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Action

sociale

Cohabitation
inter-
générationnelle
solidaire

POUR
Cohabitation
inter-
générationnelle
solidaire :
Quels leviers de
développement ?
Rapport de synthèse – septembre 2020

Cohabilis, réunion des réseaux CoSI et LIS


Avant-propos
de la Cnav
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

Avant-propos de la Cnav
Aujourd’hui, de plus en plus de Dans ce contexte, la Cnav a signé
retraités aspirent à vieillir chez une convention de partenariat avec
eux le plus longtemps possible. les réseaux associatifs CoSI et LIS
Cependant, des circonstances devenus en septembre 2020 Coha-
peuvent contrarier cette aspira- bilis, qui a pour objet de promouvoir
tion naturelle : isolement social, la cohabitation intergénérationnelle
précarité financière, solitude, etc. solidaire sur les territoires, favori-
ser une meilleure connaissance
La cohabitation intergénération- et adhésion des séniors à cette
nelle et solidaire peut, pour un solution et participer à la réflexion
certain nombre de personnes sur la structuration des concepts de
âgées, faciliter le vieillissement cohabitation intergénérationnelle.
et l’autonomie à domicile. Dé- Dans le cadre de ce partenariat,
sormais, la loi n° 2018-1021 du une étude a été réalisée autour du
23 novembre 2018, la loi ELAN, développement de la cohabitation
portant sur l’évolution du logement, intergénérationnelle solidaire et
de l’aménagement et du numérique les leviers de ce développement.
a défini un régime juridique pour la Cette étude a permis de faire un
cohabitation intergénérationnelle état des lieux de l’existant, des
solidaire. L’article 117 de cette attentes et de la perception des
loi et l’arrêté du 13 janvier 2020 offres, mais aussi de faire remonter
relatif à la charte de la cohabitation les principales réticences des re-
intergénérationnelle solidaire en traités à l’égard de la cohabitation
précisent les contours. intergénérationnelle solidaire.
Les principaux résultats de cette
étude sont ici présentés. La pré-
sente étude a été réalisée sur une
période de 8 mois avec l’appui
d’un comité de pilotage composé
du réseau LIS, CoSI, la Cnav, la
Cnaf, la DGCS, la Dhup, l’USH
ainsi que Paris Habitat.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

Introduction

Contexte

Les modalités d’accompagnement proche de plus de 85 ans. On en


de la vieillesse dans l’habitat ont comptait 29 en 1982.
très rapidement évolué en trente
ans. La cohabitation « familiale » On constate donc une forte évolu-
avec les proches de plus de 85 ans tion des comportements familiaux
diminue continuellement, comme dans un contexte où la part des
le démontre l’étude de l’Ined de plus de 75 ans de la population
20161. En effet, en 2011 aucun représente 9 % de la population
département ne compte plus de totale2 et représentera le double
35 % de cohabitation avec un à horizon 2070.

Évolution de cohabitation avec des proches entre 1982 et 2011


en France métropolitaine
1982 1990 1999 2011

moins de 10 % 15 % - 20 % 25 % - 30 % plus de 35 %
10 % - 15 % 20 % - 25 % 30 % - 35 %
Source : Insee. Loïc Trabut et Joëlle Gaymu, Population & Sociétés n° 539, Ined, décembre 2016.
1
Ined, habiter seul ou avec des proches après 85 ans en France : de fortes disparités
selon les départements Populations & Société, n° 539, décembre 2019
2
CNSA, les chiffres clés de l’aide à l’autonomie, 2019
En parallèle de cette situation, les « cohabitation intergénérationnelle
difficultés d’accès au logement solidaire » a été imaginé il y a
des jeunes de moins de 30 ans 15 ans avec, de manière sché-
sont très importantes. En effet, matique, deux formules « types » :
« une grande part de la jeunesse • l’une implique une présence du
est aujourd’hui dans l’incapacité jeune le soir et est gratuite ou
d’accéder à l’émancipation de impliquent en plus une faible
son foyer familial en raison des participation aux charges com-
nombreuses barrières systémiques plémentaires pour le jeune ;
qui empêchent une autonomie • une autre n’implique aucune
réelle. L’augmentation constante contrainte et suppose une
du prix des loyers ou encore la indemnité d’occupation signifi-
part considérable des frais inhé- cativement en deçà des coûts du
rents au logement financés par le marché immobilier local versée
foyer familial (61 %) ne sont que par le jeune hébergé au senior.
quelques exemples des multiples
freins existants à l’accès au loge- Les deux formules supposent la
ment autonome »1. Et, selon l’Unef, création d’un lien social et, sur la
après avoir perçus l’ensemble base de ces deux formules types,
des aides possibles (bourses sur le « contrat » noué entre jeune et
critères sociaux, APL etc.), il reste senior est toujours sur mesure, et
en moyenne aux étudiants 838 € accompagné par les associations.
par mois à payer2.
L’âge moyen des jeunes est de
Pour répondre à la solitude des 22 ans. Celui des seniors est de
seniors ou à la demande en loge- 81 ans pour la première formule
ment des jeunes, le dispositif de et 74 ans pour la seconde3. Entre

1
Fage, l’accès au logement des jeunes, septembre 2017
2
Unef, enquête sur le coût de la vie étudiante 2018, août 2018
3
Réseau CoSI, rapport d’activité 2016, 2017 et 2018
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

9
ces deux formules, une diversité veloppement, de nombreux acteurs
de pratiques existe en termes s’engagent pour la promotion de la
contrepartie financière modeste cohabitation intergénérationnelle
« plafond »1, de cotisation, d’ac- solidaire :
compagnement, etc. Les deux plus • ministères : Cohésion des terri-
importants réseaux de cohabitation toires, Solidarités et santé ;
intergénérationnelle et solidaire, • élus : Sénat, Assemblée natio-
le réseau CoSI (cohabitation nale, élus locaux ;
solidaire et intergénérationnelle) • corps intermédiaires : CFDT,
et le réseau LIS (logement intergé- CFDT Retraités, CFTC, USH,
nérationnel et solidaire) regroupent Uniopss, etc. ;
plus de 35 structures et totalisent • structures d’accompagnement :
plus de 900 contrats signés entre associations, plateformes,
le 1er janvier et le 31 décembre. centres communaux d’action
Cependant, la demande est plus sociale (Ccas), etc.
importante que l’offre : 61,5 % de
jeunes –sélectionnés ou non –sou- Ainsi, une politique publique
haitant réaliser une cohabitation ne voit progressivement le jour afin
trouvent pas de seniors. En 2016, d’organiser la filière émergeante :
42,7 % des jeunes sélectionnés ne • intégration dans la loi n° 2018-
trouvait pas de seniors2. 1021 du 23 novembre 2018
portant évolution du logement,
En conséquence, une forte de l'aménagement et du nu-
dynamique de structuration de la mérique : L. 118-1 du code de
cohabitation intergénérationnelle l’action sociale et des familles et
solidaire a été impulsée depuis L. 631-17,18 et 19 du code de la
2017. Pour lever les freins à ce dé- construction et de l’habitat ;

1
C’est-à-dire la limite que les structures associatives donnent au senior en la matière.
2
Réseau CoSI, rapport d’activité 2017, 2018
• financement du réseau CoSI grâce à la création d’un cadre
comme tête de réseau émer- juridique ad hoc n° 2018-1021
geante par la Caisse nationale du 23 novembre 2018. Pour
des Allocations familiales (Cnaf) aller plus loin, il convient de
• projet convention de coopération poursuivre l’identification des
entre le réseau LIS et réseau facteurs de développement
CoSI ; (structure d’offre, communi-
• arrivée de nouveaux acteurs cation, etc.) et de se poser la
« terrain » structurant : agence question suivante : Quels sont
départementale d’information les leviers de développement
pour le logement (Adil), ADMR, de la cohabitation intergéné-
Ccas, Soliha, etc. rationnelle solidaire ? C’est à
cette question qu’a tenté de
On estime à plus de 1,5 millions répondre l’étude réalisée par
le nombre théorique de loge- CoSI Expertise, en partenariat
ments en sous peuplement pro- avec le réseau LIS, pour la
noncé ou très accentué occupé Caisse nationale d’assurance
par un ménage d’une personne vieillesse (Cnav).
âgée de [60 ans ou plus] n’étant
pas contraint de déménager et
ne souhaitant pas déménager1.
Cependant, le développement de
la cohabitation intergénération-
nelle est en 15 ans d’existence
encore limitée. Pour accélérer
l’essaimage du dispositif, un
premier frein majeur a été levé

1
Estimation à partir de CAF NPDC/Cresge – Université Catholique de Lille,
Le logement intergénérationnel : évaluation de l’offre et de la demande potentielle.
Rôle des politiques publiques, 2010. Nota : on parle de sous-peuplement prononcé
s'il compte deux pièces de plus que la norme et de sous-peuplement très accentué
s'il compte au moins trois pièces de plus.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

11
Méthodologie de l’étude

La présente étude a été réalisée


par Joachim Pasquet, de CoSI
Expertise1, avec l’appui d’Asélia
conseil et du consultant Éric Co-
lucci. L’étude a suivi les 4 phases
suivantes :
• phase 0 : lancement et cadrage
de la mission2 ;
• phase 1 : étude documentaire et
diagnostic d’expert : identification
des pistes de réflexion ;
• phase 2 : réalisation de l’étude
qualitative auprès des seniors ;
• phase 3 : vérification de l’ap-
pétence des offres auprès des
jeunes.

1
Le réseau CoSI et le réseau LIS fusionnent pour devenir Cohabilis au 29 septembre 2020.
2
Outre la Cnav, la Cnaf, la DGCS, la Dhup, la CCMSA et l’USH ont participé au pilotage
de la réalisation de l’étude.
Table
des matières
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

13

1. Étude documentaire 12
2. Enquête qualitative auprès
des seniors 50
3. Perception par les organisations
de jeunesse 86
4. Recommandations finales 96
1
Étude documentaire
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

I. Le cadre légal et réglementaire


La cohabitation intergénérationnelle • les conditions étant fixées dans
solidaire existe depuis 2004 en un « contrat de cohabitation
France. Elle a été amenée lors de intergénérationnelle solidaire ».
la création de la première associa-
tion par Aude Messéan, actuelle La cohabitation intergénération-
présidente du Réseau CoSI. nelle solidaire repose désormais
sur un contrat, pour lequel la loi
Dans la définition donnée dans n° 89-462 du 6 juillet 1989 relative
l’article 117 de la loi n° 2018-1021 aux baux d’habitation ne s’applique
du 23 novembre 2018 portant pas. En conséquence, le risque
évolution du logement, de l'aména- de poursuite pour exercice illégal
gement et du numérique, la « co- du métier d’agent immobilier est
habitation intergénérationnelle » supprimé pour les « associations
nécessite plusieurs prérequis : œuvrant à la promotion de la
• un objectif de « renforcement du cohabitation intergénérationnelle
lien social »1 ; solidaire ».
• une nécessaire solidarité, avec le
terme « solidaire » accolé à « co- Il suppose une « contrepartie
habitation intergénérationnelle » ; financière modeste »2 réglée par
• un caractère « intergénération- le jeune au senior, « librement
nel » précis : « moins de 30 ans » convenue entre les parties » pour
et « 60 ans et plus » ; le parc privé et calculée au prorata
• une « location » ou une « sous- de la surface habitable pour le parc
location » ; social.

1
En italique, les extraits du texte de loi
2
Remarque : il s’agit ici du contenu de la loi. Plus haut, nous relevons que dans
les pratiques en cours depuis 15 ans, il peut y avoir une gratuité pour le jeune.
Le législateur ou le gouvernement n’ont pas prévu de plafond ni de plancher.
Il existe donc une grande liberté d’interprétation possible.
16
« Le coût de la ou des pièces place sans obligation d’accord
principales sous-louées est calculé de la part du propriétaire ou du
au prorata du loyer et des charges bailleur social. L’accueillant a juste
rapportées à la surface habitable une obligation d’information du
du logement. » bailleur, qu’il soit privé ou social.
Dans le parc social, pour faciliter
La contrepartie modeste deman- la diffusion, une convention entre
dée au jeune peut inclure en plus bailleur et association promouvant
d'une partie du loyer, une partie la cohabitation intergénérationnelle
des charges locatives et des abon- solidaire peut être réalisée mais
nements (fluides par exemple)1. n’est pas obligatoire. Le mou-
vement HLM s’est par ailleurs
En « complément » de cette formellement engagé dans un
contrepartie le jeune peut réaliser protocole d’accompagnement
des « menus services », sans lien avec l’État signé le 4 avril 2018,
de subordination, sans but lucratif à expérimenter la cohabitation
pour aucune des parties, sans intergénérationnelle.
possibilité de requalification en
contrat de travail. • L’article 117 de la loi ELAN
indique également que « le
Le contrat de cohabitation intergé- cadre général et les modalités
nérationnelle solidaire est d’une pratiques » seront précisés dans
durée librement convenue entre les le cadre d’une charte définie par
parties. Le préavis est d’un mois. arrêté. Au moment de l’étude,
l’arrêté n’était pas paru. Ce der-
Dans les cas de sous-location, nier, publié le 13 janvier 20202,
la cohabitation peut être mise en reprend les modalités et le fonc-

1
Confirmation de la Dhup, III de l’article L. 442-8-1 du CCH
2
Arrêté du 13 janvier 2020 relatif à la charte de la cohabitation intergénérationnelle
solidaire
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

17
tionnement actuels des structures • s'assurer que les engagements
de cohabitation. Elle rappelle les réciproques soient motivés par
actions que doivent mettre en l'entraide et pour concourir au
œuvre une association accom- vivre ensemble ;
pagnant un jeune et un senior • s'assurer que les locaux loués
dans le cadre de la cohabitation, ou sous-loués au jeune sont en
par exemple : bon état d'usage, ne présentent
• « travailler en lien avec les ac- aucun risque manifeste pour la
teurs sociaux et médico-sociaux sécurité physique et la santé et
du territoire pour assurer une offrent les conditions d'hygiène
coordination et une information et de confort exigées pour une
sur ce dispositif ; affectation à un usage d'habi-
• analyser les besoins et les tation ».
attentes des seniors et des
jeunes intéressés en vue d'une Sur la question des « menus
cohabitation ; services », la charte précise
• s'assurer de l'adhésion des clairement que l’association doit
candidats aux valeurs fonda- « informer les parties que le jeune
mentales de la cohabitation n'a pas vocation à intervenir en
intergénérationnelle solidaire : substitution des professionnels
respect et solidarité ; d'aide et de soins à domicile »,
• accompagner la recherche des ainsi les « menus services » ne
candidats potentiels, leur mise seront jamais des soins infirmiers
en relation et le suivi du binôme et les activités qui s'y rattachent
jeune et senior tout au long de la (toilettes, délivrance et surveil-
durée du contrat de cohabitation lance de prise de médicaments,
intergénérationnelle solidaire ; etc.) ». Elle donne l’exemple de
la « présence bienveillante dans possible que le senior et le jeune
le respect de la vie privée ». Elle perçoivent une allocation loge-
rappelle que les menus services ment. En effet, l’article L. 831-2
ne sont pas « assimilables à une du code de la sécurité sociale a
prestation régulière normalement été modifié, notamment par l’ajout
fournie par un prestataire ou par de l’alinéa suivant : « Dans les
l'emploi direct ou en mandataire cas prévus au troisième alinéa
d'un salarié à domicile ». Enfin, du présent article, la personne
elle rappelle la jurisprudence sur sous-locataire est assimilée à
la question de la subordination : un locataire pour le bénéfice de
« Le lien de subordination est l’allocation de logement prévue
caractérisé par l'exécution d'un à l’article L. 831-1 du présent
travail sous l'autorité de l'em- code, au titre de la partie du
ployeur qui a le pouvoir de donner logement qu’elle occupe ». Des
des ordres et des directives, précisions ultérieures devraient
d'en contrôler l'exécution et de être transmises par la direction
sanctionner les manquements de de l’habitat, de l’urbanisme et des
son subordonné »1. paysages (Dhup) du ministère de
la transition écologique et solidaire
Dans le cadre de l’article 116 de la et la Cnaf.
loi citée plus haut, il est désormais

II. Spécificité du parc social


Les locataires de plus de 65 ans en quel que soit le niveau de cette
sous-occupation ne peuvent être sous-occupation2.
contraints à quitter leur logement,

1
Cass. soc., 13 novembre 1996, Bull. civ., V, n° 386 ; pourvoi n° 94-13187
2
Article L.442-3-1 du code de la construction et de l’habitation
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

19
La charte parue le 13 janvier 2020 la démarche suivante « dans le
recommande par ailleurs aux asso- parc social, informer au préalable
ciations un conventionnement avec le bailleur social, et le cas échéant
les bailleurs sociaux impacté par signer une convention définissant
la cohabitation intergénérationnelle le rôle de l'association et de ce
solidaire, sans le rendre obliga- dernier pour la constitution des
toire. Elle préconise notamment binômes et leur suivi ».

