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COMPRENDRE

PROMOUVOIR
Promouvoir la santé psychique AGIR

des jeunes de 16 à 25 ans


Accompagner les transitions vers l’âge adulte

Cahier de référence pour les professionnel·le·s


Sommaire
Préambule 4

Mandat, démarche et structure du document 4

PARTIE 1
Comprendre le « devenir adulte » pour
soutenir la santé psychique des jeunes 10
1a. Qui sont les 16-25 ans d’aujourd’hui ? 11

Une population hétérogène 11

16-18 ans /18-25 ans : des réalités proches mais différentes 11

Ni adultes, ni adolescent·e·s 13

Un cerveau en restructuration 14
Des maturités asynchrones 15
De nombreux défis psychosociaux liés au développement identitaire 15

La sphère relationnelle et de l’amour 19

L’amour et les relations 19


La sexualité 20
L’identité de genre et l’orientation sexuelle et affective 22

La sphère de la formation et du travail 25

La formation et la qualification 25
Choix de formation et premières expériences professionnelles 25

La sphère de la vision du monde 28

L’autonomie 28
Les médias numériques 29
Les prises de risque 30

1b. Qu’est-ce que « devenir adulte » ? 31

Des critères qui évoluent 31


Une grande transition composée de transitions multiples et exigeantes 31
Une transition importante pour la santé psychique 33
Une transition dans une société elle-même en transition 34
PARTIE 2
Promouvoir la santé psychique 38
2a. Qu’est-ce que la santé psychique ? 38

La santé psychique : une composante essentielle de la santé 38

La santé psychique est liée au bien-être 39


La santé psychique est distincte des troubles psychiques 39
La santé psychique est liée à la satisfaction des besoins 40
La santé psychique a de nombreux déterminants 40

2b. Que savons-nous de la santé psychique des 16-25 ans ? 43

Etat de santé psychique des 16-25 ans 43

L’effet délétère du stress 43


Le vécu de violence ou de discrimination 45
La peur du futur 46
Les comportements des jeunes, des indicateurs de leur santé psychique 47

Ce que nous disent les jeunes sur la santé psychique 47


Ce que nous a appris la crise sanitaire du Covid 19 48

2c. Promouvoir la santé psychique des jeunes 49

Quelques notions clés 50


Promouvoir, quels leviers ? 51

PARTIE 3
Agir en accompagnant les transitions
de vie et de formation 54
3a. Cinq axes pour l’action 54

Axe 1 : Agir auprès et avec les jeunes 57

S’intéresser aux jeunes 57

Axe 2 : Accompagner « l’entre-deux » et les choix 58

Accompagner les potentiels 58


Accompagner les choix 59

Axe 3 : Soutenir les compétences psychosociales et les compétences en santé 61

Les compétences psychosociales 61


Travailler les compétences psychosociales 62
Compétences psychosociales et développement neuronal 63
La littératie en santé mentale 64
Informer, éduquer et permettre d’expérimenter 64
Faire connaitre les ressources en promotion de santé psychique et les prestations de soutien 65
Faire des liens entre la santé mentale et les autres questions de santé 65

Axe 4 : Activer le pouvoir d’agir de tou·te·s les professionnel·le·s en contact


avec les jeunes 70

Des adultes soutenant·e·s 70


Une posture professionnelle promotrice de santé psychique 71
Du soutien social adapté 73
Apporter du soutien social significatif pour les 16-25 ans 75

Des approches diversifiées qui font sens pour les jeunes 77


La participation 77
Les approches par les pairs 78
Les approches symboliques 78

Se former 78

Axe 5 : Impliquer l’ensemble des acteurs et actrices et la société 80

Développer des environnements qui soutiennent la santé psychique des jeunes 80


Des contextes de formation et de travail non-discriminants et sécurisants 80
Les approches globales et intégrées 81

Implémenter la promotion de la santé psychique des 16-25 ans 84

Remerciements 86
Préambule

Le passage de l’adolescence à l’âge adulte est jalonné de différentes étapes asyn-


chrones dans toutes les sphères de vie ouvrant chacune sur de nombreux défis qui
se chevauchent. Pour les jeunes de 16 à 25 ans, les exigences de socialisation et
d’intégration dans la société deviennent centrales avec l’enjeu de comprendre et
d’apprivoiser les structures sociétales qui les entourent ainsi que les exigences du
monde adulte et de pouvoir s’y mouvoir en s’y sentant compétent·e·s. Toutes et tous
ne vivent cependant pas cette période de transition dans les mêmes conditions.
Si pour nombre d’entre elles·eux le temps de formation et de la dépendance aux
parents s’étale sur de nombreuses années, pour d’autres, le passage à la majorité
civile et pénale peut s’avérer brutal. Quoi qu’il en soit, ce passage vers l’âge adulte
est à la fois une période de grands potentiels et d’importantes vulnérabilités, ce
qui en fait un moment particulièrement sensible en matière de santé psychique.

La mutation individuelle des jeunes est intimement liée au contexte de vie dans
lequel elle se produit. Aujourd’hui, dans notre monde occidental, les transfor-
mations personnelles de l’adolescence se couplent à des mutations sociétales
profondes qui influencent considérablement la manière dont elles s’expriment
ainsi que les étapes pour accéder à la vie adulte : modification des repères tradi-
tionnels, mondialisation, connectivité quasi permanente, appartenances mul-
tiples, multiculturalisme, abaissement de l’âge de la puberté, allongement de la
durée de formation et report de l’autonomie économique et sociale, sont autant
de paramètres qui vont jouer un rôle dans la manière dont les jeunes vont pou-
voir vivre les défis psychosociaux propres au passage à l’âge adulte, les résoudre,
développer leur identité et s’intégrer dans la société.

Ce document consacré aux 16-25 ans a comme objectif prioritaire de soutenir les
compétences des professionnel·le·s de la formation, de la santé et du social afin
d’accompagner au mieux les jeunes dans le passage vers l’âge adulte. Les jeunes
de cette tranche d’âge se retrouvent dans des contextes multiples. Les contenus
mettent l’accent sur des principes transversaux qui soutiennent la santé psychique
des jeunes et qui peuvent être déclinés de manière différenciée en fonction du
contexte d’intervention de chaque professionnel·le. Ces principes peuvent aussi
être utiles aux parents. Ce cahier s’inscrit dans la continuité de celui consacré aux
12-16 ans et doit se lire comme une extension de ce dernier. Nous invitons donc
le lectorat à l’envisager en lien avec le premier cahier et à s’y référer, notamment
en ce qui concerne le développement biopsychosocial et neuronal et les leviers
d’action spécifiques au milieu scolaire qui, dans une large mesure, peuvent aussi
s’appliquer au contexte de la formation post-obligatoire.

4
Mandat, démarche et
structure du document

Ce cahier est réalisé sur mandat des cantons latins, réunis au sein de Santépsy.ch1.
Il met un focus prioritaire sur la compréhension des questions liées à la transition
que vivent les jeunes entre 16 et 25 ans entre l’adolescence et l’âge adulte et à
leurs liens avec la santé psychique. Il propose aussi des pistes d’action pour ac-
compagner cette transition dans une optique de promotion de santé. Les contenus
s’appuient à la fois sur des apports théoriques et des concepts liés à la jeunesse et
à la santé psychique, sur des apports d’expert·e·s issu·e·s de différents domaines
significatifs pour la tranche d’âge concernée, ainsi que sur la parole de jeunes de
16 à 25 ans. Différents focus groups ainsi que des entretiens individuels ont été
menés avec des professionnel·le·s de Suisse romande (expert·e·s dans le cahier)
et des jeunes entre 16 et 25 ans :

• ●deux focus groups de quatre heures avec onze expert·e·s romand·e·s des do- 2

maines de la formation, de l’éducation sociale, des neurosciences, de la santé


sexuelle, de la promotion de la santé, des addictions, de la pédopsychiatrie et
de la santé scolaire du secondaire II ;

• u● n focus group de deux heures avec dix médiateur·trice·s culturel·le·s du projet


valaisan « Femmes-Hommes Tische » vient compléter le panel afin d’inclure
au mieux de potentiels enjeux liés à la réalité migratoire ;

• ●différentes démarches de récolte de la parole de jeunes de 16 à 25 ans, no-


tamment un focus group réalisé à Scène active à Genève avec 10 jeunes, des
apports libres sur le stand du marché de Noël de Soluna (centre de loisirs de
Monthey), des partages dans le cadre des espaces de parole pour jeunes de
l’association TCI-Valais et des entretiens avec des jeunes de différents ho-
rizons géographiques en situations diverses de formation. Au total, ce sont
une trentaine de jeunes de 16 à 25 ans qui ont partagé leurs préoccupations,
défis et besoins, complétant ainsi les apports des focus groups réalisés avec
60 jeunes de 13 à 20 ans pour cahier de référence des 12-16 ans.

Tout au long du texte, des citations tirées des échanges avec les jeunes et les
expert·e·s viennent illustrer les éléments présentés.

Les contenus sont développés dans une optique de promotion de la santé, telle
que définie par l’OMS. Ils ne traitent pas de la prise en charge ou de l’accompa-
gnement de jeunes atteint·e·s dans leur santé psychique, ni de la santé psychique
des professionnel·le·s. Ils sont orientés vers les ressources et le pouvoir d’agir des
adultes pour la mise en place de prestations et le développement de contextes qui
soutiennent de manière globale la santé psychique des jeunes.

1 Santépsy.ch est une campagne des cantons latins et de la CORAASP sur mandat de Promotion Santé Suisse. Son but est de promouvoir la santé mentale de la popula-
tion de Suisse latine.
2 Liste des expert·e·s en fin de document

5
Le cahier est structuré en trois parties principales :

La première propose des éléments de


compréhension sur la réalité actuelle des
PARTIE 1 ;
16-25 ans et les enjeux du devenir adulte

La deuxième se penche sur les notions de



PARTIE 2 santé psychique et de promotion de la san
psychique des jeunes de 16 à 25 ans ;

n
La troisième développe des pistes d’actio
transversales pour les professionnel·le·s

de l’éducation, de la formation, de la san
et du social en contact avec des jeunes,
afin de les soutenir dans la transition vers
PARTIE 3
l’âge adulte (référent·e·s d’apprentissage,
n
personnel du secondaire II ou de la formatio
·s
supérieure, éducateurs·trices, assistant·e
social·e·s, personnel de santé, etc.).

6
Le document ne comporte pas de bibliographie. Les éléments qui ont soutenu
la rédaction ainsi que des ressources utiles sont répertoriés directement dans le
texte en lien avec les thématiques abordées.

Pour un approfondissement des aspects scientifiques, il est recommandé de se


référer aux divers travaux réalisés ces dernières années par Promotion Santé Suisse
(PSCH) sur les questions en lien avec la santé psychique des adolescent·e·s et des
jeunes, notamment le chapitre 8 consacré à la promotion de la santé psychique
du document paru en 2023 :

« Promotion de la santé avec et pour les adolescent·e·s et les jeunes. Résultats scien-
tifiques et recommandations pour la pratique »

https://promotionsante.ch/programmes-d-action-cantonaux/themes-et-pu-
blications.

Il n’y a pas de consensus scientifique sur les âges de début et de fin de l’adoles-
cence. Pour désigner la période entre 16 et 25 ans, différents termes sont utilisés :
grande adolescence, adulescence, jeunes adultes, adultes émergent·e·s, jeunesse,
etc. Dans ce document, nous nous référons au cadre défini par l’OMS et utiliserons
le terme de « jeunes » pour qualifier les 16-25 ans :

• ●adolescence : période allant de 10 à 19 ans selon trois étapes principales :


préadolescence entre 10 et 13 ans, mi-adolescence entre 14 et 16 ans et ado-
lescence avancée dès 17 ans ;

• ●biologiquement : au sens strict, l’adolescence en tant que phase de puberté :


13-18 ans ;

• ●jeunesse : individus de 15 à 24 ans.

7
COMPRENDRE
PARTIE 1

Comprendre le
« devenir adulte »
pour soutenir la santé
psychique des jeunes
Comprendre le « devenir adulte »
pour soutenir la santé psychique
des jeunes

Dans nos sociétés occidentales, l’adolescence et le passage vers l’âge adulte prennent
la forme d’un processus de profondes transformations et de développement
biopsychosocial qui s’étend aujourd’hui de plus en plus dans le temps en raison
de l’abaissement de l’âge de la puberté et de la tendance au prolongement et à la
grande variabilité temporelle des expériences qui mènent vers la vie adulte (fin
de formation, départ de la maison, arrivée sur le marché du travail, indépendance
financière, engagement dans une relation, arrivée d’un enfant,
etc.). Ces transformations vont ouvrir sur de nombreux défis
Devenir adulte c’est être en et exiger un ajustement constant de l’équilibre identitaire, lui-
route vers la maturité, l’auto- même fortement influencé par les expériences et les contextes

nomie et l’indépendance. C’est


de vie et de formation.

un chemin prometteur fait Entre l’arrivée de la puberté et l’âge adulte, les jeunes connaissent

d’expériences, de découvertes, de nombreuses transformations et vivent des transitions à


différents niveaux : physique, psychologique, émotionnel,
d’apprentissages mais c’est social, contextuel. Cette période est aussi caractérisée par de

aussi vivre une situation multiples explorations tant personnelles que sociales qui vont
contribuer à l’affirmation de leur identité et au développement
« entre deux » pas toujours de leur autonomie.
confortable qui peut occasion-
ner du stress et impacter le
bien-être et la santé mentale.
C. VAN DER VELDE

10
Dans ce passage vers l’autonomie et l’indépendance, de 1a. Qui sont les 16-25 ans d’aujourd’hui ?
nombreux éléments influencent l’équilibre psychique :

• ●les nouveaux besoins psychosociaux liés à la maturation Une population hétérogène

COMPRENDRE
physique, sociale et neuronale et au développement de
l’identité ; Les 16-25 ans représentent une population hétérogène, très
volatile et souvent difficile à cerner. Elles·ils se retrouvent
• la succession de nouvelles expériences à un rythme soutenu ; dans des systèmes de formation divers, leurs goûts et intérêts
ouvrent sur une grande variété d’activités et d’appartenances,
• la prise d’autonomie des parents et la nécessité de créer leurs modes de vie sont diversifiés, marqués par l’exploration
son propre réseau d’amitié et de soutien ;
des possibles et son cortège de prises de risque et par une

• l’exploration des rôles sociaux, professionnels et de genre importante mobilité. Leur parcours de vie, leur situation
et le positionnement par rapport à ces derniers ; socio-économique, leur genre et leurs expériences affectives
et relationnelles les confrontent à des réalités différentes
• ●l’engagement dans des relations de plus en plus intimes ouvrant sur de multiples trajectoires. Impossible donc d’en
et l’exploration de la sexualité ; tirer un portrait uniforme tant elles·ils représentent une
population aux caractéristiques diverses à la fois du point de
• ●la nécessité de réussir une formation et son cortège de vue de leur développement propre que des environnements
pressions pour pouvoir aspirer à trouver un emploi et
de vie ainsi que de leurs expériences personnelles, de for-
s’insérer professionnellement ;
mation et de travail. Cette hétérogénéité les rend aussi plus
difficilement accessibles que les adolescent·e·s plus jeunes
• ●la nécessité de devenir indépendant·e financièrement ;
puisque dès 16 ans l’école obligatoire ne constitue plus un
• l● es nombreux choix à faire au niveau personnel, relation- lieu commun où les atteindre.
nel, professionnel, de la formation et des comportements
de santé. 16-18 ans / 18-25 ans : des réalités proches
mais différentes
Ces différents éléments constituent à la fois de grandes
En Suisse, la réalité sociale et juridique des 16-18 ans diffère
opportunités et des sources potentielles de risque. Les trans-
quelque peu de celle des 18-25 ans.
formations touchent à toutes les sphères de vie : personnelle,
amicale, amoureuse, sociale, professionnelle, citoyenne.
Les 16-18 ans ont un mode de vie encore assez proche de celui
Elles exigent de nombreuses adaptations et peuvent géné-
des adolescent·e·s plus jeunes. Si elles·ils sont plus autonomes
rer des tensions psychologiques et du stress. Ceci d’autant
dans certains aspects de leur vie (organisation quotidienne,
plus qu’elles se déroulent aujourd’hui dans un contexte
vie scolaire et relationnelle), elles·ils vivent généralement
d’individualisation croissante qui donne moins de repères et
encore chez leurs parents et sont encore souvent concer-
contribue à brouiller les règles quant aux objectifs à atteindre
né·e·s par certaines transformations pubertaires. Elles·ils
en tant qu’adultes3.
fréquentent une école secondaire de formation générale
(env. 40%, OFS 2021/20224) ou entrent en apprentissage
ou en formation professionnelle (env. 60%, OFS). Elles·ils
découvrent progressivement les exigences et les modes de
vie adultes mais partagent encore pour la plupart une culture
de pairs dans leur contexte de formation. Au niveau légal,
même si elles·ils ont atteint la maturité sexuelle et religieuse
et ont désormais le droit de se procurer certains alcools dans
l’espace public (bière, cidre et vin), elles·ils sont encore sous
la responsabilité parentale.

Les 18-25 ans se retrouvent principalement en formation


tertiaire (Hautes écoles, formation professionnelle supérieure)

3 Marcotte J., Richard M.-C. 2023. Construction de soi et appartenance dans la transition à la vie adulte. Presses Universitaires du Québec.
4 www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/education-science/personnes-formation/degre-secondaire-II.html

11
ou sur le marché du travail après avoir terminé une forma- Le passage à la majorité civile, civique et pénale (18 ans) :
tion initiale. À partir de 18 ans, même si le développement cette étape va avoir des répercussions sur les droits et les
identitaire et social n’est pas terminé, nombre d’éléments libertés des jeunes mais aussi sur leurs responsabilités. Elle
qui caractérisent les 16-18 ans ne sont plus la norme. L’école s’accompagne de nombreuses démarches administratives
n’est plus une réalité quotidienne pour toutes et tous. Elles·ils (chômage, aide sociale, AVS-AI, renouvellement des papiers
ne partagent plus une culture de pairs commune liée à l’école d’identité, déclaration d’impôts, papiers militaires, demande
et se retrouvent dans des environnements de formation ou de bourses, etc.) qui peuvent être déstabilisantes. L’oubli de
de travail multiples. Elles·ils commencent à habiter hors certaines démarches administratives peut occasionner de
du foyer familial. Pour beaucoup de garçons, et aujourd’hui grandes difficultés (par exemple le fait de ne pas remplir sa
certaines filles, c’est la période du recrutement et du service déclaration d’impôt peut déboucher sur une taxation d’of-
militaire qui les confronte de manière forte aux normes de fice avec le risque de perdre certaines prestations sociales
socialisation genrées masculines5. Même si dans les faits, comme les subsides LAMal, le non-paiement de primes
elles·ils sont plus autonomes, elles·ils ne sont pas toujours de caisse-maladie peut engendrer des poursuites, etc.).
indépendant·e·s financièrement. Elles·ils ont atteint l’âge Certain·e·s peuvent être amené·e·s à ouvrir des demandes
de la majorité civile, civique et pénale qui leur confère de d’obligation d’entretien contre leurs parents pour pouvoir
nouveaux droits (par exemple le droit de se marier ou de continuer leur formation6.
conclure des contrats sans l’accord des parents), mais aussi
de nouvelles responsabilités puisqu’elles·ils sont désormais Le passage du statut de mineur·e à celui de majeur·e provoque
responsables de leurs actes sur tous les plans. aussi des changements importants au niveau légal avec des
répercussions sur les systèmes de prise en charge éducatifs,
Quelques enjeux pour la santé psychique sociaux et sanitaires. Cet état de fait plonge certain·e·s dans
de grandes difficultés. Il est particulièrement marqué pour les
La fin de l’école obligatoire et le passage au post-obliga- jeunes avec un parcours en foyer ou en famille d’accueil (Care
toire (formation du secondaire II ou apprentissage) avec la Leavers), celles et ceux en rupture de formation, en situation
question cruciale du choix de formation : ce choix dépend socio-économique précaire ou vivant dans des foyers vulné-
dans une grande mesure des résultats scolaires, ce qui les rables, les jeunes parents encore en formation, certain·e·s
plonge souvent dans un important stress de performance jeunes LGBTIQ, ou avec un parcours migratoire, particuliè-
avec le sentiment d’y « jouer leur vie ». Cette tension est rement les mineur·e·s non accompagné·e·s (MNA). Pour ces
d’autant plus forte pour les jeunes en difficulté scolaire dernier·ère·s, les 18 ans marquent un important changement
pour qui ce stress s’accompagne du risque de décrochage et dans l’encadrement dont elles·ils bénéficiaient jusque-là.
d’isolement. Le changement de contexte de formation qui Elles·ils se retrouvent davantage livré·e·s à elles·eux-mêmes,
nécessite de s’adapter à un nouvel environnement physique ce qui peut provoquer des manifestations de grande anxiété
et relationnel ainsi qu’à de nouvelles exigences peut aussi et l’apparition de comportements ou de difficultés chez des
constituer pour certain·e·s une importante source de stress. jeunes qui jusque-là n’avaient montré aucun signe apparent
de détresse.
Les premières majorités : 16 ans, c’est l’âge de la majo-
rité sexuelle et religieuse et du droit de se procurer et de
consommer certains alcools. Ces nouveaux droits touchent à
POUR ALLER PLUS LOIN
d’importants domaines d’exploration où les prises de risque
sont courantes et créent une tension entre la reconnaissance Care leavers www.leaving-care.ch/care-leavers
d’une autonomie grandissante et du besoin d’expérimenter
et l’exigence de protection. Elles·ils ont par exemple le droit Mineur.e.s non accompagné·e·s
d’avoir des rapports sexuels, mais seulement dans certaines www.ssi-suisse.org/fr/mineurs-non-
conditions (écart maximal de 3 ans si un·e des partenaires accompagnes/330
a moins de 16 ans, absence de rapports de pouvoir, etc.) ; le
droit d’acheter et de consommer du cidre, de la bière et du
vin, mais pas d’autres alcools ; le droit d’user de leur propre
argent mais pas de conclure un contrat sans l’accord des
parents. Cet entre-deux entre libertés et limites est sensible
pour la santé psychique. En même temps qu’il ouvre sur de
nouvelles possibilités, il pose des contraintes et crée de nou-
velles responsabilités. Cet âge nécessite aussi une adaptation
de la posture des adultes (voir
voir partie 3, p.68),
p.68 notamment des
parents, ce qui peut parfois peser sur la qualité des relations
voire demander un soutien éducatif particulier.

5 Monay S. (2018) Femmes dans l’armée Suisse. Une socialisation à la domination masculine. Dans Sociétés contemporaines 2018/4 (N° 112), pages 45 à 71.
file:///C:/Users/Elitebook/Downloads/SOCO_112_0045-1.pdf
6 Depallens S. et al. Lost in transition. Regards croisés sur les 18-25 ans. Dans Revue Médicale Suisse https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2018/revue-
medicale-suisse-603/lost-in-transition-regards-croises-sur-les-18-25-ans.

12
CE QUE NOUS DISENT LES JEUNES

La gestion des démarches administratives est mentionnée tant par les étudiant·e·s, apprenti·e·s
ou jeunes salarié·e·s entretenu·e·s pour ce cahier comme une importante source de charge mentale.
Certain·e·s se sentent un peu perdu·e·s devant les procédures et la machine administrative, ne com-
prenant bien souvent ni le jargon utilisé, ni le sens de ce qui est demandé voire peinent à trouver un
système de gestion satisfaisant. Si les adultes peuvent avoir l’impression que les jeunes sont outil-
lé·e·s pour ces tâches, la plupart mentionnent ne pas avoir été suffisamment formé·e·s et ne pas
être préparé·e·s à la quantité de démarches nécessaires pour s’en sortir dans le monde des adultes.
Elles·ils se retrouvent avec très peu d’outils au moment de devoir réaliser seul·e·s ces tâches et ne
comprennent pas bien le système. Ce sentiment d’incompétence pousse certain·e·s d’entre elles·eux
à la politique de l’autruche et à ne plus ouvrir leur courrier, au risque de les plonger dans des soucis
à plus long terme (par ex. poursuites, etc.). Ces tâches semblent perçues plutôt comme des charges
que comme des marqueurs d’autonomie positifs. L’argent est aussi un souci, soit parce qu’il fait dé-

COMPRENDRE
faut pour assurer leurs besoins de base, soit parce qu’elles·ils ont de la difficulté à le gérer. Ce qui péjore
le sentiment de sécurité de base nécessaire à développer des projets de formation et de vie. Elles·ils
aimeraient que l’école leur permette de développer plus de compétences dans ces domaines,
que les adultes autour d’elles·eux se rendent mieux compte du stress que cela leur occasionne et
prennent le temps de les accompagner dans les questions de gestion administrative et financière.

La qualification professionnelle et les démarches pour entrer dans la vie professionnelle sont
aussi un souci majeur pour les jeunes de cette tranche d’âge. Elles représentent un saut dans des
contextes nouveaux qui fonctionnent avec des codes différents de ceux qu’elles·ils ont connus dans
le cadre scolaire et les obligent à se confronter au monde des adultes qui ne « leur fait pas toujours
spécialement envie ». Elles·ils se disent peu préparé·e·s à ces nouvelles exigences et se sentent sou-
vent peu compétent·e·s pour y répondre.

Ni adultes, ni adolescent·e·s
Différentes travaux7 menés sur la transition à l’âge adulte tendent à montrer que les jeunes de cette
tranche d’âge ne se définissent ni comme adultes, ni comme adolescent·e·s. Jeffrey J. Arnett, à qui l’on
doit le concept « d’adultes émergents », met en évidence cinq caractéristiques qui les distinguent à
la fois des adolescent·e·s et des jeunes adultes :

• ●l’exploration identitaire ;
• ●l’instabilité ;
• ●l’entre-deux ;
• ●les possibilités ;
• ●la focalisation sur soi.

Ces caractéristiques montrent bien la dimension « flottante » de cette période de vie où les anciens
repères changent alors que les nouveaux ne sont pas encore installés. Cet « entre-deux » est d’autant
plus sensible dans nos sociétés occidentales que la transition vers l’âge adulte est de moins en moins
orientée par des traditions normatives, qu’elle n’est plus marquée par des rituels clairs et que les
jeunes doivent de plus en plus tracer par elles·eux-mêmes leur voie vers l’âge adulte. Ainsi, les jeunes
peuvent être amené·e·s à devoir trouver par elles·eux-mêmes des réponses aux questions concernant
la carrière, les relations, les valeurs, la sexualité, la culture ou encore la spiritualité.

7 Arnett J. J. 2019. Conceptual foundations of emerging adulthood. Dans J.j. Arnet (dir.), Emerging adulthood and higher education: A new student development
paradigm (11-24). Routeledge.
Arnett J.J. 2014. 2nd 2015. Emerging adulthood: The winding road from the late teens through the twenties. Oxford University Press.
Côté J.E. 2019. Youth development in identity societies: Paradoxes of purposes. Routeledge.
Marcotte J., Richard M.-C. 2023. Construction de soi et appartenance dans la transition à la vie adulte. Presses Universitaires du Québec.

13
Un cerveau en restructuration récompense et du plaisir. Les régions du cortex préfrontal,
associées aux fonctions cognitives dites supérieures, comme
Les caractéristiques des « adultes émergents » peuvent être le raisonnement rationnel et les fonctions exécutives (anti-
lues aujourd’hui à la lumière des recherches en neurosciences cipation, prise de décision, mémoire de travail, production
qui tendent à montrer que le cerveau humain subit durant du langage, mentalisation, réflexion et jugement moral) et
l’adolescence et jusqu’à au moins 25 ans une importante au développement de la conscience de soi s’étoffent plus
restructuration qui influence considérablement les besoins tardivement et ne seront matures que vers 25-30 ans. C’est
et les comportements des jeunes. Si entre 16 et 25 ans les donc dans un contexte neuronal également en transforma-
capacités rationnelles, notamment nécessaires aux capacités tion que les jeunes cheminent vers l’âge adulte. Les récentes
d’adaptation sociale, sont déjà plus développées qu’au début recherches en épigénétique tendent à montrer que dans ce
de l’adolescence, l’ensemble des connexions entre les zones processus, les prédispositions génétiques joueraient un rôle
du cerveau limbique et du cerveau préfrontal ne sont de loin pour environ 40%. Pour les 60% restants, c’est l’influence de
pas terminées. Les 16-25 ans ne sont plus des enfants, plus l’environnement qui serait prépondérante. (www.child-en-
tout à fait des adolescent·e·s mais pas encore des adultes. cyclopedia.com/sites/default/files/docs/bulletins/page9bul-
Leurs besoins, réactions, expériences et apprentissages vont letinvol12no1dec15en.pdf). Ceci souligne l’existence d’une
dépendre dans une forte mesure du niveau de maturation de importante plasticité neuronale qui fait de cette période
leur cerveau, lui-même influencé par la qualité de l’environ- une période critique pour la santé psychique (sensibilité
nement et les contextes dans lesquels elles·ils vivent et se aux influences, vulnérabilité aux troubles psychiques), en
forment (épigénétique). même temps qu’un moment idéal pour les apprentissages et
l’ancrage d’habitudes de vie et de comportements positifs.
Le stress d’adaptation et de performance créé par les change-
ments physiques (puberté) et environnementaux (nouveaux Il est donc indispensable de proposer tout au long du processus
environnements sociaux et de formation, augmentation des de maturation neuronale des contextes de vie et d’appren-
exigences, nécessité d’adaptation, etc.) ainsi que les expé- tissage qui vont favoriser des possibilités d’expérimentation
riences nouvelles liées au processus de création identitaire, diverses ainsi que le travail de mentalisation8, c’est-à-dire
plongent le cerveau dans un contexte particulier auquel il va d’auto réflexivité qui, par un « pas de recul », va soutenir la
devoir s’adapter par un processus de maturation neuronale capacité de comprendre ses propres états mentaux et ceux
qui s’étale entre le début de la puberté et environ 25-30 ans des autres (intentions, connaissances, croyances, émotions
et qui va provoquer son remodelage complet. Ce remodelage qui influencent les comportements) et favoriser ainsi la
se fait par étapes et de manière asynchrone. Les premières conscience de soi, de ses processus internes, d’éventuels
zones à se développer sont les zones sous-corticales (système biais cognitifs9 et aussi le développement de l’empathie.
limbique), siège des émotions, des sensations, du système de

BON À SAVOIR
celui des adultes. Les
des adultes : le cerveau des jeunes n’est pas
• Les besoins des jeunes ne sont pas ceux tives (ratio nalité ) et le système
ntal liées aux fonct ions exécu
connexions entre les parties du cortex préfro vers 25 ans.
oppent en dernier et ne seront matures que
limbique (émotions et sensations) se dével
ionnel joue un rôle
lle est essentiel : le système affectif et émot
• L’apprentissage de la régulation émotionne leur dével oppe ment , le système
jeunes. Au fur et à mesure de
prépondérant dans les comportements des
réguler les émot ions.
de contrôle du cortex préfrontal pourra mieux
au des adolescent·e·s et
lesquels vivre des défis positifs : le cerve
• Elles·ils ont besoin de cadres sécurisés dans n de récompense, mais
ce qui favorise les prises de risques et le besoi
des jeunes a un besoin accru de dopamine
ndre.
aussi la motivation pour découvrir et appre
tions et le mouvement jouent
nce le développement neuronal : les sensa
• La réponse aux besoins physiques influe sage.
e corporelle et dans les processus d’apprentis
un rôle central dans la création de l’imag
nu·e·s dans leur créativité :
liquer, d’être pris·e en considération et recon
• Elles·ils ont besoin de participer, de s’imp la formation des connexions
gement et la recherche de sens soutiennent
l’exploration créatrice, l’innovation, l’enga
cerveau.
neuronales et le développement global du

8 Mentaliser est un processus mental par lequel une personne imagine et interprète ses propres comportements et ceux d’autrui, sur la base d’états mentaux comme
les besoins, les désirs, les croyances ou les sentiments (Bateman et Fonagy, 2004). La mentalisation permet d’agir comme un bouton « pause » dans le cerveau d’un·e
adolescent·e https://mentalisation.org.
9 Les biais cognitifs font référence aux erreurs identifiables et répertoriables qui se retrouvent dans notre jugement, et ce de façon prévisible et systématique. Ces
erreurs se produisent lorsque les gens doivent interpréter et gérer l’information provenant du monde qui les entoure. Personne n’y est complètement à l’abri et certains
contextes et facteurs y sont particulièrement propices www.shortcogs.com.

14
Des maturités asynchrones pement sont encore en plein processus de maturation. Ces
décalages, surtout le report de la maturité sociale, peuvent
Les jeunes entre 16 et 25 ans ne sont donc plus des adoles-
engendrer inconfort et frustration et faire ressentir de nom-
cent·e·s au sens strict du terme, mais ne peuvent pas non
breuses tensions entre ce que les jeunes peuvent réellement
plus être considéré·e·s comme des adultes. Elles·ils se re-
réaliser et ce qu’elles·ils souhaitent pour leur vie,
vie influençant
trouvent dans une sorte de phase intermédiaire caractérisée
la qualité de la confiance en soi et de l’estime de soi. Ce va
par des apprentissages dans tous les domaines de la vie, un
et vient entre les maturités peut être insécurisant et faire
entre-deux marqué par des maturités asynchrones. Elles·ils
apparaître des comportements de réassurance (p.ex. dormir
sont en chemin vers l’âge adulte avec les enjeux partagés de
avec son doudou, se blottir dans sa couverture d’enfant, etc.)
consolider leur identité, de se socialiser hors de la famille,
qui peuvent parfois désarçonner les parents ou les adultes
de devenir autonomes et de faire des choix dans toutes les
qui côtoient les jeunes.
sphères de leur vie.

