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ISBN : 978-2-38015-069-8
1. Sur les Sentences du philosophe, lire notamment Confucius, Les Quatre Livres : la grande
wétude, l’invariable milieu, les entretiens de Confucius, les œuvres de Meng Tzeu, Scotts
Valley : CreateSpace Independent Publishing Platform, 2017.
2. Réplique d’Elias de Kelliwic’h (Bruno Fontaine), Kaamelott, Livre V, épisode 9.
Livre I
Kaamelott au bureau
L’espace professionnel est un monde à part, entend-on souvent. C’est
un lieu qui doit être clairement séparé de la sphère privée et ne pas
empiéter sur cette dernière. En théorie, l’idée est charmante. Elle est
pourtant bien souvent difficile à mettre en pratique. Pourquoi ? Parce que
l’être humain n’est pas une machine, il se définit par un grand nombre de
choses ; le travail en fait nécessairement partie. Il nous permet de gagner
notre vie, certes, mais nous offre aussi un statut, donc une représentation
sociale. Et pas seulement : notre job fait partie intégrante de ce que nous
sommes, car il est synonyme d’intérêts personnels et de compétences
spécifiques. C’est tout le sens du final du Livre VI de Kaamelott : Arthur
comprend que son identité dépend aussi de son statut de roi de Bretagne,
avec toute sa complexité, ses qualités et défauts, les défis et responsabilités
que sa fonction suppose : « Je suis le roi Arthur, je ne me désespère pas,
jamais je perds courage, je suis un exemple pour les enfants. » 1
Gardez en tête que rien n’est jamais figé ; ce petit guide pourra ainsi
vous aider à tout moment de votre carrière. Car, comme le dit Perceval,
dans le fond, « ce qui compte, c’est les valeurs. » 2
C’est peu dire que le château brasse une jolie brochette d’énergumènes
en tout genre qui trouvent en ce lieu un espace de respiration, pour ne pas
dire un endroit où manger et dormir à l’œil !
Autant dire que nous n’allons pas au travail uniquement pour travailler.
Ce microcosme est positif dans un environnement sain car il vous permet de
vous élever ou, pour le dire autrement, de grandir et mûrir.
Que vous soyez roi, chevalier, valet, il vous faut apprendre à penser
votre espace professionnel comme un endroit où vous avez la possibilité de
vous épanouir. Le rapport au métier est considéré depuis longtemps comme
particulièrement aliénant pour des raisons économiques autant que sociales.
On travaille parce qu’on doit travailler. On le comprendra en remontant à
l’étymologie latine du terme : labor signifie tant « travail » que « peine » 1
et a donné en français le mot laborieux. On se référera aussi à la pyramide
de Maslow pour expliquer l’évolution du rapport au travail, partant des
besoins physiologiques primordiaux (la nécessité de survivre) jusqu’au
besoin d’accomplissement (le souhait d’être épanoui) 2.
Pour y voir plus clair, listez ci-dessous ce que vous n’aimez pas dans votre
travail. Cela peut être de tout ordre : missions, rapports humains,
aménagement du bureau, salaire, etc.
Quêtes : _____________________
Autres : _____________________
1. En latin : « Peine qu’on se donne pour faire quelque chose, fatigue, labeur, travail » (Félix
Gaffiot, Dictionnaire Latin-Français, Paris : Hachette, 1934).
2. Cette théorie, développée dès 1943 par le psychologue américain Abraham Maslow, entend
expliquer via une représentation pyramidale la hiérarchie des besoins, en fonction des
motivations et dans un ordre qui peut (mais pas nécessairement) être progressif. Les cinq
groupes de besoins identifiés sont les suivants : physiologiques, sécurité, appartenance et amour,
estime, accomplissement de soi. Cette théorie a depuis été remise en cause par différents
scientifiques, notamment pour son prétendu universalisme. Pour en savoir plus sur le sujet, lire
notamment Abraham Maslow, Devenir le meilleur de soi-même, Paris : Eyrolles, 2013 (1956
pour l‘édition originale).
3. Étude réalisée en 2019 par Viavoice sur un échantillon de 1 058 personnes en activité
professionnelle, représentatif de la population active française de 18 ans et plus.
4. Réplique de la Dame du Lac (Audrey Fleurot), Kaamelott, Livre III, épisode 65.
2
Un Kaamelott à votre image
N’oubliez pas que votre bureau est à votre image. Ajoutez-y des repères
qui vous permettront de vous y retrouver : des plantes, photos, tableaux,
objets que vous aimez… Si Karadoc en avait l’autorisation, il n’hésiterait
pas une seule seconde à installer une cuisine dans la salle de la Table
ronde : faites de même, le saucisson en moins.
Le choix de l’aménagement du bureau dépend aussi du nombre de
salariés que vous encadrez. Gardez en tête qu’un poste de travail est
personnel. Vous ne devez pas être en mesure d’observer ce que les salariés
que vous encadrez font ou ne font pas : cette attitude passerait pour un
manque de confiance, et risquerait d’entraîner une situation de défiance à
votre égard, ce qui n’est pas souhaitable. Trouvez plutôt une solution afin
de respecter l’intimité des autres : prévoir une grande Table ronde pour des
réunions d’équipe où chaque collaborateur se sent au même niveau – évitez
par exemple de vous asseoir sur un trône imposant qui n’ajouterait que de la
distance entre eux et vous. Et, dans le bureau en tant que tel, évitez les
situations où un salarié ne se sent pas à sa place : Merlin, dépossédé de la
jouissance entière de son espace de travail au profit d’Elias, pourrait vous
en dire long sur le sujet. Choisissez plutôt la stratégie inverse : définissez
clairement où chaque collaborateur va travailler et s’épanouir, et traduisez-
le matériellement. Il est à peu près certain que le plus fidèle des salariés du
roi n’aurait pas pris la poudre d’escampette si Arthur avait aménagé le
bureau des enchanteurs de façon cohérente et transparente.
1. Sur le sujet, lire notamment Jean Morval, La Psychologie environnementale, Montréal :
Presses de l’Université de Montréal, 2007.
2. Répliques de Guenièvre (Anne Girouard), Kaamelott, Livre IV, épisode 11 et épisode 54.
3. Kaamelott, Livre V, épisode 27.
4. Kaamelott, Livre II, épisode 66.
« La joie de vivre
et le jambon,
y’a pas trente-six recettes
du bonheur ! »
1
Karadoc
Il faut dire que le compère de Perceval est étonnant à plus d’un titre.
Sa capacité à ingurgiter le moindre aliment, même le pain produit par
Guethenoc (« C’est de la merde ! » 2), force le respect. Il le fait à toute
heure du jour et de la nuit mais en suivant un planning précis de 11
repas 3. S’il ne le respecte pas, il se sent à deux doigts du malaise :
« Sire, enfin, vous arrivez pour me sauver […] de l’hypolipémie ! […]
J’ai plus de gras dans le sang, je vais me mettre à peler, à perdre mes
cheveux ! » 4
Être ou ne pas être un chevalier. Telle est la question qui taraude tout un
chacun dans son quotidien professionnel. Et le bureau, à la façon d’un
château fantasmé du royaume de Bretagne, se déploie en un labyrinthe de
possibilités pour vous permettre d’évoluer sereinement dans vos rapports
avec votre boss, vos collègues, vos prestas – et même ce petit stagiaire
arrivé il y a quelques semaines et auquel on a quand même un peu envie de
s’attacher.
Être chevalier, ce n’est pas facile tous les jours. Il y a des matins où l’on
est revêche, où l’on a envie d’envoyer valser le roi avec sa satanée lubie du
Graal, voire de prendre le baluchon pour se frayer une voie romaine vers
une destination inconnue, tant que c’est loin de Tintagel et de ses
célébrations. Ces matins-là, on se questionne : est-on vraiment fait pour ça ?
a-t-on le bagage suffisant pour combattre un dragon ? et les quêtes de la
Dame du Lac, ne serait-ce pas plutôt pour une autre pomme que la sienne ?
