du Sud en passant de Guayaquit à
Acapulco, ces mehtes appendices du raisin des Tropiques, et l'examen le
plus attentif ne nous a laissé aucun doute sur un Zoophyte qui s'attache aux
Fucus comme le lierre ambrasse le tronc des arbres. Les organes décrits
sous le nom de fleurs femettes ont plus de deux lignes de long, et cette grandeur
seule auroit dû éloigner le soupçon que ces parties fussent de véritables
pistils.
La côte de Paria se prolonge à l'ouest, en formant un mur de rochers
peu élevés, à cimes arrondies et à contours ondoyans.I~ous lûmes long-
temps sans voir paroître les côtes élevées de Me de la Marguerite, où nous
levions relâcher pour prendre des informations sur la croisière des vaisseaux
mglois, et sur le danger de toucher à la Guayra. Des hauteurs du soleil,
prises sous des circonstances très-favorables, nous avoient appris combien
Soient fausses à cette époque les cartes les plus recherchées des marins.
Le i5 au matin, lorsque le garde-temps
nous plaça par les 66° ï~ t5~ de
ongitude, nous n'étions point encore dans le méridien de Hie de la Marguerite
quoique, d'après la capte rechute de l'Océan Atlantique', nous dussions
déjà avoir dépassé le cap occidental très-é~vë de cette île, qui est indiqué
par les 66" o/ de longitude. L'inexactitude avec laquelle les côtes de la
Terre-Ferme ont été ngurées avant les travaux de MM Fidalgo., Noguera et
Tiscar et,
j'ose ajouter ayant les observations astronomiques que j'ai faites
à Cumana, auroit pu devenir dangereuse pour les navigateurs, si la mer
n'étoit pas constamment belle dans ces parages. Les erreurs en latitude
surpassoient même celles en longitude, puisque les eûtes de la Nouvelle-
Andalousie se prolongent l'ouest du cap des Trois Pointes de t5 à 20 miUes
plus au nord que ne l'indiquent les cartes publiées avant l'année t8oo.
Vers les onze heures du matin, nous eûmes connoissance d'un îlot très-bas,
sur lequel s'élevoient quelques dunes de sab}e. En l'examinant avec des lunettes,
on n'y découvrit aucune trace d'habitation ni de culture. Des Cactus cylin-
driques s'élevoient ça et là en forme de candelabres. Le sol, presque dénué de
végétation, paroissoit ondoyant à cause de la réfraction extraordinaire que
subissent les rayons du soleil en traversant des couches d air en contact avec
des plaines fortement échauffées. C'est par l'effet du mirage que, sous toutes
les zones, les déserts et les plages sablonneuses offrent l'apparence d'une mer
agitée.
L'aspect d'un pays si plat ne répondoit guère aux idées que nous nous
étions formées de l'ttc de la Marguerite. Tandis qu'on étoit occupé à rapporter
les relèvemens sur les cartes, sans pouvoir les faire cadrer, on signala du haut des
mâts quelques petits bâtimens pécheurs. Le capitaine du Pizarro les appela par

Dressée au dép&t de la marine, en 1786, revue et corrigée en t~ga.


Car<o general del Oceomo ~<&tn<tco construida en e/ 7)~o<t<o hydrografico de JM<~fMf en et
ctKo i8oo, e<corr~t<&ten t8o4. C<tr<a «/er<Mt<~ ~M/t&M ~n<tA!<M con parle de la Costa del continente
de America, trabajada por Don Cosme Churruca y Don Joacquin Francisco ~Ms~o, t8o2. Ces deux
cartes ont servi de'base tontes celles qui ont paru dans ces derniers temps en diverses parties de
l'Europe, et qui, catqaées les unes sur les autres, ne diffèrent entre elles que par de nombreuses
fautes chalcograpbiques. Les observations originales des astronomes espagnols se trouvent consignées en
grande partie dans le bel ouvrage de M. Bspinosa qui a pour titre Jfemorta: sobre las o&MrMMOKM
t'4*
<M<r<MMmte<M AeoA<tt por los 7vofegtMt<e~ ~*fjtM!o&<en <<M<t)t<o: /M~are< del globo ( deux volumes
Madrid, t8og). J'ai comparé, point pour pomt, les résu!tats de ces observations avec ceux toxqneb
nous avons Cru devoir nous arrêter, M. (Mtmanns et moi ( Ot~etv. astron. T. t ~n<rot/. p. xxxiij -xUx ).
Cette comparaison sera utile à ceux qui publieront un jour des cartes de FAmérique, les nouvelles
déterminations méritant d'autant plus de conEance, que les positions ont été vériEées d'après des
méthodes astronomiques très -différentes, et par des observateurs qui ne se sont communiqué leurs
résultatsque tong-temps après avoir terminé leurs opérations.
un coupde canon mais ce signal devient inutile dans des parages ouïe totbte ne
croit rencontrer le fort que pour en recevoir des outrages. Les bateaux prirent la
ftsute vers l'ouest, et nous nous trouvâmes dans l'incertitude ou nousavions ëtë à
l'égard de la petite île de, la Grâciosa, lors de notrearrivée aux Canaries. Personne
ne connoissoit ces lieux pour y avoir abordé. Quoique la mer fut très-belle la
proximité d'un flot qui s'élève à peine de quelques pieds au-dessus de la surfacede
l'océan, sembloit prescrire des mesures de prudence. On cessa de courir à terre,
et, comme la sonde n'indiquoit que trois ou quatre brasses d'eau, on jeta
l'ancre en toute hâte.
Les côtes, vues de loin, sont comme les nuages dans lesquels chaque
observateur rencontre la forme des objets qui occupent son imagination.
Nos relèvemeas, et le témoignage du chronomètre, étant en contradiction avec
les cartes que nous pouvions consulter, on se perdit en vaines conjectures.
Les uns prenoient des buttes de sable pour des cabanes indiennes, et indi-
quoient l'endroit où, selon eux, étoit situé le fort de Pampatar; d'autres
voyoient les troupeaux de chèvres qui sont si communs dans la vallée
aride de Saint-Jean: ils désignoient les hautes montagnes du Macapao,
qui leupi paroisspient en partie cachées par des nuages. Le capitaine résolut
d'envoyer un pilote à terre; on se préparoit à mettre !a chaloupe à l'eau,
le canot ayant souSert beaucoup par le ressac dans la rade de Sainte-Croix.
Comme la côte étoit~ assez éloignée, le retour vers la corvette pouvoit devenir
difficile, si la brise eût fraîchi dans la soirée.
Au moment où nous nous disposions pour aller à terre,
on aperçut deux
pirogues qui longeoient la côte. On les appela par'
un second coup de
canon; et, quoiqu'on eût arboré le pavillon de Castille, elles ne s'approchèrent
qu'avec défiance. Ces pirogues, comme toutes celles dont
se servent les indi-
gènes, étoient faites d'un seul tronc d'arbre, et il y avoit
sur chacune d'elles
dix-huit Indiens Guayqueries, ,nus jusqu'à la ceinture, et d'une taille très-
élancée. Leur constitution annonçoit une grande force musculaire,
et la couleur
de leur peau tenoit le milieu entre le brun et le
rouge cuivré. A les voir
de loin, immobiles dans leur pose et projetés
sur l'horizon, on les auroit
pris pour des statues de bronze. Cet aspect
nous frappa d'autant plus, qu'il
ne répondoit pas aux idées que nous nous étions formées, d'après le récit
de quelques voyageurs, des traits caractéristiques
et de l'extrême fbiblesse
des naturels. Nous apprmies dans la suite,
et sans franchir les limites de la
province de Cumana, combien la physionomie des Guayqueries
contraste avec
celles des Chaymas études Caribes. Malgré les liens étroits qui semblent' unir
tous les peuples de l'Amérique, comme appartenantà nnememe~ace, plusieurs
tribus n'en dînèrent pas moins entre elles par la hauteur de lenr taille, par leur
teint plus ou moins basane, par un regard, qui exprime chez les uns ie câline
et la douceur, chez les autres un mélange sinistre de tristesse et de férocité.
Lorsque nous fûmes assez près des pirogues pour pouvoir les héler
en espagnol, les Indiens perdirent leur ménance et vinrent droit à notre
bord. Ils nous apprirent que l'tle basse, près de laquelle nous étions mouillés,
étoit l'île de Coche, qui n'avoit jamais été habitée, et que les bâtimens
espagnols venant d'Europe avoient coutume de passer plus au nord, entre
cette île et celle de la Marguerite, pour prendre un lamaneur ou pilote cotier
au port de Pampatar. Notre inexpérience nous avoit conduits dans le chenal
au sud de Coche; et, comme, à cette époque, les croiseurs anglois fré-
quentoient ce passage, les Indiens nous avoient pris pour une embarcation
ennemie. La passe du Sud est en effet très-avantageuse pour les navires
qui vont à Cumana et à Barcelone elle a moins d'eau que la passe du Nord,
qui est beaucoup plus étroite, mais l'on ne risque pas de toucher, si l'on
range de bien près l'île de Lobos et les Moros del Tunal. Le jobenal entre
Coche et la Marguerite se trouve rétréci par les bas-fonds dn cap nord-
ouest de Coche et par le banc qui entoure la Punta de Mangles. Nous examine-
rons, dans un autre endroit, sous un point de vue purement géologique,
des Testigos et la Marguerite, et
ce banc de sable, qui entoure les écueils nous
ferons voir que cette dernière Me a été réunie jadis, par Coche et Lobos,
à )a péninsule de Chacopapa.
Les Guayqueries appartiennent à cette tribu d'Indiens civilisés qui habitent
les côtes de la Marguerite et les faubourgs de la ville de Cumana. Après les
Caribes de !a Guyane espagnole, c'est la race d'hommes la plus belle de
la Terre-Ferme. Ils jouissent de plusieurs privilèges, parce que, dès les
premiers temps de !a conquête, Us sont restés les amis ndètes des Castillans.
Aussi le roi d'Espagne les nomme-t-it, dans des cédules, ses chers, nobles
et loyaux Guayqueries. Les Indiens des deux pirogues que nous rencon-
trâmes avoient quitté le port de Cumana pendant la nuit. Ils alloient chercher
du bois de charpente dans les (bréts de Cedro qui s'étendent depuis le
cap San Jose jusqu'au delà de l'embouchure de Rio Carupano. Ils nous

Cedrela odorata, Lin.


donnèrent des cocos très-frais et quelques poissons du genre Chaetodpn',
dont nous ne pouvions nous lasser d'admirer les couleurs~ Que de nchesses
renfermoient à nos yeux les pirogues,de ces pauvres !ndiens!D'énormes feuilles
de VIjao couyroient des régimes de bananes. La cuirasse écaiHeuse d'un
Tatou le fruit du Crescentiacujete servant de coupe aux naturels, !es
productions <qut sont les plus communes dans les cabinets de rEurope, avoient
un charme particulier pour nous, parce qu'elles nous rappeloient vivement,
qu'arrives sous la zone torride, nous avions atteint le but vers lequel nos
vœux tendoient depuis long-temps.
Le patron d'une des pirogues s'offrit de rester à bord du Pizarro pour
nous servir de pilote côtier t G'etoit un Guayquerie recommandable par son

'>,
caractère, plein de sagacité dans l'observation, et dont la curiosité active
s'étoit portée sur les productions de la mer comme sur les plantes indigènes.
Un hasard heureux a voulu que te premier Indien que nous rencontrâmes
au moment de notre attérage, fut ï'homme dont la connoissance nous devint
la plus utile pour le but de nos recherches. Je me plais à consigner dans
cet itinéraire le nom de Carlos del Pino, qui, pendant l'espace de seize
mois nous suivis dans nos courses le long des côtes et dans l'intérieur
a
des terres.
Le capitaine de la corvette leva l'ancre vers le soir. Avant de quitter le
haut-fond ou placer de Coche, je déterminai la longitude du cap Est de l'ile que
je trouvai par les 66° i 53~. En faisant route vers l'ouest, nous eûmes bientôt
par le travers la petite ti~de Cubagua, entièrement déserte aujourd'hui, mais
jadis célèbre par la pêche des perles. C'est là que les Espagnols, immédiatement
après les voyages de Colomb et d'Ojeda, avoient ibndé, sous le nom de la
Nouvelle-Cadix, une ville dont on ne trouve plus de traces. Au commencement
du seizième siècle, les perles de la,'Cubagua étoient connues à Séville, à
Tolède, et aux grandes foires d'Augsbourg et de Bruges. La Nueva Cadiz
n'ayant pas d'eau, on y transportoit, de la côte voisine, l'eau du Rio
Manzanares, quoiqu'on l'accusât, j'ignore par quelle raison, de causer des
ophthalmies Les auteurs de ce temps parlent tous de la richesse des premiers

Bandoulières.
HeMconia bihai.
Armadite, Dasypus, Cac~Manto.
De Practico.
s ~ferrera, ~Mertp. de &M /n<&M occidentales. (~OK&-M<, '73ù), Vol. ï, p. 13,
tolons et du Juxe qu'ils ~éployoient; aujcurd'hm, des dunes de sable mouvant
s'élèvent sur cette terre inhabitée, et le nom de Cubagua se trouve & peine
sur nos cartes.
Parvenus dans ces parages, nous v&nes les hautes mentagnes da cap
Macanao, partie eccMentat~det'îtedë la Marguerite qui s'eievoient ma je&-
tueusement sur l'horizon. A en juger par dés angles de hauteur pris à une
distance de 18 milles, la hauteur absolue d& ces cimes paroft de cinq à six
cents toises. D'après le garde-temps de Lou!s Berthoud, ta longitude du cap
Macanao est de 66*~ 4?~ J'ai relevé les rochers de l'extrémité de ce cap,
et non cette langue de terre extrêmement basse qui se prolonge à l'ouest,
et qui se perd dans un haut-fond. La position dit Macanao et celle que
j'ai assignée plus haut à la pointe Est de l'ne de Coche, ne dînèrent que
de quatre secondes en temps des résultats obtenus par M. Fidatgo.
Le vent étoit très-foible; le capitaine préféra courir des bordées jusqu'à
ia pointe du jour. Il craignoit d'entrer dans le port de Cumana pendant
la nuit, et cette prudence sembloit nécessaire à cause d'un malheureux accident
arrivé depuis peu dans ces mêmes parages. Un paquet-bot avoit mouillé de nuit
sans allumer les fanaux de poupe, on le prit pour un bâtiment ennemi,
et les batteries de Cumana firent feu sur lut. Le capitaine du Courier eut une
jambe emportée, et mourut peu de jours après à Cumana.
Nous passâmes une partie de la nuit sur le pont. Le pilote Guayquerie
nous entretint des animaux et des plantes de son pays. Nous appnmes avec
une grande satisfaction, qu'à peu de lieues de la côte on trouvoit une région
montagneuse et habitée par les Espagnols, dans laquelle le froid étoit très-
sensible, et qu'on connoissoit, dans les ptaines, deux crocodiles très-diuérens
l'un de l'autre des Boas, des anguilles électriques 2 et plusieurs espèces de
tigres. Quoique les mots Bava, CacAtC<~to et ?~K&/<Mfor nous fussent
entièrement inconnus, nous devinâmes facilement par la description naïve
des habitudes et des formes, les espèces que les Créoles désignent
par ces
dénominations. Oubliant que ces animaux sont dispersés sur
une vaste
étendue de terrain, nous espérâmes pouvoir les observer dans les forêts
voisines de Cumana. Rien n'excite fUtant ta curiosité d'un naturaliste quête
récit des merveilles d'un pays auquel il est sur le point d'aborder.

Crocoditusacutus et C. Bava.
Gymnotus electricus, TtmMa~or.
Le ï6 juillet ï'799~ à' la pointe du jour, nous vJtmes une côte verdoyaate
et d'un aspect pittoresque. Les montagnes de la Nouvelle-Andalousie, à
demi-voilées par les vapeurs, bordoient l'horizon au sud. La ville de Cumana
et son château paroissoient entre des groupes de cocotiers. Nous mouillâmes
dans le port vers tes neuf heures du matin, quarante-un jours après notre
départ de la Corogne. Les malades se traînèrent sur le tillac pour jouir de la
vue d'une terre qui devoit mettre fin à leurs souffrances.
Je n'ai point voulu interrompre le récit de notre navigation par le détail
des observation!! physiques auxquelles je me suis livré pendant la traversée
des côtes d'Espagne à TénérISe, et de Ténériffe à Cumanà. Des observations
de ce genre n'offrent un véritable Intérêt que lorsqu'on peut en disposer
les résultats d'après une méthode propre à conduire à des idées générales. La
forme d'une relation historique, et la marche qu'elle doit suivre, ne sont
pas avantageuses pour faire connoître dans leur ensemble des phénomènes
qui varient avec les saisons et la position des lieux. Pour étudier les lois
de ces phénomènes, il faut les présenter réunis par groupes et non
isolés comme ils ont été observés successivement. Il faut savoir gré aux
navigateurs d'avoir accumulé
un nombre immense de, faits, mais on doit
regretter que jusqu'à ce jour les physiciens aient tiré si peu de parti de ces
journaux de route, qui, soumis à un nouvel examen, pourroient fournir
des résultats inattendus. Je vais consigner à la fin de ce~ chapitre les expé-
riences que j'ai faites sur la températurede l'atmosphère et de l'océan, sur l'état
hygrométrique de l'air, Ustensile de la couleur bleue du ciel, et les phénomènes
magnétiques.

TEMPÉRATURE DE L'AIR..

Dans le vaste bassin de l'Océan Atlantique boréal, entre les côtes de l'Europe,
de l'Afrique et du nouveau continent, la température de l'atmosphère nous a
offert un accroissement assez lent à mesure que nous avons passé des ~3 aux
10 degrés de latitude. De la Corogne aux îles Canaries, le thermomètre cen-
tigrade observé à midi et à l'ombre, monta progressivement de
to° à t8";

Depuis le 6 au 19 juin. /~<yez les observations partielles dans te journal de route à la fin de ce
chapitre.
de Sainte-Gro~ de TénériCe ,à Cnmana,! le m~me tn9tfunMnt;.i6~eva,
a5 degrés Dans la première partie du tNjet, une~~t~rënee d~on degt'é de
température correspondoit a ~8~ de l~ti~ude da~~ seconde partie, il a fallu
parcourir 2° 3o~ de latitude pour voir monter le thermomètre d'u~ degré. Le
maximum de, la chaleur, que~ l'air atteint généralement deux heures~ après le
passage du soleil au méridien, n'excéda pas, pendant cette navigation,
26°,6 (si°,3R.), et cependant nous étions au mois de juillet, et dix degrés
au sud du tropique du cancer. L'évaporation de l'eau, augmentée par le mou-
vement de l'air et par celui des vagues, et la propriété qu'ont les liquides
transparens d'absorber très-peu de lumière à leur surface ) contribuent éga-
lement à modérer la chaleur dans la partie de l'atmosphère qui environne les
mers équinoxiales. On sait qu'aussi long-temps que la brise, souffle sous
la zone torride, les navigateurs n'y sont jamais exposés à de fortes chaleurs.
Si l'on réunit 4 les nombreuses observations faites dans la mer du Sud et
dans l'Océan-Atlantique, pendant les voyages de-Cook, de Bixon, de d'Entre-
casteaux et de Krusenstern, on trouve qu'entre les tropiques, la température
moyenne de l'air au large est de 26 à 27 degrés. Il faut exclure de ce relevé les
observations faites pendant un calme plat, parce qu'alors le corps du vaisseau
s'écbauQe extraordinairement, et qu'il est presque impossible de bien évaluer
la température de l'atmosphère. Lorsqu'on parcourt les journaux de route de tant
de célèbres navigateurs, on. est surpris de voir que jamais dans les deux
hémisphères ils n'ont observé le thermomètre sous la zone torride en pleine
mer, au-dessus de 34° (2~a R:). Sur des milliers d'observations faites
à l'heure du passage du soleil par le méridien, on trouve à peine quelques
jours où la chaleur se, soit élevée à 3ï ou 3a degrés (24",8 ou 2S",6 R.),
tandis que sur les continens de l'Afrique et de l'Asie, sous les mêmes parallèles,
la température excède souvent 35 et 36 degrés. En général, entre les 10" de
latitude boréale et australe, la chaleur moyenne de l'atmosphère qui repose
sur l'Océan me paroît, dans les basses régions, de un à deux degrés plus petite
que la température moyenne de l'air qui environne les terres situées entre

Dn a5 juin ait i5 juiUet.


Les rayons de lumière pén&tremt dans l'eau à des profondeurs assez consHéraMes, et les premières
couches, en transmettantlibrement la lumière, ne s'édMtoBent pas comme la terre et les rochers.
3 ~(yee nn exeetlent mémoire de MM. Horner et t<angsdorfdans les JMemotres tb f~tO<&nMe de

t~t~* t*.
&tt)t<-f~er<t&omg~ T. p. 46y.
~t_ ir
les deux Tropiques,t! est inutile ~e rappeler ici combien cette ctfconstance

au nord et au
deTénériGp.. ~i/ 'j'j~
modifie le ctimat du g~be entier~ ~oau~detanégate répara des ~eoptineras
.sud'.de,éqùateHP~ l'est let â ~1'ouest du -m~ridie~

L'extreme lenteur. avec taqu~lte ~M~ntentei la <température lorsqu'on fait


te trajet {d'Espagne a ta Terre-FcNne et au~ .côtes du Mexique, est
très-avantageuse pour ta santé des Européens qui viennent s'établir dans
)es cotonies. A !a Vera-Cruz et à Carthagène des tndes~ les Créoies qui
descendent des hautea~savaues de Bogota et duptateau centraLde !aNouveUe-
Espagne,courent plus de danger sur les côtes d'être attaqués de !aûèvre
jaune ou du t~M~o, que les tmbttans duNord qui arrivent par mer'. En
voyageant de pefate a Vefa-Cruz, les Mexicains parviennent, en seize heures,
de la région des pins et des chênes, d'un pays montueux où le thermomètre
baisse souvent à midi jusqu'à ou 5 degrés, dans ttne ptainc brûlante
couverte de cocotiers de Mimosa cornigera, et d'autces plantes qui ne
végètent que sous riaSuence d'une ibrte chaleur. Ces montagnards éprouvent
une différence de tempéfature de dix-huit degrés, et cette différence produit
les epets les plus funestes sur tes organes, dont elle exalte !'in'itabitité.
L'Européen au contraire traverse l'Océan-Adantiqne dans t'espace de trente-
cinq à quarante jours; il se prépare pour ainsi dire gradueUement aux
chaleurs brûlantes de la Vera Cruz, qui, sans être la cause directe de la
&èvre jaune, n'en contribuent pas moins a ta rapidité de son ~tévetoppement.
Un décroissement de chaleur très-sensibte s'observe
sur le globe soit qu'on
se porte de t'équateur vers les pôles, soit qu'on s'étève dé la surface de la
terre dans les hautes régions de l'air, soit enfin qu'on s'approche du fond
de t'Océan. Il est d'autant plus intéressant de comparer la rapidité de ce triple
décrotssement, que ce phénomène a une grande influence sur la distri-
bution climatique des productions végétales et animales. Les températures
moyennes des couches intérieures <ie Tair qui correspondent aux 65.mt, ~8.
et,ao. degrés de latitude boEéate, sont, d'après tes observations les plus
récentes, o<5; to°,y et a5°, d'où il résulte qu'un degré centigrade correspond
à peu près à un changement de parattète de t° 45' 2. Or, ie. décroissement
du calorique est d'un degré par go toises, lorsqu'on s'élève perpendtcutairement

7Vouf.-E~).,T.
En Angleterre et
ït,p.yya.. u
en Écosse on compte, qu'un degré du thermom~tM de Fahrenhe:t correspond
dans l'atmosphère ~s'ensuit que, 8Cfs ~s tropiqaes où fàbaissemènt
de la température est très-régutieradt~des montagnes d'une hauteur IBonsi'
dérabie, 5oo toises d'ëtévatiQpT~cai~Mrrespond~ Un changement
de latitude de g~~S/.GefeM~t, assez conMNne à ceux atiOtque~
d'antres physiciens se
sont~arreté~ tpès-important pour la
géographie des plantes; car, quoique dans~t~ pays septentrionaux ta distri-
bution des végétaux suc tes montagnes et dans les plaines dépende, comme
la hauteur des neiges éternelles, plus de la température moyenne des mois
d'été que de celle de toute Tannée, cette dernière n'en détermine pas
moins dans les contrées méridionales, les limites que les espèces n'ont pu
franchir dans leurs migrations lointaines. L'observation faite par Tournefort

à t" de latitude. Phil. Tram., 17/5, Vol. LXXV, p. 45g. 7%omMO, ~Mt. of the Royal Soc. )8t9,
P. 508. `

M. d'Aubuisson ne trouve, pour !'E"rope, en été, à huit heures du matin, par conséquent à
l'époque qu'il croit la pins favorable, que 85 Mises par degré. jtottRM~ .My~, T. HHU, -p. 38.
Pour la zone torride, voyez O&wr~. <M<nw., T. t, p. 139.
Chaque centaine de mètres de bauleur abaisse la température environ d'un demi degré de la
division commnne de nos thermomëtrea; et si t'en prend pour terme du refroidissement celui qui
exclut tapréMmce de le végétation, les glaces étemeMes dont les sommets sont chargés, représenœront
les glaces éternelles dont le pôle est couvert, et chaque centaine de mètres d'étevatton verticale cor-
respondra à un degré de la distance de la montagne au pôle. o Ramond, de la végétation sur les
montagnes (~nna~~jtftt~ttnt, T. IV, p. 396).
3 De &<nt&)~e, Flore française, T. t, P. t, p. ix. Léopold de BM<-&, TïeMe )MeALapland, T. H p. 076.
~aA/en&er~, ~&)ra Laponica, t8<o, p. xtviij. Dans la zone tempérée, it arrive souvent que la chaleur
moyenne d'un lieu a, est plus petite que celle don lieu &, tandis que la chateor moyenne des mois d'été
est beaucoup plus grande
en a qu'en &. C'est pour cela que l'on distingue avec raison entre un
climat continental et nn climat M<K<a<fe, dans le premier, des étés très-chauds succèdent à des hivers
extrêmement rigoureux dans le second, le contraste des saisons est moins grand les étés sont moins
chauds et les hivers moins froids, à cause de la température peu variable de t'Océan voisin qui
rafraîchit l'air en été, et le reehanne en hiver. les neiges perpétuettes descendent pins en Mande que
sur le même parallèle dans l'intérieur de la Norwège et nous voyons souvent dans les iles et sur les
côtes de l'Europe occidentale, végéter le laurier et t'arboasier, là où la vigne et le pécher ne donnent
pas de fruits mûrs. Dans la région équinoMate, au contraire, où la différence des saisons est pour ainsi
dire nulle, la distribution géographique des plantes règle presque uniquement d'après la température
se
moyennede toute l'année, qui, ette~méme, dépend de l'élévation du sol au-dessus du niveau de l'Océan.
A mesure que l'on avance vers le nord la température des mois varie de plus en plus, et la force et la
ncbesse de la végétation ne donnent plus la mesure de la température moyenne de l'année entière.
En Laponie, par exemple it existe de belles forêts sur le continent à Enontekies, tandis qu'a l'île
de Mageroe, on trouve à peine quelques arbustes épars
sur les rochers, et cependant la température
moyenne annuelle d'~nonteMes est de 3" ptus froide que cènede Mageroe La première est de –a*66,
et la seconde de + o°,07. (Wah)enberg, dans les Annales de Gilbert, t8ta, p. 371.) t.a végétation
sur le sommet de 1'Ararat, a été répétée par un grand nombre de vdyageûri!.
Lorsqu'on descend d'une haute chaoï~de montagnes, et qu~on avance veM~
les pôles, on trouve d'abord sur des pïateaux peu élevés) et en&a dans les
régions voisines des côtes ces tnémes plantes arborescentes qui, par fte
basses latitudes, necouvroient que îes cimes voisines des neiges éterneHes.
En évaluant ta rapidité avec laqueue la température moyenne de Tatmos–
phère diminue a mesore que l'on se porte de l'équateur aux pôles, ou'de
la surface de la terre aux hautes régions de l'Océan "aérien, j'ai considère
le décrôissement de la chaleur comme suivant une progression arithmétique.
Cette supposition n'est pas tout-à-fait exacte pour l'air*: elle l'est encore
moins pour l'eau, dont les couches superposées paroissent diminuer de
température d'après des lois diCÔrentes, différens degrés de latitude. Dans
les expériences intéressantes faites par MM. Forster Bladh Wales, Ellis
et Peron sur la rapidité du décrôissement de chaleur dans l'Océan, ce
décroissement a été trouvé si Inégal, qu'un degré du thermomètre centigrade
répond tantôt à douze, tantôt à quatre-vingts toises* et même plus. On peut
admettre en général que la température décroît six fois plus vite dans la mer
que dans l'Océan aérien, et c'est à cause de cette distribution du calorique dans
les deux élémens, que des plantes et des animaux analogues à ceux des

plus vigoureuse d'Enontetties est l'effet d'un été plus chaud, la température moyenne dt mois de
juillet y étant de t5°,3, tandis qu'à t'He de Mageroe elle n'est, d'après M. de Bach, que de 8"t.
Les deux endroits offrent des comptes frappaus de la diBerence qm existe entre un climat continental
et un climat insulaire; ou, comme dit M. WaMemberg,entre un c/MMtt.t& ~M<teet un climat <f/t&ttMft.
En générât, le problème de la distribution climatique des plantes est beaucoup plus compHqné
dans les pays septentrionaux que sous les Tropiques. Dans tes premiers, cette distribution dépend à
la fois de la température moyenne des mois d'été et de la température du sot, qui diKere de la chaleur
moyenne de l'année.
Dans l'étude des rapports géographiques des plantes, il faut distinguer, entre les végétaux dont
l'orgalisation résiste à de grands changemens de température et de pressionbarométrique,et les végétant
qui ne paroissentappartenirqu'à de certaines zones et A~te tertaineshauteurs,'Cettedifférence est encore
plus sensible dans la zone tempérée que sous tes Tropiques où les plantes herbacées sont moins
fréquentes, et ou les arbres ne se dépouUtent de leurs fettiUes que par l'enet de ta sécheresse de

~<
l'
l'air. Nous voyons quelques végétaat pousser leur migration des côtes septentrionales de t'AMqne par
les Pyrénées jusqu'aux landes de Bordeaux et au bassin de ta Lotre; par exempte, te Merendera, ta
Jacinthe tardive et le Narcisse bu!bocode.(~Mm!&e<&<~M., T. tV, p. 4ot.)
° Les températuresmoyennes augmentent de l'équateuraux potes, a peu près comme le carré des sinus de
la latitude, ( Journ. T.LXtt,?. 44y), ettedécrousementdetachaleur, dans un plan vertical
rapproche le plus souvent, d'après MM Oriani et Lindenau, de la loi dune progression hannoniqne
(~Me<&f(rom.,p.xlv.~<))t.por.,)nint8o5.~p~nt.2K~t788,p.t38)
régions polaires, trouvent, sous la zone torride, sur la pente des montagnes
et dans la profondeur de l'Océan, le climat qui Convient à leur organisation,
Les mêmes causes auxquelles on doit attribuer les chaleurs modérées que
l'on éprouve eu naviguant entre les, Tropiques~ produisent,aussi une égalité
singulière dans la température du jour et de la nuit. Cette égalité est encore
plus grande sur mer que dans l'intérieur des continens. Dans la province
de Cumana, au centre de castes plaines peu élevées au-dessus du niveau de
l'Océan, le thermomètre se soutient généralement, vers le lever du soleil,
de 4 à 5 degrés plus bas qu'à deux heures après midi. Dans l'Océan-Atlan-
tique, au contraire, entre les i
et i~ degrés de latitude, les plus grandes
variations de chaleur excèdent rarement i",5 à 2 degrés, et j'ai souvent
observé que, depuis dix heures du matin jusqu'à cinq heures du soir, le
thermomètre ne varioit pas de o*8. En parcourant quatorze cents observations
thermométriques faites d'heure en heure pendant l'expédition de M. de Kruseu-
stern, dans la région équatoriale de la me~ du Sud, on voit que la température
de l'air ne changeoit, du jour à la nuit, que de i à t,3 degrés centésimaux
J'ai tâché de mesurer souvent la ,/o/rc du soleil par deux thermomètres à
mercure parfaitement pareils et,dont l'un restoit exposé au soleil tandis
que l'autre étoit placé à l'ombre. La diSérence qui résulte de l'absor-
ption des rayons dans la boule de l'instrument, n'excéda jamais 3" y.
Quelquefois elle ne s'éievoit même qu'a un ou deux degrés; mais la chaleur
que conserve le corps du vaisseau, et le vent humide qui souffle par bouffées,
rendent ce genre d'expériences assez difficiles. Je les ai répétées avec plus de
succès sur le dos des Cordillères et dans les plaines en comparant d'heure
en heure, par un temps parfaitement calme, la force du soleil à sa hauteur,
à la couleur bleue du ciel et à l'état hygrométrique de l'air. Nous examinerons,
dans un autre endroit, si les différences variables que l'on observe entre le
thermomètre au soleil et-le thermomètre à l'ombre, dépendent uniquement
de l'extinction plus ou moins grande de la lumière à son passage par l'atmosphère.

J'ai constamment observé le thermomètre sur le tillac, du côté du vent et à l'ombre. Peut-être
le baromètre et le thermomètre de M. de Krosenstem étoient-ib placés dans un endroit plus ahntê par
exemple dans la Grande Chambre.
Cet instrument avoit une boule de trois lignes de diamètre, qui n'étoit pas noircie. Les échelles
étoieut renfermées dans des tubes de verre et très é)o!gnées de )a boule. Les voyageurs préfére-
roiéut aujourd'hui, avec raison, les photomètres de M. Lestie'~VtC~o&on, Journ. for ?<<. /'At/.
Vol. HI, p. 467.
TEMPERATURE DE LA MER.

Mes observations sur la température deg eaux de ont eu pourla mer,


but quatre objets très-din~rens les uns des autres: îedécroissetnent de la
chaleur dans lescoucnes superposées les unes aux autres; t'mdi~àtibn des
hauts fonds par te thermomètre; la température des mers à leur sur&ce;
enfin la température des courans qui, dingés de Fëquateur aux potes, et des
potes à t'équateur, forment des rivières chaudes ou
froides 2 au milieu des
eaux immobiles de FOcëan. Je ne traiterai ici que de la cha!eur de la mer à
sa surface, phénomène te plus important pour l'histoire physique du globe,
t
parce que la couche supérieure de Océan est la seule qui influe immédiate-
ment sur t'état de notre atmosphère.
Le tableau suivant est extrait des nombreuses expériences que renferme notre,
journal de route depuis te g juin jusqu'au 15 juillet

TBMtiaATtTiUt

t~TtTCBE I.ON&tTCDB Je
b.ré.t.. ~de.t.te. ''O.Ada.t!
tMsxr&ce
5~ M' 16" 18' i5°,o
~54" 5o~ 16° 55~ i6~5.
Sa''16' i?" 4' i7°<7
5o"56~ 16" 54' i8",6
39° i8' 16° 4o' ig°,S
36° 5i' ig° ]5' ao",o
30* 8' a8'*5)' ai'92
17" 67' 55° i4' aa<4
i4"57' 44° 4o' a3°,7
iS" 5i' 4()<'45' a4<7
10° 46' 6o°54' a5°,8

Depuis ta Corogne jusqu'à l'embouchure du Tage, l'eau de !a mer a peu varié


de température; mais depuis les 3g jusqu'aux to degrés de latitude, l'accroissement

*~aCtt~<!<ream.
courant <<tt CAt/e, qui, cemtnt )e M prouvé aiUeuM, entfai)te les eaux des hactee !et!tndM
vernt'équateur.
a été n'ès-sensibte et ~ès-constant~ quoiqu'il naît pas été toujours' annorme.
Du parallèle du cap Montego à celui du Salvage, la marche du thermomètre a été
presque aussi rapide que des ~~S~ aux to?4'6~'Ba's dte s'est trouvée
extrêmement ralentie sur les limites de la zone torride, de ag° t8' a :t0*8~.
Cette inégatité est sans doute cachée par des eouràns qui mêlent le); eaux de
différens parallèles et qui, selon qjX'oo se rapproche ou des îles Canaries ou des
y
côtes de la Guyane, portent au sud-est et & l'ouest -nord ouest. M. de
Churruca en coupant t'équateur, dans son expédition au détroit de Magellan,
par les aS" de tongitude occidentale a trouvé le maximum de ta tempé-
rature de i'Océan-AtIantique, à sa surface, par les 6~ de tatitude nord. Dans
ces parages, sur des paraHètes égatement éloignés de i'éq'Mteur, l'eau de la
mer étoit plus froide au sud qu'au nord. Nous verrons bientôt que ce
phénomène varie avec les saisons, et qu'il dépend en grande partie de
l'impétuosité avee~taqueUe les eaux coulent vers !e nord et le nord-ouest~
à travers le canal (braté entre Je BrésH .et les côtes d'Afrique. Si le mouvement
de ces eaux ne modifiait pas la température de 4~eéaB~ 4'aecroissement de
chaleur sous ta zone torridedevroit~Me énorme, parce que la surface de l'eau
renvoie infiniment moins de rayons <{ui se rapprochent de la perpendiculaire
que de ceux qxi tombent dans une direction oblique.
J'ai observé, dans 1 Océan-Atlantique, comme dans la mer du Sud, que
lorsqu'on change de latitude et de longitude à la fois, les eaux ne changent
souvent pas d un degré de température, sur des étendues de plusieurs miniers
de lieues carrées; et que dans J'espace compris entre le a y.
degré nord
et le a~ degré sud, cette température des mers est presque entièrement
indépendante des variations qu'éprouve l'atmosphère Un calme plat très-
prolongé, un changement momentané dans la direction des courans, une
tempête qui méte les couches Inférieures de l'eau ~ux couches supérieures,
peuvent, pendant quelque temps, produire une différence de deux et même
de trois degrés; mais aussitôt que ces causes accidentettes cessent d agir, la
température de l'Océan reprend son ancienne stabilité. J'aurai occasion de

Au <mp)s dioctobre ty88.


Pour faire voir eomMen peu rair!nBoe sur la température de l'immense bassin des mers, j'ai
ajouté, dans les journaux de fonte, l'indication de la chaleur de l'atmosphère à celle de la chaleur
de l'Océan. Cette dernière peut changer par des causes très-éloignées, telles que )a<6onte phM ou
moins rapide des glaces polaires, on des vents qui souNent~ece d'autres latitudes et qui produisent
des couraus.
revenir dans la suite sur ce phénomène, l'un des pllts invariables que
présente la nature.
J'ai dressé une carte de la température des mers, tant surm<s propres, obser-
vations, faites des 440 de latitude nord aux t a" de latitude <ud,etdes 43" aux to5°
de longitude occidentale, que sur un grand nombre de matériaux que j'ai eu
beaucoup de peine à réunir. Une masse d'eau considérable ne se refroidissant
qu'avec une extrême lenteur, il sumt de plonger le thermomètredans un seau que
l'on vient de remplir à la surface de l'Océan. Quoique cette expérience soit bien
simple, elle a été singulièrement négligée jusqu'Ici.Dans la plupart des relations de
voyages, on ne parle qu'accidentellement de la température
de l'Océan, par
exemple, l'occasion des recherches faites sur le froid qui règne à de grandes
profondeurs ou sur la rivière d'eau chaude qui traverse l'Atlantique~ Je n'ai
pu me servir de l'excellent ouvrage de M. Kirwan, sur les climats, parce
ses tables de la température
que ce savant n'a pas suffisamment distingué, dans
propre aux dinérentes latitudes, ce qui est dû à des expériences directes
de ce qui est le résultat dé la théorie. Mais la seconde-expédition an détroit
de Magellan commandée par Churruca et Galeano,'Ia relation du voyage
de l'~bbé Chappe, en Californie, l'ouvrage publié a Philadelphie, sous le
titre de ~t~g~ttfw <A<'y?M<MM~/T~Me et surtout les expériences intéressantes
faites, en 1800~ par M. Perrins, à bord du vaisseau le Skelton, pendant
le cours d'un vëyage de Londres à Bombay, m'ont fourni de nombreux
matériaux pour mon travail. Occupé, à Lima, de recherches sur la température
de la mer, j'avois engagé un officier de la marine royale, M. Quevedo, à
observer, jour par jour, pendant son trajet du Pérou en, Espagne, par le cap
de Horn, l'indication de deux thermomètres dont l'un seroit exposé à l'air et
l'autre plongé dans les~ couches supérieures de l'Océan. Les observations 3 faites
par M. Quevedo, en 1803, à bord de la frégate Santa ~M/!n<~ qui seront
consignées dans cet ouvrage, embrassent les deux hémisphères, depuis les 60°
de latitude sud jusqu'aux 36° de latitude nord elles sont d'autant plus précieuses
que ce navigateur très instruit connoissoitparfaitement sa longitude au moyen
d'un chronomètre de Brockbanks, et de distances 'de la lune au soleil. Ses
instrumens météorologiques, construits par Nairne, avoient été comparés, avant
son départ, à ceux dont je me suis servi sur les Cordillères.
Don Cosme de Churruca, ~pen<<teec?e<M~e <t~ ~Me&MtM~ t793, p. 98.
T'AermometrcMt~Navigation, 1799, p. 37.
*JV«'Ao<«)n'<Jot<rM/,l8o4,p.t3t.
Depuis l'équateur jusqu'aux z5 et 28 degrés nord, la température est
d'une constance bien singulière, malgré la di~rence des méridiens: elle est
plus variable dans les latitudes élevées où la fonte des glaces polaires~ les
courans causes par cette fonte et l'extrême obliquité des rayons solaires en
hiver, diminuent la chaleur de l'Ocëan. Le tableau suivant, qui, renferme des
expériences prises au hasard dans plusieurs journaux de route, conûrme ces
assertions. Les fractions de degrés, par lesquelles les résultats s'y trouvent
exprimés, naissent de la réduction des échelles du thermomètre de Réaumur
ou de Fahrenheit, à la division centigrade.

TEttPEBATDRE DE JL'OcEAN ATLANTIQUE PAR DtFFEBENS DEGRES DE I.ONCÏTt!DE.

_<M~'<.
MMFtMTOt..jtMQCE TEMT~ATUBB

t~TtTCDB. M)!)<HTCM. de ojtsERVATEPBa. moyenne de t'air,


dans le bassin
· t'ohservation. des mer..
o"58'A. 27" 54' 0. ay,: Nov. tySS Churruca
o° 67' A. 30° n~ 0. 27°,7 Avril t8o5 Quevedo.
o" 53' A. 21° 20' 0. 2~7 Mars 1800 Perrins. 9y°(Cook).
o" il' B. 84" i5' 0. 28<o Févr. i8o3 Humboldt.
o" i3' B. 5i°42' E. 9y°,ii Mai 1800 Perrins.
25" i5'
B. 20° 56' 0. 2o'o Juin '799 Humboldt.
250 20' B. 59" 5~' 0. ai<6 Avrit i8o5 Quevedo. 21° (La Pe-
25° 49' B. 26" 20' O. 20*~7 Mars *~° Perrins. ronseetDat-
27" 4o' B. 17° 4' 0. 2i'6 Janv. 1768 Chappe. rymple ).
28*47' B. 18° t7' 0. 25%5 Octob.t788 Churruca.
42"54'B. i5"45'0. M'i Févr. 1800 Perrins.
45*i7'B. 5i''27' 0. i5",5 Mai i8o3 Quevedo. ~Cook
4~58'B. 7'0. i5",9 Juin 1799 Humboldt. et d'Entrecas
44<-58'B.
B. 54°47'0.
0- i2",7 Dec. 1789 WttMams.ntrecas-
45° i5' B. 4«4o' 0. i5",5 Nov. 1776 FranckHn.
48° 11' B. 14° 18' O. 14°,5 Juin 1790 Williams.

II est extrêmement remarquable que, malgré l'immensitéde l'Océan etla rapidité


des courans, il y ait partout une grande uniformité dans le maximum de chaleur
qu'offrent les mers équinoxiales. M. Churruca a trouvé ce maximum, en ~88, i
7 -1 rro r
dans l'Océan Atlantique, de 28°,~ M. Perrins, en ï8o~, de a8",a M. Rod-
man dans son voyage de Philadelphie à Batavia, dèa8",8,etM.Quevedo,
de 28°,6. Bans ia mer du Sud, ~e l'ai observé la même année <~e :!i~3. Les
différences excèdent par conséquent à peine ï" du thermomètre centigrade, ou à
de la chaleur totale. Il faut se rappeler que, sous la zone tempérée, au norddu parais
!ète de 45°, les températures moyennes des différentes années varient de plus
de 2" ou d'un cinquième de la quantité de calorique que reçoit une partie
déterminée du globe
Le maximum de la température des mers, qui est de 28 à 29 degrés, prouve
plus que toute autre considération, que l'Océan est en générai un peu plus
chaud que I~atmosphère avec laquelle il est immédiatement en contact, et dont !a
température moyenne, près de Téquateur,estde 26 à 2~ degrés. L'équilibre entre
les deux élémens ne peut s'établir tant à cause des vents qui portent l'air
voisin des pôles vers t'équateur, qu'à cause de l'absorption du calorique, qui
est l'enet de l'évaporation. On est d'autant plus surpris de voir la température
moyenne s'élever, dans une partie de l'Océan équatorial, jusqu'au delà de 29"
(23° 2 R. ), que même sur les continens, au milieu des sabies les plus arides,
conuoît à peine
on un lieu dont la chaleur moyenne de l'année atteigne 3t".
II reste à examiner si, par de basses latitudes, sur les mêmes parallèles,
on trouve, en différentes saisons, à peu près les mêmes températures. Le
tableau suivant facilitera ce genre de recherches.

CoiMj ~A[/f!<)/tKMt ~fe<&C<!< JtftMfMm, Vol. t, p. 83.


Genëw, de .796 à .809: 7'87; 8",34; 8°,oo; 7'47; 8'38; 8°,49; S'.tg; S' 8°~ y'.ia;i
8',73; 7'78; 6°,68, et 7°,54 du thermomètre de Réaumur Paris, à l'observatture, de i8o3 à t8t0;
n°,95; to°,75; io%35; to'55; io°,5o; io°,65; n'o; et <)°,79d~ thermomètre cemttgfade.
A mesure que l'on approche du Tropique, les, variations de la température annueUe diminuent.
Rome (lat. 4f' 53'), de 1789 à 1799; i3",6; 12°,5; t3°,4, et 'a°,9 R. (Buch, dans Gilbert,
~nM&M ~r~A~Mt, T. XXtV, p. 338.) PMade!pbië (tat. 39° 56'), de t797 à t8o3, ta',7; tt",6;
ji",8; n°,7; 12°,7 et ta°,8 du thermomètre centigrade. H résulte décès observations tres-prëc!ses,
que les extrêmes ont été, à Genève, de a°,5 à Paris, de ~°,3; à Rome, de i°,3, et à Philadelphie,
de i°,t de la division centésimale. Les variations que l'on observe dans ta température de ta mer a sa
surface, paroisscnt ndre, sous ta
s'étendre,
paroissent dét la zone, pérée, entre les 35
tempérée,
zone tem 4.5 degrés de .,latitude
35« et 45 latitude à trois
tr«is
degrés autour de la moyenne, et j'ai eu tort de dire, d'une maniéré ~énérate, dans l'introduction de
la Chimie de MonMoft ( traduction j~anpoMe, T. t, p. too), que la chaleur de t'Océan indique
partout directement les températures moyennes de l'air correspondantes aux différentes latitudes.
TEMFÉRATMtE DE L'OcEAN ATLANTIQUE EN NFFERENTES SAÏ80N8.

~5.
,an–––––
THBMKMtÈTM CBNTÏORÂBE ET LONGITUDE OCCÏDENTAt.E.
~–––––––––––~–––– –––
t~TÏTUPE
b.r&e.
bor~le, j~
OHAFtB,
janvieret

février 1768.
MMUNS,

mars J 804.
~MVtDO,
avril
aCMBMJT,
et mai jumetjuinet
avraetmai
1803.
juin et juillet
CBcntuCA,

octobre. i 788.
et
BonMAN,
octobre

,799.

['h. te" Th.i8'8 Th.i6",5 Th.25",4 Th.24'3


5' Lg. 18" 20~ Lg. 41° n Lg. iS" 55~ Lg. 10" 57~ Lg. 5s" 4o'

Th.2o'7 Th.t9°,5 Th.2o°,7 Th.i8'4 Th.25°,8


"°''
300 Lg. g" 5o' Lg. zS" i5' Lg. 58" 4o' Lg. t6<' 5o' Lg. i6<' 4'
Th.2S",g Th.2<7 Th.ai'a Th.ao°,2 Th.z5°,o
260 Lg. t8'' 10' Lg. 26° 20' Lg. 39" 54' Lg. t~ 4&" Lg. 55° ao"

8~°
°

'°°
100

5
f.
f.Th.22°,7 Th.25°,2 Th.22°,4 Th.26-4 Th.26°,2
Lg. 28° 52' Lg. 4t° 17' Lg. 52° io' Lg. 22° 10' Lg. 29° 5o'

(. rh.25<8 Th.26",2 Th.28°,2 Th.28-3


Th.s5<8
Lg. 24° 5o' Lg. 57° 7' Lg.65° 4o' Lg. 22° 25' Lg. 26° 5o'

Th.26°,5 Th.26°,5 Th.z8°,5 Th.28°,8


~° Lg. 2t° 55' Lg.55° .0' Lg.22° 27' Lg.25° to'

Th. 28°,2 Th. 28°,6 Th. a8°,7 Th. 28°,8


par]eso°t5' parles 2° 2' parles6°t5' des 8'* 4o'1
Ma~mum de lat. bor. de lat. austr. de lat. bor. aux 5° 45'1
detatempé~
rature de ettes22°2t'et!es2<)°4o' ettes22°l3'de)at.bor.,
t'Océan. de long. oc. de long. oc. de long. oc. etdes25°5o'
aux 25° o'
detong.oc.

Une grande masse d'eau ne suit qu'avec une lenteur extrême les changemens
de température observés dans l'atmosphère, et le maximum des températures
moyennes de chaque mois ne correspond pas à la même époque dans l'Océan et
dans l'air. L'accroissement de la chaleur des mers éprouve nécessairement un
retard; et comme la température de l'air commence à diminuer avant que celle de
)
l'eau'ait attemt son m<WH?M~M en résulte que ie~j~)fMC<M~~a~~non~
thermométriques est plus petite à la surface de la mer que dans l'atmosphère.
Nous sommes encore bien éloignes de connottre les loisde ces phénomènes,
qui ont une grande influence dans l'économie de, la nature.
M. Kirwan admet qu'entre les t8° de latitude nordi et les ï8 de latitude sud, les
températures moyennesdes mois ne diffèrent que de 5 degrés centésimaux, et cette
évaluation est un peu trop foible; car nous savons, par des observations cal-
culées avec soin, qu'à Pondichéry, à Manille et dans plusieurs autres lieux situés
entre les Tropiques, les chaleurs moyennes des mois de janvier et d'août diCèrent
entre elles d~8 à ip degrés. Or, les variations de l'air sont au moins d'un tiers
plus petites dans le bassin des mers que sur le continent, et l'Océan n'éprouve
qu'une partie des changemens de température de l'atmosphère qui l'entoure.
Il en résulte que, si l'Océan équinoxial necommuniquoit pas avec les mers des
zones tempérées, l'influence locale des saisons y seroit presque nulle.
M. Péron qui a répété avec beaucoup de succès les expériences faites par
Ellis, Forster et Irvine sur le froid qui règne au fond~ de l'Océan, affirme
que partout au large'la mer est plus froide à midi, et plus chaude de
nuit que l'air ambiant. Cette assertion a besoin de beaucoup de
restriction; j'ignore si elle est exacte pour les 44 et degrés de latitude
australe, où ce zélé naturaliste, semble avoir fait le plus grand nombre
de ses observatioas thermométriques; mais entre les Tropiques, où l'air, en
pleine mer, est à peine de 2° ou 3° plus froid à minuit que deux heures après la
culmination du soleil, )ô n'ai jamais trouvé le moindre changement dans la
température de l'Océan, de jour et de nuit. Cette différence ne devient
sensible que dans un calme plat, pendant lequel la surface de l'eau absorbe
une plus grande masse de rayons; mais nous ~vons déjà dit que les expériences
thermométriques faites dans cet état de lOcéan n'ont rapport qu'à un phénomène
local, et qu'elles doivent être exclues entièrement lorsqu'il s'agit d'un propjtème
de la physique générale,
Les observations qui sont renfermées dans les tableaux précédons ont toutes été
recueillies sous les mêmes parallèles, mais par des longitudes et dans des saisons
très-différentes. Lors des expéditions aux terres mageHaniques et à Batavia,
le n!M!M/M de la température a été trouvé beaucoup plus au nord que dans
tous les autres voyages, ce qui a influé sensiblement sur la chaleur de la mer au
~nM~s du .MM<~m, T. V, p ta3-t48. ~own. de fAyt., T. LIX, p. S6l. Cï~e~ ~nna&m der
.P~tt,T.XïX,p.4a7.
noj~uj~~iqae~Ca~~
et;defâod~oct~ ,<tt.?~JaJna.
par ~Md~'d'apr~~ "1,,piif.qe$?Oit5nol'd.lê
l'ai. obse~~n-~nMrs~&~l'e~",0.t.,
boréale. H
s'
est prûbable '~que~'diës~ehiMtg~~ ces
anomâUes
par lés '2~,i1/~e:,Jati~u(J~
extraord!naM~s,e~g~nd~er~passe-par leg points oû l'eàu de.mer est
la plus chaude, coupe l~équateur sous un angle q~~ est variaMe selon que

à ceux de la~llnïite des ~ents alises et du~ salure


la déclinaison dn$oleil est boréale ou australe. Ces phénomènes, liés peut-être
de ta mer,
méritent d'être examines avec soin; mais on ne sauroit être surpris d'un
manque d'observations précises sur la température des mers éq~atonalcs, si Ion
se rappelé que nous ignorons encore les variations thermométriques dans les
mers voisines de l'Europe*.
Depuis les So" degrés de latitude nord, les résultats que j'ai obtenus
s'accordent très-bien avec les observations de MM. Perrins et Queve~o. Ce n'est
probablement pas à FinSuence localedëssaisons,comme nous venomrdeleprouver
plus haut~ mais au mouvement des eaux et à dés causes lointaines, qu'il
faut attribuer l'étendue des variations de température observée entre les
Tropiques dans le voyage de Londres à Bombay. Ces variations se sont
élevées a 5% tandis que dans la mer du Sud je ne les ai trouvées que de x~y.
M. Quevedo, en traversantdu sud au nord 'un espace de 6~0 lieues, ne vit changer
la chaleur de l'Océan-Atlantiquedepuis le Tropique du Capricorne jusqu'à 9° de
latitude boréale, que de ï°,y jusqu'aux z3° de latitude boréale, les plus grands
écarts de la température de la mer ne s'élevoient encore qu'à 3°,7.
Cette grande régularité dans la distribution de la chaleur de l'Océan se
manifeste aussi d'une manière bien sensible, lorsqu'on compare, dans les deux
hémisphères des zones également éloignées de l'équateur

C'eM en vain que, depttM mon retour ett i~!o4~a~ea(pg6 têt phys!c!eM qui habitent les cAtea
de t'Ocean, en Espagne, en France et en Angleterre, & déterminer, pour chaque mois de l'année, la
température moyenne de ta mer a sa surface, comparée & la température moyenne de t'atr sur te*
cotes voisiner Ce qui a été puNié a ce sujet se &)nde on sur des considérations théoriques ou mr un
petit nombre d'expériences qui n'ont pas été faites an large, mais dans des ports et dans des
rades abritées. Quel est le maximum de froid qu'atteint l'Océan sous les 45" de latitude, en prenant
la moyenne de plusieurs jours? A quel mois ce maximum correspond-il? On assure que, près de
Marseille, la mer n'est jamais plus froide que 6*,5,et pins chaude que a5°, quoique les extrêmes de la
tentpératmre de l'air soient souvent–4° et +35". (J~M. ~J~TSbo. my~e & ~tfM, t~S, p. yo.)
Peut-on admettre qu'au large, la chaleur de l'Atlantique s'éteTe à ao'* par les M* de latitude ?7.
COMPARAISON DE

I.ATtTCin:.

3<'55'B.
3° t6~
4<'
A..

8'B.
3-' 44' A.
!.ONdTUBB.

9o<'36'0.
a~O.
9.0° a3~

aa''54'0.
aS*
O.

to' 0.
LA TZMPEtATPRE

~roqUB
*t
l'ob~tion.
Février~.
Févr!,eJ'8Q~,
JanYie~ t805 a7',o
Octobre 1788
Novemb. t788
TBX~.
TaaaPim.
<t<ro«M

21:1:,7
*M

N7' Churntca.
27°,$
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DES MBM DANS

't~p~t<'Md<r
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Idem. _<<
A8o3a8'7 HunthoMt.27*
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A~m. ) Océan At't-


='8~Mer
"7 à i8o
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"m<~ta"t'
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tMttn~e !'0<!<*aMtA)'Mpr4*
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1..
moyeuna
eom)tttm.<!iM"Mt*Mh

“.
Mer du Sud.
~'3.
maymneM'notehë-
fhtt tt)t<~)M< h

)ttM.)
de l'ona6e

Af)

4-'36'B* 53-'5o'Ë.
ATrH.t8oo a6<4
Perrins. "Oc~anAttant.
Mai.t8oo a7'6 jMem. (MerdettndM.
4-'44'A. a4°5t'0.
~m.("
tt-ta'B.
t,"
n"58'B.
t~3o'A.
3a' A.

.5--a4'B.
A.
15° 24' B.
37"4t'0. A~rM.
ag"4,' 0.

a7°ao'0.
MaM

Mart. t8oo a3°,9


B5°a6'0.
0- Avnt.t8oo a5*,8
39-'44'0.
39° 44' O.
30" 34' 0.
Avril 180.3 a3-8
AvrH.i8o3
t8&3
Ho3

s3°,8 QuevedQ.}
23:,11
Mars. 18o3 a6-S
37°,!
37-o

n~Att.t
Océan
inc~Att~t
~m.
QneYedo.(
Perfim.)
AHmt.
.}
QueTedo.
~m.
Océan Atlant.
Océan AUant.
~t- t-

t5-' 5o' A.
~–––––––––––––––––––––––––––––––––- ––––~–––––––––
a3<' o'B. a6<'5o'0. Mart. t8oo at'.o P~nns. J
a3°4o'B. 41° 6'0. Avril. 1803 aa",i Qt~edo.
aa-' 5~' B. aa" i3' 0. Mn. 1799
Mar!).t8o3
ao°,o Humboldt.
Qûevedo.
~° Océan Atlant.
a3°a3'A. atfSWO. a~~
a3°a8'A.
a3'-3o'A.
a~4~0. ATrU.t8oo a~~ Ferrins.<
So-to'E. Mai.1800 aa",o
~tai.t8o4
J'<&m. a
Merde~tndet.
3i° o'B.
B. 79°37'0.
O. at-.S H'MaboMt.
3faa'B. 15° 7'0. Octobre 1788 a3'6 Chon-ttca.
3t°58'B. ao°)o'0. Mars.t(ioo t~~ Penrms.
3t"3o'B. 38"45'0. Avril. t8o3 ao",7 Quevedo. ='t°,6 Océan Attant.
3i'-3~'A. a8°a9'0.
3i<' o'A. a6"ao'0.
Marit.i8o3
Avril. t8oo
a4",3
ao*,5
/</<-m.
Pemns.
3t°34'A.
31°
36°38'B.
4'A.
46°56'0.
47<'4o'E.
4t° a'O.
Novemb.1788
Mai. t8oo
Mai. )8o3
ao-S
t9°,4
19°,3
Pemn<
Churrucà.
Queredo.
Mer des Indes.
1
ô'B. 76'-4t'0. Mai. i8o3 Humboldt.
36-'
36° 4'B.
33° !6' B.
)7" .5'0.
!o° B4' 0.
Juin.l7qa
t788
Octobre
ao~o
t5'a
a3*,4
JMem.
Churraca. 19°,8 Océan Atlant.
t.
35°aa'A. 5o°3a'0. N«Temh.t788 t7°,o ~Mem.
3'0. AvriL. t8*,8 Pet-nnf!
3f!° 3'A.
36° 5'A.
33°
4o"a8'B.
Sa'A.
17°
4t°58'0.
94°5a'0,
33°35'0.
Mai: t8oo
t8o3
Février.. i8o3
Mai. i8o3
ao°,o
aa°,o
t7°,t
A!em.
Quevedo.
Q<tevedo. }
Mer du Sud.

4o°3o'B. 68°36'0. JniMet.. t8o4 i8°,7 Humboldt. (


~45'0. PerriM.
4a"34'B.
4a°3o'A.
40° 36'A.
40° 48' A.
5o"3o'0.
48'-ao'0.
93-- 56' 0.
FéTrier..t8oo ~'t°,a
MaH.
Mars.
t8o3
t8o3
'Février.. i8o3
tX«,a
t$°,5
i7°,o
/~m.
Quevedo

7<~m.).
tT'S
<
Océan Atlant.

Mer de Sud.
~m<).a~s, ,0:'
E~discut~nt, ces..obse~ .i'if,ji~1;1J;

des/tic~€st~~ee< à,; pç 1
~t~ ~!°P~
;p,i~repatèr
daM t~ zpae temipër~e~ ~m~ chaleur. qui lui est cbtnmut
niquéë par l'air. Les anomalies qui scm~ prowiennent -peüt-~tre,en .partï~.
des variations que subissent dans ~n même lieu~m~ en dtSerehtes années~
ïestentp~ratn~s moyennes atmospMnqaës des
?1~
m~ j
Le tàbtea~ précèdent que !es idées que F~n se forme généraiement
de la basse teNtperaturede l'hémisphère austrat, ne sont pas tput-a-fait exactes.
Près des pôles, et dans des ïatttudes très-ëtevées, le froid des mers est sans
doute moins grand au nord qu'au sud de t'equatear; mais cette dINërence
n'est pas sensible entre les Tropique,; elle. l'est même très-peu jusqu'aux 35
et 4o degrés de latitude. M. tHrwan 1 est parvenu à un résultat analogue pour
l'air qui repose sur l'Océan, en prenant les moyennes d'un grand nombre
d'observations faites pendant l'hiver et l'été de chaque hémisphère, et con-
signées dans les journaux de route des navigateurs. Depuis l'éqnateur jusqu'aux
34° de latitude australe, les hivers sont plus tempérés que sous les mêmes
para!!è!es dans l'hémisphère boréal; et encore par les 5t"sud, aux îles Malouines,
le mois de juillet est beaucoup moins froid que le mois de janvier à Londres.

~<y« on mémoire tr&t-mtêreMant,!)M<ré dam les ~Mïm. de ~cof!. ~f&!B<&, Vol. VIH, p. 499.
COMPARAISON CEt-A tËBtPERATURE DE t,*A!R
<'
DAN~ Ï.E6 DjEOX NEM!SPHERES.
i

"°r
t.ANTODB. eorreapondaM. HémhpMre
'm'
TBttt~nATOHZMOOafttitJCMMMt.

HémMph&re
bM~L

Juin.
aastrat.

Décembre. a8<o
o"–! 5" a8'<,5

Octobre.
Avril. 27<55
a6'5
"–––~– ––––––– Janvier.
j~t. ~5 ––.–.–- ~.–––––
iq'5

Septembre.
Mara.
ao'~5
ao°,8

3~
Juin. i5.,8
Décembre. i5°.4

Février.
Août. i6<8
ï7°,o

~fJuiUet. i8"3

*° fJuin.
Janvier.

~Décembre.
]5'a

7°°
i7".7

S8"
~Juillet.
Janvier. 6",a
ï5",5

Ces recherches offrent un grand intérêt pour l'histoire physique de notre


planète. La quantité de calorique libre reste-t-elle la même pendant des milliers

'Les observations qui ont servi pour former ce tableau ont toutes été faites, sur mer, & t'eMeption
<)e ceUes dont on a dédoit la température moyenne du parallèle de 34". Ces dernières
sont dues
au séjour de M. Sparmann au cap de Bonne-Espérance.
d'années? Les températures moyennes correspondantes à dij9Krens parallèles
ont-elles augmenté ou diminué depuis la dernière révolation quia bonleversé
ta surface du globe? Nous ne pouvons répondre à ce$ questions dans l'état
actuel de nos connoissances nous ignorons tout ce qui a rapport à un
changement général des;climats, comme nous ignorons si la pression baro-
métrique de l'atmosphère, si la quantité d'oxygène, si l'intensité des forces
magnétiques et un grand nombre d'autres phénomènes, ont éprouvé des
changemens depuis les temps de Noé, de Xisutris ou de Menou. Comme une
variation locale dans la température de l'Océan à sa surface pourroit être l'effet
d'un changement progressif dans la direction des courans qui amènent des
eaux plus chaudes ou plus froides, selon qu'ils viennent de latitudes plus
basses ou plus élevées; de même, dan% une étendue de mer très-limitée, un
refroidissement sensible pourroit être produit par le conflit de courans obliques et
sous-marins, qui mélent les eaux du fond avec les eaux supérieures; mais on
ne sauroit tirer des conclusions générales des changemens qui ont lieu sur
quelques points du globe, soit à la surface de la mer, soit sur le continent
Ce n'est que par la comparaison, d'un grand nombre d'observations faites
sous différens paratlè)es et à dinérens degrés de longitude, qu'on parviendra
à résoudre le problème important de l'accroissement ou de la diminution de
la chaleur de la terre.
Pour préparer ce travail, il faut déterminer avec soin, à une époque donnée
le maximum de la température des eaux de la mer sous les tropiques, et
le /M/r<~eZc des eaux les plus cA<HM~. Nous avons prouvé que ce nMMwnMM
est, de nos temps, dans les parages les plus éloignés les uns des autres, de
28° à 2f)° du thermomètre centigrade. Une postérité très-reculée décidera
un jour si, comme M. Leslie a tâché de h; prouver par des hypothèses
ingénieuses, deux mille quatre cents ans suffisent pour que la température
moyenne de l'atmosphère augmente d'un degré. Quelque lent que soit cet
accroissement, il faut avouer qu'une hypotM~e"d'après laquelle la vie organique
semble augmenter peu à peu sur le globe, occupe plus agréablement notre

Les courans de l'Océan aénen agissent comme les cottrans de ta mer. En Europe, par exempte,
la températare moyenne d'un lieu peut augmenter, parce que des causes très étoignees font
changer le rapport entre les vents du sud-ouest et ceux du nord-est. On peut de même concevoir un
changement partiel dans la hauteur barométrique moyenne d'un lieu, sans que ce phénomène indique
une révolution générale dans la constitution de l'atmosphère.
~n experirrlental M~t~y into <Ae nature and propagation o~~Mtt, t6o4, p. t8t et 536.
24~ HVHE t.le refroidissement de
imagination que les anciens systèmes sur
et l'accumulation des glaces pdtatires. !La pbysiqTtë et
partie purement con~ectarale~ et l'on diroit que Ïëssctences perdent de
1a~
notre planète
ont urne

leur attrait si l'on s'eiKbree à restreindre cette partie conjeetuBetle dans des
limites trop étroites.
ÉTAT HYGROMÉTRIQUE DE L'AIR.

Malgré les doutes élevés dans ces derniers temps sur la précision avec laquelle
les hygromètres à cheveu et à baleine indiquent !es quantités de vapeurs metées
à l'air atmosphérique, oh ne sauroit disconvenir que, même dans l'état actuel
de nos cdnnotssances, ces instrumenssont d'un grand intérêt pour an physicien
qui peut les transporter de la zone tempérée la zone torride, de l'hémiaphère
boréal à Ihémisphèreaustral, des basses régions de lairqui reposent surlOcéan,
aux cimes neigeuses des Cordillères. JatimjErois mieux, dit M. de Saussure
que l'on se servit de rinstrumest le ~lus~ imparlait, d'u'~ fil de chanvre,
tendu par le poids d'urne pierre, que de négliger entièrement des recherches
dont on s'est encore -si peu occupé dans des voyages lointains. Sans
discuter si des expériences inexactes sont plus nuisibles an progrès des
sciences que l'ignorance totale d'un certain nombre de faits, je puis ainrmer
que plusieurs hygromètres, construits par M. Paul, à Genève, et réduits de temps
en temps au point de l'humidité extrême 3, m'ont iburni des observations
très-comparables entré elles. J'ai constamment préféré l'ancien instrument
muni d'un seul cheveu, à celui de Richer, dans lequel plusieurs cheveux
agissent à la fois sur le cadran, et avec des tensions inégales. Je puis aflirmer
aussi que tout ce que M. de Saussure a dit dans l'Essai -sur f~g~MM~~e,

.EM<HM<r/gnMt<'<rK~ 3M.
M. Pérou pense que «c'est dans j~~)j}t:on du capitaine Baudm que des hygromètres,
pour la
première fois, ont passÉ l'Océan;)' » mais avant ce voyage, et même long-temps avant le mien, des
observations hygrométriques avoient été faites dans l'expédition de Lapérouse, et
an Bengal, par
M. Deluc, fils.
3 Jf'a* fait cette correction chaque fois qu'il me restoit Quelque doute SU)-l'indicationde l'hygromètre.
J'ai employél'immersion dMs l'eau de pluie, telteque M. Detuo t'exige pour les bandelettes de baleine.
On sait que, même pour le cheveu, cette méthode de vénËcation ne peut causer qu'une tégère erreur de
i à t*5 (&M~ 3~, p. 3~), tandis que les meilleurshygromètres diNërententre
eux souvent dea°.Je
n'ai pu ramener le cheveu ou la bandelette de baleine au degré de sécheMsse eMréme, faute d'un appareil
portatif que j'ai regretté de n'avoir pas fait construire avant
mon départ, te conseilleaux voyageurs de se
de la-grande durée de ses hygromètresportattïs~estextrêtnemen); exact J en
ai conservé sans altération pendant trois années de voyages dans les ~br~ts et
les montagnes de l'Amérique jnéridionak leur* marche avoit été véri&ée avant
mon départ, par JM.Pictet, sur cell& des hygromètres de l'observatoire de
Genève, et je les ai presque toujours trouvés & Q~" ou too°,5 lorsque jj'ai
pu les exposer à un brouillard très-épais.
Comme le 5o.
degré de l'hygromètre à baleine correspond déjà au 86.°**
d~gré de l'hygromètre à cheveu, je me suis servi du premier sur mer et dans les
plaines, tandis que le second a été généralement réservé pour l'air sec des
Cordillères. Le cheveu au-dessous du 65~* degré de l'instrument de Saussure
accuse, par ,de grandes variations,. les plus petits obangemens de sécheresse.
!1 a en outre l'avantage de se mettre plus rapidement en état d'équilibre avec
l'air ambiant. L'hygromètre de Deluc agit au contraire avec une lenteur
extrême; et, sur la cime des montagnes, 'comme je l'ai éprouvé à mon grand
regret, on est souvent incertain si fon na pas cessé d'observer avant que
l'instrument ait cessé de marcher. D'un autre côté,> cet hygromètre,
muni d'un ressort, mérite des éloges par la solidité de sa construction,
par la précision avec laquelle il marque, dans un air très-humide, le
moindre accroissement de la quantité des vapeurs dissoutes, et surtout
parce qu'il agit dans toutes les positions, tandis que l'hygromètre' de
Saussure doit être suspendu, et- se trouve quelquefois dérangé par le vent
qui soulève le contre-poids du cadran. J'ai pensé que c'étoit rendre service
aux voyageurs que de consigner ici les résultats d'une expérience de plusieurs
années.
Pendant toute la traversée, TAMmMK~ apparente de l'atmosphère, celle
qu'indique l'hygromètre non corrige par là température, a augmenté sensi-
blement, malgré l'accroissement progressif de la chaleur. Au mois de juillet,
par les i3 et ï~ degrés de latitude, l'hygromètre de Saussure a marqué, sur

munir d'une cloche étroite contenant de la potasse caustique de la chaux vive ou du muriate de
chaux, et fertnée à vis par un plateau sur !equBJH'hy(ptMnetre soit iixé. Ce petit appareit MFoit d'un
transport facite, si t'en avoit soin de te tenir tou~ouM dans une position perpendiculaire. Comme sous
tes Tropiques, l'hygromètre de Saussure se soutient généralement au-dessus de 85°, une vérification
fréquente dttMol point del'humiditéextremesufEt]eptussouvent pour rassurer l'obserrateur. D'aiUenrs
pour reconnohre de quel côté est t'erreur, il &ut se rappeler que de vieux hygromètres <! on ne les
corrige pas, tendent à indiquer de trop grandes sécheresses.
n..w <r c*
mer, 88~ Qa degrés par un tempspari~temeat serein, le
mermomeM~
bords du !ac de Oenèye~, l'humidité moyenne
se soutenant à a4 degrés. Sur les étant'de~
du même mois n'est que de 80", la chaleur moyenne en
réduisant ces indications hygrométriques à
une tempéràtuire ~unï~rane, on
bassin de l'Océan Atlantique équî-
trouve que l'AMM~~ r~Z~, dans le
noxial, est à l'humidité des mois d'été, à (Genève, dans le rapport de !a= a 7.
Cette énorme humidité de l'atmosphère explique, en grande partie, ta ibrce
de la végétation que l'on admire sur les côtes de l'Amérique méridionate où
il ne tombe presque pas dé pluie pendant plusieurs années.
La quantité de vapeurs changeant, non avec l'élasticité, mais avec la tempé-
rature, on peut comparer. quantités absoluesde vapeurs que contient
Ou les
l'atmosphère en deux endroits, ou les rapports dans lesquels se trouvent
ces quantités avec celtes qui sont nécessaires à ta saturation complète
de rair
sous diSérens ctimats. On connott, par des expériences sumsamment exacte~,
les capacités de saturation de Fair à divers degrés du thennomètre; mats les
rapports qui existent entre ratongement progressif d'un co~s bygroscopique
et les quantités de vapeurs renfermées dans un espace donné, n'ont point été
appréciés avec -le même degré de certitude. Ce sont ces considérations qui
m'ont engagé à publier les indications des hygromètres à cheveu et a
baleine, telles qu'elles ont été observées, en notant le degré des thermo-
mètres qui font corps avec ces deux instrumens. Pour faciliter ~usquà un
certain point la comparaison des observations faites à diSérentes latitudes,
je consignerai ici un tableau qui' a été calculé par M. d'Aubuisson à
l'occasion de ses recherches intéressantes sur les coëmciens des formules baro-
métriques. L'ensemble des résultats prouve qu'à mesure que l'on avance vers
léquateùr, l'air se rapproche de l'état de saturation. On a choisi les époques
où ta température de la mer étoit à peu près égale à celle de l'air. Des huit
colonnes qui composent ce tableau, la première offre l'époque de l'obser-
vation la deuxième, la latitude du lieu; la troisième, l'état du thermomètre;

L'hygromètreà cheveu étant beaucoup ptiM connu que celui & bateme, on a unique, pour con-
server une marche uniforme, tes résultats hygrométriquesd'après l'instrument de SMsmre, lors même
que l'observation a été faite avec celui de Delnc. Ce n'est que dans te )om'mal!ntétéorptog!que
que l'on a désigné l'hygromètre emptoyé pour chaque série d'e~pér!encea. Les nombres marquent
toujours l'humidité <t/)p<trente/si le contraire n'est pas expressément énoncé.
Sous la zone tempérée, sur le continent, les extrêmes sont comntmtément en été 67° et 88°,
la température de l'air étant de aG à 18 degrés centésimaux.
~qs~~t~M~
cm~?~M~
le
~Htygir~~
dfgf&~
~m~S~a~
sero~~é~poï'~
la hmtlëme~
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t.çJnqt1.e~

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je&~nt~i~ ib.ianî remeli
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/i :.la
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l'a~c
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.ép~ï~aei~~r

~l'air,.lâ
de
:étoit,
a !ant.i~g4rd au

'de.vapem'
vapeur

d'eau

sec,;

indiquée p&rrhygrom~tre~.
RÉSULTATS D~OSSÈ&yATïON8HT~&OM~TRïQUES FAÎTES DANS LE BASSIN
/DË.~bC&ANATLANTtQCE.
DU %-Tue, ¡" :'?" JI"
eo~tettuMttMMt'air, emnnehemreentempt

~)~~*° tMtMtt!<))t.t<!tttta)tM.)'~t<MntMt.<r<tUtBttM.
!om<ttTAmo)t<
..oMMTA~o~ p)t,B<mK. ThtnBexthtt HyeMm~tn.
<t)gmn)mM.&)pMmm.~n..t<imttM..J)m!)timhM

i5.
Qjaiaty~39<'ï~
1-6
5o
5o"36'
29"i8'
t8"S5~
i4",5
ao'o
zo",o
zi",2
82° T~~
85'
83<8
8f,S
20,0
20,0
2t,3
n.4
16,?
t5,7
16,0
o,SS
0,74
0,7~
0,~5
o,~
o,t6
0,79 o,2o
4)<uMet. t6"t<~ aa'5 88'* a9,<) 19,4 o,85 o,i5
to t:54~ s4'o 89" 248 21,5 0,95 o,t5
ja to°46' a5~ 90" 26,7 85,5 1,01 o,ta
i4 tt" s5" 92° :6,8 25,8 0,98 0,09

Voici te: fondemeMdu catcntde M d'Auba!<som:


< =: Indication dtt thenmomëtre cetHigrade-
j!<=ïndMia6om de l'hygromètre de Sttmare.
soit:

e == /Ï~T°~eesd<~te<Mtonnetdat*Mm)t~t&~demt~etdea~eespar!e9memeBtett~
-~)
-= force e!ast!que de la Mpenr dMs un <<5pace ~ai est tata<
D'après tea travaux de SattSsure, on trouve <pte la farce étastique, dans un espace 0& t'hygrotnetre
marf[~e~tdegré~est~(o,ot5~–o,47),tanttq<teft~>5o'Soito,ot5~–0,4~==~.
<Bh..
M. t~Ptaeedonne,o'apreale)e<pénen<:esdeDatten, <f=o,oo5t:3x(to)'?97"°M<'6''5<
(Jmc.e~T.ÏV.p373.)Det4omco<tdM:
taa<,8
.+t.oo375'~='==*~ tniHhn.
e~~<-(*).
Il résulte de l'ensemble de ces recherches que st les vapeurs que l'air conttent
ordinairement dans nos latitudes moyennes~ forment environ les trois quarts

<
de la quantité nécessaire à sa saturation, dans la zone torride cette quantité
s'élève aux neuf dixièmes. Le rapport exact est de 0,78 à 0,88. C'est cette
grande humidité de l'air, sous les Tropiques, qui fait que l'évaporationy
est moins forte qu'on ne devroit le supposer, d'après l'élévation de la
température.
J'ai été souvent surpris, pendant cette traversée,*etplus tard dans le vaste
bassin de l'Océan Pacifique, de ne pas voirihygromètre s'approcher davantage
du point de l'humidité Cet instrument a été quelquefois, loin des~
côtes, à 83°; et, généralement dans !a zone éqninoxiale,il s'est soutenu entre go
etga degrés. D'après lestàbleaux météorologiques, publiés parMM. Langsdorf
et Borner, on voit que, dans l'expédition de Rrusenstern, de même, que dans
celle de Lapérouse, l'humidité apparente a été trouvée de 88" à <)2". Les
extrêmes ont été 83° et g~°, ce qui est conforme à mes observations. U
est vrai que, d'après les recherches curieuses de M. Cay-Lussac,! hygromètre
ne peut jamais marquer au delà de 90" dans un air qui est en contact avec
solution saturée de muriate de soude; mais
une partout t'eau de la mer s'éloigne
tellement de l'état de saturation, que te sel qu'elle contient changeroit à peine
d'un degré le point de l'humidité extrême que peuvent atteindre les basses couches
de l'air dans le bassin des mers. Ce point seroit indiqué par l'hygromètre, si
la tranquillité de l'atmosphère n'étoit pas troublée par des courans.
Le vent, en déplaçant tes~notécutesde t'air, ne fait pas aller le cheveu au
sec, comme il fait baisser un thermomètre exposé au soleil en enlevant les
couches d'air fortement écbaunees. Des expériencesnombreuses "de M. de.Saussure
prouvent que l'air agit de la même manière sur les substances hygroscopiques,
qu'il soit en mouvement ou en repos; par conséquent l'influence des vents
horizontaux et descendans ne devient sensible à l'hygromètre, qu'autant que ces
vents amènent des couches d'air moinschargéesde vapeurs. Si des courans obliques
s'établissent, soit par une accélération subite dans le décroissementdu calorique,
soit par le conflit de plusieurs vents, soit par des phénomènes électriques~ les

Jtf&Tt. de f~M~. de 7'~<eM&oMy, T. 1, p. 454. J'ai cprrigé les indications de l'hygromètre <!e
Deluc, dont se servoient tes voyageurs russes. Le 76.°* degré correopondoit,dans cet instrument, an point
de l'humidité extrême. Les hygromètres de Lamanon étoienthien TêriSés, pnisno'ibindiquoient too et
10) degrés dans une brume épaisse, ~o~a~'e~e Lapérouse, T. IV, p. x6).
7?Mf~ sur l'Hygrométrie, l5o-l56.
couches supérieures de 1 atmosphère se mêlent aux couches tnteneures. Les
dëgt~nd~ cantinens avant
mouvemens joints aux vents horizontaux qui traversent
de parvenirdans le bassin des mers, tendent perpémellementàë~i~Befl'hygromètre
du point extrême de la saturation. Peut-être aussi les couràns polaires qui, par
i'enet de la rotation du globe, semblentprodaire~'appareneedes vents alises, ont-
ils trop de vitesse pour que l'air qu'ils amènent puisse, sous chaque parallèle, se
charger de toute la quantité de vapeurs correspondante à sa température.
Les physiciens qui ont suivi long-temps la marche de l'hygromètreen plein air,
savent combien il est rare, à moins qu'on ne soit dans un brouillard épais,
de voir ces instrumens à too". Pendant les pluies les plus fortes, et même
au milieu des nuages, l'hygromètre à cheveu se maintient souvent entre
go et <)5 degrés Dans ce cas, l'air interposé aux gouttes d'eau on à la
vapeur vésicuiairc, est loin d'être saturé, et je doute que l'atmosphère, en
conservant une partaitc transparence, atteigne jamais le fKa.r//MMMde l'humidité
que nous produisons sous nos cloches. M. de Saussure, après avoir exposé la
longue série de ses expériences manométriques et hygrométriques, faites à
différens degrés de température, convient lui-même que les deux derniers
degrés de son instrument ne sont peut-être que des degrés de supersaturation
et que la quantité de vapeurs que peut contenir un certain volume d'air
libre, est probablement plus petite qu'on Tte devroit l'admettre d'après des essais
faits dans nos laboratoires 2.
Les nntnraHstes qui ont accompagné le chevalier Kruse!~terndans son vovage
autour du monde, assurent que l'hygromètre de Deluc a servi aux marins
à prévoir le mauvais temps pendant la traversée des iles Washington à Nangasacky,
et partout dans la zone torride ou les changemens de l'atmosphère ne sont presque
pas sensibles pour le baromètre. D'un autre côté, M. Péron dit qu'il a vu

M. de Saussure l'a observé même une fois !< 84°,~ pendant une ondée énorme. Essai 3~6, p. 3at.
D'un autre cote, M. Uetnc a trouvé que ses hygromètres qui, ptongé~ daf)~ feau, marquoic~t iou',
se
soutenoieuta83'3 lorsqu,'on les plaçoit sous une c)oc).c remplie d'air atmosphérique, et dont tes parois
étoitot constamment humectées. En voyant, dans mon Journal de route que l'hygromètrede Deluc s'est
maintenu le plus souvent entre 60 et 65 degrés, il &ut se rappeler que,
pour cet instrument, le point
de saturatMti dans l'air n'est pas à )oo, mais environ à 84 ou 85 degrés. Idées mr J~~on)~<
178fi, T. p. ya; T. H, p. 4y3. i7r~M, ~œt&.< de historia nt~r~, i8o3, p. aaq.
En déterminant le point de l'humidité extrême, on ~roit que l'air de la cloche n'est point
encore
saturé quand dé)a tes vapeurs se précipitent d'une manière presque imperceptible. (&MMMM, Essai,
S. [07 et 123.) M. Gay-L)MMc a fait voir que ta propriété hygroscopique du
verre devient une source
d'erreurs difficile :< éviter.
constamment baisser le baromètre sur mer, lorsque l'hygromètre à cheveu
avançoit vers l'humidité extrême. Je n'ai eu occasion de véri&er ni l'âne ni
l'autre de- ces assertions.

COCM:OR AZCREE DU'C!Ët, ET


COtHECR DE LA MER A SA SCBFACË.

Les mesures cyanométriques que renferme cet ouvrage sont je crois, les
premières que l'on ait tenté sur mer et dans les régions équinoxiales. L'instru-
ment dont je me suis servi avoit été comparé à celui de M. de Saussure.
J'avois eu la satisfaction en ~5,
de consulter ce savant illustre sur mes
projets de voyage et il m'avoit engagé à faire, hors de l'Europe, des
observations comparables à celles qu'il avoit recueillies dans la chaine des
hautes Alpes'. 4yanomètre
Je ne rappellerai pas ici la théorie du et les précautions néces-
saires pour éviter les erreurs. Quoique cet instrument assez imparfait soit encore
peu répandu, les physiciens n'en connoissent ~as~ moins te priocipe ingénieux
sur lequel se fonde la détermination des points extrêmes de l'échelle*. Pour
m'assurer~ par une preuve directe, si les observations cyanométriqhes sont
comparables entre elles, j'ai souvent essayé de placer l'instrument entre les
mains de personnes qui davoient aucune habitude de ce genre de mesure, et je
n'ai pas vu que leur jugement, sur les nuances du bleu vers l'horizon et au
zénith, différât de pins de deux degrés.
Les chasseurs de chamois~ et les pâtres de la Suisse ont été frappés de
tout temps de l'intensité de couleur qu offre la voûte céleste sur le sommet
des Alpes. Dès l'année t~65~ M. Deluc fixa l'attention des savans sur ce
phénomène dont il a développé les causes avec autant de justesse que de
simplicité. Dans le bas de l'atmosphère, dit-il 3, la couleur de l'air est
toujours plus pâle et affoiblie par les vapeurs qui, en même temps, dispersent
davantage la lumière. 'L'air des plaines devient plus foncé quand il est plus

M. Leslie a énoncé ce même <!ésir dans son ouvrage sur la .Pnyaga~KW de la cAa/eMr, p. 44a.
Jt~motreo de ?~r<n, T. tV, p. 409. Journal de ~A~tte, T. XXXVtH, p. 499. ~yo~Bt <&MM
les ~~<, 2o86. Essai la CMfgT-ttpAte des ~/<Ht<M~ tSo~, p. toa. Bouguer paroît déjà avoir
eu l'idée d'un instrument semblable, mais d'un usage plus gëméraLEn parlant de la lumière renvoyée
par les molécules d'air, il dit « On devroit employer, comme terme de comparaison, des tablettes
peintes de différentes couleurs. x 7~~ d'Optique, p. 56S.
3 Recherches sur les modifications de l'atmosphère, S- 93t.
pur, maïs H n'approche jamais de la'teinte vxve et &ncée qae ron remMque
sur les montagnes. » Um'a~paru que, dans la chaîne des Andes, ceaapparences
Sjnt moins d'impression sur l'esprit des indigènes, sans doute parce qoe ceux

mers.
d'entre eux qui gravissent tes cimes des Ck~iUërespoury prendiiede la
neige, ne viennent pas de la région des mais
de plateaux qui, eux--
mêmes, sont élevés de douze ou quinze cents toises au-dessus du niveau
des
En examinant les observationscyanométriquës consignéesdans mon journal de
route, on voit que, depuis les côtes d'Espagne etd'A~rique jusqu'à celles de l'Amé-
rique méridionale, la couleurazurée de la voûte céleste a augmenté progressivement
de ï3 A a3 degrés. Du 8 au 10 juillet, par les t2 ? et t~ degrés de latitude
le ciel a été d'une pâleur extraordinaire sans que des vapeurs concrètes ou
vésiculaires aient été visibles. Le cyanomêtre n'a indiqué, au zénith, entré
midi et deux heures', que t6° à ~°, quoique tes jours préeédens il eût été
à 22". J'ai trouvé, en général, la teinte du ciel plus (bncéeaous la zone torride
que dans les hautes latitudes; mais j'ai constaté aussi que sur le même parattète,
cette teinte est plus pâle au large que dans t'intérieur des terres.
Comme la couleur de la voûte céteste dépend de l'accumulation et de la
nature des vapeurs opaques suspendues dans t'air, il ne faut pas s'étonner
si, pendant les grandes sécheresses, dans les steppes de Vénézuéta et du
Meta, on voit le ciel d'un bleu plus foncé que dans le bassin de l'Océan.
Un air très-chaud et presque saturé d'humidité s'élève perpétuellement de
la surface des mers vers les hautes régions de l'atmosphère ou règne une
température plus froide. Ce courant asce ndànt y cause une précipitation,
ou, pour mieux dire, une condensationdes vapeurs. Les unes se réunissent
en nuages, sous la forme de vapeurs vésiculaires, à des époques où l'on
ne voit jamais paroitre de nuages dans l'air plus sec qui repose sur les
continens; d'autres restent éparses et suspendues dans l'atmosphère dont elles
rendent la teinte plus pâle. Lorsque de la cime des Andes on tourne ses

I<es observations out toujours Aé faites au zénith même ou près du ténith, mais des ép<Mjnes
où le soleil étoit éloigné de la partie du ciel dont on mesurait t'intensité de la couleur bleue. A to
ou ïa degrés de distance, autour de l'astre tes teintes ont one pâleur
locale, comme au contraire
elles ont une intensité locale lorsqu'on aperçoit te bleu du ciel soit entre deux nuages ou au-dessus
d'une montagne couverte de neige, soit entre tes voiles d'un navire ou entre tes cimes des arbres.
Il est presque inutile d'avertir que cette intensité n'est qu'apparente,et qu'eue est l'effet d'un contraste
de deux couleurs de diSefens tons.
regards vers la mer du Sud) on ap~~it~spt~e~t'~ne~~y n~niforrném`ent
répandae; à quinze ou di'xJmit'~ceBits.~o~es-'dé'h~Mtëur~-ë~co.u~attt, coinme ~Mt
voile Mger, la suè~oe de l'Océan. <6ëtte~ ltéu~ de~i û~e~ aâisôri~'ïciû

l'existence de ces v~pe~nm c'pa'qNës~ûë s'ao~nce Au~


,1'air, vu des côtes et an ~ge, para~ pa~ et par~iïemëa~t~ot~-aussi
que
lé peu d'intensité QM'oSm; ia co~e~ azarée da ciet. Noa~ ~aroasi occàStOM~i
roi
dans la suite, de revenir sur ces phénomènes qui modifient l'extinction de
!a !umièrë, et qui, sentMaMes a~xhi~uiMards que ïè peopIëap'peMë~
restent teHement circonscntsaMxha~t~ régions de l'atmosphère que nos
hygromètres n'en éprouvent aucun changement sensiMe.
J'ai répété, plusieurs tbis~dans ta partie equiBoxiate de l'OceaM Atlantique,à
les expériences que M. de Saussure a ~Kte~scr ie décroisseBM'nt de t'ihtënsitë
de couleur observée depuis le zéaith Jusqu'à l'horizon. Le 4 ]umet, par
les t6" 19~ de latitude, ieael étant du bleu le pims pur, le thermomètre se
soutenant à 22°, et l'hygromètre à 88~ j'ai trouvé, vers midi:

à t" de haMtear 5" du cyanomètre.


to" 6"
to° 10°
50" t6",5
~0° i8"
6d~ a:
entre yo et 90° 25°,5.

Le 3o juin, par les~iS" 53~ de latitude, le thermomètre étant à B!2,


et l'hygromètre à 8t°,5, le décroissement cyanometrique avoit été un peu
moins régulier:

à de hauteur 3",5 du cyaaomëtre.


10° 4~
2o° 8«,5
3o" t s*'
'45°~ ~5«,5'
5~" i8<5
60" 21"
entre yo'*etQo° as"~
Ce décroissement a beaucoup de rapport avec celui qui a été observé à
~t~t.a~jt~o~
~~yM~~tv~
~C0an~~<e'l'un
~caïcat.
han~Hr.t~JK~O!s~
tiqBe.)maM ~.j[~,i~a~)r)~~)ja~~
vap~uM.qut~posen~aa~a~a.
à,us.e des
q~

bt~s.,nou&~s~ïMm!j(~ ~MH<M~'que,pr~~des''
tes rayons
distant dn~~th)!a~T~ rdqçielparott foncée du c&t~
côtes, à égale
du contmentquedu~coté déclamer.
La quantité de vapëum qui ~odinent~l en rémé-~ n

chissant de ta lumière blanche, change ~u matin au soir; et le cyanomètre,


obse~ att zënith on près de ce pointa indique~ avec aMez de précision, tes
variations qaico~fespondent aux d~~Mntesheutesda jour:
,.J Vï' X' ?<?.?.V'~
M~4e t$''55< 17" ai" aa",4 M* 18°
t6° 19~ ïg*' aa~ sS~SaS~so*5
i5" at~ tS" t6" ty" ïy" ï5«,8

Je n'ai pas~eata retrancher b dernière observation, celle dn 8 jniUet, quoique


le clé!, par une anomaMebizarre, ait paru, ce )OurQà, aussi p~te qu'on le voit sur
le continent, dans la zone tempérée. Le soteit étant a égaies distances du méridien,
les teintes sont plus <bncées te soir que le matin, sans doute parce que te nMU~-
TnMfn de la température tombe
entre une et deux heures. Je n'ai pas remarqué,
comme M. de Saussure, que te cyanomètre tut régulièrement moins étevé à
midi que quelque temps avant le passage du soteit au méridien; mais aussi
je n'ai pu me livrer, avec autant d'assiduité que lui, à ce genre de recherches.
Il ne faut pas confondre les mesures cyànométriques avec les expériences
que Bouguer a tentées, au moyen de son ~Mcwtetn', sur l'intensité de ta
lumière dinuse ou réfMchie par l'air. Cette intensité contribue sans doute à
modi&er la teinte plus ou moins azurée de ta voûte céleste; mais les deux
phénomènes ne dépendent pas directement des mêmes causes, et il y a un grand

Jb<<roo< de jMt~t~, T. t/VM, p. 3? a.


Observationscyanométnqaes de Gen~e
Yt'- X'' MMi U'' VI"
t4°,7 aa"~ 39°,& ao°,e t7*.
nombre dé circonstances dans lesqu$!!es<Vintëns~dèSI~t~~ aérienmewest
très petite, tandis que le cyanOmetre indtquè dM t~!htës plus fbncéea.
M. Leslie a observé, par exemple, à soh~ phot~metrè~ qoë la lumière
diffuse est moins (brte, lorsque le ciel est d'an Nea tres-pnr et ~es-fon~~
que lorsqu'il est légèrement voilé par dea~ vapeurs trmsparentes~D~~
sur les montstgnes ott l'intensité de la lumière directe est bplaa! grande
la !umière aérienne est très-foible, parce que les rayons sont ré&échis par
un air moins dense. Une teinte très-fbncéey correspond a la <b!Messe de là
lumière diffuse, et ~aspect dn ciet ressëmBterbit, sur les montagnes,&ce!uiqu'oHre
la voûte céleste dans les plaines, îofsqu'eHe est éclairée par la foible htmière de
la lune, si l'état des vapeurs aqueuses ne produisait pas une diSerence sensIMe
dans la quantité de, rayons Mânes réfléchis vers les basses régions de h terre.
C'est dans ces réglons que les vapeurs se condensent après le coucher du soleil
et que des courans descendans troublent TéquiÏibr& de température qui s'est
établi pendant !e jour.5nr le dos des <3ordIuères,razurdacieïeM moins mê!éde
blanc, parce que l'air y est constamment d'une sécheresse extrême. L'atmosphère
moins dense des montagnes, édairée par ta vivetumière du soleil, réfléchit
presque .aussi peu -de rayons bleus que l'atmosphère plus dense des plaines
éctairée par la foible !umièrede la tune. H résulte de ces considérations que
l'on ne devroit pas dire, avec M. de Saussure et d'autres physiciens qui ont
récemment traité cet~e matière, que l'intensité du bleu est plus grande sur le
sommet des Alpes que dans les plaines, la couleur du ciel y est seulement
plus (bncée~ moins mêlée detblanc.
Si l'on dirige le cyanomètre vers des paTties du eiel très voisines du
soleil, l'instrument indique, près du zénith~ des teintes aussi fbibles que
celles que l'on observe près de l'horizon. Les causes de cette pâleur sont
très-dinerentes. Prèsdusoleil, une lumière trop intense fatigue nos: organes,
et, l'ceil ébloui par la quantité de rayons blancs qu'il reçoit à la fois,
devient presque insensible à l'impressionnes rayons bleus. A l'horizon~ au
contraire, ce n'est pas l'intensité de la lumière aérienne qui fait pâlir la teinte
azurée du ciel avant le coucher du soleil, ce phénomène est produit par la
lumière blanche que réfléchissent les vapeurs condensées près de la surface de
la terre.

OnjM'op~ga~ïonof AMt~p. 44t.


*J~f&tee,~<Mtn.c~<!<e,T.tV,p.a8a.poH<tO)t<&<m<)f&tJMbttA~p.96.
Bonguer a fait l'observation curieuse que, le soleil étant a ï5 on 20 degrés
de hauteur,, il y a, surent parallèle a l'horizon, deux; parttë&dtn ciel éloignées
de l'astre de ïï0 à tao degrés, où l'mtensité est à son MMMMMMt~ tandis
qu'on observe le M<M"~MMm dans un point diamétraflement opposé au soleil
Nous pensons que cette circonstance intime peu sur l'exactitude des mesures
cyanométriques faites dans la zome torride; car plus le soleil est élevé sur
l'horizon, et plus il y a d'uni~rmité dans la distribution delà lumière aérienne'.
Il paroit même qu'une partie du ciel peut réfléchir une quantité de lumière
plus ou moins grande, sans que le cyanomètre indique une teinte plus ou
moins foncée.
Je ne m'étendrai pas davantage sur les rapports qui existent entre les
résultats obtenus par le cyanomètre de Saussure et le lucimètre de Bouguer.
On sait que cette matière appartient aux recherches les plus délicates de
l'optique; et la teinte du ciel mérite d'autant plus l'attention des physiciens,
que tes expériences ingénieuses de M. Arago ont prouvé récemment que la
lumière aérienne est composée de rayoss qui ne sont pas de la même nature,
puisqu'elle en renferme qui ne sont pas susceptibles d'être polarisés~
Si le cyanomètre indique, je ne dirai pas la quantité, mais l'accumulation
et la nature des vapeurs opaques contenues dans l'air, le navigateur a une
manière plus simple de juger de l'état des basses régions de l'atmosphère.
I) observe attentivement la couleur et la figure du disque solaire à son lever
et à son coucher. Ce disque, vu à travers les couches dair qui reposent
immédiatement sur l'Océan, annonce la durée du beau temps, le calme
ou la force du vent. C'est une espèce de ~Mt~~MOTHefre dont les indi-
cations ont été interprétées, depuis des siècles, avec plus ou moins de
succès. Sous la zone torride, où les phénomènes météorologiques se succèdent
avec une grande régularité, et où les réfractionshorizontales sont plus uniformes,
les pronostics sont plus sûrs que dans les régions boréales. Une grande pàteur
du soleil couchant, une couleur blafarde, une dénguration extraordinaire du
disque y sont des signes de tempête rarement équivoques, et ton a de la
peine à concevoir comment l'état des basses couches de l'atmosphère~ que nous

Bouguer, Traité d"Op<t~tM~ p. 71 et 3<?~.

f&M~ p. 74.
~<ye~ la description de l'appareil auquel. Saussure a donné ce nom, dans tes jtjRaMtTM de Turin,
T. IV, p. 425.
révèle ce diaphanomètre naturel, peut être aussi intimement Ué à de$ chan-
gemens météorologiques qui pat lieu huit ou dtxheufes après le couehef
dusotei).
Les marins, plus. encore que les habitaos de la
'i~. '<
campagne, Ont perfectionné
la connoissance physionomique du ciel. N'apercevant que la surface.de
l'Océan et la voûte céleste qui semble reposer sur elle, ils nxent per*
pétuettement leur attention sur les plus petites modifications qu'éprouve
l'atmosphère. Parmi le grand nombre de règles météorologiques, que les
pilotes se transmettent comme par héritage il y en a plusieurs qui
annoncent beaucoup de sagacité; et, en général, les pronostics sont moins
incertains dans le bassin des mers, surtout dans la partie équinoxiale de
1 Océan, que sur le continente où la configuration du sol, les montagnes et
les plaines troublent !a régularité des phénomènesmétéorologiques. L'influence
des lunaisons sur la durée des tempêtes, l'action que la lune exerce à son
lever, pendant plusieurs jours de suite, sur la dissolution des nuages, la
liaison intime qui existe entre les abaissemens des Baromètres marins et
les changemens du temps et d'autres faits analogues, se manifestent à peine
dans t intérieur des terres comprises dans la zone variable, tandis que
leur réalité ne parott pas susceptible d'être niée par ceux qui ont navigué
long-temps entre les Tropiques.
J'ai tenté d'employer le cyanomètre à la mesure de la couleur de la mer.
Quoique cette couleur soit le plus souvent verte, on n'a pas besoin d'un
chlorométre pour évaluer l'intensité de sa teinte. Il ne Sagit, dans cette
expérience, que du ton de couleur, de la nuance plus ou moins tbncée, et non de
la nature individuelle ou de la qualité de la couleur. Par un beau temps serein,
la teinte de l'Océan a été égale au 33.°' au 38.°", quelquefois même au
~°" degré du cyanomètre, quoique la voûte du ciel fût très-pâle et atteignit
à peine te t4°*° ou i5.°" degré, Il seroit inutile de répéter ces expériences quand
l'atmosphère est chargée de nuages, ou a l'èmbrc que projette le corps du vaisseau.
Lorsqu'au lieu de diriger le cyanomètre vers une grande étendue de mer
libre, on fixe les yeux sur une petite partie de sa surface à travers une
ouverture étroite, l'eau parott d'une couleur d'outremer superbe. Au contraire,
vers le soir, quand le tord des vagues, éclairé par le soleil, brille d'un vert
d'émeraude, la face, du côté de l'ombre, a un reflet pourpré.
Rien n'est plus frappant que les changemens rapides qu'éprouve la couleur
de l'Océan par un ciel clair, et sans que l'on observe les moindres yaria-
tiens dans l'atmosphère. ne parle pas M; de tateinte MtetMe et Mahcnàtre
qui caractérise lés eaux de sonde et tes bas fendf, et qat ne pent être doe
qu'au sable suspendu dans 1~ liquide, puisqu'eUe se iroave dans des parages
où le fond, & vingt ou trente brasses de profondeur, n'est aucamen)~~ visible
je parle de ces cbangemeMeXtraot'diaaires par lesquels, au, milieu du vaste
bassin de l'Océan équinoxial, l'eau passe du bleu d'indigo au vert le plus 6)ncë~
et de celui-ci au gris d'ardoise, sans que l'azur de la voûte céleste ou ta
couleur des nuages paroissent y influer.
La teinte bleue de l'Océan est presque indépendante du reflet du ciel.
En généra!, les mers de~ Tropiques sont d'un azur plus intense et plus pur
que les mers situées sous de hautes latitudes, et cette différence se fait
L'Océan reste souvent bleu, lorsque, par
remarquer jusque dans le Gulf-stream.
un beau temps, plus des quatre cinquièmes de la voûte céleste sont couverts
de légers nuages blancs et épars. Les sayans qui n'admettent pas la théorie
de Newton, sur la coloration, considèrent te bien du ciet cuutme le noir de t'espace
vu à travers un milieu dont la transparence est troublée par des vapeurs 1;
ils pourroient étendre cette explication à la teinte bleue de l'Océan.
Tout ce qui a rapport ta couleur de t'eau est extrêmement problématique.
La nuance verte des eaux de neige qui sortent des glaciers des Alpes, et qui
contiennent très-peu d'air dissous, pourroit taire croire que cette couleur est propre
à reau dans sa plus grande pureté. C'est en vain qu'on sadresseroit à la chimie
pour expliquer ce phénomène ou la couleur bleue du Rhône près de Genève.
Rien ne prouve jusqu'ici qu'il existe des eaux ptus ou moins hydrogénées, et le
refroidissement des mers dans les tempêtes est beaucoup trop foible pour que
l'on puisse attribuer au simple changement de densité la rénexion de
rayons diversement colorés. M n'est aucunement probable que la couleur
verte des eaux soit due au mélange des rayons jaunes du fond et des rayons
bleus réfléchis par l'eau 2; car !a mer est souvent verte au large, où elle a plus
de 800 toises de profondeur. Peut-être, à de certaines heures du jour, la lumière
jaune et rouge du soleil contribue-t-elle à la coloration en vert 3. Les vagues,

1 Antonio de Dominis, La Hire et M. de Gûthe (Mémoires <& <e<t<~nMe, T. IX, p. 6l5;


T-hr&MMre, T. p. )
<D~at/e égyptienne, Vol. t~p. tôt.
La belle couleur bleu-verdâtre qu'offre la glace lorsqu'on la voit en grande masse, est an phénomène
bien (Ugne de recherches, et connu de tous les physiciens qui ont visité les glaciers des Alpes.
.cil"
semblables à des miroirs mobiles et inc~hés, revêtent pï'ogt'eMivementte)*
nuages.et les teintes aériennes, ~depuis ïe zéni!<jhjusc[U% l'horion. jLe mou-
vement de la surface de l'eau modiâe la quantité de Ïu~ejpe qui pénètre
vers les couches intérieures, et l'on conçoit que ces chaageMens rapides de
transmission, qui agissent pour ainsi dire conune des changemens d'opacité,>
peuvent, lorsqu'ils se réunissent à d'autms causes qui nous sont inconnues,
altérer la teinte de l'Océan.

INCLINAISON DE I/AtGC!U.E AIMANTÉE. INTENSITÉ DES FORCES MAGNETÏQPES.

Les variations du magnétisme terrestre appartiennent à un genre de phé-


nomènes dont je me suis occupé, avec une prédilection particulière, pendant
le cours de mes voyages et dans les années subséquentes. Les objets vers
lesquels j'ai dirigé mes recherches ont été, ï." l'inclinaison de l'aiguille aimantée;
2.~ la déclinaison ou l'angle que fait le méridien magnétique avec le méridien
du lien; 3." les variations horaires de la déclinaison; l'intensité des forces
magnétiques mesurée par la durée des oscillations d'une aiguille horizontale ou
verticale~. L'étendue de la surface du globe, dans laquelle j'ai pu déterminer
les phénomènes magnétiques avec les mêmes instrumens et en employant
des méthodes analogues, est de ït5" en 'longitude;' elle est comprise entrera"
de latitude boréale ét t2" de latitude australe. Cette vaste région offre
d'autant plus d intérêt qu'elle est traversée par l'équateur magnétique; de
sorte que, le point où lindinaison est zéro, ayant été déterminé à terre,
et par des moyens astronomiques, on peut, pour les deux Amériques,
convertir, avec précision, les latitudes terrestres en latitudes magnétiques.
Cette conversion, indispensable pour l'étude des lois compliquées du magnétisme,
est au contraire très-hasardée, lorsqu'on compare des observations d'incli-
naison faites sur des méridiens très-éloignés les uns des autres, et lorsque

Quand on mesure fintenshé par les oscillations dune ttgMUe, daM un plan honMMal, il rapt
corriger les résnttats par l'inclinaison observée dam le même tien. Cette cprrectiott devient inutile
lorsqu'on emploie une a'gttute~d'tncMnMMnqut fait des OtcHtattoM d'M tophn du méridien magnêtinme.
D ameuta ~e nombre de ces oficiUatMms, comparé au nombre de ceUe<
que fait la même MgaiHe
dans un plan perpendiculaire au méndien magnétiaue détermme t'incUnaiMn du Men. Cette m~thede
de trouver l'inclinaison par un instrument sans limbe divisé, oHte plus de précmiott prés de t'eqhateur
magnétiqueque dans les régionsboréales; elle a servi à venSerl'eMetitnde d'une partœ de mes «bservation!!
puMiées, avant mon retour en Europe, par M. de Lalande. (~oMta. ~e fAy< T. UX, p. 499.)
t'en regarde réquateur magnétique comme ma grand cercle sans tnnexton et
sans: irrégularité de courbure.
~aigré !e perfectionnement considérabte que MitcheHetNaimeavoientapporté
dans!a construction des boussoles d'incjUnaison,ces instrumens,avanttannée ï 79~ j
n'~toteatpoint encore parvenus à ce degré deprécistonqu'ils ont atteint aujourd'hui.
Si La Caille, Dalrymple, Coo!t,Bay!y et lord Mutgrave, sont parv~ il
obtenir d'excellens résultats, c'est qu'en habiles observateurs, its ont multiplié
les vérifications et pris des moyennes d'un grand nombre d'expenences. Les
boussoles de l'expédition de Lapérouse étoient celles, dont le capitaine Cook
s'étoit servi dans son dernier voyage autour du monde. On doit croire que
ces instrumens étoient dérangés ou d'un usage assez difficile; car les incli-
naisons observées à bord de l'~f/io&ï&e~ diSèrent souvent de 5, 6 et 8
degrés de celles que l'on a obtenues le même jour à bord de la Bou~-fo~. C'est
cette incertitude qui avoit engagé le célèbre Borda à s'occuper, conjointement
avec M. Le Noir, du perfectionnement des boussoles d'inclinaison. Ce géomètre,
auquel t'astronomie~st redevable de l'usage des cerdes répétiteurs, est aussi
cetui qui a facilité aux voyageurs les moyens de faire des observations précises
sur l'inclinaison magnétique. La boussole de Borda a été employée avec succès
dans l'expédition du contre-amiral d'Entrecasteaux, dans celle du capitaine
Baudin, et dans les excursions de M. Nouet en Égypte. Si t'on ajoute les
résultats obtenus dans ces diuérens voyages à ceux que j'ai réunis, pendant
sept ans, dans les deux Amériques, en Espagne, en France, en Italie, en Suisse
et Allemagne, on aura une grande masse d observationscomparables 1 entre
en.
eMes, et dignes d'exercer la sagacité des géomètres.

Les obtervatMMM d'inclinaison &itM par MM. de Rossel, Freycinet, Nouet, Gay-t~Moac et moi
sont d'autant plus comparables qu'elles embrassent une période de temps assez courte. Le Monnier
(JLcMt<«m<t~n~<MBM,p.S7) et lord Mnlgrave ( ~o~<o lhe North 7'o&, p. 68.) admettaient encore
l'invariabilitéde t'indiniusMmagnétique; mais MM. Gitpin etCavendishont prouvé, en t8o6 par des expé-
riences directes, que l'inclibaison de l'aiguille est tKM'miM, cotomela décMnaison, a des variatioMS annueUes,
quoique extrêmement tentes. Les villes de Londreset de Paris sont jusqu'ici les seuls lieux où l'on connoisse
l'étenduede ces variations.L'inclinaisonété, & Londres,en ty~Sjde ya" 3o', et, en t8o5, de 70° ai'. (Philos.
7Vofu.,T.LXVt,P.t, p. %Ot.)NoasnesanrionsadmettreavecM.Cotte(JoMr/t.~f~<T.LXVI,
p. N77 ), qu'avant t'année t8o8 on ne connoissoit pas avec précision l'inclinaison de l'aiguille
aimantée a Paris. ~e t'avo's déterminée avec beaucoup de soin conjointement avec M. de Borda
en t?o8, peu de temps avant mon départ pour l'Espagne. EMeétoit alors de 69° 5t'. M. Gay-Lussac
la trouva, en t8o6, de 60*' ta'. Le octobre )8<o, l'inclinaison étoit à Paris de 68° 60', et, te
10 novembre t8t9, de 68° 4a'. La première de ces deux expériences a été faite par M. Arago et
moi; ta seconde par M. Arago seul. Les observations partielles n'ont pas ditféré de trois à quatre
Quoique notre traversée de taCorogneà Gnmana ait duré trente-sept jours,
je n'ai, pu recueUUr, pendant cet espace de temps, que douze bonnes obser-
vations d'inclinaison magnétique. J'avois ~ait ajouter & ta b~asaote de Borda,
par un artiste habite de Maddd, M. Megnié, une suspension ÏdouMe anneau
mobile, semblable à celle qui est connue sous le nom de suspension deGafdan.par
ce moyen, l'instrument pouvoit être attachepar une corde très-longue a un endroit
de ta poupe qui paroissoit à peu près dépourvu de fer, et ou dé petites masses de
ce métal étoient très-également distribuées. Je m'étois assuré de l'avantagede cette
position en déterminant t'inctinaison, pendant un calme plat, sur le pont et dans
plusieurs parties de l'intérieur du vaisseau. Pendant le cours de ces obser-
vations, j'ai trouvé ta direction du méridien magnétique en chercnant ïe
minimum des ~inclinaisons. Le plus souvent il a iaMu juger de la grandeur
de l'angle, en prenant, parmi un grand nombre d'oscittations très-petites,
la moyenne des éiongâtions vers le Nord et le Sud. j'ai employé constamment
deux aiguilles différentes; leur éentrage à été vérifié en comparant l'indication
des deux pointes de la même aiguille, et en la retournant sur elle-même, ou
en dirigeant successivement la face divisée du timbe à t'est et à t'ouest. Je
crois m'être assuré que les observations faites à la voile peuvent atteindre une
exactitude
moyenne de douze minutes de la division centésimale

minutes. Les potes de t'aiguiUe ont été changés plusieurs fois, et l'on a employé, dans t'osage de la bous-
sole de Borda toutes tes précautions imaginables pour éviterles erreurs. Il résulte de ces observations que,
de t~5 à i8o5, FincUnaison a diminue à Londres de 4~ <8" par an à Paris, la diminution ~anoeUe a
été, depuis 1798 jusqu'en t8ia, de~%4". Urne paroitroit hasardé de remonter à des éponges aMerieuret
où les instrumens étoient trop imparfaits et où les observateursapportoient trop peu de précMom dans
leurs expériences magnétiques.
Les angles donnés par !a boussoled'inclinaison de Borda sont exprimés en gMdea mt décret centestmanx
et en parties décimâtes de ces mêmes grades. LesTéri6cat(ons de l'instrument que l'on peut faire, a
terre, et que j'ai cenetamment employées, avec M., Gay-Lussac, pendant le cours des olMervatioM
puMiées dans les Mémoires de la Société d'ArcHeil,
se réduisent, t." à donner une position honMn-
tale au cercle a~tmutat au moyen d'un niveau à h~Me d'mr et d'un fil d'aplomb a" & tronver la direction
duméridienmagnétiqme.soit'')pardesinetmaisonscorre<pomdantes,SMt&) enajoutant.Mrteeerctea.zi-
mutal, too grades aux points qui correspondent à la position perpendiculairede t'NgaiHe; soit. enfin c)
par le minimumdes inclinaisons 3.° à corriger FeMentricité de t'aignitte, en observantta pointe supérieure
et la pointe intérieure 4." à examiner si l'axe magnétique de t'aiguiHe coïncide avec <on aie physique,
en observant à l'est et à ~onest; 5.<- à corriger le manque d'éqoMibre dans l'aignMte par te chan-
gement des potes. Les différences légères que t'om remarquera entre tea resuttats pabMésdaM cette
Relation et ceux qui ont été insérés, pendant mon voyage, damptm:eur!) journaux (Joant. <&JK~-t.
T. Vï, p. 433 7)fag<M. M~op., an 8, p. 376, .ZacA ~j~~ Ctts~~ T. L, p.-4o9), pMviemnent
de ce que j'avois négligé quelquefois de prendre les moyenne))
entre let otMe~atiOM faites a t'ett
ÏNCUNAMON DE t'AtOMU.E AÏMANTEE ET NtTENStTÉ DES EÛMES MAGNETÏQDES
DANS L'OCEAN ATtANTtQOE Bp&EÀt., Ett t799.

~<MMMW !«"M"B
i.ATtTOBB MNOtTun)! detMciUtûons
mtp'etNne; emommutea ~·HQVEB.
ttBtAttOCM.
boréale.
horéate. occideBttte.
occidentale,
eccMBHNttc. ~~i,}Mtcent~.
t, de temps.

58° 5:' i6o 3:~ 75",y6 242 Bonne observation.


gy" 26' t6° Sa' y5~55 2~2 Ca!mepreoquepar&:<.
54° 5o" 16" 55' y5",00 254 ` Caimepar&tt.
5l* 46~ l?" 4~ 7~~90 ~~7 Dont., smrtoutKnteMtté.
28" 28~ l8' 55~ 69",5S 258 Bonne.
24" 55' 20" 58' 67°,6o 259 Tr&benme.
21" 29' 25" 42' 64°,65 23~ Bonne.
19" 54' 28" 45' 63",5s 356 ~~M.
i4" i5' 48" 3' 56",5o 259 Bonne.
~go ~< S3° l5' 50°,67 234 tncUn.bonne,inten5.dont.
il" t' 64" 5l' 47°.o5 237 Bonne.
10" 46' 6o" 54' 46",95 229 Bonne.
tL u JI

Une partie de ces observations ont servi de base aux théories et aux calculs
deMM.Lowen8rn,Biot et Rraft'; elles donnent la direction de l'équateur ou
des parallèles magnétiques avec d'autant plus de précision que j'ai employé le
même soin à la recherche de l'inclinaison et à celle de la position géographique
du vaisseau. Les observations les plus exactes sur la variation de l'aiguille,
sur son inclinaison et sur l'intensité des forces magnétiques, offriroient peu
d'intérêt, si le voyageur n'étoit pas muni des instrumens nécessaires pour fixer
astronomiquement la latitude et la longitude du lieu où les divers phénomènes
du magnétisme terrestre ont été observés.

et à l'ouest, et de ce que tes tatitndes et les longitudes observée: n'avoient pM toujours été réduites
par l'et<tnM à la, même ép<Mpte à laquelle l'inclinaison magnétique avoit été détermtmée.
~<HMte ~t<<. &&ta&< Strtftfr, t8oa, p. agS. Journ. de Phys. T. LIX, p. 987..M~m. <& f<f«)-'tot<
t8og, T. ï, p. ~4X. ~o~M aussi Mottweitte, Essai pour géméralMer les théonea d'Euler et de Mayer,
dans Gilbert, ~nna&-n, T. XXIX, p. t et aSi. )
Je ne rapporterai pas les essais que j'ai faits pendant la traversée pour
déterminer les courbes de déclinaison magnétique. Les résultats obtenus sur
mer par les meilleures boussoles azimutales, sont si incertains que, d'après le
témoignage des navigateurs les plus expérimentés les erreurs s'élèvent souvent
.à deuxettroisdegrés. En ne les supposant même que d'un seul degré, cette
incertitude, augmentée par le changement lent de la variation sur diSereos
méridiens, jeteroit encore beaucoup de doute sur la véritableposition des courbes
que l'on essaie de tracer sur les cartes magnétiques y

En comparant les observations faites pendant plusieurs traversées, il paroft


que nous avions coupé la courbe sans déclinaison par les t3° de latitude et
les 53 et 55 degrés de longitude occidentale cette courbe se prolonge aujourd'hui
vers le cap Hateras et vers un point situé dans le Canada, par les 33" 2~ de lati-
tude, et les ~o" de longitude. Avant lé premier voyage de ChristopheColomb,
en t~6o,!a variation étoit zéro près deftieCorvo; mais la marche de la courbe
sans déclinaison vers l'ouest, n'est pas la même dans toutes ses parties, et elle est
quelquefois ralentie par l'Influence locale des contincns ~t des ties qui forment
autant de systèmes particuliers de forces magnétiques. C'est ainsi qu'elle a para
arrêtée pendant quelque temps par l'extrémité australe de la Nouvelle-Hollande,
qu'à m Jamaïque à la Barbade, la déclinaison n'a pas éprouvé de
et et
changemens sensibles depuis cent quarante ans 3. °
L'intensité des (brces~maguétiques est un autre phénomène très important dont
très-peu de physiciens se sont occupés jusqu'ici. Déjà Graham et Mdschenbroek
avoient tenté de mesurer les% variations diurnes de cette force par la vitesse
des oscillationshorizontales d'un barreau aimanté mais il parott que c'est Borda
qui, le premier, a eu l'idée de faire osciller une même aiguille d'inclinaison dans

~o~gN <<e Yaneouver, T. ï, p. 4o et 99. De .RoMe~, dans le ~<y~ do <f.En<rec<M<M<Hf, T. ÏÏ,


p. t/a. Coot'< Me. Yoyage, T. t, p. xxiY. w

L'incertitude des observattOM de décMnaisom fûtes ett mer ne provient pas uniquement da fouit*
et du tangage on de l'imperfection des boussoles aumatalet etie est causée en grande partie par les
masses de fer répandues dans le vaisseau et agissant mégàtement, selon la direction dans laquelle on
gouverne. ~<fendrn, dans les ~e&!mRn~.o~J?<!n<tto~M.&M.~t<T.lH,p.tl~etT.V~p.aga.
Zach, Mon. Cor., t8oo, p. ~ag. ~tm~o, dans les Phil. Thmo.~ t8o5, p. tS?.
rAommn, ?<<. of the Royal &)< p. 461. Phil. ThttM., Vot. L, p. 33o et 349. (7%< Ortf<"<
Navigator, i8ot,p. 65o.)
.MtA Trans., Vol. XXXIII, p. 332. ?'4<MM(M, .tEft. of the JR<yo/&c., 46t. /K«. <& JMog!M«,
p.
Exp. CIl etCVY!. °,
dinérens lieux de la terre! Les tentatives de ce savant navigateur n'avoient
donné, comme il me l'aanirmé plusieurs fois,aucun résultat précM, à cause
du frottement qn'éprouvoient les anciennes aigniHessutr tenrs axes. On se con-
tentoit souvent, à cette époque, de faire osciller i'aiguittë des compas de
variation; et, dans la rotation manuscrite du voyage de Borda aux Bananes,
il est dit expressément, en parlant des modihcations de l'intensité des forces
magnétiques mesurées par la vivacité des oscillations, qu'au sommet du Pic on
avoit compté dix oscillations de la Rose en 9~ de temps, tandis qu'à Sainte-
Croix, leur durée avoit été de (~ a Cadix, de ïo3~, et, à Brest', de n3~.
M. Le Monnier, dans son ouvrage sur les lois du magnétisme observe
combien il seroit à désirer qu'on connût le rapport entre les oscillations d'une
même aiguille au Pérou et dans le nord de l'Europe; mais une note ajoutée &
son planisphère magnétique annonce qu'il n'avoit pas une idée bien exacte
des causes qui modifient l'intensité de ta force totale. Selon Cavendish 3,
cette intensité devoit être la même sur toute la surface du globe, et l'opinion
de ce grand physicien pouvoit être imposante pour ceux qui n'avoient point
occasion dinterroger la naturc par tic:* expériences directes.
Dans cet état d'incertitude, l'Académie des sciences engagea vivement M. de
Lapérouse à faire pendant le cours de son voyage autour du monde,
des expériences sur l'intensité des forces magnétiques. « On a reconnu, disent
les commissaires 4 dans l'instruction communiquée aux naturalistes de l'expé-
dition, qu'à Brest, à Cadix, à TénériSe~ à Gorée sur la côte d'Afrique et à
la Guadeloupe, lintensité est sensiblement la même. Il seroit intéressant de
répéter ces expériences, en estimant la force magnétique par la durée des
oscillations d'une bonne aiguille d'inclinaison, à la mer dans les temps très-
calmes. Il seroit surtout important de connoître la force magnétique là où
l'inciinaison est la plus petite. L'imperfection des boussoles embarquées à
bord des bàtimens de M. de Lapérouse n'a sans doute pas permis aux astro-
nomes de cette expédition de se livrer à ce genre de recherches, et les vceux de
l'Académie des sciences n'ont été remplis que dans le voyage de d'Entrecasteaux
et dans celui dont cet ouvrage o6re la relation. Parmi le grand nombre
d'observations précieuses que nous devons à M. de Rossel, il y en a cinq

At<nx&M-<M)<t, .p. ÏXT.


Mém. de 1786, p. 43.
.P<M-M,
JPAt<. TYœM., 1778 p. 390.
~<y<~) de ~~n)M~ T. I, p. t6o.
à faites Bj-est, àTénérine, à l'ile
sur les oscillations de l'aiguille aimantée
Van Diemeo, à Antoine et à Java. De mon coté,j'ai déterj~ine, conjointement
avec MM. Gay-Lussac et
Bonpiand, depuis les 5" de latitude magnétique sud
jusqu'aux 60" de latitude magnétique nord~ l'intensité des forces en cent quatre-
vingts endroits appartenant à deux systèmesd'attractions paKio~Mrs J'ai pu fa~re
osciller, dans l'espace de trois ans, les mêmes aiguilles ou des aiguilles comparées
entre eUes à Lima, sous l'équateur magnétique, à Mexico, à Naples et à
Berlin, ce qui m'a mis en état de fixer le rapport qui existe entre la charge
magnétique du globe dans les dinérens climats. 1} résulte de ce travail
étendu~ qui sera publié séparément, qu'en supposant l'intensité de~ forcea
sous t'équateur== i, cette intensité est, à Naples, t,5;
à Paris, ï,3~8a,
et à Berlin~ ï,3~o3.
Nous voyons dé)a que, depuis les 38 jusqu'aux t3 degrés de latitude terrestre,
dans la partie de l'Océan Atlantique boréal, à laquelle se rapporte le tableau précé-
dent, le nombre des oscillations diminue de a4~ à ~3~, tandis que l'inclinaison
varie de ?5°,~6 à 5o°,6~ de la division centésimale. Jai t&ché de faire ces
observations par un temps 'calme et torsquc le v<uaseau osciUoit dans un plan
perpendiculaire au plan du limbe de la boussole. Les oscillations de l'aiguille
ne son6 presque pas troublées par celles du vaisseau, ces dernières ayant, par
un vent uniforme, toute la régularité des pendules isochrones. En général, la
marche que suivent, par diSérentes latitudes,.la déclinaison et l'inclinaison
magnétiques, paroît plus régulière dans le bassin des mers que sur les con-
tinens où les inégalités de ~a surface et la nature des roches qui constituent les
montagnes environnantes, causent de fréquentes anomalies. Quant à la durée des
oscillations, elle éprouve quelquefois des irrégularités, même au milieu des
mers 3, sans doute parce que la couche d'eau est trop mince pour que l'aiguille
ne soit pas anectée par 1 inégale distribution des forces magnétiques dans l'in-

Ces observationsn'ont été pnbMes qu'en )8o8 (~<ya~ e!e f!En~ee<M<e<KH~ T. H, p. 387, agt
p
3at, 48o et 644); maia elles ont été faites huit an!) ayant mon voyage à l'Orénoque. J'en ai. eu con-
noissance dès l'année < 8o5, immédiatementaprès avoir communiquéà la première classe de t'Institat tes
résultats généraux de mes observations sur le décroissement progressif qu'oNre Hntensité des forces
magnétiquesdepuis Fans jusqu'à t'éqoateur magnétique, ~yet le Mémoi)'e que j'ai puMié à cette époque,
conjointement avec M. tiot, dans le Tome UX du Journal th .PA~~ue.
A cause des inflexions de t'équateur magnétique, on peut considérer les.. points du gtohe qui
diSerent peu en longitude magnétique, comme appartenant à un même système de forces. Les lon-
gitudes sont comptées du point d'intersection entre les équateurs terrestres et mamétiques.
~cye: dans le Journalde route mes observationsfaites par les 34* 3</ et tes i4* j~ de latitude nord.
tériéur du globe. La théorie mathématique des marées rend probable, il est
vrai, qnc la moyenne profondeur de l'Océan est ad moins dé quatre lieues
mais nous savons, par l'ascension aérostatique de M. Gay~Lussac, qtt'en s'élot-
gnant perpendiculairement de la sur&ce de"!a terre, de 36oo
toises, on
n'éprouve encore aucun changement sensible dans l'intensité du magnétisme.
On ne peut par conséqoent pas admettre que la mer soit beaucoup plus pro-
fonde dans les parages où, sous le, même parallèle magnétique, nous voyons
diminuer le nombre des oscillations.
Je n'ai point eu à regretter de n'avoir pas embarqué l'appareil que Saussure
a appelé magnétomètre2, et que j'avois fait construire par M.
Paul, à Genève.
J'incline à croire que les variations d'intensité que l'on a cru observer dans
un même lieu, au moyen de cet instrument compliqué, ont été l'enet d'une
illusion involontaire. M. de Saussure pensoit que. la force magnétique diminuoit
et sur les montagnes et pendant les grandes chaleurs de l'été, tandis que
M. Blondeau 3 croyoit avoir trouvé, pa)Mm instrument de son invention,
qu'une haute températurede l'atmosphère angmentoit l'intensité du magnétisme.
Ni l'une ni l'autre des ces assertions n'ont été confirmées par des expériences
précises. Il n'est pas douteux qu'il existe, dans un même lieu, des variations
périodiques dans l'intensité des forces magnétiques, comme on en a reconnu
déjà dans la déclinaison, et, jusqu'à un certain point, dans l'inclinaison 4 de
l'aiguille aimantée mais ces variations d'Intensité paroissent être infiniment
foibles, puisqu'on n'a pu les apercevoir en employant, au lieu du magné-
tomètre à verge perpendiculaire terminée par une boute de fer, l'appareil
délicat de Coulomb, c'est-à-dire les oscillations d'une petite aiguille renfermée
dans une cage de verre, et suspendue à un fil de soie sans torsion 5. D'ailleurs,
D'après ta petite hautes des marées dans tes mers libres, et le rapport de la densité de la mer
à celle de la terre. (La Place, dans les Jtf~Bt. de /*<trM, 1776, p. 9)8. )
Yoyage dans les ~pM~. 458 et atoS. Je trouve la première idée d'an appareil magnétométrique
dans tes Œuvres posthumes de Hooke. Ce physicien, dotté d'une sagacité extraordinaire, imagina,
eu t68o, de mesurer, au moyen d'nne balance ( <&t<em), la force avec laquelle un aimant attire le fer
à dtBBrentesdistances. 7*<M<A. ~orjht, p. Xtii). ~<ye* aussi tes expériencesde Br<MATaytor, faites en tyt5
3
(fM.?~.n.Vot.XXX!,p.ao4).
).
3 Sur l'appareil que M. Blondeau a désigné avant Saussurepar le nom de magnétomètre, voyez JtMnt.
de f~cof~m~e de la marine de Brett, T. I, p. 'tat.
On n'a pas remarqué des variations d'inclinaisons horaires ou diurnes, mais un changement tent
dans t'espace de plusieurs,années.
A l'hospicedu Mont-Céniset à Rome, nous avons observé, M. Gay-Lussacet moi, les oscillationsd'une
même aiguiU& de jour et de nuit, par des températures atmosphériquestrës-diuerentes le résultat de
cet expériences a été que, s'il existe une variation horaire dans l'intensité des forces magnétiques, elle
.r.
tes deux instrumens ne sont pastout-à-fait fondés sur le même principe; car
t'aimant artificiel ayant uhe quantité de fluide qui est pour ainsi dire indépen-
dante de celui de la terre, on conçoit que le magnétomètre, transporté sous diSerens
climats, ne peut donner les mêmes résultats que l'appareil oscillatoire.

En parlant des observations de physique recueillies pendant la traversée du


Ferrol à Cumanà, je n'ai pas fait mention de mes expériences sur la pureté de
l'air et sur sa charge électrique. Les premières avoient été faites au moyen du
gaz nitreux dans les tubes étroits de l'eudiomètre de Fontana elles sembloient
indiquer une plus -grande portion d'oxygène dans les couches de l'atmosphère
qui reposent sur la mer que dans celles qui entourent les continens. Nous savons
aujourdhui que, s'il existe des variations eudiométriques, elles doivent être
moindres de deux millièmes, et que les résultats que j'ai obtenus en ~~9 ne
méritent pas de confiance à cause des. moyens trop imparfaits qu'on employoit
alors à l'analyse de l'atmosphère.
Quant aux expériences électrométriques, il nous a été impossible, tant
à bord du Pizarro qu'à bord de tous les autres bâtimens sur lesquels nous
avons été embarqués dans la suite, d'apercevoir au large le moindre signe
de tension, en nous servant d'excellens étectromètres de Bennet et de
Saussure. M. Bonpland a souvent pris la peine de porter ces instrumens
armés de longues Mges métalliques et munis d'une mèche d'amadou en-
flammé, sur les mâts et sur les vergues les plus éloignés du corps du bâti-
ment. Ces tentatives ont été répétées dans la mer du Sud, sur une frégate
du roi d'Espagne dont la mâture étoit très-élevée jamais les <eu!ttets
d'or battu, les pailles tes plus sèches, ou les petites boules de moelle de

ne change pas la durée des oscillations d'un douze-centième. A Milan, la même aiguille a fait, 1~
t5 avril i8o5, dans l'intérieur de la ville, près de la cathédrale, soixante osclUatioM en4' 56",8;
et le 7 octobre, dans une prairie hors des murs, en~ 56",4. A Rome, la durée des oscillattons a été
la même à quelques dixaines de secondes près, a la Villa Borghèse, au Monte-Pincio et sur le chemin
de Tivoli. Ce genre d'expériences eat susceptibled'une telle précision que, dans différentes exptnencM
faites à la cime du Mont-Cents, deux cent cinquante oscillations ont duré taao",3, tMq",a; taaq~o
et tas<)' A Rome, nous avons trouvé successivement, en temps d'un chronomètre de Breguet,tt69",a'
n6Q",a 1169~,0 et 1169',5. fa! cru devoir rapporter ici ces résultats pour prouver que les eïpértetMte!)
faites sur l'intensité des forces magnétiques, et consignées dans cet ouvrage, ne sont
pas sujettes, dans
une étendue de terrain peu considérable a ce grand nombre d'innnences locales et horaires qui
affectent les observations sur la déclinaison de l'aiguille aimantée.
Je mettois d'autant plus d'intérêt à ce genre d'expériences que, peu de temps avant
mon départ
d'Allemagne, je m'étois livré à un travail très-étendu sur .l'électricité atmosphérique
au pied des
tureatt qui sont des substances ~ct'rQMOptq~es, moindre
divergence Est<-ce sur&ce de fOcéan qui dépoaiué de~ M
Ïes basses couches 'des~atmosph~voiies et
de puissans i&onducteurs ? Si cette action a tien~
pourquoi nos ëtec~om~~s n'ôo~M~~a~ ~ndt~ dans canots
les mata agissent-ils cOMmé
1
dM

ouverts, tandis que, sur les cotes~'dn~iPét~u'~Néus~avoBtSvu des signes d'tine


&)rte tensioa, lorsqu'un vent humide sou<&oit du large ?'
H est du devoir du physicien de rapporter avec candeur les circonstances
dans lesquelles certaines expériences ne lui ont pas réussi. Comme deux tiers
de notre atmosphère reposent sur te bassin des mers, la météorologie
gagneroit considérablement, si l'on conBoissoit l'état électrique de cette partie
de l'Océan aérien. On pourroit tenter de répéter les expériences que je viens
de décrire avec !es Mtew <~ec<nMMc~.f de MM. Weiss, Gersdorf et
Maréchaux Ces Instrumensmanitestent de l'électricité près d'un mur, à
l'ombre d'un arbre, presque partout où les étectromètre~ de Bennet et de
Saussure n'en indiquent point. Ils sont préférables aux pointes électriques atta-
chées à des cerfs-vo!ans ou à de petits aérostats, parce que t'électricité que
marquent ces dernières est le plus souvent le simple résultat du mouvement
ascensionnet, comme le prouvent iesbeHes expériences de M. Erman~.
Je n'ai pas mieux réussi que la ptupart des voyageurs a déterminer le
degré de salure de la mer qui varie avec les latitudes. Il résulte du petit
nombre d'observations précises que j'ai obtenues au moyen d'un aréomètre
de Dottond, peu dînèrent de celui de N!cho!son, que la pesanteur spéciûque
de l'eau de la mer augtnente assez régutièrement depuis tes côtes de Galice
jusqu'à Ténérine~ tandis qu'elle diminue de nouveau des 22" 5a~ de latitude
aux 18" ~5~. Dans ces parages, par les 2~ et 3o degrés de longitude, une large
bande de l'Océan est moins salée que !e reste, de trois ou quatre mHHèmes.

hautes montagnes du SaMmurg. Les résuttats de ce travalt se trouvent conHsnës dans !e ~b~nM/ de
~'A~'M~Me, tttt 7.
Gt<&er<, ~omr&n, B. XV, p. 98.
~t~ p. '89 et 5o3.
M F<-mMt, frappé des tracer de mercure qu'à avoit rencontrées .dans
tous !es tnunatetde sonde
d'Espagne (ATc&p&M't. J~tam. c/at. J°A' 'n-4°, Vot. Ht, p. 376), m'avottengagé, & mon d~art
dé Madrid, dé suspendre,pendanttatraversêe.nnetame mince d'or ou d'argent,ta poupe du vaisseau
pour voir si eUe onrirott des traces d'amalgame. J'ai suivi le conseU de ce eetë~re ctumiste, quoique
j'eusse peu de confiance dans la réussite de cet essai; maisteEtauqueria lame etoit attachée s'est
rompu
peu de jours après que j'avois mis l'appareil en e~tperienee.
Le muriat~ de soude s'élève jusqu'à 0,o3dep~le parall~le ï8"8'
jusqu'à celui de ta" 3~. entre les ~3o et 5~ degrés de longitude; mais les
attérages de l'Me de ~abago et de taTen~~Ferme s'anaonçe~ des eaux
plus légères. H m'a paru que, dans ta parité de l'Atlantique comprise entre les
côtes du Portugal et de la Terre-Ferme, l'eau est un peu plus salée au sud du
tropique du Cancer, que sous la zone tempérée, et jeserois tenté degéneraitse)'
ce fait, si les expériences recueillies pendant le troisième voyage de Cook ne
prouvoient directement que cette différence n'a pas lieu sur tOua les méri-
diens. Des courans horizontaux qui traversent l'Océan à sa surface, et des
courans obliques qui métent les couches d'eau placées a diuerentes proton~
deurs, modifient ta salure des mers et, en supposant même que la quanUté
absolue des muriates dissous dans rOcéan n'ait point augmentée par l'action des
volcans sous-marins, mais qu'elle soit restée la même depuis des milliers d'années,
il n'en est pas moins probable que la distribution de ce sel sur dinerens points
du globe subisse:, de temps en temps des changemens considérables.
JO~R~AI.E.<T&
TRAVEMËE DES CÔTES D'ESPAGNE A CEU~EJt DE t.'AMÉBtQUE MÉRtDtONAU!)
f
OU DE LA COROGNE A CUMANA. `

(Le< !ongttndea ont Md~temunéet par le g~rde-temps de M. Louis Be~thoad, n." ay. La
température de t'Ocean todiqu~e eat celle de la surface de l'eau. L'obtervaticm cyanométnqmt
a été faite au zétuth; h~hei-montetre exposé & l'air a été ptacé au vent et & l'ombre. Quand
t'observatiom dn passage du MM1 au méndien a manquéon s'est eervt de doubles bautenre,
calentée* d'après la méthode de Doutfet. Les, Mtttdib et les. longitudes sont mdi<méea pour
l'heure de midi).

~FOOUB) L~TtTUM
m
MtftHTCBB a
mr
OBSJmV.I;'1'IONS'
1799.
t79Q. boréale.
boréate. occidentale

Juin. 5 43*' a8* 10° M' Départ do port de la Corogne.


Température de tOcéan, t5'4 centésimaux air, t0°,a
~~ronte~ a hateine, 44** ou 8o",4 de l'hygromètre à cheveu
de Saussure.
<~<tnonM<fe, t3* Nuages épars; N. E. frais; mer assez grosse.
~tcNnaMOA magnétique observée an port du Ferrol, 76°,t
division centigrade.
At<<'n«M des forces magnétiques en Galice, exprimée par a43
oseiUations en to minutes de temps.

6 44' d 13° 7' ?~M<n!~trf de la mer, 16' Temp. de Pair, 9°. Vent grand frais
mer houleuse et très-agitée.

7 4~° 7' i5 a4' An delà du parallèle du cap Finistère, à 4a lieues de distance


de ce cap. Petit frais dn N. N. t:. air, t8°,7.
<attcntf<fe, t4'
8 4t° d 16* gr Nord-est très-foible. y'em~-n~re de l'air, ta°,5.
~~mm~<M, 45<6 Deluc (Sa" Sanssnre ).

9 39*'t(/ t6°t8' 7~m~nt<H)~deIamer,<5'temp.de l'air, t4'5:Temtdenor<i


foible, ciet serein.
Thermomètre exposé ao soleil, t6°j9 force du soleil, a°,4 dans
le paraHële de Péniche.
JHV&EÏ.
JOURNAL DE ROUTE
~JOURNAL DE ROUTE

~MOCEt t.ATtTCM MttonTM


oas$averibas ra~rsiQtras.
OMEBLTA'nbMMnrHQUBS.
'799. boréale. occidentale

Juin.t3 34° 3o' t6° 5~ <~<C!Cot~<re,<6";oonlenrbt~nedehmer,34'Lecietauneteinte


btea-mugettre, presque violette phénomeoe singulier que
j'ai aussi observé quelquefois dans t'Ocêan Paci6que, surtout
dant rh&mmph&reanstr~, et uns qne la mer fût verte.
~ocNn<t«oa magnétiqce, 73'o déterminée par un calme plat.
/<t<en<t<< maptét!q<te a54 oscillations.

t4 3a" 16' t7° 4' Ayettder'!B~eMadere,jt45Ueuet<tedMttanee:gfand&aMde


Ponest mer, treo-groMe.
7!K~pit<t<w de la mer, malgré la hauteur des vagues, i7'7,
temp~de t'atr, t6°,8.
Ac<HMt*o~ magnetiqBa~71*~90, un peu douteuse (ht. 3t" 46',
etloog.t7°4.').
~tMtMt~ magnétique, a3~, très-douteuse.

30° 36' t6'* S4' Beau temps, mer presque entièrement calme.
T~B~Xratmw de l'eau, i8'7 temp. de l'air, 9o",6.
3f<treAa,pn!~reMtf<de fhygromètre et du thermomètre,observée
avec Beimcoup de soin à l'ombre et 4 mètres au-dessus de la
surface de l'Océan
Henrtt.
65°~
Hygtromttrt Thtrmnmtttt
aat'*3o'
aa''3o' af.acatme.
a3''3o'
o''3o' 85-8.
85'3.
85°,7 ao<ounpeudevent.
ao'OK&'nt.

a''3o' 84°,a.
3''3o' 8t'3.
af,4catme.
a3'7M~t.
6"3o' 85°,2. ao-o~m.
y''3o' 86<2.
aa<5~m.
t9°,8M.'m.
~%rce~Mto&t7,3°,t;thermomètre a t'ombre, ao°,6; thermo-
mètre exposé au soleil a3°,7.
EntretecapdeGeeretniotduSaîvage,
a3Ueuesal'estdudernier.
L'estime des pilotes, comparée aux longitudes données par
~'horlogemarine, indique un courant qui porte vers le sud-est.

«
JOURNAL DE ROUTE.

AfoomN LATtTunz MnxHnntM


OD88RVATI61i8
OBSBKVATïÛNSPBTStQOM.
horéatë. occidentale
,M~M~~M~~M~M~~M~M
1799.

Jnin. t6 a9' 18~ t6* 4o~ Beau temp~; vent d'ouest treB'&ittte p)-~) ~es cotée occiaentttM
det'Nedet'Mcerote.
a%m~~B&H< de t'Océan, t9<3~ air, ra<9.
<~ew~Nw, aa~ (e<mte<tr de la mer, 4o°).
).

at'
~4'M'edttMlëiï,3'6;thenmomëtreexpM<Mt<mM,M*,5.
~M«n'Aa pfo~MMtfe de rhygrometre et du thetmometre, t'ait
h étant tres-pemàgtté:

t'
o'
HttxrM. ByeromMM 'n<tnno)atttrt

aaM~ 85",8. t9°,5


de SanMart. MBti~oth.

t8°,7
a3' 84',8~
83°j,t. ~7
M°,o

a~
3~ 83°,4. ao*,o;O~

5'
at°,a

6'
83-3 at°,8
83'5 a9'5
4~ 83°,5.
83°,8. at°,a
at",9
85°,o. t9°,3

17 ag" 21' t6° 6' T&mpsclaif.catmeparintervane; sarTescAtesde!apettte!lë


la Gioaciosa et dans l'archipel d'itotaqui en est an nord.
?'<'n~)~a<MMde l'QcÉan dHM le canal, entre les iles d'Ategranza
etdeSantaCtara, oMamern'aque6amètres de profondeur,
t7'8, par conaéquentde t"} plus froide qu'en pleine mer, sur
le même parallèle. Températurede t'air, ao".

18 aq" 5' '7*' 'o' 3~mpfra<M~ de la mer bien au delà, de la sonde, t8",7 temp.
det'a<r, t8*3:joti frais, temps chtir. Force du toteit, t",6;
thermomètre exposé au ëoteit, *9°,9

tqg a8*'a8' 18° 33~ ArriTeealaradedeSainte-Croi~deTénénae.


~!C&MtMon magnétique, 69 ,M.
~<<en<t<e magnétique, a38 oscittationt.
Séjour à t'tte de TénénBe, depuit le )9 jusqu'au a5 juin.

a5 a6''5i' 19*'t3' T~mp~M<«yedetamer,ao°;an-,t8<8:grandfraM)duN.E.


JOURNAL DEROUTE.

tfOttUM LATtTODB LONMTCBB


OBSBRVAT'ONS PHTStQCM.
1799. boréale. occidentale

Jnin.a6 a5° t5' ao°t/ 2T'<-a<MM!det'Oeéttn,ao°;temp.del'atr,at°,a.


/m'&<MMonmagnétiqtte,67°,6o, observation très-bonne (latit.
a4° sy et longitude 90° ~8').
~<!<e)Mt~, a39 osciUat'OtM comptées en temps de caLne, au
sud-ouest du cap Bojador, a 6a lieues de distante.

9~ aa''Sa' aa"~ Mer,ao'air,?o°,):bnseffa!cheduN.E.aforcedusoledne


parotMantqmedea'Latmit, temp.det'air t~)°,3.

a8 at"96' aS''a3' Air,M",gramd(raisduN.E.:a9ot.ded!st.aunorddueapVert


7nc&M<tMo<t maguéttque, ~t*,6~, observationtrès-bonne ( tatttaje
2t°99'ettoogihtdea5<'4a'). “
O~CtjMc[<tMMa37.

39 ao*' 8' 28° 5t' ?t'mpent<t<~ de la mer, Bi°,a; air, 20°. Depuis les [o'* du
matin jusqu'aux A'' du soir, le thermomètre n'a pas Yar!e
de o'8, pendant que la brise soutHoit très-fort
/nc&n<tMOn magnétique, 6~52. OscHtations, a36 (à 60 lieues
de distance au N. N. O. de )'ite Saint-Antoine) par les tq" 5t'
latitude et les StS" 45' de tongitude.

30 iS" 53' 3o*' 4t' ?~)~<'<t<redetamer,at°,N;temp.derair,xi'a,beautemps.


CT~a~o~ï~rc, aa°,4.
C~fom~re, 44° Deluc (8<°,5 Saussure).).
JuiUett1 t7<-57' 33- Mer, aa<4; air, a4°,8;ventdeN.E.modéré, tempsnuageux:)a
nuit bromûard ëpais qut fit baisserle therm. a th jusqu'à a)'3.

a t~" a6' 35° 8' Mer, aa°,6; air, a3°, temps couvert, quelques grains. l'eu
de variations horaires dans ta marche des instromens météo-
rologiques
Henres. Thermomètre Hygromètre
ceongrade. Je Deiuc.

,1
5.
t'- après midi
a''

'o'
4b
b
9"tesotr.
a~
~9
a3°,o

a2°,a.
aa°,a.
51°
5,°,a
5[°a
°
55°,?
5~
(86° Saussure

~~ë~
temps gris, mais
sans luie vent

(89°Saussure).
).
).
trOQCM
w-

LATtTCBZ M)N<HTPM
JOURNAL DE ROUTE.
u'=
OBSBnYATÏOtfSPBiStQPBS.
1799. boréale. occidentale

Juillet 3 t6°4t' 5a"3i'u ÏtB~~n!<.<te!amer,BB°,5.MMchedeslMtntment:


c ~Ï

ThtrmomtUt. Hygromètre de Dttne.


t7'T.
Heures.

t8~
90'
aa°,7 ~6°,8(88'7SaoMure) couvert.
57'oteverduMteit,phuetre~Ene.

o'
1
a9°,6
a2°,6. 56°,? couvert.
t
aa'8 56-o pt,t:etrht-Bne,gouttBt

t'
IJ1 aa°,8 59",o ép~Mes qui ne touchent

3"
6' af',8.
a''
aa°,7.
93°,t 59°,5
5
6a°,o
6o<a
pas !'hy~rom&tre et ne
modmemt Metqne pas
fêtât bygroMoptque
l'air.
liy swpique tte
de

aa°,y ~7°,o Neu,beHesetoi!eB.


–––––– ~––––– –––––- -–-––––––––––.––––––––;–––––––––––––
Mer,3a'i!;air,aa°.
4 i6°t9' 39*'t<)'
C~anoM~re~a3<5jc!ettres~))tr.Lanait,N.E.trt~6raM,Mt*)
de grains et de ptmie étectriqoe.
le </<ermom~<ff, tout le jour entre aa° et a3'6;rA~omt<
entre 87° et 89'<! division de Saussure.

5 )5'')8' .4a°at' Mer,a3°,o;,nr,aa'a.


Marché des instrnmen~métëorotogiques~
àa3" o' a3<a.
a'°,9t)<erm.centig.

33'4. 6t" 6~hygrom.deDetoc.


°

3' a3-4.
ah

6'-a3-t.
6o'o
6~~
63°,o
12b a3°,3 6~4
Tempscoavertetnuageux.

6 t4<' 5~' 44* 4o'

)5' aa'7.
7~Ntpe~&tfedet'OcÉan,a3'temp. de l'air, aa",8.
!hutM
a2<f! TtMrmomttn-. HygromètredtDduc.
68'5

o'
aa'
18'* 66'5
a3<3.
7' a3',i.
20b 66°,5
66-4 te'°p!.coavert,

1
ta' a3" a3",5
a3'6
6G<o
65<o
M'a
nuageux.

L'hygromètre de Saussure se teroit soatenu entre 9a°,8 et


9~-
JOURNAL D~! ROUTE.

irazTCnE
--–
!6toqom
~éroQose t~TtTOfz Mnt<ta'em!
pMBM~MMtSMXMQPM.
'799' boréale, oeeidenhde

gummummmm
JmUet?
y i4'a</ 4y3y AamiKea de )'0eé<n, cette fAMqmi etI'AménqoentM-~
dmmaîe, vent d'Ett tt~&aM ctd ~tMMmt eoBTert; met
tt~~bdh:.
BrgnxBttr'
i4* aa'6
Htam*. TiMtmetmttn.

a3'7. <hJMec.
64<5(99°,4&mMXM).

o'
ao~ a4-4. 6f
t8''

4'
8' a3-8.
a4°,a.
a3-3
63°,o

58-,5
56°,o(88°,3S*MmM).
).

tt'*aS*
<~<t)t<H~tre à
57<a
€t*
< 3o'e ciel étant tans vapeurs, 99*,5.
~a)M~tMqHe,M°,3o:o<ic~6oM~9;honmeo!Me~
Tatien(IttHmdet4°tyettongitnde48''3').

8 t3°St' 49*43' ~))~M~wdeïOeém,a4'7;<Bmp.derMr,a3'


<a<to~<~e tent~amt, t?' et cependant le ciel tout bleu, mmt
mMget~ <MH ~tpeMOvisibles couleur bleue de t'Océm, 33°.
Joli fr<M, mer Mie, & aoo lieues de distance de !a Guyane
·
a-jinCONe et an N. N. E-

ao'
H<tM*. 'ntttmomttM.
a3*,5
BygroBtttrt de Mat.
58*

4~ 9a°,8.
a3',o. 93",o 57"
S6°,9(88°,3&mMure).
Sg'.o
).

)a~ .<. 9a<3 6a'9(9t'4SaMMnr&).

9 t3* a' 5a°58' Mer agitée, bnteamez&~îche.


~ne&MtMon magnétiqmB, 5o°,67; bonne.
CtcMeHont, a34, )tB peu doete<ues.

M ta" 34~ 54° t9' Jott&<Mtre~pm-.


<y<moa~<~<eatMMnt,t6'co)denrdeta)ner,35'
ïb~nttBM de l'air depuis 17'* et K)~ entre a4<6 et a3'8.
~~o!!t«f<, pendant ce temps, entM 88°,5 et 90° SauMnre.
~jfOQCM I.ATI'rCBE MJtOtTOM
1 1
JOURNAL DE àOUt!?

OBSBRYATtONS PHTHQCBS.
t799.
1799·
boréale.
hot~ale. occidentale

n"
JmUetft
HtM«nn
57° 47'

t8'
Beaatem][H;pet:tTent.

ao'
at' a5<9.
a4*,9.
ThtnnomttM
cttoijjnMtt.
Hyermnttrt
<hMec.

o' a6-6.
60"

a3' a5",o.
a4<8 S~.
M*,3

t* a3'7.
aS~a. 59*
58',5
57*
8" a~°,o 60'
68°
~~<"ne<m de Saussure constamment entre 89** et 90*7; <M
!e méridien de SnnMm, & 80 Meeet de dutfmce des bmtohM
detQt~toqoe et de 4. Bartxde pendent la mut, un pen
deptmeetnnMitrc-en-etetinneite.

tas t0<'46' 60° M' Bon&tnB,Burtoethnn:t;Tëntd'eatame*&rt;meragiMe;c)e!


trëa-bean, maM ~aporenï.
®
X5o'~M<!<Mde t'Ocëam, 95'8; temp. de t'a&, a5°,3.
C~<mo~<tt,t4°,4:
< ~~oBt~M de SmtMnre, tout le jour, de 89°,5 & 90°,
/ncR<MMOttmagnét:qne,46°,95,osc.iBattom,aa9(hotMteotMer-
Tathm). ).

tg n*t6' 69° 45' Nnagenx~grains;~entd'e*ttr&a-<ra!6,.toefh~e-groMe; un pende


pluie, à une tieue de distance dam i'eet-snd-est du cap eepten-
ttionatdeI'MedeTabago.
7~<tr~deMcean,a5°,8,tentp.det'a!)',a5°,t.
~p~~ de~j0° ( de
&~)L°j,8 dirisiQn &tnmmre).

'4 n° if 64*'S~ T!p~M~~< de l'Océan, 35°,6;maM ter tenaa-tond qui t'<ten<


depnh Mte de Tabago à celle de la Grenade, a3',t tentp.
'del'mf.aS'
de
~yoctA~w 9f,5 à SanMtnre, 9a'7.
/'M'RnOM<t)tmagnétiqtte, 47°,5 bonne oh5er~
<MeiHations, a37;
vation. La c~te BMntagtteuse de Paria est reteTée à 4 KenM de
distance; pedtfrait,~en)ptbea)tet<ete!n.
JOUJRNA& DE ROUTE~

tfOQtnM tATtTUM MtUMMMt


OB~BnV~TMNS PKÏSÏQPM.
1799' l~~e.
1799· boréa!e. ocoideutale
occidemtate

.-T
JmItetiS to° 5t' 66* t~ VemtdetMtd-e<tM)te,heatt; mer h'&heUe.
~n~MtttMde !'0c<an sur le bas-fond près dè la Punta Araya
a3<4; mer au large, 25*,2. A 5 ntNtee de diatance du port
de CtMnMm, dam te N. N.E., la surface de t'OoéM m'arait que
99°,a de tetnpéMtmte Mm qu'il fût possible de trouver

t
dm fond & 60 ~Mët de profondeur. Ce froid e<t-il dA au eoo-
MHt qui vient dee btUt-iEMMb de l'île de la Marguerite ? DxM
te* mert tret-étrottet, par exempte dana la Batttqtte, Ja
tempérafre de t'eMt oSM également dea ch<neeme!M
brMquet. Aa port de CmatUM, l'eau de la mer t'e<<
MMttenae eb 1799 et t8oo, constamment entre 25°,2 et
ao'3, la tBtapémtmre de Ta basse nmree étant souvent. dt
<t°,8 plus éteTee que celle de la haute mtaree.
?~MiP<im<«n! de l'air, a8<7.
~]~noBKi<r<<!6''SaaMnre.

t6 to*' a8' 66'* 3o' Arrivée au port de Cumana.

DËTEtUtnrATKM DE LA. HACTBCR DE PMJMNBM POHfTS DE L'tSt-E DE T~NEMFFB.

Je discuterai, dans cette note, les mesures trigonométriques et barométriques exécutées, depuis un
siècle, par di~tens voyageurs, dans t'ite de Ténéritte. Je dounerai en même temps le précis historique
des tentatives qui ont été faites pour détenntBer lahautear du Pic de Teyde et des pointa les plus
remarquables Bttttée sur le chemin qui conduit à la cime de ce volcan. n n'est pas seulement d'un
grand intérêt pour la géologie de conno!tre exactement t'êtévation absolue de cette montagne; cette
connoissance est amsi nécessaire pour le perfectionnementdes cartes des iles Canaries, parce que MM de
Borda et Varetn, lors de l'expédition de ta frégate la ThMMM~ se sont servis des angles de hauteur du
Fie et des azimuts pour fixer les distances relatives ~e TénériBe, de Gomère et de Palma.
Quoique, dès l'année 1648, les opérations de Pascal et de Perrier eussent prouvé que le baromètre
pouvoit être appliqué avec succès aux mesures de hauteur, te n'est pourtant que depuis le commen-
cement du dix-huitième siècle qu'on a des idées précises de l'élévation de quelques montagnes.
tUceioli donnoit encore dm milles italiens, et Nieholls quinze lieues de hauteur au Pic de Teyde
Bdens ne tenta pas même une mesure, quoiqu'il fut parvenu à la cime du volcan en tyi5. Son

~tcA, ~oMfft. <utr;Mt., t8oo, T. p. 396. ~<e~a, ~ottCtfM &Hiortc<H, T. I, p. a3~.


