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Dix étapes pour bien interpréter

un texte biblique
Par Dominique Angers professeur à l’institut Biblique
de Genève
La Bible est « le Livre » sur lequel nous souhaitons fonder toute notre vie.
Pourtant, il nous arrive parfois, quand nous cherchons à nous approprier le
message de l’Écriture ou à le communiquer à d’autres, d’enfreindre
certaines règles d’interprétation biblique (les règles d’herméneutique). Nous
nous trouvons alors dans une situation délicate : comment pouvons-nous
soumettre notre vie à une Parole que nous comprenons mal ?

Définissons précisément le défi à relever. Bien interpréter un texte biblique,


c’est parvenir à une juste compréhension de ce que l’auteur inspiré de ce
texte a voulu exprimer aux destinataires de son œuvre ; c’est, en outre,
transposer de façon légitime cette « intention de l’auteur » à notre réalité
contemporaine et personnelle.

Nous proposons ici une manière parmi d’autres d’organiser la démarche


herméneutique, (dix étapes réparties en trois parties) en cherchant à mettre
en avant la méthode bien connue parmi les GBUssiens (OIA).

O : OBSERVONS !
Que devons-nous observer, au juste ?

L’espace nous manque pour rendre justice à la question importante des


genres littéraires bibliques. Selon que l’on a affaire à un texte narratif,
prophétique, apocalyptique, didactique, on repérera divers types de
signaux.

Néanmoins, certains réflexes d’observateur doivent être bien aiguisés quel


que soit le genre littéraire du texte. Posons-nous toujours les quatre
questions suivantes :

1. De quoi est-il question ?


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C’est la phase de l’ « enquête préliminaire », au cours de laquelle nous
cherchons à repérer un maximum de données qui sont effectivement
présentes dans le texte, mais dont nous ne connaissons pas encore la
portée. Quels thèmes sont abordés ? Quelles actions sont décrites ?
Quelles notions sont mises en avant ? Sept questions classiques peuvent
s’avérer utiles : Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?

2. Quels sont les accents particuliers ?


Il va de soi que tous les éléments que nous avons initialement répertoriés
n’ont pas la même pertinence. Il s’agira en quelque sorte de les
hiérarchiser. Quels sont les termes ou les notions qui sont fortement
valorisés, ou qui semblent avoir un poids théologique particulier ? Quels
mots ou concepts sont répétés ? Établissons une distinction claire entre
l’essentiel et l’accessoire, entre l’orientation générale du passage et les
détails qui en constituent la toile de fond.

3. Comment les divers éléments sont-ils rattachés les uns aux autres ?
Les marqueurs de transition ne doivent pas nous échapper, car ils
contribuent de façon significative à créer le sens du texte. Soyons attentifs
aux « ainsi », « si », « maintenant », « mais », etc. Et même lorsque de tels
indicateurs explicites sont absents, demandons-nous comment l’auteur
passe d’une idée à une autre. Le sens d’un texte peut changer
complètement selon qu’il exprime une condition, une conséquence, un
contraste, un exemple.

4. Quelle structure se dégage ?


La structure d’un texte ne contribue pas seulement à sa beauté littéraire.
Elle est porteuse de sens !

Dans un chiasme, des idées similaires se correspondent, selon la forme A,


B, C, B’, A’. L’énoncé qui intervient en position C (au milieu du passage)
représente le plus souvent l’idée principale (voir par ex. Lc 1.71-74 : nos
ennemis [A], nos pères [B], Dieu se souvient de sa sainte alliance [C], notre
père [B’], des ennemis [A’]).

Dans d’autres textes, la notion fondamentale est donnée d’emblée, puis


développée par une explication détaillée (voir par ex. Éph 4.1 et la suite) ou
des exemples (voir par ex. Mt 6.1 et la suite).

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Mentionnons aussi l’inclusion, qui entoure un texte par un concept
apparaissant à la fois au début et à la fin de la section ou sous-section (cf.
Mt 5.3 et Mt 5.10).

I : INTERPRÉTONS !
Dans cette deuxième partie de la démarche interprétative, nous analysons
les données recueillies dans la phase d’observation et nous en tirons les
conclusions qui s’imposent.

5. Quelle place ce texte occupe-t-il dans l’ensemble du livre biblique auquel il


appartient ?
Relire le passage qui précède le texte et celui qui apparaît à sa suite n’est
certes pas un luxe : une prise en compte du contexte (littéraire) est
indispensable à la bonne compréhension du texte. Il importe également de
nous familiariser avec l’ensemble de l’œuvre pour savoir où se situe ce
passage dans l’ « argumentation » globale du livre. Si la visée d’un livre
biblique nous est parfois « donnée » par l’auteur (par ex. en Jn 20.31), il
nous faut à d’autres endroits la découvrir à l’aide des indices qui figurent
dans le livre même.

6. Quel enseignement précis l’auteur inspiré voulait-il communiquer à ses


lecteurs ?
Mettons-nous dans la peau des premiers lecteurs, en étant sensibles aux
écarts culturels considérables qui nous séparent d’eux, et à leur situation
telle que nous la comprenons. Quel enseignement très précis (c’est-à-dire
adapté à leur situation particulière) l’auteur voulait-il leur transmettre ?
Comment ce texte a-t-il répondu à leurs besoins ?
7. Où se situe ce texte dans l’histoire du salut et par rapport à l’Évangile ?
Dans la mesure où la Bible présente un grand récit, qui culmine avec la
venue, la vie terrestre, la mort et la résurrection de Christ, nous devons
nous demander où se situe le texte dans cette histoire de la rédemption. On
n’interprète pas de la même manière un passage qui anticipe l’Évangile
(par ex. un texte de l’Ancien Testament portant sur les sacrifices) et un
texte qui en présente des implications pratiques (par ex. Rm 12.1ss).

8. Quel enseignement général Dieu veut-il communiquer à son Église ?

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Ayant saisi la leçon bien précise que l’auteur humain et l’Auteur divin
souhaitaient communiquer aux premiers destinataires du texte (étape 6),
reformulons cet enseignement de manière suffisamment générale pour qu’il
puisse s’appliquer à toute Église locale ou à tout chrétien. Attention : cela
exige parfois de « transposer » l’enseignement, en tenant compte de
l’étape 7, à l’époque de l’Église, qui vit entre les deux venues de Christ.

A : APPLIQUONS !
Terminons le parcours en répondant à deux questions finales :

9. Qu’est-ce que Dieu nous (me) demande par ce texte ?


L’application peut être collective : comment Dieu veut-il que nous vivions
les implications pratiques de ce texte dans notre Église locale, dans notre
GBU ? Elle peut aussi être individuelle : qu’est-ce que Dieu est en train de
me dire ? Dois-je confesser une faute, abandonner une mauvaise habitude,
changer d’attitude, entreprendre une action, redéfinir mes priorités, modifier
mon agenda, me laisser émerveiller par une vérité, évangéliser un ami ? Ne
soyons pas surpris si l’Esprit nous parle puissamment et de façon très
personnelle.

10. Quelle décision acceptons-nous de prendre aujourd’hui ?


Avec humilité, dans une attitude de soumission, répondons « Oui ! » à
Dieu, qui nous interpelle par l’Écriture et nous invite à faire certains choix. Il
a parlé ; choisissons de l’écouter et de lui obéir.

La démarche que nous venons d’esquisser en dix étapes, effectuons-la


dans une attitude de prière, en comptant sur l’Esprit de Dieu. Le même
Esprit qui a inspiré l’Écriture veut nous aider à la comprendre et à la vivre !

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