III. Une fiscalité parfois en décalage


avec la réalité du marché au niveau
des plafonds
L’article 35 bis du code général les autres régions. Ce plafond
des impôts prévoit une exonéra- apparaît particulièrement bas
tion sur le revenu pour les produits pour certaines villes impactées
de la location ou sous-location par un marché immobilier tendu.
meublé lorsque les pièces louées Pour améliorer cette situation,
constituent pour le locataire ou le un projet d’exonération totale
sous-locataire sa résidence princi- d’impôt sur le revenu en cas de
pale et que le prix de la location est cohabitation intergénérationnelle
fixé dans des limites raisonnables. solidaire avait été voté par le
En 2019, un prix est entendu comme Sénat lors du projet de loi de
raisonnable lorsqu’il est en-deçà finances pour 2020, mais celui-ci
de 187 €/m²/an en Île-de-France a été retoqué par l’Assemblée
et en deçà de 138 €/m²/an dans nationale.
Par ailleurs, lorsque le jeune tra- • il fallait supprimer le risque de
vaille et que sa résidence fiscale requalification de la convention
est au domicile du senior, il peut (autrefois utilisée) entre le jeune
avoir dans certaines situations ex- et le senior en contrat de travail.
ceptionnelles un impact sur la taxe Cela aurait pu arriver du fait de
d’habitation. Il existe également l’engagement moral de présence
d’autres dispositions plus précises du jeune, ou parfois de son enga-
pour certains cas à la marge. gement à la réalisation de coups
de main (fermer les volets, des-
On peut dire en synthèse que cendre les poubelles, ramener du
grâce à la loi ELAN du 23 no- pain ou le journal, etc.). Dans la
vembre 2018, le cadre juridique cohabitation intergénérationnelle
est maintenant favorable au solidaire, il n’y a que des liens
développement de la cohabi- d’entraide. Il ne s’agit pas de
tation intergénérationnelle. En travail, au sens du code du tra-
effet, comme l’avait déjà iden- vail. L’arrêté du 13 janvier 2020
tifié par la loi d'adaptation de mentionne en conséquence bien
la société au vieillissement du la notion d’entraide. Le risque
28 décembre 2015 – dite « loi de requalification en travail ou
ASV » – l’absence de régime service devait être définitivement
juridique constituait de fait un évité. Pour ce faire, il a également
vrai frein au développement de la bien été précisé dans la loi et
cohabitation intergénérationnelle, l’arrêté qu’il ne s’agit ni de travail
qui s’appuyait auparavant sur ni de service, et que l’hébergé ne
une « convention d’occupation doit en aucun cas se substituer
temporaire et précaire ». Plusieurs à des aides au domicile, à des
risques juridiques existaient : soignants ou aux obligations de
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

21
la famille. Au demeurant, si le Tous ces points d’achoppement
senior est en perte d’autonomie, ont été levés. En revanche, la
la structure vérifie que les ser- fiscalité est plus ou moins adap-
vices nécessaires sont souscrits tée, selon les territoires. En effet,
auprès de professionnels pour le plafond s’applique de manière
l’accompagnement et l’aide de uniforme à l’Île-de-France, sans
cette perte d’autonomie ; distinguer, par exemple, les prix
du 7e arrondissement de Paris et
• il convenait également de faire un de Saint-Denis (93). De même,
sort au risque de requalification le plafond est le même pour
de la convention en bail qui Bar-Le-Duc (55) et Lyon. Cela
impliquant un risque pour les n’est pas cohérent avec la réalité
associations d’être accusées des prix du marché, comme nous
d’exercice illégal de la profession le verrons plus loin dans cette
d’agent immobilier1. étude.

IV. Contexte et écosystème de la coha-


bitation intergénérationnelle solidaire
La cohabitation intergénérationnelle de cohabitation intergénérationnelle
solidaire bénéficie paradoxalement solidaire (84 %)2. Cette tendance se
d’une bonne image mais d’une vérifie d’ailleurs chez les premiers
notoriété faible. En effet, plus de intéressés : 81 % des moins de
8 personnes interrogées sur 10 30 ans et 85 % des plus de 60 ans
ont un avis positif sur le principe ont un avis positif sur le sujet.
1
En référence à la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice
des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds
de commerce
2
Institut Français d’Opinion Publique (Ifop), Les Français et le contrat de cohabitation
intergénérationnelle, avril 2019. Nous émettons cependant une réserve sur l’adminis-
tration online du questionnaire auprès des personnes de 60 ans et plus. En effet,
une partie non négligeable de cette population n’a pas ou a peu accès au numérique.
Il apparaît pourtant que les seniors Par ailleurs, à dire d’expert, le
sont un peu plus frileux lorsqu’il s’agit contenu précis de ce qu’est le
de l’envisager personnellement. En dispositif de cohabitation intergé-
effet, seuls 23 % des 60 ans et plus nérationnelle solidaire est très peu
se déclarent intéressés personnelle- connu du grand public. En ce sens,
ment par le contrat de cohabitation on peut considérer que sa notoriété
intergénérationnelle. est faible auprès du grand public.

V. Première estimation du potentiel


Au vu du sous-peuplement des
logements chez les personnes de
plus de 60 ans, il existe théorique-
ment un important potentiel pour le
développement de la cohabitation
intergénérationnelle solidaire.
Ci-dessous une estimation de ce
potentiel.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

23
Sur - et sous-peuplement des logements des personnes retraitées
âgées de 60 ans et plus selon le statut d'occupation (en %)
PEUPLEMENT
SOUS-
NORMAL OU
PEUPLEMENT SURPEUPLEMENT TOTAL
SOUSPEUPLEMENT
PRONONCÉ
MODÉRÉ
ENSEMBLE 76,8 18,7 4,5 100

Propriétaire 83,9 13,9 2,2 100

Locataire
50,1 37,0 12,9 100
parc privé
Locataire
49,6 37,3 13,1 100
parc social
Meublé ou
37,7 35,1 27,2 100
en hôtel
Logé
68,5 23,7 7,8 100
gratuitement

Source : Insee, recensement 2015 de la population – France métropolitaine hors Corse – personnes
retraitées âgées de 60 ans et plus résidant en maison ou en appartement.
Lecture : 4,5 % de l’ensemble des personnes retraitées âgées de 60 ans et plus vivent dans un logement
surpeuplé au sens de l’Insee.

Pour un couple de retraités ou compte deux pièces de plus 1.


pour une personne veuve vivant 83,9 % des propriétaires de 60 ans
seule, le nombre de pièces pour et plus sont en sous-peuplement
une occupation dite « normale » prononcé.
est de deux. On parle de sous-peu-
plement prononcé si le logement

1
Caisse des dépôts et consignations, les conditions de logement des personnes
âgées, juillet 2019
Si l’on considère que : constatons un potentiel théorique
• 74,1 % des personnes de 60 ans important. Déjà en 2010, la caisse
et plus sont propriétaires1 ; d’Allocations familiales (CAF) du
• l’Ifop estime dans une étude2 Nord-Pas-de-Calais et le Centre
que 15 % des retraités sont de recherches économiques, so-
prêts à louer leur chambre (sur ciologiques et de gestion (Cresge)
971 propriétaires n’ayant jamais estimaient à 2 204 357 le nombre
loués leurs chambres) ; de logements en sous peuplement
• la France compte 14,3 millions prononcé ou très accentué occupé
de retraités ; par un ménage d’une personne
• au-delà de 65 ans un logement âgée de 50 ans ou plus n’étant
est habité par 1,6 personne en pas contraint de déménager et ne
moyenne. souhaitant pas déménager3.

On peut à partir de ces chiffres


faire une première estimation d’en-
viron 850 000 personnes retraitées
qui seraient en situation de sous
peuplement prononcé et seraient
prêtes à sous-louer une chambre.
Ceci étant, cette estimation doit
être affinée. Cela fera l’objet d’une
autre étude relative au modèle
et à l’impact économique de la
cohabitation intergénérationnelle
solidaire. Cependant, nous

1
Insee, caractéristiques des propriétaires occupants, 2013
2
Ifop, les propriétaires français et le logement chez l’habitant, 2014
3
CAF du Nord-Pas-de-Calais – Cresge – Université Catholique de Lille, le logement
intergénérationnel : évaluation de l’offre et de la demande potentielle rôle des politiques
publiques, 2010
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

25

VI. Un contexte social a priori favorable


au développement de la cohabitation
intergénérationnelle solidaire
Le contexte social est a priori moins impactés, comme le montre
favorable à une demande de les cartes de l’Ined présentées plus
cohabitation intergénérationnelle avant. À partir de ce constat, on
solidaire. En effet, le souhait peut émettre l’hypothèse qu’il
de 85 % des seniors de rester existe un terreau favorable au
vivre à domicile1 crée une de- développement de la cohabitation
mande forte de solutions pour intergénérationnelle solidaire,
parvenir à cette fin, sachant que au moins afin de répondre aux
7 personnes sur 10 de 85 ans besoins des personnes âgées.
et plus vieillissent effectivement
chez elles2. Cependant, dans un D’autant qu’une partie de ces
contexte de vieillissement de la derniers subissent un isolement
population, la cohabitation des social important ou ressentent un
plus de 85 ans avec des proches sentiment de solitude. En effet,
diminue continuellement depuis plus d’une personne de plus de
1982, avec quelques spécificités 60 ans sur trois ne sort pas de chez
territoriales à prendre en compte : elle tous les jours3. Et à partir de
la Corse et certains départements 85 ans, il y a une rupture signifi-
du Sud-ouest sont légèrement cative des cercles de sociabilité.

1
Ifop, marché et habitat inclusif, quelles offres de services ? février 2019
2
Ined, « Population & Sociétés », décembre 2016
3
Petits frères des pauvres, Solitude et isolement quand on a plus de 60 ans en France
en 2017, septembre 2017
L'indicateur d'isolement relationnel décliné par cercles de sociabilité
Auprès de la population française métropolitaine âgée de 60 ans et plus
Les isolés Les isolés
Les isolés Les isolés du cercle des réseaux
du cercle familial du cercle amical «voisinage» associatifs
22 % 28 % 21 % 55 %

Sont considérées comme isolées, les personnes ne rencontrant jamais physiquement les membres de leur réseaux
de sociabilité (famille,amis,voisins, acteurs associatifs) ou ayant uniquement des contacts très épisodiques avec ces
différents réseaux (quelques fois dans l’année ou moins souvent).
Source : Petits frères des pauvres, Solitude et isolement quand on a plus de 60 ans en France en 2017,
septembre 2017

Les seniors ont des attentes fortes Bernard Thibaud, Secrétaire


d’un point de vue économique. général du Secours catholique
En effet, la tranche de revenus constate fin 2018 : « On assiste
avant impôt des 75 ans et plus à une précarisation des seniors
est inférieure (32 993 €) à celle depuis une petite dizaine d'année
des 25-3 ans (35 804 €)1, ce qui [...] et le phénomène est appelé à
montre qu’en moyenne le revenu s'accentuer »4. Or, on sait que plus
disponible n’est pas plus important les revenus sont faibles (inférieurs
sur cette tranche d’âge. Par ail- au seuil de pauvreté de 1 041 €)5,
leurs, fin 2015, le montant moyen moins on a de contacts avec son
de pension de droit direct est de voisinage, avec les commerçants,
1 050 euros mensuels/femmes et moins on s’investit dans le sec-
1 728/hommes2. teur associatif, moins on se sent
heureux et plus le sentiment de
Plus encore, le taux de pauvreté solitude est exacerbé.
des 80 ans et plus est de 9,9 %3.

1
Frédérique Aribaud et Jean-Paul Treguer, le silver marketing, 2016
2
Insee, tableaux de l'économie française, 2018
3
CDC habitat, 2019
4
L’Express avec AFP, Un rapport s'alarme d'une « précarisation des seniors »,
8 novembre 2018
5
Le seuil de pauvreté monétaire, qui correspond à 60 % du niveau de vie médian
de la population, s’établit à 1 041 euros par mois pour une personne seule en 2017.
Insee, tableau de l’économie française, édition 2020
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

27
Le lien intergénérationnel reste sionnellement par eux 1. Après
une « valeur » et une pratique 80/85 ans, le cercle familial
ancrée. Lorsqu’ils sont jeunes, proche est celui où la solidarité
par exemple, l’intervention des se resserre (62 % des 80 ans
grands-parents est loin d’être et plus voient au moins l’un de
anecdotique : environ deux tiers ses enfants une à plusieurs fois
des enfants de moins de 6 ans par semaine contre 49 % à 70-
sont gardés au moins occa- 79 ans)2.

VII. Les acteurs structurants

1. Les acteurs structurants au niveau national

Les acteurs clés structurant la


Ministères
Têtes de cohabitation intergénérationnelle
réseaux
solidaire au niveau national sont
Élus Acteurs les suivants :
nationaux numériques
Cohabittation • cabinets des ministères :
intergénérationnelle
solidaire - ministère de la cohésion des
Sécurité
Sociale
Autres caisses
fondations
territoires : intégration de la
cohabitation intergénérationnelle
Partenaires
Directions sociaux & et solidaire dans la loi ELAN3,
administratives entreprises
- ministère des solidarités et de
la santé : feuille de route grand
Source : rapport de l'étude documentaire phase 1 âge autonomie4 ;
1
Drees, étude & résultats n° 1070, les grands-parents : un mode de garde régulier ou
occasionnel pour deux tiers des jeunes enfant, juin 2018
2
Petits Frères des pauvres, Ibid, 2017
3
Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement
et du numérique
4
Feuille de route Grand âge autonomie, 30 mai 2018
• directions administratives : relatif à la cohabitation inter-
- Dhup – ministère de la cohésion générationnelle solidaire,
des territoires : pilotage des
groupes de travail, financement - Assemblée nationale : soutien
CoSI (2019), en commission mixte paritaire
- direction générale de la cohésion après la proposition du Sénat
sociale (DGCS) – ministère
des solidarités et de la santé : • Sécurité sociale :
participation aux groupes de - Cnaf :
travail, financement CoSI et LIS ˃ convention d‘objectifs et de
(2018), gestion (COG) 2018-2022
- direction de la jeunesse, de intégrant la question intergé-
l’éducation populaire et de la nérationnelle ;
vie associative (Djepva) : com- ˃ convention avec le réseau
munication sur le site internet CoSI en 2018, reconnu « tête
du ministère, financement La de réseau émergeante » sur
France s’engage, la période 2019 – 2020 ;
- direction générale du travail et ˃ Caisse nationale de retraites
ministère de la justice : partici- des agents des collectivités
pation aux groupes de travail ; locales (CNRACL), Caisse
interprofessionnelle de
• élus nationaux : prévoyance et d'assurance
- Sénat : vieillesse (Cipav) : commu-
˃ projet de proposition d’une nication,
loi tendant à la promotion de
la cohabitation intergénéra- - Cnav :
tionnelle1 ; ˃ COG 2018-2022 intégrant la
˃ portage de l’amendement question intergénérationnelle ;

1
Présenté par Agnès Canayer et plusieurs de ses collègues, sénatrice de Seine-
Maritime, enregistré à la présidence du Sénat le 6 octobre 2017
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

29
˃ convention Cnav avec CoSI - développement d’un CRM CoSI
et LIS ; (7 usagers), existence d’un
˃ réalisation de la présente CRM commun LIS Aura ;
étude ;
˃ création de la plateforme • autres caisses et fondations :
d’échange interculturel et - Klésia, AG2R, etc. : importants
intergénérationnel Toit + Moi1, appuis financiers,
- fondation Macif : importants
• têtes de réseaux : appuis financiers ;
- têtes de réseaux spécialisées :
CoSI, LIS, Ensemble 2 Géné- • partenaires sociaux & entre-
rations (E2G), prises :
- union sociale pour l’habitat - CFDT et CFDT retraités :
Caisse interprofessionnelle soutien, partenariat CoSI pour
de prévoyance : protocole les adhérents,
d’accompagnement avec l’État - CFTC : soutien,
2018-2021, - France Télévisions, Mutuelle
- Uniopss : adhésion de CoSI, des Douanes, AG2R.
soutien, échange avec les
autres têtes de réseau de la Au total, depuis 2017, une forte
jeunesse, de la vieillesse et du dynamique d’encouragement de
logement ; la cohabitation intergénérationnelle
solidaire est impulsée et de nom-
• acteurs numériques : breux acteurs s’engagent pour sa
- plateforme : Toit+moi, Nooloji, promotion. Une politique publique
Roomlala, loc-services, etc.2, voit progressivement le jour afin

1
toitplusmoi.eu
2
Ces structures ont très peu d’effet sur la structuration de l’activité comme nous le verrons
plus loin.
d’organiser la filière émergeante : de conférences des financeurs,
• article 117 de la loi n° 2018-1021 ou une volonté de lutter contre
du 23 novembre 2018 portant la sous-occupation de la part de
évolution du logement, de l'amé- certains bailleurs sociaux, etc.).
nagement et du numérique ; On ne constate pas – ou peu –
• financement du réseau CoSI d’engagements formels pour
comme tête de réseau émer- prescrire le dispositif aux assurés
geante par la Cnaf ; sociaux, et le dispositif bénéficie
• partenariat tripartite Cnav, réseau de financements nationaux de
LIS, réseau CoSI ; l’activité occasionnels et très
• convention de coopération bipar- peu élevés avec une diminution
tite entre le réseau LIS et réseau possible des moyens de l’action
CoSI (réponse commune à une sociale des caisses de retraites qui
appel d’offre France Télévision) ; sont des financeurs majeurs de la
• arrivée de nouveaux acteurs cohabitation intergénérationnelle
« terrain » structurants : Adil, solidaire.
ADMR, Ccas, Soliha, etc.
Au plan parlementaire, des sujets
Cependant, l’appui à la cohabita- importants restent en suspens,
tion intergénérationnelle solidaire comme l’exonération fiscale du
est encore limité. Avec des dispositif proposée par le Sénat
visions encore très diverses de lors du projet de loi de finance
ce que doit et ne doit pas être la 20191, et retoquée à l’Assemblée
cohabitation intergénérationnelle nationale. On note par ailleurs, que
solidaire, notamment liées à des la cohabitation intergénérationnelle
intérêts divers (par exemple une n’a pas bénéficié de financements
optique de prévention de la part au même titre que l’habitat inclusif

1
Amendement N° I-228 rectifié présenté le 22 novembre 2018 par la sénatrice
Agnès CANAYER et certains collègues « La contrepartie financière tirée du contrat
de cohabitation intergénérationnelle solidaire tel que prévu par le chapitre VIII
du titre I du livre premier du code de l’action sociale et des familles, et par l’article
L. 631-17-1 du code de la construction et de l’habitation est exonérée d’impôt sur
le revenu »
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

31
également encadré par la loi du d’activité. Sur ce dernier point il
28 novembre 2018 (article 129) : est important de noter qu’à l’instar
15 millions en 2019 et 25 millions d’une activité d’aide à domicile,
en 20201. une extension d’activité dans la
cohabitation intergénérationnelle
Le changement d’échelle visé implique suppose une période de
demande davantage d’investis- monté en charge qui peut s’étaler
sements financiers, privés ou sur plusieurs mois, voire plusieurs
publics, car les structures d’accom- années, avant que le niveau de
pagnement à la cohabitation inter- productivité optimum soit atteint2.
générationnelle solidaire ont très Il existe enfin peu d’appui financier
peu de capacité d’investissement des acteurs industriels de la « silver
pour croître : financement de la économie » pour le développement
communication et des extensions du lien intergénérationnel.

