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R. P.

GASTON COURTOIS
Fils de la Charité

L’ESPRIT DE FOI
I.- Pourquoi chercher à développer en nous l’esprit de foi ?
1°) Parce que Notre-Seigneur réclame de nous une foi ardente.
2°) Notre vie religieuse est une absurdité sans une foi vivante.
3°) Notre vie d’éducateurs est stérile sans une foi rayonnante.
II.- Comment arriver à développer en nous la foi au point qu’elle rayonne même à notre insu ?
1°) la demander.
2°) la nourrir.
3°) la protéger.
4°) l’exercer.
5°) la confier à Notre-Dame.
Collection
« Conférences spirituelles »

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Éditions de l'IRIS `
1601 est, Boul. Gouin, Montréal 12
P. Québec - Canada
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R.P. Gaston COURTOIS
Procureur Général à Rome des Fils de la Charité

(Texte reproduit d'après des conférences enregistrées et


non prévues à l'origine pour impression)

L’ESPRIT DE FOI

Pour répondre pleinement à notre vocation, nous voulons devenir des saints, c'est-à-dire essayer,
avec la grâce du Seigneur, de réaliser du mieux que nous pouvons et autant que la fragilité humaine
le permet, le plan d'amour du Père éternel sur nous.
Or, saint Paul nous le répète à trois reprises différentes dans ses épîtres : « LE JUSTE, (autre-
ment dit, en langage biblique, celui qui s'efforce de tendre à la sainteté) VIT DE LA FOI ». Il s'agit
avant tout ici de l'esprit de foi qui nous fait réagir en toutes circonstances selon des vues
surnaturelles, car autre chose avoir la foi, autre chose vivre de la foi.
Pourquoi avoir le souci de faire grandir en nous cet esprit de foi ?
Par quels moyens, travailler à le rendre plus vivant et plus intense,
tels sont les deux points proposés à notre méditation dans cette conférence.

I. - POURQUOI CHERCHER À DÉVELOPPER EN NOUS L'ESPRIT DE FOI ?

1°) Parce que Notre-Seigneur réclame de nous une foi ardente.


2°) Notre vie religieuse est une absurdité sans une foi vivante.
3°) Notre vie d'éducateurs est stérile sans une foi rayonnante.

1°) Notre-Seigneur réclame de nous une foi ardente.