1

parlant de

excède les
me$uM dans

4.
le plus ancien de ceux qui furent publiés, 6xa cependant l'attention des géographes et deo
voyage

physiciens en Europe, etiepremief essai d'une mesure &t&!t par le père Feuillée* entya~. Ce voyageur
trouva, par une opération trigonométrique, h hauteur absolue du Pic, de a9t3 toises. La Caille, en
cette !eaJMcMt~<<{età~d~~súltàt.
Ces doutes ont été reproduits par Bouguerqui, en fixant tes limites des neiges perpétneMes sous d!He-
rentes zones, a discuté, avec sa sagacité ordinaire, l'opération du père FeuiHée. Il conclut que la
hauteur du Pic n'excède pas ao6a toises
Il existe encore une autre mesure de cette montagne, faite pendant le voyage du père FeniUée,
par M. Vergmn Cette mesure, parement baM'métnquB, a été négligée ju<qm'i6!, parce que; catcuMe

delà hauteur totale du volcan, <e réduit à si


d'après la méthode de Cassini, elle avait donné l'excessive hauteur de a6a4 toises 'Cette erreur, qui
l'on applique la formule de La Place et
le coënicient de Ramond aux observations de M. Verguin, et si l'on suppose, ce qui est assex pro-
bable par une latitude aussi méridionale, que la pression de l'air n'a pas changé tres-sensiMement
dans l'espace de trois jours. Le 3t juillet )7~, le baromètre du P. FeuiHée se soutint, au port de
l'Orotava, à a~- 9,7- Le 3 août, on trouva le même instrument, au Monte-Verde, a3.~ o."
et à la cime du p!o, à t~f" 5~. Le père FeuHlée ne parle ni de la température de l'tir aux deux
i
stations, ni d'observationscorrespondantesfaites a la même heure sur la cote. Les voyageurs construisoient
eux-mêmes, à cette époque, leurs baromètressur les lieux, et les instrumens météorologique~ étoient tota-
lement inconnusà l'Orotava et à Santa-Craz. L'observationa la cime du volcan ayant éh5 taite dans due
saison où les vaj'iatioM barométriques s'élèvent rarement, sur les cotes de Téuerine, dans l'espace de troit
jours au delàd'une ou de deux lignes, on peut, en calculant l'élévation du Pie, prendf'e pour base la hauteur
du mercure observée le 3t juillet. En supposant aa" centésimauxpour la températare delà cote, plusie'Mt
heures avant le passage du soleil au méridien et 8<* pour la température de l'air a la cime du volcan,
ce qui est conforme
ylace,
la loi du décroissementdu calorique dans ces régions, je trouve, par la formule
de M. La aoa5 toises ou tao toises de plus que ne donnela mesure trigotmmétnque de M. de Borda.
Quelque changement que l'on fasse à l'estime de la température et de la hauteur barométrique de l'Oro-
tava, on trouvera toujours, et ce fait est bien remarquable, que la détermination barométrique de M. Ver-
gnin est de beaucoup plus exacte que l'opération géométrique du père FeuiUée. L'erreur de la dernière
dans laquelle on a négligé le nivellement du terrain destiné à la mesure de la .base, est presque trois
fois plus grande que l'erreur de la mesure barométrique que nous venons de rapporter.
Les observationsque le père Feuilles fit à la ville de la Laguna, indiquent à peu près la hauteur absoluede
cet endroit si connu par son extrême fraîcheur En prenant les moyenne~harométriques de deux mois,
pendant lesquels les écarts extrêmes ne s'élèvent qu'àou 5 lignes, on trouve, pour la Laguna, a5' j
et pour le port de l'Orotava, 27"' io'Or, en supposant les températures de ces deux stations de
t''
t5et 2o degrés du thermomètre de Réamnur, j'o tiens, par la formule de La Place, pour la ville de

l'r
la Laguna, 3t3 toises. Cette hauteur n'augmente it encore que de 66 toises
ou d'un cinquième, si
l'on prenoit 28~ 3" pour la hauteur moyenne e la colonne de mercure
au port de l'Orotava,

'7. 7Ya<M.,Voi.XXVH,p.S~.
a Journal mamMcrtt du ~e ~eM&'e.
3 ~Mm. A; <<:ad<(m.e, .~6,
p. )i;3. ~'oy< de la Flore, T. t, p.
4 Figure d. la 7'errt, p<J9tù,c, a.~ tM- <M mo~
t. ·
fatmc~pMM, n9e et~6!. Mttgnf h diKMtthm d.
Bouguer et la mesure si connue <!o Borda, on trotTe tacere, dM< p)Mieert
et<vr<ge( dt phytiom. la h«tMN[ dn Pie

en t8t ),
5 Afem.
p.
<-ta~<~ ~09~. ~tBoet 'o~o KMtet.)Mh(roiMtmeeditiomderMOtUemte~(«OtM!d<tMna<n!, par M. Mtn<!ec, pubM<'e
et la Geo/ogte de M. Breiskct, T. t. p. 6, dent h table dt* hauteur* foMmiUe d'erttnrt ty pogftphiqatt.
<c«<<emM, ~33 p. 45.
~oyez plus haut, p. to6.
v.. 1
quotqMl'~Mche que te harctnttre deFenitlée, mat purgé d'air, eto:t constamment tropbas de 6~ < Mgnes,
et même plus'.M. Uchtenstein~ qm< Mtrnt voyage Inté~ssant dans l'mt~riettrde.l'Afrique, évalue
t'é~vaUon absolue de la Laguna de denx a trois m~p~sa~-dessus dm niveau des côtes ·.
Adtnson, dans son ~<y<t~< <M ~n~t~, rapporte «que le Pie de Teyde{ent749)) 'wttronve élevé
de plus de aojo« toises. «M est probaMe que ce resnittt est fondé sur une base mesurée par te loch
et sur une opérationfaite !i ht voile par M. lèpres de MannevNette.comntahdantduTaimeaaMrlequel
Adansonétoitembarqué.
Le docteur Heberden dans la relation de son voyage & ta cime du Pic en tySa, avoit trouvé
t'étévation absolue du volcan, de tMg6 pieds anglois ou a4o8 toises. Ce résultat, ajoute-t-il, a été
con6nné par deux antres opérations que j'ai exécutées MtCoeMiventent il est de n~eme entterement
conforme am résultats de deux t~rat~M tngonometri~etfaitettong-tentps avant par M. John Crosse,
consul anglois à Santa-CnHde TenériBe. Voilà cinq mesures qtt'om dit t'accorder par&ttement entre
eNea et domt !es erreurs. 6'e!crent t pht de 5oo toises, OM au quart de la hautenr totale du Pic.
Le docteur H~berden avott té~maé sept ans a l'Orotava; on doit regretter qu'il ne donne aucun
détaâ ni <ar la nature des insGrtniens- employée par hu et M. Crotte, ni sur la vateur des angles,
la longueur et le nivellement de la base sur laquelle les triantes ont été appuyés. Toutes ces opéra-
tions que non: venoM de rapporter ne méritent pas plus de foi que celles de Don Manuel Hemandez
qui assure avoir trouvé, en t~éa, par une mesure ~éemétriqtM, la hauteur du volcan, de a658 toises,
et par coméqnent de aoo toises plus éhivé que le Mont-Blanc.
C'est à Borda que nous devons la connoissanee de ta TértNtMe etévation du Trolcan de TénériBë;
cet exceBent géom&tre a obtenu un résuttat exact, après avoir passé par une erreur qu'il attribue a
la négngence d'un de ses cocpérateurs H fit trois mesures du Pic, dont deux géométriques et une
barométrique. La première mesure géométrique exécutée en t77t, ne donna que iy4a toises~ et,
tant qu'on la considéra comme exacte. Borda et Pingre trouvèrent, par des opérations faites à la voile,
la hauteur du Pie de tyot toises Heureusement Borda Totales iles Canaries une seconde fois, en ~76,
conjointementavec M. de Chastenet-de-Puységor il 6t alors une opération trigonométriqne plus exacte,
dont il n'a pabtié le résultat que dans le Supplément du Voyage de la Flore On y trouve que la cause
principale de l'erreur commise en t~~t avoit été l'indication d'tm faux angle porté sur le registre
comme étant de 33', tandis qu'il avoit été TéritaMenM'nt reconnu être de 53!. 0
Le résultat de la mesure trigonométrique faite en t~S, est de too5 toises c'est celui qui est anjout~
d'hui le plus générahanent adopté et sur lequel se fonde en grande partie le gisement des îles Canaries
dans les cartes de Varela et de Borda. Je pense rendre service aux physiciens et aux navigateurs,
en consignant ici le détail des opérations faites dans la campagnede la Mgate &t J?ottMo~. et tiré du
manuscrit précieux dont j'ai eu occasion de parler dans le chapitre précédent 9. II seroit à désirer que le

Bttfom. de FemitMe
Ltmmmn, t8 ponc. tig.

s T. [, p. <t,

trouvent
&

~~em. ~«~r. ~temer., t8o6, p. 5'.

Na~a, ~o9o~e~&tf/o«,T.I,p.S8.
?..< T. t, p. 69.
1

p. 3~8.
9 Pag. )t6. Ce Manment do Depnt a
dois ta communication a
&
88..
)* cime da Pic, f~ p«M. S

4 ~M. ~MM., Vot. XLVII, p. 353. Cho~'t Meond ~oya~e mmJ


lu f/M ~ortMn~M, p. a8~, les teenitaM de la
cnafondot.~ffoM', ~t~~e
première
Cochinchine,
Mg. B~nnn. de Betda *a m<me point, iSpoae. o.lig.

tte
~erM, Vol. tt, p. tSt. Dans t'~Mt tur
mesure de Borda e< de celles de Hcbersden et d*Hefoandet M
T. ï,p. 69.
Barom. de

« Toutes ïe~ parties de notre trahit se Mutenoteot reciproqMmentet concoarotent & une même détermination, w jf&tj.,
T. t, p. t<«. Jo«m. <!e
T. t,
t~6, p. 66, et ';?9,p. '*9-
i~
pages M- il est copie tar t'ongiaat, de la main de M. de Ftettriot. J'en
tabienYeiUattcednTice-amiraIM.deRoMty.
Ct)tr<e particulière </e< M;t CfMMftM, d'après

« La
:J~“
journal de M' de Borda Mt pnbMé en entier. Les résultat* qu'il ren&nne M trouvent coMignét sut !it
<'&M~<<<t«<M de la JNe<M*e& << de ~Eep~Me, t7?6. Cette
carte, la meilleure de celles qui omtpai'ujusqu'&cejoar,&itpa<'tiede!teettee<tonpubiiéeauxfrai*dtt
~p~f&'&tAfofHM.
mesure du Pic de T~nérMb, dit M. de Borda, n'étoit pa< potu- n<m* om <tb)etdeWiMtp!ec)t)'!ot!<e!
elle tenoit ementieHejment à notre trava!! tM~Uqae. Il nous étoit n~eeMMre de <Mmne!t)(~ fet~~on
exacte de ce volcan, pour tirer parti des observations de hauteur apparente que nous tïiom faites &
plusieurs pointes des. !!e< de TéméritEa, Gom&re et Canarie, et qui deToieetMrvirt &<e*tongt-
tudes et les latitudes de ces pointes.
Le terrain des environs du port de t'Orotavaétant inégat et entrecoupé de vallons, il ne notm a pas
été possible d'y trouver une base asse~ grande pour déterminer la distance du Pic par un seuï triangle,
et nous en avons employé trois. Nous avons d'abord mesuré, près de ~< Pas, maison de campagne de
M. Cologan, une première base *,<'&, de a~9<S toises; au moyen de ceUe-ci, nous en avons conclu âme
seconde, ac, de 6t4 toises, et ensuite une troisième, cd, de t5a6 toises. Le point e étoit le sommet
du monticule nommé par les indigenesh ~bn<aiîe<<t<M~'«e~oqui dominetaTiHe du port de t'Orotov~.
La station d est l'extrémité oeeidentate d'une gâterie de la maison du cotonet Franqui, à ta
~Mh <&<
OM)<<tf< près du Dragonnier célèbre par sa grossenf et son antiqttité. U paroit
que la base du père
Feuillée avoit été mesurée daM une plage assez étendue, mais non horitontate, tituée au bas de t'hennitage
de la Paz, près de la maison de campagne de M. Cologan. Notre base ab été mesure <neeesMVBa)ent
a
par deux diBërentes troupes hpremière a trouvé t~y pie. 6 po. ta seconde, ~77 pie. 3 pp. 6 tig.
On s'est servi de trois perches de tS pieds chacune, étahmnéM avec toin
eur une règle de 3 pieds.
que M. Varela avoit comparée à Cadit à la toise péruvienne dé M. Godin. Voici les angles pris avec
un quart de cercle de Ramsden, d'un pied de rayon

Triante <t 6 e. Triangle <K- < Triangle e P


&oc==M''53'M" ~ao==85''58<4o" e<<~==94" o'4o"
<t6e = 73° 8~ 55" ~co ~= yn° at/ M" ~o/' = 76° 34' o"
Aca == ao''<'5/ 15" offc == aS" 4o' 8"
iSo" </ 5" i79° Sg' 43"
t
« Nous avons mesuré les trois angles des triangles a &c et ac~. Comme dam le triangle c<P~ on
ne pouvoit employer ce genre de vërincation, j'ai mesuré, avec la plus grande précision, les deux
et

«.
angles c~~ ~e~, au moyen d'un cercle à ré&suon, et je n'ai trouvé que deo différences de
8 à 10 secondes. H résutte de t& que l'angle au Pic c~~ est de go ay ao". On trouve de même
.c=3686r't; .<<=86~3; <=9~F. e~=5Ss,4F.6; et~Mao~a. 1~agteo ae

o.
hauteur donnent les étévatioM suivantes du Pie ou des différens points des stations ks
mtspar rapport
am autres hauteur du Pic, vue du point ~==to4:tS~ nt~me, vue du point e=t~i6?',Q;
celle de d au-dessus du pomt<t=733?' ,6; la même ta -deMns du point c=68~' 6,
an dessnsdupoint<t=4y! ,3. Cela posé,ta hauteurdu Pic au-dessus du point fêtant
et celle du point e
de to4a3P' ,a
si on ajoute la hauteur du point d au-dessus du point 733
n
on aura une première hauteur du Pic au-dessus du point
~a
)g68 )t
Au port de la Gomera, par compte, M. de Borda trouva t'an~h de hauteur du Pic de 4e Un MtèTememt
astronomique placa la montagne Est n}-- nord, En mppoKMt Ion de~tion au-deMm du niveau de, t'Oe~n de
<9o~ H)tKt, on trouve le port de la tiomem éloigné du Pic de o° a~' t9".
Yoye! Sg. ).
De méme,cetMd<t Pic
mon ajoute
au-det~dupomte
eeBed<tpointotu-detNttd)tpo!nta.
on a une féconde hauteur du Pic au-des<nn dw point <t
étant.
Prenant un milieu entre ces deus rétnitab, on tM"Te tH<io pieds;
.<
de rOcéam.La depre~ton de rhoriMn dehjmeretcttem ade Y7'y'~eten~de3~~ aV. ïy*p)fee
et,
em retr*mch~Bt pour
re&wcHeB t~,7, «tm ;m46'g, H cettoAA detef~h~r la bauteur At p<nt<t 'm-deMtt du niveau

ceodepremioB~ le point o ettelert, et~deMm d<t<Mïe<m det'0<!eMt, de 385f'6; et, en ajoutant cette
quantité à la hauteur du Pie M~deMM du point o~ On a, tMM la haaMatr
!a

atx~,
tt~So pieds <m
<tt<C,o

«t~3~'
~7~

tgoS toiMs. »
La troisième mesure faite par M. de Borda ett une t)t€Mre hMOtnét*iq<te, Nous avons encore pumé
les détaMa taivaM dans le JM<BtM<cft<~<t ~~pd~, et ils <e trouvent assez conformes aux r~uttats que
M. CavamUe* a pmbMa en ~799, d'apte* te NMaa<ent de pen Jose Vareta, danw te* ~Mo/« de
ct<!ne«M mt<t<nt&< e M. de Borda partit deSaata~-Cr<M, te ay <eptemhre ny?6. M étoit accompagné
de quarante pertMmet, panBM teequeMeoit y araiit <MMte eCclen de la tsarine françoise et etpa~no~
On t'était muni de boMMiet de décti)ta!t<m et d'incHnaMpm, d'at~ montre dB longitude, de phtt'eoM
thermometreaet de deux e~ceUensharotnëttee qui av<nentété compare*,an port de l'Orotava,au baromètre
de M. Pattey, négociant écMNtM Au retour du Pie, cet inatntmenB forent TértCé: de nouveau; la
différence étoit restée absolument la même, et l'on trouva, par l'interpolation d'un grand nombre
d'obserratmM&ttet dTtettre en henre par M. Pasley, les diMMncet tuivantet:

BABOM~TeBe TttZMtOM~TM
tTATtOtfe. r t'ait, ~Btt~QUm.
m.° t.
1
n. n. 4
<<!M)td<R<exn<Br.

Pino deI Domajito.


KnoJetDmmajih). lit.
Ijc- lis.
a5potl(!# t,9
25 poDe:.
16.
'S*'
Port d'Orotava. 28 2,8 ao"

Port.
Stationnes Rochers.ch~ t~ 9~
a8 a,7
ig 9,8
a8 3,o
8°~
<9°,S

Port.
C~n.e<h~c.8
Fit.84~9~L8'.3<m.t. 98
8
9~
a,88 '9°
U~dun,a~.
j
Port.
Pied du
a8 2,8 t9",5 )

Port.
Sommet~NPie. tO
a8
c~
a~
t8
a8
0,4
3,o ao'o
6~ ),
j
Mt0"~danmhn.
du

M. de Borda avoit troo~, dans an premier catcnï, M~ toiaet en adoptant <Q pieds paor t'cNet de )a trefraetioB.
Il n'a pas indiqua lea hauteora apparentée; on peat !et dedMMo dea va!cntra de J~ et cJP. Eu c, le Pic devnit Mntendfe
na angle de 11" t~' *8*. Il parcÏt y aTûir une tertre orfent dt)M ÏM haatenM de J Mt' c et de e <nr a. An port de fOretaTa,
!t ta ntaMoa de M. C<tt<~<a, la haMtear appareate da Totean fat troavee de 11* 3</ 35". Un relèvement attronomiqne domnt

pfnr te giMment Snd.t9" Ouest, d*ca reMtte nae dittanee de o"<E".


T. t, p. 9~5. J*ij~OM par quel malentendu il est dit, dan* ce même cavrago (T. Ï, p. 85), qne J'avoia Mon~ la
han<ear du Pic de tQ!~ touMt.
M. Padey aMUM n'avotr obeerr~, depaM phmeare anocet, ïe Ammom~ttc do RëaBBMtC, an j~rt de FOMt~Ta, m
aa-dcoaede M~~ntan-deeNOMde t~5.
septembre & 8 heures du soir jusqu'au t." octobre t 10*' 3o~ du matin, te bM'ometM
« Depuis le 3o
n'avoit varié que de ligne. D'après ta fortnute barométrique de Detuc', «a trouve les hauteuM
suivantes, en ajoutant tt toises, pour t'étévation deta maison de M. Pasley M-deMMadu niveau

–'
de la' mer: Pin du Dern~jiM, 5t6 t.; Station de* JtocheM, t5t8 t.;
CtTerae de gtace, t~Sy t.;
PiedduKton,i84/ t.esommet du Pie toag toiset. f
J'ai recalculé ces observationsde M. de Borda, conjointement avec M. Mathieu, d'armes ta ~bnnote de
M. La Place, et, en supposant la température du metotre égale a celle de l'air et etH'M'titant les
stations au niveau detamer/mOns avons obtenu,pomrle P!ndeDontajito,S33t.;pom't'Estaacia<te!os
ïngtesfs, t5M t. pdnr la Caverne de gtace, 17991. pour te pied dn Piton, t8oat.; ponrta ettneft&'fëtean,
1976 toises. Ce dernier résultat s'éloigne deux fois plus de celui de la mesure trigonometrique que la
hauteur obtenue par la formule de Detuc. Nous discuterons plus bas les causes d'erreur qui peuvent
aSecter tes opérations partiejttes. 1
H est assez ordinaire'que, lorsqu'il s'agtt d'appliquer de petites corrections a des htuteuM bare-
tuétriques et tbermo<nétriques, tes voyageurs qui ont observé ensemble ne t'arrêtent pas am mêmes

i. Kno
t.
mer.
Pino del
Niveau de la
I<MÏngteses.
iW.
nombres, considérés comme moyennes des bonnes observations. MM. Tareta et Arguedat <tomnent,
dans leur mémo!re sur la mesure du Pic, les hauteurs baromëtnques suivantes

Dorma}:to. p'°`· ''r


de! Dorna a5 0,86
a8. 4,oo
Th. t7°&.
170 R.
–– tg~
mtOHtdeïamer.
a. Estacion de

Nieva. iq
a8
o,)!t
3,7a
–– a"
in*~

TS!veandetamer.
mer.
delà ––
Sucre.
3. Cueva t8 6,n9 tl*~
98 3,51 .––tS°~

mer.
'4. Pied du Pain de 18 %e~ ~–– 9<'7
98 –– !9°tT
S.CimeduPic~
Niveau de la

Niveau de la
t8
a8
3,5t
o,n
3,~a
––– 8°~
–– tg*
M. Varela trouve, ignore d'après quelle formule, pour la première station, 534 t.; pour la
seconde station, i5Si t.; pour la troisième station, t~8o t.; pour la -quatrième station, lM4 t.; et
pour la cinquième station, t94o toises. Les petites différences que l'on observe entre tes hauteurs'
barométriques indiquéespar tes marins espagnolset cellesqui sont indiquées par M. de Borda, proïtennent
en grande partie de ce que tes unes sont réduites au niveau de la mer, tandis que les antres se rapportent
à l'élévation du sol sur lequel est placée la maison de M. Pasley.
Lors de l'expédition de Lapérouse, en 1785, M. Lamanon porta un Baromètre a la cime du Pic

Borda.
de Téuérine. L'observation de ce physicien calculée par M. de Zacb, donne, par ta formule de
Deluc, i856 t.; d'après cette de Snuckburgh, t8g~ et d'après TeBe de Roy, t88a toises, titésnite
de la même observation barométrique, selonta~brmute de M. La Place, tgoa toises.

Comptrm Ftemiem dta~b ~ya~e <M~<~)< T. U, p. tt. Femttt (OttercattoM <f<tftt~ a voy~e «)!"«!
<t<! world, Vol. t, p. tt) aome au Pic ~o piedt anglois, on tgit Mittt, d'tpttt h mMMe bMOB)<triqM de
~oyM plus haut, p. )~t. ZMA, Jit.M-n. astron. t8oo, p. 3g6. On est .ntprit de voit qn't am époque eh les
physiciens connoiMoient depuis tong-tempt )et tffnfaM ntitM de Deluc, de Shm-Utnrgh et de Trembley sur les formatM
hMomëtri-jmee, t'editeat du Voyage de LaptrotiM (T. H, p.t8 )
ait pu }ettt tmt dt dmtM <m les Kmtmtt obtenu & t'Mde
du baromètre.
M. Mmstone, en mesurantjme base au moyen dujoch, trouva la hauteur da P!c de t<nn toises
M. deChurruca, dans un voyage au détroit de MageUam, essaya égaiementde déterminer l'élévation
du volcan paruneopéMtiongéométrique~tBttavMte'.ït ta trouva, en t~SS, de atoS toises, «en M
fêtiottant devoir atteint une exactitude Mtpérieure 4 touteespérance faiMnnaMe (<oc!a «pentMo facton~ ),
parce que dei hauteurs bammetnquetcatcuMet ptrBeMut~ donneienttetnémenonthre deMi<es. » Menett
de<meturë< deantontagnes comme detMit<<de$etdef longitudes B'P~T*~ Lei observateurs sont
tatMtih de leurs op~ra~oM,torequ'ib les trouvent d'aecotd ~ec quetquMrésultats ancient auxqneb !b
donnent la préfërencetur te* auhret.
M. Cordier tneaura le Pic de Téneri~, le 16 arnttSoS, en employant un exceMent harometre qn'it
avoit fait bouillir'la veine, et par un temps trht-beau et tres-conotant qui se prolongea pendant un
mois. «Les instrument étoient placés au MHt~ dutio, et la hauteur barométrique fut ratnenee a
température de l'air ambiant. Le baromètre correspondant de construction angloise ne diueroit que
de de ligne, ancienne mesure de France, de celui de Mossy, dont se servit le voyageur. Quoique les
personneschargeet des observationsà l'Orotava, MM. Little et Legros, n'emptoyassent pas le vernier, ils
évaluèrentcependant tes hauteurs du mercure, avec beaucoup de précision, a des quarts et des cinquièmes
de lignes 4. » M. Cordier a tenu compte des petits changemens de niveau dans la cuvette, et ce
physicien tres-eMrcé am mesures barométriques, a pris toutes les précautions nécessaires pour
obtenir un résuttat exact. Voici le tableau de ses observations

THEMtOM~rxB
tTATtOtft. BZ'nMt. BtMMBTM.
deRéanmttr.

Port ~'OMtava.
E6tanc!adetottmgtBBe< 4~ tg
28
g,5
4,r,
~9
i5°,o

Portd'Orotava.
1
Sommet dm Pic te matm. 18 4,o <'°,7
a8 5,6 t9*9
T

Le baromètre correspondant étoit placé 7 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer.


M. Cordier a trouvé, par la formule de Detuc~ la station des Rochers de t5ao toises, et la cime dn
volcan de !QO) toises. La formule de M. La Place m'a donné, pour le premier de ces points,
i55o toMes; pour le second, t~ao to!se~
Résumons maintenant les mesures btrométnqnes et géométriques du Pic faites depuis un siècle

~oy~e of Lord ~<tc<K-«Ky,T. t,


p. «!.
~e JMt~e&taM. ~'e<Mf'<-< p. to.
<X)MM de JM<t<M<tM<i~tMt, Vo). )[V,p.~<6 (<'dit- de '77!). ).
4 Cez detaHe et les hauteurs barom~iqaee qui n'avoïeotpoint été Mnp)rim~< dtBt le Journal da ~'&y~t~Me, T. LVtI, p. 60,
m'ont et<? commuci~<!spar M. Cordier. Ce voyageur qui a parconrn )'Egypte, rEepagme et têt Hea Canaries, prépare on
ouvrage in~MMant sur la géologie des volcans ctcioM.
t
Dans le Voyage maammit de M. 0-Oom)), deMt je doia h cmmmmicatmB feM'geBaM dé M. Leode de Segrai,
on trouve la note tai~mte < Les mctUMt barométriques que nom Omet de )a hautear du rotean, colineident,
Il peu de chose prés ( con MrM J~etetn!t<t ) amc ce)tt< de M. Cotdier,
en ayant égard la différence de la totae francoite
et de la toise cattiUfuM. Et~ation tbtotae dea mmnt au pied de Pic, M~S Mite* etpagaoka, Ettaecia de tm IngtMea,
i~3t toi)tea sommet du Pic, 3a8~ toises. Je ae devine pat ce que M. 0-DoneU désigne sont tenoM de toiaea eapagaolea,
car, en supposant qn ait roula parietr de la vara castellana, dont a,33 font une toise francoiM, !e volcan aeroit encore
de heancoop moiM élevé que ae le tronra M. de Borda dam h première de
ses, troit mtNre*.
I. MESURES G~OMËWMQ~.

y4a.
'776.
Lep&re FeaiUee, en

Borda et Pmgre, en tyy


Borda, en

t7M.
<77t.
MannevHgtte, en

Johnstone.
1743.).
Borda et Pmgré, en
Churmcca, en

t7a4.
t.
~794.i.
t~a.
Bongoer.
Le même rësnttat mod!6e par

&
<')j~<'me.

Heherden et CroMe, cinq opérat!ont, en


HemanJezj en

) ~M~M a voile.
a9t3te!te*.
9069
94o8
9658
~49
tgo5

aooo
t~o*
9to?
t~9
II.

17~6.
1785.
t8o3.
MBSCRES BAKOM~TMQCBS C&MBijËES D'A~R~S LA MRMtnMB DB M. LA PLACE

FeuiHée et Vergntn,
Borda, en
tsamanon, en
Cord!er, en
en Boa5 touet.
to/S
tooa
tgao
Cet mesures, faites à différentes époques, varient de 1700 & a6oo toises; et, ce qui est assez
remarquable, les résultats obtenus par des opérations géométriques ditterent beaucoup plus entre
eux que ceux qui sont dus à l'emploi du baromètre. On a en bien tort cependant de citer ce manque
d'harmonie comme une preuve de l'incertitude de toutes tes mesures de montagnes. Des angles dont
la valeur est déterminée par de mauvais graphomètres, des bases qui n'ont point ét~ nivelées ou
dont la longueur a été déterminée par le sillage d'un vaisseau, des triangles qui oBrent
un angle
excessivement aigu au sommet de la montagne, des hauteurs barométriques sans indications de la
température de l'air et du mercure, ne sont pas sans doute des moyens propres a conduite! a des
résultats exacts. Des quatorze opérations trigonométriques et barométriques, indiquées phts haut, il n'y
a que tes quatre suivantes que l'on puisse considérer comme de véritables mesures

baromètre.
Lamanon,td'
Borda par une tnanguMon
Borda, au moyen du
,go5 toises.
tn~B
ttrna
Cordier, id
La moyenne de ces quatre observations, dont tous tes détaUs
nous sont connus, donne toa6 toises
pour la hauteur absoiue~u volcan; mais il faut discuter ici si, en prenant ta moyenne, on 'doit
exclure la mesure barométnqae de M..de Borda, comme péchant
par excès, ou si ton doit préférer
le récitât de la triangulation aux mesures barométriques d'un Pic rasé
presque continuellement de
vents ascendans et descendans.
L'opération trigonométrique, faite en 1776, est ptus compliquée
que ne le sont genëratement celles
par lesquelles on détermine t'~vation d'un se<tt point. Léo voyageurs ont t'baMtnde d'employer,
ou une base dirigée vers la cime d'une momtagnet~tdenx angleade httttem~prit ttttettFémité*de
cette base, ou bien une base qui seroit à peu près perpendiculaire ta
première, deux angtee de
position pris dans un plan oblique et un sent angle de hauteur. Dans les d~Om cas, bm meaare direc-
tement le cote du triangle dont le tommet est appuyé la
c~me de la montagne. La mettre du Pie
exécutée par M. de Borda, est une trianguMem enivrement semblable tcellet par teMmeBet, dans
la prolongation d'une méridienne, on détermine tes élévationt des signaux ou de* montagnes voizines
de ces signaux au-dessus du niveau de la mer. Cm ne Muroitdiseonvenirque la simplicité d'une méthode
et le petit nombre des élémens qui entrent dans le calent de la hauteur, ojErent des avantagea particuliers
mais il seroit injuste de condamner des opérations plus compliquées, si l'on peut se convaincre que
tes observateur* ont apporté le plus grand soin la
résolution de chaque triangle.
M. de Borda n'a pu mesurer immédiatement la grande base de t5a6 toises, aux extrémité' de laquelle il
a déterminétes anglesobliquesde position et let angles que sous-tendla hauteur du volcan. La longueurde
cette base a été trouvée par la résolution de deux petits triangtea et cette déterminationmérited'autant
plus de conBance que tous tes angles ont été mesurés directement qu'on a vériné, par un cercle répétiteur
à réOexion, le résultat obtenu par le petit quart de cercle de Ramsden; que les erreurs de chaque
angle ne paroissent pas avoir excédé 8 à <o secondes, et que la première base, de 2t3 toises, a été
mesurée deux fois, sans qu'on ait trouvé plus de a~ pouces de diCE6rence. Je ne pense pas que cette
partie de la mesure de M. de Borda puisse avoir manqué de précision; et il faut espérer que la même
précision a été atteinte dans les angles de hauteur, dont tro~ sont indispensables pour la mesure du
Pic; savoir: le sommet du Piton vu en d, le signal d vu en a, et la dépression de l'horizon de la
mer. il auroit été a désirer que l'observateureût déterminé ces angles au moyen de son cercle a réNexion,
en employant, comme horizon artificiel, un verre plan ou du mercure car l'erreur de collimation et la
position horizontale de l'instrumentsont bien difficiles à détermmer avec précision dans un quart de cercle
mobile d'un pied de rayon. D'après le manuscrit conservé au ZMp<!< de Marine, cette vérincation
des angles de hauteur n'a pas eu lieu et l'harmonie qu'offrent tes deux hauteurs du Piton au-dessus
des points d et c, prouve plus la constance de l'erreur de collimation que l'exactitudede la valeur
absolue des angles de hauteur. Pour obtenir deux rémitats comparati<s M. de Borda a d6 prendre sept
distances Mnithates savoir celle du sommet vu en e et en < celle du signal d và en a et en
c, celle du
signal c vu en a, et les dépressions de l'horiton de la mer mesurées en d et en a. Tout le monde
sait que ces distance zénithales sont plus difficiles à obtenir avec précision que les angles de position,
surtoutlorsqu'on ne peut faire u<)tge d'un cercle astronomiquerépétiteur Aussi, à circonstanceségales, une
méthode est d'autant plus désavantageuseque les angles de hauteur sont plus multipliés. Pour résoudre
la question de savoir quel est le nombre de toises dont la hauteur du Pic peut avoir été trouvée
trop grande ou trop petite, j'ai supposé une erreur dans la mesure de la base, dans celle de l'angle
sous-tendu par la montagne, et dans les réfractions terrestres. Si le volcan avoit toa5 toises d'élévation
absolue au lieu de too5 toises l'angle de P en c seroit, d'après le calent de M. Oitmanns et le mien,
dett° 36' 34" au lieu de n° ag' t8" que M. de Borda a trouvés; les bases cd et
0260 et i5gt pieds, au lieu de gtSg et t3?~ pieds. Or, comment supposer que l'on se soit trompé
a
seroient de

de 7' i6" en déterminant l'erreur de cotlimatian du quart de cercle, et de t4 pieds dans la double
mesure d'une base de a9Q,5 toises? Nous ignorons à combien M. de Borda a évaluél'effet de la réfraction
terrestre mais il est probable que sa supposition n'a pas diSëré beaucoup de de l'arc La

J'ai fait voir, dans un antre endroit, <tm'm bord <h la mer, on pont, awc bs«MMp d'emctinuh-, iBtBtnrer la dépression
de t'horizon par un mttnimeot r.:a<uon. en'prenant alternativementdes nanteurt du soleil au-dessus de fhetiMa de
la mer tt dans an horizon artificiel, et en réduisant CM hantons au même iMtmt.

J*
distance du volcan est de 9 mit!es,et une variation de réfraction de a~'nechangetoitencore que d'une
toiselahauteurtotaledelamdntagne.
Comme tes bases qui fervent & h mesure de* montagnes ne se trouventgénéralementpas sur les cote*
et au niveau de l'Océan, tes voyageurs sont forces de recoanr, soit
des mesares barométriques,
considérables, d étant étevé de tCg toises, et e de 55 toises an-dessns la
soit à la dépression de l'horizon. Dans t'opéra~on de M. de Borda, ces ttéductioM ont été asse*
tnrfitCe de le mer.
Or, quand il s'agit de comparer des mesures barométriques et géométriques qui ne différent que d'un
petit nombre do toises, il faut examiner quelle est la limite des erreurs que t'en
réfraction
pu
commettre, et
si la mesure pèche par excès ou par défaut. Les variations de la terrestre élèvent ou
dépriment l'horizon de la mer de a on 3 minutes pour nn observateur placé sur la côte à 3 ou 4 toises
de hauteur. A cette distance, tes trajectoires peuvent être plus ou moins concave* ou convexes, selon
la température du sol ou Ide la mer, et selon le décroissement inégal de densité qu'offrent les couches
d'air superposées. A mesure que l'observateur s'élève au-dessus des cotes, les erreurs dues aux variations
irrégutieres de la réfraction diminuent considérablement; et
il est facile de prouver que, lors.de l'opération
de M. de Borda, eUes~n'ont pas excédé 3 à 4 toises Comme la mer, a cette époque, étoit plus froide
que l'air, tes stations c et ff peuvent avoir été trouvées moins hautes qu'elles ne te sont eBectivement et
l'on peut supposer, ce qui est confirmé par les mesures barométriques,que le résultat trigonométrique,
fait en 1776, péche plutôt par défaut que par excès.
En résumant ce que nous venons de constater par l'examen successif des é!émens qui entrent
dans le calcul de l'élévation absolue du Pic de TénérNë, il résulte que la mesure trigonométrique faite par
M. de Borda est probablement exacte à moins de y~ de ta hauteur totale, à moins qu'on ne suppose
des erreurs accidentelles dues à la négligence des observateurs.
Je ne doute pas que ce même degré dé précisionpuisse être atteint, dans des circonstances bien favorables,
par des mesures multipliéesfaites au moyen du baromètre; mais il est difficile de juger, lorsqu'il s'agit de
quelquesobservationsisolées, si des vents obliques, ou une inégale distribution de la chaleur dànsles couches
d'air superposées, n'ont pas altéré tes résultats. Des trois mesures barométriques faites par MM. de
Borda, Lamanon et Cordier, et calculées d'après la formule de La Pt~ce et le eoëfneient de Ramond, il
n'y a que ]a seconde qui ne- donne pas de hauteurs plus grandes que l'opération géométrique. Si l'on
substitue a la formule de La Place celle de Deluc ou de Trembley, les hautem-s, au' lieu de pécher
par
excès, pécheront par défaut. En supposait que le Pic ait ef&ctivementtgo5 toisés d'élévation, la formule de
La Place, appliquée aux observationsbarométriques de MM. Lamanon et Cordier, n'offriroit qu'une
erreur
de 5 toises ou de quantité extrêmement petite, et qui ne seroit~ue la moitié
Oue ou tiers
le cette
tiers de celle>
à laquelle d'excettens observateurs peuvent être exposés

Les oombrcMM observations de dépression fait.,


par M. M.c]min à Montjcny, prt. de tt.rMhme, ne di~n-nt entre
elles que do 7 toises. C'est la limite des écarts tMr~mM, la hauteur totale do la
montagne étant de .«5 toises. Delambre,
J?a~ejH~'y«em€me<rt~He,T.n,p.~S9et'-65~
a Biot, sur les réfractions ~traordiaairm.dnn.k.m. )fe/MtfMt, .809, p. ,5?. et ;So. M. de Borda, comme
la plupart des géomètre. ont mesuré la dépression de t'hor.Mn, n~Cge d'mdi~er la température de t'Ocean
a mai. nous
Mvom qm'a cette époque l'air étoit a t5° et, d'après têt observationsMppertee. plus haut, p. ~ï-~o on pent admettre
que h chaleur de l'eau de la mer a été de M à 3. degrés. Or, de. hauteurs de 3o toiMt calculées, dao. h mppo.itioo d'uM
réfraction moyenne de 0,08 et d'un décroissementuniforme en progression arithmétique, paroitMntdiminneet dt 3 to<Mt
a
lorsqu'il y a quatre degrés de différence entre la température de l'air et de .'em. Ce nombre résulte des
obt~rTMiom.
nombreuses faites par MM. 1Bh<t\t Mathieu a la tour de Dantterqne.
3 M. D'Aubuisson conclut, après avoir di.c<.te
nn grand nombre d'observationscalculées d'âpre, la formulede La Place,
et comparée. de~ mesnres géodésiques précis. .qu'en évitant ie, can~. manifestes d'inexactitude, tels
matin, les changemen. considérablcs de temps 4'un jour a .'antre, les que te. henre. du
orages et 1'innnence des localités, on peut regarder
nn centième comme la limite des erren, U ajoute que, le ptn. souvent, par des compen~on. henreMc.,l'erreqr
qnedeqnetqne.miUicmc. » Journal ile Physique, T. LXXI, p. 35. .er.
pt~Mt~~Ment
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ont ét~ obMf~t &t'<MB!H'e; hs ~otndM' c~MM'M"~ troaTent Mt~téee dam ies joamem de
MM. de Befd~ et/Ve)re!a wyagem~oottt m~me les ee~t qui a)ext porté deux harom~tfe* h
cinte df Ktan' LM de~ ~tt~~M~'Mc~oiMt ~3~~ 4~Hu~M~ et yoa prenoit eoMt~m-
ment !t ~y<e)<~jM)t!re ta' dem~ St t'ott n~conn~iMO't pa~ 'vec aMez de p)~c:Mmt h T~ntaHe
hauteur du Ke~ 0~ d~wott pea'er <:p<e la me<ate !Mt«n~tnq<te (i~te en ~7~6 ne p<MMroit ette en
errew de
T:?t tandM ~'ette t'e~t RfahaMenteat au deH de M t~t
de comparef !et iadieatMna
du har~mette et du theMMH<t&tfede Borda Mree te~ mdicattonode cet to~me* uMtnttnene d<m' te*
TayegetdettfMtMWMetdeM.<~0)rdtef,pc'M' rec<ta~t!fe<p'e,daM ~ntttm~e d" t." octebte ~776,
sor le eetmnetdu PttMh !a pM~ioa de i'Mr a éprouvé
<me jmedtSo~tiea extMtH'dMta!te et trtB-proMem&tMpte.
Vaieite~eittaen~de cette c<NmpM'MMn:

'£U¡vs:.
UEOt.
BAfMMiTM

Borda,
1778;
'–– z8
M- '[H)!M~fMtt)fzDE

i) LamanOn,
t?8a.
~t~MOt. H~tïM~
Cordier,
t8o3. ~T~c'.tt.
't'op~hfen~te
d'II
B~CMtK'BttMT

MmhrtdttmtM
MrrMp.t.B.
Eoslngleses.
teotngleMs..

Sommet
a8
Estanctad~ Bar-fag~
ye.. 1'.

Sommet ~Bar.~So~
1g~,5
t4ara
8~'
af2,9
Po
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.a'S. 28
ll,pm
~,5Bar.t'S4,3
li.~
8°,5
1
Bar. 18 4,3 .9°
li
~°Bar.)~4~n
Po 4,6 i3~
n. t6enn
BM-.tgg.S

U~ero.. ~pn.
6~ L,
4,0 6.,1'
4?,9
a84,6 t5*
li., 'fh im:
B.t9?6t.
1916 t.
C.
~543
B.t555t.
C: 'M3
B.C. C.
t34t.t
t55
L. 165
B.
t55

'65 tf
du Pic.
&'1'.1& 0,2
38a,9 ao* a~3,o a4' 28 5,6 tg~g L. 1902 L. 'aS
C. tgao C. t44
i

On est frappé de voir dans ce tableau que M. de Borda a trouvé ses baromètres, an sommet du Pic,
4 lignes plus bas que d'autres<&servateurs,et sans que les indications du thermomètre servent à expliquer
une si énorme diBïrenee dana la pression atmosphérique On pourroit croire que les instrumens se
soient déranges pendant la nuit que les voyageurs ont passée à la station des Rochers mais on trouve
marqué tout exprès, dans les journaux de MM. de~Hord~ et Varela que, le lendemain du voyage,
la diBerence entre le harometr&de M. Pasley, à l'Orotava, ~t ceux qui avoient servi à la mesure du

t LecoétEcïont, i?97~ ~po<tttonjM<yy~.<h ~fojM~J t., p. 8~. AtMtooJ, ~Mem. taf ~a~fMM~e tarome~~Ma,
P-
Elle ~to!t dé 0,9 ~p ~tgae an bord dm CftttM.
d'nn degtë d<ta' rindieMioa Je h Mmp~nttnre
L'ermNr <
t'tir M changeroit emcort hhmtcm dn Pie <t
pea pr~< <k toi*.
Un grand nombre de bonnesobservations,faite* à la cime du Saint-Bernard,prouveque !eaeieTauon~tOtate< c<[ïcNtee«onttrbp
grandes on trop Petites chaque foi< que te* temp~tMnrea sont am-demM en an-detton< de )t temn~raMMme~MM du deux
*ttt:9M.Je<tm.<!e~~t.,T.LXXt,p.<o.
n. r ;g~-
pics tres-étancés, est sans doute peu propre & essayer l'erreur des coëBcient barométriques. H M
forme des vents obliques sur la pente rapide de la montagne, et il est t supposer que, lors de
la mesure de M. de Borda, un vent ascendant tres-~violent, ou quelque antre cause perturbatrice
inconnue, ont fait baisserle baromètre.LetempsavoitétépluvienxIaveiHe;le démroissementdncalorique
étoitd'uneextréme lenteur: et vraisemMaHemeàt très-peu uniforme, ce qui mot, en défaut toutes les
formules malgré ces circonstance< tans le témoignage d'un observatettrauss;exact que M. de Borde, on
auroit de la peine à croire que la pression barométrique pet changer de quatre lignes tune hauteur
déplus de tgoo toises et aux limites de la zone torride. Il en est d'une mesure barométrique Molée
comme d'une longitude déterminée par le simple transport du temps, L'une et
l'autre, exécutéesayec
de bons instrumens et dans des circonstances favorabtes, sont susceptibles d'une grande exactitude;
mais, lorsque les variations météorologiques ou'le retard du chronomètre ne suivent pas une marche
régulière et uniforme, it est impossible de 6xer la limite des erreurs, comme on le fait avec succès,
en discutant une opération géométrique, ou le résultat d'une série de distances lunaires.
Après avoir exelula mesure barométrique de Borda, il nous en reste deux autres qui inspirentune grande
confiance et dont l'une parolt pêcher un peu par défaut, comme l'autre par excès. Nous awns dé}t&it
résultatmoyen ne dISere
remarquer que leur pas de o,oo3 de la mesure géométrique, et nous ne donnerons
pas la préférence aux observations barométriques de Lamanon sur ceHesde M. Cordier, parce que nota
croyonsavoirprouvé que le résultatmêmede la triangulation ponrroitbien être trop petit de quelque* toises,
et que M. Cordier a fait son voyage par un temps très-beau et très-constant. Ce savant pense que sa mesure
doit donner un résultat très-approchant de la vérité, à cause des précautions nombreuses qu'il a prises pour
éviter les erreurs L'observation a été,fa<te le matin, et Fou sait que, pour cette époque du jour, la formule
de M. La Place donne des hauteurs trop cibles, parce que ooncoëHiciént été déterminé par des
observations faites à midi mais d'un autre c~té, M. Ramond a rendu probable que le coëftieient
adopté polar nos contrées septentrionales doit subir une légère diminution, pour l'approprier a la
mesure des hauteurs comprteeft entre les Tropiques ou rapprochées des limites de la zone torride*.
Il y a donc eu eompensatton, et cette compensation n'a pas été troublée par les effets de la variation
diurne du baromètre. J'insiste sur cette dernière circonstance, parce que des physiciens distingués ont
anirmé récemment que le baromètre doit baisser sur les hautes montagnes, tandts qu'à neuf heures
du matin il atteint son m'Mt'mMm dans les plaines. Cette assertion
local
ne se fonde que sur des aperçus
théoriques et sur un phénomène observé par Saussure dans les Alpes. Les observations que nous
avons faites, M. Bonpland et moi, sur les variations horaires du baromètre, depuis les cotes jusqu'&
aooo toises de hauteur, prouvent au contraire que, sous les Tropiques, le mercure atteint son
m<M!MtMM et son mtntmuyn exactement aux mêmes heures dans les basses régions et
sur les sommet*
des Andes.
La véritable hauteur du Pic de TénérMe dinere probablement peu de la moyenne entre les trois
mesures géométriques et barométriques de Borda, Lamanon et M Cordier/:
igo5 toises,
toca
'990 <

*9<'9
La détermination exacte de ce point est importante pour la physique, & Canee de l'application des

Ramond, p. S et t6.
Atd.,p.
Jmra. Phys., T. LXXt, p..5.
nouveaes&rmu!e<harométnqnet;pourlahav~<ion,~caMe~~ pi1o~.iD8truita
prenitentquelquefoisenptssanta~vned<tPic, pourla géographie,tcause~el'MagequeM~ et
VaMhtontfaitdecesmetnesangtBspour le MievenMnt~t~ca~ de

~a
l'ar~hipetdes Canari.

Nous avons agité plus haut, page t4o, la quesMon de savoir s! ta cote d'AMquepeut être vue dn Mmmet
du volcan de TénérMfe. Geprobtemea<tédiscutéparM.Detamhre,auquel~n~devons un si grand
nombre d'observations précieuses sur les r~~cMons hori~ntetes Voici <bmdemens ~u calcul 3oat
Pic de TénériM, et N la cote
nous n'avons donné que te seul résultat dam te a.* chapitre soit (ng. a) M le fë&action Ett paro!tre te~
qui est éloignée du pied dm Hc de l'afc PTQ=a°49'o' Comms la ,,s
objets piM élevés qu'ih ne le sont réettement, H sera possible de voir dn haut dn Pic le point N,
bien qu'il eoit caché par la coarbure delà terre Ce-point sera ~Bectivement~~ s'il est assez
élevé pour envoyer un rayon qui, en décrivantla courbe N TM & travers les couches de l'atmosphère,
no~sse qme raser la terre en T. Du sommetda Pie on apereevroit donc à la <t'is les points T et Nj et
t'observateur qui serott placé en T verroit tes points N et M dans son'horiieoo N' T M'. Si l'on désigne
par &==t9o4* la hauteur du Me, d'après !a mesure géométrique de Borda, par R==3aytaa5* le
rayon de la terre, et en6n par o le coënicient de la rëfraetton terrestre, dont la valeur. moyenne
a été trouvée de o,o9 par M. Detamhre; on aura la distance PT, a laquelle doit être t'observateur, pour

~~=~
voir le sommet M en M< à l'horizon, pa~r la formule
1
I/IT
qui donne ?T=B*' 7' a6". Telle est la plus grande distance a laquelle on puMse apercevoir le Pic
du* niveau de la mer. Si l'on retranche P T de PTQ = M" 4o' «' il restera Q T == 4t' 34", avec cette

~~r~r
distance on trouvera aisément!a hauteur N Q= A' que doit avoir la cote pour paroitreen N' 41horizon. En
effet, si, dans la formule précédente, on remplace l'arc P T par QT et la hauteurh par A~, on aura

(l-e)"
d'oh l'on tire
A'=~S'QT~
a
la
Ainsi, en vertu de réfraction et malgré la courbure de la terre qui, à la distance P Q, cacheroit
une
montagne de 3~0 on pourroit voir qnelqueioisune montagne située sur la côte et élevée seulement de
aoa* mais, comme les réfraction! sont incertaines et peuvent même être négatives, il seroit imprudent

ville.
d'affirmer quelque chose pour d'aussi grandes distances pour lesquelles on n'a nulle observation.

RÉSULTATS DES B~TBNMBtATteH~ M BAPTBCR.

Orotava,~<t)e.t.
Dortmjito.
~tace.
Lagnna, 36o toises.

Pin du
ïngtB<es.
PteddoPitott.
Eatancia de ios
Cavet~e de
~g
533
t55a
i?3a

SommetdnPicdeTénën~ t8a5
,y~
J'ai rapporté, dan~ le Chapitre te tésnttat de< ohtervatiom de longitude que jai faites &

Sainte-Croix de TénénBe. Voici des données tirées du menMcrit de M. de Borda, et qui servirent
à compléter ce qui a été rapporté dam le Recueil de mes ohetryatioM a~MnMniqaet (T. I, p. xxxvu
Mmemion du troisième
et a8). Don Josef Varela observa, le 3o août t776, au port de la Gomera,

des méridiens, o'*43' ao";te port detaGomera étant eitoé, d'après les opération* de Borda, o'
satellite de Jupiter, à 5h 4o' 8". ToEno vit, a Cadix, cette même émersion, à t6'' a3' 28". Différence
a8"
à l'est de Sainte-Croix, on trouve, pour ce dernierendroit, o'' 3o' 5a". Le ta octobre, Vareta «bterva
l'immersion du troisième satellite à Sainte-Croix, à ta*' 49' tt". ToMo Et la metne observation a
Cadix, à i3'* aa' a6". UiSerence des méridiens, o'* 4o' t5". Le même jour, émersiott dm tronieme
satellite à Sainte-Croix, & tS'' Sa' 5t"; à Cadix, 16'* Sa' S4". Différence, oh 4d y. La moyenMe de
Sainte~Croixà l'ouest
ces trois observationsde sateHites, qui n'avoient point encore été pub.tiéea, donne
de Paris de iS*' 36' 45", en comptant, avec M. de Borda, .pour Cattix, 8° 36' o", confbnnément a
t'observation de t'éctipsc annulaire da soleil de '764, catcutée par Duséjour. Mais la véritaNe longitude
de l'ancien observatoire de Cadix étant, d'âpres un grand nombre d'occultations d'étoiles*, catcn}ée~
par MM. Triesnecker et Ottmaans, de 8° 3?' 37' il en rétatte, pour Sainte-Croix, par tes satellites
i8<- 38' aa". Varela et Tofifio ee servoient de deax télescopes de Dottond de a ?pied< de tongnew,
et avec lesquels ces deux observateurs avoient souvent obtenu à Cadix des résultats d'un accord
parfait. Deux observations des pretnier et second satellites, faites par te père Feuillée, en t7:t4, a ta
Laguna et à la ville d'Orotava, et comparées aut observations de Maraldi, à Paris, donnent, pour
Sainte-Croix de TénériBe, 18° 36' 36" et t8° ao' tt", en supposant, avec Borda, la Laguna de a' 50"
et la ville de l'Orotava de 16' i5'' à l'ouest du mote de Sainte Croix (Mém.det'Acad~ '746, p. ta3).
Ces données, réunies aux résultats ctTonométriques, concourent à prouver ce que j'ai développé
ailleurs, que la longitude du mele n'est probablement m plus petite que tS" 33' ni plus grande que
18" 36' ou t8*' 38'. M. de Borda, en partante dans son Journal, du capitaine Cook, qn'itettt la
satisfact~n de rencontrer aux t!es ~maries, ajoute: a Je ne conçois pas pourquoi ce célèbre navigateur,
qui connoissoit tes déterminations des voyageurs qui l'ont précédé, s'obstine à vouloir que te port de
Sainte-Croix soit par tes t8° 5t' o". ( Z!%tn< ~'<yo~e, T. p. tg ) Avant l'expédition de la Boussole
et de t'jE~~g~, on croyait généralement la latitude d~ Pic de Ténénf!e de !aS° ta' 54". ( A~M~e~ne,
Brit. Mariner' Guide, p. 17.) Cook trouva le Pic, par des opérations &ites!a la voile, ta' t t" plus
austral et 29' 3o" plus occidental que le môle de Sainte-Croix. Les opérations géométriques de Borda
donnent, avec plus de précision, tt' 3?" pour la différence en latitude, et a3' 54" pour ta différence
en longitude. Au môle, le Pic a été relevé astronomiqttement Ouest a8'* 55' Sud. Angle de hauteur
apparent, 4° 37'. Distance, 23740 toises, en supposant l'élévation du volcan de t0o4 toises. Latitude
du Pic, a)i° t6' 53". Longitude, t8<' Sa' 54". Je cousiigne ici tout ce qui a rapport à cette montagne
célèbre pour engager les navigateurs à vérmer des résultats aussi importans pour la géographie nautique.

M. de Borda est le seul voyageur qui ait comparé, d'une manière précise, l'inclinaison magnétique
à Sainte-Croix et à la cime du Pic de TénériSe. Ma ~roevéla dernière de t" i5' plus grande. (~anM<
crit du Dépdt, Cah. 4.) Cette augmentation d'inclinaison observée sur le sommet d'une haute
montagne, est conforme à ce que j'ai remarqué plusieurs fois dans ta chaine des Andes ette dépend
probablement de quelque système d'attractions locales; mais, pour bien juger de ce phénomène, il
faudroit conno!tre exactement t'inctinabon de t'aiguille aimantée au pied dh v<~can, par exemple, a la
ville d'Orotava. Li déclinaison, en t776, étoit à Gomera -de tS" 45', au mole de Sainte-Croix de ~5" 5o',
et au bord du cratère du Pic, ~9° 4o' vers le nord-<mest.
Page lot.
~t<-< ft'o~. astron., T. p. !<S. ~me<<t, MoMnM tfe ~~«ffgantn, t.t, p. ~5.
LIVRE IL

CHAPITRE ÏV

PREMïM SEJOUR A CO!tANA.–a!VES DU'MANZANAHZS.

Nous étions arnvé&au mouithge, vis~t-visde l'embouchure du Rio Manzanares,


le t6)uH!et,à à la pointedu jour; mais nous ne pûmes débarquer que très-tard dans
la matinée, parce que nous tûmes obligés d attendre la visite des officiers du port.
Nos regards étoient nxés sur des groupes de cocotiers qui bordoient la rivière,
et dont les troncs excédant soixante pieds de hauteur dominoient te paysage.
La plaine étoit couverte de touffes de Casses, de Capparis et de ces
Mimoses arborescentes qui, semblables au pin de l'Italie, étendent leurs
branches en forme de parasol. Les feuilles pennées des palmiers se déta-
choient sur l'azur d'un ciel dont la pureté n'étoit troubtée par aucune
trace de vapeurs. Le soleil montoit rapidement vers le zénith. Une lumière
éblouissante étoit répandue dans l'air, sur les coMInes Manchâtres, parsemées
de Cactiers cylindriques, et sur cette mer toujours calme, dont tes rives
sont peuplées d'Alcatras d'Aigrettes et de Flamants. L'éclat du jour,
la vigueur des couleurs végétâtes, la forme des plantes, le plumage varié des
oiseaux, tout annonçoit le grand caractère de la nature dans les régions
équatoriales.
La ville de Cumana, capitale de la Nouvelle -Andalousie, est éloignée
d'un mille de reMt&oncod~ ou de la batterie de la Bocca, près de laquelle
nous avions pris terre, après avoir passé ia barre du Manzanares. Nous
eûmes à parcourir une vaste plaine qui sépare le faubourg des Guay-
queries des côtes de la mer. L'excessive chaleur de l'atmosphère étoit
augmentée par la réverbération du sol en partie dénué de végétation. Le
P~Hcm hnm de Ht t~He du cygne, N<t~~JP<. <~<Bt.j n~gS~. PeUc)<nat&MCM,Litt.(OMf<&
~6. X/~ c. 6 )
El Salado.
thermomètre centigrade, plongé dans lé sable blanc, s'é!ev0lt à 3~7. Dans
de petites mares d'eau salée, H se'~O~eoO~ ~3o<5~ taudis que la chaleur
de l'Océan, à sa surtace, est généralement, dans le port de Cumana de
2~°,2 à 26°,3. La première plante que nous cueillîmes sur le continent de l'Amé-
rique étoit l'Avicenniatomentosa *qu!, dans cet endroit, atteint à peine deux pieds
de hauteur. Cètarbuste,le~esuvium, le Gomphrenajaune et les Cactiers couvrent
les terrains imprégnés de muriate de soude; ils appartiennent à ce petit nombre
de végétaux qui vivent en société, comme la bruyère de l'Europe~ et qui
ne se trouvent dans la zone torride que sur les rivages de ta mer et sur les
plateaux éfevés dès Andes 3. L'Avicennia de Cumana se distingue par une autre
particularité non moins remarquable: elle offre l'exemple d'une plante commune
aux plages d~rAmérique méridionate et aux cotes du Malabar.
Le pilote indien nous fit traverser son ~ardtn qui ressemMoit phttôt à
un taillis qu'à un terrain cultivé. Il nous montra, comme une preuve de
la fertilité de ce climat', un Fromager (Bombaxheptaphyuum) dont
le tronc, dans sa quatrième année, avott Atteint près de deu~ pieds et
demi de diamètre. Nous avons Observé, sur les bords de rOrénôque et
de !a rivière de la Madeleine,
que !ësfBombax, tes Caro!inea, ÏesOchroma
et d'autres arbres de la itamiue des Màtvacées, prennent un accroissement
extrêmement rapide. Je pense cependant qu'il y a eu quelque exagération
dans le rapport de l'Indien sur l'âge du Fromager; car, sous la zone tempérée
dans les terrains humides et chauds de l'Amérique septentrionale, entre
le Mississipi et les Monts.AIeghany, les arbres n'excèdent pas un pied
de diamètre en dix ans, et la végétation n'y est en général que d'un

En rénnissant tm grand nombre d'etpénences faites en t799 et tSoo, <MBat!mtet OaiMtM, je


trouve que, dans le port de Cumana, au nord du Cerro Colorado, la mer est, pemhtitt te ))Mantj4
de o",8 plus chaude que pendant le Net, quelle que soit thettre de la marée. Je consignerai M t'oh<e'-
vation dn ao octobre, qui peut presque servir de type, et qui a été faite sur un point des côtes oit
la mer, à t5o tohesde distance, a dé)&3oou4o&ra~sdeprofbnnenr. A dii~hèarës du matin jusant,
a6°,t; air, près de la côte, a7<4; ttf, près de ta ville, 3o<9j ean dm MMtmnarM, a5'a. Aqaatre

<tuManzanarea,a5°,7..
heures de t'apres-midi mer montante, a5'3; air, prêt dee c&tef, a6',a; air à Cumana, ?8°,t;

Jtf<tn~& prieto.
eau

Sur t'Mtrénte rareté <)e)) jo&~K~ft <ofMe< entre t&< Tropiques (voyez 1*ËM<K «tr C<!o~. <&<
plantes, p. )o), et nn Mémoire de M. Brown, sur tes Protéacees (7~n<. of the Lin. Soc., VoL X,
P. ï, p. a3), dam lequel ce grand botaniste a étendu et connrmé,
par des faits nombreux, mes
idées sur les associations des végétaux d'une même espèce.
A cinq pieds de terre. Ces
mesures sont d'un excellent observateur, M. Micbauï.
einqnièmep!usaecéMrée~'enEuMpe,m~meenl~~
d'Oscid~t~ !e Tatipier '? le Gap~ dwticha qui~~a~ de neuf a quinze
pieds de diamètre. C'est ~n~i BMrta plage de CMmana,dan*~eja~n;dnpi!ote
guayquene, que nou$v~es,j~ur la première Cois, un <?MOM~ chargé de
neurs, et remarqnabte par l'~tt~me longueur et l'éclat argenté de ses BombMMM
étamines,Nous travers&me< le ~ubonrg d<~ ïndtens, dont les mes sont trèa-Men
alignées, et armées de petites maisnns toutes nenves et d'un aspect riant. Ce
quartier de la vitte venoit d'être reconstruit à cause du tremblement de terre
qui avait ruiné Cumana.dix-buit mois avant notre arrivée. A peine eûmes-
nous passé, sur un pont de bois, le Rio Manzanares qui nourrit quelques Bavas
ou CMCodttes de la petite espèce, que nous vfntes partout les traces de cette
borriMe eatastipopbe; de nouveaux ediRces s'~tevoient sur les décombres des
ancien~.
Nous ~urnes conduits, par !e capitaine du ~M<MW, chez le gouverneur de
la province, Don Vicente Emparas, pour lui présenter les passeports qui nous
avoientétë donnes par la prenuère sectëtaiBeae~detat.IInousjeçntavec cette
tranchtse et cette nob!e simpUcit~ qui, de tout temps, ont caractérisé la nation
basque. Avant d'avoir été nommé gouverneur de Portobeto et de Cumana, il s'étoit
distingué comme capitaine de vaisseau dans la marine royale. Son nom rappelle
un des événemens les plus extraordinaitieset les plus aniigeansque présente l'histoire
des guerres maritimes. Lors de la dernière rupture entre l'Espagne et l'Angleterre,
deux (rères de M. dEmparan se battirent, pendant !a nuit, devant le port de
Cadix, l'un prenant le vaisseau de l'antre pour une embarcation ennemie. Le
combat fut si terrible que les deux vaisseaux coûtèrent presque à la fois. Une
très-petite partie des équipages fut sauvée, et les deux frères eurent le malheur
de se reconnoftre peu de temps avant leur mort.
Le gouverneur de Cumana nous témoigna beaucoup de satisfaction de la
résolution que nous avions prise de séjourne!' quelque temps dans la Nouvette-
Andalouste, dont le nom, à cette époque) était presque inconnu en Europe,
et qui, dans ses montagnes et sur le bord de ses nombreuses rivières, renferme un

~a t/MtTM, qu'à ne tout pas confondre avec Ht!ga commom on taga vera, WiM. (Ma'om
htg*, Un. ) t~ étantes M~ttchee, au NOtt~M Mixmte à aomMteréit, sont aM~h~ee 4 mne CMoBe
vcrdàtre, ont m) éclat toye~ et somt tennin~eaj~r âne anthère jeume. La fleur du GtMnM a t&UgnM de
long. La baatBur commune de ce bel arbre, qui prefert: lès endroits humides, est de 8
a to toises.
Je ferai oMer~er, & cette occat.ion, que t'om a distingué dans cet ouvrage, par le caractère <~a&om<
les noms des plantes nonveUe* que no<<s aTon* recueimes M. Bonpland et moi.
grand nombre d'objets dignes de nxerl'attentien des aataranstes. M. d'Emparan
nous montra des cotons teintsavec des plantes indigènes, et dé beaux meubles
pour lesquels onavoit employé exclusivement les bois du pays:il s'intéressoit
vivement à tout ce qui a rapport & la physique, et il demanda, à notre
grand étonnement, si nous pensions que, sous le beau ciel des Tropiques,
l'atmosphère contenoit moins d'azote ( <~otteo) qu'en Espagne, ou sila Mpidité
avec laquelle le fer s'oxide dans ces climats, étoit uniquement l'effet d'une plus
grande humidité indiquée par l'hygromètre à cheveu. Le nom de la patrie~
prononcé sur une côte lointaine, ne sauroit être ptu% agréable à t'oreitle du
voyageur, que ne t'étoient pour nous ces mots d'azote, d'oxide de fer et d'hygro-
mètre. Nous savions que, malgré les oMres de la cour et les recommandations
d'un ministre puissant, notre séjour dans tes colonies espagnoles nous exposeroit
à des désagrémens sans nombre, si nous ne parvenions à inspirer un intérêt
particulier à ceux qui gouvernent ces vastes contrées. M. d'Emparan aimoit
trop les sciences pour trouver étrange que nous vinssions de si loin
recueillir des plantes et déterminer la position~ de queïques !ieux par des
moyens astronomiques. Il ne supposa d'antres motifs à notre voyage que
ceux qui étoient énoncés dans nos passeports, et les marques publiques
de considération qu'il nous a données pendant un long séjour dans son
gouvernement,
ont contribué beaucoup à nous procurer un accueil favorable
dans toutes les parties de l'Amérique méridionale.
Nous fBmes débarquer nos instrumens vers iè soir, et nous euthes la satisfaction
de trouver qu'aucun n'avoit ~é endommagé.Nous louâmes une maison spacieuse,
et, dont l'exposition étoit favorable pour tes observations astronomiques. On
y jouissoit d'une fraîcheur agréabte, lorsque la brise soutnoit, tes fenêtres étoient
dépourvues de vitres, et même de ces carreaux de papier qui, le plus souvent,
remplacent tes vitres à Cumana. Tous tes passagers du Pizarro quittèrent le
bâtiment, mais la convalescence de ceux qui avoient été attaqués de ta nèvre
maligne étoit très-tente. Nous en vîmes qui, après un mois, malgré les
soins qui leur avoient été donnés par leurs compatriotes, étoient encore
dune foiblesse et dune maigreur effrayantes. L'hospitalité, dans tes colonies
espagnoles~ est tetie, qu'un Européen qui arrive, sans recommandatMn et
sans moyens pécuniatres, est presque sur de trouver du secours s'il débarque
dans quelque port pour cause de maladie. Les Catalans, tes Galiciens et
les Biscayens ont les rapports les plus fréquens avec l'Amérique. Ils y
forment comme trois corporations distinctes, qui exercent une influence
remarqaaMe mt M mceaM, l%d~tne ~t !e comm~e~ Le ptûs
pauvre habitant de Siges ou de Vigo est sur d'etre~~ ..dàn~s- la ,~diaisoü
d'un j~a~w Catalan ou GàUctën, soit qu'it arrive an €&Ht,~ Mexique'
ou aux îles Philippines. J'ai vu les exemples les plus toachans
de ces soins
rendus à des inconnus, pendant des années entières, et toujours sans
murmure. On a dit que l'hospitalité étOit facile à exercer dans un climat
heureux, où la nourritureestabondante, où les végétaux indigènes fournissent
des remèdes salutaires, et où le malade, couché dans un hamac, trouve sous
un hangard l'abri dont il~ besoin. Mais doit-on compterpour rien l'embarrascausé
dans une famille pararrivée d'un étranger dont on ne connott pas le caractère;i
est-il permis d oublier ces témoignages dune douceur compatissante, ces soins
affectueux des femmes et cette patience qui ne se lasse point dans une longue et
pénible convalescence? On a remarqué qu'à fexception de quetques viUes très-
poputeuses, Fbospita!ité n'a pas encore diminué d'une manière. sensible depuis le
premier étaMissement des colons espagnolsdans le nouveau monde. Il est aStIgeant
de penser que ce changement aura lieu, lorsque la poputation et t'industriecolo-
niale feront des progrès plus rapides, et que cet état de la société, que l'on est
convenu d'appeler une civilisation avancée, aura banni peu à peu « la vieille
franchise castillane.
Parmi les malades qui débarquèrent à Cumana, se trouvoit un nègre qui
tomba en démence, peu de jours après notre arrivée il mourut dans cet état
déplorable, quoique son maitre, '-v;ieil1ard presque septuagénaire, qui àvoit
quitté l'Europe pour chercher un établissement à San Blas, à rentrée du
golfe de CaHibmie, lui eut prodigué tous les secours imaginables. Je cite ce fait
pour prouver qu'it arrive quelquefois que des hommes nés sons la zone torride,
après avoir habité les climats tempérés, éprouvent les effets pernicieux de la
chaleur des Tropiques. Le nègre étoit nn jeune homme de dix~huit ans, très-
robuste, et né sur la côte de Guinée. Un séjour de, quelques années sur le
plateau des Castilles avoit donné à son organisation ce degré d'excitabilité
qui rend ïes miasmes de Ja zone torride si dangereux pour les habitans des
pays septentrionaux.
LeseLqù'occupe la ville de Cumana.fait partie d'un terrain très-rematqdaNe
sous le point de vue géologique. Comme depuis mon retour en Europe,
d'autres voyageurs m'ont devancé dans la description de quelques parties

Petit marchand.
des
développement aux observations Vers te~etles leurs
dirigées. La chatne des Atp~ eatMtMS d~ Bërga~tw e~
côtes qu'ils ont visitées .après~'mat,d<Ms' ~boraer.~ Mi à donner
~tad~e~
prolonge de t'est à t'onest depuis ta cime de t'?o~~ ;t)squ'a<' p0)~ de
Mochima et au Campanario. La mer, dansdes temps tres-MC~é~pa~H.ir
séparé ce rideau de montagnes delà côte rocheuse d'Araya etde ~a~
Le vaste golte dé Cariaco est du à une irruption pélagique, et l'Ott ne sawoit
douter qu'à cette époque, les eaux ont couvert) sur la rive meridionate,
tout le terrain imprégné de muriate de soude que traverse lé Rio MbaM~ares.
H stnEt de jeter un
coup d'ceit sur te plan topôgraphique de la vitte de
Cumana, pour prouver ce fait aussi indubitable que lancien eéjour de ta met
dans te bassin de Paris~ d'Oxtbrd etde Rome. Une retraite tente dea ea~
a mis à sec cette plage étendue dans taquelte s'élève ungrompe de moatiCHtea
composés de gypse et de brèches calcaires~ de ta formation h ptas
récente.
de Cumana
La vitte est adossée à ce groupe qui étoit )adisJMne jte~ goKe
de Cariaco. La partie de ta ptaine qui est au nord de la vit!e s'appelle ta jP~t<f<f
Pi~sg~ ette s'étend à fest jusqu'à Punta Detgada, oa utte vaUée étroite,
couverte de Gomphrena nava, marque encore le point de l'ancien déversoi)'
des eaux. Cette vaHée, dont l'entrée n'est défendue par ancan ouvrage extériettr)
estle point par lequel la place est te plus exposée à une attaque militaire. L'ennemi
peut passer en toute sûreté entre la jF'oM~e des MMe.f Jît iCo~~gon et l'em-
bouchure du Manzanares,~)ù ta mer, près de t'entrée do gotfe de Cariaco,
a~o, 5o et, plus au sud~est, même jusqu'à 8~ brasses de fond. !t pentdébarqoer
près de jPMnfa ~e~et prendre le fort Saint-Antoine et la ville de Cumana
de reveM, sans craindre te &!U des batteries de l'ouest censtraites à ta ~Pettte
P~< à t'embouchure de ta rivière, et au Cp~io <CbZoiia<~o.
La cetHne de brèches caitcaices, que nous venonsde considérer comme une ne
dans l'ancien gotfe, est couverte d'une ioret épaisse de Giergea et de Raquettes. H y
en a qui ont trente à quarante pieds de haut, et dont le tronc, couvert de Lichens
et divisé en phjsieurs branches, en (orme de candélabre, offre un aspect
extraordinaire. Pces de Maniquarez, à ta Puntà Araya, nous avons mesate nn

f/<7gM C/ttC<
Punta Arenas del BarigOn, au sud du château d'Araya.
A l'OMest de &M Ne~ t<c<.
CMtier dont te tronc avaitplus de quatre pieds aettfponces de~tcon~reace 't Un
Européen~ qni ne conaott que !es Raquettes dp nus aecrew~ ~t MrprM de voie que
,le bois de ce végétal devient extrêmement dur avec l'âge,qu'it~ésiMe pendant
~es siècles & l'air et a l'humidité, et que les Miens de Cumanal'empïoient de
préférence pour des rametetdesseuilj! depoyte< Cumana~CoFO,M!e de~a
Margnerite et Curaçao Mnt !es endroits de l'Amérique méndipnale qui abondent
le plus en végétauxde la familledes Nopatéee. C'est là seulement que des botanistes,
après un long séjour, pourroient composer une monographie des Cactus qui
varient singulièrement, non dans teurs neurs et leurs Ïruits, mais dans la
forme de leur tige articulée, le nombre des arêtes et la disposition des épines.
Nous verrons dans la suite comment ces végétaux, qui caractérisent un climat
chaud et excessivement sec, semblable à celui de lÉgypte et de la Californie,
disparoissent peu à peu à mesure que l'on s'éloigne de la Terre-Ferme pour
pénétrer dans l'intérieur des terres.
Les groupes de Cierges et de Raquettes sont, pour les terrains arides de
l'Amérique équinoxiale, ce que les marécages couverts de Joncacées et
d*Hydrocaridées, sont pour nos pays du Nord. On regarde presque comme
impénétrable un endroit où des Cactiers épineux de la grande espèce sont
réunis par bandes. Ces endroits, appelés ZMna~c~, n'arrétent pas seulement
l'indigène qui marche nu jusqu'à la ceinture; ils se font craindre également
des castes pourvues de vêtemens. Dans nos promenades solitaires, nous
essayâmes de pénétrer quelquefois dans le yun~ qui couronne le sommet
de la colline du château, et dont une partie est traversée par un sentier.
C'est là qu'on pourroit étudier, sur des milliers d'individus, l'organisation
de ce singulier végétal. Quelquefois la nuit nous surprit subitement; car !e
crépuscule est presque nul sous ce climat. Nous nous trouvâmes alors dans
une position d'autant plus pénible que le <~Mca&e~ ou serpent à sonnettes 3,
le Cbna/, et d'autres vipères, manies de crochets venimeux, fréquentent, dans
le temps de la ponte, ces endroits brulans et arides, pour y déposer leurs
œufs sous le sable.
Le château Saint-Antoine est construit à l'extrémité occidentale de la colline.
Il ne se trouve pas sur le point le plus élevé, étant dominé à l'est par un
2'MMnMcAe. On distingue dans leboisduGMtttsIesprotongcmensmednUaircs,comme M.Desfontainfs
t'ad~observé.(7oMrn.T.XLVm,p.)53.)
Crohhtscumanf'nsiset C. t.6f!!ng! deux et.pecesnomreUes.fo~mon 7!<'«o7~'fM'Mrt\ soo/o'~oKf~
T. H, p. 8' J
sommet aon~brtiné. Le T~aa~ est regardé ici et partout dam les colonies espa"
gnoles, comme unmoyen de défense militaire assez tmpor~at~L~élè,de8
de terre, le~ ingénieurs cherchent & multiplier les cierges ép~
ouvrages
et à favoriser leur accroissement, comme ils ont soin de'conserver les croco'
diles dans les fosses des places de guerre. Sous nn climatou la nature organique
est si active et si puissante, 1 homme appelle à sa dépense les reptiles carnassiers
et les plantes armées de formidables épines.
Le château Saint-Antoine, sur lequel, les jours de ietës, on arbore le
pavillon castillan n'est élevé que de trente toises au-dessus du niveau des eaux
dans le golfe dé Cariaco*. Placé sur une colline nue et calcaire. Il domine
la ville et se présente d'une manière très-pittoresque aux vaisseaux qui entrent
dans le port. Il se détache en clair sur le sombre rideau de ces montagnes
qui élèvent leurs sommets jusqu'à !a région des nuages, et dont h teinte
vaporeuse et bteuâtr6 se marie avec l'azur du ciel. En descendant du tort
Saint-Antoine vers le sud'ouest, on trouve, sur la pente du même rocher,
les ruines de t'ancien château Sainte-Marie. C'est un site deHcieuK pour ceux
qui veutent)ouir, vers le coucher du soleil, de la fraîcheur delà brise de
mer et de laspect du golfe; Les hautes cimes de file de la Marguerite se
présentent au-dessus de la côte rocheuse de l'isthme d'Araya; vers t'ouest, les
petites~! ~s Caracas, Picuita et Boracha rappellent les catastrophes qui
ont déchire les côtes de la Terre-Ferme. Ces flots ressemblent à des
ouvrages de ibrtincation; et, par l'eQet du mirage, tandis que le soteu
échauue inégalement les couches inférieures de l'air, l'Océan et le sol, leurs
pointes paroissent soulevées, comme l'extrémité des grands promontoires
de la côte. On se plaft, pendant le jour, à suivre ces phénomènes inconstans~;
on voit, à lentrée de la nuit, se rasseoir sur leurs bases~ ces masses pierreuses
suspendues. en l'air; et l'astre dont la présence vivifie la nature organique,
semble, par rinnexion variable de ses rayons, Imprimerie mouvement à
tarocheiïnmob~e, et rendre ondoyantes les plaines couvertes de sables arides.
Cette ttéva~on est cottchte de, la distance aMnmtale, du m~t auquel on attache !p< fhMjmet
servant de signaux. J'ai trouvÉ, a la grande place de Camatta, cet Mtgte, non corrigé, par !a rëf)~tct!om
de 83° a' tO". D!apr&a le plan topographique de Cumana, teyé.en tjrgg.par M. Fidalgo, h dittattca
horizontale de la Gr<H!<o:<t, au Castillo de San Antonio, est de aantoitea.
Le promontoire dn Macanao.
La véritaMe cause du mirage ou de'la réfaction extraordinaire que subissent les rayons,
lorsque des couches d'air de densités diHërentesse trouvent superposéesles unes aux autres, a déj& été
en~reyM par Hoo~e. Voyez ses PM<A. ~o; p. <
La ville de Cumana, proprement dite occupe le terrain contenu entre !e
château Saint-Antoine et ies petites rivières du Manzanares et de ganta
Catalina. Le Detta, formé par la bifurcation de la première de ces rivières,
offre. un terrain fertile couvert de Mamïaea.d'Achras, de bananiers et
d'autres plantes cultivées dans les jardins ou e&o~~ des Indiens. La ville
n'a aucun édince remarquable, et la fréquence des tremblemens de terre ne
permet pas d'espérer qu'elle puisse en avoir un jour. Il est vrai que les fortes
secousses se répètent dans une même année, moins souvent à Cumana qu'àQutto,
où Fon trouve cependant des églises somptueuseset très-élevées. Mais les
tremblemens de terre de Quito ne sont violens qu'en apparence; et par la nature
particulière du mouvement et du sol aucun édifice ne s'écroule. A Cumana,
comme à Lima et dans plusieurs vi!Ies placées loin de là bouche des volcans
actifs, il arrive que la série des secousses foibles. est interrompue, après une
longue suite d années, par de grandes catastrophes qui ressemblent aux effets de
l'explosion d'une mine. Nous aurons occasion de revenir plusieurs fois sur
ces phénomènes, pour l'explication desquels on~-imaginé tant de vaines
théories, et que l'on a cru classer en les attribuant à des mouvemens per-
pendiculaires et horizontaux, au choc et à t'osciUation*.
Les faubourgs de Cumana sont presque aussi populeux que l'ancienne ville.
On en compte trois, celui des ~e/Tttc-f, sur le chemin de la jP&ïgM cAteo, où
ron trouve quelques beaux Tamariniers celui de Saint-François, vers le sud-est, et
le grand faubourg des Guayqueries ou Guaygueries. Le nom de cette tribu
d'Indiens étoit tout-à-fait inconnu avant la conquête. Les indigènes qui
le portent, appartenoient jadis à la nation des Guaraounos que t'en ne trouve
plus que dans les terrains marécageux compris entre les bras de rOrénoqoc.
Des vieillards m'ont assuré que la langue de leurs ancêtres étoit un dialecte du
Guaraouno; mais que, depuis un siècle, il n'existe, à Cumana et à l'ile de
la Marguerite, aucun indigène de cette tribu qui sache parler
un autre idiome
que le castillan.,
La dénomination de Guayqueries, de même que celle de Pérou et de
.P~'MCMM, doit son origine à un simple malentendu. Les
compagnons de

Cette c!assi6cat~n date dn temps de PoaidonuM. C'est le MtccMMto et t'tnc&not/o de Séneqne


(~Va<. ~M<B~, Lib. VI, c. at ). Mais les anciens avoient déj& remarqué judicieusement
que la nature
des secousses est trop TariaMe pour qu'on p)MMe t'assnjénr à ces lois imaginaires. (Fiatom chez ~P&;<
de placit. pAt/o< Lib. !U, c. t5,
n_I. J · t
jReMtt, T. iX,p. 55t.)
Christophe Colomb, en longeant l'Me de la Marguerite, où réside encore,
sur la, côte septentrionale, la portion la plus noble 'de la nation guayquerie,>
rencontrèrent quelques indigènes qui harponnoient des poissons en lançant
un bâton attaché à une corde et termine par une pointe extrêmement aiguë.
Ils leur demandèrent, en langue dTïayti, quel étoit leur nom, et les Indiens
croyant que la question des étrangers avoit rapport aux harpons formés
du bois dur et pesant du palmier Macana, répondirent GtMH~c, Guaike,
ce qui signifie bâton pointu. Il existe aujourd'hui une différence frappante
entre les Guayqueries, tribu de pêcheurs habiles et civilises, et ces Guaraouns
sauvages de l'Orénoque qui suspendent leurs
habitations aux troncs du
palmier Moriche!
La population de Cumana a été singulièrement exagérée dans ces derniers
temps. En ï8oo, plusieurs colons, peu habitués aux recherches d'économie
politique, faisoient monter cette population à 20,000 âmes, tandis que des
officiers du roi, employés à l'administration du pays, pensoient que la ville,
avec ses faubourgs n'en renfermoit pas 12,000. M. Dépens~ dans son ouvrage
estimable sur la province dé Caracas, donnoit, à Cumana, en ï8o2, près de
a8,ooo habitans; d'autres ont porté ce nombre, pour l'année t8to, à 3o,ooo.
Quand on considère la lenteur avec laquelle la population s'accroît à la
Terre-Ferme, je ne dis pas dans les campagnes, mais dans les villes, on doit
révoquer en doute que Cumana soit déjà d'un tiers plus peuplée que la
Vera-Cruz port principal du vaste royaume de la Nouvelle-Espagne. B est
même facile de prouver qu'en 1802, la population excédoit à peine
dix-huit à dix-neut mille âmes. J'ai eu communication des différens mémoires
que le Gouvernement a fait dresser sur la statistique du pays, à l'époque où
l'on agitoit la question de savoir, si le revenu de la ferme du tabac pouvoit être
remplacé par une contribution personnelle, et je me flatte que mon évaluation
repose sur des fondemens assez solides.
Un dénombrement, fait en 1792; n'a donné, pour la ville de Cumana, ses

Les Guayqneries <& la Ban<&t del Norte se regardent comme dè race plus noble, parce ~atL
se croient moins mélangés avec tes Indiens Chaymas et d'antres castes entrées. On les distingue des
Guayqueriesdu contme« la manière de prononcer l'espagnol qu'ils parlent presque
sans desserrer
les dents. Ils montrent avec orgneHanx Européens la Pointe de la Galère, appelée ainsi à cause du
vaisseau de Cototnb qui éte;t mo~Né dans ces parafes, et le port da ManzanHio,oit ils tarèrentaux Mânes,
pour la première fois, en t4o8, cette amitié.qu'ils n'ont janmie trahie, et ~oi leur a &it donner, en
st~te du palais, le titre de~~M,6detes. (~ye:: plus haut, p. aai.)
faubourgs et les maisonwéparsesànnelieueàlâronde,que to,74o~~ta°s.Don
Manuel Navarete, officier de la trésorerie, assure que l'erreur de ce dénombre-
ment ne sauroit être du tiers ou du quart de la somme totale. En comparant
les registres annuels des baptêmes, on ne remarque qu'un foible accrois-
sement depuis 1790 jusqu'en tSoo.Les femmes, tl est vrai, sont éxtrdmement
fécondes, surtout dans la caste des indtg&nes; mais, quoique la petite vérole
soit encore inconnue dans ce pays, la mortalité des enfans en bas âge est
effrayante à cause de l'abandon extrême dans lequel ils vivent, et de la mauvaise
habitude qu'ils ont de se nourrir de fruits verts et indigestes. Le nombre des
naissances s'élève généralement de 5xo à 600, ce qui indique au plus une
population de ï 6,800 âmes. On peut être sur que tous les enfans indiens sont
baptisés et inscrits sur les registres des paroisses; et, en supposantque la population
eût été, en ï8oo, de 26,000 âmes, il n'yauroit eu, sur quarante-trois individus,
y
qu'une seule naissance; tandis que le rapport des naissances à la population totale
est, en France, comme 28 à 100, et dans les régions équinoxiales du Mexique,
comme ïy à 100.
II est à présumer que peu à peu le faubourg indien s'étendra jusqu'à l'embar-
cadère la plaine qui n'est pas encore couverte de maisons ou de cabanes,
ayant au plus 34o toises de long Les chaleurs sont un peu moins accablantes du
côté de la plage que dans Fancienne ville ott la rëvcrbératioa du sol calcaire et la
proximité de la montagne Saint-Antoine élèvent singulièrement la température
de l'air. Au faubourg des Guayqueries, les vents de mer ont un libre accès; le
sol y est argileux, et, à ce que l'on croit, moins exposé par cette raison
aux secousses violentes des tremblemens de terre, que les maisons adossées
aux rochers et aux collines sur la rive droite du Manzanares.

Voici les résultats que j'ai tirés des registres qui m'ont été communiqués par les curés de Cumana.
Naissances de l'année 1798, dans le district des CbnM ~M-<oM< a37 dans le district des Cttr<M e<Mff<m!M
5 dansle faubourg des Guayqneries, on paroisse d'~&<* Grada, aoc dans le fanboarg des Serritos, ou
paroissedu Socorro, 19. Total, 5aa. On reconno!t, par ces registres desparoisses, la grande fécondité des
mariages indiens; car, quoique le faubourg des Gttayqoenet l'entonne bemtCMtp 4'indiTidm d'antres
castes, on est frappé de la quantité d'enfans nés sur la rive gauche dm Manzanares. Leur nombre s'élève
àdeux cinquièmes du total des naissances.
° J'ai conclu cette distancedesang!esdehauteuretdesatlmutsde p!usiem-~edincesdont)'aToismesuré
avec soin la hauteur. Du coté de la rivière, il yaToit,en iSoo, de la première cabane du faubourg des
G uayqueries à la C<Mo blanca (de Don Pasqual Goda) 538 toises, et de cette première cabane
au pont sur Je
Manzanares, 3)0 toises. Ces données auront un jour quelque intérêt lorsqu'on voudra connoître les
progrès de l'industrie et de la prospérité de Cumana depuis le commencement du dix-neuvième siècle
La plage près de l'embouchure du petit Rio Santa Catalina est bordée de
Palétuviers 1; mais ces J)~Mg~~ n'ont pàs assez d'étendue pour diminuer
la salubrité de t'air de Cumana. Le reste de ta plaine est en partie dénué
de végétation, en partie couvert de touffes de,Sesuvium portulacastrum,
Gomphrcna fia va j G. myrtifolia, Talinum cuspidatum, TI CMM~nc'F!
et Portulaca lanuginosa. Entre ces plantes herbacées s'élèvent çà et là
l'Avicennia ~McMto~a, lé Scoparia dulcis, un Mimosa frutescent à feuilles très-
irritables 2, et surtout des Casses, dont le nombre est si grand dans l'Amérique
mér!diona!e, que nous en avons recueilli, dans no& voyages, plus de trente
espèces nouvelles..
En sortant du faubourg indien et en remontant la rivière vers le sud, on
trouve d abord un bosquet de Cactiers. puis un endroit charmant, ombragé de
Tamariniers, de Bresittets, de Bombax et d'autres végétaux remarquables par
leur feuillage et leurs fleurs. Le sol offre ici de bons pâturages, où des laiteries
construites en roseaux sont séparées les unes des autres par des groupes
d'arbres épars. Le lait reste frais lorsqu'on le conserve, non dahsté iruitdn
Calebassier 3, tissu de fibrès ligneuses très-denses, mais dans des vases d'argile
poreuse de Mahiquarez. Un préjugé, répandu dans les pays du Nord,
m'avoit fait croire que les vaches, sous la zone torride, ne donnoient pas du lait
très-gras mais te séjour à Cumana, et smtuut le voyage par tes vastes plaines
de Calabozo, couvertes de graminées et de sensitives herbacées, m'ont appris
que les ruminans d'Europe s'habituent parfaitement aux climats les plus
brûlans, pourvu qu'ils trouvent de l'eau et une bonne nourriture. Le laitage
est excellent dans les provinces de la Nouvelle Andalousie, de Barcelone
et de Venezuela, et souvent le beurre est meilleur dans les plaines de la zone
équinoxia!e que sur le dos des Andes où -les plantes alpines ne jouissant
dans aucune saison, d'une température assez élevée, sont moins aromatiques
que dans les Pyrénées, les montagnes d'Estramadure et celles de la Grèce.

RhiiMphora mangte. M. B<mp!and a retrouvé, à la ~'&t~<t e/Hco, t'AUlonia incamata, dane le


même lieu o& l'Infortuné LôNing avoit décoovert ce nouveau genre des Nyç)ag!néM.
Les Espagnols désignent par le nom de Dormideras (végétaux donneum), le petit nombre de
Mimoses à feuilles irritables au toucher. Nous avons augmenté ce nombre de trois espèces qui étoient
inconnues am botanistes; savoir, le Mimosa humilis de Cmaua, le M. pellita des savanes de CaMte~o
et le M. dôrmiens des rives de t'Apuré.
3 Crescentia Cujete.
Comme les habitans de Cumana prêtèrent là 6'a~cheurdn vent de mer à
l'aspect de la végétation, ils ne connoissent presque d'autre promenade que celle
de la grande plage. Les Castillans, qu'on accuse en général de ne pas aimer tes
arbres et le chant des oiseaux, onttransporté leurs habitudes et leurs préjugés
dans les colonies. A la Terre-Ferme, au Mexique et au Pérou, il est rare de voir
un indigène ptanter un arbre, simplement dans le but de se procurer de l'ombre;
et si l'on excepteles environs des grandes capitales, les allées sont presque inconnues
dans ces pays. La plaine aride de Cumana présente, après de fortes ondées, un
phénomène extraordinaire. La terre, humectée et réchauilee par les rayons du
soleil, répand cette odeur~de musc qui, sous la zone torride, est commune a des
animaux de classes très~dinérentes, au Jaguar, aux petites espèces de chats-
tigres, au Cabiaï au vautour Galinazo 2, au crocodile, aux vipères et aux
serpens à sonnettes. Les émanations gazeuses, qui sont les véhicules de cet
anwM'~ ne semblent se dégager qu'à mesure que le terreau, renfermant les
dépouillesd'uneinnombrablequantité de reptiles, de vers et d'Insectes, commence
à s'imprégner d'eau. J'ai vu des enfans indiens de la tribu des Chaymas,
retirer de la terre et manger, des millepiés ou Scolopendres 3 de t8 pouces de
longueur sur lignes de large. Partout où l'on remue le sol, on est frappé
de la masse de substances organiques qui, tour à tour, se développent, se
transforment ou se décomposent. La nature, dans ces climats, paroit plus
active, plus féconde, on diroit plus prodigue- de la vie.
Dans la plage et près des laiteries dont nous venons de parler, on jouit, surtout an
lever du soleil, d'une très-belle vue sur un groupe élevé de montagnes calcaires.
Cavia capybara, Un. Chiguire.
Vuttur aura, Lin. Zamuro ou Galinato, !e coMto~r <&< B/~M~, de BuCbm. Je ne puis me résoudre
à adopter des noms qui désignent, comme appartenant à un seul pays des animaux propres à
tout un continent.
Les scolopendres sont très-communs derrière le château Saint-Antoine, au sommet de la
colline,
4 Si le Brigantin ( Cerro dei Bergantin ) est effectivement éloigne de Cumana de a4 mINes ou de
aaSoo toises, comme l'indique la carte de M. Fidalge, puMiée par le Dépôt hydrographique de
Madrid, en t8o5 des angles de hauteur que j'ai pris à la Plaga grande donnent à cette mon-
tagne ta55 toises de hauteur. Mais cette même carte, mbins exacte pour tes positions éloignées des
cotes que pour ces cotes mêmes, assigne à la ville de Cumanacoaune latitude de to" A', tandis qu'elle
est, d'après mes observations directes, de 10** 16' tt" (05<. <M<nM~, T. t, p. 96). Si cette position
trop méridionalein~ue sur celle du Brigantin, il faut admettre que cette cime est beaucoup moins éte~e.
Elle se présente & la Plaga grande sous un angle de hauteur corrigé par la réfraction et la courbure de la
terre, de 3** 6' ta". D'autres angles, appuyéssur une base de tf)6 toises qui a été mesurée dans un terrain où
les eaux ont séjourné long-temps, me feroient croire que la hauteur et la distance du Brigantin ne
Comme ce groupe ne sous-tend à la- maMon que nous habitions quun
angle: de trois degrés, il m'a servi pendant long-temps pour comparer les
variations de la réfraction terrestre aux phénomènes météorologiques, ~es
orages se forment au centre de cette Cordillère et l'on voit de toin, de
gros nuages se résoudre en pluies abondantes, tandis que pendantsept ots huit
mois il ne tombe pas une goutte d'eau à Cumana. Le Brigantin, qui est
la cime la plus élevée de cette chaîne, se présente d'une manière très-
pittoresque derrière le Brito et le'Tataraqual. Il a pris son nom de la forme
d'une vallée très-profonde qui se trouve à sa pente" septentrionale, et qui
ressemble à l'intérieur d'un vaisseau. Le sommet de cette montagne est presque
dénué de végétation et aplati comme celui de Mowna-Roa, dans tes Mes
Sandwich c'est un mur taillé à pic, ou, pour me servir d'un terme plus
expressif des navigateurs espagnols, une <aMp, mesa. Cette physionomie
particulière et la disposition symétrique de quelques cônes qui entourent te
Brigantin, m'avoient fait croire d'abord que ce groupe, qui est entièrement
calcaire~ renfermoit des roches de formation basaltique ou trappéenne.
Le gouverneur de Cumana avoit envoyé, en ï 707, des hommes courageux pour
explorer cette contrée entièrement déserte, et pour ouvrir un chemin direct
à la Nouvelle-Barcelone, par la cime de' la mesa. On supposait, avec raison,
que ce~chemin seroit plus court et moins dangereux pour la santé des voyageurs
que celui que suivent tes courriers de Caracas, le long des côtes; mais toutes les
tentatives, pour franchir la chaîne des montagnes du Brigantin, furent inutiles.
Dans cette. partie de l'Amérique, comme dans la Nouvelle-Hollande à
l'ouest de la ville de Sidney, ce n'est pas autant la hauteur de la Cordillère
que la forme des rochers, qui oppose des obstacles difficiles surmonter.
La vallée longitudinate, formée par les hautes montagnes de l'intérieur et
la pente méridionale du Cerro de San ~nfonjK), est traversée par le Rio Manza-
nares. C'est de tous les environs de Cumana, la seule partie entièrementboisée;
on la nomme la plaine des CAa/M~ à cause des nombreuses plantations

sont pas beaucoup au-dessus de 800 toises, et de t4 16 miUM: tna!< on ne peut avoir de la.
confiance dans une base si courte et dam UM opéfattOn dont te but n'etott pas la mesure du Brigantin.
Les montagnesBleues d~ la Nouvelle-Hollande, oeHBtdeCarmarthemetdeLaMdown, ne sont plus
visibles, par un temps ctair, au delà de 50 millet de distance. /*<!wt, ~iy~eotHt?T<n~<c<M<ra&<,p. 389.
Eu supposant l'angte de hauteur d'un demi-degré, la hauteur absolue de ces montagnes eer<ntetn!ron
de 62o toises.
CAacm, par corruption C/Mnt, hutte ou eahane environnée d'un jardin. Le mot y«<-e
a !a
même signiËcatiop.
que les habitans ont commencées depuis quelques années le long de ? rivière.
Un sentier étroit conduit de !acoMine de San Franeisco~ l~~fdrr~t;
à l'hospice des Capucins, maison de campagne M&s-agréabïe, qaejtes teHgienx
aragonais ont bâtie pour y recueillir de vieux missionnaires ïnStanett qui ne
peuvent plus remplir leur ministère. A mesure que fon avance vers t'est,
les arbres de la forêt deviennent plus vigouMux, et l'on rencontre quelques
singes qui sont d'aiHeum très~ares aux environs de Cnmana. Au pied des
Capparis, des Bauhinia et du Zygophyllum fleurs d'un jaune d'or, s'étend
un tapis de Bromelia~, voisin du B.karatas, qui, par son odeur et la
fraîcheur de son feuillage, attire les serpens à sonnettes.
La rivière du Manzanares a des eaux très-limpides, et ne MMemMe
heureusement en rien au Manzanares de Madrid, qu'un pont somptueux
fait paro!tre encore plus étroit. Eue prend sa source, comme toutes les
rivières de la Nouvelle-Andalousie, dans une partie des savanes (I~ano~),
qui est connue sous le nom de plateaux de Jonoro, d'Amana et de
Guanipa, et qui reçoit, près du viMage indien de San ~emando, les eanxdu
Rio Juanillo. On a proposé plusieurs ibis, au gouvernement, mais toujours
sans succès, de faire constrture un batardeau au premier Ipure pour
établir des irrigations artificielles dans la plaine des C~~M~ parce que, malgré
son apparente stérilité, la terre y est extrêmement productive partout
où thumidité se joint à la chaleur du climat. Les cultivateurs, qui sont
généralement peu aisés à Cumana, devoient restituer peu à peu les avances
iaites pour la construction de l'écluse. En attendant l'exécution de ce projet,
on a établi des roues à godets, des pompes mues par des mulets et
d'autres machines hydrauliques dune construction assez imparfaite.
Les bords du Manzanares sont très-agréables, et ombragés de Mimoses,
d'Erythrina, de Ceiba et autres arbres d'une taille gigantesque. Une rivière,
dont la température, dans le temps des crues, descend jusqu'à 22",
quand l'air est à 3o et 33 degrés, est un bienfait inappréciable dans un
pays où les chaleurs sont excessives pendant toute l'année, et où l'on
désire de se baigner plusieurs fois par jour. Les enfans passent pour ainsi

Le Machi commun, ou Singe pleureur.


C,M)tc&tAt<e,de la famille des Ananas.
Ces trois éminences portent les noms de Mesas, ?M~. Une plaine immense a'ete~e insensible-
ment en dos d'âne, sans qu'il y ait aucune apparence de montagnes ou de collines.
dire une partie de leur vjie tous les hahitans, même lea
dans Teau
femmes des familles les plus riches, savent nager; et, dans un pays
où l'homme est encore si près de l'état de nature, une des premières
questions que l'on se propose le matin en se rencontrant, est de savoir
si l'eau de la rivière est plus fraîche que la veille. La manière de jouir
du bain est assez variée. Nous fréquentions tous tes soirs une société de
personnes très-estimables, dans le faubourg des Guayqueries. Par un beau clair
de lune on plaçoit des chaises dans 1 eau les hommes et les femmes étoient légè-
rement vétus, comme dans quelques bains du nord de l'Europe; et la famitle et les
étrangers, réunis dans la rivière, passoient quelques heures à fumer des cigarres
en s'entretenant, selon l'habitude du pays de l'extrême sécheresse de la
saison, de l'abondance des pluies dans les cantons voisins, et surtout du luxe
dont les dames de Cumana accusent celles de Caracas et de la Havane.
Le cercle n'étoit pas inquiété par les 2~f<M ou petits crocodiles qui sont
extrêmement rares aujourd'hui, et qui approchent les hommes sans les
attaquer. Ces animaux ont trois à quatre pieds -de long nous n'en avons
jamais rencontré dans le Manzanares, mais bien des dauphins qui quelquefois
remontoient la rtvière~pendantlanuit, et effrayoient les baigneurs, en faisant
jaillir l'eau par leurs évents.
L~port de Cumana est une rade qui pourroit recevoir les escadresde l'Europe
entière. Tout le golfe de Cariaco qui a trente-cinq milles de loug sur six à huit
milles de large, offre un excellent mouillage. Le Grand-Océan n'est pas plus
calme et plus pacinque sur tes côtes du Pérou que ta mer des Antilles
depuis Pertocabetto, et surtout depuis le cap Codera jusqu'à la pointe de Paria
Les ouragans des îles Antilles ne se font jamais sentir dans ces parages, où
l'on naviguedans des chaloupes non pontées. Le seul danger du port de Cumana
est un bas-fond, celui du Morne .RoMgx?~ qui, de l'est à l'ouest, a 900 toises
de largeur, et qui est tellement accore qu'on y touche presque sans s'en apefcevou.

?'on<n<M.
° 7?<u;o del Morro roxo. H y a d'une et demie à trois brasses d'eau sur ce bat-fond, tandis que
au delà des accores il y en a dix -huit trente et même trente-'huit. Les restes d'une ancienne
bauerie, située au nord-nord-est du château Saiat-Antoiue, et tout près de ce dernier, serrent de
marque pour éviter le banc du Morne Rouge. H faut virer
de hord avant que cette batterie
couvre
nue montagne tres-é)evée de la péninsule d'Araya, qui a été retevée par M. Fidalgo, du chateatt Saimt-
Antoine, Nord 66" 3o' Est, à 6 lieues de distance. Si l'on néglige cette maMBuvre, on risqne d'autant
plus de toucher que les hauteurs de Bordones ôtent le vent au vaisseau qui se-dirige sur le port.
J'ai donne quelque étendue à la description da site de Cumana, parce
qu~i! m'a paru impor&ntde faire connoître un lieu qui depuis des sièclesi
a été le foyer des tremblemens de terre les plus enrayans. Avant de parier
de ces phénomènes extraordinaires il sera utile de résumer les traits épars du
taHe~u physique dont je viens de tracer l'esquisse.
La ville, ptacée au pied d'une colline sans verdure, est dominée par un
château. Point de clocher, point de coupoles qui puissent fixer de loin lœil
du voyageur, mais bien quelques troncs de tamariniers, de cocotiers et de
datiers qui s'étèvent au-dessus des maisons, dont les toits sont en terrasses.
Les plaines environnantes, surtout celtes du côté de la mer, offrent un
aspect triste, poudreux et aride, tandis qu'une végétation fraîche et vigoureuse
fait reconnoître de loin les sinuosités de la rivière qui sépare la ville des
faubourgs, la population de races européenne et mixte des indigènes à teint
cuivré. La colline du fort Saint-Antoine, isolée, nue et blanche, renvoie à
la fois une grande masse de lumière et de chaleur rayonnante elle est
composée de brèches dont les couches renferment des pétrifications péla-
gienncs. Dans le lointain, vers le sud, se prolonge un vaste et sombre rideau
de montagnes. Ce sont les hautes Alpes calcaires de la Nouvelle-Andalousie,
surmontées de grès et d autres formations plus récentes. Des forêts majestueuses
couvrent cette Cordillère de t'intérieur, et se lient, par un vallon boisé, aux
terrains découverts, argileux et salins des environs de Cumana. Quelques
oiseaux, d'une taille considérable, contribuent à donner une physionomie
particulière à ces contrées. Sur tes plages maritimes et dans le golfe, on trouve
des bandes de hérons pécheurs et des Alcatras d'une forme très-lourde, qui
cinglent, comme le cygne, en relevant les ailes. Plus près de l'habitation des
hommes, des milliers de vautours Gc~Mazo véritables Chacals parmi les
volatiles, sont occupés sans cesse à déterrer les cadavres des animaux Un golfe,
qui renferme des sources chaudes et soumarines, sépare les roches secondaires
des roches primitives et schisteuses de la péninsule d'Araya. L'une et l'autre
de ces côtes sont baignées par une mer paisible, d'une teinte azurée, et
toujours doucement agitée par le même vent. Un ciel pur, sec, et n'offrant que
quelques nuages légers au coucher du soleil, repose sur l'Océan, sur la
péninsule dépourvue d'arbres et sur les plaines de Cumana, tandis qu'on voit
les orages 'se former, s'accumuler et se résoudre en pluies fécondes entre les

B«~bn, Hist. des <Mf!<'<nM, T. ï, p. tt4.


B-~<
n<t<.
T' y f
cimes des montagnes de rintérieu! C'est ainsi que~ sur ces côtes comme an
pied des Andes, !e ciel et~à terre oJ~nt de grandes opposite sérénité
et de brouillards, de sécheresse et d'ondées, de hndité aÏ)so!ae et de verdure
!ë nouveau continent, les régions basses et maritimes
sans cesse renaissante.Dans
diffèrent autant des réglons montueùses dët'intériëur, que tes ptai~esdë là Basse-
Egypte diCèrentdes ptateaux étëvés de t'Abyssinie.
Les rapports que nous venons d'indiquer, entre !e littoral de la NouveMe-
Andalousie et celui du Pérou, s'étendent jusqu'à la fréquence des tremMemèns
de terre et aux limites que la nature semble avoir prescrites à ces phénomènes.
Nous avons éprouvé nous-mêmes déssëcoussès très-viotentes a Cùmana; et,
au moment où l'on reconstruisoit~es édiëces récemment écroulés, Tnous avons
été à même de recueillir sur les lieux !e détaH exact des circonstances quii
ont accompagné la grande Catastrophédu ï~ décembre t~97 Ces notions auront
d'autant plus d'intérêt, que!estremblemens de terre ont été considérés jusqu'ici,
moins sous un point de vue physique et géologique, que sous le rapport des
effets funestes qu'ils ont sur la ~population et le bien-être de la société.
C'est une opinion très ~répandue Sur les côtes de Cùmana et à l'île de la
Marguerite, que !e golfe de Cariaço doit son existence à un déchirement des
terres accompagné d'une irruption de l'Océan. La mémoire de éette grande
révolution s'étoit conservée parmi les Indiens, jusqu'à la fin, du quinzième
siècle, e~ l'on rapporte qu'à t'époque du troisième voyage de Christophe
Cotomb, les indigènes- en parloient comme d'un événement assez récent.
En i53o, de nouvelles secousses enrayèrent les habitans~ des côtes de
Paria et de Cumana. La mer~inonda les terres, et le petit fort que Jacques
Castellon avoit construit à !aNouve!ïe-ToIède' s'écroula entièrement, Il se forma
en même temps une énorme ouverture dans les montagnes de Gariaco, su~ les bord~
du golfe de ce nom, où une grande masse d'eau satëe, mêlée d'asphalte, jaillit
du schiste micacé Les tremb!emens de terre furent très-fféquens vers la fin
du seizième siècle; et, selon les traditions conservées à Cuhtana, ia mer inonda

C'est te premier nom donné & la ville de Cùmana (GtMo&tmo Be!MûB<, ~7«. <&~ jtfon<&) n«c<'o,
p. 3, 3t et 33). Jacques~CasteUon étoit atïivé deSaint-Domtngtteem t5tt, après t'apparition ~nete
fameux Barthotomée do las Casas avoit &ite dans ces contrées. En tmant avep attentïom les reMoM
de Benzoni et de Caulin, on voit qce le fort de Castellon étoit construit près de t'emhouehnre du Man-
zanares ( a/&t ripa <<e~ ~Mme de CMnMno), et non, comme l'ont aNrmë que!qt)es voyageurs modernes,
sur la montagne où se trouve aujourd'hui le château Saint-Antoine. (~M&n, Hist. eorn~~M p.
~N-er.~ J?«c!-p<-M)n de las Indiaa, p. t4.
'SOUV~~j!~P~geS,et.S'éIey~'~9'<~2~g~~+~b~t,antJ., lit!
_sauvèrent;:snr!(~rro-de~n;
!e.:?etit~cota~et.Sa<ot~Mn~!si~n.
engagèrent les habitans~~constrà 4
montagne.et.qM;'Qecup.e:Mn~i,par)t.i~~
Comme 11 n'existe ~ncnne.tChrQnique.:de~ ses archiyes,& caaa~
des dévastations continnejles des te;rn~tes~ ~UBmis Manches, ne renferment

aucun document qui rempnte à plu$ de cent cipquanteans, on ne connoft pas lest;
dates presses des ~ncij~trembleme~ns de terre. On sait~s~ dans
les temps plus approchés de nousy cannée t~6 a été à la fois la plus funeste
pour tes colons~ e)t la plus remarquable pour l'histoire physique du pays.
Une sécheresse semblable a celles que/ron éprouve de temps en temps aux
îles du cap Vert.avoit régné depuis qutnzemoM, torsque, le 2ï octobre t~66)
la viue de Comana fut entièrement détruite. La mémoire de ce jour est
tenouvelée tous les ans par une tête religieuse accompagnée d'une procession
sotenneue. Toutes les malsons s'écroulèrent dans l'espace de peu de minutes,
et tes secousses se répétèrent pendant quatorze mois d'heure en heure. Dans
plusieurs parties de !a province, ta terre s'entrouvrit et vomit des eaux
sulfureuses.. Ces éruptions ~rent surtout très-fréquentes dans une plaine qui
s'étend vers Casanay, deux Heues à l'est de ta 'ville de Cafiaco, et qui
est connue sous le nom du ~er~Mn c~~r, tierra At«?c<t~ parce qu'eue
paro~t entièrement minée par des sources thermales. Pendant les années 1766 et
t~6~, les babitans, de Camana campèrent dans les rues, et Us commencèrent
à reconstruire leurs maisons lorsque les tremblemens de terre ne se succédèrent
plus que de mois en mois. Il arriva alors sur ces côtes ce que l'on a éprouvé

4 février t~g?. Tandis que le sol


dans le royaume de Quito, immédiatement après la grande catastrophe du
continuellement, l'atmosphère
sembloit se résoudre en eau. De fortes ondées firent gonûer les rivières;
l'année fut extrêmement fertile, et les ïndien~ dont les frêles cabanes résistent
facilement aux secousses les plus fortes, célébroient, d'après les idées d'une
antique superstition, par des fêtes et des danses, la destruction du monde et
l'époque prochaine de sa régénération.
La tradition porte que, dans le tremblement de terre de t~66 comme
dans un autre très-remarquable de ~94) les secousses étoient de simples oscil-
lations horizontales ce ne fut que le jour malheureuxjdtut 4 décembre t~y, que
pour la première fois, à Cumana, le mouvement se fit sentir par soulèvement, de
bas en haut. Plus des quatre cinquièmes de la ville furent alors enttèrement
détruits; et le choc, accompagné d'un brmt souterrain tfès-fbrt,res''embloit,
comme à Riobamba, a l'explosion d'une mine ptacéeà une grande profbndemr.
Heureusement la secousse la plus violente fut précédée d~un léger mon-
vement d'ondulation, de sorte que la plupart des babitans purent se sauve!'
dans les rues, et qu'il ne périt qu'un petitnombre de ceux qui étoient
rassemttlés dans les égtises. C'est une opinion généralement reçue à Cumana,
que les tremblemens de terre les plus destructeurs s'annoncent par des oscil-
lations très-fbibtes et par un bourdonnement qui n'échappe pas à la sagacité
des personnes habituées à ce genre de phénomènes. Dans ce moment fatal, les
cris de "TKt~c~co~M, te~N&&~ tembla retentissent partout, et il est
rare que de fausses alarmessoient données par un indigène. Les plus peureux
observent avec attention les mouvemens des chiens, des chèvres et des cochons.
Ces derniers animaux, doués d'un odorat extrêmement fin, et accoutumés à
fouiller la terre, avertissent de la proximité du danger, par leur inquiétude
et leurs cris. Nous ne déciderons pas siptacé~ ptus près ~e ia sttp~ace du soi,
ils entendent les premiers le bruit souterrain; ou si leurs organes reçoivent
l'impression de quelque émanation gazeuse qui sort de la terre. On. ne sauroit
nier la possibilité de cette dernière cause. Pendant mon sétour au Pérou, on
observa~ dans l'intérieur des terres, un fait qui a rapport à ce genre de

)'
phénomènes, et qui s'étoit dejà présenté plusieurs fois. A la suite de violens
tremblemens de terre, les herbes qui couvrent les savanes du Tucuman acquirent
des propriétés nuisibles i~ y <ut épizootie parmi les bestiaux, et un
grand nombre d'entre eux paroissoit étourdi ou asphyxié par les mofettes
qu'exhaloit le sol.
A Cumana, une demi-heure avant la catastrophe du ï~ décembre ï~<)7.
i
on sentit une forte odeur de soufre près de la colline du couvent de Saint-
Franços. C'est dans ce même lieu que' le bruit souterrain, qui sembloit se
propager du sud-est au nord-ouest, fut le plus fort. En même temps on vit
paroftre des Bammes surtes bords du Rio Manzanares, près de l'hospice des
Capucins et dans le golfe de Cariaco, près de Mariguitar. Nous
verrons dans
la suite que ce dernier phénomène, si étrange dans un pays non volcanique,
se présente assez souvent dans les montagnes de calcaire alpin près de
Cumanacoa, dans la vallée de Bordones, à l'île de la Marguerite
et au milieu

~M~tccT-~e~ la <Brre tremble.


des savanes ou J~nM' de ta
"'DAce &&[,
Nouveue-ABdalousie. D~na ces savattes,
.y.
des
gerbes de <en s'élèvent la une hauteur eottsidérabte on ~es obsefve, pendant
4
des heures entières, dans tes endroits les plus arides, et Kon assure qa'eo
examinant te sot qui fournit la matière inRammabte, on n'aperçoit aucune
crevasse. Ce feu, qui rappelle tes sources d hydrogène ou Saalse de Modene et
les feux follets de nos marais, ne se communique pas à t'herbe, sans doute parce
que la colonne de gaz qui se développe est météed azote et d'acide carbonique, et
ne brute pas jusqu'à sa base. Le peuple, d'ailleurs moins superstitieux ici qu'en
Espagne, désigne ces flammes rougcâtres par te nom bizarre de t <MMe*du t~/Mn
~~wr/ imaginant que le spectre de Lopez d'Aguirre, persécuté par les
remords, erre dans ces mêmes contrées qu'il avoit souiUées de ces crimes 3.
Le grand tremblement de terre de i~Q~ a produit quelques changemens
dans la conagnration du bas-fond du Morne Rouge, vers l'embouchure du
Rio Bordones. Des soulèvemens analogues ont été observés lors de la ruine
totale de Cumana, en 1~66. A cette époque, sur la côte méridionale du
golfe de Cariaco, la Punta Delgada s'est agrandie sensiblement, et, dans
le Rio Guarapiche, près du village de Maturin, il s'est formé un écuci), sans
doute par l'action des fluides élastiques qui ont déplacé et soulevé le tond
de la rivière.
Nous ne continuerons pas à décrire en détail les changemens locaux
produits par les dif!erens trembtemens de terre de Cumana. Pour suivre une
marche conforme au but que nous nous sommes proposé dans cet ouvrage,
nous tâcherons de généraliser tes idées, et de réunir dans un même cadre tout ce
qui a rapport à ces~phénomènes la
fois si eCrayans et si difficiles à expliquer.
Si les physiciens qui visitent les AtpeSjde la Suisse ou les côtes de la Lapouie,
doivent ajouter à nos connoissances sur tes glaciers et les aurores boré<des
on peut exiger d'un voyageur qui a parcouru l'Amérique espagnole, que
son attention soit principalement Cxée sur lês volcans et les tremblemens

Dans la Mesa de Cari, au nord d'Apasay et dans la Mesa de Guanipa, loin des JMbr<eAat~,
endroits humides où wgete le nalnuer Mauritia.
~«/
qui sont les.
Géologia, T. tt, p aS~.
3 Lorst))!) Cumana et & H)e de ta Marguerite, !e penpte prononce le mot el ftnmo, c'est tomonrs

pour désigner l'infâme Lopez d'AgunTe qui, après avoir pris part, en t56o, à l'émeute de Fernande
de G~nman contre Pedro de Ursua, gouverneur des Umegnas et dn Dorado, se donna )ui même
le titre de ~tf<< le <m&re. H descendit avec sa bande la rivière des Amazones, et parvint, par
nnecommnhicatt~'ndes rivières de ta Guyane, dont nous pa<ter«ns plus bas, àt'ite de la Marguerite.
Le port de Paragaacbe porte encore dans cette ile le nom de port dis tyran.
de terre. Chaque partie dagMte ofïre des objets d'étude particuliers; et;i
lorsqu'on ne peut espérer de deviner les~ causes de~~hénontèses de !a nature, on
doit du moins essayer d'én découvrir les lois et
de démêler, par !a comparaison
de faits nombreux, ce qui est constant et uniforme, de ce~qui est variabte
et accidentel.
Les grands tremblernens de terre qui interrompent la longue série des
petites secousses, ne paroissent avoir rien de périodique à Cumana. On les
a vus se succéder à quatre-vingts, à cent, et quelquefois à moins de
trente années de distance, tandis que, sur les côtes, du Pérou, par exemple
à Lima, on ne peut méconnqttre une certaine régularité dans tes époques
des ruines totales de la ville. La croyance des habitans à l'existence de ce
type y influe même d'une manière heureuse sur la tranquillité publique et
sur la conservation de l'Industrie. On admet généralement qu'il faut un espace
de temps assez long pour que les mêmes causes puissent agir avec la même énergie;
mais ce raisonnement n'est juste qu'autant que l'on considère les secousses comme'
un phénomène local, et que l'on suppose, sous chaque point du globe exposé
à de grands bouleversemens, un foyer particulier. Partout où de nouveaux
édifices s'élèvent sur les ruinés des anciens, on entend dire à ceux qui refusent
de rebâtir, que !a destruction de Lisbonne, du t." novembre t~5~ a été
bient~ suivie par une seconde non moins funeste, le 3< mars i~6t.
C'est une opinion extrêmement ancienne et très répandue à Cumana,
à Acapulco et à Lima, qu'il existe un rapport sensible entre les tremblemens
de terre et l'état de l'atmosphère qui précède ces phénomènes. Sur les côtes
de la Nouvelle-Andalousie, on est inquiet lorsque par un temps excessivement
chaud et après de longues sécheresses, la brise cesse tout-a-coup de souNler,
et que le ciel, pur et sans nuages au zénith, offre, près de t'horizon, à 6
ou 8 degrés de hauteur ~une vapeur roussâtre. Ces pronostics sont cependant
bien. incertains; et, quand on se rappelle l'ensemble des variations météo-
rologiques, aux époques où le globe ététe plus agité, on reconnoit que des
secousses violentes ont également lieu par des temps humides et secs, par un vent
très-frais, et par un calme plat et suffocant. D'après le grand nombre de trem-
blemens de terre dout j'ai été témoin an nord et au sud de l'équateur,
sur
le continent et dans le bassin des mers, sur les côtes et à a5oo toises de
hauteur, il m'a paru que les oscillationssontgénéralement
assezindépendantes de

~rM< Meteor., Lib. H (ed. J~~ T. t, p. 798). &M. ÇM.~ ,M. Vï,
c. t9.
~nA~t~KC AV-
l'état antér~ur de l'atmosphère. Cette opinion est partagée par, beaucoup de
v*~

personnes instruites qui habitent les colonies espagnoles, et dont l'expérience


s'étend, sinon sur un plus grand espace du globe, du moins sur un plus
grand nombre d'années que lamienne.Aucontraire, dans des parties de l'Europe~
où les trcmblemens de terre sont rares comparativement & l'Amériqne, les
physiciens inclinent à admettre une-liaison intime entre les ondulations du
sol et quelque météore qui se présente accidentellement à la même époque.
C'est ainsi qu'en Italie, on soupçonne un rapport. entre le Sirocco et les
tremblemens de terre, et qu'à Londres on regarda, comme les avant-coureurs
des secousses qui se faisoient sentir depuis ï~8 jusqu'en i?56, la fréquence
des étoiles filantes, et ces aurores australes qui
depuis ont été observées
plusieurs fois par M. Dalton.
Les jours où la terre est ébranlée par des secousses violentes, la régularité
des variations horaires du baromètre n'est pas troublée sous les Tropiques.
J'ai vérifié cette observation à Cumana, à Lima et à Riobamba elle est
d'autant plus digne de fixer l'attention des physiciens, qu'à Saint-Domingue,
à la ville du Cap-françois, on prétend avoir vu baisser un baromètre d'eau
de deux pouces et demi immédiatement avant le tremblement de terre de t~o.
De même on rapporte que, lors de 'la destruction d'Oran, un pharmacien se
sauva avec sa famille, parce'que, observant par hasard, peu de minutes
avant !a catastrophe, la hauteur du mercure dans son baromètre, il s'aperçut
que la colonne se raccourcissoit d'une manière extraordinaire. J'ignore si l'on peut
ajouter foi à cette assertion; comme il est à peu près imposssible d'examiner les
variations du poids de l'atmosphère pendant les secousses mêmes, il faut

.PAM. ?t<MM., T. XLVt. p. 64a, 663 et ~43. L'aspect de ces météores conduisit presque en même
temps deux savans di~tmguée à des théories diamétratement opposées. Hales, frappé de son expérience
sur la décompositiondu gaz nitreux, lorsqu entre en contact avec l'air atmosphérique, imagina une
théorie chimique d'après laquelle le tremblement de terre étoit teCet « d'une prompte condensation
d'c~ha!!tiM)nssu!fureusesetnitrensesf (&t< p. 678). Smdteley,familiarisé avec tes idées de Franklin,
sur la distribution de Pétectricité dans les .couchée de l'atmosphère, regarda le mouvement oscillatoire
de la surface du globe comme t'eBet d'nn/fjhoc électrique qui se propage de l'air dans la terre ( ~Mf.,
p. 64a D âpres l'une et l'autre de ces théories, on admettoit, t'existence d'un gros nuage noir
qui séparoitdes couches d'air inéga!ement chargées d'étectricité ou de vapeurs nitreuses, et ce nuage
avoit été vu à Londres au moment des premières secousses. Je cite ces rêveries pour rappeler a quelles
erreurs on s'expose, en physique et en géotogie, si au He~dd'embrasserl'ensemble des phénomènes
on s'arrête à des circonstances accidentelles.
C-urrejoHes, dans le JoMm. de ~f., T. LIV, p. to6. Cet abaissement ne répond qu'à dem tignes
de mercure. Le baromètre resta assez immoHte à Pignerol, en avril 1808. (~M! T. LXVII, p. ag,. )
se contenter d'observer te baroïnetre avant on après que ces phénomènes ont
eu lieu. Dans la zone tempérée, les aurons boréales ne ~odIRent
la déclinaison de l'aimant et l'intenstté des forces magnétiques'. Peut-être aussi
les tremblemens de terre n'agissent-ils pas constamment de la même manière
sur l'air qui nous entoure.
Il paroit difficile de révoquer en. doute que, loin, de la bouche des volcans
encore actifs, !a terre, entr'ouverte et ébranlée par des secousses, répand
de temps en temps des émanations gazeuses dans l'atmosphère. A Cumana,
comme nous l'avons indiqué plus haut, des flammes et des vapeurs mêlées
d'acide sulfureux, s'élèvent du sol le plus aride. Dans d'autres parties de
la même province, ta terre vomit, de l'eau et du pétrole. A Riobamba,
une masse boueuse et inflammable qu'on appelle JMo~a, sort de crevasses
qui se referment, et s'accumule en collines élevées. A sept lieues de Lisbonne,
près de Colares, on vit, pendant le terrible tremblement de terre du
i. novembre 17 5$, sortir des flammes et une colonne de fumée épaisse du
flanc des rochers d'Alvidras, et, selon quelques témbïns~dusein de la mer Cette
fumée dura plusieurs jours, et elle étoit d'autant plus abondante que le bruit
souterrain qui accompagnoit les secousses étoit plus fort.
Des fluides élastiques versés dans l'atmosphère peuvent agir localement sur
le baromètre, sinon par leur masse qui est très-petite, comparativement à la
masse de l'atmosphère, mais parce qu'au moment des grandes explosions,
il se forme vraisemblablement un courant ascendant, qui diminue la pression
de l'air. J'incline à croire que, dans la plupart des tremblemens de terre,
rien ne s'échappe du sol ébranlé, et que ta où les émanations de gaz et
de vapeurs ont Heu, elles précèdent les secousses moins souvent qu'elles ne
les accompagnent et les suivent. Cette dernière circonstance offre l'explication
d'un fait qui paroft indubitable, je veux dire de cette influence mystérieuse
qu'ont, dans l'Amérique équinoxiale, les tremblemens de terre sur le climat
,et sur l'ordre des saisons de pluie ét de sécheresse. Si la terre n'agit générale-
ment sur l'air qu'au moment des secousses, on conçoit pourquoi il est si rare
qu'un changement météorologique sensible devienne le présage de
ces grandes
révolutions de la nature.
<

J'ai eu occasion d'observer, conjointement avec M. Oltmanns, Berlin, dans la nuit dn


20 décembre t8o6, un changement d'mtensité magnétiqoe Le point de convergence des de
t'eurore boréa)e a été déterminé astronomiquementpar des azimuts. ( Gt&e~, ~n~en, i8n, rayons
p. a?~. )
'.PAt7.7~M.,T.XUX,p.4t4.
L'hypothèse d'aprèsjaqaeHe, dams les tMmblemacts déterre de Giïmana, des
fluides élastiques tendent à s'échapper de la sar&c~ sol .gemlile confirmée par
l'observation du bruit enrayantque l'on observe pendant ïes secousses aux bords des
puits dans la plaine <~f <~ncM. Quelquefois l'eau et le sable sont- projetés a plus
de vingt pieds de hauteur. Des phénomènes analogues n'ont pas échappe à
la sagacité des anciens qui habitoient des parties de la Grèce et de l'Asie
mineure, remplies de cavernes, de crevasses et de rivières souterraines. La
nature, dans sa marche uniforme, fait naître partout les mêmes idées sur
les causes des tremblemens de terre et sur les moyens par lesquels 1 homme,
oubliant la mesure de ses forces, prétend diminuer l'effet des explosions
souterraines. Ce qu'un grand naturaliste romain a dit de l'utilité des puits
et des cavernes est répété, dans le nouveau monde, par les Indiens les
plus ignorans de Quito, lorsqu'ils montrent aux voyageurs les gT~K?o~ ou
crevasses de Pichincha.
Le bruit souterrain, si fréquent pendant les tremblemens de terre, n'est
le plus souvent pas en rapport avec la Ibrce des secousses. A Cumana il les
précède constamment tandis qu'à Quito, et depuis peu à Caracas et aux
AntHles, on a entendu-un bruit semblable à la décharge d'une batterie, long-
temps après que tes secousses avoient cessé. Un troisième genre de phénomènes, le
plus remarquable de tous, est le roulement de ces tonnerres souterrains qui
durent pendant plusieurs mois, sans être accompagnés du moindre mouvement
oscillatoire du sol
Dans tous les pays sujets aux tremblemens de terre, on regarde comme la
cause et le foyer des secousses le~ point ou, vraisemblablement par une
disposition particulière des couches pierreuses, les effets sont les plus sensibles.
C'est ainsi que l'on croit à Cumana que la colline du château St. Antoine,

In pnteis est remedium, quale et erehri specus pnebent conceptnm enim spiritum e~hal&nt
quod in certu notatur opptdit, <pMB minns qmatinntnr, crebris ad eluviem cuoicalM ca~mta. Plin.
7,tA.f7,c.8a(e<<<tr.t~3,T.t,p.tta).Encoreaujourd'hui, dam la capitale de Santo Domingo, les
puits sont regardés comme diminuantla violence des secousses. J'ohserTerat a cette occasion que la théorie
des tremblemens de terre, donnée par Séneqae (Nat. (ht<Mt, Lib. FI, c. 4-3t ), consent te germe
de font ce qui a été dit de nos temps sor l'action des vapeurs élastiques renfermées dans l'intérieur
du globe. (Comparez Michell, dans les .PA<<. ?hnM. T. LI, p. 566-634; et Thomas Yoong, daM
Rees, ~VeM'C~c&ptB~M,Vol.Xït, p. a, art. ~«r~A~Bote.)
Les tonnerres souterrains (&famM~M~ truenos tt<&<erraneo<) de Guanaxuato seront décrits dans la
suite de cet ouvrage. ( ~Vouf.p., T. t, p. 4y. ) Le phénomène d'un bruit sans secousses avoit déjà été
observé par les anciens. ( .<<rM<o< J!~e<eor., J'.t&. ~7, ed. Dt<f< p. 8oa~ ~tn., Lib. 7~ c. 80).
et surtout l'ëmmence sur laquelle est placé le couvent de Samt-francots,
renferment une énorme quantité de soufre et d'autres matières InCammaMes.
On oublie que la rapidité avec laquelle les ondulations se propagent à de
grandes distances, même à travers le bassin de l'Océan, prouve que lé centre
d'action est très-éloigné de la surface du globe. C'est sans doute par cette
même cause que les tremblemens de terre ne sont pas restreints & de certaines
roches, comme le prétendent quelques physiciens mais que toutes sont
propres à propager le mouvement. Pour ne pas sortir du cercle de ma propre
expérience, je citerai ici les granites de Lima et d'AcapuIco, le gneiss de
Caracas, le schiste micacé de la péninsule d'Araya, le schiste primitif de
Tepecuacui!coau Mexique, les calcaires secondaires de l'Apennin, de l'Espagne
et de la Nouvelle-Andalousie, enfin les porphyres trapéens des provinces de
Quito et de Popayan. Dans ces lieux divers, le sol est fréquemment ébranlé
par les secousses les plus violentes mais quelquefois dans une même
roche, les couches supérieures opposent des obstacles Invincibles à la propa-
gation du mouvement. C'est ainsi que, dans les mines de la Saxe on a
vu sortir les ouvriers enrayés par des oscillations qui n'étoient point ressenties
à la surface du sol.
Si, dans les régions les plus éloignées les unes des autres, les roches
primitives, secondaires ou volcaniques participent également aux mouvemens
convulsifs du globe, en ne peut disconvenir aussi que, dans un terrain peu
étendu, certaines classes de roches s'opposent à la propagation des secousses.
A Cumana, par exemple, avant la grande catastrophe de 17~7, les tremble-
mens de terre ne se faisoient sentir que le long de la côte méridionale et
calcaire du golfe de Cariaco'jusqu'à la ville de ce nom, tandis qu'à la
péninsule d'Araya et au village de Maniquarez le sol ne participoit pas aux
mêmes agitations. Les habitans de cette côte septentrionale qui est composée de
schiste micacé, élevoient leurs cabanes sur
un terrain immobile; un golfe
de trois à quatre mille toises de largeur les séparoit d'une plaine couverte de
ruines et bouleversée par des tremblemens de terre. Cette sécurité, fondée
sur
l'expérience de plusieurs siècles, a disparu depuis le ï~ décembre ï~Q~, de

J'aurois pu ajouter à çette liste des roches secondaires tes gypses de ta plus nouvelle formation,
par exemple celui de Montmartre, plac~ au-dessusd'un calcaire marin qui est postérieur a la craie. Voyez,
J
sur le tremblement de terre ressenti à l'ans et dans ses environs, en t68t, tes Mém. da /c<t~mte,
T. I, p. 34t.
Marienbergdans I'.E)~j'<'6tM'gB.
nouvelles communica~ons paroissent s'être ouverts dans 1 tntënenr du globe.
Aujpurdhui on n'éprouve pas seu!cment:t~a péninsule d'Araya les agitations du
sol de Cumana; le promontoirede schiste micacé est devenu son tour un centre
particulier de mouyemens. Déjà la terre est quelque&is fortement ébMnïée an
village de Maniquarez, quandàJb côte de Cumana on jouit delà plus par&ite
tranquillité. Le golfe de, Cariaco n'a cependant que soixante ou quatre-vingts
brasses de profondeur.
On a cru observer que, soit dans lescontmens soit ,dans les Mes, les côtes
occidentales et méridionales sont les plus exposées aux secousses '.Cette
observation est liée aux idées queues géologues se sont formées depuis long-
temps de la position des hautes chaînes de montagnes et de la, direction de
leurs pentes les plus rapides; l'existence de la Cordillère de Caracas et la
fréquence des oscillations sur les côtes orientales et septentrionales de la Terre-
Ferme, dans le golfe de Paria, à Garupano, à Cariaco et à Cumana, prouvent
l'incertitude de cette opinion.
Dans la Nouvelle-Andalousie, de même qu'au Chili <t au Pérou, les secousses
suivent le littoral, et s'étendent peu dans l'intérieur des terres. Cette circonstance,
comme nous le verrons bientôt, indique un rapport intime entre les causes qui
produisent les tremblemens de terre, et les éruptions volcaniques. Si le sol étoit le
plus agité sur les côtes, parce qu'elles sont les parties les plus basses de la terre,
pourquoi les oscillations ne seroient-elles pas également fortes et fréquentes dans
ces vastes savanes ou prairies qui s'élèvent a peine huit ou dix toises
au-dessus du niveau de l'Océan?
Les tremblemens de terre de Cumana sont liés à ceux des Petites Antilles,
et l'on a même soupçonné qu'ils ont quelques rapports avec les phénomènes
volcaniques de la Cordillère des Andes. Le février 1797, le sol de la
province de Quito éprouva un tel bouleversement que, malgré l'extrême
foiblesse de la population de ces contrées, près de ~0,000 indigènes périrent,
ensevelis sous les ruines de leurs maisons, engloutis par des crevasses, et
noyés dans des lacs qui se formèrent instantanément. A la même époque, les
habitans des îles Antilles orientales furent alarmés par des secousses qui ne
cessèrent qu'après huit mois, lorsque le volcan de la Guadeloupe vomit de la

Ctomrejottes, ttans le /btffn. ftefA~ T. UV, p. io4.


Les ~&Mtoe de Cumana, de la NouveUe-Barcelone,de Calabozo det'Apare et du Meta.
3 Voyez mon Tableau géologiquede l'Aménque méridionale J<wn<~ <& f~ty<M, T LUt, p. 38.
pierre ponce, des cendrés et des bo~Sees de vapenit'ssul&reuSës.Cette éruption
du 27 septembre, pendant laquelle on entendit des mugissëmehs souterrains
très-probngés', fut suivie~ le ~décembre, du grand tremblement de
terre de Cumana. Un autre volcan des îles Antilles, celui de Saint~Vincent*,
a offert depuis peu un nouvel exempte de ces rapports extraofdinaires~ Il
n'avoit pas jeté des flammes depuis i7t8, lorsque en lança dé nouveau en
i8t2. La ruine totale de la ville de Caracas précéda cette explosion de
trente-quatre jours, et de violentes oscillations du sol furent ressenties à la
fois aux Mes et sur les côtes de la Terre-Ferme.
On a remarqué depuis long-temps que les effets des grands tremblemens de
terre s'étendent beaucoup plus loin que les phénomènes qu'offrent les volcans
actifs. En étudiant les révolutions physiques de l'Italie, en examinant
avec soin la~ série des éruptions du Vésuve et de l'Etna, on a de la
peine à reconnoître, malgré la proximité de ces montagnes, les traces
d'une action simultanée. Il est indubitable, au contraire, que, lors des deux
dernières ruines de Lisbonne la mer a été violemment agitée jusque
(
~!ft~K)r< fait aux ~n~fOKt rictor .RttptM et te&<M~par ~nt;c~ ~*<ytw Hapel, jR~tt~HKtM et
Codé, cAarg~t d'examiner la <t<!«t<t<m du
volcan de A*Basse-Terre, et &< ~<<* qui ont <« lieu AtHt
la nuit du 7 ott 8 fent~mM~e an 6, p. 46. Cette relation d'un voyage fait à la cime da volcan,
renfern~be.njcoap d'otservadons curieuses elle a été imprimée à la Guadeloupe en ~98.
Letter of jtf. ~ftmt&om <o Sir Joseph B<t<:i~, t8i3. L'éruption commença le 3o avril t8ta;eHe
fut précédée de tremNemens de terre qui se répétèrent pendant onze mois. (/*A< Trans., 1785,
p. t6.)
Le a6 mars t8ia.
4 Les i."novembre t~SSet 3t mars t~Ct. Pendant le premier de ces tremMemeM de terre t'Océan
inonda en Europe, tes côtes de la Suéde, de l'Angleterre et de l'Espagne en Amérique, tes îles
Antigua la Barbade et la Martinique. A la Barbade, où tes marées n'ont généralement que at à a8
pouces de hauteur, les eaux s'élevèrent de vingt pieds dans la baie de CartMe. Elles devinrent en
même temps « noires comme de l'encre, o sans doute parce qu'ettes s'étoient metées avec le pétrole
ou asphalte qui abonde dans le fond de la mer, tant sur les côtes du golfe de Cariaco que près de t'ite
de la Trinité. Aux Antilles et dans plusieurs lacs de la Suisse, ce mouvement extraordinaire des eaux
fut observé six heures après la première secousse qui se fit sentir à Lisbonne ( fA~. T)wM., Vol.
XLIX, p. 4o3, 4.0, 544, 668; /HA, Vol. LU, p. 494). A Cadix, on vit venir du targe, a huit
millesde distance,une montagne d'eau de soixante piedsde hantenr:ettetèjetaimpétueusementsurlescotes.
et ruina un grand nombre d~édiSces, semblableà lalame de quatre-vingt-quatre p!edt de haut qui, te juin
i5S6, lors du grand tremblement de terre de Lima avoit couvert le port du Cattao (~<fM<<i, Hiat. n<!<Mm/
de las Indias, ed. f!e tSat, p. t~3.) Dans t'Amérique septentrionale, au lac Ontario, on avoit
observé de fortes agitations de l'eau dès le mois d'octobre t~M. Ces phénomènes prouvent des commu-
nications souterraines à d'énormes distances. En comparant les époques des grffdc" ruines de Lima et
de Guatimala, qui se succèdent généralement à de longs mtervaUes, on a cm reconneitre quelquefois
dans le nouveau monde, par exemple à l'Ne de la Barbade, ëbignée de plus
de douze cents lieues <Ms côtes du Portugal
Plusieurs faits tendent à prouver que tes causes qui produtsent tes tremMemens
de terre ont une liaison étroite avec celles qui agissent dans les ëraptions
volcaniques Nous avons appris à Pasto que la colonne de fumée noire et épaisse
qui, en !~97, so~toit depuis plusieurs mois, du votcan voisin de cette ville,
disparut à l'heure même où, soixante lieues au sud les villes de Riobamba,
Hambato et Tacunga furent bouleversées par une énorme secousse. Lorsque,
dans l'intérieur d'un cratère emiammé, on est assis près de ces monticules
formés par des éjections de scories et de cendres, on ressent le. mouvement
du sol plusieurs secondes avant que chaque éruption partielle a lieu. Nous
avons observé ce phénomène au Vésuve en i8o5, pendant que la montagne
lançoit des scories incandescentes; nous en avions été témoins en 1802, au bord
de l'immense cratère de Pichincha, dont il ne sortoit cependant alors que
des nuées de vapeurs d'acide sulfureux.
Tout paroit indiquer dans les tremblemens de terre Faction des fluides
élastiques qui cherchent une issue pour se répandre dans l'atmosphère.
Souvent sur les côtes de la mer du Sud, cette action se communique presque
instantanément depuis le Chili jusqu'au golfe de Guayaquil, sur une longueur

l'effet d'une action qui se crêpage lentementle long des Cordillères tantôt du nord au sud, tantôt du
sud au nord ( Cosme ~hteno, .0<M'npcM'n del /*erA, ed. de Lima, p. 6y.) Voici quatre de ces époquet
remarquables
ME)[!<!tnE. P~BOC.
(Lat. t.3a'nord). (Lat. ~sud}.
3o Nov. tS~7. t7 Juin ~78.
4 Mars '679. 17 Juin 1678.
n Févr. )689. io Oet. t688.
37 Sept. t7t7. 8 F~tT.~7~6.
J'aïone que, lorsque tes secousses ne sont pas tmutttanées, ou qu'elles ne se suivent pas à peu de
temps d intervalle, il reste beaucoup de doute snr la prétendue communication <tu. mouvement.
La liaison de ces causes, déjà reconnue par les anciens, Aappa de nouveau tjes esprits à l'époque
de la découverte de t'Amérique. (~eot<a[ p. <itf.) Cotte découverte n'offrit pas seulement de nouvelles
productionsà la curiosité des hommes elle donna aussi dé l'étendue à tenrs idées sur la géograplue
physique sur les variétés de l'espèce humaine et sur tes migrationsdes peuples. Il est impossible de lire
les premières relations des voyageurs espagnols, surtout celle du )ésuite Acosta, sans être surpris a
chaque instant de cette influence heureuse que l'aspect d'un grand continent, l'étude d'une nature
merveilleuse et le contact avec des hommes de races diverses, ont exercée sur les progrès des lumières
en Europe. Le germe d'un grand nombre de vérités physiques se trouve dans les ouvragesdu seizième
siècle, et ce germe auroit fructifié, s'il n'eût point été étouifë par le fanatisme et la superstition.
de six cents lieues et, ce qui est très-remarquable, les secousses
semblent être d'autant plus fortes que le pays est plus élo'gné des volcans
actifs. Les montagnes granitiques de la Calabre, couvertes de brèches
très-récentes, la chaine calcaire des Apennins, le. comté de Pignerol, les
côtes du Portugal et de la Grèce, celles du Pérou et de la Terre-Ferme, offrent
des preuves frappantes de cette assertion '.On diroit que le globe ~st agité
avec d autant plus de force, que la surface du sol offre moins de soupiraux: qui
communiquent avec les cavernes de l'intérieur. A Naples et à Messine, au
pied du Cotopaxi et du Tunguragua.on ne craint les tremblemens de terre
qu'aussi long-temps que les vapeurs et les flammes ne sont pas sorties de la
bouche des volcans. Dans le royaume de Quito, la grande catastrophe de
Riobamba, dont nous avons parlé plus haut, a même fait naître l'idée à
plusieurs personnes instruites, que ce malheureux pays seroit moins souvent
bouleversé, si le feu souterrain parvenoit à briser le dôme porphyritique du
Chimborazo, et si cette montagne colossale devenoit un volcan actif. De
tous les temps, des faits analogues ont conduit aux mêmes hypothèses. Les
Grecs qui attribuoient, comme nous, les oscillations du sol à la tension des
fluides élastiques, citoient en faveur de leur opinion la cessation totale des
secousses à l'tte d Eubée, par l'ouverture d'une crevasse dans la plaine
Leia~tine
Nous avons tâché de réunir, a la fin de ce chapitre, les phénomènes
généraux qu'offrent les tremblemens de terre sous dinërens climats. Nous
aussi uniformes
avons fait voir que les météores souterrains sont soumis à des lois
que le mélange des fluides gazeux qui constituent notre atmosphère. Nous nous
sommes abstenus de toute discussion sur la nature des agens chimiques qui
sont les causes des grands bouleversemens qu'éprouve de temps en temps
la surface de la terre. Il sufSt de rappeler ici que ces causes résident à
d'immenses profondeurs, et qu'il faut les chercher dans les roches que
nous appelons primitives, peut-être même, au-dessous de la croûte terreuse
et oxidée du globe, dans les abfmes qui renferment les substances métalloïdes
de la silice, de la chaux, de la soude et de la potasse.

FIeuri&u de BeUevue, 7<M<m. de Physique, T. LXU, p. a6t.


Les secousses ne cessèrent qu'âpres qu'il se fut ouvert dans la plaine de Lélante (près deChatcis )
t
une crevasse qui vomit un fleuve de boue enNammée. StMto, Lib. e~. Ojcon. t!io~ T. t, p. 85.
(VoyMaussi~traduction<i'ejM..D<t?%e~T.ïjp.t37,mote4.)
On a tenté rëces~eM de~ns~ des voÏcaos etceux des
déferre, con~ee~c~~ ~ta~ue~ d~vë!oppee
tt-emMemens
par aae déposition partiûaU~
qae souvent, torsquëde~tM~së~)~~
MOfoit nier
~risr~tJaceae
~~CCèd(!~t

où le sol est le plus agM; mais, pou~~


quelques heures, la tension etectfiq~ de l'aïraujgmente' senstMëtoenta rinstant
on, n'a. pas
besoin de recourir a une hypothèse qui est en contradiction directe avec tout
ce que t'on a observé jusqu'ici sur la structure de notre
planète, et sur
la disposition de ses couchés pierreuses. ~u

V<tyet les Mpéne«ce< aectroscopiqaM faites, en Pt&nont, dans te< vallées de P~tis et de CtnMon,
ent8oS.J~m?t.<&f~t~e,T.I<XVtt,p. aga.
CHAPITRE V.

PENCtStM D'ARATA.–MARAIS SALANS.–RMtfES DU CHATEAU SAINT-tAQMS.

LES premières semaines de notre séjour à Cumana furent employées à vérifier


nos instrumens, à herboriser dans les campagnes voisines, et à reçonnoître les
traces qu'a voit laissées le tremblement de terre du ï~ décembre 1797. Frappés
d'un grand~nombre d'objets à la fois, nous éprouvâmes quelque embarras à
nous assujétir à une marche régulière d'études et d'observations. Si tout ce qui
nous environnoit étoit propre à nous inspirer un vif intérêt, nos instrumens de
physique et d'astronomie excitoient à leur tour la curiosité des- habitans. Nous
fumes distraits par de fréquentes visites; et, pour ne pas mécontenter des é

personnes qui paroissoient si heureuses de voir les taches de la lune dans


une lunette de Dollond, l'absorption de deux gaz dans un tube eudiométrique,
ou les effets du galvanisme sur les mouvemens d'une grenouille, il fallut bien
résoudre répondre à des questions
se à souvent obscures et à répéter, pendant
des heures entières-, les mêmes expériences.
Ces scènes se sont renouvelées pour nous pendant cinq ans, chaque fois que
nous avons séjourné.. dans*un lieu où l'on avoit appris que nous possédions des
microscopes, des lunettes ou des appareils électro-moteurs. Elles étoient
généralement d'autant plus fatigantes, que les personnes qui nous visitoient
avoient des notions confuses d'astronomie ou de physique, deux sciences que,
dans les colonies espagnoles, on désigne sous le nom bizarre de la nouvelle
philosophie, 7!M<?f<ï~ojo~. Les demi-savans nous regârdoient avec une sorte
de dédain, lorsqu'ils apprenoient que nous ne portions point parmi nos livres
le Spectacle de la Nature de fabbé jPZMcA<?~ le CoMM de y~~ue de
Sigaud La Fond, ou le Dictionnaire de ~'a&noyît de Bomare. Ces trois
ouvrages et le Traité d'Économie politique du baron de JMe~e/J sont les
livres étrangers les* plus connus et les plus estimés dans l'Amérique espagnole,
depuis Caracas et le Chili jusqu'à Guatimalà et au nord du Mexique. On ne
paroh savant qu'autant qu'on peut en citer les traductions, et c'est seulement
dans les grandes capitales, à Lima, à Santa-Fe de Bogota, et à Mexico, que
les noms de Baller de Cavendish et de Lav~isier commepcent à remplacer
ceux dont la célébrité est devenue populaire depuis un deïnt-Mècle.
La curiosité qui se,porte sur les phénomènes du ciel et sur divers objets
des sciences .naturelle prend un caractère bien diS~rent chez des nations
anciennement civilisées et chez celles qui ont &it peu de progrès dans le
développement de leur intelligence. Les unes et les autres offrent, dans les
classes les plus distinguées de la société, des exemples M'équens de personnes
étrangères aux sciences; mais, dans les colonies et chez tous les peuples
nouveaux, la curiosité loin d'être oiseuse et passagère, naît d'un désir ardent
de l'instruction elle s'annonce avec une candeur et une naïveté qui n'appar-
tiennent en Europe qu'à la première jeunesse.
Je ne pus commencer un cours régulier d'observations astronomiques avant le
28 juillet, quoiqu'il m'importât beaucoup de connoître la longitude donnée par le
garde-temps de Louis Berthoud. Le hasard voulut que dans un pays où te ciel
est constamment pur et serein, il y eût plusieurs nuits sans étoites. Tous les jours,
deux heures après le passage du soleil par le méridien, il-se formait un orage,
et j'eus beaucoup de peine à obtenir dès hauteurs correspondantes du soleil,9
quoique j'en prisse trois ou quatre groupes à différeus intervalles. La longitude
cbronométriquede Cumana ne différa que de 4" en temps de celle que j'ai
déduite des phénomènes célestes; cependant notre navigation avoit duré plus
de quarante jours, et, pendant le voyage à la cime du pic deTéneriSe, l'horloge
avoit été exposée à de grandes variations de température
Il résulte de l'ensemble des observations que j'ai faites, en 1799 et tSoo,
que la latitude de la grande place de Cumana est de 10° 27' Sa~, et sa
longitude de 66" 3o~ 2~. Cette longitude se fonde sur le transport du temps,
sur des distances lunaires, sur Féclipse du soleil du 28 octobre 1799, et
sur dix immersions des satellites de Jupiter, comparées à des observations faites
en Europe. Elle dISère~ très-peu de celle que M. Fidatgo avoit obtenue avant
moi, mais par des moyens purement chronométriques. La plus ancienne carte
que nous ayons du nouveau continent, celle de Diego Ribeiro, géographe de
fempereur Charles-Quint, place Cumana par les 9° 3o~ de latitude~, position

0&<t. <M<f. T. I, p. XTtV.


