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C O L L O Q U E I N T E R N A T I O N A L SU R L A R E PO NSE D U SO U F ISM E à la C R ISE

E n prélude au G rand M agal de Touba,

É dition 1433 / 2012

'XDX'pFHPEUHjO¶K{WHO0pULGLHQ3UpVLGHQW

Dakar /Sénégal

1  

 
Introduction
« $XUHJDUGGHO¶KLVWRLUHGX0RXULGLVPHF¶HVWODSUHPLqUHIRLVTX¶XQHWHOOHDFWLRQHVWPHQpH »
9RLOjHQVXEVWDQFHOHWpPRLJQDJHG¶XQpPLQHQWJXLGHUHOLJLHX[jSURSRVdu Colloque organisé à
O¶RFFDVLRQGHODFpOpEUDWLRQGX*UDQG0DJDOGH7RXED

Le thème retenu «Réponse du Soufisme aux crises du Monde » trouve toute sa pertinence
doublement  G¶XQH SDUW GDQV OD WUDGLWLRQ LVODPLTXH VpQpJDODLVH YRLUH DIULFDLQH HW G¶DXWre part
dans le contexte mondial actuel.

(Q HIIHW O H[SDQVLRQ GH O LVODP HQ $IULTXH V¶HVW UpDOLVpH VXUWRXW JUkFH DX[ HIIRUWV GHV ILJXUHV
Soufies qui ont créé des confréries et contribué largement à la propagation de la foi islamique.

Les courants soufis, au-GHOj GHV SULQFLSHV GH EDVH GH O¶,VODP PHWWHQW O DFFHQW VXU OHV YDOHXUV
morales et spirituelles et le perfectionnement de l'âme charnelle. Au Sénégal la vie religieuse des
musulmans trouve son socle dans les confréries.

Leurs fondateurs ont légué à la SRVWpULWp XQ ULFKH SDWULPRLQH TXL FRQWLQXH G¶rWUH XQH IRUFH
motrice de rayonnement religieux et un facteur de stabilité et de mobilisation sociale.

Dans cette perspective, Cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul a initié une voie sans
précédent, dans le sillage de la tradition prophétique de Mouhamed (PSL).

Dans le contexte actuel de mondialisation, de conflits et de crise, où chaque peuple est appelé à
apporter sa contribution à l'édification d'un monde meilleur, un monde de paix, de stabilité et
d'entente, sans renoncer à son identité, il s'avère important de s'interroger sur ce que les
enseignements du soufisme en général et du Mouridisme en particulier peuvent y apporter.

Dans cette optique, d'éminents chercheurs et spécialistes ont été invités à faire des
FRPPXQLFDWLRQVHWjpFKDQJHUGDQVOHFDGUHGHWKqPHVD[pVVXUODTXHVWLRQ7HOHVWO¶REMHWGHFH
FROORTXH LQWHUQDWLRQDO TXL V¶HVW WHQX j O¶K{WHO 0pULGLHQ 3UpVLGHQW GH 'DNDU GX  DX 
Décembre 2012 sous la bénédiction du Khalif Général des Mourides, Cheikh Sidy Moukhtar
MBACKE.

/¶REMHFWLIJpQpUDOHVWGHIDLUHUHVVRUWLUOHYpULWDEOHVHQVODSUDWLTXHRUWKRGR[HHWODKDXWHSRUWpH
GX6RXILVPHGDQVXQHSHUVSHFWLYHG¶HQIDLUHGpFRXOHUGHVYRLHVHWPR\HQVDSSURSULpVSRXUPHQHU
une vie harmonieuse et adaptée dans le contexte mondial actuel.

$LQVLLOV¶HVWDJLGH clarifier les origines islamiques du soufisme, de montrer le rôle du Soufisme


dans le développement et la propagation de l'Islam en Afrique et de revisiter les valeurs
islamiques et le rôle actif du Soufisme en général et du Mouridisme en particulier face aux défis
susmentionné.