2. Les acteurs structurants au niveau territorial

Le positionnement des acteurs est


très variable selon les territoires et
les porteurs de projet. En écho,
les modèles économiques des
structures sont très divers :

1
CNSA, financement de l'habitat inclusif, 27 décembre 2019
2
Par exemple un passage de 50 à 100 binômes, demande du temps, et donc un soutien
financier jusqu’à atteindre le point d’équilibre. On compte environ 1 ETP pour 40 contrats
signés entre le 1er janvier et le 31 décembre 2016
ACTEUR FINANCEURS PRESCRIPTEURS

Ccas, Cias, Epci, communes +


+++ facteur clé
de succès
Départements, conférences
+ ++
des financeurs
Caisses de retraite
++ ++
complémentaires
Médicosocial et social :
évaluatrices APA, Clic, Saad, 0 ++
Ssiad, Maia1, etc.
Sanitaire : services sociaux
des hôpitaux, maisons médicales
0 ++
ou de convalescence,
établissements de soins, médecins
Bailleurs sociaux + (Paris, Reims,
+ (rare) Grenoble, Lyon,
Nantes, etc.)
Caisse de retraite (Assurance ++ (Sud-Est,
retraite) Aquitaine, Île- +
de-France, etc.)
Région + (Auvergne-
+
Rhône-Alpes)
CAF + (Orléans,
+
Grenoble, etc.)
Club du troisième âge 0 +
Mutuelle +
Implication
au niveau local

Source : réseau CoSI

1
Allocation personnalisée d’autonomie, centres locaux d'information et de coordination,
service d’aide à domicile, service de soins infirmiers à domicile, méthode d’action
pour l’intégration des services d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie, etc.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

33
Les mairies sont des acteurs
clés. Si la mairie ne soutient pas
la structure, l’activité peine à se
développer, et la structure se
voit dans certains cas contrainte
de fermer. Les caisses de re-
traite et les caisses de retraites
complémentaires (10 sur 16 en
2019 en France métropolitaine)
représentent un soutien financier
important pour les associations.

Des bailleurs sociaux qui ont


globalement du mal à s’engager,
malgré le protocole signé entre
l’état et le mouvement HLM1. Enfin,
les implications inégales des CAF
(8 sur 101) et des conférences des
financeurs restent encore peu
significatives.

1
Protocole d’accompagnement État – mouvement HLM 2018 – 2021. Le protocole
prévoit en effet : « L’USH et ses familles s’engagent à favoriser le maintien à domicile
des seniors et à faciliter l’accès au logement social pour les étudiants et les jeunes
actifs par une expérimentation de la cohabitation intergénérationnelle dans le parc
social ».
VIII. Quelques éléments connus
sur les profils des seniors souscrivant
actuellement à la cohabitation
intergénérationnelle solidaire
Au plan de la démographie générale du pays, une grande majorité de
femmes sont seules après 80 ans.

Répartition des personnes âgées de 85 ans et plus selon leur mode


de résidence en 1982 et 2011 (%)
0 100

1982 13 22 23 42
2011 13 9 28 51

1982 22 34 38 6
2011 23 12 54 11

1982 20 31 34 15
2011 20 11 46 23

En institution Seul
Avec des proches En couple

L.Trabuc et J. Gaymu, Population et Sociétés n°539, Ined, décembre 2016.


Source : Ined, habiter seul ou avec des proches après 85 ans en France : de fortes disparités selon
les départements Populations & Société, n° 539, décembre 2019

80-85 % des seniors bénéficiant d’un accompagnement des associations


adhérentes aux réseaux CoSI et LIS Rhône-Alpes sont des femmes,
très majoritairement vivant en milieu urbain.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

35
LIS
ACTEUR RÉSEAU COSI1 RHÔNE-ALPES2

2016 2017 2018 2018


Femmes 87 % 86,5 % 84 % 80 %
Hommes 13 % 13,5 % 16 % 20 %

Source : rapport final – évaluation de l’impact social du réseau CoSI et de l’habitat intergénérationnel
proposé par le réseau

Nota : le nombre de couples accueillants est faible : 27 au sein des


structures adhérentes au réseau CoSI en 2018, 4 pour LIS Auvergne
Rhône-Alpes.

Les motivations principales liées à l’accueil d’un jeune sont les suivantes
(réponse en nombre de personnes, sur 68 seniors interrogées)3 :

Accueillants - Motivation à l’acceuil d’un jeune dans le cadre d’une cohabitation solidaire
Pouvoir rester dans
votre logement grâce 0 45
à la présence
d’une personne tierce
Faire des économies
/pouvoir payer votre loyer
Avoir de la compagnie

Source : rapport final – évaluation de l’impact social du réseau CoSI et de l’habitat intergénérationnel
proposé par le réseau

1
Réseau CoSI, rapports d’activité 2016, 2017, 2018 données déclaratives des structures
consolidées par la tête de réseau.
2
LIS Rhône-Alpes est une association liée au réseau LIS qui regroupe 6 associations
sur 7 départements de la région Rhône-Alpes. Rapport d’activité LIS Aura 2018.
3
Ellyx-Réseau CoSI, étude d’impact sociale, février 2019
Par ailleurs, 100 % des seniors (et - « Majoritairement, ils ont un bon
87 % des jeunes) ont conscience tissus social » ;
d’être utile à l’autre, de lui apporter • ...avec souvent avec une appé-
(logement, possibilité de faire ses tence pour la solidarité ;
études, maintien à domicile, lien - « Des personnes qui sont
social, avantage économique, complètement dans l’esprit, pas
etc.). Des solutions pour pallier la forcément des assos mais des
perte d’autonomie sont rarement chorales ou des choses comme
recherchées directement par les ça »,
seniors, plus souvent par les - « Ceux qui sont dans le béné-
enfants et les proches. volat auront plus de facilités à
accueillir les jeunes, mais parce
Le profil des seniors bénéficiant de qu’ils sont déjà convaincus de
la cohabitation intergénérationnelle leur utilité sociale ».
solidaire, selon les experts1 :
• des seniors ayant plutôt une L’âge moyen varie sensiblement
bonne sociabilité, etc. ; en fonction des formules. Les
- « Plus on est inséré, plus on a déclencheurs et attentes varient
de chance d’accepter », donc probablement selon les
- « J’irais plutôt sur des per- âges. Cette piste est creusée dans
sonnes engagées dans des l’étude qualitative réalisée auprès
liens sociaux », des seniors.

ÂGE MOYEN DES SENIORS2 2016 2017 2018

Formule « conviviale » 74 73 76
Formule « solidaire » 82 80 81

1
Cf. Tableau des experts interviewé présenté au point 1.
2
Réseau CoSI, Rapports d’activité 2016, 2017, 2018 données déclaratives des structures
consolidées par la tête de réseau.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

37
Les bénéfices attendus suivants les suivants :
sont identifiés : • tranche d’âge ;
• une présence rassurante qui aide • niveau d’autonomie ;
au maintien à domicile ; • situation économique du senior ;
• compléments de revenus ; • ayant une appétence pour les
• se sentir moins seul ; actes de solidarité ;
• être solidaire avec un jeune. • vit seule ;
• genre.
Ainsi, au regard des données de
l’étude documentaire, les premiers Une première segmentation a priori
éléments significatifs permettant est identifiée et sera testée dans
d’établir une segmentation sont la phase d’étude qualitative.

IX. Les offres et les acteurs de l’offre

1. Les acteurs de l’offre

Les acteurs « types » de l’offre Orne, Manche), Le Pari Soli-


sont les suivants : daire (Île-de-France), Généra-
• les associations, qui rencontrent tions et Cultures (Nord), DiGi
les jeunes et seniors, accom- (Isère), Toi en Tandem (Alpes
pagnent la création de binômes Maritime et Var)1, Ensemble
et les suivent sur le long terme : 2 Générations (« antenne »
- exemples : LIEN (Calvados, sur Paris par exemple) ;

1
Il existe également une SCIC au sein du réseau CoSI : Toit en tandem, à Nice.
• les têtes de réseau qui ont des agit en amont de la mise en
fonctions fédératives (lobbying relation, l’intervention d’une des
et coordination et animation du associations citées ci-dessus
réseau) et d’appui au dévelop- étant par ailleurs nécessaire
pement de l’activité ; au plan local, notamment pour
- réseau CoSI1, auquel 25 struc- rencontrer les seniors et le
tures de l’Économie sociale et jeunes, s’assurer de la décence
solidaire (ESS) adhèrent, du logement de la personne de
- réseau LIS, auquel 12 struc- 60 ans et plus, etc.,
tures de l’ESS adhèrent, - le site du réseau CoSI propose
- Ensemble 2 Générations 2, un annuaire, un dispositif de
« association chrétienne de web call back, et la possibilité
solidarité », qui organise la pour les jeunes de déposer leur
cohabitation souvent via des dossier en ligne. Après celui du
bénévoles situés dans 23 ter- Ministère de la jeunesse, le site
ritoires en France ; est le premier référencé sur la
« cohabitation intergénération-
• deux exemples pertinents de site nelle » en janvier 2020. Au total,
de cohabitation : la part des plus de 65 ans qui
- Toit+Moi est une plateforme se connectent au site du réseau
développée par la Cnav qui CoSI est de 5,1 %. Celle des
permet à des jeunes étrangers 18-34 ans est de 56,4 %3.
mobiles via le programme
Eramus de vivre en France D’autres plateformes, comme par
chez un senior. La plateforme exemple Roomlala, n’interviennent

1
reseau-cosi.org
2
ensemble2generations.fr
3
Sur 60 624 sessions entre 08/2017 et 07/2019
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

39
pas directement dans le champ de sociales ou médico-sociales du
la cohabitation intergénérationnelle territoire. Au total, ces plateformes
solidaire. Cependant, Roomlala ne répondent pas aux exigences
propose depuis plusieurs années de la charte de la cohabitation in-
de mettre en relation des personnes tergénérationnelle solidaire définie
pour des dispositifs de « chambres par l’arrêté du 13 janvier 2020,
chez l’habitant » (y compris dans qui précise « le cadre général
le cadre de « logement contre et les modalités pratiques de la
services »1). Les prix de locations cohabitation intergénérationnelle
proposées se positionnent au solidaire »4. Le logement contre
niveau du marché (loyer moyen service ne correspond pas à l’équi-
de 314 €), la durée de location est libre d’entraide qui prévaut dans la
en moyenne de 3 mois2 (contre cohabitation intergénérationnelle
7 mois en moyenne en cohabita- solidaire. Il est donc important de
tion intergénérationnelle solidaire). bien cadrer la notion de « menus
services » créée par la loi, ces
Par ailleurs, ces plateformes aident derniers restant à utiliser avec
à mettre en relation les personnes prudence pour limiter les abus.
mais ne présélectionnent pas de
profils de jeunes ou de seniors3.
Les gestionnaires de la plateforme
ne se déplacent pas aux domiciles
des seniors, ne proposent aucun
suivi et ne travaillent pas en
partenariat avec des structures
1
https://fr-fr.roomlala.com/blog/hebergement-roomlala/logement-contre-services/co-
location-avec-un-senior-logement-contre-services-ou-chambre-a-louer-1446.
Les chiffres pour ce dispositif ne sont pas connus.
2
Dossier de presse 2017 – https://fr-fr.roomlala.com/prod/file/welchome/presse/Dossier_
de_Presse_2017.pdf –
3
Aucune ne fait à ce jour de « matching », comme pourrait par exemple le faire des sites
de rencontres.
4
Article 117 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement,
de l'aménagement et du numérique
2. Les types d’offre

Pour les seniors, on identifie tentes formulées par les parties. Le


deux composantes de l’offre de lien social, l’entraide et la solidarité
cohabitation intergénérationnelle sont présentes dans toutes les
solidaire : cohabitations. Partout, les mises
• la cohabitation elle-même. Elle en correspondance et les créations
permet aux seniors vivant seuls de binômes sont constituées « sur
dans un logement sous occupé mesure », en fonction de chacun.
de bénéficier d’un lien social, en
aidant un jeune. Elle permet, le
cas échéant, de percevoir un
complément de revenu ;
• l’accompagnement. Une struc-
ture accompagne la personne
âgée dans la définition de ses
attentes. Elle lui propose le jeune
le mieux adapté. Elle veille à
l’encadrement juridique et au bon
déroulement de la cohabitation.

Les offres de cohabitation sont


construites autour de l’engagement
de présence, sur la contrepartie
financière et sur la notion de
« coup de main », selon les at-
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

41
Les offres peuvent être schématisées ainsi : deux offres types et,
plus rarement, une offre intermédiaire entre ces deux offres types.

SE SENTIR
SOUHAITE AIDER MOINS SEUL
UN JEUNE, PRÉSENCE
BÉNÉFICES OFFRES
ÊTRE UTILE RASSURANTE
ATTENDUS INTERMÉDIAIRES
COMPLÉMENT FACILITANT
DE REVENU (A) UN MAINTIEN
À DOMICILE (B)
• sans engagement • engagement • avec engagement
de présence de présence +1 de présence ++3
• contrepartie • avec participa- • petites participa-
financière tion charges tions aux charges
modeste +++ adaptée fréquentes
Promesses (toujours • et/ou
significativement « partages
en deçà des prix des tâches
du marché locatif quotidienne »,
pratiqué au niveau voire services-
local) prestations2

Dans l’offre avec contrepartie financière +++ (A), la contrepartie est de


194 € par mois en moyenne4 (Paris compris) dans le cadre du réseau
CoSI.

1
Par exemple, 3-4 soirées/semaine
2
Faire les courses, partager des repas, aller au musée, vous initier à l’informatique,
fermer les volets, etc. Les services sont contractuellement détaillés/ ou non.
3
Dépend vraiment de la personne, du lien entre les jeunes et les seniors
4
Réseau CoSI, rapport d’activité 2018, avril 2019
Loyer moyen en France :
Lille 314 €
353 €
Rouen

Paris
385 €
Strasbourg
Rennes 551 €
328 €
272 € Angers

Nantes 301 €
294 € Poitiers
Lyon 363 €
277 €
Bordeaux
Grenoble 305 €
364 €
Aix-en Provence Nice
Montpellier
Toulouse 374 € 421 €
339 € 369 €
310 €
Marseille

Loyer trés Loyer Loyer Loyer


abordable abordable élevés très élevés
Source : Roomlala, rapport d’activité, 2017

Compte tenu de la grande diversité mois par les seniors dans l’étude
des prix (cf. le schéma ci-dessus) d’impact social réalisée pour le
chaque prix « modeste » est réseau CoSI en février 2019.
indexé sur les offres du marché Cette offre est plus généralement
local, auquel il est significativement sollicitée par des personnes âgées
inférieur (40 % en moyenne). qui ont besoin d’être rassurée par
une présence. La contrepartie
L’offre avec présence ++ (B) ne financière n’est, a priori, pas un
présente pas, ou peu, d’avantage critère de choix sur cette offre.
économique, d’autant que les
charges supplémentaires pour le
senior sont estimées à 57 € par
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

43
Schématiquement, les associations proposent l’accompagnement
suivant aux seniors :

Gestion Un suivi et
du «recrutement Un jeune adapté Un encadrement une possibilité
Informations de l’hébergé, à la personnalité de conciliation
explicatives juridique :
vérification du senior contrat, etc. en cas
du logement de problème

Certaines structures s’appuient


sur des bénévoles. Sans préjudice
de la compétence de ces derniers,
cela complique parfois le maintien
de « permanences ».
Les conditions financières d’accès à l’accompagnement des
associations sont les suivantes :

SOUHAITE AIDER UN SE SENTIR MOINS


JEUNE, ÊTRE UTILE
BÉNÉFICES SEUL UNE AIDE AU
COMPLÉMENT DE MAINTIEN À DOMICILE
REVENU

Offreurs Frais d’accompagne- Frais d’accompagne-


ment senior ment senior
Toit+Moi 0€ (subvention 494€/
binôme Vivre avec /
Carsat Aquitaine)
Un toit en partage 0€ 120 € par visite et
280 €/contrat signé
/
(Cnav Île-de-France
Le Pari Solidaire)
Réseau CoSI Cotisation mensuelles Cotisation mensuelles
33,3 € et frais de 26,7 € frais de dossier
dossier 26,6 € (276 € 26,6 € (226 € pour
pour 7,5 mois) 7,5 mois)
Réseau LIS Cotisation annuelle Cotisation annuelle
et frais de dossiers/ et frais de dossiers/
accompagnement accompagnement
de 100 € à 300 € de 70 € à 240 € pour
pour 12 mois 12 mois
Ensemble 2 Générations 220 € 390 €

Source : informations tirées des différentes associations : réseau CoSI, réseau LIS, Ensemble 2
Générations, la Cnav (pour Toit+Moi) et Le Pari Solidaire (pour Un Toit en Partage)
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

45
Ces conditions d’accès peuvent même senior avec un autre jeune,
être évolutives, selon qu’il s’agit de ou lorsqu’il s’agit du même binôme.
la première cohabitation intergéné- Lorsque les retraités accueillent
rationnelle ou d’un renouvellement. plusieurs jeunes, un rabais sur les
En effet, certaines associations frais de mise en relation et de suivi
réalisent des remises sur les frais peut également être mis en place
de mise en relation lors des renou- pour les seniors1.
vellements de binômes, si c’est le

Dans le cas du réseau CoSI, la répartition des offres se fait ainsi :

SANS AVEC
ENGAGEMENT ENGAGEMENT AUTRES2
DE PRÉSENCE DE PRÉSENCE

2016 56,1 % 40,4 % 3,6 %

2017 58,8 % 35,8 % 5,4 %

2018 62,0 % 33,1 % 4,9 %

Cependant, la répartition des types Sur le plan fiscal, l’article 35bis du


d’offres est hétérogène selon code général des impôts constitue
les structures. La prééminence parfois un plafond tacite pour la
de telle ou telle offre dépend de contrepartie financière modeste :
l’historique, du territoire et du projet • en région, les revenus d’une
associatif défendu. chambre de 12 m² < 137 €/ mois

1
Par exemple l’association LIEN applique - 30 %, s’il y a un renouvellement entre
le même jeune et le même retraité.
2
Autres : « Voisins Solidaires » logés au sein de foyers pour adultes en situation
de handicap. Intermédiation locative (jeunes en coloc avec un projet de lien social).
Un toit contre une présence la semaine sans le week-end. Le jeune paie entre 50
et 160 €/mois. Le jeune s'engage à une relation conviviale le soir et une présence
la nuit durant la semaine. L’engagement couvre 3 à 4 soirées par semaine des plus
de trente ans solidaires.
seront exonérés de l’impôt sur parfois trop faible aux jeunes
le revenu ; retraités, et ce d’autant que la
• Île-de-France : 187 €/mois. contrepartie peut être majorée
facilement en gré à gré ou via des
Cependant, ce montant semble plateformes comme Roomlala.

