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du commerce
international
Jean-Michel Jacquet
Philippe D elebecque
Sabine C orneloup
lère édition
daIIoz
Droit
du commerce
international
Droit
du commerce
international
2007
Jean-Michel Jacquet
Professeur à l’Institut universitaire
de hautes études internationales (Genève)
Philippe Delebecque
Professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris I)
Sabine Corneloup
Professeur à l’Université de Bourgogne
daIIoz
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sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Ç
INTRODUCTION
CHAPITRE 3
UN ACTEUR GLOBAL : L’ORGANISATION MONDIALE
100
DU COMMERCE.
'
INTRODUCTION
1. Sur cette notion, v. Ph. Francescakis, « Droit naturel et droit international privé »,
Mélanges Maury, t. I, p. 113 et s. ; R. David, Le droit du commerce international, réflexions d'un
comparatiste sur le droit international privé, Économica, 1987.
2. V., B. Oppetit, Droit du commerce international. Textes et documents, PUF, 1977, p. 30
et s.
4 DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
LE DROIT
DU COMMERCE
INTERNATIONAL,
DROIT
DES ACTIVITÉS
ÉCONOMIQUES
INTERNATIONALES
8 Comme tout commerce, le commerce international est le fruit d’acti¬
vités de caractère économique effectuées le plus souvent par des opéra¬
teurs professionnels et parfois par des États ou des entités publiques.
Ce commerce ne s’effectue pas de la même façon ni avec la même
liberté ou intensité en fonction du contexte politique et économique
qui prévaut dans la société internationale. Mais il a besoin de règles
adaptées autant que possible à ses caractères spécifiques. Il a également
besoin d’un minimum d’organisation, aussi bien pour réguler les
échanges que pour structurer les entreprises.
Consacré aux activités économiques internationales, le droit du
commerce international est, comme toute branche du droit, constitué
6 LE DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL...
'
L’OBJET DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL 9
SOUS-TITRE 1
L’objet du droit
du commerce
international
10 II n’est pas de branche du droit sans objet. Certaines branches du droit
peuvent être très anciennes, comme le droit civil. Il se peut alors que
l’homogénéité et le riche agencement des règles qui les composent
aient fait perdre de vue l’objet même qui a donné naissance à ces
branches du droit. Néanmoins, la nécessité de réunir les règles de droit
en un faisceau plus ou moins fortement coordonné résulte de l’appar¬
tenance des relations sociales auxquelles ces règles s’appliquent à une
catégorie bien déterminée : le droit de la famille, les délits, les droits sur
les choses, l’organisation constitutionnelle de l’État... etc. En raison
des problèmes spécifiques qu’elle soulève, la catégorie ainsi délimitée,
bien qu’elle ne soit pas dépourvue de liens avec les autres catégories de
relations sociales, relève d’un ensemble de règles qui sont aptes à
constituer une branche du droit.
Tel est le cas du droit du commerce international. Son unité ne peut
que de façon très imparfaite lui venir des règles qui le constituent, en
raison de la diversité de leur nature et de leurs origines. Elle repose
essentiellement sur son objet1.
Dans une première vue, nécessairement générale, on retiendra que
le droit du commerce international a pour objet de fournir les règles
qui doivent s’appliquer aux activités économiques internationales.
Cette définition mérite d’être précisée à trois égards2 : L’activité écono¬
mique (Section 1), les participants à celle-ci (Section 2) et l’élément
d’internationalité (Section 3).
1. Sur les rapports entre une branche du droit et son objet, v. les pénétrantes observations
de F. Grua, « Les divisions du droit », RTD civ. 1993. 59 et s.
2. V., Y. Loussouarn et J.-D. Bredin, Droit du commerce international, Dalloz-Sirey, 1969 ;
j.-M. Mousseron, ]. Raynard, R. Fabre, J.-L. Pierre, Droit du commerce international, droit
international de l’entreprise, Litec, 3e éd, 2003 ; P-A. Gourion, G. Peyrard, Droit du commerce
international, 3e éd., LGDJ, 2001; M. Dahan, La pratique française du droit du commerce
international, CFCE, 1992 ; H. Kenfack, Droit du commerce international, 2e éd., Dalloz, coll.
« Mémentos », 2006; S. Graumann-Yettou, Commerce international. Guide pratique, 6e éd.,
Litec, 2005; Ch. Leben, Le droit international des affaires, 6e éd., PUF, coll. « Que sais-je? »,
2003 ; J. Béguin et M. Menjucq (dir.), Droit du commerce international, Litec, 2005 ; Exporter.
Pratique du commerce international, 19e éd., 2005, Foucher-Ubifrance.
10 LES RÈGLES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
LES PARTICIPANTS
SECTION 2.
À L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE
14 La description de la substance des activités économiques visées ne suf¬
fit pas à définir l’objet du droit du commerce international. Il est éga¬
lement nécessaire de s’intéresser à ceux qui participent au commerce
international.
Ceux qui participent au commerce international sont par excellence
ceux qui le réalisent et que l’on désigne communément comme les
opérateurs du commerce international1.
Ces opérateurs sont avant tout des personnes privées, personnes
physiques ayant le plus souvent la qualité de commerçant, mais aussi
et beaucoup plus souvent des groupements, reconnus par le droit, dotés
ou non de la personnalité morale. Les sociétés commerciales, qu’elles
appartiennent ou non à un groupe transnational de sociétés, sont
les principaux opérateurs du commerce international. Leur aptitude
à concentrer des capitaux, à disposer des ressources technologiques et
financières importantes, à mobiliser hommes et femmes autour de
leurs projets explique aisément qu’elles aient une position éminente2.
national. Il suffit pour cela qu’ils aient décidé ou aient reçu pour mis¬
sion de prendre part à ces activités économiques, dans l’orbite desquels
ils sont attirés b
Les États en développement ont aussi fréquemment assuré eux-
mêmes la mise en valeur de leurs ressources en matières premières en
contractant, directement ou par le recours à des établissements publics
avec des sociétés privées étrangères, détentrices de la technologie
requise. Du contrat de concession, à la joint venture, en passant par la
société mixte, nombreuses sont les formes sous lesquelles se sont réa¬
lisées des associations plus ou moins temporaires, orientées vers la
réalisation d’un projet normalement bénéfique au développement de
l’État d’accueil1 2.
L’évocation de sociétés étrangères aux États attire l’attention sur la
troisième précision nécessaire à la définition de l’objet du droit du
commerce international, l’élément d’internationalité.
§ 1. Définition juridique
17 La définition la plus couramment retenue de l’internationalité consiste
à relever parmi les divers éléments d’un rapport juridique la présence
d’un « élément d’extranéité ». Les éléments significatifs de ce point de
vue ne sont pas très nombreux. Il peut s’agir de la nationalité des per¬
sonnes engagées dans le rapport, de leur domicile, résidence habituelle
ou siège,social s’il s’agit d’une personne morale ou d’un être collectif.
Il peut s’agir aussi du lieu de conclusion ou d’exécution d’un acte juri-
SOUS-TITRE 2
*
LE PLURALISME DES SOURCES 17
CHAPITRE 1
LE PLURALISME DES SOURCES
SECTION 1.
LES SOURCES-PROCÉDÉS
DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
23 De telles sources sont intimement liées à la société des opérateurs du
commerce international et aux évolutions qui se sont produites à l’in¬
térieur de cette société. Il convient de ranger parmi elles le contrat
(§ 1), les usages (§ 2) et les principes généraux (§ 3).
§ 1. Le contrat
24 II n’est pas d’usage dans la théorie juridique dominante de classer les
contrats parmi les sources du droit. Les contrats sont en effet soumis
eux-mêmes au droit et ne sauraient constituer la source des règles qui
leur sont applicables.
Cette vérité étant rappelée, il n'en demeure pas moins que l’impor¬
tance de fait qu’il convient de reconnaître aux contrats comme instru¬
ments normatifs du droit du commerce international, n’est pas de
nature à empêcher la reconnaissance de droit de leur qualité d’instru¬
ment de source du droit1. La question se pose au niveau individuel (A),
comme au niveau collectif, où elle doit être assimilée à celle des pra¬
tiques contractuelles (B).
1. V., A. Pellet, « La lex mercatoria, tiers ordre juridique? Remarques ingénues d’un
internationaliste de droit public », in Mélange Ph. Kahn, op. cit., p. 53 et s., spéc. p. 62 et s.
Après avoir comparé le traité au contrat, cet auteur écrit : « Le traité, que tant de traits
apparentent au contrat, est la source par excellence du droit international public ; le fait
qu’il soit conclu par ses destinataires premiers et que sa conclusion et son exécution soient
encadrées par des règles générales dont certaines, rares il est vrai, s’imposent aux parties
ne constitue pas, à ses yeux, des objections de nature à remettre en cause ce postulat fon¬
damental ». Comp. M.-A. Frison-Roche, in Les transformations de la régulation juridique,
op. cit., p. 290 sur l’hypothèse du « contrat aristocratique ».
20 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., Ph. Kahn, « L’internationalité... », op. et loc. cit.; v. N. Molfessis (dir.), Les pra¬
tiques juridiques, source du droit des affaires, Petites affiches, 2003, n° 237, spéc. F. Drum-
mond et Y. Schmidt, « Les manifestations en droit financier », p. 22 et s.
2. V. pour une décision où les juges décideront, qu’à défaut de convention écrite défi¬
nissant les rapports entre les parties au contrat, les clauses des contrats types s’appliquent
de plein droit, CE (10e et 9e S. sect. réun.), 6 juill. 2005, D. 2005. jur. 2094, note Ph Dele¬
becque.
LE PLURALISME DES SOURCES 21
1. Comp. J.-L. Guillot, « Pratiques bancaires, source du droit des affaires », in Les pra¬
tiques juridiques..., op. cit., p. 14 et s. sur l’ensemble de la question et ses rapports avec le
droit spontané, v. P. Deumier, Le droit spontané, préf. J.-M. Jacquet, Économica, 2002.
2. En ce sens M. Fontaine et F. de Ly, Droit des contrats internationaux. Analyse et rédac¬
tion des clauses, 2e éd., FEC, 2003, p. 677 et s. Pour une distinction fructueuse entre diverses
clauses au sein du contrat, v. P. Ancel : « Force obligatoire et contenu obligationnel du
contrat. » RTD civ. 1999. 771 et s.
22 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Cette distinction qui nous paraît particulièrement éclairante est prise en compte par
Ph. Fouchard, qui la considère « assez subtile... » : « L’État face aux usages du commerce
international », Travaux comité fr. DIP 1973-1975. 71 et s. spéc. p. 83.
24 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. pour une analyse approfondie P. Deumier, op. cit., n°230 et s., p. 211 et s.
2. V., E. Gaillard, « La distinction des principes généraux du droit et des usages du
commerce international », in Etudes P. Bellet, Litec, 1991, p. 203 et s.
, 3. Telle est la position clairement adoptée par le Code de commerce uniforme des
Etats-Unis, qui ne distingue pas, sur ce point, usages des parties et usages du commerce
(art. 1.205 (3) : « L’usage des parties ainsi que l’usage du commerce dans la profession ou
la branche du commerce à laquelle elles appartiennent ou dont elles ont ou auraient dû
avoir connaissance, donnent un sens particulier aux termes d’une convention ou bien les
complètent ou les précisent ».)
4. A. Kassis, Théorie générale des usages du commerce. Droit comparé, contrats et arbitrages
internationaux, lex mercatoria, Paris, LGDJ, 1984, qui refuse d’adhérer à toute conception
de l’usage qui lui accorderait davantage de valeur que celle d’un « usage conventionnel ».
La distinction est faite au contraire par T. Popescu, « Les usages commerciaux dans le droit
roumain », JDI 1983. 576.
5. V., Marty et Raynaud, Droit civil, 2e éd., Sirey, Paris, 1972, t. I, p. 204; P. Didier Droit
commercial, Paris, PUF, 1970,1.1, p. 51 et s.
LE PLURALISME DES SOURCES 25
Quant à la liaison entre l’usage et la volonté des parties, elle est pour
le moins ambiguë : comment peut-on être sûr que les parties ont voulu
ce que l’usage commande si l’on ne s’est pas préalablement assuré que
l’usage s’imposait à elles? L’usage s’impose par la seule force de son
existence et s’il avait besoin d’un consentement spécial — même pré¬
sumé1 — pour chacune de ses applications, il n’aurait jamais existé. Le
prétendu consentement à l’usage est tout autre chose que son exclu¬
sion ponctuelle, justifiée par le principe de la liberté contractuelle, et
s’exprimant sous la forme d’une dérogation assumée d’un commun
accord ou par le désaccord d’une partie au moment de la conclusion de
l’acte2.
L’on a objecté aussi que « parce qu’il se définit comme une pratique
habituellement suivie », l’usage ne peut exprimer que « ce qui se fait »
et non « ce qui doit être » au regard du droit. L’usage participerait ainsi
seulement de la pratique contractuelle3.
Cette observation n’est que partiellement exacte. L’usage exprime
effectivement ce qui se fait; c’est d’ailleurs en cela qu’il est utile. Mais
en exprimant ce qui se fait l'usage le transforme en un « devoir-être »
puisqu’il dictera la conduite à suivre ou la conduite qui aurait dû être
suivie chaque fois que les parties ne l’auront pas écarté d’un commun
accord. Le devoir-être ne serait absent de l’usage que si le seul fait de ne
pas s’y être conformé était assimilé à l’exercice de la dérogation. Or il
faut l’avoir exclu par convention (« sauf convention contraire... » dis¬
pose à son article 9 la convention de Vienne), pour qu’il ne s’applique
pas4.
Cette exclusion peut expressément viser l’usage en tant que tel ou
résulter d’une disposition du contrat incompatible avec l’usage. Faute
pour l’une ou pour l’autre de ces conditions d’être remplies, l’usage
trouve application dès que le juge ou l'arbitre est persuadé de son
existence et que la relation se situe dans son champ5.
1. Comme le laisse entendre l’article 9.2 de la convention de Vienne sur les ventes
internationales de marchandises.
2. V. pour la soumission de la question de la formation d’un contrat, l’application
directe et exclusive d’un usage du commerce de grains, sans référence par les parties, et sur
la seule constatation du caractère international du contrat : Cass. sect. com. et fin., 14 janv.
1959 JDI 1960. 476, obs. J.-B. Sialelli.
3. V., V. Heuzé, La vente internationale de marchandises. Droit uniforme, GLN Joly édi¬
tions, 1992, n° 174, p. 136; comp. E. Gaillard, op. cit., n° 8, p. 206.
4. En revanche, il faut noter que les usages, en raison des conditions de leur naissance,
ne peuvent couvrir tout le champ du devoir-être. La violation d’un usage, qui est une règle
de conduite, nécessite souvent le recours à une règle de décision supérieure à l’usage
ou extérieure à l’ordre juridique auquel appartiendrait l’usage afin d’en déduire les consé¬
quences civiles (sur la distinction entre règles de conduite et règles de décision v. P. Kinsch,
Le fait du Prince étranger, préf. J.-M. Bischoff, LGDJ, 1994, n°246, p. 335 et les références
à B. Currie).
5. Sur la distinction des usages et des coutumes, v. P. Deumier, op. cit., n°200 et s.,
p. 180 et s.
26 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Note sous Civ., 22 oct. 1991 JDI 1992. 177, spéc. p. 184.
2. V., E. Loquin,« Les règles mate'rielles du commerce international », Journée d'hommage
et d'études à la mémoire de Philippe Fouchard, Rev. arb. 2005. 443 et s. spéc. p. 451.
3. V., J. Stoufflet, « L’œuvre normative de la Chambre de commerce internationale dans
le domaine bancaire », in Mélanges B. Goldman, Litec, 1982, p. 361 et s.; S. Bostanji, « De
la promotion des usages du commerce international par la justice étatique (À propos de
l’affaire Interco/North African International Bank) », JDI 2005. 1067 et s., la justice à laquelle
se réfère cet article étant la justice tunisienne.
28 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. Genèse
B. Légitimité
44 II ne semble pas que les arbitres du commerce international se soient
beaucoup préoccupés de la légitimité du recours qu’ils faisaient à des
principes généraux. Ils y sont en quelque sorte venus en raison du
caractère approprié de ces principes au règlement de certaines des
affaires qu’ils avaient à résoudre. À cet égard les contrats d’État (contrats
conclus entre un État et une personne privée étrangère) constituaient
un terrain particulièrement favorable à la recherche et à l’utilisation de
tels principes : la compétence de la loi de l’État contractant présentait
un certain nombre d’inconvénients en raison du pouvoir de l’État de
la modifier au détriment de son partenaire étranger. D’un autre côté il
n’était pas certain que le droit international public, à le supposer appli¬
cable, ce qui se heurtait à un certain nombre d’objections, eut contenu
prima fade toutes les règles utiles3.
Mais il faut retenir aussi que les arbitres pouvaient se sentir beau¬
coup plus libres que des juges étatiques en raison de leur statut parti¬
culier : ils ne rendaient pas la justice au nom d’un État et ils n’étaient
tenus en conséquence ni à l’observation de règles de conflit de lois
déterminées, ni à porter une attention particulière à une loi du for pour
eux inexistante.
tir du terme « droit » aussi bien la loi d’un État que des règles non
étatiques.
Plus près de nous, et en pleine connaissance des termes du pro¬
blème, l’article 1496 du Nouveau Code de procédure civile, issu de la
réforme effectuée par le décret du 12 mai 1981, dispose que « l’arbitre
tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont
choisi; à défaut, conformément à celles qu’il estime appropriées ». La
référence aux « règles de droit » a été clairement adoptée pour que le
choix de droit applicable ne soit pas limité à la loi d’un État1.
Dans le domaine particulier des contrats conclus entre des États et
des personnes privées étrangères (contrats d’État) la convention de
Washington du 18 mars 1965 ayant institué un centre d’arbitrage spé¬
cifique, le CIRDI2 comporte un article 42 sur le droit applicable au
fond du litige. Ce texte dispose que « le Tribunal statue sur le différend
conformément aux règles de droit adoptées par les parties ».
Le même texte poursuit en déclarant que faute d’accord entre les
parties, « le Tribunal applique le droit de l’État contractant partie
au différend (...) ainsi que les principes de droit international en la
matière ».
1. V., R. Rodière, « Les principes généraux du droit privé français », RID comp. 1985,
n° spécial, p. 309 et s.
2. V., H. Batiffol, admettant la distinction entre ces deux catégories de principes, Pro¬
blèmes de base de philosophie du droit, Paris, LGDJ, 1979, p. 262.
3. V., M. Virally, « Le rôle des “principes” dans le développement du droit internatio¬
nal », in Le droit international en devenir. Essais écrits au fil des ans, Publications 1UHEI PUF
1990, p. 195 et s.
4. V., E. Gaillard, « Trente ans de lex mercatoria », JDI 1995. 5 et s., spéc. p. 26.
5. Selon l’expression de B. Oppetit, « Arbitrage et contrats d’État. L’arbitrage Framatome
et autres c. Atomic Energy Organization oflran », JDI 1984. 37 et s., spéc. p. 45.
LE PLURALISME DES SOURCES 33
1. Ph. Kahn, « Les principes généraux du droit devant les arbitres du commerce inter¬
national »,JDI 1989. 305 et s., spéc. p. 319.
2. P. Weil, « Principes généraux du droit et contrats d’État », in Études B. Goldman,
op. cit., p. 387 et s., spéc. pp. 397-398.
3. P. Ricœur, Le Juste, Editions Esprit Philosophie, 1995, p. 170.
4. V., F. Osman, Les principes généraux de la lex mercatoria, LGDJ, Paris, 1992, p. 19 et s. ;
P. Mayer, « Le principe de bonne foi devant les arbitres du commerce international », in
Études P. Lalive, Genève, 1993, p. 543 et s.
5. Affaire Norsolor. Sur l’ensemble de cette affaire, v. B. Goldman : « Une bataille judi¬
ciaire autour de la lex mercatoria : l’affaire Norsolor », Rev. arb. 1983. 379 et s.
6. Sur l’ensemble de ces principes, v. F. Osman, op. cit., p. 47 et s. ; adde J. Paulsson, « La lex
mercatoria dans l’arbitrage CCI », Rev. arb. 1990. 55 et s., spéc. p. 78 et s.; Ph. Fouchard,
E. Gaillard, B. Goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, Litec, 1996, p. 825 et s.
7. Ph. Kahn, « Les principes généraux... », op. cit., p. 318_et s.
8. V., Ph. Kahn, « L’internationalisation de la vente », in Etudes A. Plantey, Pedone, 1995,
p. 297 et s., spéc. p. 304 et s. ; C. Kessedjian, « Un exercice de rénovation des sources du droit
des contrats du commerce international : les principes proposés par l’Unidroit », Rev. crit.
DIP 1995. 671 et s. ; A. Giardina, « Les principes Unidroit sur les contrats internationaux »,
JDI 1995. 547 et s.; J.-P. Beraudo, JCP 1995. I. 3242; J. Huet, Petites affiches, 1995, n°135;
P. M. Patocchi et X. Favre-Bulle, Sem. jur. (Genève) n° 34, p. 596 et s.; sur l’utilisation des
Principes Unidroit dans l’arbitrage commercial international, cf. Bull de la Cour internationale
de la CCI, suppl. spécial 2002, p. 5-165; Ch. Seraglini, Rev. arb. 2003, p. 1101 et s.
34 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 1. Le droit étatique
54 Le droit étatique demeure une source incontournable du droit du
commerce international. Plusieurs raisons expliquent qu’il en soit ainsi.
La première repose sur le fait que le commerce international étant pour
l’essentiel le fait d’opérateurs privés, ceux-ci sont sujets des ordres juri¬
diques nationaux ayant compétence pour régir leurs activités de carac¬
tère économique. La seconde repose sur les liens étroits unissant le
droit du commerce international et le droit international privé. Même
si les opérations du commerce international peuvent se développer
dans un espace juridique propre, l’espace juridique transnational, rien
n’oblige en général les parties à se prévaloir des règles qui se sont déve¬
loppées dans cet espace. Le contexte dans lequel a été conclu leur
contrat, les dispositions que celui-ci contient, le juge appelé à se pro¬
noncer le cas échéant, sont autant de facteurs qui peuvent militer pour
le maintien du contrat sur l’empire de la loi d’un État déterminé.
Encore raisonne-t-on ici en fonction d’une hypothèse de pluralisme
juridique, dont la caractéristique essentielle est la disponibilité simul¬
tanée de deux ou plusieurs corps de règles à être potentiellement appli-
LE PLURALISME DES SOURCES 35
58 II convient d’autre part de rappeler que pour les pays qui appartiennent
à l’Union européenne, le droit des États est de loin le vecteur le plus
important de l’action normative des organes habilités à cette fin.
Comme l’a énoncé la Cour de justice des Communautés européennes,
le droit communautaire, originaire ou dérivé « fait partie intégrante
de l’ordre juridique applicable sur le territoire de chacun des États
membres » b
La loi d’un État comme la France est, comme on le sait, non seule¬
ment le reflet de la volonté du souverain national mais aussi, de plus
en plus souvent, le miroir des règles adoptées dans le cadre de l’Union.
Or ces règles sont particulièrement importantes dans le domaine éco¬
nomique, y compris, le domaine contractuel encore que le droit des
contrats ne soit pas en première place pour la réalisation d’un marché
intérieur.
1. CJCE 9 mars 1978, Simmentnal, aff. 106/77, Rec. 609; v. Guy Isaac, Droit communau¬
taire général, 7e éd„ Armand Colin, 1999, p. 168.
LE PLURALISME DES SOURCES 37
1. Civ., 2 juin 1950, Messageries maritimes, Rev. crit. DIP 1950. 609, note H. Batiffol;
D. 1951. 749, note Ancel; S. 1952. I. 1, note Niboyet; JCP 1950. II. 5812, note Lévy;
B. Ancel, Y. Lequette, Les Grands arrêts de la jurisprudence française de droit international
prive', 5e éd., Dalloz, 2006, n°22; adde P. Lerebours-Pigeonnière, «À propos du contrat
international »,JDI 1951. 4.
2. La convention de Rome n’évoque que la « loi » applicable aux obligations contrac¬
tuelles et se réfère à de nombreuses reprises à la loi d’un « pays », lequel ne peut manifes¬
tement être que la loi d’un État. En ce sens, v. P. Lagarde, « Le nouveau droit international
privé des contrats après l’entrée en vigueur de la convention de Rome du 19 juin 1980 »,
Rev. crit. DIP 1991. 279 et s., spéc. p. 300; A. Rassis, Le nouveau droit européen des contrats
internationaux, Paris, LGDJ, 1993, p. 373 et s.
3. V., O. Kahn-Freund, « La notion anglaise de la proper law ofthe contract devant les
juges et devant les arbitres », Rev. crit. DIP 1973. 607 et s.
38 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
(n° 2003/63, JOUEE. 159, 27 juin 2003) et par la directive du 31 mars 2004 (n° 2004/27,
JOUE L 136 30 avril 2004). La procédure d’AMM (autorisation de mise sur le marché) a
été instituée par le règlement n° 2309/93 du 22 juillet 1993, (JOCE L 194, 4 août 1993),
en vigueur depuis le 7 janv. 1995. Les biens culturels font l’objet d’une surveillance parti¬
culière à l’exportation afin de protéger Les trésors nationaux (v. règlement CE n° 3911/92
du 9 décembre 1992, JOCE L 395, 31 décembre 1992 et sur annexe; v. règlement de la
Commission n° 725/93 du 30 mars 1993, JOCE L 77, 31 mars 1993). Les matériels de
guerre, armes et munitions sont soumis à une autorisation d’importation (nécessaire pour
les 8 catégories définies par le décret n° 95-589 du 6 mai 1995, JO 7 mai 1995).
1. L’exportation des matériels de guerre et les matériels assimilés est soumise à autori¬
sation (v. La liste fournie par l’arrêté le 20 nov.1991 modifié, JOR du 22 nov.1991 et du
16 mai 1997) Les produits stratégiques à double usage figurent sur une liste incluse dans
l’annexe 1 du règlement CE n° : 2432/2001, JOCE L 338 du 20 déc. 2001, qui fait l’objet de
mises à jour régulières. Sur cette question v. Cl. Sornat, « Armes », Rép. Intern. Dalloz;
D. Romestant, Commerce et sécurité - les exportations sensibles dans la mondialisation, L’Har¬
mattan, 2003.
40 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
tion laisse subsister les impositions douanières, ainsi que la TVA. Les
droits de douane sont fixés en fonction de trois éléments qui sont l’ori¬
gine, l’espèce tarifaire et la valeur du produit.
Alors que, normalement, le paiement des droits à l’importation est
immédiatement exigible, l’Administration peut accorder des crédits
de droits non reportables. Elle a d’autre part mis en place différents
régimes adaptés aux conditions particulières des opérations et des opé¬
rateurs. Tel est le cas du régime spécifique des retours et des échan¬
tillons commerciaux, du transit sous douane, de l’admission tem¬
poraire ou des régimes de perfectionnement, destinés à favoriser la
compétitivité des entreprises qui s’approvisionnent à l’étranger.
Même le régime de droit commun connaît des procédures simplifiées.
1 V Civ., 7 mai 1963, Gosset, D. 1963. 545, note ]. Robert; JCP 1963. II. 13405, note
Goldman; Rev. crit. DIP 1963. 615, note Motulsky;/DI 1964. 82, lre esp., note Bredin.
2. V. infra, n° 1078 et s.
3. Civ., 2 mai 1966, Galakis, Rev. crit. DIP, 1967. 553, note Goldman; JDI 1966. 648,
note Level; D. 1966. 575, note Robert; B. Ancel, Y. Lequette, Les Grands arrêts..., op. cit.,
n° 44 ; dans le même sens, v. art. 177, al. 2 de la LD1P suisse.
4. V. CA Paris 8 oct. 1998, Rev. arb. 1999. 350, note P. Ancel et O. Goût; v. Ch. Jarros-
son, « L’apport de l’arbitrage international à l’arbitrage interne », in Etudes offertes à
A. Plantey, op. cit, p. 233 et s.
42 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
ces normes. Les règles liées à l’ordre public peuvent être réparties en
deux catégories.
1. V., P.-M. Dupuy, Droit international public, 4e éd., Dalloz, n° 481, p. 440 et s.;
A. Thieulent, Mesures de contrainte économique et relation contractuelles internationales, thèse
Dijon, 2000; G. Burdeau, « Les effets juridiques des Résolutions du Conseil de sécurité sur
les contrats privés », in V. Gowlland-Debbas, United-Nations Sanctions and International
Law, éd. Kluwer, 2001, p, 267 et s.
2. V., D. Carreau et P. Juillard, Droit international économique, 2e éd., Dalloz 2005
p. 193 et s.
3. V., L. Lucchini, « Le boycottage », in Aspects du droit international économique, SFDI
Colloque d’Orléans, Pedone, 1972, p. 67 et s.; L. Dubouis, « L’embargo dans la pratique
contemporaine », AFDI, 1967, p. 99 et s.; R. Chemain, « Boycott », Rép. Intern. Dalloz.
4. V. Civ. lre, 15 juill. 1999, JDI 2000. 45, note M. Cosnard, solution confirmée par un
arrêt récent, encore inédit, de la Cour de cassation, en date du 25 avril 2006
5. Parmi une littérature très abondante, v. B. Stem, « Une tentative d’élucidation du
concept d’application extraterritoriale », RQDl 1986, p. 51 et s. ; « L’extraterritorialité revi¬
sitée », AFDI, 1992, p. 244 et s. ; M. Cosnard, « Les lois Helms-Burton et d’Amato-Kennedy
interdiction de commercer et d’investir dans certains pays », AFDI, 1996, p. 36 et s.;
P. Wefi, « Le contrôle par les tribunaux nationaux de la licéité internationale des actes des
Etats étrangers », AFDI 1977, p. 16 et s.; L. Lankarani, « Une autre loi d’application extra¬
territoriale américaine. L’Europe face à l’article 211 de la loi générale portant ouverture de
crédits de 1998 », RTD eur. 2006. 97 et s.; L Barrière-Brousse, « Guerre commerciale et
LE PLURALISME DES SOURCES 43
§ 2. Le droit communautaire
72 Le droit communautaire exerce sur le droit du commerce international
une influence qui est perceptible à plusieurs niveaux. Il sera seulement
procédé à un bref rappel.
A. Droit matériel
73 Au niveau du droit matériel, l’influence du droit communautaire
s’exerce lorsque des règles de droit matériel sont adoptées par les
organes des Communautés dans le cadre de leurs compétences1. Ces
règles peuvent alors être rendues directement applicables (règlements)
ou conduire à une harmonisation du droit des États membres par le
biais des directives communautaires. Sur le plan des relations commer¬
ciales internationales, l’influence de ces règles s’exerce seulement
par l’entremise de la compétence du droit d’un État membre de la
Communauté. Elles n’apparaissent pas en tant que telles au niveau des
relations commerciales internationales. Ainsi, le droit des sociétés a été
largement reconfiguré par des directives communautaires2. La matière
de l’insolvabilité a été profondément marquée par le règlement CE du
Conseil n° 1346/2000, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insol¬
vabilité. Cependant, comme ce règlement règle les procédures « intra¬
communautaires », il ne se borne plus à modifier la substance du droit
des États membres, mais règle des relations entre ordres juridiques. Par
voie de conséquence, il est également relatif aux relations qui mettent
en cause des Etats tiers3.
C. Relations interétatiques
75 Au niveau des relations entre États membres, il est à peine besoin de
rappeler l’influence des grands principes relatifs à la libre circulation
des produits et des services, ainsi que le droit communautaire de la
concurrence.
À l’égard des États tiers, la Communauté constitue une Union doua¬
nière. Les droits de douane ayant été abolis à l’intérieur du Marché
unique, la Communauté dispose vis-à-vis de l’extérieur d’un tarif exté¬
rieur commun. Celui-ci a été établi par un Règlement du Conseil
n° 950/68 du 28 juin 1968. Il est entré en vigueur le 1er juillet 1968.
La Communauté dispose de larges compétences afin de conclure des
traités et négocier avec des États tiers dans le cadre de la politique com¬
merciale commune. Elle a également instauré des régimes particuliers.
La Communauté européenne est membre de l’OMC1.
1. Sur tous ces points, v. L. Dubouis et Cl. Blumann, op. cit., p. 195 et s.; L. Radicati di
Brozolo, « L’influence sur les conflits de lois des principes de droit communautaire en
matière de liberté de circulation », Rev. crit. DIP 1993. 40 et s.; J. Béguin et M Menjucq
(dir), Droit du commerce international, Litec, 2005, p 87 et s., 117 et s • M Lickovâ La
Communauté européenne et le système GAU/OMC. Perspectives croisées, avant-propos
B. Stern, pref. G. Abi-Saab, Cerdin Paris I, Pedone; O. Blin, « La stratégie communautaire
dans 1 Organisation mondiale du commerce », JDI 2006. 89 et s.
LE PLURALISME DES SOURCES 47
B. Caractéristiques essentielles
du droit conventionnel uniforme
77 1) Domaine O Le domaine couvert par les conventions de droit uni¬
forme est vaste et varié. Néanmoins, il ne s’étend pas à l’ensemble du
droit du commerce international, même si la question « Do we need a
global commercial code P »4 est parfaitement susceptible d’être posée.
C’est donc, pour l’essentiel, un besoin de sécurité et d’unité du droit
dans les domaines où les relations internationales sont d’une parti¬
culière densité, qui a provoqué l’éclosion du droit uniforme5.
Sans inclure à cette place l’énumération de conventions citées avec
l’évocation de leurs auteurs, il suffira de rappeler que le domaine d’élec¬
tion de ces conventions est constitué par le droit des transports6,
1. V., Ph. Malaurie, « Droit uniforme et conflits de lois », Travaux comité' fr. DIP 1967,
p. 83 et s.
2. L’existence de telles conventions démontre que l’intérêt des Etats pour le droit
du commerce international n’est pas limité aux seules relations interétatiques. Cet intérêt
n’est d’ailleurs pas forcément exempt d’ambiguïté. Ainsi qu’on l’a écrit : « La faveur dont
bénéficie la méthode conventionnelle ne s’explique que par la place qu’elle occupe dans la
stratégie des politiques étatiques et dans le souci des gouvernements d’exercer une influence
dans le processus de création du droit » (B. Oppetit, « Le droit international privé, droit
savant », Rev. cours La Haye 1992.111, t. 134, p. 339 et s., spéc. p. 422).
3. En ce sens, P. Mayer, « L’application par l’arbitre des conventions internationales
de droit privé », in Mélanges Y. Loussouarn, Dalloz, 1994, p. 275 et s., spéc. p. 280,1 auteur
rappelant que seul l’instrument d’adoption des règles est international, les règles elles-
mêmes appartenant au droit des États signataires. Comp. S. Lebedev, « Moyens législatifs
d’unification », in Le droit commercial uniforme au xxi‘ siècle, R1D comp., vol. 44, p. 36 et s.,
spéc. p. 38. ,
4. V., ). Bonnell, in Rev. dir. unif. 2000. 469 et s., se référant a un ancien projet de la
CNUDCI ; H. Gaudemet-Talion, « Le pluralisme en droit international privé : richesses et
faiblesses (le funambule et l’arc-en-ciel) », op. cit., p. 13 et s., spéc. p. 59 et s.
5. V., F. Deby-Gérard, Le rôle de la règle du conflit dans le règlement des rapports interna¬
tionaux, op. cit., n° 168 p. 134.
6. V. infra n° 570 et s.
48 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
78 Les conventions de droit uniforme peuvent aussi être adoptées dans des
domaines moins évidemment « commerciaux » et dans lesquels la part
revenant aux institutions ou aux politiques législatives conduites par
les États est prépondérante. Un exemple particulièrement net en est
fourni par la convention Unidroit sur le retour des biens culturels volés
ou illicitement exportés, cette convention faisant suite à une conven¬
tion Unesco de 1970 intervenue dans le même domaine3.
Sur le terrain du droit de l’insolvabilité, une convention de Bruxelles
du 23 novembre 1995, relative aux procédures d’insolvabilité a été
adoptée4. Elle a été transformée en règlement communautaire en
20005. Une convention du Conseil de l’Europe sur certains aspects
internationaux de la faillite a été signée à Istanbul le 5 juin 1989. Cette
convention, qui a été ratifiée par la France, n’est pas entrée en
vigueur6.
1. V., F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, op. cit. n° 430 p. 151.
2. V., B. Martor, N. Pilkington, D. Seilers, S. Thouvenot, « Le droit uniforme africain
des affaires issus de l’OHADA », op. cit. p. 7 et s.; « L’OHADA, dix années d’uniformisation
du droit des affaires en Afrique », JCP E n° 44, suppl. 2004.
3. V., J.-M. Jacquet, « Le droit de la vente internationale de marchandises : le mélange
des sources », in Mélanges Ph. Kahn, Litec, 2005 p. 75 et s.
4. Ainsi, l’Acte uniforme OHADA sur la vente commerciale; adde F. Ferrari; « Interna¬
tional sales law in the light of the OHADA Uniform Act relating to general commercial law
and the Vienna Sales convention », Rev. dr. aff. int. 2001, n° 5, p. 599 et s.
5. V., C. Brière, « Les conflits de convention internationales en droit privé », préface
P. Courbe, LDDJ 2001 ; D. Bureau, « Les conflits de conventions », Travaux comité fr. DIP
1998. 2000, p. 201 et s.; A. Malan, La concurrence des conventions internationales dans le
droit des conflits de lois, PUAM, 2002 ; pour un exemple précis v. C. Brière, « Réflexions
sur les interactions entre la proposition de règlement “Rome II" et les conventions
internationales », JDI 2005. 677 et s.
50 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., F. Ferrari, « Les rapports entre les conventions... », op. cit., p. 802.
2. V., F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, op. cit. n° 4.38 et 4.39 p. 158.
LE PLURALISME DES SOURCES 51
1. V., Cl. Witz, « Les vingt-cinq ans de la convention des Nations Unies... », op. cit. n° 8
et s. p. 11 et s.
2. V., Cl. Witz, op. cit., n° 10 p. 12.
3. En ce sens, Cl. Witz, op. cit., n° 20 et s. p. 21 et s.
4. V., F. Ferrari, « Les rapports entre les conventions de droit matériel uniforme en
matière contractuelle et la nécessité d’une interprétation interconventionnelle », )DI 2003.
791 et s. ; adde Cl. Witz, « La quête de l’universalisme dans l’interprétation » in La Commis¬
sion des Nations unies pour le droit commercial international, À propos de 35 ans d’activité,
Petites affiches, n° 252, 18 déc. 2003, p. 54 et s.
LE PLURALISME DES SOURCES 53
1. V., G. Farjat, « Nouvelles réflexions sur les codes de conduite privés » in J. Clam et
G. Martin (dir.), Les transformations de la régulation juridique, coll. « Droit et société»
LGDJ, 1998, p. 151 et s.
2. V., S. Poillot-Peruzzetto, « Les méthodes de la CNUDCI, le choix de l’instrument »,
in « La commissions des Nations unies... », op. cit. p. 43 et s.
3. Comp. S. Poillot-Perruzzetto, op. cit., p. 49, l’auteur mettant sur un même pied, au
titre des instruments porteurs de normes de référence les États et les parties.
L’UNITÉ DE LA LEX MERCATOR1A 57
CHAPITRE 2
L’UNITÉ DE LA LEX MERCATORIA
SECTION 1. LE CONSTAT
91 L’extraordinaire développement du commerce international qui a suivi
la fin de la seconde guerre mondiale et a conduit à l’actuelle mondia¬
lisation a été extrêmement favorable au dynamisme du milieu « mer-
catique ». L’examen des sources du droit du commerce international
auquel on vient de procéder démontre que certaines sources, habituel¬
lement délaissées ou vouées à un rôle secondaire, ont acquis une place
de premier plan dans le corpus du droit du commerce international1.
Ainsi, les pratiques ont pu, plus aisément qu’ailleurs, produire leurs
conséquences au niveau des contrats et des usages du commerce. L’ar¬
bitrage international, dont le développement a été concomitant, servi
par des règles favorables, a contribué à l’émergence des principes géné¬
raux, particulièrement utiles, dans la mesure où, en fonction des cir¬
constances, les lois nationales pouvaient être partiellement ou totale¬
ment délaissées par les parties et les arbitres. Les organismes corporatifs
ou professionnels, à l’écoute de leurs adhérents, ont apporté leur
concours à l’éclosion d’un corps de règles, de niveau en soi modeste,
mais très efficace, avec les contrats-type et les conditions générales. À
l’égard de ces sources, le tout représente-t-il davantage que l’assem¬
blage des parties ?
SECTION 2. LA THÉORIE
92 La théorie de la lex mercatoria repose sur le constat qui précède et qui
fait toujours sa force. 11 est devenu impossible de soutenir aujourd’hui
1. V., Ph. Kahn, « Droit international économique, droit du développement, lex merca¬
toria, concept unique ou pluralisme des ordres juridiques ? », in Mélangés B. Goldman, Litec,
1982, p. 97 et s.
58 LES SOURCES DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., Ph. Kahn, La vente commerciale internationale, Paris, Sirey, 1961; J. Stoufflet, Le
crédit documentaire, Paris, 1957; Ph. Fouchard, L'arbitrage commercial international, Dalloz,
Paris, 1965 ; A. Jacquemont, L’émission des emprunts eurobligataires. Pouvoir bancaire et sou¬
verainetés étatiques, préf. Ph. Kahn, Lib. Techniques, Paris, 1976; adde E. Caprioli, Le crédit
documentaire: évolution et perspectives, Litec, Paris, 1992; J. Ortscheidt, La réparation du
dommage dans l'arbitrage commercial international, préf. E. Gaillard, Paris, Dalloz, 2001 ;
Simon Hotte, La Rupture du Contrat International, Contribution à l’étude du droit transna¬
tional des contrats, thèse n° 687, Institut universitaire de hautes études internationales
(Genève), 2004.
2. V. « Frontières du droit et lex mercatoria », « Archives de philosophie du droit », Sirey,
1964, p. 177 et s. ; « La lex mercatoria dans les contrats et l’arbitrage internationaux : réalités
et perspectives », JDI 1979. 475 et s. ; « Nouvelles réflexions sur la lex mercatoria », in Études
P. Lalive, Genève, 1993, p. 241 et s. Parmi d’autres écrits sur la lex mercatoria, on relèvera
spécialement : C. Schmitthoff, « International Business Law : A New Law Merchant », in
Current Law and Social Problems, University of Toronto, 1961, p. 129 et s. ; Ph. de Ly, Inter¬
national business law and lex mercatoria, North Holland, 1992; F. Osman, Les principes
généraux de la lex mercatoria. Contribution à l’étude d’un ordre juridique national, LGDJ, Paris,
1992; F. Marella, La nuova lex mercatoria. Principi Unidroit ed usi dei contratti del commercio
internazionale, in F. Galgano (dir.), Trattato di diritto commerciale e di diritto public dell’eco-
nomia, Cedam, 2003, vol. 30; E. Gaillard, « Trente ans de lex mercatoria. Pour une applica¬
tion sélective de la méthode des principes généraux du droit», JDI 1995. 5 et s.;
Th. Carbonneau (dir.), Lex mercatoria and arbitration. A discussion ofthe New Law Merchant,
éd. révisée, Londres, Kluwer, 1998; E. Loquin, « Où en est la lex mercatoria? », in Mélanges
Ph. Kahn, Université de Bourgogne, CNRS, Litec, 2001, p. 23 et s.; « Les rapports avec la lex
mercatoria », in La Commission des Nations unies pour le droit commercial international,
A propos de 35 ans d’activité, Petites affiches, n° 252, 18 déc. 2003, p. 63 et s. ; A. Pellet, « La
lex mercatoria, tiers ordre juridique. Remarques ingénues d’un internationaliste de droit
public », Mélanges Ph. Kahn, op. cit. p. 23 et s. ; Ch. Leben, Le droit international des affaires,
6e éd. refondue, PUF, coll. « Que sais-je? », Paris, 2003, p. 30 et s.; P. Lagarde, « Approche
critique de la lex mercatoria », in Mélanges B. Goldman, op. cit., p. 125 et s. ; J. Paulsson, « La
lex mercatoria dans l’arbitrage CCI », Rev. arb. 1990. 55 et s.; Gbamodu, « Explorin’g the
interrelationships of transnational commercial law; the new lex mercatoria and internatio¬
nal commercial arbitration » Revue africaine de droit international et comparé 1998. 31 et s.
J.-M. Mousseron, « Lex mercatoria, bonne mauvaise idée ou mauvaise bonne idée? », in
Mélanges L. Boyer, Toulouse, PU sciences sociales de Toulouse, 1996, p. 469 et s. ; M. Mus-
tül, « The New Lex mercatoria : The First Twenty Five Years », Liber amicorum for lord Wil-
berforce, Londres, Oxford 1987 p. 149 et s.; Ch. Pamboukis, « La lex mercatoria reconsidé¬
rée », in Mélanges P. Lagarde, Paris, Dalloz, 2005, p. 635 et s.; M. Virally, « Un tiers droit?
Réflexions théoriques », in Mélanges B. Goldman, op. cit., p. 373 et s.
L’UNITÉ DE LA LEX MERCATORIA 59
LA JURIDICITÉ
SECTION 3.
DE LA LEX MERCATORIA
95 L’admission de la juridicité de la lex mercatoria suppose une adhésion à
la théorie du pluralisme juridique, récusant le rôle exclusif de l’État
LA SITUATION
SECTION 4.
CONCURRENTIELLE
DE LA LEX MERCATORIA
97 La reconnaissance de la juridicité de la lex mercatoria a donc consacré
sa positivité. Elle l’a de la sorte placée en situation concurrentielle
avec les règles issues d’autres origines. Cette situation présente des
avantages et des inconvénients pour la lex mercatoria. Ceux-ci peuvent
être décelés au niveau de son application (§ 1) comme de son contenu
(§2).
99 La lex mercatoria est inséparable des sources qui ont donné naissance
aux règles qui en constituent les principales composantes : contrats,
usages, principes généraux du droit du commerce international. Les
sources du droit du commerce international sont cependant plus nom¬
breuses et diversifiées. Parmi celles qui ont été répertoriées, certaines
sont parfaitement compatibles avec la lex mercatoria, d’autres ne le sont
pas.
Il semble en tout cas impossible d’admettre que l’ensemble des
sources du droit du commerce international puisse constituer des élé¬
ments de la lex mercatoria3.
Le droit du commerce international demeure à l’heure actuelle une
matière composite et ses sources reflètent très exactement la situation
à la fois délocalisée et territorialisée de cette matière. Au sein de ces
sources, la lex mercatoria fait office de creuset, marquant le centre de
gravité du droit du commerce international. C’est bien de ce centre de
gravité que découlent les règles les plus spécifiques de ce droit.
1. Par une sorte d’effet miroir, la lex mercatoria peut s’enrichir des entreprises
codifkatrices qui se sont inspirées d’elle (comnme les Principes Unidroit pour les
contrats du commerce international) ou tendent à lui donner une expression écrite unifiée
(v. K.P. Berger, The creeping Codification ofthe Lex mercatoria, The Hague, Kluwer Law Internatio¬
nal, 1999; v. « Central list oflex mercatoria principles, rules and standards », www.lLDB.de-List
of Principles ; v. Ph. Kahn, « L’institutionnalisation de la lex mercatoria », in Liber amicorum
Droit et Vie des affaires, Bruylant, Bruxelles, 1998, p. 125 et s.
.
L’OBJET DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL 65
SOUS-TITRE 3
Techniques et finalités
du droit du commerce
international
101 Dans toute branche du droit, les modes de production des règles et les
finalités poursuivies par le système de règles mis en place sont étroite¬
ment liées. Ainsi, si le droit du commerce international entend favori¬
ser le développement du commerce international en pensant qu’il
convient de l’affranchir au maximum de certaines contraintes inhé¬
rentes au droit interne, le recours à des règles matérielles propres au
système s’impose, au détriment de l’usage de règles de conflits de lois.
S’il entend lutter contre des pratiques déloyales ou malhonnêtes, mieux
vaut songer à renforcer l’arsenal des conventions internationales, qui
permettent la coopération, ainsi que l’arsenal des lois étatiques de
caractère impératif.
Les règles elles-mêmes ne se caractérisent pas seulement par les
sources d’où elles sont issues, mais par les fonctions qu’elles doivent
assumer. Dans le droit du commerce international, qui ne constitue
pas un système fermé, les conditions d’applicabilité des règles substan¬
tielles sont capitales (Chapitre 1). Quant aux finalités, elles suivent
une pente naturelle axée sur la défense des intérêts du commerce inter¬
national (Chapitre 2). Mais aujourd’hui, ceux-ci ne peuvent se réduire
aux souhaits des opérateurs économiques. Le droit du commerce inter¬
national ne saurait être complètement isolé de la défense d’intérêts
globaux à l’égard desquels il doit assumer sa part de responsabilité.
-
N
-
TECHNIQUES RELATIVES À LA RÈGLE 67
CHAPITRE 1
TECHNIQUES RELATIVES
À LA RÈGLE
SECTION 1.
TECHNIQUES RELATIVES
À LA NATURE DE LA RÈGLE
102 II convient ici de rappeler que le droit du commerce international, s’il
se construit essentiellement à partir de règles matérielles, ne saurait se
passer des règles de conflits de lois (§ 1). Il est important également de
souligner le recours de plus en plus fréquent à des règles dépourvues
de caractère obligatoire (§2).
1. V., B. Oppetit, « Le développement des règles matérielles. », Travaux comité fr. DIP,
Journée du cinquantenaire, p. 121 ; C. Kessedjian, « Codification du droit commercial
international et droit international privé », RCÂDI, t. 300 (2002) p. 83 et s., spéc. p. 202
et s.
68 TECHNIQUES ET FINALITÉ DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
ser même qu’un tel Code puisse voir le jour, il est fort peu vraisem¬
blable que celui-ci puisse se suffire à lui-même.
Le droit des conflits de lois s’impose donc d’abord en raison du
caractère nécessairement limité du domaine couvert par les règles
matérielles. Là où il n’existe ni règles d’origine internationale, ni règles
de droit transnational, le recours au droit étatique est indispensable.
Même les plus ardents défenseurs de la lex mercatoria n’ont jamais
prétendu que celle-ci puisse constituer un système complet. Ainsi, le
droit international privé des sociétés ne comporte-t-il qu’un nombre
limité de règles matérielles, la lex societatis étant dans l’immense majo¬
rité des cas, constituée de dispositions relevant de la loi d’un État.
Mais le droit des conflits de lois s’impose également à l’intérieur
du domaine couvert par des règles matérielles. Il peut d’abord consti¬
tuer le support de l’application de telles règles. Il ne faut en effet pas
confondre la caractéristique essentielle des dispositions du droit maté¬
riel, à savoir, fournir une solution directe à une question de droit déter¬
minée, et l’applicabilité directe des règles matérielles. Les règles maté¬
rielles peuvent être appliquées directement, mais le plus souvent, elles
trouvent application en fonction de la désignation qu’en ont effectuée
les parties. Or, cette désignation sera elle-même le plus souvent effec¬
tuée sur la base d’une règle de conflit de lois \
Enfin, les règles matérielles renvoient elles-mêmes assez souvent aux
règles de conflits de lois, lorsqu’elles doivent renoncer, pour diverses raisons,
à réglementer certaines questions qu’elles mentionnent explicitement1 2.
1. V., P. Mayer et V. Heuzé, Droit international privé, op. cit., n° 707 et s. p. 523 et s.;
J.-M. jacquet, « Contrats », Rép. Intern. Dalloz, n° 4 et s. p. 5 et s.
2. Il peut alors être opéré un renvoi global vers les règles de conflits de lois, l’auteur de
ce renvoi global vers des règles de conflit non autrement spécifiées, manifestant ainsi son
désintérêt pour la question ou le fait qu’il n’entend pas, la régler (v. C. Kessedjian, op. cit.,
p. 239; F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, 3e éd, Larder, 2005, n° 441, p. 259
qui parlent alors de « règle de signalisation »). Mais un instrument de droit uniforme peut
aussi poser lui-même une ou plusieurs règles de conflit de lois (v. article 22 et 24 de la
convention des Nations unies sur la cession de créances dans le commerce international) ;
v. Cl. Witz, « Les vingt-cinq ans de la convention des Nations unies sur les contrats de vente
internationale de marchandises. Bilan et perspectives », JDI 2006. 5 et s.
70 TECHNIQUES ET FINALITÉ DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. infra n° 407 et s.
2. V., F. Collart-Dutilleuil, « Quelle place pour le contrat dans l’ordonnancement
juridique? », in Ch. Jamin et D. Mazeaud (dir.), La nouvelle crise du contrat, Dalloz, coll.
« Thèmes et commentaires », 2003, p. 224 et s., spéc. p. 225.
3. V., E. Jolivet, Les Incoterms. Étude d'une norme du commerce international, Litec, 2003,
n° 360 et s. p. 359 et s.; du même auteur, « Les principes Unidroit dans l’arbitrage CCI »,
Bull. conv. Internat, d’arb. de la CCI, suppl. spéc. 2005 p. 71 et s.
4. V., E. Jolivet, Les Incoterms..., op. cit., p. 363 et s.
5. Encore faut-il noter le raisonnement quelque peu circulaire qui consiste à considérer
qu’une règle non en vigueur dans un ordre juridique déterminé pourrait entrer en vigueur
si l’une des conditions qu’elle a elle-même considéré comme suffisante venait à être satis¬
faite ! En fait, il semble que les conditions en cause soient davantag envisagées comme aptes
à produire l’effet souhaité, plutôt que considérées comme réellement opératoires.
TECHNIQUES RELATIVES À LA RÈGLE 71
109 Les codes de conduite ne sont pas rendus inutiles, voire trompeurs pour
autant. Sous la pression du milieu, ou la force de persuasion qu’ils sont
capables d’exercer sur leurs destinataires, ils peuvent parfaitement être
suivis d’effet. À leur égard, l’effectivité se suffit donc à elle-même, et
cette effectivité peut être acquise directement sans passer par l’inter¬
médiaire de la normativité juridique. C’est la raison pour laquelle de
nombreux codes de conduite ou ensemble de prescriptions qui peuvent
leur être assimilés, mettent en place des mécanismes de suivi pour
inciter à ce qu’ils soient connus, pris en considération et observés par
leurs destinataires. L’effectivité peut donc se passer du caractère for¬
mellement obligatoire de la règle3.
La question qui subsiste, en se plaçant dans cette hypothèse, est celle
du statut de ces règles dans le cadre du règlement d’un litige qui s’ef-
TECHNIQUES RELATIVES
SECTION 2.
À L’APPLICABILITÉ DE LA RÈGLE
110 Le droit du commerce international confère une importance considé¬
rable à la volonté des parties. Et ceci à un point tel qu’il est justifié de
distinguer, au sein des techniques destinées à assurer l’applicabilité des
règles existantes, entre les techniques qui confient un rôle à la volonté
(§ 1) et celles qui ne le font pas (§ 2).
A. Lois étatiques
112 Lorsque la règle potentiellement applicable est une loi étatique, celle-ci
peut voir son applicabilité dépendre de la volonté des parties, en vertu
d’une règle de conflit de lois presque universellement répandue en
matière de contrats. Cette règle est présente aussi bien dans les règles
de conflit de lois d’origine nationale ou communautaire, qu’interna-
1. V., Ph. Kahn, « Les réactions des milieux économiques », in Ph. Kahn et C. Kessedjian
(dir.), L'illicite dans le commerce international, Université de Bourgogne, CNRS, CREDIMI
vol. 16, Litec, 1996, p. 477 et s.
TECHNIQUES RELATIVES À LA RÈGLE 73
B. Lois de police
116 Les lois de police constituent la seconde catégorie de règles jouissant
d’un impérativité propre dans les relations internationales. Pour cette
raison, leur applicabilité ne saurait dépendre de la volonté des partis. Au
contraire des règles qui viennent d’être envisagées ci-dessus et qui
relèvent d’un rattachement objectif, les lois de police sont applicables
également en matière contractuelle où elles seront à même de s’imposer
y compris à l’égard de la loi ou des règles choisies par les parties. Elles
sont ainsi aptes à constituer un contrepoids utile voire indispensable à
l’autonomie des parties en matière contractuelle internationale1.
1. V. infra n° 383 et s.
2. V., B. Audit, Droit international privé, 4e éd, Économica, 2006, p. 254 et s. ; P. Mayer
et V. Heuzé, op. cit., p. 145 et s.
76 TECHNIQUES ET FINALITÉ DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
matérielles. C’est ainsi que la validité des clauses-or dans les contrats
internationaux a d’abord été imposée par la Cour de cassation au titre
de l’ordre public international, « avant de devenir un principe matériel
applicable directement au contrat international — indépendamment
de la loi étatique désignée pour le régir » b
L’ordre public international joue également un rôle non négligeable
en matière d’effet des jugements et d’efficacité des sentences arbitrales.
Il permet notamment au juge du for de s’opposer à l’effet dans son
propre pays, de jugements étrangers ou de sentences arbitrales rendues
à l’étranger ou en matière internationale, qui porteraient atteinte à des
solutions reposant sur des lois de police ou de principes fondamentaux
de l’ordre juridique pouvant acquérir une valeur transnationale, ou
déjà consacrés par l’ordre juridique international.
Sans remettre en cause l’utilité qu’il y a pour chaque État à disposer
de son propre ordre public international, la réalité d’un ordre public
transnational se laisse de mieux en mieux distinguer. Cet ordre public
transnational s’alimente davantage à partir des règles et des valeurs
adoptées par la Communauté internationale qu’à partir des concep¬
tions propres à un État. Il est susceptible d’être pris en compte dans des
décisions arbitrales ou des jugements de juridictions étatiques1 2.
1. V., B. Ancel et Y Lequette, note sous Civ. 21 juin 1950, Messageries maritimes, in
B. Ancel, Y. Lequette, Les Grands arrêts..., op. cit., n° 22.
2. V. P. Lalive, « Ordre public transnational (ou « réellement international ») et arbi¬
trage international», Rev. arb. 1986. 323 et s.; Ph. Kahn, «À propos de l’ordre public
transnational : quelques observations. », in Mélangés F. Sturm, Liège, 1999, p. 1539 et s.;
J-B. Racine, « La contribution de l’ordre public européen à l’élaboration d’un ordre public
transnational en droit de l’arbitrage. », Rev. aff. europ. 2005/2, p. 227 et s.
LA DÉFENSE DES INTÉRÊTS DU COMMERCE INTERNATIONAL 77
CHAPITRE 2
LA DÉFENSE DES INTÉRÊTS
DU COMMERCE INTERNATIONAL
SECTION 1.
UNE EXIGENCE FONDATRICE
DU DROIT DU COMMERCE
INTERNATIONAL
§ 2. Portée méthodologique
Ainsi, dès 1930, l’arrêt Mardelé, s’appuyait sur les intérêts du commerce
international pour admettre la validité d’une clause compromissoire, alors
prohibée par la loi française1 : « Attendu que dès l’instant que ces conven¬
tions mettent en jeu les intérêts du commerce international, et la nullité
de la clause compromissoire édictée par l’article 1006 du Code de procé¬
dure civile n’étant pas d’ordre public en France, les parties même française
l’une et l’autre, ont pu valablement, dans un contrat conclu soit à l’étran¬
ger, soit en France, déroger aux dispositions de ce texte et se référer pour
régir leurs accords à une loi étrangère, telle que la loi anglaise, admettant
la validité d’une telle clause... »2. L’arrêt est encore partiellement conflic-
tualiste, comme le montre la référence à la loi anglaise considérée comme
nécessaire, mais non suffisante à assurer la validité de la clause d’arbitrage
(d’où la mention de l’ordre public).
Mais plus tard, l’arrêt Gosset de la Cour de cassation reconnaîtra
l’autonomie de la clause compromissoire, sur le seul fondement de la
mise en jeu par le contrat des intérêts du commerce international3.
Dans les mêmes conditions, et sur le même fondement, la Cour de
cassation admettra dans son arrêt Galakis4 que la mise en jeu des inté¬
rêts du commerce international affranchit l’État et les établissements
publics français de la prohibition de conclure des conventions d’arbi¬
trage avec des personnes privées. La solution sera étendue ensuite pour
les mêmes raisons aux États étrangers5.
1. V. Civ. 19 févr. 1930, S. 1931. I. 1., note J.-P. Niboyet; v. Ph. Leboulanger, op. cit.,
p. 495.
2. V. encore Civ. 27 févr. 1931, S. 1931. I. 1, note J.-P. Niboyet; v. Ph. Leboulanger,
op. cit p. 495.
3. Civ., 7 mai 1963 D. 1963.545, note J. Robert, JCP 1963. II. 13405, note B. Goldman,
Rev. crit. DIP 1963. 615, note Motulsky; JDI 1964, lre esp., note J.-D. Bredin,
4. Civ. 2 mai 1966, Rev. crit. DIP 1967. 553, note B. Goldman; JDI 1966. 648, note
P. Level; D. 1966. 575, note J. Robert; B. Ancel, Y. Lequette, Les Grands arrêts..., op. cit.,
n° 44.
5. V. infra n° 1069. Pour une analyse nuancée et toujours actuelle de l’évolution
de la jurisprudence, v. A. Ponsard, « La jurisprudence de la Cour de cassation et le droit
commercial international », in Melanges B. Goldman, op. cit., p. 241 et s.
80 TECHNIQUES ET FINALITÉ DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., F. Osman, Les principes généraux de la lex mercatoria. Contribution à l'étude d’un
ordre juridique national, préf. E. Loquin, LGDJ, 1992.
2. V. « La responsabilité des entreprises en droit international : chimère ou réalité »,
International Law Forum du droit international, vol. 7, n° 4, déc. 2005 ; A. Clapham, Human
Rights obligations ofNon State Actors, Oxford University Press, 2006 p. 195 et s. C. Kessedjian, Les
actions civiles pour violation des droits de l’homme, aspects de droit international privé, Trav.
com. fr. dt. int. pr. 2002-2004, p. 151 et s., F. Matscher, le droit international privé face à la
convention européenne des droits de l’homme, Trav. com. fr. dt. int. pr. 1995-1998, p. 211 et s.
3. V., Ph. Kahn et C. Kessedjian (dir.), L’illicite dans le commerce international, Université de
Bourgogne, CNRS, CRED1M1, vol. 16, Litec, 1996; A. Mezghani, «Méthodes de droit
international privé et contrat illicite », RCADI t. 303 (2003) p. 123 et s.; « L’illicite dans le
commerce international. L’anomie de la société internationale », in Mélanges en l’honneur de
G. Farjat, Frison-Roche 1999, p. 193 et s.; A. Court de Fontmichel, L'arbitre, le juge et les pratiques
illicites du commerce international, préf. H. Gaudemet-Talion, éd. Panthéon-Assas, 2004.
4. V. convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers
dans les transactions commerciales internationales, signée le 17 décembre 1997, entrée en
vigueur le 15 février 1999; convention des Nations unies sur la corruption, signées à Mer-
rida (Mexique) en décembre 2003, entrée en vigueur le 15 décembre 2005.
82 TECHNIQUES ET FINALITÉ DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., G. Farjat, Pour un droit économique, PUF, coll. « Les voies du droit », 2004, p. 157
et s. ; Comp. X. Boucobza, « La prise en compte des intérêts de l’État dans le commerce
international », Rev. arb. 2005. 465 et s., l’auteur se référant à l’émergence d’une « lex
publica », composée de normes de nature variée (lois de police «véritablement
internationales », principe généraux du droit, codes de conduite...) n’ayant pas vocation à
satisfaire les intérêts des opérateurs du commerce international, mais ceux des États.
Dans le domaine des normes sociales, v. M. A. Moreau, Normes sociales, droit du travail et
mondialisation. Confrontations et mutations, Paris, Dalloz, 2006.
TITRE 2
SOUS-TITRE 1
CHAPITRE 1
LES ÉTATS
131 L’action unilatérale des États englobe aussi l’activité de leurs juridic¬
tions en matière de litiges du commerce international. Les États fixent
les règles de compétence internationale de leurs tribunaux. Ils déter¬
minent aussi les conditions auxquelles ils soumettent l’efficacité
dans leur ordre juridique des décisions rendues par les tribunaux étran¬
gers ainsi que celle des sentences arbitrales rendues à l’étranger ou en
matière internationale3.
L’action des juridictions étatiques en matière de commerce interna¬
tional est très importante car les intérêts du commerce international
1. V. infra n° 383 et s.
2. V., M. Dahan, La pratique française du droit du commerce international, éd. du CFCE,
1992, p. 5, note 1.
3. V. infra n° 1127 et s.
88 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
sont souvent pris en compte avec plus de finesse par les tribunaux que
par les législateurs. Ainsi la Cour suprême des États-Unis, a fait évoluer
sa jurisprudence dans un sens libéral en matière de clause attributive
de juridiction1 ou en matière d’arbitrabilité des litiges lorsque l’appli¬
cabilité du droit de la concurrence se trouvait en cause2. De son côté,
la Cour de cassation a, depuis longtemps, développé une jurisprudence
créatrice particulièrement ouverte à la considération des intérêts du
commerce international3.
1. V. Cour suprême des États-Unis, 12 juin 1972, Rev. crit. DIP 1973. 530, note H. Gau-
demet-Tallon et D. Talion; v. également pour la Chambre des Lords, « L’incompétence
internationale discrétionnaire du juge anglais et ses limites, L’arrêt de la Chambre des Lords
du 10 avr. 1973 (Atlantic Star c. Bona Spes) », Rev. crit. DIP 1974. 607 et s., par H. Gaude¬
met-Talion et D. Talion.
2. V., ]. Robert, « Une date dans l’extension de l’arbitrage international : l’arrêt Mitsu-
bischi c. Soler », Rev. arb. 1986. 173 et s.
3. V., A. Ponsard, « La jurisprudence de la Cour de cassation et le droit commercial
international », in Le droit des relations économiques internationales, Études offertes à B. Gold¬
man, Litec, p. 241 et s.
LES ÉTATS 89
137 C’est encore l’action concertée des États qui s’exerce au niveau de leur
association dans des unions économiques, du moins dans la phase
antérieure à la création de l’entité en cause (zones de libre-échange
comme l’Alena ou le Mercosur; ou zones d’intégration économique
comme la CEE devenue depuis l’Union européenne).
Il convient de garder présent à l’esprit que même lorsqu’ils se sont unis
par traité dans l’adoption de normes communes ou dans des institutions
qui opèrent un groupement d’État, les États continuent toujours de dis¬
poser d’une marge d’action normative et décisionnelle inhérente à leur
qualité de souverain. L’existence de cette marge d’action ou sa réappro¬
priation par des États confrontés à la défense de leurs propres intérêts
sont source de dysfonctionnements voire de conflits dont la scène éco¬
nomique internationale contemporaine donne de nombreux exemples.
1. V., à titre d’exemple, la convention des Nations unies (convention de Vienne) sur les
contrats de vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 ou le traité sur les prin¬
cipes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace
extra-atmosphérique, y compris la Lune et les corps célestes du 27 janv. 1967 (v. L’exploita¬
tion commerciale de l'espace. Droit positif, droit prospectif, Ph. Kahn (dir.), spéc. M Salem
Litec, 1992, p. 107 et s.).
LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES SPÉCIALISÉES 91
CHAPITRE 2
LES ORGANISATIONS
INTERNATIONALES
SPÉCIALISÉES
COMMERCE ET DÉVELOPPEMENT :
SECTION 1
LA CNUCED
139 La conférence des Nations unies sur le commerce et le développement
a été créée à la suite de la première conférence des Nations unies
(CNUCED) sur le commerce et le développement (Genève 1964). Elle
est un organe subsidiaire des Nations unies dont l’objectif est de favo¬
riser la coopération internationale en vue d’établir un régime général
du commerce international qui tienne compte des intérêts spécifiques
des pays en développement. Par ailleurs, ceux-ci ont créé le groupe
des 77, qui compte aujourd’hui 131 membres.
Les principaux résultats de l'action entreprise par la CNUCED sont
les suivants.
1. Actuellement, à la suite des derniers accords de Lomé, qui ont pris fin en février 2000,
est intervenu un nouvel accord préférentiel signé à Cotonou, le 23 juin 2000 entre l’Union
européenne et les pays ACP. Cet accord est établi pour une durée de 20 ans avec un réexa¬
men tous les cinq ans.
92 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
142 La CNUCED exerce également son action dans le domaine des confé¬
rences maritimes, assurant la promotion des pays en voie de dévelop¬
pement dans le cadre des accords maritimes.
C'est dans le cadre de la CNUCED qu’a été élaboré et approuvé en
1980 un Code de conduite sur les pratiques commerciales restrictives.
Ce code, comme tous les codes de conduite est dépourvu de toute
valeur normative propre. En visant les gouvernements comme les
entreprises privées, il vise à favoriser l’accès aux marchés et à contre¬
carrer les comportements qui portent trop fortement atteinte à la
concurrence.
Depuis les années 1980, la CNUCED a cherché à favoriser l’inté¬
gration des pays en développement au système commercial mondial.
Elle leur a fourni une assistance lors des négociations du cycle d’Uru¬
guay et les a aidés à rééchelonner leurs dettes publiques dans le cadre
du Club de Paris. La CNUCED a multiplié les travaux dans le domaine
de l’efficacité commerciale (facilitation des formalités douanières,
transport multimodal).
Les rapports annuels de la CNUCED font autorité : rapport annuel
sur le commerce et le développement; ou rapports spéciaux comme les
rapports sur l’investissement dans le monde1.
QUESTIONS GÉNÉRALES,
SECTION 4.
TECHNIQUES ET CONTRATS EN MATIÈRE
DE COMMERCE INTERNATIONAL
Plusieurs organisations trouvent ici un champ de compétence privi¬
légié ou épisodique.
1. V., B. Goldman, « Les travaux de la Commission des Nations unies pour le droit
commercial international, note introductive », JDI 1979. 747 et s. ; adde les actes du Congrès
de la CNUDCI (New York, Nations unies 1992) des 18-22 mai 1992, Le droit commercial
uniforme au XXIe siècle.
LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES SPÉCIALISÉES 95
CHAPITRE 3
UN ACTEUR GLOBAL :
L’ORGANISATION MONDIALE
DU COMMERCE
§ 1. Évolution historique
La naissance du GATT (A) est aussi importante que le développe¬
ment des cycles de négociation (B).
A. Naissance du GATT
155 Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale les États-Unis ont pro¬
posé, sous l’égide du Conseil économique et social des Nations unies,
la création d’une Organisation internationale du commerce. Cette
Organisation devait être le troisième pilier d’un vaste ensemble consti¬
tué par ailleurs de la Banque mondiale (BIRD) et du Fonds monétaire
international (FMI)1.
Après trois ans de négociations conduites à la conférence de La
Havane fut élaborée une charte instituant l’Organisation internatio¬
nale du commerce (OIC) et comportant un ensemble de règles devant
favoriser le commerce international. Mais cette charte n’entra jamais
en vigueur faute de ratifications (y compris de la part des États-Unis).
Il ne subsista donc qu’un accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce (désigné communément sous le sigle de GATT : General
agreement on tariffs and trade). Cet accord, qui avait été pris dans le
cadre de la négociation OIC, consistait en un exercice de réductions
tarifaires. Il fut adopté par vingt-trois pays qui s’étaient consentis des
157 Les premiers rounds ont été essentiellement axés sur l’abaissement
des barrières douanières : Genève 1947, Annecy 1949, Torquay (Angle¬
terre) 1951, Genève 1956.
Mais à partir du Kennedy Round (1963-1967) les négociations ont
commencé à sortir du cadre purement tarifaire. C’est de ce round que
date le premier Code antidumping ainsi que la reconnaissance d’un
mécanisme préférentiel en faveur des pays en développement.
Le Tokyo Round (1973-1979) qui réunit quatre-vingt-dix-neuf pays
représentant les neuf dixièmes du commerce mondial permit encore
d’obtenir un abaissement important des droits de douane (30 % envi¬
ron). Il aboutit aussi à la conclusion de nombreux accords sur les
barrières non tarifaires.
§ 2. Aspects institutionnels
160 L’OMC est une véritable organisation internationale dotée de la per¬
sonnalité juridique. Elle regroupe la plupart des États du monde. Les
membres du GATT sont devenus des membres originaires de l’OMC.
Les autres États ont dû se plier à une procédure d’accession longue et
complexe (elle a duré 15 ans pour la Chine).
L’OMC est indépendante des Nations unies. Elle constitue un sys¬
tème juridique institutionnel unique devant administrer tous les
accords et au sein de laquelle se poursuivront les futures négociations.
Elle administre aussi un mécanisme d’examen périodique des poli¬
tiques commerciales des pays membres.
L’OMC se compose de deux principaux organismes : la conférence
ministérielle (art. IV.l de l’accord) (a) et le Conseil général (art. IV.2 de
l’accord) (b). Elle comporte en outre un secrétariat composé de fonc¬
tionnaires internationaux, indépendants des États (c). Il est dirigé par
le directeur général, lui-même désigné par la conférence ministérielle.
1. V., T. Flory, « Remarques à propos du nouveau système commercial mondial issu des
accords du cycle de l’Uruguay », JDI 1995. 887 et s., spéc. p. 882.
L’ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE 105
A. Le principe de non-discrimination
Ce principe comporte lui-même deux volets1.
A. Les dérogations
172 Un membre de l’OMC peut toujours solliciter l’octroi de dérogations.
Ces dérogations lui permettront d’être délié de l’une ou plusieurs des
obligations qu’il a assumées en sa qualité de membre de l’OMC.
Ces dérogations ne sont pas nouvelles et ont déjà été prévues par le
GATT de 1947 à son article XXV. 5. Le nouvel Accord sur l’OMC prévoit
à ses articles IX. 3 et IX. 4 que la conférence ministérielle pourra accor¬
der à un État membre des dérogations, dans des circonstances excep¬
tionnelles et pour une durée d’une année, le renouvellement devant
être soumis à un examen approfondi.
De nombreuses demandes de dérogation sont intervenues avant,
comme depuis l’entrée en vigueur de l’Accord sur l’OMC.
108 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. L’article XX du GATT
177 Ce texte comporte une série d’exceptions assez disparates dont le seul
point commun est de permettre aux États d’adopter des mesures qui
seraient normalement incompatibles avec les engagements pris par ces
États dans le cadre de l’OMC. Ces exceptions peuvent cependant être
regroupées en deux catégories : celles qui tiennent à la nature des pro¬
duits et celles qui reposent sur la protection de certaines catégories
d’intérêts.
183 1 ) Les mesures antidumping O Les textes pertinents sont ici l’ar¬
ticle VI du GATT et l’accord antidumping de Marrakech (remplaçant le
Code antidumping du Tokyo Round, signé en 1979).
a) Le dumping est défini par l’article VI du GATT comme le fait d’in¬
troduire un produit sur un marché étranger à un prix inférieur à sa
valeur « normale », celle-ci était entendue comme celle auquel le même
produit est offert sur marché national du pays exportateur.
Le dumping n’est pas en soi condamnable. Mais s’il cause un préju¬
dice à un État importateur, soit en rendant difficile la survie d’une
branche de production nationale, soit en retardant sensiblement son
développement, cet État aura le droit, s’il le souhaite, de mettre en
cause des mesures antidumping. En opérant un recours fréquent à ces
mesures, les États les plus développés (USA, Canada, Communauté
européenne) en ont parfois fait un instrument de protectionnisme
contraire à la philosophie du GATT. Ainsi est-il devenu aussi important
de réglementer les mesures antidumping que le dumping lui-même.
L’accord de 1994 en se limitant à des retouches — bienvenues mais sans
doute insuffisantes — a couru le risque de ne pas réussir à limiter cer¬
tains excès dans le recours aux mesures antidumping.
b) La partie contractante qui s’estimerait lésée par un dumping doit
demander l’ouverture d’une enquête. Il s’agit pour elle de démontrer
112 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. Groupe spécial 28 oct. 2005, Corée, JDI 2006.1258, obs. H. Ruiz-Fabri et P. Mon-
nier; organe d’appel 2 nov. 2005, États-Unis, JDI 2006.1265, obs. H. Ruiz-Fabri et P. Monnier;
organe d’appel 29 nov. 2005, Mexique, JDI 2006.1269, obs. H. Ruiz-Fabri et P. Monnier.
L’ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE 113
3. Les sauvegardes
185 a) Les mesures de sauvegarde O Elles sont visées par l’article XIX du
GATT (« Mesures d’urgence concernant l’importation de produits par¬
ticuliers »). Il est compréhensible que, dans une optique de libéralisa¬
tion du commerce international, ce texte permette à certains États de
se protéger en cas de hausse imprévue des importations d’un produit
de nature à porter un préjudice grave aux producteurs nationaux.
Aussi, lorsque ses conditions d’application sont réunies, il permet à
un État de prendre des mesures provisoires afin de permettre la réor¬
ganisation du secteur de production national menacé. Ces mesures
peuvent être de deux ordres : soit des droits de douane soit des restric¬
tions quantitatives. Dans tous les cas, une enquête est imposée au
niveau national.
Mais l’article XIX imposait que ces mesures fussent appliquées de
façon non discriminatoire, c’est-à-dire, envers l’ensemble des pays
exportateurs du produit en cause, et non seulement à l’égard de celui
dont les importations avaient le plus augmenté.
1. Cf. organe d’appel 29 nov. 1965, Mexique, précité note 1 de la p. 112, n° 183.
114 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. L’Accord sur l’évaluation en douane est désigné comme « Accord sur la mise en œuvre
de l’article VII de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 ».
116 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. Les services
195 La part des services dans le commerce international est devenue consi¬
dérable1. Mais le GATT ne concerne que les échanges de biens. C’est à
l’initiative des États-Unis que les négociateurs de l'Uruguay Round ont
introduit les services dans leurs travaux. Le résultat fut un nouvel
accord : accord général sur le commerce de services (AGCS ou GATS en
anglais). Cet accord est formellement distinct du GATT. Cette distinc¬
tion correspond au parti pris dans les négociations de tenir pour signi¬
ficatives les différences entre le commerce des marchandises et celui
des services. Le facteur d’unité réside dans l’optique de libéralisation du
commerce international commune aux deux domaines.
1. Notion de service
196 Les services constituent aujourd’hui une catégorie extrêmement vaste
et beaucoup moins homogène que le secteur des marchandises.
Les règles du GATT qui s’appliquent aux marchandises visent pour
l’essentiel des marchandises qui font l’objet d’opérations d’import-
export, soit dont la propriété est transférée d’une personne à une
autre.
Les services n’excluent pas la circulation d’une marchandise, mais
leur trait caractéristique réside dans l’obligation d’une partie d’assu¬
mer en toute indépendance une prestation à l’égard d’une autre partie.
Elle met à la disposition de l’autre partie son savoir-faire, ses compé¬
tences, ainsi que les moyens matériels dont elle dispose, afin de lui
procurer le service attendu, en contrepartie duquel une rémunération
pourra être exigée. Des contrats comme le contrat d’entreprise, de
mandat, de dépôt, ou de prêt d’argent entrent dans cette catégorie.
Cependant, la réalité économique conduit à établir des catégories
plus concrètes se rapportant à des secteurs d’activité à l’intérieur des¬
quels les activités de services revêtent une forte spécificité. En s’inspi¬
rant d’une classification émanant de l’OCDE, on retiendra notamment
les trois grands secteurs suivants : opérations liées aux mouvements de
marchandises et de personnes : transport, voyages, tourisme; opéra¬
tions relevant de revenus du travail et du capital : assurance, services
bancaires et financiers; opérations liées aux télécommunications et à
l’informatique. L’article 1er du GATS se réfère simplement à la « four¬
niture d’un service », sans autre précision. Mais il exclut de son champ
les services fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental (art. 1,
alinéa 3, b), considérés comme « tout service qui n’est fourni ni sur
une base commerciale, ni en concurrence avec un ou plusieurs four¬
nisseurs de services. »
1. V., S. Ciabrini, Les services dans le commerce international, PUF, coll. « Que sais-je ? »,
1996; D. Carreau, Services, Re'p. Intern. Dalloz.
L’ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE 119
2. Problèmes posés
par le « commerce international de services »
197 Ils sont nombreux et plus complexes que pour le commerce de mar¬
chandises où sont essentiellement en cause des obstacles tarifaires, des
restrictions quantitatives ou des obstacles techniques. Il est possible de
distinguer trois catégories de problèmes.
3) Marge de liberté des États membres. Selon l’article 1.1 les États
peuvent toujours adopter dans leur législation un niveau de protection
plus large que celui qui découle des Traités mentionnés ou de l’ADPIC,
à condition que les dispositions en cause ne soient pas contraires aux
dispositions de l’Accord ADPIC.
L’article 8 intitulé « Principes » permet aux membres de prendre des
mesures appropriées, compatibles avec les ADPIC, pour protéger la
santé publique et la nutrition. Cette disposition vise surtout les PVD.
Ainsi elle permet d’instaurer un contrôle des prix.
Chaque État membre peut prendre des mesures afin de lutter contre
des pratiques anticoncurrentielles ou de lutter contre des pratiques qui
seraient préjudiciables au transfert international de technologie.
4) Rôle des procédures judiciaires nationales (articles 42 à 50) Des
procédures loyales et équitables doivent être mises en place afin de faire
respecter les droits de propriété intellectuelle. Les autorités judiciaires
doivent se voir reconnaître un certain nombre de pouvoirs. Des sanc¬
tions pénales sont envisagées à l’article 61.
d. Règles générales. Au titre des règles générales, l’Accord prévoit le
principe du traitement national. Ce principe était déjà présent dans les
traités, mais il visait seulement la protection des droits. Il est désormais
étendu à l’exercice des droits (art. 3-1, note 3), mais reste soumis aux
exceptions que comportent les traités. Il prévoit également la clause
NPF, qui n’avait jamais figuré dans les traités. Elle s’applique elle aussi
non seulement à la protection, mais aussi à l’exercice des droits. La
clause NPF a un caractère réciproque au regard des conventions de
Berne et de Rome.
L’article 64 prévoit que le règlement des différends pourra s’effec¬
tuer devant TORD. Mais le mécanisme ne pouvait pas être utilisé pen¬
dant 5 années.
208 Dans le cadre ainsi défini, l’accord transpose certains des principes
fondamentaux du GATT dans le domaine des mesures étatiques visant
de tels investissements : principe de transparence (notification et
publication, art. 6 de l’accord) mais surtout principe du traitement
national (art. 2 de l’accord) et principe d’élimination des restrictions
quantitatives.
Ainsi deviendront incompatibles avec le GATT des réglementations
étatiques imposant un minimum de contenu local : imposer à une
firme un pourcentage donné d’achats sur le marché local revient à une
restriction quantitative à l’importation; ou les prescriptions imposant
des résultats à l’exportation (proches des subventions interdites) ; ou
des prescriptions relatives à l’équilibre des échanges entre produits
importés et produits exportés...
Ces différentes mesures doivent faire l’objet d’une notification et
être supprimées dans une période de transition de deux ans, portée à
cinq ans pour les pays en développement et sept ans pour les pays les
moins avancés.
LE MÉCANISME DE RÈGLEMENT
SECTION 3.
DES DIFFÉRENDS DE L’OMC
§ 1 Observations générales sur le mécanisme
de règlement des différends de l’OMC
210 L’une des innovations majeures apportées par les accords de l’Uruguay
fut la mise en place d’un système de règlement des différends por¬
tant sur l’application des accords de l’OMC. Ce système est original à
de nombreux égards. Deux points méritent d’être soulignés à cette
place.
En premier lieu, il convient de rappeler que dans les relations inte¬
rétatiques, le règlement du contentieux doit s’effectuer de façon paci¬
fique (articles 24 et 33 de la Charte des Nations unies). Les modes
diplomatiques de règlement des différends tiennent une place très
importante. Néanmoins, le recours à des modes juridictionnels de
règlement des différends n’est en rien exclu. Cependant, qu’il s’agisse
d’arbitrage, ou de la juridiction de la Cour internationale de justice,
le consentement de l’État au jugement d’un tiers est toujours requis,
qu’il soit donné spécialement ou dans un instrument de portée plus
générale.
Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC ne déroge pas
à ces règles. En effet, il ne s’impose aux États que par voie de consé¬
quence de leur adhésion à l’OMC et de leur acceptation d’être liés par
les accords de l’OMC.
Cependant, ce point étant acquis, il réussit le tour de force de tenir
à distance les mécanismes habituels de règlement des différends en
imposant sa compétence pour les différends qui pourraient opposer des
États à propos des accords de l’OMC (cf. art. 23 du Mémorandum
d’accord sur le règlement des différends ’). Ce faisant, il conduit égale¬
ment les États à renoncer à apprécier unilatéralement la validité de leur
propre comportement ou de celui des autres États au regard des normes
de l’OMC. Ceci conduit au deuxième point.
C. Organe d’appel
214 L’organe d’appel, contrairement aux groupes spéciaux, est un organe
permanent. Il est composé de 7 membres dont 3 siégeront pour une
affaire donnée. Ces membres sont désignés par l’ORD (pour une durée
de 4 ans, renouvelable une fois) et ne doivent avoir aucune attache
avec une administration nationale.
L’organe d’appel ne statuera que sur les questions de droit soulevées
par la partie qui a fait appel. Il est appelé à confirmer, infirmer ou
modifier les constatations et conclusions juridiques du groupe spécial.
Il dispose d’un délai de 60 jours à 90 jours.
128 LES ACTEURS DU DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
SOUS-TITRE 2
h
■
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 133
CHAPITRE 1
LE DROIT APPLICABLE
AUX SOCIÉTÉS
225 Des sociétés rattachées à la loi d’un État qui constituent de très loin le
plus grand nombre (Section 1), se distinguent des sociétés internatio¬
nales et la société européenne (Section 2).
LE RATTACHEMENT
SECTION 1.
DES SOCIÉTÉS À LA LOI D’UN ÉTAT
226 II importe ici de déterminer la loi applicable à la société (§1), puis
d’exposer brièvement le domaine de cette loi (§2).
1. V., H. Batiffol et P. Lagarde, Traité de droit international privé, 1.1, 8e éd., LGDJ, 1993,
n° 203 ; B. Audit, Droit international privé, 4e éd., Économica, 2006, n° 1104 et s., p. 865 et s. ;
M. Loussouarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommieres, Droit international privé, 8e éd., Dalloz,
2004, n° 704 et s., p. 921 et s.; P. Mayer et V. Heuzé, Droit international privé, 8e éd.,
Montchrestien, 2004, n° 1030 et s., p. 717 et s. ; Y. Menjucq, Droit international et européen
des sociétés, Montchrestien, 2001, n° 69 et s., p. 8 et s. : J. Béguin et Y. Menjucq (dir.), Droit
du commerce international, Litec, 2005, p. 173 et s. par A. Couret; J.-M. Mousseron,
J. Raynard, R. Fabre, J.-L. Pierre, Droit du commerce international : Droit international de
l’entreprise, Litec, 2005; Y. Loussouarn et J.-D. Bredin, Droit du commerce international,
Dalloz-Sirey, 1969; H. Synvet, « Sociétés », Rép. lntern. Dalloz, n° 33 et s.; Loussouarn et
M. Trochu, «Conflits de lois en matière de sociétés» J.-Cl. dr. int., fasc. 564-30;
Y. Loussouarn, Les conflits de lois en matière de sociétés, thèse Rennes, 1947 ; H. Synvet,
L’organisation juridique du groupe international de sociétés (conflits de lois en matière de sociétés
et défaut d’autonomie économique de la personne morale), thèse Rennes, 1979; F. Guillaume,
« Lex societatis. Principe de rattachement des sociétés et correctifs institués au bénéfice des
tiers en droit international privés suisse », Études suisses de droit international, vol. 116,
Shultess, 2001.
134 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
A. L'incorporation
228 1) Notion O Ce critère de rattachement considère comme détermi¬
nant le droit de l’État dans lequel les sociétés ont accompli leurs for¬
malités de constitution.
Il repose sur la considération selon laquelle toutes les sociétés se
créent formellement dans le cadre d’un système juridique, celui qui a
été choisi par les fondateurs de la société. Les statuts vont donc dési¬
gner le pays choisi comme lieu du siège statutaire de la société.
Ce critère de rattachement présente de multiples avantages :
- il respecte la volonté des parties (fondateurs) et ne leur impose pas
d’autres contraintes que de se soumettre aux exigences du droit local;
- il est aisément identifiable ;
- il est très stable; seuls pourraient l’affecter des changements
volontaires qui sont exceptionnels ;
- il est souple dans la mesure où il préserve la liberté d’action de la
société. La loi applicable reste la même, même si la société déplace ses
activités ou son centre de gravité, et si elle vient à entretenir aussi des
liens plus étroits avec un autre État.
1. V. articles 210.3 al. 2 C. com. et 1837 al. 2 C. civ. qui accordent une option au tiers
pour le cas où le siège statutaire et le siège réel ne seraient pas situés dans le même pays
(solution déduite par extrapolation d’une règle de conflit unilatérale envisageant seulement
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 135
232 En Italie, une loi du 1er septembre 1995, nouvelle loi de droit interna¬
tional privé, s’est ralliée au système de l’incorporation4. L’article 25.1
de cette loi désigne la loi de l’État dans le territoire dans lequel a été
l’application de la loi française et restant silencieuse sur la loi étrangère). Ces articles ont été
appliqués uniquement dans le cas où une société incorporée à l’étranger avait son siège de
direction en France, ce qui correspond à l’hypothèse visée au texte (en ce sens, v. M. Menjucq
Droit international et européen des sociétés, Montchrestien, 2001, n° 75 p. 95; Crim. 21 nov.
1889, S. 1890. 94; CA Paris, 31 oct. 1957, RTD com. 1958. 345, note Y. Loussouarn; pour la
Suisse, v. l’arrêt Vernet du Tribunal fédéral ATF 76150 qui, dans un système favorable à l’in¬
corporation admet la réserve du siège fictif ; v. F. Guillaume, op. cit., p. 124. Mais cette juris¬
prudence a été abandonnée par le Tribunal fédéral à la suite de l’entrée en vigueur de la LDIP
(v. F. Guillaume, op. cit., p. 128 : ATF 117 II 494(f) Chilon valeurs).
1. V., F. Guillaume op. cit., p. 116.
2. Hoge Raad, 23 mars 1966, Weekblad van het Recht 2781, VLAS Netherlands reports,
p. 39. V. loi du 25 juillet 1959, entrée en vigueur le 7 octobre 1969 (F. Guillaume, op. cit.,
p. 118).
3. V. note n° 229.
4. V., G. Broggini : « La nouvelle loi italienne de droit international privé », RSDfF
1996, p. 1-41, spéc. p. 29 et s., : T. Ballarino : « Personnes, famille, régimes matrimoniaux
136 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
et successions dans la loi de réforme du droit international privé italien », Rev. crit. DIP
1996. 21 et s., spéc. p. 36 et s.
1. V., F. Guillaume, op. cit., p. 135. Pour les convergences entre les deux systèmes,
v. M. Menjucq, op. cit., n° 73 et s p. 90 et s. ; comp. P. Mayer et V. Heuzé, op. cit., n° 1034
et s., p. 719 et s. ; H. Synvet « Sociétés », Rép. Intern. Dalloz, n° 40 et s. peu convaincu que
la France impose le siège réel en l’absence, notamment, de décision de justice ayant imposé
l’application d’une loi étrangère à une société constituée en France, sous prétexte que son
siège social se serait trouvé à l’étranger. Il est exact, comme le souligne cet auteur, que les
arrêts qui pourraient être cités ici ne sont guère probants : v. Civ. lre, 30 mars 1971, CCRMA,
Rev. crit. DIP 1971.451, note P. Lagarde; JDI 1971. 834, note Y. Loussouarn; CA Paris,
19 oct. 1982, Banque Ottomane, Rev. crit. DIP 1984. 93, note H. Synvet., RJ com. 1983. 258,
note H. Gaudemet-Talion).
2. V., M. Menjucq, op. cit., n° 75 p. 93.
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 137
C. Conventions internationales
235 La question se pose de savoir si la liberté des États d’adopter le critère
qui leur convient n’est pas affectée en raison de certains traités.
1. V. BGHZ 21 mars 1986, BGH 1986 (97) p. 269; v. F. Guillaume, op. cit., p. 142.
138 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. V. infra n° 287 et s.
2. La comparaison avec le statut personnel (expérience utilisée par Civ. 4 juillet 1923,
S. 1925. I. 18) paraît exagérée.
3. V. supra n° 233 et s.
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 139
1. V., R. Crône « La loi applicable aux pouvoirs des dirigeants des sociétés étrangères »
Travaux comité fr. DIP 1998-2000, p. 243 et s.
2. V. CA Paris, 26 mars 1966, JDI 1966. 841, note B. Goldman; Rev. crit. DIP 1968. 58,
note M. Loussouarn; Civ. 2e, 8 déc. 1998, Rev. crit. DIP 1999. 284 note M. Menjucq; Com.
27 déc. 1987, Rev. crit. DIP 1989. 347 note M.N. Jobard-Bachellier; JCP 1998. II. 21113,
concl. Montanier, Banque 1988. 361, obs. J.-L. Rives -Langes.
3. V., D. Cohen : « La responsabilité civile des dirigeants sociaux en droit international
privé », Rev. crit. DIP 2003. 585.
4. V. Civ. 2e, 2 juill. 1997, Bull. Joly 1997. 1062, note M. Menjucq. « La compétence de
la loi de la faillite doit tout de même être réservée », v. H. Synvet, « Société », op. cit.,
n° 113.
5. V. en ce sens, Com. 19 mai 1992, JDI 1992. 954, note Ph Kahn, Bull. Joly 1992. 758,
note L. Faugerolas.
6. V. Infra n° 850 et s.
7. Sur ces différents points, v. H. Synvet, « Société », op. cit., n° 128 et s.
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 141
B. Lois de police
243 Si étendu que doive être le domaine de la lex societatis, celle-ci doit
parfois céder le pas à certaines dispositions internationalement impé¬
ratives qui auront le caractère de lois de police. Celles-ci, fort heureu¬
sement, ne sont pas toujours étroitement reliées au fonctionnement de
la société, mais peuvent être relatives aux activités que déploie la société
au-delà du territoire de l’État dont la loi lui est applicable.
1. V., H. Synvet op. cit., n° 159 et s.; A. Couret, op. cit., n° 474 et s., p. 184 et s.
2. V. art. 211-1 du règlement AMF.
3. V., A. Couret, op. et loc. cit., CA Paris 13 janv. 1998, Bull. Joly Bourse 1998, § 65,
p. 25, note N. Rontschewsky; RD bancaire et bourse, n° 66, 1998, 64, obs. M. Germain et
M. A. Frison-Roche; D. Affaires 1998. 704, note M. Boizard; Rev. soc. 1998. 572, note
P. Le Cannu; JCP E 1999. 1431, n° 6, obs. J.-J. Daigre; D. 1999 Somm. 255, obs. Y. Reinhard.
4. V., CA Paris 13 janv. 1998. D. Affaires 1998, obs. M.B., Bull. Joly Bourse 1998. 256,
Rev. soc 1998. 572 note P. le Cannu : « Les dispositions d’ordre public économique de la loi
du 2 juillet 1996 et le règlement général du Conseil des marchés financiers s’imposent à
tous opérateurs qui interviennent sur un marché réglementé français ».
142 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. V., M. Ruiz Fabri et J.-M. Sorel, in J. Béguin et M. Menjucq (dir.), Droit du commerce
international, op. cit., n° 295 et s., p. 130 et s.; H. Synvet, « Société », op. cit., n° 150 et s.;
M.-A. Frison-Roche et M.-S. Payet, Droit de la concurrence, Dalloz, coll. « Précis », 2006;
L. Idot Europe 2004 p. 26, 2005 et 2006 p. 6 ; S. Poillot-Peruzzetto : « Les réformes de fond
à l’occasion des réformes de^ procédure en droit communautaire de la concurrence »,
Contrats conc. consom. 2004, Études, n° 8.
2. V., M.-A. Frison-Roche et M.-S. Payet, op. cit., n° 335, p. 293.
3. V., H. Synvet op. cit. n° 157.
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 143
s’agit, en fait, que de cas particuliers reposant sur les besoins de deux
ou plusieurs États souverains, ou pris en charge par eux, et qui abou¬
tissent à la création d’une personne morale ad hoc, chargée d’effectuer
la mission envisagée par ses statuts1.
De telles sociétés peuvent avoir une personnalité morale internatio¬
nale, conférée par le traité qui leur a donné naissance et les a consti¬
tuées en sujets de droit international. Ces sujets ont cependant une
capacité limitée par leur acte constitutif et ne sauraient évidemment
prendre rang auprès des États2. Tel est le cas de la Banque internatio¬
nale pour la reconstruction et le développement (BIRD) créés par les
Accord de Bretton Woods de 1944. De son côté, la Banque des règle¬
ments internationaux (BRI) résulte d’un accord international conclu
à La Haye le 20 janvier 1930, mais voit sa personnalité juridique décou¬
ler de l’ordre juridique suisse, comme s’y était engagée la Suisse, lors de
la conclusion de l’Accord de 1930. La loi suisse a donc été dans ce cas
Linstrument de réalisation d’un acte de volonté émis par plusieurs
États au niveau de l’ordre juridique international.
Le droit applicable à de telles sociétés peut être le droit international
(cas de la Banque européenne d’investissement, régie par le traité de
Rome du 25 mars 1957 ayant institué la Communauté européenne).
Mais un renvoi peut aussi être effectué à la loi d’un État, qui peut être la
loi du siège social de la société. Tel est le cas de la Société internationale
de la Moselle, créée en la forme d’une GmbH de droit allemand3.
§ 2. La société européenne
248 II ne saurait être question de traiter de tous les aspects de la Société
européenne dans le cadre de cet ouvrage. Cependant, le droit applicable
doit être envisagé avec d’autres questions qui permettent d’avoir une
compréhension minimale de la place de la Société européenne (SE) au
sein des autres modes sociétaires de groupements de personnes. C’est
pourquoi, seront successivement présentés la genèse et les objectifs de
la SE (A), le droit applicable (B), les conditions relatives aux sociétés
fondatrices (C) et les conditions relatives à la dimension européenne
de la SE (D).
A. Origine et objectifs de la SE
1. V., B. Goldman, « Le droit des sociétés internationales », JDI 1963. 320; J.-P. Calon
« La société internationale. Éléments d’une théorie générale » JDI 1961. 694; B. Goldman,
« Droit du commerce international », Les cours de droit, p. 222 et s. ; H. Synvet, « Société »,
op. cit., n° 53 et s.
2. V. Le sujet en droit international, SFDI, Colloque de Mars, Pedone, 2005.
3. V., B. Goldman, op. cit, p. 225.
144 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
250 L’implication des travailleurs fut d’ailleurs l’une des questions qui
contribua à retarder le plus fortement l’adoption d’un projet de SE. Les
pays européens étaient en effet fort divisés sur cette question. Certains
pays, comme l’Allemagne y étaient, par tradition, très attachés et don¬
naient un rôle important aux représentants et travailleurs, notamment
en leur permettant de désigner jusqu’à la moitié des membres du
Conseil de surveillance. D’autres, comme le Royaume-Uni, étaient
« attachés à la légitimité purement capitalistique » de l’administration
des sociétés3.
Un groupe d’experts dirigé par le vicomte Étienne Davignon remit
en mai 1997 un rapport qui contenait les principaux éléments de solu¬
tion repris par la directive. Ce rapport portait sur l’information et la
consultation des salariés, mais aussi sur la cogestion. Il résulte de la
directive qui s’est inspirée de ce rapport que toute création d’une SE
1. G. Vasseur, « Pour une société de type européen », Rev. soc. 1965. 18 et s. ; M. Lous-
souarn, « La proposition d’un statut des sociétés anonymes européennes et le droit inter¬
national privé », Rev. crit. DIP 1971. 385 et s.; H. Synvet, « Enfin la société européenne? »
RTD eux. 1990. 253 et s.; F. Blanquet, « La Société européenne», La lettre des juristes
d'affaires, 30 mars 1992; M. Luby, « La Société européenne : quel devenir? Quel avenir? »,
Act. comm. 1991 p. 7 et s. ; v. Magnier, « La société européenne en question », Rev. crit. DIP
2004.555 et s.
2. V., J.-C. Colombani et M. Favero, Societas europa, Joly, 2002; K. Hopt, M. Menjucq,
Wyrmeersch (dir.), La Société européenne, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2003 ;
M. Menjucq, « La Société européenne », F. Lefevbre, 2005, Droit international et européen
des sociétés, op. cit., p. 109 et s. ; J. Béguin, « Quel avenir pour la SE ? », in Mélanges F. Terré,
Dalloz, PUF, Juris-Classeurs, 1999, p. 317 et s. ; J. Béguin, « L’avènement de la société euro¬
péenne », in Mélanges P. Lagarde, Dalloz, 2005, p. 75 et s.; Ch. Goyet: «Société euro¬
péenne », Rép. Com. Dalloz.
