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De là, il se met à parcourir la France 667. Les rencontres qu'il fait, les
actes étranges de folie qui signalent partout son passage, sont
impossibles à raconter. Il va jusqu'aux Pyrénées 668, passe en
Espagne, arrive auprès de Barcelonne, à l'instant même où
Angélique va pour s'y embarquer avec Médor 669. Il ne la reconnaît
pas; dans l'état hideux où sa démence l'a réduit, il n'en est point
reconnu. Peu s'en faut que ce furieux qu'elle a privé de la raison, ne
se venge d'elle sans le savoir; elle n'échappe à sa fureur, qu'au
moyen de l'anneau qui la rend invisible quand il lui plaît. Elle monte
enfin sur un vaisseau, et désormais en sûreté, prend, avec son cher
Médor, la route de l'Inde, où le trône du Catay les attend. Et
cependant l'insensé Roland, parvenu, en traversant toute l'Espagne,
jusqu'au détroit de Gibraltar, le passe à la nage, aborde sur les
sables d'Afrique, et continue de s'y livrer aux mêmes extravagances
et aux mêmes fureurs 670.
Note 667: (retour) St. 14. Le poëte le quitte alors, et ne le ramène sur
la scène qu'au vingt-neuvième chant, st. 40.
CHAPITRE VIII.
Roger, à peine échappé de l'île d'Alcine 671, était tombé, malgré son
amour pour Bradamante, dans une erreur des sens où la beauté
peut entraîner la jeunesse, et qu'ordinairement elle lui pardonne. Il
en avait été puni en perdant à la fois Angélique et l'Hippogryphe. Le
magicien Atlant avait alors imaginé un nouveau moyen pour
s'emparer de lui. Il avait construit par enchantement un palais, et l'y
avait attiré par un prestige infaillible. Roger avait cru voir sa chère
Bradamante enlevée par un géant et emportée dans ce palais. Il y
avait poursuivi le géant; mais au moment où il était entré, la porte
s'était fermée; il n'avait plus revu ni le géant ni Bradamante 672. Il
croyait entendre la voix de sa maîtresse qui l'appelait à son secours.
Il parcourait sans cesse l'édifice, et se fatiguait à chercher ce qu'il ne
trouvait jamais. Et dans ce même temps, la véritable Bradamante
attendait avec impatience, à Marseille, l'effet des promesses de
Mélisse et le retour de son cher Roger 673. Mélisse vient enfin lui
apprendre le nouveau stratagême employé par Atlant, et l'engage à
se rendre avec elle au château magique, dont elle lui apprend les
moyens de détruire l'enchantement. Elles y vont ensemble; pour
charmer l'ennui de la route. Mélisse prédit à Bradamante toutes les
femmes célèbres qui doivent sortir de son union avec Roger, et qui
ajouteront à l'illustration de la maison d'Este par leurs charmes et
par leurs vertus 674. Arrivées à la vue du château, Mélisse répète à
Bradamante les instructions qu'elle lui a données, et la laisse aller
seule, de peur d'être reconnue par le vieil Atlant. Mais Bradamante
suit mal ces instructions. Elle croit voir Roger, et l'entendre invoquer
son secours. Il fallait, pour le délivrer, qu'elle le tuât de sa main, lui,
ou plutôt ce qui n'en est que le fantôme 675. Elle hésite; Roger
l'appelle à grands cris en fuyant dans le château. Elle y entre sur ses
pas: la porte se referme; et la voilà close et enchantée comme Roger
lui-même. Sans cesse ils courent pour se trouver l'un l'autre: ils se
rencontrent à tout moment, et ne se reconnaissent pas.
Note 671: (retour) Voyez ci-dessus, p. 403.