2  

 
/HFROORTXHV¶HVWGpURXOpHQWURLVMRXUVHWOHVFRPPXQLFDWLRQVRQWpWpHIIHFWXpHVjWUDYHUVTXDWUH
sessions dont chacune est déclinée en plusieurs thèmes. Les sessions ont porté sur les thématiques
suivantes (avec pour chacune plusieurs thèmes) :

- Session I : Réalités et principes du soufisme modérée par Dr Hamdan Wuld Attah

- Session II : Soufisme et valeurs humanistes modérée par Dr Khadim Mbacké


chercheur à l'IFAN

- Session III : Soufisme et politique modéré par Oustaz Sidy Lamine Niass
PDG Groupe Walfadjri

- Session IV : Crise économique : le soufisme comme paradigme salvateur modérée


par Oustaz Ibrahim Mahmoud Diop et Dr Thierno Ka

- Session V: Réponse du soufisme aux crises socioculturelles, modéré par Dr


Mouhamed El Bachari Président de la confédération des musulmans d'Europe

Les thématiques développées se présentent comme suit :

¾ L e soufisme : Moyens et objectifs, par Dr Cheikh Mouhamed Souhayb Mouhamed


Achami, Chercheur Membre de la Commission de recherches et des affaires islamiques de
la Syrie.

¾ L a migration dans le parcours des hommes de DieuxSDU0(FLUøùø<g.'LUHFWHXU


de la Recherche Scientifique de Hira-magazine et de l'Académie-islamique, Turquie.

¾ A l-A mn (sécurité, quiétude) et al-iman (la foi) dans l'expérience soufie de C heikh
A hmad Bamba par Dr Mouhamed Shaqroun, Professeur de Civilisation islamique,
Université de Tunis, La Tunisie

¾ L e soufisme et le « moi » par Pr Souleyman Bachir Diagne, professeur de Philosophie,


Université Columbia, New York.

¾ L e soufisme et le projet de rationalisation, par Dr Abdoul Hamid Achak, professeur à


Dar al-Hadith al-Hassanyya Maroc.

¾ /¶pWKLTXH GH OD VXEMHFWLYLWp SROLWLTXH HQ LVODP : la révélation du sujet dans la
philosophie de Muhammad Iqbal, par Dr. Blondin Cissé, Csprp (Université Paris Diderot
Paris 7), Iris (Ehess).

¾ Soufisme et questions contemporaines: les voie d'une éthique de développement, par Pr


Abdou Aziz Kébé, Département Arabe UCAD Dakar.

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¾ L e soufisme face aux problèmes de cohabitation entre les peuples sur les plans
économique et politique, l'exemple du mouridisme par Dr Yahya wuld El Bara
Université de Nouakchott, Mauritanie.

¾ L e rôle du soufisme dans la réforme, Par Professeur Ahmad Mahmoud Karima


Université Al Azhar Egypte

¾ Du lieu commun (Touba) aux « lieux-PRPHQWV ª FpOpEUDWLRQV j O¶pWUDQJHU  OHV


mourides surfent sur la vague de la mondialisation par la conquête territoriale, par
Cheikh Gueye, Docteur en géographie Chercheur à Enda Tiers Monde,

¾ &KHLNK $KPDGRX %DPED j 'LRXUEHO /D FRQVWUXFWLRQ G¶XQ HVSDFH DXWRQRPH SRXU
O¶,VODPGDQVOH%DRO2ULHQWDOFRORQLDO-1927, par Professeur Cheikh Anta Babou,
Université de Pennsylvanie

¾ Touba, ville soufie, par Pr. Eric Ross, Al Akhawayn University, Morocco

¾ L es grandes figures du soufisme, par Oustaza Maha Haj Ali, Syrie

¾ L a littérature wolof de la Mouridyya : Un océan de sagesse et de baraka pour tous. Par


Pr. Fallou Ngom, Université de Boston±USA

¾ L e soufisme est le salut; SDU 'U 2XVPDQH 'LD -XJH j OD &RXU G¶$SSHO UHOLJLHXVH GH
Gambie.

Outre les dignitaires de la Communauté Mouride, étaient invités à ce colloque :

9 Les différentes confréries, familles et associations religieuses musulmanes du Sénégal ;

9 Des hôtes venant de Pays étrangers : (J\SWH 0DOL &RWH G¶,YRLUH )UDQFH 1LJpULD
M auritanie, T unisie, C anada, Belgique, M aroc, Syrie, E tats Unis, T urquie, G ambie.

