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AU CYCLE III
DUBOC Mathieu
Année universitaire 2020-2021
Sommaire
1. PARTIE SCIENTIFIQUE ........................................................................................................................... 3
Introduction ............................................................................................................................................ 3
Problématique : ..................................................................................................................................... 3
2. PARTIE PEDAGOGIQUE.......................................................................................................................... 9
Annexe :................................................................................................................................................ 12
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................. 13
2
1. Partie Scientifique
Introduction
Sans s’en rendre compte, un enfant baigne dans la polyphonie au quotidien, mais
l’appréhender et la maîtriser sont deux choses complexes qui nécessitent une initiation et un
apprentissage rigoureux.
Dans le monde, de nombreuses maîtrises1 font chanter des enfants en polyphonie jusqu’à 8
voix différentes sans aucune difficulté, pourtant lorsque l’on fait chanter des enfants à l’école,
même une monodie peut être une véritable épreuve pour certain, et chanter à l’unisson
relève d’un défit. Il est alors légitime de se demander si la polyphonie est accessible aux
enfants.
Du cycle II au cycle IV est prévue une montée en complexité inscrite dans un programme
spiralaire autour des deux grands champs de compétences : la perception et la production.
Le cycle II a présenté des repères didactiques et notamment des repères conceptuels
permettant d’entrer dans le langage musical (timbre, hauteur, formes simples, intensité,
tempo). C’est ainsi qu’au cycle III, la montée en complexité demande de pouvoir identifier,
choisir et mobiliser les techniques vocales et corporelles au service du sens et de
l’expression.
La polyphonie vient naturellement s’inscrire dans les programmes. Elle apporte aux élèves
des compétences culturelles (repères dans une culture commune), sociales (respect des
autres et confiance en soi), orales (recherche d’expression) et corporelles (habileté
sensori-motrices).
Problématique :
L’objectif de ce dossier sera de montrer qu’il est possible d’ouvrir le champ de la polyphonie
à l’école au cycle III et de détailler comment le mettre en œuvre.
Un peu d’histoire
Durant l’antiquité et dans l’Eglise Primitive, la musique était essentiellement monodique.
Il faut attendre le Moyen Age pour voir se développer les premières formes de polyphonie
dans les abbayes bénédictines. Ce sont des moines chanteurs qui dans un premier temps
improvisent au Lutrin autour des traits de Grégorien2. Il s’agissait d’adjoindre une seconde
voix, ou plus simplement, une basse continue appelée bourdon.
Au début du XVIIIème siècle apparait une nouvelle forme de polyphonie appelée le faux-
bourdon. Musique à trois voix, elle fait évoluer deux voix libres par-dessus une note tenue.
A la fin du XVIIème siècle nait l’un des emblèmes du chant choral tel qu’on le connait
aujourd’hui en occident. Jean-Sébastien BACH, grand maître de chapelle de Liepzig en
Allemagne, vient donner à la musique toute les règles d’écriture que nous lui connaissons.
1
Ensemble de chanteurs, chorale d'enfants attachée au service d'une institution religieuse ou
laïque. Exemple : Les choeurs et la maîtrise de Radio France.
2
Le chant grégorien est le chant du rite Latin. Il est initialement monodique et ses textes se
construisent en traits dont les voyelles sont longuement développées par des mélismes.
3
Au service de l’Eglise, il compose de grands chefs d’œuvres. Il écrit principalement ses
chorals pour 4 voix mixtes (Soprano, Alto, Ténor et Basse). Cette technique de compositions
persiste jusqu’à nos jours malgré la transformation des styles et courants musicaux.
A travers cette genèse de la polyphonie nous constatons qu’elle fait partie de notre histoire
et de notre patrimoine artistique mondial.
Lorsqu’en 1834, l’instruction musicale apparait dans les programmes, la première des
compétences attendues est de savoir chanter. Même s’il n’y est jamais mentionné de terme
de « polyphonie », nous allons voir qu’elle répond à de nombreux attendus de fin du cycle III.
Enfin, entre 7 et 15 ans, les capacités d’écoute s’affinent. On constate le développement des
associations sémantiques, des capacités d’estimation, d’écoute polyphonique et de
structuration dans le temps. L’écoute analytique peut être approfondie.
Ainsi, le cycle III est le moment privilégié pour ouvrir le champ de la polyphonie. Les
capacités d’écoute permettent de chanter en prenant en compte l’harmonie générale tandis
que les capacités vocales et pulmonaires permettent de réaliser des phrases musicales plus
ou moins complexes et de les tenir en intensité et en durée.
La mue des garçons peut être un obstacle mais cet exercice sera pour eux l’occasion
d’apprécier et de découvrir leur nouvelle voix.
La séquence pédagogique construite autour des compétences visées fera intervenir trois
œuvres : une à écouter puis deux à apprendre. Nous allons ainsi analyser ces œuvres avant
de présenter le déroulé des séances.
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Chant à apprendre : Kyrie
La pièce qui illustrera ce dossier est un Kyrie composé par L.E. de Labarthe en 2000. Il s’agit
d’un extrait dont seules les voix de Soprano et d’Alto seront apprises aux enfants. S’ils y
parviennent, le professeur pourra chanter la voix de ténor en plus (non présente sur cette
partition).