J5M., T. ï,p. 43-93.
D'âpre Herera, tat. 9° 5o'. (Descripcion de &MIndias oc<-M., p. 9.) D'après la Carte ~fOc~M
Atlantique,/tM&<~a <M< <~)« de la Marine en 1793 ht. 9° Sa. La carte de Ribeiro est de t'année t5ag.
qui diffère de 58~ deIavéritaNe latitude, et d'un demi-degré de celle à
laquelles'arrête Jenerys dans soB~ Pt~o~ f.~Kt~t~He, puMIé en 1794- Pendant
trois siècles on traça toute la cote de !a Terre -Ferme sur un parallèle trop
méridional, parce que, aux attérages de l'île de la Trinité~ les c&arans portent
vers le -nord, et que, d'après l'indication du loch, les navigateurs se croient
plus au sud qu'ils ne le sont réellement.
Le t~ août,un halo, ou couronne lumineuse autour de la lune, fixa beaucoup
l'attention des habitans. On le regarda comme le présage de quelque forte
secousse de tremblement de terre; car, d'après la physique du peuple, tous
les phénomènes extraordinaires sont immédiatement liés les uns aux autres.
Les cercles colorés autour de lalune sont beaucoup plus rares dans les pays
du nord, qu'en Provence en Italie et en Espagne. On les voit surtout, et
ce fait est assezremarquable, lorsque le ciel est pur et que le tempsserein
paroît le plus constant. Sous la zone torride, de belles couleurs prismatiques
se présentent presque toutes les nuits, même à l'époque des grandes sécheresses
souvent, dans l'espace de peu de minutes elles flisparoissent plusieurs fois, sans
doute parce que des~eourans supérieurs changent l'état des vapeurs légères
dans lesquelles la lumière se réfracte. J'ai même observé quelquefois, me trouvant
entre les i5 degrés de latitude et l'équateur, de petits halos autour de Vénus;
on y distinguoit le pourpre, 1 orangé et le violet mais je n'ai jamais vu de
couleurs autour de S~ius, de Canopus ou d'Achernar.
Pendant que le halo fut visible à Cumana, l'hygromètre marqua une forte
humidité; cependant les vapeurs paroissoient si, parfaitement dissoutes, ou
plutôt si élastiques et si uniformément répandues, qu'elles, n'altéroient pas
la transparence de l'atmosphère. La lune se leva, après uue pluie d'orage,
derrière le château Saint-Antoine. Dès qu'elle parut sur l'horizon, on distingua
deux cercles, un grand blanchâtre de ~4° de diamètre, et un petit qui, brillant
de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel, avoit t" 43' de largeur. L'espace entre les
deux couronnes étoit de l'azur le plus <bncé. A 4o° de hauteur, elles disparurent
sans que les instrumens météorologiques indiquassent le moindre changement
dans les basses régions de l'air. Ce phénomène n'avoit rien de frappant, si ce n'est
la grande vivacité des couleurs, jointe à la circonstance que, d'après des
mesuress
prises avec un sextant de Ramsden, le disque lunaire'ne
se trouvoit pas
exactement dans le centre des halos. Sans cette mesure, on auroit pu
croire que l'excentricité étoit l'effet de la projection des cercles sur la concavité
apparentedu ciel L<t forme halosr et
fbHne des baba, et les couleur qne présente l'atmosphère
couleurs que
des Tropiques éclairée par la lune, méritent de nouvelles recherches de ta part
des physiciens. A Mexico, par un temps éminemmment serein, j'ai vu de larges
bandes, ayant toutes les couleurs deTMsy parcourir ta voûte du ciel et converger
vers le disque lunaire, météore curieux qui rappelle celui qui a été décrit
par M. Cotes 3 en t~ï6.
Si l'exposition de notre maison à Cumana favorisoit singutièrement l'obser-
vation des astres et des phénomènes météorologiques elle nous procuroit
quelquefois pendant le jour un spectacle amigeant. Une partie de la grande
place est entourée d'arcades au-dessus desquelles se prolonge une de ces
longues galeries en bois que l'on retrouve dans tous les pays chauds. Cet
emplacement servoit à la vente des noirs amenés des côtes d'Afrique. De tous
les gouvernemens européens, le Danemarck a été le premier, et long-temps
le seul, qui ait aboli la traite, et cependant les premiers esclaves que
nous vunes exposés, étoient venus sur un vaisseau négrier danois. Rien ne
peut arrêter les spéculations d'un vil intérêt en lutte avec les devoirs de
l'humanité, l'honneur national et les lois de la patrie.
Les esclaves exposés en vente étoient de jeunes gens de quinze à vingt
ans. On leur distribuoit, tous tes matins, de l'huile de cocos pour se frotter
le corps et pour rendre leur peau d'un noir luisant. A chaque instant se
présentoient des acheteurs qui jugeoient, par l'état des dents, de l'âge et
de la santé des esclaves; ils leur ouvroient la bouche avec force, comme on

Le <7 août t799 thermomètre, a5°,3~ hygromètre de Deluc, 68°. La lune ayant n" a8~ de
hauteur, le diamètre horizontal de la petite couronne étoit t° 5d, et le diamètre vertical 1° 43'.
Il y avoit, du centre de la lune au bord supérieur du petit balo, 44', et au bord intérieur, 5g'.
Tout l'espace entre le disque lunaire et l'extrémité du petit halo briUoit de couleurs prismatiques.
Le diamètre horizontal du grand halo blanc étoit de 4a" y. Lorsque la lune eut atteint 37° 34'
de hauteur au-dessus de l'horizon, le diamètre du grand halo fut de 44° t0', et la largeur de la
bande laiteuse de 3° 35'. La lune ne montra plus d'eMentricitë, et le petit balo n'avoit que t° 37'
diamètre. Ces mesures ont été prises sans lunette et en ramenant dans te sextant le bord de la lune
de
en contact avec tes extrémités très-tranchées des deux couronnes. U me paroit difEcile d'admettre
que j'aie pu me tromper de 13' sur l'excentricité de la tune la réfraction auroit plutôt diminué
qu'augmenté t'étendue du hato vers le bord inférieur. JI ne faut pas confondre ce phénomène, qui
appartient aux dernières couchesde l'atmosphère, et qui s'observe par nn ciel pur et sans vapeurs visibles,
avec ces cercles cotorés qui se projettent sur des nuages blancschassés par le vent devant le disque lunaire,
et qui n'ont que sept à huit cents toises de hauteur absolue. (Yo~ez Walker Jordan dans le Journ.
de ~Vtc/to&on, Vol. IV, p. t4t; et Optique de ~VeM'tcTt, 1723, p. 476).
La nuit du 8 mai i8o3.
.Sau~A, C<wrt tf~tgM.~ *7G7, T. 1, p. t73, $. tog et p. i~, $. tBg.
tait dans les marchés aux chevaux.Getusageavihssantdate de Afhque, comme
le prouve le tableau fidèle que dans une-dé ses pièces dramatiques 'Cervantes,
sorti d'une longue captivité parmi les Maures, a tracé delà vente des chrétiens
esclaves à Alger. On gémit de penser qu'aujourd'hui même H existe aux
Antilles des colonsEuropéens qui marquent leurs esclaves avec on fer chaud,
pour les reconpoitre lorsqu'ils s'enfuient. C'est ainsi qu'on
traite ceux qui
épargnent aux autres hommes la peine de semer, de labourer et de recueillir
pour vivre, »
Plus étoit vive l'impression que nous fit la première vente des nègres à
Cumana, et plus nous nous félicitâmes de séjourner chez une nation et sur
un continent où ce spectacle est très-rare, et où le nombre des esclaves est
mille
en général pe~ considérable. Ce nombre, en t8oo, n'excédoit pas six
dans les deux provinces de Cumana et de Barcelone, lorsque, à la même
époque, on évaluoit la population entière à cent dix mille habitans. Le commerce
des esclaves Africains que les lois espagnoles n'ont jamais favorisé, est presque
nul sur des côtes où le commerce des esclaves Américains se ~aisoit au seizième
siècle avec une effrayante activité. Macarapàn appelé anciennement Amara-
capana, Cumana Araya et surtout la Nouvelle-Cadix, fondée dans l'îlot de
Cubagua pouvoient alors être regardés comme des comptoirs établis pour
faciliter la traite. Girolamo Benzoni de Milan qui, à l'âge de vingt-deux
ans,
avoit passé à la Terre-Ferme, prit part à des expéditions faites en ï5~2,
sur les côtes de Bordones de Cariaco et de Paria, pour enlever de malheu-
reux indigènes. Il raconte av~ec naïveté, et souvent avec une sensibilité peu
commune dans les historiens de ce temps, les exemples de cruauté dont il
fut témoin, Il vit traîner les esclaves à la Nouvelle-Cadix, pour les marquer
au front et aux bras/ et pour payer le quint aux officiers de la couronne.
De ce port, les Indiens furent envoyés à l'île d'Haïti ou
Saint-Domingue,

'jM?h~o~yom.7f(~M~P~F-mMo,t~84,p.5t6).
La Bn<yere, C~ae~rM, Chap. XI (eF. iyM, p. 3oo). On aime à c:te~ en entier un passage dans
lequel se peint avec force, on peut d!re avec une noble se~értté, l'mMur de l'espèce hunmme.
On trouve (sous la zone torride) certains animaux farouches, des mates et des femelles, répandus
par la campagne, noirs, livides et tout ht&tés du soleil, attacha
remuent avec une opiniâtreté
la terre <}<t'ib fouillent et qu'as
invincible. Bs ont comme une voix artientêe; et, quand ils se lêvent
sur leurs pieds ils montrent une face humaine, et en eBet !b sont des hommes. »
«Noi pigliammo dugento et quarànta schiavi fra maschi e ËMmne, piccoti e grandi. Cosa vera-
mente molto compassionevole da vedere la condutta di queUe mescMne créature, nude, standte,
stropiate. Le infelici madri con due e treSgUaoUMte spalle e in eoUo~ colme'di pianto e didotore
après avoir souvent changé de maîtres, non par voie d'achat, mais parce
quele8soldatsles)0uoientaudé. r
La première excursion ~ue nous fîmes, fut
dïrtgeeveMÏapémasd~
d'Araya et vers ces contrées jadis trop célèbres par la traite des esclaves
et la pèche des perles. Nous nous embarquâmes sur le Rio Manzanares, p~ès
du faubourg indien, le ï<) août, versies deux heures après minuit. Le but
principal de ce petit voyage étoit de voir les ruines de l'ancien château
d'Araya, d'examiner les salines, et de faire quelques observations géologiques
sur les montagnes qui forment la péninsule étroite de Maniquarez. La nuit
étoit d'une fraîcheur délicieuse; des essaims d'insectes phosphorescens brilloient
dans l'air, sur le sol couvert de Sesuvium et dans les bosquets de Mimosa qui
bordent la rivière. On sait combien les vers luisans sont communs en Italie et
dans tout le midi de l'Europe mais l'effet pittoresque qu'ils produisent ne saurait
être comparé à ces innombrables lumières éparses et mouvantes qui embellissent
les nuits de la zone torride, et qui semblent répéter sur la terre, dans la vaste
étendue des savanes, le spectacle de la voûte étoilée du ciel.
Lorsqu'on descendant la rivière nous nous approchâmes des plantations ou
cAa~tM, nous vîmes des feux de )oie allumés par des nègres. Une fumée
légère et ondoyante s'élevoit vers la cime des palmiers et donnoit une couleur
rougeâtre au disque de la lune. C'étoit la nuit d'un dimanche, et les
esclaves dansoient au son bruyant et monotone de la guitare. Les peuples
d'Afrique, de race noire, ont dans leur caractère un fond inépuisable de
mouvement et de gaieté. Après avoir été livré à des travaux pénibles pendant
la semaine, l'esclave, les jours de fête, préfère encore la musique et !a
danse à un sommeil prolongé. Gardons-nous de blâmer ce mélange d'insou-
ciance et de légèreté, qui adoucit les maux d'une vie pleine de privations
et de douleurs!
La barque dans laquelle nous passâmes le golfe de Cariaco étoit très-
spacieuse. On avoit étendu de grandes peau~ de Jaguar ou tigre d'Amérique,

aBitte, legati tutti da corde e di catene di ferro at collo, aUe braccia e alle mani. Si conducono a
Cubagua e tutti si marehiano in faccia e su le braccia con ferro infbcato, segnato d'un C noi eti
capitani ne faoo<~parte a soMati, che gli vendono,o se gU giuocano t'nnocon t'atr~. Se paga il qninto
detle perte, del oro e dei schiavi a gti mSiciati del Re. Bt<teo<M, ~M<. del 7t~bn<<o A~ot~, t565,
p. 4,7 et 9. C'est ainsi que les Phéuiciens et tes Carthaginois cherchoient jadis des esclaves en Europe,
Heyne, C~MMCtt~ T. IU, p. 63.
'Etaternoctitncns.
*Lampyri9itatica,L.noctItnca..
pour que nous pussions reposer pendant la nuit. Nous n'avions pas séjourne
deux mois sous la zone torride~ et déjà nos organes étoientteHement sensibles anx
plus petits changemehs de température, que le froid nous empechoit.de
dormir. Nous vîmes avec surprise que le thermomètre centigrade
se soùtenoit
à 21,8.' Cette observation, très-ctmnue à ceux qui ont vécu long-temps
aux
Indes, mérite l'attention des physiologistes. Bouguer raconte qu'arrivé
au
sommet de la Montagne Pelée, à Me de la Martinique, lui et ses compagnons
trembloient de froid, quoique la chaleur excédât encore 2~ degrés*. En lisant
1 intéressante relation du capitaine Bligh qui, par
une révolte à bord du navire
Bounty, avoit été tbrcé de faire douze cents lieues dans une chaloupe ouverte,
on voit que ce navigateur, entre les io et ta degrés de latitude australe,
souffroit beaucoup plus du froid que de la faim 3. Pendant notre séjour à
Guayaquil, au mois de janvier ï8b3, nous observâmes que les indigènes
se
couvroient en se plaignant du froid, lorsque le thermomètre baissoit à 23",8,
tandis que la chaleur leur paroissoit suubcante à 3o°,5. Six à
sept desrés
suffisoient pour faire naître les sensations opposées du froid et de la
chaleur, parce que, sur ces côtes de la mer du Sud, la température habituelle
de l'atmosphère est de 28" degrés. L'humidité~ qui modifie la force conductrice
de l'air pour le calorique, contribue beaucoup à ces impressions. Dans le port
de'Guayaquil
comme partout dans les basses régions de la zone torride le
temps ne se refroidit que par des pluies d'orage et j'ai observé que
lorsque le thermomètre baisse à a3°,8, l'hygromètre de' Deluc
se soutient
à 5o et 52 degrés t il ë~t au contraire à 3~ degrés
par une température
de 3o°,5. A Cumana, par de fortes ondées, on entend crier dans les
rues
Figure de la terre, p. Hv. La hauteur de ce sommet est de 736 toises d'après Dnpt.get, de
et
G66 toisel d'après M. Le Blond. Cette élévation n'est par conséquent considérable
le sentiment du froid puisse être cansé, comme auChimhorazoet à P:ch:noha,par pas asse~ pour que
la moindre quantité
d'oxygène qu'enlèvent les poumons à nn air dilaté. Si le baromètre, par t6-9 de température
se soutient
a la cime de la Montagne Pelée, à a4 pouce a lignes (.&. Blond, ~oy<~
.MM
~M&< e< dans
<n~r,?MmerM<on~, T. 1, p. 87); I'é)évat:on absolue de ce point/est, d'après la formule de
M. La Place, de 660 toises, en supposant, pour le niveau de la mer, la hauteur du
mercure à
a8 pouces i ligne, et le thermomètre à a5°.
souvent ~<~
B~A, mouillé par à la mer du Sud, mous
At m<.rfht&«<, <M<&<.<~n-
savons
par cette
&.a~, latitude
p.a65et et tempétature
3t6. L'équipage delà de 1~mer
deteauchaloupeétoit
souvent mouillé par li l¡¡mes; mais nous MVODS qu'à cette latitude., la tempéeàtnre de l'eau de la
mer ne
no
peut être au-dessousde ~3< et que le froid produit par t'évaporation est peu considérable pendant des
nuits où la température de l'air excède rarement a~
85°,8 et 86<4 de l'hygromètrede Saussure.
73" Sauss. Si la quantité de vapeurs n'augmentoit pas, tadiSerence des humidités
apparentes ne
sero)tfpede..t.
AM&~ M~CM/Ma~ quoique le thennom~~e exposé & !a pluie
observations, qu'entre
ne baisse qu'à at°,S. Il résulte de l'ensemble de ces
les Tropiques, dans des peines où la température de l'air est~ïejpar, presque
invariablement au-dessus dez~ on désire se couvrir la nuit chaque Ma que,
par un air humide, le thermomètre baisse de 4 a5T degrés.
à
Nous débarquâmes, vers leshuitheures du matin, la pointe d'Araya, près
de la nouvelle ~Mc. Une maison isolée* s'élève dans une plaine dénuée de végé-
taux, près d'une batterie de trois canons, qui est l'unique défense de cette côte
depuis la destruction du fort Saint-Jacques. L'Inspecteur de la saline passera
vie dans un hamac, d'où il donne ses ordres aux ouvriers une barque
Jtt roi (la lancha del n?~) lui porte, toutes les semaines, ses provisions de
Cumana. On est étonné qu'une saline, qui jadis avoit excité la jalousie
des Anglois, des Hollandois et d'autres puissances maritimes, n'ait pas donné
lieu à l'établissement d'un village ou d'une ferme. A peine trouve-t-on, à
l'extrémité de la pointe d'Araya, quelques cabanes de pauvres Indiens
pécheurs.
On découvre à la fois, dans ce site, l'not de Cubagua, les hautes cimes
de la Marguerite, les ruines du château Saint-Jacques, lé Cerro de la Vêla
et la chaine calcaire du Bergantin, qui borne l'horizon vers le sud. Je
profitai de cette vue pour prendre les angles entre ces ditférenspoints,
en les appuyant sur une base de quatre cents toises que j'avois mesurée
entre la batterie et la colline appelée &ï Pe/Mt. Comme le Cerro de la Vela,
le Bergantin et le château Saint-Antoine de Cumana, sont également

Quel froid g/ac~ j'en <«« transi comme si ~OM tMr <&« des montagnes. Le mot provincial
emparamarM ne peut être rendu que par une périphrase trës-Iougoe. Paramo en péruTienPuna est une
dénomination que t'on trouve sur toutes les cartes de t'Ameriqne espagnole.Elle ne signifie danstes colonies
ni un désert, ni une lande, mais un emdr<ntmont)tenxtconvert<t'<urbresrabongris, exposé aux vents, et dans
lequel règne perpétueUententunfroid humide. Sousla zone torride,tes Paramosont généralement de 1600 à
2200 toises de hauteur. Il y tombe souvent de la neige qui ne reste que quelquesheures; car il ne faut pas
confondre, comme tes géographes ont fait souvent, les mots de Paramo et Puna avec celui de
A'i*KK!o, en péruvien ~«teapa, montagne qui entre dans les limites des neigesperpétuelles.Ces notions
ont un grand intérêt pour la géologie et la géographie des végétaux, parce que, dans des contrées
ou aucune cime n'a été mesurée, on peut seformefune idée exacte de la moindre hauteur à laquelle
s'élèvent les Cordillères, en eherchamt sur les cartes les mots de Paramo et de Nevado. Comme les
Paramos sont presque continuellementenveloppésd'une brume froide et épaisse le peuple dit, a Santa-Fe
et & Mexico coe Mt pftntmtto, lorsqu'il tombe une pluie fine et que la température de l'air baisse
considérablement. De paramo on a fait emp<M!)7MrM, avoir froid comme si on étoit sur le dos des
Andes.
Z<tAan<'AerMt<~e&tSa<«M nueva.
visibles à la Punta Arenas située à l?ouest du v~tbge de Maniquarez lea reïevemens
des mêmes objets ontservi à déterminer apprqximatiyem~tla position respective
de plusieurs points qui sont indiqués dans la carte minéralogiqne de la péninsule
d'Araya. H en résulte que la lagune de Tanclenne saline est à penprès par tes
ïo" 33~. La diSérence de longitude entre Cumana etia nouvelle saMne~st, daprès
M. Fidalgo, de 5' 3~ en arc. J'ai déterminé cette même diSerence par le
transport du temps les angles horaires étoient exacts à 3 à 4 secondes
près, mais je n'ai aucune confiance dans le résultat chronométrique~ parce
qu'il ne s'agit que d'un très-petit nombre de secondes, et que l'avance de
l'horloge sur le temps moyen de Cumana n'a pu êfre vérifiée immédiatement
après mon retour, mais seulement quatre jours plus tard.
L'abondance de sel que renferme la péninsule d'Araya fut déjà reconnue 3 par
Alonso Nino, lorsque, sur les traces de Colon, d'Ojeda et d'Amerigo Vespucci, il
visita ces contrées en i 499. Quoique de toutes les nationsdu globe, les Indigènesde
l'Amériquesoient ceux qui consomment le moins de se! ,j)arce qu'Us se nourrissent
presque uniquement de végétaux, il paroit cependant que les Guayqueries
fouilloient déjà les terrains argileux et muriatHeres de la Punta ~~e/:<M.
Même les salines, que l'on appelle aujourd'hui noM~~cj~ et qui sont
situées à l'extrémité du cap Araya, ont été travaillées dans les temps les plus
recMés. Les Espagnols, étaMis d'abord à Cubagua, et bientôt
après sur les
côtes de Cumana exploitoient, dès le commencementdu seizièmesiècle, les marais
salans qui se prolongent en forme de lagune au nord-ouest du Cerro de la Vêla.
Comme à cette époquela péninsule d'Araya ne renfermoit pas de populationstable
les Hollandois profitèrent de la richesse naturelle d'un sol qui leur paroissoit une
propriété commune à toutes les nations. De nos jours chaque colonie a ses
salines particulières,et I~navigation est tellement perfectionnée,que les négocians
de Cadix peuvent envoyer à peu de frais du sel d'Espagne et de Portugal dans
l'hémisphère austral, à une distance de i goo lieues, pour les salaisonsde Montevideo
et de Buenos ayres. Ces avantages étoient inconnus du temps de la conquête;
l'industrie coloniale avoit fait alors si peu de progrès, que le sel d'Araya étoit
transporté à grands frais aux Antilles, à Carthagène, et à Portobelo~. En 160~,
la cour de Madrid envoya des bâtimens armés à la Punta Araya, avec ordre

O&Mn'. <M<r.,T.I, p. 6, n.° ty.


C<M~tn,RMt<.c&oro~ro/!e< p. 123.
3 Muri&te de soude.
~~f~S.~e<~fcAtfM~eC!<Bt«'!<t.(7n/<trnM~Aec~o«o&t-e&tS<tKm<tt!Mefa.)
d'y stationner et de chasser les HoIIandois de vive force: ceux~c' contmu&rent
cependant encore à recueillir furtivement du sel jusqu'à ce que l'on construisit,
en 16~2, près des salines, un fort devenu célèbre sous le nom de
€!Mt<Mo
Santiago, ou de la ~coZ~'M<°~M <<e~~a.
Les grandsmarais salans sont indiquéssurles cart~espagnolestes plus anciennes,
tantôt comme une anse, tantôt comme une lagune, Laet, qui écrivit son <3~Mt
no~Men t633, et qui avoit eu d'excellentes notions sur ces côtes, dit même
tout exprès que la lagune étoit séparée de la mer par un isthme plus élevé que le
niveau de la marée montante. En ~26, un événement extraordinairedétruisit
la saline d'Araya, et rendit inutile le tort dont la construction avoit coûté
plus d'un million de piastres fortes. On sentit un coup de vent impétueux,
phénomène très-rare dans ces parages où la mer n'est généralement pas plus
agitée que l'eau de nos grandes rivières. Le flot se porta bien avant dans les
terres, et, par l'effet de l'irruption de l'Océan, le lac salé fut converti en un
golfe de plusieurs milles de long. Depuis cette époque, on a établi des réservoirs
ou MMcf~ artificiels au nord de la rangée de collines qui sépare le château
de la côte septentrionale de la péninsule.
La consommation du sel s'élevoit, en ï~gget 1800, dans les deux provinces
de Cumana et de Barcelone, à neuf ou dix mille fanegas, chacune de seize
arrobas ou quatre quintaux. Cette consommation est très-considérable, et donne,e
en décomptant sur la population totale cinquante mille Indiens qui ne mangent
que très-peu de sel, soixante livres par individu. En France, d'après M. Necker,
on ne compte que douze à quatorze livres, et cette diSérence doit être attribuée à
la quantité de sel employée dans les salaisons. La viande de bœuf salée, appelée
tasajo, est l'objet d'exportation le plus important du commerce de Barcelone. Des
neuf à dix mille fanegas que fournissent les deux provinces réunies, il
n'y en a que trois mille produites par la saline d'Araya; le reste est tiré des
eaux de la mer au Morro de Barcelone, à Pozuelos, à Piritu et dans le

A l'époque <!e mon voyage, le gouvernement de Cumana comprenoit tes deux provinces de la Nouvelle-
Andalousie et de la Nouvelle-Barcelone.Les mots province et ~ocentM ou go<tfeftMM<n< de Cumana ne
sont par conséquent pas synonymes. Un Catalan, Juan de Urpin qui avoit été tour à tour chanoine,
docteur en droit, avocat à Santo Don)!ngo et simple soldat au château d'Araya, fonda, en 1636, la
vi)le de 2Vm!p<t Barcelona et essaya de donner le nom df NonTeUe-Catalogne ( AMffo Ca<Aa&B<t ) à la
province dont ta ville, récemment construite, devenoit la capitale. Cette tentative est restée infructueuse,
et c'est du chef-lieu que la province entière'a pris sa dénomination. Depuis mon départ d'Amérique elle
a été étevee au rang de GoMerno. Dans la NouveUe-Andatoasie,le nom indien de Cumana a prévalu
sur ceut de A't<ef« 2Me<~o et Nueva C<"<Ma, que l'on trouve sur les cartes du '7.°" siècle.
So~o ~M~?. Au Mexique, te seut lac salé du .Pe~on ~B~neo fournit par
an plus de a5o,Ooo~ncgN.f de set Impure
La province de Caracas a de belles- salines aux écueits de &M ~Ro~MCf;
celle qui existoit jadis à la petite fie de ta ?~a,
où te aot est fortement
imprégné de muriate de soude, a été détruite par ordre du gouvernement
espagnol. On a fait un canat par lequel la mer a un libre accès aux marais
salans. Les nations étrangères qui ont des colonies aux Petites Antilles-,
fréquentoient cette inhabitée, et la cour de Madrid, d'après les vues d'une
politique ombrageuse, cràignoit que la saline delà Tortuga ne donnàt lieu à un
établissement stable qui favorisât le commerce illicite avec ta Terre-Ferme.
La régie royale des satines d'Araya ne date que de Fannee t~ga. Avant
cette époque, elles étoient entre les mains de pécheurs indiens qui fabri-
quoient le sel à leur gré, et le vendoient en payant au gouvernement la
somme modique de 3oo piastres. Le prix de ta J~MM~M étoit alors de
4 réaux mais le sel étoit extrêmement itapur, grisâtre, mêté de parties
terreuses, et surchargé de muriate et de sut&t& ~e~~Bagnésie. Comme en
outre l'exploitation ou te travail des ~CM/n~~f se faisoit d'une manière
très-irrégutière, on manquoit souvent de sel pour ta salaison des viandes
et des poissons, circonstance qui influe puissamment dans ces contrées sur
les progrès de l'Industrie, le bas peuple indien et les esclaves se nourrissant
de poissons et d'un peu de <<M<yo. Depuis que la province de Cumana dépend
de' l'intendance de Caracas, la vente du sel se fait
par régie ;,et la fanega, que
les Guayqueries vendoient ~une demi-piastre, coûte une piastre et dernier
Cette augmentation de prix est foiblement compensée par une plus grande
pureté du sel et par la facilité qu'ont les pêcheurs et les Cotons de s'en procurer
en abondance pendanttoute l'année. L'administration de la saline d'Araya rendoit
à la trésorerie, en i ~9~, un produit net de 8000 piastres.
Il résulte de ces notions statistiques que la fabrication du sel n'est pas d'un
grand intérêt, si on ta considère comme une branche d'Industrie. Elle mérite plus

JVoMM~-EtjM~M,Vol. Iï, p. 56a et S<)5.


Dans cette Relatï;ra" comme dans 1'iaea's politique sur la -tout les prix sont
évalués en piastres fortes et en réaux d'argent; jM&«~t« mr &t~K'MK'<'&-J5'<p<tcne,<o<t*Te< pnx &sont
en
ptastreforteou
piastre fortes
atoSsous~monnoIede
piastres ÏMt
(~Vot<f.Vot.p
France. (Nouv.-Esp.,
monnoie'de d'argent, de5tn,6t6etM6.)
CM t<e<nn[ emtMtent
mne

Il La fanega se vend aux Indiens et aux pêcheurs qui te paient pas les droits royaux (<~r«~M
reales) à Punta Araya 6, Comana 8 feo~. Les prix tont, pour ]tes a)tfM castee, à Araya t0,
3 Cumana 12 rea<M.
notre attention à la nature du sot qui ren&nhe les Btatais salans.
cause de
Pour bien saisir la liaison geotogique dans laquelle se trouve le terrain
muriatM~re avec les roches de formations plus anciennes, nous allons )eter
un coup dcei! générât sur les montagnes voisines de Gumana et sur celles
de la péninsule d'Araya et de t'~e de la Marguerite.
Trois grandes chaines s'étendent parallèlement de t'est a l'ouest. Les deux
plus septentrionales sont primitives, et renferment les schistes micacés du
Macanao et du VaMe San Juan, de Maniquarez et de Chuparipari: nous les
désignerons par les noms de Cordillère de l'ile de la 3~~erïtc, et Cb~t~e~e
<f~f/M~o/ la troisième chafne, la plus méridionale de toutes, la Cordillére du
Bergantin et du CXMoRor, n'offre que des roches de formation secondaire; et,y
ce qui est assez remarquable~ quoique -analogue à la constitution géologique
des Alpes à l'ouest du St~-Gothard, le chaînon primitif est beaucoup moins
élevé que celui qui est composé de roches secondaires'. La mer a séparé les deux
Cordillères septentrionales, celles de l'île de la Marguerite et de la péninsule
d'Araya; les petites Mes de Coche et de Cubaguasont les restes de ce terrain
submergé. Plus an sud, le vaste golfe de Cariaco se prolonge, comme une
vallée longitudinale formée par l'irruption de t'Océan, entre les deux chaî-
nons d'Araya et du Cocollar, entre les schistes micacés et le calcaire alpin. Nous
'verrons bientôt que la direction des couches, très-reguHère dans les premières
de ces roches, n'est pas tout-a-fait parattèle à la direction générale du golfe.
Dans les hautes Alpes de l'Europe, la grande vattée longitudinale du Rhône
coupe aussi quelquefois sous un angle oblique, les bancs calcaires dans
lesquels elle a été creusée.
Les deux chaînons paraltètes d'Araya et du Cocollar sont liés, à l'est de
la ville de Cariaco, entre les lacs de Campoma et de Putaquao, par une sorte
de digue transversale, qui porte le nom de Cerro de Meapire, et qui, dans
des temps reculés en résistant au mouvement des flots, a empêché les eaux
du golfe de Cariaco de s'unir à celles du golfe de Paria. C'est ainsi qu'en Suisse,

DaM la NonreUB-Andatousie,la CoraM~e <&< CoeoRar n'ojtre nuHe part de< roches ptimtttTBt. Si
cet roches forment te noyau du cbahmn, et s'élèvent au dessus du niveau des plaines voisines, ce
qui est peu probable, il faut croire ~u'eUet sont toutes recouvertes de calcaire et de grès. Dans tes
Alpes de la Suisse, au contraire, le chainon que l'on désigne sous le nom t~op vague de cAa~ton
latéral et co~cattie, offre des roches primitives qui, d'après tes belles observations de MM. Escher et
Léopold de Buch, sont souvent à découvert jusqu'à huit cent et mille toises de hauteur.
Fret de Sitten. ~~<tM, T IV, p. 335. Bemott/K, Geo~n. C~&ef<M-A(~er&~«'e<p.35-4t.
la
le chaîne centrale. celle
chame centrale, ceHe oui
quicasse parlecol
passe oar le-col de
de F'erfex. leS Simplon, le St.-Gothard
ferrex, le
et le Sptùgen, tient, au nord et an sud, a deux chatnes latérales, par lea
montagnes de la Fourche et de, la Maloya. On aime à rappeler les analogies
frappantes qu'offre dans les deux continens la charpente extét~eure du
globe.
La chaîne primitive d'Araya se termine brusquement dans le méridien
du village de Maniquarez. Nous ferons voir plus bas que, trente-cinq
lieues à l'ouest, on en trouve la continuation dans tes gneiss de la tSN&t <~e
C~naca~ et dans le granite de las Trincheras nous noua bornons ici à ce qui a
directement rapport aux environs de Cumana. La pente occidentale de la
péninsule d'Araya, de même que ta plaine au milieu de laquelle s'étève le
château Sainte-Antoine, est recouverte de formations très-récentes de grès et
d'argite métés de gypse. Peut-êtreces mêmes formations ont-ettes rempli jadis les
vallées longitudinales occupées aujourd'hui par l'Océan) et peut-être ont-elles
favorisé 1 irruption des eaux, en opposant moins de résistance que les schistes
micacés et le calcaire alpin. Près de Màniquarez, une brèche ou grès à ciment
calcaire, qu'il est aisé dé confondre avec une véritable roche calcaire, est
immédiatement placée sur le schiste micacé; tandis que, sur la côte opposée,
près de Punta Delgada, ce grès couvre un calcaire compacte, gris-bteuâtre,
presque dépourvu de pétrifications, et traversé par de petits filons de chaux*
carbonatée, cristaHisee. Cette dernière roche est analogue, à la pierre calcaire
des hautes Alpes'.
La formation de grès,extrêmement récente de la péninsule d'Araya,
renferme; i", près de Punta Arenas, un grès stratifié, composé de grains très-
fins qui sont liés par un ciment calcaire peu abondant; 2. au Ce/vu de la
~e/a, un grès schisteux dépourvu de mica et faisant passage à l'argile
schisteuse 3 qui accompagne la houille; 3.°, sur la côte occidentate, entre Punta
Gorda et les ruines du château de Santiago, une brèche composée d'une
innombrable quantité de coquilles marlaes pétriBBes et réunies par un ciment
calcaire auquel sont mêlés des grains de quarz ~.<* près de la pointe du
Barigon, où Fou exploite la pierre employée pour les constructions à Cumana,
des bancs de calcaire coquillier blanc-jaunâtres, dans lesquels on reconnott
5.
aussi quelques grains épars, de quarz; au PeM<Mn<?g7M~,& la cime du Cerro de
~~penttt/t~etn.
&!not!t<emeeAte~er.
Sc/tM/e~Aon.
un calcaire c~pactegns-bleaatt~.aMeztendre, pF~~ de
pétriScations, et recouvrant le grès schisteux. Quelque extraordinajr~qa~ puisse
paro~tM ce mélange de gfè& et de calcaire compacte, on ne saaMit douter
que ces couches appartiennent à une seule formation. Les roches secondaiDes
très-récentes offrent partout des~ phénomènes analogues la molasse-du pays de
VaudMnferme un calcaire coqMUlier fétide~, et le c~~ne c~ntA~ des bords de
la Semé est quelquefois mêlé de grès*.
Les couches de brèches calcaires que l'on peut examiner le mieux, en allant,
le long de là côte rocheuse, de -Punta Gorda au .châteaud'Araya, sont composées
d'une infinité de coquilles pé!agiqnes de quatre à six pouces de diamètre et en
partie bien conservées. On y reconno~t, non des ammonites, mais des ampullaires,
des solens et destérébratutes La ptupart de ces coquilles, sont métées; les
huîtres et les pectinites sont qne!que(bis disposés par famille. Toutes se détachent
facilement, et leur intérieur est rempli de cellulaires et de madrepores tossUes.
Autrefois, en examinant les bancs de grès qui, à l'extrémité septentrionale
de la Punta .~y~c, sont fréquemment baignés par la mer, j'avais pensé
que des coquules univalves, ressemblant au genre Hélix, et mêlées aux
coquilles bivalves pélagiques, appartenoient à des espèces Ruviatiles Ce
mélange se trouve en effet dans le calcaire de très-nouvelle formation qui
recouvre la craie du bassin de Paris; mais, ponr vérifier un fait si important,
il faudroit avoir sous les yeux les coquilles fossiles d'Araya et les examiner
de nouveau avec cette scrupuleuse exactitude quont mise récemment dans
ce genre de recherches MM. Lamarck, Cuvier et Brongmart.
Nous venons de nommer les schistes micacés de Maniquarez et de Chu-
paripari, la formation de ea~H/ic~~MH de Punta Delgada et du Cocollar,
et celle de grès, de brèches calcaires et de calcaire compacte très-récent, que l'on
trouve réunis à l'extrémité occidentale de.la Punta Araya, comme au château
Saint-Antoine de Cumana. Il nous reste à parler d'une quatrième formation
qui repose probablementsap le grès calcaire d'Araya, je veux dire de
rargile THM/M~/ë~
Cuvier et Bron~tM~ Geogr. min. des ettfomntde /'«TM, t8n p. 18, a5 et l35.
~!«M<,7.eAr&<K'A<&fCefjpMMM, T. n, p. 44t.
D'âpres l'observation intéressante de M. Bendan (Voyez Cttfter << Bn<~ttMtf<, c. p. 89).
Des échantillons du grès oa brèche coquillière d'Araya te trouvent parmi les smites géotogiquea
que j'ai envoyées, en t8oo, au cabinet du roi d'Espagne à Madrid. Nous n'enpoMédons pas dans les
collections que nous avons déposées a BerII<t et à paris.
J'invite les voyageurs minéralogistes à euminer plus particulièrement le Cerro de la Vêla. La
M-l€Bt!cH~!rc~eM-~aaa!ogtt~a~j~fA~~q~
:tte~argi!e~dM~<mp!'égné~ p~ti~s~ ~~t c~: m'e,eu.
p~e ~a~retlei~it ,a,
sel_

de Bercbtesgaden~ns.y~~nq~
I gemme (le MtéP~~ ~,a~tü.de
Bercb.ésgadén~):,et¡,(lâ..&t~'PêrJqtteln&idJq~iI'lè ..de~lpaêJJUra.
~ipaqttrr~ax
EHe est généMiemen~gris'de &mée~
masses ptus solides d'un brun ~notr~M) a ça
conchoïdct <3~ ~gmeas~t~~poa< de~Iong'o~
anguleuse. Lor~qu~ls sont très- petits~ Ils donnent & ceMe ~t~i~m~'iKpect
porpbyroïue. On y trouve disséminas, 'comme noua l'avons indiqué plus
haut, soit en nids, soit en petits Ëlons, de ta séténite et plus FMçntent
du gypse fibreux. Mest assez remarquable que cette couche d'argile, denneme
que les bancs de selgeminepuretle .fo~Ao~ en Eufope, nerenterment
presque jamais de coquilles~ tandis qae tes roches circonvoisines eh oBrent
engrandeabondance. ,t,'
Qaoique le mari&te de soude ne se trouve pas en parties visib!es dans Fargite
d'Araya, on ne peut douter de son existence. H se montM en grands cristaux, si
Fon humecte !a masse avec de t'eau de p!uie, et qu'on l'expose au sotei!. La
Lagune, à Festda château de Santiago, o&e tous tes p~nom&nes qui ont ëtë
observés dans tes tacs sa!es de ta Sibérie, décrits par Ï~pechin,Gme!in et
Pajtas. Elle ne reçoit cependant que tes eaux pluvia!es qui s'innitrent à travers
les bancs d'argile, et qui se réunissentau point le plus bas de ta péninsute.
TandtS\que ta Lagune servoit de saline aux Espagnols et aux HoMandois, elle
ne commnniquoit pas avec la mer; aujourd'hui, on a de nouveau interrompu
cette communication, en plaçant des fascines a t'endroit où tes eaux de
l'Océan avoient fait une irruption en ï~6. Après de grandes sécheresses
on retire encore, de temps en temps, du tond de la ZcgM!e, des masses de
muriate de soude cristallisé et très-pur, d'un volume de l~rois ou quatre pieds

pierre catcMre des FehM negrM Mpose MF une a~!)e ~dt~NMe, mèMe de~MMe quarzeM; mxMt t<em
né pte~e que fergHe muriatt~re des MtiMttmtd'âne ~nmattonplus tmoxmte ~ue eftte M~ite <~t)Ne)Me
ou qn'eile iJtBme avec dM )bancs de gréa. Aucom pB'H n'aputt <t6 cre~ deM cet contres, rien ne peut
Moas ttMtnure tnr !a superposition des couches. Lea btMs de gre< catc.nre, que t'on trowe au nord
du tac M)ë et près des cabme< de pecheum, sur la c&te eppoeee
au cap MaeMMO, m'oot para Mrtir
<Mt-7eMOM del'argHemunati&re.
Près de Santa-Fe de Bogota. Cette SnmUon d'<t<~t~ 'MM-Mt~ toog-te~pt negM~ d'H" les
!e<
t~stëmes de géogmotie, caraetérMB le eet ~emme p!M qae te ~ypM teeomdaire atteien (<î&<~r
~M'Sy) qui repMe sur le MoAtteM ou co~c<M~ <~<m, comme je t'ai &it voir en '798, dan*
mon ouvrage sur tes'<~<<<e<mHMt,(Ce&i<r<fMtM<er<n<McAe)tC<Mor<<t.t43.)
En ~n<< remues dem a deax.
cubiques. Les eanx satées du tac, exposées a l'ardeur da~Iet!
à leur surface; des croûtes de set, formées dans une solution satarëe, tombent
au fond) et, par l'awaetioa entre des cristaux d'une même nature et
d'une même forme, les masses cristattisées s'aggrandissent de
jour en jour.
On observe en général que l'eau est satée partout o~ il s'est forme des mares
dans le terrain argileux. !t est vrai que, pour exploiter la nouvelle satine, près
de la batterie d'Araya, on reçoit tes eaux de la mer dans dcs~a~c~, comme
à i'ue de la Marguerite
aux marais salans du midi de la France; mais,
près de Pampatar, on fabrique-le sel en n'employant que les eaux douées,
qui ont lessivé fargile muriatifere.
Il ne faut pas confondre le sel disséminédans ces terrains argileux, avec celui
que renferment les sables des plages et que l'on bonifie sur les côtes dé
Normandie Ces phénomènes, considérés sous le rapport géognostique,
n'ont presque rien de commun. J*ai vu de l'argile murlatifère au niveau
de l'Océan, à la Punta Araya, et à deux mille toises de hauteur dans les
Cordillères de la Nouvelle Grenade. Si dansie prëmiëfdë ces endroits elle se
~t~d'une brèchecoquillière très-récente, elle forme contraire
trouve placée an-dessas au
en Autriche, près d'Ïscbe!, une couche 'puissante dans le calcaire alpin qui,
quoique également postérieur à l'existence des êtres organisés sur le globe,
est cependant d'une haute antiquité, comme le prouve le grand nombre de
roches qui lui sont superposées. Nous ne révoquerons pas en doute que le sel
gemme pur3, ou mêlé à l'argile muriatifère*, ne puisse être le dépôt d'une
mer ancienne; mais tout annonce qu'il s'est formé dans un ordre de choses
qui ne ressemble aucunement à celui dans lequel les mers actuelles, par une
lente évaporation déposent quelques parcelles de muriate de soude sur tes
sables de nos plages. De même que te soufre et les houilles appartiennent
à des époques de formation très-éloignées les unes des autres, le sel gemme
se trouve aussi, tantôt dans le~Me de t7N/M~KMt~ tantôt dans le calcaire

Danstn baie d'Avranches et dans beaucoup d'autresparties de t'Earope. Chaptal, C~t)!M<t<na)&ot«!e


<tM;ar«,T.tV,l6t.
J!«cA, Ceo~Mtf. B<'oto<'A<M<tgim,T. ï, p. ~33.
Cen~ de WIeUcz~a et du Pérou.
4 Celui de HaHein, Ischl et Zipaquira.
5 t~er~m~~M, dans le tctmte de transition:de t'AJtêe blanche et entre le &rauwac~e
et le calcaire
noir de transition, près de Bex, au-dessous de ta Dent de Chamoasaire selon M. de Buch.
<i~Mn tantôt dans une argile muriatiferepeeouvMnt te g~c~ co~M<Mt<cr tF&s-
récent, tantôt -enfin dans un gypsepostérieur à la craie.
La nouvelle saline d7Araya renferme cinq réservoirs ou r~ef~~ dont les
plus grands ont une forme régutierie et deux mute trois cents toises carrées
de surface. Leur profondeur moyenne est de huit pouces. On se sert à la
fois des eaux de pluie, qui, par infiltration se réunissent au point le plus bas
de la plaine, et de l'eau de la mer que l'on fait entrer par des canaux ou
TMarteZ&ere.~ lorsque le flot est poussé par le vent. La position de cette
saline est moins avantageuse que celle de la Z<o~HMe. Les eaux qui se jettent
dans celle-ci viennent par des pentes plus inclinées, et ont lessivé une plus
grande étendue de terrain. Les indigènes se servent de pompes mues à bras
d'hommes pour transporter t eau de ta mer d'un réservoir principal dans les
vasets. I! seroit cependant assez facile d'employer le vent comme moteur, la brise
soufflant toujours avec force sur cette côte. On n'a jamais pensé ni à emporter tes
terres déjà lessivées, comme cela se pratique de temps en temps t'tfe de la
Marguerite, ni à creuser des puits dans l'argue muriatifere, pour trouver
quelques couches plus riches en muriate de soude. Les .MU/~Mrw se
plaignent en général du manque de pluie; et, dans la nouvelle saline, il
'~HaU en Tyrol.
Punta Araya.
Gypse de troisième formation parmi les ~M< Mpon<&t<~e<. La ptwttte~w formation jren&rme le
gypse dans lequel se trouvent les sources salées de la Thuringe, et qui est placé, soit daus le calcaire
alpin ou McA~em,auquel il appartientessentiellement(fftMt~m, Geo~mMt. ~M&e<<en, T. !t, p. t9t),i
soit entre le Mc~tem et le ea&at~~jMM, soit entre le wA<tem et le grès nouveau. C*e<t ht ~m«
encten de formation secondaire, de l'école de Wemer (<M<frer ~ï~~M), qu'on ponrroit pretque
appeler de préférence ~pM m~Mtt~ La seconde formation se compose du
gypse Sbrenx placé Mit
dans la mo~Me ou grès nouveau, soit entre celai-ci et le calcaire supérieur Elle abonde argile
en commune
qui dinëre essentiellement du .Sa&~ea ou <t~& nM<fM< La <n)Mt~M formation de gypse est plus
récente que la craie; c'est elle qui ren&rme le ~pm oMfme<M de Paris, et, comme il pafoit fesutter du
recherches de M. SteNens ( Geogn. ~a/%<M, i8to, p. t4a), le gypse du Segeberg, Holstein, dans lequel
en
le sel gemme est disséminé quelquefoisen nids très-petits (Jtn<MrZ,t«er<t<ttr.-Ze~ )8t3, ton). Le
p. gypse
deParis, placé entre une pierre calcaire à cérithes qui recouvrela craie et nu grès sans coquilles, distingue
se
par des ossemens fossiles de quadrupèdes détruits, tandis que les gypses du Segeberg et deLunebonrg, dont le
gisement est moins certain, sont caractérisés par les boracites qu'ils enveloppent.Dent autresformations,
de beaucoupantérieures aux trois que nous venons d'indiquer, sont le
g~Mt <& <FWtM<ton ( iye&o~oMMMtt)
d'AigIe,etIe~~tMM<~(C~MM)delavaMée Canaria près d'Airolo. Je pense rendre service petit
au
nombre de géologues qui préfèrent la connoissance des faits positifs à des spéculations
tmr t'onguMdes
choses, en leur fournissant des matériaux d'après lesqueb ils pourront généraliser leurs idées
sur le
gisement des roches dans les dem hémMph&res. L'<Ht<-<MM«. relative <~< ~on~~M
est l'objet principal
d'une science qui doit nous faire conno:tre la <M~c& du globe" c'est-à-dire la
nature et la Mperposi-
tion des coucbes pierreuses qui constituent la ero< e.r<~MMre de
notre planète.
me paro~tfdimcHe de~détermiaer quelle est la qoanttté de sel qut est dac
uoiquement à l'eau de la mer. I~s indigènes l'évahtent à on sixieo~ produit
total, ï~'évaporation est ext~memeot forte,
e~ ,par%Je: ,'moo\'emeJ,lt
constant de l'air aussi la ~c~cd~ sel s~Mt dix-huit à vingt jours après qu'on
a rempli les bassins. Nous trouvâmes 'la
température de l'eau salée, dans
les 'M<Me~~ de 3a~5, tandis ~ue Mait~ & fombre, étoitdè a~2, et le sable
des côtes, à six pouces de profondeur, de ~a",5. Nous fumes surpris de voir
que le thermomètre, plongé dans la mer, ne montoit qu'a t3",t. Cette
basse température 'est peut-être due aux bas-fonds qui entourent la péninsule
d'Araya et Mie de la Marguerite, et sur les accores desquels les couches deau
Inférieures se mêlent aux eaux de la sur&ce.
Quoique le muriate de soude, soit fabriqué avec moins de soin à la péninsule
d'Araya que dans les salines d'Europe, il est cependant plus pur, et renferme
moins de muriates et de sulfates terreux. Nous ignorons si cette pureté doit être
attribuée a !a partie du-sel qui est tbumie par la mer; car, quoiqu'H soit
extrêmement probable que la quantité des sets dissous dans les eaux de TOcéan
est à peu près la même 3 sous toutes les zones, il n'en est pas moins incertain si
la proportion, entreje muriate de soude, les muriate et sulfate de magnésie
et les sulfate et carbonate de chaux, est également invariable
Après avoir examiné les satines et terminé nos opérations géodésiques,
nous partîmes au déclin du jour pour coucher à quelques milles de distance
dans une cabane indienne près des ruines du château d Araya. Nous nous
fîmes précéder par nos instrumens et nos provisions; car, fatigués par l'exces-
sive chaleur de l'air et la réverbérationdu sol, nous ne sentions de l'appétit, dans
ces climats, que le soir ou à la (ra!cheur du matin. Nous traversâmes, en
nous dirigeant vers le sud, d'abord la plaine couverte d'argile muriatifere et

Le jg a<t~t )7<)9, à trois heures après midi.


Voyez plus haut, p. ay5.
A l'exception des
mers médtterranées et des régions où se forment les glaces polaires. Voyez p&«
)
A<ta<, pag. ;4 et ~<y. Cette égalité de salure des eaux de la mer ( de o,oa4 à o,M8 rappelle t'uni~rmité
beaucoupplus grande encore avec taqueMe t'oxygène est répandu dans l'Océan aénen. Dans l'un et t'antre
de ces étémens, tes courans étabtistent et conservent l'équilibre entre tes parties dissoutes ou at&tées
entre e!tes(B<y~'et Cook, th-~Mm~Otten' 345.).
lavoisier à trouvé que, dans tes eaux de la mer, près de Dieppe, la quantité de muriate de soude
est à cette des autres sels comme 9,36 à t. D'après MM. BouHton-tjagrangeet Vogel, cette proportion
est comme a,6o à t. Voy. les observations judicieuses de M. Thomson, dans sa CAtmM~T.VÏ,p.346-35~.
(Henri, Phil. ThnM. <0<o, P. Ï~. o~ e< <ta et ~<Bna~< de, C&tnMe t. ~JCXX~7f, f. <o3-.to~).
dépourvue de végétaux) puis deux chames de ~oitiaes de grès, ientre I~squeUe~
est placée la Lagune.. La nuit nous surprit, tandis que Nous suivions <Mf
sentier étroit bordé d'un côté par ta mer, et de tautre par des bancs de
roches coupées à pic. La marée montoit rapidement et rétrécissoit notre chemiti
à chaque pas. Arrivés au pied du vieux château d'Araya, nous jotHfmes de
la vue d'un site qui a quelque chose de lugubre et de romantique. Cependant
ni la fraîcheur d'une sombre forêt, ni ta grandeur des ibrmes végétâtes né
relèvent la beauté de ces ruines. Fsolées sur une montagne nue et aride, cou-
ronnées d'agave, de cactus colonnaires et de mimoses épineuses, elles ressemblent
moins aux ouvrages de l'homme qu'à ces masses de rochers brisées lors des
premières révolutions du globe.
Nous voulûmes nous arrêter pour admirer ce spectacle imposant, et
pour observertie coucher de Vénus, dont le disque paroissoit par intervalles
entre les masures du château mais le mulâtre qui nous servoit de guide
étoit excédé de soif, et nous pressoit vivement de rebrousser chemin. M
s'étoit aperçu depuis long-temps que nous étions égarés; et, comme H se ~attoit
d'agir sur nous par la crainte, il par!oit sans cesse du danger des tigres
et des serpens à sonnettes. Les reptiles venimeux sont en effet très-communs
près du chateau d'Araya, et deux jaguars avoient été tués depuis peu à
len~rée du village de Maniquarez. A en juger par les peaux qu'on avoit
conservées, leur taille ne cédoit pas beaucoup à celle des tigres de t'Inde.
Nous avions beau faire observer à notre guide que ces animaux n'attaquent
pas les hommes sur des cô<~s ou les chèvres leur fournissent une abondante
nourriture, il fallut céder et retourner sur nos pas. Après avoir marché trois
quarts d'heure sur une plage couverte par la marée montante, nous lûmes
rejoints par le nègre qui avoit porté nos provisions; inquiet de ne pas nous voir
arriver, il étoit venu au-devant de nous. H nous conduisit, à travers un bosquet
de raquettes, à une cabane habitée par une famille indienne. Nous y fumes
reçus avec cette franche hospitalité que fou rencontre dans ces pays parmi les
hommes de toutes les castes. L'extérieur de la cabane, dans laquelle nous
tendîmes nos hamacs, étoit très -propre; nous y trouvâmes du poisson, des
bananes, et ce qut, dans la zone torride, est préférable aux atimens lès plus
exquis, de l'eau excellente.
Le lendemain, au lever du soleil, nous reconnûmes que la cabane dans laquelle

nous avions passé la nuit faisoit partie d'un groupe de petites 'habitations
situées sur les bords du lac salé. Ce sont les foibles restes d'un village considérable
qui s'étoit J~MBé jadis autourdu château. Les MÎnes d'aae ëgUs<* se présentoient
énoncées dans le sabtë et couvertes de brooMaiUes. LonMpt'em iy6a, pour
épa<-gner les irais qu'exigeoit l'entretien de la troupe, le château d'Araya fut
totatement démoli, les ïndiens et les gens de couleur, établis dansée voisinage,y
émigrèrent peu à peu pour se &cer à Maniquarez, à CarMtCo ~t dans le &u-
bourg des Guayqueries à Cumana. tin petit nombre~ retenu par l'amour du
sol natat, resta dans cetendroitstérile et sauvage. Ces pauvres gens vivent
de la péche qui est extrêmement abondante sur les côtes et les bas-fonds
voisins. Ils paroissoient contens de leur position, et trouvoient étrange qu'on
leur demandât pourquoi ils n'avoient pas de, jardins et ne cultivoient pas
des plantes alimentaires. Nos jardins, disoient ils, sont au delà du golfe
en portant du poisson à Cumana, nous nous procurons des banaaes, des
cocos et du manioc. Ce système d'économie, qui flatte la paresse, est suivi
à Maniquarez et dans toute la péninsule d'Araya. La principale richesse des
habitans consiste en chèvres qui sont d'une race très-grande et très-bette. Ces
chèvres errent dans les campagnes comme celles du Pic de TënérISe elles sont
devenues entièrement sauvages, et on les. marque comme les mulets, parce
qu'il seroit difficile de les reconnoftre à leur physionomie, à leur couleur
et à la disposition de leurs taches. Les chèvres sauvages sont d'un brun
fauve et ne varient pas de couleur comme les animaux domestiques. SI, dans une
partie de chasse, un colon tue une chèvre, qu'il ne regarde pas comme sa
propriété, il la porte de suite au voisin à qui elle appartient. Pendant deux
jours, nous entendîmes citer partout, comme un exempte d'une rare perversité,
qu'un habitant de Maniquarez avoit perdu une chèvre dont probablement
une famille voisine s'étoit régalée dans un repas. Ces traits qui prouvent une
grande pureté de mœurs parmi Je bas-peuple, se répètent encore souvent
dans le Nouveau-Mexique, au Canada et dans les pays situés à l'ouest des
Atteghanys.
Parmi les gens de couleur dont les cabanes entourent le lac salé, se trouvoit un
cordonnier de race eastillane. II nous reçut avec cet air de gravité et d'amour-
propre qui, dans ces climats, caractérise presque tous ceux qui croient
posséder un talent particulier. 11 étoit occupé à tendre la corde de son arc et
à aiguiser des flèches pour tirer des oiseaux. Son métier de cordonnier ne. pouvoit
être lucratif dans un pays dont la plupart des habitans vont pieds nus
aussi se plaignoit-il de ce que, par te renchéris&ment de la poudre d'Europe
un homme de sa qualité étoit réduit à employer les mêmes armes que les
Indiens. C'étoit le savant du lieu; it connoissoit la Ïbrmation da se! par l'!n'-
âuenee du soleil et de !& pleinet lune, les aymptômes des tretiftbiemens de
terre, les Indices par lesquels on découvre les minè~d'o~ et d'argenté et les `
plantes médicinales qu'il divisoit, comme tous les colons depuis te Ghilt
jusqu'en Gallfbmie.en plantes c&aM~ et~/hQiM?.f Ayant rasseStbM tes tra-
ditions du pays, .il,.nous donna des détails curieux sur tes perles de ~ubagua,
objets de luxe qu'il traitoit avec le dernier mépris. Pour faire voir combien les
livres saints lui étoient familiers., il septaisoitàciterJobqui préféroit la sagesse
à toutes les perles de finde. Sa philosophie étoit circonscrite dans le cercle
étroit des besoins de ta vie. Un ~ne bien robuste, qui put porter une forte
charge de bananes à t'embàrcadere~ëtoit l'objet de tous ses désirs.
Après un tong discours sur le néant des grandeurs humaines, il tiray d'une
poche de cuir des pertes bien petites et bien opaques, qu'il nous força
d'accepter. Il nous enjoignit en même temps-de marquer sur nos tablettes, qu'un
cordonnier indigent dAraya, mais homme b!anc et dé race noble castiHane,
avoit pu nous donner ce qui, de l'autre côté de la mer', étoit recherché
comme une chose très-prëcieuse.Je m'acquitte un peu tard de la promesse
que je fis à ce brave homme, et je me félicite de pouvoir ajouter que son
désintéressement ne lui permit pas d'accepter la plus .légère rétribution. La
côte des perles oSre sans doute le même aspect de misère que les pays de
l'or et des diamans, le Choco et leBrësii; mais la misère n'y est pas accom-
pagnée de ce désir Immodéré du gain qu'excitent les richesses minérales.
L'Aronde aux pertes abon&e sur les bas'-fbnds qui s'étendent depuis le cap
Paria jusquà celui de la Vela 3. L'ne de la Marguerite~ Cubagua, Coche,
la Punta Araya et l'embouchure du Rio la Hacha étoient célèbres au seizième
siècle, comme te golfe Persique et l'île Taprôbanel étoient chez les anciens 4.
Il uest pas juste de dire, comme plusieurs historiens font avancé, que les
indigènes de l'Amérique ne connoissoient pas le luxe des pertes. Les premiers

Excitantes ou déMUtantes stMntques ou MthémiqnM du système de Brown.


° ~'or <?, ou <&<o~fo <a<&)c<e<c/Mn'o (proprementH<t<MA<~e&!tg7'<M<<em<Mw), expression 6gurée,
par laquelle le peuple désigne l'Europe dans les colonies espagnoles.
Costa de lm fer&«. ~rern, Dec. Lib. c. 9. Comnfct,
<
~M< 78. Petri Be~M C~tt~n.
Hist. ~ene<tE~.[&n~C/7(i5M),p.83.Cot<tce//ten,JO<M. <<jpr<t (?)-«<. Co<om&o(t)i0')), p. K)t.
4 Strabo, Lib. XY (/)<t~. Oson. <o~.). ~n., Lib. /X, c. 35, Z.t&. -X:~ c. Solin. Polyhist.
e.
c. 66 ( <i<S, p..M etji<4), et surtout ~A<o., D<'ynoMpA. /t&.jH~ e. 4t (<< &<f~AtltM!ef
T.l,p.~o-3~,et~n«tM<<feM.t)t~<&en.,<p.f~.
Espagnols qui abordèrept à la Tetre-Ferme', traaverent tes sauvages parés d&
colliers et de bracelets; et, parmi tes peup!es~civitisés du Mexique et du
Pérou, les perles d'une belle &)rmeétoientextrêmement recherehees. J'ai fait
connottre te buste en basalte d'âne prêtresse mexicaine dont la coi8e,
ressemblant daitteurs au c~anfK'a des têtes d'Isis~ est garnie de pertes. Las
Casas et Benzoni ont décrit, et non sans quelque exagération, les cruautés
que t'en exerçoit envers les malheureux esclaves indiens et nègres employés
à la pèche. Au commencement de la conquête, l'île de Coche seule four-
nissoit fSoo marcs de perles par mois. Le ~mnf~ que les ~~c/w du roi
retiroient sur le produit des perles, s'étevoit à 15,ooo ducats., ce qui d'après
la valeur des métaux dans ces temps, et d'après t étendue de la fraude, doit
être regardé comme une somme très-considérable. H paroit que, jusqu'en
i53o, la valeur des perles envoyées en Europe s'étevoit, année commune, à
plus de 800,000 piastres. Pour juger de t'importance que l'on devoit donner
à cette branche de commerce à Sévit!e,.à Tolède, à Anvers, et à Gênes, il
faut se rappeler qu'à la même époque toutes les mines de l'Amérique ne
fournissoient pas deux millions de piastres, et que la flotte d'Ovando sembloit
être d'une richesse immense,parce qu'elle rentermoit près de 2600 marcs d'argent.
Les perles étoient d'autant plus récherchées que le luxe de l'Asie avoit été
introduit en Europe par deux voies diamétralement opposées, par Constan-
tinople, où les Paléologues portoient des vêtemens couverts de réseaux de perles,
et par Grenade, la résidence des rois maures, qui déployoient à leur cour
tout le faste de l'Orient. Les perles des Grandes-Indes furent préférées à celles
de l'Occident; mais le nombre de ces dernières qui circotoient dans le. com-
merce, n'en étoit pas moins considérable dans tes temps qui suivirent
immédiatement la découverte de rAmérique. En Italie, comme en Espagne,
1 flot de Cubagua devint l'objet de nombreuses spéculations mercantiles. Benzoni 3

rapporte l'aventure d'un certain Louis Lampagnano à qui Charles-Quint avoit


accordé te privitége de passer, avec cinq c~M~e/M sur les côtes de Cumana

.<&M ~MMoM~Be, Pt. t et a.


J'a! tAcM de prouver, dans un antre endroit ( ~Vottf.-E~p., T. H, p. 65a ) par rhistoire détaillée
des anciennesmines du Menque et du Pérou, combien sont peu exactes les idées répandues
en Europe
sur t'épmsement des g!tes m~taBiteres de t'Améritnte sur leur richesse <!écro!ssante et sur la quanttté de
métaux que l'Espagne a reçus pendant les règnes de Chartes-Quint et de PMtippe t[.
Z,a //M~. t/e/~oaA) ~V;'o~o,~). 54. Louis t~ampagnano, parent de celui qui avoit assassiné le due
de Milan, Ga!eazzo Maria Sforza, ne put payer les négoeians de Sévitte qui avoient fait les
avances
de l'expédition il resta cinq ans a Cubagua, et moufnt dans un accès de démence.
pour y pocher des perles. Lés colons le renvoyèrent avec ta réponse hardtt
que l'empereur, trop Mbërat de ce qui n'étoit pas & lui~ n'avoit pas le droit de
disposer des huttfes qui viventdans te fond des mers; f
La pêche des pertes diminua rapidement vers la fin du seizième siècte; et,
d'après te rapport de Laet, elle avoit cessé depuis long-temps en ï633
L'industrie des Vénitiens, qui imitoient avecune grande perfection les pertes unes,
et l'usage fréquent des diamans tailtés rendirent les pèches de Cubagua moins
lucratives. En même temps les moules qni fournissent les pertes, devinrent plus
rares, non, comme on le croit d'après une tradition populaire, parce que ces ani-
maux, effrayés par le bruit des rames, s'étoient portés ailleurs, mais parce qu'en
arrachant imprudemment les coquilles par milliers, on avoit empêché leur
propagation. L'aronde aux pertes est d'une constitution plus délicate encore
que la plupart des autres mollusques acéphales. A Me de Ceytan, où, dans la
baie de Condeatchy, ta pèche occupe six cents plongeurs, et où son rapport
annuel est de plus' d'un demi-million de piastres, on 'a essayé en vain de
transplanter l'animal sur d'autres parties de Ja cote. Le gouvernement n'y
permet la pêche que pendant un seul mois, tandis qu'à Cubagua on exptoitoit
le banc de coquilles da)tS toutes les saisons. Pour se faire une idée de la
destruction de l'espèce dausee par les plongeurs, il faut se rappeler qu'un bateau
recHeItte quelquefois, en deux ou trois semaines, plus de35,ooo moules. L'animât
ne vit que neuf à dix ans, et ce n'est que dans sa quatrième année que
les perles commencent à se montrer. Dans to.obo arondes, il n'y a souvent
pas une seule perle de prix 3. La tradition rapporte que, sur le banc de
la Marguerite, les pêcheurs ouvroient les coquines une à une à file de Ceylan,
on entasse les animaux, on les (ait pourrir à l'air; et, .pour séparer les perles
qui né sont pas attachées à la coquille, on soumet au Z(a!M!gp des monceaux
de pulpe animale, comme font les mineurs avec les sables qui renferment des
pepites d'or, de l'étain ou des diamans.
Aujourd'hui, l'Amérique espagnole ne fournit d'autres perles au commerce

« Insutarum Cubagua: et Coches quondam magna, fuit dtgMtas, quum mnionum captura floreret
nunc, illa deCciente, ol~scura admodunt fama. J~t. ~Vof. <MM, pag. 66g. CecotMMhteurexMt, en
parlant de la Punla Araya, ajoute que ce pays est tellement oublié « Mtvi~ ulla atta Americs;
mertdionaEs pars bodie obscurior Stt. »
La taille des diamansfut mTentée par Louis de Berquen~ en t456, mais elle ne devint trcs-
commune que dans le siecte suivant,
3 Cor~MM; Description of Ceylan, 1807, Vot.U~p. 187.
que celles du golfe de~Panama et de J'embpMchure du Rio de Hacha; la
Sur les bas-tfonds qui entourent Cubagua, Coche et~te de 1~ Marguerite,
la pêche est aussi négligée que sur les eôtesdeCali~onïie'.Oa croit&Cumaoa
que l'aronde aux perles s'est. multipliée sensiblement après deux siècles de
repos~; et Ion se demandepourquoi tes pertes trouvées de nos jours dans Jes
coquittes qui s'attachent? aux Ëlets des pécheurs, sont si petites et de si pe<t
d'éclat, tandis qu'à l'arrivée des Espagnols, on en vit de très-bettes parmi
les Indiens, qui sans doute ne se donnoient pas la peine de tes recueillir
en plongeant. Ce problème est d'autant plus dintcile à résoudre que nous
ignorons si des tremblemens de terre ont altéré la nature du fond, ou
si des changemens de courans sOumarinS peuvent avoir influé, soit sur.
la température de l'eau, soit sur la fréquence de certains mollusques dont se
nourrissent les arondes.
Le 2o au matin, le fils de notre hôte, jeune Indien très-robuste, nous
conduisit, par le Barigon et le Caney, au vittage de Maniquarez. tt y avoit
quatre heures de chemin. Par l'effet de la réverbération des sables le
thermomètre se soutenoit à 3t"
Les cactiers cylindriques qui bordent la
route, donnent au paysage un aspect de verdure sans offrir de. la fraîcheur
et de l'ombre. Notre guide, quoiqu'il n'eût pas Mt une lieue, s'asseyoit à
chaque instant. H voulut se coucher à t'onibre d'un beau tamarinier, près
des Casas de la /~c~a, pour y attendre rentrée de la nuit. J insiste sur ce
trait de caractère que l'on observe chaque fois que l'on voyage avec des Indiens,
et qui a fait naître les idées les p!ns fausses sur la constitution physique des
différentes races d'hommes. L'indigène cuivré, plus accoutumé à la chaleur
ardente du climat que le voyageur européen, s'en plaint davantage, parce
qu'il n'est stimuté par aucun intérêt. L'argfnt est sans appât pour lui; et s'il
s'est laissé tenter un moment par l'idée du gain, il se'repent de sa résolution
dès qu'il est en route. Le même Indien, qui se plaint lorsque, dans une
herborisation, on le charge d'une botte remplie de plantes, fait remonter un
canot contre le courant le plus rapide, en ramant pendant quatorze ou

jVoHf -Es~ T. 1 p. 3<3~e~'C. Il, p. ~~65. Je sms surpris de n'avoir jamais entendu parler dans
nos voyages de perles trouvées dans les coquilles d'eau douce de t'Amériqub méridionale,quoique quelques
espèces du genre ~nto abondent dans les rivières du PcMu.
En t8ta on a fait à la Marguerite quelques tentatives nouvelles pour la pêche des perles.
Les habitans d'Araya vendent quelquefois de ces petites perles aux petits marchands de Cumana.
Le prix commuu est d'une piastre la douzaine.
quinze heures de suite, parce qu'iï désire retourner dans sa famille. Pour bien
juger de la force musculaire des peuples, il faut les observer dans des cir-
constances où leurs actions sont déterminées par une volonté également
énergique.
Nous examinâmes de près tes ruines du château Santiago dont la cons-
truction est remarquable par son extrême solidité. Les murs, en pierre de
taille, ont cinq pieds d'épaisseur; On est parvenu à les renverser en taisant
jouer des mines on trouve encore des tuasses de sept à huit cents ~pieds
carres qui sont à peine crevassées. Notre guide j!ous montra une citerne
( el aljibe ) qui a trente pieds de profondeur, et qui, quoiqu'assez endom-
magée, fournit de l'eau aux habitans de la péninsule d'Araya. Cette citerne
a été terminée en ï68t par le gouverneur Don Juan de Padilla Guardiola, le
même qui construisit à Cumana Je petit fort de Sainte-Marie'. Comme le
bassin est couvert d'une voûte en plein cintre, l'eau s'y conserve très-frafche
et d'une excellente qualité. Les conferves qui tout en décomposant te carbure
dhydrogène, abritent- aussi des vers et de petits jmsectes~ n'y prennent -pas
naissance. On avoit- cru, pendant des siècles, que la péninsule d'Araya étoit
entièrement dépourvue de sources d'eau douce; mais, en '7<)7, après beau-
coup de recherches inutiles, les habitans de Maniquarez sont parvenus à en
découvrir.
f~En traversant les collines arides du
cap Cirial, nous sentîmes une forte
odeur de pétrole. Le vent souffioit du côté où se trouvent les sources de
cette substance, dont les premiers historiens de ces contrées ont dé)a fait
mention 3. Près du village de Maniquarez, le schiste micacé sort au-dessous
de la roche secondaire en formant une chaine de montagnes de t~!o à t8o toises
d'étévation. Cette roche primitive est dirigée, prèsdu cap Sotto, du nord-est
au sud-ouest ses couches inclinentde So° au nord-ouest Le schiste micacé
est blanc d argent, à texture lamelleuse et ondulée, et renferme beaucoup

Sur la carte qui accompagne l'histoire de l'AtCtfnqae de Rchertion, on trouve le nom de ce

J"
ehAteam confondu avec celui de la Nueva Cordoba. Nous aïons déj& fait observer ptut haut, p. 3~0, que
cette dernière dénommaHon étoit jadis synonyme de Cnmana. (~brera, p. t4 )
€<<<?) de Ntt'M<* ~afMt ou ~TterCs de N. &
p. a84.)
la Ca&eM. Voyez plus haut, pag. ao6. ( Cott~/t,

Oviedo, Lib. XIX, cap. i. « Liqueur réMne)Me, aromatique et médicinale, »


4 ~*M~a pelada des créoles.
5 Hor. 3-4 de la boussole de Freiberg. Tout près du village de Maniquarez, les couches varient

hor. ti et t2 en inclinant souvent au sud-ouest.


de grenats. Des couches de quarz, dont la pnissance varie de 3 à 4 to'ses,
traversent leschiste micacé, comme on peutl'observeB dans pÏusieaNravins étroits,
creusés par les eaux. Nous détachâmes avec peine an fragment de cyanite_d un
bloc dé quarz laiteux et fendillé, quîétoit isolé sur la ptage. C'est la seule
fois que nous ayonstrouvé cette substance dans l'Amérique méridionale*.
Les poteries de Maniquarez, célèbres depuis un temps Immémorial,
forment une branche d'industrie qui se trouve exclusivement entre les mains
des femmes indiennes.La fabrication se fait encore suivantla méthode employée
avant la conquête. Elle annonce à la fois et l'enfance des arts et cette immo-
bilité dé mœurs qui caractérisent tous les peuples indigènes de l'Amérique. Trois
siècles n'ont pas suffi pour introduire le tour de potier sur une côte qui
n'est éloignée de l'Espagne que de trente, à quarante jours de navigation. Les
indigènes ont des notions confuses sur l'existence de cet instrument, et ils
s'en serviroient si on leur en présentoit le modèle. Les carrières d'où l'on
tire l'argile sont à une demi lieue à l'est de Maniquarez. Cette argile est
due à la décomposition d'un schiste micacé coloré en rouge par de l'oxide de
fer. Les Indiennes préfèrent les parties les plus chargées en mica. Elles
façonnent avec beaucoup d adresse des vases qui ont deux à trois pieds de
diamètre, et dont la courbure est très-régulière. Comme elles ne connoissent
pas l'usagedes fours, elles placent des broussaillesde Desmanthus, deCassia et de
Capparis arborescent autour des pots, et leur donnent la cuite en plein air.
Plus à l'est de la carrière qui fournit l'argile, se trouve le ravin de la
Mina. On assure que, peu de temps après la conquête, des orpailleurs véni-
tiens y ont tiré de l'or du schiste micacé. Il parott que ce métal n'est pas réuni
dans des filons de quarz, mais qu'il se trouve disséminé dans la roche,
comme il l'est quelquefois dans le granite et le gneiss.
Nous rencontrâmes à Maniquarez des créoles qui venoient d'une partie de
chasse de Cubagua. Les cerfs de la petite espèce sont si communs sur cet îlot
inhabité, qu'une personne peut en tirer trois ou quatre dans un jour. J'ignore
par quel accident ces animaux y sont venus; car Laet et d'autres chroniqueurs
de ces contrées, en parlant de la fondation de la Nouvelle-Cadix, ne font mention
que de la grande abondance de lapins. Le ~enod!o de Cubagua appartient

DMtMne, Baity.
AteNouveUe-EspagM, la cyanite n'a encore été découverte que dans la province Ae Guatimala,
à Ettanoia grande. Ce< Rio Tablas min., tSo4, p. a~.
à âne de ces nombreuses espèces de petits cerf~ américains que les zoologistes >9

ont confondues pendant long-temps sous te nom vagup de Ci?~M,f Mî<?~ca~Bhf.


Une me paroit pas identique aveelar~cAe~~c~aanMdeC~y~nneauGMtzHft
du Paraguayqui vit également en troupeau.Sa couleur est rt))Uge brunâtre sur
le dos, et blanche sous le ventre il est moucheté comme i'Axis. Dans te~ ptaines
du Cari, on noMa montré, comme une chose très~rare dans ces ctimatabratans,
une variété toute Manche. C'étoit une femelle de ta grandeur du chevreui! d'Eu-
rope, et d'une forme extrêmement élégante. Les variétés <~M~ se trouvent,
dans le nouveau continent, jusque parmi tes tigres. M. d'Azara a vu un jaguar
dont la robe toute blanche n'ofïroit, pour ainsi dire, que l'ombre de quelques
four ainsi
taches annulaires. 7
De toutes tes productions des côtes d'Araya, celle qui est regardée par le
peuple comme la plus extraordinaire, on peut dire comme la plus merveilleuse,
est la jMpr~ ~~j~r, /Me<~M ~e /<M <yo~. Cette Substance catcaire est le
sujet de toutes tes conversations: d'après la physique des indigènes, c'est unee
pierre et un animal à la fois. On la trouve dans Je ~abte~on~etle est Immo-
bile mais isolée, sur une surface potie, par exemple sur un plat d'étain
ou de faïence, elle marche dès qu'on l'excite par du jus de citron Placé
dans t'ceit~ le prétendu animal tourne sur lui-même, et chasse tout autre
corps
étranger qui s'est introduit accidentellement. A la nouvelle'saline et au village
de Maniquarez, les ~M/TiM Je~ j~<?M~' nous furent oSertes par centaines et les
indigènes s'empressoient de~nous faire voir l'expérience du citron. On vouloit
nous introduire du sable dans les yeux pour que nous pussions éprouver
sur nous-mêmes refncacité du remède. Il étoit aisé de reconnoftre que ces
pierres sont des opercules minces et poreuses qui ont, fait partie de petites
coquilles univalves. Leur diamètre varie de ï a lignes de leurs deux surfaces
l'une est ptane, et l'autre bombée. Ces opercules calcaires font effervescence avec
le jus de citron et se mettent en mouvement à mesure que l'acide carbonique
se dégage. C'est par l'effet d'une semblable réaction que des pains, placés au
four, se meuvent quelquefois sur un plan horizontal, phénomène qui donné
a
lieu, en Europe, au préjugé populaire des ~M/~f <McA<M~. Les piedras de
los ojos, introduites dans l'œH, agissent comme de petites perles et diSerentés

Pennant, Qnadrupeds,?. t '9 n. 52. Aftara, Essai sur les quadropMm <ht Paraguay, T. I, p.
Cuvier, sur les RtumMns fossiles, dans les .~MM&t du ~t<f, T. Xtt, p. 365:
On les trouve les plus abondamment près de la batterie, à l'Mtrëm:té du
cap Araya.
graines Modes, employées par les sauvages de î'Aménqae~ pour augmenter
récoulemont des larmes. Ces, explications furent peu goûtées des Jhabitans
d'Araya. La nature paroit d'autant plus grande à l'homme qu'elle est plus

simplicité..
mystérieuse, et la physique du peuple fejette tout ce qui porte un caractère
de
En suivante c&te méridionale, à l'est de M~niquarez~ on trouve rappro-
t,
1

chées les unes des autres trois langues de terre qui portent les noms de Punta
de Soto, Punta de la Brea et Punta Guaratarito. Dans ces parages, le fond
de la mer est évidemment fermé de schiste micacé, et c'est de cette roche
que, près du cap de la Brea', mais à quatre-vingts pieds de distance de ta
côte, jaillit une source de naphte, dont rôdeur se répand dans l'intérieur de
la péninsule. H fallut entrer à mi-corps dans la mer, pour examiner de près
ce phénomène Intéressant. Les eaux sont couvertes de Zostera; et, au milieu
d'un banc d'herbes très étendu, on distingue un endroit libre et circulaire
de trois pieds de diamètre~ sur lequeL nagent quelques masses éparses d'Ulva
lactuca. C'est là que se montrent les ~ources~ Le fond du goue est recouvert de
sable; et le pétrole qui, par sa transparence-et sa couleur jaune, se rapproche
du véritable naphte, sort par jets accompagné de bulles d'air. En raffermissant
le sol avec les pieds, on aperçoit que ces petites sources changent de place. Le
naphte couvre la surface de la mer, à plus de mille pieds de distance. Si l'on
suppose de la régularité dans l'inclinaison des couches, le schiste micacé doit
se trouver à peu de toises au-dessous du sable.
Nous avons fait observer plus haut que l'argile muriatif~re d'Araya renferme
du pétrole solide et friable. Ces rapports géologiques entre la soude muriatée
et les bitumes se manifestent partout où il y a des mines de sel gemme ou
des fontaines salées mais un fait extrêmement remarquable est l'existence
d'une source de naphte dans une formation primitive. Toutes celles que
l'on connoit jusqu'ici appartiennent aux montagnes secondaires et ce mode
de gisement sembloit favoriser l'idée que tous les bitumes minéraux étolent dus
à la destruction des végétaux et des animaux3, ou à l'embrasement des houilles.
A la péninsule d'Araya, le naphte découle de la roche primitive même et
Cap du Goudron. Le plus grand dépôt de pétrole (Chaptpotp) est celui de l'ile de la Triuité,
décrit par MM. Span, Hatchett, Anderson etDatmon Lavaysse. (~<y~
<MM ?-< de 2VHtt<M e< de
Tabogo, T. t, p. a4-3o )
“.“ Pietra MaLt; Fanano; Mont-Zibio; Amiano, oit
sont tes sources qui fonnuMemt le naphte pour
l'illumination de la ~Me de Gênes; BadLou, etc. r f"
Hatcbett, dans les ?httM. o/'<Ae ~tn.&)CM< 1798, p. 190.
ce acquiert une nouvelle
phénomène ~cqple~
ce phénomcne importancesisi l'on
nouv~He importance Von se
se rappelle que Je
~Lt
même terrain primitif renferme tles rfeux soutermins, qu'au bord
1 des cratères
enflammés l'odeur du pétrolese Jfait sentir de temps en temps', et que la
plupart des sources. chaudes deAntériquesortent du gneiss et du schiste micacé.
Après avoir examiné les environs de Maniquarez, nous nous embarquâmes
)a nuit dans un canot de pécheurs pour retourner à Cumana. Rien ne prouve plus
combien la mer est paisible dans ces parages, que l'extrême petitesse et le
mauvais état decescanots, qui portent une voile très-haute. Celui que nous
avions choisi comme Je moins endommagé, faisoit tant d'eau que le 61s
du pilote étoit continuellement occupé à la puiser avec un ?~HMM ou
fruit du Crescentia cureté. H arrive assez souvent, dans le golfe deCariaco~
et surtout au nord de ta péninsuled'Araya, que les pirogaes chargées de cocos
chavirent, en gouvernant trop près du vent, droit contre la lame. Ces accidens ne
sont redoutés que des passagers peu habitués à nager; car si la pirogue est con-
duite par un pécheur indien accompagné de son fils, le père redresse la nacelle
et commence à en faire sortir leau, tandis ,que le fils rassemble les cocos en
nageant à t'entour. En moins d'un quart d'heure la pirogue est de nouveau
sous voile, sans que l'indien, dans son imperturbable indiSerence~ ait proféré
une plainte.
que nous avons visités une seconde fois en revenant
~Les habitans d'Araya,
de l'Orénoque, n'ont pas oublié que leur péninsule est un des points les, plus
anciennement peuplés par les Castillans. Ils aiment à parler de la pêche des
perles, des ruines du château Saint-Jacques, qu'ils se flattent de voir recons-
truit un jour, et de tout ce qu'ils appellent l'antique splendeur de ces contrées.
En Chine et au Japon, on regarde comme des inventions récentes celles que
l'on ne connoît que depuis deux mille ans: dans les colonies européennes~ un
événement paroit extrêmement ancien s'il remonte à trois siècles, à l'époque
de la découverte de l'Amérique.
Ce manque de souvenirs qui caractérise les peuples nouveaux, soit dans les
États-Unis, soit dans les possessions espagnoles et portugaises, est bien digne
d'attention. Il n'a pas seulement quelque chose de pénible pour le voyageur qui
se trouve privé des plus belles jouissances de ~imagination il influe aussi sur les
liens plus ou moins puissans qui attachent le colon an sol qu'il habite, à la forme
des rochers qui eo'parent sa cabane aux arbres qui ont ombragé son berceau.

Voyez plus haut, p. t36.


Chez les anciens, les Phéniciens et les Grecs, par e~~
.les ~t~~ditians
et les souvenirs nationaux passèrent de la métropole aux cdoniesj, ou~ se
perpétuant de génératious en générations, ils ne cessèrent d'Inûuer favora-
blement jsur les opinions, les mœurs et la politique des colons. Les climats
de ces premiers établissemens ultramarins diHeroient peu de celui de la mère-
patrie. Les Grecs de l'Asie mineure et de la Sicile ne devinrent point étrangers
aux habitans d'Argos, d'Athèneset de, Corinthe, dont ils se glorifioient de
descendre. Une grande analogie de moeurs contribuoit à cimenter l'union
qui se fondoit sur des intétets religieux et politiques. Souvent les colonies
oCroientles prémices des moissons aux temples des métropoles; et lorsque,
par un accident sinistre, le feu sacré s'étoit éteint sur les autels d'Hestia,
on envoyoit duibnd de l'ïonie, le chercher aux Prytanées' de la Grèce.
Partout, dans la Cyrenaïque, comme sur les bords de la Méotide, se
conservèrent les anciennes traditions de la mère-patrie. D'autres souvenirs,
également propres à émouvoir limagination.étoientattachés aux colonies
mêmes. Elles avoient leurs bois sacrés, leurs divinités tutélaires leur mytho-
logie locale, et ce qui donne de la vie et de la durée aux fictions des
premiers âges, des poètes dont la. gloire étendoit son éclat jusque sur la
métropole.
Ces avantages, et bien d'autres 'encore manquent aux colonies modernes.
La plupart sont fondées dans une zone où te climat, les productions,
l'aspect du ciel et du paysage dînèrent totalement de ceux de l'Europe. Le
colon a beau donner aux montagnes, aux rivières, aux vallées des noms qui
rappellent les sites de la mère-patrie; ces noms perdent bientôt leur attrait,
et ne parlent plus aux générations suivantes. Sous l'influence d'une nature
exotique naissent des habitudes adaptées à de nouveaux besoins, les souvenirs
nationaux s'effacent' insensiblement, et ceux qui se conservent, semblables
aux fantômes de 1 imagination ne se rattachent plus ni à un-temps, ni à un
heu déterminé. La gloire de Don Pelage et du Cid Campeador a pénétré
jusque dans les montagnes et les foréts de l'Amérique; le peuple prononce
quelquefois ces noms illustres, mais ils se présentent à son esprit comme
appartenant à un monde idéal, au vague des temps fabuleux.
Ce ciel nouveau, ce contraste des climats, cette conformation physique du
pays agissent bien plus sur l'état de la société dans les colonies, que l'éloi-

C&~Mf, ~fM<. <&w fnMteM temps do &t Grèce. T. M, p. 67 (T. t, p. t88).


gnement absolu de la métropple. Tel est le pertectionnemeat de la navigation
moderne que les bouches de i'Orénoque et do R~o de la PIata semblent plus
rapprochées de l'Espagne que ne l'étoient jadis le Phase etTartessus des côtes
de la Grèce et de la Phénicie. Aussi observons~nousqne~dans des régions
également éloignëe&, les moeurs et les traditions de rEurope se sont p!us
conservées dans la ~one tempérée et sur le dos des montagnes équatpriales
que dans les plaines dé la zone torride. L'analogie de position contribue, jus-
qu'à un certain point, à maintenir des rapports plus intimes entre les colons
et la métropole. Cette influence -des causes physiques sur l'état des sociétés
naissantes se manifeste surtout lorsqu'il s'agit de portions de peuples d'une
même race et qui se sont nouvellement séparés. En parcourant le nouveau
monde, on croit trouver plus de traditions, plus de fraîcheur dans les souvenirs
de la mère-patrie partout où le climat permet la culture des céréales. Sous
ce rapport, la Pensylvanie, le Nouveau-Mexique et le Chili, ressemblent à ces

Chez les anciens, les


plateaux élevés de Quito et de la Nouvelle-Espagne qui sont couverts de
chênes et de sapins.
opinions religieuses et l'état physique d'un
pays se tenoient par des liens indissolubles. Pour oublier l'aspect des sites et
les anciennes révolutions de la métropole, le colon auroit dû renoncer au
culte transmis par ses ancêtres. Chez les peuples modernes, la religion n'a plus,
pour ainsi dire, une teinte locale. En donnant plus d'étendue aux idées, en
rappelant à tous les peuples qu'ils font partie d'une même famille, le christia-
nisme a affoibli le sentiment national il a répandu dans les deux mondes
les traditions antiques de l'Orient et d'antres qui lui sont propres. Des nations
qui diffèrent d'origine et d'Idiomes ont reçu par lui des souvenirs communs;
et rétablissement des missions, après avoir jeté les bases de la civilisation
dans une grande partie du nouveau continent, a donné aux idées
cosmogo-
niques et religieuses une prééminence marquante sur les souvenirs purement
nationaux.
Il y a plus encore les colonies de l'Amérique sont fondées presque toutes
dans des contrées où les générations éteintes ont à peine laissé quelque trace
de leur existence~ Au nord du Rio Gila., sur les bords du Missouri, dans
les plaines qui s'étendent à l'est des Andes, les traditions ne remontent pas
au delà d'un siècle. Au Pérou, àGuatimala et au Mexique, des ruines d'édinces,
des peintures historiques et des monumens de sculpture attestent, il
est
vrai, l'ancienne civilisation des indigènes; mais, dans une province entière,
on
trouve à peine quelques ~amitiés qui aient desnotions precîse~ sur Mstoiredes
prineesll1:xicains. L'indigèn~a eonservésa:tangne,sÓn
Incas et des princes mexicains. L'indigène a conservé sa tangae, son costame
coStume
et son caractère national: mais le manque de quippus et de peintures sym-
boliques, l'introduction du christianisme et d'antres circonstances que j~
développées ailleurs ont fait disparottre peu à peu tes traditions historiques
et religieuses. D'un autre cote, le coton de race européenne dédaigne tout
ce qui a rappel aux peuples vaincus. Placé entre les 'souvenirs de ta
métropole et ceux du pays qui t'a vu naître, il considère les uns et les autres
avec la même indiSérence; sous un climat où l'égalité dés saisons rend
presque insensible la succession des années, il ne se livre qu'aux jouissances
du présent, et porte rarement ses regards dans les temps écoulés.
Quelle différence aussi entre l'histoire monotone des colonies modernes et
le tableau varié qu'offrent la législation, les moeurs et les révolutions poli-
tiques des colonies anciennes Leur culture intellectuelle, modifiée par les
formes diverses de leurs gouvernemens, excitoit souvent t'envie des métropoles.
Par cette heureuse rivalité les arts et les lettres atteignirent le plus haut degré
de splendeur en Ionie, dans la Grande-Grèce et en Sicile. De nos jours~ au
contraire, les colonies n'ont ni histoire ni littérature nationales. Celles du
nouveau monde n ont presque jamais eu de voisins puissaus, et 1 état de la
société n'y a subi que des changemensinsensibles. Sans existence politique,
z
ces étabtissemens de commerce et d'agriculture n'ont pris qu'une part passive
aux grandes agitations du monde.
L'histoire des colonies modernes ne présente que deux événcmens mémo-
rables, leur fondation et leur séparation de la mère-patrie. Le premier de
ces événemens est riche en souvenirs qui appartiennent essentiellement aux
pays occupés par les colons mais, loin de rappeler les progrès paisibles de
l'industrie ou !e perfectionnementde la législation coloniale, il n'offre que des
actes d'injustice et de violence. Quel charme peuvent avoir ces temps extraordi-
naires où, sous le règne de Chartes-Quint, les Castillans déployoient plus de
courage que de vertus, et où l'honneur chevaleresque, comme la gloire des
armes turent souiUés par te fanatisme et ta soif des richesses? Les colons, doux
de caractère, et affranchis par leur position des préjugés nationaux apprécient
à leur juste valeur les exploits de ta conquête. Les hommes qui ont britté à
cette époque sont des Européens, ce sont les soldats de la métropole, Ils
paroissent étrangers aux habitans des colonies, car trois siècles ont suffi pour
dissoudre les liens du sang. Parmi les conquistadores, il s'est trouvé sans doute
des hommes probes et généreux; mais, con~ndus dans la masse, ils n'ont pu
échapper à !a proscription gênerait
Je crois avoir indiqué les causes principales qui, dans les colonies modernes,
font disparoitre les souvenirs nationaux sans les remplacer dignement par
d'autres qui aient rapport an pays nouvellement habité. Cette circonstance,
nous ne saurions le répéter assez, exerce une grande influence sur la positMndes
colons. Dans lès temps orageux d'une régénération politique ils se trouvent
isolés, semblables à un peuple qui, renonçant à l'étude de, ses annales, cesse-
roit de puiser des leçons de sagesse dans les malheurs des siècles antérieurs.
LIVRE ML

CHAPtTRE VI

MONTAGNES DE LA NOUVELLE ANDALOUSIE. VALLÉE DE CCMANACOA. – CIME DU


COCOLLAB. – MMSMNS DES INDIENS CHAYNLAS.

J~! OTBE
première excursion à la péninsule d'Araya fut bientôt suivie d'une autre
plus longue et plus instructive dans l'intérieur des montagnes, aux missions des
Indiens Chaymas. Des objets d'un intérêt varié y appetoient notre attention.
Nous entrions dans un pays hérissé de forêts nous allions visiter un couvent
ombragé de palmiers et de fougères en arbres, situé dans une vallée étroite, où
l'on jouit, au centre de la zone torride, d'un climat frais et délicieux. Les mon-
tagnes d'alentour renferment des cavernes habitées par des milliers d'oiseaux
nocturnes et, ce qui frappe plus l'Imagination que toutes les merveilles du
monde physique on trouve, au-delà de ces montagnes, un peuple naguère
encore nomade, sortant à peine de l'état de nature, sauvage sans être barbare,
stupide plutôt par ignorance que par un long abrutissement. A cet intérêt si
puissant se mêiolent involontairement des souvenirs historiques. C'est dans le
promontoire de Paria que Colomb a reconnu le premier la terre continentale:
c'est là que se terminent ces vaHons,dévastéstour à tour par les Caribes guerriers
et anthropophageset par les peuples commerçans et policés de l'Europe. Dans le
commencement du seizième siècle, les malheureux Indiens des côtes de Carupano,
de Macarapan et de Caracas furent traités comme l'ont été de nos jours les
habitans de la côte de Guinée. Oncuttivoit le sol des Antilles; on y transplantoit
des végétaux de l'ancien continent; mais la Terre-Ferme resta long-temps étran-
gère à un système régulier de colonisation. Si les Espagnols en visitoiient le
littoral, ce n'étoit que pour se procurer, soit par violence, soit
par échange,
des esclaves, des perles, des grains d'or et du bois de teinture. On crut ennoblir
les motifs de cette avarice insatiable, en affectant un zèle passionné pour la
religion; car chaque siècle a ses nuances,son caractère particulier.
La traite des mdtgènes t~int cuivré fut
indigènes à temt tut accompagnée
accompag des mêmes actes
nëgMs africains
ceHe des nègres
d'inhumanité que celle aussi !es mêmes suites, elle
africains eHe eut aussi
rendit plus farouches et les vainqueurs et les vaincus. Bès-lors, les terres devinrent
plus fréquentes parmi les mdigènes; les prisonniers furent traînes de l'Intérieur
des terres vers les côtes, pour être vendus aux blancs qui les enchamoient sur
leurs vaisseaux. Cependant les Espagnols étoient à cette époque, et furent encore
long-temps après, une des nations les plus civilisées de l'Europe. La vive lumière
dont brilloient les lettres et les arts en Italie, avoit rejailli sur tous les peuples
dont les langues remontent à la même source que celle~du Dante et de Pétrarque.
On auroit dit qu'un adoucissement général dans les mœurs devoit être la suite
de ce développement de l'esprit, de ces élans sublimes de l'imagination. Mais au
delà des mers, partout où 1a soif des richesses amène l'abus de la puissance,
les peuples d~ l'Europe, à toutes les époques de l'histoire, ont déployé le même
caractère. Le beau siècle de Léon X fut signalé dans le Nouveau-Monde,par
des actes de cruauté qui semblent appartenir aux siècles les plus barbares. On
est moins surpris de l'enrayant tableau que présente 4a conquête de l'Amérique
si l'on se ranpelle ce qui se 'passe encore malgré les bienfaits d'une législation
plus humaine sur les côtes occidentalesde l'Afrique.
Le commerce des esclaves avoit cessé'depuis long-temps à la Terre-Ferme,
grâce aux principes adoptés par Charles-Quint; mais les Cbn<yMM<a~or~, en
continuant leurs incursions, prolongeoient ce système de petite guerre qui a
diminué la populationaméricaine, perpétué les haines nationales, étouSé pendant
long-temps les germes de Ip civilisation. Enfin des missionnaires protégés
par le bras séculier, firent entendre des paroles de paix. Il appartenoit à la reli-
gion de consoler l'humanité d'une partie des maux causés en son nom; elle a
plaidé la cause des indigènes devant les rois elle a résisté aux violences des
commendataires, elle a réuni des tribus errantes dans ces petites communautés
que l'on appelle missions, et dont Inexistence favorise les progrès de l'agriculture.
C'est ainsi que se sont formés insensiblement, mais d'après une marche uni-
forme et préméditée, ces vastes établissemens monastiques ce régime extraor-
dinaire, qui tend sans cesse à s'isoler, et place sous la dépendance des ordres
religieux des pays quatre ou cinq fois plus étendus que la France.
Des institutions, si utiles pour arrêter l'effusion du sang et pour jeter les pre-
mières bases de la société, sont devenues, par la suite, contraires à ses progrès.
L'effet de l'isolement a été tel, sont restés dans un état peu diue-
que les Indiens
rent de celui où ils se trouvoient, lorsque leurs habitations éparses n'étoient
po!nt encore réunies autour de la maison du missionnaire. Leur nombre a
considérablement augme&té, mais non la sphère de leurs idées. Us ont perdu
progressivement de cette vigueur de caractère et de cette vivacité naturelle, qui,
dans tous les états de l'homme, sont les nobles fruits de l'indépendance. En
soumettant à des règles invariables jusqu'aux moindres actions de leur vie
domestique, on les a rendus stnpides, à.force de les rendre obéissans. Leur
nourriture est en gênerai plus assurée, leurs habitudes sont devenues plus
paisibles; mais assujétis à la contrainte et à la triste monotonie du gouvernement
des missions, ils annoncent, par un air sombre et concentré, qu'ils ont sacrifié
à regret la liberté au repos. Le régime monastique, restreint,à l'enceinte du
cloître, tout en enlevant à l'état des citoyens utiles, peut servir quelquefois à
calmer les passions, à consoler de grandes douleurs, à nourrir l'esprit de médi-
tation; mais transplante dans les forêts du Nouveau-Monde, appliqué anx rap-
ports multipliés de la société civile, il a des suites d'autant plus funestes que sa
durée est plus longue. Il entrave, de génération en génération, le développement
des iacultés intellectuelles; il empêche les communications parmi les peuples,
il s'oppose à tout ce qui élève l'âme et agrandit les conceptions. C'est par la
réunion de ces causes diverses que les indigènes qui habitent les missions, se
maintiennent dans un état d'Inculture que nous appellerions stationnaire, si
les sociétés ne suivoient pas la marche de l'esprit humain, si elles ne rétrogra-
doient point, par céla même qu'elles cessent d'avancer.
Ce fut le 4 septembre, à cinq. heures du matm, que nous commençâmes
notre voyage aux missions des Indiens Chaymas et au groupe de montagnes
élevées qui traversent la Nouvelle-Andalousie. On nous a voit conseillé, à cause
de l'extrême difnculté des chemins, de réduire nos bagages au plus petit volume.
Deux bêtes de somme surnsoieUt en effet pour porter nos provisions, nos
instrumens et le papier nécessaire pour sécher les plantes. Une même caisse
renfermoit un sextant, une boussole d'inclinaison, un appareil pour déterminer
la déclinaison magnétique, des thermomètres et l'hygromètre de Saussure. C'est
le choix des instrumens, auquel nous nous arrêtâmes constamment dans les
courses de peu de durée. Quant au baromètre, il exigeoit plus de soins encore que
le garde-temps je puis ajouter que c'est l'Instrumentqui donne le plus d'embarras
aux voyageurs. Nous le confiâmes pendant cinq ans à un guide qui .nous.suivoit t
à pied; et cette précaution, assez dispendieuse, ne l'a pas toujours mis à l'abri
desaccfdens. Ayant déterminé, avec précision, l'époque des marées atmos-
phériques, c'est-à-dire les heures auxquelles le mercure monte et descend
régulièrement tous les jours sous les tropiques, nous avions reconnu la
r~euttèrement h possibilité
possibt
de niveler le pays au moyen du baromètre, sans employer des observationscorres-
pondantes faites à Cumana. Les plus grands changemens dans la pr~ssiom de~l'atr
ne s'élèvent, dans ces climats, sur les cotes, qu'à
ï-t,3 lignes; et si l'on a une
seule fois marque, dans un lieu et à une heure quelconques, la hauteur du
qu'éprouve
mercure, on peut indiquer, avec quelque probabilité, les variations
de la
cette hauteur pendant l'année entière, à tontes les époques du jour et
nuit Il en résulte que, sous la zone torride, le manque d'observations corres-
pondantes ne peut guère causer des erreurs qui excèdent 12-15 toises; ce qui est
l'Iniluencedes~
peu important, Jorsqu'Il s'agit d'un nivellementgéologique, ou de
hauteurs sur le climat et la distribution des végétaux.
La matinée étoit d'une fraîcheur délicieuse. Le chemin, ou plutôt le sentier
qui conduit à Gumanacoa, suit la rive droite du Manzanarès, en passant par
l'hospice des Capucins, situé dans un bois de gayac et de câpriers arborescens.
En sortant de Cumana, nous jouîmes, du haut de la colline de San Francisco,
pendant la courte durée du crépuscule,d'une vue étendue sur la mer, sur la plaine
couverte de Bera à fleurs dorées~, et sur les montagnes du Brigantin. Nous étions
frappés de la grande proximité dans laquelle se présentoit la Cordillère avant que
le disque du soleil levant eût atteint l'horizon. La teinte bleuâtre des cimes est plus
foncées leurs contours paroissent plus fermes,leurs masses plus détachées, aussi
long-temps que la transparence de l'air n'est pas troublée par des vapeurs qui,
accumulées pendant la nuit dans les vallons, s'élèvent à mesure que l'atmosphère
commence à s'échauSer.
A l'hospice de la Divina Pastora, le chemin se dirige vers le nord-est, et
traverse, pendant deux lieues, un terrain dépourvu d'arbres, et anciennement
nivelé par les eaux. On y trouve non seulement des Cactiers, des touffes de
Tribulus à feuilles de Ciste, et la belle Euphorbe pourprée cultivée dans les
jardins de la Havane sous le nom bizarre de jP<c<<WMO real, mais aussi
l'Avicennia l'Allionia, le Sesuvium.Ie Thalinum, et la plupart des Portuiacées
qui croissent sur les bords du golfe de Cariaco. Cette distribution géographique
des plantes semble désiguer les limites de l'ancienne côte, et prouver, comme

On
~oj-M mes 0&M~. <M<M)n., Tom. tt p. a8g..
appelle ces GApriers, dans le pays: Pachaca, 0&f0,<<o~ ce sont Capparis tenaMitiqaa, Jacq.
C. ferruginea, C. emat~tK<t<s, C. e~p<K'o, C. M<tCH&<<a, C. rotjemo~t.
~'ft~oMn<Zygoph~namarboream,Jacq.Les<!eur!)OBtl'odeardeta~antt!e.
Euphorbia tithymaloides.
nous l'avons remarqué plus haut; que les collines, dont nous longeâmes le revers
méridional, formoient. jadis un ilot, séparé du continent par un bras de mer.
Après deux heures de-chemin, nous arrivâmes au pied de la haute chatne de
intérieur, qui se prolonge de l'est à l'ouest, depuis le Brigantin jusqu'au Cerro
de San Lorenzo. C'est là que commencent de nouvelles roches, et, avec elles,
un autre aspect de !a végétation. Tout y prend un caractère plus majestueux et
plus pittoresque. Le terrain abreuvé par des sources, est sillonné dans tous
les sens. Des arbres d'une hauteur gigantesque, et couverts de lianes, s'élèvent
dans les ravins; leur écorce, noire et brûlée par la double action de la lumière
et de l'oxigène atmosphérique, contraste avec la fraîche verdure des Pothos et
des Dracontium, dont les feuilles coriaces et luisantes ont quelquefois plusieurs
pieds de longueur. On diroit que les Monpcotylédonesparasites remplacent entre
les tropiques, la mousse et les lichens de notre zone boréale. A mesure que nous
avancions, les rochers, tant par leur forme que par leur agroupement, nous rap-
peloient les sites de la Suisse et du Tyrol. Dans ces Alpes de l'Amérique, même
à des hauteurs considérables, végètent des Héliconia, des Costus, des Maranta
et d'autres plantes de la famille des Balisiers, qui, près descôtes, ne se plaisent
que dans les endroits bas et humides. C'est ainsi que, par un rapprochement
extraordinaire, dans la zone torride comme dans le nord de l'Europe sous
inHuence d'une atmosphère continue!!ement chargée de vapeurs, comme sur
un sol humecté par des neiges fondantes, la végétation des montagnes offre tous
les traits qui caractérisent la végétation des marécages.
Avant de quitter les plaines de Cumana et les brèches ou grès calcaires qui
constituent le sol du littoral, nous rappellerons les diSérentes couches dont se
compose cette formation très-récente telle que nous Pavons observée sur les
revers des collines qui entourent le château Saint-Antoine. Cette indication est
d'autant plus indispensable, que nous apprendrons bientôt à connoitre d'autres
roches, qu'on pourroit aisément confondre avec les poudingues des côtes. En
avançant vers l'intérieur du continent, nous verrons se dérouler peu à peu à nos
yeux le tableau géologique de ces contrées.
La brèche, ou grès calcaire, est une formation locale et partielle, propre
à la péninsule d'Araya au littoral de Cumana et de Caracas. Nous l'avons
retrouvée au Cabo Blanco, à l'ouest du port de la Guayra, où elle renferme,
outre des débris de coquilles et de madrépores, des fragmens souvent anguleux
~o~Mt&er~, de vegotatione T~Mt~KB f< «o~mt&p<en<rM<tM~ p. xcvt). et Hx.
~ty<t plus haut, pag. 539.
de quarz et de gneiss. Cette circonstance rapproche la Jbr&che de ce grès récent,
désigné par les minéralogistes allemands sous le nom de Mt~~M~e, et qui
couvre une si grande partie de la Suisse pMqu'à mille toises de h~ateuB', sans
of&Ir cependant quelque trace de productions pélagiques. Près de CnmMMt, Ja
formation ~e &~e&ClT~P<M~9MB~<Me, ï". d'Hn calcaire ,cA~te gris-,
blanchâtre, dont les couches, tantôt horizontales, tantôt irrégnIiërejment~MMKn~,
ont cinq à six pouces d'épaisseur. Quelques bancs sont presque sans méhntge de
pétrifications; mais, dans la plupart, les cardites, les turbinites, les ostracites
et des coquilles de petites dimensions se trouvent rapprochées à têt point, que
la masse calcaire ne forme qu'un ciment, par lequel sont unis des grains de
quarz et les corps organiques; a", d'ung~ calcaire, dans lequel les grains de
sable sont beaucoup plus fréquens que les coquilles pétrinées d'autres couches
forment un grès entièrement dépourvu de débris organiques,faisant pen d'eRer-
vescence avec les acides,' et enchâssant, non des paillettes de mica, mais des
rognons de mine de fer brune compacte 3°. des bancs d'a~g~ end'MWM, qui
renferment de la sélénite et du gypse lameîleux Ces derniers bancs offrent
beaucoup d'analogie avec l'argite mnriatuere de Punta Araya et paroissent
constamment inférieurs aux couches précédentes..
La formation de brèche ou d'agglomerat du littoral que nous venons de décrire,
a une teinte blanche; elle repose immédiatement sur le calcaire de Cumanacoa,
qui est gris-bleuâtre. Ces deux roches
contrastent d'une manière aussi tran-
chante, que la mollasse du pays de Vaud avec le calcaire du- Jura Il est à
remarquer qu'au contact des <teux formations superposées, les bancs du calcaire
de Cumanacoa, que je regarde comme un calcaire,alpin, sont presque toujours
fortement chargés d'argile et de marne. Dirigés,comme les schistesmicacés d'Araya,
du nord-est au sud-ouest, ils se trouvent inclinés, près de Punta Delgada, sous
un
angle de 60° au sud-est.
Nous traversâmes la forêt par un sentier étroit; nous longeâmes un ruisseau qui
coule en bouillonnant sur un lit de rochers. Nous observâmes
que la végétation
étoit plus belle partout où le co~<M~e alpin est recouvert d'un ~iM ~M~rzetM',
dépourvu de pétrifications, et très-différent de la ~pcAf du RMon~. L:t
cause
de ce phénomène ~ne tient vraisemblablement pas autant a la nature du terreau,
qu'à la plus grande humidité du sol. Le grès quarzeux ren&rme des couches peu

Au Hohgaut qui domine l'Emmethal.


Au nord du château de Saint-Antoine, totttpr~sdeCttmaM.
Par exemple, près d'Aarau, de Boudry et de Porentrni, en Suisse
ëpatsses, d'une argile schtsteuse 'noirâtre,
argile' schisteuse
~ba~e~M~rsecondaire; et ce sont ces Couches qui
noirâtre, qu'on con<ondro!taisément
con!ohdro!t aisément avec du
les eaux dé se
perdre dans tes crevasses dont est rempli le calcaire alpin. Ce dernier offre ici,
comme dans le pays de Salzbourg et dans la chaîne desApehnIns, des bancs
fracturés et fortement rnclinés. Lé g]r&s,atr contraire, partout où il est superpose
à la roche calcaire, rend l'aspect des sites moins sauvage; les collines qu'il forme
paroissent plus arrondies, et leur revers, doucement incliné, est couvert d'un
terreau plus épais.
C'est dans ces lieux humides où le grès enveloppe le calcaire alpin, que l'on
trouve constamment quelque trace de culture. Nous rencontrâmes des cabanes
habitées par dès métis, dans le ravin de LosFrailes, comme entre la Cuesta de
Caneyes et le Rio Guriental. Chacune de ces cabanes est placée au centre d'un
enclos qui renferme des bananiers, des papayers, de la canne a sucre et du maïs.
On pourroit être surpris de la petite étendue de ces terrains défriches, si l'on ne
se rappeloit qu'un arpent cultivé en bananiers, rapporte près de vingt fois plus
de subsistance alimentaire que le même espace semé en céréales. En Europe, nos
graminées nourrissantes, le froment, l'orge et le seigle, couvrent de vastes éten-
dues de pays les terres labourées se touchent nécessairement partout où les
peuples tirent leur nourriture des céréales. n'en est pas de même sous la zone
torride, où l'homme a pu s'approprier dés végétaux qui donnent des récoltes plus
abondantes et moins tardives. Dans ces climats heureux, l'Immense fertilité du
sol répond à l'ardeur et à l'humidité de l'atmosphère. Une population nombreuse
trouve abondamment sa nourriture sur un espace étroit, couvert de bananiers,
de manioc, d'ignames et de maïs. L'isolement des cabanes dispersées au milieu
de la forêt, indique au voyageur la fécondité de la nature; souvent un petit
coin de terre défrichésuffit au besoin de plusieurs familles.
Ces considérations sur l'agriculture de la zone torride rappellent involontai-
rement les rapports intimes qui existent entre l'étendue des défrichemens et les
progrès de la société. Cette richesse du sol, cette force de la vie organique, tout
en multipliant les moyens de subsistance, ralentissent la marche des peuples
vers la civilisation. Sous un climat doux et uniforme, le seul besoin urgent
de l'homme est celui de la nourriture. C'est le sentiment de ce besoin qui
excite 'au travail; et l'on conçoit aisément pourquoi, au sein de l'abondance,
à l'ombre des bananiers et de l'arbre à pain, les facultés intellectuelles se
&'A<e/er<Aon.
II p. 366.
~tMt~o&& sur la ~Vom'eMe-Efp<<~M,Tom.
développent moins rapidement que sous un ciel rigoureux, dans là regtOn
des céréales, où notre espèce est sans cesse en lutte avec les élément. Lorsqu'on
embrasse d'un coup d'oeil général les pays occupés par les peuples agricoles,
on observe que tes terrains cultivés restent séparés par des forets ou se touchent
immédiatement, non-seulement selon l'accroissement delà popu!at!oia,'ma!8
selon le choix des plantes alimentaires. En Europe, nous Jugeons du nombre
des habitans par l'étendue de la culture sous les tropiques, au contraire, dans
la partie la plus chaude et, la plus humide de l'Amérique méridionale, des
provinces très-peuplées paroissent presque désertes,* parce que l'homme, pour
s'y nourrir, ne soumet au labourage qu'un petit nombre d'arpens.
Ces circonstances, bien dignes d'attention, modifient à la fois l'aspect physique
du pays et le caractère de ses habitans; elles donnent à l'un et à l'antre une
physionomie, particulière, quelque chose d'agreste et d'inculte, qui appartient
à une nature dont l'art n'a point encore altéré le type primitif. Sans voisins,
presque sans commerce avec les hommes, chaque famille de colons forme une
peuplade isolée. Cet isolement arrête ou ralentit les progrès vers la civilisation,
qui ne peut s'accroître qu'à mesure que la société devient plus nombreuse, et
que ses liens sont plus intimes et plus multipliés mais la solitude développe
aussi et raffermit dans l'homme le sentiment de l'indépendance et de la liberté
c'est par elle qu'est nourrie cette fierté de caractère qui, dans tous les temps,
aTdIstIngué les peuples de race castillane.
Ces mêmes causes, dont l'influence puissante nous occupera souvent dans
la suite, tendent à conserver au sol, dans les régions les plus habitées de
l'Amérique équinoxiale, un aspect sauvage qui se perd, dans les climats tem-
pérés, par la culture des graminées nourrissantes. Entre les tropiques, les
peuples agricoles occupent moins de terrain l'homme y a moins étendu son
empire; on diroit qu'il yparott, non comme un maître absolu qui change à
son gré la surface du sol, mais comme un hôte passager qui jouit paisiblement
des bienfaits de la nature. En effet, dans le voisinage des cités les plus
popu-
leuses, la terre reste hérissée de forets ou couverte d'une bourre épaisse
que le
le soc n'a jamais fendue. Les ptantes spontanées y dominent
encore, par leur
masse, sur testantes cultivées et déterminent seules l'aspect du paysage.
H est à présumer que cet état de choses ne changera qu'avec
une extrême lenteur.
Si, dans nos climats tempérés, la culture des céréales contribue à répandre
une
triste uniformité sur les terrains défrichés, on ne sauroit douter que, même
avec
une population croissante, la zone torride conservera cette majesté des formes
végétales, ces traits~une nature vierge et Indomptée qui la rendent si attrayante
et si pittoresque. C'est ainsi que, par un ènchamement remarquable de causes
physiques et morates,le choix, et le produit des plantes alimentaires Influent
à la fois sur trois objets importans: l'association ou l'isolement des famines,y
les progrès plus ou moins lents de la civilisation, et le caractère individuel du
paysage.
A mesure que nous nous enfonçâmes dans la forêt le baromètre nous indiqua
l'élévation progressive du sol. Les troncs des arbres offroient. ici un coup
d'eeit extraordinaire: une graminée* à rameaux verticillés grimpe, comme une
liane, à huit ou dix pieds de hauteur, et forme des festons qui traversent le
chemin et sont balancés par les vents. Nous Smes halte, vers les trois heures
de l'après-midi, sur un petit plateau, que l'on désigne sous le nom de Quetepe,
et qui est étevé à peu près de ï~o toises au-dessus du niveau de l'Océan.
Quelques cases 2 ont été construites près d'une source renommée, parmi les
indigènes, par sa fraîcheur et sa grande, salubrité. L'eau de cette source nous
parut en effet très-belle; sa température étdit de 2~
du thermomètre centi-
grade, tandis que celle de l'air s'élevoit à 2 8", y. Les sources qui descendent des
montagnes voisines plus étevées, indiquent souvent un décroissementdechaleur
trop rapide. En effet, si l'on suppose'de 26° la température moyenne des eaux
à la côte de Cumana, on doit en conclure, à moins que d'autres causes locales
ne modifient la température des source~, que celle -de Quetepe acquiert sa
grande fratcheur à plus de 35o toises d'étévation absolue 4. En parlant des
sources qui jaillissent dans les plaines de la zone torride ou à de petites
élévations, je ferai observer, en général, que c'est seulement dans les régions,
où la température moyenne de l'été diSère beaucoup de celle de l'année
entière, que les habitans peuvent boire de l'eau de fontaine extrêmement
froide, pendant la saison des grandes chaleurs. Les Lapons, près d'Umeo et
de Sôrsete, sous les 65° de latitude, se rafraîchissent à des sources, dont la
température, au mois daout, est à peine de 2 à 3 degrés au-dessus du point
de la congélation tandis que, le jour, la chaleur de l'air s'élève à l'ombre,

Carice anatogue au C~tM~Me de Santa-Fe, <h) groupe des Nastus. Cette graminée donne une excellente
nourriture pour les mulets. ~o~e: les A'ofa Genen*«~)ectM Plantarum e~MM!. (Tom.t, p. aoi de
t'é<ttt!on in-4.°), que je publie conjointement avec MM. Bonpland et Komth.
/~<t&t<<tet<M!<& ~ott Juan Pelay.
Pe )8*R.
~o~e: plus haut; p. Bto, a~S et 990.
JEb<t~. ~<en<t. ~c<K<. ~eHandl., t8oa, p. ap5.
dans ces marnes régions boréales, à a6 ou 2~ degrés. Dans nos d!mats tempérés,
en France et en Auemagne~ la différence entre l'air et lés sources n'excède
jamais 16 à i~ degrés entre les tropiques, il est même rare qu'elle s'élève
à 5 ou 6 degrés. On se rend facilement mison de ces phénomènes, en se
rappelant que t intérieur du globe et les eaux souterraines ont une tempéra-
ture presque identique avec la température moyenne annuelle de l'air, et que
cette dernière dineré d'autant plus de la chaleur moyenne de l'été, que l'on
s'éteigne de Féquateur. L'incHnaison magnétique à Quetepe étoit de 4~7
la division centésimale: le cyanomètre nindiquoit,~pour la couleur du ciel
au zénith, que t~sans doute parce que la saison des pluies avoit commencé
depuis queiques jours, et que l'air étoit déjà mêlé de vapeurs
Du haut d'une colline de grès qui domine la source de Quetepe, nous jonhnes
d'une vue magnifique sur la mer, le cap Macanao et la péninsule de Maniquarez.
Une immense forêt s'étendoità nos pieds jusqu'au rivage de l'Océan: les cimes des
arbres, entrelacéesde lianes, couronnées de longs panaches de fleurs, formoient un
vaste tapis,de verdure, dont la teinte sombre retevoîtFécîat delàlumière aérienne.
L'aspect de ce site nous frappoit d'autant plus, que nos yeux embrassoient ici,
pour la première fois, ces grandes masses de la végétation des tropiques. Nous
cueillîmes, sur la colline de Quetepe, au pied du Malpighia coco~o&fp/MM,
dont les feuilles sont extrêmement coriaces, parmi des touffes de Polygala
wo/a!, les premiers Melastomes, surtout cette belle espèce décrite sous le nom
de M. rufescens. Le souvenir de ce site nous restera long-temps présent à la
mémoire le voyageur conserve une vive prédilection pour les lieux où il
rencontre un groupe de plantes qu'il n'a point encore vues à l'état sauvage.
En avançant vers le sud-ouest, le sol devient aride, et sablonneux nous
gravîmes un groupe de montagnes assez é)evées qui séparent la côte des vastes
plaines ou savanes bordées par l'Orénoque. La partie de ce groupe
sur
laquelle passe le chemin de Cumanacoa, est dénuée de végétation, et des
a
pentes rapides vers le nord et le sud. On la désigne sous le nom de Fj~MDO~t&A?~
parce qu'on pense qu'en cas d'un débarquement de l'ennemi, cette crête de
montagnes offriroit un asyle aux habitans de Cumana. Nous arrivâmes à la cime
<.

A quatre heures du soir hygromètre de Deluc, 48°; thermomètre centigrade, a6",5. De Qnetene,
je relevai, avec la boussole, le cap Macanao N.
a6"0. L'angte entre ce cap et la vallée San Juan de tite
de la Marguerite est de 39° 28'. La distance directe de Quetepe & Cumana paroît
être de trois lieues
et demie.
peu de temps ayant le coucher du soleil et je pus à peine prendre quelques
angtes horaires pour dé~rminer la longitude du !ieu, au moyen du chronomètre*.
La vue de t'Ïmposible est plus belle et lus étendue que celle. du plateau de
Quetepe., Nous distinguâmes très'bien, et à !a simple vue, la cime aplatie du
Brigantin, dont il seroit si important de bien fixer ta position, l'embarcadère et
la rade de Cumana. La côte rocheuse de ta péninsule d'Araya se dessinbit
dans toute sa longueur. Nous fûmes frappés surtout delà configuration extraor-
dinaire d'un port, que l'on désigne sous te nom de Z~M~c G~an~cu Laguna
t?c/0&M~o. Unvastebassin, environné de hautes montagnes, communique au
golfe de Cariaco par un canal étroit, qui ne donne passage qu'à un seul
vaisseau. Ce port, dont M. Fidatgo a levé te plan détaitté, pourroit contenir
plusieurs escadres à la fois. C'est un lieu désert, fréquenté d'année en année
par des bâtimens qui conduisent des mulets aux îles Antilles. On trouve quelques
pâturages au fond de la baie. Nous suivîmes del'œil les sinuosités de ce bras
de mer qui, semblable à un neuve, s'est creusé un 'lit entre des rochers taillés
à pic et dénués de végétation. Ce coup d'ceil extraordinaire rappelle le fond du
'paysage fantastique dont Léonard de Vinci a orné le fameux portrait de la
Joconde
Nous pûmes observer, au chronomètre, le moment où le disque du soleil
toucha l'horizon de la mer. Le premier contact eut lieu à 6' j3"; le second, 8
à 6'* 10' 26", en temps moyen. Cette observation, qui n'est pas sans intérêt
pour la théorie des réfractions terrestres, fut faite au sommet de la montagne
à la hauteur absolue de 2g6 toises. Le coucher du soleil fut accompagné d'un
refroidissement de l'air bien rapide. Troisminùtes après le dernier contact
apparent du disque avec l'horizon de la mer, le thermomètre baissa subitement
de a5~a à 21°,3. Ce refroidissement extraordinaire étoit-il l'effet de quelque
courant descendant ? L'air cependant étoit calme, et aucun vent horizontal ne
se Et sentir.
Nous passâmes la nuit dans une maison où il y a un poste militaire de

~<ye~ mes 06«rc. <Mtron., Tom. ï, p. n4. La latitude doit être près de to* 23' cause de la distance
la côte méridionale du golfe de Cariaco. Je relevai la rade de Cumana, N.6t°ao'0.; le cap Macanao,
N.99° a/0. la t.agnna Grande, wr la cAteseptentr'ottate du golfe de Cariaco, N.g° to'0. le Cerro del
Bergantin ( centre d: la Mesa ), S.a7° 5'0. Oistance plus courte à la mer trois a quatre millea. Les angtes
ont été pris, en partie par le Mutant, en partie par la boussole ces derniers sont déjà corrigés par la décll
naison magnétique.
Mena Lisa, épouse de FrancescodelGiocondo.
36~ Il RtvnB ïtt.
huit
h)i!t hommes ~umman~s par
hnmtnfs commandés un sergent espagnol.
nar un C'eS un hospice, construità
esDacnoL C'est
côté d'un magasin à poudre, et qui offre,au voyageur toMe sorte de secours.
Le même détachement militaire habite la montagne pendant cinq à six mois.
On choisit de préférence tes soldats qui ont des c~c~-f on plantations dans tes
environs. Lorsqu'aprèsla prise de l'Me de ta Trinité par les Angtois~en ~97,
]a ville de Cumana Jut menacée d'une attaque, beaucoup d'habitans se réfu-
gièrent à Cumanaçoa et déposèrent ce qu'ils avoient de plus précieux
dans des hangars, construits en hâte, à la cime de l'ïmposible. On avoit résolu
alors d'abandonner, en cas d'une invasion imprévue, le château Saint-Antoine,
après une courte résistance, et de concentrer toutes les forces autour de la
montagne qu'on peut regarder comme la clef des jL/o~o~. Les événemens
militaires qui, à la suite des révolutions politiques, ont eu lieu depuis dans ces
contrées, ont prouvé combien ce premier plan étoit sagement combiné.
La cime de l'ïmposible, autant que j'ai pu l'observer est couverte d'un
grès quarzeux dépourvu de. pétrification. Ses couches sont ici, comme sur le
dos des montagnes voisines, assez régulièrement dirigées du N.N.E. auS.S.O'.
J'ai déjà rappelé plus haut que cette direction est aussi la plus fréquente,*
dans les formations primitives, à la péninsule d'Araya et le long des côtes
de Venezuela. Sur la pente septentrionale de limposible près des Penas
Negras une source abondante sort du grès, qui alterne avec de l'argile
schisteuse. On observe sur ce point, des couches fracturées qui sont
difrigées du nord ouest au sud est et dont l'Inclinaison est presque
perpendiculaire.
Les Llaneros, ou habitai des plaines, envoient leurs productions, surtout
le maïs, le cuir et le bétail, au port de Cumana par la route de l'Imposible.
Nous voyions arriver sans cesse des mulets conduits par des Indiens ou des
mulâtres. La solitude de ce lieu me rappela vivement les nuits que j'avois passées
à la'cime du Saint-Gothard.Le feu avoit pris sur plusieurs points aux vastes
forêts qui entourent la montagne. Des ûammesrougeâtres, à demi-enveloppées
dans des torrens de fumée, offroient le spectacle le plus imposant. Les, habitans
mettent le feu aux forêts pour améliorer les pâturages et détruire le~ arbustes
qui étouffent l'herbe déjà si rare dans ces contrées. Souvent aussi 4'énormes
embrasemens sont bausés par l'insouciance des Indiens qui négligent
en
voyageant, d'éteindre le feu auquel ils avoient préparé leurs alimens. Ces

Hor.3-4, mcUn.de45°ausnd.
accidens ont contribua à diminuer le nombre des vieux arbres dans le chemin
dé Cumana à CumatMcoa, et les habitansobserventavec raison que~ sur
plusieurs points de leur province, la sécheresse a augmente, non-seulement
parce que te ~bl devient d'année en année plus crevasse par la fréquence des
tremblemens de terre, mais aussi parce qu'il est aujourd'hui moins garni dé
bois qu'il ne l'étoit à l'époque de la conquête.
Je me levai pendant la nuit pour déterminerla latitude du lieu par te passage
de Fomahault par le méridien. L'observation fut perdue, par le temps que
j'employai à niveler l'horizon artificiel. C'est le grand inconvénient des
instrumens à réflexion, lorsqu'on ne se sert pas, à cause de la mobilité des
fluides, d'horizons à mercure, à amalgame où à huile, mais de ces verres plans,
dont l'usage a été introduit par M. de Zach. H étoit minuit, j'étois transi de
froid comme nos guides; cependant le thermomètre se soutint encore à ï9"7.
A Cumana, je ne l'ai jamais vu baisser au-dessous de 2ï"; mais aussi la maison
que nous habitions à flmposible étoit élevée de 258 toises au-dessus du niveau
de l'Océan. Je déterminai, à la Casa de la ~o/tWM, l'inclinaisonde l'aiguille
aimantée elle étoit de ~2°,5. Le nombre des oscillations correspondantes à
10' de temps, s'élevoit à 233; l'intensité des forces magnétiques avoit par
conséquent augmenté des côtes à la montagne, peut-être par l'influence de
quelques masses ferrugineuses, cachées dans les couches de grès, qui surmontent
le calcaire alpin.
Nous quittâmes l'Imposible le 5 septembre, avant le lever du soleil. La
descente est très-dangereuse pour les bêtes de somme; le sentier n'a généralementt
que i5 pouces de large, et il est bordé de précipices. En t~gô, on avoit conçu
le projet utite de tracer une belle route depuis le village de San Fernando jusqu'à
la montagne. Un tiers de cette route étoit même déjà terminé; malheureusement
on l'avoit commencée dans la plaine au pied* de flmposible de sorte que la
partie du chemin la plus difficile étoit restée intacte. Les travaux furent inter-
rompus par une de ces causes qui font échouer presque tout projet d'amélioration
dans les colonies espagnoles. Plusieurs autorités voulurent s'arroger le droit de
diriger à la fois les travaux. Le peuple a payé patiemment le péage pour un
chemin qui n'existoit pas, jusqu'à ce que le gouverneur de Cumana ait mis
fin à cet abus.

A t~5 R.
L'inclinaisonmagnétiqueest toujours expnmée, dans cette Relation historique,
en division centési-
male, si le contraire n'est pas expressément indiqué.
En descendant l'ïmposible, on voit reparoftrè, sous le grès, la roche
calcaire alpine. Comme les couches sont généralement inclinées au sud et au
sud-est, un grand nombre de sources jaillissent sur la pente ïnéridionale de la
montagne. Dans !a saison des pluies, ces sources forment des torrens, qoi
descendent en cascades ombragées d'Hura, de Cuspa et de Cecropi& 1à

feuilles argentées.
Le Cuspa, assez commun dans les environs de Cumana et de Bor~toaes, est
un arbre encore inconnu aux botanistes de l'Europe. 11 n'a servi pendant
long-temps qu'à la construction des maisons, et est devenu célèbre, depuis
l'année 179~ sous le nom de Cascarilla on Quinquina de la Nouvelle-Anda-
lousie. Son tronc s'élève à peine à quinze ou vingt pieds de hauteur; ses feuilles
alternes sont lisses, entières et ovales. Son écorce, très-mince et d'un jaune
pâle, est éminemment fébrifuge} elle a même plus d'amertume que l'écorce des
véritable~ ~inchona, mais cette amertume est moins désagréable. Le Cuspa
s'administre, avec le plus grand succès, en extrait alcoholique et en infusion
aqueuse~ tant dans les Sèvres intermittentes que dans les fièvres malignes. Le
gouverneur de Cumana, M. d'Emparan~ en a envoyé une quantité considérable
aux médecins de Cadix; et, d'après des renseignemens donnés depuis peu
par Don Pedro Franco pharmacien de l'hôpital militaire de Cumana, le
Cuspa a été reconnu en Europe presque aussi bon que le Quinquina de Santa-Fe.
On prétend que, pris en poudre, il a l'avantage, sur ce dernier, d'irriter moins
l'estomac des malades, dont le système gastrique est très-anbibli.
/Sur les côtes de la Nouvelle-Andalousie, le Cuspa est regardé comme une
espèce de Cinchona;,et Pon assure que des moines aragonois, qui avoient résidé
long-temps dans le royaume de la Nouvelle-Grenade,Ont reconnu cet arbre par
la ressemblance de ses feuilles avec celles des véritables Quinquinas. Cette
assertion n'a rien d'exact; c'est justement par la disposition de ses feuilles et
par l'absence des stipules, que le Cuspa diffère totalement des plantes de la
famille des Rubiacées. Il se rapproche peut-être de la famille des Chèvre-
Feuilles ou Caprifbliacées~ dont une section a des feuilles alternes, et parmi
lesquels on trouve déjà plusieurs Cornouillers remarquables
fébrifuges~. par leurs propriétés
<
Bois de trompette.
Vers le sommet des brancher les feuilles sont quelquefois opposées, mais
conoKtmment <<éponrvttes
de stipuïes.
(
3 Cornus florida et C. sericea des États-Unis. ~<t~. on the tW~ of <&ComM <~ Cinchona
contpa!re<P/tt/af<i8o3.)
CBÀPITREVt. 367
Le goût la fois amer;r et
astringent !a couleur ~tuve
~stninsent et la &uve de Fecorce ont
pu seuls conduire à la découverte de la vertu fébrifuge du Gaspa. Comme il
fleurit à la fin de novembre, nous ne t'avons pas trouvé en Heur, et nous
ignorons à quel genre il appartient. Depuis plusieurs années, j'ai demandé
vainement à nos amis de Cumana des échantillons de la fleur et du fruit.
J'espère que la détermination botanique du Quinquina de la Nouvelle-Anda-
lousie fixera un jour l'attention des voyageurs qui visiteront ces régions après
nous, et qu'Us ne confondront pas, malgré l'analogie des noms, le CM~a avec
le Cuspare. Ce dernier ne végète pas seulement dans les missions du Rio Carony,
mais aussi à l'ouest de Cumana, dans le golfe de Santa-Fe. Il fournit aux
pharmaciens d'Europe le fameux Cortex .<M<M~, et forme le genre Bon-
plandia, décrit par M. WUldenow dans les Mémoires de l'Académie de Bertin
d'après des notes que nous lui avions communiquées.
H est assez surprenant que, pendant un long séjour que nous avons fait sur
les côtes de Cumana et de Caracas, sur !es rives de l'Apure, de l'Orénoque et
du Rio Negro, dans une étendue de terrain de ~0,000 lieues carrées, nous
n'ayons jamais rencontré une de ces nombreuses espèce~ de Cinchona ou
d'Exostema, qui sont propres aux régions basses et chaudes des tropiques,
surtout à l'Archipel des Antilles. Nous sommes loin de vouloir affirmer que,
dans tonte la partie orientaJe de l'Amérique du Sud, depuis Portocabello jusqu'à
Cayenne, ou depuis l'équateur jusqu'au !0° de latitude boréale, entre tes
méridiens de 54 et
71 degrés, il n'existe absolument pas
de Quinquina.
Pourroit-on se vanter de connoitre en entier la Flore d'une si vaste étendue
de pays? Mais lorsqu'on se rappelle qu'au Mexique même, on n'a encore
découvert aucune espèce 3 des genres Cinchona et Exostema, ni sur le plateau
central, ni dans les plaines, on doit être porté à croire que les îles montagneuses

~nn~t8o'p.a4.
Ant Cinchonasdes basses rég!ons( qui <ont presque tontes des J?jftM<enM, corollis glabris, filamentis
longe eMertis, e basi tubi nascentibns, seminibusmargine integro cinctis ) appartiennent C. longiflora de
Lambert, C. caribœa,~C. angusttfotia de Swartz, C. lineata de Vau!, C. pbilippica de Née. royez mon
Essai botanique et physique sur les Quinquinas du Nouveau-Continent, dans Ber/. Jtfa~<t:M A'M<«r/!)r<cA.
7'*reM/!f<e, )8o7, p. 108. Le genre Exostema a été décrit le premier par MM. Richard et Bonptanddans nos
Plantes ~<HBOjrM&s Tom. t, p. l3t. ~t~cArtM~er, J~Hr~M' die Bo~ntt, B. t, p. ~M.~J
Le Cinchona angusttfoHa et le C. tongiNora n'ont jamaisété trouvés a la Nouvelle-Espagneou a Cayenne,
quoiqu'on l'ait amrmé récemment (Lambert, Deeer. o~ <e genus CMc~o~m, ~97, p 38. Btt~etm de
~MrnMfM, )8tit, p. 4ga). M. Richard, qutarésidési long-temps, après Aublet, a ta Guiane francoise,
assure qu'aucune espèce de Quinquina n'y a été découverte. L'échantmondu C. tongiOora, que M. Lambert
cite dans ton intéressante Monographie comme tiré de l'herbier d'Aublet, est probablement de l'ile Saint-
des Antilles et la Cordittère des Andes ont des Flores parttcauères, et queMes
possèdent des groupes de végétaux qui n'ont passé ni des nés sur !e Continent,
ni de l'Amérique méridionale aux côtes de la Nouvetie-Espagne.
Il y a plus encore. En réfléchissant sur les nombreuses analogies qui existent
entre les propriétés des végétaux et leur forme extérieure, on est surpris de
trouver des vertus éminemment fébrifuges dans des écorces d'arbres qui appar-
tiennent à dISérens genres, et même à des familles différentes 1. Quelques-unes
de ces écorces se ressemblent à tel point ,qu'il est facile de les confondre
au simple aspect. Mais, avant d'examiner la question de savoir si l'on découvrira
un jour, dans le véritabtë Quinquina, dans le Cuspa de Cumana, le Cortex
~o~fHnr, le Switenia de t'tnde, les sautes de l'Europe, les fruits du Caner
et de t'Uvaria, une matière uniformément répandue et offrant ( comme
l'amidon/te caoutchouc et te camphre), dans différens végétaux, les mêmes
propriétés chimiques, on pourroit demander si, en général, dans tétât actuel
de la physiologie et de la médecine, on doit admettre un ~TMC~Cj~&~t~e?

Domingue du moins Vahl a reconnu parmi tes plantes des Antittes, conservée* dans tes collections de
M. de Jussieu,le C. longiflora. tjë Quinquina du Grand Para (C, brasiliensis, Hofmansegg) est-il un véri-
table Cinchona, ou appartient~it au genre Machaonia ?
tt peut être de quelque intérêt pour la chimie, la physiologie et la botanique descriptive,de réunir aous
un même point de vue tes végétaux qui ont été employés avec plus ou moins de succèsdanstes fièvres inter-
mittentes. Nous trouvons, parmi tes /<u&/ac~e<, outre tes Cinchona et tes Exostema, le Coutarea speciosa
ou Quinquina de Cayenne, le Portlandia grandiflora des Antilles, on autre Portlandia découvert par
M. Sesse au Mexique, le Pintmeia pubescensdes Ëtats'Unjs, le fruit dm Caner, peut-être aussi le Macroc-
nemum corymbosumet le GuettaMa coccinea parmi les ~n~mo/tac~M, le Tulipieret te Magnolia glauca;
parmi tes Zanthoxylées, le Cuspare de l'Angostura, connu en Amérique sous le nom de Quinquina de
t'0réuoqne,et le Zanthoxylon carib~um; panni les Légumineuses, lesGeoB'ra'a, te SwitBnia<ebrifuga,
t'~Esehinomene grandiitora, le CiBSatpinia bonducella; parmi tes Caprifoliacées, le Comus florida et le
Cuspa de Cumana parmi tes Rosacées, le Ceras<*<virginiana et le Geum urbanum parmi tes .ten<ac<M j
les saules, les chênes, tes bouleaux, dont l'extrait alcoholique est usité en Russie parmi le peuple, le
Populus tremutoides, etc. parmi tes ~nnonac~, l'Uvaria febrifuga dont nous avons vu employer avec
succès les fruits dans les missions de la Guiane espagnole; parmi tes &BMroHMM le Quassia am~ra
célèbre dans les plaines Sévreuses de Surinam, parmi les TX~~t~AaceM, le Rhus glabrmn; parmi les
Euphorbiacées, le Croton Cascaritta, parmi tes Composées, t'Enpatorium perfoliatum, dont les sauvages
de l'Amérique septentrionate connoissent tes vertus fébrifuges. ( Grt/t<M, C'Atn<HMn-o~a<, Dorpat, t8oa.
Renard, <t~ tn/anc!. &H-n)~a<e der CAMorM~e, ~<tM:, t6o~. J9M~n<&)~~ ~Mr~~rojer~~nte~tca/M
des plantes, ~8~6, p. y3, tao, ig8, t4a, 165, t~t, t7Q. Rogers, on <A<~Mpe~te< of the Liriodendron
<)t/er< ~f7f!f/<iSoa. ) C'est de t'écorce des racines qu'on se sert dans le Tulipier, comme dans le
Quassia. On a de même reconnu, à Loxa, des vertus éminemment fébrifuges dans le corps cortical des
racines du Cinchona condaminea; mais il ést heureux, pour la conservationde l'espèce, qu'on n'emploie
pas
dans les pharmacies tes racines des véritables Quinquinas. On manque encore de rechercheschimiques
sur
les amers éminemmenténergiques, contenus dans les racines du Zanthori~aaptifotia de t'Acta-a race-
et
mosa le dernier a été quelquefoisemployé avec succès a KeH -York, dans les épidémiesde la 6e vre jaune.
N'estai! pas probaNS, plutôt, que ce dérangement particuUer de l'organisation,
que l'on désigne sous le nom vague d~~J~WH.r~ et dans lequel le
système vasculaire- et le système nerveux sont attaques à la fois, cède à
des remèdes qui n'agissent point par les mêmes principes, par un même mode
d'action sur les mêmes organes, par un même jeu des attractions chimiques
et électriques? Nous nous'bornerons à faire observer ici que, dans les espèces
du genre Cinchona, les vertus antifébriles ne paroissent résider, ni dans le
tannin (qui y est mêlé accidentellement ), ni dans le cinchonate de chaux, mais
dans une matière résiniforme que l'alcohol et l'eau dissolvent à la fois, et que
l'on croit composée de deux principes, de l'<MMcr et du rouge CMcAon~M&f.
Or, peut-on admettre que cette matière résinifbrme, diSéremment énergique
selon les combinaisons qui la modifient, se retrouve dans toutes les substances
fébrifuges? Celles par lesquelles le sulfate de fer est précipité en vert, comme
le vrai Quinquina, l'écorce du saole blanc et le périsperme corné du Caner,
n'annoncent pas pour cela une identité de composition chimique et cette
identité pourroit exister, sans que l'on puisse en conclure que les vertus
médicales fussent analogues. Nous voyons que les ~Mcn?~ et les tannins, lorsqu'ils
sont extraits de plantes qui ne sont pas d'une même famille, offrent des différences
multipliées, tandis que l'analyse comparative du sucre, de la gomme et de
l'amidon, la découverte du radical de l'acide prussique, dont les effets sur
l'organisation sont si puissans, et tant d'autres phénomènes de la chimie végétale,
prouvent indubitablement que « des substances composées d'un petit nombre
d'élémens Identiques, et en même proportion, oSrcnt les propriétés les plus
hétérogènes, à cause de ce mode particulier de combinaison que la physique
corpusculaire appelle l'arrangement,des molécules~.
En sortant du ravin qui descend de l'Imposible, nous entrâmes dans une

L'écorcedu Cuspare( CM-t. ~n~Ct<MriB ) préctpttc le fer en jaane, et cependant elle est employée. sur
tes bords de l'Orénoque, et surtout & la ville de Saint-Thomas de l'Angostura, comme mn excellent
Quinquina. D'un autre côté, t'ecorce du cerisier commun, dont la propriété fébrifuge est presque huUe,
précipite -le fer en vert, comme les véritables Cinchonas. ( Vauquelin, dans les ~MM& <& Chimie,
Tom. LIX, p. t43. Reuss, dans le Journal de Pharmacie, 18) 5, p. 5o5. Grindel, /ïtM<MeAe<~aAr6. der
T'Aorm., 1808, p. i83. ) Matgré t'extrême imperfectionde la chimie végétate,les expériences déj& faites sur
les Quinquinas prouvent suffisamment que, pour juger des propriétés anti(ébriles d'une écorce it ne faut
pas attacher une grande importance,ni au principe qui verdit les oxides de fer, ni au tannin,niMamattëre
qui précipitel'infusion de tan.
Cay j~uMac, JP~t. sur f/oeh p. t <9, no<e 1. (Humb., ~-s. über die ~ere~te .Mt~~Mer, B. 1,
p..28.)
forêt épaisse et traversée par un grand nombre de petites rivières que l'on
passe facilement à gué. Nous observâmes que le
Cecropia, dont la dispositiondes
branches et le tronc élancé rappellent le port du palmier, se couvre de feuilles
plus ou moins argentées, selon que le sol est aride ou marécageux. Nous en vhnes
des pieds dont la feuille étoit entièrement verte sur les deux surfaces Les racines
de ces arbres se cachoient sous des touffes de Dorsteriia, qui ne se plaît que dans
les endroits ombragés et humides. Au milieu de la foret, sur les bords du Rio
Cedono, comme à la pente méridionale du Cocollar, on trouve, à l'état sauvage,i
des papayers et des orangers à fruits grands et doux. Ce sont probablement les
restes de quelques conucos ou plantations indiennes; car, dans ces contrées,
l'oranger ne peut être compté parmi les végétaux spontanés, non plus que le
bananier, le papayer, le maïs, le manioc et tant d'autres plantes utiles dont
nous Ignorons la véritable patrie, quoiqu'elles aient accompagné l'homme dans
ses migrations, dès les temps les plus reculés.
Lorsqu'un voyageur, récemment arrivé d'Europe, pénètre, pour la première
fois, dans les forêts de l'Amérique méridionale, la nature se présente sous lui
un aspect inattendu. Les objets qui l'entourent ne lui rappellent que fbiblement
les tableaux que des écrivains célèbres ont tracés sur les bords du MissIssipI, en
Floride, et dans d'autres régions tempérée du Nouveau-Monde. Il sent, à chaque
pas qu'il se trouve, non sur les limites, mais au centre de la zone torride, non
dans une des îles Antilles, mais sur un vaste continent, où tout est gigantesque,
les montagnes, les rivières et la masse des végétaux. S'il est sensible aux beautés
des sites agrestes, il a de la peine à se rendre compte des sentimens divers qu'il
éprouve. Il ne sait démé~r ce qui excite le plus son admiration, ou du calme
silencieux de la- solitude, ou de la beauté individuelleet du contraste des formes,
ou de cette force et de cette fraîcheur de la vie végétale qui caractérisentle climat
des tropiques. On diroit que la terre, surchargée de plantes, ne leur offre pas assez
d'espace pour se développer Partout le tronc des arbres est caché sous un tapis
épais de verdure; et si l'on transplantoit avec soin les Orchidées, les Piper et
les Pothos, que nourrit un seul Courbaril ou un figuier de
l'Amérique, on
parviendroit à couvrir une vaste étendue de terrain. Par cet agroupementbizarre,
les forêts, comm&lenanc des rochers et des montagnes agrandissent le domaine
a

Le Manzanarès;le Cedeno, avec une plantation de Cacoyera et une roue hydrauHqne le Vichoroco
le Lucasperez avec une habitation qui porte le nom du de la Cuesta; le Rio San Juan j etc.
° Le Cecropia concolor de Willdenovne seroit-il qu'une variété du C.peltata?
Ficus gigantea.
de~a,atMe.,o~e8~
c~&d~ës~Ms~ ~'un à.l'gutrey à.plug;d,e,cent pied.s'dé
C'est ainsi que,, .pa~Btf~ pladtt~ss.eui'¡~B:âfti¿n~
es~;souvent,.e~posé;cpnfbad~~
nent a,
Nous
des~espèces~dME~ent~
~march~B~€8~penda~ .T, :< ces voûtes qui
<

laissentà peine;.entFevQi~~l~zu~du.ciel~ d'un Meu d'indigo d'autant


plus ~ncéyque le ~rt des pentes équinoxi~ est généralement d'un tojc~
vigoureux et tiran!. sur le brun~ Une~rande j~ugère~en~~a~~ très-diCérente
dnBo~podtmma''boreu!n des ÂjMMtes, sarm<MtttMt des masses de rochers épars.
Nous jtumes &~ppss, dans c~t eodroit, pour ta premtère fols, de ces nids en
tonne de bouteiMes ou depetites poches ) qui se trouvent suspendus aux branches
des arbres tes moins e!e~ës. !!$ attestent t'adn)irab!e industrie des Tronpia!s, qui
mé!oient !eur ramage aux cris rauques des perroquets et des aras. Les derniers,
si connus par t~ vivacité de ïeurs codeurs, ne voloitent que par paires, tandis
que les véritabtes perroquets errent par troupe!! de plusieurs centaines d'in-
dividus. H faut avoir vécu dans ces climats, surtout dans les vallées chaudes
des Andes, pour concevoir comment ces oiseaux peuvent quelquefois couvrir
de leur voix le brait sourd des torrens qui se précipitent de rocher en rocher.
Nous quittâmes les tbrets à une forte Ueue de distance du village de San
Fernando. Un sentier étroit conduit, après plusieurs détours~ dans un pays
découvert, mais extrêmement humide. Dans la zone tempérée j les Cypéracées
et les Graminées y auraient &)rmé dévastes prairies ici, le sol àbondoit en
plantes aquatiques à feuilles sagittées, et surtout en basiliers, parmi lesquels nous
reconnûmes les Rears superbes des Costus, des Thalia et des Héliconia. Ces
herbes succulentes ~élèvent à huit ou dix pieds de hauteur, et en Europe leur
agroupement seroit considéré comme un petit bois. Le spectacle ravissant des
prairies et d'un gazon parsemé de Neurs manque presque entièrement aux
basses régions de la zone torride; on ne le retrouve que sur les plateaux des
Andes.
Près de San Fernando, l'éyaporation,causée par l'action du soleil, étoit si
forte, que, n'étant que très-légèrement vétus, nous nous sentîmes mouillés
comme dans un bain de vapeur. Le chemin étoit bordé d'une espèce* de
bamboasier, que les Indiens désignent sous le nom de Iagua ou Guadaa, et

Peat-~tre n«tre AspMmm cot~M'tOtha


Bambttsa GtM<&«t. ( f~yez I& PL XX de n<M f&tn<M ~«M., Tom. t, p. 68. )
qui s'élève à plus de quarante pieds de hauteur. Rien n'approche de l'élégance
de cette graminée arborescente. La forme et la dispositionde ses feuilles lui
donnent un caractère de légèreté qu! contraste agréablement ave<~ la hauteur de
sa taille. Le tronc lisse et taisant du !agua estgénéralement penché veMie bord
des ruisseaux, et il s'agite au mpindresou~nle des vents~ Quelque élevée que soit
la canne' dans le midi de l'Europe, elle ne peut donner aucune idée de l'aspect
des graminéesarborescentes; et, si j'osois m'en rapporterà ma propreexpérience,
je dirois que le bambousier et la fougère en arbre sont “ de toutes les formes
végétales des tropiques, celles qui frappent le plus l'imagination du voyageur.
Je n'entrerai pas dans les détails de la botanique descriptive pour prouver
que les bambous des grandes Indes, les c~MMe~J~f&aM~ de Hie de Bourbon,
les Guaduas de t'Amérique méridionale, et peut-être même les Arundinaria
gigantesquesdes bords du Mississipi .appartiennent à un même groupedeplantes.
Ces discussions sont consignées dans un autre ouvrage, consacré uniquement à
la description' des nouveaux genres et des nouvelles espèces que nous avons
rapportés de ,nos voyages 3. Il sufnt ici de faire observer, en général, qu'en
Amérique, les bambousiers abondent moins qu'on ne le croit communément, Ils
inondées
manquent presque entièrement dans les marécages et tes vastes plaines
du Bas-Orénoque, de l'Apure et de FAtabapo, tandis qu'ils forment des bois
épais de plusieurs lieues de long, dans la partie du nord. ouest, dans la
Nouvelle-Grenade et dans le royaume de Quito. On diroit que la pente occi-
dentale des Andes est leur véritable patrie; et,
ce qui est assez remarquable
nous les avons trouvés non seulement dans les basses régions, au niveau de
l'Océan, mais aussi dans les hautes vallées des Cordillères, jusqu'à 860 toises
d'élévation.
Le chemin, bordé de bambousiers, nous conduisit jusqu'au petit village de San
Fernando, qui est situé dans une plaine étroite, entourée de rochers calcaires
très-escarpés. C'étoit la première mission 4 que nous voyions en Amérique. Les

Amndo Donax.
° Bamhusa, ou plutôt Nashnatpina.
Nov. Gen. et %M~, Tom. ï, p. a<n et a4t de I'édtt:on m-4 Les ~ux continent oarent chacun
diverses espèces de gen~e* Nastuo et BamItuM.
On appelle, dans !es colonies espaghotea,~MMn
on Pueblo de Miaion, une rémnon d'habitations
autour d'une égusë qui est desservie par un moine missionnaire. Les viMaget indiens, gouvernés des
curés, s'appellent Pueblos de Doctrina. On distingue d'ailleurs le Cttra doctrinero, qui est le curépar
d'une
paroisse d'tndiens, et le Cura. ~e~, qui est te curé d'an village haMté
mêlée.
par des hommes btaBes on de
race
maisons, ou plutôt les cabanes des Indiens Chaymas séparées les unes des autres,
ne sont point entoura de jardins. Les raes, larges et bien alignées, se coupent
à angle droit tes murs, très-minces et peu soMdes~soat de' terre glaise et
raSermispardes lianes. Cetteuniformité de construction, fair grave, et ta'c!turce
des habitans, l'extrême propretéqni règne dans leurs maisons, tout MppëMe ici
les établissemensdes Frères Moraves. Chaque famille d'jfndienscultive, à quelque
distance du village, outre son propre jardin, le eonuco de la commune C'est
dans ce dernier que les individus adultes des deux sexes travaillent une heure
le matin et une heure le soir. Dans les missions les plus rapprochées de la cote,
le jardin de la communauté est généralement une plantation de canne à sucre
ou d'Indigo, dirigée par le missionnaire, et dont le produit, si l'on suit stricte-
ment la loi, ne peut être employé qu'à l'entretien de l'église et à l'achat des
ornemens sacerdotaux. La grande place de San Fernando, située au centre du
village, renferme l'église, la demeure du missionnaire, et cet humble édifice que
l'on appelle tastueusement la maison du roi, Casa del ~y. C'est un véritable
caravanserai, destiné à donner de l'abri aux voyageurs, et, comme nous t'avons
souvent éprouvé, infiniment précieux dans un pays où le mot d'auberge est encore
inconnu. Les Casas del Re se retrouvent dans toutes tes colonies espagnoles, et
l'on pourroit croire qu'elles sont une imitation des Tambos du Pérou établis
d'après les lois de Manco Capac.
Nous avions été recommandés aux religieux qui gouvernent les missions des
Indiens Chaymas, par leur syndic qui réside à Cumana. Cette recommandation
nous étoit d'autant plus utile, que les missionnaires, soit par zèle pour la pureté
des moeurs de leurs paroissiens, soit pour soustraire le régime monastique à la
curiosité indiscrète des étrangers, mettent souvent en exécution un réglement
ancien, d'après lequel il n'est pas permis à un homme blanc de l'état séculier de
s'arrêter plus d'une nuit dans un village indien. En général, pour voyager agréa-
blement dans les missions espagnoles, il seroit imprudent de se fier uniquement
au passe-port émané de la secrétairerie d'état de Madrid ou des gouverneurs civils
il faut se munir de recommandations données par les .autorités ecclésiastiques
surtout par les gardiens des couvens ou par les généraux des ordres résidant à
Rome, qui sont inûniment plus respectés des missionnaires que ne le sont les
évoques. Les missions forment, je nedirai pas, d'après leurs institutionsprimitives
et canoniques, mais dans le fait, une hiérarchie distincte, à peu près indépendante
et dont les vues s'accordent rarement avec celtes du clergé séculier.
CottMCo de la communidad.
Le missionnairede San Fernando étoit un capucin aragono!s, très-avance en
âge, mais encore plein de vigueur et de vivacité. Son extrême embonpoint, son
humeur joyeuse, son intérêt pour les combats et les sièges, s'accordaient assez
mal avec les idées que l'on se forme, dans les pays du nord, de la rêverie mélan-
colique et de la vie contemplative des missionnaires. Quoique très-occapë d'une
vache qui devoit être tuée le lendemain, ce vieux religieux nous reçut avec
bonhomie; il nous permit de tendre nos hamacs dans un corridor de sa maison.
Assis, sans rien faire, pendant la majeure partiedu jour dans un grand fauteuil de
bois rouge, il se plaignoit amèrement de ce qu'il appeloit la paresse et 1 ignorance
de ses compatriotes. H nous fit mille questions sur le véritablebut de notre voyage,
qui lui parut hasardeux et pour le moins très-inutile. Ici, commeàl'Orénoque,
nous fûmes fatigués par cette vive curiosité que conservent les Européens, au
milieu des forêts de l'Amérique .pour les guerres et les orages politiques de l'Ancien-
Monde.
Notre missionnaire sembloit d'ailleurs très-satisfait de sa position. Il traitoit les
Indiens avec douceur; il voyoit prospérer sa mission; illouoît avec enthousiasme
les eaux, les bananes et If laitage du canton. La vue de nos instrumens, de nos
livres et de nos plantes sèches lui arrachoit un sourire malin; et il avouoit, avec
la naïveté qui est propre à ces climats, que, de toutes les jouissancesde la vie,
sans en excepter le sommeil, aucune n étoit comparable au plaisir de manger de
la bonne viande de vache, carne <~focco tant il est vrai que la sensualité se
développe par l'absence des occupations de l'esprit. Notre hôte nous engagea
souvent à visiter avec lui cette vache qu'il venoit d'acheter et, le lendemain,
au lever du soleil, nous ne pûmes nous dispenser de la voir tuer à la manière du
pays, c'est-à-dire en coupant le jarret, avant d'enfoncer un large couteau dans les
vertèbres du cou. Quelque dégoûtante que fût cette opération, elle nous apprit
à connoître l'extrême adresse des Indiens Chaymas, qui, au nombre de huit, en
moins de vingt minutes, parvinrent à couper l'animal en petites portions. Le
prix de la vache n'étoit que de sept piastres, et ce prix sembloit très-considérable.
Le même jour, le missionnaire avoit payé dix~huit piastres à un soldat de Cumana
y
pour avoir réussi, après plusieurs tentatives infructueuses, à le saigner au pied.
Ce fait, peu important en apparence, prouve, d'une manière frappante, combien,
dans les pays incultes, le prix des choses diQère de celui du travail.
La mission de San Fernando a été fondée à la fin du dix-septième siècle, près
de la jonction des petites rivières duManzanarès et de Lucasperez Un incendie,
CoM/tn, 7?M~. cor<c~ZVMet~~M&MM~ p. 3oQ.
qui consuma l'église et les cabanes des Indiens, engagea !es eapacins & ptacer le
village dans le beau s4<te qu'il occupe aujourd'hui. Le nombre dte familless'est
accru jusqu'à cent et le missionnaire nous &t observer que l'usage que ~uivent
tesjehne~ gens, dese mariera l'âge de trei~ ou quatorze ans, contribuebeaucoup
à cet accroissement rapide de la population,tinioit que la vieillesse fut aussi
précoce parmi tes Indiens Chaymas, que le croient eommunéBMnt les Européens.
Le gouvernement de ces communes indiennes est d'ailleurs très-compliqué; elles
ont leur gouverneur rieurs alguazils majors et leurs commandans de milice,
qui sont tous des indigènes cuivrés. La compagnie des archers a ses drapeaux,
et fait l'exercice avec l'arc et la flèche en tirant au Manc c'est la garde nationale
du pays. Cet appareil militaire, sous un régime purement monastique, nous
parut bien singulier.
La nuit du 5 septembre, et le matin suivant, il y eut une brume épaisse;
nous n'étions cependant pas élevés de plus de cent toises au-dessus de la
surface de la mer. Je déterminai géométriquement au moment de partir, la
hauteur de la grande montagne calcaire ptacée & 800 toises de distance, au midi
de San Fernando, et coupée à pie vers le nord. Elle n'est que de 2ï5 toises plus
élevée que la grande place; mais des masses nues de rochers, que l'on découvre
au milieu d'une végétation épaisse, lui donnent un aspect très-imposant
Le chemin de San Fernando à Cumana passe, au milieu de petites
plantations, par une vallée ouverte et humide. Nous traversâmes à gué un
grand nombre de ruisseaux. A l'ombre, le thermomètre ne se soutenoit pas
au-dessus de 3o"; mais nous étions exposés aux rayons directs du soleil,
parce que les bambousiers qui bordent la route ne présentoient qu'un foible
abri, et nous sounrîmes beaucoup de la chaleur. Nous passâmes par le village
d'Arenas, habité par des Indiens qui sont de la même race que ceux de
San Fernando; mais Arenas n'est plus une mission, et les indigènes, gouvernés
par un curé', y sont moins nus et plus policés. Leur église est d'ailleurs
connue dans le pays, à cause de quelques peintures informes. Une frise étroite

BMe dirigéevers la montagne, ago pieds. Angte: de hauteur, 14° a5' 6" et 15° t y' 36". Baromètre de
6,7 tignesptasbasqu'au port de CnnMna.Haatearatt-desMsduniveande la mer, ai~ -{- 93 :=3o8 toisea.