Le Père Blaise est irrité par les récits d’aventures de Perceval dont
les détails changent en permanence. Il se met en colère : « Apportez-les
vous-même, les modifications, moi j’en ai marre, j’arrête ! » 5
Les valeurs jouent un rôle essentiel dans les objectifs personnels. Plus
encore, on pourrait dire que sans valeurs il ne peut y avoir d’objectifs. Et
pour cause, les buts que l’on se donne résultent de la recherche individuelle
d’une forme d’accomplissement. Pour le dire autrement, ils donnent du sens
à notre existence et justifient la quête de plaisir.
1. Sur le sujet des valeurs, lire notamment Jean-Marc Ferry, Valeurs et normes. La question de
l‘éthique, Bruxelles : Éditions de l‘Université de Bruxelles, 2020 et Christine Chataigné,
Psychologie des valeurs, Paris : De Boeck, 2015.
2. Kaamelott, Livre V, épisode 50.
3. Kaamelott, Livre VI, épisode 5.
4. Kaamelott, Livre III, épisode 2. Dans cet épisode, Léodagan subit une période de déprime.
Sa fascination pour l‘homicide, bien connue à Kaamelott, s‘éteint brutalement, inquiétant son
entourage jusqu‘à Arthur lui-même. Après une courte période de détente en Carmélide, il
revient en pleine forme et brûle 43 condamnés : « 43 exactement, parce que le voleur de l‘autre
fois, je l‘ai coupé en dés et je l‘ai donné à bouffer aux porcs. Oui, parce que c‘est thématique
avec la faute. Oh et puis merde hein ! Ça change un peu ! » – Réplique de Léodagan (Lionnel
Astier).
5. Réplique du Père Blaise (Jean-Robert Lombard), Kaamelott, Livre I, épisode 51.
2
Quelle(s) quête(s)pour quel chevalier ?
Pour y voir plus clair, revenons sur Léodagan. Ses objectifs sont
multiples.
Reprenons :
il a peur des armes et conspue le concept de guerre, prenant
n’importe quel prétexte pour éviter le combat : « Ennemi ou pas
ennemi, je refuse d’être menacé ! Imaginez que ça s’envenime et
qu’on en vienne aux mains… » 3 ;
il craint les animaux de la forêt, au rang desquels les faisans, « des
oiseaux de quatre pieds de long, je m’excuse du peu, mais je trouve
ça parfaitement terrifiant » 4 ;
il est parfois lâche, ou plus exactement fort impressionnable,
préférant par exemple donner toutes les femmes du royaume à Attila
plutôt que d’entrer en discussion avec lui : « Notre dernière heure a
sonné ! » 5 ;
il a une attitude d’enfant vis-à-vis d’Arthur, qui s’apparente à un
rapport affectueux de dépendance face à cette figure d’autorité ;
il hait le climat breton et préférerait délocaliser le château dans des
contrées plus chaudes, une situation qui le fait parfois glisser dans de
courtes périodes de dépression : « Y en a marre de ce temps de
merde, Sire ! On ne peut pas mettre le nez dehors sans attraper une
fluxion de poitrine ! » 6
Dans la sphère professionnelle, on tombe parfois sur des collègues
craintifs, et notamment dans leur rapport à la hiérarchie et à l’autorité.
Or, un salarié en retrait n’est pas nécessairement symbole de désintérêt
par rapport au travail. D’un point de vue psychologique, cette attitude
peut couvrir différents types de troubles anxieux, qui vont de la simple
timidité à la phobie sociale. Le sentiment de peur au travail peut aussi
s’étendre à la production en tant que telle. Pourquoi ? La nouveauté, par
exemple, peut être source de stress : de nouvelles méthodes de travail
imposées, un collègue qui vient d’être embauché, une modification des
espaces du bureau…
Face à votre Bohort ou dans son dos, évitez les peu subtils « il a peur
de tout », « il n’est pas courageux », « il n’est jamais satisfait », des
remarques moins constructives que blessantes et qui n’auront pour effet
que de l’isoler plus encore du reste de l’équipe.
Apprenez au contraire à l’aborder, à le connaître, à le comprendre.
Les personnes facilement sujettes aux poussées de stress présentent
généralement une grande sensibilité et un regard réfléchi sur leur
environnement.
Ces qualités humaines peuvent être des plus au travail : votre Bohort
sera par exemple très efficace dans les relations avec des clients, des
prestataires, en communication interne… Elles joueront également un
rôle fondamental et enrichissant dans les rapports entre collègues, et
particulièrement si votre boss organise des team buildings ou toute sortie
visant à la cohésion de la boîte : c’est peut-être lui qui, à la manière de la
fête du printemps, trouvera les bonnes idées pour enchanter tout le
monde !
Nous possédons tous des talents qui nous sont propres et peuvent être
utilisés dans le domaine professionnel. Perceval a par exemple une
incroyable capacité de calcul, qui aurait pu être mise à profit dans le cadre
4
de ses missions de chevalier . Arthur, en tant que manager, a manqué
l’occasion d’exploiter cette force. Prenez plutôt le parti inverse et employez
les qualités de vos salariés pour faire fructifier votre équipe.
Apprenez à affirmer ce que vous êtes, ce que vous aimez au travail, et à
exploiter vos compétences personnelles (dessin, musique, sport,
mathématiques, etc.) et celles de vos collaborateurs pour en faire un plus
dans la boîte : cette étape est nécessaire pour s’affirmer au travail, mais
aussi dans sa vie privée.
1. « Le travail occupe une place centrale dans la vie des Européens : seule une minorité de
personnes interrogées – moins de 20 % dans quasiment tous les pays – déclarent que le travail
n’est « pas très important » ou « pas important du tout » dans leur vie. […] La France occupe
une position singulière : elle se distingue des pays continentaux et méditerranéens par une
proportion plus importante d’habitants – de l’ordre de 70 % – pour lesquels le travail est « très
important ». » – Lucie Davoine, Dominique Méda, « Quelle place le travail occupe-t-il dans la
vie des Français par rapport aux Européens », dans Informations sociales, no 153, 2009/3.
2. Lire notamment Michel Borgetto, « « Crise des valeurs » et fonctionnement social »,
Informations sociales, 2006/8 (no 136) et Diane Girard, « Conflits de valeurs et souffrance au
travail », Éthique publique. Revue internationale d’éthique sociétale et gouvernementale, Nota
bene, vol. 11, no 2, 2009.
3. Réplique d’Arthur (Alexandre Astier), Kaamelott, Livre V, épisode 49.
4. Il n‘utilisera cette capacité à bon escient qu‘une seule fois à l‘occasion d‘un affrontement
entre les légions de Kaamelott et une armée ennemie : « On est 112, et les autres d‘en face ils
sont 744 […] en comptant les 13 du commandement. […] Je les ai bien vus, tout à l’heure, du
haut de la colline ! » – Réplique de Perceval (Franck Pitiot), Kaamelott, Livre II, épisode 18.
Étude de cas
Le management dont vous êtes le héros
Perceval arrive en courant vers vous. Il vous annonce, tout fier, qu’il vient
de réaliser une analyse poussée de l’évolution du nombre de saucissons
dans le garde-manger du château, en prenant en considération le déficit
causé par la consommation hypothétique de son ami Karadoc, en partant
d’une moyenne calculée à l’aide trois échelles : quotidienne, mensuelle,
annuelle. Il souhaite votre avis sur cette fameuse variable qui pourrait, lui a-
t-on dit, bouleverser le résultat de l’étude. La variable, c’est pas un aliment,
vous demande-t-il ?
saucissons, lui répondez-vous. On n’est pas à Kaamelott pour observer la consommation frénétique
de Karadoc, mais pour chercher le Graal ! Vous en êtes où, dans cette foutue quête ? Et ne me parlez
plus de variable ou vous vous prenez un pain !