La présence des accords au dessus de la partition permettent au professeur d’accompagner
les enfants à la guitare ou au piano.
Analyse :
Le chant est constitué de 2 couplets identiques dont seules les paroles changent. Il s’agit de
couplets courts de 3 phrases musicales, réparties sur 6 mesures.
L’ambitus (c'est-à-dire l’amplitude des notes) ne dépasse pas une octave. Il est compris
entre le Ré 4 et le Do 5 donc situé dans le domaine des notes faciles à chanter pour des voix
d’enfants.
La voix d’alto a aussi un ambitus de 4 notes mais plus graves. Les intervalles sont plus
difficiles que sur la voix de soprano car on y trouve des tierces et des quartes en plus des
mouvements conjoints. La tierce reste encore facile à attraper mais la quarte ne fait pas
partie des intervalles naturels, il faudra la travailler en chantant le début de La Marseillaise
par exemple.
Concernant les intervalles harmoniques entre les deux voix, on retrouve des unissons, des
tierces (majeures et mineures), des quartes et des quintes qui sont des intervalles justes et
faciles à chanter. En revanche, on observe plusieurs sixtes, intervalle juste mais plus difficile
chanter, et également une seconde majeure difficile à chanter car dissonante. Etant sur une
note de passage et ne durant qu’une croche, elle ne posera pas de problème technique.
Enfin, en termes de tonalité, le chant est en La Mineur, sans altération et sur un mode que
l’on peut qualifier de « triste » ou « méditatif » auprès des enfants.
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Œuvres complémentaires
Cette œuvre est très intéressante car elle permet d’entendre seulement deux instruments
mélodiques dont les timbres sont très éloignés. La discrimination auditive, c'est-à-dire la
capacité à différencier des voix, est très difficile surtout chez les enfants si l’oreille n’est pas
éduquée. Le son chaud et nasal de la clarinette et le son rond du violon sont très facile à
distinguer.
L’alternance des mouvements est très intéressante. Dans un premier temps le violon
accompagne la clarinette, puis ils inversent régulièrement pour ensuite jouer en mouvements
conjoints par moments.
Enfin, dans cette œuvre les instruments nous offrent un large ambitus de notes, allant de
leurs extrêmes graves jusque dans les aigues et modulant d’un mode majeur à mineur au
milieu de l’extrait.
Cette œuvre sera un support d’introduction complet pour habituer l’oreille à la polyphonie.
L'objectif de cette écoute est d'acquérir la capacité d’écouter des voix simultanées tout en les
différenciant, ceci dans le but d'étendre cette capacité à un plus grand nombre de voix, et de
pouvoir soi-même produire une polyphonie sans être dérangé par ce que chantent les
autres. De plus, il permet de faire le parallèle entre les polyphonies vocale et instrumentale.
Il est écrit en Mi mineur et possède un ambitus un peu plus large que le Kyrie, allant du Si 3
au Si 4 mais ces notes restent dans la tessiture des enfants de cycle III.
Les rythmes très jazzy sont difficiles à lire mais peuvent facilement être retenus oralement (la
partition ne sera pas donnée aux enfants). Les paroles seront apprises par répétition orale.
Elles ont du sens pour les enfants et le côté ironique du texte (en lien avec l’interdiction de
manger du chewing-gum à l’école) les amusera et les aidera à le mémoriser.
Enfin, ce canon sera l’occasion de faire une première évaluation formative sur la
compétence des élèves à chanter tout en écoutant les autres chanter autre chose. Un
élément facile à repérer est que les élèves en difficulté ont tendance à se boucher les
oreilles pour ne pas être inquiétés par ce que chantent les autres.
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Transposition didactique
Les programmes nous disent « Prenant en compte la sensibilité et le plaisir de faire de la
musique, comme d’en écouter, l’éducation musicale apporte les savoirs culturels et
techniques nécessaires au développement des capacités d’écoute et d’expression »
Dans ce cadre, il devient plus qu’intéressant de découvrir la polyphonie à l’école, en prenant
en compte les capacités de l’enfant et la bonne conduite de son développement. La
séquence suivante vient décrire une manière d’offrir aux élèves une forme d’initiation à la
polyphonie, pouvant ensuite faire l’objet d’un projet de spectacle de fin d’année.
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On parle de Dysmusie lorsqu’il s’agit d’un trouble congénital affectant sélectivement
différentes habiletés musicales malgré une exposition normale à la musique.
A l’école, de nombreux facteurs entrent en jeu lorsqu’un élève ne réussit pas à chanter. La
plupart du temps il peut s’agir d’une mue précoce (chez le garçon mais également chez la
fille même si plus discrète) car le larynx est encore en plein développement.
La piste de l’Amusie et de la Dysmusie ne sont pas à négliger car c’est à cet âge que tout se
joue dans la rémédiation.
Rémédiation
Si la Dysmusie est irrémédiable, l’Amusie peut se « guérir ».