S.4t"E.
De la grande place de Sat. Fernando, la montagne de limposiblegitN.74*0., et la ville de Cmmanacoa

Le9qxatrev!t!agetd'Arenas,Maca)'apana,MarigaitaretAncagua,<ondeepardescapucintd'Aragon,
portent te nom de Coc<rMt<M <<< BncoBMent&t.
renferme des figures d'Armadils, de Caymans, de Jaguars. et autres animaux
du Nouveau Monde.
C'est dans ce même village que vit un laboureur, Francisco LoZano, qui
offre un phénomène de physiologie bien propre à frapper l'imagination, quoi-
qu'il soit très-conforme aux lois connues de la nature organique. Cet homme
a nourri un fils de son propre lait. La mère étant tombée malade, !e père,
pour tranquilliser l'enfant, te prit dans son lit et le pressa contre son sein.
Lozano, âgé de trente-deux ans, n'avoit point remaMpié, jusqu'à ce jour,
qu'il eût du Iait~ma!s l'Irritation de la mamelle, sucée par l'enfant, causa
l'accumulation de ce liquide. Le lait étoit épais et fortement sucré. Le père,
étonné de voir grossir son sein, donna à téter à l'enfant, pendant cinq mois,
deux ou trois fois par jour. Il attiroit sur lui l'attention de ses voisins, mais
il n'imag~oit pas, comme il auroit fait en Europe, de mettre à profit la
curiosité qu'il excitoit. Nous avons vu le procès-verbal dressé sur les lieux
pour constater ce fait remarquable. Les témoins oculaires vivent encore ils
nous ont assuré que, pendant l'allaitement, le EIs ne reçut aucune autre
nourriture que le lait du père. Lozano, qui ne se trouvoit pas à Arenas lors
de notre voyage dans les missions, est venu nous visiter à Cumana. Il étoit
accompagné de son fils qui avoit déjà treize ou quatorze ans. M. Bonpland a
examiné attentivement le sein du père, et l'a trouvé ridé comme chez les
femmes qui ont nourri. Il observa que le sein gauche étoit surtout très-
dilaté, ce que Lozano nous expliqua par la circonstance que les deux mamelles
n'ont jamais fourni le latjt. avec la même abondance. Don Vicente Emparan,
le gouverneur de la province, a envoyé à Cadix une description circonstanciée
de ce phénomène.
Il n'est pas très-rare de trouver, parmi les hommeset les animaux des mâles
dont les mamelles renferment du lait, et le climat ne parott pas exercer une
influence bien marquée sur cette sécrétion plus ou moins abondante. Les
anciens citent le lait des boucs de Lemnosct de Corse: encore de nos jours,
on a vu, dans le pays d'Hanovre, un bouc qui, pendant un grand nombre
d'années, fut trait de deux jours l'un: il donnoit plus de lait que les chèvres*.
Parmi les signes de la prétendue foiblesse des Américains, les voyageurs ont
~~<M./<MnM<&at~emamm<tnMt<<M<e<.t8ot,p. 6. ~M-,B/e)!t..P~t)'o/Tom.Vn,P.!t,p. t8.
B/Mmen&t<-A,~e~teA. ~na< t8o5, p. 504. ~onSf~cAft ~Magaz., ty8y,
p. y53. /M<, ~M-A. der
~A~McA,Tom.IU,p.43g.~on~m,G<M.~e~aB~8t9,p.t~.
fait mention du lait contenu dansée sein des hommes*,t~~ cepenoant peu
probable que ce phénSmène ait jamais été observé chez une peuplade entière,
dans quelque partie de l'Amérique mcohnue aux voyageM~modernes~~ je
puis affirmer qu'aujourd'hui, il n'est pas plus commun dans le Nouveau-
Continent que dans l'ancien. Le laboureur d'Arenas, dont nous venons de
rapporter l'histoire, n'est pas de la race cuivrée des Indiens Chaymas c'est
un homme blanc, descendant d'Européens. De plus, les anatomiste& de
Pétersbourg ont observé que, chez le bas-peuple russe, le lait, dans les
mamelles des hommes, est beaucoup- plus fréquent que chez les nations plus
méridioaales, et les Russes n'ont jamaisété considérés comme foibles et enéminés.
Il existe, parmi les variétés de notre espèce, une race d'hommes, dont le
sein, à l'âge de la puberté, offre un volume très-considérable. Lozano n'appar-
tenoit pas à cette classe, et il nous a répété souvent que ce n'est que
l'irritation de la mamelle, effet de la succion qui lui a fait venir le lait.
Cela confirme l'observation des anciens 3 qui remarquent « que les hommes
qui ont un peu de lait, en donnent abondamment, dès qu'on suce leurs
mamelles. » Ces effets singuliers d'un stimulus nerveux étoient connus aux
bergers de la Grèce ceux du MoUt-Oetas frottoient les mamelles des chèvres,
qui n'avoient pas encore conçu, avec de l'ortie, pour leur faire venir du lait.
Lorsqu'on réfléchit sur l'ensemble des phénomènes vitaux, on trouve qu'aucun
d'eux n'est entièrement isolé. Dans tous les siècles, on a cité des exemples de
jeunes filles non nubiles, ou de femmes dont les mamelles étoient flétries
par l'âge, qui ont nourri des enfans. Chez les hommes, ces exemples sont
infiniment plus rares; et, après bien des recherches, j'en ai trouvé à peine
deux ou trois. L'un est cité par l'anatomiste de Verone, Alexandre Benedictus,
qui vivoit à la fin du quinzième siècle. Il raconte 4 l'histoire d'un habitant
de la Syrie qui, pour calmer l'inquiétude de son enfant, après la mort de la
mère, le pressa contre son sein. Le lait dès-lors vint avec une telle abondance,
que le père seul put se charger d'allaiter l'enfant. D'autres exemples se trouvent
On a même atRnné gravement que, dans une partie du BréaH, c'étoienttes hommes, et non tes femmes,
qui nourrissoienttes enfans. Clavigero, Storia di JMeMM-o, Tom. !V, p. 169.
OMHtMnt. J*e<ny., Tom. m, p. 376.
~Wtt., ~Mt. <HMm., <[&. 3, cap. ao, ed. D«Mt<, 1639, Tom. Il, p. a59. e

MaripetnM sacrt ordinis equestris tradtdtt, Syrum quendam, cui ntms mfans, mortua con)nge,
Mpererat, ubera saepiaa admo~risse, ut Smëm Stu v8gientis frustraret, continuatoque suctu lacte manasse
papittam; quo exindenutritus est, magno totius orbis miraculo. Alex. Benedictihum. corp. ~fn<t<ome/Bas.,
t5t9,!tb.3,cap.4,p.595.Bat-<Ao/t~!f.~tKt<om.,t648,p.5a.
rapportes par SantoreHus, Faria, jet par l'éveque d~ Cpr~e} Robert. Comme !a
plupart de ces phénomènes ont été observés dans des jt~mps assez éteignes,
il n'est pas sans intérêt pour la physïologie, qu'on ait pu les constater de
nos jours. Ils touchent d'ailleurs de très-près à la discussion
tant rebattue sur
les causesfinales. La présence de la mamelle chez l'homme a long-temps
embarrassé les philosophes et récemment encore on n'a pas hésité d'a~rmer
M que ta nature a refusé à l'un des sexes la faculté de nourrir, parce que
« cette
faculté ne seroit pas d'accord avec la dignité de l'homme. »
En s'approchant de la ville de Cnmanacoa, on~ trouve un terrain plus uni
et une vallée qui s'élargit progressivement. La petite ville, est située dans une
plaine nue, presque circulaire, environnée de hautes montagnes: elle offre un
aspect t morne <t triste. Sa population s'élève à peine à 2,300 habitant du
temps du~père Caulin~ en ï~53, elle n'étoit que de 600, les maisons sont
très-basses, peu solides, et, à l'exceptionde trois ou quatre, toutes construites
en bois. Nous parvînmes cependant à placer nos instrumens, d'une mantere
assez avantageuse, chez l'administrateur de la régie du tabac, Don Juan
Sanchez. C'étoit un homme aimable, doué de beaucoup de vivacité d'esprit.
It nous avoit préparé une demeure spacieuse et commode. Nous y passâmes
quatre jours, et il voulut bien nous accompagner dans toutes nos excursions.
Cumanacoa fut fondée, en ï~t~, par Domingo Arias*, au retour d'une
expédition faite à t'embouchure du Guarapiche, pour détruire un étaMissement
tenté par des flibustiers franeols. La nouvelle ville prit d'abord le nom, de
San Baltazar de La~~no~, mais la dénomination indienne a prévalu,
comme le nom de Caracas a fait oublier celui de Santiago de Leon, que l'on
trouve encore souvent sur nos cartes.
En ouvrant le baromètre nous fumes frappés de voir la colonne de
mercure à peine de ~,3 lignes plus courte que sur 'les côtes. L'instrument ne
paroissoit cependant aucunement dérangé. La plaine, on plutôt le plateau,

G<t~r. AMC~tMt~~M<. natur. CM'. &tn<&)M& t~at, p. 332. Misc. <M;a< nat. Cta' t688, p. atg.
~At&<tM.,i74i,p.8)o.
Comment. ~'e<rcp.,Tom.ïH,p. ayy.
Hist. Cor.,pt3t)9et3t7.DeavoyagenrsféceMdonnent4CmoittMCoa~mepopu!ati<Mtde5,<MMMnet;
mais j'ai déj& fait observerplus haut (Chap. tV~ p. 9g8) que je n% mesuitMrét6 à des nombres moi~~rattda
qu'après des recherches faites conjointementavec les officiers tin roi et des colons tres-tnteHxMM.
Le père CanUn assure que la vaUée dams laquelle Arias fit les premières e<tnstructtoas,portoit très-
anciennement le nom de Cumanacoa mais les Biacayensrevendiquent la terminaison coo, qui tMaiBe em
basque de Cumana ou dépendant t<e CtfBMna, comme dans Jaungoitoa, Baeoco<n etc.
dans ÏM~el là ville de Cumanacoa est située, na pas attela de 104 totses
d'élévation au-dessus ~u niveau de l'Océan c'est trois on quatre fois' moins
que te apposent les habttans de Cnmaha, à cause des idées exagérées qu'tls
ont du troid de Cumamac&a. Mais la différence de climat qae l'on observe
entre des lieux si voisins, est peat~tre moins due & la hauteur du site qru'à
des circonstances locàïCs parmi lesquelles nous citerons la proximité des
forêts, la fréquence des couransdescendans, si communs dans des vallées
fermées, rabondance des pluies, et ces brames épaisses qui diminuent, pendant
une grande partie de l'année, l'action directe des rayons solaires. Le
décroissement de la chaleur étant à peu près le même entre les tropiques
et, pendant t'été, sous la zone tempérée, la foible différence de niveau de
cent toises ne détroit produire qu'un changement de température moyenne
de i" à t°,5. Nous verrons bientôt qu'à Cumanacoa.la différence s'élève à
plus de quatre degrés. Cette ffatcheùr du climat est d'autant ptus surprenante,
que l'on éprouve encore des chaleurs tres-tbrtes à la ville de Carthago à
Tomependa, situé sur le bord' de la rivière des Amazones et dans les vallées
d'Aragua, à t'ouest de Caracas quoique la hauteur absolue de ces différens
lieux soit entre 200 et ~80 toises. Dans la plaine comme sur les montagnes,
les lîgnes Mot~erMM ne sont pas constamment parallèles à Féquateur ou à la
surface du globe C'est le grand problème de la météorotogie de déterminer
les indexions dp ces lignes, et de reconnottre, au milieu des modifications produites
par des causes locales, les lois constantes de la distribution de la chaleur.
Le port de Cumana n'est éloigné 4 de qumanacoa que d'environ sept lieues
marines. H ne pleut presque jamais dans le premier de ces deux endroits;
tandis que, dans le second, il y a sept mois d'hivernage. A Cumanacoa les
sécheresses règnent depuis le solstice d hiver jusqu'à l'équinoxe du printemps. De
petites pluies sont assez fréquentes dans les mois d'avril, de mai et de juin; à cette
époque, les sécheresses reprennent de nouveau, et durent depuis le solstice d'été
jusqu'à la fin d'août enfin suivent les véritables pluies d'hivernage, qui ne cessent

~<y<t nn Mémotresur les réfraettOMhottiMmtaIes, dans mes OA<. <M<r., Vot. 1, p. i ag et t4t, et plus
hant, dans cette Relation, p. ttg, t4tett83
Dans la province de Popayan,ta chatear est t'eftet de la rérerberatmn des plaines.
Toyet mea ~«rnetM<& <K<<~<~tbnegto~apA«!<t~&M<<tnMt~<«-<tn<&<m t'<~&<entper~efttet o&tttMfMMnt
,n!Ott<tam,danttesA<K'.Geo.e<~<c.,Tom,t,p.xxvm,ed.in-4°.
La distance Itinéraire est comptée, dans le pays, de ta lieues, mais ces Henes ont à peine aooo toises.
te conclus la distance vraie des observations astronomiques que j'ai faites à Cumana et Cumanacoa, et qui
ont été publiéesen 1808.
qu'au mois de novembre; et pendant lesqueltest des iorrensd'eau descendant
du ciel. D'après la latitude deCumanacoa,lesoIei! passe par !e zénith de
lieu, fbis~Iet6 avril, et, la seconde fois, le 2~ aout' On voit,
la première
par ce que nous venonsd'èxpose! que, ces deux passages coïncident avec le
commencement des pluies et des grandes explosions électriqtKS.
C'est pendant l'hivernage que nous fnnes notre premier séjour dans Jes
missions. Toutes les nuits une brume épaisse éouvroit le ciel comme un
voile uniformément répandu, et ce ne fut que par des éclaircies que je
réussis à faire quelques observations d'étoiles. Le ~thermomètre se. soutenoit, x
de i8°,5 à 20°, ce qui sous cette zone, et au sentiment d'un voyageur qui
vient des côtes, indique une assez grande fraîcheur. A Cumana je n'ai
jamais vu baisser la température de la nuit au-dessous de aï". L'hygromètre de
Deluc indiquoit, à Cumanacoa, 85", et, ce qui est assez remarquable dès
que les vapeurs se dissipoient et que les étoiles brilloient de tout leur éclat,
l'instrument rétrogtadoit jusqu'à 55". Cette différence de sécheresse de 3o"
n'auroit fait varier l'hygromètre de Saussure que de tt". Vers le matin, la
température augmentoit lentement, à cause de la force de l'évaporation, et,
à dix heures, elle ne s'élevoit point encore au-dessus de ax". Les plus fortes
chaleurs se font sentir de midi à trois heures, le thermomètre se soutenant
entre 26 et 27 degrés. L'époque du maximum de la chaleur, qui a lieu environ
jfteux heures après le passage du soleil au méridien étoit marquée très-
régulièrement par un orage qui grondoit de près. De gros nuages noirs et
très-bas se dissolvoient enfuies; ces averses duroient deax à trois heures, et
faisoient baisser le thermomètre de cinq à six degrés. Vers les cinq heures, la
pluie cessoit entièrement; le soleil reparo~ssoit peu avant son coucher et
Ihygromètre marchoit vers la sécheresse; mais, à huit ou neuf heures du
soir~ nous étions de nouveau enveloppés dans une couche épaisse de vapeurs.
Ces changemens divers se suivent, ce
qu'on nous assuroit pendant des
mois entiers, d'après une loi uniforme, et cependant on ne sent
pas le moindre
souffle de vent. Des expériences comparatives m'ont fait croire,
en général,
que les nuits de Cumanacoa sont de t à 3 et les jours de 4 à 5 degrés
centésimaux plu~ frais qu'au port de Cumana. Ces différences sont
assez
grandes; et si, au lieu d'mstrumens météorologiques, on ne consultoit que le
sentiment qu'on éprouve, on les supposeroit encore plus considérables =*.

'.De i4'8-t6"R.
Cumanacoa,le 6 septembre t~g, & minuit: <~BM)!)~, t~R; ~wn~M,M''Deluc(bnmM).
la plaine qui environne la ville est assë~ monotoney
ï~a végétatMMï de
mais remarquable par une grande ira~ehear due à l'extréme hunudité de
l'atmosphère. Ce qui la caractérise particulièrement est une Solange arbores-
cènte ~i a quarante pieds de hauteur~ lUrttca
baccifera, et une nouvelle
espèce du genre Guettarda '.La terre est très-fertile, et elle pourroit même
être arrosée facilement, si l'on faisoit des saignées à un grand nombre de
ruisseaux dont les sources ne tarissent pas de toute l'année. La production
la plus précieuse du canton est le tabac c'est aussi la seule qui ait donné
quelque célébrité à une ville si petite et si mal construite. Depuis l'intro-
duction de laj~rime' en 1779, la culture du tabac est à peu près restreinte,
dans la province de Cumana, à la seule vallée de Cumanacoa, de même qu'an
Mexique elle n'est permise que dans les deux districts d'Orizaba et de
Cordova. Le système de la ferme est un monopole odieux au peuple. Tout
le tabac qui a été récolté, doit être vendu au gouvernement; et, pour éviter,
ou plutôt pour diminuer la fraude, .on trouvé plus simple de concentrer
la culture sur un même point. Des gardes parcourent le pays pour détruire
les plantations qui se forment hors des cantons privilégiés; ils dénoncent les
malheureux habitans qui osent fumer des cigarres qu'ils ont préparées de leurs
mains. Ces gardes sont pour la plupart Espagnols, et presque aussi insolens
que ceux que nous voyons faire le même métier en Europe. Cette insolence
n'a pas peu contribué à entretenir la haine entre les colonies et la métropole.
Après les tabacs de t'He de Cuba et du Rio Negro, celui de Cumana est
des plus aromatiques, ïl l'emporte sur tous les tabacs de la Nouvelle-Espagne
et de la province de Varinas. Nous donnerons quelques détails sur sa culture,
parce qu'elle diffère essentiellement de celle qui est usitée en Virginie. Le
développement prodigieux que l'on remarque dans les Solanées de la vallée

Le 7 septembre, à la même heure; fAenMmet~, t4'8R. Aygr., 8S°,8. A ta** a~ de la nuit <A<-rm.
t6<4R. A~r.,M'3 ( ciel étoile ).A t'*4' dehnutt; <A<rm., t5''R.hygr. 8a"(ctel concert,brtunenx;
arc-en-ciel lunaire; éclairsde chaleur dans le lointain). Leseptembre, à 8'' du matin; ~fnn., ty~a R. i
7'
~gf., 7a<' ( ciel convert ). A t''45', <Aemt., aa'R. A~ 48°. A après la pluie et l'orage; ~~m.,1
t7°,3 R. A~ 5a°. A to'* dn soir; tAenn., i6°,4 R. hygr. 8a° ( brume). La vallée de Cumanacoa est
tres-etposee adi orages. On assure qu'au mois d'octobre, on entend gronder le tonnerre la majeure partie
du jour.'
Ces arbres sont entoures de Galega pitosa, Stellaria rotundifolia, Aegiphila elata Swartz, Sauvagesia
erecta, Martinia pérennisa et d'un grand nombre de Rivina. La savane de Cumanacoa oSre parmi les
graminées, le Paspalus tenticularis, Panicum adscendens, Pennisetum aniflorum, Gynerium saccha-
roides, Eleusine indica, etc.
Emanée ~<t~ de TMoco.
de Cumanacoa, surtout dans les espèces multipliées de Solanum arboreacëns,
d'Aquartia et de Cestrum, semble indiquer combien ce Mteeft&vûraMe aux
plantations de tabac. On en sème la graine en pleine terre, au commencement
de septembre: quelquefois on attend jusqu'au mois de décembre, ce qui est
moins avantageux pour la récolte. Les cotylédons paroissent le huitième jonr;
on couvre les jeunes plants de larges feuilles d'Heliconia et de Bananiers
pour tes garantir'de l'action directe du soleil, et l'on a soin d arracher la
mauvaise herbe qui pousse, entre les tropiques, avec une enrayante rapidité.
Le tabac est transplanté, dans une terre grasse ~et bien ameublie un mois
et demi après que la graine a levé. Les plants se disposent par rangées
bien alignées, à trois ou quatre pieds de distance les uns des autres. On a
soin de sarcler souvent, et l'on ~M&?, à plusieurs reprises, la tige principale,
jusqu'à ce que des taches bleu-verdâtre indiquent au cultivateur la m<j~Mr~
des feuillffs. On commenceà les cueillir dans te quatrième mois 'et généralement
cette première récotte se termine dans t'espace de peu de jours, tl seroit préférable
de ne récolter les feuilles qu'à mesure qu'elles sèchent. Dans de bonnes années,
les cultivateurs coupent le plant lorsqu'il a quatre pieds de haut, et le jet qui
naît de la racine pousse de nouvelles feuilles avec une telle rapidité, qu'elles
peuvent déjà être cueillies te treizième ou le quatorzième jour. Ces dernières
ont le tissu cellulaire très-étendu elles renferment plus d'eau, plus d'albumine
et moins de ce principe âcre volatil et peu soluble dans l'eau dans lequel
paroit résider la propriété excitante du tabac.
La préparation qu'on fait subir à Cumanacoa au tabac récolté est celle
que les Espagnols apposent de cura ~eca. M. de Pons l'a très-bien décrite
telle qu'elle se pratique à Uritucu et dans les vallées d'Aragua On suspend
les feuilles à des fils de Coculza"; on leur enlève ta côte, et
on les tord'en
corde. Le tabac préparé devroit être porté dans les magasins du roi,
au mois de
juin mais la paresse des habitâns et la préférence qu'ils donnent à ta culture
du maïs et du manioc, les empêchent le plus souvent de finir la préparation
avant le mois d'août. !t est aisé de concevoir que les feuilles trop long-temps
exposées à un air éminemment humide, perdent de leur
arôme. L'administrateur
de la ferme conserve, pendant soixante jours, et
sans y toucher, le tabac
déposé dans les magasins du roi. Lorsque
ce temps est écoulé, on ouvre les

~o)~ à la Terre-Ferme, Vol. II, p, 3oo à 3o6,


Agareamericana.
M~jt R~r
~t~p!i~~)e~at~c~ tabac
~;j[tVM~Bt~Cette me~~qHai~reven~
p~~de.:do~e .pitastres~et' ''au

ïes avances de~


qu.i est entré de nouveau en
([Ht a..feca
long travaH. Nous vtmes
~nneatattoa, est br&M em~p cuttïv&teur
te ~ruit ~uh
détruire, sur ~grande' 'pïace~~ des tas de cinq cents

_j_
arabes, qui auroient sans doute servi en Europe, pour en faire du tabac
en poudre.
Le sot de Cumanacoa estsiprapfe a cette branche de culture,
que le tabac
devient sauvage partout ou Ïa geaine trouve quetque humidité. C'est ainsi qu'il
croît spontanémentau Cerro del Cuchtvano et autour de la caverne de Caripe.
D'aiUeurs, la seule espèce de tabac cuhivée & Cumauacoa, comme dans les
districts voisins d'Aricagua et de San Lorenzo, est !e tabac à larges <eui!!es
sessiles appelé tabac de Virginie. On n'y connott pas !e tabac
pët!olëes~, qui est le véritable ye~ des anciens Mexicains quoiqu'on le
à
feuilles

désigne en Attemagne sous te nom bizarre de ~&ac turc.


Si la culture du tabac ëtoit!ibre,ïaprovince de Cumana pourroit
en
pourvotr une grande partie de l'Europe il paroft même que d'autres can-
tons ne seroient pas moins <avorabtes à cette branche de l'industrie coloniale,
que la vallée de Cumanacoa, dans laquelle des pluies trop abondantes altèrent
souvent les propriétés aromatiques des feuiues. Aujourd'hui que Fagricutture
est restreinte dans un espace de quelques lieues carrées, le produit total de la
récoite n'est que de 6000 arobes Cependant, les deux provinces de Cumana
et de Barce!ona en consomment ta,ooo; ce qui manque est fourni par la
Guiane espagaote. B n'y a, en général, que t5oo individus qui s'adonnent,
dans les environs de Cumanacoa, à là recette du tabac. Ce sont tous des Mânes
l'espoir du gain y engage dimcilement les indigènes de
race Chaymas et la
ferme ne regarde pas comme prudent de teur faire des avances.
En étudiant l'histoire de nos plantes cuttivées, on est surpris de voir qu'avant
la conquête, Fusage du tabac étoit répandu dans la majeure partie de l'Amérique,

NicotianaTMMcunt.
*N{cM!amaT)Mttca.
~<«M ~o~. <~ &t Abm-eMt-~Mtg!)~ Tom. n, p. 44~. En Crm~e, on cmtttTe de pre~Mnee le
Nicotianapan:t:u!ata. faMm)~ .RenM M die ttMÏ. Nt<t«Aa&er<cA< Tom. 11, 3~7.
p.
La récolte de ~98 <to!t de 3~00 afobee; eeUe de 1799, de 6too.
tandis que la pomme de terre étoit inconnue, tant auMexique qu'aux âes AntIMes~
où elle vient cependant très-bien da~sles régions montueuses. De même, le, tabac
a été cultivé en Portugal dès l'année
t5~g, tandis que la pomme de terre n'est,
devenue un objet de l'agriculture européenne que depuis la Bn du dix-septième
et le commencementdu dix-huitième siècle Cette dernière plante~ qui a influé
si puissamment sur le bonheur de la société, s'est répandue dans les dpux conti-
nens avec plus de lenteur qu'une production qui ne peut être considérée que
comme un simple objet de luxe.
Après le tabac, la culture la plus importante de la vallée de Cumanacoa est
celle de l'indigo. Les indigoteriës de Cumanacoa, de San Fernando et d'Arenas
en produisent qui~ dans le commerce est encore plus estimé que celui de
Caracas il approche souvent, pour l'éclat et la richesse de la couleur, de l'indigo
de Guatimàla. C'est de cette province que l'on a reçu, sur les côtes de Cumana,
la première graine de l'tndigofera Anil, qui est cultivé conjointement avec
l'Indigofera tinctoria Comme dans la vallée de Cumanacoa les pluies sont
très-fréquentes, une plante de quatre pieds de haut nëTÏonn~pas plus de matière
colorante qu'en onriroit une autre trois fois plus petite dans les vallées arides
d'Aragua, à l'ouest de la ville de Caracas.
Toutes les indigoteries que nous avons examinées sont construitesd'après les
mêmes principes. Deux trempoirs ou cuves qui reçoivent l'herbe destinée à la
pourriture, sont accouplées. Chacune d'elles a i5 pieds en carré sur a? de
profondeur. Ces cuves supérieures versent le liquide dans les batteries, entre
lesquelles est placé le moulin à eau. L'arbre de la grande roue traverse les deux
batteries; il est garni de cuilléres à longs manches, propres au battage. D'un
reposoir spacieux, la fécule colorante est portée dans les séchoirs', où elle est
étalée sur des planches de Bresilet, qu'on peut, au moyen de petitesroulettes,placer
sous un toit, si la pluie survient inopinément. Ces toits, inclinéset très-bas,donnent
de loin aux séchoirs l'aspect d'une serre. Je n'entreraipoint ici dans plus de détails
sur la fabrication des productions coloniales je suppose le lecteur Instruit dans la
théorie des arts chimiques, et je me borne aux observations qui peuvent éclaircir
des questions moins rebattues. Dans la vallée de Cumanacoa, la fermentation de
l'herbe soumise a la pourriture se fait avec une promptitude étonnante. Elle
ne
Les indigos répandus dans le commerce sont dus a qnatre espècesde plantes a t. tinctona, & ï. Anil,
à 1 argentea et I. disperma. Am Rio Negro, près des frontières du BrésU,
nous avons trouvé sauvage le
Largentea, mais seulement dans des lieux anciennement hajtites par tes Indiens.
O~c~naspara secar el ant/.
dure généralement
Mnt que quatre à cinq heures. Cette courte durée durée nene doit être
attribuée qu'à l'humidité du Climat, 'et à l'absence du soleil pendant le dévelop-
pement de la plante. J'ai cru observer, dans le cours de mes voyages, que plus
le climat est sec, plus la cuve travaille lentement, et plus aussi les tiges abondent
en indigo au minimum de loxidation,Dans.la province de Caracas, où 56a pieds
cubes d'herbe légèrement entassée donnent 35 à ~o livres d'indigo sec, le liquide
ne passe dans la batterie qu'après vingt, trente ou trente-cinq heures. Il est
probable que les habitans de Cumanacoa retireroient plus de matière colorante
de l'herbe employée, s'ils la laissoient tremper plus long-temps dans la première
cuve 1. J'ai dissout comparativement, dans de l'acide sulfurique, pendant mon
séjour à Cumana, l'indigo un peu lourd et cuivreux de Cumanocoa et celui de
Caracas. La dissolution du premier m'a paru d'un bleu beaucoup plus intense.
Maigre l'excellence des productions et la fertilité du sol, l'Industrieagricole de
Cumanacoa est encore, dans sa première enfance. Arenas, San Fernando et
Cumanacoa ne versent, dans le commerce, que 3oo<~ livres d'indigo, dont la
valeur est, dans le pays, de ~5oo piastres. On manque de bras, et la foible
population diminue journellement par des émigrations dans les Llanos. Ces
savanes immenses offrent à l'homme une nourriture abondante, à cause de la
facile multiplication des bestiaux, tandis que la culture de l'indigo et du tabac
exige des soins particuliers. Le produit de, cette dernière branche est d'autant
plus incertain, que l'hivernage est plus ou moins prolongé. Les laboureurs se
trouvent dans la dépendance de la ferme royale qui fournit des avances
pécuniaires et ici comme en Georgie et en Virginie on préfère la culture
des plantes alimentaires à celle du tabac. On avoit proposé récemment au
gouvernement de faire acheter, aux frais du roi, quatre cents nègres, et de les
distribuer aux cultivateurs qui seroient en état de rendre les avances d'achat en
deux ou trois ans. Par ce moyen, on comptoit porter la récolte annuelle du tabac
jusqu'à 15,ooo arobes. J'ai vu, avec satisfaction que ce projet a été blâmé par
beaucoup de propriétaires. On ne pouvoit espérer qu'à l'exemple de quelques
parties des États-Unis, on accorderoit la liberté aux nègres ou à leurs descendans,
après un certain nombre d'années, et l'on devoit craindre, surtout depuis les
funestes événemens à l'île, de Saint-Domingue d'augmenter le nombre des

Les eoloM pensent assez généralement que la fermentation de l'herhe ne devrait jamais durer moins
de dix heures. B«Htf<M</M<Ht, .~<& ftœSgo<Mf, p. 8t. à.
~efmn, ~Vo~s on ~t~nM, p. 306 et p. 388.
386 t!V]\E ïï!.
esclaves sur la Terre-Ferme. Une politique prudente sa souvent tes
politique prudente mêmes effets
que les sentimens plus nobles et plus rares de la justice et de l'humanité.
La plaine, de Cumanacoa parsemée de fermes et de petites plantationsd'indigo
et de tabac, est entourée de montagnes qui s'élèvent surtout vers Ip sud, et offrent
un double Intérêt au physicien et au géologue. Tout annonce que lavaMée est le
fond d'un ancien tac; aussi les montagnes qui en ont formé jadis le rivage, sont
toutes taillées à pic du côté de la plaine. Le lac ne donnoit d'issue aux eaux que
du côté d'Arenas. En creusant des fondations, on a trouvé, près de Cumanacoa,
des bancs de galets mêlés à de petites coquilles bivalves. Au rapport de plusieurs
personnes très-dignes de foi, on a même découvert il y a plus de trente ans,
dans le fond du ravin de San Juanillo deux énormes fémurs, de quatre pieds
de loug, et qui pesoient plus de trente livres. Les Indiens les prenoient, comme
fait encore aujourd'hui le peuple en Europe, pour des ossemens de géants, tandis
que les demi-savans du pays, qui ont le droit de tout expliquer, afnrmoient
gravement que côtoient ~des jeux de la nature peu dignes d'attention. Ceux-ci
fondoient leur raisonnement sur la circonstance que les ossemens humains se
détruisent très-rapidement dans le sol de Cumanacoa. Pour orner les églises à
la fête des morts, on fait prendre des crânes dans les cimetières sur la côte, où
la terre est chargée de substances salines. Les prétendus fémurs de géants furent
transportés au port de Cumana.Je les y ai cherchés en vain mais, d'après l'analogie
des ossemens fossiles que j'ai recueillis dans quelques autres parties de FAmérIque
méridionale, et qui ont été soigneusement examinés par M. Cuvier 2 il est
probable que les fémurs gigantesquesde Cumanacoa appattenolent à des éléphans
d'une espèce perdue. On~peut être surpris de les avoir trouvés dans un endroit si
peu élevé au-dessus du niveau actuel des eaux car c'est un fait très-remarquable,
que les fragmens de Mastodontes et d éléphans fossiles que j'ai rapportés des
régions équinoxialesdu Mexique, de la Nouvelle-Grenade, de Quito et du Pérou,
ne se sont pas rencontrés dans les régions basses ( comme dans la zone tempérée,1
les Megatheriumdu Rio Luxan 3 et de la Virginie4, les grands Mastodontesde l'Ohio

Cette découverte fat faite par Don A lexandroMexias, oorrégidor de Catuaro.


7!ecAereAM <tUf oMemetMyoMt/et, Tom. H ( I~pAatM~eMtTM),p. 57.
A
une lieue au sud-est de la.ville de Buenos-Ayree.
Le Megatherium de la Virginie est le Megatonht de M. JeBerson. Toutes les dépouilles énormea,
trouvées dans les plaines du Nouveau-Continent, soit au nord, soit au sud de t'éqnateHr~ n'appartiennent
pas à la zone torride, mais à la zone tempérée. D'un autre cAte,Pa!tasobservequ'en Sibérie, par conséquent
encore hors des tropiques, les ossemens fossiles manquent entièrement dans les parties montueuses.
et~es eléphans fossiles du Susquehana),mais sur des plateaux de six cents à
quatorze cents toise%de hauteur.
Lorsque 1*00 atteint le rivage méridional du bassin de Cumanacôa, on
jouit de la vue de Turimiquiri'. Un mur énorme de rochers, reste d'une
ancienne falaise, s'élève au milieu des forêts. Plus à l'ouest, au Cerro de!
Cuchivano la chaîne de montagnes paro~t brisée comme par l'eSet d'un
tremblement de terre. La crevasse a plus de cent cinquante toises de largeur elle
est environnée de rochers taillés à pic et remplie d'arbres dont les branches
entrelacées ne trouvent pas despace pour s'étendre. On croit voir une mine
ouverte parl'éboulement des terres. Un torrent, le Rio Juagua, traverse cette
crevasse, dont l'aspect est extrêmement pittoresque, et qui porte le nom de 7ÏMCO
del Cuchivano. La rivière naît à sept lieuesde distance vers le sud-ouest, au pied
de la montagne du Brigantin, et forme de belles cascades, avant de se répandre
dans la plaine de Cumanacoa.
Nous visitâmes plusieurs fois une petite ferme le Conuco de Bermudez,
placé vis-à-vis de la crevasse du Cuchivano. On y cultive, dans les terrains
humides, des bananes, du tabac et plusieurs espèces de cotonniers', surtout
celle dont le coton a la couleur fauve du nankin, et qui est si commune à
l'île de la Marguerite3. Le propriétaire de la ferme nous dit que le ravin
étoit habité par des tigres Jaguars. Ces animaux passent le jour dans les
cavernes, et rôdent la nuit autour des habitations. Comme ils sont bien nourris,
ils atteignent jusqu'à six pieds de longueur. Un de ces tigres avoit dévoré
lannée précédente un cheval appartenant 'à la ferme. Il avoit traîné sa
proie, par un beau clair de lune, à travers la savane, sou% un Ceiba d'une
grosseur énorme. Les gémissemens du cheval expirant avoient éveillé les
esclaves de la ferme. Ils sortirent au milieu de la nuit, armés de lances et

( Nov. Comment. ~*<<n;p., t~a, p. N77. ) Cet faits, intimement liés entre eux, semblent conduire & I&
cenmoimance d'une grande loi géologique.
Quelques habitans prononcent Tumur!qmr!,TuranMqain ou Tnmirtqnu'L Pendant tout le temps de
notre séjour à Cumanacoa, te sommet de cette montagne fut couvert je nuages. Elle devint TuiMe le
)( septembre au soir, mais pour peu de minutes. Je trouvai t'angte de hauteur, à la grande place de
Cumanacoa, de 8° a*. Cette détermination et la mesure barométrique de la montagne qne je fis le t3
peuvent servir à trouver approximativementla distance qui est de 6 milles ou 6o5o toises, en supposant
que la partie découvertede nuages avoit 85o toises de hauteur au-dessusde la plaine de Cumanacoa.
Gossipium unigtandulosmn, improprement appelé herbaceum, et G. barbadense. M. de Rohr a prouvé
combien il règne encore de confusiondans la détermination des variétés et des espèces de cotonniers.
G. reKgiosum.
de MMc~p~M Le tigre, couché sur sa proie, tes attendit tranqu!Hemeot~il
ne succomba qu'après une résistance longue et opiniâtre. Ce fait et nombre
d'autres vérinés sur les lieux prouvent que le grand Jaguarà de la Terre-Ferme,
comme le Jaguarëte du Paraguay et le véritable tigre d'Asie ne fuient pas
devant l'homme lorsque celui-ci veut les combattre corps à. corps et
lorsqu'ils ne sont pas enrayés par le nombre des assaiHans. Les naturalistes
savent aujourdhui que Buffon a entièrement méconnu le plus grand des chats
de l'Amérique. Ce que cet écrivain célèbre dit de la lâcheté des tigres du
Nouveau-Continent se rapporte aux petits Ocelots. 3, et nous verrons bientôt
qu'à rOrénoque le véritable tigre Jaguar de l'Amériqu& se jette quelquefois à
l'eau pour attaquer les Indiens dans leurs pirogues.
Vis-à-vis !a ferme de Bermudez, deux cavernes spacieuses s'ouvrent dans la
crevasse du Cuchivano il en sort de temps en temps des nammes que l'on
distingue de très-loin pendant la nuit. Les montagnes voisines en sont éclairées;
et, à juger par 1 élévation des rochers au-dessous desquels ces émanations
enflammées s élèvent, on seroit tenté de croire qu'elles atteignent une hauteur
de plusieurs centaines de pieds. Ce phénomène a été accompagné d'un bruit
souterrain, sourd et prolongé, à l'époque du derniergrand tremblement de terre de
Cumana 4. On l'observe surtout pendant la saison des pluies, et les propriétaires
des fermes situées vis-à-vis de la montagne du Cuchivano assurent que les
flammes sont devenues plus fréquentesdepuis le moisde décembre de l'année ~y. ï
Dans une herborisation que nous fimes à la Rinconada, nous essayâmes en
vain de pénétrer dans la~crevasse. Nous voulûmes examiner de près les roches
qui semblent renfermer dans leur sein les causes de ces embrasemens extraor-
dinaires. La force de la végétation l'entrelacement des lianes et des plantes
épineuses, nous avoient empêchés de passer en avant heureusement les habitans
de la vallée prenoient eux-mêmes un vif intérêt à nos recherches, moins par

Grands couteaux, à lames tres-atongées, semblablesaux couteaux de chasse. Dans la zone torride on ne
va pas dans tes bois sans être armé d'un machete, tant pour se frayer un chemin, en coupanttes lianes et
les branches des arbres, que po~ se défendre contre les animaux sauvages.
~/Monfo,Ltn., que Buffon a nommé Panthère oillée, et qu'il a cru originaire d'Afrique, La panthère
femeHe, Egarée dans]'~M<ot~ des Quadrop~M de Bt~Mt, Tom. ÏX, pl. XH, est un véritable Jaguar.
( Ctffter, OMem. ~oMt~M, Tom. ÏV, Chats, p. t S. ) Nous aurons occasion de revenir dans la suite
sur ce
sujet important pour la zoologie et la géographie des animaux.
fe<M pardalis, Lin.,
ou Chibiguazu d'Azzara, diterent dn Tttteo-Oeetottem chat tigré des Aztèques.
~oye:pIushaut,Chap.IV,p.3o8.
la crainte d'nae explosion volcanique, que parce que !ear tmagmatton etott
frappée de l'idée qee le Risco det CucMvano renfermoit une mine d'or.
Nous avions beau énoncer nos doutes sur l'existence de t'or dans un calcaire
coquillier, ils voulurent savoir ce que le mineur allemand pensoit de la
richesse du filon. » Depuis le temps de Çhartea-Ouint et te gouvernement des
Welsers, des Ainngers et des SaiteM, a Coro et à Caracas, le peuple conserve,
à ta Terre-Ferme, une grande conSance dans tes Allemands pour tout ce qui
a rapport à l'exploitation des mines. Partout
où je passai dans FAmérique
méridionale, on venoit me montrer des échantillons déminerais, dès que
t'en savoit le lieu de ma naissance. Dans ces colonies, tout François est un
médecin, et tout Allemand est un mineur.
Les fermiers, aidés de leurs esclaves onvrirent un chemin à travers tes
bois jusqu'à la première chute du Rio Juagua et, te 10 septembre nous
Hmes notre excursion au Cuchivano. En entrant dans la crevasse nous
reconnûmes la proximité des tigres tant par un porc-épic, fratchement éventré,
que par l'odeur infecte de leurs exerémens qui ressemblent à ceux du chat
d'Europe. Pour plus de sûreté tes Indiens retournèrent à la ferme et
cherchèrent des chiens d'une race très-petite. On assure que, dans le cas d'une
rencontre par un chemin étroit, le Jaguar se jette plutôt sur le chien que sur
l'homme. Nous suivîmes, non le bord du torrent, mais la pente des rochers
qui sont suspendus au-dessus des eaux. On marche à côté d'un précipice de
deux à trois cents pieds de* profondeur, sur une espèce de corniche très-
étroite, semblable à la route qui du Grindetwald, conduit le long du
Mettenberg, au grand Glacier. Lorsque la corniche se rétrécit au point que
l'on ne sait plus où poser le pied, on descend dans le torrent, on le traverse,
soit à gué, soit monté sur l'épaule d'un esclave, et l'on gravit le mur opposé.
Ces descentes sont assez pénibles, et il ne faut point se fier aux lianes qui,
semblables à de. gros cordages, pendent de la cime des arbres. Les plantes
sarmenteuses et parasites ne tiennent que foiblement aux branches qu'elles
embrassent; le poids de leurs tiges réunies est assez considérable, et l'on
risque d'ébranler tout un berceau de verdure, si, en marchant sur un terrain
incliné l'on se tient suspendu aux lianes. Plus nous avancions, et plus la
végération devenoit épaisse. En plusieurs endroits, les racines des arbres avoient
brisé la roche calcaire, en s'introduisant dans les fentes qui séparent les bancs.
Nous avions de la peine à porter les plantes que nous cueillions à chaque pas.
Les'Canna, les Heliconia à belles fleurs pourprées les Costus et d'autres
végétaux de la famille des Amomées atteignent ici huit à dix pieds de hauteur.
Leur verdure tendre et franche, l'éclat soyeux et !e développement extraordinaire
du parenchyme, contrastent avec le ton brun des fougères en arbres, dont le
feuillage est si délicatement découpé. Les Indiens munis de leurs grands
couteaux, faisoient des incisions dans le tronc des arbres ils fixèrent notre
attention sur la .beauté de ces bois rouges et jaune doré qui seront recherchés
un jour de nos tabletiers et de nos tourneurs. Ils nous montroient une Composée
de vingt pieds de taut (l'Eupatorium taevigatum de la Marck), la ~!<Me
Belveria célèbre par l'éclat de ses ueurs pourprées et le ~a/~Je D~~on de
ce pays, qui est une espèce de Croton non encore décrite, et dont le suc rouge
et astringent est employé pour fortifier les gencives. Ils recoanoissoiënt les
espèces par l'odeur, et surtout en mâchant les fibres ligneuses. Deux indigènes,
à qui l'on donne le même bois à mâcher, prononcent, et le plus souvent sans
hésiter, le même nom..Nous ne pûmes profiter que très-peu de la sagacité de
nos guides; car, comment se procurer des feuilles des fleurs ou des fruits,
placés sur des troncs, dont tes branches aaissettt à~ cinquante ou soixante pieds
de hauteur. On est frappé de trouver, dans cette gorge, l'écorce des arbres
et même le sol couverts de mousse 3 et de lichens. Ces cryptogames y sont
aussi communes que dans les pays du Nord.. Leur développement est favorisé
par l'humidité de l'air et par l'absence de la lumière directe du soleil cependant
la température est généralement le jour de a5, la nuit de ig degrés.
Les rochers qui bordent la crevasse, sont escarpés comme des muraiUes, et
composés de la même formation calcaire qui nous suivoit depuis Punta
delgada. Elle est ici gris-noirâtre, de cassure compacte, faisant quelquefois
passage au grenu, et traversée par de petits filons de- spath calcaire blanc. A ces
caractères, on croit reconnoître le Calcaire alpin de la Suisse et du Tyro!,
dont souvent -la couleur est très-foncée, quoique toujours à
un moindre
Brownea racemosa, Bfe<&')m. ined.
Des végétaux de famitte toat-a-faitdi~rente portent, dans les cotoaMj)espagnolesdeo deux continent,
le nom de Sangre <&< Drago ce sont des Draoma, dea PterocarpM et de) Crotons. Le ptre CattMn ( .D<-<cf.
Coro~<co, p. a5 ), en parlant des résines que l'on trouve dans les forêM de Cumana, distingue très-bien
le Drago A Unare qui a des feuilles pennées ( PterocatpMbfaco ), du 0~~ ~M~.
Paria qui a des feuilles entières et velues. Le dernier est notre Croton ~n~H~m de CumanMoa, de
Caripe et de Cariaco.
De YéritaMes
Boletus
m~c<
igniarius
Nons y recne!Mtme<aussi, outre un petit Boletusatipitatas blanc de neige,
e et le Lycoperdon ateHatum d'Esope. Je n'.v.MttO.Tà~e deMier~tedaM des endroits
tre~-secs, en AUemagne ou ett Pologne.
degré que dans le CMca~ de ~~tOK
(~nâtit~e le GaChtva~o, te noyaM
groupe des hautes montagnes de ta NouyeUe-Andatousie.Je n'y ai pas vu
de~
La première de ces tbrmadons

de
tout le

pétrification; mais les habitans assurentque ~oh trouve des masses considéraHes
de coquilles à de très-grandes hauteurs. Le même phénomène se présente
dans le pays de Sa!zbourg*.Au~ucMvano,teCat<Mirè alpin renferme. des
couches d'argile marneuse qui ont jusqu'à trois ou quatre toises d'épaisseur,
et ce fait géologique rappelle, d'un côté, t'identité de 1'<?M~Z~~M avec
le Zeebstein de Thunnge; de l'autre, l'amnité de ibrmation qui règne entre
!e Calcaire alpin et celui du Jura 4. Les couches marneuses font effervescence
avec les acides, quoique la silice et falumine y
prédominent: elles sont
fortement chargées de carbone, etnoircissent quelquefois les mains comme
feroit un vrai schiste vitriotique.
La prétendue mine d'or du Cuchivano, qui étoit l'objet de nos recherches,
n'est autre chose qu'une excavation tentée sur une de ces couches noires de
marne qui abondent en pyrites. L'excavation est sur la rive droite du Rio
Juagua, dans un endroit dont il faut s'approcher avec précaution, parce que
le torrent y plus de huit pieds de profondeur. Les pyrites sulfureuses se

'Etcher,daMl'~tM,Tom.tV,p.34o.
En Suisse, les bancs de coquilles, isolés à treize cents on deux mille toises d'élévation dans !e
Jungfrauhom, la Dent de Morcle et la Dent de Midi ~appartiennent au Gt&KMre de <r<tn<t<ton.
~etgw&c&te/er.
Le Calcaire du Atnt et le C<t&Mtf<- alpin sont des ~HTnaUonsfoMtet que l'on a quelquefoisde la peine
à distinguer,torsqn'eUeo reposent immédiatementl'une smt l'autre, connue dans lu Apennins le Calcaire
<)tn et le JZecA~MB, célèbres parmi tes géologues de Freiberg, sont des formations identiques. Cette
identité, que j'ai indiquée dès l'année )7o9(C~h!r die CrM&e<t-~e«er, p. gS), est un fait géologique
d'autant plus intéressant qu'it setnhteKerlesfortnationsdnnord de l'Europecette de la chaine centrale.
On sait que le Zechstein estphcé entre le Gypse mnrmtifere et le Conglomérat ( grèsancien ), on lorsque le
GypsemuriatKeremanque, entre le grès argileux t Colites( &un<e &m<&<eM, Werner ) et le Conglomérat
ou grès ancien ( Tot&M /.M~<MM~ ) Il renferme des couches dé marne schisteuseset cuivreuses ( &t<«mMdce
Jtfe~e~-Mn~Jft~~Mf-Ate/er ) qui sont un objet importantd'exploitation dans le Mansfetd en Saxe, près de
RiegetsdorfenHesse, et à Hase! et Pransnitz en SSéste-Dansta partieméridionalede la Bavière (Oberbaiern),
j'ai vu la pierre calcaire alpine contenir ces mêmes bancs d'argileschisteuseet de marne qui, plus minces,
plus blancs, et surtout,plus fréqneM,eaMCtérisentle Calcairedu Jura. Quant aux schistes du Btattenberg,
dans le canton de Glaris, qu'a cause de nombreusesempreintesde poissons,tes minéralogistes ont confondus
long-temps avec le scbistecuivreux du M*nsfeld, ils appartiennent, d'après M. de Buch, à une véritable
formation de transition. L'ensemblede ces données géologiques tend a prouver que des couches de marne,
plus on moinschargées de carbone, se trouvent dahs le Calcairedu Jura le Calcaire alpin et les schistesde
transition. Le mélange de carbone, de sulfure de fer et de cuivre me paraît augmenter avec l'ancienneté
relative des formations.
trouvent les unes en masse, les autres cristallisées et disséminées dans la roche:
leur couleur, d'un jaune d'or très-clair, n'indique pas qu'elles renferment du
cuivre: elles sont mêlées de fer sulfuré fibreux et de rognons de pierre
puante ou chaux carbonatée fétide. La couche ~crneMC traverse le torrent;
et, comme les eaux enlèvent les grainsmétalliques, le peuple s'imagine, à cause
du reflet des pyrites, que le torrent est aurifère. On raconte qu'après les grands
tremblemens de terre qui eurent lieu en 1765, les eaux du Juagua se trouvoieht
tellement chargées d'or, que « des hommes, qui vinrent de très-loin et dont on
ignoroit la patrie, "y établirent des-lavages. Ils disparurent pendant ta nuit,
après avoir recueilli beaucoup d'or. Il seroit superflu de prouver combien ce
récit est fabuleux des pyrites dispersées dans des filons quarzeux, qui
traversent le Micaschiste sont sans doute très-souvent aurHères, mais aucun
fait analogue ne conduit jusqu'ici à supposer que le fer sulfuré, que l'on
trouve dans les marnes schisteuses du Calcaire alpin, contienne également
de For. Quelques essais directs, que j'ai faits par la voie humide, pendant
mon séjour à Caracas, ont prouvé que les pyrites ~u ~uchivano ne, sont
aucunement aurifères. Nos guides Mâmoientmon incrédulité; j'avois beau dire
qu'on retireroit tout au plus de l'alun et du sulfate de fer de cette prétendue
mine d'or, ils continuèrent à ramasser en secret chaque parcelle de pyrite qu'ils
voyoient briller dans l'eau. Plus un pays est dépourvu de mines, et plus les
habitans ont des idées exagérées sur la facilité avec laquelle on retire des
richesses du sein de la terre. Combien de temps n'avons-nous pas perdu,
pendant cinq années de voyage, pour visiter, à l'Invitation pressante de nos
hôtes, des ravins dont les coucheS pyriteuses pertent, depuis des siècles, le
nom fastueux de minas de o~/Que defbisn'avons.nous pas souri en voyant
des hommes de toutes les classes, des magistrats, des curés de village, de
graves
missionnaires broyer, avec une patience InattéraMe, de l'amphibole
ou du
mica jaune pour en retirer de l'or au moyen du mercure! Cette fureur
avec
laquelle on se porte à la recherche des mines, frappe surtout dans
un climat
où le sol ne demande qu'à être légèrement remué pour offrir de riches moissons,
Après avoir reconnu les marnes pyriteuses du Rio Juagua, nous continuâmes
à suivre la crevasse, qui se prolonge comme un canal étroit et ombragé
par
des arbres très-élèves. Nous observâmes, sur la rive gauche, vis-à-visdu

~aart~t.
G/HtmMfM'Ate/er.
s
t~?~o oM Cuchivano, des couches stnguuèrement arquées et contournées.
C'est le phénomènes que j'avois souvent admiré a t'Achsenberg en passant
le lac de Lucerne. D'ailleurs, les bancs calcaires du Cuchivano et des montagnes
voisines conservent assez régulièrement la direction du N.N.E. au S.S.O. Leur
inclinaison est tantôt au nord, tantôt au sud; le plus souvent elles paroissent
se, précipiter vers la vallée de Cumanacoa, et l'on ne sauroit douter que
la formation de la vallée n'ait exercé de l'influence sur l'inclinaison des
couches.
Après bien des fatigues, et tout mouillés par les passages fréquens du
torrent, nous arrivâmes au pied des cavernes du Cuchivano. Un mur de
rochers s'élève perpendiculairement à huit cents toises de hauteur. Il est rare
que, sous une zone où la force de ta végétation cache partout le sol et les
rochers, on voie une grande montagne présenter des couches à nu dans une
coupe perpendiculaire. C'est au milieu de cette coupe, dans une position
malheureusement inaccessible à l'homme, que s'ouvrent deux cavernes en forme
de crevasses. On assure qu'elles sont habitée par les mêmes oiseaux nocturnes
que nous apprendrons bientôt à connoître dans la Cueva JcZ Guacharo de
Caripe. Près de ces 'cavernes nous vîmes des couches de marne schisteuse
traverser le mur de rocher, et plus bas, au bord du torrent, nous trouvâmes,
à notre plus grand étonnement, du cristal de roche enchâssé dans les bancs
du Calcaire alpin. C'étoient dés prismes hexaèdres, terminés en pyramides,
ayant 14 lignes de long sur 8 de large. Les cristaux, parfaitement transparens,
se trouvoient isolés, souvent éloignés fun de l'autre de trois à quatre toises.
Ils étoient renfermés dans la masse calcaire, comme les cristaux de quarz de
Burgtonna 3 et les Boracites de Lunébourg qui sont renfermés dans le gypse.
Il n'y avoit de près aucune fente, aucun vestige de spath calcaire

Cette montagne de la Suisse est composée de Calcaire de transition. Les mêmes inBexions de couche se
retrouvent près de la Bonneville, au Nant d'Arpenaz en Savoie, et dans la TaUée dT~statthée dans les
Pyrénées. (Saussure, ~<y.,Tom. I, $. 4~9 et 1673. ~MOMntOM~ ~oy. JMt<t~r<t/ p. i54. Ramona,
~<y. aux Pyrénées, p. 55, too et a8o. ) Une autre roche de transition le Gr<M<(fattedes Allemands,ou
JH/~M des Angtott~joSre le même phénomène en Ecosse..Ecfta&. ~At<. ?~<HM., t8t4, p. 80.
Om peut faire la même observation au lac de Gemünden en Autriche, que j'ai visité avec M. de Bnch
et qui est un des sites les plus pittoresques de l'Europe.
Dans le duché de Gotha.
Ce phénomène en rappelle un autre également rare, les cristaux de quarz que M. Freiesleben
( JE~/enK-At-t/er,Tom. U, p. 89 ) a trouvés en Saxe, près de Bur~ômer, dans le comté de Mansfetd, au
Nous nous reposâmes au pied dp la caverne. C'est de là qu'on a vu sortir
ces jets de flammes qui sont devenus plus fréquens dans les dernières années.
Nos guides et le fermier j également instruits des localités de la province,
discutoient, à la manière des Créoles, sur les dangers auxquels la ville de
Cumanacoa seroit exposée, si le Cuchivano devenoit un volcan actif, se
veniesse a refen~r. Il leur sembloit indubitable que la Nouvelle-Andalousie,
depuis les grands~€remblemens de terre de Quito et de Cumana, en ~7, ï
étoit de jour en jour plus minée par les feux souterrains. Ils citoient les flammes

l'
que l'on avoit vu sortir de terreàCumana, et les secousses que l'on éprouve
dans des lieux où le sol n'a jamais été ébranlé avant. Ils rappeloientqu'àMacarapan,
on sentoit fréquemment, depuis quelques mois, des émanations sulfureuses. Nous
fûmes frappés de ces faits, sur lesquels ils fandoient des prédictions qui se sont
presque toutes réalisées. D'énormes bouleveraemens ont eu lieu à Caracas en 1812
et ont prouvé combien la nature est tumultueusement agitée dans la partie
nord-est de la Terre-Ferme.
Mais quelle est la cause des phénomènes tgnes que l'on observe au Cuchivano
Je n'ignore pas qu'on voit briller quelquefois d'une vive lumière la colonne
d'air qui s'élève au-dessus de la bouche des volcans enuammcs*. Cette lueur,
que l'on croit due au gaz hydrogène, a été observée, de Chillo, sur la cime
du Cotopaxi, à une époque où la montagne paroissoit dans le plus grand
r repos. Je sais qu'au rapport des anciens, le Mons Albanus, près de Rome,
connu aujourd'hui sous le nom de Monte Cavo, sembloit enûammé de temps
en temps pendant la nt~t mais le Mons Albanus est, un volcan récemment
éteint qui, du vivant de Caton, jetoit encore des rapiUI~, tandis que le
Cuchivano est une montagne calcaire, éloignée de toute roche de formation
trapéenne. Peut-on attribuer ces flammes à une décomposition de l'eau qui
entre en contact avec les pyrites dispersées dans des marnes schisteuses?
Est-ce de l'hydrogène enflammée qui sort des cavernes du Cuchivano? Les

l'
milieu d'une roche calcaire poreuse ( AtMcAffhMe ) qui repose immédiatementsnr la pierre calcaire alpine.
Les cristaux de roche, qui sont assez communs dans le Calcaire primitif de Carrare, tapirent des cavités
sans être enveloppés de la roche même.
Il ne faut pas confondre ce phénomène très-rare avec la tueur que l'on observe communément, à peu
de toises au-dessusdu bord des cratères, et qui ( commeje l'ai vu au Vésuve, en 18n5 ) n'est que !e reflet de
grandes masses de scories ennammées et projetées sans dépasserl'ori6ce du volcan.
Albano Monte biduum continenter tapidibtMpMt. ~tc~yX~, y. ( ~tevne, C~<MeM&< aco~
Tom. m, p. a6i). ).
marnes, comme leur odeur l'indique, sont bitumineuses et pyriteuses à la
fois, et les source~ de goudron minéral auBuénPastor et l'île de la Trimté
naissent peut-être de ces mêmes bancs de calcaire atpin. ïl seroitaisé
d'imaginer des rapports entre les eaux infiltrées dans ce Calcaire et décomposées
sur des couches'de pyrites, et les tremblemens de terre de Cumana, les sources
d'hydrogène sulfuré de Nueva Barcelona.lesdépôts de soufre natif deGarupano,
et les émanations d'acide sulfureux que l'on sent de temps en temps dans
les savanes: on ne sauroit douter aussi que la décomposition de l'eau par
les pyrites, à une haute température~ favorisée par l'afnaité de l'oxide de fer
pour les substances terreuses, ne puisse donner lieu à ce dégagement de gaz
hydrogène, auquel plusieurs géologues modernes font jouer un rôle si important.
Mais, en générât, l'acide sulfureux se manifeste plus constamment dans
l'éruption des volcans que l'hydrogène, et c'est surtout l'odeur de cet acide
qui se fait sentir quelquefois pendant que la terre est agitée par de fortes
secousses. Lorsqu'on envisage dans'leur ensemble les phénomènes des volcans
et des tremblemens de terre, lorsqu'on ~e~ rappelle l'immense distance à
laquelle le mouvement se propage au-dessous du bassin des mers, on abandonne
facilement des explications fondées sur de petites couches de pyrites et de
marnes bitumineuses. Je pense que les secousses que l'on ressent si fréquemment
dans la province de Cumana, doivent aussi peu être attribuées aux roches qui
viennent au jour, que les secousses qui ébranlent les Apennins, à des filons
d'asphalte ou à des sources de pétrole embrasé. Tous ces phénomènestiennent
à des causes plus générales, j'aurois presque dit, plus profondes~ et ce n'est
pas dans les couches secondaires qui forment la croûte extérieure de notre
globe, mais dans les roches primitives, à une énorme distance de la surface
du sol, qu'il faut placer le centre de l'action volcanique. Plus la géologie fait
de progrès et plus on conçoit l'insuffisance de ces théories fondées sur
quelques observations purement locales.
Des hauteurs méridiennes du Poisson austral observées dans la nuit du
y septembre, donnèrent, pour la latitude de Cumanacoa, 10° ï6' ï";l'erreur
des cartes les plus estimées est par conséquent de de degré. Je trouvai
l'inclinaison de l'aiguilleaimantée de ~2",6o et l'intensité des forces magnétiques
correspondante à 228 oscillations, en dix minutes de temps l'intensité étoit
par conséquent de neuf oscillations ou de moindre, qu'au Ferrol.
Le 12, nous poursuivîmes notre voyage au couvent de Caripe, chef-lieu
des missions Chaymas. Nous préférâmes à la route directe le détour par les
montagnes du Cocollar 1 et du Turimiquiri, dont la hauteur excède peu celle
du Jura. Le chemin se dirige d'abord vers l'est, en traversant, pendant trois
lieues, le plateau. de Cumanacoa, sur un sol anciennement nivelé par les
indien
eaux; puis il détourne vers le sud. Nous passâmes le petit village
d'Aricagua entouré de coteaux boises et .d'un aspect riant. De là. nous
commençâmes à monter, et la montée dura plus de quatre heures. Cette, partie
du chemjtn est très-fatigante on traverse vingt-deux fois la rivière de Pututucuar,
torrent rapide et rempli de blocs de rochers calcaires. Lorsque, sur laCMe~~
del Cocollar, on atteint une élévation de deux mille pieds au-dessus du niveau
de la mer, on est surpris de ne presque plus trouver de forets ou de grands
arbres. On parcourt un immense plateau couvert de graminées. Des -Mimosa
à cime hémisphérique, et dont les troncs n'ont que trois à quatre pieds de
hauteur,interrompent seuls la triste uniformité des savanes. Leurs branches
sont inclinées vers la terre ou s'étendent en parasol. Partout où il y a des
escarpemens et des masses de rochers à demi-couverts de terreau, le Clusia
ou Cupey à grandes fleurs de Nymphée étale sa IbeHe verdure. Les racines
de cet arbre ont jusqu'à huit pouces de diamètre, et sortent quelquefois du
tronc à cinq pieds de hauteur au-dessus du sol.
Après avoir continué long-temps de gravir la montagne, nous arrivâmes
à une petite plaine, à l'Hato <M Cocollar. C'est une ferme isolée dans un
plateau qui a 408 toises de hauteur. Nous restâmes trois jours dans cette
solitude, comblés des soins du propriétaire qui nous avoit accompagnés depuis
le port de Cumana. No<j)s y trouvâmes du lait, des viandes excellentes à cause

R..
de la richesse des pâturages, et surtout un climat délicieux. Le jour, le
thermomètre 3 centigrade ne s'élevoit pas au-dessus de a a" à 23"; peu avant
le coucher du soleil, il baissoit à ï g", et, de nuit, il se soutenoit à peine à 14°.
La température nocturne étoit par conséquent de degrés plus frafche que

Ce nom est-il d'origine indienne? A CnnMtBt, en~~Mfire, d'aBe~nMHereMsezrecherchée,dn mot


espagnol C~o<&<, ccear des plantes oléracées le Cocollar formant le centre du gronpe entier des montagnes
de la NouveUe-A~datonsie.
BottMathiasYtnrbNri, natif de !a Biscaye.
A cinq heure, du soir, le ciel étant serein, therm. de RéaMnnr, tS" hygrom. de Detnc, 6a°. A 9'' du
so!r,tb.,)3'hyg.,7<i'An'th.,tt°,a;hyg,8o°.AM\th.,t8°;hyg.,5i°.Amidi,th.,)o'hyg.,5o'
Nous ne vîmes pas l'hygromètre au-dessous de 46° (83° Saass. ), mat~é la hantenf du lieu; mais aussi
la saison des .pluies avoit commencé, et
à cette époque, l'air, quoique tre~-Meuet transparent, etbit dé)ii
extraordinairementchargé de vapeurs aqueuses.
< A tt°, a
celle des côtes; c~qui prouve de nouveau, le plateau du Cooollar étant moins
élevé que le sol de la ville de Caracas, un décroissemeat de calorique
extrêmement rapide.
Aussi loin que porte la vue, on n'aperçoit de ce point élevé que des
savanes nues; cependant de petits bouquets d'arbres épars s'élèvent dans les
ravins; et, malgré l'apparente uniformité de la végétation, on ne laisse pas de
trouver ici un grand nombre de plantes très-remarquables~. Nous nous bornerons
à citer un superbe Lobelia à fleurs pourprées, le Brownea coccinea qui a
plus de cent pieds de haut, et surtout le Pejoa, célèbre dans le pays, à
cause de l'odeur délicieuse et aromatique que répandent ses feuilles lorsqu'on
les froisse entre les doigts 3. Mais ce qui nous charmoit le plus dans cet
endroit solitaire, côtoient la beauté et le calme des nuits. Le propriétaire
de la ferme prolongeoit ses veilles avec nous, il sembloit jouir de l'étonnement
que produit sur des Européens, nouvellement transplantés sous les tropiques,
cette fraicheur toujours printanièrede l'air que l'onressent suf les montagnes après
le coucher du soleil. Dans ces climats éloignés, où les hommes connoissent
encore tout le prix des dons de
la nature, un propriétaire vante l'eau de
sa source, l'absence des insectes, malfaisans, le ~nt salutaire qui soutne autour
de la colline, comme nous vantons en Europe les avantages de notre demeure
ou l'effet pittoresque de nos plantations.
Notre hôte étoit venu dans le Nouveau-Monde avec une expédition qui
devoit établir, sur les bords du golfe de Paria des coupes de bois pour la
marine espagnole. Dans ces vastes forets d'Acajou, de Cedrela et de Brésillets
qui bordent la mer des Antilles, on comptoit choisir les troncs d'arbres les

Cassiaocu<a,Andromedart~M&t, Casearia hypericifolia, Myrthus longifolia, Büttneria salicifolia,


Glycine picta, G.~r~enfM, G. gibba, Oialis nm&roM, Malpighia pnryepMM, Cephaëlis salicifolia,
Stylosanthesan~Mtt/b~a, Salviapaeudocoecinea, EryBginm/<B<t<<m.Nous avons trouvé une seconde fois 1
cette dernière plante, mais à une très-grandehauteur, dans tes vastes forêts de Quinquina qui environnant
la ville de Loxa, au centre des Cordillères.
Lobe~ia a~ec~N.
<<<r Jv~<.
C'est le Gaultheria o~omta,décrit par M. Willdenow. ~A~Mt Schrifien /'re«n< Tom. ÏV,
p. 218), d'après des échantillons que nous lui avions communiqués. Le Pejoa se trouve autour du lac du
Cocollar, duquel prend naissance le grand fleuve Guarapiche. Nous avons rencontré des pieds du même
arbrisseau à la Cuchilla de Guanaguana. C'est une plante subalpine qui, comme nous le verrons bientôt,
forme, à Silta de Caracas, une zone beaucoup plus é'evee que dans la province de Cumana. Les feuilles
du Pejoa ont l'odeur plus agréable encore que celles du Myrthus Pimenta; mais elles ne répandent plus de
parfums, si on les froisse quelques heures après que la branche a été séparée du tronc.
plus gros, leur donner, comme par ébauche, la forme nécessaire pour la
construction des vaisseaux, et les envoyer tous les ans au chantier des
Caraques, près de,Cadix. Des hommes blancs, non acclimatés ne purent
résister aux fatigues du travail, à l'ardeur du climat et à l'impression de
l'air malfaisant qu'exhalent les forêts. Ces mêmes vents, qui sont charges du
parfum des fleurs, des feuilles et des bois, portent, pour ainsi directe germe
de la dissolution dans les organes. Des fièvres pernicieuses enlevèrent, avec
les charpentiers de la marine royale, les personnes qui administroient le
nouvel établissement et cette anse, que les premiers Espagnols ont nommée
le Golfe triste, à cause de l'aspect lugubre et sauvage de ses côtes, devint
le tombeau des marins européens. Notre hôte eut le rare bonheur d'échapper
à ces dangers après avoir vu mourir un grand nombre des siens, il se retira,
loin des côtes, dans tes montagnes du Cocollar. Sans voisins, tranquille
possesseur de cinq lieues de savanes, il y jouit à la fois de l'indépendance
que donne la solitude, et de cette sérénité d'esprit que produit, dans les
hommes simples, un air pur et fortifiant.
Rien n'est comparable à l'impression du calme majestueux que laisse l'aspect
du firmament dans ce lieu soti~ire. En suivant de t'cell, à l'entrée de la nuit,
ces prairies qui bordent l'horizon, ce plateau couvert d'herbes et doucement
ondulé, nous crûmes voir de loin, comme dans les steppes de t'Orénoque, la
surface de l'Océan supportante la voûte étoHée du ciel. L'arbre sous lequel nous
étions assis, les insectes lumineux qui voltigeoient dans l'air, les constellations
qui brittoient vers le sud, tout sembloit nous dire que nous étions loin du sol
natal. Si,alors, au milieu de cette nature exotique, du fond d'un vallon, ta
cloche d'une vache ou le mugissement du taureau se faisoit entendre, le souvenir
de la patrie se réveilloit soudain. C'étoit comme des voix lointaines qui reten-
tissoient d'au-delà des mers, et dont le pouvoir magique nous transportoit d'un
hémisphère à l'autre. Étrange mobilité de l'imagination de l'homme, source
éternelle de ses jouissances et de ses douleurst
A ta fraîcheur du matin, nous commençâmes à gravir le Turimiquîn. C'est
ainsi que t'jon appelle le sommet du Cocottar qui, avec le Brigantin, ne forme
qu'une seule masse de montagnes, jadis appelée par les indigènes la Sierra de
los Ta~n?~. On fait une partie du chemin sur des chevaux qui errent dans ces
savanes, mais dont quelques-uns sont accoutumés à porter la selle.. Quoique
très'tourds de (orme, ils grimpent lestement sur Je gazon le plus glissant. Nous
nous arrêtames d'abord à une source qui sort encore, non de ta roche calcaire,
mais d'une couche ~e grès quarzeux. ~a température étoit de aï", par conséquent
de ~5woMM de la sourcéj cte ~uëtepe
qùè~eMe aussi la dif~'ence duniveau
est de près de detïx cent vingts toises! Partout ou legrèsvient~n~ est sot
uni, et forme comme de petits plateamx qui se suivent par gradins. Jusqu'à septt
cents toises de hauteur, et même au-delà,cette montagne, comme toutes celles
qui l'avoisinent n'est couverteque de graminées'.A Gnnïana, on attribue ce
manque d'arbres à la grande élévation du sol; mais, pour peu qu'on réfléchisse
sur la distributiondes végétaux dans les Cordillères de la zone torride, on conçoit
que les cimes de la Nouvelle-Andalousiesont b!en loin d'atteindre la limite
supérieure des arbres qui, par cette latitude, se soutient au moins à mille huit
cents toises de, hauteur absolue. Lê gazon ras du Cocollar commence même déjà
à se montrer à trois cent cinquante toises au-dessus du niveau de la mer, et l'on
peut continuer de marcher sur ce gazon jusqu'à mille toises d'élévation plus tpin,
au-de~ de cette bande couverte de graminées, se trouve, dans des pics presque
inaccessibles à l'homme, une petite forét de Cedrela, de Javillo 3 et d'Acajou.
Ces circonstances locales font croire que les savanes montueuses du Cocollar et
du Turimiquiri ne doivent leur existence qu'à la funeste habitude qu'ont les
indigènesde mettre le feu aux bois qu'ils veulent convertir en pâturages. Lorsque
ainsi, depuis trois siècles, les graminées et les herbes alpines ont couvert le sol
d'une bourre épaisse, les graines des arbres ne parviennent plus à germer et à
se fixer dans la terre, quoique le vent et les oiseaux les transportent continuel-
lement des forêts éloignées vers le milieu des savanes.
Le climat de ces montagnes est si doux, qu'à la ferme du Cocollar on cultive
avec succès le cotonnier, le cafier et même la canne à sucre. Quoi qu'en disent
les habitans des c~tes, on n'a jamais vu, par les to" de latitude, de la gelée
blanche sur des cimes dont la hauteur excède à peine celle du Mont-dOr et du
Puy-de-Dôme. Les pâturages de Turimiquiri diminuent de bonté avec l'élévation

Direction Hor. 4,3. tnetinamon 45** au sud'e~t.


Les espèces dominantes sont des Paspalus, t'Andropegot*/fM<tgM<t<m qui forme le genre Diectomis
<)eM.atMMt<!eBeaoTois,etteÏ*MHcnmo~roM~M.
Hara crëpitans, de la famille Jet Euphorbes. L'McrotMementde son tronc est s! énorme que, dans
la yaUée de Curiepe, entre le cap Coderaet Caracas, M. Bonpland a mesuré des caves en bois de Ja~iIIo
nm avotentqaatorze pieds de long sur huit de large Ces caves, d'nne seule pièce, servent a conserver le
gaarapo on )nsde canne et la métasse. Les graines de Javillo sont un poison très-actif,et le lait qui jaillit
dn péttote, lorsqu'on te brise, nous a souvent causé des maux d'yeux, si par hasard tes plus petites
quantités s'introduisoient entre tes paupières.
du site. Partout où des roches éparses offrent de l'ombre, on trouve et de~
plantes licheneuses et quelques mousses de 1'Europe. Le Melastome Guacito1
et un arbrisseau dont les feuilles grandes et coriaces résonnent comme du
parchemin, lorsque le vent les agite, s'élèvent çà et là dans la savane. Mais
l'ornement principal du gazon de ces montagnes est une liliacée&Heurs dorées,
y
le Marica martinicensis. On ne l'observe généralement, dans les provinces de
Cumana et de Caracas s, que lorsqu'on s'étève à quatre ou cinq cents toises de
hauteur. Toute la masse rocheuse du Turimiquiri est composée d'un Calcaire
alpin semblable à celui de Cumanacoa et de couches assez minces de marne
et de grès quarzeux. Le Calcaire enchâsse des masses de fer oxidé brun et du
fer spathique. J'ai reconnu, en plusieurs endroits, et très-distinctement, que
le grès ne repose pas seulement sur le Calcaire, mais que souvent aussi cette
dernière roche renferme le grès en alternant avec lui.
On distingue, dans le pays, le sommet arrondi du Turimiquiri et les pics
élancés ou 6'MCurMcAM revêtus d'une végétation épaisse, et habités par'des
tigres que l'on chasseà cause de la grandeur et -de la beauté de leur peau. Nous
avons trouvé le sommet arrondi, qui est couvert de gazon, élevé de 707 toises
au-dessus du- niveau de l'Océan. C'est de ce sommet
que se prolonge vers
l'ouest une arête de rochers escarpés. Elle est interrompue, à un mille de distance,
par une crevasse énorme qui descend vers le golfe de Cariaco. Au point où l'on
pourroit supposer la continuation de l'arête, s'élèvent deux mamelons ou pitons
calcaires, dont le septentrional est le plus élevé. C'est ce dernier
que l'on appelle
plus particulièrement le Cucurucho de Turimiquiri et
la que l'on regarde
comme plus haut que montagne du Brigantin 4, si connue des marins qui

Metastoma Mn<~o<t<K-AyMm,appelé Guacito, à Caracas.


Paticonrea rigida, C~xMvo bovo. Dans tes
savanes ou Llanos, le même nom castillan est donné
à un arbre de la famille des Protéacées.
Par exemple, dans la Montana de Avila., dans le chemin de Caracas à la Guayra et dans la Silla de
Caracas. Les graines du Marica mûrissent a )a fin de décembre.
Cette opinion populaire, sur hauteur du Brigantin favorisela supposition
Cumanaà k montagne est beaucoupau-dessous
que la distance du port de
devingt~natremittesnautiquesicar
( Chap. IV, p. 3o i ) que tes angles de hauteur pris à Cumana donnent Brigantin tnous avOM vu plus haut
au a55 toise* d'ététation,
si l'on croit exacte la distanceindiquée dans ta carte du P~oMto ~Ap~~co de Madrid.
Je trouve que,
pour mettre en harmonie t'angte observé et une hauteur supposée de mille toises, le sommet du Brigantin
ne devroit pas être éloigné de Cnmana de plus de dix-neuf milles. La cha!ne des montagnes de la
NouveHe-Andatous!e se dirige, comme la cote voisine,
assez régulièrement de l'est à l'ouest et, dans
l'hypothèse d'une distance de plus de dit-neuf mittes, te BrigaBtmseroitplus méridionat
du Cocollar. Cependant tes habitans de Cumana ont voulu tracer, que le parallèle
par le Brigantin, un chemin à Nueva
~~t~t~t~SM~ ~t~amana~~O'ap~ des ~~ettr ~et~ne base
as6e~~coiMr~'tt!a<eée ~su~: 1&'son~rnt~
le'o~(~oru~
.stationK~de~orte'jque~a~ut~
.¡d(,C!()'t~¡s~s'~l~¡.
Ï
<ï~ notre

~La~-vue~dont.~on~ suri~'Ï* étendues jet <tes plus


piMoresques.Bepaïs'ii~t~
mo!~gnes qur se dmg~t~
des chatnes de
qui bordent des
à louest, et
vaH~estoQgitMdtBates.~otnme ces dem~res sont coupées en angle droit par
in&Bttë de petits Mvîns que les torrens ont creuses~ il en résulte quêtes
une
chapons latéraux sont traasjfbrmés en autant de rangées de mamelons, tantôt
arrondis, tantôt pyramidaux. La pente générale dû terrain est assez douce
jusqu'à nmposible; .plus loin, les escarpemens deviennent très-rapides, et se
suivent jusqu'au rivage du golfe de Cariaco. Cet amas de montagnes rappelle
par sa forme, les chaînons du Jura, et la seule plaine qu'il onre est la vallée de
Cumanacoa. On croit voirie tond d'un entonnoir, dans lequel on distingue,
entre des bouquets d'arbres épars, le village Indien d'Aricagua. ~Vers le nord,
une langue de terre étroite, 1~ péninsule d'Araya, se détachoit en brun sur la
mer qui, éclairée par les premiers rayons du soleil reûétoit une vive lumière.
Au-delà de la péninsule, l'horizon étoit borné par le cap Macanao dont les
rochers noirs ~élèvent au milieu des Eaux, comme un immense bastion.
La~ferme du Coeollar, située au pied du TurimiquirI, est par les io°g'33" n
de latitude. J'y ai trouvé l'inclinaison magnétique de 4~,10. L'aiguille oscilloit
deux cent vingt-neuf fois en dix minutes de temps. Peut-être des masses de
mines de fer brunes, renfermées dans la roche calcaire, causent-elles une
légère augmentation dans l'Intensité des forces magnétiques. Je ne consigne
pas ici les expériences faites avec un pendule Invariable malgré les soins

Barcellona, et je n'ai pas trouvé ta latitude de cette ville au-dessousde 10" 6' 5a" Cette circonstance
confirme le résultat de la triangulation faite an Sf'M" Cnmana, tandis que de t'antre c&té un relèvement
tC9gnét!qne da Brigantin, pris au sommet de t'hnpMtMe, conduit à tmélo!gnememt plue grand. Ce
re!eve<nent seroit inBtt:ment précieux, M t'en étoit bien sûr de la !ong:tnde de t'ïmposiMe et de la
variation de t'aig~Nte aimantée, dans un endroit où le grès est extrêmement ferrugineux. n est du
devoir dn voyageur d'énoncer avec franchise les doutes qui lui restent Mr des poinU qui ne sont pas
ta
eneore tt6banMnent éctaireis. A notre atterage sur les cotesde Cumana,,tes pilotes évahterent distance
du Tataraqnat à quinze ou seize milles.
D'âpres te$ haateon! mendiennes de Deneb da Cigne, que )'at prises dans les nuits du m et
dai3 septembre. 0&Mfvo<.<M<t.,Vot.t, p. 98.
que j'ai mis & ce genre d'expériences, je les crois âé&ottMOSM~ & cauM de
la suspension imparfaite de la verge du pen<Me. )
Le i4 septembre, nous descendîmes le Cbcolïar ver$ Ïa nuasion de Sam
Antonio. Le chemin conduit d'abord & travers des savanes paMemées de grands
blocs de rochers calcaires; puis on entre dans une foret épaisse. Après avoir
passé deux arêtes de montagnes extrêmement escarpées on découvre une
belle vallée qui a cinq à six lieues de long, ~n suivant presque constamment
la direction de t'est à l'ouest. C'est dans cette vallée que sont situées les
missions de San Antonio et de -Guanaguana. La première est renommée, à
cause d'une petite église à deux tours, construite en brique, dans un assez
bon style, et ornée de colonnes d'ordre dorique; c'est la merveille du pays.'
Le préfet des capucins avoit terminé la construction de cette église en moins
de deux étés, quoiqu'il n'eût employé que les Indiens de son village. Les
moulures' des chapiteaux, les corniches et une frise décorée de soleils et
d'arabesques, ont été exécutées en argile mêlée de brique pitée. Si l'on est
surpris de trouver, sur les confins de la Laponie*, des églises dans le style
grec le plus pur, on est encore plus frappé de ces premiers essais dans les
arts, sous une -zone où tout annonce l'état sauvage de l'homme, et où les
bases de la civilisation n'ont été jetées par les Européens que depuis une
quarantaine d'années. Le gouverneur de 1~ province désapprouva le luxe
de ces constructions dans les missions; et, au plus grand regret des religieux,
l'achèvement du temple est resté suspendu. Les Indiens de San Antonio
sont loin de partager ces regrets ils approuvent en secret la décision du
gouverneur qui flatte leur paresse naturelle. Ils né se soucient pas plus
d'ornemens d'architecture, que jadis les indigènes dans les missions des Jésuites
du Paraguay.
Je ne m'arrêtai à la mission de San Antonio que pour ouvrir le baromètre et
pour prendre quelques hauteurs du soleil. L'élévation de la grande place an-
dessus de Cumana est de 2t6 toises. Après avoir traversé le village, nous
passâmes à gué les rivières Colorado et Guarapiche qui, naissant toutes deux
dans'les montagnes du Cocollar, se réunissent plus bas, à l'est. Le Colorado
a un courant très-rapide, et devient, à son embouchure, plus large que le

Ces arêtes, assez difficiles à gravir vers la fin de la saison des pluies, sont connues
sous les noms
bizarres de Loa Y<pM et du Fantasma.. Le Calcaire, partout où il paroît
au jour dans ces endroits,
se dirige, hor. 4-5. (Incl. des couches 40° au S.E.)
A Skelefter, pre~de Tomeo. ~M-A, ~o~e en ~Vbw~, Tom. 11, p. 37$.

0
Rhin: tcGuarapiche, réuni au Rio Areo, a plus de vingt-cinq crasses ue
profondeur. Ses borda sont ornés d'une superbe graminée que j'ai dessinée
deux ans plus tard, en remontant le fleuve de la Magdeleine et dont le
chaume à feuilles distiques atteint 15 ou 20 pieds de hauteur Nos mulets
avoient de la peine à se tirer des bottes épaisses dont étoit couvert letchemm
qui est étroit et uni. Il pleuvoit à verse la forêt entière sembloit convertie
en un marais par la force et la fréquence des ondées.
Nous arrivâmes vers le soir à la mission de Guanaguana, dont le sol est
presque au niveau du village de San Antonio. Nous avions grand besoin de
nous sécher. Le missionnaire nous reçut avec une extrême bonhomie. C'étoit
un vieillard qui paroissoit gouverner ses Indiens avec beaucoup d'intelligence.
Le village n'existe que depuis trente ans dans le site qu'il occupe aujourd'hui.
Avant cette époque il étoit placé plus au sud, adossé à une colline. On
est étonné de la facilité avec laquelle on fait changer de demeure aux Indiens.
Il y a des villages de l'Amérique méridionale qui, en moins d'un demi-siècle,
ont été déplacés trois fois. L'indigène se trouve attaché par de si fbibles liens
au sol qu'il habite, qu'il reçoit avec indifférence l'ordre de démolir sa maison
et de la rebâtir ailleurs. Un village change de place comme un camp. Partout
où l'on trouve de l'argile, des roseaux, des feuilles de palmier et d7Heliconia,
la case est reconstruite en peu de jours. Ces changemens forcés n'ont souvent
d'autre motif que le caprice d'un missionnaire qui, récemment arrivé d'Espagne,
s'imagine que le site de la mission est fiévreux ou qu'il n'est pas assez exposé
aux vents. On a vu des villages entiers se transporter à quelques lieues de
distance, simplement parce que le moine ne trouvoit pas assez belle ou assez
étendue la vue de sa maison.
Guanaguana n'a point encore d'église. Le vieux religieux, qui habitoit
depuis trente ans les forêts de l'Amérique~ nous fit observer que l'argent de
la communauté, ou le produit du travail des Indiens, devoit être employé
d'abord à la construction de la maison du missionnaire, puis à celle de l'église,
et enfin aux vêtemens des Indiens. Il assuroit gravement que cet ordre ne
pouvoit être interverti sous aucun prétexte. Aussi, les Indiens qui préfèrent

~.<t<<tou Cana brava. C'est un nouveau genre entre Aira et Arundo, que nous avons décrit sous
le nom de Gynerinm (Pd. équin., Vol. Il, p. na). Cette graminée colossale a le port du Donax
),
d'Italie eUe est, avec l'Arundinaria du Mississipi (Lùdol6a Wittd., Miegia de Persoon et avec les
Bambousiers, la graminée la plus élevéedu Nouveau-Continent. On en a transporté la gratne à Saint-
Domingue, où Ion coupe le chaume pour en couvrir les cases des Nègres.
une nudité absolue au vêtement le plus léger, nè.sônt pas presses que leur
tour arrive. On venoit de terminer la demeure spacieuse dû .P<M~c, et nous
remarquâmes avec surprise que cette maison, dont le fatte se terminoit en
terrasse, étoit ornée d'un grand nombre de cheminées qm 'réssembloiept à
autant de tourelles. C'étoit, disoit notre hôte, pour se rappeler une patrie
qui lui étoit chère, et des hivers de l'Aragon, au milieu des chaleurs de la
zone torride. Les Indiens de Guanaguana cultivent le coton pour leur profit,
comme pour celui de l'église et du missionnaire. Le produit est censé appartenir
à la commune/et c'est avec l'argent de la commune que l'on sumt aux besoins
du curé et de Faute!. Les indigènes ont des machines d'une construction très-
simple servant à séparer leçoton de sa graine. Ce sont des cylindres de bois;
d'un diamètre extrêmement petit, entre lesquels passe le coton, et qu'on fait
mouvoir avec Je pied, comme nos rouets. Ces machines, bien imparfaites,
sont cependant très-utiles j et l'on commence les imiter dans d'autres missions.
J'ai exposé ailleurs, dans mon ouvrage sur le Mexique, combien l'habitude
de vendre le coton avec la graine embarrasse ie Transport -dans les colonies
espagnoles, où toutes les marchandises arrivent à dos de mulets dans les ports
de mer. Le sol de Guanaguana est aussi fertile que celui d'Aricagua, petit
village voisin qui a également conservé son ancien nom indien. Un .~KtM&ï
de terrain (à i85o toises carrées) produit, dans les bonnes années, 25 à.3o
fanègues de maïs, chaque fanègue pesant cent livres. Mais ici, comme partoutt
où la bienfaisance de la nature retarde le développement de l'industrie, on
ne défriche qu'un très-petit nombre d'arpens, et l'op néglige de varier la
culture des plantes alimentaires. La disette se fait sentir, chaque fois que Ja
récolte du maïs se perd par une sécheresse prolongée. Les Indiens de Guanaguana
nous racontoient, comme un fait peu extraordinaire, que, t'année précédente~
pendant trois mois, eux, leurs femmes et leurs enfans avôient été al monte,
c'est-à-dire errant dans' tes forêts voisines, pour se nourrir d'herbes succulentes,
de choux palmiers, de racines de fougère et de fruits d'arbres sauvages. Ils
ne parloient pas de cette vie nomade comme d'un état de privation. Le
missionnaire seul en avoit été incommodé, parce que le village etoit resté
désert, et qu'au retour des forêts, les membres de la petite commune étoient
moins dociles qu'auparavant.
La belle vallée de Guanaguana se prolonge vers l'est, en s'ouvrant dans les
plaines de-Punzere et de Terecen. Nous aurions bien voulu visiter ces plaines
pour examiner les sources de pétrole qui se trouvent entre le fleuve Guarapiche
journeMement~dans~pIus'gra~
que nous av~nsEecaciM qui
Punzere. m-on 'pa~ San
pentes
~$!AFe~mais;la.Mison;de~~p!uî~é~ noua trouvions

iE~li~~u?' "n~~itJd,e:t1.u~.Dà~nâ~il~e,.de
'es~ un XoM
(terme de Mtait ) de~ missîûaaairs~~ qu'au rapport
des Indien8,l~trouve~gMndea~maj~d~ dans une roche
gypseuse ou calcaire, mais a peu de pro~ndeur au-dessous de la surface du sol,
dans des bancs d'argile. Ce phénomène singulier me parott propre à l'Aménque
nous le retrouverons dans le r~aame~dë~~ En
approchant de Punzere, on voit, dans les savanes; de petits sacs formés par un
tissu de sole, suspendus aux branches des arbres les moins élevés. C'est la .M<~
~fMt~e, ou soie sauvage du pays, qui est d'un be! ec!at, mais très-~rude au
toucher. La pha!ène quHa produit est peut-être analogue à celle des provinces
de Guanaxuato et d'Antioquia, qui fournissent également de la soie sauvage
On trouve, dans la belle forêt de Pun~re, deux arbres connus sous les noms de
Curucay et de Cane!a le premier, dont nous parlerons dans la suite, offre
une
réstne très-rechercMe des ~F'MC&M ou sorciers indiens; le second a des feuilles
dont t'odeur est ceUe de la veritabte canneMe de Ceytan De Punzere le chemin
se dirige parTerecenetNuevaPaïencia,qui est une nouveHe colonie de Canariens,
au port de Saint-Jean, situé sur la rive droite du Rio Areo, et ce n'est qu'en
traversant ce fleuve avec une pirogue~ qu'on parvient aux fameuses sources de
pétrole ( ou goudronminerai )du Buen Pastor. On nous les a décrites comme de
petits puits ou entonnoirs creuses par la nature dans un terrain marécageux. Ce
phénomène rappelle le lac d'Asphalte ou de C&a/~of<? de l'tle de la Trinité 3
qui n'est éloigné du Buen Pastor, en ligne droite, que de trente-cinq lieues
marines.
Après avoir lutté quelque temps contre le désir que nous avions de descendre
le Guarapiche jusqu'au GoMb triste, nous primes la route directe des
montagnes.
Les vallées de Guanaguana et de Caripe sont séparées par une espèce de digue
ou

'~Vottf.JB<p.,Tom.I,p.453;TomïI,p.668.
Ett-ce te Lturm cmnamommJea de MntM?QMt e<tt cet antre Cannettier appetë par tes Indieno
~OT-co, qui abonde dans les montagaef de Tocuyo et anx Murées du Rio Uch:re?0n
en mêle t'ecorce
au chocobt. Le père Cau)in désigne sous le nom de Curucay le Copaifera oEcinaiis, qui donne le
baume de Copahu. (.~M<. ccn~rn~ p. a4 et 34.)
~MM ~au Md-ett du port de Naparima. n y a uue autre soarce d'asp~tte
cAte ortemtaie de l'He, dans la baie de Mayaro.
Mr fa
arête calcaire, très-célèbre sonsile nom de~la <X~ ~nanag~M. N00$
trouvâmes ce passage pénible, parce qu'à c~te époque npos~~
parcouru !es Gor~tëre~; ~Ms il n'est aucunement aussi dï~eM~ ae plalt
à le dépeindre àCumana. Le sentier, il est vrai, n'a, sur plusieurs points, que
i4 ou ï5 ponces de largeur la croupe déjà jmontagne, surlaqueUe la rente se
prolonge, est couverte. d'nngazon ras extrêmementglissant; les pentesdesdenx
côtés sont assez rapides, et le voyageur, s'il faisoit une chute, pourroit en
roulantsur l'herbe, être entramé jusqu'à sept ou huit cents pieds de profondeur.
Cependant, les Nancs de la montagne oSrent plutôt des escarpemens que de
véritables précipices, et les mulets de ces contrées ont le pied si sur, qu'ils
inspirent ta plus grande connance. Leurs habitudes sont les mêmes que celles des
bêtes de somme de la Suisse ou des Pyrénées. A mesure qu'un pays est plus
sauvage, l'instinct des animaux domestiques gagne de finesse et de sagacité.
Lorsque les mulets se sentent en danger, ils s'arrêtent en tournant la tête à droite
et à gauche; le mouvement de leurs oreiller semble indiquer qu'iis réfléchissent
sur le parti qu'ils doivent prendre. Leur résolution est~ente, mais toujours
bonne, si elle est libre, c'est-à-dire si elle. n'est point entravée ou accélérée par
l'imprudence -du voyageur. C'est dans les chemins épouvantables des Andes
e
pendant des voyages de six à sept mois, à travers des montagnes sillonnées par
les torrens, que l'intelligence des chevaux et des bêtes de somme se développe
dune manière surprenante. Aussi 1 on entend dire aux montagnards « Je ne
vous donnerai pas la. mule dont la marche est la plus commode, je vous donnerai
celle qui raisonne le mieux, la mas racional » Ce mot du peuple, dicté par une
longue expérience, combat le système des machines~animées, mieux peut-être
que tous les argumens de la philosophie spéculative.
Lorsque nous eûmes atteint le point le plus élevé de la crête ou Cuchilla
de Guanaguana, un spectacle intéressant s'offrit à nos yeux. Nous embrassâmes
d'un coup d'œil les vastes prairies ou savanes de Maturin et du Rio Tigre s,
le piton 3 du Turimiquiri et une infinité de chaînons parallèles qui, vus de loin,
ressemblent aux lames de la mer. Vers le nord-est s'ouvre la vallée qui
renferme le couvent de Caripe. Son aspect est d'autant plus attrayant,
qu ombragée par des ibrêts, cette vallée contraste ~vec la nudité des
montagnes

Aréte semblable à la lame d'un couteau. Dans tonte rAmériqne espagnole, le mot cuchilla désigne
une crête de montagnes a doubles pentes très-rapides.
Ces prairies natnreMe< font partie des Llanos on steppes immenses bordées par lOrénoque.
1 El CMft/rMf~o.
-~jMma~a~)~
'desc~dant'~i'a~te'pa~
2~îses'pMs.'e!evee-'qa
'sel~<id~<no~~
entièrement bo!sé. Le et Bonv~e espèce <te
t)rosera qai,'par''s6n~p0rt~~pp~ Alpes. L'épaisseur
des forets et ta force de la vë~etatica augc~ t'apprécie
du couvent de Garipë.'fout'"6haagé~ M d'aspect, même ta roche qui noos
accompagnoit depuis PantaBeigadà.Les couches calcaires deviennent plus
minces eties arment des assises qui s'alignent en mnraiMes, en corniches et
en tours, comme dans les montagnes du Jura dains celles de Pappenheim en
Allemagne, et près d~Oic~w, en (~alËcie. La couleur de la pierre n'est pins
gris de fumée et gris-bleuâtre, elle devient Manche: sa cassure est unie,
quelquefois même imparMtement eonchoïde. Ce n'est plus le Calcaire des
Hautes-Alpes, T)!M& une fbrn'ation à ïaqneHe ceM-ci sert de base et qui est
analogue an C~c<M~ ~a J«Me. Damr chame des Apennins~ entre Rome et
Nocera, j'ai observé cette même superposition Immédiate*: elle indique, nous
te répétons Ici, T!on te passage d'âne roche à l'autre, mais l'affinité géotogiqne
qui existe entre deux formations. Selon le typè gênerai des couches secondaires,

Drosera tenella.
C'est ainsi qne~prës de Genève,hroehe du MMe, qui appartient au Ca&<tMW <t~pt)t,Mt<Mt-<&«otM
du C<t&OMe du Jura, qui eoootitue le Mont-jM~e.
Voici la suite des formations secondaire*, hriqne toutes ont pris un développement égal, c'est-
à-dire lorsqu'aucune d'elles n'a été supprimée ou engtobée par tes formations voisines t. Gret ancien
reposant sur le schistede transition ( ~<&«'Sandatein X~tM Liegende ); a. Calcairealpin (~~pento~~eM,
ZeeA<<em); 3. Gypse ancien (&!&~y<); 4. Calcaire du Jura (JttmAa<t«eM}, 5. Grès de seconde
fonnationj MotaMe (Bunter <S!M<~<Mt), 6. Gypse fibreux (~«er Gyp<); 7. Calcaire de troisième
formation (J~McAe~<~t«etn<&~ento); 8. Craie; 9. Calcaire à Cerithes; to.Gypseaossemens; n. Grès;
ta. Formation d'eau doBce. Nons aurons souvent occasion de recourir a ce ~pe, dont la connoissance e
perfectionnée semble être le but principal de la Geognosie, et sur lequel on n'a commencé a avoir
des idées exactes que depuis une vingtaine d'années. Nous nous bornerons à faire observer ici que tes
dernières formations, 8, 9, t0, tt et ta, examinées avec tant de soin par MM. Brongniart et Cuvier,
manquent dans une grande partie de t'Europe que tes CatcaireBa et 4 ne font souvent qu'une senle masse,
et que, partout où tes deux formations de.gypses (3 et 6) n'ont pu se développer,la suite des roches
secondaires se réduit au type infiniment simple de deux ~orma~otM de ~r~ <tùenM<n<et <!f<e deux
formations. <'tt&-atr<'<. Pour se rendre compte d'un grand nombre de phénomènes de superposition qui
paroissent très-bizarres au premier aspect, il faut se rappeler tes deux lois suivantes qui sont fondées
sur t'anatogie de faits bien observés: t.* lorsque dem formation se succèdent immédiatement, il
arrive souvent que les couches de l'une commencent d'abord à alterner avec les couches de l'autre,
qui a été reconnu dan% une grande
séparé du Calcaire du Jura par G~~e le
partie dp 1~
~< ma'S~S~ le Calcaire; alpin est
celui-ei
manque entièrement ou s.e trouve ren~rmë comme eo~~e~M~~nM~e'dans
le Calcaire alpin~ Alors les deux grandes formations catcairea se succèdent
immédiatement ou se con~ndeot en uneMulei~
La descente de laCuchiMa est beaucoup moins longue jquela montée. Nous
trouvâmes lé niveau de layaltée de Caripe de aoo toises p!us élevé que celui de
la vallée de Gua!)aguana. Un groupe de montagnes, de peu de !argeur, sépare
deux bassins, dont l'un est d'ùuë~raIcheuF délicieuse, tandis que l'autre est
renommé par l'ardeur de son climat. Ces contrastes, si communs au Mexique,î
dans la Nouvelj~Grénade et au P~rou~ sont bien rares dans la partie nord-est
de l'Amérique méridionale. Aussi, de toutes les hautes vallées de la NouveUe*-
Andalousie, celle de Caripe est la seule qui soit tres~haMtée.Dans une province
dont la population est peu~considérable, ~t. où les montagnes n'oSreBt tu une
grande masse, ni. des plateaux très-~tendus.les hpmmes ont peu de motifs pour
abandonnerles plaines et pour se fixer dans des régions tempérées et montueuses.

jusqu'à ce que la fonnatiom h pttNneuve se montre uns mélange de oonehet tabordonnêes (PacA, Ceo~t.
Beob., Tom. ï~ p. io4 et iS~) a.° lonqu'une formation peu puissante se trotTe placée, d'ap~t son
ancienneté relative,entre deux grandes &)nnà~M, on observe parfois, ou qu'elle dieparoit entièrement,
ou qu'elle est engtobée, connue coacbe subordonnée,tantôt dans t'one, tantôt dans t'antre des formations
voisines.
Hauteur absolue da couvent, au-dessusdu niveaude la mer, 4ta toises.
d
CHAPITRE VIL

COUVENT DE CAMPE. CAVEMtE DUCCACHARO. – OISEAUX NOCTURNES.

<Jt!E allée de Persea nous conduisit l'hospice des capucins aragbnois. Nous
à
nous arrêtâmes près d'une croix de brésillet qui s'élève au milieu d'une. grande
place. Elle est entourée de bancs où les moines normes viennent dire leur rosaire.
Le couvent se trouve adossé à un énorme mur de rochers taillés à pic et tapissés
d'une végétation épaisse. Les assises de la pierre, d'one blancheur éclatante, ne
paroissent que cà et là entre le feuillage. Il est difficile d'imaginer un site plus
pittoresque il me rappela vivement les vallées du comté~ de T)erby et les
montagnes caverneuses de Muggendorf en Franconien Les hêtres et les érables de
l'Europe sont remplacés ici par les formes, plus imposantes du Ceiba et des
palmiers Praga et Irasse. Des sources sans nombre jaillissent du flanc des rochers
qui entourent circulairement le bassin de Caripe, et dont les pentes rapides
offrent, vers le sud, des profils de mille pieds de hauteur. Ces sources naissent,
pour la plupart, de quelques crevasses ou gorges étroites. L'humidité qu'elles
répandent favorisel'accroissementdes grands arbres; et les indigènes, qui aiment
les lieux solitaires, forment leurs conucos le long de ces crevasses. Des bananiers
et des papayers y entourent des bouquets de fougères arborescentes. Ce mélange
de végétaux cultivés et sauvages, donne à ces lieux un charme particulier. Sur le
flanc nu des montagnes, on distingue de loin les sources par des masses touffues
de végétation qui d'abord semblent suspendues au roc, et puis, en descendant
dans la vallée, suivent les sinuositésdes torrens.

Parmi tes plantes int~reMantM de la vaUée de Caripe, nous avons trocvé pour la première fois: un
Caladium dont le troue a vingt pieds de haut (C. arboreum), le Mikania mtt-nMtAo qui pourroit bien
participer aux propriétés antivénéneuses de &mem Gaoco du Cboco, le Bauhinia ctttM~MM, arbre
colossal que les Indiens appellent Guarapa, le Weinmamnia glabra, un Psychotria en arbre, dont les
capsules, froissées entre les doigts, répandent une odeur d'orange tres-agréabte, le Dorstenia Houstoni
(~!<tM de M</Ha~o),te Martynia Craniolaria dont la Ceur blanche a six à sept pouces de long
une
Scrophutaire qui a le facies du Verbascam Miconi, et dont tes feuilles, toutes radicales et velues, sont
marquées de glandes argentées. Le NaeilMBa ou Manettia de Caripe ( Manettia empota ), que j'ai
Nous fumes reçus avec le plùsgrand empressemeBtpar les moinea de l'hospice
Le père gardien Ou supérieur étoit absent;mais, averti. d~ notre départ de
Cumana, il avoit pris les soins tes plus empressés poumons rendre notre séjour
agréable. L'hospice a une cour intérieure, entourée d'un -portique, comme les
couvens d'Espagne. Cet endroit clos nous offtoit beaucoup de commodité pour
établir nos instrumens et pour en suivre la marche. Nous trouvâmes dans le
couvent unesociété nombreuse de jeunes moines, récemment venus d'Espagne,
étoient au point d'être répartis dans les missions, tandis que de vieux missionnaires
infirmes cherchoient leur convalescence dans l'air vif et salutaire des montagnes
de Caripe. <~e logeai dans la cellule du gardien, qui rentermoit une collection de
livres assez considérable. J'y trouvai, avec surprise, près du Z~o~ cnMco de
Feijo et des Lettres ~{~aMt~~le ?hï~ec<Mc~de l'abbé Nollet. On
diroit que le progrès des lumières se fait sentir jusque dans les forets de l'Amérique.
.Le plus jeune des moinesttCapucins de la dernière mission 2 avoit apporté une
traduction espagnole de la Chimie de <~pt< Il comptoit étudier cet ouvrage
dans une solitude où, pour le reste dt~ ses jours, it devoit être abandonné à
lui-même. Je doute que le désir de l'instruction se conserve chez un jeune religieux
isolé aux bords du Rio Tigre: mais ce qui est certain, et très-honorablepour
l'esprit du siècle, c'est que, pendant notre séjour dans les couvens et les missions
de l'Amérique, nous n'avons jamais éprouvé aucune marque d'intolérance. Les
moines de Caripe n'ignoroient pas que j'étois né dans la partie protestante de
l'Allemagne. Muni des ordrès de la cour, je n'avois aucun motif de leur cacher
ce fatt cependant jamais aucun signe de méfiance, aucune question indiscrète,
aucune tentative de controverse, n'ont diminué le prix d'une hospitalité exercée
avec tant de loyauté et de franchise. Nous examinerons dans un autre endroit
les causes et les limites de cette tolérance des missionnaires.

dessmé sur tes lieux, d<B&re beaucoup du M. reclinata de Mntis. Ce dem:er, quî servi de type
a au genre,
est ptaeé par Linné au Mexique, quoiqu'il soit de la Nouvelle-Grenade. M. Mutis n'a jamais été au
Mexique, et il nous a engagé à rappeler aux botantstet~ue toutes les plantes qu'il envoyéesà UpMt,
a
et que le Species, la Mantissa et le Supplémentindiquent comme mexicaines, sont de la Montuosa,
près yde Pamplona ou de la Mina del Zapo, près d'Ibagae, par conséquent des montagnes de la
Nonvette-Grenade.
Nous aimons à citer avec reeonnoissance les noms des PP. Manuel de Monreat, Louis de Mirahete
et Francisco de Allaga.
Outre les villages dans lesquels tes indigènes sont réunis et gouvernés par un religieux,
on appelle
mission, dans les colonies espagnoles, la réunion des jeunes moines qui partent à la fois d'un port
d'Espagne pour recruter tes étaMissemens monastiques, soit dans le Nouveau-Monde, soit
aux îles
Pbilippines. De là, l'expression: «aller à Cadix chercher une nouvelle mission.
H
co~n~de..dan~,sïte ~appeM~act~M~~
hau~u~aN~-d~u~nMMeam~~
Moatagn~~ïe~dei'
la
&a

vi~~de~~aracas~de~ia~pa~~b~
Aussi.'Ies'températures';m'oy€~ne8Ï~~
entre les tropiques sont pem~di!iMpaQ~C~on sent le besoin de se tenir
couvert pendant la nuit, surtout sol~eil, 1.'tl'olts vnnesle thermo-
mètre centigrade, à minuit' .entre t~ et t~,5~
tg" et 20".
Vers une heure de l'après-midi) il ne s'étevoit encore qu'à at" et 22",5.
C'est une température qui sumt au dévjeloppement des productions de la zone
torride; en la comparant aux chaleurs excessives des plaines de Cumana, on
l'appeMemit une température de printemps. L'eau,exposée à des courans d'air
dans des vases d'argile pbrease~ were&oidit à Caripe, pendant la nuitt, jusqu'à
t3". Je n'ai pas besoin de rappeler que cette eau paroît presque à la gtaceà des
voyageurs qui, dans une même journée, arrivent au couvent, soit de la côte,
soit des savanes brutantes de Terezen, et qui par conséquent sont accoutumés à
boire de l'eau des rivières, dont ta ~ha!eu~ est communément de aS" à 26°
centésimaux.
La températuremoyenne de la vaMée de Caripe, conclue de celle du mois de
septembre, paroît être de t8°,5. Sous cette zone, d'après les observations faites
à Cumana la température de septembre diffère à peine d'un demi-degréde celle
de t'aBnée entière. La température moyenne de Caripe est égale à celle du mois
de juin à Paris, où cependant les chaleurs extrêmes sont de 10° plus fortes que
dans les jours les plus chauds de earipe. Comme l'élévation absolue du couvent
n'est que de ~oo toises, on peut être surpris de la rapidité avec laquelle décroît

6ant) le district de Ctarendon,te then~omëtre centigrade se Mntâent, de jour, entre aa" et a4°; !t
monte rarement à 96' et il deMemd quelquefoisjuqu'à t8*. Cette région des montagnes Bleues est
assez habitée. On y trouve metne quelques maisons a des haMenm oh les colons ont t'habitade de faire
du feu pour se cbaufbr, lorsque (comme a Santa-Fe de Bogota) Fatr se refroidit !e matin jnsou'a to*.
A tam~me époqae, les ehaleurs de la plaine, par eMmpte JL~ingston, sont de 3a'* a 35*. Voyez
les ObserraNonsde M. Farqnhar, qai a Teon dix-sept ans a ta Jamaïque, dans te fMo~~Mtt AM.
~tMm~t) Vot. 1, p. t8a. J'ai désira réunir dans mon ouvrage tout ce qui a rapport a~ l'inBuence
des hantears sur les climats et les ettes organisa, soit dans tes AntiUes, soit sur le continentde l'Amérique
éqninoxiate.
Entre t9'8-t4'R.
Qu'a i6°,8-i8° R.
Jusqu'à te'4 R.
De ao*,o-2o",8R.
la chaleur depuis les cotes. L'épaisseur des forets empêche la révefbératioa du
sol, qui est humide et convertd'unebourreépaisse d'herbes et de mousses.Par
un temps constamment brumeux, le soleil reste des journées ehtiefes sans action
et, vers l'entrée de la nuit, des vents frais descendent de la Sierra del Guacharo
dans la vallée.
L'expérience a prouvé que le climat tempéré et l'air raréné de ce site sont
singulièrement favorables à la culture du caûer, qui, comme on le sait, se plaft
sur les hauteurs. Le supérieur des capucins, homme actif et éclairé a donné à
sa province cette branche nouvelle d'industrie agricole. On avoit cultivé-jadis de
l'indigo à Caripe mais le peu de recule que rendoit cette plante 'qui demande
de fortes chaleurs, en a fait abandonner la culture. Nous trouvâmes dans le
Conuco de /a Cb?n7MMn<*beanc9upde plantes potagères, du maïs, dela canne à
sucre, et cinq mille pieds de caner qui promettoient une belle récolte. Les
religieux espérolent d'en tripler le nombre dans peu d'années. On ne peut
s'empêcher de remarquer cette tendance uniforme qui se manifeste, au commen-
cement de la civilisation, dans la politique delà Mérarchie monacale. Partout
où les couvens n'ont point encore acquis de richesses, dans le Nouveau-Continent
comme dans lés Gaules en Syrie comme dans le nord de l'Europe ils exercent
une influence heureuse sur le défrichement du sol et sur l'introduction des
végétaux exotiques. A Caripe, le Conuco de la commune offre l'aspect d'un grand
et beau jardin. Les indigènes sont tenus dy travailler.tous les matins de six
à dix heures. Les Alcades et les Alguasils de race indienne surveillent les
travaux. Ce sont les grands officiers de l'État qui, seuls, ont le droit de porter
une canne, et dont le choix dépend du supérieur du couvent. Ils attachent
beaucoup d'importance à ce droit. Leur gravité pédantesque et silencieuse,
leur air froid et mystérieux, leur amour pour la représentation à l'église et
dans les assemblées de la commune, font sourire les Européens. Nous n'étions
pas encore accoutumés à ces nuances du caractère indien, que nous avons
trouvées les mêmes à l'Orénoque, au Mexique et au Pérou, parmi des peuples
qui diSèrent par leurs mœurs et leurs langages. Les Alcades venoient tous les
jours au couvent, moins pour traiter avec les moines des affaires de, la'mission,
que sous le prétexte de s'informer de la, santé des voyageurs récemment
arrivés. Comme nous leur donnâmes de l'eau-de-vie, les visites devinrent plus
fréquentes que ne le désiroient les religieux.
Pendant tout le temps que nous avons passé à Caripe et dans ~Ïes autres
missions Chaymas, nous avons vu traiter les Indiens avec douceur. En général.
les missions des capucins aragonois nous ont paru gouvernées d'après un
système d'ordre et de discipline qui malheureusement est peu commun dans
le Nouveau-Monde. Bes abus qui tiennent à l'esprit gênerai des établissemens
monastiques, ne peuvent être imputés à aucune congrégation en particulier. Le
gardien du couvent fait vendre le produit du jardin de la commune; et,
puisque tous les Indiens y travaillent, tous prennent aussi une part égale au
gain. On leur distribue du maïs, des vétemens~ des outils, et, à ce qu'on
assure, quelquefoisde l'argent. Ces institutions monastiques ressemblent, comme
je l'ai fait observer plus haut,aux établissemens des Frères Moraves; elles sont
utiles <M~grès d'une société naissante et, dans les communautés catholiques,
que t'da~Signe sous le nom de missions, l'indépendance des familles et
rexistence individuelle des membres de la société sont plus respectées que
dans les communautés protestantes qui suivent la règle de Zintzendorf.
Ce qui donne le plus de célébrité à la vallée de Caripe, après la fraîcheur
extraordinaire du climat, est la grande Cueva ou caverne du Guacharo Dans
un pays où l'on aime le merveilleux, une caverne qui donne naissance à une
rivière, et qui est habitée par des milliers d oiseaux nocturnes dont la graisse
est employéedans les missions pour apprêter les alimens, est un objet intarissable
d'entretiens et de discussions. Aussi, à peine un étranger est-il débarquéà Cumana,
qu'il entend parler jusqu'à satiété de la pierre des yeux d'Araya, du laboureur
d'Arenas qui a allaité son enfant, et de la caverne du Guacharo qu'on assure
avoir plusieurs lieues de longueur. Un vif intérêt pour les phénomènes de la
nature se conserve partout où la société n'a pas de vie, où, dans une triste
monotonie, elle ne présente que des rapports très-simples et peu propres à piquer
la curiosité.
La caverne que les indigènes appellent une mine de g'nM.Mc, ne se trouve pas
dans la vallée de Caripe même, mais à trois petites lieues de distance du couvent,
vers Fouest-sud-ouest.Elle s'ouvre dans Une vallée latérale qui aboutit à la Sierra
del Guacharo. Nous nous mîmes en chemin vers la Sierra, le 18 septembre,
accompagnés des alcades ou magistrats indiens et de la plupart des religieux du
couvent. Un sentier étroit nous conduisit d'abord, pendant une heure et demie,

La province de GmtcAarMcM, que Delgado visita en t534, ttans l'expédition de Hieronimo de Orta! x
paroit avoir été située au sud ou au sud-est de Macarapana. Son nom a-t-il quelque rapport avec
ceux de la caverne et de l'oiseau, ou ce dernier nom est-il d'origine espagnole? (~ae~ Nov. 0~.
p. 676 ). Guacbaro signifie en castillan qui crie et <e &Mne)t<e or, foiseau de ta caverne de Caripe et le
Gaacharaca (Phasianus Parraka) sont des oiseaux extrêmement criards.
vers lé sud, à travers une plaine riante et couverte
d'un beau gazon; puis nous
de la
tournâmes vers l'ouest le long.d'une petite rivière qui sort;de la'bouche
caverne. On marche, en nfontant pendant trois quarts
d'heure, tantôt dans l'eau
qui est peu profonde, tantôt entre le torrent et un mur de rocher, sur un sol
extrêmement glissant et fangeux. L'éboulement des terres, les troncs d'arbres
épars, sur lesquels les mulets ont de la peine à passer, les plantes sarmenteuses
fatigante. Nous fûmes
qui couvrent le sol, rendent cette partie du chemin assez
surpris de trouver ici, à peine à 5oo toises de hauteur au-dessus du niveau de
l'Océan, une Crucifère, le Raphanus~nnofM.f. On sait combien les végétaux
de cette famille sont rares sous les tropiques; ils offrent, pour ainsi dire, une
forme &on~Ze, et, comme telle, nous n'Imaginions pas la trouver sur le plateau
peu élevé dé Caripe. Ces mêmes formes boréales sembtoieht se
répéter dans le
Ga!ium, caripense, le Valeriana ~ccn<&~ et un Sanicula qui se rapproche du
S. marilandica.
Lorsqu'au pied de la haute montagne du Guacharo on n'est plus qu'à quatre
cents pas de la caverne, on n'en voit point encore Touverturë. Le torrent coule
dans une crevasse qui a été creusée par les eaux, et l'on marche sous une corniche
dont la saillie empêche de voir le ciel. Le sentier serpenté comme la rivière; au
dernier détour, on se trouve subitement placé devant' l'ouverture immense de
la grotte. Cet aspect a quelque chose d'imposant, même aux yeux de ceux qui
sont accoutumés aux scènes pittoresques des Hautes-Alpes. J'avôis vu à cette
époque les cavernes du Pic de Derbyshire, où, couché dans un bateau, on traverse
une rivière souterraine sous une voûte de deux pieds de hauteur. J'avois parcouru
la belle grotte de Treshemienshiz dans les Carpates, les cavernes du Harz et
celles de Franconie qui sont de vastes cimetières* 1 d'ossemens de tigres, d'hyènes
et d'ours, grands comme nos chevaux. La nature, sous toutes les zones, suit des
lois immuables dans la distribution des roches, dans la forme extérieure des
montagnes, et jusque dans ces changemens tumultueux qu'a éprouvés la croûte
extérieure de notre planète. Une si grande uniformitéme faisoit croire que l'aspect

Le, terreau qui couvre, depuis des milliers d'années, le sol des cavernes de <&aytenreoth et de
Muggendorf eu Franconie, exhale encore anjourd'hu}, à de certamet époque* de t'année, des mofettes
ou des mélanges gazeux d'hydrogène et d'aMte,<)u! s'étevent vers la vo&te des souterrains. Ce fait est connu
de tous ceux qui montrent ces cavernes aM voyageurs;et, torsqae }'avois la direedon des mines du
Fichtetberg, j'ai eu occasion de l'observer souvent en été. M. Laugier a trouvé, dans ce terreau de
Muggendorf, outre les phosphates de chaux (
de matière ammale, Cww, .HeoAo'c~m<Mr M~m.
fossiles, Tom. 1V~ Ours, p. i4.) En projetant le terreau sur un fer rougi, j'ai été frappé, pendant
mon séjour à Steeben, de l'odeur fétide et ammoniacale qui se dégage, °
delaca~rn~deC~~ voy~s
eoung~ati~ des g~Qttes~
.antéH€Mrs~r~l~é:<a,,dc~be~60u~ ,'ul1,.9~té"1i1

iadiyiduel.
rature ittorganiqae oSreut
de la végétation équinoxiale do~, &
de~~ppa~~ lautre aussi la majesté
l'ouv~ d'une caverne, un caractère
La Cuevadel Guacharo est percée daw le piROnI vertical d'un rocher. L'entrée
regarde le sud; c'est une voûte qui a quatre-vingts pieds de large sur soixante-
douze de hauteur. Cette élévation égale, à un cinquième près, ceUe de la colonnade
du Louvre. Le rocher, qui surmonte la groMe, est couronne d'arbres d'une taille
à
gigantesque Le Mamei et le Genipayer' feuilles larges et luisantes! élèvent
verticalement ïeurs branches versje ciel, tandis que cettes du Courbant et de
t'Erythrina forment, en s'étendante une voûte épaisse de verdure. Des Pothosà
tige succulente, des Oxa!is et des Orchidées d'une structure bizarre naissent
dans tes tentes les plus arides du rocher, tandis que des plantes sarmenteuses,
balancées par les vents, s'eptrelacent~n festons devant l'ouverture de la caverne.
Nous distinguâmes, dans ces festons, unBignonia d'un bleu violet, le Dolichos
pourpré, et, pour la première ibis, ce magninque Solandra~dont la fleur, couleur
orange, a un tube charnu de plus de quatre pouces de longueur. U en est de
l'entrée des grottes comme de la vue des cascades; c'est le site plus ou moins
Imposant qui en fait le charme principal, qui détermine, pour ainsi dire, le
caractère du paysage. Quel contraste entre la Cueva de Caripe et ces cavernes du
nord qui sont ombragées par des chênes et par de sombres mélèzes.
Mais ce luxe de la végétation n'embellitpas seulement la voûte extérieure, il
se montre même dans le vestibule de la grotte. Nous vîmes, avec étonnement,
de superbes Héficoniaà feuilles de Bananier, atteignantdix-huit pieds de hauteur,
le palmier Praga et des Arum arbbrescens, suivre le bord du ruisseau jusque vers
ces lieux souterrains. La végétation continue dans la caverne de Caripe, comme
dans ces crevasses profondes des Andes, qui ne jouissent que d'un demi-jour elle
ne cesse de se montrer que lorsqu'on avançant dans l'intérieur, on est parvenu
à 30 ou 4o pas de distance de l'entrée de la grotte. Nous mesurâmes le chemin
au moyen d'une corde, et nous marchâmes près de quatre cent trente pieds sans

Cttoto, Genipaamericana. La Seur varie, & Caripe, de cinq a sit etaminea.


tachetée de noir, de trois pouces de tongueur.
Um Deu(troM)t)n'& Be(u' dorée,
Solandra tMMM~M. C'eat le GoMMttteAo des Indiens Chaymas.
avoir besoin d'allumer des torches. La lumière du jour pénètre jusqu'à cette
région, parce que la grotte ne, forme qu'un seul canal, qui conserve la même
direction du sud-est au nord-ouest. Là, pu la lumière commence à s'éteindre, on
entend de loin te bruit rauquè des oiseaux nocturnes que les naturels croient
exclusivement propres à ces lieux souterrains.
Le Guacharo a la grandeur de nos poules, la gueule des Engoulevens et des
Procnias, le port des Vautours dont le bec crochu est entouré de pinceaux de soie
roide. En supprimant avec M. Cuvier l'ordre des P/c~B, il faut rapporter cet
oiseau extraordinaireaux Passereaux dont les genres sont liés entre eux par des
passages presque insensibles. Je l'ai fait connoître sous le nom de Steatornis, dans
une Monographie particulièreque renferme~e second volume de mes Observations
de Zoologie et d'Anatomie comparée: il forme un nouveau genre très-différent
du Caprimulgus, par le volume de sa voix, par son bec extrêmement fort et
muni d'une double dent, par ses pieds dépourvus de membranes qui unissent les
phalangesantérieures des doigts. Il offre le premier exemple d'un oiseau nocturne
parmi les Passereaux dentirostres. Il a, par ses mœurs, à la fbis des rapports
avec les Engoulevens et les Choucas des Alpes Le plumage du Guacharo est
d'une couleur foncée gris-bleuâtre, mélangé de petites stries et de points noirs.
De grandes taches blanches, qui ont la forme d'un cœur et qui sont bordées de
noir, marquent la tête, les ailes et la queue. Les yeux de l'oiseau sont blessés par
l'éclat du jour; ils sont bleus et plus petits que ceux des Engoulevens ou Crapauds
volans. L'envergure des ailes, qui sont composées de ï~ à t8 pennes remiges,
est de trois pieds et demi. Le Guacharo quitte la caverne à l'entrée de la nuit
surtout lorsqu'il fait cla~ de lune. C'est presque le seul oiseau nocturne frugivore
que nous connoissions jusqu'à ce jour; la conformation de ses pieds prouve assez
qu'il ne chasse pas à la manière de nos chouettes. Il se nourrit de fruits très-durs
comme le Casse-noix etle Pyrrhocorax. Le dernier se niche aussi dans les fentes
des rochers, et on le'désigne sous le nom de Corbeau de nuit. Les Indiens
assurent que le Guacharo ne poursuit ni les insectes lamellicornes ni les phalènes
qui scrvent de nourriture aux Engoulevens, H sufSt de
comparer les becs du
SM~aractCMsementiBtssont:~<M<nfm ftt&&t<m,&t<ert&t~ conyreMMm,
~tee tM~eant, mon<N&t~<t
auperiori MMt<&n<a<<t,dente anteriori <teM«on..R<e<<M <M!p~tM)MM..P<~t~Mj), <&F'<M~MM, M~ttt&tM
integerrimis.
Corvus Pyrrhocorax.
Corrus caryocatactes, C. glandaruM. Le Choucas
ou la corneille <!e nos Alpes niche, Yen) la cime
du Liban, dans des grottès souterraines, à peu près comme le Gmacharo, dont il
a aussi la voix
épouvantablementaiguë (Labillardière,dans tes ~M<t~ At Toux. XVHt, p. 455 ).
~<~
<As~
Gu~cbaro,,et~u,.Gapri~uIga~

ces oiseaux i~t dans la~p~t~e


qu'au bruit de nos corbeilles qui;
société, etconstruisent leurs nids sur dé~lesd~
sons aigus et peccajMdes~uacha~ réRéchissent contre les des
yMectt'en
de

cimes se touchent. Les


rochers,
et l'écho les répète au fondde lacayerne. Les ïndÏ~ns nous montrpient les nids
de ces oiseaux, enaxantjdes torches au bout d'une longue perche. Ces nids se
trouvoientà 5o ou 60 pieds de hauteur au-dessus de nos têtes, dans des trous en
forme d'entonnotfs, dont le pMbnd de la grotte est criblé. Le bruit augmehte à
mesure que l'on avance et que les oiseaux sont eSi'ayés par la lumtère que
répandentÏes torches de Copal. Lorsqu'il ces'soit pendant quelques minutes autour
de nous on entendott de loin les cris plaintifs des oiseaux nichés dans d'autres
emhranchemens de la caverne. On auroit dit que ces bandes se répondoient
alternativement.
Lej! Indiens entrent dans la Cueyadet Guacharo une fois par an, vers la fête
de Saint-Jean, armés de perches au moyen desquelles ils détruisent la majeure
partie des nids. On tue à cette époque plusieurs milliers d'oiseaux et les vieux~
comme pour dé&ndre leurs couvées, planent autour de la tête des Indiens, en
poussant des cris horribles. Lés jeunes qui tombent à terre sont éventrés
sur-le-champ. Leur péritoine est fortement chargé de graisse, et une couche
adipeuse se prolonge depuis rabdomen jusqu'à l'anus, en formant une espèce de
pelotte entre les jambes de l'oiseau. Cette abondance de graisse dans des animaux
frugivores, non exposés à la lumièreet faisanttrès-peu dejnouvemensmusculaires,
rappelle ce que l'on a observé depuis long-temps dans l'engraissement des oies et
des bœufs. On sait combien l'obscurité et le repos favorisent cette opération.
Les oiseaux nocturnes de l'Europe sont maigres, parce qu'au lieu de se nourrir
de fruits, comme le Guacharo, ils vivent du produit peu abondant de leur
chasse. A l'époque que ron appelle vulgairement à Caripe la récolte de Z'AM~e
les Indiens construisent des cases en feuilles de palmier près de l'entrée et dans
le vestibule même de la caverne. Nous en vîmes encore quelques restes. C'est là,
qu'à un feu de broussailles, on fait fondre et découler, dans des pots d'argile, la

'~MpoRiMd'e/GmMAam.
Z~ e«McJt<t <~e &t!n<M<em~
graisse des jeunesolséauxrécèmmenttuës. Cette graisse est connue soas!e nom
de beurre ou d'huile ( M~Ttfcca ou aceite ) du Guacharo elle est à demi-Hqaide,
transparente et inodore. Sa pureté est telle qu'on la conserve au-~età d'un an,
sans qu'elle devienne rance. Au couvent de Garipe, dans ta cuisine des moines, on
n'employoit d'antre huile que celle de la caverne, et jamais nous n'avons observé
qu'elle donnât aux m~ts un goût ou une odeur désagréable.
La quantité récoltée de cette huile ne répond guère au carnage que les Indiens
font annuellement dans la grotte, ï! paroît que l'on ne recueille pas au-delà de i5o
à 160 bouteilles 1 de M~nf<?<M bien pure; !e reste, moins transparent, est
conservé dans de grands vases de terre. G~.te branche de l'industrie des indigènes
rappelle la récolte de l'huile de pigeon dont on tetiroit autrefois en Caroline
quelques milliers de barriques. A Caripe, l'usage dej rhùi!e de Guacharos est
très-ancien, et !es missionnaires n'ont rait que régotarisertaméthode de rextraire.
Les membres d'une Ji~He indienne qui porte te nom de Morocoymas, préfendent,
comme descendansdes premierscolons de la vaHée, être lespropriétaires légitimes
de la caverne: ils s'arrogent le monopole de la graisse mais, grâce
aux institutions
monacales, leurs droits aujourd'hui ne sont qu'honorifiques. D'après le système
des missionnaires, les Indiens sont obligés de fournir de t'huite du Guacharo à
la lampe de régHse on assure que le reste leur est acheté. Nous ne
prononcerons
ni sur la légitimité des droits des Morocoymas ni sur l'origine de l'obligation
imposée aux indigènes par les moines. Il paroîtroit naturel
que le produit de
la chasse appartînt à ceux qui la font mais, dans les forêts du Nouveau-
Monde, comme au centre de la civilisation européenne, le droit public
est
modifié d'après les rapports qui s'établissent entre le fort et le foible les
conquérans et les conquis.
La race des Guacharos seroit éteinte depuis long-temps, si plusieurs circon-
stances n'en favorisoient pas la conservation. Les indigènes, retenus
idées superstitieuses, n'ont souvent
par leurs
pas le courage de pénétrer bien avant dans la
grotte. M paroît aussi que des oiseaux de la même espèce habitent des
cavernes
voisines, qui sont trop étroites pour être accessibles à l'homme. Peut-être la grande
caverne se repeupte-t-eUe de colonies qui abandonnent ces petites grottes; car les
missionnaires nous ont assuré
que jusqu'ici on n'observe pas que le nombre des
oiseaux ait diminué sensiblement., On envoyé de jeunes Guacharos
a au port
de Cumana; ils y ont vécu plusieurs jours
sans prendre aucune nourriture, les
De 60 pouces cubes chacune.
C. pigeon-oil vient de la Columba migratoria. (~~n<~ ~-«c ~b.T.m. ïî, p. 13).
grame~qu,~o~E,o~ on

'<G<un.
des jeunes oisea
<W~!M~ab~ e~yestomac
sort~;dp~<s.durs .et.se~~qu~~'Jl~fA,:t),iffr~9:,gJ;ajo~
oc
po~
mtttpntes, Ge
On les ramasse soigoe~e~ot
,&h<jrea~~ntet'-
sont ~es~vieux-~IsjMux~~t~.pe~ graines à leuM~pe~ts.
:Cj1ri~t
dans d'autres endroit &évreux des basses rég~~
Nous suivîmes, toujours en parjMurànt!a caverne, les bords de la pettte
rivière qui y prend na~ssancë~EUe à ~8 a~3o~Ieds~de large. On marche sur
le rivage aussi Ïong-temps que permettent les couines, formées d'inçrustations
calcaires; souvent, lorsque ie torrent serpente entre des masses de staï~ctites
très-éievées, on est pMïgé de descendre dans son lit m~me qui n'a que deux
pieds de profondeur. Nous ~pprïmes~ avec surprise, que ce ruisseau souterrain
est l'origine du Rio Caripe qut,à que~ques Meues de distance,après s'être réuni
au petit Rio de Santa Maifia, est aavigaMe pour des pirogues. Il entre dans la
rivière d'Areo, sous le nom de C~So ~e ~~Men. Nous trouvâmes, sur le bord
du ruisseau souterrain, une grande quantité de bois de palmier. Ce sont tes
restes des troncs sur tesqueis grimpent les Indiens pour parvenir aux nids
d'oiseaux suspendus au pta~bnd de la caverne. Les anneaux formés
par les
vestiges des anciens pétioles, oBrent comme les marches d'une ëcheUe placée
perpendiculairement.
La grotte de Caripe, sur une distance exactement mesurée de 47~ mètres
ou ï~58 pieds, conserve ta même direction, la même largeur, et sa hauteur
pnmitive de 60 à yo pieds. Je n'ai vu aucune cav6rpe,d~a8 !es deux continens,
qui ait une structure aussi uniforme et aussi régun~~j~s avions eu beaucoup
de peine à persuader aux tndiens de dépasser la parEfS"antérieure de la grotte,
la seule qu'ils iréqaentent annuellement pour
y recueillir de la graisse. Il
faHut toute rautorité de 7<M pour les faire avancer jusqu'à l'endroit
où le sol s'élève brusquement avec une inclinaison de 6o", et où le torrent
forme une petite cascade souterraine Les indigènes attachent des idées
mystiques à cet antre habité par des oiseaux nocturnes. Ils croient
que tes
ames de leurs ancêtres séjournent au Jbnd de la caverne. L'homme, disent-ils,
doit craindre des lieux qui ne sont éclairés jai par le so!eU, ~M,
par ïa ni
'Ce phénomène d'une cascade sonterMine se tronve rêpêlê, mais
snr une ëcheKe beaucoup plus
grande, en Angleterre, dans le cnmtê d'Iorc~, près de &:agsda!e, & Yerdao-CMe.

u,wt.
lune, nMiM. Aller rejoindre les Guacharos c'est rejoindre ses pères, c'est
mourir. Aussi, les magiciens,/MacA<M,et les empoisonneurs, ïMû~n~, font
leurs jongleries nocturnes à t'entrée de ta caverne, pour conjurer le chef des
mauvais esprits, ivorokiamo. C'est ainsi que se ressemblent, dans tous !es
climats, les premières fictions des peuples, celles surtout qui tiennent & deux
principes gouvernant !e monde, au séjour des ames après la mort, au bonheur
des justes et à la punition des coupables. Les langues les'plus différentes et
les plus grossières onrent un certain nombre d'images qui sont les mêmes,
parce qu'elles 'ont leur source dans là nature de notre intelligence et de nos
sensations. Les ténèbres se lient partout à ridée de la mort. La grotte de
Caripe est le Tartare des Grecs, et les Guacharos qui planent au-dessus du
torrent, en poussant des cris plaintifs, rappellent les oiseaux stygiens.
C'est au point où la rivière forme la cascade souterraine
que se présente, d'une
mamère bten pittoresque, le coteau, couvert de végétation, qui est opposé à
l'embouchure de la grotte. On le découvre à l'extrémité d'un canal droit, de
2~otoisesde longueur. Les stalactites qui descendent de ta voûte et qui ressemblent
à des colonnes suspendues en l'air projettent
se sur un fond de verdure. L'ouverture
de !a caverne paro~t singulièrement rétrécie
vers le milieu du jour; et nous la
vîmes éclairée de cette vive lumière que reflètent à la fois le ciel, tes plantes et
les rochers. La clarté lointaine du jour cOntrastoit
avec les ténèbres qui nous
enveloppoient dans ces vastes souterrains. Nous avions déchargé
nos fusils comme
au hasard, partout où les cris des oiseaux nocturnes et le battement de leurs ailes
faisoient soupçonnner qu'un grand nombre de nids étoient réunis. Après plusieurs
tentatives inutiles, M. Bonpland réussit à tuer deux Guacharos qui, éblouis
la lumière des torches, sembloient par
nous poursuivre. Cette circonstance me procura
le moyen de dessiner cet oiseau qui, jusqu'ici,
est resté inconnu aux naturalistes.
Nous gravîmes, non sans quelque peine, la petite colline de laquelle descend
le
ruisseau souterrain. Nous vîmes
que la grotte se rétrécit sensiblement, en ne
conservant que 4o pieds de hauteur, et qu'elle se prolonge au nord-est,
dévier de sa direction primitive, qui est parallèle à cette de la grande sans
vallée de
Caripe.
Dans cette partie de la caverne,
ci~erne le ruisseau dépose
déposé un terrain noirâtre,
noiràtre assez
semblable à la matière que, dans la grotte de Mugendorf,
en Francdnie, on
appelle la terre du sacrifice Nous
ne pûmes découvrir si ce terrrau, fin et
O~r- de la caverne du Hode Berg (montagne percée ajoar).
spongieux, tombe à travers des fentes qui communiquentaa-dehofs avec ta surface
du sol, ou s'il est charié par les eaux de pluie qui pénètrent dans la caverne.
C'était un mélangede silice, d'alumine et de detritus végéta!. Nous marchâmes
dans une boue épaisse jusqu'à un endroit où nous vones avec étonnement les
progrès de la végétation souterraine. Les fruits quêtes oiseaux portent dans la
grotte pour nourrir leurs petits, germent partout oit ils peuvent se -fixer dans le
terreau qui couvre les incrustations calcaires.Des tigesétioléeset munies de quelques
rudimens de feuilles avoient jusqu'à deux pieds de hauteur. ït étoit impossible de
reconnoitre spécifiquement les plantes dont la (orme,!a couleur et tout le port
avoient été changés par l'absence de la lumière. Ces traces de l'organisation, au
milieu des ténèbres frappoient vivement la curiosité des naturels, d'ailleurs si
stupides et si difncites à émouvoir. Ils les examinoient dans ce recueillement
silencieux que leur inspire un lieu qu'ils semblent redouter. On auroit dit que ces
végétaux souterrains, pâles et défigurés, leur paroissoient des fantômes bannis de
la surface de la terre. Quant à moi, ils me rappeloient une des époques les plus
heureuses de ma première jeunesse, un long séjour dans tes mines de Freiberg,
où je fis des expériences 1 sur les effets de t'étiotemeht, très-différens, selon que
l'air est pur ou surchargé d'hydrogène et d'azote.
Les missionnaires, malgré leur autorité, ae purent obtenir des Indiens de
pénétrer plus loin dans la caverne. A mesure que la voûte du souterrains'abaissoit,
les cris des Guacharos devinrent plus perçans. Il fallut céder à la pusillanimité de
nos guides, et retourner sur nos pas. Le spectacle qu'offroit la caverne étoit
d'ailleurs bien uniforme. !t paroît qu'un évéque de Saint-Thomas de la Guiane
étoit parvenu plus loin que nous. !t avoit mesuré près de aSoo pieds depuis
l'embouchuré jusqu'à l'endroit Où il s'arrêta, quoique la caverne se prolongeât plus
loin. La mémoire de ce fait s'étoit conservée au couvent de Caripe, sans
que l'on
en eût marqué t'époque précise. L'éveque s'étoit muni de gros cierges de cire
blanche de Castille; nous n'avions que des torches composées d'écorce d'arbre et
de résine indigène. La fumée épaisse que donnent ces torches dans un souterrain
étroit, incommode les yeux et gêne la respiration.
Nous suivîmes le cours du torrent pour sortir de la caverne. Avant
que nos
yeux fussent éblouis par la lumière du jour, nous vîmes étincelef, au-dehors de
la grotte, l'eau de la rivière cachée sous le feuillage des arbres. C'étoit
comme un

Humbotdt, Aphorismi ex physiologia chemica plantarum (~om ~~e~. M<&er~M< p. t8t.)


960 ferot.
otacé dans le lointain,
tableau placé auquel couverture de rla caverne ~ervoit
lointaiû. et aacrueLI~~ertMre
d'encadrement. Arrivés enjSn a cette ouverture, assis au bofd du ruisseau, nous
nous reposâmes de nos fatigues. Not~ étions bten aises de ne plus entendre
les
cris rauques des oiseaux, et de quittejr un lieu où les ténèbres n'on~ent guère
le charme du silence et de la tranquillité. Nous avions de la peiné a nous persuader
que le nom de la grotte de Canpe ait pu rester jusqu'alors entièrement inconnu
en Europe Les Guacharos seuls auroient su~R pour la rendre célèbre. Hors les
montagnes de Caripeet de Cumanacoa, on n'a jusqu'ici découvertnulle part de
ces oiseaux nocturnes, a
Les missionnaires avoient fait préparer un repas à l'entrée de la caverne. Des
feuilles de bananiers et de VIjao qui ont un lustre soyeux, nousservoient de
nappe, selon l'usage du pays. Rien nemanquoltànos jouissances, pasm~me des
souvenirs qui sont d'ailleurssi rares dans ces contrées où les générations s'éteignent
sans laisser de trace de leur existence. Nos hôtes se plaisoient à nous rappeler que
les premiers religieux, venus dans ces montagnes pour fonder le petit village de
Santa-Maria 3, avoient vécu pendant un mois ~ansla~Eaverne, et que là, sur
une pierre, à la lueur des torches, ils avoient célébré les mystères de la religion.
Ce réduit solitaire servoit de refuge aux missionnaires contre les persécutions
d'un chef belliqueux dès Tuacopans, campé sur les bords du Rio Caripe.)
Avant de quitter le ruisseau souterrain et ces oiseaux nocturnes, jetons un
dernier coup d'oeil sur la caverne'du Guacharo et sur l'ensemble des phéno-
mènes physiques qu'elle présente. Lorsqu'on a suivi le voyageur pas à pas
dans une longue sérier d'observations modifiées par les localités, on aime à
s'arrêter pour s'élever à des considérations générales. Les grandes cavités, que
l'on appelle exclusivement dès cavernes ~doivent-elles leur origine aux mêmes
causes qui ont produit les drouses-des filons et des couches métallilères, ou le
phénomène extraordinaire de la porosité des roches? Les grottes appartiennent-
elles à toutes les formations, ou à cette époque seule où les êtres organisés

On doit être surpris que le père Gil:, auteur<ht &tgg'<' 'K &o< ~tMWMnn (Tom. ÏV,p. 4t4 ), n'en
ait pas parlé, quoiqu'il eût entre les mains un manuscrit composé, en t~So, <m couvent deCaripememe.
~'ai ~dhnë tes premières Not!oMd& la Cuevadel Gtaacharo en 1800, dans me~ Lettres & MM. Delambre
et Detatmétherie,publiéesdans le ~Mmo~de~'&yt~M. ~cy<t)MtMi ma C&)~r. ~~&Ht<e*, p. 84.
Heliconia Mhai, Lin. Les créokt ont changé, dans le mot haytien Bihào, le b en f et lh en j,
conformément & la prononciation castillane,.
3 Ce Titlage.simé
au sud de la caverne, étoit jadis le chef-lieu des mMsions Chaymao. C'est ponr cela
que, dans la CAoH~opAM <&< père Ca~M~p. 7 et 3io, elles sont dêtignéea sous les noms de J~~ione~
de Santa Maria de &)<! l'P. CopMcAmoj!~agCnetM.
commencoieatà peupler la surface du globe? C<6s questions géologiques ne
peuvent ~tre résolues qu'autant qu'elles ont pour objet, Pétât actuel des choses,
c'est-a~~ des faits susceptibles d'e~v&'i&éspat l'observatiQ~~
En considérant les ï'pch<es d'ap~s la BOGcessicn des tempson reconno~qne
les formations primitives onrent tr&speu de cave mes, Les grandes cavités que
l'on observe dans le granité l&pltts ancien, et qee l'on appeHe~M~ lorsqa'eMes
sont tapissées de cristaux de roches, naissent le plus souvent de ta réunion de
plusieurs~MoM~ eo~o~Sj&M de quarz, de feldspath ou de granite à petits
grains. Le gneiss présente, quoique plus rarement, !e même pMnomene;et, près
de Wunsiedel au Fichtelgebirge j'ai eu occasion d'examiner des ~M~
cristaux ayant deux à trois pieds de diamètre, dans une partie de la roche qui
n'étoit pas traversée par des filons. Nous ignorons rétendue des cavités que tes
feux souterrains et les soutèvemensvolcaniques peuvent avoir produites au sein
de la terre, dans ces roches primitives qui, abondant en amphibole, en mica,
en grenats, en fer oxiduié et en titane, paroissent antérieurs au granite, et
dont nous reconnoissonsquetques fragmens parmi les éjections des volcans. Ces
cavités ne peuvent être envisagées que comme des phénomènes partiels et locaux,
et leur existence ne répugne guère aux notions que nous avons acquises par les
belles expériences de Maske!yne et de Cavendish, sur la densité moyenne de
la terre.
Dans lès montagnes primitivesexposées à nos recherches,de véritables grottes,
celles qui ont quelque étendue, n'appartiennent qu'aux formations calcaires,
aux carbonates et au sulfate de chaux. La solubilité de ces substances paroît avoir
favorisé depuis des siècles l'action des eaux souterraines. Le calcaire primitif
présente des cavernes spacieuses, comme le calcaire de transition 3 et celui que
l'on appelle exclusivement secondaire. Si ces cavernes sont moins fréquentes
dans le premier, c'est que cette roche ne forme généralement que des couches

G&<cAtet<<~a ?nMttnter. C'est à ces petits filons qui paroissent du même Age que la roche, qu'appar-
tiennent tes filets de taie et d'asbeste, dans la serpentine, et les nombreux filets de quarz qui traversent
tes schistes (?%o<Mc&M/er). J.zmMon on contemporan8ous feMM dans tes .Méat. of the Werner. &c.
Tom. I, 4.
En Franconie, au sud-est de la TLuehsburg.
Dans Je calcaire primitif se trouvent le Hut~et-Loch, près de Kautungen
en Silésie, et probablement
plusieurs cavernes des Mes de t'Archipet. Dans te calcaire de transition, on observe les cavernes
d'Etbingerode, du Rubeland et de Scbarzfeld, au Harz; celles de taSaMuh, daM tes &fMons et,
d'après M. Greenough,celle de Torbj, dans le Devonshire.
micacé etet
subordonnées au schiste micacé un syst~e
nonopmm montai parttcuheres,
système de montagnes t
dans lesquelles lés eaux puissent s'innitrer et drculer & de grande~ distance
érosions causées par cet élément dépendent &Ia fois de s& q~ntitét de son
séjour plus ou moins long.deila vitesse qu'ilacquiert parla chute, et du degré
de solubilité de la roche. J'ai observé, en généfai, que les eaux attaquent plus
facilement les carbonates et les sulfates de chaux des montagnes secondaires,
que !es càlcaju'es de transition fortement mêlés de silice et de carbone. En
examinant la structure Intérieuredes~talactitesquI recouvrent les paro!s des
cavernes, on y reconnoît tous les caractères d'un précipite chimique. Le carbonate
de chaux n'a pasétéentra~né ou suspendu, il a été vraiment dissous. Je n'ignore
pas que, dans les procédés de nos laboratoires, cette substance ne paro!t soluble
que dans une eau fortement chargée d'acide carbonique mais les phénonaènes
que la. nature nous offre journellement dans les cavernes et dans les sources,
quanj&té d'acide carbonique sumt déjà pour
prouvent assez qu'une petite donner
à l'eau, après un long contact, la propriété de dissoudre quelques parcelles de
carbonate de chaux.
A mesure que l'on approche de ces temps où la vie organique se développe
dans un plus grand nombre de formes, le phénomène des grottes devient plus
fréquent. H en existe plusieurs, connus sous le nom de baumes non dans le
grès ancien auquel appartient la grande formation de houille, mais dans la pierre
calcaire alpine et dans le cal caire du Jura, qui n'est souvent que la partiesupérieure
de la formation alpine. Le calcaire du Jura est tellement caverneux 3 dans l'un et
1 antre continent, qut~ plusieurs géognostes de l'école de Freiberg luiont~donné
le nom de calcaire à cavernes, Z~SA~enAa~t~n. C'est cette roche qui interrompt
si souvent le cours des rivières 4 en les engounrant dans son sein. C'est elle aussi
qui renferme la fameuse Cueva <~ Guacharo et les autres grottes de la vallée de
Caripe, Le gypse munatifere 5, soit qu'il se trouve en couche dans le calcaire du
Jura ou dans celui des Alpes, soit qu'~sépare ces deux formations, soit enfin

QaetqneMsm&'metmgneiss, comme ~uSimpton, entre Dovredo et Cirevola.


Dans le diatecte des Suisses allemands Balm8n. C'est & le pierre calcaire alpinequ'tpparttemneotles
Ba~es du Sentis, du mie et du Beatenberg,sur tes bords dtt lac de Tbun.
Je me bornerai a citer les grottes de BoHdry,deM<Miera-TraTemetdeVatorbe,dans!e Jmra;ht
grotte de Balme près de Genève; les cavernes entre Mugendorf et Gailenreutb, en Franconie;Sowia Jama,
Ogrodzimiec etWtodowice, en Pologne.
Ce phénomène géologique avoit beaucoup fixé l'attentiondes anciens, SCf~o, Gt< ?. 6(e~.
OMn,t8û7,To'n.ï,p. Soy).)·
5 Gypse de Bottendorf,SeA/o~eng)y~. o
qu'il repose entraxe calcaire alpin et le grès argileux offre aussi, à cause de sa
grande solubilité dans l'eau, des cavités énormes. Elles communiquent quelquefois
entre elles à des distances de plusieurs lieues. Lorsque ces bassins, souterrains 1
sont remplis d'eau leur proximité devient dangereuse aux mineurs, dont ils
exposent les travaux à des inondations imprévues; si les cavernes au coniraire
sont à sec et très-spacieuses, elles' favorisent le desséchément d'une mine.
Distribuées par étages, elles peuvent recevoir les eaux dans leur partie supérieure,
et servir, en secondant les effets de l'industrie, comme des-galeries d'écoulement
creusées par la nature. Après les formations calcaires et gypseuses, il resteroit à
examiner, parmi les roches secondaires, Une troisième formation, celle du. grès
argileux plus neuf que les terrains à sources salées; ma~s cette roche, composée
de petits grains de quarz, cimentés, par de l'argile, renferme rarement des cavernes;
et, lorsqu'il s'en présente elles ont peu d'étendue. Rétrécies progressivement vers
leur extrémité 3 leurs parois sont recouvertes d'ocre brune.
Nous venons de voir que la forme des grottes dépend en partie de la nature
des roches dans lesquelles on les trouve mais souvent aussi cette forme, modifiée
par des agens extérieurs, varie dans une même formation. Il en est de la
configuration des cavernes comme des contours des montagnes, de la sinuosité
des vallées, et de tant d'autres phénomènes qui n7ôffrent, au premier abord, que
de l'irrégularité et de la confusion. L'apparence de l'ordre renaît lorsqu'on peut
soumettre a l'observation une vaste étendue de terrain qui a subi des révolutions
violentes, mais uniformes et périodiques. D'après ce que j'ai vu dans les montagnes
de l'Europe et dans les Cordillères dé l'Amérique, les cavernes peuvent être
divisées, selon leur structure intérieure, en trois classes. Les unes ont la forme
de larges fentes ou crevasses semblables à des filons non remplis de gangue,
comme la caverne de Rosenmuller en Franconie, Elden-hole dans le Pic de
Derbyshire 'et les ~MMiMe~M de Chamacasapa4 au Mexique. D'autres cavernes
communiquent avec le jour aux deux extrémités ce sont de véritables roches
percées, des galeries naturelles qui traversent une montagne isolée. Tels sont le
Hole-Bergde Muggendorf, et la fameuse caverne appelée Dantoe par les Indiens
Otomites, et le font de la Mère de Dieu par les Espagnols-Mexicains.Il est
difncile de prononcer sur l'origine de ces canaux, qui servent quelquefois de lit

AMtM-~eMM,en Thuringe.
Grès de Weisenfels et de Nebra, grès & Oolites. B~~o San~teM.
Tdi) sont la Reuscheune, en Si)~e; le I)iEbAe!kr et le KuhstaH.en Saxe.
Près de Tasco et de Tehuilotepec.
à des rivières souterraines. Les roches percées sont-elles creusées par l'impulsion
d'un courant, ou doit-on admettre plutôt quel'unedesonvertares de la caverne
est due à un éboulemeht subséquent, à un changement dans la fb~me extérieure
des montagnes, par exemple à une nonvellevallée ouverte dans leuirs~ancs? Une
troisième forme de cavernes, et la plus commune de toutes, offre une enfilade
de cavités placées à peu près au même niveau, dans une même direction, et
communiquant entre elles par des couloirs plus ou moins étroits.
A ces différences de formes générâtes se joignent d'autres circonstances non
moins remarquables. Il arrive souvent que des grottes peu spacieuses ont des
ouvertures extrêmement vastes, tandis qu'on pénètre en rampant sous des voûtes
très-basses dans les cavernes tes plus vastes et les plus profondes. Les couloirs
qui réunissent les grottes~ partielles sont généralement horizontaux: j'en ai vu
cependant aussi qui ressemblent à des entonnoirs ou à des puits, et que l'on
pourrbit attribuer au dégagement dé quelque fluide élastique à travers une masse
non endurcie. Lorsque des rivières sortent des grottes, elles ne forment qu'un
seul canal horizontal continu et dont les dilatations sont prcsqae insensibles.
Telles se présentent la Cueva del GMCcAanO que nous venons de décrire, et,
dans les Cordillères occidentales du Mexique, la caverne de San Felipe, près de
Tehuilotepec. La disparition subite 1 du ruisseau qui prend sa source dans cette
dernière caverne, est devenue une cause d'appauvrissement pour un canton,
dont les colons et les mineurs ont également besoin d'eau pour arroser les champs
et pour mouvoir les machinès hydrauliques.
En considérant cette variété de structures qu'offrént les grottes dans les deux
hémisphères, on est forcé de rapporter leur formation à plusieurs causes très-
diSérentes. Lorsqu'on parle, de l'origine des cavernes, il faut opter entre deux
systèmes de philosophie naturelle, dont l'un attribue tout à des secousses
violentes et instantanées, par exemple à la force élastique des vapeurs et aux
soulèvemens causés par des volcans, tandis que l'autre a recours à de petites
forces qui agissent presque insensiblement par un développement progressif. Il
seroit contre le but d'un ouvrage qui s'occupe des VoM <~e la nature, de discuter
lon~/M des choses, et d'abandonner le petit nombre de faits bien observés
jusqu'ici, pour se perdra dans le vague des conjectures. Nous engagerons seule-
ment les physiciens qui aiment à se livrer à des hypothèses géologiques, à ne
pas oublier l'horizontalité que l'on remarque si souvent au sein des montagnes

Dans la nuit du t6 avril 8o2.


gypseuses et cal~res, sur de grandes étendues, dans la. position de grottes qui
communiquent ~tre ellespar des couloirs. Cette horizontaHM presque parfaite
cette pente douce et Baiibrme,semMeat être ïe résultat d'a~ séjour des
eaux qui agrandissent par érosion les fentes déjà existantes et qui enlèvent les
matières tes plus tendres d'autant plus facilement que l'argile on le mùriate de
soude se trouve mêlé au gypse et au calcaire fétide '.Ces effets sont les mêmes,
soit que les cavernes forment une longue enniade continue, soit queplusieurs
de ces enfilades se trouvent superposées les unes aux autres, comme cela
arrive presque exclusivement dans les montagnes gypseuses.
Ce qui, dans les roches coquillères ou neptuniennes, appartient à l'action
des eaux, semble être quelquefois, dans les roches volcaniques, l'effet d'éma-
nations gazeuses 3 qui agissent dansja direction où elles trouvent le moins de
résistance. Lorsqu'une matière fondue se meut sur une pente très-douce, les
grands axes des cavités armées par le dégagement des fluides élastiques sont
à peu près horizontaux ou parallèles au plan sur lequel a lieu le mouvement de
translation. Un dégagement semblable de vapeurs~ joint A Ja force élastique
des gaz qui pénètrent des couches ramollies et soulevées, paroît donner quel-
quefois une grande étendue aux cavernes que l'on trouve dans les trachytes ou
porphyres trapéens. Ces cavernes porphyriques portent, dans les Cordillères de
Quito et du Pérou, le nom indien de .Mac~~ 4: elles sont généralement peu
profondes, tapissées de soufre, et diffèrent, par l'énorme grandeur de leur
ouverture, de celles qu'offrent les tuffes volcaniques 5 en Italie, à Ténériffe et

&MtM«fe, Yoyages, 465, 2~M<<e&en, Jï~/eMcA~/er,Tom. H, p. tya.


&<nt<<eM). M. Werner a hasardé l'hypothèse que, dans le gypse ancien de la Thnnnge, tes cavernes
sont dues à la soustraction d'énormes masses de muriate de soude. ~Me~6en, e*, p. aoS. Reuss,
Geo~/Mtte,B. p. 484.
~o~e: pIashaNt,T.t,p.a47,35.ïet35Q.AuVéi&Te,tedncdetaTon-em'afa:tTOtr, en t8o5, dans des
courans de tave récente, des cavités atongées dans,le sens des courans, et ayant 6-y pieds de long sur
3 pieds de hauteur. Ces petites ftKWa~ volcaniquesétoient tapissées de fer spécn!aire qui ne peut
conserver te nom de fer oligiste depuis les dmiers travaux de M. Gay-Lussac sur les otides de fer.
Machay est un mot de la langue qqaiehoa ~oe les Espagnols appellent vulgairement la langue de
l'lnco. C'est ainsi que Callancamachay signifie u caverne grande comme une maison, une caverne qui
sert de tambo ou caravanseray.
5 Quelquefois le feu agit comme l'eau,
en enlevant des masses tes cavités peuvent être l'euet d'une
solution ignée, comme elles sont plus souvent l'effet d'une 'érosion ou solution aqueuse. Le capitaine
Flinders, dont tes amis des sciences ont déploré la perte funeste et prématurée, attribue une caverne,
près de laplantation Menil, dans l'iste-de-France, à une couche de &f spécutaire fondne et enlevée à la
suite d'une éruption volcanique. <o ?~nM ott~ra~ Vol. U, p. 445.
dans les Andes. C'est en rapprochant ainsi par la pensée les roches primitives;
secondaires et volcaniques, en distinguant entre la croûte oxidéc du globe et le
noyau Intérieur, composé peut-~tre de substances métalloïdes inflammables,
et
qu'on reconnoit partout l'existence des~ grottes. Elles agissent dans l'économie
de la nature comme de vastes réservoirs d'eau et de fluides élastiques.
Les cavernes gypseuses brillent de l'éclat de ta sélénite cristallisée. Des lames
vitreuses, coloriées en brun et en jaune, se détachent sur un fond strié, composé
de couches d'albâtre et de calcaire fétide. Les grottes calcaires ont une teinte
plus uniforme. Elles sont d'autant plus belles et plus riches en stalactites,
qu'elles sont plus étroites et que l'air y circule moins librement. C'est pour
être trop spacieuse et trop accessible a l'air, qne la caverne de Caripe manque
presque entièrement de ces incrustations, dont les formes imitatives excitent,
dans d'autres pays, la curiosité du peuple. J'y ai aussi cherché en vain des
plantes souterraines, de ces Cryptogames de la famille des Usnéacées, qu'on
trouve quelquefois collées sur les stalactites comme le lierre &ur nos murs, au
moment où l'on pénètre pour la première fois dans une grotte latérale
Les cavernes des montagnes de gypse renferment souvent des moSettes et des
gaz délétères Ce n'est pas le sulfate de chaux qui agit sur l'air atmosphérique,
mais l'argile légèrement carburée et le calcaire fétide qui se trouvent si souvent
mélangés avec le gypse. On ne sauroit décider encore si la chaux carbonatée fétide
agit comme un hydrosulfure ou par un principe bitumineux 3. Sa propriété
d'absorber l'oxigène est connue de tous les mineurs de la Thuringe elle est la
même que l'action de~ l'argile carburée des grottes gypseuses et des grandes
chambres ( ~n~tfp~c ) que l'on pratique dans les mines de sel gemme, exploitées
par l'introduction des eaux douces. Les cavernes des montagnes calcaires ne sont

C'est ainsi' qu'a été découvert le Lichen toph:co!alors de ta première ouverture de la beHe caverne
de RosenmuHer, en Franconie (~9«m& Uber cKe Gn~nf~Mer,p. 39). La cavité,
<pM renfermoitle Lichen,
étoit fermée de tous côtés par d'énormea masses de stalactites- Cet eiemple ne favorise pas l'opinion de
quelques physiciens qui pensent que tes plantes sonterraines, décrites par Scopoli, par~Hofmaonet
par
moi, sont les cryptogames de nos forêts portées accidentellement avec des bois de charpente dans
Knténeurdes nune8,etde66nreespar!esenëtsdel'etlotement.
'~M<~en,Tom.H,p.t89.
3 L. <Tom.U,p. t6,aa. Le Stinkstein a constamment des teintes brun noirâtres: H nedevtentManc
que par décomposition,qu'après avoir agi sur l'air environnant. Il ne faut pas confondre avec ie~<tnt«em,
qui est de formation secondaire, un calcaire prumttf grenu, très-blanc, de l'Me de Tbasos, qui, radé~
offre une odeur d'hydrogène sulfuré. Ce marbre a te grain phm
gros que le marbre de Carare ( marmor
Z.t<MM<-). H a été tres-commnnément employé par tes statuaires
grecs, et j'en ai souvent recueitti
des fragmensà la ~M&t.~frtfHM, près de Rome.
pas exposées à ce~ décompositions de l'air atmosphérique,à moins
qu'elles ne
renferment des ossemens de quadrupèdes, ou ce terreau mêlé de gluten et de
phosphate de chaux, duquel se dégageât, comme nous l'avons observé plus haut,
des gaz Inflammables et fétides.
Malgré toutes les recherches que nous-avons faites près des habitans de'Caripe,
de Cumanacoa et de Cariaco, nous n'avons pas appris qu'on ait jamais découvert,
dans la caverne duGuacharo, ni des dépouilles de carnassiers, ni de ces brèches
osseuses d'animaux herbivoresque l'on retrouve dans les cavernes d'Allemagne et
de Hongrie ou dans les fentes des roches calcaires de Gibraltar. Les os fossiles de
Megatherium~ d'Eléphans et de Mastodontes que des voyageurs ont rapportés de
1 Amérique méridionale, appartiennent tous aux terrains meubles des vallées et
des plateaux élevés. A l'exception du Mégalonix espèce de paresseux à taille de
bœuf, décrit par .M,Jefferson, je ne connois jusqu'ici pas un seul exemple de
squelette d'animaux enfoui dans une caverne du Nouveau-Monde. L'extrême
rareté de ce phénomène géologique paroit moins surprenante, si l'on se rappelle
que la France, l'Angleterre et l'Italie offrent aussi un grand nombre de grottes dans
lesquelles on n'a jamais rencontré de vestige d'ossemens fossiles
Quoique, ~lans la nature brute, tout ce qui tient aux idées d'étendue et de
masse ne soit pas d'une grande importance, je dois rappeler cependant que la
caverne de Caripe est une des plus spacieuses que l'on connoisse dans les roches
calcaires. Elle a pour le moins goo mètres ou 2800 pieds de long En général,
à cause des divers degrés de solubilité de la roche, ce ne sont pas les montagnes
calcaires, mais les formations gypseuses qui offrent les enfilades de grottes les
plus étendues. On en connoît, en Saxe, dans le gypse, qui ont plusieurs lieues
de long, par exemple celle de Wimelbourg, qui communique à la caverne
de Cresfeld.
L'observation la plus curieuse que présentent les grottes aux physiciens,
c'est la détermination exacte de leur température. La caverne de Caripe située
à peu près par les io"to~ de latitude, par conséquent au centre de la zone torride,
est élevée de 5o6 toises au-dessus du niveau des eaux dans le golfe de Cariâco.

