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Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

MODELISATION DE LA RELATION NON-LINEAIRE ENTRE LE


DEVELOPPEMENT FINANCIER ET LA CROISSANCE
ECONOMIQUE

Par
DONTSI
Professeur Agrégé, Université de Yaoundé II, Cameroun.
dontsi@yahoo.fr
&

Denise Gisèle MEGNIGANG


Docteur, Institut Universitaire des Sciences, des Technologies et de
l’Ethique (IUSTE), Yaoundé-Mendong, Membre du Laboratoire
d’Analyses et de Recherche en Economie Mathématique (LAREM) de
l’Université de Yaoundé II, Cameroun.
megnigang@yahoo.fr

Résumé : Cet article présente un modèle de croissance endogène dans lequel le secteur
financier améliore l’efficacité de l’accumulation du capital physique à l’aide des ressources
productives du secteur réel. L’analyse repose sur le modèle de Eggoh et Villieu (2013) auquel
nous ajoutons le secteur financier informel et la qualité des institutions Etatiques. Le modèle
ainsi amélioré met en évidence l’existence de la double causalité entre la qualité des
institutions et le développement financier. Il montre également que la relation entre le
développement financier et la croissance peut être non-linéaire et conditionnée par l’efficacité
du secteur financier dans l’allocation de l’épargne. Lorsque le secteur financier informel est
assez efficace, son développement stimule la croissance économique ; Dans le cas où il est
peu efficace, son effet dépend de l’efficacité du secteur financier formel. En dessous d’un
certain seuil de développement financier, l’efficacité du secteur financier formel stimule la
croissance alors qu’elle la défavorise au-delà de ce seuil.
Mots clés : non-linéarité, Développement financier, croissance économique.

Abstract : This paper presents a model of endogenous growth in which financial sector
enhances the efficiency of physical capital accumulation with real resources. The analysis
based on the Eggoh and Villieu (2013) model to which weaddin formal financial sector and
quality of state institutions. The model thus improved high lights the existence of the double
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causality between quality of institutions and financial development. It also shows that the
relation ship between financial development and economic growth can be non-linear and
depends on the efficiency of the financial sector in transforming savings into investment.
When the informal financial sector is fairly efficient, its development stimulates economic
growth; When it’s not very efficient, its effect depends on the efficiency of the formal
financial sector. Below a certain threshold of financial development, the efficiency of the
formal financial sector stimulates growth, while above this thres holdithinders growth.
Key Works: non-linearity, financial developmeent, economic growth.

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Introduction
Depuis les travaux de Berthélemy et Varoudakis (1994) qui mettent en évidence
l’existence des effets de seuil dans le processus de croissance associé au développement du
secteur financier, plusieurs auteurs se sont intéressés à la non-linéarité entre le développement
financier et la croissance économique. Sur le plan théorique, Eggoh et Villieu (2013) montrent
que l’interaction entre le secteur financier (constitué des intermédiaires financiers) et le
secteur réel génère des équilibres multiples qui peuvent produire une non-linéarité de la
relation entre le développement financier et la croissance. Ceci rejoint l’idée de Berthélemy et
Varoudakis (1994) selon laquelle l’effet du développement financier sur la croissance dépend
de la taille des intermédiaires financiers1. Le modèle de Aka (2005) révèle quant à lui que cet
effet est conditionné par la disponibilité des marchés de capitaux : en l’absence de ces
marchés, la croissance économique croit avec l’efficacité d’intermédiation financière, tandis
qu’elle décroît avec cette dernière lorsque les marchés de capitaux émergent. Par ailleurs,
Minea et Villieu (2010)trouvent que l’effet du développement financier sur la croissance
dépend de la qualité des institutions, qu’ils assimilent à la capacité du Gouvernement à faire
rentrer les recettes fiscales.
Les travaux empiriques confirment l’existence des effets de seuil dans la relation entre
le développement financier et la croissance, tout en relevant plusieurs sources potentielles de
non-linéarité. Les études sur données de panel de Arcand et al. (2012), Cleays (2016) et
Diandy (2018) montrent que l’effet du développement financier sur la croissance n’est pas
significatif dans les pays financièrement sous-développés, alors qu’il est positif dans les pays
financièrement développés et négatif dans les pays financièrement très développés. Il ressort
des travaux de Gaytan et Rancière (2004), Kpodar (2007) et Eggoh (2009) que le
développement financier n’impacte pas significativement la croissance dans les pays à faible
revenu, alors qu’il la favorise dans les autres groupes de pays, avec un effet relativement plus
élevé dans les pays à revenu intermédiaire. Yahyaoui et Rahmani (2009) ainsi que Kuipou et
al. (2015) identifient la qualité des institutions comme variable de seuil, en montrant que le
développement financier favorise la croissance lorsque les institutions sont de bonne qualité ;

1
Le résultat de Eggoh et Villieu (2013) diffère cependant de celui de Berthélemy et Varoudakis (1994) à travers
l’existence d’un taux de croissance positif au niveau des deux équilibres stables obtenus, et compte tenue de
l’indétermination locale ou globale du modèle. Berthélemy et Varoudakis trouvent plutôt trois équilibres dont
deux stables et un instable. Le premier équilibre stable est caractérisé par un faible développement financier et
un taux de croissance négatif, tandis que le second estassocié à un secteur financier développé et un taux de
croissance positif. L’équilibre instable quant lui sert de transition et est caractérisé par un secteur financier assez
développé et un taux de croissance négatif.
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dans le cas contraire, il ne l’influence. Des résultats identifiant le niveau du capital humain
comme variable de seuil sont obtenus par Berthelemy et Varoudakis (1996). C’est aussi le cas
l’inflation (Eggoh, 2009) et la fragmentation ethnique. Avoutou(2019) trouve qu’il existe un
seuil de fragmentation ethnique en deçà duquel, le développement financier stimule la
croissance et au-delà duquel son impact est non significatif.
Dans le modèle de Berthelemy et Varoudakis (1996) ainsi que celui Eggoh et Villieu
(2013), dont la particularité est d’analyser la question de double causalité entre la sphère
réelle et la sphère financière, les auteurs ne tiennent pas compte de la fragmentation du
secteur financier (secteur formel et secteur informel). Pourtant, c’est une caractéristique
importante du secteur financier dans les pays en développement (PED), où une bonne partie
des adultes font recours au secteur financier informel (SFI) pour épargner et financer leurs
activités. En Afrique Sub-Saharienne par exemple, le SFI est plus accessible que le secteur
financier formel (SFF). En 2017 par exemple, 15% des adultes de cette région ont épargné
dans le SFF contre 25% pour le SFI. La même année, 7% des adultesy ont bénéficié d’un
crédit bancaire contre 9% pour le crédit informel (Global Findex, 2018). Par ailleurs, les
auteurs considèrent la quantité de main d’œuvre utilisée comme unique facteur explicatif de la
transformation de l’épargne en investissement. Plusieurs facteurs peuvent influencer
l’efficacité des intermédiaires financiers dans cette fonction. C’est le cas par exemple de la
qualité des institutions en place (Qian et Strahan, 2007 ; Pasiouras et al.,2009 ; Fouopi
Djiogap et Song, 2016), de l’environnement des affaires et des comportements opportunistes
des agents économiques caractérisés entre autres par la culture de non remboursement et le
détournement de l’objet du crédit.
Le présent article se propose de réexaminer théoriquement la relation non-linéaire entre
le développement financier et la croissance. Celui-ci repose sur l’approche de Eggoh et
Villieu (2013)selon laquelle le système financier rend des services d’intermédiation,
permettant d’améliorer l’efficacité de la transformation de l’épargne à l’investissement. Pour
ce faire, il prélève les ressources du secteur réel, ce qui permet d’endogenèiser les services
d’intermédiation. Nous intégrons dans leur modèle le secteur financier informel ainsi que la
qualité des institutions mises en place par l’Etat.
La présentation des agents économiques est nécessaire (1) pour déterminer le
programme dont la résolution (2) aboutit aux résultats qui conduisent à faire des suggestions
de politique économique (3).