X. Parcours clients actuels


Nous avons retenu 4 parcours Pour chaque parcours clients, nous
clients types de senior en logement avons identifiés a priori :
sous-peuplé : • les actions clés du senior (étapes
• 3 parcours avec structure d’ac- suivies dans le parcours de la
compagnement : découverte du principe à l’ins-
- Bernadette et ses enfants : tallation du binôme) ;
85 ans, seule, GIR 3-4, accom- • les différents points de contact
pagnée de ses enfants, actuel (numérique, téléphone,
- Lucie : 74 ans, seule, GIR 5, local de l’association, etc.) ;
grand-mère de deux petits • les moments clés dans la prise
enfants de moins de 16 ans, de décision de sénior.
- Saïda : 68 ans, seule, GIR 5,
grand-mère de deux petits Au total, quel que soit le parcours :
enfants de moins de 16 ans ; la prise de connaissance du
concept de cohabitation et l’aide à
• 1 parcours digital : Lucile, 68 ans, la décision sont des moments clés.
seule, GIR 5, grand-mère de La priorité est de faire connaître
deux petits enfants de moins de le concept, encore peu connu.
16 ans. Il faut également intervenir pour
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

47
accompagner la décision, c’est En effet, le canal numérique de
un moment clé de réassurance, communication et de distribution
et l’usage du joue fortement dans crée une exclusion significative
un tel moment. d’une partie des seniors : « 57 %
des 70 ans et plus ne s'estiment
Pour les parcours avec structure pas à l'aise lorsqu'ils doivent
d’accompagnement, le ren- utiliser la technologie et en
dez-vous à domicile est aussi un particulier naviguer sur inter-
moment clé de réassurance. net. Cet illettrisme numérique
concernerait six personnes sur
Pour les parcours digitaux, le dix lorsqu'elles sont âgées de
moment de la validation à distance, plus de 70 ans. L'étude souligne
sans avoir toujours rencontré même le cas des abandonnistes
physiquement la personne, est (31 %), des Français de 70 ans
également un moment clé. et plus, soit pratiquement un sur
trois qui reconnaissent avoir déjà
Pour les seniors en situation de renoncé, au cours des douze
fragilité, il semble souvent néces- derniers mois, à faire quelque
saire d’intégrer les enfants dans le chose parce qu'ils devaient
parcours clients. utiliser internet. Et 42 % se
sentiraient en décalage avec leur
• Focus sur le canal numérique : entourage »1. Le taux d’équipe-
Concernant le canal numérique, ment en ordinateur chute à 24 %
il est important de prendre en chez les plus de 75 ans. Toit+Moi
compte l’« illectronisme » majo- comme le site du réseau CoSI
ritaire des plus de 70 ans. enregistre moins de 6 % des plus
de 65 ans parmi leurs visiteurs.

1
CSA pour syndicat de la presse sociale, enquête sur « l’illectronisme » en France,
mars 2018
S’il apparait évident que les pra- sauf si les enfants prescripteurs
tiques des plus de 70 ans seront ou les jeunes seniors sont ciblés
amenées à changer dans les an- par une stratégie de croissance
nées à venir, il ne semble pas pour digitale adaptée, les jeunes seniors
le moment que ce soit le canal de étant de grands consommateurs
communication à privilégier pour le de Facebook et de vidéos1.
développement de la cohabitation,

XI. Premiers freins et leviers


de développement
L’étude documentaire a permis
d’identifier les premiers freins
interrogés. Un diagnostic réalisé
auprès d’experts a également
permis de poursuivre l’identification
des leviers de développement à
tester.

1
Frédérique Aribaud, Jean-Paul Tréguer, Le Silver Marketing, Dunod, 2016
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

49
Les experts interviewés sont les suivants :

Responsable fondatrice de la structure


La Logitude (CoSI) d’Avignon – 10 ans d’expériences

Président de l’association de Bordeaux


Vivre Avec (LIS) Professeur émérite Université de Bordeaux –
Gérontopsychologie
Chargée de mission logement
La Maison en Ville
intergénérationnel à Rennes
(adhérent E2G) Formation initiale de psychologue clinicienne
Consultant spécialisée champ de
Généracio la vieillesse – Sociologie de la famille /
grands-parents

Cheffe de projet, responsable du projet


Cnav / Toit + Moi Toit + Moi

Responsable du service handicap et vieillis-


Paris Habitat sement, en charge de Partage de Toit

À partir de ces entretiens, les 2. les éléments déclencheurs et


thématiques suivantes ont été l’intérêt pour le sénior ;
détaillées dans le cadre d’un guide 3. les principales attentes sur cette
qui a servi à identifier les freins cohabitation ;
et les leviers de développement : 4. perception de l’offre proposée et
1. connaissance de la cohabitation raisons de non-adhésion.
intergénérationnelle solidaire ;
La segmentation suivante a dans un premier temps été imaginée :

Segment A Segment B Segment C


- Homme et femme - Femme - Femme
- Seul ou en couple - Seule - Seule
- 65-74 ans - 75-80 ans - > 80 ans
- Appétence pour - « Revenu » - Avec une perte d’autonomie
les actes solidaires GIR 4 < Revenu < GIR 6

Les critères de segmentations retenus sont les suivants :

Situation
Niveau
Tranche d’âge économique
d’autonomie
du senior

Ayant
une appétence Vit seule Genre
pour les actes
de solidarité
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

51
• à partir de ces critères, trois Enfin, les leviers suivants avaient
principaux segments ont été d’ores et déjà été identifiés :
imaginés dans le cadre de l’étude • faire connaître un dispositif dont
documentaire et du diagnostic les contours précis sont mal
expert. Ils seront testés dans le connus du grand public ;
cadre de l’enquête qualitative ; • rassurer, créer la confiance
• un segment A, qui regroupent auprès de seniors ;
des hommes ou femmes âgés • financer le dispositif, dont le
de 65 à 74 ans, vivant seuls ou modèle économique est encore
en couple. Ils ou elles ont une mal stabilisé.
appétence particulière pour les
actes solidaires ;
• un segment B, constitué de
femmes âgées de 75 à 80 ans,
vivants seules, et ayant un reve-
nu inférieur à 1 200 €, le critère
financier étant pressentis comme
important dans le cadre de la
formule conviviale ;
• un segment C, enfin, dans lequel
se retrouvent des femmes seules,
plus fragiles, âgées de 80 ans et
plus , et dont le niveau d’autonomie
serait égal ou supérieur au GIR 41.

1
Les personnes en GIR 4 sont des personnes de plus de 60 ans n'assumant pas seule
leurs transferts (c’est-à-dire le fait de s’asseoir, se lever ou se coucher), mais qui,
une fois levées, peuvent se déplacer à l'intérieur de leur logement, et qui ont besoin
d'aides pour la toilette et l'habillage ; ou des personnes n'ayant pas de problèmes
locomoteurs mais qui doivent être aidée pour les soins corporels et les repas.
Source : service-public.fr, Qu'est-ce que la grille Aggir ?, le 13 février 2020.
2
Enquête qualitative
auprès des seniors
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

53

I. Méthodologie, caractéristiques
des seniors interrogés
Il s’agit d’une enquête qualitative de la sous-location à des jeunes.
semi-directive. 30 seniors ont été Parmi ces 13 seniors :
interrogés. Les recrutements (23) - 6 avait déjà fait de la cohabita-
ont majoritairement été réalisé à tion intergénérationnelle,
partir d’un fichier de 113 noms en- - 2 étaient engagés au moment
voyé par des structures membres de l’étude dans une cohabita-
des réseaux CoSI (6) et LIS (3). Le tion sans association, dont 1
fichier étant insuffisant pour par- avec un jeune présenté par sa
venir à l’objectif de 30 personnes famille,
interrogées, l’échantillon a été - 4 sous-louaient ou avaient déjà
complété par un recrutement opéré sous-loué à un jeune,
par bouche à oreille. L’ensemble - 1 couple accueillaient des
des répondants avaient déjà tous migrants régulièrement durant
entendu parler de la cohabitation un mois en lien avec une
intergénérationnelle solidaire. association.

Parmi eux : En cohérence avec la réglementa-


• 17 répondants ont voulu faire de tion relative aux données person-
la cohabitation intergénération- nelles, des courriers d’information
nelle mais n’ont pas finalisé leur ont été systémiquement transmis
démarche ; et des déclarations de consente-
• 13 vivent ou ont eu une expé- ment ont été signées.
rience de la cohabitation et/ou
Les entretiens ont été réalisés entre 25 entretiens ont été effectués en
le 15 octobre et le 22 novembre 2019 territoires urbains ou périurbain, et
dans les régions suivantes : 5 entretiens se sont déroulés en
• Île-de-France : 14 territoires ruraux. Sont considérés
• Provence Alpes Côte d’Azur : 2 comme « ruraux » les territoires
• Auvergne Rhône Alpes : 4 difficilement accessibles par les
• Centre : 1 moyens de transports en communs
• Lorraine : 1 (fréquence de passage de car par
• Occitanie : 2 exemple).
• Bretagne : 1
• Normandie : 2 L’échantillonnage de l’étude a
• Pays de la Loire : 3 été constitué à partir de la seg-
mentation présentée plus haut
L’importante dispersion des dans l’étude documentaire. Il est
territoires nous a contraints à globalement conforme à ce qui
réaliser une partie des entretiens était prévu (les chiffres entre pa-
par téléphone (12), et une partie renthèses indiqués correspondant
en face à face (18). à l’objectif initial) :

SEGMENT A SEGMENT B SEGMENT C

< 75 ans 70-80 ans


Âges avec petits-enfants seul revenu
> 80 ans

Urbain, 6 sans 2 (3) avec


8 9 (8)
périurbain enfant enfant
1 sans 1 avec
Rural 2 1 (2)
enfant enfant
Total 10 10 10
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

55
Pour les plus de 80 ans, nous la prise de décision de s’investir
sommes partis du principe qu’il dans le dispositif de cohabitation
était important d’identifier le rôle intergénérationnelle solidaire.
des enfants, notamment dans

II. Connaissance de la cohabitation


intergénérationnelle solidaire
Le principe général de cohabitation intergénérationnelle était
globalement bien cerné par les personnes interrogées :

Bonne connaissance Connaissance moyenne Mauvaise connaissance


15 12 3

En spontané, la « cohabitation une attention mutuelle : « coha-


intergénérationnelle » produit bitation : c’est un partage de lieu,
majoritairement des évocations en acceptant les particularités de
positives autour de la notion chacun » ;
d’entraide, de partage : • vivre sous le même toi, mais aussi
• des générations qui s’entraident : partager son intimité : « si c’est
« Ça veut dire qu’il y a une gé- une personne qu’on ne connait
nération qui en aide une autre et pas vraiment et qu’on l’accueille
que cela doit être réciproque »1 ; chez soi, ça ouvre sur l’intimité
• une cohabitation bienveillante, de la personne en elle-même » ;

1
L’intégralité des verbatims ne peut être présentée. Certains sont présentés en guise
d’exemple.
• une aide des jeunes ou des per- d’abord un questionnement sur le
sonnes ayant peu de moyens : caractère intergénérationnel des
« quelque chose d’important car parties prenantes au dispositif de
il y a des difficultés de logement cohabitation solidaire : quelles sont
pour les jeunes ». les limites d’âge des jeunes et des
seniors ? N’est-ce pas réducteur
Les personnes interrogées de se donner des limites d’âge ?
évoquent aussi souvent une pré- Pourquoi n’accueillir solidaire-
sence pour (rompre la solitude des ment que des jeunes, pourquoi
personnes âgées), une veille ou pas d’autres personnes âgées
une aide pour le senior – voire dans (colocation entre seniors) ? Par
un cas du ménage, du jardinage ailleurs, certains découvrent lors
(même si c’est élément n’entre pas de l’entretien qu’il peut y avoir des
dans la définition du dispositif). flux financiers entre le jeune et le
De manière moindre, certains senior.
seniors parlent d’aide financière,
d’aide pour les personnes âgées Après avoir été interrogé, une mi-
qui commencent à perdre leur norité de seniors (trois d’entre eux)
autonomie. Deux d’entre eux ont ne semblent pas intéressés par la
cités une expérience négative : question de la solidarité inhérente
« ma mère l’a fait une fois et ça au dispositif de « cohabitation
s’était mal passé ». intergénérationnel solidaire ».
Treize sont modérément intéres-
Une fois la définition précise don- sés par le caractère solidaire. La
née aux personnes interviewées1, moitié, enfin, sont identifiés comme
deux principales réactions se sont particulièrement intéressés par le
notamment manifestées. On relève caractère solidaire du dispositif.

1
« La cohabitation intergénérationnelle solidaire est le fait de louer ou sous-louer
à des personnes de moins de 30 ans une partie de votre logement afin de renforcer
le lien social et de faciliter l’accès au logement des jeunes dans un cadre solidaire ».
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

57
L'ENTRAIDE L’AIDE DES JEUNES

« Solidaire, c’est faire pour l’un, « Les jeunes représentent le monde


faire pour l’autre. » de demain, investir sur le futur.
« C’est de l’entraide. » J’aime bien semer. »
« Entraide mutuelle permanente, « Je le faisais pour la solidarité,
donnant-donnant. » je me sens redevable d’avoir eu
« C’est avoir une présence, de la chance. »
un étudiant, lui n’a plus de souci « Pas airbnb, car je veux le côté
de logement et moi ça me fait solidaire, je ne veux pas être une
une compagnie. » hôte. »
« C’est sûr. J’ai des enfants et
je vois bien ce que c’est. Il y a
un peu d’APL mais ça ne suffit pas. »
« Moi aussi j’ai été étudiant, et j’avais
énormément de difficultés pour
trouver un logement. J’étais obligé
d’être dans une chambre d’hôtel
et ça coutait très cher. »

Parmi ces derniers, la compré- tendances dans le souhait de


hension de la solidarité se divise solidarité.
en deux motivations « types » :
d’une part la volonté d’entraide, Dans le cas de l’entraide, la notion
qui suppose un souhait d’équilibre de « régularité » du partage est
et de réciprocité, et d’autre part évoquée. « On partage les repas et
la volonté d’aider des jeunes, on vit au quotidien ». Cela n’exclut
davantage axée sur le don. Un pas une contribution financière
type n’exclue pas l’autre, mais cela minimum : « je demanderais quand
permet d’identifier deux grandes même peut-être aussi un peu de
participation pour le chauffage ou La non-réciprocité ou un prix
l’électricité ». de la « contrepartie financière
modeste » au niveau du marché
On constate cependant que des immobilier locatif entre en contra-
nuances importantes peuvent diction avec le principe même de
apparaître dans la façon dont la solidarité telle qu’elle est comprise
solidarité est perçue : dans le dispositif.
• une solidarité « à sens unique »
qui bénéficierait uniquement aux Enfin, deux personnes interrogées
seniors est évoquée dans un cas manifestent un scepticisme sur la
(« solidaire, ça veut dire que si capacité de solidarité des jeunes.
j’avais besoin de petits travaux, Ainsi un senior déclare : « je pense
le jeune m’aiderait ») ; que les jeunes qui acceptent cette
• une sensibilité à la situation proposition ne le font pas pour
des jeunes, etc. mais avec une rendre service aux personnes
contrepartie financière au niveau âgées mais pour se loger, je ne
du marché. Pour une des per- crois pas au solidaire côté jeune.
sonnes âgées interrogées vivant Nous sommes dans des mondes
en zone semi-rurale, « 300 € différents, à l’air du jeunisme. Je ne
serait solidaire, avec les charges, crois pas que des jeunes aient des
eaux électricité tout compris ». intérêts à rencontrer des seniors ».

III. Une nouvelle segmentation apparaît


Les attentes vis-à-vis de la coha-
bitation intergénérationnelle sont
très structurantes.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

59
À partir de l’étude de ces dernières nous parvenons en synthèse,
à la segmentation ci-dessous :
Segment 1 Segment 2 Segment 3

Un revenu Être là en cas Aider un jeune


complémentaire de problème, dans le besoin
besoin d’une veille
Attentes Avoir de la compagnie, En plus mineur :
prioritaires une présence • Besoin d’accompagnement Une compagnie
pour sorties en journée
ou soirée
Pas d’engagement • Besoin de quelques mois
de temps mais le respect par an (en remplacement
de certaines consignes de l’aidant)
Focus : De contribution
en termes modeste élevée « Participation aux charges » ou gratuité
financiers à loyer substantiel
Source : identification des leviers de développement de la cohabitation intergénérationnelle solidaire –
rapport de l’étude qualitative

Les caractéristiques générales des segments 1, 2 et 3 sont


les suivantes :
2 11 12 5

Jeunes Autonome Fragiles Solidaires Hors cadre


seniors seules 80 ans et + 60 ans et +
«actifs» 60-75 ans

Besoin d’un Besoin d’un Avec Avec


En perte le souhait le besoin
complément complément d’autonomie premier de plus
de revenu ++ de revenu + d’aider que des
un jeune menus
Apprécient Avec dans services
présence un sentiment le besoin
des jeunes de solitude

Sensible à
la question
Hors segmentation du logement Hors segmentation
des jeunes
Frontière secteur Frontière secteur
immobilier classique Ménage et care

Source : identification des leviers de développement de la cohabitation intergénérationnelle solidaire –


rapport de l’étude qualitative
Certains seniors peuvent avoir une apprécient la présence des jeunes
envie de lien social, voire de soli- dans leur foyer sans attente de
darité, mais veulent louer au prix présence spécifique. Aucun senior
du marché. D’autres ne souhaitent « hors cadre » n’a en revanche
pas nécessairement de revenu été interrogé.
complémentaire, mais attendent
en revanche des prestations qui Les « autonomes seules » sont
représentent plus que des « menus des femmes autonomes et vivant
services » et qui s’apparentent à seules. Elles ressentent majoritai-
des services à la personne. Ces rement un sentiment de solitude,
deux catégories de seniors sont avec des enfants peu présents
en dehors de la segmentation et/ ou des situations de veuvage
retenue puisque leurs attentes fréquentes. Elles ont entre 62 et
ne correspondent ni à la définition 74 ans dans l’étude. Elles sou-
réglementaire ni à l’esprit de la haitent une contrepartie financière
cohabitation intergénérationnelle modeste, en-deçà du marché mais
solidaire tel qu’il est mis en œuvre suffisamment importante pour
depuis 2004. constituer un complément de reve-
nu. Les personnes ayant un revenu
Les deux « jeunes seniors actifs » mensuel net inférieur à 1 200 €
qui ont été interrogés sont âgés de sont davantage représentées dans
71 et 77 ans. Ce sont des retraités cette catégorie (une sur deux) mais
autonomes et investis dans de ce critère de segmentation n’est
nombreuses activités – notamment pas suffisamment présent pour être
au sein d’associations : « on ne identifié comme pertinent. Elles ont
s’appartient plus »1. Ils souhaitent toutes une sensibilité – plus ou
une contrepartie financière au moins marquée – à la question du
niveau du prix du marché. Ils logement des jeunes.