Communément, l’âge adulte fait référence à des maturités


CE QUE NOUS DISENT LES JEUNES

COMPRENDRE
dans différentes dimensions :

Les jeunes entretenus pour réaliser ce cahier, surtout


• ●maturité biologique : atteinte du poids, de la taille et de les plus âgé·e·s en formation supérieure, mettent
l’ossature définitive, maturité des fonctions de repro-
en évidence l’inconfort, les tensions et la frustration
duction sexuelle ; qu’elles·ils ressentent en lien avec le décalage
entre ces différentes maturités. Elles·ils mettent parti-
• ●maturité
m aturité psychologique : capacité d’autonomie envers
culièrement en évidence la difficulté à concilier
les parents, d’indépendance affective, de prise de recul leur besoin d’autonomie (et leur sentiment de pouvoir
sur le plan émotionnel et de gestion de conflits, de pensée l’être) avec la dépendance matérielle vis-à-vis des
critique et de jugement personnel (capacité à porter un parents, notamment lorsqu’elles·ils vivent encore sous
regard critique sur les croyances, l’éducation, les normes leur toit. Elles·ils relèvent aussi la difficulté à se
sociales, les processus d’influence et à se faire sa propre détacher émotionnellement des parents et à faire leurs
opinion), de prise de décision pour soi dans les différents propres choix de vie sans conflit de loyauté ou
domaines de la vie (santé, relations, formation, profession, sentiment de redevabilité. Ces tensions peuvent être
style de vie) et de liberté d’action ; stabilisation de l’identité source d’un sentiment de malaise, voire d’impuissance
qui peut péjorer leur bien-être psychique.
et capacité d’engagement, conscience d’être soi, de son
identité physique, sociale, de genre, connaissance de ses
valeurs, qualités, forces, limites, besoins, affirmation de
soi dans ses relations aux autres et au monde ;
De nombreux défis psychosociaux liés au
• ●maturité
maturité sociale : socialisation secondaire et intégration développement identitaire
des normes, règles de conduite, codes sociaux de la société
dans laquelle on vit ; insertion culturelle (intégration des Les principaux défis des 16-25 ans selon les expert·e·s :
valeurs, codes culturels et symboliques ; appartenances) et
professionnelle (nouveaux rôles et statuts, indépendance • ●la majorité civile et l’autonomie financière ;
financière et matérielle), expérimentation des rôles sociaux,
professionnels et de genre avec capacité à y adhérer ou à
• ●les expériences de plus en plus autonomes dans toutes
les sphères de vie et les prises de risques ;
s’en distancier, capacité à trouver et à prendre sa place
dans le monde, à exercer son rôle de citoyen·n·e, etc. ; • ●la stabilisation de l’identité personnelle et sociale avec
l’enjeu de l’identité de genre ;
• ●maturité
maturité neuronale : se fait en lien avec toutes les autres
maturités et marque l’intégration des différentes parties • l● ’adaptation permanente au stress et à l’incertitude, ren-
du cerveau ; forcée par la prise de conscience que les adultes n’ont
pas de réponse ;
• maturité
m
● aturité juridique : atteinte de l’âge de la majorité sexuelle
(16 ans) ou civile, civique et pénale (18 ans), responsabi- • ●la quête de sens dans une temporalité stressante et un
lité envers soi et les autres, exercice de sa citoyenneté. environnement perçu comme peu motivant et plutôt
anxiogène ;

Ces différentes maturités ne s’atteignent pas en même


temps et il peut exister d’importants décalages entre elles.
• ●la recherche de leur place à la fois au niveau personnel,
professionnel et social.
Les jeunes peuvent être matures au niveau biologique mais
pas émotionnel, avoir atteint la maturité juridique mais pas
sociale, être autonomes dans leur vie affective mais dépen- Le développement biopsychosocial des jeunes de 16 à 25 ans
dant·e·s au niveau financier. La maturité du corps biologique s’inscrit dans le prolongement de celui des adolescent·e·s
est généralement atteinte en premier, alors que les aspects plus jeunes. Les grandes tâches de développement que sont
psychologiques, neuronaux et surtout sociaux du dévelop- la formation de l’identité,
l’identité le développement de l’autonomie

15
et la socialisation vont continuer à joncher leur parcours,
mettant sur leur chemin de grands défis développementaux POUR ALLER PLUS LOIN
et d’adaptation. À cet âge ces derniers sont intimement liés
à la quête identitaire et à la nécessité d’accepter qui elles·ils Christine Cannard. 2019. Le développement de
deviennent. Ils vont également se traduire dans la nécessité l’adolescent. L’adolescent à la recherche de son identité.
de faire de manière de plus en plus autonome des choix qui De Boeck
engagent à plus long terme. Une synthèse des approches actuelles du déve-
loppement de l’adolescent·e : https://fr.wikipedia.
Les trois tableaux ci-après donnent un aperçu récapitulatif
org/wiki/Psychologie_de_l%27adolescent
des grandes étapes du développement, des tâches de déve-
loppement et des défis psychosociaux partagés par les jeunes
de cette tranche d’âge. Ils s’inscrivent dans les théories sur
les stades du développement humain d’Erik Erikson et les
statuts identitaires de James Marcia10.
(https://journals·openedition·org/osp/1716?lang=fr)

Tableau 1. Principales étapes du développement adapté du site www.euteach.com

DÉBUT D’ADOLESCENCE MILIEU D’ADOLESCENCE FIN D’ADOLESCENCE


MARQUEURS
ENV. 10-13 ANS ENV. 14-16 ANS ENV. 17-20 ANS

Signes physiques • Début de la puberté • Fin de la puberté • Corps adulte

DÉVELOPPEMENT INTELLECTUEL

• Pensée concrète
Façon de penser • • Pensée abstraite, projets
Pensée concrète, égocentrique • Réalisation de tâches plus
d’avenir
complexes

AUTONOMISATION

Image de soi • Image de soi centrée sur la


• Corps séduisant • Acceptation de son corps
puberté-le corps

Indépendance • Moins d’intérêt pour les • Conflits avec les parents • Acceptation du soutien des
parents • Tester les limites parents

• Impulsivité
Relation aux autres • Relations avec ami·e·s du

• Relation avec ami·e·s du
même sexe
Relations plus intimes
même sexe

IDENTITÉ

Orientation et identité • Confirmation de l’identité


sexuelle • Besoin de son jardin secret • Comportement exploratoires
sexuelle

• Idéalisme • Expérimentation pour • Poser des limites, faire des


Valeurs, normes, rapport construire son propre système compromis
à l’autorité • Instabilité, prises de position
de références (valeurs, • Respect des valeurs
excessives
normes) personnelles acquises

Orientation scolaire ou • Ouverture et appétence de • Capacité à s’engager dans des


professionnelle, identité connaissances, plaisir de la projets personnels ou avec • Premiers choix professionnels,
désir d’indépendance
professionnelle pensée les pairs

Ce tableau met en évidence les grands thèmes qui jalonnent chologique, neuronal et social, nécessitant une adaptation
le développement entre l’adolescence et l’âge adulte. Tous des actions éducatives et préventives pour correspondre aux
se retrouvent tout au long du parcours mais avec des accents besoins et capacités des jeunes.
particuliers en fonction du développement physique, psy-

10 Erikson. E. 2011. Adolescence et crise. La quête de l’identité. Flammarion. Champ d’essai N°60.
Marcia J.E. 1966. Development and validation of ego-identity status. Journal of Personality and social psychology.
Schwartz et al. 2013. Identity in emerging adulthood: Reviewing the field and looking forward. Dans Oxford Handbook of Emerging Adulthood (pp.401-420).
Chapter: 25. Oxford University Press Editors: Jeffrey J. Arnett
www.researchgate.net/publication/283080905_Identity_in_emerging_adulthood_Reviewing_the_field_and_looking_forward

16
Tableau 2. Les tâches de développement : développer son identité, devenir autonome, se socialiser

Développer son identité


physique
psychique
de genre
affective et sexuelle
sociale
numérique...

S’intégrer

COMPRENDRE
S’individualiser Exploration
Engagement Se socialiser
S’autonomiser
Devenir indépendant·e

Confiance en soi - image de soi - estime de soi


Les tâches de développement sont communes à l’ensemble des jeunes
Chacun·e les résout à sa manière et à son rythme

L’exploration identitaire est une caractéristique majeure de Former son identité c’est réussir à développer un concept de
la transition vers l’âge adulte. Les jeunes sont appelé·e·s à se soi qui réunit à la fois les facettes de soi-même ressenties à
définir dans une multiplicité de domaines. La formation de l’intérieur de soi et celles perçues dans le regard des autres.
l’identité se fait par un double processus « d’exploration-en- Sur ce chemin, chaque jeune connaît de nombreuses tensions :
gagement » (Marcia, 1966) qui est fortement influencé par la
possibilité ou non de vivre de nouvelles expériences de manière • r● éussir à se percevoir à la fois dans l’unité de soi et dans la
de plus en plus autonome, le sentiment de compétence face continuité de sa propre existence dans le temps et l’espace
à ces expériences et la valeur qui leur est accordée par soi et (voire note de bas de page n°9), c’est-à-dire reconnaître
l’entourage. Confiance en soi et estime de soi vont donc jouer qu’il y a quelque chose en moi qui reste identique, que je
un rôle essentiel dans le développement de l’identité. Leur sois dans la famille, à l’école ou avec mes ami·e·s ;
présence facilite l’exploration qui, à son tour, agit sur leur
renforcement ou affaiblissement en fonction de la perception • ●pouvoir équilibrer l’image de soi et l’image sociale de
de réussite ou non. soi, c’est-à-dire la description de moi-même selon mon

i
propre point de vue et l’idée que je me fais de moi-même
à partir d’indices sur moi qui viennent des autres ou que
j’attribue aux autres ;
L’exploration est définie comme un
processus de recherche de différentes
alternatives qui s’offrent à nous, en lien avec
• ●jongler entre le processus d’individualisation et celui de
soi socialisation c’est-à-dire apprendre à me connaître, savoir
socialisation,
la recherche d’informations à propos de
ent, de façon à prend re qui je suis, devenir autonome, exprimer ma singulari-
ou de son enviro nnem
une décision, concernant des choix de vie
té auprès des autres et dans le monde tout en intégrant
tent
importants dans des domaines qui comp
les normes de la société et en trouvant ma place dans la
pour la const ructio n du conce pt de soi. collectivité.
à un
L’engagement fait référence à l’adhésion
spéci fique de buts, de valeu rs et de
ensemble
personnel
croyances. Il relève d’un positionnement
relevant du processus d’individuation.
t de l’adolescent.
Source : Cannard C. 2019. Le développemen
, de Boeck Supérieur
L’adolescent à la recherche de son identité

17
provo-
empêchent de s’engager et de passer à l’action,
BON À SAVOIR effets
quant une sorte de blocage de l’exploration avec des
gement, et l’estim e
En croisant les dimensions d’exploration et d’enga négatifs sur la confiance en soi, l’imag e de soi
profils identitaires : psychi que. Les recher ches empi-
Marcia a dégagé 4 de soi, donc sur la santé
profils
ge riques ont montré que les adolescent·e·s des quatre
Identité achevée (réalisée, aboutie) : la·le jeune s’enga mes
nes après une explor ation intens ive différaient de façon significative en termes de problè
dans différents domai alisés. Par exemp le,
est psychologiques, internalisés ou extern
de toutes les éventualités qui s’offrent à elle·lui. Elle·il et d’enga gemen t (identi té diffuse )
rôles qu’elle ·il a pu l’absence d’exploration
une personne unifiée, malgré tous les ative et positiv e à des compo rte-
ses valeur s et choix de est liée de façon signific
être amené·e à jouer ; elle·il assum e
d’alcool
adhère entière ment et volont aireme nt. ments à risque de type externalisés, comme l’abus
vie auxquels elle·il engag ement s (identi té
et de drogue, alors que de forts
en- asso-
Identité moratoire : la·le jeune se trouve activement achevée et dans une moind re mesur e forclos e) sont
encore nt
gagé·e dans un proces sus d’explo ration sans avoir ciés positivement au bien-être et au bon développeme
détresse
décidé d’engagements définitifs et stables. psychosocial de l’individu et négativement à la
valeurs psychologique.
Identité forclose : la·le jeune adopte les objectifs,
des person nes
et engagements des parents, des pairs ou (Cannard-revue-europeenne-coaching.com/nume
ros/n2-avril-2017/
maniè re quasim ent auto- n-identitaire-mo tivation-academique-
qui comptent pour elle·lui, de lien-entre-processus-de-formatio
oration.
matique, sans entrer dans une démarche d’expl
chez-jeune-adulte/)

n’est pas délibé ré mais pris par confor misme ou


Son choix
de leurs
par respect de l’autorité, de la religion ou de la traditi on. La compréhension des processus identitaires et
uvoir la
enjeux psychosociaux est importante pour promo
y ait ou
Identité diffuse : la·le jeune ne s’engage pas, qu’il santé psychique des 16-25 ans. Elle nous donne des clés de
rtemen ts sont peu
non exploration préalable. Ses compo compréhension et nous perme t de dévelo pper des accom -
adaptés, son identité person nelle est confus e. soient mieux adapt és à
pagnements vers la vie adulte qui
ts
Les profils identitaires évoluent beaucoup entre
11 et 25 leurs besoins en prenant en compte les différents élémen
bien-ê tre. Dans ce
ans, allant généralemen t d’une identité à prédom inance qui influencent leur équilibre et leur
le rôle
diffuse ou forclos e à une identité achevé e, via une identité sens, les statuts identitaires mettent en évidence
identi- adulte s qui entour ent les jeunes et ouvren t
moratoire. Pour certain·e·s jeunes, le processus important des
nt le
taire peut devenir « ruminatif », ouvrant sur des
pensées des pistes pour développer des pratiques qui facilite
en boucle, des remise s en questi on perma nentes qui les chemin vers l’identité achevée.

Tableau 3. Les défis psychosociaux des 16-25 ans (adapté de l’article de Dr H. Bolliger-Salzman in « La santé
psychique au cours de la vie ». PSCH, 2016)

APPRIVOISER ET INTÉGRER LES MODIFICATIONS CORPORELLES


développer une image corporelle positive

Développer et défendre ses propres conceptions


Se détacher des parents
S’individualiser du monde, son éthique et ses attitudes
CONSTITUER UN CERCLE D’AMI·E·S
Entretenir des relations plus étroites, intimes S’autonomiser APPRENDRE À SE CONNAÎTRE ET D’ÉVALER
Développer son identité citoyenne

Confiance en soi
Image de soi
Estime de soi
Se positionner par rapport aux rôles de genre PRENDRE DES DÉCISIONS POUR SA VIE
DÉVELOPPER SON IDENTITÉ AFFECTIVE ET Se socialiser Choisir une formation/profession
DE GENRE ET SON ORIENTATION SEXUELLE S’intégrer Développer des perspectives d’avenir et des
Oser affirmer qui je suis objectifs de vie

Intégrer les modifications neuronales, cognitives, physiques, émotionnelles


Trouver un sentiment d’identité solide dans ses rapports aux autres

Alors qu’entre 12 et 16 ans les défis psychosociaux touchent Les défis psychosociaux de cette tranche d’âge vont concerner
prioritairement à l’acceptation et à l’intégration des modifi- prioritairement trois grandes sphères de leur vie : l’amour,
cations physiques et au développement de relations significa- le travail et la vision du monde (Arnett, 2015), avec l’enjeu
tives avec les groupes de pairs, ceux des 16-25 ans concernent transversal de faire des choix, de les expérimenter, de les
de plus en plus les questions liées à l’autonomie sociale, à évaluer et de décider de s’y engager ou non.
l’intimité et au développement de leur propre style de vie.

18
La sphère relationnelle et de l’amour

L’amour et les relations


Entre 16 et 25 ans, la sphère relationnelle évolue beaucoup. Les jeunes vont passer
du besoin primordial de se détacher des parents et de créer des appartenances
significatives au sein des groupes de pairs, à la nécessité de développer des rela-
tions amicales et amoureuses de plus en plus choisies et intimes. L’étude James
2022 (www.swisscom.ch/fr/about/durabilite/james.html) met
en évidence que les jeunes entretiennent moins de relations
d’amitié qu’il y a 10 ans, mais qu’elles sont de meilleure qua- PAROLES DE JEUNES
lité. La relation aux parents se transforme aussi. Elle devient
moins oppositionnelle et plus calme. Une vie relationnelle et Avec les programmes qu’on a
amoureuse positive, ainsi que l’existence d’un réseau d’amitié
pour les études, l’organisation

COMPRENDRE
sont des sources importantes de bien-être et de renforcement
de l’estime de soi pour les 16-25 ans. Les amitiés et les liens des semaines, les trajets et le
relationnels sont cités par les jeunes rencontré·e·s pour ce cahier travail, c’est difficile de trou-
ver des horaires et des occa-
comme d’importants soutiens et des critères très significatifs
pour leurs choix de vie, notamment pour leur lieu d’habitation
hors du foyer familial. sions pour continuer à voir mes
La sphère relationnelle joue aussi un rôle prépondérant dans
ami·e·s. En tout cas, lorsque
la construction et la stabilisation de l’identité et comporte de j’aurai fini mes études, je ne
nombreux défis au niveau de l’image de soi et de l’estime de soi : veux pas choisir mon lieu de vie
pouvoir s’aimer, être aimé·e et aimer vont occuper une large
place dans les préoccupations de cette tranche d’âge : en fonction du travail. Ce sont
là où sont mes ami·e·s que je
• s’aimer soi-même c’est pouvoir apprécier qui l’on devient veux vivre.
tant au niveau physique, que psychologique : accepter les
attributs de son corps adulte, aussi de ses parties sexuées,
développer une image corporelle positive ; accepter ses ressentis, ses attirances,
ses compétences, ses qualités mais aussi ses limites ; comprendre son mode
de fonctionnement, ses réactions sans se juger constamment. Autrement dit,
s’aimer soi-même c’est développer le sentiment d’être digne d’être aimé·e,
ce qui ne va pas de soi pour les jeunes ;

• être aimé·e c’est se sentir reconnu·e et vivant·e dans le regard des autres,
devenir conscient·e qu’on est important·e pour d’autres. Cela demande d’oser
prendre le risque de s’ouvrir de façon de plus en plus personnelle et intime à
certaines relations amicales et amoureuses, de faire confiance à qui l’on est
et à l’autre, ainsi que d’être capable de recevoir de l’attention positive et de
l’affection ;

• aimer c’est oser lâcher-prise, se décentrer et prendre le risque de se montrer


et de s’engager tel·le que l’on est dans une relation tout en acceptant l’autre
comme elle·il est. C’est trouver des solutions pour gérer les désaccords ou les
conflits sans tout remettre en question, avec sa·son partenaire, ses ami·e·s

i
et aussi ses proches.

. La plupart des
relle des 16-25 ans sont disponibles en Suisse
Peu d’informations concernant l’image corpo
jeunes.
enquêtes sur ce thème concernent les plus
t satisfait·e·s de leur corps. En-
ns et 40% des filles entre 14 et 17 ans se disen
En Suisse romande seul·e·s 37% des garço à prend re leur distance par rapport
e corporelle négative et ont du mal
viron 1/5 des jeunes interrogé·e·s ont une imag aurai ent dava ntage confiance en elles·eux et
sont persuadé·e·s qu’elles·ils
aux images corporelles irréalistes. Elles·ils menée en Suisse en 2015 et
ils pouvaient modifier leur corps· Etude ZHAW
seraient plus heureuses et heureux si elles·
2016 promotionsante.ch/node/1158
parents s’intéressent peu à
u de stress est élevé (1/3) déclarent que leurs
34,3% des enfants et jeunes dont le nivea
. 2021 www.projuventute.ch/fr/etude-sur-le-stress
elles·eux. Etude Pro Juventute sur le stress

19
La sexualité • apprendre la sexualité, le plaisir, mais aussi la gestion
des risques potentiels qui lui sont liés : savoir se protéger
La sexualité est une dimension fondamentale de l’être humain des différentes infections sexuellement transmissibles
qui touche non seulement à l’intimité mais aussi à la sphère (IST), où et comment se procurer une contraception, une
sociale et culturelle. La dimension sexuée de l’identité joue contraception d’urgence, des préservatifs, faire un test
un rôle important dans le processus identitaire des 16-25 ans IST-VIH ou de grossesse ; savoir et oser exprimer ses be-
en raison de l’entrée dans la sexualité active, mais aussi en soins, son consentement ou un refus, fixer ses limites,
raison de la confrontation aux normes sociales qui lui sont demander le port d’une protection comme le préservatif.
liées (hétéronormativité, pression de l’âge des premières Connaître les lieux de conseil en matière de santé sexuelle ;
expériences sexuelles pour celles et ceux qui entrent plus
tôt ou plus tardivement en sexualité active, pression liée au • se sentir à l’aise avec son identité de genre et son orienta-
fait d’être en relation de couple, pression du regard social tion affective et sexuelle ; choisir de les exprimer ou non
sur les parents jeunes ou avec une orientation non exclusi- dans les différentes sphères de sa vie, avec la question
vement hétérosexuelle, etc.). La découverte de la sexualité de la répétition des « coming out » dans les différents
va ouvrir sur de nombreuses conduites exploratoires tant contextes ; oser demander de l’aide en cas de besoin, no-
physiques que relationnelles pour découvrir qui l’on est ou tamment oser signaler des comportements violents ou
qui l’on n’est pas. Cette exploration se fait à un rythme et inappropriés ;
avec des expériences propres à chacun·e. Elle s’accompagne
de nombreuses questions liées au plaisir, à sa capacité de • pour certain·e·s, composer avec des situations particulières
et sensibles. Par exemple concilier une entrée en parentalité
plaire et de nouer des relations affectives et sexuelles, à la
en étant mineur·e ou encore en formation, entamer un
connaissance de soi, de ses limites et de sa capacité à les
processus de transition de genre, être une personne avec
poser, à sa capacité et son désir de se reproduire, ou encore
des variations du développement sexuel, des variations
à l’identité de genre et à l’orientation affective et sexuelle.
de genre ou qui a subi des mutilations génitales.
Elle peut aussi être source de prises de risques (par exemple
rapports sexuels non protégés) et avoir des conséquences
sur la santé psychique et physique, par exemple lors d’ex- Les questions liées à la sexualité sont au cœur de la vie des
périences de relations malsaines voire violentes. En Suisse, 16-25 ans. Il faut donc favoriser une grande accessibilité à
l’âge moyen des premières relations sexuelles est de 16,5 ans l’information et à des prestations d’éducation, de conseil,
(Barrense Dias et al, 2020). de soutien et de prise en charge (gynécologues, urologues,
etc.) en matière de santé sexuelle (simplicité des démarches,
Les enjeux croisés entre santé sexuelle et santé psychique discrétion, gratuité ou prix réduits). Il est aussi important que
sont nombreux durant cette période de vie : les adultes qui les côtoient s’informent et se forment sur les
grandes questions liées à la sexualité et à la santé sexuelle
• développer une approche positive de la sexualité, libre pour pouvoir intégrer au mieux cette dimension dans leurs
de tabous et de fausses représentations (pornographie accompagnements.
notamment) ;
Ressource : Répertoire des centres de santé sexuelle de Suisse :
• intégrer la dimension sexuée de son identité et compo- www·sante-sexuelle·ch/centres-de-conseil
ser avec les normes dominantes (cisnormativité et hé-
térocentrisme) ;

La sexualité ne se limite pas aux relations sexuelles.


• développer une image positive de son corps, notamment Elle touche aux questions identitaires fondamentales
de son corps sexué sur lequel les normes sociales, les in-
et concerne des dimensions sociales et sociétales. Dé-
jonctions stéréotypées, les idéaux de beauté irréalistes et
velopper une sexualité positive, vivre des expériences
l’hypersexualisation médiatique et commerciale pèsent
enrichissantes et savoir gérer sa santé sexuelle sont des
aussi, pouvant mener à une insatisfaction et à des prises de
facteurs protecteurs pour la santé psychique des 16-25
risque importantes en matière de santé (chirurgie esthé- ans. C’est un apprentissage exigeant qui nécessite le
tique génitale ou mammaire (vidéos Génitalia du Bioscope développement de nombreuses compétences en matière
de l’UNIGE www.unige.ch/ssi/ressources/ressources-pe- de connaissance de soi et au niveau relationnel : identi-
dagogiques-ssi/sitevideos/genitalia-capsules-videos/), fication de ses émotions, de ses besoins, de ses limites,
prise de médicaments pour augmenter la performance communication, négociation, gestion de situations
sexuelle, etc.) ; complexes et du stress, capacité à prendre soin de sa
santé sexuelle et à demander de l’aide dans le domaine
• développer des relations intimes significatives et vivre de l’intimité, etc. Ces compétences ne vont pas de soi et
des expériences relationnelles et sexuelles basées sur le doivent être entraînées le plus possible dans toutes les
consentement, exemptes de violences et de contraintes et autres sphères de la vie pour pouvoir être activées par
respectueuses des droits humains, notamment des droits les jeunes en situation (anticipation).
sexuels ; apprendre les codes sociaux, les règles et ses
droits en matière de sexualité digitale ;

20
premier rapport sexuel, 84% utilisent le prése
rvatif masculin
i
• 93% des jeunes se protègent lors de leur
(Etude IUMSP, 2018) ;
esses pour 1000 adolescentes
s est l’un des plus bas du monde (2,1 gross
• le taux de fécondité des adolescentes suisse adole scent·e·s) (Données OFS, 2017) ;
uptions de grossesse (3,5 pour 1000
entre 15 et 19 ans), tout comme celui des interr
ience sexuelle sans
s que les hommes à avoir accepté une expér
• les femmes sont largement plus nombreuse ent l’avoi r fait pour garder une bonne
e première raison, elles indiqu
vraiment le désirer (53% contre 23%). Comm
2018) ;
relation avec leur partenaire (Etude IUMSP,
contre 2.8% d’hommes
es d’un abus sexuel ou d’un viol avant 26 ans
• 16% des femmes ont indiqué avoir été victim
(Etude IUMSP, 2018) ;
des faveurs sexuelles contre
2,8% chez les femmes) de jeunes échangent
• une petite minorité (3,7% chez les hommes,

COMPRENDRE
de l’argent, des cadeaux ou des avantages
(Etude IUMSP, 2018).

POUR ALLER PLUS LOIN

Barrense-Dias Y., Akré C., Berchtold C., Leener, B., Morselli D., Surís J-C. Unisante (2018) Sexual health and
behavior of young people in Switzerland. Raison de santé 291.GRSA. IUMSP. Lausanne. www.unisante.ch/fr/formation-
recherche/recherche/projets-etudes/sexual-health-and-behavior-young-people-switzerland

Barrense-Dias Y, Akre C, Suris JC.(2019). La sexualité à l’ère numérique : les adolescents et le sexting 2.0, 2ème phase.
Raisons de santé 296. GRSA. IUMSP. www.unisante.ch/fr/formation-recherche/recherche/publications/
raisons-sante/raisons-sante-296

Colombo, A., Carbajal, M., Carvalho Barbosa, M., Jacot, C., & Tadorian, M. (2017). Sexe, relations… et toi? Sexualité
et transactions sexuelles impliquant des jeunes en Suisse. Synthèse des résultats de recherche financée par la Fondation
Oak. Givisiez, HETS Fribourg. www.hets-fr.ch/media/znrnsmru/synth%C3%A8se-des-r%C3%A9sultats_sexe_
et_toi.pdf

21
L’identité de genre et l’orientation sexuelle et affective
Le développement de l’identité de genre et l’orientation affective et sexuelle sont
également au cœur du développement identitaire des jeunes. Pour les jeunes non
exclusivement hétérosexuel·le·s ou cisgenres de cette tranche d’âge, un enjeu
central concerne le questionnement sur ce qu’elles·ils veulent communiquer et
affirmer à leur entourage. Les études montrent que les jeunes non exclusivement
hétérosexuel·le·s ou cisgenres, tout spécialement les jeunes trans*, connaissent
un état de santé global moins bon que le reste des jeunes du même âge. Elles·ils
sont plus souvent victimes de discrimination et de violence, sont plus touché·e·s
par les addictions, souffrent plus souvent de troubles psychosomatiques et de
dépression et connaissent une vulnérabilité accrue aux troubles psychiques et
au suicide. Elles·ils sont aussi plus à risque en matière de santé sexuelle, surtout
les jeunes hommes bi ou homosexuels.

Ce n’est pas l’identité de genre et l’orientation sexuelle qui sont responsables du


moins bon état de santé psychique des jeunes LGBTIQ. Les difficultés psychiques
sont engendrées par des facteurs internes comme l’homophobie, la biphobie ou
la transphobie intériorisée, des maladies psychiques ou une faible estime de soi
et surtout par des facteurs externes tels que des expériences de discrimination et
de violence et les inégalités auxquelles elles·ils doivent faire face.11 Ces dernières
touchent de nombreux domaines de leur vie, notamment l’accès à des systèmes
sûrs d’éducation et de santé et à des professionnel·le·s ouvert·e·s, accueillant·e·s
et compétent·e·s. Entre 16 et 25 ans, la question du coming-in (prendre conscience
de sa propre identité de genre et orientation sexuelle) et surtout du coming-out
(affirmer socialement son identité de genre ou orientation sexuelle) va jouer un rôle
important pour la santé psychique des jeunes LGBTIQ. Ne pas révéler son orien-
tation sexuelle ou se conformer aux normes de genre à l’encontre de son ressenti
peut par exemple permettre d’éviter d’être harcelé·e mais induire un stress ou une
LGBT-phobie intériorisée influençant négativement la santé mentale (Bize et al.
2022). Cela peut aussi engendrer des situations à risque, notamment en exposant

11 www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/nationale-gesundheitsstrategien/gesundheitliche-chancengleichheit/forschung-zu-gesundheitlicher-
chancengleichheit/gesundheit-von-lgbt-personen.html#-705496054

22
PAROLES DE JEUNES

Quand tu es une fille, il y a beaucoup de gens qui te parlent pas comme


à une personne, ils te parlent comme à une femme (méprisant)· Ils
pensent que tu peux pas réfléchir comme une personne… Et être en
public moi ça me fait vraiment peur, parce que tu sais jamais quand
quelque chose va se passer, quand est-ce que… juste marcher dans la
rue, ça peut être traumatisant. Et ça, ça stresse beaucoup.
Moi je pense que t’es baisé des deux côtés. Parce que moi souvent ce que

COMPRENDRE
j’ai vu, c’est que les hommes, on nous traite souvent comme des objets
et pas comme des hommes. Soit on nous dit “ah, toi t’es l’homme et t’es
censé faire ça et t’es censé faire ça et t’es censé faire ça”. Et souvent
ben ça nous demande aussi énormément d’énergie. Et je pense que des
deux côtés, il y a vraiment beaucoup de problèmes d’égalité.

la·le jeune à des environnements familiaux et extra-familiaux


qui peuvent être nuisibles et en rendant difficile un soutien BON À SAVOIR
adéquat de la part des professionnel·le·s du milieu scolaire ou ble pu-
Dans la dernière enquête sur le vivre ensem
de la santé. À l’inverse, le coming-out peut être protecteur
Suiss e en 2023, un tiers de la popu lation
bliée en
avoir été
résidente permanente en Suisse déclare
face à la dépression mais exposer davantage à la victimisation
valeur
victime de discrimination ou de violence. Cette
(Unisanté, 2022). L’effet d’un coming-out dépend donc du
14-25 ans, ce qui repré sente une
contexte dans lequel évoluent les jeunes et constitue un bon atteint 50% chez les
ion de six points par rappo rt à 2020. Les
exemple de l’importance de l’environnement sur le dévelop- augmentat
arrivent
pement de la résilience. Les discriminations, l’isolement, motifs racistes et liés à l’identité de genre
le stress minoritaire12, le harcèlement scolaire, l’ignorance en haut de la liste.
des professionnel·le·s sur la réalité des personnes LGBTIQ, tion/co mmuniques.
www.admin.ch/gov/fr/accueil/documenta
l’invisibilisation et le manque de modèles identificatoires msg-id-92922.html
diversifiés et positifs sont de grands facteurs de risque pour
certa in·e·s
leur santé mentale sur lesquels il faut absolument agir. Ces Les jeune s issu·e ·s de la migration et
en Suisse avec un passe port suisse sont
facteurs sont encore renforcés par la difficulté que peuvent jeunes né·e·s
onté·e ·s à plus de suspi cion sur la voie publique,
rencontrer certaines familles pour offrir un soutien adéquat, confr
de violen ce, en
en raison d’une méconnaissance, d’une non-acceptation, ou à plus de contrôles policiers, voire
de peau . Les idéau x de beau té
raison de leur couleur
parce qu’elles peinent à comprendre ce que vit leur enfant.
avoir un grand impa ct sur la mani ère
peuvent aussi
ncer son
dont la·le jeune se perçoit et fortement influe
La littérature met en évidence que les principaux facteurs de
aller jusqu ’à prendre
estime d’elle·lui-même, pouvant
protection de la santé psychique des jeunes LGBTIQ sont un
afin de blanc hir sa peau et/
climat scolaire ou de formation soutenant et un entourage des risques pour la santé
des pratiq ues extrê mes de comp orte-
familial faisant preuve d’acceptation et de soutien. ou à adopter
e doit être
ment de santé. Une attention particulièr
plusie urs facteurs
portée aux jeunes qui cumulent
de risque en matière de discr imina tion.

12 La notion de « stress minoritaire » a été développée par Illan Meyer. Elle désigne un état de stress élevé (voire chronique) lié au fait d’appartenir à un groupe minoritaire.