3. V., M.-A. Moreau, « L’implication des travailleurs dans la société européenne »,
Dr. sociétés 2001. 967 et s.; E. Pichot, « La participation des salariés aux organes de la
société en Europe », Petites affiches avr. 2002, n° 76, p. 12; B. Teyssié « L’implication des
travailleurs dans la société européenne » JCP E, 2002. 1728.
LE DROIT APPLICABLE AUX SOCIÉTÉS 14 5
B. Droit applicable à la SE
252 Le Règlement détermine lui-même le droit applicable à la SE. Le
système retenu est le suivant (art. 9) : Tout d’abord la SE est régie par
les dispositions du règlement et, lorsque celui-ci l’autorise, par les sta¬
tuts de la SE. Cependant, le règlement n’ayant pas abordé toutes les
questions soulevées par la SE, il renvoie lui-même pour les matières
qu’il ne règle pas :
Article 9. 1. c
i) aux dispositions de lois adoptées par les États membres en appli¬
cation des mesures communautaires visant spécifiquement la SE.
ii) aux dispositions de la loi des États membres qui s’appliqueraient
à une SA constituée selon le droit de l’État membre dans lequel la SA a
son siège statutaire.
iii) aux dispositions des statuts de la SE, dans les mêmes conditions
que pour une SA constituée selon le droit de l’État membre dans lequel
la SE a son siège statutaire.
D. Conditions relatives
à la dimension européennes de la SE à constituer
254 1 ) Modes de constitution O Le règlement prévoit quatre modes de
constitution de la SE qui sont tous révélateurs de la dimension euro¬
péenne exigée. Cette dimension européenne n’est plus relative aux
liens des sociétés fondatrices avec Punion, mais aux liens que la future
SE devra entretenir avec plus d’un État membre. Les modes de création
retenus sont les suivants :
- La fusion. Dans ce cas deux des sociétés devant fusionner doivent
être des SA relevant du droit de deux États différents.
- La société holding. Plusieurs sociétés peuvent constituer une
holding (société détenant des participations dans d’autres sociétés et
intervenant dans la gestion des sociétés dont elle détient des participa¬
tions). Ces sociétés peuvent être des SA ou des S à RL Deux d’entre
elles, au moins, doivent relever du droit d’États différents, ou avoir,
depuis deux ans au moins, une filiale relevant du droit d’un autre État
membre, ou, depuis deux ans au moins, un établissement situé dans
un autre État membre.
CHAPITRE 2
LA NATIONALITÉ
DES SOCIÉTÉS
257 La nationalité des sociétés doit être rapprochée et, si nécessaire, dis¬
tinguée de la loi applicable, la lex societatis (§1). Ensuite, seront suc¬
cessivement envisagées l’utilité (§ 2) puis l’unité (§ 3) du concept de
nationalité des sociétés.
1. V., J.-P. Niboyet, « Existe-t-il vraiment une nationalité des sociétés? », Rev crit. DIP
1927. 401 et s.; A. Pépy, La nationalité des sociétés, thèse Paris, Sirey, 1920; A. Pillet, Les
personnes morales en droit international privé, thèse Paris, Sirey, 1914, p. 121 et s. ; L. Lévy, La
nationalité des sociétés, LGDJ, 1984; F. Guillaume, « Lex societatis. Principe de rattachement
des sociétés et correctifs institués au bénéfice des tiers en droit international privés suisse »,
Études suisses de droit international, vol. 116, Shultess, 2001 ; Y. Loussouarn et J.-D. Bredin,
Droit du commerce international, Dalloz-Sirey, 1969; B. Goldman, « Droit du commerce
international », Les cours de droit; Ch. Leben, in B. Goldman (dir.), L’entreprise multinatio¬
nale face au droit, Litec, 1977, p. 224 et s. ; Hamel « Faut-il parler de “nationalité” en matière
de société? », in Mélanges M. Gutzwiller, Bâle, 1959, p. 367 et s.; L. Mazeaud « La nationa¬
lité des sociétés », ]DI 1928. 30 et s. ; J. Béguin « La nationalité juridique des sociétés inter¬
nationales devrait correspondre à leur nationalité économique », in Mélanges P. Catala,
p. 859 et s.; H. Batiffol et P. Lagarde, Traité de droit international privé, t. I, 8e éd., LGDJ,
1993, n° 192 et s., p. 329 et s. ; B. Audit, Droit international privé, 4e éd., Économica, 2006,
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 149
1. V. loi du 16 oct. 1919; décret-loi du 12 nov. 1938, D. 15 avr. 1970 et D. 12 mai 1970;
v. également loi du 23 déc. 1981, réservant aux sociétés française l’exploitation de res¬
sources minérales des grands fonds marins.
2. D. 6 mai 1955 et D. 16 déc. 1998.
3. Loi du 15 juin 1907; loi du 9 juin 1977, loi du 12 juillet 1982.
4. D. 6 mai 1995, D. 16 déc. 1998; pour d’autres exemples, v. J. Béguin, «La
nationalité... », op. cit., n° 31.
5. Loi du 11 févr. 1982.
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 151
1. Loi du 6 août 1986; loi du 19 juillet 1993; v. B. Goldman, « Les décisions du Conseil
constitutionnel relatives aux nationalisations et le droit international »,JDI 1982. 275 et s.
2. V., P.-M. Dupuy, Droit international public, 4e éd., Dalloz, coll. « Précis », n° 471
et s. p. 431 ; B. Stem, « Responsabilité internationale », Rép. Intern. Dalloz, n° 216 et s.
152 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
victime l’un de ses nationaux. 11 est également nécessaire que cette natio¬
nalité soit opposable à l’État auteur du dommage. Celui-ci pourrait dans
certains cas, être amené à contester la réalité de ce lien de nationalité1.
1. V. infra n° 280 et s.
2. V. infra n° 777 et s.
3. V. S. Manciaux, Investissements étrangers et arbitrage entre États et ressortissants
d’autres États, préf. Ph. Kahn, Credimi, Université de Bourgogne, CNRS, vol. 24, 2004,
n° 136 et s., p. 129; H. Synvet « Société », op. cit., n° 199 et s.
4. V., P. Mayer et V. Heuzé, op. cit, n° 1043 p. 727; F. Guillaume, op. cit., p. 80 et s.
5. 23 novembre 1959, Rev. crit. DIP I960. 180, note Loussouarn; JDI 1961. 442, note
B. G; v. encore CA Paris, 17 mai 1967, JDI 1967. 874 note Loussouarn ; JCP 1968. II. 15427,
note Oppetit.
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 153
Qu’on le regrette ou non, cet arrêt exprime une part de vérité, dans
la mesure où les exemples abondent de cas dans lesquels une définition
de la nationalité des sociétés est accolée au texte substantiel dont elle
délimite ainsi les destinataires. C’est ainsi, au cas par cas, que la défi¬
nition des sociétés qu’il considère comme nationales et étrangères est
effectuée par l’auteur d’une règle en fonction des objectifs poursuivis
par la règle et des nécessités de la défense des intérêts nationaux. En
d’autres termes, la définition de la nationalité en cause ne préexiste pas
à la règle dont elle contribuerait ainsi à définir les destinataires, mais
suit la règle substantielle et la complète en indiquant par ce moyen
quels en sont les destinataires.
Dans un système juridique déterminé, un critère général de nationa¬
lité risque donc d’être sujet à de nombreuses exceptions, ou, si l’on
préfère, de ne s’affirmer que dans l’espace résiduel laissé par le silence
des textes spéciaux.
SECTION 2. LA DÉTERMINATION
DE LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS
269 II ne peut pas y avoir de nationalité sans un lien minimum entre une
société et un Etat. Mais la complexité et la plasticité de la personne
morale, les difficultés de tenir compte de la réalité économique,
conduisent à envisager simultanément une pluralité de critères suscep¬
tibles de conduire à l’établissement du lien de nationalité. Ces critères
seront exposés tout d’abord (§ 1). L’utilisation qui en est faite permet¬
tra ensuite de mieux saisir comment se détermine en France la natio¬
nalité des sociétés (§2). Enfin, les solutions du droit international, qui
ne sauraient être négligées, seront brièvement évoquées (§3).
A. L’incorporation
270 On a vu que ce critère jouait un rôle très important en matière de
détermination de la loi applicable à la société, soit à titre exclusif, soit
complété par d’autres éléments1.
Il peut aussi être utilisé pour déterminer la nationalité des sociétés.
Ses avantages sont la simplicité, et la fixité. Il demeure indépendant
des modifications de siège ou du lieu des activités principales de la
société ou de la répartition de ses activités sur plusieurs États. Il convient
aux États qui entendent favoriser l’implantation de sociétés qui auront
ensuite une activité importante en dehors de leur État de fondation.
1. V. supra n° 228 et s.
154 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
B. Le siège social
271 S’il s’agit seulement du siège statutaire, les observations faites sur
l’incorporation peuvent être transposées. Il dépend de la volonté des
associés et ne garantit pas la réalité des liens entre la société et l’Etat où
ce siège est fixé.
Mais l’on ne dira pas de même du siège social réel. Le siège réel
établit un lien plus fort avec un État. Rappelons qu’il correspond au
lieu où est exercée la direction effective de la société, soit au lieu de
résidence des organes de direction et au lieu de tenue des assemblées.
Il permet donc de dévoiler l’existence d’un lien effectif. Il présente
l’inconvénient (ou l’avantage?), contrairement à l’incorporation, de
n’être pas fixé une fois pour toutes. Il n’est pas toujours aisé de
transférer le siège d’une société ni d’en tirer les conséquences qui
conviennent1.
C. Le contrôle
272 Selon ce critère la société aurait la nationalité des personnes qui la
contrôlent (principaux actionnaires et dirigeants sociaux2). Cette
solution présente plusieurs inconvénients : d’abord elle n’est guère
satisfaisante sur le plan théorique car elle refuse de tirer les consé¬
quences du fait que la société est une personne, distincte de ses
membres. Sur un plan pratique, cette solution expose aux difficultés
inhérentes à la mise en évidence du contrôle — surtout en cas de
contrôle à plusieurs degrés. De plus, la variabilité du contrôle provo¬
querait la variabilité de la nationalité de la société dans le temps sans
autre raison déterminante. Aussi, doit-il être écarté comme critère de
principe de la nationalité des sociétés.
Ce critère n’est cependant pas dépourvu d’utilité. La jurisprudence
française l'a utilisé durant la première guerre mondiale afin de distin¬
guer les sociétés qui étaient entre les mains de sujets ennemis. Dans un
contexte plus actuel, le contrôle est utilisé parfois par le législateur
pour refuser spécifiquement à une société certains droits ou l’accès à
certaines activités économiques dans des secteurs considérés comme
sensibles pour l’État. Mais la spécificité du contexte démontre précisé¬
ment que le contrôle ne saurait être utilisé à titre de critère exclusif et
systématique pour la détermination de la nationalité des sociétés.
1. V. infra n° 292 et s.
2. V., Y. Loussouarn et J.-D. Bredin, Droit du commerce international, Paris, Sirey, 1969,
p. 237 et s.
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 155
274 L’utilisation des critères dans les textes (A) sera distinguée de celle qui
est effectuée par la jurisprudence (B).
ou des droits de vote sera entre des mains étrangères, sera considérée
comme étrangère1.
1. V., H. Synvet « Société », op. cit. n° 186, qui signale une disposition analogue dans la
loi n° 86 — 1067 du 30 septembre 1986 « relative à la liberté de communication ».
2. V. CJCE 7 mars 1996, aff. C. 334/94, Rec. CJCE I. 1307 La France a été condamnée en
raison de son refus d’immatriculer un navire et de le laisser battre pavillon national si la majo¬
rité des personnes physiques qui le possédaient n’étaient pas françaises, ou si les personnes
morales qui le possédaient n’avaient pas leur siège social en France. Pour des condamnations
identiques ayant frappé le Royaume-Uni et l’Irlande, v. H. Synvet « Société », op. cit., n° 181.
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 157
D’un point de vue rationnel, l’on devrait admettre que le premier élé¬
ment significatif de la nationalité d^une société consiste dans le fait que
cette société est soumise à la loi de l’État dont la nationalité est recherchée.
La volonté des fondateurs joue donc un rôle important, puisque l’imma¬
triculation, déterminée par le siège social statutaire, est le premier acte de
rattachement d’une société à un ordre juridique déterminé. Cependant,
dans les pays qui, comme la France, sont partisans du siège social réel,
cette condition ne sera pas forcément suffisante. La loi applicable repose
sur le siège réel et non sur le seul siège statutaire. Ceux-ci sont présu¬
més coïncider, mais une partie pourrait démontrer que la société est diri¬
gée à partir d’un autre siège que celui qui est désigné dans les statuts1.
Cependant la soumission d’une société à la loi d’un État ne peut être
considérée comme un élément suffisant à l’octroi systématique, par
voie de conséquence, à cette société, de la nationalité de cet Etat. Cet
État peut parfaitement refuser de considérer une telle société comme
nationale, ce qui est susceptible de conduire à des cas d'apatridie.
Il sera donc nécessaire, pour déterminer la nationalité d’une société,
de s’assurer que celle-ci est soumise à la loi du for, et que d’autres élé¬
ments permettent de conclure qu’elle est suffisamment reliée à l’État
dont la nationalité est en cause pour pouvoir être considérée comme sa
ressortissante.
1. V. Ass. plén. 21 déc. 1990, Rev. crit. DIP 1990. 70, note G. Duranton; JCP 1991. II.
21640, concl. D.H. Dontenwille, JCP E. 1991. II. 120, rapport J. Lemontey, décidant, dans
le cadre des rapports entre la France et la Suisse « le rattachement auquel se réfère l’article 26
de la convention Franco-Suisse du 9 septembre 1966 n’est autre que la nationalité, laquelle,
pour une société, résulte en principe de la localisation de son siège réel, défini comme le
siège de la direction effective et présumé par le siège statutaire ».
2. V. Civ lre, 30 mars 1971, CCRMA, Rev. crit. DIP 1971. 451, note P. Lagarde; JCP
1972. II. 17140 et 17101, note B. Oppetit, JDI 1972. 834, note M. Loussouarn; B. Ancel,
Y. Lequette, Les Grands arrêts de la jurisprudence française de droit international prive', 5e éd.,
Dalloz, 2006, n° 59; Ass. plén. 21 déc. 1990, préc.
3. V., Mazeaud, op. cit., p. 48, L. Lévy, op. cit., p. 241 et s., comp. B. Audit, « Droit inter¬
national privé », op. cit., n° 1119, p. 867.
158 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. V., Civ. 2e, 18 avr. 1972, Rev. crit. DIP 1972. 672, note P. Lagarde; ]DI 1973. 218 note
B. Oppetit. On notera que la Cour de cassation n’a pas hésité à attribuer pour les besoins
de la cause une nationalité étrangère à une société. Il aurait au moins fallu pour arriver à
une telle conclusion, à la rigueur justifiée par les besoins du règlement de l’affaire, que la
Cour de cassation se préoccupe des critères retenus en Suisse pour l’admission de la natio¬
nalité suisse de cette société (comp. P. Mayer et V. Heuzé, op. cit., n° 1045, p. 728).
2. V. Civ. 2e, 8 févr. 1972, JDI 1973. 218, 2e esp., note B. Oppetit; Rev. crit. DIP 1973.
299 et Civ. 10 mars 1976, Rev. crit DIP 1976. 658.
3. V., B. Stem, « Responsabilité internationale», op. cit., n° 228 et s., F. Guillaume,
op. cit. p. 93 et s.
LA NATIONALITÉ DES SOCIÉTÉS 159
281 La Cour a admis en outre que dans certains cas, des liens plus étroits
ou différents pouvaient être considérés comme nécessaires pour que la
protection diplomatique existe.
Néanmoins, elle a refusé de considérer qu’un critère d’attribution de
la nationalité pourrait l’emporter sur les autres. Elle a également refusé
de faire jouer un rôle spécifique à l’effectivité, alors que celle-ci joue un
rôle dans le cas de la nationalité des personnes physiques : « Sur le plan
particulier de la protection diplomatique des personnes morales, aucun
critère absolu applicable au lien effectif n’a été accepté de manière
générale. Les critères que l’on a retenus ont un caractère relatif et l’on
a parfois mis en balance les liens d’une société avec un État et ses liens
avec un autre »3.
La Cour internationale de justice a admis par ailleurs qu’un État
pourra, dans certaines conditions, exercer la protection diplomatique
des actionnaires d’une société. L’intérêt se déplace alors de la nationalité
de la personne morale vers celle des personnes qui en font partie4.
1. CIJ arrêt du 5 février 1970, Rec. 1970, p. 3; v. F. Francescakis « Lueurs sur le droit
international des sociétés de capitaux; l’arrêt Barcelona de la Cour internationale de justice,
Rev. crit DIP 1970. 609 et s.
2. Rec. 1970. 3, spéc. p. 42.
3. Rec., op. et loc. cit.
4. V. aff. Elettronica Sicula S.p.A. (ELSI) : CIJ arrêt du 20 juillet 1989, Rec. 1989 p. 15;
v. B. Stern : « La protection diplomatique des investissements internationaux. De Barcelona
Traction à Eleltronica Sicula ou les glissements progressifs de l’analyse »,JDI 1990. 897 et s. ;
dans le cadre du CIRD1, v. aff. C.M.S.c. Argentine, décision sur la compétence 17 juill. 2003,
in E. Gaillard, La jurisprudence du CIRDJ, Paris, Pedone, 2004 p. 793 et s.
160 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
CHAPITRE 3
L’ACTIVITÉ INTERNATIONALE
DES SOCIÉTÉS
282 L’activité internationale des sociétés est commandée par leur recon¬
naissance (Section 1), mais surtout par la question de leur établisse¬
ment international (Section 2)
SECTION 1. LA RECONNAISSANCE
DES SOCIÉTÉS
§ 1. Notion de reconnaissance
283 La reconnaissance est une condition particulière qui peut être imposée
aux sociétés constituées en vertu d’une loi étrangère. La reconnais¬
sance consiste dans l’admission dans un ordre juridique déterminé de
la personnalité morale conférée par une loi étrangère. Cette condition
ne vise donc que les sociétés dotées de la personnalité morale1.
La reconnaissance se trouve étroitement liée à la question de la loi
applicable à la société, mais elle ne doit pas être confondue avec elle.
Une société constituée en vertu de la loi considérée comme applicable
au for ne sera pas automatiquement reconnue. De même, le refus de
reconnaissance ne devrait pas être considéré comme la sanction du fait
qu’une société n’a pas été constituée en vertu de la loi considérée
comme applicable du point de vue du for considéré.
Pourtant, faute d’un autre concept approprié, c’est bien le refus^ de
reconnaissance qui risque d’être opposé par les tribunaux d’un État
lorsqu’une société prétend avoir été constituée en vertu d’une loi qui
n’est pas celle que désigne la règle de conflit du for. Cette solution a été
retenue dans la convention de La Haye du 1er juin 1956 concernant la
reconnaissance de la personnalité juridique des sociétés, association et
fondation étrangères, non entrée en vigueur, mais ratifiée par la
1. La loi du 30 mai 1857 dont il sera question plus bas ne pose d’exigence relativement
à la reconnaissance que pour les sociétés anonymes (v. Civ. 26 juill. 1853, S. 1853. I. 688;
CA Rennes 8 juill. 1981, Rev. crit. DIP 1982. 81, note P. Mayer).
L’ACTIVITÉ INTERNATIONALE DES SOCIÉTÉS 161
France b Dans différents arrêts récents ayant pour objet la liberté d’éta¬
blissement, la CJCE a cédé au même glissement sémantique1 2.
284 Malgré cela, la reconnaissance n’a pas d’autre objet que « l’existence
de la société en tant que sujet de droits et d’obligations dans l’ordre
juridique du for3.
Il est possible d’associer les refus de reconnaissance à des raisons
juridiques tenant au caractère fictif (ou prétendument fictif) de la per¬
sonnalité morale accordée par une loi étrangère. Cette personnalité
juridique ne saurait alors s’imposer de piano dans un ordre juridique
étranger, même si elle a été conférée par la loi considérée comme appli¬
cable aux yeux de cet ordre juridique4.
La question n’est pas non plus forcément dépourvue de toute dimen¬
sion politico-juridique, un Etat pouvant souhaiter se réserver le droit
de refus face à certaines sociétés étrangères, dont il pourrait considérer
les activités comme indésirables sur son territoire.
Aucune de ces raisons n’est vraiment convaincante5.
§ 2. Conditions de la reconnaissance
285 La jurisprudence française n’a jamais sanctionné par le refus de recon¬
naissance le non-respect de la règle de conflit de lois française, en ce
qu’elle impose l’identité du siège statutaire et du siège réel, même si
cette solution « affleure parfois »6.
La seule cause de refus de reconnaissance d’une société soumise à
une loi étrangère en France réside dans une loi du 30 mai 1857, prise
dans le sillage du règlement d'un contentieux entre la France et la
Belgique. En vertu de cette loi, les SA soumises à l’autorisation du gou¬
vernement belge et l’ayant obtenue pouvaient automatiquement exer¬
cer leurs droits et ester en justice en France. Mais un article 2 de cette
loi soumettait pour l’avenir à un décret de reconnaissance des SA
étrangères (non belges). Un système de décret collectif, visant l’en¬
semble des sociétés anonymes d’un pays déterminé était donc mis en
place7.
286 Pour les cas où le refus de reconnaissance pourrait encore être imposé,
la Cour de cassation a encore limité l’impact de cette condition. Elle a
en effet considéré que les articles 6.1 et 14 de la convention euro¬
péenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamen¬
tales, ainsi que les articles 1 et 5 de son premier Protocole additionnel
imposaient, avec valeur supérieure à celles des lois de la République,
que « toute personne morale, quelle que soit sa nationalité a droit au
respect de ses biens et à ce que sa cause soit entendue par un tribunal
indépendant et impartial »2. La solution vaut, même pour une société
qui aurait son siège dans un État qui ne serait pas partie à la convention
européenne3.
En définitive, l’on doit donc considérer aujourd’hui qu’aucune
société ne peut plus se voir opposer un refus de reconnaissance en tant
que tel, du point de vue de son droit d’ester en justice devant les tribu¬
naux français.
Le refus de reconnaissance pourrait encore être opposé, pour l’apti¬
tude à acquérir certains droits, et donc développer une activité juridique
en France, pour les sociétés soumises à une loi étrangère et qui ne pour¬
raient se prévaloir ni d’un décret collectif de reconnaissance (ils sont très
nombreux), ni d’un traité instituant leur reconnaissance.
SECTION 2. L’ÉTABLISSEMENT
INTERNATIONAL DES SOCIÉTÉS
1. V., M. Menjucq, Droit international et européen des sociétés, op. cit., p. 279 et s.
2. V., J.-B. Biaise, « Une cohabitation difficile : nationalité des sociétés et libre établis¬
sement, dans la communauté européenne », in Mélanges en l'honneur de Ph. Kahn, Litec,
2000, p. 585 et s. spéc. 586.
164 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
291 Les difficultés qui viennent d'être évoquées, pour être pleinement juri¬
diques, n’en sont pas moins liées aux préoccupations d’ordre écono¬
mique des États ou de certaines organisations internationales. Les États
n’admettent pas toujours aisément qu’une société ayant son siège sur
leur territoire le déplace dans un autre État, car ce changement est
souvent le prélude — mais parfois ne fait que concrétiser — à un dépla¬
cement du centre des activités de la société, qui se traduira par une
diminution de recettes fiscales, voire des fermetures d’établissements
ou des licenciements au niveau local. Quant aux États sur le territoire
desquels se feront sentir les effets positifs du droit d’établissement, ils
peuvent néanmoins imposer ou être tentés d’imposer le respect de
conditions onéreuses à une société dont l’implantation principale leur
échappe et qui reste soumise à une loi étrangère.
Il convient donc ci-dessous de distinguer la modification de l’éta¬
blissement principal des sociétés, de la création d’un établissement
secondaire.
L’ACTIVITÉ INTERNATIONALE DES SOCIÉTÉS 165
295 La seconde difficulté apparaît alors. Elle est relative à l’articulation des
deux lois déclarées successivement applicables en fonction même de la
volonté des initiateurs du changement. Cette articulation peut se révé¬
ler fort complexe, voire presque impraticable en raison des exigences
propres à chacune de ces lois.
Aucune de ces deux lois n’ayant adopté une vue globale de l’opéra¬
tion, leur articulation pourra se révéler fort problématique, tant dans
la réalisation pratique de l’installation de la société sous l’empire de sa
nouvelle loi, qu’au niveau de la protection des associés et des tiers
potentiellement affectés par le changement envisagé. Il se peut aussi
que les dispositions substantielles de l’une des lois soient tellement
draconiennes que le transfert devienne pratiquement impossible.
Ainsi, la loi française, s’agissant d’une société qui voudrait transférer
son siège hors de France, exige, pour les sociétés en commandite simple
et les sociétés à responsabilité limitée, l’unanimité des associés1. S’il
s’agit d’une SA, une convention est exigée avec le pays d’accueil. Or
aucune convention de ce genre n’existe à l’heure actuelle, et la solution
de l’unanimité, considérée comme possible, n’en reste pas moins très
improbable.
Quant à l’accueil des sociétés étrangères qui voudraient transférer
leur siège en France, aucune solution légale n’a été envisagée. Et il faut
se contenter de réponses ministérielles2. Les solutions qui viennent
d’être évoquées, valables, lorsque le transfert du siège s’effectue à l’égard
d’un pays n’appartenant pas à l’Union européenne, valent-elles encore,
lorsque le droit communautaire est applicable ?
2. Droit communautaire
Une solution générale est tempérée par certaines exceptions
297 Le transfert du siège social n’a pas été organisé à titre général par le
droit communautaire. Il en résulte que les difficultés évoquées ci-des¬
sus dans le cadre du droit international privé n’épargnent pas le trans¬
fert intracommunautaire du siège.
À ce sujet, il convient de noter que la Cour de justice des commu¬
nautés européenne, dans son arrêt Daily Mail, a considéré qu’une
société créée en vertu d’un ordre juridique national n’avait d’existence
qu’à travers la législation nationale qui en détermine la constitution
et le fonctionnement2. Elle a donc donné raison à un État membre, en
l’occurrence, le Royaume-Uni, qui prétendait s’opposer à une demande
d’autorisation du transfert du siège de la société Daily Mail vers les
Pays-Bas. Et elle a affirmé de la façon la plus nette que les articles 52
et 58 du traité ne donnaient aucun droit, en l’état du droit commu¬
nautaire à la date de l’arrêt, à une société constituée en conformité de
la législation d’un État membre et y ayant son siège statutaire, de trans¬
férer son siège de direction dans un autre État membre.
Cet arrêt ne se réfère pas à une règle d’interdiction du transfert du
siège d’une société à l’intérieur de la Communauté. Mais, rappelant
l’appartenance nationale de toute société, il souligne la soumission
inconditionnelle de toute société aux règles de l’ordre juridique dont la
1. V., M. Menjucq, Droit international européen des sociétés, op. cit., n° 270, p. 333;
B. le Bars in J. Béguin et M. Menjucq, op. cit., n° 730, p. 273.
2. CJCE 27 sept. 1988, aff. 81/87, Rec. p. 5483; O. Loy, « Le Marché unique et la
société », DPCI 1989. 2, p. 253.
168 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
299 Le transfert n’est pas possible lorsque la société fait l’objet d’une pro¬
cédure tendant à sa dissolution ou sa liquidation, d’une procédure
collective, ou d’une procédure de « suspension des paiements ».
Un projet de transfert doit être établi et publié. La décision du trans¬
fert sera soumise à la majorité des 2/3 requise pour modifier les statuts,
et devra intervenir au moins deux mois après la publication. Cette
décision fera l’objet de mesures de publicité nationales et communau¬
taires. Une nouvelle immatriculation devra être effectuée sur présenta¬
tion d’un document établi par l’autorité désignée par la loi du siège
(notaire ou tribunal...) et qui atteste de la régularité de la procédure de
transfert. Ce certificat de légalité doit purger les vices éventuels de
l’opération. La date du transfert et de la notification des statuts corres¬
pond à la date de la nouvelle immatriculation, mais les tiers de bonne
foi peuvent continuer à se prévaloir de l’ancien siège tant que la radia¬
tion de l'ancienne immatriculation n’est pas publiée.
1. CJCE 22 nov. 1978, D. 1979 Somm. 458, note B. Audit; JDI 1979. 672, note
A. Huet.
2. CJCE, aff. C. 212/97, Rec. 1999,1-1459, concl. La Pergola; v. J.-B. Biaise, article pré¬
cité, in Mélanges Ph. Kahn, op. cit., p. 585 et s.; T. Ballarino « Les règles de conflit sur les
sociétés commerciales à l’épreuve du droit d’établissement. Remarques sur deux arrêts
récents de la Cour de justice des Communautés européennes », Rev. crit. DIP 2003. 373
et s. ; H. Muir Watt « Aspects économiques du droit international privé », RCADI t. 307
(2004) p. 39 et s., spéc. p. 103 et s.
L’ACTIVITÉ INTERNATIONALE DES SOCIÉTÉS 171
307 b) Vaffaire Inspire Art O Dans cette affaire était en cause la créa¬
tion d’un établissement secondaire aux Pays-Bas par une société consti¬
tuée au Royaume-Uni, en fonction de règles qui facilitaient cette créa¬
tion, alors que l’éventail des activités de cette société devait se
développer aux Pays-Bas et non au Royaume Uni. Les Pays-Bas enten¬
daient imposer à cette société une obligation de s’immatriculer en tant
que « société étrangère de pure forme », cette immatriculation entraî¬
nant un certain nombre de conséquences relatives au droit néerlandais
des sociétés. Se trouvaient en effet ainsi rendues applicables certaines
règles du droit des sociétés portant sur le capital social minimum et la
responsabilité des administrateurs1.
De façon similaire à l’affaire Centros, la juridiction compétente des
Pays-Bas posait à la Cour la question préjudicielle de savoir si l’appli¬
cation, dans les conditions indiquées, de la législation néerlandaise
n’était pas incompatible avec les règles relatives à la liberté d’établis¬
sement.
La cour considéra qu’« il est sans importance, au regard de l’appari¬
tion des règles relatives à la liberté d’établissement, qu’une société n’ait
été constituée dans un État membre qu’en vue de s’établir dans un
second État membre, où serait exercé l’essentiel, voire l’ensemble, de
ses activités économiques »2. Elle conclut que l’application des règles
néerlandaises indiquées ci-dessus était contraire au principe de la
liberté d’établissement, et que leur application ne pouvait être justifiée
s’il était possible d’établir, au cas par cas, un abus d’invoquer la liberté
d’établissement garantie par le traité.
1. CJCE 30 sept, 2003, aff. C 167/01, Rec. I, 10223; JCP 2004. 251, note Magnier;
D. 2004. 491, note É. Pataut; JCP 2004. II. 10002, note M. Luby ; Rev. crit. DIP 2004. 151,
note H. Muir Watt.
2. V. Rec. I. 10223, Cours 95.
172 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. Les objectifs d’ordre fiscal ne doivent cependant pas être perdus de vue. (v. B. Le Bars
in Droit du commerce international, dir. Béguin et Menjucq, op. cit., p. 300, n° 803. Dans un
arrêt récent, la CJCE s’est prononcée, à propos de l’affaire Cadbury Schweppes, sur la légiti¬
mité de la création de filiales dans un État dans un souci d’optimisation fiscale. Elle a admis
cette légitimité à condition que l’implantation de la filiale soit réelle et son activité effective
(arrêt du 12 septembre 2006, rapporté par M. Wathelet, les Échos, 13/14 octobre 2006).
LE GROUPE TRANSNATIONAL DE SOCIÉTÉS 173
CHAPITRE 4
LE GROUPE TRANSNATIONAL
DE SOCIÉTÉS
LA CONSTITUTION DU GROUPE
SECTION 1.
TRANSNATIONAL DE SOCIÉTÉS
§ 1. Notion de groupe
311 Les groupes de sociétés résultent de la création d’une entité, le groupe,
constituée de sociétés juridiquement distinctes. Le langage juridico-
économique se réfère soit à la notion de firme, société ou entreprise
transnationale, soit à la notion de groupe multinational ou transnatio¬
nal de sociétés1.
Ces expressions sont, comme leur multiplicité le démontre, impré¬
cises et dans une certaine mesure, juridiquement impropres car il
n’existe pas de statut juridique d’ensemble du groupe international de
sociétés2.
Il s’agit pourtant là d’un phénomène déjà ancien mais dont l’impor¬
tance est devenue considérable et qui désigne toute forme d’activité
d’une société exercée dans plusieurs pays par l’entremise d’autres socié¬
tés, qui se trouvent soumises d’une façon ou d’une autre à la domina¬
tion de la première et sont ainsi associées à la stratégie globale de celle-
ci3. Le nombre extrêmement variable des sociétés impliquées dans ce
tissu relationnel et la complexité des ramifications possibles sont sus-
1. V., M. Delapierre et Ch. Michelli, Les firmes multinationales. Des entreprises au cœur
d’industries mondialisées, Vuibert, 1995; R. Sandretto, Le commerce international, A. Colin,
1995, p. 167 et s. ; La Commission des Nations unies sur le commerce et le développement
(CNUCED) utilise l’expression de « sociétés transnationales » (v. rapport sur l’investis¬
sement dans le monde, 1995, « Les sociétés transnationales et la compétitivité. Vue d’en¬
semble » UNCTAD/DICI/26).
2. V., B. Goldman, Droit du commerce international, Les cours du droit, Paris, 1972-
1973, p. 102 et s. ; H. Synvet, L'organisation juridique du groupe international de sociétés, thèse
Rennes, 1979.
3. CA Paris (lre ch. suppl.), 31 oct. 1989, soc. Kis France, Rev. arb. 1992. 90.
174 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. Selon les estimations de l’ONU, à l’heure actuelle, les sociétés transnationales sont
au nombre d’environ 37000 avec 206000 filiales.
2. V., Ph. le Tourneau, L’ingénierie, les transferts de technologie et de maîtrise industrielle,
Paris, Litec, 2003, n° 514 et s., p. 230 et s.; C.-H. Chenut, Le contrat de consortium, préf.
A. Bénabent, LGDJ, 2003.
3. V., L.-O. Baptista et P. Durand-Barthez, Les associations d’entreprises (joint ventures)
dans le commerce international, 2e éd., FEDUCI, FEC, LGDJ, 1991; V. Pironon, Les joint
ventures. Contribution à l'étude juridique d'un instrument de coopération internationale, préf.
Ph. Fouchard, Dalloz, 2004.
4. V., Ch-.A. Michalet, L'entreprise plurinationale, Paris, Dunod, 1969; Qu'est-ce que la
mondialisation P, La Découverte-Poche, 2004, p. 67 et s.
LE GROUPE TRANSNATIONAL DE SOCIÉTÉS 175
A. La fusion transfrontalière
B13 Dans une vision purement organique du groupe transnational de socié¬
tés, la fusion ne trouverait pas sa place, puisque, loin de tisser certains
liens entre des sociétés jusqu’alors totalement étrangères l’une à l’autre,
elle opère une réduction du nombre de sociétés en présence. Cepen¬
dant, la fusion est aussi un moyen de contrôle d’une société sur une
autre, même s’il suppose la disparition de l’une d’elles. D'autre part, il
se réalise souvent entre des sociétés appartenant elles-mêmes à un
même groupe ou à des groupes différents. Elle n’est donc pas étrangère
au phénomène des groupes de sociétés1. Les prises de contrôle d’une
société par une société étrangère constituent le moyen le plus impor¬
tant afin de constituer des groupes. Néanmoins, le plus souvent, une
prise de contrôle laisse subsister chacune des sociétés en présence. On
exposera brièvement les principaux problèmes, puis les solutions du
droit communautaire.
1. Principaux problèmes
314 a) Objectifs de la fusion O La fusion entre deux sociétés constitue
un mécanisme de restructuration des entreprises. Cette restructuration
s’effectuera dans le sens de la concentration, puisqu’une seule société
existera à l’issue d’une opération conclue entre deux sociétés.
La fusion va conduire à la dissolution de l’une des deux sociétés et à
la transmission de l’universalité de ses biens à la société qui subsiste et
se trouve donc en situation de société absorbante.
La fusion est en principe intéressante pour les deux sociétés, car elle
doit conduire à une rentabilité supérieure. L’opération n’est cependant
pas sans dangers. Elle peut en effet être lourde de menaces pour les
salariés de chacune des entreprises, en provoquant des licenciements.
Elle peut aussi être préjudiciable à l’intérêt général, en réduisant la
concurrence, ce qui peut n’être pas sans conséquences sur le niveau des
prix et la qualité des produits ou des services offerts.
La fusion se heurte également à de sérieuses difficultés juridiques qui
seront brièvement présentées maintenant2.
1. V., M. Cozian, A. Viandier, F. Deboissy, Droit des sociétés, 17e éd., Litec, 2004, p. 545
et s.; M. Menjucq, Droit international et européen des sociétés, Montchrestien, 2001, p. 209
et s.; A. Couret, in J. Béguin et M. Menjucq (dir.), Droit du commerce international, Litec,
2005, p. 235 et s.
2. V., M. Menjucq, Le droit international et européen des sociétés, op. cit., p. 209 et s.;
G. Beitzke, « Les conflits de lois en matière de fusion des sociétés (droit communautaire et
droit international privé), Rev. crit. DIP 1967. 1 et s.; M. Loussouarn, « La concentration
des entreprises dans la Communauté économique européenne », Rev. crit. DIP 1974. 246
et s.; H. Synvet, « Société », op. cit., n° 125 et s.; B. Le Bars, op. cit., n° 633 et s., p. 235
et s. ; F. Blanquet, « Les fusions transfrontalières et la mobilité des sociétés », Rev. soc. 2000.
105 et s.; J.-J. Caussain, « Des fusions transfrontalières dans l’Union européenne », in
Mélanges AEDBF-France, t. II, p. 113 et s. ; T. Tilquin, « Fusions et scissions - Aspects trans¬
frontaliers », Dictionnaire Joly droit des sociétés) J.-J. Daigre « Les fusions internationales (et
176 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
316 En revanche, une application distributive des lois des chacune des
sociétés en cause pourra suffire lorsqu’aucune interférence n’est justi¬
fiée. Ainsi, à l’égard de chaque société, il suffira de se référer aux dispo¬
sitions de la lex societatis afin de déterminer les conditions internes
s’imposant à la décision de fusion : procédure d’approbation, règles de
quorum et de majorité devant être observées lors de l’assemblée géné¬
rale extraordinaire, formalités à accomplir, rapports des commissaires
aux comptes ou des commissaires à la fusion...).
Les difficultés au niveau même de l’application de la loi compétente
peuvent être considérables. Ainsi, la nécessité, fréquente d’un vote
unanime des associés de la société qui disparaît, peut constituer un
obstacle dirimant à la réalisation de la fusion1.
Du point de vue fiscal, l’assimilation du transfert de siège impliqué
par l’opération à une cessation d’entreprise, constituerait également
un obstacle de taille à la réalisation de fusions internationales2.
Cependant, au niveau du droit communautaire, certains pas décisifs
viennent d’être franchis.
Il doit d’abord être rappelé que l’une des voies d’accès à la société
européenne (é>E) est la fusion entre sociétés anonymes relevant d’au
moins deux Etats membres1. Çette fusion peut être réalisée, soit sous
forme de fusion-absorption, soit sous l’effet de la disparition des deux
sociétés qui y participent, afin de donner naissance à une SE.
Le Règlement du 8 octobre 2001 ne supprime pas l’application des lois
étatiques applicables aux sociétés en présence, mais il laisse subsister
seulement l’application distributive, dans les conditions qu’il indique et
comporte un certain nombre de dispositions substantielles2.
319 D’autre part la directive du 26 octobre 2005 sur les fusions transfron¬
talières de sociétés de capitaux, qui est maintenant publiée, doit être
transposée avant le 15 décembre 2007. Elle autorise les fusions trans¬
frontalières dès lors que la législation des États membres concernés
autorise les fusions. Les règles applicables à une fusion nationale sont
applicables. La directive comporte un certain nombre de règles maté¬
rielles inspirées du règlement du 8 octobre 2001 relatif à la société
européenne et qui visent le contenu du projet de fusion, la publicité et
l’expertise de validité de la fusion.
Dans le cas de la réalisation d'une SE par fusion, comme dans le cas
de la fusion transfrontalière, la directive impose le respect des règles
relatives à la participation des travailleurs en vigueur dans l’Etat
membre où le siège statutaire est établi.
Dans le cas de la réalisation d’une SE par fusion, comme dans le cas
de la fusion transfrontalière, la directive impose le respect des règles
éventuelles relatives à la participation des travailleurs en vigueur dans
l’État membre où le siège statutaire est établi.
1. V. supra n° 253.
2. V., H. Synvet, op. cit., n° 141.
3. V., H. Le Nabasque, « L’incidence des normes européennes sur le droit français
applicable aux fusions et au transfert de siège social », Rev. soc. 2005. 81 s.
178 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. Généralités
320 L’intégration d’une société dans un groupe s’opère le plus souvent par
le truchement d’une prise de contrôle de celle-ci par une autre société
membre du groupe \ Cette prise de contrôle dépend des liens en capital
susceptibles de s’établir entre les deux sociétés. Ceux-ci conduisent à la
domination de la société contrôlée par les droits de vote attachés à la
détention d’une fraction du capital, ou la possibilité de nommer ou
révoquer les dirigeants (art. L. 233-3-II C. com.).
Il est communément admis que la détention d’une fraction de 50 %
du capital confère ce contrôle. Ainsi le Code de commerce qualifie, à
son article L. 233-1, de filiale, la société dont une autre société possède
50 % du capital. Il est à noter que la constitution d’un groupe peut
aussi bien résulter de la prise de contrôle d’une société existante que de
la création d’une filiale ex nihilo1 2.
Pourtant, des prises de participation inférieures à 50 % du capital
peuvent conduire au même résultat lorsque le capital de sociétés, le plus
souvent cotées en bourse, se trouve dispersé entre de nombreuses mains.
Ainsi, l’article L. 233-3-II du Code de commerce considère qu’est présu¬
mée exercer le contrôle sur une autre société toute société disposant,
directement ou indirectement, d’une fraction de 40 % des droits de vote
dès lors qu’aucun associé ou actionnaire ne détient directement ou indi¬
rectement, une fraction du capital supérieure à la sienne3.
À l’égard des sociétés dont le siège social est situé en France, la loi
française a édicté des règles protectrices lorsque leur capital fait l’objet
de prises de participation, quelle que soit l’origine de celles-ci. De telles
règles peuvent avoir le caractère de lois de police. Cependant, comme
elles visent des sociétés dont le siège est en France, elles seraient de
toute façon applicables au titre de lex societatis. Elles imposent un cer¬
tain nombre de notifications et la délivrance de certaines informations
lorsque certains seuils de participation ont été franchis4.
1. V., H. Synvet, op. cit., n° 159 et s., p. 26 et s. La cour d’appel de Paris a jugé que « les
dispositions d'ordre public économique de la loi du 2 juillet 1996 et le règlement général du
Conseil des marchés financiers s’imposent à tout opérateur qui intervient sur un marché
réglementé français. » (CA Paris 13 janv.1998, D. Affaires 1998. 704, obs. M. B.; Bull. Joly
Bourse 1998. 256, note P. Le Cannu).
2. V. règlement n° 90-04 (homologué par arrêté du 5 juillet, JO 20 juillet).
3. V. JOC du 24 janv. 2001 ; S. Loisy, « Le projet de treizième directive européenne en
matière d’offres publiques », Rev. dr. aff. int. 2000, n. 2, p. 194 et s. ; J.-J. Daigre, « Le projet
de treizième directive relative aux offres publiques : une directive subsidiaire et pourtant
nécessaire », RD. banc. fin. n° 6, 2000, 39 et s. ; H. Hovasse, « Les aspects juridiques et fis¬
caux de la globalisation des marchés financiers. », Dr. sociétés 2000. 7 et s. ; M. Prada, « La
régulation des offres publiques : problèmes posés par la globalisation. », Bull. COB mai 2000,
n° 346, p. 1 et s. Sur la proposition de nouvelle directive, v. A. Couret, « Le nouveau projet
de treizième directive sur les offres publiques », Bull, d’actualité Lamy Droit du financement
n° 13 5, nov. 2002, p. 1 et s. ; V. De Beaufort, « Étude de la proposition sur les offres publiques
d’acquisition », Bull. Joly Bourse 2003, p. 233 et s.; P.-A. Gailly, « Les OPA communautaires-
Propositions de la chambre de commerce et d’industrie de Paris », Rapport adopté par
l’Assemblée générale du 19 déc. 2002; sur la nouvelle directive, v. P. Servan-Schreiber et
A.-W. Grumberg, « Défenses anti-OPA. Adoption de la directive européenne sur les OPA et
enjeux pour les entreprises françaises », JCP E. 2004, n° 1598; M. Luby, « De la difficulté
à dénouer le fil d’Ariane... », Dr. sociétés 2004 n 16, p. 9 et s.; M. Haschke-Dourneaux,
« L’adoption de la directive européenne relative aux offres publiques d’acquisition », Petites
affiches, 2004, n° 83, p. 7 et s.; F. Peltier et F. Martin-Laprade, « Directive 2004/25 CE du
21 avril 2004 relative aux OPA ou l’encadrement par le droit communautaire du change¬
ment de contrôle de’une société cotée », Bull. Joly Bourse 2004, p. 610 et s.
LE GROUPE TRANSNATIONAL DE SOCIÉTÉS 181
323 Le législateur français a ainsi adopté une loi anti-OPA dans le contexte
particulièrement passionné né de l’offre de Mittal-Steel sur Arcelor sur
fond de débat sur le patriotisme économique1. Le projet de loi sur les
OPA a finalement été adopté le 23 mars 2006. Le nouvel article L- 232-32
du Code de commerce donne aux dirigeants d’une société cotée la
possibilité de mettre en œuvre des mesures de nature à faire échouer
l’offre. Cependant cette mise en œuvre est subordonnée à l'obtention
de l’approbation ou la confirmation préalable de l’assemblée générale
pendant la période d’offre. Ce principe s’applique sous réserve de réci¬
procité. Le moyen retenu réside dans l’attribution gratuite de bons de
souscription d’actions aux actionnaires, de nature, en principe, à obli¬
ger l’auteur de l’offre à un déboursement supérieur pour obtenir la
fraction du capital nécessaire à la prise de contrôle2.
ÉLÉMENTS DE RÉGIME
SECTION 2
JURIDIQUE DU GROUPE TRANSNATIONAL
DE SOCIÉTÉS
324 Le groupe transnational de sociétés présente une incontestable unité
d’un point de vue économique, mais cette unité ne trouve pas forcé¬
ment de consécration au point de vue juridique3. L’absence d’un statut
unitaire du groupe (§1) est seulement contrebalancée par la prise en
considération de sa réalité de fait (§2).
1. V. D. 2006, cahier aff., act. légis., p. 644; Les Échos, 30 mars 2006 p. 16.
2. V. le communiqué de la Commission européenne du 12 octobre 2006, demandant
à la France de modifier le décret du 30 septembre 2005 sur les investissements étrangers
(D. 2006, cahier aff. p. 2598); v. sur le nouveau règlement général de l’A.M.F., les Échos
du 2 nov. 2006, p. 12.
3. Cf. A.A. Fatouros, « Problèmes et méthodes d’une réglementation des entreprises
multinationales », JDI 1974, p. 495 et s.; Ch. Hannoun, Le droit et les groupes de sociétés,
LGDJ 1991, C. Mage, Les groupes de sociétés en droit international privé, thèse Nice, 1996.
182 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
K. G. Weil, « La responsabilité de la société mère vis-à-vis d’une SARL filiale. », Rev. soc.
1993. 767 et s.
1. V., M. Menjucq, op. cit., n° 208 p. 267.
2. L’acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE, sans
ignorer complètement le groupe de sociétés, ne lui a pas consacré de dispositions organi¬
sant sa consécration (v. Fr. Anoukaha et al, OHADA. Sociétés commerciales et GIE, Bruylant,
Bruxelles, 2002, p. 180 et s.
3. V. J.-P. Laborde, « Droit international privé et groupes internationaux de sociétés :
une mise à l’épreuve réciproque », in Mélanges ]. Derruppé, Joly éditions, 1991, p. 49 et s.,
spéc. p. 52.
4. V. TGI Paris, 7 mars 1986, D. 1988, IR. 208; Corn. 2 avr. 1996JCP 1997. IL 22803,
note J.-P. Chazal.
5. V., Ch. Leben, in L’entreprise multinationale face au droit, p. 107 et s., spéc. n°188,
p. 190.
184 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
1. Req. 24 déc. 1928, S. 1929. 121, note Niboyet; Req. 12 mai 1931 (Remington Type-
writers), S. 1932. 1.57, note Niboyet.
2. V., B. Goldman, Droit du commerce international, op. cit., p. 99 et s.
3. V. Civ., 8 févr. 1972, JDI 1973. 218, lre esp., note Oppetit, Rev. crit. DIP 1973. 299;
Civ., 10 mars 1973, Rev. crit. DIP 1976. 658; Civ., 18 avr. 1972, Rev. crit. DIP 1972. 672,
note Lagarde; JDI 1973. 218, 2e esp., note Oppetit.
4. L. Levy, op. cit., n°233, p. 295.
5. V. M. Menjucq, op. cit. n° 199 et s., p. 260 et s. ; A. Couret, op. cit., n° 706 et s. p. 263
et s. ; H. Synvet, L'organisation juridique du groupe international de sociétés (conflits de lois en
matière de sociétés et défaut d’autonomie économique de la personne morale), thèse Rennes,
1979, p. 84 et s.
LE GROUPE TRANSNATIONAL DE SOCIÉTÉS 185
A. Jurisprudence française
334 Alors que la fragmentation juridique du groupe impose aux États dont
les lois sont en cause ou dont les tribunaux sont saisis de faire la plu¬
part du temps abstraction de l’unité du groupe, il arrive cependant que
la réalité du groupe soit prise en considération au détriment du prin¬
cipe de l’autonomie des personnes morales. Le groupe fournit alors un
contexte dont il est tenu le plus grand compte pour l’application de
règles dont les objets sont divers, mais la dynamique provient des règles
ou des institutions en cause, non du groupe dont le statut juridique
reste inchangé1.
Ainsi, le droit fiscal peut être conduit à tenir compte de l’apparte¬
nance des sociétés à un groupe transnational afin d’éviter notamment
les cumuls d’imposition2.
En matière de droit du travail international, il est tenu compte
de la mobilité des salariés au sein d’un groupe afin de déterminer
l’employeur, la qualité d’employeur pouvant être attribuée à plusieurs
sociétés du groupe en fonction des circonstances. De même, c’est au
sein du groupe transnational de sociétés que s’effectuera l’obligation de
reclassement des salariés prévue par l’article L. 122-14-8 du Code du
travail3.
1. V. Commission, 13 juill. 1994, Carton, JOCE n L 243,19 sept. 1994, point 140. Adde,
L. Idot, « La notion d’entreprise en droit de la concurrence, révélateur de l’ordre concurren¬
tiel », in Mélanges Pirovano, Frison-Roche, 2003, p. 523 et s.; J.-Y. Chérot, « Le droit com¬
munautaire de la concurrence fonde-t-il un ordre concurrentiel ? », in Mélanges A. Piro¬
vano, op. cit., p. 563 et s.
2. V. CJCE 14 juill. 1972, Impérial Chemical Industrie (ICI) Ltd c. Commission, aff.
48/69, Rec. 619.c et les décisions citées in M.-A. Frison-Roche et M.-S. Payet, Droit de la
concurrence, Dalloz, coll. « Précis », 2006, p. 144 et s.
3. V. les arrêts Shell c. Commission (TPÎCE 10 mars 1992, aff. T- 11/89, Rec. 11-757) et
Impérial Chemical Industries, préc.
4. V. CJCE (gde ch.) 17 janv. 2006 et 2 mai 2006, D. 2006, cahier aff. 1752, note
R. Dammann.
5. V. déjà, T. com. Nanterre, 15 févr. 2006, D. 2006, cahier aff. 793, note J.-L. Vallens;
CA Versailles, 4 sept. 2003, D. Jur. 2352, note J.-L. Vallens, Rev. soc. 2003. 891, obs.
J.-PRémery;JCP2004.1. 10007, note M. Menjucq;T. com. Nanterre, 19 mai 2005, J. 1787,
note R. Dammann; Bull. Joly Sociétés 2005 995, note Mélin; Rev proc coll. 2005. 241 note
M. Menjucq; M. Raimon, « Centre des intérêts principaux et coordination des procédures
dans la jurisprudence européenne sur le réglement relatif aux procédures d’insolvabilité »,
JDI 2005. 739 et s.
188 LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES
B. Instruments internationaux
339 Diverses tentatives ont été faites au niveau international pour régle¬
menter les activités des sociétés transnationales.
C’est ainsi qu’ont été adoptées le 20 juin 1976 trois recommanda¬
tions par le Conseil des ministres de l’OCDE édictant des principes
directeurs pour ces sociétés. Ces principes ont fait l’objet d’une
réactualisation en l’an 20002. Le conseil d’administration de l’OIT a
également adopté une réglementation de principe sur les firmes multi¬
nationales le 16 novembre 19793. De même, la Commission de l’ONU
sur les firmes transnationales a adopté en 1984 un projet de Code
de conduite. Ce Code insiste particulièrement sur la nécessité pour
ces firmes de respecter la souveraineté des États dans lesquels elles
sont implantées : souveraineté sur les ressources naturelles, respect
des objectifs de politique générale fixés par les gouvernements, protec¬
tion de l’environnement, promotion de l’innovation et des trans¬
ferts de technologie4. Récemment l’Institut de droit international a
adopté une résolution sur les obligations des sociétés transnationales
et leurs sociétés membres, permettant aux États d’imputer en vertu de
leurs lois et dans certaines conditions une responsabilité aux sociétés
dominantes5.
LES OPÉRATIONS
DU COMMERCE
INTERNATIONAL
340 Plan O Le négoce international1 donne lieu à de nombreux contrats, nom¬
més ou innommés et diversement qualifiés. Le plus souvent, il s’agit de ventes
qui, étant internationales, s’accompagnent nécessairement d’un transport.
Ces deux contrats sont complémentaires et constituent le cœur des opérations
du commerce international. Les contrats de mandat et plus généralement de
représentation sont tout aussi importants : ils assurent le lien entre les opéra¬
teurs et leur clientèle, parfois entre les opérateurs eux-mêmes, et soulèvent des
questions juridiques parmi les plus fines. Les prestations de services, de logis¬
tique et de distribution ne cessent par ailleurs de se développer, tout en appe¬
lant un meilleur encadrement juridique. Les mécanismes de financement sont
également déterminants dans l’essor des échanges internationaux. Le crédit
demeure le nerf des affaires : il les favorise d’autant mieux qu’il s’accompagne
de bonnes garanties, personnelles ou réelles, reposant aussi sur de solides clau¬
ses contractuelles.
Quoi qu’il en soit, tous ces contrats et conventions méritent d’être étu¬
diés avec attention, car ils se concluent dans des conditions parfois originales
et s’exécutent souvent en application de clauses particulières. Autrement dit,
si les principes généraux du droit des obligations restent essentiels, ils ne
contiennent pas, à eux seuls, toute la matière des contrats internationaux.
Les contrats du commerce international ne peuvent toutefois se développer
que dans un environnement qui offre toutes les garanties aussi bien financières
LES CONTRATS
DU COMMERCE
INTERNATIONAL
341 Plan O Les opérations du commerce international se nouent et se dénouent
dans le cadre de contrats b Ces contrats obéissent aux règles usuelles de forma¬
tion et d’exécution prévues par les textes et développées par la jurisprudence.
Ce sont d’abord des contrats comme les autres, des accords entre deux ou plu¬
sieurs personnes auxquels le droit donne force juridique en sanctionnant les
engagements qu’il inclut. Mais force est de reconnaître que les contrats du
commerce international se détachent sur certains aspects des règles habituel¬
les, ne serait-ce que par la large voie qu’ils laissent à la liberté contractuelle.
De nombreuses clauses qui, en droit interne, seraient condamnées, sont au
contraire, dans les relations internationales, considérées comme valables.
Cette originalité des contrats internationaux mérite d’être traduite, ce que l’on
fera en évoquant les problèmes communs qu’ils posent.
Les contrats du commerce international correspondent par ailleurs à des
figures juridiques connues : il s’agit pour l’essentiel de ventes, de transports, de
prêts, de mandats, de louages d’ouvrage, bref de contrats, le plus souvent, tout
à fait ordinaires, mais qui, soit par leur économie, soit par leur conception,
présentent des traits particuliers qu’il faut savoir combiner avec des règles
communes1. Ces contrats spéciaux du commerce international2 appellent des
précisions ; elles seront ordonnées en distinguant les contrats commerciaux des
contrats de financement.
Dans le prolongement, sera évoquée la question du paiement, toutes les
obligations étant appelées à se dénouer et à procurer, en principe, satisfaction
au créancier.
On se demandera, avant toute analyse, si tous ces contrats n’obéissent pas
à ce que l’on pourrait appeler des règles communes, en commençant par exa¬
miner la question du droit applicable.
1. V. G. Carducci, Lex spéciales et lex generalis dans les contrats internationaux, LGDJ
2005 ; égal. Jiménez, Export-Import Basics, ICC Publication, n° 543.
2. L’étude n’est ici que très partielle. V. par ex. pour un exposé assez approfondi, S. Sana
Chaillé de Néré, Les difficultés d’exécution du contrat en droit international privé, thèse Bor¬
deaux 2001 ; MM. Béguin et autres, Droit du commerce international, Litec 2005, n° 1000 s.,
traitant de la vente internationale de marchandises, des contrats de production, des contrats
de distribution et des contrats portant sur un service, i.e. contrats d’entreprise, de trans¬
port ou encore de représentation; MM. Mousseron et autres, Droit du commerce internatio¬
nal, 3e éd., p. 207 s., envisageant les contrats en tant qu’instruments du commerce inter¬
national et traitant principalement de la vente et des opérations de transfert. En parlant de
contrats du commerce international, on ne vise pas uniquement les contrats commerciaux,
d’abord parce que la distinction contrats civils/contrats comerciaux n’a plus beaucoup de
fondement, ensuite parce la notion de commerçant n’a guère de pertinence dans le droit
des opérations internationales. Les contrats que l’on considérera ci-après sont donc aussi
bien des contrats civils que des contrats commerciaux; il reste qu’il s’agit, avant tout de
contrats impliquant, de part et d’autre, des professionnels.
Une étude plus systématique que celle-ci traiterait également du contrat de bail, mobi¬
lier (v. J. Cayron, La location de meubles, thèse Aix-Marseille 1993) et immobilier, du contrat
de dépôt (v. J.-M. Jacquet, Rép. dr. int, V° Dépôt), de la transaction (v. Ch. Jarrosson,
« Le contrat de transaction dans les relations commerciales internationales », Rev. crit. DIP
1997.657) et surtout des contrats en matière de propriété littéraire et artistique ou inndus-
trielle : contrats de brevets, de licence de marque, d’édition,... (v. M. Josselin-Gall, Les
contrats d'exploitation du droit de propriété littéraire et artistique, 1995, éd. GLN Joly; T. Azzi,
Recherche sur la loi applicable aux droits voisins du droit d’auteur en droit international privé,
thèse Paris-Il, 2000, LGDJ 2004, préf. H. Gaudemet-Talion).
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 193
CHAPITRE 1
LA DÉTERMINATION DE LA LOI
APPLICABLE AUX CONTRATS
droit commun des conflits de lois en matière des contrats. Elle est,
d’autre part ouverte à la signature des États membres des Communau¬
tés européennes. À son égard, deux protocoles d’interprétation ont été
signés le 19 décembre 1998. Ils donnent compétence à la Cour de jus¬
tice des communautés européennes pour interpréter la convention
selon la formule du renvoi préjudiciel. Leur entrée en vigueur nécessi¬
tait la ratification par l’ensemble des 12 États signataires. La dernière
ratification nécessaire est intervenue de la part de la Belgique, par une
loi du 25 avril 2004; les protocoles sont ainsi entrés en vigueur le
1er août 2004 b
En dépit de variations sur le caractère obligatoire de la règle de
conflits de lois, la Cour de cassation a rappelé que la convention de
Rome devait être appliquée par les juges français1 2.
§ 2. Le principe d’autonomie
347 II convient d’en dégager la signification (A) avant de porter sur lui une
appréciation critique (B), puis d’exposer les conséquences qui lui sont
attachées (C). Les règles que lui consacre la convention de Rome seront
ensuite exposées (D).
1. En France, la ratification des protocoles avait été autorisée par une loi du 30 janvier
1995 (JO 31 janv. 1995, p. 1608); Le décret n° 2005-17 du 5 janvier 2005 (JO 12 janv.
2005, p. 501) procède à la publication de ces protocoles.
2. V., Civ. lre, 31 mai 2005, D. 2005. IR. 1729, Panorama par P. Courbe et F. Jault-
Seseke, p. 1496; RDC, 2005. 1185, obs. D. Bureau; Civ. lre, 25 janv. 2000, Rev. crit. DIP
2000. 737, note J.-M. Jacquet.
3. V. infra, n° 1111 et s.
196 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. La volonté seule
348 Cette règle aujourd’hui bien établie et largement admise a pourtant
suscité d’intenses controverses, auxquelles il ne put être mis un terme,
en France, que grâce à la théorie de la localisation du contrat, due à
Henri Batiffol. Prenant acte des excès de la doctrine objectiviste/anti-
autonomiste (laquelle refusait énergiquement tout rôle à la volonté
des parties dans la détermination de la loi du contrat), comme de ceux
de la doctrine subjectiviste (prônant pour les parties une liberté au
fondement mal défini et aux limites incertaines), il proposa la thèse
transactionnelle de la localisation, qui peut être exprimée en une
formule lapidaire : « la loi applicable au contrat est déterminée par le
juge, mais en raison de la volonté des parties quant à la localisation du
contrat »L
Cette thèse se refusait à couper les ponts avec une jurisprudence
résolument acquise à l’autonomie. Mais elle refusait par ailleurs les
excès d’une règle de conflit qui semblait déposséder le juge au bénéfice
des parties, alors que seul le juge est — y compris dans les relations
internationales — gardien de l’autorité de la loi1 2.
349 Instruite des dérives possibles d’une autonomie trop largement accor¬
dée aux parties, la jurisprudence française s’était ralliée à la théorie de
la localisation du contrat, mais sans y avoir fait totalement allégeance.
La théorie de la localisation postulait en effet que le choix exprimé par
les parties en faveur d’une loi déterminée ne soit considéré que comme
un élément dans l’ensemble de ceux que le juge devait prendre en
considération pour déterminer la loi applicable. La Cour de cassation
manifestait cependant sa faveur à une règle de conflit qui semblait bien
conférer à la volonté des parties la fonction d’un véritable facteur de
rattachement. La localisation du contrat, fondée sur un faisceau d’élé¬
ments, et destinée à faire apparaître le pays avec lequel le contrat pré¬
sentait ses liens les plus significatifs, n’était utilisée qu’à défaut de
volonté manifestée par les parties3.
L’entrée en vigueur de la convention de Rome, le 1er avril 1991,
devait tarir les termes de la controverse : c’est bien à la seule volonté
1. V., H. Batiffol et P. Lagarde, Droit international privé, LGDJ, 1983, t. II, n° 571,
p. 265.
2. V. J.-M. Jacquet, Principe d'autonomie et contrats internationaux, op. cit., p. 23 et s.
3. V., Civ. 6 juill. 1959, Fourures Rend, Rev. crit. DIP 1959. 708, note H. Batiffol;
Civ. 2e, 15 juin 1982, D. 1983. IR. 150; Civ. 25 mai 1980, Mercator Press, Rev. crit. DIP
1980. 576, note H. Batiffol; D. 1981. IR. 162.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 197
2. La fonction de la volonté
350 a) Fonction de rattachement O Dans la règle de conflits de lois, le
rôle de la volonté des parties est celui qui est habituellement attribué à
un facteur de rattachement « objectif », tel le lieu de situation d’un
bien ou le lieu de résidence habituelle d’une personne.
La volonté est donc appelée à jouer le rôle de facteur de rattachement
du contrat à un ordre juridique déterminé. Instruites du pouvoir qui
leur est ainsi conféré, les parties ne manquent pas, dans de nombreux
contrats internationaux, de l’exercer dans sa plénitude, en désignant la
loi étatique applicable à leur contrat1. L’accomplissement de la fonc¬
tion de rattachement du principe d’autonomie est cependant insépa¬
rable de la substantialisation de celui-ci.
1. V. J.-M. Jacquet, Principe d’autonomie..., op. cit., p. 177 et s.; Contra V. Heuzé, La
réglementation française des contrats internationaux, op. cit.; J.-M. Jacquet, « Retour sur la
règle de conflit de lois en matière de contrats », JDI 1991. 679 et s.; comp. A. Mezghani,
op. cit., p. 173 et s.
2. Ceci ne conduit pas à faire pour autant du principe d’autonomie une règle matérielle.
En ce sens, A. Mezghani, op. cit., p. 194 et s.; contra F. Deby-Gérard, Le rôle de la règle
de conflit de lois dans le règlement des rapports internationaux, Paris, Dalloz, 1973 ; S. Chaillé
198 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Appréciation critique
Les avantages du principe d’autonomie doivent être appréciés au
regard des difficultés qu’il peut susciter.
de Néré, Les difficultés d’exécution du contrat en droit international privé, préface J.-P. Laborde,
PUAM 2003, p. 61 ; pour une analyse d’ensemble très approfondie, v. P. M. Patocchi,
« Règles de rattachement localisatrices et règles de rattachement à caractère substantiel. De
quelques aspects récents de la diversification de la méthode conflictuelle en Europe », Études
suisses de droit international privé, Société suisse de droit international, Georg, Librairie de
l’Université, Genève, 1985.
1. V., H. Batiffol, « La loi appropriée au contrat », op. cit.
2. V., E. Loquin et L. Ravillon, op. cit. ; comp. H. Muir-Watt, op. et loc. cit.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 199
357 c) Le contrat sans loi O Les hypothèses de contrat sans loi sont
plutôt rares1. Lorsqu’on les rencontre, elles sont parfois le fruit d’une
volonté délibérée des parties. Une telle volonté peut-elle être suivie
d’effet? La réponse est positive si les parties s’accordent à maintenir
leur accord en dehors du droit. Aucune d’entre elles ne demandera la
sanction d’une éventuelle violation du contrat. Le seul fait de saisir un
juge pour lui demander de donner effet au contrat manifeste une
contradiction avec la volonté initiale des parties de maintenir leur
accord en dehors du droit. Il est alors concevable que le juge détermine
le droit applicable afin de savoir s’il se trouve en face d’un contrat ou
d’un engagement non-juridique.
Mais plus souvent les situations de contrat sans loi sont le fruit d’un
accident de parcours dans l’application de la règle de conflit de lois. Ou
bien ils résultent aussi d’une jurisprudence particulièrement favorable
à l’autonomie contractuelle ou à la validité des contrats en matière
internationale qui parvient à ce résultat afin d’éviter de prononcer la
nullité d’un contrat ou d’une clause de celui-ci2.
C. Conséquences du recours
au principe d’autonomie
En tant que règle de conflit de lois, le principe d’autonomie produit
deux séries de conséquences. L’une est relative au dualisme de la règle
de conflit, l’autre à l’inapplicabilité de certaines règles.
1. Sur le contrat sans loi, v. P. Level, « Le contrat dit sans loi », Travaux comité fr. DIP,
1964-1966, p. 209 et s. ; L. Peyrefitte, « Le problème du contrat sans loi », D. 1965. Chron.
113 et s. ; W. Wengler; « Immunité législative des contrats multinationaux », Rev. crit. DIP,
1971. 637 et s. Comp., dans une perspective différente, J.-P. Béraudo, « Faut-il avoir peur
du contrat sans loi? », in Mélangés en l'honneur de P. Lagarde, Dalloz, 2005, p. 93 et s.
2. V. supra n° 356 sur l’incorporation conflictuelle. Sur la situation dans laquelle un
contrat a été soumis seulement à des usagers, cf. CA Montpellier, 3 déc. 2002, JDI
2004.888, note S. Poillot-Peruzzetto. Sur l’importance d’un tel courant dans la jurispru¬
dence française antérieure à l’application de la Convention de Rome, cf. J.-M. Jacquet,
Principe d’autonomie et contrats internationaux, op. cit., p. 17 et s.
202 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. déjà favorable à cette solution, dans une conception plus radicale, dissociant le
fondement des deux règles de conflits de lois, F. Déby-Gérard, op. cit., n° 297 et s., p. 237
et s.
2. V., H. Batiffol et P. Lagarde, Traité de droit international privé, t. I, 8e éd., LGDJ, 1993,
n° 311, p. 509. Ce serait déjouer les prévisions des parties que de les soumettre à la loi
désignée par la règle de conflit de lois de l’ordre juridique qu’elles ont choisi. Ce renvoi
s’étend aussi à la qualification en matière de contrats; v. CA Paris, 3 mars 1994, JDI 1995.
607, note G. Légier; Rev. crit. DIP 1994. 532, note B. Ancel.
3. V., F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, 3e éd, Larcier, 2005, n° 14 - 42,
p. 800.
LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 203
2. Modalités du choix
362 II convient de s’arrêter sur le droit applicable au contrat d’electio juris,
comme sur l’expression de la volonté des parties.
1. V., P. Lagarde, « Le dépeçage du contrat dans le droit international privé des contrats »,
Rivista di diritto internazionale privato e processible, 1993, p. 33 et s.
2. V., J, Foyer, « Le contrat d’« electio juris » à la lumière de la convention de Rome du
19 juin 1980 », in L'internationalisation du droit, Mélangés en l’honneur de Y. Loussouarn,
Paris, Dalloz, 1994, p. 169 et s. ; V. Brulhart, Le choix de la loi applicable — questions choisies
(avec une ébauche de réglementation de l’electio juris et quelques réflexions sur le rattachement
des contrats d'assurance), Berne, Staempfli, 2004.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 205
1. Civ. lre, 12 juill. 2005, Rev. crit. DIP 2006. 94, note P. Lagarde; D. 2005. IR. 2337;
D. 2006. Pan. 1498 par P. Courbe et F. Jault-Seseke; /DJ 2006. 986, note A. Sinay-
Cytermann; dans le même sens, v. Civ. lre, 9 déc. 2003, Bull. civ. I, n° 251, p. 200; Rev. crit
DIP 2004, somm. p 847.
2. V., Soc. 21 janv. 2004, Bull. civ. V, n° 21, p. 19; Rev. crit. DIP 2005, somm. p. 789;
JCP 2004. IV. 1534; Gaz. Pal. 2004, somm. p. 1317.
3. V., S. Tomaszewski, « La désignation, postérieure à la conclusion du contrat, de la loi
qui le régit », Rev. crit. DIP 1972. 567 et s.
4. Sur l’accord procédural, v. D. Bureau, « L’accord procédural à l’épreuve », Rev. crit.
DIP 1996. 587 et s.; B. Audit, «Droit international privé», op. cit., n° 266, p. 224;
B. Fauvarque-Cosson, « L’accord procédural à l’épreuve du temps », Mélangés P. Lagarde,
op. cit., p. 263 et s.
5. V., F. Deby-Gérard, op. cit., n° 302, p. 241.
206 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. la prestation caractéristique1
364 À défaut de choix, l’article 4 dispose que le contrat est régi par « la loi
du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits ». On a vu dans
ce texte une illustration du « principe de proximité »2. Cependant, la
désignation de cette loi ne s’effectue pas sans que des repères ne soient
fournis au juge. L’article 4, alinéa 2 introduit en effet ici une présomp¬
tion apte à orienter vers la détermination des liens les plus étroits.
Cette présomption repose sur deux éléments.
Selon le premier élément de cette présomption, les liens les plus
étroits s’établiront par rapport à l’une des parties au contrat. Il s’agira
de sa résidence habituelle ou de son administration centrale, s’il s’agit
d’une société, association ou personne morale.
Toutefois, la convention ajoute une disposition qui intéresse parti¬
culièrement les contrats conclus par des opérateurs du commerce
international : si le contrat est conclu dans l’exercice de l’activité pro¬
fessionnelle d’une partie, on devra prendre en considération le pays de
son principal établissement, ou, si, selon le contrat, la prestation doit
être fournie par un établissement autre que l’établissement principal,
le pays où se trouve situé cet établissement (art. 4.2).
365 Mais il reste à mettre en place le second élément, celui qui permet¬
tra de désigner celle des deux parties au contrat dont la résidence
habituelle ou un établissement sera pris en considération. Pour ce
faire, la convention de Rome, reprenant une solution issue du droit
international privé suisse, désigne le débiteur de la prestation caracté¬
ristique3.
1. V., H. Batiffol et P. Lagarde, Traité..., t. II, op. cit., n° 579 et s., p. 289 et s.;
J.-M. Jacquet, « Contrats », Rép. Intern. Dalloz, n° 120 et s., p. 21 et s. Sur l’ensemble de la
question, v. M. E. Ancel, La prestation caractéristique du contrat, préface L. Aynès, Paris,
Economica, 2002 ; S. Chaillé de Néré, Les difficultés d’exécution du contrat en droit international
privé, préf. j.-P. Laborde, PUAM, 2003.
2. V., P. Lagarde, « Le principe de proximité en droit international privé », Rec. cours
La Haye 1986, t. 196, p. 9 et s.
3. V., A. Schnitzer, « Les contrats internationaux en droit international privé suisse »,
Rec. cours La Haye 1968, t. 123, p. 543 et s. V. pour une application en matière de contrat
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 207
B. La clause d’exception
366 Une clause d’exception a été introduite à l’article 4.5. Cette clause
d’exception autorise le juge à déterminer directement la loi avec laquelle
le contrat présente les liens les plus étroits en recherchant et en éva¬
luant les points de contact que le contrat présente avec différents
pays3.
Elle doit jouer dans deux cas. Le premier correspond aux situations
dans lesquelles « la prestation caractéristique ne peut être détermi¬
née ». On peut songer à tous les contrats de quelque complexité dans
lesquels aucune des deux parties ne se borne à devoir un paiement mais
d’agence sportive, soumis, il est vrai, à tort, à la convention de Rome, Civ. lre, 18 juill. 2000,
JDI 2001. 97, note E. Loquin et G. Simon.
1. P. Lagarde, op. cit., Rev. crit. DIP 1991, n°29, p. 308.
2. V., Civ. lre, 15 mai 2001, Rev. crit. DIP 2002. 86 note P. Lagarde; JDI 2001. 1121,
note A. Huet; Lamy dr. aff. févr. 2002, n°46, p. 5, note H. Kenfack; Civ. lre, 25 nov. 2003,
Rev. crit. DIP 2004. 102, note P. Lagarde; JDI 2004. 1179, note M. E. Ancel; D. 2004. 494,
note H. Kenfack; Gaz. Pal. 2004, somm. 635 ; JCP 2004.1. 159, n° 2, obs. Ch. Delpy, et JCP
2004. 11. 10046, note J. Raynard; RTD corn. 2004. 396, obs. Ph. Delebecque.
3. V., P. Rémy-Corlay, Étude critique de la clause d'exception dans le conflit de lois, thèse
Poitiers, 1997 ; C. Dubler, « Les clauses d’exception en droit international privé », in Études
suisses de droit international, vol. 35, 1983.
208 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., TGI Poitiers, 22 déc. 1999, Rev. crit. DIP 2001. 670, note P. Rémy-Corlay.
2. V., Com. 4 mars 2003, Rev. crit. DIP 2003. 285, note P. Lagarde; RTD com. 2003.
421, obs. Ph. Delebecque; DMF, 2003. 556, obs. Ph. Delebecque;/CP 2003. IV. 1786 et JCP
2003. I. 166, obs. M. Attal.
3. Le contrat d’assurance a été écarté du domaine de la convention lorsqu’il couvre
un risque situé sur le territoire de l’un des États membres (pour les directives communau¬
taires intervenues en la matière), v. E. Jayme et Ch. Kohler, « L’interaction des règles de
conflit contenues dans le droit dérivé de la Communauté européenne et des conventions de
Bruxelles et de Rome », Rev. crit. DIP 1995. 1 et s., spéc. p. 5.
4. V., P. Lagarde, Le nouveau droit international privé... op. cit., n°33, p. 311.
LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 209
371 Le principe du choix de la loi applicable par les parties est maintenu.
Cependant la loi de la résidence habituelle du consommateur s’impose
en cas d’absence de choix par les parties d’une loi différente. Elle
devient ainsi la loi du contrat2. Mais la loi de la résidence habituelle du
consommateur s’applique aussi lorsque les parties ont choisi une loi
différente. Dans ce cas en effet, le consommateur « ne peut être privé
de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi
du pays dans lequel il a sa résidence habituelle ». Le contrat sera donc
soumis à la loi choisie par les parties mais la loi de la résidence habi¬
tuelle écartera les dispositions de la loi choisie dans la mesure où elles
assurent au consommateur une meilleure protection.
Cette solution suppose cependant qu’un certain nombre de condi¬
tions soient réalisées.
1. Sur le rôle joué par les directives communautaires, v. E. Jayme et C. Kohler, « L’inter¬
vention des règles de conflits contenues dans le droit dérivé de la Communauté européenne
et des conventions de Bruxelles et de Rome », Rev. crit. DIP 1995. 1 et s. ; M. Wilderspin et
X. Lewis, « Les relations entre le droit communautaire et les règles de conflit de lois des États
membres », Rev. crit. DIP 2002.1 et s.
2. V., Civ. lrc, 12 juill. 2005, Rev. crit. DIP 2006. 94, note P. Lagarde; JDI 2006. 985,
note A. Sinay-Citermann ; Dr. et patr., nov. 2005. 113, obs. M. E. Ancel; Dr. fam., 2005,
comm. 203, obs. V. Larribeau-Terneyre.
210 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
b Conditions de la protection
372 1) Conditions relatives au contrat O II faut qu’il s’agisse d’un
contrat passé avec un consommateur au sens de la convention. Selon
l’article 5, paragraphe 1, le consommateur est celui qui a agi « pour un
usage pouvant être considéré comme étranger à son activité profession¬
nelle » b Bien que le texte ne le précise pas, le cocontractant du consom¬
mateur doit avoir agi dans le cadre de son activité professionnelle,
sinon le déséquilibre inhérent au contrat de consommateur ne se
retrouverait plus.
Le contrat en question doit être un contrat de fourniture d’objets
mobiliers corporels, ou de fourniture de services ou encore un contrat
destiné au financement des contrats précédents. Cependant, il devra
être fait retour au droit commun de la convention (art. 3 et 4) lors¬
qu’un contrat de fourniture de services vise des services qui doivent
être rendus au consommateur exclusivement dans un pays autre que
celui dans lequel il a sa résidence habituelle (contrat d’hôtellerie par
exemple).
Enfin le contrat de transport passé avec un consommateur ne relève
pas de l’article 5 sauf s’il offre un prix global pour des prestations
combinées de transport et de logement (art. 5, paragraphe 5).
1. Sur la question de savoir si un consommateur peut être une personne morale, v. CJCE
22 nov. 2001, JCP G 2002. Il 10047, note G. Paisant; RTD civ. 2002, obs J. Raynard. La
réponse donnée par la Cour de justice à cette question est négative. Cette réponse est impor¬
tante, même si la CJCE n’intervenait pas pour interpréter l’article 5 de la convention de
Rome.
2. V. pour une difficulté sérieuse dans le cas d’un contrat dit de Time-sharing,
C. fédérale d’Allemagne, 19 mars 1997, Rev. crit. DIP 1998. 610, note P. Lagarde.
LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 211
A. Questions exclues
378 1) Questions exclues du champ d'application de la conven¬
tion de Rome O Parmi les nombreuses exclusions effectuées à
l’article 1, paragraphe 2 de la convention de Rome, trois méritent par¬
ticulièrement d’être mentionnées ici :
La première est relative au droit des sociétés, associations ou per¬
sonnes morales, très logiquement exclues vu le particularisme de la
matière.
La seconde est relative à la question des pouvoirs d’un intermédiaire
ou du pouvoir d’un organe d’une société, association ou personne
morale d’engager un représenté ou la personne morale en cause vis-
à-vis des tiers. La question des pouvoirs de l’intermédiaire relève de la
convention de La Haye du 14 mars 1978 b Quant à la question des
pouvoirs de l’organe d’une société, association ou personne morale,
elle est étroitement liée au droit des sociétés, associations ou personnes
morales, qui reste en dehors de la convention (art. 1, § 2f).
Enfin, la troisième exclusion vise l’état et la capacité des personnes
physiques qui relèvent traditionnellement en France de la loi person¬
nelle (loi nationale) et non de la loi du contrat (art. 1 § 2a). Par excep¬
tion à cette exclusion, l’article 11 de la convention de Rome, intitulé
« incapacité », autorise la prise en considération de la loi du lieu de
conclusion d’un contrat passé entre personnes physiques se trouvant
dans le même pays lorsque cette loi considérerait comme capable l’un
des cocontractants incapable d’après sa loi personnelle supposée diffé¬
rente. Cette solution est écartée si le cocontractant de l’incapable ne
mérite pas cette protection fondée sur l’apparence. L’article 11 retient
la connaissance de l’incapacité ou le fait qu’elle n’ait été ignorée qu’en
raison d’une imprudence de la part du cocontractant de l’incapable. Il
est important de noter que la preuve de l’incapacité repose sur celui qui
l’invoque.
1. V., Corn., 19 mai 1992, JDI 1992. 954, note Ph. Kahn.
214 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
382 2) Effets du contrat O Les effets généraux attachés par tout sys¬
tème juridique aux contrats, tels la force obligatoire ou l’effet relatif
dépendent de la loi du contrat2.
Elle régit aussi les divers modes d’extinction des obligations, ainsi
que les prescriptions et déchéances fondées sur l’expiration d’un délai
(art. 10, § ld).
Les articles 12 et 13 de la convention consacrent des réglés spéci¬
fiques aux deux modes de transfert des obligations qui constituent la
cession de créance et la subrogation.
383 Les lois de police constituent une catégorie particulière de lois dont
l’application aux rapports internationaux doit s’effectuer d’une manière
spécifique en raison des objectifs qu’elles poursuivent. À la présenta¬
tion de la catégorie des lois de police (§ 1) suivra l’exposé de leur mise
en oeuvre (§ 2).
384 Les règles de conflits de lois qui viennent d’être présentées traduisent,
du point de vue des ordres juridiques étatiques, un certain libéralisme,
puisque ces ordres juridiques laissent à la volonté des parties le rôle de
désigner le droit applicable.
Il ne s’agit pas de remettre en cause le bien fondé de la règle de
conflits en matière de contrats1. Mais il est capital de mettre l’accent
sur le fait que le règlement de conflits de lois en matière de contrats est
fondé sur le postulat implicite selon lequel la surveillance des contrats
internationaux par les ordres juridiques étatiques ne souffre pas de la
désignation de la loi du contrat effectuée sur la base de la volonté des
parties2. Il est cependant difficile de récuser la persistance de situa¬
tions dans lesquelles les États, en dépit de cette attitude libérale,
entendent imposer l’application de certaines de leurs lois aux contrats
internationaux.3
diate ou nécessaire; Comp. A. Sperduti, « Les lois d’application nécessaire en tant que lois
d’ordre public, Rev. crit. DIP 1977. 257 et s. ; A. Bonomi, « La norme impérative ne! diritto,
intemazionale privatto », préf. P. Widmer, Publications de l’Institut suisse de droit comparé,
Schultess Polygraphicher Verlag AG, Zürich, 1998; A. Mezghani, Méthodes de droit interna¬
tional privé et contrat illicite, op. cit., p. 245 et s.
1. Pour les limites imposées aux lois de police d’un État par le droit communautaire
relatif à la libre prestation de services, v. CJCE 15 mars 2001, Rev. crit. DIP 2001. 495, note
É. Pataut; CJCE 23 nov. 1999, Rev. crit. DIP 2000. 710, note M. Fallon, consacrant très
nettement la notion de loi de police étatique, tout en rappelant la nécessité pour les États
de respecter le droit communautaire.
2. P. Lagarde, « Le nouveau droit international privé des contrats après l’entrée en
vigueur de la convention de Rome du 19 juin 1980 », op. cit., p. 322.
218 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 4 oct. 1989, Rev. crit. DIP 1990. 316, note P. Lagarde; JDI 1990. 415, lrc esp.,
note Ph. Kahn; RTD com. 1990. 245, note B. Bouloc; D. 1990, Somm. 266, obs. B. Audit.
2. Civ. lre, 23 juin 1921, Gaz. Pal. 1921. 2. 453; CA Paris, 22 déc. 1983, Rev. crit. DIP
1984. 484, note J. Mestre.
3. V., Com. 28 nov. 2000, JDI 2001. 511, lrc esp., note J.-M. Jacquet; adde, à propos de
la loi française du 16 juillet 1984 (modifiée par la loi du 6 juill. 2000) sur le contrat
d’agence sportive, Civ. lre, 18 juill. 2000, JDI 2001. 97, note E. Loquin et G. Simon.
4. V., L. Idot, « Les conflits de lois en droit de la concurrence »,JDI 1995. 321 et s., spéc.
p. 325 et s. ; adde pour une obligation de publier un film, CA Paris, 10 juill. 1991, JDI 1992.
384, note F. Pollaud-Dulian.
5. V., B. Audit, « Extraterritorialité et commerce international. L’affaire du Gazoduc
sibérien », Rev. crit. DIP 1983. 401 et s.; B. Grêlon et Ch. E. Gudin, « Contrats et crise du
Golfe », JDI 1991. 633 et s.; J.-M. Jacquet, « La norme juridique extraterritoriale dans le
commerce international »,JDI 1985. 327 et s.
220 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
mise en raison de son siège social à une loi étrangère dans la mesure
où l’application de la législation française était compatible avec la
situation du siège social à l’étranger (P)1. Les dispositions de la loi
française sur le licenciement des salariés protégés sont applicables
même si le contrat de travail est soumis à une loi étrangère en raison
du fonctionnement du comité d’entreprise sur le territoire français2.
Plus généralement, alors que le contrat de travail est soumis à la loi
d’autonomie (rapports individuels du salarié et de l’employeur), les
règles qui concernent la collectivité des travailleurs, notamment en ce
qui concerne « l’organisation et la réglementation administrative du
travail s’appliquent à tout travail effectué sur le territoire3.
Dans un autre domaine, la loi Hoguet du 2 janvier 1970 régle¬
mentant certaines activités relatives aux immeubles et aux fonds de
commerce, et imposant de ce fait certaines obligations à l’agent immo¬
bilier, est considérée par la jurisprudence comme une loi de police.
Cependant son application n’a pas été étendue au mandat confié en
France à un agent immobilier établi à Monaco de vendre un immeuble
situé à Monaco4.
392 Ont encore été considérées comme des lois de police, la loi du 10 janvier
1978 relative à la protection des consommateurs (car le bon fonctionne¬
ment du marché est en cause), la loi du 16 juillet 1984 relative aux
activités physiques et sportives (même si cette loi a été appliquée sur le
fondement de la compétence générale de la loi française), la loi exigeant
un agrément antérieurement à la directive 89/646 du 15 décembre 1989
pour l’exercice en France d’opérations de banque, ainsi que la loi du
3 janvier 1967 (art. 10) prescrivant certaines conditions de forme pour
les actes relatifs à la propriété des navires francisés5.
Un arrêt a également considéré que la loi française du 25 janvier
1985 était applicable en tant que loi de police à une revendication
exercée sur la base d’une clause de réserve de propriété, alors qu’une
1. CE 29 juin 1973, Cie internationale des Wagons-lits, Rev. crit. DIP 1974. 344, concl.
N. Questiaux et chron. Ph. Francescakis, p. 273; JDI 1975. 538, note M. Simon-Depitre;
Dr. soc. 1976. 50, obs. J. Savatier; Rev. sociétés 1976. 633, note J.-L. Bismuth; B. Ancel,
Y. Lequette, Les Grands arrêts..., op. cit., n° 54; Soc. 3 mars 1988, Rev. crit. DIP 1989. 63,
note G. Lyon-Caen; JDI 1989. 78, note M.-A. Moreau.
2. Ass. plén., 10 juill. 1992, Air Afrique, Rev. crit. DIP 1994, lre esp., 69, note B. Audit.
3. Soc., 31 mai 1972, Thuillier, Rev. crit. DIP 1973. 683, note P. Lagarde; JCP 1973. II.
17317, note G. Lyon-Caen; comp. CA Paris, 13 avr. 1995, Rev. crit. DIP 1996. 319, note
E. Moreau.
4. V., TGI Nice, 24 avr. 1985, Rev. crit. DIP 1986. 325, note P. Lagarde; Civ. lre, 8 juill.
1986, Bull, civ., 1986, I, n° 194; CA Paris, 21 janv. 1994, Rev. crit. DIP 1995. 535, note
P. Lagarde.
5. V, respectivement Civ. lre, 19 oct. 1999, JDI 2000. 328, note J-B. Racine; Rev. crit.
DIP 2000. 29, note P. Lagarde, pour la loi du 10 janvier 1978; Civ. lre, 18 juill. 2000, JDI
2001. 97, note E. Loquin et Y. Simon, pour la loi du 16 juillet 1984 sur les activités sportives;
Com. 7 janvier 2004, RD banc, et fin., 2004. 54, obs. F. J. Crédot et Y. Gérard; Rev. crit. DIP,
2005. somm. 795 pour les activités bancaires, et Com. 14 janv. 2004, RTD civ. 2004. 353,
obs. J. Perrot; RTD com. 2004. 845, obs. Ph. Delebecque, RJ com. 2004. 302, note S. Poillot-
Peruzzetto; DMF 2004. 723, note G. Mecarelli pour la loi du 3 janvier 1967.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 223
1. V., Com. 8 janv. 2002, Rev. crit. DIP 2002. 328, note D. Bureau.
2. V., Com. 28 nov. 2000, JDI 2001. 511, lre esp., note J.-M. Jacquet; D. 2001. A.J. 305,
obs. E. Chevrier; Gaz. Pal, 2001. somm. 254; RTD com. 2001. 502, obs. B. Bouloc, 1067.
obs. Jacquet; CJCE 9 nov. 2000, JDI 2001. 511, 2e esp., note J.-M. Jacquet; Rev. crit. DIP
2001. 107, note L. Idot; JCP 2001. I. 328, obs. L. Bernardeau; DMF 2001. 487, note P. Pes-
tel-Debord.
3. V., M. Mousseron, « Les relations de prestataires de services : services généraux et
services spécifiques », Petites affiches 1994, n° 118, p. 11 et s. Pour l’agent commercial,
v. Cl. Ferry, « Contrat international d’agent commercial et lois de police », JDI 1993. 299 et s.
4. V., L. Idot, op. cit.; du même auteur, « Le domaine spatial du droit communautaire
des affaires », Travaux comité fr. DIP 1992-1993, p. 145 et s.
5. Pour l’emploi de la langue française, v. Soc. 19 mars 1986, Rev. crit. DIP 1987. 554,
note Y. Lequette.
6. En ce sens V. Heuzé, La réglementation française des contrats internationaux. Étude
critique des méthodes, op. cit., n° 473 et s., p. 218 et s., même si l’auteur se place dans une
perspective différente.
224 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 28 mai 1991, Huston, Rev. crit. DIP 1991. 752, note P.-Y. Gautier; JDI 1992.
133, note B. Edelman.
2. Selon l’expression de P. Lagarde, Rev. crit. DIP 1991, note 76, p. 316.
3. V., la sélection sévère retenue par la Cour fédérale d’Allemagne, dans sons arrêt du
19 mars 1997 précité.
4. V., P. Mayer et V. Heuzé, Droit international prive', op. cit., nos 124 et s.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 225
et s. ; sur l’ensemble de la question, cf. P. Mayer, Travaux comité fr. DIP, Journée du cinquan¬
tenaire, p. 109 et s.
1. V., M. Pelichet, « La vente internationale de marchandises et le conflit de lois »,
Rec. cours La Haye 1987, t. 201, p. 9 et s., spéc. p. 181 et s.
2. P. Kinsch, Le fait du prince étranger, op. cit., n° 298 et s., p. 424 et s.
3. Pour une illustration en matière de droit de la concurrence, v. L. Idot, « Les conflits
de lois en droit de la concurrence », op. cit., p. 337 et s.
228 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Document COM (2005) 650 final, 2005/0261 (COD). Sur le Livre vert qui a précédé
cette publication (COM, 2002, 654 final), v. D. Bureau, RDC 2003. 197 et s.; P. Lagarde,
« Vers une révision de la convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contrac¬
tuelles », in Mélanges Y. Guyon, Dalloz, 2003, p. 571 et s.; M. Wilderspin, in A. Fuchs,
H. Muir-Watt, É. Pataut (dir.), Les conflits de lois et le système juridique communautaire,
Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2004, p. 173 et s.
2. V., P. Lagarde, « Remarques sur la proposition de règlement de la Commission euro¬
péenne sur la loi applicable aux obligations contractuelles », Rev. crit. DIP 2006. 331 et s. ;
C. Castets-Renard, « Proposition de règlement sur la loi applicable aux obligations contrac¬
tuelles du 15 décembre 2005 (Rome 1). Conséquences pratiques sur les contrats du
commerce électronique et la propriété intellectuelle », D. 2006, cahier aff., p. 1522 et s.
LA DÉTERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS 229
§ 2. Le rattachement objectif
1. CJCE 9 nov. 2000, Rev. crit. DIP 2001. 107, note L. Idot.
2. V. dans une perspective plus large, S. Francq, L'applicabilité du droit communautaire
dérivé au regard des méthodes du droit international privé, préf. M. Fallon, Bruylant, LGDJ,
2005.
232 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 2
PROBLÈMES COMMUNS
AUX CONTRATS DU COMMERCE
INTERNATIONAL
1. V. notamment l’extrême développement de l’obligation de conseil (v. par ex. Civ. lre,
8 juin 1994, Bull. civ. I, n° 206) ou encore l’avènement du prétendu « solidarisme contrac¬
tuel », théorie que la jurisprudence récente refuse, à juste titre, d'admettre : v. Civ. 3e,
14 sept. 2005, Bull. civ. III, n° 166, D. 2006, 761, note crit. D. Mazeaud, considérant qu’un
contractant n’a pas à se soucier des intérêts de son partenaire.
2. Comp. Cl. Ferry, La validité des contrats en droit international privé, LGDJ 1989, préf.
B. Teyssié, allant jusqu’à proposer un principe de validité substantielle des contrats mettant
en jeu les intérêts du commerce international ; égal. B. Mercadal, « Ordre public et contrats
internationaux », DPCI1977, 457, défendant la thèse de la validité du contrat international
en lui-même, sous réserve du jeu de l’ordre public. Ces positions doctrinales, si intéres¬
santes soient-elles, n’ont jamais été consacrées par la jurisprudence. En outre, ce n’est pas
parce que le contrat est international qu’il doit être, ipso facto, libéré de toute contrainte
juridique. La seule question est de savoir si la règle de droit perd son fondement lorsqu’elle
est appelée à jouer dans une situation internationale. Cela peut être le cas (v. pour la régle¬
mentation des clauses monétaires, notamment), mais ce n’est pas nécessairement le cas
(on pense notamment à la protection de certains intermédiaires, agents...).
3. Dont se font l’écho la plupart des travaux contemporains et érigées au rang de dis¬
positions de droit matériel des contrats auxquelles les parties peuvent donner compétence :
v. art. 3-2 du règlement dit Rome I. Ce qui renvoie principalement aux Principes d’Unidroit
et aux Principes du droit européen des contrats :
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 233
droit européen des contrats ont, à cet égard, recueilli de nombreuses règles
issues de la lex mercatoria et ayant trouvé leur expression dans la juris¬
prudence arbitrale internationale. Ils ont vocation à constituer progres¬
sivement la trame des contrats internationaux. Les Principes d’Unidroit
reprennent des règles essentielles du droit des contrats, notamment :
- le consensualisme (art. 1.2) : « les Principes n’imposent pas que
le contrat... soit conclu ou constaté sous une forme particulière »;
- la liberté contractuelle (art. 1.1) : «les parties sont libres de
conclure un contrat et d’en fixer le contenu »;
- la force obligatoire (art. 1.3) : « le contrat valablement formé lie
ceux qui l’ont conclu. Les parties ne peuvent le modifier ou y mettre fin
que selon ses dispositions, d’un commun accord ou encore pour les
causes énoncées dans ces Principes »;
- la bonne foi (art. 1.7) : « les parties sont tenues de se conformer
aux exigences de la bonne foi dans le commerce international ».
Il y a dans ces Principes autant de clauses et parfois de dispositions
fondamentales1 que les parties, cherchant à « construire » un contrat
équilibré, peuvent parfaitement adopter, recopier ou aménager. Les
Principes du droit européen du contrat sont de la même veine : parfois
plus détaillés que les précédents, ils constituent eux aussi une source
de droit matériel à laquelle les parties sont invitées à puiser.
Progressivement, l’ensemble de ces dispositions s’uniformisent,
voire se standardisent2. Ces règles et principes sont également au cœur
- sur les Principes d’Unidroit, v. supra, n° 52 et 87 ; adde : M.J. Bonell, RD aff. int. 1997,161 ;
C. Kessedjian, Rev. crit. DIP 1995, 642; J.-P. Béraudo, JCP 1995, I, 3842; Ch. Larroumet,
JCP 1997,1, 4011; M. Bonell, RD aff. int. 1997, n° 2, 145 ; GiardinaJD1 1995, 547; B. Fau-
varque-Causson, RID comp. 1998.463; J. Huet, P.A. 10 nov. 1995, 6; F. de LY, « Choice of
law clauses, Unidroit principles of international commercial contacts and art. 3 Rome
convention », Mélanges Mercadal, 133. Les Principes d’Unidroit, établis en 1994, ont été,
partiellement, amendés et complétés en 2004, v. M.J. Bonell, «The new édition of the
Principles of international commercial contacts adopted by the International Institute for
the unification of private law », Rev. dr. uniforme 2004/1, 5 ; du même auteur, An interna¬
tional restatement ofcontract law, The Unidroit Principles of international commercial contracts,
3e éd., 2005 ; égal. MM. Béguin et autres, op. cit., n° 942 s.
Sur l’accueil des Principes d’Unidroit, v. P. Deumier, Les Principes Unidroit ont dix ans :
bilan en demi teinte, RDC 2004, 774.
- sur les Principes du droit européen des contrats : v. le texte et les commentaires, in Principes
du droit européen du contrat, version préparée par G. Rouhette, Société de législation comparée
2003 ; égal. D. Mazeaud. A propos de droit virtuel des contrats : réflexions sur les principes
d’Unidroit et de la Commission Lando, Mélanges M. Cabrillac, 1999.205 ; égal. C. Castronovo,
Prinicipi di diritto europeo dei contratti, éd. Giuffré, Milan, 2001 ; G. Levebvre et E. Sibi Daran-
koum, RD aff. int. 1999, n° 1, 47 ; R. Schulze, Des principes de la conclusion du contrat dans
l’acquis communautaire, RID comp. 2005, 877; J. Raynard, RTD civ. 1998, 1006; S. Whit-
taker, On the development of European Standard Contact Terms, ERCL 2006, 51 ; MM. Béguin
et autres, op. cit., n° 944. v. encore : Regards croisés sur les principes du droit européen et sur le
droit français, sous la direction de C. Priéto, PU Aix-Marseille 2003.
Plus général. V.P.Mayer, « Actualité du contrat international », Petites affiches, 5 mai 2000, 55.
1. Les Principes d’Unidroit n’ont pas, en principe, un caractère impératif (art. 1.5).
Néanmoins, certaines dispositions sont essentielles : leur importance est telle que les par¬
ties ne sauraient y déroger : v. le principe de bonne foi, les règles sur les vices du consente¬
ment ou encore sur l’abus dans la détermination du prix.
2. V. D. Lamèthe, « L’uniformisation des pratiques contractuelles et la mondialisa¬
tion », Mélanges Talion, 1999, 303. Dans un contrat de prestation de services relativement
234 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
407 Plan O On rendra compte dans les développements qui suivent des principa¬
les clauses qui constituent la trame des contrats internationaux en suivant très
simplement la chronologie contractuelle habituelle de la conclusion, du
contenu et de l'exécution du contrat.
§ 1. Conclusion du contrat
408 Conditions O Tout contrat, quel qu’il soit, ne peut être valablement
conclu que s’il respecte les conditions fondamentales que l’article 1108
du Code civil a très exactement rassemblées. Sans doute ce texte n’est-
il pas applicable si le contrat est soumis à un droit étranger au droit
français, mais ce n’est pas pour autant que ce contrat échappe aux
exigences de validité. Celles-ci sont, une fois encore, parfaitement
contenues dans le Code civil. Avec les nuances que l’on s’efforcera
d’apporter, il s’agit du consentement que les parties doivent exprimer,
banal, il n’est pas rare de trouver près de 70 clauses, rédigées généralement en anglais :
Foreword; Définitions; Reliance; Scope of agreement; Language; Subcontracting; Disputes;
Applicable Law; Notices; Miscellaneous; Effective date of Contract; Signatures; v. MM. Fon¬
taine et F. de Ly, Droit des contrats internationaux, Feduci, 2e éd., 2003 ; 55e séminaire de la
Commission Droit et Vie des affaires : les grandes clauses des contrats internationaux,
Feduci 2005.