Le Megalonix a été trouvé dans tes cavernes de Green-Briar, en Virginie, à t5oo lieues de distance
du Megstberinm, dont il diffère très-peu, et qui a la tailledu Rhinocéros,(~menc. ?~afM.,n." 3o, p. a46 ).
Ct«'Mr,7ïe<'A.Mtr&«MeenMB<yoMt<M,Tom.rV,OttMjp. io.
La céiebre caverne de Baomann, au Barz, n'a, d'après MM. Gilbert et Ilsen, que 5~8 pieds de
longueur la caverne de Scharzfeld en a 35o; cette de Gaitenreuth, 304; celle d'Antiparos, ?oo pieds
(f)iMM&&en,Tom. H, p. t65 Mais, d'après Saussure (~<yo~, $. 465), la grotte de Balme
en compte t3oo.
avons trouvé
Nous y avons trouvé partout, mois de septembre
.partout, au mots septembre, la température de
l'air Intérieur entre t8°,4 ~t i8'Q
ft- du thermomètre
-1 centésimal. L'atmosphère
extérieure étotta t6°,2. A l'entrée de la caverne, le thermomètre se soutenoit
dans l'air à ~°,6; mais, plongé dans l'eau de la petite rivière souterraine, il
marquoit, jusqu'au fond de la caverne, t6°,8. Ces expériences offrent beaucoup
d'intérêt, si l'on réfléchit sur l'équilibre de chaleur qui tend à s'établir entre
les eaux, l'air et la terre. Lorsque je quittai l'Europe, les physiciens regrettoient
encore de n'avoir pas assez de données sur ce qu'on appelle un peu fastueusement
la f<?7M~/MtMrc de l'intérieur du g~&c, et ce n'est que très-récemment qu'on a
travaillé avec quelque succès à résoudre ce grand problème de la Météorologie
souterraine. Les couches pierreuses qui forment la croûte de notre planète,
sont seulesaccessibles à nos recherches, et l'on sait aujourd'hui que la température
moyenne de ces couchés ne varie pas seulement avec les latitudes et les hauteurs,
mais que, selon la position des lieux, elle fait aussi, dans espace dune année,
des oscillationsrégulières autour de la chaleur moyenne de l'atmosphère voisine.
Nous sommes déjà loin de cette époque où l'on étoit surpris de trouver, sous
d'autres zones, la chaleur des grottes et des puits, différente de celle que l'on
observe dans les caves de l'Observatoire de Paris. Le même instrument qui,
dans ,ces, caves, marque 120, s'élève, dans les souterrains de l'île de Madère, près
deFuncbal'.à i6",2; dans le puits de Saint-Joseph, au Caire', à 2t°,2; dans
les grottes de l'île de Cuba à 22° ou 23°. Cet accroissement est à peu près
proportionnel à celui des températures moyennes de l'atmosphère, depuis
les 48" de latitude jusqu'au tropique.
Nous venons devoir que, dans la caverne de Guacharo, l'eau de la rivière
est de près de 2° plus froide que l'air ambiant .du souterrain. L'eau, soit en
s'infiltrant à travers les roches, soit en coulant sur des lits pierreux, prend, à
n'en pas douter, la température de ces lits. L'air, au contraire, renfermé dans
les grottes, n'est point en repos; il communique avec l'atmosphère de dehors.
Quoique, sous la zone torride, les changemens de la température extérieure
soient extrêmement petits, il se forme cependant des courans qui modifient

A Fmchal (lat. Sa" 3?'), la température moyenne de t'air est de ao'4: ce qui ett d'autant ptua
probable que M. Escobr trouve, pew Sainte-CM!!tdeTéoénBe,at",8 (CaveBdMtt,da)Mte&fAt/.
T~.
'778, p. Sgs Nous reviendrons dans la mute sur cette différence remarquable entre te< souterrains
à l'ile de Madère et L'atmosphère circonvoisine.
Aa Caire (!at. 3o°a'), ta température moyenne de l'air est de M-4, d'après Nonet.
s 0~. astr., Tom. p. t34. La température moyenne de l'air à La Havane est, d'apre$M. Ferrer, ''y,6.
e
périodiqH~CMia chaleur de Jt'airinténeu~~
des
de la
eaux, celle
montagnes,
te~e daus ces
~et6o,8que~ ~~rqtJ~ce~~1J'IKtt",fle.sçendent
pomt rapiditë des
~onlMj~6~T~ plus é_lep~ées.
ces rapprochein~s~q~~
avec
ïl Mit de
prëcis, trpuY& ,1J~~1J.~f{1Ie~nedesn()mbres'lirfi~J"
absetamept on
A Caripe, dans la zone éq~noxija~, à 5oo toises,'hauf.e1Jr" la
température
moyenne du globe n'est pas au-dessous de ï6°,8; c'est ce que donne l'expérience
faite sur l'eau deJarivière souterraine. On peut de même prouver que cette
température du globe n'est pas au-dessus de ïp" degrés, puisque l'air de la
caverne, au mois de septembre, a été trouvé à ï8" Comme la température
moyenne de l'atmosphère, dans le mois le plus chaud, ne dépasse pas t9"~5,
il est probable que, dansaneune saison de l'année, on ne verroit monter le
thermomètre, exposé à l'air dans !a grotte, au-dessus de t~. Ces résultats,
comme tant d'autres, que nous présentons dans ce voyage, paroissent de
peu
d'importance, en/es considérant isotément mais si on les compare aux
observations réclament faites parMM. de Buch et WaMenberg sous !e cercle
polaire, ils rép~dpnt du jour sur l'économie de la nature en général et sur
l'équilibre de Mmpérature vers lequel tendent sans cesse l'air et la terre. Il n'est
r
plus douteux qu'en Laponie, la croûte pierreuse du globe soit de 3 à 4 degrés
oM-~c~Mdela température moyenne de l'atmosphère. Le froid qui règne
perpétue!tement dans les abunes de l'Océan éqninoxial, et qui est l'cSet des
courans polaires, produit-il, sous les tropiques, une diminution sensible dans
la température de la terfe ? Cette température y est-elle aM-de.MeM~ de celle
de l'atmosphère:' Voila ce que nous examinerons dans la suite, lorsque
nous
aurons réuni plus de faits dans les hautes régions de la Cordillère des Andes.
La tempé~atcM moyenne Jnmeis de teptetnbre.&Canpe,est 4e t8'5;et,MU-hautesdeCnmana,
«& nous Mon* pmfecneiiNrun grand nombre d'obserwtietM, les tempénttnres
moyennes des mois les
ptM chauds ne diNefent de cette: deo ntOM les p!us &o:ds qme de i°,8.
CHAPITRE VIÏt.

DÉPART DE CAMPE. – MONTAGNE ET FORET DE SANTA MARIA. –- MÏSS!ON DE


CATUARO. PORT DE CARIACO.

LES jours
que nous passâmes au couvent des Capucins, dans les montagnes
de Caripe, s'écoulèrent bien rapidement; cependant, notre vie étoit aussi
simple qu'uniforme. Depuis le lever du soleil jusqu'à l'entrée de la nuit, nous
parcourions la, foret et les montagnes voisines pour recueillir des plantes
dont nous n'avions jamais fait une plus ample moisson. Lorsque les pluies de
l'hivernage nous empéchoient d'entreprendre de& ~omse& lointaines, nous
visitions les cabanes des Indiens, le Co~Meo delà commune, ou ces assemblées
dans lesquelles les alcades indiens distribuent, tous les soirs, les travaux du
lendemain. Nous ne rentrions au monastère que lorsque le son de la cloche
nous appeloit à partager dans le réfectoire le repas des missionnaires. Quelquefois
de grand matin, nous les suivions à l'église pour assister à la doctrine c'est-à-
dire à l'enseignement religieux des indigènes. C'est une entreprise au moins
très-hasardée que de vouloir parler de dogmes à des néophytes, surtout
lorsqu'ils n'ont qu'âme connoissance très-vague de la langue espagnole. D'un
autre côté, les religieux ignorent aujourd'hui, presque totalement l'idiome
Chaymas; et la ressemblance des sons embrouille à tel point l'esprit de ces
pauvres Indiens, qu'elle leur fait naître les idées les plus bizarres. Je me bornerai
à citer un seul exemple. Nous vîmes un jour le missionuaire s'agiter vivement
pour prouver que I't~?<?mpj en&r, et l'Mf~Tto, hiver, n'ëtoient pas la même
chose, mais qu'ils différoient comme la chaleur et le froid. Les Chaymas
ne connoissent d'autre hiver que le temps des pluies, et l'enfer des blancs
leur paroissoit un endroit où les méchans sont exposés à de fréquentes averses.
Le missionnaire eut beau s'impatienter,il étoit impossible d'elfacer les premières
impressions, dues à l'analogie entre deux consonnes on ne parvint pas à séparer
dans l'esprit des néophytes les idées de pluie et d'enfer, d'tw~7:o et
dt~/?emo.
~t.~t.aM.~ "(¡;¡'Iaté3età
Ap~avo~ passé presque tout le., jour en plein ,air nous, tac~~s
s~t~~j
te
dessiner celles qui noMparoïssoi~ f~émer dés genrés ~nauvé~i' Les puoinés
nous taissoient jouir de ;~out&notre~~liber~ Vêt nous nous ~rappelo'M, avec
une vive satis&ction, un sétot~r~a~ pour nos tfavanx.
NEalheureusement, !e ciel,~u~nx~d'une~~i~Bij~e~où les forets versent une
prodigieuse quantité d'eau dans faitr, étoit peu iavorable aux observations
astronomiques. Je passai une partie des nuits pour saisir le moment où quelque
étoile étolt visiHeentredes nuages près de son passage an méridien. Souvent
je trejmMotots de froid, quoique le thermomètrene baissât que jusqu'à ï6°. C'est,
dans nos climats, la temperatureduMUrversïaBndeseptenutre.LesiBstrùmens
restoient montést~as la cour du couve)ttt pendant plusieurs heures, et presque
toujours j'étoistMmpé dans mon attente. Quelques bonnes observations de
Fomahantt et de Deneb du Cygne donnèrent, pour !a latitude de Canpe,
t o" ï b ï ce qui prouve que la position indiquée sur la carte de Caulin est
faussedeï8~,ceHedArrowsmithd~–––––––
Comme des observations de hauteurs correspondantes du soleil me faisoient
connoïtre le temps vrai à 3" près, je pus déterminer avec précision, au moment
du midi, la variation de l'aiguille aimantée. Elle étoit, le 20 septembres 799,
de 30 ï5~ 3o~; au nord-est,parconséquent,de o" 58~ ï5~ plus petite qu'a
Cumana.Si l'on a égard à l'influence des variations horaires qui, sous ces climats
ne s'élèvent généralement pas au-delà de 8~, on reconnoitra qu'à des distances
considérables,la déclinaison change avec moins de rapidité qu'on ne le croit
communément. L'inclinaison magnétique étoit ~a~S (division centésimale),
et le nombre des oscillations qui expriment l'intensité des forces magnétiques
s'élevoitaaa9,enïo'detemps.
Le chagrin de voir disparoitre les étoiles par un ciel brumeux est le seul que
nous ayons connu dans la valléede Caripe. L'aspect de ce site a quelque chose
à !a fois de sauvage et de- calme, de lugubre et d'attrayant. Au milieu d'une
nature si puissante, on n'éprouve que des sentimens de paix et de repos. Je
dirois même qu'on est moins frappé, dans la solitude de ces montagnes, des
impressions nouvelles que l'on reçoità chaque pas, que des traits de ressemblance
qu'oSrent les climats les plus éloignés. Les collines auxquelles le couvent est
adossé, sont couronnées de palmiers et de Ïbugères arborescentes. Le soir, par

<?<. astr. Tom. I, p. tOo-toC.


un ciel qui annonce la pluie, l'air retentit du hurlement uniforme des singes
Alouates, qui ressemble au bruit lointain du vent .lorsqu'il agite la foret.
Cependant, malgré ces sons inconnus, ces formes étranges de, plantes, et ces
prodiges d'un monde nouveau, partout la nature fait entendre à l'homme une
voix dont les accens luisent familiers. Le gazon qui tapisse le sot, la vieille
mousse et la fougère dont se couvrent les racines des arbres, les torrens qui se
précipitent sur les bancs inclinés de la roche calcaire; enfin, cet accord
harmonieux de couleurs que reflètent les eaux, la verdure et le ciel, tout rappelle
au voyageur des sensations qu'il a déjà éprouvées.
Les beautés naturelles de ces montagnes nous occupoient si vivement, que
nous nous aperçûmes bien tard de rembarras qu'éprouvoient les bons religieux
qui nous donnoient l'hospitalité. Ils n'avoient pu faire qu'une foible provision de
vin et de pain de froment; et, quoique, dans ces régions, l'un et l'autre ne soient
regard'és que comme appartenant au luxe dé la table, nous vîmes à regret que
nos hôtes s'en privoient eux-mêmes. Notre ration de pain.avoitdéjà diminué
de trois quarts, et cependant de cruelles averses nous ~breoient encore de
différer notre départ de deux jours. Que ce retard nous parut long; que nous
redoutions le son de la cloche qui nous appeloit au réfectoire! Nous sentions
vivement, par les procédés délicats des missionnaires, combien notre position
contrastoit avec cette des voyageurs qui se plaignent d'avoir été dépouillés de
leurs provisions dans les couvens Coptes de ta Haute-Egypte.
Nous partîmes enfin le 32 septembre suivis de quatre mulets chargés
d'instrumens et de plantes. Nous eûmes à descendre la pente nord-est des Alpes
calcaires de la Nouvelte-Andalousie que nous avons appelées la grande chaule
du Bergantin et du Cocollar. La hauteur moyenne de cette chaîne n'excède
guère six ou sept cents toises; et, sous ce rapport et celui de sa constitution
géologique, on peut la comparer à la chaîne du Jura. Malgré l'élévation peu
considérable des montagnes de Cumana, la descente en est des plus pénibles,
on pourroit presque dire des plus dangereuses, du côté de Cariaco. Le Cerro
de Santa-Maria, que les missionnaires gravissent pour se rendre de Cumana à
leur couvent de Caripe, est surtout célèbre par les dinicultés qu'il
oppose aux
voyageurs. En comparant ces montagnes, les Andes du Pérou, les Pyrénées et
les Atpes que nous avons parcourues successivement,
nous nous sommes
rappelé plus d'une fois que les cimes les moins élevées sont souvent les plus
inaccessibles.
En quittant la vallée de Caripe, nous traversâmes d'abord
une rangée de
collines sîtuéès au nord-est du couvent. Le chemin nous conduisittou}ours en
montant, par une vaste savane, jusqu'au plateau du Guardia de ~~MfM.
Nous y fîmes halte pour attendre Hndien qui portoit le baromètre; nous nous
trouvâmes à 533 toises d'élévation absolue, un peu plus haut que le fond de la
caverne du Guacharo. Les savanes, ou prairies naturelles, qui oSrent d'cxcetlens
pâturages aux vaches du couvent sont absolument dépourvues d'arbres et
d'arbustes. C'est le domaine des plantes monocotylédones; car au milieu des
graminées ne s'élèvent ça et là que quelques pieds de Maguey dont les hampes
fleuries ont plus de 26 pieds de hauteur. Arrivés au plateau du Guardia, nous
nous trouvâmes comme transportés dans le fond d'un ancien lac, nivelé par le
séjour prolongé des eaux. On croit reconnoître les sinuosités de l'ancien rivage,
des langues de terre qui s'avancent des rochers escarpés qui s'élèvent en forme
d'îlots. Cet ancien état des choses semble même indiqué par la distribution des
végétaux. Le fond du bassin est une savane, tandis que ses bords sont couverts
d'arbres de haute futaie. C'est probablement la vallée la plus élevée des provinces
de Cumana et de Venezuela. Il est à regretter qu'un site où l'on jouit d'un climat
si tempéré, et qui seroit sans doute propre à la culture du froment, soit
totalement inhabité.
Depuis le plateau du Guardia, on ne fait plus que descendre jusqu'au village
indien de Santa Cruz. On passe d'abord par une pente extrêmement glissante et
rapide, à laquelle les missionnaires ont donné le. nom bizarre du Purgatoire
C'est un rocher de grès schisteux décomposé, couvert d'argile, et dont le talus
paroît d'une rapidité effrayante; car, par t'eSet d'une illusion d'optique très-
commune, lorsqu'on regarde du haut de la colline vers le bas, le chemin paroît
incliné de plus de 6o". En descendant, les mulets rapprochent les jambes de
derrière de celtes de devant, et, baissant la'croupe, ils se laissent glisser au
hasard. Le cavalier ne court aucun risque, pourvu qu'il lâche la bride et qu'il
ne contrarie en rien les mouvemens de i animal. De ce point, on aperçoit, vers
la gauche, la grande pyramide du Guacharo. L'aspect de ce Pic calcaire est
très-pittoresque mais on le perd bientôt de vue en entrant dans la forêt épaisse,
qui est connue sous le nom de la Montana de .yanta-TMayra. On descend sans
interruption pendant sept heures, et il est difficile de se faire l'idée d'une
descente plus épouvantable; c'est un véritable chemin des échelles, une espèce

Agave americana.
Balada del Purgatorio.
de ravin dans lequel, pendant le temps des pluies, les torrens impétueux
s'élancentde rocher en rocher. Les gradins ont deux à trois pieds de hauteur; et les
malheureuses bêtes de somme, après avoir mesuré l'espace qui est nécessaire
pour que la charge puisse passer entre les troncs des arbres, sautent d'un bloc
de rocher sur un autre. De peur de manquer le saut, on les voit s'arrêter
quelques instans comme pour examiner le terrain, et rapprocher les quatre
jambes à la manière des chèvres sauvages. Si l'animal n'atteint pas le bloc de,
pierre le plus voisin, il enfonce jusqu'à mi-corps dans l'argile molle et ocreuse
qui remplit les interstices des rochers. Partout où les blocs manquent, d'énormes
racines offrent dès points d'appui aux pieds de l'homme et des animaux. Elles
ont jusqu'à vingt pouces d'épaisseur, et partent souvent du tronc des arbres
beaucoup, au-dessu~ae la surface du sol. Les créoles se fient assez à l'adresse et
à l'heureux instinct des mulets pour rester en selle pendant cette longue et
pérUfeuse descente. Craignant la fatigue moins qu'eux, et accoutumés à voyager
lentement, pour recueillir des plantes et pour examiner la nature des roches,
nous préférâmes descendre à pied. Les soins qu'exigëoient nos chronomètres, ne
nous làissoient pas même la liberté du choix.
La forêt qui couvre le flanc escarpé de la montagne de Sainte-Marie, est
une des plus épaisses que j'aie jamais vues. Les arbres y sont d'une hauteur et
d'une grosseur prodigieuses. Sous leur feuillage touffu et d'un vert foncé, il
règne constamment un demi-jour, une sorte d'obscurité dont nos forêts de pins,
de chines et de hêtres ne nous offrent pas d'exemple. On diroit que, malgré sa
température élevée, l'air ne peut dissoudre la quantité d'eau qu'exhalent la
surface du sol, le teuillage des arbres, et leur tronc couvert d'une bourre
ancienne d'Orchidées, de Peperomia et d'au très plantes charnues. A l'odeur
aromatique que répandent les fleurs, les fruits et le bois même, se mê!e celle
que nous sentons en automne dans les temps brumeux. Ici, comme dans les
forêts de l'Orénoque, en fixant les yeux sur le sommet des arbres, on aperçoit
souvent des tramées de vapeurs là où quelques faisceaux de rayons solaires
pénètrent et traversent l'atmosphère épaissie. Nos guides nousfaisoient remarquer,
parmi les arbres majestueux dont la hauteur excède ï20-i3o pieds, le Curucay
de Terecen ',qui donne une résine blanchâtre, liquide et très-odorinante. Elle
fut employée jadis par les Indiens Cumanagotes et Tagires
pour encenser leurs
idoles. Les jeunes branches ont un goût agréable, quoique
un peu astringent.

~'oyMp!Mhaut,p.4o5.
Après le Curucay et d'énormes troncs d Hymenea dont le diamètre excède
9-ïo pieds, les Végétaux qui attiroient le plus notre attention, étoient le Sang
de, Dragon (Croton sanguISnum), dont le sue brun pourpre s'épanche sur une
écorce blanchâtre, la fougère Ca~ïM~, différente- de celle du Pérou, mais
presque également salutaire et les palmiers trasse, Macanilla, Corozo et
Praga Le dernier offre un choux palmiste très-savoureux dont nous avons
mangé quelquefois au couvent de Caripe. Avec ces palmiers à feuilles pennées
et épineuses, contrastoient agréablement les fougères en arbre. Une d'entre elles,
le Cyathea speciosa 3, s'élève à plus de trente-cinq pieds de hauteur, ce qui est
prodigieux pour des plantes de cette famille. Nous découvrîmes ici et dans la
vallée de Caripe cinq nouvelles espèces de fougères arborescentes 4 du temps
de Linné, les botanistes n'en connoissoient pas quatre dans les deux Continens.
On observe que les fougères en arbre sont, en général, beaucoup plus rares
que les palmiers. La nature les a circonscrites dans des lieux tempérés, humides
et ombragés. Elles craignent les rayons directs du soleil; et, tandis que le Pumos ?e
le Corypha des steppes et d'autres palmiers de l'Amérique, se plaisent dans les
plaines nues et brûlantes, ces fougères à tronc arborescent, qui, vues de loin,
offrent l'aspect des palmiers, conservent le caractère et les habitudes des plantes
cryptogames. Elles aiment les lieux solitaires, le demi-jour, un air humide,
tempéré et stagnant. Si eUes descendent quelquefois jusque vers les côtes, ce
n'est qu'à l'abri d'un ombrage épais Le vieux tronc des Cyathea et des Meniscium
est couvert d'une poudre charbonneuse, qui (peut-être dépourvue d'hydrogène )
a un lustre métallique comme le graphite. Aucun autre végétal ne nous a présenté
ce phénomène; car les troncs des Dicotylédones, malgré l'ardéur du climat et
l'intensité de la lumière, sont moins brûlés sous les tropiques qu'ils ne le sont
dans la zone tempérée. On diroit que les troncs des fougères, qui, semblables

Le Calahuala de Caripe est !e Polypodium crasifolium; celui du Pérou, dont MM. Ruiz et Pavon ont
tant répandu l'usage, vient de l'Aspidtum coriaceum,Wtlld. (Tectaria Catahoata, Cav. ). On me!e, dans
le commerce, les racines diaphorétiqnesdu Polyp. crassifoliumet de l'AcrostIchamHuascaro aux racines
du véntaMe Calahuala on Aspidiumcoriaceum.
AiphanesPraga.
Peut-être un Hemitelia de Robert Brown. Le tronc seul a aa-a4 pieds de longueur c'est, avec le
Cyathea excelsa de Itle de Bourbon, la plus majestueuse de toutes les fougèresen arbres décrites par
les botanistes. Le nombre total de ces cryptogames gigantesques s'étëve aujourd'hui à a5 espèces; celui
des Palmiers, à 80. Avec le Cyathea croissent, dans la montagne de Santa-Maria, Rhexia juniperina,
ChiococcantcemoMt, Commelina spicata.
Meniscium «r~ore<ce)M, Aspidium caducum, À. rostratum, Cyathea villosa, et C. speciosa. ~<yet
les ~Vofa Genera et Spec. plant., tom. t, p. 35, de l'édition in-4".
aux Monocotylédones, grossissent par les débris des pétioles,
tneu!'eBt~!a
circonférence vers le, centre, et que, dépourvus d'organes corticaux, par lesquels
les sucs élaborés descendent vers tes racines, ils se brûlent pins facilement par
l'oxigène de l'atmosphère. J'ai rapporta en Europe de ces poudres à éclat
métallique, enlevées à des troncs de Meniscium etd'Âspidium tfès-~aBiem.
A mesure que nous descendîmes la montagne de Santa-Maria~ cous ~tne$
diminuer les fougères en arbre et augmenter le nombre des palmiers. Les beattx
papillons à grandes ailes les Nymphales, qui volent à une hauteur prodigieuse,
devenoient plus communs. Tout nous annonçoit que nous nous rapprochions
des côtes et d'une zone dont la température moyenne du jour est de a8 à
3o degrés centigrades.
Le temps étoit couvert et faisoit craindre une de ces averses pendant lesquelles
il tombe quelquefois i à i,3 pouces d'eau dans un seul jour. Le soleil édairoit
par intervalles le sommet des arbres; et, quoique à l'abri de ces rayons, nous
éprouvâmes une chaleur étonnante. Déjà le tonnerre gMndoit dans le lointain;
les nuages paroissoient suspendus-à la cime des hantes montagnes du Guacharo,
et le hurlement plaintif des Araguatos que nous avions si souvent entendu à
Caripe au coucher du soleil annonçoit !a proximité de l'orage* Nous eûmes
occasion ici, pour la première fois, de voir de près ces singes hurleurs. 'Ils
sont de la famille des Alouates dont les auteurs ont long-temps confondu
les diverses espèces. Tandis que les petits Sapajous de l'Amérique, qui imitent,
en sifflant, la voix des Passereaux, ont l'os de la langue mince et simple, les
singes à grande taille, comme les Alouates et les Mafimondes 2, ont la langue
placée sur un large tambour osseux. Leur larynx supérieur a six poches, dans
lesquelles se perd la voix, et dont deux, en terme de nids de pigeons,
ressemblent assez au larynx inférieur des oiseaux. C'est par l'air chasse avec
force dans le tambour osseux, qu'est produit le son lugubre qui caractérise
les Araguatos. J'ai dessiné sur les lieux ces organes imparfaitementconnus des
anatomistes, et j'en ai publié la description, d'abord après mon retour en
Europe Lorsqu'on considère les dimensions de la boite osseuse des Alouates
et le grand nombre de singes hurleurs nichés sur un seul arbre dans les forêts
de Cumana et de la Guiane, on est moins surpris de la force et du volume de
leurs voix réonies.

Stentor Geoffroy.
Atetes, G.
~O~Zoo/ogte,Totn.t,p.8,pt.4,n.°9.
L'Araguetto,, que les Indiens TamanaqnesappetïentAravata ëttesMaypures
Marnée, ressembj~ a un jeune ours. Il a trois pieds de long en comptant du
sommet de la tête, qui est petite et très-pyramidale, jusqu'à Forigine de la
queue prenante; son pelage est touffu et d'un brun-roussàtre; la poïfrineet te
ventre sont également couverts d'an beau poil, et
non pas nus comme dans le
~foMO colorado, ou Alouate rouxde BuSbn, que nousavons examiné avec soin,
en remontantde Carthagène des Indes à ~ata-F~ de Bogota.La face de l'Araguato,
d'un bleu noirâtre, est couverte d'une peau nne -et ridée. Sa barbe est assez
longue; et, malgré la direction de la ligne faciale, dont l'anglè n'est que de 3o",
lAraguato a dans le regard et dans l'expression de la physionomie autant de
ressemblance avec l'homme que la Marimonde (S. Belzebuth, Brisson) et le
Capucin de lOrénoque ( S. chiropotes). Parmi des milliers d'Araguatos que nous
avons observés dans les provinces de Cumana, de Caracas et de la Guiane, nous
n'avons jamais vu de changemens dans le pelage brun-roussâtre du dos et des
épaules, soit que nous ayons examiné des individus, ou des bandes entières. Il
m'a paru en général que les variétés de couleurs sont moins communes parmi les
singes que ne le croient les naturalistes Elles sont surtout très-rares parmi les
espèces qui vivent en société.
L'Araguato de Caripe est une nouvelle espèce du genre Stentor, que j'ai fait
connottre sous le nom d'Alouate-Ourse,~MMMï ~nH/M. J'ai préféré ce nom à ceux
que j'aurois pu tirer de la couleur du pelage, et je m'y suis arrêté d'autant plus
facilement que, d'après un passage de Photius, les Grecs connoissoient déjà un
singe velu sous le nom d'~re<o~A<?c<M. Notre Araguato dinère également de
l'Ouarine ( S. Guariba ) et de l'Alouate roux ( S. Seniculus). Son œil, sa voix,
sa démarche, tout annonce de la tristesse. J'ai vu de jeunes Araguatos,
élevés dans les cabanes des Indiens ils ne jouent jamais comme les petits Sagoins,
et leur gravité a été bien naïvement décrite par Lopez de Gomara, au commen-
cement du t6." siècle. « L'.Aranata de los C~MMejej,dit cet auteur, a le visage

Gomara ( ~M<- cap. 80, p. io4). Fray Pedro Simon (Noticias de la Conquista
general de las Ind.
~e 7'tetv~~nM, t6a6. A~t.4,c.a5,p.3t7),ettepereCaut<n (/eor.,p. 33), décrivent ce singe
sous tes nonn d'dranata et Araguato. On reconno!t aisémentdans les deux noms une même racine; le f
a été transformé en g e< en n. Le nom d'~M&ata, que Gumilladonne aux singes hurleursdu Bas-Orénoqne,
et que M. Geoffroy pense appartenir an S. stramioea du Grand Parà est encore le même mot tamanaque
~ra~<M<t. Cette identité de noms ne doit pas nous surprendre. Nous verrons bientôt que la langue des
Indiens Chaymas de Cumana est une des branches nombreusesde la langue tamanaque, et que celle-ci
est liée à la langue caribe du Bas-Orénoque.
Spit, dans les Mém. de f~fc~. <&-Munich, 1815, p. 340.
de l'homme, la barbe d'un bouc, et le maintien grave, A<MmM<o ~<?~o."J'ai
déjà fait observer dans une autre partie de cet ouvrage que les singes sont
d'autant plus tristes, qu'ils ressemblent plus à l'homme. Leur gaieté pétulante
diminue à mesure que leurs facultés intellectuelles paroissent plus développées
Nous nous étions arrêtés pour observer les singes hurleurs, qui, au nombre de
trente à quarante, traversoient le chemin en passant, en longue nie, d'un arbre
à l'autre par des branches croisées et horizontales. Tandis que ce spectacle nouveau
nxoit toute notre attention, nous rencontrâmes une troupe d'Indiens qui se
dirigeoient vers les montagnes de Caripe. Ilsétoient entièrement nus, comme le
sont généralement les indigènes de ce pays. Les femmes, chargées d'un fardeau
assez lourd, fermoient la marche; les hommes étoient tous armés, jusqu'aux
enfans les plus jeunes, d'arcs et de flèches. Ils marchoient en silence, les yeux
fixés sur le sol. Nous tâchâmes d'apprendre d'eux si nous étions encore loin de
la mission de Santa-Cruz, où nous comptions passer la nuit. Nous étions harassés
de fatigue et tourmentés par la soif~ La chaleur augmentoit avec la proximité de
l'orage, et nous n'avions pas, sur notre chemin, trouvé de source pour nous
désaltérer. Les mots si Patre, no JPaf~, que les Indiens répétoient sans cesse,
nous faisoient croire qu'ils entendoient un peu l'espagnol. Aux yeux des indigènes,
tout homme blanc est un moine, un jP~M~e~; car, dans les missions, la couleur
de la peau caractérise le religieux plus encore que la couleur du vêtement. Nous
eûmes beau tourmenter les Indiens de nos questions sur la longueur du chemin,
ils répondolent comme au hasard, si et no, sans que nous pussions attacher un
sens précis à leurs réponses. Cela nous impatientoitd'autant plus, que leur sourire
et leurs gestes indtquoient l'intention de nous plaire, et que la forêt sembloit
toujours devenir plus épaisse. II fallut nous séparer; les guides indiens, qui
entendoientla langue chaymas, ne pouvoient nous suivre que de loin, parce que
les mulets de charge s'abattoient à chaque pas dans les ravins.
Après plusieurs heures de marche, en continuant de descendre sur des blocs
de rochers épars, nous nous trouvâmes Inopinément à l'extrémité de la forêt
de Santa-Maria. Une savane 3, dont les pluies de l'hivernage avoient renouvelé
la verdure, se prolongeoit devant nous à perte de vue. A gauche, nos regards
s'étendoient sur une vallée étroite, qui aboutit aux montagnes du Guacharo.

0~. zoo< Tom. I, p. 399 et 3M, Pl. 3o.


Dans ta Gr~ce moderne, les moines portent vulgairement !e
nom de hw ~MtNan&, Katog~eroL
On y trouve Paspalum con~gatum, P. scoparium, ~o~M~<nct/<M-ntM, etc.
Le fond de cette va!!ée est couvert dune épaisse fb~ret.L'œilp!ongeoïtsur la cime
des arbres, qui, & 8oo pieds au-dessousdu chemin,&rmoient un tapis de verdure
dune teinte sombre et uniforme. Les clairières de la foret paroissoi'ent comme de
vastes entonnoirs, dans lesquels nous reconnûmes, à leur forme élégante et à leur
feuillage penné, les palmiers Praga et ïrasse. tHais~e qui rend ce site éminemment
pittoresque, c'est l'aspect de !a ~e<v~ ~GtMtc~aw. Sa pente septentrto~ale,
celle qui regarde le golfe de Cariacd, est abrupte: elle offre un mur de rochers,
un profil presque vertical, dont la hauteur excède trois mille pieds. La végétation
qui couvre ce mur est si peu épaisse~ que l'œil peut suivre l'atignement des
assises calcaires. Le sommet de la ~<TM est aplati, et ce n'est qu'à son
extrémité orientale que s'élève, comme une pyramide Inclinée, le Pic majestueux
du Guacbaro. Il rappelle par sa Corme tes aiguilles et les cornesdes Alpes de
la Suisse. Comme la plupart des montagnes à pentes abruptes paroissent plus
élevées qu'elles ne le sont effectivement, il ne faut pas être surpris que le
Guachàro passe dans les missions pour une cime qui domine le Turimiquiri et
IcBrigantin.
La savane que nous traversâmes jusqu'au' village indien de Santa-Cruz est
composée de plusieurs plateaux très-unis, et superposés comme par étages. Ce
phénomène géologique, qui se répète sous tous les climats, paroît Indiquer un
long séjour des eaux dans des bassins qui ont déversé les uns dans les autres. La
roche calcaire n'est plus au jour eUe est couverte d'une épaisse couche de terreau.
Là où nous la vtmes pour la dernière fois dans la forêt de Santa-Maria,elle étoit
légèrement poreuse et ressembloit plus au calcaire de Cumanacoa qu celui de
Caripe. Nous y trouvâmes de la mine de fer brun disséminée en nids, et, si nous
ne nous sommes pas trompés dans l'observation, une corne d'Ammon. Nous ne
parvînmes pas à la détacher elle avoit sept pouces de diamètre. Ce fait est
d'autant plus important que, nulle part, dans cette partie de l'Amérique
méridionale, nous n'avons vu d'Ammonites. La mission de Santa-Cruz est située
au milieu de la plaine. Nous y arrivâmes vers le soir, excédés de soif, étant
restés près de huit heures sans trouver de l'eau. Le thermomètre se soutenoit
à 26 degrés; aussi nous n'étions plus élevés que de ïgo toises au dessus du
niveau de la mer. Nous passâmes la nuit sous un de ces Ajupas que l'on appelle
maisons du rui, et qui, comme je l'ai dit plus haut, servent de tambo ou

SchreUtôrnefjrmsteramhom.
caravanserai aux voyageurs. Les pluies empéchoient toute observation d'étoiles
et nous continuâmes, le lendemain a3 septembre, notre descente vers te golfe
de Cariaco. Au-delà de Santà-Cruz commence de nouveau une foret épaisse.
Nous y trouvâmes, sous des touffes de Melastomes, une bette fougère à feuilles
d'Osmunda, qui forme un nouveau genre 1 de l'ordre des PotypodiacéeS.
Arrivés à ta mission de Catuaro, nous voulûmes continuer à t'est par Santa-
Rosalia, Casanay, San-Josef, Carupano, Rio-Carives et la Montagne de Paria;
maisnousapprtmes, à notre grand regret, que les averses avoient déjà rendu
les chemins impraticables, et que nous risquerionsde perdre les plantes que nous
venions de cueillir. Un riche planteur de cacaoyères devoit nous accompagner
de Santa-Rosalia au port de Carupano. Nous apprîmes à temps que ses affaires
l'avoient appelé à, Cumana. Nous résolûmes par conséquent de
nous embarquer
à Cariaco; et de retourner directement par le golfe, au lieu de passer entre l'file
de la Marguerite et l'isthme d'Araya.
La mission de Catuaro est placée dans le site le plus sauvage. Des arbres de
haute futaie environnent encore l'église, et les tigres viennent la nuit manger les
poules et les cochons des Indiens. Nous logeâmes chez le curé, moine de la
congrégation de l'Observance, auquel les capucins avoient confié la mission,
parce qu'ils manquoient de prêtres de leur communauté. C'étoit un docteur en
théologie, petit homme sec, d'une vivacité pétulante. H nous entretenoit sans
cesse du procès qu'il avoit avec le gardien de son couvent, de l'Inimitié de ses
confrères, et de l'injustice des Alcades, qui, sans égard pour les priviléges de
son état, l'avoient fait jeter dans un cachot. Malgré ces aventures, il avoit
conservé un malheureux penchant pour ce qu'il ~appetoit des questions méta-
physiques. Il vouloit savoir ce que je pensois du libre arbitre, des moyens de
dégager les esprits de leur prison corporelle, et, avant tout, de t'âme des animaux,
sur lesquels il avoit les Idées les plus bizarres. Lorsqu'on a traversé les forets dans
la saison des pluies, on se sent peu de goût pour ce genre de spéculations. D'ailleurs
tout étoit extraordinaire dans cette petite mission de Catuaro, jusqu'à la maison
du curé. Elle avoit deux étages, et étoit devenue pour cela l'objet d'une vive
contestation entre les autorités séculières et ecclésiastiques. Le supérieur des
capucins, la trouvant trop somptueuse pour un missionnaire, avoit voulu forcer
les Indiens à la démolir le gouverneur s'y étoit opposé avec vigueur,
et sa
volonté avoit prévalu contre les moines. Je cite ces faits
peu importans en
Po!ybotna. ~Vbf. Gen., Tom. 1, tab. 2.
eux-mêmes, parce qu'Hs font connoïtre le régime intérieur des missions qui
n'est pas toujour~aussi paisible qu'on le suppose en Europe.
Nous rencontrâmes, dans la mission de Catuaro le corrégidor' du district,
homme aimable et d'un esprit cultivé. M nous donna trois Indiens qui) munis
de leurs MMcAe~, devoient nous précéder pour frayer un chemin a travers la
foret. Dans ce pays si peu fréquenté, ta~brcc de la végétation est telle, à l'éppqne
des grandes pluies, qu'un homme a cheval a de la peine à passer par des sentiers
étroits, couverts de lianes et de branches entrelacées. A notre plus grand regret,
le missionnaire de Catuaro voulut absolument nous conduire à Cariaco. Nous
ne pûmes nous y refuser il ne nous tourmentolt plus de ses rêves sur l'àme des
animaux et le libre arbitre de 1 homme, II avoit à nous entretenir d'nn objet
bien autrement pénible. Le mouvement vers l'Indépendance, qui avoit manqué
d'éclater à Caracas, en ï~8, avoit été précédé et suivi d'une grande agitation
parmi les esclaves de Coro, de Maracaybo et,de Cariaco. Un malheureux Nègre
avoit été condamné à mort dans cette dernière ville, et notre hôte, le curé de
Catuaro, s'y rendoit pour lui offrir les secours de son ministère. Qu'il nous parut
long ce chemin, pendant lequel nous ne pûmes échapper à des conversations
'< sur
la nécessité de la traite, la malice innée des Noirs, et les avantages que tire
cette race de son état de servitude parmi les chrétiens »
On ne sauroit nier la douceur de la législation espagnole, en la comparant au
Code Noir de la plupart des autres peuples qui ont des possessions dans les deux
Indes. Mais tel est ~tat des Nègres isolés dans des lieux à peine défrichés, que
la justice, loin de les protéger emcacement pendant leur vie, ne peut même
punir les actes de barbarie qui ont causé leur mort. Si l'on tente une enquéte,
la mort de l'esclave est attribuée à la foiblesse de sa santé, à l'influence d'un climat
ardent et humide, aux plaies qu'on lui a faites, mais que l'on assure avoir été
peu profondes et peu dangereuses. L'autorité civile est impuissante en tout ce
qui regarde l'esclavage domestique, et rien n'est plus illusoire que l'effet tant vanté
de ces lois qui prescriventla forme du fouet et le nombre de coups qu'il est permis
de donner à la fois. Les personnes qui n ont point vécu dans les colonies ou
qui n'ont habité que les Antilles, pensent assez généralement que l'Intérêt du
maftre à la conservation des esclaves doit rendre leur existence d'autant plus
douce que le nombre en est moins considérable. Cependant, à Cariaco même,
peu de semaines avant mon arrivée dans la, province, un planteur qui ne possédoit

Don AteMndro Me~ia.


que huit Nègres en fit périr six, en tes fustigeant de la manière !a plus
barbare.
Il détruisit votontairément la majeure partie de sa fortune. Deux de ses esclaves
expirèrent sur-le-champ, Il s'embarqua avec les quatre qui sembloient plus
robustes, pour le port de Cumana mais ils périrent pendant la traversée. Cet
acte de cruauté avoit été précédé, dans la même année, d'un autre, dont les
circonstances étoient également enrayantes. Des forfaits si grands sont restés à
préside à leur
peu près impunis l'esprit qui a dicté les lois n'est pas celui qui
exécution. Le gouverneur de Cumana étoit un homme juste et humain; mais
les formes judiciaires sont prescrites, et te pouvoir du gouverneur ne s'étend pas
sur une réforme d'abus qui sont presque inhérens à tout sytème de colonisation
européenne.
La route que nous suivîmes à travers la forêt de Catuaro ressëmNe à la
descente de la montagne de Santa-Maria, aussi les passages les pins difficiles sont-
ils désignés ici par des noms également bizarres. On marche comme dans un sillon
étroit, creusé par les torrenset rempli d'argite fine et tenace. Les mulets abaissent
la croupe et se laissent glisser sur les pentes les plus rapides. Cette descente
)
s'appelle ~co-~antec~ à cause de la consistance de la boue qui ressemble à du
beurre. Le danger de la descente devient nul par ta grande adresse des mulets de
ce pays. L'argile qui rend le sol si glissant est due aux couches fréquentes de grès
et d'argile schisteuse qui traversent le calcaire alpin gris-bteuâtre celui-ci disparoit
à mesure que t'en se rapproche de Cariaco. La montagne de Meapire est déjà
formée en grande pattie d'un calcaire blanc rempli de pétrt&cations pélagiques
et parcissant appartenir, comme le prouvent des grains de quarz agtutinés dans
la masse, à la grande formation des brèches du littoral On descend cette
montagne sur les assises du roc, dont la coupure ofïre des gradins de hauteur
Inégale c est encore un véritable chemin des échelles. Plus loin, en sortant de
la forét, on atteint la colline de Buenavista Elle est digne du nom qu'elle
porte; car c'est de là qù~on découvre la ville de Cariaco, au milieu d'une vaste
plaine remplie de plantations, de cabanes et de bouquets épars de cocotiers. A
l'ouest de Cariaco s'étend le vaste golfe qu'un mur de rocher sépare de l'Océan:
enfin vers l'est, on découvre, comme des nuées bleuâtres, les hautes montagnes
d'Arco et de Paria 3. C'est une des vues tes ptus étendues et les plus magnifiques,
dont on puissejouir sur les côtes de la NouveIte-Andatoùsie.

Montagne de la belle vue.


~yMplMhaut,sorcettefonBationdegr~onpoBdtngMcatcmre,p.357.

Sierra de ~eo et Montana de Paria.


Nous trouvâmes dans la ville de, Cariaco une grande partie des habitans
étendus dans leurs hamacs, et malades de fiêvres intermittentes. Ces ûèvres
prennent, en automne, un mauvais caractère, et passent à l'état de fièvres
pernicieuses dysentériques. Lorsqu'on considère l'extrême ~ertitité des plaines
environnantes, leur humidité et la masse des végétaux qui les'couvrent,, on
conçoit aisément pourquoi an mHien de tant de décompositions de matières
organiques, les habitans ne jouissent pas de cette salubrité dé Pair qui caractérise
la campagne aride de Cumana.ItestdijBiciiede trouver, sous la zone torride,
une grande fécondité de sot, des nhnes fréquentes et prolongées, un luxe
extraordinaire de la végétation, sans que ces avantages soient contre-balancés
par un climat plus ou moins funeste à la santé des hommes blancs. Les mêmes
causes qui entretiennent la fertilité de la terre et-qui accélèrent le développement
des plantes, produisent des émanations gazeuses qui mêtées à l'atmosphère
lui donnent des propriétés nuisiHes. Nous aurons souvent occasion de faire
remarquer la coïncidence de ces phénomènes, lorsque nous décrirons la culture
du cacaoyer, et les rives de l'Orénoque, où, sur quelques points, les indigènes
eux-mêmes ont de la peine à s'acclimater. Dans la vattéede Cariaco,l'insalubritéde
l'air ne dépend pas uniquement des causes générales que nous venons d'indiquer;
on y reconnott l'influence particulière des localités. Il ne sera pas sans intérêt
d'examiner la nature de ce terrain qui sépare le golfe de Cariaco du golfe de Paria.
La chaîne de montagnes calcaires du Brigantin et du Cocollar envoie au nord
un rameau considérable qui se réunit aux montagnes primitives de la côte. Ce
rameau porte le nom de A~e~z de Meapire; du côté de la ville de Cariaco, ili
s'appelle le C~vo gMHMte CaMaco. Sa hauteur moyenne ne m'a pas paru
excéder i5o à 200 toises; là on j'ai p~t'examineF~ il est composé de la brèche
calcaire du littoral. Des bancs marneux et catcaipe~akement avec d'autres bancs
qui renferment des grains de quarz. C'est un phénomène assez frappant, pour
ceux qui étudient le relief d'un pays, que de voir une arête transversale lier en
angle droit deux chaînons parallèles, dont l'un, le plus méridionai, est composé
de roches secondaires, et l'autre, le plus septentrional, de roches primitives.
Ce dernier, que nous avons fait connottre dans notre excursion à la péninsule
d'Araya n'offre, jusque vers le méridien de Carupano, que des schistes micacés;
mais à l'est de ce point, là où il communique par une arête transversale ( la

A peu près ou 4a' à l'est du méridien de Cumana.


~ey<M plus haut p. 33a.
Sierra de Meapire), au chaînon calcaire, il renferme du gypse lamelleux du
calcaire compacte et d'autres roches d!e formation secondaire. On dirolt que cest
le chaînon méridional qui a donné ces roches au chatnon~septentrional.
Lorsqu'on se place sur le sommet du Cerro de Meapire, on voit les versans
aller d'un côté au golfe de Paria, et de l'autre an golfe de Cariaco. A l'est et à
l'ouest de l'arête, il y a des terrains bas et marécageux qui se prolongent sans
interruption; et si l'on admet que les deux golfes doivent leur origine à des
affaissemens et à des déchiremens causés par des tremblemens de terre, il faut
supposer que le Cerro de Meapire a résiste aux mouvemens convulsifs du globe,
et empêche les eaux du golfe de Paria de se réunir à celles du golfe de Cariaco.
Sans l'existence de cette digue rocheuse, l'isthme n'existeroit vraisemblablement
pas. Depuis le château d'Araya jusqu'au cap Paria, toute la masse des montagnes
côuëres fbrmeroit une île étroite, parallèle à l'ue de la Marguerite, et quatre fois
plus longue. Ce ne sont pas seulement l'inspection du terrain et des considérations
tiréesde son relief qui con~rmentces assertions la simple vue de la configuration
des côtes et la carte géologique du pays, feroientnattre les mêmes idées. Il parott
que l'île de la Marguerite a été contiguë jadis à la chalne côtière d'Araya, par('
la péninsule de Chacopata et les îles Caribes, Lobo et Coche de la même
manière que cette chaîne l'est encore à celle du Cocollar et de Caripe, par
l'arête du Meapire.
Dans l'état actuel des choses on voit s'agrandir, en gagnant sur la mer, les
plaines humides qui se prolongent, à l'est et à l'ouest de l'arête,, et qui portent
les noms impropres de vallées de San Bonifacio et de Cariaco. Les eaux de la
mer se retirent, et ces changemens de rivage sont surtout très~sensibles sur la
côte de Cumana. Si le nivellement du sol semble indiquer que les deux golfes
de Cariaco et de Paria occupoient jadis un espace beaucoup plus considérable,
on ne sauroit douter aussi que ce sont aujourd'hui les terres qui augmentent
progressivement. Près de Cumana, une batterie, qu'on appelle de la Bocca,
a
été construite, en !79ï, sur le bord même dé la mer:~ 1799, nous la vîmes
très-loin dans l'intérieur des terres. A l'embouchure du Rio Neveri, près du
Morro de Nueva Barcelona la retraite des eaux est encore 'plus rapide. Ce
phénomène local est dû probablement à des àtterrissemens dont la marche n'a
pas encore été suffisammentexaminée.
En descendant la Sierra de Meapire, qui forme l'isthme
entre les plaines

PrëscteGmreetdeCarupano.
de San Bonifacio et de Cariaco, on trouve, vers l'esté grand lac dePutacuao~
qui communique ayec le Rio Areo, et qui a à 5 lieues de dtttmecre. Les
terrains montagneux qui environnent ce bassin, ne sont connusqu'aux indigènes.
C'est là que se voient ces grands serpens Boas que les Indiens Chaymas désignent
sous te nom de Guainas, et auxquels ils attribuent fabuleusement un aiguillon
sous la queue. En descendant taSierra de Meapire,vers l'ouest, on rencontre
d'abord un terrain ereux ( tierra Aueca), ~ut, pendant les grands tremblemens
de terre de ï~BS, a jeté de l'asphalte enveloppé dans du pétrole visqueux:
plus loin on voit jaillir du sol une innombrable quantité de sources thermales
hydro-sulfureuses; enfin on atteint les bords du lac de Campoma, dont les
émanations contribuent à rendre insalubre le climat de Cariaco. Les naturels
pensent que le terrain creux est formé par l'engouffrement des eaux chaudes;
ct, à en juger par le son que l'on entend sous les pieds des chevaux, on doit croire
que les cavités souterraines se prolongent'dé l'ouest à l'est jusque vers Casanay,
sur une longueur de trois à quatre mille toises. Une petite rivière, le Rio Azul,
parcourt ces plaines. Elles sont crevassées par des tremblemens de'terre qui
ont un centre d'action particulier, et qui se propagent rarement jusqu'à Cumana.
Les eaux du Rio Azul sont froides et limpides: elles naissent au revers occidental
de la montagne de Meapire, et l'on croit qu'elles s'enrichissent des infiltrations
du lac de Putacuao, qui est situé de l'autre côté du chaînon. La petite rivière
et les sources chaudes hydro-sulfureuses se jettent ensemble dans la Laguna
de Campoma. C'est le nom que l'on donne à une grande mare qui se divise,
dans le temps des sécheresses, en trois bassins situés au nord-ouest de la ville
de Cariaco, près de l'extrémité du golfe. Des émanations fétides se dégagent
sans cesse de l'eau croupissante de cette mare. L'odeur de l'hydrogène sulfuré
se méte à celle des poissons pourris et des végétaux décomposés.
Les miasmes se forment dans la vallée de Cariaco, comme dans la campagne
de Rome mais l'ardeur du climat des tropiques en accroît l'énergie délétère.
Ces miasmes sont probablement des combinaisons ternaires ou quaternaires
d'azote, de phosphore, d'hydrogène, de carbone et de soufre. Deux mittièmes
d hydrogène sulfuré, métés à l'air atmosphérique, suffisent pour asphyxier un
chien, et, dans l'état actuel de t'eudiométrie, nous manquons de moyens pour
apprécier des mélanges gazeux qui sont plus ou moins nuisibles à la santé,
selon que les élémens, en quantités infiniment petites, se combinenten différentes

~M~&mo de ~KM calientes, à t'E.N.E. de Cariaco, distance de a lieues.


orooorttoos. servM~Mtïes
desservjeest
iKtportaas qae la chimie
les plus importans que !a moderne ait rendus
chtmien
proportions.Un
Un des

à la physiologie, est d'avoif enseigné que nous ignoroOs~encore ce que des


expériences illusoires sur la composition chimique et sur la salubrité de
l'atmosphère avoient fait admettre~il y a quinze ans.
La position de la lagune de Gampoma rend le vent nord-ouest, qui soume
fréquemment après le couche du soleil, très-pernicieux pour les habitains de la
petite ville de Cariaco. On peut d'autant moins douter de son influence, qu'on
voit les fièvres intermittentes dégénérer en fièvres typhoïdes, à mesure qu'on se
rapproche de la lagune, qui est le foyerprincipal des miasmes putrides. Des
familles entières de Nègres libres, qui ont de petites plantations sur la cote
septentrionale du golfe de Càriaco, languissent dans leurs hamacs dès l'entrée
de l'hivernage. Ces fièvres prennentle caractère de fièvres rémittentes pernicieuses,
si, exténué par un long travail et une forte transpiration,on s'expose à des pluies
fines qui tombent souvent vers le soir. Cependant les hommes de couleur, et
surtoutles Nègres créoles, résistent pins que toute autre race aux influences du
climat. On traite les malades avec de laTImonade, des infusions du Scoparia
dulcis, rarement avec le Cuspare, qui est le quinquina de l'Angostura.
On remarque en général que, dans ces épidémies de la ville de Cariaco, la
moralité est moins considérable qu'on ne devroit le supposer. Lea nèvres
Internuttentes, lorsqu'elles attaquent les mêmes individus pendant plusieurs
années successives, altèrent et affoiblissent la constitution mais cet état de
débilité, si commun sur les côtes malsaines, ne cause pas la mort. Il est d'ailleurs
assez remarquable qu'on croit ici, comme dans la campagne de Rome, que l'air
est devenu progressivement d'autant plus malsain, qu'on a soumis à la culture un
plus grand nombre d'arpens. Les miasmesqu'exhalent ces plaines n'ont cependant
rien de commun avec ceux qu'exhale nne foret lorsqu'on coupe les arbres, et
que le soleil échauSe une couche épaisse de feuilles mortes: près de Cariaco, le
pays est nu et peu boisé. Doit~nsupposer que-le terreau, franchement remué et
humecté par les pluies, altère et ~ieie plas4'atmosphère que cette bourre
épaisse d'herbes qui couvreun sol non labourée A cescauses locales joignent
se
d'autres causes moins problématiques. Les bords voisins de la mer sont couverts

S: cette action est nuisible, elle n'eat


certainement pas restreintece procédé de ~o~Ma~ot. qoe
j'ai constaté par de nombreuses expénence* sur l'humus et les, terres (carburées) d'une `
couleur foncée.
C'est peut-être simultanément et à l'occasionde cette absorptîem d~sgene,
que te fermenta par le jeu
comptiqné des affinités, les combinaisons gMeaMs délétère!) a bafe double
ou tripte.
de Mangliers, d'Avicennia et
d'autres arbrisseaux à écorce astringente. Tous les
habitans des tropiques connoissentles exhalaisons malfaisantes de ces végétaux,
et on les craint d'autant plus, que leurs racines et leur pied ne sont pas toujours
sous l'eau, mais alternativement mouilles ou exposés à l'ardeur du soleil. Les
Mangliers produisent des miasmes, parce qu'ils renferment, comme je l'ai fait
observer ailleurs, de la matière végéto-animale, combinée avec du tannin. On
assure qu'il ne seroit pas difficile d'élargir le canal par lequel la Laguna de
Campoma communique avec la mer, et de donner par~là de l'issue aux eaux
croupissantes.Les Nègres libres, qui visitent fréquemment ce'terrain marécageux,
affirment même que cette saignée n'auroit guère besoin d'être profonde, parce
que les eaux froides et limpides du Rio Azul se trouvent placées au fond du lac,
et qu'en puisant dans les couches inférieures, on trouve de l'eau potable et sans
odeur.
La ville de Cariaco a été saccagée jadis plusieurs fois par les Caribes: sa
population a augmenté rapidement depuis que les autorités provinciales, malgré
les ordres prohibitifs de la cour de Madrid, ont souvent favorisé le commerce
avec les colonies étrangères. Elle a doublé en dix ans, et elle étoit, en 1800, de
plus de 6000 âmes. Les habitans s'adonnent avec beaucoup de zèle à la
culture du coton, qui est d'une très-belle qualité, et dont le produit excède
ï o~ooo quintaux On brûle avec soin les gousses du cotonnier, dont la laine
a été séparée. Jetées à la rivière et soumises à la putréfaction, ces gousses donnent
des émanations que l'on croit très-nuisibles. La culture du Cacaoyer a beaucoup
diminué dans ces derniers temps. Cet arbre précieux ne rend qu'après huit ou
dix ans. Son fruit se conserve très-mal dans les magasins, et il je /M<yMe au

Les créoles comprennent les deux genres RhiMphora et Aviceunia, sous le nom de 3~&, en les
distinguant par les adjectifs co&)ra<&) et prieto. Voici le catalogue des plantes ~orM~M qui couvrent ces
plages sablonneuses du littoral, et qui caractérisent la végétation de Cumana et du golfe de Cariaco
Rhizophora Mangte, Avicennia nitida, Gomphrena flava, G. &nM-&M<a',Sesuvium portutaoastrum(~MMo),
Talinum cuspidatum (~tcAo), T. cnmanense, Fortniacapt&Ma (&~oM),P. tanuginosa, Illecebrum
maritimum, Atriplex crM<<t<tt, Hehotropinm viride, H. latifolit4m, Verbena cuneata, MoHago verticillata,
Euphorbia maritima, Convolvulus otH)M'Mn<M. Ces tableaux de la végétation ont été formés sur les lieux,
en indiquant dans un journal, par des nombres, les plantes de nos herbiers que nous avons déterminées
plus tard. Je pense que cette méthode peut être recommandée aux voyageurs elle contribue à faire
connoitre l'aspect du pays sur lequel les catalogues, désignés sous le nom vague de 7'ïore< ne nous
instruisent que très-imparfaitement,
parce qu'ils embrassent tous les genres de terrains à la fois.
Aottf..E~p.,Tom. Iï, p. ~45. L'exportation du coton s'étevoit, en t8oo, dans les deux provinces de
Cumana et de Barcelone, à i8,ooo quintaux, dont le port de Cariaco seul fournissoit six à sept mille;
en 1793, l'exportation totale n'étoit que de 390o. Le prix moyen du quintal est de 8 à to piastres.
bout d'un an, malgré toutes les précautions qu'on a employées pour le
sécher. Ce désavantage est très-grand pour le colon. Sur ces cotes, selon te
caprice d'un ministère, et la résistance plus ou moins courageuse des gouverneurs,
le commerce avec les neutres est tantôt prohibé, tantôt permis sous de certaines
restrictions. Les demandes d'une même marchandise et les prix qui sont réglés
par la fréquence de ces demandes, subissent par conséquent les variations les
plus brusques. Le colon ne peut profiter de ces variations, parce que le cacao
ne se conserve pas dans les magasins. Ainsi les vieux troncs de Cacaoyers, qui
ne portent généralement que jusqu'à l'âge de quarante ans, n'ont point été
remplacés. En 1792, on en comptoit encore. 254,ooo dans la vallée de Cariaco
et sur les bords du golfe. Aujourd'hui l'on préfère d'autres branches de culture,
celles qui rendent dès la première année, et dont le produit moins tardif est
d'une conservation moins incertaine. Tels sont le coton et le sucre qui, sans
être sujets à la corruption comme le cacao, peuvent être -conservés pour tirer
parti de toutes. les chances de la vente. Les changemens que la civilisation et
les relations avec les étrangers ont introduits dans Tes mœurs et le caractère des
habitans de la. côte, ontInnué sur ta préférence marquée qu'ils accordent aux
diverses branches d'agriculture. Cette modération dans tes désirs, cette patience
qui résiste à une longue attente, ce calme qui fait supporter la triste monotonie
de la solitude, se perdent peu à peu dans le caractère des Espagnols-Américains.
Plus entreprenans, plus légers et plus mobiles, ils préfèrent des entreprises dont
le résultat est plus prompt.
Ce n'est que dans l'Intérieur de la province, à l'est de la Sierra de Meapire,
dans ce pays inculte qui s'étend de Carupano par la vallée de San Bonifacio
vers le got(e de Paria, que l'on voit naître de nouvelles plantations de Cacaoyers.
Elles y deviennent d'autant plus productives, que les terres récemment
détrichées et entourées de forêts sont en contact avec un air plus humide, plus
stagnant et plus chargé d'émanations méphitiques. C'est là que l'on voit des
pères de famille, attachés aux anciennes habitudes des colons, préparer à eux
et à leurs enfans une fortune tardive, mais assurée. Un seul esclave leur sumt
pour les aider dans leurs pénibles travaux. Ils défrichent de leurs mains le sol,
étevent de jeunes Cacaoyers à l'ombre de l'Erythrina
ou des Bananiers,
ébranchent l'arbre adulte, détruisent cet essaim de vers et d'insectes qui
attaquent l'écorce, les feuilles et les fleurs, creusent des rigoles, et se résolvent
à mener une vie misérable pendant l'espace de sept ou huit ans, jusqu'à
ce que
le Cacaoyer commence à donner des récoltes. Trente mille pieds assurent de
CHAPITRE VIII.
4~'
l'aisance à une famille pour une génération et demie. Si là culture du coton
et du café a fait diminuer cette du cacao dans la province de Caracas et dans
la petite vallée de Cariaco, il faut convenir que cette dernière branche de
l'industrie coloniale a en général augmenté dans l'intérieur des provinces de
Nueva-Barcelona et de Cumana Les causes de cette marche progressive des
Cacaoyères de l'ouest à l'est sont faciles à concevoir. La province de Caracas
est la plus anciennement cultivée or, à mesure qu'un pays est défriché plus
long-temps, il devient, sous la zone torride, plus dénué d'arbres, plus sec
plus exposé aux vents. Ces changemensphysiques sont contraires à la production
du cacao; aussi les plantations, en diminuant dans la province de Caracas,
s'accumulent, pour ainsi dire, vers l'est, sur un sol vierge et nouvellement
défriché. La Nouvelle-Andalousie seule a produit, à l'époque de 1799, dix-huit
à vingt mille fanègues de cacao (à 40 piastres la fanègue en temps de paix),
dont cinq mille étoient exportés par contrebande à l'île de la Trinité. Le
cacao de Cumana est infiniment supérieur à ~elal de Guayaquil. La meilleure
qualité est due aux vallées de San Bonifacio, comme les meilleurs cacao de la
Nouvelle-Barcelone~ de Caracas et de Guatimala sont ceux de Capiriqual,
d'Uritucu et de Soconusco.
Nous eûmes à regretter que les nèvres 'qui régnoient à Cariaco nous empé-
chassent d'y prolonger notre séjour. Comme nous n'étions point encore
suffisamment acclimatés, les colons même, pour lesquels nous avions des
recommandations, nous engageoient à partir. Nous trouvâmes dans cette ville
un grand nombre de personnes qui, par une certaine aisance dans les manières,
une plus grande étendue dans les idées, je dois ajouter par une prédilection
marquée pour les gouvememens des Etats Unis, annonçoient avoir eu de
fréquens rapports avec l'étranger. C'est pour la première fois, dans ces climats,
que nous entendfmes prononcer, avec enthousiasme, les noms de Francklin
et de Washington. Aux expressions de cet enthousiasme se mélolent des
plaintes sur l'état actuel de la Nouvelle-Andalousie, l'énumération souvent

Informe del Tesorero Don Manuet Navarete, sobre el proyectado estanoo de aguardiente de cana,
t~oa (~f<tntMcn'<).
Les endroits où la culture est la plus abondante, sont tes vallées de Rio Carives, Carupano,
Irapa, célèbre par ses eaux thermales, Chagttarama, Cumacatar, Caratar, Santa Rosalia, San Boni-
facio, Rio Seco, Santa Isabela, Patpeutal. En t~a, on ne comptoit encore dans tout ce terrain
que
4a8,ooo Cacaoyers. En 1709, it y en avoit, d'après des renseignemens officiels que je me suis procurés,
près d'un million et demi. La fanègue de cacao pèse no livres.
exagérée de ses richesses naturelles, des voeux ardems ed, inquiets pour un
avenir plus heureux., Cette disposition des esprits devoit frapper un voyageur
qui venoit de voir de près les grandes agitations de l'Europe: elle n'annonçoit
encore rien d'hostile et de violent, aucune direction déterminée. H y ayoit ce
vague dans les idées et les expressions, qui caractérise, chez les peuples comme
chez les individus, un état de demi-culture, un développementprématuré de la
civilisation. Depuis que l'ile de la Trinité est devenue une colonie angloise,
toute l'extrémité orientale de la province de Cumana surtout la côte de Paria
et le golfe de ce nom, ont changé de face. Des étrangers s'y sont établis ils
ont introduit la culture du eafier, du cotonnier et de la canne à sucre d'Otaheiti.
La population a extrêmement augmenté à Carupano, dans la belle vallée de
Rio-Caribe, Guire et au nouveau bourg de Punta de Piedra, placé vis-à-vis
du port d'Espagne de la Trinidad. Le sol est si fertile dans le Golfb triste;i
que le maïs y donne deux récoltes par an et produit 38o fois la semence'.
L'isolement des établ-issemens a favorisé le commerce avec les colonies étrangères
et, dès l'année ~797, il s'est fait une révolution dans les 4dées, dont les suites
ne seroient de long-temps devenuesfunestes pour la métropole,si le ministère
n'avoit continué à froisser tous les intérêts, à contrarier tous )es vœux. Il est
un moment, dans les rixes des colonies comme dans presque toutes les
commotions populaires, ou les gouvernémens, lorsqu'ils ne sont point aveuglés
sur le cours des choses humaines, peuvent, par une modération sage et
prévoyante rétablir l'équilibre et conjurer l'orage. Si ce moment leur échappe,
s'ils croient pouvoir combattre par une force physique une tendance morale,
alors tes événemens ae développent irrésistiblement ,etla séparation des colonies
s'effectue avec une violence, d'autant plus funeste; que la métropole, pendant
la lutte, est parvenue à rétablir, pour quelque temps, ses monopoles et son
ancienne dominatioq.
Nous nous embarquâmes de grand matin, dans l'espoir de faire en un jour la
traversée du golfe de Cariaco. 'Le mouvement de ses eaux ressemble à celui
de nos grands lacs, lorsqu'ils sont doucement agités par les vents. Il n'y
a
que,douze lieues marines de l'embarcadère à Cumana. En sortant de la petite
ville de Cariaco nous côtoyâmes vers l'ouest la rivière de Carenicuar, qui
alignée comme un canal artificiel, se fraie un chemin entre des jardins et
des plantations de cotonniers. Tout ce terrain, un peu marécageux, est cultivé

Un almuda donne, dans le Go~o triste, ga, à Cariaco, a5 /a!Mga<.


avec k jp!~ ~nd soin. Pendant notre séjour au Pérou, on y a mtrodtntdans
les en~JMîts plus%ecs la culture du caner. Nous v~mes les J~mes indien
le lo~fg de ta rivière de Cariaco, tayer leur linge avec le fruit du ~na~~ya
( Sapindus saponaria ). On prétend que cette at~,eopération est très nuisible
aux
tissus 6ns. L'écprce de ce ~it donn~ beaitcoup~d~~ et le ~It est
tellement élastique que, jeté sur une pierre il bondit trois ou quatre fois à
7 ou 8 pieds de hauteur. Gomme il est d'un
forme sphérique, on l'emploie
à faire des chapelets.
A peine embarques, n~ous eûmes a lutter contte des vents contraires. Il pleuvoit
à verse, et le tonnerre grondoit de près. Des essaims de FIamingos, d'Aig~ttes
et de Cormorans remp!isso!ent l'air en cherchant le rivage. L'Alcatras, grande
espèce de Pélican, continuoit seul paisiblement sa pèche au milieu du golfe.
Nous étions ï8 passagers, et nous eûmes de la peine à placer nos instrumens
et nos collections dans une pirogue' étroite, surchargée de sucre brut, de
régimes de bananes et de noix de cocos. Le bord du bateau étoit à fleur d'eau.
Le golfe de Cariaco a presque partout ~? à ?b Tarasses de profondeur; mais,
à son extrémité orientales, près de Curaguaca, sur une étendue de 5 lieues, la
sonde n'indique pas plus de 3 à 4 brasses. C'est là que se trouve le baxo de la
Cb~MC, banc à fond de sable, qui, à la marée basse, se découvre comme un
îlot. Les pirogues qui portent des vivres à Cumana, y échouent quelquefois,
mais toujours sans danger, parce que la mer n'y est jamais grosse ou ctapoteuse.
Nous traversâmes cette partie du golfe où des sources chaudes jaillissent du
fond de la mer. C'étoit le moment du flot, de sorte que le changement de la
température étoit moins sensible. Aussi notre pirogue dérivoit trop vers la côte
méridionale. On conçoit que l'on doit trouver des couches d'eau de température
différente', selon que le fond de la mer est plus ou moins bas, ou selon que
les courans et les vents accélèrent le mélange des eaux thermales avec celles du
golfe. C'est un phénomène' bien remarquable que l'existence de ces sources
chaudes qui élèvent, à ce que l'on assure, la température de la mer sur une
étendue de dix à douze mille toises carrées. Lorsqu'on se dirige du promontoire
de Paria vers l'ouest, par ïrapa,Aguascalientes,le golfe de Cariaco, leBergantin

ZattcAa. 1
~nr !a grève.
*A t'Me de la Guadeloupe, il y a une fontaine louillante qui jaillit ( LescaUer dans le
fA~
7ot<m. <<e tom. LXVII, p. 379. ) Des sources d'eau chaudes sortent du fond de la mer dans le golfe
de Naples, et, près de l'!te Palma dans l'archipel des Canaries.
et les vallées dAragua, jusqu'aux montagnes neigeuses de Merida, on trouve
sur plus, de i5o lieues de longueur une bande continue d'eaux thermales.
Le vent contraire et le temps pluvieux nous forcèrentde relâcher a Pericantra!,
petite fermesituée sur la côte méridionale du golfe. Toute cette côte, converte
d'une belle végétation, est presque dénuée de culture: on y compte à peine
~oo habitans et, à l'exception du village de Mariguitar', on n'y rencontre que
des plantations de cocotiers, qui sont les oliviers du pays. Ce palmier occuper
dans les deux continens, une zone dont la température moyenne de l'année
n'est pas au-dessous de ao°. H est, comme le Chamcerops du bassin de la
Méditerranée, un véritable Palmier du .littoral. H préfère l'eau salée à l'eau
douce; il vient mmns bien dans l'intérieur des terres, où l'air n'est pas chargé
de particules saunes, que sur les côtes. Lorsque, à la Terre-Ferme ou dans les
missions de t'Orénoque, on plante des cocotiers loin de la mer, on jette une
quantité considérable, jusqu'à an demi-boisseau de sel, dans le trou qui reçoit
les noix de cocos. !1 n'y a, ~armi les plantes cultivées par l'homme, que la
canne à sucre; le bananier, 1 Mammei et l'Avocatier qui aient la propriété
du Cocotier, de pouvoir être é paiement arrosés d'eau douce et d'eau salée. Cette
circonstance favorise leurs migrations; et si la canne à sucre du littoral donne
un vezou un peu saumâtre, il est aussi, à ce que l'on croit, plus propre à !a
distillation des eaux-de-vie, que le vezou produit dans l'intérieur desterres.
Le Cocotier, dans le reste de FAmérIque, n'est généralement cultivé qu'autour
des fermes, pour en manger le fruit. Dans le golfe de Cariaco, il forme de
véritablesplantations. On parle à Cumana d'une hacienda de coco, comme d'une
hacienda de cana ou de cacao. Dans un terrain fertile et humide, le Cocotier
commence à porter abondammentdu fruit la quatrième année mais, dans les
terrains arides, les récoltes ne s'obtiennent qu'au bout de dix ans. La durée de
l'arbre n'excède généralement pas 80 à 100 ans; sa hauteur moyenne, à cette
époque, est de 70 à 8o pieds. Ce développement rapide est d'autant plus
remarquable, que d'autres palmiers, par exemple le Moriche 3 et la Palma de

'~Adas géographique de l'ouvrage de Raynal indique, entre Cumana et Cariaco nm bourg appelé
~mM qui n'a jamais existé. Lea oartea les plus récentes de l'À!nét-iqtie sont enrcbargées de
noms de
lieux, de rivières et de montagnes, sans que l'on puisse deviner seulement la
source de ces erreurs qui
se propagent de siècle en siècle.
Le cocotier végète dans l'hémisphère boréal, depuis t'éqmtear jusqu'à 28° de latitude,
Près de
t'équateur,it s'élève, depuis les plaines jusqu'à ta hauteurde 700 toises, au-dessus du niveau de la
Mauritia ûexuosa. mer.
Sombrero dont !a longévité est très-grande, n'ont souvent encore atteint que
à t8 pieds à t'~ge de 60 ans. Bans Ï~s premières 3oà~o années, un Cocotier
du golfe de Cariaco porte, toutes lé~lunatsons, un régime -de ï0-t~ fruits, qui
ne parviennent cependant pas tous à lamatunté. On peut compter~~ terme
moyen un arbre fournit annueHementtCentc~cos, dont on retire huit~Me<M'a
d'huile. Le~ajeo se vend pour deux r~uxetdemi~de ou
3a sous. En
Provence, un olivier de 3oans donne a6 livres ou sept fiascos d*buiÏe, de sorte
qu'il en produit un peu moins qu'un cocotier, Il existe, dans le golfe de Cariaco
1
des AocMn<~<M de huit à neuf millejCocotiers elles rappeHent~ par leur aspect
pittoresque, ces belles plantations de Dattiers, près d'Elche, en Murcie, où, sur
une lieue carrée, on trouve plus de ~o,oob palmiers réunis. Le Cocotier ne
continue à porter abondamment du fruit que jusqu'à l'âge de 3o à ~o ans .·
passé cet âge, les récoltes'diminuent, et un vieux tronc de 100 ans, sans être
absolument stérile, est cependant de bien peu de rapport. C'est dans la ville de
Cumana que se fabrique une grande quantité d'huile de Cocos, qui est limpide;
sans odeur, et très-propre à l'éclairage. Le commerce de cette huile est aussi actif
que l'est sur les côtes occidentalesde l'Afrique le commerce de l'huile de yoZ/nc
tirée de l'Elays guineensis.Cette dernière est employée comme aliment. A Cumana,
j'ai vu souvent arriver des pirogues chargées de 3ooo fruits de Cocotier. Un arbre
en bon rapport donne un revenu annuel de deux piastres et demie ( t liv. 5 s.
mais comme, dans les haciendas de coco, des troncs d âges différens se trouvent
mêlés, on n'en évalue~ le capital, dans les estimations par experts, qu'à quatre
piastres.
Nous ne quittâmes la ferme de Pericantral qu'après le coucher du soleil. La
côte méridionale du golfe. ornée d'une riche végétation, offre l'aspect le plus
riant, tandis que la côte septentrionale est nue, rocheuse et aride. Malgré cette

CoryptMt <ee<t!ntm. Voy. nos 2V«f. Gt-n. << ~<eo., tome ï p. agf) de l'édition !n-4.°.
Ua~Mco a 70-80 poacet cttoeKt~piect de PAnt.
Ces évatuations peuvent jeter quelque jour sur les avantagesque l'on tire de la culture des arbres frai-
tiers sous la zone torride. Près de Cumana on évalue dans une estimation par experts, un pied de bananier
à un réat de ptata (t3 sous) un ~Vtf~ero ou <!apotHMer, à 10 piastres. On vend pour un demi-réal quatre
noix de cocos et huitfruits de N!spero(Aiehras Sapota). Le prix des premiers a douMé depuis vingt
ans à
cause de la grande exportation que t'en eh fait pour les îles. Un Nisperode bon rapport donne an fermier
qui peut vendre le fruit dans une ville voisine, près de 8 piastres par an; un pied de Bixa et un Grenadier
ne donnent que i piastre. Le Grenadier est très-recherchéà cause du suc rafraîchissant de ses fruits, que
l'on pré&re à ceux des Passiflores ou ~*«rcA<M.
aridité et !e manque de pluie que l'on ressent quelquefois pendant quinze mois,e
la péninsuled'Araya (semblable au désertdeCanound dans l'tnde) produit des
Patillas ou melons d'eau, qui pèsent de 5o à 70 livres. Sous la zone torride,
les vapeurs que l'air contientforment environ les de la quantité nécessaire à
sa saturation, et la végétation se soutier par
l'admirable propriété qu'ont les
feuilles de pomper l'eau dissoute dans~ l'atmosphère. Nous passâmes une nuit
assez mauvaise dans une pirogue étroite et surchargée, et nous arrivâmes, à
5 heures du matin, à l'embouchure du Rio-Mançanares. Accoutumés, depuis
plusieurs semaines, à l'aspect des montagnes, à un ciel orageux et à de sombres
forets, nous fûmes frappés de cette pureté invariable de l'air, de cette nudité
du sol, de cette masse de lumière réfléchie qui caractérise le site de Cumana.
Au soleil levant, nous vîmes les vautours ~aMM~w par bandes de 40 à 5o
perchés sur les Cocotiers. Ces oiseaux se rangent par files, pour dormir ensemble
à la .manière des gallinacées, et leur paresse est telle, qu'Us se couchent bien
avant le soleil, et qu'ils s'éveillent seulement lorsque le disque de cet astre est
déjà sur l'horizon. On diroit que cette paresse est partagée dans ces climats' par
les arbres à feuilles pennées. Les Mimoses, et les Tamarins ferment leurs feuilles,
par un ciel serein, 25 à 55 minutes avant le coucher du soleil ils les ouvrent
le matin, lorsque son disque a été visible, pendant le même espace de temps.
Comme j'observois assez régulièrement le lever et le coucher du soleil pour suivre
le jeu du mirage ou des réfractions terrestres, j'ai pu donner une attention suivie
aux phénomènes du sommeil des plantes. Je les ai trouvés les mêmes dans les
steppes, là où aucune inégalité de terrain n intercepte la vue de l'horizon. Il
paroît qu'accoutumées pendant la journée à une extrême vivacité de lumière,
les sensitives et d'autres légumineuses à feuilles minces et délicates se ressentent
le soir du'plus petit affoiblissement dans l'intensité des rayons; de sorte que la
nuit commence pour ces végétaux, là comme jOhez nous~ avant la disparition

Les pluies paroissent avoir été plus fréquentes au


commencement du se!zteme eiecte. Du moins le
chanoine de Grenade, JPe<ff« Martyr tf-~n~AMM (de reb. Ocean. Cotonue, ) 5y4, ~5), en partant des
p.
salines d'Araya ou d'.RitnH<t, que nonjt avons décrites dan~te 5.' chapitre, fait mention d'averses
(c<t~!i'<t<M t/ntte~), comme d'un phénomène très-commun. Le même auteur, qui mourut
en tSa6(C<MC<t-
Rert, ~Vo<HMdi Co~B~p, p. a ta), afSrme que lea salinesfurent exploitées par les Indiens avant l'arrivée
des Espagnols. On sécha le sel en forme de briques, et Petrus Martyr discute même déjà !a question
géologique, si le terrain mrgUeux d'Haraia renferme des sources salées, ou s'il été enrichi de set
a
pendant des siècles, par les inondations périodiques de l'Océan.
totaÏe dttdisque solaire. Mais ppufqupi, sons âne Mne o& it n'y a pt'esqne pas
de crepasca~BSj~remietsrayons de fastre~n~ stiJD~neï-iJs;pa.s:'Iesfeuinesavèc
d'autant pïn~ de torce que Fabsemee de ~~tlumière a dA les.rendre plus irritables?S
Peu~trefh~iditedëpo~s~tepaM~hy~refroidissemèutdes fenilles~
qai est t'eHet du rayoNnente~t noct~t~ë~emp~che~-eUe l'action des pfemlers
rayotM du soteit? Oaas nos
cUMats~ â euilles irritables s'éveillent
d~à avant l'apparition de yastte, pe~damtle ccepasc)ule du matin.
CHAPITRE IX
CONSTITUTION' PHYSIQUE ET MOËURSDESCKAYMAS.Ï.EUB8Ï.ANGUES.–F!UATïON DES
PEUPLES QUI' BABItENT LA NOUVELLE-ANDALOCStE.–PABtAGOTES
VUS PAR COLOMB.

JE n'ai point voulu mêler


au récit de notre voyage dans les missions de Caripe,
des considérations générales sur les différentes tribus d'indigènes qui habitent la
Nouvelle-Andalousie, sur leurs mœurs, leur langage et leur origine commune.
Retourné au lieu dont nous étions partis, je vais placer sous un même point de
vue des objets qui touchent de si près à l'histoire du genre humain. A mesure
que nous avancerons dans l'intérieur des terres, cet intérêt remportera sur celui
des phénomènes du monde physique. La partie nord-est de l'Amérique équi-
noxiale, la Terre-Ferme et les rives de 1 Orénoque, ressemblent, sous le rapport
de la multiplicité des peuples qui les habitent, aux gorges du Caucase, aux
montagnes de l'Hindou-Klio, à l'extrémité septentrionale de l'Asie, au-delà des
Tungouses, et des Tartares stationnés à l'embouchure du Lena. La barbarie qui
règne dans ces diverses régions, est peut-être moins due à une absence primitive
de toute civilisation qu'aux effets d'un long abrutissement. La plupart des hordes
que nous désignons sous le nom de sauvages, descendent probablement de nations
jadis plus avancées dans la culture et comment distinguer l'enfance prolongée
de l'espèce humaine (si toutefois elle existe quelque,part }, de cet état de dégra-
dation morale dans lequel l'isolement, la misère, des migrations forcées, ou les
rigueurs du climat, effacent jusqu'aux traces de la civilisation ? Si tout ce qui
tient à t'état primitif de l'homme et à la première population d'un continent
pouvoit être, par sa nature, du domaine de l'histoire, nous en appellerions
aux
traditions de l'Inde, à cette opinion si souvent exprimée dans les lois de Menou
et dans le Ramajan, qui considère les sauvages comme des tribus bannies de
la société civile et rejetées dans les forêts.* Le mot barbare, que
nous avons
emprunté des Grecs et des Romains, n'est peut-être
que le nom propre d'une de
ces hordes abruties

a[!emand),t8t6,p.i~.
11;,
LesVarvaras,!MPaMawa9,tesSatm,!esJawanasJesKamhodschas, les Tsch.aM.
pad., p. 3io..Bc~, ~<eme grammatical du sanscrit, du grec, du
/<M, Hixo-
latin et du ~At?Me (en
Dans le Nouveau-Monde, au commencement de la conquête, les mdtgènes ne
se trouvoient reBnis en grandes sociétés que sur le dos des CordIHères et sur
les côtes opposées à l'Asie. Les plaines~ couvertes de forêts et entrecoupées de
rivières, les savanes Immenses quÏ s'étendent vers l'est et bornent l'horizon,
enrôlent à l'œil du spectateur des peuplades errantes, séparées par la différence
du langage et de~ mœurs, éparses comnte les débris d'un vaste naufrage. Nous
essaierons si, dans l'absence de tout autre monument, l'analogie des langues et
l'étude de la constitution physique de l'homme peuvent nous aider à grouper
les différentes tribus, à suivre les traces de leurs migrations lointaines, et à
retrouverquelques-unsde ces traits de famille par lesquels se manifeste l'antique
unité de notre espèce.
Les naturels ou habitansprimitifsfont encore, dans le pays dont nous venons
de parcourir les montagnes, dans les deux provinces de Cumana et de Nueva-
Barcelona, près de la moitié de la foible population de ces contrées. Leur nombre
peut être évalué à 60,000, dont 24,000 habitent la Nouvelle-Andalousie. Ce
nombre est très-considérable, si on le compare à celui des peuples chasseurs de
l'Amérique septentrionale; il paroft petit, si l'on se rappelle les parties de la
Nouvelle-Espagneoù l'agriculture existe depuis plus de huit siècles, par exemple,
l'intendance d'Oaxaca, qui renferme la Mixteca et la Tzapoteca de l'ancien Empire
Mexicain. Cette intendance est d'un tiers plus petite que les deux provinces réunies
de Cumana et de Barcelone et cependant elle offre plus de ~00,000 indigènes,
de race pure cuivrée Les Indiens de Cumana ne vivent pas tous réunis
dans les missions: on en trouve qui so~ dispersés dans le voisinage des villes,
le long des côtes, où la pêche les attire, et jusque dans les petites fermes
des Llanos ou savanes. Les seules missions des Capucins Aragonois, que nous
avons visitées, renferment i5,ooo Indiens, presque tous de race Chaynjas.
Cependant les villages y sont moins peuplés que dans la province de Barcelone.
Leur populationmoyenne n'est que de cinq à six cents Indiens, tandis que, plus
à l'ouest, dans les missions des Franciscains de Piritu, on trouve des villages
indiens de deux à trois mille habitans. En évaluant à 60,000 lé nombre des
indigènes dans les provinces de Cumana et de Barcelone, je n'ai considéré que
ceux qui habitent la Terre-Ferme, et non les Guaiqueries de 1 Me de la Marguerite,
et la grande masse des Guaraunos, qui ont conservé leur indépendance dans les

L'<H*M des deux provinces est de 6100 lieues carrées, de 25 an degré.


Nouv. Eap. Tom. t, p. y y eta<)2.
nés formées parnar le Delta de l'Orénoque. seoMeoeB le nombre de.
l'Orénoaue. On estime généralement
ceux-ci à six ou,huit mille; mais cette évaluation me paroft exagérée. A l'exception
des familles Guaraunos qui rodent de temps en temps dans les terrains marécageux*
et couverts du Palmier Moriche (entre le Canote Manamo et le Rio Goarap~che),
par conséquent sur le continent même, il n'y a, depuis trente ans, plus d'Indiens
sauvages dans la Nouvelle-Andalousie.
J'emploie à regret le mot sauvage, parce qu'il Indique entre nndien réduit,
vivant dans les missions, et l'Indien libre ou indépendant, une dinérence de
culture qui est souvent démentie par l'observation. Dans les forets de l'Amé-
rique méridionale, il existe des tribus d'indigènes qui, paisiblement réunies
en villages, obéissent à des chefs*, cultivent, sur un terrain assez étendu,
des bananes, du manioc et du coton, et emploient ce dernier à tisser des
hamacs. Ils ne sont guère plus barbares que les Indiens nus des missions,
auxquels on a appris à faire le signe de la croix. C'est une erreur assez répandue
en Europe, que de regarder tous les indigènes non réduits, comme errans et
chasseurs. L'agriculture a existé sur la Terre-Ferme long-temps avant l'arrivée
des Européens elle existe encore entre t'Orénoque et l'Amazone, dans les
clairières des forêts, là où les missionnaires n'ont jamais pénétré. Ce que 1 on
doit au régime des missions, c'est d'avoir augmenté l'attachement à la propriété
foncière, ta stabilité des demeures, le goût pour une vie, plus douce et plus
paisible. Mais ces progrès sont lents, souvent même insensibles, à cause de
l'isolement absolu dans lequel on tient Jes Indiens, et c'est faire naître de fausses
idées sur l'état actuel des peuples de l'Amérique méridionale, que de prendre
pour synonymes les dénominations de chrétiens, réduits et civilisés, celles
de/MH<?7M, .MHcag<Met indépendans. L'Indien réduit est souvent aussi
peu
chrétien, que l'Indien indépendant est idolâtre; l'un et l'autre, occupés des
besoins du moment, montrent une indifférence prononcée pour les opinions
religieuses, et une tendance Secrète vers le culte de la nature et de ses forces.
Ce culte appartient à la première jeunesse des peuples; il exclut les idoles, et
ne
connott d'autres lieux sacrés que les grottes, les vaHons et les bois.
Si les Indiens indépendans ont à peu près disparu depuis
un siècle au nord
de 4'Orénoque et de l'Apure, c'est-à-dire depuis les montagnes neigeuses de
Merida jusqu'au promontoire de Paria, il ne faut
pas en conclure qu'il existe

7.M JtfoncAtt~et.
Ces chefs s'appellent .Pec<HM<t, ~o<o ou Sibierene.
aujourd'hui moins d'indigènes dans ces contrées que du temps de l'ëveqae de
Chiapa, Barthélémyde Las Casas. J'ai déjà prouvé, dans mon onvMge sur le
Mexique, combien on a eu tort de présenter, comme un fait général 1 la
destruction et la diminution des Indiens dans les colonies espagnoles. H en
existe encore de race cuivrée, dans les deux Amendes, plus de six millions;
et quoiqu'une innombrablequantité de tribus et de langues se soient éteintes
ou fondues ensemble, on ne sauroit révoquer en 'doute qu'entre les tropiques,
dans cette partie du Nouveau-Monde ou la civilisation n'a pénétré que depuis
Christophe Colomb, le nombre des indigènes n'ait considérablement augmenté.
Deux villages de Caribes, dans les missions de Piritu ou de Carony, renferment
plus de. familles que quatre ou cinq peuplades de FOrénoque. L'état de la vie
sociale des Caribes qui ont conservé leur indépendance, aux sources de
l'Esquibo et au sud des montagnes de Pacaraimo, prouve suffisamment combien
même, dans cette belle race d hommes, la population des missions remporte,
pour le nombre, sur celle des Caribes libres et confédérés. D'ailleurs, il n'en
est pas des sauvages de la zone torride comme des sauvage du Missouri. Ceux-ci
ont besoin d'une vaste étendue de pays, parce qu'ils ne vivent que de la
chasse les Indiens de la Guiane-Espagnole plantent du manioc et des bananes.
Un petit terrain suffit pour les nourrir. Ils ne craignent pas l'approche des
blancs comme les sauvages des Etats Unis, qui, poussés progressivement
derrière les A!éghan!s, l'Ohio et le MIssissipi, perdent leurs moyens de
subsistance à mesure qu'ils se trouvent resserrés dans des limites plus étroites.
Sous la zone tempérée, soit dans les~MWMCKM internas du Mexique, soit au
Kentucky, le contact avec les colons européens est devenu funeste aux indigènes,
parce que ce contact est immédiat.
Ces causes n'existent point dans la plus grande partie de l'Amérique méri-
dionale. L'agriculture, sous les tropiques, ne demande pas des terrains très-
étëndus. Les blancs avancent avec lenteur. Les ordres religieux ont fondé leurs
établissemens entre le domaine des colons et le territoire des Indiens libres.
Les missions peuvent être considérées comme des états intermédiaires elles
ont empiété, sans doute, sur la liberté des indigènes; mais presque partout
elles ont été utiles à l'accroissement de la population, qui est incompatible
des Indiens Indépendans. A
avec la vie inquiète mesure que les religieux

coea eofM<<m<e M-M a~nHMtyemtb por <<M&M partes el numero de <«< jTm&M. ( M~oo, ~Vb~eMe
~mef., t~a, p. 344.)
avancent vers les forets et gagnent sur les Indigènes, les colons blancs cherchent
à envahir à leur tour, et du côté opposa, !e territoire des missions. Dans 1 cette
lutte prolongée, le brassécùtler tend sans cesse ~soustraire tes Indiens réduits,a
à la hiérarchie monacale et les missionnaires sont remplacés peu & peu par
des curés. Les .blancs et'les castes desang meté, favorisés par tes Cb)hpg)M&)W~~
s'établissent au milieu des Indiens. Les missions deviennent des villages espa-
gnols, et les indigènes perdent jusqu'au souvenir de leur idiome natiônat.
TeUe est la marche de !a civilisation des côtes vers l'intérieur marche lente,
entravée par les passions des hommes, mais sure et uniforme.
Les ,provinces de la Nouvette-Andatousie et de Barcelone, comprises sous
le nom de govierno de Cumana, offrent, dans leur population actuelle, plus
de quatorze tribus dans la NouveUe-Andatousie, ce sont des Chaymas, des
Guaiquéries des Pariagotos des Quaquas, des Aruacas des Caribes et
des*Guarauaos dans la province de Barcelone, des Cumànagotes, des Paienques,
des Caribes, des Pintus,des Tomuzas, des Topocuares, des Chacopatas et
des Guarives. De ces quatorze tribus, neuf ou dix se regardent eues-mémes
comme de race entièrement différente. On ignore le nombre exact des
Guaraunos, qui font leurs cabanes sur les arbres, à l'embouchurede t'Orénoque;
celui des Guaiqueries, dans te faubourg de Cumanaet à la péninsule d'Araya,
s'élève à a,ooo. Parmi les autres tribus indiennes, les Chaymas des montagnes
de Carine les Caribes des savanes méridionales de Nueva-Barcelona,et les
Cumanagotos, dans les missions de Piritu, sont les plus nombreux. Quelques
familles de Guarannos ont été réduites en mission, sur la rive gauche de
t'Orénoque, là où~e Delta commence à se former. La tangue des Guaraunos,
celles des Caribes, des Cnmanagotos et des Chàymas, sont les plus répandues.
Nous verrons bientôt qu'elles semblent appartenir à une mém~ souche
et
qu'elles offrent, dans leurs formes grammaticales, de ces rapports intimes qui,
a
pour me servir d'une comparaison tirée de langues plus connues lient le grec,
l'allemand, le persan et le sanscrit.
Malgré ces rapports, on doit regarder comme des peuples diSerens, tes
Cbaymas les Guaraunos, les Caribes, les Quaquas, lès Aruacas ou Arawaques,
et les Cumanagotos. Je n'oserois affirmer là, même chase des Guaiqneries~ des
Pariagotos, des Piritus des Tomuzas et des Chaeopatas. Les Guaiqueries
con-
viennent eux-mêmes de l'analogie de leur langue
avec celle des Guaraunos. Les
uns et les autres sont une race littorale, comme les Malayes de l'ancien
continent. Quant aux tribus qui partent aujourd'hui les idiomes Cumanagotè,
Caribe etChayma~ il est dtinçile de pronpocer sur leur première origine et
sur leurs rapports avec d'autres peuples jadis plus pmssans. Les historiens de
confondent sans cesse a la manière des anciens, des ~MHKM~MMM g!
la conquête, de même que les religieux qui ont décrit les progrès des missions,

cAMMC~ avec des noms de race. ïls parlent d~tndiensde Cumana et de la côte
de Paria, comme si la proximité des demeures prouvoit une identité d'origine.
Le plus souvent même ils nomment des tribus d'après le nom de leurs chefs,
d'après celui de la montagne et du vallon qu'elles habitent. Cette circonstance,
en multipliant à l'innni le nombre des peuplades, rend incertain tout ce que
les religieux rapportent sur les étëmens hétérogènes dont se compose la
population de leurs missions. Comment décider aujourd'hui si le Tomuza et le
Piritu sont de race différente, lorsque tous les deux parlent la langue cumanogote,
qui est la langue dominante dans la partie occidentale du Govierno de Cumana,
comme le Caribe et le Chaymas le sont dans les -parties méridionale et orientale.
Une grande analogie de constitution physique rend ces recherches fort dluicites.
Tel est te contraste entre les deux continens, que, dans le nouveau, on observe,
une surprenante variété de langues parmi des nations qui sont d'une même
origine, et que le voyageur européen distingue à peine par leurs traits; tandis
que, dans l'ancien continent, des races d'hommes très-différentes, les Lapons,
les Finnois et les Esthoniens, les peuples germaniques et les Hindoux, les
Persans et les Kourdes, des tribus tartares et mongoles, parlent des langues dont
le mécanisme et les racines onrent les plus grandes analogies.
Les Indiens des missions américaines sont tous agriculteurs. A ~exception
de ceux qui habitent les hautes montagnes. ils cultivent les mêmes plantes
leurs cabanes sont rangées de la même manière; la distribution de leurs journées,
leurs travaux dans le conuco de la commune, leurs rapports avec le missionnaire
et les magistrats choisis dans leur sein, tout est soumis à des règles uniformes.
Cependant, et ce fait est très-remarquSbte dans l'histoire des peuples une si
grande analogie de position n'a pas sud pour eSacer les traits individuels les
nuances qui distinguent les différentes peuplades américaines. On observe dans
les hommes à teint cuivré une inflexibilité morale, une persévérance constante
dans les habitudes et les mceurs qui, modinées dans chaque tribu caractérisent
essentiellement la race entière. Ces dispositions se retrouvent sous tous les
climats, depuis l'équateur jusqu'à la baie d'Hudson et au détroit de Magettan
èllès tiennent à l'organisationphysique des naturels, mais elles sont puissamment
favorisées par le régime monacal.
H existe dans les missions peu de villages où les divefoea familles appar-
tiennent à dICérentes peuplades~et ne parlent pas la même langue. Des sociétés,
composées d'élémens si hétérogènes, sont difficiles à gouverner. Généralement
les religieux ont réuni des nations entières, ou de grandes portions d'une même
nation, dans des villages rapprochés les uns des autres. Les naturels, ne voient
que ceux de leur tribu; car te manque de communication et l'isolement sont
l'objet principal de la politique des missionnaires. Le Chaymas, le Garibe, le
Tamanaque réduits, conservent d'autant plus leur physionomienationale, qu'ils
ont conservé leurs langues. Si l'individualité de l'homme se reflète pour ainsi
dire dans les idiomes, ceux-ci, à leur tour, réagissent sur les idées et sur les
sentimens. C'est ce lien intime entre les langues, le caractère et la constitution
physique, qui maintient et perpétue la diversité des peuples, source féconde
de mouvement et de vie dans le monde intellectuel.
JLes missionnaires ont pu interdire à l'Indien de suivre certaines pratiques,
usitées à la naissance des enfans, à leur entrée dans l'âge de la puberté, à
l'enterrement des morts; ils ont pu les empêcher de se peindre la peau ou de
se faire des incisions au menton, au nez et aux joues; ils ont pu détruire, chez
la grande masse du peuple, ces idées superstitieuses qui se transmettent mysté-
rieusement, de père en fils, dans de certaines familles; mais il a été plus aisé
de proscrire des usages et d'effacer des souvenirs, que de substituer de nouvelles
idées aux idées anciennes. L'Indien des missions est plus sûr de sa subsistance.
N'étant pas dans une lutte continuelle avec des forces ennemies, avec les
élémens et les hommes, il mène une vie plus monotone, moins active, moins
propre à donnerdede l'énergie à l'âme, que l'Indien sauvage ou indépendant.
Il a la douceur caractère que donne l'amour du repos, non celle qui naft
de la sensibilité et des émotions de l'âme. L'étendue de ses i<tées n'a pas augmenté
là où, sans contact avec les blancs, il est resté éloigné dej objets dont la civi-
lisation européenne a enrichi le Nouveau-Monde. Toutes ses actions semblent
motivées par le besoin du moment. Taciturne, sans gaîté, replié sur lui-même,
il prend un air grave et mystérieux. Lorsqu'on a peu vécu dans les missions,
et qu'on n'est point encore familiarisé avec l'aspect des indigènes, on est tenté
de prendre leur indolence et l'engourdissement de leurs facultés pour l'expression
de la mélancolie et d'un penchant vers la méditation,
J'ai insisté sur ces traits du caractère indien et sur les diverses modifications que
ce caractère éprouve sous le régime des missionnaires, pour donner plus d'intérêt
aux observations partielles qui font l'objet de ce chapitre. Je commencerai par
la nation des Chaymas, dont plus de i5,ooo habitent les missions que nous
venons de décrira Cette nation, peu belliqueuse, que le P. Francisco de
Pamplona a commencé à réduire depuis Je milieu du dix-septième siècle, a les
Cnmanagotos à l'ouest, les Guaraunos à l'est, et les Caribes au sud. Elle
occupe, le long des hautes montagnes du Cocollar et du Guacharo, les rives du
Guarapiche, du Rio Colorado, de l'Areo et du Cano de Caripe. D'âpres un
relevé statistique, fait avec beaucoup 'de soin par le P. Préfet~, on comptoit,
en 1792, dans les missions des Capucins Aragonois de Cumana:
dix-neuf villages de missions, dont le plus ancien dè ~28; ils avoient
6433 habitans répartis en ï4~S familles;
seize villages de doctrina, dont le plus ancien de i66o; ils avoient
8170 habitans, répartis en t~66 familles 3.
Ces missions ont beaucoup souffert, en t68t, tôg~ et 1720, par les invasions
des Caribes, alors indépendans, qui brûtolent des villages entiers. Depuis ï~3o
jusqu'en !~36, la population a rétrogradé par les ravages de la petite vérole,
toujours plus funeste pour la race cuivrée que pour les blancs. Beaucoup de
Guaraunos qu'on avoit réunis, se sont enfuis pour retourner dans leurs marais.
Quatorze anciennes missions sont restées désertes ou n'ont point été reconstruites.
Les Chaymas sont généralementd'une petite taille; ils paroissent tels, surtout
lorsqu'on les compare, je ne dirai pas à leurs voisins, les Caribes, ou aux
Payaguas et Guayquilit4 du Paraguay, également remarquables par leur stature,
mais au commun des naturels de l'Amérique. La taille moyenne d'un Chaymas
est de i",57 ou 4 pieds io pouces; ils ont le corps trapu et ramassé, les épaules
extrêmement larges, la poitrine aplatie, tous les membres ronds et charnus.
LfUt couleur est celle qu'offre toute la race américaine depuis les plateaux froids
de Quito et de la Nouvelle-Grenade jusqu'aux plaines brûlantes de l'Amazone.
Elle ne change plus par l'influence variée des climats; elle tient à des dispositions

Le nom de ce religieux, connu par son act!ve intrenijité est encore réTéré dans la province. C'est
lui qui a répandu les premiers germes de la civilisation dans ces montagnes. 11 avoit été long-temps
capitaine de navire, et s'appeloit, avant d'ê tre moine, Tiburtio Redin.
Fray Francisco de Chiprana. (Mémoiremanuscrit.)
Terres cultivées (&t&rtMM<M), appartenant à
ces 35 viUages.: 6554 almudas. Le nombre des taches ne
s'étevoit.ent/Qa,qu'à i883 têtes.
La taille moyenne des Guayquilit ou Mbayas, qui vivent entre les 20" et aa° de latitude australe est,
d'après Azzara, de t°84 ou de 5 pieds 8 pouces. Les Payaguas, également élancés, ont donné leur nom au
Payaguay ou Paraguay.
organiques qut, depuis des siècles, se propagent InaItéraMement de généraMon
en génération. Si la teinte uniforme de la peau est plus cuivrée et plus rouge
vers !e nord, elle est, au contraire, chez les Chaymas, d'un brun obscur tirant
sur le tanné. La dénomination d'hommes ~OHgM-etwr~f n'auroit jamais pris
naissance dans l'Amérique équinoxiale, pour designer tes indigènes.
L'expression de ta physionomie du Chaymas, sans être dure ou farouche, a
quelque chose de grave et de sombre. Le front est petit et peu saillant aussi
dit-on, dans plusieurs langues de ces contrées, pour exprimer la beauté d'une
femme, qu'elle est grasse et qu'elle a un front étroit. Les yeux des Chaymas
sont noirs, enfoncés et très-alongés; Us ne sont ni placés aussi obliquement, ni
aussi petits que chez les peuples de race mongole, dont Jornandes dit naïvement
qu'ils ont plutôt des points que des yeux, magis ~Mnc~t <~M<Mt lumina.
Cependant le coin de l'oeit est sensiblement relevé par en haut vers les tempes;
les sourcils sont noirs ou d'un brun-foncé, minces et peu arqués; les paupières
sont garnies de cils très-longs, et l'habitude de les baisser, comme si elles étoient
appesantie~ par lassitude, adoucit le regard chez~ les~ femmes~ et fait paroftre
l'oeil voilé plus petit qu'il ne l'est effectivement. Si les Chaymas, et en général
tous les indigènes de l'Amérique méridionale et de la Nouvelle-Espagne, se
rapprochent de la race mongole parla forme des yeux, leurs pommettes saillantes,
leurs cheveux droits et plats, et par le manque presque absolu de barbe, ils en
différent essentiellement par la forme du nez, qui est assez long, proéminent
dans toute sa longueur, épaissi vers les narines, dont les ouverturessont dirigées
par en bas, comme chez les peuples de la race du Caucase. La bouche grande,
à lèvres larges, maistpeu saillantes, a souvent une expression de bonté. Le passage
du nez à la bouche est marqué, chez les deux sexes,'de deux sillons qui se dirigent,
en divergeant, des narines vers le coin de la bouche. Le menton est extrêmement
court et rond; les mâchoires sont remarquables par leur force et leur largeur.
Quoique les Chaymas aient les dents blanches et belles comme. tous les hommes
qui mènent une vie très-simple, elles sont cependant beaucoup moins fortes que
chez les Nègres. L'usage de se noircir les dents, dès l'âge de quinze ans,
par
l'emploi de quelques sucs d'herbes et de là chaux caustique, avoit attiré
1 attention des nremiers voyageurs il est aujourd'hui tout-à-fait inconnu. Telles

Les premiers historiens de la conquête attribuent cet eBet aux feuilles d'un arbre, que les indigènes
appeloient ~ty, et qui reasembloit au myrte. Parmi des peuples trë~étoignës les
une des autres, le piment
porte un nom semblable i chez les Haytiens (de l'ile Saint-Doanngue) <~t ou ahi; chez les Maypures de
ont été surtout depuis les
les migmtipns des diverses tribus dans ces contrées,
incursions des espagnols, qui faisoient la traite des esclaves qu'on peut
admettre que les habitans d~ Paria, Visites par Christophe Colomb et par Ojeda,
n'étoien);,pas de la même race que les Chaymas. Je doute fort que la coutume
de se noircir les dents ait été originairement liée, comme l'affirme Gomara',
à des idées bizarres sur J)a beauté, ou qu'elle ait eu pour but d'empêcher les
maux de dents. Ce mal est à peu près inconnu aux Indiens; les blancs mêmes en
souffrent très-rarement dans les colonies espagnoles, du moins dans les régions
chaudes où la température est si uniforme. Ils y sont plus exposés sur le dos des
Cordillères, à Santa-Fe et à Popayan.
Les Chaymas ont, comme presque toutes les nations indigènes que j'ai· vues,
les mains petites et peu larges. Leurs pieds sont grands, et les doigts du pied
conservent une mobilité extraordinaire. Tous les Chaymas ont un air de famille,
et cette analogie de forme, tant de fois observée par les voyageurs frappe
d'autant plus, qu'entre vingt et cinquante ans, l'âge ne s'annonce pas par les
rides de la peau, par la couleur des cheveux ou la décrépitude du corps. En
entrant dans une cabane, on a souvent de là peine, parmi les personnes adultes,
à distinguer le père du fils, à ne pas confondre une génération avec l'autre. Je
pense que cet air de famille tient à deux causes très-différentes, à la position
locale des peuplades indiennes, et au degré inférieur de leur culture intellectuelle.
Les nations sauvages se subdivisent en une infinité de tribus qui,
se portant une
haine cruelle les unes aux autres, ne s'allient pas entre elles, lors même
que leurs
langues remontent à une même souche, et qu'un petit bras de rivière
ou un
groupe de collines séparent seuls leurs habitations. Moins les tribus sont nom-
breuses, et plus les alliances, répétées depuis des siècles entre les mêmes familles,
tendent à fixer une certaine égalité de conformation, un type organique,
que

l'Orénoque.a-t. Des plantes stimulantes et aromatiques, qui n'appartiennentpas toutes


au genre Capsicum,
étoient désignées par un même nom.
Cap. 78, p. tôt. Les peuples qui se présentaient aux Espagnols
sur la côte de Paria, avoient sans
doute l'habitude de stimuler les organes du goût par de la chaux caustique,
comme d'autres le font par
le tabac, le Chimo, les feuittes du Cocca ou le Bétet. Cette habitude
se retrouve encore aujourd'hui
la même cote, maisplus a l'ouest, chez les Guajiros, à l'embouchure du Rio La Hacha. Ces Indiens, sur
restés
sauvages, portent de petitescoquittes calcinées et réduites en poudre dans un fruit qui leur sert de
vase
et qu'ils suspendent à ta ceinture. La poudre des Guajiros est un objet de commerce, t'étoit jadis,
comme
selon Gomara, celle des Indiens de Paria. En Europe, l'usage immodéré du tabac à fumer jaunit
et noircit
aussi les dents. Seroit-il juste de conclure de là que l'on fume chez
nous, parce que l'on trouve les dents
jaunes plus belles que les dents blanches?
l'on peut appeler national'. Ce type se conserve sous le régime des missions
formées par une seule peuplade. L'isolement est le même, les mariages ne se font
que parmi les habitans d'un même hameau. Ces liens du sang, qui unissent
presque toute une nation, sont Indiqués d'une manière naïve dans ie langage
des Indiens nés dans les missions ou par ceux qui, enlevés dans les bois, ont
appris l'espagnol. Pour désigner les individus qui appartiennent à la même
peuplade, ils emploient les mots mis parientes, mes parens.
A ces causes, qui ne tiennent qu'à l'isolement, et dont les effets se retrouvent
chez les Juifs de l'Europe, chez les-différentescastes de l'Inde et chez tous les
peuples montagnards en général, se lient d'autres causes plus négligées jusqu'ici.
J'ai déjà fait observer ailleurs que c'est la culture intellectuelle qui contribue le
plus à diversifier les traits. Les nations barbares ont plutôt une physionomie de
tribu ou de horde qu'une physionomie propre à tel on tel individu: Il en est
de l'homme sauvage et de l'homme cultivé comme de ces animaux de la même
espèce dont les. uns errent dans les forets, tandis que les autres, rapproches de
nous, participent, pour ainsi dire, aux bienfaits et aux maux qui accompagnent
la civilisation. Les variétés de forme et de couleur ne sont fréquentes que chez
les animaux domestiques. Quelle différence dans la mobilité des traits et la
diversité de physionomie entre les chiens-redevenus sauvages dans le Nouveau-
Monde, et ceux dont on soigne jusqu'aux moindres caprices, dans
une maison
opulente! Chez l'homme et les animaux, les mouvemens de l'âme se reflètent
dans les traits, et ces traits prennent d'autant plus l'habitude de la mobilité,
que
les émotions sont plus fréquentes, plus variées et plus durables. Or, l'Indien
des missions, éloigné de toute culture, guidé uniquement
par le besoin physique,
satisfaisant presque sans peine ses désirs, traîne, sous un climat heureux,
une
vie indolente et monotone. La plus grande égalité règne parmi les membres
d'une même commune, et c'est cette uniformité, c'est cette invariabilité de
position qui se peignent dans les traits des Indiens.
Sous le régime des moines, les passions violentes,
comme le ressentiment et
la colère, agitent l'indigène plus rarement
que lorsqu'il vit dans les forêts. Si
l'homme sauvage se livre -à des mouvemens brusques et Impétueux,
sa physio-
nomie, jusque-là calme et immobile, passe instantanément à des contorsions
convulsives. Son emportement est d'autant plus passager, qu'il est plus vif. Chez

Nullis a!s aliarum nationum connubus infecta, propria et sincera, et tantnm sui similM
gens, Unde
habitus quoque eorporum, quamquam in tanto bommam numéro, idem omnibtM. T~e. Germ.
c. 4.
l'Indien des missions, comme je Fat souvent observé à l'Orénoqne, la colère
est moins violente, moins franche, mais pins longue. Bailtenrs, dans toutes
les conditions de l'homme, de ne sont pas l'énergie ou le déchaînement éphémère
des passions qui donnent de l'expression aux traits, c'est plutôt cette sensibilité
de Famé qui nous met sans cesse en contact avec le monde extérieur, multiplie
nos souffrances et nos plaisirs, et réagit a la <bis sur la physionomie, les
moeurs et le langage. Si la variété et la mobilité des traits embellissent le domaine
de la nature animée, il faut convenir aussi que Tune et l'autre, sans être le
produit seul de la civilisation, augmentent avec elle. Dans la grande famille
des peuples, aucun autre ne réunit ces avantages à un plus haut degré. que
la race du Caucase ou Européenne. ~!e n'est que dans les hommes blancs que
peut avoir lieu cette pénétration instantanée du système dermoïde par le sang,
ce léger changement de couleur dans la peau qui ajoute si puissamment à
l'expression des mouvemens de l'âme. '< Comment se fier à ceux qui ne savent
pas rougir », dit l'Européen dans sa haineinvétéréecontrele Nègre et l'Indien?
On doit convenir d'ailleurs que cette immobilité des traits n'est pas propre à
toutes les races à teint très-basané elle est beaucoup moins grande chez l'Africain
que chez les indigènes de l'Amérique.
A ce tableau physique des Chaymas, nous ferons succéder quelques notions
sommaires sur leurs manières de vivre et sur leurs mœurs. Ignorant la langue de
ce peuple, je ne prétendrai point, après un séjour peu prolongé dans les missions,
avoir approfondi leur caractère. Chaque fois que je parlerai des Indiens, j'ajouterai
ce que nous avons appris des missionnaires, au peu que nous avons observé par
nous-mêmes.
Les Chaymas, comme tous les peuples à demi-sauvages qui habitent les régions
excessivement chaudes, ont une aversion prononcée pour les vêtemens. Les
écrivains du moyen âge nous apprennent que, dans le nord de l'Europe, les
chemises et les caleçons, distribués par les missionnaires, ont beaucoup contribué
à la conversion des païens. Sous la zone torride, au contraire, on voit les Indigènes
avoir honte, comme ils disent, d'être vêtus, et s'enfuir dans les bois, lorsqu'on
les force trop tôt de renoncer à leur nudité. Parmi les Chaymas, malgré les remon-
trances des moines, hommes et femmes restent nus dans l'intérieur de leurs
maisons. Lorsqu'ils traversent le village, ils portent une espèce de tunique de
toile de coton, qui descend à peine jusqu'au genou. Elle est munie de manches
chez les hommes; chez les femmes et les jeunes garçons, jusqu'à l'âge de dix à
douze ans, les bras, les épaules et le haut de la poitrine sont nus. La tunique
est
coupée de manière que la partie antérieure tient ocelle du dos par deux bandes
étroites qui reposent sur les épaules. En rencontrant tes naturels hors de la
mission, nous les vhnes~surtout par un temps de pluie, dépouillés de leurs
vétemens~tenant leur chemise roulée sous lebras. Ïlsaimoient mieux recevoir
la pluie sur le corps tout nu que de mouillerleurs vetemens. Les femmes les plus
vieu!es se cachoien~. derrière les arbres~ en jetant de grands éclatsde fipe lors-
qu'elles nous virent passer. Les missionnaire~ se plaignent en général que les
sentimens de décence et de pudeurne sont guère plus prononcés chez les jeunes
filles que chez les hommes. Déjà Ferdinand Colomb' raconte que son père trouva,
en 1498, à l'~le de la Trinité, les femmes entièrement nues, tandis que les
hommes portoient le guayuco, qui est plutôt une bandelette étroite qu'un tablier.
A cette même époque, sur la côte de Paria, les filles se distinguoient des femmes
mariées, ou, comme le prétend le cardinal Bembo2, par une nudité absolue,
ou, selon Gomara~, par la couleur du guayuco. Cette bandelette, que nous avons
trouvée encore en usage chez les Chaymas -et chez toutes les nations nues de
FOrénoque, n'a que a à 3 pouces de large, et s'attache de deux côtés à un cordon
qui ceint te mitieu du corps. Les ËUes se marient souvent à t'âge de douze ans:
jusqu'à celui de neuf ans, les missionnaires leur permettent d'aller nues, c'est-à-
dire sans tunique, à l'église. Je n'ai pas besoin de rappeler ici que, parmi les
Chaymas comme dans toutes les missions espagnoles et les villages indiens que
j'ai parcourus, un caleçon, des souliers ou un chapeau, sont des objets de luxe,
inconnus aux naturels. Un domestique qui nous avoit servi pendant notre voyage1
à Caripe et à l'Orénoque, et que j'ai amené en France, étoit tellement frappé,
en débarquant, de voir labourer la terre à un paysan qui portoit un chapeau,
qu'il se. croyoit « dans un pays misérable, où les nobles même (&M WMmoj
caballeros) suivent la charrue. M
Les femmes Chaymas ne sont pas jolies, d'après les idées
que nous attachons

Vie de l'Amiral, cap. 7) (Churchill's Collection, tyaS, Tome 11, pag. 586). Cette Vie rédigée, poaté-
rieurement t'année tSSy, d'après les notes autographes de Christophe Colomb, est le Monument le
plus précieux de l'histoire de.ees découvertes. Elle n'existe que dans les traductionsitaUenneteteBpa-
ghot-sd'AtfonsodeUlloa et de Goozalès Barcia
car l'originât porté, en tS~t.~ à Venise, par le savant
Fomari, n'a pas été publié ni retrouvé depuis. Napione della ~<Waatt Cb&.M&o, t8o4,
p. tog et aoS.,
Cance~<rt<t)pnt CArM<. Colombo, l8oj),p. tao.
~M la description étoquente de t'Aménque, dans l'histoire de Venise (livre XII) «Femina: virum
passa; nuUam partem, praiter mutiehria virgines ne iUam quidem tegebact. a
Las donzellas se conocen en el color y tamaBo det Corde), y traerlo asi, es senal cerths:ma de
~irg!nidad. ( Comoro, cap. y3 p. 06. )
à la beauté; cependant les jeunes filles ont quelque chose de doux et de triste
dans lé regard, qui contraste agréablement avec K'expression un peu dure et
réunis en deux longues tresses;
sauvage de la bouche. EMesportentÏescheveux
elles ne se peignent pas ia peau et neconhoissent d'autres ornemens, dans leur
extrente pauvreté, que des colliers et de& bracelets formés de coquilles, d'os
d'oiseaux et de graines. Hommes et femmes ont le corps très-musculeux, mais
charnu, à formes arrondies. Il est superflu d'ajouter que je n'ai vu aucun
individu qui ait une diubrmité naturelle; je dirois la même chose de tant de
milliers de Caribes, de Muyscas,d'!ndiens Mexicains et Péruviens, que nous
avons observés pendant cinq ans. Ces difformités du corps, ces déviations,, sont
infiniment rares dans de certaines races d'hommes, surtout chez les peuples qui
ont le système dermoïde fortement co!oré. Je ne puis croire qu'elles dépendent
uniquement du progrès de la civilisation, de la mollesse de la vie, de la cor-
ruption des moeurs. En Europe, une fille bossue ou très-Iaidc se marie si elle
a de la fortune, et les enfans héritent souvent de la difformité de la mère. Dans
l'état sauvage, qui est un état d'égalité, rien ne peut engager les hommes à s'unir
à une femme contrefaite ou d'une santé extrêmement foible. Si elle a eu le rare
bonheur de parvenir à l'âge adulte; si elle a résisté aux chances d'une vie inquiète
et agitée, elle meurt sans enfans. On seroit tenté de croire que les sauvages
paroissent tous bien faits et vigoureux, parce que les enfans foibles périssent en
bas âge, par manque de soin, et que les plus vigoureux survivent seuls; mais ces
mêmes causes ne peuvent agir chez l'Indien des missions, qui a les mœurs de nos
paysans, chez les Mexicains de Cholula et de Ttascàla, jouissant d'une richesse
qui leur a été transmise par des ancêtres plus civilisés qu'eux. Si, dans tous les
états de la culture~ la race cuivrée manifeste cette même inflexibilité, cette même
résistanceà la déviation d'un type primitif, ne sommes-nous pas forcés à admettre
que cette propriété tient en grande partie à l'organisation héréditaire, à celle qui
constitue la race? Je dis à dessein, en grande partie, pour ne pas exclure entière-
ment l'influence de la civilisation. D'ailleurs, chez les hommes cuivrés comme chez
les blancs, le luxe et la mollesse, en affoiblissant la constitution physique, avoient
rendu jadis les difformités plus communes au Couzcoet à Tenochtitlan. Ce
n'est point parmi les Mexicains d'aujourd'hui, tous laboureurs et vivant dans la
plus grande simplicité de moeurs, que Montezuma auroit trouvé les nains et
les bossus que Bernai Diaz vit assister à son diner

Bernai /M<M ~fM<. fer~. de la Nueva ~fpantt, t63o, cap. gt, p. 68.
La coutume de se marier très-jeune n'est, selon !e témoignage des religieux,
aucunement contraire à la population. Cette nubilité précoce tient à la race et
non à l'influence d'un climat excessivement chaud on la retrouve à la côte nord-
ouest de l'Amérique; chez lès Esquimaux, et en Asie, parmi les Kamtschadales et
les Korcekes, où des filles de dix ans sont souvent mères. On peut être étonné
que le temps de la gestation, la durée de la grossesse, ne soient jamais altérés
dans l'état de santé chez aucune race et sous aucun climat.
Les Chaymas&ont presque sans barbe au menton, comme les Tongouses et
d'autres peuplesde race mongole. Ils arrachent le peu de poils qui leur viennent;
mais H n'est pas juste de dire en général qu'ils n'ont pas de barbe, uniquement
parce qu'ils se l'arrachent. Indépendamment de cet usage, la majeure partie des
indigènes seroient encore à peu près Imberbes'. Je dis la majeure partie, car
il existe des peuplades qui, paroissant comme isolées parmi les autres, n'en sont
que plus dignes de fixer notre attention. Tels sont, dans l'Amérique du Nord,
les Chepewyans~, visités par Mackenzie, et les Yabipaïs~, près des ruines
Toltèques du Moqui, à barbe touffue; dans l'Amérique <ht sud, lex Patagons et
les Guaranys. Parmi ces derniers on trouve des individus qui ont du poil, même
sur la poitrine. Lorsque les Chaymas, au lieu de s'arracher le peu de barbe qu'ils
ont au menton, essaient de se raser fréquemment, la barbe leur pousse. ,J'ai vu
faire cette expérience avec succès à de jeunes Indiens qui servoient la
messe, et
qui désiroient vivement ressembler aux Pères Capucins, leurs missionnaires et
leurs maîtres. La grande masse du peuple conserve autant d'antipathie
pour la
barbe que les Orientaux l'ont en honneur.'Cette antipathie dérive d'une même
prédilection
source avec la pour les fronts aplati&, qui se manifeste d'une manière
si bizarre dans la représentation des divinités et des héros aztèques. Les peuples
attachent l'Idée de la beauté à tout ce qui caractérise particulièrement leur
con-
formation physique, leur physionomie nationale t Il
en résulte que si la nature

H n'y auroit jamais eu de dissentiment parmi les pbysMqgistes, sur


l'énonce de !a barbe chez les
Américains, si on avoit pesé ce que les premiers historiens de la découverte de t'Aménque avoient
écrit
sur, cette question; par exemple, Pigafetta, en i5ig, dans son ~.t<nM/, conserve la bibliothèque
Ambrosienne à Milan, et pubUé ( en t8oo ) par M. ~n~, p. t<t, Be~ JK«. dal
~VMom,l57a,p.35;~em&o,J?M<)te<t557,p.86.
Lat. 6o<65'' nord.
3 ~&m& Nouv. ~p., Tom. Il, p. 4io.
C'est ainsi que les Grecs e~géroient, dans leurs. plus belles
outre mesure la !:gneiac!ate.(G~<. comp. T. !p.6.<m.T~,p.
statues, la forme du front, en retenant
,58.)
leur a donné tr~-peu de barbe, un front étroit ou la peau Mage-brunâtre,
chaque individu se croit d'autant plus beau, qu'il a le corps plus dépourvu 'de
poils, la tête plus aplatie, la peau plus couverte de ~HCOM, de cAMM, ou de
quelque autre couleur rouge-cuivre.
La vie des Chaymas est de la plus grande uniformité; ils se couchent très-
régulièrement à sept heures du soir ils se lèvent long-temps avant le jour, à
quatre heures et demie du matin. Chaque' Indien a un feu près de son hamac.
Les femmes sont si frileuses, que je les ai vues grelotter à l'église lorsque le
thermomètre centigrade ne baissoit pas au-dessous de ï8°. L'Intérieur des cabanes
des Indiens est extrêmement propre. Leurs hamacs, leurs estères, leurs pots pour
contenir le manioc ou le maïs fermenté, leurs arcs et leurs flèches, tout est rangé
dans le plus grand ordre. Hommes et femmes se baignent tous les jours; et,
comme ils sont presque constamment nus, on ne trouve pas chez eux cette
malpropreté dont les vêtemens sont la cause principale chez le bas peuple, dans
les pays froids. Outre la maison dans le village, ils ont généralement dans leurs
conucos, près de quelque source ou à l'entrée d'un vallon bien solitaire, une
cabane étroite, couverte en feuilles de palmier et de bananier. Quoiqu'ils vivent
moins commodément dans le conuco, ils cherchent à s'y retirer aussi souvent
qu'ils le peuvent. Nous avons déjà parlé plus haut de ce désir irrésistible de fuir
la société, et de rentrer dans la vie sauvage. Les enfans les plus jeunes quittent
quelquefois leurs parons, et rôdent 4 à 5 jours dans les forêts, se nourrissant de
fruits, de choux-palmiste et de racines. En voyageant dans les missions, il n'est
pas rare de trouver les villages presque déserts, parce que les habitans sont dans
leurs jardins ou dans les forêts jn~nfc. Chez les peuples civilisés, la passion
pour la chasse tient peut-être en partie à ces mêmes sentimens, aux charmes de
la solitude, au désir inné de l'indépendance, à l'impression profonde que laisse
la nature, partout où l'homme se voit seul en contact avec elle.
L'état des femmes est, chez les Chaymas comme chez tous les peuples à demi-
barbares, un état de privationset de souffrances. Les travaux les plus durs sont
leur partage. Lorsque nous vtmes les Chaymas revenir le soir de leur jardin,
l'homme ne portoit rien que le couteau (~MC&eKe) avec lequel il se fraie le
chemin dans les broussailles. La femme étoit courbée sous un grand fardeau de
bananes; elle tenoit un enfant dans ses bras; deux autres étoient quelquefois
placés au haut de la charge. Malgré cette inégalité de condition, les femmes des
Indiens de l'Amérique méridionale m'ont paru, en général, plus heureuses que
celles des sauvages du Nord. Entre les Monts-Alleghanys et le Mississipi, partout
n
où les indigènes ne vivent pas en grande partie de la chasse, ce sont les femmes
qui cultivent le maïs, tes fèves et les coorges les hommes ne prennent ancnne
part au labourage. Sous la zone torride, les peuples chasseurs, sont extrêmement
rares, et, dans les missions, les hommes travaillent au champ comme tés femmes.
Rien n'égale ta difUcultéavec laquelle les Indiens apprennent l'espagnol: ils
Font en aversion, aussi long-temps qu'éteignes des blancs, ils n'ont pasi l'ambition
d'être appelés des Indiens policés, ou, comme on dit dans les missions, dés
Indiens latinisés) 7/K~KM muy latinos. Mais ce qui m'a frappé le plus, non
seulement chez les Chaymas, mais dans toutes les missions très-reculées que j'ai
visitées par la suite, c'est la dimculté extrême qu'ont les Indiens de coordonner
et d'exprimer les idées les plus simples en espagnol, lors même qu'ils saisissent
parfaitement la valeur des mots et le tour des phrases. On les croiroit d'une
Imbécillité d'esprit, qui n'est pas même celle de l'enfance dès qu'un blanc les
questionne sur des objets qui les entourent dès leur berceau. Les missionnaires
assurent que cet embarras n'est pas 1'effet de ta'timidité; que, chez les Indiens
qui fréquentent journellement la maison du missionnaire, e~ qui ordonnent les
travaux publics, il ne tient pas à une stupidité naturette, mais àt'obstac!e qu'ils
trouvent dans le mécanisme d'une langue si différente de leurs langues natales.
Plus 1 homme est é!<Mgné de la culture, et plus il a de roideur et d'InûexibHIté
morale. Il ne faut donc pas s'étonner de trouver, chez l'Indien isolé dans les
missions, des obstacles qu'ignorent ceux qui habitent une même paroisse avec
les métis, les mulâtres et-les blancs dans le voisinage des villes. J'ai été surpris
souvent de la volubilité avec laquelle à Caripe, l'alcalde, le governador et le
sargentomayor harangnoient, pendant des heuresentières ) les Indiens assemblés
devant t'égHse: ils régtoieht les travaux de la semaine, réprimandoient les
paresseux, menaçoient les indociles. Ces chefs qui sont également de race chaymas,
et qui transmettent les ordres du missionnaire, parlent alors tons à la fois, d'une
voix forte, avec des intonationsmarquées, presque sans aucun geste. Les traits de
leur visage estent immobiles, leur regard est impérieux et sévère.
Ces mêmes hommes, qui anoonçoientde la vivacité d'esprit, et qui possédoient
assez bien l'espagnol, ne pouvoient plus Her leurs idées, lorsqu'en nous accom-
pagnant dans nos excursions autour du couvent, nous leur faisions adresser des
questions par les moines. On leur faisoit aflirmer ou nier ce que l'on vouloit; et
l'indolence, accompagnée de cette politesse rusée à laquelle l'Indien le moins
cultivé n'est pas étranger, les engageoit quelquefois à donner à leurs réponses le
tour qui paroissoit Indiqué par nos questions. Les voyageurs ne sauroient trop
se prémHhIrcOB~e ces assentiment o&cieux, lorsque ~eal~lt s appuyer (ta
témoignagedesnatifs. Pour mettre~n~calde in l~.ptçqve',ie lui demandai
un jour s H ne croyoit pas que la petite rivière de Caripe qui
sort ~e ta
«
grottedu Gaacharo, y~entr'Bduc~té opposé, par une ouverture inconnue, en
remontant la pente de !& mon~gne." Après avoir eu l'air de rénéchir, <1 dit,
pour étayer mon système: Commentoussi, sans cela, y auroit-il toujours 4e Feau
dans le lit de la rivière, à la bouche de la caverne?
Les Chaymas ont une extrême dimculté à saisir tout ce qui tient à des
rapports numériques. Je n'en ai pas trouvé un seul à qui l'on n'eût fait dire
qu'il avoit t8 ou <? ans. M. Màrsden a observé la même chose chez les Malais
de Sumatra, quoiqu'ils aient plus de cinq siècles de civilisation. La langue
chaymas renferme des mots qui expriment des nombres assez grands, mais peu
d'Indiens savent les employer; et comme, par leurs rapports avec les mission-
naires, ils en ont senti la nécessité, les plus intelligens comptent, en castillan
avec un air qui annonce un grand effort d'esprit, jusqu'à 3o ou 5o. Les mêmes
hommes ne comptent, en langue chaymas, pas au-delà de 5 ou 6. Il est naturel
qu'ils emploient de préférence les mots d'une langue dans laquelle on leur a
enseigné la série des unités et des dixaines. Depuis que les.savans de l'Europe
n'ont pas dédaigné d'étudier la structure des idiomes de l'Amérique, comme
on étudie la structure des langues sémitiques/du grec et du latin, on n'attribue
plus à l'imperfection du langage ce qui appartient à la grossièreté des peuples.
On reconnott que presque partout les idiomes offrent plus de richesses, des
nuances plus fines qu'on ne devroit le supposer, d'après l'état d'inculture des
peuples qui les parlent. Je suis loin de vouloir placer sur une même ligne les
langues du Nouveau-Monde avec les plus belles langues de l'Asie et de l'Europe;
mais aucune de celles-ci n'a un système de numération plus net, plus régulier
et plus simple que le qquichua et l'aztèque, qui étoient parlés dans les grands
empires du Cauzco et d'Anahuac. Or, seroit-il permis de dire que, dans ces
langues, on ne compte pas au-delà de quatre parce que dans les villages où
elles se sont conservées parmi les pauvres laboureurs de race péruvienne ou
mexicaine, on trouve des individus qui ne savent pas nombrer au-delà. L'opinion
bizarre que tant de peuples américains comptent seulement jusqu'à 5,
io ou 20, a été répandue par des voyageurs qui ignoroient que, selon le
génie des diSérens idiomes, les hommes s'arrêtent, sous tous les climats, à des
groupes de 5, i o op 2o unités (c'est-à-dire aux doigts d'une main, de deux
mains; des mains et des pieds) et que 6, 13 ou 20 sont diversement exprimés
groupe de dix unités? s~
par cinq un~ dix trois et pied dix '? Difoi~on que tes~ombrea des Européens
ne vont pas au~telà de dix, parceque nous nous arrêtons après avoir
forme un

La structure des langues amérieames est si opposée à celle des langues dérivées
du latin, que les Jésuites, qui avoient examiné à fond doutée qui pouvott
contribuer étendre leurs établissemens, introduisoient parmi les néophytes,
au lieu de l'espagnol, quelques langues indiennes très-riches, tres-rëguhères et
très-répandues, comme le qquichua et le guarani. Ils tâchoient de substituer ces
langues à des idiomes plus pauvres plus grossiers, plus irréguliers dans leur
syntaxe. Cette substitution étoit très-aisée les Indiens des différentes tribus s'y
prétoient avec docilité, et dès-lors ces langues américaines généraliséesdevinrent
néophytes. On
un moyen facile de communication entre les missionnaireset les
auroi~ tort de croire
que la, préférence donnée à la langue de l'tncas sur le
castillan, n'avoit d'autre but que celui d'isoler les missions, et de les soustraire
à l'influence de deux puissances rivales, les éveques et les gouverneurs civils:
les Jésuites avoient encore d'autres motifs indépendans de leur politique, pour
vouloir généraliserde certaines langues indiennes. Ils trouvoient dans ces langues
un lien commun et facile à établir entre des hordes nombreuses, qui étoient
restées isolées, ennemies les unes des autres et séparées par la diversité des
idiomes; car, dans les pays incultes, après l'écoulement de plusieurs siècles,
les dialectes prennent souvent la forme, ou du moins 1 apparence de langues
mères.
Lorsqu'on dit qu'un Danois apprend plus facilement l'allemand, un Espagnol
plus facilementl'italien ou le latin que toute autre langue, on pense d'abord que
cette facilité résulte de lidentité d'un grand nombre de racines qui sont com-
munes à toutes les langues germaniques ou à celles de l'Europe latine on oublie
que, près de cette ressemblance des sons, il y en a une autre qui agit plus
puissamment sur les peuples dune commune origine. Le langage n'est pas le
résultat d'une convention arbitraire le mécanisme des flexions, les formes
grammaticales, la possibilité des inversions, tout dérive de notre intérieur,
de notre organisation individuelle. Il y a dans l'homme un principe instinctif
et régulateur, diversement modifié chez les peuples qui ne sont pas d'une même

~oye: mes .MbnumetM américains, vol. M, p. 329-~7. Les sauvages, pouf faciliter tear nMnn&re.
d'exprimer de grands nombres, ont l'habitude de fprmer des groupes de 5,'io
ou ao grains
de tMM,
selon qu'ils comptent danatemra langues par pentades par décades
ou par icosiades.
race. Le climat plus e)u moins Apre, le séjour dans les gorges des montagnes ou
sur les bords de la mer, les habitudes de la vie, peuvent altérer les son&, rendre
méconnoissablel'identité des racines, et en multiplier le nombre; mais toutes
ces causes n'aCectent pas ce qui constitue ta structure et le mécanisme des
tangues. L'influence du climatet des agens extérieurs disparoït auprès de Celle
qui tient à la race, à l'ensemble héréditaire des dispositions individuelles de
l'homme.
Or, dans l'Amérique, et ce résultat des recherches les plus modernes est
infiniment remarquable pour l'histoire de notre espèce; en Amérique, depuis
le pays des Esquimaux jusqu'aux rives de l'Orénoque, et depuis ces rives
brûlantes jusqu'aux glaces du détroit de Magellan, des langues mères, entière-
ment différentes par leurs racines, ont pour ainsi dire une même physionomie.
On reconnoît des analogies frappantes de structure grammaticale, non seulement
dans des langues perfectionnées comme la langue de l'incas l'aymare, le
guarani, le mexicain et le cora, mais aussi dans des langues extrêmement
grossières. Des idiomes, dont les racines ne se ressemblent pas plus que les
racines du slave et du basque, ont de ces ressemblances de mécanisme intérieur,
qu'on trouve dans le sanscrit, le persan, le grec et les langues germaniques.
Presque partout, dans le Nouveau-Monde, on reconnoît une multiplicité de
formes et de temps dans le verbe, une industrie artificieuse, pour indiquer
d'avance, soit par la flexion des pronoms personnels qui forment la désinence
des verbes, soit par un ~M~TMM intercalé, la nature et les rapports du régime
et du sujet, pour distinguer si le régime est animé ou inanimé, de genre
masculiuou féminin, unique ou en nombre complexe. C'est à cause de cette
analogie générale de structure, c'est parce que des langues américaines qui

Vater, dans le ~f<<~Mh<M, Tom H!, P. H, p.385-4o9.M.,BfMB&eF-«n~wt~fntef-K:<t,p.307.


Dans le grœntandois, par exempte, la multiplicité des régimes-pronomsproduit vingt-sept formes
pour chaque temps de l'indicatif du verbe. On est étonné de trouver, chez des peuples placés aujourd'hui
au plus bas degré de la civilisation, ce besoin de nuancer les rapports du temps, cette surabondance
de modifications apportées au verbe pour caractériser le régime..N~Hpo, il t'ote; nMM<Mp<-<, tu l'Êtes;
nM«tHpff<«, il t'ote; BM«<np<tgt<, je t'&te. Et au prétérit du même verbe m<t«<tM<, it t'a 6té; mat-
taratit, it t'a été. Cet exemple. tiré du grœntandois, peut servir à faire voir comment le régime et le
pronom personnel forment corps, dans les langues américaines,avecle radical du verbe. Ces nuances
dans la forme <ht verbe, d'après la nature des régimes-pronoms, ne se retrouvent, dans l'ancien monde
que dans le basque et le congo. ( ~a<er, Mithr. Tom. HI, P. L,p. ai8; P. n, p. 386, et P. Ht,
442.
p.
GMtMtMMM de Humboldt, de la langue AtM~M,
p. 58.) Etrange conEormité dans la strocture des langues sur
des points si éloignes et chez trois races d'hommes, si diBérentes, les Cautabres blancs les
Congos noirs
et les Américains rouge~cuivrés 1
n'ont aucun mot de commun ( par exempte le mexiGai~ et te qqutcnaa}, se
ressemblent entre elles par leur, organisation, et eontrasfentt entièf~ment avec
les langues de fEurope latine, q~e t'ïndien des missions se re<!d plus aisément
familier un Idiome américain, que celut de ta métropole. Dans tes tbf~ts de
t'Orénoque, )'ai vu les ïndiens les plus abrutis parler deux ou trois tangues,
Souvent des sauvages de nations diNerentes se communiquent tours Idées par un
idiome qui n'est pas le leur.
Si i'on avoit suivi le système des Jésuites, des langues qui occupent dë)à de
vastes étendues de pays, seFoient devenues presque génërales. A la Terre-Ferme
et à rOrënoque, on ne-parleroit aujourd'hui que le caribe ou le tamanaque;
dans le sud et le sud-ouest, le qquichua, le guarani, l'omagua et t'araucan. En
s'appropriant ces langues, dont les formes grammaticales sont trës-régutières,y
presque aussi fixées que celles da grec et du sanscrit, les missionnaires se
mettroient dans des rapports plus intimes avec les indigènes qu'ils gouvernent.
Les diiBcaltes sans nombre que Fon rencontre dans le régime des missions
formées par une dixaine de peuplades, disparottroiBnt avec la confusion des
idiomes. Ceux qui sont peu répanda~deviendroient des langues mortes; mais
l'Indien, en conservant un idiome américain, conserveroit son individualité,
sa physionomie nationale. On achèveroit ainsi, par des voies paisibles, ce que
ces Incas trop vantés, qui ont donné le premier exemple du fanatisme religieux
dans le Nouveau-Monde ont commencé à établir par la force des armes.
Comment s'étonner, en effet, du péu de progrès que font tes Chaymas, les
Caribes, les Salives ou les Otomaques dans la connoissanee de ta tangue espa-
gnole, lorsqu'on <e rappelle qu'~m homme btânc, un seul missionnaire, se
trouve isolé ;au milieu de cinq ou six cents Indiens, et qu'il a,de la peine à
former parmi eux un Governador, un Alcade ou un Fiscal qui puisse lui servir
d interprète. Si on parvenoit à substituer au régime des missionnaires un autre
moyen de civilisation, disons plutôt d'adoucissement de mœurs ( car l'Indien
réduit a des moeurs moins barbares, sans avoir plus de lumières); si~ an lieu
d'éloigner les blancs, on pouvoit les mêler aux indigènes récemment réunis en
villages, les idiomes américains seroient bientôt remplacés par les langues de
l' Europe et les naturels recevroient dans ces tangues ta grande masse d'idées
nouvelles qui sont le fruit de la civilisation. Dès-tors,l'introduction des langues
générales, comme celtes de Fincas ou du guarani, deviendroitsans doute inutile.
Mais après avoir vécu si long-temps dans les missionsde l'Amérique méridionale
après avoir vu de si près les avantages et les abus du régime des missionnaires, il
me sera perçus de douter qu'il sott iacue ttaBanaonner ce regnae~ est ires-
suscepËNèdeperfeetionnement, et qui onre un moyen p~paraM'reaun antre
plus conforme & nos idées de liberté civile. On m'o~ectëpa qN~ tes Romains
avaient réussi à introduire rapidement leur langue avec leur domination dans
les Gaales dans la Bétique et
dans la province d~Aifriqne mais les peuples
indigènes de ce pays n'étoient pas des sauvages. Ns habitoient des villes ils
connoissoient l'usage de l'argent; ils avoient des institutions qui indiquent un
état de culture assez avancé. L'appât du commerce et un long séjour des légions
romaines les avoient mis en contact avec les vainqueurs. Nous voyons au contraire
que l'introduction des langues de la métropole a trouvé des obstacles presque
insurmontables partout oit des colonies carthaginoises, grecques ou romaines
se sont établies sur des côtes entièrement barbares. Dans tous les siècles et
dans tous les climats, le premier mouvement de l'homme sauvage est de fuir
l'hommepolicé.
La langue des Indiens Chaymas m'a paru moins agréable à l'oreille que le
caribe, le salive et d'autres langues de ~'Orénoquc.jEUe~t surtout moins de
terminaisons sonores en voyelles accentuées. On est frappé de la répétition
fréquente des syHabesg~z, cz, ~Mee et ~Mn Nous verrons bientôt que ces
désinences dérivent en partie de la flexion du verbe être, et de certaines prépo-
sitions qui s'ajoutent à !a nn des mots, et qui, d'après le, génie des idiomes
américains, font corps avec eux. On auroit tort d attribuer cette rudesse de sons
au séjour des Chaymas dans les montagnes ils sont étrangers à ce climat tem-
péré. Ils y ont été conduits par les missionnaires, et l'on sait que, de même
que tous les habitans des régions chaudes, ils avoient d abord en horreur ce
qu'ils appellent le froid de Caripe. Je me suis occupé, avec M. Bonpland,
pendant notre séjour dans l'hospice des Capucins, de former un petit catalogue
de mots chaymas. Je n'ignore pas que les langues sont beaucoup plus caractérisées
par leur structure et leurs formes grammaticales que par l'analogie des sons et
des racines, et que cette analogie des sons devient quelquefois méconnoissable

Je le caractère des tnd'gene:etdans Fêtât de leur cMMsaUon,et non dans


croM qu'il tant chercher dans
la structure de leur tangue, la cause de cette rapide introduction du latin dans les Gaules. Les nations
celtes, cheveux bruns, dinëroient certainement de la racti des nattons germaniques a 'chelem Monds
et, quoique la caste des Druides rappelle une des institutions du Gange, it u'est pas prouvé pour cela
que t'idiothe des Celtes appartienne,comme celui des peuplesd'Odin, au rameau des langues indo-pelasges.
Par analogie de structure et par analogie de racinesle latin auroit dû pénétrer plus facilement au-deta
du Danube que dans les Gaules; mais l'état d'inculture,joint à
une grande mBexibintë morale, s'opposoit
sans doute à cette introduction chez les peuples germaniques.
dans les dinerens dialectes d'une même langue: car les tribw dans lequelles M
divisé une nation désignent souvent les mêmes objets par des mots toùt-a'&tt
hétérogènes. en résulte qu'on est facilement induit en erreur, si, en négligeant
l'étude des flexions, et en ne consultantque les racines, par exempte !es mots qui
désignent la lune, le ciel, l'eau et la terre, on prononcesur la diSerence absolue
de deux idiomes d'après la seule dissemblance des sons. Tout en connoissant
cette source d'erreur les voyageurs doivent continuer, je pense, à réunir 'les
matériaux que leur position peut leur offrir. S'ils ne font pas connottre lastructure
intérieure et l'ordonnance générale de l'édifice, ils-en feront connottre isolément
quelques parties importantes. Les catalogues des mots ne sont point à négliger;
ils nous apprennent même quelque chose sur le caractèreessentield'un Idiome,
si le voyageur a recueilli des phrases qui montrent la flexion du verbe et le
mode si différent de désigner les pronoms personnels et possessifs.
'Les trois langues les plus répandues dans les provinces de Cumana et de
Barcelone sont aujourd'hui le chaymas, le cumanagotte et tecaribe. Elles ont
constamment été regardéesdans ces pays comme des idiomes tUSerens chacune
d'ellès a son dictionnaire, composé; pour l'usage des missions~ par les pères
Tauste,,Ruiz-Blanco et Breton. Le ~oeotM&ïrM <trte de la lengua de
lndios Chaymas est devenu extrêmement rare. Le peu d'exemplaires des gram-
maires américaines, imprimées pour la plupart au t~* siècle, ont passé dans les
missions, et se sont perdus dans les forêts. L'humidité de l'air et la voracité des
insectes rendent la conservation des livres presque impossible dans ces régions
brûlantes. Ils se trouvent détruits dans un court espace de temps, malgré les
précautions qu'on~emploie. J'ai eu beaucoup dtT peine à réunir dans les missions
et les couvens les grammaires de langues américaines que j'ai remises, d'abord
après mon retour en Europe, entre les mains de M. Severin Vater, professeur
et bibliothécaire à l'université de Kœnigsberg:~lleslui ont offert des matériaux
utiles pour le grand et bel ouvrage qu'il a composé sur les idiomes du Nouveau-
Monde. T'avois omis, dans le temps, de transcrire de mon journal, et de commu-
niquer à ce savant ce que j'avois recueilli sur le chaymas. Comme ni le père
Gili, ni labbé Hervas, n'ont fait mention de cette langue, je vais exposer suc-
cinctement ici le résultat de mes recherches~.

Les termites, m connues dans fAmênqoe e*ptgncte sous le nom de CMM~o.


~tytt la note A
la fin de ce livre.
à
Voyez, poxrmnpttMamptedéHit, la note B. °
Sur la rive droite de t'Ojénoque, au sud-est de !a mission de t'Encaramada
à plus de €<n<r~ieuesde distance des Chaymas, demeurent les Taman~ques
),
( j~monocM dont ta langue se divise en plusieurs dialectes. Cette nation jadis
très-puissante, est réduite aujourd'hui à un petit nombre; ette est séparée des
montagnes de Caripe par t'Orénoque, par les vastes steppes de Caracas et de
Cumana, et, ce qui est une barrière bien plus difficile a franchir, par les peuples
d'origine caribe. Malgré cet éloignement et ces obstacles multipliés, on reconnoît,
en examinant la langue des Indiens Chaymas, qu'elle est une branche de la langue
tamanaque. Les plus anciens missionnaires de Caripe n'ont'aucune connoissance
de ce résultat curieux, parce que les'capucins aragonois ne fréquentent guère
les rives méridionales de t'Orénoque, et qu'ils ignorent presque l'existence des
Tamanaques. J'ai reconnu l'analogie entre l'idiome de ce peuple et celui des
Indiens Chaymas, long-temps après mon retour en Europe, en comparant les
matériaux que j'avois recueillis, au précis d'une grammaire publiée en Italie par
un ancien missionnaire de l'Orénoque. Sans connottre le chaymas, l'abbé Gili
avoit pressenti que la langue des habitans de Paria devoit avoir du rapport
avec le tamanaque.
Je prouverai ce rapport par les deux voies qui peuvent faire reconnoître
l'analogie des idiomes, je veux dire par la structure grammaticale et l'identité
des mots ou des racines. Voici d'abord les pronoms personnels des Chaymas,
qui sont en même temps des pronoms possessifs.: u-re, je, moi; eu-re, toi,
tu; teu-re, il, lui. En tamanaque: M-je;
amare ou oK-~<ï,tu; iteu-ja, il.
Par les y et ~a5' de latitude.
Ct/t, &~<o di &ofM ~mer., Tom. III, p. apt. M. Vater a aussi donné des conjectures très-fondées
snr la liaison des tangues tamemMmes et caribes avec les tangues que l'on parte sur la côte nord-est de
l'Amérique méridionale. ~<Â<~S&E<t, Tom. ïtt, P. U, 654 et 6~6. Je dois avertir le lecteur que ~'ai
p.
constammentécrit les mots des langues atnéricaines d'après l'orthographe espagnole; de sorte que les u
doiventêtre prononcés ou, le che comme ofAe, en aUemand,etc. N'ayant parlé, pendant nn grand nombre
d'années, aucune autre tangue que le castillan j'ai noté les sons d'après un même système d'écriture, et
je craindrois aujourd'hui de changer la valeur des signes,
en en substituant d'autres également imparfaits.
C'est un usage barbare que d'exprimer comme la plupart des nations de l'Europe, des sons très-simples
et tre~disttncts, ou par plusieurs voyelles ou par plusieurs consonnes réunies (ou, eo, OMgA, <m'~c&,
<cA, <~cA,~A,pA, <<, da ), tandis qu'on pourroit les indiquer par des lettres également simples. Quel
chaos, que ces vocabulaires écrits d'après des notations angloises, allemandes,françoises ou espagnoles

7.
Le nouvel essai que l'illustre auteur du ~o~oge Égypte, M. de Volney, va publier bientôt sur t'anatyse
en
des sons, trouvés chez les dinërens peuples, et
sur la notation de ces sons d'après un système uniforme,
fera faire les plus grands progrès a l'étude des langues.
Rnh. "F n
Le radical de la première et de la troisième personne est' en chaymas, u et
teu; les mêmes racines se retrouvent chez les Tamanaqaes.

CHAYMAS. TAttAttAQCB.

Z7w,}e. Ure.
T~o.eaa. 2~~
CoMo~Ojpluie'. Canepo.
Poturu, savoir. Puturo..
~po<o,feu. Uapto (en caribe) ualo.
Nuna, tune, mois. Nuna 3.
Je, arbre. Jeje.
~~a, maison. ~H<'<?. <`
J?M~a, à toi. ~M; N.
?b~o!,àtoi. //e~<
Guane, niiel
CMaNe, mieL Vane.
t~Hte.
~Vac<tfawa~ irt'a dit. j~<!c<!r~M<!<
~'McAa (~M<tcA~), médecin, sorcier. ~MteAe (Psiaschi).
7Ybin, un. O~M(enJaoi,y!?H'M).
~eo~deux. <?eo(eocaribe,0cco).
Oroa, deux. Orua (en caribe, O~o).
jPMn,chaire. JPMHM.
Pra, non (négation), fnt.

Le verbe substantif être s'exprime, en chaymas, par az en àjoutant au


verbe le pronom personnel je ( u de M-y~e ), on placer pour l'euphonie
un g
It ne faut point être surpris de ces racines qui se réduisent à une sente voyette. Dans nnelangne de
l'ancien continent, dont la- stmcture est si artiEcieuMmentcompMquée,dans le basque, le
nom patro-
nymique ugarte (entre &< <a<M), renferme ru de ttn! (eau) et ar<e (entre). Le g est a)ecté
pour
l'euphonie. GMt/<. de jHiMt&o&& sur langue &a<<e, p. 46.
Le même mot conqM) signtne~Met <MM~e. On compte les années par le nombre des AM'Mw, qui est
la saison des/)&< On dit, en chaymas comme en sanscrit, tant de pluies, pour dire tant d'années. En
basque, le mot tH-<M, année, dérive d'<~<em (/nm<&<c<M), développer des feuilles
an printemps.
3 En tamanaque et en caribe, nonosignineta terre; nuna, la lune,
comme en chaymas.Ce rapportm'a
paru Lien curieux: aussi. les Indiens du Rio Caura disent que la hne est une autre terre. On tronM chez
les sauvages, au milieu de tant d'idées Confuses, de certaines ~mMMCtMteMbien dignes d'attention. Chez
les GrcBnIandois,m<nasigni6ela terre, anoningat la lune.
devant l'M, comme dans g~MM, proprement g'-M-a~. Gomme la première
personne se reconnoitparunH, la secondeestdésignée par an M, la troisième
ri"< ttt es, Ma.t:
par un
wl 1 1 1~~i~Mee
1 1 ~~M~/?<'Maz,pourquoi
,0, 1 es-tu1triste
1 pro-
prement cela pour triste fot ~tn-, ~Mn~M<?cfo~MC~<*<?M~,tu es gras de corps,
proprement chair (~Mn ) pour (~M<*c ) ~N~ ( te~McAe ), tu étre ( iM< ). Les
pronoms possessif précèdent le substantif: upatay, dans ma maison, proprement
~t0t MoMdn en. Toutes les prépositions et la négation ~yM sont incorporées à la
6n, comme dans ~c tamanaque. On dit, en chaymas, ~Mec, avec lui, proprement
ZM~fce;eM~<ï, à toi on toi à; epuec charpe guaz, je suis gai avec toi, pro-
prement toi avec gai moi ~fn?/ Mca~e~yia, non comme moi, proprement 7K<M
comme non; quenpotupra quoguaz, je ne le connois pas, proprement le
connoissant pas je suis; quenepra quoguaz, je ne l'ai- pas vu, proprement
le voyant pas je suis. En tamanaque) on dit acurivane, beau, et acurivanepra,
laid, non beau; Moto~~t, il n'y a pas de poisson, proprement poisson pas;
uteripipra, je ne veux pas aller, proprement je aller vouloir non, composé
de ttc~ aller, ipiti, vouloir, et~fN, non. Chez les Caribes, dont la langue
a aussi des rapports avec le tamanaque, quoiqueplacé
infiniment moins que le
chaymas, la négation est exprimée par un m devant le verbe amoyen-
lenganti, il fait très-froid, et mamoyenlenganti, il ne fait pas très-froid.
D'une manière analogue, la particule mna ajoutée au verbe tamanaque, non à
la fin, mais par intercalation, lui donne un sens négatif, comme taro, dire,
taromnar, pas dire.
Le verbe substantif ( être) très-irréguUer dans toutes les langues, est a~ on
ats en chaymas; et uochiri (dans les compositions H~c, Ma~cAa) en tama-
naque. Il ne sert pas seulement à former le passif, mais it s'ajoute aussi incon-
testablement, comme par aglutination, au radical des verbes attributifs, dans
un nombre de temps 2. Ces agtutinations rappellent l'emploi que fait le sanscrit

Em chaymas: M<ec~), j'irai aossi, proptementje (") aller (le radical t<e, ou à cause de la voyelle
qui précMe te) <MMM (c&<m ou ere on ire ). Dam N&t-Mne on retrouve te verbe tamanaque, aller, t<<'n\,
dont t<e est encore le radieal, et ri la terminaison de t'inBnitif. Pour prouver qu'en chaymas, eAeft on ere
indiqnet'adverbe <nfMt, je citera),d'après le fragment d'un vocabulaire que je poMede t<-e&er<, je auM:
nacontm~M, il le dit ausat; gtMMMNeM,je portai auMi eAarecAere, porter aussi. En tamanaque,chareri
signifie porter tout comme en chaymas.
Le présent tamanaque, ~Mf-tfc-Nre, ne me paro!t autre ccose que le verbe substantif bac, om f«tc
(de uocachiri, être),ajouté au radical porter ~are (à l'in6nitif~<tfBrt),d'ou résulte ~M'tott~'to'.
des verbes auxiliaires as et MM (o~ et Mac~)*; letat!n,de~et/MOU~<o';
le basque, de t'z<M; Mc~n eteg~M. M y a de certains points dans lesquels les
idiomes lesplus dissemblables se rencontrent; ce qu'il y a de coMtmaa à l'orga-
nisation intellectuelle de l'homme se reflète dans la structure générale des
Iangues,et tout idiome, quelque barbare qu'il paroisse, décelé un principe
réguiateuF qui a présidé a sa formation.
Le pluriel, en tamanaque, est indiqué de sept manières, selon la terminaison
du substantif, ou selon qu'il désigne un objet animé ou Inanimé En chaymas,
le pluriel se fait comme en earibe ~,en on teure, lui-méme; teM~con~ eux-
mêmes; tanorocon, ceux d'ici; montaonocon, ceux de là-bas, en supposant que
l'interloculeurparle d'un endroit où II se trouvoit présent /K~vonocon, ceux de
là-bas,.en supposant que l'inteI'lQcu'teur indique un lieu où il ne se trouvoit pas.
Les Chaymas ont aussi les' adverbes castillans aqui et allà, nuances que
nous ne pouvons exprimer que par des périphrases, dans les idiomes d'origine
germanique et latine.
Quelques Indiens, qui savoient l'espagnol, nous ont assuré que Z~f ne.
signifioit pas seulement le Soleil, mais aussi la Pivinité. Cela m'a paru d'autant
plus extraordinaire que, chez toutes les autres nations américaines, on trouve des
mots distincts pour Dieu et le Soleil. Le Caribe ne confond pas ~f/MOM-MK~&o, le
vieux du ciel, avec le soleil i~yoM. Même le Péravien, adorateur du soleil,
s'élève à l'idée d'un être qui règle la marche des astres. Le soleil porte dans la
langue de l'Incas, presque comme en sanscrit, lenomd'M~, tandis que Dieu
est appelé ~MM~y Huayna, f~~e~cMcntycMne~.
L'arrangement~des mots est, chez les Chaymas, tel qu'on le trouve dans
toutes les langues des deux Continensqui ont conservé un certain air de jeunesse.

Dans le rameau des langues germaniques, on retrouve bhu, dans les formes bim, &M<; as, dans les
formesMM,<'tM<,fe<M~.(Bopp,p.i38.)
"De là, /i<-eru, a~M~-tMem, om<M~-eram, ~M-~Mm (jM~Hm). ).
7'<tm<nMcM, un Tamanaque; pluriel ~XMtaatemt ~bM~Aemt,
uu Espagnol, proprement MtJtontnM
AoM~; ~ongamo, les Espagnols ou les habillés. Le pluriel en cne caractérise les objets tnammes;
exemple, cetM chose ;ceneene les choses jeje arbre, jejecne les arbres. par
~t<AW~<e<,Tom.tn,P.M,p.687.
indre; amour,
m.
t En qquichua o. langue de l'Incas, soleil, ~,an.oaf,
m~< grand,(~<d.,< ni, T.
grand, ~p~. en sanscrit, soleil,
p. 333. ) Ce sont les seuls exemptes.
d'analogie de son qu'on ait trouvés jusqu'ici. Le caractère des grammMres des dem langues
diffère
totalement.
"~ttM! toujours ou ëternet,A!Myno,dans*E~eurde t'age.
régime~avant le
On place !e rëgimeavant verbe, le verbe avant le
le verbe, le pronom peMonpet. L'objet
pronotp personnel. L'objet
sur lequel l'attention doit être principalement ûxée, préc&de toutes les modifi-
cations de cet objet. L'AméHcain diroit 7~rt~ éntiére aimons-nous, au lieu
de: nous aimons la liberté entière; to~ccec A<'M~M.r ~MM~g, au lieu, de: je
suis heureuxavec toi. H y a quoique chose de direct, de ferme et démonstratif
dans ces tours, dont la naïveté augmepte par l'absence de l'article. Doit-on
admettre qu'avec une civilisation avancée, ces peuples, abandonnés à, eux-
mêmes, auroient changé peu à peu l'arrangement de leur phrase? On est porté
àadopter cette idée si l'on se rappelle les changemens qu'a éprouves la syntaxe
des Romains dans les langues précises claires, mais un peu timides de l'Europe
latine.
Le chaymas, comme le tamanaque et la plupart des langues américaines,
manque entièrement de certaines lettres, comme de f,
b et d. Aucun mot ne
commence par un La même observation a été faite sur la langue mexicaine,
quoiqu'elle se trouve surchargée des syllabes tli tla et tf/, à la fin ou au milieu
des mots. Le chaymas substitue des r aux l, substitution qui tient à un défaut
de prononciationsi commun sous toutes les zones C'est ainsi que les Caribes
de l'Orénoque ont été tranformés en Galibi dans la Guiane françoise, en
confondant ravecZ, et en adoucissant le c. Du mot espagnol soldado, le
Tamanaque a fait cAo~(.M&ïZo). La disparition de f et b dans tant d'idiomes
américains tient à la liaison intime entre de Certains sons, qui se manifeste
dans toutes les langues d'une même origine. Les lettres f, v, b et p se trouvent
substituées les unes aux autres; par exemple en persan, peder, father pater;
&Mr<M~y', frater; &e&ar, ver; en grec, ~&or~M (./orfon), bùrde; pous, fouss.
De même, chez les Américains,et & deviennent p, et <~ devient t. Le Chaymass
prononce patre, Tios, ~tOM~ aracapucha pour padre, Dios, ~<~OM et
arcabuz arquebuse).
Malgré les rapports que nous venons d'indiquer, nous ne pensons pas qu'on
puisse regarder la langue chaymas comme un dialecte du tamanaque, tels que
le sont les trois dialectes Maitano, Cuchivero et Crataima. Il existe beaucoup
de dISérences essentielles, et les deux langues me paroissent tout au plus
rapprochées, comme l'allemand, le suédois et l'anglois. Elles appartiennent à
une même subdivision de la grande famille des langues tamanaques, caribes

La substitution de r à Mraeténse, par exemple, le dialecte bMcht)MWt['.te de la lMg)te copte.