Nous avons tous remarqué en lisant 1'Evangile l'insistance que met jésus à réclamer la foi de
ceux qui l'approchent. Par exemple, il n'est guère de guérison qui ne soit conditionnée par elle et
jésus souvent se plaît à le souligner.
C'est la foi des compagnons du paralytique à Capharnaüm qui obtient la guérison miraculeuse du
grabataire.
C'est la foi qui mérite à la femme malade depuis douze ans d'être délivrée de son infirmité :
« Ma fille, TA FOI T'A SAUVÉS, va en paix et sois guérie ».
Un jour, deux aveugles suivent Notre-Seigneur en criant : « Fils de David, ayez pitié de nous ! »
Jésus les laisse s'approcher et leur dit : « Croyez-vous que je puisse vous guérir ! » - « Oui,
Seigneur », lui répondent-ils. Alors, il leur touche les yeux en disant : « Qu'il vous soit fait SELON
VOTRE FOI ».
Au lépreux qui est venu le remercier, il affirme : « Relève-toi, va, TA FOI T'A SAUVÉ » et la
même expression revient pour la guérison de l'aveugle de Jéricho qui lui demandait : « Seigneur,
faites que je voie ! » Jésus lui dit : « Vois, TA FOI T'A SAUVÉ » et à l'instant il recouvre la vue.
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De même, après sa Transfiguration, il trouve en descendant de la montagne du Thabor un père
angoissé qui lui demande la guérison de son enfant ; les Apôtres avaient essayé et n'avaient pas
réussi. Que lui dit Jésus ? : « Si tu peux croire, tout est possible » - « Je crois, Seigneur, mais
augmentez ma foi », et l'enfant est délivré.
Quand le chef de la synagogue lui demande de ressusciter sa fille, c'est encore la même réponse
que Jésus lui donne : « Crois seulement et elle sera sauvée ».
Quand Marthe, sœur de Lazare, qui était son ami, lui laisse entendre qu'il aurait pu empêcher son
frère de mourir, Notre-Seigneur lui affirme que Lazare ressuscitera, mais il veut avant d'opérer ce
miracle que Marthe accomplisse un acte de foi en sa personne : « Je suis la Résurrection et la Vie, le
crois-tu ? »
Là où il ne rencontre pas la foi, il limite délibérément les efforts de sa puissance. Saint Matthieu
nous dit expressément qu'à Nazareth il ne fit pas beaucoup de miracles « à cause de l'incrédulité de
ses compatriotes ». Il semble que le manque de foi, pour ainsi dire, le paralyse. Mais là où il la
trouve, il ne peut rien lui refuser.
Il est prêt à en faire fréquemment l'éloge : ainsi à Capharnaüm, quand le centurion s'approche de
lui et lui demande la guérison d'un serviteur malade, Jésus lui dit : « J'irai et je le guérirai » et le
centurion de répondre : « Seigneur, ne prenez pas cette peine, je ne suis pas digne que vous entriez
dans ma maison, mais dites seulement une parole et mon serviteur sera guéri. Voyez, j'ai des soldats
sous mes ordres, je dis à celui-ci : « Va » et il va, à celui-là : « Viens » et il vient, à mon serviteur :
« Fais cela » et il le fait ; de même, il vous suffira de dire un mot, de commander à la maladie et elle
disparaîtra ». Jésus manifeste la joie que lui cause cette foi : « En vérité, même chez les fils d'Israël,
je n'ai pas trouvé une foi aussi grande » et s'adressant au centurion il lui dit : « Va, et qu'il te soit fait
selon ta foi ».
La foi est si agréable à Jésus qu'elle finit par obtenir de lui ce qu'il n'était pas dans ses intentions
premières d'accorder. Nous avons de cela l'exemple frappant de la guérison demandée par la
Cananéenne : « Oh ! femme, ta foi est grande, qu'il te soit fait selon ton désir ». Et à l'heure même sa
fille fut guérie.
De ses Apôtres, il réclame une foi totale, sans réserve, sans mesure. C'est sur ce point que sans
cesse il les stimule : « Pourquoi êtes-vous timides, hommes de peu de foi ? » - « Où est votre foi ? » -
« Que disiez-vous entre vous, hommes de peu de foi ? »
A Pierre, venant à sa rencontre sur les flots, qui hésite et qui sombre : « Homme de peu de foi,
pourquoi as-tu douté ? » Au même Pierre d'ailleurs, il rendra un solennel hommage parce que
courageusement il aura témoigné sa foi ; à la question : « Qui dit-on que je suis ? », les disciples
répondaient « Pour les uns, vous êtes Jean-Baptiste, pour d'autres Elie, pour d'autres Jérémie ou l'un
des prophètes » - « Mais pour vous, leur dit-il, qui suis-je ? » Simon-Pierre alors prenant la parole
répondit : « Tu es le Christ, Fils du Dieu vivant » et Jésus d'affirmer : « Heureux es-tu Simon, car ce
n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela (c'est-à-dire la nature humaine laissée à ses seules
forces), mais mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! moi, je te dis : « Tu es Pierre et c'est sur
cette pierre que je bâtirai mon Eglise ».
C'est la même promesse de bonheur que jésus renouvelle lorsque, huit jours après sa résurrection,
il apparaît à Thomas et lui dit : « Parce que tu m'as vu, Thomas, tu as cru ; heureux ceux qui
croiront sans avoir vu. ! »

La foi que Jésus attend de nous est autre chose qu'une simple adhésion intellectuelle à des vérités
abstraites. C'est l'engagement enthousiaste de tout notre être à celui qui a pu dire : « Je suis la Voie,
la Vérité et la Vie ».

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Cet engagement comporte une part d'obscurité et en un certain sens une part de risque : en effet,
comme de dit l'Abbé Perreyve : « Il y a dans les vérités divines assez de lumière pour qu'il soit
raisonnable de croire et il y a assez d'ombre pour que la foi soit mérite et vertu ». C'est pourquoi la
foi est un bel hommage à faire à Dieu ; c'est choisir en sa faveur, c'est, sous l'influence de la grâce
jamais refusée à qui la demande d'un coeur sincère, préférer la parole du Christ, transmise par
l'Eglise, à notre jugement propre. Ce choix est autant une œuvre d'amour qu'un acte de l'esprit :
« Scio qui credidi - Je sais à qui j'ai cru ». Ce cri de saint Paul n'est-il pas à rapprocher de celui de
saint Jean, qui résumait en ces mots toute la foi des premiers chrétiens : « Nous autres, nous croyons
à l'Amour ! ».
Un religieux qui n'aurait pas cette foi ardente ne saurait répondre à ce que Dieu attend de lui.
« Sans la foi, dit l'épître aux Hébreux, il est impossible de plaire au Seigneur ».

