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© Mathias Matallah – 2ème trimestre 2017

Réalisation l’Atelier Blanc


Dessins Gabs
ISBN 978-2-9560906-0-1

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Asclépios, fils d’Apollon et d’Epione, dieu de la médecine au sein de l’Olympe,
avait deux filles aussi belles que sages, Hygie et Panacée. Hygie se consacra à
maintenir les humains en bonne santé pour éviter à son père la peine d'intervenir
continuellement afin d'alléger ou de guérir leurs souffrances et devint ainsi la
déesse de la prévention. Panacée quant à elle mit toute son énergie dans la
découverte de nouveaux remèdes à prodiguer aux humains pour guérir leurs maux
et devint la déesse des soins. Après plus de deux millénaires de rivalité féroce, au
cours desquels chacune des sœurs tenta de convaincre les humains de la
supériorité de sa science, Panacée crut avoir enfin gagné la partie en soufflant à
Alexander Fleming la formule de la pénicilline. Mais les humains ne surent pas
mettre à profit cette formidable invention et les extraordinaires progrès de la
médecine curative qui l’accompagnèrent. Persuadés désormais d’être les égaux
des dieux, ils devinrent sédentaires et boulimiques et poussèrent la perversité
jusqu’à inventer de nouvelles maladies incurables, diabète, cancers et autres
maladies cardiovasculaires. Paniqués par la catastrophe ainsi déclenchée, ils se
tournèrent à nouveau vers Hygie, qui remplaça durablement sa sœur dans leur
cœur. C’est l’histoire de cet incroyable retour de situation que raconte ce livre.

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Introduction

J’ai créé il y a près de vingt ans la société de conseil jalma ,


spécialisée exclusivement en santé. Nous sommes devenus l’acteur de
référence dans ce domaine et avons conseillé depuis 1997 l’Assurance
maladie, l’Institut national du cancer (INCa), de nombreuses agences
régionales de santé (ARS) ainsi que les principaux assureurs santé privés,
laboratoires pharmaceutiques et fabricants de dispositifs médicaux.
Après avoir traité uniquement des problématiques de financement,
nous avons, à partir de 2006, commencé à nous orienter vers des sujets de
prévention à fort contenu médical. Nous avons progressivement mis en
place une équipe médicale constituée d’éminents spécialistes hospitaliers
et travaillé sur des programmes de dépistage et d’accompagnement des
patients dans les domaines du cardiovasculaire, de la cancérologie et de la
pneumologie.
En élaborant ces programmes, j’ai rapidement acquis la
conviction que le système de santé sous sa forme actuelle était incapable
de faire face à l’explosion des maladies chroniques liées au vieillissement
et à la dégradation continue des modes de vie. Il a été construit sur un
modèle purement curatif pour traiter des malades atteints d’affections
aiguës alors que nous sommes désormais dans un monde où l’essentiel de
l’activité médicale porte sur des maladies chroniques.
Une première particularité des maladies chroniques est qu’elles
sont évitables mais que, une fois survenues, elles se soignent mais ne se
guérissent pas. Pour les endiguer, il faut donc les traiter très en amont, ce
qui implique l’existence de dispositifs de prévention conséquents.
Aujourd’hui, ces dispositifs manquent cruellement, d’où des lacunes
criantes dans leur dépistage. A titre d’exemple, seul un hypertendu sur
deux est détecté, alors que l’hypertension artérielle est la première cause

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d’accidents vasculaires cérébraux (AVC).
Une seconde particularité de ces maladies, cause de leur mauvais
dépistage, est qu’elles sont souvent asymptomatiques. Le patient ne ressent
pendant très longtemps aucun symptôme et n’est donc pas incité à se faire
examiner. Une consultation de médecin traitant durant en moyenne à peine
dix minutes, le sujet de la prévention n’y est que très rarement abordé.
J’ai aussi réalisé rapidement, en travaillant sur ces programmes,
que la médecine moderne, quels que soient les progrès accomplis,
incontestables, ne peut à elle seule résoudre tous les problèmes. D’abord,
parce qu’elle est de plus en plus contestée par les malades chroniques eux-
mêmes, comme l’atteste la faible observance des traitements
médicamenteux, y compris dans le cadre d’affections où le pronostic vital
est engagé, et ensuite, parce que des aspects du mode de vie, comme
l’activité physique et les régimes alimentaires, pèsent bien plus lourd que
la prise en charge médicale dans la prévention et l’accompagnement des
malades chroniques.
En 2012, j’ai créé avec deux associés smartsanté, société de
technologies et de services spécialisée dans la conception et la mise en
œuvre de solutions digitales de dépistage et de suivi des maladies
chroniques. Nous avons commencé par le cardiovasculaire, l’aire
thérapeutique qui concerne le plus de monde (environ 60 % des Français
ont au moins un facteur de risque cardiovasculaire et plus d’un quart
d’entre eux, deux ou plus). Nous avons créé une solution en ligne,
entièrement sécurisée et validée médicalement, de dépistage et
d’accompagnement des principaux facteurs de risque cardiovasculaires,
diabète de type 2, hypertension artérielle et excès de cholestérol. Cette
solution, qui peut être utilisée à partir d’un smartphone, d’une tablette ou
d’un PC, a pour vocation de prendre en charge, après un bilan complet
initial, tous les aspects du suivi des personnes ayant des facteurs de risque :
médical, nutrition, activité physique et addictions.
Au-delà, l’ambition de cette société est de porter notre vision de la
manière dont nous allons nous soigner demain, la smartsanté. Dans ce
livre, je vais montrer que cette smartsanté repose sur cinq piliers.
Le premier est la Médecine Responsable. Il est illusoire de croire
que l’on peut faire de la santé sans médecins et ceux qui diffusent des
idées de cette nature sont des bonimenteurs et des charlatans. Je me
souviens à ce sujet d’une anecdote amusante. Il y a quelques années, nous
avons accompagné un grand groupe de santé français qui souhaitait
développer une activité de prise en charge des patients atteints de

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bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) en Chine. Lors d’une
réception avec une délégation officielle chinoise, l’un de mes associés,
brillant polytechnicien et ancien haut fonctionnaire, avait exprimé au chef
de la délégation, pour le flatter, son admiration pour la médecine
traditionnelle chinoise. Son interlocuteur, incrédule, l’avait longuement
regardé en se demandant s’il était sérieux ou s’il se moquait de lui. Au
bout d’un moment, voyant qu’il était visiblement sincère, il lui avait tapoté
l’épaule et répondu laconiquement : “Vous savez, cher Monsieur, les
antibiotiques, c’est bien meilleur.”
Si la médecine est indispensable, il n’en reste pas moins qu’elle
doit évoluer. Au-delà du fait qu’elle est purement curative dans un
contexte de développement rapide des maladies chroniques où seule une
prévention bien conduite peut être efficace, elle est aujourd’hui beaucoup
trop prescriptrice et obsédée par l’objectif de battre la mort, qui aboutit
souvent à un acharnement thérapeutique absurde et inhumain. Ce mode de
fonctionnement n’est pas dénué d’ambiguïté et traduit, au-delà d’une
philosophie médicale, une inféodation profonde de la grande majorité des
médecins aux industriels du secteur, laboratoires et autres fabricants de
dispositifs médicaux, qui réalisent l’essentiel de leurs profits sur les
traitements ultracoûteux de la fin de vie. La minorité de praticiens de haut
niveau qui perpétue en France la tradition d’une médecine humaine,
clinique et éthique, ne saurait être l’arbre qui cache cette forêt de pratiques
éminemment contestables.
La Médecine Responsable a pour objectif de donner au patient les
outils nécessaires pour reprendre sa santé en mains. Pour pallier les
carences du système de santé en matière de prévention, elle met à sa
disposition les dernières innovations technologiques, des objets connectés
d’automesure reliés à des systèmes experts distants lui permettant de
réaliser un certain nombre d’examens de dépistage à domicile et de gérer
ensuite ses facteurs de risque s’il en a. Pour le mettre en situation
d’échapper à la sur prescription et à l’acharnement thérapeutique, elle lui
donne les informations nécessaires, notamment sur les effets secondaires
des traitements qui lui sont proposés, pour arbitrer en fonction de critères
de qualité de vie.
Les pires assassins du XXe siècle ont été les nazis, les
communistes et les industriels du tabac. Au XXIe siècle, les sucriers et
autres industriels de l’agroalimentaire sont déjà certains de figurer sur le
podium, les autres lauréats restant à déterminer. Le sucre est sans doute
le serial killer le plus redoutable de toute l’histoire de l’humanité, dont il
menace l’existence même à travers la pandémie d’obésité et de diabète

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qu’il a déclenchée, la plus longue et la plus meurtrière sur la durée jamais
recensée. Sa responsabilité dans les cancers n’est pas encore clairement
établie mais, sachant que les diabétiques ont une probabilité très supérieure
à celle des gens en bonne santé d’en contracter un, il est probable que dans
un proche avenir elle le soit sans ambiguïté.
Le deuxième pilier de la smartsanté, le Régime 4M (pour Manger
Moins, Mieux et plus Malin), est une déclaration de guerre au sucre sous
toutes ses formes. Il préconise une alimentation aussi pauvre que possible
en glucides et, à l’inverse, riche en graisses et en protéines. Je tiens à
préciser d’emblée que le Régime 4M n’est, malgré certains points
communs, ni un régime cétogène ni un régime paléo. Je ne suis pas assez
fou pour vouloir rétablir au XXIe siècle le mode d’alimentation de nos
ancêtres qui vivaient dans les cavernes, des milliers d’années se sont
écoulées depuis qu’on ne peut pas effacer d’un trait de plume. Je laisse
cela à d’autres, qui arrivent parfois à en faire un commerce fructueux, et
j’incite leurs adeptes à lire ce qui suit, qui est bien plus réaliste et adapté à
leur mode de vie.
Le Régime 4M s’inscrit dans la droite ligne des dernières
recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de la
Food & Drug Administration (FDA), l’autorité de régulation de la santé
aux Etats-Unis. Toutes deux ont notablement durci leurs recommandations
sur la consommation de sucre. Les experts de l’OMS, qui considèrent qu’il
est une drogue au même titre que l’héroïne ou la cocaïne, ne sont pas
encore allés au bout de leur raisonnement tant les intérêts économiques
sont gigantesques, et ceux de la FDA se sont globalement alignés sur eux.
La FDA a en revanche créé un véritable séisme dans ses
recommandations de 2015, où elle supprime toute référence aux aliments
riches en cholestérol. L’argumentation avancée est que la consommation
de ces aliments n’a pas d’incidence sur le taux de cholestérol, bon (HDL)
ou mauvais (LDL), et que seules sont en cause les graisses industrielles
hydrogénées — progressivement interdites ou sévèrement réglementées
dans la plupart des pays industrialisés — et les graisses saturées.
Un régime riche en graisses et pauvre en sucre n’a donc que des
avantages. Il réduit le risque d’obésité et de maladies cardiovasculaires et,
poussé à l’extrême, constitue la meilleure forme de prévention contre les
cancers. En l’absence de sucre, l’organisme utilise en effet ses réserves de
graisses, que le foie convertit en corps cétoniques, carburant tout aussi
efficace que le glucose. L’un des multiples avantages de ce carburant est
qu’il n’est pas assimilable par les cellules cancéreuses, dont les besoins en
sucre sont dix-huit fois plus élevés que ceux des cellules saines.

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Le troisième pilier de la smartsanté est le Jeûne Actif. Je
m’interrogeais depuis des années sur les vertus du jeûne avant, l’été 2016,
en prévision de l’écriture de ce livre, de tester moi-même le concept. J’ai
donc passé quinze jours début août à la clinique Buchinger en Allemagne,
considérée comme la référence en matière de jeûne thérapeutique et située,
ce qui ne gâche rien, au bord du lac de Constance, dans un cadre
paradisiaque. Pour créer les conditions du test, je me suis volontairement
astreint en juin et juillet à prendre cinq kilos en mangeant et buvant
significativement plus que d’habitude.
J’ai réitéré l’expérience en décembre 2016, sur une période plus
longue, trois semaines, après avoir entre-temps testé des formules de jeûne
intermittent (deux jours de jeûne par semaine ou jeûne dit de seize heures,
supprimant le repas du soir). Les résultats se sont révélés pour le moins
stupéfiants. Pendant mes deux séjours à Buchinger, au cours desquels j’ai
jeûné totalement une fois onze jours et une deuxième fois quinze, j’ai pu
pratiquer tous les jours en moyenne quatre heures de sport, natation et
course à pied notamment, sans ressentir la moindre fatigue. L’organisme,
privé de tout apport extérieur, se met rapidement en mode réserve et
transforme ses stocks de graisses en corps cétoniques, qui sont décidément
un carburant formidable. Les tests de jeûne intermittent étaient également
très concluants, celui de seize heures se révélant particulièrement efficace
et stimulant.
Au-delà de mon expérience personnelle, qui n’est sans doute pas
généralisable, notamment à des personnes déjà malades, le thème du jeûne
thérapeutique commence à être abondamment documenté dans la
littérature scientifique. Ses effets positifs sur les risques cardiovasculaires
ne sont plus guère contestés. La grande nouveauté de ces dernières années
est l’impact du jeûne sur le traitement du cancer. Les équipes de Valter
Longo, professeur de biologie à l’Université de Californie du Sud, ont mis
en évidence l’incidence d’un jeûne court sur les chimiothérapies, dont il
renforce l’efficacité et réduit les effets secondaires. D’autres
expérimentations sont en cours qui, si elles allaient jusqu’à leur terme,
pourraient révolutionner de fond en comble le traitement des cancers.
Le quatrième pilier de la smartsanté, la Méthode Bravo (du nom
de la coach sportive Marie-Eva Bravo, avec qui j’ai travaillé sur ce
concept), traite de l’autre élément fondamental du mode de vie, l’activité
physique au sens large. Nous sommes de plus en plus sédentaires et
réfractaires à l’effort physique. Les quelques dizaines de mètres quotidiens
jusqu’au métro ou du parking au bureau sont pour le plus grand nombre le
maximum envisageable. La Méthode Bravo propose une approche

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radicalement différente de l’effort physique. Remplacer le métro par la
marche, prendre l’escalier plutôt que l’ascenseur, faire quelques exercices
simples tous les matins, courir une ou deux fois par semaine est à la portée
de tout un chacun. Et cela suffit, couplé avec le Régime 4M, pour rester en
bonne santé pendant très longtemps. L’activité idéale est la marche rapide
pratiquée régulièrement. Elle fait travailler le cœur à un rythme optimal et
permet de brûler les graisses plus efficacement que n’importe quelle autre
activité.
La pratique d’un sport plus intensif, qui relève davantage de choix
personnels et revêt une dimension de plaisir, ne peut en aucun cas
remplacer une activité régulière moins intense, tout au plus la compléter.
Dans tous les cas, il faut privilégier les sports d’endurance (course à pied,
vélo, natation) aux efforts musculaires violents, le simili-culturisme
n’apportant rien sur le plan de la santé.
L’activité physique est un outil de prévention essentiel des
maladies chroniques, notamment des maladies cardiovasculaires et des
cancers. C’est aussi, une fois la maladie installée, un complément médical
à tout traitement médicamenteux. Les recommandations pour les
différentes affections cardiovasculaires et les cancers sont relativement
proches, avec des variantes à la marge.
Une multitude d’applis et d’objets connectés sont aujourd’hui
disponibles pour gérer son activité physique. Ils ne sont très souvent pas
assez fiables et sécurisés pour être d’une réelle utilité. Mais la situation
évolue rapidement et on se dirige vers un marché rationalisé sur lequel le
smartphone sera l’outil principal dont chacun d’entre nous se servira pour
piloter sa santé. Pour gérer sa Méthode Bravo, on aura recours aux services
proposés par les Apple, Samsung et autres Google, qui devraient
considérablement améliorer la fiabilité de leurs solutions à relativement
court terme. Les montres lancées par les géants d’Internet, d’une simplicité
d’utilisation édifiante, pourront compléter le smartphone.
Le cinquième et dernier pilier de la smartsanté est la Soft Attitude,
qui recouvre la dimension d’intégration de la smartsanté dans la cité. On
ne peut pas être en bonne santé dans un cadre dégradé, ce qui signifie que
notre action sur l’environnement influe directement sur notre santé. Le cas
de la Chine, où la BPCO est devenue la deuxième cause de mortalité en
raison d’une pollution massive, l’illustre parfaitement.
De même, on ne peut être en bonne santé dans une entreprise où
les conditions de travail sont exécrables, l’exemple de France Télécom
dans les années 2000 en témoigne. Il faut donc sélectionner son employeur

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en prenant ce critère en compte pour éviter de subir un stress qui, s’il
devient trop intense, peut déboucher sur un burn-out, c’est-à-dire une
forme de dépression associée au travail.
Le stress et ses conséquences ne sont d’ailleurs pas liés qu’au
travail. Beaucoup d’événements de la vie privée, divorces, décès d’un
proche et autres, peuvent en être à l’origine. C’est donc une véritable
maladie de société, qui peut s’installer dans la chronicité si on n’agit pas le
plus en amont possible avec des actes de prévention adaptés. Assez
logiquement, le Régime 4M et la Méthode Bravo sont des thérapies idéales
pour les personnes excessivement stressées. Une action sur le sommeil,
dont la qualité est fondamentale pour gérer son stress, s’impose. Tous les
outils existent et sont connus, encore faut-il avoir une attitude positive et
vouloir les mettre en œuvre, ce qui pour beaucoup d’entre nous est
l’aboutissement d’un cheminement personnel qui n’est pas nécessairement
simple.
Nous vivons dans un monde où nous sommes poussés à
l’addiction. Les adolescents commencent souvent à boire dès 14 ans. Les
industriels de l’alcool incitent, avec un cynisme absolu, les jeunes adultes
à boire régulièrement en offrant de l’alcool pour les soirées d’étudiants et
en subventionnant les happy hours , ce qui leur permet de contourner
allégrement l’interdiction de publicité. Ils se créent ainsi une clientèle à
vie, dont une bonne proportion sera alcoolique vingt ou vingt-cinq années
plus tard.
Parallèlement, un puissant lobby milite pour la légalisation du
cannabis, alors qu’on sait aujourd’hui qu’il entraîne de fortes addictions et
peut être à l’origine de troubles psychotiques graves. Face à ce laxisme
généralisé, la Soft Attitude, c’est de ne pas tomber dans le panneau et de
savoir renoncer à un plaisir dès qu’on se rend compte qu’on ne maîtrise
plus ses excès.
La Soft Attitude, c’est aussi de savoir préserver sa vie privée, et
plus particulièrement ses données de santé. Celles-ci font aujourd’hui
l’objet de toutes les convoitises et ne sont, malgré une réglementation
draconienne, pas suffisamment sauvegardées. Chacun doit donc se
protéger seul, sans compter sur les pouvoirs publics. Tout qu’une attitude
trop rigide peut avoir des conséquences négatives pour lui, notamment en
poussant les assureurs à abandonner certains risques si l’asymétrie
d’information est trop en faveur de leurs assurés.
Le problème des données de santé sera sans doute l’objet de
débats passionnés pendant les années, voire les décennies, à venir. Faut-il

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que chacun d’entre nous puisse avoir accès à toutes ses données de santé, y
compris celles issues du dépistage génétique ? Cela ne risque- t-il pas de
menacer dans leur existence même les régimes de solidarité bâtis après
1945 ? La Soft Attitude, c’est aussi de savoir nous fixer des limites quand
ce que nous avons de plus précieux est en danger.
Pour finir, je tiens à préciser que je ne suis pas médecin et que ce
que j’écris n’engage que moi. Certains médecins avec qui je travaille
depuis des années ne seront sans doute pas d’accord avec tout ce que je
dis. Ma réflexion a certes été alimentée par mes innombrables échanges
avec eux et la consultation d’une abondante littérature scientifique, mais
aussi par mon expérience de terrain acquise dans le cadre de l’élaboration
de nombreux programmes de dépistage et d’accompagnement de malades
chroniques.
En définitive, j’écris ce livre parce que j’estime qu’il est
dangereux de laisser aux seuls médecins le monopole du débat sur la santé.

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Sommaire

Introduction
Le premier pilier de la smartsanté : la Médecine Responsable
Recette n°1 Pour bien vieillir ta santé en mains tu prendras
Recette n°2 Par Internet et les objets connectés la surveillance de ta santé
passera
Recette n°3 Au progrès médical indéfini de croire tu cesseras
Recette n°4 Aux discours de prévention moralisateurs la sourde oreille tu feras
Recette n°5 A la folie prescriptrice des sorciers en blouse blanche tu résisteras
Le deuxième pilier de la smartsanté : le Régime 4M
Recette n°6 Contre le syndrome de l’assiette trop pleine toute ta vie tu te battras
Recette n°7 De ton assiette le sucre sous toutes ses formes tu banniras
Recette n°8 La transition entre ton régime actuel et le Régime 4M avec bon sens
tu feras
Recette n°9 Les graisses et les protéines le cœur de ton régime alimentaire
deviendront
Recette n°10 Par d’autres aliments qui conviennent au Régime 4M ton régime tu
compléteras
Le troisième pilier de la smartsanté : le Jeûne Actif
Recette n°11 En jeûnant régulièrement ton statut de Sapiens tu retrouveras
Recette n°12 Avec le Jeûne Actif le pouvoir sur ton corps tu reprendras
Recette n°13 Contre les maladies cardiovasculaires le Jeûne Actif ton meilleur
atout sera
Recette n°14 Contre le cancer du Jeûne Actif un allié tu te feras
Recette n°15 Combiner astucieusement le Jeûne Actif et le Régime 4M tu
tenteras
Le quatrième pilier de la smartsanté : la Méthode Bravo
Recette n°16 Dans la lignée de tes ancêtres Sapiens un nomade tu redeviendras
Recette n°17 Les sports d’endurance qui te protègent des maladies chroniques
toujours tu préféreras
Recette n°18 Le diabète grâce à l’activité physique tu géreras

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Recette n°19 Contre le cancer de l’activité physique tu te serviras
Recette n°20 Avec ton smartphone ton activité physique tu piloteras
Le cinquième pilier de la smartsanté : la Soft Attitude
Recette n°21 Ton environnement comme un facteur essentiel de ta santé tu
considéreras
Recette n°22 Pour éviter le burn-out ton entreprise tu choisiras
Recette n°23 Positif en toutes circonstances tu resteras
Recette n°24 Pour ne pas le payer très cher un jour tout ce que tu ne maîtrises pas
tu éviteras
Recette n°25 Tes données de santé comme ton bien le plus précieux tu protégeras
Conclusion
Bibliographie
Remerciements

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Le premier pilier de la smartsanté :
la Médecine Responsable

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L’âge de l’antibiotique touche à sa fin. En soixante-dix ans, il a
permis d’augmenter l’espérance de vie plus que dans les dix mille années
précédentes. Le revers de la médaille est qu’il a généré un système de
santé strictement curatif, dont l’obsession principale est de battre la mort et
qui se caractérise aujourd’hui par une surprescription massive, très
coûteuse pour la collectivité, un acharnement thérapeutique, notamment
lors des fins de vie, qui confine à l’absurde, et une incapacité structurelle à
prendre en compte des notions essentielles comme la qualité de vie des
patients. Le peu de prévention qui accompagne ce mastodonte curatif se
limite à des campagnes moralisatrices et globalisatrices qui ont fini par
devenir inaudibles.
Face à ce système très soviétique, les patients s’organisent
progressivement pour prendre leur santé en mains et s’émanciper des
sorciers en blouse blanche qui avaient jusqu’ici un droit de vie et de mort
sur eux. Les nouvelles maladies auxquelles ils sont confrontés sont très
différentes des maladies infectieuses qui décimaient la population il y a un
siècle encore. Les plus fréquentes, diabète de l’adulte et affections
cardiovasculaires, ont ceci de commun qu’elles sont évitables mais qu’une
fois installées, elles peuvent être soignées mais pas guéries. Il est donc
indispensable de les détecter le plus tôt possible, lorsqu’elles sont encore à

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l’état de facteurs de risque maîtrisables. Les cancers obéissent à une
logique un peu différente dans la mesure où ils peuvent être guéris, mais,
là aussi, un dépistage précoce est un facteur clé de succès.
La prise en mains de leur santé par les patients passe par une
utilisation éclairée des immenses possibilités qu’offrent Internet et les
objets connectés. Examens de dépistage ou suivi de maladies chroniques
peuvent désormais être effectués par le patient à son domicile à l’aide de
dispositifs médicaux connectés à des systèmes experts distants capables
d’en interpréter les résultats et d’orienter l’utilisateur dans ses choix
thérapeutiques par une information et des conseils réellement
personnalisés. Ces systèmes ne sont pas destinés à remplacer le médecin
mais à donner au patient les moyens d’avoir avec lui un dialogue équilibré.
La Médecine Responsable n’est pas une médecine sans médecins, c’est
une médecine où le patient est aux commandes et le médecin à son service.

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Recette n°1
Pour bien vieillir ta santé en mains tu prendras

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A 40 ans, on sait aujourd’hui que, sauf accident ou ticket perdant
à la grande loterie génétique, on en a encore autant à vivre. Un peu plus
pour les femmes, un peu moins pour les hommes, mais c’est du détail.
Cette perspective est à la fois grisante et inquiétante. Grisante parce que
l’idée d’une telle durée prolonge le sentiment d’immortalité qu’on éprouve
à 20 ans. Inquiétante parce que les quadras actuels ne sont pas la première
mais la deuxième génération qui va vivre aussi longtemps.
La fin de vie de nos parents que l’on a vus atteindre le bout de la
route a de quoi faire réfléchir. La louche de médicaments à ingérer tous les
matins à partir de 70 ans, les problèmes de motricité à partir de 75 et la
démence sénile au-delà n’ont rien de bien excitant. A tel point que nous
sommes de plus en plus nombreux à externaliser cette vision qui nous
dérange dans des mouroirs pompeusement baptisés “maisons de retraite”.
Nous enfermons nos vieux comme l’on enfermait les fous jusqu’à une
période récente.
Comment vieillir mieux que nos parents et durer ainsi plus
longtemps qu’eux ? En profitant bien sûr pleinement des extraordinaires
progrès de la médecine dans un certain nombre de domaines. Les prothèses
de la hanche et la chirurgie esthétique, notamment, permettent de
conserver très longtemps motricité et jeunesse apparente. Pourquoi s’en
priver si on en a besoin ?
Cela ne suffit cependant pas. Pour durer réellement, il faut vaincre
le stress tout au long de sa vie professionnelle, échapper au diabète gras de
l’adulte trop bien nourri, détecter très en amont les cancers curables, éviter
après 60 ans que l’inactivité ne transforme son cerveau en bubble-gum.
C’est-à-dire, tout au long de sa vie, faire les efforts physiques et
psychiques nécessaires, s’alimenter de manière équilibrée, résister aux
addictions... Et, à partir d’un certain âge, pratiquer un dépistage
systématique des principaux facteurs de risque auxquels on peut être
confronté. En résumé, faire évoluer en profondeur son comportement en
matière de santé et l’adapter à une logique de long terme.
C’est là que se situe la vraie rupture avec nos parents, qui n’ont
jamais réellement cherché à modifier leurs habitudes à une échelle

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individuelle. Ils n’en ressentaient pas le besoin dans la mesure où ils
bénéficiaient pleinement de formidables avancées collectives qui leur
permettaient d’empiler les années d’espérance de vie supplémentaires sans
effort particulier. Le tout-à-l’égout, les changements de modes
d’alimentation liés à l’élévation du niveau de vie et la généralisation des
salles de bains dans l’habitat moderne ont plus fait pour l’espérance de vie
que toutes les initiatives à caractère davantage individuel. En Europe, le
recul de la pollution, aujourd’hui bien inférieure à ce qu’elle était il y a un
siècle, contrairement à ce que voudraient faire croire les écologistes
radicaux, a également joué un rôle déterminant.
Les progrès de la médecine ne doivent pas être oubliés dans cet
inventaire. Au-delà des antibiotiques, qui sont peut-être la découverte la
plus extraordinaire de l’histoire de l’humanité, d’autres avancées ont
changé en profondeur la vie de la génération des baby-boomers. Les plus
spectaculaires concernent le domaine cardiovasculaire : on meurt de moins
en moins d’infarctus et autres cardiopathies et on vit de mieux en mieux
avec. Les progrès de la chirurgie et les statines, notamment, ont modifié,
radicalement et Dans le bon sens, le pronostic de maladies qui, il y a à
peine trente ans, étaient encore très souvent mortelles à court terme.
Pourquoi changer un modèle gagnant et extrêmement confortable,
qui nous a fait conquérir plus d’espérance de vie en soixante-dix ans que
dans les dix millénaires qui les ont précédés ? Parce que ce modèle est en
décalage croissant avec la société réelle. La primauté de la collectivité sur
l’individu n’a pas survécu au modèle soviétique et les générations actives
ne croient plus guère aux solutions miracles dictées d’en haut et qui
s’appliquent à tous. Les réflexes, encore très spontanés en apparence, de
défense d’institutions symboliques comme la Sécu sont en fait déterminés
par la préoccupation purement égoïste de préserver son niveau de vie
individuel. Pas question de renoncer au privilège de consommer des soins
sans limites. Pas question non plus de faire un effort de discipline pour
préserver le système et le transmettre aux générations futures. Carpe
diem ...
L’individualisme forcené condamne à relativement court terme le
système de santé tel que nous le connaissons. Son cœur, l’hôpital, ne peut
tenir qu’à coups de hausses d’impôts que plus personne n’est prêt à
accepter. L’exercice médical, particulièrement exigeant en termes
d’emploi du temps, est peu compatible avec l’hédonisme ambiant et la
volonté de privilégier la qualité de vie et les loisirs. Il sera donc de plus en
plus difficile dans l’avenir de se soigner comme on le fait actuellement,
pas à cause d’une quelconque fatalité de déclin, mais parce que c’est ce

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que nous voulons au fond de nous-mêmes. La médecine strictement
curative, ultra-technique et très consommatrice de ressources qui est la
nôtre fait partie d’un monde industriel finissant, et nous sommes en train
de passer à autre chose.
Cette autre chose, c’est la prise en charge par chacun de sa santé
tout au long de sa vie. La médecine n’occupera dans ce concept de santé
durable qu’une place marginale. Nous avons inconsciemment intégré les
théories d’un économiste canadien du nom de G.E Alan Dever sur les
facteurs explicatifs de l’état de santé : le style de vie compterait pour 43 %,
les facteurs biologiques et génétiques pour 27 %, l’environnement pour 19
% et le système de soins pour seulement 11 %. Il faudrait être vraiment
stupide pour continuer à investir autant dans un système de soins
traditionnel qui rapporte au fond aussi peu !