D'o!t l'allemand brader, avec les mêmes consonnes.
Commeil
et arouaques. Comme il n'existe pas une mesure absolue de parenté entre les
mesure absolue
Idiomes, on ne peut indiquer ces degrés de parenté que pa
idiomes, par des exemples tirés
regardons comme
iangues connues. Nous regardons
de langues comme d'une même memf famille ceux qui se
,n,al,an+entre
rapprochent o"w nnm,na le
nnf,.neux, m·nr l'allemand,
comme 1u grec, l'!IIn~rnftnèl le
~a persan
n~rA~ et le sanscrit.
On a cru découvrir, en comparant les langues, qu'elles se divisent toutes
en deux classes', dont les unes, plus parfaites dans leur organisation, plus
aisées et plus rapides dans leurs mouvemens, annoncent un. développement
intérieur par~c~ton, tandis que les autres, plus grossières et moins suscep-
tiblès de perfectionnement, n'offrent qu'un assemblage brut de petitesybnne-t
ou particules aglutinées, conservant chacune ia physionomie qui leur est propre,
lorsqu'on les emploie isolément. Cet aperçu très ingénieux manqueroit de
justesse, si l'on supposoit qu'il existe des idiomes polysyllabiques sans aucune
flexion, ou que ceux qui se développent organiquement, comme par des
~germes intérieurs, ne connoissent pas d'accroissement de dehors par la voie
des ~M~Mt et des o~.r<ï, accroissement que nous avons déjà appelé plusieurs
fois par aglutination ou incorporation. Beaucoup de chose qui nous paroissent
aujourd'hui des flexions du radical, ont peut-être été, dans l'origine, des
amxa, dont il est à peine resté une ou deux consonnes. Il en est des langues
comme de tout ce qui est organique dans la nature; rien n'est entièrement isolé
ou dissemblable. Plus'on parvient à pénétrer dans leur structure interne, plus
les contrastes, les caractères tranchans s évanouissent. « On diroit 3 qu'elles sont
comme les nuages dont les contours ne paroissent bien terminés que lorsqu'on
les voit dans le lointain.
Mais si noua~ n'admettons pas un principe unique et absolu dans la classifi-
cation des langues, nous n'en demeurerons pas moins d'accord que, dans leur
état actuel, les unes montrent plus de tendance pour la flexion, les autres plus

~oyez le savant ouvrage de M. Frédéric Schteget, Sprache and ~'eMAettt&r~&r,p. 44-6o.


Dans le sanscrit même, plusieurs <ea~M se forment par agrégation on ajoute le verbe substantif être
au radical, par exempledans le p)rem!er futur. De même nous trouvons en grec m<M'&.e~ ,at le < n'est pas
l'effet de la mexion, et en latin, pot-ero (Bopp, p. 26 et 66). Voilà des exemples.d'incorporattons et
d'agtotinattons dans le système grammatical de langues, que l'on cite avec raison comme des modèles
d'un développement intérieur par Be~ion. Dans te système grammatical des Américains, par exempte
chez les Tamanaques, <<!MMcAt, je porterai, se compose de la même manière du radical <H' (infin. jareri,
porter), et du verbe substantif <cM-At (;nEn. tMMcttrt, être), n ëliste à peine un mode d'agrégation,
dans les langues américaines, dont on ne trouve un exempleanalogue dans quelque autre langue que l'on
suppose ne se développer que par flexion.
GM/ de Humboldt, lur les monographies des langues, t. Le m<<tM, sur la &M~M< So~~Ke
p. 43, 46 et 5p..
de tendance pour l'agrégation externe, On sait qu*~ ta prem~fe.~ywon, appar-
.!d!ome8.~a~~tas~c<aB~
les tangues. ~sémitiqMe8,.et:~b~<!q~~e~p~~q~4~
l'!dIonMdesChayïnas;M~

de
&ciHe
constante .Yers~;l'incorp9rati<)n:o~agt'~a:ttQ~
séparer, quoique. d'aprè~nn.iM~ïa~~ ra&oé, ait
est
.~na dQqte,,()~p"t~Jlvel'çe~J1~CC:
on leur
fait perdre quelques lettres, ou qd'on les ait augmentées de quelques autres. Ces
<~y«,en alongeantlesmo~, indiquent les rapports les plus variés de nombre,
de temps et de mouvement.
Lorsqu'on reRechitsur ta structure particulière destangHes américaines, on
croit recoonoitre ta source de cette opinion très-ancienne et uni verseMement
répandue dans tes~missions, que ces langues ont de l'analogie avec l'hébreu
et le basque. Partout, au couvent de Caripe comme à fOrénpque, au Pérou
comme au Mexique, j'ai entendu énoncer cette idée, et particulièrement à des
religieux qui avoient quelques notioos~ vagues des langues sémitiques. Des
motifs que l'on croit intéresser la religion, ont-Ils fait établir une théorie si
extraordinaire?Dans le nord dé l'Amérique, parmi les Chactas et les Chicasas~
des voyageurs un peu crédules ont entendu chanter l'a~c&~tA des Hébreux,
comme, au dire des Pandits,les trois paroles sacrées des mystères d'Eleusis
( <&<MM'oM~M*) retentissentencore dans l'hde Je ne soupçonne pas que les
peuples de l'Europe latine aient appelé hébreu on basque tout ce qui a une
physionomie étrange, de même que long-temps onnommoit monumens égyp-
tiens ceux qui n'étoient pas dans le style grec ou romain. Je crois plutôt que

3.
c'est le système grammatical des idiomes américains qui a tbrtiné les missionnaires
du seizième siècle dans leurs idées sur l'origine asiatique des peuples du Nou-
veau-Monde.La fastidieuse compilation du père Garcia, T~a~Mfode~ortgp/ï de
/<M j&Mf~.en&it foi La position des prononM possessif et personnets à la
fin du nom et des verbes, ainsi que les temps si multipliés de ces derniers
caractérisent l'hébreu et les autres langues sémitiques. L'esprit de quelques mis-
sionnairesa été frappé de trouver ces mêmes nuances dans les languesaméricaines.

langues appartiennent à une même souche.


Ils Ignoroient que l'analogie de plusieurs traits éparsne prouve point que des

IIF~carliot,CCharlevom
L'Esou'Bot, harlevoiret même Adair(( Hi~t.
mAme AJair <
JSM<. 'ôf <Ae ~atet-K-aK
the flmericarx Iudiena, t~S, p.
~KotM,y775 i 5-~so).
P· t5-a90 ).
*~<ta<.jR«.,Tom.V,p.93t.Oaf<M'o~<Kf&<B)y~t~<~E~MMM,t&~p.ayetn5.
'Jt.~o.f/T,cof..r~,$.3.
Il paroft moins étonnant que des hommes qui ne coono'ssent bien que deux
langues entièrementhétérogènes~ le castillan et le basque, aient trouvé àcelui-ci
un air de famille avec les langues américaines. C'est la composition des mots,
la facilité avec laquelle on retrouve les élémens partiels, ce sont les formes du
verbe et les modifications diverses qu'il éprouve, selon la nature du régime, qui
ont pu causer et entretenir cette illusion. Mais, nous le répétons, une égale
tendance vers l'agrégation ou incorporation ne constitue pas une identité d'origine.
Voici quelques exemples de ces rapports de physionomie entre les langues
américaines et la langue basque entre les idiomes qui diNèrent entièrementdans
les racines.
En chaymas: quenpotupra ~MOFMC~,je ne connois pas, proprement ne
connoissant pas je suis. En tamanaque :y<<trcr-M~e-Mrc,portant suis-je~ je porte
anarepra aichi, il ne portera pas, proprement portant ne sera patcurbe,
bon; ;~<ïtCHif~r!, se faire bon: Tamanàcu, un Tamanaque; Tamanacutari, se
faire Tamanaque .Po~Ae7K< espagnol; ~ong~e~f~, s'espagnoliser; tenect-
~eAt, je verrai; teneicre, je reverrai; ~e~cAc~ ~~ai~c~ai~, je retourne;
M<M~ butké, un petit Indien Maypure; aicabutké, une petite femme';
nM~M)~a/<?, un vilain Indien lVlaypure; aicataje, une vilaine femme.
En basque: maitetutendot, je t'aime, proprement je aimant raI;&cg~M,rœI!,
et beguitsa, voir; aitagana, vers le père; en ajoutant tu, on en forme le verbe
aitaganatu, aller vers le père; ume-tâsuna, ingénuité douce et enfantine; ume-
queria, entantiDage désagréable
J ajouterai à ces exemples quelques composés descriptifs qui rappellent l'en-
fance des peuples, et nous frappent également dans les langues américaines et
basques par une certaine naïveté d'expression. En iamanaque: la guêpe, uane-
<MM, père (:7K-~), du miel (H<M<?); les doigts du pied, ptari-mucuru,
pro-
prement les fils du pied; les doigts de la main, amgna-mucuru, les fils de la
main; les champignons,~~e~nar:, proprement les oreilles (panari) de l'arbre
(jeje); les veines de la main, <Mng'Ma-7Kt~, proprement les racines ramifiées,
les {eui!lesj~rM~~r~7' proprement les cheveux de la sommité de l'arbre-
j~MtreTïe-~c/M, proprement soleil (t/e/M) droit ou perpendiculaire; foudre~

Le diminutif de femme (aica) pn d'Indien Maypnre, se forme en ajoutant &M<M,qu: est la term!naisoa
de petit, cM/MpM<M/<<t/e repond au accio des Italiens.
La terminaison <ae!tna indique une bonne qualité; ~HerM en indique une mauvaiseet dénTC de erM,
maladie. ( GMt/ de BMm&oMt, BatyMm, p. 4o. )
3 Je reconnois dans ttnenMrM, tonnetTe ou orage, [a racine tfnsne, noir.
Ât7!<?M~M-tM~<M't, proprement le fea (M~to) du tonnerre ou de l'orage. En
basque &<*coyMM~ le front, ce qui appartient (co et ~M~) à t'œil (&egTMc)~
o<~o~a, le bruit (o<~a) du nuage (odeia) ou tonnerre; am&~CM, t'ëcho~ propre-
ment la pierre animée de <MVMt, pierre, et McM, la vie.,
Les verbes chaymas et tamanaques ont une énorme complication de temps,
deux présens, quatre prétérits, trois futurs. Cette multiplicité caractérise les
langues américaines les plus grossières. Astarloa compte de même, dans le système
grammatical du basque, deux cent six formes du verbe. Les langues, dont la
tendance principale est la flexion, excitent moins la curipstté du vulgaire que
celles qui semblent formées par agrégation.Dans les premières, on ne reconnoft
plus les étémens dont se composent les mots et qui se réduisent généralement
à quelques lettres. Isolés, ces ëtémens n'offrent aucun sens; tout est assimilé et
fondu ensemble. Les langues américaines sont au contraire comme des machines
compliquées dont les rouages sont à jour. On reconnoît l'artince, je dirai le
mécanisme industrieux de leur structure. On croit assister à leur formation on
les dit'oit d'une origine très-récente, si l'on ne se rappeloit pas que l'esprit humain
suit imperturbablement une impulsion donnée, que les peuples agrandissent,
perfectionnent ou réparent t'édince gEMnmaticat de leur langues, d'après un
plan une fois déterminé; enfin, qu'il y a des pays dont le langage, les institu-
tions et les arts sont invariables depuis une longue suite de siècles.
Le plus haut degré de développement intellectuel s'est trouvé jusqu'ici chez
des nations qui appartiennent au rameau indien et pelasgique. Les langues formées
principalement par agrégation paroissent opposer elles-mêmes des obstacles à
la culture; elles sont en partie dépourvues de ce mouvement rapide, de cette
vie intérieure que favorise la flexion des racines, et qui donnent tant de charmes
aux ouvrages de l'imagination. N'oublions 'pas cependant qu'un peuple célèbre
dès la plus haute antiquité, auquel les Grecs mêmes ont emprunté des lumières,
avoit peut-étre une langue dont la structure rappelle involontairement celle des
langues de l'Amérique.Quel échafaudagede petites formes monosyllabes ou dissyl-
labes ajoutées au verbe et au substantif dansla langue copte Le Chaymas et leTama-
naque,à demi-sauvages,ont des mots abstraitsassezcourts pour exprimerla grandeur,
l'envie et la légèreté, cheictivate, uoite et Mon~p, mais, en copte; le mot malice
nzetrepherpetou, est composé de cinq élémens faciles à distinguer. Il signifie

Voyez, sur t'identité incontestable de l'ancien Égyptien et du Copte et sur le système particulier
de synthèse de cette dernière langue, les réflexions judicieuses de M. ~&'«<re de Sacy, dans la Notice
des Récherches de M. Étienne ~«atrem~re Bur la littérature de f~j~pte, p. 18 et 23.
Relation AM<or/~Me, yb/M. 62a
la ~HC&~ (M~<) ~'M~ JM/Ct (replt) qui fait (e~) la chose'qui est (pet) W~
(OM). Cependant la langue copte a eu sa littérature comme la langue chinoise~
dont les racines, loin d'être agrégées,sont à peine rapprochées les unes des autres,
sans contact Immédiat. Convenons que les peuples, une fois réveillés de leur
léthargie, et 'tendant vers la civilisation, trouvent dans les langues les plus
bizarres te secret <f exprimer clarté les conceptions de l'esprit, et de peindre
avec
les mouvemensdé l'âme. Un homme respectable, qui a péri dans les sanglantes
révolutions de Quito, don Juan de la Rea, avoit imité avec une grâce naïve
quelques Idylles de Théocrite dans la langue de l'Incas, et l'on nifa assuré qu'en
exceptant les traités de science et de philosophie, il n'y a presque pas d'ouvrage
de la littérature moderne qu'on ne puisse traduire en péruvien.
Les rapports intimes qui se sont formés depuis la conquête, entre les naturels
et les Espagnols, ont fait passer un certain nombre de mots américains dans la
langue castillane.Quelques-uns de ces mots n'expriment pas des choses inconnues
avant la découverte du Nouveau-Monde, et nous rappellent à peine aujourd'hui
leur origine barbare Presque tous appartiennent à la langue des grandes
Antilles, que l'on désignoit jadis sous le nom de langue d'Haïti, de Quizqueja,
ou d'Itis*. Jeme bornerai à citer les mo~t~a~, ta&<K'~c<M!0~ &a~<P)C<MMM~
balsa, conuco, etc. Lorsque les Espagnols, dès l'année 1498, commencèrent à
visiter la Terre-Ferme, ils avoient déjà des mots 3 pour désigner les végétaux

Par exemple savane, cannibale.


Le nom d'Itis pour Haïti ouSaint-Domu)gne(Hispan:ola),setrouve dansl'ltinerarium de l'évoque
Geraldini ( 7!omo', !63*, p. ao6~. « Qoam Colonus /<<m insu~n) cemeret.
x
Voici, dans leur vé~taMeforme, les mots haïtiens qui ontpassé, dès la fin du 5.° siècle, dans la langue
castillane, et dont une grande partie n'est pas sans intérêt pour la botanique descriptive ahi (Capsicum
baccatum),batata (Convolvnlus Batatas), bihao (Heliconia Bihai), Mtmtto (Chrysophyttam Caimito),
cahoba ( SwieteniaMahagoni ), ~cca et casabi ( JatrophaManihot; le mot casabi ou ofMMfe ne s'emploie
que pour le pain fait des racines du Jatropha; le nom de la ptante,/<tce«, fut aussi entendu par
Americo Vespucci sur la côte de Paria); age ou a/M (Dioscorea à!ata ), copei ( Ctusia at~a ),
y«y<M.<!n
(Guajacum officinale), ~~a&<t(Psidium pyn<erum), guanavano (Anona muricata), nMHtt(Arachis
bypogsa), gm<tm<t (Inga), Aen~tten (originairement cne herbe avec taqoette, selon les Contes des
premiers voyageurs, les Haïtiens coupoient les métaux, aujourd'hui tout fil très-résistant); ~teaco
~(ChrysohalanasIcaco) maghei (Agave amer!cana),NMAMOunMM(Zea),n«!nMt (Mammeaamerioama),
TtMn~ (Rhitophora ), jM<o/M/<t ( Cactus Pitahaja ), eet&n (Bombax),<tM<t (Cactus Tuna), Atco<e« (tortue),
~n<t(Laeertaïguana), manati (Trichecus Manati), n.~M. ( Putexpenëtrans), Aomaett (Hamac), &a&a
(radeau, cependant &tt&M: est un mot ancien castillan lorsqu'il signifie une mare ), &<tr&ac<M ( couchettede
bois téger, ou de roseau), <-<Mee ou &M/;to (cabane), canoa ( canot), <-oc«/o (Etater nootitucus), chicha,
~fAMcAo (boisson fermentée), macana ( gros bâton ou massue faite des pétioles d'un palmier), tabaca (non
l'herbe, mais le tuyau duquel on se servoit pour respirer la fumée du tahac), coz~Ke (chef). D'aa&es mots
tes plus utiles l'homme, communs aux AntiUes et aux côtes de Gumana et
de. Paria. Ils ne ? contentèrent pas de conserver ces mots empruntés aux
Haïtiens,i!s contribuèrent aussi àtes répandre dans toutes tes parties de FAmé
rique, à une époque ou !à tangue d'Haïti étoit déjà une langue morte~ et chez
des peuples qui ignoroient jusqu'à ~existence des Antilles. Quelques mots dont
on se sert journeUementdansi~s colonies espagnoles sont attribués à tort aux
Haïtiens. Banana est du Cha~, de la langue mbaja; <a
(pain de manioc ou
de Jatropha Manihot), et gTM~MCo (tablier, perizoma), sont caribes; curiara
(canot très-alongé) est tamanaque;c&MC&or/io(hamac), et fMfMM<ï (fruit du
Crescentia Cujete, ou vaisseau pour contenir un liquide), sont des mots chaymas.
Je me suis arEété long-temps à des considérations sur les langues américaines,
parce qu'en Ies<analysant pour la première fois dans cet ouvrage, j'ai cru devoir
faire sentir tout l'intét~t de ce: genre de recherches. Cet Intérêt est analogue à
celui qu'inspirent les monumens des peuples à demi-barbares. On ne les examine
point, parce qu'Us méritent par eux-mêmes une place parmi les ouvrages de
l'art, mais parce que leur étude répand quelque jour ~ur l'histoire de notre
espèce et sur le développement progressif de nos facultés.
Après les Chaymas, il me resteroit à parler des autres nations indiennes quii
habitent les provinces de Cumana et de Barcelone. Je me contenterai de les
indiquer succinctement.
!.° Les Pariagotos ou Paricas. On croit que les terminaisons en go<o, comme
dans Pariagoto,Purugoto, Avarigoto, Acherigoto, Cumanagoto, Arinagoto,
Kirikirisgoto indiquent une origine caribe 2. Toutes ces peuplades ( à
l'exception des Purugotos du RioCaura) occupoient jadis les pays qui ontt
été si long-temps sous la domination caribe; sa voir, les côtes de Berbice et

améncMM, aujourd'hui aussi Mites parmi les Cr<o!e* que ks mots arabes espagnolisés, n'appartiennent
pas à la langue d'Haïti par exemple, e<!MMM!, jotn~tw,jK~xt/a ( Carica ) <M<M'a<e ( Persea ), tarat~o,
/)ftramo. L'aNté Gili rend probable qu'ils sont t!rés de la langue de quelques peuples qui habitoient le
pays tempéré entre Coro, les montagnes de Merida et le plateau de Bogota ( Nf~gto, Tom. III p. aa8.
~'M anssi plus haut, Chap. v, p. 3ay ) Que de mots des tangaes celtique et germanique noos auroient
conservé Jntes-César et Tacite, si les productions des pays septentrionaux Tisités pat. tes Romains, avoient
différé autant des productions de l'Italie et de l'Espagne que de ceUes de rAmérique équinotiate.
Les JEMttrMgMo* (ou Kirikiripas) sont de la Guiane-HoUandoise.Il est bien remarquable que,
parmi les petitespeupladesbrésiliennesqui ne parlent pas la langue des Tupi, les JEtftft, matgré l'énorme
émignententde 65o lieues, ont plusieurs mots tamanaques. ~eff<M Ca<a&)~o delle <MgKe, p. a6.
Dans la langue tamanaque,qui est d'un même rameau avec le caribe, se trouve aussi la terminaison
,~o, comme <Me~Mm~o<«,animal. Souvent une analogie dans les terminaisonsdes noms, loin de prouver
une identité de race, indique seulement que les noms des peuples ont été empruntésd'uue même langue.
d'Esquibo, la péninsule de Paria, les plaines de Piritu et la PaMme. C'est
par ce dernier nom qu'on désigne, dans les missions, te terrain peu
connu entre tes sources du Cujuni, du Caroni et du Mac. Les Indiens.
Parlas se sont fondus en partie avec les Chaymas de Cumana d'autres
ont été fixés par les capucins aragonois dans les missions de Caroni, par
exemple à Cupapuy et Alta-Gracià, où l'on parte encore leur langue, qui
paroît tenir le milieu entre le tamanaque et le caribe. Mais te nom de Parias
ou Pariagotos n'est-il qu'un nom purement géographique? Les Espagnols
qui fréquentoient ces côtes depuis'leur premier établissement à l'tle de
Cubagua et à Macarapana, ont-ils fait passer le nom du promontoire de
Paria à la tribu qui l'habitoit? Nous ne l'affirmerons pas positivement;
car les Caribes nommoient eux-mêmes Caribana 3 un pays qu'ils occupoient
et qui s'étendoit du Rio Sinu au golfe de Darien. C'est un exemple frappant
d'une identité de nom entre un peuple américain et le territoire qu'il
$
possède. On conçoit que, dans un état de la société où les demeures
ne sont pas fixes pour long-temps, ces exemples devoient être très-
rares.
2.° Les Guaraons ou Gu-ara-unu, presque tous libres et indépendans, dis-
persés dans le Delta de l'Orénoque, dont eux seuls connoissent bien les
canaux si diversement ramifiés. Les Caribes appellent les Guaraons <7-<MTa-H.

Cat<Kn, p. 9, 88, 136. ~er, Tom. III, P. H, p. 465, 6t 7, 676. Gidi, Tom. m, p. aot, ao5.
Paria Uraparia, même Hnriaparia et Payra, sont les anciens noms du pays, écrits comme les
premiers navigateurs ont cru les entendre. (Ferd. Colomb, dans C«re&~ Co//«-<Mn,Tom. n, 686,
p.
Cap. l.xxi. Galvano, dansjyat~'< Suppl. t8ta, p. t8. 7'e<nM ~far~r, p. ~3, yS. CtM&tmo Be~to~,
p.
Geraldini Itinerer, p. i~. Christ. CotnmbiNaTigatio.dansG<yn. Orb. Nov., p. 80 et 86. Go<~Mm,
p. ton
Cap. i.xxxrv.) tt ne me paroit guère probable que )e promontoire de Paria ait reca son nom de celui d'un
cacique t~-M/x!n, célèbre par la résistance qu'il 6t à Diego Ordaz en i53o, trente- deux ans après
que
Colomb avoitentendu te nom de Paria de la bouche des indigènes, (Fray Pedro ~mton, to3, tto<<eM
p.
Cap. xvi. C~M&n,p. i34ett43.) L'Orénoque,à son embouchure,prit aussUenomd'Uriapari.Ynyapari
a
ou lyupari. (Herera Dec., Tom. ï, p. 80, 184 et 108.) Dans toutes cea dénominations d'um grand
fleuve, d'un littoral, et d'un pays pluvieux, je crois reconnoitre le radical
par, qui signifie eau, non
seulement dans les !an$nes de ces contrées, mais dans ceUes de peuples très-étoignés tes
uns des autres
sur les côtes orientales et occidentales de l'Amérique..Mer grande dit, canbe,
ou eau se en en maypttre et
en brésilien ,~MBo, en tamanaqne,~<!MM. Dans la HauteGuiane, l'Orénoqne s'appelle anM: Parava.
En péruvien ou qquichua, je trouve pluie, ~<tr<t, pleuvoir ,jMmnt.De p!M il y mnn lac Pérou, qui
au
porte très-auciennement le nom de Paria. (Garcia, Ong~t &M Ind. p. aoa.) Je suis entré dans détail
ce
bien minutieux sur le mot Paria, parce que très-récemment on a cru y recomno!trele
pays des .PorKM`,
caste de l'Hindostan.
3 /'e<mt! Martyr, Ocean.
p. ia5.
Us doivent leur Indépendance la nature de leur pays; car les nussionnaires,
malgré leur zele% n'ont pas été tentés de les suivre sur la dme des arbres.
On sait que les Guaraons, pour élever leurs habitations au-dessus de la
surface de l'eau à l'époque des gfandes Inondations, les appuient sur des
troncs coupés de manglier et du palmier Mauritia'. Ils font du pain de la
farine médullaire de ce palmier, qui est te véritable sagoutler de l'Aménque.
La farine porte le nom de Yuruma: j'en ai mange à la ville de Saint-Thomas
de la Guiane, et elle m'a paru très-agréable au goût, ressemblant plutôt
au
pain de manioc qu'au sagou de l'Inde. Les Indiens m'ont assuré que les
troncs du Mauritia (I'~r&~ de vie tant vanté par le père Gnmilla) ne
donnent abondamment de la farine que lorsqu'on abat le palmier avant que
les fleurs se développent. C'est ainsi que le maguey ~cultivé à la Nouvelle-
Espagne ne fournit une liqueur sucrée, te vin (pulque) des Mexicains,
qu'à l'époque où la plante pousse sa hampe. En Interrompant la floraison
on force la nature à porter aillears cette matière sucrée ou amylacée, qui
devoit s'accumuler dans les fleurs du maguey et dans les fruits du Mauritia.
Quelques familles de Guaraons, agrégées aux Chaymas, vivent loin de
leur terrénatale, dans les missions des plaines ou Llanos de Cumana
par
exemple à Santa-Rosa de Ocopi. Cinq ou six cents ont abandonné volon-
tairement leurs marécages, et ont formé, il y a peu d'années,
sur la rive
septentrionale et méridionale de l'Orénoque, à 25 lieues de distance du
cap
Barima, deux villages assez considérables, sous les noms de Zacupana
et
Imataca. Lorsque je fis le voyage de Caripe, ces Indiens étoient encore
sans
missionnaires et vivoient en pleine indépendance. Les excellentes qualités
qu'ont ces Indigènes j comme marins, leur grand nombre, leur connoissance
intime des bouches de l'Orénoque et de ce dédale de bras qui
commu-
niquent les uns aux autres, donnent aux Guaraons une certaine importance
politique. Ils favorisent le commerce clandestin, dont t'ne de la Trinité
est le centre; ils faciliteroient probablement aussi toute expédition'militaire

Leurs mœurs ont toujours été les mêmes. Le cardinal Bembo les a décrites au commencement du
16.' siècle Quibusdam in tocio propter paludes mcohB domus in arboribus <edi6cant. (
« » jy,
)55t, p. 88. ) Sir Walter Raleigh en t~S, dépeint les Gaaraons sous les noms d'~roo«~, de ?VtM~
renet:,
et de /iT<H-aM't<e< c'étaient peut-être les noms de quelquestribus dans lesquelles la
masse de la grande
nation guaraonne se subdivisoit alors. ( Barrere, Essai
sur MM<. nat. de la France équin., p. ~o
M. Kunth a réuni les trois genres de Palmiers,Catamus, Saguset~anritia,
)
sous une no~yeUe section
des Catamées. (~'oye* nos Nova Génère, Tom.
p. 3)0.)
~ace ome/YcotM,t'atoës de nos jardins.
qui voudroit remonter l'Orénoque pour attaquer la Guiane espagnole. Les
gouverneurs de Cumana ont appelé depuis long-temps, et toujours sans
succès, l'attention du ministère sur cette peuplade indienne. Comme les
Guaraons courent avec une extrême adresse sur des terrains vaseux la ou le
blanc, le nègre ou tout autre ïhdien n'oseroient marcher, on croit commu-
nément qu'ils sont d'un moindre poids que le reste des indigènes. C'est aussi
l'opinion qu'on a en Asiè des Tartares Durâtes. Le peu de Guaraons que j'ai
vus étoient d'une taille médiocre, trapus et très-musculeux. La légèreté avec
laquelle ils.marchent dans les endroits récemment desséchés, sans enfoncer,
lors même qu'Us n'ont pas de planches liées aux pieds, me paroît être l'effet
d'une longue habitude. Quoique j'aie navigué long-temps sur l'Orénoque,
je ne suis pas descendu jusqu'à son embouchure; les voyageurs qui visiteront
ces marécages rectiËeront ce que j'ai avancé.
3°. Les G~a~Mcr~ ou GMa/Ae/'M. Ce sont les plus habiles et les plus intrépides
pêcheurs décès contrées ;euxseulsconnpissent bien le banc très-poissonneux
qui entoure les îles Coche, Marguerite,Sola et Testigps~banc qui a plus
de ~oo lieues carrées, et qui s'étend, de l'est à l'ouest, depuis Maniquares
jusqu'aux Bouches-du-Dragon. Les Guaiqueries habitent l'île de la. Mar-
guerite, la péninsule d'Araya et le faubourg de Cumana, qui porte leur
nom. Nous avons déjà fait observer plus haut 1 qu'ils croient leur langue un
dialecte de la langue des Guaraons. Cela rapprocheroit ceux-ci de la grande
famille des nations caribes; car le missionnaire Gili 2 pense que l'idiome
des Guaiqueries est un des rameaux nombreux de la langue caribe. Ces
rapports on~ de l'intérêt, parce qu Us font apercevoir ~d'anciennes liaisons
entre des peuples dispersés sur une vaste étendue de pays, depuis la bouche
du Rio Caura 3 et les sources de l'Erevato, dans la Parinie, jusqu'à la Gniane
françoise et aux côtes de Paria.

'T.n.Chap.iv.p.agS. (Voy.!HKm~-f<MCa<p.49). Si le nom do port de Pam-Patar, at'Me de


la Margaerite,est guaiqueri, comme on ne sauroit en dooter, il offre un trait d'analogie avec la langue
cumanagote qui se rapproche du caribe et <ht tamanaque. Sur ta Terre-t'erme~ dans les missions
de Piritu, nous trouvona le villagede C<~t«t-~a«t)-, dont le nom signifie maison de Caygua.
'Chap.tv,p.a98.~<t~r,Tom.ïU!,P.n,p.676.
Lee Cuaiquirie om 0-aikiris, ttatiomea <m;om-d'hm sur les rives de lErerato, et jadis
entre Je
Rio Caura et le Cochivero, près de la petite viUed'Aita-Gracia, Mat-ib d'une origine différente
des Guaiqueries de Cmnama? te connois aussi, dansFintérienrdes terres dans les missions des Piritus,
prësdnTiUagedeSanJuanEvangeltStadel&Mnve, un ravin qui porte très-anciennementle
nom des
Guayquiricuar. Ces indices semblent prouver des migrations du sud-ouest
vers le littoral. La terminaison
Les ~MC~H~y, que ksTamanaquesappeMentjM~o~,peuplade jadis
très-guernère et alliée des CanbM. C'est, un phénomène assez coHènx que de
les trouver mêlés aux Chaymas dans les missions de Cumana; car Icm'idiome
est, avec l'ature des cataractes de l'Orénoque, un dialecte de la langue salive,
et leur site originaire est sur les rives de l'Assivtiru, que les Espagnols
appellent Guchivero.ïtsont poussé leurs migrations ïoo lieues au nord-est.
Je les ai souvent entendu nommer à. l'Orénoque, au-dessus de la bouche du
.Meta; et, ce qui est tres-remarquable~on assure~' que des missionnairesjésuites
ont trouvé des Quaquas jusque dans les Cordillères de Popayan. Raleigh
cite, parmi les naturels de lile de la Trinité, les Salives, -peuplade de mœurs
très.douces de l'Orénoque, qui demeure au sud des Quaquas. Peut-être ces
deux tribus, qui parlent presque la même langue ont-elles voyagé ensemble
vers les côtes.
5." Les Cumanagotes ( ou, selon la prononciation des Indiens, CM~MM~co~o ),
aujourd'hui à l'ouest de Cumana, dans les missions de J?iritu, où ils vivent
comme agriculteurs au nombre de plus de 36,000. Leur langue, de même
que celle des j~enc<M ou Palenques et GM<MWc~, se trouve placée entre
le tamanaque et le caribe, mais plus rapprochée du premier. Ce sont encore
des idiomes d'une même famille; mais, pour les considérer comme de simples
dialectes, il faudroit aussi nommer le latin un dialecte du grec, et le suédois
un dialecte de l'allemand. Lorsqu'il s'agit de l'affinité des langues entre elles,
on ne doit pas oublier que ces auïnités peuvent être très-diversementgraduées,
et que ce seroit tout confondre que de ne pas distinguer entre de simples
dialectes et des langues d'une même familte. Les Cumanagotes, les Tama-
naques, les Chaymas, les Guaraons et les Caribes ne s'entendent pas malgré
les analogies fréquentes de mots et de structure grammaticale qn'onrent
leurs idiomes. Les Cumanagotes habitoient, au commencement du seizième
siècle, les montagnes du Bergantin et de Parabolata. Le père Ruiz-Btanco,
d'abord professeur à Sévitte, et puis missionnaire dans la province de Nueva-
Barcetona, a publié, en ï683, une grammaire du cumanagote, et quelques

caor, qui se tr<m~ dans tant de noms cnmmMgotea et caribes, signifie ravin, comme dans Guaymacuar
( raïin des lézards), ~'<rK-A!tc!<ar (ravin ombragé de pahmen Pincho ou Pu-ttn), CA~tMAM-Nar (favin
de coquilles terrestres). Raleigh décrit les Guaiqueries sous le nom d'OMttefM. tt appette tes Chaymas
&Hma<, en changeant (d'après la prononciation caribe) le che em<.
~<t<e~,Tom.IH,P.ït,p.364.Lemomde ~Ma~aseretronTe accidentellement sur la côtelé Gnmêe.
Les Européensle donnent à une peuplade de Nègres, à l'est du cap Lahon.
~t. ~L-–
théologi~es dans la même
ouvrages théotogiques mêmelangue.
rt"*– Cocheymas, Chacopatas,Tomuzas,
PIritus, f~––
T~_––- Topocuares, confondus
!e indiens
langue. Je a'ai pu savoir si 'les
-–<*–J). âujour-
d'hui-dans tes mêmes villages avec les Cumanagoteset parlant leur langue
ont été originairement des tribus de la même nation. Les ~Tt~f, comme
nous l'avons fait observer ailleurs ont tiré leur nom du ravin ~rtC~MCMar,
où' croît en abondance le petit palmier épineux ~r~M dont te bois
excessivement dur, et par cela même peu combustible, sert à faire des
pipes. C'est dans ce même tieu qu'a été fondé, en i556, le vitiagè de la
Conception de Piritu,cheMieu des missions cumanagotes, connues sous la
dénomination de mission.es de Piritu.
6.° Les Caribes ( Chrtfcj ). C'est le nom que les premiers navigateurs leur
donnent, et qui s'est conservé dans toute l'Amérique espagnole les François
et tes Allemands font tranformé, j'ignore pourquoi, en Caraïbes, eux-mêmes
s'appellent Ça/Ma, Ca~na et Callinago. J'ai parcouru quelques missions
caribes des Z<Z<M<M en revenant du'voyage de t'Orénoque, e; je me bor-
nerai Ici à rappeler que les Galibis (Caribi de Cayehne), les 7t«~oc<M et
les CMKagïMtra~, qui habitoient originairement les plaines entre les mon-
tagnes de Caripe (Caribe) et le village de Matunn, les Iaoi de t'tïe de la
Trinité et de la province de Cumana, et peut-être aussi les GMa~tfc~
alliés aux Palenques, sont des tribus de la grande et belle nation caribe.
Quant aux autres nations dont nous avons indiqué les rapports de
langage avec le tamanaque et le caribe, nous ne pensons pas qu'il soit
indispensable de les considérer comme de même race avec eux. En Asie,
les peuples d'origine mongole diHerent totalement par leur organisation
physique, de ceux d'origine tartare. Tel a été cependant le mélange de ces
peuples, que, d'après les belles recherches de M. deRtaproth, des langues
tartares rameaux de l'ancien Oigour)sont parlées aujourd'hui par des
hordes incontestablement mongoles. Ni l'analogie ni la diversité du langage
ne peuvent suffire pour résoudrele grand problème de la filiation des peuples
elles ne donnent que de simples probabilités. Les Caribes proprement dits,
ceux qui habitent les missions du Cari dans les Llanos de Cumana, les rives

Cand:cegraci!:actJeato,M:Mp:nn<ttis.Peut~tre da geMeAiphanes de Willdenow. (~'etthes


.Pn)/e~.<&<H<~t.~eo~r./)&m<t8ty,p.aa8.)
Je me servirai dorénavant de ce mot ~&M<M ()oca~)&M<~ en supprimant le ~), sans ajouter les
équivalons de ~am/KM, Mf<MM /M-<HMM, steppes ou ~<aMM. Le
pays entre les montagnes eotiëres et la
rive gauche de 1 Orénoque comprend les Llanos de Cumana, de Barcelone et de Caracas.
du Caura et Jes plaines aunprd-estdessourcesde l'Or~noqae~ MidtStmguent,
par leur taille presque gigantesque de 1'toutes les autres nations que j'ai vues
dans le Nouveau-Continent. Faut-il admettre pour cela que ces Caribes sont
une race entièrement isolée.et que les Guaraons et les Tamanaqaes, dont les
langues se rapprochent du caribe, n'ont aucun lien de parenté avec eNx? Je
pense que non. Parmi des peuples d'une même famille, un rameau peut
prendre un développement d'organisation extraordinaire. Les montagnards
du Tyrol et du Salzbourg sont d'une taille plus élevée que les autres races
germaniques; les Samojèdes de l'Altaï sont moins petits et trapus que
ceux du littoral. De même il seroit difficile de nier que les G~Mfsont
de véritables Caribes et cependant malgré l'identité des langues,e
quelle dISérence frappante dans la hauteur de la taille et la constitution
physique!1
En indiquant les élémens dont se compose aujourd'hui la population indigène
des provinces de Cumana et de Barcelone, je n'ai pas voulu mêler des sou-
venirs historiques à la simple énumération des fâits. Avant que Cortès brûlât ses
vaisseaux en débarquant sur les côtes du Mexique, avant qu'il entrât dans la
capitale de Montezuma, en t5aï, l'attention de l'Europe étoit fixée sur les
régions que nous venons de parcourir. En décrivant les moeurs des habitans de
Paria et de Cumana on croyoit dépeindre les moeurs de tous les indigènes du
Nouveau-Continent. Cette remarque ne sauroit échapper à ceux qui lisent les
historiens de la conquête, surtout les lettres de Pierre Martyr d'Anghiera,
écritesla cour de FerdInand-le-Catholique, remplies d'observations fines sur
Christophe Colomb, sur Léon X et sur Luther, inspirées par un noble enthou-
siasme pour les grandes découvertes d'un siècle si riche en événemens extraor-
diuaires. Sans entrer dans aucun détail sur les mœurs des peuples que l'on a
confonduslong-temps sous la dénominationvague de Cumaniens ( Cumaneses ),
il me paroit important d'éclaircir un fait que j'ai souvent entendu discuter r
dans l'Amérique espagnole.
Les Pariagotes d'aujourd'hui sont rouge -bruns, comme les- Caribes, les
Chaymas et presque tous les naturels du Nouveaux-Monde. Pourquoi les historiens
du seizième siècle affirment-ils que les premiers navigateurs ont vu des hommes
blancs cheveux blonds au promontoire de Paria? Ëtoient-ce de ces Indiens
à peau moins basanée, que nous avons vus, M. Bonpland et moi, à lEsmeraIda
près des sources de l'Orénoque Fatals ces mêmes Indiens avoient les cheveux
Relation AMto~M~ yom. 65
aussi noirs que les Otomaques et d'autres tribus dont te teint est le plus foncé.
Etoient-ce des Albinos, comme On en a trouve jadis à l'isthme de Panama? Mais
les exemples de cette dégénération sont très-rares dans la race cuivrée, et
Anghiera de même que Gomara, parlent des habitans de Paria en général,
et l'autre les décrivent comme si c'étoient des
individus. L'un
non de quelques
peuples d'origine germanique: ils les disent blancs et à. cheveux blonds. Ils
ajoutent même qu'ils portoient des vetemens semblables à ceux des Turcs
Gomara et Anghiera écrivent d'après les relations orales qu'ils avoient pu
recueillir.
Ces merveilles disparoissent si nous examinons le récit que Ferdinand Colomb3
a tiré des papiers de son pèce. On y trouve tout simplement l'Amiral que
étoit surpris de voir les habitans de Paria et ceux de rile de la Trinité mieux
~aits, plus cultivés (de buena conversacion) et plus blancs que les indigènes'
qu'il avoit vus jusqu'alors. » Cela ne veut pas dire sans doute que les Pariagotes
sont blancs. La couleur moins foncée de la peau des indigènes, et la grande
fraicheur des matinées, à la côte'de Paria, sembloient confirmer l'hypothèse
bizarre que ce grand homme s'étoit faite sur l'Irrégularité de la courbure de la
terre, et sur la hauteur des plaines dans cette région, comme effet d'un renflement
./Ethiopes nigri, crispi lanati, Pariae incola albi, capiHit oMongis protenais ~<tfM. Petrus Martyr,
Ocean. Dec. I., LU). VI (ed. 1574), p. yt.Utnusque<e!.nsindigen<Bo&tf~<tN<w<n'<e<,pra'<er«M~tfKU&
sok versantur, loc. cit., p. y5. Gomara dit des indigènes que Colomb vit à l'embouchurede la rivière
de Cumana « Las domzeMas eran amorosae, desmudas y Ms~KM ~taa de la casa ) los Indios que van al
campo estan negros del sol. x ~fMt. de ~M /yt<!to<. Cap. Lxxtv, p. 97- Los todiosde Paria son &&MOM y
rnb!os.GarcM,Of~)tde~7ttA<M,tya9,L!h.ïV,Cap.,)m,p.~70.
Ils portoient autour de la tête un mouchoir de coton rayé. Ferd. Colomb, Cap. i.xxi ( Churchill,T. ït,
p. 586). A-t on pris ce genre de coMe pour un tarban? ( Garcia del Origen ffa TM.,p. 3o3.) Je suis surpris
qu'un peupte de ces regtons se couvrit la tête; mais, ce qui-est bien plus curieux encore, c'estqoePinzon,
dans un voyage qu'il 6t seul à la cote de Paria, et dont Pierre Martyr d'AngMert
nons a c<MMervé les
détads, prétend avoir trouvé les indigènes vétus. « ïneolasomnesgenu tenus mares, fœminM surarum
tenus, gossampinis vestibus amictos simptieibusrepererunt:sed viros more Turcarum insoto minatira gos-
sipio ad heUi usum dupUcHus. ( Petrus Martyr, Dèe. !ï, Lib. VH,
p. to3.) Qn'est'ceque ces peuples plus
civilisés, couverts de tuniques, comme sur le dos des Andes, e~ tronvés
sur une côte ou, avant et après
Pinzon, on ne vit que des hommes uns ?
CA~rcA.~ Co/&eA, Tom. H, p. 584 et 586. Herréra, p. 80, 83, 84. M~M, J9t«. ~v«~.

voyageurs.
~Mt«&), Tom. 1, p. 283. « El color era bazo comoes regular
en los Indios, pero mas ctaro que en lu Mas
reconocidas. » Les missionnaires ont l'habitude de nommer M<Me~<M~t,ommême
presque &tMM, les
Indiens moins brnns, moinsbasanés. ( Gt<mt&t, ~M<. de O~no~M, Tom. ï, Chtp, v, $ a.) Ces expreMions
tmprepreapeuvent tromper ceux qui ne sont pas accoutumésaux exagérations que se permettent souvent
les
extraordinairedu globe dans le sens dès parallèles'.AmengoVespncct (su est
permis de citer son prétendu /T?M~ voyage composa peut-être sur le récit
d'autres navigateurs ), Vespucci compare les naturels aux peuples <im~HiM non
pour leur couleur, mais pour la largeur du visage et i'express!on de la
physionomie.
Mais s'il est certain qu'a la fin du quinzième siècle il y avoit, sur les côtes de
Cumana, tout aussi peu d'hommes à peau blanchâtre qu'il y en a de nos
jours, il ne faut pas en conclure que les indigènes du Nouveau-Monde
offrent partout une même organisation du système dermoïdè. Il est aussi inexact
de dire qu'ils sont tous rouge-cuivres, que d'anirmer qu'ils n'auroient pas une
teinte basanée s'ils n'étoient pas exposés à l'ardeur du soleil ou hâlés par le
contact de l'air. On peut partager les naturels en deux portions très-inégales en
nombre; à la première appartiennent les Esquimaux du Grœnland, du Labrador
et de la côte septentrionale de la baie de Hudson, leshabitans du détroit de
Bering, de la péninsule d'Alaska et du golfe du Prince Guillaume. Le rameau
oriental et occidental 3 de cette race polaire, les Esquimaux et les Tchou-
gazes, malgré l'énorme distance de 8qo lieues qui les sépare, sont liés par
l'analogie la plus intime des langues. Cette analogie s'étend même, comme cela
a été prouvé récemment d'une manière indubitable, jusqu'aux habitans du
nord-est de l'Asie; car l'idiome des Tchouktches 4, à l'embouchure de l'Anadyr,
a les mêmes racines que la langue des Esquimaux qui habitent la côte de l'Amé-
rique opposée à l'Europe. Les Tchouktchessont les Esquimaux d'Asie. Semblable
aux Malays, cette race byperboréenne n'occupe que le littoral. Elle est composée
d'Ichtyophages, presque tous d'une stature plus petite que les autres Américains,
vifs, mobiles et bavards. Leurs cheveux sont plats, droits et noirs; mais leur
peau ( et ceci est très-caractéristique dans cette race que je désignerai sous le
nom de la race des ~a<~atM~?!cAot~~e~), leur peau est originairement
blanchâtre. Il est certain que les enfans des Grœnlandois naissent blancs, quel-

~<yM la note C à !a fin du livre.


VnUm non muttmm speciosi sunt, qnontam tatas facies r<M-htWMMbinutataehabent. (AmencI Vespatu
Navigatioprimadans C<yn, Oft. Nov., t555, p. aia. )
Vater, dans te ~t~rK&!<M, Tom. ]N, P. HI, p. 4a5-468, Egede,Crantz, Hearne, Mackensie,PorUoc~,
ChwostotF, DavidofF, Resanoff, Merket Billing, nous ont fait conno!tre la grande famille de ces peuples
Estluimaus-Tchougazesr
Je ne parle ici que des Tchouktches a demeures stables car te~ Tchouktches nomades se rapprochent
des Korceket.
ques-uns conservent cette blancheur, et spuyent dans les plus brunis (les plus
hâlés) on voit paroître le rouge du sang dans les joues
La seconde portion des Indigènes de l'Amérique renferme tous les peuples
qui ne sont pas jE~~M<Htr-?~AoHg~.M~ à commencerdepuis la fivière~de Cook
jusqu'au détroit de Magellan, depuis les Ugaijachmouzes et les Kinaïs du Mont-
Saint-Elie jusqu'aux Puelches et Tehuelhets de l'hémisphère austral. Les hommes
qui appartiennent a cette seconde branche sont plus grands, plus forts, plus
guerriers, plus taciturnes. Ils offrent aussi des dISérences très-remarquables dans la
couleur de leur peau. Au Mexique, au Pérou, dans la Nouvelle-Grenade, à Quito,
sur les rives de l'Orénoque et de l'Amazone, dans toute la partie de l'Amérique
méridionale que j'ai examinée, dans les plaines comme sur les plateaux très-
froids, les enfans indiens, à l'âge de deux ou trois mois, ont le même teint
bronzé que l'on observe dans les adultes. L'idée que les naturelspourroient bien
être des~Mancs hâlés par l'air et le soleil, ne s'est jamais présentée à un Espagnol,
habitant de Quito ou des rives de l'Orénoque. Dans le nord-est de l'Amérique,
au contraire, on rencontré des tribus chez lesquelles les palans sont blancs, et
prennent, à l'âge viri!, la couleur bronzée des indigènes du PérQn et du Mexique.
Michikinakoua, le chef des Miamis avoit les bras et les parties du corps non
exposés au soleil, presque blancs. Cette différence de teinte entre les parties
couvertes et non couvertes ne s'observe jamais chez les indigènes du Pérou ou
du Mexique, même dans les familles qui vivent dans une grande aisance et
restent presque constamment renfermées dans leurs maisons. A l'ouest des
Miamis, sur la côte opposée à l'Asie, chez les Kolouches et Tchinkitans de la
baie de Norfbick) les filles adultes, lorsqu'on les force de se nettoyer la peau,
offrent le teint blanc des Européens. Cette blancheur se retrouve, selon quel-
ques relations 3, chez les peuples montagnards du Chili.
VoHà des faits bien remarquables et contraires à cette opinion trop générale-
ment répandue de l'extrême conformité d'organisation chez les indigènes de
l'Amérique. Si nous divisons ceux-ci en ~~Mt~MM~et non Esquaimaux, nous

Cron~, ~M<. of Green&Ht~, 1667, Tom. p. t3a. Le Greentand parait ne pas avoir <té haMt6 an
11 eiëcle, du moins les Esquimauxne parurent qu'au 14.' siècle, venant de t'Oueot. ( Lac. cit., aS8. )
p.
Entre tes 54° et 58° de latitude. Ces peuples blancs ont été visités McceMtvement par Portlol,
Marchand, BaranoifetDa~idotF. Les TcMnk!tans ou Schinkit sont tes habitans de Me Sitka. ~<!<<r.
Mithr.,T. tII.F. H, p. at8. Marchand, ~cf~e, T. 11, p. 167, t7o.
5 ~o~no, Saggio «t~ «orM œ!<.de/ Chili, éd.
9, p. 393. Doit-ou ajouter foi à CM yeux bleusdes Boroas
du Chili et des Guayanas de l'Uruguay qu'on noue peint comme des peupkt de la
race dOdin? ~Mnt~
~ya~, T; ïï, p. 76.
convenons volontiers que cette classi&càtion n'est pas pins philosophique que
celle des anciens qui ne voyoient dans tout le monde habité que des Celtes et
des Scythes, des Grecs et des Barbares. Cependant, lorsqu'il s'agit de grouper
des peuplades sans nombre, on gagne dé)& en procédant par exclusion. Nous
avons voulu établir ici qu'en séparant toute la race des Esquimaux-Tchougazes,
il reste encore, au milieu des Américains brun-cuivreux, d'autres races dans
lesquelles les enfans naissent blancs, sans qu'on puisse prouver, en remontant
jusqu'à l'histoire de la conquête, qu'ils se soient mêlés avec les Européens.Ce
fait mérite d'être éclairci par des voyageurs qui, doués de connoissances en
physiologie, auront l'occasion d'examiner à l'àge de deux ans les enfans bruns
des Mexicains, les enfans blancs des Miamis, et ces hordes de
lOrénoque qui,9
vivant dans les régions les pins brûlantes, conservent, pendant toute leur vie
et dans la plénitude de leurs forces, la peau blanchâtre des Métis. Le peu de
communication qu'il y a eu jusqu'ici entre l'Amérique du Nord et les colonies
espagnoles, a entravé toutes les recherches de ce genre.
Dans l'homme, les déviations du type commua la race entière portent
plutôt sur la taille s, sur la physionomie, sur la forme du corps, que sur la
couleur. Il n'en est point ainsi chez les animaux, où les variétés se trouvent plus
dans la couleur que dans la forme. Le poil des mammifères, les plumes des
oiseaux, et même les écailles des poisscms changent de teinte selon l'influence
prolongée de la lumière et de l'obscurité, selon l'intensité de la chaleur et du
froid. Dans l'homme, la matière colorante paroît se déposer dans le système
dermoïde par la racine ou le bulbe des poils 3, et toutes les bonnes'observations
prouvent que la peau varie de couleur par l'action des stimulus extérieurs
dans les individus, et non héréditairement dans la race entière. Les Esquimaux
du Grœnland et les Lapons sont hâtés par l'influence de l'air; mais leurs enfans
naissent blancs.Nous ne prononcerons pas sur les changemens que là nature peut
produire dans un espace de temps qui excède toutes les traditions historiques.
Le raisonnement s'arrête dans ces matières, lorsqu'il n'est plus guidé par l'expé-
rience et les analogies.
Les peuples qui ont la peau blanche commencent leur cosmôgonie par des
hommes blancs; selon eux, les nègres et tous les peuples basanés ont été noircis

Ces peuplades & teint blanchâtresont les Guaicas, les Ojos et les Maquiritares.
Les peuples circoopolaires des deux continens sont petits et trapus, quoique de races très-différentes.
D'après les recherches intéressantesde M. Gaultier, sur l'organisationde lapeau de l'homme, p. 5 y, John
n
Hunter observe que, dans plusieurs animaux,la coloration du poil est Indépendante de cette de la peau.
du soleil. Cette théorie, adoptée par les Grecs',
ou brunis par l'ardeur excessive
quoique non sans contradiction', s est propagée jusqu'à nos jours. BuSbn a redit
en prose ce que Théodectës avoit exprimé en vers, deux mille ans avant, « que
les nations portent la livrée des climats qu'elles habitent. "SI l'histoire avoit été
écrite par des peuples noirs, ils auroient soutenu, ce que récemment des Euro-
péens mêmes ont avancé 3, que l'homme est originairementnoir ou d'une couleur
très-basanée, qu'il a blanchi dans quelques races par reffet de la civilisation et
d'un affoiblissement progressif, de même que les animaux, dans l'état de
domesticité, passent d'une teinte obscure à des teintes plus claires: Dans les,
plantes et dans les animaux, des variétés accidentelles, formées sous nos yeux,
sont devenues constantes, et se sont propagées sans altération mais rien ne
prouve que, dans l'état actuel de l'organisation humaine, les différentes races
d'hommes noirs, jaunes, cuivrés et blancs, lorsqu'elles restent sans mélange,
devient considérablement de leur type primitif par l'influence des climats, de
la nourriture et d'autres agens extérieurs.
J'aurai occasion de rappeler de nouveau ces considérations générales, lorsque
nous monterons sur les vastes plateaux des Cordillères,qui sont quatre à cinq fois
plus étevés que la vallée de Caripe. tl me suffit ici de m'appuyer du témoignage
d'UHoa Ce savant a vu les Indiens du Chili, des Andes du Pérou, des côtes
i
'.<
&raAo,Lib.XV
T;~ irv~ !7~
(e~. Ojon. fa/eoM., T. tt p. 990).
T H, t
)
Ouesicritus,apnd &a&on., Lib., XV ( <oco ett., p. 983 ). L'expédition d'Alexandre paroit avoir beau-
coup contribué <t fixer l'attention des Grecs sur la grande question de t'inNueneedes climats. Ils avoient
appris par des voyageurs que, dans t'HindostaUj les peuples du midi étoient plus basanés que ceux du
nord, Toisins des montagnes, et ils supposoient que les ~ns et les autres éto!emt de la même race.
~<yee l'ouvrage de M. Prichard, plein de recherches curieuses /!eMafcAM tMo the ~A~Mc<t<
~rM<.o/M<t7t,t8t3,p.a33,a39.
Par exemple, la brebis pieds de devant très-courts, appelée <Meo/t tAe~p dans le Conectico.t, et
examinée par Sir Everard Home. Cette variété ne date que de l'année t~ot.
5 nLes Indiens (Américains) sont d'une couleur cuivrée qui,
par t'efFet du soleil et de l'air, devient
plus obscure. Je dois avertir que ni la chaleur ni le climat froid ne produisent de changement sensible
dans la couleur, de sorte que t'on confond aisément les Indiens des Cordillères du Pérou avec les Indiens
des plaines les plus chaudes, et que l'on ne peut distinguer par la couleur, ceux qui vivent sous la ligne de
ceux que l'on trouve par les 4o° de latitude nord et sud. n ~Vo<M'«M «mefKMHMM, Cap. xvn, p. 307.
Aucun auteur ancien n'a aussi claitement indiqué les deux formes de raisonnement par lesquelles on
explique encore de nos jours les diBefëncesde conteur et de traits, parmi des peuples voisins,que Tacitedans
la Vie d'Agricota. Il distingue entre~tesdispositions héréditaires et l'influence des climats; et,
comme un
philosophe qui est persuadé de n<Mre profonde ignorance sur l'origine des choses, it ne décide rien.
Habitus cotpommvarii o~tte ae eo CrgMnte~a. &t< durante originis vi Mtt~octH-Mntt&tMin diversa ~rrM,
positio cœ/t corporibus habitum dedit. Agricola,Cap. n.
brûlantes de Panama, et ceux delà LoUmane,sttuëe sous la zone tempérée
boréale. !ï a eaîavaatage de vivre & âne é~~ tes théof~esétoi~nt moins
maltipliéës, et, comme mot, il a ëtd trappe de voir que l'indigène, sous la ligne,
est aussi bronza, aussi bran ~as le dimat~ Cordillères, que dans les
plaines. Lorsqu'on observe des dISëjMnces~de couleur, elles tiennent à la race.
Nous trouverons bientôt, sur les rives brûlantes derôrénoque~ des ïndiens à
peau blanchâtre est <~M~?M on~MM VM. `
NOTES DU LIVRE !!ï.

Note A.

Je vais donner ici une notice des grammaires de langue* américaine: que j'ai rapportée* en Europe,
et sur lesquelles l'Intérêt des savansaétéC~é récemment par les travaux de MM. Hervas,GH!,Barton,
Vater et Schlegel.
Bernardo de ~~o, gMt)tM<tca de la lengua ~e<M~t/ del ATtefo Reyno de Granada o <<e &t &n~M <~ ~M
j)f.K~te<Mo~)fozcat.~f<MtrMf,t6tQ.
t Diego Gon:<t~ ~Nb~Mtn, ~ocotM&trtO<& la lenguageneralde <<x~o e/ Peru, /A!mo<&t&ngtMt ~tMC&Mt o
del Inca, eon/orme a la propriedad cofteMnat <5Meo. C<tK&~<& &« ~!<ye<~ 1608.
GmnM«catfh&)!&ttgtM~7nc<t.~t)!Mt,ty53.
<~e JtfoNtM, ~oe<~H&n-to<& & ~tgzM Jtftitteana. ~<.ttc0y tS~~
~t<g!M<M t~ ~«a!n<ct< ~r« t<<, la ~t~M af<œte<tM. ~f~fM', 1673.
.~M. ~M~Mex G<M~&<~ ~ïo~m. A ~MMa JtfMtt'an<t. ~eMa tb &)<
e<<e <& &B~fM ~~<~
tBgS.
L. <<e TVefe~ Jtfo&M., ~&Md!eor<o~r<t, ~cetonorM~ or<e ded t~mxMt Othomi. ~«tco, tySy.
Carlos <<e Tapia Zen<e<M, j~o~oMt de la &m~!«t ~MM<eeo, con <<oc~-HM) cArMtMno. Jtfe*&'o, t76/.
7'n<o!tto<ot~e<,CMtm<t<tc<tcfe&t~)!gMoJtfM<eca.~)fM;MO,tSQ5.
J<Me Zambrano Bonidla, cm-s <&) San ~n<&-M ~t<c<<~<tn, arte de la &n~M<t '~Xonaca, con una
doctrina de la lengua de Naolingo, con <MB<M foee«&<<t&ngM<tf<e<~tM/&t<t«-My~e«<t~of<K-<t,
par Franc. Dominguez, ettMtffe JÏ<t~)on.\F't<e&&t de/ot -~n~e<ty5a.
Vote de Ortega, ~oM~/srtO <M~ lengua C<M<<~&tna~ Cora. Mexico, t~3a.
J~n!XtBMnM, Gra~ta<tM de la &)tgtM Caribe. ( Manoecrit. )
Mon frère, M. GaHIamne de Humboldt, quia a fait une étnde approfondie des langue* américaine*,
a enrichi cette collection des ouvrages snivans C. fh Tapia Zenteno, a~e ttopMMma ~n~tM JfMtMtM.
Jt?ej[M'o,ty53.
7ï<ymot!c! Breton, Dict. Ctt~tt&e-KfOM. ~Mofre, i6€5.
Dictionnaire Galibi, par M. D. L. S. 7*0~63.
~.MM Figueira, CM;ttS<K!<! de la lengua ~Mt/. ~M~M 1 yoS.
~.ctc.BmH.M&.t~nS.
H possède en outre quatorze tnanoscr~ copiés
mr ceux de l'abbé HervM et de la Propagandaa
Rome': i. ~M. sur &t&M~M ~<ByMe oM ~<M<)M. a. JtfM.
<rttr la langue <&< 0&)~<e<. 3. ~fM. «H'/o
langue Maya on du ~ttca~M. 4. ~M. sur /M &t~MM
~~n~. ~M Y<tta)-<.<. 6. ~M. <na-~ &M~MB<
fO~ao~tM M ~M& 5.
~M. «M-
y. jfM. sur la ~<tn~ OMMgMO. 8. JtfM.
<M- la
&Mg!M~MoXM,~<H-&~n!CaaMao.9.JtfM.<~&,t,n~«.CMMM.
iO.~fM.tttr&t~~MCtMMartt
ot<a.tt.~M.Mr&t&m~M~rocoM.ta.J<fM.<t<r&.&tMZ(t&.
i3.Mm.ttM.&t langue du ~Mjoont.
i4. ~M. ~r ~g~ ~rawaM CM& Cette notice offre plus de trente langues américaine,qui ont
été réduites en grammaires à l'usage des moines missionnaires.Il m'a
pam d'autant pins nti!e de h con-
signer ici, que les plus riches bibliothèques de t'Europe.
par exemple celle d. Roi à Patis, né noM~dent
pas trois grammaires de l'Amérique espagnole.
~o<eB.

Langée des Chayn<Mdans te* mMont de CWpe Co~mne~ t~MOi~Mtf ou tt~MOttMf, ma chasse, ce
C-M'e,mo!-même. quej'a!tné.
Eure, tu, toi. ~<Hrf, «n~n~pM~ou enef~po, &*n cmTfage.
Teure, il, lui. ~M<e, magicien,médecin.
?~«feeon, etn-mêmea. fcorotMMM, diable, mauvais esprit.
<~c~rc,moiauMi. Chavi, tigre, jaguar.
~'M~a.àtoi. CAofHMct, descendant du tigre, expression figurée
Tuya, peut-être, teuya, à lui. pour désigner an homme cruel.
Taquer, avec lui. 7b~&&, coq. ·
t~a ou M~Maf~, comme moi. ~'beera, poule.
t/eorym, pas comme moi. Cuivivi, camard.
J)ft<me, muenere, ce!m-!A. ?~et<cAt, colibri;
?!'m«ient, tout cela. Sicotu, chique ntgua, Pn!ex penetraus.
?!&ttpt~pnt~ un sent. Ba<tf<o, en prononçant le b presque comme/ B&te.
~cAocono, tous les deux. Camo, chanter.
~cAonMono,tous les trois. Tandema, demain.
!7cAe<yc~M-, McAeM-<tnxt,moi-même, entasistantj C~M~tte prends, impératif.
J
moi sans en douter. ~Mca, porte, impératif.
?~«er, avec lui. Th~pM, il crève.
Upuyao ou t~)Hn~<to pour moi. Keaoptreipnei, il est malade.
CMM je suis (az, être ~-M, moi donc moi être). Tiiptntepo~K, il fait chaud.
Pra, pas, non. ?!MM<ttnp<~t,U<ait froid.
~M, soleil. il tonne.
~VeMe&'<tne,
Nana, looe. Tït~po&poo maney, dé)a vient l'averse.
ù~<*te«. Vénus. Mico ttM-MH"Hp<Mt, un enfant est né.
~ï&t&oret,les Pléiades. 7h~«erM~t<e canMH~y, ou <Mpf~c<tBMtn< es-tu
Apotos, feu. marié?
Tana, eao. ?}Mn«'cam<MM~ et-tn mariée?
0['a<~po, pluie, averse. ?ttgMefu~tt<ga<M,je suis marié.
Pemsi, vent. ?t<tMt~t<eg!M:,je suis mariée.
Mico, enfant. Iguanepuin use, ou tpM'tMpfo, je suis ~euye.
Ures fille. ~gmeftcA~pM~M*,ou tpt«<epnt, je suis veuf.
!7m/o<, garçon. J,p«Me<ac~ marie-toi, en parlant à une femme.
~Mne~p«rou ipuetepuin veuf. Ipuetetac, marie-toi en parlant unhomme.
7pKe<~M<r, veuve. Epuitpe tttC&Mt BMt'Ae, que ceUe-ci soit ta femme.
?~«en:~Mett, le marié. 7t<pagt«<MjpM<,j'a<mangé assez.
7!«mey!ten, ia mariée. ~i~ptteoMere, pour toi.
Ye, arbre ou bois G~pMKcomKM,ou cttpHeeon~ on c«pM)'econ, pour
GMey, hangard. nous.
Chinchorro, hamac. Ipuec ipagua, it est avec lui.
C%!tm<M<r, fièvre. Onquapan, ou aponomac,donne-moidairantage.
M)<onMea<t,cela a 6ni. GtMrqMtnMt,je porterai davantage.
~'an<M ou paremano, c'est assez. j~uec charpe g)H<M, je suis gai avec toi.
~jMMeo<qM)W!~il aime à tuer. C<«!~tM cMMMM~o,ou CMmu~MC, ils vont tuer da
Notomocan, c'est fini. gibier.
G«ana~pMec,H cultive son jardin. ~a<a)!M~ chemin.
Çt<e)MfpMnM:e je ne î'ai vu. Conopyaune,ou conqy<t)'< !oM de t'aTerM.
.~<M yeef<M, le maïs se mouiUe. Q«e<~o<t<pm ~MO~tMt, je ne le eonttoia pas.
7'eor~!«t,itfaitgtMsant. QfMnepra ytto~Moz, je ne l'al pM vn.
Imoron, on imoromnique, empoisonneur. Terepuirpuec, pourquoi $'enftie-t-it?
?t<MjptK)p<Me, il se meurt. 7!<raj'opMc,&eMsedehtmaMie.
yoraMn~ao ou tora~Mconttao il aura peu Chetayma, en dedans.
JV«nM<!o, au clair de tune. CMm<«n/MOtn il voulut le frapper.
~<~xt<ec~M,ils doivent apprendre. E~a<a)' guane mana, il y a du miel dam ma cahane.
Etatechin, ils doivent entendre. ?tfntanent<t,toujours danser.
J?ntr<e<n~ ils doivent faïre. P<<cAHtn~ ) j'irai aussi.
Uyare OB~Mqje, donne-moi aussi. Jtf<Mp<!n<onoaMtapotoaca itumuecon seulement les
~4macAen~)~tM, va me porter. méchans iront au feu. `
~mna <;MM, ou en:M, allons. ~'<!<MCM)!Mn<tn%e<MMn,Iepereest-itaC)UBana?
tJE<~<t, qu'est-ce que cela? Camanantacamana oai, il est à Cumana.
JtfananeyMMt, on l'appelle. ~on&!o<Mco<t, ou tafonocen ceux d'ici.
Ipunet, il le veut. ~f~onoeoo, ceox de là-bas.
~nee narepo, qui l'a vu? ye~uMjoMeceapt<em)<M,jëteNa!a!'arb)'e.

Note C.

Lorsque Christophe Colomb revint de son troisièmevoyage, an bruit confus se répandit dans toute l'Eu-
rope qu'il avoit reconnu, à dé certains mouvemensde la polaire, que la côte de Paria et la mer circonvoisine
étoient élevées comme un vaste plateau; que la terre n'étoit pas tont-a-Mt tonde, mais que (dans les con-
trées de l'ouest ) eU~ avoit nn renflement vers l'équateur qu'on montoit en allant de Cadiz à la péninsute
de Paria, et qu'à cause de cette grande élévation des terrains occidentaux, on trouvolt a Paria un climat
moins ardent et des hommes moins basanés qu'en Afrique. Tous les écrivainsde ce temps (ont mention
de ces hypothèses bizarres. (Petr. Martyr. Océan., Dec.ï.Lib.Vtf,?. Gomaro,B«t<M.,Cap.vtn,
p. 110. Herera, Dec. I, Lib. tM, Cap. xu.)
Mai~queHe étoitt'observationde la polaire qui avoit pu faire croire à Christophe Colomb des choses si
étranges? Ferdinand Colomb nous t'apprend dansïaViede son pcre ( C~Kn-/<~<Co~. T. ït, 583). L'Amirat
p.
avoit observé,surk parallèle desîles Acores, la haNtenr méridiennede la polaire au-dessus et an-dessons du
pôle. La différence de ces deux hauteursétoit S", et il en résuhoit a° 3o' pour la distance de t'étoite
an po)e
tandis que, par un calcul trigonométriqne, on trouve qu'eUe devoit être à cette époquede 3°a4'3o". L'er-
feurétoitdoncde 54' en moms. Cotombjugeo:tdespassagesde la polaire par la position de la grande Ourse.
Quand le Chariot étoit à l'est «a à l'ouest, il ind:nn<Ht !e passage de !a polaire méridien mais cette indi-
an
cation étant très-incertaine, Colomb n'étoit pas sûr d'observer au moment où la polaire étoit dans le
méridien; la hauteur inférieure de la polaire devoit être trop.grande, et la hauteur supérieure
trop petite,
ce qui explique pourquoi Colomb n'a tromvé que 5<' de dilférence entre les deux hauteurs.
Sous la zone torride,vers y& 8" de latitude boréale, Colomb trouva ta polaire élevée de
t f an dessus de
l'horizon au méridien supérieur, et seulement de 6° lorsqu'elle étoit digression à la hauteur pote,
en ou du
ce qui lui donnoit une distance polaire de 5°. Ici Colomb supposoit encore que la polaire étoit
au
la
méridien supérieur, ~mfque le Chanojt êjtoit M'ouest; mais Mtmne
ménd!eninférienr,pareequ'elleétoit<Mpbt~,~observa htuMar~
il ne poatoitp" T0:r !a claire au
supérieur, et indiquoit la digression de ~Ëte. I~poMre lui parut eacore Ma hauteur de g)* lorsquele
Chariotétoit anméridienin~ieur~etp~rconséquent invisible & cause du pemd'elévatiom dm pôle.
Si la constellation indiqnoitmall~passtget delapolaireau méridien, iIparottqn'eMeindiqw't encore
plus mal les digressions, car it est bten pro!~h!e qnë Cotomh prenott la hauteur de ta })oh<Mi<h'~f'~e
Étottau-demoM de!ad'gremiemetdM~te,entort~MtM''T<tamehanteBr h-oppettte, etMM) d!ttamce
potaire de 5" an t!em de a'* 3o'qa'it av<)!t conct)t de tee ohMfratmm aux A~oret. Fonr se rendre MXott
d'une si grande diCerento, Colomb pensa qBBLUiprte m'a~Mt pas ta forme d'une ~e/oMf, mau d'une ~o~e,
et qu'on s'éterottprodigieMententveM k c(et,en aMantdes~cor~oh le cercle décrit par la
polaire devoit pa~ître fort grand, parce qn'it etoitvtt de plus près. « D'aittenrt, dit-il, quoique }€ ne
mb pas bien tnattre de mon e~pMcatJOn, t'étoiteparoit dans son orbite entière soust'eqnatenr, tandis
que plus on approche du pote,etptas cette orbite diminue, aca<tse de t'obliquitedociet."tout ceci
n'est pas feit pour nous donner une idée taToraMë des connoissances aetfonomiqoes de Christophe
Colomb. Comment admettre que ce grand homme n'ait pas eu des notions ptM justes sur la distance des
étoiles et totrs monvemens apparens?Ii'Atnirat raconte qu'il souffroit d'nne inflammation des yen!.
pendantte temps qu'il étoit sm- tesc&tes de Paria A-t-il observé plus mat qu'a t'ordinau-e,ou a-t-il marqué
sar son {eumat les observationsdes pilotes? Peut-être anssile Bis a-t-il eonfasémenténoncéles idéesdu père.
Gomara Marne t'Amicatd'avoir cru que ~*an<t est plus près des ciem que l'Espagne. ta terre, dit-il,
est ronde et non de la Bgnre d'une poire. Cette&asse opinion de Colombs'est soutenue jusqu'à nos jours
et fait croire aux pilotes, qui ne sont pas lettrés,que, des Indes et de Pariaen Espagne, on va en descendant
cueeta n&citf. f Pierre Martyr d'Anghicra juge aussi l'Amiral avec beaucoup de sévérité. Qua: de poli
vanetate refert Cotonus, contraomnium astronomorum sententiamprolata videntur. n
LIVRE IV. 1

CHAPITRE X.

SECONP SEJOUR A CCMANA.–TREMM.EMENSDE TERRE. – METEORES EXTRAORDMAtRES.

Nous restâmes
encore un mois à Cumana. La navigation que nous devions
entreprendre sur l'Orénoque et le Rio Negro exigeoltdes préparatifs de tout
genre. Il f~Hoit choisir les instrumens les plus faciles à transporter dans des canots
étroits; il falloit se munir de fonds pour un voyage de dix mois dans l'intérieur
des terres, à travers un pays qui est sans communication avec les côtes. Comme
la détermination astronomique des lieux étoit le but le plus important de cette
entreprise, j'avois un grand intérêt à ne pas manquer l'observation d'une éclipse
de soleil qui devoit être visible à la fin du mois d'octobre. Je préférai rester
jusqu'à cette époque à Cumana, où le ciel est généralement beau et serein. Il
n'étoit plus temps d'atteindre les rives de l'Orénoque, et la haute vallée de
Caracas offroit des chances moins favorables, à cause des
vapeurs qui s'accumulent
autour des montagnes voisines. En fixant avec précision la longitude de Cumana,
j'avois un point de départ pour les déterminations chronométriques, les seules
sur lesquelles je pouvois compter, lorsque je ne m'arrétois pas assez long-temps
pour prendre des distances lunaires ou pour observer les satellites de Jupiter.
Il s'en fallut peu qu'un accident funeste ne me forçât à
renoncer au voyage à
l'Orénoque, ou du moins à l'ajourner pour long-temps. Le
37 octobre, veille de
l'éclipsé, nous allâmes, comme de coutume, au bord du golfe pour prendre le frais
et pour observer l'instant de la pleine mer/dont la hauteur, dans ces parages,
n'est que de 12 à i3 pouces. Il étoit huit heures du soir, la brise souSIoitpoint
ne
encore. Le ciel étoit couvert, et, pendant un calme plat, il faisoit
une chaleur
excessive. Nous traversâmes la plage qui sépare de l'embarcadère le faubourg des
Indiens Guaiqueries. J'entendis marcher derrière moi;
en me tournant, je vis
un homme d'une taille élevée, de la couleur des Za~Ao~, et nu jusqu'à la cein-
ture. Il tenoit presque au-dessus de ma tête une macana, gros bâton de bois de
palmier, renflé vers le bout en forme de massue. J'évitai le coup en faisant un
saut vers ta gauche. M.Bonplaad, qui marehoit~ ma droite.fut moins heureux.
Il avoit aperçu le Zamboplustard qaemoi; il reçut au-dessas de la tempe un
coup qui l'étendit par terre. Nous nous trouvionsseuls, sans armes, à une
demi-
lieue de toute habitation, dans une vaste plaine bordée par la mer. Le Zambo,
chapeau de
au lieu de m'attaquer de nouveau, s'éloigna lentement pour saisir le
M. Bonpland, qui, en amortissant un peu la violence du coup, étoit tombé loin
de nous. Enrayé de voir mon compagnon de voyage terrassé et sans connoissance
pendant quelques instans, je ne m'occupai que de lui. Je l'aidai à se relever; la
douleur et le ressentiment redoublèrent ses forces. Nous nous portâmes sur le
Zambo qui, soit par une lâcheté assez commune dans cette caste, soit parce
qu'il aperçut de loin quelques hommes sur la plage, ne nous attendit point, et se
mit à fuir vers le Tunal, petit bocage de Raquettes et d'Avicennia arborescent.
Le hasard le fit tomber en courant; M. Bonpland qui l'avoit atteint le premier,
se prit corps à corps avec lui, et s'exposa au danger le plus imminent.
Le Zambo
tira un long couteau de son caleçon et, dans cette lutte inégale, nous aurions
été blessés indubitablement, si des négocians biscaïens, qui cherchoient le frais
sur la plage, n'étoient venus à notre secours. Se voyant entouré, le Zambo ne
songea plus à se détendre il parvint à s'échapperde nouveau et, après que nous
t'eûmes suivi long-temps en courant à travers les Cactus épineux, il se jeta comme
par lassitude dans une vacherie, d'où il se laissa conduire tranquillement à la
prison.
M. Bonpland eut la fièvre pendant la nuit; mais, plein de courage et doué de
cette gaîté de caractère qu'un voyageur doit regarder comme un des dons les plus
précieux de la nature, il continua ses travaux dès le lendemain. Le coup de la
/M<K;<Mc avoit porté jusqu'au sommet de la tête; il
s'en'ressentit deux à trois
mois, pendant le séjour que nous urnes à Caracas. En se baissant pour ramasser
des plantes, il fut plusieurs fois saisi d'un étourdissement, qui nous fit craindre
qu'il ne se fut formé un dépôt intérieur. Heureusement ces craintes n'étoient pas
fondées, et des symptômes, d'abord si alarmans, disparurent peu à peu. Les
habitans de Cumana nous donnèrent les marques les plus touchantes de leur
intérêt. Nous appnmes que le Zambo étoit natif d'un des villages indiens qui
entourent le grand lac deMaracaybo-tl avoit servi sur un corsaire de l'île de
Saint-Domingue et, à la suite d'une querelle avec le capitaine, il avoit été
abandonné sur les côtes de Cumana, lorsque le navire avoit quitté le port. Ayant
vu le signal que nous avions fait placer pour observer la hauteur des marées, il
guéta le moment où il pourroit nous attaquer sur sur !a ptage. MMais pourquoi après
la plage.
avoir étendu par terre un de nous, scmbloit-il se contenter du simple vol d'un
chapeau ? Dan~ un interrogatoirequ'il subit, ses réponses furent à la fois si con-
fuses et si stupides, qu'il étoit impossible d'éclaircir nos doutes; te plus souvent
il soutenoit que son intention n'avoit pas été de nous voter, mais qu'irrité des
mauvais traitemens qu'il avoit endurés à bord du corsaire de Saint-Domingue,It
n'avoit pu résister au désir de nous faire du mal dès qu'il nous avoit entendu
parier françois. Comme la justice est si lente dans ce pays, que les détenus dont
regorgent les prisons, restent sept à huit ans sans pouvoir obtenir un jugement,
nous apprîmes avec quelque satisfaction que, peu de jours après notre départ
de Cumana, le Zambo avoit réussi à s'échapperdu château Saint-Antoine.
Malgré l'accident fâcheux arrivé à M. Bonpiand, je me trouvois, le lendemain
d8 octobre, à cinq heures du matin, sur là terrasse de notre maison pour me
préparer à l'observation de l'éclipsé. Le ciel étoit beau et serein. Le croissant de
Vénus, et la constellation du Navire, si éclatante par le rapprochement de ses
immenses nébuleuses, se perdirent dans les rayons du soleil levant. J'avois d'autant
plus à me féliciter d'un si beau jour que, depuis plusieurs semaines, les orages
qui se formoient régulièrement au sud et au sud-est, deux à trois heures après
le passsage du soleil par le méridien, m'aVoient empêché de régler les montres
par des hauteurs correspondantes. La nuit, une de ces vapeurs roussâtres qui
n'affectent guère l'hygromètre dans les basses couches de l'atmosphère, voiloit
les étoiles. Ce phénomène étoit d'autant plus extraordinaire, que, dans d'autres
années, il arriva souvent que, pendant trois ou quatre mois, on ne voit pas la
moindre trace de nuages et de vapeurs. J'eus une observation complète du progrès
et de la fin de l'éclipsé. Je déterminai la distance des cornes ou les différences de
hauteurs etoazimuth par le passage aux fils du quart de cercle. La 'fin de l'éclipsé
étoit à 2''ï4~5"')4? temps moyen de Cumana. Le résultat de mon observation,
calculée, d'après les anciennes tables, par M. Ciccolini, à Bologne, et par
M. Triesnecker, à Vienne, a ét~ publiée dans la Connoissance des fe7KM'. Ce
ï
résultat ne différoit pas moins que de 'g~ en temps de la longitude que j'avois
obtenue par le chronomètre; mais recalculée par M. Oitmanns, d'après les nou-
velles tables lunaires de Burg et les tables du soleil de Delambre, l'éclipsé,et
le chronomètre se sont accordés à 10" près. Je cite cet exemple remarquable
d'une erreur réduite à y par l'emploi des nouvelles tables-, pour rappeler aux

~:9,p.i42.Zach~on.Co/TM~Vo!.ï,p.59'(~o).Ma,MsHanoteA&taCn dece4.'t!ïre.)
voyageurs combiet~lestdëleur intérêt de noter et de puMierjusqn'au
détails de ïears observations partieltes. L'harmonie par&ite~ trouvée M~ lieux
mêmes~entre les satellites de Jupiter et les résultats chronométriques, m'avait
inspirébeaucoup deconnance dans la marche du garde-tempsde Louis Berthoud,
chaque fois qu'il n'était point exposé aux fortes secousses des mulets
Les jours qui précédèrent et qui suivirent celui de l'éclipsé du soleil, surirent
des phénomènes atmosphériquestrès-remarquables. C'étoit ce qu'on appelle,dans
ces contrées, la saison d'hiver,
c'est-a-dire~elle~es nuages et des petites pluies
ë!ectriques. Depuis le io octobrejusqu'au3 novembre, à l'entrée de la nuit, une
vapeur roussâtre s'élevoit sur l'horizon et couvroit en peu de minutes, comme
d'un voile plus ou moins épais, la voûte azurée du ciel. L'hygromètre de Saussure,
'loin de marcher à l'humidité, rétrogradoit souvent de go" à 83". La chaleur du
jour étoit de 28° à 32°, ce qui, pour cette partie de la zone torride, est une
chaleur très-considérable.Quelquefois, au milieu de la nuit, les vapeurs dispa-
roissoient dans un instant; et, au moment où je plaçois les instrumens, des
nuages d'une blancheur éclatante se formoient au zénith et s'étendoient jusque
vers l'horizon. Le ï8 octobre, ces nuages avoient une transparence si extraor-
dinaire, qu'ils ne cachoient pas les étoiles de la quatrièmegrandeur.Je distinguois
si parfaitement les taches de la lune, qu'on auroit dit que son disque étoit ptacé
au-devant des nuages. Ils étoient à une hauteur prodigieuse, disposés par bandes
et également espacés, comme par l'effet de répulsions électriques. Ce sont ces
mêmes petits amas de vapeurs que j'ai vus au-dessus de moi sur !e dos des Andes
les plus élevées, et qui, dans plusieurs langues, portent le nom de moutons.
Lorsque la vapeur roussâtre couvroit légèrement le ciel, les grandes étoiles qui,
généralement, à Cumana, scintillent à peine au-dessous de 20" ou aS", ne conser-
voient pas même au zénith leur lumière tranquille et planétaire. Elles scintitloient

Voiciles résultats de l'ensemble des observations de longitude, faites à Cumana, en t ygg et 1800
Corogne.
soteit.
Par le transport du temps de la 4h a6' 4"

Par des distances !<toaires<


Par dix Immersions et ÉmersioM des Satellites 4h a6' 6"
4'* aS' 3a"
e

1-ongitade de Cumana.
Par l'éclipse dn

Voyez mes 0~.<M<~n.,Vot.t, p. 64-86.


4" a5' 55"
4''a5'54"
Ilfaut se rappeler que, par cette latitude, à des époques ou il ne pleot jamais, l'hygromètre de
Saussure se soutient assez constamment entre 85° et 90*, la températureétant de a5'3o' En Europe au
mois d'août, à la même température, t'bnmMité moyenne de l'atmosphère est de /8'8o°. ~cyM plus haut,
p. aM.
5ta I.IVRËÏV.
hauteurs, comme après une fôrte
les hauteurs,
à toutes les torte pluie
pluie d'orage Je fus frappé de
rhygrometr< à la surface du sol. Je restois
cet effet d'une brume qui n'anectoit pas l'hygromètre
une partie de la nuit assis sur un balcon, d'ou je découvrois une grande partie
de l'horizon. Sous tous les climats, c'est un spectacle attrayant pour moi de
fixer les yeux, par un ciel serein, sur quelque grande constellation, et de voir se
former, s'agrandircomme autour d'un noyau central, disparoftre et se former de
nouveau des groupes de vapeurs vésiculaires.
Du 28 octobre au 3 novembre, la brume roussàtre fut plus épaisse qu'élle ne
l'eût encore été: la chaleur des nuits paroissoit étouffante, quoique le thermo-
mètre ne s'élevât qu'à 26°. La brise qui, généralement, rafraîchit l'air dès les huit
ou neuf heures du soir, ne se fit pas sentir du tout. L'atmosphère paroissoK
comme embrasée; la terre poudreuse et desséchée se fendilloit de toute part.
Le novembre, vers les deux heures après midi, de gros nuages d'une noirceur
extraordinaireenveloppèrentles hautes montagnes du Brigantin et du Tataraqual.
Ils s'étendirentpeu à peu jusqu'au zénith. Vers les quatre heures, le tonnerre se
fit entendre au-dessus de nous, mais à une immense hauteur, sans~ roulement,
d'un bruit sec et souvent interrompu. Au moment de l'explosion électrique la
plus forte, à 12~, il y eut deux secousses de tremblement de terre qui
se succédèrent à i5 secondes de distance l'une de l'autre. Le peuple jetoit les
hauts cris dans la rue. M. Bonpland, qui étoit penché au-dessus d'une table
pour examiner des plantes, fut presque renversé. Je sentis la secousse très-
fortement, quoique je fusse étendu dans un hamac. Elle étoit dirigée, ce qui est
assez rare à Cumana', du nord au sud. Des esclaves qui tiroient de l'eau d'un
puits de plus dë~dix-huit à vingt pieds de profondeur, près du Rio Manzanares
entendirent un bruit semblable à l'explosion d'une forte charge de poudre à
canon. Le bruit sembloit venir du fond du puits, phénomène très-singulier,

Je n'ai observé aucun rapport direct entre le scintillement des étoiles et la sécheresse de l'air.dans
cette partie de l'atmosphère qui est sbnmiMà nos expériencesJ'ai vu souvent 4 Cfmtana Un fort scintille-
ment des étoUes d'Orion ou du Sagittaire, l'hygromètre de Sanssure se soutenant a M". D'autre* fois, ces

,h3..
mêmesétoiles, placées à de grandes hantemrs om dessus de~'horixon, répandoientune lumière tranquille
et pfanétaire, l'hygromètre étant à 90° et oS". Ce n'est probaNementpas la quantité de
vapeoK contenues
dans l'air, mais la manière dont la vapeur est répandue et plus ou moins parMtemeatditsoute, qui déter-
mine le sei~ltement, constamment accompagné d'une cotoration de lumière. !1 est
assez remarquable
que, dans les pays du Nord, le scintillement est le plus fort par un très-grand froid, à une époque où
l'atmosphère paroit éminemment sèche, (~oy~ la note B.)
Dans la plantation (chara) du colonel d'artillerie don Antonio Montana. ~<yM plus haut, Chap.
iv,
p. 3<3.
déterre.
quoique bien commun dans la plupart des pays de l'Atnénque exposés aux
tremb!)Èmens
ques minutes avant Ja première secousse,H y eut un coup de vent très-
violent, suivi d'une pluie électrique a grosses gouttes, J'essayaide suite l'électricité

l~lectroæ~ 1'e,de,
atmosphérique par
atmospherl~e par l'électromè~re de :V~lta.Les
Volta, Les petites boules sécart()lent,de
petites boules s'écartoient de
tignes l'électricité passa souvent du positif au négatif~ comme c'est le cas
pendant les orages, et, dans le nord de l'Europe, même quelquefois lors de la
chute des neiges. Le ciel resta couvert, et le coup de vent fut suivi d'un calme
plat, qui dura toute la nuit. Le coucher du soleil présenta un spectacle d'une
magnificence extraordinaire. Le voile épais des nuages se déchira comme par
lambeaux, tout près de l'horizon le soleil pa~ut à t2° de hauteur, sur un fond
bleu indigo. Son disque étoit énormément élargi, défiguré et ondoyant vers les
bords. Les nuages étoient dorés, et des faisceaux de rayons divergens, qui reflé-
toient les plus belles couleurs de l'iris, s'étendoient jusqu'au milieu du ciel. Il y
eut un grand attroupement sur la place publique. Ce phénomène,le tremblement
de terre, le coup de tonnerre qui l'avoit accompagné, Ja vapeur roussâtre vue
depuis tant de jours, tout fut regatdé comme l'effet de l'éclipsé.
Vers les neuf heures du soir, il y eut une troisième secousse beaucoup moins
forte que les deuxpremières, mais accompagnée d'un bruit souterrain très-sensible.
Le baromètre étoit un peu plus bas qu'à l'ordinaire 1; mais la marche des varia-
tions horaires ou des petites marées atmosphériques ne fut aucunement inter-
rompue. Le mercure se trouvoit précisément au minimum de hauteur au moment
du tremblement de terre; il continua de monter jusque vers les onze heures du
soir, et baissa de nouveau jusqu'à quatre heures et demie du matiu, conformément
à la loi à laquelle sont sujettes les variations barométriques. La nuit du 3 au

Le4nov.t799, haut. harotm.,&9he)tre<dftmatm,de336H.83; &4'dn Mif,<le336,o4;& 4'3o'<!e


335,ga; ait' de 336,4a.Le5noT.,à 9' dm matin, de33)',oa; à ioh. de337,oo; à t'de336,7a; à 3b.
<!e336,aS; à 4' de 336,ao;a4' 3o' de336,5a;an' du soir, 336,86; a t'dela nuit, 336,3a; à
4* 3o' du matin, 336,a8. Le t8 août, j'avois été frappé de trouver la hauteur absolue du baromètre
un peu moindre qu'à l'ordinaire. Il y eut, ce jour-là, onze fortes secousses de- tremblement de terre à
Carupano, aa lieues à l'est de Cmnana. Le a5, une légère secousse fut sentie à Cumana, et la hauteur
barotnétrtqne fut aussi grande nn'a l'ordinaire. Pendant ces dem phénomènes, les marées atmosphé-
riques furent éga~ment régulières, seulement, le aSao&t, leur étendue étoit de beaucoup plus
petite. Je placerai ici, pour chaque jour, les trois observations que nous avons faites, M. Bonpland et
moi, a 9' du matin, à 4' 3o' de l'après-midi, et à ti' du soir. Le t8 août 336,85; 335,Qa;
336,75. Le a5 août 337,01;336,8o;337,oo:le a6 août 337,5o; 336,4a;337,io: le 27 août 337,18; 336,5i;
336,8~. Ces exemples conSnnemt ce que j'ai'exposé plus haut sur l'invariabilité des marées atmosphé-
riques & l'époque des secousses. ( Chap. tv, p. 311. )
4 novembre, la vapeur roassâtre fut tellement épaisse, que je ne pus distinguer
l'endroit où la lune étoit ptacée, que par un beau halo de ao<'de dtamètre.
11 y avoit à peine vingnieux mois que la ville de Cumana avoit été presque

totalement détruite par un tremblement de terre. Le peuple regarde tes vapeurs


qui embrument l'horizon, et le manque de brise pendant !a nuit, comme des
pronostics infaiHiblement sinistres.Nous eûmes de fréquentes visites de personnes
qui s'infbrmolentsi nos instrumens indiquoient de nouvelles secousses pour le
lendemain. L'inquiétude fut surtout très-grande et très-générale, lorsque, le
5 novembre, exactement à la même heure que la veille, il y eut un coup de vent
violent, accompagnéde tonnerre et de quelques gouttes de pluie. Aucune secousse
ne se fit sentir. Le vent et l'orage se répétèrent pendant cinq ou six jours à la
même heure, on auroit presque dit à la même minute. C'est une observation faite
depuis long-temps par les habitans de Cumana et de tant d'autres lieux situés
entre les tropiques, que les changemens atmosphériques qui paroissent les plus
accidentels suivent, pendant des semaines entières~
un certain type avec une
régularité étonnante. Le même phénomène se-manifeste, en été, sous ta
zone
tempérée: aussi n'a-t-11 pas échappé à la sagacitédes astronomes qui, par un ciel
serein, voient souvent pendant trois ou quatre jours de suite se former des
nuages
au même point du ciel, prendre la même direction, et se dissoudre à la même
hauteur~ tantôt avant, tantôt après le passage d'une étoile
au méridien, par
conséquent à peu dé minutes près au même tc~j
wïH'.
Le tremblement de terre du 4 novembre, le premier
que j'aie senti, fit une
impression d'autant p!us vive sur moi, qu'H étoit, peut-être accidente!Iement,
accompagné de vacations météorologiques si remarquables. G'étoit de plus
un
véritable soulèvement de bas en haut, et non one
secousse par ondulation. Je
n'aurois pas cru alors qu'après un long séjour sur les plateaux de Quito
et
les côtes du Pérop, je deviendrois presque aussi familier avec les
mouvemens un
peu brusques du sol, que nous le sommes, en Europe, avec le bruit du, tonnerre.
Dans la ville de Quito, nous ne pensions pas à nous lever la nuit, lorsque des
mugissemens souteDpaIns (&nMKM6M- ), qui semblent toujours venir du volcan de

étoiles.
~PIchincha~ annonçoient (2 ou 3,quelquefois
7 ou 8 minutes d'avance) une
secousse dont la force est rarement en rapport avec l'intensité du bruit. L'insou-
ciance des habitans, qui se rappellent
que, depuis trois siècles, leur ville n'a
N.us avons été t~tt.nti& à cepM.nc, M. Arago et moi, pendant one longue série d'obser-
faites, années et ""< 1'ob~t.ir. de Paris, p..r vérifier la dedinai~ des
pas été ruinée, se communique &ciïentent à l'étranger !e moins hardi. Ce n'est
en générât pas autant ta crainte du danger que la nouveauté de la sensation qui
frappe si vivement, lofsqu'on vient d'éprouver pour !a première fois tes eSets du
tremblement de terre le plus léger.
Dès notre enfance, Ndée de certains contrastes se fixe dans notre esprit; l'eau
nous paroît un élément mobile, la terre une masse immuable et inerte. Ces idées
sont, pour ainsi dire, le produit d'âne expérience journalière; elles se lient à
tout ce qui nous est transmis par les, sens. Lorsqu'une secousse se fait sentir,
lorsque la terre est ébranlée dans ses vieux fbndemens, que nous avions Cru* si
stables, un instant suffit pour détruire de longues illusions. C'est comme un
réveil, mais un réveil péniMe.On sent qu'on a été trompé par te calme apparent
de !à nature; on devient dès-lors attentif au moindre brait, on se méfie, pour
la première fois, d'un sol sur lequel, si long-temps, on a pose le pied avec assu-
rance. Si les secousses se répètent,si elles deviennent fréquentes pendant plusieurs
jours successifs, l'incertitude disparoh. rapidement. En ï~8~, les habitans du
Mexique s'étoient accoutumesà enteadre gronder te tonnerre au-dessous de leurs
pieds*, comme nous l'entendons dans la région des nuages. La confiance renait
facilement dans l'homme; et, sur les côtes du Pérou, on finit par s'accoutumer
aux ondulations du sol, comme le pilote aux secousses du navire causées par le
choc des vagues.
Le tremblement de terre du 4 novembre m'a paru avoir exercé une influence
sensiblesur les phénomènes magnétiques. J'avols trouvé, peu de temps après mon
arrivée sur les côtes de Cumana, l'inclinaison de l'aiguille aimantée de ~3°,53
division centésimale. Quelquesjours avant le tremblementde terre, }étois occupé
très-assidûment à vérinerce résultat. Le gouverneur de Cumana, qui possédoit
beaucoup de livres de sciences, m'avoit prêté 1 Intéressant Z/M<a<&) de Nave-
gaciota de Mendoza; j'avois été frappé de l'assertion qui s'y trouve énoncée
'< que
l'inclinaison de l'aiguille varie selon les mois et les heures plus fortement
que la déclinaison magnétique. » Une suite d'observationsque j'avois faites en
t ~g8, conjointement avec le chevalier de Borda, à Paris, et puis seul à Mar-
seille et à Madrid m'avoit convaincu que les variations diurnes ne poudroient
être aperçues dans les meilleures boussoles d'inclinaison; que si elles existent
(comme on doit le supposer), elles n'excèdent pas 8-!0 minutes et que les

Los bramidosde GtMHt<MrtMf<0. ~<yM plus haut, Chap. tï, p. 3)3.


Tom. !t, p. 79-
Les changemensannuels de l'inclinaisonparoissent, dans nos climats, de 4-5 minutes; mais, d'après
changemens horaires,
horaires beaucoup p!ùsplus constderabtes,
considérables, mdtqués par les atMerens
auteurs, dévoient être attribués au nivellement imparfait de l'instrument. Malgré
ces doutes assez fondés, je n'hésitai point, le ï."novembre,& placer la grande
boussole de Borda dans un endroit très-propre aux expériences délicates de ce
genre. L'Inclinaison se trouva invariablement de ~S"
Cemombrë èsC la
moyenne de beaucoup d'observations faites avec le plus grand soin. Le 7 no-
vembre, trois jours après les fortes secousses du tremblement de terre/je
recommençai la même série d'observations, et je fus étonné de voir que l'incli-
natsoh étoit devenue plus petite de go minutes centésimales; elle n'étoit p!ns
quede ~2<S. Je crus que peut-êtreelle augmenteroit de nouveau en revenant
progressivement à son premier état, mais je fus trompé dans mon attente. Un
an plus tard, après mon retour de l'Orénoque, je trouvai encore l'inclinaison de
l'aiguille aimantée, à Cumana, de ~o,
l'intensité des forces magnétiques
'étant restée la même avant et après Je tremblement de terre. Elle se trouvoit
exprimée par 329 oscillations en ïo~ de temps, lorsqu'à Madrid elle étoit
proportionnelleà 240 à Paris à a~S osclllations.~e~élemunai,te -y novembre,
ta déclinaison magnétique~ elle étoit de 4" ï3~ 5o~ au nord-est. Je Favois trou-
vée, avant le tremblementde terre, à dinerente&heures du jour, de 5 à 6 minutes
plus grande et plus petite. Les variations horaires masquent les changemens de
déclinaison absolue, lorsque celles-ci
ne sont pas très-considéraMes.
En réûéchissant sur l'ensemble de ces phénomènes magnétiques je n'aperçois
pas de cause d'erreur qui ait pu altérer le résultat de mes observations d'incli-
naison faites avant le novembre. J'ai employé les mêmes précautions, je n'ai
pas déplacé l'Iestrument j'ai noté dans mon journal le détail de chaque
observation partielle. Il est même bien remarquable
que l'aiguille conservée avec
le plus grand soin dans du papier huilé/a donné, après
un voyage de 700 lieues,
en revenant à Cumana, par !a moyenne de quinze observations~ 5 minutes
centésimales près, la même inclinaison qu'immédiatement après le tremblement
de terre. Je n'ai pas changé, il est vrai, à chaque observation, les potes de t'ai-
guille, comme je l'ai fait dans une longue suite d'inclinaisons déterminées, con-

l'analogie .des variatioM diurnes et annuelles de h dédm.:Mm magnétîque il


n'est pas indMpeMtNe
d'admettre qoe les changemens dinme' d'inelmaMon soient Plus petits
qne les changemens annuels.
Le ~Saoùt '799.ct:nMoual'est,4a<97;at'onest,44'o.Lei."nov.e<t,43°,to;onest,44'ao.
Le 7 noY. est, 4a~i~onest, 43<35. Le 5 sept. 1800
est, 4a'M ouest, 43<4o.
Nous avons trouvé, en i8.5, M. Gay-Lussacet moi ( en changeant les pâtes
dans chaque endroit), à
Milan, dans l'intérieur de la ville, 66-- 46' dans
une prairie près de !a riMe, 65" 36' anc. div.
second voyage du capitaine,Coo~ Cette opérationes b~
jointementravticM. <&ay-Lussac,~en ï8o5 et ~806~ entrançe, en itaue,:en autsse
et en Allemagne ,~et comme les astronomes l'aypient constamment fait dans le
lprsqu'on
se voit forcé d'observer presque toujours en plein air. En quittant l'Europe, le
chevalier de Borda m'avoit~conseiMë de ne désaimanter l'aiguille qu'après de
certains intervalles, et de tenir compte des di~rences. Ces diSérences ne s'ete-
voient, à Paris, dans les expériences faites avec M.Lenoir, qu'à ï2 minutes; à
Mexico, dans dmérens essais à 8, ï 5,6 et t o minutes aussi l'aiguiUe d'un acier
bien trempé a conservé tout son poli pendant cinq ans. De plus, dans le phéno-
mène qui nous occupe, il ne s'agit que d'un changement d inclinaison apparente,
et non d'une quantité absolue. N'ayant pas touché l'aiguille, je n'entrevois pas la
possibilité d'une erreur d'un degré centésimal.
On sait que le choc, en modifiant la position des moléculesde fer, de cobalt
ou de nikel, modifie aussi leurs propriétés magnétiques; qu'il est capable de
donner des pôles et quelquefois même de ,les changer. Lorsque je fis connoitre
les axes magnétiques d'une grande montagne de serpentine polarisante située au
nord de Baireuth, en Franconie ,M. Liçhtenberg, le célèbre physicien de Got-
tingue, énonça la conjecture que ces axes pouvoientbien être l'effet des trem-
blemens de terre qui dans les grandes catastrophes de notre planète avoient
agi long-temps selon une même direction. Nous savons, par les expériences
récentes de M. Haüy, que si la chaleur diminue la charge magnétique elle peut
aussi quelquefois rendre attirable à l'aimant de certaines substances dans les-
quelles le fer est combiné avec quelque autre principe. On conçoit par-là, jusqu'à
un certain point, comment des tremblemens,deterre et des agens volcaniques,
produisent dans l'intérieur du globe, à de grandes
par les changemens qu'ils
profondeurs, peuvent modifier les phénomènes magnétiques que nous observons
à sa surface. Je n'insisterai pas sur des conjectures si hasardées, et je me bornerai
à faire observer ici, qu'aux époques ou nous avons éprouvé de fréquentes et
fortes secousses dans lesCordIUères de Quito et sur les côtes du Pérou, nous
n'avons jamais pu découvrir aucune variation accidentelle dans l'inclinaison
magnétique. Il est vrai que les Ishangemens analogues, produits par les aurores
boréales dans la déclinaison de l'aiguille de même que ceux que j'ai cru remar-
quer dans l'intensité des forces, ne s'observent aussi que de temps en temps ils
sont d'ailleurs passagers, et cessent avec la durée du phénomène.

Par exemple, le fer suUuré, le ter arsénical.


La vapeur roussâtre qui embrumoit l'horizon
t'honzon peu avant le coucher
peu avant co' du soleil,
avoit cessé depuis le novembre. L'atmosphère avoit repris son ancienne pureté,
et la voûte du ciel parut au zénith de cette teinte d'un bleu foncé, qui est propre
à des climats où la chaleur, la lumière et une grande égalité de charge électrique
semblent favoriser à la fois la plus parfaite dissolution de l'eau dans l'air. J'ob-
servai, dans la nuit du 7 au 8 l'Immersion du second satellite de Jupiter'.Les
bandes de la planète étoient plus distinctes que je ne les eusse jamais vues
auparavant. °

Je passai une partie de la nuit à comparer l'intensité de la lumière que répandent


les belles étoiles qui brillent dans le cielaustral. J'ai suivi ce travail avec soin sur
mer, et pendant mon séjour à Lima, à Guayaquil et à Mexico, dans l'un et
l'autre hémisphère. Près d'un demi-siècles'étoit écoulé depuis que La Caille avoit
examiné cette région du ciel qui reste invisible en Europe. Les étoiles voisines
du pôle austral sont observées en général avec si peu de suite et d'assiduité, que
les plus grands changemens peuvent avoir lieu dans l'Intensité de leur lumière et
dans leur mouvementpropre sans que les astronomes en aient la moindre con-
noissance. Je crois avoir remarqué des changemens de ce genre dans la constellation
de la Grue et dans celle du Navire. J'ai comparé d'abord, à la simple vue, les
étoiles qui ne sont pas très-éloignéeales unes des autres, pour les ranger d'après
la méthode que M. Herschel a indiquée dans un mémoire lu à la société royale de
Londres, en ï ~06 dans la suite, j~ai employé des diaphragmes diminuant l'ou-
verture de l'objectif, des verres colorés et non colorés placés devant l'oculaire,
et surtout un instrument de réflexion propre à ramener à la fois deux étoiles
dans le champ deM lunette, après avoir égalisé leur lumière en recevant à volonté
plus ou moins de rayons réfléchis par la partie étamée du miroir. Je conviens
que tous ces moyens photométriques ne sont pas d'une grande précision; mais
je crois que le dernier, qui peut-être n'avoit point encore été employé, pourroit
être rendu assez exact, en ajoutant une échelle au support mobile de la lunettedu
sextant. C'est en prenant des moyennes d'un grand nombre d'évaluations, que
j'ai vu décroître l'intensité relative de la lumière des grandes étoiles, de la manière
suivante:SIrius, Canopus, du Centaure .Achernar, du Centaure, Fomahault,
Rigel, Procyon, Betelgeuze,e du Grand Chien, J. du Grand Chien, <tdela

Je l'observai à n''a5'6", tempe moyen <o!t réoutte, en comparant


mon observation à celles de
Viviers et de Marseille, toug. de Cumana 4''a6'6". ( 0~. <M~. T. 1, p. ?n.)
Phil. <r<m;For, <796,p..66. (Comparezaussirigottet Goodticke.daMtes :~wM.,voL -rS T. J
p.ta7,i54,etvoI.76,T.I,p.)g7.)
Crue, ? du Paon. 6s travail, dont j'ai publié ailleurs les résultats numériques
augmentera d'intérêt lorsque, de 5o à $o ans, les voyageurs detemuner~nt de
nouveau l'intensité de la latntèrë des astres, et découvriront quelques-uns de ces
changemens que semblent éprouver les corps célestes, soit à leur surface, soit
dans leur distance d~e notre système plaaé~m'e.
Quand on a observé long-temps avec tes mentes lunettes, dans nos climats
du nord et sous la zone torride, on est surpris de l'eSet que produisent dans
celle-ci la transparence de l'air et la moindre extinction de.la lumière sur la
netteté avec laquelle se présentent les étoiles doubles, les sa~Hitesde Jupiter ou
de certaines nébuleuses. Par un ciel également serein en apparence on croiroit
avoir employé des instrumens plus parfaits, tant ces objets paroissent plus dis-
tincts, plus terminés entre les tropiques. On ne peut douter qu'à l'époque où
l'Amérique équinoxiale sera le centre d'une grande civilisation, l'astronomie
physique gagnera prodigieusement,à mesure que le ciel sera exploré par d'ex-
cellentes lunettes, dans les climats secs et brMa&s de Cumana, deCoro et de l'île
de la Marguerite. Je ne nomme point ici le dos des Cordillères, parce que, à
l'exception de quelques hautes plaines assez arides du Mexique et du Pérou,
les plateaux très-élèves, ceux dans lesquels la pression barométrique est de 10
ou t pouces plus petite qu'au niveau de la mer, n'offrent qu'un climat brumeux
et extrêmement variable. Une grande pureté de l'atmosphère, telle qu'elle règne
constamment dans les basses régions, pendant la saison des sécheresses, compense
l'effet de la hauteur du site et de la rareté de l'air sur les plateaux. Les couches
élevées de l'atmosphère éprouvent des changemens brusques dans leur transpa-
rence, là où elles enveloppent le dos des montagnes.
ï
La nuit du i au 1 a novembre étoit fraîche et de la plus grande beauté 3.
Vers le matin, depuis deux heures et demie, on vit, à l'est, les météores lumineux
les plus extraordinaires. M. Bonpland,qui s'étoit levé pour jouir du frais
sur la
galerie, les aperçut le premier. Des milliers de bolides et d'étoiles filantes se

~o~M la note C& la fin da 4.* Livre, et ttiM 0&<. a«r., Tom. T, p. t.xxt.
Deay à 3o centimètres, par exemple, les plaines qui environnent le Tolcan de Cotopaxi, entre la
fenne de Pansache et Pumaurcu; le plateau de Chusulongo sur la pente d'Antisana, et,
au Chimborato,
la plaine au-dessus du Lac noir, en péruvien, Yanacocha. D'après les formules de la Mécanique céleste de
M. Laptace, l'extinction de la lumière est à la bantear de ces plateaux 999.?; à la cime dm Chimborazo
9989; à la plus haMteeimede l'Himataya (supposée avec M. Webb, de 4oi3 toises) 9987, lorsqu'au
niveau de la mer, t'extmetion de la lumière est toooo. ( ~'oyez taon ~&/ea!t de la Géographie <fM
Plantes, 1806.) `
3 Therm. cent. à 11'' du soir Bt'8. Hygr. 82". Pas de scintillement d'étoHes an-dessus de
to-- de hauteur.
succédèrent pendant quatre heures. Leur direction étoit très-régulièrement du
nord au sud; pelles remplissoient une partie du ciet qui s'étendoit du vérit&Me
point Est, 50° vers le nord et le sud. Sur une amplitude de 60* on voyoit les
météores s'élever au-dessus de l'horizon à l'E.N.E. et à t'E., parcoanr des arcs
plus ou moins grands, et retomber vers te sud après avoir suivi la direction dn
méridien'. Quelques-uns atteignoientjusqu'à 4o" de hauteur; tous déjpassoient
25" à 3o°. Le vent étoit très-fbibte dans les basses régions de l'atmosphère, et
souûloitde l'Est. On ne voyoit aucune trace de nuages. M. Bonptand rapporte
que, dès le commencement du phénomène, H n'y avoit pas nu espace du ciel
égal en étendue à trois diamètres de la tune, que l'on ne vît, à chaque instant,
rempli de bolideset d'étoiles niantes. Les premiers étoient en plus petit nombre
mais comme on en voyoit de dinérente grandeur, il étoit impossible de fixer la
limite entre ces deux classes de phénomènes. Tous ces météores laissoient des
traces lumineuses de 8 à 0
degrés de longueur, comme c'est souventle cas dans
les régions équinoxiales La phosphorescence de ces traces ou bandes lumi-
neuses durcit a 8 secondes. Plusieurs étoiles ntantes avoient~ un noyau très-
distinct, grand comme te disque de Jupiter, et d'ou partoient des étinc€!les
d'une -lueur extrêmement vive. Les bolides sembloient. se briser comme par
explosion; mais les plus gros, de ï" à i" 15' de diamètre, disparôissoient sans
scintillement, et laissoient derrière eux des bandes phosphorescentes (~~&~),
dont la largeur excédoit ï5 à 20 minutes. La lumière de ces météores étoit
blanche, et non rougeâtre, ce qui devoit être attribué sans doute au manque
de vapeurs et à l'extrême transparence de l'air. C'est par la même cause que,
sous
les tropiques, ~es étoiles de première grandeur, en se levant, ont une lumière.
sensiblement plus blanche qu'en Europe. v
Presque tous les habitans de Cumana furent témoins de phénomène,
ce parce
qu'ils quittent leur maison avant quatre heures pour assister à la première
messe
du matin. Ils ne voyoient pas ces bolides avec indinérenCe les plus anciens se
souvenoient que les grands, trembtemensdeterrede 1766 avoient été précédés 3
par un phénomène tout semblable. Au faubourg indien, les Guaiqueries étoient
sur pied ils prétendoient « que le feu d'artifice avoit commencé une heure de

Cette uniformitédansla direction avoit aussi trappe ptomears habitans de Nneva Barcetona qm
nons
en parterent à notre retour de lOrénoque, sans que nous leur eussions communiqué les observations
de Cumana.
~o~ei! pka haut, Chap. i, p. 80.
~o~ez plus haut, Chap. tv~ 30~.
p.
matin
la nnit, et qn'enrevenant de la pèche dans le golfe, ils avoie~t déjà aperçu des
étoiles niantes, mais très-petites, s'élever à l'est. M !ls assuroieûten même temps =
que, sur ces côtes, les météoresignésétoienttrès-rares après deux heures du

Depuis quatre heures, le phénomène cessa peu* & peu les bolides et les
étoiles filantes devinrent plus rares ~cependant on en distinguoitencore quelques-
unes vers !e nord-est; à leur lueur blanchâtre et à la rapidité de leur mouvement,
un quart-d'heure après le lever, du soleil. Cette dernière~ circonstance parottra
moins extraordinaire, si je rappelle ici qu'on a vu en plein jour, Fan 1788,
dans la ville de Popayan rintërieur des appartemens fortement éclairé par un
aérolithe d'une énorme grandeur. Il passa, vers une heure après-midi, par un
beau soleil, au-dessus de la' ville. Le 26 septembre ï8op, lors de notre second
séjour à Cumana, nous réussies, M. Bonpland et moi, après avoir observé
l'immersion du premier satellite de Jupiter à voir distinctement la ptanète à
la simple vue, dix-huit minutes après que le disque du soteilétoit sur l'horizon.
y avoit une vapeur très-légèredu côtéde t'est; mais Jupiter paroissoit sur un fond
azuré. Ces faits prouvent t'extréme pureté et la transparence de l'atmosphère sous
la zone torride. La masse de lumière diffuse y est d'autant plus petite,
que les
vapeurs sont plus parfaitement~dissoutes. La même cause par laquelle se trouve
affoiblie la diffusion de la tumière solaire, diminue l'extinction de la lumière qui
émane soit des bolides, soit de Jupiter, soit de la lune, vue le deuxième jour
après sa conjonction.
ï
La journée du 2 novembre fut encore très-chaude, et l'hygromètre indiqua
une sécheresse bien considérable pour ces climats Aussi la vapeur roussâtre
embruma de nouveau l'horizon, et s'éleva jusqu'à t4" de hauteur. Ce fut la der-
nière fois qu'elle se montra dans cette*année. Je dois faire observer ici qu'en
général elle est aussi rare sous le beau ciel de Cumana, qu'elle est commune à
Acapulco, sur les côtes occidentalesdu Mexique.
Comme, à mon départ d'Europe, les recherches de M. Chiadni avoient singu-
lièrement fixé l'attention des physiciens sur les bolides et les étoiles filantes,
nous ne négligeâmes pas, pendant le cours de notre voyage de Caracas au Rio
Negro*, de nous informer partout si les météores du
12 novembre avoient été

Je l'observe à 5''to'8", temps moyen long. de Cumana, déthute des taMes de M. Ddamhre,
4'' a5' S~ ( 0&Mtv. <M~ Tom. t, p. 8q. )
A 9 heures du matin, therm. cent. a6<a; hygr. 66",4. A t~, therm. ag*; hygr. 81" (toujours !a
division de l'hygromètre de Saussure quand lé contraire n'est
pas expressémentindiqua ).
Relation &M<onyMe 7o/M. 7, 66
aperçus. Dans un pays sauvage, où la majeure partie des habitans couchent en
~plein air, un phénomène aussi extraordinaire ne pouvoit rester Inaperçu que la
où des nuages l'avoieat dérobé aux yeux de l'observateur.Le missi6nnà!recapucin
de San Fernando de Apure village situé au milieu des savanes de la province
de Vannas, les religieux de Saint-François, stationnés près des cataractes de
J'0rén<)que et à Maroa sur les bords du Rio Negro, avoient vu des étoiles
niantes et des bolides sans nombre éclairer la voûte du ciel. Maroa est au sud-
ouest de Cumana, à t~4 lieues de distance. Tous ces observateurs comparoient
le phénomène à un beau feu d'artifice, qui avoit duré de trois à six heures du
matin. Quelques religieux avoient marqué le jour sur leur rituel; d'autres lé dési-
gnoient par les fêtes d'église qui en étoient les plu~ proches. Malheureusement
aucun d'eux ne se souvenoit de la direction des météores ou de leur hauteur
apparente. D'après la position des montagnes et des forêts épaisses qui entourent
les missions des cataractes et le petit village de Maroa, je présume que les bolides
ont encore été visibles à 200 de hauteur au-dessus deJ'horizon. Arrivé à l'extré~
mité méridionale dè la Guiane espagnole, au petit fort de Saint-Charles,j'y trouvai
des Portugais qui avoient remonté le Rio Negro depuis la mission de Saint-
Joseph des Maravitains. Ils m'assuroient que, dans cette partie du Brésil, le
phénomène avoltété aperçu, au moins jusqu'à San Gabriel das Cachoeiraa, par
conséquent jusqu'à Téquateur même
J'étois vivement frappé de l'immense hauteur que devoient avoir ces bolides
pour être visibles à la fois à Cumana et aux limites du Brésil, sur une ligné de
23o lieues de longueur.Quel fut mon étonnement, lorsqu'à
mon retour en Europe,
j'appris que le même phénomène avoit été~ aperçu sur une étendue de globe
de 64° en latitude, et de~t" en longitude, à l'éqnateur, dans l'Amérique méri-
dionale, au Labrador et en Allemagne'Pendant mon trajet de Philadelphie à
Bordeaux, je trouvai accidentellement dans les jM~KOt~M ~e la ~oct~ <&?
i Pensylvanie l'observationcorrespondante de M. Ellicot (lat., So~~a' ), et, lors
de mon retour de Naples à Berlin, dans la bibliothèque de Gottingue, le récit
des missionnaires Moraves chez les Esquimaux. A cette époque, plusieurs physi-

Lat. 7° 53~ a"; long. 70° ao'.


Lat. a° 42'o"; long. yo° ai'.
Un peu au nord-ouest de San Antonio de Castanheiro. Je n'ai point trouvé de peMOMes qni aient
observé ce météore à Santa-Fe de Bogota, à Popayan, ou, dans~hétmsphëM amtral, à Quito et
ta Pérou.
Fent-étre l'état de l'atmosphère, si variable dans ces contrées occidentales, a-t-il seul empêché
l'observation.
ciens avoient déjà discuté ia coïncidence des observations do nord avec celtes
de Cumana, que obus avions publiées~M. Bonpiand et moi,desl'annéeï8oo.
Voicil'indicationsuccinctedes faits: t,<'lesmétéores ignésont été vusà l'est et à
l'est-nord-est, jusque 4o" de hauteur, de 3 à 6 heures à Cumana (lat~o" 5a~,
long. 66" 3o~); à Porto-CabeDo (lat. to" 6~5:t~, long. 6~5~), et sar les
frontières du Brésil, près de l'équateur,par les 70" de long. occidentale du
méridien de Paris, a." Dans la Guiane françoise (lat. 4" 56~, long. 54° 35~ ), on
vit « le ciel comme enflammé dans la partie du nord. Pendant une heure et
demie, d'innombrables étoiles filantes parcouroient le ciel, et répanSoient une
lumière si vive, qu'on pouvoit comparer ces météores aux gerbes flamboyantes
lancées dans un feu dartince. » La connoissance de ce fait repose sur un témoi-
gnage infiniment respectable, celui de M- le comte de Marbois, alors déporté
à Cayenne, victime de son amour pour la justice et pour une sage liberté
constitutionnelle; 3.° M. Ellicot, l'astronome des Ëtats-Unis, ayant terminé ses
opérations trigonométriques, pour la rectification des limites,'sur l'Ohio, se
trouva, le ïa novembre, dans le canal de Bahama, par les 25° de latitude
et 8t"5o~de longitude.)!vit 2, dans toutes les parties du ciel, «autant de météores
que détoiles: ils se dirigeoient dans tous les sens; quelques-uns paroissoient
tomber perpendiculairement, et l'on s'attendoit à chaque instant à en voir
descendre sur le vaisseau, Le même phénomène fut aperçu sur le continent
américain jusque par les 3o° ~2 de latitude. ~.° Au Labrador, à Nain (lat. 56° 55' ),
et Hoffenthal ( lat. 58° 4~ ); dans le Groenland, à Lichtenau (lat. 6t? 5~ ), et au
Nouveau Herrenhut (tat.64" ~4~ long. ~2'* 2Ct~), les Esquimauxfurent effrayés
de l'énorme quantité de bolides qui tomboient, pendant le crépuscule, vers tous
les points du ciel, et dont quelques-uns avoient un pied de largeur. 5." En
Allemagne, M. Zeissing, curé d'ttterstadt,près de Weimar (lat. 5o°59', long.
or. <)" ï i
aperçut, le a novembre, entre 6 et heures du matin ( lorsqu'il étoit
deux heures et demie à Cumana), quelques étoiles filantes qui avoient une
lumière très-blanche. «Bientôt après parurent, vers le sud et le sud-ouest, des
rayons lumineux, de 4-6 pieds de long, qui étoient rougeâtres, et ressembloient
à la traînée lumineuse d'une fusée. Pendant le crépuscule du matin, on vit,
entre 7 et 8 heures, la partie sud-ouest du ciel, de temps en temps fortement

MM. deHardenberg, R!tteretB6ekmann,daMtes~nn<t<Mcfe Gt~cr~Tom.VI,?. tg) ;Tom. Xtl!,


p. aM; Tom. XtV, p. n6 Tom. XV, p. toy. (Yoigt, jMa~.t~r ~V<K~ttfm<e,Tom. IX, p. 468.
Phil. <ran<. of the Amerie. Me., )8o4. Vol. VI, p. 29.
éclairée par quelques éclairs blanchâtres qui parcouroient l'horizon en serpentant.
La nuit, le froid avoit augmenté, et lebaromètre ëtoit monté.M !1 est très-pro-
bable que le météoreauroit pu être observé plus à l'est, en Pologne et en Russie
Si une notMe détaiHée n'avoit pas été tirée, par M. Ritter, des papiers du. curé
d'Itterstadt, nous aurions cru aussi que les bolides n'avoient pas été visibles
hors des limites du Nouveau-Continent.
Il y a de Weimar au Rio Negro ï 800 lieues marines, du Rio Negro à Herrenhut,
dans le Grœnland, !3oo lieues. En admettant que les mêmes météores ignés.
aient ététrus sur des points si éloignés les uns des autres, il faudroit supposer
que leur hauteur fût au moinsde ~t t lieues. Près de Weimar, les fusées parurent
au sud et au sud-ouest; àCumana, à l'est. et à l'est-nord-est. On pourroit croire
par conséquent que des aérolithes sans nombre seroient tombés dans la jner,
entre l'Afrique et l'Amérique méridionale, à l'ouest des Mes du Cap-Verd. Mais
pourquoi les bolides, dont la direction n'étoit pas la même au Labrador et à
Cumana, n'ont-ils point été aperçus, dans ce dernier endroit, au nord, comme à
Cayenne? On ne sauroit être assez prudent dans une hypothèse sur laquelle
nous manquons encore de bonnes observations faites dans des-lieux très-distans.
J'incline à croire que les Indiens Chaymas de Cumana n'ont
pas vu les mêmes
bolides que les Portugais du Brésil et les missionnaires du Labrador; toujours
on ne sauroit révoquer en doute (et ce fait me paroit extrêmement remarquable)
que, dans le Nouveau-Monde, entre le méridien de ~6° et 82°, entre l'équateur
et le parallèle de 6~° nord, on a aperçu, aux mêmes heures, une immense quan-
tité de bolides et d'étoiles filantes. Sur un espace de <)aï,ooo lieues carrées, ces
météores ont été partout également resplendissans.
Les physiciens qui récemment ont fait des recherches si laborieuses
sur les
étoiles filantes et leurs parallaxes, Ies' regardent comme des météores appartenant
aux dernières limites de notre atmosphère, placés entre la région de l'aurore
boréale et celle'des nuages 3 les plus légers. On
en a vu qui n'avoient que
14,000 toises, environ 5 lieues d'élévation; les plus hautes
ne paroissent, pas

A Pariset & Londres, le temps étoit couvert à Carisrub, M. BMmannaperce, avant le crépuscule,
des éclairs à la fois au nord-ouest et au sud-est. ~e .3 novembre, on vit,. CarbnA. une lueur particu-
J3.c~,
lière aa end-est. ( Sur les bolides vues à Bof, voyez FK-~K., Tom. M, p.ao5. )
° MM.Benzenberg et Brandes.
3 D'après les ohservatioiM que j'ai faites
sur le dos des Andes, à ptm de 3700 t.MM de hauteur. sur les
moutons ou petits nuages blancs. et pommeMs, il m'a paru que leur élévation au-dessus du niveau des
côtespouvoit être quelquefois de plus de 6000 toises.
dépasser ao lieues. Eues ont souvent plus de cent ptedsaetuametre, et teur
vitesse est telle qu'elles parcourent en peu de secondes un espace de deux lieues.
On en a mesuré dont la direction étoit de bas en haut presque perpendicalaire,
ou faisant un angle de 5o° avec la verticale. Cette circonstance, très-remarquable,
a fait conclure que les étoiles filantes ne sont pas des aérolithes qui, après avoir
plané long-tempsdans ~espace, comme les corps célestes, s'enflamment en entrant
accidentellementdans notre atmosphère, et tombent vers la terre
Quelle que soit l'origine de ces météores lumineux, il est difficile de concevoir
une inflammation instantanée dans une région où il y a moins d'air que dans le
vide de nos pompes pneumatiques et où (à aS.ooo toises de hauteur) le mercure,
dans le baromètre, ne s'élèverolt pas à 75~? lignes. Nous ne connoissons, il est
vrai, le mélange uniformede l'air atmosphérique à r~s près, que jusqu'à 3ooo toises
de hauteur, par conséquent pas au-deià de la dernière couche des nuages flocon-
neux. On pourroit admettre que, dans les premières révolutions du globe, des
substances gazeuses qui nous sont restées inconnues jusqu'ici, se sont élevées
vers cette région que parcourent les étoiles Riantes: mais des expériences précises
faites sur des mélanges de gaz quin'ont pas la même pesanteur spécifique, prouvent
que l'on ne peut admettre une dernière couche de l'atmosphère entièrement
différente des eouches inférieures.. Les substances gazeuses se mêlent et se pénètrent
au moindre mouvement, et, dans le cours des siècles, l'uniformité du mélange se
seroit établi à moins qu'on ne suppose les effets d'une répulsion dont les
corps que. nous connoissons ne noua. om'ent aucun exemple. De plus, si nous
admettons des fluides aériformes particuliers dans ces régions inabordables des
météores lumineux, des étoiles filantes, des bolides et de l'aurore boréale,
comment concevoir que la couche entière de ces fluides ne s'enflamme pas à la
fols~ mais que des émanations gazeuses remplissent, comme les nuages, un espace
limité? Comment admettre une explosion électrique sans amas de vapeurs,
susceptibles d'une charge Inégale, dans un air dont la température moyenne est
peut-être de a5° au-dessousdu zéro du thermomètre centigrade, et dont la raré-
faction est telle, que la compression du choc électrique ne peut presque plus y

M. CbMni, qui regardoit d'abord les étoiles filantes comme des aérolithes,a dans la soite abandonné
cette idée.
Voyez mes expériencessur un mélange d'hydrogène et d'oxigene, ou sur nn air atmosphérique à base
d'hydrogène, dans nn méntoire stf les ré&actions joint N mes Observations <M<~nonM~MM,Tom. ï,
p. ti~-iao.
dégager de la chaleur? Ces difficultés disparottroient etf grande partie, si la
direction du mouvement des étoiles filantes permettoit de !es considérer comme
des corps à noyau solide, comme des phénomènes cc~MC~ (appartenant à
1 espace hors des limites de l'atmosphère),et non comme des phénomènes <e/&<-
riques appartenant à notre seu!ep!anète).
En supposant que tesmétéores de Cumana n'eussent que !a même hauteur a
laquelle se meuvent généralement les étoiles filantes, on<t pu voir, au-dessus de
l'horizon, les mêmes météores, dans des endroits éloignés les uns des autres de
ptus'de 3to lieues'. Or quelle disposition d'incandescence extraordinaire doit
avoir régné le ï novembredans les hautes régions de l'atmosphère, pour fournir
pendant quatre heures desmIHiards de bolides et d'étoiles filantes, visibles à
t'équatëur, au Grceniand et en Auemagne! M. Benzenberg observe judicieusement
que la même cause qui rend le phénomène plus fréquent, influe aussi sur la
grandeur des météores et l'Intensité de leur ïumière. En Europe, les nuits ou il
y a le plus grand nombre d'étotles filantes, sont celles dans lesquelles
on en voit
de très-tumineuses metées à de très-petites. La péribdicité~du phénomène ajoute
à l'intérêt qu'H inspire. Il y a des mois où dans notre zone tempérée~ M. Brandes
na compté que 60 à 80 étoiles filantes dans une nuit; il y en a d'autres où leur
nombres'est élevé à
2000. Lorsqu'on en observe une qui a le diamètre de Sirius ou
de Jupiter, on est sûr de voir succéder à un météore si brillant un grand nombre de
météores plus petits. Si, pendant une nùit,tes étoiles filantes sont très-fréquentes,
il est très-probable que cette fréquence se soutiendra pendant plusieurs semaines.
On diroit qu'il y a périodiquement dans les hautes régions de l'atmosphère, près
de cette limite extrême où la iorce* centrifuge est balancée
par la pesanteur,
une disposition particulière pour la production des bolides, des étoiles filantes
et de l'aurore boréale 3. La périodicité de ce grand phénomène dépend-elle de
l'état de Fatmosphère, du de quelque chose que cette atmosphère reçoit de

~M l'expMcation de la cMeM- qne predait !e choc étectnque, donnée par M. Gay-LaMM, dès
l'année i8o5, et exposée dans un mémoire que )'a: pnN:e
avec lui dans le ~own. ~~< Torn. LX.

distances..
C'est cette circonstance qui avoit engagé Lambert à
proposer l'observation

Ritter, sar les périodes de 9 a to ans ( 1788, .798, .807), dans les
Tom. XVï,
~a~
des étoiles filantes pour la
.détermination des longitudes terrestres. Il les regardoit comme des signaux célestes
vus à de grandes

Gilbert, Tom. XV,


p. a~ p. M4. distingue, comme ptasieursphysiciens, les bolides mêtés aux étoiles filantes,
H
de ces météores lumineux, qui sont enveloppés de fnmée et de
vapeurs, qui font explosion avec fracas,
et laissent tomber ( le plussouvent !e).M-)desacrolithes. Ces derniers n'appartiennent certainement pas
à notre atmosphère.
.w la terre a~a~ce<~Myécl!p~quecela,
dehors~ tandts que
comme! on~Mg~rott'\d~-teB~
qu'émet sont plus~qdente~da~la~
QaaNt'aax'étoHM~tc~ ïl me~f9tÇ'P~~$/~U~1~~pr~ce,
des:e~J-<a
au-dessus des conttnens et';pr~s.~de~r~t~t~~q~~

exercent-eUes ïëùr innuej~


surtace rayonnante du globe, et la charge électrique desbasses régtpns de l'atmos"
ph&re, qu! vane d'après Ïa nature du soF et le g!sement des contiens et des mers,
règne .uDhî~èr-~ernei.?
L'absence entière des auages,Tnéme des plus petits~ dans de certaines saisons,
1

ou au-dessus de quettptes pÏaînes arides et dépourvues de végétaux, setnblent


prouver que cette innaemce est sènsiHe, au moins jusqu'à einq ou six mUle toises
dehautéar. Dans nn pays hérissé de yotcans, sur !e plateau des Andes, on a
observé, y a trente an~, un phénomène analogue à celui du ta novembre. On
vit, à h viMe de Quito, s'élever ~dans une seule partie du ciel, au-dessus du volcan
de Cayambe, un si grané nombre d~tôîtes niantes, que l'on crut toute !a mon~
tagne embrasée. Ce spectacle extraordinaire dura plus d'une heure le peuple
s'attroupa dans la plaine de l'Ëxido, ou l'on jouit d'une vue magnifique sur tes
plus hautes cimes des Cordillères. Déjà une procession étoit sur le point de sortir
du couvent de Saint-François,lorsqu'on s'aperçut que l'embrasementde l'horizon
étoit du à des météores ignés qui parcouroientle ciel dans toutes les.directions,
àiaouï~degrésdehauteur.
CHAPITRE XI.

TRAJET DE CUMANA A LA GUAYRA. – MOMO DE NUEVA BAMEt-OttA. – CAP CODERA.–


·
ROUTE DE LA GUAYRA A CARACAS.

L<E t8 novembre, à huit heures du soir, nous étions sous voile pour passer, le
long des côtes, de Cumana au port de la Guayra, par lequel les habitans de la
province de Venezuela exportent la majeure partie de leurs productions. Le
trajet n'est que de 60 lieues, et né dure le plus souvent~ue 36à~o heures. Les
petits bâtimens côtiers sont favorisés à la fois par le vent et les courans ceux-ci
portent avec plus ou moins de force de l'est à l'ouest le long des cotes de la Terre-
Ferme, surtout du cap Paria à celui de Chichibacoa. Le chemin de terre de
Cumana Nueva Barcelona, et de là à Caracas, est à peu près dans le même
état qu'avant la découverte de l'Amérique. Il faut lutter contre les obstacles
qu'opposent un terrain fangeux, des blocs de rochers épars et la force de la
végétation; il faut coucher à la belle étoile, passer les vallées de l'Unare, du Tuy
et du Capaya, traverser des torrens qui croissent rapidement à cause de la
proximité des montagnes. A ces obstacles se lient les dangers qui naissent de
l'extrême insalubrité du pays qu'on traverse. Les terrainstrès-bas, entre la chafne
cotière et le rivage de la mer, sont extrêmement malsains, depuis la baie de
Mochima~usqu'à Coro. Mais cette demière<vi!le, entouréed'un immense bocage
de raquettes ou Cactus-épineux, doit, de même que Cumana, la grande salubrité
.de son climat à .l'aridité de son sol et au manque de pluies.
On préfère quelquefois le chemin de terre au trajet par mer, lorsqu'on retourne
de Caracas à Cumana, et que l'on craint de remonter
contre le courant. Le
courier de Caracas met neuf jours à faire cette route: nous
avons
les personnes qui lavoient suivi, arriver à Cumana malades de fièvresvunerveusessouvent
et miasmatiques. L'arbre, dont l'écorce fournit un remède salutaire contre
fièvres, cro~t dans les mêmes vallons, sur la lisière de ces
ces mêmes forêts, dont les
exhalaisons sont si dangereuses. M. Bonpland a reconnu le Guspare parmi les

Cor<M~~os<Mr<Bdemosphar)BM:es,récon:e<:[uBonphndiatrift)t:ata.
végétaux du golfe de Santa-Fe, situé entre les ports de Cumana et de Barcelone.
Le voyageur sounrant s'arrête dans une chaumière dont les habitam Ignorent
les qualités fébrifuges des arbres qui ombragent les valions d'alentour.
En passant par merde Cumana à ta Guayra~ notre projet etolt de séjourner
à la ville de Caracas ~usqu'àlàând&Ia saison des pluies,de nous diriger de !a,
à travers les grandes plaines ou Llanos, sur les missions de l'Orénoque, de
remonter cette immense rivière, au sud des cataractes, jusqu'au Rio Negro et
aux frontières du Brésil, et de revenir a Cumana. par la capitale de la Guiane
espagnole, appelée vulgairement, à cause de sa position, l'~n~o~fM~c ou le
Détroit. Il ne nous fut aucunement possible de fixer le temps qu'il faudroit
pour terminer ce voyage de ~oo lieues, dont plus des deux tiers devoient être
faits en canots. On ne connoît sur les côtes que les partiesde l'Orënoque les plus
proches de son embouchure. Aucune relation de commerce n'est entretenue avec
les missions. Tout ce qui est au-delà des Llanos est un pays inconnu aux habitans
de Cumana et de Caracas. Les uns pensent que les plaines de Calabozo, cou-
· vertes de gazon, se prolongent huit cents lieues au sud, en communiquant avec
les steppes ou Pampas de Buenos Ayres les autres, se rappelant la grande
mortalité qui régnoit parmi la troupe d'Iturriaga et de Solano, lors de leur
expédition à l'Orénoque, regardent tout le pays, au sud des cataractes d'Aturès,
comme excessivement dangereux pour la santé. Dans une contrée où Ion voyage
si rarement, on se plait à exagérer aux étrangers les diSicuttés qu'opposent le
climat, les animaux et l'homme sauvage. Nous étions encore Mu accoutumés
à ces moyens de découragement que les cotons emploient avec une candeur à la
fois naïve et affectueuse: mais nous persistâmes dans le projet que nous avions
formé. Nous pouvions compter sur l'intérêt et la sollicitude du gouverneur de
Cumana, don Vicente Emparan, de même que sur les recommandations des
religieux de Saint François, qui sont les véritables maftres des rives de
l'Orénoque.
Heureusement pour nous, un de ces religieux Jnan Gonzales se trouvoit à
cette époque à Cumana. Ce jeune moine n'étoit. qu'un frère lai mais il étoit
éclairé, très-intelligent, plein de vivacité et de courage. Peu de temps après
son arrivée sur la côte il avoit eu le malheur de dépêtre à ses supérieurs, lors
de l'élection d'un nouveau gardte~ des missions de Piritù, qui est l'époque des
grandes agitations dans le couvent de Nueva Barcelona. Le parti vainqueur
exerça une réaction si générale, que le frère lai ne put y échapper. Il fut envoyé à
l'Esmeralda dernière mission du Haut Orénoque renommée par l'innom-
brable quantité d'insectes malfaisans dont l'air y est constamment rempli. Fray
Juan Gonzales connoissoitàfondies forets qui s'étendent depuis les cataractes
jusque vers les sources de t'Orénoque. Une antre révolution dans le gouverne-
ment républicain des moines l'avoit ramené depuis quetqaes années sur les
côtes, où il jouissoit, et ajuste titre, de t'est!m& de ses supérieurs. !t nous fbr-
tifioit dans notre désir d'examiner la bifurcation si contestéede rQréno~ue il
nous donna des conseils, utiles sur la conservation de notre santé, dans des
climats dans lesquels lui-même avoit souSert si toB~emps des &&vres intermit-
tentes. Nous avons èu la satisfaction de retrouver, Nueva Barcelona, le frère
Juan à notre retour du Rio Nègre. Voulant passer de la Havane à Cadiz, il se
chargea obligeammentde transporter en Europe une partie de nos herbiers et
de nos Insectes de l'Orénoque mais ces collections furent malheureusement
englouties avec lui par la mer. Cet excellent jeune homme, qui nous étoit vive-
ment attaché, et dont le zèle courageux auroit pu rendre de grands services
aux missions de son ordre, périt, en t8ot ,dans une tempête, sur les côtes
d'Afrique.
Le bateau qui nous conduisit de Cumana à la Guayra étoit un de ceux qui
font le commerce des côtes et des fies Antilles. Ils ont trente pieds de long, et pas
au-delà de trois pieds de hauteur sur les bords ils ne sont pas pontés et leur
charge est généralement de deux cents à deux cent cinquante quintaux. Quoique
a mer soit très-honteuse depuis le cap Codera jusqu'à la Guayra, et qu'ils
portent une én<)fme voile triangulaire assez dangereuse dans les rafales qui sortent
les gorges des montagnes, on n'a pas d'exempte, depuis trente ans, qu'un de
ces bateaux ait sombré dans le trajet de Cumana aux côtes de Caracas. Telle
est
'habileté des pilotes Guaiqueries, que les naufrages sont même très-rares dans
es voyages fréquens qu'itâ font de Cumana à la Guadeloupe ou aux îles danoises,
entourées de brisans. Ces navigations de 120 à ï5o lieues par une mer libre,
tors de la vue des côtes s'exécutent dans des bateaux ouverts, à la manière des
nciens, sans observation delà hauteur méridienne du soleil, sans cartes ma-
ines, presque toujours sans boussole. Le pilote indien se dirige de nuit d'après
étoile polaire, et de jour d'après lé cours du soleil et le vent, qu'il suppose
eu variable. J'ai vu des Gualqueries et des pilotes de ta caste des Zambos, qui
avoient trouver la polaire par l'alignement de~tet ~8 de la grande Ourse et il
l'a semblé qu'ils gouvernoient moins d'après la vue de la polaire que d'après

On paie ce trajet tao piastres si l'on dépose du bateau entier.


cet alignement. On est surpris que, 8t aia prenuere vue ae terre, us
souvent,
trouvent Me de h Guadeloupe, Sainte-Croix'ou Porto-Rico mais la
compen-
sation des erreurs de route n'est pas toujours également neuréaset Les bateaux
en attérant sous le vent, ont beaucoup de difnculté à remonter vers
l'est, contre
le vent et les courans. Souvent, en temps de guerre, les pilotes paient cher leur
ignorance et le manque d'usage de l'Octant, parce que les corsaires croisent près
de ces mêmes caps, que les bateaux de la Terme-Ferme, égarés dans leur route,
doivent reconno!tre pour assurer leur point.
NousdescendtmesrapMementla petite rivière du Manzanares~ dont des co-
cotiers marquent les sinuosités, comme les peupliers et les vieux saules dans
nos climats. Sur la plage voisine et aride, les buissons épineux qui, de jour,
n'offrent que des feuilles couvertes de poussière, britloient, pendant la nuit, de
mille étincelles lumineuses. Le nombre des insectes phosphorescens augmente
dans la saison des orages. On ne se lasse pas d'admirer, sous la région équi-
noxiale, l'effet de ces feux mobiles et rougeâtres qui, reflétés par une eau
limpide, confondent leurs images avec celles de la voûte étoilée du ciel.
Nousquittàmeslesbordsde'Cumanacomme si nous les avions long-temps
habités. C'étoit la première terre à laquelle nous avions touché sous une zone
vers laquelle tendoient mes vœux depuis ma première jeunesse. Il y a quelque
chose de si grand et de si puissant dans l'impression que fait la nature sous le
climat des Indes, qu'après un séjour de quelques mois on croit y avoir vécu
une longue suite d'années. En Europe, l'habitant du Nord et des plaines éprouve
une émotion presque semblable, lorsqu'il quitte, même après un voyage de
peu de durée, les bords du golfe de Naples, la campagne déHcieuse entre
Tivo!i et le lac de Nemi, ou les sites sauvages et imposans des Hautes-Alpes et
des Pyrénées. Cependant, partout, sous la zone tempérée, la physionomie des
végétaux offre des effets peu contrastés. Les pins et les chênes qui couronnent
les montagnes de la Suède, ont un certain air de famille avec ceux qui végètent
sous le beau climat de la Grèce et de l'Italie. Entre les tropiques, au contraire,
dans les basses régions des deux Indes, tout paroît neuf et merveilleux dans la
nature. Au milieu des champs, dans 1 épaisseur des forêts, presque tous les
souvenirsde 1 Europe sont eSacés car c'est la végétation qui détermine le carac-
tère du paysage; c'est elle qui agit sur notre imagination par sa masse, le con-
traste de ses formes, et l'éclat de ses couleurs. Plus les impressions sont fortes
et neuves, plus elles affoiblissent les impressions antérieures. La .force leur
donne l'apparence de la durée. J'en appelle à ceux qui, plus sensibles aux beautés
de la nature qu'aux charmes de la vie sociale, ont fait un long séjour dans la
pour la vie, la première
zone tôrride. Qu'elle leur reste thère et mémorable
en eux jusque
y,terre où ils ont aborde Uo désir vague de la revoir se renouvelle
dans l'âge le plus avancé. Cumana et son sol poudreux se présentent encore
aujourd'hui plus souvent à mon Imagination que toutes les merveilles des
Cordillères. Sous le beau ciel du midi, !a lumière et la magie des couleurs aé-
riennes embellissent une terre presque dénuée de végétaux. Le soleil n'éclaire
pas seulement, il colore les objets, il les enveloppe d'une vapeur légère qui
sans altérer la transparencede l'air,rend les teintes plus harmonieuses, adoucit
les effets de lumière, et répand dans ta nature le calme. qui se renète dans notre
âme. Pour expliquer cette vive impression que laisse l'aspect du paysage dans les
deux Indes, même sur des côtes peu boisées, il suffit de rappeler que la beauté =
du ciel .augmente, de Naples vers l'équateur, à peu près autant que depuis la
Prôvenèe jusqu'au midi de l'Italie.
Nous passâmes, à la haute marée la barre qu'a formée à son embouchure .la
petite rivière du Manzanares. La brise du soir soulevolt mollement les vagues
dans le golfe de Cariaco. La lune n'étoit pas levée mais la partie de la voie
lactée qui s'étend des pieds du Centaure vers la constellation du Sagittaire,
sembloit verser une lumière argentée sur la surface de l'Océan. Le rocher blanc
que surmonte le château Saint-Antoine, paroissoit de temps en temps entre
les hautes cimes des cocotiers qui bordent le rivage. Bientôt nous ne reconnûmes
les côtes que par les lumières éparses des pécheurs Guaiqueries. C'est alors que
nous sentîmes doublement le charme de ces lieux et le regret de nous en éloigner.
Il y avoit cinq mais que nous étions débarqués sur cette plage comme sur une
terre nouvellement découverte j étrangers à tout ce qui nous environnoit, appro-
chant avec méfiance de chaque buisson, de chaque lieu humide et ombragé.
Aujourd'hui cette même côte disparut à nos yeux en nous laissant des souvenirs
qui sembloient dater de loin. Le sol, les rochers, les plantes, les habitans,
tout nous étoit devenu familier.
Nous cinglâmes d'abord au N.N.O. en nous approchant de la péninsule d'Araya
puis nous courûmes 3o milles sur l'O. et sur TO.S.O. En avançant vers le bas
fond qui entoure le cap Arenas, et qui se prolonge jusque vers les sources de
pétrole du Maniquarez, nous joùimes d'un de ces spectacles variés que la grande
phosphorescence de la mer offre si souvent dans ces climats. Des bandes de
marsouins, se plaisoient à suivre notre embarcation. Quinze ou seize dé ces
animaux nageoient à égales distances. Lorsqu'en tournant sur eux-mêmes, i!s
frappoient de leur large nageoire la surface de l'eau, ils ~pandoieat anejtueur
btiUan~e on auroit~it des Nammes qui sortoient du fond de la mer. Chaque
bande, en sillonnant la surface des eaux laissoitderneree~e une tM~n~e~de
lumière. Cet aspect nous frappoit d'autant plus, que le reste des ondes tt'ëtoit
point phosphorescent. Comme te mouvement d'une rame et le siUage dm Bateau
ne produisoient dam. cette nuit que de faibles étincettesj II est naturel de croire
que la vive phosphorescence causée parles marsouins étoit due non seulement
à l'impulsion de leur nageoire, mais encore à la matière gélatineuse qui enveloppe
la surface de leur corps, et se détache parle choc des vagues.
A minuit, nous nous trouvâmes entre des îles arides et rocheuses qui s'élèvent
comme des bastions au milieu de la mer c'est le groupe des îlots Caracas et
Chimanas La lune étoit sur l'horizon; elle éctairoit ces rochers fendillés, sans
herbes et d'un aspect bizarre. La mer, entre Cumana et le cap Codera, forme
aujourd'hui une espèce de baie, un léger enfoncement dans les terres. Les ilots
Picua, Picuita, Caracas et Boracha offrent comme les débris de l'ancienne côte
qui se prolongeoit depuis Bordones dans un& même direction de lest à louest.
Derrière ces îles se trouvent les golfes de Mochlma et de Santa-Fe qui deviendront
sans doute un jour des ports fréquentes. Le déchirement des terres, la fracture
et l'inclinaison des couches, tout annonce ici les effets d'une grande révolution.
C'est peut-être la même qui a brisé la chaine de montagnes primitives, et séparé
les schistes micacés d'Araya et de t'fte de la Marguerite des gneiss du cap Codera.
Plusieurs de ces îles sont visibles à Cumana de la terrasse des maisons, où elles
présentent, selon la superposition de couches dair plus ou moins chaudes, les
effets de suspension et de mirage les plus extraordinaires La hauteur de ces
rochers n'excède probablementpas j5o toises; mais, de nuit, éclairés par la tune,
ils paroissent d'une élévation très-considérabtB.
On peut être étonné de trouver des ~tes Caracas si loin de la ville'de ce nom,
vis-à-vis la côte des Cumanagotes; mais la dénomination de Caracas désignoit,
au commencement de la conquête, non un site particulier, mais une tribu
d'Indiens voisins des Teques, des Taramaynas et des Chagaragates. Le groape
dttes si montueuses que nous rangeâmes de près, nous ôtoit te-vent; et, au
lever du soleil, de petits filets de courans nous portoient \'ers la Boracha. C'est

a trois îles Caracas et huit îles Chimanas.


Hy
Voyez la note D à la fin du Livre.
ÛKM<<o &n!<M, jHM<- de ~e)te:M& Mb. ÏÏT~ Cap. ne, p. i4o. Une des petites Antilles, la Guade-
tcupe s'appeloit anciennement anse! Caracqueira. Petr. Martyr, Ocean. Dec. !tï, Lib. ÏX, p. 3o6.
le
culairement, le fond acore;I et,
Fond est acore d .11
la plus grande de toutes ces Mes. Commères rochers s'élèvent presque perpendi-
et et&~tsnn autre voyage, j'y ai vu mouiller
des frégates presque en touchant )à ferre. La temperatnre~e l'atmosphère avoit
augmenté sensiblemeat depuis que n~osavtons cinglé entre les gles dece petit
archipel. Leurs roches s'ëchaunent, pendant le jour, et rendent, la huit, par
rayonnement, une partie de la chaleur absorbée. A mesure que le soleil montoit
au-dessus de l'horizon, les montagnes brisées projetoient leurs grandes ombres
sur la surface de l'Océan. Les Flamants commençoient leur pêche partout où,
dans une anse, les rochers calcaires étoient bordés par une plage étroite. Tous
ces îlots sont aujourd'hui entièrement inhabités; mais sur une des Caraques, on
trouve des chèvres sauvages, brunes, d'une taille très-élevée, rapides à la course,
et ayant (à ce que disoit notre pitate indien ) la chair d'un goût exquis. H y a
trente ans qu'une famille de blancs s'étoit établie sur cet Mot elle cultivoit du
~naïs et du manioç. Le père survécut seul à ses enfans. Comme son aisance avoit
augmenté,il acheta deux esclaves noirs: ce fut la cause de son malheur, Il fut
tué par ses esclaves. Les chèvres devinrent sauvages, mais non les plantes
cultivées. Le maïs en Amérique, comme le froment en Europe, ne semblent
se conserver que par les soins de l'homme, auquel ils sont liés depuis Ms
premières migrations. Nous voyons se disséminer quelquefois ces graminées
nourrissantes; mais .lorsqu'elles -sont abandonnées à elles-mêmes, les oiseaux
empêchent leur reproduction en détruisant les graines. Les deux esclaves de l'~e
de Caracas échappèrent long-temps à la justice on avoit de la peine à constater
un crime commis dans un lieu si solitaire. L'un de ces noirs est aujourd'hui le
bourreau de Cumana. Il avoit dénoncé son complice; et, d'après l'usage barbare
de ce pays, comme on manquoit d'exécuteur public, on fit grâce à l'esclave,
sous la condition qu'il se chargeroit de pendre tous les détenus, dont l'arrêt de
mort étoit prononcé depuis long-temps. On a de !a peine à croire qu'il y ait
des hommes assez féroces pour. racheter leur vie à ce prix, et exécuter de leurs
mains ceux qu'ils ont dénoncés la veille.
Nous quittâmes des lieux qui laissent des souvenirs si pénibles~ et nous
mouillâmes, pour quelques heures, dans la rade de Nueva Barcelona, à l'em-
bouchure du Rio Neveri, dont le nom indien (Cumanagote) est Enipiricuar.
La rivière est remplie de crocodiles qui poussent quelquefois leurs excursions
jusqu'en pleine mer, surtout par un temps de calme. Ils sont de l'espèce qui est
si commune dans l'Orénoque, et qui ressemble a tel point au crocodile de l'Egypte,
qu'on )'a long-temps confondu avec lui. On conçoit qu'un animal, dont le
corps
l'eau. B~&~j~&tta ~comme ~~ï~rappoptedaM Mo ;ou~ïj~
est entoura d'uoo espèce de cuirasse, doit être assez indiËKrent à la saÏMM de

là Mijbn, ~voït va, sor ïes côtes de Mte de Bornéo, des cfocod!~qu< habitent
égalent la terre et la mer. Ces ËMts doivent întéresser I~s geoïogues, depuis
que leof attention a ét~ &x~e sur les CM*matioM d'eau douée et sar le Méta~ge
curieux de pétri6cat)0)Mmarines et &uviat!ies que l'on observe quelquefois dMts
de certaines roches très<rece~'tes.
Le port de Barcelone, dont le nom se trouve à peine sur nos cartes, fait un
ï
commerce très-actif depuis Tannée ~5. C'est par ce port que s'écoutent, en
grande partie, les produits de ces vastes steppes qui s'étendent depuis le revers
méridionat de la chafne côtière jusqu'à rOrenoque, et qui abondent en bétail de
toute espèce, presque Comme les Pampas de Buenos-Ayres. ~'industrie com-
merçante de ces contrées se fonde sur le besoin qu'ont les grandes et petites
Antilles de viandes salées, de bœuÏs, de mulets et de chevaux. Les côtes de la
Terre-Ferme étant opposées à celles. de t'He de Cuba, dans un étoignement de
t5 à ï8 jours de navigation, les négocians de la Havane aiment mieux, surtout
en temps de paix, tirer leurs provisions du port de Barcelone, que de courir les
chances d'un long voyage dans l'autre hémisphère, à l'embouchure du Rio de la
Plata. Sur une population noire de t,3oo,ooo que renferme déjà aujourd'hui
l'archipel des Antilles, Cuba seule a plus de 23o,ooo esclaves dont la nourriture
se compose de légumes, de viandes salées et de poisson desséché. Chaquebâtiment
qui fait le commerce dela viande salée ou du tasajo de la Terre-Ferme, en charge
vingt à trente mille arobes, dont le prix de vente est de plus de 45,ooo piastres.
Barcelone, par'sa situation, est singulièrement favorisé, pour lé commerce du
bétaiL Les animaux n'ont que trois jours de marche depuis les Llanos jusqu'au
port, tandis que, â cause de la chatne de montagnes du Bergantin et de l'Impo-
sible, ils en mettent huit ou neuf jusqu'à Cumana. D'après les renseignemens
que j'ai pu me procurer, on embarquoit, pendant les années 179~) et ï8oo, à
Barcelone.8ooo, à Porto-Cabello 6000, à Carupano 3ooo mulets pour les îles
espagnoles, angloises et françoises. J'ignore l'exportation précise de Burburata,
de Coro et des embouchures du Guarapiche et de l'Orénoque; mais je pense que,

2~ae?.<f.~mere«t,p.tM.
Les débats des Cor<~ de Cadiz smrt'aboMotMtela traite ont engagé le Consuladode la îtavaue à faire,
en i8n, des recherches exactes sur la popnbtion de l'ile de Cuba on t'a trouvée de 600,000 âmes,
dont 2~4,000 blancs, tt4,ooo hommeslibresde codeur, etat2,ooo nègres esclaves. L'évaluation publiée
ttans mon ouvrage sur le Mexique, Tom. U, p. étoit donc encore de beaucoup trop petite.
malgré les causes qui ont diminué le nombre des bestiaux dans les Llanos de
Cumana, de Barcelone et de Caracas, ces steppes immenses ne fburnissolent
pourtant, à cette époque, pas moins de 3o,ooo mulets~paran au commerce
avec les Antilles. En évaluant chaque mulet à a5 piastres (prix d'achat), on
voit que cette branche de commerce seule rend près de 3,700,000 francs, sans
compter le gain sur le fret des bâtimens. M. de Potis d'ailleurstrès-exact dans
ses données statistiques, s'arrête à des nombres moms grands. Comme il n'a pu
visiter lui-même les Llanos, et que sa place d'agent du gouvernement françois
l'a forcé de résider constamment à la villede Caracas, les propriétaires des A~fc-y
lui'auront peut-être communiqué des évaluations trop foibles. Je réunirai plus
bas, dans un chapitre particulier, tout ce qui a rapport au commerce et à
l'industrie agricole de ces pays.
Débarqués sur la rive droite du Neverl, nous montâmes à un petit fort,
*<?~ Morro de Barcelona, placé à 60 ou 7o toises d~élévatioù au-dessus du niveau
de la mer. C'est un rocher calcaire nouvellement fortifié. Il est dominé, au sud,
par une montagne beaucoup plus élevée, et les gens de fart assurent qu'il ne
seroit pas difficile à l'ennemi, après avoir débarqué entre l'embouchure de la
rivière et le Morro, de tourner celui-ci pour établir des batteries sur les hauteurs
environnantes. Nous restâmes cinq heures dans le fortin, dont la garde est confiée
à la milice provinciale. Nous attendîmes vainement des renseignemens sur les
corsaires anglois stationnés le long de la côte. Deux de nos compagnons de voyage,
frères du marquis del Toro de Caracas, venoient d'Espagne, où its avoient servi
dans les gardes du Roi. C'étoient des officiers d'un esprittrès-cultivé, qui retour-
noient, après une longue absence, conjointementavec le brigadier M. de Caxigal
et le comte Tovar, dans leur pays natal. Ils devoient craindre, plus que nous,
d'être faits prisonniers et amenés à la Jamaïque. Je n'avois point de passeport
de l'amirauté; .mais, sûr de la protection que le gouvernement britannique
accorde à ceux qui voyagent pour le progrès des sciences, j'avois écrit, dès mon
arrivée à Cumana, au gouverneur de l'île de la Trinité, pour lui exposer le but
de mes recherches. La réponse que je reçus par la voie du golfe de Paria, fut
entièrement satisfaisante.
La vue dont on jouit au haut du Morro est assez belle. On a file rocheuse de
!a Boracha à l'est, le promontoire d'Unare, qui est très-élève, à l'ouest, et à ses
pieds l'embouchure du Rio Neveriet les plages arides, sur lesquelles les cro-

~cya~a Th'n'-F~nM~ Tom.!I,p.386t


codiles viennent dormir au soleil. Malgré l'extrême chaleurde Faif (le thermomètre
exposé au reflet de la roche calcaire Manche montoit à 38° ),
nous parcourûmes
la colline. Un heureux hasard nous fit observer un phénomène géologique très-
curieux, mais quenous avons retrouvé depuis dans les Cordillères du Mexique*.
Le calcaire de Barcelone a la cassure matte, égale ou conchoïde, à cavités très-
aplaties. Il est~ivisé en couches assez minces, et offre moins d'analogie avec le
calcaire de Cumanacoa qu'avec celui de Caripe, qui renferme la caverne du
Guacbaro. H est traversé par des bancs de jaspe ~cA/~cu~r~, noir, à cassure
conchoîde, se brisant en fragmens de forme parallélipipède. Ce fossile n'offre
pas de ces petits fUets de quarz si communs dans la pierre lydienne. H se décom-
pose à sa surface en une croûte gris-jaunâtre, et n'agit point sur l'aimant. Ses
bords, un peu translucides, le rapprochent des Ao/TM~K (pierre de corne),
qui sont si communs dans les calcaires secondaires3. Il est remarquablede trouver
ici le jaspe schisteux qui, en Europe, caractérise les roches de transition dans
un calcaire qui a beaucoup d'analogie avec celui du Jura. Dans l'étude des
formations, qui est le grand but de la géognosie, les connoissancesacquises dans
les deux mondes doivent se suppléer mutuellement. Il paroit que ces couches
noires se répètent dans les montagnes calcaires de l'île Boracha 5. Un autre jaspe,
celui qui est connu sous le nom de c<MNoM<2~v/?fe', a été trouvé par M. Bon-
pland près du village indien de Curacatiche 6, quinze lieues au sud du Morro
de Barcelona, lorsque, de retour de l'Orénoque, nous traversâmes les Llanos,
et que nous nous approchâmes des montagnes côtières. Il offroit des dessins
concentriques et rubannés jaunâtres, sur un fond rouge-brun. Il m'a paru que
les morceaux arrondis de jaspe égyptien appartenoient aussi au calcaire de
Barcelone. Cependant, d'après M. Cordier, les beaux cailloux de Suez sont dus
à une formation de brèche ou d'aglomérat siliceux.
Au moment où nous mîmes à la voile, le 19 novembre, à midi, je pris des
hauteurs de la lune pour déterminer la longitude du Morro. La différence du

JSM<!t~O/t~MeM<r&t.2VMtMRf'-E~)ft~M,T.tI,p.535.
s
JftMt~cAte/erde Wcrmer.
Em Suisse, h pierre de
corne (hornstein) faisant passage an jaspe commun, se rencontre par rognons
et par couchesdans le calcairè alpin et le calcaire du Jura, surtout dans le premier.
4 Les schistes et les calcaires de transition.

