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Essai d'affaissement
d'un blindage cylindrique de galerie
muni de renforts
et soumis à la pression extérieure
Collapsing test
on stiffened cylindrical tunnel sheeting
subjected to an outside pressure
PAR J. BIGTAL
INGÉNIEUR DES ARTS ET METIERS
ÉTABLISSEMENTS BOUCHAYER & VIALLET, GRENOBLE
Cet essai, demandé par Electricité de France, à This test was asked for by Electricité de France
l'occasion de l'exécution des galeries blindées de when the tunnel sheeting was being manufac-
la chute de Roselend, a été effectué sur un tured for the Roselend project, and was carried
tuyau de 3 800 mm de diamètre, de 12 mm d'épais- out on a pipe with a diameter of 3 800 mms,
seur et de 2 700 mm de longueur. a length of 2 700 mms and 12 mms walls.
21 avait pour but de vérifier le comportement
d'un tel tuyau muni de renforts extérieurs en The purpose of the test was to find out how the
cornières, soumis à la pression d'eau inter- sheeting, which was fitted with external angle
stitielle contenue dans la roche. Des essais iron stiffeners, would stand up to the pressure
analogues avaient été précédemment faits, mais of the interstitial water in the surronnding
sur un tuyau non muni de renforts. rock. Similar tests had previonsly- been
Après un exposé^ critique des diverses théories undertaken with unstiffened sheeting.
actuellement connues concernant l'affaissement
des enveloppes cylindriques, en particulier de A critical discussion of various carrent théories
celles munies de renforts annulaires, l'auteur on the collapsing of cylindrical shells—especially
expose la conception de l'essai, décrit le modèle, when fitted with annular stiffeners—is followed
les appareils de mesure, le déroulement des by a description of the test particulars, the
essais et leur résultat final. model, its instrumentation, the actual tests, and
L'étude se termine par une description critique their final resuit. The article ends with a
sur les précisions du calcul et sur les résultats critical assessment of the calculation accuracy
obtenus. and the results obtained.
INTRODUCTION
La résistance aux sous-pressions des blindages Les caractéristiques des blindages des gale-
cylindriques en galeries bétonnées a fait l'objet ries d'amenée de Roselend sont :
de nombreuses études, et les conceptions des — Diamètre du blindage 3 800 mm;
constructeurs diffèrent sur les renforcements à
— Epaisseur des viroles 12 mm;
utiliser et sur leur justification.
L'étude présentée a été effectuée pour Electri- — Cercles renfort en cornières 120 X 120 X 3 3
cité de France qui avait confié aux Etablisse- posées en chevron et soudées, espacées d'axe
ments Bouchayer et Viallet l'exécution des blin- en axe de 675 mm ;
2
— E ^ 36 k g / m m 2
A > 20 % ; ses, établie par M. Simon-Suisse, et ils ont justi-
— Cornière renfort de même qualité. fié la continuation des études dans le même sens
Les résultats des essais ont démontré la valeur pour son application aux blindages renforcés par
de la théorie de l'affaissement des blindages lis- anneaux.
I. — B U T ET R A I S O N S DE L'ESSAI
IL 1 -Rappel théorique sur le flambage. représentée par une série des divers modes (ana-
logues à la série de Fourier).
Les études sur le flambage classique font appa- Soit cette série :
raître deux stades :
— Flambage d'un système homogène et géomé- = #o CE, y) = + « i f i CE, y)
triquement parfait; + «2/2 OR, {/) + ..• + nfn OC y) a
membrane pour laquelle la limite élastique est A priori, la théorie de E. Amstutz semble en
atteinte. Cette contrainte moyenne v , peut être cr
bon accord avec les données physiques.
calculée à l'aide de la formule suivante : Cependant l'étude détaillée entreprise lors de
l'extension au cas du raidisseur, avait fait appa-
raître une erreur de principe dans la mise en
(t+fïM' + ' ^ i t ) équation du problème : l'équation différentielle
choisie par E. Amstutz (équation linéaire du
second ordre à coefficients constants) ne permet
pas de satisfaire aux conditions d'extrémités.
E. Amstutz a d'ailleurs présenté successivement
équation dans laquelle deux formules. Dans la première, où il choisis-
— jeu radial entre virole et béton;
£
sait une déformée comportant une période sinu-
R = rayon de la virole; soïdale, apparaissait une discontinuité de mo-
e = épaisseur de la virole; ments aux points de contacts sur le béton. Dans
T7« i -^(module d'élasticité) . la seconde, où il choisit une déformée à trois
1 demi-périodes, la discontinuité de moments dis-
d = limite élastique du métal utilisé.
E paraît, mais est remplacée par une discontinuité
d'efforts tranchants. Cette discontinuité est
Cette formule est de résolution graphique rela- absorbée par les réactions d'appui aux points de
tivement aisée. contact avec le béton, mais si l'on tient compte
#
##
de ces réactions d'appui, les équations différen-
tielles de l'équilibre ne sont plus linéaires.