23
Les questions liées au genre préoccupent aujourd’hui l’en- rapports entre les genres, les principes d’égalité et d’inclusion
semble des jeunes. D’abord parce qu’elles·ils peuvent toutes de la diversité, ainsi que toute l’organisation de la société.
et tous être témoins d’actes de violence et de discrimination, Les questions autour de l’identité de genre et de l’orientation
ensuite parce que ces questions touchent à leur vision du affective et sexuelle que se posent les jeunes font à la fois
monde, replaçant le débat bien au-delà du domaine intime fortement sens pour leur développement identitaire personnel
de l’identité et de la sexualité. De manière plus large, les et pour leur engagement social et sociétal. Elles les touchent
connaissances actuelles sur la diversité sexuelle et de genre aussi dans leur sentiment de bien-être et de sécurité. Il est
(https://www.unige.ch/ssi/) et l’ouverture de la parole sur donc important de les respecter et de les prendre en compte
les réalités vécues par les personnes LGBTIQ poussent au- de manière adaptée dans nos accompagnements.
jourd’hui l’ensemble de la société à revisiter sa vision binaire
et hétérocentrée et à considérer d’autres réalités. Ce sont Ressource : https://www.lgbtiq-helpline.ch/fr/conseil
d’importantes questions qui réinterrogent l’ensemble des

jeune sur six (16,5%) indique avoir une orient


ation non exclusivement hété-
i
• Dans le canton de Vaud, un·e t avoir été victimes d’agressions sexuelles
au cours des trente
rosexuelle. Parmi ces personnes, 15% disen avoir subi du harcè lement (y compris en ligne)
osexuelles. 16% rappo rtent
derniers mois, contre 3% des personnes hétér (20%) des jeunes non exclusivement
derniers mois (contre 8%). Un cinquième
de manière hebdomadaire sur les douze cinq (79%) décrivent des troubles
santé générale (contre 11%). Quatre sur
hétérosexuel·le·s s’estiment en mauvaise ssivit é (contre 36%). Un peu plus d’un
(contre 56%) et 58% font état de dépre
somatiques et psycho affectifs récurrents né à la naiss ance. (Unisanté. 2022).
dans le genre qui lui a été assig
jeune sur cent (1,3%) ne se reconnaît pas
jusqu’à 7 fois
les jeunes hétérosexuel·le·s. Ce risque est
2 à 5 fois plus de risque de se suicider que
• Les jeune s LGB ont
tentatives de suicide concernent 1 jeune
LGB sur 4 et 2 jeune s trans sur 3. La
plus important pour les jeunes trans. Les tenta tives ont lieu avan t 20 ans,
ans. Chez les garçons 50% des premières
moitié de ces tentatives ont lieu avant 20
Descuves & Berrut, 2013).
74% chez les filles (Häusermann.2014 et
conversion vi-
suisse à légiférer pour interdire les mesures de
n de Neuchâtel est devenu le premier canton
• En mai 2023 le canto
thérapies de conversion »). La question est actue
llement débat tue dans plusieurs
sant les personnes LGBTQ (aussi appelées « Conse il national en décem bre 2022.
aussi été acceptée au niveau fédéral par le
autres cantons. Une motion dans ce sens a -en-ordre-disperse.html
version
les-cantons-sattaquent-aux-therapies-de-con
https://www.rts.ch/info/suisse/13996943-

POUR ALLER PLUS LOIN

Dayer C. 2022. Réagir face à l’homophobie et la transphobie. In Revue REISO.


www.reiso.org/articles/themes/genre/9213-re-agir-face-a-l-homophobie-et-la-transphobie

HSLU. 2022. Gesundheit von LGBT Personen in der Schweiz - Rapport de recherche de la Haute école de Lucerne 2022.
Résumé en français www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/nationale-gesundheitsstrategien/gesun-
dheitliche-chancengleichheit/forschung-zu-gesundheitlicher-chancengleichheit/gesundheit-
von-lgbt-personen.html#-705496054

Podcast : Portail Audio www.rts.ch/audio-podcast/2022/audio/comment-ca-se-passe-a-l-ecole-quand-on-


est-lgbt-25824025.html

Stop Suicide. 2020. Le risque de suicide chez les jeunes LGBTQ+. Document de synthèse sur le risque suicidaire
parmi les jeunes LGBTQ+, mise à jour par Joséphine Gut en 2020, Stop suicide

Unisanté. 2018. Enquêtes populationnelles sur la victimisation et la délinquance chez les jeunes dans les cantons de Vaud,
Zurich et Neuchâtel. Vaud et Zürich. www.unisante.ch/fr/formation-recherche/recherche/publications/rai-
sons-sante/raisons-sante-279. Neuchâtel: www.unisante.ch/fr/formation-recherche/recherche/
publications/raisons-sante/raisons-sante-288

Unisanté. 2022. Des chiffres vaudois sur la victimisation des jeunes LGBT.
www.unisante.ch/fr/formation-recherche/recherche/publications/raisons-sante/raisons-sante-329

24
La sphère de la formation et du travail
sont
leurs ascendant·e·s, même lorsqu’elles·ils
et des mêmes
La formation et la qualification déten teur·r ice·s du même passe port
ires et profe ssion-
qualifications linguistiques, scola
mporain·e· s d’orig ine suisse .
Le développement des capacités cognitives et intellectuelles nelles que leurs conte
tion-a-lembauche-des-des-
doit permettre aux jeunes de faire face de manière de plus (https://nccr-onthemove.ch/blog/la-discrimina
7e%c2%b7s/?lang=fr)
cendant%c2%b7e%c2%b7s-dimmigre%c2%b
en plus autonome aux exigences scolaires et profession-
nelles et d’atteindre un niveau de qualification suffisant
pour, à terme, être indépendant·e·s économiquement. Sur
ce chemin, elles·ils doivent franchir un certain nombre de A l’issue de l’école obligatoire, la phase du choix de formation
transitions (entre le secondaire et la formation profession- est un moment clé. Elle peut s’avérer difficile à plusieurs
nelle ou générale, puis vers la formation supérieure ou le niveaux. D’une part, la compétence de choisir pour soi n’est
monde du travail) qui vont nécessiter des adaptations sur pas innée et demande à être entraînée et accompagnée.
plusieurs plans : nouveaux environnements et parfois lieux D’autre part, toutes et tous ne se retrouvent pas sur un pied

COMPRENDRE
de vie, nouvelles règles de fonctionnement, pairs provenant d’égalité face à ce choix. Des facteurs socio-économiques,
de plusieurs horizons, nouveaux enseignant·e·s, nouvelles une faible présence de soutien social, de mauvais résul-
routines, etc. Ces adaptations peuvent être d’importantes tats scolaires mais aussi les inégalités de traitement face à
sources d’inquiétude et de stress. l’embauche vont largement l’influencer et rendre parfois
difficile de trouver un cursus de formation qui corresponde
Le choix de formation et les premières à leurs aspirations, avec le risque de sortie du système de
expériences professionnelles formation. Le sentiment de ne pas être compétent·e dans un
domaine tellement valorisé par notre société (performance
Entre 16 et 25 ans, la question de l’avenir professionnel et scolaire) risque de se renforcer et d’influencer durablement
la nécessité de faire des choix prennent une grande impor- la faible confiance en ses propres capacités. Ce phénomène
tance. Elles poussent à se questionner sur ses intérêts et ses d’intériorisation est très présent chez les jeunes issu·e·s
aspirations de formation ou professionnelles et à se projeter d’environnements familiaux vulnérables qui rencontrent
dans le temps alors que le cerveau peine encore à anticiper. plus souvent que les autres des problèmes d’adaptation ou
Le sentiment de compétence scolaire joue un grand rôle de discrimination en raison de leurs difficultés scolaires ou
dans la manière dont les jeunes réussissent à résoudre cette de formation. Pour faire face à ces défis, les jeunes ont besoin
tâche. Si pour la majorité cette transition est une expérience d’adultes et d’environnements qui les soutiennent dans leur
motivante, certain·e·s trouvent les exigences de la vie scolaire réflexion sur les choix qu’ils doivent faire et qui valorisent
très stressantes et se retrouvent en difficulté pour mener à l’ensemble de leurs compétences, pas seulement celles qui
bien un projet de formation. Elles·ils peuvent éprouver de sont scolaires. Les parents sont particulièrement concernés
l’anxiété ou du stress démesurés qui peuvent avoir un impact mais l’école et les services d’orientation professionnelle
important sur leur sentiment d’auto-efficacité ainsi que sur devraient aussi mettre un accent sur la préparation aux choix
l’image et l’estime d’elles·eux-mêmes. L’étude Juvenir menée tout au long du parcours de formation.
par la Fondation Jacobs en 2017 avait déjà mis en évidence
l’important stress de performance des jeunes suisses. Ces L’entrée dans un cursus de formation supérieure ou en
données sont confirmées par la récente étude publiée en 2021 apprentissage ouvre aussi sur de nombreux défis d’adap-
par Pro Juventute (www.juvenir.ch et www.projuventute.ch/ tation : nouvelles exigences de formation demandant plus
fr/etude-sur-le-stress) d’autonomie, immersion dans un monde d’adultes, nou-
velles règles de fonctionnement, nouveau réseau amical et

i
social à développer, parfois nouveau lieu de vie à apprivoiser
et premières expériences de vie quotidienne hors du foyer
En plus du stress personnel qui peut être familial. Pour nombre de jeunes, la longueur des cursus de
vécu durant cette phase, certain·e·s
lités formation et la tension entre le besoin d’indépendance et
jeunes se trouvent confronté·e·s à des inéga
auche . Une étude menée la situation de dépendance matérielle aux parents peuvent
de traitement face à l’emb
Natio nal Cente r of Comp etenc e in également peser sur leur bien-être et altérer leur motivation
en 2021 par le
rch – The Migra tion-M obilit y Nexus de l’Uni- sur le long terme. La précarité matérielle des étudiant·e·s et
Resea
s à l’emploi
versité de Neuchâtel a montré que l’accè de certain·e·s apprenti·e·s dont la rémunération ne suffit pas
ine immig rée est freiné par
des jeunes suisses d’orig à couvrir les frais quotidiens, est un autre facteur important
discriminat oire direct emen t imput able
un traitement qui influence leur santé psychique. Beaucoup d’étudiant·e·s
étran gère de leurs paren ts. Ces résult ats
à l’origi ne doivent concilier études et travail nourricier, ce qui peut
désav antag es
mettent en évidence un cumul des occasionner beaucoup de fatigue et péjorer la qualité des
sur le
pour les personnes issues de la migration apprentissages. Les faibles rétributions des emplois d’étu-
il suisse . Outre les discri mina tions
marché du trava diant·e·s et des stages (souvent obligatoires pour accéder à
auche fondé es sur la natio nalité ou le titre
à l’emb
tent les une qualification professionnelle) ainsi que les rémunérations
de séjour, des inégalités de traitement affec
·s de la migra tion parce très moindres des apprenti·e·s dans certaines branches sont
citoyen·ne·s suisses issu·e
peau de
qu’elles·ils portent le nom ou la couleur de
aussi des paramètres qui pèsent sur leur santé psychique,
surtout pour celles et ceux qui sont dans de longs cursus
de formation et/ou déjà engagé·e·s dans une vie de famille.

25
CE QUE NOUS DISENT LES JEUNES

Les étudiant·e·s des Hautes Ecoles entretenu·e·s mentionnent avoir été par-
ticulièrement touché·e·s dans leur santé psychique durant la pandémie de
Covid 19. L’enseignement à distance les a coupé·e·s de leurs pairs et de la
possibilité de se créer un nouveau réseau d’ami·e·s. Elle a aussi péjoré leur
situation économique, les éloignant des petits emplois qui leur permettaient
d’améliorer leur quotidien, voire pour certain·e·s de financer leurs études.
Elles·ils évoquent aussi le fait qu’elles·ils se sont senti·e·s mal informé·e·s et
soutenu·e·s par les établissements de formation durant cette période et très
stressé·e·s par les examens à distance.

La fin d’apprentissage ou de formation supérieure est une autre grande étape


sur le chemin de l’autonomie. Elle ouvre sur le défi de l’entrée dans le monde
du travail avec la pression du premier emploi et des démarches nécessaires aux
postulations (dossier de candidature, entretien d’embauche, etc.). Les premières
expériences professionnelles exigent d’importantes capacités d’adaptation et de
régulation du stress pour faire face à un environnement souvent très différent
de celui qu’elles·ils ont connu jusque-là (règlements, codes, horaires, tâches
et mission, responsabilités, soutien des adultes, etc.). Ces étapes de recherche
d’emploi et d’immersion dans le monde professionnel peuvent
avoir une influence importante sur le reste du parcours pro-
PAROLES DE JEUNES fessionnel. Elles nécessitent souvent du temps et peuvent
décourager certain·e·s jeunes (absence de réponse, réponse

Ma vie sera construite autour négative, discrimination à l’embauche, stress élevé face aux
nouvelles tâches, sentiment de ne pas être à la hauteur, ab-
de ma vie relationnelle, pas sence de sens, etc.), au risque de rupture d’apprentissage ou
du travail. D’abord parce que d’arrêt de travail pour raisons de santé. Si une des explications

je ne vois pas le travail comme


de ces difficultés réside dans le fait que les jeunes découvrent
les nouvelles exigences du monde professionnel et qu’elles·ils
un lieu où se faire des ami·e·s ont besoin de temps pour s’y adapter, l’organisation même

et aussi parce que je me rends du travail semble aussi jouer un rôle important. L’adaptation
aux exigences fait partie intégrante des apprentissages, mais
compte que je n’ai pas besoin les entreprises doivent aussi porter une attention particulière
de beaucoup pour vivre comme aux besoins des jeunes durant cette phase et trouver un juste
équilibre entre ce qui peut être exigé d’elles·eux et leurs besoins
je veux. d’adaptation (prise d’un nouveau rythme avec souvent une
importante fatigue, appréhension pour poser des questions
ou demander de l’aide, peur de se tromper, etc.). Cette phase est capitale pour
favoriser la motivation et l’engagement dans les nouveaux environnements et
les nouvelles tâches. La variété du travail proposé jouera un rôle important, tout
comme la possibilité de s’impliquer, de pouvoir faire entendre leurs idées, de les
tester (créativité, responsabilité) et de développer leurs compétences dans des
processus d’essais-erreurs qui leur laissent la possibilité de se tromper sans grand
risque (acceptation, pas de conséquences démesurées, etc.).

Les résultats du Job Stress Index 2022 (https:/


/friendlyworkspace·ch/
i
e-la-gestion-de-la- sante- en-entreprise/
fr/devenez-un-e-professionnel-le-d
stress-lie-au-travail/etude) montrent
que les jeunes personnes actives ont
ues plus âgé·e·s : elles
une situation plus difficile que leurs collèg
plus de contr ainte s que de resso urces et sont donc plus
connaissent
étenc e semble aussi inférieur
exposées au stress. Leur sentiment de comp
tenda nce à s’auto -évaluer plus
à celui des plus âgées. Elles·ils ont
des comp étenc es de copin g plus faibles (capacité
négativement et à avoir
à faire face aux difficultés).

26
Un autre aspect auquel nombre de jeunes sont aujourd’hui
sensibles concerne l’équilibre entre vie privée et profession- CE QUE NOUS DISENT LES RÉFÉRENT·E·S
nelle. Leur rapport au travail est en transformation. Elles·ils D’APPRENTISSAGE
ont souvent vu leurs parents souffrir d’un important stress
pour tout concilier et aspirent à ne pas vivre la même chose. Au printemps 2023, santépsy.ch a effectué des entre-
tiens qualitatifs avec différent·e·s référent·e·s d’appren-
Le travail est de plus en plus perçu comme un moyen qui doit
tissage en Suisse romande pour récolter leurs besoins
permettre de répondre au mieux à leurs besoins que comme
en matière de soutien à la santé psychique des appren-
une finalité en soi. Il doit être porteur de sens. La signifi-
ti·e·s. Elles·ils se disent particulièrement préoccupé·e·s
cation qui lui est donnée semble donc être tout autant liée par l’absentéisme, la démotivation, le stress et les états
à ce qu’il permet qu’au sens de ce qu’il produit. Les jeunes émotionnels fluctuants des apprenti·e·s. Elles·ils men-
voient de moins en moins le travail comme le centre de leur tionnent leur besoin de développer des connaissances
vie. Elles·ils sont d’accord de travailler mais pas à n’importe sur la santé psychique et sur les enjeux de cette tranche
quel prix. Beaucoup d’entre elles·eux souhaitent aménager d’âge pour diminuer l’« écart générationnel ». Elles·ils
leurs pourcentages et horaires de travail de sorte à pouvoir souhaitent aussi renforcer leurs compétences pour

COMPRENDRE
réaliser le plus pleinement possible leurs aspirations dans leur communiquer plus facilement avec leurs apprenti·e·s
vie privée et sociale. Elles·ils sont de plus en plus sensibles et développer une relation de confiance et des postures
perçues comme soutenantes par ces dernier·ère·s.
à la flexibilité des horaires et à la possibilité de télétravail.
Elles·ils accordent une plus grande importance que les gé-
Pour les référent·e·s d’apprentissage interrogé·e·s, un·e
nérations précédentes au bien-être au travail et aux valeurs
apprenti·e en bonne santé psychique… :
humaines et écologiques de l’entreprise. Lorsqu’elles·ils ne
se sentent pas en accord avec certaines valeurs ou que les • vient travailler avec le sourire et évite l’absentéisme ;
exigences de l’entreprise sont incompatibles avec leur projet
de vie personnelle, elles·ils hésitent beaucoup moins que les
• a du plaisir dans son travail ;

générations précédentes à la quitter. • a une bonne attitude globale : arrive à l’heure, a un


bon contact avec ses collègues, pose des questions,
ose s’exprimer quand il y a des problèmes ;
Il est donc nécessaire de s’intéresser aux raisons qui poussent
les jeunes à interrompre une formation, à quitter un emploi • arrive à faire la part des choses entre ses émotions
et le travail et est en mesure de gérer ses émotions
ou à retirer une postulation ; il est tout aussi nécessaire de
dans le cadre professionnel pour qu’elles ne l’em-
mettre un accent à agir sur la question de leur bien-être et de pêchent pas de travailler ;
leur motivation en entreprise. Dans ce domaine, la manière
de les accueillir, de prendre en considération leurs besoins • peut exécuter les tâches sans angoisse ;

dans l’organisation du travail ainsi que la qualité du soutien • prend des initiatives et des responsabilités ;
social vont jouer un rôle central.
• est intégré·e dans l’équipe ;

i • se sent soutenu·e et dispose d’un endroit où déposer


ses demandes.
Le chiffre des résiliations anticipées des
apprentissages n’a jamais été aussi
haut en Suisse. Près du quart des contrats
d’apprentissages signés en 2017 (59’349)
.
se sont soldés par une résiliation (OFS 2023) POUR ALLER PLUS LOIN
Dans certa ins canto ns comm e à Genè ve,
le taux est encore plus élevé (38%). https://friendlyworkspace.ch/system/files/
documents/2023-05/Faktenblatt_80a_psyGe_
Lernende_Studienresultate_fr_web.pdf

Le passage dans le monde du travail et les premières expé- https://friendlyworkspace.ch/system/files/


riences professionnelles sont des étapes importantes pour la documents/2023-05/Faktenblatt_80b_psyGe_
santé psychique des jeunes. Elles nécessitent de nombreuses Lernende_Handlungsanweisungen_fr_web_0.pdf
compétences personnelles et sociales tant de la part des jeunes Label « Friendlyworkspace »
que des adultes qui les côtoient et demandent une attention https://friendlyworkspace.ch/fr/bgm-services/
particulière de la part de l’entourage et des entreprises. Un apprentice
accent important doit être mis sur la formation des parents
et des référent·e·s d’apprentissage ainsi que sur le renfor- Promotion Santé Suisse. 2021. Jeunes personnes
cement de la compétence des entreprises à accompagner les actives, condition de travail et santé, document de
défis psychologiques liés à cette tranche d’âge. travail https://promotionsante.ch/node/941

Promotion Santé Suisse. 2023. Feuilles d’informa-


tion 80 a et b. Gestion des apprenti-e-s soumis-es à
des contraintes psychiques dans l’entreprise.

27
CE QUE NOUS DISENT LES JEUNES

« Le système de valeur dans lequel vous voulez qu’on entre déconne. Il reproduit tellement de choses qui ne vont pas et
broie les gens. Le système actuel veut seulement nous préparer à y rentrer pour devenir des travailleurs qui le servent,
pas des humains. Moi je suis préoccupée par ça toute la journée et je ne sais pas comment faire pour trouver ma place en
gardant mes valeurs. C’est pareil pour quasi toutes mes amies.
On se voit pas passer des entretiens d’embauche où on doit raconter ce qu’ils veulent entendre pour leur plaire, ça c’est
au-dessus de nos forces, ça appartient au monde d’avant, au vieux système. »

La qualification professionnelle et les démarches pour entrer dans le monde du travail semblent être de grands fac-
teurs de stress pour les jeunes. Dans ces domaines, la question du sens est au cœur de leurs préoccupations. Sans cela
elles·ils peuvent faire preuve de peu de persévérance et peiner à s’investir. Elles·ils ont moins peur que les générations
précédentes des interruptions dans leur parcours professionnel et hésitent moins à quitter une place de travail qui ne leur
convient pas. Elles·ils évoquent une tension importante entre ce qu’exige le système qualifié de « vieux » ou « du monde
d’avant » par certain·e·s (parcours « école-études/formation-travail » compétition, performance, croissance, profit, etc.)
et la réalité du monde dans lequel elles·ils vivent : globalisation, incertitude, multiplicité des crises, urgence écologique,
besoin d’innovation et de modes de faire qui ne répètent pas ce qui nous a menés à cette situation, etc.. Pour certain·e·s
cette tension entre « deux mondes » est difficile à supporter, occasionnant de l’angoisse et une sorte de tétanisation pour
passer à l’action.

La sphère de la vision du monde L’autonomie

La vision du monde est à mettre en lien avec le système de Le processus d’autonomisation est un processus graduel par
valeurs et les principes éthiques qui soutiennent le mode de lequel les jeunes cherchent à devenir plus indépendant·e·s
vie, permettent de trouver du sens et de faire des choix qui et à prendre en charge leur propre vie. Pour les 16-25 ans,
favorisent l’épanouissement sur le plan personnel et social. l’autonomie se traduit souvent par une plus grande liberté
Elle va influencer le processus d’autonomisation. Entre 16 dans leur vie quotidienne, une plus grande capacité à prendre
et 25 ans, le développement de cette sphère est particuliè- des décisions importantes en matière de relations, de choix
rement riche. C’est l’âge des questionnements sur le monde de santé ou de style de vie et à gérer leur vie en fonction de
et son sens ainsi que de la réflexion sur la place qu’on ai- leurs propres valeurs et objectifs. Elle se traduit aussi par la
merait y prendre. C’est aussi le temps des échanges sur les capacité à vivre seul·e, à travailler, à payer leurs factures et
grands thèmes existentiels et sociaux qui vont contribuer à prendre des décisions financières. L’autonomie est for-
graduellement au développement d’une éthique et d’un tement influencée par des facteurs socio-économiques et
positionnement personnels ainsi qu’à l’acquisition de la contextuels, mais aussi par la vision du monde que développe
conscience citoyenne. Un enjeu de taille lié à la vision du la·le jeune, puisqu’elle lui confère la possibilité de revisiter
monde concerne la capacité à faire des choix de vie dans un les valeurs dans lesquelles elle·il a grandi et de mettre en
monde de possibilités présentées comme illimitées alors que action ses propres idées.
bien illusoires pour certain·e·s, avec l’injonction conjointe à
La notion d’autonomie revêt des sens différents en fonction
la responsabilité individuelle : « Tu peux tout choisir mais si tu
des disciplines. Les jeunes entre 16 et 25 ans vont devoir
te trompes tu en es responsable ». Dans ce développement de la
développer leur autonomie sur trois niveaux principaux :
vision du monde, le besoin d’appartenance à une communauté
sur laquelle elles·ils peuvent s’appuyer et où elles·ils peuvent
expérimenter des formes d’engagement est aussi particu- • l’autonomie comme forme d’expression de soi : c’est
l’idée d’exprimer son originalité, sa singularité, ses in-
lièrement important. Cette notion de communauté doit être
térêts, valeurs, désirs, dans ses conduites et décisions.
vue de manière élargie pour les jeunes qui développent des
« Oser être qui l’on est » ;
appartenances multiples et élastiques qui se déclinent autant
sur le net (communauté liée à des passions, comme les fans
• l’autonomie comme forme d’indépendance à autrui :
de manga, les joueur·euse·s d’échec, les gameur·euse·s de jeux c’est l’idée d’autodétermination qui exprime la capacité
particuliers, etc.) que dans leur vie sociale plus locale (clubs à trouver en soi l’origine de ses conduites, et l’idée d’au-
de sport, d’activités artistiques, engagements associatifs tosuffisance qui exprime la capacité à trouver en soi la
divers, etc.). Où qu’elle se situe, la possibilité de s’engager satisfaction des besoins ainsi que les réponses aux ques-
soutient le développement de compétences nécessaires à tions que l’on se pose ;
l’autonomie et à la prise de responsabilités. Elle permet
aussi de trouver du sens.

28
• l’autonomie comme moyen d’action pour faire évoluer Les médias numériques
les éléments d’une situation : c’est l’idée d’un pouvoir
d’agir sur sa trajectoire personnelle en disposant de « Les médias numériques repré-
sentent une ressource impor-
moyens pour influer ou élaborer de nouvelles conduites
susceptibles d’améliorer son rapport à l’environnement.
tante en matière de santé pour
Ces trois composantes vont se jouer sur trois axes principaux : les enfants, les adolescents et
l’autonomie financière (axe socio-professionnel), l’autonomie
les jeunes adultes. Ils consti-
liée au logement (axe résidentiel) et l’autonomie affective
(axe relationnel). tuent non seulement une source
d’information sur la santé, les

i
maladies et les comportements
Entre 16 et 25 ans, les jeunes connaissent
à adopter, mais aussi un canal

COMPRENDRE
une grande tension entre autonomie et
nt
pour l’éducation à la santé et
indépendance. Ces deux notions sont souve
confondues mais elles ne signifi ent pas tout à fait l’intervention dans ce domaine. »
. Une personne peut avoir les capa cités
la même chose (COUNCIL ON COMMUNICATIONS AND MEDIA, 2016).
décid er elle-m ême de l’orga nisat ion de sa
pour
moyens
vie et de ses actions sans avoir toujours les
C’est le cas de nomb re
d’agir par elle-même. Internet et les médias numériques jouent un rôle important
encore
de jeunes de cette tranche d’âge qui sont dans la manière dont les jeunes développent leur vision du
dant· e·s de leurs paren ts au nivea u financier
dépen monde. Ils sont entrés dans leurs habitudes de vie, comme
aptes à décid er
et matériel alors qu’elles·ils sont dans celle de la majeure partie de la population. Les médias
dans beau coup de doma ines.
pour elles·eux-mêmes numériques sont d’importantes sources d’information et des
vecteurs pertinents pour atteindre les jeunes. Ils leur offrent

29
de nombreuses opportunités d’apprentissage et d’expression Les prises de risque
et leur permettent de développer des compétences nécessaires
pour leur vie professionnelle comme par exemple structurer Entre 16 et 25 ans les jeunes se trouvent dans une phase
leur pensée, résoudre des problèmes ou élaborer des stratégies. exploratoire de l’existence liée à divers changements et
Parallèlement ils constituent aussi d’importantes sources incertitudes qui s’accompagne souvent d’une propension
d’influence pas toujours positives (modèles irréalistes de à prendre des risques, notamment en matière d’habitudes
modes de vie, d’image corporelle, de possibilités de se faire de santé (alimentation, sommeil, activité physique), de
de l’argent facilement, etc.) et peuvent comporter certains sexualité, d’image corporelle ou de consommation de subs-
risques. Pour les jeunes entre 16 et 25 ans qui jouissent gé- tances psychoactives dont l’offre est en constante évolution
néralement d’une plus grande liberté pour disposer de leur et facilement accessible sur internet (puff, snus, etc.). Si
argent et de leur temps, on peut citer le risque d’endettement les prises de risque font partie intégrante du processus de
lié au gaming ou aux loot boxes ou celui d’un déséquilibre du développement identitaire et de prise d’autonomie et qu’il
temps d’écran par rapport aux activités sportives ou sociales existe toutes sortes de raisons à ces expérimentations (plaisir
en présence. Si l’éducation et l’accompagnement aux médias de faire la fête, désir d’être reconnu·e par ses pairs, besoin
numériques doivent commencer dès l’enfance, ils doivent se d’explorer ses limites, etc.), elles sont aussi à mettre en lien
poursuivre auprès des 16-25 ans par des approches adaptées avec la vision du monde des jeunes. Dans la phase d’explo-
à leur réalité. Dans ce sens, il est important de reconnaître ration des différents domaines de leur vie, leurs croyances,
les aspects positifs des médias numériques pour leur déve- valeurs, idéaux peuvent influencer leurs choix et l’adoption
loppement et leur intégration dans le monde professionnel de certains comportements. Il est à noter que la plupart des
tout en leur donnant des repères pour une utilisation res- comportements à risque semblent augmenter jusqu’à l’âge
ponsable et critique ainsi que des alternatives à l’usage des de 20 ans et ont tendance à se stabiliser lorsque les individus
écrans. L’éducation numérique des jeunes de cette tranche commencent à intégrer des rôles usuels de la vie d’adulte
d’âge devrait aussi mettre un focus fort sur l’apprentissage (travail, couple, parentalité, etc.).
des outils numériques en lien avec la gestion des tâches
administratives (formulaires, impôts, paiements, etc.) qui
sont aujourd’hui essentiellement gérées en ligne. POUR ALLER PLUS LOIN

i
Addiction Suisse www.addictionsuisse.ch

GREA www.grea.ch
Le canton du Valais vient de se doter
(2023) d’une stratégie cantonale pour Le Breton D. 2014. Adolescence et conduites à risque.
nsable
une éducation à un usage numérique respo Editions Fabert.
à la fois positionné comme mesu re de santé
du Plan https://www.yapaka.be/sites/yapaka.be/files/
publique et compatible avec les objectifs
se des pistes utiles publication/pdf_web_le_breton_adolescence_
d’Etude roma nd. Elle propo
sur
tant aux professionnel·le·s qu’aux parents
et_conduites_a_risque.indd_.pdf
respo nsab iliser,
quatre axes prioritaires : dialoguer, Le Garrec S. 2012. L’entre-deux risque(s). Entre
sécuriser et saisir les oppo rtunités.
perspective préventive et réalité individuelle. Journal
ion-numerique-3146.html
www.promotionsantevalais.ch/fr/educat des socio-anthropologues de l’adolescence et la jeunesse.
numérique
« Brochure Ecran, dis-moi… ». Guide cantonal https://docplayer.fr/1345985-L-entre-deux-
respo nsab le, 2023.
pour une éducation numérique risque-s-entre-perspective-preventive-
et-realite-individuelle-sophie-le-garrec.html

Unisanté,2023. Premiers chiffres sur la consommation


des puffs chez les jeunes
POUR ALLER PLUS LOIN https://www.unisante.ch/fr/unisante/actualites/
premiers-chiffres-sur-consommation-puffs-
Etude James 2022 Zhaw. Retour sur une décennie jeunes
d’études sur la jeunesse et les médias
https://www.swisscom.ch/content/dam/assets/ Zimmermann G. Barbosa Carvalhosa M. Sznitman
about/nachhaltigkeit/james/documents/raport_ G., Van Petegem S. Baudat S., Darwiche J.,
james_2022fr.pdf Antonietti J. & Clémence A. 2017. Conduites à risque
à l’adolescence : manifestations typiques de construction
Le portail national de l’identité ? Enfance, 2, 239-261.
www.jeunesetmedias.ch https://psycnet.apa.org/record/2017-35467-005
Unisanté 2020. Adolescents, Internet et médias
numériques : les côtés positifs
www.unisante.ch/fr/formation-recherche/
recherche/publications/raisons-sante/rai-
sons-sante-317

30
1b. Qu’est-ce que « devenir adulte » ? PAROLES DE JEUNES

Des critères qui évoluent Devenir adulte c’est… :

Durant les dernières décennies le passage vers l’âge adulte a • prendre des responsabilités ;

beaucoup changé et ne se réalise plus comme autrefois selon
une séquence définie, linéaire et souvent irréversible. La l’impression d’avoir un
jeunesse se prolonge, se diversifie, explore toute une série système de valeur dans
de possibilités. Les parcours se « désynchronisent ». On y
observe des pas en avant et des pas en arrière, des départs et
lequel je m’engage ;
des retours, des périodes d’expérimentation suivies ou non
d’engagements, faisant de cette période de vie un temps de • Pouvoir trouver des solutions
transition « yoyo » avec de nombreux défis qui s’étalent dans pour moi-même sans avoir

COMPRENDRE
le temps. Il est donc bien difficile aujourd’hui de donner une
besoin de quelqu’un d’externe
définition claire du devenir adulte car :
pour me soutenir ;
• l’âge, notamment celui de la majorité, n’est plus un critère
pour définir le fait d’être adulte ; • être indépendant·e
financièrement ;
• les marqueurs de seuils habituellement utilisés par la
sociologie sont en pleine évolution et sont aujourd’hui
insuffisants comme critères de définition de l’âge adulte
• être libre de faire ce que je
(fin de formation, déménagement de chez les parents, 1er veux sans demander la
emploi permettant l’autonomie financière, entrée en rela- permission à mes parents ;

tion stable/mariage, 1er enfant). Ils ont été constamment
repoussés par les jeunes générations depuis les années savoir poser mes limites dans
1960, se chevauchent de plus en plus et correspondent
aujourd’hui bien plus à la réalité des trentenaires que
les relations ;
des 16-25 ans ;
• être là pour ma famille quand
• les parcours de vie évoluent sans cesse en fonction des ça va pas bien ;

contextes sociaux, économiques et culturels entraînant
dans leur sillage des trajectoires de vie et de formations assumer mes actions ;

diverses et peu linéaires.
avoir le permis.

i
En Suisse :
à 25 ans. 69,4%
chez leurs parents en 2018, contre 75,5%
• A 22 ans la moitié des jeunes n’habitent plus . 16.6% des femm es et 8,1% des hommes
et 24 ans n’ont pas de parte naire
des hommes et 44% des femmes entre 18 Ce chiffre passe à 54%
ménage. 7,7% des 18-24 ans sont marié·e·s.
qui ont un·e partenaire partagent le même
fr/10467789
pour les 25-35 ans. https://www.bfs.admin.ch/asset/
pour les femmes.
est de 32,5 ans pour les hommes et 30,4 ans
• En 2022, l’âge moyen au premier mariage ires-divorces.html
ues/population/mariages-partena
https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiq
les hommes.
ans pour les femmes et de 35,2 ans pour
L’’âge moyen au premier enfant est de 31.2 ite.assetdetail.27225531.ht ml
ues/population/naissances-deces/fecond
https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiq

apprenti·e·s. Dans cette tranche


de la population active, 36,2 % sont des
• En 2022 les 15-24 ans représentent 11.6% rnent plus de 25 % des cas ; en 2022
) sont en augmentat ion et conce
d’âge les contrats à durée déterminée (CDD pour les 40-54 ans). La part
7,7%. Il est de 4,4% pour les 25-35 ans (3,7%
le taux de chômage des 15-23 ans atteint
e a reculé de 17,4% en 1991 à 11,6% en 2022
des 15 à 24 ans dans la population activ tion/activite-professionnelle-temps-trava
il/age-generations-retraite-sante/
ues/travail-remunera
https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiq
jeunes-marche-travail.html

s (CSIAS, 2019).
sentent 10% de l’ensemble des bénéficiaire
• En 2019 les 18 à 25 ans à l’aide sociale repré lagen_und_studien/210218_Junge_Erwachsene_
in_der_Sozialhilfe_f.pdf
/public/pdf/grundlagen_und_positionen/grund
https://skos.ch/fileadmin/user_upload/skos_main

31
Dans ce contexte de changements structurels, l’entrée dans Une grande transition composée
l’âge adulte n’est plus marquée par un « seuil de passage » de transitions multiples et exigeantes
unique, mais par différents « seuils » qui se chevauchent et
font référence à des maturités croisées dans les différentes La grande transition entre l’enfance et l’âge adulte n’est
sphères de la vie. Le passage vers l’âge adulte se fait donc pas monolithique. Elle est elle-même composée de plu-
sous la forme d’un
un processus progressif qui s’inscrit dans le sieurs autres importantes transitions qui se traduisent par
développement de l’identité, le parcours de vie et les trajec- de nombreux changements qui se condensent sur un temps
toires scolaires, professionnelles, résidentielles et familiales. relativement court dans les différentes sphères de vie : rela-
tionnelle, familiale et de formation. Elles sont intimement

i
liées au développement de l’identité et impliquent des prises
de décisions qui vont influencer tant la qualité de vie immé-
Les notions de parcours de vie et de diate que le futur.
trajectoire de vie ont émergé dans
les années 70 des travaux du sociologue Cette transition vers l’âge adulte se compose d’importants
es
américain John Elder. Elles se sont développé
iques passages :
au croisement de plusieurs courants théor
du
des sciences sociales, comme la psychologie
développement, l’ana lyse socio logiq ue des rappo rts • de l’école obligatoire au secondaire II (formation générale
tionn els, l’ana lyse anthr opolo gique ou professionnelle), puis du secondaire II à la formation
intergénéra
encore le
des temporalités et des âges de la vie ou supérieure et/ou au monde du travail, chaque étape im-
oppe ment huma in.
modèle écologique du dével pliquant de nouvelles compétences en matière de straté-
se défin it comm e étant l’ense mble
Le parcours de vie gies d’apprentissage et d’adaptation ainsi que des choix
toires conju gales , famil iales, profe ssion-
des trajec engageants pour le futur ;
trajec-
nelles et éducationnelles d’un individu. Ces
une série d’évé nements
toires sont caractérisées par • de la dépendance aux parents à l’autonomie psychologique
court e durée qui renvo ient à
et de transitions de (émotionnelle et affective) et à l’indépendance financière
geme nt d’éta t, de statu t ou de rôle chez cet
un chan et matérielle, impliquant le fait de devoir se débrouiller
indivi duell es
individu. La complexité des trajectoires seul·e, de prendre ses propres décisions et donc la né-
selon cinq princi pes :
est généralement abordée cessité de se sentir capable et compétent·e ;
ments
temps historique et lieu ; temporalité des événe
; vies liées ; dével oppe ment tout au long
de la vie • d’un contrôle parental externe à l’auto-contrôle (locus
cité
de la vie ; intentionnalité (agentivité ou capa interne), impliquant une bonne connaissance de soi, la
à agir). capacité à réguler stress et émotions, la capacité à faire
des choix pour soi, notamment en matière de santé, de
relations et de citoyenneté, et la conscience de ses nou-
velles responsabilités ;
Les marqueurs habituels sociologiques et d’âge ne per-
mettant plus une compréhension claire de ce qui constitue • de relations de groupe à des relations personnelles de
l’âge adulte, il faut s’intéresser à la manière dont les jeunes plus en plus intimes, amicales, amoureuses et sexuelles,
elles·eux-mêmes le définissent. Les travaux qui se sont ouvrant sur l’exploration de son identité sociale et de genre
penchés sur cette question (Arnett, 2015 et 2020 ; Marcotte et et de son orientation sexuelle et affective et nécessitant
Richard, 2023) mettent en évidence que ce sont aujourd’hui de bonnes compétences psychosociales, notamment en
bien plus les engagements identitaires que des marqueurs matière de régulation émotionnelle, de communication,
sociologiques ou d’âges particuliers qui déterminent si une de négociation (savoir exprimer ses besoins et les faire
personne fonctionne ou non en adulte. respecter, exiger un préservatif, etc.) ainsi qu’une bonne
connaissance de soi et de ses besoins pour pouvoir poser
Trois principales notions se retrouvent au cœur de la défini- ses limites et écouter celles de l’autre (consentement) ;
tion de l’âge adulte par les jeunes : responsabilité, autonomie
et indépendance. Ces dernier·ère·s se considèrent comme • du statut de « mineur·e » protégé·e par de nombreuses
lois à celui de « majeur·e » qui implique responsabilité
adultes lorsqu’elles·ils :
de soi, de ses choix et de ses actes en tant que personne
et citoyen·ne ainsi que de nouvelles compétences, notam-
• acceptent la responsabilité d’elles·eux-mêmes ;
ment en matière de gestion administrative et financière ;
• prennent leurs propres décisions ;
• deviennent financièrement indépendant·e·s.

32
• de systèmes d’éducation, de soutien social et de soins Une transition importante pour la
adaptés aux besoins des mineur·e·s (prise en compte santé psychique
des enjeux de leur développement psychosocial) à des
systèmes pour adultes moins adaptés aux besoins inhé- La notion de devenir adulte porte en elle à la fois l’idée de
rents et à la réalité psychosociale des jeunes. Ce passage continuité et de changement. Elle laisse entrevoir un pro-
marque souvent la fin de soutiens ou de mesures (droits qui cessus d’évolution vers un nouvel état tout en continuant à
changent, soutien éducatif ou aide sociale qui s’arrêtent, être ce qu’on était. Devenir c’est donc être engagé·e dans un
etc.). Ce point est particulièrement important pour les processus évolutif qui va permettre le passage d’un état à un
jeunes mineur·e·s non accompagné·e·s (MNA) ou avec un autre en changeant de forme tout en conservant son essence.
parcours en foyer ou famille d’accueil (care leavers), les Comme dans tout passage, il y a une phase d’entre deux, où
jeunes atteint·e·s de maladies chroniques, en situation de on se retrouve dans une certaine instabilité, avec un pied de
handicap (physique, sensoriel ou psychique) ou en rupture chaque côté. C’est ce que vivent les jeunes en route vers l’âge
de formation. Il est aussi à risque pour les jeunes LGBTIQ adulte avec une partie de leurs besoins dans l’exploration des
et toutes celles et ceux qui se retrouvent en situation de transformations de l’adolescence et de l’identité et une autre

COMPRENDRE
vulnérabilité ou de précarisation en raison d’un soutien dans le développement de l’autonomie, la responsabilité des
parental défaillant. choix de la vie adulte et les exigences de la société.