Il est évident qu’un enfant qui baigne dans la musique depuis sa naissance aura des facilités
dans le domaine musical. De même, un enfant privé de musique aura plus de mal mais il est
toujours possible d’éduquer son oreille et sa voix.
L’amusie étant encore méconnue par rapport à d’autres troubles cognitifs, il n’existe à l’heure
actuelle pas de stratégie thérapeutique spécifique. Sa prise en charge repose
essentiellement sur de la rééducation. L’enseignant peut, au sein de sa classe mettre en
œuvre des rituels d’écoute et de production musicale avec un petit groupe d’élèves
concernés par ces difficultés, sans pour autant diagnostiquer l’Amusie chez tous. Le cas
échéant, il pourra accompagner individuellement les élèves qui présentent de sérieuses
difficultés en leur faisant analyser de courtes œuvres et en leur constituant un répertoire
musical. Une bonne piste est de diffuser de la musique dans la classe durant des moments
stratégiques de la journée, et pourquoi pas, d’analyser ces musiques en grand groupe.
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2. Partie Pédagogique
Description d’une séquence pédagogique
Titre : Découverte de la polyphonie
Contexte : Dans le cadre du « vivre ensemble » et en s’appuyant sur les attendus de fin de
cycle III d’éducation musicale, l’année est axée autour des ensembles musicaux
(instrumentaux et vocaux). Dans notre école, les élèves sont habitués à chanter depuis la
maternelle. En début d’année, plusieurs œuvres ont déjà été chantées par les enfants en
monodie. Il est temps de découvrir la polyphonie. Une évaluation diagnostique a été faite lors
de la séquence précédente pour vérifier les pré-acquis des élèves quant à leur capacité de
chanter juste et de reproduire un modèle mélodique et rythmique.
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Séance /
Objectifs Déroulement Matériel
Temps
-Mise en condition d’écoute
-Enceinte
-Ecoute du duo
Développer l’écoute et la Bluetooth
Séance 1 violon/clarinette de Fuchs
discrimination auditive en
30’ -Discussion autour des
identifiant plusieurs voix -Musique sur
impressions et observations
ordinateur
de chacun
-Echauffement
Développer la capacité à
Séance 2 -Ecoute du canon
chanter et à entendre -Piano
30’ -Apprentissage du Canon à
l’autre
une voix
-Echauffement
-Théorie : comment est
Séance 3
Aller vers la polyphonie construit un canon -Piano
40’
-Rappel du canon puis chant
à plusieurs voix (en canon)
-Echauffement
-Apprentissage des voix par
-Partition Kyrie
groupe
Séance 4
Aller vers la polyphonie -Mise en polyphonie
40’ -Piano
-Discussion autour du
morceau, impressions,
remarques de chacun
-Echauffement -Enregistreur
Séance 5
Chanter en Polyphonie -Chant en polyphonie
40’
-Evaluation et Enregistrement -Piano
Matériel :
-Piano
-28 Photocopies de la partition du Kyrie (pour avoir le texte)
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Moment Organisation
Tps Déroulement, consignes enseignant
didactique spatiale et matérielle
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Différenciation : S’il y a des élèves en difficulté, ils pourront être repérés lorsqu’ils n’arrivent
pas à chanter leur partie avec le reste de leur groupe. Les élèves en difficulté avec la
polyphonie seront visibles à leur habitude de se boucher les oreilles pour ne pas entendre
les autres parties.
Un élève en difficulté sera placé à côté d’un élève à l’aise avec sa partie pour le soutenir. Si
la difficulté persiste, l’enseignant enregistrera sa partie et donnera l’enregistrement à l’élève
pour qu’il puisse la réécouter autant qu’il le souhaite pour la mémoriser et s’en imprégner
avant la dernière séance.
Annexe :
Partition « Canon du bubble gum »
Jean-Yves Leduc (2013)
Extraite de Les canons et comptines des p'tits lascars
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Bibliographie
Textes officiels :
BO n°30 du 25 juillet 2015 : Référentiel des compétences professionnelles des
métiers du professorat et de l'éducation
Ouvrages :
Ayotte, J., Peretz, I. & Hyde, K. (2000). Congenital amusia: a developmental disability
for music. Communication affichée présentée à « The Annual Congress of the
Neuroscience Society, Nouvelle-Orléans », Louisiane (USA).
Bsiri, L. (2010). Guide de la voix à l’usage des enseignants, France : Retz
Gesta, R. (2011). Voyage a cappella vol. 1 et 2, France : Fuzeau
Institut français d'art choral (2015). Référentiel de formation du chef de chœur,
ouvrage collectif
Maneveau, G. (2001). Relation pédagogique et direction musicale, Pau, France :
Edisud
Massin, B., J. (1987), Histoire de la musique occidentale, France : Fayard
Schoen, PJ. (2019). Education musicale - Oral / admission - CRPE 2020-2021 - 5e
édition, France : Dunod
Yacovleff, M. & Genetay, J. (2002). Jeux, voix, vocalises vol. 3, France : Fuzeau
Sitographie
Eduscol http://www.eduscol.education.fr
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