2°) Notre vie religieuse est une absurdité sans une foi vivante.

a) Oui, sans la foi, notre vie n'a aucun sens. Nos paroles, nos gestes, nos génuflexions, notre
célibat même ne signifient plus rien. « La vocation religieuse, dit le Chanoine Leclercq, suppose que
Dieu soit perçu comme un être personnel, vivant, avec qui les rapports sont de personne à
personne ».
Si nous avons la foi, tout s'éclaire : la croix, l'hostie, la souffrance, le sacrifice, la mort. L'âme
religieuse ne peut s'épanouir que dans la mesure où elle croit à l'invisible, où elle regarde l'invisible,
où elle travaille pour l'invisible, c'est-à-dire dans la mesure où elle grandit dans la foi. Alors
l'invisible devient une réalité plus solide que le visible. Ce qui ne passe pas revêt à nos yeux plus de
prix que ce qui passe. Nos jugements de valeur s'appuient sur ceux de Dieu. C'est à sa seule lumière
que nous apprécions toutes choses, allant au-delà des apparences pour atteindre en tout et en tous la
réalité profonde, la seule vraie, la seule qui compte. C'est vraiment, comme l'appelle saint Benoît, la
lumière qui transfigure.
b) Plus notre foi est vivante, plus elle devient une force à l'heure de la tentation. La vie, vous
le savez, est un combat. Il y a parfois des répits, mais nous devons être toujours sur nos gardes. Il est
normal que nous ayons à lutter. Où serait notre mérite de vaincre si nous ne subissions jamais aucune
attaque ? Or, le démon s'acharne parfois davantage contre des âmes de religieux parce qu'il sait bien
ce qu'il aurait à gagner en les faisant tomber. Mais c'est saint Pierre qui nous le dit, notre victoire sera
d'autant plus assurée que notre foi sera plus résistante, cui résistite fortes in fide.
c) Au dire du concile de Trente, la foi est la racine de la sainteté : de même que les racines
plongent dans le sol pour y puiser les sucs nourriciers nécessaires à la vie de l'arbre, la foi doit
profondément plonger en Dieu pour y puiser des sucs qui feront la fidélité de notre vie religieuse.
Que les racines viennent à se dessécher, l'arbre va dépérir et se flétrir. Que la foi vienne à s'anémier,
notre vie religieuse perd toute sa force et sa beauté; au contraire, que notre foi s'intensifie, notre vie
d'oraison s'épanouit.
Nous lisons dans le prophète Osée (au chapitre II, verset 20), cette promesse si réconfortante :
« Je t'épouserai dans la foi et tu sauras à ce moment-là que je suis le Seigneur ». Il y a des grâces
d'intimité avec Dieu qui sont la récompense de cette croissance de l'esprit de foi. Au progrès de la foi
active correspond toujours une plus grande dilatation du cœur. N'est-ce point la béatitude promise par
le Divin Maître : « Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu » ?
d) Pour les besoins de l'étude, de l'analyse, de l'exposition doctrinale, les théologiens ont
distingué les trois vertus théologales, mais cette trilogie n'est que la triple expression d'une réalité
unique : notre vie de relation avec Dieu dans la phase terrestre de notre existence.
Il n'y a pas ici-bas de foi véritable sans espérance et sans charité. Il n'y a pas d'espérance sans foi
et sans amour. Il n'y a pas d'amour sans foi et sans espérance.
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Dans le ciel, la charité aura tout absorbé, car il n'y aura plus d'ombre pour donner lieu à la foi,
l'espérance aura fait place à une possession « jusqu'au bord ». Il ne restera plus que l'amour qui
recevra et se donnera dans un échange sans nuage et une étreinte sans réserve.
Nous n'avons que cette terre pour vivre de foi. Profitons-en. Plus tard, il sera trop tard ...

3°) Notre vie d'éducateurs est stérile sans une foi rayonnante.