B. Vous l’observez, le regard attendri, et lui expliquez posément que vous n’êtes pas opposé à
ce qu’il prenne sur son temps libre pour établir ce type de calcul mais que sa priorité, comme celle
des autres chevaliers, n’est autre que la quête du Graal. Il serait bon qu’il s’investisse autant dans
extraordinaire et vous l’invitez à réfléchir avec vous sur la meilleure façon d’exploiter cette force
A. Vous marquez un temps d’arrêt et prenez la nouvelle avec le plus de distance possible.
Vous êtes un spécialiste de l’armement, félicitez-vous Léodagan, et j’ai une entière confiance en vous
sur un incalculable nombre de sujets liés au domaine militaire. Attention néanmoins, ce type de
commande représente un coût considérable que le royaume ne peut pas forcément se permettre. Vous
l’invitez alors à revoir avec lui la procédure afin que vous puissiez intervenir dans la décision avant
l’officialisation de la commande.
B. Vous êtes hors de vous et entrez dans une colère noire : avant de dilapider les finances du
procédure ! Ou l’arbalète, je ne m’en servirai pas contre l’ennemi auquel vous pensez !
C. Vous êtes ravi. Vous savez pertinemment que Léodagan fait du très bon boulot et vous
avez entièrement confiance en lui. Certes, cet achat représente une petite fortune pour Kaamelott
mais, après tout, si le spécialiste pense la commande indispensable, vous ne voyez pas le problème.
Vous aurez toujours le temps de faire des économies, sur le saucisson par exemple.
Situation 3
Lancelot arrive au château sur son cheval, très fier, et vous explique, l’air
légèrement hautain, qu’il a passé la semaine à chercher des indices sur le
Graal et qu’il en a profité pour sauver une dizaine de personnes des mains
de certains des bandits qui traînent dans le royaume de Bretagne. Il a le
sentiment d’avoir bien avancé en vue de cet objectif mais craint d’être le
seul à se préoccuper tellement de la question. Même vous, vous accuse-t-il
avec un sourire amical, êtes moins intéressé par cette glorieuse quête
émanant des dieux que par votre quotidien seigneurial.
A. Vous retenez votre colère, mais vous ne vous laisserez pas traiter ainsi par votre
subordonné. Vous lui répondez calmement que vous êtes très satisfait de son job et que vous êtes ravi
qu’il soit dans votre équipe. Néanmoins, poursuivez-vous, il n’est jamais opportun de reprocher aux
autres de mal faire leur travail sous prétexte qu’ils le font différemment. Vous lui expliquez que vous
êtes le manager et que vous n’avez pas à justifier votre rôle au sein de l’équipe : « il y a des
responsabilités qui m’incombent et que vous ne soupçonnez pas. » Vous lui rappelez que vous êtes
très content de son travail mais que ce type d’invective ne doit pas se reproduire.
B. Vous vous mettez en colère : vous n’avez pas à vous justifier. Vous êtes le chef d’équipe
et, fort de ce statut, vous la dirigez de A à Z ! Seigneur Lancelot, gardez pour vous vos reproches et
travaillez plutôt vos rapports humains. Je suis content de votre job, certes, mais votre manière de
vous mettre toujours au premier plan, au détriment de l’ensemble des autres chevaliers, est tout
C. Vous rougissez et le regardez sans trop savoir que répondre. Vous n’avez pas tort, seigneur
Lancelot, vous êtes sans doute le chevalier le plus qualifié et le plus performant de l’équipe. Sans
vous, je ne suis pas sûr que l’objectif du Graal puisse être réalisable. Ne croyez néanmoins pas que je
me contente d’absorber votre travail sans rien faire de mon côté. Être roi, vous savez, est plus
compliqué qu’il n’y paraît : il y a les doléances, les stratégies de guerre, les cérémonies protocolaires,
les réunions avec la Dame du Lac, la gestion des royaumes fédérés et de ceux ennemis… Je suis bien
A. Vous explosez de rire et envoyez une violente tape affectueuse dans son dos. Allez,
seigneur Bohort, ce n’est pas grave. Les gens ne célèbrent pas le printemps en graillant de la
charcute. Ne vous bilez pas tant. On pourra très bien remplacer cette victuaille par des fruits et des
graines. Vous êtes probablement le seul, de toute façon, à trouver un intérêt dans cette fête annuelle.
B. Vous posez une main sur son épaule, geste que vous espérez rassurant, et le regardez dans
les yeux. Ce n’est pas grave, seigneur Bohort, nous trouverons une solution adéquate en
pour le réprimander et l’inviterai à vous aider dans l’organisation des buffets de cette célébration.
Vous le remerciez de vous avoir averti de ce problème et entamez un nouveau sujet pour lui libérer
C. Vous levez les yeux au ciel et posez une main ferme sur son épaule pour éviter qu’il ne file
dans le couloir. Seigneur Bohort, commencez-vous en prenant sur vous pour ne pas vous mettre en
colère, je vous ai dit cent fois de ne pas laisser les victuailles des banquets dans le garde-à-manger.
Depuis combien d’années êtes-vous à Kaamelott ? Cinq ans ? Six ans ? Vous savez pertinemment que
le seigneur Karadoc s’empare de tout ce qui s’y trouve. Ne venez pas vous en plaindre maintenant.
Bonnes réponses : 1. C. ; 2. A ; 3. A ; 4. B.
Livre II
1. L’épithète est choisie par Lancelot lui-même pour se caractériser lors de l’entretien préalable
à son intégration à la Table ronde : Kaamelott, Livre VI, épisode 3.
2. On peut considérer l’absence de réaction d’Arthur, au moment du départ de Lancelot, comme
une manière de laisser au chevalier le choix de son avenir professionnel sans lui mettre de
pression, une stratégie qui démontre la grande maturité du manager.
Épisode 1
Chacun de nous a des capacités qui lui sont propres. Certains sont
passionnés de musique, d’autres ont une imparable logique, sont des férus
d’histoire, des maîtres du jeu vidéo, des amoureux de la bonne chère… Ces
particularités peuvent avoir des incidences, directes ou indirectes, dans
votre travail. Elles dévoilent en tout cas en filigrane une sensibilité et des
émotions qui n’appartiennent qu’à vous. Pourquoi ne pas les mettre en
avant à l’occasion de ce rendez-vous ?
Dans cette situation, Lancelot joue un rôle qui lui sert à démontrer une
réalité : il est courageux et capable, et il en a conscience. Cette réalité est
son argument fondamental (avoir les compétences d’un véritable chevalier),
son jeu repose quant à lui sur l’acceptation de ces compétences.
Concrètement : il se dit bon dans son travail mais n’est pas pédant, ce qui
lui évite d’affirmer (quand bien même il le penserait) qu’il n’a plus rien à
apprendre.
Quand vous avez fait le tour des questions qui vous taraudent
l’esprit, invitez le candidat à poser ses questions, s’il en a. Cela vous
montrera s’il s’est réellement intéressé à l’entreprise avant l’entretien ou
non. Cela lui permettra également d’interroger les valeurs de la boîte et de
comprendre s’il se projette en son sein. C’est en outre le premier vrai
instant où vous tissez un lien humain avec lui, en l’invitant à se mettre à
votre place.
Face à votre Merlin, restez objectif, sans vous laisser altérer par vos
émotions. Plutôt que de décrier le travail de votre collègue et mettre en
doute ses compétences, prenez le parti inverse : soutenez-le dans ses
initiatives, encouragez-le et félicitez-le quand il atteint les objectifs qu’il
s’est fixés.
Nul doute que Merlin n’aurait pas claqué la porte si les chevaliers lui
avaient montré un peu plus de considération !
Les premiers pas dans une nouvelle boîte sont parfois effrayants.
Certains d’entre nous peuvent éprouver des difficultés à y trouver leur
place. Pourquoi ? Parce que rejoindre une Table ronde suppose différents
positionnements en tant que salarié mais aussi de manager. Nous sommes
censés épouser les valeurs et les objectifs du château, par exemple une
quête du Graal. Ces objectifs sont communs aux salariés investis de cette
mission mais aussi personnels ; en tant que responsable d’une équipe, vous
devez être capable de soutenir les collaborateurs pour les aider à se projeter
dans ces finalités inhérentes à leur fiche de poste respective.