Il faut également compter sur la pratique des contrats types établis par les fédérations pro¬
fessionnelles et auxquels leurs adhérents recourent systématiquement, ce qui facilite la
rédaction, tout en ayant recours à des conditions particulières ; conditions FIDIC ; Guide
CCI; Syntec; GAFTÂ... : v. Ph. Le Tourneau, L'ingénierie, les transferts de technologie et de
maîtrise industrielle, Litec 2003 et les nombreux exemples ; égal, dans le monde du shipping,
les chartes types : Synacomex, Gencon, Intertanko... Ces contrats types ont une valeur
purement contractuelle.
Plus généralement, v. M.-L. Niboyet et M. Santa-Croce, Contrats internationaux, théorie
générale, éd. J.-Cl. 1998; B. Bourdelois, « L’élaboration du contrat international », in Pra¬
tique des contrats internationaux, Dictionnaire Joly; D. Blanco, Négocier et rédiger un contrat
international, 3e éd., 2002; Adde : Colloque CREDIMI, La mondialisation du droit, Dijon,
sept. 1999, Transnational rules in international commercial arbitration. E. Gaillard (ed.), ICC
Publications 1993.
1. V. P. Courbe, « Ordre public et lois de police en droit des contrats internationaux »,
Mélanges Mercadal, 2002, 99. ; v. égal, sentence Thalès, RTD com. 2005, 263, obs. Loquin, et
infra, n° 428.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 235
1. Rappr. CA Paris 14 déc. 1993, Rev. crit. DIP 1995, 300, obs. H. Muir Watt.
2. V. J. Schmidt, « La négociation du contrat international », DPCI 1983, p. 239;
M. Fontaine, « Les lettres d’intention dans la négociation des contrats internationaux »,
DPCI 1977, 73.
3. V. F. Labarthe, Le document contractuel, LGDJ 1998, préf. J. Ghestin; O. Audic, Les
fonctions du document, Paris-I, 2003, préf. Delebecque.
4. V. C. Witz, Droit privé allemand, t.l, Litec, n° 168; M. Pédamon, Droit allemand des
contrats, Economica, 2e éd., n° 38.
5. V. Civ. lre, 16 févr. 1999, JCP 1999, II, 10162, note Fillion-Dufouleur.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 237
413 Clauses types O Les parties recourent souvent à des clauses types, à
des « dispositions établies à l’avance par l’une d’elles pour un usage
général et répété et effectivement utilisé sans négociation avec l’autre »
(Principes d’Unidroit, art. 2.1.19). Ces clauses produisent les effets
habituels de toute clause contractuelle ; elles sont cependant sans effet
(v. Principes d’Unidroit, art. 2.1.20) lorsqu’elles sont d’une nature
telle que l’autre partie ne pouvait raisonnablement s’attendre à les voir
figurer au contrat, à moins qu’elle n’y consente expressément.
Lorsque les parties utilisent des clauses types sans parvenir à un
accord sur celles-ci, le contrat est néanmoins conclu sur la base des
clauses convenues et des clauses types qui, pour l’essentiel, sont com¬
munes aux parties, à moins que l’une d’entre elles ne signifie à l’autre,
soit à l’avance, soit ultérieurement et sans retard indu, qu’elle n’entend
pas être liée par un tel contrat (art. 2.1.22).
1. V. déjà Com. 20 mars 1972, JCP 1973. II. 17543, note J. Schmidt.
2. V. Com. 26 nov. 2003, Bull. civ. IV, n° 186, D. 2004, 869, note A Dupré-Dallemagne,
RTD civ. 2004, 80, obs. J. Mestre, Rev. sociétés 2004, 325, obs. N. Mathey; égal. Civ. 3e,
28 juin 2006, JCP 2006, II, 10130, note O. Deshayes.
3. Selon la doctrine allemande (Ihering), les dommages-intérêts négatifs tendraient à
replacer la victime dans la situation qui aurait été la sienne, si elle n’avait pas engagé
les pourparlers. Les dommages-intérêts positifs chercheraient à compenser le manque à
gagner du contrat espéré. V. plus généralement, C. Witz, Droit privé allemand, t. 1, Litec,
n° 355 et s.
4. V. O. Deshayes, « Le dommage pré-contractuel », RTD com. 2004.187.
PROBLEMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 239
1. V. J.-P. Désideri, La préférence contractuelle, PUAM 1998, préf. J. Mestre. Il n’est pas
dans la nature du pacte de préférence de pré-déterminer le prix du contrat envisagé et qui
ne sera conclu ultérieurement, que s’il advient que le promettant en décide ainsi : Civ. lre,
6 juin 2001, Bull. civ. I, n° 166; de même, quoiqu’on en dise, aucun terme n’a à être stipulé,
car tant que le promettant n’a pas fait connaître sa décision de vendre, le bénéficiaire du
pacte est dans l’impossibilité d’exercer ses droits et, en conséquence, la prescription ne
court pas contre lui.
2. Ch. mixte 26 mai 2006, D. 2006, 1861 note P.Y. Gautier, note crit. D. Mainguy, JCP
G 2006, II, 10142, note L. Leveneur, JCP E 2006, II, 2378, et la note.
3. Par ex. : au cas où le concessionnaire refuserait de distribuer l’un des produits du
catalogue, le concédant pourra confier la commercialisation de ce produit à un autre distri¬
buteur.
4. On sait cependant que la jurisprudence française admet, en substance, que le pro¬
mettant puisse se « rétracter » : Civ. 3e, 15 déc. 1993, Bull. civ. III, n° 174, D. 1994, 507,
note Bénac-Schmidt, dont la solution est considérée comme générale. Il reste que cette
rétractation est, en soi, fautive et doit s’accompagner d’une indemnisation du préjudice
subi par le bénéficiaire, qu’il est possible de fixer par avance. Les clauses d’exécution forcée
que l’on rencontre parfois dans la pratique sont d’une efficacité relative, malgré leur effet
psychologique.
5. V. Req. 15 déc. 1920, S. 1922, 1, 17; Civ. lre, 16 févr. 1977, Rev. sociétés 1977, 681,
note Guyon.
242 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
322, observant que la lésion — qui n’est pas en soi un vice du consentement — demeure
dans la catégorie des règles d’ordre contractuel, l’indice de rattachement le plus sûr restant
toutefois la situation du bien.
1. V. l’exemple donné dans le commentaire des Principes d’Unidroit, p. 111 : A proprié¬
taire d’une usine automobile, vend une chaîne d’assemblage démodée à B, agence gouver¬
nementale d’un pays désireux de constituer sa propre industrie automobile. Bien que A ne
fasse aucune déclaration quant à l’efficacité de la chaîne d’assemblage, il parvient à fixer un
prix qui est manifestement excessif. B, après avoir découvert qu’il a payé un montant qui
correspond à une chaîne d’assemblage bien plus moderne, peut annuler le contrat.
244 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. Civ. 25 juin 1957, Rev. crit. DIP 1957, 680, note Batiffol.
2. Req. 16 janv. 1861, DP 1861, 193, Grands arrêts de la jurisprudence de droit internatio¬
nal prive', n° 5 ; v. égal. M.N. Jobard-Bachellier, L’apparence en droit international prive'. Essai
sur le rôle des représentations individuelles en droit international prive', Economica, 1984.
3. B. Audit, op. cit., n° 604.
4. B. Audit, op. cit., n° 597.
5. B. Audit, ibid.
6. Com. 8 nov. 1988, Rev. crit. DIP 1989, 371.
PROBLEMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 245
C. Objet du contrat
421 Objet du contrat. Objet de l'obligation. Objet de la presta¬
tion O Le droit français développe longuement le thème de l’objet du
contrat4. Le droit international n’y porte pas la même attention. L’ob-
1. P. Mayer, « Le contrat illicite », Rev. arb. 1984, 205 ; égal, du même auteur, Le prin¬
cipe de bonne foi devant les arbitres du commerce international, Mélanges Lalive, 1993,
543 ; H. van Houtte, « The impact of trade prohibitions on transnational contracts », RD
aff. int. n° 2, 1988, 141 ; E. Loquin, « Les manifestations de l’illicite », in L'illicite dans le
conmmerce international, Litec 1996, 276 ; H. de Fontmichel, L'arbitre, le juge et les pratiques
illicites du commerce international, éd. Paris 2, 2004.
2. Les auteurs se demandent s’il serait concevable de ne pas tenir compte de ces dis¬
positions lorsque les parties ont choisi expressément la loi en cause : leur application
serait indifférente en l’espèce à l’État qui les édicte et les parties ne les auraient pas eu en
vue, v. B. Audit, op. cit., n° 828.
3. V. CA Paris 30 sept. 1993, Rev. crit. DIP 1994, 349, note Heuzé, RTD civ. 1994, 96,
obs. J. Mestre; égal, sur le terrain de la cause illicite, CA Paris 29 janv. 1991, Rev. crit.
DIP 1991, 731, note V. Heuzé, RTD civ. 1991, 385, obs. J. Mestre.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 247
422 Prix O L’objet de la prestation, c’est également son prix. Les clauses de
prix sont fréquentes dans les contrats internationaux. Les formules
sont extrêmement diversifiées et sont généralement acceptées. Le droit
français est aujourd’hui très accueillant puisqu’il admet que le prix
peut être déterminé unilatéralement, sous réserve de textes contraires
et sous réserve de l’abus. Ce qui est du reste la solution (impérative)
retenue par l’article 5.1.7, al. 2, des Principes d’Unidroit : « lorsque le
prix doit être fixé par une partie s’avère manifestement déraisonnable,
il lui est substitué un prix raisonnable, nonobstant toute stipulation
contraire ».
Parmi les clauses de prix, on retiendra la clause de l’offre concur¬
rente : elle permet à une partie, généralement un acheteur, de faire
valoir auprès de son cocontractant, le vendeur, l’offre plus favorable
d’un tiers sur l’objet du contrat en cours. Si le vendeur accepte de s’ali¬
gner sur le tarif du concurrent, le contrat continue aux nouvelles
conditions. À défaut, le contrat est suspendu ou résilié. Ce type de
clause pose des problèmes de preuve et surtout de validité, dans la
mesure où la concurrence n’est pas effective1. La clause du client le
plus favorisé est très proche : le bénéficiaire est en droit de réclamer
l’alignement de son contrat sur les conditions plus favorables que le
cocontractant aurait octroyées à un tiers.
Enfin, si rien n’est prévu, c’est-à-dire si le contrat ne fixe pas le prix
à payer ou encore ne prévoit aucun moyen de le déterminer, on peut
présumer que les parties ont implicitement fait référence au prix habi¬
tuellement pratiqué lors de la conclusion du contrat, dans la branche
commerciale considérée, pour les mêmes prestations effectuées dans
des circonstances comparables. S’il n’y a pas de comparaison possible,
c’est au prix raisonnable (fixé par le juge ou l’arbitre) qu’il faudrait se
référer. Du moins telles sont les prévisions des Principes d’Unidroit
(art. 5.1.7, al. 1 ; comp. infra, en matière de vente, n° 545).
D. Cause du contrat
423 Condition occultée O La théorie de la cause est essentielle dans un
système de droit civil2. Dans les systèmes de common law, c’est la consi¬
dération qui est présentée comme une condition préalable de la validité
et de l’exécution d’un contrat ainsi que pour sa modification ou sa
révocation par les parties. La cause et la considération se rejoignent,
sans jamais coïncider, et se séparent, sans pour autant divorcer. Devant
les difficultés de trouver un dénominateur commun3, les rédacteurs
des Principes d’Unidroit ont préféré écarter ici toute exigence : d’où
l’article 3.2 aux termes duquel : « pour conclure, modifier un contrat
1. CA Paris 2 mai 1986, JCP 1986, II, 20622, note J. Ghestin, et sur pourvoi : Com.
14 juin 1988, D. 1989, 89, note Ph. Malaurie.
2. Pour une application récente dans un contrat de concession commerciale : Com.
8 févr. 2005, D. 2005, 639.
3. V. R. David, « Cause et considération », Mélanges Maury, t. 2.
248 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
E. Forme du contrat1
424 Locus régit actum O Un temps, les contrats internationaux étaient
purement et simplement soumis à la règle traditionnelle qui veut que
la forme obéit à la loi du lieu de passation de l’acte (locus régit actum).
La solution a été progressivement assouplie par la jurisprudence, au
point d’être purement alternative. La convention de Rome a consacré
cette évolution (art. 9.1) en soumettant la forme du contrat de manière
alternative à la loi qui la régit au fond ou à la loi du lieu où le contrat
a été conclu et ce, sans aucune hiérarchie. Si le contrat a été conclu
entre absents, il suffit qu’il satisfasse aux conditions de forme de la loi
de l’un des pays où se trouvaient l’une des parties, toujours sans aucune
hiérarchie (art. 9.2). Ces règles jouent alors même que le contrat est
conclu par un intermédiaire (art. 9.3).
La question de la qualification règle de forme/règle de fond ne va pas
toujours de soi : elle se pose assez souvent dans les contrats internatio¬
naux (v. infra, s’agissant des mentions requises en matière de cession
de fonds de commerce, n° 663).
1. Selon la loi française, la loi applicable à la forme des actes est celle du lieu de conclu¬
sion : Civ. lre, 23 janv. 2001, JCP 2001, II, 10620, obs. G. Légier
2. V. MM Mousseron, «La langue du contrat», Mélangés Cabrillac, 1999, 219;
B. Galonnier, Les difficultés linguistiques du contrat anglais, Cahiers dr. entreprise 1997/6, 1 ;
égal. B. Mauro, Gaz. Pal. 1988, 1, Doct. 214.
3. V. Ph. Malaurie, « Le droit international privé français et la diversité des langues »,
JDI 1965, 587 ; égl. Ph. d’Harcourt, JCP E 1996, n° 18. En cas de divergences linguistisques,
la préférence est donnée à l’interprétation fondée sur la version d’origine : art. 4.7 Principes
d’Unidroit.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 249
reste que cette exception n’a guère de raison d’être dans les matières
fortement internationalisées et spécialement en matière d’assurance
maritime1.
427 Preuve O Proches des exigences de forme, sont les questions de preuve4.
Le rattachement des règles de preuve est difficile à établir. Les prescrip¬
tions sont ici complexes. Elles intéressent le fond du droit, mais égale¬
ment la forme des actes ou encore l’administration de la justice. D’où
des incertitudes. Il ne faut cependant pas exagérer les problèmes, car
la plupart des pays admettent, en matière commerciale, la liberté de
la preuve. En outre, le plus souvent, la loi du fond, la lex loci contractus
et la lex fori coïncident.
§ 2. Contenu du contrat
428 Liberté contractuelle et ordre public O La règle est ici celle de la
liberté contractuelle : les parties à un contrat international qui sont
toujours libres de contracter ou de ne pas contracter, sont « libres d’en
1. Com. 11 mars 1997, Rev. crit. DIP 1997, 537, rapport Rémery, DMF1998, Hors Série,
n° 98, obs. P. Bonassies, Defrénois 1997, 1348 et les obs.
2. Com. 14 janv. 2004, Bull. civ. IV, n° 9, DMF 2004, 723, obs. Mecarelli, RTD com.
2004, 845 et les obs., Rev. crit. DIP 2005, 55 note P. Lagarde, RJ com. 2004, 302, obs.
S. Poillot-Peruzzetto.
3. B. Audit, op. cit., n° 822. v. égal. Sur le caractère de loi de police de la loi de 1975 sur
l’usage de la langue française : Soc. 19 mars 1986, Rev. crit. DIP 1987, 554, note Y. Lequette,
D. 1987, 359, note G. Légier.
4. Sur les questions de preuve, v. Civ. lre, 5 janv. 1999, Bull. civ. I, n° 4 : « s’il appartient
au juge français d’accueillir les modes de preuve de la loi du for, c’est sans préjudice pour
les parties de se prévaloir également des règles de preuve du lieu d’accomplissement de
l’acte »; Civ. lre, 28 juin 2005, D. 2006, 2853, note N. Bouche : « la loi applicable à la force
probante des mentions d’un acte notarié dressé à l'étranger est la loi du lieu de l’acte ».
v. encore A. Huet, Les conflits de lois en matière de preuve, LGDJ 1965 ; T. Groud, La preuve en
droit international privé, PUAM 2000; E. Fongaro, La loi applicable à la preuve en droit inter¬
national privé, LGDJ 2000; G. Niyungeko, La preuve devant les juridictions internationales,
Bruylant 2005, préf. J. Salmon.
250 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. S’agissant des modalités d’exécution et des mesures à prendre par le créancier en cas
de défaut dans l’exécution » la convention de Rome (art. 10.2) invite à « avoir égard » (en
tant que donnée de fait?) à la loi du pays d’exécution. On entend par modalités, les ques¬
tions qui n’affectent pas la substance de l’obligation, v. B. Audit, op. cit., n° 830.
2. V. art. 1.9 Principes d’Unidroit : « les parties sont liées par les usages auxquels elles
ont consenti, ainsi que par les pratiques qu’elles ont établies entre elles ; elles sont liées par
tout usage qui, dans le commerce international, est largement connu et régulièrement
observé par les parties à des contrats dans la branche commerciale considérée, à moins que
son application ne soit déraisonnable ».
3. V. C. Mouly-Guillemaud, Retour sur l’article 1135 du Code civil, une nouvelle source
du contenu contractuel, LGDJ 2006, préf. D. Ferrier, avant propos MM. Atias et Cabrillac;
Ph. Jacques, Regards sur l’article 1135 du Code civil, Dalloz 2004, préf. Chabas.
4. À défaut d’indication, cette qualité — exigence aujourd’hui essentielle — doit être
« raisonnable » : art. 5.1.6 des Principes d’Unidroit; v. l’ex. donné dans le commentaire des
Principes, p. 141 : « A s’engage à construire un hôtel à proximité d’une gare ferroviaire à
trafic intense. Le contrat prévoit une “isolation sonore adéquate” dont la qualité n’est pas
déterminée. On peut cependant déterminer à partir du contrat que l’isolation sonore doit
répondre à des critères sévères rendus nécessaires du fait de la proximité de l’hôtel d’une
gare ferroviaire ».
5. V. notamment sur les obligations professionnelles des armateurs, K. Le Kouviour,
thèse Bordeaux 2005.
252 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
431 Bonne foi3 O Les contrats internationaux n’échappent pas aux impé¬
ratifs de la bonne foi qui ont pris, dans la jurisprudence contempo¬
raine, l’importance que l’on sait. Les Principes d’Unidroit le rap¬
pellent : « les parties sont tenues de se conformer aux exigences de la
bonne foi dans le commerce international » (art. 1.7) ; et ajoutent, ce
qui paraît aller de soi, que les mêmes parties « ne peuvent exclure cette
obligation ni en limiter la portée ». La bonne foi est présentée comme
l’une des directives de base de ces Principes. Si cette obligation est inhé¬
rente au contrat, rien ne s’oppose à ce que les parties prévoient des
critères de comportement plus stricts. Rien ne s’oppose non plus à ce
que cette obligation soit précisée, e.g. : « les parties s’engagent à faire
tout ce qui est en leur pouvoir pour parvenir au bon accomplissement
des engagements, sans imposer à l’autre partie des frais inutiles; elles
exécutent de bonne foi les obligations nées du contrat et s’abstiendront
à cet effet de prendre ou de faire prendre tout acte ou toute mesure, de
conclure ou de faire conclure tout accord, qui aurait pour effet de faire
ration.1 En tout cas, un tel devoir connaît des limites qui tiennent aux
« attentes raisonnables » des parties.
1. V. jurisprudence du Canal de Craponne (Civ. 6 mars 1876, DP 1876, 1, 193) qui n’a
pas été, en droit français, remise en cause, malgré certaines décisions d’espèce, v. sur ce
point, Civ. lre, 16 mars 2004, JCP E 2004, 737, note O. Renard-Payen. V. plus générale¬
ment, R. David, « L’imprévision dans les droits européens », Mélanges Jauffret, 1974, 211 ;
égal. Ph. Stoffel-Munck, Regards sur la théorie de l’imprévisiôn, PU Aix-Marseille, 1994.
2. V. Oppetit, « L’adaptation des contrats internationaux aux clauses changements de
circonstances : la clause de hardship », JDI 1974.794; J.-L. Delvolvé, L’imprévision dans les
contrats internationaux, Travaux Comité fr. DIP 1989-1990, p. 147 ; égal, diverses études in
DPCI 1976, p. 7 s.; Ullmann, « Droit et pratique des clauses de hardship dans le système
juridique américain », RD aff. int. n° 7,1988.889 ; Ph. Fouchard, « L’adaptation des contrats
à la conjoncture économique », Rev. arb. 1979.81 ; D. Mazeaud, « La révision du contrat »,
Petites affiches 30 juin 2005, 4 ; B. Fauvarque-Cosson, « Le changement de circonstances »,
RID comp. 2004, 67; M.A. Prado, Le Hardship dans le droit du commerce international, Bruy¬
lant 2004.
3. V. Civ. lre, 30 juin 2004, Bull. civ. I, n° 192 : « ...professionnelle rompue à la pratique
des marchés internationaux, il lui appartenait de prévoir des mécanismes contractuels de
garantie ou de révision ». D’autres clauses de révision, d’adaptation du contrat au change¬
ment des circonstances, de « sauvegarde », peuvent être stipulées, v. R. Fabre, RTD civ.
1983, 1; rappr. CA Paris 28 sept. 1976, JCP 1978, II, 18810; égal. Civ. lrt, 16 mars 1999,
Bull. civ. I, n° 94 : la convention instituant un mécanisme de stabilité des cours (du cacao)
et soumise au droit anglais « ne heurte pas l’ordre public international ».
4. V. l’exemple — pertinent — donné dans le commentaire des Principes, p. 189 : « en
janvier 1990, A, commissionnaire de transport, a conclu un contrat de transport maritime
de deux ans avec B, transporteur. En vertu du contrat, B est tenu de transporter certaines
marchandises de Hambourg à New York à un prix fixe, sur une base mensuelle, pendant
deux ans. Invoquant une augmentation importante du prix du mazout à la suite de la crise
du Golfe de 1990, B demande une augmentation de 5 % du taux pour le mois d’août 1990.
B n’a pas droit à une telle augmentation parce qu’il assume le risque que l’exécution de la
prestation devienne plus onéreuse ».
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 257
1. « If either party should suffer a gross inequity as a resuit of the formula failing to
fairly reflect cost changes, such inequities will be resolved by mutual agreement between the
parties ».
2. C’est à la jurisprudence anglaise que l’on doit le concept de frustration : v. « Corona-
tion cases » remettant en cause tous les contrats conclu pour célébrer le couronnement
d’Edouard V, événement reporté au dernier moment compte tenu d’un empêchement du
futur Roi; égal, l’affrètement au voyage entre Londres et un port indien en passant par Suez,
dérouté par le Cap, à la suite des événements d’Égypte de 1956 : v. R. David et D. Pugsley,
Les contrats en droit anglais, 2e éd., LGDJ, n° 422 et s. ; H. Beale, « Partial and temporary
impossibility in English and French law », Mélangés Talion, 19.
3. V. les affaires célèbres : Pelissier de Besset, Civ. 17 mai 1927, DP 1928, 1, 25, concl.
Matter, note Capitant; Messageries maritimes, Civ. 21 juin 1950, D. 1951, 749, note Hamel,
Rev. crit. DIP 1950, 609, note Batiffol.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 259
§ 3. Exécution du contrat
438 Loi compétente O Le contrat est, bien entendu, appelé à s’exécuter,
ce qui, le plus souvent, ne soulève pas de difficulté particulière. L’exé¬
cution relève de la compétence de la loi du contrat; la loi du contrat
régit la sanction de la force obligatoire, fixant notamment les consé¬
quences de l’exécution des obligations contractuelles4. Étudier l’exé-
risque, le plus souvent, d’être privé de tout droit, les droits étrangers n’admettant que très
rarement l’action directe « à la française ».
1. V. en ce sens, MM. Mayer et Heuzé, op. cit n° 752-1 ; égal. Civ. lrc, 10 oct. 1995, Rev.
crit. DIP 1996.332, note V. Heuzé, JCP 1996.11.22742, note L.-C. Henry; 6 févr. 1996, Rev.
crit. DIP 1996.460, 2e esp. Rappr. Civ. 3e, 16 nov. 2005, D. 2006, 971, note R. Cabrillac,
faisant observer qu’une clause de non garantie opposable par un vendeur intermédiaire à
son propre acquéreur ne peut faire obstacle à l’action directe de l’acquéreur final contre le
vendeur originaire, dès lors qu’aucune clause de non garantie n’a été stipulée lors de la
première vente; autrement dit, seule la clause du contrat initial est opposable.
Il n’est pas sûr cependant que la jurisprudence accepte encore de qualifier l’action du tiers
intéressé de contractuelle : on peut le craindre car cette qualification n’est plus retenue en
matière de conflit de juridictions, v. CJCE 17 juin 1992, Rev. crit. DIP 1992.726, note
H. Gaudemet-Talion, JCP 1992.11.21927, note C. Larroumet; Civ. lre, 6 juill. 1999, Rev. crit
DIP 2000.67, note Pataut; v. sur l’action du destinataire contre le transporteur de fait, CJCE
27 oct. 1998, DMF 1999.9, et les obs., Rev. crit. DIP 1999.323, note H. Gaudemet-Talion.
2. Pour un exemple : Civ. lre, 4 avr. 2006, JCP 2006, IV, 2012 : « ayant souverainement
retenu que les deux conventions constituaient un ensemble contractuel indivisible, la cour
d’appel en a déduit à bon droit que la résiliation du contrat d’exploitation (de la chaufferie
d’un hôpital) avait entraîné la caducité du contrat d’approvisionnement, libérant la société
des stipulations qu’il contenait ».
3. V. J.B. Seube, L’indivisibilité' et les actes juridiques, Litec 2000. La jurisprudence n’est
pas toujours favorable à ces clauses : v. obs. MM. Mestre et Fages, obs. RTD civ. 2006, 308
4. MM Loussouarn et Bredin, op. cit., n° 532; plus général. V. V. Hotte, L’exécution des
contrats internationaux, Thèse IUHEI, Genève 2004; S. Chaillé de Néré, op. cit.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 261
A. Exécution
439 Paiement O Les questions de paiement, c’est-à-dire d’exécution de
l’obligation, sont de la compétence de la loi de l’obligation. La règle a
une portée très générale. Ainsi, la prescription extinctive d’une obliga¬
tion est-elle soumise non à la lex fori, mais à la loi qui régit l’obliga¬
tion L Toutefois, certains modes d’extinction doivent être soumis à une
loi propre : cela vaut pour la remise de dette qui est un acte juridique
distinct de l’obligation qu’elle éteint. De même, la novation est-elle un
acte indépendant et donc dépendant de la loi choisie par les parties qui
est normalement la loi de l’obligation à éteindre1 2.
Les Principes d’Unidroit s’étendent très largement sur les problèmes
concrets d’exécution et donnent, notamment, les solutions suivantes :
- le moment de l’exécution est fixé par le contrat, étant précisé que
si les parties ont simplement envisagé une période de temps pour l’exé¬
cution, tout moment au cours de cette période sera acceptable; dans
tous les autres cas, l’exécution de la prestation est due dans un délai
raisonnable (art. 6.1.1);
- l’exécution doit se faire en une seule fois, à moins que les parties
se soient accordées sur une exécution échelonnée;
- le créancier peut refuser l’exécution partielle, à condition d’avoir
un intérêt légitime à le faire (art. 6.1.3) ;
- les parties sont tenues, en principe, d’exécuter leurs prestations
simultanément (art. 6.1.4);
- le créancier peut, en principe, refuser l'exécution avant l’échéance
(art. 6.1.5) ;
- le lieu d’exécution est fixé par le contrat et, à défaut, pour une
obligation de somme d’argent, au lieu de l’établissement du créancier,
et pour toute autre obligation, au lieu de l’établissement du débiteur
(art. 6.1.6) ;
- le débiteur tenu de plusieurs dettes de sommes d’argent à l’égard
d’un même créancier peut indiquer, au moment du paiement, sur
quelle dette il entend l’imputer (art. 6.1.12).
Ces mêmes Principes contiennent aujourd’hui d’intéressantes et
utiles dispositions sur la compensation (Chapitre 8), sur la cession
de créances et de dettes (Chapitre 9) et sur la prescription (Cha¬
pitre 10).
1. Civ. lre, 8 févr. 1983, Bull. civ. I, n° 51 ; égal. Civ. lre, 21 avr. 1971, Rev. crit. DIP 1972,
74, note P. Lagarde.
2. MM. Loussouarn et Bredin, op. cit., n° 538.
262 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lrc, 13 oct. 1998, D. 1999, 197, note Ch. Jamin, Somm. 115 et les obs.; 20 févr.
2001, Bu II. civ. I, n° 40.
2. V-M Vanwijck-Alexandre, « Les clauses mettant fin au contrat et les clauses survivant
au contrat », RD aff. int. 2002, 407
3. V. Principes d’Unidroit, art. 7.3.5, al. 3 : la résolution n’a pas d’effet sur les clauses
du contrat relatives au règlement des différends ni sur toute autre cause destinée à produire
effet même en cas de résolution »; v. égal. Hugon, Le sort de la clause pénale en cas d’ex¬
tinction du contrat, JCP 1994,1, 3790.
4. V. CA Angers 27 janv. 2004 et CA Paris 14 oct. 2005, RTD civ. 2006, 112, obs. ). Mestre
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 263
B. Inexécution
442 Sanctions O Les problèmes d’exécution se réduisent, le plus souvent,
à des problèmes d’inexécution, étant entendu qu’on entend par là tout
manquement par une partie à l’une quelconque de ses obligations
résultant du contrat, y compris l’exécution défectueuse ou tardive
(Principes d’Unidroit, art. 7.1.1). La loi du contrat régit en principe ces
questions, mais la convention de Rome précise (art. 10.1 c) que la loi
du contrat est applicable aux conséquences de l’inexécution des obliga¬
tions, y compris l’évaluation du dommage — dans la mesure où des
« règles de droit » la gouvernent4 —, « dans les limites des pouvoirs
attribués au tribunal par sa loi de procédure ». Cette précision est
importante, car certaines règles sur la réparation peuvent être considé¬
rées comme procédurales : ainsi en est-il en droit français de l’appré¬
ciation du montant de la réparation, peut-être aussi de la mitigation (à
la supposer admise) ; il reste que les principes — réparation intégrale,
distinction des préjudices, perte et gain manqué — relèvent de la loi du
contrat.
Contrairement à ce que l’on a pu écrire (v. rapport Doing Business de
la Banque mondiale), le droit français n’est pas, sur ce thème, en retard.
De nombreuses dispositions favorisent Yenforcing contracts. En cas de
manquement à ses obligations, le débiteur défaillant s’expose à toutes
les sanctions de l’inexécution d’un contrat (relevant de la loi du contrat),
1. Les Principes d’Unidroit sont — à tort — plus exigeants : « la cession d’un contrat
requiert le consentement de l’autre partie (le cédé) » (art. 9.3.3), en admettant néanmoins
que ce « consentement » puisse être anticipé (art. 9.3.4).
2. V. L. Aynès, Les clauses de circulation des contrats, in Les principales clauses des
contrats entre professionnels, PUAM 1990, 131 ; égal, de Ly, « Les clauses de cession dans les
contrats commerciaux internationaux », RD aff. int. 1996, 7, 799.
3. V. Com. 13 déc. 2005, RTD civ. 2006, 310, obs. MM. Mestre et Fages.
4. V. par ex. Civ. lre, 11 mars 1997, Bull. civ. I, n° 84. Entrent dans la catégorie des
« règles de droit » gouvernant l’évaluation des dommages, les règles plafonnant les dom¬
mages intérêts ou instituant des réparations forfaitaires; mais l’évaluation concrète des
dommages intérêts relève de la lexfori, car cette question relève, en principe, de l’apprécia¬
tion souveraine des juges du fond, v. sur ces questions particulièrement intéressantes et
importantes, O. Boskovic, « Les dommages-intérêts en droit international privé », D. 2006,
1583.
264 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. l’ex. donné par les commentaires des Principes, p. 233 : A promet de livrer du
pétrole à B par M/S Paul à Montréal le 3 février. Le 25 janvier, M/S Paul est encore à
2000 km de Montréal. À la vitesse à laquelle il va, il n’arrivera pas à Montréal le 3 février,
mais le 8 au plus tôt. Comme le temps est un élément essentiel du contrat, il faut s’attendre
à un retard important et B peut résoudre le contrat avant le 3 février.
266 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
448 Clauses pénales O Quant aux clauses pénales, elles sont pareille¬
ment soumises à la loi de l’obligation3. Ces clauses ont pour objet de
prévoir forfaitairement et par avance le montant des dommages-inté-
1. v. CA Paris 5e ch. A 18 janv. 2006, Mja c. Xts Telecom : les clauses écartant toute
responsabilité du fournisseur en cas de défaillance, de panne, d’interruption... ne sont pas
applicables à une cessation définitive des prestations.
2. V. Ph. Delebecque, « Les renonciations à recours, Mélangés Simler », Dalloz-Litec
2006, 563.
3. CA Paris, 22 déc, 1983, Rev, crit. DIP 1984.484, note J. Mestre, réservant l’exception
d’ordre public à l’encontre d’une loi étrangère qui, contrairement à la loi française, inter¬
dirait toute révision judiciaire; B. Mercadal, « L’article 1152, al. 2 du Code civil est-il d’or¬
dre public international français? » DPCI 1979, 285; M. Fontaine, DPCI 1982.401.
Il faut ajouter que l’article 1152, al. 2, ne devrait pas s’appliquer aux clauses limitatives de
réparation : Malinvaud, Mélangés Terré, 1999, 689.
On rapprochera des clauses pénales, les clauses dites « take or pay » obligeant le débiteur à
s’exécuter (généralement à prendre livraison) ou à, immédiatement, s’acquitter d'une
indemnité, v. F. Dessault, « L’obligation d’achat dans certains contrats internationaux de
fourniture », RD aff. int. 1998, 3. Bien entendu, si la clause institue une obligation alter¬
native, on ne saurait parler de clause pénale.
270 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. D. Mazeaud, La notion de clause penale, LGDJ 1992, préf. Chabas; égal. A. Jault, La
notion de peine privée, LGDJ 2005, préf. Chabas. La clause pénale n’est pas le prix de la fuite :
elle doit sanctionner l’inexécution d’une obligation contractuelle. L’indemnité de dédit,
l’indemnité d’immobilisation ou la contrepartie pécuniaire d’une obligation de non concur¬
rence n’est pas une clause pénale ; en revanche, l’indemnité stipulée en cas de manquement
à l’obligation de non concurrence est une clause pénale. L’astreinte conventionnelle, i.e. la
stipulation d’indemnités de retard progressives et comminatoires est une forme de clause
pénale. Par ailleurs, la clause pénale se distingue de la clause limitative de réparation : la
première fixe un forfait, la seconde un plafond de réparation.
De même, la clause qui ne représenterait que le prix d’une faculté de résiliation unilatérale,
en dehors de toute notion d’inexécution, ne mériterait pas la qualification de clause pénale :
Civ. lre, 6 mars 2001, Bull. civ. I, n° 56, D. 2001, Somm. 3243, à propos d’une clause de
résiliation unilatérale d’un mandat.
La définition des Principes d’Unidroit est à la fois très large : « lorsque le contrat porte que
celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à raison de l’inexécution... »
art. 7.4.13, al. 1, et très restrictive, car rien ne s’oppose à ce que la clause pénale se traduise
par autre chose qu’une somme d’argent : la sanction conventionnelle peut être une sanc¬
tion en nature.
2. V. Niai, « Les clauses pénales dans les contrats de vente internationaux », Mélanges
Julliot de la Morandière, 1964, 417; U. Draetta et R.-B. Blake, « Les clauses pénales et les
pénalités dans la pratique du commerce international », RD aff. int. 1993, 261 ; égal. Cre-
mades, « Les dommages intérêts conventionnels, in Les clauses pénales et les dommages-
intérêts à caractère répressif dans les contrats internationaux », RD aff. int. 2002, 3-4,
329.
3. La compagnie de transport engagée pour une durée déterminée s’expose à payer une
indemnité en cas de retard dans la livraison, le chargeur étant, de son côté, tenu de payer
une indemnité s’il ne remet pas le volume attendu. Le « dead freigth » — somme due si la
cale n’est pas pleinement remplie — est néanmoins considérée comme faisant partie du
prix.
4. Une clause sera qualifiée de « penalty clause » si elle est d’un montant considérable
par rapport au dommage le plus considérable pouvant résulter d’une inexécution donnée;
elle constitue une simple « liquidated damage clause » si les circonstances étaient telles
qu’une estimation précise et exacte du dommage était impossible, mais qu’elle a été vrai¬
ment tentée, v. Rouhette et autres, Principes du droit européen du contrat, p. 421.
V. plus généralement, l’étude de la CNUDC1 sur les liquidated damages and penalty clauses,
cité par M. Fontaine, Droit des contrats internationaux, p. 152, ad notam. recensant les dif¬
férentes obligations susceptibles d’être sanctionnées par une clause pénale.
PROBLEMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 271
CONTRATS DU COMMERCE
SECTION 2.
ÉLECTRONIQUE
Le recours à des moyens modernes de communication, tels que le
courrier électronique ou l’échange de données informatisées, pour la
conduite des opérations commerciales internationales s’est très large¬
ment répandu depuis une dizaine d’années. De nombreuses règles
régissent aujourd’hui les contrats conclus « en ligne » dans le but fon¬
damental de favoriser le développement du commerce électronique,
l’enjeu économique pour les États étant considérable.
Entrent également dans le champ du commerce électronique les services tels que ceux
consistant à fournir des informations en ligne, des communications commerciales et des
outils de recherche, d’accès et de récupération de données, d’accès à un réseau de commu¬
nication ou d’hébergement d’informations, y compris lorsqu’ils ne sont pas rémunérés par
ceux qui les reçoivent. »
1. Sur cette distinction, v. Th. Revet, « Présentation générale du contrat électronique »,
in Le contrat électronique, Trav. de l’Assoc. Henri Capitant, Ed. Panthéon-Assas, 2002.
2. Ce qui exclut de l’étude les différents contrats spéciaux liés au fonctionnement de
l’Internet (contrats de fourniture d’accès à Internet, contrats de référencement dans les
moteurs de recherche, contrats d’utilisation d’un logiciel, etc.) ainsi que les questions rela¬
tives à l’attribution et à la protection des noms de domaine.
3. L’approche englobe donc à la fois les contrats conclus en ligne mais exécutés hors
ligne et les contrats conclus en ligne et exécutés en ligne.
4. Sur ces questions, v. notamment Th. Verbiest, Le nouveau droit du commerce électro¬
nique, Larcier, 2005, p. 23-107 avec de nombreuses références; v. aussi, X. Linant de Belle-
fonds, Le droit du commerce électronique, PUF, Que sais-je ? 1923, p. 29 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 273
452 Place respective des règles de conflit de lois et des règles maté¬
rielles O Progressivement, depuis une dizaine d’années, les contrats du
commerce électronique ont été dotés d’un ensemble de règles substan¬
tielles qui leur sont spécifiques. Ainsi, il existe aujourd’hui, dans les
législations internes de nombreux États et dans certains textes interna¬
tionaux, un droit matériel régissant le consentement des parties, les
modalités de conclusion du contrat, le paiement en ligne, les respon¬
sabilités encourues, etc. Mais ces règles matérielles n’ont pas pour
autant éliminé la nécessité de recourir aux règles de conflit3. En effet,
si l’on prend le cas du droit français, son application suppose, si le
contrat est international, que la loi française soit applicable au contrat
en vertu des règles de conflit de lois. Et il en ira de même, par exemple,
pour les dispositions figurant dans la convention de la CNUDCI
du 23 novembre 2005 sur l’utilisation de communications électro¬
niques dans les contrats internationaux lorsque celles-ci entreront en
vigueur4.
Par conséquent, la détermination du droit applicable au contrat
du commerce électronique doit précéder l’application des règles
matérielles.
453 Plan O II convient, dès lors, d’étudier, dans un premier temps, les questions
suscitées par le conflit de lois (Sous-section 1) afin de déterminer la loi appli¬
cable aux opérations du commerce électronique, avant d’aborder, dans un
second temps, les règles matérielles régissant les contrats du commerce électro¬
nique (Sous-section 2).
1. En tout cas, il convient bien mieux que le lieu de conclusion ou le lieu d’exécution
du contrat, lesquels sont difficiles à localiser dans le commerce électronique
2. En effet, la notion de prestation caractéristique du contrat signifie que l’on s’attache
à la prestation pour laquelle le paiement est dû. Dans un contrat de prestation de service,
il s’agit de la prestation de service, dans une vente, l’obligation de transférer la propriété du
bien (toutefois, s’il s’agit d’une vente internationale d’objets mobiliers corporels, le contrat
relève de la convention de La Haye du 15 juin 1955, et non de la convention de Rome).
3. L’art. 2c) de la directive définit le «prestataire établi » dans les termes suivants :
« prestataire qui exerce d’une manière effective une activité économique au moyen d’une
installation stable pour une durée indéterminée. La présence et l’utilisation des moyens
techniques et des technologies requis pour fournir le service ne constituent pas en tant que
telles un établissement du prestataire ». Et selon l’article 14 al. 3 de la LCEN, « une per¬
sonne est regardée comme étant établie en France au sens du présent chapitre lorsqu’elle
s’y est installée d’une manière stable et durable pour exercer effectivement son activité,
quel que soit, s’agissant d’une personne morale, le lieu d’implantation de son siège social ».
Sur la notion d’établissement retenue par la CNUDCI qui est très proche de la définition
communautaire, v. infra, n° 482. Sur l’ensemble de la question, v. O. Cachard, La régulation
internationale du marché électronique, LGDJ, 2002, n° 124 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 277
d’origine, il doit pouvoir le faire aussi dans les autres États membres,
sans que ces derniers ne puissent lui imposer le respect de conditions
spécifiques posées par leur propre législation. Par conséquent, lors¬
qu’on parle ici du pays d’origine, on désigne celui dans lequel est établie
la partie qui se prévaut de ses libertés de circulation (fournisseurs de
biens et de services). Transposé au conflit de lois, ce raisonnement
conduit à dire que appliquer une autre loi que celle du pays d’origine
constitue une entrave à la libre circulation. Si cette analyse s’avérait
exacte, la directive évincerait, pour le domaine coordonné, le jeu de la
convention de Rome. Or, ce serait contraire à l’affirmation faite à
l’article 1er § 4. De plus, la directive précise expressément dans son
annexe que l’article S § 1 et 2 ne s’appliquent notamment pas à la
liberté des parties de choisir le droit applicable à leur contrat1, ce qui
semble indiquer que l’article 3 ne doit pas être compris comme ayant
une influence sur la loi applicable. Le texte paraît donc contradictoire,
ce qui ouvre la porte à toute sorte d’interprétations2.
En effet, d’autres interprétations ont été proposées. Certains esti¬
ment qu’il faut, dans un premier temps, appliquer la règle de conflit de
la convention de Rome, puis, dans un second temps, éventuellement
écarter ou adapter les règles de droit matériel, si celles-ci restreignent
la libre prestation des services relevant du domaine coordonné (excep¬
tion de reconnaissance mutuelle)3. Pour d’autres auteurs, la clause
marché intérieur ressemble davantage au mécanisme des lois de police4.
Il faudrait analyser les règles dans le domaine coordonné comme des
règles internationalement impératives. Ainsi, les règles nationales de
transposition de la directive de l’État d’origine s’appliqueraient impé¬
rativement à tout prestataire établi dans cet État. Mais cela n’affecte
1. Sur le lien logique entre le jeu de l’autonomie et l’absence d’entrave, v. H. Muir Watt,
« L’entrave à la prestation transfrontière de services : réflexions sur l’impact des libertés
économiques sur le droit international privé des États membres », Mélanges J. Béguin, Litec,
2005, p. 545 et s.
2. Pour une présentation des différentes interprétations possibles, notamment M. Fal-
lon, J. Meeusen, « Le commerce électronique, la directive 2000/31/CE et le droit interna¬
tional privé », Rev. crit. DIP 2002, p. 435 et s.
3. V. notamment M. Wilderspin et X. Lewis, « Les relations entre le droit communau¬
taire et les règles de conflit de lois des États membres », Rev. crit. DIP 2002. p. 1 et s. et
p. 289 et s. V. aussi, H. Gaudemet-Talion, « Le pluralisme en droit international privé :
richesses et faiblesses », RCADI 2005, t. 312, p. 9 et s. (spéc. p. 250 et s.). Au soutien de
cette interprétation, on peut citer le considérant 23 du préambule de la directive : « La
présente directive n’a pas pour objet d’établir des règles supplémentaires de droit interna¬
tional privé relatives aux conflits de loi ni de traiter de la compétence des tribunaux. Les
dispositions du droit applicable désigné par les règles du droit international privé ne doivent
pas restreindre la libre prestation des services de la société de l’information telle que prévue
par la présente directive. »
4. V. notamment M. Hellner, « The Country of Origin Principle in the E-commerce
Directive : A Conflict with Conflict of Laws ? », in Les conflits de lois et le système juridique
communautaire, Dalloz, 2004, p. 205 et s. Comp. l’analyse nuancée de MM. Fallon et
Meeusen combinant les deux interprétations en fonction de l’identité de l’État du for (État
de destination ou État d’origine), op. cit., spéc. p. 474 et s.
280 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
pas pour autant la faculté qu’ont les parties au contrat de choisir la loi
applicable, et ceci sur le fondement de la convention de Rome1. ^
Pour éviter toute confusion sur la portée de la clause « marché inté¬
rieur », il semble préférable de distinguer clairement entre deux ques¬
tions : d’une part, celle de la loi applicable au statut de l’opérateur du
commerce électronique, et d’autre part, celle de la loi applicable aux
contrats conclus par l’opérateur avec ses clients2.
• Conséquences de la clause sur la loi applicable à l’organisation de
l’activité de l’opérateur. Les règles d’organisation de l’activité profes¬
sionnelle définissent les conditions d’accès de l’opérateur à l’activité en
cause et organisent le statut de celui-ci. Le plus souvent, il s’agit de
règles de droit public3. Depuis la directive 2000/31, les législations
nationales des Etats membres sont harmonisées en la matière. Faute
d’être complètement identiques, elles peuvent au moins être tenues
pour équivalentes, ce qui permet d’appliquer la logique de la reconnais¬
sance mutuelle et de poser le principe du pays d’origine. Par consé¬
quent, sur ce terrain, le principe de la loi du pays d’origine joue pleine¬
ment4 : l’État sur le territoire duquel l’opérateur est établi doit le
soumettre à sa législation nationale; tous les autres États membres
devront reconnaître la situation ainsi légalement constituée et s’abste¬
nir de poser toute condition fondée sur leur propre législation, si l’opé¬
rateur désire exercer son activité sur leur territoire5.
En revanche, la situation se présente différemment pour la loi appli¬
cable aux contrats conclus par l’opérateur.
• Conséquences de la clause sur la loi applicable aux contrats conclus
entre l’opérateur et ses clients. Tout d’abord, il convient de rappeler
ici que selon l’annexe de la directive, « les paragraphes 1 et 2 de
l’article 3 ne s’appliquent pas dans les cas suivants [...] la liberté des
parties de choisir le droit applicable à leur contrat ». Cela signifie que
la clause « marché intérieur » n’affecte pas la règle de conflit de
l’article 3 de la convention de Rome, selon laquelle les parties à un
contrat électronique peuvent choisir la loi applicable, sans avoir à se
soucier de la loi du pays d’origine.
C. Lois de police
461 L’interférence éventuelle de lois de police dans le jeu des règles de
conflit est une question importante que certains considèrent être « au
cœur de la controverse sur la loi applicable » en matière de commerce
électronique1 dans la mesure où ces lois marquent la limite que posent
les États à la volonté des opérateurs et ainsi à l’autonomie du marché
électronique. Dans les opérations entre professionnels, on est confronté
principalement aux règles d’organisation des marchés, comme le droit
de la concurrence, le droit boursier ou encore les règles régissant les
§ 2. Contrats de consommation
462 Plan O La convention de Rome consacre, dans son article 5, une disposition
spécifique aux contrats conclus par les consommateurs5 dont l’application au
1. Sur l’ensemble de la question, v. O. Cachard, op. cit., n° 271 et s. et n° 289 et s., avec
de nombreuses références.
2. V. Commission européenne, « Lignes directrices sur les restrictions verticales », JOCE
n° C 291 du 13 octobre 2000, spéc. n° 51 : « Chaque distributeur doit être libre de recourir
à internet pour faire de la publicité ou pour vendre ses produits. Une restriction à l’utilisa¬
tion d’internet par les distributeurs ne serait compatible avec le règlement d’exemption par
catégorie que dans la mesure où la promotion ou les ventes via internet entraînent la réa¬
lisation de ventes actives vers les territoires exclusifs ou aux clientèles exclusives d’autres
distributeurs. En général, le recours à internet n’est pas considéré comme une forme de
vente active [...]. Indépendamment des remarques qui précèdent, le fournisseur peut impo¬
ser des normes de qualité pour l’utilisation du site internet à des fins de vente de ses pro¬
duits [...]. L’interdiction catégorique de vendre sur internet [...] n’est admissible que si elle
est objectivement justifiée. Quoi qu’il en soit le fournisseur ne peut se réserver les ventes ou
la publicité sur internet ». V. aussi, P. Thieffry, Commerce électronique : droit international et
européen, Litec, 2002, n° 221 et s. et 239; D. Ferrier, « La distribution sur internet dans le
cadre d’un réseau », D. 2004.2594; et sur un problème voisin, Conseil de la concurrence,
3 février 2006, D. 2006. 1229, obs. C. Manara.
3. Soit par l’effet d’une clause d’electio juris, soit par application de l’article 4 § 2 de la
convention de Rome, qui désigne, selon l’interprétation actuelle de la Cour de cassation
française, la loi du fournisseur. V. Civ. lre, 15 mai 2001, JDI 2001. 1121, note A. Huet,
JCP 2001. IL 10634, note J. Raynard, Rev. crit. DIP 2002. 86, note P. Lagarde, D. 2002.
1397, note B. Audit; confirmé par Civ. 1, 25 novembre 2003, Bull. civ. I, n° 237, p. 187.
V. aussi injra, n° 661.
4. O. Cachard, op. cit., n° 294 et s.
5. V. supra, n° 370 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 285
1. Un vœux que le Conseil d’État a exprimé dès 1998 : Conseil d’État, Section du rap¬
port et des études, Internet et les réseaux numériques, La Documentation française, 1998,
p. 42 et s.
2. V. C. Castets-Renard, « Proposition de règlement sur la loi applicable aux obligations
contractuelles du 15 décembre 2005 (Rome I) : Conséquences pratiques sur les contrats du
commerce électronique et la propriété intellectuelle », D. 2006. 1522.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 287
tifs” : ainsi un site invitant à l’envoi d’une commande par fax vise à
conclure des contrats à distance. En revanche, ne vise pas la conclusion
d’un contrat à distance le site qui, tout en s’adressant aux consomma¬
teurs du monde entier dans l’intention de fournir des informations sur
un produit, les renvoie ensuite à un distributeur ou agent local pour la
conclusion du contrat ».
1. Les contrats électroniques font partie de la catégorie générale des contrats à distance
et le régime institué par les deux directives leur est donc applicable, si aucun texte spécifique
ne comporte des indications particulières pour eux. L’objet des deux directives consiste
principalement à imposer au professionnel un certain nombre d’obligations d’information,
à instituer au profit du consommateur un droit de rétractation et à définir les droits du
consommateur en cas d’inexécution du contrat par le professionnel. Sur ces règles maté¬
rielles, v. infra, n° 505 et s. La France a transposé ces directives dans le Code de la consom¬
mation, aux articles L. 121-16 et s.
2. Sur la qualification exacte de ces règles d’applicabilité internationale, v. E. Pataut,
op. cit., spéc. p. 138 et 139 qui montre de façon convaincante que « bien plus que d’une
impérativité internationale, il s’agirait en réalité d’une impérativité interne, où simplement
le terme « interne » serait à étendre à l’ensemble de l’ordre juridique communautaire ».
3. Le législateur français a transposé cette règle dans le nouvel article L. 121-20-15 du
Code de la consommation qui dispose : « Lorsque les parties ont choisi la loi d’un État non
membre de la Communauté européenne pour régir le contrat, le juge devant lequel est
invoquée cette loi est tenu d’en écarter l’application au profit des dispositions plus protec-
290 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. Le choix de la technique
1. Sur ces spécificités, notamment, Th. Schultz, Réguler le commerce électronique par la
résolution des litiges en ligne. Une approche critique, Bruylant, 2005, p. 30 et s. V. aussi,
U. Draetta, cours précité, spéc. p. 42 et s.; V. Gautrais, op. cit., p. 27 et s.
2. Sur cette convention, v. infra, n° 482.
3. En effet, on verra que la CNUDCI a élaboré des règles spécifiques uniquement là où le
caractère électronique du contrat empêche une application satisfaisante du droit commun.
4. V. O. Cachard, « Le contrat électronique et la convention de Vienne », in Les
deuxièmes journées internationales du commerce électronique, Litec, 2005, p. 107 et s.;
P. Thieffry, op. cit., n° 357 et s.
292 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
476 Enfin, pour l’application des règles sur l’exécution du contrat, tout
dépend de l’interprétation que l’on retient de la notion de marchan¬
dise. Si l’on suit l’opinion dominante, la notion de marchandise englobe
seulement les biens corporels, à l’exclusion des produits numériques.
L’exécution du contrat électronique ne soulève alors aucune difficulté
1. Si, au contraire, on estime que la notion de marchandise doit comprendre aussi les
produits numérisés, l’application des règles de la convention nécessitera certaines adapta¬
tions, notamment sur le terrain de la livraison et de l’appréciation de la conformité des
marchandises. V. O. Cachard, article précité.
2. Sur la détermination des problèmes juridiques spécifiques d’Internet, v. U. Draetta,
cours précité, spéc. p. 51 et s.
3. V. notamment le préambule de la directive n° 2000/31 du 8 juin 2000 sur le commerce
électronique. V. aussi P. Thieffry, Commerce électronique : droit international et européen,
Litec, 2002, n° 19 et s.
4. V. notamment le Guide pour l’incorporation dans le droit interne de la Loi type de la
CNUDCI sur le commerce électronique (1996), n° 2 et s. V. aussi le préambule de la nouvelle
convention de la CNUDCI sur l'utilisation de communications électroniques dans les
contrats internationaux, adoptée en 2005 :«[...] Considérant que les problèmes créés par
les incertitudes quant à la valeur juridique de l’utilisation de communications électroniques
dans les contrats internationaux constituent un obstacle au commerce internatio¬
nal, Convaincus que l’adoption de règles uniformes pour éliminer les obstacles à l’utilisation
des communications électroniques dans les contrats internationaux, notamment les obs¬
tacles pouvant résulter de l’application des instruments de droit commercial inter¬
national existants, renforcerait la sécurité juridique et la prévisibilité commerciale pour
294 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
les contrats internationaux et peut aider les États à accéder aux circuits commerciaux
modernes, [...] ».
1. Sur les principaux modèles de régulation du cyberespace, v. notamment Th. Schultz,
Réguler le commerce électronique par la résolution des litiges en ligne. Une approche critique,
Bruylant, 2005, p. 87 et s.
2. V. E. Caprioli, « Aperçus sur le droit du commerce électronique (international) »,
Mélanges Ph. Kahn, Litec, 2000, p. 247 et s. (spéc. p. 251).
3. Sur l’autorégulation en matière de commerce électronique, notamment V. Gautrais,
G. Lefebvre, K. Benyekhlef, « Droit du commerce électronique et normes applicables :
l’émergence de la lex electronica », RD aff. int. 1997. 547; O. Cachard, La régulation inter¬
nationale du marché électronique, LGDJ, 2002, n° 18 et s.; V. Gautrais, Le contrat électro¬
nique international, Bruylant, 2002, p. 229 et s.; U. Draetta, cours précité, spéc. p. 21 et s.;
Th. Schultz, op. cit., p. 94 et s. et p. 102 et s. ; P. Thieffry, op. cit., n° 2 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 295
480 Règles contraignantes et soft law O Par soft law, on désigne toutes
les règles qui ne possèdent pas un caractère obligatoire pour leur desti¬
nataire5. Elles s’imposent seulement par la volonté des parties qui
cipe est celui de l’équivalent fonctionnel. Il signifie que l’on doit iden¬
tifier les objectifs et fonctions des règles traditionnelles, puis rechercher
comment les mêmes objectifs et fonctions peuvent être garantis dans
le cadre du commerce électronique. L’idée est qu’il faut en principe
essayer d’adapter les règles traditionnelles au commerce électronique,
et c’est seulement si cette adaptation s’avère impossible que de nou¬
velles normes sont nécessaires. La Loi-type adopte cette approche
notamment sur le terrain de la forme écrite, de la signature et de la
notion de document original1.
Ce premier texte de la CNUDCI en matière de commerce électro¬
nique a connu un grand succès puisqu’il a inspiré de très nombreuses
législations nationales, notamment la loi française du 13 mars 2000
sur la preuve électronique, ainsi que les travaux d’autres organisations
comme l’Union européenne, en particulier.
• La loi-type de la CNUDCI sur les signatures électroniques de
20012. Cette seconde Loi-type a pour objet d’assurer la fiabilité de la
méthode utilisée pour identifier le signataire d’un message électro¬
nique. Pour ce faire, elle adopte une approche de neutralité technolo¬
gique ne privilégiant l’utilisation d’aucune méthode particulière de
création de signature3. L’idée générale est que les signatures électro¬
niques, qui satisfont à certaines exigences de fiabilité technique, sont
considérées comme équivalentes à des signatures manuscrites4. Plus
précisément, une signature est considérée comme fiable, si les données
afférentes à sa création sont liées exclusivement au signataire et sont
sous son contrôle exclusif. De plus, toute modification ultérieure doit
être décelable5.
Parallèlement, la Loi type pose des normes de conduite qui peuvent
servir de référence pour évaluer les obligations et responsabilités éven¬
tuelles qui incombent aux différentes parties au processus d’utilisa¬
tion d’une signature électronique : le signataire, la partie se fiant à la
signature et les tiers de confiance susceptibles d’intervenir dans ce pro¬
cessus.
Cette seconde Loi-type de la CNUDCI est moins innovante que la
première. En effet, elle a été adoptée, alors que l'Union européenne
avait déjà élaboré la directive du 13 décembre 1999 sur les signatures
1. Le texte a été adopté par l’Assemblée générale de l’ONU le 23 novembre 2005, dans
une version issue des travaux des 4-15 juillet 2005, et il est désormais ouvert à la signature
depuis le 16 janvier 2006 jusqu’au 16 janvier 2008. En juillet 2006, six États avaient signé
la convention, mais aucun ne l’a ratifiée pour l’instant : République centrafricaine
(27 février 2006), Sénégal (7 avril 2006), Liban (22 mai 2006), Chine (6 juillet 2006),
Singapour (6 juillet 2006) et Sri Lanka (6 juillet 2006).
2. Le choix d’un instrument juridique contraignant s’explique notamment par le fait
que différentes conventions internationales actuellement applicables contiennent des dis¬
positions faisant obstacle à l’utilisation de communications électroniques que seul un
instrument ayant la même place dans la hiérarchie des normes est susceptible d’éliminer.
V. la note élaborée par le secrétariat de la CNUDCI en 2002, doc. n° A/CN.9/WG.4/WP.94.
3. Art. 1 al. 1er, à moins que cette circonstance ne ressort pas du contrat : art. 1 al. 2.
4. Art. 6 al. 1er.
5. Art. 4 h).
6. Art. 6 al. 4.
7. Art. 6 al. 5.
300 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. La portée du principe du pays d’origine est limitée aux services relevant du domaine
coordonné. Sur la définition du domaine coordonné, v. notamment O. Cachard, « Le
domaine coordonné par la directive sur le commerce électronique et le droit international
privé », RD aff. int. 2004, p. 168 et s.
2. Cela concerne notamment les règles sur le formalisme. L’obligation est complétée par
la directive 1999/93 sur les signatures électroniques.
3. Le destinataire doit avoir la possibilité de corriger les erreurs avant l’envoi de la com¬
mande et le prestataire doit envoyer une confirmation de la réception de la commande.
4. Les différents projets sont présentés sur le site Internet de l’Union européenne,
http://europa.eu, dans la rubrique « Activités », « Société de l’information ».
5. V. Communication de la Commission du 21 septembre 2006 relative à l’application
de la directive 1997/7 sur les contrats à distance, COM (2006) 514 final.
6. V. Communication de la Commission du 19 mai 2006, « i2010 — Premier rapport
annuel sur la société européenne de l’information », COM (2006) 215 final, p. 6 et s.
V. aussi, Communication de la Commission, « eEurope 2005 : une société de l’information
pour tous - Plan d’action à présenter en vue du Conseil européen de Séville des 21 et 22 juin
2002 », COM (2002), 263 final, spéc. point 3.1.2.
7. Les cybermarchés interentreprises sont définis comme des plates-formes commer¬
ciales basées sur l’Internet où les entreprises échangent des biens et des services. On dis¬
tingue entre les « enchères en ligne » qui sont des procédures d’établissement des prix
sur une plate-forme commerciale de l’Internet lancées par un vendeur afin de vendre des
produits ou des services au plus haut prix possible, et les « enchères inversées » qui sont
lancées par l’acheteur afin d’acquérir des produits et des services au plus bas prix possible.
304 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
2. Sources privées
488 Lex electronica O Au titre des sources privées, on doit mentionner la
pratique des opérateurs du commerce électronique ainsi que l’activité
normative de certains organismes privés, comme la CCI7, qui ont
dence arbitrale n’est pas encore assez développée pour avoir apporté une contribution signi¬
ficative. Sur la problématique des sources privées dans le commerce électronique, en général,
v. notamment V. Gautrais, G. Lefebvre, K. Benyekhlef, « Droit du commerce électronique et
normes applicables : l’émergence de la lex electronica », RD aff. int. 1997, p. 547 et s.
1. Sur l’émergence d’une lex electronica, notamment V. Gautrais, G. Lefebvre,
K. Benyekhlef, art. précité; aussi V. Gautrais, Le contrat électronique international, Bruylant,
2002, p. 229 et s. ; Th. Schultz, Réguler le commerce électronique par la résolution des litiges en
ligne. Une approche critique, Bruylant, 2005, p. 472 et s.
2. O. Cachard, La régulation internationale du marché électronique, LGDJ, 2002, n° 18 et s.
3. V. toutefois V. Gautrais, op. cit., p. 260 et s.
4. De toute façon, à l’avenir, si les usages et principes du commerce électronique
devaient se développer, une telle clause ne serait concevable que dans le cadre d’un arbitrage
puisque, devant le juge étatique, il sera fait application de la convention de Rome qui ne
permet pas qu’un contrat soit détaché de tout ordre juridique étatique. Cette situation ne
devrait pas changer avec le Règlement « Rome I », puisque dans sa proposition du
15 décembre 2005, la Commission européenne précise expressément que les modifications
envisagées à l’article 3, permettant le choix d’un droit non étatique, n’ont pas vocation à
s’appliquer à la lex mercatoria, ni aux codifications privées qui ne seraient pas suffisamment
reconnues par la communauté internationale : « Proposition de Règlement du Parlement
européen et du Conseil sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) » du
15 décembre 2005, COM (2005) 650 final.
306 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 2. Formation du contrat
492 Plan O Sur le terrain de la formation du contrat, l’emploi des nouvelles tech¬
nologies de l’information soulève toute une série de questions, dont certaines
sont déjà bien connues dans les contrats conclus à distance par des moyens de
communication traditionnels (téléphone, fax, courrier postal, etc.), alors que
d’autres sont nouvelles ou, du moins, impliquent des spécificités pour l’Inter¬
net : la possibilité d’utiliser des moyens électroniques pour la conclusion d’un
a été opérée au nouvel article 1108-1 du Code civil (issu de la LCEN) qui
dispose que « lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juri¬
dique, il peut être établi et conservé sous forme électronique [...] ». Le
législateur français a fait usage de deux des quatre possibilités de déroga¬
tion instituées par la directive, en exceptant les actes relatifs au droit de
la famille et des successions, ainsi que les actes relatifs à des sûretés per¬
sonnelles ou réelles, dès lors qu’ils ne sont pas passés par une personne
pour les besoins de sa profession (art. 1108-2 du C. civ.).
Une fois posé le principe général de reconnaissance des communi¬
cations électroniques, il faut encore le rendre effectif en aménageant
concrètement la possibilité pour les parties de se servir des nouvelles
technologies de l’information. Un certain nombre de dispositions ont
ainsi été adoptées régissant, d’une part, les étapes successives du pro¬
cessus de formation du contrat et, d’autre part, la forme et la preuve
du contrat.
1. Et 1 art. 4 précise, de façon générale, que les dispositions du chapitre III peuvent être
modifiées par convention.
2. Art. 10 et 11 de la directive 2000/31, transposés à l’art. 1369-6 du Code civil.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 311
plus, même si elle apparaît encore sur un autre site, dès lors que cet
affichage est indépendant de sa volonté.
1. Art. 10.
2. Art. 11.
3. Art. 15. V. pour la même solution la clause 2.1 b) des Clauses 2004 de la CCI.
4. Art. 10.
5. Comp. la clause 2.2 des Clauses 2004 de la CCI qui stipule que, s’il a été envoyé à un
système d’information autre que celui qui a été spécifié par le destinataire, le message « est
réputé avoir été reçu au moment où le destinataire en prend connaissance ».
6. Sur le recours aux fictions et présomptions en matière de commerce électronique,
v. V. Gautrais, « Libres propos sur le droit des affaires électroniques », Lex Electronica, vol.
10, n° 3, 2006, http://www.lex-electronica.org, spéc. p. 10 et s.
7. V. art. 15 de la Loi-type de la CNUDCI de 1996 et art. 10 de la convention de la
CNUDCI de 2005. V. aussi, pour la même solution, la clause 2.3 des Clauses 2004 de la
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 31B
teur français a ajouté que ces informations doivent figurer dans 1 offre
de contracter1.
De leur côté, les textes de la CNUDCI ne posent aucune obligation
de ce type, mais la convention du 23 novembre 2005 précise expressé¬
ment que ce silence n’a aucune incidence sur l’application de toute
règle de droit qui poserait une obligation d’information2.
1. Art. 11 de la directive 2000/31 et art. 1369-5 du Code civil. Selon ce dernier texte, la
possibilité de vérification doit porter sur le détail de la commande, ainsi que sur le prix total
de l’opération.
2. Pour une analyse de cette condition de validité en termes de théorie générale du
contrat, par ex., J. Huet, « Encore une modification du Code civil pour adapter les contrats
à l’électronique », JCP 2004. I. 178; Ph. Stoffel-Munck, « LCEN, La réforme des contrats
du commerce électronique », Com. comm. électr. 2004, doctr., n° 30, p. 2004 et s. ; J. Roch-
feld, « Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004... », RTD civ. 2004, p. 574 et s.; P.-Y. Gautier,
« Formation du contrat : un code, deux régimes », RDC 2005, p. 589 et s. (spéc. n° 3 et s.) ;
X. Linant de Bellefonds, « La LCEN et le consensualisme », RDC 2005, p. 592 et s.
3. Art. 11 de la directive 2000/31 et art. 1369-5 du Code civil.
316 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. « [...] le contrat est conclu quand le destinataire du service : — a reçu, par voie électro¬
nique, de la part du prestataire l'accusé de réception de l'acceptation du destinataire du service, et
— a confirmé la réception de l'accusé de réception », art. 11 de la Proposition de la Commission
du 23 décembre 1998, COM (1998) 586 final, JOCE n° C 30, du 5 février 1999, p. 4.
2. V. P. Thieffry, Commerce électronique : droit international et européen, Litec, 2002,
n° 441.
3. En ce sens aussi, p. ex., Luc Grynbaum, Droit civil. Les obligations, Hachette, 2005,
n° 110; F. Mas, La conclusion des contrats du commerce électronique, LGDJ, 2005, n° 113
et 232; Th. Verbiest, Le nouveau droit du commerce électronique, Larcier, 2005, n° 196;
M. Vivant, « Le contrat plongé dans l’économie numérique », RDC 2005, p. 533 et s.
4. Art. 14.
5. V. S. Guillemard, « Le “cyberconsommateur” est mort, vive l’adhérent », JDI 2004,
p. 7 et s.
6. Sur le champ d’application international du régime institué par les directives,
v. supra, n° 468 et s.
7. On se limite ici aux seuls textes spécifiquement consacrés aux contrats conclus à
distance, auxquels il faut, en réalité, souvent ajouter de nombreuses règles générales du
droit de la consommation (v. prohibition des clauses abusives, etc.).
8. Transposée en droit français par l’ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant
transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire en
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 317
508 Sont visés ici les contrats qui portent sur un service ayant trait à la
banque, au crédit, à l’assurance (vie ou non-vie), aux retraites indivi¬
duelles, aux investissements et aux paiements'1. Le type de mesures
instituées est bien connu, puisqu’il s’agit de nouveau d’une série d’obli¬
gations d’information et d’un droit de rétractation, mais ces mesures
ont été renforcées par rapport aux autres contrats à distance.
Sur le terrain de l’obligation d’information, l’article L. 121-20-10
du Code de la consommation fournit une liste d’informations que le
professionnel doit communiquer au consommateur avant la conclu¬
sion du contrat. On retrouve ici, dans une large mesure, les obligations
déjà vues à propos des autres contrats à distance. Dans un premier
temps, les informations peuvent être fournies par tout moyen appro-
prié, mais une confirmation par écrit, ou sur tout autre support dura¬
ble, doit intervenir, dans un second temps, et ceci avant la conclusion
du contrat (et non pas seulement au moment de l’exécution) L L’obli¬
gation de communication par écrit, ou sur tout autre support durable,
s’applique aussi aux conditions contractuelles et il ne suffit donc pas
que le professionnel les mette à la disposition du consommateur, par
exemple, au moyen d’un lien hypertexte sur son site Internet. Quant
au droit de rétractation, il a également été renforcé puisque le délai de
rétractation a été porté à quatorze jours calendaires (au lieu de sept)1 2,
et il est même de trente jours en matière d'assurance sur la vie et de
retraites individuelles. Malheureusement, ici encore, il existe toute une
série de contrats qui ont été exclus du champ d’application du droit de
rétractation3. De plus, le consommateur peut renoncer à sa faculté de
rétractation en demandant l’exécution immédiate de la prestation, ce
qui aboutit évidemment à une remise en cause de la protection.
1. L’écrit
Il convient de partir ici du principe d’équivalence entre l’écrit papier
et l’écrit électronique, pour étudier ensuite plus précisément les condi¬
tions auxquelles cette équivalence est subordonnée, ce qui conduit à
envisager, en particulier, les textes sur la signature électronique.
1. V. Art. 1316 et le renvoi opéré par l’art. 1108-1 aux art. 1316-1 et s. du Code civil.
V. not. E. Joly-Passant, L'écrit confronté aux nouvelles technologies, LGDJ, 2006 ; L. Gryn-
baum, Droit civil. Les obligations, Hachette, 2005, n° 115 et s.
2. Par ailleurs, la forme électronique est désormais possible également pour les actes
authentiques. V. art. 1108-1 et 1317 al. 2 du Code civil (issus de la loi n° 2000-230 du
13 mars 2000 et de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004) dont le régime est complété par
deux décrets du 10 août 2005 (décret n° 2005-973 sur l’activité des notaires et décret
n° 2005-973 sur celle des huissiers de justice).
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 321
d équivalence chaque fois que la loi exige une forme écrite ou prévoit
des conséquences en l'absence d’un écrit1.
| La directive 2000/31 sur le commerce électronique ne contient pas
d affirmation explicite de cette équivalence, mais cette dernière découle
de son article 9 § 1 selon lequel les États doivent veiller notamment à
ce que le régime applicable ne conduise pas à priver d’effet et de validité
juridiques des contrats électroniques pour le motif qu’ils sont passés
par voie électronique. Sur ce fondement, le droit français a consacré le
principe d’équivalence, d’une part, à l’article 1108-1 du Code civil
(hypothèse où l’écrit est exigé pour la validité d’un acte) et, d’autre
part, aux articles 1316-1 et 1316-3 du Code civil (hypothèse où l’écrit
est requis pour la preuve).
Toutefois, pour que l’écrit électronique puisse se voir reconnaître la
même valeur juridique qu’un écrit papier, encore faut-il qu’il présente
des garanties en termes de fiabilité. Pour cette raison, un certain nombre
de conditions ont été posées.
1. Comp. l’approche retenue par les Clauses 2004 de la CCI pour les contrats électro¬
niques qui est légèrement différente. Sur le terrain de la validité de l’acte, la clause 1.3
implique une renonciation des parties à se prévaloir des règles qui pourraient exiger l’écrit
papier ad validitatem. Quant à la preuve, la clause 1.2 admet les messages électroniques
comme mode de preuve, si la loi applicable l’autorise.
2. V. V. Gautrais, « Le consentement électronique », in Les deuxièmes journées interna¬
tionales du droit du commerce électronique, Litec, 2005, p. 71 et s.; A.-M. Leroyer, « Ordon¬
nance n° 2005-674... », RTD civ. 2005. 843 (spéc. p. 846 et s.).
322 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. La signature est considérée comme fiable si elle répond à quatre exigences : les don¬
nées sont liées exclusivement au signataire; elles sont sous son contrôle exclusif; toute
modification ultérieure de la signature est décelable; toute modification ultérieure de l’in¬
formation contenue dans le message est décelable (lorsque l’exigence légale de signature
vise à garantir l’intégrité de l’information).
2. Une exigence déjà posée par la Loi-type de 1996, mais qui a été légèrement reformu¬
lée afin d’appréhender les hypothèses dans lesquelles une personne signe un document,
sans pour autant approuver l’information qui y est contenue, par ex. le notaire légalisant
un acte ou l'officier ministériel attestant une déclaration sous serment. V. travaux de la
trente-huitième session de la CNUDCI des 4 au 15 juillet 2005, Doc. A/60/17, § 60 et s.,
p. 16 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 325
1. Une formulation que l’on trouve déjà en partie dans la Loi-type de 2001. La seconde
alternative a pour but d’éviter que l’exigence de fiabilité ne puisse être détournée par un
plaideur de mauvaise foi, alors que la véritable identité et la volonté effective de la partie
peuvent être prouvées. V. travaux de la trente-huitième session de la CNUDCI des 4 au
15 juillet 2005, Doc. A/60/17, § 65 et s., p. 17 et s.
2. Ou qu’elle ne repose pas sur un certificat qualifié, ou encore que le certificat qualifié
n’a pas été délivré par un prestataire accrédité de services de certification ou enfin que la
signature n’a pas été créée par un dispositif sécurisé de création de signature.
3. Le texte est issu de la loi du 13 mars 2000 et il a été complété par un décret d’appli¬
cation du 30 mars 2001, lequel a été modifié ultérieurement par un décret du 18 avril
2002.
326 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
En droit français, la question a été résolue par une précision qui a été
apportée à l’article 1325 du Code civil h Pour les contrats électroniques,
l’alinéa 5 de l’article 1325 dispose désormais que P exigence d’une plu¬
ralité d’originaux est réputée satisfaite si l’acte a été « établi et conservé
conformément aux articles 1316-1 et 1316-4 » du Code civil « et que
le procédé permet à chaque partie de disposer d’un exemplaire ou d’y
avoir accès ».
Après l’étude des règles régissant la formation du contrat électronique,
qui forment l’essentiel du droit matériel en la matière, il convient d’abor¬
der plus brièvement les dispositions relatives à l’exécution du contrat.
§ 3. Exécution du contrat
513 Besoin exceptionnel de règles spécifiques O L’exécution du contrat
du commerce électronique fait l’objet d’un nombre assez restreint de
règles matérielles spécifiques. Cette situation est pleinement justifiée
pour les contrats partiellement dématérialisés, où seule la conclusion
se fait en ligne. En effet, dès lors que l’exécution repose sur des moyens
traditionnels, aucun régime particulier n’est nécessaire1 2. En revanche,
la situation est différente pour les contrats entièrement dématérialisés
où même l’exécution a lieu en ligne. Ici, un certain nombre de notions
juridiques mériteraient d’être précisées pour permettre leur application
au commerce électronique3, mais on constate que peu d’initiatives ont
été prises sur ce terrain. Ainsi, on peut d’emblée noter qu’aucun des
textes élaborés par la CNUDCI ne contient des règles relatives au
contenu ou à l’exécution du contrat. En droit communautaire, on
rencontre quelques dispositions sur des points précis : une directive a
été adoptée sur la monnaie électronique, ce qui conduit à étudier la
question du paiement électronique; une disposition de la directive sur
le commerce électronique exige que les États membres instituent des
sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » en cas de viola¬
tion des règles de la directive, ce qui mène au régime de responsabilité
mis en place par le droit français; et enfin les deux directives sur les
contrats à distance conclus par des consommateurs organisent une
protection particulière du consommateur pour cette catégorie de
contrats.
1. L’art. 1325 traite, comme on le sait, de l’exigence d’une pluralité d’originaux à propos
des actes sous seing privé contenant des conventions synallagmatiques, puisque ces actes
« ne sont valables qu’autant qu’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il y a de parties
ayant un intérêt distinct ». La précision relative aux contrats sous forme électronique a été
apportée par l’ordonnance 2005-674 du 16 juin 2005.
2. Comme particularité, on peut mentionner simplement que les ventés sur Internet
impliquent systématiquement un transport, dans la mesure où les parties ne se trouvent pas
en un même lieu et qu’il est ainsi nécessaire d’expédier la marchandise chez l’acheteur. Sur
les contrats de vente et de transport en général, v. infra, n° 520 et s. et n° 570 et s.
3. On peut penser, par ex., aux notions de « livraison » ou de « conformité » des
produits : v. O. Cachard, « Le contrat électronique et la convention de Vienne », in Les
deuxièmes journées internationales du commerce électronique, Litec, 2005, p. 107 et s.
PROBLÈMES COMMUNS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 329
A. Paiement électronique
514 Diversité des instruments de paiement O Chaque fois qu'un
paiement se réalise au moyen d’Internet, on parle de paiement électro¬
nique h Différents instruments techniques peuvent être utilisés. Le plus
répandu est un instrument classique, la carte de crédit. En raison de
l’augmentation des fraudes, des systèmes de sécurité ont été mis en
place par les acteurs du secteur financier, afin d’éviter le risque d’inter¬
ception des communications contenant les données relatives à la carte.
Il existe aussi des chèques électroniques qui transitent sous forme cryp¬
tographique et qui sont sécurisés au moyen d’une signature électro¬
nique. Dans la mesure où ces instruments de paiement n’offrent pas à
leur utilisateur une garantie d’anonymat, ni une sécurité tout à fait
parfaite, il a paru nécessaire de développer des instruments de paie¬
ment nouveaux, parmi lesquels on trouve notamment la monnaie
électronique. Il s’agit d’une valeur monétaire qui est stockée sur un
support électronique lequel peut être une mémoire d’ordinateur ou
une carte électronique1 2. L’utilisateur acquiert contre remise de fonds
une valeur monétaire qui est destinée directement au paiement et qui
sera stockée sur un support électronique. Dans ce domaine, une direc¬
tive a été élaborée par l’Union européenne le 18 septembre 20003. Elle
régit l’activité des établissements de monnaie électronique, et plus pré¬
cisément les conditions d’accès à l’activité ainsi que les conditions de
son exercice. Son objet est de poser un cadre normatif harmonisant la
surveillance prudentielle des établissements de monnaie électronique,
afin de garantir leur intégrité financière et une gestion saine et pru¬
dente. À côté de ces techniques de paiement, la pratique récente en a
développé bien d’autres qui seraient trop longues à présenter ici4.
CHAPITRE 3
PRINCIPAUX CONTRATS
DU COMMERCE
INTERNATIONAL
A. Sources
1. Ce qui ne signifie pas que la méthode conflictualiste n’ait plus eu, dès cette époque,
d’intérêt, v. M. Pelichet, « La vente internationale de marchandises et les conflits de lois »,
Rec. cours. Académie La Haye 1987, t. 201, p. 9 et s.
2. Comp. T. régional sup. Munich, 9 août 1995, D. 1997, Somm. 219, obs. Cl. Witz.
Une autre convention a été adoptée à Genève le 17 février 1983 : la Convention (Unidroit)
sur la représentation en matière de vente internationale de marchandises. Elle n’est pas
encore entrée en vigueur, v. infra n° 659.
3. Comme toute convention internationale, elle s’impose au juge français qui doit en
faire application sous réserve de son exclusion expresse ou tacite : selon l’art. 6, qui s’inter¬
prète comme permettant aux parties de l’éluder tacitement, en s’abstenant de l’invoquer
devant le juge français, Civ. lre, 26 juin 2001, Bull. civ. 1, n° 189, D. 2001. 2591, obs.
V. Avena-Robardet, 3607, note Cl. Witz, Rev. crit. DIP 2002.93, note H. Muir-Watt, RTD
com. 2001.1052, obs. J.-M. jacquet; rapp. T. Vigevano 12 juill. 2000, D. 2002, Somm. 395,
obs. N. Spiegel. Le juge peut en faire application d’office, mais après avoir invité les parties
à un débat contradictoire, Civ. lre, 2 oct. 2001, Bull. civ. I, n° 237; comp. dans une procé¬
dure de référé-provision, Civ. lre, 8 janv. 2002, Rev. crit. DIP 2002.343, note H. Muir-Watt.
V. égal. CA Paris 6 nov. 2001, RTD com. 2002, 211.
Plus récemment, la Cour de cassation (lre civ. 25 oct. 2005, D. 2005, 2872, note Chevrier;
RTD com. 2006, 249 et les obs., JCP 2006, II, 10086, note J.-C. Mahinga, Rev. crit. DIP
B36 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
2006, 373, note D. Bureau, RTD civ. 2006, 269, obs. P. R.-C.) a fini par admettre que la
convention constituait le droit substantiel français et, à ce titre, s’imposait au juge français
qui devait en faire application, sous réserve de son exclusion, même tacite, cette exclusion
étant caractérisée lorsque les parties se sont placées, dans leurs conclusions, sous le seul
empire des dispositions internes, en l’espèce les articles 1641 s. C. civ.
1. Ce caractère doit se définir en application des critères traditionnels, v. supra n° 16 et s. Il
ne saurait être créé artificiellement par les parties.
2. V. Civ. lre, 10 oct. 1995, Rev. crit. DIP 1996, 332; D. 1996 Somm. 171, obs. B. Audit;
18 déc. 1990, JCP 1992.11.21824. La convention n’a pas un caractère impératif, v. Civ. lre,
6 mai 1997, Bull. civ. I, n° 140, JDI 1997.804, note D. Bureau; B. Ancel, Y. Lequette, Les
grands arrêts de la jurisprudence de droit international privé, Dalloz, 2006, n° 84; 26 mai
1999, Bull. civ. I, n° 172. Ce qui ne signifie pas qu’elle ne doive pas être respectée, v. Civ. lre,
7 oct. 1997, Rev. crit. DIP 1998.84, note P.-L. ; égal. 18 oct. 1989, Bull. civ. I, n° 322, Rev.
crit. DIP 1990, 712, note Foyer, excluant le renvoi; v. égal. CA Paris, 14 janv. 1998, D. 1998,
Somm. 288, obs. B. Audit. Elle ne s’applique pas à l’action directe du sous-acquéreur, celui-
ci n’étant pas partie au contrat initial de la chaîne, CA Colmar, 8 juill. 1997, Rev. crit. DIP
1999.267, note J. Bauerreis.
3. V. C. Brière, Les conflits de conventions de droit privé, LGDJ, 2000. Une autre Conven¬
tion de La Haye sur la loi applicable aux contrats de vente internationale de marchandises
a été ouverte à la signature le 30 octobre 1985 pour actualiser la précédente, mais son entrée
en vigueur est actuellement improbable, v. MM. Cohen et Ughetto, D. 1986, Chron. 149;
Y. Loussouarn, « La Convention de La Haye d’octobre 1985 », Rev. crit. DIP 1986, 271.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 337
ayant leur établissement dans des États différents, lorsque ces États
sont des Etats contractants. Si une partie a plus d’un établissement,
l’établissement à prendre en considération est celui qui a la relation la
plus étroite avec le contrat (art. 10).
, Si le vendeur et l’acheteur ne sont pas établis tous les deux dans des
Etats contractants, la convention s’applique encore lorsque les règles
du droit international privé conduisent à l’application de la loi d’un
État contractant (ce que n’est pas un État ayant émis des réserves,
art. 92, al. 2) ; ainsi en est-il, dans un conflit opposant, devant un juge
français, un vendeur établi en France et un acheteur établi dans un État
non contractant, lorsque les règles françaises de conflit désignent le
droit français. Ainsi, la nationalité des parties est-elle indifférente :
seul compte le lieu où celles-ci sont « établies ».
la discussion. Rappr. Conv. Vienne, art. 9, al. 2 et Règlement 44/2001, art. 23. Il pourrait s’agir
aujourd’hui, puisque les Incoterms se renouvellent régulièrement, de modèles de contrats.
1. Les Incoterms sont élaborés par la CCI depuis 1923 (la lre brochure date toutefois de
1936) et sont régulièrement révisés, v. D. Le Masson, « Les incoterms », in La Convention
de Vienne et les Incoterms, LGDJ, 1990, p. 37; Guide pour les Incoterms, Pub. CCI n° 354,
1980; Guide pour les Incoterms, Pub. CCI n° 461/90, 1990, trad. de J.-C. de Gassart. Ces
deux versions sont dues en grande partie au professeur Ramberg. V. égal, le guide de l’utili¬
sateur du progiciel sur les Incoterms : Incoterms 1990, Interactive software, Doc. CCI,
n° 470, 1997, coproduction CCI et Ch. com. Lille, due à MM. Ely, Guedon, Jimenez et
Jolivet, Les Incoterms 2000 sont en vigueur depuis le 1er janv. 2000, v. BTL 1999.340 et la
brochure correspondante de la CCI. Il ne s’agit pas comme en 1990 d’une refonte, mais
seulement d’apporter des précisions, des adaptations et des simplifications (dans un
contexte moins maritime que par le passé).
On parle d’une nouvelle version des Incoterms pour 2007.
2. V. par ex. CA Paris, 18 mars 1998, D. 1998, Somm. 279, obs. B. Audit.
3. Les Incoterms n’ont aucune incidence sur le transfert de propriété, rappr. Com., 23 juin
1998, Bull civ. IV, n° 210, pour une clause franco-frontière — ni, du reste, sur la conformité.
4. V. par ex. CA Paris, 25 févr. 2000, BTL 2000.256.
344 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
EXW FCA EAS FOB CFR/ CFT/ DAF DES DEQ DDU/
CIF CIP DDP
Transport
terrestre X X X X X
Transport aérien X X X
Transport fluvial
Exclusivement
(port à port) X X X X X X
Transport
maritime
Exclusivement
(port à port)
- par
affrètement X X X X X X
- de ligne en
conventionnel X X X X X X
Transport
multimodal
En partie mari¬
time ou fluvial
- de porte à port X X X X X X
- de porte
à porte X X X X
532 Liner terms O Les Incoterms ne doivent pas être confondus avec les
« liner terms ». L’expression renvoie aux conditions des connaissements
de lignes régulières relatives à la répartition des frais de chargement
entre la compagnie et les intérêts cargaison. Ces clauses1 sont prévues
en tenant compte de la nature des marchandises, de l’équipement des
ports ou d’autres facteurs commerciaux. Les « liner terms » les plus
fréquents sont2 :
- de bord à bord : la marchandise supporte tous les frais de charge¬
ment et de déchargement,
- de bord à sous palan : la marchandise supporte les frais postérieurs
à la mise sous palan au port de déchargement,
- de bord à quai : la marchandise supporte les frais de mise à bord
et, à la livraison, les frais éventuels d’entreposage;
- de sous palan à bord : la marchandise supporte les frais de charge¬
ment jusqu’à la prise sous palan et, au déchargement, tous les frais y
afférents ;
B Conclusion du contrat
533 Consensualisme O Même si la sécurité et les modalités pratiques des
transactions imposent la rédaction d’un écrit, le consensualisme reste
le principe dans les échanges commerciaux, internes et internationaux.
D’après l’article 11 de la convention, le contrat de vente n’a pas à être
conclu ni constaté par écrit : il repose sur le consentement des parties
et n’est soumis à aucune condition de forme. Il peut aussi être prouvé
par tous moyens, même par témoins.
Toutefois, certaines législations nationales (not. chinoise) imposent
l’écrit comme condition de formation du contrat de vente, et la conven¬
tion permet aux États contractants de conserver cette solution par une
réserve appropriée. L’article 12 décide en conséquence que la règle de
l’article 11 ne s’applique pas dès lors que l’une des parties a son établis¬
sement dans un État contractant qui a usé de cette faculté. C’est une
règle impérative, qui ne peut pas être écartée par les parties, par déro¬
gation à l’article 6. La convention de Vienne contient par ailleurs
certaines règles sur la charge de la preuve (ex. art. 79, al. 1er) : ces règles
ne s’étendent pas au-delà de son champ d’application matériel1.
1. Bundesgerichtshof, 9 janv. 2002, D. 2003, Somm. 2362, obs. F. Limbach; plus géné¬
ral. V. Ferrari, Charge de la preuve dans la CV, RD aff. int. 2000, 665.
2. Le stipulant doit adresser au destinataire le texte de ses conditions générales ou les rendre
accessibles : Bundesgerichtshof, 31 oct. 2001, D. 2002, Somm. 2362, obs. F. Limbach.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 347
1. V. Com., 6 mars 1990, Bull. civ. IV, n° 74, JCP 1990, II, 21583, note B. Gross.
2. CA Paris, 10 sept. 2003, RTD com. 2004, 394 et les obs. ; CA Fribourg, 11 oct. 2004,
D. 2005, Somm. 2285, obs. Cl. Witz; Comp. Civ. Ve, 27 janv. 1998, Bull. civ. I, n° 28,
D. 1998, Somm. 312, obs. Cl. Witz : « ne méconnaît pas la règle selon laquelle le silence, à
lui seul, ne vaut pas acceptation, non plus que la CVIM, la cour d’appel qui relève souverai¬
nement que l’acheteur avait lui-même demandé la modification des caractéristiques des
pièces commandées, et avait ensuite accepté sans réserves le plan des pièces comportant la
modification, ainsi que la livraison des pièces modifiées ».
3. Après son acceptation, l’acquéreur ne saurait se rétracter unilatéralement, ce qui
semble aller de soi : T. suprême Espagne, 28 janv. 2000, D. 2002, 322, obs. W. Rosch.
348 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
tue une contre-offre qui doit être acceptée par 1 offrant1. L article 19.2
écarte le principe au cas où les compléments n’altèrent pas substantiel¬
lement les termes de l’offre, mais l’article 19.3 énonce une liste, non
limitative, de compléments considérés comme substantiels . cette liste
couvre la plupart des hypothèses, en sorte que le principe et l’exception
se rejoignent2.
En effet, pour la convention (art. 19.3), altèrent substantiellement
les termes de l’offre, « des éléments complémentaires ou différents
relatifs notamment au prix, au paiement, à la qualité et à la quantité
des marchandises, au lieu et au moment de la livraison, à 1 étendue de
la responsabilité d’une partie à l’égard de l’autre ou au règlement des
différends ».
C. Contenu du contrat
538 Obligations du vendeur O En droit français, le vendeur est tenu de
deux obligations principales : celle de délivrer et celle de garantir la
chose qu’il vend (C. civ. art. 1603). Ces obligations n’ont cessé de se
développer, sans doute parce que la protection de l’acheteur a l’oreille
1. V. T. féd. suisse, 11 déc. 2000, D. 2002, Somm. 396, obs. W. Rosch et N. Spiegel.
350 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
539 Livraison O La livraison doit intervenir dans les délais convenus ou,
à défaut, dans un délai raisonnable1. Cette précision est importante et
démontre que le temps est de plus en plus « ofthe essence ofthe contract ».
Le respect des délais fait partie de la qualité de la prestation attendue
par le client.
La livraison doit également comporter la remise des documents corres¬
pondant à la marchandise. Dans l’hypothèse la plus fréquente où la vente
implique un transport de marchandises, la livraison s’exécute par la remise
des marchandises « au premier transporteur pour transmission à l’ache¬
teur2 ». Dans les autres cas, elle intervient, soit au lieu où les parties
savaient que les marchandises devaient être fabriquées ou produites, soit
au lieu où le vendeur avait son établissement au moment de la formation
du contrat (art. 31). Bien que la convention n’exprime pas de règle géné¬
rale, il résulte des solutions énoncées par les articles 67 et 69 que la livrai¬
son par le vendeur emporte habituellement le transfert des risques.
1. V. C. Barcelone, 20 juin 1997, D. affaires 1999, Somm. 361, obs. W. Rosch. Le défaut
de livraison à la date fixée constitue une contravention essentielle aux stipulations du
contrat : Milan, 20 mars 1998, D. 1999, Somm. 364, obs. N. Spiegel.
2. V. Civ. lre, 16 juill. 1988, préc. ; égal. lre civ., 2 déc. 1997, Bull. civ. IV, n° 341, D. 1998
IR 20; CA Paris, 17 sept. 1998, D. affaires 1998.1776; 4 mars 1998, D. 1998, Somm. 279,
obs. B. Audit.
3. Art. 67 : « 1 — Lorsque le contrat de vente implique un transport des marchandises
et que le vendeur n'est pas tenu de les remettre en un lieu déterminé, les risques sont trans-
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL B 51
1. V. C. consom. art. L. 211-18 : « quelle que soit la loi applicable au contrat, l’acheteur
qui a sa résidence habituelle dans un Etat membre de la CE ne peut être privé de la protec¬
tion que lui assurent les dispositions prises par cet État en application de la directive et qui
ont un caractère impératif :
- si le contrat a été conclu dans l’État du lieu de résidence habituelle de l’acheteur,
- ou si le contrat a été précédé dans cet État d’une offre spécialement faite ou d’une publi¬
cité et des actes accomplis par l’acheteur nécessaires à la conclusion dudit contrat,
- ou si le contrat a été conclu dans un État où l’acheteur s’est rendu à la suite d’une pro¬
position de voyage ou de séjour faite, directement ou indirectement, par le vendeur pour
l’inciter à contracter ».
V. commentaire, in Rev. crit. DIP 2005, 362.
2. V. CA Grenoble, 15 mai 1996, D. 1997, Somm. 221, obs. Cl. Witz, décidant que la
survenance d’une panne, intervenue dans un court délai après la livraison, établit, nonobs¬
tant toute connaissance plus précise du vice, le défaut de conformité.
3. V. M.F. Papandréou-Deterville, obs. D. 2003, Somm. 2365.
4. V. T. Saarbrücken, 2 juill. 2002, D. 2003, Somm. 2363, obs. Cl. Witz : « si le délai
d’examen de biens durables est, en principe, de trois à quatre jours, ce délai peut être plus
court selon les circonstances; il en est ainsi en cas de livraison d’animaux vivants; égal, les
décisions analysées par Cl. Witz, D. 2005, Somm. 2287.
5. V. T. régional supérieur de Cologne, 21 août 1997, D. 1998, Somm. 311, obs.
Cl. Witz. Rappr. Hoge Raad, 20 févr. 1998, D. 1998, Somm. 313 ; CA Colmar, 24 oct. 2000,
D. 2002, Somm. 393, obs. Cl. Witz.
6. V. S. Joly, «La nouvelle génération des doubles délais extinctifs», D. 2001,
Chron. 1450.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 353
1. Ch. com. Stockholm, 5 juin 1998, D. 1999, Somm. 365, obs. F. Limbach.
2. V. Civ. lre, 19 mars 2002, Bull. civ. IV, n° 98, JCP 2002, II, 10016, note Raynard,
D. 2003, Somm. 2366, obs. Witz.
3. En ce sens, v. CA Paris, 25 févr. 2005, RTD com. 2005, 639, et les obs.
4. V. Com., 24 sept. 2003, Bull. civ. IV, n° 139, RTD com. 2004, 394, faisant très claire¬
ment peser la charge de la preuve sur l’acheteur.
5. Ce qui ne requiert pas une assignation en justice, CA Versailles, 29 janv. 1998, JCP E
1999. 1081.
354 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 26 mai 1999, D. 2000.788, note Cl. Witz; v. égal. : CA Colmar, 24 oct. 2000,
D. 2002, Somm. 393, obs. Cl. Witz; v. Oldenbourg, 5 déc. 2000, D. 2002, Somm. 314, obs.
W.T. Schneider; T. féd. suisse, 28 oct. 1998, D. 2000, Somm. 443, obs. W.T. Schneider; sur le
point de départ du délai, v. C. féd. ail., 3 nov. 1999, D. 2000, Somm. 434, obs. Cl. Witz.
2. C. Justice Genève, 10 oct. 1997, D. 1998, Somm. 316, obs. Cl. Witz; C. suprême
Ontario, 31 août 1999, D. 2000, Somm. 447, obs. F. Limbach.
Autre chose est la prescription de l’action, prescription réglée, le cas échéant, par applica¬
tion de la Convention de New York du 14 juin 1974 (non ratifiée par la France, v. supra
n° 524) et à défaut par la loi du contrat, CA Versailles, 13 oct. 2005, BTL 2005 , 748 : « la
VSC ne régissant pas la prescription de l’action en garantie de conformité par l’art. 35-2, le
délai de prescription doit être recherché conformément à l’art. 7-2, en appliquant les règles
de droit du contrat et donc le droit national applicable, lui-même déterminé selon le droit
international privé du tribunal saisi et en conséquence du droit international privé fran¬
çais (trouvant en l’espèce son expression dans la Convention de La Haye du 15 juin 1955) ;
CA Paris, 19e ch. À, 6 nov. 2001, SA Traction Levage.
3. La mauvaise foi du vendeur peut se déduire des circonstances : Civ. lre, 4 oct. 2005,
Bull. civ. I, n° 360, RTD corn. 2006, 250 et les obs., RTD civ. 2006, 272, obs. P. R.-C; égal.
CA Anvers, 27 juin 2001, D. 2003, Somm. 2365, obs. M.-F. Papandréou-Deterville.
Le vendeur peut également renoncer à se prévaloir du caractère tardif de la dénonciation,
C. féd. Justice allemande, 25 juin 1997, D. 1998, Somm. 309, obs. Cl. Witz et 25 nov. 1998,
D. affaires 1999, Somm. 356. Jugé qu’une dénonciation faite 24 jours après la livraison était
tardive, T. régional sup. Karlsruhe, 25 juin 1997, D. 1998, Somm. 310, obs. Cl. Witz; Comp.
CA Grenoble, 13 sept. 1995, JCP 1996. IV. 712, un mois pour une livraison de fromages;
v. égal. T. civ. Coni, 31 janv. 1996, D. 1997, Somm. 222, obs. SpiegeljT. civ. Sarrebrück, 3 juin
1998, D. affaires 1999, Somm. 356, obs. Cl. Witz; Civ. lre, 26 mai 1999, n° 97-14315.
4. V. C. féd. Illinois, 7 déc. 1999, D. 2000, Somm. 448, obs. M.-F. Papandréou-Deterville.
5. Barcelone, 3 nov. 1997, D. 1999, Somm. 363, obs. W. Rosch, assimilant la tolérance
de l’acheteur à la stipulation d’un délai supplémentaire.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 355
1. Il s'agit d’une contravention qui « cause à l’autre partie un préjudice tel qu’elle la
prive substantiellement de ce que celîe-ci était en droit d’attendre du contrat, à moins que
la partie en défaut n’ait pas prévu un tel résultat et qu’une personne raisonnable de même
qualité placée dans la même situation ne l’aurait pas prévu non plus » (art. 25), v. par ex.
CA Versailles, 29 janv. 1998, préc. Rappr. C. civ., art. 1150. La notion rappelle celle defun-
damental breach of contract, v. B. Gilson, Inexécution et résolution en droit anglais, LGDJ,
1969; R. Sefton-Green, La notion d’obligation fondamentale : comparaison franco-anglaise,
thèse, Paris-I, 1997.