Nous savons que beaucoup de nos élèves, à l'heure actuelle, sont imprégnés de matérialisme.
Même appartenant à des familles chrétiennes, ils vivent dans une ambiance de plus en plus
paganisante. Que ce soit les chansons, que ce soit la radio, que ce soit la télévision, que ce soit la
littérature, que ce soit les milieux techniques ou d'affaires, le matérialisme pénètre partout.
Il serait vain d'en gémir ou de s'en plaindre. C'est à nous, éducateurs chrétiens, que revient
l'honneur d'apporter à ce monde qui gît dans les ténèbres ou qui se laisse enténébrer, la lumière
salvatrice. C'est vous qui êtes la lumière du monde. Pour beaucoup d'hommes aujourd'hui, vous le
savez, seul ce qui se voit, ce qui se touche, ce qui se palpe compte. Or, nous devons être les témoins
des réalités invisibles.
Le monde dans lequel nous vivons n'a que trop souvent des réflexes païens : haine, violence,
impureté, mollesse, égoïsme, amour de l'argent. C'est à nous de lui donner peu à peu des réflexes
chrétiens. C'est de nous que dépend en grande partie la notion que nos jeunes se feront plus tard de la
religion qui doit informer toute leur vie, aussi bien professionnelle que familiale, aussi bien
personnelle que sociale.
Il faut donc que leur âmes à notre contact sentent que pour nous Jésus-Christ n'est pas quelque
chose mais « quelqu'un », et pas seulement quelqu'un du passé, mais quelqu'un d'actuel, pas
seulement quelqu'un de lointain, mais quelqu'un de proche, quelqu'un d'aimant, notre grand Ami
auquel nous avons consacré notre vie et pour lequel nous sommes prêts, s'il le faut, à verser notre
sang.
Il faut lorsque nous parlons de lui, lorsque nous prononçons son nom, que quelque chose de notre
âme, plus encore de notre amour, passe dans notre voix. Rien n'est contagieux comme une foi ardente
qui rayonne à l'insu même de celui qui la possède. Si les âmes des jeunes sentent que nous croyons
vraiment à ce que nous disons et que nous agissons conformément à ce que nous affirmons, leur foi
s'éveillera et s'affermira. Notre attitude à l'heure de la prière, notre façon de faire le signe de la croix,
le respect avec lequel nous prononçons les paroles religieuses, le regard de foi que nous fixons sur
l'Hostie ont à notre insu plus d'influence sur les âmes qu'un discours minutieusement préparé qui
ressemblerait à une leçon apprise par cœur. Ce que nous sommes - ou tout le moins ce que nous nous
efforçons d'être - influence bien plus que ce que nous disons. « On fait encore plus de bien par ce que
l'on est que par ce que l'on dit », affirmait le philosophe Ollé - Laprune.
Educateurs chrétiens, nous sommes les distributeurs de réalités qui ne se voient pas. Il nous faut
être des hommes qui sachent voir à travers les apparences. Plus ou moins consciemment beaucoup
d'âmes nous attendent. En tout cas, beaucoup ont les yeux fixés sur nous. Nous sommes pour ces
jeunes celui qui a des relations officielles avec l'au-delà. Nous sommes des religieux. Qu'est-ce que
c'est qu'un religieux, sinon celui qui est constamment en relation avec le Seigneur ? Il faut que cela se
sente.
Et même pour ceux qui ne partageraient pas notre foi, nous ne sommes pas tout à fait des
hommes comme les autres. Ce qu'ils attendent de nous, c'est une réponse vivante à la question qui, un
jour ou l'autre, devant une douloureuse épreuve ou devant la perte d'un être cher, se posera à eux :
« Dieu est-il une réalité qui doive compter dans ma vie ? », « Dois-je vivre en fonction de
l'éternité ? » Il ne s'agit pas de leur asséner une affirmation péremptoire, encore moins de leur donner
un mot banal de consolation. Il faut que puisse jaillir de notre cœur - parce que c'est toute notre vie
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qui en garantit l'authenticité - l'un de ces mots de lumière qui suffira parfois à les bouleverser et à
changer l'orientation d'une existence. Il faut qu'à l'heure de la tentation, aujourd'hui ou plus tard,
quand ils seront loin de nous, notre simple souvenir les aide à la surmonter.
Nous ne croyons pas assez à la puissance de notre foi. Ce que les jeunes espèrent plus ou moins
consciemment de nous, ce que, en tout cas, ils ne sont jamais étonnés de nous voir leur donner,
c'est .Jésus-Christ. Ce serait dommage de leur apparaître uniquement comme un bon professeur
profane alors que nous avons à leur communiquer, à travers tout notre enseignement, une vraie vie de
foi et cela avec tellement d'amour qu'elle soit pour eux une lumière qui illumine toute leur existence.
Oui, Messieurs, nous devons être pour eux tous des révélateurs de Jésus-Christ, des messagers de
l'Evangile.
Un religieux doit pénétrer d'esprit de foi les tâches qui lui sont confiées. Sinon, c'est un
mercenaire, ce n'est plus un religieux. Si ce n'est pas le Christ qui parle par nos lèvres, qui aime par
nos cœurs, qui agit par notre activité, si ce n'est pas Lui que nous avons en vue à travers nos enfants,
si ce n'est pas pour lui qu'en définitive nous travaillons, nous bâtissons sur le sable.
Quand notre activité ne jaillit pas de la foi, ce sont uniquement des raisons d'ordre naturel qui
sont nos motifs d'action. On peut faire beaucoup de poussière, ce n'est pas construire ; on peut faire
beaucoup de fumée, ce n'est pas réchauffer ; on peut faire beaucoup de bruit, ce n'est pas faire du
bien.
Notre monde moderne est un monde technique où rien ne traduit la présence du sacré, un monde
dépourvu de mystère où n'est envisagé comme réel que ce qui est objet d'expérience. Il importe à
l'heure actuelle plus que jamais de former des chrétiens qui dans leur milieu de vie soient des
affirmations à la fois simples et sincères du surnaturel. Il appartient avant tout aux âmes consacrées
de donner elles-mêmes un témoignage rayonnant de foi authentique.
« Malheur à moi si je n'évangélise pas », disait saint Paul. Pour que notre message passe, il faut
que notre foi soit fulgurante.
Toutes les audaces sont permises à celui qui croit vraiment. La promesse du Christ est formelle :
« Celui qui croit en moi fera les choses que je fais et de plus belles encore. Il aura davantage de
succès que j'en ai eu sur terre ». Et comme affirme saint Jean : « Notre foi doit être la force qui fait
plier le monde ».
Oui, Messieurs, l'esprit de foi conditionne la fécondité de notre vie spirituelle et de notre vie
d'éducateurs chrétiens.