Un chevalier, quel que soit son statut hiérarchique, doit également
savoir s’adapter à l’environnement matériel qui compose l’espace de
travail : le château, les geôles, les caves… Disons-le autrement : il doit
développer des repères, qui relèvent de l’intimité, dans l’espace qui
l’entoure. La décision d’améliorer son espace de travail peut être portée par
le manager, en lien direct ou indirect avec sa propre hiérarchie 1.
Sa place d’exception repose donc sur une stratégie, réfléchie juste avant
la légitimation d’Arthur en tant que roi de Bretagne. Mais ce sont ses
compétences qui lui ont permis de garder son poste, de nombreuses années
durant : il est parvenu à assurer son autonomie au regard de sa hiérarchie en
développant ses compétences, héritées de son apprentissage en Carmélide,
notamment auprès de son père.
1. Cette supposition est à l‘image de sa proposition lorsque Bohort est chargé d‘organiser
l‘événement : Kaamelott, Livre II, épisode 42.
2. Lire « Avoir fait ses classes ».
3. Pour ce faire, vous pouvez vous aider du tableau ici.
4. Pour se faire, vous pouvez vous aider du tableau ici
3
Soi-même et les autres
Travailler avec autrui suppose de partager avec lui une partie de sa vie.
Or ce n’est pas toujours chose facile, et ce, pour de nombreuses raisons :
des personnalités en contradiction, des non-dits, des rumeurs, des disputes
entre collègues… Au travail, la sociabilité est très importante car elle
participe à l’environnement professionnel (le bien-vivre). Même Léodagan,
avec son tempérament fort et sa tendance facile à la colère, joue
parfaitement le jeu en étant avec les autres.
On peut voir dans les échanges entre collègues une forme de partage, de
communion autour d’un intérêt : le bien-être de la boîte. C’est aussi une
mécanique à activer dans le cadre du développement personnel au travail
car les relations pourries au bureau ont des effets négatifs individuellement,
qui peuvent s’exprimer de diverses manières : attitude d’isolement,
augmentation du stress, remise en cause de soi et de ses propres
compétences, etc.
Il faut dire que Léodagan n’a pas sa langue dans la poche, et il n’hésite
pas à exprimer franchement ses opinions, que ce soit à la Table ronde ou
devant la table à manger. Cette authenticité joue un rôle fondamental dans
les relations avec les autres : toujours être soi-même avec ses collègues, une
règle à laquelle il ne faut jamais déroger.
Ne soyez malgré tout pas trop dur avec les autres. Dans une
conversation, restez ouvert d’esprit : nous percevons tous le monde d’une
manière différente. Rappelez-vous que nos préjugés jouent un rôle
important dans notre rapport à autrui – ils nous permettent de nous
construire un cadre rassurant dans lequel nous pouvons évoluer. Même si
des différends surgissent avec un collègue, un salarié que vous managez,
pensez que vous avez sans doute plus de choses en commun avec lui que
vous ne l’imaginez.
S’intéresser aux autres, c’est faire preuve d’empathie. Les gestes, les
attitudes, permettent de passer un message qui ne s’exprime pas
nécessairement dans le langage. Et là où Léodagan ne fait pas autorité, c’est
sur la bonne humeur. Il n’est pas réputé pour sa bonhomie et sa chaleur
humaine. Pour autant, et malgré un caractère bien trempé, il est important
de se montrer ouvert aux autres. Dans cette perspective, le sourire est d’or,
même quand vous êtes de mauvaise humeur. Il vous rendra accueillant et
vous aidera, en outre, à vous sentir plus heureux. Inutile, bien sûr, de sourire
à tout-va, restez vous-même. Mais l’esquisser au moment du bonjour
matinal, par exemple, vous aidera à commencer la journée sous de bons
auspices et à maintenir des liens chaleureux avec vos collègues.
Être sociable, c’est accepter l’autre, avec ses qualités et ses défauts.
C’est aussi se dévoiler en partie, faire tomber les barrières. Plus qu’un
ensemble de techniques, c’est un état d’esprit à intégrer à votre manière
d’être au quotidien, avec l’ensemble de vos collaborateurs : salariés
encadrés, boss, collègues au même niveau hiérarchique… Ne soyez jamais
en retrait, en particulier avec votre équipe ; au contraire, les échanges sont
toujours constructifs et vous aideront à ériger une image positive de vous-
même auprès de la chaîne intégrale de hiérarchie.
« Y’en a marre
de se comporter comme
des sagouins avec tout
le monde sous prétexte
qu’on
a des responsabilités ! »
1
Dame Séli
Son rapport au travail est sain, même s’il n’en saisit pas l’enjeu : « Moi,
j’ai arrêté le Graal. […] Au bout d’un moment, c’est un truc à se casser les
dents, ça ! Non, moi je m’occupe de mon cas, c’est déjà pas mal. » 2 Pour
autant, il semble plutôt satisfait de sa condition et, surtout, de sa place de
choix auprès d’Arthur : il avouera même au roi qu’il quitterait
immédiatement le château si ce dernier lui déclarait qu’il ne l’aimait pas 3.
Comment Perceval fait-il pour rester aussi serein ? Il exerce la
méditation. L’épisode de la canne à pêche 4 est sur ce point révélateur :
Arthur surprend son chevalier en train de pêcher à l’aide d’un grand bâton
au bout duquel est suspendu un simple fil. « Je ne sais pas comment vous
expliquer… ça me détend. […] Il y en a qui picolent, d’autres qui se battent
à l’épée… Moi, je fais ça. Au moins je ne fais de mal à personne. » 5 Et,
plus loin dans l’épisode : « Moi, la canne, ça m’aide. Je visualise le caillou
dans l’eau. J’ai l’impression de faire partie d’un tout. Moi, le caillou, le fil,
le lac, le ciel. C’est entier, vous comprenez ? C’est bien fini. » 6
Inutile pour autant de vous rendre autour du lac le plus proche pour y
manier la canne à pêche. La méditation peut se faire dans n’importe quel
endroit, et notamment au travail : en réunion, à son bureau, sur le terrain,
durant une pause, aux toilettes…
BON À SAVOIR
La loi, qui peut être renforcée par la convention collective,
encadre le droit de faire des pauses au travail. « Dès que le
temps de travail quotidien atteint 6 heures, le salarié doit
bénéficier d’un temps de pause d’au moins 20 minutes
consécutives. La pause est accordée soit immédiatement après
6 heures de travail, soit avant que cette durée de 6 heures ne soit
entièrement écoulée. » 1 La rigidité d’une telle mesure ne permet
certes pas de l’appliquer au pied de la lettre au quotidien. Pour
autant, les droits d’un salarié supplantent nécessairement les
exigences de son supérieur : vous avez donc toute légitimité à
vous arrêter pour souffler.
1. « Temps de pause du salarié dans l’entreprise : quelles sont les règles ? », sur service-
public.fr, consulté en janvier 2020.
« Là, vous faites sirop
de vingt-et-un et vous
dites : beau sirop, mi-
sirop, siroté, gagne-sirop,
sirop-grelot, passe-
montagne, sirop
au bon goût. »
1
Perceval
Devenir chevalier n’est pas une mince affaire, même pour quelqu’un
comme Arthur, ou Léodagan. Parmi les personnages de Kaamelott,
Lancelot est peut-être le seul qui entend sa fonction comme un
prolongement de lui-même.
Cela vous permettra de vous épanouir dans votre quotidien, donc d’être
plus heureux dans votre vie, tant au travail qu’en dehors du bureau. Cela
vous aidera également à être plus efficace à votre poste, en redonnant du
sens à ce que vous faites, à ce que vous êtes. En vous libérant des doutes,
des angoisses, vous pourrez développer votre concentration, votre façon de
vous organiser et, dans cette perspective, vos compétences de chevalier.