Les transitions sont sensibles pour l’équilibre psychique,


Les différents passages qui composent la transition car elles sont bien plus que de simples changements. Elles
vers l’âge adulte ne sont pas linéaires et se réalisent engagent l’ensemble de la personne et mettent toujours en
dans un processus de va et vient entre exploration et action trois processus importants pour l’équilibre13 :
intégration. Ils influencent et sont influencés par les
trajectoires de vie : personnelle et identitaire, de for- • des processus d’apprentissage et de construction de
mation et de travail ainsi que citoyenne. Les jeunes connaissances qui permettent de développer de nouvelles
les traversent plus ou moins facilement en fonction manières de comprendre et d’agir ;
de leur situation personnelle et de leurs compé-
tences propres, mais aussi et surtout en fonction du • des dynamiques de changement identitaire,
identitaire qui sont
contexte de vie et de formation et de la qualité du liées à de nouvelles relations sociales, à des enjeux de
soutien social dont elles·ils bénéficient. Ces étapes reconnaissance et d’estime de soi ;
font partie intégrante du processus de développement
identitaire et psychosocial, sont liées aux grandes • des processus de construction de sens qui permettent
tâches de développement, mettent en jeu de nombreux à la personne de gérer les émotions liées au changement
défis psychosociaux dans toutes les sphères de leur ou à la rupture, de les situer dans un champ de valeurs
vie et se déroulent dans un important contexte de
ou de les inscrire dans un récit de soi.
restructuration cérébrale.

Le quotidien des 16-25 ans étant beaucoup moins structuré


par l’école que celui des plus jeunes, ces processus de tran-
sition se déroulent dans des contextes multiples. Ils restent
cependant fortement influencés par des repères institu-
tionnels et sociaux comme les lois, les politiques sociales,
sanitaires, de formation ou encore les normes symboliques.
Ces repères posent un cadre sociétal dans lequel les jeunes
doivent apprendre à se mouvoir et qui est aujourd’hui bien
souvent en décalage avec la temporalité du parcours de vie
et la réalité vécue par les 16-25 ans. Ce décalage contribue
considérablement aux difficultés que rencontrent certain·e·s
dans le passage à la vie adulte.

13 T. Zittoun. 2012. In Les transitions à l’école sous la direction de Pierre Curchod, Pierre-André Doudin et Louis Lafortune. Collection éducation et intervention, PUQ 2012

33
Une transition dans une société Des crises multiples qui favorisent l’anxiété
elle-même en transition Les tâches de développement et la transition vers l’âge adulte
sont indissociables du contexte dans lequel elles sont vécues.
Les jeunes actuel·le·s vivent d’importantes transformations
Or, nous connaissons aujourd’hui une situation de crise
dans un contexte sociétal lui-même en évolution rapide,
multimodale qui affecte la santé des jeunes, mais aussi celle
proposant sans cesse de nouveaux modèles et une infinité de
de l’ensemble des adultes : crise écologique, catastrophes
possibles qui les poussent à développer de nouvelles straté-
naturelles, risques accrus de pandémies, guerre en Ukraine
gies de création de soi et de liens sociaux. Parallèlement, les
et ailleurs dans le monde. Tout se précipite, s’accélère,
repères traditionnels sur lesquels sont encore basées nombre
s’entremêle, pouvant créer insécurité, climat d’angoisse,
d’institutions sociales sont en perte de vitesse et subissent de
augmentation des inégalités et difficulté à se projeter. Cette
profondes transformations. Cette rubrique met brièvement
période tend aussi à renforcer la polarisation de notre société
en évidence, et de manière non exhaustive, certaines de ces
entraînant dans son sillage une augmentation des tensions
évolutions sociétales qui doivent être prises en compte par
et des manifestations de mécontentement. Dans ce contexte,
les adultes pour réfléchir aux stratégies éducatives et aux
beaucoup de jeunes développent une vision plutôt négative
soutiens proposés.
du futur, éprouvent de l’anxiété vis-à-vis de l’écologie et ne
font plus confiance aux structures en place, aux décideurs
Une société de la vitesse
et aux politiques.
L’hyper connectivité et la globalisation du monde, mêlées à
l’individualisation de la société modifient profondément la
notion d’appartenance ainsi que le rapport à l’autorité, au
savoir et au temps. La multiplicité des possibles présentés
comme facilement accessibles tend aussi à augmenter la
frustration liée aux choix quasi permanents qu’il faut faire. Ce
sont autant de paramètres qui ont un impact sur la manière
dont les jeunes tentent de résoudre leurs défis psychoso-
ciaux. Ils influencent aussi le regard que les adultes portent
sur les jeunes ainsi que la manière dont elles·ils doivent se
positionner en tant que parents ou professionnel·le·s. Les
connaissances et compétences qui doivent être assurées
aux jeunes pour leur permettre de devenir des adultes aptes
à vivre dans le contexte actuel évoluent sans cesse, exigeant
en continu de chacun·e de nous une flexibilité mentale et
comportementale.

Une remise en question du capitalisme et


du patriarcat
Un peu partout dans le monde des jeunes remettent en ques-
tion les structures et les anciens modes de fonctionnement
basés sur le capitalisme et le patriarcat. Elles·ils sont de
plus en plus nombreux·ses à se mettre en mouvement pour
le climat, pour la paix, pour les droits humains et à affirmer
ne plus vouloir d’une société basée sur le profit et la com-
pétition et qui discrimine en raison de la couleur de peau, du
genre, du sexe ou du mode de vie. Des transformations sont
en cours dans toutes les sphères de la vie et remettent en
question des normes sociales devenues obsolètes. Cela ne se
fait pas sans difficulté. La transition vers cette société plus
juste et humaine souhaitée par de nombreux·ses jeunes se
fait par étape et l’entre-deux actuel leur pose de nombreux
défis : relation entre les genres, nouveaux modèles de vie de
couple, de parentalité, équilibre entre vie professionnelle et
vie personnelle, conflit de loyauté entre leur propre système
de valeurs et celui de leur employeur ou de leur famille, etc.

34
Entre 16 et 25 ans les jeunes vivent de nombreuses transitions dans toutes les sphères de leur vie. Cette période de vie est
porteuse de grands potentiels. C’est un âge de possibles, d’expérimentations, d’exploration de soi et du monde, qui per-
met de découvrir qui l’on est et de faire des choix pour sa vie.

C’est une période particulièrement sensible pour la santé psychique en raison des nombreux défis personnels et sociaux
rencontrés par les jeunes mais aussi parce qu’elle est un « entre-deux » qui peut engendrer un sentiment d’instabilité ou
d’insécurité ainsi que certaines difficultés à se projeter et à trouver du sens. Certain·e·s peuvent ressentir de l’appréhen-
sion face à l’inconnu et/ou une tension entre autonomie et indépendance réelle.

Les défis de cette période exigent la mobilisation de nombreuses ressources personnelles et sociales ainsi que d’impor-
tantes compétences d’adaptation, de résolution de problèmes et de régulation des émotions et du stress. Certain·e·s
jeunes peuvent avoir peur de ne pas être à la hauteur.

Aujourd’hui ces transitions se vivent dans un contexte sociétal mouvant et peu sécurisant, au sein de structures sociales

COMPRENDRE
ou de formation parfois peu adaptées aux besoins des jeunes et à leur réalité. Certain·e·s doivent faire face à des inéga-
lités de traitement et des discriminations qui entravent leur progression vers l’autonomie et l’indépendance.

Les tâches de développement identitaires et les défis psychosociaux des 16-25 ans sont nombreux. Promouvoir leur santé
psychique durant cette étape de vie va donc exiger :

• d’agir pour soutenir le développement de leurs compétences psychosociales et de leur résilience ;

• de les aider à (re) trouver de la confiance et du sens ;

• de contribuer à faire évoluer les structures sociales ainsi que les environnements de vie et de formation pour que l’éga-
lité des chances et la sécurité soient garanties à chacun·e.

POUR ALLER PLUS LOIN

Boutinet J.P. 2020. Psychologie de l’âge adulte. PUF

Centre de recherche en psychologie socio-culturelle de l’UNINE et ses travaux sur les transitions et les parcours
de vie www.unine.ch/ipe/home/recherche

Centre suisse d’expertise sur les parcours de vie. Comprendre la vulnérabilité et la résilience au cours de la vie
www.centre-lives.ch/fr/projet/mesurer-la-vulnerabilite

Charruault A. Le paradigme du parcours de vie. Point de repère. Dans Informations sociales 2020/1 (n° 201),
pages 10 à 13, Éditions Caisse nationale d’allocations familiales.

Curchod P. A. Doudin & L. Lafortune (Eds.). 2012. Les transitions à l’école. Presses de l’Université du Québec
www.puq.ca/catalogue/livres/les-transitions-ecole-1903.html

Etude suisse TREE sur la transition de l’école à l’emploi : www.tree.unibe.ch/rsultats/index_fra.html

Marcotte J., Richard M.-C. 2023. Construction de soi et appartenance dans la transition à la vie adulte.
Presses de l’Université du Québec

Sapin, M. Spini D. Widmer E. 2007. Les parcours de vie. De l’adolescence au grand âge. Presses Internationales
Polytechniques Savoir Suisse. Lausanne https://archive-ouverte.unige.ch/unige:23373

Van de Velde C. 2015. Sociologie des âges de la vie. Paris, Armand Colin

35
PROMOUVOIR

PARTIE 2

Promouvoir la
santé psychique
Promouvoir la
santé psychique

2a. Qu’est-ce que la santé psychique ?

Le concept de santé psychique est en lien avec les systèmes de pensée et l’évolu-
tion des sociétés. Il n’y a donc pas de définition unique de la santé psychique et
encore moins de la santé psychique des jeunes. Dans cette partie, nous essayons
de mettre en évidence des éléments qui permettent de mieux comprendre ce
qu’elle recouvre en nous appuyant principalement sur la définition de la santé
psychique de l’OMS et le modèle des deux continuums de Keyes (2005) qui sont
les références de base actuellement utilisées en Suisse pour la promotion de la
santé psychique. Ces éléments sont complétés par des données
tirées des dernières études en Suisse ainsi que par les apports
PAROLES DE JEUNES des expert·e·s et des jeunes qui ont contribué à ce cahier.

Déjà on se lève souriant, de


La santé psychique : une composante
bonne humeur, souvent pas trop essentielle de la santé
tard. On est créatif, on a envie
de donner sa joie aux autres. L’OMS définit la santé comme « (…) un état de complet bien-être
physique, mental et social. Elle ne consiste pas seulement en une absence
On est heureux en fait de vivre de maladie ou d’infirmité ». Cette définition a pour important
un jour. corollaire que la santé mentale est davantage qu’une seule ab-
sence de troubles ou de handicaps mentaux. Elle est « un état
de bien-être dans lequel une personne peut se réaliser, surmonter les
Ouais c’est ça, sortir de cette tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et contribuer
bulle de négativité, à penser à la vie de sa communauté. »

tout le temps à des trucs La santé psychique est indispensable pour que l’être humain
négatifs. Moi c’est beaucoup puisse, au niveau individuel et collectif, penser, ressentir,

la motivation. échanger avec les autres, gagner sa vie et profiter de l’existence.


Elle dépend de facteurs personnels (biologiques et psycholo-
giques) et aussi de facteurs structurels et sociaux (conditions
de vie, de formation, de travail, relations avec l’environnement, etc.). Elle est
influencée par les valeurs collectives dominantes et les valeurs propres à chaque
personne. La santé psychique est donc à la fois une composante essentielle de la
santé, le fondement du bien-être individuel et une base au bon fonctionnement
d’une communauté.

OMS. 2014. La santé mentale : renforcer notre action. Aide-mémoire No 220

www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mental-health-strengthening-
our-response

38
La santé psychique est liée au bien-être La santé psychique est distincte des
troubles psychiques
L’OMS (1946) met en évidence l’aspect multidimensionnel
du bien-être qui comprend : La définition de la santé psychique de l’OMS s’inscrit dans une
logique de salutogenèse, telle que l’a conceptualisée Aaron
• le bien-être physique : sensation d’être à l’aise dans Antonovsky. La santé psychique n’est pas un état fixe mais
son corps, capacité de pourvoir aux besoins physiques : un état dynamique qui peut évoluer tout au long de la vie sur
alimentation, sommeil, mouvement, etc. ; un continuum entre bien-être et maladie mentale. Elle se
construit en permanence dans la recherche d’équilibre entre
• le bien-être émotionnel et psychologique: sentiment les dimensions physiques, cognitives, psychologiques, émo-
de contentement général face à la vie, optimisme, joie de
tionnelles, spirituelles et sociales. Pour comprendre la santé
vivre, sentiment de compétence dans sa vie en général,
psychique, il est donc indispensable de faire la distinction
satisfaction de son image corporelle, acceptation de soi,
entre santé psychique et troubles psychiques. Pour les jeunes,
contrôle, autonomie, buts, relations positives, estime
le modèle des deux continuums de Keyes est particulièrement
de soi, pensées constructives, envie d’apprendre, etc. ;
pertinent. Il met en évidence que :

• le bien-être social : relations positives avec les autres,


expression des sentiments envers les autres, sentiment • la santé psychique est corrélée au bien-être émotionnel

PROMOUVOIR
ainsi qu’au fonctionnement psychique et social. Ces der-
d’être reconnu·e et aimé·e, sentiment d’appartenance,
niers sont fortement soutenus par les compétences psy-
de confiance et de sécurité dans les relations sociales,
chosociales et la présence d’environnements soutenants ;
contribution sociale et sentiment d’utilité, capacité d’ac-
tualisation, sentiment de cohérence, etc.
• sur le chemin vers l’âge adulte, les jeunes peuvent connaître
un faible niveau de bien-être émotionnel, psychique
ou social, indépendamment de la présence de troubles
psychiques. Inversement, celles et ceux qui souffrent de
troubles psychiques peuvent ressentir un niveau élevé
de bien-être.

Tableau 4. Le modèle des deux continuums de Keyes

Niveau élevé de santé psychique


Bien-être émotionnel élevé et fonctionnement psychique et social élevé

Parfaite santé
Présence de maladie
psychique Absence de maladie
psychique psychique
Nombreux/sévères Aucun/faible
symptômes de maladie symptôme de
psychique maladie psychique

Niveau faible de santé psychique


Faible bien-être émotionnel et faible fonctionnement psychique et social

Personnes ayant un bien-être psychique élevé, sans trouble psychique


Personnes ayant un bien-être psychique élevé, avec un trouble psychique pouvant être diagnostiqué Adapté de : Promotion Santé Suisse. 2022. Promotion
Personnes ayant un bien-être psychique faible, sans trouble psychique de la santé pour et avec les adolescent·e·s et les jeunes
Personnes ayant un faible bien-être psychique, avec un trouble psychique pouvant être diagnostiqué adultes. https://promotionsante.ch/node/8253 p.70

39
La santé psychique est liée à la satisfaction
des besoins POUR ALLER PLUS LOIN

Les besoins fondamentaux de l’être humain sont ceux qui Fize M.2009. Antimanuel d’adolescence Les Editions
doivent être satisfaits pour ne pas entraver le processus de vie de l’Homme
et permettre le développement de l’individu. La satisfaction
Newsletters de #MOICMOI: Newsletter #4 – Des
de ces besoins va jouer un rôle important dans le sentiment
besoins nouveaux au cœur du sentiment de bien-
de bien-être et influencer la santé psychique.
être et Newsletter #5 – Le développement neuronal

Les besoins fondamentaux ont été décrits par Abraham Maslow Santépsy.ch. #MOICMOI. Mindmatters. 2020.
(1916-1972), précurseur des approches humanistes, qui les « Promouvoir la santé psychique des adolescent·e·s à
regroupe en cinq types : les besoins vitaux ou physiologiques, l’école et dans l’espace social. Cahier de référence pour
de sécurité et de protection, d’amour et d’appartenance, d’es- les professionnel·le·s ». p.26 https://moicmoi.ch/
time de soi et de réalisation de soi. En 2002, Deci et Ryan ont wp-content/uploads/2020/11/promouvoir_la_
mis en évidence dans leur théorie de l’autodétermination trois sante_psychique_des_adolescents-annexes.pdf
besoins psychologiques essentiels à la croissance, à l’intégrité
et au bien-être de chaque être humain : le besoin d’autonomie,
de compétence et de relation à autrui (affiliation).

LES BESOINS FONDAMENTAUX DES 16-25 ANS La santé psychique a de nombreux


déterminants
La manière dont les jeunes vont faire face aux défis psy-
chosociaux rencontrés entre 16 et 25 ans est influencée La santé psychique est influencée par de nombreux facteurs
dans une grande mesure par la qualité des réponses à leurs individuels, économiques, sociaux et sociétaux. L’approche
besoins fondamentaux qui dépendra pour une part de leurs écosystémique des déterminants de la santé montre que l’en-
compétences et ressources personnelles mais surtout de vironnement dans lequel nous nous développons et évoluons
la possibilité d’évoluer dans des environnements qui les affecte tous les plans de notre vie et permet de prendre en
prennent en compte : compte les influences du milieu social sur la santé psychique.
Elle permet aussi de considérer l’influence qui existe entre les
• les besoins physiques qui évoluent en raison des multiples différents systèmes et les différents facteurs de protection.
transformations initiées par la puberté et exigées par leur
développement : alimentation, sommeil, mouvement,
éveil de la sexualité ;

• les besoins cognitifs qui vont soutenir leur soif de décou-


verte et d’innovation : explorer, apprendre, comprendre,
donner du sens ;

• les besoins neuronaux qui vont soutenir le développement


du cerveau et sa maturation : anticiper, se concentrer,
avoir conscience de soi, pouvoir se maîtriser, développer
la flexibilité mentale ;

• les besoins psychosociaux qui sont des besoins d’ordre


psychologique qui ne peuvent être comblés que par l’en-
tremise de relations. Michel Fize, sociologue français spé-
cialiste de l’adolescence, de la jeunesse et de la famille
les présente sous la forme de « sept besoins capitaux » :
confiance, sécurité, autonomie, responsabilité, espoir,
dialogue, affection et « quatre besoins complémentaires » :
reconnaissance, appartenance, intimité, présence d’adultes.

40
Tableau 5. Les déterminants de la santé mentale dans une optique écosystémique

Facteurs
individuels

Facteurs sociaux
et économiques

Facteurs
sociétaux

PROMOUVOIR
FACTEURS BIOLOGIQUES ET PROCHES ET CERCLE SOCIAL POLITIQUE SOCIALE ET
INDIVIDUELS - Famille
ÉCONOMIQUE
- Santé psychique - Soutien social - Inégalités sociales
- Facteurs génétiques - Services sociaux
- Genre SITUATION ÉCONOMIQUE - Politiques de l’emploi
- Orientation sexuelle - Statut socio-économique - Crèches et écoles
- Origine ethnique - Emploi - Autodétermination
- Revenu
FACTEURS PSYCHOLOGIQUES - Dettes
ENVIRONNEMENT ET
- Personnalité
INFRASTRUCTURES
- Niveau d’éducation
- Compétences psychosociales - Infrastructures
- Exposition à la violence et à la
FACTEURS LIÉS AU PARCOURS criminalité
DE VIE - Sécurité et confiance de quartier
- Nature
- Enfance
- Expérience négatives dans la
petite enfance CULTURE
- Statut migratoire - Stigmatisation
- Croyances culturelles

Adapté de : www.minds-ge.ch/ressources/les-determinants-de-la-sante-mentale

41
Si au niveau individuel les compétences psychosociales sont La différence entre la solastalgie et l’éco-anxiété est donc
d’importants facteurs de protection sur lesquels on peut et le rapport au temps.
doit agir, les déterminants de la santé psychique ne sont pas
qu’individuels. Les plus récentes connaissances en matière de
POUR ALLER PLUS LOIN
promotion de la santé psychique mettent en évidence que les
facteurs contextuels et structurels ont un impact majeur sur
Promotion Santé Suisse. 2022. « Promotion de
l’amélioration de la santé mentale. Ce sont précisément ceux
la santé pour et avec les adolescent·e·s et les jeunes.
sur lesquels nous avons le plus de possibilités d’agir : qualité
Résultats scientifiques et recommandations pour la
de vie dans les quartiers, infrastructures, services sociaux et
pratique ». https://promotionsante.ch/
aides sociales, politiques publiques de formation, de l’emploi,
programmes-daction-cantonaux/themes-
du logement, soutien social et politique environnementale.
et-publications
La santé en général et la santé psychique en particulier sont
aujourd’hui indissociables de la santé environnementale. Cette Promotion Santé Suisse. 2016. « La santé psychique
dernière n’apparaît pas explicitement dans les déterminants au cours de la vie ». https://promotionsante.
habituels de santé. Cependant l’apparition de notions comme ch/sites/default/files/2023-03/Rapport_006_
l’éco-anxiété ou la solastalgie rend indispensable l’intégration PSCH_2016-04_-_La_sante_psychique_au_
de cette dimension car la question de la durabilité de notre cours_de_la_vie.pdf
écosystème influence grandement notre santé psychique et
Roberge M.-C. et Déplanche F., sous la coordination
celle des générations futures.
de Sonia Côté. « Synthèse des connaissances sur
les champs d’action pertinents en promotion de la santé
mentale chez les jeunes adultes ».
Bon à savoir https://www.inspq.qc.ca/publications/2283
La solastalgie
Revue Médicale Suisse. Médecine et hygiène.
La solastalgie est un terme développé par 2022. « Santé et environnement. Vers une nouvelle
Il décrit
le philosophe australien Glenn Albrecht. approche globale ». Sous la direction de Nicolas
sse induit chez les huma ins Senn N. Gaille M. del Río Carral M. Gonzalez
le sentiment de détre
n de l’envi ronne ment . L’opp osant Holguera J. Dont l’article de Sarah Koller
par la modificatio
à la nostalgie – mélancolie ou mal du pays « Eco-anxiété et société ». Ch.13. https://www.
séparés
que ressentent les individus lorsqu’ils sont revmed.ch/livres/sante-et-environnement#tab
de leur foyer –, Albre cht défin it la solas talgie =tab-shop
nt celles
comme le sentiment de détresse qu’éprouve Keyes, C. L. M. 2005. „Mental illness and/or mental
rent face aux chan geme nts dans
et ceux qui souff health? Investigating axioms of the complete state
leur environnem ent d’orig ine. C’est « le deuil
model of health“. J Consult Clin Psychol, 73(3), 539–548.
train
d’un monde que l’on a connu » et qui est en https://doi.org/10.1037/0022-006X.73.3.539
de disparaître.

Bon à savoir
L’éco-anxiété

ent
L’éco-anxiété se définit comme un sentim
nti face à la mena ce globa le du
d’angoisse resse
changement clima tique , exace rbé par un
contrôle
sentiment d’impuissance et de manque de
Plus récem ment , ce conce pt
sur la situation.
dérant
s’est d’une certaine manière étendu, consi
ent n’est pas réserv é exclu sivem ent
que ce sentim
dont l’envi ronne ment direct est
aux personnes
de la po-
modifié ou détruit : c’est toute une partie
iale et parti culièr emen t les jeunes
pulation mond
de la prise de consc ience de
qui, dans le cadre
geme nt clima tique et de leur
l’impact du chan
vent ce
fréquent sentiment d’impuissance, éprou
remet tent en quest ion un modè le
sentiment et
les projet s qu’ils pouva ient avoir ,
de vie ainsi que
même de faire des enfan ts.
y compris l’idée

42
2b. Que savons-nous de la santé tentative de suicide (+26%). Le nombre d’appels de jeunes

psychique des 16-25 ans ? avec des pensées suicidaires au 147 a plus que doublé entre
2019 et 2022, passant de 57 à 161. (www.projuventute.ch/fr/
fondation/actualite/consultations-suicide).
Etat de santé psychique des 16-25 ans
Ces chiffres nous rappellent combien la période de transition
Si l’enquête suisse sur la santé 2022 (www.bag.admin.ch/bag/ à la vie adulte est un moment critique sur le plan de la santé
fr/home/das-bag/aktuell/news/news-03-11-2023.html) met mentale mais ne nous disent rien de ce qui cause le mal-être
en évidence que 85% des personnes de 15 ans et plus vivant ni des facteurs qui influencent la santé psychique des jeunes.
en Suisse s’estiment en bonne santé et que 83% se déclarent Des études récentes qui se sont intéressées aux facteurs de
heureuses, elle montre aussi que la détresse psychologique risque et de protection de la santé psychique ainsi que les
a augmenté depuis 2017 et que c’est la tranche d’âge des 15 éléments issus des échanges avec les jeunes qui ont contri-
à 24 ans qui est la plus touchée. D’autres études récentes bué à ce cahier nous permettent de mettre en évidence trois
mettent en évidence que la santé psychique des 16-25 a été grands facteurs d’influence sur l’état de bien-être actuel des
particulièrement touchée durant la pandémie de Covid-19 et jeunes : le stress, le vécu de violence ou de discrimination
continue à montrer des signes de vulnérabilité. On constate dans leur parcours de vie et la peur du futur.
une péjoration du bien-être psychique, surtout chez les
jeunes femmes de 18 à 30 ans, qui sont 55% à décrire leur état L’effet délétère du stress
psychique comme étant perturbé, voire pire. (www.css.ch/
L’étude sur le stress des jeunes menée par Pro Juventute (www.
fr/a-propos-de-css/portrait/medias-publications/medias/
projuventute.ch/fr/etude-sur-le-stress) met en évidence
communiques-de-presse/css-etude-sante-2022.html).
que les jeunes connaissent un niveau de stress important.
Selon les derniers chiffres publiés par l’OFS à fin 2022 (www.
En Suisse, environ 1/3 des enfants et des jeunes sont sou-
bfs.admin.ch/asset/fr/23772012), les troubles psychiques
mis à un stress élevé. Les filles sont plus stressées que les
constituent pour la première fois la première cause des hos-
garçons et cette différence augmente significativement avec
pitalisations des 10 à 24 ans (19 532 cas), devant les blessures
l’âge. L’étude montre que la présence d’un niveau élevé de
(19 243 cas) ; les consultations psychiatriques ambulatoires
stress est à la fois influencée par l’absence ou le manque
et les hospitalisations pour troubles anxieux de l’humeur
d’importants facteurs de protection et source de la diminu-

PROMOUVOIR
ou du comportement sont en augmentation, particulière-
tion de ces derniers :
ment chez les jeunes femmes de 10 à 24 ans, tout comme
les hospitalisations pour cause de lésions auto-infligées ou
• estime de soi et relations sociales : le haut niveau de
stress est corrélé avec un plus fort niveau d’anxiété et

Bon à savoir
d’insécurité, un sentiment de bien-être diminué, une
moins bonne image de soi, un sentiment d’efficacité
Si les études récentes
personnelle plus faible et des relations sociales signifi-
mettent en évidence que
cativement moins bonnes ;
l’augmentation des consultations et des
les
hospitalisations concerne principalement • participation et reconnaissance : les jeunes soumis à un
es, cela ne signifi e pas pour autan t
jeunes femm stress élevé trouvent qu’elles·ils ne peuvent pas suffi-
s homm es ne souff rent pas. En
que les jeune samment participer aux décisions à la maison, décrivent
presque
suisse, le taux de suicide des hommes est leur relation avec leurs parents comme mauvaise et disent
ieur à celui des femm es. Les travaux de
trois fois supér que leurs parents ne s’intéressent que peu à elles·eux ;
oire de Minds (https: //mind s-ge.ch /2022/05/19/
l’Observat
) mettent en
les-hommes-aussi-ont-une-sante-mentale • regard positif de l’adulte : le regard porté par les adultes
évidence que la souff rance psych ique des hommes sur les jeunes a un impact sur la perception du stress.
reste souve nt invisib le et semb le sous- évaluée en L’étude de Projuventute montre que dans le cadre sco-
raison d’une incap acité à la décel er et d’un manque laire, outre la culture de l’école, l’image que les ensei-
d’intervent ions effica ces pour la traite r. De manière gnant·e·s ont de la classe a un lien clair avec le stress des
homm es dema ndent moins souve nt de
générale, les élèves. Plus l’enseignant·e a une image négative de la
dent plus longt emps avan t de le faire
l’aide et atten classe (cela inclut des déclarations telles que « Les élèves
es. Ils prenn ent aussi moins bien soin ne font pas assez d’efforts » ou « Les élèves sont paresseux
que les femm
n social
d’eux-mêmes et apportent moins de soutie et pleurnichards »), plus les élèves de cette classe sont
les femm es. La santé ment ale des
à autrui que stressé·e·s. L’importance de la qualité du regard posé sur
encor e trop peu étudi ée, notam ment
hommes est les jeunes a aussi été évoquée par les médiateur·trice·s
des norm es masc ulines et des comp orte-
l’influence culturel·le·s qui ont participé à ce cahier. Elles·ils ont
dus d’une masc ulinit é dite « tradit ion-
ments atten mentionné que les jeunes de leurs communautés étaient
e pas,
nelle » sur leur bien-être : un garçon ne pleur encore trop souvent considéré·e·s par les enseignant·e·s
ne peut pas mont rer ses émot ions, etc. uniquement sous l’angle stéréotypé lié à leurs origines
ite-toxique-un-
(https://acsmmontreal.qc.ca/news/la-masculin et à leur parcours migratoire.
s%e2%80%89).
obstacle-a-la-sante-mentale-des-homme

43
Comme principales causes de leur stress, les 16-25 ans rencontré·e·s mentionnent :

• la pression de performance de l’école (notes et enjeux de réussite) et


d’adaptation au moment de l’entrée dans le monde du travail ;

• la difficulté à se projeter et la pression des choix dans les différentes


sphères de leur vie ;

• le faible sentiment de compétence face aux démarches administratives


liées au passage à l’âge adulte ;

• le sentiment de perte de contrôle sur les événements climatiques et mondiaux.

Les étudiant·e·s du secondaire II (maturité) et des écoles supérieures entretenu·e·s


pour ce cahier ont décrit un important mal-être et une grande démotivation dans
leurs études. Elles·ils ont mentionné ne pas vraiment savoir ce qui leur arrivait,
car elles·ils se sentaient jusque-là plutôt intéressé·e·s et bon·ne·s élèves. Ça m’est
tombé dessus, je suis tellement fatigué, j’ai plus envie d’étudier, ça ne m’intéresse plus,
je me demande ce que je fais là. Ces quelques phrases prononcées
font ressortir les caractéristiques du burn-out scolaire qui
PAROLES DE JEUNES touche de plus en plus les jeunes et même les enfants. Si l’école
semble jouer un rôle important dans l’apparition du burn-out
On ne nous laisse aucun espace, des enfants et des jeunes, de multiples facteurs l’influencent,
comme par exemple la sur-occupation du temps « libre » par
ni temps pour trouver le sens. Du des activités perçues par les parents comme utiles pour l’avenir
coup on est obligé de faire un et le succès, au détriment de vrais temps de ressourcement,

burn-out et d’avoir un certificat


de rêverie, d’imagination ou de création spontanée, tellement
importants pour la régénération du corps et de l’esprit. Dans sa
médical pour qu’on puisse s’ar- campagne 2017 Pro Juventute a mis en évidence que près de 90%

rêter et être entendu. des jeunes qui se disent sous pression se plaignent également
de n’avoir pas assez de temps libre. Elles·ils semblent avoir ten-
dance à intégrer les attentes placées sur elles·eux et à se mettre
elles·eux-mêmes la pression (www.swissinfo.ch/fre/toute-l-actu-en-bref/cam-
pagne-de-pro-juventute-contre-la-pression-mise-sur-les-enfants/43594194).

Cette thématique doit être prise au sérieux tant par les parents que par les éta-
blissements de formation. Elle engage une réflexion de fond et à long terme sur
les modèles éducatifs et les systèmes scolaires et de formation. Un premier pas
consiste à la reconnaître et à lui laisser des espaces d’expression. L’Université de
Fribourg vient par exemple dans ce sens de mettre sur pied (2023) des groupes
de parole pour les étudiant·e·s sur le thème de l’épuisement scolaire et du burn-
out (www.unifr.ch/alma-georges/articles/2023/gare-a-lepuisement-scolaire).

44
Bon à savoir
ensionnel :
Le burn-out scolaire (stress scolaire chronique) chez les adolescent·e·s est tridim
chronique face
ologique et émotionnel qui tend à devenir
• un épuisement physique, psych
aux exigences de leur formation ;
traduit par une attitude distante, désinvolte,
envers tout ce qui touche à l’école et qui se
• une sorte de cynis me
perte d’intérêt et une démotivation génér
ale pour le travail scolaire,
parfois critique et provocatrice due à une
leur travail en classe ;
et un manque de sens à leur présence et/ou
é, de non-performance et de manque
tant qu’élève, une sensation d’inefficacit
• un sentiment d’inadéquationd en général.
d’accomplissement à l’égar de l’école en
ire, soutien social et burnout
Antonietti J.-P. et Stephan P. 2015. Stress scola
Meylan N., Doudin P.-A. Curchod-Ruedi D. ndle.net/20.500.12162/2194
tion et francophonie, 43(2), 135-153. http:// hdl.ha
à l’adolescence: quelles relations? Éduca

POUR ALLER PLUS LOIN

Des informations actuelles sur le stress et le « test du mille pattes » pour évaluer son stress.
https://apprivoisersonstress.ca/outils/autoevaluation-de-son-niveau-de-stress

Le centre d’études sur le stress de Sonia Lupien. www.stresshumain.ca

Le vécu de violence ou de discrimination • des humiliations verbales (25,2%) ;

PROMOUVOIR
• un vécu de discriminations (12,9% dont 48,7% en raison
PAROLES DE JEUNES de leur orientation sexuelle, 38,9% de leur ethnie, 22,5%
de leur lieu de naissance, 19,3% de leur religion et 9,6%
Moi c’est de mes 10 ans à d’un handicap).

jusqu’à maintenant. C’est des


traumatismes qui viennent Un résultat de cette étude est particulièrement interrogeant :
29,1% ont déclaré ne parler à personne de leurs problèmes
qui partent, qui reviennent, qui et seulement 3% ont recours à des professionnel·le·s de la
repartent, donc moi c’est santé ou de l’éducation.

aussi des vagues, mais ça reste Ces résultats mettent en évidence deux axes prioritaires pour
constant depuis que j’ai 10 ans. la promotion de la santé psychique des jeunes :

• la nécessité de développer des cadres de vie et de forma-


L’étude Santé mentale des jeunes. Étude sur la situation en Suisse tion protecteurs qui ne discriminent pas et qui assurent
et au Liechtenstein menée en 2021 par Unisanté auprès de la reconnaissance et la sécurité de toutes et tous ;
jeunes de 14 à 19 sur mandat de l’UNICEF (www·unicef·ch/fr/
notre-travail/suisse-liechtenstein/sante-mentale) montre • l’urgence de renforcer le soutien social par des actions, des
que 37% des jeunes interrogé·e·s signalent des problèmes de professionnel·le·s et des offres de prestations qui soient
santé mentale avec un sentiment de bien-être émotionnel et perçues comme soutenantes et pertinentes par les jeunes
une estime de soi faibles. 69% d’entre elles·eux ont déclaré et qui soient simples et facilement accessibles.
avoir fait une mauvaise expérience dans l’enfance. Ce chiffre
passe à 89% parmi les jeunes qui présentent des symptômes
de trouble de l’anxiété et/ou de dépression. Parmi ces der-
nier·ère·s, 17% ont tenté de se suicider, dont 48% à plusieurs
reprises. Les principales mauvaises expériences concernent :

• du harcèlement ou de l’intimidation à l’école (44%) ;


• le fait de se sentir sans défense, mal aimé·e·s ou non
soutenu·e·s (28,4%) ;

45
La peur du futur
L’éco-anxiété et la solastalgie (cf.
cf. p. 42)
42 semblent particulièrement affecter les
jeunes. Une étude menée dans 10 pays auprès des 16-25 ans et publiée en 2021 dans
le journal scientifique The Lancet Planetary Health, met en évidence qu’elles·ils
sont préoccupé·e·s (89%) par le changement climatique, dont 59% de manière très
importante. Elles·ils sont plus de 50% à se sentir tristes, anxieux·euses, en colère,
impuissant·e·s, désemparé·e·s et coupables et plus de 45% disent que les pensées
et sentiments en lien avec le changement climatique affectent négativement
leur vie quotidienne et leur fonctionnement. Elles·ils se sentent trahi·e·s et non
réconforté·e·s par les réponses des gouvernements qu’elles·ils
évaluent plutôt négativement. L’étude montre que l’anxiété et
la détresse sont significativement corrélées à la perception des PAROLES DE JEUNES
réponses inadéquates et aux sentiments de trahison qui y sont
associé (www.thelancet.com/journals/lanplh/article/PIIS2542- Ben oui, des séries comme
5196(21)00278-3/fulltext).
« Alice in wonderland » ou « The
Ces facteurs de stress psychologique menacent la santé et le last of us » ça reflète bien nos
bien-être de plusieurs façons. Il est donc urgent de les prendre
anxiétés. On est forcé d’être dans
en compte dans la santé psychique des jeunes et de thématiser
aussi la question écologique sous l’angle de la tristesse (liée à la le moment présent, de chercher
perte) et de l’anxiété
anxiété (liée aux projections négatives et à l’in- du sens dans le moment présent
certitude) pour les aider à accueillir ces émotions et à trouver
des stratégies pour faire face à leur impact négatif dans leur
du fait qu’il n’y en a plus. Moi
quotidien. j’essaie d’être dans le moment
présent en prenant soin des
autres.