On sent que l'Arioste, peu gêné par les mœurs de son temps, par le
genre de son poëme, par le génie de sa langue, et tout aussi peu
par son propre génie, a dû prendre bien des libertés dans un pareil
sujet. Nous qui, suivant l'expression d'un ancien poëte, cultivons des
Muses plus sévères 688, disons seulement que quelque envieux
s'aperçut enfin de la chose, que Marsile en fut instruit, qu'il fit
prendre au lit Richardet, et le condamna au dernier supplice, que le
jeune et beau chevalier allait être brûlé vif, lorsque Roger arrive fort
à propos pour être son libérateur 689. Il fond avec l'impétuosité de la
foudre sur la canaille qui entoure le bûcher, sur les satellites, sur les
bourreaux, frappe, blesse, tue tout ce qui ne s'enfuit pas. Richardet,
détaché du poteau fatal, le seconde avec les premières armes qui lui
tombent sous la main. Ils sortent ensemble de cette ville maudite; et
c'est alors que Richardet raconte à Roger le tour de page qui a été
sur le point de finir si mal.
Note 688: (retour) Qui Musas colimus severiores.
La nuit suivante, Roger, au lieu de dormir, est agité par ses pensées.
La promesse qu'il a faite à Bradamante de se faire chétien, est-ce le
moment de la remplir? Un courrier lui avait annoncé la position où se
trouve Agramant, son seigneur et son roi. Ce serait une lâcheté que
de l'abandonner quand la fortune l'abandonne, et lorsqu'il est
attaqué dans son camp par toutes les forces de Charlemagne. Il
suivra, quoi qu'il lui en coûte, la loi de l'honneur et du devoir. Il écrit
à Bradamante, l'instruit de sa résolution, et lui jure de nouveau que
dès qu'il aura délivré Agramant, il tiendra toutes ses promesses 690.
Note 690: (retour) St. 86.
Le lendemain il sauve encore d'un grand péril Vivien et Maugis,
cousins de Bradamante. En marchant à leur délivrance avec leur
frère Andigier et Richardet, ils rencontrent la guerrière Marfise qui se
réunit avec eux. Elle a déjà paru plusieurs fois dans le poëme. Déjà
plusieurs exploits l'ont fait voir en Orient et en Europe telle qu'elle
est annoncée dans le roman du Bojardo; mais ce n'est qu'ici qu'elle
se lie à l'action principale. Elle contribue puissamment à délivrer
Vivien et Maugis d'une troupe de Mayençais, car c'est toujours de
cette race perfide qu'il faut sauver ou venger les héros de la maison
de Montauban. Les trois chevaliers et Marfise tuent ou mettent en
fuite tous les traîtres. Vivien et Maugis sont libres et se joignent à
leurs libérateurs 691. Ils font ensuite, soit ensemble, soit séparément,
plusieurs exploits. Ils se quittent enfin pour aller où le devoir les
appelle; Roger et Marfise au secours de leur roi Agramant qui
rassemble toutes ses forces pour résister à Charlemagne, les autres
auprès de cet empereur qui se prépare à l'attaquer avec toutes les
siennes.
Note 691: (retour) C. XXVI, st. 26.
Voilà encore un tableau des plus originaux, des plus animés, des
plus fortement conçus et des mieux peints qui soient dans aucun
poëme 697. Bien des gens le placent dans celui-ci au premier rang
avec ceux de l'assaut de Paris et de la folie de Roland; et il serait
difficile d'en trouver dans d'autres poëmes modernes que l'on pût
mettre à côté de ces trois-là.
Note 697: (retour) Il remplit une grande partie du c. XXVII.
C'est dans cette disposition d'esprit qu'il arrive à une hôtellerie, dont
l'hôte jovial et bon homme raconte devant lui l'histoire graveleuse de
Joconde 699, que l'Arioste conseille si plaisamment aux dames et à
ceux qui les aiment de ne pas lire, parce qu'elle contient des
exemples de la fragilité des femmes trop honteux et trop injurieux
pour elles, mais qu'il a si agréablement narrée, qu'il en est peu qui
suivent rigoureusement ce conseil. On sait que notre La Fontaine a
tiré de cet épisode un de ses plus jolis contes, et que le sévère
Boileau, dans sa jeunesse, lorsqu'il n'était pas encore le législateur
de notre Parnasse, écrivit pour défendre le Joconde 700 de La
Fontaine, contre celui de M. de Bouillon, que de sots juges ne
manquaient pas de lui préférer, et aussi profondément ignoré
aujourd'hui qu'ils le sont eux-mêmes. Boileau, non content de
prouver que La Fontaine vaut mieux que Bouillon, veut aussi qu'il
vaille mieux que l'Arioste. Cette question n'est pas de nature à
pouvoir être discutée ici. Je dirai seulement, avec tout le respect
dont je fais profession pour Boileau, qu'il paraît n'avoir pas assez
connu la langue de l'Arioste ni le genre dans lequel il a écrit, pour le
juger sainement. Il parle du Roland comme d'un poëme héroïque et
sérieux, dans lequel il le blâme d'avoir mêlé une fable et un conte de
vieille. D'abord ce n'est point là un conte de vieille, au contraire.