Votre personnalité :
est un plus dans votre métier.
ne doit pas entrer en contradiction avec votre métier.
est plus importante que votre métier.
est en sourdine dans votre métier.
La pleine conscience :
est une philosophie qui vous permet de moduler votre personnalité.
est une forme de méditation pour apprendre à être zen.
est une métaphore futuriste et utopiste visant à améliorer son mode de
vie.
je ne sais pas ce que c’est.
Vous vous rendez au travail parce que vous le devez et non parce que vous le souhaitez.
Évidemment, l’un des objectifs d’un emploi est d’en tirer de l’argent. Mais ce ne doit pas être le
seul : il est essentiel que vous vous retrouviez dans votre métier, que ce soit dans vos tâches, vos
objectifs, votre statut… Questionnez-vous sur vos valeurs et interrogez leur sens dans votre
poste actuel. Vous êtes peut-être tout simplement malheureux dans ce que vous faites, la preuve
en est que vous êtes dans une démarche d’évitement, privilégiant les pauses à l’excès, et
Vous n’êtes pas heureux au travail, c’est clair. Chaque journée est une nouvelle torture, au
point que vous devenez agressif avec ceux qui vous entourent. Et c’est dommage, car vous
travaillez beaucoup, vous obéissez toujours aux exigences de votre hiérarchie, la boule au
ventre. Attention : vous ne vous épanouirez pas de cette manière. Revenez à la première leçon
du guide et identifiez vos valeurs et objectifs. C’est peut-être le moment opportun pour prendre
Vous êtes extrêmement investi dans votre travail, au point que vous voulez toujours faire les
choses trop bien. Vous ne prenez pas de pauses, ou rarement – vous n’en voyez pas l’intérêt.
Vous voulez plaire à votre chef et vos collègues et, pour ce faire, vous jouez un rôle au
quotidien. Le point positif, c’est que vous êtes passionné. Attention néanmoins à ne pas vous
brûler les ailes à vouloir trop en faire. Reprenez cette leçon pas à pas et refaites le test.
Poursuivez ensuite sur la suivante et faites le point sur votre rapport au travail : est-il sain ? y
êtes-vous heureux ?
Vous êtes épanoui dans votre job. Vous prenez plaisir dans vos missions, vos relations avec
vos collaborateurs sont saines et vous savez vous garder du temps pour vous. Vous affirmez
votre personnalité au travail sans être excessif. Poursuivez la leçon pour apprendre à développer
vos compétences au quotidien.
Livre III
Bohort est bien mal en point quand tout Kaamelott apprend que, malgré
son statut de chevalier, il n’a jamais fait ses classes, c’est à dire qu’il n’a
jamais reçu d’éducation militaire 1. Dans votre job, les armes ne sont a
priori pas indispensables et même, la plupart du temps, furieusement
déconseillées. Mais entendons l’expression autrement : la formation, et
surtout l’expérience professionnelle, marquent autant de pas qui vous
permettent de maîtriser votre travail. C’est ce qu’on appelle les acquis, à la
source des compétences.
Cet ensemble doit être employé avec une certaine souplesse d’esprit,
« combiner et mobiliser un ensemble de ressources personnelles et externes
pertinentes pour réaliser, dans un contexte particulier, des activités
professionnelles selon certaines modalités d’exercice (critère d’orientation)
afin de produire des résultats (services ou produits) satisfaisant à certains
critères de performance pour un client ou un destinataire. » 6
Pour faire évoluer ses compétences, il faut avant tout les cerner. Chacun
de nous est conscient d’une partie de ses connaissances dans son domaine
professionnel, mais une autre, souvent étendue, nous échappe
nécessairement. Il s’agit des compétences liées à notre éducation scolaire et
familiale, à nos loisirs, à nos anciens métiers… La liste est quasi infinie.
De même, pour améliorer ses compétences de manager, il faut prendre
le temps de repérer et développer les compétences de ses collaborateurs,
c’est à dire identifier les leviers d’évolution, et les accompagner dans cette
démarche.
Vous pouvez bien sûr vous lancer dans un bilan de compétences 7. Cela
vous permettra de jauger vos acquis professionnels et vos qualités
personnelles, et de cibler ou recentrer votre carrière. Cet exercice a
l’avantage de mettre en exergue des aptitudes que vous ne soupçonniez pas
car vous ne les exploitez pas dans votre vie de tous les jours. Mais il vous
est également possible de les lister vous-même. Dans le tableau ci-dessous,
indiquez vos qualités personnelles et associez-les à des compétences
spécifiques. Trouvez ensuite un moyen de les développer, par exemple en
prenant des cours, en suivant une formation accélérée, en lisant sur le sujet
pour renforcer vos connaissances en la matière… Pensez à indiquer à
chaque fois le coût approximatif d’une telle démarche. Vous pourrez ainsi
en mesurer la faisabilité.
Ce type d’exercice peut être mené en équipe, lors d’ateliers qui peuvent
être anonymes. C’est une bonne façon de stimuler le désir d’évolution des
salariés que vous managez, et de les inviter à se dépasser. Pensez à vérifier
en amont si l’entreprise peut se permettre de financer des formations, et
dans quelle mesure.
Combattre l’ennemi
Il est vrai que l’homme n’a pas à craindre pour sa place à Kaamelott.
Figure essentielle du château, il est celui qui forme les chevaliers aux armes
et qui les maintient à niveau. « C’est capital, de s’entraîner ! En combat
réel, vous allez droit au casse-pipe, avec votre surcharge pondérale ! » 2 La
surcharge pondérale en moins, il n’a pas tout à fait tort. Car à Kaamelott,
comme dans tous les lieux de travail, le danger est partout. Et il ne se
manifeste pas toujours par la force armée ; il y a des prestataires grincheux,
des collègues impossibles, des collaborateurs toxiques, la concurrence…
Au quotidien, le boulot est un véritable champ de bataille. Et Merlin n’est
pas toujours là pour vous prêter main-forte.
1. Réplique du Maître d’armes (Christian Bujeau), Kaamelott, Livre VI, épisode 6.
2. Ibid., Livre II, épisode 76
1
Jauger la concurrence
Quel que soit le Graal que vous cherchez, soyez certain qu’une autre
équipe de chevaliers planche également sur la fabuleuse quête. La
concurrence peut être rude et source de combat. Imaginez par exemple
qu’un de vos collaborateurs quitte la boîte pour lancer sa start-up dans le
même corps de métier, comme Lancelot, et qu’il parvienne finalement à
récupérer l’objet magique avant vous, mettant en cause l’ensemble de votre
mission. Votre entreprise aurait l’œil triste, et vous la boule au ventre. Pour
éviter ce type d’anicroche et maintenir un faciès de leader afin de briller
face à votre hiérarchie, quelques règles s’imposent. Attention néanmoins à
ne jamais déclarer la guerre à l’un de ces ennemis, soyez plus subtil ; on
travaille toujours avec les autres, même s’il s’agit de concurrents, et jamais
contre eux.
Dans cette situation, c’est son statut de roi qui lui permet de jouer de
son autorité pour réduire à néant la montée en puissance de la colère de
Karadoc et du Père Blaise 4. Mais nous n’avons pas tous l’intitulé de poste
qui va avec. En tant que manager, suivez plutôt cette stratégie :
organisez une entrevue entre les deux parties en conflit pour les amener
à exprimer posément leurs griefs. Ce type de situation doit se dérouler
dans le calme du début à la fin. Le manager joue alors un rôle de
conciliateur. Il doit être capable d’apaiser les deux salariés et d’étouffer
les éventuelles montées de colère. À l’issue de la confrontation, il
propose des solutions permettant de poursuivre la vie de bureau dans un
climat plus paisible : une nouvelle répartition des tâches, une
distanciation imposée entre les deux personnes, des moments de team
buildings pour renforcer la cohésion d’équipe, etc. ;
si la situation est plus compliquée, ou si vous-même êtes aux prises
avec un autre collègue, faire appel à un médiateur est plus adapté. Il
peut s’agir d’un collègue, ou d’un professionnel, qui parviendra à rester
complètement objectif au regard de la situation.