La résolution ne saurait être partielle CA Paris, 4 juin 2004, RTD com. 2004, 639 et les obs.,
D. 2005, Somm. 2288, obs. CL Witz.
2. V. Civ. lre, 13 oct. 1998, D. 1999.197, D. 1999, Somm. 115 et les obs., note Ch. Jamin,
RTD civ. 1999.506, obs. J. Raynard : égal. 20 févr. 2001, Bull. civ. I, n° 40, admettant une
résiliation aux risques et périls de son auteur en cas de comportement gravement répréhen¬
sible du co-contractant; peu importe que le contrat soit à durée indéterminée ou détermi¬
née : Civ. lre, 20 févr. 2001, Bull. civ. I, n° 40 — V. pour une application de l’art. 49 CVIM,
C. féd. justice Allemagne, 3 avr. 1996, D. 1997, Somm. 218, obs. Spiegel — v. égal, supra
n° 440.
3. La compétence s’établit en application du règlement communautaire 44/2001,
art. 5.1; étant précisé qu’est compétent le tribunal du lieu où, en vertu du contrat, les
choses ont été ou auraient dû être livrées; comp. Civ. lre, 26 juin 2001, Bull. civ. I, n° 187,
D. 2001, 3607, note Cl. Witz.
4. B. Audit, op. cit., nos 141 et s.; Niggemann, « Les obligations de l’acheteur selon la
Convention de Vienne du 11 avr. 1980 », RD aff. int. 1988, n° 1, p. 14.
5. CA Grenoble, 4 févr. 1999, D. 1999, Somm. 363, obs. Cl. Witz.
356 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
D. Inexécution du contrat.
Obligations communes au vendeur et à l'acheteur
547 Circonstances permettant de prévoir l'inexécution O Si les cir¬
constances permettent de prévoir que l’une des parties n’exécutera pas
correctement ses obligations, les articles 71 et 72 confèrent à l’autre
1. V. par ex. CA Grenoble, 23 oct. 1996, Rev. civ. DIP 1997.756, note A. Sinay-Cyter-
mann; CA Paris, 14 janv. 1998, D. 1998, Somm. 288, obs. B. Audit. L’art. 57 n’est pas
applicable à la créance de restitution du prix, C. sup. Autriche, 10 mars 1998, D. affaires
1999, Somm. 357, obs. Niessen.
2. Civ. lre, 26 juin 2001, Bull. civ. I, n° 188, qui en tire une conséquence sur la compé¬
tence du tribunal; v. égal. T. Stuttgart, 28 févr. 2000, D. 2002, Somm. 315, obs. F. Limbach;
Barcelone, 7 juin 1999, D. 2000, Somm. 440, obs. W. Rosch — v. encore sur le tribunal
compétent, CA Versailles, 27 juin 2002, RTD com. 2003, 419.
3. V. Civ. lre, 6 févr. 1996, Bull. civ. I, n° 59.
4. V. égal. art. 64.2; et CA Grenoble, 22 févr. 1995, D. 1995, IR 100.
358 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. CA Grenoble, 21 oct. 1999, D. 2000, 441, obs. Cl. Witz : seule la détérioration de
l’image commerciale ayant entraîné un préjudice pécuniaire est réparable en vertu de
l’art. 74; T. féd. Suisse, 28 oct. 1998, D. 2000, Somm. 443, obs. Schneider : est réparable le
préjudice lié au goodwiU ou résultant de la perte définitive d’un client en raison d’une livrai¬
son défectueuse dans la mesure où il peut être prévisible pour le vendeur même en l’absence
d’avertissement exprès lorsque l’acheteur agit manifestement en tant qu’intermédiaire dans
un marché sensible et qu’il lui est par ailleurs impossible de livrer à ses clients à temps et
par d’autres moyens, une marchandise conforme, v. sur le remboursement des frais d’avo¬
cat, question exclue du champ d’application de la convention et relevant du droit appli¬
cable, C 7e circuit E.U., 19 nov. 2002, D. 2003, 2372, obs. M.-F. Papandréou-Deterville.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 359
1. V. C. féd. ail., 24 mars 1999, D. 2000, Somm. 435, obs. Cl. Witz. Cette idée reçoit
certaines applications en droit interne (CA Douai, 15 mars 2001, D. 2001, 307) et dans les
principes Unidroit, art. 7.4.8 : « Le débiteur ne répond pas du préjudice dans la mesure où
le créancier aurait pu l’atténuer par des moyens raisonnables ». V. égal. Y. Derains, RD aff.
int. 1987.380; sentence CCI 5865/1989, JDI 1998.1008.
2. V. F. Ferrari, Chron. CVIM, RD aff. int. 1999, n° 1, 86; égal. « Les décisions analy¬
sées » par Cl. Witz, D. 2005, 2289.
3. CA Colmar, 12 juin 2001, D. 2003, Somm. 2367, obs. W-T Schneider.
4. L’exonération suppose la réunion de trois conditions : la contravention doit avoir été
indépendante de la volonté du débiteur. Ensuite, l’événement invoqué ne doit pas avoir été
raisonnablement prévisible ni surmontable. Enfin, le débiteur doit avoir informé son cocon¬
tractant de sa survenance, dans un délai raisonnable, v. Civ. lre, 30 juin 2004, Bull. civ. I,
n° 192, D. 2005, Somm. 2289, obs. Cl. Witz, RTD com. 2004, 847; on notera que l’arrêt
écarte l’application de l’art. 79 dans une hypothèse de hardship ». Lorsque ces conditions
sont réunies, la victime perd le droit à indemnisation, mais elle n’en conserve pas moins
tous ses autres droits.
5. L’art. 79 permet au vendeur qui supporte les risques de fabrication, de s’exonérer,
dans l’hypothèse où les origines de la défectuosité de la marchandise se trouvent dans le
domaine du fournisseur (dans sa sphère de compétence) uniquement si la défectuosité
repose sur des circonstances se situant en dehors de son propre domaine d’influence et de
celui de chacun de ses fournisseurs : Cour féd. ail. 24 mars 1999, D. 2000, Somm. 435, obs.
Cl. Witz.
360 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lrc, 4 oct. 1989, Bull. civ. I, n° 304; Rev. crit. DIP 1990.316, note P. Lagarde.
V. égal. Missaoui, JCP 1996. I. 3927 ; MM. Bertrand, Calvo, Claret et Sleigh, « Convention
de Vienne et clauses limitatives des responsabilités ; les points de vue français et anglais »,
Gaz. Pal. 1992.1.263; E. Rawach, « La validité des clauses exonératoires de responsa¬
bilité et la Convention de Vienne », R1D comp. 2001.141. La garantie conventionnelle ne
relève pas de la convention, v. Civ. lre, 5 janv. 1999 préc. De même, la CVIM ne régit
pas les clauses pénales, rappr. T. com. Hasselt, 21 janv. 1997, D. 1998, Somm. 312, obs.
M.-F. Papandréou-Deterville.
2. V. CA Paris, 14 janv. 1998, D. 1998, Somm., obs. B. Audit; v. égal. C. suprême
Autriche, 29 juin 1999, D. 2002, Somm. 318, obs. V. Babusiaux.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 361
§ 2. Ventes maritimes
552 Caractères O Une vente maritime est une vente commerciale qui
implique un transport par mer1. La vente doit être suivie ou précédée
d’un transport de marchandises par mer; les deux contrats de vente et
de transport sont placés, par la volonté des parties, dans une certaine
dépendance l’un de l’autre. En outre, les marchandises vendues sont,
souvent, représentées par un titre, le connaissement2, qui, enrichi par
d’autres documents, la facture d’origine et la police d’assurance, est
remis à l’acquéreur (le capitaine détient ainsi les marchandises pour le
compte du porteur ou de l’endossataire du connaissement). D’où le
nom de « vente documentaire ».
L’une des principales difficultés est de cerner les relations entre la
vente et le transport. Dans l’absolu, ces contrats sont distincts3, ce qui
conduit à raisonner en termes d'effet relatif des conventions (C. civ.,
art. 1165 ; « privity ofcontract »). La réalité est cependant quelque peu
différente, si bien que ces contrats ne peuvent s’ignorer4. Au total, les
solutions sont souvent complexes.
553 Sources O Les ventes maritimes sont désignées dans la pratique par
des noms traditionnels qui sont quelquefois trompeurs, en ce qu ils ne
répondent pas à leur véritable nature. La loi française n 69-8 du
3 janvier 1969 sur les ventes maritimes s’est préoccupée de préciser
cette terminologie.
Les plus anciennes étaient les ventes au débarquement, parmi les¬
quelles on distinguait la vente par navire désigné et la vente sur embar¬
quement, ce qui prêtait à confusion. La loi de 1969 a conservé la dis¬
tinction sous la rubrique générale de ventes à l’arrivée. La vente la plus
récente est une vente à l’embarquement, l’acquéreur assumant les
risques des marchandises dès qu’elles sont mises à bord; cette vente
porte le nom de vente CAF, expression issue des lettres initiales des
trois mots : coût, assurance, fret (en anglais vente CIF : cost, insurance,
freight). Le dernier type de vente est la vente au départ; la plus répan¬
due porte le nom de vente FOB, expression forgée par les lettres ini¬
tiales des mots anglais free on boarà (franco-bord).
Les ventes maritimes se concluent, en général, sur la base de contrats
types dont le proforma varie suivant le genre de marchandises. Les
exemples ne manquent pas1. Un projet de règles internationales a
été arrêté par l'International law association à la Conférence de Var¬
sovie en 1928, mais les Warsaw Rules, relatives à la vente CAF, ne
paraissent pas avoir eu beaucoup de succès. Les Incoterms en ont eu
davantage.
Y. Tassel, « Le transport dans les ventes maritimes », in Mélanges P. Bonassies, éd. Moreux,
2001, 345.
1. V. les contrats types des groupements suivants : GAFTA (Grain and Feed Trade Asso¬
ciation), FOSFA (Fédération of Oils, Seeds and Fats Association), LCTA (London Corn Trade
Association), SAA (Silk Association of America), TFA (Tallow Trade Association) et RSA
(Refîned Sugar Association). L’Europe connaît d’autres contrats (par exemple, en France : les
contrats types de la chambre syndicale des graines et farines et de la meunerie de Paris, les
contrats des céréaliers de l’Afrique du Nord, les contrats de vente de café vert...).
2. Il se peut aussi que les parties soient elles-mêmes confuses : v. CA Douai, 27 mai
2004, BTL 2005, 642 : « ... les deux incoterms DDP et EXW ne peuvent se superposer sans
s’opposer ».
3. V. C. Gelens, Incoterms and Contracts ofCarriage on Liner Terms, Incoterms in Practice,
Ch. Debattista, Pub. CCI n° 505, 1995.
4. V. P. Cordier, « Ventes maritimes », J.-Cl. com., Fasc. 1350.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 363
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555 Liberté contractuelle O Les règles posées par la loi du 3 janvier 1969
de même que les dispositions issues des Incoterms n’ont aucun caractère
impératif. Les parties peuvent y déroger librement1. Les contractants
peuvent donc, par des clauses particulières, modifier à leur gré la formule
contractuelle usuelle et combiner les effets des divers types de ventes. Mais
la vente maritime, aménagée par une clause contractuelle, peut alors ne
plus entrer dans le cadre juridique correspondant à son intitulé. Ainsi, une
vente FOB assortie de la clause « poids délivré », par laquelle le vendeur
assume le risque des pertes de poids constatées à l’arrivée ne correspond
plus au schéma classique de la vente FOB qui opère en principe le transfert
des risques au départ (v. infra n° 556). De même, la vente CAF qui contient
des clauses mettant à la charge du vendeur l’ensemble des risques du
transport est en réalité une vente à l’arrivée mal dénommée, la clause CAF
mentionnée sous la rubrique « prix » n’ayant alors pour objet que d’indi¬
quer les éléments constitutifs du prix de vente2.
1. V. Corn., 2 oct. 1990, Bull. civ. IV, n° 222, DMF 1991.504, précisant que les règles
dites Incoterms résultent uniquement des usages commerciaux.
2. Corn., 19 mai 1952, DMF 1952.679.
3. Une variante est la vente CPT (Carriage Paid To), dans laquelle le transfert des
risques s’opère lorsque le vendeur remet la marchandise au premier transporteur : CA
Orléans, 18 nov. 2004, RTD corn. 2005, 640.
4. V. Req., 2 mai 1927, S. 1927.1.343.
5. CA Paris, 31 mars 2004, BTL 2004, n° 3034.
6. V. Com., 9 juill. 1996, Bull. civ. IV, n° 216. L’acheteur est partie au contrat de trans¬
port : Com., 3 avr. 1990, DMF 1990.426.
7. CA Aix, 30 avr. 1953, D. 1953.395. En outre, l’acheteur ne peut refuser la marchan¬
dise dès lors qu’elle est conforme aux prévisions de la vente, Com., 2 avr. 1996, D. 1996.559
et la note, DMF 1996.702, rapport J.-P. Rémery.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 365
B. Vente CAF
558 Définition O La vente coût, assurance, fret, toujours appelée par
abréviation vente CAF, est une véritable vente à l’embarquement
(L. 1969, art. 39), dans laquelle le vendeur prend l’obligation de
conclure le contrat de transport, de mettre la marchandise à bord et
d’assurer la marchandise contre les risques de ce transport.4
1. V. pour une clause FIOS («free in and out stowed », v. égal, infra n° 614) et, en
conséquence, pour une vente FOB arrimée où le chargement et l’arrimage sont à la charge
du vendeur, agissant pour l’acquéreur, Com., 13 févr. 1978, Bull civ. IV, n° 58; v. égal. CA
Aix 10 oct. 2005, BTL. 2006.432.
2. V. BTL 1997, 233 ; sur le FOB Anvers, v. CA Versailles, 14 mars 2002, DMF2002, 853,
RTD com. 2002, 772 et les obs. : au port d’Anvers, la mise en FOB s’effectue non pas lors
du chargement à bord du navire, mais à la remise de la marchandise dans le périmètre du
navire selon la résolution des organismes professionnels anversois.
3. Com., 2 avr. 1996, D. 1996, 559, rapport Rémery et la note.
4. V. Bellot, Traité de la vente CAF, thèse Aix, 2e éd., 1951, préf. Ripert; E. du Pontavice,
« L’évolution récente des ventes maritimes à l’embarquement », DMF 1966, 387 et 451;
« Les obligations des parties dans la vente CAF », DET1982, 378.
366 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CA Paris, 10 sept. 2003, DMF Hors Série 2004, n° 115; comp. Ch. nationale Argen¬
tine des appels commerciaux 31 oct. 1995, D. 1997, Somm. 225, obs. W. Rosch : « ... il y a
lieu d’appliquer les dispositions de la CV sur le transfert des risques ».
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 367
1. Comp. L. 1969, art. 41 : « La seule insertion dans le contrat des clauses ‘‘poids
reconnu à l’arrivée”, “poids délivré au port d’arrivée” ou autre clauses semblables n’a pas
pour effet de modifier la nature de la vente CAF ».
2. V. CA Paris, 7 nov. 1990, DMF 1991.185.
3. CA Paris, 6 juin 1952, JCP 1953. II. 7390, note de Juglart.
370 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Le vendeur reste par ailleurs tenu par une garantie des vices et une garantie contre
l’éviction, CA Paris, 29 sept. 1995, DMF 1996.905, obs. Y. Tassel.
2. V. not. Corn., 9 janv. 2001, DMF 2001.512 et les obs. Les conditions générales de ces
sociétés de contrôle contiennent de larges clauses d’exonération, généralement considérées
comme valables.
3. Pour une clause « poids délivré », v. Corn., 19 déc. 1995, Bull. civ. IV, n° 310.
4. Com., 2 oct. 1990, Bull. civ. IV, n° 222, DMF 1991.504. Une clause qui aurait pour
effet de soustraire l’acquéreur aux risques du voyage entraînerait la ré-qualification du
contrat, mais non sa nullité : Com., 19 nov. 1996, DMF 1997.402 : « les parties ne peuvent
convenir d’une clause qui aurait pour effet de soustraire l’acquéreur aux risques de route
sans qu’il en résulte une disqualification du contrat en vente à l’arrivée ».
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 371
nales (v. infra n° 607), ont interdit ces combinaisons du moins pour la
partie maritime du transport.
C. Vente à l’arrivée
567 Transfert de propriété' O Dans les ventes à l’arrivée, les marchandi¬
ses vendues se trouvent déterminées par leur chargement sur le navire.
Le chargement est établi par la remise du connaissement. Le connais¬
sement étant un titre représentatif de la marchandise, celui qui le
détient a la possession de la marchandise par l’intermédiaire d’un tiers
détenteur, en l’occurrence, le capitaine. Par la nature même du contrat,
la propriété de la marchandise n’est transférée à l’acquéreur qu’à l’ar¬
rivée du navire dans le port d’importation et le connaissement est
remis à l’acquéreur en temps utile pour qu’il puisse prendre possession.
Les risques du transport sont donc pour le vendeur (L. 1969, art. 36).
La vente à l’arrivée a longtemps été pratiquée à une époque où le
transport maritime était long, incertain dans sa durée et périlleux.
Celui qui importait des marchandises se souciait peu de courir les
risques du transport, alors qu’il ne pouvait choisir le navire transpor¬
teur et qu’il lui était difficile d’assurer la cargaison. Aujourd’hui, ce
mode de vente connaît un nouvel essor, car, compte tenu de la concur¬
rence internationale, les fournisseurs qui emportent les marchés sont
souvent ceux qui peuvent proposer les produits les plus achevés, ce que
sont les produits rendus à destination.
568 Vente sur navire désigné O C’est la forme la plus ancienne, la seule
qui ait été usitée au temps de la navigation à voile. Elle s’analyse comme
une vente ferme de marchandises embarquées sur un navire déterminé
pour telle destination, étant entendu que l’acquéreur prendra livraison
à l’arrivée, des mains du capitaine, et que le vendeur se chargera de
faire réaliser le transport. Le vendeur doit, dans le contrat, désigner le
navire; il doit aviser l’acheteur du nom du navire sur lequel il charge la
marchandise vendue. D’où la dénomination retenue. Cette désigna¬
tion est irrévocable; « elle rend le marché ferme », ce qui signifie sim¬
plement que le vendeur a exécuté son obligation.
Les parties conviennent de spécialiser les marchandises dès le départ
et dispensent le vendeur de « se remplacer » en cas de perte ou d’avarie
due au voyage maritime, c’est-à-dire survenue après la désignation du
navire et l’avis adressé à l’acheteur (L. 1969, art. 37, al. 2). Cependant,
si le transfert de propriété peut être anticipé, le transfert des risques ne
s’opère qu’à l’arrivée. Si le vendeur ne livre pas, les risques sont pour
lui : il ne perçoit pas le prix.
Ce type de vente n’est pas uniforme. Dans la vente par navire à dési¬
gner, le vendeur se réserve le droit de mentionner le navire dans le délai
fixé par le contrat; c’est seulement à partir de cette désignation que le
contrat est « ferme ». Dans d’autres types de contrat, les vendeurs
372 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. Les clauses allégeant les obligations dans les contrats, thèse Aix-Marseille 1981.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 373
1. V. R. Rodière, Droit des transports, t. 1, 2 et 3, lre éd. ; 2e éd. en un seul tome, 1977;
Bronner et Allegret, JCP E 1987. II. 11.14470; Ch. Debattista, « Carriage Conventions and
their interprétation in English Courts », Journal of Business Law, 1997. 130.
2. V. « Le nouveau droit international des transports », in Mélangés J. Béguin, Litec,
2005, 267; égal. Mütz, « Évolution du droit du transport international terrestre; étude
comparée des RU CIM et de la CMR », Rev. dr. uniforme 1998, 615.
L’OHADA a également adopté un droit uniforme des transports terrestres, v. Rev. dr. uni¬
forme 2003, 708.
3. V. Pour une théorie du contrat de transport, in Mélanges J.-L. Aubert, Dalloz, 2005, 103.
3 74 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
573 Sûreté O Une autre question commune à tous les modes de transport
est celle de la sûreté, c’est-à-dire la prévention des actes illicites de
terrorisme et de piraterie. La question, on le sait, est devenue très sen¬
sible et conduit les autorités communautaires et les législateurs natio¬
naux à prendre toute une série de mesures qui ont nécessairement un
effet sur l’organisation des transports, sur leur coût et sur la respon¬
sabilité des intervenants4. La réglementation la plus achevée est celle
du transport aérien : il est notamment prévu que les marchandises
hors gabarit ou opaques ne pouvant être contrôlées par les appareils à
§ 1. Transport routier
574 Convention internationale O La convention de Genève du 19 mai
1956, dite CMR, est entrée en vigueur en France le 2 juillet 1961. Modi¬
fiée par un protocole signé à Genève le 5 juillet 19783, elle constitue le
modèle « le plus abouti » des conventions matérielles. Son succès est
reconnu, à telle enseigne que personne ne songe à la remettre sérieuse¬
ment en cause. Tout au plus est-il question de moderniser certaines de ses
dispositions. Il reste qu’elle n’a pu éviter certaines difficultés dues, en
partie, à son plurilinguisme, les versions française et anglaise faisant foi.
La CMR a pour finalité de régler de manière uniforme les conditions
du contrat de transport international de marchandises par route, par¬
ticulièrement en ce qui concerne les documents utilisés et la responsa¬
bilité du transporteur. Elle comprend des dispositions relatives à la
formation du contrat et prévoit les mentions que doit comporter la
lettre de voiture. Elle aménage les situations relatives aux empêche¬
ments au transport et à la livraison, fait peser sur le transporteur une
obligation de résultat et traite des questions contentieuses.4
Enfin et surtout, le transport doit être régi d’un bout à 1 autre par le
même titre de transport : la CMR a alors le même champ d’application
que celui du titre de transport, peu importe qu’il y ait des transports
successifs et des ruptures de charge1.
Ces conditions étant remplies, il suffit pour que la CMR s’applique
que l’État de départ ou l’État prévu pour l’arrivée soit un État contrac¬
tant; peu important que les pays traversés ne soient pas contractants.
Le domaine territorial de la CMR (46 États contractants; 39 ratifica¬
tions) s’étend à l’Europe et certains pays du Maghreb (Tunisie; Maroc)
et du Proche-Orient (Liban), à l’exception de l’Albanie, de la Turquie
et des États Insulaires (Irlande, Islande, Malte). La CMR concerne tous
les transports au départ ou à destination de la France. Il est même
question de l’intégrer dans l’ordre juridique interne2.
1. V. Com., 21 nov. 1995, Bull. civ. IV, n° 86, D. 1998, Somm. 318; com., 2 mai 2001,
RTD com. 2001, 1055 et les obs.
2. Ce que l’Autriche et la Belgique ont déjà fait. Rien ne s’oppose, par ailleurs, à ce que
les parties à un contrat interne se soumettent à la CMR, v. Com., 1er juill. 1997, Bull. civ. IV,
n° 218, JCP 1998. 11.10076 et la note; CA Versailles, 22 nov. 2001, RTD com. 2002, 595 et
les obs. égal. F.-]. Sanchez-Gamborino, « La CMR en tant que loi applicable au transport
national », in Mélanges B. Mercadal, op. cit., 511.
3. Com., 17 déc. 1980, Bull. civ. IV, n° 432.
4. Ce qu'un protocole additionnel a prévu. Ce protocole élaboré par Unidroit et exa¬
miné par la CEE ONU devrait bientôt voir le jour.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 379
1. V. Com., 28 janv. 2004, D. 2004, 944, note J.-P. Tosi, JCP E 2004, 728 et les obs., qui
réserve l’hypothèse dans laquelle l'expéditeur a interdit à son cocontractant toute substitu¬
tion; égal, com., 13 juin 2006, D. 2006, 1967, note J.-P. Tosi, précisant que ne peut être
opposé au transporteur exerçant l’action directe que l’interdiction de substitution dont ce
voiturier a eu ou aurait dû avoir connaissance.
2. Com., 7 mars 2006, RTD com. 2006/3; CA Versailles, 3 avr. 2003, RTD com. 2003,
848; Comp. Com., 26 nov. 2002, Bull. civ. IV, n° 180, RTD com. 2003, 211 et les obs.
Sur le tribunal compétent : TGI Thionville, 22 janv. 2004, RTD com. 2004, 640
3. Com., 24 mars 2004, D. 2004, 1163, JCP E 2004, 1208.
4. V. L’art. L. 132-8 C. com.; Mélanges B. Mercadal, op. cit., 441; v. égal. T. com. Paris,
19 avr. 2005, BTL 2005, 325; RTD com. 2005, 642, et les obs.
5. Com., 5 févr. 2002, RTD com. 2002, 595 et les obs.
6. Com., 20 janv. 1998, Bull. civ. IV, n° 39.
7. Com., 27 janv. 1981, D. 1982.110, note A. Sériaux. Sur le vol, en tant que cas excepté :
Com. 2 juin 2004, RTD com. 2004, 640 et les obs.; v. plus strict, Com., 11 juill. 2006,
n° J 04-18.079.
380 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
contours de la faute lourde b Ce qui n’est pas très satisfaisant. L'une des
solutions serait d’abandonner la règle de l’équivalence dol/faute lourde
qui n’a plus guère de justification depuis que la jurisprudence voit dans
le dol une faute délibérée.
L’article 27 fixe à 5 % le taux d’intérêt de l’indemnité accordée; ce
taux est forfaitaire1 2.
1. V. Com., 4 juin 2004, Bull. civ. IV, n° 115 ; 30 juin 2004, RTD com. 2005, 641, et les
obs. ; CA Paris, 28 nov. 2001, RTD com. 2002,212.
2. V. Com., 3 mars 1998, Bull. civ. IV, n° 92.
3. V. Com., 28 mai 2002, RTD com. 2002, 596 et les obs.
4. V. Com., 1er oct. 1991, Rev. crit. DIP 1993, Somm. 758. Comp. en droit commun :
Conv. Rome art. 10.d donnant compétence à la loi du contrat : pour une application,
v. Com., 27 nov. 2001, RTD com. 2002.212. Sur le jeu de l’interruption, v. Com., 15 mai
2001, RTD com. 2001, 1056 et les obs. ; 27 nov. 2001, RTD com. 2002, 212 et les obs.
382 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Rappr. CA Paris, 29 juin 2005, RTD com. 2005, 872, et les obs. Sur l’action directe
contre l’assureur de responsabilité, v. Civ. lre, 20 déc. 2000, RTD com. 2001, 1057 et les obs.
2. V. CJCE, 28 oct. 2004, D. 2005, 547, note C. Brière, RTD com. 2005, 642, et les
obs.
Selon l’article 31 de la CMR, sont compétentes les juridictions du pays sur le territoire
duquel :
a) le défendeur a sa résidence habituelle ou son siège social,
b) sont situés le lieu de la prise en charge de la marchandise ou celui prévu pour la livraison.
La CMR ne dit pas que sont compétentes les juridictions du lieu de prise en charge ou de
livraison. Elle offre seulement un choix de pays « compétents », laissant à leur droit natio¬
nal le soin de déterminer le tribunal appelé à statuer. V. CA Rouen, 2e ch., 30 mars 2006,
Juris-Data 300983 : « les dispositions de la CMR n’ont pas pour objet de désigner directe¬
ment le tribunal spécialement compétent; en l’absence d’une règle de droit interne consa¬
crant le critère de désignation du for prévu par l’art. 31, la juridiction saisie, qui ne peut
refuser au demandeur le droit qu’il tient de ce texte de saisir une juridiction française, doit
se reconnaître compétente dès lors qu’elle a un lien suffisant avec le litige et que sa sai¬
sine est conforme à une bonne administration de la justice »; égal. Com., 17 janv. 1995,
BTL 1995.90; 11 déc. 2001, RTD com. 2002.213 et les obs.; v. encore Civ. lre, 20 déc. 2000,
Rev. crit. DIP 2001.683, note Heuzé, RTD com. 2001.1057 et les obs.; égal. M. Veiga de
Faria, RD aff. int. 1993, n° 8, 1072; égal. V. Theunis et J.-F. Peters, « L’article 29 de la CMR
et le forum shopping », in Mélangés B. Mercadal, op. cit., 521.
Ces règles sont impératives, en ce sens que le demandeur ne peut saisir que les juridictions
mentionnées : d’où le question de savoir si les clauses de compétence, au demeurant admi¬
ses (si elles font l’objet d’un « commun accord », v. Cass. Belgique 29 avr. 2004, RTD com.
2005, 642), fixent des règles de compétence exclusive ou au contraire non exclusive.
3. À moins de considérer que la décision ainsi obtenue ne serait pas susceptible
d’exécution.
4. En France, les hésitations sont permises, compte tenu de l’exigence — de principe —
d’un intérêt né et actuel pour agir (v. NCPC, art. 31). En droit international privé, l’intérêt
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 383
né et actuel est, en raison de son caractère procédural, commandé par la loi du for, la loi
du fond n’étant applicable que si elle n’accorde pas de droits à celui qui agit en justice,
v. Civ. lre, 4 déc. 1990, Bull. civ. I, n° 272, Rev. crit. DIP 1991, 558, note M.L. Niboyet.
1. V. cependant, CA Versailles, 7 févr. 2002, RTD com. 2002, 596 et les obs.
2. À ne pas confondre avec la Convention CLNI, sur la limitation de responsabilité des
armateurs fluviaux, applicable dans en Allemagne, mais pas encore en France. Sur la CMNI,
v. Hübner, DMF 2000, 972.
3. Pourtant considéré en droit français — mais à tort — comme un contrat de transport :
Com., 23 janv. 1973, Bull. civ. IV, n° 37, BT 1973, 366.
384 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 3. Transport ferroviaire
583 Conventions internationales O Sur l’initiative de la Suisse, qui a
été souvent appelée « la plaque tournante de l’Europe », après une série
de conférences tenues en 1878, 1881 et 1886, la convention interna¬
tionale du 14 octobre 1890, connue dans la pratique sous le nom de
convention de Berne, a unifié le droit des transports ferroviaires inter¬
nationaux. Cette convention inspira la loi suisse du 29 mars 1893 et le
Code allemand de 1897, tandis qu’elle fut adoptée par la France sans
modification de la législation interne. Elle a créé à Berne un Office
central qui a étudié les révisions périodiques nécessaires (convention
du 16 juin 1868 et 19 septembre 1906)2.
Après la dénonciation de la convention de Berne par la France en
1920, deux nouvelles conventions ont été élaborées à Rome en 1924
(révisées à leur tour en 1933) : Tune pour le transport international
des marchandises (CIM), l’autre pour le transport international des
voyageurs et des bagages (CIV). Après 1945, plusieurs autres révisions
sont intervenues à différentes reprises, jusqu’à la signature à Berne, le
9 mai 1980, d’une convention relative aux transports internationaux
ferroviaires (COTIF), à laquelle sont annexées la CIM et la CIV. Le
décret du 15 mai 1991 a publié le texte de ces conventions dans leur
dernier état, applicable depuis le 1er janvier 1991.
1. Plafond unique de 1 500 DTS pour le conteneur et de 25 000 DTS pour la marchan¬
dise à l’intérieur du conteneur, soit 26 500 DTS.
2. P.M.F. Durand, Les transports internationaux par chemin de fer, 1956; Bronner,
JCP 1986, éd. E. 1.14770. Une convention a été conclue à Belgrade pour le transport par fer
dans l’Est européen : elle est désignée par le sigle SMGS. Elle a sans doute perdu sa raison
d’être depuis l’adoption des Règles de Vilnius.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 385
1. M. Allégret, « Les nouvelles règles uniformes CIM », in Mélanges B. Mercadal, op. cit.,
395; G. Mutz, « La révision 1999 de la COTIF », in Me!anges B. Mercadal, op. cit., 474.
42 États avaient adhéré aux règles de la CIM, tous les États européens, à l’exception des États
qui sont succédé à l’Union soviétique, sauf la Lituanie, la Lettonie et l’Ukraine, ainsi que
4 États du Proche Orient et 3 en Afrique du Nord. On peut penser que les mêmes États
ratifieront les nouvelles règles (ce qui est en cours pour bon nombre d’entre eux).
2. V. RTD com. 2001, 1059; égal. RTD com. 2003, 209; RTD com. 2006.3.
386 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Comp. sous l’empire de l'ancienne convention : Com., 16 mai 1977, JCP 1978.
11.18881, note Rodière; 9 déc. 1997, Bull. civ. IV, n° 335.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 387
1. Cette lettre n’a pas de fonction commerciale : elle n’a pas la valeur d’un connaisse¬
ment (art. 6.5).
388 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. par ex., sous l’empire des anciens textes : Com., 28 févr. 1966, BT 1967, 22.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 389
§ 4. Transport aérien
591 Convention internationale O Le transport aérien est encore, par¬
tiellement, régi par la convention de Varsovie du 12 octobre 1929 (CV)
ratifiée par la plupart des pays et par la France depuis le 16 septembre
1932 L Le texte a concerné en fait tous les transports aériens interna-
1. Cas, Les Sources du droit aerien, thèse, Aix, 1964; J.-P. Tosi, Responsabilité' aérienne,
1978, Litec; plus généralement, MM. de Juglart, du Pontavice, Dutheil de la Rochère et
Miller, Traité de droit aérien, LGDJ ; L. B. Goldhirsh, The Varsaw Convention annoted, Kluwer
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 391
1. Le document ne vaut LTA que s’il est valablement signé par l’expéditeur et le trans¬
porteur : Com., 4 mars 2003, RTD com. 2003, 419, et les obs.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 393
1. V. Com., 17 oct. 2000, Bull. civ. IV, n° 158, RTD com. 2002.214. La présomption de
l’art. 18-3 est subordonnée à deux conditions : le transport terrestre doit s’intégrer dans
l’exécution d’un transport aérien, ce qui exclut l’hypothèse du transport combiné et il doit
être effectué en vue d’un chargement, d’une livraison ou d’un transbordement.
2. Auxquelles il faut ajouter la faute de la personne lésée (art 20, in fine).
3. V. par ex. Com., 14 mars 1995, Bull. civ. IV, n° 86 ; M.-M. Veaux, « La pénétration en
droit français de la théorie de la faute inexcusable en matière aérienne et maritime sous
l’influence des conventions internationales », in Mélanges Y. loussouarn, Dalloz, 1994,
p. 391 ; G. de Monteynard, Responsabilité et limitation en droit des transports, Rapport
C. cass. 2002, 247. On peut aussi rappeler que le concept tire son origine de la définition
donnée par la Cour de cassation à la faute inexcusable de la loi française du 9 avril 1998
sur les accidents du travail (Cass. 15 juill. 1941, DC 1941, 117, note Rouast).
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 395
1. V. du reste en ce sens, Corn., 21 mars 2006, RTD com. 2006, 519 et les obs., JCP 2006,
II, 10090, note M. Mekki. L’annotateur fait à juste titre état de l’évolution de la Cour de
cassation, aujourd’hui de nouveau favorable, à l’appréciation in concreto et donc au rappro¬
chement faute inexcusable/faute dolosive, mais critique la solution, en omettant toutefois
de relever que la jurisprudence aérienne rejoint, consciemment, la jurisprudence maritime
sur ce thème.
2. V. en cas d’actions connexes, Civ. lrc, 25 nov. 1997, Bull. civ. I, n° 331, décidant que,
la CV étant muette sur la connexité, rien ne s’oppose à ce que la cour compétente pour
connaître d’une demande dirigée contre le constructeur de l’appareil domicilié dans son
ressort l’est également, en application de l’art. 42, al. 2 NCPC, pour se prononcer sur l’ac¬
tion en responsabilité contre le transporteur aérien étranger. Cette solution a été renver¬
sée par Civ. lre, 11 juill. 2006, D. 2006, 2055, RTD com. 2006, 703 et les obs., qui souligne que
l’art. 28 de la CV énonce une règle de compétence directe ayant un caractère impératif.
396 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. Com., 3 juin 1997, Bull. civ. IV, n° 174. Le délai, compris comme un délai de
prescription (v. Ass. plén. 14 janv. 1977, D. 1977, 89, concl. Schmelck, arrêt (passagers)
remarquable, car se fondant sur les travaux préparatoires de la CV), est par ailleurs suscep¬
tible de suspension et d’interruption (v. CA Paris, 24 avr. 1990, D. 1990, Somm. 272), la
lexfori étant alors applicable (rappr. Conv. art. 29, al. 2) ; v. Boyer, Le délai de l’article 29
de la CV, un combat douteux de la Cour de cassation, RFDA 1981, 282; Rodière, « L’écou¬
lement du temps et la recevabilité de l’action en responsabilité contre le transporteur
aérien », D. 1976, Chron. 265, proposant que certaines causes d’interruption et de suspen¬
sion soient retenues.
2. Com., 13 nov. 2002, RTD com. 2003, 420 et les obs. ; 14 mai 1991, Bull. civ. IV,
n° 162, D. 1992, Somm. 85, obs. Rémond-Gouilloud; v. égal. CA Paris, 19 mai 1975,
BT 1975.336, refusant toute action de l’expéditeur réel; v. encore, Com., 1er déc. 1992,
BTL 1992.812, à propos du commissionnaire ne figurant pas comme expéditeur sur le titre
de transport; égal. Com. 7 juin 2005, JCP 2005,11, 10182, RTD com. 2005, 643; CA Ver¬
sailles, 4 sept. 2003, RTD com. 2004, 395. La jurisprudence anglaise est moins stricte :
v. Transidit, n° 44, 45, 46, 2005, p. 30.
3. V. J.-P. Tosi, L’affrètement aérien, LGDJ 1977; G. Guillaume, « Location, affrètement
et banalisation des aéronefs en exploitation internationale », RFD aérien 1978, 395.
4. On peut concevoir un affrètement « with demise » dans lequel la totalité des pou¬
voirs de gestion est transféré à l’affréteur, l’aéronef n’étant pas pour autant remis coque-
nue, car l’équipage du fréteur est remis à l’affréteur.
398 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 5. Transport maritime
599 Conventions internationales O La plupart des transports mari¬
times internationaux3 sont régis par la convention de Bruxelles (25 août
1924) pour « l’unification de certaines règles en matière de connaisse¬
ment » (dénommée en pratique Règles de La Haye). Le texte a été
exemple deux ports français. En même temps qu’elles ont exclu de leur
champ d’application les transports entre deux ports d'un même État,
les Règles de Visby (art. 5) ont modifié l’article 10 de la convention de
Bruxelles dans son texte de 1924, pour donner une liste précise des
trois situations dans lesquelles la convention s’applique :
- au cas de connaissement émis dans un État contractant;
- au cas où le transport a lieu au départ d’un port d’un État
contractant ;
- au cas où une clause du connaissement (dite clause paramount)
stipule que le transport sera soumis à la convention1.
Les Règles de Visby indiquent très exactement qu’il n’y a pas lieu de
tenir compte de la nationalité du navire, ni de celle du transporteur, du
chargeur, du destinataire ou de toute autre personne intéressée.
La convention couvre les opérations de transport depuis le charge¬
ment jusqu’au déchargement, alors que la loi française régit le trans¬
port depuis la prise en charge jusqu’à la livraison2. Ce qui donne lieu
aussi à des clauses très variées3.
1. La clause est ainsi conçue: «The Hague Rules contained in the International
Convention for the Unification of certain rules relating to Bills of Lading dated Brussels the
2 5 th August 1924 as enacted in the country of shipment shall apply to this contract. When
no such enactment is in force in the country of shipment, the corresponding législation of
the country of destination shall apply, but in respect of shipments to wich non such enact-
ments are compulsory applicable, the terms of the said Convention shall apply ». La clause
paramount doit être acceptée : CA Aix, 10 janv. 2001, DMF 2001, 313, note Y. Tassel. Elle
précise que la convention s’applique si le port de chargement est situé dans un État contrac¬
tant, ce qui étend le texte de 1924 : elle rend donc applicable la convention internationale
par la volonté des parties, mais elle ne produit d’effet que si la convention ne s’applique pas
d’elle même, v. Com., 20 juin 1995, DMF 1996, 382, note J.-P. Rémery; la clause étend
aussi l’application de la convention de 1924 aux situations qu’elle ne régit pas d’elle-même :
celle-ci couvre alors la période précédant le chargement et la période postérieure au charge¬
ment; d’où des possibilités de conflit avec la loi française de 1966.
La clause paramount pose une autre question : peut-elle déroger, d’une manière ou d’une
autre, au système de responsabilité? La jurisprudence ne l’admet pas : Com., 4 févr. 1992,
Rev. crit. DIP 1992.495, note P. Lagarde, précisant, au demeurant, que les parties qui
conviennent de soumettre leur contrat à une convention internationale ne peuvent écarter
celles de ses prescriptions auxquelles, si la convention était applicable de plein droit, il ne
saurait être dérogé à peine de nullité ; la solution est très brutale et sans doute trop ; elle
est aussi bien écartée par les tribunaux arbitraux, v. sentence CAMP 1999, 2 févr. 1999,
DMF 1999.836.
2. Com. 19 mars 1985, Bull civ. IV, n° 102 : il résulte de l’art. 2 de la convention que
celle-ci régit les opérations de déchargement comme les opérations de chargement et donc
les opérations de manutention portuaire; Com., 20 juin 1995, Bull. civ. IV, n° 191, Rev. crit.
DIP 1996.382, rapport J.-P. Rémery : « la responsabilité d’un transporteur maritime, qui
allègue que le dommage avait une cause antérieure au chargement ou postérieure au déchar¬
gement, doit s’apprécier, dès lors que le transport a été effectué au départ d’un port français,
sur le fondement de la loi française et non sur celui de la Convention de Bruxelles du
25 août 1924 modifiée qui ne s’applique qu’à la responsabilité encourue par le transporteur
maritime pendant le temps écoulé depuis le chargement des marchandises à bord du navire
jusqu’à leur déchargement ». Autrement dit, la loi française prend alors le relais de la
convention internationale. Son caractère impératif exclut le jeu de clauses d’exonération,
mais rien ne s'oppose à ce que les parties délimitent son champ d’application, v. : clauses
sous palan, de remise à quai...
3. - Clause CY/CY, désignant le lieu de livraison dans la zone portuaire : Com., 2 févr.
1999, DMF 2000, 132,
402 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Comp. Com., 5 mars 2002, Bull. civ. IV, n° 49, DMF 2002, 969, obs. M.N. Raynaud,
RTD com. 2002, 773, et les obs., appliquant sans aucune nuance les textes du transport.
2. CA Aix, 10 mars 1981, DMF 1982, 88.
3. Com., 29 janv. 1985, DMF 1985, 400.
4. Dont l’identification ne va pas toujours de soi; le notify est, en pratique, le destina¬
taire réel de la marchandise, alors que le consignée, personne désignée comme destinataire,
n’est qu’un intermédiaire, v. égal CA Paris, 10 sept. 2003, RTD com. 2004, 396 et les obs.
5. CA Aix, 2 mars 1972, DMF 1973, 74 : « les contrats nés d’une pratique commer¬
ciale répondant sous la dénomination booking note ou arrêté de fret, aux besoins de commo¬
dité et de sécurité des déplacements de certaines catégories de marchandises, telles que les
céréales, ne se rattachent, par essence, ni aux transports maritimes, ni aux affrètements,
mais doivent être assimilés aux premiers ou aux seconds selon les stipulations qu’ils
contiennent »; égal. H. Tainturier, DMF 1986, 143. Si les réservations de fret contiennent
404 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
une clause d’arbitrage et qu’il est prévu que ces documents seront annulés et remplacés par
les stipulations du connaissement et que les connaissements contiennent une clause attri¬
butive de compétence, seule cette clause est applicable et la clause d’arbitrage est manifes¬
tement inapplicable : Civ. lre, 11 juill. 2006, D. 2006.2273, DMF 2006, n° déc. 06, obs.
P. Bonassies et Ph. Delebecque.
1. Égal, sur la fonction administrative du connaissement, CA Paris, 22 oct. 2003, RTD
com. 2004, 396, et les obs. CA Versailles, 3 nov. 2005, DMF 2006, 219, obs. Y. Tassel. Le sea
way bill n’est qu’une lettre de transport maritime, sans valeur commerciale.
2. V. sur les conséquences d’une absence volontaire de prise de réserves : Com., 4 avr.
2006, RTD com. 2006.702. dans la pratique, il est fréquent que le transporteur soit sollicité
pour ne pas prendre de réserves et émettre un connaissement « clean », seul accepté par le
banquier engagé dans un crédit documentaire. Si le transporteur accepte, il met en jeu sa
responsabilité : d’où, en contrepartie, la délivrance par le chargeur d’une lettre de garantie
qui n’est autre qu’une contre lettre. Cette pratique est reconnue par la loi : L. 18 juin 1966,
art. 20, al. 1, et par les Règles de Hambourg : art. 17-2. La lettre de garantie frauduleuse est
cependant condamnée : art. 20, al. 2 et 17-3.
3. V. Civ. 17 août 1859, DP 1859, 347 : « le connaissement peut être stipulé à ordre...
il se transmet (alors) comme la lettre de change ainsi que les marchandises dont il est la
représentation »; égal, en matière fluviale : Com., 1er oct. 1985, Bull. civ. IV, n° 224 : « une
cour d’appel retient à bon droit que le connaissement fluvial négociable constitue un titre
dont la possession régulière vaut propriété de la marchandise qu’il désigne ».
4. V. Com., 21 févr. 2006, DMF 2006, 601, rapport G. de Monteynard, obs. Y. Tassel,
RTD com. 2006, 520 et les obs., l’arrêt précise utilement que le destinataire nommément
inscrit dispose d’un droit d’action à l’encontre du transporteur maritime, sans avoir à jus¬
tifier d’un intérêt pour agir.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 40 5
1. Une autre question est de savoir si l’affréteur peut ignorer la charte lorsqu’il agit en
tant que cessionnaire des droits du porteur : pro : Com., 8 oct. 2003, Bull. civ. IV, n° 154,
DMF 2004, 339, obs. M. Rémond-Gouilloud; contra : Civ. lre, 16 mars 2004, Bull. civ. IV,
n° 82, DMF 2004, 423, RTD com. 2004, 395 et les obs. ; la première chambre civile semble,
pour une fois, plus attentive aux usages, en relevant que le chargeur, cessionnaire, a un
recours contre le transporteur dans les cadre de la charte-partie initiale dont « il ne peut
ignorer les termes » ; égal, infra n° 614.
2. En réalité, les choses sont plus complexes : le réceptionnaire, porteur du connaisse¬
ment, peut être une filiale du chargeur/affréteur; l’inopposabilité de la charte n’a alors plus
de raison d’être, v. F. Arradon, « Chartes-parties et connaissement », Gazette de la CAMP
2003, n° 2.
406 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. not. Com., 16 avr. 1996, Bull. civ. IV, n° 120, D. 1996, 571, note Ch. Larroumet.
2. Cette obligation est personnelle à l’armateur et ne peut être déléguée; autrement
dit, l’armateur n’est pas libéré par le simple justification d’un certificat de classification :
Ch. Lords, 7 déc. 1961, Muncaster Castle, DMF 1963, 245, obs. P. Bonassies.
3. La loi française considère même que ces obligations sont impératives (Décr. 1966,
art. 38).
4. Le transport en pontée n’est régulier qu’avec le consentement du chargeur; si la
pontée est régulière, les clauses d’exonération de responsabilité sont admises. À défaut, le
transporteur est en faute. Le transport de conteneurs sur des navires porte-conteneurs
échappe bien entendu à cette spécificité, étant un transport « normal »; v. supra n° 600.
5. V. J.-B. Racine, « Le retard dans le transport maritime de marchandises », RTD com.
2003, 223.
6. V. not. les clauses de grève, Com., 15 nov. 2005, Fort Royal, DMF 2006, 146, obs.
Y. Tassel.
7. Com., 16 janv. 1996, Monte Cervantes, DMF 1996, 629 et les obs. ; CA Paris, 14 sept.
2005, BTL 2005, 677.
8. Com., 17 nov. 1992, Bull. civ. IV, n° 365; 11 juin 2003, D. 2003, 1837.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 407
1. V. Com., 17 juin 1997, Bull. civ. IV, n° 196, BTL 1997, 556; plus général. V. Villeroil,
« La garantie souscrite en l’absence de BL », Banque et droit, mars-avril 1998, 10.
2. V. La responsabilité' du transporteur maritime, Trav. Assoc. H. Capitant, 2002. Ce sys¬
tème est appelé à évoluer — modérément — en l’état du projet CNUDCI. En tout cas, il
restera impératif et non susceptible d’être aménagé directement (par des clauses de respon¬
sabilité) ou indirectement (par des clauses de compétence, v. CA Aix, 29 avr. 1990, DMF
1991.105, obs. P. Bonassies) par les parties.
408 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Où la faute du destinataire, par exemple, n’est pas un cas excepté : Com., 15 nov.
2005, RTD com. 2006, 250, et les obs.
2. Il faut encore tenir compte de la limitation de responsabilité de l’armateur, fixée
aujourd’hui par la convention de Londres du 19 nov. 1976 : les connaissements peuvent en
réserver l’application : v. sentence CAMP 1391, 22 oct. 2002.
3. Il faut entendre par unité de fret celle qui est mentionnée au connaissement, en
particulier à l’occasion de transports en vrac. Le « colis » doit se comprendre comme toute
charge individualisée et spécifiée comme telle sur le document de transport. Quant aux
conteneurs : si le connaissement en énumère le contenu et donne les références d’indivi¬
dualisation, la limite s’entend pour chaque colis mentionné, et non par conteneur. Ainsi la
mention « un conteneur » vaut pour un colis. Celle « un conteneur » de 20 caisses indivi¬
dualisées par marquage vaudra pour 21 colis (20 + 1).
410 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. par ex. Com., 14 mai 2002, DMF 2002.620; la notion est appréciée aujoud’hui
plus strictement, la disparition inexpliquée d’une cargaison ne traduisant aucune faute
inexcusable : v. Com., 7 févr. 2006, RTD com. 2006, 521, et les obs.
2. Ass. plén., 22 déc. 1989, « Mercandia », DMF 1990, 29, obs. P. Bonassies, JCP 1990,
II, 21503 et la note.
3. Les solutions sont aujourd’hui parachevées, car le chargeur réel comme le destina¬
taire réels se voient reconnaître le droit d’agir, Com., 19 déc. 2000, Bull. civ. IV, n° 208, DMF
2001, 222, obs. P. Bonassies, RTD com. 2001,1062 et les obs. La détermination du créancier
de l'obligation de transport en cas d’endossement du connaissement relève de la loi du
contrat : Com., 2 mars 1993, Rev. crit. DIP 1993, 632, obs. H. Muir-Watt.
4. Com., 21 févr. 2006, DMF 2006, 601, rapport G. de Monteynard, obs. Y. Tassel, RTD
com. 2006, 520 : « dans le connaissement à personne dénommée, le destinataire inscrit au
connaissement dispose d’un droit d’action à l'encontre du transporteur maritime ».
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 411
1. V. CJCE, 27 oct. 1998, DMF1999, 9 et les obs., Rev. crit. DIP 1999, 323, obs. H. Gau¬
demet-Talion, JDI 1999, 625, note Leclerc; égal. Civ. lre 16 mars 1999, Bull. civ. IV, n° 60.
2. Contrairement à ce que dit un peu rapidement, Civ. lre, 22 nov. 2005, cité infra,
n° 614; les clauses compromissoires étaient fréquentes à l’époque où la distinction trans¬
port/affrètement n’était pas acquise, v. CA Caen, 23 déc. 1915, JDI 1918, 180. Il reste que
le contentieux arbitral peut se développer par le truchement de lettres de garantie contenant
elles-mêmes une clause compromissoire.
3. V. les espèces analysées, in RTD com. 2001, 305.
4. V. CJCE, 28 sept. 1999, Rev. crit. DIP 2000, 253, note B. Ancel ; Com., 20 juin 2000,
Bull. civ. IV, n° 127, DMF 2000, 794 et les obs. ; égal. Com., 9 déc. 1997, Rev. crit. DIP 1998,
117, note J.-P. Rémery.
412 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. Com., 29 nov. 1994, DMF 1995.209, note P. Bonassies, 218, obs. Y. Tassel;
16 janv. 1996, DMF 1996, 393, obs. P. Bonassies; 25 nov. 1997, Bu II. civ. IV, n° 310;
Com., 25 juin 2002, Bull. civ. IV, n° 111, DMF 2003, 41, RTD com. 2003, 212 et les obs.
A. Kpoahoun Amoussou, Les clauses attributives de compétence dans le transport maritime de
marchandises, thèse Aix-Marseille 1999, préf. P. Bonassies.
2. À cela s’ajoute un second argument, car le destinataire est tenté d’abandonner la
partie, si la clause l’oblige à se déplacer dans un pays lointain pour recouvrer une somme
relativement faible, ce qui est le cas dans la plupart des « cargo daims ».
3. Civ. lre, 12 juill. 2001, DMF 2001, 996, RTD com. 2001, 1063 et les obs.; Com.
4 mars 2003, RTD com. 2003, 421, et les obs., Rev. crit. DIP 2003, 285, note Lagarde,
JDI 2004, 197, note A. Huet, DMF 2003, 556 et les obs.; égal CA Rouen, 23 juin 2005,
MV Johnny, DMF 2006, 27 et les obs. 16; E. Pataut, note sous Com. 8 déc. 1998, Rev. crit.
DIP 1999, 536. Une solution plus judicieuse eût été de retenir la compétence de la lexfori.
4. CJCE, 16 mars 1999, Transporta Casteletti, Rev. crit. DIP 1999, 539, note H. Gaude¬
met-Talion, JDI 2000, 528, note A. Huet, DMF 2000, 11 et les obs; CJCE, 9 nov. 2000,
Coreck Maritime, DMF 2001, 187 et les obs., RTD com. 2001, 307, Rev. crit. DIP 2001, 359,
note Fl. Bernard-Fertier, JDI 2001, 701, note Bischoff.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 413
une forme qui soit conforme à un usage connu des parties. Ce qui a été
compris avec un grand libéralisme. Sans doute les usages du commerce
international sont-ils une réalité. Sans doute les connaissements
contiennent-ils, le plus souvent, une clause de compétence. Mais il est
difficile de dire que la clause est acceptée pour la simple raison qu’elle
figure dans un connaissement. Peut-on affirmer qu’une partie est cen¬
sée connaître et accepter la clause du connaissement, alors que les
connaissements ne sont pas tous les mêmes, qu’ils varient en fonction
des compagnies, qu’ils ne sont pas rédigés une fois pour toutes et que,
dans ces conditions, la teneur de l’usage dépend d’un grand nombre de
facteurs? Autrement dit, encore faudrait-il pour que l’on puisse parler
d’usage que l’on entre dans le détail et que l’on considère ce qui se fait
sur telle ou telle ligne ou dans tel ou tel type de négoce. Du reste, c’est
ce à quoi invite le texte de l’article 23 qui demande de tenir compte
dans la reconnaissance des usages de « la branche commerciale consi¬
dérée ».
Le problème principal est en tout cas du côté du destinataire ou de
son assureur subrogé, car ce qui compte, aujourd’hui, est de respec¬
ter la loi applicable au contrat de transport. Au demeurant, il devrait
revenir aux autorités communautaires de déterminer « le droit natio¬
nal applicable » à l’opposabilité de la clause de compétence au destina¬
taire, en prenant en considération les objectifs mêmes du règlement
communautaire plutôt que d’abandonner cette question essentielle à
la juridiction nationale compétente. Sur ce point, comme sur beau¬
coup d’autres, l’Europe juridique a décidément beaucoup de mal à se
construire.1
1. Le problème se pose aussi avec acuité dans le projet CNUDCI. Les solutions favo¬
rables aux armateurs pourraient s’imposer.
2. Les armateurs anglais se sont regroupés dès le xixe siècle en Protection and Indemnity
Clubs (PcSt I Clubs) pour compléter les indemnisations dont ils sont débiteurs. Le rôle des
P <ScI Clubs s’est depuis diversifié au point que chaque fois qu’un navire est en difficulté, on
trouve un Club comme interlocuteur. Ils assurent en fait tout ce que les assureurs tradition¬
nels n’assurent pas. La question juridique essentielle est de savoir si l’action directe de la
victime — admise par le droit français, simplement reconnue dans des cas déterminés par
le droit anglais — est envisageable. Si la loi compétente est celle de la créance protégée
(v. infra n° 654, ad notam), elle devrait néanmoins se combiner avec celle du contrat d’as¬
surance déterminante pour le jeu de l’opposabilité des exceptions, v. Ch. Scapel, « L’action
directe contre le P & 7 Clubs », in Mélangés P. Bonassies, op. cit., 331.
414 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. not. pour une clause d’embargo, Com., 24 nov. 1998, Bull. civ. IV, n° 276.
2. V. J. Le Clère, Les chartes parties et l'affrètement maritime, Litec 1962; Scrutton, On
charter parties, Sweet and Maxwell, Lloyd's LP ; Bernard, L'affrètement : tendances et perspec¬
tives, éd. Giufré, Milan 1981.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 415
1. Com., 20 mai 1997, Nobility, DMF 1997, 891, note J.-P. Rémery, obs. M. Rémond-
Gouilloud; l’arrêt est également intéressant par la prise de position sur la loi applicable aux
privilèges, infra n° 815.
2. Comp. Com. 20 mars 1984, Bull. civ. IV, n° 110, DMF 1985, 97, note Achard, sur une
question de prescription. En pratique, les parties ne manquent pas de choisir la loi appli¬
cable, en se référant, au besoin, aux conventions internationales qui sont alors incorporées
au contrat.
3. Chartes souvent mises au point par une conférence assistée de leur assureur respon¬
sabilité, v. Baltic and international Maritime Conférence (BIMCO).
4. Les courtiers interprètes et conducteurs de navires jouissaient, en tant qu’officiers
publics, d’un monopole : celui de traduire, en cas de contestations portées devant les tribu¬
naux, les déclarations, chartes-parties, connaissements, contrats et tous actes de commerce
dont la traduction était nécessaire; celui aussi de la conduite (au port) d’un navire com¬
mandé par un capitaine étranger ne voulant pas agir par lui-même. Ils pouvaient aussi
accomplir, sous réserve de ne pas faire de commerce pour leur compte, tous les actes n’en¬
trant pas dans leur privilège découlant de leur mandat et n’étant que le complément de leur
assistance aux armateurs, v. CA Bordeaux, 15 févr. 1932, DP 1032, 2, 33, note Ripert. Ce
monopole, incompatible avec les exigences du droit communataire, a été supprimé par la
loi 2003-43 du 16 janvier 2001.
5. V. Com., 12 juin 1990, DMF 1990, 394, note R. A.
416 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
sans doute tenus d’un devoir de conseil, ils sont chargés de trouver un
emploi pour un navire ou chargés de trouver un navire et négocient
ainsi les chartes pour le compte de leurs donneurs d’ordre. La charte
contient les main terms, (caractéristiques techniques du navire, date et
lieu de livraison, durée de la C/P, taux de fret) et des détails (mise en
oeuvre de la responsabilité, paiements de certains matériels, conditions
de restitution). L’accord définitif est souvent subordonné à la décision
des dirigeants (subject board approval). Les clauses pré-imprimées et
clauses dactylographiées se conjuguent intelligemment, étant pré¬
cisé que ces dernières, en cas de contradiction avec les premières, l’em¬
portent en principe. Les clauses sont extrêmement variées et géné¬
ralement très complètes : sur les conditions de rupture par le fréteur,
par l’affréteur, sur le navire1, sur l’interprétation, sur l’arbitrage, sur
la prescription2, sur le fret, sur les garanties ...3. Il est deux types de
clauses que l’on rencontre quasi systématiquement dans les chartes-
parties :
- la new both to blâme collision clause est stipulée en prévision d’un
abordage et dit en substance qu’en cas d’abordage entre le navire trans¬
porteur et un autre navire consécutif à la faute de ce navire et à la faute
nautique du capitaine ou d’un pilote, les propriétaires des marchandi¬
ses transportées garantiront le transporteur de sa responsabilité à
l’égard de l’autre navire à la hauteur des dommages-intérêts que le
navire non transporteur pourrait réclamer compte tenu de l’indemni¬
sation accordée par ce dernier auxdits propriétaires. Si cette clause
n’était pas envisagée, les intérêts cargaison pourraient agir pour le tout
contre le navire non transporteur et ce dernier dans son recours extra¬
contractuel contre le navire transporteur ne pourrait se voir opposer
comme cause d’exonération la faute nautique, faute nautique qui est
un cas excepté dans les relations transporteur/marchandise, la consé¬
quence étant que le navire transporteur ne pourrait donc plus bénéfi¬
cier de l’exonération pour faute nautique; d’où le recours qu’il se
ménage contre les intérêts cargaison (le droit français de l’abordage est,
à cet égard, plus simple puisqu’il prévoit qu’en cas d’abordage dû à une
faute commune, la responsabilité des deux navires est engagée sans
solidarité, v. L. 7 juill. 1967, art. 4, al. 2, ce qui règle, en amont, la dif¬
ficulté) ;
- la new Jason clause prévoit qu’en cas d’accident, de danger ou de
dommage avant ou après le commencement du voyage, quelle qu’en
soit l’origine, les intérêts cargaison contribueront avec le transport aux
avaries communes susceptibles d’être encourues et spécialement au
versement des indemnités d’assistance éventuellement dues.
(sauf cas de force majeure prévue par la charte), ou au port sûr le plus
proche (so near as she can safely get).1
Le plus souvent, les ports d’escale sont nommément désignés : le
fréteur accepte cette désignation et considère les ports qu’il doit desser¬
vir comme étant des ports sûrs2. Le fréteur accepte donc que soit choisi
le port qui lui est le moins favorable et supporte ainsi les conséquences
dommageables d’un mauvais choix. Rien ne s’oppose, néanmoins, à ce
que l’affréteur accepte de garantir le fréteur et renforce ainsi ses obli¬
gations.
Quant à la responsabilité du fréteur, elle est également limitée aux
dommages résultant d’un mauvais arrimage, ainsi qu’aux dommages
résultant d’un manque de diligence de sa part pour assurer la naviga¬
bilité du navire. En fait, une fois l’innavigabilité du navire constatée
(mauvais fonctionnement du gouvernail, mauvaise étanchéité des
panneaux de cale...), l’absence de diligence est largement présumée par
les tribunaux. Une obligation de moyens renforcée pèse donc sur le
fréteur3. Le fréteur peut parfaitement s’exonérer de sa responsabilité
ou, a fortiori, fixer des plafonds de réparation : ces clauses sont, en
principe, parfaitement valables. En pratique, il est fréquent de renvoyer
purement et simplement aux Règles de La Haye Visby. Il ne s’agit pas
pour autant pour les parties de se soumettre à la convention interna¬
tionale, fût-elle impérative. Ce renvoi n’est qu’une incorporation des
termes et conditions de la convention dans la charte, laquelle prime en
cas d’incompatibilité ou de contradiction4.
L’affréteur, de son côté, doit payer le fret, lequel est très souvent,
« acquis à tout événement », c’est-à-dire exigible même si l’opération
ne va pas à son terme (« ship lost or not lost »). Il assume toutes les
opérations portuaires de chargement et de déchargement. Il doit aussi
charger la quantité de marchandises convenue au contrat5 et, surtout,
assurer le chargement et le déchargement de la marchandise dans les
1. Sur les clauses de liberté, v. égal. Les clauses allégeant les obligations dans les contrats,
thèse Aix-Marseille 1981
2. La notion de port sûr est appréciée à la lueur d’une jurisprudence célèbre : Eastern
City, High Court of Justice Queen's bench division, 16 juill. 1957, 1958, 2, Lloyd’s Report, 127 :
« a port will not be safe unless, in the relevant period oftime ; the particular ship can reach it,
use it and return from it, without, in the absence ofsome abnormal occurrence, being exposed to
danger which cannot be avoided bygood navigation and seamanship » ; v. égal. Sentence CAMP
n° 1021, Dyna Gemini, 25 juin 2004; égal. Sentence CAMP 1111 du 28 mars 2005; dans
le voyage charter, les risques sont en principe assumés par le fréteur ; toutefois, il se peut
que l’on ait indiqué dans la C/P une rangée de ports définie dans des limites géographiques :
le fréteur au voyage n’accepte plus les risques d’accès et de séjour du navire dans des ports
qui ne sont plus nommément dénommés ; dans ce cas, le fréteur au voyage est dans la même
situation que le fréteur à temps, v. encore : Buhler, « Obligations des affréteurs quant à la
sécurité du port et du poste », DMF 1984, 131 s.
3. V. par ex. Sentence CAMP n° 1119, 29 juill. 2005.
4. V. Sentence CAMP n° 999, 2 févr. 1999, DMF 1999, 836; égal. Sentence CAMP,
Dynamic Spirit, 18 juill. 1996, précisant que malgré le renvoi aux Règles de La Haye Visby,
le fréteur n’a pas entendu pour autant assumer la responsabilité des opérations de charge¬
ment et de déchargement
5. Ainsi que la qualité : généralement, le connaissement est exigé « clean », ce qui auto¬
rise la capitaine à rejeter la marchandise présentant des corps étrangers, tout en collaborant
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 419
avec l’affréteur : v. Sentence CAMP n° 1112 du 19 mai 2005 ; égal. Sentence CAMP n° 1118
du 19 oct. 2005.
1. Sentence CAMP 1102 du 2 août 2004, précisant que le refus des autorités du déchar¬
gement de la cale affectée par la mouille n’est pas un fait du prince ; comp. Sentence CAMP
1125 du 24 déc. 2005, refus de déchargement en raison des avaries de la marchandise,
avaries s’expliquant par le défaut de navigabilité du navire
2. Il est fréquent que les grues du bord soient mises à la disposition de l’affréteur : si ce
dernier occasionne un dommage au fréteur, il en est responsable, mais la clause ne rend pas
responsable l’affréteur de plein droit : Sentence CAMP 1114 du 14 juin 2005; il se peut
aussi que les rôles soient renversés et que les « stevedores » soient considérés comme les
préposés du fréteur et non plus de l’affréteur : Sentence CAMP 1121 du 25 juill. 2005.
3. « Free in and out », fixant la répartition des frais de chargement (in) et de décharge¬
ment (out) ; « Free in and outStowed » : id. Plus les frais d’arrimage et de désarrimage; « Free
in and out Stowed and Trimmed ». Ces clauses complètent l’économie du contrat d’affrète¬
ment où l’affréteur a la responsabilité du chargement et du déchargement. Dans le contrat
de transport, elles soulèvent davantage de difficultés dès lors que le transporteur est, en
principe, tenu d’assurer ces opérations, v. CA Aix, 6 mai 2004, DMF 2005, Hors série, n° 80 ;
comp. Sentence CAMP 1123 du 27 déc. 2005, à propos d’une même clause stipulée dans
un connaissement de charte-partie, clause considérée comme opposable au porteur du
connaissement et comme paticipant de l’économie du contrat de transport.
4. Ce qui donne lieu à un contentieux d’interprétation, pour l’essentiel, v. par ex.
Sentence CAMP 1120 du 12 sept. 2005.
5. V. Com., 28 avr. 1998, Bull. civ. IV, n° 141, précisant que si les clauses de la CP rela¬
tives à l’exigibilité et au mode de calcul des surestaries ont été incorporées au contrat de
vente CF, l’acquéreur, co-contractant de l’affréteur au voyage, doit les surestaries.
420 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Com., 15 févr. 1994, DMF 1994, 695 ; 14 oct. 1997, DMF 1997, 1094 : « le privilège
institué par l’art. 12 n’a pas pour effet de rendre le propriétaire fréteur personnellement
débiteur des frais d’escale commerciaux ».
2. Écartée néanmoins en cas de faute : v. Sentence CAMP n° 977, du 20 févr. 1998.
3. Com., 24 févr. 1982, DMF 1983, 84.
4. Com., 16 févr. 1973, navire Rachild Brovig, Bull. civ. IV, n° 28; égal. P. Bonassies, La
responsabilité du fréteur à temps à l’égard des tiers, DMF 1980, 131.
5. Dont le non paiement est sanctionné par la résiliation du contrat : v. Sentence
CAMP 1115 du 13 juin 2005.
6. Com., 28 janv. 2004, DMF 2004, 419 et les obs.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 423
A. Commission de transport
619 Notion et régime O Le commissionnaire de transport est un organi¬
sateur. C’est ce qui le différencie du courtier ou du mandataire qu’est
le transitaire, ou encore du transporteur lui-même dont l’activité prin¬
cipale consiste dans le déplacement de la marchandise. En proposant
un contrat de commission, le commissionnaire s’engage envers le
commettant à accomplir pour le compte de celui-ci les actes juridiques
nécessaires au déplacement de la marchandise d’un lieu à un autre5.
1. Com., 16 févr. 1988, Bull. civ. IV, n° 75. En réalité, le commissionnaire peut n’avoir
à accomplir qu’une partie de l’opération : Com., 5 juill. 2005, BTL 2005, 505. Mais relever
que l’intéressé n’est pas seulement transitaire ou agent de douane mais également char¬
gée de faire exécuter le transport n’est pas suffisant pour le qualifier de commissionnaire :
Com., 27 juin 2006, D. 2006, 2031. Comp. Com., 7 déc. 2004, RTD com. 2005, 192, déci¬
dant que lorsque le transporteur a le choix entre tel ou tel mode de transport, son obliga¬
tion est alternative. Il est parfois difficile de savoir si le commissionnaire est un véritable
commissionnaire, un sous-commissionnaire ou encore un transporteur, v. CA Versailles,
6 mai 2003, RTD com. 2003, 849.
2. Le commissionnaire est débiteur d’une obligation de conseil assez étendue : CA Paris,
22 mai 2003, RTD com. 2003, 850.
3. V. par ex. Com., 11 févr. 2004, RTD com. 2004, 397, rappelant que le commission¬
naire est garant des faits des transporteurs auxquels il s’adresse, dès lors que le choix de
ceux-ci ne lui a pas été imposé par le commettant.
4. V. Com., 8 juill. 1981, D. 1981, Somm. 541 obs. Mercadal, pour un contrat conclu
entre un commissionnaire français et un chargeur hollandais soumis à la loi française.
V. égal. CA Rouen, 2 févr. 1995, D. 1995.612, note B. M.; CA Versailles, 9 déc. 1993,
DMF 1995.94; CA Aix, 23 mars 2006, BTL 2006.569; rappr. Com., 8 déc. 1998, Bull. civ. IV,
n° 344. La commission n’est régie par aucune convention internationale de transport,
v. Com., 25 juin 1996, Bull. civ. IV, n° 196.
5. V. D. Guyot, « Le spediteur allemand : transitaire ou commissionnaire », BT 1986,
669. V. cependant, depuis la réforme du droit des transports en Allemagne, Herber, DET
1998, p. 591 ; v. sur la statut du « spedizionere » italien, CA Paris, 26 mai 2005, RTD com.
2005, 873, et les obs.
6. V. J.-M. Morinière, Le NVOCC, thèse Nantes 1994.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 427
projet Rome 1, ne dit rien à cet égard). C’est dans ce pays que le
commissionnaire de transport et l’expéditeur de la marchandise ont le
plus souvent leur principal établissement. Cette loi sera ainsi la loi
commune des contractants, celle qu’ils connaissent le mieux. Ce ratta¬
chement réaliste permet une bonne prévisibilité du régime juridique
devant régir le contrat international de commission de transport1.
1. V. CA Versailles, 10 mai 2005, RTD com. 2005, 643 et les obs. précisant que l’art. 4.4
de la Convention de Rome n'est pas applicable à la commission et qu’il convient dans ces
conditions de s’en tenir à la loi du lieu de résidence du commissionnaire, débiteur de la
prestation caractéristique, sous réserve de la clause d’exception applicable en l’espèce. Sur
la nécessité de prouver le contenu de la loi étrangère, v. Com., 16 nov. 1993, DMF 1994.120,
note Y. T.
2. V. plus généralement, « Actualité de la commission de transport », in Mélanges
B. Bouloc, Dalloz, 2007.
428 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Documents conventionnels
621 Adaptation des documents de transport habituels O Les parties
peuvent stipuler :
- un connaissement direct qui couvre la marchandise non seule¬
ment pendant le trajet maritime, mais aussi pendant le trajet terrestre
ultérieur. Ce connaissement a pour effet de rendre ses clauses oppo¬
sables tant aux porteurs qu’aux transporteurs successifs, et, générale¬
ment, de considérer le premier transporteur comme responsable des
autres. Toutefois, les clauses stipulent que la compagnie émettrice n’est
personnellement responsable que pour le trajet qu’elle effectue elle-
même. Elles ajoutent généralement qu’au regard des transporteurs
subséquents elle agira comme mandataire de l’expéditeur et ne répon¬
dra des avaries, manquants ou retards imputables à ces transporteurs
que suivant le régime juridique auquel ils sont soumis ; elles indiquent
parfois que, dans le doute sur l’origine du dommage, celui-ci serait
présumé tirer sa cause du trajet maritime1 ;
- une lettre de voiture ou de transport aérien directe dont les termes
sont comparables2.
C. Conventions internationales
623 CMR O La convention de Genève de 1956 s’applique au transport
multimodal comportant une phase routière, s’il n’y a pas rupture de
charge (Système roll/on, roll/off. ; avion-cargo..., art. 2). Pour que la
CMR joue en l’occurrence, il faut d’abord que les conditions d’applica¬
tion telles que précédemment examinées soient réunies (v. supra
n° 575). Il faut, en outre, que le transport commence par un transport
routier effectué par le transporteur multimodal, quels que soient les
autres modes : maritime, ferroviaire, fluvial ou aérien; la CMR
s’appliquera alors à la totalité du transport. Cependant, si l’événement
entraînant la responsabilité du transporteur survient pendant la phase
non routière de ce transport, sans que la responsabilité du transporteur
routier ne soit engagée, la responsabilité du transporteur routier sera
alors déterminée conformément aux règles du mode de transport
concerné, dans la mesure néanmoins où ces règles sont impératives1.
À titre d’exemple pour un transport multimodal transmaritime
comportant une phase routière, la CMR s’appliquera de bout en bout
si le transport est au départ ou à destination d’un pays contractant,
sous réserve des conditions suivantes :
- s’il s’agit d’un transport route-mer (et non mer-route) ;
- en l’absence de rupture de charge;
- s’il n’est pas possible de prouver le moment où est intervenu l’évé¬
nement cause du dommage;
- si l’événement a eu lieu pendant la phase terrestre;
- si l’événement a eu lieu pendant la phase maritime, il faudra
alors, soit qu’il engage la responsabilité du transporteur routier, soit
que ce transport maritime ne soit pas soumis à une règle d’applica¬
tion impérative (d’après la version française du texte), ce qui ne sera
pas le cas pour un transport maritime au départ ou à l’arrivée en
France puisque la loi française du 18 juin 1966 ou la convention de
Bruxelles de 1924 sont alors normalement applicables.
1. V. Com., 5 juill. 1988, Bull. civ. IV, n° 234, DMF 1989.219, R. Achard. Le conteneur
n’étant pas au sens de la CMR un véhicule, le transport de marchandises par conteneur ne
pourra être éventuellement régi de bout en bout par la CMR que s’il n’y a pas de rupture de
charge du conteneur ; c’est dire que le conteneur ne devra pas quitter sa plate-forme routière
ou ferroviaire, v. DET 1990, n° 2; plus généralement, v. « Les transports multimodaux et
superposés », in Les 50 ans de la CMR, IDIT 2006, Rev. dr. uniforme 2006/1.
430 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
est limitée à 17 unités de compte (DTS) par kilo de poids brut man¬
quant ou avarié; ne cas de retard, la réparation ne peut dépasser deux
fois le prix du transport;
- les plafonds de réparation sont écartés en cas de faute personnelle
intentionnelle ou de faute personnelle inexcusable, ce qui, on le notera,
est assez restrictif;
- la prescription est de 9 mois à compter de la livraison ou du jour
où les marchandises auraient dû être livrées.
Ce texte est très intéressant et a le grand mérite de la simplicité et de
la clarté. La Commission européenne ne souhaite nullement l’imposer.
Ayant conscience de l’importance des opérations multimodales au
moment où l’on parle, à tort ou à raison, des autoroutes de la mer, elle
entend soumettre à la discussion un projet, ce qui permettra, peut-être
et incidemment d’améliorer le texte de la CNUDCI sur le transport
entièrement ou partiellement par mer.
1. Com., 8 juin 1955, Bull civ. III, n° 207 : à propos d’un chargement de ruches et de
leurs abeilles.
2. La Convention de Montréal (art. 30) est plus généreuse que la Convention de Varso¬
vie (art. 25) car elle accorde à l’agent, en tant que préposé, tout le système de responsabilité,
les limites de responsabilité, mais aussi les conditions de la responsabilité
3. V. J. Bonnaud, Définition du consignataire du navire et de l’agent maritime français,
DMF 2001, 1041.
4. On peut cependant estimer que cette règle de conflit n’a plus de raison d’être depuis
l’adoption de la Convention de Rome.
5. V. Sentence CAMP 1122 du 7 déc. 2005.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 435
B. Auxiliaires de la marchandise
635 Transitaires O Le transitaire est le mandataire dont la mission est
limitée à la réception, à l’entreposage et à la réexpédition de la mar¬
chandise par un mode de transport, ainsi qu’à l’accomplissement des
diverses formalités y afférentes. Il exécute sa mission et rend compte
des opérations qu’il a effectuées dans le cadre strict des instructions
qu’il a reçues. Le contenu de son contrat dépend largement des usages b
En tant que mandataire, il est responsable en principe de sa faute prou¬
vée. Compte tenu de sa qualité de professionnel, la preuve de cette
faute est en fait facilitée. Le transitaire, contrairement au commission¬
naire, ne répond pas des faits du transporteur auquel il peut s’adresser.
Il n’a pas davantage à assurer les marchandises. Il n’est soumis à aucune
règle procédurale particulière. En pratique, il est souvent difficile de
distinguer le transitaire du commissionnaire. Le mode de rémunéra¬
tion est un premier critère, étant précisé que le commissionnaire per¬
çoit généralement un forfait. Il faut aussi tenir compte des mentions
apposées sur le document de transport : si le document porte dans
la case chargeur le nom du commissionnaire, on peut penser que
le contrat conclu est effectivement un contrat de commission, car le
commissionnaire contracte en son nom, contrairement au transitaire.
Enfin et surtout, le commissionnaire est un organisateur, alors que la
mission du transitaire est plus précise et limitée à tel ou tel acte. La
mise en oeuvre de ces directives est souvent délicate.
En tout cas, les transitaires et les commissionnaires interviennent
indifféremment en matière terrestre, aérienne ou maritime. Il n’y a ici
aucune spécificité en fonction du mode de transport.
1. V. par ex. Com., 12 juill. 2005, RTD com. 2005 , 874, et les obs. ; CA Paris, 27 mars
2002, RTD com. 2003, 213. Sur le devoir de conseil du commissionnaire en douane, v. CA
Paris, 19 janv. 2001, RTD com. 2001, 573.
2. L’une des difficultés est de savoir si le commissionnaire en douane substitué peut agir
contre le mandant, client initial, alors que ce dernier a déjà réglé ce qu’il devait ; la réponse
est aujourd’hui négative, v. Com., 3 déc. 2002, Bull. civ. IV, n° 188, D. 2003, 786, note
B. Mallet-Bricout, RTD com. 2003, 214 et les obs.
3. V. MM. Bonnaud et Legal, Rev. Scapel 2001, 67.
4. CA Paris, 4 janv. 2000, BTL 2000, 169 : précisant que la livraison n’apparaît pas
essentielle, mais uniquement comme l’aboutissement des opérations de stockage et de
gestion.
5. V. Com., 27 avr. 1979, BTL 1979, 401 ; T. com. Marseille, 15 juin 2004, BTL 2005, 335.
6. Com., 3 oct. 1989, Bull. civ. IV, n° 244 : une cour d’appel peut décider qu’une
convention par laquelle une société a chargé une autre société d’assurer le transport, la
manutention, le stockage de produits pétroliers qu’elle achetait pour revendre constitue une
commission de transport et ce, malgré une facturation distincte des trois phases succes¬
sives; égal. Com., 27 avr. 1979, Bull. civ. IV, n° 133.
7. Com., 20 juill. 1970, Bull. civ. IV, n° 252.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 439
§ 1. Marchés de construction
638 Diversité O Les marchés de construction ne sont pas nécessairement,
loin de là, des marchés privés. Il faut donc tenir compte de cet aspect
et respecter, le plus souvent, les règles applicables aux marchés publics,
1. G. Cavalier, Essai sur le contrat de services en droit international privé, thèse Lyon 3,
2005. On sait les difficultés que posent l’application de la loi du pays d’origine dans le cadre
communautaire. À ce jour, on ne sait exactement si cette règle est ou non remise en cause,
le principe de libre prestation des services posé par la nouvelle proposition de directive sur
les services ayant une portée limitée, v. A. Raynouard, JCP 2006,1, 157, n° 13.
2. G. Durand-Pasquier, Le maître de l’ouvrage, thèse Paris-I, 2005.
3. « Techniques » est plus approprié que « technologie », v. Contrats civils et commer¬
ciaux, précis Dalloz, n° 897.
4. Les « grands » contrats dans les exportations françaises sont en relative stagna¬
tion. Ils sont le fait de quelques entreprises et portent sur des opérations qui ne se renou¬
vellent guère : Centrale électrique, Airbus, Métro, Équipements de traitement de l’eau... Les
10 premiers groupes exportateurs français sont (v. Douanes, Insee, 2000) : Peugeot SA
(Industrie automobile), Régie Renault (Industrie automobile), Airbus Industries (Biens
d’équipement), Arcelor (Biens intermédiaires), Total (Biens intermédiaires), Rhône-Pou¬
lenc (Biens intermédiaires), EDF (Énergie), Alstom (Biens d’équipement), IBM (Biens
d’équipement), LVMH (Biens de consommation).
440 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
règles qui sont pour la plupart nationales. Les choses ne sont cepen¬
dant pas toujours très nettes, d’abord parce que la frontière droit
public/droit privé s’estompe et n’est pas universelle. Ensuite, parce
qu’il faut bien reconnaître que de nombreux marchés privés s’inspirent
des règles publiques et inversement1. La CNUDCI a bien compris cette
évolution et mis au point certains textes particulièrement intéressants.
Nous en rendrons compte avant de présenter quelques observations
sur les marchés privés.
A. Marchés réglementés
1. Loi type de la CNUDCI sur la passation
des marchés de biens, de travaux et de services
639 Préambule O Cette loi type, complétée par un Guide pour l’incorpo¬
ration en droit interne (pub. Nations Unies, 1995), a été mise au point
en 1994. Son préambule permet d’en comprendre très exactement les
raisons :
« considérant qu’il est souhaitable de réglementer la passation des
marchés (Le. « l’acquisition par un moyen quelconque de biens, de
travaux ou de services ») de biens, de travaux et de services2, afin de
promouvoir les objectifs suivants :
- aboutir à un maximum d’économie et d’efficacité dans la passa¬
tion des marchés ;
- favoriser et encourager la participation aux procédures de pas¬
sation des marchés des fournisseurs et des entrepreneurs et en parti¬
culier, le cas échéant, leur participation sans distinction de nationalité,
et promouvoir ainsi le commerce international ;
- promouvoir la concurrence entre fournisseurs ou entrepreneurs
pour la fourniture des biens, l’exécution des travaux ou la fourniture
des services devant faire l’objet de marchés;
- garantir un traitement juste et équitable à tous les fournisseurs et
entrepreneurs ;
- promouvoir l’intégrité et l’équité du processus de passation des
marchés et la confiance du public dans ce processus;
- assurer la transparence des procédures de passation des marchés ».
2. Projets d’infrastructures
640 Grands projets O Les grands projets de construction sont généra¬
lement contrôlés par les pouvoirs publics. Lorsqu’il s’agit de réaliser
de projet devant, en principe, être régi par la loi du pays hôte et devant
comporter toute une série de clauses, notamment sur sa durée, sa pro¬
rogation, sa résiliation ainsi que sur le règlement des différends).
B Marchés privés
1. Marché principal
645 Droit applicable O Lorsque le contrat est international, le marché
peut échapper à la compétence de la loi française et relever ainsi d’autres
dispositions. D’après l’article 4.3 de la convention de Rome, « dans la
mesure où le contrat a pour objet un droit réel immobilier ou un droit
d’utilisation d’un immeuble, il est présumé que le contrat présente les
liens les plus étroits avec le pays où est situé l’immeuble2 ». La situa¬
tion de l'immeuble est donc déterminante3. La précision s’applique,
1. Rappr. CA Versailles, 22 sept. 1993, Bull. Joly 1994.104, note C. Kessedjian. Comp.
pour un contrat de fourniture d’une serre, Civ. lre, 2 mars 1999, D. 1999 IR 86.
Le domaine de la lex situs est large, v. pour une action en revendication à la suite
de l’annulation d’une vente (mobilière) : Civ. lre, 9 déc. 1974, Bull. civ. I, n° 328, Rev. crit.
DIP 1975, 504, note Mezger.
V. pour une application de l’art. 22.1 du règlement 44/2001, à une action en résolution
d’une vente d’immeuble : CJCE, 5 avr. 2001, JCP 2001.11.10638, note C. Bruneau.
2. Rappr. CEDH 16 nov. 2004, JCP 2005, comm. 115, obs. Lechevallier, RDC 2005, 467,
obs. A. Debet : « un bail d’une durée de 300 ans confère aux preneurs un intérêt patrimo¬
nial entrant dans la catégorie des baux qui constitue un bien ». Rappr. égal, pour d’autres
contrats ayant un objet immobilier : sur les difficultés de délimitation du domaine de la
loi du 2 janv. 1970 sur les agents immobiliers, v. CA Paris, 21 janv. 1994, Rev. crit. DIP
1995.537, note P. Lagarde; v. égal. Tomasin, RD imm. 1993.167. Le « mandat » de l’agent
immobilier n’est pas un contrat ayant pour objet un droit réel immobilier; il est, par
ailleurs, permis de se demander si certaines dispositions de la loi de 1970, plusieurs fois
modifiée, n’ont pas le caractère de loi de police.
3. V. déjà, J.-P. Rémery, « Remarques sur le conflit de lois applicables au contrat
international de construction d’immeubles», D. 1985.255; égal. Civ. lre, 15 juin 1982,
Bull. civ. I, n° 223.
4. V. TGI Poitiers, 22 déc. 1999, Rev. crit. DIP 2001.670, note Rémy-Corlay; v. encore
A. Nuyts, « Les contrats relatifs aux immeubles en droit international privé conventionnel
européen : le cas du time-sharing », Revue de droit international et de droit compare', 2000,
143. La même solution devrait jouer pour les contrats d’assurance construction juridique¬
ment obligatoires.
5. V. not. M.-C. de Lambertye-Autrand, La distinction des meubles et des immeubles en
droit international privé, thèse Paris 1, 2001, no 232 s. comp. L. Perreau-Saussine, L’im¬
meuble et les méthodes du droit international privé, thèse Paris 2, 2004, n° 393 s., consi¬
dérant que les opérateurs du commerce international peuvent trouver dans le principe
d’autonomie à la fois un instrument sûr de prévisibilité qui leur permet de s’organiser et
une souplesse suffisante pour adapter leur comportement aux nécessités changeantes du
marché; égal. L. d’Avout, Sur les solutions du conjlit de lois en droit des biens, Economica
2006, préf. H. Synvet.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 44 5
648 Typologie O Les marchés sont extrêmement variés, ce qui n’a rien
d’étonnant, car ils sont avant tout le fruit de la liberté contractuelle. Il
n’est cependant pas inutile de chercher à les qualifier, si ce n’est à les
classer, car les parties ne sauraient tout prévoir et il est alors utile de
disposer de règles supplétives. Cette démarche est, il faut le recon¬
naître, très « civiliste », ce qui ne veut pas dire qu’elle soit dénuée de
pertinence même dans les opérations internationales où l’on s’en tient,
avant tout, au contrat tel qu’il a été conclu.
650 Contrat clés en mains O Si le contrat est conclu clés en mains (turn
key job), l’ingénieur doit concevoir l’installation et en diriger les tra¬
vaux. Le client doit, de son côté, payer le prix3 Si les prestations ne sont
pas parfaitement exécutées, sa responsabilité est engagée4. Mais une
1. Le Tourneau, op. cit., n° 10; J. Larrieu, Le contrat d'ingéniérie, thèse Toulouse 1984.
2. Il se peut que le contrat couvre un ensemble de prestations : on parlera alors plus
volontiers de « contrat d’ensemblier », v. Le Tourneau, op. cit., n° 405.
3. V. Mezghani, « La signification du prix dans les contrats clé en mains », JDI 1990, 271.
4. V. Civ. lre, 31 mars 1992, Contrats, conc. consom. 1992, n° 131, note Leveneur,
admettant la résolution pour manquement du fournisseur d’un système informatique
« clef en mains » à son obligation de conformité ; comp. Civ. lre, 26 nov. 1980,/D/1981.585,
note Kahn : « le contrat clé en main de fourniture d’une machinerie et de construction
d’un édifice pour la recevoir n’est pas soumis aux conditions générales de Genève de four¬
niture de biens d’équipement, dès lors que les parties n’ont pas conclu d’accord exprès écrit
450 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
s'y référant et que le contrat n’est pas un contrat de vente d’objet mobilier corporel »; égal.
Boon et Goffin, Les contrats clés en mains, Masson, 2e éd., 1987.
1. Il s’agit d’une étape très importante. Rappr. G. Gruwez, Les essais en vol, PU Aix-Mar¬
seille, 2005, préf. Ch. Scapel.
2. Une garantie peut être donnée : elle trouve son expression dans « l’engagement
d’achat ». Le vendeur en profite, comme son banquier qui est ainsi, grâce aux redevances
payées par l’acquéreur, assuré d’obtenir le remboursement de son prêt (v. Cabrillac et
Mouly, Droit des sûretés, Litec, n° 27).
3. Corn., 12 déc. 1984, Bull. civ. IV, n° 346, RTD civ., 1986.142, obs. J. Huet; égal.
3e civ., 16 mars 1977, JCP 1978.11.18913, note Hassler.
4. V. J. Huet, obs. préc. ; v. aussi Ph. Le Tourneau, « L’évolution des rapports contrac¬
tuels dans les transferts de technologie », in Mélanges P. Azard, Cujas, 1980, 153.
5. V. sentence Klôckner, JDI 1984, 409.
6. V. P. Blanchard, « Concessions et BOT électriques et gaziers en Cote d’ivoire : tenta¬
tives innovantes des années 1990 », RD aff. int. 2000/7, 829.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 451
2. Sous-traitance
652 Notion O La sous-traitance est l’opération par laquelle un entrepre¬
neur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre
personne appelée sous-traitant l'exécution de tout ou partie du contrat
d’entreprise ou d’une partie du marché public conclu avec le maître de
l’ouvrage (L. 31 déc. 1975 relative à la sous-traitance, art. 1er, al. 1).
Elle correspond à des activités très importantes, car il est rare qu’un
marché d’une certaine ampleur puisse être réalisé par une seule et
même entreprise. La spécialisation des tâches et leur extrême technicité
expliquent aisément le recours à la sous-traitance.
On peut considérer que la sous-traitance a (en droit français) une
dimension internationale chaque fois que l’une des parties à l’opéra¬
tion (le maître de l’ouvrage, l’entrepreneur principal et le sous-trai¬
tant) n’a pas un établissement en France. Tel est le cas lorsque l’une
des parties au contrat de sous-traitance est établie hors de France. Tel
est le cas également si le contrat de sous-traitance conclu entre des
entreprises françaises s’adosse à un marché principal dont le caractère
international est démontré. Cela paraît suffisant pour que la sous-
traitance mette en cause les « intérêts du commerce international »’.
La sous-traitance internationale soulève de nombreuses difficultés
aussi bien dans les rapports entre l’entrepreneur principal et le sous-
traitant que dans les relations qui peuvent se nouer entre le sous-trai¬
tant et le maître de l’ouvrage.
1. P. Lagarde, art. préc., p. 191, v. égal. CA Colmar, 16 mars 2006, JCP 2006.1V.2963,
appliquant la clause d’exception. Si le sous-traitant est appelé en garantie, il ne devrait pas
se voir opposer les dispositions de l’article 333 NCPC interdisant à l’appelé en garantie de
décliner la compétence du tribunal saisi de la demande principale, l’article 333 ne jouant
pas dans l’ordre international (Com., 30 mars 1993, Rev. crit. DIP 1993, 680, note H. Gau-
demet-Tallon, DMF 1993, 294, note Y. Tassel).
2. L’une des questions est de savoir si cet agrément peut intervenir en cours d’exécution
du contrat.
3. P. Lagarde, art. préc., p. 193.
4. V. G. Betto, « Sous-traitance internationale : comment écarter la loi française de
1975 ?», RDaff. int. 1999.411.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 453
1. P. Lagarde, art. préc., p. 199, précisant que si l’existence de l’action directe relève du
contrat de sosu-traitance, c’est à la loi du contrat principal de définir l’assiette de l’action;
v. égal. F. Leclerc, Les chaînes de contrats en droit international privé, JDI 1995, 267, 308 s.
En pratique, le sous-traitant est payé lorsque l’entrepreneur lui-même l’est (clause if and
when).
2. V. sur ce point, Contrats civils et commerciaux, Précis Dalloz, 7e éd., n° 916.
3. V. V. Heuzé, « La loi applicable aux actions directes dans les groupes de contrats :
l’exemple de la sous-traitance internationale », Rev. crit. DIP 1996.243. L’auteur préconise
aussi bien de donner compétence à la loi du contrat principal, à la fois pour régir l’existence
de l’action et l’étendue de l’obligation du maître. L’analyse repose sur l’idée qu’il s’agit
d’étendre au sous-traitant le bénéfice d’une obligation contractée envers un tiers par le
maître.
Comp. en matière d’assurance terrestre où la même question se pose et où l’on décide
d’appliquer à l’action directe de la victime contre l’assureur la loi de la créance protégée
— loi qui fonde l’action — et de combiner cette loi avec la loi du contrat d’assurance, seule
apte à fixer les conditions auxquelles l’assureur est engagé. Req. 19 févr. 1936, DP 1936, 49,
note Savatier; Ve civ., 14 oct. 1968, JCP 1969.11.16145, note J. Bigot; 21 avr. 1971, Rev. crit.
DIP 1972.302, note P. Lagarde; 13 mars 1979, Rev. crit. DIP 1980.717, note G. Légier;
20 déc. 2000, Rev. crit. DIP 2001.683, note Heuzé; égal, infra n° 828.
4. Les auteurs optant alors pour une répartition entre les lois ; pour la recevabilité de
l’action, loi du contrat principal; pour l’étendue de la réparation, loi du sous-contrat,
cf. H. Muir-Watt, note sous Civ. lre, 15 janv. 1991, Rev. crit. DIP 1993, 52; F. Leborgne,
L’action en responsabilité dans les groupes de contrats : étude de droit interne et de droit interna¬
tional privé, thèse Rennes 1995, n° 458 ; comp. V. Heuzé, art. préc., proposant l’application
de la loi du contrat auquel le défendeur est partie, le manquement à ce contrat justifiant
l’action du demandeur : c’est l’idée d’opposabilité par un tiers du contrat auquel il n’est pas
partie. L’analyse paraît plus exacte.
5. Ass. plén. 12 juill. 1991, D. 1991, 549, note J. Ghestin; Civ. lre, 23 juin 1992,
Bull. civ. 1, n° 195.
6. V. cependant, sentences CCI régulièrement analysées in JDI ou encore dans les
Cahiers de l'arbitrage.
454 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
Tout ceci permet de dire qu’il n’y a pas de formule unique de contrat
de communication de savoir-faire. L’obligation essentielle qui est de
transmettre un savoir-faire peut être comprise d’une façon plus ou moins
large et son exécution se trouver affectée de différentes modalités, selon
les éléments que comporte le « know-how » en cause1. La forme la plus
simple de cette obligation consiste pour le fournisseur à accueillir dans
ses installations un certain nombre d’ingénieurs du bénéficiaire pour des
visites techniques, au cours desquelles ils pourront prendre connais¬
sances du savoir-faire qui est exploité2. Cependant, il se peut que, dans
certaines situations, cette obligation minimum de laisser prendre
connaissance du savoir-faire, ne soit pas suffisante pour satisfaire le
bénéficiaire. Il convient alors de se demander si le fournisseur ne doit
pas, en ce cas, procurer en outre à son cocontractant une certaine assis¬
tance pour que ce dernier puisse retirer du contrat un certain profit.
L’obligation fondamentale du contrat serait ainsi amplifiée au point de
comprendre une obligation d’assistance.
§ 3. Contrats de distribution
pourrait pas exclure un associé pour des raisons disciplinaires. Dans les pactes extra-statu¬
taires, les clauses peuvent être admises dans la mesure où elles trouvent leur expression
dans des promesses unilatérale et conditionnelles de cession de titres et ne sont donc des
exclusions pures et simples, v. S. Darioseq et N. Métais, Les clauses d’exclusion, solution
à la mésentente entre associés, Bull. Joly 1998, 908 s. En dehors du droit des sociétés,
ces clauses ne soulèvent guère de difficulté, si ce n’est d’interprétation et de rédaction,
M. Gaspar, Les clauses d’exclusion dans les accords de coopération, thèse Paris-I, 1999.
1. V. P. Bonassies et C. Scapel, Traité de droit maritime, LGDJ 2006, n° 325 et s.
2. V. M. Behar-Touchais et G. Virassamy, Les contrats de distribution, LGDJ 1999,
n° 661 s.; D. Berlin, « Droit international et distribution internationale », DPCI 1993,
6 et s.; M.Seysen-Guérin, Le contrat de distribution international, thèse Paris XI, 2001;
F.-X. Licari, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, Litec 2002.
3. M. Behar-Touchais et G. Virassamy, op. cit., n° 664.
4. V. CA Paris, 30 nov. 2001, Cah. dr. entr. 2002/3, p. 29, obs. J. Raynard, Dr. et patri¬
moine juin 2001, 111, obs. Mainguy, précisant qu’une partie ne peut prétendre voir sanc¬
tionner de nullité, au regard des prescriptions que cette loi comporte, le contrat de droit
international expressément soumis au droit espagnol qui la lie à son cocontractant.
458 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
les conflits de lois en matière de représentation volontaire », Rev. crit. DIP 1984.413 et note
sous CA Grenoble, 11 janv. 1996, JDI 1997.123, commenté égal, par S. Poillot-Peruzzetto,
Rev. crit. DIP 1997.500; plus général, v. C. Diloy, Le contrat d’agence commerciale en droit
international, LGDJ 2000, préface Peyrefitte, avant propos J.-M. Jacquet ; Le contrat d’agence
commerciale internationale, coll. Faculté de droit, Liège, 1997.
Pour ce qui est de la compétence judiciaire, les règles habituelles, tirées du règlement 44/2001,
sont applicables : la juridiction française n’est donc pas compétente si, selon la loi applicable
(déterminée par la convention de 1978), la prestation de service (en l’espèce, placement de
polices d’assurance) doit s’exécuter en Angleterre : Civ. lre, 14 mars 2006, Bull. civ. I, n° 150.
1. La convention a été ratifiée par la France : loi du 2 juill. 1987, JO du 4 juill. 1987
et v. ce texte dans V. Heuzé, op. cit., p. 431 et s., la convention entrant en vigueur après
dix ratifications, article 33, v. Ch. Mouly, « La Convention de Genève sur la représentation
en matière de vente internationale de marchandises », RID comp. 1983.82.
2. Deux exceptions sont cependant organisées :
- lorsque la loi applicable aux questions couvertes par le texte a fait l’objet, de la part du
représenté ou du tiers, d’une désignation écrite acceptée expressément par l’autre partie,
aloi ainsi désignée est applicable à ces questions;
- la loi applicable est celle du pays dans lequel l’intermédiaire a agi si, soit le représentant
au nom duquel l’intermédiaire a agi, soit le tiers ont leur résidence habituelle dans ce pays
ou si l’intermédiaire y a agi en bourse ou pris part à une vente aux enchères.
3. Sur la qualification du contrat, v. Com. 10 déc. 2003, Bull. civ. IV, n° 198.
4. Doc. CCI, n° 496; v. C. Diloy, op. cit., n° 219; égal. Guide pour l’établissement du
contrat d’agence, Doc. CCI, n° 410; v. égal. P.-Y. Lucas et H. Scalbert, « Les agents dans les
460 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
pays du GCC (i.e.) du Golfe arabique», RD aff. int. 1993, p. 883. Plus généralement,
v. P. Crahay, Les contrats internationaux d'agence et de concession de vente, LGDJ, 1991.
1. Un intermédiaire indépendant chargé de la conclusion d’un seul contrat, par la suite
prorogé pendant plusieurs années, est un agent commercial au sens de la directive commu¬
nautaire : CJCE 16 mars 2006, aff. C-3/04, Poséidon Chartering BV; v. X. Licari, « La notion
d’agent commercial et la jurisprudence récente de la CJCE », Rev. Lamy droit civil, 2006, n° 29, 5 ;
cet arrêt est d’autant plus important qu’il indique que le juge communautaire est compé¬
tent pour interpréter la directive au-delà de son domaine d’application, les Pays-Bas ayant,
comme la France, étendu la directive au secteur des services, v. J.S. Berge, RDC 2006, 873.
2. Ces activités sont diverses et visent aussi bien la vente, que le transport ou encore
le louage.
3. Sur l’incidence du défaut d’immatriculation de l’agent sur le registre prévu, v. Com.,
19 nov. 1996, Bull. civ. IV, n° 273.