1
Nota : les noms des formules, comme ceux des segments, n’ont rien de définitif
et servent simplement pour faciliter l’analyse.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

61
Les « fragiles » sont des femmes en ce sens, pour se rassurer, et/ou
ou des hommes ayant 80 ans et rassurer également leurs enfants.
plus, éventuellement en tout début
de perte d’autonomie. Ils ou elles Enfin, les « altruistes » ont entre
ont entre 80 à 94 ans dans l’étude. 61 à 89 ans dans l’étude. Ce sont
Ces personnes attendent toutes des personnes seules autonomes,
une « présence ». Les enfants plus souvent des femmes. Elles
sont très souvent proches, ce qui sont particulièrement sensibles
confirme l’enseignement de l’étude aux questions de solidarité et
documentaire : la famille proche souhaitent aider un jeune « dans
a tendance à se resserrer autour le besoin ». Elles ont une vie
des personnes âgées en vieillis- associative souvent plus intense
sant, lorsque la barre des 80 ans que les autres, et elles n’attendent
commencent à être franchie. Il n’y pas – ou peu – de contrepartie
a pas d’attente en termes d’aide financière.
financière, ou alors une simple par-
ticipation aux charges. Certains ont Quel que soit le profil identifié,
pourtant des niveaux des revenus le niveau de revenu n’est pas
faibles. On constate également segmentant : des seniors ayant
que les personnes âgées com- un niveau de revenu faible
prises dans ce segment n’ont pas peuvent attendre de la présence
ou peu de vie associative. Elles sans contrepartie financière, tout
bénéficient toutes d’aide à domicile comme certains peuvent disposer
pour le ménage. La cohabitation d’un revenu confortable et attendre
intergénérationnelle solidaire un apport financier conséquent. De
est un moyen de se maintenir à même, les « altruistes » ne sont
domicile grâce à un lien social et pas plus aisés ou plus pauvres
une veille, et ils utilisent le dispositif que les autres.
IV. Les éléments déclencheurs
Les déclencheurs sont des évé- sont pas nécessairement celles
nements ou des conditions qui ont qui ont le plus fort sentiment
amené les seniors à s’intéresser de solitude. Pour exemple, une
de près, voire à souscrire, à la personne âgée pourra avoir de
cohabitation intergénérationnelle nombreuses relations sociales
solidaire. Spontanément, les durant la journée, et ressentir en
seniors interrogés identifient deux plus le besoin de contact humain
déclencheurs majeurs : chez elle, quand d’autres per-
• pour les « autonomes seules » sonnes âgées s’accommoderont
et les « fragiles », il s’agit d’un de moins de relations sociales
besoin de présence, qui peut se sans pour autant ressentir de
traduire selon les cas par un be- sentiment de solitude ;
soin de présence conviviale, un • pour les « autonomes seules »
besoin de présence rassurante, et les « altruistes », une volonté
ou les deux. « D’abord de ne pas d’aider les jeunes : « on est
être seul dans ma maison ». Les étonné qu’autant de logements
« altruistes » souhaitent égale- soient inoccupés, et qu’il y ait
ment être moins seuls ; autant d’étudiants dans des
• il est important de noter à ce situations très précaires. Alors
stade que les personnes isolées rester à deux dans une si grande
socialement – c’est-à-dire avec maison ne serait pas cohérent
des relations à des cercles de so- avec nos valeurs ».
cialisation (familles, associations,
amis, etc.) moins fréquents – ne
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

63
Au total, les déclencheurs majeurs par segment sont les suivants
(++++ indiquant que le déclencheur est fondamental pour le segment
et aucun + que le déclencheur ne joue pas de rôle) :

AUTONOME FRAGILE ALTRUISTE


SEUL

Pour être moins seule ++++ ++++ +++

Pour se sentir plus en sécurité


++ ++++
grâce à la présence d’un jeune
Suite à perte de revenu, pour
++++
un complément de revenu
Pour rester jeune, branché ++
Pour rassurer ses enfants en
++ ++
ayant un jeune à la maison
Pour aider un jeune ++++ ++ ++++

Pour apprendre une langue,


++
l’informatique, etc.

Pour être rassurée – demande


+++
des enfants (1)

On le voit, le segment des « auto- solidaire consécutivement à une


nomes seules » se dirigera vers la perte de revenu ou pour un complé-
cohabitation intergénérationnelle ment de revenu : « je l’ai fait pour
avoir un complément de revenu Cependant, les seniors « fragiles »
quand j’ai pris ma retraite, ça fait sont – quant à eux – peu intéres-
partie des raisons ». À noter : ce sés par le fait de rassurer leurs
n’est pas parce qu’une personne a enfants, ce n’est en tous les cas
une retraite conséquente qu’elle ne pas un déclencheur. On voit ici l’im-
souhaitera pas un complément de portance de bien cibler le contenu
revenu, significativement inférieur de la communication selon que l’on
aux prix du marché locatif pratiqué s’adresse aux seniors « fragiles »
au niveau local. eux-mêmes ou aux enfants pres-
cripteurs. Par ailleurs, on voit que
Les enfants des seniors recom- l’envie d’aider un jeune est moins
manderont le dispositif à leur souvent un élément déclencheur
parents « fragiles » pour avoir du chez les « fragiles ».
temps pour soi : « après on peut
se permettre de se relâcher un
peu. Parce que j’ai connu des
périodes ou je ne partais pas de
la maison sans qu’elle dorme ».
Ils le feront également pour être
rassurés [(1) voir tableau page
précédente] (en cohérence avec
le besoin des seniors de se sentir
en sécurité) : « c’est ce que je lui
dis, si elle prend quelqu’un moi
je dormirai mieux quand je suis
chez moi », « surtout que depuis
que ma mère a fait des chutes, je
suis inquiet ».
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

65

V. Les attentes sur la cohabitation


intergénérationnelle solidaire
elle-même
Les attentes en termes de coha- • une participation à un temps de
bitation intergénérationnelle, par cuisine.
segment, sont synthétisées plus
haut dans la nouvelle segmenta- Une constante importante : les
tion proposée. seniors interrogés sont soucieux
d’accueillir un profil de jeune dont
Des attentes en termes de « me- la personnalité leur convienne. Ces
nus services » ressortent peu attentes sont très diversifiées et ne
au niveau des « autonomes » et dépendent pas du segment.
des « altruistes ». Elles sont en
revanche évoquées par les « fra-
giles », mais de manière moindre.
On relève notamment :
• un accompagnement dans les
sorties ;
• une aide dans les situations de
perte d’autonomie du quotidien ;
• une aide ponctuelle et un peu
de ménage ;
• des échanges en anglais ;
ATTENTIF AUX
UN JEUNE DISCRET DÉPENSES D’ÉNERGIE
UNE PERSONNE OU D’EAU
DANS LE BESOIN « JE NE PEUX PASSER
MON TEMPS À DISCUTER, « PAS DÉPENSER
« UN JEUNE IL FAUT QUELQU’UN DE D’EAU INUTILEMENT »
DANS LE BESOIN » DISCRET QUI NE PARLE « LE CHAUFFAGE
« UN RÉFUGIÉ » PAS TOUT LE TEMPS… » ÉLECTRIQUE
C’EST CHER »
Un jeune qui ne soit
pas susceptible
Un jeune « Parfois on dit des
Pas de fumeur dans le monde du travail choses et c’est mal pris,
Un étudiant je n’ai pas envie de me
compliquer la vie
avec ça. »
Un jeune respectueux
« Dans les relations
Un genre particulier Un étranger humaines le respect
« Un garçon » qui parle anglais est important, et il faut
« Une jeune fille » Un réfugié syrien respecter son espace,
ne pas faire
n’importe quoi. »

Un jeune mature Un jeune qui veut s’en


« Quelqu’un de Une personne qui peut sortir
relativement être là dans la journée « Je suis prête à aider
indépendant/mature, Un jeune qui n’est pas ceux qui veulent s’en
je ne veux pas jouer là le week-end sortir. J’en ai assez
le rôle de la maman. » bavé dans ma vie. »

Un jeune indépendant
Une personne propre
« Je ne me vois pas
« Tout ce qu’il salit, il
faire la conversation,
faudra le nettoyer, il Un jeune qui ait une
que la personne puisse
faut que la personne appétence pour le lien
se débrouiller, il faut
laisse le lieu en bonne
que le jeune soit indé-
état. »
pendant. »
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

67
En termes de participation finan- englobant les situations allant
cière, les attentes varient selon d’une participation aux charges
deux grands types : variables à une gratuité : « non
• d’une part une catégorie allant pas du tout d’engagement finan-
d’une contribution modeste cier. Puis au contraire ce serait
élevée à un loyer substantiel (au un grand plaisir de pouvoir aider
niveau du marché, « 400 € ») ; quelqu’un. ».
• d’autre part une catégorie

VI. Les attentes en termes d’accompa-


gnement de la structure
En termes d’accompagnement de la structure, les trois attentes
qui arrivent largement devant sont les suivantes :
« Juste pour le début, pour identifier la personne c’est
important. »
« Identifier si son mode de vie est compatible avec le
COMPRENDRE mien (ex régime alimentaire végétarien, langue, etc.). »
LE BESOIN « Ils voient la personne avant, j’étais confiante. »
ET PROPOSER
DES CANDIDATS « Trouver un jeune bien. J’ai bon cœur, mais si ça se passe
mal je ne peux pas. »
« Je ne sais pas, je ne suis peut être tout simplement pas
tombée sur la bonne fille. »
Fin du tableau page suivante
ÊTRE « Oui le suivi c’est important, surtout si une des deux est
UN RECOURS pas contente pour voir ce qu’on peut faire. »
EN CAS
DE PROBLÈME « Si j’avais choisi le Pari Solidaire c’est parce que c’est
encadré et sécurisant, je veux pas avoir ça à régler si ça
passe pas bien. »
« Je ne redoute pas la sécurité, ou la mauvaise entente
parce qu’il y a une structure, et si il y a un problème,
je le dis. »
« si jamais ça ne va pas, de pouvoir gérer la situation. »
« Le minimum ce serait que lorsqu’il y a désaccord il pourrait
intervenir et trouver un autre lieu de résidence. »
« Aujourd’hui, il n’y a pas de contrat écrit, c’est oral et
basé sur la confiance. C’est pour ça qu’on a contacté
Nantes Renoue qui serait un bon médiateur. S’il y a un souci
l’association est là pour remettre les choses au point.
Nous c’était « gentils » comme problèmes » .
CRÉER « Je demande aux associations de nous mettre en
LES CONDITIONS confiance. Comment ? : en choisissant un étudiant sur les
DE LA
CONFIANCE critères qu’on demande. J’ai demandé un étudiant, et ils
m’ont envoyé à chaque fois un monsieur qui travaille. »
« J’accorde beaucoup d’importance aux mots, à ce qu’on
me dit. étudiant c’est étudiant et anglophone c’est anglo-
phone. C’est important, sinon ça coupe la confiance
et le contact. donc c’est important de tenir compte de ce que
dit la personne sénior. »
« Une mise en relation, une charte, etc. »
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

69
Dans une moindre mesure, les apparaît comme une réassurance
seniors attendent également que supplémentaire par rapport à une
l’association agissent comme plateforme internet seule, elle a
une « garantie » sur l’ensemble également des compétences qui
du parcours, via des vérifications lui permettent de proposer aux
régulières, notamment afin de seniors des activités à réaliser
s’assurer que le jeune « tient ses avec les jeunes.
engagements ». L’association

VII. La perception des offres


Afin de mieux cerner les attentes engament de présence du
des seniors en matière de co- jeune,
habitation intergénérationnelle ˃ la formule dite « solidaire »,
solidaire, il leur a été demandé : qui suppose une présence
• leur perception sur l’offre qui certains soirs et, parfois,
leur avait été présentée par les une petite participation aux
structures, le cas échéant et charges ;
lorsqu’ils s’en souvenaient ; - deux nouvelles formules :
• leur perception sur des concepts ˃ une formule axée sur la
d’offre présentés en entretien : flexibilité de présence pour le
- deux offres proches de deux for- jeune, dont l’absence pourrait
mules majoritaires aujourd’hui ; permettre à l’hébergeur d’uti-
˃ la formule dite « conviviale », liser – avec son accord – la
qui suppose une contribution chambre,
financière modeste significa- ˃ une offre « low cost » réalisée
tivement en deçà des prix 100 % via internet sans inter-
du marché locatif local, sans vention de structure.
Pour mémoire, on peut distinguer complément de revenu ;
deux composantes de l’offre : • l’accompagnement : une struc-
• la cohabitation elle-même : elle ture accompagne la personne
permet aux seniors vivant seuls âgée dans la définition de ses
dans un logement sous-occupé attentes. Elle lui propose la
de bénéficier d’un lien social, personne de moins de trente
de présence et/ou de menus ans la mieux adaptée. Elle
services tout en aidant un jeune. veille à l’encadrement juridique
Elle est également un moyen, et au bon déroulement de la
le cas échéant, de percevoir un cohabitation.

VIII. Perception des offres qui avaient


été proposées par les structures
Sur les modalités de « coha- (sans précision des tâches), des
bitation » en tant que telles, sorties en journée ou des petites
on a constaté globalement un participations aux charges. Les
souvenir de l’offre assez flou de « autonomes seules », eux, se
ce qui était attendu en termes de souvenaient plus volontiers de
menus services ou de présence. deux caractéristiques d’offre :
Cependant, les « fragiles » se d’une part, aucun engagement
souvenaient d’une offre avec des formel de présence – même si
engagements de présence, qui « ça ne doit pas être un courant
supposaient aussi parfois en plus d’air » – d’autre part la réalisation
la réalisation de coups de main de menus services ponctuels.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

71
En revanche, quel que soit les segments, la description de la
contrepartie financière est plus précise, même si le souvenir de
celle-ci est parfois au-dessus de la réalité des pratiques :
SEGMENT SOUVENIR DE LA CONTREPARTIE FINANCIÈRE

Seniors « actifs »
(hors champ de
• « 285 €/mois »
la cohabitation inter-
• « 400 €/mois »
générationnelle)

Autonomes seules • « 350 €/mois sans engagement. Le jeune


a l’APL »
• « Autour de 200 €/mois »
• « 150€ de participation »
• « L’offre « Toit + moi » : 150 €/ mois et parler
anglais »
• « Ils n’ont pas dit » « Ne me souviens plus
bien »
• « Juste aider à faire la vaisselle, mais honnête-
ment j’ai besoin de rien »
Fragiles • « Participation aux charges, mais ce n’est pas
la question. »

Altruistes • « 270 €/mois, mais le repas du soir fourni »


• « 150 €/mois »
• « Participation aux charges. Mais je ne suis pas
là pour ça. »
• « Pas de contrepartie »
Sur le versant « accompagne- jeune, et la possibilité du recours
ment », on constate également à la structure en cas de problème.
un souvenir vague de l’accompa-
gnement et du prix à payer aux La perception des prix des frais
structures. De manière générale, de dossier et frais de suivi sont
les seniors avaient en effet une très divers, révélant la diversité
réminiscence assez lointaine de de pratiques des associations.
l’accompagnement proposée par En effet, lorsque les seniors se
la structure (le cas échéant) même rappelaient de cet aspect, ils
s’ils les interviewés ayant été en re- évoquaient un coût « pas cher »,
lation avec une structure évoquait la gratuité1 ou des frais précis allant
toujours la mise en relation avec un de 100 à 300 €.

IX. Perception des concepts d’offres


testés
Les concepts d’offres testés sont les suivants :

Avec la formule « conviviale » hébergez un(e) jeune et recevez


une compensation financière :
• aidez un jeune à poursuivre ses Les frais de l’association qui vous
études ; accompagne du recrutement du
• partagez des moments de jeune au suivi de la cohabitation
convivialité ; s’élèvent à 33 €/mois.
• percevez un loyer en-deçà des
coûts de l’immobilier pratiqué au
niveau local. De 150 à 400 €/mois
en fonction du lieu.
1
Une personne ne se souvenait sans doute pas qu’il fallait payer frais de dossier et frais
de suivi. Mais il existe également quelques associations pour lesquels l’accompagnement
est 100 % gratuit (notamment les associations reconnues d’utilité publique).
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

73
Avec la formule « présence » hébergez un(e) jeune qui s’engage
à une présence régulière le soir :
• le jeune est présent les soirs et Les frais de l’association qui vous
nuits 4 soirs par semaine et un accompagne du recrutement du
week-end sur deux ; jeune au suivi de la cohabitation
• il a quatre semaines de vacances s’élèvent à 33 €/mois.
de septembre à juin dont une
semaine à Noël ;
• toutes les journées sont libres
pour le jeune ;
• gratuité pour le jeune.

Avec la formule « simplicité » choisissez vous-même votre


colocataire parmi nos jeunes demandeurs et organisez votre
cohabitation :
• bénéficiez de nos contacts et Frais d'adhésion à l'association de
documents contractuels via notre 50 €/an, soit 4,2 €/mois.
plateforme internet ;
• percevez jusqu'à 300 €/mois* ; *Dépendant de la zone géogra-
• aidez un jeune à poursuivre ses phique et du prix moyen des loyers
études ; exercés sur cette zone.
• partager des moments de convi-
vialité.
Avec la formule « flexibilité » hébergez un(e) jeune la semaine
tout en gardant votre tranquillité pour les weekends et les fêtes :
• aidez un jeune à poursuivre ses * Les frais de l’association qui vous
études ; accompagne du recrutement du
• partagez des moments de jeune au suivi de la cohabitation
convivialité ; s’élèvent à 33 €/mois.
• percevez jusqu’à 150 €/mois* ; **Le jeune hébergé s’engage
• gardez votre logement disponible à vous laisser profiter de votre
lors des vacances pour vos logement lorsqu’il sera absent.
petits-enfants**.