1- Les principaux agents économiques


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On considère une économie à deux secteurs (secteur financier et secteur réel) dans
laquelle l’Etat intervient pour assainir l’environnement des affaires, façonner les institutions,
ordonner le droit et assurer les fonctions régaliennes comme la justice. Le comportement de
l’Etat n’est pas formalisé dans ce travail. On suppose qu’il influence l’efficacité du secteur
financier via les institutions qu’il met en place. Seul le comportement des agents du secteur
réel et du secteur financier fait l’objet d’une modélisation spécifique.

1.1 Le secteur financier


Les activités du secteur financier se font aussi bien dans le secteur formel que dans le
secteur informel. Ce secteur est composé essentiellement des intermédiaires financiers dont la
principale fonction est d’assurer la collecte des ressources et l’allocation de ces dernières au
secteur privé. Ainsi, l’efficacité du secteur financier se trouve dans l’aptitude des
intermédiaires financiers à collecter l’épargne et à la transformer en investissement.
L’épargne collectée par le secteur financier (formel et informel) à l’instant t (𝑆𝑡 ) est
constituée du revenu non consommé. Elle est donnée par l’expression suivante :
𝑆𝑡 = 𝑌𝑡 − 𝐶𝑡 (1)
Où : 𝑌𝑡 et𝐶𝑡 sont respectivement le revenu et la consommation agrégée des ménages.
Supposons qu’une fraction τ (0 < 𝜏 <1) de l’épargne collectée est dans le secteur
financier formel (SF), la fraction (1 − 𝜏)étantabsorbée par le secteur financier informel (SI).
L’épargne formelle est donc donnée par : 𝑆𝑆𝐹,𝑡 = 𝜏 ∗ 𝑆𝑡 (2)
L’épargne informelle est donnée par :𝑆𝑆𝐼,𝑡 = (1 − 𝜏) ∗ 𝑆𝑡 (3)
Equation dans laquelle𝛕et (𝟏 − 𝝉)mesurent respectivement l’efficacité du SF et du SI
dans la mobilisation de l’épargne.
Une fraction 𝐚(0 < 𝑎 < 1) de l’épargne informelle est réinvestie dans l’économie et le
résidu de cette épargne (1 − a) est thésaurisée. En effet, les activités du secteur financier
informel ne se résument pas aux pratiques de thésaurisation. Les fonds empruntés à la tontine
ou aux usuriers ne sont pas gardés à la maison, tout au contraire, ils sont utilisés pour acheter
de la marchandise, payer les ouvriers, louer une parcelle de terrain à cultiver, acheter les
intrants agricoles, accroitre son activité, etc…… Ces fonds sont donc utilisés pour financer les
activités économiques, mais dans un circuit qui ne passe pas par les établissements de crédit.
L’investissement financé par le secteur financier informel (𝐼𝑆𝐼,𝑡 ) est donné par :
𝐼𝑆𝐼,𝑡 = 𝑎 ∗ 1 − τ ∗ St (4)

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Où 𝒂mesure l’efficacité du SI dans l’allocation des ressources au secteur privé. Pour des
besoins de simplification, il est considéré comme un paramètre exogène.
Supposons comme Pagano (1993), qu’une proportion 𝜑( 0 < 𝜑 < 1) de l’épargne
formelle est effectivement transformée en investissement ; La fraction (1 − 𝜑)de cette
épargne a disparu dans le processus d’intermédiation financière du fait de l’existence des
imperfections du marché et des réserves obligatoires exigées par la banque centrale.
Dans ces conditions, l’investissement financé par le secteur financier formel à l’instant t
(𝐼𝑆𝐹,𝑡 )est donné par l’équation ci-après :
𝐼𝑆𝐹,𝑡 = 𝜑 ∗ 𝜏 ∗ 𝑆𝑡 (5)
Où 𝜑 mesure l’efficacité des intermédiaires du SF dans la transformation de l’épargne en
investissement. Un accroissement de 𝜑traduit une amélioration de l’efficacité de ce secteur
sous l’angle de l’allocation des ressources.
On considère que l’efficacité du SF dans l’allocation de l’épargne dépend non
seulement des ressources productives et donc de la main d’œuvre utilisées (Eggoh et Villieu,
2013), mais aussi de la qualité des institutions qui incarnent l’Etat. Celles-ci assurent le bon
fonctionnement de l’économie dans son ensemble via la stabilisation, la régulation et la
règlementation. Pour assurer ces différentes fonctions, les institutions prélèvent aussi une
quantité de ressources productives du secteur réel.
Supposons que la transformation de l’épargne en investissement se fait avec une
technologie Cobb-Douglas. Soit 𝑢la proportion de main d’œuvre employée dans le SF et 𝑣la
fraction de main d’œuvre employée dans le secteur institutionnel. L’efficacité du SF dans
l’allocation des ressources est donnée par l’expression :
𝜑 𝑢, 𝑣 = 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 (6)
où 0 < 𝛽 < 1 ;𝑞 est un paramètre constant qui capte tous les autres facteurs
pouvantinfluencer l’efficacité du SF, 𝑢 est l’indicateur de la taille du secteur financier formel;
𝑣mesure la taille des institutions mis en place par l’Etat.
La fonction 𝜑 𝑢, 𝑣 croit avec 𝑢𝑡 et avec 𝑣𝑡 (𝜑𝑢′ 𝑢, 𝑣 > 0 𝑒𝑡 𝜑𝑣′ 𝑢, 𝑣 > 0). Ce qui
veut dire que si la qualité des institutions s’améliore, le climat des affaires et les mentalités
des agents économiques vont s’améliorer et l’allocation des ressources sera plus efficace. De
même, lorsque la qualité de main d’œuvre employée dans le secteur financier formel
s’améliore, les intermédiaires financiers vont transformer une grande partie de l’épargne
collectée en crédit.