La loi de 1991 contient de nombreuses dispositions protectrices de l’agent : c’est un texte d’ordre
public interne, mais on ne peut y voir — au regard des législations étrangères à l’UE — une loi
de police applicable dans l’ordre international, Com., 28 nov. 2000, Bull. civ. IV, n° 183, RTD
com. 2001,1067, obs. J.-M. Jacquet, Cah. dr. entr. 2001/2, p. 12, obs. J. Raynard.
Comp. CJCE, 9 nov. 2000, Ingmar, Rev. crit. DIP 2001.107, note L. Idot, JDI 2000, 511 note
J.-M. Jacquet, décidant que le droit à une indemnisation de l’agent commercial après cessation
du contrat, garanti par la directive 86/653/CEE du 18 décembre 1986, est applicable alors
même que le commettant est établi dans un pays tiers et que, en vertu d’une clause à cet effet,
le contrat est régi par la loi de ce pays. V. L. Bernardeau, « Droit communautaire et lois de
police », JCP 2001.1.128. L’arrêt « Ingmar» a cependant un champ d’application limité. Sa
jurisprudence, favorable à la qualification de la loi de police dans l’ordre communautaire, ne
devrait s’appliquer qu’aux agents chargés de vendre des biens et des produits, seuls agents
concernés par la directive communautaire. Les autres, ceux chargés de négocier ou conclure des
prestations de services, ne sont concernés que par les législations nationales (dont la législation
française) qui ont souhaiter assurer une transposition au-delà des termes de la directive.
4. Civ. lre, 24 nov. 1998, Bull. civ. I, n° 277. Le non renouvellement donne droit à répar¬
tition du préjudice subi résultant de la perte pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation
de la clientèle commune, tandis que le caractère anticipé de la cessation des relations
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 461
1. Civ. lre, 15 mars 1988, Bull. civ. I, n° 83, décidant que le contrat de concession n’entre
pas dans le champ d’application de la Convention de La Haye du 15 juin 1955; v. égal, à
propos d’un contrat de commercialisation de pneus et de représentation du fournisseur sur
le marché français : CA Paris 5e ch. A, 20 avr. 2005, Speed Kart c. Racine Kart, RTD com.
2005, 641 et les obs. ; Il ne relève pas davantage de la Convention de Vienne. Le contrat de
concession relève de la loi choisie par les parties en application des critères de la Convention
de Rome, mais la loi régissant le contrat-cadre ne régit pas forcément les contrats d’appli¬
cation et vice versa, v. CA Paris, 26 sept. 1996, D. 1996.IR.245, Somm. 285, obs. B. Audit.
Sur les problèmes de conflit de juridictions (Règlement 44/2001, art. 5.1), tout dépend
désormais de la qualification retenue : rapproché d’une vente, c’est toujours le tribunal du
lieu où, selon le contrat, les produits ont été ou auraient dû être livrés ; ramené à un contrat
de service, on peut penser que ce serait le tribunal du lieu où les prestations du concession¬
naire ont été ou auraient dû, en vertu du contrat, être fournies ; classé comme un contrat
distinct d’une vente et d’un contrat de fourniture de service, il faudrait alors suivre la juris¬
prudence antérieure et rechercher où s’exécute l’obligation qui sert de base à la demande en
application de la loi compétente selon les règles de conflit de la juridiction saisie, v. Civ. lre,
15 mai 2001, cité, v. infra note 2; comp. Civ. lre, 23 janv. 1979, Rev. crit. DIP 1979.816,
obs. H. Gaudemet-Talion; Com., 18 mars 1997, D. affaires 1997.507; CA Paris, 14 oct.
1998, D. 1999, Somm. 291, obs. B. Audit. V. plus généralement M. Behar-Touchais et
G. Virassamy, op. cit., n° 685 et s.; sur la validité d’une clause attributive de compétence,
v. Civ. lre, 13 avr. 1999, D. 1999 IR 128.
2. Ce qui permet à certains de penser que la prestation caractéristique du contrat est
celle du distributeur. Il paraît cependant préférable de s’en tenir à la prestation du fournis¬
seur, initiateur et organisateur du réseau, v. Civ. lre, 15 mai 2001, Bull. civ. I, n° 134,
D. 2002, Somm. 1397, obs. Audit, JCP 2001.11.10634, note Raynard, D. 2002.198, note
C. Diloy, Rev. crit. DIP 2002.86, note Lagarde; 25 nov. 2003, Bull. civ. I, n° 237, D. 2004,
494, note Kenfack, JCP 2004, II, 10046, note Raynard, Rev. crit. 2004,102, note P. Lagarde,
JDI 2004, 1179, note M.E. Ancel, RTD com. 2004, 398 : « pour un contrat de distribution,
la fourniture du produit est la prestation caractéristique » ; contra lre civ., 8 févr. 2000,
Bull. civ. I, n° 39, D. 2000.741, note G. Blanc, Rev. crit. DIP 2001.148 ; v. encore M. Behar-
Touchais et G. Virassamy, op. cit., n° 769.
la même solution devrait jouer en matière de distribution sélective, v. D. Berlin, art. préc.,
n° 91 ; comp. CA Paris, 30 sept. 2004, RTD com. 2005, 192, et les obs.
Le futur règlement Rome I est ambigu, car il donne, sous réserve du choix exprimé par les
parties, à « la loi du pays dans lequel le distributeur a sa résidence habituelle ».
Plus généralement, v. P. Gourdon, L'exclusivité, LGDJ 2006.
3. Comp. Com., 8 févr. 2005, D. 2005, 639, annulant pour défaut de cause, en tenant
compte de l’économie de la convention, un contrat de concession ne comportant qu’une
contrepartie dérisoire pour le concessionnaire; égal. Lambert, « Le contrôle de l’assistance
dans le contrat de bière », D. 2005, 1085.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 463
rectement dans la zone, soit encore que l’exclusivité ne porte pas sur la
vente mais sur la prospection dans le territoire concédé. Pour des rai¬
sons tirées du droit de la concurrence, que l’on peut considérer comme
une « loi de police économique1 », le concessionnaire ne doit pas
bénéficier d’une protection territoriale absolue.
1. Cependant, dans la mesure où cette exclusivité existe, les prescriptions de la loi Dou-
bin s’imposent, mais cependant pas au titre de loi de police, CA Paris, 30 nov. 2001, Cah.
dr. entr. 2002/3.
2. V. Ph. Le Tourneau, Les contrats de franchisage, Litec 2003.
3. Ce qui n’est pas sans conséquence pour déterminer la loi applicable, v. M. Behar-
Touchais et G. Virassamy, op. cit., n° 768.
4. Ph. Le Tourneau, J.-CI. Contrats, fasc. 1810, n° 40. v égal. « Loi type Unidroit sur la
divulgation des informations en matière de franchise et le rapport explicatif », JCP 2003,1,
1724; encore Doc. CCI, n° 557/2000.
5. D. Ferrier, «La franchise internationale», JDI 1988.625; H. Kenfack, La fran¬
chise internationale, thèse Toulouse 1996, décrivant, notamment, quatre grandes méthodes
d’internationalisation :
- la franchise directe, simple ou avec une zone de développement dans un pays déterminé
où le franchisé doit être propriétaire des unités de franchise qu’il installe, avec, en général,
interdiction de « sous franchiser » ;
- la franchise par l’intermédiaire d’une filiale ou d’une succursale dans la pays d’implan¬
tation, cette structure accordant des franchises à des partenaires locaux en signant avec eux
des contrats de franchise directe ;
- la franchise par l’entremise d’une filiale commune avec un partenaire local;
- la franchise principale, contrat de portée internationale, par lequel le franchiseur permet
à un franchisé principal, moyennant rémunération, de conclure des accords — nationaux —
de franchise avec des franchisés.
6. Sur la détermination du tribunal compétent en application de l’art. 5-1 du règlement
44/2001, la jurisprudence du 15 mai 2001, v. supra n° 661, pourrait servir de référence, la
loi du franchiseur étant compétente, à défaut de choix exprimé par les parties ; rappr. CA
Paris, 13 janv. 1999, D. affaires 1999.633. Le futur règlement Rome 1 n’a cependant pas
retenu cette solution, en choisissant la protection du franchisé, le contrat devant être, sauf
volonté contraire, régi par la loi de la résidence habituelle du franchisé.
466 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Ph. Le Tourneau, J.-Cl. Contrats, fasc. 1810, nos 42 et 43. V. égal. O. Binder, « Les
initiatives d’Unidroit en matière de franchisage; vers un système moderne et transparent
de distribution », Rev. dr. uniforme 2000-707.
2. Une autre forme de franchise est le franchisage industriel par lequel un industriel
accorde à un autre industriel le droit de fabriquer et de commercialiser ses produits (v. fran¬
chise Coca-Cola). Ce qui implique la conclusion de nombreux contrats (brevet, assistance,
maintenance...).
3. V. CJCE, 3 juill. 1997, aff. C. 269-95, D. affaires 1997.932.
4. Com., 17 janv. 2006, n° 03-12.382, soulignant que l’obligation de non concurrence
est nécessaire pour protéger des droits de propriété industrielle ou intellectuelle du franchi¬
seur ou pour maintenir l’identité commune ou la réputation du réseau franchisé.
5. V. E. Jolivet, « Loi applicable et règlement des différends dans le contrat modèle de
franchise internationale CCI », in Le contrat de franchise, Bruylant 2001, p. 155.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 467
1. Il faut tenir compte également des nombreuses dispositions prévues dans le cadre
communautaire, v. B. Sousi-Roubi, Droit bancaire européen, Précis Dalloz; Th. Bonneau,
Droit bancaire, 6e éd. V. égal, le rôle important tenu par la Banque européenne d’investisse¬
ment, Les notes Bleues, oct. 1998, n° 144.
2. V. Th. Bonneau, Droit bancaire, n° 311. On signalera ici le rôle de l’Agence française
de développement qui est une institution financière spécialisée (c’est-à-dire un établis¬
sement de crédit remplissant une mission permanente d’intérêt public) et spécialement de
sa filiale Proparco intervenant dans le financement et la promotion du secteur privé,
v. « L’AFD », Les notes Bleues de Bercy, oct. 2000, n° 192.
3. V. Plus généralement, « Les opérations internationales de banque », RJ com. 1985,
n° spécial. ; ]. Morel-Maroger Bolze, Les opérations de banque en droit international privé,
thèse Paris-I, 2003, éd. 2004, préf. P. Mayer; J.-P. Mattout, Droit bancaire international,
éd. Banque, 3e éd., 2004.
4. V. Freymond, « Questions de droit bancaire en droit international privé », Rec. cours
La Haye, t. 131, 1970-111, p. 29 et s. Loussouarn et Bredin, Droit du commerce international,
n° 660 et s. ; Mattout, Droit bancaire international, n° 10 et s. Une banque se réfère généra¬
lement à la loi et aux usages du lieu de son établissement.
5. Th. Bonneau, op. cit., n° 98, ajoutant très exactement que cette définition doit être
appliquée dans les deux hypothèses les plus fréquentes en France, i.e. :
- si l’établissement de crédit étranger est installé en France, c’est la loi française qui est la
loi de la banque;
- si cet établissement effectue librement des prestations de services en France, sans y être
installé, c’est la loi étrangère qui est la loi de la banque.
468 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. pour un exemple négatif à propos de la loi française sur l’anatocisme (C. civ.
art. 1154), Corn., 20 oct. 1953, Rev. crit. DIP 1954.386, note Y. Loussouam.
2. Th. Bonneau, op. cit., n° 106.
3. V. L. 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant
dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, intégrée dans le Code
monétaire et financier ; on notera que le nouvel art. L. 564-3 précise que les mesures de gel
ou d’interdiction... s’imposent à toute personne copropriétaire des fonds... ainsi qu’à toute
personne titulaire d’un compte joint... et sont opposables à tout créancier et à tout tiers
pouvant invoquer des droits sur les fonds, instruments financiers et ressources écono¬
miques considérés.
4. V. L. 12 juill. 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre
le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants et les textes complémentaires,
Loi NRE, L. 11 févr. 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques
et surtout Directive 2005/60/CE du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l’utilisation
du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme ;
cette directive (partiellement transposée, v. Décr. 2006-736 du 26 juin 2006; Comment.
C. Cutajar, D. 2006.2104) impose, sous réserve du respect du secret professionnel, une
vigilance et une coopération accrue de la part des personnes et établissements visés.
Les mesures de vigilance s’appliquent dès l’instant que les intéressés nouent une relation
d’affaire (définie comme une relation d’affaires, professionnelle ou commerciale, liée aux
activités professionnelles des établissements et personnes soumis à la directive et censée,
au moment où le contact est établi, s’inscrire dans une certaine durée), concluent une
transaction, à titre occasionnel, d’un montant de 15 000 euros au moins, soupçonnent le
blanchiment ou doutent de la véracité ou de la pertinence des données concernant l’iden¬
tité d’un client.
Ces mesures comprennent l’identification du client, du bénéficiaire (le cas échéant), l’ob¬
tention d’information sur l’objet et la nature envisagée de la relation d’affaire et l’exercice
d’une vigilance constante de la relation d’affaire.
Les personnes visées sont :
- les établissements de crédit,
- les établissements financiers,
- les commissaires aux comptes, experts comptables et conseillers fiscaux, les notaires et
autres membres des professions juridiques indépendantes lorsqu’ils participent à toute
transaction financière ou immobilière ou lorsqu’ils assistent leur client dans la préparation
ou la réalisation de transactions portant sur l’achat et la vente de biens immeubles ou
d’entreprises commerciales, la gestion de fonds, de titres ou autres actifs appartenant au
client, l’ouverture ou la gestion de comptes bancaires d’épargne ou de portefeuille, l’orga¬
nisation des apports en société, la gestion de fiducies ou de structures similaires,
- les prestataires de services aux sociétés et fiducies,
- les agents immobiliers,
- les autres personnes négociant des biens pour un montant de 15 000 euros au moins, et
les casinos.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 469
1. Rappr. Com., 3 avr. 1984, Bull. civ. IV, n° 129; v. Leclerc, Martin et Synvet, RD banc,
et bourse 1990.100 et s.; égal. CA Pau, 1er mars 2001, D. 2002, Somm. 639, obs. Synvet.
2. Telle est l’analyse généralement faite, v. J.-M. Jacquet, Ency. Dalloz, Re'p. international,
V° Prêt; Vignal, in Mélanges M, Cabrillac, op. cit., 545.
Elle est sans doute exacte, en matière de crédit immobilier, si l’immeuble est situé en
France et si l’une ou l’autre des parties est établie en France. Comp. Civ. lre, 19 janv. 1999,
Bull. civ. I, n° 21, D. 1999, Somm. 292, obs. B. Audit, JCP 2000, II, 10248, note Vignal,
Defrénois 1999.523, note M. Revillard, à propos d’un prêt contracté à Genève par des
Suisses et soumis — valablement — à la loi suisse, l’immeuble, objet de l’acquisition, étant
pourtant situé en France.
En matière mobilière, la Cour de cassation semble favorable à la qualification de loi de
police : Civ. lre, 23 mai 2006, D. 2006,1597 note V. Avena-Robardet : « selon l’art. L. 311-37
C. consom. d’application impérative au sens de l’art. 7-2 de la Convention de Rome, le
tribunal d’instance est seul compétent quelle que soit la loi applicable ».
3. V. en ce sens, H. Synvet, « Les lois de police applicables aux opérations bancaires »,
Banque et droit, Hors série juin 1993, 15.
4. V. Civ. lre, 18 juill. 2000, Bull. civ. I, n° 216, Rev. crit. 2001.136 : lorsqu’un emprunt
est destiné à financer une opération immobilière concernant pour 46 % un immeuble
d’habitation et pour le solde un immeuble à usage professionnel, l’article 15 du texte ne
s’applique pas.
V. en matière de crédit mobilier, Civ. lre, 19 oct. 1999, Bull. civ. I, n° 281, Rev. crit. DIP
2000.29, note Lagarde, D. 2000.765, note B. Audit : viole les art. 3 C. civ. et la loi n° 78-22
du 10 janv. 1978 une cour d’appel qui, après avoir énoncé que les conditions d’application
de l’article 5 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 n’étaient pas réunies, retient que
les dispositions de l’article 7 de cette Convention ne concernent que les seules lois de police
et non les lois protégeant les consommateurs visés par l’article 5 et qu’il résulte de la dis¬
tinction même établie par les articles 5 et 7 que cette Convention ne range pas parmi les
lois de police celles destinées à la protection des consommateurs, telles que la loi du 10 janv.
1978, alors que la Convention de Rome n’étant pas encore en vigueur, la loi française sur
le crédit à la consommation du 10 janv. 1978 était d’application impérative pour le juge
français.
Rappelons que l’article 5 de la Convention de Rome précise que l’on ne peut priver le
consommateur de la protection assurée par les dispositions impératives de la loi de son pays
de résidence, le texte édictant par ailleurs certaines conditions « objectives » auxquelles il
s’applique (démarchage, publicité, signature de certains documents dans le pays de rési-
470 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
Ces règles ont un bel avenir devant elles puisque les directives
communautaires visant la coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant 1 accès à 1 activité des
établissements de crédit et son exercice, les laissent intactes1.
Sous le bénéfice de ces observations, on rendra compte non pas de
tous les contrats bancaires2, mais des principaux contrats de finance¬
ment3, en distinguant très schématiquement le financement des expor¬
tations et celui des importations4.
A. Crédits de préfinancement
668 Diversité O Les crédits de préfinancement5 sont accordés aux chefs
d’entreprise qui ont besoin d’avances pour produire les biens à expor¬
ter. Sous certaines conditions, le bénéfice de ces crédits peut être étendu
aux entreprises sous-traitantes. Leur durée maxima est de deux ans et
leur montant couvre 90 % des dépenses nettes engagées pour l’exé¬
cution des contrats.
Ces crédits peuvent être spécialisés, c’est-à-dire servir au finance¬
ment d’un marché déterminé (crédits sur commande ferme). Ils
peuvent aussi être accordés pour financer le courant d’affaires régulier
de l’entreprise avec l’étranger (crédits sans commande ferme); ces
crédits sont alors revolving.
Afin de permettre leur mobilisation, ces crédits donnent lieu à la
souscription d’un billet par l’exportateur à l’ordre de la banque cré¬
ditrice. La Banque française pour le commerce extérieur (BFCE,
aujourd’hui privatisée) ou même, depuis quelques années, toute
banque, donne ensuite son aval. La mobilisation intervient enfin et
dence du consommateur) ; lorsque ces conditions ne sont pas remplies, l’article 7 prend
alors le relais comme vecteur de l’application des dispositions protectrices.
1. V. B. Sousi, Rev. dr. bancaire 1990.155; Vasseur, « Les problèmes juridiques de l’Eu¬
rope financière », Rev. Banque et droit, 1988.50 et s.
2. V. pour un contrat de change, réputé conclu sans condition ni faculté de rétracta¬
tion : Com., 28 mars 2006, D. 2006, 1105.
Sur l’importance des contrats-cadre, v. P. Mousseron, Dr. et patrimoine 2005, 115.
3. La loi du contrat s’applique au contrat de prêt dans les conditions habituelles. On
rencontre des clauses originales, à l’exemple de la clause de défaut croisé autorisant le
prêteur à résilier le contrat si l’emprunteur manque à l’une quelconque de ses obliga¬
tions financières, même à l’égard d’un tiers, v. J. Gruber, « Cross-default clauses in finance
contracts », RD aff. int. 1997.591. V. égal. Y. Zein, Les pools bancaires, aspects juridiques,
éd. Économica, 1998; Ganem, «Le financement des grands projets internationaux»,
RD aff. int. 1997.535.
4. Sur cette distinction fondée sur la finalité du crédit, finalité qui justifie que les crédits
à l’exportation bénéficient d’avantages particuliers, contrairement aux autres, v. Th. Bon¬
neau, op. cit., n° 617 ; égal. P. Antoni, Les techniques de crédit à l’exportation, RJ com. févr.
1985, 8 s.
5. V. Chevalier, « Le préfinancement export, principes et montages », Petites affiches,
août 1991.12; J. Stoufflet, JCP 1968.1.2159.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 471
1. V. D. Bureau, RDC 2004, 449. L’auteur observe très justement que le texte corres¬
pond à la définition fonctionnelle de la loi de police, mais laisse entière la question de savoir
s’il répond à sa définition conceptuelle. Il n’est pas sûr, en effet, qu’une disposition sur
l’opposabilité aux tiers d’une cession de créance est une loi dont l’observation est nécessaire
à l’organisation politique, sociale ou économique du pays.
2. V. P. Lagarde, « Retour sur la loi applicable à l’opposabilité des transferts convention¬
nels de créances », in Mélanges ]. Béguin, Litec 2005, 415.
3. V. RD bancaire 2004, 128.
4. V. MM. Ancel, Kieninger et Sigman, « La proposition de règlement Rome 1 et les
effets sur les tiers de cession de créances », Banque et droit, mai juin 2006, 39; P. Lagarde,
« Commentaire du projet Rome 1 », Rev. crit. DIP 2006, 331, n° 19.
5. V. J. Stoufflet, « L’apport au droit français de la Convention des Nations Unies sur la
cession de créances dans le commerce international », Banque et Droit, 2003, n° 90, 37 s.
474 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
C. Crédit acheteur
675 Intérêt O Le crédit acheteur est un mode de financement des expor¬
tations. Le banquier prête ici directement à l’importateur (acheteur), à
l’occasion d’un contrat commercial auquel il reste étranger, en stipu¬
lant que le remboursement devra intervenir dans les termes du contrat
bancaire et indépendamment des aléas du contrat commercial, c’est-à-
dire du contrat de base2. Plus précisément, le banquier consent une
ouverture de crédit irrévocable à son client, l’acheteur — emprunteur,
et s’engage à payer le tiers bénéficiaire, exportateur, désigné dans les
instructions de son client.
La réalisation du crédit permet un paiement comptant de l’exporta¬
teur français par la banque, à charge pour l’exportateur de présenter,
dans un certain délai, des documents spécifiés. Mais la banque ne
prend pas d’engagement inconditionnel vis-à-vis du bénéficiaire. La
banque n’est que le mandataire de l’acheteur-emprunteur et doit res¬
pecter toutes ses instructions (paiement « monobloc », progressif...),
au demeurant irrévocables et acceptées dans la convention de crédit et
dans la notification qui en est faite au bénéficiaire3.
D. Financement de projet
676 Définition O Le financement de projet peut être défini comme un
prêt dont le remboursement n’est assuré que par la réussite du projet
auquel il est affecté b Rappelant le prêt à la grosse aventure2, ce finan¬
cement est utilisé dans les domaines les plus variés : industries lourdes,
exploitation d’énergie, de minerais, aéronautique, télécommunica¬
tions... L’opération peut correspondre à ce qu’il est convenu d’appeler
le BOT (Build Operate Transfer) : un État délègue à un investisseur
étranger la conception, la construction, l’exploitation et la mainte¬
nance d’un équipement public; la mission est réalisée par l’entremise
d’une société ad hoc, localisée dans le pays hôte et l’investisseur est
rémunéré par les recettes tirées de l’exploitation du bien, pendant une
certaine période, à l’issue de laquelle la propriété du bien est transférée
à l’État hôte (v. égal, supra n° 651).
L’opération construction-exploitation-acquisition (Built Own Ope-
rate) comporte les mêmes caractéristiques, l’investisseur devenant
cependant propriétaire de l’équipement à l’expiration du bail dont il
bénéficie.
Le banquier prête ici à une idée et accepte de se faire rembourser et
rémunérer en fonction de la réussite de l’opération. Le prêt sera affecté
et garanti par toutes sortes de sûretés. L’une d’entre elles réside dans
la clause de substitution (step-in), clause par laquelle le prêteur se voit
octroyer le droit de désigner un nouveau concessionnaire en lieu et
mica, préf. Schaeffer, 1995. v. aussi bien, Th. Bonneau, op. cit., n° 626, considérant que le
versement des fonds intervient non seulement en vertu d’un mandat, mais également d’un
engagement personnel, autonome et direct de la banque à l’égard du fournisseur. Il reste
qu’il est souvent convenu entre l’acheteur et son banquier que le remboursement se fera
nonobstant toute exception tirée du contrat commercial; c’est la fameuse clause « Isa-
bel » : « les prêteurs étant absolument étrangers au contrat passé avec le fournisseur, l’em¬
prunteur ne pourra se soustraire aux obligations qu’il a souscrites aux termes de la présente
ouverture de crédit en opposant aux prêteurs des réclamations ou exceptions, quelles
qu’elles soient, tirées dudit contrat, notamment de son exécution ou de quelque autre rap¬
port qui le lierait au fournisseur ».
1. Pour la définition du financement de projet, voir notamment M. Sarnet, « Les finan¬
cements internationaux de projets en Europe », Banque 1980.392; A. Grenon, « Project
financing : concepts fondamentaux et aspects juridiques », DPCI 1980.189; Ch. d’Auvigny-
Lombard et F. Lombard, « Risques et garanties des financements internationaux des projets
dans les pays en voie de développement », Banque 1980.1361; A.M. Toledo et P. Lignères,
Le financement de projet, éd. Joly, 2001, préf. L. Aynès.
2. C. civ., art. 1964; C. com., art. 311 (abrogé). Le prêt à la grosse aventure n’est pas
pour autant interdit et se pratique encore dans certaines régions du monde. Rappelons qu’il
s’agit du contrat aléatoire par lequel un capitaliste place de l’argent dans une expédition
maritime avec l’espoir, en cas de succès de cette expédition, d’être remboursé et de recevoir
un profit important, la prime de grosse ou le profit maritime. Fait devant notaire ou sous
signature privée, le contrat doit énoncer le capital prêté et la somme convenue pour le
profit maritime, les objets sur lesquels le prêt est affecté, les noms du navire et du capitaine,
ceux du prêteur et de l’emprunteur, si le prêt a lieu pour un voyage, pour quel voyage et pour
quel temps, l’époque de remboursement. Ce contrat a une triple fonction; association,
crédit et assurance (dans laquelle le capital est payé d’abord et remboursé s’il n’y a pas de
sinistre). Le prêt à la grosse aventure est une assurance dans laquelle l’indemnité est versée
par avance et sous condition résolutoire.
478 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
E. Affacturage international
678 Affacturage à l'exportation et à l'importation O L’exportateur
français recourt souvent à la technique de l’affacturage. Il transmet
ainsi par subrogation (conventionnelle, supposant un paiement et la
délivrance — contemporaine — d’une quittance subrogative’) ses
créances sur l’étranger à son factor1 2. Cependant, comme celui-ci ne
peut apprécier la solvabilité des débiteurs étrangers, c’est le factor des
étrangers qui interviendra et garantira au factor français la solvabilité
des clients. Le factor de l’importateur reste toutefois étranger aux rela¬
tions entre le factor de l’exportateur et l’exportateur lui-même, ce
dernier ne traitant qu’avec celui qui achète et paie sa créance. Il demeure
également étranger au débiteur, bien qu’il reçoive généralement man¬
dat de la part du factor de l’exportateur pour procéder au recouvrement
de la créance transmise à ce dernier par le fournisseur3.
Pour développer l’affacturage international4, une convention a été
élaborée, sous l’égide d’Unidroit. Le texte a été adopté à Ottawa le
28 mai 1988 (avant d’être ratifié par la France par une loi du 10 juillet
1991)5. Cette convention réalise une oeuvre de synthèse des droits des
rage régi par la Convention Unidroit », RD aff. int. 2000.43 - V. égal. E. Cashin-Ritaine,
op. cit., nos 146 et s.
1. Th. Bonneau, op. cit, n° 635.
2. V. Th. Bonneau, op. cit., ibid.
3. Sur la nature juridique de la garantie, v. Mouly, Les sûretés, éd. FEDUCI, p. 142 et s.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 481
A. Crédit documentaire
680 Présentation O Les ventes internationales donnent lieu à la déli¬
vrance de divers documents : le connaissement, ou titre de transport
maritime, la lettre de transport aérien, la police d’assurance, la facture
consulaire, le certificat de qualité, etc. Ces documents attestent la
bonne exécution du marché; quant au connaissement, il a en outre cet
avantage de représenter la marchandise en cours de transport (v. supra
n° 602). Toutes ces pièces favorisent l’octroi de crédit et permettent
spécialement les opérations de crédit documentaire.
Le crédit documentaire est une opération profondément synallag¬
matique : au moment où le vendeur bénéficiaire se dessaisit de sa mar¬
chandise à bord du navire ou au moment de la remise au transporteur,
l’acquéreur demande à son banquier de payer le prix de la marchandise.
La technique repose sur l’idée que les opérations effectuées sur les
documents réalisent les mêmes transferts de droits que si elles étaient
faites directement sur les marchandises ; le lien entre les documents et
les marchandises reste juridiquement formel1. Les banquiers porteurs
des documents acquièrent ainsi une garantie sérieuse, qui justifie les
crédits qu’ils accordent.
Le crédit est parfois utilisé à l’exportation. Le vendeur tire une traite
à laquelle il joint les documents et la fait escompter par son banquier; le
banquier escompteur remet les documents à l’acheteur contre son accep¬
tation ou contre paiement. Plus souvent, le crédit est un crédit à l’im¬
portation. Le banquier de l’importateur ouvre à l’exportateur un crédit,
dénommé crédit documentaire parce que sa réalisation est subordonnée
à la présentation des documents ; ce crédit peut permettre à l’exportateur
de se procurer des avances auprès de son propre banquier.
Des règles uniformes en matière de crédit documentaire ont été
adoptées par la Chambre de commerce internationale lors de la Confé¬
rence de Vienne de 1933; elles sont révisées périodiquement (la der¬
nière fois en 1993; v. Doc. CCI, n° 500, en pratique RU 500)2. Les
1. V. Com., 14 oct. 1981, Bull. civ. IV, n° 357JCP 1982.11.13872, obs. MM. Gavalda et
Stoufflet, D. 1982.301, note Vasseur, RJ com. 1982.253, note Sortais. Il existe des formes
simplifiées du crédit documentaire, naturellement moins protectrices (v. CA Rouen, 13 mai
1986, D. 1987, Somm. 219, obs. Vasseur, pour une attestation déblocage de fonds), comme,
du reste, des techniques plus élaborées, à l’exemple du crédit documentaire transférable et
du crédit documentaire adossé (Back to back crédit). V. égal. Com., 9 oct. 1974, Bull civ IV
n° 243.
Quant à la remise documentaire proprement dite, elle est très souple : l’exportateur
mandate sa banque — remettante — pour recueillir le prix de vente ; celle-ci contrôle les
documents fournis par le vendeur et les transmet à la banque de l’acheteur - dite présen¬
tatrice - qui les met à la disposition de ce dernier — le titré — et reçoit son règlement ou sa
traite. La banque n’assume ici aucun engagement (v. Règles uniformes d’encaissement,
doc. 522 CCI) ; v. CA Aix, 22 nov. 2005, BTL 2006, 367.
2. V. Com., 3 mars. 2004, Bull. civ. IV, n° 43.
3. V. Queen’s Bench Division, Commercial Court, 13 déc. 1993, JCP 1995.1.465, n° 18
obs. J. Stoufflet.
, 4. J. Stoufflet, « L’œuvre normative de la Chambre de commerce internationale »,
Etudes Goldman, Litec, 1982, p. 361.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 483
2. Émission de l’accréditif
68S Lettre de garantie Une fois que le banquier a donné son accord au
donneur d’ordre, il lui reste à émettre un accréditif en faveur du béné¬
ficiaire. Il ne s’agit pas d’un effet de commerce, mais d’un « document
bancaire » qui se présente généralement sous la forme d’une lettre
missive, et qui exprime les obligations du banquier émetteur à l’égard
du bénéficiaire et, par suite, les droits de celui-ci.
1. Com., 14 oct. 1981, précit. 14 mars 1984, Bull. dv. IV, n°102; 7 oct. 1987,
Bull. civ. IV, n° 213, Banque 1988.234, obs. J.-L. Rives-Lange.
2. Com., 18 mars 1986, Banque 1986.610, obs. Rives-Lange, JCP E 1986. IL 14714,
note J. Stoufflet.
3. Com., 4 mars 1954, S. 1954.1.121, note Lescot, RTD com. 1954, 688, obs. Becqué et
Cabrillac; égal. Com., 11 oct. 2005, D. 2005, 2802, note X. Delpech, RTD com. 2006, 172,
obs. D. Legeais, JCP E 2005, 1677, note Stoufflet : un crédit documentaire réalisable par
acceptation étant seulement exécuté par le paiement de l’effet accepté, la fraude, découverte
antérieurement à ce règlement, fait échec à l’obligation de paiement de la banque accep¬
tante au titre du crédit documentaire, hors la circonstance où cet effet serait présenté par
un tiers porteur de bonne foi, non partie au crédit; v. encore CA Versailles, 13 déc. 2002,
RTD com. 2003, 351, obs. D. Legeais.
4. V. Cependant sur les limites de la fraude qui ne peut porter sur l’exécution du
contrat de base et qui, pour être prise en compte, doit affecter les documents en cause,
Com., 29 avr. 1997, JCP 1997, éd. E. 976, obs. J. Stoufflet; égal. Com., 25 avr. 2006, D.
2006, 1367, BTL 2006, 311 : le droit pour le donneur d’ordre de se prévaloir d’une fraude
affectant les documents d’un crédit documentaire avant son exécution pour en paralyser le
paiement n’est pas subordonné à la condition que cette fraude soit décelable par la banque
émettrice au terme d’un simple examen formel.
486 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
4. Paiement. Modalités
1. Étant précisé qu’il appartient au seul donneur d’ordre d’autoriser la banque à payer
sans réserves, Com., 7 janv. 2004, Bull. civ. IV, n° 1, RTD com. 2004, 399 et les obs.
2. Ce qui suppose que les conditions du crédit soient réunies, v. Com., 18 nov. 1997,
Bull. civ. IV, n° 292.
3. V. M. Vasseur, « Réflexions sur le crédit documentaire à paiement différé », D. 1987,
Chron. 59; Com., 7 avr. 1987, JCP 1987.11.20829, note J. Stoufflet, D. 1987.399, note
M. Vasseur.
488 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
B Crédit-bail international
694 Loi applicable O De nombreuses opérations de crédit-bail ou, plus
exactement, de location financière mobilière4, atteignent aujourd’hui
une dimension internationale : c’est le cas dans le domaine de l’auto¬
mobile5, de la navigation maritime ou encore de l’aéronautique6. Les
établissements financiers français sont incités depuis peu à s’engager
dans cette voie, car la COFACE accepte de les assurer dans des condi¬
tions assez intéressantes. Sont garantis les risques de non-paiement
pendant la période de location et même le risque tenant au non-règle-
§ 1. Conflit de lois
698 Plan O La convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux
obligations contractuelles consacre au contrat individuel1 de travail une règle
de conflit spéciale à finalité protectrice (art. 6) (A) 2. La Commission euro¬
péenne propose, à l’occasion de la transformation de la convention de Rome
en règlement communautaire, d’apporter quelques améliorations au texte actuel
afin de lever les incertitudes que son application suscite (B). Dans la mise en
oeuvre de la règle de conflit de la convention de Rome, il est nécessaire de tenir
compte d’un certain nombre de dispositions spécifiques du droit communau¬
taire (C).
1. Sur le droit applicable dans le domaine des relations collectives du travail, P. Rodière,
La convention collective de travail en droit international, Litec, 1987; J.-P. Laborde, « Les
rapports collectifs de travail en droit international privé », Trav. corn. fr. DIP 1996-1997,
p. 153 et s.; F. Jault-Seseke, « La détermination des accords collectifs applicables aux
relations de travail internationales », in Mélangés P. Lagarde, Dalloz, 2005, p. 455 et s.;
A. Lyon-Caen, « La grève en droit international privé », Rev. crit. DIP 1977, p. 271 et s.;
E. Pataut, « La grève dans les rapports internationaux de travail : questions de qualifica¬
tion », Dr. soc. 2005, p. 303 et s.
2. Ph. Coursier, Le conflit de lois en matière de contrat de travail, LGDJ, 1993 ; P. Rodière,
Droit social de l'Union européenne, LGDJ, 2002, n° 535 et s.; G. Lyon-Caen et A. Lyon-Caen!
Droit social international et européen, Dalloz, 1993 ; M. Audit, « Les contrats de travail
conclus par l’Administration à l’étranger », Rev. crit. DIP 2002, p. 39 et s.; F. Jault-Seseke,
« L’office du juge dans l’application de la règle de conflit de lois en matière de contrat dé
travail », Rev. crit. DIP 2005, p. 253 et s.; S. Robin-Olivier, « La mobilité internationale du
salarié », Dr. soc. 2005, p. 495 et s.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 493
1. V. supra, n° 370 et s.
2. Soc. 25 mai 1977, Montfort, et Soc. 31 mars 1978, Royal Air Maroc, Rev. crit. DIP
1978. 701, note A. Lyon-Caen ; Ch. mixte 28 févr. 1986, Cie Air Afrique, Dr. soc. 1986. 406,
note H. Gaudemet-Talion, Rev. crit DIP 1986. 501, note P. Lagarde, D. 1987. 173, conci.
P. Franck. Sur cette construction jurisprudentielle, notamment P. Lagarde, « Sur le contrat
de travail international : analyse rétrospective d’une évolution mal maîtrisée », in Mélangés
G. Lyon-Caen, Dalloz, 1989, p. 83 et s.
494 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. infra n° 721.
2. En matière de contrat de travail, et bien que l’article 6 § 2 soit fondé sur le principe
de proximité, on retrouve toujours, à l’arrière-plan, la question du contenu des lois suscep¬
tibles de s’appliquer. Très souvent, c’est la loi française qui est la plus favorable au salarié,
ce qui peut expliquer indirectement de nombreuses solutions jurisprudentielles.
3. Soc., 30 juin 1993, Rev. crit. DIP 1994. 323, note M.-A. Moreau, RJS 4/94, p. 236.
4. Paris, 14 juin 1989.
5. Paris, 11 juin 1996.
6. Comp. Paris, 7 juin 1996, Boikov, RTD eur. 1996. 785, note H. Gaudemet-Talion,
Rev. crit. DIP 1997. 55, note M.-A. Moreau, JDI 1997. 429, note Saintourens, faisant une
application par anticipation de la convention de Rome. Après un contrat de travail initial,
conclu entre un salarié russe et une société russe et exécuté en Russie pendant 15 ans, deux
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 49 5
nouveaux contrats ont été conclus : l’un avec la filiale anglaise de la société russe en vertu
duquel le travailleur devait être détaché en France, l’autre avec la société russe. Ce dernier
comportait une clause selon laquelle la société allait proposer au salarié un nouvel emploi,
lorsque sa mission à l’étranger aura pris fin. Aucun des contrats ne comportait un choix de
la loi applicable. Après deux ans, le salarié a été relevé de ses fonctions en France et la société
russe lui a proposé une nouvelle affectation en Russie qu’il a refusée. La Cour d’appel a
appliqué la loi française aux deux contrats, soulignant que celui conclu avec la filiale
anglaise était exclusivement exécuté en France et que la relation avec la société-mère ne
pouvait être qualifiée de détachement temporaire. Il s’agissait d’un nouveau contrat de
travail qui avait été conclu à l’occasion de cet envoi à l’étranger et dont le lieu d'exécution
habituel était dès lors situé en France, ce qui constitue une analyse discutable.
1. V. cependant l’affaire Air Afrique, soumise aux tribunaux français avant l’entrée en
vigueur de la Convention de Rome. Le salarié était un pilote d’avion qui travaillait sur des
lignes internationales. Il avait signé son contrat de travail à Paris, mais avec la mention
« fait à Abidjan ». Ni le lieu d’exécution habituel du travail, ni le lieu de l’établissement
d’embauche ne permettraient un rattachement sans difficulté. Ch. mixte 28 févr. 1986,
Dr. soc. 1986. 406, note Fl. Gaudemet-Talion, Rev. crit. DIP 1986. 501, note P. Lagarde,
D. 1987. 173, concl. P. Franck.
2. V. toutefois A. Sinay-Cytermann, « La protection de la partie faible en droit interna¬
tional privé », in Mélangés P. Lagarde, Dalloz, 2004, p. 737 et s. (spéc. p. 741), qui soutient
que la clause d’exception est destinée à favoriser le salarié.
496 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. toutefois Soc. 23 mars 2005, pourvoi n° 03-42609, inédit, RDC 2005. 1181, obs.
D. Bureau. En l’espèce, une ressortissante française avait été engagée par l’association Ecole
française René Descartes à Kinshasa, au Zaïre, suivant contrats successifs d’un an en qualité
de secrétaire. Après 4 années d’activité, l’association lui a notifié son intention de ne pas lui
proposer un nouveau contrat pour l’année suivante. Les juges du fond ont déclaré la loi
française applicable au litige et la Chambre sociale a rejeté le pourvoi de l’association, en se
fondant sur l’article 6 § 2 in fine. Les contrats avaient été conclus entre personnes de natio¬
nalité française, étaient rédigés en langue française et fixaient le salaire en francs français.
Le travail était accompli dans un établissement français soumis à la réglementation fran¬
çaise en vigueur dans les établissements d’enseignement, sous le pouvoir disciplinaire du
conseiller culturel de l’ambassade de France, lui-même placé sous l’autorité du ministre
français de la coopération.
2. V. récemment, Soc., 10 mai 2006, pourvoi n° 03-46593, D. 2006. IR. 1401, obs.
P. Guiomard. En l’espèce, le contrat de travail d’une employée de maison était régi par la
loi nigériane du lieu d’accomplissement habituel du travail, mais la Cour a décidé que
l’ordre public international s’opposait à son application « dans un différend qui présente
un rattachement avec la France et qui a été élevé par un salarié placé à son service sans
manifestation personnelle de sa volonté et employé dans des conditions ayant méconnu sa
liberté individuelle ».
3. Sur la notion de choix implicite et l’application peu orthodoxe de la convention de
Rome par les juges du fond, F. Jault-Seseke, « L’office du juge dans l’application de la règle
de conflit de lois en matière de contrat de travail », Rev. crit. DIP 2005, p. 253 et s.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 497
1. Cette loi n’est donc pas nécessairement une loi très protectrice.
2. D. 2003. 387, obs. E. Lafuma, Dr. soc. 2003. 339, obs. M.-A. Moreau, Rev. crit. DIP
2003. 446, note F. Jault-Seseke, JCP 2003. I. 166, obs. S. Poillot-Peruzzetto, JDI 2004. 131,
note S. Dion. Une salariée avait dispensé des cours de langue à l’Institut culturel autrichien
à Paris. Son contrat de travail avait été signé par le ministère autrichien des Affaires étran¬
gères et comportait une clause de choix de la loi autrichienne. Pour des raisons budgétaires,
l’Institut a décidé de cesser l’organisation des cours et a licencié la salariée. Estimant que la
rupture était irrégulière, la salariée a d’abord saisi les tribunaux autrichiens mais, déboutée,
elle s’est ensuite tournée vers les tribunaux français. Devant les juges du fond, la salariée a
obtenu une indemnité de licenciement équivalant à 9 mois de salaire, sur le fondement du
droit autrichien. Elle a formé un pourvoi en cassation, estimant que le droit français sur le
licenciement sans cause réelle et sérieuse était applicable. Les juges du fond ont également
condamné l’employeur, sur le fondement du droit français cette fois, à des dommages-inté¬
rêts pour inobservation de la procédure de licenciement (absence d’entretien préalable) et
pour défaut de proposition d’une convention de conversion. Et c’est ce que l’employeur a
contesté dans son pourvoi, estimant que le droit français n’était pas applicable. La Cour de
cassation a rejeté le pourvoi de l’employeur et accueilli le pourvoi de la salariée.
3. La solution de la Cour de cassation, dans l’arrêt précité du 12 novembre 2002, n’al¬
lait pas de soi en ce qui concerne la convention de conversion, puisque cette convention
est spécifique au système français d’indemnisation du chômage. Elle s’inscrit davan¬
tage dans la politique de lutte contre le chômage que dans le droit du travail au sens strict.
Mais la solution de la Cour est claire : il ne convient pas de distinguer au sein des règles
impératives.
498 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
loi choisie sur de très nombreux points \ Et l’on peut même se deman¬
der si le choix d’une loi étrangère a encore un intérêt pour un contrat
de travail qui est exécuté en France1 2.
1. Rappr. Soc. 20 oct. 2004, pourvoi n° 02-41796, inédit, où il était allégué, à propos du
calcul des indemnités dues en cas de licenciement, que les dispositions de la loi du lieu
d’exécution du travail faisaient double emploi avec celles de la loi choisie par les parties.
2. Proposition de Règlement sur la loi applicable aux obligations contractuelles
(Rome I) du 15 décembre 2005, COM (2005) 650 final. Sur cette proposition, P. Lagarde,
« Remarques sur la proposition de règlement de la Commission européenne sur la loi appli¬
cable aux obligations contractuelles (Rome I) », Rev. crit. DIP 2006. 331. V. aussi le Livre
vert sur la transformation de la convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obli¬
gations contractuelles en instrument communautaire ainsi que sur sa modernisation du
14 janvier 2003, point 3.2.8 et suivants.
3. V. CJCE, 9 janv. 1997 (aff. C 383/95), P.W. Rutten c. Cross Medical, Rev. crit. DIP
1997. 336, note H. Gaudemet-Talion; JDI 1997. 635, obs. J.-M. B., précisant que «le
lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail [...] est celui où le travailleur a
établi le centre effectif de ses activités professionnelles. Pour la détermination concrète
de ce lieu, il convient de prendre en considération la circonstance que le travailleur accom¬
plit la majeure partie de son temps de travail dans un des États contractants où il a un
bureau à partir duquel il organise ses activités pour le compte de son employeur et où il
retourne après chaque voyage professionnel à l’étranger ». Sur cette jurisprudence, v. infra
n° 947.
4. V. la proposition de Réglement, p. 7.
500 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Cette solution a notamment été défendue par le Groupe européen de droit interna¬
tional privé.
2. Une dernière modification concerne l’article 6 § 2 b) où il est proposé d'ajouter
expressément l’hypothèse dans laquelle le travailleur accomplit son travail « dans un espace
non soumis à une souveraineté nationale », conduisant à l’application de la loi du pays où
se trouve l’établissement d’embauche.
3. En effet, l’article 20 de la convention de Rome consacre la priorité du droit commu¬
nautaire.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 501
710 Libre prestation des services et application des lois de police1 <>
Dans le domaine du droit du travail, les lois de police ne sont pas rares.
Avant d’aborder la question de l’incidence du droit communautaire2,
une précision terminologique s’impose puisqu’il faut veiller ici à ne pas
confondre les lois de police, au sens de l’article 7 de la convention de
Rome, avec les dispositions impératives visées par l’article 6 § 1er. En
effet, les « dispositions impératives » de l’article 6 sont celles du droit
interne, c’est-à-dire celles auxquelles il n’est pas possible de déroger par
contrat en droit interne. Au contraire, les lois de police sont des disposi¬
tions qui sont impératives sur le plan international. Elles ont pour
conséquence de mettre à l’écart la règle de conflit de lois. L’exemple du
droit français du licenciement permet d’illustrer cette différence. Les
règles régissant le licenciement des salariés non protégés, c’est-à-dire
ceux qui ne sont pas investis d’une fonction de représentation du per¬
sonnel, sont impératives au sens où il n’est pas possible d’y déroger par
contrat. Ce sont donc des « dispositions impératives » au sens de
l’article 6. À ce titre, elles peuvent éventuellement se substituer aux dis¬
positions de la loi choisie par les parties. En revanche, selon la jurispru¬
dence3, ces règles ne sont pas des lois de police. Elles ne sont pas appli¬
cables quelle que soit la loi du contrat. Par conséquent, si le travail est
exécuté à l’étranger et le contrat ne comporte pas un choix de la loi fran¬
çaise, le salarié français ne peut pas espérer voir la législation française
appliquée au titre de l’article 7. Il en va différemment lorsque le licencie¬
ment concerne un représentant du personnel. En effet, si les fonctions
représentatives sont exercées dans une entreprise en France, la loi fran¬
çaise sur le licenciement est applicable en tant que loi de police4.
était régi par la loi italienne. Pour les salariés du groupe qui étaient employés en France, il
existait ainsi une différence de traitement selon la loi applicable à leur contrat. Les salariés
soumis au droit français ont saisi les tribunaux français en prétendant notamment être
victimes d’une discrimination fondée sur la nationalité prohibée par l’article 39 du traité
CE. Selon le pourvoi, il s’agissait d’une forme de discrimination indirecte dans la mesure
où la plupart des salariés dont les contrats relevaient de la loi italienne étaient de nationa¬
lité italienne. Toutefois, la Cour de cassation les a déboutés puisque la différence de traite¬
ment était fondée sur une justification objective qui tenait au fait que les salariés italiens
avaient accepté des sacrifices au moment de la restructuration, sacrifices qui n’ont pas
concerné les salariés régis par le droit français.
1. Sur les lois de police en général, v. supra n° 383 et s.; sur la proposition de directive
« services », v. infra, n° 713.
2. Pour une étude dépassant le cadre du seul droit du travail, v. E. Pataut, « Lois de
police et ordre juridique communautaire », in Les conflits de lois et le système juridique
communautaire, Dalloz, 2004, p. 117 et s.
3. Soc. 29 mai 1991, Mjorndal, Rev. crit. DIP 1992. 469, note H. Muir Watt.
4. CE 29 juin 1973, Cie des Wagons-lits, Rev. crit. DIP 1974. 344, concl. N. Questiaux
et chron. Ph. Francescakis, p. 273, JDI 1975. 538, note M. Simon-Depitre; Dr. soc. 1976.
50, obs. J. Savatier, Rev. soc. 1976. 633, note J.-M. Bismuth. B. Ancel, Y. Lequette, Les grands
arrêts..., op. cit., n° 53;Ass.plén. lOjuill. 1992, Cie Air Afriquec. Gueye, JCP L993. IL 22063,
note P. Rodière, Rev. crit. DIP 1994. 69, note B. Audit. Le raisonnement des juges est le
suivant. Les règles françaises sur la création et le fonctionnement du comité d’entreprise
constituent des lois de police. Elles s’appliquent à toute entreprise en France. Or, la protec¬
tion des membres du comité d’entreprise contre le licenciement se rattache au fonctionne¬
ment du comité. Le régime de protection des représentants du personnel contre le licencie¬
ment constitue donc également une loi de police.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 503
1. Art. 1er § 6 de la Proposition modifiée de Directive relative aux services dans le mar¬
ché intérieur du 4 avril 2006, COM (2006)160 final, dans la version résultant de la posi¬
tion commune adoptée par le Conseil le 24 juillet 2006, n° de dossier interinstitutionnel
2004/0001 COD.
2. Par exemple, la construction d’une installation, la surveillance d’un chantier, la
réalisation d’une étude de marché ou encore le transfert de savoir faire.
3. Dans les groupes de sociétés, la mobilité internationale des cadres a souvent pour
fonction d’assurer une uniformisation de la direction et de développer la conscience de la
dimension internationale du groupe.
4. Le principal objectif d’une délocalisation est souvent de pouvoir bénéficier d’une
main d’œuvre locale à coût réduit, ce qui est problématique au regard de la protection des
droits des travailleurs, français et étrangers. V. infra n° 721.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 507
A. Sources
À côté des sources étatiques, il convient de mentionner également
certaines sources privées.
1. Cës questions dépassent toutefois le cadre du présent ouvrage. Pour une bibliographie
sommaire, v. supra n° 698, note de bas de page n° 1.
2. Le phénomène des codes de conduite privés existe depuis les années 30 où ils ont fait
leur apparition aux États-Unis, au sein de certains milieux professionnels. À l’objectif initial
d’une normalisation professionnelle dont la portée se limitait aux relations entre agents
économiques, se sont progressivement ajoutées d’autres préoccupations, comme la protection
de l’environnement ou la normalisation des relations de travail. Sur ce phénomène, en géné¬
ral, v. supra n° 108 et s. ; et G. Farjat, « Réflexions sur les codes de conduite privés », in
Mélanges B. Goldman, Litec, 1987, p. 47 et s. ; A. Sobczak, Réseaux de sociétés et codes de conduite.
Un nouveau modèle de régulation des relations de travail pour les entreprises européennes, LGDJ,
2002 ; M.-A. Moreau, « L’ordre concurrentiel et les droits sociaux fondamentaux au plan
international », in Mélanges A. Pirovano, éd. Frison-Roche, 2003, p. 385 et s.
3. V. notamment, Résolution du Parlement européen sur des normes communautaires
applicables aux entreprises opérant dans les pays en développement du 15 janvier 1999,
JOCE C-104/180; Communication de la Commission du 2 juillet 2002 concernant la
responsabilité sociale des entreprises, COM (2002) 347 final (spéc. p. 15) et aussi Livre vert
de la Commission du 18 juillet 2001, « Promouvoir un cadre européen pour la responsabi¬
lité sociale », COM (2001) 366 final.
4. Par exemple, le code de conduite de Levi Strauss, qui est considéré comme le pionnier
en ce domaine, peut être consulté à l’adresse suivante : http://www.levistrauss.com/res-
ponsibility. On peut citer aussi C & A, H & M, NIKE ou encore IKEA dont les codes de
conduite sont publiés dans : R. Blanpain (dir.), Multinational Enterprises and the Social
Challenges oftheXXlst Century, Kluwer, 2000, p. 343, 353, 359 et 369.
5. Certains codes vont, en revanche, plus loin et contiennent des garanties, par exemple,
sur le terrain du salaire minimum ou du congé de maternité.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 509
B. Contenu
717 L’applicabilité des règles matérielles qui seront examinées à présent
suppose que le contrat de travail soit régi par le droit français. On se
limitera aux seules règles matérielles présentant un intérêt particulier
pour les contrats internationaux5. Dans cette double perspective, on
abordera les règles applicables lors de la formation du contrat et celles
régissant son exécution.
1. Formation du contrat
1. Par ex. Soc., 3 avr. 1990, pourvoi n° 88-41856, inédit. En l’espèce, un « statut des
personnels expatriés » était annexé au contrat de travail et les juges ont estimé qu’il avait
valeur conventionnelle. Sur cet arrêt aussi, Travailler à l'étranger, Editions Francis Lefebvre
1999, n° 330.
2. Art. 4.
3. P. Rodière, Droit social de l’Union européenne, LGDJ, 2002, n° 456.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 513
1. Selon les cas, il peut être prévu que cette relation de travail continuera selon des
modalités spécialement définies pour la situation de détachement, ou au contraire, qu’elle
sera suspendue durant la durée du détachement, ce qui est le cas le plus fréquent. L’em¬
ployeur initial reste alors simplement tenu d’un certain nombre d’obligations secondaires,
alors que les obligations principales incomberont à l’employeur local.
2. On se trouve alors dans l’hypothèse d’un licenciement pour motif économique en
France. 11 incombe à l’employeur une obligation de reclassement dont on sait qu’elle s’étend
à toutes les entreprises composant le groupe de sociétés. V. notamment Soc. 25 juin 1992,
Dr. soc. 1992. 826, concl. Kessous et ibid. 1993. 272, note Urban; Soc. 5 avr. 1995, Vidéo-
color, D. 1995. 503, note Keller, Dr. soc. 1995. 482, note Waquet, RJS 1995. 321, concl.
Chauvy, JCP II. 22443, note Picca; Paris, 14 nov. 1995, RJS 1996. 15, n° 10. Selon les
cas de figure, l’employeur peut proposer un reclassement des salariés dans l’établissement
ou dans la filiale à l’étranger à qui est désormais confiée la production, voire même une
embauche par une entreprise sous-traitante. Dans l’ensemble de ces cas de figure, la réem¬
bauche se fait selon la loi du pays de la délocalisation.
3. Sur cette question, notamment B. Boubli, « La détermination de l’employeur dans
les groupes de sociétés », in Les groupes de sociétés et le droit du travail, B. Teyssié (dir.),
Ed. Panthéon-Assas, 1999, p. 23 et s.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 515
alors que le ministre du travail avait estimé que, sous certaines conditions, le texte pouvait
également s’appliquer aux salariés immédiatement envoyés dans la filiale, s’ils ont conservé
avec la société-mère un lien juridique : Rép. min. JOAN Q 27 avr. 1976, p. 2240.
1. La notion de filiale ne dépend pas uniquement du critère de la possession de 50 % du
capital. La Cour de cassation applique plus généralement le critère du contrôle d’une société
par une autre : Soc. 27 juin 1990, pourvoi n° 86-43483 inédit, qui reconnaît la qualité de
société-mère à une société qui ne possédait pas la majorité de capital d’une autre société,
mais qui la contrôlait en lui assurant une assistance technique et en passant pour elle des
actes qui auraient dû relever normalement de la seule autorité de cette dernière.
2. Soc. 6 juill. 1982, pourvoi n° 80-41092, Bull. civ. V, n° 451, D. 1982. 641, note
Mestre et Buy.
3. Soc. 5 mai 1982, pourvoi n° 80-40481, Bull. civ. V, n° 274.
4. En particulier si les conditions de travail sont très différentes : Soc. 26 janv. 1983,
inédit.
5. Dans ce cas, on a vu que l’article L. 122-14-8 du Code du travail impose à la société-
mère une obligation de rapatriement et de reclassement : supra n° 723.
6. La jurisprudence exige alors que le motif du licenciement soit fondé sur des faits
concernant la société-mère, et non la filiale : Soc. 18 mai 1999, Bull. civ. V, n° 216 p 159
Dr. soc. 1999. 1110, obs. M.-A. Moreau.
PRINCIPAUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL 517
1. V. par ex., Soc. 27 oct. 2004, Bull. civ. V, n° 269, p. 244; Soc., 6 avr. 2005, inédit,
pourvoi n° 03-42021.
2. Pour l’indemnité de congés payés : Soc. 22 nov. 1979, Bull. civ. V, n° 897 ; pour l’in¬
demnité de préavis : Soc. 10 oct. 1975, Bull. civ. V, n° 599.
3. Soc. 28 févr. 1973, Bull. civ. V, n° 119, p. 106; Soc. 10 oct. 1975, Bull. civ. V, n° 599.
Pour une confirmation récente, Soc., 31 janv. 2006, inédit, pourvoi n° 04-44771.
518 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 4
LE DROIT DU PAIEMENT
INTERNATIONAL
1. Les échanges bancaires internationaux sont organisés dans un système très élaboré :
le système SWIFT (Society for worldwide interbankfinancial télécommunication), v. J.-C. Mou¬
riez, « Un exemple de coopération bancaire internationale », Banque 1976.1003.
2. V. P. Bloch, La lettre de change et le billet à ordre dans les relations commerciales interna¬
tionales, Economica 1986, préf. Fouchard; Vasseur, « Aspects juridiques des transferts inter¬
nationaux de fonds par d’autres moyens que les cartes », Banque et droit, n° 3, mars-avr. 1989 ;
Delierneux, « Les instruments du paiement international », RD aff. int. 1993, n° 8, p. 987.
3. V. Bismuth, Étude des problèmes monétaires dans les contrats internationaux, thèse, Paris,
1973; R. Libchaber, Recherches sur la monnaie en droit privé, LGDJ 1992, préf. P. Mayer.
4. V. Com., 21 avr. 1992, RJDA 1992, n° 939; CA Paris, 10 juin 1967, D. 1969.221,
concl. Granjon; 27 mai 1983, D. 1984 IR 72, obs. M. Cabrillac.
LE DROIT DU PAIEMENT INTERNATIONAL 519
1. L’introduction de l’euro n’a pas eu pour effet de modifier les termes d’un instrument
juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution et n’a pas donné à une partie à un
instrument juridique le droit de le modifier ou d’y mettre fin unilatéralement. Cf. Règle¬
ment CE n° 1103/97 du 17 juin 1997 fixant certaines dispositions relatives à l’introduction
de l’euro, v. B. Dutour, « L’euro et la continuité des contrats », JCP 1997.1.4048. Quant à
l’écu, créé et défini dans le cadre du SME, ce n’est pas une monnaie étrangère : le paiement
des obligations en écus est donc autorisé dans les contrats internes (Civ. lre, 13 avr. 1999,
D. 1999. IR. 135).
2. Comp. Civ. 3e, 18 oct. 2005, Bull. civ. III, n° 196 : « dans un contrat de droit interne,
la monnaie de paiement doit être nécessairement l’euro et non une monnaie étrangère ; la
clause stipulant une indemnité exprimée en dollar doit donc être annulée ».
3. Sur les problèmes de conversion, v. Civ. lre, 15 févr. 1972, Rev. crit. DIP 1973.77, note
Batiffol; v. égal. CA Paris, 1er juill. 1999, D. 1999, n° 37, Act. jur. : dans l’« Euroland » les
unités monétaires nationales ne sont plus convertibles entre elles.
4. Rappr. en matière extracontractuelle, où la monnaie de compte est en principe celle
de l’État sur le territoire duquel la victime a son domicile ou sa résidence au moment où le
dommage a été subi : Civ. lre, 4 déc. 1990, Bull. civ. 1, n° 280, Rev. crit. DIP 19992, 292,
note E. Putman.
5 Civ. 17 mai 1927, DP 1928.1.25, concl. Matter, note Capitant.
6. V. Civ. lre, 15 juin 1983, Bull. civ. I, n° 175; JCP 1984.11.20123; 13 mai 1985, Bull,
civ. I, n° 146; 12 janv. 1988, D. 1989, 80, note Ph. Malaurie; RTD civ. 1988.740, obs.
520 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 1. Instruments de paiement
A. Lettre de change
728 Unification O Dans les pays étrangers, le droit cambiaire n’est pas
compris aussi précisément qu’en droit français. L’opposition est assez
nette entre le système allemand, le système français et le système
anglais. D’où, depuis longtemps, l'idée d’une unification dans les rela¬
tions commerciales internationales. Celle-ci a été réalisée, au moins en
partie, par trois conventions internationales signées à Genève le 7 juin
193CP :
- une convention portant règlement uniforme du droit de la lettre
de change par laquelle les États contractants se sont engagés à intro¬
duire dans leur législation interne les dispositions de la loi uniforme
annexée à la convention. Quant au fond, la loi uniforme a, le plus
souvent, adopté le modèle plus perfectionné de la loi allemande ; cepen¬
dant, des réserves ont été prévues pour permettre aux États signataires
de conserver sur certains points leur réglementation nationale : la
France en a usé notamment sur l’articulation entre les rapports fonda¬
mentaux et cambiaires ;
- une convention portant sur le règlement des conflits de lois, qui a
été nécessaire parce que l’accord n’a pas pu se faire sur certains points
qui tiennent au système législatif général de chaque pays (la capacité
entre autres difficultés) ;
- une convention sur le timbre par laquelle les différents États se
sont engagés à ce que leur loi interne n’admette aucune nullité de la
lettre à raison des infractions aux lois fiscales sur le timbre, compte
tenu de la difficulté de reconnaître la régularité fiscale des traites créées
à l’étranger.
Les conventions de Genève n’ont pas été adoptées dans le monde
anglo-américain. L’unification n’est donc pas pour demain dans ce
domaine, pourtant essentiel.
J. Mestre; 11 oct. 1989, D. 1990.167; Corn., 22 mai 2001, Bull. civ. IV, n° 98, Defrénois
2001, 1067, obs. Libchaber; CA Bordeaux, 8 mars 1990, D. 1990. 550, note Ph. Malaurie.
1. V. R. Chemaly, Conflits de lois en matière d’effets de commerce, thèse, Paris, 1981;
Rec. Cours La Haye 1988, t. 209, p. 347 s. L’interprétation des textes fait apparaître des
divergences au sein même des pays ayant adhéré au système, v. not. P. Lagarde, Rev. crit.
DIP 1964.235; Lescot, JCP 1963.1.1756. Plus généralement, v. R. Libchaber, « Effets de
commerce et chèques », Rép. dr. int. 1998.
LE DROIT DU PAIEMENT INTERNATIONAL 521
B. Chèque
730 Unification O L’unification du droit du chèque a été poursuivie,
en même temps que celle de la lettre de change par les conférences de
La Haye et de Genève2. La conférence de Genève, développant l’œuvre
réalisée en 1930 pour la lettre de change, a adopté trois conventions le
11 mars 1931, la première portant texte d’une loi uniforme, la seconde
sur les conflits de lois3, la troisième sur le timbre. Mais la convention
portant loi uniforme permet des réserves et beaucoup de pays (dont la
France, v. D. 21 oct. 1936) en ont usé, de telle sorte que l’unification
n’est pas complète, même dans les États signataires.
L’Angleterre n’a ratifié que la convention sur le timbre. Sa législation
(Bill of Exchange Act) est importante : elle a influencé notamment les
dispositions de YUniform Commercial Code américain en la matière4.
C. Virement international
731 Loi applicable O Le virement est une opération, subordonnée à l’exis¬
tence de deux comptes, qui réalise un transfert de fonds ou de valeurs,
par un simple jeu d’écriture : l’inscription au débit du compte du don¬
neur d’ordre et d’un crédit corrélatif au compte du bénéficiaire5. À ce
titre, le virement entre dans la catégorie des opérations de banque.
jusqu’au milieu des années 1970, lorsqu’une personne souhaitait
transférer des fonds d’un pays à un autre, soit pour s’acquitter d’une
obligation, soit pour disposer de fonds dans cet autre pays, ses possibi¬
lités étaient limitées. Elle pouvait soit envoyer un chèque au destina¬
taire des fonds, soit acheter à sa banque une traite tirée par celle-ci sur
A. Cession de créance
733 Fonctions O La cession de créance a plusieurs fonctions3 : une fonc¬
tion de crédit (v. supra n° 670), une fonction de spéculation — l’opéra¬
tion est en ce sens une vente — une fonction de garantie (v. infra
n° 811) et une fonction de paiement. Dans ce dernier cas, la cession de
créance s’analyse en une sorte de dation en paiement, car elle vise à
éteindre une dette du cédant à l’égard du cessionnaire par la remise en
pleine propriété d’un bien, en l’occurrence une créance. On peut alors
estimer que la loi applicable en tant que loi du lieu de résidence du
débiteur de la prestation caractéristique est la loi du cédant, à moins de
considérer que le paiement est l’objet essentiel de l’opération, ce qui
conduirait à l’application de la loi de l’obligation éteinte4.
B Subrogation
734 Subrogation légale et conventionnelle O La subrogation est aussi
souvent sollicitée en tant qu’instrument de paiement. C’est du reste sa
vocation première. Lorsqu’elle intervient en matière contractuelle,
l’article 13 de la convention de Rome prévoit que lorsqu’un créancier a
des droits à l’égard d’un débiteur et qu’un tiers a l’obligation de désin¬
téresser le créancier ou encore que le tiers a désintéressé le créancier en
exécution de cette obligation, la loi applicable à cette obligation du tiers
détermine si celui-ci peut exercer en tout ou partie les droits détenus
par le créancier contre le débiteur selon la loi régissant leurs relations.
Le chapitre II traite des obligations des parties, le chapitre III des conséquences des inci¬
dents, erreurs ou retards dans les virements et le chapitre IV de l’achèvement du virement.
1. ’ Directive CE 97-5 du 27 janv. 1997, concernant les virements transfrontaliers, JOŒ
n° L 43, 14 févr. 1997.
2. V. D. Pardoel, Les conflits de lois en matière de cession de créances et d'opérations ana¬
logues, thèse, Paris-I, 1994, LGDJ, 1997, préf. P. Lagarde.
3. D. Pardoel, op. cit., n° 153 s.
4. V. M.N. Jobard-Bachellier, Rép.dr. int., V° Créances, n° 41.
524 LES CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL
C. Compensation
735 Loi applicable O Quant à la compensation conventionnelle,
l’article 10.1 de la convention de Rome la soumet à la loi du contrat,
mais encore faut-il qu’il s’agisse de créances contractuelles et encore
faut-il que les deux créances à compenser relèvent de la même loi. Si
les deux créances sont soumises à des lois différentes, il convient,
semble-t-il, d’appliquer cumulativement les lois régissant les créances
réciproques.
La compensation est une technique de prédilection dans les opéra¬
tions financières2. Elle n’est pas en reste dans les opérations commer¬
ciales internationales. Les professionnels y recourent constamment :
les exemples suivants l’attestent3.
Le droit applicable à la compensation légale est celui qui régit l’obli¬
gation à laquelle est opposée la compensation. Compétence est ainsi
donnée à l’« obligation passive » (art. 16 du projet Rome 1).
LE DROIT
DES INVESTISSEMENTS
738 L’économie mondiale ne peut fonctionner sans d’importants mou¬
vements de capitaux, nécessaires aussi bien au développement et à la
croissance des pays récepteurs de ces capitaux que des entreprises
situées dans les pays émetteurs. Ainsi que cela sera précisé, tous les
mouvements de capitaux ne correspondent pas à des investissements
(il suffit de songer aux paiements internationaux) et des investis¬
sements peuvent inclure d’autres composantes que des capitaux.
Néanmoins, les mouvements de capitaux sont à la base de l’investis¬
sement.
L’investissement international peut être public et se trouve dans ce
cas en général assuré par des banques, telles la Banque mondiale ou la
Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD)
ayant la nature d’institutions intergouvemementales1 .
Mais la plus grande part de l’investissement international est d’ori¬
gine privée, assurée par des entreprises trouvant là le moyen d’amélio¬
rer leur rentabilité, de se développer sur des marchés étrangers, ou de
réorienter leurs activités2.
On comprend donc que les États ne puissent se désintéresser de cette
question, à l’égard de laquelle ils peuvent cependant adopter des poli¬
tiques très différentes. Ils entendront généralement, au minimum,
exercer un certain contrôle sur les flux d’investissements qui peuvent
s’effectuer à partir ou à destination de leur territoire. Parfois, ils auront
pu prendre part à une opération représentative d’investissement, à
CHAPITRE 1
LE DROIT COMMUN FRANÇAIS
DE L’INVESTISSEMENT
INTERNATIONAL
SECTION 1. PRINCIPES
740 Les États membres qui bénéficiaient, le 31 décembre 1993, d’une déro¬
gation en vertu du droit communautaire ont été autorisés à maintenir,
au plus tard jusqu’au 31 décembre 1995, les restrictions aux mouve¬
ments de capitaux autorisées par les dérogations existant à cette date
(art. 73 E).
Ce principe de liberté n’est cependant pas absolu. Des exceptions
sont encore prévues. Lorsque, dans des circonstances exceptionnelles,
les mouvements de capitaux en provenance ou à destination de pays
tiers causent ou menacent de causer des difficultés graves pour le fonc¬
tionnement de l’Union économique et monétaire, le Conseil peut
prendre, à l’égard des pays tiers, les mesures de sauvegarde nécessaires,
pour une période ne dépassant pas six mois (art. 73 F).
Lorsqu’une position commune ou une action commune adoptée en
vertu des dispositions du traité sur l’Union européenne relatives à la
politique étrangère et de sécurité commune prévoit une action de la
Communauté visant à interrompre ou à réduire, en tout ou en partie,
les relations économiques avec un ou plusieurs pays, le Conseil peut
prendre à l’égard des pays tiers concernés les mesures urgentes néces¬
saires en ce qui concerne les mouvements de capitaux et les paiements
(art 73 G et 228 A). En attendant que le Conseil ait pris ces mesures,
un État membre peut, pour des raisons politiques graves et pour des
motifs d’urgence, prendre des mesures unilatérales contre un pays tiers
concernant les mouvements de capitaux et les paiements. La Commis¬
sion et les autres États membres doivent être informés de ces mesures,
au plus tard le jour de leur entrée en vigueur. Le Conseil peut décider
que l’État membre concerné doit modifier ou abolir les mesures en
question (art. 73 G).
§ 2. Liberté contrôlée
1. À partir de cette loi, le texte de base fut le décret n° 68-1021 du 21 novembre 1968,
resté en vigueur jusqu’en 1989.
LE DROIT COMMUN FRANÇAIS DE L’INVESTISSEMENT INTERNATIONAL 531
742 Selon une distinction classique, l’on envisagera d’abord le cas des
investissements étrangers en France (§1), puis celui des investisse¬
ments français à l’étranger (§ 2).
A. Investissement direct
744 Seuls les investissements directs font l’objet d’une réglementation
spécifique en leur qualité d’investissements, alors que tous les investis¬
sements sont soumis à la réglementation des changes2. Les investisse¬
ments directs reposent sur la notion de contrôle d’une entreprise de
droit français3. L’article 2 du décret du 30 décembre 2003 considère
ainsi, de la part d’une personne physique ou morale non-résidente : la
création d’une entreprise en France, l’acquisition d’une branche d’ac¬
tivité d’une entreprise du droit français, une opération sur le capital
d’une entreprise de droit français dès lors que cette opération permet à
ses auteurs de détenir plus de 33,33 % du capital ou des droits de vote
de cette entreprise, le contrôle d’une entreprise dont le siège social est
en France, au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce.
B. Obligations de l’investisseur
Traditionnellement, deux sortes d'obligations peuvent être impo¬
sées : la déclaration et l’obtention d’une autorisation
1 Déclaration
745 Deux types de déclarations sont prévues. Elles peuvent devoir être
effectuées auprès de la direction Trésor, ou auprès de la Banque de
France lorsqu’elles sont d’offre purement statistique. Les articles 4 et
suivants de l’arrêté du 7 mars 2003 (destiné à être remplacé) offrent
les précisions nécessaires à cet égard. Les sanctions prévues sont celles
de l’article 459 du Code des douanes (amende). Des dispenses de
déclarations sont prévues et malgré leur aspect bienvenu, compliquent
le système.
2. Autorisation
746 a) Domaine des activités soumises à autorisation O Le prin¬
cipe d’autorisation à l’égard des investissements étrangers devant être
constitués en France manifeste que la souveraineté étatique s’exerce
encore dans ce domaine sensible. L’article L 151-3 (dans sa rédaction
de la loi du 9 décembre 2004, art. 30) permet au ministre de l’Écono¬
mie et des Finances de s’opposer à certains investissements lorsque
ceux-ci touchent à des secteurs stratégiques.
Son ainsi visés les investissements dans une activité qui, même à
titre occasionnel, participent de l’exercice de l’autorité publique. Sont
également visés les investissements dans une activité relevant de l’un
des domaines suivants : activités de nature à porter atteinte à l’ordre
public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale;
activités de recherche, de production ou de commercialisation d’armes,
de munitions, de poudres ou de substances explosives1. Ces activités se
trouvent précisées par un décret en Conseil d’État : sont visés les jeux
d’argent, la sécurité privée, les agents pathogènes ou toxiques, le maté¬
riel d’interception de correspondance ou de détection à distance de
conversations, de services dans le cadre d'évaluation agréées, de la
sécurité des systèmes d’information, des biens et technologies à double
visage — civil et militaire — de la cryptologie, des secrets de la défense
nationale, de l’armement et des contrats d’étude ou de fourniture
d’équipements au profit du Ministère de la défense.
Mais le décret du 30 décembre 2005 a prévu deux cas de dispense
d’autorisation, le premier en cas d’investissement au sein d’un groupe
de sociétés, et le second lorsqu’un investisseur déjà autorisé à acquérir
le contrôle d’une société franchit le seuil des 33 % de détention directe
ou indirecte des droits de vote de cette société.
A. Principe de liberté
750 Après une histoire plutôt mouvementée, qui remonte au régime ins¬
tauré par le décret n° 67.78 du 27 janvier 1967, et qui a recouru aussi
bien à la déclaration préalable, ou a posteriori, qu’à l’autorisation
ministérielle3, le régime des investissements français à l’étranger se
trouve aujourd’hui totalement libéré d’autorisation ou de déclaration
préalable. Une déclaration peut seulement devoir être effectuée auprès
de la Banque de France lorsque le montant de l’opération dépasse
15 millions d’euros.
B. Politique économique
751 On rappellera que les entreprises françaises qui investissent à l’étranger
peuvent obtenir diverses formes de prêts et de garanties qui leur sont
consenties, les unes par la Banque française du commerce extérieur
(BFCE), les autres par la Compagnie française d’assurance et du
commerce extérieur (COFACE) et qui les couvrent contre les risques
inhérents à l’exportation.
Des aides fiscales sont également accordées aux entreprises en vue
de faciliter leur implantation à l’étranger. Elles consistent essentielle¬
ment dans la faculté de constituer une provision pour dépenses d’im¬
plantation à l’étranger (CGI art. 39 octies, A).
C’est dans ce cadre qu’a été lancée, le 22 octobre 2001, l’AFII (Agence
française pour les investissements internationaux) créée par l’article 144
de la loi sur les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001.
Établissement public à caractère industriel et commercial, il est placé
sous la double tutelle du ministre de l’Économie, des Finances et de
l’Industrie et du ministre chargé de l’Aménagement du territoire et de
752 Elle devient l’acteur unique, au niveau national, chargé de mobiliser les
moyens de l’État pour faciliter les démarches des entreprises interna¬
tionales et accompagner leur installation, en concertation avec les
collectivités territoriales, La création de l’AFII vise à offrir et à dévelop¬
per ce partenariat étroit de l’ensemble des acteurs du développement
des territoires, y compris ceux les moins favorisés et donc, a priori, les
moins bien placés dans la compétition mondiale. Dans ce contexte, les
régions seront représentées au conseil d’administration de l’AFII, et
associées à la construction de sa stratégie.
L’AFII a pour objectif de développer des implantations durables,
créatrices de richesses et donc d’emplois et a pour missions :
la promotion du territoire national auprès des investisseurs et des
relais d'opinion ; la prospection des projets internationalement mobiles ;
la coordination entre entreprises, collectivités territoriales, agences de
développement, administrations, prestataires de services pour faciliter
l’accueil des investissements internationaux; la mise en cohérence des
propositions d’accueil des territoires; la veille et l’étude des tendances
de l’investissement international et des facteurs de localisation.
LE DROIT INTERNATIONAL DE L’INVESTISSEMENT 537
CHAPITRE 2
LE DROIT INTERNATIONAL
DE L’INVESTISSEMENT
L’on ne peut faire ici abstraction du débat qui a longtemps pesé sur
le rôle du droit international (Section 1). Ce débat n’a pas empêché les
substantielles avancées du droit international de l’investissement (Sec¬
tion 2). Un régime juridique riche et diversifié fait de principes et de
règles matérielles se met en place dont seront évoqués les principaux
éléments (Section 3).
754 Un débat, historiquement daté, mais dont les résonances se font encore
sentir aujourd’hui, même si le contexte s’est modifié, s’est développé
sur le rôle du droit international en matière d’investissements interna¬
tionaux (§ 1). Il s’est déplacé aujourd’hui sur la quête d’un instrument
universel (§2).
tait la volonté des États qui entendaient s’en prévaloir d’exercer leur
contrôle sur les intérêts étrangers présents sur leur territoire, Une
conséquence fort précise en découlait : le contrôle exercé par les États
sur les activités exercées par des étrangers sur leur territoire devait
s’exercer seulement en fonction du droit national de l’État, le conten¬
tieux éventuel étant du seul ressort des tribunaux nationaux1.
756 La Résolution 1515 (XV) de 1960 était encore fort mesurée et se pré¬
sentait comme un texte de compromis, s’efforçant à la fois de ne pas
entraver les mouvements de capitaux dont les Etats en développement
avaient besoin, et de reconnaître les droits souverains de l’État déten¬
teur de ressources. Elle reconnaissait qu^aucun investissement ne pou¬
vait être effectué sur le territoire d’un État sans que son autorisation
ne fût recueillie. Cette autorisation, reflétant l’intérêt des États et des
peuples intéressés, pouvait s’accompagner de conditions mises à l’exer¬
cice de l’investissement. Les importations et exportations de capitaux
et transferts de revenus étaient régis par les termes de cette autorisa¬
tion, le droit national et le droit international.
Mais la Résolution 1803 (XVII) sur la charte des droits et des devoirs
économiques des États, beaucoup moins conciliante envers l’investis¬
sement d’origine étrangère, affirmait sans ambages le droit souverain
de tout État de légiférer dans la matière des investissements étrangers,
d’imposer des contraintes d’exploitation, et avait fait disparaître toute
référence au droit international.
Ce mouvement fortement idéologique n’empêchait pas les États
récepteurs d’investissement d’agir avec pragmatisme comme en
témoignent les nombreux codes d’investissement dont beaucoup se
dotèrent à cette époque2 Si certains de ces codes purent être justement
qualifiés de dissuasifs ou neutres, d’autres, qui ne furent pas les moins
nombreux, furent incitatifs.
Néanmoins, une occasion avait été perdue de parvenir dans le cadre
des Nations Unies à un texte qui aurait pu être de nature convention¬
nelle, et à vocation universelle, sur l’investissement international. Il
n’était pas inconcevable pour autant que des traités multilatéraux
fussent conclus dans un cadre différent.
760 Cette Convention n’est jamais entrée en vigueur. Toutefois, elle a exercé
une influence considérable sur de nombreuses conventions bilatérales
relatives à la promotion et la protection des investissements, qui seront
envisagées plus loin1 2.
À une période où les affrontements idéologiques des années soixante
étaient mis sous le boisseau, l’OCDE fit une nouvelle tentative d’établir
une convention à vocation universelle devant constituer un véritable
instrument de multilatéralisme en matière d’investissement interna¬
tional dans un univers désormais mondialisé. L’échec que connût cette
entreprise est particulièrement instructif.
1. Nature de l’AMI
761 L’objectif poursuivi par les promoteurs de cet Accord était double. Il
s’agissait d’abord de consolider dans un texte unique des solutions que
l’on pouvait considérer comme acquises au niveau du droit internatio¬
nal général ou en raison de leur diffusion dans le réseau des conven¬
tions bilatérales d’investissements. Le domaine visé ici était essentiel¬
lement celui de la protection des investissements internationaux. En
second lieu, il s’agissait d’assurer une plus grande liberté de l’investis¬
sement international en favorisant le libre choix du pays d’investisse¬
ment, ainsi que l'autonomie de l’investisseur dans la gestion de son
investissement. Sur ce deuxième aspect devaient cohabiter des règles
déjà généralement acceptées et des règles nouvelles.
Il faut ajouter à ceci que l’initiative de l’élaboration du texte avait
été prise dans le cadre d’une enceinte relativement limitée, l’OCDE. La
relative homogénéité de vues régnant entre les membres de l’OCDE,
tous favorables à la libéralisation du droit international de l’investisse¬
ment constituait, à coup sûr, un facteur favorable. Il est en effet permis
de se demander quelles auraient été les chances de réussite d’un projet
d'accord multilatéral qui n’aurait pas reçu l’approbation des membres
de l’OCDE.
Néanmoins, l’OCDE demeure une institution limitée ne compre¬
nant actuellement en son sein ni pays émergent, ni PVD.
762 La technique à laquelle il a été recouru est celle de l’« Accord auto¬
nome ». Il s’agit de négocier au sein de l’institution un traité interna¬
tional ouvert ensuite à l’adhésion des pays non membres. L’adhésion
de ces pays s’effectue ensuite à la condition qu’ils veuillent et puissent
assumer les obligations impliquées par l’accord. Il leur est cependant
possible de négocier un certain nombre d’exceptions spécifiques.
Cette technique, qui ne soulève pas en soi de problème particulier,
se révéla progressivement inadéquate lorsqu’il devint évident que l’im¬
portance des problèmes traités dans le projet d’AMI n’étaient pas de
ceux qui se traitent sous le manteau et que société civile et groupes de
pression mirent le doigt sur les multiples implications très concrètes
que n’eut pas manqué d’entraîner la mise en vigueur de l’Accord.
2. Contenu de l’AMI
763 L’AMI est un texte complexe, et qui n’a pas été tout à fait achevé. Les
points particulièrement dignes de remarques sont les suivants :
1. V. art. V. D. 1 du projet.
2. V. art. V. D. 2 du projet.
3. V. sur cette question. P. Juillard, « À propos du décès de l’AMI », op. cit. ; Y. Kodama,
« Dispute seulement under the Draft Multilatéral Agreement on Investment. The quests for
an Effective Investment Dispute Seulement Mechanism and its Failure », Journal of inter¬
national arbitration 1999, 16 (3), p. 45 et s.
4. À l’initiative de la France, en 1991, la Banque mondiale a proposé ses « Principes
directeurs » sur le traitement des investissements étrangers. Cette synthèse, de grande qua¬
lité, tant rédactionnelle que substantielle, appartient malheureusement au domaine du
droit souple, ce qui ne les prive pas nécessairement de tout avenir (cf. Carreau et Juillard,
op. cit., p. 413 et s., I. Shihata, Recent trends relating to entry of foreign direct investment,
ICSID Review, 1994, p. 47 et s.
546 LE DROIT DE L’INVESTISSEMENT INTERNATIONAL
1. La littérature sur les contrats d’État est immense. La bibliographie présentée ici est
donc nécessairement restrictive. Au rang des ouvrages et thèses, l’on citera : Walid Ben
Hamida, L’arbitrage transnational unilatéral. Réflexions sur une procédure réservée à l’initia¬
tive d'une personne privée contre une personne publique, thèse, Paris II, 2003 ; D. Bettems, « Les
contrats entre États et entreprises étrangères^», Meta éd. Lausanne, 1985; S. Manciaux,
« Investissements étrangers et arbitrage entre États et ressortissants d’autres États ». Trente
années d’activité du CIRDI université de Bourgogne. CNRS Litec 2004;. E. Gaillard,
« La jurisprudence du CIRDI, Paris, Pedone 2004 ; L. Lankarani El-Zein, « Les contrats
d’État à l’épreuve du_ droit international », Bruylant, Bruxelles, 2001 ; Ph. Leboulanger,
« Les contrats entre États et entreprises étrangères » Paris, Economica, 1985; S. Lemaire,
« Les contrats internationaux de l’Administration », Paris LGDJ 2005. Au rang des cours et
monographies : B. Audit, « L’arbitrage transnational et les contrats d’État : bilan et
perspectives » Centre d’études et de recherche du droit international et de relations
internationales (Académie de droit international de la Haye), Martinus Nijhoff, Dordrecht,
1987; D. Berlin, « Contrats d’État » Rép. dr. int.; J.-M. Jacquet, « Contrat d’État » J.Cl. dr.
int. Fasc 565.60 J.-F. Lalive, « Contrats entre États ou entreprises étatiques et personnes
privées ». Développement récents »; RCADI t. 181, 1983 p. 9 et s.; Ch Leben, « La théorie
du contrat d’État et l’évolution du droit international des investissements » RCADI, t. 302
(2003) p. 201 et s.; P. Weil « Problèmes relatifs aux contrats passés entre un État et un
particulier », RCADI t. 128 1969) p. 95 et s. Au rang des colloques, l’on retiendra H. Cassan
(dir), « Contrats internationaux et pays en développement » Paris, Economica, 1989; Rev.
arb. 1985 n° 4 p. 489 et s.; « Les Etats et l’arbitrage international; Rev. arb. 2003 n° 3,
p. 617 et s. : « Les États dans le contentieux économique international ». Au rang des
articles on retiendra particulièrement : D. Berlin, « Les contrats d’État (state contracts) et
la protection des investissements internationaux» DPCI 1987 p. 197 et s.; G. Burdeau,
« Droit international et contrats d’État, la sentence Aminoil au Koweit du 24 mars 1982 »,
AFD I 1982 p. 454 et s.; A. El Kosheri, « ICSID arbitration and developing countries »
ICSID Review FLJ 1993 vol. 8, p. 104 et. s.; « The particularity of the conflict avoidance
methods pertaining to petroleum agreements » ICSID Review, FILJ 1996, vol. 11, p. 272
et s. ; J.-M. Jacquet, « La loi de l’État contractant », Mélanges dédiés à Louis Boyer, Presses de
l’Université des sciences sociales de Toulouse, 1996, p. 283 s.j Ph. Kahn, « Souveraineté de
l’État et règlement du litige. Régime juridique du Contrat d’Etat » Rev. arb. 1985 p. 641 et
s. ; « Contrats d’État et nationalisation. Les apports de la sentence arbitrale du 24 mars
1982 JDI 1982 p. 844 et s. ; « Les principes généraux du droit devant les arbitres du
commerce international» JDI 1989 p. 305 et s.; D. Lamèthe, « Les relations entre les
gouvernements et les entreprises en matière de grands projets d’investissement » JDI 1998
p. 45 et s.; B. Montembault, « La stabilisation des contrats d’État à travers l’exemple des
contrats pétroliers ». Le retour des dieux sur l’Olympe? », RD aff. int. 2003 p. 593 et s.;
Ch. Leben, « Retour sur la notion de contrat d’État et sur le droit applicable à celui-ci »,
LE DROIT INTERNATIONAL DE L’INVESTISSEMENT 547
Tous les contrats d'État ne peuvent pas être classés dans la même
catégorie. De nombreux contrats ayant été conclus entre un État et un
investisseur étranger ont pour objectif la réalisation d’un projet qui
mérite d’être qualifié d’investissement. Dans une situation de ce
genre, fréquente encore aujourd’hui, notamment de la part d’États qui
entendent faire appel à des opérateurs privés étrangers afin d’obtenir
d’eux les réalisations les plus diverses dont ils n’entendent assumer ou
faire assumer par un opérateur national la charge, l’État intervient en
une double qualité. Il est à la fois État souverain, récepteur d’un inves¬
tissement devant prendre place sur son territoire, et partie à un contrat
conclu avec l’investisseur étranger. Il n’est donc pas abusif de qualifier
un tel contrat de contrat d’investissement et de s’interroger sur son
régime juridique1.
Mélanges H. Thierry, Paris Pedone, 1998 p. 247 et s.; « Quelques réflexions théoriques à
propos des contrats d’État », Mélanges Ph. Kahn, Université de Bourgogne, CNRS, Litec 2000,
p. 119 et s.; « La responsabilité internationale de l’État sur le fondement des traités de
promotion et de protection des investissements » AFDI 2004 p. 683 et s.; P. Mayer, « La
neutralisation du pouvoir normatif de l’État en matière de contrats d’État » JDI 1986 p. 5
et s.; F.M. Maniruzaman, « State Contracts in Contemporary International Law : Monist
versus Dualist Théories »,European Journal of International Law 2001 p. 309 et s. ; B. Oppetit,
« Arbitrage et contrats d’État. L’arbitrage Framatome et autres c/Atomic Energy organization
of Iran» JDI 1984 p. 37 et s.; B. Stern, «Trois arbitrages, un même problème, trois
solutions : les nationalisations pétrolières libyennes devant l’arbitrage international »,
Rev. arb. 1980 p. 3 et s.; P.Y. Tschanz, « Contrats d’État et mesures unilatérales de l’État
devant l’arbitre international ». Rev. crit. DIP 1985 p. 47 et s. ; P Weil, « Droit international
et contrats d’État », Mélangés P. Reuter, Paris, Pedone, 1981, p. 549 et s. ; Principes généraux
du droit et contrats d’État », Mélanges B. Goldman, Paris, Litec, 1982, p. 387 et s.
1. La définition du contrat d’État est une question qui a fait couler beaucoup d’encre.
Un accord semble s’établir assez largement au sein de la doctrine pour distinguer l’État-
administration, personne morale de droit public interne, de l’État souverain, sujet du droit
des gens (v. P. Haggenmacher » , « L’État souverain comme sujet du droit international, de
Vitoria à Vatel », 1’État/2, Droits, n° 16, 1992, p. 11 et s.; S. Lemaire, « Les contrats
internationaux de l’Administration, op. cit. p. 9 et s.). Il est généralement admis que l’État
souverain est parfaitement apte à conclure des contrats avec des personnes privées
étrangères, quitte à insister sur la présence dans le contrat de clause révélatrices, et d’un
contexte favorable à cette présence du souverain (v. P. Mayer, « La neutralisation...op. cit.
p. 14; ch. Leben, « La théorie du contrat d’État... » op. cit. p. 240 et s.; 258 et s. Contra
S. Lemaire, op. cit. ; adde, insistant sur la nécessaire distinction entre les contrats conclus
par l’État et les contrats conclus par une émanation de l’État, M. Kamto, « La notion du
contrat d’État : une contribution au débat »Rev. arb. 2003 p. 719 et s.). Dans une perspective
plus proche de celle retenue dans le présent texte, v. P. Juillard, « Contrats d’Etat et
investissement », in « Contrats internationaux et pays en développement », op. cit. p. 159
et s. Saber Salama, « L’acte de gouvernement : Contribution à l’étude de la force majeure
dans le contrat international » éd. Bruylant, Bruxelles, 2001.
548 LE DROIT DE L’INVESTISSEMENT INTERNATIONAL
s’il est associé dans une certaine part à la réalisation du contrat, par
exemple en devant réaliser des études, ou mettre à disposition de son
partenaire certaines installations, l’État est pour l’essentiel créancier
d’un ensemble de prestations, tandis que la partie privée sera créan¬
cière d’un prix sous quelque forme que celui-ci se présente. Mais il est
plus important encore de garder à l’esprit, que dans la mesure où le
contrat est un contrat d’investissement, il s’accompagne du côté de
l’investisseur privé d’apports significatifs, d’un engagement souvent
durable et d’une prise de risque plus ou moins importante selon la
nature de l’opération. L’État de son côté attend la réussite du projet,
laquelle, du point de vue du droit de l’investissement, ne peut guère se
matérialiser que par sa contribution au développement ou ses consé¬
quences économiques favorables.
À l’égard de la constitution de l’investissement international, le
contrat d’État ne pose guère de problèmes de constitution, car le contrat
autorise par hypothèse la constitution, qui doit s’accompagner des
autorisations formelles requises. Il pose au contraire d’importants pro¬
blèmes de sécurité. Le contractant étranger de l’État est en effet exposé
aux mesures de puissance publique du souverain avec lequel il a
contracté, qui peuvent à tout moment rendre plus difficile ou compro¬
mettre sa situation, voire anéantir ses espoirs par une résiliation du
contrat ou des autorisations d’investir, ou par une expropriation ou
une nationalisation.
L’insécurité du cocontractant de l’État atteint son degré maximal si
le contrat est soumis à la loi de l’État, et les litiges qui peuvent s’élever
à ses propres tribunaux, car même si l’indépendance du système judi¬
ciaire peut être présumée, l’investisseur étranger ne se sentira pas plei¬
nement à l’aise en cas de différend. Toute l’évolution qui s’est produite
en matière de contrats d’État a donc consisté à porter remède autant
que faire se peut à cette insécurité juridique.
779 Le très grand nombre de ces traités ne correspond cependant pas à une
totale disparité des règles adoptées par les États contractants. En effet,
la Convention de l’OCDE de 1967 sur la protection de biens des étran¬
gers, dont on se souvient qu’elle n’est jamais entrée en vigueur, a très
fortement inspiré les conventions bilatérales conclues entre États euro¬
péens et pays en voie de développement. Elle leur a servi de modèle du
point de vue de la structure, du contenu, ainsi que de la formulation
des normes. Le modèle nord-américain de conventions accuse un cer¬
tain nombre de différences2.
L’existence de ces traités illustre le rôle du droit international au
niveau de l’investissement international. Tout d’abord parce que ces
traités fournissent l’essentiel des règles applicables aux investissements
qui tombent dans leur champ d’application. Ensuite, et plus subsidiai-
A. Phase de pré-investissement
784 La phase de pré investissement est dominée par une question lanci¬
nante, dont les répercussions économiques sont considérables :
convient-il d’imposer aux États l’admission de tous les investissements,
d’où qu’ils viennent et dans quelque domaine que ce soit, ou convient-
il de laisser aux États le libre choix de fixer les conditions d’accueil des
investissements d’origine étrangère sur leur territoire ?
Une réponse positive à cette question, qui serait parfaitement en
phase avec la mondialisation, ne s’est pas encore imposée. Il est au
demeurant peu vraisemblable qu’elle s’impose sans nuances3.
certaine prudence. Cette avancée fut une des raisons de son échec. À
l’heure actuelle, une telle solution ne semble guère concevable que
dans le cadre d’intégrations économiques régionales comme l’Union
européenne ou l’ALENA. La Charte de l’énergie porte en germe ce prin¬
cipe, celui-ci dépendant cependant d’un Accord additionnel non encore
en vigueur. Le modèle de Convention bilatérale adopté depuis 2004 par
les Etats-Unis d’Amérique, et que ceux-ci s’efforcent de faire accepter
par les États avec lesquels ils concluent des Convention bilatérales est
également en ce sens.
En d’autres termes, le « traitement national » dans la phase de
constitution des investissements, corollaire du principe de la non-dis¬
crimination ne s’est pas encore imposé.
La plupart des traités bilatéraux sur l’investissement se rallie à la
solution traditionnelle contraire, selon laquelle chaque État demeure
libre — même s’il est appelé à être « encourageant » — d’accepter ou
non la constitution d’investissements étrangers sur son territoire. De
tels investissements doivent être constitués en conformité avec les
lois et règlements du pays hôte. Telle est la solution retenue dans les
traités bilatéraux conclus par la France. Telle est également la solu¬
tion retenue par la Convention de Séoul du 11 octobre 1985 ayant créé
l’Agence multilatérale de garantie des investissements, destinée à
mettre en place un système d’assurance internationale, favorable à la
création des investissements internationaux. Cependant, la solution
contraire pourrait certainement être reprise, sous une forme ou
sous un autre, si un accord multilatéral sur l’investissement devait voir
le jour dans le cadre d’une autre organisation internationale que
l’OCDE.
B. Phase de post-investissement
Dans la phase de post-investissement, la matière est dominée par le
traitement et la protection de l’investissement.
1. Contexte nouveau
790 Ainsi que cela a déjà été indiqué, les tribunaux arbitraux CIRDI
acceptent depuis quelques années de se reconnaître compétents, en
l’absence de convention d’arbitrage conclue entre un État et une per¬
sonne privée étrangère, sur le fondement du consentement de l’État à
l’arbitrage donné dans une de ses propres lois ou, plus souvent, dans
un traité de protection et de promotion des investissements, l’investis¬
seur privé mettant en oeuvre le droit dont il a reçu le bénéfice par la
formulation de sa demande d’arbitrage7.
2. Problèmes nouveaux
792 Sans prétendre ici à l’exhaustivité2, l’on se bornera à relever trois
catégories de questions apparaissant comme centrales dans le récent
contentieux de l’arbitrage CIRDI.
1. Wena Hotels c/Égypte, Comité ad hoc, 5 févr. 2002, E. Gaillard, op. cit. 689; Vivendi
c/Argentine, Comité ad hoc, 3 juill. 2002, E. Gaillard, op. cit. 719; Azurix c/Argentine, sen¬
tence sur la compétence du 8 déc. 2003, E. Gaillard, op. cit. 849; S.G.S. c/Philippines,
sentence sur la compétence du 29 janv. 2004, E. Gaillard, op.cit. 865 ; Lesi Dipenta c/Algérie,
op. cit. ; Impregilo c/Pakistan, sentence sur la compétence du 29 avril 2005. JDI 2006. 288
obs. E. Gaillard; C.M.S. c/Argentine, sentence du 12 mai 2005, JDI 2006. 308, obs.
E. Gaillard ; Bayndir Insaat c/Pakistan, op. cit.
2. V. sentence du 30 août 2000, Metalclad c/Mexique, E. Gaillard, op. cit. p 612 -617
et 669-680.
3. V. affaires SGS/Philippines, précité, Nobles Venture c/Roumanie, sentence du 12 oct.
2005, JDI 2006. 326, obs. E. Gaillard.
562 LE DROIT DE L’INVESTISSEMENT INTERNATIONAL
considérant que celle-ci ne couvrait que les actes pris par 1 État en sa
qualité de souverain, par opposition aux actes qu’il peut accomplir en
qualité de commerçant1.
798 Enfin les tribunaux arbitraux CIRDI ont dû également se prononcer sur
la portée de la clause de la nation la plus favorisée présente dans de
nombreux traités bilatéraux. Cette clause a en effet été invoquée par
certains investisseurs privés étrangers afin de se prévaloir des disposi¬
tions relatives au règlement des différends contenus dans un autre
traité conclu par l’État récepteur de leur investissement. La question a
donc été posée à certains tribunaux arbitraux CIRDI de savoir si leur
propre compétence pouvait reposer, en vertu de la clause NPF, sur un
traité différent de celui qui protège l’investisseur auteur de la demande
d’arbitrage. Ici encore, il n’est guère possible de dégager plus qu’une
tendance dans la jurisprudence arbitrale CIRDI. Celle-ci semble favo¬
rable à une application de la clause NPF à la question de règlement des
différends. Cependant, le libellé exact de la clause demeure d’une
grande importance et la solution finale doit en dépendre2.
LES RISQUES
ET GARANTIES
DU COMMERCE
INTERNATIONAL
799 Environnement juridique O Les échanges commerciaux entre les
opérateurs internationaux entraînent des mouvements importants de
capitaux1. On imagine facilement que ces opérateurs aient besoin de
garanties. L’environnement juridique dans lequel ils interviennent doit
naturellement leur donner confiance. Les règles juridiques doivent être
non seulement morales2, mais également sûres et, sinon libérales, du
moins favorables à la circulation des richesses.