En synthèse, pour les quatre offres testées, les enseignements


ont été les suivants :

FORMULES TESTÉES CONSTATS AMÉLIORATIONS

Formule conviviale Une offre bien adaptée • Le prix trop élevé


Avec la formule pour les « autonomes » est identifié comme
« conviviale » un frein.
hébergez un(e)
jeune et recevez
une compensation
financière
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

75
FORMULES TESTÉES CONSTATS AMÉLIORATIONS

Formule solidaire Offre bien perçue • Des engagements de


Avec la formule au niveau de sa présence qui paraissent
« présence » promesse. Elle est trop contraignants pour
plus adaptée aux le jeune. Aussi, les
hébergez un(e)
« fragiles » engagements présentés
jeune qui s’engage dans l’offre doivent être
à une présence mis « pour exemple ».
régulière le soir L’important est de
montrer que le contrat
est flexible et peut
suivre les besoins de
chacun dans un cadre
déterminé.
• Le prix trop élevé est
aussi perçu comme
un frein, même s’il est
moins bloquant.

Formule tout Une offre qui • Cette formule pourrait


internet concerne les seniors être proposer, mais avec
Choisissez vous- appétant à internet une option « recours
et les enfants des à une structure » pour
même votre
seniors. rassurer les seniors. Elle
locataire parmi nos pourrait permettre la
Une formule qui
jeunes demandeurs intéresse des seniors cosélection des jeunes.
et organisez votre « actifs ». Il convient cependant
cohabitation sur de bien circonscrire
internet le rôle d’internet dans
la communication
et la distribution en
fonction des segments,
en se rapportant aux
enseignements relatifs
aux parcours clients
(ci-dessous).
Fin du tableau page suivante
FORMULES TESTÉES CONSTATS AMÉLIORATIONS

Formule flexibilité L’offre peut être • Il s’agit d’une option


Avec la formule adaptée à la marge marginale mais qui
« flexibilité » aux seniors ayant des peut être rendue
besoins d’accueil possible via une
hébergez un(e) jeune
(petits-enfants, amis, option « à la carte ».
la semaine tout
etc.).
en gardant votre
tranquillité pour
les week-ends et les
fêtes.

Au total, excepté l’offre conviviale donc être valorisé et expliqué.


pour les « autonomes seules », La demande d’une offre dédiée
les offres actuelles ne répondent aux souhaits des « altruistes »
pas totalement aux besoins re- apparaît également pour accom-
lativement diversifiés des seniors. pagner Ces seniors souhaite
Une demande d’offre un peu plus avant tout accompagner un jeune
à la carte notamment sur le ni- dans le besoin, sans attentes
veau et le type de présence de compensation financière
auprès des fragiles se fait jour. ou de présence. Cette attente
Le surmesure, pourtant souvent apparaît à la marge, mais elle
effectué par les associations, doit très évidente.

X. Freins identifiés
Les raisons principales qui ont cohabitation intergénérationnelle
amené les seniors à arrêter de solidaire sont liées à la question
s’investir dans le dispositif de du profil du jeune :
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

77
En amont de la première rencontre
• appréhension de tomber sur trop » « je suis très indépendante
quelqu’un de malhonnête : et je n’aime pas avoir quelqu’un
« Quelle garantie sur le fait qu’il sur le dos » ;
ne va pas faire n’importe quoi. • appréhension sur les jeunes :
les personnes vieillissantes ont « Il y a du racisme, ou de l’ap-
besoins d’être sécurisées » ; préhension, même juste le fait
• peur de tomber sur un jeune trop que ce soit un jeune ça peut faire
présent : peur ... Déjà une aide-ménagère
« Une amie est tombée sur c’est parfois dur ».
quelqu'un d’envahissant et c’était

Après la première rencontre


• parce qu’il ne répondait pas au refusée » ;
besoin : • parce que le premier contact n’a
« Les jeunes ne répondaient pas pas été jugé satisfaisant :
à mes attentes, elles étaient trop « La brésilienne semblait un
occupées pour sortir avec moi peu trop envahissante, elle
deux fois par semaine » ; était comme un ordinateur elle
« On m’a proposé une jeune, très planifiait (repas, etc.) » ;
jeune qui n’étais pas mature, « L’algérienne, elle était nerveuse
certainement l’habitude d’être (au tél), pas le feeling ».
cocounée, c’est la seule que j’ai

Après une première expérience


• le jeune n’était pas assez présent Ce qui compte ce sont leurs
« C’est parce que les jeunes ne copains et leurs études. » ;
sont pas assez présents. Ils ne « La jeune restait dans sa
pensent qu’à profiter de la vieille. chambre et se renfermait » ;
« Au début tout s’est bien passé téléalarme, finalement préférée
mais au bout d’une semaine (sic) ;
on s’est rendu compte que ça • le caractère du senior devenu
marcherait pas ». trop difficile ;
• non pertinence si accident grave • une contrepartie financière trop
« Parce que mon mari était peu élevée ;
handicapé, j’étais seul avec lui • le cadre bâti inadapté à une vie
la nuit et je voulais quelqu’un en commun ou des travaux à
capable de m’aider en cas de réaliser pour rendre la chambre
catastrophe. Mais pour finir ce habitable / accueillante ;
n’est pas la bonne solution : ni • les hésitations ou l’opposition de
elle, grosse comme un râteau, la famille ;
ni moi, n’aurait pu le soulever ». • un service qui n’est pas assez
« sur mesure », une écoute
Au total, pour quasiment tous les insuffisante de la structure ;
seniors, une appréhension forte ou • la perte de l’intimité ;
des préjugés les profils de jeunes • une solution peu ou mal connue ;
a été un frein majeur. • le coût de la structure jugé trop
élevé, notamment pour les
Enfin, nous avons identifié les « altruistes » qui ne veulent pas
freins suivants, cités de manière « payer pour aider » un jeune ;
spontanée : • la peur de trop s’attacher ;
• la peur d’un impact fiscal négatif ; • la crainte de rythmes de vie trop
• le fait que le logement soit dé- différents ;
centré, notamment par rapport • la crainte de brider un jeune.
aux campus ;
• la concurrence d’une solution de Ces freins sont rarement cumulés.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

79
Ils doivent être tous pris au sérieux, tation. Des actions partenariales
à des degrés différents. Ils peuvent avec les pouvoirs publics et les
être, plus ou moins facilement, dé- organismes de protection sociale
passés, par des actions adaptées permettront également de lever
sur la communication, les parcours certains de ces points de blocage
des bénéficiaires, les concepts (notamment sur la question fis-
d’offre – dont les accompagne- cale et la question du « prix » du
ments des associations en amont, dispositif).
pendant et à la fin de la cohabi-

XI. Les parcours clients


Majoritairement, nous constatons dans l’étude que la découverte
de la cohabitation intergénérationnelle solidaire se fait de la
manière suivante :

+ • « Oh vous savez, j’étais en train de parler avec des gens à


Fragile la boulangerie et on m’en a parlé, je me suis dit que ça pouvait
Le bouche être bien alors j’ai contacté l’association. »
à oreille • « Je parlais avec mes voisins dans mon immeuble. »
• « Ma fille et un medecin m’en avaient parlé. »
Autonome • « Une amie qui a une amie l’a fait. »
seule Local
• « J’étais au CCAS et quelqu’un m’en a parlé et m’a donné
le numéro de l’association. »
Un organisme
National
+ Solidaire • « C’était au téléphone, quelqu’un de la CNRACL me l’a présenté. »
• « Quand la Cnav m’a envoyé ça, j’ai vu a quoi ça correspondait. »
De manière moins massive, les • journal :
canaux suivants sont également - « J’ai découvert ça sur des
identifiés : journaux locaux je crois, puis je
• télévision : me suis renseigné sur internet
- « Après le reportage j’ai cher- et au téléphone » ;
ché sur internet puis j’ai appelé
Paris Solidaire », • radio ou journal puis internet :
- « J’ai vu quelque chose à la - « J’ai dû entendre une émission
télé », de radio (j’écoute France Inter,
- « Un documentaire à la télé- j’ai regardé sur internet et
vision » ; tombée sur Paris Solidaire »).

• leurs enfants : Une fois la découverte réalisée, les


- « Mon gendre a fait une seniors n’ont très majoritairement
recherche et a trouvé cela. pas eu de difficultés pour s’informer
Sur internet je crois mais pas sur le dispositif, car la structure
certaine » ; locale leur a donné les réponses
nécessaires. Les informations
• professionnel de santé : peuvent également être trouvées
- « Je l’ai su par mon infirmière. sur internet.
Elle m’a donné un numéro de té-
léphone et je les ai contactés » ;

Pour mieux faire connaître la cohabitation intergénérationnelle


solidaire, les leviers suivants sont proposés par les seniors, et
leurs enfants le cas échéant :
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

81
TOUT SEGMENT AUTONOMES FRAGILES
CONFONDU ET SOLIDAIRES
LA TÉLÉVISION, DES RÉUNIONS, LE JOURNAL LOCAL
PEUT-ÊTRE AVEC DES TÉMOIGNAGES
EN MAJEUR ++ EN MAJEUR

« Il faudrait des vidéos, « J’aimerais bien voir « La presse locale »


des témoignages car en réunion les autres « Ouest France »
beaucoup de gens qui ont déjà fait de la
sont braqués pour cohabitation, comment
accueillir des inconnus ils pensent. »
à diffuser dans émis- « Leur proposer de
sions destinées aux se réunir, à un endroit
seniors. » où pas mal de gens
« En parler à la télévi- souhaitent se rencon-
sion, pour que tout le trer : goûter, apéro
monde sache ce que dinatoire. »
c’est . Si la Cnav ne « Présenter des cas,
m’avait pas contacté, des exemples qu’on
je n’aurais jamais en- peut citer : un tel a
tendu parler de ça. » fait ceci chez telle
personne. Expliquer
ce qui est possible et
ce qui peut se faire,
et amener des jeunes
et des seniors qui
souhaitent vivre cette
expérience. Et à partir
de cette réunion faire
en sorte que les gens
laissent leurs coor-
données en partant
pour qu’on puisse les
contacter pour les
mettre ensemble. »
De manière moins importantes, partenaires, la communication aux
sont également identifiés claire- aidants ou des informations en ré-
ment : les Carsat, les informations sidence établissements sociaux ou
en mairie et les journaux dédiés médicosociaux dédiés aux seniors,
aux seniors. En revanche, la radio, sont des canaux rarement cités.
le courrier, les informations via des

Schéma de la perception de la mise en relation des jeunes et des


seniors via internet :

Perception + Perception +/- Perception -


5 7 17

• 1 fragile • 1 fragile • 10 fragiles


• 1 autonome • 5 autonomes • 5 autonomes
• 1 solidaire • 1 solidaire • 3 solidaire
• 1 Actif • 1 actif
• 1 (enfant de) fragile

Un des enseignements impor- perception négative globale est


tants de cette étude, et qui a été tirée par les « fragiles » plus
particulièrement creusé, est que âgées. D’autre part, la façon dont
de prime abord et de manière le canal numérique est perçu est
majoritaire, la mise en relation davantage diversifiée chez les
entre jeune et senior par internet autres segments, en fonction de
est perçue de manière négative. leur appétence à l’usage d’inter-
Deux nuances doivent cependant net. Cette réponse confirme les
être apportées. D’une part, cette constats réalisés dans la partie
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

83
étude documentaire : 57 % des
70 ans et plus ne s'estiment « pas
à l'aise » lorsqu'ils doivent utiliser
la technologie et en particulier
naviguer sur internet1. Si les jeunes
seniors (moins de 70 ans) et les
enfants prescripteurs des seniors
peuvent être clairement ciblés sur
le canal digital, il convient cepen-
dant d’avoir une approche multi
canal pour atteindre les « fragiles »
et une bonne partie encore, des
« autonomes seules », puisque
la moyenne d’âge de ce segment
se situe autour de 70 ans.

1
CSA pour syndicat de la presse sociale, enquête sur « l’illectronisme » en France,
Mars 2018
En approfondissant auprès des seniors interviewés, il a été constaté
que les réponses étaient négatives car :

FRAGILES ET AUTONOMES

« J’essaye d’apprendre en ce moment mais non je sais


pas encore me servir de tout ça. »
... PAS
D’ACCESSIBILITÉ « Je n’ai pas internet. Je ne comprends pas. »
À INTERNET
« Pas de vision latérale, ne permet pas de naviguer sur
internet et ne veut pas de l’aide de son gendre. »
« Internet c’est risqué, il faut voir les gens , il faut voir
la personne absolument, je préfère le contact direct. »

... INTERNET « On ne sait pas sur qui on tombe par internet. »


PARAÎT ÊTRE UN
MOYEN RISQUÉ « Pas trop bonne perception, parce qu’honnêtement
avec internet aujourd’hui, avec tout ce qu’on entend,
même si j’ai FB aussi, on est derrière un écran, mais
on ne sait pas ce qui se passe en direct. »

TOUT SEGMENT

... PRÉFÉRENCE
« Il vaut mieux que ce soit de visu que par internet. »
POUR
LE CONTACT « S’il faut vraiment je peux trouver une information sur
DIRECT
internet mais ça me fatigue et j’aime pas trop ça. »
« Ma pauvre dame, les vieilles personnes n’utilisent
pas internet. »
... INTERNET
N’EST PAS POUR « Forte résistance de certains seniors sur internet. »
LES PERSONNES
ÂGÉES
« Je ne m’en sers pas. J’ai un ordinateur mais je ne
m’en sers plus du tout, parce qu’il est ancien, et parce
qu’à l’âge que j’ai, je ne veux pas m’occuper de ça. »
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

85
Par ailleurs, les personnes interro- ailleurs, certains seniors et enfants
gées – y compris les détracteurs du interrogés considèrent que le nu-
numérique – ont bien conscience mérique peut être utilisé en premier
que les habitudes sont amenées contact s’il y a ensuite l’appui d’une
évoluées en fonction des généra- structure locale, confortant en cela
tions, de plus en plus connectées, les enseignements des associa-
qui accède à la « vieillesse ». Par tions de médiations numériques1.

TOUT SEGMENT CONFONDU ET ENFANTS

EN MAJEUR

« Pourquoi pas comme un annuaire oui »

INTÉRÊT POUR « C’est une première mise en relation et après il y a


UNE PREMIÈRE
SÉLECTION forcément plusieurs rencontre. »

« Ca peut se concevoir pour faire un tri mais fatiguant »


« Pour moi c’est nickel mais avec une structure en
INTÉRÊT appui »
SI STRUCTURE
EN APPUI « oui, mais il faut que ce soit structuré par quelqu’un
derrière. il faut toujours un intermédiaire physique. »

EN MINEUR

POSSIBILITÉ
D’Y INSÉRER « Intérêt d’une plateforme avec des vidéos des per-
DES VIDÉO DE sonnes »
TÉMOIGNAGE

1
« La « médiation numérique » désigne les ingénieries, c’est-à-dire les techniques,
permettant la mise en capacité de comprendre et de maîtriser le numérique, ses
enjeux et ses usages, c’est-à-dire développer la culture numérique de tous, pour
pouvoir agir, et développer son pouvoir d’agir, dans la société numérique. »
Source : lamednum.coop
XII. Synthèse des enseignements
sur les parcours clients
Au global, quels que soient les - carte concept de chaque offre ;
parcours, trois moments de vérité
identiques sont identifiés : • mieux faire connaitre la cohabi-
• la découverte ; tation intergénérationnelle, avec ;
• la compréhension des attentes ; - une présentation de l’offre
• le début de la cohabitation. différenciée par cible,
- un recours à des prescripteurs
Un point d’attention particulier spécifiques,
devra être apporté sur le traitement - des canaux de communications
des insatisfactions. dédiés,
- des actions aux moments clés
Les leçons détaillées par segments de communication ;
de l’étude des parcours clients
sont précisées dans la conclusion • les autres recommandations en
finale. termes de parcours clients :
- agir sur le bouche-à-oreille,
Au total, les recommandations - les leviers d’actions sur les
ci-dessous sont issues de l’étude autres moments de vérité,
qualitative réalisée auprès des - faciliter la circulation de l’infor-
seniors : mation et le suivi des seniors par
• une nouvelle segmentation ; une approche « crosscanal ».
• des recommandations en termes
d’offre ; Ces recommandations sont
- cartographie des offres, détaillées dans la partie finale de
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

87
l’étude, après la présentation des jeune en termes de présence
apports du diagnostic « experts » ou de « menus services »,
réalisé auprès des organisations - le jeune ne paye qu’une parti-
jeunesses. Nous présentons cipation aux charges,
cependant à ce stade, pour une - frais d’association à payer pour
meilleure compréhension de la le senior comme le jeune ;
partie qui suit, les caractéristiques
des trois formules « type » d’offre • formule « altruiste » :
conçues et testées auprès des - aider un jeune dans le besoin,
organismes jeunesses : dans une logique de convivialité
• formule « conviviale » : et de partage,
- la contrepartie financière - aucune de frais d’association
modeste est significativement pour le senior,
sous le prix du marché locatif - aucun engagement ni contre-
local, de 150 € à 350 € selon partie mensuelle de la part du
les territoires (Paris y compris), jeune,
- aucun engagement de la part - le jeune paye une part des
du jeune, frais d’association du binôme
- un profil de jeune dans une ou la CAF subventionne cette
logique de convivialité et de formule à terme.
partage,
- frais d’association à payer pour Il convient de noter que ce dernier
le senior comme le jeune ; type d’offre répond clairement à
une attente de certains seniors,
• formule « solidaire » : mais leur part est bien moindre
- une formule sur mesure : le que pour les deux premières. Il
senior, le jeune et l’association s’agit donc à proprement parler
se mettent d’accord sur les d’une « niche ».
modalités d’engagement du
3
Perception
par les organisations
de jeunesse
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

89

I. Méthodologie du diagnostic expert


Les objectifs de cette partie de l’étude sont de recueillir la perception
d’organismes experts de l’accompagnement de jeunes sur les offres
identifiées, et de valider l’équilibre des dispositifs proposés afin qu’ils
soient souhaités autant par les seniors que par les jeunes. Pour ce
faire, cinq responsables de structures ayant des compétences sur la
question du logement et de l’engagement des jeunes ont été interrogés,
quatre de ces organisations sont d’envergure nationale, et une des
associations est locale.