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En combinant les équations (5) et (6), l’investissement financé par le secteur financier
formel devient :𝐼𝐹,𝑡 = 𝜏 ∗ 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ∗ 𝑆𝑡 (7)
L’investissement total agrégé à l’instant t (𝐼𝑡 ) est donné par l’équation ci-après :
𝐼𝑡 = 𝐼𝑆𝐼,𝑡 + 𝐼𝑆𝐹,𝑡 = 𝜑 ∗ 𝜏 ∗ 𝑆𝑡 + 𝜏 ∗ 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ∗ 𝑆𝑡 (8)

Et la forme réduite de l’investissement total est donnée par :


𝐼𝑡 = 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝑆𝑡 (9)

Equation dans laquelle la quantité 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) représente la fraction de


l’épargne globale (formelle et informelle) qui est transformée en investissement.
L’équation (9) montre que la finance informelle ne serait une meilleure solution au
problème de financement dans cette économie que si la fraction de l’épargne globale
transformée en investissement est supérieure à 𝜑. Ce qui est équivalent à 𝑎 > 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 . Ceci
traduit que si les défaillances du SF sont plus aigües que celles du SI, alors les individus
auront tendance à migrer vers la finance informelle. Ainsi, tant que le SF ne s’améliore pas de
manière à devenir une meilleure alternative pour les agents économiques, alors l’informel sera
l’option préférée et les frictions observées sur ce marché pourront porter des coûts néfastes
sur la croissance économique.
1.2 - Le secteur réel
Le secteur réel est composé des entreprises (sociétés non financières) et des ménages.
 Les entreprises
Il s’agit essentiellement des sociétés non financières que nous décrivons ici par un agent
représentatif. Celui-ci utilise une technologie Cobb-Douglas pour produire les biens et
services. Les proportions𝑢 et 𝑣de main d’œuvre étant employées respectivement dans le
secteur financier et le secteur institutionnel, la fraction de main d’œuvre absorbée par ces
deux secteurs est donnée par :𝑧 = 𝑢 + 𝑣.On suppose que le reste de ressources productives
disponibles(1 − 𝑧)est intégralement utilisée l’entreprise représentative dans sa production.
En considérant comme Eggoh et Villieu (2013) que l’externalité liée au processus de
production est une fonction du stock moyen de capital par unité de production (𝐾𝑡 ), la
fonction de production agrégée à l’instant t est donnée par :

𝑌𝑡 = 𝐴 𝐾𝑡 𝐾𝑡𝛼 [ 1 − 𝑧 𝐿𝑡 ]1−𝛼 (10)


Où : 𝑌𝑡 est le niveau de production; 𝐴(𝐾𝑡 )représente une externalité au processus de
production ;𝐾𝑡 est la quantité de capital utilisée dans le processus de production ; 𝐿𝑡 est la

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quantité de travail utilisée dans la production ; 𝛼 est un paramètre positif inferieur à


l’unité.L’externalité liée au processus de production est donnée par l’équation ci-après:
A K t = AK1−α
t (11)
AvecA un paramètre constant désignant le progrès technique.
En combinant les équations (10) et (11), la fonction de production devient :

𝑌𝑡 = 𝐴𝐾𝑡1−𝛼 𝐾𝑡𝛼 [ 1 − 𝑧 𝐿𝑡 ]1−𝛼 (12)


Et la fonction de production par unité de travail peut s’écrire de manière suivante :
𝑦𝑡 = 𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 1 − 𝑧 1−𝛼
(13)
Où : 𝑦𝑡 est le niveau de production par tête;𝑘𝑡 est le stock de capital unité de travail ; 𝑘𝑡 est le
stock moyen de capital par unité de production déflatée par la quantité de travail.
Contrairement à Eggoh et Villieu (2013), nous supposons comme Pagano (1993) que le
capital investi se déprécie par période au taux 𝛿. Ce qui permet d’écrire la dynamique
d’accumulation du capital de la manière suivante:
𝑘𝑡+1 − 𝑘𝑡 = 𝐼𝑡 − 𝛿𝑘𝑡 (14)
En combinant les équations (9) et (14), la dynamique d’accumulation du capital devient:
𝑘𝑡+1 − 𝑘𝑡 = 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝑆𝑡 − 𝛿𝑘𝑡 (15)
La combinaison des équations (1) et (15) aboutit à l’équation suivantes :
𝑘𝑡 = 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝑦𝑡 − 𝑐𝑡 − 𝛿𝑘𝑡 (16)
En remplaçant 𝑦𝑡 dans l’équation (16) par son expression donnée par l’équation (13), on
obtient :
𝑘𝑡 = 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 1 − 𝑧 1−𝛼
− 𝑐𝑡 − 𝛿𝑘𝑡 (17)

 Les ménages
Les ménages sont décrits ici par un agent représentatif qui a un horizon temporel infini.
Il reparti donc son revenu en consommation et épargne. Cet agent épargne aussi bien dans le
SF que dans le SI avec pour objectif de maximiser son utilité intertemporelle. Il cherche ainsi
à maximiser la valeur actualisée de son utilité future (𝑈0 ) qui est donnée par l’expression
suivante :

𝑈0 = 𝑡
𝑈(𝑐𝑡 )𝑒 −𝜌𝑡 𝑑𝑡(18)
Où : 𝑈(𝑐𝑡 ) est la fonction d’utilité instantanée ; 𝑐𝑡 la consommation du ménage par unité de
travail à l’instant t ; ρ > 0 le taux d’escompte psychologique ou la préférence pour le
présent.Plus ρ est élevée, plus l’agent valorise le présent plutôt que l’avenir.

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Dans le but d’obtenir un sentier de croissance stationnaire, on suppose comme Eggoh et


Villieu (2013), que la fonction d’utilité instantanée iso élastique du ménage est donnée par :

𝐶𝑡1−𝜃 −1
𝑝𝑜𝑢𝑟 𝜃 ≠ 1
𝑈 𝑐𝑡 = 1−𝜃 (19)
ln 𝑐𝑡 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝜃 = 1
Avec𝜃 > 0le coefficient d’aversion lié au risque. L’inverse de ce coefficient représente
l’élasticité de substitution intertemporelle. Il est donnée par :
1 1 𝑈 ′ (𝑐) 𝑈 ′′ (𝑐𝑡 )
= − 𝐶 𝑈 ′′ (𝑐)⇒𝑐𝑡 = − 𝜃(20)
𝜃 𝑈 ′ (𝑐𝑡 )

Plus le coefficient d’aversion relatif au risque est élevé, plus l’utilité marginale décroit
quand le niveau de consommation à l’instant t s’accroit2.
Le programme de maximisation à résoudre par le planificateur social, compte tenu de
l’existence d’une externalité au processus de production est donnée par :
∞ 1−𝜃
𝑐𝑡 − 1 −𝜌𝑡
𝑀𝑎𝑥 𝑈0 = 𝑒 𝑑𝑡
0 1−𝜃
s/c
𝑘𝑡 = 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 1 − 𝑧 1−𝛼
− 𝑐𝑡 − 𝛿𝑘𝑡 (21)
Dans ce programme, 𝑐𝑡 est la variable de contrôle,𝑘𝑡 est la variable d’état et𝑘𝑡
l’équation d’évolution du capital.

2- Résolution du programme

Le Hamiltonien courant du programme de maximisation de l’utilité du consommateur


est donné par :
𝐶𝑡1−𝜃 − 1 −𝜌𝑡
𝐻𝐶 = 𝑒 + λ𝑡 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 1 − 𝑢 − 𝑣 1−𝛼
− 𝑐𝑡 − 𝛿𝑘𝑡
1−𝜃
(22)
Où λ𝑡 est l’équivalent du multiplicateur de Lagrange.

 Les conditions de premier ordre (CPO)


𝜕𝐻𝐶
= 𝐶𝑡−𝜃 𝑒 −𝜌𝑡 − λ𝑡 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) = 0 (23)
𝜕𝑐𝑡

2
Lorsque 𝜃 → 0, l’agent ne s’intéresse qu’à sa consommation actualisée. A contrario, lorsque 𝜃 → +∞, l’utilité
du ménage représentatif dépend de la plus petite valeur de la consommation. La fonction d’utilité instantanée de
l’agent est supposée croitre avec le niveau de consommation (c'est-à-dire 𝑈 ′ (𝑐) > 0 ) et être concave (c'est-à-
dire 𝑈 ′′ (𝑐) < 0).