Les protections attendues résultent d’abord, comme on l’a vu (v. supra,
n° 739 s.) de toute mesure prise par les États pour accueillir les inves¬
tissements étrangers. Si ces investissements peuvent se faire librement,
1. Cf. les objectifs du Fonds monétaire international qui sont (art. 1 des statuts) :
• Promouvoir la coopération monétaire internationale au moyen d’une institution perma¬
nente fournissant un mécanisme de consultation et de collaboration en ce qui concerne les
problèmes monétaires internationaux.
• Faciliter l’expansion et l’accroissement harmonieux du commerce international et
contribuer ainsi à l’instauration et au maintien de niveaux élevés d’emploi et de revenu réel
et au développement des ressources productives de tous les États membres, objectifs pre¬
miers de la politique économique.
• Promouvoir la stabilité des changes, maintenir entre les États membres des régimes de
change ordonnés et éviter les dépréciations concurrentielles de change.
• Aider à établir un système multilatéral de règlement des transactions courantes entre les
États membres et à éliminer les restrictions de change qui entravent le développement du
commerce mondial.
• Donner confiance aux États membres en mettant les ressources générales du Fonds tem¬
porairement à leur disposition moyennant des garanties adéquates, leur fournissant ainsi
la possibilité de corriger les déséquilibres de leurs balances des paiements sans recourir à des
mesures préjudiciables à la prospérité nationale ou internationale.
• Conformément à ce qui précède, abréger la durée et réduire l’ampleur des déséquilibres
des balances de paiements des États membres.
2. V. P.-H. Ganem, « Sécurisation contractuelle des investissements internationaux »,
grands projets, mines, énergie, métallurgie, infrastructure, Feduci 1999, préf. Lesguillons,
avant-propos Pellet.
LES SÛRETÉS 565
CHAPITRE 1
LES SÛRETÉS
800 Distinction O Les sûretés1 2 occupent une place déterminante dans les
opérations du commerce international. Il n’est plus guère de crédit qui
ne s’accompagne aujourd’hui d’une garantie. Les garanties et les sûre¬
tés (on s’en tiendra ici à une conception large de la matière) ont sou¬
vent une dimension internationale, par exemple lorsque le bien grevé
est à l’étranger, alors que les autres aspects de l’institution sont regrou¬
pés en France; ou encore, lorsqu’elles garantissent l’exécution d’une
obligation présentant un caractère international.
Un temps très nationale, la matière est en voie sinon d’unification
du moins d’harmonisation autour de trois projets principaux3, celui de
la BERD, celui d’Unidroit et celui de la CNUDCI.
805 Plan O En attendant que ces différents textes deviennent de droit positif et
faute de règles matérielles suffisantes, il faut encore raisonner en termes de
conflits de lois dont le jeu diffère selon qu’il s’agit de sûretés réelles ou de sûre¬
tés personnelles.
§ 1. Sûretés réelles
806 Principes O La loi compétente en matière de sûreté réelle se déter¬
mine généralement en distinguant le droit réel lui-même de sa source3.
Le premier est soumis à la loi du lieu de situation (lex rei sitae). La cause
de la sûreté est régie soit par la lex contractus, si la source est contrac¬
tuelle, soit par la lexfori s’il s’agit d’un jugement, soit enfin, si la sûreté
a une origine légale, par la loi qui gouverne le rapport juridique auquel
la garantie est légalement attachée. Cette distinction ne joue, toutefois,
que dans la mesure où l’on cherche à apprécier les conditions d’exis¬
tence de la sûreté. Une double vérification s’impose alors4. Mais s’il est
A. Sûretés conventionnelles
807 Hypothèque O Le crédit hypothécaire a pris une place essentielle dans
les techniques de financement, à telle enseigne que l’on s’interroge
dans l’Union Européenne sur l’opportunité d’instituer « un instru¬
ment paneuropéen qui pourrait être utilisé de manière souple, pour ce
qui concerne la garantie des prêts immobiliers, c’est-à-dire les sûretés
hypothécaires »2 contrat d’hypothèque est soumis à la loi choisie par
les parties, qui coïncide le plus souvent avec la lex rei sitae. Si tel n’est
pas le cas, la loi du lieu de situation doit être appliquée pour que soient
déterminées les prérogatives réelles du créancier hypothécaire — droit
de préférence et droit de suite — et leur opposabilité aux tiers3.
L’originalité de l’hypothèque est ailleurs. L’article 2417 du Code civil
apporte en effet une importante dérogation à la règle locus régit actum.
Ce texte dispose que « les contrats passés en pays étranger ne peuvent
donner d’hypothèque sur les biens de France, s’il n’y a des dispositions
contraires à ce principe dans les lois politiques ou dans les traités ». Il en
résulte que le contrat ne peut être passé hors de France, même devant
1. Cf. G. Khairallah, Les sûretés mobilières en droit international privé, Economica, 1984 ;
v. égal. H. Gaudemet-Talion, JCP 1970.11.16182 ; H. Batiffol, « Crédit et conflits de lois »,
Mélanges Houin, p. 233. La proposition est peut-être plus facile à réaliser s’agissant d’opé¬
rations fiduciaires, v. Bismuth, « Les opérations fiduciaires en droit international privé », in
Les opérations fiduciaires, éd. Feduci; égal. L. Floret, « Fiducie-gestion et fiducie-sûreté dans
les projets de financements BOT en Amérique latine », D. aff. 1999.1986 — v. égal. S. Graillé
de Neré, Les difficultés d'exécution du contrat en droit international privé, thèse Bordeaux
2001, p. 209 s. ; M.E. Ancel, Repenser le droit des sûretés mobilières, Bibliothèque Tune, LGDJ
2005.
2. Cf. Livre vert sur le crédit hypothécaire, 19 juill. 2005; v. égal. M.E. Ancel, « Crédit
hypothécaire transfrontière, ou comment dessiner l’empire des lois », Rev. Lamy droit civil,
mai 2005, 28 ; Ch. Albiges, « L’hypothèque conventionnelle transfrontalière européenne »,
Dr. et patrimoine 2006, n° 150, 74 s.
3. V. Civ. lre, 19 janv. 1999, Bull. civ. I, n° 21, JCP 2000, II, 10248, note Th. Vignal,
D. 1999, Somm. 292, obs. B. Audit : « La sûreté immobilière est soumise à la loi de situa¬
tion des biens »; l’arrêt ajoute que la loi de la source de l’hypothèque est la loi d’autonomie.
V. encore sur cet arrêt, M. Revillard, Defrénois 1999.523, v. aussi Bouckaert, « Les prêts
transfrontaliers garantis par une hypothèque : esquisse d’une solution », Mélanges De Val-
keneer, Bruxelles, Bruylant, 2000, p. 77. La « lex rei sitae » doit également régir les privilèges
spéciaux immobiliers, dont le privilège du prêteur de deniers.
570 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. M. Revillard, Defrénois 1982, art. 32875; Droz, « Problèmes soulevés par l’établis¬
sement en Angleterre ou aux États-Unis d’un mandat d’hypothèque sur un immeuble
français », Mélanges Breton-Derrida, 1991.93.
2. Est valable, sauf fraude, l’hypothèque consentie par une société fictive antérieure¬
ment à la reconnaissance officielle de fictivité : Com., 22 juin 1999, Bull. civ. IV, n° 136,
DMF 2000, 535, rapport Rémery, obs. P. Bonassies, s’agissant d’une hypothèque constituée
à Chypre par un bureau d’avocat sur un navire russe.
3. V. Com., 15 mars 1994 JCP 1994, II, 22277, note Larroumet; le report sur les indem¬
nités d’assurance n’est cependant pas admis : CA Rouen 1er sept. 2005, DMF 2005, 988,
obs. crit. P. Latron.
4. CA Rennes, 6 févr. 1962, Rev. crit. DIP 1964, 486, note C. David.
LES SÛRETÉS 571
810 Gage O Depuis 1933, la jurisprudence décide que la loi française est
seule applicable aux droits réels dont sont l’objet les biens mobiliers
situés en France1 et soumet le gage à cette règle. La lex rei sitae régit
toutes les prescriptions qui visent à assurer l’efficacité du droit réel de
gage : écrit, mise en possession, pacte commissoire et plus générale¬
ment toutes les prérogatives du créancier gagiste.
En revanche, la loi du contrat de gage s’applique aux rapports per¬
sonnels que ce contrat établit entre le créancier et le débiteur : conser¬
vation du bien objet du gage, détérioration, restitution...
Cette dualité de lois compétentes est inéluctable et conduit à la pré¬
pondérance de la loi la plus sévère2.
La réforme du gage opérée par l’ordonnance du 23 mars 2006 devrait
conduire à accueillir plus favorablement qu’hier les sûretés étrangères.
En effet, le gage n’est plus un contrat réel et devient parfait par le seul
établissement d’un écrit contenant la désignation de la dette garantie,
de la quantité des biens donnés en gage ainsi que leur espèce ou leur
nature (art. 2336 C. civ.). Il n’est pas exclu, du reste, que l’on permette
à un créancier étranger de procéder en France à l’inscription de sa
sûreté3.
S’agissant de la compétence des tribunaux, on notera qu’il n’y a
pas, en la matière, de compétence exclusive.4 C’est ainsi qu’une société
de droit français a pu assigner valablement en France une banque,
siégeant en France, en mainlevée d’un gage-espèces destiné à garantir
la contre-garantie consentie par ladite banque au bénéfice d’une banque
irakienne5.
1. Req., 24 mai 1933, D. 1935.1, p. 253, note Batiffol, Rev. crit. DIP 1934, 142, note
J.P.N.; Civ. lre, 8 juill. 1969, Bull. civ. I, n° 268, Rev. crit. DIP 1971, 75, note Fouchard,
JCP 1970, II, 16182, note H. Gaudemet-Talion; 3 mai 1973, Rev. crit DIP 1974.10, note
Metzger, JDI 1975, 74, note Fouchard. Lorsque le gage porte sur une créance, la difficulté
est de localiser l’objet de la sûreté, v. not. Surville, « La cession de créance et la mise en gage
des créances en droit international privé », JDI 1897.671 ; égal. P. Lagarde, note Rev. crit.
DIP 1982.336.
2. V. S. Sana Chaillé de Neré, op. cit., n° 306.
3. V. sur ce point, M. Attal, « Les incidences internationales de la réforme du droit
français des sûretés réelles », D. 2006, 1738.
4. Sous réserve de l’art. 22.4 du Règlement 44/2001 qui donne compétence aux juridic¬
tions de l’État où le dépôt ou l’enregistrement d’un brevet ou d'un droit équivalent a été
effectué, ce qui concerne les nantissements conventionnels de brevets, marques et droits
voisins.
5. Com., 24 févr. 1998, JDI 1998, 963, note Jacquemont, Rev. crit. DIP 1999, 309, note
A. Sinay-Cytermann.
LES SÛRETÉS 573
812 Floating charge O Les Anglais connaissent une sûreté encore plus
efficace : il s’agit de 1a floating charge que l’on définit généralement de
la manière suivante1 : une charge sur un ensemble de biens présents et
futurs appartenant à une société (the whole business and undertaking of
the company) et susceptible de mouvements pendant l’exercice normal
de la société, i.e. une sorte de privilège général grevant l’ensemble des
biens du débiteur. Le débiteur conserve la libre administration et dis¬
position de ses biens jusqu’à la survenance d’une défaillance qui auto¬
rise alors le créancier à prendre toutes les mesures qui s’imposent pour
réaliser ses droits. Autrement dit, tant que les choses vont bien, la
sûreté est flottante et se distingue ainsi de la fîxed charge. Une fois que
les difficultés se présentent, la sûreté se cristallise sur les biens existants
et une procédure de réalisation est mise en oeuvre sous la responsabilité
d’un receiver (liquidateur), le créancier pouvant être primé par certains
créanciers et notamment par les salariés de la société et le fisc.
Malgré les évolutions du droit français, une telle sûreté est sans
doute difficilement compatible avec nos propres principes. Son carac¬
tère universel et surtout le rôle dévolu au liquidateur heurte encore les
conceptions françaises du droit des sûretés.
813 Garanties financières O Pour lever toute difficulté sur cette ques¬
tion de localisation, la Directive du Parlement européen et du conseil
en matière de garanties financières a posé une règle assez claire2. Selon
l’article 9 de ce texte, les instruments financiers composant l’assiette
1. V. P. Lagarde, note sous CA Paris, 19 janv. 1976, Rev. crit. DIP 1977,126; égal. Dahan,
« La floating charge : reconnaissance en France d'une sûreté anglaise », )DI 1996, 381 ; plus
général. Sur les sûretés en droit angais, v. M-F. Papandréou-Deterville, Le droit anglais des
biens, LGDJ 2004, préf. G. Samuel, avant-propos C. Witz, p. 339 s.
2. Dir. Cons. CE n° 2002/47, 6 juin 2002, JOCE 27 juin, L. 168, 43.
574 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Sûretés légales
815 Lex rei sitae et lex causae O Les sûretés réelles d’origine légale sont
soumises à la compétence de principe de la loi du lieu de situation L La
solution vaut ou devrait valoir pour le droit de rétention2, aujourd’hui
dûment reconnu par le Code civil en tant que garantie, voire en tant
que voie d’exécution simplifiée, mais sans doute pas en tant que véri¬
table sûreté3.
La lex rei sitae a également vocation à régir les privilèges et plus par¬
ticulièrement les privilèges spéciaux qui sont de véritables sûretés4.
Cependant, cette compétence n’est pas exclusive : il faut également
tenir compte de la lex causae. Ainsi le fréteur qui veut exercer devant
une juridiction française le privilège accordé par la loi française (lex rei
sitae ou lexfori) doit, en même temps et cumulativement, justifier qu’il
bénéficie d’un privilège ou de droits équivalents selon la loi applicable
au contrat d’affrètement (lex causae)5. La solution dégagée pour les
privilèges maritimes n’est pas une solution particulière : elle contient
le droit commun.
S’agissant du classement des privilèges, la loi la plus appropriée
paraît être la lexfori.
C. Sûretés judiciaires
816 Lex rei sitae et lex fori O L’hypothèque judiciaire conservatoire, le
nantissement judiciaire du fonds de commerce et le nantissement judi¬
ciaire des parts de sociétés et des valeurs mobilières sont des véritables
sûretés (L. 9 juill. 1991, art. 77). Ils relèvent ainsi de la compétence
du tribunal et de la loi du lieu de situation6. Cette loi n’est pas ici en
cée par un créancier réservataire. La décision ne va pas de soi : il est difficile de ranger la loi
française sur la réserve de propriété parmi les lois de police : celle-ci est applicable en tant
que lex concursus et doit composer avec d’autres lois lorsque le bien formant l’objet de la
clause de réserve est situé à l’étranger. En outre, la question de l’existence même du droit
de propriété est antérieure à celle des conditions de la revendication : il est donc nécessaire
de déterminer en toute hypothèse une loi applicable.
1. En tenant compte également de loi de la source, i.e. de la loi applicable aux relations
justifiant l’octroi de la sûreté. S’il s’agit de prendre une inscription conservatoire d’hypothèque,
la lexfori serait compétente : Civ. lre, 31 janv. 1984, JCP 1985, II, 20362, note F. Boulanger.
2. V. Corn., 2 mars 1999, Bull. civ. IV, n° 52, JCP 1999.1.158, n° 11, Rev. crit. DIP
1999.305, rapport J.-P. Rémery; DMF 2000.245, et les obs. ; égal. Derruppé, La nature juri¬
dique du preneur à bail et la distinction des droits réels et des droits de créance, n° 355.
3. C. civ. art. 2285 : « Peut se prévaloir d’un droit de rétention sur la chose :
- celui à qui la chose a été remise jusqu'au paiement de sa créance;
- celui dont la créance impayée résulte du contrat qui l’oblige à la livrer;
- celui dont la créance impayée est née à l’occasion de la détention de la chose ».
4. Com., 8 juill. 1981, Bull. civ. IV, n° 311; D. 1981, IR 541, obs. B. Mercadal, Rev.
crit. 1982, 267, note M. Santa-Croce.
5. Com., 20 mai 1997, navire Nobility, Bull. civ. IV, n° 153, DMF 1997.891, rapport
J.-P. Rémery, obs. M. Rémond-Gouilloud, Rev. crit. DIP 1997.545; A. Fall. Privilège du fré¬
teur et mesures conservatoires, à propos de l’arrêt du 20 mai 1997, Rev. Scapel 2000, 155.
6. Cf. Civ. lre, 17 nov. 1999, Bull. civ. I, n° 305, Rev. crit. DIP 2000.433, note Rémery,
D. 2000.548, concl. Sainte-Rose, note Khairallah, JDI 2001, 851, note V. Bonnet : « Le prin-
576 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
cipe et le régime de l’hypothèque judiciaire provisoire sont soumis à la seule loi de situation
de l’immeuble et il en est de même pour l’inscription définitive de cette hypothèque ».
1. Civ. lre, 17 janv. 1995, Bull. civ. I, n° 34, JCP 1995.11.22430, note H. Muir-Watt,
Rev. crit. DIP 1996.133, note Y. Lequette. Les actions, qui ne concernent pas le fond, font
cependant l’objet d’une interprétation large, ce qui revigore la compétence du forum arresti
(Civ. lre, 11 févr. 1997, Bull. civ. I, n° 47 et 48, DMF 1997.616, obs. P. Bonassies). Contra :
Civ. lre, 6 nov. 1979, Nassibian, Bull. civ. I, n° 269, JDI 1980, 95, rapport Ponsard, Rev. crit.
DIP 1979, 589, note Couchez; v. égal, infra, n° 838.
2. V. Les sûretés, la publicité foncière, 3e éd., Précis Dalloz, n° 20; v. égal. M. Bourassin, L’ef¬
ficacité des garanties personnelles, LGDJ 2006, préf. M.N. jobard-Bachellier et V. Brémond.
3. V. CA Paris, 22 oct. 2000, D. 2002, Somm. 1394, obs. V. Audit, précisent que la
prestation caractéristique est l’obligation de faire à la charge du promettant. La jurispru¬
dence contemporaine a consacré le porte fort d’exécution : Com., 13 déc. 2005, D. 2006,
298, JCP 2006, II, 10021, note Simler : « celui qui se porte fort pour un tiers en promettant
la ratification de ce dernier d’un engagement est tenu d’une obligation autonome dont il se
trouve déchargé dès la ratification par le tiers, tandis que celui qui se porte fort de l’exé¬
cution d'un engagement par un tiers s'engage accessoirement à l’engagement principal
souscrit par le tiers à y satisfaire si le tiers ne l’exécute pas lui-même ».
4. V. Y. Loussouarn, « Les sûretés personnelles traditionnelles en droit international
privé », in Les sûretés, FEDUCI, 1984, 429. Rappr. en matière de novation, Civ. lre, 13 déc.
1972, Rev. crit. DIP 1974.498, note P. Lagarde; de délégation, v. supra, n° 676. Pour le reste,
la jurisprudence est inexistante, d’où le recours aux principes contenus dans la Convention
de Rome et dans le règlement 44/2001.
LES SÛRETÉS 577
A. Cautionnement
818 Définition O Le cautionnement est le contrat par lequel un garant, la
caution, se soumet envers un créancier à satisfaire à l’obligation sous¬
crite par un débiteur, si ce dernier n’y satisfait pas lui-même (C. civ.
art. 2288). Contrat unilatéral liant la caution au créancier et s’inscri¬
vant dans une opération tripartite, le cautionnement a connu ces der¬
nières années un développement considérable. Économique d’abord,
car cette sûreté personnelle est venue garantir de très nombreux cré¬
dits. Juridique, ensuite, la jurisprudence et la loi s’étant succédé pour
parfaire le régime de l’institution dont le Code civil s’était contenté de
donner les grandes lignes, en insistant particulièrement sur le caractère
accessoire de l’engagement de la caution. Dans le monde des affaires,
ce sont souvent des banques qui se portent caution. Ce sont aussi des
dirigeants de sociétés qui sont appelés à cautionner leur entreprise.
Cela vaut dans l’ordre interne comme dans l’ordre international.
Malgré un contentieux relativement important, la pratique du
commerce international utilise encore le cautionnement pour couvrir
des risques très divers4 :
- caution de soumission,
- caution d’achèvement, de bonne fin (performance guarantee, per¬
formance bond),
- caution d’entretien,
- caution de restitution d’acomptes (repayment guarantee, mobilisa¬
tion payment guarantee)
- caution de retenue de garantie (rétention money bond).5
1. Civ. lre, 1er juin. 1981, Bull. civ. I, n° 241, Rev. crit. DIP 1982.336, note P. Lagarde;
13 avr. 1992, Bull. civ. I, n° 121; T. com. Luxembourg, 27 nov. 1980, D. 1981, JR, p. 504.
Plus généralement, v. A. Sinay-Cytermann, Rep. dr. int., V° Cautionnement 1998.
2. Civ. lre, 1er juill. 1981, préc.; 3 déc. 1996, Chaker, inédit.
3. V. CA Versailles, 6 févr. 1991, D. 1992.174, note MondoliniJCP 1992.11.21972, note
Osman, Rev. crit. DIP 1991.745, note P. Lagarde; RTD civ., 1992, p. 387, obs. J. Mestre,
/DJ 1992.125, note J. Foyer. V. égal. R. Libchaber, Rev. sociétés 1991.758.
4. Cf. Civ. lrc, 29 mars 1978, Rev. crit. DIP 1980.114, note P. Lagarde.
5. Com., 21 déc. 1987, Bull. civ. IV, n° 281, Rev. sociétés 1988, 398, note H. Synvet, Rev.
crit. DIP 1989.344, note M.N. Jobard-Bachellier; égal. 9 avr. 1991, Rev. sociétés 1991.746,
note R. Libchaber, Bull. Joly 1991.589; 8 déc. 1998, Rev. sociétés 1999,93, note Y. Guyon,
Rev. crit. DIP 1999.284, note M. Menjucq; 9 mars 1993, Bull. civ. IV, n° 94, Rev. sociétés
1993, 584. - égal, supra, n° 241.
LES SÛRETÉS 579
B. Garantie autonome
822 Définition O La garantie autonome est apparue dans les relations
d’affaires internationales dans les années 1970. Rapidement reconnue
par la jurisprudence3, elle se définit comme « l’engagement par lequel
le garant s’oblige, en considération d’une obligation souscrite par un
tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant des
modalités convenues » (C. civ. art. 2321, al. 1er, issu de l’ord. 23 mars
2006). Ainsi, la garantie autonome est-elle souvent donnée par une
banque française à un bénéficiaire étranger, pour favoriser la passation
1. V. Rép. min., 22 juill. 1985, Rev. crit. DIP 1986.178, JCP 1986.IV.25.
2. Com., 22 oct. 1996, Bull. civ. IV, n° 245.
3. Com., 20 déc. 1982, D. 1983.365, note Vasseur, v. plus généralement O. Elwen, « La
garantie bancaire à première demande», Rec. Cours Academie La Haye 1998, 275;
Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes, 3e éd., Litec, n° 856 et s.
5 80 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. La CCI a mis au point des règles uniformes en la matière, mais la pratique ne les a
pas définitivement adoptées, v. cependant sentence CCI, n° 5639, D. 1988, Somm. 242,
obs. Vasseur, JDI 1987, 1054. V. Règles uniformes pour les garanties contractuelles, doc. CCI,
n° 325 ; Formules normalisées pour l’émission de garanties contractuelles, doc. CCI, n° 406;
Bank Guarantees in International Trade, doc. CCI, n° 930 ; Guide to the ICC Uniform Rulesfor
Demand Guarantees, doc. CCI, n° 510; égal. S. Piédelièvre, « Remarques sur les règles uni¬
formes de la CCI relatives aux garanties sur demande», RTD com. 1993.615; Ph. Simler,
Petites affiches 13 mai 1992, p. 25.
La CNUDCI, de son côté, a élaboré en 1995 une Convention sur des garanties indépen¬
dantes et des lettres de crédit stand-by, aujourd’hui en vigueur, mais se heurtant encore à
beaucoup de résistances, au point qu’elle n’a réuni, à ce jour, aucune ratification, cinq étant
requises pour une entrée en vigueur, v. Stoufflet, RD banc. 1995.132; Mattout, RD banc,
janv. 2000, n° 16; égal. R. Illescas, « Les garanties indépendantes, les lettres de crédit
stand-by et la bonne foi dans le commerce international, à propos de l’article 19 de la
Convention de 1995 », Mélanges Gavalda, 173.
2. V. Com., 13 déc. 1994, D. 1995.209, note L. Aynès. Les garanties stipulées irrévo¬
cables et inconditionnelles ne sont cependant pas privées d’autonomie par de simples
références au contrat de base, n’impliquant pas appréciation des modalités d’exécution de
celui-ci pour l’évaluation des montants garantis, ou pour la détermination des durées de
validité, Com., 18 mai 1999, Bull. civ. IV, n° 102; comp. Com., 15 juin 1999, D. aff. 1999.1328.
3. La garantie autonome est un acte causé, v. com., 19 avr. 2005, D. 2005,1285, JCP 2005,
II, 10075, note S. Piedelièvre : « l’engagement d’un garant à première demande est causé,
dès lors que le donneur d’ordre a un intérêt économique à la conclusion du contrat de base,
peu important qu’il n’y soit pas partie ».
4. Ainsi la clause compromissoire incluse dans le contrat de base est sans effet sur le
contrat de garantie, CA Paris, 14 déc. 1987, D. 1988, Somm. 248, obs. Vasseur.
5. V. Civ. Ve, 25 janv. 2000, Bull. civ. I, n° 21, Rev. crit. DIP 2000.737, note Jacquet;
CA Paris, 28 juin 1989, D. 1990, Somm. 212, obs. Vasseur. Comp. Civ. lre, 30 oct. 1993,
LES SÛRETÉS 581
Rev. crit. DIP 1997.685, note M.-N. Jobard-Bachellier; v. égal. Pelichet, « Garanties ban¬
caires et conflits de lois », RD aff. int. 1990.337; H. Synvet, Lettres de crédit et lettres de
garantie en droit international privé, Trav. comité fr. dr. int. pr. 1992 ; A. Prüm, Les garanties
à première demande, Litec 1994; O. Elwan, La loi applicable à la garantie à première demande,
Rec. Cours La Haye, 2000, t. 275, 145.
Les rapports donneur d’ordre/garant devraient obéir à la loi du garant, s’agissant du moins
du recours personnel; les rapports garant/contre-garant devraient relever du droit de la
banque contre-garante.
1. Civ. lre, 24 févr. 1998, JDI 1998, 963, note Jacquemont, Rev. crit. DIP 1999, 309,
note A Sinay-Cytermann; égal. CA Poitiers, 11 mars 1992, Bull. Joly 1993, 779, et les obs.
2. V. Civ. lre, 24 févr. 1998, préc.
3. V. Corn., 19 mai 1992, D. 1993, Somm. 104; égal. 12 juill. 2005, D. 2005, 2214 :
« l’exigence d’une demande justifiée qui ne confère pas au garant une quelconque faculté
d’en discuter le bien fondé, ne suffit pas à exclure la qualification de garantie autonome ».
4. V. Corn., 3 juin 1986, D. 1987, Somm. 174,
582 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Ce qui fait difficulté en cas d’embargo prononcé contre le bénéficiaire, v. Civ. lre,
24 févr. 1998, JCP 1998.1.149, n° 10; plus généralement, v. Grêlon et Del Fabra, RD banc,
et bourse 1994.98.
2. Com., 24 janv. 1989, D. 1989, Somm. 159, obs. Vasseur.
3. CA Paris, 9 janv. 1991, D. 1991, Somm. 196.
4. Le garant ne peut, non plus, reprocher au bénéficiaire de n’avoir pas déclaré sa
créance au passif de la société garantie : Com., 9 juin 2004, Rev. sociétés, 2004, 894, note
M. Pariente.
5. V. Com., 9 oct. 2001, D. 2001, 3193; v. égal. Civ. lre, 27 juin 2000, Bull. civ. I,
n° 197, écartant toute connexité entre les deux garanties — plus généralement, v. « Garan¬
ties et contre-garanties», Mélanges Gavalda, Dalloz 2001.91; C. Houin-Bressand, Les
contre-garanties, Dalloz 2006, préf. H. Synvet. À cet égard, la thèse précitée distingue fort
justement les contre-garanties en fonction de l’objet de l’obligation du contre-garant :
tantôt son engagement est centré sur le remboursement du garant (comme dans le sous-
cautionnement) ; tantôt sur la garantie elle-même, son engagement étant alors principal
(comme dans la contre-garantie autonome). Cette distinction dicte naturellement les
régimes juridiques applicables; v. égal. A. Prüm, « De l’autonomie des contre-garanties à
première demande », Mélanges AEDBF 1997, 261.
6. Com., 4 juill. 2006, JCP 2006, IV, 2711.
7. V. not. Com., 12 déc. 1984, D. 1985.269, note Vasseur.
LES SÛRETÉS 583
827 Recours O Le banquier ayant avancé les sommes garanties dans des
conditions conformes aux instructions qui lui ont été données, jouit
d’un recours contre son client donneur d’ordre. Ce recours peut même
être exercé directement par le garant de premier rang, mais, le plus
souvent, celui-ci se retourne contre le contre-garant qui, à son tour,
agit contre le donneur d’ordre. Ce dernier ne peut échapper à son obli¬
gation en rapportant la preuve du caractère injustifié de l’appel à la
garantie par le bénéficiaire. Si le garant a normalement rempli ses
obligations à l’égard du bénéficiaire, son recours contre le donneur
d’ordre est fondé. Il n’en va autrement que si la garantie a été payée,
alors qu’elle n’avait pas à l’être (terme expiré ou appel manifestement
abusif)4.
Le recours du garant est, la plupart du temps, un recours personnel,
car il s’appuie sur les rapports contractuels existant entre le garant et
son client. Il peut aussi être subrogatoire, dès l’instant que la jurispru¬
dence considère que le paiement d’une dette personnelle ne fait pas
obstacle au jeu de la subrogation, lorsque le paiement a libéré envers le
C. Assurances
828 Questions de droit international O Les assurances sont, bien
entendu, déterminantes dans le négoce international. Les risques sont
plus élevés qu’ailleurs et du reste certaines opérations ne se conçoivent
pas sans assurance. Les institutions jouent un rôle essentiel en la
matière, ce qui ne veut pas dire que les assureurs privés soient absents.
Au contraire. En tout cas, dès l’instant que l’opération présente un
élément d’extranéité, les questions habituelles de loi applicable et de
tribunal compétent se posent.
La loi applicable, à défaut de choix exprimé par les parties, est la loi
de l’assureur, l’assureur étant le débiteur de la prestation caractéris¬
tique du contrat3. Il faut naturellement réserver l’application des lois
de police, qui peuvent être nombreuses en la matière. L’une des diffi¬
cultés concerne l’action directe du tiers victime (v. supra, n° 654).
Quant au tribunal compétent, il faute, en dehors des solutions habi¬
tuelles, tenir compte des dispositions du règlement communautaire
44/2001 et plus précisément de ses articles 8 à 15 qui s’efforcent, à
tort ou raison, de protéger la partie considérée comme faible, i.e. l’as¬
suré4. Ainsi, le preneur d’assurance doit-il être attrait devant les tribu¬
naux de l’État membre de son domicile (art. 12). Les actions contre
l’assureur obéissent également à des règles particulières : __
- si l’assureur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre,
mais s’il y possède une succursale, une agence ou tout autre établisse¬
ment, il est néanmoins considéré comme ayant son domicile dans cet
État pour toutes les contestations relatives à leur exploitation (art. 9-2).
- si l’assureur est domicilié chez le preneur d’assurance, l’assuré et
le bénéficiaire jouissent d’une option entre le tribunal du domicile de
l’assureur et leur propre tribunal. Ils bénéficient alors du forum actoris
(art. 9-2). Les articles 10 et 11 ouvrent d’autres options : l’assureur
1. Cf. C. assur., art. R 442-1 : « dans l’intérêt du commerce extérieur de la France, les
risques commerciaux, politiques, monétaires, catastrophiques, ainsi que certains risques
dits extraordinaires, liés aux échanges internationaux, sont, en application de la loi du
5 juillet 1949, garantis et gérés pour le compte de l’État et sous son contrôle par la société
anonyme dénommée COFACE ». V. à propos d’un risque de fabrication, T. com. Paris,
11 mai 1998, D. 1989, IR 333, obs. Vasseur; plus généralement; v. M.-J. Noinville, La
COFACE, la garantie des risques à l'exportation, Dunod, Paris, 1993.
2. Les contrats conclus avec les assurés dans le cadre de la gestion des garanties pour le
compte de l’État sont des contrats de droit privé : ils relèvent donc de la compétence judi¬
ciaire : Civ. lre, 18 nov. 1992, RGAT 1993.153, note J. Kullmann. Le droit international
privé traditionnel leur est applicable.
3. V. J. Bastin, L'assurance-crédit dans le monde contemporain, 1978, éd. Jupiter; v. plus
généralement, J. Bigot, « L’internationalisation du droit des assurances », Mélanges Lous-
586 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
souarn, Dalloz, 1994. J. Ripoll, « Les conflits de lois en matière de droit des assurances »,
RGAT 1992.479; égal. P.-G. Brachet, « Problèmes d’assurance en matière de contrats inter¬
nationaux », DPCI 1984.213.
1. V. M. Chareyre, « Le forfaitage », Banque 1987.911.
2. Cf. Y. Lambert-Faivre, Risques et assurances des entreprises, 3e éd., Précis Dalloz,
n° 721 et s. ; Ph. Kahn, « La vente commerciale internationale », S. 1961, n° 365 s.
3. V. CA Paris 7e ch. À, 14 oct. 2003, Baudoin c. COFACE : l’économie générale de ces
contrats est de garantir l’assuré du risque financier résultant de l’échec d’une campagne de
prospection commerciale dans une zone déterminée; le fonctionnement de ces contrats se
déroule en deux phases : dans une première phase, dite période de garantie, les dépenses de
prospection sont prises en compte par l’assureur dans les limites du budget initailement
fixé et pour une durée précisée au contrat; dans une seconde phase, dite d’amortissement
complémentaire, ces avances sont susceptibles d’être remboursées par l’assuré au prorata
d’une fraction de son chiffre d’affaires réalisé à l’exportation » ; en l’espèce l’assuré voulait
remettre en cause une clause de compensation des soldes des quatre contrats souscrits en
LES SÛRETÉS 587
garantie de pertes financières pouvant résulter de l’échec des campagnes publicitaires; jugé
que cette clause créant un lien juridique entre les contrats en modifiait certes l’économie,
mais ne privait pas les contrats de leur objet et n’affectait pas leur cause, à savoir l’existence
d’un aléa.
1. Des avances sur indemnité sont envisageables pour assurer le préfinancement de la
prospection. La prime d’assurance représente 3 % du budget de prospection garanti, majo¬
rée de 2 % en cas d’avance sur indemnité.
2. Y. Lambert-Faivre, op. cit., n° 737.
588 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Y. Lambert-Faivre, op. cit., n° 740; égal. Civ. lre, 25 mars 1991, Bull. civ. I, n° 103.
2. V. CA Versailles, 12e ch., 2e sect., 19 sept. 1999, S. A. Sodiacam.
LES MESURES D’ÉXECUTION 589
CHAPITRE 2
LES MESURES D’EXÉCUTION
833 Droit de l'exécution O Tout créancier jouit d’un droit de gage géné¬
ral sur l’ensemble des biens de son débiteur (C. civ. art. 2284-2285).
Ce droit ne porte, en principe, que sur les biens du débiteur. Il ne sau¬
rait affecter les droits d'un tiers, fût-il lié au débiteur. Chaque personne
physique ou morale n’a qu’un patrimoine et ne répond de ses engage¬
ments que sur son propre patrimoine. C’est ce patrimoine qui est offert
aux créanciers et ceux-ci doivent s’en contenter. Ils ne sauraient, sauf
dans des cas particuliers, mettre en oeuvre leurs droits sur le patrimoine
de celui qui n’est pas leur débiteur. La règle paraît simple, mais les
situations de fait sont souvent complexes, si bien que l’hésitation est
parfois permise1.
1. V. TGI Paris, 29 juin 1988, préc.; égal. TGI Lyon, 4 mai 1993, D. 1994, 55, note
Prévault.
2. V. Ph. Théry, art. préc., n° 56 s. Comp. Civ. lre, 16 juin 1992, Rev. crit. DIP 1993.34 :
« la réponse à la question de savoir si les biens communs répondent de la dette délictuelle
de la femme ne peut être donnée que par la loi du régime matrimonial et non par le droit
des saisies relevant, au titre des voies d’exécution, du lieu de la saisie ».
3. Sur les justifications théoriques et pratiques de la loi du lieu d’exécution, v. A. Tou-
biana, Le domaine de la loi du contrat, n° 117 s.).
4. La Cour de cassation avait déjà, en matière terrestre, écarté l’application de la loi du
contrat au profit de la loi du lieu de livraison s’agissant de la mise en œuvre des formalités
requises pour préserver les droits des intérêts cargaison, v. Cass. 12 avr. 1938, S. 1938, 1,
218; v. égal. CA Paris, 18 mars 1977, JCP 1979, II, 19247, note Rodière.
5. V. par ex. Civ. lre, 18 mai 1976, Bull. civ. I, n° 173
6. Cass. 12 mai 1931, S. 1931, 1, 137 : « les tribunaux français ne peuvent, sans porter
atteinte au principe de l’indépendance et de la souveraineté respectives des États, connaître,
en dehors de l’exequatur, d’une demande de nullité, ni en mainlevée d’une saisie-arrêt
pratiquée en pays étranger, en vertu d’une décision des autorités judiciaires de ce pays, ladite
saisie fût-elle intervenue à la requête d’un créancier français au préjudice d’une partie
française elle-même ». ; v. égal. Ph. Théry, Pouvoir juridictionnel et compétence, thèse Paris 2,
n° 175 s., faisant observer que le principe d’abstention du juge français a, en l’occur¬
rence, une portée générale et qu’il s’agit davantage d’un défaut de pouvoir que d’une incom¬
pétence.
LES MESURES D’ÉXÉCUTION 591
835 Droit de gage général O Le droit de gage général offert à tout créan¬
cier est, en tant que tel, soumis à la compétence de la loi de la créance
protégée1. Il s’agit là d’une règle universelle. La mise en œuvre du droit
de gage général suppose cependant une procédure et se traduit par
l’appréhension des biens, corporels ou incorporels, mobiliers ou immo¬
biliers du débiteur. La loi applicable est alors la loi du lieu où ces biens
sont, d’une manière ou d’une autre, appréhendés. Cette loi est compé¬
tente comme loi du for s’agissant des formes à suivre; mais elle régit
également des questions qui touchent à la substance même des droits2.
Ainsi en est-il de la détermination des biens saisissables3, des règles
de distribution du prix4 ou encore de la question du classement des
créanciers5.
Il appartient cependant à tout créancier de défendre ses droits par
des mesures conservatoires ou des voies d’exécution au besoin en
saisissant tel bien du débiteur. Un temps ces procédures n’étaient orga¬
nisées que dans un cadre national. D’où les questions habituelles de
conflits de lois et de juridictions.
Aujourd’hui, le paysage juridique n’est plus le même compte tenu de
l’emprise du droit communautaire. De nombreuses propositions ont
vu ou sont en train de voir le jour.6 Tel est le cas du règlement 44/2001
sur la compétence des tribunaux et son article 22-5 aux termes duquel :
« en matière d’exécution des décisions, les tribunaux de l’État membre
du lieu de l’exécution (sont exclusivement compétents) »; mais aussi
de textes plus particuliers comme le règlement CE 1348/2000 du
29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États
membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et
commerciale ou encore le règlement sur le titre exécutoire européen7.
- d’un règlement instituant une procédure européenne pour les demandes de faible
importance.
1. Batiffol et Lagarde, op. cit., n° 541.
2. Cf. M.L. Niboyet, L'action en justice dans les rapports internationaux de droit prive',
1986, p. 240 s. ; contra CA Aix, 30 mars 1979, Rev. crit. DIP 1980, 717, note crit. G. Légier,
donnant compétence à la loi de la créance du débiteur.
3. Batiffol et Lagarde, op. cit. ibid., ajoutant que, là encore, l’application de la loi la plus
restrictive est justifiée par le caractère exorbitant de l’institution.
4. V. par ex. Civ. lre, 17 sept. 2003, Bull. civ. 1, n° 181.
5. En matière de transport international, Com., 24 mars 2004, JCP E 2004, 1102 et la
note.
LES MESURES D’ÉXECUTION 593
1. Civ. lre, 20 déc. 2000, Rev. crit. DIP 2001, 683, note crit.V. Heuzé, RTD com. 2001,
1057 et les obs. On observera que, pour la Cour de cassation, la loi de la créance protégée
est, en matière contractuelle, la loi du lieu du dommage et non la loi du contrat, ce qui est
assez singulier.
2. V. P. de Vareilles-Sommières, La compétence des tribunaux français en matière de
mesures provisoires, Rev. crit. DIP 1996, 397 ; comp. CA Rennes, 11 déc. 2002, DMF 2003,
573, obs. G. Gautier qui, dans l’affaire du pétrolier Limburg, victime d’un attentat au large
du Yémen, s’est autorisé à nommer un expert avec mission d’étudier les causes de l’explo¬
sion, au motif que l’exécution à bord d’un navire français d’une mesure d’instruction
ordonnée par une juridiction française ne saurait être regardée comme de portée extra¬
territoriale; la solution ne va pas de soi, car la théorie de la territorialité du navire n’a,
aujourd’hui, plus beaucoup de sens.
3. Com. 1er oct. 1997, Secil Angola, DMF 1998, 17, rapport J.-P. Rémery et les obs.
4. Civ. lre, 17 janv. 1995, Bull. civ. I, n° 34; com., 11 févr. 1997, Strojexport, Bull. civ. IV,
n° 47.
La jurisprudence limite cependant l’incompétence du forum arresti au seul litige portant sur
l’existence de la créance : Com., 11 févr. 1997, Bull. civ. IV, n° 48, DMF 1997, 616, obs.
P. Bonassies, décidant que les tribunaux français étaient compétents après qu’une saisie eut
été pratiquée sur un navire étranger dans un port français, pour statuer sur la fictivité des
sociétés propriétaires de ces navires, de telle manière qu’ils répondent des dettes incombant
à une autre société : que cette action relative à la saisie conservatoire ne concerne pas le
fond de la créance et partant, relève de la compétence des juridictions de l'État sur le terri¬
toire duquel la saisie a été pratiquée.
594 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CJCE, 26 mars 1992, Reichert, Rev. crit. DIP 1992, 714, note B. Ancel.
2. CJCE, 17 nov. 1998, Van Uden Maritime BV, D. 2000, 378, note G. Cuniberti, RTD
civ. 1999, 180, obs. Normand ; l’arrêt prend le soin de préciser que le texte s'applique néan¬
moins si, d’une part, le remboursement au défendeur de la somme allouée est garanti dans
l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l’affaire et, d’autre
part, la mesure sollicitée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant ou
devant se situer dans la sphère de compétence territoriale du juge saisi ; v. égal. A. Marmisse
et M. Wilderspin, Rev. crit DIP 1999, 669.
3. Aff. Reichert, préc. ; égal. CJCE, 10 janv. 1990, Rev. crit. DIP 1991, 154, note B. Ancel.
4. CJCE, 28 avril 2005, Rev. crit. DIP 2005, 742, note E. Pataut.
5. CA Dijon, 27 mai 2004, Rev. crit. DIP 2005, 311, note B. Ancel; contra pour
une mesure d’expertise au titre de l’art. 145 NCPC, CA Versailles, 29 juin 2000, D. 2002,
Somm. 1390, obs. B. Audit.
6. Civ. lre, 11 déc. 2001, Bu II. civ. I, n° 313, Rev. crit. DIP 2002, 371, note H. Muir-Watt,
JCP 2002, II, 10106, note du Rusquec.
7. Comp. lorsque la compétence d’un juge des référés est fondée sur une clause attribu¬
tive de compétence : CA Orlans, 7 nov. 2002, Rev. crit. DIP 2003, 326, note H. Muir-Watt,
s’affranchissant en pareil cas des exigences communautaires.
8. MM. Perrot et Théry, Procédures civiles d'exécution, n° 39.
9. CJCE, 6 mars 1980, de Cavel, Rev. crit. DIP 1980, 614; CJCE, 21 mai 1980, Denilauer,
Rev. crit. DIP 1980, 787, note Mezger.
LES MESURES D’ÉXECUTION 595
841 Injonction anti-suit5 O Dans les systèmes de common law, les juges
ont, au moins depuis le début du 19e siècle, le pouvoir d’interdire à une
partie d’introduire ou de poursuivre une procédure (« oppressive or vexa¬
tions ») devant les juges d’un autre pays. C’est ce que l’on appelle la
procédure d’« anti-suit »6. Le principe général est que l’anti-suit est déli¬
vrée « where it is appropriate to avoid injustice ». Les injonctions pronon¬
cées sont redoutables, car elles s’accompagnent de lourdes sanctions
pénales. Ne pas respecter une décision de justice est l’expression d’un
mépris pour la Couronne, ce qui caractérise le délit de « contempt of
court » et expose son auteur à une peine d’emprisonnement.
1. L’astreinte n’est pas, en soi, une mesure d’exécution; c’est une mesure en vue de
l’exécution, v. MM. Perrot et Théry, op. cit., n° 41, faisant observer que l’asteinte est la
sanction de l’exécution d’une décision de justice et ne peut être prononcée que par le juge
de l’État où la mesure est ordonnée, mais qu’elle peut avoir, en tant que mesure de contrainte
à caractère personnel, un effet extra-territorial.
2. Cf P. Lagarde, Rev. crit. DIP 1992, 617; H. Muir-Watt, «Extra-territorialité des
mesures concervatoires in personam », Rev. crit. DIP 1998, 27; G. Cuniberti, Les mesures
conservatoires sur des biens situés à l’étranger, LGDJ 2000, préf. H. Muir-Watt.
3. Civ. lre, 20 juin 2004, Bull. civ. I, n° 191, Rev. crit. DIP 2004, 815, note H. Muir-
Watt, JDI 2005,113, note G. Cuniberti, ]CP E 2005, 237, avis J. Sainte-Rose, D. 2004, 2743,
note N. Bouche, RTD civ. 2004, 549, obs. Ph. Théry : « une injonction « Mareva » par
laquelle il est fait défense (en l’espèce par la High Court de Londres) à un débiteur d’effec¬
tuer toute opération sur l’un quelconque de ses biens dans les limites fixées par le juge, est
une mesure conservatoire et provisoire de nature civile qui, aux fins de la reconnaissance
sollicitée, doit être examinée indépendamment de la sanction pénale qui l’assortit dans
l’État d’origine; cette interdiction faite à la personne du débiteur de disposer en tout lieu
des ses biens, dans la mesure où il s’agit de préserver les droits légitimes du créancier, ne
saurait porter atteinte à un droit fondamental du débiteur, ni même indirectement, à une
prérogative de souveraineté étrangère et, notamment, n’affecte pas, à la différence des
injonctions anti-suit, la compétence juridictionnelle de l’État requis ».
4. V. égal. Civ. lre, 19 nov. 2002, Bull. civ. 1, n° 275 : l’injonction à la personne du
défendeur d’agir ou de s’abstenir, quelle que soit la localisation des biens en cause, dès lors
qu’elle est prononcée par le juge français de la faillite compétent au fond n’entre pas dans
le régime des règles de compétence visé aux art. 14 et 15 C. civ. ».
5. V. S Berti, « Englishe anti-suit injunctions in europaïchschen Zivilprozessrecht : a
flourishing species or a dying breed. ». in Private law in the International Arena, from
national conflict rules towards harmonization and unification”, Liber amicorum Kurt Siehr,
La Haye — Zurich, p. 33; égal. R. Carrier, « L’anti-suit injunction », DMF 2002, 499;
Kennet, « Les injunctions anti-suit », in L’efficacité de la justice civile en Europe; Bruxelles,
Larcier, 2000, 133; égal. Van Houtte, eod. loc., 147.
6. V. S. Clavel, Le pouvoir injonctif extraterritorial pour le règlement des litiges privés inter¬
nationaux, thèse Paris-I, 1999; égal. H. Muir-Watt, Rev. gén. procédures, oct. déc. 1999.
596 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CJCE 27 avril 2004, aff. Turner, D. 2004, 1919, note R. Carrier, Rev. crit. DIP 2004,
654, note H. Muir-Watt.
2. R. Carrier, « Anti-suit injunctions : réquisitoire pour l’abandon de leur prononcé en
matière d’arbitrage », D. 2005, 2712.
3. Cf. Tcom. Marseille 13 janv. 2006, BTL mai 2006, et les obs.
4. V. C. Navarre-Laroche, La saisie de navires en droit français, éd. Moreux 2001 ;
V. P. Bonassies et Ch. Scapel, Traité de droit maritime, LGDJ 2006; pour une étude
assez systématique de droit comparé sur l’application de la convention internationale,
v. F. Berlingieri, Arrest ofships, LMP 2006.
LES MESURES D’ÉXECUTION 597
plus souple et plus contraignante qu’en droit interne. Plus souple, car
il suffit d’alléguer une créance pour engager la procédure : il n’est donc
nécessaire de justifier d’un principe de créance ni même d’une créance
paraissant fondée en son principe1. Plus contraignante, cependant, car
la créance cause de la saisie doit être une « créance maritime » et
répondre ainsi aux exigences de l’article 1 de la convention qui énu¬
mère 17 types de créances maritimes.
L’une des difficultés est précisément de savoir quel texte appliquer :
la jurisprudence a fini, très exactement, par admettre que la conven¬
tion internationale pouvait s’appliquer même à la saisie d’un navire
battant pavillon d’un État non contractant, le droit de l’État de la saisie
ne reprenant son rôle que pour ajouter aux créances maritimes de nou¬
velles créances, elles aussi propres à fonder la saisie2.
La saisie peut frapper n’importe quel type de navire (saisissable) ;
encore faut-il néanmoins que le navire soit celui auquel la créance se
rapporte, la convention admettant cependant que peuvent être saisis
non seulement ce navire, mais aussi tous ceux qui appartiennent au
même débiteur3. Elle peut même frapper un navire affrété pour une
dette de l’affréteur à temps ou coque-nue. En cas de vente du navire, la
saisie ne peut être autorisée que dans la mesure où le créancier justifie
d’un privilège sur le navire4.
La saisie est autorisée5 par ordonnance rendue sur requête par le
Président du Tribunal de commerce dont la compétence est détermi¬
née conformément au droit commun. Si la saisie est autorisée, elle
est signifiée au capitaine du navire et aux autorités portuaires. Elle
empêche le départ du navire, mais ne porte pas atteinte au droit du
propriétaire qui peut toujours vendre son navire. En pratique, toute
saisie provoque une réaction immédiate de l'exploitant qui ne peut se
permettre d’immobiliser le navire. D’où des procédures de mainlevée
généralement accordées en contrepartie d’engagements bancaires en
faveur du créancier saisissant.
La saisie conservatoire de navire est, en pratique, un moyen de pres¬
sion très efficace. Elle ne se prolonge que très rarement dans une saisie
vente.
1. V. encore Com., 7 mars 2006, n° T 05-15.906, allant jusqu’à admettre la saisie par
un créancier (maritime) dont la créance était pourtant prescrite.
2. Com., 30 oct. 2000, Bull. civ. IV, n° 168, DMF 2000, 1012; comp. plus restrictif,
Com., 28 oct. 1999, DMF 1999, 709, rapport Rémery, obs. Vialard.
La Convention de 1952 n’entend pas déterminer le tribunal compétent pour autoriser
une saisie : elle entend seulement qu’une telle saisie soit autorisée par une juridiction de
l'État contractant dans lequel la saisie est pratiquée : Com., 5 janv. 1999, DMF 1999, 130,
obs. Vialard, Rev. crit. DIP 1999, 137, rapport Rémery.
3. D’où les difficultés que l’on imagine pour savoir quand un navire est la propriété
du débiteur; sur ce problème et celui de la saisie des navires apparentés, propriété d’une
société du même groupe ou de la même famille que le débiteur, v. not. Com., 23 nov. 1999,
DMF 2000, 719, obs. N. Molfessis; égal. J.-S. Rohart, Faut-il se méfier de l’apparence ou la
saisie des navires apparentés, DMF 1988, 499; et DMF 1994, 339.
4. Com., 4 oct. 2005, R. One, DMF 2006, 47, obs. P. Bonassies.
5. Même si le créancier est déjà en possession d’un titre obtenu à l’étranger : Com.,
1er oct. 1997, Secil Maritima, Bull. civ. IV, n° 234, DMF 1998, 17 et les obs.
598 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Cf. Com., 14 juin 1977, Bull. civ. I, n° 277, Rev. crit. DIP 1978.615 : « l’accord diplo¬
matique par lequel le Gouvernement français accepte la limitation de la dette d’un Gouver¬
nement étranger envers un ressortissant français ne prive pas ce dernier de l’exercice des
voies de droit découlant du contrat passé par lui ».
LES MESURES D’EXÉCUTION 599
1. Cf. CJCE, 4 juill. 1985, JDI 1986, 449 note A.H. : « les actions en opposition à exé¬
cution, telles qu’elles sont prévues par l’art. 767 C. ail. proc. civ., relèvent, en tant que telles,
de la compétence de l’art. 16.5 Conv. Bruxelles; mais cette dernière disposition ne permet
pas, pour autant, de demander devant les tribunaux de l’État contractant du lieu d’exé¬
cution, par la voie d’une action en opposition à exécution, la compensation entre le droit
en vertu duquel l’exécution est poursuivie et une créance sur laquelle les tribunaux de cet
État ne seraient pas compétents pour statuer si elle faisait l’objet d’une action autonome.
2. V. F. Ferrand, « Le nouveau titre exécutoire européen », Dr. et patrimoine n° 130, oct.
2005, 70 ; K.E. Beltz, « Le titre exécutoire européen », D. 2004, 2707; v. plus critique,
L. d’Avout, Rev. crit. DIP 2006, 1 s.
600 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 3
INSOLVABILITÉ
1. V. J.-P. Rémery, La faillite internationale, coll. « Que sais-je? », PUF, 1996; Travaux
comité'fr. DIP 1992-1993, p. 227; F. Mélin, La faillite internationale, LGDJ 2004; A. Martin-
Serf, JDI 1995.31 ; M. Trochu, Conflits de lois et conflits de juridictions en matière de faillite,
thèse, éd. Sirey, 1967 ; J. Béguin, Mélangés Loussouarn, 31 et s. ; P. Didier, RD aff. int. 1989,
n° 3, 201 et s.; M.-N. Jobard-Bachellier, « Quelques observations sur le domaine d’appli¬
cation de la loi de la faillite », Dr. prat. com. int., t. 1, 1995, n° 1 ; G. Kairallah, Les fail¬
lites concurrentes, Trav. comité fr. dr. int. privé 1993-1995, p. 157; H. Synvet, Rép. dr. int.,
V° Faillite; P. Vol ken, «L’harmonisation du droit international privé de la faillite»,
Rec. cours Ac. dr. int. La Haye, t. 230, p. 343 et s.; F. Mélin, « L’OHADA et le droit de la
faillite », D. 2005, 1568.
2. V. encore s’il s’agit d’une faillite bancaire, J.-P. Mattout, « La défaillance d’une
banque. Aspects internationaux», RJ com., n° sp. 1996.114; Th. Bonneau, Rev. dr.
banc. 1997, n° 59.
3. V. en application, Com., 16 mars 1999, Bull. Joly 1999.637, note M. Menjucq; Com.,
1er oct. 2002, Rev. crit. DIP2003,109, note D. Bureau; lrc civ; 27 janv. 1998, D. 1998, 380;
31 janv. 1990, D. 1990, 461.
INSOLVABILITÉ 605
1. V. Civ. lre, 6 juin 1990, D. 1991, 137; 25 févr. 1997, Rev. sociétés 1997.602, note
M. Beaubrun.
2. V. Kherkhove, « La Convention européenne relative aux procédures d’insolvabilité »,
Rev. proc. coll. 1996.377; égal. Vallens, «Le droit européen de la faillite», D. 1995,
Chron. 307; S. Poillot-Peruzzetto, « Le créancier et la faillite européenne », JDI 1996.757.
3. V. L. Idot, « Un nouveau droit communautaire des procédures collectives »,
JCP 2000.1.1648; M.E. Mathieu-Bouyssou, « Aperçu des règles de droit judiciaire privé
relatives aux procédures d’insolvabilité européennes », D. 2002, chron. 2245; v. J.-L. Val¬
lens et autres auteurs, Procédures d’insolvabilité, Le nouveau cadre juridique communautaire,
Lamy dr. aff, juill. 2002 ; « Les entreprises en difficulté dans l’Union européenne », Petites
affiches, n° spécial, 20 nov. 2001 ; M. Menjucq, L'apport du droit communautaire au règlement
des faillites internationales, Travaux Comité français de DIP, 2002/2004, 35; V. Marquette
et C. Barbé, « Les procédures d’insolvabilité extracommunautaires. Articulation des dispo¬
sitions du règlement 1346/2000 et du droit commun des États membres », JDI 2006, 511.
4. Convention d’Istanbul du 4 juin 1990, Rev. sociétés 1990.669.
5. UNCITRAL, Legislative Guide on insolvency law, New York, 2005; v.J.-L. Vallens,
« La loi type de la CNUDCI sur l’insolvabilité internationale », D. 1998, Chron. 157; égal.
Rev. dr. uniforme 1997.4.769; plus général., v. J.E. Fletcher, Insolvency and private internatio¬
nal law, Clarendon Press Oxford, 1999.
606 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CJCE 22 févr. 1979, Gourdain, Rev. crit. DIP 1979, 657, note Lemontey, JDI 1980,
527, note Bismuth; égal. Com., 14 mars 2000, D. 2000, 241; v. égal. Com., 5 mai 2004,
Bull. civ. IV, n° 82, D. 2004, 1796, note Vallens, Rev. crit. DIP 2005, 104, note Bureau,
précisant que cette action relève de la compétence du tribunal qui a ouvert la procédure
collective, même à l’égard d’un dirigeant de nationalité étrangère et dont le domicile est à
l’étranger.
2. Com., 24 mai 2005, Bull. civ. IV, n° 108, D. 2005, 2394, note Kessler, Rev. crit.
DIP 2005, 489, note Bureau.
3. V. Com., 14 mars 2000, Bull. Joly 2001, n° 132 : le tribunal de la procédure collective
est seul compétent pour prononcer le redressement judiciaire personnel du dirigeant et
convertir la procédure en liquidation s’il constate que celui-ci ne s’est pas acquitté du passif
social mis à sa charge, sans qu’il y ait lieu de considérer si le dirigeant, résidant à l’étranger,
a ou non, un centre d'intérêts en France.
4. V. T. com. Paris, 23 juill. 1991, D. 1992.332, note J.-P. Rémery et, dans la même
affaire, Com., 11 avr. 1995, Rev. crit. DIP 1995.742, note Oppetit, D. 1995.640, note Vas¬
seur; v. égal. Civ. lre, 21 juill. 1987, D. 1988.169, note J.-P. Rémery; pour le lieu de situation
de l’immeuble pris en crédit-bail : Com., 26 oct. 1999, Bull. Joly 2000, 385, note Menjucq;
v. égal. Com., 21 mars 2006, Khalifa Airways, D. 2006, 1466, note C. Henry, JCP 2006, IV,
INSOLVABILITÉ 607
854 Loi applicable O En tout cas, lorsqu’une procédure collective est pro¬
noncée en France, le juge français appliquera la loi française. Cette loi
est compétente pour régler toutes les questions qui concernent la pro¬
cédure : conditions d’ouverture, situation des dirigeants5, discipline
collective6, institutions dont le jeu est affecté par l’ouverture de la
faillite — contrats en cours, opposabilité des sûretés, nullités de la
période suspecte, compensation7, revendication8... La règle de la sus¬
pension des poursuites est également essentielle : elle est considérée
comme étant d’ordre public, ce qui interdit toute saisine d’un tribunal
arbitral9.
1769 : ayant relevé que la société avait fait immatriculer au RCS de Nanterre son établisse¬
ment principal installé à Puteaux, la cour d’appel a pu en déduire que le centre principal
des intérêts de la société en France était situé dans le ressort du tribunal de commerce de
Nanterre, et a ainsi justifié sa décision de rejet de l’exception de compétence au profit des
juridictions algériennes.
1. Com., 19 janv. 1988, D. 1988.565, note J.-P. Rémery; 11 avr. 1995, préc.
2. Com., 19 mars 1979, Rev. crit. DIP 1981.524, note P. Lagarde, Rev. sociétés 1979.567,
note Guyon.
3. Civ. 2e, 7 juin 1962, Bull. civ. II, n° 506, JDI 1963.106, note Ponsard.
4. D’autant que, dans cette hypothèse, la procédure étant ouverte sur la base d’un for
réduit, le juge français est en réalité mal placé pour apprécier la situation ; la faillite est, en
fait, limitée.
5. V. Com., 16 juill. 1981, Rev. crit. DIP 1982.124, note Lemontey; CJCE 12 févr. 1979,
Rev. sociétés 1980.656, note Bismuth. Rappr. en cas de confusion de patrimoines d’une
société-mère et d’une filiale, CA Aix, 19 avr. 1990, D. 1991.116, note Vasseur.
6. Tous les créanciers, sans distinction de nationalité ni de réciprocité, doivent ainsi
produire, Com., 14 mai 1996, D. 1996.585, note Vasseur, Rev. crit. DIP 1996.475, rapport
J.-P. Rémery.
7. Cf. Com., 6 juin 1990, D. 1991.137, note J.-P. Rémery.
8. Com., 8 janv. 2002, Rev. crit. DIP 2002.328, note D. Bureau.
9. Com. 2 juin 2004, JDI 2005, 101, note Mourre.
608 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 19 nov. 2002, Bull. civ. I, n° 275, D. 2002, 3341, note Lienhard, D. 2003,
797, note G. Khairallah, JCP 2002, II, 10201, concl. J. Sainte Rose, note S. Sana Chaillé de
Néré, Rev. crit. DIP 2003, 631, note H. Muir-Watt. En l’espèce, deux époux faisaient l’objet
d’un RJ en France. Ils étaient propriétaires d’un immeuble en Espagne. La question se posait
de savoir si un créancier chirographaire pouvait saisir cet immeuble, alors que le jugement
d’ouverture n’avait pas fait l’objet d’une procédure d’exequatur en Espagne et qu’en consé¬
quence le droit espagnol ne s’opposait pas à une telle initiative. La cour d’appel avait jugé
que ces poursuites individuelles étaient exclues et en avait tiré une conséquence originale
en enjoignant au créancier d’y renoncer sous astreinte. La Cour de cassation a approuvé
cette décision en visant expressément le principe d’universalité de la faillite, sans toutefois
se prononcer sur la légitimité de l’injonction en cause. La thèse de l’universalité a été reprise
récemment : v. Com., 21 mars 2006, D. 2006, 1466, note C. Henry.
2. Sur cette dernière limite qui n’est cependant pas une condition de l’ouverture de la
procédure en France, v. Com. 21 mars 2006, préc.
3. La décision doit être reconnue, dès lors que « le litige se rattache d’une manière
caractérisée » au pays du tribunal duquel il émane, Civ. lre, 18 janv. 2000, Rev. crit. DIP
2000.442, note Bureau, JDI 2001.539, note S. Poillot-Peruzzetto.
4. V. CA Colmar, 10 févr. 1864, DP 1864.123; CA Paris, 22 oct. 1872, DP 1872.2.90;
29 mai 1963, JDI 1964.119; TGI Paris, 15 juin 1988, JDI 1990.423.
5. CA Poitiers, 20 déc. 1972, Rev. crit. DIP 1974.128; Com., 14 mai 1996, D. affai¬
res 1996.810; Rev. crit. DIP 1996.475, note J.-P. Rémery (aff. BCCI).
6. Civ., 21 juin 1870, DP 1871.1.294; 30 janv. 1912, S. 1916.113, note Audinet.
7. Civ. lre, 24 mars 1998, Bull. civ. I, n° 122, JCP 1998.11.10155, note E. Kerkhove :
l’arrêt précise que la décision étrangère n’a, en l’absence d’exequatur, « aucun effet de des-
INSOLVABILITÉ 609
1. V. D. Bureau, « La fin d’un ilôt de résistance », Rev. crit. DIP 2002, 613; L. Idot,
JCP E 2000, 648; Menjucq, Bull. Joly 2000, 1109; J.-L. Vallens, « La mise en œuvre du
règlement communautaire sur les procédures d’insolvabilité : questions de procédure »,
D. 2003, 1421 ; MM. Robine et Jault, « Le droit européen de la faillite », D. 2004, 1009;
L’effet international de la faillite : une realite'P, éd. Dalloz 2004.
2. Ce qui vise les procédures de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire, mais
exclut celles de règlement amiable.
3. V. Y. Chaput, « Le juge des défaillances financières des entreprises dans l’UE »,
Mélangés Béguin, 107; R. Damman, « Droit européen des procédures d’insolvabilité : pro¬
blématique des conflits de juridictions et de forum shopping », D. 2005, 1779; A. Honorât
et C. Henry, « La compétence juridictionnelle en matière d’insolvabilité : une nouvelle
tentative de conciliation par la hiérarchie entre universalité et territorialité en matière de
faillites internationales, » Mélangés Sortais, Bruylant, 2002, 313.
INSOLVABILITÉ 611
862 Loi applicable O En principe, la loi applicable est celle de l’État dans
lequel la procédure a été ouverte (lex concursus). Cette loi détermine
notamment :
- les débiteurs pouvant faire l’objet d’une procédure d’insolvabilité
du fait de leur qualité ;
- les biens qui font l’objet du dessaisissement et le sort des biens
acquis par le débiteur après l’ouverture de la procédure;
- les pouvoirs respectifs du débiteur et du syndic ;
- les conditions d’opposabilité d’une compensation (cf. en droit
français le jeu de la compensation pour dettes connexes) ;
- les effets de la procédure d’insolvabilité sur les contrats en cours
auxquels le débiteur est partie;
- les effets de la procédure d’insolvabilité sur les poursuites indivi¬
duelles, à l’exception des instances en cours;
- les créances à produire au passif du débiteur et le sort des créances
nées après l’ouverture de la procédure;
- les règles concernant la production, la vérification et l’admission
des créances ;
- les règles de distribution du produit de la réalisation des biens, le
rang des créances et le droit des créanciers qui ont été partiellement
désintéressés après l’ouverture de la procédure en vertu d’un droit réel
ou par l’effet d’une compensation
- les conditions et les effets de la clôture de la procédure, notam¬
ment par concordat;
- les droits des créanciers après la clôture de la procédure;
- la charge des frais et des dépenses de la procédure;
- les règles relatives à la nullité, à l’annulation ou à l’opposabilité des
actes préjudiciables à l’ensemble des créanciers; toutefois, la lex concur¬
sus n’est pas applicable lorsque celui qui a bénéficié d’un acte préjudicia¬
ble à l’ensemble des créanciers apporte la preuve que cet acte est soumis
à la loi d’un autre État membre que l’État d’ouverture et que cette loi ne
permet en l’espèce, par aucun moyen, d’attaquer cet acte.
1. L’établissement est tout lieu d’opérations où le débiteur exerce de façon non transi¬
toire une activité économique avec des moyens humains et des biens (art. 2 h).
614 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
864 Droits réels O Une première zone de neutralité de la lex concursus est
fixée par l'article 5 du règlement. Elle concerne les droits réels princi¬
paux ou accessoires. En effet, le texte indique que l’ouverture d’une
procédure d’insolvabilité « n’affecte pas le droit réel d’un créancier
ou d’un tiers sur des biens corporels ou incorporels, meubles ou
immeubles — à la fois des biens déterminés et des ensembles de biens
indéterminés dont la composition est sujette à modification — appar¬
tenant au débiteur, et qui se trouvent, au moment de l’ouverture de la
procédure, sur le territoire d’un autre État membre ».
Le texte s’explique sur les droits réels visés; ces droits sont notamment :
- le droit de réaliser ou de faire réaliser le bien et d’être désintéressé
par le produit ou les revenus de ce bien, en particulier en vertu d’un
gage ou d’une hypothèque;
- le droit exclusif de recouvrer une créance, notamment en vertu de
la mise en gage d'une créance ou de la cession de cette créance à titre
de garantie ;
- le droit de revendiquer le bien et/ou d’en réclamer la restitution
entre les mains de quiconque le détient ou en jouit contre la volonté de
l’ayant droit.
- le droit de percevoir les fruits d’un bien.
Pour autant toutes les difficultés de qualification ne sont pas réso¬
lues. On peut cependant estimer que la référence aux « ensembles de
biens indéterminés dont la composition est sujette à modification »
renvoie aux privilèges et à la floating charge (à supposer que l’on admette
que les bénéficiaires d’un privilège général et d’une floating charge soient
titulaires d’un droit réel (v. supra, n° 812)).
865 Réserve de propriété O Les droits du vendeur fondés sur une réserve
de propriété ne sont pas davantage affectés par l’ouverture d’une pro¬
cédure collective principale. Encore faut-il cependant que le bien grevé
se trouve au moment du jugement déclaratif sur le territoire d’un autre
État membre que l’État d’ouverture (art. 7.1). La réserve de propriété
bénéficie ainsi d’un régime de faveur qui ne résulte pas seulement de
l’article consacré aux droits réels : une disposition particulière a été
prise en faveur de la clause de réserve. La règle vise à protéger non pas
le fournisseur local qui est censé connaître les conséquences de la pro-
1. F. T’Kint, « La mise en œuvre des sûretés dans le cadre d’une faillite internationale
en droit belge », Mélanges Horsmans, Bruylant 2004, 1073.
INSOLVABILITÉ 615
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INSOLVABILITÉ 625
626 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 4
LA RESPONSABILITE
EXTRA-CONTRACTUELLE
874 Présentation O Une règle de conflit dont les origines remontent aux
postglossateurs soumet la responsabilité extra-contractuelle à la loi du
lieu de commission du délit (lex loci delicti commissi) h Après avoir
bénéficié d’une extraordinaire stabilité durant des siècles, elle a été, à
partir du milieu du xxe siècle, la cible de nombreuses critiques et remises
en cause, au point qu’il n'en reste aujourd’hui qu’un « paysage
dévasté»1 2. Des phénomènes nouveaux sont apparus dont certains,
comme les cyberdélits ou la pollution transfrontière, se laissent diffici¬
lement appréhender par un rattachement au lieu du délit. Des ques¬
tions nouvelles se posent également, comme celle de la responsabilité
des entreprises multinationales pour violation des droits de l’homme,
1. Sur l’ensemble de la matière, cf. P. Bourel, Les conflits de lois en matière d'obligations
non contractuelles, Paris, 1961 ; et du même auteur, « Du rattachement de quelques délits
spéciaux en droit international privé», RCAD1 1989, t. 214, p. 251 et s.; F. Monéger,
Réflexions sur le principe de la compétence de la loi locale en matière de responsabilité délictuelle,
thèse dactyl. Paris II, 1974; M.-A. Moreau-Bourlès, Structure de rattachement et conflits de
lois en matière de responsabilité délictuelle, thèse dactyl. Paris II, 1985; G. Légier, « Sources
extra-contractuelles des obligations», Juris-Classeur Dr. int., Fasc. n° 553-1 à 553-4;
O. Boskovic, La réparation du préjudice en droit international privé, LGDJ, 2003.
2. Selon l’expression de P. Bourel, cours précité, spéc. p. 263.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 627
A. Choix du rattachement
875 De lege lata O Selon le célèbre arrêt Lautour de la Cour de cassation
du 25 mai 1948, « la loi territoriale compétente pour régir la responsabi¬
lité civile extra-contractuelle [...] est la loi du lieu où le délit a été commis »3.
Ce rattachement s’appuie sur diverses justifications. Son objectivité et
sa neutralité permettent d’assurer un équilibre entre les droits des indi¬
vidus. De leur côté, les États ont un intérêt à ce que leurs règles de
comportement soient respectées de façon homogène sur leur territoire.
De plus, la solution est doublement prévisible : au moment de l’acci¬
dent, l’auteur du dommage peut se douter qu’il doit se conformer aux
règles locales de comportement et, après la survenance du dommage,
l’identification de la loi applicable soulève, en principe, peu d’incerti¬
tudes, ce qui est important, notamment en raison de l’implication
fréquente d’assureurs et du nombre élevé de transactions conclues en
la matière4. Mais le rattachement au lieu du délit présente également
un certain nombre d’inconvénients. En particulier, le lieu du délit est
parfois peu significatif, par rapport aux autres éléments de l’espèce, et
1. Cf C. Kessedjian, « Les actions civiles pour violation des droits de l’homme — Aspects de
droit international privé », TCFDIP 2002-2004, p. 151 et s. avec de nombreuses références.
2. Sur le droit comparé, notamment, G. Légier, op. cit. ; et récemment, H. Gaudemet-
Talion, « Le pluralisme en droit international privé : richesses et faiblesses », RCADI 2005,
t. 312, p. 9 et s. (spéc. p. 217 et s., p. 285 et s. et p. 311 et s.).
3. Civ., 25 mai 1948, Rev. crit. DIP 1949. 89, note H. Batiffol, D. 1948. 357, note
P. L.-P., S. 1949. 1. 21, note Niboyet, JCP 1948. IL 4532, note Vasseur, Grands arrêts DIP,
5e éd. 2006, n° 19.
4. V. P. Mayer, V. Heuzé, Droit international prive', Montchrestien, 2004, n° 679.
628 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Rev. crit. DIP 1964. 284, note Castel. Sur le droit américain, notamment Y. Lous-
souarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommières, Droit international privé, Dalloz, 2004, n° 180
et s. ; G. Légier, op. cit., Fasc. n° 553-1, n° 50 et s. ; F. Monéger, « The last ten ou les derniers
États des Etats-Unis d’Amérique fidèles à la lex loci delicti », Mélanges P. Lagarde, Dalloz,
2005, p. 577 et s.
2. Sur cette question, notamment H. Muir Watt, « L’entrave à la prestation transfron¬
tière de services : réflexions sur l’impact des libertés économiques sur le droit international
privé des États membres », Mélanges J. Béguin, 2005, p. 545 et s. ; P. de Vareilles-Sommières,
« La responsabilité civile dans la proposition de règlement communautaire sur la loi appli¬
cable aux obligations non contractuelles (« Rome II ») », in Les conflits de lois et le système
juridique communautaire, Dalloz, 2004, p. 185 et s. (spéc. p. 198 et s.). V. aussi, sur la clause
« marché intérieur », supra, n° 457 et infra, n° 922.
3. Mais tout élément de souplesse dans la règle de conflit se traduit inévitablement
par une moindre prévisibilité du rattachement. Cf. H. Gaudemet-Talion, cours précité,
spéc. p. 311 et s.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 629
B. Fonctionnement du rattachement
877 Facteurs de complexité' O Le fonctionnement du rattachement est
affecté d’un certain nombre de facteurs de complexité. En particulier,
on est confronté, de plus en plus souvent, à des hypothèses dans les¬
quelles le dommage ne se réalise pas dans le même Etat que celui dans
lequel le fait générateur a été commis (délits complexes). Le critère du
lieu du délit ne permet alors pas de désigner la loi applicable (1). Mais
même pour les délits simples, il peut s’avérer parfois difficile d’identi¬
fier le lieu du délit, notamment lorsqu’il ne s’agit pas d’un accident
matériel et que l’on ne dispose pas d’éléments matériels permettant
une localisation dans l’espace. Souvent ces difficultés se doublent de
problèmes de qualification rendant les solutions particulièrement
incertaines1. C’est ce que l'on verra en examinant concrètement l’ap¬
plication du critère de rattachement dans un certain nombre de situa¬
tions particulières fréquemment rencontrées dans le commerce inter¬
national (2).
1. Comme le montre l’exemple du dommage causé par une information publiée par
voie de presse. Le fait générateur du dommage est-il constitué par l’édition du journal ou
plutôt par la diffusion de celui-ci? La première qualification a été consacrée par la CJCE
en matière de conflit de juridictions (CJCE, 7 mars 1995, Fiona Shevill, JDI 1996.543, obs.
A. Huet; Rev. crit. DIP 1996.487, note P. Lagarde; Europe 6/1995, Chron. n° 7, obs. L. Idot;
RTD eur. 1995.611, note Gardenes Santiago), alors que la seconde qualification est
celle retenue par la Cour de cassation en matière de conflit de lois (Civ. lre, 14 janv. 1997,
Gordon, cf. infra).
2. Pour un aperçu de droit comparé montrant que certains droits étrangers privilégient
le lieu de réalisation du dommage, alors que d’autres retiennent le lieu du fait générateur,
cf. H. Gaudemet-Talion, cours précité, spéc. p. 221 et s.
3. JDI 1984. 123, note G. Légier (responsabilité d’une banque lors de la vente en bourse
d’actions détournées frauduleusement).
630 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
879 Comme le montrent les arrêts cités, l’hypothèse du délit complexe est
souvent aggravée par une multiplication des éléments constitutifs
du délit. Un dommage unique peut avoir été causé par une pluralité
de faits générateurs commis dans des États différents et un fait généra¬
teur unique peut avoir causé une pluralité de dommages dans des États
différents. Dans l’hypothèse d’une pluralité' de faits générateurs, l’appro¬
che de la Cour de cassation peut parfois permettre d’envisager le délit
dans son intégralité, sans le décomposer en une multitude de délits
autonomes. C’est ce qui s’est produit dans l’arrêt Mobil North Sea où le
1. Rev. crit. DIP 1988. 546, note P. Bourel, JDI 1988. 752, note B. Edelman (atteinte à
la vie privée par voie de presse).
2. D. 1997. 177, note M. Santa-Croce, Rev. crit. DIP 1997. 504, note J.-M. Bischoff,
JCP 1997. II. 22903, note H. Muir Watt; confirmé par Civ. lre, 28 oct. 2003, JCP 2004. II.
10006, note G. Lardeux, D. 2004. 233, note Ph. Delebecque, Rev. crit. DIP 2004. 83, note
D. Bureau, JDI 2004. 499, note G. Légier (accident de navigation sur le Mékong).
3. Dans l’affaire Gordon, la solution est venue de la qualification du fait générateur de
responsabilité. La Cour de cassation a décidé que le fait générateur était la diffusion de la
revue en France, ce qui a eu pour conséquence de réduire ce délit potentiellement complexe
en un délit simple entièrement localisé en France.
4. D. 1999. Somm. 295, obs. B. Audit, JCP 1999. II. 10183, note H. Muir Watt,
JDI 1999. 1048, note G. Légier, Rev. crit. DIP 2000. 199, note J.-M. Bischoff (naufrage
d’une plate-forme pétrolière en mer du Nord).
5. JCP 2002. IL 10082, note H. Muir Watt, D. 2003. 58, note M. Josselin-Gall, Rev. crit.
DIP 2003. 440, note J.-M. Bischoff (actes de contrefaçon de logiciels commis en Angleterre,
aux Pays-Bas et en Suède au préjudice d’une société française). Cet arrêt est toutefois d’une
interprétation malaisée.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 631
1. Cf. CA Rennes, 29 avril 1992, Bull. Joly 1993. 132, note Daigre, JDI 1999. 189, obs.
A. Huet; CA Paris, 3 avril 2002, JDI 2003. 145, obs. A. Huet. La problématique est alors
différente, en raison de l’option de compétence entre le lieu du fait générateur et le lieu du
préjudice qui n’est pas admise sur le terrain du conflit de lois. Le fait générateur semble
devoir être localisé à l’endroit où la lettre de rupture a été rédigée et envoyée, alors que la
localisation du préjudice peut dépendre de l’objet du contrat négocié (approche adoptée par
la Cour d’appel de Paris à propos de la cession d’un progiciel conduisant à rechercher le lieu
où celui-ci aurait été exploité) ou conduire tout simplement au lieu où la lettre de rupture
a été reçue (qualification retenue par la Cour d’appel de Rennes).
2. Cf. l’affaire Horn y Prado, Civ. lre, 8 févr. 1983, précité (détournement en France
d’actions d’une société espagnole qui ont été revendues en bourse en Espagne par l’inter¬
médiaire de banques françaises).
3. Sur le terrain du conflit de juridictions, notamment CJCE, 10 juin 2004, Kronhofer
(aff. C-168/02), Rev. crit. DIP 2005. 326, note H. Muir Watt, à propos d’une affaire où des
conseillers en placement allemands avaient convaincu un investisseur autrichien de trans¬
férer des fonds sur un compte de placement en Allemagne afin d’acquérir des options
d’achat sur des actions à la bourse de Londres. Le dommage a été situé en Allemagne, au
lieu du compte par lequel les fonds ont transité, et non pas au domicile de la victime.
4. Sur le terrain du conflit de lois, notamment l’arrêt Horn y Prado, précité, estimant
que le délit s’est produit en France, au lieu « où a été donné l’ordre de vente des titres frau¬
duleusement détournés ».
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 633
1. Cf. notamment, J.-S. Bergé, « Droit d’auteur, conflit de lois et réseaux numériques :
rétrospective et perspective », Rev. crit. DIP 2000. 357; P.-Y. Gautier, « Du droit applicable
dans le village planétaire au titre de l’exploitation immatérielle des oeuvres », D. 1996.
Chron. 131 ; et du même auteur, « Les aspects internationaux de l’Internet », TCFDIP1997-
98, p. 241 et s.; C. Nourissat, «L’Internet et la loi applicable à la responsabilité civile
délictuelle », JCP E 2002, Cah. dr. entr. n° 4, p. 27 et s. ; Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de
Vareilles-Sommières, Droit international privé, Dalloz, 2004, n° 407-3 ; B. Audit, Droit inter¬
national privé, Economica, 2006, n° 800.
2. Si l’on raisonne ici comme l’a fait la Cour de cassation en matière de concurrence
déloyale commise par voie de presse (arrêt Gordon, précité), on devrait dire que le fait géné¬
rateur est la diffusion de l’information dans un pays donné. Cette qualification n’est guère
satisfaisante en matière d’Internet, compte tenu de la portée mondiale du réseau.
3. En effet, en matière de conflit de juridictions, la Cour de cassation a estimé que le
fait générateur doit être localisé dans « l’État du lieu d'établissement de l'auteur de la contre¬
façon » : Civ. lre, 9 déc. 2003, Rev. crit. DIP 2004. 632, note O. Cachard, JDI 2004. 872,
note A. Huet, D. 2004. 276, obs. C. Manara, JCP 2004. IL 10055, note C. Chabert, RTD
com. 2004. 281, obs. F. Pollaud-Dulian. Cette qualification devrait pouvoir être transposée
au conflit de lois.
4. En ce sens aussi, H. Gaudemet-Talion « Le pluralisme en droit international privé :
richesses et faiblesses », RCADI 2005, t. 312, p. 9 et s. (spéc. p. 223).
5. Civ. lre, 9 déc. 2003, précité. Dans le même sens déjà CA Orléans, 6 mai 2003,
Rev. crit. DIP 2004. 139, note H. Gaudement-Tallon, JDI 2004. 193, obs. A. Huet. Certains
juges du fond se montrent plus exigeants en recourant à la théorie de la focalisation consis¬
tant à admettre la compétence du tribunal du lieu de diffusion seulement si l’opérateur a
dirigé son activité vers cet État, notamment par l’emploi de sa langue. Par exemple, TGI de
Paris, 11 févr. 2003 et 11 mars 2003, JDI 2004. 491, note J.-S. Bergé.
634 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
soient disponibles dans ce pays1. Une fois que l’on a identifié et localisé
les éléments constitutifs du délit, il reste à surmonter la difficulté de la
localisation des délits complexes, afin d’identifier la loi du délit. Il
n’existe pas encore d’arrêt de la Cour de cassation. Les juges du fond
semblent privilégier la loi du lieu de réception de l’information2. Une
autre solution est-elle concevable ? Certains auteurs proposent de
recourir à la théorie de la focalisation3 4. Selon cette théorie, la loi de
l’État de réception est seulement applicable s’il s’agit d’un pays cible,
c’est-à-dire que l’auteur du site a particulièrement visé cet Etat parmi
les États destinataires de son site. Comme critère de la focalisation, on
pourrait utiliser notamment la langue employée, du moins si le site
n’est pas en anglais. D’autres critères devraient s’y ajouter. Une autre
approche pourrait consister à transposer à Internet la solution des
arrêts Mobil North Sea et Sisro\ en donnant la préférence à la loi qui
présente les liens les plus étroits avec le délit (loi du lieu du fait géné¬
rateur ou loi du lieu du dommage). L’inconvénient réside dans le
manque de prévisibilité du rattachement. D’autres propositions sont
avancées par la doctrine, comme l’application de la loi du lieu d’émis¬
sion5, l’application de la loi du lieu de connexion6 ou encore l’applica¬
tion de la lexfori7. Notre préférence personnelle va en faveur d’une
application de la loi du lieu de réception/diffusion de l’information,
tempérée par la théorie de la focalisation, dans la mesure où tout rat¬
tachement à la loi du lieu d’émission (établissement de l’auteur du site
ou de son hébergeur), bien qu’ayant un titre sérieux à s’appliquer,
1. Cf. Com., 11 janv. 2005, JCP 2005. II. 10055, note C. Chabert. En l’espèce, il se
déduisait des précisions apportées sur le site lui-même que les produits n’étaient pas dispo¬
nibles en France, de sorte que l’on devait considérer que le site ne visait pas le public en
France.
2. Cette tendance est parfaitement illustrée, en matière de contrefaçon de marque, par
le jugement du TGI de Draguignan du 21 août 1997, reproduit in A. Bensoussan, Y. Bréban,
Les arrêts-tendances de l'internet, Hermès Science, 2000, p. 210 et s. Alors que l'auteur de la
contrefaçon ainsi que l’hébergeur du site étaient établis aux États-Unis, le tribunal a appli¬
qué la loi française dans la mesure où il y a eu une réception de renseignements offerts au
public dans une sphère territoriale soumise à l’application de la loi française. La préférence
donnée à la loi du pays de la réception, au détriment de la loi du pays de l’émission, n’est
pas toujours prévisible pour l’auteur du site qui risque d’engager sa responsabilité sur le
fondement d’une loi étrangère, alors que son comportement est éventuellement licite au
regard de la loi du pays de son établissement (lequel coïncide souvent avec le pays d’établis¬
sement de l’hébergeur du site). En même temps, si l’on prend l’exemple de la concurrence
déloyale ou de la contrefaçon de marque, l’entreprise victime des agissements est en prin¬
cipe connue et peut être localisée d’avance. V. aussi, E. Caprioli, Règlement des litiges inter¬
nationaux et droit applicable dans le commerce électronique, Litec, 2002, n° 64 et s.
3. V. notamment, O. Cachard, La re'gulation internationale du marché électronique, LGDJ,
2002 ; aussi B. Audit, op. cit., n° 800.
4. Arrêts précités.
5. Sur cette position, cf. C. Nourissat, article précité.
6. C’est la solution défendue par C. Nourissat, article précité.
7. Cf. Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommières, op. cit, n° 407-3. La compé¬
tence de la lex fori doit être limitée, selon ces auteurs, à la réparation des seuls dommages
subis localement. V. aussi P.-Y. Gautier, « Les aspects internationaux de l’Internet », TCFDIP
1997-98, p. 241 et s. Compte tenu des règles de conflit de juridictions, la lexfori devrait le
plus souvent correspondre à la loi du lieu de diffusion.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 635
1. L’expression est de M. Vivant, « Cybermonde : droit et droits des réseaux », JCP 1996.
I. 3969.
2. Interdiction des ententes et abus de position dominante, articles 81 et 82 du
Traité CE. Cf. en droit international privé, notamment L. Idot, « Les conflits de lois en droit
de la concurrence », JDI 1995, p. 321 et s. En droit interne et communautaire, par ex.,
v. M.-A. Frison-Roche, M.-S. Payet, Droit de la concurrence, Dalloz, 2006, n° 317 et s.;
M. Malaurie-Vignal, Droit de la concurrence interne et communautaire, Armand Colin, 2005,
n° 447 et s. avec les références.
3. V. le Livre vert de la Commission du 19 décembre 2005 relatif aux dommages et
intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les abus de position
dominante, COM (2005) 672 final.
4. Cf. notamment, en droit international privé, J.-M. Bischoff, « La concurrence
déloyale en droit international privé », TCFDIP 1969-1971, p. 5 et s. ; A. Dyer, « La concur¬
rence déloyale en droit international privé », RCADI 1988. IV. 373; H. Duintjer Tebbens,
« Les conflits de lois en matière de publicité déloyale à l’épreuve du droit communautaire »,
Rev. crit. DIP 1994, p. 451 et s.; Dutoit, « Une convention multilatérale de droit interna¬
tional privé en matière de concurrence déloyale : mythe ou réalité? », Mélangés G. Droz,
1996, p. 515 et s. ; F. Leclerc, « Concurrence déloyale et droit international privé », D. 2001,
p. 88 et s.
5. Selon l’expression de Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommières, Droit inter¬
national privé, Dalloz, 2004, n° 407.
6. Civ. lre, 14 janv. 1997, Gordon, précité; aussi CA Grenoble, 21 oct. 1999, JDI 2000.
1016, note C. Witz.
636 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
C. Domaine du rattachement
La lex loci delicti possède un domaine d’application large, tant sur le
terrain des délits rattachés que sur celui des questions rattachées.
1. Cf. C. Kessedjian, « Les actions civiles pour violation des droits de l’homme —
Aspects de droit international privé », TCFDIP 2002-2004, p. 151 et s., avec de nombreuses
références. V. aussi la Résolution du Parlement européen sur des normes communautaires
applicables aux entreprises opérant dans les pays en développement du 15 janvier 1999,
JOCE C-104/180; et plus généralement sur la responsabilité sociale des entreprises,
Communication de la Commission du 2 juillet 2002 concernant la responsabilité sociale
des entreprises, COM (2002) 347 final (spéc. p. 15) et aussi Livre vert de la Commission
du 18 juillet 2001, « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale », COM
(2001) 366 final.
2. C. Kessedjian, article précité, spéc. p. 171 et s.
3. Toujours selon C. Kessedjian, l’exception ne doit pas être étendue à la question des
dommages-intérêts punitifs, lesquels doivent relever exclusivement de la loi de la résidence
habituelle de la victime.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 637
1. Civ. lre, 4 déc. 1990, Rev. crit. DIP 1992. 292, note E. Putman.
2. L’idée d’une uniformisation en Europe des règles de conflit en matière d’obligations
non contractuelles est en réalité déjà assez ancienne puisque la Convention de Rome devait
initialement porter à la fois sur les obligations contractuelles et les obligations non contrac¬
tuelles. Cf. l’avant-projet de convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles
et non contractuelles de juin 1972, Rev. crit DIP 1973. 209; et le rapport de P. Lagarde sur
l’examen de cet avant-projet, TCFDIP 1971-1973, p. 147 et s. Plus récemment, le Groupe
européen de droit international privé a présenté une « Proposition pour une convention
européenne sur la loi applicable aux obligations non contractuelles » en septembre 1998,
Rev. crit. DIP 1998. 802.
3. COM (2003) 427 final. Cf. P. de Vareilles-Sommières, « La responsabilité civile dans
la proposition de règlement communautaire sur la loi applicable aux obligations non
contractuelles (« Rome II ») », in Les conflits de lois et le système juridique communautaire,
Dalloz, 2004, p. 185 et s. Un avant-projet de proposition a été publié par la Commission le
3 mai 2002. Sur ce texte, cf. C. Nourissat, E. Treppoz, « Quelques observations sur l’avant-
projet de proposition de règlement du Conseil sur la loi applicable aux obligations non
contractuelles Rome II », JDI 2003, p. 7 et s.
4. Proposition modifiée de Règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi
applicable aux obligations non contractuelles (« Rome II ») présentée par la Commission
le 21 février 2006, COM (2006) 83 final.
5. Le 25 septembre 2006, le Conseil de l’UE a adopté une position commune dont il n’a
pu être tenu compte pour la présente édition. V. dossier interinstitutionnel n° 2003/0168
(COD).
6. Cf. considérants 3, 4, 7 et 20 de la proposition modifiée. On peut ajouter que l’ac¬
tuelle situation en Europe est propice au forum shopping en raison de l’option de compé¬
tence juridictionnelle instituée par le Règlement 44/2001 Bruxelles I (art. 5. 3) et de la
grande divergence des règles de conflit de lois des États membres.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 639
1. Pour les personnes morales et les personnes physiques agissant dans le cadre de leur
activité professionnelle, le principal établissement tient lieu de résidence habituelle (art. 20).
2. À l’origine, il devait y avoir cinq délits spéciaux, mais la disposition relative aux
atteintes à la vie privée et aux droits de la personnalité a été abandonnée, faute de consen¬
sus, ce qui a conduit à une exclusion de la matière du champ d’application du règlement
(art. 1er § 2 h).
3. Lorsque la pratique affecte exclusivement les intérêts d’un concurrent déterminé, on
appliquera également le rattachement désignant la loi de la résidence habituelle commune
des parties, ainsi que la clause d’exception. Dans tous les autres cas, seul le critère du lieu
de survenance du dommage est applicable.
4. Sur la responsabilité en matière d’environnement, cf. infra, n° 895 et s.
5. Sur la responsabilité du fait des produits, cf. infra, n° 916 et s.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 641
1. Civ. lrc, 16 déc. 1997, Rev. crit. DIP 1998, 300, note crit. P. Lagarde, s’agissant d’une
action récursoire d’un vendeur contre le fabricant.
2. Civ. lre, 7 mars 2000, Bull. civ. I, n° 77, Rev. crit. DIP. 2001, 101, note P. Lagarde,
s’agissant d’une action d’un tiers acquéreur contre le fabricant qui, en droit français, est
considérée comme contractuelle.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 645
suspension des délais (cf. art. 8). L’idée étant d’éviter, dans toute la
mesure du possible, un morcellement du droit compétent.
La convention ne dit rien cependant de l’action directe, ce qui est
regrettable, mais compréhensible, car les juristes de common law, tou¬
jours très influents, ont du mal à accepter ce mécanisme, au demeurant
très protecteur des victimes.
On ajoutera que l’application de l’une des lois déclarées compé¬
tentes ne peut être écartée que si elle est « manifestement » incompa¬
tible avec l’ordre public de l’État requis.
1. Y. Markovits, La directive..., LGDJ 1990, préf. J. Ghestin; v. égal. Ph. Brun, « La direc¬
tive du 25 juillet 1985, le législateur français et la Commission européenne : propos désabusés
sur la réalisation d’un marché... de dupes », Mélangés Dutoit, éd. Droz, Genève 2002, 21.
2. D’autant que pour les produits mis en circulation après 1988, date de l’entrée en
vigueur de la directive, et avant 1998 (21 mai), date de l’entrée en vigueur de la loi nationale
française, la jurisprudence considère qu’il faut appliquer les textes du Code civil, « interprétés
à la lumière de la directive », v. par ex. Civ. lre, 24 janv. 2006, D. 2006,1273, note. L. Neyret,
JCP 2006, II, 10082, note L. Grynbaum, RTD civ. 2006, 325, obs. P. Jourdain.
3. CJCE, 25 avr. 2002, aff. C-52/00, D. 2002, 1670. Autrement dit, les droits nationaux
et spécialement le droit français ne peuvent plus se démarquer du droit communautaire,
ce qui conduit à oublier la jurisprudence sur l’obligation de sécurité et à réduire la portée
de l’option pourtant offerte par l’art. 13 de la directive et l’art. 1386-18 C. civ. Cette option
ne devrait autoriser, en application de la loi française, que les actions en garantie des
vices cachés ou en responsabilité du fait des choses, ces actions ayant un fondement diffé¬
rent de celui qu’organise la directive; v. J. Calais-Auloy, « Menace européenne sur la
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 647
dant pas se contenter d’un simple défaut virtuel, mais le défaut peut
résulter d’un défaut d’information.
Le caractère défectueux doit être apprécié in abstracto, en tenant
compte de toutes les circonstances indiquées.
Enfin, la responsabilité suppose que le produit soit mis en circula¬
tion. Tel est le cas lorsqu’il est sorti du processus de fabrication mis
en œuvre par le producteur et qu’il est entré dans un processus de
commercialisation dans lequel il se trouve en l’état offert au public aux
fins d’être utilisé ou consommé1.
1. CJCE, 9 févr. 2006, Declan O'Byrne C-127/04, JCP 2006, II, 10083, RTD civ. 2006,
331, obs. P. Jourdain.
2. Cf. J.-P Béraudo, « L’application internationale des nouvelles dispositions du Code
civil sur la responsabilité du fait des produits défectueux », JCP 1999,1, 140.
650 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. Armateurs
1. Droit commun
908 Diversité des sources de responsabilité O Les occasions de res¬
ponsabilité d’un armateur — de celui qui exploite un navire, qu’il en
soit ou non propriétaire1 — sont fréquentes. Sa responsabilité est
d’abord extra contractuelle et découle des fautes personnelles qu’il est
possible de lui imputer dans l’exploitation du navire. Cette responsabi¬
lité est également une lourde responsabilité pour fait d’autrui, l’arma¬
teur répondant des agissements de ses préposés maritimes (dont le
capitaine) ou terrestre, comme tout chef d’entreprise. Elle peut aussi
être attachée à la garde du navire2. La responsabilité de l’armateur est
enfin et surtout contractuelle : elle résulte de manquements à l’un des
nombreux contrats dans lequel il est engagé et spécialement des contrats
d’affrètement ou de transport. En tant que transporteur, l’armateur
bénéficie d’une limitation de responsabilité contractuelle, calculée par
kilo ou par colis. À cette limitation, s’ajoute celle qui lui est accordée
en tant qu’armateur, ce qui peut conduire à des situations assez
complexes. Précisément, l’élément essentiel de la responsabilité de l’ar¬
mateur est l’institution de la limitation de responsabilité.
2. Limitation de responsabilité
909 Conventions internationales O La limitation de responsabilité des
armateurs est une institution ancienne que l’on trouvait déjà dans
1. Cf. L. 3 janv. 1969 sur l’armement, art. 1, ce qui vise l’affréteur coque-nue, le fré¬
teur à temps et le fréteur au voyage. Dans l’affrètement à temps, la Cour de cassation a
cependant considéré que la qualité d’armateur se partageait entre le fréteur et l’affréteur, ce
qui n’est guère convaincant (Com. 26 oct. 1999, DMF 2000, 106, rapport Rémery, obs. I.
Corbier, DMF 2001, hors série, n° 23, obs. crit. P. Bonassies). Plus général. V. I. Corbier,
La notion d’armateur, éd. Dalloz 1999, préf. M. Rèmond-Gouilloud.
2. Ch. mixte 4 déc. 1981, DMF 1982, 140, obs. R. Achard.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 651
1. Cf. Littré, V° Fortune, 6°, Terme de marine : accidents auxquels sont exposés les
navigateurs.
2. Largement ratifiée et notamment par la France. Le texte est complété par un proto¬
cole du 2 mai 1996 visant essentiellement à relever les plafonds de réparation. Le droit
interne issu de la loi du 3 janvier 1967 modifiée est le décalque de la LLMC. S’agissant des
navires français devant les tribunaux français, la loi française est applicable. S’agissant des
navires étrangers, la convention s’applique à l’égard de tout armateur étranger qui a sa
résidence dans un État contractant et dont le navire bat pavillon d’un État contractant.
Pour les armateurs ne remplissant pas ces conditions, la convention prévoit qu’un État peut
les exclure du champ d’application du texte, ce que la France n’a pas fait.
3. P. Bonassies et Ch. Scapel, op. cit.} n° 347.
652 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. not. CA Bordeaux, 31 mai 2005, « Heidberg », DMF 2005, 839, obs. A. Vialard;
égal. Ph. Delebecque, La faute inexcusable de l'armateur, colloque ABDM, Anvers 2005.
2. Pour les dommages corporels, les chiffres sont bien plus importants et ont été rehaus¬
sés avec l’adoption du Protocole de 1996 ; mais la limitation existe et n’a pas été supprimée,
comme certains le réclament pourtant.
3. Une convention internationale définit avec une relative précision la manière dont la
jauge doit se calculer (cf. Conv. de Londres 23 juin 1969).
4. Jugé qu’une demande introduite devant la juridiction de l’État contractant par un
propriétaire de navire tendant à la création d’un fonds limitatif de responsabilité, tout en
désignant la victime potentielle du dommage, d’une part, et une action en dommages-
intérêts introduite devant la juridiction d’un autre État contractant par cette victime contre
le propriétaire du navire, d’autre part, ne créent pas une situation de litispendance au sens
de l’art. 21 de la Convention de Bruxelles, CJCE 14 oct. 2004, Rev. crit. DIP. 2005, 119.
5. V. La limitation de responsabilité de l’armateur : quel est le juge compétent? DMF 2002,
1070. L’art. 7 prévoit que : lorsqu’en vertu du présent règlement, un tribunal d’un État
654 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
3. Avaries communes
contractant est compétent pour connaître des actions en responsabilité du fait de l’utilisa¬
tion ou de l’exploitation d’un navire, ce tribunal connaît aussi des demandes relatives à la
limitation de cette responsabilité.