Bon à savoir
évidence l’importance du cortex cingulaire
Les recherches en neurosciences ont mis en processus
lien avec l’amygdale neuronale dans les
antérieur dans la recherche de sens et son s, le cortex cingulaire
au où se rejoig nent les deux hémis phère
de stress. Situé dans le sillon médian du cerve l’habituel (ce à quoi
à chaque fois que quelque chose sort de
fonctionne comme une sonnette d’alarme moyen de notre vision
nons pas à interpréter les événements au
on peut s’attendre) ou lorsque nous ne parve ions de l’amygdale
. Son activation déclenche en chaîne les réact
du monde (impossibilité de donner du sens) xte sociétal actuel où les repères
cortisol et la noradrénaline. Dans le conte
et la sécrétion des hormones du stress : le er du sens aux
les traditionnels ne permettent plus de donn
sont en constant mouvement et où les modè isant des situations d’anxiété,
en état d’alerte quasi permanente, favor
événements, notre cortex cingulaire serait bilisation, perte de motivation,
le sens de notre vie avec le danger de démo
de mal-être, d’interrogation profonde sur er avec des stratégies de
er notre cortex cingulaire nous devons renou
dépression et conflits internes. Pour calm l’alignement entre ce que nous
en contexte de « sécurité », par exemple :
régulation que nous avons moins mobilisées gement dans une vie
et ce que nous faisons dans notre vie, l’enga
ressentons profondément au fond de nous rs fondamentales, une
des gens avec qui nous partageons des valeu
collective qui permet de créer des liens avec place de choix à la
t les grandes questions existentielles et une
vision de l’avenir cohérente qui fait sens devan
ment en lien avec la nature.
spiritualité et à l’état d’émerveillement, notam
t Laffont.
Sébastien Bohler. 2020. Où est le sens ? Rober
forme le cerveau.
Planète santé. 2020. La spiritualité trans piritualite-transforme-le-cerveau
et-cerveau/Mecanismes-du-cerveau/La-s
www.planetesante.ch/Magazine/Psycho-

46
Les comportements des jeunes, comportements sur les médias sociaux ; les comportements à risque
des indicateurs de leur santé psychique (consommation de substances psychoactives, comportements
sexuels à risque) ; les comportements suicidaires et les actes au-
La prise en compte d’informations issues d’études menées todestructeurs ; les vécus de discrimination, de harcèlement et de
dans des domaines clés pour le développement des ado- violence (aussi sexuelle) et le stress de performance.
lescent·e·s et des jeunes adultes s’avère aussi nécessaire
pour avoir une vision plus complète de leur état de santé Ci-après quelques liens sur des études ou publications ré-
psychique. Les données concernant les domaines suivants centes qui donnent des éléments scientifiques sur la santé
sont particulièrement importantes à considérer : la sexualité psychique et sur les différents domaines d’importance qui
et la santé sexuelle ; la vie affective et relationnelle ; l’image de soi, l’influencent dans la vie d’un·e jeune.
dont l’image corporelle ; l’alimentation et le mouvement ; les

POUR ALLER PLUS LOIN

Promotion Santé Suisse. 2016. La santé psychique au cours de la vie. https://promotionsante.ch/node/1311

Promotion Santé Suisse. 2023. « Promotion de la santé avec et pour les adolescent·e·s et les jeunes. Résultats
scientifiques et recommandations pour la pratique. Données scientifiques sur les comportements de santé des
adolescent·e·s et des jeunes ainsi que recommandations.
https://promotionsante.ch/node/8253

Rapport national sur la santé 2020. La santé en Suisse-Enfants, adolescents et jeunes adultes.
www.gesundheitsbericht.ch/fr

Santépsy.ch. #MOICMOI. Mindmatters. 2020. Annexe 4 « Ce que nous disent les études » dans Promouvoir la santé
psychique des adolescent·e·s à l’école et dans l’espace social. Cahier de référence pour les professionnel·le·s.
https://moicmoi·ch/promouvoir_la_sante_psychique_des_adolescents-annexes

Série d’études Juvenir sur la jeunesse de la Fondation Jacobs. www.juvenir.ch

PROMOUVOIR
Unisanté. Groupe de recherche sur la santé des adolescent·e·s (GRSA). Répertoire des recherches.
www.lesados.ch

Ce que nous disent les jeunes sur la santé psychique

PAROLES DE JEUNES

Même si les autres sont dans des situations similaires et qu’on peut
compter sur nos parents, on est quand même très seul·e avec nos
préoccupations parce qu’on n’est plus des enfants et qu’on devrait
se débrouiller.

Y a des trucs que t’apprends pas. Par exemple, moi j’en sais plus sur la
vie de Louis XIV que je sais payer mes factures, c’est un truc de fou !
Non mais vraiment, j’en sais plus sur un mec qui a vécu il y a 400 ans que…

47
Les jeunes qui ont contribué à ce cahier sont conscient·e·s Ce que nous a appris la crise sanitaire
qu’une bonne santé mentale est nécessaire à leur équilibre. du Covid 19
Si la plupart d’entre elles·eux disent avoir expérimenté des
périodes de remise en question, voire de « dépression », La tentation d’expliquer les difficultés psychiques des jeunes
elles·ils mentionnent aussi que lorsqu’elles·ils réussissent à par la pandémie peut être grande. Mais ne nous y trompons
traverser ces expériences elles·ils découvrent des forces qui pas. La plupart des difficultés des jeunes ne sont pas appa-
leur sont utiles dans leur vie. Elles·ils citent par exemple : rues avec la crise sanitaire. Elles étaient déjà bien présentes
l’amour, l’acceptation, une certaine joie, le partage sans auparavant et ont été renforcées par les mesures sanitaires
jugement, la liberté d’expression, la compréhension et la qui les ont privé·e·s d’importantes ressources qui leur per-
bienveillance. mettaient de mieux y faire face : la sécurité au niveau de leurs
besoins fondamentaux, la présence de pairs avec qui partager
Du côté des éléments qui ont un impact négatif sur leur et vivre des expériences, la possibilité de se ressourcer dans
sentiment de bien-être et leur santé psychique elles·ils des activités de loisir, la possibilité de se former dans des
mentionnent : contextes stables, la possibilité de pouvoir se projeter et de
développer des projets en faisant confiance à l’avenir - le sien
• le stress de performance et la pression scolaire qu’elles·ils et celui de la planète -, la possibilité de trouver du sens à sa
ressentent comme permanents. Elles·ils sont nombreux·ses
vie, de participer et d’être impliqué·e·s dans les décisions qui
à dire que l’école a eu un effet négatif sur leur estime
les concernent. Si la pandémie a mis en évidence la fragilité
d’elles·eux-mêmes et à s’être senti·e·s rejeté·e·s par l’école
de la santé psychique des 16-25 ans, elle a surtout montré à
et la société (le « système »), surtout lorsque elles·ils ne
quel point elle est dépendante de facteurs externes indispen-
correspondaient pas aux attentes de réussite ;
sables à leur développement et sur lesquels nous pouvons
agir. Elle a aussi rendu visible la résilience des jeunes et les
• un sentiment d’inutilité et de dévalorisation de soi insuffisances des offres adaptées à cette tranche d’âge en
qu’elles·ils mettent souvent en lien avec l’importance
matière de promotion de la santé psychique, de prévention
accordée aux résultats scolaires par rapport à d’autres de
et de prestations de soutien et de prise en charge.
leurs compétences qui ne sont pas valorisées (pas bon à
l’école=tu ne vaux rien) ;

• un sentiment d’impuissance qu’elles·ils éprouvent dans POUR ALLER PLUS LOIN


beaucoup de domaines de leur vie : envers les adultes,
l’école, les figures d’autorité (parents, enseignant·e·s, Barrense-Dias, Y. Urben, S. Chok, L. Schechter, D.
police, services sociaux, etc.), la situation écologique et Suris JC. 2021. Exploration du vécu de la pandémie
la société en général ; et du confinement dus à la COVID-19 des adolescent·es
et des parents. Lausanne, Unisanté – Centre
• l’impression de ne pas être écouté·e·s, entendu·e·s et universitaire de médecine générale et santé
compris·e·s par les adultes. Elles·ils disent éprouver une
publique. (Raisons de santé 320).
certaine « méfiance » envers eux et perçoivent souvent
le soutien proposé par les adultes comme imposé sans Chok, L., Suris, J. C., & Barrense-Dias, Y. 2023.
tenir compte de leur consentement et sans un réel intérêt Adolescents’ mental health and emotional problems:
pour leur situation et leurs besoins, notamment dans le a qualitative study in Switzerland. Qualitative
cadre des aides liées à l’école (psychologues scolaires) ; Research Journal, 23(2), 181-190.
https://lesados.ch/publications/articles
• les paroles et les attitudes dévalorisantes des adultes
qui souvent ne cherchent pas à les comprendre et les
jugent sans connaitre leur situation ;

• les difficultés et les préoccupations qu’elles·ils ren-


contrent en lien avec les questions de genre dans leurs
relations, dans l’espace public dans la société en général
(oppressant, réducteur, non-reconnaissance des femmes,
inégalités, effets négatifs de l’éducation genrée et difficulté
à trouver des repères pour les comportements et pour
être qui on est, tant pour les filles que pour les garçons) ;

• l’important sentiment de solitude qu’elles·ils éprouvent


dans cette période de vie.

48
2c. Promouvoir la santé psychique des Être en bonne santé psychique quand on a entre 16 et 25 ans

jeunes c’est donc trouver un équilibre biopsychosocial : satisfaction


de ses besoins fondamentaux ; connaissance et compréhension
de ce qui se passe au niveau de son développement physique,
psychologique et neuronal, sentiment d’être aimé·e et de
PAROLES D’EXPERT·E·S pouvoir aimer, possibilité de se sentir accepté·e dans un
groupe, développement d’une image de soi positive, pos-

Être en bonne santé psychique sibilité d’entraîner ses compétences psychosociales, possi-
bilité de se former, et de s’intégrer dans le monde du travail
pour les 16-25 ans c’est… : pour pouvoir être indépendant·e matériellement, capacité à


répondre aux exigences administratives et économiques du
avoir le droit d’être qui l’on est monde adulte, possibilité de trouver du sens à ses projets et
(acceptation) ; au monde dans lequel on vit, etc..

• se sentir bien dans son identité Cet équilibre est indissociable du parcours de vie et des tra-
de genre et son orientation jectoires qui le composent :

sexuelle et soutenu·e par des


• trajectoire personnelle vers l’autonomie : qualité des
ami·e·s, la famille et les adultes expériences d’attachement, expériences relationnelles,
présent·e·s dans les contextes amicales, amoureuses, parentalité, affirmation de son
de vie et de formation ; identité de genre et qualité de l’accueil par l’entourage,


présence ou absence de vécu de violence ou d’abus, etc. ;
oser rechercher la nouveauté et
prendre des risques pour découvrir • trajectoire de formation : présence de terrains d’expé-
rimentation, réussite ou difficultés scolaires ou d’ap-
le monde ; prentissage, possibilité de choisir son orientation profes-

• être capable de faire des projets


sionnelle, décrochage scolaire, insertion dans le monde
professionnel, etc. ;
et de les concrétiser dans les

PROMOUVOIR
différentes sphères de sa vie ; • trajectoire citoyenne : identité sociale, compréhension

et choix des rôles sociaux, capacité à s’engager, à faire
ne pas être isolé·e, avoir au moins valoir ses droits et à respecter ceux des autres, etc.
un·e ami·e ou une personne
significative sur qui pouvoir Il est indissociable aussi de la qualité des contextes de vie

compter ; et de formation et des politiques publiques en matière de


jeunesse, d’éducation, de logement, de soutien social, de
• pouvoir développer des santé et d’environnement: possibilité de vivre, de se déve-

relations affectives, d’amitié, lopper et de se former dans des environnements propices,


sûrs et non-discriminants qui laissent le temps de faire des
sexuelles avec ses pairs ; expériences, de trouver ses marques ; existence d’aide et de

• sentir que l’on est important·e soutien facilement accessibles, politiques qui prennent en
compte les difficultés liées à la transition, etc..
pour le groupe auquel on
appartient et qu’il est important Pour les jeunes de 16 à 25 ans, la santé psychique est in-
pour soi ; timement liée à la possibilité de réussir la transition vers


l’âge adulte et de développer et maintenir son identité. Une
pouvoir développer son autonomie, transition dépend à la fois des caractéristiques personnelles,
son esprit critique et avoir la des ressources adaptatives et de la qualité des contextes. Si

possibilité d’entraîner ses com- pour toutes et tous il s’agit d’un défi qui demande beaucoup
d’énergie, certain·e·s jeunes sont plus à risque de vivre des
pétences psychosociales. difficultés, soit parce qu’elles·ils ont moins accès aux res-
sources, notamment au soutien social, soit parce qu’elles·ils
disposent de moins de compétences psychosociales, ce qui
La santé psychique d’un·e jeune dépend à la fois de sa capacité péjore leurs capacités d’adaptation.
à relever les défis de son environnement socioculturel de
manière efficace (notamment la formation et les enjeux de Pour les 16-25 ans la promotion de la santé doit donc absolu-
la transition vers l’âge adulte dans sa société) ainsi que de sa ment mettre un accent sur l’égalité des chances et soutenir
capacité à reconnaître, développer et exprimer ses propres des mesures qui puissent faire sens et être accessibles pour
potentiels (connaissance de soi, agentivité, réalisation de soi). l’ensemble des jeunes.

49
Quelques notions clés
L’AUTO-EFFICACITÉ
i
En promotion de la santé mentale, deux questions sont
uie sur
centrales : « qu’est-ce qui soutient le bien-être et comment L’auto-efficacité est une notion qui s’app
ura.
le renforcer ? » Répondre à ces questions pour les jeunes la théorie sociale cognitive d’Albert Band
pouvo ir
de 16 à 25 ans nécessite de les envisager dans le contexte Elle désigne la conviction subjective de
exécuter efficacement les actions souha itées
élargi du développement identitaire et social et des enjeux
nnes
psychosociaux qui jalonnent leur chemin vers l’autonomie grâce à ses propres compétences. Les perso
cacit é
et l’indépendance. Cela exige une action simultanée à trois ayant acquis un certain niveau d’auto-effi
voient les tâches complexes comme des défis
niveaux :
menaces
pouvant être surmontés et non comme des
à éviter. (https://promotionsante.ch/node/1306).
• individuel : s’intéresser aux ressources et aux compé-
tences psychosociales nécessaires aux jeunes pour vivre
au mieux la transition vers l’âge adulte et à la manière de

i
les soutenir. Augmenter leur résilience et leur sentiment
d’auto-efficacité par le renforcement de leurs capacités
et compétences personnelles, sociales, professionnelles, LES COMPÉTENCES PSYCHOSOCIALES
en santé et citoyennes ; cité
Les compétences psychosociales sont la capa
nne à répon dre avec effica cité aux
d’une perso
• contextuel : interroger la qualité des environnements de e. C’est
vie, de formation, de travail ainsi que l’accessibilité des exigences et épreuves de la vie quotidienn
perso nne à main tenir un état
prestations et leur adéquation aux besoins des jeunes. l’aptitude d’une
ortement
Créer des environnements de vie, de formation où elles·ils de bien-être mental, en adaptant un comp
positi f, à l’occa sion des relati ons
puissent exercer leurs compétences, participer, s’impli- approprié et
re et son
quer, s’engager activement et développer leur sentiment entretenues avec les autres, sa propre cultu
ent. Les comp étenc es psych osoci ales
d’utilité et de sens ; environnem
impor tant à jouer dans la prom otion de
ont un rôle
le plus large , en terme s
• structurel : réinterroger la pertinence des politiques pu- la santé dans son sens
sont des
bliques qui concernent les jeunes à la lumière de l’évolution de bien-être physique, mental et social. Ce
es cogni tives, émot ionne lles et socia les
de la société et de leurs besoins (cadres structurels, lois, compétenc
t de renfo rcer le pouvo ir d’agir . L’OMS
normes, etc.) et s’engager pour leur adaptation. Renfor- qui permetten
cer le sentiment de cohérence de tous les partenaires et en définit 10 organisées en couple :
re
des jeunes elles·eux-mêmes par une compréhension, un
• savoir résoudre des problèmes - savoir prend
langage et des objectifs communs. des décisions ;
critique ;
• avoir une pensée créative – avoir une pensée

LA RÉSILIENCE
i • savoir communiquer efficacement – être habil
dans les relati ons interp erson nelles ;
e

pour
physique • avoir conscience de soi – avoir de l’empathie
La résilience est un terme qui vient de la
maté riaux les autres ;
et qui désig ne la capa cité de certa ins
ions.
initia le après un choc. En • savoir gérer son stress – savoir gérer ses émot
à reprendre leur forme
la notio n de résilie nce est issue des
psychologie OMS. 1997. Life skills education for childre
n and adolescents
Elle a
travaux de John Bolwby sur l’attachement.
Facilitate the
in schools. Introduction and Guidelines to
e par entatio n of Life Skills Programmes.
été développée depuis les années 90 en Franc Development and Implem
Organization. Genève.
l’art de navi- Programme on mental health World Health
Boris Cyrul nik qui la décrit comm e «
ne donc
guer entre les torrents ». La résilience désig
cité d’une perso nne à surmo nter les crises
la capa
de vie et à rebon dir face à l’adve rsité en
du cycle
des resso urces perso nnelle s et socia les
tirant parti
é de dé-
et en les utilisant comme une opportunit
nt. La résilie nce repré sente la mise en
veloppeme
la capa cité à se const ruire avec les autres
œuvre de
de tran-
et l’environnement. Dans ce sens, la phase
l’écol e oblig atoire et l’app rentis sage
sition entre
tion repré sente un mome nt clé pour la
ou la forma
travailler.
004/revue-medicale-
www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2
oncept-en-10-question-s
suisse-2504/resilience-a-l-adolescence-un-c

50
LE SENS DE LA COHÉRENCE
i SOUTENIR LE DÉVELOPPEMENT IDENTITAIRE ET
PSYCHOSOCIAL POUR FACILITER LA TRANSITION
VERS L’ÂGE ADULTE
cohérence
Le sens de la cohérence ou sentiment de
se qui
est une notion centrale de la salutogenè Le développement de l’identité est une tâche centrale de
par Aaron
a été développée dans les années 1970 l’adolescence et de la transition vers l’âge adulte qui a une
génér ale
Antonowsky. Il désigne une orientation influence importante sur la santé psychique (et vice versa).
e, qui
dans l’attitude face à la vie et au mond La littérature actuelle met en évidence que le développement
t, mais
se manifeste par un sentiment permanen d’une identité cohérente et claire est un puissant facteur de
de trois
dynamique, de confiance. Il se compose protection en matière de santé psychique des jeunes. Un
éléments : développement identitaire abouti est corrélé positivement
:
• la compréhension des événements de la vie avec des relations sociales positives et une présence moindre
je sais ce qui se passe ; de troubles internalisés (anxiété, dépression, p.ex.) et ex-

• la capacité à pouvoir les gérer (sense of


ternalisés (alcool, drogue, p.ex.).
manageability) : je peux le faire ;
Soutenir le développement identitaire des 16-25 ans est donc
• le sentiment qu’ils ont un sens (sense of
meaningfulness) : cela en vaut la peine.
un élément clé de la promotion de leur santé psychique.
Pour ce faire, il est important de :
www.quint-essenz.ch/fr/topics/1249

• les aider à acquérir une meilleure connaissance d’elles·eux-


mêmes et de leurs projets personnels et professionnels,

i
autrement dit les aider à passer d’une identité diffuse
confuse à une identité moratoire où l’exploration s’en-
LES COMPÉTENCES EN SANTÉ clenche puis à une identité achevée avec un engagement
es en
Les compétences en santé : par compétenc stabilisé ;
la
santé ou littératie en santé, on comprend
capacité de chaque individu à prendre au
quotidien • faire en sorte que leurs explorations soient adaptatives
ve sur et constructives plutôt qu’inadaptées et ruminatives,
des décisions qui ont une influence positi

PROMOUVOIR
ensem ble autrement dit les aider à entrer dans un processus de
sa santé. La littératie en santé est un
ettre réalisation identitaire par des actions concrètes et des
de compétences en santé qui vont perm
ation, feedbacks réguliers dans des domaines importants de
d’en prendre soin au mieux. Elle englobe la motiv
indivi du leur vie (relations, formation, travail, choix de vie, etc.) ;
les connaissances et la capacité d’un
santé, à
à trouver des informations en matière de • les aider à faire des liens entre les différents engagements
base,
les comprendre, à les évaluer et, sur cette de leur vie (études, ami·e·s, parents, relations intimes) et
veme nt
à prendre des décisions qui influent positi à les coordonner entre eux pour qu’ils deviennent consis-
sur sa santé. Ces compétences doivent être
tants entre eux et se soutiennent mutuellement.
priées
favorisées par des conditions-cadres appro
(OFSP).
-und-politik/ Un autre important levier consiste à prioriser les actions sur
www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie
sundhe itspolit ik/gesu ndheitskomp etenz.html les éléments qui ont un effet sur le développement psycho-
nationale-ge
social des jeunes,
jeunes ce qui signifie aujourd’hui :

• mettre un accent important sur la question du sens ;


Promouvoir, quels leviers ? • les outiller à vivre avec les émotions liées aux questions
existentielles et à l’incertitude de l’avenir ;

Lorsqu’elles·ils ont traversé des périodes difficiles, les • renforcer leur résilience par un travail conscient sur leurs
jeunes interrogé·e·s se sont appuyé·e·s sur … : compétences psychosociales ;

• leur propre force intérieure et le travail intime et • agir à créer des environnements sûrs et non discriminants ;
solitaire d’introspection pour réussir à s’accepter et
à accepter leur parcours et leurs parts d’ombre ; • identifier les facteurs de stress dans les contextes de for-
• les pairs qui ont vécu ou non les mêmes expériences ; mation et de travail et agir pour les diminuer ;

• des adultes qui ont fait preuve d’écoute, de bienveillance, • soutenir les compétences parentales des parents de jeunes
et qui ont eu la volonté réelle de les aider ; entre 16 et 25 ans, notamment en les formant aux enjeux
• de petits rites qu’elles·ils se sont créés pour se rassurer ; de la transition à l’âge adulte et à la manière dont elles·ils

• la spiritualité pour trouver du sens à leur vie, aux peuvent soutenir leur enfant.
souffrances, relativiser et retrouver leur propre pouvoir.

51
AGIR

PARTIE 3

Agir en accompagnant
les transitions de vie et
de formation
Agir en accompagnant
les transitions de
vie et de formation

3a. Cinq axes pour l’action

Ce que les jeunes interrogé·e·s aimeraient pour se sentir en bonne santé psy-
chique… :

• avoir le temps ! Le temps d’apprendre, de faire des expériences, de se


connaître, de faire des choix, de se reposer ;

• rencontrer des adultes, à qui elles·ils puissent faire confiance : qui vont les
considérer, les écouter sans les juger ni les dévaloriser et les accompagner
sans toujours vouloir trouver des solutions rapides à tout ;

• être soutenu·e·s dans l’apprentissage des tâches administratives et de


la gestion de l’argent : comment se débrouiller seul·e, payer une facture,
trouver un logement, faire un état des lieux, etc. ;

• être accompagné·e·s dans les choix pour le futur avec des informations
claires sur les chemins possibles pour se former et trouver du travail et
pas seulement sur la voie académique ;

• apprendre à gérer les conflits, pas seulement entre elles·eux mais aussi
ceux qu’elles·ils rencontrent dans leur vie quotidienne avec des figures
d’autorité (comment parler à l’administration, aux formateur·trice·s, à la
police etc. lorsqu’on n’est pas d’accord, quels sont nos droits ? etc.) ;

• pouvoir vivre dans des structures moins dominantes et oppressantes qui


arrêtent de catégoriser les gens de manière binaire (bon·ne/mauvais·e
élève, homme/femme, travailleur·se/flemmard·e, etc.) ;

• pouvoir vivre plus souvent des moments de partage où elles·ils sentent


qu’on s’intéresse à ce qu’elles·ils vivent, à leurs émotions sans les juger.

Aujourd’hui la santé psychique des jeunes interroge l’ensemble des adultes. Com-
ment être soutenant·e en tant que parent ou professionnel·le qui les accompagne ?
Que faire ? Où mettre les priorités ? Que devons-nous changer ? Renforcer ? Aban-
donner ? Ces questions n’ont pas de réponse unique. Les leviers d’action peuvent
différer en fonction des contextes dans lesquels nous sommes en contact avec les
jeunes (famille, organisme de formation, entreprise, loisirs, individuel, groupal,
etc.) mais une intention commune doit être au centre de toutes nos actions : celle
de les soutenir dans leur développement identitaire et de les accompagner dans
les transitions qu’elles·ils vivent.

54
• renforcer les connaissances et les compétences des adultes
Promouvoir la santé mentale des jeunes, c’est avant et des professionnel·le·s qui gravitent autour des jeunes ;
tout les accompagner à développer les connaissances
et les compétences qui leur permettront de traverser • agir au niveau structurel pour faire évoluer les politiques
au mieux les transitions - notamment les compétences publiques afin qu’elles prennent en compte la réalité psy-
psychosociales et celles en santé psychique - de stabi- chologique, économique et sociale des jeunes d’aujourd’hui
liser leur identité, de faire les choix les plus justes pour et soutiennent le décloisonnement des approches.
elles·eux-mêmes et de trouver leur place dans le monde,
tant au niveau personnel que professionnel. C’est aussi
leur proposer des contextes qui leur permettent d’en- PAROLES D’EXPERT·E·S
traîner leur autonomie, d’activer leurs potentiels et de
consolider leurs compétences. Dans le contexte sociétal
actuel, c’est aussi offrir un soutien émotionnel et social Accompagner les transitions en
de qualité, qui tienne compte de leur réalité et de leurs promotion de la santé c’est :
besoins spécifiques, notamment en lien avec la situa-
tion d’incertitude globale qui sert de toile de fond à leur
entrée dans le monde adulte. • augmenter la capacité de
contrôle des jeunes sur leur vie ;
• garantir l’accès aux ressources
Pour être soutenantes dans une optique de promotion de matérielles et sociales dans
santé psychique, nos actions doivent : leurs milieux de vie ;
• s’appuyer sur certains principes fondamentaux trans- • donner la possibilité de participer
versaux : l’égalité des chances, la non-discrimination, à la vie sociale et économique ;

la participation et le renforcement de l’auto-efficacité
(sentiment de compétence) ; protéger contre la discrimination
et la violence ;
• s’inscrire dans un modèle de développement positif des
jeunes qui pose un regard résolument confiant sur elles et
• prendre en compte les besoins des
eux, tient compte de leur réalité globale (contexte de vie
jeunes en situation particulière ;
élargi, sens qu’elles·ils donnent à leurs comportements,
préoccupations, etc.) et ne se focalise pas sur les difficultés,
• accueillir les jeunes comme
les déficits et les risques, mais sur la reconnaissance et le
elles·ils sont.
AGIR
renforcement de leurs potentiels et ressources ;

• rendre les environnements de formation et de travail Cette partie propose cinq grands axes sur lesquels mettre
accueillants, sûrs, non discriminants et conscients des l’accent pour accompagner les transitions des 16-25 ans dans
besoins des jeunes, notamment en matière de continuité, une optique de promotion de santé psychique. Dans chacun
nécessaires entre les apprentissages et les environne- d’entre eux, nous ouvrons sur des pistes d’action et des
ments de formation ; ressources plus concrètes pour activer notre pouvoir d’agir
d’adulte au quotidien et sortir du sentiment d’impuissance qui
• proposer des interventions et du soutien social indivi- peut parfois nous envahir. Les axes et les pistes pour l’action
duel adaptés aux besoins réels des jeunes et basés non ont émergé des focus groups d’expert·e·s et des entrevues
pas sur les procédures et les performances, mais sur la avec les jeunes. A chaque fois que possible, ils sont mis en
qualité relationnelle et le renforcement des compétences perspective avec des éléments théoriques.
psychosociales ;

55
Axe 1
Agir auprès et avec
les jeunes

Axe 2
Accompagner
« l’entre-deux » et les choix

Axe 3
Soutenir les compé-
tences psychosociales et
les compétences en santé

Axe 4
Activer le pouvoir
d’agir de tou·te·s les
professionnel·le·s en
contact avec des jeunes

Axe 3
Impliquer l’ensemble
des acteurs et actrices
et de la société

56
Axe 1 : Agir auprès et avec les jeunes L’intérêt pour le mode de vie des jeunes est essentiel pour
pouvoir identifier les thématiques émergentes d’importance
Les transitions sont plus que de simples changements. Elles pour elles et eux. Il est important de les écouter, d’apprendre
touchent à toutes les dimensions et à toutes les sphères de de leurs mots, de leurs attitudes, de comprendre le sens
vie et mettent en jeu des éléments fondamentaux pour la santé qu’elles·ils donnent à leurs comportements et ce qu’elles·ils
psychique : l’identité, l’apprentissage et le sens. Les travaux essaient de nous dire à travers eux. Une telle démarche sou-
qui se sont intéressés aux transitions mettent en évidence tient le développement de mesures ou d’approches basées
l’importance d’agir à la fois sur des leviers individuels et col- sur leurs besoins réels et non sur les seules perceptions qu’en
lectifs et de s’appuyer sur les ressources de l’environnement ont les adultes. Les perceptions inversées entre adultes et
qui font sens pour les jeunes et aident à trouver des repères. jeunes sont nombreuses. Nos offres de soutien sont souvent
Certains éléments semblent particulièrement pertinents : développées sur la base de ce qu’on croit leur être utile.
Elles se matérialisent trop régulièrement par des approches
• s’appuyer sur les expériences personnelles des jeunes et axées sur la prévention des risques perçus par les adultes
se souvenir des nôtres au même âge ; et ne laissent que peu de place pour aborder les thèmes
importants qui préoccupent vraiment les jeunes : comment
• mettre en place des dispositifs collectifs pour encadrer faire pour entrer en relation, tenter une première relation sexuelle,
et accompagner les changements ; pour composer avec les émotions ; comment faire un choix et savoir
s’il est bon pour moi, comment traverser l’incertitude, l’angoisse,
• favoriser dans les différents contextes de vie (familial, comment s’engager dans une formation alors que je n’ai pas d’espoir
sportif, associatif, de formation, etc.) des approches par-
pour l’avenir, etc. ? Ces questions traversent les 16-25 ans et
ticipatives et des espaces d’expression qui donnent une
doivent être prises en considération pour promouvoir leur
place importante à l’exploration des compétences, à la
santé psychique. Elles concernent leur pouvoir d’agir et les
prise de responsabilité ainsi qu’aux ressources symbo-
compétences transversales nécessaires pour répondre aux
liques qui facilitent la construction de sens (improvisation,
défis psychosociaux. Travailler avec les besoins des jeunes,
musique, culture, film, peinture, littérature, danse, toute
c’est aussi leur donner la possibilité réelle de participer
forme d’expression artistique, etc.)
aux décisions qui les concernent et les impliquer dans la
co-création des informations, ou prestations qui leur sont
Pour prendre sens pour les jeunes, ces mesures et la manière destinées. Cela nécessite d’instaurer un vrai dialogue basé
dont elles vont se décliner doivent être pensées non pour mais sur une égalité relationnelle et de prendre en compte la
avec elles·eux. Elles doivent s’appuyer sur leur réalité, prendre perception qu’elles·ils ont de leur réalité.
en compte leurs besoins et être en lien avec leur quotidien et
les défis qu’elles·ils rencontrent dans leur développement
psychosocial. S’intéresser aux jeunes et favoriser leur parti- La compréhension par les adultes du mode de vie des
cipation et leur engagement est donc essentiel pour soutenir jeunes, de leurs préoccupations, de ce qui les motive et
leur santé psychique par des actions et des mesures qui leur du sens qu’elles·ils donnent à leurs comportements est
sont utiles et surtout dont elles·ils reconnaissent le sens. un facteur important de soutien à leur santé psychique.
Elle améliore également le sentiment de compétence
S’intéresser aux jeunes des parents et des professionnel·le·s et renforce leur
pouvoir d’agir. Plus on peut faire de liens entre nos
prestations et la réalité quotidienne des jeunes, plus on
PAROLES D’EXPERT·E·S contribue à soutenir leur santé psychique.

Pour toucher les jeunes il faut


AGIR
s’intéresser à leur réalité, les
rejoindre dans leur mode de vie
et favoriser leur participation.

La promotion de la santé est en lien direct avec le quoti-


dien des jeunes. Elle vise à renforcer leurs ressources pour
qu’elles·ils puissent trouver des stratégies positives devant les
situations de leur vie qui leur posent question ou problème.
Pour soutenir leurs compétences, il s’agit donc de sortir de
nos représentations d’adultes et d’aller à leur rencontre pour
faire connaissance avec leur réalité.