Les situations pourries entre collègues peuvent aussi avoir une origine
plus profonde, qui repose sur une personne en particulier. On l’appelle le
collègue toxique, mais ce peut être un chef 1, un client, un prestataire… Ces
personnes sont de plusieurs types : il y a des manipulateurs invétérés, des
critiqueurs à tout-va, qui usent de stratégies de sadisme parfois difficilement
identifiables comme l’intimidation et l’humiliation. Le pervers narcissique
en est le modèle suprême, ce personnage, sympathique au premier abord,
qui emploie toutes les techniques possibles, sans empathie, pour se mettre
en valeur et en tirer un profit personnel 2.
1. Réplique du Maître d’armes (Christian Bujeau), Kaamelott, Livre II, épisode 52.
Profil no 7 : Décryptage
Le vulgo-collègue
« En garde, espèce de vieille pute
dégarnie ! » 1
Parmi les collègues insupportables, il y en a un qui, parfois, nous fait
nous esclaffer au travail et, à d’autres moments, nous donne
furieusement envie de lui mettre un pain. Ce salarié, c’est le vulgaire. Il
a la langue bien pendue et épicée, et ne manque jamais une occasion de
balancer une blague sale, voire carrément immorale. En soi, ce collègue
n’est pas fondamentalement méchant. Il peut même être plein de
sympathie et de bonne volonté. Et ses expressions décadentes amusent
plus souvent qu’elles ne blessent.
Il peut malgré tout être compliqué de travailler avec lui, tant en tant
que collègue direct que manager, car le vulgos est, comme chacun de ses
pairs, un fier représentant de sa boîte. Et aucune entreprise ne souhaite
être assimilée à un langage de charretier.
C’est un peu le Maître d’armes de votre boîte, celui capable de
déclamer des « petite bite », « petite pédale » ou « petite tapette », des
« vieille pute dégarnie » ou « grosse conne », et on en oublie ! Il n’a pas
peur d’être taxé de sexiste, d’homophobe, de raciste, car tout le monde
en prend pour son grade sans ciblage spécifique – ce qui, soyons clair,
n’est pas plus légitime. Il insulte copieusement son prochain, avec une
certaine forme de camaraderie, et sans se préoccuper, le plus souvent, du
statut hiérarchique de son interlocuteur. C’est ainsi que le Maître
d’armes prendra grand plaisir à injurier Arthur afin de stimuler sa verve
combattante.
Que faire si votre collègue ou le salarié que vous encadrez fait partie
de cette catégorie ? Sachez d’abord qu’une insulte ciblée (sexiste,
homophobe, raciste…) dans le cadre professionnel peut être considérée
par la loi comme une forme de harcèlement au travail. Si ce type de
situation se présente, il convient de rappeler à l’ordre le salarié en lui
expliquant les textes de lois et les risques qu’il encoure. Dans le cas d’un
injure jugée humiliante, voire dégradante, une réaction disciplinaire peut
être décidée en concertation avec votre hiérarchie et/ou votre direction
des ressources humaines.
Le cas du collègue non nuisible mais au langage de charretier est
plus délicate, pour la simple raison qu’aucune loi n’interdit de parler de
manière grossière au travail.
Le vulgo-collègue n’est pas entièrement maîtrisable. Apprenez
néanmoins à le connaître et tissez un lien humain avec lui. Ses
expressions parfois inattendues au bureau amusent l’équipe ; il peut ainsi
tenir un rôle fondamental dans la cohésion d’équipe.
Tout chevalier qui se respecte doit apprendre à servir son roi. Attention,
cela ne signifie pas être soumis à son chef. Bien au contraire. Servir son roi,
c’est trouver la bonne adéquation entre ses exigences professionnelles (vos
objectifs imposés) et ses intérêts en tant qu’individu dans le travail (vos
objectifs personnels).
La notion de hiérarchie peut néanmoins être problématique dans vos
relations avec lui, et notamment si vous managez une équipe. Après tout, le
roi est un être humain, il a donc des défauts et des qualités. Il n’est pas
irréprochable et peut même, parfois, être carrément pénible. Comme vous.
1
Faut-il être ami avec son roi ?
Le lien qui existe entre deux personnes, par choix ou par obligation, est
précieux mais fragile. Parvenir à maintenir ce rapport empathique est
compliqué car les personnalités peuvent entrer en confrontation. Il est
essentiel de prévoir des moments de partage, tant du côté du salarié que du
manager. Cela peut passer par l’organisation des déjeuners d’équipe mais
aussi par des demandes plus spontanées : prendre un café ou déjeuner seul
avec son boss, à la demande de l’un ou l’autre des deux parties, comme
Perceval le fait fréquemment avec Arthur, permet par exemple de clarifier
certaines attitudes que l’un des deux côtés aurait mal interprétées.
1. Hélène Jacob, C’est qui le chef ?… Ou comment gérer son boss, Paris : Vuibert Pratique,
2011.
2. Kaamelott, Livre II, épisode 90.
3
Et si le roi est toxique ?
1. Chiffres issus de l’enquête « Le manager idéal », réalisée en 2011 par BVA pour BPI Group
dans 11 pays, sur un panel de 6 800 salariés.
2. Enquête Ipsos réalisée en 2000 sur un panel de 471 salariés. Ce chiffre est à mettre en
relation avec d’autres études : selon un sondage Cegos réalisé en 2015 sur un panel de
1 204 personnes, 61 % des salariés estiment subir un stress régulier lié à la charge de travail et
73 % considèrent que leur métier empiète sur leur temps personnel.
3. Enquête IFOP menée en 2018 sur un échantillon de 2 008 salariées.
4. Si certaines scènes de la série pourraient être jugées sexistes, comme d’autres homophobes
ou racistes, elles doivent être remises en lien avec l’œuvre dans son ensemble qui se veut un
reflet critique de notre société actuelle. Nous ne prendrons donc pas ce parti ici.
5. Code du Travail, article L1152-1.
6. Vous pouvez consulter le site du ministère du Travail qui explique clairement la marche à
suivre : www.service-public.fr. Ce type de démarche, qui peut être lourde, résulte d’un choix qui
n’appartient qu’à vous, le principal étant que vous trouviez l’épanouissement, d’une manière ou
d’une autre.
« J’ai dit :
“Le roi je l’emmerde.”
Mais c’était dit sans
méchanceté. »
1
Lancelot
Être manager est un travail à plein temps. Il est même double car il
suppose :
– de mener à bien les objectifs qui vous ont été donnés, tant dans la
production (si vous êtes également exécutant) que dans la gestion cohérente
et organisée de l’équipe – trouver le Graal avec ses chevaliers de la Table
ronde, les piloter pour mener des quêtes annexes, décider de stratégies de
guerre…
– de protéger cette équipe, au sens large du terme ; c’est vous qui êtes
garant de l’ambiance et du bien-être des salariés dans la limite du pouvoir
qui vous est octroyé en tant que responsable – permettre à chacun de
trouver ses repères dans votre Kaamelott, être présent en cas de besoin, ne
pas craindre d’être médiateur si deux chevaliers en viennent aux armes.
Cette double mission est parfois lourde à gérer – nous n’avons pas tous
le même bagage, qu’il soit lié aux expériences passées ou à sa propre
personnalité – mais ce n’est pas rédhibitoire : chaque salarié a en lui la
force de devenir un jour manager. Observez Karadoc : qui aurait pu
imaginer qu’un jour il grimperait sur le trône du roi de Bretagne ? Et qui
peut dire qu’il exerce mal le pouvoir ?
Vous devez être assez flexible dans la mise en pratique de ces leçons
pour avoir la réponse adéquate dans une situation spécifique. Car, de la
même manière, aucun collaborateur ne ressemble à un autre.