21
Recette n°2
Par Internet et les objets connectés
la surveillance de ta santé passera

22
L’accès traditionnel aux soins par le médecin traitant et les
spécialistes va devenir de plus en plus problématique dans les années à
venir. Malgré l’assouplissement récent du numerus clausus inepte mis en
place dans les années 1990, le nombre de médecins va continuer à baisser
au moins jusqu’en 2020, alors que le vieillissement accéléré de la
population fait exploser la demande de soins. L’Observatoire de l’accès
aux soins du cabinet spécialisé jalma montre que le délai d’attente pour un
rendez-vous chez un spécialiste est en moyenne de 50 jours, avec de
profondes disparités selon les régions et les spécialités. Le record toutes
catégories est détenu par les ophtalmologues : il faut patienter en moyenne
110 jours pour un rendez-vous et un tiers des Français subissent des délais
supérieurs à six mois.
La situation est également en train de devenir dramatique en
médecine générale. 2 500 généralistes partent à la retraite chaque année.
Sur les sept dernières années, 19 000 postes ont été ouverts par le ministère
de la Santé à l’internat de médecine générale. Le compte y est donc a
priori. Seulement voilà, seuls 15 000 de ces postes ont trouvé preneurs. Sur
les 15 000 jeunes médecins concernés, 5 000 ont bifurqué vers des
pratiques spécialisées (allergologie, etc.). Restent 10 000, dont seulement 5
000 se sont effectivement inscrits à l’Ordre des médecins, les autres ayant
changé de voie, pour devenir consultants, salariés de l’industrie
pharmaceutique, comédiens, etc. Résultat des courses : les médecins
traitants encore en activité sont débordés et n’acceptent plus de nouveaux
patients.
Nous allons donc devoir nous débrouiller autrement si nous
voulons continuer à nous soigner. Les pseudo-économistes de la santé qui
se sont toujours trompés depuis trente ans mais qui continuent à occuper la
scène médiatique nous expliquent qu’il y a en réalité assez de médecins en
France et que beaucoup de tâches pourraient être déléguées à des
personnels moins qualifiés, infirmières et autres optométristes. Le
problème est que ça n’a jamais marché parce que les médecins français,
pour des raisons historiques qui remontent à Napoléon Ier, y sont
férocement opposés.

23
La seule solution est une délégation d’une nature différente. L’e-
santé ouvre progressivement la voie à un transfert des tâches médicales,
répétitives ou exigeant un faible niveau de technicité, du médecin traitant
non pas à d’autres professionnels de santé moins qualifiés mais
directement au patient. Ainsi, l’automesure de marqueurs biologiques ou
physiques permet de déplacer au domicile du patient beaucoup d’actes
médicaux courants. Le dépistage et le suivi de l’hypertension artérielle (un
tiers des hypertendus traités sont déjà équipés d’un autotensiomètre), des
maladies cardiovasculaires et du diabète de type 2 ainsi que le suivi des
maladies chroniques associées devraient se généraliser sous cette forme
dans les années à venir.
Grâce aux extraordinaires progrès réalisés depuis les années 1980
dans le domaine de la protocolisation de l’activité médicale, les données
issues de l’automesure pourront être analysées de manière très largement
automatisée par des systèmes experts, et des recommandations d’actions
de santé pourront être transmises à l’utilisateur (par exemple une
adaptation de la posologie, un conseil sur le type d’activité physique
recommandé). Les données pourront aussi être directement envoyées au
médecin, qui prendra les décisions nécessaires (prescriptions, actes de
soins, examens complémentaires) distance.
Les mesures biologiques et physiques pourront être complétées
par des questionnaires d’auto-évaluation que le patient remplira à domicile
via Internet, et qui permettront de connaître ses antécédents familiaux, son
mode de vie, etc. Ces informations feront apparaître ses facteurs de risque
et seront ensuite croisées avec les données biologiques et physiques par les
systèmes experts et par les médecins traitants.
Ce type d’approche permettra la captation d’un grand nombre
d’informations de santé et leur traitement approprié sans intervention
systématique du médecin traitant. Des programmes de suivi hygiéno-
diététique ou de suivi des malades chroniques et autres services de santé
pourront aussi être aisément généralisés via des plates-formes numériques
à un grand nombre de personnes, et ce pour un coût relativement faible.

24
La diffusion très large des nouvelles technologies de santé est
d’autant plus probable qu’elle s’inscrit dans un mouvement plus global de
généralisation du do-it-yourself . La tendance observée depuis plus de
vingt ans est une suppression progressive des activités intermédiaires dans
l’ensemble des secteurs de l’économie. Le médical, relativement
conservateur, est jusqu’ici resté en marge de ce mouvement. Les enjeux à
venir de rationalisation économique et de pénurie de temps médical
pousseront cependant à un rattrapage du retard et à une désintermédiation
du secteur.
Les nouveaux processus de soins induits apporteront au patient de
nombreux avantages : une meilleure qualité de soins grâce à un suivi plus
régulier, un gain de temps généré par la suppression de déplacements et de
consultations inutiles, etc. Les médecins trouveront eux aussi leur intérêt
dans cette mise en place, qui les déchargera d’actes répétitifs et faiblement
rémunérés.
Dans ce nouvel environnement, le système reposera en grande
partie sur la responsabilisation et l’autonomie du patient. Grâce à une
meilleure évaluation de l’ensemble des déterminants de santé et de leur
impact sur le développement des maladies, des stratégies de prévention
précoces, personnalisables et pluridisciplinaires pourront être mises en
place.

25
Recette n°3
Au progrès médical indéfini de croire
tu cesseras

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Le XXe siècle a été celui de la médecine curative et de l’illusion
du progrès technique indéfini. Les fulgurants progrès de la médecine ont
engendré dans un premier temps, chez ceux qui en ont bénéficié, une
paresse persistante. Ils ont conduit à croire que l’on arriverait un jour à tout
soigner. Cette illusion a entraîné une croissance des comportements à
risque, ce qui explique notamment que la mortalité des hommes jeunes
n’ait plus baissé depuis 1950 malgré le formidable développement du
système de soins.
La corrélation entre amélioration de la sécurité et croissance des
comportements à risque est un phénomène frappant. Ainsi, contrairement
aux idées reçues, le freinage ABS n’a pas réduit la sinistralité automobile.
Il l’a au contraire augmentée dans un premier temps parce que les
automobilistes conduisaient plus vite, convaincus qu’il ne pouvait rien leur
arriver avec un système aussi sophistiqué.
Les gros fumeurs tiennent implicitement un raisonnement
identique : pourquoi diable s’arrêter de fumer alors que la probabilité
d’apparition d’un cancer du poumon est après tout faible et qu’on trouvera
bien un remède dans les prochaines années ? Pourquoi renoncer aux
aliments gras et sucrés, surtout aux Etats-Unis, où des coupe-faim —
pourtant reconnus comme dangereux — sont en vente libre ? Le cas des
alcooliques, notamment ceux qui ont un permis de conduire, est
légèrement différent mais participe de la même logique.
Cet optimisme béat n’est pourtant pas corroboré par les faits. Aux
Etats-Unis, la prévalence de la plupart des affections graves (cancers,
maladies cardiovasculaires, diabète) est en forte croissance sur les trente
dernières années et l’espérance de vie des malades, pondérée par la qualité
de vie, n’a significativement évolué que dans le domaine du
cardiovasculaire. Compte tenu de l’énorme augmentation des dépenses de
santé dans ce pays, c’est, plus qu’un échec, une faillite.
Nous devons à un petit nombre d’innovations de rupture, et
notamment aux antibiotiques, l’essentiel du gain d’espérance de vie réalisé
depuis la Seconde Guerre mondiale. En revanche, nous n’en sommes
qu’aux balbutiements en ce qui concerne des maladies souvent très

27
récentes, en tout cas à grande échelle.
Il n’est pas question ici de prétendre que le progrès technique va
s’arrêter et que nous resterons indéfiniment impuissants devant certaines
formes de cancers ou de maladies virales. L’exemple du Sovaldi, nouveau
traitement de l’hépatite C qui permet de guérir 95 % des personnes
traitées, est là pour aller à l’encontre de cette présomption. Le génie
génétique et les biotechnologies permettront vraisemblablement de faire un
saut quantique dans le traitement de certaines affections.
On nous annonce par ailleurs que nous sommes à la veille d’une
véritable révolution technologique qui va rendre possible un dépistage plus
ciblé et de plus en plus en amont de la maladie, notamment dans le
domaine de la cancérologie. Les progrès sont impressionnants dans deux
secteurs clés, les biomarqueurs et l’imagerie médicale.
L’avancement des recherches sur les biomarqueurs, définis
comme des outils d’origine biologique capables de distinguer un état
médical normal d’un état pathologique ou d’une réponse à un traitement
thérapeutique, contribue à mieux cibler les populations à risques, et à les
soigner préventivement.
Les progrès importants de l’imagerie permettent d’identifier et
d’analyser des tumeurs de plus en plus petites. Les scanners
multidétecteurs visualisent un organe en trois dimensions et autorisent
ainsi la détection des cancers de moins de 5 mm, auparavant invisibles.
L’imagerie permet aussi, en suivant certaines molécules grâce à
l’utilisation de traceurs spécifiques (radioactifs, fluorescents ou
magnétiques), de repérer des anomalies avant même qu'elles aient un
impact sur la fonction de l'organe. Ne nous faisons cependant pas
d’illusions, il faudra encore une à deux décennies, voire plus, pour que
toutes ces avancées majeures soient réellement disponibles. La recherche
progresse beaucoup moins vite que les effets d’annonce ne le laisseraient
croire. Nombre d’innovations dévoilées en 2010 et censées être mises en
place en 2015 ne le seront pas avant 2020 et même au-delà. Un autre
facteur de ralentissement est le prix stratosphérique de la nouvelle
génération de molécules et d’examens. Dans un contexte général de crise
économique, les organismes de Sécurité sociale, y compris ceux des pays
les mieux lotis, ont de plus en plus de mal à suivre. Toutes les innovations
ne pourront pas être financées dès leur mise sur le marché. Sachant cela, il
est bon de se rappeler que, dans la plupart des cas, la thérapie la plus
efficace reste la prévention et l’action sur le mode de vie.

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Recette n°4
Aux discours de prévention moralisateurs
la sourde oreille tu feras

29
30
Le principal obstacle à une meilleure prise en charge par chacun
de sa santé, à travers une prévention durable et responsable, est la
confusion permanente entre prévention et abstinence et le discours
moralisateur qui en découle. C’est mal de fumer car on met en danger sa
santé et celle d’autrui. C’est mal de boire car on se détruit et on détruit les
autres à petit feu. C’est mal de conduire trop vite et encore plus mal si on
est de surcroît en état d’ivresse. C’est mal de trop manger car l’obésité est
une tare sociale et favorise de nombreuses pathologies. C’est mal de
tromper son conjoint car on le rend malheureux. Et on pourrait continuer
ainsi à l’infini à énumérer toutes les conduites qui méritent un jugement
sans appel sur l’échelle du bien et du mal médicaux.
Le problème est que, après des milliers d’années marquées par la
doctrine du péché originel, la majorité des gens ne supportent plus ce
discours binaire et culpabilisant. Les interdits collectifs se heurtent à
l’affirmation exacerbée du libre arbitre individuel. Les accros au tabac, à
l’alcool, à la bouffe, à la vitesse ou au sexe se font plaisir en assouvissant
leur vice et se montrent donc peu sensibles à des arguments qui les
encouragent, au contraire, à entrer dans un cycle de frustrations.
Dans leur excellent essai Idées folles, idées fausses en médecine
publié en 1992, Petr Skrabanek et James McCormick décrivent le profil
idéal pour échapper à toutes les maladies, et il faut reconnaître qu’il a de
quoi faire réfléchir. L’homme sans risque serait “un employé municipal ou
par exemple un embaumeur, efféminé, totalement dénué de vivacité
physique ou mentale, sans ambition et sans esprit de compétition. Il
n’aurait jamais tenté de se fixer ni d’atteindre le moindre but. Il aurait peu
d’appétit, se sustenterait de fruits et de légumes, de maïs et d’huile de
baleine, détesterait le tabac, refuserait avec mépris radio, télévision ou
automobile. Sa chevelure serait abondante, son allure efflanquée et non
athlétique, bien qu’il exerce sans cesse ses frêles muscles. Ses revenus, sa
tension artérielle, son taux de sucre, d’acide urique et de cholestérol
seraient faibles. Il aurait pris de l’acide nicotinique, de la pyridoxine et un
traitement anticoagulant de longue durée sans interruption depuis sa
castration prophylactique”.

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Son pendant féminin serait “une naine au chômage, faisant de la
bicyclette, maigre, en préménopause, hypolipidique et hypobêta-
protéinémique, vivant dans une pièce surpeuplée de l’île de Crète avant
1925 et se nourrissant de céréales entières, d’huile de tournesol et d’eau”.
Il est bien entendu recommandé à tous ceux qui ne correspondent
pas exactement à ces profils de tout faire pour s’en rapprocher...
L’épidémie du sida est symptomatique de l’inefficacité croissante
du discours de prévention fondé sur l’abstinence. On nous explique depuis
maintenant plus de vingt ans, campagne de communication après
campagne de communication, que seuls l’usage du préservatif et la parfaite
connaissance de ses partenaires constituent des protections réelles contre le
virus. Malgré cela, le préservatif est loin de s’être généralisé. Plus grave,
on note depuis l’apparition des trithérapies une recrudescence de rapports
“non protégés” dans la population la plus exposée, celle des homosexuels.
Pour une raison toute simple : préservatif et plaisir ne seraient pas
compatibles...
L’argument, souvent avancé pour diaboliser les fautifs, du coût
des addictions pour la collectivité est particulièrement hypocrite et plus
personne n’est dupe. Les fumeurs sont bien conscients de payer leur vice
paquet après paquet, sous forme de taxes qui augmentent chaque année.
Les conducteurs de leur côté ont fini par comprendre qu’en excès de
vitesse, ils consomment plus de carburant et paient donc plus de taxes. Ce
civisme imposé est incompatible avec la mauvaise conscience.
Les médecins ne donnent pas toujours l’exemple. Nombre d’entre
eux sont de gros fumeurs, ce qui ne les empêche pas de diaboliser leur
vice. Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Nous sommes donc fondés à
penser que la sanction n’est pas si automatique qu’on veut bien nous le
faire croire.
Nous avons d’ailleurs au moins en partie raison, car toutes les
statistiques disponibles montrent que les cancers et autres maladies
cardiovasculaires apparaissent généralement à un âge où on commence à
réaliser qu’il faut bien mourir de quelque chose. Quand on les analyse de
plus près, on voit qu’elles ne vont clairement pas dans le sens des
ayatollahs de la prévention punitive. La probabilité de mourir d’un cancer
du poumon, par exemple, reste faible même pour un très gros fumeur.
L’affirmation selon laquelle le risque est multiplié par cent ou plus au-delà
d’un certain niveau de consommation ne veut pas dire grand-chose tant on
part de bas. Dans ce domaine de l’infiniment petit, il est difficile de
mobiliser des individus et de leur faire prendre conscience qu’ils sont

32
réellement concernés.
Qu’on s’entende bien, la Médecine Responsable n’est pas un
pousse-au-crime qui encourage tous les comportements à risque. Un gros
fumeur en surpoids, hypertendu et bourré de cholestérol est clairement en
danger de mort s’il ne change pas de mode de vie. Les campagnes de
prévention actuelles, relayées par le corps médical, lui fixent comme
priorité de s’arrêter de fumer. Seulement voilà, si tant est qu’il y arrive, il
pèse sur lui une très forte probabilité de prendre encore beaucoup de kilos,
de se faire larguer par sa petite amie et de s’enfoncer dans la dépression. Il
a donc peut-être tout intérêt à faire de la perte de poids sa priorité, en se
lançant dans un jeûne initial, d’une durée adaptée à sa situation, et une
remise à plat de sa manière de se nourrir. Une fois cette étape franchie, il
pourra s’attaquer à son addiction préférée.
A l’extrême inverse, un jeune fumeur sans autres facteurs de
risque ni hérédité défavorable, pratiquant du sport régulièrement, n’est
objectivement pas concerné par le “Fumer tue” inscrit sur les paquets de
cigarettes. Il s’arrêtera un jour de fumer après plusieurs tentatives, et cinq
années plus tard son risque sera redevenu celui d’un non-fumeur.
La Médecine Responsable s’inscrit dans cette logique. Elle est
aux antipodes des discours moralisateurs et globalisateurs ambiants. Elle
part du principe qu’il y a dans un pays comme la France des milliers de
profils de risque différents et qu’il ne peut donc pas exister une réponse
unique à leurs situations.
L’ennemi le plus acharné de cette prévention personnalisée
intelligente que je préconise est le mythe de l’acquis qui imprègne nos
sociétés depuis la fin du XIXe siècle. Dans un louable souci égalitaire, les
idéologies dominantes se sont acharnées à nier les différences entre les
individus à la naissance et à imputer toutes leurs caractéristiques de l’âge
adulte à leur éducation, aux traumatismes subis dans leur petite enfance et
à leur mode de vie.
Les raisons de cette dictature de l’acquis, qui, ne l’oublions pas,
puise ses racines dans la Révolution française et son credo égalitaire, sont
connues et en grande partie honorables. Il s’agit pour l’essentiel d’une
réaction aux idéologies raciales qui ont prospéré en Europe et aux Etats-
Unis entre les deux guerres mondiales et qui appelaient une réponse de ce
type. L’affirmation universelle, même fausse scientifiquement, de l’égalité
de tous à la naissance a permis de faire progresser les libertés et la
démocratie.
Dans certains cas, ce discours a néanmoins montré ses limites.

33
Appliqué à la prévention, il devient même franchement crétinisant.
Comme nous l’avons vu, tenir les mêmes propos sur les risques du tabac
ne fût-ce qu’à dix personnes et nier ainsi tout ce qui peut les séparer n’a
pas de sens. L’existence d’antériorités familiales dans le domaine
cardiovasculaire est un facteur très aggravant qui, associé au tabac, crée un
terrain pathologique particulier. Le taux de cholestérol ou d’hypertension
artérielle, les habitudes alimentaires, la consommation d’alcool instaurent
d’autres types d’associations dont les risques sont très différents.
Les formidables avancées du génie génétique renvoient, partout
ailleurs qu’en France, les idéologies de l’acquis aux oubliettes de
l’Histoire. Sigmund Freud, qui en a été le chantre le plus talentueux, fait
aujourd’hui à bien des égards figure de marchand de sable, et ses disciples,
de charlatans. Le décryptage du génome humain montre progressivement
que de nombreuses maladies modernes, cancers et autres affections
cardiaques, sont liées à des prédispositions génétiques.
Nous ne sommes pas encore totalement prêts à suivre ce
mouvement. Le progrès scientifique ne pénètre, en ces domaines
éminemment subjectifs, que très lentement dans le cerveau de la grande
majorité des décideurs et guère plus vite dans celui des membres du corps
médical. Un consensus commence toutefois à s’établir sur le fait qu’il vaut
mieux éviter de tomber malade que d’avoir à se soigner. Et tout le monde
s’accorde à dire que la consommation de médocs (pas le vin, les pilules),
au-delà du fait qu’elle ne peut pas tout régler, n’a rien de particulièrement
fun. Le tout-curatif a donc vécu. De là à envisager de lui substituer
progressivement un système de santé fondé sur une prévention entièrement
personnalisée, prenant en compte de manière différenciée chaque
croisement de patrimoine génétique et de mode de vie, il y a un grand pas
à franchir. Le modèle de santé actuel touche à sa fin, à nous tous de
construire le suivant, la Médecine Responsable.

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Recette n°5
A la folie prescriptrice des sorciers en blouse
blanche tu résisteras

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36
Avant la Première Guerre mondiale, on vivait en moyenne jusqu’à
45 ans. La tuberculose tuait en moyenne entre 100 000 et 150 000
personnes par an. On allait à l’hôpital plutôt pour y mourir que pour y être
soigné. La moindre infection pouvait être fatale. La mortalité infantile
atteignait encore des niveaux qui de nos jours feraient honte à des pays
sous-développés.
A présent, on vit en moyenne jusqu’à près de 80 ans. Sauf
épidémie foudroyante ou cataclysme nucléaire, une personne sur deux qui
naît aujourd’hui connaîtra le XXIIe siècle, ce qui signifie que l’espérance
de vie à la naissance s’approche de la longévité biologique. Les
antibiotiques ont banalisé la plupart des maladies infectieuses. La mort
d’un nourrisson, phénomène quotidien il y a un siècle, est désormais la
tragique exception.
De quoi meurt-on encore dans ce monde idéal ? D’accidents,
d’homicides, d’alcoolisme, de tabagisme et, de plus en plus souvent, de
suralimentation. Nous avons substitué aux endémies du siècle dernier un
ensemble de maladies imputables à notre mode de vie qui nous amènent,
parfois, à mourir précocement, c’est-à-dire avant 65 ans : affections
cardiaques et diabète, largement causés par une alimentation trop riche en
sucres et en graisses ; cancers du poumon et du larynx résultant presque
exclusivement de la consommation excessive de tabac ; cancers liés à
l’activité professionnelle dans le cas de l’amiante, etc.
En faisant un compte grossier, on peut estimer que, sur les trente
et quelques années d’espérance de vie gagnées en un siècle, vingt
s’expliquent par les progrès réalisés en termes d’environnement, d’hygiène
et de mode de vie, et que, pour l’essentiel, les dix restantes sont liées à la
généralisation des antibiotiques et, plus marginalement, de quelques autres
classes de médicaments. Compte tenu de l’arrivée à maturité de ces
facteurs de progrès, les gains d’espérance de vie qui leur sont dus sont
réalisés ou le seront à bref délai.
Vouloir prolonger l’espérance de vie à tout prix risque donc de
devenir contre-productif dans l’avenir. Un indicateur permet par exemple
de la pondérer par un facteur de qualité, la résultante étant un nombre

37
d’années de survie équivalant à une santé parfaite. Cet indicateur, en
permettant de comparer rationnellement durée et qualité de vie, montre
qu’un traitement peut avoir non pas un mais trois résultats possibles : il
peut prolonger la vie tout en améliorant sa qualité ; il peut aussi raccourcir
l’espérance de vie tout en améliorant sa qualité ; il peut enfin prolonger la
vie au prix d’une dégradation de sa qualité.
L’utilisation de cet indicateur remet en cause un certain nombre
d’idées reçues. Ainsi, des études américaines, toujours excellentes sur le
plan statistique, montrent que l’espérance de vie en santé parfaite de
malades atteints de cancers ou de diabète est stationnaire depuis près de
trois décennies, et ce malgré l’explosion du coût de traitement de ces
affections. La prolongation de la vie n’a donc été obtenue qu’au prix de
grandes souffrances et d’une fin de vie très dégradée. Quel échec !
Au-delà, il est permis de s’interroger sur le bien-fondé de
nombreux traitements et sur les critères de choix du corps médical, qui
sont souvent à l’opposé de ceux des patients. Il y a vingt ans, on était
considéré comme diabétique et traité pour cette affection au-delà d’un taux
de glycémie de 140 mg/dl. Depuis, on a abaissé le seuil de la zone rouge à
126 mg/dl et il est question de descendre dans un proche avenir à 110
mg/dl. Le traitement de l’hypertension et celui de l’excès de cholestérol
ont suivi la même logique. Les laboratoires ont même eu l’aplomb de
publier des études montrant que les statines réduisaient le risque de
mortalité quel que soit le taux de LDL, le mauvais cholestérol. Toute
personne en bonne santé est un malade qui s’ignore, Knock a gagné par
KO. De qui se moque-t-on ?
Il y a plus grave. De nombreuses études montrent que, dans le
traitement des cancers, les médecins privilégient presque
systématiquement la probabilité de survie alors que les patients
s’interrogent aussi beaucoup sur leurs conditions de vie post-traitement.
Résultat des courses, des taux records de non-observance des
chimiothérapies orales, près de 30 %, alors même que la vie des malades
en dépend. Tout simplement parce qu’ils ne supportent plus les effets
secondaires inhumains de la chimie qu’on leur fait ingérer à haute dose.
On passe donc assez naturellement de la surmédicalisation
orchestrée à l’acharnement thérapeutique, notamment en fin de vie. On a
coutume de dire que la dernière année d’existence représente en coût la
moitié des dépenses totales de santé d’un individu. Cette affirmation est
bien entendu fausse dans la mesure où elle ne prend pas en compte l’âge
de la mort, mais elle donne un ordre de grandeur qui n’est pas absurde.

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Pourquoi le coût de la mort est-il si prohibitif ? Parce que la
dépense marginale à engager pour augmenter l’espérance de vie croît de
manière exponentielle avec l’âge, avec un gain marginal de plus en plus
faible. Cela signifie que la productivité marginale des soins diminue
rapidement, surtout en phase terminale. Lorsque l’objectif quasi exclusif
du système de soins est de battre la mort, en faisant abstraction de tout
critère de qualité de vie, la charge financière qui en découle peut donc
rapidement devenir pharamineuse.
On voit bien à travers ce qui précède que la folie prescriptrice et
son corollaire, l’acharnement thérapeutique, s’inscrivent dans une logique
bien plus économique que médicale. La prise en charge à 100 % des
maladies chroniques par le régime des affections de longue durée (ALD)
permet de faire financer intégralement par la collectivité le progrès
technique. Les traitements de pointe les plus coûteux concernent à peine
15 % de la population, des malades chroniques traités à vie ou des
personnes en fin de vie, mais représentent l’essentiel des profits des
laboratoires pharmaceutiques.
En résumé, la médecine “moderne” est devenue un énorme
business dont le seul objectif est de prolonger la vie humaine à un prix
toujours plus élevé. L’écrasante majorité des médecins qui nous soignent
ne cherchent pas à améliorer notre bien-être, leur unique obsession est de
parfaire leurs statistiques pour préserver leur statut social et matériel. Les
laboratoires pharmaceutiques ont pour unique obsession la maximisation
de leurs profits et n’ont aucun scrupule à mettre sur le marché des
médicaments aux effets secondaires dévastateurs. Il faut être conscient que
cette collusion de fait entre ceux qui ont notre santé en charge risque de
condamner une majorité d’entre nous à mourir lentement, par paliers de
plus en plus douloureux. C’est cela que nous devons refuser et la
Médecine Responsable a pour objectif de nous en donner les moyens.

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Le deuxième pilier de la smartsanté :
le Régime 4M

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Le sucre va tuer au XXIe siècle plus de monde que le tabac,
l’alcool, la cocaïne et l’héroïne réunis. C’est sans doute le tueur le plus
redoutable de l’histoire de l’humanité. L’OMS et la FDA sont en train de
le reconnaître, même si c’est encore du bout des lèvres tant les enjeux
économiques du sugar business sont gigantesques. Parallèlement, les
aliments riches en cholestérol, sur lesquels l’industrie du sucre avait réussi
à focaliser l’attention des régulateurs, sont largement réhabilités puisque
seules les graisses saturées et les huiles industrielles, de toute façon en
voie de disparition, font encore l’objet de recommandations dans les
dernières directives de la FDA. Bonne nouvelle pour les amateurs d’œufs
au plat au petit déjeuner, ils vont pouvoir les déguster sans avoir le
sentiment de commettre un péché mortel.
Le Régime 4M que je préconise est un nouveau mode de vie
alimentaire qui déclare la guerre au sucre sous toutes ses formes.
L’organisme ne requiert en réalité que très peu d’apport glucidique pour
répondre à ses besoins naturels. Privé de glucides, il puise dans ses stocks
de graisses que le foie transforme en corps cétoniques, qui se substituent à

41
elles. Les corps cétoniques n’ont que des avantages, dont le principal est
peut-être qu’ils ne peuvent servir de carburant qu’aux cellules saines de
l’organisme et qu’ils sont donc les ennemis les plus redoutables des
cellules cancéreuses.
Le Régime 4M implique de réduire l’apport glucidique au
minimum et de le remplacer par un apport énergétiquement équivalent en
matières grasses. Toutes les graisses ne sont pas bonnes et il faut donc être
vigilant sur celles que l’on consomme. Les graisses insaturées, dont la
reine est sans conteste l’huile d’olive, sont à privilégier. Les graisses
saturées étaient jusqu’il y a peu considérées comme uniformément
mauvaises. Là aussi, les choses évoluent et certaines, tels l’huile de coco et
notre bon vieux beurre, à condition qu’il provienne de vaches nourries
naturellement, font désormais partie des bonnes graisses.
Le Régime 4M n’est pas un régime frustrant mais un véritable
mode de vie qui propose une alimentation variée et de qualité. Viandes,
volailles, œufs, poissons, fromages, charcuteries et chocolat riche en cacao
sont autorisés sans restrictions particulières à condition d’être de qualité.
Tous les légumes à de rares exceptions près peuvent les accompagner. Les
légumineuses peuvent être intégrées à doses raisonnables. Les fruits trop
sucrés sont écartés, mais il reste un large éventail de choix pour les
amateurs, notamment tous les fruits rouges. Le vin, plutôt rouge et à doses
raisonnables, est bienvenu. En revanche, adieu baguettes, burgers, frites,
plats de pâtes, pizzas et sodas sucrés. Mais la vie est faite de renoncements
et celui-là en vaut la peine, il éloignera durablement de vous le spectre des
maladies cardiométaboliques et autres cancers.

