Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
https://manualpost.com/download/link-belt-excavator-210-lx-ex-schematics-operat
ors-part-service-manual/
Catherine voulait empêcher à tout prix cette lutte plus que civile.
Convaincue qu'il importait au bien du royaume et du Roi de
contenter le duc d'Anjou, elle changea de politique, sinon de
sentiments. Sans doute elle aurait mieux aimé voir François à la
Cour, paisible et docile, que de le servir en ses entreprises
étrangères. Mais le seul moyen qui lui restât d'accorder les deux
frères, c'était de soutenir les ambitions de l'un pour assurer la
sécurité de l'autre. Une première fois à Blois ou à Chenonceaux, à
son retour d'Alençon, en mai 1581, elle aurait essayé sans succès de
décider le Roi à soutenir le Duc sous main1113. Elle lui avait
représenté, raconte l'ambassadeur d'Espagne, Tassis, que le Duc,
«se voyant sans souffisans moyens pour exécuter ce qu'il a en teste
par faulte de la faveur de son frère, de rage ne voulsist convertir sa
furye contre luy et allumer ce royaulme de nouvelle guerre
civile»1114. A la longue elle lui persuada de souffrir ce qu'il n'aurait
pu défendre, sans de gros risques. En juillet il était résigné, tout en
continuant à désavouer l'agression. Le seigneur de Crèvecœur,
lieutenant général du Roi en Picardie, rapporte l'agent florentin
Renieri, vint à la Cour, «pour savoir de la bouche du Roi la vérité sur
l'entreprise de Monsieur, à qui Sa Majesté répondit qu'elle ne se
faisait pas de son consentement. Crèvecœur m'a dit que la Reine-
mère lui demanda si le Roi pouvait empêcher la dite entreprise. Il dit
que oui. De quoi elle se montra mécontente1115».
Note 1112: (retour) Kervyn de Lettenhove, t. VI, p. 133.
Note 1113: (retour) Sur ce premier échec à Blois, voir une dépêche de
l'ambassadeur vénitien, citée dans Lettres, t. VII, p. 375, note.
Elle alla encore une fois, par acquit de conscience, trouver son fils à
La Fère-en-Tardenois pour le détourner de cette aventure (7 août),
mais déjà elle avait pris toutes les dispositions pour la protéger. Le
sieur de Puygaillard, qui commandait les troupes royales, avait
l'ordre de côtoyer l'armée d'invasion et d'empêcher les Espagnols de
l'attaquer avec avantage. C'est sous la protection de ce lieutenant du
Roi que le duc d'Anjou mena au secours de Cambrai les troupes que
le Roi lui avait défendu de rassembler et qu'il avait abandonnées aux
coups des populations. Il entra dans la ville le 18 août, la débloqua
ensuite et marcha sur Cateau-Cambrésis, qui capitula le 7
septembre. Mais la Reine-mère restait anxieuse. «Je suis, écrivait-
elle à Du Ferrier, le 23 août, en une extresme peine de l'issue du
voyage auquel mon fils s'est embarqué»1116. Elle craignait que la fin
ne correspondît pas au commencement.
Note 1116: (retour) Mariéjol, Histoire de France de Lavisse, t. VI, 1, p.
209. Lettres, t. VII, p. 391.
Note 1127: (retour) 8 février 1579, Lettres, t. VI, p. 256. Henri III avait
cédé, d'assez mauvaise grâce, à ce qu'il semble, aux importunités de sa
mère.--Cf. t. VI, p. 117, 13 novembre 1578; t. VI, p. 214, 10 janvier
1579.