II. - COMMENT ARRIVER À DÉVELOPPER EN NOUS LA FOI AU POINT QU'ELLE


RAYONNE MÊME À NOTRE INSU.
1°) La demander.
2°) La nourrir.
3°) La protéger.
4°) L'exercer.
5°) La confier à Notre-Dame.

1°) La demander.

La foi est un don de Dieu auquel nous n'avons pas droit par nous-mêmes. C'est un don gratuit
que nous avons reçu en germe au baptême, mais dont le développement suppose que nous le
demandions avec insistance : « Seigneur, je crois, mais augmentez ma foi » - « Seigneur, faites que
je voie ».
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Si nous croyons vraiment à son importance, nous demanderons chaque jour d'en avoir une dose
de plus en plus intense, qui nous permettra de percevoir Dieu en nous-mêmes, à travers nos
confrères, à travers nos supérieurs, à travers nos élèves, à travers toutes les circonstances de notre
vie.

2°) La nourrir.
Il ne suffit pas de demander la grâce de la foi, il faut la nourrir.
Rien ne nourrit la foi comme la parole de Dieu. Ayons une véritable dévotion à la Sainte
Ecriture. Constituons-nous une anthologie personnelle des paroles inspirées. Ne craignons point d'en
apprendre un bon nombre par cœur, de les citer souvent, mais surtout de les vivre.
Soyons attentifs à l'enseignement de l'Eglise, des Encycliques pontificales si riches de substance,
des Lettres de nos évêques. Rappelons-nous la parole du Maître : « Qui vous écoute m'écoute ».
C'est surtout dans l'oraison, dans cette prise de contact personnelle avec le Seigneur que
s'acquiert et se développe ce sens spirituel qui nous permet de percevoir sa divine présence et de
comprendre le sens profond de ses divines paroles. « Notre compagnie est dans l'au-delà » « Nostra
conversatio in cœlis est » disait saint Paul. Alors nous projetterons sur les réalités terrestres les
lumières de l'éternité, nous vivrons comme nous voudrions avoir vécu lorsque nous serons de l'autre
côté.