1. V. pour une application de la théorie des avaries communes par référence à un
connaissement : Sentence CAMP n° 1109, du 6 mai 2005.
2. P. Latron, « La révision des Règles d’York et d’Anvers », DMF 1990, 231 ; R. Paren-
thou, « Réflexions autour de l’avarie commune », Rev. Scapel 1994, 23; égal, du Pontavice,
« Les avaries communes, actualité de l’institution», BTL 1983, 134; plus généralement,
v. G. Hudson, The York-Antwerp Rules, 2e éd. LLLP 1996.
3. L’indemnité d’assistance due si le navire est en péril et en cas de résultat utile (« no
cure no pay ») est assez substantielle, car elle prend pour base le succès obtenu, les efforts
et le mérite de l’assistant, le danger encouru, le temps passé, ainsi que la valeur des choses
sauvées.
RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE 655
B. Compagnies aériennes
914 Risques de l’air O L’exploitant d’un aéronef est exposé, comme
son homologue maritime à de sévères risques. Pour autant, les
« risques de l’air » ne donnent pas lieu à des compensations juri¬
diques3. Ainsi, les compagnies ne bénéficient-elles d’aucune limitation
de responsabilité. En tant que transporteurs de passagers, elles ne
peuvent plus, lorsque la Convention de Montréal est applicable, se
prévaloir de plafonds de réparation. Et, en tant que transporteurs de mar¬
chandises, ces plafonds sont assez élevés. Les compagnies aériennes
sont donc assujetties à une lourde responsabilité, que renforcent, au
demeurant, certains textes spéciaux.
A. Pollution marine
917 Droit positif O Le monde maritime est à juste titre préoccupé par les
problèmes de pollution de la mer. D’où toutes une série de mesures
réglementaires très concrètes2. D’où aussi des textes importants sur la
responsabilité des pollueurs des mers. L’OMI est à l’origine de plusieurs
conventions : l’une en vigueur, les deux autres encore en projet.
1. La convention donne une liste de ces matières extrêmement diversifiées, v. art. 1er.
Une convention spéciale a été adoptée en matière de transport maritime de matières
nucléaires : Conv. 17 déc. 1971 « relating to civil liability in the field of maritime carriage
of nuclear material ».
2. Une autre convention, restée lettre morte à ce jour, a été adoptée pour les trans¬
ports de marchandises dangereuses routiers, ferroviaires et fluviaux : Convention CRTD du
10 oct. 1989.
660 LES RISQUES ET GARANTIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Autres pollutions1
921 Convention de Lugano O Une convention sur la responsabilité
civile des dommages résultant d’activités dangereuses pour l’environ¬
nement a été adoptée sous l’égide du Conseil de l’Europe le 21 juin
19932. Il s’agit de la Convention de Lugano qui se propose d’assurer
une réparation adéquate des dommages résultant des activités dange¬
reuses pour l’environnement et prévoit des moyens de prévention et de
réparation3. La responsabilité est attachée à l’exercice d’activités dan¬
gereuses (largement définies, cf. art. 1er) lorsqu’elles sont à l’origine de
LE RÈGLEMENT
DES LITIGES
DU COMMERCE
INTERNATIONAL
666 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
924 Plan O Les malentendus entre les parties sur l’existence ou l’étendue exacte
de leurs obligations, les carences vraies ou supposées dans 1 exécution de celles-
ci sont susceptibles de conduire à une situation dans laquelle les parties n ont
plus d’autre solution que de recourir à un tiers pour trancher leur litige.
Dans un certain nombre de cas, l’affaire pourra se prêter à un « mode de
règlement alternatif des différends » (ADR selon le sigle le plus communément
répandu : « alternative dispute résolution ») reposant sur la conciliation ou la
médiation1. Mais ce recours reste encore marginal, malgré son indéniable
intérêt, et, le plus souvent, les parties continuent d’avoir besoin d’obtenir une
décision de caractère juridictionnel ayant vocation à être exécutoire.
Elles devront donc soit obtenir le règlement de leurs différends en portant
leur affaire devant les tribunaux d’un Etat (Titre 1), soit recourir, ce qui est le
plus fréquent, à l’arbitrage commercial international (Titre 2).
1. V., J.-Cl. Goldsmith, « Les modes de règlement amiable des différends », RD aff. int.
1996. 221 et s.
TITRE 1
LE RECOURS
A UNE JURIDICTION
ÉTATIQUE
925 Les tribunaux des États, quoique institués avant tout pour rendre la jus¬
tice dans les affaires domestiques, doivent aussi se prêter au règlement
des litiges du commerce international. Les particularités de la matière
justifient son inclusion dans le droit international privé dont elles
constituent la branche du « conflit de juridictions ». L’expression
même de « conflit de juridictions », dictée par l’usage, est réductrice. Il
s’agit en réalité d’établir, en présence d’un litige présentant des élé¬
ments d’extranéité, la compétence des tribunaux d’un État déterminé,
en d’autres termes, d’un ordre juridictionnel déterminé. Il s’agit égale¬
ment d’établir lorsqu’une décision a été rendue par le tribunal d’un
État, si et dans quelle mesure cette décision sera susceptible de produire
des effets dans un autre État. Ces problèmes peuvent être résolus par
l’appel au droit commun des États, ou par l’application de conventions
internationales adoptées par eux.
La matière est complexe et vaste et ne saurait être appréhendée ici
dans son ensemble. On se limitera donc à envisager les questions
qu’elle soulève plus spécifiquement pour les litiges d’ordre commercial.
Seront traitées successivement : les règles de compétence de la juridic¬
tion étatique (Chapitre 1), les immunités de juridiction et d’exécution
des États et des organisations internationales (Chapitre 2) et l’effet des
jugements étrangers (Chapitre 3).
668 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 1
LES RÈGLES DE
DÉTERMINATION DE LA
JURIDICTION COMPÉTENTE
926 Pour nous en tenir ici aux juridictions françaises, on sait que leur compé¬
tence peut se déterminer principalement (car il existe un certain nombre
de conventions bilatérales) soit en fonction du droit commun de la com¬
pétence juridictionnelle (Section 1), soit en fonction du droit européen
(conv. Bruxelles du 27 septembre 1968 et régi. CE n° 44/2001 du
22 décembre 2000, Section 2). Mais les parties ont la possibilité de s’ac¬
corder sur la compétence des tribunaux au moyen d’une clause attributive
de juridiction (Section 3).
1. Civ. lre, 30 oct. 1962 Scheffel, Rev. crit. DIP 1963. 387, note Francescakis; D. 1963.
109, note G. Holleaux; D. Ancel, Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence française
de droit international prive', 5e éd., Dalloz, 2006, n° 37.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 669
1. V. dans l’hypothèse inverse, Civ. lre, 2 avr. 1996, Bull. civ. I, n°164.
2. V. Com. 3 nov. 1988, Bull. civ. IV, n°291 ; Gaz. Pal. 1989. 1. somm. 252, obs. Guin¬
chard et Moussa; RTD civ. 1989. 396, obs. crit. Normand; Com. 14 juin 1994, Bull. civ. IV,
n°221 ; D. 1994. IR. 185. Pour une solution surprenante en matière de vente CAF, v. Com.
1er mars 1994, Rev. crit. DIP 1994. 672, note V. Heuzé.
3. Civ. 2e, 18 janvier 2001, Bull. civ. II, n° 10, JCP 2001. IV. 1413, Procédures 2001.
comm. 56, obs. Perrot.
670 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 19 nov. 1985, Soc. Cognac et Brandies, Rev. crit. DIP 1986. 712, note
Y. Lequette; JDI 1986. 719, note A. Huet; JCP 1987. II. 20810, note P. Courbe; D. 1986.
362, note Prévault, et IR. 268 obs. B. Audit; Les grands arrêts..., op. cit., n°71; CA Paris
(lre ch. D), 18 déc. 1996, Rev. crit. DIP 1997. 527, note M. Santa-Croce; Civ. lre, 18 avril
2000, Bull. civ. I, n° 110.
2. Le règlement n° 44/2001 autorise même, à son article 4, alinéa 2 toute personne
domiciliée dans un État contractant à utiliser les règles de compétence qui y sont en vigueur.
Un étranger domicilié en France peut donc, en vertu de cet article du règlement, utiliser
l’article 14 du Code civil à l’encontre d’un défendeur domicilié en dehors de la Commu¬
nauté.
3. Civ. lre, 21 mars 1966, Rev. crit. DIP 1966. 670, note Ponsard; D. 1966. 429, note
Ph. Malaurie; JDI 1967. 380, note J.-D. Bredin.
4. CA Montpellier, 2 mai 1985, Rev. crit. DIP 1987. 108, note G. Droz; Civ. lre, 24 nov.
1987, Rev. crit. DIP 1988. 364, note G. Droz, JDI 1988. 733, note E. Loquin; Civ. lre,
14 décembre 2004, Bull. civ. I, n° 311 (la preuve d’une fraude n’a pas été rapportée dans
l’hypothèse d’une cession des droits et actions résultant de polices d’assurance par l’affré¬
teur d’un navire de droit étranger à son PDG de nationalité française).
DETERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 671
A. Convention de Bruxelles
929 Fruit d’un effort d’unification sans précédent, la convention de
Bruxelles du 27 septembre 1968 a remplacé, dans de nombreuses hypo¬
thèses, les règles de compétence juridictionnelle de droit commun qui
ont été présentées ci-dessus. Elle s’étend à la détermination de la juri¬
diction compétente au stade du litige ainsi qu’à l’effet des jugements
au sein de l’Union européenne.
Liant l’ensemble des États membres de l’Union européenne, elle a
subi certaines modifications lors des nouvelles adhésions, qui se sont
généralement effectuées par groupes d’États. Ainsi la dernière conven¬
tion d’adhésion intervenue est celle du 29 novembre 1996, signée par
l’Autriche, la Finlande et la Suède. La version de la convention de
Bruxelles issue de la convention de Luxembourg régit la compétence
judiciaire dans les rapports avec la Belgique. La version issue de la
convention de San Sébastian du 26 mai 1989 lie l’ensemble des autres
États membres.
La convention de Lugano du 16 septembre 1988, pratiquement simi¬
laire à la convention de Bruxelles et qui doit recevoir la même interpré¬
tation, lie d’une part, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Dane¬
mark, l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le
Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, le Royaume-Uni, la
Suède, et d’autre part, l’Islande, la Norvège et la Suisse2. On ne traitera
pas ici spécialement de cette convention.
Sur la question capitale de l’interprétation de la convention de
Bruxelles, le protocole de Luxembourg du 3 juin 1971 a confié à la Cour
de justice des Communautés européennes (CJCE) une compétence
d’interprétation de la convention reposant sur le mécanisme de la
question préjudicielle posée par les cours suprêmes ou les cours d’appel
des États membres.
L’interprétation de la convention donnée par la CJCE a vocation à
s’imposer aux juridictions de tous les États membres.
1. Civ. lre, 25 nov. 1986, Rev. crit. DIP 1987. 396, note H. Gaudemet-Talion.
2. Des travaux sont actuellement en cours en vue de l’adoption d’une nouvelle conven¬
tion de Lugano. L’objectif est d’aligner, dans la mesure du possible, ses dispositions subs¬
tantielles sur celles du règlement n° 44/2001. Concernant la compétence pour conclure
cette nouvelle convention, v. CJCE, avis n° 1/03 du 7 février 2006 retenant une compétence
exclusive de la Communauté européenne.
672 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Règlement « Bruxelles I »
930 Le règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 résulte
des nouvelles dispositions de l’article 61 du traité CE, modifiées par
le traité d’Amsterdam. Ce traité, visant, entre autres, à mettre en
place un « espace de liberté, de sécurité et de justice» a permis au
Conseil de prendre des mesures dans le domaine de la coopération
judiciaire en matière civile. Le règlement du 22 décembre 2000 marque
un pas important dans le développement de la coopération judiciaire
civile1.
Ce règlement ne met pas complètement fin à l’existence de la
convention de Bruxelles. Elle continuera de s’appliquer aux territoires
des États membres qui relèvent de son champ géographique mais auquel
le traité sur la Communauté européenne ne s’applique pas (art. 299 du
traité)2.
Le règlement est entré en vigueur le 1er mars 2002 et s’applique aux
actions judiciaires intentées depuis cette date, ainsi qu’aux décisions de
justice rendues après le 1er mars 2002 sur des instances introduites
avant cette date3.
Le contenu du règlement est très proche de la convention de
Bruxelles. On présentera ici l’étude des solutions du règlement indis¬
pensables à connaître en droit du commerce international, en men¬
tionnant leur construction progressive, sous l’influence décisive de la
CJCE, depuis la convention de Bruxelles. On notera à cette place qu’en
matière d’interprétation, le texte pertinent est désormais l’article 68
du traité CE qui ne permet plus aux cours d’appel de soulever des ques¬
tions préjudicielles d’interprétation4. Celles-ci sont réservées aux cours
suprêmes. Quant aux recours dans l’intérêt de la loi, ils ne relèveront
plus des procureurs généraux auprès des cours suprêmes, mais du
Conseil, de la Commission, ou d’un État membre.
A. Le domicile du défendeur
934 La compétence des juridictions de l’État du domicile du défendeur est
la règle de base du règlement (art. 2). Il n’est pas exigé que le deman¬
deur soit lui-même domicilié sur le territoire d’un État membre de
l’Union ou sur le territoire d’un État étranger à l’Union. Le règlement
du 22 décembre 2000 précise à son considérant n° 11, après avoir
insisté sur le « haut degré de prévisibilité » des règles de compétence,
que « cette compétence doit toujours être disponible sauf dans quelques
cas bien déterminés où la matière du litige ou l’autonomie des parties
justifie un autre Critère de rattachement, ce qui élimine toute tentation
de recourir au forum non conveniens »3.
Le domicile des personnes physiques est déterminé en fonction de la
lex domicili (art. 59 régi.).
Le règlement comprend désormais une règle matérielle pour les
sociétés ou personnes morales (art. 60). Le demandeur dispose d’une
1. V. infra, n° 957 et s.
2. Il est prévu que ces règles de compétence s’appliqueront, à l’avenir, également à la
procédure européenne d’injonction de payer : v. proposition amendée de règlement du
Parlement européen et du Conseil instituant une procédure européenne d’injonction de
payer, COM (2006) 57 final du 7 févr. 2006, art. 6. Par ailleurs, elles devraient également
déterminer la juridiction compétente dans le cadre de la future procédure européenne pour
les demandes de faible importance, le règlement devant préciser qu’il n’affectera pas l’ap¬
plication du règlement n° 44/2001 : v. proposition de règlement du Parlement européen et
du Conseil instituant une procédure européenne pour les demandes de faible importance,
COM (2005) 87 final du 15 mars 2005, art. 19.
3. CJCE 1er mars 2005, aff. C 281/02, A. Owusu c. N. B. Jackson, JDI 2005. 1177, note
G. Cuniberti et M. Winkler, indiquant que la convention de Bruxelles « s’oppose à ce
qu’une juridiction d’un État contractant décline la compétence qu’elle tire de l’article 2 de
ladite convention au motif qu’une juridiction d’un État non contractant serait un for plus
approprié pour connaître du litige en cause, même si la question de la compétence d’une
juridiction d’un autre État contractant ne se pose pas ou que ce litige n’a aucun autre lien
de rattachement avec un autre État contractant ». V. aussi, H. Gaudemet-Talion : « Le
forum non conveniens, une menace pour la Convention de Bruxelles? » (à propos de trois
arrêts anglais récents), Rev. crit. DIP 1991. 451 et s.; C. Chalas, L’exercice discre'tionnaire de
la compétence juridictionnelle en droit international privé, PUAM, 2001 ; A. Nuyts, L’exception
de forum non conveniens, Bruylant, LGDJ, 2003.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 675
option lui permettant de les assigner soit au lieu de leur siège statu¬
taire, soit à celui de leur administration centrale, soit à celui de leur
principal établissement1.
1. Matière contractuelle
En matière contractuelle, le demandeur peut porter son action
devant « le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande
a été ou doit être exécutée » (art. 5.1a).
1. Mais la règle de conflit reprend son emprise lorsque la définition du siège est néces¬
saire afin de déterminer la compétence exclusive « en matière de validité, de nullité et de
dissolution de sociétés ou personnes morales » (art. 22-2 régi.).
2. CJCE 22 mars 1983, aff. 34/82, Martin Peters, JDI 1983. 834, obs. A. Huet; Rev. crit.
DIP 1983. 667, note H. Gaudemet-Talion; CJCE 8 mars 1988, aff. 9/87, Arcado, JDI 1989.
453, obs. A. Huet; Rev. crit. DIP 1988. 610, note H. Gaudemet-Talion; D. 1989. Somm.
344, obs. B. Audit.
3. Arrêt Arcado préc., pts 12 et 13.
4. V. arrêt Martin Peters préc. et CJCE 10 mars 1992, Powell, JDI 1993. 474,
obs. J.-M. Bischoff; Rev. crit. DIP 192.528, note H. Gaudemet-Talion.
5. CJCE 4 mars 1982, Effer c. Kantner, Rev. crit. DIP 1982. 570, note H. Gaudemet-
Talion; JDI 1982. 473, obs. A. Huet; Civ. lrc, 25 janv. 1983, Rev. crit. DIP 1983. 516, note
H. Gaudemet-Talion. V. égal, pour les litiges sur la résolution, C. sup. Autriche 10 mars
1998, D. Affaires 1999. Somm. 357, obs. J. Niessen.
676 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CJCE 17 juin 1992, Jakob Handte, JDI 1993. 469, obs. J.-M. Bischoff ; Rev. crit. DIP
1992. 726, note H. Gaudemet-Talion; CJCE 27 octobre 1998, aff. C 51/97, La Reunion
Européenne S.A., Rev. crit. DIP 1999. 322, note H. Gaudement-Tallon, JDI 1999. 625, note
F. Leclerc. V. égal. Infra, n° 938.
2. CJCE 27 sept. 1988, Kalfelis, JDI 1989. 457, obs. A. Huet; Rev. crit. DIP 1989. 112,
note H. Gaudemet-Talion; D. 1989. Somm. 254, obs. B. Audit; et l’arrêt La Réunion Euro¬
péenne S.A. précité (action directe dans les groupes de contrats); CJCE 17 sept. 2002, aff.
C 334/00, Tacconi, Rev. crit. DIP 2003. 668, note P. Rémy-Corlay, JDI 2003. 668, obs.
A. Huet (responsabilité précontractuelle).
3. V. notamment, G. Droz, « Delendum est forum contractais? », D. 1997. Chron. 351;
V.Heuzé :« De quelques infirmités congénitales du droit uniforme : l’exemple de l’article 5.1
de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 », Rev. crit. DIP 2000. 595 et s.
4. En effet, il résulte de l’article 5. 1 c) que toute opération qui n’entre pas dans la
qualification de vente de marchandises ou de fourniture de services relève de la règle géné¬
rale de l’article 5. 1 a).
5. CJCE 6 oct. 1976, JDI 1977. 719, obs. J.-M. Bischoff et A. Huet; Rev. crit. DIP 1977.
751, 2e esp., note P. Gothot et D. Holleaux; D. 1977. 616, 2e esp., note G. Droz.
6. CJCE 15 janv. 1987, JDI 1987. 465, obs. J.-M. Bischoff et A. Huet; Rev. crit. DIP 1987.
793, note G. Droz.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 677
1. CJCE 19 févr. 2002, aff. C 256/00, Besix, Rev. crit. DIP 2002. 577, note H. Gaudemet-
Talion.
2. CJCE 6 oct. 1976, Tessili, Rev. crit. DIP 1977. 751, note P. Gothot et D. Holleaux; JDI
1977. 714, obs J.-M. Bischoff et A. Huet; D. 1977. 616, 1er esp., note G. Droz. Solution
reprise plus récemment par CJCE 29 juin 1994, aff. C 288/92, Custom made commercial ltd,
Rev. crit. DIP 1994. 698, note H. Gaudemet-Talion; JDI 1995. 461, obs. A. Huet; CJCE
28 sept. 1999, aff. C 440/97, Groupe Concorde, Rev. crit. DIP 2000. 253, note B. Ancel,
JDI 2000. 547, obs. J.-M. Bischoff.
3. V. cependant CJCE 20 févr. 1997, Les Gravières rhénanes, JDI 1997. 625, obs.
A. Huet.
4. V. Civ. lre, 2 juin 1981, JDI 1983. 395, obs. D. Holleaux, D. 1982. IR 72, obs. B. Audit;
Com. et fin., 18 mars 1997, JDI 1998. 129, obs. A. Huet.
5. V. Civ. lre, 6 févr. 1996, Rev. crit. DIP 1996. 504, note G. Droz; Civ., 8 févr. 2000;
CA Orléans, 17 févr. 2000, Rev. crit. DIP 2000. 473, note H. Muir-Watt; Civ., 27 juin 2000,
678 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
JDI 2001. 137, chron. A. Huet; CA Versailles, 27 juin 2002, RTD com. 2003. 419, obs.
Ph. Delebecque; Civ. lre, 17 juin 2003, Bull. civ. 1, n° 144, RTD com. 2004. 396, obs.
Ph. Delebecque (indemnité de clientèle).
1. V., Paris, 10 nov. 1993, JCP 1994. II. 22314, note B. Audit; RTD com. 1994. 698, note
Dubarry et Loquin; Petites affiches 1995, n° 52, note I. Barrière-Brousse; JDI 1994. 678, note
J.-M. Jacquet; Civ. lre, 6 févr. 1996, préc. ; l’arrêt Custom made préc. de la Cour de justice
consacre cette solution. Adde, depuis, Civ. lre, 4 janv. 1995, D. 1999. 289, note Cl. Witz,
23 janv. 1996, D. 1996. 334, note Cl. Witz, Rev. crit. DIP 1996. 460, note Bureau; Civ. lre,
2 déc. 1997, JDI 1999.185, obs. A. Huet; Civ. lrc, 16 juill. 1998, D. 1999.117, note Cl. Witz;
T. com. Paris, 25 septembre 2001, JDI 2003. 129, note Ph. Kahn.
2. V., H. Gaudemet-Talion, Compétence et exécution des jugements en Europe, LGDJ, 2002,
n° 194; Civ. lre, 11 mars 1997, JDI 1998. 129, obs. A. Huet, Rev. crit. DIP 1997. 585, note
H. Gaudemet-Talion.
3. En particulier depuis l'arrêt précité Groupe Concorde de la CJCE. V. chronique
A. Huet, examinant 6 arrêts de la Cour de cassation rendus en 1999 et 2000, JDI 2001. 133
et s.; adde Civ., 27 juin 2000, JDI 2001. 137, chron. A. Huet.
4. V., Civ. Ve, 3 oct. 2006, D. 2006.IR.2549 à propos de l’action d’un agent commercial
en paiement de l’indemnité de clientèle.
5. V., Civ. lre, 8 févr. 2000 et CA Orléans, 17 févr. 2000, préc.
6. Ainsi, il faudra revenir à la règle de principe de l'article 5.1 a) lorsque, dans un
contrat de vente, les marchandises n’ont pas été livrées et que les parties sont demeurées
DETERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 679
silencieuses sur le lieu de livraison. Sur les différentes difficultés qui peuvent se présenter,
H. Gaudemet-Talion, Compétence et exécution des jugements en Europe, LGDJ, 2002, n° 188
et n° 199 et s.
1. Cf. notamment O. Cachard, La régulation internationale du marché électronique, LGDJ,
2002, n° 618 et s. ; A. Bencheneb, « Commerce électronique et règlement des litiges contrac¬
tuels », JCP Cah. dr. entr. 2002, n° 4, p. 33 et s. Certains auteurs pensent qu’il convient
de transposer ici la solution de l’arrêt Besix de la CJCE du 19 février 2002 précité, n° 936,
note 1 : faute de pouvoir localiser l’obligation en un lieu précis, l’article 5.1 est inappli¬
cable. V., P. Thieffry, Commerce électronique : droit international et européen, Litec, 2002,
n° 501.
2. V., Y. Guyon, Droit des affaires, t. 1, Économica, 2003, n° 839 et s.
3. V. arrêt Kalfelis du 27 septembre 1988 préc., refusant de considérer comme de nature
contractuelle l’action directement exercée par un sous-acquéreur contre le fabricant d’un
produit, confirmé par l’arrêt La Réunion Européenne S.A. du 27 octobre 1998 précité.
V. aussi, CJCE 17 septembre 2002, Rev. crit. DIP 2003. 668, note P. Rémy-Corlay, JDI 2003.
668, obs. A. Huet, Defrénois 2003. 254, obs. R. Libchaber, qualifiant de délictuelle l’action
en responsabilité précontractuelle (engagée pour rupture fautive des négociations contrac¬
tuelles) ; pour la même qualification mais sur le fondement de la convention de Lugano,
CA Paris, 3 avril 2002, JDI 2003. 145, obs. A. Huet.
4. V., CJCE 19 sept. 1995, aff. C 364/93, Marinari, Europe 1995, n°408, note L. Idot et
les références fournies par J.-P. Beraudo,/.-Cl. Europe, fasc. 3020, n°42.
680 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
939 Délits complexes O II peut arriver qu’un fait générateur produise, dès
sa survenance, des conséquences dommageables dans un autre pays.
Cette distorsion entre le lieu du fait et le lieu du dommage est parti¬
culièrement bien illustrée par l’hypothèse de la pollution transfron¬
tière : un déversement ou une émanation toxique prend sa source dans
un État puis se propage dans un autre État où divers préjudices sont
occasionnés. Tel fut le cas dans l’affaire Mines de potasse d'Alsace où un
déversement effectué par une entreprise établie en France dans le Rhin,
se propagea avec celui-ci et causa des dommages aux exploitations
horticoles aux Pays-Bas et en Allemagne. En pareil cas, la Cour de jus¬
tice a admis que le demandeur pouvait saisir aussi bien les juridictions
du pays dans lequel le fait générateur s’était produit que celles du pays
dans lequel le dommage s’était réalisé3.
1. CJCE 10 juin 2004, aff. C 168/02, R. Kronhofer c. M. Maier, Rev. crit. DIP 2005. 326,
note H. Muir Watt à propos d’un dommage financier subi à l’occasion d’opérations spé¬
culatives en bourse réalisées à partir d’un compte de placement.
2. V., CJCE 11 janv. 1990, Dumez France, Rev. crit. DIP 1990. 368, note H. Gaudemet-
Talion; JDI 1990. 497, obs. A. Huet; Cah. dr. eur. 1992. 655, noteTagaras.
3. CJCE 30 nov. 1976, Mines de Potasse d'Alsace, Rev. crit. DIP 1977. 776, note P. Bourel;
D. 1977. 614, note G. Droz; JDI 1977. 628, obs. A. Huet; Europe 1977. 323, note A.-C. Kiss;
dans le même sens, v. CJCE 7 mars 1995, Fiona Shevill, JDI 1996. 543, obs. A. Huet;
Civ. lre, 16 juill. 1997, JDI 1998. 136, obs. A. Huet.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 681
judice réalisée sur leur territoire, alors que le tribunal du lieu du fait
générateur a une compétence globale pour connaître de l’ensemble des
préjudices. La centralisation du contentieux peut ainsi toujours être
réalisée par la saisine de ce dernier1.
1. V. CJCE 7 mars 1995, Fiona Shevill, JDI 1996. 543, obs. A. Huet; Rev. crit. DIP 1996.
487, note P. Lagarde; Europe 6/1995. chron. n° 7, obs. L. Idot; RTD eur. 1995. 611, note
Gardenes Santiago.
2. Civ. lre, 9 déc. 2003, Rev. crit. DIP 2004. 632, note O. Cachard, JDI 2004. 872, note
A. Huet, D. 2004. 276, obs. C. Manara, JCP 2004. II. 10055, note C. Chabert, RTD com.
2004. 281, obs. F. Pollaud-Dulian. En l’espèce, pour considérer que l’objet de la contrefaçon
a été diffusé en France, la Cour s’est fondée sur la simple accessibilité du site Internet en
France. Dans le même sens déjà, CA Orléans, 6 mai 2003, Rev. crit. DIP 2004. 139, note
H. Gaudemet-Talion, JDI 2004. 193, obs. A. Huet (à propos d’une action en concurrence
déloyale pour commercialisation sur Internet de produits fabriqués en violation du savoir-
faire et des secrets de fabrication relevant de l’art. 46 al. 3 NCPC; pour la réparation du
préjudice subi hors de France, la compétence a été fondée sur l’art. 14 C. civ.). Certains
juges du fond se montrent plus exigeants en recourant à la théorie de la focalisation qui
consiste à admettre cette compétence seulement si l’opérateur a dirigé son activité vers cet
État, notamment par l’emploi de sa langue. Par exemple, TGI de Paris, 11 février 2003 et
11 mars 2003, JDI 2004. 491, note J.-S. Bergé.
3. À propos de l’action préventive d’une association de protection des consommateurs
demandant l’interdiction de l’utilisation, par un commerçant, de clauses abusives dans ses
contrats avec les consommateurs : CJCE 1er oct. 2002, aff. C 167/00, Henkel, D. 2002.
3200, note G. Gaba, Rev. crit. DIP 2003. 682, note P. Rémy-Corlay, JDI 2004. 903, note
F. Leclerc.
682 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CJCE 22 nov. 1978, Somafer, JDI 1979. 672, obs. A. Huet; D. 1979. IR. 458, obs.
B. Audit.
2. V., Com., 25 janv. 2000, Rev. crit. DIP 2000. 462, note M.-E. Ancel.
3. CJCE 6 avr. 1995, Rev. crit. DIP 1995. 774, note G. Droz; Europe 6/1995, n°240, note
L. Idot.
4. G. Droz, note préc., p. 776.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 683
1. CJCE 15 févr. 1989, aff. 32/88, Six Constructions; Soc., 21 janvier 2004, Bull. civ. V,
n° 22.
2. Sur cette hypothèse, v. H. Gaudemet-Talion, op. cit., n° 302.
3. Préc.
4. À propos d’un salarié embauché en France qui effectuait son travail à bord d’un
navire hors du territoire d’un pays déterminé : Soc. 29 avril 2003, Dr. soc. 2003. 893, obs.
P. Chaumette.
5. Sur cette notion ainsi que sur la directive n° 96/71 en général, v. supra, n° 711.
6. La règle de compétence a été transposée en droit français à l’art. R. 517-1-1 C. trav.
686 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 1. Droit commun
951 La première question à évoquer est celle de la licéité des clauses attri¬
butives de juridiction. Mais, même lorsque de telles clauses sont licites,
il reste encore à s’assurer de leur efficacité.
quelques hésitations, la chambre sociale a fait une application fidèle des arrêts de 1974. Par
exemple, Soc. 7 mai 1987, Rev. crit. DIP 1988. 78, note H. Gaudemet-Talion. En revanche,
la première chambre civile s’en est éloignée pour admettre la licéité de la clause, dès lors que
le travail ne s’exécute pas en France : Civ. lre, 16 juin 1987 et 8 mars 1988,/DI 1988. 1041,
note A. Lyon-Caen. Finalement, au début des années 1990, la chambre sociale s’est rangée
à cette interprétation : Soc. 30 janv. 1991, Bull. civ. V, n° 41. V. aussi, P. Mayer, « Les clauses
relatives à la compétence internationale insérées dans les contrats de travail », in Mélanges
D. Holleaux, Litec, 1990, p. 269 et s.
1. V. cependant, pour de nouvelles incertitudes dans la position de la chambre sociale ;
Soc. 24 avril 2001, pourvoi n° 98-46424, inédit, marquant un retour à la position des arrêts
de 1974. Et de manière plus étonnante, Soc. 21 janvier 2004, Rev. crit. DIP 2004. 644, note
F. Jault-Seseke, D. 2004. Somm. 2187, obs. M.-C. Escande-Varniol, admettant la licéité de
la clause dans un contrat initialement exécuté à l’étranger, mais où la salariée a été affectée
en France par la suite (il est vrai que les juges du fond avaient estimé que le contrat s’exé¬
cutait à l’étranger, malgré l’affectation de l’hôtesse de l’air à la base de Roissy). V. aussi Soc.
16 mars 2004, Bull. civ. V, n° 88 (hypothèse d’une clause attribuant compétence aux juri¬
dictions françaises alors que le travail était exécuté à l’étranger). Adde, M.-A. Moreau, note
sous CE, 29 déc. 2004, JDI 2006. 182.
2. V. Com. 30 mars 1993, Rev. crit. DIP 1993. 680, note H. Gaudemet-Talion; Rev.
marit. fr. 1993. 294, note Y. Tassel ; Civ. lre, 12 mai 2004, Bull. civ. I, n° 129, RTD civ. 2004.
553, obs. R. Perrot.
690 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lrc, 23 oct. 1990, Bull. civ. I, n° 219; Civ. lre, 24 févr. 1998, Rev. crit. DIP 1999.
310, note A. Sinay-Cytermann.
2. V., H. Gaudemet-Talion, note sous TGI Paris, 10 juill. 1991, Rev. crit. DIP 1993. 54,
jugement particulièrement critiquable en ce qu’il refusa de reconnaître effet à une clause
attributive de juridiction incluse dans un contrat de prêt dont l’annulation est alléguée par
Tune des parties.
3. Corn. 19 déc. 1978, JDI 1979. 366, note H. Gaudemet-Talion; Rev. crit. DIP 1979.
617, note A. Huet; D. 1979, IR. 341, obs. B. Audit. Contra CA Paris, 10 oct. 1990, Rev. crit.
DIP 1991. 605, note critique H. Gaudemet-Talion.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 691
1. En France, l’art. 42, al. 3 NCPC permettra de résoudre le problème pour le cas où
aucun des chefs de compétence territoriale retenus par ailleurs ne permettrait de détermi¬
ner le tribunal spécialement compétent.
2. V., Com. 25 nov. 1997, Rev. crit. DIP 1998. 98, rapport j.-P. Rémery; v. cependant
Civ. lre, 16 mars 1999, Rev. crit. DIP 2000. 219, note B. Ancel.
3. V., Paris, 10 oct. 1990, Rev. crit. DIP 1991. 605, note H. Gaudemet-Talion.
4. Civ. lre, 3 déc. 1991, Rev. crit. DIP 1992. 340, note H. Gaudemet-Talion.
5. Pour la transmission de la clause, v. infra, les développements relatifs aux clauses
compromissoires, n° 1088 et s.
6. Sur cette question, v. supra, n° 611.
692 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
de l’article 23. Il n’est pas exigé que cette partie soit en position de
défendeur; la position procédurale est indifférente1.
Néanmoins, le règlement n’est pas resté silencieux sur le cas des
clauses conclues entre des parties dont aucune n’est domiciliée sur le
territoire d’un État membre et qui désignent les juridictions d’un État
membre. Dans ce cas, l’article 23, alinéa 3 décide que les tribunaux des
États membres non désignés par la clause « ne peuvent connaître du
différend tant que le tribunal ou les tribunaux désignés n’ont pas
décliné leur compétence ». La clause ne reste donc pas lettre morte aux
yeux du règlement bien que le litige ne soit pas à proprement parler
intégré à la Communauté. Il dépendra du tribunal désigné de décider
si, en vertu de son droit commun, la clause doit être suivie d’effet. En
cas de réponse positive, aucun tribunal d’un autre État membre ne
devra se déclarer compétent.
La Cour de justice n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer
expressément sur le point de savoir si le domicile pris en considération
doit l’être à la date de conclusion de la clause ou à la date d’introduc¬
tion de l’instance2. Les opinions sont partagées. La nature contrac¬
tuelle de la clause imposerait au minimum de ne pas priver d’effet une
clause souscrite à une date à laquelle la condition de domicile était
réalisée, même si celle-ci ne l’est plus au moment du procès. Mais il ne
serait pas inconcevable d’étendre le bénéfice de l’article 23 au cas où
aucune des parties n’ayant rempli la condition de domicile au moment
de la conclusion du contrat^ l’une au moins d'entre elles serait domi¬
ciliée sur le territoire d’un État membre au moment de l’introduction
de l’instance.
tional de la situation qui s’apprécie, pour des motifs de sécurité juridique, au moment de la
conclusion de la clause attributive de juridiction ».
1. Comp. J.-P. Beraudo, qui semble dubitatif sur ce point, J.-Cl. Europe, fasc. 3010,
n°39. Dans son arrêt précité du 4 octobre 2005, la première chambre civile a conclu au
caractère interne de la situation. En l’espèce, un contrat de sous-traitance avait été conclu
entre une société française et une société allemande pour la réalisation, par cette dernière,
d une construction sur le territoire français au profit de sociétés françaises. L’opération
devait être exécutée par l’intermédiaire de l’établissement français de la société allemande
lequel est devenu une société de droit français pour la poursuite de ces activités. La clause
attributive de juridiction insérée dans le contrat désignait un tribunal français. La Cour a
déduit de l’ensemble de ces éléments que « dans la commune volonté des parties, la situa¬
tion n’avait pas de caractère international ».
2. Une règle protectrice du défendeur domicilié au Luxembourg figure à l’art. 63. 2
régi.
3. V„ CJCE 14 déc. 1976, ColzaniJDI 1977. 734, obs. J.-M. Bischoff; Rev. crit. DIP 1977.
585, note E. Mezger; D. 1977, IR. 349, obs. B. Audit.
696 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., CJCE 19 juin 1984, aff. 71/83, Tilly Russ, JDI 1985. 159, obs. J.-M. Bischoff, Rev.
crit. DIP 1985. 385, note H. Gaudemet-Talion; pour un exemple, v. Civ. lre, 9 janv. 1996,
Rev. crit. DIP 1996. 730, lre esp., note H. G. T.
2. V. CJCE 24 déc. 1976, SegouraJDI 1977. 734, obs J.-M. Bischoff; Rev. crit. DIP 1977.
734, note E. Mezger; D. 1977, IR. 349, obs. B. Audit.
3. V. arrêt Tilly Russ préc., attendu n° 18.
4. V., Civ. Ve, 9 janv. 1996, JDI 1997. 173, obs. A. Huet.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 697
1. V., CJCE 20 févr. 1997, Les Gravières rhénanes, Rev. crit. DIP 1997. 563, note H. Gau¬
demet-Talion, JDI 1997. 625, obs. A. Huet; CJCE 16 mars 1999, Trasporti Castelletti, Rev.
crit. DIP 1999. 559, note H. Gaudemet-Talion, JDI 2000. 528, obs. A. Huet.
2. CJCE arrêt Trasporti Castelletti préc.
3. V., CJCE arrêt Trasporti Castelletti, préc., 36, Rev. crit. DIP 1999. 569 : « 11 appartient
donc au juge national de se référer aux usages commerciaux dans la branche considérée du
commerce international pour déterminer si, dans l’affaire dont il est saisi, la présentation
matérielle de la clause attributive de juridiction, en ce compris la langue dans laquelle elle
est rédigée, et son insertion dans un formulaire préétabli non signé par la partie étrangère
à son établissement sont conformes aux formes admises par ces usages ».
4. V. cependant, semblant se passer du recours à la loi applicable CJCE 27 févr. 1997,
JDI 1998. 579, obs. J.-M. Bischoff.
698 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., CJCE 10 mars 1992, Powell Duffryn, JDI 1993. 474, obs. J.-M. Bischoff, Rev. crit.
DIP 1992. 528, note H. Gaudemet-Talion.
2. V., H. Gaudemet-Talion, op. cit., n° 148.
3. V., Civ. lre, 12 déc. 1989, Rev. crit. DIP 1990. 58, note H. Gaudemet-Talion, JDI 1991.
158, obs. A. Huet, à propos d’un contrat d’agence commerciale suivi d’un contrat de
consultation et d’assistance commerciale; Com. 27 févr. 1996, Rev. crit. DIP 1996. 736,
note H. Gaudemet-Talion, à propos d’un contrat-cadre suivi de contrats d’application;
Civ. lre, 5 janvier 1999, JDI 2000. 75, 2e esp., chron. A. Huet, dans l’hypothèse d’une plu¬
ralité de défendeurs.
4. V., CJCE 17 janv. 1980, Zelger, Rev. crit. DIP 1980. 387, note E. Mezger; JDI 1980.
435, obs. A. Huet.
5. Dans sa première version, la convention de Bruxelles ne comportait aucune
règle spécifique sur les clauses attributives contenues dans les contrats de travail. Elles
étaient donc assez largement admises, v. CJCE 13 nov. 1979, Sanicentral, JDI 1980. 429, obs.
A. Huet.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 699
1. CJCE 3 juill. 1997, aff. C 269/95, Francesco Benincasa, JDI 1998. 581, obs. J.-M. Bis-
choff; Civ. lrc, 19 mars 2002 (deux arrêts), JCP 2002. II. 10199, note P. Guez, JDI 2003.
146, obs. A. Huet.
2. CJCE 14 déc. 1976, aff. 24/76, Colzani, JDI 1977. 734, obs, J.-M. Bischoff; Rev. crit.
DIP 1977. 585, note E. Mezger; D. 1977, IR. 349, obs. B. Audit; CJCE 14 déc. 1976, aff.
25/76, Segoura,JDI 1977. 734, obs J.-M. Bischoff; Rev. crit. DIP 1977. 734, note E. Mezger;
D. 1977, IR. 349, obs. B. Audit; CJCE 9 nov. 1978, aff. 23/78, Glacetal, Rev. crit. DIP 1981.
136, note H. Gaudemet-Talion; JDI 1979. 663, obs. A. Huet. Dans l’hypothèse d’une plu¬
ralité de défendeurs, les juridictions françaises avaient estimé, pendant un temps, que la
clause ne faisait pas obstacle à la compétence du for des codéfendeurs (art. 6. 1°; v. Civ. lre,
2 mars 1999, JDI 2000. 75, obs. A. Huet), une interprétation qui semblait contraire à la
jurisprudence de la Cour de justice, et qui a finalement été abandonnée par Civ. lre, 20 juin
2006, pourvoi n° 05-16706, JCP 2006, act. 320, D. 2006. IR. 1841, obs. X. Delpech.
700 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 12 juillet 1982, JDI 1983. 405, note D. Holleaux, Rev. crit. DIP 1983. 658,
note P. Lagarde, JCP 1983. II. 20015, note P. Bourel, D. 1983. IR. 145, obs. B. Audit;
Civ. Ve, 18 oct. 1989, JDI 1991. 155, obs. A. Huet; D. 1989, IR. 283; Civ. lre, 6 janv. 2004,
Bull. civ. I, n° 1, RTD civ. 2004. 553, obs. R. Perrot.
2. CJCE 9 déc. 2003, aff. C 116/02, Gasser, Rev. crit. DIP 2004. 444, note H. Muir Watt,
JDI 2004. 641, obs. A. Huet, D. 2004. 1046, note C. Bruneau. V. aussi, sur cet arrêt,
T. C. Hartley, « Choice-of-court agreements, lis pendens, human rights and the realities of
international business : réfactions on the Gasser case », in Mélanges P. Lagarde, Dalloz,
2005, p. 383 et s.
3. V. récemment, N. Dorandeu, « La transmission des clauses attributives de compé¬
tence en droit international privé », JDI 2002. 1001 et s.
4. CJCE 14 juill. 1983, aff. 201/82, Gerling, Rev. crit. DIP 1984. 146, note H. Gaude¬
met-Talion; JDI 1983. 843, obs. A. Huet.
DÉTERMINATION DE LA JURIDICTION COMPÉTENTE 701
1. CJCE 19 juin 1984, aff. 71/83, Tilly Russ, JDI 1985. 159, obs. J.-M. Bischoff, Rev. crit.
DIP 1985. 385, note H. Gaudemet-Talion.
2. V. par exemple, Com. 9 oct. 1984, JCP 1984. IV. 344.
3. Civ., 25 nov. 1986, Rev. crit. DIP 1987. 396, note H. Gaudemet-Talion.
4. V., Ph. Delebecque, « L’appréhension judiciaire des groupes de contrats », in Le juge
et l’exécution du contrat, PU d’Aix-Marseille, 1993, p. 117 et s., spéc. n° 12 et s.
5. V. supra, n° 935.
6. V., A. Huet, obs. sous Com. 18 oct. 1994, JDI 1995. 143, spéc. p. 145.
7. V., Com. 18 oct. 1994, JDI 1995. 143, obs. A. Huet, Rev. crit. DIP 1995. 721, note
A. Sinay-Cytermann; Com. 23 mars 1999, Rev. crit. DIP 2000. 224, note F. Leclerc.
8. V., Civ. 2e, 6 juill. 1999, Rev. crit. DIP 2000. 67, note E. Pataut.
702 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
CHAPITRE 2
ACTION EN JUSTICE
ET IMMUNITÉS DES ÉTATS
ET DES ORGANISATIONS
INTERNATIONALES
NOTIONS GÉNÉRALES
SECTION 1.
SUR LES IMMUNITÉS
1. V., M. Cosnard, « La soumission des États aux tribunaux internes, face à la théorie
des immunités des États», préf. B. Stem, Paris, Pedone, 1996; 1. Pingel-Lenuzza, «Les
immunités des États en droit international », Bruxelles, Bruylant, 1998 ; P. Bourel, « Conflits
de juridictions. Immunités de juridiction et d’exécution », J.-Cl. Dr. Int., Fasc. n° 581-50,
1993; C. Kessedjian, «Immunités», Rep. Intern. Dalloz; Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de
Vareilles-Sommières, Droit international privé, Dalloz, 2004, n°469 et s.
2. Civ. 22 janv. 1849, Gouvernement espagnol c. Casaux, D. 1849. 1. 9, S. 1849. 1. 81
affirmant pour la première fois l’immunité au profit d’un État étranger.
3. V., CE, Ass., 15 oct. 1993, JDI 1994. 89, note J. Chappez, statuant sur le recours
formé par un État étranger contre une décision du gouvernement français en matière d’ex¬
tradition.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 703
1. Civ. lre, 2 nov. 1971, Bull. civ. I, n° 278, Rev. crit. DIP 1972. 310, note P. Bourel; JCP
1972. II. 16969, note D. Ruzié se référant à la « courtoisie internationale » qui impose qu’il
ne soit pas porté atteinte à la souveraineté et l’indépendance d’un État étranger. De même,
dans l’affaire Banque du Japon, jugée le 16 mars 1974 (JDI 1974. 842, note Ph. Kahn), la
cour d’appel de Paris affirme que l’immunité « a pour fondement la souveraineté et l’indé¬
pendance des États auxquels la courtoisie internationale impose qu’il ne soit pas porté
atteinte ». On retrouve la même analyse dans plusieurs arrêts récents de la CEDH, spéc.
l’arrêt du 21 novembre 2001, Al-Adsani c. Royaume-Uni, req. n° 35763/97, § 54 : « La Cour
estime que l’octroi de l’immunité souveraine à un Etat dans une procédure civile poursuit
le but légitime d’observer le droit international afin de favoriser la courtoisie et les bonnes
relations entre Etats grâce au respect de la souveraineté d’un autre État », JDI 2002. 273,
obs. O. de Frouville, JCP 2002. I. 105, chron. F. Sudre, RGDIP 2002. 893, note I. Pingel,
D. 2003.1246, obs. J.-F. Flauss. V. aussi CEDH 21 novembre 2001, Fogarty c. Royaume-Uni,
req. n° 37112/97, in F. Sudre, J.-P. Marguénaud et ai, Grands arrêts CEDH, PUF, 2005,
n° 26, et CEDH, 21 novembre 2001, McElhinney c. Irlande, req. n° 31253/96. Sur le recours
à la notion de courtoisie internationale, v. B. Hassane, Pouvoir de juridiction et État étranger,
thèse, Toulouse, 1996.
2. V., P.-M. Dupuy, Droit international public, Dalloz, 2004, n° 114 et s. ; Nedjar, « Ten¬
dances actuelles du droit international des immunités des États », JDI 1997. 59 et s.; R. de
Gouttes, « L’actualité de l’immunité de juridiction des États étrangers », D. 2006. 606.
V. Civ. lre, 6 juill. 2000, État du Qatar, JDI 2000. 1054, note I. Pingel-Lenuzza, Rev. arb.
2001.114, lre esp., note Ph. Leboulanger; Ch. mixte, 20 juin 2003, École saoudienne de Paris,
Rev. crit DIP 2003. 647, note H. Muir Watt, JDI 2003. 1124, comm. I. Pingel; Civ. lre,
2 juin 2004, RFA et Soc. BMW, Rev. crit. DIP 2005. 75, note H. Muir Watt.
704 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1978. Mais tel n’est pas le cas de la France dont les règles sont forgées
par la jurisprudence. La tendance générale qui se dégage de l’évolution
contemporaine est que l’immunité des États n’est plus perçue comme
absolue, mais limitée à la seule mesure nécessaire au respect de la
souveraineté des États étrangers. Ce phénomène de rétrécissement
des immunités s’est produit notamment sous l’effet d’une prise en
considération croissante des droits fondamentaux, même si des consi¬
dérations d’opportunité économique ne sont pas étrangères à cette
évolution1.
1. Civ. lre, 2 nov. 1971, République du Viêt-Nam Nord, Rev. crit. DIP 1972. 310, note
P. Bourel.
2. Civ. lre, 27 avr. 2004, RFA et Soc. BMW, préc. L’immunité a été accordée à la Répu¬
blique fédérale d’Allemagne pour des actes commis par le Troisième Reich. Solution confir¬
mée par Civ. lre, 3 janv. 2006, inédit, pourvoi n° 04-47504 (également à propos du Troi¬
sième Reich). En revanche, l’immunité a été refusée à la République fédérale de Yougoslavie
pour les actes de la République socialiste fédérative de Yougoslavie au motif de la disparition
de cette dernière : Civ. lre, 12 oct. 1999, JDI 2000. 1036, note M. Cosnard.
3. V., Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommières, op. cit., n° 474.
4. V., P. Lagarde, « Une notion ambivalente : L’émanation de l’État nationalisant », in
Études Cl.-A. Colliard, Pedone, 1984, p. 539 et s. Pour des exemples récents, v. Civ. lre,
4 janv. 1995.649, JDI 1995.649, note A. Mahiou et Civ. lre, 15 juill. 1999, JDI 2000. 45,
note Cosnard.
5. Pour un organisme bancaire, v. Civ. lre, 3 nov. 1952, Rev. crit. DIP 1953. 423, note
Ch. Freyria; JDI 1953. 654, note JBS; Civ. Ve, 19 mai 1976, Banque du Japon, Rev. crit. DIP
1977. 359, note H. Batiffol; JDI 1976. 687, note Ph. Kahn.
6. Civ. lre, 25 févr. 1969, Soc. Levant Express Transport, Rev. crit. DIP 1970. 102, note
P. Bourel; B. Ancel, Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence française de droit inter¬
national privé, 5e éd., Dalloz, 2006, n°47.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 709
B. La nature de l’acte
977 La nature de l'acte est l’élément décisif O La raison profonde de l’oc¬
troi de l’immunité de juridiction aux États étrangers conduit à accorder
le bénéfice de celle-ci chaque fois que l’État a agi en tant que souve¬
rain2. Décider le contraire reviendrait à vider l’immunité de juridiction
de son sens. Mais à partir du moment où l'État a cessé de se cantonner
à son rôle d’État gendarme pour intervenir massivement dans des acti¬
vités laissées jusqu’alors à la société marchande, il devenait choquant
— et même parfois gênant pour lui — de le laisser continuer à bénéficier
d’une protection qui n’avait pas été instituée dans ce but3. L’extension
du privilège aux nouvelles fonctions assurées par l’État ou ses émana¬
tions ne se justifiait pas4.
La jurisprudence se réfère à un double critère alternatif inspiré de la
distinction entre les actes d’autorité, accomplis jure imperii, et les actes
1. Civ. lre, 19 mai 1976, préc. Pour des exemples récents, v. Civ. lre, 28 mai 2002,
Banque centrale de Tunisie, Rev. crit. DIP 2003. 296, note H. Muir Watt; Civ. lre, 27 avr.
2004, Rev. crit. DIP 2005. 75, note H. Muir Watt (à propos d’une collision en vol entre un
parachutiste français et un soldat de l’armée américaine lors d’un stage d’entraînement
financé par l’armée américaine et effectué sous son commandement) ; Crim. 23 nov. 2004,
Malta Maritime Authority, Rev. crit. DIP 2005. 468, note I. Pingel; Civ. lre, 14 déc. 2004,
Agence pour la sécurité de la navigation en Afrique, Rev. crit. DIP 2005. 468, note I. Pingel,
D. 2005. 1197, note P. Courbe et H. Chanteloup.
2. V., Civ. lre, 4 févr. 1986, Rev. crit. DIP 1986. 718, note P. Mayer; JDI 1987. 112, note
J.-M. Jacquet; comp. TGI Paris, 7 févr. 1991, JDI 1991. 406, note A. Mahiou.
3. V., J. Combacau et S. Sur, Droit international public, Montchrestien, 2004, p. 245
et s.
4. B. Ancel et Y. Lequette, Les grands arrêts, op. cit., n° 47, § 2.
710 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V. refusant l’immunité de juridiction, par exemple, Civ. lre, 12 juin 1990, Rev. crit.
DIP 1991. 140, 2e esp., note P. Bourel (licenciement d'un journaliste par une agence de
presse qualifiée d’émanation de l’État koweïtien : acte de gestion). Le contentieux des licen¬
ciements de personnel d’ambassade ou de consulat a donné lieu à une jurisprudence abon¬
dante : Civ. lre, 7 janv. 1992, Bull. civ. I, n°3 et sur renvoi, CA Versailles ch. soc. réunies,
14 juin 1995, JDI 1996. 102, note Ch. Byk (infirmière secrétaire médicale de l’ambassade :
acte de gestion); dans le même sens que ce dernier arrêt, Cour suprême des Pays-Bas,
22 déc. 1989, Netherlands int. law review 1994. 115; Soc. 2 avr. 1996, Petites affiches 1997,
n°4, p. 20, note S. Rouquié (adjoint au service de presse de l’ambassade : acte de gestion) ;
Civ. lre, 11 févr. 1997, Rev. crit. DIP 1997. 332, note H. Muir Watt (concierge de l’ambas¬
sade : acte de gestion); Soc. 10 nov. 1998, D.1999. 157, note M. Menjucq (infirmière
secrétaire médicale de l’ambassade : acte de gestion) ; CA Paris, 26 novembre 1998, D.
1999, Somm. 170, obs. Lattes; Soc. 14 déc. 2005, inédit, pourvoi n° 03-45.973 (employée
principale du bureau du service national du consulat : acte de gestion).
2. Ch. mixte, 20 juin 2003, École saoudienne de Paris, préc.
3. V., R. de Gouttes, « L’actualité de l’immunité de juridiction des États étrangers »,
D. 2006. 606, spéc. p. 609. Toutefois, l’analyse ne se trouve pas encore clairement confir¬
mée par les arrêts plus récents.
4. Civ. lre, 14 nov. 1995, Hintermann, Rev. crit. DIP 1996. 337, note H. Muir Watt, JDI
1997. 141, note C. Byk (Union de l’Europe occidentale) ; Soc. 5 juin 2001, Eutelsat, Bull. civ. V,
n° 204; Soc. 4 mars 2003, inédit, pourvoi n° 01-41.099 (Agence intergouvemementale de
la francophonie); Soc. 30 sept. 2003, JCP 2004. IL 10102, note J.-G. Mahinga (Union
latine), censurant des juges du fond qui avaient transposé le critère de la « responsabilité
particulière dans l’exercice du service public », du domaine des contrats de travail conclus
par les États, à celui des contrats conclus par les organisations internationales.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 713
1. Parfois même, l’affectation découle avec évidence de la nature du bien. Tel est le cas,
par exemple, des navires ou aéronefs militaires.
2. Tel est notamment le cas des créances de sommes d’argent.
3. Civ. lre, 14 mars 1984, Eurodif, JDI 1984. 598, note B. Oppetit, Rev. crit. DIP 1984.
644, note J.-M. Bischoff, JCP 1984. II. 20205, note H. Synvet, Les grands arrêts, op. cit.,
n° 65.
4. Pour une confirmation récente : Civ. lre, 25 janv. 2005, D. 2005. 616, concl.
J. Sainte-Rose, Rev. crit. DIP 2006. 123, note H. Muir Watt : « selon les principes de droit
international relatifs aux immunités, les Etats étrangers bénéficient, par principe, de l’im¬
munité d’exécution; qu’il en est autrement lorsque le bien saisi se rattache, non à l’exercice
d’une activité de souveraineté, mais à une opération économique, commerciale ou civile
relevant du droit privé qui donne lieu à la demande en justice ». En l’espèce, le litige trouvait
son origine dans le non-paiement par un État étranger de charges de copropriété. Le syndi¬
cat des copropriétaires avait diligenté une procédure de saisie immobilière sur les lots de
copropriété en cause. L’immunité d’exécution a été refusée puisque l’État avait acquis les
biens pour y loger son personnel diplomatique, et non pas pour affecter les locaux aux
services de l’ambassade ou à la résidence de l’ambassadeur.
5. Ces considérations montrent que l’affectation de la créance saisie est définie à partir
de l'origine de cette créance, et non pas de sa destination, comme le soulignent B. Ancel et
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 715
Y. Lequette, Les grands arrêts, op. cit., n° 65-66. 8, du moins lorsque l’affectation de la
créance est inexistante ou impossible à établir : P. Mayer, V. Heuzé, Droit international privé,
Montchrestien, 2004, n° 327.
1. V., J.-M. Bischoff, note préc.; Ph. Théry, note sous CA Paris, 9 juill. 1992, Rev. arb.
1994. 133. Sur la question du lien éventuel entre la créance et l’activité du débiteur en
France, v. B. Audit, Droit international privé, Économica, 2006, n°414.
2. CA Paris, 12 déc. 2001, Creighton c. Qatar, D. 2002. IR. 617, Rev. arb. 2003. 417, note
Ph. Leboulanger.
3. V. art. 22 al. 3 de la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diploma¬
tiques; art. 25 al. 3 de la convention de New York du 8 décembre 1969 sur les missions
spéciales; CA Paris, 10 août 2000, Noga, JDI 2001. 116, note I. Pingel-Lenuzza, Rev. arb.
2001, 2e esp., 115, note Ph. Leboulanger, D. 2001. 2157, note E. Fongaro, RTD com. 2001.
410, obs. E. Loquin; sur cet arrêt aussi G. de la Pradelle, « Blocage des comptes en banque
des missions diplomatiques et saisie d’un navire d’État affecté à une personne publique »,
Gaz. Pal. n°spécial 10 ans, 12 juin 2001, p. 22 et s.
4. Civ. lre, 25 avril 2006, pourvoi n° 02-17.344, D. 2006. IR. 1335, obs. I. Gallmeister,
cassant l’arrêt de la CA Paris, 20 févr. 2002, Rev. crit. DIP 2002. 746, note M. Audit, Gaz.
Pal. 2002. jur. 987, doctr. 1169, note G. de la Pradelle, qui avait statué sur renvoi après
cassation de Civ. lre, 15 juill. 1999, JDI 2000. 45, note M. Cosnard. En l’espèce était en
cause un marché de construction conclu par l’État de l’Irak et le litige opposait l’Irak à un
sous-traitant français qui avait pratiqué des saisies-arrêts sur des fonds détenus en France
pour le compte de l’Irak par plusieurs banques.
5. Civ. lre, 1er oct. 1985, Rev. crit. DIP 1986. 527, note B. Audit; JDI 1986. 170, note
B. Oppetit; )CP 1986. II. 20566, concl. Gulphe, note Synvet; Les grands arrêts, op. cit., n° 66.
716 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. V., TGI Brest, 24 juill. 2000, Gaz. Pal n° spécial 10 ans, 10 au 12 juin 2001, p. 35. Sur
le refus de la Cour de cassation d’adopter une conception extensive de l’« émanation de
l’État», v. Civ. lre, 21 juill. 1987, Benvenuti-Bonfant, JDI 1988. 108, note Ph. Kahn;
Rev. crit. DIP 1988. 347, M. Remond-Gouilloud; Civ. lre, 6 juill. 1988, JDI 1989. 376, note
Ph. Kahn; Civ. lre, 4 janv. 1995, JDI 1995. 649, note A. Mahiou, Rev. arb. 1997. 269, note
E. Gaillard; Civ. lre, 15 juill. 1999, préc.; Civ. lre, 12 mai 2004, Bull. civ. I, n° 135. Comp.
avec l’assouplissement récent de la position de la cour d’appel de Paris constatant l’absence
d’autonomie réelle de l’organisme public à l’égard de l’Etat étranger, CA Paris, 23 janv.
2003, Société Nationale des Pétroles du Congo c. Société Connecticut Bank of Commerce
(1er arrêt), n° rép. gén. 2002/03187, et Société Nationale des Pétroles du Congo c. S.A. Walker
International Holdings Ltd. (2e arrêt) ; CA Paris, 8e chambre, section B, 3 juillet 2003, Société
Nationale des Pétroles du Congo c. S.A. Walker International Holdings Ltd., n° rép. gén.
2002/03185, qualifiant la Société Nationale des Pétroles du Congo, un établissement public
à caractère industriel et commercial doté de la personnalité morale et de l’autonomie finan¬
cière, « d’émanation de la République du Congo », ce qui autorisait la saisie de ses biens par
un créancier de l’État du Congo. Dans le même sens, CA Paris, 8e ch., sect. B, 22 janv. 2004,
Winslow Bank <Sc Trust Company Ltd. c. Société Nationale des Hydrocarbures, n° rép. gén.
2002/20287, qui admet la saisie, par un créancier de l’État du Cameroun, de biens appar¬
tenant à la Société nationale des hydrocarbures, un établissement public à caractère indus¬
triel et commercial camerounais doté de la personnalité morale et de l’autonomie finan¬
cière, aux motifs que la « S.N.H. ne dispose que d’une apparence d’autonomie juridique et
financière par la propriété d’un patrimoine propre, sans consistance réelle et sans indépen¬
dance suffisante pour prendre des décisions autonomes, dans son intérêt propre, et pour
être considérée comme bénéficiant d’une autonomie de droit et de fait à l’égard de l’État du
Cameroun permettant de dire qu’elle est effectivement une personne morale distincte ».
Mais, refusant la qualification « d’émanation de l’État étranger », CA Paris, 8e ch., sect. B,
1er sept. 2005, Central Bank oflrak c. Hochtief Aktiengesellschaft, n° rép. gén. 04/14837.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 717
1. Civ. lre, 28 oct. 2003, Union latine c. Mme Refievna, Rev. crit. DIP 2004. 773, note
S. Clavel, JCP 2004. II. 10102, note J.-G. Mahinga, accordant le bénéfice de l’immunité
d’exécution à l’occasion de saisies-attributions pratiquées par une salariée de l’organi¬
sation internationale ayant obtenue la condamnation de cette dernière à des dommages-
intérêts pour licenciement abusif.
2. V., Civ. lre, 25 févr. 1969, préc.; adde P. Hébraud, note Rev. crit. DIP 1963. 807;
H. Motulsky, note Rev. crit. DIP 1969. 537.
3. V., P. Hébraud, note préc.; F. Terré, Rev. crit. DIP 1963. 598; Ph. Théry, Pouvoir juri¬
dictionnel et compétence (Étude de droit international privé), thèse dactyl. Paris II, 1981, p. 223
et s. ; M. Çosnard, La soumission des États aux tribunaux internes (Face à la théorie des immu¬
nités des États), Pédone, 1996, p. 39 et s.
4. V., Civ. lre, 20 oct. 1987, Rev. crit. DIP 1988.727, note P. Mayer; adde Civ. lre, 4 févr.
1986, préc. et en matière d’immunités d’agents diplomatiques, Civ. lre, 15 avr. 1986, Rev.
crit. DIP 1986. 723, note G. Couchez; Civ. lre, 14 nov. 1995, Rev. crit. DIP 1996. 337, note
H. Muir-Watt. Aujourd’hui, cette jurisprudence est clairement établie et régulièrement
confirmée : v. Soc. 5 juin 2001, Bull. civ. V, n° 204; Civ. lre, 28 mai 2002, Rev. crit. DIP
2003. 296, note H. Muir Watt; Civ. lre, 22 oct. 2002, Rev. crit. DIP2003. 299, note H. Muir
Watt; Soc. 4 mars 2003, inédit, pourvoi n° 01-41.099; CA Paris, 7 oct. 2003, Rev. crit. DIP
2004. 409, note M. Audit; Civ. lre, 14 déc. 2004, Rev. crit. DIP 2005. 468, note I. Pingel.
718 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
œuvre par une fin de non-recevoir et non par une exception d’incom¬
pétence1.
À partir de cette analyse de la nature de l’immunité, on s’est demandé
si celle-ci doit être relevée d’office par le juge, solution qu’au demeu¬
rant l’article 92 NCPC ne condamne pas dans la mesure où l’on se
trouve bien dans un cas où l’affaire « échappe à la connaissance de la
juridiction française ». La jurisprudence est peu claire. Un arrêt de la
Cour de cassation avait énoncé que l'immunité « ne peut être invoquée
que par l’État qui se croit fondé à s'en prévaloir lorsqu’il n’y a pas
renoncé », laissant planer un doute sur l’étendue de l’obligation faite
au juge lorsque l’État ne manifeste pas ou n’est pas mis en mesure de
manifester clairement son intention2. Récemment, la Cour de cassa¬
tion a affirmé qu’en dehors d’un traité international, une cour d’appel
n’avait pas à invoquer d’office une immunité de juridiction ou d’exé¬
cution; en effe^ ces immunités n’étant pas absolues, « doivent être
invoquées par l’Etat étranger qui s’y prétend fondé »3.
§ 2. Immunité et renonciation
988 Ainsi que la formule qui vient d’être citée le laisse entendre, l’État
étranger peut toujours renoncer à son immunité de juridiction ou
d’exécution. La solution est traditionnelle. Elle est en harmonie avec la
reconnaissance d’un privilège et adéquate à l’existence d’une compé¬
tence de l’ordre juridictionnel du for dont la renonciation à l’immu¬
nité permet le plein accomplissement.
Cette renonciation doit être certaine^ Elle peut être expresse. Elle peut
aussi résulter du comportement de l’État qui se défend au fond sans
faire de réserves. Une jurisprudence traditionnelle voit dans la signa¬
ture d’une clause d’arbitrage par un État une renonciation à son immu¬
nité de juridiction. Si l’immunité de juridiction n’a guère de sens devant
les arbitres, elle recouvre sa pertinence devant la juridiction étatique
chargée d’accorder 1 ’exequatur à la sentence. La Cour de cassation a
établi un lien (excessif?) en considérant que la signature d’une clause
d’arbitrage par l’État valait renonciation à la faculté d’opposer son
immunité de juridiction devant le juge étatique de l’exequatur4.
La renonciation à l’immunité d’exécution est également possible et
ne saurait se déduire de la seule mise à l’écart de l’immunité de juridic¬
tion, y compris par renonciation. Cependant, par un arrêt remarqué,
1. V. sur ce point les observations de G. Couchez, note préc. La solution est régulière¬
ment rappelée par la jurisprudence. Par ex., Civ. lre, 16 déc. 2003, Bu II. civ. I, n° 258, RGDIP
2004. 259, note F. Poirat; Civ. lre, 27 avr. 2004, RTD civ. 2004. 769, obs. Ph. Théry, Rev.
crit. DIP 2005. 75, note H. Muir Watt; Soc. 23 févr. 2005, inédit, pourvoi n° 02-41.870.
2. V., Civ. lrc, 30 juin 1993,JDI 1994. 156, note G. Burdeau; Civ. lre, 7 janv. 1992, Bull,
civ. I, n° 3.
3. Civ. lre, 12 octobre 1999, JDI 2000. 1036, note M. Cosnard.
4. Civ. lre, 18 nov. 1986, SEEEJDl 1987. 120, note B. Oppetit; Rev. arb. 1987. 149, note
J.-L. Delvolvé; Rev. crit. DIP 1987. 786, note P. Mayer.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 719
1. Civ. lre, 6 juill. 2000, Creighton c. Qatar, JDI 2000. 1054, note I. Pingel-Lenuzza,
D. 2001. Chron. 2139, par J. Moury, Gaz. Pal. 2001. jur. 80, note S. Piedelièvre, JCP 2001.
II. 10512, note Ch. Kaplan et G. Cuniberti, Rev. arb. 2001, lrc esp., 114, note Ph. Leboulan-
ger, RTD com. 2001. 410, obs. E. Loquin. V. aussi, E. Gaillard, « Effectivité des sentences
arbitrales, immunité d’exécution des États et autonomie des personnes morales dépendant
d’eux. Réflexion sur trois principes incompatibles », in Droit des immunités et exigences du
procès e'quitable, Pédone, 2004, p. 119 et s.
2. V. déjà en ce sens CA Rouen, 20 juin 1996, Rev. arb. 1997. 263, note E. Gaillard;
depuis l’arrêt du 6 juillet 2000 préc., CA Paris 12 déc. 2001, D. 2002. IR. 617.
3. CA Paris, 10 août 2000, préc.. La solution s’explique par l’importance particulière
que revêtent ces biens pour l’exercice de la souveraineté étatique. V. aussi CA Paris, 26 sept.
2000, RD banc. fin. 2001. 357.
720 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CE, Sect., 29 octobre 1976, Burgat, JDI 1977. 630, note G. Burdeau, JCP 1977. II.
18606, note F. julien-Laferrière, RDP 1977. 213, concl. J. Massot, AJDA 1977. 30. chr.
M. Nauwelaers et L. Fabius, D. 1978. 77, note C.-L. Vier et F. Lamoureux.
2. En effet, cette jurisprudence administrative se comprend comme une extension du
régime de la responsabilité du fait des lois à la responsabilité du fait des conventions inter¬
nationales ayant force de loi. V., M. Long, P. Weil, G. Braibant, P. Delvolvé, B. Genevois, Les
grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 2005, n° 85, spéc. n° 4, p. 578. Pour
l’arrêt de principe en la matière, v. CE, Ass., 30 mars 1966, Cie generale d’énergie radio-élec¬
trique, AJDA 1966. 350, chron. Puissochet et Lecat, D. 1966. 582, note Lachaume, RDP
1966. 774, concl. M. Bernard et 955, note M. Waline, JCP 1967. II. 15000, note Dehaussy,
GAJA, n° 85.
3. CE, 4 octobre 1999, Syndicat des copropriétaires du 14-16 bd. Flandrin, JCP 2000. II.
10387, note Faupin, RGDIP 2000. 263, note Poirat. V., M. Long, P. Weil, G. Braibant,
P. Delvolvé, B. Genevois, op. cit., n° 85. 4.
4. Le raisonnement démontre en réalité un certain glissement sur le terrain du caractère
imprévisible du préjudice lequel ne constitue pourtant pas une condition de la responsabi¬
lité.
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 721
1. CAA Paris, 16 juillet 1992, Ministre des Affaires étrangères c. Mme Aga Khan, RFDA
1993. 156, note Godfrin. L’indemnisation a été refusée pour défaut de spécialité du préju¬
dice dans la mesure où celui-ci trouvait son origine dans l’application d’une convention
internationale de portée générale (la convention de Vienne de 1961 sur les relations diplo¬
matiques) dont le propriétaire ne pouvait ignorer l’applicabilité.
2. La gravité suffisante du préjudice a été niée dans une affaire où la demanderesse se
prévalait d’une créance de 2 279,35 FF dont elle ne pouvait obtenir l’exécution forcée en
raison de l’immunité d’exécution instituée par la convention de Vienne de 1961 sur les
relations diplomatiques : CE, 1er juin 1984, Ministre des Relations extérieures c. Tizon et
Millet, Rec. 1984, RFDA 1985. 117, note P. Bon, D. 1986. IR. 34, obs. F. Moderne.
3. Comme le souligne à juste titre P. Lagarde, « Conclusions générales », in Droit des
immunités et exigences du procès équitable, Pédone, 2004, spéc. p. 160.
4. Sur l’historique de l’élaboration du texte, v. G. Flafner, « L’immunité d’exécution
dans le projet de Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des
Etats et de leurs biens », in Droit des immunités et exigences du procès équitable, Pédone, 2004,
p. 85 et s. ; I. Pingel, « Observations sur la Convention du 17 janvier 2005 sur les immuni¬
tés juridictionnelles des États et de leurs biens », JDI 2005. 1045 et s. V. aussi, sur le projet
d’articles de la Commission de droit international des Nations unies, C. Kessedjian et
Ch. Schreuer, RGDI publ. 1992, p. 299 et s., P.-M. Dupuy, op. cit., n° 113 et s.
5. Art. 30. En novembre 2006, trois États (l’Autriche, la Norvège et le Portugal) avaient
ratifié la convention et vingt autres États l’avaient signée. La France n’en fait pas partie.
722 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
§ 1. L’immunité de juridiction
992 Le principe selon lequel l’État jouit de l’immunité de juridiction devant
les tribunaux d’un autre État (art. 5) est assorti d’un certain nombre
d’exceptions fondées soit sur la volonté de l’État lui-même, soit sur
l’activité de l’État qui forme l’objet du litige.
1. Si la transaction a été conclue par une entreprise d’État dotée d’une personnalité
juridique distincte et si la procédure est dirigée contre cette entreprise, l’immunité de juri¬
diction de l’État n’est en principe pas affectée (art. 10 § 3), sous réserve toutefois de l’éven¬
tuelle « levée du voile dissimulant l’entité » (v. annexe à la convention, laquelle fait partie
intégrante de la convention, conformément à l’art. 25).
ACTION EN JUSTICE ET IMMUNITÉS DES ÉTATS 723
§ 2. L’immunité d’exécution
1. Les biens utilisés dans l’exercice des fonctions des missions diplomatiques et consu¬
laires, des fonctions militaires, des banques centrales, ou encore les biens faisant partie du
patrimoine culturel de l’État ou d’une exposition d’objets d’intérêt scientifique, culturel ou
historique : art. 21 § 1 a) à e).
2. Par ailleurs, l’annexe précise également que l’article 19 ne préjuge pas non plus les
« questions liées à une situation dans laquelle une entité d’État a délibérément déguisé sa
situation financière ou réduit après coup ses actifs pour éviter de satisfaire à une demande,
ni d’autres questions connexes ». Quant au « lien » entre l’entité et le bien, il s’entend dans
un sens plus large que la propriété ou la possession. Enfin, la notion « d’entité » s’entend
de l’État, d’une unité constitutive d’un État fédéral, d’une subdivision d’un État, d’un orga¬
nisme ou d’une institution étatique ou de toute autre entité, dotée d’une personnalité
juridique indépendante. Sur la valeur juridique de l’annexe, v. supra, note de bas de page
n° 1.
EFFETS EN FRANCE DES JUGEMENTS ÉTRANGERS 72 5
CHAPITRE 3
EFFETS EN FRANCE
DES JUGEMENTS ÉTRANGERS
998 L’effet en France des jugements étrangers est une question dépassant le
cadre du droit du commerce international. Traitée de façon complète
dans les ouvrages de droit international privé1, elle sera envisagée ici
plus brièvement. En la matière coexistent le droit commun (Section 1)
et le droit européen2 (Section 2).
A. Solution de principe
1. V., B. Audit, Droit international prive', Économica, 2006, n° 451 et s.; H. Batiffol et
P. Lagarde, Droit international privé, t. II, LGDJ, 1983, n° 739 et s., p. 612 et s. ; D. Holleaux,
J. Foyer et G. de Geouffre de la Pradelle, Droit international privé, Masson, 1987, n° 898 et s.,
p. 419 et s. ; Y. Loussouarn, P. Bourel et P. de Vareilles-Sommières, Droit international privé,
Dalloz, 2004, n° 491 et s. ; P. Mayer, V. Heuzé, Droit international privé, Montchrestien,
2004, n° 359 et s. V. aussi, H. Peroz, La réception des jugements étrangers dans l’ordre juridique
français, LGDJ, 2005.
2. Il existe, en outre, de nombreuses Conventions internationales, souvent bilatérales.
V. la liste fournie par P. Mayer, V. Heuzé, op. cit., n°464.
726 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. Exceptions
1000 Certains effets sont susceptibles d’être reconnus à toute décision de
justice étrangère indépendamment de sa régularité internationale et
a fortiori de tout contrôle juridictionnel exercé à son sujet.
1. Req., 3 mars 1930, Hainard, S. 1930. I. 377, note Niboyet, JDI 1930. 981.
2. V., CA Paris, 4 juill. 1991, JDI 1992. 705, note Ph. Kahn et, en matière d’arbitrage,
Civ. lre, 11 juin 1991, JDI 1991. 1005, note E. Gaillard, Rev. crit. DIP 1992. 331, note
P. Lagarde.
3. La plupart des auteurs critiquent cette solution et croient pouvoir percevoir les pre¬
miers signes d’une évolution jurisprudentielle : B. Audit, op. cit., n°484; Y. Loussouarn,
P. Bourel et P. de Vareilles-Sommières, op. cit., n° 503 et s.; P. Mayer, V. Heuzé, op. cit.,
n° 399 et s.
4. Civ. lre, 28 févr. 1860, Bulkley, S. 1861.1. 210, concl. Dupin; D. 1860.1. 57, B. Ancel,
Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence française de droit international privé, 5e éd.,
Dalloz, 2006, n° 4.
5. CA Bordeaux, 10 févr. 1824, S. 1824. II. 317; Civ., 30 janv. 1912, S. 1916.1. 113, note
Audinet, JDI 1912. 845, Rev. crit. DIP 1913. 131 ; Civ. lre, 3 nov. 1983, Rev. crit. DIP 1984.
336, note M. Revillard, JDI 1985. 115, note Ancel.
728 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
B. L’action en exequatur
1004 L’action en exequatur est de la compétence du tribunal de grande ins¬
tance statuant à juge unique (art. L. 311-11 Code de l’organisation
judiciaire tel qu’issu de la loi du 9 juillet 1991). En cas de besoin, ce
juge peut renvoyer l’affaire à la formation collégiale.
Le tribunal territorialement compétent sera celui du domicile du
défendeur, ou celui dam le ressort duquel le demandeur entend faire
procéder à l’exécution. À défaut, le choix s’effectuera « en fonction
d’une bonne administration de la justice »2.
À l’occasion de l’action en exequatur, le juge ne peut pas accepter de
demandes additionnelles; il ne peut qu’accorder ou refuser Vexequatur.
L’exequatur partielle est tout de même possible3.
La procédure doit être contentieuse, avec éventuellement assigna¬
tion du ministère public en tant que contradicteur légitime.
La jurisprudence a également admis une action en inopposabilité
des jugements étrangers. Cette action répond aux mêmes conditions et
présente les mêmes caractères que l’action en exequatur. Elle tend à
l’effet inverse : le demandeur entend dénier au jugement étranger tout
effet en France4.
1. Civ. lre, 3 janv. 1980, Garino, JDI 1980. 341, note A. Huet, Rev. crit. DIP 1980. 597,
note D. Holleaux, D. 1981. IR. 161, obs. B. Audit; Civ. lre, 19 déc. 1995, Rev. crit. DIP 1996.
714, note H. Gaudemet-Talion.
2. Comme pour l’application des articles 14 et 15 du Code civil.
3. Pour davantage de précisions, v. P. Mayer, V. Heuzé, op. rit., n°419 et s.
4. V. Civ., 22 janv. 1951, Weiller, Rev. crit. DIP 1951. 167, note Francescakis, JCP 1951.
II. 6151, note Sarraute etTager, Les grands arrêts, op. cit., n° 24; TGI Paris, 8 déc. 1977, Air
Afrique, Rev. crit. DIP 1978. 539, note H. Gaudemet-Talion; CA Paris, 9 juill. 1986, JDI
1986. 976, note P. Mayer.
5. Civ. lre, 7 janv. 1964, Munzer, Rev. crit. DIP 1964. 344, note H. Batiffol; JDI 1964.
302, note B. Goldman; JCP 1964. II. 13590, note M. Ancel; Les grands arrêts, op. cit.,
n°41.
EFFETS EN FRANCE DES JUGEMENTS ÉTRANGERS 729
puis ramené à quatre points par l’arrêt Bachir\ ce contrôle n’a plus été
formellement modifié depuis lors1 2.
1. Civ. lre, 4 oct. 1967, Rev. crit. DIP 1968. 98, note P. Lagarde; D. 1968. 95, note
E. Mezger; JCP 1968. II. 15634, noteJ.-B. Sialelli; )DI 1969. 102, note B. Goldman. L’arrêt
Munzer avait fait de la régularité de la procédure suivie à l’étranger une condition de régu¬
larité autonome, alors que selon l’arrêt Bachir, cette condition doit être appréciée unique¬
ment au regard de l’ordre public international français et du respect des droits de la défense.
Il s’agit donc d’un aspect de la condition plus large de conformité à l’ordre public.
2. Comp. CA Paris, 25 mars 1994, Rev. crit. DIP 1996. 119, note H. M.-W.
730 LH RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. CA Paris, 10 nov. 1971, Mack Trucks, RTD com. 1972. 239, obs. Y. Loussourn, JDI
1973. 239, obs. A. Huet; CA Paris, 5 mars 1976, Giroux, JDI 1977. 880, obs. A. Huet, Rev.
crit. DIP 1978. 149, note B. Audit. Ces arrêts suivent la voie indiquée par D. Holleaux,
Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements, Dalloz, 1970.
2. V., Civ. lre, 6 févr. 1985, Simitch, Rev. crit. DIP 1985. 369, et la chronique Ph. Fran-
cescakis, p. 243; JDI 1985. 460, note A. Huet; D. 1985. 469, note J. Massip et IR. 497; obs.
B. Audit, Les grands arrêts, op. cit., n° 70; adde Civ. lre, 6 janv. 1987, D. 1987. 467, note
J. Massip; Rev. crit. DIP 1988. 337, note Y. Lequette; JDI 1988, 2e esp., note J.-M. Jacquet;
Civ. lre, 15 juin 1994, Rev. crit. DIP 1996. 127, note B. Ancel.
3. La Cour de cassation a considéré que cette règle de compétence exclusive ne consti¬
tuait ni une « atteinte au droit à un procès équitable, ni une discrimination inadmissible » :
Civ. lre, 30 mars 2004, Gaz. Pal. 2004. jur. 1970, note K. Weissberg, et somm. 3364, note
EFFETS EN FRANCE DES JUGEMENTS ÉTRANGERS 731
M.-L. Niboyet, JCP 2004. II. 10097, note V. Egea, Defrénois 2004. 1235, obs. J. Massip, Rev.
crit. DIP 2005. 89, note L. Sinopoli.
1. V. cependant CA Paris, 22 nov. 1990, D. 1992, Somm. 169, obs. B. Audit; CA Paris,
21 sept. 1995, JDI 1996. 683, note Ph. Kahn; CA Orléans, 24 janv. 2002, Rev. crit. DIP
2002. 354, note H. M.-W.
2. Civ. lre, 23 mai 2006, pourvoi n° 04-12.777, FS P+B+R+I, Prieur c. de Montenach,
D. 2006. IR. 1561, obs. I. Gallmeister, et la chronique de B. Audit, p. 1846 et s., « La fin
attendue d’une anomalie jurisprudentielle : retour à la lettre de l’article 15 du Code civil »,
Les grands arrêts..., n° 87. Il s’agissait en l’espèce d’un jugement suisse ayant annulé un
mariage pour vice du consentement. La Cour a admis la compétence indirecte du tribunal
suisse dans la mesure où « les parties, toutes deux nées en Suisse, s’étaient mariées dans ce
pays en convenant d’un contrat de mariage régi par le droit suisse et y avaient établi leur
résidence » et que la saisine du tribunal étranger n’a pas été frauduleuse.
3. TGI Paris, 7 févr. 1986, Rev. crit. DIP 1986. 547, note H. Gaudemet-Talion. V. aussi
P. Mayer et V. Heuzé, op. cit., n° 377 et s.
4. V., B. Ancel, « Loi appliquée et effets en France des décisions étrangères », Travaux
Comitéfr. DIP 1986-1988, p. 25 et s.; S. Gressot-Léger, « Faut-il supprimer le contrôle de
la loi appliquée par le juge étranger lors de l’instance en exequatur ? », JDI 2003. 767 et s.
5. En ce sens P. Mayer et V. Heuzé, op. cit., n°389.
6. V., T. civ. Seine, 22 oct. 1956, Rev. crit. DIP 1958. 117, note H. B.
732 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1. Req., 29 juill. 1929, Drichemont, DH 1929. 458, JDI 1930. 377, S. 1930. I. 20, Rev.
crit. DIP 1931. 334; Civ. lre, 22 avr. 1986 et 6 juill. 1988, Rev. crit. DIP 1989. 89, note
H. Gaudemet-Talion; Civ. lre, 28 janv. 2003, JDI 2003. 468, note J.-M. Jacquet, Defrénois
2003. 1086, obs. J. Massip, Rev. crit. DIP 2004. 398, note H. Muir Watt. Sur la notion
d’équivalence, plus généralement, Ph. Malaurie, « L’équivalence en droit international
privé », D. 1962. 215 ; H. Gaudemet-Talion, « De nouvelles fonctions pour l’équivalence en
droit international privé? », in Mélanges P. Lagarde, Dalloz, 2005, p. 303 et s.
2. V. les observations de H. Muir Watt sous CA Paris, 25 mars 1994, Rev. crit. DIP 1996.
119.
3. On peut y rattacher, en outre, l’hypothèse du conflit de jugements. En effet, si le
jugement étranger s'avère incompatible avec un jugement français, même postérieur, ou
avec un jugement étranger déjà efficace en France, il ne peut être reconnu en France. V.,
Civ., 8 janvier 1963, Hohenzollern, Rev. crit. DIP 1963.1032, note A. Ponsard, D. 1963. 341,
note Ph. M., JCP 1964. II. 13470, note Ph. Francescakis ; plus récemment, Civ. lre, 24 sept.
2002 et 27 avr. 2004, Rev. crit. DIP 2004. 610, note H. Muir Watt, Gaz. Pal. 2004. somm.
3365, note M.-L. Niboyet. V. aussi, Y. Loussouarn, P. Bourel, P. de Vareilles-Sommières,
op. cit., n° 499-3 et s.
4. V., Civ. lre, 17 avr. 1953, Rivière, Rev. crit. DIP 1953. 412, note Fl. Batiffol; JDI 1953.
860, note Plaisant; JCP 1953. IL 7863, note Buchet; Les grands arrêts, op. cit., n° 26; TGI
Paris, 13 mai 1992, JDI 1994. 419, note H.-J. Lucas.
EFFETS EN FRANCE DES JUGEMENTS ÉTRANGERS 733
Ainsi, il faudra que l’assignation ait été loyale et réelle1, que le défen¬
deur ait été régulièrement représenté, que le principe de la contradic¬
tion ait été observé...2. Si le jugement étranger émane d’un État qui
n’applique pas la Conv. EDH, le juge de Yexequatur doit s’assurer que
les exigences de l’article 6 de la Conv. EDH relatives au procès équitable
ont été respectées3.
D. Absence de fraude
1013 Citée parmi les chefs de contrôle du jugement étranger par l’arrêt Mun-
zer, la fraude a de nouveau été mentionnée dans son propre contexte
par l’arrêt Simitch qui exige que le choix de la juridiction étrangère n’ait
pas été frauduleux4. La fraude peut se présenter de deux façons.
1. Pour l’hypothèse d’une fraude aux droits de la défense, commise par un demandeur
ayant déclaré mensongèrement qu’il ignorait l’adresse du défendeur et ayant ainsi obtenu
l’autorisation de l’assigner par voie de publication dans un journal qu’il n’avait aucune
chance de lire : Civ. lrc, 30 sept. 2003, Bull. civ. I, n° 190. Ici, la violation des droits de la
défense ne résultait pas du contenu des règles étrangères sur la signification des actes, mais
de la fraude que le juge étranger n’avait eu aucun moyen de déceler.
2. V., Y. Loussouarn, P. Bourel, P. Vareilles-Sommières, op. cit., n°498-l; pour un
exemple d’irrégularité ne revêtant pas une gravité suffisante, v. Civ. lre, 10 juill. 1996, Rev.
crit. DIP 1997. 85, note H. Muir-Watt; pour un exemple contraire, v. Civ. lre, 3 déc. 1996,
Rev. crit. DIP 1997. 328, note H. Muir-Watt.
3. CEDH 20 juill. 2001, Pellegrini, AJDA 2001. 1062, obs. Flauss, RTD civ. 2001. 986,
obs. J.-P. Marguénaud, Rev. crit. DIP 2004. 106, note L.-L. Christians. V. aussi, L. Sinopoli,
« Droit au procès équitable et exequatur. Strasbourg sonne les cloches à Rome », Gaz. Pal.
2002. doctr. 1157 et s. Comp., pour une interprétation plus restrictive de la portée de l’arrêt
Pellegrini, Ch. des lords, 22 juill. 2004, Rev. crit. DIP 2005. 315, note H. Muir Watt. Sur les
dangers d’une trop grande sévérité, v. not. P. Mayer, « La Convention européenne des droits
de l’homme et l’application des normes étrangères », Rev. crit. DIP 1991. 651 et s.; et du
même auteur, « Droit au procès équitable et conflit de juridictions », in Les nouveaux déve¬
loppements du procès équitable au sens de la CEDH, Nemesis, 1996, p. 125 et s.
4. Sur la fraude en général, v. H. Batiffol et P. Lagarde, Droit international privé, t. I,
n° 370 et s., p. 394 et s. ; B. Audit, La fraude à la loi, Dalloz, coll. « Bibl. dr. int. pr. », 1974,
E. Comut, Théorie critique de la fraude à la loi. Étude de droit international privé de la famille,
Defrénois, 2006. V. aussi, P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping devant les juridic¬
tions françaises », TCFDIP 1998-2000, p. 49 et s.
734 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
1016 Seules seront étudiées ici les règles générales sur les effets des juge¬
ments, issues de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 et
du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, les règles spéci¬
fiques relatives au titre exécutoire européen pour les créances incontes¬
tées posées par le règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004 ayant
déjà été présentées avec les mesures d’exécution (cf. supra, n° 845). Le
règlement n° 44/2004 du 22 décembre 2000 établit un régime précis,
uniforme et libéral de circulation des jugements dans l’Europe com¬
munautaire3. À l’exposé des décisions visées (§ 1) fera suite celui de la
§ 1. Décisions visées
1017 Le règlement s’applique à toutes les décisions rendues par une juridic¬
tion d’un État membre quelle que soit la dénomination retenue (juge¬
ment, arrêt, ordonnance...) à la seule condition que ces décisions
entrent dans les matières couvertes par le règlement (v. art. 32 et
art. I)1.
Cependant le règlement ne limite pas ses règles sur la reconnais¬
sance et l’exécution aux décisions de juridictions compétentes seule¬
ment en vertu des règles de compétence directe qu’il édicte. En d’autres
termes, le champ du règlement au niveau de l’exécution des décisions
étrangères se trouve considérablement élargi puisqu’il recouvre aussi
les décisions rendues dans chaque État membre en vertu de son droit
commun et même les décisions rendues dans le cas d’un litige pure¬
ment interne2. Ainsi un jugement rendu par un tribunal français
compétent sur la seule base de l’article 14 du Code civil — texte exclu
par le règlement au niveau de la compétence directe, cf. article 3 —
bénéficiera, en Italie, du système d’exécution du règlement.
§ 2. Procédure du contrôle
l’AELE; pour cette convention et les rapports entre les deux textes, v. G. Droz, « La Conven¬
tion du Lugano parallèle à la Convention de Bruxelles concernant la compétence judiciaire
et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale », Rev. crit. DIP 1989. 1 et s.
1. Pour le champ d’application dans le temps du règlement, v. art. 66.
2. À l’exception des décisions judiciaires autorisant des mesures provisoires ou conser¬
vatoires, rendues sans que la partie contre laquelle elles sont désignées ait été appelée à
comparaître et destinées à être exécutées sans avoir été préalablement signifiées. CJCE,
21 mai 1980, Denilauer, JDI 1980. 939, obs. A. Huet; Rev. crit. DIP 1980. 787, concl. May-
ras, note Mezger.
736 LE RÈGLEMENT DES LITIGES DU COMMERCE INTERNATIONAL
2000. comm. 157, obs. L. Idot, Gaz. Pal., 3 oct. 2000, note M.-L. Niboyet; CJCE 11 mai
2000, aff. C 38/98, Régie Renault, Rev. crit. DIP 2000. 497, note H. Gaudemet-Talion, JDI
2001. 696, obs. A. Huet, JCP 2001. II. 10607, note C. Nourissat, ce dernier arrêt exigeant
une « violation manifeste d’une règle de droit considérée comme essentielle dans l’ordre
juridique de l’État requis ».
1. V., Civ. lre, 16 mars 1999, Rev. crit. DIP 2000. 223 et l’article de G. Droz, « Variations
Pordéa (à propos de l’arrêt de la Cour de cassation, lre Chambre civile, du 16 mars 1999) »,
ibid. p. 182 et s. ; JDI 1999. 773, note A. Huet.
2. Sur ce même fondement, v. aussi Civ. lre, 30 juin 2004, Stolzenberg, Rev. crit. DIP
2004. 815, note H. Muir Watt, D. 2004. 2743, note N. Bouche, JCP 2004. II. 10198, avis
J. Sainte-Rose, RTD civ. 2004. 549, obs. Ph. Théry, JDI 2005. 112, note G. Cuniberti, Gaz.
Pal. 2005. somm. 654, note M.-L. Niboyet. L’arrêt a admis la reconnaissance en France
d’une injonction « Mareva » (« une mesure conservatoire et provisoire de nature civile »,
selon la Cour, qui interdit à la personne du débiteur de disposer en tout lieu de ses biens)
prononcée par un juge britannique. La première chambre civile a confirmé que le droit à un
procès équitable consacré par l’art. 6 de la Conv. EDH relève de l’ordre public international
au sens de l’article 27 de la convention de Bruxelles (art. 34 régi.), mais a estimé qu’en
l’espèce, l’ordonnance étrangère ne portait pas atteinte à un droit fondamental du débiteur,
le « moyen tiré de la contrariété à l’ordre public ne devant être considéré que dans les cas
exceptionnels où les garanties inscrites dans la législation de l’État d’origine et dans la
Convention de Bruxelles n'ont pas suffi à protéger le défendeur d’une violation manifeste
de son droit de se défendre devant le juge d’origine ».
3. V., CJCE 28 mars 2000, aff. C 7/98, Krombach, préc.
EFFETS EN FRANCE DES JUGEMENTS ÉTRANGERS 739
1022 Dans les procédures par défaut, l’acte introductif d’instance doit
avoir été « signifié ou notifié au défendeur défaillant en temps utile et
d’une telle manière qu’il puisse se défendre »3. Lorsque le défendeur
a eu effectivement connaissance de l’instance engagée contre lui, le
juge de l’État requis doit apprécier essentiellement si la durée du temps
qui a ainsi été laissé au défendeur pour se défendre a été suffisante.
Dans cette appréciation, il n’est lié ni par les dispositions de la loi
du pays d’origine, ni par les constatations faites par le juge du pays
d’origine4. Lorsque, au contraire, le défendeur n’a pas eu connaissance
effective de l’instance engagée contre lui (par exemple dans l’hypo¬
thèse d’une notification à Parquet), le problème se pose différem¬
ment. La Cour de justice estime que le jugement étranger pourra néan¬
moins être reconnu, du moins si le mode de notification utilisé était
régulier. Mais elle réserve l’hypothèse de « circonstances exception¬
nelles » pouvant conduire le juge de l’État requis à refuser la recon¬
naissance 5, notamment au regard de la loyauté du comportement des
parties6.
1. Par cette précision relative aux voies de recours, le règlement condamne une juris¬
prudence antérieure de la Cour de justice. V., CJCE 12 nov. 1992, aff. C 123/91, Minalmet,
Rev. crit. DIP 1993. 85, note G. Droz, JDI 1993. 468, obs. A. Huet; CJCE 10 oct. 1996, aff.
C 78/95, Hendrikman, Rev. crit. DIP 1997. 455, note G. Droz, JDI 1997. 621, obs. A. Huet.
2. V., J. Marotte, L’incompatibilité des décisions de justice en droit judiciaire privé interne,
européen et international, thèse dactyl. Paris X, 2001 ; V. Moissinac-Massénat, Les conflits de
procédures et de décisions en droit international privé, thèse dactyl. Paris I, 2002.
3. CJCE 4 févr. 1988, aff. 145/86, Hoffmann, préc.; CJCE 6 juin 2002, aff. C 80/00,
Italien Leather SpA c. WECO Polstermôbel GmbH & Co, Rev. crit. DIP 2002. 704, note
H. Muir Watt, JDI 2003. 671, obs. A. Huet, Gaz. Pal. 2003, n° 320-322, 21, note M.-L.
Niboyet, précisant que la notion d’inconciliabilité entre deux décisions s’applique égale¬
ment aux décisions rendues par le juge des référés, dès lors qu’il existe une conciliabilité des
conséquences juridiques. Pour une confirmation récente, v. Civ. lre, 20 juin 2006, D. 2006.
IR. 1843. V. également, Civ. lrc, 29 janv. 2002, Rev. crit. DIP 2002. 573, note B. Ancel, JDI
2003. 157, obs. A. Huet, excluant l’inconciliabilité de deux décisions rendues entre parties
différentes et n’ayant pas le même objet, ni la même cause.
4. V., TGI Paris, 31 mai 1989, Rev. crit. DIP 1990. 550, note G. Droz.
TITRE 2
L’ARBITRAGE
INTERNATIONAL
1024 L’arbitrage est un mode de résolution des litiges1. Alors que la justice
étatique est inséparable de l’appareil judiciaire dans lequel elle s’in¬
carne, l’arbitrage tend à promouvoir le rôle de tiers, personnes privées
ou agissant en cette seule qualité, à qui les parties ont entendu par
convention confier le règlement de leurs différends. Ces tiers prennent
le nom d’arbitres. En fonction de la qualité qui leur est reconnue, ils
disposeront d’un certain nombre de pouvoirs, mais ils seront aussi
assujettis au respect d’un certain nombre de règles. En cela, ils seront,
dans une certaine mesure les homologues des juges. Il ne faut point
s’en étonner, car ils exercent, tout comme les juges une mission juri-
CHAPITRE 1
PRÉSENTATION DE
L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., J.-L. Devolvé, « Vraies et fausses confidences, ou les petits et les grands secrets
de l’arbitrage », Rev. arb. 1996. 373 et s.; la confidentialité peut cependant être appréciée
de différentes façons; v. Cour suprême de Suède, 27 oct. 2000, Rev. arb. 2001. 821, note
S. Jarvin et G. Reid. ; Civ. lre, 22 janv. 2004, Rev. arb. 2004. 647 note E. Loquin.
2. V., E.Gaillard, « Le principe de confidentialité dans l’arbitrage commercial interna¬
tional », D. 1997. Chron. 153., E. Loquin, « Les obligations de confidentialité dans l’arbi¬
trage », Rev. arb. 2006. 323 et s. F. Dessemontet, « Arbitration and Confidentialité », Am.
Rev. int. Arb. 1996, p. 299; Ch. Müller, « La confidentialité en arbitrage commercial inter¬
national, un trompe l’œil? », Bull. ASA 2005, p. 216 et s.
3. Y. Derains, « Sources et domaine d’application du droit français de l’arbitrage inter¬
national », in Droit et pratique de l'arbitrage international en France, Feduci, 1984, p. 1 et s.,
spéc. p. 2.
PRÉSENTATION DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL 745
1. Sur cette notion, ses implications et les distinctions qu’elle appelle, v. Ch. Jarrosson,
« Réflexions sur l'imperium », in Études offertes à P. Bellet, op. cit., p. 245 et s.
2. V., G. Cornu, « Les principes directeurs du procès civil par eux-mêmes (fragment
d’un état des questions) », in Études offertes à P. Bellet, op. cit., p. 83 et s.
3. V., B. Oppetit, op. cit., p. 422.
4. V., B. Oppetit, op. cit. et loc. cit.; Comp. pour un exposé plus complet M. de Boisse-
son, M. de Boisseson, Le droit français de l’arbitrage interne et international, GLN-Joly éd.,
préf. P. Bellet, 1990, n°257 et s., p. 227 et s.; sur le principe de la contradiction dans l’ar¬
bitrage, v. C. Kessedjian, « Principe de la contradiction et arbitrage », Rev. arb. 1995. 381.
PRÉSENTATION DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL 747
C. Complémentarité
1030 Loin d’appartenir à des sphères qui s'ignorent, justice étatique et justice
arbitrale entretiennent, dans tous les États, des rapports de complé¬
mentarité d’intensité variable. Cette complémentarité, presque struc¬
turelle dans le droit de l’arbitrage, même lorsque celui-ci est interna¬
tional, est bien présente dans le droit français. Sans entrer dans les
détails de questions qui seront étudiées plus loin, il est instructif, pour
avoir une bonne vision générale de la matière, de retenir dès mainte¬
nant les trois principaux aspects de cette complémentarité entre justice
arbitrale et justice étatique : la complémentarité implique en effet tan¬
tôt coordination, tantôt collaboration et tantôt prévalence entre les
deux justices.