42
Recette n°6
Contre le syndrome de l’assiette trop pleine
toute ta vie tu te battras

43
Ile de Nauru, 1945. Petit atoll de 21 km2 planté au milieu de
l’océan Pacifique, au large de l’Australie, qui aurait inspiré Daniel Defoe
pour Robinson Crusoé. Peuplé de Mélanésiens paisibles, qui vivent du
produit de leur pêche et d’un peu d’agriculture. Tout le monde est mince,
presque trop même : un quart de la population est morte de faim pendant
les trois ans d’occupation japonaise.
Ile de Nauru, 1975. Changement complet de décor. Entretemps,
les voisins australiens ont découvert que l’île n’était en fait qu’un
gigantesque tas de phosphates qu’ils se sont mis à exploiter intensivement
pour en extraire les engrais indispensables à leur agriculture. Les habitants
sont ainsi devenus en moins d’une génération les rois du pétrole du
Pacifique. Ils ont arrêté de travailler et remplacé le régime sushi par de
bons hamburgers, garnis de frites et arrosés de bière et de soda. Ils sont
tous devenus obèses et 60 % d’entre eux, proportion unique au monde,
sont en plus diabétiques. L’OMS, fascinée par cette évolution, a fait de
Nauru un laboratoire d’étude sur le diabète.
Ile de Nauru, aujourd’hui. Après l’épuisement des gisements de
phosphates, les habitants sont partis s’installer en Australie. Leur
république, proclamée au début des années 1960, n’est plus qu’une boîte
postale qui permet de blanchir les milliards de dollars de la mafia russe et
figure sur la liste noire des paradis fiscaux du G20. Le diabète a fortement
reflué, essentiellement parce que la forme développée, très grave, se
déclarait chez des sujets encore très jeunes et pouvait entraîner des
troubles sexuels constituant un sérieux frein à leur reproduction. La
nouvelle génération descend ainsi pour l’essentiel des 40 % de mutants des
années 1950 ayant échappé à la maladie.
L’histoire de l’île de Nauru est celle de l’humanité concentré et en
accéléré. Si l'homme préhistorique était plutôt bien nourri et peu carencé,
la sédentarisation et l'apparition de l'agriculture pendant le néolithique ont
apporté la disette récurrente, entrecoupée de périodes de pléthore. Les
sujets aptes au stockage de l'énergie en période faste et à son économie en
période de vaches maigres ont mieux résisté aux moments difficiles.
Ce phénomène s'expliquerait par une dérive génétique dite

44
“d'épargne”. Dans les conditions d'approvisionnement alimentaire
fluctuantes et généralement insuffisantes qui ont prévalu au cours de
l'histoire de l'humanité, les individus qui, génétiquement, avaient une
capacité d'épargne plus développée étaient les mieux à même de survivre
car une plus grande proportion des calories qu'ils ingéraient lors des rares
périodes d'abondance était transformée en graisses. Grâce à quoi ils
surmontaient mieux le retour de la pénurie. Alors qu’à l’origine de
l’humanité seule une proportion infime d’individus avait eu la chance
d’être porteuse de ces gènes, on estime qu’aujourd’hui, après des
millénaires de sélection naturelle, c’est la moitié de la population mondiale
qui est concernée.
Les mêmes individus qui ont reçu en héritage ces gènes stockeurs
de graisses autrefois protecteurs sont confrontés aujourd'hui à la
surabondance permanente, deviennent obèses et développent un diabète.
L’immense atout qui avait permis à l'humanité de survivre est devenu un
sérieux handicap au maintien de sa santé.
Pourquoi les habitants de Nauru sont-ils porteurs de ces gènes
stockeurs de graisses dans de telles proportions ? Sans doute parce que
leurs ancêtres sont arrivés sur l’île après de longs voyages en canoë
auxquels résistaient surtout ceux qui avaient le plus de graisses au départ !
Il faut ajouter que l’occupation japonaise avait opéré pendant la Seconde
Guerre mondiale une sélection naturelle particulièrement efficace, en
éliminant le quart de la population le moins apte à constituer des réserves.
Washington, Congrès des Etats-Unis, juillet 2004. Pour la
première fois, le secrétaire américain à la Santé annonce devant une
commission sénatoriale que les programmes publics Medicare et Medicaid
devront retirer de leurs directives la phrase qui affirme que l’obésité n’est
pas une maladie et que les régimes publics et privés devront à l’avenir
prendre en charge les soins qui y sont liés.
Il faut dire que, si la situation était déjà catastrophique, elle s’est
encore terriblement dégradée depuis. Les statistiques publiées en 2015 par
les centres pour le contrôle et la prévention des maladies (Centers for
Disease Control and Prevention ou CDC) montrent que le poids des
femmes américaines est plus élevé que jamais. Les Américains ont pris du
poids lors des cinquante dernières années, près de 13,5 kilos pour les
hommes comme pour les femmes, constatent les CDC. Mais un chiffre a
fait sensation : une femme américaine moyenne pèse aujourd’hui 75,45 kg,
soit 18,5 % de plus qu’en 1960, ce qui correspond à quelques grammes
près au poids d’un homme moyen de cette époque (75,5 kg). Le poids
moyen des hommes a lui aussi augmenté, pour atteindre aujourd’hui 88,8

45
kg, ce qui représente une hausse de 17,6 %. Les CDC ont également
annoncé que plus d’un tiers des adultes américains de plus de 20 ans sont
obèses, de même qu’un cinquième des jeunes âgés de 6 à 19 ans.
Pour partie, cette prise de poids peut être attribuée à la
progression de la taille des Américains, qui ont gagné 2,5 cm depuis les
années 1960. Mais les auteurs de l’étude concluent que la hausse du poids
est surtout le résultat du changement du style de vie. Les Américains font
de moins en moins de sport, choisissent une nourriture de moins en moins
saine et en consomment plus. En moyenne, l’apport calorique d’un
Américain moyen est passé de 2 109 calories en 1960 à 2 568 en 2010, ce
qui, d’après Pew Research , est “l’équivalent d’un sandwich au bifteck
supplémentaire tous les jours”.
Paris, octobre 2012. La dernière enquête obEpi vient rappeler
que, à l'instar de nombreux pays, la France prend du ventre. Plus de 21
millions de Français sont en surpoids ou obèses. La population adulte
française compte 32,3 % de personnes en surpoids et 15 % de personnes en
situation d’obésité. La hausse continue, même si elle ralentit par rapport
aux années précédentes.
Les disparités sociales ou régionales sont importantes. Dans les
foyers au revenu net de 3 800 euros par mois ou plus, 8,3 % des adultes
sont obèses contre 24,1 % dans les foyers dont le revenu est inférieur à 1
200 euros par mois. Une corrélation similaire apparaît si l’on considère le
niveau d’éducation plutôt que le revenu. Certaines régions (Midi-Pyrénées,
PACA et Pays de Loire) comptent moins de 12 % d’obèses au total tandis
que d’autres (Nord-Pas-de-Calais et Champagne-Ardenne) dépassent les
20 %.
Le coût pour les régimes sociaux de cette valse des tours de taille
est encore mal connu des deux côtés de l’Atlantique, mais il est
vraisemblablement gigantesque. Les obèses sont souvent atteints de
polypathologies dont les conséquences financières ne sont pas globalisées.
Le lien entre obésité et diabète 2 est clairement établi. De manière plus
générale, le Pr Arnaud Basdevant, qui a piloté l’enquête obEpi, rappelle
qu’ “un obèse a dix fois plus de risques d'être traité pour trois facteurs de
risque vasculaires (diabète, hypertension, anomalies des graisses du sang)
qu'une personne de poids normal”. Il a donc également plus de risques de
se retrouver en arrêt de travail ou de décéder précocement. Pour tous les
experts, l’obésité, qui tue 300 000 personnes aux Etats-Unis chaque année,
est d’ailleurs en passe de devenir le premier facteur de mortalité
“évitable”.

46
Après avoir survécu pendant des millénaires aux famines et autres
pandémies, l’humanité est-elle à présent menacée d’extinction pour cause
de suralimentation ? Tout porte à le croire. La génération des moins de 30
ans pourrait être la première depuis le début de l’ère industrielle à vivre
moins longtemps que celle de leurs parents. Si rien n’est fait, l’espérance
de vie pourrait commencer à reculer dès la prochaine décennie dans de
nombreux pays développés. L’espérance de vie à la naissance a d’ailleurs
baissé légèrement aux Etats-Unis en 2015.
Face à ce cataclysme, faut-il diaboliser les sodas, jus de fruits
sucrés, snacks et autres hamburgers produits et commercialisés par des
multinationales anglo-saxonnes ? La réponse est clairement oui. Ces
concentrés de graisses industrielles et de sucres sont effectivement très
nocifs et ont la particularité d’être très bon marché, donc à la portée du
plus grand nombre.
Mais parallèlement, les études réalisées par des sociologues
français sur les modes alimentaires montrent que chez nous la proportion
de personnes obèses est aussi élevée dans les populations qui restent
fidèles à la cuisine traditionnelle que dans celles qui se nourrissent pour
l’essentiel de junk food made in USA . Les charcuteries, le confit de
canard, le bon fromage de terroir et la tarte des demoiselles Tatin sont
aussi riches en calories que le cheeseburger de McDonald’s, et le pot de
beaujolais n’a rien à envier sur ce point aux breuvages de Coca-Cola. La
nourriture artisanale à l’ancienne n’est donc pas la panacée lorsqu’elle est
absorbée en quantité trop importante par des individus dont l’activité
sportive se limite aux matchs de foot sur BeIN.
Pourra-t-on soigner l’obésité à moyen terme ? Il est bien entendu
difficile de répondre à cette question, d’autant qu’un ensemble de facteurs
incitent à la prudence. Tout porte à croire, comme nous l’avons vu plus
haut, que le patrimoine génétique joue un rôle déterminant dans le
développement de la maladie. Les chercheurs les plus optimistes sont
convaincus que la mise au jour des anomalies génétiques prédisposant aux
formes les plus communes d’obésité n’est qu’une question de temps. Ils le
pensent cependant depuis suffisamment longtemps pour qu’on ne partage
pas leur optimisme. Si, comme tout semble l’indiquer, de nombreux gènes
sont en cause, la mise au point de traitements réellement efficaces peut
prendre des décennies. Le précédent du cancer, pour lequel la recherche
marque le pas depuis quarante ans, montre que le génie humain a des
limites et qu’elles sont difficiles à dépasser (cf. Recette n°3).
Des approches en rupture complète avec tout ce qui précède, que
je ne partage pas mais qu’il n’est pas question pour autant d’éluder,

47
commencent à émerger. Faut-il investir des milliards d’euros dans la
recherche sur l’obésité et dans son traitement ? N’est-il pas au fond plus
raisonnable de laisser la sélection naturelle s’opérer, comme à Nauru ? La
question mérite après tout d’être posée et elle l’est déjà aux Etats-Unis, où
un lobbying puissant, qui conteste le caractère pathologique mécanique du
surpoids, est à l’œuvre. Qualifier l’obésité de pandémie revient à
culpabiliser les gros, accusés d’être responsables de la dérive des dépenses
de santé, et à opérer ainsi une forme de discrimination moralement
contestable. Mobiliser des moyens énormes dans la recherche alors qu’il
est probable que le dernier obèse sera mort longtemps avant la mise au
point d’un traitement efficace est économiquement absurde. Il faudrait
donc aborder le problème sous un angle moins médicoéconomique, plus
humain. Nous ne sommes sans doute qu’au début d’un débat qui
mobilisera les consciences pendant des décennies.

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Recette n°7
De ton assiette le sucre sous toutes ses
formes tu banniras

49
Pendant des décennies, les glucides, c’est-à-dire les sucres sous
toutes leurs formes, ont été considérés comme des sources d’énergie de
qualité, à préférer aux matières grasses, jugées malsaines et à réduire au
minimum dans l’apport alimentaire quotidien. Ces sucres ont
progressivement colonisé notre alimentation et on les retrouve à tous les
repas : céréales au petit déjeuner, pâtes, féculents, pâtisseries, fruits, bière,
vin, etc. Une fois qu’ils ont été digérés, ils laissent dans l’organisme du
glucose et du fructose.
Dans beaucoup de pays, le dogme de la nécessité de l’apport
glucidique dans l’alimentation n’a toujours pas été remis en question. En
Allemagne, par exemple, la Société allemande de nutrition continue de
recommander que plus de la moitié de l’apport calorique s’effectue sous
forme de glucides. Les braves fonctionnaires qui gèrent cette honorable
institution ne doivent visiblement pas être connectés à Internet. S’ils
l’étaient, ils sauraient que même l’OMS a très sérieusement révisé ses
positions en la matière.
Les recommandations de l’OMS en 2015 s’appuient sur les effets
avérés de l’apport de sucres libres sur la santé. Ces sucres comprennent les
monosaccharides et les disaccharides ajoutés aux aliments par le fabricant,
la personne qui prépare les aliments ou le consommateur, et les sucres
naturellement présents dans le miel, les sirops et les jus de fruits naturels et
concentrés. Le morceau de sucre que vous laissez tomber dans votre café
le matin en fait bien évidemment partie. Les sucres libres se distinguent
des sucres présents dans les fruits et légumes frais entiers.
Les recommandations de l’OMS sont fortes : chez les enfants
comme chez les adultes, l’apport de sucres libres devrait être réduit à
moins de 10 % de l’apport énergétique total, et le ramener à moins de 5 %
présenterait des avantages supplémentaires pour la santé. Elles reposent
sur une analyse des toutes dernières données scientifiques, qui montrent,
premièrement, que les adultes qui consomment moins de sucres ont un
poids moins élevé et, deuxièmement, que l’augmentation de la quantité de
sucres dans l’alimentation est associée à une augmentation comparable du
poids. De plus, les travaux de recherche révèlent que les enfants qui

50
consomment beaucoup de boissons édulcorées risquent davantage d’être
en surpoids ou obèses que ceux qui en consomment peu.
En termes choisis et diplomatiques, pour ne surtout pas fâcher les
grandes multinationales de l’agroalimentaire, l’OMS reconnaît au moins
implicitement que l’explosion de la consommation de sucre au cours des
cinquante dernières années est directement responsable de la pandémie
d’obésité et de diabète qui est en train de déferler sur toute la planète.
La FDA a fait largement siennes les recommandations de l’OMS.
Dans ses préconisations de 2015, largement approuvées par des sommités
mondiales comme le nutritionniste en chef de l’université Harvard, Walter
Willett, elle considère qu’une consommation excessive de sucre augmente
le risque d’accidents cardiovasculaires, et peut entraîner l’obésité et les
maladies associées, diabète 2 et cancer notamment.
Le lien entre consommation excessive de sucre et cancer est donc
officiellement reconnu. Il était déjà clairement identifié par la communauté
médicale, ou au moins par une partie de celle-ci. D’innombrables études
montrent qu’un taux de glycémie élevé augmente significativement le
risque de cancer. Ainsi, les diabétiques souffrent plus souvent de cancer
que la moyenne de la population. La raison en est simple. Contrairement
aux cellules saines, qui brûlent le sucre à l’aide de l’oxygène présent dans
le sang pour fabriquer de l’énergie, les cellules cancéreuses cessent peu à
peu de respirer et passent en mode de fermentation anaérobie. Or une
cellule qui vit sur ce mode de métabolisme fermentaire a d’énormes
besoins en sucre, dix-huit fois plus qu’une cellule saine.
Logiquement, les malades du cancer ont très fréquemment une
glycémie élevée. Et plus elle l’est, plus les cellules cancéreuses croissent
vite et gagnent en mobilité, ce qui est à l’origine des métastases. Ils ont
aussi un taux d’insuline, l’hormone qui aide l’organisme à assimiler
rapidement l’afflux de sucre consécutif à un repas riche en glucides, plus
élevé que la moyenne. Or un taux d’insuline durablement élevé favorise la
sécrétion d’hormones et de facteurs de croissance dont les cellules
cancéreuses ont besoin pour se diviser et se développer.
Le fait que le sucre accroît le risque de cancer amplifie
considérablement sa nuisance. Car si on sait aujourd’hui à peu près
correctement traiter et stabiliser un diabétique, les progrès thérapeutiques
dans le domaine du cancer sont modestes. Les seules avancées réelles
depuis quarante ans sont liées à un dépistage plus précoce, qui augmente
les chances de guérison. Depuis quelques années, les laboratoires
présagent une révolution thérapeutique au travers de thérapies dites

51
ciblées, qui seraient particulièrement efficaces sur certains profils
génétiques. Mais outre le fait qu’elles ne concernent qu’une partie des
malades, elles s’accompagnent d’effets secondaires qui altèrent la qualité
de vie et sont annoncées à des prix souvent dissuasifs. Tout cela pour une
prolongation de l’espérance de vie de quelques mois tout au plus.
Paradoxalement, alors que le sucre sous toutes ses formes tombe
en disgrâce, on assiste à une réhabilitation progressive des matières
grasses, longtemps mises à l’index et accusées de tous les maux, sans
doute parce que les industriels, en tout cas les plus malins d’entre eux,
avaient flairé les fantastiques opportunités qu’allait leur offrir le marché
des produits allégés, vendus plus cher alors qu’ils sont souvent moins
coûteux à produire.
Le vent est en train de tourner. Walter Willett, qui avait
commencé sa carrière en recommandant de consommer le moins possible
de graisses, se limite à présent à mettre en garde contre les graisses
industrielles hydrogénées. Il a eu l’honnêteté de reconnaître publiquement
que ses collègues et lui, sur la base des connaissances scientifiques de
l’époque, avaient longtemps donné au public des conseils nutritionnels
erronés.
Cette évolution est heureuse car elle marque le retour d’une
certaine forme de bon sens. Nos ancêtres, dont le régime alimentaire était
effectivement très gras et très protéiné, n’ont découvert l’agriculture, et
donc les céréales, qu’il y a dix mille ans, et le sucre de canne il y a à peine
cinq siècles. Et si leur espérance de vie était très inférieure à la nôtre,
c’était plutôt dû aux maladies infectieuses et virales et aux guerres qu’à
leur alimentation. Il suffit d’aller au musée de l’Armée pour constater que
les généraux et maréchaux de nos monarques vivaient généralement
jusqu’à des âges très avancés quand ils avaient eu la chance de sortir
indemnes des champs de bataille.
Au-delà de ces considérations historiques, force est de constater
que beaucoup de produits tenus pour des must alimentaires sont
extrêmement gras et que personne ne s’en offusque. Longtemps super-
vedette de la plupart des régimes alimentaires, l’huile d’olive, composée à
100 % de matières grasses, est en train d’être supplantée par l’huile de
coco qui, aussi grasse que sa concurrente, est très riche en graisses
saturées, lesquelles avaient encore très mauvaise presse il y a peu.
Ce retour en grâce des matières grasses ouvre des perspectives
multiples de modification des comportements alimentaires. Que se
passerait-il si on réduisait drastiquement la part du sucre sous toutes ses

52
formes dans l’apport calorique et si on augmentait dans les mêmes
proportions la part des matières grasses ? Le corps s’adapterait sans
dommages particuliers en remplaçant, comme carburant nécessaire pour
entretenir ses fonctions essentielles, le sucre par des corps cétoniques
produits par le foie à partir des matières grasses. Nous verrons plus loin
qu’un processus de même nature se met en place dans le cadre d’un jeûne.
Avec les glucides qui seraient maintenus dans l’apport calorique et le sucre
qu’il produit lui-même, l’organisme pourrait faire face sans problème aux
besoins des cellules qui ne peuvent s’en passer, notamment les globules
rouges.
L’avantage essentiel de ce régime, que j’appellerai dans la suite
Régime 4M, est que les corps cétoniques fabriqués par le foie conviennent
parfaitement aux cellules saines mais ne peuvent en aucun cas servir de
carburant aux cellules cancéreuses. Des expériences ont montré que les
cellules cancéreuses sont affaiblies lorsqu’il y a des corps cétoniques dans
leur environnement, et ce même lorsqu’elles ne sont pas privées de sucre.
Pourquoi ? On n’en sait en fait trop rien, mais peu importe puisque c’est
avéré.
Le Régime 4M que je préconise a donc de formidables avantages.
Il permet de faire reculer le diabète, dont la croissance exponentielle est
l’un des sujets majeurs de santé publique à l’échelle de la planète. Et
surtout, il est une véritable prévention du cancer. Il semble aussi que,
lorsque la maladie est déjà déclarée et même à un stade avancé, combiné
avec une chimiothérapie, il apporte un véritable plus au malade. Mais les
études sur ce thème sont trop peu nombreuses et concernent trop peu de
malades pour que l’on puisse en généraliser les résultats.
Un dernier point doit être abordé, celui du cholestérol. N’y a-t-il
pas un risque d’augmentation brutale du taux de mauvais cholestérol
(LDL) en cas d’augmentation significative de la part des matières grasses
dans le régime alimentaire ? La FDA apporte, dans ses préconisations de
2015, une réponse à cette question délicate. Après des décennies de mise à
l’index des aliments trop riches en cholestérol, elle a purement et
simplement supprimé toute recommandation de cette nature dans cette
actualisation.
L’argumentation avancée par la FDA est que la consommation
d’aliments riches en cholestérol n’a pas d’incidence sur le taux de
cholestérol, bon (HDL) ou mauvais (LDL), et que seules sont en cause les
graisses industrielles hydrogénées — qui sont progressivement interdites
ou sévèrement réglementées dans la plupart des pays industrialisés — et
les graisses saturées. A titre d’exemple, cette recommandation remet à

53
l’honneur les œufs, longtemps considérés comme des tueurs silencieux : le
jaune d’œuf est en effet riche en cholestérol mais pas en graisses saturées.
Pour ce qui est des triglycérides, la situation est plus simple. Leur
taux étant très largement lié à la consommation de sucre, notamment celui
contenu dans l’alcool sous toutes ses formes, il baisse dans la plupart des
cas très fortement dans le cadre d’un Régime 4M.
A travers ce qui précède, on voit bien que si le sucre sous toutes
ses formes est largement à bannir, il ne peut pas être remplacé par
n’importe quelle matière grasse. Un tri rigoureux doit être fait entre bonnes
et mauvaises graisses, c’est l’objet du prochain chapitre.
Deux remarques importantes pour finir. La première est que, pour
des personnes ayant un taux élevé de cholestérol, le Régime 4M n’a pas
pour vocation de remplacer un traitement médicamenteux, une statine en
général. Les statines ont pour défaut d’engendrer des effets secondaires
relativement handicapants, notamment pour des personnes qui pratiquent
un sport régulièrement. Dans ce cas, je recommande d’essayer les levures
de riz rouge, qu’on trouve sans problème en pharmacie et qui sont des
statines naturelles beaucoup mieux tolérées par l’organisme que leurs
cousines chimiques. Pour des raisons évidentes, elles sont bien entendu
très décriées par les laboratoires. Pour ceux qui préfèrent rester dans le
circuit de la médecine “scientifique”, une alternative plus orthodoxe est de
coupler la prise de statines avec de la coenzyme Q10 : de nombreuses
études montrent que cette association réduit significativement les effets
secondaires.
La seconde remarque est que le Régime 4M n’est pas adapté aux
personnes atteintes d’hypercholestérolémie familiale sévère, qui ont un
taux de cholestérol endogène très élevé. Cette population nécessite un
accompagnement spécifique et, dans la mesure où cette affection est très
mal dépistée (à peine 10 % des personnes concernées), j’incite tous ceux
qui veulent faire des principes du Régime 4M un pilier de leur mode de vie
à se faire dépister avant.

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Recette n°8
La transition entre ton régime actuel
et le Régime 4M avec bon sens tu feras

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56
Passer d’un régime fortement glucidique au Régime 4M ne se fait
pas en claquant les doigts. Beaucoup d’experts, ceux de l’OMS et de la
FDA notamment, commencent à penser très fort et à dire tout bas, tant les
intérêts économiques sont importants, que le sucre est une addiction au
même titre que le tabac, l’alcool ou l’héroïne. J’ai compris cela adolescent,
en observant le comportement de ma grand-mère maternelle, qui est le seul
de mes grands-parents que j’ai connu, les autres ayant été emportés avant
ma naissance par la guerre, la maladie ou définitivement éloignés par des
brouilles familiales.
J’adorais ma grand-mère et passais tous les étés au moins deux
semaines avec elle. Elle était grande diabétique, insulinodépendante et
totalement accro au sucre. Ma grand-mère était allemande et, comme
beaucoup de ses compatriotes, elle ne prenait pas son dessert à la fin d’un
repas mais à l’heure du thé. Comme dans un rituel, j’allais chez le pâtissier
d’à côté, excellent au demeurant, lui chercher tous les après-midi son
goûter, un gâteau très sucré et dégoulinant de crème. J’ai essayé à maintes
reprises de lui expliquer que ça lui faisait du mal. Un jour, je me suis
même mis en grève et ai refusé d’aller lui chercher son dessert. Elle a
tellement mal réagi que j’ai baissé les bras, je l’aimais trop pour me fâcher
avec elle. J’ai donc perdu ce combat, elle est morte quelques années plus
tard dans une institution, aveugle et impotente. Cela a été pour moi une
leçon pour la vie.
Dès lors que l’on se situe dans le domaine de l’addictologie, il n’y
a guère que deux stratégies possibles, le sevrage brutal et le décrochage
progressif. Pendant longtemps, la première semblait la seule ayant une
chance d’aboutir à un résultat positif. Le Pr Michel Lejoyeux, chef du
service de psychiatrie et d’addictologie de l’hôpital Bichat, écrivain de
talent de surcroît, considère l’option du décrochage comme aberrante. Il a
coutume de dire qu’on ne quitte pas sa petite amie en passant un quart
d’heure de moins chaque jour avec elle. Il est spécialisé dans l’alcoologie,
où les addictions sont parmi les plus sévères et les rechutes très
nombreuses, son point de vue peut donc se comprendre.
Un certain nombre de ses confrères commencent néanmoins à
penser qu’un décrochage progressif et le retour à une consommation

57
raisonnable de la substance à l’origine de l’addiction sont possibles, y
compris dans le cas de l’alcool. Puissent-ils avoir raison, car si ce n’est pas
le cas, notre combat contre le sucre sera très difficile.
Le choix de la stratégie à adopter est fonction de l’état de santé et
de l’hérédité. Si vous êtes déjà diabétique ou si vous risquez de le devenir
compte tenu de vos antécédents familiaux, un régime fortement glucidique
vous met en danger de mort. Vous ne mourrez pas nécessairement de votre
diabète, mais plus probablement d’un cancer. Nous avons vu
précédemment que les diabétiques ont une probabilité beaucoup plus forte
que le reste de la population de développer un cancer. Mon ex-beau-père,
que j’aimais comme un deuxième père, était grand diabétique. Lorsqu’il a
été atteint du cancer de la moelle épinière dont il est décédé, son
endocrinologue lui a expliqué avec le cynisme propre aux médecins que
c’était en réalité son diabète qui l’avait rongé lentement de l’intérieur
depuis des années et qui en définitive le tuait sous une autre forme.
Dans ce cas, l’arrêt brutal du sucre sous toutes ses formes est
vital. Il faut à tout le moins éliminer immédiatement de son régime
alimentaire toutes les formes de sucres communément appelés rapides :
sucre en morceaux ou en poudre, pâtisseries, confiseries, viennoiseries,
baguette, chocolat à teneur en cacao inférieure à 85 %. En parallèle, il faut
réduire autant que possible la consommation des sucres communément
appelés lents : pâtes, riz blanc et légumineuses. Le sevrage peut
commencer par un jeûne long (cf. troisième pilier de la smartsanté)
permettant de remettre les compteurs de l’organisme à zéro. Son succès
passe par une désaccoutumance complète du goût même du sucre. Un
nutritionniste éminent m’a expliqué il y a quelques années que les régimes
basés sur des substituts alimentaires hypocaloriques étaient une vaste
escroquerie intellectuelle et financière (les substituts en question génèrent
pour les industriels qui les produisent des marges pharamineuses) dans la
mesure où, sucrés à l’aspartame, ils ne permettent pas aux personnes qui
les prennent d’oublier le goût du sucre. Le parallèle avec les anciens
fumeurs est très éclairant. Même si l’on a décroché depuis des années, le
simple fumet de la cigarette d’un voisin déclenche une envie violente de
replonger.
Si vous êtes en bonne santé et sans risque immédiat particulier, la
stratégie du décrochage progressif est plus adaptée. Elle est certes moins
violente mais a contrario plus subtile. Je recommande une démarche que
j’ai personnellement expérimentée, simple et peu contraignante. Lorsque
vous aurez décidé de faire le grand saut et d’adopter le Régime 4M,
commencez par vous acheter un petit carnet et le stylo qui va avec. Si vous

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êtes adepte du tout-numérique, vous pouvez aussi utiliser le bloc-notes de
votre smartphone. Notez-y pendant une semaine complète tout votre
régime alimentaire dans les moindres détails. N’oubliez aucun snack,
aucun apéro, aucune tartine beurrée grignotée au restaurant en attendant un
convive, aucun verre de vin. Soyez le plus honnête et le plus précis
possible, personne ne sera là pour vous juger.
Une fois ce travail de fourmi effectué, relisez en détail ce que
vous avez noté et demandez-vous ce à quoi vous êtes réellement attaché et
ce qui relève de l’habitude, voire de la compulsion, et qui ne vous
manquerait pas si vous y renonciez demain. Pratiquement tous les régimes
échouent parce qu’ils reposent sur une approche strictement calorique et
qu’ils ne prennent pas en compte la dimension affective de notre rapport à
ce que nous mangeons. Si vous frustrez votre corps, il se vengera, ce qui
explique qu’après chaque régime on reprend les kilos perdus avec un
bonus, l’organisme ayant optimisé sa capacité de stockage pour mieux se
préparer à votre prochaine agression.
La méthode que je préconise permet d’éviter cet écueil. Quand
vous aurez éliminé tout ce qui ne vous manquera pas, vous vous rendrez
compte que vous avez fait un pas énorme en avant et vous constaterez une
perte de poids spectaculaire et sans effort dans un temps très court. Il y a
une vingtaine d’années, j’ai entrepris cette démarche. Je buvais à l’époque
énormément de café, que je sucrais machinalement. En goûtant un bon
arabica sans sucre, je me suis rendu compte que je faisais fausse route
depuis des années. Exit donc les six à huit morceaux de sucre quotidiens.
Je buvais aussi beaucoup de sodas sucrés, je suis passé sans la moindre
douleur aux formules light. Mon seul regret a été d’arrêter de boire des
gin-tonics en apéritif, le Schweppes est un concentré de sucre et il n’y en
avait pas de versions light à l’époque. Mais la vie est faite de
renoncements, qui seuls permettent de progresser, et celui-là m’a peut-être
évité de devenir alcoolique...
Je me suis en parallèle rendu compte que je ne tenais pas plus que
ça à la baguette nationale, ni au beurre qui l’accompagne
traditionnellement, ni aux viennoiseries, qui sont encore bien plus grasses
et sucrées qu’une tartine beurrée. Exit donc baguettes, croissants, pains au
chocolat et aux raisins et beurre. J’ai réalisé aussi que je n’étais pas accro
aux frites, je n’y ai pas renoncé complètement mais je me suis limité à
celles, d’excellente qualité, que servent les bonnes brasseries.
En revanche, je n’ai abandonné aucun de mes péchés mignons.
J’adore le vin et le chocolat noir à forte teneur en cacao, j’en consomme
autant qu’avant. Je suis un authentique Sapiens, je raffole de tout ce qui est

59
gras et protéiné, j’ai donc continué à déguster de temps à autre de bonnes
blanquettes de veau, de délectables cassoulets et autres merveilles
culinaires françaises. Je suis un fan de couscous, surtout de celui que je
cuisine moi-même, et j’en fais quelques-uns par an pour une ribambelle
d’amis. Le riz qui accompagne généralement la blanquette, les haricots
tarbais du cassoulet, la semoule très grasse de mon couscous maison ou,
plus rarement, une pizza ou un plat de pâtes, sont mes entorses au Régime
4M. Le reste du temps, je suis plutôt observant, avec un régime gras et
protéiné, sans glucides autres que ceux apportés par les fruits.
Résultat de ma démarche initiale de décrochage par tri sélectif
dans mon régime alimentaire ? J’ai perdu 11 kilos en sept semaines et n’ai
rien repris pendant de très longues années. Qui dit mieux ? L’honnêteté
m’oblige à préciser qu’il y a trois ans, le cumul d’un divorce compliqué,
d’un conflit d’associés sur le plan professionnel et de blessures qui m’ont
handicapé sévèrement (je suis marathonien et la course de fond est pour
moi un facteur essentiel d’équilibre) a rompu ce cercle vertueux et que j’ai
repris beaucoup des kilos perdus depuis des années. C’est à cette occasion
que j’ai découvert le jeûne et son extraordinaire faculté de remettre
l’organisme dans la bonne voie. Après mon premier jeûne long, j’ai
recommencé mon travail de tri sélectif et tout est rentré dans l’ordre.