L'extension de cette formule au cas d un ren- 5
Comme indiqué plus loin, la solution exacte du
fort est assez simple. En suivant exactement le problème a été donnée peu de temps avant que
même développement, on établit la formule : n'ait lieu l'essai, et uniquement dans le cas d'une
tôle lisse,
Faugmentation de la pression, jusqu'à ce que les et une seule, indépendante de l'amplitude des
contraintes dépassent la limite élastique. déformations initiales. La seule influence proba-
Par contre, la résolution des équations diffé- ble des déformations initiales se limite donc à
rentielles et des équations de l'équilibre y est prédéterminer l'emplacement où se situera la
traitée avec une rigueur mathématique incontes- cloque. La pression d'affaissement étant fonc-
table. L a solution — pour la déformée — y appa- tion inverse du rayon de courbure, on est en
raît sous la forme d'une fonction de Mathieu. La droit de penser que la cloque se produira dans
théorie montre comment dans la majorité des la zone où le rayon de courbure moyen est le
cas pratiques, dont on détermine les limites, la plus grand.
résolution de l'équation de Mathieu peut être L'absence de valeurs polaires ainsi que l'in-
simplifiée et elle aboutit à un abaque d'emploi fluence très secondaire des déformations initiales
très simple. oblige à séparer ce phénomène du flambage.
Il semble cependant qu'une seule question C'est pourquoi on devrait utiliser pour le dési-
pouvait être posée concernant cette théorie : si gner le terme affaissement et non flambage en
les frottements sur le béton avaient une influence galerie.
relativement faible, il devait effectivement se De toute manière, cette théorie n'est établie
former une seule cloque, ce cas étant celui qui que pour des blindages lisses, et son extension
correspond à la pression d'affaissement la plus au cas du raidisseur pose de gros problèmes. En
basse. Par contre, si les frottements étaient effet, la largeur associée est variable tout au long
importants, la déformation en 8 qui marque le de la déformée et dépend de l'aspect de cette
début du phénomène provoquerait l'appui en déformée qui, elle-même, dépend de la variation
deux points diamétralement opposés, puis la for- de la largeur associée. En fait, il semble que ce
mation de deux cloques persistantes. problème ne puisse être résolu que par itération
On doit remarquer que dans le développement à l'aide d'un calculateur électronique.
de la théorie n'apparaît aucune valeur polaire C'est donc avec de nombreuses idées qualitati-
similaire à celles que sont les pressions criti- ves, et sans chiffres théoriquement solides que
ques. Pour une pression, il existe une déformée l'essai a été conduit.
III. — C O N C E P T I O N ET R É A L I S A T I O N D E L'ESSAI
FIG. 2
Appareil d'essai.
820 LA HOUILLE BLANCHE N° 6 - DÉCEMBRE 1961
FIG. 3
Poste de commande.
FIG. 4 l
Poste de commande et virole. |
DÉCEMBRE 1961 - N ° 6 J. RI G AL 821
FIG.7
Essentiel des appareils
de mesure.
FIG. 8
FÏG. 9
DÉCEMBRE 1961 - N ° 6 J. RI G AL 823 -
F I G . 10
sure sont définis par rapport à un développe- 2° Mesure des rayons polaires à l'aide d'une
ment de la virole sur les figures 8 et 9. jauge expansible, par rapport à un axe défini par
une visée optique (fig. 11).
III.3.1 - M E S U R E S DE DÉFORMATIONS INITIALES :
FIG. n
Jauge expansible
pour la mesure
des, rayons polaires.
824 LA HOUILLE BLANCHE N° 6 - DÉCEMBRE 1961
L'essai principal fut exécuté le 6 juillet. Il déformations nettement visibles à l'œil : de nom-
comportait des paliers de pression de plus en breuses, cloques se forment entre raidisseurs,
plus rapprochés, avec la lecture de tous les appa- d'une profondeur de quelques centimètres, à
reils à chaque paliers. maille nettement carrée.
Les paliers furent les suivants : 10, 15, 17,5, A chaque formation de cloque, on constate
2
20, 21,5, 23 et 25 k g / c m . une chute de la pression, puis une remontée
2
Jusqu'à 15 k g / c m aucune observation parti- lente au fur et à mesure de l'alimentation, puis
culière. Les déformations augmentent progres- formation d'une nouvelle cloque... La pression
sivement, avec prédominance sur les généra- finit par se stabiliser, puis à monter jusqu'à
trices 19 et 20 (alors que la génératrice 7 pouvait 2
23 k g / c m , au fur et à mesure de la formation
être soupçonnée de préférence). A partir de la de nouvelles cloques.