UNHAJ
Structures spécialisées sur le logement des jeunes
UNCLLAJ
INSTITUT DE
Engagement des jeunes
L’ENGAGEMENT
ADIJ CÔTES Information jeunesse et cohabitation
D’ARMOR intergénérationnelle
FORUM
FRANÇAIS DE Plaidoyer pour les organisations de jeunes
LA JEUNESSE

Source : identification des leviers de développement de la cohabitation intergénérationnelle


solidaire – rapport final et projection 2020
II. Synthèse de la perception
Spontanément, la cohabitation également rappelé très clairement
intergénérationnelle solidaire est par tous les experts interrogés que
considérée comme une solution le dispositif ne saurait constituer
adéquate pour des profils particu- une réponse massive à la problé-
liers de jeunes : « ce n’est pas pour matique du logement des jeune. Et
tout le monde » « c’est une solution « c’est une discussion récurrente,
parce qu’on n’a pas autre chose » parce qu’il y a une injonction forte
« c’est une solution économique des pouvoirs publics. Pour nous
d’abord... et après ça peut être c’est une solution qui peut être
intéressant si ça matche bien pertinente, mais pas pour tout le
entre les deux personnes ». Ces monde ».
jeunes doivent notamment être
capables d’avoir une perception En synthèse, une perception
positive de la vieillesse : « il y a générale commune se dégage :
une différence : ceux dont ce serait pour les personnes interviewées,
la corvée, à cause des représen- il s’agit d’abord d’une solution
tations de la vieillesse qui y sont économique. Elle permet éga-
liées ; et ceux qui sont plus orientés lement aux jeunes de se sentir
« lien social », et là ça se passe utiles, citoyens, de construire
très bien. Il y en a qui partent sur leur autonomie. Elle permet de
une relation propriétaire/locataire, développer l’entraide. Enfin, la
et dans ces cas-là ça ne marche présence d’une structure tierce
pas et ça ne correspond pas locale est identifiée par toutes et
aux attentes du seniors ». Il est tous comme nécessaire.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

91
De manière plus diffuse, des • la perte d’une certaine intimité,
experts interrogés relèvent que de la liberté ;
la cohabitation intergénérationnelle • l’impossibilité de ne pas pouvoir
permet de rompre l’isolement des inviter qui on veut ;
jeunes, sécuriser et réconforter, • le risque de tomber sur une
notamment lors de la décohabi- personne avec qui on ne s’entend
tation des plus jeunes (y compris pas ;
les mineurs) d’avec leurs parents. • la crainte d’être mis à la porte.
« On sort du giron de ses parents,
et aller sur une base nouvelle pour Sur ce dernier point, il est impor-
échanger, écouter partager des tant de noter que le délai légal
bonnes adresses, une expérience, de préavis de la cohabitation
c’est ça qu’un jeune peut trouver ». intergénérationnelle solidaire est
Cela permet enfin de valoriser le le même que celui du bail meublé,
parc existant. à savoir un mois.

Outre le fait que le dispositif soli- Pour servir l’analyse (et pour
daire n’est à l’évidence « pas fait mémoire, voir plus haut) on sé-
pour tous les jeunes », les freins pare dans cette étude la formule
suivants sont plus précisément de cohabitation elle-même de
identifiés : l’accompagnement réalisé par les
• une appréhension, des a priori associations.
vis-à-vis des seniors, et en
particulier une représentation
négative des personnes âgées ;
• la crainte d’une contrepartie trop
lourde ;
Sur la cohabitation elle-même

Sur la cohabitation elle-même, mais également que ce ne soit


les principales attentes sont les pas trop astreignant : « il faut
suivantes : que ce ne soit pas trop contrai-
• que cela reste économique en gnant. » ;
comparaison avec un logement • que le senior n’ait pas un profil
autonome : « pour que ça reste autoritaire : « si quelqu’un s’oc-
attractif il faut que ce soit très troie une forme d’autorité sur les
économique ». « Il faut que ça modes de vie... ça peut être dur.
sorte de la comparaison avec C’est un peu comme une coloc
un logement autonome. Il faut classique ».
que ce soit singulièrement éco-
nomique. » ; Cependant, sur ce dernier aspect,
• une formule modulable : « que ce l’article 117 de la loi ELAN précise
soit modulable : par exemple, s’il bien que les « menus services »
y a des périodes de vacances, sont réalisés le cas échéant dans
les jeunes ne paient pas ces le cadre d’une « collaboration
périodes de vacances » ; exclusive de tout lien de subordi-
• passer du temps avec quelqu’un, nation entre les cocontractants ».

L’accompagnement de la cohabitation

Sur l’accompagnement des conforté : en amont, par l’attente


cohabitations, le rôle central de d’une vérification du profil et du
la structure tierce est largement logement du senior et un cadrage
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

93
de la relation1, puis en aval, par derniers considèrent largement
l’attente d’un suivi durant la cohabi- comme indispensable l’interven-
tation : il faut « être sur une logique tion d’un structure tierce locale.
de suivi, de tiers de confiance ». De manière plus surprenante,
Plus particulièrement, les orga- les organisations jeunesse ne
nisation jeunesses s’attendent à recommandent pas un dispositif
ce que la structure tierce veille à 100 % web, ou web plus téléphone.
l’équité, à une répartition du temps Le canal digital peut en effet être
équilibrée, à ce qu’elle s’assure un bon canal de communication, et
que le senior cadre ses attentes : constituer une partie du parcours
• « s’assurer que le senior n’en client des jeunes, mais il doit être
demande pas trop, que ce soit complémentaire à l’intervention
fait en bonne intelligence » ; d’une structure d’accompagne-
• « Dans la coloc, tout le monde sur ment, car il faut des acteurs de
un pied d’égalité. Dans le cas de terrain :
la cohabitation, il y a une position • « Non ça ne pourrait pas être
supérieure du propriétaire ou internet, ou alors ça pourrait
locataire qui sous-loue. Il y a donc être internet dans une logique
un risque que la personne âgée de choix du logement doublé
pose ses conditions » ; d’un entretien : logement dé-
• « Des temps qui doivent être des cent, vérifier que l’hébergeur
temps pour le jeune, des temps n’est pas inadapté. Si ça se fait
qui sont des temps partagés et intégralement en ligne il faut que
d’échange avec les personnes l’association ait vérifié. Il faut
qui cohabitent... ». une équipe de terrain derrière
la plateforme pour vérifier que
Concernant internet, et au vu des ce qui est proposé est correct. » ;
données relatives à la fracture • « Pour informer, c’est le vecteur
numérique chez les seniors, ces le plus utile, mais on ne peut pas

1
Un « appui à la contractualisation » est notamment attendu.
en faire l’alpha et l’oméga, il faut d’informer le jeune que sur Le
des acteurs de terrain pour être bon coin, il n’y a aucune garantie,
en partenariats » ; et qu’il vaut mieux payer des frais
• « Un jeune peut faire une d’agence quand on peut » ;
proposition via internet, mais • une intelligence artificielle
avec l’intermédiation d’une risquerait d’induire une discri-
vraie personne qui va faire le mination : « Un « Tinder » de la
lien avec le senior. Par analogie, cohabitation intergénérationnelle
Watson [développé par IBM] peut ça me ferait très peur. Dans les
faire des recommandations de deux sens : côté senior, et côté
traitements à des médecins. jeune. On aurait notamment
Mais c’est quand même à la fin des risques de ségrégation au
un médecin qui va regarder les profil »1.
propositions de Watson. Ce n’est
pas la machine qui fait entière- En revanche, le numérique est
ment le job. L’outil numérique sans surprise le canal considéré
doit être intermédié. ». comme le plus pertinent pour dif-
fuser l’information, en privilégiant
Deux risques précis doivent être des réseaux précis : « Diffusion
pris en considération : d’information, communiquer :
• certains sites n’offrent aucune Snapchat, Instagram, etc. oui.
garantie au jeune, et peuvent Des binômes disent que ce se-
même être dangereux : « AirBnB rait intéressant d’avoir un temps
et Le Bon coin sont « top of d’échange non professionnel avant
mind » chez les jeunes, ce qui le début de la convention. » « FB
est dommage : c’est important c’est dépassé pour le jeune. ».

1
Sur ce point, Aurélie Jean précise que les biais discriminatoires sexistes ou racistes
dans les dispositifs d’intelligence artificielle sont effectivement constatés dans
de nombreuses études.
Source : ELLE, les robots sont-ils machos ? novembre 2019
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

95
Sur l’équilibre des concepts d’offre retenus

Il a été demandé aux organismes Les personnes ont été interro-


leur perception sur les trois concepts gées sur possibilité d’occuper
d’offre conçus consécutivement à la chambre durant l’absence du
l’étude qualitative réalisée auprès jeune, et minoré ainsi la contribu-
des seniors. Les enseignements tion financière modeste, sachant
suivants ont été tirés. que cette pratique existe dans les
dispositifs ordinaires de « chambre
Sur la formule « conviviale », les chez l’habitant ». En réponse :
recommandations portent essen- il conviendrait de vérifier dans
tiellement sur l’aspect financiers : une premier temps la possibilité
• revoir les frais de suivi à la baisse, juridique de mettre en œuvre cette
d’autant que la structure tierce a variante. Dans l’affirmative, il fau-
souvent moins de temps de suivi drait encadrer très précisément la
sur ces formules ; pratique pour qu’elle soit déclinée
• être attentif à l’adaptation de la dans l’intérêt des deux parties, en
contribution financière modeste définissant notamment des moda-
selon les territoires ; lités de recueil du consentement
• revoir les modalités de tarification, des jeunes.
en ne prévoyant pas de frais
mensuels rajoutés à un forfait : L’offre « solidaire » correspondrait
« Soit vous faites une adhésion davantage à des jeunes avec une
d’entrée et après il n’y a plus rien, appétence particulière plus marqué
mais facture 15 € par mois ne sera pour le lien social et l’engagement
pas bien perçu ». solidaire, par exemple des étu-
diants dans le champ social et sa- les réseaux locaux pour la pres-
nitaire. Proposer du « sur mesure » cription des jeunes en difficulté, par
dans cette formule est également exemple, des jeunes en insertion,
recommandé, et ils convient pour des jeunes migrants soutenus par
ce faire de donner des exemples des associations partenaires. Il se-
d’engagement qui peuvent être mis rait aussi possible de sélectionner
en place. Le cadre doit également des jeunes ayant un besoin d’un
être bien précisé pour la notion de logement en urgence à la suite
« menus services » en surlignant le d’une rupture dans une cohabita-
lien de « non-subordination » entre tion. Cette formule ne doit pas être
le jeune et le senior, spécifié dans totalement gratuite pour le jeune.
l’article 117 de la loi n° 2018-1021 Un engagement symbolique vis-
du 23 novembre 2018. Il est enfin à-vis du senior doit apparaître en
fondamental pour ce type d’offre contrepartie, qu’il s’agisse d’une
de bien s’assurer que la structure somme très modique ou autre.
joue son rôle d’intermédiaire entre Sinon, le jeune risque de se sentir
les jeunes et les enfants aidants. par trop « débiteur » vis-à-vis du
senior. L’ajout de cette contrepartie
Pour la formule « coup de pouce » symbolique permettrait de simpli-
la typologie des jeunes ciblés doit fier la relation.
être précisée, en s’appuyant sur

Sur la possibilité d’hébergements temporaires

Les organisations jeunesses at- selon les profils et les territoires.


tirent l’attention sur la diversité des Sur les territoires détendus, il
besoins et des attentes des jeunes pourrait y avoir davantage d’attente
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

97
en termes de « court séjour », Les frais liés à l’accompagnement
c’est-à-dire plus court qu’une sont trop importants sur la formule
année universitaire classique, par « conviviale ». Il convient de cadrer
exemple le temps de la durée d’un fortement le ciblage des profils de
stage ou d’un apprentissage. Il ne jeunes qui pourraient être concer-
faut d’ailleurs pas sous-estimer les nés par la formule « altruiste »,
besoins sur les territoires ruraux, en s’appuyant sur les réseaux
« parce qu’il y a les mêmes diffi- solidaires locaux. Il faudrait, en-
cultés mais pas de possibilité de fin, expérimenter des dispositifs
construire du logement collectif, d’hébergements temporaires sur
et le logement chez l’habitant est les territoires détendus.
une solution souple ».

Au total, le diagnostic réalisé au-


près des organisations jeunesses
traduit une perception plutôt po-
sitive du dispositif, qui ne saurait
cependant constituer une solution
massive au logement des jeunes.
C’est un dispositif d’engagement
solidaire autant que de logement,
qui correspond à certains profils.
L’image des seniors et la peur de
la « charge » de l’engagement
peuvent être des freins. Une
attention particulière doit être
portée sur cette « charge » dans
la formule « solidaire ». Le rôle
central de la structure est conforté.
4
Recommandations
finales
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

99
Au total, nous proposons une ont même renforcé sa portée. Nous
segmentation plus fine de la recommandons donc d’agir sur
cohabitation intergénérationnelle, ce phénomène ne serait-ce que
réalisée en fonction des principales pour limiter les risques d’impacts
caractéristiques et attentes des négatifs. Il conviendra pour cela,
seniors. Par suite, pour mieux faire en premier lieu, de mesurer le
connaître la cohabitation intergé- degré de satisfaction dans le
nérationnelle, nous proposons une cadre d’un baromètre, à l’aide
présentation de l’offre différenciée de l’échelle NPS (Net Promoting
par cible (cf. : cartographie des Score) : « Sur une échelle de 0 à
offres et cartes concept ci-des- 10, dans quelle mesure recom-
sous), avec des parcours clients manderiez-vous le dispositif de
adaptés : prescripteurs spécifiques, cohabitation intergénérationnelle
canaux de communications dédiés solidaire et notre structure à un
et actions aux moments clés de proche ? ». En fonction du nombre
communication. De manière plus choisi par le senior, il sera classé
générale, il apparaît important de dans l'une des catégories sui-
développer la notoriété et l’image vantes : « détracteur », « passif »
du dispositif. ou « promoteur ». Cela permettra
d’affiner le diagnostic et de prévoir
Parmi les recommandations au besoin des actions correctives
transversales en termes de tant en termes d’accompagnement
prescription, il faut davantage qu’en terme de communication.
prendre en compte le « bouche Créer un système de parrainage ou
à oreille ». En effet, ce dernier donner la parole aux bénéficiaires
continue à faire les preuves de dans le cadre de témoignage
son efficacité et le développement pourrait s’avérer particulièrement
d’internet et des réseaux sociaux efficace.
I. Axe 1 : segmenter en fonction
des attentes
En cohérence avec les enseignements de l’étude présentée en II-c,
la segmentation retenue est la suivante1 :

Autonomes Fragiles Solidaires


seules 80 ans et + 60 ans et +
60-75 ans

Besoin d’un Avec le souhait


En perte
complément premier d’aider
d’autonomie
de revenu + un jeune
dans le besoin
Avec
un sentiment
de solitude

Sensibles à
la question
du logement
des jeunes
Frontière secteur
immobilier Frontière secteur
classique Ménage et care

Source : identification des leviers de développement de la cohabitation intergénérationnelle


solidaire – rapport final et projection 2021

1
Les noms des formules n’ont rien de définitif et servent simplement pour l’exposé.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

101
Les « autonomes seules » des personnes âgées en vieillissant,
sont des femmes âgées de 60 lorsque la barre des 80 ans com-
à 75 ans, autonomes et seules. mencent à être franchie. Il n’y a pas
Elles ressentent majoritairement d’attente en termes d’aide financière,
un sentiment de solitude, avec des ou alors une simple participation
enfants peu présents, des situations aux charges. Certains ont pourtant
de veuvage fréquentes. Elles ont des niveaux de revenus faibles.
entre 62 et 74 ans dans l’étude. Elles On constate également que les
souhaitent une contrepartie finan- personnes âgées comprises dans
cière modeste, en-deçà du marché ce segment n’ont pas ou peu de
mais suffisamment importante pour vie associative. Elles bénéficient
constituer un complément de reve- toutes d’une aide à domicile pour
nu. Les personnes ayant un revenu le ménage. La cohabitation intergé-
mensuel net inférieur à 1 200 € sont nérationnelle solidaire est un moyen
davantage représentées dans cette de se maintenir à domicile grâce
catégorie (une sur deux) mais ce à un lien social et une veille, et ils
critère de segmentation n’est pas utilisent le dispositif en ce sens,
suffisamment présent pour être pour se rassurer, et/ou rassurer
retenu comme étant pertinent. Elles également leurs enfants.
ont toutes une sensibilité (plus ou
moins marquée) à la question du Enfin, les « altruistes » ont plus
logement des jeunes. de 60 ans. Ce sont des personnes
seules autonomes, plus souvent des
Les « fragiles » sont des femmes femmes. Elles sont particulièrement
ou des hommes ayant 80 ans et plus sensibles aux questions de solida-
en tout début de perte d’autonomie. rités et souhaitent aider un jeune
Ces personnes attendent tous une « dans le besoin ». Elles ont une
« présence ». Les enfants sont très vie associative souvent plus intense
souvent proches, ce qui confirme que les autres, et elles n’attendent
l’enseignement de l’étude documen- pas – ou peu – de contrepartie
taire : la famille se resserre autour financière.
II. Axe 2 : revoir les concepts d’offre
et adapter les parcours client
Une nouvelle cartographie des offres est présentée ci-dessous. Les
noms des formules n’ont rien de définitif et servent simplement
pour l’exposé.
Autonomes
Segment Altruiste Enfant > Fragile
seules

Plateforme web Pré sélection de profil (cf. multicanal)


Sélection / validation du jeune
Accompagnement
de la structure Accompagnement de la contractualisation, puis de la phase test
Suivi (durée moyenne de cohabitation 7 mois)

Frais payés par Cotisation annuelle


le senior • Frais de dossier : 30 € symbolique de 20 € • Frais de dossier : 30 €
• Frais d’accompagnement • Frais d’accompagnement
27€/ mois 33 €/ mois
(cible : - de 20 €) • Frais de dossier : 30 € (cible : - de 20€ )
Frais payés par • Frais d’acc. : 70€/ m.
le jeune (Act. soc. CAF à terme)