5 Nous en avons Tu, comme lest, dans un bateau pêcheur, à Punta Araya. On en auroit pris les fragmens
pour du basalte.
Ou Curacaguitiche.
n_· 1. _°_- m F
méridien entre Cumana et ta ville de Barcelone, où je fis un grand nombre
d'observations astronomiques en ï8do~ est de d°34'4~. J'at discuté ailleurs
cette dinérence, sur laquelle il y avoit beaucoup de doute à cette époque';
je trouvai l'Inclinaison de l'aiguille aimantée de 4a<ao: l'intensité des -forces
étoit exprimée par 224 oscillations.
Depuis le Morro de Barcelone jusqu'au cap Codera, les terres s~baiMent en se
retirant vers le sud elles portent leurs sondes au large jusqu'à trbts mutes de
distance. Au-delà de cette ligne, il y a fond de 45 à 5o brasses. La température
de la mer étoit, à'sa surface, de s5",g; mais lorsque nous passâmes par le canal
étroit qui sépare les deux Mes Piritù, surun fond de trois brasses, le thermomètre
ne marqua plus que a4",5. La différence étoit constante; elle seroit peut-être
plus grande si le courant qui porte avec rapidité vers l'ouest, soulevoit des
eaux plus profondes, et si, dans une passe de si peu de largeur, les terres ne
contribuoient pas à élever la température de la mer. Les îles Piritu ressemblent
à ces hauts fonds qui deviennent visibles à la marée descendante. Elles ne
s'élèvent que de 8
à 9 pouces au-dessus des eaux moyennes. Leur surface-est
~toute unie et couverte de graminées. On croit voir une de nos prairies du nord.
Le disque du soleil couchant paroissoit comme un globe de feu suspendu sur!a
savane. Ses derniers rayons, en rasant la terre, éclairoient les pointes de Fherbe,
fortement agitées par la brise du soir. Lorsque, dans les lieux bas et humides
de la zone équinoxiale, les graminées et tes joncacées offrent l'aspect d'une prairie
ou d'un gazon, il manque presque toujours à ce tableau un ornement principal,
je veux dire cette variété de fleurs agrestes qui, s'élevant à peine au-dessus des
graminées, se détachent sur un fond uni de verdure.~ Entre les tropiques, la
force et lé luxe de la végétation donnent un tel développement aux plantes,
que les herbes dicotylédones les plus petites deviennent des arbustes. On diroit
que les liliacées, mêlées aux graminées, remplacent les Heuts de nos prairies.
Elles imposent, sans doute, par leur forme; elles brillent par la variété et l'éclat
de leurs couleurs; mais, trop élevées au-dessus du sol, elles troublent ces

< ~<yez l'/n<ft)<&M-<ton& me: 0& <M<nm., T. 1, p. xxxtx. M. Etpinosa s'arrÈte aM~ourd'hu! à 3W.
Les pilotes qui navigment sur ces <~te< comptent de Cntnana à Batcetone ta Kernee de Barcelone anx Mes
Ptritft 6 t.; de ces Mes au cap Unare 6 t.,
dn cap Unare au cap Codera t8 1. Le chMnom&trede Ber-
thoud m'a donné la pointe occidentale de la plus grande des îles Pintu, de t4'3a"; le cap Codera,
de t°24' 4" à l'ouest du méridien de Nueva Barcelona.
Cerésuttatappartientproprementant.°*ao&t)8ooetataTiUedeIîaevaBarcetoma(!at. ~o°6'5a"),o~~
j'ai pu faire l'observation avec plus de soin.
rapports harmonieux qui existent entre les végétaux dont se composent notre
gazon et nos prairies~ La nature bienfaisante a donné au paysage, sous chaque
zone, un type de beauté qui lui est propre.
On ne.doit pas être surpris que des ~tes fertiles, si rapprochées de ia Terre-
Ferme, ne soient pas habitées aujourd'hui. Ce n'est qu'à la première époque de
la découverte, lorsque les Indiens Caribes, Chaymas et Cumanagotes étoient
encore maîtres des cotes, que les Espagnols firent des étàblissemens àCubagua
et à la Marguerite. Dès que les indigènes furent soumis ou repoussés au sud vers
les savanes, on préféra se fixer sur le continent, où l'on eut le choix des terres et
celui des tndiens, qu'on pouvoit traiter comme des bêtes de somme. Si les petites
nés Tortuga, BtanquiUa et Orchilla étoient placées au milieu du groupe des
Antdtes, elles ne seroient pas restées sans trace de culture.
Desbâtimens qui tirent beaucoup d'eau, passent entre la Terre-Ferme et la
plus méridionale des fies Piritù. Comme elles sont très-basses, leur pointe nord
est redoutée par les pilotes qui attérissent dans ces parages. Lorsque nous nous
trouvâmes à l'ouest du Morro de Barce!ona et de l'embouchure du Rio Unare,
la mer, qui jusque-là avoit été beHe, devint d'autant plus agitée et houleuse
que nous nous approchions du cap Codera. L'influence de ce grand promontoire
se fait sentir de loin dans cette partie de la mer des Antilles. C'est de la facilité
plus ou moins grande avec laquelle on parvient à doubler le Cabo Codera,
que dépend la durée du trajet de Cumana à la Guayra. Au-delà de ce cap, la
mer est constamment si grosse, qu'on ne croit plus être près d'une côte où
( depuis la pointe de Paria jusqu'au cap Saint-Roman ) on n'éprouve jamais un
coup de vent. L'impulsion des vagues se faisoit vivement sentir dans notre
bateau. Mes compagnons de voyage souffroient beaucoup je dormis tranquil-
lement, ayant le bonheur assez rare de ne pas être sujet au mal de mer. Il ventoit
frais pendant la nuit. Le 20 novembre, au lever du soleil, nous nous trouvâmes
assez avancés pour pouvoir espérer de doubler le cap en quelques heures. Nous
comptions arriver le même jour à la Guayra, mais notre pilote indien craignoit de
nouveau les corsaires stationnés près de ce port. Il lui parut prudent de chercher
ta terre, de mouiller dans le petit port de l'Hignerote, que nous avions déjà
dépassé, et d'attendre la nuit pour continuer la traversée. Lorsqu'on offre à des
personnes qui souSrent du mal de mer le moyen de débarquer, on est sûr de la
résolution qu'elles vont prendre. Les remontrances étoient inutites, il fallut
céder; et, le 20 novembre, à neuf heures du matin, nous étions déjà
en rade
dans la baie de l'Higuerote, à l'ouest de l'embouchure du Rio Capaya.
Nous n'y trouvâmes ni village ni ferme, mais deux ou trois cabanes habitues
par de pauvres pêcheurs métis. Leur teintlivide et l'extrême maigrea~ des
enfans
fiévreux
nous rappelorcnt que cet endroit est an des plus malsains et des plus
de toute la côte. La mer a si peu de fond dans ces parages que, dansla plus
petite barque, on ne peut descendre à terre sans marcher dans l'eau. Les forêts
avancent jusque vers la plage, qui est couvérte d'un bocage épais de Paletuviers,
d7Avice'nn.ia, de Mancenilliers et de cette nouvelle espèce de Suriana que les
indigènes appellent .Rwncro de la Htor'. C'est à ce bocage, surtout aux exha-
laisons des palétuviers ou mangliers, qu'ici, comme partout ailleurs dans les
deux Indes, on attribue l'extrême insalubrité de l'air. En débarquant, lorsque
nous ne fumes éloignes que de ï5 à 20 toises, nous sentîmes une odeur fade et
douceâtre,qui me rappeloit celle que répand dans les galeries des mines délaissées,
là où les lumières commencent à s'éteindre, le boisage couvert de Byssus flocon-
neux.'La température de l'air s'élevoit à 34* à cause de la réverbération des
sables blancs qui formoient une lisière entre lés mangliers et les arbres de haute
futaie de la foret. Comme le fond s'abaisse par une pente doucettes petites
marées sufËsent pour couvrir et mettre à sec alternativement les racines et en
partie le tronc des mangliers. C'est san& doute pendant que le soleil échauffe le
bois humide, et fait fermenter, pour ainsi dire, le terrain fangeux, le détritus
des feuiiïes mortes et les mollusquesenveloppés dans des débris de varec flottant i
que se forment ces gaz délétères qui échappent à nos recherches. Sur toute la
côte, nous v~mes l'eau de la mer, là où elle est-en contact avec les mangliers,
prendre une couleur d'un brun jaunâtre.
Frappé de ce phénomène, j'ai recueilli à l'Higue~ote une quantité considé-
rable de branches~etde racines pour tenter, dès mon arrivée à Caracas, quelques
expériences sur l'infusion du bois de manglier. Cette infusion, faite à chaud,
avoit une couleur brune et un goût astringent. Elle offroit un mélanged'extractif
et de tannin. Le Rhizophora, le Guy, le Cornouiller, toutes les plantes qui
appartiennent aux familles naturelles des Loranthées et des Capnfbliacées, ont
ces mêmes propriétés. L'infusion de manglier, mise en contact pendant douze
jours sous une cloche avec de l'air atmosphérique, n'en altéra pas sensiblement
la pureté. Il se fbrmoit un petit dépôt floconneux noirâtre, mais il n'y avoit
pas d'absorption d'oxigène sensible. Le bois et les racines de manglier, placés
sous l'eau, furent exposés aux rayons du soleil. Je voulois imiter ce que la
nature opère journellement sur les côtes à la marée montante. Il se dégagea des
Suriana maritima..
bulles d'aic formèrent pendant dix jours an voïume ae~~,:pouc.é~ c~bes.
C'étoit aa ~rnélang~ d'azota et d'acide carbonique. Le ..gaz.. iMt~e~'Mïq~t~
peine là présence de Poxigène Ennnj, dans um ~Mn boM<~
69 agir du bois etdes racines de maaglier fortement humectés sur del'aicatmpN~
A~
phérique d'un volume déteHniné. Tout l'oxigène disparut; et, ïoia de se trouver
remplacé par det'acidecarboniqne,l'eau dechaux n'indiqua de cetui-ciquep,oa.
n y eut même une diminution de volume plus considérable que celle qui corres-
pondoit à l'oxigène absorbé. Ce travail à peine ébauche me portoit à croire que
cesontl'écorce et le-bois humides qui agissent sur l'atmosphère dans les forets
de mangliers, et non la couche d'eau de mer fortement colorée en jaune, qui
formoit une zone particulière le long des côtes. En suivant les dtOerens degrés
de décomposition de la matière ligneuse, je n'ai pas observé de trace de ce
dégagement d'hydrogène sulfuré, auquel plusieurs voyageurs attribuent rôdeur
que l'on sent au milieu des mangliers. La décomposition des sulfates terreux et
alcalins, et leur passage à l'état de sulfure, favorisent sans doute ce dégagement
dans plusieurs plantes littorales et marines, par exemple, dans les fucus; mais
j'incline plutôt à croire que le Rhizophora, l'Avicennia et le Conoearpus
augmentent l'insalubritéde rair par la matière animale qu'ils renfermentconjoin-
tement avec le tannin. Ces arbrisseaux appartiennent à trois familles naturelles,
les Loranthées, les Combretacées 2 et les Pyrenacées, dans lesquelles abonde le
principe astringent, et j'ai déjà fait observer plus haut que ce .principe accom-
pagne la gélatine, même dans nos écorces de hêtre, d'aune et de noyers 3.
D'ailleurs, un bocage épais, couvrant des terrains vaseux, répandroit des
exhalaisons nuisibles dans l'atmosphère, fut-il composé d'arbresqui~ par eux-
mêmes, n'ont aucune propriété délétère. Partout où les mangliers se fixent sur
le bord de la mer, la plage se peuple d'une inanité de mollusques et d'insectes.
Ces animaux aiment l'ombre et le demi-jour; ils trouvent de l'abri contre le
choc des vagues entre cet échafaudagede racines épaisses et entrelacéesqui s'élèvent
comme un treillis au-dessus de la surface des eaux. Les coquilles s'attachent à ce
treillis, les crabes se nichent dans le creux des troncs, les varecs que les vents et
la marée poussent vers les côtes, restent suspendus aux branches repliées qui
se dirigent vers la terre. C'est ainsi que les forêts maritimes-, en accumulant un

En tbo parties, 84 d'azote, i5 d'acide carbonique que Peau n'avoit pas-absorbées, t d'oxigene.
Rob. Brown, Flor. ?< ~fo~ jPro<~Tom.I,p.35t.
Vauquetm, ~nn. du 7tf<M. Tom. XV, p. 77
limon vaseux entre leurs racines, agrandissent te domame des conunens;mais a
mesure qu'elles gagnent sur la mer, elles n'augmentent presque pas en largeur.
Leurs progrès même deviencent ta cause de leur destruction. Les maogtiem et
les autres végétaux avec lesquels ils vivent constamment en société*, pénstentà
mesure que le terrain se dessèche, et qu'ils ne sont plus baignés par l'eau aaMe.
Lenrs vieux troncs, couverts de coquillages et à moitié ensevelis dans tes saMes,
marquent, après des siècles, et la route qu'Usent suivie dans leurs migrations, et
la limite du terrain qu'ils ont conquis sur lOcéan.
La baie de l'Higuerote est très-favorablement située pour examiner le cap
Codera, qui s'y présente dans toute sa largeur, à sept milles de distance. Ce
promontoire est plus imposant par sa masse que par son élévation, qui, daprès
des angles de hauteur' pris sar !a plage, ne m'a paru que de aop toises. Il est
taitté à pic au nord, a t'est et à l'ouest. On croit reconno~tre dans ces gmnds
profils l'inclinaison des couches. A en juger d'après les fragmens de roches que
l'on trouve le long de la côte, et d'après les collines voisines de l'HIguerote, te
cap Codera est composé, non de granite à texture grenue, mais d'un véritable
gneiss à texture feuilletée. Les feuillets sont très-larges, et quelquefois sinueux 3;
ils renferment de grands noeuds de feldspath rougeâtre et peu de quarz. Le
mica se trouve en paillettes superposées, et non isolé. Les couches les plus
voisines de la baie étoient dirigées N.6o"E. et inclinées de 800 au nord-ouest.
Ces rapports de direction et d'inclinaison sont les mêmesà la grande montagne
de la Silla, près de Caracas, et à l'est de Maniquarez dans l'isthme d'Araya ils
semblent prouverque la chame primitive de cet isthme, après avoir été déchirée
ou engloutie par la mer, sur une longueur de 35 lieues 4, reparoît de nouveau
dans le cap Codera et continue vers l'ouest comme une chame côtière.
On m'a assuré que, dans l'intérieur des terres, au sud de l'Higuerote, on
trouve des formations calcaires. Quant au gneiss, il n'agissoit pas sur la bous-
sete; cependant, le long de la côte qui forme une anse vers le cap Codera, et qui
est couverte d'une belle forêt, j'ai vu du sable magnétique mêlé à des'paillettes
de mica qui sont déposées par la mer. Ce phénomène se répète près du port de

Voici les nom! de ces végétaux sur le continent et aux Antilles Ayicennta nitida, A.
guyancensis R!ch.
Conocarpusracemosa, Rhizophora Mangte, Cocoltoba uvigera, Bippomane Mancinella, Echites biflora,
Suriana, StrumpEa, le palmier Pinau, etc.
L'angle apparent est de i*' a5' ao".
7)t~t~r<~r Gneiss.
4 Entre les méridiens de Maniqnarez et de l'Higuerote.
la Guayra: il annonce peut-être l'existencede quelque couche descb~~ampht-
bolique rouverte par les eaux, et dans laquelle te sabte est dissénua~VeM te
Nord, te ~àp Codera forme un immense segment spMriqtM.~Asottpied se
prolonge un terrain très-bas, que les navigateurs. connOtssent sous les nom de
Pointes du Tntumo et de San Francisco.
Mes compagnonsde voyage redoutoient si fort te roulis de notre petite embar-
cation, dans une mer grosse et houleuse ~<pï'i!s résoturent de prendre la route
de terre qui conduit de l'Higuerote à Caracas elle passe par un pays sauvage
et humide, par la Montana de Capaya au no~d de Gaucagua, la vauée du Rio
Guatire et Guarcnas. Je vis avec satisfaction que M. Bonpland préféroit cette
même route qui, malgré les pluies continuelles et les débordemens des rivières,
lui a procuré une riche collection de plantes nouvelles Quant à moi, je
continuai seul, avec le pilote Guaiquerie, le trajet par'mer; il me. paroissoit
hasardeux de quitter les instrumens qui devoient nous servir sur les bords de
1 Orénoque.
Nous mimes à la voile à l'entrée de la nuit. Lèvent etoit peu favorable, et
nous eûmes beaucoup de peine à doubler le cap Codera, les lames étoient courtes,
et brisoient souvent les unes sur les autres; il falloit avoir senti la fatigue d'une
journée excessivement chaude, pour dormir dans un petit bateau qui cingloit
au plus près du vent. La mer étoit d'autant plus élevée, que le vent fut contraire
au courant jusqu'après minuit. Le mouvement général vers l'ouest, qu'éprouvent
les eaux entre les tropiques, ne se fait bien vivement sentir sur ces côtes
que
pendant les deux tiers de l'année. Dans les mois de septembre, d~pctobre et de
novembre, it arrive assez souvent que le courantporte vers~est'* pédant qui~~
ou vingt jours consécutifs. On a vu des navires faMant route de la Guayra
à Porto-Cabetto, ne pas pouvoir remonter contre le courant qui se dirigeoit
de l'ouest à l'est, quoiqu'ils eussent le vent en poupe. On n'a pu découvrir
jusqu'ici la cause de ces anomalies les pilotes pensent qu'elles sont l'eSet de
quelques coups de vent du nord-ouest dans le golfe~du Mexique cependant
ces
coups de vent sont bien plus forts vers le printemps 3 qu'en automne. Il est
remarquable aussi que le courant vers l'est précède le changement de la brise;

Banhmia ferrnginet, Bt~wnea racemosa Bred., ïnga bymemeiMia, Inga cunepensis que M. WiM-
denow a nommé par erreur I.car~MM, etc.
Con-Mn~e~or<!ntta.
'VcM'E~M~<M~TomI,p.~o.
il commence d'abord à se faire sentir par un temps de calme et, ~pres quelques
jours, le vent m~me suit te courant et se nxe à l'ouest. Pendant la durée de ces
phénomènes,~ jeu des petites marées bardmétfiquesn'estaucunemeatinterrfmpa.
Le 21 novembre, au lever du soleil, nous nous trouvâmes à l'ouest du cap
Codera, vis-à-vis le Curuao. Le.pilote indien étoit effrayé d'apercevoir une
frégate angloise vers le Nord, à un mille de distance. Elle nous prit sans doute
pour un de ces bateaux qui font le commerce de contrebande avec les Antilles,
et qui ( car tout s'organise avec le temps ) étoient munis de licences signées par
le gouverneur de la Trinité. Elle joe nous fit pas même héler par le canot qui r
sembloit s'approcher de nous. Depuisr le cap Codera~ la côte est rocheuse et très-
élevée;el)e offre des sites à la fois sauvages et pittoresques. Nous étions assez
près de terre pour distinguer des cabanes éparses, entourées de cocotiers, et des
masses de végétations qui se détachoient sur le fond brun des rochers. Partout
les montagnes sont taillées à pic, à trois ou quatre mille pieds de hauteur: leur
flanc projetoit des ombres larges et fermes sur le terrain humide qui s'étend
jusqu'à la mer, et qui brille d'une fraîche verdare. CeUttoral produit en grande
partie les fruits de la région chaude, que l'on voit en si grande abondance dans
les marchés de Caracas. Entre Camburi et Niguatar,des champs cultivés,en cannes
à sucre et en maïs se prolongent dans des vallons étroits qui ressemblent à des
crevasses ou à dès fentes de rochers. Les rayons du soleil peu élevé sur l'horizon
pénétroient dans ces lieux, et oSroient les oppositions les plus piquantesd'ombre
et de lumière.
La montagne de Niguatar et la Silla de Caracas sont les cimes les plus élevées
de cette chame côtière. La seconde atteint presque la hauteur du Canigou on
croit voir les Pyrénées ou les Alpes dépourvues de leurs neiges, s'élever du
sein des eaux, tant la masse des montagnes semble s'agrandir lorsqu'on les
aperçoit pour la, première fois du côté de la mer. Près de Caravalleda,le terrain
cultivé s'élargit; on y trouve des collines à pentes douces, et la végétation s'élève
à une grande hauteur. On y~cultive beaucoup de cannes à sucre, et les moines
de la Merci y ont une plantation et 200 esclaves. Cet endroit étoit jadis extréme-
.ment fiévreux, et l'on assure que la salubrité de l'air a augmenté depuis qu'on
a fait croître des arbres autour d'une lagune dont on craignoit les émanations,
et qui est aujourd'hui moins exposée à l'ardeur du soleil. A l'ouest de Caravalleda,
un mur de rochers arides avance de nouveau vers la mer; mais il a peu d'étendue.
Après l'avoir tourné, nous découvrîmes à la fois le joli site~da village de Macutp,
les rochers noirs de la Guayra hérissés de batteries qui se succèdent par étages,
et dans nn ïointaia~ vaporeux, an tong promontoire a c!<Bt~ côniqaes et d'une
Manehéar éëtatante, ïé
~&o jS~BMeo~ Des cocotiers bordent Ïeftvage, et lui
donnent,sons cedetbrn!ant,nne apparence de fertilité.
Débarqué an portdêï&Gnayra.~è~s, dans la soirée même, les apprêts ponr
transporter mes instrumens & Carateas. Les personnes pour tesquettes j'avbis des
recommandations me conseitloient de cdneher, non dans la ville ou la Sevré
jaune n'avoit cessé de régner qne depuis peu de semaines, mais au-dessus du
village de Maiquetia, dans une maison placée sur une petite hauteur, et plus
exposée aux vents frais-que la Guayra. J'arrivai à Caracas te 2 novembre au soir,
quatre jours avant mes compagnons de voyage, qui, dans la route de terre, entre
Capaya et Curièpe, avoient beaucoup souffert par les averses et les inondations
des torrens. Pour ne pas revenir plusieurs fois sur les mêmes objets, je vais réunir
à la description de la Guayra et de la route extraordinaire qui conduit de ce
port à la viiïe de Caracas, tout ce que nous avons observé, M. Bonpland et moi,
dans une excursion faite au Cabo B!anco versia fin du mois de janvier t8oo.
Comme M. Dépens a visité ces lieux après moi, et que son ouvrage instructif
a précédé !e mien, je m'abstiendrai de décrire en détail des objets qu'il a traités
avec une précision suffisante 2.
La Guayra est plutôt une rade qu'un port; la mer y est constamment agitée,
et les navires souffrent à la fois par l'action du vent, les lits des marées, le
mauvais ancrage et les tarets 3. Les chargemens se font avec difficulté, et la
hauteur des lames empêche qu'on ne puisse embarquer ici des mulets comme à
Nueva Barcelona et à Porto-Cabello. Les nègres et les mulâtres libtes qui portent
le cacao à bord des batimens, sont une classe d'hommes d'une force musculaire
très-remarquaMe. !ts traversent l'eau à mi-corps, et ce qui est bien digne
d'attention ils n'ont rien à redouter des requins, qui sont si fréquens dans ce
port. Ce fait semble se lier à ce que j'ai souvent observé entre les tropiques,
relativement à d'antres classes d'animaux qui vivent par bandes, par exempte

Dn 23 au 27 janvier,
Je d«M rappeler. ici que les meMrM de hauteur et les résultats d'observations magnétiques publiés
par M. Depons (Ttm. Hî, p. 66, tg~ ), se fondent sur mes calculs approximatifsfaits sur les lieux, et
dont j'avois donné des copies à plusieurs personnes qui s'intéressoient à ce genre de recherches. C'est aux
errenrs de ces copies qu'il fautattribuer sans doute les indications de M~roTn~M de Detnc, les inclinaisons
de l'aiguilleaimantéeconfonduesavec t'tBe/MMMon<&t~)<!& à Caracas, les osciUatiomsd'un pendule dontla
longueur n'est pas déterminée, et qui ne sont pas comparées aux oscittations comptées dans un autre
lieu pendant le même espace de temps, etc.
~~&n)nM.Teredona~atis,tf,
les singes et les crocodiles, Dans lea missions d~l'O~aoque~ et de ~a rivière des
Amazones, les Indiens qui prennent des singes powrteevendMtsavent très-
bien qu'ils parviennent à apprivoiser &cilement ceux qui habitent <te certaines
fies, tandis que les singes de ta Même espèce, pris sur le continent v<M<in,
meurent de rage ou defrayeurdes qu'Usée voient au pouvoir dei'homme.
Les crocodiles d'une mare des Llanos sont lâches, et Ment m4me dans t~au,
tandis que ceux d'une autre mare attaquent avec une Intrépidité extrême. H
serott dUneile d'expliquer, par l'aspect des localités, cette différence de mœurs
et d'habitudes. Les requins du port de la Guayra semblent offrir, un exempte
analogue. Ils sont dangereux et avides de sang aux Mes opposées à la cote de
Caracas, aux Roques, àBonayre et a Curaçao, tandis qu'ils n'attaquent pas les
personnes qui nagent dans les ports de la Guayra et de Sainte-Marthe. Le peuple
qui, pour simplifier l'explication des phénomènes physiques, a toujours recours
au merveilleux, assure que, dans l'un et l'autre endroit, un éveqne adonné la
bénédiction aux requins.
La situation de la Guayra est très-extraordinaire on ne peut la comparer
qu'à celle. de Sainte-Croix de TénériSe. La chame de montagnes qui sépare le
port de la haute vallée de Caracas, plonge presque immédiatementdans la mer,
et les maisons de la ville se trouvent adossées à un mur de rochers escarpés. H
reste à peine, entre ce mur et la mer, un terrain uni de too à t~o toises de
largeur. La ville a six à huit mille habitans et ne renferme que deux rues, dirigées
parallèlement de l'est à l'ouest. Elle est dominée par la batterie du Cerro colo-
ro<&~ etj~s fortifications, le long de la mer, sont bien disposées et bien
entretenues. L'aspect de cet endroit a quelque.chose de solitaire et de lugubre;
on croit se trouver, non sur un continent couvert de vastes forêts, mais dans
une Me rocheuse, dépourvue de terreau et de végétation. A l'exception du cap
Blanc et des cocotiers de Maiquetia on n'a d'autre paysage que l'horizon de la
mer et la voûte azurée du ciel. La chaleur est étonnante de jour, et le plus
souvent aussi pendant la nuit. On regarde avec raison le climat de la Guayra
comme plus ardent que le climat de Cumana, de Porto-Cabello et de Coro, parce
< que la brise de mer~'y fait moins sentir, et que les rochers taillés à pic em-
brasent l'air par le calorique rayonnant qu'ils émettent depuis le coucher du
soleil. On jugeroit mal cependant de la constitution atmosphérique de ce lieu
et de tout le littoral voisin, si l'on necomparoit que les températures indiquées
par les degrés du thermomètre. Un air stagnant, engouffré dans une gorge de
montagnes, en contact avec un massif de rochers arides, agit autrement sur nos
organes, qtt'w ai~alemeat chatte dans âne campagne ouverte. Je suie loin de
chercheF~a oaoM physique de ~$4i~~nèsâdawl~de'là
char~ ~I~triquede i'M~ je dobdë$ ajo~
qu'lÍu¡leb;.a.'l!efjt: de lx
Guayra~ du côté de MetcaM) to4a n~isoas~ et, a plos de cent te~ses de
dMtttBce des rocher de gae!~ ~aî~tt~peme obtenir, pendant plusieurs joue~î
quelquet MMe< signes d'élec~Mt~e~tot~ m~rrieshèurms de;1'a~pis~
midi, à Cumaaa~ et avec le meMe ~lectromètrc de ~oita, armé d'une mèche
fumante, pavois observé un étiârtement des boules de jsureaudei à a lignes.
J'exposerai plus bas leavariatioas régulières qu'éprouve chaque jour la tension
électrique de l'air daus ta ~)Më torrtde, et qui indiquent an rapport frappant
entre les vanriatitMM de Miaperâtare et la hauteur da<oleii.
L'examen des observations tnermOBtétriqaes faites pendant neuf mois, à la
Guayra patr nN médecin diM~nguë nt~ mis en état de comparer le climat de
ce port à ceux de CcBtaaa.de ta Havane et de la VeM-Cruz. Cette compa-
raison est d'autant plus Intéressante, qu'elle est un sujet iatarissafMe de conver-
sations dans tes colonies espagnotes e< parmi les marins qui fréquentent ces
parages. Comme rien n'est plus trompeur/dans cette matière, que te témoignage
des sens, cm ne peut juger de ? diSMrence des cthnat& que par des rapports
numériques.
Les quatre endroits que nous venons de nommer sont regardés comme les
plus chauds qu'offre le littoral du Nouveau-Monde leur comparaison peut
servir à confirmer ce que nous avons rappelé plusieurs fois, que généralement
c'est la durée d une haute température, et noM l'excès de la chaleur ou sa quantité
absolue, qui font soufFrir les habitansde la zone torrtde. 1
La moyenne des observations de midi, depuis le 2~ juin jusqu'au ï6 no-
vembre, a été, à la Gua~ra, 3i'6 da thermomètre centigrade; à Cumana,
s9°,3; à Vera-Cruz, a8",7 a la Havane, 2<)°,5. Les différences des jours ont à
peine excédé, à la même heure, 0*~8 à ~,4. Pendant tout ce temps il n'a plu
que quatre fois, et seulement à 8 minutes c'est l'époque où règne la fièvre

Don ïote Herrera, correspondant de la MoHMS de médecine A'Edimhturg. Lea obBerratmM (dm
a mai ~9 au 17 janvier t<oo) <to!itnt faites t'ombre, loin du reBet des murs, avec mathermo-
mètre que j'ai comparé aux mieM), et p<tr les nmeM aux thenmah&tres de Pobaervato:re de Paris.
On pourroit ajouter à ce petit Mmbre Coro~ Carthagène des Indes, ùmoa,Camp<che,Gntyaqml
et Acapulco. Mes comparatM'M M ibademt, pour Cnm'ma, ~tr mes propre* oh!termt!oM et celles de
don FatBtm RoMo pour la Vera-CrM et h Havane, sttr les observations de don Bernardo de Orta et de
don toaeqmn Behfef.
jaune, qui disparoit ordinairement à la Guayra comme a vem'~ruz'et amc
de Saint-Vincent, lorsque la température des jours baisse a~dessous de z3 ou
2~ degrés. La température moyenne du mois le plus chaud a ëtë~ a la Guayra~
à peu près de 29,~3; à Cumana, de 29°~ ;a Vera-CruZ, de y
a7'anGaire,
d'après Nouet, de 20",9 à Rome, de a3~o. Du 16 novembre au ïo décembre,
la température moyenne n'a été, à la Guayra, à midi que de a4~3 la nuit,
de 2t°,6. C'est l'époque à laquelle on soùffre le moins de la chaleur. Je pense
cependant qu'on ne voit pas descendre le thermomètre (peu avant le lever du
soleil) au-dessous de 2~, il baisse quelquefois à Camana, à at°,at, à Vera-
Cruz, à !6°;à la Havane (toujours lorsque le vend du nord soude)~ à 8" et
même au-dessous. La température moyenne du mois le plus froid* est, dans
ces quatre endroits, de 33~9, 36°,8, 2~,1, ai~o. Au Caire, elle est
de ï5",4'·
La moyenne de fan/
entière est, d'après de bonnes observations calculées
avec soin, à la Guayra, à peu près de a8",t à Cumana., 27°,-7
à Yera-Cruz,
35*4; à la Havane-, 25°,6; à Rio Janeiro, 23~5; à Sainte-Croix de TénériSe,
située par les 28",28~ de latitude, mais adossée, commet Guayra, a un mur
de rochers, 21 ",9; au Caire, 22" à Rome, 15°,8.
Il résulte de l'ensemble de ces observations que la Guayra est un des

~VoMf. Espagne, Tom. !ï, p. ~65.


La moyenne du mois le plus cbaud 4 Paris est de tg* ao°, par conséquent 3 à 4 degrés de moins que
la température moyenne du mois le plus froid la Guayra.
Voici les variations horaires du baromètre exprimées en lignes du pied de Paris. jointes aux
observationsdu thermomètre centigrade et de l'hygromètre baleine de De!no, comme je les ai observées
du 23 au a5 janvier~n port de Guayra.
J<mM. Heurm ~ron). Ttwm. Hy~~m.
23 janvier ii s. 33~,9 a3°,5 ~t°,o étoiM,beau.
(
4m. 33o,7 a3°,t 5a°,4
a4 y~m. 33y,5 a3°,a 4a',3
9 337,7 a4",3 4a'5
10 33~,6 a5'\6 4a°,3
ta 33y,t 26°,2 45°,a ciel
vaporeux.
2̀ -, 336,4 a6°,4 45°,8
` 4~¡ 33<3 a6-a 46°,3
5~
4
336,6 a3<7 47'
os. 337,t a4°,3 M'~B nuages.
i~ 336,8 23°,7 5a''4
25 7 m. 337,0 aa',3 5t'a serein, ciel azuré.
8 337,3 a3°,5 5o°,3
Les observationsde température correspondantes aux miennes donnoient, pour Cu~nana, !ea3 janvier,
endroits le$ plus chauds de la terre que la quantité de dt~l~m* que reçoit ce
lieu pendant le cours d'une année, est un peu plus ge~xd&qae celle qu'oi
éprouve a Cumana nMis que, dans les moM de novembre, décembre et janvier a
(à égsile distance des deax passages dn soleil par le zénith de la viHe ), t'attnos-
phère se 'refroidit davantage à 1~~ bien piM léger
que celui- qu'on éprouver presque à la même époque, a la Ver~-Çruz et &
la
Havane~ ne serôit-il pas l'~t
de la position plus occidentale de la Guayr&?
L'océan aérien qui, au premier aspect, ne paroit former qu'une seule masse,
est agité par des couràns dont les limites sont fixées d'après des lois immuables.
Sa température est diversement modifiée par la configuration des terres et des
mers sur lesquelles il repose. On peut le subdiviser en plusieurs bassins qui
déversentles uns dans les autres, et dont les plus agités (par exemple celui
placé .au-dessus du. golfe du Mexique ou entre la Sierra de Santa Martha et le
golfe de Darien ) ont une influence marquante sur le refroidissement et le mou-
vement des colonnes d'air voisines. Les vents du nord causent quelquefois, dans
la partie sud ouest de la mer des Antilles, des refbulemens et des contre-
courans qui semblent, dans certains mois, diminuer les chaleurs jusque sur la
Terre-Ferme.
Lors de mon séjour à la Gnayra on n'y connoissoit encore que depuis deux
ans le fléau de la fièvre jaune, ou calentura aynar/Z/a encore la mortalité
n'avoit-elle pas été très-grande, parce que l'affluence des étrangers sur la côte
de Caracas, étoit moindre qu'à la Havane et à !a Vera-Cruz. On avoit vu de
temps en temps des individus, même des créoles et des gens de couleur, être
enlevés subitement par de certaines Rèvres ataxiques rémittentes, qui, par des
complications bilieuses, des hémorragies, et d'autres symptômes également
effrayans, paroissoient avoir quelque analogie avec la fièvre jaune. C'étoient
généralement des hommes qui s'étoient !ivrés aux travaux pénibles de la coupe
des bois, par exemple dans les forêts qui avoisinent le petit port de Carupano

à ti''du soir, a6°,6; le 94 janvier, à apr~s mid!, a8",a; à tl' du soir, a6*5; le 25 janvier, à y'' du
matin, a5',5.
En Asie, les températures mcyennM d'Atashar, de Madras et de Batavia ne sont pas au-dessm'de 25
et a~ degrés; mais le mois le plus chaud e'éteve, à Madras, d'après Rotbnrgh, à 3a°; a Abusbar, sur le
golfe persique d'après M. Jules, à 33°,9; ce qui est a et 4 degrés de plus qu'au Caire. ~<ye* Barrow,
~oy. to Cochinchina,.p. tSo; Wa~eo&tt, ~M<. o~' Persia, T. 11, p. 5o5, et mon Essat sur la distri-
hntion de la chaleur et les lignes isothermes dans les j!~nt. de /<! $ppte~ ~rc«e<7, Tom. ÏH.
Depuis la moitié de janvier, la chaleur va déjà en augmentant à la Guayra.
ou le golfe de Santa-Fe, à l'ouest de Cumasa. Lear mort atapNEtoit gavent, daaa
des villes qu'on croyoit éminemment saines, ÏMB~u~pée~no~accMmaté);
mais les germes de la maladie dont ils avoieat é~ attaqnea spM~dt~~emejitt~ne
se propageoient pas. Sur ïa côte de la Terc~B~rme ~ïe i~ntaMe typt~
rique, celui qui est connu sous les nonM de ~oMitto~MSte' ( vomiasement noïr )
et de fièvre jaune et qu'on doit regarder com~etM~e aSbct~om mot~i~oe ~H<
generis, n*étoit connu qu'à Porto-Cabeno~àCaftbagèBedesïadesetaSamte-
Marthe, ou Gastelbondo l'avoit observé et décrit dès l'année 17 99. Lea Espa-
gnols récemment débarqués et tes habitans de la vallée de Caracas ne craignoient
point alors le séjour de la Guayra on se plaignoit seulement des chaleurs acca-
blantes qui régnoient pendant une grande partie de l'année. Si t'on s'exposoit
à l'action immédiate du soleil, on redoutoit tont au plus. ces inflammations de
la, peau et des yeux que l'on éprouve presque partout sous la zone torride, et
qui sont souvent accompagnées d'un mouvement fébrile et de fortes congestions
vers !a te~e. Beaucoup d'individus préféroient au climat frais, mais excessivement
variable de Caracas, le climat ardent, mais égal de la Guayra: on ne parloitt
presque pas de l'Insatubnté de l'air de ce port.
Depuis l'année i~gy, tout a été changé. Le commerce fut ouvert à d'autres
vaisseaux que ceux de la métropole. Des matelots, nés dans des pays plus froids
que l'Espagne, et par conséquent plus sensibles aux impressions ~llmatériqnes
de la zone torride, commençoient à fréquenter la Guayra. La nèvre jaune
se
déclara; des Américains du nord atteints du typhus, furent reçus dans les
hôpttaux espagnols; on ne manqua pas de dire qae e'étoient eux qui avoient
importé la eon~gion, et qtt'avant d'entrée en. rade, la maladie s'étoit déeta~éc
à b<Mfd d'un brigantin qui venoit de Philadelphie. Le capitaine de ce brig&ntin
nioit le fait, et prétendoit que, loin d'avoir introduit le mal,
se& matelots
l'avoient pris dans le port même. On sait, d'après ce qui est arrivé à Cadix
en
i 8oo, combien il est difficile d'éclaircir des faits dont l'incertitude semble favo-
riser des théories diamétralement opposées. Les habitans les plus éclairés de
Caracas et de la Guayra partagés, comme les médecins d'Europe et des États-
Unis sur le principe de la contagion de la Sevré jaune citoient le même navire
américain pour prouver, les uns que le typhus venoit de dehors, les autres qu'il
avoit pris naissance dans le, pays même. Ceux qui embrassoient te dernier sys-
tème, admettoient une altération extraordinaire de la constitution atmosphé-
rique, causée par le débordement du Rio de la Guayra. Ce torrent, qui n'a
génëratemcnt pas to pouces de fond/eut, après soixante heures de pluie dans
lestMBtagnes, recrue si extraordinaire, qu'Hcharria des troncs d'arbres et
des masses de rochers d'un volume considéraMë. Pendant la crue i'eauavoit
3o à 4o pieds de large sur 8 à ï0 pieds 'de profbndeur.OneupposOit qu'elle
étoit sortie de quelque bassin souterrain, ibrmé par des inSItratIons successives
dans des terres meublés et nouvellement défrichées. Plusieurs maisons furent
emportées par le torrent et l'inondation devint d'autant plus dangereuse pour
les magasins, que la porte'de la ville, qui seule pouvoit donner de l'issue aux
eaux, s'étoit fermée accidentellement. Il fallut tirer brèche contre le mur du
côté de la mer; plus de trente personnes périrent, et le dommage fat évalue à
un demi-million de piastres. Les eaux stagnantes qui infectoient les magasins, les
caves et les cachots de la prison publique, répandoient sans doute des
miasmes
dans l'air, qui, comme causes prédisposantes, peuvent avoir accéléré le déve-
loppement de la fièvre jaune mais je pense que l'inondation du Rio de la
Guayra en a été tout aussi peu la cause première que les débordemens du
Guadalquivir, du Xenil et du Gual-Medina, ne l'ont été à Séville, à Ecija et à
Malaga dans les funestes épidémies de ï8oo et i 8o4. J'ai examiné attentivement
le lit du torrent de la Guayra; je n'y ai vu qu'un terrain aride, des blocs de schiste
micacé et de gneiss, renfermant des pyrites et détachés de la Sierra de Avila;
je n'y ai rien trouvé qui e&t pu altérer la pureté de l'air.
Depuis les années 1797 et 1798 ( les mêmes dans lesquelles il y eut une énorme
mortalité à Philadelphie, à Sainte-Lucie et
à Saint-Domingue), la fièvre jaune
elle n'a pas seulement été meur-
a continué à exercer ses ravages à la Guayra;
trière pour la troupe nouvellement arrivée d'Espagne, mais aussi pour celle qui
avoit été levée loin des côtes dans les Llanos, entre Calabozo et Uritucu, dans
une région presque aussi chaude que la Guayra, mais favorable à la santé. Ce
dernier phénomène nous surprendroit encore davantage, si nous ne savions pas
que même les natifs de la Vera-Cruz, qui dé sont point attaqués
du typhus dans
leur propre ville, y succombent quelquefois dans les épidémies de la Havane et
des Etats-Unis*. De même que le vomissement noir trouve, sur la pente des
montagnes du Mexique, dans le chemin de Xalapa, une limite insurmontable
à l'Encero (à 476 toises de hauteur), où commencent les chênes et un climat
frais et délicieux, la fièvre jaune ne dépasse presque pas l'arête de montagnes
qui sépare la Guayra de la vallée de Caracas. Cette vallée en a été exempte

CtT&~te, on ~e~MeoM o/<M ~fo/e~'e ~tm<~on M the ~ntt/ t8oo, p. i;.


AoKf. jE<p., Tom. U, p. yya.
pendant long-temps car il ne faut pasconfbndre lefoM~o et ta nèvre jaune
avec !esnèvresataxiques et bilieuses. La Cumbre et le Cerro de Avila sont un
rempart bien utile pour la ville de Caracas, dont l'élévationexcède un peu celle
de l'Encero.mais dont la température moyenne est au-dessus de latempépatnre
de Xalapa.
1.
J'ai exposé dans un autre ouvrage les observations physiques faites par
M. Bonpland et par moi sur la localité des villes; qui sont périodiquement
sujet au fléau de la fièvre jaune, et je ne hasarderai point ici de nouvelles
conjectures sur les changemens que l'on observe dans la constitution ~fAog~-
niqùe de certaines villes. Plus je rénéchis sur ces matières, et plus je trouve
mystérieux tout ce qui tient à ces émanations gazeuses que/Ton appelle si vague-
ment des germes de la contagion, et que l'on suppose se développer dans un
air corrompu, se détruire par le froid, se transporter avec les vétemens, et se
"fixer
aux murs des maisons. Comment expliquer que, pendant les dix-huit ans
qui précédèrent l'année !~4~ n'y eut pas un seul exemple de vomito & la
Vera-Cruz, quoique le concours des Européens non acclimatés et des Mexicains
de l'intérieur fut extrêmement grand; que les matetots se livrassent aux mêmes
excès qu'on leur reproche aujourd'hui, et que la ville f&t moins propre qu'elle'
ne l'est depuis l'année i8oo?
Voici la série des faits pathologiques considérés dans leur plus grande simpli-
cité. Lorsque, dans un port de la zone torride dont l'Insalubrité n'a pas été
particulièrementredoutée par les navigateurs,il arrivela fois un grand nombre
de personnes nées dans un/climat froid, le typhus d'Amérique se fait sentir.
Ces personnes n'ont pas eu le typhus pendant la traversée; il ne se manifeste
parmi eux que sur les lieux mêmes. La constitutionatmosphériquea-t-elle changé
ou une nouvelle forme' de maladie §'est~eHe développée dans des individus dont.
l'excitabilité est fortement exaltée ?
Bientôt le typhus commence à exercer ses ravages parmi d'antres Européens
nés dans des pays plus méridionaux. Si c'est par contagion qu'il se propage,
on
est surpris d'observer que, dans les vi!!es du continent équinoxial, il ne suit pas
(le certaines rues, et que le contact immédiat n'augmente
pas plus le danger

~Mc. ~~p,j T'ont. 11, p, 753-788,


Dans la peste de l'Orient ( autre typhus earactêrmépar le désordre du système lymphatique),le contact
nnmédiat est aussi moins à craindrequ'on ne le pense génératement. M. Larrey assure qu'il n'est pas dan-
gereux de toucher ou de cautériser des bubons, mais il pense qu'on ne doit pas risquer de se couvrir des
vetemens des pestiférés, Mém. sur les 'na/adtM~efarnt~anfoMe ~'Mp<e, 35.
<m p.
du séjour que l'Isolement ne le diminue. Lesmalades, traaspottesdansitnteneur
Xaïapa,
des terres, surtout dans des lieux plus &ais et plus élevés, par exemple, &

ne communiquent pas le typhus aux habitans de ceslieux,soit parce qu'il n'e&t


pas contagieux par sa nature, soit parce que-les causes prédisposantes n'y sont
pas les mêmes que dans la région du littoral. Avec un abaissement considérable
de ta température, l'épidémie cesse ordinairementdans l'endroit où elle a pris
naissance. Elle recommence à l'entrée de'la saison chaude, quelquefois long-
temps avant, lorsque, depuis plusieurs mois, il n'y a eu aucun malade dans le
port, et qu'aucun navire n'y est entre.
Le typhus d'Amérique parott restreint au littoral, soit parce que c'est là que
débarquent ceux qui l'importent* et qu'on y entasse les marchandises que l'on
suppose imprégnées de miasmesdélétères ,~oit parce que, sur les plages de la mer,
il se forme des émanations gazeuses d'une nature particulière. L'aspect des lieux
où ce typhus exerce ses ravages, paroit souvent exclure tout soupçon d'une
origine locale ou endémique. On la vu régner aux îles Canaries, aux Bermudes
et parmi les petites Antilles, dans des endroits secs et connus jadis par la grande
salubrité de leur climat. Les exemples de la propagation de la fièvre jaune dans
l'intérieur des terres paroissent très-douteux sous la zone torride on peut avoir
confondu cette maladie avec des fièvres rémittentes bilieuses. Quant à la zone
tempérée,où le caractère contagieux du typhus d'Amérique est plus prononcé,
le mal s'y est répandu indubitablement loin du littoral, même dans des lieux
très-élevés ou exposés à des vents frais et secs, comme en Espagne, à Medina-
Sidonia, à la Carlotta et à la ville de Murcie. Cette variété de phénomènes qu'offre
la même épidémie selon la diCérenee des climats, la réunion des causes prédis-
posantes, sa durée plus ou moins longue, et les degrés de son exacerbation
doivent nous rendre très~circonspects en remontant aux causes secrètes du typhus
d'Amérique. Un observateur éclairé, qui, dans les cruelles épidémies de 1802
et t8o3, a été médecin en chefde la coloniede Saint-Domingue,et qui a étudié
la maladie à l'ile de Cuba, aux Etats-Unis et en Espagne, M. Bailly, pense comme
moi « que le typhus est fort souvent contagieux, mais qu'il ne l'est pas toujours 2. M
Depuis que l'on a vu la fièvre jaune exercer de si cruels ravages à la Guayra,
on s'est plu à exagérer la malpropreté de cette petite ville, comme on exagère
celle de la Vera-Cruz, et des quais ou waifs de Philadelphie. Dans un lieu dont

BatUy, <~&t~Mffe/<tMM, i8t4, p. 4at.


Ba!My~ c. p. xn (~Vonp.
JE<p., Tom. ïï, p. 77~)*).
le sol est extrêmement sec, qui est dépourvu de Végétation, et oui! tombe à peine
quelques gouttes d'eau eh 7 ou 8 mois, les causes qui produisent ce que 1*00 appelle
des miasmes délétères ne, peuvent pas être bien fréquentes. Les rues de la Guayra
m'ont paru en général assez, propres, à l'exception du quartier des boucheries. La
rade n'offre pas de ces plages sur lesquelles s'amoncellent des débris de tucus et
de mollusques; mais la côte voisine, celle qui se prolonge à l'est, vers le eap
Codera, et par conséquent au vent de la Guayra, est extrêmement malsal'ne. Des
fièvres intermittentes, putrides et bilieuses, règnent souvent à Macuto et à
Caravalleda; et, lorsque de temps en temps la brise est interrompue par un vent
de l'ouest, la petite baie de Catia que nous aurons souvent occasion de nommer
dans là suite, envoie, vers la côte de.la Guayra, malgré le rempart qu'oppose
le cap Blanc, un air chargé d'émanations putrides.
L'irritabilité des organes étant si différente chez les peuples du nord et ceux
*du midi, on ne sauroit révoquer en doute qu'avec une plus grande liberté du
commerce et une communication plus fréquente et plus intime entre des pays
situés sous différens climats, la fièvre jauné étendra ses ravages dans le Nouveau-
Monde. Il est même possible que le concours de tant de causes excitantes et leur
action sur des individus si différemment organisés fassent nattre de nouvelles
formesde maladies, de nouvelles déviations des forces vitales. C'est un des maux
qui accompagnent inévitablement une civilisation croissante l'indiquern'est pas
regretter la barbarie; ce n'est pas partager l'opinion de ceux qui voudroient
rompre les liens entre les peuples, non pour assainir les ports des colonies, mais
pour entraver l'introduction des lumières, et ralentir les progrès de la raison.
Les vents du nord qui amènent l'air froid du Canada vers le golfe du Mexique,
fônt cesser périodiquement la fièvre jaune et le vomissement noir à la Havane et
à la Vera-Cruz. Mais l'extrême égalité de température qui caractérise le climat
de Porto-Cabello de la Guayra, de Nueva Barcelona et de Cumana, fait craindre
que le typhus n'y devienne un jour permanent, lorsque, par une grande concur-
rence d'étrangers, il aura pris un haut degré d'exacerbation.Heureusement que
le nombre des morts a diminué depuis qu'on a varié les traitemens selon le
caractère qu'offre l'épidémie dans les différentes années, depuis qu'on a mieux
étudié les diverses périodes de la maladie, qui se reconnoissent par des symptômes
d'inflammation et d'ataxie ou de débilité. Je pense qu'il seroit injuste de nier
le succès que la nouvelle médecine a obtenu sur u& néau si terrible cependant
la persuasion de ce succès n'est pas très-répandue dans les colonies on y entend
dire assez généralement « que les médecins expliquent aujourd'hui la marche de
Ja maladie d'une jjnanière plus satisfaisantequ'ils ne Soient autrefois~ mais
qu'Us ne la guérissent pas mieux; que jadis on selaissoit mourir lentement en
ne prenant d'autres remèdes qu'une infusion de tamarins que de nos jours une
médecine plus active conduit à la môrt d'une manière plus prompte et plus
directe. »
Cette opinion n'est pas fondée sur une connoissanee exacte de ce que l'on
faisoit autrefois aux Antilles. On peut se convaincre, par le voyage du père Labat,
qu'au commencement du 18.* siècle, les médecins des Antilles ne laissoient pas
mourir le malade aussi tranquillementqu'on semble le supposer. On tuoit alors,
non par des émétiques, du quinquina et de l'opium, employés en trop grandes
doses et à contre-temps, mais par de fréquentes saignées et l'abus des purgatifs.
Les médecins sembloient même si bien connoitre les effets de leur traitement,
qu'ils avoient la bonne foi "de se présenter au lit du malade, accompagnés, dès
la première visite, du confesseuret du notaire. Aujourd'hui, dans des hôpitaux
propres et bien entretenus, on parvient souvent à réduire le nombre des morts
à t8 ou t5 sur cent et un peu au-dessous; mais partout où les malades sont
entassés, la mortalité s'élève à la moitié, et même (comme l'armée françoise en
a offert l'exemple à Saint-Domingue, en 1802) à trois quarts des malades.
J'ai trouvé la latitude de la Guayra io"36~ !<)" et la longitude 6~"26~ ï3~
L'inclinaison de l'aiguilleaimantée étoit, le 2~ janvier 1800, de ~2",20; sa décli-
naison au nord-est, ~"20~35". L'intensité des forces magnétiques a été trouvée
proportionnelle à 23y oscillations.
En suivant la côte granitique de la Guayra, vers l'ouest, on trouve, entre ce
port qui n'est qu'une rade peu abritée et celui de Porto-Cabello., plusieurs enfon-
cemens <tans les terres, qui offrent un excellent mouillage aux vaisseaux. Tels
sont la petite baie de Catia, Los Arecif<:s,Puerto-la-Cruz, Choroni, Sienega de
Ocumare, Turiamo, Burburata et Patanebo. Tous ces ports, à l'exception de celui
de Burburata par lequel on exporte des mulets pour la Jamaïque, ne sont visités
aujourd'hui que par de petits bàtimenscôtiers qui chargent des provisions et le
cacao des plantations circonvoisines. Les habitans de Caracas, ceux du moins
qui ont des vues plus étendues, fixent un intérêt bien vif sur le mouillage de
Catia, à l'ouest du cap Blanc. C'est un point de la côte que nous avons examiné,
M. Bonpland et moi, pendant notre second séjour à la Guayra. Un ravin, dont

EspinoM fixe, d'après M. Ferrer, la partie la plus septentrionale de la ~ilte


par to*'36'4o" de latitude
Memorias de &M navegantes espailoles, tSog, Tom. Il, Part. IV, p. 24.
nous parlerons dans la suite, et qui est connu sous le nom de la ~Me~~a <~e*
Z~pc~ descend du plateau de Caracas vers Catia. On a con<{u depuis long-temps
le projet de construire, par ce ravin, un chemin propre au charriage, et d'aban-
donner l'ancienne route de la Guayra, qui ressemble presque au passage du
Saint-Gothard. D'après ce projet, le port de Catia qui est aussi vaste que sûr,
pourroit remplacer celui de la Guayra. Malheureusement, toute cette plage y sous
le vent du cap Blanc, est remplie de Palétuviers et excessivement malsaine. Je
suis monté sur la cime du promontoire, qui forme le Cabo Blanco, pour y
observer à la vigie le passage du soleil au méridien. Je voulois comparer le matin
les hauteurs prises sur un horizon artificiel, avec celles prises sur l'horizon de la
mer, pour vérifier la dépression apparente du dernier, par la mesure barométrique
de la colline C'est une méthode peu employée jusqu'ici, d'après laquelle, en
.réduisant les hauteurs de l'astre au même temps, on peut se servird'un instrument
à réflexion comme d'un instrument muni d'un niveau. Je trouvai la latitude du
cap, qui n'est pas marqué sur les cartes, d'ailleurs si exactes~ du Depositohydro-
jg7'o/?co de Madrid~de io"36~5'~ je ne pus me servir que des angles
que donnoit
l'image du soleil réfléchi sur un verre plan; l'horizon de la' mer étoit fortement
embrumé, et les sinuosités de la côte m'empéchoient de prendre les hauteurs du
soleil sur cet horizon.
Les environs du cap Blanc ne sont pas sans intérêt pour l'étude des roches.
Le gneiss passe ici à l'état de mica-schiste et renferme, le long des côtes de la
mer, des couches de Chlorite schisteuse 3. J'ai reconnu dans cette dernière des
grenats et du sable magnétique. En prenant le chemin de Catia, on voit le
schiste chloritique passer au schiste amphiboliqué4. Toutes
ces formations se
retrouvent ensemble dans les montagnes primitives de l'ancien monde, surtout

Baromètre au niveau de la mer, 337,3; thermomètre, a8°; baromètre à la vigie, à la cime du


cap
Blanc, 33~8 (toujours en lignes de l'ancien pied de roi); .;thermomètre, a~a; hauteur, 65 toises. J'ai
trouvé, à la vigie, l'angle entre la maison de.la compagnie des Phainpines a la Guayra et la tour de Mai-
quitia, n''3t'a5"; entre cette maison et la pointe de Niguata, t4°S8'35". L'axe longitudinal du
cap, qui
forme un promontoire alongé, se dirige dans toute la mameN.8t''E.; la partie ta p)o<t taiUante, celle du
,miHen, se dirige N.47'E. A ta Guayra, j'ai vu ( r<mt étant e!evé de 33 pieds ) la vigie dn causons un angle
d'etévationde t°ta',cequi,combineavec tametnrebarometnqae,donnepour la distance 33t6 toises.
t,
(0~. ~<r., Tom. p. 193.) Jefferys, dansle ~M. ft&x de ~83, place le cap Blanc, minutçs
20
(presque 7 lieues) à rouest de la Guayra.
G~mmenseAte~er.
CMo~eAM/er.
jyornMend'~eAt'~er.
dans le nord de l'Europe. An pied du cap Blanc, la mer jette sur ïa plage des
masses roulées d'une roche grenue, qur est Mt mélange intime d'amphtbôle et de
feldspath lamellaire. C'est ce qu'on appelle un peu vaguement do g~tMcM
~nH~ On y reconno~t des traces de quarz et de pyrites. Il est probable que,
près des côtes, il existe quelques rochers sous-marins qui fournissent ces masses
excessivement dures. Je les ai comparés, dans mon journal, au ~tey~e~feM du
Fichtelberg, en Franconie, qui est aussi une diabase, mais tellement fusible,
qu'on en fait des boutons de verre, employés pour le commerce des esclaves sur
la côte de Guinée. J'avois cru d'abord, d'après l'analogie des phénomènes
qu'offrent ces mêmes montagnes de Franconie, que la présence de ces masses
amphiboliques à cristaux de feldspath commun (non compacté) indiquoit !a
proximité des roches de transition; mais dans la haute vallée de Caracas, près
d'Antimano, on reconnoît des boules de la même diabase remplissant un filon
qui trave~e !e schiste micacé. Sur la* pente occidentale de !a colline du cap
Blanc, le gneiss est couvert d'une formationde grès ou d'aglomérat extrêmement
récent. Ce grès renferme des fragmensanguleux de gneiss, de quarz et de chlorite,
du sable magnétique, des madrépores et des coquilles bivalves pétrifiées. Cette
formation est-elle du même âge que celle de Punta Araya et Cumana ? J'en ai
envoyé de nombreux échantillons au cabinet du roi d'Espagne à Madrid.
Peu de parties de la côte ont un climat aussi brûlant que les environs du cap
Blanc. Nous souffrimes beaucoup de la chaleur augmentée par la réverbération
d'un sol aride et poudreux mais les effets de l'insolation n'eurent pas de suite
fâcheuses pour nous. On craint excessivementà la Guayra l'action vive du soleil
sur les fonctions cérébrales, surtout à une époque où la fièvre jaune commence
à se faire sentir. Me trouvant un jour sur la terrasse de la maison pour observer
le midi et la diSérence des thermomètresau soleil et à l'ombre, je vis paroftre
derrière moi un homme qui me pressa avec instance d'avaler une potion qu'il
tenoit toute préparée à la main. C'étoit un médecin qui, de sa fenêtre, m'a voiec
vu, depuis une demi-heure, la tête nue, exposé aux rayons du soleil. Il assuroit
que, né dans un pays très-septentrional, je devois, d'après l'imprudence que je
venois de commettre, éprouver indubitablement, et le soir même, les symptômes
de la fièvre jaune, si je m'obstinois à ne pas prendre un préservatif. Cette
prédiction, quoique fort sérieuse, ne m'alarma point, car depuis long-temps je
me croyois acclimaté; mais comment ne pas céder à des instances motivées par

Près SchauetMtem et Steben, o!t domine le schiste catburé de transition.


t
un intérêt si bienveillant? J'avalai !a potion, et le médecin me compta peut-être
au nombre des malades qu'il avoit sauvés dans le courant de l'année.
Après avoir décrit le site et la constitution atmosphérique de la Guayra, nous
quitterons les cotes de la mer des Antilles, pour ne les revoir presque plus avant
notre retour des missions de l'Orénoque. Le chemin, qui conduit du port à
Caracas, capitale d'un gouvernement de près de ~00,000 habitans ressemble,
comme nous l'avons fait observer plus haut, aux passages des Alpes, aux chemins
du Saint-Gothard et du grand Saint-Bernard. On n'en avoit jamais tenté te nivelle-
ment avant mon arrivée dans la province de -Venezuela on n'avoit même aucune
idée précise de l'élévation de la vattée de Caracas. On s'étoit aperçu depuis long-
temps que l'on descend beaucoup moins de la Cumbre et de Las ~Me&a~, qui
est le point culminant de ta route, vers la Pastora à l'entrée de la vallée de
Caracas, que vers le port de la Guayra mais comme la montagne d'Avita a une
masse très-considérable,on ne découvre pas à la fois les points qu'on voudroit
comparer. tt est même impossible de se former une idée exacte de l'élévation de
Caracas par te climat de la vallée. L'air y est refroidi par des courans d'air
descendant, et, pendant une grande partie de l'année, par les brumes qui enve-
loppent la haute cime de la ~Na. J'ai fait plusieurs fois à pied le chemin de
la Guayra à Caracas; j'en ai esquissé un profil, fondé sur ia points, dont la
hauteur a été déterminée par des mesures 1 barométriques. J'ai désiré vivement
jusqu'ici que mon nivellement fut répété et perfectionné par quelque voyageur
instruit qui visitât cette contrée à la fois si pittoresque et si int éressante pour le
physicien.
physicien. U
Lorsqu'on respire, dans la saison des grandes chaleurs, l'air embrasé de la
Guayra, et que l'on tourne ses regards vers les montagnes, on est vivement
frappé de l'Idée qu'à la distance directe de cinq à six mille toises, une popu-

Voici les observations barométr!ques et leurs résultats. Ma:qnét!a, 335,0, therm., aS°,6. La Venta,
grande auberge à la pente septentrionale de la Cambre ou du Cerro de Avila barom.,394, t therm., t Q°,a
El Guayavo ou petite Venta de la Cumbre, 385,3;tberm. t8<7. Fort de la Cuchilla, a8~S; theem.,
18°,8. Venta chica de Sanchorquiz, 284,2 therm. 18°,7. Près de la source de Sanchorquiz ( ta Foente )
286,4; therm. i8°,6. Dernière petite Venta, avant d'arriver à la Croix de la Gnayra a84,t Aerm.,
t8'8 La Cruz de la Cuayra. 993, therm., t~o. La Douane de Caracas, Adnama de ta Pastora, barom.
3oi,3; therm., t5-t. CaracasMaTrinidad,baron).,3o3,7; therm., t5",9.(Voyezmeo0~. <M<r., Tom. t,
p. 396 et 367. ) Les résultats catcotés péchent probablement nn peu par défaut. On a réduit les hauteurs
barométriques, à la même heure, partaconnoMMnce précise de l'effet des petites marées barométriques.
La hauteur absolue du baromètre au niveau de la mer est indiquée plus petite que la donnoit le même
ne
instrument bien rectifié dans le point zéro de son échette il ue s'agit ici que des différences.
jatton ~p,ppoames~ ret~tc
d~
printen~t~d'une~ttempérat~q~ l~)If:¡n~ur'au
à\l~RaU:tB~ètre
cen~simat. Ge ~:Qu!tO,Ï~'om~<dans
~approcit~e~~de~~d~)~~ climats `est trés-com~mïuü -da~s~ tôute
!a (~rdH!ere_des~Andes,
la Nouvelle-Grenade~')~'& de ~v<~yage~~ dans l'inténettr ~as~tf!!T<M~,
soit .par les platncs, "sott:e~.Te~~a~ parvenir aux grandes
'qo~te
vi Iles qui sont, ~s~atres' ~e ia!~tÏ!~MRf~Mvat!Ô~' de: Caracas c'est
tiets de celle deMexiço, de «~uîitOetde Sànta-Fe dé Bogota; mais, parmi toutes
les capitales de l'AmériqueespagnoIe, qui au milt torride, ont un
climat frais et délic~eux~ c'est Caracas qui est le plus rapproche des côtes. Quel
avantage d'avoir on pOFt de mer à trois lieues de distance, et d'être situé entre
!es montagne~ dans ut~ ptatean qui produiroit du troment~ si on en prë~ëroit
!acu!tureàceÏ!educaRer!l
Le chemin de la Gnayra a la vaUée de Caracas est Innniment plus beau que
celui de Honda à Santa-Fe et de Gnâyaqail à Quito; il-est même mieux entretenu
que t'ancienne route qui condoit daportdela Vera-Cruz àPerote, suria pente
drienta!e des montagnes de taNouveMe-Espagne. On ne met, avec de bonnes
mutes, que trois heures pour aMer du port de !a Guayra à Caracas; il n'en faut
que deux pour le retour. Avec des mulets de charge ou à pied, le chemin est de
quatre à cinq heures. On monte d'abord, sur une pente de rochers extrêmement
rapide et par des stations qui portent les noms de Zbn~ ~He?M<MCa, CM/MCMft
et du Salto, à une grande auberge (&t ~enta) placée à 600 toises de hauteur
au-dessus du niveau de la mer. La dénomination de T~bar &r~Me indique la
vive sensation que l'on éprouve lorsqu'on descend vers la Guayra. On est comme
suSbquépar la chaleur que reMètentles murs de rochers, et surtout les plaines
arides sur lesquelles plonge* la vue. Dans cette route, comme sur le chemin de
Vera-Cruz à Mexico, et partout où, sur une pente rapide, on change de climats,
laccrOissement des forces musculaires et le sentiment de bien-être que l'on
éprouve, à mesure que l'on entre dans des couches d'air plus froides, m'ont paru
moins vifs que le sentiment d'aSaissement et detangueur dont on est péniblement
saisi en descendant vers les plaines brûlantes du littoral. Telle est l'organisation
de l'homme que, même dans le monde moral, nous ne jouissons pas autant de ce
qui adoucit notre situation, que nous sommes anectés d'une peine nouvelle.
De Gurucuti au Satto, la montée est un peu moins pénible. Les sinuosités du
chemin contribuent à rendre la pente plus douce, comme dans l'ancienne route
du Mont-Cenis.Le <S'OM< ou Salto est~une crevasse que Ton passe sur un pont-

<
levis De véritables fortifications couronnent le sommet de la montagne. A la
Venta, nous vmies le thermomètre, à midi, à ï9°,5, lorsque, à la Guayra, il
se soutenoit, à la même heure, à 36",2. Comme, depuis l'époque ou les neutres
ont été admis de temps en temps dans les ports des colonies espagnoles, on a
plus facilement permis aux étrangers de monter à Caracas qu'à Mexico, la Venta
jouit déjà de quelque célébrité en Europe et aux États-Unis, par la beauté de
son site. En effet, lorsque les nuages le permettent, ce site offre une vue magni-
fique sur la mer et les côtes voisines. On découvre un horizon de plus de
vingt-deux lieues de rayon; on est ébloui de la masse de lumière que reflète le
littoral blanc et aride; on voit à ses pieds le cap Blanc, le village de Maiquetia
avec ses cocotiers, la Guayra et les vaisseauxqui entrent dans le port. J'ai trouvé
ce spectacle bien plus extraordinaire encore, quand le ciel n'est pas tout-à-fait
serein, et que des tramées de nuages, fortement éclairés à leur surface supérieure,
~aroissent projetés, comme des îlots mobiles, sur l'immense surface de l'Océan.
Des couches de vapeurs, se soutenant à diSérentes élévations, forment des plans
intermédiaires entre l'ceil de l'observateur et les basses régions. Par une illusion
facile à expliquer, elles agrandissent la scène et la rendent plus imposante. Les
arbres et les habitations se découvrent de temps en temps à travers les ouvertures
que laissent les nuages chassés par le vent et roulés sur eux-mêmes. On croiroit
alors les objets placés à une plus grande profondeur qu'ils ne se présentent par
un air pur et uniformément serein. Lorsque, sur la pente des montagnes du
Mexique, on se trouve à la même élévation (entre Las Trancas et Xatapa) on
est encore à douze lieues de distance de la mer; on ne distingue que confusé-
ment la côte, tandis que dans la route de la Guayra à Caracas, on domine les
plaines (la t<<?~ ea~cTtfe) comme du haut d'une tour. Qu'on se figure l'impres-
sion que doit laisser cet aspect à ceux qui, nés dans l'intérieur des terres, voient,
pour la première fois, de ce point, la mer et des vaisseaux.
J'ai détermine,par des observations directes, la latitude de la Venta, pour
pouvoir donner une Idée plus précise de, sa distance des côtes. Cette latitude est
de 10°33' g". Sa longitude m'a paru d'après le chronomètre, à peu près
de 2'4?" en arc à l'ouest de la ville de Caracas. J'ai trouvé à cette hauteur
l'inclinaison de l'aiguille aimantée de 4i",75, et l'Intensité des forces magnétiques
égale à z34 oscillations.
t..
~(y<s le profil que j'ai pmNié dans l'~&M de la AoMfeKe-Etpa~M,Pl. n.
Les hauteurs du soleil que j'ai prises le 20 janvier ~800 étaient très-près du de t'astre p~r le
passage
méridien. (0&s.eM<r.,Tom.T,p. t86.)
Depuis !a Venta, que l'on appelle aussirenta grande, pour la distinguer de
trois ou quatre autres petites hôtelleries établies (de mon temps") teJtong de
la route, on monte encore plus de t5o toises pour arriver au GtM~fo. C'est
presque le point culminant du chemin j'ai porté le baromètre encore au-delà~
un peu au-dessus de la Cumbre", au fortin de la Cuchilla. Me trouvant sans
passe-port (car pendant cinq ans je n'en ai connu le besoin qu'au moment dé
débarquer), je manquai de me voir arrête par un poste d'artilleurs.Pour calmer
le courroux de ces vieux militaires, je leur traduisis en vares castillanes le nombre
de toises qu'a ce poste au-dessus du niveau de la mer. Cela ne parut guère les
intéresser, et je ne dus ma liberté qu'à un Andalou, qui devint extrêmement
traitable, lorsque je lui dis que les montagnes de-son pays, la Sierra Nevadâ de
Grenade, étoient bien plus élevées que toutes les montagnes de la province de
Caracas.
On se trouve, au fort de la Cuchilla à la hauteur de la cime du Puy-de-
Dôme ou à peu près i5o toises plus bas que le poste du Mont-Cenis. Comme la
ville de Caracas, la Venta del Guayavo et le port de la Guayra sont si rapproches,
nous aurions désiré, M. Boupland et moi, .pouvoir observer simultanément,
pendant quelques jours successifs, l'étendue des petites marées barométriques,
dans une vallée de peu de largeur, sur un pbteau exposé aux vents et près des
côtes de la mer mais l'atmosphère n'étoit pas assez calme pendant le temps que
nous séjournâmes dans ces lieux. D'ailleurs, je n'avois pas le triple appareil
d'instrumens météorologiques qu'exigeoit ce travail que je recommande aux
physiciens qui visiteront ce pays par la suite.
Lorsque, la première ibis, je passai ce plateau pour me rendre à la capitale
de Venezuela, je trouvai réuni autour de la petite auberge du Guayavo beaucoup
de voyageurs qui faisoient reposer leurs mulets. C'étoient des habitans de Caracas.
Ils se disputoient sur le mouvement vers l'indépendance qui avoit eu lieu peu de
temps auparavant. Joseph Espana avoit péri sur l'échafaud; sa femme gémissoit
dans une maison de réclusion, parce qu'elle avoit donné asyle à son mari fugitif,
et qu'elle -ne l'avoit point dénoncé au gouvernement. Je fus frappé de l'agitation
qui régnoit dans les esprits, de l'aigreur avec laquelle on débattoit des questions
sur lesquelles des hommes d'un même pays ne devroient pas différer d'opinion.
Tandis qu'on dissertoit sur la haine des mulâtres contre les nègres libres et les
a
EUes soot presque toutes détruites aujourd'hui.
La cime le tonMte~.
blancs, sur la richesse des moines et la dtmcultë de tenir les esclaves dans t obets-
sançe, un vent froid, qui sembloit descendre de la haute cime de ta Silla
de
Caracas, nous enveloppa dans une brume épaisse, et mit fin à une conversation
si animée. On chercha de l'abri dans la Venta du G~ayavo. Lorsque nous
entrâmes dans l'hôtellerie, un homme âge, celui qui a~oit parle avec le plus
de calme, rappela aux autres combien,'dans ces temps qe dë!àt!on,sar!a mon-
tagne comme à la ville, il étoit imprudent de se livrer à des discussions politiques.
Ces mots, prononcés dans un Heu d'un aspect si sauvage, me -causèrent une vive
impression et qui s'est renouvelée souvent, pendant nos courses dans les Andes
de la Nouvelle-Grenade et du Pérou. En Europe, où les peuples vident leurs
querelles dans !ës plaines, on, gravit les montagnes pour y trouver l'isolement et
la liberté. Dans le Nouveau-Monde, les Cordillères sont habitées jusqu'à douze
mille pieds de hauteur. Les hommes y portent avec eux, et leurs dissentions
civiles, et leurs passions petites et haineuses. Des maisons'de jeu sont établies
sur le dos des Andes, !à où la découverte des mimes & iait fonder des villes;
et, dans ces vastes solitudes, presque au-dessus de la région des nuages, au milieu
d'objets qui devroient agrandir les idées, la nouvelle d'une décoration ou d'un
titre refusés par la cour trouble souvent le bonheur des familles.
Que l'on porte ses regards ers l'horizon lointain de la mer, ou qu'on les dirige
an sud-est, vers cette crétei dentelée de rochers qui semble réunir la Cumbre
à la Silla quoiqu'elle en sait séparée par le ravin ( OMC&rs<&ï ) de Tocume,
partout on admire le grand caractère du paysage. Depuis !e Guayavo, on parcourt
pendant une demi-heure un plateau assez uni, couvert de plantes alpines. Cette
partie du chemin s appelle las ~He~M, à cause de ses sinuosités. Un peu plus haut
se trouvent les baraques ou magasins de farine que la compagnie de Guipuzcoa
avoit construits dans un lieu d'une température très-franche, lorsqu'elle avoit le
monopole exclusif du commerce et de rapprovisionnement de Caracas. C'est
dans le chemin de las Vueltas que Fon voit pour la première fois la capitale,
placée trois cents toises plus bas, dans une vallée richement plantée en cafiers
et en arbres fruitiers de l'Europe. Les voyageurs ont l'habitude de s'arrêter près
d'une belle source, connue ~ous le nom de Fuente ~e ~a~cAor~Ht~ et qui
descend de la Sierra sur des couches inclinées de gneiss. J'en ai trouvé la
température de i6°,4; ce qui, pour une élévation de ~26 toises, est une
fraîcheur bien considérable. Elle parottroit plus grande encore à ceux qui boivent
cette eau limpide, si la source, au lieu de jaillir entre la Cumbre et la vallée
tempérée de Caracas, se trouvoit sur la descente vers la Guayra. Mais j'ai observé
CHAPITRE XI. 000
qu'a cette descente~sar te revers septeatrional de làmontagnc, la roche' par
une exception peu commune dans cettecontrée) est Inclinée, non àHnord~onest,
mais au sud-est, ce qui empêche peut-être les eaux souterraines d7y ionmer des
sources.
Du petit ravin de Sanchorquiz, on continue de descendre à la Crnz de ïa
Guayra, croix placée dans un Hettdécouverta 63a toises de hauteur,et de ta
(en entrant par ta douane et le quartier de la Pastora), à la ville de Caracas.
Sur ce revers méridional de la montagne d'Avila, le gneiss offre plusieurs phé-
nomènes géognostiques qui sont dignesde l'attention des voyageurs. M est traversé
par des filons de quarz qui enchâssent des prismes cannelés, souvent articulés de
titane ruthile de deux ou trois lignes de diamètre. Dans les Sentes du quarz,
on trouve, lorsqu'on le brise, des cristaux très-déliés qui forment un réseau en
se croisant quelquefois 2, te titane ne se présente qu'en dendrites d'un rouge vif
Le gneiss de la vallée de Caracas est caractérisé par les grenats verts et rouges
qu'il enchâsse, et qui disparoissentià où la roche passe au schiste micacé. Ce
même phénomène a été observé par M. de Buch, en Suède dans le Helsingland;
tandis que, dans l'Europe tempérée, ce sont généralement les schistes micacés
et les serpentines, et non le gneiss, qui renferment les grenats. Dans les enclos
des jardins de Caracas, construits en partie ayec des fragmens de gneiss,
on
reconnoft des grenats d'un beau rouge, un peu transparens, mais très-diûiclles à
détacher. Le gneiss, près de la Croix de la Guayra, à une demi-lieue de distance
de Caracas, m'a offert aussi des vestiges de cuivre azuré 3, disséminé dans des
filons de quarz et de petites couches de graphite ou fer carburé terreux. Ce
dernier, qui laisse des traces sur le papier, se trouve en assez grandes
masses,
et quelquefois meté au fer spathique, dans le ravin de Tocume, à l'ouest de
la Silla.
Entre la source de Sanchorquiz et la Croix de la Guayra, comme plus haut
encore, le gneiss renferme des bancs puissans de catca!re*prim!t!f, gris-bleuâtre
saccaroïde, à gros grain, contenant du mica et traversé par des ntons de spath
calcaire blanc. Le mica, à larges feuillets, est p~acé dans le
sens de l'inclinaison
des couches. J'ai trouvé dans ce calcaire primitifbeaucoup de pyrites cristallisées
et des fragmens rhomboïdaux de fer spathique d'un jaune isabelle. La peine que

Hor. 8,3; !nct.~4o"aa sud-est.


Surtout au-dessousde la Cruz de la Guayra, à 5g4 toises de hauteur absolue.
Cuivre carbonaté bleu.
*T tremolithe dans le Fichtelberg
je me suis donnée pour découvrir de la 1 qui,

en Franconie', est commune dans le calcaire grenu (sans dolomie), a


été
inutile. En Europe, des bancs de calcaire primitif s'observent généralement
dans les schistes micacés; mais on trouve aussi du calcaire saccaroïde dans un
gneiss de la plus ancienne formation en Suède près d'Upsal, en Saxe près
de Burkersdorf, et dans les Alpes au passage du Simplon. Ces gisemens sont
analogues à celui de Caracas. Les phénomènes de la gëognosie, particulièrement
ceux qui tiennent à iastratiScation des roches et à leur agroupement, ne sont
jamais isolés; on les retrouve les mêmes dans l'un et l'autre hémisphère. J'ai été
d'autant plus frappé de ces rapprochemens et'de cette identité de formations,
qu'à Fépoque de môn voyage, les minéralogistes ne connoissoient pas encore le
nom d'une seule roche de Venezuela, de la Nouvelle-Grenade et des Cordillères
.de Quito.

Grammatitede M. Hauy Le calcaire pr!mit!fa)t-deM)M de la source de S*nct)0t~[<t!t ett dirigé, comme


le gneiss daM ce point, bor. 5,a, et incliné de 45' au nord, mais la direction générate dn gnetm ett, datM
le Cerro de Avila, hor. 3,4 avec 60° d'inclinaison auN. 0. Des exceptions locales s'observent sur une
petite étendae de terrain preii de la Croixde la Guayra (hor. 6,a, inclin. 8°. N. ), et ptM haut, vis-&-T's la
Quebrada de Tipe ( hor. ta inclin. 5o° 0. )
PresdeWttnsiedd.
CHAPITRE Xïï.
VUE 6EKERALE SUR LES PROVINCES DE VENEZPJELA.–DÏVER8ÏTÉDE LEURS
INTÉRÊTS*

– YIU.E ET VALLÉE DE CARACAS. – CMMAT.

JL'tNPORTAKCE
d'une capitale ne dépend pas uniquement de sa population, de sa
richesse et de son site pour l'apprécier avec quelque justesse, il faut se rappeler
rétendue du territoire dont elle est le centre, la masse des productions indigènes
qui sont l'objet de son commerce, les rapports dans lesquels elle se trouve avec
les provinces soumises~à son influence politique. Ces circonstances diverses se
modifient par les liens plus ou moins relâchés qui unissent les colonies à la
métropole; mais tels sont empire des habitudes et les combinaisons de l'intérêt °

commercial, qu'il est à prévoir que cette influence des capitales sur les pays
environnans, ces associations de provinces, fondues ensemble sous la dénomi-
nation de royaumes, de capitaineries générales, de présidences et de gouverne-
mens survivront même à la catastrophe de la séparation des colonies. Les
démembremensn'auront lieu que là où, en dépit des limites naturelles, on a réuni
arbitrairement des parties qui se trouvent entravées dans leurs communications.
Là civilisation en Amérique, partout où elle n'existoit pas déjà jusqu'à un certain
point avant la conquête (comme au Mexique, à Guatimala, à Quito et au Pérou),
s'est portée des côtes vers l'intérieur, en suivant tantôt la va!tée d'un grand
ûeuve~tantôt une chaîne de montagnes qui oSroient un ctimat tempéré. Con-
centrée à la fois sur différens points, elle s'est propagée comme par rayons
divergens. La réunion en provinces ou en royaumes s'est effectuée au premier,r
contact immédiat entre les parties civilisées ou du moins soumises à une domi-
nation stable et régulière. Des contrées désertes ou habitées par des peuples
.sauvages, entourent aujourd'hui les pays conquis par la civilisation européenne.
Elles divisent ces conquêtes comme par des bras de mer dimeiles à franchir, et

jReuKM, CajM~M:t<M ~nera&M, jPfefMtncta~, GofMnMM, ~oytnc~M, sont les noms que la cour
d'Espagne a donnés de tout temps à ses possesstons d'outre-mer, c!onu)tt0< de «Ztfttmar.
le plus souvent des états voisins ne se tiennent que par des langues de terres
défrichées, tl est plus facile de connottre les configurations des côtes baignées par
l'Océan, que les sinuosités de ce littoral intérieur sur lequel la barbarie et la
civilisation, des forets Impénétrables et des terrains cultivés, se touchent et se
limitent. C'est faute d'avoir réfléchi sur l'état des sociétésnaissantes du Nouveau-
Monde, que les géographes défigurent si souvent leurs cartes, en traçant les
différentes parties des colonies espagnoles et portugaises ..comme si elles étolent
contiguës sur tous les points de l'intérieur. Les connoissances locales que j'ai pu.
acquérir par moi-même sur ces limites, me mettent en état de mer avec quelque
certitude l'étendue des grandes divisions territoriales, de comparer les parties
sauvages et habitées, et d'apprécier l'Influence politique plus ou moins grande
qu'exercent certaines villes d Amérique, comme centres de pouvoir et de
commerce.
Caracas est la capitale d'un pays qui est presque denx~ fols plus grand que le
Pérou actuel, et qui le cède peu en étendue au royaume de,Ia Nouvelle-Grenade
Ce pays, que le gouvernement espagnol désigne sous le nom deTC!a/Mt<MM gene~
(
de C<M-ac<M ou des /?rc'MMc<M r~Mn~) de ~enc~Me&t a près d'un million
d'habitans parmi lesquels 60,000 esclaves. Il renferme, le long des côtes, la
Nouvelle-Andalousie ou la province de Cumana ( avec l'île de la Marguerite ),
Barcelona, Venezuela ou Caracas, Coro et Marncaybd; dans l'Intérieur, les i
provinces de Varinas et de la Guiane, la première le long des rivières de Santo-
Domingo et de l'Apure, la seconde le long de l'Orénoque, du Casiquiare, de
l'Atabapo et du Rio Negro. En jetant un coup d'ceil général sur les sept provinces
réunies de la Te~re-Ferme, on voit qu'elles forment trois zones distinctes, qui
s'étendent de l'est à l'ouest. °

La Capitania gentry de Caracas a près de 48,ooo lieues carrées (de 95 an degré) Pérou
(depuis que La Paz, Potosi~Charcaset Santa-Cruz. de la Sierra ont été séparés et reonM
royanté de Buenos-Ayres) eaa3o,ooo; taNonTeHe-Gremade, en y comprenant la province de Quito,
la vice-

65,000. Ces cateuts ont été faits par M. OHmanna, d'après les changemens
que mes déterminationsastro-
nomiques ont apportés aux. cartes de l'Amérique espagnole. Je préfère ici des évaluations en nombres
~mdti; tesdiacnssKHMparticnUeressurt'étBndnedesdtyers pays, leur population réspeetive et d'autres
faits purement statistiques trouveront leur place dans des chapitrés particnlieM,
mesure que nous
quitterons chacune des grandes divisions territoriales.
Le capitaine généra! de Caracas porte le titre de Capitan general <& las .PnK-Mte«M de Yenezuela
y Ciudad de Caracas.
Cette ile, rapprochée des côtes de Cumana, forme un Govierno particulier, qui dépend immédiatement
du capitainegénéral de Caracas.
et grès de la chatne
jOn trouve d'abord des terrains cultivés le long du littoral
destfrontag~es côtières, pulsdes savanes ou des pâturages; ennn,an-de!à de
l'Orénoque, une troisième zone, celle des fbretS, dans lesquelteson ne pénètre
qu'au moyen des rivières quHes traversent. Si les indigènes ~haMtans de ces
forets, vivoient entièrement des produits de la chasse, comme ceux du Mtssoary,
nous dirions que les trois zones dans lesquelles nous venons de diviser le territoire
de Venezuela, offrent l'image des trois états de là société humaine, la vie du
sauvage chasseur dans les bois de l'Orénoque, la vie pastorale dans les savanes
ou Llanos, celle de l'agriculteur dans les hautes vallées et au pied des montagnes
côtières. Les moines missionnaires et quelques soldats occupent ici, comme dans
toute l'Amérique, des postes avancés sur les frontières du Brésil. Cette première
zone est celle où se fait sentir la prépondérance de la force,
et l'abus du pouvoir,
qui en est une suite nécessaire. Les indigènes se font une guerre cruelle, et se
mangent quelquefois les uns les autres. Les moines tachent d'augmenter leurs
petits villages de missions, en profitant des dissentions de~ indigènes. Les
militaires destinés à protéger les moines, vivent en querelle avec eux. Tous
offrent également le triste tableau de la misère et des privations. Nous aurons
bientôt occasion de voir de près cet état de l'homme que vantent, comme un
état de nature, ceux qui habitent les villes. Dans la seconde région, daus les
plaines et les pâturages, la nourriture n'est pas variée, mais elle est très-abon-
dante. Plus avancés dans la civilisation, les hommes, hors de l'enceinte de quelques
villes éparses, n'en restent pas moins isolés les uns des autres. A voir leurs
habitations, en partie couvertes de peaux et de cuirs, on diroit que, loin d'être
6xés, ils sont à peine campés dans ces vastes prairies qui bornent l'horizon.
L'agriculture qui seule affermit les bases de la société, et en resserre les liens,
occupe la troisième zone, le littorat, et surtout les vallées chaudes et tempérées
des montagnes voisines de la mer.
On pourroit objecter que, dans d'autres parties de l'Amérique espagnole et
portugaise, partout où l'on peut suivre le développement progressif de la civili-
sation, on trouve réunis les trois âges de la société mais on doit remarquer, et
cette observation est très-importante pour ceux qui veulent conno~re à fond l'état
politique des diversescolonies, que la disposition des trois zones, celles des forêts,
des pâturages et des terres labourées, n'est pas partout la même, et que nulle part elle
n'est aussi régulière que dans le pays de Venezuela. Il s'en faut de beaucoup que

~oMf..E~ Tom.ï,p. t44.


ce soit toujours de la cote vers l'intérieur que diminuent la population, l'industrie
commerciale et !a culture intellectuelle. Au Mexique au Pérou et & Quito, ce
sont les plateaux et tes montagnes centrâtes qui onrent ia réunion la plus nom-
breuse de cultivateurs, les villes les plus rapprochées, les institutions les plus
anciennes. On observe même que, dans le royaume de Buenos-Ayres, la région
des pâturages, connue sous le nom des Pampas, se trouve interposée entre le
port isolé de Buenos-Ayres et ta'grande masse d'Indiens cultivateursqui habitent
les Cordillères de Charcas, de la Paz et du Potosi. Cette circonstance fait naître,
dans un même pays, une diversité d'Intérêts entre les peuples de l'Intérieur et
ceux qui habitent ta côte.
Lorsqu'on veut se former une idée précise de ces vastes provinces qui, depuis
des siècles, ont été gouvernées, presque comme des états séparés, par des vice-
rois ou des capitaines-généraux,il faut fixer son attention sur plusieurs points à
la fois. Il faut distinguer les parties de l'Amérique espagnole qui sont opposées à
l'Asie de celles q<M sont baignées par l'Océan atlantique; il faut discuter, comme
nous venons de le faire, où se trouve placée la majeure partie de la population,
si elle est rapprochée des côtes, ou si elle est concentrée dans l'intérieur, sur les
plateaux froids et tempérés des Cordillères; il faut vérifier les rapports numériques
entre les indigènes et les autres castes, rechercher l'origine des familles euro-
péennes, examiner à quelle race appartient le plus grand nombre de blancs
dans chaque partie des colonies. Les AndalouxCanariens de Venezuela, les
Montagnards' 1 et les Biscayens du Mexique, les Catalans de Buenos-Ayres
diiïèrent essentiellement entre eux dans leur aptitude pour l'agriculture, les arts
mécaniques, le commerce et les objets qui tiennent au développementde l'intel.
ligence. Chacune de ces races a conservé, dans le Nouveau~Monde comme dans
l'ancien, les nuances qui constituent sa physionomie nationale, l'apreté
ou la
~ouceur de soit caractère, sa modération ou le désir excessif du gain, son
hospitalité an~ble ou le gont pour l'isolement. Dans des pays dont la population
est en grande partie composée d'Indiens et de castes mêlées, lesdinerences qui se
manifestent parmi les Européens et leurs descendahs~ne peuvent
pas sans donte
être aussi contrastées et aussi marquantes que celles qu'oSroient jadis les colonies
d'origine ïonienne et doraique. Transplantésdans la zone torride, devenus, sous un
ciel nouveau, presque étrangers aux souvenirs de la mère patrie, les Espagnols,
ont dû éprouver des changemens plus sensibles que les Grecs établis sur les côtes

J)fon<of:MM. C'est ainsi qu'on appelle en Espagne les habitans des montagnes de Santahder.
de l'Asie-Miaeure ou de l'halle, dontles climats diSerent si peu de ceux d Athènes
ou de Corinthe. €& ne sauroit nier les modiccations diverses qu'ont produites
à ta ibis dans le caractère de l'Espagnol~Amérieamla eonstitu~ion physiquedu
pays, l'isolement des capitales sardes plateaux, ou leur rapprochement des eôteS)
la vie agricole, le travail des mines et l'habitude des spéculations commerctaÏes~:
mais on reconno~ partout dans les habitans de Caracas, de Santa-Fe-, deQuito
et de Buenos-Ayres, quelque chose qui appartient à la race, à la filiation des
peuples.
Si l'on examine fêtât de la capitainerie généralede Caracas d'après les principes
que nous venons d'exposer, on voit que c'est principalementprès du littoral que
se trouvent son industrie agricole, la grande masse de sa population, ses villes
nombreuses et tout ce qui tient à une civilisation avancée. Le développement
des côtes est de plus de 200 lieues. Elles sont baignées par la petite mer des
Antilles, sorte de Méditerranée, sur les bords de laquelle presque toutes les
nations de l'Europe ont fondé des colonies, qui communique sur beaucoup de
points à l'Océan atlantique, et dont l'existence, depuis ta conquête, a influé
sensiblement sur le progrès des lumières dans la partie de l'est de l'Amérique
équinoxiale. Les royaumes de la Nouvelle-Grenade et du Mexique n'ont de
rapport avec les colonies étrangères, et par elles avec l'Europe non-espagnole,
que par les seuls ports de Carthagène des Indes et oe Sainte-Marthe, de Vera-
Cruz et de Campêche. Ces vastes pays, par la nature de leurs côtes et l'isolement
de leur population sur le dos des Cordillères, offrent peu de points de contact
avec l'étranger. Le golfe du Mexique est même moins fréquenté, pendant une
partie de t'année, à cause du danger des coups de vent du nord. Les côtes de
Venezuela, au contraire, par leur étendue, leur développement vers l'est, la
multiplicité de leurs ports et la sûreté de leurs atterrages dans les différentes
saisons, profitent de tous les avantages qu'onre la mer intérieure des Antilles.
Nulle part les communications avec les grandesMes, et même avec celles du Vent,
ne peuvent être plus fréquentes que par les ports de Cumana, de Barcelone,
de la Guayra de Porto-Cabello,de Coro et de Maracaybo nulle part le commerce
illicite avec les étrangers n'a été plus difficile à, restreindre. Peut-on s'étonner que
cette facilité de rapports commerciaux avec les habitans de l'Amérique libre et
les peuples de l'Europe agitée aient augmenté à la fois, dans les provinces réunies
sous la capitainerie générale de Venezuela, l'opulence, les lumières et ce désir
Inquiet d'un gouvernement local, qui se confond avec l'amour de la liberté et des
formes républicaines?
Les indigènes cuivrés ou indiens ne constituent une masse très-importante de
la population agricole quela o& les Espagnols, au'moment de là conquête, ont
trouvé des gonvememens réguliers, une société civile, des institutionsanciennes
et le plus souvent très-compliquées, comme & la Nouvelle-Espagne au sud de
Durango, et au Pérou depuis le Gouzco jusqu'au Potôsi. Dans la capitainerie
générale de Caracas, la population indienne est peu considérable, du moins hors
des missions, dans !a zone cultivée.Au moment des grandes dissentionspolitiques
les indigènes n'Inspirent pas de craintes aux blancs et aux castes mêlées. En
évaluant, en )t8oo, la population totaledes sept provincesréunies à <)00,ooo âmes,
j'ai pensé que les Indiens n'en font que tandis qu'au Mexique ils font presque
la moitié des habitans.
Parmi les castes dont se compose la population de Venezuela celle des noirs,
qui excite la fois l'Intérêt du au malheur et la crainte d'une réaction violente,
n'est pas considérable par le nombre; elle l'est par son accumulation sur une
étendue de terrain peu considérable. Nous verrons bientôt que, dans toute la
capitainerie générale, les esclaves n'excèdent pas de la population entière dans
l'île de Cuba, cel!e des Antilles où les nègres sont en plus petit nombre compara-
tivement auxblancs,ce rapportétoit,en t8ït/comme ï à3. Les sept provinces
réunies de Venezuela ont 60,000 esclaves; Cuba, dont l'étendue est huit fois
moindre, en a 212,000. En considérant la mer des Antilles, dont le golfe du
Mexique fait partie, comme une mer intérieure a plusieurs issues, il est important
de fixer notre attention sur les rapports politiques qui naissent de cette configu-
ration singulièredu Nouveau-Continent entre des pays placés autour d'un même
bassin. Malgré l'isolement dans lequel la plupart des métropoles tâchent de
tenir leurs colonies, les agitations ne s'en communiquentpas moins. Les élémens
de division sont partout les mêmes; et, comïne par instinct, il s'établit un accord
entre des hommes d'une même couleur séparés par la din~rence du langage, et
habitant des côtes opposées. Cette Méditerranée de l'Amérique, formée par le
littoral de Vene'a~la, de la Nouvelle-Grenade, du Mexique, des États-Unis et
des Mes Antiue~ compte sur ses bords près d'un million et demi de noirs
libres et esclaves; ils sont si Inégalement répartis, qu'il n'y en a que très-peu
au
sud et presque pas dans Ift fégion de l'ouest. Leur grande accumulationse trouve
sur !es cotes septentrionales et orientales. C'est pour ainsi dire la! partie a&icaine
Les produits des états fwM-aMe~snMMsont exportés par le Mississipi, et M posseMiom des Fto-
rides n'est s. vivement désirée par les Anglo-Américains ptM~rfmd
que pour eecttper tm déYetoppement
de cotes sur la mer intérteure.
de ce bassin intérieur, Il est naturel que les troubles qui, repais ï~Q~, se sont
manifestés à Sain~Domingue,,se soient propagés aux côtes de 'Venezuela. Aussi
long-temps que l'Espagne a possédé tranquillement ces belles colonies tes petites
émeutes d'esclaves ont été facilement réprimées; mais, dès qu'une lutte d'un
autre genre, celle pour l'indépendance, a commencé, les noirs, par leur attitude
menaçante, ont tour à tour inspiré des craintes aux partis opposes, et l'abolition
graduelle ou instantanée de l'esclavage a été proclamée dans différentes régions
de l'Amérique espagnole, moins par des motifs de justice et d'humanité que pour
s'assurer l'appui d'une race d'hommes Intrépides, habitués aux privations, et
combattant pour leurs propres Intérêts. J'ai trouvé dans la rotation du voyage
de Girolamo Benzoni un passage curieux qui prouve combien datent de loin les
craintes que doit produire l'accroissement de la population noire. Ces craintes
ne cesseront. que là où les gouvernemens seconderont, par des lois les amélio-
rations progressives que l'adoucissement des moeurs~ l'opinion et le sentiment
religieux introduisent dans l'esclavage domestique. « Les nègres, dit Benzoni,
se sont tellement multipliés à Saint-Domingue, qu'en ï5~5, quand j'étois à la
Terre-Ferme(à la côte de Caracas), j'ai vu beaucoup d'Espagnols qui ne <~OM<<Me7!t
pas que sous peu cette ~e ~c/ïMt propriété des noirs étoit réservé à Il
notre siècle de voir s'accomplir cette prédiction, et une colonie européenne de
Amérique se transformer en un état africain.
Les 60,000 esclaves que renferment les sept provinces unies de Venezuela
sont si inégalement répartis, que la province de Caracas seule en contient pwes

Vi sono molti Spagnmot!,chetengonopar concerta, che quest'Isola (San Dominico) in breve


tempo sarà posseduta da qaestt Mori di Guinea. (B~Mat, ~fM<. del nton~~ttofo, éd. ada 'Sya,
p. 65.) L'auteur, qui n'est pas tr&s-scrnpoteuxsur les données statistiques
qu'il adopte, croit que de son
temps il y avoit à Saint-Domingue 7000 nègres fugitifs ( Jtfon cimaroni) avec lesquels don Luis Colomb fit
un traité de paix et d'amitié, I
Cette évaluation ne dinere que d'un dixième de celle que j'ai publiée dans mon ouTrage sur le Mexique
(Tom. H, p. 748), qui est terminé par des considérations générales sur l'état de toutes les colonies
espagnoles.Vivementintéressé à connoître avec précision la population noire de l'Amérique je m'étois
formé, en t8oo, sur les lieux mêmes et en consultant de riches propriétaires (A<MMtM&!<&M),des listes par-
tielles pour les vallées de Caracas Caucagua, Guapo, Guatire, Aragna, Ocnmare, etc. Ces évaluations
donnoientpour la provincede Venezuela3a,Soo esclaves~pour toutela Capitaniagênent~ de OaraotM54,poo,
èt non ;ti8,4oo noirs, comme M. Depons l'indique en supposant (sans doute par erreur de chi&es), que
les noirs sont presque le tiers (~) de la population entière, (Yoyage à la Terre-Ferme, Tom. t, p. t7S
et a4t.) Les données que je me suis procurées pendant mon séjour à Caracas, à Cumana et dans la
Guiane espagnole, ont été soumises récemment à de nouvelles vériEcations, par les soins obligèans de
Don Manuel Patacio-Faxardo qui a publié une notice très-intéressante sur le carbonate de soude ou Urao
de quarante mille, dont de mulâtres, Maracaybo dix à douze miUe, Cumana
et Barceloneà peine six mille. Pour juger de l'influence que les esclaves et les
gens de couleur en général exercent sur la tranquiHité publique it
ne sa~Lt pas
de connoître leur nombre, il faut considérer leur accumulation sur certainspoints
et leur genre de vie comme cultivateurs ou habitans des v!Hes. Dans la province
de Venezuela, les esclaves se trouvent presque tous rëunis-sur un tereain~qui
n'est pas d'une, grande étendue, entre la côte et une ligne qui passe (à 12 lieues
de !a cote) par Panaquire, Yare, SabSna de Ocumare, Villa de Cura et Nirgua.
Les Llanos ou vastes plaines de Cataboso, San Carlos, Guanare et Barquecimeto
n'en renferment que quatre à cinq mille, qui se trouvent épars dans les fermes et
occupés du soin des bestiaux. Le nombre des affranchis est très-considérabte les
lois et les mœurs espagnoles favorisent l'affranchissement. Le maître ne peut
refuser la liberté à un esclave qui lui offre la somme de trois cents piastres,
t'esdave eût-il co&té le double, à cause de son industrie et d'une aptitude parti-
culière au métier qu'il exerce. Les exemples de personnes qui, par testament,
donnent la liberté à un certain nombre d'esclaves, sont plus communs dans la
province de Venezuela que partout qilleurs. Peu de temps avant que nous
visitassiez les vallées fertiles d'Aragua et Je lac de Vaience, une dame qui habitoit
le grand village de La Victoria ordonna, sur son lit de mort, à ses enfans, de
donner !a liberté à tous ses esclaves~ au nombre de trente. J'aime à rapporter
des faits qui honorent le caractère des habitans dont nous avons reçu, M. Bon-
j pMnd et moi, tant de marques d'affection et de bienveillance.
Après les noirs on est surtout Intéressé, dansles colonies, à conno~tre le nombre
des blancs créons que j'appelle Z~agno~M~-tC~HM et celui des blancs nés
en Europe. H est tiinicHe de se procurer des notions sufEsamment exactes sur un
point si délicat. Le peuple, dans le Nouveau-Monde comme dans l'ancien,
abhorre les dénombremens, parce qu'il soupçonne qu'on les fait pour augmenter
la masse des impôts. D'un autre côté, les administrateursenvoyés par la métropole
dans les colonies, n'aiment pas plus que le peuple les relevés statistiques, et cela
par des raisons d'une politique ombrageuse. Ces retevés fatigans à faire sont
dinicilement soustraits à la curiosité des colons. Quoique, à Madrid, des ministres,
<'ela LaguniUa, et dont les trois journaux de rtmte de Santa-Fe à Vannas, de Caracas aux Llanos de
Fore et de Merida à Truxillo m'ont fourni des matériaux précient pour le perfectionnement des
cartes géographiques.
A l'imitation du mot Anglo-~«Mf-aM fecu dans teates les tangnes de PEnrope. Dans les colonies
espagnotes, on nomme les blancs, nés en A mérique,des .E~M~no~, et les ventaMes Espaptob, ceux qui sont
nés dans la métropole, des JPM~~M,~ac/w~tfM
on Chapeton8.
éclairés sur les v~ltables intérêts de la patrie aient désiré de temps en temps
obtenir- des informations précisessur la prospérité croissante des colonies, les
autorités locales n'ont généralement pas seconde des vues si utiles. Il a &Mu des
ordres directs de la cour-d'Espagne pour qu'on délivrât aux éditeurs du Af~nc'K~
~rMftcn les excellentes notions d'économie politiquequ'ils ont publiées. C'est a
Mexico, et non à Madrid,que j'ai entendu blâmer le vice-roi comte de Revillagigedo
d'avoir appris à toute la Nouvelle-Espagne que la capitale d'un pays qui a près
de six millions d'habitans ne renfermoit, en ï~po, que a3oo Européens, tandis
qu'on y comptoit plus de 5o,ooo Espagnols-Américains. Les personnes qui
proféroient ces plaintes,considéroient le bel établissementdes postes par lesquelles
une lettre voyage de Buenos-Ayres à la Nouvelle-Californie, comme une des
plus dangereuses conceptions du comte de Florida-Blanca elles conseilloient
(heureusement sans succès) d'arracher les vignes au Nouveau-Mexique et au
Chili pour favoriser le commerce de la, métropole. Étrange aveuglement, qui
fait croire que, par des dénombremens,on révélera aux colonies le sentimentde
leurs forces! Ce n'est que dans les temps de désunion et de troubles intérieurs,
qu'en examinant la prépondérance relative des castes, qui toutes devroient être
animées d'un même intérêt, on semble évaluer d'avance le nombre des
combattans!
Si l'on compare les sept provinces réunies de Venezuela, au royaume du
Mexique et à l'ile de Cuba, on parvient à trouver approximativementle nombre
des blancs créoles et même celui des Européens. Les premiers, ou Espagnols-
Américains, font au Mexique près d'un cinquième; à l'île de Cuba, d'après le
dénombrement très-exact de ï 8 ï ï, un tiers de la population totale. Lorsqu'on
réfléchit sur les deux millions et demi d'indigènes de race cuivrée qui habitent
le Mexique, lorsqu'on considère l'état des côtes baignées par l'Océan pacifique et
le petit nombre des blancs que renferment les intendances de Puebla et d'Oaxaca
comparativement aux indigènes, on ne peut douter que, sinon la Capitania
general, du moins la province de Venezuela, offre une proportion plus forte
que celle de ï à 5. L'~e de Cuba, dans laquelle les blancs sont même plus
nombreux qu'au Chili peut nous fournir un nombre limite, c'est-à-dire le
MMMWHMTM, qu'on peut supposer dans la capitainerie générale de Caracas. Je
crois qu'il faut s'arrêter à deux cents ou deux cent dix mille Espagnols-Américaine

Je ne nomme pas le royaume de Buenos-Ayresoù, sur plus d'un million d'haMtans, les blancs sont
extrêmement nombreux dans h partie du littoral, tandis que les plateaux ou provinces de la Sierra
sont
presque entièrement peupMs d'indigents.
sur une population totale de 900,000 ames. Dans la race Manche, !e nombre des
Européens (Tton compris les troupes envoyées par la métropole)ne parott
pas excéder douze quinze mille. Au Mexique, il. ne s'élève certainement pas
au-delà de 60,000, et je trouve, par plusieurs rapprochemens, que si l'on évalue
toutes les colonies espagnoles à i~ ou i5.millions d'habitans~ il y a dans ce
nombre au plus 3,ooo,ooo de créoles blancs et 200,000 Européens.
Lorsque le jeune Tupac-Amaru, qui se croyoit héritier légitime de l'empire
des Incas, fit, en ï~8t, à la tétede ~0,000 tndiens montagnards, la conquête
de plusieurs provinces du Haut-Pérou, tous les blancs furent saisis de la même
crainte. Les Espagnols-Américains sentirent, comme les Espagnols nés en Europe,
que la lutte étoit celle de la race cuivrée contre la race blanche, de la barbarie
contre la civilisation. Tupac-Amaru, qui lui-même n'étoit pas sans culture,
'commença par flatter-les créoles et le clergé européen; mais bientôt entraîné par
les événemens et l'esprit de vengeance de son neveu Andréa Condorcanqui, il
changea de projet. Un mouvement vers l'IndëpeBdanc~ devint une guerre cruelle
entre les castes les blancs restèrent vainqueurs, et, excités par le sentiment d'un
intérêt commun, ils fixèrent dès-lors une vive attention sur le rapport qui existe,
dans les différentes provinces, entre leur nombre et celui des Indiens. Il étoit
réservé à nos temps de voir les blancs porter cette attention sur enx-m~mes, et
par des motifs de méfiance, examiner les élémens dont se compose leur caste.
Chaque entreprisepour conquérirl'indépendanceet la liberté, met en opposition
le parti national ou américain et les hommes de la métropole. Lorsque j'arrivai
à Caracas, ceux-ci vénoient d'échapper au danger dont ils s'étoient crus menacés
dans le soulèvement projeté par Espana. Cette tentative hardie eut des suites
d'autant plus graves, qu'au lieu d'approfondir les véritables causes du mécon-
tentement populaire, on crut sauver la métropole en n'employant que des
moyens de rigueur. Aujourd'hui, des mouvemens qui ont éclaté depuis les bords
du Rio de la Plata jusqu'au Nouveau~Mexiqu&, sur une étendue de quatorze
cents lieues, ont divisé les hommes dune commune origine.
On paroît étonné en Europe de voir que les Espagnols de la métropole, dont
nous avons Indiqué le petit nombre, ont fait, pendant des siècles,
une si longue
et.si forte résistance; et l'on oublie que, dans toutes les colonies, le parti européen
s'augmente nécessairement d'une grande masse de nationaux. Des intérêts de
famille, le désir d'une tranquillité non interromMue, la crainte de. se jeter dans
une entreprise qui peut échouer, empêchent ceux-ci dembrasser la cause de
l'indépendance, ou d'aspirer à l'établissement d'un gouvernement local et repré-
sentatif, quoique dépendant de la mère-patrie. Les uns, craignant tous les moyens
violons, se flattent que des réformes lentes pourront rendre moins oppressif te
régime colonial Ils ne voient dans les révolutions que la perte de leurs esclaves,la
spoliation du clergé et l'introduction d'une tolérance religieuse qu'ils croient
incompatible avec la pureté du culte dominant. D'autres appartiennent à ce petit
nombre de familles qui, dans chaque commune,soit par une opulence héréditaire,
soit par leur établissement très-ancien dans les colonies, exercent une véritable
aristocratie municipale. ils aiment mieux être privés de certains droits que de les
partager avec tous; ils préféreroient même une domination étrangère à l'autorité
exercée par des Américains d'une caste inférieure ils abhorrent toute constitution
fondée sur l'égalité des droits; ils redoutent surtout la perte de ces décorations
et de ces titres qui leur ont coûté tant de peine à acquérir, et qui, comme nous
l'avons rappelé plus haut, font une partie essentielle de leur bonheur domestique.
D'autres encore, et leur nombre est très~onsidérable, vivent à la campagne des
produits de leurs terres, et jouissent de cette liberté qu'oSre, sous les gouverne-
mens les plus vexatoires, un pays dont la population est éparse. N'aspirant point
aux places eux-mêmes, ils les voient avec IndiSérence occupées par des
hommes dont le nom leur est presque inconnu et dont le pouvoir ne les atteint
pas. Ils préféreroient, sans doute, à l'ancien état des colonies, un gouvernement
national et une pleine liberté de commerce mais ce désir ne l'emporte pas assez
sur l'amour du repos et les habitudesd'une vie indolente, pour les engager à-des
sacrifices longs et pénibles.
En caractérisant, d'après les rapports multipliés que j'ai eus avec toutes les
classes des habitans, cette tendance diverse des opinions politiques dans les
colonies, j'ai développé par-là même les causes de cette longue et paisible domi-
nation de la métropole sur l'Amérique. Le repos a été le résultat de l'habitude,
de la prépondérance de quelques familles puissantes, et surtout de l'équilibre qui
s'établit entre des forces ennemies. Une sécurité, fondée sur la désunion, doit
être ébranlée dès qu'une grande masse d'hommes, oubliant pour quelque temps
leurs haines individuelles, se réunissent par le sentiment d'un intérêt commun;
dès que ce sentiment, une fois éveUlé, se fortifie par la résistance, et que le
progrès des lumières et le changement des mœurs diminuent l'influence de
l'habitude et des idées anciennes.
Nous avons vu plus haut que la population indienne, dans les provinces
réunies de Venezuela, est peu considérable et récemment civilisée; aussi toutes
les villes y ont été fondées par les conquérans espagnols. Ceux-ci n'ont pu suivre,
comme au Pérou et au Mexique, tes traces de l'ancienne culture des indigènes.
Caracas, Maracaybo, Cumana et Coro n'ont d'Indien que lenr~nOMM. Parmi les
trois capitales 1 de l'Amérique équinoxiale, placées dans les montagnes, et
jouissant d'un climat très-tempérer Caracas est la moins élevée. Comxne la
grande populationde Venezuela se trouve rapprochée des côtes et que la région
la plus cultivée leur est parallèle en se dirigeant de l'est à l'ouest, Caracas n'~st
point un- centre de commerce, comme Mexico, Santa-Fe de Bogota et Qnitp. Des
sept provinces réunies dans une capitainerie générale, chacune a un port parti-
culier par lequel sortent ses produits. H sumt de considérer la position des
provinces, leurs rapports plus ou moins intimes avec les tles du Vent on les
grandes Antilles, la direction des montagnes et le cours des grands fleuves, pour
concevoir que Caracas ne pourra jamais exercer une influence politique très-
puissante sur les pays dont elle est la capitale. L'Apure, le Meta et l'Orénoque,
'qui se dirigent de l'ouest vers l'est, reçoivent tous les aniuens des Llanos ou de
la région des pâturages, Saint-Thomas de la Guiane sera nécessairement un jour
une place de commerce d'une haute importance, surtout quand les farines de la
NonveUe-Grenade, embarquées audessus du confluent du Rio Negro et de
l'Umadea, descendront par le Meta et l'Orénoque, et qu'à Caracas et à Cumana
on les préférera aux farines de la Nouvelle-Angleterre. C'est un grand avantage
pour les provinces de Venezuela de ne pas voir toutes leurs richesses territoriales
dirigées sur un même point, comme celles du Mexique et de la Nouvelle-Grenade
qui refluent à Vera-Cruz et à Carthagène, mais d'onrir un grand nombre de villes
presque égalementbien peuplées, et formant comme autant de centres divers de
commerce et de civilisation,
Caracas est le siège d'une ~M~MHCM (haute-cour de justice) et d'un des huit
archevêchés dans lesquels est, divisée toute l'Amérique espagnole'.Sa population

Mexico, Santa-Fe de Bogota et Quito. On ignore encore t'etévatton du sol de la capitale de Guatimata.
D'après les productions végétâtesqui naissent sur ce sol, on peut croire qu'elle est an-deiisons de 5op toises.
Les archevêchés ~jie" AudiemciM n'ont pas les mêmes Mntites qae les grandes divisions politiques
~q~~I, indépendantes tesones des autres, sont
connues sous les non)s de Tiee-royimtés et de capitaineries
générâtes. Souvent it y a deux ~ff&MCM< dans une même Ttce-royaute, comme cettes de Mexico et de
Guadataxara, de Lima et du ConzcO; quelquefois les évêques d'une vice-royauté sont dependans de rar-~
chevêquequi réside dans une antre division politique, Les éveqmes de Panama, de Mainas, de Quito et de
Cuenca sont soumis à l'archevêque de Lima, pt non à celui de la Nouvelle-Grenade. Les 8 archevêques
de l'Aménque espagnole ont leur siège à Mexico, Guatimala, Saint-Domingue, la Havane, Caracas,
Santa-Fe de Bogota. Lima et Chuquisaca ou Charcas. Les ta ~M~MnptMsontcettes de Mexico, Guada-
lasara, Guatimala, ta Havane, Caracas, §anta.Fe de Bogota, Quito, Lima, Couzco, Chuquisaca, Santiago
.e~~
a~
de~~a~ca~t~a
deHE:a]~<
le~x~,i~:p~~sxr~rts.la~c~yoïe~t ~~n~e
~t,d ~y~ib~çe~xd~ c~uüeur~
D!valti~ta~~s`~~ ~ai~x~~8~
~an~es ~re~enseactë~
br~)~e=.liée;d~5~~c~ttn,i~ëat4gfiac~e.avoxt~sau~'éx~
dt~mt
~tae~
ttttB~ pa~ -,uu~ ~~tlle, ~~id,te~`âe,~ia `~etitewérole: La. Dlortalitéi s'éléya `:
ectte époque¡ méQ}t)fable, l'inoc'olati.oo,
es~deweBae..g~erate~t~~ Je: s~urs. d.~s médeeins.
proMnce-de-~C!u<~Ma.-t~wlpwùuicatÍ(I!4Juvt~a-1.°Éurope 3Qntmoins. fré;

qMB~.aM~t~racas.
qMBte6,M.a~d~<
parce
te~ps1,.p!Í$.:un~eJnple!d~p:eii~,Y.~roledepuis

qa'~s'y~oiatro~to~o~ ~pQradiqPeJDènt:sul'plusieurspoints à.;la'fois

p~~
Je d~~porad~ejn~e~da~ns .i'Amérïque équitioxiale, où les chaugemens,de
ratmosp~reettesphe~ojme~d~ sujets à une;v¢~io-
~~M~~aaMe~ Ïa
vaccïne~ n'exe~Mt
r~an4ae)<s~ï5oQt§
~va~
in, ro uc iQn~ sx ien aisa~te ~d~ ~a
t'on p~tt ajouter J!bi à ooe croyance trës-
mop"retonrenEurope,la popnlatiôu
deCaM~sa~~a~aag~~clle étoit; de 5P,ooo>àmes.,lorsque,legrand
tremblement de terre dMs6tMM tSï&emËtp&ir,soMstesminesdeemaïsens,
près de doaze mille. Les évéoemens po!!t!qaes qci ont saccéd~ cette:catastrophe,
ont red<Mt le nombre des habitans a moios de vingt ïmme;mats ces perte$ ne
tarderont pas à être t'ëparëes, sije pay~ e~r~ement jEert~eetco~mercantdont

sage
La
adtBHMstratton.
Caracas est le centre, a le bonheur de )oaM' de qaehptes anales de repos et d'une

TtHe est sttNee à rentrée de ïaplatne de Chacao, qui s'étend trois Henes
l'est vers Canritoare et la Cuesta de Aoyamas, et qui a jusqu'à deux lienes et

de CMa et ~eM~AyM!). EmSn, ÏM ti ~*°~ ~M"oB' P~Mt'qaM Mnt U T:ce-MyanM du Mextqne


(a~edeM cMtmMt~MM ~m~MM<ttMte< JRwtoeMM Mt~f~xMet te capitainegen~t de Tacatam) tea C~t-
de!S&mt-!&)~!ngM,de Porto-Rico
«t~KM ~)Mfa~de G~<&m<)h, d~deM HottdeB,del'tte de <~tba,
et de VetezMh; h ~tce-MyMM de h Non<eBe-6Maade~~(~ M .PMMf&'M~deQmtû); ceNM dn
MMmetdeBaea<~&yt*t;h ~'M~ do~~ Be'ytque quaWl vice.-royauf&;mais le tûiilî,
Qotta et GnMttMh omtt~)o~parte eRJ~<pe~e~ea<~4e< le .titre Toy~)tMt,~ït~M<.
Le pteOdemt d'une ~~ieaettt
co!)MM~<t~g<<t<n!~ ~nt etfeM)mmt&
dm* teit aJMret nn et
adm!td$t!-a<iTe~ amtUa&es,d)t ~ce-Mt
t:ce-to!;parexempie, deSMMa-Fe.
eelmde fat crmcomme
QMto dépend, devoir
co>ri~aniiont gëaéràd; dans leS àlFaireaadmilÛlÍÜ'ati,veset lnilitafreB,dn vice-roide Santa-Fe. J'si cru devoir
rappeter ici ces tr!p!e* di~HmM dethtéfMcMes ptt~qaCt~~eMasttqueet jmdMmM, ptree qt'eBes se
tfowemt Mave&t contemdwe* deM te~ oavtagM qm Mettentdes cotonies Mpagnotee.
demie de large. Traversée par le Rio Guayre, cette plaine a ~t~ tp!sés d'éléva-
tion au-dessus du niveau de là mer. Le terrain qu'occupe !s ville de Caracas est
inégal et a une pente très-forte du N.N.O. vers le S.S.E. Pour se former une idée
exacte de la position de Caracas, il faut se rappeler la disposition générale des
montagnes côtières et des grandes vallées longitudinales qui les traversent. La
rivière du Guayre natt dans le groupe des montagnes primitives de THiguerote,
qui sépare la valléede Caracas de celle d'Aragua. Elle se forme près de las Ajuntas,
de !a réunion des petites rivières de San Pedro et de Macarao, et se dirige
d'abord à l'est jusqu'à la CMM&t de Auyamas, et puis au sud, pour réunir,e
au-dessous de Yare, ses eaux à celtes du Rio Tuy. Ce dernier est la seule rivière
considérable dans la partie septentrionale et montagneuse de la province. Elle
suit régulièrement là direction de l'ouest à l'est, sur une longueur de 3o lieues
en ligne droite, dont plus des trois quarts sont navigables. J'ai trouvé sur cette
longueur, par des mesures barométriques, la pente du Tuy, depuis la plantation
de-ManteroIa jusqu'à son embouchure, à l'est du cap Codera, de a~5 toises.
Cette rivière forme, dans la chatne c6tière, une espèce de vallée longitudinale,
tandis que les eaux des Llanos ou des cinq sixièmes de la province de Caracas,
suivent l'inclinaison du terrain vers le sud, et deviennentdes afHuens de l'Oré-
noque. Cet aperçu hydrographique peut jeter quelque lumière sur la tendance
naturelle qu'ont les habitans d'une même province à exporter leurs productions
par des routes diverses.
Si la vallée de Caracas n'est qu'une branche latérale de celle du Tuy, les deux
vallées n'en restent pas moins parallèles pendant quelque temps. Elles sont
séparées par un terrain montueux, que l'on traverse dans le chemin de Caracas
aux hautes savanes d'Ocumare, en passant par le, Valle et Salamanca. Ces savanes
se trouvent déjà au-delà du Tuy; et comme la vallée du Tuy est beaucoup plus
basse que celle dt! Caracas, on descend presque toujours dans la direction du
nord au sud. De même que le cap Codera, la Silla, le Cerro de Avila entre
Caracas et la Guayra, et les montagnes de Mariara forment la rangée la plus
septentrionale et la plus élevée de la chaîne côtière, les montagnes de Panaquire,
d'Ocumare, de Guiripa et de la Villa de Cura en forment la rangée la plus
australe. Nous avons rappelé plusieurs fois que la direction presque générale des
couches qui composent cette vaste chame du littoral, est du sud-ouest
au nord-
est, et que leur inclinaison est ordinairement vers le nord-ouest. Il résulte de

'Au pied de la haute montagne de Cocuyza, 3'~ l'est de la Victoria.


là que ht direction des couches primitives est indépendante de celle. dé la chatne
entière et, ce qui est très-remarquable, en suivant cette chaîne depuis Porto-
Cabello jusqu'à Maniquarez et au Macana~, dans HIe dé la Marguerite on trouve,
de l'ouest à l'est, d'abord du granité, puis du gneiss, du schiste micacé et du
schiste primitif; enfin du calcaire compacte; du gypse et des ag!omerat8 qui
renferment des coquilles pélagiques.
On doit regretter que la ville de Caracas n'ait pas été placée plus à l'est;
au-dessous de l'embouchure de FAnaneo dans le Guayre, là où, vers Chacao,
la vallée s'élargit en une plaine étendue et comme nivelée par le séjour des
eaux. Diego de Losada lorsqu'il fonda* la ville, suivit sans doute les traces
du
premier établissement fait par Faxardo. A cette époque les Espagnols, attirés
par la renommée des mines d'or de los Teques et deBaruta, n'étoient pas encore
maîtres de la vallée entière, et préf~roient rester près du chemin qui conduit à la
côte. La ville de Quito se trouve également située dans la partie la plus étroite et la
plus inégale d'une vallée, entre deux belles plaines (Turupambaet Rumipamba ),
dont on auroit pu profiter, si l'on avoit voulu abandonner les anciennes cons-
tructions indiennes.
On descend continuellement, de la douane de la Pastora, par la place de la
Trinité et la Plaza major, à Sainte-Rosalie et le Rio Guayre. J'ai trouvé, par
des mesures barométriques, la douane de 3y toises au-dessus de la place de la
Trinité, près de laquelle j'ai fait mes observations astronomiques; celle-ci de
8 toises au-dessus du pavé de la cathédrale de la grande place, et la grande
place 3a toises au-dessus du Rio Guayre à la Noria. Cette déclivité du terrain
n'empéche pas les voitures de rouler dans la ville, mais les habitans en font
rarement usage. Trois petites rivières~ qui descendent des montagnes, FAnauco,
le Catuche et le Caraguata, traversent la ville en se dirigeant du nord au sud;
elles sont très-encaissées, et rappellent en petit, avec les ravines desséchées qui
s'y réunissent en entrecoupant le terrain, les fameux Guaicos de Quito 3. On
boit à Caracas l'eau du Rio Catuche; mais les personnes aisées font venir l'eau
du Valle, village situé à une lieue au sud. On croit cette eau et celle de Gamboa

J'ai parlé plushaut, Chap.Xt, p.549, Jel'mterntpHon détachons du littoral l'est dn cap Codera.
La fondation de Santiago de Léon de Caracas est de t56~, et postérieure à celle de Cumana, Coro,
Nueva Barcelona et Caravalleda ou El Collado. Fray Pedro Simon, Not. 7, Cap. m, p. 5~5. Oviedo y
BfMtM, p. 262.
~o~MpttKthant,Chap. iv, p. 3l3.
très-salutaires, parce qu'elles coulent sur les racines de lasàlsepareille Je n'y ai
pu découvrir aucune trace d'arôme ou d'extractif l'eau du VaIIe ne contient pas
de chaux, mais un peu plus d'acide carbonique que l'eau de l'Anauco. Le pdnt
nouveau sur cette dernière rivière est d'une belle construction, et fréqheiOite par
ceux qui se promènent du côté de la Gandelaria, surÏà route de Chacao et dé
Petare. On compte à Caracas 8 églises, 5 couvens et une salle de spectacle qui
peut renfermer quinze à dix-huit cents personnes. De mon temps, elle étoit
disposée de manière que Je parterre, dans lequel les hommes se trouvent séparés
des femmes, nétoit pas couvert. On voyoit à la fois les acteurs et les étoiles.
Comme le temps brumeux me faisoit perdre'beaucoupd'observationsde satellites,
je pouvois, d'une loge du théatre,m'assurer si Jupiter seroit visible pendant la
nuit. Les rues de Caracas sont larges bien alignées, et se coupent en angles droits,
comme dans toutes les villes fondées par les Espagnols en Amérique; Les maisons
sont spacieuses, et plus élevées qu'elles ne devroient t'être dans ,un pays sujet
aux trembtemens de terre. En ï8oo, lesdeux places d'AIta Gracia et de Saint-
François offroient un aspect très-agréaMe; je dis em8oo, car les terribles
secousses du a6 mars 1812ont détruit presque toute la ville. Eite se relève ten-
tement de ses ruines; te quartier de la TWnK&ïJ, que j'ai habité, a~te bouleversé
comme si une mine avoit éclaté au-dessous.
Le peu d'étendue de la vallée et la proximité des hautes montagnes d'Avila
et de la Silla donnent au site de Caracas un caractère morne etsévère, surtout
dans cette partie de l'année où règne la température la plus*fratche, aux mois
de novembre et de décembre. Les matinées sont alors d'une grande beauté par
un ciel pur et serein, on voit à découvert les deux dômes ou pyramides arrondies
de la -Silla et la crête dentelée du Cerro de Avità. Mais, vers le soir, l'atmosphère
s'épaissit; les montagne~ se couvrent; des traînées de vapeurs sont suspendues à
leurs flancs toujours verts, et les divisent comme par zones superposées les unes
aux autres. Peu à peu ces zones se comtbndent, l'air froid qui descend de la
Silla s'engouffre dans le vallon, et condense les vapeurs légères en
gros nuages
floconneux. Ces nuages s'abaissent souvent au-dessous de la Croix de la Guayra,
et on les voit s'avancer, en rasant la terre, vers la Pastora de Caracas
et vers le
quartier voisin de la Trinidad. A l'aspect de ce ciel brumeux,je me croyois, non

Dans toute l'Amériqoe, on s'imagine que teseaut acquièrent tM vertus des plantes à l'ombre
desquelles elles coulent. C'est ainsi qu'au détroit de MageMan
on ~tnte beaucoup t'eau qut entre en con-
tact avec les racines daWinteranaCaneHa.~<!gen/~<&,ne<t ~8, p. 3t5.)
dans une des vallées tempérées de la zone torride, mai~au&nd del'Allemagne,e
sur les montagnes ~uHarzcouverteade pins et de mélèzes.
Mais cet aspect si sombre et si mélancolique, ce contraste entre la sérénité
du matin et le ciel couvert du soir, ne s'observent pas ao milieu de ï'été. Les nuits
de juin et de juillet sont clairesetdélicienses l'atmosphère conserve alors presque
sans interruption cette pureté et cette transparencequi sont propres aux plateaax
et à toutes les hautes vallées par un temps calme, aussi long-temps que les vents
ne mêlent pas des couches d'air d'inégale température. C'est dans cette saison
d'été que l'on jouit de toute la beauté d'un paysage que je n'ai vu bien éclairé
que pendant quelques jours, à la fin du mois de janvier.Les deux cimes arrondies
de la Silla se présentent à Caracas presque sous le même angle de hauteur que
le Pic de TénériSe au port de l'Orotava. La première moitié de la montagne est
couverte d'un gazon ras; puis vient la zone des arbustes toujours verts, que
reflète une lumière pourprée à l'époque de la &oraisôn du Befaria, te Rosage des
Alpes de l'Amérique équinoxiale. Au-dessus de cette zone boisée s'élèvent deux
~nasses rocheuses en forme de dômes. Dépourvues de végétation, elles augmentent,
par leur nudité, la hauteur apparente d'une montagne qui, dans l'Europe
tempérée,entreroit à peine dans la limite des neiges perpétuelles. C'est avec cet
aspect imposant de la Silla et les grands mouvemens du terrain au nord de !a
ville, que contrastent agréablement la région cultivée du vallon, les plaines
riantes de Chacao, de Petare et de la Vega.
Le climat de Caracas a été nommé souvent un /~Tnfem/M perpétuel; on le
retrouve partout à mi-côte sur les Cordillères de l'Amérique équinoxiale, entre
~oo et goo toises d'élévation, à moins que la grande largeur des vallées et des
plateaux, jointe à l'aridité du sol, n'augmente outre mesuré l'intensité de la
chaleur rayonnante. Que peut-on en effet imaginer de plus délicieux qu'une
température qui se soutient le jour entre 20° et 26", la nuit entre i6" et t8°,
et qui favorise à la fois la végétation du Bananier ( Cambury ), de l'Oranger, du
Cafier, du pommier, de l'abricotier et du froment! Aussi un écrivain national 5

J'ai trouvé Ha Trinidad, la hauteur apparente de la S'Ha, de n° 19' 4g". Sa distance est a peu près
de 45oo toises.
Comme à Carthago et a ïbague dans la Nouvelle-Grenade. Voyez mes fro& de ~M~eo~.pj<!n/.
p. 98.
Entre t6<'et9o'8 R.
Entre ia",8et t4°,4R.
L'historiographe de Venenteta, Jose de Oviedo y BaBos.
compare le site de Caracas au Paradis terrestre, et reconnoît, <tans Mnauco et
les torrens qui l'avoisinent, les quatre fleuves du Paradis.
H est à regretter qu'un climat si tempéré soit généralement inconstant et
variable. Les habitans de Caracas se plaignent de ce que, dans le même jour,
ils ont différentes saisons, et que les passages d'une saison à l'autre sont extre-
mement brusques. Souvent, au mois de janvier par exempte, une nuit dont la
température moyenne est de 16° est suivie d'un jour pendant lequel le ther-
momètre se soutient à l'ombre, huit heures consécutives, au-dessusde a a". Dans
la même journée, on trouve des températures de 2~" et de t8". Ces oscillations
sont extrêmement communes dans nos régions tempérées de l'Europe; mais, sous
la zone torride, les Européens mêmes sont si habitués à l'action uniforme des
stimulus extérieurs, qu'ils souCrent d'un changement de température de 6".
A Cumana, et partout dans les plaines, la température ne change ordinairement,
depuis i heures du matin jusqu'à 11 heures du soir, que de 2° à 3°. D'ailleurs
ces variations atmosphériquesinfluent plus à Caracassur ~organisation de l'homme
qu'on ne pourrôit le supposer en consultantseulement le thermomètre. Dans cette
vallée étroite, l'atmosphère est pour ainsi dire balancée entre deux vents, dont
l'un vient de l'ouest ou du côté de la mer, et l'autre de l'est ou de l'Intérieur
des terres. Le premier est connu sous le nom de vent de Catia, parce qu'il
remonte de~Catia à l'ouest du cap Blanc, par le ravin du Tipe, que nous avons
déjà nommé plus haut, en parlant dune nouvelle route et d'un nouveau port
que l'on a projetés pour remplacer le port et la route de la Guayra. Le vent de
Catia n'a que l'apparence d'un vent d'ouest; le plus souvent c'est la brise de l'est
et du nord-cst~qui, soufilant avec une grande Impétuosité, s'engouffre dans la
Quebreda de ipe. Rénéchi par les montagnes élevées d'M~ 2VegTN.f, ce
vent remonte vers Caracas, du c6té de l'hospice des Capucins et du Rio
Caragùata. Il est chargé d'humidité, et il la dépose à mesure qu'il diminue de
température aussi la cime. de la Silla se couvre de nuages lorsque le Catia
s'introduit dans la vallée. Les habitans de Caracas le craignent singulièrement
il cause des maux de tête à ceux qui ont le système nerveux très-Irritable. J'ai
connu des individus qui, pour éviter les effets de ce vent, se renfermoient dans
leurs maisons, comme on fait en Italie lorsque le Sirocco soume..Pavois cru
reconnoitre, pendant mon séjour à Caracas, que le vent de Catia étoit plus
pur (un peu plus riche en oxigène) que le vent de Petare. Je pensois même
que sa pureté pouvoit être la cause de sa propriété excitante. Mais les moyens
que j'avois employés méritent peu de confiance. Le vent de Petare, venant de
l'est et du sud-est, par l'extrémitéorientale de la vallée du Guayre, amène l'air
plus sec des montagnes et de l'mténenrdu pays: il dissipe les nuages et fait
paroftre Je sommet de la Silla dans toute sa beauté.
Nous savons que les modifications apportées par les vents à la composition
de l'air, dans tel ou tel lien, échappent entièrement à, nos procédés endiomé-
triques dont les plus exacts n'évaluent que o,003 d oxigène. La chimie ne conno~t
encore aucun moyen pour distinguer deux flacons d'air dont l'un auroit été
rempli pendant le Sirocco ou le Catia, et l'autre avant que ces vents eussent
commencé à soufuer. H me paroit probable aujourd'hui que l'effet singulier du
Catia et de tous ces courans d'air auxquels une croyance populaire attache tant
d'importance, doit être attribué à des changemensd'humidité et de température,
plus qu'à des modifications chimiques. On n'a pas besoin d'avoir recours à des
miasmes amenés à Caracas des plages malsaines de !& côte on conçoit que des
hommes habitués à l'air plus sec des montagnes et de l'intérieur doivent être
désagréablement aSectés lorsque l'air de mer très-humide, poussé par la brèche
de Tipe, arrive, comme un courant ascendant, dans labaute vallée de Caracas,
et qu'en se refroidissant, par la dilatation et par le contact des couches voisines,
y
il y dépose une grande partie de l'eau qu'il renferme. Cette inconstance du climat,
ces passages un peu brusques, d'un air sec et transparent à un air humide et
brumeux, sont des inconvéniensque partage Caracas avec toute la région tempérée
des tropiques, avec tous les lieux placés entre quatre et huit cents toises de hauteur
absolue, soit sur des plateaux d'une très-petite étendue, soit sur la pente des
Cordillères, comme Xalapa au Mexique, et Guaduas dans la Nouvelle-Grenade.
Une sérénité non interrompue pendant une grande partie de l'année, ne règne
que dans les basses régions au niveau de la mer, et à de très-grandes hauteurs sur
ces vastes plateaux où le rayonnement uniforme du sol semble contribuer à la
dissolution des vapeurs vésiculaires. La zone intermédiaire se trouve niveau des
au
premières couches de nuages qui entourent la surface de la terre. Le climat de
cette zone, dont la température est si douce, est essentiellement inconstant et
brumeux.
Malgré la hauteur du lieu le ciel est généralement moins bleu à Caracas qu'à
Cumana. La vapeur aqueuse y est moins parfaitement dissoute, et ici,
comme
dans nos climats, une plus grande diffusion de la lumière diminue l'intensité de la
couleur aérienne, en mélant du blanc au bleu de l'air Cette intensité, mesurée

~<~M plus haut, Chap. ni, p a52.


par le cyanomètre de Saussure, a été trouvée, de novembre à janvter, généra-
lement de t8°, jamais au-dessus de 20", sur les côtes elle étoit de az° à a5".
J'ai observé, dans la vallée de Caracas, que le vent de Petare contribue quel-
quefois singulièrement à donner une teinte pâle à la voûte céleste. Le M janvier,
le bleu du ciel étoit, à midi au zénith, plus foible. que je ne l'ai jamais vu
sous la zone torride. M correspondoit à t2° du cyanometre l'atmosphère
étpit
alors de la plus grande transparence, sans nuages, et d'une sécheresse remar-
quable. Des que le vent impétueux de Petare eut cessé, le bleu augmenta au
zénith jusqu'à ï6". J'ai souvent observé, à la mer, quoique dans un moindre
degré, un effet semblable du vent sur la couleur du ciel le plus serein.
Quelle est la température moyenne de Caracas Nous la connoissons moins
bien que celle de Sânta-Fe de Bogota et de Mexico. Je pense cependant pouvoir
démontrerqu'elle ne s'éloigne pas beaucoup de ai à 22 degrés. J'ai trouvé, par
mes propres observations, pour les trois mois très-frais de novembre,décembre
et janvier, en prenant pour chaque jour le maximum et le minimum de la
température, les moyennes de ao"
20°, i; 20°,a. Or, par les connoissances
que nous avons acquises sur la distribution de la chaleur dans les difïérehtes
saisons, et à diGérentes hauteurs au~essus du niveau de la mer, je suis en état
de déduire approximativement, des moyennes de quelques mois, la température
moyenne de Tannée, à peu près comme on conclut la hauteur méridienne d'un
astre, des hauteurs prises hors du méridien. Voici les considérations sur lesquelles
se fonde le résultat auquel je m'arrête. A Santa-Fe de Bogota le mois de janvier
ne diffère, d'après M. Caldas, de la température moyenne de l'année entière que
de 0~,2; à Mexico déjà très-rapproché de la zone tempérée, la difïérence atteint
un maximum de 3°. A la Guayra, près de Caracas, le mois le plus froid diffère
de la moyenne annuelle, de 4")9; mais si l'air de la Guayra ( et celui de Catia )
monte quelquefois en hiver, par la QM~YMf<t de Tipe, à la haute vallée de
Caracas, cette vallée n'en reçoit pas moins, pendant une plus grande partie de
l'année, les vents de l'est et du sqd-est venant de Caurimare et de l'intérieur des
terres. Nous avons appris, par des observations directes, quà la Guayra et à
Caracas, les mois les plus froids sont de a3°,a et 20", t. Ces différencesexpriment
un décroissementde température qui, dans lu vallée de Caracas, est l'effet simul.

&mM!,thermom&treM'ontthrea3'7(anm!eH,arabrtd)tTent3o°,4);hygrom~tre
de Deluc 36°,2;
Cyan. au zémth ta° à l'horizon 3°. A heures de t'apres-mtd!, le vent cessa. Therm. at" bygr. 3Q°,3;
cyam.i6°.A6hearesduso!r,therm.ao°,2;hygr.39'
tanéde lahaatear dnsite (ou de!a
~da~<?onSi~~t~'I~'venM~de~d~~tà~'
di! ~–ar.
de fâic dans le ~ouraut a~cendant )
B'â~~ an petit nombre d*ôbsë~'faitesy pendant trois en'~partïe
à Caracas, en partie a Oh~ea.o~toat'pt'ès~de. la capitale,;'ai va que Ie..ttt.e~tre
centigrade se soutient,dan~'I.â'8aiso~'<roide~-en novembre et décembre, ïe~as

chaude, en JuiNët~taoût, cet instrument montre 25°


souvent~, le joar,* entire~t?~t"a2~~ nuit, entre ï~' et 17". Dans la satS~m
à 26°; denutt,
22° à 23". C'est l'état haMMteldel'atmosphère,et ces mêmes observations, faites
avec un instrument que j'ai véri&é, donnent,~?OMr~a ~M~~rM~M~ Moyenne
de ~ana~e AC~~e~M, an peu ptus~de 2ï°,5. C'est celle qaè, dans le système
desclimats citattanti~ues,on trouve dans les plaines par les 36° ou S~" de
latitude,ïl estpresqneinutile de rappeleriçi que cette comparaison ne porte que sur
la quantité de chaleur qui se développe dans chaque endroit pendant le courant
d'une année entière et qu'elle ne s'étend aucunement au <c/WM<, c'est-à-dire à
la distribution de ia chaleur entre les différentessaisons.
On voit tfes-raretiMntaCaracas, pendant quelques heures, s'dever la tempé-
rature,en été à 20* On assuré l'avoir vu descendre, en hiver, immédiatement
avant le lever du soleil à ï ï". Pendant mon séjour a Caracas, le maximum et
le minimum observés n'ont été que de a5" et ï2",5. Le froid nocturne est d'autant
plus sensible, qu'il est ordinairement accompagné d'un temps brumeux. Jat été
des semaines entières sans avoir pu prendre des hauteurs du soleil et des étoiles.
J'ai trouvé si brusques les passages de la plus belle transparence de l'air à une
obscurité parfaite, que souvent, l'œil déjà fixé à la lunette~ une minute avant
l'immersion d'un satellite, je perdois, dans la brume, et la planète et les objets
qui m'entouroient de plus près. En Europe, sous la zone tempérée, la
température est un peu plus uniforme sur les hautes montagnes que dans les
plaines. A l'hospice du Saint-Gothard, par exemple, la dinérence entre les
températures moyennes des mois les plus chauds et les plus froids est de ï7°,3
lorsque, sous le même parallèle, presque au niveau de la mer, elle est de
20° à at". Le froid n'augmente pas sur nos montagnes aussi rapidement-que

D'âpre !cheMe~e Réamnar.te jour de. <6°,84 t8°,o;Aen)tit,de ta'8&iy,S.


i

De, jour, ao° & 90",8; de nuit; l~.e à t8<Mathenn.de Réamaur.


? D<! '7°~ R..Jem'etoi. arrêté, dam!et..PK.MM', p. 98. tB' R. ~mr teSotserratioMpartielles,
fO)'M la note p à la fin du t.tYre.
A 93°.a R.
A S°,8 R.
ta chaleur y diminue. Nous verrons, à mesure que nous avancerons vera les
Cordillères, que, sous la zone torrid~, le dimatest plus ani~ftoe dans Ie< plaines
que sur les plateaux. A Cumana et à ta Guayra
( car il,ne faut pas citer des
endroits où les vents du nord troublent pendant quelques mois l'équilibre de
atmosphère), ~thermomètre se soutient, pendant l'année ent~re~ entre
ai" et 35° ;& Santa-Feet à Quito, on trouve des oscillations de 3"à M", sH'pn
compare~ je ne dis pas les jours, .mais les heures de l'année les plus
froides et
les plus chaudes. Dans les basses régions, à Cumana par exempte, les, nuits ne
diSerent généralement des jours que de 3° à 4"' A Quito, j'ai trouve cette
différence (en prenant avec soin, chaque jour et chaque nuit, les moyennes de
4 ou 5 observations) de 7". A Caracas, situe à une élévation presque trois, fois
moindre, et sur un plateau de peu d'étendue, les, jours sont encore, dans les
mois de novembre et décembre, de 5" à 5",5 plus chauds que les nuits. Ces
'phénomènes du reiroidissement nocturne peuvent étonner au premier abord:
ils sont modifiés par l'ëchauSement des plateaux et des montagnes pendant le
jour, par le jeu des courans descendans, et -surtout par le -rayonnementnocturne
du calorique dans l'air, pur et sec des Cordillères. Voici les différencesde climat
entre Caracas et son port
C~tAC~t. LA GnATBA.

t'MBée. (Hmt.tMt.) (NiT.dchmer).

froide.
Maximum.
T. m. delaNisonchaade.
Température moyens Je

T. m. de la saison

MininHUN*
3t° a aa<*
a4'*
t~*
a~*
n~
aS"
a<)°
23°,5
35**

at"

Les pluies sont extrêmement abondantes à Caracas dans les trois mois d'avril,
mai et juin. Les orages viennent toujours de l'est et dn sud-est, du côté de
Petare et du Valle.,Il ne tombe pas de grêle dans les basses régions des tropiques;
mais on en a observé à Caracas, presque tons les quatre ou cinq ans. On a même
vu de la grêle dans des vallées plus basses encore, et ce phénomène, lorsqu'il s'y
~présente, fait une vive impression sur le peuple. La chute des aérolithes est
moins rare chez nous que ne l'est la gréle, sous la zone torride, .malgré la fréquence
des orages, à 3oo toises d'élévation au-dessus du niveau de la mer.
Le climat frais et délicieux que nous venons de décrire convient encore à la
culture des productions équinoxiates. La canne à sucre se cultiva avec succès,
même à des hauteurs qui excèdent cellede Caracas;mais on préfère, dans la vallée,
à cause de la sécheresse du site et du terrain pierreux, la cMtttoM du caner dont
le fruit peu aboyant est de !a plus belle qualité. Lorsque cet arbrisseau est en
Reur, la plaine qui s'étend au-del& de Chacao omie l'aspect ïeptus riant. Le
bananier que l'on voit dans les plantations autour de la ville, n'est pas le'grand
Platano harton ce sont tes Variétés CaM&H~ et Domi&!H*o~ qui exigent moins
de chaleur Les grandes bananes viennent au marché de Caracas, des A<M'tcn~a!J
de Turiamo, situées sur la côte, entre Burburata et Pbrto-CâbeHo.Les ananas
les plus savoureux sont ceux de'Baruta de l'Empedrado, et des hauteurs de
Buenavista, dans le chemin de la Victoria. Lorsqu'un voyageur monte pour la
première fois à la vallée de Caracas, il est agréaMeaaentsurpris de trouver, à
côté du camer et du bananier, les plantes potagères de nos climats, des fraisiers,
des ceps de vigne, et presque tous les arbres fruitiers de !a zone tempérée. Les
pèches et les pommes les plus recherchées viennent de Macarao ou de !'extrénuté
occidentale de !a vaHée. C'est !à que le coignassier, dont !e tronc n'atteint que
quatre à cinq pieds, est si commun, qu'il est presque devenu sauvage. Les
confitures de pommes et surtout de coing sent très-recherchées dans un pays
où l'on croit que, pour boire de l'eau, il faut commencer par exciter la soif en
mangeant des matières sucrées. A mesure que les environs de la ville ont été
cultivés en cafier, et que l'établissement des plantations, qui ne date que de
l'année !~<)5, a augmenté le nombre des nègres cultivateurs~, on a remplacé,
dans la vaHée de Caracas, les pommiers et les coignassiers épars dans les savanes,
par du maïs et des légumes. Le riz, arrosé par des rigoles, étoit autrefois plus
commun dans la plaine de Chacao qu'il ne l'est aujourd'hui. J'ai observé, dans
cette province, comme au Mexique, et dans tous les terrains élevés de la zone
torride, que là où le pommier est le plus abondant, la culture du poirier offre
de grandes difficultés. On m'a assuré que, près de Caracas, les pommes excellentes
que l'on vend au marché viennent d'arbres non greffés. On manque de cerisiers
les oliviers que j'ai vus dans la cour du couvent de San Felipe Neri sont
grands et beaux; mais le luxe même de leur végétation les empêche de porter
des fruits. <

fo~phMh*ut,Chap.!I,p. to4.
CM&'e<<emftn:ona~<&mem&r<<&).
La consommation des TiUes de t'Amériqne espagnole, en comestibles, et surtout en viande, est si
énorme, qu'en )8oo, on tuoit à Caracas 4o,ooobn*nfs par an, tandis que Paris; avec une population
t4 fois plus grande, n'en cousommoit, du temps de M. Necker, que 70,000.
Sila constitution atmosphérique de la vallée est si favorableaux différens.
genres de culture qui font là base de l'industne colonMe.elle ne I!est pas égale-
ment à la santé des hàbitans et des étrangers étàbiM dans la capitale de Venezuela.
La grande inconstancedu climat èt~la suppression fréquente de la transpiration
cutanée font nattre des-affections catharrale~ qui prennent les fbrmes~Ies plus
différentes. Un Européen, une fois habitué aux fortes chaleurs~ jouit ptus cons-
tamment d'une bonne santé à Cumana, aux vallées d'Aragua, et partout ou jta
basse région des tropiques n'est pas tres-humMe, qu'à Caracas et-dans, tous ces
climats de montagnes que Ton vante commele séjour d'un printemps perpétue!.
En parlant de !a fièvre jaune de la.Guayra, j'ai énoncé l'opinion la plus
généralement répandue, d'après laquelle on suppose que cette cruelle, maladie
se propage presque aussi peu, de la côte de Venezuela a la capitale, quedes
côtes du Mexique à Xalapa. Cette opinion est (ondée sur l'expérience des derniers
vingt ans. Les épidémies qui ont exercé tours ravages dans ie portde la Guayra,
se sont à peine fait sentir à Caracas. Je ne voudrois pas trouMer, par des
craintes chimériques, la sécurité des habitans~d~ja~capitateornais je ne suis pas
persuadé que le typhus d'Amérique, devenu plus ~endémique sur la côte par
une plus grande fréquentation du port, ne puisse un jour, s'il est favorisé par
des circonstancescumatériques particulières, devenirtrès-fréquent dans la vallée;
car la températuremoyenne de Caracas est encore assez élevée pour que, dans les
mois les plus chauds, le thermomètre se soutienne entre aa° et 26°. Si l'on ne
peut douter que ce typhus, sons la zone tempérée, se communique par contact,
peut-on être sûr que, dans un haut degré d'exacerbation, il ne se montre
également contagieux par contact sous la zone torride, là où, à quatre lieues
des côtes, la température de Fêté seconde la prédisposition des organes? La
situation de Xalapa, sur la pente des montagnes mexicaines, offre plus de
sécurité, parce que cette ville, moins populeuse, est cinq fois plus éloignée de
la mer que Caracas, parce que son élévation est de s3o toises plus grande, et
que sa température moyenne est de 3° plus franche. En ï6<)6, un évoque de
Venezuela, Diego de Banos, dédia une église (cr/nt~t) à,Sainte-Rosalie de
Palerme, pour avoir délivré la capitale, après seize mois de ravages, du fléau
du vomissement noir, vomito negro une messe, célébrée tous les ans à la n
cathédrale, au commencement de septembre, a perpétué la mémoire de cette

Entre 17" et 2o°,8 R.


Oviedo Ban<M,p. 2<!g.
épidémie, comm& les pro~sionson~dans
de~,gra]~~tremMemens~i~
par:ibâevre~aune;quï.sévissmt'-d~
¡.itQt..tn:able
Ie~ colaniesys~~guales, la date

à bien étabïir soN.e;q)~e~ croire & '~e~pïd~mie


de~vomissement~noïr.tMa~<n~~p~nf'et<JUi.t..averaa"
cBtte.-saIso~e~trem~en~i~ehe~
ainsi dire.,
en ~3~
à Caracas ;asqN'ata~ ancten dans la hMte
vallée de Caracasqae daos jtes p~l~ fr~qaent~s de!aTen'e-Fenne?s~-
D'après UHoa, on me teconao~ssoit pas dans ceox-ci avant ïyag. Je doute que
l'ëpideïa!e de ï6g6 att~te ïa~èwe jaune~u le vëritaNe typhus d'Amérique. Les
déjectiûas aon~s a<!t!~pa~ent sôuveat ïes~ b!ueases rémittentes~ et ne
caraeterisent~ a eN~s seu~s ) pas ptas que tes A~?Mt<~n~~ Ïa crueUe matadie
qu'on cpnBait a~ourd'hui à la Havane et à la Vera-GnM sons Je nom de~oM~o.
Ma~s si aucune descnption exaete ne démontre que te typhus d'Amérique ait
régne à Caracas, des !a En du dix-septiëme slec!e, H est malheureusementtrop
certain que cette ma!adie, dans ïa même capitale,~a enlevé un grand nombre
de jeunes mUitaires européens en ï8oa. On est eSrayé de voir qu'an centre
de la zone torride, un plateau~ é!evé de 4~o toises, mais tres-rapprochë de la
mer, ne garantit point encore tes habitans d un méan que l'on croit propre aux
basses régions du littoral.

'BaI)y,p,M.
CHAPITRE Xtïf
SÉJOUR A CARACAS.–MONTAGNES QPÏ AVOISINENT LA VH.M.–EXCORSÏOtf A tA
· CIME DE LA 8tï.tA. – ÏNDtCES DE MtNES.