Ensuite ce genre de poëme n'est héroïque et sérieux que quand il
plaît au poëte. Le roman épique admet tous les tons, et surtout ce
ton de demi-plaisanterie que l'Arioste possède si bien, mais que l'on
ne peut véritablement sentir que quand on connaît toutes les
finesses et les délicatesses de la langue italienne. La preuve que
Boileau ne poussait pas loin cette connaissance, c'est qu'il trouve le
ton de l'Arioste sérieux, même dans cette nouvelle de Joconde 701.
Note 699: (retour) C. XXVIII.
Note 700: (retour) Et non pas la Joconde, comme on le dit
ordinairement, et comme le dit Boileau lui-même.
Note 701: (retour) Boileau reproche aussi à l'Arioste d'avoir fait, dans un
conte de cette espèce, jurer le roi sur l'Agnus Dei, et d'avoir fait une
généalogie plaisante du reliquaire que Joconde reçut de sa femme en
partant. Ce n'est plus ici la langue que le censeur ne connaît pas, ce sont
les mœurs du pays et du siècle. En Italie, pourvu que l'on reconnût
l'autorité du pape, on a toujours été très-coulant sur ces sortes d'objets.
Note 704: (retour) C'est sur ce pont que Roland, devenu insensé, le
rencontre. Voyez ci-dessus, p. 417, note 3.
Note 714: (retour) On verra plus bas ce qu'ils sont devenus, et à quoi,
dès ce moment, le poëte les destine, sans paraître y songer.
Note 715: (retour) St. 52.
Marfise les voit de loin; elle croit qu'ils n'ont d'autre intention que de
finir leur combat; elle les suit et arrive presqu'en même temps
qu'eux. Bradamante ne doute point que ce ne soit l'amour qui la
conduise. Furieuse, elle jette sa lance, met l'épée à la main et se
précipite sur Marfise. Leurs épées ne suffisent pas: elles s'attaquent
avec leurs poignards. Roger s'efforce de les séparer; il saisit d'un
bras vigoureux Marfise, qui se met en colère, lui reproche de lui
avoir arraché la victoire, reprend son épée, et fond sur lui à son tour.
Il se défend, reçoit un coup très-rude sur la tête, se met aussi lui en
fureur, et d'un coup qu'il adressait à Marfise enfonce son épée très-
avant dans le tronc de l'un des cyprès dont ce bois est planté 719.
Note 719: (retour) St. 58.
Astolphe ignorait encore que son cousin Roland était devenu fou;
l'apôtre le lui apprend. Il ajoute que c'est Dieu qui lui a envoyé cette
infirmité pour le punir d'avoir trop aimé une païenne, ennemie de la
foi dont il était le défenseur. Mais trois mois de folie suffisent pour
expier son erreur; Dieu lui-même a fixé ce terme, et c'est sa volonté
toute-puissante qui a conduit Astolphe sur la montagne du paradis,
pour y apprendre les moyens de rendre au comte d'Angers son bon
sens. Mais il lui reste un autre voyage à faire. Ce n'est point dans la
paradis terrestre que se trouve le remède à ce mal, c'est dans la
Lune. Le char d'Élie est là tout prêt pour y transporter Astolphe et
son guide. Ils y montent; et sans trop s'arrêter à considérer les
merveilles du monde lunaire, il vont droit à une vallée où se trouve
rassemblé avec ordre tout ce qui se perd confusément dans celui-ci,
non-seulement les sceptres, les richesses et les autres vanités que