60
Recette n°9
Les graisses et les protéines le cœur de ton
régime alimentaire deviendront

61
Il y a matières grasses et matières grasses. Laissons de côté les
graisses industrielles hydrogénées, véritable poison aujourd’hui en voie de
disparition, et concentrons-nous sur les deux grandes catégories que sont
les graisses insaturées et les graisses saturées. Aucun aliment contenant
des graisses ne renferme qu’une de ces catégories d’acides gras, elles sont
toujours toutes deux présentes, mais dans des proportions fortement
variables.
Les acides gras insaturés se divisent en deux groupes, les gras
monoinsaturés et les gras polyinsaturés. Les principales sources d’acides
gras monoinsaturés, aussi appelés oméga-9, sont l’huile d’olive, les noix,
les arachides et l’avocat. Ce sont de bonnes graisses, qui ont des effets
bénéfiques reconnus sur la fonction cardiovasculaire. Liquides à
température ambiante et supportant bien la chaleur, elles peuvent être
utilisées aussi bien comme assaisonnement à froid que pour la cuisson.
Les principales sources d’acides gras polyinsaturés sont les huiles
végétales. Elles sont liquides à température ambiante et fragiles à
l’oxydation. Elles se subdivisent elles-mêmes en deux sous-catégories, les
oméga-3 et les oméga-6. Les graines de lin et l’huile qu’on en tire sont
particulièrement riches en oméga-3. Les huiles de soja, de maïs et de
tournesol sont, elles, riches en oméga-6.
Les oméga-3 et les oméga-6 sont d’une utilisation moins souple
que l’huile d’olive et ses petites sœurs. Les oméga-3 ne peuvent pas être
chauffées et les oméga-6 ne supportent pas les hautes températures. Ce
sont elles aussi de bonnes graisses, qui protègent la fonction
cardiovasculaire. Le consensus entre nutritionnistes est cependant que,
dans les pays développés, on consomme beaucoup trop d’oméga-6 et pas
assez d’oméga-3. Dans la mesure où ces deux acides gras se
concurrencent, les bénéfices intrinsèques des oméga-3 sont insuffisamment
exploités par l’organisme.
Les acides gras saturés peuvent être d’origine animale (beurre,
crème, fromage, graisse de porc, de bœuf, d’oie, de canard, etc.) ou
végétale (huile de coco, huile de palme, etc.). Ils se présentent sous forme
solide à température ambiante et supportent mieux la chaleur que les

62
acides gras insaturés. Ils ont très longtemps été considérés comme de
mauvaises graisses contribuant à la formation du LDL, le mauvais
cholestérol.
Cette appréciation est en train d’évoluer. La matière grasse star du
moment, qui a même supplanté l’huile d’olive, est l’huile de coco, une
graisse saturée. Pourquoi ? Parce qu’elle a une très forte teneur en
triglycérides à chaîne moyenne (TCM), qui sont des graisses dont
l’absorption intestinale ne requiert ni l’action de la bile ni celle des sucs
pancréatiques, ce qui en fait un carburant plus rapidement disponible que
toutes les autres matières grasses. Cerise sur le gâteau, l’huile de coco
apporte à l’organisme du potassium, du manganèse, du zinc et du
sélénium.
Autre revenant après un long séjour dans l’enfer de la nutrition, le
beurre. Il contient également, dans une proportion moindre que l’huile de
coco, des TCM et une grande quantité d’autres acides gras, notamment des
oméga-3. L’inconvénient du beurre est néanmoins celui de toutes les
graisses animales. Le beurre frais provenant du lait de vaches élevées en
plein air et nourries à l’herbe et au foin est une graisse d’excellente qualité
malgré la présence dans sa composition d’acides gras saturés. En revanche,
celui issu d’un élevage industriel de bovins nourris au maïs et au soja a une
composition totalement différente, très nocive, et est à bannir.
Après cette entrée en matière, passons au concret. Quelles sont les
matières grasses incontournables du Régime 4M ? L’huile d’olive et
l’huile de coco sont des fondamentaux. Le beurre et les fromages, aux
réserves près émises ci-dessus, également. Les poissons gras (sardines à
l’huile, filets de harengs à l’huile, saumon fumé, etc.), très riches en
oméga-3 et sources de vitamines, de minéraux et d’oligoéléments
indispensables à l’organisme, sont à consommer sans modération.
L’appréciation des charcuteries, riches également en protéines, est
plus nuancée. Outre qu’elles posent le même problème que toutes les
autres graisses animales, elles peuvent avoir une très forte teneur en sel,
qui est un facteur d’hypertension artérielle. Je déconseille donc la
consommation de jambon cru, trop salé, et d’une manière plus générale
celle des charcuteries industrielles vendues en grande surface. En
revanche, un jambon blanc, un saucisson, un pâté ou une andouille dont la
provenance est garantie sont des compagnons de route privilégiés du
Régime 4M.
Last but not least, le chocolat. Idéalement, il devrait avoir une
teneur en cacao d’au moins 85 % pour être éligible au Régime 4M. Mais

63
tout le monde ne se fait pas au goût de cacao trop prononcé qu’une telle
teneur implique. A ces récalcitrants je recommande une approche
progressive, en commençant à 70 % et en augmentant la dose de cacao par
paliers jusqu’à 85 %. Telle a été ma démarche, et aujourd’hui, une amie
très chère, grande amatrice de chocolat devant l’Eternel et créatrice d’une
recette de gâteau au chocolat à se damner, a même réussi à me convertir à
des teneurs de 100 %.
Passons maintenant aux protéines. Elles ont un rôle
fondamental pour notre santé en raison de leur double fonction, structurale
et métabolique. La fonction structurale regroupe tout ce qui concerne la
composition des tissus, le renouvellement des cheveux, de la peau, des
ongles et des organes. La fonction métabolique concerne l’ensemble des
réactions chimiques indispensables au bon fonctionnement du corps.
Nombre d’aliments riches en protéines le sont également en
matières grasses et nous les avons déjà cités. C’est le cas des fromages, des
charcuteries et des poissons gras notamment. Ajoutons-y les œufs, qui sont
une formidable source de protéines et de matières grasses mais aussi de
vitamine A, de calcium, de fer et de choline (nutriment important pour la
bonne santé des nerfs et du foie). Il faut privilégier les œufs issus de poules
fermières, élevées en plein air et nourries naturellement. Le label bio
apporte une bonne garantie de qualité et on en trouve désormais à des prix
abordables dans la grande distribution.
La source reine d’apport en protéines a longtemps été la viande
rouge, issue de l’élevage bovin. Dans beaucoup de pays, le steak-frites est
encore considéré comme le symbole d’un certain art de vivre français. La
réalité est pourtant bien différente aujourd’hui. Longtemps leader
incontesté des produits de boucherie, la viande bovine est désormais
dépassée par les volailles et la viande porcine. L’épisode de la vache folle
y est pour beaucoup mais bien d’autres facteurs jouent.
L’industrialisation de l’élevage, avec le doute sur la qualité des
produits proposés, notamment en grandes surfaces, en est un. Mais le
principal est sans doute la prise de conscience progressive des effets
désastreux pour l’environnement de l’élevage bovin. L’élevage dans sa
globalité contribue aux émissions de gaz à effet de serre pour 14,5 %, soit
davantage que le secteur des transports, et l’élevage bovin en représente
les deux tiers à lui seul. Les pets de vaches font plus de dégâts que les pots
d’échappement des voitures ! Non seulement la viande, mais tous les
autres produits de l’élevage bovin, beurre et fromages divers, doivent être
jugés à l’aune de cette dure réalité.

64
Autre source privilégiée d’apport en protéines qui commence à
avoir du plomb dans l’aile, les poissons de mer. Leur chair est très riche en
protéines de qualité mais ils sont de plus en plus contaminés par la
pollution des mers et océans. Les espèces du haut de la chaîne alimentaire,
comme le thon, sont les plus touchées. Il faut donc être extrêmement
vigilant sur la provenance des poissons que l’on achète et éviter ceux de la
pêche industrielle et des élevages intensifs. L’information étant difficile à
obtenir et le prix des poissons dont la provenance et la qualité sont
indiscutables étant prohibitif, la prudence inciterait à en consommer de
façon modérée.
D’autres sources de protéines, moins onéreuses et d’une qualité
indiscutable, me semblent à privilégier. On trouve de délicieuses volailles,
poulets, canards, dindes, etc., à des prix très abordables, et la teneur en
protéines d’une cuisse de poulet est supérieure à celle d’un morceau de
bœuf persillé. Le lapin est bon marché et son apport en protéines excellent.
La viande d’agneau et de chevreau provient encore essentiellement
d’animaux de pâturage et d’herbage sauvage, ce qui est une garantie de
qualité. Le gibier apporte également une viande de choix.
Pour ceux qui ne consomment pas de produits d’origine animale,
le soja et son dérivé, le tofu, gorgés de protéines, constituent des
alternatives séduisantes. Les amandes et graines de chanvre et de lin,
riches en protéines, vitamines, minéraux et oligoéléments, également. Je
suis en revanche beaucoup plus réservé sur le seitan, fabriqué à partir du
gluten de blé, qui peut provoquer des allergies redoutables. Sans être un
ayatollah anti-gluten, je suis néanmoins convaincu qu’il faut en
consommer le moins possible.
Ce tour d’horizon montre que le Régime 4M, en dehors du sucre
sous toutes ses formes, n’est pas un régime monacal susceptible de
provoquer d’intenses frustrations et une révolte de nos organismes.
D’autant plus que nous allons voir dans la Recette n°10 que le champ des
possibles est encore bien plus étendu

65
Recette n°10
Par d’autres aliments qui conviennent
au Régime 4M ton régime tu compléteras

66
Dans ce qui suit, les règles définies pour les produits animaux
s’appliquent bien évidemment aussi. Un végétal, fruit, légume ou autre,
produit à l’aide de quantités massives d’engrais, de pesticides et autres
matières toxiques ne peut pas être meilleur pour la santé que la viande, le
lait, le beurre ou les œufs d’animaux nourris industriellement et bourrés
d’antibiotiques.
Les légumes verts à feuilles font bien entendu partie intégrante du
Régime 4M. Ils sont tout à la fois riches en fibres, en vitamines, en
minéraux et en oligoéléments et pauvres en glucides. Les épinards, blettes,
endives et autre cresson peuvent être consommés sans modération. Les
salades, laitues de toute nature et mâche, également. Elles doivent être
assaisonnées à l’huile d’olive mixée avec du citron ou avec une
vinaigrette.
Les légumes pauvres en amidon sont eux aussi les bienvenus.
Toutes les formes de chou, l’artichaut, les asperges, l’aubergine, le brocoli,
le céleri branche, le concombre, la courgette, les haricots verts, le poireau,
le poivron, les différents types de radis, la tomate et l’oignon sont
concernés, et cette liste n’est pas exhaustive. Sans oublier la choucroute,
qui se marie à merveille avec des charcuteries de qualité pour faire un des
plats vedettes du Régime 4M.
Les champignons ne font pas exception. Il convient de privilégier
les cultivés plutôt que les sauvages qui peuvent être contaminés par des
métaux lourds, et parmi eux ceux qui ont le plus faible taux en glucides.
Les champignons de Paris, cèpes, girolles et autres champignons des bois
sont mes favoris, avec une tendresse particulière pour les cèpes.
Epices, herbes aromatiques et condiments peuvent être utilisés
sans restriction. On prête à certains d’entre eux des vertus miraculeuses.
La vedette incontestée est le curcuma, puissant antioxydant qui
permettrait, entre autres, de prévenir les cancers et autres maladies
neurodégénératives. Effet de mode — l’Inde et ses pratiques culinaires
millénaires étant très en vogue en ce moment — ou réalité ? Peu importe,
je trouve cette épice délicieuse, je sais qu’elle me fera peut-être du bien et
certainement pas de mal et j’en consomme le plus souvent possible. Je

67
vous incite à faire de même.
Le cas des fruits est plus complexe. Les bananes et les melons,
trop sucrés, ne peuvent pas convenir au Régime 4M. Ils sont même un
redoutable poison pour les personnes atteintes d’un cancer, dont ils
nourrissent les cellules cancéreuses. A l’opposé, la grenade, peu sucrée et
qui est comme le curcuma un puissant antioxydant, est le fruit vedette du
Régime 4M. Les fruits rouges (fraises, framboises, myrtilles, etc.),
également à faible teneur en sucre, conviennent parfaitement. Consommés
avec modération, d’autres fruits, comme les pommes, pêches, poires,
oranges, pamplemousses et kiwis, seront dégustés tels quels et non sous
forme de jus.
Pour ceux qui ne sont pas amateurs de fruits, les légumineuses
(pois chiches, lentilles, haricots, etc.) constituent une bonne alternative.
Riches en glucides et en protéines, elles sont aussi un complément idéal
pour les végétariens. De manière générale, elles sont préférables aux
céréales.
Quelle solution pour les accros de la baguette ? Je ne suis pas
partisan des pains protéinés qui commencent à arriver sur le marché et sont
un gadget de bobos. Je préfère nettement le pain complet, de seigle, de
sarrasin ou d’épeautre, moins onéreux et plus facile à trouver. Il est un peu
étouffe-chrétien au départ, mais on s’y fait rapidement et il contraint, vu sa
consistance, à manger plus lentement, ce qui est plutôt bénéfique.
Comment concilier Régime 4M et sports d’endurance comme le
marathon ou le triathlon ? J’ai testé en 2015 un Régime 4M à teneur
glucidique minimale au marathon de Berlin, et il m’a fallu une heure de
plus que d’habitude pour le terminer. Je me suis ensuite documenté en
observant le mode d’alimentation des sportifs de haut niveau. J’en ai tiré
une méthode simple et efficace.
Prenons l’exemple d’un coureur de fond qui prépare un marathon
et qui n’a pas de problème de santé. Douze semaines avant la course, il
commence à s’entraîner quatre fois par semaine, dont une grosse sortie de
deux heures le dimanche. Supposons qu’il court le matin. La solution pour
lui est de remplacer ses menus habituels Régime 4M-compatibles par un
repas du soir glucidique (type plat de pâtes) les veilles de course en
semaine et de faire une journée glucidique entière le samedi précédant sa
sortie longue.
Dans les quinze jours avant le marathon, je préconise de se
préparer sur le plan nutritionnel en trois phases de cinq jours chacune : une
première phase de Jeûne Actif complet, une deuxième de réalimentation

68
sans glucides et une troisième de régime hyperglucidique pour charger
l’organisme en glycogène. Pour être le plus léger possible le jour de la
course, je recommande de jeûner pendant les dernières vingt-quatre
heures. Testez cette méthode, chers marathoniens adeptes du Régime 4M,
et vous verrez qu’elle vous fera encore progresser.
Dernier sujet, celui des boissons. Celles à base de cola et de
caféine sont à proscrire en raison de leur très forte acidité. A titre
d’exemple, pour équilibrer l’acidité d’un verre de cola, il faudrait boire
trente-deux verres d’eau alcaline ayant un pH très élevé, de l’ordre de 10.
Comme c’est évidemment impossible, l’organisme met en œuvre d’autres
stratégies et utilise notamment des tampons sanguins alcalins. Mais, au-
delà d’un certain seuil, ceux-ci deviennent indisponibles pour d’autres
tâches et les déchets acides toxiques s’accumulent dans l’organisme,
provoquant de graves dommages pour la santé.
L’alcool quant à lui est un concentré de sucre. Un alcoolique
cumule donc deux addictions à la fois, ce qui explique pourquoi tant
d’entre eux n’arrivent pas à décrocher. Prenons le cas d’un individu qui
boit un à deux verres de vin par jour, deux à trois fois par semaine. S’il y
est attaché, qu’il continue et qu’il compense en réduisant sa consommation
d’autres formes de glucides évoquées ci-dessus. Je conseille plutôt le vin
rouge au vin blanc, très riche en soufre lorsqu’il a moins de cinq ans. Et
aussi d’arrêter de boire des alcools forts, qui sont malsains et n’apportent
rien.

69
Le troisième pilier de la smartsanté :
le Jeûne Actif

70
Bien qu’encore rejeté par une bonne partie de la communauté
scientifique, le jeûne suscite un engouement certain depuis quelques
années. Les raisons de ce succès sont multiples. Le système curatif
traditionnel est en échec sur la maladie la plus redoutée, le cancer. Les
maladies cardiométaboliques (diabète, hypertension artérielle, etc.) sont en
train d’exploser dans le sillage de la pandémie d’obésité qui touche tous
les pays développés. Contrairement aux infections qui décimaient les
populations il y a un siècle, elles sont évitables par des actions énergiques
sur le mode de vie mais on ne sait pas les guérir une fois installées et elles
handicapent sévèrement pour le reste de la vie. L’inefficacité des régimes
amaigrissants est de plus en plus visible. Face à ce contexte morose, nous
sommes logiquement à la recherche de solutions nouvelles.
Le jeûne en apporte de très prometteuses, en rupture complète
avec ce modèle de santé traditionnel en échec. Il met en évidence les
formidables potentialités de notre organisme à s’autorégénérer dès qu’on
lui en donne les moyens et il nous rappelle notre statut de Sapiens. Nos
ancêtres ont été confrontés pendant des milliers d’années à des périodes où
la nourriture était peu disponible et où la règle était l’alternance de
l’abondance et du jeûne. Ils ont pour survivre développé des mécanismes
d’autodéfense performants, qui nous ont permis d’être là aujourd’hui et
que nous sommes en train de redécouvrir.

71
L’efficacité du jeûne sur les maladies cardiométaboliques est
incontestable et connue depuis longtemps. Il agit particulièrement bien
dans les cas de diabète de l’adulte et d’hypertension artérielle. La
révolution de ces dernières années a été la découverte du rôle qu’il peut
jouer dans la prévention et le traitement du cancer.
Comme dans le Régime 4M, en période de jeûne, l’organisme
substitue au glucose nécessaire à son fonctionnement des corps cétoniques
issus de la transformation de ses réserves de graisses par le foie. Ces corps
cétoniques conviennent parfaitement aux cellules saines de l’organisme
mais ne sont pas utilisables par les cellules cancéreuses, qui sont ainsi
progressivement affamées et donc affaiblies. Une équipe américaine a
montré que chez l’homme un jeûne préalable de trois jours suffisait à
améliorer notablement les résultats d’une chimiothérapie et à en réduire les
effets secondaires. Des études ultérieures parviendront peut-être à mettre
en évidence qu’un jeûne peut se substituer à une chimiothérapie, comme
cela a déjà été établi par des études sur des souris. Une formidable
aventure commencerait alors, qui conduirait notre organisme à produire
lui-même les médicaments nécessaires à sa survie.

72
Recette n°11
En jeûnant régulièrement ton statut de Sapiens
tu retrouveras

73
“Il faut soigner ses petits maux par le jeûne plutôt qu'en ayant
recours aux médicaments”, aurait affirmé Hippocrate (vers 460-vers 375
av. J.-C.). Les trois religions monothéistes ont inscrit cette pratique dans
leur calendrier. Si la durée et les modalités varient, pour toutes le temps de
la diète est l’occasion de se recentrer sur le spirituel, une façon de purifier
à la fois le corps et l’esprit. Les animaux malades refusent toute nourriture,
laissant à penser que l’abstinence alimentaire a des visées protectrices.
On parle de jeûne lorsqu’il y a privation complète de nourriture et
de boissons caloriques pendant des périodes pouvant aller de douze heures
à plusieurs semaines. Le jeûne intermittent consiste à alterner des périodes
de jeûne complet et d'alimentation normale. Ces pratiques ne doivent pas
être confondues avec les régimes hypocaloriques, dont nous verrons plus
loin que la logique et l’impact sur l’organisme sont fondamentalement
différents.
Dans une interview accordée à Thierry de Lestrade dans le cadre
de son livre Le jeûne, une nouvelle thérapie ? l’écophysiologiste français
Yvon Le Maho, qui a passé des années à observer ces jeûneurs
professionnels que sont les manchots, explique que “la faculté de jeûner
est commune à tous. Et si cette faculté est commune, c’est qu’elle a existé
dès qu’il y a eu des animaux sur terre. Cela s’explique bien : les animaux
ont été confrontés à des périodes pendant lesquelles la nourriture était peu
disponible, et il est probable que les mécanismes d’adaptation au jeûne ont
été parmi les premiers à se mettre en place dans l’histoire de l’évolution.
Le jeûne est donc le fruit de cette capacité d’adaptation qui a permis aux
animaux et aux hommes de survivre en cas de famine et de disette”.
Dans le même livre, interviewé par Thierry de Lestrade, le
biologiste américain Valter Longo, dont les travaux sur le vieillissement
sont notamment en train de bouleverser la prise en charge des cancers, fait
judicieusement observer : “Nous pensons que manger régulièrement est
une situation banale. Mais ce n’est pas le cas, bien au contraire. Pour la
grande majorité des organismes vivants, l’environnement normal est celui
où la nourriture fait défaut. Cette situation est entrecoupée par des périodes
où elle devient accessible, suivies de nouveau par un état de manque.”

74
Le fait de jeûner nous permet ainsi de retrouver notre statut de
Sapiens et de nous réinscrire dans le cycle de l’évolution. Une partie de la
communauté médicale, notamment en France, continue à faire du
négationnisme et à affirmer que le jeûne est dangereux pour la santé.
L’argument avancé est qu’un jeûne prolongé épuise le stock de protéines
dont l’organisme a un besoin vital et qu’il pourrait ainsi provoquer de
graves accidents cardiovasculaires.
Cet argument ne résiste pas à l’observation. Le carburant qui
permet à notre cerveau et à notre système nerveux central de fonctionner
est le glucose. Les protéines jouent également un rôle essentiel dans la
mesure où les muscles, notamment, en sont constitués. Elles permettent
également de lier les cellules entre elles et sont à la base des réactions
chimiques dans l’organisme. Les lipides (ou graisses) sont la réserve de
celui-ci, dans laquelle il peut puiser si besoin.
En cas de jeûne, l’organisme épuise en vingt-quatre heures ses
réserves de glucose. Il en fabrique spontanément en utilisant ses réserves
de protéines, mais ce mécanisme ne dure que très peu de temps, quatre ou
cinq jours tout au plus. Il est ensuite programmé par des milliers d’années
d’évolution pour puiser dans son stock de graisses, que le foie va
transformer en un substitut de glucose, les corps cétoniques, qui peuvent
irriguer très spontanément le cerveau et le système nerveux central.
L’argument selon lequel le jeûne entraîne une fonte musculaire mettant le
jeûneur en danger est donc infondé, ce sont bien les graisses qui
représentent l’essentiel (plus de 80 %) de la perte de poids.
Les réserves de lipides ne sont certainement pas inépuisables,
mais elles sont néanmoins conséquentes. Au moment où j’écris ces lignes,
ma balance m’indique 85 kilos et une masse grasse de 18 %, soit environ
15 kilos de graisse, ce qui équivaut à environ 150 000 kcal, de quoi
maintenir les fonctions essentielles de mon organisme pendant au moins
cinquante jours. Au-delà, le corps envoie des signaux de détresse qui se
traduisent par une faim douloureuse, comparable à celle du nourrisson
qu’on a oublié d’allaiter, et il faut siffler la fin de la récréation si on en a la
possibilité.
Est-on épuisé pendant un jeûne long ? Cela dépend bien entendu
des personnes et de leur état de santé au début du jeûne. Il ne peut pas y
avoir de règle générale et je me limiterai à mon expérience personnelle.
J’ai entrepris deux jeûnes à quelques mois d’intervalle pour mieux en
comprendre la logique et l’esprit, l’un de deux semaines et le second de
trois. Dans les deux cas, j’ai pu mesurer la capacité de mon corps à
s’adapter presque immédiatement à l’arrêt total de toute forme

75
d’alimentation. En pratiquant quatre heures de sport (natation, vélo,
marche rapide, jogging) très intensif par jour, je n’ai éprouvé à aucun
moment de sensation d’épuisement. En fin de jeûne, mes performances
étaient même meilleures qu’au début. Les corps cétoniques sont
décidément un carburant formidable !
Ces corps cétoniques que l’organisme fabrique à partir de son
stock de lipides sont d’ailleurs vraisemblablement à l’origine de la plupart
des bienfaits du jeûne. Un chercheur américain, le Dr Richard Veech, a
montré dès 1995 que les corps cétoniques amélioraient le fonctionnement
du métabolisme et diminuaient la production de radicaux libres, qui sont
un facteur essentiel du vieillissement. En 2001, il a émis l’hypothèse que
les corps cétoniques pouvaient avoir un effet bénéfique sur des maladies
neurologiques comme Alzheimer, l’épilepsie ou Parkinson. Dans le cas
d’Alzheimer notamment, ils arriveraient à passer la barrière cérébrale qui
protège le cerveau plus efficacement que le glucose, dans la période qui
précède l’apparition de la maladie. Selon une publication de 2013, cette
hypothèse a été validée sur des souris. L’objectif affiché est de mettre au
point un complément alimentaire, le ketone ester , que certains aux Etats-
Unis considèrent déjà comme la plus grande avancée médicale depuis la
pénicilline. Attendons de voir, ce type d’effets d’annonce a souvent fait
pschitt dans le passé, et contentons-nous pour l’instant de jeûner.

76
Recette n°12
Avec le Jeûne Actif le pouvoir sur ton corps
tu reprendras

77
Les considérations objectives exposées dans la Recette n°11
n’expliquent pas à elles seules le formidable engouement que suscite le
jeûne depuis quelques années. C’est pourquoi je me suis longtemps
interrogé sur les raisons profondes qui poussent un nombre croissant de
personnes de toutes origines et de tous âges à s’engager dans cette
aventure et souvent, après une première expérience réussie, à en faire un
élément structurant de leur mode de vie sur la durée.
Curieusement, pendant mes deux séjours d’observation à la
clinique Buchinger, à Überlingen en Allemagne, si l’on excepte la
population moyen-orientale, accablée par des problèmes de surpoids et de
diabète, j’ai constaté que seule une minorité y vient pour perdre du poids.
J’ai été frappé par le nombre de personnes, souvent en couple, qui n’ont
pas un gramme à perdre et dont certaines sont pourtant là pour des jeûnes
longs, pouvant aller jusqu’à quatre semaines (période de réalimentation
comprise).
Que viennent-elles chercher ? Certaines attendent des miracles,
comme ce restaurateur fortement handicapé par une arthrose de la main
qui entreprend un jeûne long en espérant une guérison que la médecine
traditionnelle ne lui a pas offerte. Sa démarche n’a rien d’absurde, les
problèmes articulaires étant, avec le cardiométabolique et les maladies
respiratoires, l’une des cibles privilégiées des jeûnes.
Pour la grande majorité, la démarche est moins spécifique, mais
peut-être encore plus existentielle. La peur de mal vieillir est clairement au
cœur des préoccupations. Les quadras et quinquas, qui composent le gros
de la troupe, ont vu leurs parents décliner, souvent en mauvaise santé et
avec des fins de vie difficiles, et ils n’ont pas envie d’emprunter le même
chemin. Ils réalisent qu’ils sont, du fait de modes de vie chaotiques, sous la
menace permanente de maladies chroniques qu’on sait soigner mais dont
on ne guérit pas. Ils estiment que la médecine traditionnelle, trop curative
et trop chimique, ne leur apporte pas de réponse satisfaisante et sont en
quête d’autre chose. D’une autre chose dont ils auraient la maîtrise, sans
intermédiation de ces sorciers en blouse blanche en lesquels ils ont perdu
confiance.