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𝜕𝐻𝐶
= λ𝑡 𝜏𝛽𝑞𝑢𝛽 −1 𝑣 1−𝛽 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 − 𝑐𝑡 − (1 − 𝛼) 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 −
𝜕𝑢

𝑧−𝛼𝐴𝑘𝑡1−𝛼𝑘𝑡𝛼=0 (24)

𝜕𝐻𝐶
= λ𝑡 𝜏(1 − 𝛽)𝑞𝑢𝛽 𝑣 −𝛽 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴𝑘𝑡1−𝛼 𝑘𝑡𝛼 − 𝑐𝑡 − (1 − 𝛼) 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 −
𝜕𝑣

𝑧−𝛼𝐴𝑘𝑡1−𝛼𝑘𝑡𝛼=0 (25)

𝜕𝐻𝐶
= λ𝑡 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴 − 𝛿 = −λ𝑡 (26)
𝜕𝑘 𝑡

A partir de (26), on peut écrire :


λ𝑡
= 𝛿 − 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴(27)
λ𝑡

A ces CPO, s’ajoute la condition de transversalité qui est donnée par lim𝑡→+∞ λ𝑡 k 𝑡 𝑒 −𝜌𝑡 = 0
 Application de la règle de Keynes Ramsey

La règle de Keynes Ramsey permet de déterminer le taux de croissance de la


consommation. A partir de (23) on a :
𝑐𝑡−𝜃 𝑒 −𝜌𝑡 = λ𝑡 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) (28)
En remplaçant 𝐶𝑡−𝜃 par son expression (𝑈 ′ (𝑐𝑡 )),l’équation (28) devient donc :

𝑈 ′ 𝑐𝑡 𝑒 −𝜌𝑡 = λ𝑡 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) (29)


En introduisant le logarithme dans l’équation (29), on obtient :
𝑙𝑛𝑈 ′ 𝑐𝑡 − 𝜌𝑡 = 𝑙𝑛λ𝑡 + ln⁡𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) (30)
La dérivation de l’équation (30) par rapport au temps donne:
𝑈 ′′ (𝑐𝑡 ) λ c 𝑈 ′′ (𝑐𝑡 ) λ
c𝑡 − 𝜌 = λ𝑡 +0 ⇒c 𝑡 𝑐𝑡 − 𝜌 = λ𝑡 (31)
𝑈 ′ (𝑐𝑡 ) 𝑡 𝑡 𝑈 ′ (𝑐𝑡 ) 𝑡

La combinaison des équations (20) et (31) abouti à :


c𝑡 λ
−𝜃 − 𝜌 = λ𝑡 (32)
c𝑡 𝑡

A partir des équations (27) et (32), on peut écrire:


c𝑡
−𝜃 − 𝜌 = 𝛿 − 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴
c𝑡
c 𝑎−𝜏(𝑎−𝑞𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1−𝑧 1−𝛼 𝐴−(𝜌+𝛿)
⇒c 𝑡 = (33)
𝑡 𝜃

L’équation (33) ci-dessus montre que le taux de croissance de la consommation par tête
c
(c 𝑡 ) de l’agent représentatif dépend de: la fraction de l’épargne globale transformée en
𝑡

investissement 𝑎 − 𝜏(𝑎 − 𝑞𝑢𝛽 𝑣 1−𝛽 ) , la fraction de main d’œuvre employée dans le secteur
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1−𝛼
réel 1−𝑧 , le progrès technique (A), le taux d’escompte psychologique (𝜌 ), le
coefficient d’aversion lié au risque (𝜃 ) et le taux de dépréciation du capital (𝛿 ).

A l’équilibre, le stock moyen de capital par unité de production (𝐾 𝑡 ) est égal au stock
de capital par unité de production(𝐾 𝑡 ). Sur la base de cette hypothèse formulée par Eggoh et
Villieu(2013), les équations (21), (24) et (25) deviennent respectivement :

𝑘 𝑡 = 𝑎 − 𝜏 (𝑎 − 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝐴 𝑘 𝑡 1 − 𝑧 1−𝛼
−𝑐 𝑡 − 𝛿 𝑘 𝑡 (34)

𝜏𝛽𝑞 𝑢 𝛽 −1 𝑣 1−𝛽 1 − 𝑧 1−𝛼


𝐴𝑘 𝑡 − 𝑐 𝑡 = (1 − 𝛼 ) 𝑎 − 𝜏 (𝑎 − 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 −
�−����(35)

𝜏 1 − 𝛽 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 −𝛽 1 − 𝑧 1−𝛼
𝐴𝑘 𝑡 − 𝑐 𝑡 = (1 − 𝛼 ) 𝑎 − 𝜏 (𝑎 − 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1 −
�−����(36)

A partir de l’équation (34), on détermine le taux de croissance du capital par unité de


travail de la manière suivante :
k𝑡 c
= 𝑎 − 𝜏 (𝑎 − 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 𝐴 1 − 𝑧 1−𝛼
− k𝑡 − 𝛿 (37)
k𝑡 𝑡

A partir des équations (35) et (36) on obtient la consommation par unité de capital comme
suit:
c𝑡 c 𝜏𝛽𝑞 𝑢 𝛽 −1 𝑣 1−𝛽 1−𝑧 1−𝛼 −(1−𝛼 ) 𝑎 −𝜏 (𝑎 −𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1−𝑧 −𝛼
= k1 = ∗ 𝐴 (38)
k𝑡 1 𝜏𝛽𝑞 𝑢 𝛽 −1 𝑣 1−𝛽

c𝑡 c 𝜏 1−𝛽 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 −𝛽 1−𝑧 1−𝛼 −(1−𝛼 )𝑎 −𝜏 (𝑎 −𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽 ) 1−𝑧 −𝛼


= k2 = ∗ 𝐴 (39)
k𝑡 2 𝜏 1−𝛽 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 −𝛽

c c
En remplaçant k1 et k2 dans l’équation (37) par leurs expressions ci-dessus, on obtient les
1 2

deux taux de croissance du capital par unité de travail.


𝛽 1−𝛽 ) 2
k1 −𝛼 𝑎 −𝜏 (𝑎 −𝑞 𝑢 𝑣
= (1 − 𝛼 ) 1 − 𝑧 𝐴𝑢 − 𝛿 (40)
k1 𝜏𝛽𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽

𝛽 1−𝛽 ) 2
k2 −𝛼 𝑎 −𝜏 (𝑎 −𝑞 𝑢 𝑣
= (1 − 𝛼 ) 1 − 𝑧 𝐴𝑣 − 𝛿 (41)
k2 𝜏 1−𝛽 𝑞 𝑢 𝛽 𝑣 1−𝛽

k k
A l’équilibre, k2 = k1 . En faisant donc l’égalité entre (40) et (41), on obtient :
2 1

𝛽 1−𝛽
𝑢 ∗ = 1−𝛽 𝑣 ∗ ⇒𝑣 ∗ = 𝛽
𝑢 ∗ (42)

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11
Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

L’équation (42) donne la condition d’équilibre du marché de l’économie que nous


avons esquissée. Elle montre qu’à l’optimum, la taille du secteur financier dépend de la
qualité des institutions mises en place et vice versa. Une augmentation de la taille du secteur
institutionnel, qui se traduit par une amélioration de la qualité des institutions, entraine un
accroissement du niveau de développement financier, toute chose étant égale par ailleurs.Le
taille du secteur financier évolue avec la qualité des institutions comme le montre le
graphique 1 ci- après. Celui-ci a été construit en attribuant une valeur au paramètre 𝜷 et en
faisant varier le paramètre v.