4XDQW j OD FRQFHSWLRQ HW O¶RUJDQLVDWLRn du colloque, plusieurs rencontres préparatoires ont été
WHQXHVHWRQWUHJURXSpG¶XQF{WpOHVPHPEUHVGX&RPLWpG¶2UJDQLVDWLRQj7RXEDHWG¶DXWUHSDUW
FHX[GX&RPLWp6FLHQWLILTXHj'DNDU&HVUHQFRQWUHVRQWpWpO¶RFFDVLRQGHGpILQLUHQVHPEOHOHV
modalités organisationnelles et le contenu scientifique du colloque.

/HVWUDYDX[RQWpWpDEULWpVSDUO¶K{WHO0pULGLHQ3UpVLGHQWGH'DNDUDYHFODPRELOLVDWLRQGHWRXWH
la logistique et des outils nécessaire.

4  

 
C érémonie G¶RXYHUWXUH
A llocutions
&
Conférence inaugurale

5  

 
I ± L A -2851(('¶289(5785(
/DFpUpPRQLHG RXYHUWXUHV¶HVWWHQXHOH9HQGUHGL'pFHPEUH1. Elle a été présidée par Son
Excellence Maître Abdoulaye WADE, Président de la République du Sénégal, en présence du
représentant du Khalif Général des Mourides Serigne Bassirou Abdou Khadre, des représentants
des Familles religieuses et des associations islamiques du Sénégal, des autorités traditionnelles et
politiques et des Oulémas et spécialistes venant de divers pays du monde.

Les discours se sont succédés et sont relatés comme suit :

A llocution de Serigne Bassirou A bdou K hadre, Porte Parole du K halif Général des
Mourides

$X QRP  G¶$//$+ OH 0LVpULFRUGLHX[ OH 7RXW 0LVpULFRUGLHX[


/RXDQJHVj$//$+OHPDvWUHGHO¶XQLYHUVTXLDDVVXUpODERQQH fin aux pieux.

Que la paix et le salut soient sur le sceau des prophètes et le guide suprême des messagers de
Dieu, sur sa famille, sur ses compagnons et sur tous ceux qui les suivent sur la voie de la foi et de
la charité jusqu'au jour du jugement dernier

Excellence, Monsieur le Président de la République,

Honorables guides religieux et représentants de confréries,

Chers éminents érudits et chercheurs,

Excellences et Messieurs les représentants des pays islamiques et pays amis,

Mesdames et messieurs, chers invités,

Assalamou Aleikoum wa rahmatoullahi wa barakatouhou

Honorable assistance,

,O HVW XQH XOWLPH PDUTXH G¶KRQQHXU SRXU PD PRGHVWH SHUVRQQH GH YRXV SUpVHQWHU FHWWH
allocution au nom du Cheikh Sidy Mouhtar MBACKE, le khalife général des mourides, que Dieu
OHSUpVHUYHELHQHWOHSURWqJHDLQVLTX¶DXQRPGHVRQIUqUH&KHLNK$KPDG0RXKWDU0%$&.(
ici présent pour le représenter.

Honorable assistance,

Je vous souhaite tous la bienvenue tout en vous remerciant de votre présence très
honorifique et je magnifie votre remarquable contribution pour la tenue de ce colloque
international dans les meilleures conditions. Ce colloque organisé pour la première fois au
Sénégal dans le cadre des activités commémoratives du Magal de Touba.
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Cet évènement religieux annuel auquel a incité, fortement, le fondateur du mouridisme
pour rendre grâce à Dieu des innombrables bienfaits apparents et cachés que son exil au Gabon,
en 1895, lui a procurés.