57
Axe 2 : Accompagner « l’entre-deux » liés à l’incertitude, renforcer leur motivation à explorer les
et les choix possibles, à prendre des décisions, les aider à porter un regard
réflexif sur leurs expériences et à s’engager dans celles qui
La période de transition vers l’âge adulte est un « entre-deux » leur conviennent le mieux. C’est aussi leur fournir du soutien
qui peut être inconfortable, car tout ou presque est condition- pour toutes les « premières fois » qu’elles·ils rencontrent sur
nel, alors que les potentiels et les idéaux sont énormes. Un le chemin de l’autonomie, notamment sociale et citoyenne.
potentiel, c’est à la fois une capacité, dont on dispose, mais
qui n’est pas totalement activée ou réalisée, et un possible Dans les phases de transition on retrouve généralement quatre
dans le futur, mais encore soumis à des conditions et dont on étapes : une phase de « fin de quelque chose de connu », une
ne peut être certain·e. La phase de vie entre 16 et 25 ans est phase neutre d’entre-deux où la direction et les outils à activer
remplie de potentiels, dans tous les sens du terme : « entre ne sont pas clairs, une phase de renouveau et de découverte
deux » identitaire, émotionnel, relationnel, professionnel, où on se lance dans une nouvelle expérimentation et une
social où le monde des possibles est encore vaste, mais de phase d’évaluation de l’expérience pour confirmer ou non
plus en plus soumis à des contraintes. Cet « entre-deux » l’engagement. Chacune d’entre elles peut générer du stress et
questionne dans toutes les sphères de vie avec en son cœur devrait être accompagnée de manière adaptée par les adultes.
la question du choix. Accompagner la transition vers l’âge
La phase de fin du connu (p. ex. fin de l’école obligatoire) né-
adulte, c’est donc accompagner les « potentiels » et les choix.
cessite d’accueillir les émotions qui sont liées à la sépara-

Accompagner les potentiels tion (des ami·e·s, des habitudes, d’une certaine sécurité de
fonctionnement, d’une école, etc.) et d’accompagner une
Accompagner les potentiels, c’est prendre en compte la réalité éventuelle tristesse du « deuil » de ce qui a été, ainsi que la peur
« flottante » dans laquelle se trouvent les 16-25 ans dans ou l’attrait de l’inconnu. Lorsqu’il s’agit d’étapes planifiées,
la période d’« entre-deux » et mettre un accent à renforcer comme p. ex. les transitions entre les niveaux scolaires,
les compétences dont elles·ils ont besoin pour franchir les cette phase devrait être préparée et anticipée pour faciliter
étapes exploratoires entre les rives. C’est leur apprendre à le passage.
anticiper, les outiller à la régulation des émotions et du stress

58
La phase neutre « entre deux » (p. ex. le choix d’une for- La phase d’évaluation (fin du 1er trimestre ou semestre p.
mation) nécessite à la fois de permettre un « pas de recul » ex.). C’est une étape de bilan de la phase de découverte qui
pour observer la situation et ce qui s’y joue et de travailler permet de se positionner sur la qualité de l’adaptation au
l’anticipation pour diminuer le stress ou l’anxiété liés à nouvel environnement, sur son envie d’y rester, sur d’éven-
l’incertitude. Il s’agit de les aider à faire des choix en sou- tuels ajustements et, le cas échéant, sur la nécessité d’une
tenant leurs réflexions sur leurs goûts, leurs aspirations, réorientation. Dans cette phase, il est important de soutenir
en les aidant à prendre conscience des compétences développées les capacités auto-réflexives des jeunes sur leur motivation et
et des ressources activables, en les amenant à se faire une idée des objectifs, de mettre en évidence les compétences qu’elles·ils ont
options possibles, mais aussi des contraintes ou limites. C’est une développées durant l’expérience et pas seulement ce qui n’a
phase importante pour travailler les compétences qui vont pas fonctionné, de leur fournir du soutien pour une nouvelle
soutenir l’adaptabilité. Dans cette phase, le soutien à la flexi- orientation (ressources, présentation de possibilités) et de
bilité mentale est particulièrement important pour permettre les impliquer entièrement dans les nouveaux choix. Si l’adap-
de porter un autre regard sur une situation ou d’éventuels tation est concluante et que la·le jeune décide de poursuivre
facteurs de stress. La mentalisation qui soutient l’empathie son engagement, il faudra alors soutenir sur le long terme
cognitive par la compréhension que ce qui se passe en soi se sa motivation et sa capacité à persévérer. Si ce n’est pas le
passe aussi chez les autres, peut aussi les aider à comprendre cas, le processus recommence à la phase 1.
leur vécu intérieur, à relativiser et à se décentrer (voir
voir p.14).
p.14

La phase de découverte (p. ex. le début d’une nouvelle for- Les principes de ce processus de transition peuvent soutenir
mation) est une phase de familiarisation avec les nouveaux n’importe quelle transition (relation amoureuse, deuil,
fonctionnements, d’acclimatation progressive à l’environne- déménagement, changement de statut social ou légal,
ment institutionnel et social, d’élargissement de l’autonomie, etc.). Ils se retrouvent aussi dans les grandes étapes
de gestion du stress lié aux premières évaluations. Durant du développement identitaire qui nécessite le deuil de
cette phase, l’accompagnement des stratégies d’adaptation doit l’enfance, la traversée des transformations et des
incertitudes de l’adolescence, la plongée dans l’explo-
être particulièrement soigné par les nouveaux contextes
ration des possibles des jeunes adultes émergents
(établissements scolaires, de formation ou entreprises) qui
et l’engagement dans des choix de vie à l’âge adulte.
devraient par exemple :
Repérer l’étape dans laquelle se trouvent les jeunes
est donc important pour ajuster nos actions et soutiens.
• veiller au climat positif de l’établissement ;
• dégager du temps pour l’accueil et laisser un temps suffisant
pour découvrir le nouvel environnement et s’entraîner
progressivement aux nouvelles exigences ;
Accompagner les choix

• se mettre à la place des nouveaux et nouvelles arrivant·e·s, La question du choix est au centre de la vie des 16-25 ans et
se décentrer du fonctionnement habituel pour se deman- transversale à toutes les sphères de vie : choisir une forma-
der de quoi elles·ils auraient besoin pour se sentir à l’aise tion, un métier, un logement, un·e partenaire, un mode de
(ressources, soutien, etc.) ; vie, des comportements de santé, etc. Autant de situations
où les jeunes vont devoir se positionner et tenter de privi-
• mettre en place un système de mentorat avec les élèves légier ce qui fait sens pour elles·eux et favorise le mieux leur
plus âgé·e·s ; équilibre. La manière dont les jeunes s’envisagent dans le
monde va passablement influencer leurs choix. Certains
• favoriser les apprentissages par essais-erreurs ; choix de comportements ou de mode de vie peuvent avoir

• veiller à trouver un juste équilibre entre les tâches à d’importantes influences sur la qualité de vie immédiate,

AGIR
réaliser de manière indépendante (responsabilisation, mais aussi future, car c’est à cet âge que s’installent de nom-
créativité, motivation) et l’aide utile pour que les jeunes breuses habitudes. Les questions concernant le style de vie
ne se sentent pas dépassé·e·s. touchent des domaines comme l’alimentation, la pratique
d’un sport, le temps de repos et de sommeil, les activités de
loisirs, les comportements pouvant créer une dépendance
(alcool, tabac, autres substances, jeux, etc.), l’utilisation des
médias (téléphones portables, jeux en ligne, médias sociaux,
etc.), la gestion de l’argent ou encore le mode de réaction
et la posture générale face à la vie et aux événements. A cet
âge, les jeunes ont tendance à vivre encore dans l’immédiateté.
Elles·ils se sentent généralement en bonne santé et ne
voient pas les conséquences potentielles à plus long terme
de leurs choix, ni les liens entre santé physique et santé
psychique, aujourd’hui clairement documentés. Les choix,

59
surtout de formation et relationnels, peuvent aussi devenir
une source importante de préoccupations. L’engagement
nécessité par le choix peut être perçu par les jeunes comme
un renoncement à des possibles non explorés et tentants
plutôt que comme une décision de privilégier une direction
où mettre leur énergie. La satisfaction retirée d’un choix est donc
souvent amoindrie par le fait qu’il ne représente qu’une possibilité
parmi une multitude d’autres. Plus les choix à leur portée sont
nombreux (ce qui est le cas dans bien des domaines dans
notre société de consommation connectée), plus elles·ils
peuvent aussi éprouver une tension psychique déplaisante
en lien avec l’indétermination (incertitude) sur leur propres
choix (que choisir, comment ? en choisissant x je renonce à
y, j’aurais pu/dû choisir z, etc.).

L’accompagnement aux choix doit être une priorité


pour les 16-25 ans. Choisir est une importante
compétence psychosociale à soutenir pour cette tranche
d’âge. Comme toute compétence psychosociale,
elle n’est pas innée et demande à être entraînée et
conscientisée tout au long des expériences. Pour
soutenir leur santé psychique, nous devons encourager
le développement de leur esprit critique pour
qu’elles·ils puissent se positionner face aux influences
de groupe, des médias et de la société de consom-
mation en général et apprendre à évaluer les
avantages et inconvénients de leurs choix. Une bonne
manière de le faire est de s’appuyer sur la réalité
de leur quotidien et d’engager un dialogue réflexif avec
elles·eux à partir de leurs propres expériences. Nous
pouvons le faire dans tous les contextes en les aidant
à mieux se connaître, à lire une situation à la lumière
de différents critères, à ressentir l’effet des différentes
options non seulement dans leur tête (mental) mais
aussi dans leur cœur et leur corps (est-ce que ça serre,
ça ouvre, ça détend, ça contracte ?), en mettant en
évidence les compétences qu’elles·ils ont développées
dans les divers apprentissages, en les aidant à se
réjouir de leur choix, à relativiser le caractère définitif
d’un choix et à s’engager dans l’exploration de la
réalité qui s’ouvre à elles·eux avec le choix posé.

60
Axe 3 : Soutenir les compétences psychosociales et
les compétences en santé

Les compétences psychosociales


Les compétences psychosociales (CPS) sont des compétences de vie qui nous
permettent d’être auteurs·trices et acteurs·trices de notre vie. Elles se déclinent
sous la forme des habiletés et des capacités individuelles, cognitives, émotion-
nelles et sociales que nous activons pour répondre le plus efficacement possible
aux situations du quotidien et pour nous adapter à notre environnement. Elles
sont d’importants facteurs de protection pour la santé globale et tout particu-
lièrement pour la santé psychique, car elles contribuent à développer le pouvoir
d’agir, le sentiment de compétence (auto-efficacité), la confiance en soi et l’estime de soi
et soutiennent le développement de stratégies d’adaptation. Elles occupent donc une
place de choix en promotion de la santé et particulièrement de la santé psychique.

Apparues dans la littérature dans la Charte d’Ottawa en 1986, elles ont été précisées
dans les années 1990 par l’OMS qui les présente en 5 couples (p. p. 50 partie 2).
2 Si
la définition de l’OMS reste une référence en promotion de la santé, elle a évolué
parallèlement à la définition de la santé et aux apports d’autres disciplines qui
s’y sont intéressées. Santé publique France l’a actualisée en 2023 et définit les
CPS comme « un ensemble cohérent et interrelié de capacités psychologiques (cognitives,
émotionnelles et sociales), impliquant des connaissances, des processus intrapsychiques et des
comportements spécifiques, qui permettent de renforcer le pouvoir d’agir (empowerment), de
maintenir un état de bien-être psychique, de favoriser un fonctionnement individuel optimal
et de développer des interactions constructives » (www.santepubliquefrance.fr/docs/
les-competences-psychosociales-un-referentiel-pour-un-deploiement-aupres-
des-enfants-et-des-jeunes.-synthese-de-l-etat-des-connaissances-scientif).

L’importance des CPS et leur nécessité sont aujourd’hui reconnues bien au-delà
du champ de la promotion de la santé. On les voit réapparaître sous des appella-
tions diverses dans de nombreux domaines : compétences socio-émotionnelles
dans le champ de la psychologie positive, compétences transversales dans celui
de l’éducation (p. ex. dans le Plan d’Etudes romand), compétences sociales dans
le champ de l’économie. L’UNESCO les présente comme base à
l’éducation d’aujourd’hui dans ses quatre piliers de l’éducation
- L’éducation en vue des objectifs de développement durable
Une compétence est un savoir-
Objectifs d’apprentissage et Repenser l’éducation vers un bien agir complexe qui prend
commun mondial ? -, l’OCDE comme des compétences qui
stimulent le bien-être et le progrès social et qui sont incon-
appui sur la mobilisation et
tournables pour fonctionner dans le monde moderne (OCDE, la combinaison efficaces d’une
2016. Les compétences au service du progrès social: le pouvoir des variété de ressources internes
compétences socio-affectives. www.oecd.org/fr/education/les-
et externes à l’intérieur
AGIR
competences-au-service-du-progres-social-9789264256491-
fr.htm et L’importance des compétences. Nouveaux résultats de d’une famille de situations.
l’évaluation des compétences des adultes. www.oecd-ilibrary.org/
J. TARDIF
education/l-importance-des-competences_9789264259492-fr).

Il existe une infinité de compétences. Pour qu’une compétence soit qualifiée de


« psychosociale », il faut qu’elle soit mise en action et que les ressources mobili-
sées soient de trois ordres différents : social, affectif et cognitif. Les compétences
psychosociales sont donc la mise en action des ressources et des potentiels com-
binés de la personne dans des situations concrètes.

61
Tableau 5. Formalisation des CPS. Tiré de Cultures et santé, 2016. Compétences psychosociales des adultes et
promotion de la santé.

Ressources Ressources Ressources


sociales affectives cognitives
Elles concernent la relation Elles touchent aux émotions, Elles ont trait aux
avec les autres et notre capacité à notre vécu, à notre manière connaissances et aux
à communiquer propre de percevoir les choses opérations intellectuelles

• S’investir dans une collectivité • Gérer son stress ou sa colère • Argumenter sa pensée, porter un
• Ecouter activement • Avoir conscience de ses émotions regard critique
• Prendre en compte l’avis d’autrui • Prendre du recul sur son propre res- • Restituer des connaissances
• Coopérer, négocier senti • Synthétiser un texte, une discussion
• Exprimer des difficultés, des fragilités • Faire face à un traumatisme • Lire, écrire
• Gérer son anxiété • Pouvoir comparer des informations
émanant de sources différentes

1 SITUATION-PROBLÈME

MOBILISATION DES
2 RESSOURCES Ressource Ressource Ressource

DE LA PERSONNE

ce
COMBINAISON DES ur
so
3 RESSOURCES Re
s

Ressource
DE LA PERSONNE Ressource

EXERCICE DE LA
4 COMPÉTENCE
• Accompagner ses enfants dans leur scolarité
• Assurer une interview en vue d’un emploi
PSYCHOSOCIALE • S’associer avec ses voisins pour aménager son quartier
FACE À LA • Interagir avec des professionnels de santé
SITUATION • Demander de l’aide à quelqu’un

Les CPS sont de prime importance pour les jeunes, car leur • les stratégies d’adaptation et d’ajustement aux situations
présence va considérablement soutenir les apprentissages nouvelles et aux nouveaux contextes de vie et de formation ;
durant le passage à l’âge adulte, notamment ceux liés à leur
développement psychosocial : communiquer ses besoins • le développement de l’esprit critique et la compréhension
dans les relations, négocier un comportement, faire face aux de l’influence du vécu personnel mais aussi de l’éducation,
influences, prendre des décisions pour son avenir, s’adapter à des relations sociales et du contexte de vie ;
de nouveaux environnements, composer avec les émotions et
le stress, etc. Elles favorisent leur bien-être physique, mental,
• la motivation pour développer ou modifier un compor-
tement ;
relationnel et social et les aident à rester en équilibre dans
le monde complexe actuel. Il est indispensable d’y accorder • la capacité à se projeter dans un avenir en le bâtissant et
une attention forte dans les approches et les prestations que non en le subissant.
nous leur proposons, car elles sont d’importants facteurs de
protection. Elles soutiennent particulièrement :
TRAVAILLER LES COMPÉTENCES PSYCHOSOCIALES

• le développement des connexions neuronales ; Le renforcement des CPS peut se faire par différents entraîne-
ments : au quotidien à partir des situations qui se présentent,
• la prise de conscience de soi, de ses attitudes et com- dans des activités spécifiques intégrées de manière régulière
portements ;
dans les cursus de formation (relaxation, moments de retours
• la capacité à entrer en relation avec de nouvelles personnes ; sur soi, entraînement de la gratitude, travail d’intégration
en fin de cours ou de journée, etc.) ou dans le cadre de pro-
• la capacité à prendre en compte et à comprendre l’autre grammes qui visent plus particulièrement à en renforcer
(empathie) ; certaines (régulation émotionnelle, gestion du stress, ré-

62
solution de conflit, etc.). Pour soutenir leur développement, COMPÉTENCES PSYCHOSOCIALES ET DÉVELOPPEMENT
trois points sont fondamentaux : NEURONAL

Les récents développements en neurosciences tendent à


soutenir l’expérimentation : c’est-à-dire offrir aux jeunes
montrer qu’il existe d’étroits liens entre le développement
des occasions de s’essayer dans leurs actions, d’explorer
neuronal et les compétences psychosociales. Dans l’article
leurs ressources, de tester des idées inhabituelles et de
Amicitia : les trois liens qui tissent les réseaux socio-émotionnels
s’engager. Les approches collectives, participatives et créatives
dans le cerveau (www.skjp.ch/fileadmin/PDF_Word/PuE/2020-
soutiennent particulièrement le développement des CPS des jeunes :
2029/PuE_2023_1_Article_Fahim_Cherine.pdf), la Dre en
coopération, jeux de rôle, pour expérimenter d’autres points
neurosciences Chérine Fahim met en évidence que pour
de vue, mises en situation à partir d’un problème complexe,
exister le cerveau a besoin de tisser des liens « d’amitié »
ateliers de théâtre, d’expression corporelle, improvisation,
entre les neurones de ses différents réseaux :
etc. L’engagement dans des clubs de sport ou des associations
diverses contribue aussi au développement de nombreuses CPS
le réseau neuronal de saillance : c’est le « détecteur de per-
comme le sens des responsabilités ou la capacité à travailler
tinence » qui implique les régions cingulaires antérieures
en équipe. Les espaces formels et informels de rencontre et de
et insula-temporal du cerveau. C’est un réseau essentiel à
partage sur des thèmes qui font sens dans leur réalité ou sur
l’équilibre interne du cerveau qui est lié au système de mo-
les grandes questions de société qui les préoccupent (écologie,
tivation et de récompense. Il permet d’identifier les stimuli
développement durable, égalité, etc.) sont aussi de puissants
les plus homéostatiques pour guider le comportement ;
leviers pour travailler les compétences psychosociales. De
tels espaces permettent aux jeunes de se rendre compte
le réseau neuronal de mode par défaut : c’est le « détecteur
qu’elles·ils ne sont pas seul·e·s dans leurs questionnements
de soi » qui implique les régions cingulaires postérieures et
et de se sentir reconnu·e·s par les adultes. Ils favorisent le
frontales du cerveau. Sa fonction principale est en lien avec
développement de leur sens éthique, contribuent à soutenir
les processus mentaux autoréférentiels tels que l’imagination
leur envie de s’impliquer dans des actions concrètes et per-
et la mémoire autobiographique. Il concerne les fonctions
mettent encore aux adultes de confronter leurs perceptions à
au repos et s’active et se développe par exemple lorsqu’on
ce que vivent et ressentent les jeunes afin de mieux orienter
s’ennuie, se laisse aller, joue seul·e ou rêve ;
les mesures, par exemple éducatives ou préventives, pour
qu’elles atteignent leurs objectifs ;
le réseau neuronal exécutif : c’est le « détecteur d’action »
qui implique les régions préfrontales et pariétales du cer-
soutenir la réflexivité : c’est-à-dire les inciter à porter un
veau. Ce réseau est lié aux fonctions exécutives qui sont un
regard réflexif sur les situations qu’elles·ils vivent (observation,
ensemble de processus cognitifs qui permettent à l’individu
description de ce qui se passe, accent sur le « comment »
de réguler intentionnellement sa pensée et ses actions en vue
plutôt que sur le « pourquoi »), soutenir une démarche intros-
d’atteindre un but précis. Ces habiletés de haut niveau sont
pective sur elles·eux-mêmes (identification de leurs modes de
nécessaires à la réalisation d’un comportement dirigé vers
fonctionnement, de leurs réactions, de leurs schémas men-
un but. Elles facilitent l’adaptation aux situations nouvelles
taux, des biais cognitifs, des processus qui les influencent
et interviennent dans la régulation du comportement et de la
et de la manière dont elles·ils peuvent les renforcer, adapter
prise de décision. Ce réseau joue un rôle clé dans la mémoire
ou réorienter, etc.) et les amener à prendre en compte la pers-
de travail et le contrôle cognitif supérieur qui permet de ré-
pective d’autrui (empathie). Autrement dit, c’est favoriser la
guler les changements d’attention et d’accès aux ressources
mentalisation ;
cognitives générales et spécifiques au domaine en question.
Les fonctions de ce réseau connaissent un important développement
soutenir le transfert : les jeunes activent et exercent leurs
graduel entre la puberté et environ 25 ans. Elles sont soutenues par
compétences, mais n’en sont pas toujours conscient·e·s.

AGIR
le travail de mentalisation et d’anticipation.
Soutenir le transfert, c’est prendre du temps avec elles·eux pour
réfléchir aux apprentissages réalisés dans les expériences, question-
ner les stratégies utilisées, favoriser la reconnaissance des capacités
mises en œuvre (important pour l’estime de soi) et surtout faire
des liens avec leur quotidien (sens et anticipation).

Les recherches ont montré que les approches les plus perti-
nentes sont celles qui impliquent l’ensemble des partenaires
(globales et intégrées) et qui mettent un accent fort non
seulement sur le renforcement des compétences des jeunes,
mais aussi sur celles des adultes qui les accompagnent et
de l’ensemble de l’environnement (compétences sociales
de l’institution comme par exemple la capacité à collaborer
avec le réseau extérieur, à mettre en place des processus de
gestion de crises, à prendre en compte le stress du personnel
et des jeunes, etc.).

63
Pour bien fonctionner, ces trois réseaux ont besoin de se lier • communiquent leur pensée, sentiments, théories et idées
et de s’appuyer mutuellement les uns sur les autres. Le dé- au moyen de diverses formes artistiques ;
veloppement des capacités d’auto-régulation cognitives qui
accompagne la phase de transition à l’âge adulte doit pouvoir • manifestent une conscience de leur identité personnelle
s’appuyer sur de bonnes fondations socio-émotionnelles. La et une image de soi positive ;
maturation du cerveau est donc fortement liée à la qualité
des environnements et des interactions : la présence de liens
• manifestent la confiance en soi nécessaire pour faire face
aux préjugés et à la discrimination envers soi et envers
d’attachements sûrs, l’existence de terrains d’expérimenta-
les autres ;
tion, la possibilité de développer des amitiés avec les pairs et
la présence d’adultes significatifs sont indispensables pour • manifestent une conscience de leurs capacités artistiques
découvrir et valider qui l’on est. en participant à l’art dramatique, à la danse, à la musique
et aux arts visuels avec les autres.
La Dre C. Fahim met en évidence que les jeunes qui ont pu
développer un bon tissage de liens entre ces différents réseaux
CPS et capacités neuronales se développent et se renforcent
du cerveau manifestent sept capacités. Elles·ils :
donc mutuellement au fur et à mesure des expériences.

• communiquent de différentes façons, à des fins variées Le schéma ci-après tente de représenter visuellement la
et dans divers contextes ;
transversalité des CPS et celles qui doivent être privilégiées
• font preuve d’autonomie, d’autorégulation émotionnelle aux différentes étapes du développement pour une synergie
et de responsabilité ; optimale avec le développement neuronal.

• manifestent des habiletés de résolution de problèmes


dans une variété de contextes ;

Tableau 6. lien entre CPS et maturation cérébrale


Résolution de problèmes
Prise de décisions
Communication
Habiletés
relationnelles
Esprit critique
Régulation des et créatif
émotions
et du stress

Connaissance Empathie
de soi

0 5 ans 10 ans 15 ans 20 ans 25 ans

Rouge/jaune: Bleu/violet:
parties du cerveau parties du cerveau
moins matures plus matures

Adapté de : J. Giedd, National Institute of mental health

64
Tou·te·s les jeunes n’évoluent pas dans des environnements Pour soutenir le passage à l’âge adulte, les CPS sur lesquelles
qui leur permettent de développer les CPS et ne disposent mettre un accent prioritaire selon les expert·e·s :
pas des mêmes possibilités de les entraîner. Il est donc im-
portant que les établissements de formation et l’ensemble
des adultes y accordent une attention toute particulière dans avec les jeunes de 16 à 18 ans
leurs objectifs d’apprentissage et développent les méthodes, communication et habiletés relationnelles ; gestion du
notamment collectives, qui favorisent leur expérimentation stress ; développement de la pensée critique ;
et leur intégration. Une attention toute particulière doit aussi
être mise à ne pas privilégier les CPS cognitives au détriment avec les jeunes de 18 à 25 ans
des autres, ce qui constitue un réel défi pour notre système prise de décision et résolution de problèmes ; dévelop-
pement de la pensée critique ; gestion du stress.
de formation actuel.

RESSOURCES

« 10 compétences psychosociales dans une capsule ». www.youtube.com/watch?v=L76E8JEdlAM

Annexe 2 du Cahier de référence 12-16 ans. « Comment l’éducation peut soutenir le développement du cerveau
des adolescent·e·s » https://mcusercontent.com/60fd6bf0d21fb03b709c035a8/files/bbd145df-21e3-cfb9-4f60-
f08b9a1adfed/ANNEXE_2.pdf

Les approches de neuroéducation pour favoriser l’apparition de comportements prosociaux et soutenir


les apprentissages.www.revue-cortica.net/search/search?query=neuro%C3%A9ducation&authors=&date
FromYear=&dateFromMonth=&dateFromDay=&dateToYear=&dateToMonth=&dateToDay=

J. Tardif in L’évaluation des compétences : documenter le parcours de développement. Montréal : Chenelière Education, 2006.

La description actualisée des différentes CPS et des propositions d’activités tirées de différents programmes
pour les travailler avec les jeunes en promotion de la santé. Pages 26 à 43 du « Rapport de synthèse sur les
compétences psychosociales de Santé Publique France ». https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-
traumatismes/sante-mentale/depression-et-anxiete/documents/rapport-synthese/les-competences-
psychosociales-etat-des-connaissances-scientifiques-et-theoriques

« Les CPS expliquées aux jeunes » avec des exemples concrets de leur déclinaison dans leur quotidien.
www.ciao.ch/recherche/?q=comp%C3%A9tences+psychosociales&type=
www.ontecoute.ch/themes/estime-de-soi/?sub=117&page=1#articles-list

« Mes incroyables compétences ». 5 capsules vidéos de Promotion santé Valais et Santépsy.ch réalisées à partir
de situations récoltées auprès de jeunes de 12 à 16 ans
www.promotionsantevalais.ch/fr/incroyables-competences-2855.html

POUR ALLER PLUS LOIN

« Compétences psychosociales des adultes et promotion de la santé ». 2016. Focus santé n°4
AGIR
www.cultures-sante.be/nos-outils/les-focus-sante/item/410-focus-sante-n-4-competences-psychosociales-
des-adultes-et-promotion-de-la-sante.html

« La revue Cortica » de l’Université de Fribourg en accès libre pour rapprocher le milieu de la recherche en
neurosciences et celui des pratiques en vue d’améliorer la qualité des interventions
www.revue-cortica.net/about

« Les compétences psychosociales, un levier pour la promotion de la santé ». Education et santé, 2023
https://educationsante·be/les-competences-psychosociales-un-levier-pour-la-promotion-de-la-sante/

L’éducation psychosociale. Dossier thématique 2016. « Ecole. Changer de cap »


https://catalogue.education21.ch/fr/leducation-psychosociale

65
La littératie en santé mentale la recherche d’aide : processus par lequel une personne
recherche activement un soutien auprès de ressources ex-
La littératie en santé mentale est la capacité de reconnaître et de ternes dans le but de résoudre un problème en lien avec ses
comprendre les caractéristiques des troubles mentaux (symptômes, émotions ou comportements.
risques et causes), et quand et comment obtenir de l’aide et accéder
à des services de soins. Elle englobe aussi la compréhension de Comment faire ? Relayer encore et encore les adresses res-
comment obtenir et maintenir un bon état psychique, ainsi que la sources, donner aux jeunes le temps nécessaire pour les
réduction de la stigmatisation liée aux troubles mentaux. découvrir et les aider à comprendre comment fonctionne
Ilaria Montagni, 201914 l’aide, entraîner les compétences de communication, etc. ;

La période entre 16 et 25 ans est particulièrement sensible pour le soutien social à autrui : c’est le fait de procurer à une autre
la santé psychique. Cette période est de plus particulièrement personne le sentiment d’être aimée, valorisée et de faire
à risque pour l’émergence de troubles psychiques. En Suisse, partie d’un réseau social. Le soutien social à autrui peut avoir
environ 18% de la population est en souffrance psychique. un impact positif sur la santé mentale non seulement de la
Dans près de 80% des cas, les troubles sont apparus avant 25 personne qui le reçoit, mais aussi sur celle de celle qui l’offre.
ans (www.gesundheitsbericht.ch/fr/05-sante-psychique/52-
prevalence-de-la-sante-et-des-maladies-psychiques). Il est Comment faire ? Favoriser les approches collectives, de
donc important de soutenir la littératie en santé mentale des coopération, les approches par les pairs, l’engagement pour
jeunes pour qu’elles·ils sachent comment maintenir un bon la communauté et les espaces d’écoute et de parole basés sur
niveau de santé psychique et puissent reconnaître les premiers l’échange mutuel de ressources, etc.
signaux de stress, d’anxiété ou d’autres difficultés psychiques.
Si chaque adulte ou professionnel·le en contact avec des
INFORMER, ÉDUQUER ET PERMETTRE D’EXPÉRIMENTER jeunes a la responsabilité de thématiser la santé psychique,
d’aider les jeunes à comprendre ce qu’elle signifie et de leur
Pour cela :
donner des outils pour pouvoir en prendre soin, les écoles et
les établissements de formation qui touchent les jeunes de
• intégrer le thème de la santé mentale dans leurs envi- manière collective ont un rôle primordial à jouer en matière
ronnements de vie ou de formation et en parler pour faire
d’égalité des chances. Ils peuvent favoriser les compétences
tomber le tabou qui l’entoure ;
en santé mentale des jeunes en :

• les informer sur ce que signifie la santé mentale et sur


les facteurs qui l’influencent ; • développant une approche de promotion de santé globale
et intégrée (voir
voir axe 5)
5 ;
• renforcer leur capacité à en prendre soin (auto-soin) et
à demander de l’aide en cas de besoin ; • introduisant dans leurs cursus des informations et des
enseignements sur la santé mentale ;
• leur donner des repères et des informations qui leur per-
mettent de trier les bonnes informations des fausses sur • mettant un accent fort sur l’éducation socio-émotionnelle
le net en matière de santé psychique ; et le renforcement des compétences psychosociales, au
quotidien et dans les enseignements ;
• soutenir le développement de comportements promo-
teurs de santé. • proposant à leurs élèves, étudiant·e·s ou apprenti·e·s la
possibilité d’expérimenter des outils de régulation émo-
tionnelle et de gestion du stress ainsi que de vivre des
Les comportements promoteurs d’une bonne santé mentale expériences de soutien social.
comprennent toutes les actions, décisions ou activités qu’une
personne peut adopter ou réaliser à titre individuel pour agir
en faveur de sa propre santé mentale ou de celle des autres. Les établissements du secondaire sont particulièrement concer-
La revue de littérature effectuée en 2023 par l’association nés, car ils peuvent considérablement contribuer à l’aug-
Minds, à Genève, à ce sujet met en évidence trois types de mentation de ces compétences avant que les jeunes ne se
comportements à favoriser (www.minds-ge.ch/ressources/ retrouvent devant les défis de la transition (étudiant·e·s qui
les-comportements-promoteurs-dune-bonne-sante-mentale): quittent le foyer familial, jeunes qui entrent en apprentissage,
etc.). Les établissements de formation supérieure et les entreprises
le self-care : processus d’engagement intentionnel dans des doivent aussi s’engager à soutenir les compétences en santé
pratiques qui promeuvent la santé et le bien-être holistique de leurs étudiant·e·s ou jeunes employé·e·s. En ce sens, en
du soi. Ces pratiques peuvent être physiques, émotionnelles, plus d’une stratégie institutionnelle globale, le partage de
relationnelles ou spirituelles. bonnes pratiques et les collaborations avec d’autres insti-
tutions similaires, les systèmes de mentorat ou de soutien
Comment faire ? Proposer aux jeunes des possibilités d’en par les pairs, les mesures de sensibilisation et un système
découvrir et d’en expérimenter, par exemple des outils pour d’accès rapide et efficace aux aides et aux soins sont des
réguler les émotions ou le stress, des techniques de respi- mesures très pertinentes.
ration, la relaxation, la cohérence cardiaque, le yoga, etc. ;

14 La littératie en santé mentale : un levier fondamental en faveur du bien-être des jeunes adultes - Entretien avec Ilaria Montagni – Juillet 2019.
PromoSanté Ile de France. Juillet 2019. www.promosante-idf.fr/file/64656/download?token=QcHEws28

66
La santé mentale des jeunes est aussi intimement liée à
celle des adultes qui les entourent. Les établissements de RESSOURCE
formation ainsi que les entreprises peuvent contribuer à
augmenter la littératie en santé mentale de l’ensemble de Infographie de Promotion Santé Suisse : Comment
leurs acteur·trice·s par l’organisation d’événements ou de atteindre les jeunes avec des messages de promotion
formations sur la santé mentale. Les semaines de la santé de santé https://promotionsante.ch/sites/default/
mentale organisées par l’EPFL peuvent être une source files/2022-12/Comment%20atteindre%20les%20
d’inspiration. (www.epfl.ch/campus/security-safety/sante/ jeunes%20avec%20des%20messages%20de%20
semaine_sante-mentale/) promotion%20de%20la%20sant%C3%A9.pdf

FAIRE CONNAÎTRE LES RESSOURCES EN PROMOTION DE


SANTÉ PSYCHIQUE ET LES PRESTATIONS DE SOUTIEN

Bon à savoir

PAROLES D’EXPERT·E·S
Nombre de 16-25 ans perçoivent le téléphone
(appel) ou les e-mails comme un frein à la
Nous devons sortir de nos « bu- communication. Des documents papier ou numé
riques

reaux » et aller à la rencontre avec adresses mails ou numé ros pour appe l
ct
téléphonique comme seuls moyens de conta
des jeunes directement dans les sont donc peu pertinents pour cette tranc
he
sApp,
endroits qu’elles·ils fréquentent : d’âge qui préfère communiquer par What
d’app licati ons en
Instagram ou par le biais
écoles et organismes de forma- ligne. L’univers numérique présente donc
de bons
à
tion (qui restent prioritaires pour supports pour atteindre les jeunes, mais
fiables
deux conditions : les contenus doivent être
les 16-20 ans), espace public, en- (garantis par des instit ution s recon nues) et la
(gara ntie par une analy se des
vironnements festifs, associatifs, forme attra ctive
).
profils et des besoins des utilisateur·trice·s
sportifs, de loisir, centres com-
merciaux, fitness, communautés
spécifiques et univers numérique.
Il nous faut mieux utiliser les FAIRE DES LIENS ENTRE LA SANTÉ MENTALE ET LES
AUTRES QUESTIONS DE SANTÉ
canaux de communication nu-
mériques : collaborer avec des La santé mentale des jeunes est multifactorielle. Elle est for-
tement influencée par des questions qui touchent de manière
influenceur·euse·s, utiliser les plus large à leur santé psychosociale comme le développement
multimédias et la gamification, de relations positives, la sexualité et la santé sexuelle, les

développer des applications de


prises de risque et la consommation de substances, la diversité
et les discriminations ou encore la gestion de l’argent par
santé. exemple en lien avec les risques d’endettement liés aux jeux
de hasard. Augmenter leur littératie en santé mentale consiste

AGIR
Les jeunes doivent avoir accès facilement à de l’information donc aussi à les aider à comprendre les liens entre leur santé
en matière de santé psychique sur leurs lieux de loisirs, de psychique et ces différentes thématiques. De manière générale,
formation et de travail et sous une forme qui leur parle. Nous toutes les actions qui vont aider les jeunes à se situer par rapport à
devons communiquer clairement sur les ressources existantes leur avenir, à s’engager comme citoyen·ne à prendre en charge leur
et mettre à disposition du temps pour que les jeunes puissent bien-être dans des champs de santé particulièrement importants
les découvrir (démarches, prix, confidentialité, conséquences pour elles·eux et à développer des relations intimes positives sont
si une démarche est faite, partage d’une expérience, etc.) car soutenantes pour leur santé psychique. De telles actions doivent
la seule information verbale sur l’existence de ressources est être favorisées dans les établissements de formation avec un
insuffisante. Les sites www.ciao.ch et www.ontecoute.ch renforcement de la compréhension de leurs liens avec la santé
pourraient par exemple être installés sur les pages d’accueil psychique et un accent sur les compétences psychosociales.
de tous les ordinateurs d’un établissement de formation, des Des approches croisées de promotion de la santé psychique
exercices pourraient être proposés directement dans les disci- via des thèmes d’importance pour les jeunes sont aussi
plines à partir des contenus de ces sites ou d’autres matériels extrêmement pertinentes, comme la promotion de la santé
d’information. Nous devons aussi adapter nos pratiques de psychique via des actions de promotion de la santé sexuelle
communication pour utiliser un langage accessible aux jeunes ou d’une image corporelle positive.
ainsi que les canaux qu’elles·ils privilégient.