Graphique 1 : Evolution de la taille du secteur financier en fonction de la taille des


institutions pour 𝜷 = 𝟎 . 𝟖𝟓
0,9
taille du secteur financier

0,8
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0,13
0,01
0,02
0,03
0,04
0,05
0,06
0,07
0,08
0,09
0,1
0,11
0,12

0,14
qualité des institutions

Il ressort de ce graphique que la taille du secteur financier augmente fortement avec la


qualité des institutions. Lorsque les institutions mises en place sont faibles, le niveau de
développement financier l’est aussi. De même, lorsque les institutions sont fortes, le niveau de
développement financier est élevé.
En remplaçant 𝑣 par son expression dans l’équation (33), le taux de croissance de la
consommation devient :
1−𝛽 1−𝛽 1−𝛼 𝛽 𝛼 −1 𝐴 −(𝜌 +𝛿 )
𝑎 −𝜏 𝑎 −𝑞 𝛽
𝑢 𝛽 −𝑢
c𝑡
=𝐹 𝑢 = (43)
c𝑡 𝜃

En remplaçant aussi 𝑣 par son expression dans l’équation (40) ou (41), le taux de
croissance du capital devient:
2
1−𝛽 1−𝛽
(1−𝛼 ) 𝛽 −𝑢 −𝛼 𝑎 −𝜏 𝑎 −𝑞 𝑢
k𝑡 𝛽
=𝐺 𝑢 = 𝐴 − 𝛿 (44)
k𝑡 𝜏𝑞 𝛽 𝛽 −𝛼 1−𝛽 1−𝛽

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Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

La trajectoire de croissance équilibrée traduit une situation dans laquelle le capital et la


consommation par tête croissent au même taux constant ; ce dernier étant assimilé au taux de
croissance économique. A l’équilibre de long terme, le capital, la consommation et la
𝑘 𝑐 𝑦
production nationale croissent donc au même taux 𝑔 tel que 𝑔 = 𝑘 = 𝑐 = 𝑦 .

L’équilibre de marché est ainsi caractérisé par les relations (43) et (44). Ces relations
déterminent le niveau d’équilibre du secteur financier u ainsi que le taux de croissance
économique de long terme (𝑔 ).
Pour connaitre la taille du secteur financier à l’équilibre, on résout l’équation obtenue en
posant 𝐹 𝑢 = 𝐺 𝑢 . C'est-à-dire l’équation caractéristique ci-après :

2
1−𝛽 1−𝛽 1−𝛼 𝛽 𝛼 −1 𝐴 −(𝜌 +𝛿 ) 1−𝛽 1−𝛽
𝑎 −𝜏 𝑎 −𝑞 𝑢 𝛽 −𝑢 (1−𝛼 ) 𝛽 −𝑢 −𝛼 𝑎 −𝜏 𝑎 −𝑞 𝑢
𝛽 𝛽

𝜃
= 𝜏𝑞 𝛽 𝛽 −𝛼 1−𝛽 1−𝛽
𝐴 − 𝛿 (45)

Déterminer la trajectoire de croissance équilibrée revient donc à trouver la valeur


stationnaire de la part de main d’œuvre (𝑢 )affectée au secteur financier telle que 𝐹 𝑢 =
𝐺 𝑢 .
Etant donné que l’efficacité du secteur financier est une fonction croissante des
ressources productives issues du secteur réel, celui-ci a une externalité positive sur le secteur
financier. En retour, le secteur financier contribue à l’accumulation du capital en transformant
l’épargne en investissement. Ce qui traduit, qu’il y’a interaction entre ces deux secteurs
d’activité, qui peut générer des phénomènes d’équilibres multiples entre le développement
financier et la croissance économique. L’analyse mathématique des fonctions
𝐹 𝑢 𝑒𝑡 𝐺 𝑢 permet d’identifier cette possibilité d’équilibres multiples.

 Analyse du taux de croissance de consommation par tête : 𝐹 𝑢

1−𝛽 1−𝛽
En posant 𝐶 = 𝜏𝑞 , le taux de croissance de consommation par tête devient
𝛽
1
𝐹 𝑢 =𝜃 𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝐶𝑢 𝛽 −𝑢 1−𝛼
𝛽 𝛼 −1 𝐴 − (𝜌 + 𝛿 ) (46)
Cette fonction n’a de sens que si et seulement si 𝑢 < 𝛽 .∀ 𝑢 ∈ [0, 𝛽 [, la dérivée de F(u)
est donnée par :
𝛽 𝛼 −1 𝐴
𝐹′ 𝑢 = 𝜃
𝛽 −𝑢 −𝛼
(𝛽 − 𝑢 )𝐶 − (1 − 𝛼 ) (47)

En posant𝐹 ′ 𝑢 = 0, on obtient le la valeur de(𝑢 ) qui annule le dérivé comme suit :


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13
Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022
𝛽𝐶 +𝛼 −1
𝑢 = 𝐶
(48)

Puisque 𝑢 est supérieure à zéro, l’équation (48) implique 𝛽𝐶 doit être supérieur à
𝛼 − 1.L’image de ce point noté 𝐹 (𝑢 ) est donnée par :
1 𝛽𝐶 +𝛼 −1 1−𝛼
𝐹 (𝑢 ) = 𝜃 𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝛽𝐶 + 𝛼 − 1 𝛽− 𝐶
𝛽 𝛼 −1 𝐴 − (𝜌 + 𝛿 ) (49)
1
L’image de zéro est donnée par :𝐹 (0) = 𝜃 𝑎 − 𝜏𝑎 𝐴 − (𝜌 + 𝛿 )
La différence entre 𝐹 (𝑢 ) et 𝐹 (0) donne :
1−𝛼 1−𝛼 1−𝛼 1−𝛼
𝐹 𝑢 −𝐹 0 = 𝑎 1−𝜏 𝐶
𝛽 1−𝛼 − 1 + 𝛽𝐶 + 𝛼 − 1 𝐶
𝛽 1−𝛼 (50)

Il ressort de (50) que 𝐹 𝑢 − 𝐹 0 > 0⇒ 𝐹 𝑢 > 𝐹 0 . L’image du point qui annule


la dérivée est donc supérieure à l’image de zéro. Puisque 𝑢 > 0 et 𝐹 𝑢 > 𝐹 0 , on peut
conclure que la fonction F(u) est croissante en 𝑢 pour 0 < 𝑢 < 𝑢 .
𝜌 +𝛿
La limite de F sur la borne supérieure est :lim𝑢 →𝛽 < 𝐹 (𝑢 ) = − 𝜃

En faisant la différence entre 𝐹 (𝑢 ) et 𝐹 𝛽 = lim𝑢 →𝛽 < 𝐹 (𝑢 ), on obtient :


1 𝛽𝐶 +𝛼 −1 1−𝛼
𝐹 𝑢 −𝐹 𝛽 =𝜃 𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝛽𝐶 + 𝛼 − 1 𝛽− 𝐶
𝛽 𝛼 −1 𝐴 > 0 (60)

Il ressort de l’équation (60) que 𝐹 𝑢 > 𝐹 𝛽 .Puisque 𝑢 est par définition inferieur à
𝛽 , on peut conclure que la fonction F(u) est décroissante en 𝑢 pour 𝑢 < 𝑢 < 𝛽 .
En résumé, la fonction 𝐹 𝑢 est : croissante en 𝑢 sur l’intervalle [0, 𝑢 [ ; décroissante
𝛽𝐶 +𝛼 −1
sur l’intervalle [𝑢 , 𝛽 [ ; et admet pour maximum le point 𝑢 = . Le taux de
𝐶

consommation par tête est donc concave en 𝑢 .