Au fil des temps, cet évènement est devenu le plus grand rassemblement humain de la
sous-région où convergent des millions et des millions parmi toutes les couches et toutes les
composantes de la société sénégalaise à Touba. Cet événement marque aussi la présence
remarquable à Touba de tous les dirigeants du pays, de toutes obédiences et sensibilités
confondues. Tout cela dans une fructueuse interaction à travers des rencontres intellectuelles de
QDWXUHjIDYRULVHUODFRPPXQLRQGHVF°XUVHWjFUpHUODFRQYHUJHQFHGHYXHGDQVXQHDPELDQFH
IUDWHUQHOOHTXLSHUPHWDX[JHQVGHV¶HQWUHFRQQDvtre et de se comprendre davantage. Ce qui fait
TXH O¶pYqQHPHQW GX 0DJDO RFFXSH XQH SODFH WUqV LPSRUWDQWH FKH] OD SOXSDUW GHV KRPPHV GH
VFLHQFHHWGHSOXPHFDULOV\YRLHQWXQWHUUHDXIHUWLOHSRXUFRQVWUXLUHOHVEDVHVG¶XQHVDLQHVRFLpWp
islamiques où les dLIIpUHQFHV HW OHV SHWLWHV DSSDUWHQDQFHV VHURQW HIIDFpHV SRXU OH FRPSWH G¶XQH
V\PELRVHHWG¶XQHWUqVEHOOHFRH[LVWHQFHDXUpROpHVSDUOHVVXEOLPHVLGpDX[GHVHQVHLJQHPHQWVGX
Ciel.

Chers éminents savants et penseurs de la nation islamique, ce colloque auquel vous


assistez à la séance inaugurale entre dans le cadre des activités liées à la 116ème célébration de
O¶H[LO GX &KHLNK $KPDGRX %DPED $ORUV TXH WRXW OH PRQGH VDLW TXH SHUVRQQH QH SRXUUD
circonscrire tous les aspects de la vie de cette très saillante personnalité et sa contribution dans le
GRPDLQHGXVRXILVPHLVODPLTXHjO¶pSRTXHFRQWHPSRUDLQH&HWWHFRQWULEXWLRQTXLFRQWLQXHUDGH
rayonner toujours.

'HSXLV OH GpEXW GH VD YLH VFLHQWLILTXH LO V¶pWDLW GRQQp FRPPH PLVVLRQ GH UHYLYLILHU OHV
sciences islamiques surtout le soufisme dont il a développé sa méthode et ses conceptions avec un
JpQLH LQWHOOHFWXHO LQpJDODEOH &H TXL O¶D SHUPLV GH IRQGHU XQH QRXYHOOH FRQIUpULH HQ SDUIDLWH
FRQIRUPLWp DYHF OHV H[LJHQFHV GX PRPHQW GDQV OH GRPDLQH GH O¶pGXFDWLRQ HW GH O¶RUganisation
VRFLDOH ,O V¶DJLW LFL G¶XQH JUDQGH RSSRUWXQLWp SRXU UHQRXYHOHU OH FRQWDFW DYHF FH SHQVHXU
PXVXOPDQVHUHVVRXUFHUGHVHVHQVHLJQHPHQWVHWG¶DVVLPLOHUVRQGLVFRXUVVRXILGDQVFHWWHpWDSH
de notre vie très délicate marquée par des évènements, des évolutions et des défis qui laissent des
séquelles négatives dans la vie de la nation islamique qui subit une crise multiforme dans les
domaines politique, social et moral. Cette situation qui laisse de très lourdes pesanteurs sur la vie
sociale et culturelle du monde musulman.

Chers éminents penseurs et chercheurs, sans aucun doute, vous vous trouvez interpelés
par cette situation de crise au premier chef et vous êtes mis devant vos énormes responsabilités
qui consistent en la nécessité de relever tous ces défis de manière consciente et courageuse et de
WUDYDLOOHUjWLUHUOHVFRQVpTXHQFHVHWOHVOHoRQVTX¶LOIDXWGHFHWWHVLWXDWLRQ(QHIIHWODWHQXHGHFH
colloque, sous le thème du soufisme islamique, vise à traiter des questions très complexes liées à
notre vie spirituelle, sociale et culturelle avec comme objectif principal de trouver une conception
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commune sur la nature du rôle du soufisme dans notre vie contemporaine. La séquence
temporelle qui nous sépare de Cheikh Ahmadou Bamba a vu naître plusieXUVW\SHVG¶pYpQHPHQWV
GHGpYLDQFHVHWGHFULVHVG¶XQHJUDYLWpH[WUrPH&HTXLDFUpHXQHFRQIXVLRQGDQVOHVYLVLRQVHW
un dérèglement dans les comportements, surtout au niveau des jeunes et des femmes. Ce qui
menace notre existence et notre identité cultXUHOOHHWTXLVqPHOHGRXWHGDQVO¶HVSULWGHVMHXQHVHW
des générations montantes.