78
Le jeûne est une réponse particulièrement séduisante à cette quête.
Il est l’expression d’un choix purement personnel et d’une volonté de
reprendre le pouvoir sur son corps et son esprit, voire, dans certains cas, de
mesurer ses limites. Il répond au besoin d’anticiper la maladie pour ne pas
avoir à la soigner ensuite. Il peut être pratiqué avec un encadrement
médical minimal. Il est en phase avec le modèle de développement durable
qui est en train de s’imposer tout doucement, au moins sur notre vieux
continent.
Il est d’autant plus séduisant que les régimes alimentaires,
hypocaloriques, hyperprotéinés et autres, ont eu amplement le temps de
montrer leurs limites et les dangers qu’ils représentent pour la santé de
leurs dizaines de millions d’adeptes à travers le monde. Et que, même si
cela peut paraître contre-intuitif, le jeûne n’est pas un régime poussé à
l’extrême, mais au contraire l’opposé d’un régime.
Pourquoi ? Parce que les signaux envoyés au cerveau sont
radicalement différents. Si l’on suit la théorie de l’évolution, notre cerveau
a été forgé il y a 20 000 ans, dans les cavernes. A cette époque, le jeûne
n’était pas un choix thérapeutique, mais une nécessité vitale, tout
simplement parce que la chasse et la cueillette n’étaient pas possibles toute
l’année et que les chambres froides, conserves et autres techniques de
stockage alimentaire restaient encore à inventer.
C’est ce contexte moins douillet que le nôtre qui explique, entre
autres, notre attirance pour les graisses, qui permettent à l’organisme de
constituer des réserves d’une exceptionnelle qualité, idéalement adaptées à
des périodes limitées sans nourriture. Le démarrage d’un jeûne envoyait
donc au cerveau le signal très clair qu’une phase de déstockage
momentané des réserves disponibles arrivait, et c’est toujours le cas des
milliers d’années après.
Rien de tel avec un régime. La réduction de la ration calorique
quotidienne envoie au cerveau le signal que l’organisme va devoir
durablement survivre avec moins de nourriture, qu’il faut donc à tout prix
préserver les réserves existantes et optimiser le stockage des graisses à
l’avenir. Un gros est gros parce qu’il stocke les graisses mieux que les
autres, à chaque régime il les stocke encore un peu mieux et devient, après
une phase momentanée de baisse de poids, encore un peu plus gros. C’est
absurde, mais c’est ainsi que nous avons été conditionnés par l’évolution
pour survivre, à une époque où on mangeait pour vivre et pas l’inverse.
Je connais une foule de gens qui, au bout de vingt ans de régimes
successifs et de quelques milliers d’euros payés à des gourous de la

79
nutrition, se retrouvent avec 20 kilos de plus qu’au départ sans comprendre
pourquoi et avec un profond sentiment d’injustice. Mon conseil est simple
: arrêtez de vous priver inutilement, jeûnez !!! Vous verrez très rapidement
la différence.
Lors de mes séjours à Buchinger, j’ai aussi passé pas mal de
temps à essayer de comprendre pourquoi les Français étaient, de loin, la
population la plus représentée, et ce alors que le corps médical français est
le plus réfractaire à cette approche thérapeutique. Premier élément
d’explication, le succès phénoménal du documentaire Le jeûne, une
nouvelle thérapie ? , de Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade, diffusé sur
ARTE en 2011, déjà reprogrammé deux fois et qui a battu tous les scores
d’audience de la chaîne. Il est à voir, on peut acheter le DVD et le bouquin
qui va avec à la boutique ARTE sur Internet. De l’aveu des dirigeants et
médecins de la clinique que j’ai interrogés, il a fait exploser la notoriété du
jeûne en général et de la méthode Buchinger en particulier auprès d’un
certain public français, plutôt CSP+, pour lequel ARTE est une référence.
Le buzz n’explique cependant pas tout. Beaucoup des participants
que j’ai rencontrés lors de mes séjours en étaient à leur deuxième,
troisième participation, voire beaucoup plus pour certains. La preuve pour
eux que ça a marché, et ils ne se privent pas de l’exprimer. Mais quand on
creuse un peu, il ne s’agit pas simplement d’avoir perdu quelques kilos,
n’importe quel régime hypocalorique permettant d’y arriver, au moins
momentanément. Ils ont, surtout, le sentiment d’avoir décroché le Graal,
l’accès à un mode de vie différent, tout à la fois plus épanouissant et plus
durable.
Il y a incontestablement une dimension spirituelle dans le jeûne
qui dépasse largement la simple privation momentanée de nourriture. Le
discours des dirigeants de la clinique Buchinger est clairement empreint de
religiosité et ils n’hésitent pas à rappeler que Moïse et Jésus ont, d’après
les livres saints, longuement jeûné avant d’aller vers leur destin. Mais
l’Allemagne est beaucoup plus religieuse que la France et je doute que ces
arguments soient déterminants pour les laïcs incurables que nous sommes.
Il y a donc encore autre chose, de spécifiquement français. Une
explication plausible est sans doute un rejet plus massif qu’ailleurs de la
médecine traditionnelle. Après avoir été pendant longtemps les champions
du monde de la consommation de médicaments, les Français réalisent, au
vu des scandales à répétition de ces dernières années (Mediator, Dépakine,
etc.), qu’on leur a beaucoup menti sur les vertus miraculeuses des cachets
et autres potions qu’on leur faisait ingurgiter. Ce n’est pas un hasard si
nous sommes aujourd’hui en tête dans les classements internationaux de la

80
non-observance des traitements médicamenteux, y compris dans des
domaines, comme la cancérologie, où le pronostic vital est engagé.
Dans ce contexte de défiance et de rejet, toutes les thérapies
alternatives ont le vent en poupe. Celles qui marchent, comme le Jeûne
Actif ou l’ostéopathie, se développent de façon exponentielle. En
revanche, les remèdes de charlatans, souvent prétendument importés
d’Asie, passent généralement à la trappe après avoir attiré quelques gogos.

81
Recette n°13
Contre les maladies cardiovasculaires
le Jeûne Actif ton meilleur atout sera

82
Les facteurs de risques cardiovasculaires (diabète 2, hypertension
artérielle, dyslipidémie) concernent en France plus de 60 % de la
population. Un actif (18-65 ans) sur deux présente au moins un de ces
facteurs de risque, un sur six deux et un sur trente trois. Ces valeurs
explosent logiquement au-dessus de 65 ans. Ces maladies sont pendant très
longtemps parfaitement asymptomatiques, ce qui veut dire qu’on n’en
souffre pas à proprement parler. En revanche, leurs complications sont
redoutables.
L’exemple de l’hypertension artérielle (HTA) est probablement le
plus parlant : en France métropolitaine, on estime à 31 % la prévalence des
18-74 ans. Son caractère asymptomatique se reflète dans l’importante
proportion d’hypertendus non diagnostiqués (environ 50 %). Les
complications de cette maladie sont légion : les AVC, dont l’HTA est le
principal facteur de risque selon l’OMS, a maladie coronaire, l’infarctus,
l’insuffisance cardiaque, l’insuffisance rénale, etc.
Ainsi, une personne souffrant d’une hypertension même modérée
(155-95) présente un risque de 75 % plus élevé de réaliser un accident
coronaire à dix ans et un risque multiplié par plus de 2 de décéder dans
l’année des suites d’une maladie cardiovasculaire qu’une personne ayant
une tension normale. Ces chiffres augmentent considérablement en cas de
pressions plus élevées. Il en est de même pour le diabète de type 2, ou les
troubles du cholestérol.
Pour aller plus loin, notons que la probabilité de présenter une
complication cardiovasculaire est encore plus élevée lorsque ces risques se
cumulent : ainsi, un individu associant une hypertension légère et un
diabète voit son risque de développer une maladie coronaire à dix ans
multiplié par 1,75, et par 4,5 si à ces deux pathologies s’ajoute une
dyslipidémie (excès de mauvais cholestérol) même modérée. Les chiffres
sont encore plus parlants lorsqu’il s‘agit de comparer les risques de
décéder dans l’année des suites d’une maladie cardiovasculaire : quelqu’un
qui présente ces trois facteurs de risque voit alors cette probabilité
multipliée par 14,5 par rapport à une personne sans risque. Le tabac,
associé à un ou plusieurs des facteurs de risque évoqués ci-dessus, est
considérablement aggravant.

83
Comme nous l’avons déjà vu, les personnes qui souffrent de ces
maladies sont traitées à vie avec des médicaments aux effets secondaires
redoutables (notamment dans le cas des statines), ce qui conduit à des taux
d’observance des traitements d’à peine 50 % et à une proportion élevée de
complications graves. Ces maladies nécessitent donc une prise en charge
basée sur un modèle fondamentalement différent du modèle curatif
prédominant aujourd’hui.
Une approche efficace devra être centrée sur l’individu,
anticipatrice (du fait de l’absence fréquente de symptômes de ces
maladies), et faire intervenir différents types d’acteurs. Cette approche part
du postulat qu’il n’est plus licite d’intervenir lors de la dernière phase,
comme c’est le plus souvent le cas avec la médecine actuelle, mais qu’il
importe de remonter le cours de la maladie pour agir bien plus en amont.
La pratique médicale est donc vouée à se révolutionner progressivement
pour passer d’un modèle curatif à un modèle centré sur la prévention et la
personnalisation de la prise en charge.
Les connaissances ont aujourd’hui atteint un niveau de maturité
élevé sur les sujets relatifs à la sphère cardiovasculaire. De nombreux
scores prédictifs (Framingham, SCORE, etc.) ont été validés sur des
cohortes nombreuses. L’influence du mode de vie et de l’hérédité d’un
individu sur son risque cardiovasculaire es tégalement bien documentée.
En outre, comme on l’a vu dans la Recette n°2, les technologies permettant
d’obtenir les indicateurs pertinents sont de plus en plus faciles
d’utilisation. L’ensemble de ces éléments autorise à envisager la
dimension prédictive de la prise en charge de ces maladies au travers d’un
simple questionnaire complété par quelques prises de mesures réalisables
par soimême. Ce questionnaire doit, au-delà de l’état de santé du patient,
donner des informations sur son environnement, son hérédité, son hygiène
de vie, etc., afin d’adapter les actions proposées à sa situation réelle.
Nous avons vu que l’utilisation d’Internet et des appareils
connectés d’automesure telle que nous l’avons exposée dans notre Recette
n°2 est un facteur clé de succès de cette nouvelle approche de prise en
charge des facteurs de risque cardiovasculaires. Quel impact le jeûne peut-
il avoir sur ces maladies ? Mme Wilhelmi de Toledo, médecin et directrice
de la clinique Buchinger, m’a expliqué, lors d’un entretien que nous avons
eu en décembre 2016, que les résultats étaient fonction de l’avancement de
la maladie. Lors d’un jeûne long (deux semaines ou plus), le taux de sucre
dans le sang baisse de manière relativement spectaculaire pour tous les
jeûneurs. Je ne suis pas diabétique mais j’avais pu m’en rendre compte dès
mon premier séjour : en dix jours, mon taux de sucre était passé de 100

84
mg/dl à 63 mg/dl !
Différents cas de figure sont observés. Des patients à un stade peu
avancé de la maladie peuvent cesser tout traitement médicamenteux s’ils
adaptent a minima leur mode de vie après la fin du jeûne. Ceux qui sont à
un stade plus avancé peuvent à tout le moins réduire les doses de leurs
traitements et donc les effets secondaires associés. Mme Wilhelmi de
Toledo a même évoqué des cas de patients insulinodépendants ayant pu
arrêter tout traitement après un jeûne long et une remise en question en
profondeur de leurs habitudes alimentaires et de leur activité physique. Ces
cas remettent en cause le dogme de la médecine “scientifique” selon lequel
l’insulinodépendance est irréversible.
L’effet sur les triglycérides est également spectaculaire. J’étais
arrivé en juillet 2016 à Buchinger avec un taux relativement élevé, qui a
très fortement baissé en dix jours pour revenir dans la fourchette basse de
la norme. Idem en décembre. En revanche, je n’ai pas noté d’évolution
significative au niveau du cholestérol, sans doute parce que le mien est
d’origine familiale et varie peu en fonction du poids. La logique voudrait
que le cholestérol lié au mode de vie évolue dans le même sens que la
glycémie et les triglycérides.
Pour l’hypertension, les résultats sont encore bien plus
impressionnants. Une personne en hypertension sévère peut, après un
jeûne de deux semaines ou plus, revenir à des valeurs normales et s’y
stabiliser durablement moyennant quelques aménagements dans son mode
de vie, en réduisant notamment significativement sa consommation de sel.
Ce point n’est pas contesté, et au-delà des statistiques très positives
affichées par la clinique Buchinger, une littérature scientifique
internationale fournie existe sur le sujet.
Il est donc possible avec le jeûne d’éviter les maladies
cardiovasculaires avant qu’elles ne soient installées ou de réduire, voire de
supprimer, les traitements médicamenteux quand elles le sont déjà. Pour
cela il faut prolonger les effets du jeûne initial et ne pas replonger dans ses
errements passés. La meilleure manière d’y parvenir est d’intégrer
durablement dans son mode de vie un jeûne intermittent.
Ce jeûne intermittent peut prendre différentes formes. Le jeûne dit
de seize heures consiste à sauter systématiquement un repas et à
s’alimenter normalement pendant les suivants. Aux Etats-Unis, il est
recommandé de supprimer le petit déjeuner, très gras et sucré dans ce pays
(œufs, bacon, céréales riches en sucre, etc.). En Europe, l’impasse sur le
dîner est une alternative que je vois se développer de plus en plus dans

85
mon entourage et qui est tout aussi efficace.
Une autre forme est un jeûne hebdomadaire, d’une ou deux
journées, selon la situation et les objectifs de la personne. Les habitudes
alimentaires ne doivent pas changer pendant les autres jours. Cette forme
serait tout aussi efficace que la précédente, mais peut-être plus difficile à
mettre en œuvre pour des raisons de sociabilité.
Il en existe d’autres, souvent des combinaisons ou des variantes
de celles qui viennent d’être décrites. A chacun de trouver la formule qui
lui convient le mieux et qui lui permet d’atteindre les objectifs qu’il s’est
fixés. J’ai testé pendant quelques semaines une combinaison avec trois
jeûnes de seize heures et une journée de jeûne complète par semaine, c’est
parfaitement supportable et gérable sur le plan social et on parvient ainsi à
stabiliser durablement les effets positifs d’un jeûne long.
Une dernière remarque, qui vaut pour tous les jeûnes mais plus
particulièrement ceux dont l’objectif principal est la prévention des risques
cardiovasculaires : un jeûne est d’autant plus efficace qu’il est actif. Je l’ai
testé pendant mes deux séjours à Buchinger où, en pratiquant quatre heures
de sport par jour, je n’ai eu, à l’exception de coups de pompe anodins,
aucune sensation de fatigue. L’activité physique est un formidable coupe-
faim, qui permet d’accélérer le recours par l’organisme à ses réserves de
lipides, et de protéger ainsi son stock de protéines, donc sa masse
musculaire.
Privilégiez les sports d’endurance, marche, course lente, natation,
vélo, etc. Evitez les efforts violents, jeûne et gonflette ne peuvent pas faire
bon ménage. Faites-le à votre rythme, en fonction de vos capacités du
moment, mais faites-le. Et buvez abondamment, de l’eau bien entendu, pas
de la bière, les médecins de Buchinger recommandent trois litres par jour,
ce qui ne m’a pas paru excessif. Dans la mesure où cette forte
consommation d’eau peut vous déminéraliser, je vous suggère également
une petite cure d’oligoéléments en sortie de jeûne pour compenser.

86
Recette n°14
Contre le cancer du Jeûne Actif un allié
tu te feras

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Deux études menées par les scientifiques de l’Université de
Californie du Sud (USC), sous la direction du professeur de biologie
Valter Longo, sur 18 patients cancéreux en chimiothérapie, publiées à
quelques jours d’intervalle, en juillet 2016, dans les revues Cancer Cell et
BMC Cancer, ont montré qu’un jeûne de trois jours permettait de
régénérer complètement le système immunitaire.
Les promoteurs de ces études affirment que cette découverte
pourrait être particulièrement bénéfique pour ceux dont le système
immunitaire est endommagé, tels que les patients cancéreux sous
chimiothérapie. Elle pourrait aussi aider les personnes âgées dont le
système immunitaire devient moins efficace.
Selon Valter Longo et son équipe, le jeûne donne le feu vert aux
cellules souches pour s’activer et commencer à proliférer jusqu’à
reconstruire l’ensemble du système immunitaire. Parallèlement, le corps se
débarrasse des cellules vieilles, endommagées et inefficaces. Dans le cas
d’un système immunitaire fortement détérioré par la chimiothérapie ou le
vieillissement, les cycles de jeûne peuvent littéralement en générer un
nouveau.
En fait, jeûner trois jours contraint le corps à consommer ses
réserves de glucose et de graisses, ce qui entraîne l’élimination d’une
quantité importante de globules blancs. Quand il est privé de nourriture, le
corps essaie d’économiser l’énergie dépensée. Pour cela il recycle un
grand nombre de cellules du système immunitaire qui ne sont pas
indispensables, notamment celles qui sont abîmées. Ainsi, pendant le
jeûne, le nombre de globules blancs baisse fortement, puis augmente
rapidement quand la personne s’alimente à nouveau.
L’équipe qui a conduit l’étude a par ailleurs découvert que le
jeûne prolongé réduit également l’enzyme PKA, impliquée dans le
vieillissement, qui augmente le risque de cancer et favorise la croissance
tumorale. Durant les tests, les bénévoles ont été invités à jeûner
régulièrement entre deux et quatre jours sur une période de six mois.
Un jeûne pendant les 72 heures précédant le traitement
chimiothérapique en diminuerait également les effets secondaires. Selon

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Tanya Dorff, professeur adjoint de médecine clinique à l’USC, “les
résultats de cette étude suggèrent que le jeûne peut atténuer certains des
effets nocifs de la chimiothérapie”.
Le Pr Longo n’en est pas à son coup d’essai et les études publiées
en 2016 sont dans la droite ligne de ses travaux précédents. Dans une étude
publiée par la revue Aging en 2010, il avait essayé, sur 10 patients
volontaires diagnostiqués avec différents types de tumeurs malignes, des
cycles de jeûne avant (48-140 heures) et/ou après (5-56 heures) la
chimiothérapie. Aucun de ces patients, qui avaient reçu une moyenne de
quatre cycles de chimiothérapie différente en combinaison avec le jeûne,
n’avait rapporté d’effets secondaires importants causés par le jeûne lui-
même, si ce n’est la faim et des étourdissements.
Chez ces patients, le jeûne n'avait pas empêché la réduction
induite par la chimiothérapie du volume tumoral ou des marqueurs
tumoraux. Les volontaires avaient ressenti une diminution de la fatigue, de
la faiblesse et des effets gastro-intestinaux secondaires de la
chimiothérapie. Les 10 cas présentés dans cette étude montraient déjà que
le jeûne en combinaison avec la chimiothérapie était faisable, sûr, et qu’il
permettait de réduire les effets secondaires.
Dans une étude publiée en février 2012 dans la revue Science
Translational Medicine , le Pr Longo a fait valoir que le jeûne seul permet
de traiter efficacement une majorité de cancers chez des animaux de
laboratoire, y compris les tumeurs cancéreuses provenant de cellules
humaines. Selon cette étude, sur huit types de cancers observés chez des
souris de laboratoire, cinq ont réagi aussi bien au jeûne qu'à la
chimiothérapie. L’étude a aussi mis en évidence le fait que des cycles de
jeûne sans chimiothérapie peuvent ralentir un développement du cancer du
sein, du mélanome et d'une tumeur du cerveau. Dans certains cas, le jeûne
est aussi efficace que la chimiothérapie
Cette étude révèle que le fait de réduire la quantité de nourriture
consommée ralentit la croissance et la propagation du cancer. Et qu’à
chaque fois, la combinaison de cycles courts de jeûne avec une
chimiothérapie est soit plus efficace, soit nettement plus efficace que la
chimiothérapie seule. Ainsi, de multiples périodes de jeûne combinées à la
chimiothérapie guérissent 20 % de certains cancers très agressifs chez les
souris de laboratoire. Le taux de guérison grimpe à 40 % pour les souris
atteintes de ces mêmes cancers mais moins étendus, tandis qu'aucune
souris n'a survécu traitée uniquement avec la chimiothérapie.
Il faudra sans doute encore de longues années pour que la

89
communauté scientifique valide formellement l’introduction du jeûne dans
la boîte à outils du traitement des cancers, mais le mouvement est
enclenché. De nombreux spécialistes commencent même à admettre que
l’impact positif du jeûne sur les chimiothérapies relève du bon sens.
L’argument généralement avancé est que, lorsque l’apport en nourriture est
stoppé, les cellules saines ont la possibilité de passer en mode “urgence” et
de s’alimenter avec les corps cétoniques produits par le foie à partir du
stock de graisses de l’organisme. Les cellules cancéreuses en revanche
n’ont pas cette possibilité et en l’absence de sucre elles se retrouvent
rapidement en situation de stress et sont ainsi plus vulnérables aux
substances toxiques de la chimiothérapie. On retrouve donc une logique
très proche de celle du Régime 4M.
Certains spécialistes des deux côtés de l’Atlantique commencent à
évoquer l’intérêt de jeûnes intermittents dans le traitement du cancer. Une
équipe allemande travaille sur un scénario 5+2, c’est-à-dire cinq jours
d’alimentation normale et deux jours de jeûne par semaine. Une équipe
américaine du National Institute of Health (NIH) planche, elle, sur un
scénario de jeûne de seize heures, c’est-à-dire la suppression d’un repas
par jour, a priori le petit déjeuner. Le recul est encore insuffisant pour
apprécier l’intérêt de ces scenarii, mais ils montrent que le lobbying
acharné de Valter Longo commence à payer et que la communauté
scientifique envisage enfin que le jeûne puisse être intégré à moyen terme
dans les protocoles de traitement du cancer.
Le pionnier de l’utilisation du jeûne dans le traitement du cancer,
bien avant Valter Longo, est un naturopathe autrichien, Rudolph Breuss,
né en 1899 et mort en 1990. Il a mis au point une cure, dite “de Breuss”,
qui consiste en un jeûne très strict de 42 jours pendant lesquels le patient
doit arrêter tous ses traitements et se nourrir uniquement d’une boisson
dont il est l’inventeur et de tisanes. Cette cure est unanimement
condamnée dans la mesure où elle met en danger la vie de patients déjà
très affaiblis par la maladie en les privant de toute nourriture pendant une
période très longue. D’une manière générale, la piste des jeûnes longs, qui
donnent des résultats intéressants pour les affections neuropsychiatriques
et les maladies inflammatoires, n’est pas considérée comme une option
crédible en cancérologie.

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Recette n°15
Combiner astucieusement le Jeûne Actif
et le Régime 4M tu tenteras

91
92
Dans son essai paru en août 2016 Le secret des peuples sans
cancer. Approche et traitements complémentaires de 55 cancers , le
médecin ethnologue Jean-Pierre Willem, pionnier en France du jeûne
thérapeutique, constate qu’il existe des régions du monde où les maladies
des pays développés dites “maladies de civilisation”, comme les cancers et
les maladies cardiovasculaires, sont très peu répandues. En vivant chez les
Hounzas du Karakoram au Cachemire, les Abkhazes du Caucase russe, ou
chez les habitants de la Vallée des centenaires en Équateur, il a remarqué
que tous ces peuples ont un point en commun : ils suivent à un moment de
l’année une diète alimentaire restrictive sévère qui met leur organisme en
acidose. C’est selon lui ce jeûne qui les préserve des cancers.
Ce point de vue est d’autant plus intéressant que, étant peu
probable que ces ethnies soient de grandes consommatrices de baguettes,
viennoiseries, pâtes, pizzas, glaces et autres concentrés de glucides, elles
doivent avoir au quotidien un régime beaucoup plus proche du Régime 4M
que du modèle nutritionnel hyper-glucidique qui est la norme dans les pays
développés. Si l’on suit Jean-Pierre Willem dans son raisonnement, cela
signifie que ces populations cumulent Régime 4M et Jeûne Actif. Et donc
que ces deux piliers ne sont pas antagonistes mais bien complémentaires.
Le modèle ultime serait donc la combinaison d’un mode
alimentaire courant privilégiant les graisses et les protéines et d’un jeûne
long une fois par an. Il est probable que l’objectif de ce jeûne est de
pousser l’organisme dans ses derniers retranchements pour le rendre plus
résistant aux agressions extérieures et lui permettre d’éliminer
naturellement ses cellules abîmées ou malades. Les populations pratiquant
ce type de prévention sont restées d’authentiques Sapiens puisqu’elles ont
réussi à conserver les réflexes d’autodéfense de leurs ancêtres qui vivaient
dans les cavernes.
Il est peu plausible que l’homme moderne qui vit et travaille dans
des immeubles surchauffés en hiver et surclimatisés en été soit prêt à se
plier à un mode de vie aussi dur. Différents scénarios intermédiaires sont
envisageables. Le premier est le statu quo en matière d’habitudes
alimentaires, couplé avec un ou deux jeûnes de dix jours à trois semaines
dans l’année. C’est le scénario qui comporte le plus de risques d’échec et

93
s’apparente le plus à un régime. Un jeûne qui ne s’accompagne pas d’un
changement de mode de vie ne peut avoir que des effets très éphémères.
J’ai rencontré à la clinique Buchinger beaucoup de personnes qui
viennent une fois par an pour une révision générale comprenant perte de
poids, baisse de la glycémie et du cholestérol et remise en forme grâce à la
multiplicité des prestations de bienêtre proposées. Trois mois après leur
sortie, elles ont retrouvé leurs poids, glycémie, cholestérol et mauvaise
condition physique — liés à un mode de vie trop sédentaire — initiaux. Et
rebelote neuf mois après.
Un deuxième scénario est celui du jeûne intermittent, couplé ou
non avec des périodes régulières de jeûne plus long. Le jeûne intermittent
peut être, comme nous l’avons déjà vu, un 6+1, un 5+2 ou un jeûne de
seize heures. Les périodes de jeûne long, s’il y en a, dépassent rarement
dix jours, et c’est d’ailleurs largement suffisant. Même si les habitudes
alimentaires ne sont pas modifiées en profondeur, c’est un modèle efficace
car il intègre, à travers le jeûne intermittent, un vrai changement de mode
de vie.
Un troisième scénario est celui du Sapiens qui applique
strictement les préceptes du Régime 4M mais que le jeûne rebute. A
condition que l’apport en calories soit adapté à l’activité physique, il est au
moins aussi efficace que le précédent car il implique un effort sur la durée
et permet une vraie rupture avec le sucre sous toutes ses formes.
Reste un scénario supplémentaire, celui du jeûne curatif. J’ai
croisé à Buchinger (cf. Recette n°12) des personnes atteintes d’affections
graves, neuropsychiatriques ou inflammatoires pour l’essentiel, et que la
médecine “scientifique” n’arrivait pas à guérir. Pour elles, le jeûne est
souvent ressenti comme la dernière chance de s’en sortir. Il est en général
long (trois, voire quatre semaines), les diètes courtes n’ayant pas d’impact
réel sur les affections concernées. S’il est couronné de succès, ce qui arrive
fréquemment, elles reviennent. Dans le cas contraire, elles cherchent
d’autres remèdes miracles.
Pour ma part, après quelques tâtonnements, j’ai opté pour la
formule suggérée par Jean-Pierre Willem, avec les nuances déjà exposées
(cf. Recette n°8). J’ai la chance de ne pas aimer le sucre, et de l’aimer de
moins en moins au fil du temps. Je suis donc le candidat idéal pour le
Régime 4M. En même temps, j’ai été extrêmement séduit par l’effet
dynamisant, presque incroyable, des jeûnes longs. Je vais donc m’orienter
vers une formule comprenant le Régime 4M, un jour de jeûne par semaine
et trois semaines de jeûne chaque été. Et je m’autoriserai une entorse par

94
semaine pour ne pas être contraint de renoncer complètement à certains
plaisirs culinaires, toujours du salé, auxquels je tiens. Pendant la
préparation aux épreuves sportives (marathon, triathlon, trail, etc.), dont je
raffole, j’appliquerai le protocole que j’ai mis au point après le marathon
de Berlin 2015 et que j’ai déjà décrit (cf. Recette n°10).
En résumé, la formule idéale est celle d’un couplage entre Régime
4M et Jeûne Actif, mais elle risque de faire peu d’adeptes. Les scénarios
dégradés les plus efficaces sont ceux qui impliquent un effort sur la durée,
c’est-à-dire un jeûne intermittent permanent, couplé ou non avec des
périodes de jeûne plus long, et un Régime 4M permanent. Le choix entre
les deux est purement personnel, car les critères sont multiples et
complexes. A chacun de se déterminer en fonction de ses propres
appétences et contraintes.