3°) La protéger.
Rien n’est plus dangereux pour la vie religieuse que de laisser notre foi s'anémier. Pour cela,
ayons la volonté d'une loyauté totale et surveillons nos, mobiles d'action et nos affections ; nous
sommes si enclins à nous faire illusion ! Tant que nous tenons à quelque chose pour nous, si peu que
ce soit, un écran de brouillard nous cache Dieu ; mais en revanche, si nous brisons net dès que nous
avons conscience de la moindre recherche de nous-mêmes, l'horizon s'éclaircit et de nouveau, Dieu
se laisse entrevoir.
L'un des plus grands dangers de la tiédeur, c'est l'obscurcissement progressif de l'esprit par
rapport aux réalités surnaturelles, l'endurcissement du cœur qui ne savoure plus rien des biens
spirituels. C'est là où l'ascèse, c'est-à-dire la fidélité aux petits sacrifices de la vie de chaque jour,
nous rend service car elle assure la limpidité de notre regard de foi : « Bienheureux les cœurs purs,
car ils verront Dieu ».
Soyons également vigilants à bannir de notre esprit toute pensée d'orgueil. L'humilité est une des
conditions de croissance pour notre foi : « Nous ne pouvons bien connaître Dieu qu'en connaissant
nos iniquités. Aussi ceux qui ont connu Dieu sans connaître leur misère ne l'ont pas glorifié mais se
sont glorifiés », disait Pascal. Le Seigneur se fait lointain pour ceux qui font les savants et les
suffisants. « Je te rends grâces, ô mon Père, d'avoir caché cela aux sages et aux habiles et de l'avoir
révélé aux tout-petits ».

4°) L'exercer.
Nous connaissons tous le vers fameux : « La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère ? » De
fait, à force de ne pas vivre comme l'on pense, on finit par penser comme l'on vit. Il nous faut agir en
conséquence des données de notre foi. C'est pourquoi il nous faut bien nous garder de mettre des
cloisons étanches entre notre vie de piété et nos activités.
Une des conditions de la croissance de la foi, c'est avant tout l'effort loyal pour agir en toutes
circonstances en conformité avec elle. En pratiquant la vérité que l'on sait, on mérite celle qu’on
ignore.
Notre-Seigneur l'a bien dit : « Celui qui fait la vérité, vient à la lumière ».
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Que la présence de Dieu nous soit familière, que Dieu soit vraiment pour nous quelqu'un, quel-
qu'un de vivant, quelqu'un de très proche, quelqu'un qui compte dans nos pensées, dans nos
préoccupations, dans nos projets, quelqu'un avec qui nous comptons et sur qui savons que nous
pouvons toujours compter.
Multiplions des actes de foi. Pensons davantage à sa présence. Sachons le voir à travers la nature.
N'est-elle point un livre qui révèle à l'âme de foi le Créateur ? Sachons le voir à travers les
événements, parfois déconcertants pour notre pauvre logique humaine. « Mes voies ne sont pas vos
voies », dit le Seigneur, mais c'est le Seigneur qui mène et rien ne peut nous manquer. Sachons le
voir surtout à travers les autres, c'est le fondement le plus sûr de la charité. Quand nous entrons dans
la chapelle, que notre génuflexion ne soit pas une cérémonie de simple convenance exécutée par
routine, mais un hommage de foi intime et d'adoration profonde devant Notre-Seigneur, comme si
nous le voyions dans tout l'éclat de sa gloire.
Avons-nous compris que notre attitude à l'heure de la prière, notre façon de faire le signe de la
croix, notre ton de voix quand nous parlons de Lui ont à notre insu plus d'influence sur les âmes que
les plus beaux discours ? Redisons-le : La foi est essentiellement contagieuse, mais à la condition
qu'elle soit loyale et vécue.

5°) La confier à Notre-Dame.


Confions notre foi à celle qui est par excellence la Vierge fidèle.
Dans le silence de l'oraison, contemplons longuement les attitudes et les paroles qui nous sont
rapportées d'elle dans l'Evangile. Contemplons-la dans les différents mystères joyeux et douloureux ;
nous verrons qu'elle est pour nous non seulement un modèle de foi vivante, humble et silencieuse,
mais une mère aimante qui peut nous aider par son influence à guider les âmes qui cherchent, à
soutenir celles qui trébuchent, à guérir celles qui doutent, pour les conduire à son Fils qui est la
Résurrection et la Vie.

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