« Un manager, comme un dirigeant, est souvent seul face à lui-même et
n’a pas le loisir de se confier à qui que ce soit pour livrer son état
émotionnel, ses doutes et ses craintes, quelquefois ses anxiétés. Et pourtant,
sa capacité à douter, à douter de soi, de ses actions, des décisions passées et
de son aptitude à faire face, transformera le manager en leader en
l’autorisant à remettre en question ses points de vue, en osant agir de
manière différente. » 1
Être chef, c’est d’abord être coach, c’est à dire se positionner dans
une stratégie de conseil et de soutien, et non dans une démarche autoritaire.
Concrètement, formez et échangez avec vos managers pour trouver la
bonne manière de communiquer avec eux, mais évitez dans la mesure du
possible de donner des ordres. Vos objectifs ayant été énoncés en réunion,
vous devrez intervenir plutôt sur la réflexion, par exemple de la stratégie,
mais pas sur l’organisation concrète de la production.
C’est ce qu’on appelle co-construire en communauté, développer le
travail d’équipe – et ne pas centraliser les décisions entre les mains d’une
personne, vous en l’occurrence.
Être en lien permanent avec les autres ne signifie pas faire n’importe
quoi. Si Arthur profite de moments de détente avec ses chevaliers, s’il joue
à la balle ou boit une cervoise à leurs côtés, il maintient toujours son
autorité de roi, qui est indiscutable. Faites de même.
Être un bon roi, c’est être un roi exemplaire. Comme Arthur avec ses
chevaliers, apprenez à demander de l’aide à vos collaborateurs. Le roi de
Bretagne est toujours assisté lors des séances de doléances, il ne part jamais
seul au combat, et il est souvent en demande de conseils pour mener à bien
des missions spécifiques. Avoir le soutien des autres n’est pas négatif. Au
contraire, soyez ouvert à de nouvelles manières de penser et d’agir.
Vous serez sans doute amené à faire des erreurs : c’est tout à fait
normal. Il faut savoir les accepter. La remise en question d’Arthur, tout au
long du Livre V, en est un exemple fort 1. Évitez ainsi d’exprimer votre
déception : « Des collaborateurs qui savent rien faire, excusez-moi mais,
depuis la Table ronde, j’ai que ça, des collaborateurs qui savent rien
faire. » 2 S’ils ne sont pas aussi efficaces que vous ne l’aviez souhaité, peut-
être que la faute vous revient : les avez-vous formés comme il se doit ?
avez-vous exprimé clairement leurs objectifs ? les avez-vous aidés à définir
une stratégie et une organisation de travail cohérente pour ce faire ?
Nous commettons tous des erreurs ; l’admettre ne remettra pas en cause
votre statut de chef.
De plus, ne vous couronnez pas des lauriers de vos collaborateurs : leurs
réussites sont aussi les vôtres, mais ce sont eux qui les ont menées.
Félicitez-les et ne vous accaparez pas leur travail, de la même manière que
vous n’avez pas à assumer chacune de leurs erreurs.
En outre, soyez réaliste. L’une des erreurs d’Arthur est d’avoir emmené
ses chevaliers vers une quête très difficile, celle du Graal, et d’attendre
d’eux des résultats concrets, rapides, sans leur donner de marche à suivre.
Au bureau, certains objectifs sont irréalisables, faute de temps, de moyens
humains ou matériels, en raison d’imprévus au bureau (un collaborateur
malade, par exemple).
Clarifier les objectifs d’une équipe, c’est se donner les moyens de les
mesurer sur une période précise : soyez honnête, transparent, et donnez des
deadlines. L’organisation de la production, quelle qu’elle soit, repose sur cet
échange.
1. Cette remise en question s’exprime lors de la longue période de doutes existentiels que vit
Arthur, qui a abouti à une dépression et son abdication. Cette métaphore est extrême, mais elle
met néanmoins en exergue sa grande capacité à interroger son statut, ses choix, son histoire en
tant que roi de Bretagne.
2. Réplique d’Arthur (Alexandre Astier), Kaamelott, Livre V, épisode 9.
4
« On en a gros » :
un roi gère les crises sociales
1. Réplique de Perceval (Franck Pitiot) et Karadoc (Christophe Hembert), Kaamelott, Livre II,
épisode 36, et Livre IV, épisode 15.
2. Lorsque Guethenoc, caricature du paysan, se rend à Kaamelott pour se plaindre de ses
conditions de travail, on ne peut pas dire qu’il soit reçu les bras ouverts. Dans les trois épisodes
« La révolte », Alexandre Astier transpose nos mœurs franco-françaises (l’image de l’habitude
des révoltes, chère aux Français) dans un contexte médiéval fictionnel qui n’appartient qu’à la
série. Il donne ainsi le reflet des batailles entre l’instance de pouvoir étatique et le porte-parole
du peuple lui-même. Ce rapport pourrait en effet trouver un écho dans les relations
grévistes/patron – Kaamelott, Livre II, épisode 23 ; Livre III, épisode 49 ; Livre IV, épisode 31.
3. « Le CSE dans les entreprises de 11 à 49 salariés », https://travail-emploi.gouv.fr, consulté en
juin 2020.
4. Réplique d’Arthur (Alexandre Astier), Kaamelott, Livre II, épisode 36.
5. Arthur finira par écouter leurs doléances, si absurdes (et drôles) que nous ne nous arrêterons
pas dessus.
6. Sur les PSE, lire notamment Delphine François-Philip B. de Saint-Julien, Les plans de
sauvegarde de l’emploi. État des lieux, architecture d’un PSE, mesures de reclassement,
perspectives, Metz, Éditions Liaisons, 2010.
« Je sais que je suis venu
officiellement pour tenter
de retirer l’épée, mais j’ai
trouvé ici quelque chose
de beaucoup plus
précieux, j’ai trouvé
la sérénité affective. »
1
Le Duc d’Aquitaine
« Je vais vous dire, quand on sait mener trente-cinq couverts sans une
fausse note comme hier soir, les doigts dans le nez on dirige le clan
autonome. » 1 À la taverne, Perceval et Karadoc font le tour de la question ;
oui, monter un clan autonome est une bonne idée, et oui, ils le feront
certainement mieux que Lancelot : « Évidemment, c’était pas un mauvais
gars mais il avait pas les épaules. » 2
L’ambition des deux chevaliers de la Table ronde est louable. Mais être
son propre roi ne se décide pas sur un coup de tête, basé sur des
considérations très personnelles : se lever à l’heure que l’on souhaite, éviter
les réunions « qui servent à rien », décider de sa propre équipe pour éviter
de « bosser avec des mecs qui sont pas taillés pour l’aventure » 3. Le clan,
qu’ils nommeront « les Semi-Croustillants », n’accomplira aucune quête
digne des chevaliers de la Table ronde, moins encore celle du Graal.
Pour éviter ce type de crise existentielle (quel est mon but ? à quoi je
sers ? est-ce que je souhaite être roi ? dois-je assassiner le roi en place pour
ce faire ?), définissez dès l’origine l’identité de l’entreprise 3. Projetez-vous
en développant un calendrier concret et, au sein de ce dernier, considérez
l’aspect strictement humain : combien de salariés seront nécessaires à
l’évolution positive de l’entreprise ? Et quand elle prendra son envol,
combien de salariés pourrez-vous embaucher ? Pour faire quoi ? Sur quel
calendrier ? Ces questions doivent vous interpeller au moment de la mise en
place de votre business plan.
PIÈGE À ÉVITER
Nombre d’entrepreneurs font l’erreur de ne pas définir en
amont la composition espérée de l’équipe. Or, au-delà du nom
de la boîte (ne vous faites surtout pas appeler les « Semi-
Croustillants » !), cette démarche évitera les conflits qui
risquent de naître au moment du réel développement de votre
structure ainsi que la frustration de vos collaborateurs, de
laquelle peuvent émerger des luttes de pouvoir.