95
Le quatrième pilier de la smartsanté :
la Méthode Bravo

96
La sédentarité croissante des populations des pays développés
explique tout autant que la suralimentation l’explosion de l’obésité et des
maladies chroniques. Aux Etats-Unis, l’épidémie d’obésité des cinquante
dernières années est étroitement corrélée avec l’évolution du nombre
d’automobiles par habitant. L’activité physique d’une grande partie d’entre
nous se limite à un peu de marche et au match de foot sur BeIN Sports, ce
qui est nettement insuffisant.
La Méthode Bravo est le pilier activité physique de la smartsanté.
Elle fait clairement la distinction entre activité physique et sport. Si courir
un marathon n’est pas à la portée de tout le monde, en revanche, remplacer
le métro par la marche, prendre l’escalier plutôt que l’ascenseur, faire
quelques exercices simples tous les matins, courir une ou deux fois par
semaine, tout un chacun, ou presque, peut s’y risquer. C’est cette
approche, accessible au plus grand nombre, qui peut sauver nos sociétés et
les empêcher de devenir un immense hospice peuplé de malades
chroniques et de vieillards séniles et grabataires.
Dans le cadre de la Méthode Bravo, la prévention des maladies
chroniques, notamment les affections cardiométaboliques, passe
essentiellement par des exercices d’endurance (marche rapide, course

97
lente, natation, vélo) qui font travailler le cœur à un rythme permettant à
l’organisme de brûler ses graisses excédentaires, notamment abdominales.
Le renforcement musculaire et les exercices d’assouplissement
accompagnent utilement ce travail d’endurance. La prévention du cancer
obéit à une logique différente mais le même type d’activités est bénéfique
dans son cas aussi.
Lorsque la prévention échoue et que la maladie s’installe,
l’activité physique doit impérativement être maintenue. Elle est un facteur
essentiel de stabilisation pour les diabétiques et améliore considérablement
le pronostic de nombreux cancers si elle est pratiquée régulièrement et
avec méthode. Là encore, ce sont les exercices d’endurance qui sont les
plus importants, avec un accompagnement léger de musculation et
d’assouplissement. Pour certains cancers, notamment celui de la prostate,
la musculation pourrait être plus au centre de la stratégie d’activité
physique. La recherche avance lentement sur ces sujets, compte tenu des
faibles moyens qui lui sont alloués, et il est probable que des stratégies
plus ciblées seront identifiées dans les prochaines années.
Nous allons progressivement gérer notre activité physique avec
notre seul smartphone, enrichi de quelques modules supplémentaires
permettant, par exemple, de procéder sans assistance médicale à des bilans
sanguins extrêmement complets. La plupart des milliers d’applications et
dizaines d’objets connectés vont être remplacés par des solutions
propriétaires des fabricants de smartphones et des plates-formes dont le
métier sera de collecter, d’interpréter et de stocker, dans des
environnements hautement sécurisés et à l’accès strictement réglementé,
les données de santé sensibles des utilisateurs.

98
Recette n°16
Dans la lignée de tes ancêtres Sapiens
un nomade tu redeviendras

99
100
Non contents de nous alimenter de plus en plus mal, nous sommes
aussi de plus en plus sédentaires et réfractaires à l’effort physique. Les
quelques dizaines de mètres quotidiens jusqu’au métro ou de notre parking
jusqu’au bureau sont pour le plus grand nombre le maximum envisageable.
Dans nos tours climatisées, les queues devant les ascenseurs sont
interminables, alors que les escaliers sont juste réservés aux pannes et
autres urgences. L’impact de cette paresse croissante sur notre santé est
dévastateur et nous n’en prenons conscience que très progressivement.
A titre d’exemple, les chercheurs du NIH ont montré que si aux
Etats-Unis les ascenseurs ne s’arrêtaient qu’au troisième étage, la
prévalence de l’obésité réduirait de 25 %. Aux Etats-Unis aussi, l’épidémie
d’obésité est parfaitement corrélée avec l’évolution du nombre
d’automobiles par habitant. Les variations du cours du pétrole n’ont pas
simplement une incidence sur le pouvoir d’achat des Américains, elles ont
aussi, si l’on en croit de très sérieux magazines comme le Time , un impact
significatif sur leur tour de taille.
Les Emirats arabes unis battent tous les records en termes
d’obésité et de diabète. 25 % de la population est diabétique et 70 % des
plus de 50 ans sont obèses. Un mode d’alimentation très sucré explique en
partie cette situation catastrophique. Mais l’absence d’activité physique est
aussi clairement en cause. La première fois que je suis allé à Dubaï, il y a
quelques années, j’ai eu pendant les trois premiers jours un sentiment de
malaise en traversant la ville en voiture. Quelque chose clochait mais je
n’arrivais pas à comprendre quoi. Le quatrième jour, j’ai réalisé : pour la
première fois de mon existence, je me trouvais dans une ville sans trottoirs.
Personne là-bas ne marche plus de 50 mètres par jour, tout le reste se fait
en voiture.
En France, nous n’en sommes pas là mais, comme nous l’avons
vu dans la Recette n°6, nous ne sommes pas épargnés par l’épidémie
d’obésité qui déferle sur la planète. L’activité physique est de plus en plus
réduite et le mode de vie s’américanise à toute vitesse. Nous avons
heureusement encore vingt ans de retard sur les Etats-Unis, mais si nous ne
faisons rien, nous finirons par les rattraper.

101
Peut-on sérieusement envisager de revenir en arrière et de
réinsuffler un zeste de nomadisme dans une société qui a visiblement fait
une croix dessus ? Cela prendra du temps bien sûr mais nous n’aurons en
réalité pas le choix. Nous avons vu dans la Recette n°1 que le mode de vie
explique à 43 % l’état de santé d’une population et représente même plus
de 60 % des facteurs sur lesquels une action est aujourd’hui possible,
c’est-à-dire en excluant le poids de l’héritage génétique.
Il serait donc ridicule d’imaginer que l’on puisse ne fût-ce
qu’enrayer la croissance exponentielle de l’obésité et des maladies
chroniques par la mise au point de médicaments miracles. Les tentatives
ont été jusqu’ici vaines et beaucoup de molécules présentées comme des
avancées majeures ont dû être précipitamment retirées du marché en raison
de leurs effets secondaires dévastateurs.
Il faut donc agir en priorité sur le mode de vie. Or l’activité
physique en est un facteur essentiel, qui plus est étroitement lié aux modes
d’alimentation.
Nous avons vu dans la Recette n°6 que l’apport calorique d’un
Américain moyen est passé de 2 109 calories en 1960 à 2 568 en 2010, ce
qui explique l’impressionnante prise de poids de la population américaine
sur la période (13,5 kilos en moyenne). Ce que l’on oublie en découvrant
cette statistique est que l’apport calorique moyen aux Etats-Unis était
d’environ 3 200 calories il y a un siècle et que les obèses étaient aussi rares
là-bas à l’époque que les léopards en Somalie aujourd’hui. Comment
expliquer ce paradoxe ? Par l’activité physique tout simplement. En ce
temps-là, les Américains se déplaçaient le plus souvent à pied et avaient
dans leur grande majorité des métiers manuels physiquement astreignants,
que l’on qualifierait de pénibles aujourd’hui.
Le corollaire de ce qui précède est simple : en réalité nous ne
mangeons pas trop, nous mangeons trop par rapport à notre activité
physique. Prenons l’exemple d’un homme mesurant 1,80 m et pesant 100
kilos, donc en surpoids manifeste, qui ne pratique aucune activité
physique. Faites-le marcher trente à quarante minutes tous les jours
pendant un an, et sans modification de son régime alimentaire il aura perdu
8 à 10 kilos. En couplant cette activité minimale avec un Régime 4M
adapté à ses efforts physiques, il pourrait fondre de manière encore plus
spectaculaire. C’est moins rapide qu’un jeûne mais peut-être encore plus
efficace sur la durée.
La Méthode Bravo est le pilier activité physique de la smartsanté.
Elle propose une approche radicalement différente de l’effort physique.

102
Remplacer le métro par la marche, prendre l’escalier plutôt que
l’ascenseur, faire quelques exercices simples tous les matins, courir une ou
deux fois par semaine est à la portée de tout un chacun ou presque. A
condition d’être moins pressé et donc, d’une certaine manière, moins
stressé. Plus qu’une discipline, la Méthode Bravo est un mode de vie
reposant sur un rapport différent au temps.
Mise en pratique régulièrement et intelligemment dosée, elle
réduit tous les facteurs de risque, sans exception. Hors antécédents
familiaux désastreux, elle permet, couplée avec l’alimentation saine et
équilibrée proposée dans le Régime 4M, de durer très longtemps dans de
bonnes conditions et de réduire radicalement son budget de frais de santé
tout au long de la vie.
La Méthode Bravo intègre aussi une approche plus intensive de
l’activité physique à travers une pratique sportive régulière et astreignante.
Rien ne prouve que cette approche soit meilleure pour la santé que celle,
plus light, exposée ci-dessus, et il se pourrait même que ce soit l’inverse.
Mais la pratique intensive d’un ou de plusieurs sports comporte une
dimension de plaisir qui est essentielle pour certaines personnes, dont je
fais partie. Et comme le plaisir n’a pas de prix, il vaut tous les sacrifices.
Le risque pour les sportifs est de confondre activité physique et
sport et de vivre dans la croyance que faire du sport dispense de tout effort
le reste du temps. Quelle tragique erreur ! Faire tous ses trajets en voiture
ou transports en commun, prendre systématiquement l’ascenseur au lieu de
l’escalier fait de la plupart des sportifs qui ont zéro activité physique au
travail au mieux des sportifs sédentaires, qui risquent d’être un jour sujets
au surpoids, au diabète et/ou à l’hypertension artérielle. 80 % des anciens
rugbymen professionnels sont obèses dix ans après la fin de leur carrière...

103
Recette n°17
Les sports d’endurance qui te protègent des
maladies chroniques toujours tu préféreras

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105
Beaucoup de gens confondent sport et effort violent. Ils imaginent
que, pour perdre du poids, il faut en baver, lever des tonnes de fonte, finir
chaque séance en nage et au bord de l’évanouissement, en bref pratiquer
une forme de culturisme. D’innombrables émissions de télé font la
promotion de programmes ultraviolents censés faire perdre un maximum
de poids en un minimum de temps. C’est du charlatanisme dont le seul
objectif est de plumer des naïfs. La vérité est que les exercices qui
permettent de perdre durablement du poids et de muscler son cœur sont
ceux que l’on effectue le plus longtemps possible à un rythme cardiaque
modéré, c’est-à-dire les exercices d’endurance, marche rapide, course
lente, vélo de randonnée ou natation. La gonflette, c’est bon pour draguer,
pas pour rester en bonne santé.
La marche rapide est la reine des sports d’endurance, dans la
mesure où elle s’exerce à un rythme cardiaque bas et sans à-coups.
Pratiquée régulièrement, c’est la meilleure prévention possible contre les
risques cardiovasculaires. C’est aussi le moyen le plus efficace de perdre
du poids sur la durée dès lors qu’elle s’effectue dans les plages de rythme
cardiaque où l’on brûle essentiellement des graisses. Elle peut se pratiquer
partout et ne demande qu’un investissement minimal.
J’habite à 6 km de mon bureau. Quand j’ai le temps et que la
météo s’y prête, je fais le chemin à pied d’un pas vif avec des chaussures
de marche et un tee-shirt. Mes chaussures de ville et ma chemise sont dans
mon sac à dos et je me change en arrivant au travail. Lorsque je suis plus
bousculé, je me contente de m’arrêter à trois ou quatre stations de métro de
mon bureau, ce qui est mieux que rien.
La course à pied est un exercice fabuleux. Elle agit comme un
euphorisant en permettant à l’organisme de sécréter de l’endorphine, qui
est un puissant antidépresseur. Courir un marathon est un exercice
épuisant, qu’on termine en ayant mal partout quel que soit son niveau, on
ne peut plus descendre d’escaliers pendant trois ou quatre jours après, et
pourtant il y a de plus en plus de marathoniens chaque année. Cela traduit
un besoin croissant de se dépasser, d’aller au bout de ses forces. Un
marathon, préparation incluse, procure des sensations qui ne sont pas très
éloignées de celles d’un jeûne.

106
Le vélo a l’avantage de moins solliciter l’organisme que la course
à pied. C’est aussi un excellent exercice d’endurance, qui peut se pratiquer
à un rythme cardiaque assez bas. J’ai cependant du mal à comprendre la
logique de ceux qui s’y adonnent dans Paris, au milieu des pots
d’échappement et constamment à la merci d’un automobiliste distrait. Il y
a autour de Paris de fabuleux domaines forestiers qui sont le paradis des
amateurs de VTT, mais il faut les atteindre et ce n’est guère possible que le
week-end. Ailleurs en France, en dehors des grandes mégapoles, c’est une
activité idéale pour ceux qui n’aiment pas la course ou qui ont des
problèmes aux genoux, ce qui est fréquent après 45 ans, notamment chez
les anciens coureurs.
La natation est mon sport fétiche. Elle est parfaite à tous égards,
moins traumatisante que tous les autres sports précités, pouvant être
pratiquée à tous les rythmes, faisant travailler tous les muscles. Elle a un
gros inconvénient, le très faible taux d’équipement en piscines en France.
Si on n’a pas la chance d’habiter à proximité de l’une d’entre elles, c’est le
parcours du combattant.
La pratique régulière d’exercices de musculation pour
accompagner un sport d’endurance est fortement recommandée. Pas
besoin de salle de sport suréquipée. Quelques minutes par jour de chaise
(rester assis contre un mur sur une chaise virtuelle) permettent de se faire
des cuisses en acier en quelques mois, excellent avant le ski, et il ne faut
guère qu’un mur pour s’entraîner. Les pompes et autres exercices
abdominaux et de gainage se pratiquent à même le sol, sans équipement,
les squats aussi. L’acquisition d’un tapis en mousse et d’un medicine ball
d’un poids adapté à ses capacités est le seul investissement utile, sans être
indispensable.
Les exercices de flexibilité (étirements du bas du dos ou encore
des muscles ischio-jambiers par exemple), qui consistent à s’étirer en
douceur pour allonger les muscles, sont également recommandés. Ils
procurent plus de souplesse aux articulations, augmentent l’amplitude des
mouvements et permettent ainsi de faire les gestes de la vie de tous les
jours plus facilement. Ils aident à détendre les muscles et à diminuer les
risques de blessures. Certains types d’activité physique comme le yoga
peuvent intégrer à la fois des exercices de musculation et de flexibilité.
Une pratique régulière, qui ne comprend pas le match de foot sur
BeIN Sports, est primordiale. Il vaut mieux plusieurs petites séances
qu’une grosse, car si elles se déroulent à une intensité raisonnable, cela
réduit significativement le risque de blessure. Mais aussi parce qu’en
endurance, la régularité permet normalement de constater des progrès

107
rapides, et que cette gratification est essentielle pour tenir sur la durée.
Dernière recommandation, ne pas être monosport et diversifier sa
pratique. Laissez ça aux professionnels, pour un amateur c’est trop risqué.
En course à pied, par exemple, personne n’est à l’abri d’une blessure qui
contraint à se mettre au repos plus ou moins longtemps. J’en ai fait
l’expérience en 2013, en me blessant quelques semaines avant le marathon
de Paris. Il m’a fallu deux ans pour vaincre des tendinites au mollet
particulièrement tenaces et pouvoir recommencer à courir. J’ai passé de
très mauvais moments de grosse déprime avant de me résoudre à reprendre
la natation sur une base régulière. Ça m’a sauvé, et depuis, la natation fait
partie intégrante de mon programme de préparation d’un marathon.

108
Recette n°18
Le diabète grâce à l’activité physique tu géreras

109
L’activité physique d’un diabétique détecté à un stade peu avancé
de la maladie ne diffère en rien de celle d’une personne en bonne santé,
tout au plus doit-il, lors d’efforts longs, avoir sur lui un complément
glucidique permettant de faire face à une hypoglycémie éventuelle.
Couplée avec une alimentation appropriée, elle est, en accompagnement
d’un traitement médical adapté, la garantie d’une stabilisation durable.
Ce point est essentiel. La communauté médicale s’accorde sur le
fait qu’une fois installé, un diabète se soigne mais devient chronique, ce
qui signifie qu’il ne guérit pas. La clinique Buchinger fait état de
rémissions, il n’y a pas de raisons de mettre en doute ses affirmations,
mais reconnaissons qu’il s’agit pour le moment de cas exceptionnels.
L’objectif, une fois le diabète installé, est donc de le stabiliser le plus tôt
possible. Les assureurs santé américains, très en avance sur nous en
matière de gestion du risque, considèrent qu’un diabétique stabilisé
représente un risque qui n’est pas sensiblement différent de celui d’une
personne en bonne santé. Les chiffres de l’Assurance maladie en France
vont dans le même sens : le coût du diabète dans sa globalité est certes
élevé, mais l’essentiel de ce coût concerne les complications graves de
personnes non stabilisées.
Vouloir stabiliser un diabétique uniquement avec un traitement
médicamenteux est utopique. On a pendant des décennies maintenu les
gens dans l’illusion que la médecine moderne pouvait se substituer au
mode de vie et les dispenser du moindre effort. Le résultat est édifiant, on
a créé ainsi un monde de personnes en surpoids et de malades chroniques.
Une fois dans ce cycle de chronicité, la priorité n’est donc pas de se
précipiter à la pharmacie du coin de la rue, mais de retrouver un mode de
vie équilibré, combinant jeûne, alimentation adaptée et, last but not least,
activité physique intense et régulière. A ce stade, c’est encore possible.
Si en revanche vous vivez avec le diabète depuis plusieurs années
et que commencent à apparaître des complications chroniques liées à cette
maladie, telles que des problèmes cardiaques, neurologiques ou autres, ou
encore que vous êtes sédentaire de longue date, consultez votre médecin
avant d’entreprendre un programme d’activité physique plus intense que la
marche. Il procédera à une évaluation médicale : tension artérielle, taux de

110
cholestérol dans le sang, taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) et
glycémie, cœur et système circulatoire, fonction rénale et santé des yeux et
des pieds. Cette évaluation vous permettra de mieux cibler les activités
physiques qui vous conviennent, sachant que les problèmes
cardiovasculaires peuvent rendre dangereuses certaines d’entre elles
d’intensité élevée.
Votre médecin peut également vous conseiller sur le meilleur
moment de la journée pour vos exercices en fonction du type de
médication et du moment de la prise, comme il peut vous aider à ajuster
les doses d’insuline en fonction de l’activité pratiquée.
Les exercices d’endurance d’intensité moyenne, les plus adaptés
pour un diabétique (marche rapide, course lente, vélo, natation), doivent
lui permettre d’avoir un meilleur contrôle sur son poids et donc sur son
diabète. Ils augmentent la dépense d’énergie et, par là même, la quantité de
glucose utilisée par les muscles. Parallèlement, ils diminuent les risques de
complications liées au diabète, comme les maladies cardiovasculaires, les
néphropathies (reins), les rétinopathies (yeux) et les neuropathies
(sensibilité, nerfs).
Il est recommandé de pratiquer un minimum de deux heures et
demie d’activité d’endurance d’intensité moyenne par semaine, réparties
sur au moins trois jours et sans rester inactif plus de deux jours. Ces deux
heures et demie devront être complétées par un maximum d’exercices de
faible intensité (marche au quotidien dans la plupart des cas). Idéalement,
l’activité d’endurance cumulée (intensité moyenne et faible) devrait se
situer autour de dix heures par semaine.
Les exercices de musculation les plus adaptés pour un diabétique
sont ceux qui se pratiquent avec le seul poids du corps, c’est-à-dire sans
soulever de fonte : monter des escaliers, faire des pompes, des chaises et
travailler sur les abdominaux et le gainage notamment. Ils doivent lui
permettre d’améliorer sa force et sa posture. Ils sont un complément
indispensable aux exercices d’endurance. En revanche, les exercices de
musculation intenses, avec des haltères lourds et des appareils, sont
formellement déconseillés.
Il est recommandé de pratiquer des activités musculaires à raison
de deux séances de vingt à trente minutes par semaine, trois si possible.
Les exercices de flexibilité n’ont pas encore démontré leur utilité
dans le cadre de l’activité physique des diabétiques.

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Recette n°19
Contre le cancer de l’activité physique
tu te serviras

112
113
Activité physique et cancer paraissent antinomiques. On a du mal
à imaginer de prime abord que des personnes affaiblies par la maladie et
les traitements puissent faire des efforts physiques, ne fût-ce que de
longues marches. Et pourtant, l’expérience montre que la plupart des
individus atteints d’un cancer sont capables d’un effort physique modéré à
intense et qu’un nombre significatif d’entre elles peuvent pratiquer un ou
plusieurs sports.
Le plus dur est de commencer. Le malade doit se conditionner
pour les premiers efforts, qui sont les plus difficiles. La dimension
psychologique est à ce stade plus importante que la capacité physique. Je
me souviens d’avoir visité il y a une vingtaine d’années une clinique qui
avait développé une méthode avant-gardiste permettant de réduire
significativement la durée de séjour de malades ayant subi de lourdes
interventions cardiaques. La méthode était extrêmement simple. Dès que
les patients convalescents étaient en mesure de se déplacer, on les faisait
déjeuner non pas dans leur chambre mais à la cantine du personnel
soignant. Le fait de se retrouver au milieu de bien-portants les considérant
comme leurs semblables leur permettait de se rétablir beaucoup plus vite.
Pour une personne atteinte d’un cancer, le cheminement doit être
similaire. Elle doit se persuader qu’elle est une personne en bonne santé
qui s’ignore et retrouver le plus rapidement possible une vie normale, avec
une activité physique modérée au début, puis une montée en charge
progressive de semaine en semaine. Pour y parvenir, elle doit idéalement
avoir un accompagnement psychologique. Le rôle de la famille est aussi
très important : il faut qu’elle joue le jeu et ne considère pas le malade
comme un être faible à ménager à tout prix.
Le rythme de la montée en charge et l’activité physique optimale
dépendent de chacun. Il faut savoir écouter son corps et ne pas chercher à
brûler les étapes. Des études menées sur de grandes cohortes de femmes et
d’hommes atteints du cancer colorectal montrent que, pour les femmes,
l’activité d’endurance optimale, surtout de la marche rapide, se situe entre
six et neuf heures par semaine. Pour les hommes, elle est un peu plus
élevée, supérieure à neuf heures.

114
Le jeu en vaut la chandelle. Les chercheurs américains Robert
Newton et Daniel Galvão ont montré qu’une activité physique régulière
améliore de 50 à 60 % les chances de survie des malades atteints d’un
cancer, le plus fort impact ayant été attesté dans les cas des cancers du sein
et du côlon. Les études auxquelles ils font référence portent
essentiellement sur des populations pratiquant régulièrement des activités
d’endurance.
Le cancer entraînant, entre autres effets, une fonte musculaire, la
question de la reconstitution de la masse perdue se pose également. Elle
passe nécessairement par un Régime 4M, avec un apport en protéines
significatif, couplé avec un travail de musculation d’une intensité là aussi
progressive. Des études menées ces dernières années montrent que ce
travail de musculation est un complément très utile aux activités
d’endurance et qu’il améliorerait sensiblement les chances de survie des
malades atteints d’un cancer de la prostate.
Au bout du compte, on s’aperçoit que l’activité physique optimale
d’un malade atteint d’un cancer n’est pas fondamentalement différente de
celle d’un diabétique. Cela peut inspirer deux réflexions. La première est
que tous les organismes malades, quelle que soit l’affection concernée, ont
les mêmes besoins pour ce qui est de la protection du cœur et du maintien
ou de la reconstitution de la masse musculaire. Cette hypothèse est
séduisante car elle paraît tomber sous le sens. Toutefois, l’économiste
américain Steven Levitt, auteur des best-sellers Freakonomics
et SuperFreakonomics et spécialiste de l’application des méthodes de
l’économétrie aux phénomènes de société, a fait remarquer que beaucoup
de théories a priori tombant sous le sens se révélaient fausses après une
analyse plus poussée.
Une seconde observation est que nous n’en sommes qu’aux
balbutiements de la recherche sur l’activité physique des malades
chroniques. Les Prs Newton et Galvão sont des précurseurs dans un
domaine qui a beaucoup de mal à mobiliser des équipes de recherche et
des capitaux que l’on préfère affecter à la mise au point de nouvelles
molécules pouvant rapporter des milliards. Il est effectivement infiniment
moins rentable de faire faire de la marche rapide ou de la musculation à un
malade que de lui administrer une chimiothérapie ciblée dont le coût peut
atteindre des dizaines, voire des centaines de milliers d’euros par an.
Face à des acteurs qui privilégient clairement leurs intérêts
économiques à la qualité de vie des malades, les patients doivent
progressivement apprendre à se défendre. L’objectif essentiel de la
smartsanté dans sa globalité est, rappelons-le, de leur en donner

115
progressivement les moyens. C’est à eux de choisir entre une thérapie
basée sur la nutrition et l’activité physique, qui peut leur faire gagner des
années de vie en bonne santé, et des traitements qui permettent tout au plus
de prolonger, au prix souvent de grandes souffrances, leur espérance de vie
de quelques mois. Ils commencent à le comprendre aujourd’hui, en se
rebellant contre le tout curatif à travers une observance très faible et
déclinante dans le temps des traitements les plus toxiques. Mais c’est une
forme de résistance par défaut, donc négative. L’étape suivante pour eux
est de s’organiser pour contraindre les pouvoirs publics à redéployer au
moins une partie des sommes gigantesques allouées à un système curatif à
bout de souffle vers des outils et des moyens de prise en charge globale de
la santé de l’individu.

116
Recette n°20
Avec ton smartphone ton activité physique
tu piloteras

117
Nous sommes submergés depuis deux ou trois ans par des objets
connectés santé qui nous permettent de prendre notre tension, de mesurer
notre glycémie, de suivre notre poids, de calculer le nombre de pas que
nous effectuons chaque jour, d’évaluer la qualité de notre sommeil, etc. Ils
sont généralement connectés avec des applis qui interprètent et stockent les
informations collectées. Ces applis utilisent les fonctions des smartphones,
géolocalisation et autres, pour fournir des services similaires. Les deux
monstres qui dominent le marché des smartphones, Apple et Samsung, ont
développé leurs propres applis santé, qui sont en concurrence avec des
centaines d’autres.
Cette cacophonie pose un ensemble de problèmes qu’il va falloir
résoudre pour créer réellement les conditions d’une prise en mains par
chacun de sa santé. Le premier est la fiabilité. Les seuls objets connectés
vraiment fiables sont aujourd’hui les tensiomètres et les balances, qui sont
des dispositifs médicaux bénéficiant de technologies de capteurs anciennes
et éprouvées. Les appareils de mesure de la glycémie sont beaucoup moins
fiables (le sang capillaire donne des résultats moins précis que le sang
veineux) mais aussi moins utiles puisque la glycémie n’est la mesure de
référence que pour une petite minorité de diabétiques (ceux de type 1, à
peine 10 % du total).
En dehors de ces exceptions, c’est la joyeuse anarchie. Entre deux
applications calculant le nombre de pas, les écarts peuvent être de 30 %.
En comparant avec les résultats de ma montre de course Garmin, qui est
précise à 99 %, je n’ai trouvé qu’une appli, Runtastic, qui soit à peu près
fiable (à peine 5 % d’écart), mais elle a le défaut rédhibitoire de ne pas
fonctionner en continu : il faut la lancer et l’arrêter à chaque mesure. La
palme de la médiocrité revient à l’appli santé d’Apple, dont les résultats
sont erratiques et farfelus.
Au-delà de la fiabilité se pose le problème de l’utilité. Les objets
connectés et les applis santé existants sont monofonctions, ce qui signifie
qu’ils vous donnent des résultats qui ne prennent pas en compte vos
caractéristiques propres, hérédité, antécédents médicaux, mode de vie, etc.
Pour mieux comprendre ce que cela implique, prenons l’exemple des

118
tensiomètres connectés. Ils mesurent de façon relativement fiable votre
tension et, si elle est élevée, l’appli à laquelle ils sont connectés peut vous
envoyer une alerte. Le problème est qu’une tension élevée n’a pas du tout
la même signification selon qu’elle est votre seul facteur de risque ou que
vous êtes en plus diabétique et fumeur. Elle n’a pas non plus la même
signification selon que vous êtes sous traitement ou pas ; dans le premier
cas, cela peut être beaucoup plus grave que dans le second, car cela
signifie que votre traitement ne fonctionne pas (ou que vous ne le prenez
pas).
Deux raisons principales expliquent pourquoi les applis ne
collectent pas les données de santé nécessaires pour réellement évaluer le
risque qu’elles prétendent prendre en charge. La première est que le
traitement de ces données demande une expertise médicale très pointue
que les fabricants d’objets connectés sont incapables de mobiliser. La
seconde, plus prosaïque, est qu’ils refusent de se soumettre à la législation
française sur la protection des données de santé, qui est très contraignante.
Comment la situation peut-elle évoluer dans un sens permettant
au consommateur de s’y retrouver ? Bien qu’il soit encore un peu tôt pour
être catégorique, deux tendances lourdes semblent émerger. La première
est que les fabricants de smartphones vont peu à peu évincer du marché du
wellness (mesure de l’activité physique, du sommeil, conseil en nutrition,
etc.), peu contraignant sur le plan réglementaire, la multitude de petits
acteurs qui prolifèrent actuellement. Pour aller plus vite, ils s’associeront
aux géants du business du sport ; le partenariat en train de se monter entre
Apple et Nike s’inscrit dans cette logique.
Ils vont aussi s’attaquer assez rapidement à un certain nombre
d’objets connectés que le smartphone peut intégrer et donc remplacer. A
titre d’exemple, et bien que la recherche avance moins vite que ce qui était
annoncé il y a deux ans, il est à peu près certain que vous pourrez d’ici
deux ou trois ans acheter avec votre smartphone des modules additionnels
miniaturisés à l’extrême qui vous permettront de faire des bilans sanguins
extrêmement complets et précis dans votre fauteuil le matin avant le petit
déjeuner (à l’heure de l’apéro, certains examens, comme la mesure de la
glycémie, sont moins précis).
La seconde tendance lourde est que les fabricants de smartphones
ne tenteront pas de s’implanter dans le domaine de la médecine en ligne.
C’est un marché trop réglementé et surtout trop éclaté, chaque pays ayant
des spécificités à prendre en compte. Ils préféreront s’associer avec des
acteurs spécialisés, disposant de l’expertise médicale, technologique et
juridique nécessaire.