2
pression 20 k g / c m par contre, inversion de la La formation des diverses cloques est facile-
prédominance : c'est la génératrice 7 qui est la ment visible sur l'enregistrement exécuté, où la
plus déformée. Cette déformation n'est d'ail- pression est modulée de petits « tops » toutes les
leurs, pas évidente à l'œil : la mesure indique 5 à 10 minutes. Pratiquement, les mesures
5 mm à l'étage 4 et 6,5 mm à l'étage 2. Ces dé- deviennent impossibles, la pression étant deve-
formations sont certainement encore élastiques. nue trop instable. On peut, cependant, constater
2
A 21,5 k g / c m apparaissent les premières sur place que la déformation de la génératrice 7
DÉCEMBRE 1961 - N ° 6 J. RI G AL 825
FIG. 12
Vue de la v i r o l e
après essai.
a plutôt diminué au profit de celle des généra- progresse plus, puis brutalement se produit à
2
trices 19 et 20 (nouvelle inversion). 25 k g / c m une déchirure de la tôle à sa jonction
Les mesures étant devenues impossibles, la avec le caisson inférieur qui met fin prématu-
pression est « poussée » jusqu'au maximum. rément, semble-t-il, à l'essai.
Les génératrices 19 et 20 s'enfoncent progres- La virole, et notamment le raidisseur central
sivement, cependant que la génératrice 7 ne sont sensiblement déformés et semblent très pro-
FIG. 13
Blindage Roselend. Déformation des étages 2 et 4 à différents paliers de pression.
Essais du 6 j u i l l e t 1959.
826 LA HOUILLE BLANCHE N° 6 - DÉCEMBRE 1961
Sur la virole, après démontage, on relève en Si l'on compare les résultats à ceux des cal-
divers points des traces de glissement sur le culs qui donnent :
béton, longues de deux à trois centimètres. De — Pression de flambage de la tôle entre raidis-
2
part et d'autre de la cloque des génératrices 19 seurs : 37 k g / c m (contre 21,5 à l'essai);
et 20, ces traces sont distantes d'environ 1,5 à — Pression d'affaissement du raidisseur :
2
1,6 m, correspondant à un angle au centre d'en- 24 k g / c m (contre 25 à l'essai) ;
viron 45 à 50°. Ces traces sont très légèrement on constate :
perceptibles sur la figure 12. 1° Une grosse divergence en ce qui concerne
Enfin, la forme de la cloque correspond assez la pression de flambage entre raidisseurs. Cette
bien à une fonction de Mathieu, en ce qu'elle divergence s'explique facilement, car il a fallu,
présente au centre une courbure bien plus accen- pour choisir le coefficient K de Sturm, prolonger
tuée qu'aux extrémités. Ceci la distingue nette- une courbe de l'abaque dans une zone où ces
ment d'une forme sinusoïdale, dont elle est coefficients varient très rapidement. II serait
cependant assez proche dans son ensemble. Il préférable dans un tel cas, de recalculer
serait hasardeux d'aller plus loin et de comparer selon la théorie le coefficient de Sturm, dans la
exactement son profil avec celui d'une fonction bande considérée. Une bonne approximation
de Mathieu, étant donné ce qui est dit précédem- pourrait être obtenue à l'aide de la théorie du
ment des « largeurs associées » , variables tout flambage des voiles plans; en effet, les cloques
au long de la courbe, et ce que l'on peut savoir sont très courtes devant le développement de la
de l'homogénéité des métaux. virole, et l'influence de la courbure est par con-
séquent faible;
** 2° Une très faible divergence, en ce qui con-
cerne l'affaissement du raidisseur. Ce fait peut
Le relevé des déformations est très suggestif, paraître plus difficile à interpréter, étant donné
si l'on fait abstraction de quelques anomalies de que la théorie de E. Amstutz, qui a servi aux
3
la courbe relative à la pression 23 k g / c m (fig. 13) calculs, semble mal fondée mathématiquement.
et donne un reflet exact du déroulement du phé- Cependant, on observe que la déformée choisie
nomène. par E. Amstutz n'étant pas très éloignée de la
Par contre, les relevés de contraintes sont peu déformée théorique, et la largeur associée choi-
parlants. Malgré la grande densité des appareils sie, bien qu'approximative, étant également de
de mesure, les allongements relevés ne varient l'ordre de grandeur de la largeur associée réelle,
pas d'une manière suffisamment continue entre il était normal que le résultat obtenu soit proche
les diverses jauges. de la réalité.
CONCLUSION
De ces diverses observations, on peut con- c) par le fait que des impacts très nets et
clure : bien localisés aux extrémités de la cloque ont
été observés;
— Que moyennant la modification simple du
d) par le fait qu'il s'est formé deux clo-
procédé de calcul du flambage entre raidis-
ques au début de la montée en pression, mais
seurs, la méthode de dimensionnement
que l'oscillation de leurs amplitudes relati-
actuellement employée par les Etablisse-
ves et la formation d'une seule cloque finale
ments Bouchayer et Viallet est valable;
ont bien prouvé cette tendance à n'en former
qu'une.
— Que la théorie de M. Simon-Suisse est justi-
fiée : ***
a) par sa bonne concordance avec les ré- Tous les éléments théoriques sont réunis pour
sultats sur viroles lisses; exécuter l'extension de la théorie de M. Simon-
Suisse au cas des viroles renforcées : théorie du
b) par la concordance avec la déformée flambage en galerie des viroles lisses, et théorie
observée lors de Fessai relaté dans la pré- des largeurs associées pour les formes de révolu-
sente communication; tion.