 Analyse du taux de croissance du capital par tête

1−𝛽 1−𝛽 (1−𝛼 )𝐴


En posant 𝐶 = 𝜏𝑞 et 𝐷 = 𝜏𝑞 ,le taux de croissance du capital
𝛽 𝛽 𝛽 −𝛼 1−𝛽 1−𝛽
−𝛼 2
par tête devient :𝐺 𝑢 = 𝐷 𝛽 − 𝑢 𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝐶𝑢 − 𝛿 (61)

Cette fonction n’a de sens que si et seulement si 𝑢 < 𝛽 .∀ 𝑢 ∈ [0, 𝛽 [, la dérivée de


G(u) est donnée par :
𝐺′ 𝑢 = 𝐷 𝛼 𝛽 − 𝑢 −𝛼 −1
𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝐶𝑢 2
+ 2𝑢 𝛽 − 𝑢 −𝛼
(𝑎 − 𝜏𝑎 + 𝐶𝑢 ) (62)

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Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

Comme on peut l’observer sur l’équation, 𝐺 ′ 𝑢 > 0, ce qui implique que la fonction
G(u) est croissante ∀ 𝑢 ∈ [0, 𝛽 [. En procédant au calcul des limites aux bornes du domaine
de définition de notre fonction, on a3 :
𝐺 0 = 𝐷 𝛽 −𝛼 𝑎 − 𝜏𝑎 2
− 𝛿 etlim𝑢 →𝛽 < 𝐺 (𝑢 ) = +∞ (63)
En effet, 𝛽 − 𝑢 −𝛼
= 𝑒 −𝛼 ln⁡(𝛽 −𝑢 ) , Quand 𝑢 → 𝛽 ; 𝛽 − 𝑢 → 0+
⇒ ln 𝛽 − 𝑢 = −∞ et −𝛼 ln 𝛽 − 𝑢 = +∞ ⇒ 𝑒 −𝛼 ln⁡(𝛽 −𝑢 ) → +∞

La limite à la borne supérieure étant égale à +∞ confirme que la fonction G(u) est
strictement croissante. Cette fonction pourrait également être convexe. Malheureusement,
l’existence de plusieurs paramètres ne permet pas de déterminer le signe de la dérivée seconde
pour confirmer cette hypothèse.

3) Implications économiques du modèle

La fonction F(u) étant concave en cloche et G(u) strictement croissante et convexe, il


peut exister au plus deux équilibres si le maximum de F(u) domine au moins un point de G
(u).Plus précisément, si le maximum de F(u) domine un point de G (u), alors les deux courbes
se coupent deux fois, traduisant ainsi la coexistence de deux sentiers de croissance
stationnaire à long terme. Dans le cas où le maximum de F(u) est égal à un point de G (u),
alors les deux courbes se coupent une seule fois et il existe un sentier de croissance
stationnaire à long terme. Lorsque le maximum de F(u) ne domine aucun point de G(u), les
deux courbes ne se touchent pas et il n’existe pas de sentier de croissance stationnaire à long
terme ; Dans ce cas, la courbe de F(u) passe sous la courbe de G(u) pour toutes les valeurs de
u.
Etant donné qu’on ne peut pas déterminer analytiquement le taux de croissance
d’équilibre, ni la taille optimale du secteur financier 𝑢 , nous allons simuler les équilibres
possibles en attribuant les valeurs raisonnables aux différents paramètres du modèle. Ce qui
permettrade tracer dans un même graphique la courbe du taux de croissance de la
consommation et celle du capital en fonction de la taille du secteur financier.
Les équilibres possibles suivant la variation de la part de l’épargne informelle réinvestie
(𝒂 )sont donnés par la figure24.Lorsque le SFI n’est pas efficace dans l’allocation de l’épargne

3
A partir de l’équation (3.70), on peut avoir :𝐺 0 = 0 si 𝐷 𝛽 −𝛼 𝑎 − 𝜏𝑎 2 = 𝛿 ; 𝐺 0 > 0 si 𝐷 𝛽 −𝛼 𝑎 −
𝜏𝑎2>𝛿 ; et 𝐺0<0 si 𝐷𝛽−𝛼𝑎−𝜏𝑎2<𝛿.
4
Les simulations sont faites pour les valeurs suivantes : 𝜽 = 0.4; 𝜌 = 0.2; 𝐴 = 2; 𝛿 = 0.01; 𝜏 = 0.6; 𝛽 =
0.85, 𝑞 = 1 𝑒𝑡 𝛼 = 0.6
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Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

(𝑎 ≤ 27%), il existe deux équilibres (figure 2.1 et 2.2) de croissance endogène associés à
différents niveaux de développement financier. Une hausse de 𝒂 entraine un déplacement de
la courbe F(u) vers le haut, et le taux de croissance de l’équilibre bas se réduit tandis que celui
de l’équilibre haut s’accroit. Ainsi, une amélioration de l’efficacité du SFI dans l’allocation de
l’épargne défavorise la croissance lorsque la taille secteur financier est faible. A contrario, elle
stimule la croissance lorsque le niveau de développement financier est élevé.
Dès lors que le SFI devient efficace dans l’allocation de l’épargne (𝑎 > 27%), il existe
un seul point d’équilibre (figure 2.3 et 2.4). Une hausse de 𝒂 engendre une augmentation du
taux de croissance qui passe de 0.69% (figure 2.3) à 1.23 % (figure 2.4), malgré la baisse du
niveau de développement financier. Le taux de croissance est d’autant plus élevé que la part
de l’épargne informelle réinvestie est aussi élevée. Ce résultat révèle donc qu’un SFI efficace
dans l’allocation de l’épargne contribue à long terme à la croissance économique.

Figure2: Equilibres de long terme entre développement financier et croissance suivant la part
de l’épargne informelle réinvestie (𝒂 )
Figure 2.1 : a=0 Figure 2.2 : a=0.2
F(u) G(u) F(u) G(u)

1 1,5
Taux de croissance

Taux de croissance

0,5 1

0 0,5

-0,5 0
0

0,7
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6

0,8

-1 -0,5
Taille du secteur financier Taille du secteur financier
Figure 2.3 : a=0,4 Figure 2.4 : a=1
F(u) G(u) F(u) G(u)

2 4
Taux de croissance

Taux de croissance

1,5 3
1 2
0,5 1
0 0

Taille du secteur financier Taille du secteur financier

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Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

Les équilibres possibles suivant la variation de la part de l’épargne mobilisée par le


SFF(𝝉 ) sont donnés par la figure 35, qui montre que les résultats dépendent les valeurs de.
Lorsque la mobilisation de l’épargne est très faible(𝜏 ≤ 0.05), il n’existe pas d’équilibre
entre le développement du secteur financier et la croissance économique (figure 3.1). Cette
situation traduit que le comportement des agents économique ne concorde pas avec les
paramètres de l’économie, pour qu’on puisse avoir l’équilibre. Pour permettre à l’économie
de retrouver une situation d’équilibre, il faudrait une modification du comportement des
agents économiques ou des ajustements au niveau des autres paramètres. Pour des valeurs
moyennes de 𝝉 (0.05 < 𝜏 < 0.44)il y’a un point d’équilibre (figure 3.2) l’augmentation de
𝝉 entraine une amélioration du niveau de développement financier et du taux de croissance.