119
On se dirige donc vers un marché sur lequel le smartphone sera
l’outil principal que chacun utilisera pour piloter sa santé. Pour ses besoins
en wellness, il aura recours aux services proposés par les Apple, Samsung
et autres Google. Pour ses besoins de dépistage, de prévention et
d’accompagnement médicalisé en ligne, il fera appel à des acteurs
spécialisés, capables de mobiliser les services adéquats sur une plate-forme
unique hautement sécurisée.
Dans ce panorama d’ensemble, j’ai volontairement abordé la
santé connectée dans sa globalité, ce qui m’a conduit à aller bien au-delà
de la simple activité physique. Tout simplement parce que la smartsanté
est un tout cohérent dont l’activité physique est un pilier étroitement
imbriqué avec les autres. Un hypertendu sportif est avant tout un
hypertendu qui doit mesurer sa tension régulièrement pour éviter une
complication grave. Une fois qu’il a fait ce geste essentiel, il peut se
préoccuper du nombre de kilomètres qu’il a couru, du nombre de calories
qu’il a brûlé, etc.
Si on revient à l’activité physique en particulier, le corollaire
logique de ce qui précède est que nous la gérerons sur nos smartphones,
avec des outils proposés par les fabricants et leurs partenaires
équipementiers sportifs. Pour des raisons pratiques, il n’est pas exclu que
les montres connectées développées par Apple et Samsung portent ces
outils et deviennent progressivement des objets très appréciés par les
sportifs pour leur légèreté et leur simplicité d’utilisation : il est plus facile
d’aller courir ou nager avec une montre au poignet qu’avec un smartphone
dans une poche qui n’existe souvent pas.

120
Le cinquième pilier de la smartsanté :
la Soft Attitude

121
La Soft Attitude, c’est l’intégration de la smartsanté dans la cité.
La qualité de l’environnement pèse presque deux fois plus que le système
de santé dans les facteurs explicatifs de la santé d’une population. Le
corollaire logique est qu’on ne peut pas être en bonne santé dans un
environnement qui ne l’est pas. Nous sommes de ce point de vue bien
mieux lotis que des pays émergents comme la Chine, où la situation est
catastrophique, mais nous avons encore beaucoup de progrès à faire. Ils
peuvent passer par des initiatives collectives mais aussi par la contribution
personnelle de chacun de nous.
La qualité de nos conditions de travail est également
fondamentale pour notre santé. Plus de 41 % des salariés français et plus
d’un cadre supérieur sur deux se déclarent stressés au travail, ce qui
constitue un record en Europe. Soumis à une trop forte pression, beaucoup
d’entre eux finissent par craquer. Parmi les problèmes de santé qui peuvent
s’ensuivre, le burn-out, forme la plus médiatisée, est en fait une dépression
causée par des raisons professionnelles. Mais ce que l’on sait moins est
que 33 % des infarctus sont directement liés au stress, ce qui représente
une mortalité largement supérieure à celle des accidents de la route. Toutes
les entreprises n’étant pas égales en termes de conditions de travail, le

122
choix de notre employeur est donc une décision qui peut avoir des
conséquences importantes sur notre santé.
Le stress ne concerne pas que la sphère du travail, il est par
définition multifactoriel. Sa prise en charge n’est pas différente de celle
des maladies chroniques et des cancers. Une fois qu’il s’est installé et qu’il
a dégénéré en burn-out et autres formes de dépression, il est difficile à
soigner et encore plus à guérir. Il faut donc le prévenir le plus en amont
possible. Les recettes sont les mêmes que pour la prévention du diabète ou
du cancer, une combinaison équilibrée entre Régime 4M et Méthode
Bravo, le tout complété par une gestion optimale du sommeil. Encore faut-
il le vouloir, et l’adoption de ce mode de vie représente souvent non pas un
début mais l’aboutissement d’un cheminement personnel qui n’est pas
nécessairement évident.
Le sujet des addictions est complexe. Comme l’industrie du tabac
au siècle dernier, l’industrie de l’alcool est en train de créer des
générations d’accros à ses produits. Elle investit massivement dans
l’alcoolisation des plus jeunes en sachant qu’elle en fidélisera ainsi une
bonne partie pour la vie. Les pouvoirs publics sont impuissants et même
parfois consentants face à cette politique commerciale cynique et délibérée
qui menace directement notre santé à tous. Nous devons donc nous
défendre seuls et nous fixer comme règle d’or de renoncer à tout ce que
nous ne sommes pas ou plus en mesure de maîtriser. Le prix à payer peut
être élevé mais il le sera toujours infiniment moins que celui de l’addiction
à une substance quelle qu’elle soit, qui est ni plus ni moins qu’une forme
d’esclavage.
La sauvegarde de nos données de santé est un sujet sensible. La
réglementation française en la matière est l’une des plus restrictives au
monde et nous sommes théoriquement bien protégés. En pratique, la
situation est plus complexe, d’une part parce que le marché de l’e-santé, en
pleine explosion, n’est pas encore réellement régulé et d’autre part parce
que nous donnons sans le savoir une foule d’informations sur notre santé
aux fameux GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon). Il faut certes
mieux réguler ces flux d’informations et l’utilisation qui en est faite, mais
en même temps éviter qu’une réglementation trop rigide ne finisse par
pousser certains opérateurs essentiels, les assureurs notamment, à se retirer
du marché, ce qui pénaliserait in fine une grande partie de la population.

123
Recette n°21
Ton environnement comme un facteur essentiel
de ta santé tu considéreras

124
On ne peut pas être en bonne santé dans un environnement
dégradé et/ou vicié. Nous avons vu dans la Recette n°1 que
l’environnement entre dans les facteurs explicatifs de l’état de santé d’une
population pour 19 %, soit presque deux fois plus que le système de santé.
La généralisation du tout-à-l’égout a sans doute contribué autant que les
progrès de la médecine à la formidable augmentation de l’espérance de vie
que nous connaissons depuis un siècle.
L’exemple des “tigres” asiatiques qui ont enregistré une
croissance économique sans précédent depuis vingt ans est édifiant. Ils ont
construit l’essentiel de celle-ci sur la délocalisation par les vieilles nations
d’une grande partie de leurs activités industrielles. Nous avons transféré en
Chine et en Inde beaucoup de nos emplois, mais ce faisant, nous avons
aussi exporté vers ces pays la pollution qui allait avec. C’est d’ailleurs
uniquement grâce à cela que l’Europe arrive à maîtriser tant bien que mal
ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre : nous n’en
émettons pas moins qu’il y a vingt ans, sans doute même bien plus en
analyse globale, mais nous avons délocalisé le différentiel.
Vivre en Chine est ainsi devenu un enfer. Le pays cumule trois
strates différentes de pollution, celle liée à l’agriculture, celle générée par
l’utilisation massive de charbon pour la production d’électricité et celle
induite par l’explosion du parc automobile. Aucun pays, depuis les
Sumériens, ne s’est jamais retrouvé dans une situation pareille. Les
conséquences sur la santé sont désastreuses. Déjà rongée par le diabète (un
diabétique sur quatre dans le monde est chinois), la Chine est également
confrontée à une épidémie de BPCO, maladie inflammatoire atteignant les
bronches. Généralement due au tabagisme, cette affection est en Chine
directement liée à la pollution et y est devenue la seconde cause de
mortalité. Les riches Chinois, qui ne sont pas fous, se délocalisent de plus
en plus vers l’Australie, la Californie et même la Suisse. Ils sont les
principaux bénéficiaires du boom économique des deux dernières
décennies et les responsables du désastre environnemental qu’il a causé,
mais ils ne tiennent visiblement pas à en assumer les conséquences.
En Europe, nous sommes heureusement beaucoup mieux lotis. En
écoutant le discours ambiant sur les dégâts provoqués par les particules

125
fines et autres marottes de nos Verts, on a l’impression de vivre dans un
enfer pollué par l’automobile. Outre le fait que les bovins émettent autant
de gaz à effet de serre que notre moyen de transport préféré et qu’on en
entend beaucoup moins parler, la réalité est bien différente.
Si paradoxal que cela puisse paraître, Paris a connu ses pics de
pollution autour de 1350 (eh oui !), à l’âge du charbon de bois et, déjà, des
émissions animales. La situation s’est considérablement améliorée depuis
et n’a jamais été meilleure qu’aujourd’hui. Londres n’a jamais été aussi
polluée qu’en 1840, à l’apogée de l’ère du charbon, et les conditions
environnementales y sont incomparablement meilleures aujourd’hui. C’est
devenu aussi, mais ceci explique cela, la mégapole la plus verte (au sens
d’espaces verts, pas de politique) d’Europe et peut-être de la planète.
Nous vivons donc dans un environnement béni si on le compare
au passé ou à celui d’autres continents. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut
rien faire de mieux. De nombreuses pistes d’amélioration sont
envisageables et nous n’en explorerons que quelques-unes. La
transformation des centres-villes en zones piétonnes, évoquée depuis
longtemps, serait une avancée formidable. Au-delà de son impact évident
sur l’environnement, elle permettrait enfin de circuler à vélo sans danger et
à l’abri des pots d’échappement et de redonner ainsi le goût de l’effort
physique à des millions de citadins qui l’ont perdu. Le chantier est
immense, car il faudrait prévoir de vraies facilités de stationnement en
périphérie, c’est-à-dire des infrastructures gigantesques et coûteuses, mais
il vaut la peine d’être mené.
Doit-on augmenter encore les taxes sur les carburants, déjà très
élevées ? Je pense qu’il faut d’abord leur redonner une cohérence
écologique. On a favorisé le diesel au-delà du raisonnable en France pour
finir par se rendre compte qu’il est à l’origine de l’essentiel des émissions
de particules fines, c’est-à-dire celles qui pénètrent le plus profondément
dans l’arbre respiratoire et sont de ce fait la seconde cause de BPCO et de
cancers bronchiques, après le tabac.
Une politique alternative bien plus favorable à l’environnement
serait dans un premier temps de taxer uniformément les véhicules utilisant
uniquement des carburants de l’ère du carbone et dans un deuxième temps
de relever ces taxes pour financer la transition avec l’ère post-carbone.
C’est avec une démarche de même nature que les Allemands ont géré la
sortie du nucléaire. Ils ont pu ainsi financer massivement les énergies
renouvelables, solaire et autres éoliennes, qui devraient contribuer pour 50
% à leur consommation d’électricité d’ici 2025, ce qui les met sur ce point
très en avance sur le reste du monde.

126
A contrario, une réforme comme la fermeture des voies sur berges
à Paris n’est en rien favorable à l’environnement. La congestion de la
circulation qui s’ensuit augmente la pollution au lieu de la réduire.
Désormais, les quais rive gauche sont vides neuf mois sur douze, ce qui
signifie que la fermeture, censée rendre ces voies aux piétons, ne sert à
rien. Au-delà, l’aggravation des conditions de circulation qu’elle a
provoquée augmente considérablement le stress des automobilistes,
notamment les professionnels, chauffeurs de taxi, livreurs et autres. En
définitive, cette réforme censée améliorer l’état de santé des personnes
vivant et/ou travaillant à Paris va sans doute le dégrader.
La focalisation sur l’automobile permet d’éluder le débat sur les
transports collectifs. Alors que l’obésité progresse sans cesse, faut-il
continuer à les subventionner comme on le fait aujourd’hui et à financer
dans les grandes villes des stations de métro et des arrêts de bus tous les
200 mètres ? Une remise en cause radicale paraît difficile, mais les aides
pourraient être beaucoup plus fortement modulées en fonction de la
longueur des trajets, et la cartographie des stations et autres arrêts revue
progressivement.
Des politiques publiques encourageant cette brique essentielle de
la Soft Attitude qu’est la protection de l’environnement sont nécessaires
mais pas suffisantes. Chacun d’entre nous doit prendre conscience du fait
que sa santé et celle de son environnement sont intimement liées et qu’il
doit contribuer individuellement à la préservation de son cadre de vie. Ne
pas prendre sa voiture pour aller acheter sa baguette deux rues plus loin, ne
pas lancer une machine à laver le linge à moitié pleine, ne pas surchauffer
son appartement ou son bureau l’hiver et éviter de mettre la climatisation à
fond l’été sont autant de micro-actes citoyens relevant de la Soft Attitude.
Pas besoin de projets de loi ni de longs débats au Parlement où chaque
lobby va user de son influence pour vider le texte initial de sa substance,
c’est à nous d’agir et il ne nous faut ni l’autorisation ni les incitations de
personne pour ça.

127
Recette n°22
Pour éviter le burn-out ton entreprise
tu choisiras

128
Malgré la réduction du temps de travail, la population active passe
encore environ un tiers de sa semaine, hors vacances, dans son entreprise
ou dans les transports pour s’y rendre ou en revenir. La qualité de la vie au
travail est donc un facteur déterminant de la santé dans la durée.
41 % des salariés et plus d’un cadre supérieur sur deux se
déclarent stressés en France. C’est le taux le plus élevé en Europe. Le
stress apparaît donc depuis plusieurs années comme l’un des risques
majeurs auxquels les entreprises doivent faire face.
Le stress est à la base une réaction normale de l’organisme
lorsqu’il est soumis à une stimulation, des pressions ou des contraintes de
son environnement. Un état de stress au travail survient lorsqu’il y a
déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui
impose son environnement et celle qu’elle a de ses propres ressources pour
les affronter. L’individu éprouve alors de grandes difficultés face à une
exposition prolongée ou répétée à ces pressions qu’il perçoit comme
intenses. Cet état est donc la conséquence à la fois de l’environnement et
de la sensibilité ou du caractère de l’individu. Ainsi, deux personnes
soumises aux mêmes contraintes professionnelles ne vont pas forcément
toutes les deux se sentir stressées.
Les causes du stress occasionné par le travail les plus souvent
citées sont la réorganisation ou l'insécurité de l'emploi, les longues heures
ou la surcharge de travail, ainsi que le manque de reconnaissance ou le
harcèlement.
Si cette situation perdure, elle peut finir par mettre l’individu dans
un état d’épuisement professionnel, plus communément appelé burn-out.
Celui-ci se caractérise par une fatigue chronique, un désinvestissement
professionnel et un sentiment d’échec dans le travail qui conduisent à
l’incapacité à faire face à ses exigences professionnelles. Il concerne tous
les types d’emplois.
Le burn-out est nécessairement lié au travail et c’est en cela qu’il
doit être bien distingué de la dépression, pour laquelle le travail n’est pas
forcément la cause première même s’il peut être un facteur aggravant.
Toutefois, le burn-out peut, s’il n’est pas pris en charge, conduire à la

129
dépression. Contrairement à celle-ci, il n’est pas aujourd’hui répertorié
dans les classifications officielles, c’est pourquoi il n’existe que peu de
données sur ce sujet.
Le burn-out est le résultat d’un stress professionnel trop important
par rapport à la capacité d’adaptation de l’individu. Les causes le plus
souvent avancées, qui recoupent nécessairement celles du stress, sont une
trop forte charge de travail, une grosse pression par rapport aux délais ou
aux résultats, une absence de reconnaissance, un manque de contrôle sur
les décisions ou prises de position, la peur de perdre son travail, des
relations exigeantes avec la clientèle, un faible rapport social et une
mauvaise communication entre collègues ou avec la hiérarchie. L’individu
voit alors son énergie, sa motivation et son estime de soi décliner.
Un excès de stress peut aussi conduire à de graves problèmes
cardiovasculaires. Bien que le lien entre le stress et les maladies
cardiovasculaires soit encore mal compris, des études très documentées ont
mis en évidence que 33 % des infarctus ont le stress comme facteur de
risque principal. Cela représente environ 6 000 décès par an, beaucoup
plus que les accidents de la route.
La meilleure manière de gérer son stress est de pratiquer une
activité physique régulière et de s’alimenter raisonnablement, en somme
de respecter les principes de la Méthode Bravo et le Régime 4M. Les
personnes qui sont victimes de complications graves, burn-out ou accident
cardiovasculaire, font malheureusement souvent le contraire : elles
réagissent en mangeant de manière excessive, en buvant et en fumant
exagérément, en devenant sédentaires. Nous verrons ce point beaucoup
plus en détail dans la Recette n°23.
En cas de décès d’un salarié par infarctus ou de suicide consécutif
à un burn-out ayant dégénéré en épisode dépressif majeur, la responsabilité
des entreprises est de plus en plus systématiquement mise en cause. Le
précédent de France Télécom ne plaide pas pour elles. Entre 2008 et 2009,
une trentaine de salariés s’y sont donné la mort. Il aura fallu à la justice
sept ans d'enquête pour demander le renvoi en procès pour harcèlement
moral de France Télécom et de son ex-patron, Didier Lombard,
soupçonnés d'avoir mis en place une politique systématique et
parfaitement préméditée de déstabilisation des salariés.
L’histoire est tragiquement simple. La gestion désastreuse du
prédécesseur de Didier Lombard, Michel Bon, pendant la bulle Internet
avait conduit au bord de la faillite une entreprise très rentable et où les
relations sociales étaient de bonne qualité. Pour la redresser et rembourser

130
les dettes contractées pour acheter des licences de téléphonie mobile
payées trois à quatre fois leur prix, il a fallu restructurer à la hache.
Comme une partie des salariés bénéficiaient encore d’un statut protégé,
tous les moyens ont été mis en œuvre pour s’en débarrasser, avec un
cynisme qui fait froid dans le dos : mutations permanentes aux quatre
coins de la France, réorganisations incessantes, brimades, etc. Des
méthodes pour briser les salariés rappelant celles de l’ex-Union soviétique,
qui a réussi en un peu plus de soixante-dix ans à briser l’âme d’un peuple
pour plusieurs générations.
La morale de cette histoire est que si vous vous fixez comme
priorité de rester en bonne santé, ce qui est plutôt sage, vous avez tout
intérêt à choisir votre employeur. Telle entreprise de téléphonie mobile
(qui n’est ni Orange, qui a retenu la leçon, ni Bouygues Télécom ni Free)
est réputée pour être l’employeur et le client le plus infect de la place, vous
n’avez que des coups à y prendre, n’y allez surtout pas. Telle entreprise de
tech américaine est connue pour chouchouter ses salariés, battez-vous pour
y entrer. Evitez les secteurs en restructuration permanente, vous avez
toutes les chances d’y trouver des France Télécom miniatures. Faites
fonctionner le bouche-à-oreille, il est souvent très efficace.
Aux Etats-Unis, les salariés peuvent consulter depuis une bonne
quinzaine d’années le taux d’accidents du travail de leur futur employeur
sur le site du département du Travail. Les mauvais élèves se sont vus
boycottés par les meilleurs postulants et contraints d’investir dans des
mesures de prévention, ce qui a fait spectaculairement reculer les taux
d’accidents du travail au niveau national. Sur ce dossier, l’Administration
du travail américaine a fait preuve de Soft Attitude en favorisant de facto
les entreprises prenant le mieux soin de leurs salariés. Elle a pour cela
utilisé une arme simple mais redoutable, la transparence.
On n’en est pas encore là en France. Mais la pression sur les
entreprises va s’accroître dans des proportions considérables au cours des
prochaines années et celles qui pensent pouvoir faire l’économie d’une
réflexion de fond sur leurs rapports avec leurs salariés et la qualité de la
vie au travail mènent sans le savoir un combat d’arrière-garde.
Le développement de processus sophistiqués de scoring social,
reposant sur une analyse très fine des causes de l’absentéisme, des
accidents du travail et des maladies professionnelles, va rapidement les
mettre au pied du mur. Il est en effet probable que ces processus
intégreront très vite une notation des efforts entrepris pour améliorer la vie
au travail et que la gestion du stress deviendra à terme un facteur clé
d’attractivité des entreprises pour les jeunes diplômés. Et cela dans un

131
contexte de pénurie chronique de main-d’œuvre qualifiée, où les salariés
diplômés sont en position de force.

132
Recette n°23
Positif en toutes circonstances tu resteras

133
Nous avons vu dans la Recette n°22 que le stress au travail est
devenu un enjeu clé tant pour les salariés que pour les entreprises. Mais il
n’y a malheureusement pas que le travail qui génère un stress excessif. Les
divorces, la ménopause, une maladie grave, le décès d’un proche, le départ
des enfants du foyer, la retraite, etc., peuvent également provoquer des
pics de stress, avec les mêmes risques de complications graves que le
stress professionnel.
Le stress excessif est donc d’une certaine manière une maladie de
société au même titre que le diabète ou le cancer, liée à l’évolution du
monde du travail et à celle de nos modes de vie. Comme ces deux fléaux,
le stress, une fois installé durablement, est difficilement guérissable et les
personnes atteintes entrent dans une spirale infernale de traitements à base
de médicaments, antidépresseurs et autres anxiolytiques, dont les effets
secondaires peuvent sur la durée être dévastateurs.
Il faut donc impérativement agir en amont par des actions de
prévention ciblées. Des questionnaires fiables pour évaluer le niveau de
stress existent. Les remèdes les plus efficaces pour faire retomber la
pression sont connus : alimentation saine, activité physique régulière et
sommeil de qualité.
Les deux premiers axes de prévention sont des piliers de la
smartsanté. Nous avons montré l’impact d’une activité physique régulière
et d’une alimentation adaptée sur la prévention du risque cardiovasculaire
et des cancers. Nous allons à présent voir qu’elles agissent aussi sur le
cerveau et sont de puissants atouts pour faire refluer les accès de déprime
engendrés par le stress.
L’activité physique, en plus de ses autres vertus, est un fabuleux
antidépresseur et des études ont montré qu’elle a des effets psycho-
dynamisants supérieurs à ceux des molécules chimiques que vous prescrit
à gogo votre médecin traitant ou votre psychiatre. On savait déjà qu’une
activité physique intense permettait au cerveau de sécréter des
endorphines, cette morphine endogène qui, comme les opiacés, procure
une sensation de bien-être, voire d’euphorie. Les travaux les plus récents
montrent que l’activité physique augmente aussi l’oxygénation du cerveau

134
et stimule ses capacités de base comme la mémoire ou la réflexion. Elle
constituerait ainsi une protection efficace contre la maladie d’Alzheimer.
L’alimentation joue un rôle aussi essentiel que l’activité physique.
Elle permet au cerveau de fabriquer ses neurotransmetteurs. La sérotonine,
dont un niveau anormalement bas expliquerait les états dépressifs, est le
fruit de la transformation d’une molécule alimentaire, le tryptophane.
Parmi les aliments autorisés dans le Régime 4M, ce sont les œufs, la
viande, les noix de coco et le chocolat noir qui en contiennent le plus.
Les oméga-3, en plus de leurs autres vertus, agiraient aussi sur
l’humeur. Nous avons vu dans la Recette n°9 que les poissons gras
(sardines à l’huile, filets de harengs à l’huile, saumon fumé, etc.) sont très
riches en oméga-3, il convient donc de les consommer sans modération.
On voit ainsi s’esquisser un régime alimentaire antistress, utilisant
l’huile de coco comme matière grasse et riche en œufs, viande et poissons
gras. Couplé avec une activité physique privilégiant l’endurance sur la
résistance, il améliore fondamentalement la capacité de l’organisme à
combattre les pressions extérieures.
Penchons-nous à présent sur le troisième axe clé de prévention
identifié, un sommeil de qualité. Afin de pouvoir prendre en charge au
mieux les différentes situations de stress rencontrées chaque jour, il est
indispensable d’être reposé et en forme. Le manque de sommeil, au
contraire, aura pour effet d’accroître l’anxiété et la nervosité.
Quelques règles simples permettent d’améliorer considérablement
la qualité du sommeil. Si l’on a des difficultés à s’endormir, il ne sert à
rien de rester éveillé dans son lit plus d’une vingtaine de minutes. Il est
préférable de se lever et de faire autre chose en attendant d’avoir sommeil.
Avant le coucher, il est conseillé de dîner légèrement, en
bannissant les excitants (cola, café, thé, vitamine C) et l’alcool. Le sport
après 19 heures a le même effet qu’un excitant et doit donc être évité
autant que possible. Les activités relaxantes, comme la lecture ou la
musique, sont au contraire extrêmement bénéfiques. Enfin, il faut aller se
coucher dès les premiers signes de fatigue (bâillements, yeux qui
piquent...) et dormir de préférence dans une chambre aérée où la
température se situe entre 18 et 20 °C.
Si nous savons tout cela, pourquoi aussi peu d’entre nous
adoptent-ils ces bonnes pratiques ? Parce qu’il ne suffit pas de savoir,
encore faut-il vouloir. Le Pr Michel Lejoyeux, chef du service de
psychiatrie et d’addictologie de l’hôpital Bichat, a une jolie formule dont il
a fait le titre d’un livre que je vous incite vivement à lire si vous ne l’avez

135
pas déjà fait. Il considère que “ Tout déprimé est une personne en bonne
santé qui s’ignore ”.
Pour lui, les personnes déprimées sont celles qui ont trop soif
d’absolu, qui se croient atteintes d’un mal mystérieux et incurable, sont à
la recherche d’un remède miracle qui pourrait les guérir et attendent le
bonheur absolu. Elles entrent ainsi dans un cercle vicieux qui mène tout
droit à la dépression. Pour en sortir, il faut qu’elles apprennent à vivre dans
un monde où rien n’est absolu. Plutôt que de se croire très malades, il faut
qu’elles s’astreignent à chercher les causes de leur déprime. Plutôt que
d’attendre un miracle, il faut qu’elles fassent l’effort de trouver et changer
les fausses croyances qui nourrissent leur mal de vivre. Plutôt que
d’aspirer au bonheur absolu, il faut qu’elles acceptent de se satisfaire de
petits bonheurs qui, mis bout à bout, finissent par en faire un grand, et à se
souvenir de leurs réussites plutôt que de leurs échecs.
Quel que soit le contexte, l’expérience montre que des personnes
soumises à la même pression et au même stress ne réagissent pas de la
même manière. Certaines se laissent emporter par la vague, commencent à
déprimer pour finir par un burn-out ou une dépression, d’autres au
contraire s’organisent pour faire face et s’en sortent indemnes. Parce
qu’elles sont capables dans un premier temps de relativiser et de faire le
travail indispensable sur elles-mêmes pour comprendre ce qui leur arrive et
dans un second temps de faire les efforts en termes de mode de vie qui leur
permettront de renforcer leurs défenses naturelles. En résumé, parce
qu’elles appliquent un des fondements de la Soft Attitude, qui est d’avoir
en toutes circonstances une attitude positive face à ce qui vous arrive.

136
Recette n°24
Pour ne pas le payer très cher un jour tout ce
que tu ne maîtrises pas tu éviteras

137
Comme nous l’avons vu dans notre Recette n°7, le sucre va
probablement tuer au XXIe siècle plus de monde que le tabac, l’alcool, la
cocaïne et l’héroïne réunis. A ceci près que l’alcool est un concentré de
sucre et que, du coup, les ravages causés par le serial killer le plus
redoutable de l’Histoire sont encore amplifiés.
L’exemple de l’alcool est très éclairant sur les pièges dans
lesquels il ne faut pas tomber. Les jeunes commencent aujourd’hui souvent
à boire à 14 ans, malgré une législation qui l’interdit a priori. A 18 ans, ce
sont déjà des buveurs réguliers. Pour ceux qui font des études supérieures,
les universités et grandes écoles sont des hauts lieux de beuverie.
Lorsqu’ils entrent dans la vie active, la consommation régulière
d’alcool est déjà ancrée dans leurs habitudes. Ils commencent à goûter
aux happy hours , ces périodes horaires d’après-bureau où les alcools sont
proposés à des prix imbattables. A 30 ans, souvent sans le savoir, ils sont
déjà alcooliques et leur addiction ne peut que s’aggraver dans le temps,
s’ils ne prennent pas de mesures énergiques, puisque les doses nécessaires
pour qu’ils ressentent les mêmes effets augmentent progressivement.
Dans leur naïveté, ils ne réalisent pas qu’ils sont manipulés sans
vergogne par les grandes marques d’alcool. Un bureau des élèves de
grande école n’aura aucun mal à se procurer de l’alcool gratuit ou à des
prix dérisoires directement auprès des principales marques du secteur.
Les happy hours sont subventionnées par ces mêmes opérateurs. Tout est
fait pour rendre l’alcool facilement accessible à des gens jeunes à bon
pouvoir d’achat qui, devenus accros, feront d’excellents clients plus tard.
Les politiques publiques en la matière relèvent de la tartufferie.
On interdit la publicité pour les alcools ? L’industrie de l’alcool la
remplace par les happy hours et les alcools généreusement distribués aux
grandes écoles et universités. La vente aux mineurs est strictement
réglementée ? Vrai, mais comme pour l’ivresse au volant, il n’y a jamais
de contrôles et la plupart des cafés, dont les mineurs assurent une bonne
partie des recettes, ferment les yeux sur l’âge de leurs clients en sachant
que le risque de se faire prendre est infime.
Le cynisme des producteurs d’alcool est absolu et parfaitement

138
assumé. Ce qui précède m’a été expliqué dans le détail par le cadre
dirigeant d’une des majors de ce marché. Ils mettent sans scrupule une
génération dans la seringue à un âge où elle se sent immortelle et
n’imagine pas un seul instant pouvoir devenir accro.
Face à cette absence totale de vergogne, la Soft Attitude consiste à
s’organiser d’emblée pour ne jamais entrer dans la seringue. Différentes
stratégies peuvent être mises en œuvre. L’abstinence absolue en est une
mais, lorsqu’on est jeune, elle est très difficile à assumer tant est forte la
pression sociale. La plus efficace me semble être le jeûne alcoolique
intermittent. Il peut être hebdomadaire, certains de mes amis l’appliquent
avec succès. Repas d’affaires ou pas, ils ne boivent pas une goutte d’alcool
en semaine, du lundi matin au vendredi soir. Je n’en connais aucun qui soit
devenu alcoolique.
Une autre configuration possible du jeûne alcoolique est de le
faire régulièrement sur des périodes beaucoup plus longues. Un de mes
amis se met au régime sec un mois tous les trois mois, soit tout de même
trois mois par an. Il n’a jusqu’ici jamais eu de mal à s’arrêter bien qu’il
boive assez régulièrement le reste du temps.
Dans tous les cas, lorsqu’on se rend compte que le sevrage
devient de plus en plus difficile et que le manque commence à se faire
sentir lors des périodes d’abstinence, le moment est venu de décrocher
complètement. C’est l’un des principes essentiels de la Soft Attitude : il
faut renoncer définitivement à tout ce qu’on ne maîtrise pas ou plus sous
peine de le payer très cher.
Dans son best-seller Le dernier verre , feu le Dr Olivier Ameisen
a raconté dans le détail son itinéraire d’alcoolique et sa quête éperdue du
Graal, le remède miracle qui l’aiderait à s’en sortir. Il a, fait rare, fini par le
trouver avec le baclofène, médicament utilisé depuis quarante ans dans le
traitement de la sclérose en plaques et qui s’est avéré très efficace à très
hautes doses dans le cas de la dépendance alcoolique. Mais il n’a pas pu en
profiter longtemps. Sans doute trop abîmé par des années d’alcoolisation
excessive, il est décédé d’un infarctus à 60 ans. Je ne souhaite à personne
de vivre l’enfer qu’il a connu.
Sans même parler du tabac, sujet abondamment traité depuis des
décennies, beaucoup d’autres substances peuvent créer une addiction aussi
forte que celle à l’alcool. On a longtemps pensé que le cannabis était
relativement inoffensif, mais on s’est rendu compte récemment qu’il peut
engendrer des dépendances redoutables et, cerise sur le gâteau, qu’il
risque, consommé à hautes doses, d’être à l’origine de troubles

139
psychotiques graves. Je suis donc par définition opposé à sa légalisation et
je suis même surpris que la question puisse se poser.
L’indigence des politiques publiques est fortement responsable
des dérives actuelles. L’alcool fait partie de la culture nationale et est donc
largement ménagé. Bien que l’on sache pertinemment qu’il est la
principale cause de mortalité sur les routes, un conducteur français subit un
alcootest en moyenne une fois tous les douze ans. En Suède, c’est une fois
tous les 29 jours. Le slogan “Fumer tue” pour le tabac n’impressionne plus
guère. Comme nous l’avons déjà vu, en envoyant un message trop
uniforme, il finit par ne plus s’adresser à personne. Le laxisme vis-à-vis du
cannabis, qu’une partie de la classe politique souhaite légaliser, encourage
toutes les dérives, et la consommation des jeunes, déjà très alcoolisés, est
en pleine explosion. La Soft Attitude dans ce domaine, c’est donc aussi de
trouver en soi les ressources pour s’en sortir dans un environnement peu
favorable.