Note 1128: (retour) Elle venait de signer la paix de Nérac et elle était
enorgueillie de ce succès diplomatique, qui n'eut pas, comme on le sait,
de lendemain. C'était d'ailleurs son principe de ne laisser prescrire aucun
droit. A la même époque elle apprit que des Urbinates, probablement
mécontents de leur ancien duc mort ou de son successeur, étaient allés le
dire à l'ambassadeur de France à Rome, le sieur d'Abain. Elle n'oubliait
pas que son père avait été duc d'Urbin et qu'on l'appelait elle-même en
son enfance la «duchessina». Elle écrivit à l'ambassadeur d'interroger les
gens de ce duché, «où j'ay tel droict que je puis dire» qu'il «m'appartient
comme le comté d'Auvergne qui est de mon propre et privé héritage» (30
décembre 1578). Elle lui recommanda de voir le pape, offrant, si celui-ci
embrassait chaudement cette affaire, de bien gratifier son bâtard
(Jacques Buoncompagni, châtelain de Saint-Ange). Mais Grégoire XIII ou
les mécontents d'Urbin se tinrent cois, car il n'est plus question du duché
dans la correspondance de Catherine.
Le cardinal Henri étant mort (31 janvier 1580) sans avoir réglé la
question de succession, les gouverneurs des cinq grandes provinces,
chargés de la régence, décidèrent qu'elle le serait par voie de
justice, comme s'il s'agissait d'un procès civil. Des trois prétendants
les plus sérieux, Antonio, prieur de Crato, fils naturel d'un frère du
cardinal, Philippe, roi d'Espagne, fils d'une infante portugaise, et le
duc de Bragance, grand seigneur portugais, gendre d'une autre
infante, mais qui était inférieure en degré à la mère de Philippe
II1129, Antonio était le plus populaire, Bragance, le plus sortable et
Philippe II, le plus puissant et le plus proche en parenté. Le roi
d'Espagne avait tant d'intérêt à parfaire l'unité politique de la
péninsule, ce rêve de ses prédécesseurs, qu'il était bien résolu à n'en
pas laisser échapper l'occasion. Il faisait exposer ses droits par ses
juristes, sans toutefois admettre qu'ils fussent contestables,
simplement pour éclairer l'opinion. Cependant il massait sur la
frontière de Portugal ses vieux régiments, tirait de sa disgrâce pour
les commander son meilleur général, le duc d'Albe, et, en prévision
d'un prochain voyage dans son nouveau royaume, faisait venir de
Rome où il l'avait relégué, le plus habile de ses hommes d'État, le
cardinal Granvelle, qui le remplacerait en son absence à Madrid.
Note 1129: (retour) Conestaggio, Dell'Unione del regno di Portogallo
alla Corona di Castiglia, Venise et Vérone, 1642, p. 56.
Elle eut même l'idée, à ce qu'il semble, de donner toute autorité sur
les armements que faisait le connétable de D. Antonio à son gendre,
le roi de Navarre, qu'elle fit assister par son cousin, Philippe Strozzi,
colonel général de l'infanterie française. «La résolution de tout,
écrivait Strozzi à Catherine, est remise à la volonté de saditte
majesté (Henri de Navarre).... Le tout ne se résoudra que après
avoir parlé à elle et reçeu ses commandemens sur lesquels monsieur
le comte de Vimiose (le connétable) est résolu de se régler de
tout...1134» Henri III, qui avait peu de goût pour les aventures, avait
probablement, pour marquer sa désapprobation, laissé attendre
«quelque heure» le comte de Vimiose dans l'antichambre de sa mère
avant de le recevoir1135. Mais Catherine, plus diligente, faisait verser
au capitaine Carles, qui avait convenu avec Vimiose de mener des
hommes aux Iles, les 1 500 écus qui lui étaient nécessaires pour
aller rafraîchir les troupes du capitaine Scalin qui s'y trouvait déjà.
Elle pressait le départ des renforts1136, sachant que le roi d'Espagne
avait expédié de Lisbonne aux Açores, le 15 juin, 8 vaisseaux et 8 ou
900 bisognes (recrues). Elle soutenait D. Antonio, tout en s'excusant
de ne pas lui donner dans ses lettres le titre de roi, de peur que
l'Espagnol pût croire qu'elle ne persistait plus «en son droit et
prétention»1137.