Figure 3: Equilibres de long terme entre développement financier et croissance suivant la part
de l’épargne formelle (𝜏 )
Figure 3.1 : Tau=0.04 Figure 3.2 : Tau=0.4
F(u) G(u) F(u) G(u)

5 1,5
Taux de croissance

Taux de croissance

4
1
3
2 0,5
1
0
0
-1

Taille du secteur financier Taille du secteur financier


Figure 3.3 : Tau=0.6 Figure 3.4 : Tau=0.8
F(u) G(u) F(u) G(u)

1,5 1,5
Taux de croissance
Taux de croissance

1 1

0,5 0,5

0 0

-0,5 -0,5
Taille du secteur financier Taille du secteur financier

5
Il est construit en faisant varier 𝝉 et pour les valeurs suivantes : 𝜽 = 0.4; 𝜌 = 0.2; 𝐴 = 2; 𝛿 = 0.01; 𝑎 =
0.2; 𝛽 = 0.85, 𝑞 = 1 𝑒𝑡 𝛼 = 0.6
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Lorsque la mobilisation de l’épargne formelle est élevée (𝜏 ≥ 0,44), il y’a deux


équilibres (figures 3.3 et 3.4). Une hausse de la valeur de 𝝉 entraine un déplacement de la
courbe F(u) vers le bas, et la taille du secteur financier ainsi que le taux de croissance
augmentent. Sur la figure 3.3 où 𝝉 est relativement plus faible, les niveaux de développement
financier et de croissance observés aux différents points d’équilibres, sont respectivement
inférieurs à ceux de la figure 3.4. Le développement financier et la croissance économique
sont d’autant plus élevés que 𝝉 est élevé. Une forte efficacité du SFF dans la mobilisation de
l’épargne stimule donc le développement financier et la croissance économique. Ainsi, les
économies caractérisées par une faible mobilisation de l’épargne formelle se retrouvent sur
des sentiers de croissance où il n’y aura pas d’équilibre entre la sphère financière et la sphère
réelle (figure 3.1).
Les équilibres possibles suivant la variation du coefficient d’aversion au risque(𝜽 )sont
donnés par la figure46.Il en ressort que pour des valeurs très faible de 𝜽 , il existe un point
d’équilibre (figure 4.1)caractérisé par un secteur financier de petite taille et un faible taux de
croissance économique. Dans la figure 4.2 où 𝜽 est relativement plus faible, on a deux
équilibres pour lesquels les niveaux de développement financier et de croissance sont
respectivement supérieurs à ceux de la figure 4.3. Plus le coefficient d’aversion au risque est
faible, plus sont élevés le niveau de développement financier et le taux de croissance. Ce qui
traduit donc qu’une forte élasticité de substitution stimule le développement financier et la
croissance économique. Il en résulte que lorsque les individus aiment trop le risque
(coefficient d’aversion élevé), ils substituent moins leur consommation dans le temps (faible
élasticité de substitution inter temporelle) et l’économie se retrouve sur des sentiers de
croissance où il n’aura pas d’équilibre entre le développement financier et la croissance.

Figure 4: Equilibres de long terme entre développement financier et croissance suivant les
valeurs du coefficient d’aversion au risque (𝜽 )
Figure 4.1 : 𝑻𝒉 é𝒕𝒂 = 𝟎 . 𝟎𝟐 Figure 4.2 : 𝑻𝒉 é𝒕𝒂 = 𝟎 . 𝟐

6
Ce graphique est construit pour les valeurs suivantes : 𝜌 = 0.2; 𝐴 = 2; 𝛿 = 0.01; 𝜏 = 0.6; 𝑎 = 0.2; 𝛽 = 0.85,
𝑞 = 1 𝑒𝑡 𝛼 = 0.6

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F(u) G(u) F(u) G(u)

15 1,5
Taux de croissance

Taux de croissance
10 1

5 0,5
0 0

0,7
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6

0,8
-5 -0,5
Taille du secteur financier Taille du secteur financier
Figure 4.3 : 𝑻𝒉 é𝒕𝒂𝜽 = 𝟎.𝟒 Figure 4.4 : 𝑻𝒉 é𝒕𝒂 = 𝟓
F(u) G(u) F(u) G(u)

1,5 1,5
Taux de croissance

1
Taux de croissance 1

0,5 0,5

0 0
0

0,2

0,5

0,8
0,1

0,3
0,4

0,6
0,7

0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0
-0,5 -0,5
Taille du secteur financier Taille du secteur financier
Dans le cas de deux états stationnaires, une hausse du coefficient d’aversion au risque
s’accompagne d’un déplacement de la courbe F(u) vers le bas. Les niveaux de croissance et
de développement financier de l’équilibre bas ne change presque pas, tandis que ceux de
l’équilibre haut se réduisent. Ce qui traduit que l’accroissement du niveau de risque ne stimule
pas le développement financier et la croissance dans les pays à secteur financier
embryonnaire, alors qu’elle les défavorise dans les pays financièrement développés.
Les équilibres possibles suivant la valeur du taux d’escompte psychologique(𝝆 )sont
donnéspar lafigure57.Celle-ci montre que pour des valeurs très faibles de 𝝆 , on a un équilibre
caractérisé par des niveaux de développement financier et de croissance élevés(figure 5.1).
Par contre, dans les économies où les ménages ont une forte préférence pour le présent (figure
5.4), ils vont épargner moins dans le secteur financier et il n’y aura pas d’équilibre possible
entre la croissance et le développement financier. Ce résultat révèle ainsi que plus les agents
économiques ont une préférence pour le présent, plus l’économie s’éloigne du sentier de
croissance où il peut avoir équilibre entre la croissance et le développement financier.

7
Ce graphique est construit en faisant varier 𝜌 et pour les valeurs suivantes : 𝜽 = 0.4; 𝐴 = 2; 𝛿 = 0.01; 𝜏 =
0.6; 𝑎 = 0.2; 𝛽 = 0.85, 𝑞 = 1 𝑒𝑡 𝛼 = 0.6 .