140
Recette n°25
Tes données de santé comme ton bien
le plus précieux tu protégeras

141
Nos données de santé sont un élément essentiel de notre intimité
et donc un de nos biens les plus précieux. La préservation de leur
confidentialité est vitale car leur divulgation et leur utilisation par des tiers
peuvent avoir des conséquences importantes pour notre vie sociale et
professionnelle. En France, elles sont a priori bien protégées. La
réglementation de la CNIL sur leur collecte et l’usage que peut en faire le
collecteur est l’une des plus restrictives au monde. L’hébergement de ces
données doit se faire obligatoirement chez un hébergeur agréé par le
ministère de la Santé sur la base d’un cahier des charges draconien. Nous
pouvons donc dormir sur nos deux oreilles, elles sont à l’abri d’utilisateurs
malveillants.
Ce qui précède, ce n’est malheureusement que la théorie, et la
pratique est très différente. Comme nous l’avons vu dans la Recette n°20,
aucun fabricant d’objets connectés santé ne respecte la réglementation.
Lorsque vous prenez votre tension avec un tensiomètre connecté à une
appli sur smartphone, partez du principe que vous ne bénéficiez d’aucune
garantie de confidentialité. Les fabricants ne vous en donnent d’ailleurs
pas, ce qui est plutôt honnête de leur part. J’ai même entendu un jour le
représentant de l’un d’entre eux, et non des moindres, expliquer lors d’une
conférence sur l’e-santé, devant un éminent représentant de l’Ordre des
médecins, que son business model reposait en partie sur la vente des
données collectées à des tiers, assureurs notamment.
Allons encore un peu plus loin dans le raisonnement. Si vous
utilisez une balance connectée du même fabricant, le croisement des
données de tension artérielle et de poids fournit déjà des indications
précieuses sur votre profil de santé. La plupart des applis de ce type
intégrant des outils permettant de mesurer approximativement votre
activité physique (nombre de pas parcourus dans la journée), votre profil
se précise encore. Imaginons maintenant que le fabricant en question
partage ses données avec un moteur de recherche ou une entreprise de
vente en ligne dont nous ne citerons pas les noms pour des raisons de
confidentialité. Ces acteurs ont une connaissance très fine de vos
recherches sur Internet et des achats que vous y effectuez. En croisant

142
leurs données avec celles du fabricant d’objets connectés, ils sont en
mesure de définir votre profil de santé avec une précision dépassant 90 %.
Que peut-on faire contre cela ? A l’heure actuelle, pas grand-
chose malheureusement. Le marché de l’e-santé est encore une espèce de
Far West du XXIe siècle qui évolue trop rapidement pour que les
régulateurs puissent y mettre réellement de l’ordre. Les fabricants dont
vous achetez les objets connectés sont rarement français et leurs données
rarement hébergées en France. Impossible donc, ou presque, de leur
imposer des règles contraignantes. La frontière entre wellness et médical
est encore trop floue et a besoin d’être précisée. Le suivi du poids est-il
une donnée de santé ou simplement une donnée s’intégrant dans des
programmes de bienêtre ? La même question se pose pour beaucoup
d’autres données.
La réglementation, si stricte soit-elle, n’étant pas une protection
suffisante, c’est au consommateur, c’est-à-dire à vous, de s’organiser pour
ne pas être complètement transparent face aux acteurs du web. C’est à
vous de vous assurer — en lisant réellement les conditions générales de
vos fournisseurs au lieu de simplement cliquer dans une case pour donner
votre accord — qu’ils ont bien l’agrément de la CNIL et que les données
que vous leur confiez sont bien stockées chez un hébergeur agréé.
“Seuls les paranoïaques survivent”, avait coutume de dire Andrew
Grove, le fondateur d’Intel, qui en a même fait le titre d’un livre fort
intéressant. Il a mille fois raison, suivez donc son précepte. Dans la vie
courante, quand on n’a pas envie d’être tracé, on éteint le GPS de son
portable et on paie en liquide. Appliquez le même principe pour vos
données de santé. Si vous avez un problème médical sérieux et que vous
voulez que ça ne se sache pas, ne surfez pas sur Internet pour trouver de
l’information, allez à la FNAC, achetez-vous des bouquins qui traitent du
sujet, à l’ancienne, et payez en liquide. N’utilisez surtout pas votre carte
d’adhérent pour engranger des points, vous seriez tracé aussi sûrement que
sur Internet.
En suivant ces préceptes, il faut que vous soyez conscient qu’ils
n’ont pas que des avantages. A titre d’exemple, dans aucun pays civilisé
les assureurs ne peuvent avoir accès à vos tests de dépistage génétique.
Aux Etats-Unis, c’est le président George W. Bush, pourtant chantre du
libéralisme, qui a signé le décret interdisant cet accès aux assureurs,
provoquant leur fureur. Leur argument était simple et logique : si l’assuré
dispose d’une information essentielle à laquelle ils ne peuvent avoir accès,
il se crée une asymétrie d’information qui rend le risque difficilement
assurable, voire pas assurable du tout.

143
Pour mieux comprendre ce qui précède, prenons l’exemple de la
maladie d’Alzheimer, première cause de dépendance en France. Il y aura
dans un avenir proche des tests prédictifs qui permettront de déterminer
votre probabilité de contracter la maladie. Si elle est faible, vous ne vous
assurerez pas. Si elle est en revanche très forte, vous vous assurerez pour
le montant maximal. L’assureur n’ayant pas accès à l’information, il se
retrouvera rapidement avec un portefeuille uniquement composé de
mauvais risques et sortira du marché. Le sujet est donc loin d’être simple
et il faudra trouver des compromis si l’on veut que certains risques
sensibles puissent rester assurables. Si l’on n’y arrivait pas, ce sont les
consommateurs qui seraient les premiers lésés, les assureurs ayant toujours
la possibilité de se redéployer sur d’autres risques plus assurables.
On sent bien à travers cet exemple que l’accès aux données de
santé sera l’un des grands sujets du XXIe siècle, avec des conséquences
encore imprévisibles. Au fur et à mesure que nous progresserons dans le
décryptage du génome humain, nous prendrons conscience de l’inégalité
fondamentale des individus face à la maladie. J’ai coutume de dire que la
solidarité est la fille aînée de l’ignorance. Une fois que chacun connaîtra
son risque avec une précision suffisante, elle volera en éclats.
La Soft Attitude face à ce sujet délicat de la protection des
données de santé est donc à double tranchant. Mon point de vue est que
leur confidentialité doit être préservée à tout prix, mais qu’a contrario,
pour protéger notre modèle social, il n’est pas souhaitable que nous-
mêmes ayons accès à toute l’information nous concernant. Cette approche
est aussi protectrice pour les personnes : si leur probabilité à long terme de
contracter une maladie grave est élevée, à quoi bon les en informer très
longtemps à l’avance et gâcher ainsi leur vie ?

144
Conclusion

Avril 2018. Jacques V. est en route vers la gare de Lyon, où il


doit prendre le TGV pour Bourg-Saint-Maurice. Il rejoint sa famille à
Tignes pour les traditionnelles vacances de Pâques au ski dans leur
appartement de Val Claret. Il est soucieux et renfrogné. A 48 ans, il vient
de faire pour la première fois un bilan de santé complet et son cardiologue,
le Dr Pascal D., n’a pas mâché ses mots. Tous les voyants sont dans le
rouge, lui a-t-il expliqué. Jacques pèse 90 kg pour 1,80 m, ce qui signifie
qu’il a au moins 10 kg de trop. Son tour de taille est de 105 cm, soit 10 cm
au-dessus de la normale. a tension est élevée (155/105). Son taux de
glycémie est de 1,15g/l, ce qui le situe dans la zone dangereuse du
prédiabète, et son taux de mauvais cholestérol (LDL) est désastreux (2,8
g/l alors que la zone à risque commence à 1,6 g/l). Seul point positif,
Jacques a arrêté de fumer depuis dix ans. Mais compte tenu d’une
mauvaise hérédité cardiovasculaire, a conclu le cardiologue, si Jacques ne

145
se reprend pas en mains rapidement, il n’est pas à l’abri d’un infarctus ou
d’un AVC. Il lui a prescrit du Tahor, une statine destinée à faire baisser
son taux de LDL, et lui a recommandé un régime moins gras et moins
sucré ainsi qu’une activité physique plus régulière et plus soutenue.
Rendez-vous est pris pour le mois suivant.
Jacques se doutait bien avant de faire ce bilan que quelque chose
clochait et qu’il n’entendrait pas de bonnes nouvelles. Cadre supérieur
commercial dans une multinationale américaine, il enchaîne les repas
d’affaires, les déplacements à l’étranger et les meetings de groupe. Il a
conscience de manger et de boire plus qu’il ne faudrait. Il n’arrive pas,
faute de temps, à reprendre une activité physique régulière alors qu’il était
très sportif dans sa jeunesse. Mais il ne s’attendait pas à un coup de
massue pareil.
Arrivé à la gare, en passant devant le Relay, un livre intitulé 25
recettes pour bien vivre pendant trèslongtemps , exposé dans la vitrine,
attire son attention. Il se souvient qu’un de ses amis lui a recommandé de
le lire. Comme il a près de six heures de train, il se dit que c’est un moyen
comme un autre de tuer le temps.
En arrivant à Bourg-Saint-Maurice, il a retrouvé le sourire. Il a lu
le livre d’une traite et y a trouvé toutes les recettes pour repartir sur de
bonnes bases. Cerise sur le gâteau, il s’est rappelé que son entreprise avait
intégré dans son contrat complémentaire santé la solution de suivi du
risque cardiovasculaire CardioSens évoquée dans l’ouvrage. Il avait à
l’époque reçu un mail pour s’y connecter, qu’il n’avait jamais ouvert.
Le soir même, après la traditionnelle raclette en famille, Jacques a
consulté sa boîte mail et a retrouvé le lien lui permettant d’accéder à
CardioSens. Il s’est connecté, a rempli le questionnaire et abouti à un bilan
strictement identique à celui fait par son cardiologue le matin même. Il
s’est inscrit au programme de suivi et s’est commandé sur Amazon une
balance et un tensiomètre connectés compatibles avec CardioSens ainsi
que le lecteur de glycémie et de HbA1c proposé par Sanofi.
Dans les jours suivants, il commence à faire attention à ce qu’il
mange et boit et s’astreint à passer plus de temps sur les pistes que sur les
terrasses d’altitude. Parallèlement, il évoque avec Hélène, son épouse,
l’idée d’un jeûne de trois semaines en août à la clinique Buchinger à
Überlingen. Ayant elle aussi quelques kilos à perdre et leurs deux enfants
étant grands et partant en vacances de leur côté avec des bandes de
copains, elle se laisse convaincre de tenter l’aventure.
Avril 2023. Jacques est en route pour Bourg-Saint-Maurice et se

146
replonge cinq ans en arrière. Après Tignes, il s’était inscrit au club de gym
le plus proche de son bureau et astreint à y aller deux fois par semaine au
moins quand il n’était pas en déplacement. En voyage, il avait pris
l’habitude de passer au moins une heure par jour dans les salles de fitness
des hôtels où il logeait. Il avait réduit sa consommation d’alcool, supprimé
les desserts en fin de repas et renoncé à toute forme de grignotage.
Mais la vraie rupture s’était faite en août à la clinique Buchinger.
Hélène et lui avaient été sidérés par la capacité de leur organisme à
s’adapter à une privation complète de nourriture. Ils craignaient d’être
épuisés et de se traîner comme des âmes en peine à longueur de journée.
Bien au contraire, ils avaient débordé d’activité, cumulant chaque jour
randonnée, piscine, fitness et yoga. Ils étaient revenus délestés de tous
leurs kilos en trop et dans une forme d’enfer.
Conscients de l’efficacité de la smartsanté, ils avaient profité de la
dernière semaine du mois d’août pour s’organiser pour le reste de l’année.
D’un commun accord, ils avaient convenu d’opter pour une forme libérale
du Régime 4M, avec un craquage autorisé par semaine avec des copains,
équilibré les deux jours suivants par un jeûne de seize heures. Ils avaient
aussi décidé de renoncer définitivement à la viande bovine sous toutes ses
formes, après avoir réalisé avec horreur que les bovins polluaient au moins
autant que les automobiles.
Pour l’activité physique, ils avaient fait l’acquisition d’un tapis de
course et d’un peu de matériel de musculation, et s’étaient fixé comme
objectif de courir quatre fois par semaine — le weekend, de préférence
dans un parc voisin si la météo le permettait — et de faire ensemble au
moins deux séances de trente minutes de musculation par semaine, en
s’inspirant de séries d’exercices trouvées sur YouTube.
Jacques est aujourd’hui un homme heureux. Il a fait il y a
quelques jours son bilan de santé à l’aide des outils fournis dans le cadre
de CardioSens, qui ont évolué à une vitesse folle. Tous les voyants sont au
vert. Il a retrouvé son poids de superforme, légèrement en dessous de 80
kg. Sa tension est à 130/80, autant dire parfaite, et sa glycémie est tombée
à 0,9 g/l. Seul point de vigilance, un cholestérol encore au-dessus de la
norme, mais la littérature scientifique a considérablement évolué en
quelques années sur le sujet et se montre beaucoup moins alarmiste sur les
risques associés. Il a d’ailleurs arrêté depuis trois ans de prendre des
statines, dont les effets secondaires le handicapaient dans sa pratique du
sport. Il n’a plus vu physiquement son cardiologue depuis trois ans ; il
communique désormais avec lui via CardioSens et fait un point tous les
ans en téléconsultation. Depuis 2019, ces téléconsultations sont prises en

147
charge par sa complémentaire santé.
Jacques et Hélène sont devenus des mordus de la course à pied.
Ils ont couru l’an dernier leur premier marathon à Londres, terminé en
5h15 dans la souffrance, mais c’est le lot de tous les débutants qui ne sont
ni éthiopiens ni kenyans. Ils se sont inscrits cette année au marathon de
New York et ont prévu de s’entraîner d’arrache-pied cet été pour faire un
temps canon. A la montagne, ils sont peu à peu passés du ski alpin au ski
de randonnée. Les conditions sont idéales cette année, avec une neige de
printemps parfaite pour la peau de phoque, et Jacques se réjouit déjà des
sorties qu’il a programmées. Elles se feront en famille, Sophie et Pierre,
leurs deux enfants, s’étant laissé séduire par cette nouvelle approche de la
montagne.
Sur le plan de l’alimentation, Jacques et Hélène se sont
parfaitement adaptés au Régime 4M, agrémenté de quelques trips
glucidiques de temps à autre. Ils en ressentent clairement les bénéfices et
n’ont jamais eu de sensation de frustration ni de manque. Ils ne sont pas
retournés à la clinique Buchinger, mais jeûnent tout de même deux fois par
an pendant une dizaine de jours dans un des multiples centres qui se sont
ouverts en France, généralement de très bonne qualité et plus adaptés à des
personnes jeunes et en bonne santé comme eux.
Sur le plan professionnel aussi, Jacques ressent les bienfaits de la
smartsanté. Il avait fait un bilan de son rapport au travail pendant son
séjour à Buchinger et réalisé qu’il subissait une pression énorme dans le
groupe où il travaillait, qui, cumulée avec des déplacements incessants, le
mettait dans un état de stress permanent. La maison mère en demandait
toujours plus chaque année et il avait compris que toujours plus, ce serait
trop pour lui un de ces jours, qu’il craquerait et ferait un burn-out. Il était
certes extrêmement bien payé mais sentait intuitivement que le jeu n’en
valait plus la chandelle. Depuis 2020, il a changé d’employeur et son
nouveau job est tout aussi passionnant que l’ancien mais dans une
ambiance plus détendue et avec moins de déplacements. Il a fait un
sacrifice de salaire non négligeable mais ne le regrette pas.
Juin 2040. Sophie, la fille aînée de Jacques et Hélène, est en
retard. Elle habite New York et doit prendre l’avion pour Paris, où elle va
fêter le soixante-dixième anniversaire de son père. Sophie est neurologue
et a participé à la conception de la version 10.2 de SantéSens, le lointain
descendant de CardioSens, qui couvre désormais toutes les aires
thérapeutiques. Professeure associée à la New York University, elle vient
de donner une conférence sur le rôle de la nutrition dans la prévention et le
traitement des maladies neurodégénératives. La conférence a visiblement

148
passionné les étudiants et elle s’est fait happer à la sortie par quelques-uns
d’entre eux qui l’ont bombardée de questions.
Des progrès extraordinaires ont été accomplis en deux décennies
dans ce domaine. On sait depuis quelques années déjà qu’un Régime 4M
combiné avec un jeûne intermittent est bien plus efficace et infiniment
moins toxique qu’une chimiothérapie. Les cellules cancéreuses, privées de
glucose, sont tuées dans l’œuf et les cancers ne se développent plus. Les
personnes ayant adopté le Régime 4M et/ou un Jeûne Actif ont une
probabilité de développer un cancer ou d’être victimes d’un accident
cardiovasculaire inférieure de 80 % à celle du reste de la population.
Malgré un combat d’arrière-garde de l’industrie pharmaceutique
et d’une partie du corps médical, la FDA a fini, en 2032, par intégrer le
Régime 4M et le Jeûne Actif dans ses recommandations pour la prévention
et le traitement des cancers et maladies cardiovasculaires. Le sucre ajouté,
c’est-à-dire celui qui n’est pas naturellement contenu dans les fruits, subit
peu à peu le même sort que les graisses hydrogénées dans les années 2010.
Il est interdit dans l’Union européenne et au Japon et en passe de l’être aux
Etats-Unis et au Canada.
Le pionnier de la recherche sur les bénéfices du jeûne dans le
traitement du cancer, Valter Longo, est devenu Prix Nobel de médecine en
2035. Ce n’est que justice car il est à l’origine de l’une des découvertes les
plus importantes de l’histoire de l’humanité : il a démontré que
l’organisme humain, placé dans des conditions optimales, est capable de
créer lui-même les médicaments dont il a besoin pour se défendre contre
des agressions extérieures.
En un quart de siècle, un chemin immense a été parcouru. Les
recherches initiales sur le cancer se sont étendues aux maladies
neurodégénératives. Il est désormais démontré que les corps cétoniques,
ces médicaments créés par l’organisme, agissent non seulement sur le
cancer, mais aussi sur l’épilepsie et les maladies d’Alzheimer et de
Parkinson. Sophie est fière de participer à cette formidable aventure
médicale, la plus exaltante depuis l’invention des antibiotiques.
Elle a réussi à s’échapper et à sauter dans un taxi qui va
l’emmener à Kennedy Airport. Elle est heureuse de retrouver ses parents et
son petit frère adoré, qu’elle n’a pas vus depuis des mois. Ses parents sont
restés étonnamment jeunes et ont couru l’an dernier leur vingtième
marathon. Ils travaillent toujours, même si c’est à un rythme moins
intense. Jacques fait du consulting pour des grands groupes et il croule
sous les propositions de missions. Hélène, médecin comme sa fille et

149
spécialisée en endocrinologie, est toujours active. Atteinte par la limite
d’âge en France, elle passe maintenant une bonne partie de son temps en
Chine, où elle conseille les autorités sanitaires dans l’organisation du
parcours de soins des diabétiques. Un chantier immense (un quart des
diabétiques dans le monde sont chinois) qui va l’occuper encore au moins
dix ans...

150
Bibliographie

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Health Policy Analysis - Social Indicators Research, volume 2, issue 4,
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travail “Activité physique et diabète” de la Société francophone du diabète
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côlon :l’activité physique basée sur les preuves scientifiques – Science &
Sports, décembre 2009, volume 24 (6), pages 273-280.
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Kurzweil, R, Grossman, T (2004) - Serons-nous immortels ?
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Wilhelmi de Toledo, F (2015) - L’art de jeûner – Jouvence
éditions.
Wilhelmi de Toledo, F (2016) - Conversation entre l’auteur et le
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et traitements complémentaires de 55 cancers - Editions du Dauphin.
Willett, WC (2001) - Eat, Drink and Be Healthy. The Harvard
Medical School Guide to Healthy Eating - Avec la Harvard School of
Public Health. Free Press.

153
Remerciements

Mes remerciements vont tout d’abord à mes enfants, Jérémy et


Victoria. Bien qu’ils vivent maintenant à Londres, ils n’ont jamais cessé de
me soutenir et de m’encourager dans mes différents travaux, dont ce livre,
même s’ils les ont payés par de nombreux week-ends sans moi au fil des
années. Jeunes adultes maintenant, ils ne m’en veulent pas trop et je leur
en suis infiniment reconnaissant.
Mes amis de toujours, Jean-Louis et Marie-Cécile Dufloux, qui
sont pour moi une seconde famille, m’ont accompagné et soutenu dans les
moments de doute et de difficulté et ont ainsi apporté une contribution
essentielle à ce travail. Je leur en serai toujours reconnaissant.
Alice Marcillaud, qui a créé smartsanté avec moi et avec qui je
travaille depuis maintenant six ans sur cet ambitieux projet, occupe une
place à part dans l’histoire de ce livre. Sa connaissance de nombreux
aspects de la chose médicale est sans égale et elle a insufflé dans nos
travaux son enthousiasme et sa rigueur. Nos innombrables échanges sur les
sujets abordés ont contribué de manière essentielle à façonner le contenu
de ce livre. Qu’elle en soit chaleureusement remerciée.

154
Mes remerciements vont également à l’équipe pionnière qui a
contribué à la création de smartsanté et à la définition de sa philosophie,
Valérian Claude, Laetitia Deacken, Florence Desthieux et Sophie Ferjaoui.
Les deux premiers sont encore avec nous, Florence s’est orientée vers de
nouvelles aventures dans le domaine de la santé et Sophie a décidé de
reprendre ses études et de devenir médecin, les deux années passées avec
nous lui ayant fait prendre conscience que c’était sa vocation.
Merci aussi à mes clients et amis professionnels du secteur de
l’Assurance maladie, de l’assurance santé privée et de l’industrie de la
santé en général. C’est grâce à la confiance qu’ils m’ont accordée depuis
des années en me demandant de les assister dans leurs ambitieux projets de
prévention et d’accompagnement des malades que j’ai pu acquérir sur ces
sujets une connaissance concrète, de terrain, sans laquelle ce livre n’aurait
pas pu exister.
Merci à Pierre et Anne-Céline Donnersberg, qui m’ont fait
l’amitié de relire mon manuscrit et dont les multiples remarques et
propositions de précisions et d ’améliorations ont été très précieuses.
Marie-Eva Bravo m’a particulièrement aidé dans ma réflexion sur
l’activité physique. Je lui dédie le pilier correspondant, qu’elle a marqué
de son empreinte et qui porte à juste titre son nom.
Merci à Nicole Dervaux, qui a corrigé avec une patience
formidable mon manuscrit, et à Michel Nicolitch, qui lui a donné sa forme
définitive. Ils travaillent avec moi depuis de longues années et chaque
nouvelle opportunité de collaboration avec eux est pour moi un moment de
pur bonheur.
Last but not least, merci à toute l’équipe de jalma , à cette
communauté humaine dont l’expertise et le travail de veille me soutiennent
précieusement dans mon effort d’analyse critique du système de santé
depuis des années.

155
25 recettes pour bien vivre pendant très longtemps décrit dans le détail la
smartsanté, c’est-à-dire la manière dont nous allons nous soigner demain.
La smartsanté repose sur cinq piliers, constitués chacun de cinq recettes.
Le premier est la Médecine Responsable, qui a pour objectif de donner au
patient les outils, objets connectés et autres, nécessaires pour reprendre sa
santé en mains.
Le deuxième, le Régime 4M, est une déclaration de guerre au sucre sous
toutes ses formes. Il préconise une alimentation aussi pauvre que possible
en glucides et, à l’inverse, riche en graisses et en protéines. Un tel régime
n’a que des avantages, il réduit le risque d’obésité et de maladies
cardiovasculaires et, poussé à l’extrême, constitue la meilleure forme de
prévention contre les cancers.
Le troisième est le Jeûne Actif. La grande nouveauté de ces dernières
années est l’impact du jeûne sur la prise en charge du cancer. Une équipe
américaine a mis en évidence l’incidence d’un jeûne court sur les
chimiothérapies, dont il renforce l’efficacité et réduit les effets
secondaires. D’autres expérimentations sont en cours, qui pourraient
révolutionner le traitement des cancers.
Le quatrième, la Méthode Bravo, propose une approche radicalement
différente de l’effort physique. Remplacer le métro par la marche, prendre
l’escalier plutôt que l’ascenseur, faire quelques exercices simples tous les
matins, courir une ou deux fois par semaine est à la portée de tout un
chacun. Et cela suffit, couplé avec le Régime 4M, pour rester en bonne
santé pendant très longtemps.
Le cinquième et dernier pilier de la smartsanté est la Positive Attitude,
qui recouvre la dimension d’intégration de la smartsanté dans la cité. On
ne peut pas être en bonne santé dans un environnement dégradé, dans une
entreprise où les conditions de travail sont exécrables, etc. Notre action sur
notre environnement influe donc directement sur notre santé.
L’auteur :
Mathias Matallah est HEC et actuaire de formation et travaille depuis 25
ans dans le secteur de la santé. Il a notamment créé le cabinet de conseil

156
jalma, qui conseille les acteurs du secteur dans leurs grands projets
d’innovation et la société de technologies et de services en santé
smartsanté, qui est en train de révolutionner le dépistage et
l’accompagnement des maladies cardiovasculaires.

157
Table des Matières
Introduction 4
Le premier pilier de la smartsanté : la Médecine
14
Responsable
Recette n°1 Pour bien vieillir ta santé en mains tu prendras 17
Recette n°2 Par Internet et les objets connectés la surveillance de
22
ta santé passera
Recette n°3 Au progrès médical indéfini de croire tu cesseras 26
Recette n°4 Aux discours de prévention moralisateurs la sourde
29
oreille tu feras
Recette n°5 A la folie prescriptrice des sorciers en blouse blanche
35
tu résisteras
Le deuxième pilier de la smartsanté : le Régime 4M 40
Recette n°6 Contre le syndrome de l’assiette trop pleine toute ta
43
vie tu te battras
Recette n°7 De ton assiette le sucre sous toutes ses formes tu
49
banniras
Recette n°8 La transition entre ton régime actuel et le Régime 4M
55
avec bon sens tu feras
Recette n°9 Les graisses et les protéines le cœur de ton régime
61
alimentaire deviendront
Recette n°10 Par d’autres aliments qui conviennent au Régime 4M
66
ton régime tu compléteras
Le troisième pilier de la smartsanté : le Jeûne Actif 70
Recette n°11 En jeûnant régulièrement ton statut de Sapiens tu
73
retrouveras
Recette n°12 Avec le Jeûne Actif le pouvoir sur ton corps tu
77
reprendras
Recette n°13 Contre les maladies cardiovasculaires le Jeûne Actif
82
ton meilleur atout sera
Recette n°14 Contre le cancer du Jeûne Actif un allié tu te feras 87
Recette n°15 Combiner astucieusement le Jeûne Actif et le
91
Régime 4M tu tenteras
Le quatrième pilier de la smartsanté : la Méthode Bravo 96

158
Recette n°16 Dans la lignée de tes ancêtres Sapiens un nomade tu
99
redeviendras
Recette n°17 Les sports d’endurance qui te protègent des maladies
104
chroniques toujours tu préféreras
Recette n°18 Le diabète grâce à l’activité physique tu géreras 109
Recette n°19 Contre le cancer de l’activité physique tu te serviras 112
Recette n°20 Avec ton smartphone ton activité physique tu
117
piloteras
Le cinquième pilier de la smartsanté : la Soft Attitude 121
Recette n°21 Ton environnement comme un facteur essentiel de ta
124
santé tu considéreras
Recette n°22 Pour éviter le burn-out ton entreprise tu choisiras 128
Recette n°23 Positif en toutes circonstances tu resteras 133
Recette n°24 Pour ne pas le payer très cher un jour tout ce que tu
137
ne maîtrises pas tu éviteras
Recette n°25 Tes données de santé comme ton bien le plus
141
précieux tu protégeras
Conclusion 145
Bibliographie 151
Remerciements 154

159

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