Ne promettez pas aux autres un statut, ou des fiches de poste que vous
ne serez pas en mesure d’offrir. Soyez clair, transparent, même si votre
visibilité est trop réduite pour présenter un plan entièrement réalisable. De
la même manière, ne faites jamais travailler les gens gratuitement et sans
perspective concrète. Fidéliser les salariés, c’est aussi leur donner le
sentiment que vous croyez en eux et en leurs compétences. Le management
commence à ce niveau : « Les dirigeants ont traditionnellement développé
leurs compétences en finance, planning, marketing et en techniques de
production. Trop souvent, les relations avec leurs collaborateurs ont eu une
place plus secondaire. C’est pourtant un sujet, de loin trop important pour
ne pas y donner une attention directe… Nous devons réinvestir la
dimension humaine du management. » 4
Dans tous les cas, respectez les gens avec lesquels vous travaillez. Le
modèle de travail à l’américaine a révolutionné en partie les pratiques en
France. Il repose sur l’empowerment, c’est à dire un fonctionnement basé
sur l’autonomie, moins regardant sur les heures effectives de travail que sur
le résultat de la mission. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille
travailler 24 h/24, 7 J/7. Être un bon manager de start-up, c’est parvenir à
trouver le moyen de se dépasser et de rester innovant, tout en posant un
regard social sur son équipe : respecter leur vie privée, leurs temps de repos,
leurs difficultés, leurs moments moins énergiques…
1. Réplique du roi Loth (François Rollin), Kaamelott, Livre III, épisode 27.
Profil no 10 : Décryptage
Le beau parleur incompréhensible
« Fiat minimis et patria !
– Ce qui veut dire ?
– Absolument rien. » 1
Parmi les boss insupportables, il y en a un qui est particulièrement
handicapant dans les missions du salarié : c’est celui que l’on ne
comprend pas. Soyons honnête : tout patron a au moins une fois, dans sa
carrière, été incompréhensible aux yeux (ou plutôt aux oreilles) de ses
collaborateurs. Mais c’est tout à fait problématique quand la situation se
produit à de multiples reprises. C’est encore plus agaçant quand il
emploie des tournures de phrase tarabiscotées qui n’apportent rien à la
discussion et ne rendent pas ses expressions plus évidentes. Du point de
vue du collaborateur, le message n’a aucun sens ; il est vide.
Être roi, c’est d’abord choisir le roi que nous souhaitons devenir, et ce,
dès les premiers pas. Il n’existe pas de modèle suprême du manager. C’est à
vous de prendre vos décisions, en connaissance de cause, et en ayant
toujours assez de recul et une visibilité assez large pour pouvoir vous
projeter.
5. En fin d’année, vous faites le point sur les projets de chacun. Vous
réalisez que certains de vos collaborateurs ont dépassé leurs objectifs
tandis que d’autres sont en retard. Quelle est votre réaction ?
6. Vous réalisez que la personne que vous venez d’embaucher est d’une
grande timidité. Cela peut être problématique lors des missions en
équipe. Comment gérez-vous cela ?
7. Lors d’une réunion, vous vous êtes emporté et êtes peut-être allé trop
loin, vous pouvez le voir à l’expression de votre équipe. Que faites-
vous ?
9. Votre direction des ressources humaines vous annonce que, pour des
raisons économiques, vous devez vous séparer dans les prochains mois
de quelques salariés identifiés. Quelle est votre stratégie ?
1. Claude Chrétien, Caroline Tsiang (ill.), Manager par la confiance. Mettre l’humain au cœur
des transformations de l’entreprise, Montreuil : Pearson France, 2020.
Réponses :
1. Proposition 1 : vous organisez des rendez-vous privés avec chacun
de ces collaborateurs et les laissez s’exprimer librement. Vous prenez
note de leurs reproches, les traduisez en demandes et prenez le temps de
réfléchir. Peut-être devez-vous modifier votre façon d’interagir avec
votre équipe, en étant par exemple plus transparent ?
Proposition 2 : vous revoyez votre organisation interne, par exemple en
proposant chaque semaine, toutes les deux semaines, chaque mois, ou
au rythme qui convient à votre structure, des réunions bilans pour
partager avec eux les dernières avancées. Vous pourrez alors argumenter
sur les choix que vous avez faits, en expliquant à vos collaborateurs que
leurs avis comptent tout autant que les vôtres mais que votre vision,
plus large, vous permet d’avoir plus de recul pour prendre une décision
cohérente et positive pour la boîte.
5. Proposition 1 : vous faites tout pour être juste au regard des mérites
de chacun. Vous faites jouer les éventuelles primes de fin d’année en
calculant le bénéfice gagné grâce au travail de ceux qui se sont
dépassés. Vous prenez rendez-vous avec ceux qui sont en retard pour
comprendre ce qui se passe et vous ajustez l’organisation afin que les
projets soient menés à leur terme.
Proposition 2 : vous attendez l’entretien annuel d’évaluation pour faire
le point avec chacun de vos collaborateurs sur les missions non
terminées et celles achevées. Vous exprimez votre contentement, projet
après projet, et évaluez la possibilité de nouveaux objectifs plus
cohérents au regard des différents profils et de la charge de travail de
chacun.
6. Proposition 1 : vous ne brusquez pas votre nouveau collaborateur
mais le laissez trouver ses marques dans la boîte. En réunion, vous ne le
mettez pas de côté mais faites attention à ne pas le placer dans une
situation de malaise qui pourrait provoquer des crises d’anxiété
(rougissements, bégaiement, etc.). Vous le faites travailler en binôme
pour qu’il parvienne à se sociabiliser sans lui mettre de pression.
Proposition 2 : comme avec vos autres collaborateurs, vous organisez
fréquemment des réunions individuelles. À cette occasion, échangez
humainement avec lui, parlez-lui de votre parcours, demandez-lui ce
qu’il aimerait faire dans la boîte… Amenez-le doucement à s’investir
dans les projets de l’entreprise et à s’y retrouver.
Reliez ces propositions pour créer des phrases qui ont du sens dans
le cadre professionnel.
« C’est parce que je cherche le Graal que je suis roi » 1, explique Arthur
à Guenièvre pour justifier le statut de son épouse. L’affirmation paraît bête ;
elle met néanmoins le doigt sur un questionnement quasi philosophique :
notre métier nous définit-il ? Et si oui, jusqu’à quel point ?
« Le meilleur manager est celui qui sait trouver les talents pour faire les
choses, et qui sait aussi refréner son envie de s’en mêler pendant qu’ils les
font » 2, déclarait Theodore Roosevelt.
Derrière cette affirmation s’impose l’idée d’un management par la
confiance, ce fameux empowerment qui sous-tend la délégation et
l’autonomie. Il y a également la volonté de co-construire, c’est à dire créer
en communauté, avec vos salariés, vos managers, votre hiérarchie, pour
permettre à l’entreprise d’aller de l’avant.
La boîte dans laquelle vous travaillez est vivante ; elle se développera
en fonction des personnalités et des sensibilités qui la composent. À vous de
trouver vos critères d’épanouissement pour pouvoir évoluer sereinement. Et
si c’était ça, tout simplement, votre quête du Graal ?
Livre I
Kaamelott au bureau
Épisode 1
Votre Kaamelott est un espace de vie
Épisode 2
Définissez votre quête du Graal
BILAN
Le bonheur, autour de la Table ronde
Livre II
Devenez chevalier :
apprenez à croire en vous et en votre équipe
Épisode 1
L’entretien d’embauche : Lancelot, la recrue modèle
Épisode 2
S’affirmer comme un Léodagan
Épisode 3
Être zen comme Karadoc et Perceval
BILAN
Un chevalier stressé reste un chevalier
Livre III
Les trois piliers du chevalier
Épisode 1
Avoir fait ses classes
Épisode 2
Combattre l’ennemi
Épisode 3
Servir son roi
BILAN
Le chevalier manager ne s’invente pas
Livre IV
Devenez chevalier :
être un roi magnanime en trois leçons
Épisode 1
Les premiers pas pour assurer (ou pas) comme Arthur
Épisode 2
Lancer son affaire : devenez votre propre Arthur
BILAN
Arthur, est-il un bon roi ?
Conclusion
Vers une quête… mais de quoi, en fait ?