1. Le principe de la contradiction est privilégié (v. art. 1502, 4e NCPC; art. 7 de la loi
italienne du 5 janvier 1994 portant nouvelles dispositions en matière d’arbitrage, Rev. arb.
1994. 581 ; art. 694 du Code judiciaire belge). La LDIP suisse prévoit à son article 182.3 que
« quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral doit garantir l’égalité entre les
parties et leur droit d’être entendues en procédure contradictoire »; comp. art. 21 de la loi
espagnole n° 36/88, Rev. arb. 1989. 353.
2. Il convient également de ne pas négliger la convention de New York du 10 juin 1958
pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères dont l’article 2 est
consacré à l’effet que les États contractants et leurs tribunaux doivent reconnaître aux
conventions d’arbitrage.
748 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. L’alinéa 2 du même article 1458 tempère légèrement la solution de l’alinéa 1er dans
la situation inverse où le tribunal arbitral « n’est pas encore saisi » : dans ce cas la juridic¬
tion étatique doit également se déclarer incompétente, « à moins que la convention d’arbi¬
trage ne soit manifestement nulle ».
2. V., Ph. Fouchard, « La coopération du président du tribunal de grande instance à l’ar¬
bitrage », Rev. arb. 1985. 5 et s. ; B. Leurent, « L’intervention du juge », Rev. arb. 1992. 303
et s., et intervention de G. Pluyette sur le même sujet, ibid., p. 314 et s.
3. V. par exemple, l’article 26 du Concordat suisse sur l’arbitrage du 27 août 1969.
4. V., Civ. lre, 18 nov. 1986, Atlantic Triton, Rép. de Guinée, Rev. crit. DIP 1987. 760, note
Audit; JDI 1987. 125, note Gaillard; Rev. arb. 1987. 315, note Flécheux; Civ. lre, 20 févr.
1989 et 28 juin 1989, Rev. arb. 1989. 653, notePh. Fouchard; Civ. 2e, 8 juin 1995, Rev. arb.
1996. 125, chron. J. Pellerin et Y. Derains; sur l’ensemble de la question, v. S. Besson, Arbi¬
trage international et mesures provisoires, Étude de droit comparé, Études suisses de droit
international, Zürich, Schultess Polygraphister Verlag, 1998. M.A. Bahmaei « L’interven¬
tion du juge étatique des mesures provisoires et conservatoires en présence d’une conven¬
tion d’arbitrage. Droits français, anglais et suisse », préf. J. Béguin, LGDJ, 2002.
PRÉSENTATION DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL 749
1. Selon l’expression utilisée par J. Robert et B. Moreau, L’arbitrage. Droit interne, droit
international privé, Delmas, 1985, n°331, p. 292.
2. V., P. Mayer, « L’insertion de la sentence dans l’ordre juridique français », in Droit et
pratique de l’arbitrage international en France, Feduci, 1984, p. 81 et s.
3. V., P. Level, « L’arbitrabilité», Rev. arb. 1992. 213.; Ch. Jarrosson, « L’arbitrabilité,
présentation méthodologique », R] com. 1996, p. 1 et s.
750 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
§ 1. L’arbitrage institutionnel
1035 Le choix de l'arbitrage institutionnel O II implique le recours à une
institution d’arbitrage1. L’institution d’arbitrage n’est pas une juridic¬
tion; son rôle se limite à administrer et à fournir un minimum d’infras¬
tructure aux arbitrages qui se dérouleront sous son égide. Comme tou¬
jours en matière d’arbitrage, les tribunaux arbitraux verront leur existence
limitée au règlement de l’affaire pour laquelle ils auront été institués.
De très nombreuses institutions d’arbitrage existent de par le monde,
d’importance et de qualité variable, à vocation plus ou moins spéciali¬
sée, éventuellement limitée à un type de relations (v. Chambre arbi¬
trale maritime de Paris) ou de négoce particulier (cacao, blé...)2 3 4. Dans
le commerce international, et sans prétendre à l’exhaustivité, l’on doit
retenir: l’Association américaine d’arbitrage (AAA), la Commission
interaméricaine d’arbitrage commercial (CIAAC), la Chambre de com¬
merce internationale (CCI), dont le siège est à Paris, la Cour d’arbi¬
trage international de Londres (CAIL), la Chambre de commerce de
Stockholm (CCS), le Centre international pour le règlement des diffé¬
rends relatifs aux investissements (CIRDI)34.
Le fonctionnement d’une institution d’arbitrage repose sur trois carac¬
téristiques essentielles : un règlement d’arbitrage élaboré par l'institution
et qui détermine les principales règles de l’arbitrage, les pouvoirs et les
devoirs des arbitres; l’existence d’une autorité chargée d’assurer l’admi¬
nistration de l’arbitrage et exerçant parfois un certain contrôle sur celui-ci
ainsi que le règlement de certaines difficultés (ainsi, la Cour internatio¬
nale d’arbitrage de la CCI ou le Comité d’arbitrage pour l’Association
française d’arbitrage); enfin un secrétariat chargé d’assurer la liaison
entre les parties, les arbitres, les experts... et assurant également diverses
tâches d’ordre matériel. En outre les institutions d’arbitrage peuvent aussi
fournir aux parties des listes d’arbitres et des clauses types d’arbitrage.
Il est important, en cas de recours à l’arbitrage institutionnel, d’avoir
une bonne connaissance des pouvoirs que le règlement d’arbitrage de
l’institution confère à l’autorité.
Ainsi, dans le cas d’un arbitrage CCI, la Cour internationale d’arbi¬
trage peut avoir à fixer le siège de l’arbitrage à la place des parties; elle
peut intervenir dans la constitution du tribunal arbitral : elle confirme
les arbitres choisis par les parties, nomme les arbitres si les parties n’y
ont procédé elles-mêmes, peut avoir à statuer sur les demandes de
récusation des arbitres ou sur le remplacement des arbitres en cours
d’instance. Elle intervient également pour superviser la procédure,
notamment par la fixation et la prolongation des délais en cas de
besoin. Elle procède à l’administration financière de l’arbitrage en
fixant provisions et frais d’arbitrage1...
L’arbitrage institutionnel est apprécié pour la sécurité qu’il assure et
les services qu’il fournit aux parties. Au premier rang de ses avantages,
il convient sans doute de mentionner l’existence d’un règlement d’ar¬
bitrage dont les parties et leurs conseils peuvent aisément prendre
connaissance et qui fournira la solution immédiate et souvent heu¬
reuse de bon nombre de difficultés (ainsi, en cas de défaut de l’une des
parties ou de refus de l’une des parties de désigner un arbitre). Le coût
de l’arbitrage institutionnel est en revanche élevé. Les parties doivent
ajouter aux honoraires des arbitres (et de leurs propres conseils) la
rémunération du centre d’arbitrage2.
§ 2. L’arbitrage ad hoc
§ 1. Instruments internationaux
1038 Les instruments internationaux prennent naissance dans un cadre
interétatique. La figure classique des conventions internationales doit
être complétée par les instruments facultatifs.
1. V., le commentaire de la loi type de Ph. Fouchard, JDI 1987. 861 et pour une appré¬
ciation d’ensemble des travaux de la CNUDCI, B. Golman, JDI 1979 . 747.
2. Sur la réforme du droit de l’arbitrage international, outre les ouvrages généraux pré¬
cités, v. notamment P. Bellet et E. Mezger, « L’arbitrage international dans le nouveau Code
de procédure civile », Rev. crit. DIP 1981. 611 et s.; Ph. Fouchard, « L’arbitrage internatio¬
nal en France après le décret du 12 mai 1981 », JDI 1982. 374 et s.
3. V., Ph. Fouchard, « La laborieuse réforme de la clause compromissoire par la loi du
15 mai 2001 », Rev. arb. 2001. 397 et s. ; Ch. Jarrosson; « Le nouvel essor de la clause com¬
promissoire après la loi du 15 mai 2001 »,JCPG 2001. I. 333. L’article 2061 du Code civil,
texte d’ordre public interne, a été écarté en matière internationale. V. notamment Civ. lre,
4 juill. 1972, Hecht, JDI 1972. 843, note B. Oppetit; Rev. crit. DIP 1974. 82, note P. Level;
Rev. arb. 1974.89; CA Paris, lre ch. civ., 8 mars 1990, Rev. arb. 1990. 675, 2e esp., note
P. Mayer; CA Paris, lre ch. civ., 14 nov. 1991, Rev. arb. 1994. 545, note Ph. Fouchard.
4. V., Perspectives d'évolution du droit français de l’arbitrage, actes du colloque organisé
par le Comité français de l’arbitrage, Rev. arb. 1992. 195 et s. ; un nouveau texte est actuel¬
lement proposé par le Comité français de l’arbitrage, dont la présentation est effectuée par
J.-L. Delvolvé, Rev. arb. 2006. 491 et s.
PRÉSENTATION DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL 755
A. Le principe
1043 Selon l’article 1492 NCPC « est international l’arbitrage qui met en
cause les intérêts du commerce international ». Par cette définition, le
droit français a choisi de caractériser l’internationalité de l’arbitrage,
non par l’arbitrage lui-même, comme le font beaucoup de pays, mais
par le litige donnant lieu à l’arbitrage3.
Ainsi qu’on l’a écrit, « ce n’est pas l’arbitrage, c’est-à-dire la procé¬
dure arbitrale comme telle, qui intéresse le commerce international,
mais c’est l’objet du litige porté devant les arbitres4 ». C’est donc au
niveau du rapport de fond lui-même, objet du litige, que doit être
recherchée la mise en cause des intérêts du commerce international.
B. Ses applications
1045 Ainsi a été considéré comme international l’arbitrage convenu entre
deux sociétés italiennes au sujet de la propriété d’un immeuble en
France, le paiement étant stipulé en francs suisses3; ou l’arbitrage
intervenant entre deux sociétés françaises réunies au sein d’une société
en participation afin de réaliser un transfert de savoir-faire en Angola
et de s’implanter auprès de sociétés locales : un flux de savoir-faire à
destination de l’étranger coexistait avec l’existence d’un flux financier
vers la France4; ou encore l’arbitrage auquel a donné lieu le problème
du paiement d’une commission à un intermédiaire établi à l’étranger
pour la vente d’un immeuble en France : il y a transfert de fonds à
l’étranger pour un service rendu à l’étranger5. A également été consi¬
déré comme international l’arbitrage intervenant entre une partie
marocaine et une partie française liées par des accords contractuels
instituant entre elles une coopération et une collaboration techniques
pour développer au Maroc une politique de visio-enseignement impli¬
quant la vente et l’installation d’un visio-centre et l’exploitation d’une
franchise 6. Au contraire, et selon la même logique, il n’y a pas d’arbi-
1. CA Paris, lre ch. civ., 5 avr. 1990, Rev. arb. 1992. 110, note Synvet; Rev. crit. DIP
1991. 580, note C. Kessedjian; CA Paris, lre ch. C, 1er juillet 1997, Rev. arb. 1998. 131, note
D. Hascher; CA Paris, lre ch. C, 29 mars 2001, Rev. arb. 2001. 543, note D. Bureau, se
référant en outre à « une opération qui ne se dénoue pas économiquement dans un seul
État ».
2. CA Paris, lre civ. E, 19 févr. 2000, Rev. arb. 2004. 859, 3e esp., note L. Jaeger.
3. CA Paris, lre ch. suppl., 19 janv. 1990, Rev. arb. 1990. 125, lrcesp.; Cah. jurispr. fr.,
par JHM et CV.
4. CA Paris, lrech. suppl., 26 janv. 1990, Rev. arb. 1990. 125, 2e esp.; Cah. jurispr. fr.,
par JHM et CV; adde, en matière d’acquisition d’une société, CA Paris, 29 nov. 1990, JDI
1991. 414, note Ph. Kahn.
5. CA Paris, lre ch. suppl., 5 avr. 1990, Rev. arb. 1990. 875, note Ph. Fouchard.
6. CA Paris, lre civ. C, 19 oct 2000, Rev. arb. 2004. 859, lre esp., note L. Jaeger.
PRÉSENTATION DE L’ARBITRAGE INTERNATIONAL 757
1046 Sans aucun doute, le maniement d’un critère aussi souple peut être
parfois délicat et l’on peut citer quelques décisions où le refus par les
tribunaux de reconnaître l’internationalité de l’arbitrage peut être cri¬
tiqué4 ou, au contraire, certaines décisions pour lesquelles, l'admission
du caractère international de l’arbitrage peut prêter à discussion5.
Néanmoins la solution française ne semble pas mériter les critiques
qui lui sont parfois adressées6. Le critère de la mise en cause des inté¬
rêts de commerce international est essentiellement réaliste : il inclut
des arbitrages se rattachant à des contrats éventuellement dépourvus
de points de contact visibles avec l’étranger mais qui présentent des
liens avec une opération économique internationale et n’exclut au
fond que les arbitrages qui seraient en rapport avec l’économie d’un
seul pays.
De la même façon, la signification du mot « commerce » dans l’ex¬
pression « intérêts du commerce international » s’est totalement déta-
1. CA Paris, lre ch. suppl., 26 mai 1992, Rev. arb. 1993. 624, note L. Aynès; v. CA Paris,
28 nov. 1996, Rev. arb. 1997. 380, note E. Loquin.
2. CA Paris, Ve ch. suppl., 24 avr. 1992, Rev. arb. 1992. 598, note Ch. Jarrosson; pour
d’autres exemples, v. CA Paris, 1er juill. 1997, Rev. arb. 1998. 131, note D. Hascher; CA
Paris, 23 mars 1993, Rev. arb. 1998. 541, note Ph. Fouchard.
3. CA Paris, lre ch. suppl., 26 avr. 1985, Rev. arb. 1985. 311, note E. Mezger; JDI 1986.
175, note J.-M. Jacquet.
4. Ainsi, CA Paris, Ve ch. org., 1er févr. 1993, Rev. arb. 1994. 695, note D. Cohen; Bull.
Joly 1994. 310, note E. Loquin; CA Paris, lre ch. suppl., 11 févr. 1994, Rev. arb. 1995. 482,
note Ph. Théry.
5. CA Paris, lre ch., sect. C, 5 avr. 1990, Courrèges, Rev. arb. 1992. 110, note H. Synvet;
Rev. crit. DIP 1991. 580, note C. Kessedjian.
6. V., A. Kassis, Le nouveau droit européen des contrats internationaux, LGDJ, 1993, p. 105
et s.
758 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., J. Robert et B. Moreau, op. cit., n°259, p. 228; M. de Boisséson, op. cit., n° 518,
p. 420; v. CA Paris, 13 juin 1996, Rev. arb. 1997. 250, note E. Gaillard, JDI 1997. 151, note
E. Loquin.
2. V.,JDI 1990. 507; Rev. arb. 1990. 210.
3. V., CA Paris, lre ch. C, 13 juin 1996, Rev. arb. 1997. 251, note E.Gaillard, JDI 1997.
151, note E. Loquin.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 759
CHAPITRE 2
LA COMPÉTENCE
DU TRIBUNAL ARBITRAL
SECTION 1. L’APPRÉCIATION
DE LA COMPÉTENCE ARBITRALE
1048 On a reconnu à l’arbitre le droit de se prononcer sur sa propre compé¬
tence (§1), mais le contrôle du juge étatique ne saurait être exclu (§2).
1. V., E. Gaillard, « Les manœuvres dilatoires des parties et des arbitres dans l’arbitrage
commercial international », Rev. arb. 1990. 759 et s., spéc. p. 770.
2. Art. 1466 : « Si, devant l’arbitre, l'une des parties conteste dans son principe ou son
étendue le pouvoir juridictionnel de l’arbitre, il appartient à celui-ci de statuer sur la validité
ou les limites de son investiture ». La solution avait été consacrée en jurisprudence par
l’arrêt Caulliez (Civ., 22 févr. 1949, JCP 1949. IL 4899, note H. Motulsky). Dans la juris¬
prudence arbitrale, v. sentence partielle, CCI n°6719, 1994, JDI 1994. 1071, obs. J.-J. A.
3. Adde l’article 41.1 de la convention de Washington du 18 mars 1965 ; la loi-modèle
de la CNUDCI consacre à l’admission du principe son article 16.1 ; au niveau des règle¬
ments d’arbitrage; v. l’article 21.1 du règlement de la CNUDCI, ainsi que l’article 8.3 du
règlement de la CCI; sur « l’autonomie » de l’arbitre dans l’appréciation de cette compé¬
tence; v. P. Mayer, Rec. cours La Haye, préc., p. 373 et s.
4. CA Paris, 14e ch. A, 28 févr. 2001, Rev. arb. 2001. somm. 236.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 761
1. Sur l’extension de l’article 1458 à l’arbitrage international, v. Civ. lre, 7 juin 1989,
Rev. arb. 1992. 61, obs. Y. Derains; CA Paris, 20 sept. 1995, Rev. arb. 1996. 87, note
D. Cohen, pour un exemple récent, v. Civ. lre, 16 oct. 2001, Rev. arb. 2001. 920.
2. Civ. lre, 5 janv. 1999, Rev. arb. 1999. 260, note Ph. Fouchard.
3. V., Civ. lre, 26 juin 2001, Rev. arb. 2001. 529 note E. Gaillard; RTD. com. 2002. 49,
obs E. Loquin; Gaz Pal 12-13 déc. 2001. 26, obs. M.-L. Niboyet, JCP E 2002. 274 obs.
Ch. Kaplan et G. Cuniberti.
4. V., Civ. lre, 16 oct. 2001, Rev. arb. 2002. 919 note D. Cohen; v. Civ. lre, 4 déc. 2002,
Rev. arb. 2003. 1986 note E. Gaillard.
5. V., D. Cohen note préc., p. 923.
6. V., Civ lre, 8 nov. 2005, D. 2005. IR. 2896, Th. Clay, Panorama, D. 2005. 3056.
762 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., Civ. lre, 27 avr. 2004, JDI 2005. 349 note O. Cachard.
2. En droit comparé, les solutions retenues sont souvent plus nuancées et peuvent lais¬
ser un rôle plus important au juge (v. A. Dimolitsa, « Autonomie et “Kompetenz-Kompe-
tenz” », Rev. arb. 1998. 305 et s., spéc. p. 329 et s.). Comp. la solution donnée par le Tri¬
bunal fédéral suisse, 14 mai 2001, Rev. arb. 2001. 835, note J.-F. Poudret.
3. Cf. infra, n° 1138. Pour le cas où la décision des arbitres sur la compétence aurait pris
la forme d’une sentence préliminaire, la jurisprudence a décidé qu’un recours immédiat
contre cette sentence est possible (CA Paris, lre ch. suppl., 7 juin 1984, Rev. arb. 1984. 504,
note Mezger). Toutefois elle a exclu le caractère suspensif de ce recours. Les arbitres peuvent
donc poursuivre la procédure (v. CA Paris, lre ch. suppl., 7 juill. 1987, Rev. arb. 1988. 649,
note Mezger; 9 juill. 1992, Rev. arb. 1993. 303, note Jarrosson; 17 déc. 1991, Gatoil, Rev.
arb. 1993. 281, note Synvet).
4. V., TGI Paris, 20 nov. 1996, Rev. arb. 1999. 627, note Y. D.
5. Civ. lreciv., 6 janv. 1987, Plateau des Pyramides, JDI 1987. 638, note B. Goldman;
Rev. arb. 1987. 469, note Ph. Leboulanger.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 763
Ce cas n’a pas été prévu par les textes et pourtant, si les arbitres se
sont estimés à tort incompétents, la partie qui comptait sur la compé¬
tence du tribunal arbitral pour qu’il vidât le litige ne subit-elle pas un
préjudice indu ?
La jurisprudence a admis de faire jouer là aussi son contrôle dans le
cadre du respect de la mission des arbitres1 en rappelant d’abord que
les arbitres ne sont pas souverains dans l’appréciation de leur compé¬
tence et en ajoutant que l’absence de censure d’une incompétence
arbitrale affirmée de façon erronée par les arbitres serait une cause de
déséquilibre des garanties offertes aux plaideurs par rapport au cas
inverse2. Le contrôle s’impose donc de la même façon.
Les conditions dans lesquelles l’appréciation de la compétence du
tribunal s’effectue nous étant maintenant connues, il est possible de
passer à l’étude de l’arbitrabilité du litige.
§ 1. Principes directeurs
1053 Ils ont été laborieusement dégagés. Il convient de clarifier les rapports
de l’arbitrabilité avec l’ordre public (A) pour conclure que l’arbitrabi-
lité des litiges repose essentiellement sur la matière du litige (B). La
situation particulière de l’arbitre doit être envisagée (C).
1054 Les rapports entre l’arbitrage et l’ordre public sont complexes1. Il est
nécessaire de noter immédiatement que l’arbitrabilité n’est cependant
mise en cause qu’au niveau des rapports de l’ordre public avec la
convention d’arbitrage; l’intervention de l’ordre public en raison du
contenu de la sentence arbitrale est un problème distinct qui ne
concerne plus l’arbitrabilité : une sentence rendue dans un litige inar¬
bitrable serait nulle, non en raison de ce que la sentence arbitrale
décide, mais par le seul fait qu’elle serait intervenue là où seule la jus¬
tice étatique pouvait être saisie2.
Cette précision étant donnée, les rapports entre inarbitrabilité du
litige et ordre public ont été longtemps dominés par la crainte que le
recours à l’arbitrage ne constitue un moyen de violer l’ordre public.
Ce n’est donc point le fait qu’un litige conduise l’arbitre à utiliser
des règles d’ordre public qui faisait problème, mais la crainte que l’ar¬
bitre n'en vienne, même indirectement, à consacrer une violation de
l’ordre public, en consacrant des droits subjectifs déduits d’un contrat
illicite3.
La solution était plutôt illogique : si l’arbitre avait la conviction
d’une absence d’illicéité, le litige était arbitrable et la convention d’ar¬
bitrage ne pouvait être frappée de nullité, au moins de ce chef. Mais en
cas d’illicéité, il devait alors se déclarer incompétent4.
La seule raison que l’on pouvait trouver pour défendre cette solution
résidait dans le principe selon lequel la juridiction arbitrale ne pouvait
sanctionner une violation de l’ordre public car une telle prérogative
n’appartenait qu’aux tribunaux de l’État5. Pourtant, si certaines sanc¬
tions (amendes pénales par exemple) ne peuvent manifestement pas
être ordonnées par un tribunal arbitral, certaines autres, et notamment
les sanctions civiles semblent assez naturellement s’accorder avec la
mission juridictionnelle des arbitres.
Ce pas a finalement été franchi par l’arrêt Ganz de la cour de Paris
où la cour commença par rappeler que, « en matière internationale,
l’arbitre a compétence pour apprécier sa propre compétence quant à
1055 Les principes énoncés par l’arrêt Ganz devaient être précisés peu après
dans l’important arrêt Labinal de la cour de Paris (rendu, tout comme
l’arrêt Ganz en matière de droit de la concurrence).
Tout en réaffirmant, en des termes identiques, le pouvoir de l’arbitre
d’apprécier sa compétence quant à l’arbitrabilité du litige et de sanc¬
tionner la méconnaissance des principes et des règles qui relèvent de
l’ordre public international, la cour y ajoute que « l’arbitrabilité d’un
litige n’est pas exclue du seul fait qu’une réglementation d’ordre public
est applicable au rapport de droit litigieux2 ».
Ce faisant la cour démontre qu’elle est pleinement consciente du
fait que 1 ’arbitrabilité d’un litige n’est pas conditionnée par l’applica¬
bilité d’une réglementation d’ordre public (puisque comme toute per¬
sonne investie d’un pouvoir juridictionnel, l’arbitre dispose du pouvoir
de sanctionner la violation des règles d’ordre public). Mais elle réaf¬
firme aussi son attachement au droit de l’arbitre d’apprécier sa compé¬
tence par rapport à l’arbitrabilité du litige, en fixant une directive sou¬
ple (« au regard de l’ordre public international ») et la limite tenant au
contrôle éventuel du juge de l’annulation3.
Délestée de l’encombrant et inutile obstacle des règles d’ordre public
applicables au fond du litige, l’arbitrabilité est ainsi orientée vers la
seule question apte à la conditionner : la matière du litige.
1. CA Paris, lre ch. suppl., 29 mars 1991, Rev. arb. 1991. 478, note L. Idot.
2. CA Paris, lre ch. suppl., 19 mai 1993, Rev. arb. 1993. 645, note Jarrosson ; JDI 1993.
957, note L. Idot; sentence CCI n° 8626, JDI 1999. 1073, obs. J.-J. A.
3. V. pour un raisonnement où l’arbitrabilité est directement fondée sur l’ordre public
international, et non sur la loi étatique applicable à la convention d’arbitrage, sentence CCI
n° 8910, JDI 2000. 1085, obs. D.H.
4. V., P. Level, op. cit., p. 219 et s.
5. On a parlé ici d’une arbitrabilité « per se » (L. Idot, note Rev. arb. 1989. 299, sp.
n° 10).
766 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. L’article 177 de la LDIP suisse recourt à une règle de droit international privé maté¬
rielle se référant au seul critère de la nature patrimoniale du litige (v. T. féd. suisse, 23 juin
1992 et 28 avril 1992, JDI 1996. 732).
2. Pour une analyse lucide et stimulante de l’arbitrabilité, v. E. Loquin : « Les illusions
perdues du contrôle de l’arbitrabilitéé du litige international », in Mélanges J. Normand,
Paris, Litec, p. 339 et s., v. également O. Arfazadeh, Ordre public et arbitrage à l’épreuve de la
mondialisation, op. cit., p. 80 et s., favorable à l’application de la lexfori.
3. L’arrêt Ganz, préc., de la cour d’appel de Paris, a ajouté la réserve du cas où « la non-
arbitrabilité relève de la matière.... en ce qui intéresse au plus près l’ordre public internatio¬
nal et excluant de manière absolue la compétence arbitrale du fait de la nullité de la
convention d’arbitrage ».
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 767
§ 2. Applications
1058 Dégagés par la jurisprudence avec l’appui de la doctrine, les principes
qui viennent d’être exposés sont inséparables des espèces qui ont fourni
l’occasion de les exprimer. On évoquera cinq domaines sensibles dans
lesquels l’évolution est inégalement avancée.
A. Droit de la concurrence
1059 Ayant à se prononcer dans le cadre d’un accord de joint-ventures sur
l’arbitrabilité d’un litige dans lequel était en cause l’article 86 du traité
de Rome, l’arrêt Labinal\ après avoir énoncé les principes directeurs
que l’on sait a précisé les limites de l’arbitrabilité dans ce domaine. La
cour de Paris considère que « si le caractère de loi de police économique
de la règle communautaire du droit de la concurrence interdit aux
arbitres de prononcer des injonctions ou des amendes, ils peuvent
néanmoins tirer les conséquences civiles d’un comportement jugé illi¬
cite au regard des règles d’ordre public pouvant être directement appli¬
quées aux relations des parties en cause ».
La même solution a été retenue par l’arrêt Aplix1 2 où était en cause la
conformité au droit de la concurrence d’un contrat de licence d’exploi¬
tation de brevet.
1. CA Paris, 19 mai 1993, préc. ; sur l’importante évolution qui s’est produite aux États-
Unis, V. J. Robert, « Une date dans l’extension de l’arbitrage international : l’arrêt Mitsu¬
bishi c. Soler », Rev. arb. 1986. 173 et s.
2. CA Paris, lre ch. C., 14 oct. 1993, Rev. arb. 1994. 164, note Ch. Jarrosson.
3. CJCE 23 mars 1982, Nordsee, Rev. arb. 1982. 473 ; 27 janvier 200, Rev. arb. 2005. 765,
note L. Idot. Sur l’ensemble de la question, v. « l’arbitrage commercial et l’espace judiciaire
européen », Rev. aff. européennes 2005/2, p. 137 et s.
4. CJCE 1er juin 1999, Eco Swiss China, Rev. arb. 1999. 631, note C. Idot, RTD com.
2000. 340, obs. E. Loquin; S. Poillot-Peruzzetto, «L’ordre public international en droit
communautaire, à propos de l’arrêt de la Cour de justice des Communautés du 1er juin
1999 », JDI 2000.299 et 505.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 769
B. Propriété industrielle
C. Procédures collectives
1. V., Civ. lre, 8 mars 1988, Rev. arb. 1989. 473, note P. Ancel, D. 1989. 577, note
J. Robert, Civ. lre, 5 févr. 1991, Rev. arb. 1991. 625 note L. Idot; Com. 2 juin 2004, Rev.
arb. 2004. 591 (2e esp.), note P.Ancel. Adde., P. Ancel, «Arbitrage et procédures collec¬
tives », Rev. arb. 1983. 255 et s. ; mise à jour Rev. arb. 1987 p. 127.
2. V., Civ. lre, 5 févr. 1991, préc.
3. V., Com. 2 juin 2004, Rev. arb. 2004. 591 (3e esp.), note P. Ancel.
4. Sur cette question, v. P. Ancel, note préc., p. 605 et s.
5. Soc. 12 févr. 85, Rev. crit. DIP 1986. 469, note M.-L. Niboyet-Hoegy et 5 nov. 1984,
Rev. arb. 1986. 47, note M.-A. Moreau; pour le droit interne, v. CA Paris, 3 juill. 1997, Rev.
arb. 1997. 612, obs. L. D.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 771
E. Contrat de consommation
1063 L’arbitrage constitue-t-il un mode de règlement des litiges bien adapté
aux litiges relatifs à des contrats passés avec des consommateurs? Le
doute est permis, de legeferenda, du moins s’il s’agit de l’arbitrage de droit
commun. Il pourrait être levé si un arbitrage organisé conjointement par
des associations de consommateurs et les organes représentatifs des
professionnels était mis en place5. Mais tel n’est pas le cas aujourd’hui.
Mais en dépit des critiques qu’elle avait pu soulever, elle a été maintenue
dans un arrêt du 30 mars 2004 : une consommatrice ayant accepté une
offre de produits financiers, s’est vu opposer l’incompétence des juridic-
1. CA Grenoble, ch. Soc., 13 sept. 1993, Rev. arb. 1994. 337, note M.-A. Moreau; comp.
déjà favorable, CA Paris, lrech. suppl., 28 févr. 1992, Rev. arb. 1992. 649, note D. Cohen.
2. V., Soc. 16 févr. et 4 mai 1999, Rev. crit. DIP 1999. 745, note F. Jault-Seseke; Rev. arb.
1999. 290, note M.-A. Moreau.
3. V. Soc. 9 oct. 2001, Rev. arb. 2002. 347, note Th. Clay, Petites affiches 2002, n° 242,
p. 19, note F. Jault-Seseke, Dr. soc. 2002. 122, note M.-A. Moreau; Soc. 28 juin 2005,
D. 2005. IR. 2035, JCP 2005.1. 179, §2, obs. J. Béguin, D. 2005. Pan. Th. Clay, p. 3052.
4. V., Soc. 28 juin 2005, JDI 2006. 616, note S. Sana Chaillé de Néré.
5. V., E Loquin, « L’arbitrage des litiges du droit de la consommation », in F. Osman
(dir.), Vers un code européen de la consommation, Bruxelles, Bruylant, 1998, p. 357 et s.
6. V., Civ. lre, 21 mai 1997, RTD com. 1998. 330, obs. J.-Cl. Dubarry et E. Loquin;
Rev. crit. DIP 1998. 87, note V. Heuzé, New York Law Journal, 4 déc. 1997, obs E. Gaillard,
Dr. etpatr. 1997, n° 1800, obs. P. Laroche de Roussane, RGDIP1998.156, obs. M.-C. Rivier;
Civ. lre, 21 mai 1997, 2e décision, Rev. arb. 1997. 537, note E. Gaillard, JDI 1998. 969
(lre esp.) note S. Poillot-Peruzzetto.
772 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
A. Données du problème
1064 Longtemps exprimé par les articles 83 et 1004 du Code de procédure
civile de 1806, repris à l’article 2060 du Code civil (rédaction de la loi
du 3 juillet 1972), le principe de la prohibition de l’arbitrage pour les
personnes publiques aurait en réalité la nature d’un principe général,
de caractère organique, propre au droit administratif3 (sur les excep¬
tions en faveur d’EDF, la Poste et France-Telecom, cf. respectivement
art. 25, al. 1 de la loi 89.1153 du 30 déc. 1982, JO 31 déc. 1982 et
art. 28 de la loi 90-568 du 2 juill. 1990, JO 8 juill. 1990).
Sa justification principale réside dans « la volonté de ne pas per¬
mettre aux personnes publiques d’échapper à la juridiction des tribu¬
naux spécialement établis pour elles4 ».
Ce principe présente, dans son intangibilité, deux principaux incon¬
vénients en matière internationale.
1. Civ. lre, 30 mars 2004, D. 2004. Jur. 2458, note I. Najjar, RTD com. 2004. 447,
obs. E. Loquin, Rev. arb. 2005. 115, lre esp., note X. Boucobza,/CP 2005. i. 134, § 3, obs.
Ch. Seraglini; D. 2005. Pan. par Th. Clay, p. 3053.
2. En ce sens, Th. Clay, obs. préc. Sans interdire la clause compromissoire dans les contrats
de consommation, la loi n° 2005.67 du 28 janvier 2005 marque bien les réticences du
législateur pour les « modes alternatifs du règlement des litiges » (sur cette loi v. JO n° 26,
1er févr. 2005, p. 1648; S. Bollée Rev. arb. 2005. 225, JCP 2005. I. 179, § 8 obs. J. Béguin et
183 § 4, obs. Th. Clay). Dans un arrêt du 28 oct. 2006 (Aff. C-168/05) la CJCE vient de
rappeler que la clause d’arbitrage conclue avec un consommateur pouvait être considérée
comme une clause abusive susceptible d’être annulée de ce chef par le juge de l’annulation
d’un État membre, même si la nullité n’avait pas été soulevée devant le tribunal arbitral.
3. V., Y. Gaudemet, « L’arbitrage : aspects de droit public. État de la question », Rev. arb.
1992. 241 et s.; adde, D. Foussard, « L’arbitrage en droit administratif », Rev. arb. 1990. 4
et s.; J. Ribs, « Ombres et incertitudes de l’arbitrage pour les personnes morales de droit
public français », JCP 1990.1. 3465 ; Les États et l’arbitrage international, Journée du Comité
français de l’arbitrage, Rev. arb. 1985.493 et s.; G. Teboul, «Arbitrage international et
personnes morales de droit public », DPCI 1996. 199 et s.
4. Y. Gaudemet, op. cit., p. 251, se référant à Laferrière.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 773
B. Éléments de solution
Le problème se pose pç>ur les États et les organismes publics français,
mais aussi à l’égard des États et des organismes publics étrangers.
1. Avis du Conseil d’État du 6 mars 1986, Eurodisney land, Rev. arb. 1992. 397.
2. V., M. de Boisséson, « Interrogations et doutes sur une évolution législative (l’art. 9
de la loi du 19 août 1986) », Rev. arb. 1987. 3 et s.
3. V., traité de Canterbury du 12 février 1986 conclu entre le Royaume-Uni et la Répu¬
blique française, art. 19.1.b et concession quadripartite du 14 mars 1986, art. 40 (approu¬
vée par la loi n° 87.384 du 15 juin 1987, JO 16 juin 1987).
4. V., M. Audit « Le contrat de partenariat ou l’essor de l’arbitrage en matière adminis¬
trative », Rev. arb. 2004. 541 et s.
776 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., CE 29 oct. 2004; Cons. const. 2 déc. 2004, Rev. arb. 2005. 134, note D. Foussard.
« L’arbitrage en droit administratif», Rev. arb. 1990. 3 et s.; L. Boy, « L’arbitrabilité de
litiges concernant les personnes morales de droit public en droit français », RID éco. 1992.
99 et s. ; P. Delvolvé, « L’avenir de l’arbitrage en droit administratif », in Mélanges J. Moreau,
Économica, 2003, p. 165 et s.; Ch. jarrosson « L’arbitrage en droit public », AJDA 1997. 16
et s. ; E. Bruce, « La compétence du juge administratif dans l’arbitrage des personnes publi¬
ques, Remise en question », Rev. arb. 2006. 65 et s.
2. CA Paris, lre ch. C., 17 déc. 1991, Gatoil, Rev. arb. 1993. 281, note Synvet.
3. CA Paris, lre ch. C., 24 févr. 1994, Ministère tunisien de l'équipement, Rev. arb. 1995.
275, note Y. Gaudemet.
4. V.,CA Paris, 13 juin 1996, JDI 1997. 151, note E. Loquin, Rev. arb. 1997. 251, note
E. Gaillard.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 777
1070 Base indispensable de l’arbitrage, en tout cas dans les rapports com¬
merciaux entre personnes privées, la convention d’arbitrage doit
d’abord être envisagée en fonction de ce qui la singularise au sein de
l’ensemble des divers contrats spéciaux: son objet processuel (§ 1).
Ceci étant fait, il conviendra de mettre en évidence les principaux
aspects du régime juridique de la convention d’arbitrage dans le droit
français de l’arbitrage international. Ainsi seront étudiés successive¬
ment le principe d’indépendance de la convention d’arbitrage (§ 2),
le principe de validité (§ 3) et l’extension de la convention d’arbitrage
(§4).
A. Définition
1072 La convention d’arbitrage peut être définie comme l’acte juridique par
lequel deux ou plusieurs parties décident de confier à une juridiction
arbitrale le litige qui les oppose ou est susceptible de les opposer.
Si le litige est déjà né, la convention d’arbitrage prendra la forme
d’un compromis (cf. art. 1447 NCPC).
Le plus souvent, surtout en matière internationale, la convention
d’arbitrage prendra la forme d’une clause compromissoire. L’ar¬
ticle 1442 NCPC définit la clause compromissoire comme « la conven¬
tion par laquelle les parties à un contrat s’engagent à soumettre à
l’arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat ».
En matière d’arbitrage interne, compromis et clause compromissoire
se distinguent non seulement par le moment auquel ils se situent par
rapport à la naissance du litige, mais aussi parce qu’un certain nombre
de règles différencient leur régime juridique. En matière d’arbitrage
international, ces différences de régime juridique sont presque totale¬
ment estompées. On les négligera donc et on se concentrera désormais
sur la clause compromissoire1.
1. Un arrêt récent de la cour d'appel de Paris en date du 17 janv. 2002 (lre ch. C, Rev.
arb. 2002. 391, note J.-B.Racine) a été jusqu’à déclarer « la distinction entre la clause com¬
promissoire et le compromis s’abolissent en matière internationale pour se voir substituer
la seule catégorie de convention d’arbitrage, laquelle intervient indifféremment à l’égard
d’un litige né ou éventuel (...) ». Sur l’importance des compromis, v. O. Diallo, Le consen¬
tement des parties à l’arbitrage, op. cit., p. 114 et s.
2. V., M. de Boisséson, L'arbitrage..., op. cit., p. 481; v. TGI, Paris, réf. 14 oct. 1985,
Chayaporm, Rev. arb. 1987.182, note Ph. Fouchard; adde Scalbert et Maleville, « Les clauses
compromissoires pathologiques», Rev. arb. 1988. 117; M.H. Maleville, « Pathologie des
clauses compromissoires », RD aff. int. 2000, p. 61 et s.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 779
1. V., Civ. lre, 6 juin 1978, British Leyland, JDI 1978. 907, note Oppetit; Rev. arb. 1979.
230, note Level; CA Paris, lre ch. suppl., 7 juin 1994, Rev. arb. 1995. 107, note Jarvin.
2. La Cour de cassation (Civ. lre, 18 nov. 1986, JDI 1987. 120, note Oppetit; Rev. crit.
DIP 1987. 786, note P. Mayer) a même étendu l’effet de la renonciation au juge chargé de
l’exequatur de la sentence. Pour l’immunité d’exécution, v. infra, n° 998.
3. V., Civ. lre, 19 mars 2002, Rev. arb. 2002. 214, approuvant CA Paris, lre ch. civ.,
1er juin 1999, Rev. arb. 2000. 493 et l’article de B. Stem ibid., p. 403 et s. ; RTD com. 1999.
659, obs. E. Loquin; JDI 2000. 370, note E. Loquin.
780 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
CIRDI peut être acquise au moyen d’un accord distinct d’une conven¬
tion d’arbitrage1.
1. La convention de New York de 1958 n’infirme en rien cette solution, puisque son
article II.3 ne vise pas la validité de la convention d’arbitrage, mais seulement certains
éléments de nature à faire douter de son caractère opératoire.
2. La solution vaut a fortiori lorsque, une convention d’arbitrage ayant été convenue, la
procédure arbitrale n’a pas encore été mise en oeuvre.
3. V., Civ. lre, 18 nov. 1986, Atlantic Triton, Rev. crit. DIP 1987. 760, note B.Audit;
Rev. arb. 1987. 315, note Flécheux; TGI Paris, 15 mars 1995, JDI 1997. 813, note B. Audit;
CA Paris, lre ch. C., 7 juin 2001, Rev. arb. 2001. 616.
4. V., Civ. lre, 20 mars 1989, Eurodif, Rev. arb. 1989. 653, note Ph. Fouchard; JDI 1990.
1004, note Ouakrat.
5. V., Civ. lre, 20 mars 1989, Ipitrade, JDI 1989.1045, note Oppetit; Civ., 29 nov. 1989,
Balenciaga et 6 mars 1990, Horeva, Rev. arb. 1990. 633, note H. Gaudemet-Talion ; v. cepen¬
dant TGI Saint-Dié (ord. réf.), 2 févr. 1993, Rev. arb. 1995. 132, lreesp., obs. P. Véron; adde
P. de Vareilles-Sommières, « La compétence des tribunaux français en matière de mesures
provisoires, Rev. crit. DIP 1996. 397 et s., spéc. p. 434 et s.
6. CJCE 17 nov. 1998, Van Linden, Rev. arb. 1999. 143, note H. Gaudemet-Talion;
Rev. crit. 1999. 669 et s., chron. Marmisse et Wilderspin; RTD com. 2000. 340, obs.
J.-Cl. Dubarry et E. Loquin.
782 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 7 mai 1963, JCP 1963. II. 13405, note Goldman ; JDI 1964. 82, 2e esp., note
Bredin; Rev. crit. DIP 1963. 615, note Motulsky; D. 1963. 545, note Robert.
2. V. par exemple, art. 178, al. 3 LDIP suisse; acide, convention de Genève de 1961,
article 53 ; loi type de la CNUDCI, article 16.1.
3. Civ., 18 mai 1971, Impex, Rev. arb. 1972. 2, lre esp., note Kahn; Rev. crit. DIP 1972.
129, note Mezger; D. 1972. 37, note Alexandre; pour une résolution, v. CA Paris, 21 févr.
1964, JDI 1965. 113, note Goldman; Rev. crit. DIP 1964. 543, note Mezger.
4. Civ. lre, 6 déc. 1988, Navimpex, Rev. arb. 1989. 641, note Goldman; JDI 1990. 134,
note M.-L. Niboyet-Hoegy.
5. Selon la formule consacrée récemment par la Cour de cassation dans son arrêt Dalico
du 20 décémbre 1993, Rev. crit. DIP 1994. 663, note P. Mayer; JDI 1994. 432, note
E. Gaillard, et 690, 2e esp., note E. Loquin; Rev. arb. 1994. 116, note H. Gaudemet-Talion.
6. Civ. lre, 10 juill. 1990, L.-B. Cassia, Rev. arb. 1990. 851, note Moitry et Vergne.
Comp. Ph. Fouchard, E. Gaillard, B. Goldman, Traite', op. cit., n° 595, p. 376, très critiques
au sujet de cet arrêt; v. CA Paris, 11 sept. 1997, Rev. arb. 1998. 564; CA Paris, 19 janv. 1999,
Rev. arb. 1999. 601, 3e esp., note Ch. Jarrosson.
784 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
A. Évolution
1080 Dans le droit de l’arbitrage international de nombreux pays, la validité
de la convention d’arbitrage, comme bien d’autres aspects de son
régime juridique dépendent de la loi qui lui est applicable. L’utilisation
de la méthode conflictuelle n’empêche pas une certaine faveur à la
validité, ainsi que le démontre la règle de conflit alternative qui figure
à l’article de la LDIP suisse1 2.
Or la jurisprudence française s’est orientée de longue date délibéré¬
ment vers la méthode des règles matérielles, systématiquement orien¬
tées en faveur de la validité de la convention d’arbirtrage3 * S..
La question du droit applicable en la forme à une convention d’ar¬
bitrage a été posée à la Cour de cassation dans une affaire où l’une des
parties concluait à la nullité de la clause en raison d’un défaut de signa¬
ture pourtant exigée par la loi étrangère applicable au contrat.
La Cour de cassation répondit dans un arrêt de principe par une
formule très générale : « Attendu qu’en vertu d’une règle matérielle du
droit international de l’arbitrage, la clause compromissoire est indé¬
pendante juridiquement du contrat principal qui le contient directe¬
ment ou par référence et que son existence et son efficacité s’appré¬
cient, sous réserve des règles impératives du droit français et de l’ordre
1. Civ. lre, 25 oct. 2005, Rev. arb. 2006. 103, note J.-B. Racine; JDI 2006, note
F. -X. Train.
2. V., J.-F. Poudret et S. Besson, Droit comparé de l'arbitrage international, op. cit.,
p. 121 et s.
3. Un arrêt récent a approuvé une cour d’appel de n’avoir pas « recherché les consé¬
quences d’une application de la loi russe au litige, dès lors que les parties n’avaient pas
soumis la validité et les effets de leur convention d’arbitrage à cette loi, ni même à aucune
loi déterminée » (Civ. lre3, 30 mars 2004, Uni-Kod, Rev. arb. 2005. 959 note. Ch. Seraglini;
S. Bollée, JDI 2006. 127 et s.) RTD com 2004. 443 obs. E. Loquin; JCP 2004. II. 10132, note
G. Chabot. Il faut donc une manifestation spéciale de la volonté des parties quant à la loi
applicable à la clause d’arbitrage pour que la loi ainsi désignée puisse être prise en compte.
Cela est fort rare en pratique.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 785
1. V., Civ. lre, 20 déc. 1993, Dalico, JDI 1994. 432, note G. Gaillard et 690, note
E. Loquin; Rev. arb. 1994. 116, note H. Gaudemet-Talion; Rev. crit. DIP 1994. 663, note
P. Mayer; RTD com. 1994. 254, obs. J.-C. Dubarry et E. Loquin.
2. V. cependant, l’art. 7.2 de la loi type de la CNUDCI et l’art. Il de la convention de
New York de 1958.
3. V., B. Oppetit, « La clause arbitrale par référence », Rev. arb. 1990. 551 et s.; Bou-
cobza, « La clause d’arbitrage par référence en matière d’arbitrage commercial internatio¬
nal », Rev. arb. 1998. 495. V., T. féd. suisse, 7 févr. 1984, Tradax, Rev. arb. 1986. 589, chron.
R. Budin.
4. Civ. lre, 11 oct. 1989, Bomar OU I, Rev. arb. 1990. 134, note C. Kessedjian; JDI 1990.
633, note E. Loquin.
786 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. Civ. lre, 9 nov. 1993, JDI 1994. 690, note E. Loquin, Rev. arb. 1990. 551 et s.
2. Civ. lre, 3 juin 1997, Rev. arb. DIP 1999. 92, note P. Mayer.
3. Comp. Com. 14 nov. 2000, Rev. arb. 2001. 558, obs. C. Legros.
4. V. déjà Civ. lre, 3 mars 1992, Sonetex, JDI 1993. 140, note B. Audit.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 787
sée par la Cour de cassation sous le rappel des principes selon lesquels
l’existence et l’efficacité de la clause d’arbitrage s’apprécient « sans
qu’il soit nécessaire de se référer à une loi étatique ». Ainsi se confirme
que pour la Cour de cassation « l’existence et l’efficacité de la clause »
englobent à la fois la forme et le fond.
1. CA Paris, 19 juin 1970, JDI 1971. 836, note Oppetit; JCP 1971. II. 16927, note Gold¬
man; Rev. crit. DIP 1971. 692, note Level; Rev. arb. 1972. 67, note Ph. Fouchard; adde CA
Paris, 13 déc. 1975, Menicucci, JDI 1977. 106, note E. Loquin; Rev. crit. DIP 1976. 507, note
Oppetit; Rev. arb. 1977. 147, note Ph. Fouchard.
2. V., CA Paris, 30 nov. 1988 et 14 févr. 1989, Rev. arb. 1989. 691, note P.-Y. Tschanz;
28 nov. 1989, Rev. arb. 1990. 675, lre esp., note P. Mayer; 11 janv. 1990, JDI 1991. 141,
B. Audit; 17 déc. 1991, Rev. arb. 1993. 281, note Synvet.
3. Civ. lre, 5 janv. 1999, Rev. arb. 1999. 260, note Ph. Fouchard; Rev. crit. DIP 1999.
546, note D. Bureau; RTD com. 1999. 380, obs. E. Loquin; JDI 1999. 784, note S. Poillot-
Peruzzetto; RGDIP 1999. 409, obs. M.-Cl. Rivier.
4. V., CA Paris, 17 janv. 2002, Rev. arb. 2002. 391, note J.-B Racine; Civ. lre, 11 juill.
2006, D. 2006. IR. 2051.
788 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., B. Oppetit, « L’arbitrage et les tiers : présentation générale », Rev. arb.. 433 et s.;
D. Cohen, « Arbitrage et groupe de contrats », Rev. arb. 1997. 471 et s.
2. V., F. Leclerc, « Les chaînes de contrat en droit international privé », JDI 1995. 267
et s.
3. V., P. Mayer, « “La circulation” des conventions d’arbitrage », JDI 2005. 251 et s.,
spéc. p. 252, sur cette question, v. « L’arbitrage et les tiers », Rev. arb. 1988. 431 et s.;
E. Loquin, « Différences et convergences dans le régime de la transmission et de l’extension
de la clause compromissoire devant les juridictions françaises », Cahiers de l'arbitrage, Gaz.
Pal. 2002, n° 1, lre partie, p. 7; J.-F. Poudet, « Arbitrage et groupes de coontrats », Rev. arb.
1997. 471 et s. ; F.-X. Train, « Les contrats liés devant l’arbitre du commerce international »,
LGDJ, 2003.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 791
eux, sans qu’il soit besoin d’un consentement spécial du tiers. Celui-ci
n’est pas censé ignorer la teneur des droits qui lui sont transmis, et à
la transmission desquels il a apporté son concours, ou, s’il les a ignorés
(décès du créancier) auquel il peut toujours renoncer.
1. CA Paris, 1er nov. 1998, RTD com. 1999. 377, note J.-Cl. Dubarry et E. Loquin. Un
arrêt (CA Paris, 10 sept. 2003, Rev. arb. 2004. 623, note L. Aynès) a bien marqué l’absence
de contradiction, parfois relevée un peu rapidement, entre le caractère indépendant, ou
autonome, de la convention d’arbitrage et son caractère dit parfois « accessoire », relevé ici
et qui conduit la clause d’arbitrage à suivre le sort des droits substantiels. Sans autonomie,
ou séparabilité, la clause compromissoire ferait partie intégrante de l’économie du contrat,
et la question de l’accessoire ne se poserait pas non plus (v. note L. Aynès, préc.).
2. V., Civ. lre, 29 nov. 2005 et Com. 21 févr. 2006, JDI 2006. 622 note C. Legros,
DMF 2006.379, obs. Ph. Delebecque.
3. Civ. lre, 28 mai 2002, Cimat, Rev. arb. 2003. 397, note D. Cohen; Rev. crit. DIP2002.
758 note N. Coipel-Cordonnier; RTD com. 2002. 667, obs. E. Loquin, JCP 2003.1.105, obs.
Ch. Seraglini; M.-L. Niboyet, « La transmission automatique de la clause d’arbitrage :
ultime conséquence du principe de l’autonommie de l’accord compromissoire », Cahiers de
l'arbitrage, Gaz. Pal juillet 2004, p. 72 et s.
LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL ARBITRAL 793
CHAPITRE 3
LE TRIBUNAL ARBITRAL
ET L’INSTANCE ARBITRALE
1. Sur le statut des arbitres dans la jurisprudence française, v. Ph. Fouchard, Rev. arb.
1996, doctr. p. 325 et s.; Th. Clay, L’arbitre, préf. Ph. Fouchard, Dalloz, coll. « Nouvelle
Bibliothèque de Thèses », 2001.
2. V., Civ. lre, 7 janv. 1992, Dutco, Rev. arb. 1992. 470, note P. Bellet, JDI 1992. 707,
concl. Flipo et note Ch. Jarrosson; RTD com. 1992. 796, obs. J.-Cl. Dubarry et E. Loquin;
CA Paris, 7 oct. 1999, Rev. arb. 2000. 288, note D. Bureau.
LE TRIBUNAL ARBITRAL ET L’INSTANCE ARBITRALE 795
1. V., CA Paris, lre ch. C., 29 mars 2001, JDI 2002. 498, note critique D. Cohen; Civ.,
1er févr. 2005, Rev. arb. 2005. 693, note H. Muir-Watt; D. 2005. 2727, note S. Hotte; RTD
com. 2005.266, obs. E. Loquin; Gaz. Pal. 27/28 mai 2005. 37, note F.-X. Train; JCP 2005.
I. 1344, obs. ]. Béguin, Rev. crit. DIP 2006. 140, note Th. Clay.
2. V., Civ. lre, 7 mars 2000, Rev. arb. 2000. 447, lre esp., note A. Lacabarats.
3. Civ. 2e, 22 nov. 1989, Rev. arb. 1990. 142, note S. Guinchard; v. cependant pour le
cas où la décision du président du tribunal de grande instance était affectée d’un « vice
grossier », CA Paris, lre ch. C., 19 déc. 1995, Rev. arb. 1996. 110, note A. Hory; v. art. 11.5
de la loi type de la CNUDCI.
4. CA Paris, lre ch. suppl., 6 avr. 1990, Philip Brothers, Rev. arb. 1990. 880, note
M. de Boisseson.
5. V., Civ. 2e, 27 juin 1984, RTD civ. 1984. 775, obs. R. Perrot; CA Paris, 19 déc. 1995,
Rev. arb. 1996. 110, note A. Hory.
LE TRIBUNAL ARBITRAL ET L’INSTANCE ARBITRALE 797
1. Sur l’ensemble de la question, v. Ph. Fouchard, J.-Cl. Dr. int., fasc. 586.7.1 et Rev. arb.
1985. 5 et s.; G. Pluyette, intervention au colloque Perspectives d’évolution du droit français
de l’arbitrage; CA Paris, 27 janv. 1992, Rev. arb. 1992. 314 et s.
2. V., G. Pluyette, op. cit., p. 315 et s. ; TGI Paris, 13 juill. 1999, Rev. arb. 1999. 625, obs.
D. B.
3. V., TGI Paris (ord. réf.), 12 juill. 1989, La belle créole, Rev. arb. 1990. 176, lrc esp.,
note Ph. Kahn.
4. V., TGI Paris (ord. réf.), 24 févr. 1992 et 15 avr. 1992, Rev. arb. 1994. 557, obs.
Ph. Fouchard.
5. V., TGI Paris (ord. réf.), 14 juin 1989, 29 juin 1989, 15 juill. 1989, Philip Brothers,
Rev. arb. 1990. 497 et les rapports au colloque sur les institutions d’arbitrage en France,
Paris, 19 janv. 1990, de M. de Boisseson, Rev. arb. 1990. 337 et s. et G. Pluyette, ibid., p. 353
et s.
798 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., CA Paris, lre ch. A, 18 nov. 1987 et 4 mai 1988, Rép. de Guinée, préc. et CA Paris,
lre ch. suppl., 6 avr. 1990, Philip Brothers, Rev. arb. 1990. 880, note M. de Boisseson.
2. V., G. Pluyette, op. cit., Rev. arb. 1992. 318; TGI Paris (ord. réf.), 24 févr. 1992 et
15 avr. 1992, Rev. arb. 1994. 557, obs. Ph. Fouchard et les affaires Philip Brothers et Rép. de
Guinée préc.
LE TRIBUNAL ARBITRAL ET L’INSTANCE ARBITRALE 799
Ce moyen est fort rarement utilisé. Elles peuvent ensuite régler indi¬
rectement la procédure en se référant à un règlement d’arbitrage, qui
pourra être soit le règlement de l’institution à laquelle elles se seront
adressées, soit un règlement d’arbitrage comme celui de la CNUDCI,
lequel trouve ici toute son utilité.
Elles peuvent enfin se référer à une loi de procédure qu’elles auront
désignée librement (loi suisse, loi française, etc.).
2. Dans le silence de la convention d’arbitrage sur ce point — ou,
faut-il ajouter, pour le cas où les indications données par les parties
seraient insuffisantes — il reviendra aux arbitres de déterminer eux-
mêmes les règles de procédure1. L’article 1494, alinéa 2 NCPC prévoit,
de la même façon qu’à l’égard des parties, que les arbitres pourront soit
fixer eux-mêmes les règles de procédure, soit se référer à un règlement
d’arbitrage ou à une loi.
Dans une formule plus synthétique et qui insiste encore davantage
sur la liberté des arbitres, la loi type de la CNUDCI sur l’arbitrage
(art. 19) et le règlement d’arbitrage de la CNUDCI (art. 15) déclarent
qu’il appartient au tribunal arbitral de procéder « comme il l’estime
approprié ». La formule est heureuse car la détermination des règles de
procédure relève essentiellement des pouvoirs propres de l’arbitre.
En précisant que les arbitres règlent la procédure « autant qu’il est
besoin », l’article 1494, alinéa 2 laisse bien entendre que les arbitres ne
sont nullement tenus d’adopter une position figée en début d’instance
et qu’ils peuvent se contenter de fixer les règles les plus importantes
qu’ils compléteront en fonction des besoins et selon l’évolution de
l’instance.
B. Siège de l’arbitrage
1104 Le droit français de l’arbitrage international ne comporte pas de dispo¬
sition spécifique pour la fixation du siège de l’arbitrage. Il s’agit d’une
mesure de procédure que l’article 1494 NCPC laisse à la libre détermi¬
nation des parties ou des arbitres. Une fois ce choix exercé par les par¬
ties, notamment dans la convention d’arbitrage, il devient extrême¬
ment difficile d’en obtenir la modification si les deux parties ne sont
pas d’accord pour décider de ce changement. Ainsi un tribunal arbitral,
statuant dans le cadre d’un arbitrage CCI, a refusé d’accéder à la
demande d’une partie de déplacer le siège de l’arbitrage de Belgrade à
Genève3 Certains règlements d’arbitrage, comme celui de la CCI,
décident que la Cour internationale d’arbitrage « fixe le siège à moins
que les parties n’en soient convenues » (art. 12).
C. Langue de l’arbitrage
1105 II revient en principe aux parties de fixer la langue de l’arbitrage. Dès
lors qu’un choix aura été effectué et qu’aucune distinction n’aura
été introduite, cette langue s’imposera dans les échanges écrits ou
oraux ainsi que la rédaction de la sentence (cf. art. 22 de la loi, modèle
CNUDCI).
En l’absence de décision des parties sur ce point, il appartiendra aux
arbitres de déterminer la langue de l’arbitrage2. Ils peuvent également
prescrire la traduction de tout ou partie des documents échangés. Les
arbitres se baseront souvent sur la langue du contrat ou des premiers
documents si elle est unique. Cependant, le nouveau règlement d’arbi¬
trage de la CCI n’en fait plus qu’un élément parmi d’autres (art. 16).
L’on a d’ailleurs remarqué que l’importance de la langue utilisée
dans le cours de l’arbitrage était plus grande que pour la seule rédaction
du contrat3 : d’où la possibilité de laisser les parties s’exprimer dans
leur propre langue tout en choisissant une langue unique pour la rédac¬
tion des actes de la procédure (la traduction simultanée est toujours
envisageable mais évidemment coûteuse)4.
1. Ces règles ne peuvent être que d’importance secondaire. Elles ne sauraient toucher la
substance de la procédure, mais seront plutôt relatives à certaines « modalités d’exécution »
de l’arbitrage, comme l’exigence de dépôt de la sentence au greffe d’un tribunal (v. art. 193
LDIP suisse).
2. V. cependant CA Paris, lre ch. C., 23 juin 2005, D. 2005. 3059, pan. Th. Clay, où la
cour d’appel refuse d’annuler une sentence alors que les arbitres avaient rendu une ordon¬
nance de procédure autorisant l’échanges de certaines conclusions dans une langue non
choisie pour l’arbitrage.
3. M. de Boisseson, Le droit français de l'arbitrage, op. cit., n° 739, p. 725.
4. V. sentence CCI, aff. 8817, JDI 1999. 1080, obs. D. H.
802 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., CA Paris, lre ch. C, 25 mars 1994, Rev. arb. 1994. 391, note Ch. Jarrosson;
Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traite', op. cit., n°1226.
2. V., S. Jarvin, « Les décisions de procédure des arbitres peuvent-elles faire l’objet d’un
recours juridictionnel ? », Rev. arb. 1998. 611.
3. V. Y. Derains, « La pratique de l’administration de la preuve dans l’arbitrage
commercial international », Rev. arb. 2004. 781 et s.
4. V., art. 1460 al. 3 NCPC.
5. V., art. 184 LDIP suisse; art. 27 de la loi type de la CNUDCL
804 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
E. Le délai d’arbitrage
1108 1) Délais pour les actes de procédure O Comme toute procédure
juridictionnelle l’arbitrage suppose que les actes de procédure soient
accomplis selon certains délais (communication des écritures, échanges
de pièces). En règle générale il appartiendra au tribunal arbitral de fixer
ces délais, le cas échéant en accord avec les parties. À titre indicatif,
l’article 23 du règlement d’arbitrage de la CNUDCI retient un délai de
quarante-cinq jours, en précisant qu'un tel délai peut être prorogé par
le tribunal arbitral.
1. V., Ph. Grandjean, « La durée de la mission des arbitres », Rev. arb. 1995. 39 et s.;
Ch. Jarrosson, chron. de droit de l’arbitrage, R] com. 1997. 77.
2. Pour une excellente Théorie du délai arbitral, v. M. de Boisseson, op. cit., n° 764 et s. ;
CA Paris, lre ch. C., 26 oct. 2000, Rev. arb. 2001. 200, obs. Ph. Pinsolle.
3. V. Civ. lre, 30 juin 1976, JDI 1977. 114, note B. Oppetit; CA Paris, 15 juin 1994, Rev.
arb. 1995. 88, lre esp., note E. Gaillard.
4. V., M. de Boisseson, op. et loc. cit. ; E. Gaillard, obs. préc., Rev. arb. 1995. 96 et s.
LE TRIBUNAL ARBITRAL ET L’INSTANCE ARBITRALE 805
1. Une prorogation tacite est possible, v. Civ. 2e, 11 mai 2000, Rev. arb. 2000. 635, note
E. Taÿ Pamart; Civ. 2e, 18 oct. 2001, Rev. arb. 2001. 923, mais cf. Civ. 2e, 7 nov. 2002, Rev.
arb. 2002.115, note E. Loquin.
2. La Cour de cassation impose aussi aux centres d’arbitrage la notification des pro¬
rogations de délais aux parties. V., Civ. lre, 6 juill. 2005, JCP 2005.1. 179, § 4 obs. J. Ortsc¬
heidt, D. 2005. 3061, pan. Th. Clay.
3. V., TGI réf., 12 janv. 1988, 10 mai 1990, 30 oct. 1990, 6 juill. 1990, Rev. arb. 1994.
538, obs. Ph. Fouchard.
4. V. supra, n° 557.
5. Civ. lre, 15 juin 1994, Degrémont, Rev. arb. 1995. 88, 2e esp., note E. Gaillard.
6. Art. 1502, 2e NCPC. V., Civ. lre, 6 déc. 2005, Rev. arb. 2006. 126, note Ch. Jarrosson,
admettant également une responsabilité des arbitres fondée sur une obligation de résultat.
7. V., CA Colmar, 21 sept. 1993, Rev. arb. 1994. 348, note D. Cohen.
8. J.-Ch. Pommier, « La résolution du conflit de lois en matière contractuelle en pré¬
sence d’une élection de droit : le rôle de l’arbitre », JDI 1992. 5 et s.
806 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1112 2. La référence opérée par l’article 1496 aux règles de droit donne à la
volonté des parties le champ le plus large. De la façon la plus classique,
les parties peuvent choisir une loi étatique. Ce choix devra être suivi
d'effet. Il pourra d’ailleurs provoquer l’application d’une convention
internationale portant droit uniforme (comme la convention de
Vienne sur les ventes internationales de marchandises) si par ailleurs
les parties n’ont pas clairement laissé entendre leur refus de voir appli¬
quer ladite convention3.
Les parties pourraient même se référer à un texte de droit uniforme
en dehors de ses propres prévisions : il s’agit toujours de « règles
de droit » et l’arbitre est avant tout tenu de respecter la volonté des
parties4.
Enfin les parties peuvent avoir la volonté que leur contrat soit uni¬
quement soumis à la lex mercatoria, ce qu’elles exprimeront au moyen
de clauses ou d’écritures dont l’interprétation n’est pas toujours aisée.
On sait que l'arbitrage constitue un lieu privilégié pour l’élaboration
comme pour l’application de la lex mercatoria. C’est en approuvant
l’application de la lex mercatoria au fond du litige par certaines sen¬
tences arbitrales rendues en matière internationale que la Cour de
cassation a manifesté sa propre reconnaissance de la lex mercatoria5.
Les Principes Unidroit peuvent être appliqués en fonction de leur dési-
choisir une loi étatique, un texte de droit uniforme, les principes trans¬
nationaux ou la lex mercatoria \ Mais comme ils ne choisissent pas
pour eux-mêmes, il est assez naturel qu’ils s’efforcent d’effectuer un
choix approprié car seul un tel choix peut être vraiment conforme à la
nature de la mission qui leur a été confiée. Le choix que les arbitres
vont exercer est un choix de substitution, non un choix d’autorité.
L’article 1496, alinéa 2 réserve une mention particulière aux usages
du commerce. Il indique que dans tous les cas (c’est-à-dire que les
parties aient choisi ou non le droit applicable) l’arbitre « tient compte
des usages du commerce ».
Ce rappel est digne d’attention dans un texte aussi laconique que
l’article 1496. Il suggère deux remarques. La première est relative à
la place des usages du commerce : ceux-ci sont toujours susceptibles
de trouver application quelle que soit la nature du droit applicable. Ils
constituent en effet des règles de conduite susceptibles de s’insérer
harmonieusement dans n’importe quel système de règles, y compris
une loi étatique, dès lors que les parties n’ont pas manifesté leur volonté
commune de s’en écarter.
La seconde est relative à la controverse sur la nature exacte des
usages du commerce. Alors même qu’une conception large des usages
du commerce dans le commerce international n’est pas conceptuelle¬
ment insoutenable1 2, celle-ci se trouve manifestement condamnée ici :
admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser les arbitres à appli¬
quer la lex mercatoria (à laquelle équivaut pratiquement la conception
extensive des usages) même dans les cas où le choix des parties s’est
explicitement porté vers un seul autre ensemble normatif, notamment
la loi d’un État3.
1. Sur l’application par les arbitres des Principes Unidroit pour les contrats de com¬
merce international, v. « Principes d’unidroit relatifs aux contrats du commerce internatio¬
nal. Réflexions sur leur utilisation dans l’arbitrage international », CCI / UNIDROIT, Bull,
de la Cour internationale de la CCI suppl. spécial; Ch. Seraglini, « Du bon usage des Principe
Unidroit dans l’arbitrage international », Rev. arb. 2003. 1101 et s.
2. V., E. Loquin, La réalité des usages du commerce international, préc.
3. Dans le même sens, Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traité... op. cit., n° 1513
et 1514. La pratique arbitrale n’est cependant pas toujours suffisamment rigoureuse.
V. cpdt., Civ. lre, 15 juin 1994, Sonidep, Rev. arb. 1995. 88, lre esp., note E. Gaillard.
LE TRIBUNAL ARBITRAL ET L’INSTANCE ARBITRALE 809
1. V. art. 187.1; sur cette règle, v. P. Lalive, J.-F. Poudret et Cl. Reymond, Le droit de
l’arbitrage interne et international en suisse, Payot, 1989, p. 387 et s.
2. Sur tous ces points, v. Y. Derains, « L’application cumulative par l’article des sys¬
tèmes de conflits de lois intéressés au litige», Rev. arb. 1972. 99 et s.; Ph. Fouchard,
E. Gaillard et B. Goldman, Traité, p. 880 et s.; v. sentence, CCI, aff. n°6840, en 1991,
JDI 1992. 1030, obs. Y. D.
3. V. pour une étude récente « Transnational rules in international commercial arbitra-
tion », éd. par E. Gaillard, ICC public. n°480/4, 1993; v. sentence CCI, aff. n°6500, en
1992, JDI 1992. 1015, obs. J.-J. A.
4. V. Ch. Seraglini, « Du bon usage des principes Unidroit dans l’arbitrage internatio¬
nal », Rev. arb. 2003.1101 et s.; « Principes d’Unidroit relatifs aux contrats du commerce
international, Réflexions sur leur utilisation dans l’arbitrage international », suppl. spécial
Bull, de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI, ICC/UNIDROIT, public, 642-F, 2002.
810 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1117 L’on doit se souvenir ici qu’en présence d’une loi de police étrangère un
juge dispose d’un pouvoir d’appréciation (cf. art. 7 de la convention de
Rome). Le même pouvoir d’appréciation ne saurait manifestement être
refusé à l’arbitre pour qui toutes les lois de police doivent être considé¬
rées comme étrangères. Mais les considérations susceptibles de guider
l’arbitre dans cette appréciation sont un peu différentes. D’un côté,
l’origine contractuelle de sa mission le rend tributaire de la volonté des
parties : or celle-ci n’est sans doute pas orientée vers l’application de la
loi de police et peut même se muer en volonté d’exclusion. D’un autre
côté, l’arbitre doit se soucier de l’efficacité de sa sentence. Elle est à vrai
dire fort peu menacée sur le plan de la loi applicable car ce point n’est
pas soumis en tant que tel au contrôle du juge de l’annulation. En
revanche, la contrariété à l’ordre public international du juge de
l’annulation constitue une cause d’annulation de la sentence (NCPC,
art. 1502, 5°). La menace se fait plus présente sans être toutefois
1. V. cpdt, en faveur d’une telle coïncidence, la sentence rendue dans l’affaire Hilmarton
(sentence CCI, n° 5622 du 19 août 1988), Rev. arb. 1993. 327, annulée par la T. féd. suisse,
17 avr. 1990, Rev. arb. 1993. 315.
2. V. supra, la jurisprudence citée au sujet de l’arbitrabilité du litige.
3. V., L. Idot, « Les conflits de lois en droit de la concurrence », JDI 1995. 321 et s., spéc.
n° 17, p. 329; v. toutefois, infra n° 1142.
4. V. la sentence CCI, aff. 1859, de 1973 citée par Y. Derains, op. cit., p. 40; adde les
fortes affirmations d’une sentence arbitrale citée par Y. Derains, Rev. arb. 1973. 122;
v. sentence CCI, aff. 6142, en 1990, JDI 1990. 1039, obs. Y. D. annulant un contrat de
licence de marque en fonction d’un décret espagnol; v. Ch. Seraglini, Lois de police et justice
arbitrale internationale, Dalloz, 2001.
5. V. la sentence CCI, aff. 6294, de 1991, JDI 1991. 1050, obs. J.-J. A. et les sen¬
tences citées par Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traité, op. cit., n° 1526 et
1527; pour le refus d’application de la loi américaine « Rico » dans le cas d’un contrat
soumis par les parties à la loi brésilienne, v. sentence CCI, n° 6320 de 1992, JDI 1995. 986,
obs. D. H.
6. V. sentence CCI, aff. 3281, en 1981, JDI 1982. 991, obs. Y. Derains; dans le même
sens, v. sentence CCI, aff. 4338, en 1984, JDI 1985. 981, obs. Y. Derains.
7. V., P. Mayer, « Le mythe de “l’ordre juridique de base” (ou Grundlegung) », in Études
offertes à B. Goldman, op. cit., p. 199 et s., spéc. p. 216; dans le même sens, Ph. Fouchard,
E. Gaillard et B. Goldman, Traité, op. cit., n°1534.
812 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
§ 5 L’amiable composition
1119 L’amiable composition autorise l’arbitre à ne pas s’en tenir à la rigueur
d’un raisonnement juridique dont la règle de droit et le contrat sont les
principaux points d'appui si les exigences de l’équité lui paraissent
appeler une solution différente6.
L’amiable composition ne peut se présumer et doit résulter d’une
volonté certaine des parties (v. art. 1497 NCPC selon lequel « l’arbitre
statue comme amiable compositeur si la convention des parties lui a
conféré cette mission »).
Lorsque tel est le cas, l’amiable composition n’est pas inconciliable
avec l’application par l’arbitre de règles de droit7. Mais l’arbitre tire de
ses pouvoirs d’amiable compositeur la faculté d’écarter une règle dont
l’application lui paraîtrait conduire à des résultats contraires à l’équité.
Cela signifie aussi qu’il peut parfaitement appliquer une règle sans faire
un usage effectif de ses pouvoirs d’amiable compositeur. Mais il faut
alors qu'il se soit assuré de la compatibilité de la solution qui en découle
avec l’équité : sinon il n’aurait pas fait ce que les parties attendent de lui.
L’amiable composition est un devoir autant qu’un pouvoir8 II est délicat
2001, D. 2001. 2780, note N. Rontchevsky, Rev. arb. 2001, 135, lre esp., note E. Loquin;
CA Grenoble, 15 déc. 1999, 2 arrêts, Rev. arb. 1999. 135, 2e et 3e esp., note E. Loquin.
1. Civ. lre, 8 juill. 2004, JCP 2004. I. 179, n°4, obs. Ch. Seraglini; comp. CA Paris,
19 mai 2005, RTD com. 484, obs. E. Loquin.
2. E. Loquin, L’amiable composition..., préc., n°483.
3. V., CA Paris, lre ch. suppl., 19 avr. 1991, Rev. arb. 1991. 673, obs. E. Loquin.
4. V., CA Paris, 28 nov. 1996, Rev. arb. 1997. 381, note E. Loquin; CA Paris, 21 nov.
1997, Rev. arb. 1998. 704, obs. Y. D.
5. V., CA Paris, Ve ch. suppl., 6 mai 1988, Rev. arb. 1989. 83, note E. Loquin; CA Paris,
lre ch. suppl., 19 avr. 1991, préc.
6. V., CA Paris, 4 nov. 1997, préc.
814 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
CHAPITRE 4
LA SENTENCE ARBITRALE
ET LA PHASE POST-ARBITRALE
1120 La décision des arbitres prend la forme d’une sentence. Avec la sen¬
tence rendue sur le fond s’achève la mission des arbitres. L’affaire sera
terminée si la sentence est exécutée volontairement par les deux parties
(Section 1). Cependant une phase post-arbitrale plus ou moins nour¬
rie peut s'ouvrir si la partie perdante refuse l’exécution ou entend user
d’une voie de recours (Section 2). Les tribunaux étatiques seront alors
saisis.
1. CA Paris, lre ch. urg., 25 mars 1994, Rev. arb. 1994. 391, note Ch. Jarrosson. Comp.,
pour une définition plus large, indispensable dans certains cas, exigeant que le Tribunal
arbitral qui est l’auteur de la sentence, offre « des garanties suffisantes d’impartialité
et d’indépendance ». T. féd. suisse 15 mars 1993 — ATF 119 II 271, JDI 1996. 735, chron.
P. Lalive et M. Scherer.
2. V., CA Paris, lre ch. C., Rev. arb. 1999. 834, note Ch. Jarrosson. Pour le refus de
reconnaître à une fatwa la valeur d’une sentence arbitrale, v. Cass, libanaise 23 avril 2002,
Rev. arb. 2003. 457, note M.-F. Slim et H. Slim.
3. V., CA Paris, lre ch. C., 7 oct. 2004, JDI 2005. 341, note A. Mourre et P. Pedone; JCP
2005.1. 13, § 5 et 7, obs. J. Ortscheidt; JCP 2005. II. 10071, note J.-M. Jacquet.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 815
1. V., CA Paris, lre ch. suppl., 19 déc. 1986, Rev. arb. 1987. 359, et le commentaire
d’E. Gaillard, p. 275 et s., et Civ. lre, 8 mars 1988, Rev. arb. 1989. 481, note Ch. Jarrosson.
2. Le droit français de l’arbitrage international est muet sur ce point, mais la pratique
est couramment admise. Dans le même sens, v. art. 188 LDIP suisse; art. 1049 CPC néer¬
landais; art. 21, paragraphe 1er règlement d’arbitrage CCI.
3. V., les observations de Ch. Jarrosson sous CA Paris, lrech. suppl., 9 juill. 1992 et
CA Paris, 25 mars 1994, Rev. arb. 1994. 391.
4. V., S. Jarvin, « Les décisions de procédure des arbitres peuvent-elles freiner l’objet
d’un recours juridictionnel? », Rev. arb. 1998. 611 et s. et la définition citée p. 614 du
Black’s law dictionary : « The mode of proceeding by which a legal right is enforced as dis-
tinguished from substantive law which gives of defines the right ».
5. V., Civ. 2e, 6 déc. 2001, Rev. arb. 2001. 932. Pour une solution contraire, admettant
Vexequatur d’un « order » en fonction de la convention de New York de 1958, v. CA États-
Unis (7e circuit), 14 mars 2000, Rev. arb. 2000. 657, obs. Ph. Pinsolle.
6. V. J.M. Tchakoua, « Le statut de la sentence arbitrale d’accord parties : les limites d’un
dégrisement bien utile », RD aff. int. 2002 p. 775 et s.
816 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
B. Forme de la sentence
1123 Le droit français de l’arbitrage interne comporte certaines exigences
quant à la présentation formelle de la sentence (art. 1471 à 1473
NCPC) dont certaines sont sanctionnées par la nullité. Cependant, ces
exigences ne sont pas reprises en matière d’arbitrage international et
même lorsque la loi française régit la procédure, la sanction de la nul¬
lité est écartée (cf. art. 1502 NCPC).
Néanmoins, la volonté des parties et la référence fréquente à un
règlement d’arbitrage peuvent imposer aux arbitres le respect de
certaines formes. La pratique arbitrale s’oriente spontanément dans le
même sens.
1. CA Paris, lre ch. C., 22 sept. 1995, deux arrêts, Rev. arb. 1996. 100, note E. Gaillard.
2. Civ. lre, 22 nov. 1966, JDI 1967. 631, note B. Goldman ; Rev. crit. DIP 1967. 372, note
Ph. Francescakis ; comp. introduisant une réserve en cas d’atteinte à l’ordre public ou aux
droits de la défense, Civ. lre, 18 mars 1980, Rev. arb. 1980. 496, note Mezger; JDI 1980. 874,
note E. Loquin.
3. CA Paris, 16 juin 1988, Rev. arb. 1989. 309, note Ch. Jarrosson.
818 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. Pour une application, v. CA Paris, 11 mars 1997, Rev. arb. 1997. 606, obs. L. D.
2. Sur cette question, v. D. Hascher : « L’autorité de la chose jugée des sentences arbi¬
trales », Travaux comité fr. D/P 2002-2004, p. 17 et s.; P. Mayer : « Litispendance, connexité
et chose jugée dans l’arbitrage international », in Liber amicorum Cl. Reymond, Litec, 2004,
p. 185 et s.
3. V., TGI Paris, réf., 30 janv. 1985, Rev. arb. 1985. 289, 2e esp., note P. Bellet; CA Paris,
9 juill. 1992, Rev. arb. 1994. 133, note Ph. Théry.
4. V., N. Garnier, « Interpréter, rectifier et compléter les sentences arbitrales internatio¬
nales », Rev. arb. 1995. 565 et s.
5. Selon l’expression due à P. Mayer, v. Y. Derains (dir.), Droit et pratique de l’arbitrage
international en France, éd. du Feduci, 1984, p. 81 et s.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 819
A. La reconnaissance
1128 Elle est l’admission par l’ordre juridique français de l’existence de
la sentence. Elle se distingue de Y exequatur dans la mesure où elle ne
tend pas à l’exécution forcée : ainsi une partie peut demander en France,
la reconnaissance d’une sentence ayant débouté son adversaire : cela
n’implique aucune mesure d’exécution b
En revanche, elle se distingue malaisément de l’autorité de chose
jugée : si un plaideur invoque une sentence internationale dans un
procès dirigé contre lui en France ne pourrait-il se contenter de se
retrancher derrière l’autorité de chose jugée? La doctrine propose de
distinguer l’une et l’autre en cas de contestation : l’autorité de chose
jugée impliquerait alors que soient satisfaites les conditions de la recon¬
naissance1 2. Comme celles-ci sont les mêmes que celles de la demande
d’exequatur, elles vont être présentées ci-dessous.
1. V., Civ. lre, 13 juin 1978, Rev. crit. DIP 1978. 722, note B. Audit; JDI 1979. 414,
obs. Ph. Kahn.
2. V., CA Paris, lre ch. C., 18 janv. 2001, Rev. arb. 2001. 230; CA Paris, lre ch. C.,
22 févr. 2001, Rev. arb. 2001. 235.
3. V., Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traite'..., op. cit., n°1572, p. 909.
V. art. 1478, al. 1er NCPC.
4. Pour un exemple de refus de considérer une sentence contraire à l’ordre public inter¬
national, v. Civ. lre, 19 nov. 1991, Rev. arb. 1992. 76, note L. Idot.
5. Pour la question de l’exécution provisoire, v. Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman,
Traite'... op. cit., n°1578, p. 913.
6. V., J. Paulsson, « L’exécution des sentences arbitrales dans le monde de demain »,
Rev. arb. 1998. 937 et s.; Ph. Fouchard, « Suggestions pour accroître l’efficacité internatio¬
nale des sentences arbitrales », Rev. arb. 1998. 653 et s.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 821
1. V., CA Paris, lre ch. C., 2 avril 1998, Rev. arb. 1999. 821, note B. Leurent; Civ. lre,
17 oct. 2000, Rev. arb. 2000. 648, note P. Mayer.
2. V., A. Bûcher, Le nouvel arbitrage international en Suisse, Bâle, 1988, p. 138-139;
P. Lalive, J.-F. Poudret et Cl. Reymond, Le droit de l'arbitrage interne et international en suisse,
Payot, 1989, p. 456 et s.
3. V., Civ. lre, 11 juin 1991, Soabi c. État du Sénégal, Rev. arb. 1991. 637, note A. Broches.
822 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
Techniquement il peut être dirigé soit contre les sentences dont Vexe-
quatur ou la reconnaissance n’ont pas (encore) été accordées, soit
contre des sentences ayant déjà bénéficié de la reconnaissance ou l’exe-
quatur en France, qui sont de loin les plus nombreuses (cf. art. 34 de
la loi type CNUDCI).
1. V. CA Paris, lre ch. suppl., 12 déc. 1989, Rev. arb. 1990. 863, note P. Level; Civ. lre,
6 avr. 1994, Rev. arb. 1995. 263, note P. Level; CA Paris, lre ch. C., 14 juin 2001, Rev. arb.
2001. 773, note Ch. Seraglini ; CA Paris, lre ch. C., 29 mars 2001, Rev. arb. 2001. 543, note
D. Bureau. Comp. CA 9e circuit États-Unis, 9 déc. 1997, Rev. arb. 1999, 886, obs. D. Has-
cher. CA Paris, 19 févr. 2004, Rev. arb. 2004. 859, 4e esp., note L. Jaeger.
2. Civ. lre, 25 mai 1992, Fougerolle c. Procofrance, Rev. arb. 1993. 3 et s., avec le com¬
mentaire de M. de Boisseson; JDI 1992. 974, note E. Loquin; Rev. crit. DIP 1992. 699, note
B. Oppetit; Civ. lre, 11 déc. 2001, Rev. arb. 2002. 201; adde E. Loquin, « Perspectives
pour une réforme des voies de recours », Rev. arb. 1992. 321, spéc. p. 332, 333. Il est à noter
que le Tribunal fédéral suisse a admis la révision non prévue en vertu de la théorie des
« lacunes ». V. T. féd., 11 mars 1992, Rev. arb. 1993. 115, note Tschanz. Adde, Civ. lrc,
19 déc. 1995, Westman Int., Rev. arb. 1996. 49, note D. Bureau.
3. V., CA Paris, lre ch. suppl., 16 févr. 1989, Almira, Rev. arb. 1989. 711, note L. Idot.;
v. CA Paris, lre ch. C., 19 oct. 2000, 2 oct. 2003, 16 oct. 2003, 19 févr. 2004, Rev. arb.
2004.859, note L. Jaeger.
824 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., art. 1505 NCPC. Il a été précisé que la signification envisagée est une signification
à la partie, et non pas au conseil de celle-ci, v. Paris, 14 mars 1989, Rev. arb. 1991. 355, obs.
Moitry et Vergne.
2. V., Civ. 2e, 18 oct. 2001, Rev. arb. 2002. 157, note Ph. Pinsolle.
3. V., CAParis, lrc ch. C., 28 juin 2001, Rev. arb. 2002. 163, note J. Paulsson.
4. V. supra, n° 1132 et s.
5. Art. 1490 NCPC, auquel renvoie l’art. 1507.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 82 5
1. CA Paris, 14 janv. 1997, Rev. arb. 1997. 395, note Ph. Fouchard; adde, CA Paris,
lre ch. C, 29 sept. 2005, Bechtel, D. 2005. Pan. 3063 par Th. Clay, Stockkholm Int. arb.
Review 2005. 3. 151. obs. A. Mourre; Rev. arb. 2006. 695, note H. Muir-Watt.
2. US District Court of Columbia, 31 juill. 1996, Rev. arb. 1997. 439; et, moins
catégorique, 17 mars 2006, Rev. arb. 2006. 786, note J. Paulsson.
3. V., CA Paris 29 sept. 2005, Rev. crit. DIP 2006. 387, note A. Szekely, Stockholm Int.
arb. Rev. 2005. 3. 151 et s., obs. A. Mourre.
4. V., CA Paris, 23 oct. 1997, Rev. arb. 1998. 143, note Ph. Fouchard; CA Paris, 31 mars
2005, Rev. arb. 2005. 665, note E. Gaillard.
5. C. suprême d’Autriche, 20 oct. 1993, Rev. arb. 1998. 419, note P. Lastenouse et
P. Senkovic.
6. V., CA des États-Unis (2e circuit), 12 août 1999, Rev. arb. 2000.135, note E. Gaillard
et la jurisprudence citée.
7. V., J.-F. Poudret, « Quelle solution pour en finir avec l'affaire Hilmarton? Réponse à
Ph. Fouchard », Rev. arb. 1998. 7 et s. et Cf. Ph. Fouchard, « La portée internationale de l’an¬
nulation de la sentence arbitrale dans son pays d’origine», Rev. arb. 1997. 329 et s.; adde,
E. Gaillard, « L’exécution des sentences annulées dans leur pays d’origine », JDI 1998. 645 et s.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 827
1. V., CA Paris, 12 févr. 1993, Rev. arb. 1993. 255, 2e esp., note D. Hascher; Civ. lre,
10 juin 1997, JDI 1997. 1033, note E. Gaillard.
2. V., Civ. lre, 20 déc. 1993, Fougerolle, Rev. arb. 1994. 126, note P. Bellet.
3. V., Civ. 2e, 31 janv. 2001, Rev. arb. 2002. 209; CA Aix, 4 juin 2003, Rev. arb. 2006.
139.
4. V., Civ. lre, 23 févr., Rev. arb. 1994. 683.
828 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
Tel est le cas lorsque l'auteur du recours s’appuie sur une contradiction
de motifs dans la sentence T
B. Dans le cadre ainsi tracé, le juge chargé d’exercer le contrôle de
la sentence n’est en rien limité par les énonciations de fait ou de droit
qu’elle contient dans sa recherche du bien-fondé des griefs articulés
contre la sentence. Ainsi que l’a exprimé la Cour de cassation : « aucune
limitation n’est apportée au pouvoir (de la cour d’appel) de rechercher
en droit et en fait tous les éléments concernant les vices en ques¬
tion 1 2 ».
4. Enfin les griefs qui ne reposent pas sur des éléments découverts
par les parties lorsqu’elles découvrent le contenu de la sentence, mais
qui reposent sur une irrégularité affectant la clause compromissoire ou
des irrégularités de procédure (composition du tribunal arbitral,
conduite de l’instance...) doivent être soulevés dès que les parties en
ont connaissance3. Il n’en irait autrement que si les règles applicables
à la procédure ne permettaient pas en pratique à la protestation de
produire un effet quelconque4.
1. V., CA Paris, lre ch. C., 17 janvier 2002, Rev. arb. 2002. 203. Dans le même sens,
comp. Cass, tunisienne, 23 février 2000, Rev. arb. 2001. 597, note A. Ouerfelli; Civ. lre,
11 mai 1995 et CA Paris, lre ch. C., 26 oct. 1999, Rev. arb. 1999. 811, note E. Gaillard;
Civ. lre, 14 juin 2000; CA Paris, lre ch. C., 16 nov. 2000, CA Paris, lre ch. C, 28 juin 2001,
Rev. arb. 2001. 729, note H. Lécuyer, les deux premiers de ces arrêts ajoutant la précision
selon laquelle le contenu de la motivation de la sentence échappe au contrôle du juge de
l’annulation, hors les cas de violation du principe de la contradiction ou de contrariété de
la sentence à l’ordre public international.
2. Civ. lre, 6 janv. 1987, JDI 1987. 638, note B. Goldman; Rev. arb. 1987. 469, note
Leboulanger; CA Paris, lre ch. C., 10 sept. 1998. 583, obs. J.-B. Racine.
3. V., CA Toulouse, 17 nov. 1986, Rev. arb. 1987. 175, note Zollinger; CA Paris, 12 déc.
1996, Rev. arb. 1998. 698, chron. D. Bureau; CA Paris, 24 juin 1997, Rev. arb. 1997. 588,
obs. D. Bureau; CA Paris, lre ch. C., 14 juin 2001, Rev. arb. 2001. 773, note Ch. Seraglini;
CA Paris, lre ch. C., 14 déc. 1999, Rev. arb. 2000. 471, note J.-B. Racine; L. Cadiet, « La
renonciation à se prévaloir des irrégularités de la procédure arbitrale », Rev. arb. 1996.
3 et s.
4. V., CA Paris, 21 janv. 1997, Rev. arb. 1997. 430, obs. Y. D.
5. V. supra, n° 1049 et 1063, note 2 pour les contrats conclus avec des consommateurs.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 829
1. V., CA Paris, lre ch. C., 7 févr. 2002, Rev. arb. 2002. 209; sentence ad hoc rendue en
Belgique le 26 juin 1997, Rev. arb. 1999. 685, note J. Linsmeau.
2. V. supra, n° 1052 et s.
3. V. supra, n° 1084 et s.
4. V. supra, n° 1093 et s.
5. V. infra pour l’inclusion de ce principe dans l’ordre public international.
6. V. supra, n° 1095 et s.
830 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traité..., op. cit., n° 1627 et s., p. 953 et s.
2. V., CA Paris, 16 juin 1988, Petrogab, Rev. arb. 1989. 309, note Ch. Jarrosson.
3. CA Paris, 19 déc. 1986, Sofldif, Rev. arb. 1987. 359, commentaire E. Gaillard,
p. 275.
4. Civ. lre, 22 nov. 1966, préc.
5. V., par exemple, CA Paris, lre ch. suppl., 10 mars 1988, Rev. arb. 1989. 269, note
Ph. Fouchard; dans le même sens, à propos des usages du commerce international,
v. Civ. lrc, 15 juin 1994, Rev. arb. 1995. 88, lre esp., note E. Gaillard.
6. V., implicitement, le célèbre arrêt Valenciana ayant reconnu l’existence de la lex mer-
catoria (Civ. lre, 22 oct. 1991, préc.).
7. V., CA Paris, 28 févr. 1980, Rev. arb. 1980. 583, note E. Loquin, maintenu par Civ. 2e,
30 sept. 1981, Rev. arb. 1982. 431, note E. Loquin.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 831
1. V., Civ. lre, 5 févp. 1991, Almira, Rev. arb. 1991. 625, note L. Idot.
2. V., CA Paris, 27 nov. 1987, Rev. arb. 1989. 62, note G. Couchez.
3. V., C. Kessedjian, « Principe de la contradiction et arbitrage », Rev. arb. 1995. 381
et s.; S. Guinchard, « L’arbitrage et le principe du respect du contradictoire (à propos de
quelques décisions rendues en 1996) », Rev. arb. 1997. 185 et s.
4. V., J.-L. Delvolvé, « L’instance arbitrale », in Arbitrage et propriété intellectuelle, Lib.
techniques, 1994, Actes du colloque organisé par l’IRPI (Paris, 26 janv. 1994), p. 41 et s.,
spéc. p. 47; Ph. Lalive, J.-F. Poudret et Cl. Reymond, Le droit de l’arbitrage interne et interna¬
tional en Suisse, op. cit., p. 426.
5. V., C. Kessedjian, « Principe de la contradiction et arbitrage », op. cit., p. 388 et s.
6. V., J.-L. Delvolvé, op. cit., p. 47.
7. V., J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, LGDJ, 1999,
p. 437 et s.
832 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., CA Paris, 27 oct. 1994, Reynolds, Rev. arb. 1994. 709 (violation du monopole
libanais d’importation du tabac).
2. V., CA Paris, lre ch. C., 14 juin 2001, Rev. arb. 2001. 773, note Ch. Seraglini.
3. V., Civ. lre, 7 janv. 1992, Rev. arb. 1992. 470, note P. Bellet; JDI 1992. 707, 2e esp.,
concl. Flipo, note Ch. Jarrosson; RTD com. 1992. 796, obs. J.-Cl. Dubarry et E. Loquin
(arbitrage multipartite). En revanche, la capacité d’agir en justice ne relève pas de l’ordre
public international, v. Civ. lre, 1er déc. 1999, Rev. arb. 2000. 277, note M.-L. Niboyet.
4. CA Paris, 30 sept. 1993, European Gas turbines, Rev. arb. 1994. 359, note D. Bureau;
Rev. crit. DIP 1994. 349, note V. Heuzé.
5. V., Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traite'..., op. cit., n° 1468, p. 835 et les
références.
6. V., J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, op. cit., n°845
et s., p. 471 et s.
LE SENTENCE ARBITRALE ET LA PHASE POST-ARBITRALE 833
1. V., P. Mayer, « La sentence contraire à l’ordre public au fond », Rev. arb. 1994. 615
et s., spéc. p. 640 et s.
2. V., CA Paris, lre ch. C., Aplix, Rev. arb. 1994. 164, note Ch. Jarrosson, refusant d’an¬
nuler une sentence qui n’avait pas violé le droit de la concurrence.
3. V., Civ. lre, 8 mars 1988, Thinet, D. 1989. 577, note J. Robert; Rev. arb. 1989. 473,
note P. Ancel; Civ. lre, 5 févr. 1991, Almira, préc.
4. V., CJCE, 1er juin 1999 Eco Suiss, Rev. Arb. 1999. 631, note L. Idot; RTD com. 2000.
232, obs. S. Poillot-Peruzzetto, 343, obs. E. L.
5. V., à propos du contrôle des investissements étrangers en France, CA Paris, 5 avr.
1990, Courrèges, Rev. crit. DIP 1991. 580, note C. Kessedjian; Rev. arb. 1992. 110, note
H. Synvet.
6. CA Paris, 18 nov. 2004, Rev. arb. 2005. 751 et article L. Radicati di Brozolo : Rev.
arb. 2005. 529 et s.; JDI 2005. 357, note A. Mourre; JCPéd. G., Il 10038, note Chabot, JCP
E. 2005. 759 obs. Ch. Seraglini; v. Cl. Lucas de Leyssac, « Arbitrage et concurrence : retour
sur Eco Swiss », Concurrences 2005/1, p. 1 et s.; E. Barbier de la Serre et B. Cheynel,
Rev. Lamy Concurrence 2005, n° 2.
834 L’ARBITRAGE INTERNATIONAL
1. V., J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l'ordre public, op. cit., n°823,
p. 459; comp. Ch. Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, op. cit., p. 327 et s.
INDEX ALPHABÉTIQUE
Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes
E
G
Échanges, 737.
Écrit électronique, 510 s., 962, 964. Gage, 810.
Effets des jugements, 998 s. Gage général (droit de), 833, 835.
— de fait, 1101. Garantie autonome, 822.
— de titre, 1002. Garantie financière, 813.
Émanation d’un État étranger : Garanties, 799.
V. Organisme public étranger GATT, 155 s.
INDEX ALPHABÉTIQUE 839
Handling, 630.
Hypothèque, 807. L
Hypothèque aérienne, 809.
Hypothèque maritime, 808. Langue, 425.
Lettre d’intention
— contrat, 409.
I — garantie, 817.
Lettre de change, 728 s.
Immeubles, 368. Lettre de garantie (crédit documen¬
Immunités, 970 s. taire), 683.
— d’exécution, 982 s., 993 s. Lex electronica, 479, 488.
— de juridiction, 975 s., 992 s. Lexfori, 439, 442, 609.
— diplomatiques, 972, 984, 988, 990. Lex loci delicti : V. Responsabilité extra¬
Importations, 65 s. contractuelle
Incoterm, 530, 531, 554. Lexrei sitae, 523, 645, 663, 806 s.
Indexation, 436. Lex mercatoria, 87, 90 s., 488.
Ingéniérie, 649. Lex societatis, 225 s., 419, 817.
Injonction Libre circulation des marchandises,
1021.
— anti-suit, 841.
Libre circulation des travailleurs,
— de payer (procédure européenne),
709.
932.
Libre prestation des services, 710.
— Mareva, 840, 1021. Licence de brevet, 655.
Insolvabilité, 850 s. Licenciement, 724.
Intégrateur de transport, 627. Liner term, 532.
Intérêts du commerce international, Litispendance, 967.
118 s. Locus régit actum, 424, V. égal.
Intermédiaire, 659. Contrat.
Internationalité ,16 s., 451, 953, 960, Logiciel, 474, 476.
1043 s. Logistique, 636.
Internet, 883, 941, V. égal. Commerce Loi de police
électronique et Prestataires intermé¬ — cautionnement, 820.
diaires d’Internet — commerce électronique, 457, 461.
Interprétation, 82 s., 433. — contrat, 71, 116, 383 s., 426.
Investissement — contrat de travail, 710, 953.
— AMI, 761 s. — crédit, 667.
— CIRDI, 780 s., 783 s., 788 s. — réserve de propriété, 814.
— contrats d’Etat, 770 s., 783 s., 788 s. — responsabilité extra-contractuelle,
— droit commun français, 739 s. 892.
— droit international, 753 s. — société, 243 s.
— investissements en France, 750 s. — transport, 577.
— investissements étrangers, 743 s. Loi-type de la CNUDCI, 89.
— notion d’investissement, 793. — arbitrage, 1040.
— OCDE, 757 s. — commerce électronique, 477, 482,
— protection, 787. 487, 493 s.
— traités, 777 s., 783 s., 788 s. — passation de marchés, 639.
840 INDEX ALPHABÉTIQUE
Saisies, 846.
Saisie de navire, 842, 846. T
Savoir-faire, 655.
Services (contrat de), 600,937, V. égal. Techniques
Libre prestation des services — relatives à la règle, 102 s.
Siège social, 232 s., 271, 278, 934, — relatives à l’applicabilité, 110 s.
958, V. égal. Établissement Terminaux portuaires, 634.
842 INDEX ALPHABÉTIQUE
Ubifrance, 134.
Y
Unidroit, 150.
Usages du commerce, 34 s., 488 s., York et Anvers (Règles de) :V. Avaries
965, V. égal. Crédit documentaire communes
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 1
'
.
706915 (I) - (3,5) - OSB -T - 50gr - CMB - ORT
Imprimé en France. - JOUVE, 11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS
N° 417871W. - Dépôt légal : Janvier 2007
Matière composite et complexe, le droit du commerce
international est une branche du droit en pleine expansion.
Il a pour objectif de fournir les règles juridiques applicables
aux relations entre opérateurs économiques lorsque sont
impliqués des mouvements de personnes, de biens, de services
ou de valeurs intéressant l'économie de plusieurs États.
Il lui est donc indispensable de déterminer ses méthodes
et ses sources.
Si les règles de conflit de lois ne sont pas délaissées, les règles matérielles
d'origine diverse ont acquis progressivement une importance déterminante.
Droit des sociétés, contrats, investissements, commerce électronique,
ainsi que risques et garanties sont au cœur de la matière. Il est indispensable
que le droit du commerce international indique aussi dans quelles conditions
s'opère le règlement des litiges, par recours aux juridictions étatiques ou à
l'arbitrage international.
Conçu dans une perspective résolument internationaliste, l'ouvrage envisage
néanmoins le droit du commerce international du point de vue français.
Il s'adresse aux étudiants, aux chercheurs et aux praticiens désireux d'acquérir
une vision globale et de bénéficier d'une étude systématique de la matière.
ISBN 978-2-247-06915-6
9782247069156 23
11/14/2019 14:49-2