67
RESSOURCES POUR PROMOUVOIR LA SANTÉ PSYCHIQUE DES JEUNES

www.minds-ge.ch notamment les dossiers thématiques https://minds-ge.ch/les-dossiers

www.santepsy.ch le site de promotion de la santé mentale dans les cantons latins

Pour les jeunes

www.ciao.ch pour les 11-20 ans. Notamment le forum pour échanger avec des jeunes du même âge, les pages
santé mentale www.ciao.ch/themes/sante-mentale, le dossier « Des ressources pour prendre soin de ta santé
psychique www.ciao.ch/pages/santepsy et le guide pour les moments difficiles www.ciao.ch/pages/guide

www.ontecoute.ch pour les 18-25 ans. Notamment le forum pour échanger avec des jeunes du même âge,
les pages santé mentale www.ontecoute.ch/themes/sante-mentale et le kit d’urgence pour gérer le stress
www.ontecoute.ch/articles/stress-kit-durgence

www.143.ch/fr la ligne d’appel d’urgence de la Main Tendue

www.147.ch/fr la ligne d’appel d’urgence de Projuventute

Zahw et OFSP. 2021. Prends soin de toi ! Boîte à outils pour les adolescents qui veulent apprendre à gérer des
situations difficiles.
https://www.zhaw.ch/fr/gesundheit/forschung/gesundheitswissenschaften/projekte/take-care/

Les cercles d’écoute et de parole, par exemple ceux de Minds et de la Main Tendue https://minds-ge.ch/
?s=cercles+d%27%C3%A9coute ou de l’association TCI-Valais www·aetci-a4v·eu/poles-formateurs/tci-valais-
suisse et une capsule vidéo avec les témoignages de jeunes qui y participent https://youtu.be/YPQuy2WdhHk*

Des outils d’auto-soin pour les étudiants https://ecouteetudiants-iledefrance.fr/home

Les trousses outils pour les jeunes, les familles et les écoles de la Fondation « Jeunes en tête » :
https://fondationjeunesentete.org/nos-outils

Pour les établissements de formation et/ou institutions

Des courtes vidéos pour aider les jeunes à apprivoiser leur stress :
www.stresshumain.ca/programmes/surfe-ton-stress

Fiches pédagogiques pour la prévention du jeu excessif chez les adolescent·e·s et les jeunes adultes
https://catalogue.education21.ch/fr/fiches-pedagogiques-pour-la-prevention-du-jeu-excessif-chez-les-
adolescentes-et-les-jeunes-adultes

Gambling Escape
www.fr.ch/dsas/actualites/gambling-escape-prevenir-de-maniere-ludique-le-jeu-excessif-chez-les-jeunes

Gouvernail, programme romand de promotion de la santé et prévention des conduites à risque pour adolescents.
Pour les institutions www.gouvernail.ch

Guide-école, des informations, conseils et recommandations sur les thèmes de l’alimentation, l’activité
physique et l’image corporelle positive. Avec des exemples de projets réalisés par des établissements/classes
www.guide-ecole.ch

La plateforme de l’éducation sexuelle holistique à l’école www.educationsexuelle-ecole.ch

Mindmatters, un programme pour renforcer la santé psychique des jeunes dans les établissements de formation
en s’appuyant sur les compétences psychosociales (démarche d’établissement et ressources pédagogiques pour
l’enseignement en lien avec le PER) www.mindmatters.ch/fr

#MOICMOI, une approche globale de promotion de la santé psychique des adolescent.e.s basé sur les compétences
psychosociales pour les établissements scolaires du cycle 3 www.moicmoi.ch

Ready4life, une application de coaching (appli) destinée à promouvoir l’acquisition de tes compétences
de vie comme la gestion du stress et d’Internet, la consolidation des compétences sociales ainsi que la capacité
à résister à la consommation de substances addictives ou d’alcool www.r4l.swiss/fr

SchoolMatters, des ressources pour permettre aux établissements scolaires de se développer dans le domaine
de la santé psychique, du bien-être et la promotion d’un climat scolaire bienveillant
www.radix.ch/fr/ecoles-en-sante/offres/schoolmatters

Sortir ensemble & se respecter. Programme national de prévention des violences et de renforcement des
compétences psychosociales www.radix.ch/fr/ecoles-en-sante/offres/sortir-ensemble-et-se-respecter

68
Stop Suicide. des informations, interventions et ateliers pour parler du suicide www.stopsuicide.ch

Stress ? on fait face ! Un projet pilote pour encourager les élèves des gymnases à se soutenir pour gérer ensemble le
stress www.radix.ch/fr/ecoles-en-sante/offres/stress-on-fait-face

Pour les entreprises

Le programme LIFT, de prévention des risques de non insertion professionnelle en fin de scolarité obligatoire
pour les écoles secondaires de toute la Suisse : https://jugendprojekt-lift.ch/fra-propos

Le projet « Apprentice » et le label « Friendly Work Space ». Promotion Santé Suisse :


https://friendlyworkspace.ch/fr/bgm-services/apprentice

Le projet Prev@work de prévention des addictions pour les jeunes en formation professionnelle. Addiction
suisse : https://shop.addictionsuisse.ch/fr/entreprise-formation/41-depliant-prevatwork.html

Pour les parents

www.addictionsuisse.ch/le-secteur-prevention/prevention-adolescence/guides-pour-les-parents-dados,
guides pour les parents d’ados.

www.educationsexuelle-parents.ch, pour soutenir les parents dans l’éducation sexuelle de leurs enfants

www.formation-des-parents.ch/fr, formation des parents et soutien à la parentalité

www.jeunesparents.ch, l’association « Jeunes parents » pour les parents jeunes adultes et adolescents en
Suisse romande

www.monado.ch, un site ressource pour accompagner les adolescent·e·s

www.projuventute.ch/fr/parents/formation/entree-vie-professionnelle, pour soutenir les jeunes à l’entrée


dans la vie professionnelle

Gourion D. &Muzo. 2019. Docteur Feel Good. Odile Jacob

Des ressources thématiques

www.addictionsuisse.ch des informations, du matériel et des projets de prévention des addictions

www.agnodice.ch informations, conseils et soutien aux personnes trans, non-binaires ou en questionnement


de genre et à leur entourage

www.healthybodyimage.ch/fr/home-fr la plateforme nationale sur l’image corporelle positive et les liens


sur les projets qui la promeuvent

www.sante-sexuelle.ch un shop avec un riche matériel d’information pour les jeunes et la liste des centres
de santé sexuelle en Suisse

www.stressnostress.ch/fr le site de la Fédération Suisse des psychologues avec des outils pour mieux faire
face au stress au niveau personnel et en entreprise, ainsi qu’un stress-check personnel

www.violencequefaire.ch plateforme d’informations, d’aide et d’orientation pour toute personne concernée par

AGIR
la violence au sein du couple avec des pages dédiées aux jeunes

Des brochures pour les jeunes utiles à toutes et tous

Bioscope de l’Université de Genève. Diverses brochures. « Bon stress » ; « Manger, bouger, une question
d’énergie », « 1,2,3 Sommeil » ; « Sexesss » https://scienscope.unige.ch/bioscope/brochures
Mon sexe et moi (en collaboration avec RTS et santé sexuelle suisse)
www.unige.ch/ssi/ressources/ressources-pedagogiques-ssi/brochures/sexoado

Fondation Agnodice: La sexualité plur-IELS.Guide de santé à l’attention des jeunes trans et non binaires
www.agnodice.ch

Réseau Jeunes de Santé sexuelle Suisse. 2023.The Sexplorers : une bande dessinée qui aborde des thèmes du
consentement, de la relation à son corps et à ses émotions, la masturbation, l’orientation sexuelle et l’identité
de genre et qui montre la diversité des sexualités et des manières de les découvrir.
https://shop.sante-sexuelle.ch/fr/A~1913~2/0~0~SGS/THE-SEXPLORERS/fran%C3%A7ais

Santé sexuelle Suisse : Ta sexualité, tes droits https://shop.sante-sexuelle.ch/img/A~1064~2/1/1064-02-


ta-sexualite?xet=1664198188000 ; Hey You https://shop.sexuelle-gesundheit.ch/fr/A~1825~1/1~10~SGS/
Mat%C3%A9riel-d%27information/Hey-You/allemand

69
Axe 4 : Activer le pouvoir d’agir Des adultes soutenant·e·s
de tou·te·s les professionnel·le·s Les adultes font partie des contextes de vie, de formation et
en contact avec les jeunes de travail des jeunes. Dans la phase de prise d’autonomie et
d’indépendance vis-à-vis des parents, elles·ils ont besoin de
La promotion de la santé psychique est l’affaire de toutes et
pouvoir côtoyer hors de la famille des adultes à qui parler, sur
tous. Chacun·e, là où elle·il se trouve, a un pouvoir d’agir. Il
qui pouvoir compter et qu’elles·ils puissent percevoir comme
faut donc l’identifier
identifier et l’activer.
des ressources et des repères positifs et inspirants. Cela est
d’autant plus important pour les jeunes qui ne peuvent pas
s’appuyer sur le soutien de leurs parents.
PAROLES D’EXPERT·E·S
Les enseignant·e·s, professeur·e·s, référent·e·s d’apprentis-
Soutenir la santé psychique des sage, de travail (collègues, direction, etc.), de loisirs (enca-

jeunes en tant qu’adulte ou drant·e·s, bénévoles, etc.) ou les professionnel·le·s de services


qui offrent des prestations diverses (social, santé, etc.) peuvent
professionnel·le en contact avec toutes et tous contribuer de manière significative à la santé

elles·eux, c’est… : psychique des jeunes, sans en être des spécialistes. Elles·ils
peuvent les soutenir dans leurs besoins psychosociaux par de

• veiller à la qualité de l’accueil ;


l’information et du conseil, du soutien aux apprentissages et
au développement des compétences psychosociales, de l’aide

• donner du temps en suffisance directe ou de l’orientation sur des ressources, mais surtout

pour s’adapter ;
par la manière dont elles·ils vont les accueillir, les écouter
et les prendre en considération. Autrement dit, la qualité

• reconnaître leurs compétences de leur présence et de leur posture sera prépondérante pour

et leurs ressources ; pouvoir créer un lien de confiance et être perçu·e·s comme


des adultes crédibles, sécurisant·e·s et dignes de confiance.

• valoriser leurs expériences et


leurs progrès, pas seulement
PAROLES DE JEUNES
les résultats ;
• soutenir leur développement Un·e adulte soutenant c’est un·e
global et pas seulement cognitif ; adulte qui… :
• accueillir la dimension émo-
• crée de l’espace et nous donne
tionnelle et lui donner une vraie
de l’espace ;
place dans les approches ;
• se soucier de la qualité
• pose des questions malgré
mon absence de réponses, j’ai
relationnelle ;
envie qu’on creuse, qu’on me
• veiller à la cohérence entre prouve qu’on s’intéresse à moi ;
les acteur·trice·s ;
• est solide sur ses deux pieds
• soutenir les compétences et peut recevoir mes problèmes
psychosociales et les valoriser. sans sombrer ;
• écoute, est attentif·ve ;
• me parle de son expérience et
dont j’absorbe les paroles ;
• est cohérent·e avec un système
de valeurs clair (visible, lisible
et fiable) ;
• se comporte comme elle·il dit,
sans ambiguïté et de manière
authentique.

70
Une posture professionnelle promotrice de santé psychique
La posture adoptée par les adultes face aux jeunes est un des facteurs clés pour
promouvoir leur santé psychique. Elle joue un rôle fondamental dans la manière
dont elles·ils vont se sentir dans leur environnement de formation ou de travail ou
pour oser demander du soutien. Elle va influencer non seulement les conditions
d’apprentissage, mais aussi la qualité des relations et du vivre ensemble. Elle est
aussi un levier central des approches basées sur les compétences
psychosociales qui sont au cœur des facteurs de protection de
PAROLES D’EXPERT·E·S
la santé psychique des jeunes.

Une posture professionnelle soutenante est basée sur une re- Développer une posture
lation authentique qui crée de la sécurité, priorise l’autorité de d’adulte soutenante c’est être
compétence sur l’autorité liée à l’âge et vise la cohérence. Elle
permet de développer la sécurité psychologique par :
authentique, cohérent·e et
suffisamment sécurisant·e
• une vision positive et globale du développement des jeunes ; pour accueillir les jeunes
• la connaissance de leur réalité et de leurs besoins et la ca- dans leurs nombreux besoins
pacité à comprendre leurs ambivalences ;
parfois ambivalents et
• la reconnaissance qu’elles·ils sont des interlocuteur·trice·s contradictoires.
et des partenaires valables ;

• un accueil soigné et une écoute active ;


• un lien de qualité et des accompagnements basés sur la relation plus que sur
les procédures ;

• une flexibilité des approches qui permettent de prendre en compte leurs be-
soins : adaptation des horaires d’ouverture des services à leur mode de vie,
espaces qui favorisent les échanges et la créativité ; possibilités d’expérimenter
en situation par essais-erreurs, etc. ;

• la prise en compte de leur temporalité qui diffère bien souvent de celle des
adultes, de la famille ou des organismes de formation, par exemple pouvoir
aller au rythme des jeunes, avoir le temps de mettre en lumière le sens dans
ce qu’elles·ils vivent ainsi que leurs valeurs, prendre en compte la possibilité
d’interruption et d’aller-retours (drop out) dans les accompagnements, etc.

Bon à savoir
Amy Edmonson, professeure à la Harvard
tions
Business School met en évidence sept condi
les contextes professionnels :
AGIR
qui favorisent la sécurité psychologique dans

cela se retourne contre soi ;


• la possibilité de faire des erreurs sans que

• la responsabilité partagée ;

• la possibilité de prendre des risques ;


l’aide aux autres ;
• la possibilité de demander facilement de
·s) ne mettront pas volon-
• la confiance que ses collègues (ou supérieur·e
tairement en dangers ses efforts ;
étences et leur valorisation ;
• la possibilité d’utiliser ses talents et comp
èmes difficiles avec ses
• la capacité à soulever des questions ou probl
collègues.
y-edmondson
www.crossknowledge.com/fr/experts/am

71
Une posture professionnelle soutenante concerne tous les
niveaux des pratiques professionnelles : POUR ALLER PLUS LOIN

la capacité à garantir la sécurité et la cohérence des contextes Alliance PSE. www.radix.ch/pse et argumentaire
et des interactions : ne tolérer aucune discrimination ou « la santé renforce l’éducation »
injure ; réagir à ces dernières et ne pas faire semblant de
Campagne santépsy·ch https://santepsy.ch/
n’avoir rien vu ni entendu ; poser des règles de fonction-
la-sante-mentale/en-prendre-soin
nement claires idéalement en collaboration avec les jeunes
elles·eux-mêmes, les expliciter par des exemples concrets Réseau d’Ecole 21
qui en montrent le sens, s’assurer qu’elles soient comprises www.reseau-ecoles21.ch/sante/sante-psychique
et que les conséquences de leur non-respect soient connues ;
s’assurer que les jeunes savent ce qu’on attend d’elles·eux (les
objectifs sont clairs, le résultat attendu clairement expliqué) ;
Des qualités à entretenir pour être perçu·e comme
qu’elles·ils ont les ressources pour y répondre (elles·ils savent
soutenant·e par les jeunes
comment faire, où chercher des informations, de l’aide, etc.)
et qu’elles·ils comprennent le sens de ce qu’on leur demande
(pourquoi, à quoi ça sert, à quoi ça contribue, etc.) ;
• authenticité : oser sortir du seul rôle lié à sa
fonction pour partager ses expériences ;

la manière dont nous mettons en vie nos compétences en • ouverture : avoir du plaisir à être avec les jeunes et
situation avec les jeunes : s’envisager comme facilitateur·trice le montrer ; leur faire sentir qu’elles·ils sont impor-
tant·e·s et accueillir chacun·e comme elle·il est ;
d’apprentissage plutôt que comme transmetteur·euse de
savoirs ; proposer des situations d’apprentissage et des • humour : faire preuve d’humour et être capable de
terrains d’expérimentation stimulants qui favorisent leur dédramatiser ;
participation ; faire « avec », montrer car les apprentissages
• cohérence : avoir de la consistance dans sa manière
se font beaucoup par observation et mimétisme ; valoriser d’être et de fonctionner ; ne pas tendre de piège,
l’erreur comme une opportunité d’apprendre; donner des donner des informations claires sur ses intentions
feedbacks qui mettent en évidence leurs compétences et leurs et les mettre en action ;
progrès plutôt que leurs manques ou leurs erreurs ; donner
des repères dans les savoirs disponibles pour favoriser l’esprit
• consistance : être fiable et faire ses preuves (prendre
au sérieux les demandes des jeunes pour prouver
critique ; faire des liens avec leurs quotidien pour ancrer les qu’on est digne de confiance), avoir conscience de
apprentissages ; son rôle de repère et appliquer à soi-même les
exigences posées aux jeunes, activer ses propres
la conscience de nos attitudes, c’est à dire de notre ma- compétences psychosociales ;
nière d’être et de notre état d’esprit dans l’échange : être
conscient·e de nos représentations et prédispositions mentales
• présence et conscience de soi : signaler sa disponi-
bilité à l’échange, être entièrement présent·e dans
à leur égard - quelles sont les croyances que j’ai sur elles·eux ? l’échange, montrer son intérêt, ne pas faire autre
Qu’en ai-je entendu qui m’influence ? Ai-je du plaisir à les chose en même temps, être conscient·e de ses
côtoyer ? Comment est-ce que je vois mon rôle? , etc. ; être attitudes verbales et non verbales, et aussi
capable d’identifier et d’accueillir les émotions ressenties reconnaitre ses émotions et les accueillir, prendre
face aux jeunes et de voir comment elles nous influencent, en considération les messages de son corps,
savoir les réguler pour ne pas les laisser influencer de manière travailler sur ses représentations et ses résonances,
inadaptée nos choix, actions ou réactions, etc. ; connaître ses limites, personnelles et de rôle, et
transmettre les situations qui le nécessitent à des
les comportements adoptés en contexte envers les jeunes : professionnel·le·s spécialisé·e·s.
porter attention à ce que notre langage verbal et non verbal
soient respectueux et congruents ; utiliser un langage inclusif
qui permet à chacun·e de se sentir pris·e en considération et
RESSOURCES
reconnu·e dans son identité et ses spécificités ; être juste dans
nos décisions, être fiable. Faire ce que l’on dit ; faire exister
Les dossiers thématiques de #MOICMOI sur
chaque jeune positivement dans notre regard en accordant de
les postures, développés pour les contextes
l’attention régulière à chacun·e, un sourire, un petit mot, etc. ;
d’enseignement et utiles à tout adulte au contact
de jeunes
une posture soutenante, c’est aussi un·e adulte qui va bien :
https://moicmoi.ch/accueil/ressources-et-liens
la possibilité de développer une posture accueillante, non
jugeante, basée sur une vision positive des compétences des En particulier le self-check de sa posture :
jeunes est intimement liée au bien-être des adultes elles·eux- https://moicmoi.ch/wp-content/uploads/2023/
mêmes et à leur santé psychique. Il est donc indispensable 06/MOICMOI-fiche-animation-2-Self-check.pdf
d’en prendre soin.

72
Du soutien social adapté
Le soutien social est une ressource cruciale durant la transition à la vie adulte et le
soutien à la santé psychique. Il englobe toutes les relations interpersonnelles, où
les individus échangent des ressources pour s’aider mutuellement. Ces ressources
peuvent être matérielles (argent, logement, mobilier) mais aussi pratiques (aider
à déménager), informationnelles (donner une ressource, un conseil) et émotion-
nelles (réconfort, amour).

Même si elles·ils sont plus autonomes et qu’elles·ils peuvent nous paraître


« grand·e·s » et capables de se débrouiller, les jeunes ont encore besoin de sou-
tien, notamment au niveau émotionnel et en lien avec le développement de leur
indépendance sociale et citoyenne qui va nécessiter de nombreux apprentissages.
La prise d’autonomie et le chemin vers l’âge adulte des 16-25 ans sont fortement
liés à la possibilité de pouvoir s’appuyer sur des ressources
solides dans l’environnement, tant au niveau émotionnel que
matériel et pratique. Se sentir aimé·e·s, entouré·e·s estimé·e·s, PAROLES D’EXPERT·E·S
valorisé·e·s et savoir qu’elles·ils peuvent compter dans leur en-
tourage sur des personnes prêtes à les soutenir lorsqu’elles·ils Promouvoir la santé psychique
en ont besoin est un grand facteur de protection pour leur santé
des 16-25 ans, c’est les aider
psychique. Ce sentiment soutient l’état de santé globale, permet
de développer un meilleur sentiment d’efficacité et de mieux faire à sortir de leur solitude et se
face au stress et aux événements difficiles de la vie. Le soutien nourrir mutuellement.
social favorise aussi la persévérance scolaire et professionnelle.

Si l’existence de soutien de l’environnement social est un facteur majeur de


protection dans les transitions des 16-25 ans, la perception du soutien est toute aussi
importante que le soutien lui-même. Il est donc important de signaler aux jeunes
notre disponibilité à les soutenir en cas de besoin,
besoin même si elles·ils n’ont rien
demandé. Le soutien social va dans les deux sens. Celui de recevoir et aussi de
donner. Dans ce sens, les groupes d’entraide et les engagements bénévoles des
jeunes peuvent aussi contribuer à leur bien-être en leur permettant de se sentir
utiles et de trouver du sens à leur vie.

AGIR

73
Tableau 7. Infographie Minds « Les multiples bienfaits du soutien social » www.minds-ge.ch/ressources/les-multiples-
bienfaits-du-soutien-social

Augmente
Augmente considérablement le
le taux sentiment de maîtrise
d'ocytocine : que l’on a sur sa vie
l’hormone de l’amour,
de la confiance et de
l’affection Améliore notre capacité
à adopter une bonne
hygiène de vie et des
Booste comportements sains :
bien manger, bien dormir, faire
le système du sport, se reposer, prendre des
immunitaire pauses, etc.

Diminue Réduit
la pression le stress
sanguine

Augmente le
sentiment d’efficacité Réduit les
personnelle comportements
Augmente à risque
notre capacité
de résilience

Le soutien social est important pour tou·te·s les jeunes mais de l’éducation, du social, de la santé, les référent·e·s d’ap-
tout particulièrement pour celles et ceux qui se retrouvent prentissage ou les encadrant·e·s d’activités de loisirs jouent
en situation de vulnérabilité particulière15. Les jeunes mi- un rôle encore plus important que pour les autres. Elles·ils
neur·e·s non accompagné·e·s (MNA), celles et ceux en situation peuvent devenir de vraies figures significatives (tuteur·trice·s
socio-économique précaire, en rupture de formation, les de résilience), sans même le savoir. Il est important que ces
jeunes non exclusivement hétérosexuel·le·s ou cisgenres, adultes soient conscient·e·s de l’importance de leur rôle au-
les jeunes-aidants, les care leavers ou tout autre jeune ayant près de ces jeunes dans la phase de transition à la vie adulte.
des besoins spécifiques peuvent moins souvent compter sur Une présence attentive, consciente, de qualité ainsi que le
un réseau primaire soutenant. Ce dernier peut être lacunaire, partage de ressources significatives contribue à les rassurer
voire inexistant. Cela les confronte à un manque de stabilité devant les nouveaux défis, les aide à oser prendre le risque
sur le plan des relations positives et de confiance, mais parfois de se lancer dans l’exploration de nouvelles compétences et
aussi au niveau matériel. Pour elles·eux, les professionnel·le·s démarches, et leur permet d’élargir leur réseau de soutien.

15 Osgood, D. W., Foster, E. M. et Courtney, M. E. (2010). Vulnerable populations and the transition to adulthood. The Future of Children, 20 (1), 209-229).

74
APPORTER DU SOUTIEN SOCIAL SIGNIFICATIF POUR LES
Se poser les bonnes questions pour soutenir l’identité, 16 À 25 ANS
l’apprentissage et le sens dans les phases de transitions
Soutien affectif et émotionnel : il est fondamental pour
• qu’est-ce qui a été vécu comme rupture ? Dans accompagner les défis de la transition à l’âge adulte et encore
quelle(s) sphère(s) d’expérience ? Que se passe-t- plus aujourd’hui pour aider les jeunes à traverser les incer-
il sur le plan identitaire, des apprentissages, des titudes liées au contexte sociétal. Pour ce faire :
constructions de sens ?

• s’intéresser à leur vie, les accueillir et les reconnaître


• lesquels de ces processus semblent bloqués et dans leurs forces, joies et réussites ;
pourquoi ? Au contraire, sur laquelle de ces
dimensions peut-on s’appuyer pour aider la·le
• leur faire sentir qu’on leur fait confiance en leur accordant
jeune à changer dans une autre dimension ? une bonne latitude dans les choix scolaires ou profes-
sionnels ;
• en quoi des expériences provenant des autres
sphères d’expérience sont-elles utiles ? Quelles sont
• soutenir le développement d’une image de soi positive
les expériences que la·le jeune a déjà faites et par des retours (rétroactions), une appréciation, des com-
qui pourraient servir de ressources maintenant ?
mentaires sur les aptitudes et dispositions observées ;

• à quels éléments culturels et à quels réseaux


• encourager et reconnaître leurs efforts ;
sociaux la·le jeune a-t-elle·il accès ? En quoi
ces réseaux pourraient-ils lui servir en tant que • écouter et accompagner des passages difficiles ou dou-
ressources dans le cas présent ? loureux. Accueillir leurs émotions sans les minimiser ni
les juger, notamment leur incertitude, tristesse, colère
Source : T. Zittoun. 2012. In Les transitions à l’école sous la direction
de Pierre Curchod, Pierre-André Doudin et Louis Lafortune. Collection ou frustration derrière l’éco-anxiété ou la solastalgie ;
éducation et intervention, PUQ prendre au sérieux leurs préoccupations et leur stress
de performance ;

• privilégier de petites attentions quotidiennes ;


Bon à savoir • « pousser dans le dos » pour encourager, donner l’élan
nécessaire à l’action ;
Les jeunes aidant·e·s sont
des enfants, des adolescent·e·s
Elles·ils • offrir de la disponibilité et des espaces de partage et de
et de jeunes adultes de moins de 25 ans. parole pour accueillir leur vécu et ressentis, qu’elles·ils
pent d’une perso nne qui ne va pas bien. Il
s’occu
le, par exemple puissent déposer, partager et ne pas rester seul·e·s ;
peut s’agir de quelqu’un de la famil
-mère , le grand -père ,
la mère, le père, la grand
le frère ou la sœur . Il peut égale ment s’agir d’une • conseiller sur la base de l’expérience ou de l’expertise,
ple pas de valeurs.
personne de l’entourage proche, par exem
ils doive nt gérer
d’un·e voisin·e ou d’un ami·e. Elles·
s scola ire ou leur forma tion.
en parallèle leur cursu Soutien matériel et financier : il est une base au sentiment
emment
Elles·ils ont tendance à souffrir plus fréqu de sécurité. Si les besoins de base ne sont pas garantis, les
de probl èmes physi ques et psych osoci aux.
jeunes auront de la difficulté à se sentir bien dans d’autres
à l’école
Elles·ils sont particulièrement sollicité·e·s domaines de leur vie. Le soutien matériel et financier est
vé·e·s dans leur vie sociale
et en formation et entra principalement du ressort des parents. Lorsque ces derniers
. En Suisse leur nomb re est évalu é à 50
et leurs loisirs

AGIR
probl émat ique exige donc une atten tion ou l’entourage proche sont en difficulté ou absents pour
000. Leur
l’assurer, les adultes en contact avec les jeunes doivent s’en
particulière https://www.young-carers.ch/fr.
soucier. Pour ce faire :
rd’hui
De nombreux jeunes semblent jouer aujou
tant rôle de « pairs -aida nt·e·s » pour leurs • s’inquiéter de leur situation financière et matérielle et
un impor
le
ami·e·s en difficulté psychique. Elles·ils sont évaluer leur besoin d’aide ;
elles·eux
premier réseau de soutien et tissent entre
une sorte de filet de veille et parfo is d’ala rme. • les informer sur les aides officielles existantes : bourses,
le souci
Plusieurs jeunes entretenu·e·s ont mentionné subventions caisse maladie, aide au logement, aide so-
été
qu’elles·ils ont pour des ami·e·s et avoir déjà ciale, possibilité de recevoir directement les allocations
pour des
les donneur·euse·s d’alerte aux proches familiales ou de formation, etc. Le cas échéant, les ac-
e. Ceci met en évide nce
tentatives de suicid compagner dans les démarches nécessaires ;
e de soute nir les comp étenc es de l’en-
l’importanc
qui sont
semble des jeunes, aussi de celles et ceux • faire connaître le réseau social de soutien en réalisant par
des ressources pour leurs pairs. exemple une carte visuelle de celui dédié à la jeunesse
dans sa région. La présenter et la mettre à disposition
des jeunes à l’école, dans les centres de formation, les
entreprises, etc. ;

75
• les aiguiller vers des services ou ressources d’aide et de sou- • relayer des adresses et ressources utiles, par exemple :
tien dédiés aux jeunes ou des sites ressources par exemple : www.csp.ch/vaud/services/questions-de-jeunes ou
www.coupdepoucemajeur.ch/content/aides-et-alloca- www.autonomia-ge.ch/lassociation ; les articles de on-
tions-durant-la-formation ; tecoute·ch sur le thème de l’argent et de l’administratif
www.ontecoute.ch/themes/argent/?page=4#article-list ;
• leur fournir des adresses ressources pour : le starter pack pour la vie d’adulte de ontecoute·ch
www.ontecoute.ch/articles/ton-starter-pack-pour-la-
- trouver des petits jobs, p. ex. : www.adosjob.ch ; www.pe- vie-dadulte.
titboulot.ch/?page=1& ;
Soutien à la formulation d’intentions d’implémentation : il
- des réseaux de deuxième main pour les vêtements, de s’agit d’aider les jeunes à passer d’une intention abstraite ou
magasins sociaux, de soutien alimentaire, etc. P. ex.
générale à une mise en action concrète dans le quotidien. Par
les boutiques et épiceries de Caritas dans les cantons ;
exemple, passer de « je veux faire plus de sport » à « chaque
- des activités de loisirs, de vacances accessibles ou de bé- matin je fais 10 pompes et je me rends en vélo au travail ».
névolat : p. ex. : www.caritas-jeunesse.ch/nos-activites ; L’intention d’implémentation permet de rendre concrète
www.redcross.ch/fr/aidez-nous/benevolat/possibilites- une intention générale et d’ouvrir des possibilités pour at-
d-engagement-benevole/benevolat-pour-les-jeunes ; teindre un objectif. Elle permet aussi de minimiser certaines
www.proju-arc.ch/aide-jeunesse ; tendances à la procrastination par la mise en perspective
d’objectifs simples et accessibles (www.bst.bkd.be.ch/fr/start/
- la gestion de budget ou le désendettement : www. themen/lern-arbeitstechniken/allgemeine-arbeitstechniken/
jugendbudget.ch/fr/risque-dendettement-eviter- aufschieben-vermeiden.html) C’est une étape importante
lendettement-des-adolescents et Till Next Bill, un jeu dans l’identification de son pouvoir d’agir qui soutient le
vidéo de prévention du surendettement proposé par sentiment de compétence central pour la santé psychique16.
le canton de Vaud pour les 15-25 ans. www.reiso.org/
actualites/fil-de-l-actu/11150-till-next-bill-un-jeu-
video-de-prevention-du-surendettement.
Bon à savoir
La digitalisation des
Soutien instrumental : il s’agit d’un soutien pratique pour
démarches administratives,
ent
réaliser certaines tâches comme un déménagement, un les cartes bancaires et les modes de paiem
nistra tives de
déplacement en voiture, la recherche d’un travail, une de- par internet rendent les tâches admi
Fini les table s famil iales
mande de renseignement ou tout autre « coup de main » plus en plus abstraites.
devient
particulier. Pour les 16-25 ans, les tâches administratives jonchées de documents chaque mois. Tout
le et peu tangi ble. Sans un accen t consc ient
constituent un vaste domaine où elles·ils disent avoir besoin invisib
les jeune s peuve nt
de soutien pratique. (voir
(voir p. 13).
13). Par exemple : à une éducation administrative,
grandir et devenir maje ur·e·s sans s’être rendu
saire
concrètement compte de tout ce qui est néces
• aider à remplir des formulaires, à suivre la correspon- dans ce doma ine pour vivre dans notre socié té et
dance, à vérifier des messages, du courrier, un budget, à uissance
se retrouver avec un fort sentiment d’imp
rédiger un Curriculum Vitae, à prendre un bail à loyer, à rité. Nous devon s porter
au moment de leur majo
faire un état des lieux, à déposer une demande d’aide, à cette quest ion qui peut péjor er la santé
attention à
faire une offre d’emploi, etc. ; ique de différentes mani ères : par le stress
psych
quences
qu’elle occasionne, mais aussi par les consé
• accompagner physiquement pour certaines démarches potentielles si ces déma rches ne sont pas faites .
(rendez-vous dans des services administratifs, étatiques, admi nistra tive et citoy enne doit donc
L’éducation
er une
médicaux, police, etc.) ; être un souci des parents, mais aussi trouv
forma tion. Tout
place dans les programmes de
• veiller à la défense de leurs droits et intérêts et les leur adulte en lien avec les jeune s devra it vérifi er leur
faire connaitre. Par exemple au moyen du nouveau portail étenc es en la matiè re et trava iller à
niveau de comp
d’information du canton du Valais destiné aux 12-2o ans sur liorer en « faisa nt avec » et non « à la place »
l’amé
leurs droits et leurs devoirs www.reglo.ch. Cette question de la·du jeune.
est particulièrement importante pour les jeunes mineur·e·s
non accompagné·e·s au moment du passage à la majorité.
Deux ressources du Service social international peuvent
leur être utiles : la plateforme « Myself » du Service social
international pour les jeunes MNA qui deviennent adultes
www.ssi-suisse.org/fr/projets-actuels/368 et le projet
participatif « My perspective » www.my-perspective.
ch/fr/projet/my-perspective ;

16 Toli, A., Webb, T. L., & Hardy, G. E. (2016). Does forming implementation intentions help people with mental health problems to achieve goals? A meta analysis of
experimental studies with clinical and analogue samples. British Journal of Clinical Psychology, 55(1), 69-90.) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25965276

76
POUR ALLER PLUS LOIN

Audet et al. (2019). Mieux comprendre le soutien social durant la


transition à la vie adulte chez des jeunes présentant un profil de
vulnérabilités : Aperçu des connaissances actuelles :
www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&c-
d=&ved=2ahUKEwjWjebR47b_AhWrhP0HHUcbCjgQFnoECBE-
QAQ&url=https%3A%2F%2Fsante-mentale-jeunesse.usherbrooke.
ca%2Fwp-content%2Fuploads%2F2019%2F04%2FAudet-et-al.-2019.
pdf&usg=AOvVaw03myPkB9qFNFHLM_hJ6ePV

Des approches diversifiées qui font sens pour les jeunes


LA PARTICIPATION

L’OMS considère la participation comme une condition préalable à une croissance


saine et à une bonne qualité de vie. Pour les 16-25 ans, elle est un important
fondement de leur pouvoir d’agir et de leur sentiment d’au-
to-efficacité et de cohérence, indispensable au développement
de l’autonomie. Aujourd’hui, plus que jamais, il est crucial d’im- PAROLES D’EXPERT·E·S
pliquer les jeunes dans les réflexions globales que nous devons
mener pour l’avenir de notre planète et le vivre-ensemble ainsi Prendre en compte les besoins
que de favoriser leur engagement dans des actions collectives
qui soutiennent la transition personnelle et sociétale et qui des jeunes, c’est adapter nos
font sens pour elles·eux. Les activités associatives (sportives, pratiques pour les toucher.
culturelles, thématiques, etc.) ont un grand rôle à jouer dans
ce domaine. Elles sont d’importants terrains d’expression et
d’entrainement de compétences psychosociales pour de nombreux·ses jeunes et
peuvent favoriser leur participation et leur engagement en leur donnant une place
dans le développement de leurs activités et dans leurs processus décisionnels.