Sans engagement de Une présence à définir


Sans engagement de
présence ni de menus avec le Senior
Formule présence ni de menus
services mais en
de cohabitation services
convivialité Participation aux charges
et coût (60 €/ mois max)
(versé au senior) De 150 à 350 €
selon les territoires 10/ 20 € Menus services
et les types de logements à définir avec le Senior

Offre Conviviale Coup de pouce Solidaire

Source : Synthèse de l’étude visant à identifier les leviers de développement de la cohabitation


intergénérationnelle solidaire – Document interne aux réseaux - CONFIDENTIEL
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

103
Les concepts des offres présentées dans cette cartographie sont
détaillés ci-dessous.

L’offre « conviviale »

Segment selon les territoires (uniquement


Cette offre répond aux attentes pour Paris dans ce dernier cas)1 ;
du segment des « autonomes • aucun engagement de présence
seules » décrites plus haut. de la part du jeune ;
• un profil de jeune dans une
Proposition de valeur for- logique de convivialité et de
mulée pour répondre partage ;
La formule conviviale permet aux • frais à payer pour le senior
seniors autonomes et vivant seuls comme le jeune.
de cohabiter avec un jeune de leur
choix. Ce contrat leur permet de Problèmes identifiés et
toucher une compensation finan- bénéfices apportés
cière modeste tout en réduisant Les problèmes les plus fréquem-
leur sentiment de solitude. ment observés chez les « auto-
nomes seules » sont un sentiment
Les principales caractéris- de solitude, des revenus qu’elles
tiques de l’offre sont : considèrent comme assez faibles
• une contrepartie financière mo- et une envie de vraiment choisir la
deste – significativement sous le personne hébergée. Les seniors
prix du marché – de 150 € à 350 € concernés veulent bénéficier

1
Et avec la possibilité de minorer le prix en cas d’absence du jeune le week-end
ou certains week-ends, notamment pour que la chambre soit occupée. Sur la possibilité
d’occuper la chambre durant l’absence (par exemple par des petits enfants), la faisabilité
juridique va être étudiée. En cas de faisabilité le recueil du consentement et la définition
des modalités seront systématiquement réalisés par les parties.
d’une amélioration du niveau de • une combinaison de télévision,
vie (financier), un renforcement marketing direct et e-mail ;
du sentiment d’utilité sociale et • le bouche à oreille ;
parfois, de manière corrélative, • les réseaux sociaux (en particu-
le sentiment de rester « dans le lier Facebook) ;
coup », branché. • les vidéos internet ;
• le site internet ;
Distribution • la structure elle-même (possibilité
L’offre est distribuée dans le cadre de se déplacer sur site).
d’un accompagnement réalisé par
des associations disponibles direc- Les moments clés de com-
tement et localement, et joignable munication
par téléphone. Une plateforme Les moments clés de communi-
internet permettant de s’inscrire cation sont, notamment via les
et de remplir son dossier, et de parcours clients de l’Assurance
présélectionner certaines options. retraite :
• 6 mois après la retraite ;
Frais • 6 mois après le décès d’un
Des frais de dossier fixes seraient conjoint.
de 30 €, et les frais d’accompa-
gnement avec une cible à moins Les prescripteurs
de 20 €/mois. Les prescripteurs plus spécifi-
quement recommandés pour ce
Les canaux de communi- segment sont :
cation • les acteurs publics locaux (mairie,
Il est recommandé de privilégier des etc.) via des réunions, des actions
actions sur les canaux suivants : intergénérationnelles (culturelles,
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

105
numériques, etc.) permettant une exemple, une Maison de l’ha-
sensibilisation, etc. ; bitat) ;
• les institutions de prévoyance ; • les caisses de retraites (natio-
• les bailleurs sociaux pour les nales et locales).
locataires du parc social (par

L’offre « coup de pouce »

Segment leur permet de bénéficier d’une


Cette offre répond aux attentes du structure pour encadrer leurs
segment des « altruistes » décrites cohabitations moyennant une
plus haut. Pour mémoire, si l’on a cotisation symbolique.
bien constaté un segment homo-
gène très clair, leur part était moins Les principales caractéris-
importante dans l’enquête quali- tiques de l’offre sont :
tative, et ces seniors constituent • de proposer au senior un profil
a priori davantage une « niche ». de jeune dans le besoin, dans
une logique de convivialité et de
Proposition de valeur for- partage ;
mulée pour répondre • aucun frais d’association pour
La formule « coup de pouce » le senior (sauf une cotisation
aide les seniors vivant seuls, symbolique) ;
soucieux d’aider les autres, à • pas d’engagement ni de contre-
héberger, sans contrepartie, un partie mensuelle de la part du
jeune dans le besoin. Ce contrat jeune (mis à part une contrepartie
symbolique pour le jeune) ; et de remplir son dossier, et de
• le jeune paye une part des frais présélectionner certaines options.
d’association du binôme, mais
idéalement ces frais devraient Frais
être pris en charge par des Dans la mesure où le senior
partenaires, par exemple la CAF souhaite simplement aider, sans
à terme. contrepartie financière, de présence
ou de menus services, il ne s’attend
Problèmes identifiés et pas à devoir payer pour l’accom-
bénéfices apportés pagnement de l’association. Ainsi
On identifie chez les « altruistes » seuls une cotisation symbolique à
une volonté plus marquée d’aider l’association de l’ordre de 20 € peut
des personnes dans le besoin, être demandée.
toujours un sentiment de solitude
et une envie de vraiment choisir Les canaux de communica-
la personne hébergée. La formule tion
permet notamment de renforcer Il est recommandé de privilégier
leur sentiment d’utilité sociale. des actions sur les canaux sui-
vants :
Distribution • le marketing direct ciblé, notam-
L’offre est distribuée dans le cadre ment via des emails transmis aux
d’un accompagnement réalisé par réseaux associatifs locaux ;
des associations disponibles direc- • le bouche à oreille ;
tement et localement, et joignable • le site internet, notamment via
par téléphone. Une plateforme des vidéos ;
internet permettant de s’inscrire • les réseaux sociaux.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

107
Dans ces deux derniers cas, sociale prédéfinis1 ;
il importe de bien préciser les • annonce de structures de jeunes
conditions d’accès restrictifs pour travailleurs dans le besoin, telles
les jeunes, afin que ces derniers que des missions économiques.
ne pensent pas uniquement à
solliciter cette formule, forcément Les prescripteurs
plus avantageuse pour eux. Les prescripteurs plus spécifi-
quement recommandés pour ce
Les moments clés de com- segment sont :
munication • des corps intermédiaires soli-
Il s’agira de communiquer notam- daires (syndicats, associations
ment : concernées, etc.) ;
• en remplacement d’un jeune co- • associations d’entraides locales ;
habitant à la suite d’un problème • acteurs publics locaux (mairies,
chez un senior ; etc.).
• dans d’autres cas d’urgence

L’offre « solidaire »

Segment Proposition de valeur for-


Cette offre répond aux attentes du mulé pour répondre
segment des « fragiles » décrites La formule aurait tout aussi bien
plus haut. pu s’appeler « présence person-
nalisée ». Elle aide les seniors

1
Une association membre du réseau CoSI est notamment engagée dans l’expérimen-
tation de « cohabitation solidaire avec les réfugiés ».
seuls, fragiles, à bénéficier de la vacances scolaires sont
présence solidaire d’un jeune. Ce possibles, mais doivent être
contrat personnalisé leur permet de prévues à l’avance ;
bénéficier d’une veille sécurisante
et de menus services convenus • le cas échéant, la participation
avec le jeune. aux charges est inférieure à
60 € ;
Les principales caractéris-
tiques de l’offre sont : • dans la présentation de l’offre,
• une formule sur mesure : le insérer un cadre : [ exemples et
senior, le jeune et l’association limites des « menus services » ] :
se mettent d’accord sur les mo- - aller faire une course,
dalités d’engagement du jeune - fermer les volets,
en termes de présence ou de - promener le chien,
menus services ; - accompagner une personne
• le jeune contribue financièrement dans une sortie (course, cultu-
en participant aux charges ; rel, etc.) ;
• frais à payer pour le senior
comme le jeune. • les engagements mis en place
sont sur mesure, selon les
Nous précisions également que : attentes de chacun (valoriser) ;
• le temps de présence n’excédera • les profils de jeunes sont sélec-
pas : tionnés selon leurs appétences et
- 4 soirées et soirs par semaine, leurs « compétences » sociales
- une soirée + soirs, un week-end pour s’engager dans ce type de
sur deux, formule (valoriser).
- les absences pendant les
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

109
Problèmes identifiés et de décision du senior. Ils seront
bénéfices apportés également ciblés par les actions de
Les « fragiles » ont un sentiment communication. Le web callback
de solitude et son moins auto- (web plus téléphone) pourra leur
nomes, plus fragiles. Ils ont besoin permettre d’entrer en contact avec
de renforcer leur sentiment d’utilité la structure, dans une logique de
sociale, d’améliorer leur sentiment parcours client fluidifié.
de sécurité pour eux-mêmes et
leurs proches et de diminuer l’ap- Frais
parition de risques liés à la perte Des frais de dossier fixes seraient
d’autonomie. de 30 €, et les frais d’accompa-
gnement avec une cible à moins
Leurs enfants ont également de 20 €/mois.
besoin d’être rassurés.
Les canaux de communi-
Distribution cation :
Plus que les autres, des asso- • senior
ciations disponibles localement - bouche à oreille,
par téléphone et en contact direct - télévision,
sont des acteurs indispensables et - marketing direct courrier,
attentifs pour cette cible qui doit - presse locale,
être davantage rassurée. - structure accompagnant des
seniors fragiles ;
Les enfants apparaissent comme
de fort prescripteurs, voire comme • enfant de senior
des codécideurs. Ils sont plus for- Les enfants pourront être atteints
tement engagés dans le moment par :
- une combinaison de télévision, avant les périodes de retrou-
marketing direct et e-mail, vailles familiales, favorables à
- le bouche à oreille, l’échange avec les enfants sur
- radio (émission confession, le choix de solutions rassurant
témoignage), le sénior et sa famille.
- les vidéos sur internet,
- réseaux sociaux, Les prescripteurs
- site internet. • senior
- acteur public local (mairie, etc.),
Les moments clés de com- notamment via les centres
munication sociaux d’action sociale (Ccas),
Il s’agira de communiquer aux - établissement et service médi-
moments suivants cosocial vieillesse,
• senior - assistant social hôpital,
- au moment de l’évaluation - service ménage / service d’aide
préalable à la mise en place à domicile ;
d’un plan d’actions personnalisé
(Cnav), • enfant de senior
- un mois avant les périodes - les branches professionnelles
de retrouvailles familiales et les syndicats,
(vacances d’hiver, vacances de - caisses de retraites pour les
printemps, grandes vacances), retraités et actifs,
favorables à l’échange avec les - les entreprise (services des
enfants sur le choix de solutions ressources humaines, comité
rassurant le sénior et sa famille ; social et économique),
- association accompagnant des
• enfant de senior aidants.
- de manière symétrique, un mois
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

111

III. Axe 3 : agir sur les « moments


de vérité »
Le terme de moment de vérité client services). Il conviendra également
fait référence à un ou plusieurs de valoriser le « à la carte » pour
moments clés dans le parcours que les formules soient au plus
« d’achat » d’un « client ». Ils près des attentes dans le respect
vont jouer un rôle central dans de la proportionnalité et de la
la construction de l'expérience réciprocité. En effet, cette pratique
client. Selon les actions mises est aujourd’hui la règle, mais elle
en place (ou non), le moment de reste mal valorisée.
vérité peut favoriser la qualité de
l'expérience (coupe de champagne Valoriser la sélection d’un jeune
servie à l’accueil) ou au contraire pourra se faire en mettant en avant
la dégrader (temps d'attente en l’accompagnement et l’expertise de
caisse)1. l’association dans la qualification et
le choix des jeunes. Mais il convien-
Dans le cas de la cohabitation dra d’éviter les « sur-promesses »
intergénérationnelle solidaire, il sur le nombre de profils possibles :
s’agira de porter une attention il est faisable de présenter une,
particulière à l’expression des deux, voire trois personnes à un
besoins et des attentes des se- senior. Aller au-delà ne favorise
niors en termes de profil de jeune pas l’expérience des bénéficiaires
attendu (travailleur, étudiant, etc.) et dessert la satisfaction perçue
et en termes de contreparties par les parties.
(financières, présence, menus

1
definitions-marketing.com
Il serait cependant intéressant et permettent un premier contact.
possible de permettre aux seniors
de s’impliquer directement sur la Enfin, deux actions sont à mettre
co-sélection (avec l’association) en œuvre :
des jeunes : • valoriser le temps de préavis pour
• en présélectionnant des jeunes faire valoir le peu de risque pris
sur une plateforme orientée par les deux parties : le contrat
jeunes seniors, seniors avec de cohabitation intergénération-
aidants et aidants. Les struc- nelle solidaire prévoit un mois
tures tierces font aujourd’hui d’engagement, à l’instar du bail
le travail de « matching » entre meublé ;
senior et jeune. Les dispositifs • mesurer la satisfaction des
numériques peuvent aider dans seniors à la fin de chaque
les pré-sélections de profils, cohabitation, afin notamment
c’est le cas notamment du CRM de s’assurer que le « bouche à
« binôme »1 ; oreille » reste positif ou, s’il est
• en s’appuyant sur des activités mauvais, mettre en place des
intergénérationnelles locales actions correctives.
(numériques, culturelles, etc.) qui

IV. Axe 4 : développer une approche


« cross canal »
Il s’agit d’une stratégie de commu- profit plusieurs canaux. Elle prend
nication et de distribution mettant à en considération le fait que le

1
Logiciel développé par le réseau CoSI à partir de la solution Zoho, il permet
des inscriptions en ligne, le suivi administratif, l’établissement de correspondances
entre jeunes et senior (lieu, formules souhaitées, etc.). Les professionnels
des associations sont cependant toujours indispensables pour établir les binômes.
Cohabitation intergénérationnelle solidaire

113
bénéficiaire utilise éventuellement de faciliter la circulation de l’in-
de multiples canaux différents pour formation et le suivi des seniors
faire ses achats. Chaque canal par une approche cross canal.
n’est pas considéré de manière On constate en effet des points
indépendante et sans interférence d’entrée et des interactions variées
avec les autres. En effet, cette (téléphone, plateformes, « sites
approche aborde l’ensemble des locaux », déplacement dans les
canaux de distribution et d’informa- bureaux, etc.) selon les parcours
tion de manière simultanée, afin et les moments des parcours. Il
de tirer profit des interactions et convient donc de favoriser le dé-
des synergies qui peuvent exister veloppement en optimisant le suivi
entre eux. L’approche cross canal1 des seniors dans leurs parcours.
permet ainsi de s’assurer de la
cohérence de la promesse faite, Pour cela, il est proposé de :
qu’il convient alors de respecter • favoriser le lien entre les acteurs
au mieux d’un canal à l’autre afin des parcours ;
de ne pas perturber le bénéficiaire • connecter les différents SI, et
potentiel. rendre cette connexion possible,
par exemple en prévoyant une
Pouvoir suivre les seniors sur interopérabilité dans le cadre
l’ensemble du parcours – avant d’une plateforme ou d’un CRM ;
(découverte), pour identifier l’en- • s’appuyer sur la plateforme
semble des séniors intéressés et Toit+Moi, qui inclut déjà un lien
ne pas perdre de lead2 , pendant aux structures et une présélection
et après, pour assurer la satisfac- dans le parcours et la possibilité
tion et la reconduction (relance, de communiquer facilement à
etc.) – il est également important un grand nombre de retraités

1
e-marketing.fr
2
« Lead est un anglicisme utilisé pour désigner un contact commercial, c'est-à-dire un
client potentiel (prospect) dont l'intérêt pour l'offre est plus ou moins avéré. »
Source : definitions-marketing.com
et de partenaires. Cela pourrait • intégrer aussi la possibilité de
être réalisé après sa « mise à mettre en contact « binôme »
jour » prévoyant une ouverture avec d’autres plateformes
aux diversités d’offres prévues compatibles avec le cadre et
pour fin 2020 ; les offres.

V. Axe 5 : agir sur les leviers


économiques
Dans la mesure où la cohabitation comme trop élevés les frais de
intergénérationnelle solidaire a un suivi à payer aux structures tierces.
fort impact social1, le modèle éco- La réalisation d’une telle étude per-
nomique mixte privé (frais payés mettra enfin de recommander des
par les jeunes et les seniors, aides actions fines sur l’environnement
de partenaires privés) et public qui permettraient de favoriser le
(subventions publiques) doit en développement de la cohabitation
être maintenu et structuré. Il intergénérationnelle solidaire :
convient pour appuyer cette re- prestation sociale, exonération
commandation de préciser l’impact fiscale, prise en charge partielle
économique de la cohabitation ou totale par des mutuelles santé2
intergénérationnelle solidaire. ou des caisses de retraites3.

Cela permettra par ailleurs de


réduire le coût pour les seniors,
dont une part importante considère

1
Ellyx-Réseau CoSI, Étude d’impact sociale, février 2019
2
Une expérimentation avec la Mutuelles des Douanes et le réseau CoSI est en cours
depuis 2019.
3
Une expérimentation avec AG2R, le réseau CoSI et le réseau LIS est en cours
depuis 2020.
Cohabitation
intergénérationnelle
solidaire En cohérence avec les objectifs de la COG 2018-2022,

Réf. 552007_T – 09/2020 – Réalisation : studio graphique, Cnav


qui prévoit l’accompagnement de nouveaux publics et le développement
de nouvelles offres de prévention de la perte d’autonomie, la politique
d’action sociale de l’Assurance retraite favorise le développement de modes
d’hébergement innovants et accompagne les initiatives permettant aux retraités
de bien vivre à leur domicile. Dans ce cadre, l’Assurance retraite soutient
notamment le développement de la cohabitation intergénérationnelle.

À ce titre, elle a lancé une étude en partenariat avec les réseaux CoSI et LIS
afin d’analyser l’offre existante en matière de cohabitation intergénérationnelle
solidaire. L’étude identifie les principaux leviers et freins au développement
de cette solution d’habitat, tout en mettant en lumière la grande diversité
des financements locaux, qui renforce la pluralité des modèles économiques
des structures.

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