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19
Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

Figure5 : Equilibres de long terme entre développement financier et croissance suivant les
valeurs du taux d’escompte psychologique (𝝆 )
Figure 5.1 :𝑹𝒉𝒐 = 𝟎 . 𝟏 Figure 5.2 : Rho= 𝟎 . 𝟐
F(u) G(u) F(u) G(u)

1,5 1,5

Taux de croissance
Taux de croissance

1 1

0,5 0,5

0 0

0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
-0,5 -0,5

Taille du secteur financier Taille du secteur financier


Figure 5.3 : 𝑹𝒉𝒐 = 𝟎.𝟑 Figure 5.4 : 𝑹𝒉𝒐 = 𝟎.𝟒
F(u) G(u) F(u) G(u)

1,5 1,5
Taux de croissance

Taux de croissance

1 1
0,5
0,5
0
0
0

0,8
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
-0,5
-0,5
-1
Taille du secteur financier Taille du secteur financier

Pour des valeurs moyennes de 𝝆 , il existe deux équilibres (figures 5.2 et 5.3). Une
hausse de 𝝆 s’accompagne un déplacement de la courbe F(u) vers le bas. Les niveaux de
développement financier et de croissance de l’équilibre haut se réduisent tandis que ceux de
l’équilibre bas s’accroissent. Ce résultat révèle donc que la hausse du taux de préférence pour
le présent stimule le développement financier et la croissance dans les économies
financièrement sous-développées, alors qu’elle la défavorise dans les économies
financièrement développées.
En résumé, les simulations montrent que l’interaction entre le secteur financier et le
secteur réel peut générer des phénomènes d’équilibres multiples illustrés par les figures 2.1,
2.2, 3.3, 3.4, 4.2, 4.3, 5.2 et 5.3. Au point d’équilibre bas (premier équilibre), les niveaux de
développement financier et de croissance économique sont faibles, tandis qu’au point
d’équilibre haut (second équilibre), le niveau de développement financier est élevé et la
croissance forte. Ces résultats qui mettent en évidence les phénomènes de trappe de sous-
développement et de trappe à pauvreté dans la relation entre le secteur réel et le secteur

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20
Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

financier8 ont été également trouvé par Eggoh et Villieu (2013).Contrairement à ces deux
auteurs, pour qui les 02 équilibres peuvent être atteint pas un saut instantané de la taille du
secteur financier, le modèle que nous venons d’esquisser montre que l’amélioration de la
qualité des institutions est le catalyseur du passage de l’équilibre bas à l’équilibre haut.

 Etude de la sensibilité de la trajectoire de la croissance

La figure 6 décrit la manière dont les deux états stationnaires sont déformés par la
variation de l’efficacité du secteur financier dans la transformation de l’épargne en
investissement. A l’équilibre, la technologie d’allocation de l’épargne est donnée par :

1−𝛽 1−𝛽
𝜑 (𝑢 ∗ ) = 𝑞 𝛽
𝑢∗ (64)

Cette technologie est une fonction décroissante du paramètre𝛽 . En effet les paramètres
𝑞 𝑒𝑡 𝑢 admettent des valeurs positives et (1 − 𝛽 )1−𝛽 < 𝛽 1−𝛽 . Ce qui implique qu’une
amélioration de l’efficacité du secteur financier se traduit par une diminution du paramètre 𝛽 .

Figure 6: Equilibres de long terme entre le développement financier et croissance


Figure 6.1 : Beta= 0.85 Figure 6.2 : Beta=0.75
F(u) G(u) F(u) G(u)

0,8 1
Taux de croissance
Taux de croissance

0,6 0,8
0,6
0,4
0,4
0,2 0,2
0 0
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 -0,2 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7
-0,2

Taille du secteur financier Taille du secteur financier

8
Un secteur financier de taille initialement réduite résulte d’un faible prélèvement de la main d’œuvre
qualifiée dans le secteur réel. Ce qui implique une faible efficacité dans la transformation de l’épargne en
investissement et donc une faible externalité du secteur financier sur le secteur réel. Il en résulte une réduction
continue de la taille du SF jusqu’à l’équilibre bas où la taille du SF et le taux de croissance sont tous faibles. À
contrario, une taille du SF initialement élevée accroit l’efficacité des sociétés financières dans la transformation
de l’épargne en investissement et par conséquent les externalités que le secteur financier exerce sur le secteur
réel. Il s’en suit une augmentation du taux de croissance avec certainement des résultats positifs sur la
productivité du travail dans les sociétés financières qui leur permettra de rivaliser les sociétés non-financières sur
le marché du travail et de conserver l’emploi à un niveau élevé (Berthélemey et Varoudakis, 1994 ; Eggoh et
Villieu, 2013).

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21
Finance & Finance Internationale N°24 juillet 2022

Cette figure montre que, lorsqu’on améliore l’efficacité du secteur financier dans
l’allocation de l’épargne (baisse de𝛽 de 0.85 à 0.75), la courbe F(u) se déplace vers le bas et
les nouveaux états stationnaires sont obtenus (figure 6.2). Le taux de croissance bas
s’améliore passant de 0.017 à 0.019, tandis que le taux de croissance haut se réduit passant de
0.48 à moins de 0.40. L’amélioration de l’efficacité de l’intermédiation financière engendre
donc une amélioration de la trajectoire basse de la croissance et une réduction de la trajectoire
haute de la croissance. Ce résultat révèle ainsi que le développement financier stimule la
croissance économique au niveau de l’équilibre bas (pays initialement dotés d’un faible
niveau de développement financier), tandis qu’il la défavorise au point d’équilibre haut (pays
initialement dotés du secteur financier développé).

Conclusion
Il était question dans cet article de réexaminer la relation non-linéaire entre le
développement financier et la croissance à l’aide d’un modèle théorique. Celui-ci repose sur
l’approche de Eggoh et Villieu (2013) selon laquelle le secteur financier prélève des
ressources du secteur réel pour rendre des services d’intermédiation. L’intégration du secteur
financier informel et de la qualité des institutions dans leur modèle aboutit aux résultats ci-
après.
 Le développement du secteur financier est une fonction croissante de la qualité des
institutions et vice versa.
 Le degré d’efficacité du secteur financier informel dans l’allocation de l’épargne exerce
des effets de seuil dans sa relation avec la croissance. Lorsqu’il est assez efficace, son
développement stimule la croissance économique ; dans le cas où il est peu efficace, son
effet dépend du niveau de développement du secteur financier formel ; plus précisément, le
développement d’un SFI peu efficace défavorise la croissance lorsque le SFF est peu
développé, et la stimule lorsqu’il est assez développé.
 L’interaction entre le secteur financier et le secteur réel génère des équilibres multiples,
pouvant produire une relation non-linéaire entre le développement financier et la
croissance. Il existe au plus deux équilibres : un premier équilibre où les niveaux de
développement financier et de croissance sont faibles, et un second équilibre caractérisé
par un niveau de développement financier élevé et une croissance économique forte ;
 Le passage de l’équilibre bas à l’équilibre haut se faisant via une amélioration de la qualité
des institutions en place. En dessous d’un certain seuil de développement financier,

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l’efficacité de l’intermédiation financière stimule la croissance alors qu’elle la défavorise


au-delà de ce seuil.
 Une forte élasticité de substitution ainsi qu’une faible préférence des individus pour le
présent, stimulent à long terme le développement financier et la croissance économique.

Ces résultats mettent ainsi en évidence l’existence de la relation non-linéaire entre le


développement financier et la croissance, les niveaux de développement financier formel et
informel exerçant des effets de seuil dans cette relation. Ils suggèrent également l’existence de
la double causalité entre le développement financier et la qualité des institutions, montrant
ainsi que les institutions fortes favorisent le développement du secteur financier et par
conséquent la croissance économique. La vérification empirique de ces prédictions du modèle
théorique présenté dans le présent travail fera l’objet de nos travaux de recherches futurs.

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