Les professionnel·le·s qui accompagnent des jeunes doivent mettre un accent


sur la qualité de la participation qui leur est accordée dans les décisions qui les
concernent dans toutes leurs sphères de vie (bénévolat, comités scolaires ou as-
sociatifs, participation aux processus décisionnels de l’école, de l’entreprise et de
la société, engagement dans des projets locaux ou pour des causes, choix de vie,
etc.). La participation des jeunes ne doit pas être un alibi. Pour cela, les adultes
doivent reconnaître les compétences des jeunes, prendre réellement en compte
leurs avis et idées, leur proposer un maximum d’opportunités de l’entrainer et
réhabiliter une culture positive de l’échec et de l’erreur. Une récente étude sur le
stress menée par Pro Juventute (2022) a mis en évidence une corrélation entre le

AGIR
niveau de stress perçu par les jeunes et le niveau de participation dans le cadre
familial. Les plus stressé·e·s étant celles et ceux qui ont le moins de possibilités de
participer aux décisions qui les concernent et qui ressentent donc une absence de
contrôle sur leur vie. La participation des jeunes devrait entrer dans les habitudes
naturelles des écoles, des organisations de formation, des entreprises et de toute
structure qui s’occupe de jeunes. Il s’agit de penser et d’agir avec et non pour les
jeunes et de les impliquer à toutes les étapes des processus qui sont mis en place.

POUR ALLER PLUS LOIN

Unicef, 2020 : La participation des enfants et des jeunes en théorie et en


pratique. Pour les communes et villes.
www.unicef.ch/fr/shop/publikationen/g160-f-la-participation-des-
enfants-et-des-jeunes-en-theorie-et-en-pratique-pour

77
LES APPROCHES PAR LES PAIRS
DES PROJETS PARTICIPATIFS INSPIRANTS
Les pairs sont d’importantes ressources pour les jeunes.
Lorsqu’elles·ils se retrouvent en difficulté, elles·ils ont ten- Idée sport et ses projets de mouvement ouverts
dance à essayer de résoudre leurs problèmes seul·e·s, puis se et gratuits où les jeunes sont responsables de
tournent vers leurs pairs. Les adultes ne sont pas toujours l’organisation et de l’encadrement des événements.
perçu·e·s comme des soutiens fiables (lien de confiance) et www.ideesport.ch/fr/programmes
ne sont souvent sollicité·e·s que lorsque les deux premières
stratégies n’ont pas donné de résultat probant. Or, l’étude Parlement des jeunes, pour soutenir l’éducation
menée par UNICEF en 2022 a montré que 29,1% des jeunes citoyenne et la participation politique des jeunes.
interrogé·e·s n’ont parlé à personne de leurs problèmes et www.fspj.ch
seulement 3% disent avoir eu recours à des professionnel·le·s Réseau jeunes de SANTÉ SEXUELLE Suisse pour
de la santé ou de l’éducation. discuter sans tabou de questions en lien avec la
sexualité et la santé sexuelle et s’impliquer dans
Ceci met en évidence l’importance de s’appuyer sur les des projets participatifs de promotion de la santé
pairs et de favoriser le partage de ressources et de compé- sexuelle. www.sante-sexuelle.ch/nos-activites/
tences directement entre elles et eux. Pouvoir s’appuyer sur reseau-jeunes
l’expérience et la présence de jeunes qui vivent une réalité
similaire à la sienne est un important facteur de protection
de la santé psychique. Les groupes de pairs jouent donc un DES PROJETS DE PRÉVENTION ET DE
rôle majeur non seulement dans des processus de rétablis- PROMOTION DE SANTÉ PAR LES PAIRS EN
sement (pairs praticien·ne·s en santé mentale, p. ex.) mais SUISSE ROMANDE
aussi en promotion de la santé psychique (éducation par les
pairs ou projets collectifs participatifs entre pairs, p. ex.). Association AdO, prévention par les pairs en
Les approches par les pairs soutiennent la santé psychique milieu festif
tant des jeunes facilitateurs·trice·s que des bénéficiaires www.association-ado.ch/fr
des activités. Elles facilitent l’ouverture de la parole sur des
Be my Angel
préoccupations partagées, permettent d’entraîner les com-
www.bemyangel.ch/fr
pétences psychosociales et la responsabilité personnelle ainsi
que de partager des ressources qui font sens pour les jeunes, Ever Fresh
car directement en lien avec leur réalité. Elles sont d’impor- www.ideesport.ch/fr/programmes/everfresh
tantes pistes à explorer pour le soutien à la santé psychique Georgette in Love, Fondation Profa
des jeunes et devraient être conséquemment soutenues par www.cpnv.ch/gil
les pouvoirs publics, car elles sont exigeantes en termes de
mise en place et de suivi pour en assurer la qualité. Le Boulevard, Empreinte Fribourg
www.tremplin.ch/fr/prestations/promotion-
LES APPROCHES SYMBOLIQUES de-la-sante-sexuelle

Les forums interactifs entre pairs


Les approches symboliques qui s’appuient sur la créativité,
www.ontecoute.ch/forum et www.ciao.ch/forum
l’écriture, le théâtre, la peinture, la danse, la photographie, ou
toute forme d’expression, sont particulièrement pertinentes
pour les jeunes, car elles leur permettent d’alimenter à la
fois le dialogue interne et la connaissance de soi et d’expri-
mer des émotions ou ressentis autrement que par des mots
Se former
parfois difficiles à trouver ou à prononcer. Elles permettent Un·e adulte soutenant·e qui peut offrir un accompagnement
de « mettre de l’ordre » dans les différentes expériences, de de qualité, c’est aussi un adulte qui se sent à l’aise, confiant·e
prendre de la distance avec celles-ci et facilitent leur partage et compétent·e face aux jeunes. Les défis et les thématiques
avec les autres. Elles sont donc importantes dans le contexte qui peuvent émerger pour les jeunes entre 16 et 25 ans sont
actuel, car elles permettent de soutenir des processus de nombreux et variés. Les adultes qui les côtoient doivent
construction de sens et peuvent être de réels outils de pro- pouvoir disposer de connaissances et de compétences dans
motion de la santé psychique17. de nombreux domaines. C’est donc nécessaire qu’elles·ils se
forment de manière régulière sur les thèmes qui font sens
pour les jeunes, mais aussi à des approches particulièrement
pertinentes pour accompagner cette tranche d’âge. Ci-après
quelques idées de formations en Suisse romande.

17 Zittoun.T.2012 : Usage de ressources symboliques à l’adolescence www.revue-tranel.ch/article/view/2934


Et Psychologie des transitions : des ruptures aux ressources
www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjDq4qRi9WBAxWFG-wKHZcPCHoQFnoECA0QAQ&url=https%3A%2F%2Flibra.unine.
ch%2Fentities%2Fpublication%2F08106f10-f223-4bbd-a4c6-2e39e2750223&usg=AOvVaw2Z3si1cedR6IGBY-uT-n31&opi=89978449

78
SE FORMER AUX ENJEUX DE LA TRANSITION ET SE FORMER DANS DES APPROCHES SOUTENANTES
À LA SANTÉ PSYCHIQUE
Les approches d’intervention systémiques,
Les modules de formation #MOICMOI sur les issues de « l’Ecole de Palo Alto » qui permettent
enjeux du développement psychosocial des de reconnaître la complexité des situations et
adolescent·e·s et les CPS www.moicmoi.ch de considérer la personne dans sa globalité en
tenant compte de l’influence des systèmes et des
Les symposiums sur l’adolescence de l’UNIL
interactions entre les diverses sphères de la vie
https://wp.unil.ch/sympados
https://www.cerfasy.ch/clinique-approche.html;
Les ressources, formations, bibliothèque et https://www.hesge.ch/hets/formation-continue/
agenda de santepsy.ch https://santepsy.ch formations-postgrade/certificats-cas/cas-en-ap-
proche-systemique
Les interventions et formations de la Coraasp
www.coraasp.ch/cours-interventions Les approches DPA-PC de développement du
pouvoir d’agir (empowerment) pour développer
Les formations de « Stop suicide »
des postures d’accompagnement qui soutiennent
www.stopsuicide.ch ; https://stopsuicide.ch/
les capacités concrètes des personnes (individuel-
nos-actions/formation-des-professionnelles
lement ou collectivement) d’exercer un plus
Les cours Ensa de Pro Mente Sana, premiers secours grand contrôle sur ce qui est important pour elles,
en santé psychique orientés « adolescent·e·s » leurs proches ou la collectivité à laquelle elles
www.ensa.swiss/fr s’identifient
Les formations continues de Santé sexuelle https://dpapcsuisse.ch/initiation-niveau-1
Suisse pour les professionnel·le·s, sur la sexualité L’approche transformative unitaire de l’être
et la santé sexuelle (système des drapeaux, humain dans les soins de santé de Martha Rogers
Dosavi, santé sexuelle et droits sexuels) (utilisée par l’unité PSPS du canton de Vaud)
www.sante-sexuelle.ch/nos-activites/ qui considère l’être humain dans sa totalité et
formations-conferences vise à accompagner les jeunes dans la prise
Le CAS et formations continues en neurosciences de conscience de leur capacité à faire des choix
de l’éducation de l’UNIFR pour amener des changements dans leur vie et
www.unifr.ch/formcont/fr/formations/detail. optimiser leur bien-être et leur potentiel
html?cid=2687 Rogers ME. Nursing science and the space
age. Nurs Sci Q. 1992 Spring ; 5(1) :27-34. doi :
Les risques psychosociaux. Les comprendre et 10.1177/089431849200500108. PMID : 1538852.
les prévenir. Offre de formation Unisanté pour https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/1538852
les entreprises
www.unisante.ch/fr/mandats-services/ Les approches basées sur le parcours de vie qui
formations-entreprise/risques-psychosociaux- cherchent à comprendre les logiques qui
comprendre-pour-prevenir structurent des trajectoires diverses (personnelles,
scolaires, professionnelles, de santé, etc.)
des individus et permettent d’appréhender les
interactions qui les lient les unes aux autres en
les ancrant dans des contextes sociaux particuliers :
UNINE www.unine.ch/ipe/de/home/recherche/

AGIR
transitions-et-trajectoires.html ; UNIL et UNIGE
www.centre-lives.ch.

79
Axe 5 : Impliquer l’ensemble des acteurs Développer des environnements qui
et actrices et la société soutiennent la santé psychique des jeunes
Le travail sur le développement et le renforcement des com-
Notre société a une propension pétences de vie et en santé des jeunes est important, mais
à vouloir adapter les gens seul, il n’est pas suffisant. Pour être cohérent, il doit être
accompagné d’un accent parallèle sur les environnements
au système… et moins à repenser de vie et d’apprentissage. Les contextes de formation et de
de manière éthique le fonction- loisirs doivent s’engager à développer des milieux favorables

nement de celui-ci pour qu’il


au développement des jeunes et à leur santé psychique.

soit adapté aux réalités sociales DES CONTEXTES DE FORMATION ET DE TRAVAIL

et humaines des personnes qui NON-DISCRIMINANTS ET SÉCURISANTS

le composent. L’idée de la Le sentiment de sécurité


compétence doit être examinée psychologique se définit comme
et relativisée afin de la resituer un climat de confiance, de
dans le contexte social et cultu- respect, de transparence et
rel qui est le nôtre – un contexte d’ouverture où les indivi-
où les inégalités sociales de dus peuvent s’exprimer sans
santé se font particulièrement craindre d’être punis,
sentir. humiliés ou marginalisés.
CULTURE ET SANTÉ ASBL. 2016.18 AMY C. EDMONDSON.

18 Compétences psychosociales et promotion de la santé. Focus santé n°4.

80
au niveau des exigences qu’au niveau relationnel. Le climat
Le sentiment de bien-être et de sécurité des jeunes de
général de l’établissement de formation ou de l’entreprise
16 à 25 ans est fortement influencé par les principes
ainsi que la manière dont les jeunes vont se sentir reconnu·e·s,
éthiques sur lesquels se basent le fonctionnement des
structures. Les cadres internationaux en matière de pris·e·s en considération et soutenu·e·s vont fortement
santé (OMS) et d’éducation (UNESCO) mettent en influencer leur sentiment de bien-être. Or, ce dernier joue
évidence que le respect des droits humains, l’égalité un rôle prépondérant dans leur santé psychique, mais aussi
des chances et de traitement, l’inclusion, la non- dans leur motivation au travail.
discrimination et la participation doivent être les
socles sur lesquels doivent se développer nos actions. LES APPROCHES GLOBALES ET INTÉGRÉES
Pour soutenir la santé psychique des jeunes, ces
principes doivent se décliner dans les pratiques, dans Les approches globales et intégrées qui agissent simultané-
les structures, dans les offres et les méthodes et ment sur les individus, les structures, les groupes et la com-
dans les postures professionnelles. munauté sont reconnues comme particulièrement efficaces
pour soutenir la santé psychique des jeunes. Elles sont aussi
indispensables dans le travail en compétences psychosociales.
De telles approches doivent s’inscrire dans une démarche
Le sentiment de sécurité est primordial pour la santé psy- planifiée (avec des objectifs déclarés et des stratégies claires),
chique, particulièrement pour celle des jeunes en raison de intégrée (s’inscrire dans la vie de la structure et impliquer tout
« l’entre-deux » qu’elles·ils vivent à la fois dans leur déve- le monde) et holistique (qui prend en compte la complexité
loppement et socialisation, mais aussi au niveau de la société et agit sur ses différentes composantes). Elles doivent aussi :
actuelle. La mouvance des repères intérieurs créée par les
importantes transformations physiques et psychosociales • tenir compte des aspects multidimensionnels des jeunes :
est renforcée aujourd’hui par l’instabilité du monde extérieur la santé psychique des 16-25 ans est intimement liée à
et la difficulté à trouver du sens et de la cohérence. Il n’y a leur quête d’identité, à leur recherche d’autonomie et à
plus de chemin tracé. Les repères extérieurs à la fois se multiplient leurs choix. Ces trois dimensions se jouent dans tous les
et perdent en force de direction. Plus que jamais, les jeunes ont domaines de leur vie et s’entremêlent dans leur quotidien,
besoin de pouvoir trouver une certaine stabilité et de la sé- mettant en jeu des défis au niveau de toutes les dimensions
curité dans leurs contextes de vie, de formation et de travail. de leur être. Soutenir leur santé psychique, c’est donc
Nous devons veiller à agir consciemment, là où nous sommes, développer des actions pour soutenir les connaissances
pour les aider à développer leur boussole intérieure et leur et compétences dans toutes les dimensions : physique
assurer l’existence de « bases d’envol et d’atterrissage » (corps), cognitive (tête), émotionnelle (cœur), sociale
sur leur parcours vers l’âge adulte. En plus du soutien social (lien) et spirituelle (sens). C’est aussi favoriser les liens
de la famille, des pairs et des professionnel·le·s, la qualité entre ces dimensions ;
des environnements de formation et de travail constitue un
puissant levier à activer. • prendre soin du climat qui règne dans les établissements
de formation, les entreprises et les milieux de vie et de
Les établissements de formation du secondaire (I et II), les loisirs : les jeunes sont particulièrement sensibles à la manière
Hautes Ecoles et les entreprises sont d’importants lieux de so- dont elles·ils sont accueilli·e·s et considéré·e·s par les adultes
cialisation et d’apprentissage. Les 16-25 ans y expérimentent qui les entourent ainsi qu’aux valeurs qui soutiennent
leur autonomie et leurs compétences personnelles, sociales le vivre-ensemble. Elles·ils sont aussi particulièrement
et professionnelles. Ce sont aussi des lieux où se tissent de sensibles à la justice et à la non-discrimination qui leur garan-
nouvelles relations, notamment avec d’autres adultes que les tissent de pouvoir être elles·eux-mêmes sans risque, ainsi
proches, ainsi que de grands contextes d’expérimentation des qu’à la manière dont sont pris en compte leurs besoins. Pour

AGIR
rôles sociaux et de prise de responsabilités. Les recherches apprendre et oser s’engager, elles·ils ont besoin d’envi-
ont montré que la santé et l’éducation sont reliées. Les jeunes ronnements qui soignent l’atmosphère qui règne dans les
ne peuvent développer leurs compétences et atteindre leur plein rapports sociaux et qui veille à leur sécurité psychologique
potentiel que si leurs besoins en matière de santé physique, mentale, et à leur bien-être. Un climat scolaire ou d’entreprise
intellectuelle et affective sont satisfaits. Leurs environnements positif soutient les apprentissages et le développement
de vie, de formation et de travail ont donc une importante de relations de confiance. Il assure la stabilité, favorise
responsabilité pour créer des milieux qui soient de bons la coopération à l’interne et à l’externe et privilégie le
endroits pour apprendre, travailler et aussi se ressourcer. soutien social. Pour les établissements scolaires et de
formation, Janosz met en évidence cinq composantes du
Le passage de la scolarité obligatoire à la formation générale climat scolaire qui font aussi sens dans les entreprises :
ou professionnelle puis à la formation supérieure ou au monde le climat relationnel, le climat éducatif, le climat de sécurité, le
du travail nécessite l’activation de nombreuses compétences climat de justice et le climat d’appartenance. Janosz, M. & al.
d’adaptation à de nouvelles exigences et normes. C’est un pro- (1998). L’environnement socioéducatif à l’école secon-
cessus qui demande beaucoup d’énergie et qui peut nécessiter daire. In : Revue Canadienne de Psycho-éducation, Vol 27, No
du temps avant que les jeunes ne se sentent en confiance, à 2, 1998, 285-306. www.climatscolaire.ch/wp-content/
l’aise et compétent·e·s dans le nouvel environnement, tant uploads/Janosz-article-1998.pdf

81
Les approches globales et intégrées sont aussi une réponse
intéressante pour les entreprises face au changement de RESSOURCES
rapport au travail des jeunes. Aujourd’hui leurs aspirations
s’orientent majoritairement vers un besoin d’épanouissement www.climatscolaire.ch, un site romand qui
et un souci constant de bien-être qui influence aussi la rela- présente des réflexions et des exemples d’activités
tion au travail. Ce dernier est de moins en moins considéré pratiques qui ont pour but de développer le mieux
par les nouvelles générations comme une finalité et bien vivre ensemble et la prévention des violences en
plus comme un moyen de réaliser leurs aspirations. Pour milieu scolaire
nombre de jeunes, le travail est un paramètre parmi d’autres www.ecoleenaction.ch - démarche d’établissement
dans leur quête de satisfaction et de bonheur. Elles·ils pri- pour la prévention du stress au travail dans les
vilégient souvent le temps partiel pour pouvoir concilier vie écoles (de tous niveaux) soutenue par Promotion
professionnelle et vie privée, ont besoin de se sentir dans un Santé Suisse
environnement « familial et amical » pour développer leur
créativité et n’hésitent pas à renoncer à travailler au sein www.friendlyworkspace.ch/fr, la plateforme de
d’entreprises trop traditionnelles qui ne correspondent pas à Promotion Santé Suisse sur la gestion de la santé
leurs valeurs. La motivation des jeunes au travail semble donc en entreprise
aujourd’hui beaucoup moins liée au salaire, à la récompense www.reseau-ecoles21.ch/, le Réseau d’école en
extérieure ou au statut social (motivation extrinsèque) qu’à santé et durable
la gratification de soi, au plaisir à la tâche et au bien-être
(motivation intrinsèque). Il n’en reste pas moins qu’elles·ils Pour approfondir des pistes d’action spécifique-
ont besoin d’un revenu suffisant pour pouvoir s’émanciper des ment dédiées au contexte scolaire, voir la partie 3
parents et vivre de manière indépendante. Les entreprises se du Cahier de référence dédié aux 12-16 ans qui a
retrouvent donc devant de nouvelles exigences : celle d’être mis le focus sur le pouvoir d’agir des écoles et des
attractives au niveau de la rémunération et de garantir des enseignant·e·s. Les éléments qui y sont développés
environnements propices au bien-être et à la motivation, ce conviennent aussi pour le secondaire II
à quoi les approches globales et intégrées de promotion de https://santepsy.ch/actualite/sante-mentale-
la santé psychique contribuent grandement. des-adolescent%C2%B7e%C2%B7s-un-cahier-
de-reference-pour-les-professionnel%C2%B7le
L’implication de l’ensemble de l’établissement ou de l’en- %C2%B7s/
treprise dans une telle démarche de promotion de santé est
donc essentielle. Sans accompagnement par des mesures
structurelles et collectives, les actions de promotion de la
santé psychique dédiées aux jeunes comportent le risque de
Les principes de l’approche globale et intégrée en pro-
faire reposer la résolution des problèmes uniquement sur
motion de santé sont aussi pertinents pour repenser au
l’individu (psychologisation), ce qui est par exemple parti-
niveau sociétal les cadres politiques et structurels qui in-
culièrement problématique dans les situations de violences,
fluencent les parcours des 16-25 ans ainsi que l’organisation
d’intimidation ou de harcèlement, mais aussi concernant
des prestations qui leur sont destinées. Les déterminants
l’éco-anxiété que beaucoup ressentent. Ce sont des domaines
de la santé psychique des 16-25 ans touchent pour une
où le travail sur les contextes est bien souvent le principal
grande part à des dimensions sociales et sociétales qui ont
levier à activer. Lorsque ces derniers sont peu soutenants,
un impact prépondérant sur leur santé psychique. Des poli-
les professionnel·le·s doivent rester conscient·e·s qu’elles·ils
tiques publiques (santé, éducation, social, culture, logement,
ont toujours un pouvoir d’agir dans la relation directe avec les
jeunesse, etc.) et des cadres de fonctionnement institu-
jeunes et la manière de travailler avec elles·eux. Chacun·e, là
tionnels qui s’appuient sur une vision globale des besoins
où elle·il est, peut contribuer à la santé psychique des jeunes
des jeunes et permettent de décloisonner les prestations,
et doit passer à l’action.
notamment par des financements croisés facilités, sont donc
particulièrement judicieux. Ils permettent de pen-
ser les interventions sous forme de dispositifs et de
mieux ajuster les prestations aux besoins du dévelop-
pement et du bien-être global des jeunes. (Voir le docu-
ment de travail de Promotion Santé Suisse sur l’approche
multisectorielle pour la Suisse romande et le Tessin
https://promotionsante.ch/node/718).

82
Quelques exemples de mesures structurelles sociétales proposées par les
expert·e·s

• rallongement de la formation obligatoire jusqu’à 18 ans pour éviter les


difficultés des 16-18 ans en rupture de formation ;

• prolongement des aides éducatives ou sociales au moment du passage


à la majorité ;

• mise à disposition de ressources pour des programmes de transition


basés sur les compétences psychosociales et les approches symboliques
et pas seulement sur du renforcement scolaire ;

• reconnaissance de la participation politique et sociale des jeunes comme


mesure de promotion de la santé psychique et soutien à son implantation ;

• mise en place de mesures pour contrer la précarité des étudiant·e·s


et des jeunes en formation (stages décemment rémunérés, initiatives
« remplir le frigo », etc. );

• offres de prestations communautaires faciles d’accès (gratuité,


horaires, information, langage accessible – falc - , plusieurs langues) ;

• création de centres de prestations pour jeunes regroupant sous un même


toit (ou sous forme d’unités mobiles) des prestations dans des domaines
d’importance pour les jeunes : informations juridiques et sociales, santé
sexuelle, aides sociales, bourses, soutien administratif, etc. ;

• politique de logement et de soutien financier qui tient compte des budgets


réduits des jeunes : par exemple gratuité de la contraception pour les
jeunes, mise à disposition de serviettes hygiéniques, de préservatifs dans
les écoles et les lieux fréquentés par les jeunes, etc. ;

• renforcement du soutien à la parentalité : soutien social et matériel aux


familles, formation aux enjeux de la transition à l’âge adulte, groupes
d’échanges, etc.

Bon à savoir
au
L’engagement des professionnel·le·s qui sont
ct des jeunes dans le trava il de plaid oyer est
conta
ques publiques et les cadres
un levier important pour faire évoluer les politi
nt faire enten dre les besoi ns des jeunes et les
sociétaux. Elles·ils peuve

AGIR
ils ont aussi un rôle important
réalités rencontrées sur les terrains. Elles·
s des jeunes pour mettre
à jouer dans le travail de sensibilisation auprè
ions politi ques sur leur quotidien et
en évidence l’impact de certaines quest
u’elle s·ils le peuve nt, sur les objets politiques
les encourager à voter, lorsq
qui les concernent.

83
Implémenter la promotion
de la santé psychique des
16-25 ans

La réussite des approches de promotion de la santé psychique est intimement


liée à la qualité des contextes, aux postures des adultes et à la cohérence entre
les différents acteurs et actrices autour des jeunes. Elle est aussi fortement dé-
pendante de la manière dont les jeunes peuvent s’impliquer
dans la famille, l’établissement de formation ou l’entreprise
PAROLES D’EXPERT·E·S et trouver de réels terrains d’expérimentation de leurs compé-
tences psychosociales. Ceci demande un engagement de toutes
Pour accompagner la santé et tous et l’acceptation d’une temporalité un peu différente de

psychique des jeunes nous celle effrénée de nos institutions.

devons sortir de la logique de Les connaissances actuelles en matière de santé psychique des

territoire et « d’ego » insti- 16-25 ans laissent entrevoir des pistes pour agir en promotion
de santé mentale. Elles mettent surtout en évidence qu’il ne
tutionnel pour mettre les jeunes s’agit pas vraiment de développer de nouvelles prestations,
au centre. La capacité des mais plutôt de décloisonner les settings, de casser les silos, de
travailler en synergie et en réseau pour accompagner au mieux
professionnel·le·s et des struc- les transitions vers l’âge adulte. Cela signifie :
tures à « concentrer les univers
et à sortir des boîtes » est • réfléchir de manière globale, travailler plus consciemment
à faire des liens entre les domaines, intégrer partout où
indispensable. Anticipation nous le pouvons la thématique de la santé mentale et le

et participation : ce sont renforcement des compétences psychosociales et de santé


et accorder un soin tout particulier à accompagner les nom-
les deux maîtres mots à mettre breuses transitions psychosociales qui jalonnent le parcours
en vie avec les jeunes. des jeunes vers l’âge adulte en nous appuyant sur les regards
et compétences croisés de différents secteurs ;

• proposer aux jeunes des prestations transversales simples, facilement ac-


cessibles et compatibles avec leur mode de vie ;

• développer et renforcer les liens entre promotion de la santé, contextes de


formation et monde professionnel : parler un langage commun, identifier les
terrains de renforcement des objectifs mutuels, voir les liens entre santé men-
tale et exigences professionnelles, améliorer la cohérence entre les contextes
de formation et les contextes de travail, créer des plateformes d’échange de
besoins et de ressources ;

• accorder une attention soutenue aux jeunes en situations particulières qui


ont besoin d’approches collectives et d’un soutien à la fois intersectoriel et
personnalisé ;

• sortir de la logique de profit pour réintégrer l’humain et ses besoins fonda-


mentaux de nature, de culture et de spiritualité qui sont au cœur des approches
symboliques.

84
on-de-la-sante-et-prevention
Les réseaux Fribourg  www.fr.ch/ssp/sante/prevention-et-promotion/promoti
rategie-du-canton
www.ge.ch/dossier/prendre-soin-sa-sante-geneve/st
de promotion de Genève  
Jura
la santé des
www.fondationo2.ch
es/accueil.aspx
Neuchâtel   www.ne.ch/autorites/DFS/SCSP/prevention/Pag
cantons latins Tessin www4.ti.ch/index.php?id=27948
Valais  www.promotionsantevalais.ch
.ch/unite-psps
Vaud  www.unisante.ch/fr/promotion-prevention et www.vd

Toute la société est concernée par la santé psychique des Levier : considérer les élèves et les étudiant·e·s comme des
jeunes et possède des leviers d’action : partenaires compétent·e·s et co-créer avec elles·eux la vie de
l’établissement.
Jeunes : conscience de leur importance, de leurs compétences
Entreprises : conscience des besoins des jeunes apprenti·e·s
et du pouvoir d’agir qu’elles·ils ont pour prendre soin de leur
ou travailleur·euse·s en matière de bien-être, d’adaptation
santé psychique. Conscience aussi que le fait de ne pas aller
et d’accompagnement, mais aussi de leur nouveau rapport
bien dans la société n’est pas nécessairement un signe de
au monde du travail qui redéfinit la manière dont elles·ils se
dysfonctionnement personnel ;
positionnent dans l’entreprise. Conscience de l’importance
Levier : garder l’espoir et trouver du sens dans les petites choses de renforcer les liens avec les organismes de promotion de
de la vie quotidienne et dans les engagements sociaux. la santé ;

Parents : conscience de l’importance de leur rôle et de leur Levier : faire évoluer les structures et les modes de fonctionne-
soutien même si leur enfant prend de l’autonomie et peut ment de l’entreprise pour qu’elles soient perçues par les jeunes
comme soutenantes de leur bien-être et valant la peine de
sembler se débrouiller seul·e ;
s’y engager.
Levier : garder un lien vivant avec son enfant.
Politiques publiques et institutions sociales : conscience que
Organismes de promotion de la santé et de prévention : la santé psychique est au croisement de nombreuses poli-
conscience que la santé psychique des jeunes, c’est avant tiques publiques et que la soutenir c’est travailler à avoir une
tout la capacité à activer des compétences psychosociales vision globale des mesures nécessaires (formation, logement,
et de santé pour traverser les défis liés au développement famille, soutien parental, aide sociale, etc.), développer des
identitaire et social de leur âge et non seulement pour faire prestations transdisciplinaires et décloisonner les finan-
face aux risques ; cements. La nouvelle entité interinstitutionnelle créée en
Levier : passer d’approches de prévention basées sur les risques juin 2023 par le canton de Neuchâtel en faveur de l’insertion
à des approches de promotion de santé basées sur le renforce- professionnelle des 15-25 ans est un exemple de dispositif
ment des compétences et des ressources transversales utiles qui réunit les compétences de plusieurs services ;
à toutes et tous et dans tous les domaines d’action (tabac,
Levier : sortir de la logique des structures pour passer à celles
alcool, drogue, sexualité, écrans, etc.).
des dispositifs.
Professionnel·le·s de l’éducation, de la santé ou du social :
conscience que là où elles·ils sont, elles·ils ont un pouvoir
d’agir sur la santé psychique des jeunes en les accueillant sans C’est à partir de la conscience de notre pouvoir d’agir que
jugement dans leur réalité, en s’intéressant à ce qu’elles·ils nous pourrons l’activer. Aujourd’hui, pour soutenir la santé
vivent, en renforçant leurs compétences psychosociales et psychique des jeunes, il ne suffit pas d’en avoir la volonté. Il
en prenant le temps de leur fournir du soutien émotionnel ; faut urgemment AGIR !

Levier : passer des approches de procédures à des approches


relationnelles.

Ecoles et établissements de formation : conscience des im-


portants leviers que constituent le développement d’en-
vironnements sûrs et non discriminants et le soutien à la
santé psychique de l’ensemble de ses acteurs et actrices.
Conscience aussi de l’importance d’introduire dans leurs
cursus de formation un accent explicite sur le développement
des compétences psychosociales non cognitives (émotion-
nelles et sociales) qui sont aujourd’hui d’incontournables
compétences pour s’insérer professionnellement, mais aussi
et surtout pour se débrouiller dans le monde actuel ;

85
Remerciements

Nous adressons nos plus vifs remerciements à toutes les • Lea Perenon, infirmière scolaire, Gymnase de Crissier ;
personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation
de ce document. Tout spécialement : • Marjory Winkler, directrice de l’Association CIAO ;
Pour leur participation aux focus groups et le partage de leur
• Angélique Wüthrich, responsable du PAC cantonal valaisan
« santé psychique des enfants et des adolescent·e·s ».
réalité d’adolescent·e·s :
Promotion Santé Valais.

• les jeunes de Scène Active à Genève ;


Pour l’accompagnement du processus :
• les jeunes des Espaces d’écoute et de parole du Valais
central de l’Association TCI-Valais;
• Alexia Fournier Fall, coordinatrice de la Commission de
prévention et promotion de la santé du GRSP, co-res-
• les jeunes du marché de Noël de Monthey qui se sont ponsable Campagne Santépsy ;
arrêté·e·s sur le stand de Soluna, le Centre de loisir de
Monthey ;
• Stéphanie Romanens-Pythoud, directrice de la Coraasp,
coordination romande des Associations d’Actions pour la
• et tou·te·s les jeunes étudiant·e·s ou apprenti·e·s qui Santé Psychique et co-responsable Campagne Santépsy.
ont accepté de répondre à nos questions dans le cadre
d’échanges individuels ou de groupe.
Pour leur relecture experte du document :

Pour le partage de leur expertise dans des domaines impor-


tants pour les jeunes :
• Valéry Bezançon, professeur de marketing, membre du
Conseil scientifique de la campagne Santépsy.ch ;

• Antoine Bays, chargé de prévention, Association REPER ; • Florence Chenaux, cheffe de projet (programme Mind-
Matters et projet pilote Stress - on fait face !) Fondation
• Sophie Chezeau, directrice de Cap Formations, OFPC Of- RADIX ;
fice pour l’Orientation, la Formation Professionnelle et
Continue du canton de Genève ;
• Jessica De Bernardini, responsable de projet, Promotion
santé Suisse ;
• Sarah Depallens, médecin associée, responsable du CAN
Team, le Child Abuse and Neglect Team, au Centre hos-
• Fabienne Furger, collaboratrice campagne Santépsy.ch ;
pitalier universitaire vaudois (CHUV) ;
• Corina Gogalniceanu, responsable sites ciao.ch et on-
• Cherine Fahim, Dre en neurosciences, Faculté de mé- técoute.ch ;
decine-psychiatrie Université de Montréal, CHU Sainte
Justine, Axe Cerveau et Développement, Canada ; fon- • Stéphanie Mertenat, directrice Fondation O2, Jura ;
datrice et directrice de Endoxa Neuroscience Neuchâtel,
Suisse - Neurosciences et éducation ; • Catherine Moulin Roh, responsable du domaine promotion
de la santé, Promotion santé Valais ;
• Sébastien Gendre, responsable d’unité action sociale,
Hospice Général, Genève ; • Gaël-Anne Pannatier, responsable du bureau romand de
la Fondation RADIX, Radix Suisse romande ;
• Claire Girardet, Cheffe de projet santé mentale à l’Unité de
promotion de la santé et de prévention en milieu scolaire • Stéphane Saillant, médecin-chef du département de psy-
chiatrie de l’adulte et du Centre d’Urgences Psychiatriques
du canton de Vaud ;
(CUP) et psychiatrie de liaison, CNP, Neuchâtel ;
• Clémence Guex, psychomotricienne, Service de l’enfance
et de l’adolescence, Ville de Lausanne ; • Madeleine Taddeï, chargée de missions Santé des enfants
et des jeunes, Direction Générale de la Santé, VD.
• Caroline Jacot-Descombes, directrice adjointe, SANTÉ
SEXUELLE Suisse ;

86
Le cahier de référence est disponible
en version électronique sur le site
www.santepsy.ch. Il peut aussi être
commandé en version papier à
info@santepsy.ch.

Les membres du groupe de travail intercantonal porteur de


la Campagne Santépsy.ch :

• Laure Chiquet, collaboratrice scientifique, Service de la


santé publique du Jura ;

• Tania Larequi, médecin responsable dossiers promotion


et prévention, Direction Générale de la Santé, VD ;

• Myriam Nnadi, conseillère scientifique, Département de


la santé et des mobilités (DSM), Direction générale de la
santé, GE ;

• Laurence Peer, chargée de mission Santé mentale, Direc-


tion santé communautaire, Etat de Vaud ;

• Joanne Schweizer Rodrigues, chargée du programme de


santé mentale, Service de la santé publique, NE ;

• Jean-Blaise Seppey, collaborateur scientifique, Service


de la santé publique, VS ;

• Manuela Vanolli, collaboratrice scientifique, Servizio di


promozione e valutazione sanitaria, TI

• Christel Zufferey, collaboratrice scientifique, Service de


la santé publique, FR.

Pour leur contribution aux focus groups, à l’analyse de


littérature et à la relecture finale du document

• Romane Crettenand, étudiante en master en sciences so-


ciales options psychoéducation et anthropologie (UNINE)

• Debra Lanfranconi, chargée de projet, Santépsy

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IMPRESSUM

Editeur : Santépsy.ch
Autrice : Gilberte Voide Crettenand, g2L snc
Conception graphique : Céline Gogniat, nacara design graphique
Illustrations : Amélie Dupré
Copyright 2023

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Avec le soutien de

88
www.santepsy.ch

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