J'Ai séjourné deux mois à Caracas. Nous habitions, M. Bonpiand et


mot, une
grande maison presque Isolée, dans la partie la plus élevée de !a ville. Du haut
d'une galerie, nous pouvions découvrir à la fois le sommet de laSilla, la crête
dentelée du Galipano et la vallée riante du Guayre,dont la riche culture contraste
avec le sombre rideau des montagnes d'aIehtouif.C'ëtoit la saison des sécheresses.
Pour améliorer les pâturages, on met le && aux savanes~erau gazon qui couvre
les rochers les plus escarpés. Ces vastes embrasemêns, vus de loin, produisent
des effets de lumière surprenans. Partout où les savanes, en suivant les ondulations
des pentes rocheuses, ont rempli les sillons creusés par les eaux, les terrains
enflammés se présentent, par une nuit obscure, comme des courans de laves
suspendues sur le vallon. Leur lumière vive, mais tranquille, prend une teinte
rougeâtre lorsque le vent qui descend de la Silla accumule des traînées de
vapeurs dans les basses régions. D'autres fois, et ce spectacle est le plus imposant,
ces bandes lumineuses, enveloppées de nuages épais, ne paroissent que par
intervalles à travers des éclaircies. A mesure que les nuages montent, une vive
clarté se répand sur leurs bords. Ces phénomènes divers, si communs sous les
tropiques, gagneht d'intérêt par la forme des montagnes, la disposition des
pentes et la hauteur des savanes couvertes de graminées alpines. Pendant le )our,
le vent de Petare qui soude de l'est, chasse la jfumée vers la ville, et diminue
la-transparence de l'air.
Si nous avions lieu d'être satisfaits de l'exposition de notre maison, nous
l'étions encore plus de l'accueil que nousfaisoient toutes les classes des habitans.
C'est un devoir pour moi de citer la noble hospitalité qu'a exercée envers nous
le chef du gouvernement, M. de Guevara Vasconzelos, alors capitaine général
des provinces de Venezuela.Quoique j'aie eu l'avantage que peu d'Espagnols ont
partagé avec moi, d'avoir visité successivement Caracas, la Havane, Santa-Fe
t
de Bogota Quitq~ Lima et Mexico, et que, dans ces six capitales de Aménque
espagnol,ma position m'ait mis en relation avec des hommes de tous les rangs,
je ne me permettrai pas de prononcer sur les dISerens degrés de civilisation
auxquels la société s'est déjà élevée dans chaque colonie. Il est plus &cite
d'indiquer les nuances diverses de la culture nationale, et le but vers lequel se
dirige de préterence le développementintellectuel, que de comparer et de classer
ce qui ne peut être envisagé sous un même point de vue. Il m'a paru qu'il y a une
tendance marquée pour l'étude approfondie des sciences à Mexico et à Santa-Fe
de Bogota; plus de goût pour les lettres et tout ce qui peut flatter une imagina-
tion ardente et mobile à Quito et à Lima plus de lumières sur les rapports
politiques des nations, des vues plus étendues sur l'état des colonies et des
métropoles, à la Havane et à Caracas. Les communications multipliées avec
l'Europe commerçante, et cette mer des Antilles que nous avons décrite plus
haut comme une Méditerranée à plusieurs issues, ont influé puissamment sur
le progrès de la société à l'Me de Cuba et dans les belles provinces de Venezuela.
Nulle part ailleurs, dans l'Amérique espagnole, la civilisation n*a pris une phy-
sionomie plus européenne. Le grand nombre d'Indiens cultivateurs qui habitent
le Mexique et l'intérieur de la Nouvelle-Grenade,donnent à ces vastes pays un
caractère particulier, ~'aurois presque dit plus exotique. Malgré l'accroissement
de la population noire, on se croit, à la Havane et à Caracas, plus près de Cad~z
et des États-Unis que dans aucune autre partie du Nouveau-Monde.
Comme Caracas est placé sur le continent, et que sa population est moins
mobile que la population des tics, les habitudes nationales s'y sont plus con-
servées qu'à la Havane. La société n'ofire pas des plaisirs très~vKs et très-variés;
mais on éprouve, dans l'intérieur des tamHtes~ ce sentiment de bien-être
qu'Inspirent une gaieté franche et la cordialité unie à la politesse des manières.
Il existe à Caracas, comme partout où il se prépare un grand changement dans
les idées, deux races d'hommes, on pourroit dire deux générations très-distinctes.
L'une, qui est restée peu nombreuse,conserve un vif attachement aux anciennes
coutumes, de la simplicité dans les mceurs, de la modération dans les désirs.
Elle ne vit que dans les images du passé. L'Amérique lui paro~t la propriété de
ses*ancétres qui l'ont conquise. Abhorrant ce que l'on appelle les lumières du
siècle, elle conserve avec soin, comme une partie de son patrimoine, ses préjugés
héréditaires. L'autre, moins occupée même du présent que de l'avenir,a un
penchant souvent Irréfléchi pour les habitudes et les idées nouvelles. Lorsque
ce penchant se trouve réuni à l'amour d'une instruction solide lorsqu'il est
contenu et dirige par une raison forte et éclairée, ses effets deviennent utiles
pour la société. J'ai connu à Caracas, dans cette seconde génération, plusieurs
hommes également distingués par leur goût pour l'étude, la douceur de leurs
mœurs et l'élévation de leurs sentimens; j'en ai connu aussi
qui, dédaigneux
pour tout ce que le caractère, la littérature et les arts espagnols présentent
d'estimable et de beau, ont perdu leur individualiténationale, sanà avoir puisé,
dans leurs rapports avec les étrangers, des notions précises sur les véritables
bases du bonheur et de l'ordre social.
Comme depuis le règne de Charles-Quint, l'esprit de corporation et les haines
municipales ont passé de la métropole aux colonies, on se plaît, à Cumana et
dans d'autres villes commerçantes de la Terre-Ferme, à exagérer les prétentions
nobiliaires des familles les plus illustres de Caracas, connues sous le nom de &M
Mantuanos. J'ignore comment ces prétentions se sont manifestées jadis mais il
m'a paru que le progrès des lumières et la révolution qui s'est opérée dans les
mœurs ont fait disparottre peu à peu, et assez généralement~ce que les distinc-
tions ont d'oSensant parmi les blancs. Dans toutes les colonies, il existe deux
genres de noblesse. L'âne se compose des créoles dont les ancêtres ont occupé
très-récemment de grandes places en Amérique elle fonde en partie ses préro-
gatives sur l'illustration qu'elle ~dans la métropole; elle croit pouvoir les conserver
au-delà des mers, quelle que soit l'époque de son établissement dans les colonies.
E'autre noblesse tient plus au sol américain elle se compose des descendans des
conquistadores, c'est-à-dire des Espagnols qui ont servi dans l'armée dès la
première conquête. Parmi ces guerriers, compagnons d'armes de Cortez, de
Losada et de P~zarro, plusieurs appartenoient aux familles les plus distinguées
de la péninsule; d'autres, issus <tes classes inférieures du peuple, ont illustré
leurs noms par cette valeur chevaleresque qui caractérise le commencement du
seizième siècle. J~ai rappelé ailleurs qu'en étudiant ces temps d'enthousiasme
religieux et militaire, on trouve à la suite des grands capitaines plusieurs hommes
probes, simples et généreux. Ils blàmoient les cruautés qui souilloient la gloire du
nom espagnol; mais, confondus dans la masse, ils n'ont pu échapper la
proscription générale. Le nom de conquistadores est.resté d'autant plus odieux,
que la plupart d'entre eux, après avoir outragé des peuples pacifiques, et vécu
au sein de l'opulence, n'ont pas éprouvé, à la fin de leur carrière, de ces
longues adversités qui calment la haine des hommes et adoucissent quelquefois le
jugement sévère de l'histoire.
t ~o~ plus haut, Cbap. V, p. 35~.
Mais ce N'est pas seulement le progrès des lumières et, le conSit entre'deux
noblesses d'un~origine diS~rente, qui engagent tes cartes privilégiées & renoncer
à leurs prétentions, on dn moins & les déguiser habilement. L'aristoct&tie, dans
les colonies espagaotM, ~ouve un contre-poids d'une autre espèCÈ~ et dont
l'action devient de jour en tour plus puissante. Parmi les blancs, un se~Ment
d'égalité a pénètre dans toutes les âmes. Partout où les hommes de conleu~sônt
regardés ou comme esclaves ou comme aSranchis~ c'est la liberté héréditaire,
c'est la persuasion intime de ne compter parmi ses ancêtres que des hommes
libres, qui constituent la noblesse. Dans les colonies, la véritable marque
extérieure de cette noblesse est la couleur de la
peau. Au Mexique comme an
Pérou, à Caracas comme à Me de Cuba,
on entend dire journellement à un
homme qui marche pieds nus: Ce blanc si riche
se croiroit-il "plus blanc que
moi? La population que l'Europe peut faire écouler
vers l'Amérique étant très-
considérable,on conçoit que l'axiome tout homme blanc est noble, todo blanco
es co&a~Mio, contrarie singulièrement les prétentions des familles européennes,
dont l'illustration date de très-loin. Il y plus encore H& vérité de cet axiome
a
est depuis long-temps reconnue en Espagne, chez un peuple justement célèbre
par sa loyauté, son industrie et son esprit national. Tout Biscayen se dit noble;
et, comme il existe plus de Biscayens en Amérique et aux Philippines que dans
la Péninsule, les blancs de cette race n'ont
pas peu contribué à propager dans les
colonies le système de l'égalité de tous les hommes dont le
sang n'est pas mété
avec le sang africain.
D'ailleurs, les pays dont les habitans, tnéme sans
un gouvernement représen-
tatif et sans institution de pairie, mettent une si haute importance
aux généa-
logies et aux avantages de la naissance, ne sont
pas toujours ceux dans lesquels
l'aristocratie des familles est la plus offensante. On chercheroit
en vain chez les
peuples d'origine espagnole ces airs froids et prétentieux que le caractère de la
civilisation moderne semble rendre plus communs dans le reste de l'Europe. Aux
colonies comme dans la métropole, la cordialité, l'abandon
et une grande
simplicité dans les manières rapprochent les diSérentes classes de la société. On
peut même diré que l'expression de la vanité et de 1 amour-proprey blesse d'autant
moins, qu'elle a quelque chose de franc et de naïf.
J'ai trouvé dans plusieurs familles de Caracas le goût de l'instruction, la
cohnoissance des chefs-d'œuvre de la littérature françoise
et italienne, une
prédilection marquée pour la musique, qui est cultivée
avec succès, et qui sert,
comme fait toujours la culture des beaux-arts, à rapprocher les diverses classes
de la société. Les sciences exactes, le dessin et la peinture n'ont point ici de ces
grands établissemensque Mexico et Santa-Fe doivent a la munincencedu gouver-
nement espagnol et au zèle patriotique des nationaux. Au milieu d'une nature
si merveilleuse et si riche en productions,personne sur ces côtes ne s'occapoit
de l'étude des plantes et des minéraux. C'est seulement dans un couvent de Saint-
François que j'ai trouvé un vieillard' respectable qui calculoit l'almanach pour
toutes les provinces de Venezuela, et qui avoit quelques notions précises sur
l'état de l'astronomie moderne. Nos instrumens l'intéressoient vivement, et un
jour notre maison se trouva remplie de tous les moines de Saint-François, qui,y
à notre grande surprise, demandoient à voir une boussole d'inclinaison. La
curiosité qui se porte sur les phénomènes physiques augmente dans des pays
minés par les feux volcaniques, sous un climat où la nature est à la fois si
imposante et si mystérieusement agitée.
Lorsqu'on se rappelle qu'aux Etats-Unis de 1 Amérique du nord, on publie des
journaux dans de petites villes de 3ooo habitans, on est surpris d'apprendre que
Caracas, avec une population de quarante à cinquante mille âmes, n'avoit pas
d'imprimerie avant t8o6; car on ne peut donner ce nom à des presses avec
lesquelles on a tenté, d'année en année, d'imprimer quelques pages d'un calendrier
ou un mandementde l'évéque. Le nombre des personnes qui connoissent le besoin
de lire n'est pas très-grand, même dans celles des colonies espagnoles, qui sont
les plus avancées dans la civilisation; mais il seroit injuste d'attribuer aux colons
ce qui a été l'effet d'une politique ombrageuse. Un François, M. Delpeche, allié
à une des familles 2 les plus respectablesdu pays, a le mérite d'avoir établi le
premier une belle imprimerie à Caracas. C'est, dans les temps modernes, un
spectacle assez extraordinaire de voir un établissement de ce genre, qui offre le
plus grand des moyens de communications entre les hommes, suivre et non
précéder une révolution politique.
Dans une contrée qui offre des aspects si ravissans, à une époque où, malgré
les tentatives d'un mouvement populaire, la plupart des habitans ne dirigeoient
leurs pensées que sur des objets d'un intérêt physique, la fertilité de l'année,
les longues sécheresses,le conflit des vents de Petare et de Catia, je croyois devoir
trouver beaucoup de personnes qui connussent à ~bnd les hautes montagnes
d'alentour. Mon attente ne fut point remplie; nous ne pûmes découvrir à Caracas

Le Père Puerto.
LafamiUedesJtfon~a.
un seul homme qui fut allé an sommet de la Silla. Les chas&eurs ~s'élèvent pas
si haut sur la croupe des montagnes,et on ne voyage gu~re,dans ces pays pour
chercher des plantes alpines pour examiner des rochea ou pour porter un
baromètre sur des tiénx élevés. Accoutumé à une vie uniforme et casanière, on
redoute la fatigue et les changemens brusques de climat; on diroit que t'en ne
vit pas pour jouir de la vie, mais uniquement pour la prolonger.
Nos promenades nous conduisoient souvent à deux plantations de caner, dont
les propriétaires étoient des hommes d'une société aimable. Ces plantations sont
placées vis-à-vis de la Silla de Caracas. En examinant, par une lunette, les pentes
rapides de la montagne et la forme des deux pics qui la terminent, nous avions
pu apprécier les dimcultés que nous aurions à vaincre pour parvenir au sommet.
Des angles de hauteur pris avec le sextant, à la Trinidad, m'avoient fait juger
que ce sommet devoit être moins élevé au-dessus du niveau de la mer que la
grande place de la ville de Quito. Cette évaluation ne s'accordoit guère avec les
idées des habitans de la vallée. Les montagnes qui dominent de grandes villes
acquièrent, par cela même, dans les deux continens, une célébrité extraordinaire.
Long-temps avant qu'on les ait mesurées d'une manière précise, les savans du
pays leur assignent une hauteur en toises ou en fay~ castiltannes, dont il n'est
pas permis de douter sans blesser un préjugé national.
Le capitaine général, M. de Guevara, nous fit donner des guides par le teniente
de Chacao. C'étoient des noirs; ils connoissoient un peu le sentier qui conduit
vers les côtes par la crête des montagnes, près du pic occidental de la Silla. Ce
sentier est fréquenté par les contrebandiers; mais ni ces guides, ni tes hommes les
plus expérimentés de la milice, employés à poursuivre tes contrebandiers dans
des lieux si sauvages, n'avoient été sur le pic oriental ~ai forme le sommet le
ptus élevé de la Silla. Pendant tout le mois de décembre, la montagne, dont les
angles de hauteur me faisoient connoitre le jeu des réfractions terrestres, n'avoit
paru que cinq fois sans nuages. Comme dans cette saison deux jours sereins se
succèdent rarement, on nous avoit conseillé de choisir, pour notre excursion,
moins un temps clair qu'une époque où les nuages se soutiennentà peu de hauteur,
et où l'on peut espérer qu'après avoir traversé la première couche de vapeurs
uniformément répandues, on entrera dans un air sec et transparent. Nous passâmes
la nuit du a janvier dans l'Estancia de Gallegos, plantation de cafiers, près de

Don Andres de Ibarra et M. Blandin.


A Caravalleda.
laquelle, dans un ravin richement ombragé, la petite rivière de Chacaito forme
de belles cascades en descendant des montagnes. La nuit étoit assez c!a!re; et `
quoique, la veitted'unvoyage pénible, nous eussions~lésiréjouir de-quelque repos,
nous passâmes toute la nuit, M. Bonpland et moi, à attendre trois occultations
des satellites de Jupiter. Pavois détermine d'avance les instans de l'observation,
et nous les manquâmes toutes, à cause des erreurs de calcul qui s'étoient glissées
dans la CbnnoM~anccdes temps. Un mauvais sort avoit été jeté sur les pronostics
des occultations pour les mois de décembre et de janvier. Le temps moyen avoit
été confondu avec le temps vrai'.
Je fus singulièrement impatienté de cet accident; et, après avoir observé, avant
le lever du soleil, l'intensité des forces magnétiques au pied de la montagne,
nous nous mimes en marche à 5 heures du matin, accompagnés d'esclaves qui
portoient nos instrumens. Nous étions dix-huit personnes qui marchions à la
sMte les unes des autres par un sentier étroit. Ce sentier est tracé sur une pente
rapide, couverte de gazon. On tâche d'abord de gagner le sommet d'une coltine
qui, vers le sud-ouest, forme comme un promontoire de h Sitta. Elle tient au
corps même de la montagne par une digue étroite, que les pâtres désignent par
un nomtrès-caractéristiquie~ celui de la Porte, ou Puerta de la Silla. Nous y
arrivâmes vers les y heures. La matinée étoit bette et fraîche: le ciel, jusque-là,
paroissoit favoriser notre excursion. Je vis le thermomètre se soutenir un peu
au-dessous de t~ Le baromètre m'indiqnolt que nous étions déjà à 685 toises
d'élévation au-dessus du niveau de la mer, c'est-à-dire près de 8o toises plus haut
qu'à la ~en~a, où l'on jouit d'une vue si magnifique sur les côtes. Nos guides
pensoient qu'il faudroit encore 6 heures pour parvenir au sommet de la Silla.
Nous traversantes une digue étroite de rochers couverts de gazon elle nous
conduisit du promontoirede la Puerta à la croupe de ta grande montagne. La
~ue plonge sur deux vattons qui sont plutôt des crevasses remplies d'une végéta-
tion épaisse. A droite, on aperçoit le ravin qui descend entre les deux pics vers
la ferme de TtfMno~. à gauche, on domine la crevasse de Chacaito, dont les eaux
abondantes jaillissent près de la~n~cde Gallego. On entend le bruit des cascades
sans voir le torrent, qui reste caché sous l'ombrage touffu des Erythrina,' des
Clusia et des Figuiers de l'Inde 3. Rien n'est plus pittoresque, sous une zone où

Voyez mes 0~. astr., Tom. p. 180.


De n°,2R.
Ficus nymphaeiMia,Erythrinamilis. On trouve, dans le même vaHon,deu~belles espèces de Mimoses,
Inga~M~oMetJ.cinerea.
tant de végétaux ont des feuilles grandes.luisantes et coriaces, que laspect dû
sommet des arbres places &<une grande pro&ndeur, et éclairés par les rayons
presque perp~ndiculairesdn soleil.
Depuis la Puerta, la montée devient toujours plus rapide. !1 falloit jeter le
corps fortement en avant pour pouvoir avancer. Les pentes sont~ sonvent de
3o" à 3a". Le gazon est serre, et ~ne longue sécheresse l'avpit rendu singulière-
ment glissant.Nous aurions désire avoir des crampons ou des bâtons ferrés. Des
herbes courtes couvrent tes rochers de gneiss, et l'on ne peut ni se saisir de ces
herbes, ni former des gradins, comme on fait sur des terrains moins durs. Cette
montée, plus fatigante que périlleuse, découragea les personnes qui nous àvoient
accompagnésdepuis la ville, et qui n'étoient pas accoutumées à gravir les mon-
tagnes. Nous perdimes beaucoup de temps à les attendre, et nous ne résolûmes
de continuer,seuls notre route que lorsque nous les vîmes tous descendre la mon-
tagne au lieu de la gravir. Le temps commençoit & se couvrir. Déjà, dn bocage
humide qui bordoit, au-dessus de nous, la région des savanes alpines, la brume
sortoit comme de la fumée en filets minces et droits. On auroit dit d'un incendie
qui se manifestoit à la fois sur plusieurs points de la forêt. Peu à peu ces traînées
de vapeurs s'accumuloient; et, détachées du sol, poussées par la brise du matin;
elles rasoient, comme un nuage léger, la croupe arrondie des montagnes.
A ces signes infaillibles; nous reconnûmes, M. Bonpland et moi, que nous
serions bientôt enveloppés dans une brume épaisse. De crainte que nos guides
ne profitassent de cette circonstance pour nous abandonner, nous nous rimes
précéder par ceux qui portoient les instrumens les plus nécessaires. Nous conti-
nuâmes à gravir les pentes qui s'inclinent vers la crevasse dé Chacaito. La
loquacité familière des noirs créoles, contrastoit avec cette gravité taciturne des
Indiens qui nous avoient constamment accompagnésdans les missionsdé Caripe.
Ils s'égayoient sur ceux qui avoient renoncé si vite à un projet longuement
préparé, surtout ils ne ménageoient pas un jeune moine capucin, professeur de
mathématiques,qui n'avoit cessé de vanter les avantages de force physique et de
hardiesse qu'avoient, selon lui, les Espagnols européens de toutes les classes sur
les Espagnols américains. Il s'étoit muni de bandelettes de papier blanc, qui
dévoient être découpées et jetées dans la savane, pour indiquer aux traîneurs la

Depuis que j'ai fait les expériences sur les pentes ( Chap. n, p. t5a), j'ai tronTë dans la Figure de
la 7trredeBoaguer(p.c!x), nn passage qui prouve que cet astronome, dont tes opinions sont d'un si
grand poids, regardoit aussi 36° comme t'inctinaison d'une pente inaccessible, si le sol ne permet
pas qu'on
y fasse des marches avec le pied.
direction qu'il falloit prendre: Le professeur a volt même promis aux religieux
de son ordre de lancer la nuit quelques fusées pour annoncer & toute la ville de.
Caracàs que nous avions réussi dans une entreprise qui lui paroissoit, je dois
ajouter à lui seul, une entreprisebien Importante. It avoit oublié que ses vetcnïens,
si longs et si lourds, devaient l'embarrasser dans la montée. Comme il avoit
perdu courage long-temps avant les créoles, il passa le reste de la journée, dans
une plantation voisine, à nous voir gravir la montagne par une lunette dirigée
sur la Sitla. Malheureusement pour nous, ce religieux, qui ne manquoit pas
d'instruction en physique, et qui a été assassiné peu d'années âpres par les
Indiens sauvages de l'Apure, s'étoit chargé du transport de l'eau et des provisions
si nécessaires dans une excursion de montagnes. Les esclaves qui devaient nous
rejoindre furent si long-temps retenus par lui, qu'ils ne purent arriver que très-
tard, et que nous restâmes pendant dix heures sans eau et sans pain.
Des deux pics arrondis qui forment le sommet de la montagne, l'oriental est le
plus élevé. C'étoit celui auquel nous devions parvenir avec nos Instrnmcns. L'en-
foncement entre ces deux pics a donné à la montagne entière le nom espagnol de
Selle, Silla. Une crevasse que nous avons déjà nommée, descend de cet enfon-
cement vers la vallée de Caracas à son origine ou extrémité supérieure, elle se
rapproche du dôme occidental. On ne peut attaquer le sommet oriental qu'en
prenant d'abord à l'ouest de la crevasse par le promontoire de la Puerta, en se
dirigeant droit sur le sommet le moins élevé, et en ne tournant vers l'est que
lorsqu'on est presque parvenu à la crête ou à l'e/of!nent de la Silla, entre
les deux pics. L'aspect général de la montagne semble prescrire cette route; car
l'escarpement des frochers à l'est de la crevasse est, tel, que l'on auroit beaucoup
de peine à s'élever au sommet de la Silla en montant, non par la Puerta, mais
tout droit vers le dôme oriental.
Depuis le pied de la cascade de Chaoaito jusqu'à mille toises d'élévation, nous
ne trouvâmes que des savanes. Deux petites liliacées à fleurs jaunes s'élèvent
seules au milieu des graminées dont la surface des rochers est couverte. Quelques
pieds de ronces nous rappeloient la forme de nos végétaux d'Europe. Nous
nous attendîmes en vain à trouver sur ces montagnes de Caracas, et plus tard
sur le dos des Andes, un églantier à côté des ronces. Nous n'avons pas observé

Cypuramart:nicens:BetS:syr!nchiu!ntn(<</c~m. On trouve aussi eette dernière Iridée près de la Venta


Je la Guayra, à 600 toises de hauteur.
Rubus jamaicensis.
de rosier tndtgène dans toute iAmenque menotonate, matgre ianatogte qm
règne entre le climat des hautes montagnes de la zone tornde et le climat de
notre zone tempérée. Il paroit même que ce charmant arbuste manque à tout
l'hémisphère austral, en deçà et au-delà du tropiquejCe n'est que sur les montagnes
mexicaines que nous avons été assez heureux pour découvrir, par les ï?" de
latitude, des églantiers américains*.
La brume nous enveloppa de temps en*~emps; nous avions de la peine à
trouver la direction de notre route. A cette hauteur, il n'y a plus de chemin
tracé. On s'aide des mains lorsque les pieds manquent sur une pente si rapide et
si glissante. Un nton rempli de terre à porcelaine,attira notre attention. Cette
terre, d'un blanc de neige, est sans doute le résidu d'un feldspath décomposé.
J'en ai remis des portions considérables à l'intendant de la province. Dans un
pays où le combustible n'est pas rare, le mélange dé terres réfractaires peut
devenir utile pour améliorer la faïence et même les briques. Chaque fois que les
nuages nous entouroient, le thermomètrebaissoit~ jusqu'à ïa°; par un ciel serein,
il s'éleva à 21". Ces observations se firent à t'ombre; mais H est dimcite, sur des
pentes si inclinées, couvertes d'un gazon desséché, luisant et jaune, de se garantir
de l'effet du calorique rayonnant. Nous étions à 9~0 toises; et cependant, à la
même hauteur vers l'est, nous vimes, dans un ravin, non quelques palmiers
isolés, mais tout un bocage de palmiers. C'étoit la Palma ~M~, peut-être une
espèce du genre Oreodoxa. Ce groupe de palmiers, occupant une région si élevée,
contrastoit singulièrement avec les sautes épars dans le fond plus tempéré de
la vallée de Caracas. On voit ici des formes européennes placées au-dessous
des formes de la zone torride.
Après quatre heures de marche par les savanes, nous entrâmes dans un bocage
formé d'arbustes et d'arbres peu élevés. Ce bocage s'appelle el ~~u~Z, sans doute
à cause de la grande abondance du Pejoa ( Gaultheria odorata ), plante à feuilles

M. Redouté a publié, dans sa belle Monographie des Rosiers, notre églantinier mexicain sons le nom
de Rosier de Montezuma.
,a
La pnosance du 6ton est de 3 pieds sa direction est bor. de la boussole de Freiberg, tandis que
cette du gneiss est partout hor. 3,4 avec 50°-60° d'inclinaison au nord-ouest. Cette terre à porcelaine
humectée abaorbe avidement l'oxigène de l'air; j'ai trouvé (a Caracas) le résidu d'azote tres-foiMement
mêlé d'acide carbonique, quoiquej'eusse opéré dans des fiaconsbouchés à t'émerit et non remplis d'eau.
Jusqu'à g°,6 R.
Satix Humboldtiana de M. WiUdenow. Sur les palmiers alpins, voyeï mes 7'fc~omena de <<t<<r.
plant., p. a35.
très-odoriférantes'. Lapente de ta montagne devient pins douce, et-rious éprou-
vâmes un plaisir indicible examiner les végétaux de cette région. Nulle part
peut-être, on ne trouve réuni, sur un petit espace de terrain, des productions si
belles et si remarquables sous le rapport de la géographie des plantes. A. mille
toises d'élévation, les hautes savanes de la Silla aboutissent à une zone d'arbustes
qui, par leur port, leurs brancher tortueuses, la dureté de leurs feutlles, la
grandeur et la beauté de leurs fleurs pourprées, rappellent ce que, dans la
Cordillère des Andes, on désigne, par le nom de végétation des Paramos et des
Punas C'est la que se montrent la famille-des Rosages alpins, les Thibaudia,
les Andromèdes, les Vaccinium, et ces Befaria à feuilles résineuses que nous
avons comparés plusieurs fois au Rhododendrum des Alpes de l'Europe.
Lors même que la nature ne produit pas les mêmes espèces sous des climats
analogues, soit dans les plaines sur des parallèles isothermes 3, soit sur des
plateaux dont la température approche de celle des lieux plus voisins des pôles*,
on observe cependant une ressemblance frappante de port et de physionomie
dans la végétation des régions les plus éloignées, ~~phénomène est un des plus
curieux que présente l'histoire des formes organiques. Je dis l'histoire, car la
raison a beaa~interdire a l'homme les hypothèses sur l'origine des choses, nous
n'en sommes pas moins tourmentés de ces problèmes insolubles de la distribution

~bj~z plus haut, Chap; vt ,p. 397). C'est un grand avantage de la langue espagnole que de
pouvoir dériver, comme en latin, du nom de la plupart des arbres, un mot qui désigne t'<M<ocM<tOM
ou l'agroupement des arbres de la même espèce. C'est ainsi que sont formés les mots o&car, robledar et
pinal, de o&f), toMe et~mo. Les Espagnols-Américainsont ajouté Tunal, ~'<~<t<, C«o~<t~, etc., Meut où
croissent ensemble beaucoup de Cactus, de Gaultheria, odorataetdePsidium~
L'explication de ces mots a été donnée plus haut, Chap. v, p. 3a~.
s On peut ou comparer entre elles des latitudes qui, ~dans ie même hémisphère, offrent la même
température moyenne (p. e., ta Fensytranie et la France centrale, le, Chili et la partie auttraie de la
),
NouveHe-HoHande ou considérer tes rapports qui existent entre la végétation des deux hémisphères
sous des parallèles isothermes (d'égale chaleur).).
4 La géographie des plantes n'examine pas seulement les analogies que l'on observe dans
un même
hémisphère entre la végétation des Pyrénées et des pMnes Scandinaves, entre celle des Cordillères du
Pérou et des côtes du Chili elle discute aussi les rapports entre les plantes alpines des deux hémis-
phères. Elle compare la végétation des Alleghanys.et des Cordillères du Mexique avec celle des montagnes
du Chili et du Brési). En se rappelantque chaque ligne isotherme aune branche alpine (celle Mu réunit, e.,
p.
Upsal à un pont situé dans les Alpes de la Suisse), on peut réduire le grandproblèmedet'a<M&~e<<M~mM
végétales à l'expression suivante t.* examiner,dans chaque hémisphère et au niveau des cotes, la végéta-
tion sur une même ligne isotherme,surtout près des sommets concaves ou convexes; a."
comparer,sous lé
rapport de la forme des plantes, sur une même ligne isotherme au nord etau sudde l'équateur, la branche
alpine à la partie tracée dans les plaines; 3." comparer ta végétation sur des tigres isothermes homonymes
dans les deuxhémisphères, soit dans tes basses régions, soit dans les régtons alpines.
des êtres. Une gammée de la Suisse surles rochers gmoitiques du
détroit de Magellan. La Nouvelle-Hollande nourrit plus de quarante plantes
phanérogames de l'Europe, et le p!as grand nombre des végétMX qui sont
identiques dans les zones tempérées des deux hémisphères,manquent entièrement
dans la région intermédiaire,qui est la région équinoxiale, tant dans les plaines
que sur le dos des montagnes. Une violette à .feuilles velues, qui termine pour
ainsi dire la zone des phanérogames sur le volcan de Ténéri~e, et que long-temps
on a cru propre à cette Me se montre trois cents lieues plus au nord près du
sommet neigé des Pyrénées. Des graminées et des cypéracées de l'Allemagne, de
l'Arabie et du Sénégal, ont été reconnues parmi les plantes que M. Bonptand et
moi avons recueillies sur les plateaux froids du Mexique, le long des rives
brûlantes de l'Orénoque, et dans l'hémisphère austral sur le dos des Andes de
Quito 3. Comment concevoir les migrations des plantes à travers des régions
d'un climat si diSerent, et qui sont aujourd'hui couvertes par l'Océan? Comment
les germes des êtres organiques, qui se ressemblent par leur port et même par
leur structure interne, se sont-ilsdéveloppés à d'inégalesdistances des pôles et de
la surface des mers, partout où des lieux si distans offrent quelque analogie de
température ? Malgré l'influence que la pression de l'air et l'extinction plus ou
moins grande de la lumière exercent sur les fonctions vitales des. plantes, c'est
pourtant la chaleur inégalement distribuée entre les différentes parties de l'année,
que l'on doit considérer comme le stimulus le plus puissant de la végétation.
Le nombre des espèces qui se trouvent identiques dans les deux continens et
dans les deux hémisphères, est beaucoup moins grand qu'on ne l'avoir cru d'après
les assertions des premiers voyageurs. Les hautes montagnes de l'Amérique équi-
noxiale ont sans doute des plantains, des valérianes,des arénaires, des renoncules,
des néfliers, des chênes et des pins, qu'à leur physionomie on pourroit confondre
avec ceux de l'Europe; mais ils en sont tous spécifiquement différens. Quand la
nature n'offre pas les mêmes espèces, elle se plaît à répéter les mêmes genres. Des

PMeumatpinmn, examiné par M' Browm. D'après les recherches de cearand botaniste, il n'est pas dou-
teux qu'un certain nombre de plantes est à la fois commun aux deux continens et aux zones tempét eea
des demt hémupheret. PotentiUaanserina, PrnmeUaTutgaris, Scirpus mucronatns et Panicum Crus galli
croissent en Allemagne, dans la NouveHe-HoUande,et en Pensylvanie.
Le Viola cheiranthifolia que nous avons décrit, M. Bonptand etmoi (Chap. n; p. t38 et t8y), a
été reconnu, par MM. Kanth et Léepotd de Buch, parmi tes ptantes alpines que Joseph de Jussieu a rappor-
tées des Pyrénées.
Cyperus mncronatus, Poa Eragrostis, Festuca Myurus, Andropogon avenaceus, Lapago racemosa.
(Voyez nos Nova Genera et Spec., Tom. !,p.xxY, t58, t5S, 189, ng.)
espèces voisines sont souvent placées à d'énormes distances les une des autres,
dans les basses régions de la zone tempérée et les régions alpines de l'Equateur.
D'autres fois encore (et la Silla de Caracas offre un exemple happant de ce
phénomène} ce ne sont pas les genres européens qui ont envoyé des espèces
comme des colons, pour peupler les montagnes de la zone tofride, ce sont des
genres d'une même tribu, dif&cites à distinguer par leur port, qui se remplacent
à différentes latitudes.
Il y a plus de deux cents lieuesde distance des montagnes de la NouveUe-Grcnade,
qui entourent le plateau de Bogota, à celles de Caracas et cependant la Silla, seul
pic élevé dans une chaîne assez basse, offre ces agroupemens singuliers de Befaria
à fleurs pourprées, d'Andromëdes, de Gaultheria, de Myrtilles, d'!7c<~ cama-
ronas de Nertera etd'Araties à feuilles velues 2, qui caractérisentla ~~h~on
des Paramos sur les hautes Cordillères de Santa-Fe. Nous avons trouvé le même
Tbibaudia glandulosa à rentrée du plateau de'Bogota et dans le jPe/ua/ de la
Silla. 'La chame côtière de Caracas se lie, à n'en pas douter (par le Torito, la
Palomera, Tocuyo, les Paramos de las Rosas, de Bocono et de Niquitao), aux
hautes Cordillères de Merida,de Pamplonaet de Santa-Fe; mais de la Silla au
Tocuyo, sur une distance de soixante-dix lieues; les montagnes de Caracas sont
si basses, que les arbustes de la famille des Ericinéesque nous venons de citer,
n'y trouvent pas le climat froid qui est nécessaire à leur développement. En
supposant même, comme il est probable, que le Thibaudia et le rosage des
Andes ou Befaria, existent dans le Paramo de Niquitao et dans la Sierra de Merida
couverte de neiges éternelles, ces végétaux n'en manqueroientpas moinsd'une arête
assez élevée et assez prolongée pour faire leur migration vers la Silla de Caracas.
Plus on étudia la répartition des êtres organisés sur le globe, et plus
on est
porté, sinon à renoncer à ces idées de migration, du moins à ne pas les considérer
comme des hypothèses entièrement satisfaisantes. La chaîne des Andes partage
longitudinalement toute l'Amérique méridionale en deux parties inégales. Au
pied de cette chaîne, à l'est et à l'ouest, nous avons trouvé un grand nombre
~ds plantes spécifiquement les mêmes. Les diacrens
passages des Cordillères ne
permettent nulle part aux productions végétales des régions chaudes de passer

Le nom de vigne en arbre et d'MM camaronas est donné, dans tes Andes, aux plantes du genre Thi-
baadia, cause de leurs grands fruits succ~ns. C'est ainsi que tes botanistes anciensappetoient
(uva ursi), et vignes du 7)f<~ /<&, (ritis~dtea) les Arbousiers et tes Myrtilles qmappartMMent
Thibaudia à la familledes Ericinées.
J'
vigne
comme le
Nertera depressa. Aralia reticulata,Hedyotis &~tMt~
des côtes de la mer du Sud aux rives de l'Amazone. Lorsque, soit au milieu des
plaines et de montagnes tressasses, soit au centre d'an archipeld'~essouïevées
par les feux souterrains, un pic atteint ~ne grande hauteur, sa cime est couronnée
d'herbes alpines, dont plusieurs se retrouvent à d'immenses distances sur
d'autres montagnes qui ont nn climat analogue. Tels sont les phénomènes
généraux de la distribution des végétaux, et l'on ne sauroit assez engager les
physiciensà les étudier. En combattant des hypothèses trop légèrement adoptées,
je ne m'engage pas à leur en substituer d'autres plus satisfaisantes. Je pense
plutôt que les problèmes dont H s'agit ici sont insolubles, et que le physiciena
rempli sa tâche, s'il indique les lois d'après lesquelles la nature a distribué les
formes végétales.
On dit qu'une montagne est assez élevée pour entrer dans tes limites des
Rododendrum et des Befaria, comme on dit depuis long-temps qu'une montagne
atteint la limite des neiges perpétuelles. En se servant de cette expression, on
suppose tacitement que, sous l'influence de certaines températures, certaines
formes végétales doivent nécessairement se développer. Une telle supposition
n'est pas rigoureuse dans toute sa généralité. Les pins du Mexique manquent sur
les Cordillères dm Pérou. La Silla de Caracas n'est pas couverte de ces chênes
qui, dans la Nouvelle-Grenade, végètent à la même hauteur. L'identité des formes
indique une analogie de climats; mais, sous des climats analogues, les espèces
peuvent être singulièrement diversifiées.
Le charmant rosage des Andes, le Befaria a été décrit le premier par
M. Mntis qui t'avait observé près de Pamplona et de Santa-Fe de Bogota, par
les et de latitude boréale, n étoit si peu connu, avant notre excursion à
la Silla, qu'il n'existoit presque dans aucun herbier de l'Europe. Les savans
éditeurs de !à Flore du .P~OM l'avoient même décrit sous un nouveau nom
celui d'Acunna. De même que les rosages de la Laponie, du Caucase et des
Alpes dînèrent entre eux, les deux espèces de Befaria que nous avons rappor-
tées de la Silla sont aussi spécinquement différentes A. celles de Santa-Fe de
Bogota 3. Près de l'équateur, les rosages des Andes ~couvrent les montagnes

Rhododendrmn tap&nictum,R. citttMStcmn, R. <ern)g!neom et R. hirsutom.


qm! Befana~aMcs,
renferment prenne M(/o&o.
B. cne Voyez nos~'&tn&s~mno~M~.Tom.
Monographie n,p. porter
complète du genre Be&ria qn! devroit ny-tat),
tt8-ta6 (Tab. de Bf~arm.
qui renferment presque une Monographiecomplète du genre Befariaqui devroitporter le nom de Bejoria,
Befaria œstttans et B. resinosa.
Surtout B. zstnans de Mntis et deux nouvelles espèces de l'hémisphère austral que nous avons
décrites sous les noms de B. cenr<'<<tM et B. gMn<H~M<.
jusque dans les Parâmes les plus élevés, à seize et dtx-sept cents totses de hau-
teur. En avançant vers le nord, dans la Silla de Caracas, on les trouve beaucoup
plus bas, un peu au-dessous de mille toises le Betaria, récemment découvert
dans la Floride, sur le parallèle de 3o", végète mêmesur des collines de peu de
hauteur. C'est ainsi que, sur une distance de 600 lieues en latitude, ces arbustes
descendent vers les plaines à mesure qu'ils s'éloignent de Féquateùr. Le rosage
de la Laponie végète de même huit à neuf cents toises plus bas que le rosage
des Alpes et des Pyrénées. Nous avons été surpris de n'avoir découvert aucune
espèce de Befaria dans les montagnes du Mexique, entre les rosages de Sante-
Fe et de Caracas et ceux de la Floride. Y

Dans le petit bocage qui couronne la Silla le Befaria ledifolia n'a que trois à
quatre pieds de haut. Le tronc est divisé, dès sa base, en un grand nombre
de rameaux fragiles et presque verticillés. Les feuilles sont ovales, lancéolées,
glauques en dessous, et roulées vers les bords. Toute la plante est couverte de
poils'longs.et visqueux; elle aune odeur résineuse très-agréable. Les abeilles
visitent ses belles fleurs pourprées, qui sont très-abondantes comme dans toutes
les plantes alpines, et qui, bien épanouies, ont souvent près d'un pouce de
largeur.
Le Rhododendrumde la Suisse, là où il végète entre 800 et iooo toises de
hauteur, appartient à un climat dont la température moyenne est de + 2" et
– t°, semblable à celle des plaines de la Laponie. Dans cette zone, les mois
les plus froids sont de 4° et t o° les mois les plus chauds, de 12" et de ~°.
Des observations thermométriqucs, faites aux mêmes hauteurs et sous les mêmes
parallèles, rendent très-probable qu'au jP~MaZ de la Silla, mille toises au-dessus
du niveau de !a ~ner des Antilles, la température moyenne de l'air est encore
de i~à 18°, et, que le thermomètre s'y'soutient dans la saison la moins-S
chaude, de jour, entre ï5" et 20°; de nuit, entre to" et 12°. A l'hospice du
Saint-Gothard, qui est près de la limite supérieure du rosage des Alpes, le
maximum de chaleur qM~ au mois d'août, à midi (à l'ombre ), ordinairement
~de 12" à 13°; de nuit,<ïan's là même saison, l'air s'y. refroidit par l'effet du
rayonnement du sol, jusqu'à + i bu – t",5. Sous la même pression baromé-
trique, et par conséquent à la même élévation, mais 3o" en latitude plus près
de l'équateur, le Befaria de la Silla est souvent, à midi, exposé à une tempé-
rature de a3° à 2~°. Le plus grand abaissement nocturne n'excède probablement
jamais ~°. Nous avons comparé avec soin le climat sous lequel végètent, à
diSérentes latitudes, deux groupes de plantes d'une même famille à égale dis-
tance du niveau de la mer; les résultats auroient ététrès-dinérens, si nous avions
comparé des zones également distantes, soit des neiges perpétaelles, soit de la
ligneisothennex~w*.
Dans ie bocage du P~MO~ végètent près des 2~rM à fleurs pourprées, un
Hedyotis à feuilles de bruyère de huit pieds de haut; le C~oroM'.qaiestan
grand Hypericum arborescent un Lepidium qui paroit identique avec celui de
Virginie; enfin des Lycopodiacées et des mousses qui tapissent, les rochers et
les racines des arbres. Ce qui donne, dans le pays, le plus de célébrité à' ce
bocage, est un arbuste de i o à 15 pieds de haut, de la famille des CorymbLferes.
Les créoles l'appellent ~nce~~ Incienso 3. Ses feuilles coriaces et crénelées,
de même que l'extrémité des rameaux, sont couvertes d'une laine blanche. C'est
fleurs ont
une nouvelle espèce de Trixis, extrêmement résineuse, et dont les
l'odeur agréable du storax. Cette odeur est très-diSerente de celle 'qu'exhalent
les fleurs du Trixis therebentinacea des montagnes de la Jamaïque opposées à
celles de Caracas. On mêle quelquefois l'lnciensb de la Silla aux fleurs du
Pevetera, autre composée dont t'arome ressemble à celui de t'Hétiotrope du
Pérou. Le ~efetera ne s'élève cependant pas sur les montagnes jusqu'à la zone
du Befaria il vient dans la vallée de Chacao, et les dames de Caracas l'emploient
pour préparer une eau de senteur extrêmement agréable.
Nous nous arrétames long-temps à examiner les belles plantes résineuses et
odoriférantes du Pejual. Le ciel devint toujours plus sombre. Le thermomètre
baissa jusqu'ap-dessous de n". C'est une température à laquelle, sous cette
zone, on commence à souffrir du froid. En quittant le bocage d'arbustes alpins
on se trouve de nouveau dans une savane. Nous gravîmes une partie du dôme
occidental pour descendre dans renfoncementde la ~e~c, vallée qui sépare les
deux sommets de la Silla. C'est là que nous eûmes de grandes dinicultés à vaincre,
à cause de la force de la végétation. Un botaniste ne devineroit pas aisément
que le bois épais qui couvre ce vallon est formé par l'agroupement d'une plante

La couche d'airdont la température annuelle est ~o, et qui ne coïncide guère avec la limite inférieure
paraUete
des neiges perpétuelles, se trouve sar le des Rhododendram de la Suisse à goo toMe*; sur le
paralMedeaBe<ariadeCaracas,a9700<Otsesdehantenr.
Vismia C<tpcn<m ( servant d'appui à un Loranthosqui s'approprie le soc jaune du Vismia) DaTaHia
m<t~)R<t, Hieracium ~M&~ Aralia.arboreaJacq. et Lipidinm virginicum. Deux nouvelles espèces de
Lycopodium, le ~OK<M et t'<!TM<a<Mm,se montrent déjà plus bas vers la Puerta de la Silla. (Voyez nos
Nova Gen. et j%)ec., Tom. ï, p. 38. )
5 Triais nereifolia de M. Bonpland.
de la famille des Musacées C'est probablement un Marantaou un Heliconia;
ses feuilles sont larges et lustrées; II s'élève à ï~ ou, t5 pieds de hauteur,, et ses
tiges succulentes sont rapprochées comme le chaume des Cannes'~ que l*on
trouve daus les régions humides de l'Europe australe. Il fallut se &'ayer un
chemin à travers cette forêt de Musacées. Les nègres nous devançoient avec
leurs coutelas ou machettes. Le peuple confond cette ScitaoHnée alpine avec
les graminées arborescentes, sous le nom de <~rK?c nous n'en vtmes ni les fleurs
ni le fruit. On est surpris de trouver une famille de Monocotylédones, que l'on
croit exclusivement propre aux régions basses et
chaudes des tropiques, à
1100 toises de hauteur, bien au-dessus des Andromèdes, des Thibaudia et du
rosage des Cordillères 3. Dans une chaîne de montagnes également élevée et
plus septentrionale encore, dans les montagnes bleues de la. Jamaïque, le
Heliconia des perroquets et le Bihai croissent aussi de préférence dans des
lieux.alpins ombragés 4.
En errant dans ce bois épais de Musacées, ou herbes arborescentes, nous
nous dirigeâmes toujours du côté du pic oriental que nous devions atteindre. Il
étoit de temps en temps visible par une clairière. Soudain nous nous trouvâmes
enveloppés dans une brume épaisse la boussole seule pouvoit nous guider;
mais, en avançant vers le nord, nous risquâmes à chaque pas de nous trouver
au bord de l'énorme mur de rochers qui descend presque perpendiculairement à
6000 pieds de profondeur vers la mer. n fallut s'arrêter; entourés de nuages
qui rasoient la terre, nous commençâmes à douter si nous pourNons atteindre
le pic oriental avant l'entrée de la nuit. Heureusement les nègres qui portoient
l'eau et nos provisions nous avoient rejoints, et nous résolûmes de prendre
quelque nourriture. Notre repas ne fut pas long. Soit que le père capucin n'eût
pas pensé au grand nombre de personnes qui nous accompagnoient, soit que
les esclaves eussentj:buGhé aux provisions pendant -la route nous ne trouvâmes
que des olives presque pas de pain. Horac&, dans sa retraite de TIbur, n'aa
pas vanté de repas plus frugal et plus léger s; mais les olives qui pouvoient nourrir
un poète livré à l'étude et à la vie sédentaire, paroissent un aliment bien peu
'\Ii

&:t<<!ntMt~ ou famille des Bananiers.


Arundo donax.
3 Befaria.
Heliconia psittacorum et H. B!ha:.(Satisb))ry,dans tes ThMf.e/M~M. &)< Tom. ï,p. a/S.)
Ces deux Heticonia sont, à la Tet-re-Ferme,tre~-eommoms dans tes ptames.
5 Carm. I, 3t.
substantiela des hommes qui gxttvisaent les montagnes. Nous avions veillé la
majeure partie de la nuit, et nous marchâmes pendant. neuf heure$ sans avoir
trouvé de sources. Nos guides étbMnt découragés, ils voulurent abNo!ument
redescendre, et nous eumes~ M. BôUpland et moi, beaucoup de peîne aies
retenir.
Je fis, au milieu delà brume, l'expérience de l'é!ectromètre de Volta armé
d'une mèche. Quoique très-rapproché des Heticonia réunis en un bois épais,
j'obtins des signes d'é!ectricité atmosphérique très-sensibles. Elle passa souvent
du positif au négatif, en changeant d'intensité à chaque'instant. Ces variations
et le conflit de plusieurs petits eourans d'air qui divisoient la brume et la trans-
fbrmoientennnage~àcontoursdéterminés,me parurent des pronosticsinfaillibles
d'un changementde temps. Il n'étoit que deux heures après midi. Nous conçûmes
quelque espoir de pouvoir atteindre le sommet oriental de la Silla avant le
coucher du soleil, et de redescendre dans le vallon qui sépare les deux pics.
C'est là que nous comptions passer la nuit, en allumant un grand feu et en
faisant construire par les nègres une cabane avec les feuilles larges et minces de
l'Heliconia. Nous renvoyâmes la moitié de nos gens, en leur enjoignant de venir
le lendemain matin à notre rencontre, non avec des olives, mais avec des pro-
visions de viandes satées.
A peine avions nous pris ces dispositions, que le vent d'est commença à
souffler avec impétuosité du côté de la mer. Le thermomètre s'élevajusqu'à ï a",5.
C'étoit sans doute un vent ascendant qui, en faisant hausser la température,
dissolvoit tes vapeurs. En moins de deux minutes, les nuages' disparoissoient.
Les deux dômes de la Silla se montrèrent à nos yeux dans une proximité
extraordinaire. Nous ouvrîmes le baromètre dans la partie la plus basse de l'en-
foncement qui sépare tes sommets, près d'une petite marre d'eau très-bourbeuse.
Ici, comme dans les Mes Antilles on trouve des terains fangeux à de grandes
hauteurs, non parce que tes montagnes boisées attirent les nuages, mais parce
qu'elles condensent des vapeurs par Fenet du refroidissement nocturne que
causent le rayonnement du sol et celui du parenchyme des feuilles. Le mercure
se soutenoit à 2 ponces 5,y lignes. Nous nous dirigeâmes droit vers le sommet
oriental. La végétation nous opposa peu à peu moins d'obstacles: il fallut cepen-
dant encore abattre des Heliconia; mais ces herbes arborescentes étoient moins
élevées et moins rapprochées. Les pics même de la Silla comme nous l'avons

LeMond, Yoyage aux dntilles, Torn. ï, p. 4ao.


rappelé plusieurs fois, ne sont couverts que <rammees et de pettts arbustes
de Befaria. Ce n'est pas leur hauteur qui est la cause de leur nud.it~La.limi.te des
arbres, dans cette zone, est encore de 4oo toises plus élevée; ca~, à en'juger
d'après l'analogie d'autres montagnes, cette limite ne se tronveroit ici qu'à
j8oo toises de, hauteur. Le manque de grands arbres sur les deux sommets
rocheux de la Silla paroit dû l'aridité du sol, à l'impétuosité des vents de
mer, et aux incendies si &équens dans toutes les montagnes de la région
équinoxiale.
Pour atteindre le pic le plus élevé, celui de t'est, il faut se rapprocher, autant
que possible, de l'énorme escarpement qui descend vers Caravalleda et les côtes
Le gneiss avoit conservé jusqu'ici sa texture lamelleuse et'sa direction primitive;
mais là où nousgravtmes le sommet de la Silla il passe au granite. Sa texture
devient grenue; le mica, plus rare, est plus inégalement réparti. On~ne trouve
plus de grenats, mais quelques cristaux isolés d'amphibole. Ce n'est cependant
pas une syénite, c'est plutôt un granite de nouvelle formation. Nous mîmes
trois quarts d'heure pour parvenir à la cime de la pyramide. Cette partie du
chemin n'est aucunement périlleuse, pourvu qu'on examine bien la solidité des
blocs de rochers sur lesquels on pose le pied. Le granite superposé au gneiss
n'offre pas une séparation régulière en bancs; il est divisé par des fentes qui se
coupent souvent en angles droits. Des blocs prismatiques, d'un pied de large
.et de douze pieds de longueur, sortent obliquement de la terre, et se présentent
au bord du précipice comme d'énormes poutres suspendues au dessus de
l'abîme.
Arrivés au sommet, nous jouîmes, mais pendant peu de minutes seulement,
de toute la sérénité du ciel. Nos regards embrassoient une vaste étendue de
pays; ils plongeoient à la'fois, vers le nord sur la mer, vers le midi sur la vallée
fertile de Caracas. Le baromètre se soutint à so pouces y ,6 lignes; ta température
de l'air étoit de~3",7. Nous nous trouvâmes à ï35o toises de hauteur. La
vue
embrasse une étendue de mer de 36 lieues de rayon. Ceux dont les sens se
troublent à la vue des profondeurs, doivent se tenir au centre du petit plateau
qui surmonte le dôme oriental de la Silla. La montagne n'est
pas très-remar-
quable par sa hauteur, qui est presque de 80 toises moindre que la hauteur
du Canigou, mais elle se distingue de, toutes les montagnes que j'ai parcourues
par l'énorme précipice qu'elle onre du côté de la.mer. La côte ne forme qu'une
lisière étroite; et, en regardant du haut de la pyramide
sur les maisons de
Caravalleda, on s'Imagine, par une illusion d'optique dont nous
avons souvent
parte, que le mur de rochers est presque perpendiculaire. La venfatMë incli-
,naisonde la pe)tte m'a paru, par un~calcul exact de 53<'38~.}L'taclmaison
moyenne du Pic de Ténérine peine de ï a" 3o~. Un précipice de MX & sept
est
mille pieds, comme celui de là Sï!!a de Caracas, est un phénomène beauooup plus
rare que ne l'imaginent ceux qut parcourent les montagnes sans mesurer leur
hauteur, leur masse et leurs pentes. Depuis qu'on s'est occupé de nouveau, dans
plusieurs parties de l'Europe~ d'expériences sur la chute des corps et sur leur
déviation vers le sud-est, on a cherché inutilement dans toutes les Alpes de la
Suisse~ un mur de rocher qui ait a5o toises de hauteur perpendiculaire. La
déclivité du Mont-Blanc vers l'AlléeBlanche n'atteint pas même un angle de 45",
9
quoique, dans la plupart des ouvrages géologiques, le Moat-BIanc soit décrit
comme coupé à pic du côté du sud.
A la Silla de Caracas, l'énorme falaise septentrionale est en partie couverte de
végétation, malgré l'extrême rapidité de sa pente. Des tournes de Befaria et
d'Andromèdes se présentent comme suspendues au roc. La petite vallée qui
sépare les dômes vers le sud, se prolonge du tôté ~ïe la mer. Les plantes alpines
remplissent cet enfoncement; débordant la crête de la montagne, elles suivent
les sinuosités du ravin. On croiroit que des torrens sont cachés sous des ombrages
si frais, et la disposition des végétaux,l'agroupementde tant d'objetsimmobiles,
donnent au paysage le charme du mouvement et de la vie.
Il y avoit sept mois que nous nous étioas trouvés au sommet. du volcan de
TénériSe,d'où l'on embrasse une surface duiglobe égale au quart de la France.
L'horizon apparent de la mer y est de 6 lieues plus éloigné qu'à la cime de la
Silla,et cependant nous vîmes cet horizon, du moins pendant quelque temps,
très-distinctement, Il étoit bien tranché, et ne se confondoit pas avec les couches
d'air circonvoisines.A la Silla qui est de 55o toises moins élevée que le Pic de
TénériSe, l'horizon plus rapproché de, nous demeuroit invisible vers le nord et
le nord-nord est. En suivant de l'œil la surface de la mer, qui ressembloit à celle
d'une glace, nous fumes frappés de la diminution progressive, de la lumière
réfléchie. Là ou le rayon visuel touche la dernière limite de cette surface, l'eau
f.e confondoit avec les couches d air superposées. Cet aspect a quelque chose de

Les observationsde latitude donnent, pour la distance horizontale du pied de ia montagne près de
Caravblledaà ia~erticatequi passe par le sommet, la peine i o0o toises.
~ye: le témoignage du géognoste qui a le plus parcouru tes Alpes, M. Escher, de Zttrtch dans
!)M«,Tom.lV,p.a3<. ·
~o~e: plus haut, Chap. t, p. g6, et Chap. n, p. i4o.
très-extraordinaire.On s'attend à voir l'horizon au niveau defoeil et a~ïieu de
distinguer à cette hauteur une limitetranchée entre les deux ë~éa~ns,les couches
d'eau les plus éloignées paroissent comme converties eh vapeurs, et melé~~ à
l'Océan «érien. J'ai en ce même aspect, non dans une secte partie de l'horizon,t
mais sur plus de t6o° d'étendue, près de la mer du Sud, lorsque je me
trouvai, pour la première ~ois, sur le rocher pointu qui domine !e ctatère de
Pichincha, volcan doAtlahauteurexcède celle du Mont-Btanc. La visibilité
d'un horizon très-éloigaé dépende lorsqu'il n'y a pas de mtn~/de deux choses
distinctes, de la quantité de InmtêRB que reçoit la partie de l'Océan & laquelle
aboutit le rayon visuel, et de l'extinction qu'éprouve la ttHnière réfléchie,
pendant son passage à travers les couches d'air interposées, Il peut arriver que,
malgré la sérénité du ciel et la transparence de l'atmosphère, l'Océan, à 35 ou
~b lieues de distance, soit foiblement éclairé) ou que les couches 'air les plus
rapprochées de la terre éteignent considérablement la lumière en absorbant les
rayons qui les traversent.
Même en supposant au!sles èCets de la ré&action '~on devroit voir, du haut
de la Silla par un beau temps, les Mes Tortuga, Orchila~ Roques ~t Aves, dont
les plus rapprochées sont àa5 lieues de distance Nous n'aperçûmes aucune de
ces ftes, soit que Tétât de t'atmosphère nous en empêchât, soit que le temps
que nous pûmes employer par un ciel serein àchercher/les ~les ne fût pas assez
long. Un pilote instruit, qui avoit tenté de gravir avec nous à la cime de la
montagne, don Miguel Areche, nous assura avoir re!evé'Ia Sitia prèsi!esCaycs
de Sel, à la JRocca </e J~[e?M~ par les t2"t de tatitude Si les cimes environ-
nantes n'interceptoient pas la vue, on devroit, du sommet de la SHta, voir la
côte à l'est jusqu'au Morro de PIritù, à l'ouest jusqu'à la Punta del Soldado,
!0 lieues au-dessous du vent de Porto-CabcHo. Au sud, dans l'intérieur des
terres, la rangée de montagnes qui séparent Yare et la savane d'Ocumare de la
vallée de Caracas, bornent l'horizon, comme un rempart qui se prolonge dans la
direction d'un paranè!eàréquateur.Si ce rempart avoit une ouverture, une brèche,
eomme on en trouve si souvent dans les hautes montagnes du Sàlzbourg 3 et de
la Suisse, onjouiroit~ct du spectacle le plus étonnant. On découvriroità travers
la brèche les Llanos ou vastes steppes de Calabozo; et comme
ces steppes

Le rayon visuel est sans réfraction de t" Xg' en arc avec une réfraction d'an dixième, est de t" 5o'.
La latitude de la Silla est t0*5t'5" d'après M. Ferrer.
Par exempte, aa /~M ~u~.
&élèverotent à la hauteurde t'ceil de lobservatear, on verroit du même point les
horizons semblables de l'eau et de la terre.
Le pic arrondi ou d~ja~e occidental de !à Sma nous déroba la vue de la ville
de Caracas; mais nous. diatimga&mes les maisOtMiespIxMvoisines, les vil~ges de
ChacaoetdePetare, les pÏttntatiOnsd~canereetecOursduRioGuayM.~&let
d'ea~ qui renétoit une lumière argentée, La bande étroite de terrain cultive
contrastoit agréablement ave~aspectmorne et sau vage des montagnes d alentour.
En embrassant d'un coup d'<peil ce vaste paysage, on regrette à peine de ne
pas voir les solitudes du Nouveau-Monde embellies de l'image des temps passes.
Partout où, sous la zone torride, la terre, hérissée de montagnes et jonchée de
végétaux, a conservé ces traits primitifs, l'homme ne se présente plus comme
le centre de la création. Loin de dompter les é!émens, il ne tend qu'à se soustraire
à leur empire. Les changemens que les sauvages ont faits depuis des siècles à la
surface du globe, disparoissentauprès de ceux que produisent, en quelques heures,
l'action des feux souterrains, les débordemens des grands neuves, l'impétuosité
des tempêtes. C'est la lutte des élémens entre eux qui caractérise dans le Nouveau.
Continent le spectacle de la nature. Un pays sans population se présente à
l'habitant de l'Europe cultivée comme une cité délaissée par ses habitans. En
Amérique, lorsqu'on a vécu pendant plusieurs années dans les forêts des basses
régions, ou sur le dos des Cordillères lorsqu'on a vu des pays étendus comme
la France ne renfermer qu'un petit nombre de cabanes éparses, une vaste solitude
n'effraie plus notre imagination. On s'habitue à l'idée d'un monde qui ne nourrit
que des plantes et des animaux, où l'homme sauvage n'a jamais fait entendre le
cri de l'allégresse ou les aceens plaintifs de la douleur.
Nous ne pûmes profiter long-temps des avantages qu'onre la position de la
Silla, qui domine sur toutes les cimes d'alentour. Tandis que nous examinions
avec une lunette la partie de la mer dont
l'horizon étoit bien terminé, et la chaîne
des montagnes dOcumare, derrière laquelle commence le monde inconnn de
l'Orénoque et de l'Amazone, une brume épaisse s'éleva des plaines vers les hautes
régions. Elle remplissoit d'abord le fond de la vallée de Caracas. Les vapeurs,
éclairées d'en haut, offroient une teinte uniforme, d'un blanc laiteux. La vallée
paroissoit couverte d'eau; on eût dit d'un bras de mer, dont les montagnes
voisines formoient le rivage escarpé. Nous attendîmes en vain l'esclavequi portoit
le grand sextant de Ramsden il fallut profiter de l'état du ciel, et me résoudre
à prendre quelques hauteurs du soleil avec un sextant de Troughton, de deux
pouces de rayon. Le disque du soleil étoit à demi-voilé par la brume.La diSérence
de longitude entre te quartier de la Trinidad et le. pie oriental de la Sitta paroft
à peine excéder'o°3'22~.
Tandis que, assis sur le rocher, j'étois occupé à déterminef l'inditt&Mon de
l'aiguille aimantée, je me trouvai tes mains couvertes d'âne espèced'abeitlesvètues,
un peu plus petites que l'abeiHcmetunqûedû nord de
l'Europe. Ces inaectes
font leurs mds dans ta terre, tts volent rarement; et, d'après lalenteur,de leurs
mouvemens, je tes aurois crus engourdis par le froid des montagnes. Le peuple,
dans cesrégions, tes appelle de/w~j <H!g~.f, a~geZ~o~ parce qu'its ne piquent
que très-rarement. Ce sont sans doute des apiaires du groupe des Metipones. Quoi
qu'en aient dit plusieurs voyageurs, il n'est pas vrai que ces abeilles, propres
au Nouveau-Continent, soient. dépourvues de toute arme offensive. Elles ont
l'aiguillon plus fbible, et el!es s'en servent plus rarement Lorsqu'on n'est pas
encore bien rassuré sur la douceur de ces <Mg~t<<M,on ne peut se défendre
de*quetque crainte. J'avoue que, soui~ent, pendant les observations astronomiques,
j'ai été jHïr te point de laisser tomber tes instrument; quand je me sentois les mains
et le visage couverts de ces abeilles velues. Nos guides assuroient que ces
insectes ne se mettoient en défense que lorsqu'on les irritoit en tes prenant par
les pattes. Je n'ai pas été tenté de faire cet essai sur moi-même.
L'inclinaison de l'aiguille aimantée étoit, à la Silla, d'un degré centésimal
plus petite qu'à la ville de ~Caracas. En réunissant les observations que j'ai
faites, par un temps calme et dans des circonstances très-favorables soit sur
les montagnes, soit le long des côtes voisines, on croiroit, au premier abord,
reconnottre, dans cette partie du globe, une certaine influence dès hauteurs
sur l'inclinaison d~ l'aiguille et sur l'intensité des forces magnétiques; mais il
faut remarquer que l'inclinaison de Caracas est singulièrement plus grande qu'on
ne devroit le supposer d'après la position de ta vitte, et que les phénomènes
magnétiques sont modifiés par la proximité de certaines rochesqui forment
autant de centres' particuliers, ou pe~tssystèmes d'attraction.

~La <MR:'ence de longitude de la S!!ta et de la Guayra est d'âpre* M; F!da!ge,o''6'4o".


~ez le Mémoire de Mt Latreille iMeré daaf) mes 0~ ï,
<& ~&o<o~<t, Tom. p. a6! et 369.
J'ai vu des fregmeM de quarz que traveMent des, bandes paraMHes de fer tMgaétiqae, portés
dans la v allée de Caracas, par les eaux qui descendent du Gatipano et du Cerro de Avila. Cette
mine de fer magnétique ruhannéë se rencontre aussi dans la Sierra ~ef~a de Merida. Entre les deux
pics de la Silla, on trouve des iragmens angmtemdé quarz ceHuteM, cotttert d'oxide
rouge dé fer ÏIs
n'agissent pas sur t'aimant. La codeur de cet oxids est d'nn ronge de cinabre.
MMX(l8oo). nAM)!)nt
'T'
MMtmz MMMtm*
Mp~H',
ttfcm'ju'OK
<M~<dh.dMM..Fi~
MCtH~no"
MMur..t

La Guayra. 3 nfS~o" 69" 37' ~s'~o 2X7

Caracas (Trinidad). 454 to"5o~5o" 69''zS' 42«,90 Ma

LaV€nta(deAvtb). 606 io<'55'9" 69" 28' 4ï".75 z54

LaSiUa. i55o io"5t/t5'' 69" ai" 4~90 25o

La température de l'atmosphère varioit, sur le pic de la Silla, de li à t~


degrés, selon que le temps étoit calme ou que le vent souffioit. On sait combien
il est difficile, sur la cime des montagnes, de vériner la température que l'on
doit employer dans le calcul barométrique. Le vent étoit Est, ce qui semble
prouver que la briseou les vents alisés ~'étendent, par cette latitude, bien
au-delà de tSoo toises de hauteur. M~ de Buch a observé qu'au Pic de Ténérine,
placé près de la limite septentrionale des vents alisés, on trouve, à 1900 toises
d élévation, le plus souvent, un vent de ~ntOM, celui de l'ouest; L'académie
des sciences avoit engagé les physiciens qui accompagnoient t'intbrtuné La
Peyrouse à se servir de petits ballons aérostatiques, pour examiner sur mer,
entre les tropiques, Fétendue des vents alisés. Ces recherches sont très-diuMUes
à faire, si l'observateur ne quitte pas la surface du globe. Les petits ballons
n'atteignent généralement pas la hauteur de la Silla, et les nuages légers que
l'on découvre quelquefois à des élévations de trois ou quatre mille toises, par
exemple les moutons, restent immobiles, ou ont le mouvement si lent, qu'on
ne peut juger de sa direction.
Pendant'le court espace de temps que nous vîmes le ciel serein au zénith,
je trouvai le bleu de l'atmosphère sensiblement plus foncé que sur les côtes.
H étoit de 26",5 du cyanomètre de Saussure. A Caracas, le même instrument

n'indiquoit généralement, par un temps beau et sec que t8°. Il est probable
qu'aux mois de juillet et d'août, là différence de la couleur du ciel, sur les
côtes et au sommet de la Silla est bien plus considérable encore'< Mais le
phénomène météorologique dont nous avons été le plus happés,M. Bonpiand
et moi, pendant le séjour d'une heure que nous Rme~ sur la mon~gne,
fut celui de la sécheresse apparente de l'aire qui sembloit augmenter & mesure
que la brume se formoit. Lorsque retirai de sa caisse l'hygromètre à baleine
pour le mettre en expérience, H montra 5a" (87° Sauss.). Le ciel étoit clair;
cependant des traînées de vapeurs à contours distincts passoient de temps en
temps au milieu de nous, en raMnt la terre. L'hygromètrede Deluc rétrogradoit
à 49°(85° S. ). Une demi-heure plus tard, un gros nuage vint nous envelopper;
nous ne distinguâmes plus les objets qui nous.entouroient de plus près; et nous
vîmes avec surprise que l'instrument continuoit à marcher au sec, jusqu'à 47"t7
(84° S. ). La températurede l'air étoit, pendant ce temps, de 12" à ïS". Quoique,
pour 1 hygromètre à baleine, te point de saturation dans l'air ne soit pas à ioo",
mais à 84°5 (99° S.), cet effet d'un nuage sur la marche de l'instrument me
parut des plus extraordinaires. La brume dura assez long-tempspour que la
bandelette de baleine, par son attraction ~our les molécules deau eût pu
s'alonger. Nos vétemens ne furent pas humectés. Un voyageur, exercé aux obser-
vations de ce genre, m'a assuré récemment avoir vu, à la Montagne Pelée de la
Martinique, un effet semblable de& nuages sur ~hygromètre à cheveu. Il est du
devoir du physicien de rapporter tous les phénomènes que la nature lui présente
surtout lorsqu'il n'a rien négligé pour éviter les erreurs d'observation. M. de Saussure
a vu une énorme ondée pendant laquelle son hygromètre, qui n'étoit pas mouillé
par la plnie, se soutint a presque comme à la Silla, dans le nuage ) à
84°,7 (48°,6 Deluc) mais on conçoit plus facilement comment l'air interposé
entre les goutter de pluie n'est pas parfaitement saturé, que l'on peut expliquer
comment des vapeursvésicutaires qui touchent immédiatement le corps hygros-
copique, ne font pas marcher ce corps vers l'huinidité. Qu'est-ce que cet état
d'une vapeur qui ne mouille pas et qui est visible à l'oeil? Il faut supposer, je
pense, qu'un air plus sec s'est mêlé à celui dans lequel le nuage s'est formé, et
que les vésicules de vapeur, dont le volume est de beaucoup moindre que
celui de l'air interposé, ne mouittotent pas la surface lisse de la, bandelette de
baleine. L'air transparent qui précède un nuage peut être plus humide quel-
quefois que le courant d'air qui nous arrive avec le nuage.

royez plus haut, Cbap. u, p- t~s, et Chap. Uf, p. 2~8.


~'cyez plus haut, Chap. t<r, p. a4y.
Il awroit été imprudent de rester plus long-temps dMsez~
épaisse,
au bord d'un Mécipice de <ept à
huit mille pieds de pM~deM* Nous
descendîmesle dôme otaentat de ta Sitta, et, nous récuetuîme~ en deMendant
une graminée qui forme non seuletnent un nouveau genM très-remarqai!u)te,
mais que, à notre plus grand étontïément; nous avons retrouvée dans !a suite
sur le sommet du volcan de Kchincha, dans l'hémisphère austral, à ~oo lieues
de distance de ta §itt& '.Le Lichen nondu~, si commun dans le nord de
l'Europe, couvroit les branches du Befaria et de la Gauttheria odorata; il
descendoit jusqu'à la racine de ces arbustes. En examinant les mousses qui
tapissent le rocher de gneiss dans le vallon, entre tes deux pics, je fus surpris
de trouver de véritables galets, des &agmens de q~arz arrondis On conçoit
que la vallée de Caracas a pu être anciennement un lac intérieur, avant que
le Rio Guayre se fut fraye un chemin à t'est, près de Caurimare, au pied de la
eoHine d'Auyamas, et avant que le ravin de Tipe s'ouvrit à l'ouest vers Catia
et le cap Blanc; mais comment imaginer que les eaux aient pu monter jusqu'au
pic dé la SiHa, lorsque les montagnes opposées à ce pic, celles d'Ocumare,
sont beaucoup trop basses pour empêcher un déversement dans les Llanos ? Les
galets n'ont pu~t~e amenés par des torrens de quelques points plus élevés,
puisqu'aucune hauteur ae domine la Silla. Faut-il admettre qu'its ont été soulevés
comme toute la chaîne de mentagnes <pn borde le littoral-?
Il étoit quatre heures et demie du soir lorsque nous eûmes fini Tïos obser-
vations. Satisfaits de l'heureux succès de notre voyage, nous oubliâmes qu'il
pouvoit être dangereux de descendre dans l'obscurité sur des pentes escarpées,
couvertes d'uri gazon ras et glissant. La brume nous déroboit la vue de ta vallée;
mais nous distinguâmes la double colline de la Puerta, qui paroissoit, comme
font toujours les objets placés presque perpendiculairement au-dessous de nous,
dans une proximité extraordinaire. Nous abandonnâmes le projet de passer la
nuit entre les deux pitons de la Silla; et, après avoir retrouvé le sentier que
nous nous étions frayé en montant à travers le bois touffu dHeticonia, nous
parvînmes au .P<yHaZ, qui est ta région des arbustes odoriférans et résineux.
La beauté des Befaria, leurs branches couvertes de grandes fleurs pourprées,

Vers le nord-ouest, !eB pentee paroissept plus accessibles. On m'a même parlé d'an sentier d&con-
trebamdterqai conduit à Caravalledaentre les deux pics de la Silla. Du pic oriental j'ai relevé le pic
occidental S. 64*'4o'0.j et des maisonsqu'on m'a dit appartenira CaravaHedaN. SS'ao'O.
~gopogancencAroK&t.Voyez nos Nov. Genera ~ec., Totn. I, p. )3a, Tab.XUt. 1.
A ces galets se trouvoient métes à ttyo toises de haoteor, des fragmens de mine brune de cuivre.
attiroient de nouveau toute notre attention. Lorsque dans ces climats on recueitte
des plantes pour faire des herbiers, on est d'autant plus difRcite sur te choix,
que le luxe de la végétatibh est plus grand. On rejette tes branches qu'on vient
de couper, parce qu'elles paroissent moins belles que les branches qu'on n'a
pu atteindre. Surchargé de plantes en quittant te bocage, on semble regretter
encore dt ne pas avoir fait une ptusriche moisson. Nous nous arrêtâmes si
long-temps dans te P~t~, que la nuit nous surprit à notre entrée dans la
savane, à plus de goo toises de hauteur.
Comme, entre les tropiques, le crépuscule est presque nut/ on passe subite-
ment de la plus grande clarté du jour dans les ténèbres. La lune étoit sur
l'horizon; son disque étoit couvert de temps en temps par de gros nuages que
chassoit un vent froid et impétueux. Les pentes rapides, revêtues d'herbes jaunes
et sèches, tantôt paroissoient dans t'ombre; tantôt, subitement éclairées, ettet
ressembloient à des précipices dont l'œit mesuroit la profondeur. Nous mar-
châmes en longue file; on tâchoit de s'aider des mains pour ne pas rouler en
tombant. Les guides qui portoient nos instrumens nous abandonaoient peu à
peu~pour coucher dans la montagne. Parmi ceux qui étoient restés, j'admirois
l'adresse-d'un nègre congo, qui portoit sursa tête une grande boussole d'incli-
naison il la tenoit constamment en équilibre, malgré l'extrême déclivité des
rochers. La brume avoit disparu peu à peu dans le fond de la vat)ée. Les lumières
éparses que nous vîmes au-dessous de nous causèrent une double illusion. Les
escarpemens semMoient encore plus dangereux qu'ils ne sont; et, pendant
six heures de descente continuelle, nous nous crûmes également près des fermes
placées au pied de !a Silla. Nous entendimes très-distinctement la voix des
hommes et les ~ons aigus des guitares. En général, le son se propage si bien de
bas en haut que, dans, un ballon aérostatique, à 3ooo toises de hauteur,
on
entend quelquefois l'aboiement des chiens.
Nous n'arrivâmes qu'à to heures du soir au fond de la vattée, harassés de
fatigue et de soif. Nous avions marché presque sans interruption pendant
15 heures; la plante de nos pieds étoit déchirée par les aspérités d'un sol pierreux
et par le chaume dur et sec des graminées. M avoit fallu quitter
nos bottes, dont
les semelles étoient devenues trop glissantes. Sur des pentes qui, dépourvues
de broussailles ou d'herbes ligneuses, ne peuvent onrir aucun appui
aux mains,
diminue le danger de la descente en marchant pieds
on nus. Pour raccourcir

M. Gay-Lussac, dans son ascension du t6 septembre )8o5.


<

B..
le chemin, on nous conduisit de !a Puerta de la Silla à la ferme de Gallegos, par
un sentier qui m~ne à un réservoir d'eau, el tanque. On manqua le sentier, et
cette dernière descente, la plus rapide de toutes, nous rapprocha du ravin de
Chacaito. Le bruit des cascades donna à cette scène nocturne un caractère grand
et sauvage.
Nous passâmes la nuit au pied de la Silla; nos amis de Caracas avoient pu
nous distinguer, par des lunettes, sur le sommet du pic oriental. On s'intéressoit
au récit de nos fatigues, mais on étoit peu content d'une mesure qui ne donne
pas même à la Silla l'élévation de la plus haute cime des Pyrénées Comment
blâmer cet intérêt national qui s'attache aux monumens de la nature, là où les
monumens de l'art ne sont rien ? Comment s'étonner que tes habitans de Quito
et de Riobamba, qui s'enorgueillissent depuis des siècles de la hauteur du Chim-
borazo, se défient de ces mesures qui élèvent les montagnes de l'Himalaya, dans
l'Inde, au-dessus de tous les colosses des Cordillères?
Pendant le voyage à la Silla, que je viens de décrire, et pendant toutes nos
excursions dans la vallée de Caracas, nous tûmes très-attentifs aux filons et aux
indices de mines qu'offrent les montagnes de gneiss. Comme aucun travail régulier
n'a été suivi, il faut se contenter d'examiner les crevasses, les ravins et les
éboulemens causés par les torrens dans la saison des pluies. La roche de gneiss
faisant passage quelquefois à un granite de nouvelle formation, quelquefois au
schiste micacé, appartient, en Allemagne, aux roches les plus métallifères; mais
dans le Nouveau-Continent, le gneiss ne s'est pas montré jusqu'ici comme très-
riche en minerais dignes d'exploitation. Les mines les plus célèbres du Mexique
et du Pérou se trouvent dans les schistes primitifs et de transition, dans les
porphyres trapéens, le grauwakke et la pierre calcaire alpine 3. Sur plusieurs
points de la vallée de Caracas, le gneiss présente un peu d'or disséminé dans de
petits filons de quarz, de l'argent sulfuré, du cuivre azuré et de la galène; mais il
reste douteux si ces différens gîtes métallifères ne sont pas trop pauvres pour
mériter des essais d'exploitation. Ces essais ont été faits, dès la conquête de cette
province, vers le milieu du i6." siècle.
Depuis le promontoire de Paria jusqu'au-delà du cap la Vela, les navigateurs
avoient trouvé parmi les habitans du littoral des ornemens d'or, et de l'or en

On croyoit anciennement que la hauteur de la Silla de Caracas différoit à peine de celle du Pic de
Ténêrinë. Laet. -~mfr/fa' deser. t633, p. 682.
Surtout à de grandes hauteurs.
JVbttf..E~)., Tom. H, p. 494.
poudre. On pénétra dans l'intérieur des terres pour découvrir les lieux d'o~ venoit
ce métal précieux; et, quoique les renseignemens que l'on
avoit pris dMs !a
province de Coro, aux Marchés de Curiana et de Cauchieto indiquassent assez
clairement qu'une véritable richesse en minerais ne se trou voit qu'à l'ouest et
au sud-ouest de Coro, c'est-à-diredans les montagnes qui avoisinent celle de la
Nouvelle-Grenade,toute la province de Caracas n'en fut pas explorée avec moins
de zèle. Un gouverneur, récemment arrivé sur ces côtes, ne pouvoit se faire
valoir à la cour qu'en vantant les mines de sa province, et, pour ôter à la
cupidité ce qu'elle a d'ignoble et de repoussant, on justifioit la soif de For par
l'emploi qu'on feignoit de donner à des richesses acquises par la fraude et la
violence.L'or, dit Christophe Colomb*, dans sa dernière lettre au roi Ferdinand,
l'or est une chose d'autant plus nécessaire à Votre Majesté, que, pour accomplir
une ancienne prédiction, Jérusalem doit être reconstruit par un prince de la
monarchie espagnole. L'or est le plus excellent des métaux. Que deviennent ces
pierres précieusesqu'on cherche aux extrémités de la terre? On les vend, et
l'on finit par les convertir en or. Avec de l'or~on seulement on fait tout ce
que l'on veut dans ce monde on peut encore l'employer à tirer des âmes du
purgatoire et à peupler le paradis. Ces mots, d'une candeur si naïve, portent
l'empreinte du siècle où vivoit Colomb, mais on est surpris de voir l'éloge le
plus pompeux des richesses sortir de la plume d'un homme dont toute la vie a
été marquée par un noble désintéressement.
Comme la conquête de la province de Venezuela a commencé par son extrémité
occidentale, ce sont les montagnes voisines de Coro, de Tocuyo et de Barqui-
simeto, qui ont attiré les premières l'attention des conquistadores. Ces montagnes
réunissent les ~'oEdIHères de la Nouvelle Grenade (celles de Santa-Fe, de
Pamplona, de la Grita et de Merida), à la, chaîne cotiere de Caracas. C'est
un
terrain d'autant plus Intéressant jpour le géognoste, qu'aucune carte n'a fait

~<r. Martyr, Ocean. D<c.~jM. ~/77,p. 90.9t. C~n~M, p. 63-84. fn~ ~«~ -S~M j'Ve<. J'7,
'Ch~. n. 3, p. 55. Herrera, PM. ~&. IY, Oy. r (Tom. t,p..06). Les Eap~n.h.tMt.~reat,
en t5oo, dans le pays de Curiana (aujourd'hui Coro). de petits OMeam des grenonincs et d'antres orne-
mens d'or massif. Ceux qui savoientfondre ces 6gt)re< vivoient à Caucbieto, lieu plus rapprochédu Rio ta
Hacha. J'ai Ytt desornemeM semblables ce)m que décrit Kerre Martyr d'Angbiera,et qui
annoncent
des orfévres assez habiles parmi tes onïrages des anciens habitons de Candinamarca.
La même industrie
paroît avoir régné sur les cotes et plus au sud, dans les montagnes dé la Nouvelle-Grenade.
Lettera rarissima data M~ 7~M n~a isola di Jamaira 7~~ <M t5o3. (B<!Mano, t8to), 9o-3t.
« Lo oro ë metallo sopra gli altri excellentissimo
<, p.
e dell' oro si fanno H tesor: e cbi lo tiene fa c opera
quanto vuole nel mondo, e Cimente aggionge a mandare le anime at Paradiso.
»
connoitre jusqu'ici les ramifications de montagnes qu'envoient vers le nord-est
tes Paramos de~iquitao et de las Rosas, les derniers de ceux dont la hauteur
atteint ï6oo toises. EntreTocuyo,AraureetBarquisimeto,6'élè~< le groupe
des montagnes de l'Altar. Il se lie vers le sud-ouest, au Paramo de t~s Rosas.
Un rameau de l'Atlarse prolonge au nord-est par San Felipe el Fuerte~en se
réunissant aux montagnes granitiquesdu Uttoral, près de Porto-CabeUo. ï~'autre»
rameau se porte, vers l'est, à Nirgua et le Tinàco, pour se joindre à la c&a~M <<c
l'intérieur,a celle de Yusma, Villa de Cura et Sabana d'Ocamare: Tout ce terrain
que nous venons de décrire sépare les eaux qui vont à l'Orénoque de celles qui
coulent dans l'immense lac de Maracaybo et dans la mer des Antilles.. M offre
des climats plus tempérés que chauds, et on- le regarde dans le pays, malgré
l'éloignement de plus de cent lieues, comme un prolongement des terrains
métallifères de Pamplona. C'est dansée groupe de montagnes occidentales de
Venezuela que les Espagnols, dès l'année t55r, travaillèrent la mine d'or de
Buria qui donna lieu à la fondation de la ville de Barquisimeto 2; mais ces
travaux, comme plusieurs autres mines ouvertes successivement furent bientôt
abandonnés. Ici, comme dans toutes les montagnes de Venezuela, les g~es de
minerais ont été trouvés très-inconstans dans leur rapport. Les filons se divisent
et s'étranglent souvent les métaux ne paroissent que par rognons, et offrent
les apparences les plus trompeuses. Cependant ce n'est que dans ce même
groupe de montagnes de San Felipe et dé Barquisimeto qu'on a continué jusqu'à
nos temps le travail des mines. Celles d'Aroâ.prës de San Felipe el Fuerte,
situées au centre d'un pays extrêmement âévreux, sont les seules que l'on
exploite dans toute la capitainerie générale de Caracas. Elles donnent une petite
quantité de cuivre, et nous en parlerons plus tard après. avoir parcouru les
belles vallées d'Aragua et les bords du lac de Valence.
Après les exploitations de Buria, près de Barquisimeto, ce sont celles de la
vallée de Caracas et des montagnes voisines de la capitale qui sont les plus
anciennes. Francisco Faxardo et sa femme Isabelle, de la nation des Guaiqueries,
tous deux fondateurs de la ville du Collado visitoient souvent le plateau où
se trouve située aujourd'hui la capitale de Venezuela. Ils avoient donné à ce
plateau le nom de j~Re de San Z~ancMco, et, ayant vu des pépites d'or entre

.Be<t~de Jtf<n<M d~ &M Felipe de Barm.


° ~V~efa Segovia.
CM-avatMa.
les mains des. indigènes, Faxardo parvint, dès tannée
découvrir
ï56o, à les
mines de los Tc~Me~ au sud-ouest de Caracas, près du groupe des montagnes
de la Cocuiza, qui sépare les vallées de Caracas et d'Àragua. On croit que, dans
la première de ces vallées, près de, Baruta (au sud-du village du ~<a!~c), tes
indigènes avoient même fait quelques excavations sur des filons de quarz aurifères,
et que, lors du premier établissement des Espagnols et lors de la fondation de ta
ville de Caracas, ils avoient rempli d'eau les puits dcjà~reusés. Il est impossible
aujourd'hui de vérifier ce fait; mais il est certain que, long temps avant la
conquête, des grains d'or étoient, je ne dis pas généralement, mais entre de
certains peuples de la Terre-Ferme, un moyen d'échange On donnoit de l'or
pour se procurer des perles, et il ne parott guère sarprenant qu'après avoir
ramassé long-temps des grains d'or dans les ruisseaux, des peuples qui avoient
des demeures stables, et qui s'adonnoient à l'agriculture, eussent tenté de
suivre des filons aurifères dans leurs auleUremens. Les mines, de/o~7e~uc~
ne'purent être paisiblement travaiHées qu'après la défaite du Cacique Guaycay-
puro, fameux chef des Indiens Tèques, qui~tisputa~~Uong-temps aux Espagnols
la possession de la'province de Venezuela.
H nous reste à nommer un troisième point
sur lequel l'attention des Conquis-
tadores fut appelée, par des indices de mines, dès ta fin du t6.*8ièc!e. En
suivant la vallée de Caracas vers l'est, au-delà de Caurimare, dans le chemin de
Caucagua, on parvient à un terrain montagneux et boisé, où l'on fait aujourd'hui
beaucoup de charbon, et qui portoit jadis le
nom de la province de los Mariches.
Dans ces montagnes orientales de Venezuela, le gneiss passé à t'état d'un schiste
talqueux. Il renferme, comme dans le Satzbourg, des filons de
quarz aurifères.
Les travaux qu'on a commencés très-anciennement
sur ces filons ont été souvent
abandonnes et repris.
Pendant plus de cent ans, les mines de Caracas restèrent dans l'oubli mais
dans les temps les plus rapprochés de
nous, vers la fin du dernier siècte, un
intendant de Venezuela, don Jose Avalo, se livra de nouveau à toutes les
illusions qui avoient ûatté la cupidité des Cbn~MMM~M. Il s'imagina
que les

Treize années plus tard, en 1~3, Gabriel de Avila, un dès alcades de la nouvelle ville de Caracas,
reprit le travail de ces mines qu'on appela des-toM le ~0~ ~no< Nuestra &noro. Peut-être çe
même Avila, à cause de qnetqu.s fermes qu'il possédoit dans tes
montagnes voisines de la Guayra et de
Caracas, a-t-il fait donner à la Cun.bre le ~a.
nom de Montafia de
app).q..é à la Shta et à toute la chaîne qui s'étend
Ce nom dans la suite, a été faussement
le
vers cap Codera. Oviedo p. 998 et 3a4.
Pe<rM< Martyr, p. 9).
montagnes voisines de la capitale renfermoient de grandes richesses métalliques.
Comme à cette époque un jeune vice-roi de la Nouvelle-Espagne, le comte de
Galvez, visita les côtes de la Terre-Ferme pour en examiner les fortifications et
rétat de défense, l'intendant pria le vice-roi de lui envoyer -quelques mineurs
mexicains. Le choix ne fut pas heureux. Ceux qu'on employa ne eonnoîssoient
de l'or, et de l'argent. Les deux
aucune roche; tout, jusqu'au mica, leur parut
chefs 1 de ces mineurs mexicains avolent chacun i5,ooo francs de traitement.
H n'étoit pas de leur intérêt de décourager un gouvernement qui ne s'effrayoit
d'aucune dépense propre à accélérer l'exploitauon. Les travaux furent dirigés
sur te ravin de Tipe, et sur les anciennes mines de Baruta au sud de Caracas, où
les Indiens recuèilloient, encore de mon temps, un peu d'or de lavage. Le zèle
de l'administrationse ralentit bientôt et, après avoir fait beaucoup de dépenses
inutileson abandonna entièrement l'entreprise des mines de Caracas. On avoit
trouvé des pyrites aurifères, de l'argent sulfurée et un peu d'or natif, mais ce
n'étoient que de foibles indices; et, dans un pays où la main d'œuvre est extrê-
mement chère, il n'y avoit pas d'intérêt à suivre des exploitations de si peu de
rapport.
Nous avons visité le ravin de Tipe, situé dans la partie de la vallée qui s'ouvre
vers le cap Blanc. On passe, en sortant de Caracas, près de la grande caserne de
San Carlos, par un terrain aride et rocailleux. A peine y trouve-t-on quelques
pieds d'Argemonc mexicana. Le gneiss vient partout au jour on se croiroit sur
le plateau de Freiberg. On traverse d'abord le petit ruisseau de ~~H<ï Salud,
eau limpide qui na aucun goût minéral, et puis le Rio Caraguata On est
dominé à droite par le Cerro de Avila et la Cumbre, à gauche par la montagne
de ~gu<M 2V~ra~. Ce défilé oSre beaucoup d'intérêt sous le rapport géologique;
c'est le point où la vattée de Caracas communique par les vallées de Tacagua et
de Tipe avec le littoral, près de Catia. Une arête de rocher, dont le sommet
est étcvé de 4o toises au-dessus du fond de la vallée de Caracas, et de plus de
3oo toises au-dessus de la vallée de Tacagua, divise les eaux qui coûtent vers le
Rio Guayre et vers le cap Blanc.' Sur ce point de partage, à t'entrée de la brèche,
la vue est très-ag) é.tbte. On change de climat à mesure qu'on descend vers Fouest.
Dans la vallée de Tacagua, nous trouvâmes de nouvelles habitations, des conucos
de maïs et de bananiers. Une plantation très-étendue de Tuna ou Cactus donne

Pedro Mendana et Antonio Henriqnez.


Gneiss, hor. t2, incL 70° à l'ouest.
à ce pays aride un caractère particulier. Les cierges ont jusqu'à ï 5 pieds de
hauteur et s'élèvent en candélabres, comme les euphorbes d'Afrique. On les
cultive pour en vendre les fruits rafraichissans au marché de Caracas. C'est la
variété dépourvue d épines qu'on appelle assez bizarrement, dans les colonies,
Tuna.de'E,spa-na. Nous mesurâmes, dans le même endroit, des Magueys ou
~gwe, dont la hampe chargée de fleurs avoit jusqu'à 44 pieds d'élévation.
Quelque commune que soit aujourd'hui cette plante partout dans le midi de
l'Europe, un homme, né sotts un climat septentrional, ne se lasse pas d'admirer
le luxe de la végétation, le 'développement rapide d'une liliacée qui renferme à
la fois une sève sucrée et des sucs astringens et caustiques employés dans la
guérison des plaies pour brûler les chairs.
Nous trouvâmesdans là valléede Tipe l'aSIeurement de plusieurs filons de quarz.
Ils renfermentdespyrites, duferspathique, des traces d'argent sulfuré (g~~crt;)',
Cit du cuivre gris ou fahlerz. Les travaux commencés, soit pour extraire le minerai,
soit pour reconno~tre la nature de son g!te, paroissoienttrès-superficiels.Des ébou-
lemensavoient comblé les excavations, et nous ne pumesjugerpar nous-mêmesde la
richesse décès filons. Malgré les dépenses faites sous l'intendancede don Jose Avalo,
la grande question si la province de Venezuela possède des' mines dignes d'être
exploitées, paroH. encore indécise. Quoique,dansdes pays où l'on manque de bras, la
culture du sol demande indubitablementla première sollicitude du gouvernement,
l'exemple de la Nouvelle-Espagne prouve cependant assez que l'exploitation des
métaux ne nuit pas toujours aux progrès de l'Industrie agricole. Les champs
mexicains les mieux cultivés, ceux qui rappellent aux voyageurs les plus belles
campagnes de la France et de l'Allemagne méridionale,s'étendent de Silao vers la
Villa de Leon ils avoisinent les mines de Guanaxuato, qui, à elles seules,
pro-
duisent la sixième partie de tout l'argent du Nouveau-Monde.
NOTES DU LIVRE tV.

Note À.

La6ndei'éc)!psede soteitjm 98 octobre tygg~Chap.x, p. 5to) m'a <t&rtmt phénomène tres-


remarqnaMe.Je vais le décrire teigne je le trouve marqué sur mon journal astronomique. <t En regardant
avec la grande !onette de DoMend bien CMment (a~ 4~ S8' da chronomètre) la partie obsoarcie da
disque dn soleil je vis parettre et disparaitre tttemtttvememttrois & quatre points lumineux semblables
à des étoitet 4e la CMtt(aieme grandeur. J'attribue pendant quelquestMtMH ce phénomène t t'etptoBton des
Te!e*Bt 4e h hme dont Hertcbet t<httett'etmtBnee, et que Don Antonio CNM regardMt comme des tron<
qui tm~ertent !t ~)Mtete. Qnet fat mon étonnement, husque, ven la fin de fedipse, t 5* 3/' dn ébrono-
mètre, ~'xpercat ~MOL points ImnmeM <e<nhhhtM hon de disque, étoi~Bétdo bord de t9 om t5 minutes
en arc, du eM qui ~'avoit point été éetiptê. La fin de Pedipte étoit S'* 4S'3y" do chronomètre.
tjetdenx points !mnment ne punirent ~t')M<e <ettte~!M<b Bt~voient Fintem!té <!e hnaere d'âne éte!te de
la troisième grandeur. Je ne ptm pM me rendre raison de ce phénomène. Ma Tue m'éteit pas dn toat
fatiguée. B
Lonville rapporte (J~m. de <fe< t~tS p. 96) avoir vu à Londres, pendant l'éclipse totale de
soleil du 3 mai ty t5, « des fulminations ou vibrations inttantanéee de rayons lumineux. Ils pareM*oient,
pendant t'ODfennté totale, sur la superficiede la tune en sorte que t'en auroit cru voir des tr!<!mee< de
poudre enflammées. Comme la lune est très-montagneose,il n'est pas extraordinaire que les orageBy
n

)~
soient tres-frequem. B Dans le phénomène que j'ai obserTé, il eut ancnne fntgnratton, aucune
apparence de traineeo de lumière. C'étotent des pointa Inmtnem d'une lumière tranquille, et qui dis-
parOMBoient après avoir hrit!ét 6 ou 8 secondes. Ils n'étoient pas rougeâtres comme celui qtt'BHoa a cru
être t'e&t d'une excavation dans la lune. (~'At<. T~ntM., t~~a, p. it6. Jtf~tt. de B<rNn, ty88, p. 9e4. )
A quoi attribuer ces apparences lumineusesobservées à diBerentes époques sar le disque hma!re pendant
une éctipse de soleil? Les points que j'ai Tus en dehors du disquesolaire ne ponToient être dus'à la même
iUnsion d'optique qni a fait voir le satellite de Vénus. Dansée dernier on a cru voir des phases.

Note B.

Je rapporterai ici l'explication ingénieuse et satisfaisante que M. Arago a donnée du phénomènede la


scintillation, et qui n'a point encore été pmMiée. Ve!c!hnoteqne ce savant a bien vontu rédigerama prière
« Les physiciens et les astronomes
qui se font occupés de'la seintiHation des étoites, ont fait, pour la
plupart, abstraction de la circonstance pent-étre la ptns remarqnaMe de ce phénomène, je veux parler de
ces changement brusques et fréqmens de couleur dont il est toujours accompagné. Les progrès que la
théorie pbysiquede la lumière a faits depuisquelquesannées, nous permettront,ce mesemhie, de rattacher
l'explication de ce fait curieux à )a loi des interférences dont on doit la découverte au docteur Toung
D'aprèstes expériences dececél&bre physicien,deux rayons de lumière homogène,et qui parviennent
légèrement inégates, s'a~oufentou se détruisent suivant
en un mêmp point de l'espace par deux routes
telte autre valeur. Les différences qui conviennent Ma
que la différence <es chemins parcourus a telle ou
neutralisation des rayons de diverses nuances sont assez sensiblementinégales, pour que le résultat de
l'interférence ou du mélange de deux faisceaux blancs soit toujours accompagné d'une coloration
sensible; l'expérience a prouvé *de plM(~<~ez Annales de .chimie et de physique, Tom.ï,p. tog)
qu'il ne suffit pas, en recherchant la place ou deut faisceant peuvent s'inNuencer, de tenir compte de la
dif~rence des chemins parcourus, mais qu'il est de'plus nécessaire d'avoir égard à l'inégale réfringence
des milieux qu'ils ont traversés. Cela posé, il est facile de démontrer que les rayons qui, en partant
d'un même point, viennent se réunir au foyer d'une lentille peu étendue, vibrent,d'accord ou s'ajoutent
s'ils ont tous traversé des milieux de même dentité ou d'une égale réfringence; le même raisonnement
montrera, au contraire,qu'une inégalité de réfringence pourra, suivant qu'on la supposera plus ou moins
grande, donner naissance, dans le même foyer, ata neutralisation de telle ou telle autre classe de
rayons ooiorés En appliquant ces considérations à la scintillation des étoiles, on trouvera que si tous les.
rayons qui parviennent aux différentesparties de la pupille, traveDienf Constammentdes couches atmos-
phériques de mema-densité, l'image de l'astre aura toujours la même intensité et la même teinte; tandis
que, dans le eas;contraire, elle pourra changer du nuance et d'éclat à chaque instant. Pour un astt'c
au zénith, tes chances de scintillation seront beaucoup moindres, sous teo mêmes circonstances,que
pour un astre peu élevé au-dessus de l'horizon~ Dans nos climats,elles seront moindres que sons les tropiques'
ou la chaleur est plus uniformémentdistribuée dans les coucher atmosphérique). ~Lcs changementd'intensité
se verrontplus facilementdans les étoHes de première grandeur, ou ils seront accompagnésd'un change-
ment de couleur plus prononcé que dans les étoiles foibles; dans les astres blancs, que dans ceux qui sont
naturellement colorés. Toutes ces circonstances,si je ne me trompe, sont conformes aux observations, a

Note C.

tl ne faut pas craindre qu'en employant le moyen que }'m indiqué (Chap. x, p. 5to) pour évaluer
l'intensité de la lumière des étoiles le changement d'inclinaison des miroirs mit une inffuence sensible sur
la quantité de huniere~rêBecnie. Cette inBuence est sans doute tres-considt'raMe lorsque la tnmiere est
réméeMe par un verre diaphane;, elle est presque nulle, quand les rayons sont renvoyés par
un miroir
étamé sur sa face intérieure. H en résulte que, pour comparer deux étoitetret pour égaliser teur lumière
on peut ramener dans le champ de la lunette des étoiles dont les distances angulaires sont très-grandes.
Voici les résultats de mon travail, en plaçant sur l'<M&-m~<r<f, les étoiles de la première grandeur entre
8o°–too", cem de la deuxième grandeur entre 60''–80°, ceux de la troisième grandeur entre 45°–60°
ceux de la quatrième grandeurentre 3o"–45°, cenx de la cinquième grandeur entre ao"_3o°

5ia..
<
Sirius loo".
Canopus g8°.
et Centaure 96°. y
Achernar 94°.
Centaure gS'
Fomahaalt 92°.

Voyez plua haut, Chap. x, p.


R!gel 90-
Procyott 88°.
BetcigeuM M".

aGrue
8t°.
sGrand Chien 83°.

8t°.
a Paon 78'
0Grue y5°.
jSGrandChien y3°.
? Lièvre 7*°.
«Toucan yo°.
~Lièvre yo°.
m Colombe 68°.
67-
«GrandChien 66'.
«Phcenit 65°.
y Grue 58°.
Grand Chien 5t°.
ettndien 5o°.
CGrandChien. 4?°.
it est plus difficile de déterminersi a Indien a la moitié de la lumière de Sirius, que de reconnoitre si
<tGrue est plus près de t'ectat de Sirius que decetn! de <t Indien. En comparant Beteigeuze et tt Paon à
a Grue, on trouve que Beteigeuze doit être placé entre a'Grue et Sirins, et a Paon entre a Grue et <t Indien.
Plus les limites deviennent étroitee, et plus il est aisé d'éviter les erreurs, surtout si l'on essaie de
parvenir au même résultat numérinne par des voies tres-diKérentes. On peut comparer, par exemple,
e Grue et Procyon, soit immédiatement, soit en égalisant, dans un instrumentde réSexion, les lumières de
Procyon et de Canopus, de Canopus et de <t Grue, soit enfin en comparantGrue et Procyon par l'intermède
de Rige) et de Sirius. Herschelfait snivre dans le Grand Chien ,e,9', o. Dans la Grue, il y a aujonr-,
d'hui beaucoup moins de différence entrée et qu'entremet~; quant à l'intensité relative de la lumière
de Sirius et de Canopus, les opinions des astronomes qui ont visité la zone équinoxiate, ont été singuliè-
rement partagées jusqu'à ce jour. J'ai cru avoir reconnu, par beaucoup de combinaisons, que Sirius est
plus brillant que Canopua, autant que Centaure est plus brillant qu'Achernar. J'espère reprendre ce
travail.

~<-D,
Voici t'extrait des observationssur le mirage,faites en 1799 et t800, pendant mon séjoura Cumana,telles
que je tes ai consignéesdans mon Journal astronomique. Je ne pouvois avoir atorsancune connoissance
de la théorie de M. Monge et des expénences de MM. Brandes WoUaMom et Tralles. Celles dn oétebre
physicienanglois ont été faites à la même époque que tes miennes. M. Vince s'étoit contenté de suivre
avec le tétescope tes phénomènes de suspension, sans déterminer la grandeur des images et la dépres-
sion de l'horizon de la mer. Ces déterminationsmanquoient aussi dans les travaux de b1. Buseh, à Hambourg
(7~ac<o<!M duo optici argumenti)', et de l'abbé Gruber ( Ueber &ra&n&MeA!<n~ und ~~n!<&<~ des
~.tcA<t, 1793.) Quoique, en t8oo, je n'eusse qu'une idée vague des diversescirconstances qui modifient le
n n
mirage, je ne négligeai pas de mesurer les anglesde dépression de l'horiMn,la ht~ur de l'intersticeentre
l'horizon et l'objet suspendu, la température du sable au dessus duquel paHtoient les rayons lumineux,
celles de l'air et de l'eau. J'examinai l'influence de ta forme des Nets sur leur saimeMionptns ou moins
complète, les cas où il y a suspension sans double image, enfin têt changemens que te lever on le coucher
du soleil produisent dans le jeu de cesréfractiomeMraordinaires. (J~c~M plus haut, CA<y. J~<< Jï/,p. ao6
et 533. )
<' Cumana,
lat. to'*a7'5a". Terrasse de la maison de don PM~tet Marttnez, que j'habite depuis mon
retour'du Rio Negro. J'y découvre tes mêmes objets que j'ai mestMea daM mon ancienne demeure plus
rapprochée du Rio Manzanares; je vois au sud tes~nontagnesdu Mgantin,le TataMqxatet toute la chaîne
de montagnes de la Nouvelle-Andalousie;au nord-ouest,le groupe d'îles situéesentre les ports de Cumana
et de Nueva Barcelona,tes Mes Caracas,Picuita et Boracha. Distance de ces !te< t0-t5 m'ttes. Quart de
cercle de Bird, à double division, soigneusementvériné par un niveau à Mte d'air et le fil à plomb.
L'instrument est placé sur un mur massif. Je me suis constamment servi de la division en g6° dont chaque
degré est égal à 56't5'\ Le vernier subdivise tes degrés en ta& parties. L'erreur de cotlimationtété
déterminée par la latitude du lieu et par tacomparaison avecnnsextamtde&tmttten< tEUeestS4o~ (div. sex.)
additivesaux distances zénithales. L'objectifde la lunettedu quart de cercle est ehivéde ta4 pieds 11 ponces
au-dessus du niveau de la mer. Pour être plus sur qu'aucun accident n'inNue Mf les angles de dépression
et de suspension, je prends chaque <oist'anglede hauteurd'une tour (~)qai, par <en élévation et sa proxi-
mité n'est pas susceptible d'être aBecté sensiblement par les changemens de ré&iactioM horizontales,
x
Le i." septembre t8oo, aa3*' t<
lespointes des ttes et dm c*p~ du ~nntit~~tvoisin Mfi~nt toutes
relevées, suspendues.Luhettede DoUond, grossissement de 65 fois. Therm. l'air et à l'ombre 99,"6 R.
Hygromètre 45,a Deluc. Cyanomètre ao°. (où tour servant pour la rectification de l'instrument)
94°3t'3". B, ou cap Est de t'tte Caracas 90° 5~25". C, ou le sommet de la petiteMePicuitanS~ou
95°56'3o". D, ou base de l':te Picuita gS°5M'a3". jE, ou la hauteur de Mie Bot-acha
dépression de l'horizon de la mer oS"
o5' F, ou
L'eau de la mer at°,4. Le sable des plages entre la ville et la
mer 3o°,8 R.
« Le 3 septembre, à )Q'- du matin. Th. 9t" R. Hygr. 43. Cyan. t4'.
A 9~
B nS" –~
C 05" -L °
D 9S°
~95°-A
F Q5°

a Le soir à 6** ciel couvert; il va pleuvoir. Air extrêmement transparent. Les lies paroissent tres-
rapprochees.Th.2t'yR.Hygr.4o"
D 95"
E 95 ou 95° 9~,5.
« Le 4 septembre à 5* couvert, air très-transparent. Th. ay.S. Hygt-.4t°,9; L'eau de la
surface 2i°,8. Sable blanc de la plage a8 ,5. Au lien de 'je
marque l'angte 6a,a.
mer a sa

A 94° 69~.
B 95° to4,5.
C 95° )tt;3.
D 95° tt6,?.
E 95° 9a,5.
F 95° n6.
e ToMtetMp*tMpe~M,m~bM~tt'tem'*q'w5& 6 tm'nn~M~eJ~gnenr.La Pienitaest
entièrementen l'air, s<t iongnettr itpp<~e<t~ ~tt'An<~noherdaMte~r*ttM!e pedon
la base de t'i)e et t'hori& de la merdtmtnne !t ~MMtreqne t'atmoeph%re~ohtcnMtt. Lpt'sqne le disque dn
soteH se cache derrière desnnagest~-M~eentMdetatienitarepo)esurt'h<~ tes
t
ettrémitésde l'île qui restent atots snspendaes. Le <!o!e~ repMott dans son éclat, qno'qne seulement 4° de
t
hauteur, et toute t'Me se re!eve:eHe e<t emtHte)meBt«wpe!)dtM!,ttnt Mn centre, qm forme <me petite
convexité qu'au deux ettt~mtt~. FM de double MMi~e, r!e~ <j~e <Mpemti<m, Apre< le coucher de ttoteit,
la Pioaitt reste encore en Mr. Je t'eMmineaTee h ~~de t~ttw de ~Uo~ il fait déjà obMttr qne d
j'ai de la peiaet HteïeMmbedm textàn~ t<MteoBMeBce<MHdMtte&<era&o!dir;t)M!*je vois toujours
dera~(aBespacetérien)entre~6r'~B~~pri<Be~etamereti<bMedet'Ne.)'»
« Le 5 septembre. Fendit Ïecr~p~ah dm ~in.9t',3.H~ Le disque du soleil n'est
point encore visible, et déjà tonte la Kcaitt paroît suspendueen l'air. CrépMetJe tres-foiMe.
A 94* 69.
B g5° to3,7.
C 950 tn,a.
D 95" tt5,9.
E95" 93.
F 95-' t~,7.
«A3''9pree-m:di.Th.9S*,aR.Hygr.36<De!nc.CyM.2a'.
B g50 to5,3.
C 95° t*a,7.
D 95° t'7,5.
E 95° 93.
F 95° u7<5.

< A6''(]uso!r,)esoteHm'aqM4°dehaut.Th.aa'8R.Bygr.36',5.
A 94' 6a,a.
B <)5° <o't,5.
C 95° ttt,3.
D 95* n6.
N95" 9~,7.
F 95° 116,3.

« Pendant le coucher du soleil, t'horiton est oscillant. La Picuita htiMe et n'est p)us:nspendne;la
dépremion de l'horMon, au moment même du coucher 95° n5,7~ et ~amtnutes plus tard, pendant le
créputcute 95°n4,7. Cou P!cu!ta95°na. Encore plus tard: C95°m,3. F95°n6,3. U n'y a pas
d'errenr dans cet observations;car le signal reste a la même hauteur, tandis qne l'horizon de la mer
éprouve des changmeussi brusques. D'antres jours j'ai vu tes Mots se reposer sur l'horizon un peu avant
le coucher du soleil. Ce coucher ne produit pas toujours les marnes changemens de température et de
rétractions terrestres. »
«Le at septembre. Depuis le 18, oiel constamment couvert. Le temps change dans la nuit du a3.
Grande transparence, les étoites extrêmement brillantes, mais point de scintillement, pas même à l'horizon.
Le a4, grande sécheresse.Hygr. a at** du matin 3a° Deluc ( 67° Saussure). Therm. at'5 R. Dépression
de l'horizon, la plus grande de toutes celles que )'aiob<erveM.Eau de la meraa' Le terrain aride de ta
plage 3a°,7. La Boracha toute en l'air. Le ciel tres-Nen. Cyan. a~. De petites harqnes de pecheuM
suspendues, nageanten l'air, 3 à 4 minutes au-dessus de l'horizon de la merqtti est <xtrêtoement tranché.
Une des barques, vue par la lunette, ogre nne image tenvcMée.
A 94° 6a.
Bg5"to6.
CQ5°u6,a.
ËoS" 93,a.
F 96° ta, donc de ~(près de 8') piM grande quête 4 septembre.
« La Picuita paroît souvent double et renversée, pendant le reste du jour. L'image renïfraée est de taf
même grandeur et hauteur que l'image directe la dernière est tonte suspendue;mais l'image renversée,
dont l'Intensité de lumière est assez foible, empiète sur l'horizon de la mer: elle couvre une partie de
dernières couches de l'Océan. A aa'* du matin, therm. a3°,5 R.; hygr. 3t°,S.
A g4° 62,3.
Ct)5° m.
F 96° o.
« A midi, la dépression de l'horizon encore 96' t. Calme plat.M
Le 25 et le a6 septembre, l'horizon éclatant delumière, oscillant trois à quatre fois dans l'espace d'une
heure. La dépression de l'horizon est tantôt o5° ] t8, tantôt 96'* 4 sans que tes instrumens météorologiques
changeut dans l'endroit où est ptacé le quart de cercle de Bifd~jLcs changemens ont sans doute lieu
dans tes couches d'air intermédiaires,dans !a températurede l'eau et du so) qui rayonnent de la chatenr.
Je crois voir que le phénomène d'un changement de dépression s'annonce par une variation de couleur.
Sans que la teinte azurée du ciel soit altérée, l'horizon de la mer se sépare en deux bandes. On voit
paro!tre une strie plus <bncée que te reste, tout ce qui est postérieur à cette strie ptMt peu à,peu, et finit
par disparoitre entièrement tont ce qui est antérieur a la strie, augmente de couleur. Mte de la Picuita
est déjà suspendue; son pied (sa limite inférieure) ne change pas; mais, à mesure que la strie de-
vient l'horizon, et que la partie de la mer située derrière la strie s'évanouit, la suspension apparente
[le l'île augmente. Elle semble s'étoigner de l'horizon', tandis que c'est plutôt l'horizon qui s'est éloigné
de l'ile. Avant la formation de la strie D. g5° !i6,3. F. 95° 11 g. Un quart d'heure plus tard, après que
la zone derrière la strie est devenue invisible, je trouve D. <)5° n6,3. F. 96° 4,8. Peu à peu la zone
antérieure qui forme l'horizon pâtit à son tour, la partie de la mer derrière la strie reparoit. On diroit
que cette dernière gagttë en couleur ce que t'autre perd. F. est~te nouveau 95° n8. D. reste invariable-
ment 95° 1 6,5. La partie qui a reparu prend nne teinte btéu foucé; la partie antérieure, au contraire
( celle qui formoit l'horizon, lorsque la dépression étoit 95° no), est toute blanche. J'ai observé cette
oscillation pendant plusieurs jours. Les variations de couleur sont tes pronostics d'un changement de
dépression. Ne doit-on pas admettre que tes rayons lumineux que nous envoiela partie la plus éloignée
de la mer, cette qui pâlit, sont Mtéchis de manière, pendant leur passage par les basses couches de
l'atmosphère, que, dans leur courbure convexe vers la surface du sol ils se confondent
avec tes rayons
de la couche antérieure de la mer. Nous ne jugeons que d'après la direction des rayons;
ces mêmes
rhyons inBéchis, qui nous arrivent des couches d'eau les plus étoignées,
nous semblent dès tors appartenir
aM couches plus rapprochées. C'est cette circonstance qui cause t'apparence des stries, et qui augmente
cette intensitéde couleur ou d'éclat qu'on remarque dans le nouvel hortzon.
« Tous ces phénomènes s'observent aussi dans tes steppes arides de Caracas et sur tes bords de
t'Orénoque, là où le fleuve est bordé par des terrains sablonneux. Nous avons vu fréquemment
le mirage cette année (en t8oo), entre Catabozo et San Fernando ~e Apure, et & l'Orénonue,
nord de la mission de l'Encaramada. Les monticules de San Juan et d'Ortiz, la chaîne appelée teGatera au
paroissentsuspendues, lorsqu'on les voit du coté des steppes, a 3 ou 4 lieues de d:stance. Le sable, a midi'
étoit éehauBe (au so)eH) jusque ta température de 4a'&éaomur. A t8 pouces d'étevation an-dessusdu
M); le thermomètre montra, dans t'a!r,'3a' R. A 6 pieds; it s'éteva (a t'ombre) & 99'$ R. Des palmiers,
isolés dans les Llanos, paroissent mtmqMM de p!ed on diroit qu'une eonche d'air les sépâre. du sol. Les
plaines, dënnéea de vëgétaaï, paroissent des mares ou des lacs. C'est l'iUoMOH M commune dans têt détertt
d'A&iqae. la Mesa de Pavones, au miHettdes tteppM deCaracM, nous avonevn.M. BonptaBdet moi,
deB vaches en t'aur. Distance' de tooo toises. Eu meMrMt avec le sextantla largeurde l'interstice aérien
nous troutàmet!es pieds de t'an!mat élevés au-deMMda sol de y 30' Simple suspension pasdedoeMe
image. On assure avoir vu, près de CataboM,des ehevaBOt suspendus et renverses,tansqu'iisprescn-
tossent une imagedirecte. t
Tout ce qui précède a été écrit à Cumana, vers la fin de l'année t8oo. Le dernier phénomène m'a été
rapporté par des personnes très-dignes de M.Hmeparo!tanaIogueacetui que décrit M. ~{inee, etq~e
M. Biot a très-heureusement expliqué dans ses ~!<eAe~eAe< Mfr r</r<!c<mM<ej[<ntoM/&!at~< ( <8to,
).
p. a~g, fig. 4o &« On a vu deux images de vaisseaux dont la supérieure étoit l'image renversée. Dans
l'ouvrage que je viens de citer, M. Biot a discuté une partie des mesures que j'avois faites pendant mou
séjour sous la zone torride. Voici la réduction des distances témtbates (ancienne division seMgésimatc )
pour tes jours oh la suspension a été la plus forte

DATEB BOXMET MMMEf BAMOOFtZD C~fUEBSION


dea de l'île dénie de dct'horizon
emBttt~TioSt. Boracha. Fimut*. la Picnit*. ~< )t mor.

a septembre à ag'' 89' M' 33" 90° 5~ a3" 90° ?' 5" 90° 7' 4e"
à 6'' 89 55 33 9°Sao go 6 ig
3 septembre à t9*' 89 55 3o 90 4 a3 9° 7 6 9° 7
à 895547 go ~~7
4 septembre à 5*4 89 55 46 9°~~ 9°S5a 9° 6 48
5 septembre, crépuscote. 89 56 o go 9° 6 44 9" 7
à 6b 89 56 o 9«436 go 6 48 90 65Î*
créptu.catednsotr. 9° 4 55 9° 6 io
plus tard.
a4 septembre a' 89 56 a 90436
90 6 48
90
90
65~
'7

En examinantles anglesde hauteur MM lesquels se présentent les sommets des Mes Boracha et Picuita, on
remarque que l'étendue des variationsdiminue avec la grandeurdes angles. Les oscillationsde l'horizon ont
été de 7' 57"; celles du sommet de la Picuita, de a' a5"; du sommet de la Boracha,deo' a~
La dépression
Traie de l'horizon devroit être, indépendamment de tonte réfraction, 5'ao"; je l'ai trouvée entre
6'to'~et t4~ t~Dans tous ces cas, la réfraction a été négative,c'est à-dire que tes trajectoires décrites par
les rayons lumineux ont été, au moins dans leur partie Intérieure, convetes ~ers la surface de t'ean. On
remarquera encore que la base apparente de l'ile Picuita ne s'est pas toujours trouvée au-dessus dé l'horizon
apparent de la mer. Elle est quelquefoisdescendue à la même hauteur, par exemple, le 5 septembre, au
coucher du soleil. Alors l'île a du paroitre reposer sur l'horizon. Quelquefois même la base de l'ile a paru
au-dessousde l'horizon apparent de la mer, comme le 4 septembre; alors la surface de la mer a été vue
un peu au deH de l'Me. «Pendant ces variations, tes trajectoires des rayons lumineux étoient convexesvers
la mer, au momsdansleur partie intérieure, comme la dépression de l'horizon le prouve mais le point
de tangence de la trajectoire limite sur la surface de la mer étoit plus ou moins éloigné de l'observateur, et
c'est ce qui produisoit les variétés observées dans la suspension des îles, qui se trouvoient tantôt au-delà
de cette limite, tantôt en-deea.N(BM<, Rech., p. at6,at7,a'9.)
L'inNMnce du lever et du coucher du seleti qui mani~Mte dan* tn~tab'e~atiQnss~r laptcwtt.
conSrme ce qui a été vu par LegentH pendant so<t séjour à fond'cMry. Ce oa~~t ~ya~nr a co~MtMMMmt
vu pendant l'hiver, l'horizon 4e la mer o'ahaimerde 36! ttrsqm ~e premietray<m de <cet.*stM c<!tnmenc«it
à paroUre. Le soleil se teva <<&MM de l'horizon apparentde !a Mer, comnM
p.ax~. Voyez aussi mon ~{<eMeMa!'o&Mn,.<M<r«n.,Tom.t, p. t~3.)
<
<~<ot<<j&«!A«ot, (J?M~,
`
J'ai fréquemment observé que tes deux caps de l'ile Bertcb~ étoient Mgatement Mtevé*. ï~ partie
suspendre avoit, au cap Nord, 5'de long; Au cap Sud, 4 peine Le premier de ces ctp* M);a)'de
l'Océan, tandis que le c&té sud est opposé au continent et rappro~é de t'He PiCtita qot Mywe de la
chaleur pendant le jour. e Lofsqne la mer est plus chaude dans ces parages que l'air, la d~Breneedes
températures extrêmes de t'eao et de l'air doit ~tre toujours moindre du cAt~smd que ducAtenerd.d'o!)
resnite unejnoindre réfraction négat!Te,etpa!rcopt)éqfentuneptwpettte tu<pension.N(BtO~,p.~38.)
J'avois été très-attentif, pendant le cours de mes observatmMde Comata, et dans d'autres observations
faites sur les côtes de la mer du Snd à Lima, à ri(t<Memee qu'eterce h &~«t<r de l'objet snr te phénomène
de la suspension. J'avois cru trouver, i.° que, dans de<!tes à sommet con~eM, !ece~tM de par
semM~btes, rHe repose
sur l'horiMn, tandis que extrémités sont relevées a. que de demt ttes & <brmM
tes exempte
à formes paraHétipMes,t'ela plus longue ne sera rehYée que vers tes bords, tandw tque ta plus courte
parottra toute en l'air. Les belles expénences faites sur le mirage par MM. Mot et Matbi~ont parfaitement
ec!airci les véritaMes causes de ces phénomènes. Lorsqu'une !te rocheuse n~ se présente pas comme
un mur coupé perpendiculairement aux deux extrémités, mais qu'elle s'éteve vers son centre, il n'y a que
la partie du ciel qui repose sur tes extrémités (les couches d'a!r qut s~përcotYënt comme plus rapprochées
de l'horizon), qui peuvent se mirer. La bande aérienne,le oietreBéohi,ne se verra pas au-dessous du centre
de t'!)e, là ou elle est le plus étevée. La même chose arrivera, si de deux objets de forme semblable t'un a
une beaucoup ptus grande dimension dans le sens latéral. « D'après la théorie des réfractions extraordi-
naires près de l'horizon, la surface caustique s'élève à mesure qu'elle s'éteigne. Les extrémitéslatérales
d'un objet étant plus étoignées de l'observateur que son centre,seroient donc coupées par la caustique à une
plus grande hauteur. Si Ktot est très-peu large, la différence sera insenstMe, et it paroitra tout entier élevé
dans le ciel, a neu près également. Mais si l'on observe une île assez grande, dont les contours répon-
dront à des points beaucoup plus éloignés que le milieu, la diBerence de hauteur de la caustique à ces
<Uvers étoignemens pourra devenir sensible, et les extrémités latérales de t'ue paroih'ont seules relevées.
Si peu à peu les dinërenees de température augmentent, et que le point de tangence de la trajectoire
limite se rapproche de l'observateur,ou, ce qui revient au même si l'observateur s'abaisse la trajectoire
limite pourra s'élever au-dessus du sommet de t'tte qui sera alors entièrement suspendue
en l'air. i<
( Biot, p. 2t2.) C'est ainsi que, je trouve marqué sur mon journal te 7 septembre,
sur la plage près de
l'embouchure du Rio ManMnares,aupieddu~<M~<&la boca, therm. 'g'R.; bygrom.M'a.Haut.
de 1'ceB 4 pieds 3 pouces. A 19'' du matin, au quart de cercle que j'avais transporté bord de la
au mer,
C. 9$° g s,3. Le corps de l'île repose sur l'horizon de la mer. Les extrémités seulessont relevées. Eau de la
mer près des cotes ao°,a R. A ath, therm. ao°,9 R. hygrom. 4a<C. 95"9t,8, mais;toute l'île suspendue,
le centre comme les extrémités. Eau de la mer, couvrant une plage
le sable 26° R.
que le soleil échauffe, a*6
Ce que nous venons de dire sur l'inauence dé la longueur et de la forme des objets
sur les phéno-
mènes de la suspension,me paroÎt conduire M'exptication d'en pamage curieux deThéophrMte, dans
son ouvragesur les pronosticsdes ~n«, « Quand les caps ( ou parties saillantesdes cotes), dit Tbéophraste,
semblent suspendus en l'air, on quand, au lieu d'une ile, en croit fOtfpAHM.t~, ce phénomèneindiquey
en
un changement du vent du sud. Quand la terre vous semble noire (lorsqu'elle se détache en brun), von~
aurez le vent du nord, vous parott-elle blanche (se détache-t-ette en clair) .attendez-vous au vent du sud..
Tlieophr. de signis ventoram. 4a.. A ~<. s
(Furlanus traduit si promontoria sublimia, instd~e
si una plure8 appareant, austr: mutationem indicant). Lorsqu'une île étoignée
est tres-inégatedans
~<M!)~r~~tM '~t~t~i~tnt-tt~ cüe'l'I~tzon et~ri~in i~"xr(naga ~t~üttrere~e dnciet-tormée
~t$-et.M.M'.aB''t~
~i&Ï~'St~h~
~a.t~~n~.j~tpat<t<a)~ae~~ra~~
la fai~é ~r'rnltré'coxanï~ ·lix~t ~t~' ~gée`eri plu-
iïnê màtsdpiicité~d'i~twg~yla~~ ~i4~a~âéesôus
Ariatôté, â~ leït ~a~~cdŸola~ili.
p. ~y~e..(~i6i~~
t~td~&a~HMh~~
Cap. M~ p. 5~7 G. (éidit. ~ttvaly;
Cep.
rr, ~fal~ssi m~ntiou $e'ïa euxptarion
won' des, des, e°t ~à c~r~t~dërë'ame

~ai'Mt~Htement'diitt~e' ~`canxa dr~ ~fnetùL~r~tït~nsanr le ·mirs~a ylee cse3irh~#.t~il


y àTOit't~M~'MM-P~ ~iwt ee.dlitÎ81esÍ¡Uelles a
eepbéi1ODÍ~ne.
qté t'im~ ~ôi~
dès iMmeMi<MM <; pe~te< <pt*<et!e
tien it ptonve (~e~
devient 4mpefcept!btë.
nostics (t'au
K
p. t6t )
QMnt<~t~&&)i~~
changemeM~è<~t~<P~*
tnetet<ptMt l'boriadn t~pM-

toujours sous l'a~eet de ~t!tMemM~'<W ~pat&t par des imMrMtUe< ~M~M. (Nt0<, p. t0, t83 t5t,
et a6S. ) Je n'at ~BM!t<<Met~CM i''tMT'HM que &<mM t'a!r «SiMeM j'&: mMpbwiemt V)t q<i*an pand a

eh<hgemBntdea<p<~aa~tp~~é~ta~n~t~n~t~ n~Yel horizon alloit se placer.


yai prouvé p!m<t<M (Ch<p. nt, p, a34) que, prêt <!e l'&pM)M«t~ ta <M&~ <[)e WeêaM est presque
hththtètteKMmt de d~
~& t*,5p!Mch«w4eq)tei'aîre)mbiMt.Cette ~Œ~ence temp~toM est taBMm-
ment gmnde pour pouvoir ~tre <regM'<Mecomme nne cause de Bt!rage. Snr te< bords de t'B!be, M. Watt
mann a oh~et~é qu'il y aT«!t double image, ~~<npte tMpenMtM*, lorsque la temperatore de t'eac étoit
de de<m degrés AtthenHMnètM de Fahrenheit (a',a eettt ) plu ete'rê«q<'ecelle de t'air. ït ne tant donc
pas t'etmmef que le nnrage ~it M commun entre ïeOtMpiqMt, tOMqme ïe$ TayoM nont tnwent en rasant
la tmr&ce de la mer. ( Bifandet,dant ie< ~ntM&M<& Ct&<f<jt T<Mn. X~Cn, p. 17~.)
Eu sanscrit, le phénomène dll mimge porte le nom de tn~<t-<f<pAn4,soîf ou <MMr<& <ntt&)pe, Mns
doute parce que cet animal ( <nttgN), pressépar la soif ( ~tc&t<t ), s'appnxihe de ce~ tiem arides o&, par
t'eBot de t'inBe<ion des rayons,il croit voir ta tortace ondoyante des eanx.

~VoteE.

Les températures m<yeH<tM de l'année indiquent tes températm'es qu'auroient tes diverstienx de la terre
siiesquantitésinégatesdechate)tr,quisedévetoppenten différentes saisons et &dMBrentesbeuresdu{our
et de la nuit, étoient uniformément- répandues dans l'espace d'une année. Depuis les dernières recherches
qn'oo a faites sur la chaleur de l'intérieur de !a terre à dimerBnteslatitudes et à dNettntet hauteurs, on ne
peut pins regarder comme identiques, dans un tien donne, (es températtres moyennes des basses couches tj

de l'atmosphère et te< températmreadetacrontepierreuse du glohe. On a dit souvent que les températures


moyeanes earaotérisoient par un seul chuTre tesdiNtats à différentes htitudes: cette assertion n'est
pas tout-à-fait exacte. Pour connohre le cNmo<, il faut savoir quelle est la distribution de la chaleur en
différentesparties de l'année, et deux endroits, par exempleMManetPeUn~dontIatempérature moyenne
(de t3°) est la même, peuvent avoir, le premier un hiver de + a°,4, et un été de a~,8; le second, un
hiver de 3°, et un été de a8°. !1 est vrai que, partout ou la température moyenne de t'année s'éteve
à t5°, on ne trouvera plus une température moyenne de l'hiver au-dessous de t~n). En réunissant par une
courbe (Mo<Aen!te), des lieux dont tes températures moyennes de l'année sont tes mêmes, on voit que le
partage de la chaleur entre l'hiver et t'été se fait d'après des proportions~~ixes~ e'esta-dire que tes varia-

VttyM plus haut p. 6~8.


tiens ne dépassent pas de certaines jimites; mais ces Osci~ttOM, que j'ai eMtt~a~ dans un
mémoireparticulier (~m. de la Société ~ntM<7, Tom. M ), sont encore assez grandes pour
exercer une influence sensible sur la culture des plantes ntilet&l'homnte~Sironveutcaraçtériserun
climat de vigne, il ne suSt .pas de dire- que ta température de l'année doit être an-deMM de «".y on 9°
il faut ajouter que, pour avoir du vin potable,l'hiver ne doit pas être an-dessoM de -r- t**t t'e<e pM au-
dessous de t8°,5 a ta". Or, dam le Nouveau-Continent (aux États-Unis), les hivers sont au-deMOua de
zéro, là ou les températures moyenue* de l'année n'excèdent pas o*. Sur la tigneisotherme de g* om voit
souvent descendre te thermomètre, dans le système de ciimtat!trtm-attantiq)te9,&–tS". f
Il résalte de l'ensemble de ces comsidÉratiom qne, pomr donner une idée précise du climat d'un tien, il
faut faire connohre, outre les moyennes de l'année, des saisons ou des mois, les variations de tempéraMres
qui ont eu lien effectivementà différentes heures du jour etde ta nnit, pendant un espace de temps assez
considéraMe.Lorsqu'on peut disposer d'une grande
masse d'observations,on doit, je pense, chercher par
des moyennesde 15 années (par conséquent par iog5o données partiettes)tesmoyennes de t'année et des
mois, et choisir pour exemplela marche du thermomètre, à différentes heures du jour et de la nuit, dans
i
le mois qui rapproche te plus de la moyenne de ces années. Cette méthodede présenter tes observations
telles qu'elles ont été successivementMtes, dans l'espace d'un mois,
me parott préférable a la méthode
d'après laquelle on chercheroit, par iog5o observations, la moyenne de chaque jour det'amnée. Pour
c~tK~Mer un climat, il.ne faut pas faire disparo!tre entièrement ce que j'oserois appeler sa physionomie
ses traits individuels, les passages brusques d'une température à une autre, tes variations qui sont Mciden*
telles, mais qui-se répètent fréquemment. C'est suivant cet principes que~me Mit proposé depuMier
en
dans cette Relation une partie des observations météorologiquesque, j'ai faites
entre tes tropiques a diBe-
rcntes hauteurs. ~Lorsqu'on réBéchit sur la position d'un voyageur, qui ne peut pas observer à des heutes
fixes, et qui doit partager son attention entre grand nombre d'objets à la fois,
nn ou ne sera pas surprisde
trouver des lacuneslà où t'en désireroitune suite non interrompue d'observations. J'ai ajouté
aux tempéra-
tures de Caracascelles de Cumana, notées par don Faustin Rubio. Les
unes et tes autres sont exprimées en
degrésdu thermomètre de Réaumur, dtv.sé
en 80 degrés. Les instrmnens éto.ent en plein air, à t'ombre,
loin du reflet des murs et du sol. L'hygromètre
est celui de Deluc; it n'a pas été corrigé par la température,
de sorte qu'il indique l'humidité apparente. Les observations de Cumana
sont précédées d'un C et se
rapportent aux mêmes heures; par exemple, le 28 octobre,la température de l'air étoit a Caracas,
midi, t8",4; à Cumana (au faubourg des Indiens Guaiqueries), d'après à
un thermomètre comparé aux
miens, a3°,a.Pournepasajoutersanscesse les mots
avant ou aerès midi, le temps est expriméatama-
n.ère des astronomes ~esorte qu'ici comme dans-le ~r~ route (p. =67) .0" du matin répondenta M
Caracas, quartier de la Trinidad; Lat..o'3c'5o". Long. 69~5'. Haut. 454
toises. Temp. moyenne de
tannée t~aB.(~<y<Mptushaut,p.My.)
rt~wir~r~~trirrr~rrr~r~r
MMUt*
ttOTBiMM
'799.
OMMVAWOM.
ctcmBM MtMt.
r '799-)~ OBMMA!noN5.

a8.
t8",4 48°,a eMr(C.93°,9). t?
8 i5,e 53, brouittard. 7 *5,5 &9,7 Mm.
bleu.
tt i4,2 .54,a clair. n t4,o 53,a (C.3t°,7).
~'ao'' ='°'' '5'o~5t°,o azuré (C.aa°,a).
.4~0 54-o ctair(C.ai-7).
t5,a 53,a '~3 50,4
i8,t 5o,o ~,a 48,i1
~.a 47,3 (C.a4-).). 41 '8,4 43,8 (C.5).).
i5,6 54,o 46,3
9
'3,5 47,9 beau clair de lune.
ni )5,o
––––––––––––––––––:–––––– 53,a 9
t3,a hlen(C.9f,3).
tt 47,3
20'* i4<o 54°,a Meu(C.at°,3).
i i8,a 49,7 at'*d i5',o 48°,7 azuré avec nuages.
3 t8,o 48,a (C.a4°,o).
). M t5,5 47,5 couvert.
4 `-, t8,o 47,3 b)eu. 9~ t6,3 46,5
5 t7,i 48,o a3~ 17,3 45,9
8 `-, t4,5 53,2 b)e<t(C.a9°,a). o i8,a 45,3 azuré,vent.
9- t5,o 5a,o t t8,o 43,9 (C.a3'5).
il 14,7 53,a !esmaagesh~sbas). '8,0 4a,9
== –=====-––- t~3 ~g~ bleu.
Décembre ~g ~g cahne(C.2t~5).
t9' i3°,o 5t',3 Meu(C.at-2).
2t~ i5,o 5),3 ao'* tB°,a 49*a brouillard.
aa t6,5 49,5 30~`-, !a,8 49,4 coaTert(C.ao°,4).
a3 17,3 47,7 bleu: ai !4,o 5o,a
o i8,o 46,9 ai~ t5,a 5o,3 bleu.
o~ t8,7 45,4 a5 17,0 4€,a nuages (C.a3't).
t t9,o 44,7 Meu(C.34*,o). o '7'S 45,o
––––––––––––––––––––––––-
a3''
4 t8,9 4i,6
i7'5 48-a couvert. '~o 44,a bleu.
0 i8,o 47,9 ( C. a3°,5).
). ` 15 43,6

g
5

a~~`-,
atï
t6,5
"S,5

t4",9
16,0
48,7
5a,a

5o°,7
49,9
couvert.
ptuM.

MM.
vent
–––
d'est :mpet.
7.
,9)~

at
ta«,5

t5,a
~6,5
5*°,6

49,7
48,a r
azuré (C.)9",5).

o i7,5 47,8 a3 17,7 47,5 SiMadécouverte.


a; `-, t8,o 47,a (C.a3°,6).
). o~ t8,5 45,o (C.a3",a).
Sï t8,o 46,8
"7'
nitCEMM
n{,CSMSRB

.1799.

7
10~ï
n~
TBBKM.
a·HBax.
Maumur.

16
i3,5
t3,7
HMMM. ctcBMBM

–––––––––.–––––––––––––
~6~ ~55 49' M~.
18
M
8

21
5
8
i2,3
i3,'t
i3,4
16,7
15,0
48,a2
5o,a.
50,7

4<),a
~9,7
5o,a
48,2
51,1
n{,CBMBILB
osasavextoxa.
OBSBKVATIONN.

azuré.

(C.at°,7).

soleillevant.
couYert(C.M°,o). M~
couYert(C.aa°,o).
14.

,g.
i/99-

23
0
6
y~
i..4,5
o~
2;ï
5,
TamM.
ssau.
W

R&~mr.

t7,o
t7,o
t5,a
tt5,5

t6°,5
i8,5
*7,8
*7<5
3
MtHMM.
àA

4g,7
4g,S
r~

5<,6
53,9
55,7

5o°,a
47,3

4g,9
osa8àve~oxe..
OMmv.tTMtM.

couvert.
(C.9t°,7).

t.S.Uadéc.u~rtc.

azuré.
laSiMateconvre.
~7,3 (C.aa°,6).
i4 t4,.5 52,9 brume 6 i6,3 .5t,o nuages très-bas,

S
3,

––––:–––––––––––––––––––
,“ Mon
a3' i7<3 5o",a “ avec nuages.
.8,.
],2 8 45,3
3 M~.a~e.
bleucalme. to
Il
6~
9
)6,o
t5,o
51,6
5~6

M,.
couvert.
couvert:
(C.~7).
(C .21 ,7
3'
4. ~o,0 45,3
3 (Ç.0)..5.0 15,0 5'"
<7,2 Ó)

7 t6,a 49,2 ,6.


8 i5,o 5o,3 bleu. a~~ i6-a 48',7 Mea(C.ao°,4).).
9 i4,a 53,a aa 16,5 48,7 nuages très-bas.
10 i5,o 52,7 couvert. 23; t7,5 47,0
il i5,9 5a,a bleu. o t8,o 46,3 (C.aa°,6).
––––––––––––––––––––––––– ,~g très-beau.
o~
bï c.~ert(C.8).
,7-55 46°,3 ,couver.. 7y dec.uT.rte.
Silla découverte.
22,
tCa
7 t6,a 5it
5i,t
tt
9 5
t5,~ 5t,t ~)-
(C. zt°,3)..
"9'
12'
4
~~7
~.o
~,7
45;4
bleu.
bleù.

serein (C.).
17- J31,

°
16,,5 ~='
49*,2
.47,9
'<
couvert.

9 49.5 azuré. ,1 177 46 !t

.4,.0 4~ ~.(C.3).
4g,55
id.~(C. 2= (C..3-).
z3°,~1

i3. '–––––––––-––––––––––––– 4 ~6,7 48,7 couvert.

3~
5'
i8°,t
.75
46",3
463
47~
Meu(C.aa'6).
bleu 6)
(C. 22o,6).
'9' t3'o
“ 53° (C
53-a (C.ao°,.)
zo°,o) couvert.
5 i6,.
16,2 47,2 couvert.
couvert. 14,2 50, 2
12 ~,3 (C.3). ~a
t
'6,8 49,o
t
couvert.
i4. o t8,5 46,1
21'' iS-.o 5i'i couvert (C.ao°,8). t8,€ 44,9 (C.aa°,6).
=~ i6,5 50,9 3 i8,5 44,5 couvert.
M t<6,5 5o;a 6~ ,~8 49,0 azuré.
~Z~OMt. mhiZMM TttMM. BtoMtt..
BtcttMM TBZM. OBt~VAKOM.
t799. Réaumur.
1 I7~g~_
~799. baleine. ON~VATIONf!.

t9. 93!. o:
'9~ t4<g Sa°,a (C.90*,4) couvert. t7,5 48,9
M t5,o 5t,9 t t7,8 47,9
aa~ t6~3 50,8 vent d'est a~pét. 3L t8,a 45~4 moageux.
(C.9a°,a). 4~ 17,3 4J',9 bleu.
t
31
5
17.7
iy,o 47,55
48,0

48,o
cpttvert.5~
calme. 8
t~o
t5j,i
46,a'
Bo~t
*7,t
7~ t.5,5 5t,o M t4,a 5t,8
8~'i i~3 5t,o couvert. Il i3,4 54,9 bleu.
ta 53,5 (C. at'o) pluie. ––~–– –––– –––––––––––
)(4,8
––––––
a4.aa'' i7°,a
2 47°,G Mon.
.–––
tg~ 14*,3 54*,9 (C.ao'4)cowert. 23 17,5 ~47,6 est impétueux.
at-i 16,o 51,8 estumpétueMt. t 18,0 46,3
aa 16,8 49,9 3~ t7,a 48,a calme.
a3- 17,0 47,8 couvert,
(C.aa'6).).
y i6,t 1 53,a ~ottert.
3- 17,4 44,4 8 i5,4 54,a
4 17,5 43,o azuré, io 14,7 54,9

n
7-i

a)L*'
i5,a
12,5

t4°,5
5o,t
53,a

53°,7
_––
(C.at°,3) couvert

couvert,
25.
i4
–––––––––––––––––––––––
a5.a3'*

o
14,3

17°,0
~6,5
57,8

4<)°,7
5t,t
couvert.
p!u!e.
a~ 13,5 56..8 pluie. 3 i5,3 57,8 couvert.

'4
23 t6,o 55,7 7 i5,o 57,6
o 15,5 55,7 pluie. '~a 58,8 couvert.
t .5~ 54,9 (C.Ba',6)._ –~–––––––––––––––––––––––
26. 21i
4 .4,9
,9 -53,a -Co
14 I 532 3'3
·'i 17',0 '53',2 couvert.
M t6,5 5a,3

il
9

1
I4,o
I4,3 ~.9
54,g ~)-
couvert.
(C. sL°,3). °o
o-
0,
17,7
17.7
.7,9
17,9 48,a
i7,S
48,9
~FBW
'~48,z
45,a bleu.
22. 48;3
a3'' t6°,o 48-7 couvert. 6 15.4
o t7,a 46,3 8 i5,o 5a,a couvert.
(C.a3.,t). –––––––––––––-––––––––––

'~–––6
17,7 45,4
45,8 ~'a~ )L6°,o 5t-o
5
8
IlI
i7,t
i5,o
t4,a
53,7
54,9
couvert.
t(C.9t-3). 0 ~g ~g bleu.
nuageux.

Silla découverte.
6 17,0 4i,6
aa'' i6°,o 5o°,a couvert. i '3,a 54,a bleu.
a3 t6,a 49,7
o 16,7 49,0
HYOMM.
BËOEMBB.E

1799.
TEERjM.
Réaumur.
OBSEttVATNM.
OBSERVATIONS.
dNVlSa.
]TANVM&

t8oo. B~mn.
THanyf..
THEUM.
BTGMM.
4 OSMtVJtNOM.

a8. ao''
21
1:~2
i2,5
baleine.
bMeme.

5~o
55j brume.
4.
4h i8°,3
15,7
Mttttt.

4o',7
48,a
azuré(C.93'5).
azuré.
9
~a t~.o .54,9 assez bleu. tt t5 5t,6 oonvert(C.at°,7).
1 16,2
2 49,a –––––––––––––'–––––––––
'7~ t6",5 44",i bleu.
4 18,0
~'7
bleu.
..9.0 40,7 (C.).

7
9 14~ 5,,o étoilé. M.u(C.3).
n t6,o 53,2 couvert. –––––––––––––––––––––––––––
9'"a~~ t7°,$
°5 45°,o
'"5' bl
Men.
~9.
20'' i4'o 52',2 azuré, t i9,5 43,6 (C.a3°,5).
~t L i4,8 53,a 3 ,8,4 4~ couvert.
aa 16,0 5),o 5 t~s 45,6
'7~

1..
48~ n~ ~4,o~ ~8,a ~ouTert(C.at°,7).
t '7,5 47,9' azuré. –––––––––~–––––––––––––––––
la i4,66 54,9
g .Tert. '°-~ .rt(C.3).
30. 21 t6,a 48,1
ao'' i5<o 5o'a bleu. 3 tg.o 40,7 Nea(C.a3°,o).
22~ t7,a 47,3 4~ t8,a 4t,6
23' t~5 45,o 10 i4,5 49,9
o i8,5 44,S i4,o 49,0 étoNé(G.ai'4).
i i8,5 43,6 '"–––––––––––––-–––––––––
3 i8,o
i
39,7 bleu.
4
th

t~.
4,
39,6ô
Meu(C.aa*,6).
'°~
g,
*–––––––– 7.
.7.5
'5,o
4,,7
46,3
couvert.
étoilé.
ao i5°,o 5o°,~ bleu. ja.
aa~ 17,0
o 47,3
3 i8-8 37°,6 Men(C.aa°,7).
23~ 17,5 45,o 4 i9,o 35,9

3 o

3
i8,a
'8,5
i8,o
'~°
44,5
43,6
39,7
44,5
bleu.
9
t3
'~<5
i3,o
"T'–––––––––––––––––
i3',a 44.,t
46,o
44,5 ét«Ué(C.at°,3).

.Mgeux.
'°~ ~9.='
2 couvert. 4.,7
0 i7,,
–~–===========
1. 9u~ 15,,5 490,2 t Meu(C.6).
9" 9
~,5 49' ~uré.
15 azuré. ,5

54,9 "°'ert
touteo~ert
f3i
4
17,2 41,7
6
ï
1 10,0
tto.lé(C.ao",4).
!A«Vt)!)t
t8o0.
Ttfm'M.Jt'i'
Re*)<mur.
~mmKtË'
.MMYAnoM..
OP
t t
t800.
)ANT!B)t"TMm<<' tamu.,
a&mnm.
t
)mr<KtOM.'
.Mm~TMM.
hale!Re< Metne.

t4. 16.~
ao~ t5',o 44-S Mea(<t8<e). 4 < t6,5 4$,3 ventdeC~tia(C.99'9)
tt, t7,a 4t,3
t7,5 4o,i (C.aa'9).
7
'<'
'5,9
t4,o
48,3
48,5
couvert.
couvert (C.at',3)
1
3~'Î 18,3 38,3 MeN. '~––––––'––––––––––
'a~
t5,77 44,3 t3",3 47<a Me)t(C.t9°~).
9 '4,9 47,9 coarert.–– ––3~ ~[8,7 39~ (C. 99°,6).
n t3,5 49,3 coovert(C.ao*,8). t4,o .43,7 étoiM(C.'at°,3).
'5 a~
t6",S
i8. a,h
4t<7 couvert. ~e'.o 45-4 amré.
1 t7,e 4t,7 Mea.(C.aa°,9). 1 ,~a 38,6 (C.23'5).
3~ t8,o 4),9 couvert. 3~A ~,3 36,9
4~ 16,7 4a,7 5~ 4,~ azuré.
9 '~o 43,6 ,t ,~6 4t,9 couvert(C.at",7).
16.
n
––––.–
t7''
-–t4,5

t3°,9
éte!M(C.at°,3). ––––––––––––––––––––––––
44,o
––– –––~––~–~– -aa-–––
45<4 Nen(C.ao'o).
o'' ––––
i9'o .–––~
33",8 Meu(C.aa<6).
6 16,3 36,9
o 18,0 41,7 tg~ bte<t(C.3i°,a).

Les observations faites simultanément aCumana eta Caracas, aux extrémités d'une colonne d'air de
900 mètres (459 toises) de hauteur, me paroissent d'un grand intérêt. Quoique le port de Cumama soit
plus Étoigué de Caracas que ne l'est la Guayra, ce port offre pourtant un point de comparaison beaucoup
plus s<~r. L'air circule plus HbremeM amtoar de GmBana, et la température y est moins snjette à des
mNnences locales: En comparant, tor toute ta masse des ohserratioBS, at jours sereins choisis indistinc-
tement dans tes Mois de novembre,décembre et janvier, je trouve,en calculant !es tempëratoret moyennes
de chaque jour, d'après tes aMM't'nt<m et les nt<nHnM)m observés, tes résultats smvans:
~~rr~Yrrwrrrwiirrrrrrr
JOV118.'
T~~T~~Y~
10UllS.
JOCBS. ~«!
CumMM.
d<t)0)lMAà

C<yacM. a~r.
29 novemb. aa°,g t6°,6 6",3
3o aa,6 16,0 6,6
t"déoemh. 22,6 16,0 6,6
3 aa,6 i6,t 6,S
4 at,8 15,8 6,0
5 at.y 15,7 6,0
'6 a~y t~! 6,6
9 a'~ '6,6 5,[
ta a)[,3 t4,8 6,5
at,6 t6,7 4,9
4 janvier. at,9 16,6 5,3
8 ao,8 ~,o 3,8
9 a~,4 t~,a 5,a
ta aa,o t6,o 6,0
'3 at,7 t5,B 6,5
t~ 2o,4 tj,9 4,5
t5 ao,8 t6,a 4,6
t6 at,t t5,6 5,5
t7 at,o 15,6 5,4
i8 at,o t6,8 4,a
'9 a<,5 t~.o 4,5

Les température: moyennes de 21 jours sereins ont dineré à Cumana de 3°,t a Caracas,de 3°,o du
thermomètre centéamal. Les dtnërences les moins grandes entre les températures moyennes des deux
endroits,n'ont pas toujours eu lieu )orsqu'it a fait le plus chaudCaracas; ellesontoseillé entre 4°,6 et S'a.
La moyenne de toutes les différences a été de 6'0 (5**J5 Réaum.), à peu près de t39 mètres par degré
centésimaLLavaïtee de Caracas est plus fraîche qu'elle ne devroit t'être à une hauteur de 900 mètres, et
cette circonstance rend le décroissement du calorique singulièrement rapide. La moyenne de toutes
mes observations, faites entre les tropiques, m'a donné, pour tes premières couches d'air comprises
entre le niveau de la mer et 1000 mètres d'étération, tyo mètres, correspondans à 1° du thermomètre
centigrade ou tog toises pour t° Réaum.
SUPPLÉMENT.

Le Frontispice, gravé d'après le dessin de M. Gérard, représentel'Amérique consolée par M!nerte et


Mercure des maux de la conquête. On lit au bas de la planche les mots humanitas, /<<<eyYB,yrM~.
Pline le jeune écrit Matime, qnestem' de Bithynie, nommé gouverneur de la province de t'Acha!e:
Songez que tes Grecs ont donaé aux autres peuples la ctf<~M«Mo tes lettres et lefroment. » Çea mêmes
biens, l'Amérique tes doit l'ancien continent. Les armes, tes costumes et les monumens sont d'une
exacte ndétité. (Voyez l'~&t~ pittoresque ou ~MM des Cordilléres et Monumens des peuples t/M~t~n~,
Pt. t,7,9,t4,t6,ai,38, 49).

Le désir que j'ai énonce de voir examiner l'archipeldes îles Canaries, sous le rapport de la géologie, de
la physique et de la géographie des végétaux, par des voyageurs qui potrroienty faire un long séjour, a
été rempli depuis peu. M. Léopold de Buch prépare un ouvrage étendu qui renfermera tes fruits de ses
laborieuses recherches sur TénériNe et les îles voisines. C'est à ce grand géognoste et aux travaux de
M. Smith qui, victime de son zèle pour tes sciences, a péri récemment dans ~expédition du Congo,
qu'est d&te tableau physique du Pic de Teyde,(~</ojt géographique, Pl. Il.). Je n'ai pas hésité de
substituer des notions plus exactes à celles que M. Broussonnetm'avoit communiquées. (~o~M plus haut,
p i83-t87.)M. de Buch distingue, t."ta région <~<~brmMo/tcaM~o–aoo toises; 9.°ta région des vignes
et des eerM~j) 2oo-43o toises; 3.° la région des Lauriers, n~ sylvatica 43o–680toises; 4.° la région
~M7'<nH< Mn<H-MnMt68o–980 toises; 5."ta région f~~Ae~ma, Spartium nubigenum 980–ty3o toises.
Le Retama ne se trouve qu'à Téménne. Sa limite inférieure est de tooo toises. Les montagnes de toutes
les autres îles, à l'exception de Palma, ne sont pas assez élevées pour entrer dans cette limite, et le sommet
du Pico de dos Muchachos de Palma (1193 toises) n'est <brmé que de rochers
nus et arides. Les*
graminées sont très-rares, et, comme l'observe M. detuch, elles ne forment pas une
zone par~cnUère.
On a mis entre deux parenthèses tes plantes étrangères au Pic de TénériBë.maisquicroissent, aux hauteurs
indiquées,danstes montagnes des îles voisines. On a ajouté un S (Smitb) aux espèces nouvelles qui seront
pubtiées par MM. de Buch et Smith. Une croix placée à la fin d'un mot
marque la limite supérieure d'une
plante, la hauteur à laquelle elle cesse de végéter,
Je vais consigner ici d'antres notions que je dois à l'obligeante communication de M. de Buch, qui
et
serviront à rectifier ce que j'ai avancé dans le a.* Chapitre de cette Relation. Je saisis
les occasions qui se présentent de perfectionner cet
avec empressement
ouvrage, d'après le rapport des personnes instruites
qui ont visité les mêmes lieux, et qui y ont séjourné plus long-temps moi. « Le Pin des Canaries
(p. 186) est bien certainement une espèce nouvelle, inconnue jusqu'ici que botanistes de l'Europe. Le
aux
Dragonnier (p. n8) ne paroit point appartenir aux Indes orientales,
comme Linné l'avoit avancé. On
le trouve à t'état sauvage près d'lgueste à
70 ou aoo toises de hauteur au-dessus du niveau de l'Océan.
La plante épineuse de Lancerote, que M. Broussonnet prise
a pour Sonchus ( p. 169 ) est le Prenanthes
spmosa.–Le volcan de Lancerote, que j'avois jugé de 3oo toisesun d'élévation (p. 84), d'après des angles
pris sous voile est la Corona, dont la hauteur, d'après
une mesure barométrique hce-exacte -est de
aoa toises. La hauteur de la ville de la Laguna, qui n'avoit jamais été déterminéed'une manière précise
(p. 105 et a8y ), est de a64 toises. Aucun mur circulaire de laves m'empêche, du c&té du nord et de
l'ouest, d'entrer dans le cratère du Pic de TénénSe. Ce que j'ai dit de ce mur et de l'analogie entre le
sommet dn Pic et du Cotopaxi (p. t3a) ne parait pas exact. Aucune notion postérieure m'a con&rmé
l'assertion de M. Broussonnet (p. t6S), que Mte de ta Gomere renferme un noyau de granito et de
schiste micacé mais M. Esooiar, satantmiaératogisteespagnot,a trouvé, aHte de Fortaventure, un
bloc de, roche primitive syénitique. C'est une masse à Base de feldspath renfermant des cristaux d'amphi'
bole. M. de Buch a découvert,dans le grand cirque de Hïe de Palma qm'H regarde comme l'ancien
era~re de MM/~fement, une autre roche primitive. Elle, offre égatement une base feldspathique qui
enchâsse des grenats et de l'actinote(straMstein). Dans observe/~es 'blocs isotét de
un ravin voisin on
schiste micacé avec de l'amphibole. Les formations calcaires et gypseusesde Lancerote et de Fortaventure
(p. 169) sont des couches subordonnées à la formation des tufs volcanique*. On y trouve m~me des
bancs d'oolithes. D'après M. de Buoh, auqOel sont dues toutes hs observations rapportées dans ce supplé-
meut, h température moyenne de Sainte-Croix de Ténér!neeMde~t",8Fahr.ou at'6 cent.

bans cette Relation ~Mton~tM, toutes les indications de température sont comptées en degrés du
thermomètre centésimal, si le contraire n'est pas expressément marqné. Les noms genériquee. et spéci ·
fiques des plantes imprimés en caractère t<oN~!M désignent des genres on des espèces inconnM avantt
notre voyage, et décrits dans nosoMbfo G~MMtet <%)ecM<~att<ftnt~o~M noM.

FIN DU PREMIER VOLUME.


M~~f.
Page 49,!i~e3a,deToHÏon~,5;:&<~t6*,7.
hgne3o,<<tt~Mde&en&ifeio°,m~M9'')6.
Iigneta,0!<~MttdëNaptMt8*~o:~MMi7'5.
88,tignet,<!M~a(tenns:7MMaott<.
tot,tignett,aa~Mdet6'Xo'~Nt<<ta''B7'.
t09~Mgne98,etpag,ïtt,t!gÏët~~de pin lisez pain.
tt8,Mgnet8,<~OMieezapreeeï:d'apr&aLinné.
t43, ligne t,<nt~et<Ïe3o'&e<19°.

t55, ligne tt,


i45, ligne 14, «~~tme~ depuis «qu'on n'an )usqn'it a liberté."n
un point étonne wgnkapre~M~& et une virgule après coacAo~e.
t85, ligne ta, place. deux pcinu après Mogador.
a~S, ligne ta, lieu de ao*,3: ~M~aS*.
<tt<
ayC, ligne ?B, au lieu de cdP ~M~e dPc.
t.
aSy, ligne a8, au lieu de Lagnua 36o /Ket B641. d'après M. de Buch.
t~
a88, ligne 5, <!« lieu de 5'' 4p' 8" &'et 4o' 8".
a96,I:gaeB9(no~),<Ht<Mad'az!mutate:/Mezténitha!e.
326, ligne 5, supprimez le signe de la note Cette note appartienta la ligne 5, la note·
àhKgnetB,!e6notet'et*a!at!gnea3.
3aS, ligne dernière, au &e« de i &mz de 9 & 10degr~t.
333, ligne ag, au lieu de sur le &M au-dessous du.
334, ligne a8, au 7MM de pronve ~MM e'oppose à admettra.
~M~ au lieu d'ancienne :<Mez nente.
335, ligne 17, aM&n de an-dessus :&<<<an-de&wn<.
336, ligne i au lieu de reeonTrent &ez couverte par.
388, ligne t5, at<&et<deau-dessons:&w~au-deMM.
42o, ligne t8, tt~xtine* vers le tnitien du jour.
458, ligne 22, au lieu de Ramajam NMz Ramâyana.
48a, ligne 19, au lieu de chaire &e* chair.
ligne t8, au lieu de oroa, deux &M~ oroa, ~rols.
ligne 12, au lieu de toya à toi &~ toya à lui.

»
TABLE DES MATIERES
CONTZ!njES

DANS LE PREMIER VOLUME.

INTRODUCTION f e
l,
LIVRE PREMIER.
CHAPITRE PREMIER. Préparatifs.–Instrumens.–Départ d'Espagne.-Retâche
auxites Canaries,?. 39.
CBAP. II. Séjour à TénériSe.–Voyage de Sainte-Croix à rOrotava.–Excur-
sion à là cime du Pic de Teyde, p. 99.
n u
CHAP. 111. Traversée de TénériBe aux côtes de l'Amérique méridionale.–
-Reconnoissance'del'ue de Tabago.–Arrivée à Cumana, p. 198.
Observations physiques
Température de l'air, p. 99~.
Température de la mer, p. a3o.'
Etat hygrométrique de t'air, p. a~a.
Couleur azurée du ciel et couleur de la mer à sa surface, p. a48.
Inclinaison de l'aiguille aimantée. Inteasitédestbrcesmagnétiques,p.256.
Électricité,p. s64.
NOT'ESDU~ÏTVREI.
A. Journal de route, traversée des cotes d'Espagne à Cumana, p. 367.
B. Ëtévatfon de plusieurs points de l'île, de TénénCe, p. 9~5.
LIVRE H.
CHAP. IV. Premier séjour à Camana.–Rives du Manzanares, p. 989.
CnAp. V. Péninsule d'Araya. Marais salans. Ruines du château Saint-
Sso.
Jacques,p.

LIVRE m.
CnAp. VI. Montagnes de la NouveUe-Andatousie.–Vallée de pumanacoa.–
Cime du Cocollar,-Missions des Indiens Chaymas, p. 553.
CHAP. VII. Couvent de Caripe.-Caverne de Guacharo.–Oiseaux nocturnes,
P. 409.
UBAr. VJJU. repart <tet.<artpe.?–Htomagne ettutctu<fuMmM'*ttt.–t*
de~CatuaFO.–PortdeCartàco,p.~3z.
CBAp. IX. Constitatton phy~siqae et moeurs des Chay~ langues.-
T~tion des peuples q~h~~ la l~Toavelle-Aadalousîe.-Pariagotes
vus par Colomb, p. aS8~
NOTES PU ï.rVHB
A. Bibliographie des grammaires de langues américaines, p. So4.
B. Fragment d'un vocabulaire de la langue des Indiens Chaymas, p. 5o5.
C. Observations de Christophe Colomb sur !e passage de la polaire par le
méridien, p..5ô6.
UVRE IV.
~CHAp.X. Second séjour à Cnmana.–TremMemens de terre.–Météores
extraordinaires, p. 5o8.
Cn~p. XI. Trajet de Cumana à ta Guayra.-Morro de Nueva Barcelona.-
Cap Codera.–Route de la Guayraà Caracas, p. 5:8.
CHAp. XII. Vue générale sur tes provinces de Venezuela.–Diversitéde leurs
intérêts.–ViUe et vallée de Caracas.-Climat, p. 565.
CHAp. XIIÏ. Séjour à Caracas.~–Montagnes qui avoisinentla viUe.–Excursion
à la cime de la Silla.-Indices de mines, p. 5oo.
NOTSS DU HTM IV.
A. Points lumineux vus pendant l'éclipse de soleil du 28 octobre 1799,
p. 635.
B. Recherches sur la cause du scintillement des étoiles, p. 6a5.
C. Essais pour déterminer l'intensité relative de la lumière des étoiles,
p. 6a4.
D. Observations faites sur le mirage et la dépression variable de l'horizon
de la mer, p. 6a5.
E. Observations météorologiquesfaites dans la vallée de Caracas, p. 63).
SUPPLÉMENT, p. 65Q.
t

FIN DE LA TABLE.

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