Il découle des enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba une vérité selon laquelle
O¶KXPDQLWp GRLW WRXMRXUV UpYLVHU VRQ DWWLWXGH IDFH j VD IDoRQ G¶DGRUHU 'LHX HW j VH VRXPHWWUH
H[FOXVLYHPHQWjVDYRORQWpFKDTXHIRLVTX¶HOOHEXWHGHYDQWGHVGLIILFXOWpVHWGHVFULVHV&HFLSRXU
se conformer à la prescription divine qui doit prévaloir dans la vie.

Pour ne pas nous montrer défaitistes dès le début, nous vous réitérons nos grandes attentes
et nos grands espoirs placés en vos exceptionnelles compétences et capacités à traiter toutes les
questions liées à notre riche patrimoine islamique à partir des données et des normes scientifiques
contemporaines.

Chers éminents savants et penseurs venus de toute part pour répondre à notre appel,
sachez que nous sommes grandement conscients et rassurés quant à vos hautes compétences et
qualifications qui vous ont poussé à tant de sacrifice pour le compte de la nation islamique et le
EpQpILFHGHO¶KXPDnité toute entière.

7RXVQRVUHPHUFLHPHQWVHWQRWUHHVWLPHjYRXVWRXVDLQVLTX¶jWRXVFHX[TXLRQWFRQWULEXp
de près ou de loin, pour la tenue de cet évènement. Il vient à la tête de ceux-ci son Excellence le
Président de la République Maître Abdoulaye WADE dont le soutien matériel et moral pour la
tenue de ce colloque a été remarquable. Il a fait tout cela en sa qualité de Président de la
5pSXEOLTXH GRXEOpH G¶XQ PRXULGH HQJDJp TXL D FKRLVL &KHLNK $KPDGRX %DPED FRPPH VRQ
guide religieux et grâce à sa sagesse qui lui a permis de concilier ces deux qualités sans léser ou
frustrer les autres. Cette équidistance est, sans doute, une qualité très importante pour un chef
G¶(WDW

([FHOOHQFH 0RQVLHXU OH 3UpVLGHQW GH OD 5pSXEOLTXH F¶HVW DX QRP GX &KHLNK 6LG\
Mouhtar MBACKE le Khalife général des mourides et en mon nom personnel, que je vous
exprime les plus hauts sentiments du respect et du remerciement pour toutes vos réalisations dans
OHGRPDLQHGXGpYHORSSHPHQWHWSRXUYRWUHVRXWLHQLQGpIHFWLEOHSRXUO¶DFWLRn islamique et pour
VHVDFWHXUVDX6pQpJDO4XH'LHXYRXVHQUpFRPSHQVHGHODIDoRQODPHLOOHXUHSRXUO¶LVODPHWOHV
musulmans.

+RQRUDEOHDVVLVWDQFHF¶HVWHQWRXWHVROHQQLWpTXHMHGpFODUHO¶RXYHUWXUHGHVDFWLYLWpVGHFH
colloque international autour du soufisme, à Dakar la capitale de la République du Sénégal.

Assalamou Aleikoum

8  

 
A L L O C U T I O N D U PR ESI D E N T D E L A R E PU B L I Q U E M E A B D O U L A Y E
WADE

Assalamou halaykoum wa rahmatullahi wa barakatuhu (que la paix, la miséricorde et la grâce de


Dieu soient sur vous).

Chers compatriotes sénégalais ;

Chers représentants du khalife général des mourides Serigne Sidy Moukhtar Mbacké ;

Toutes les confréries du Sénégal.

-¶DGUHVVH PHV YLYHV VDOXWDWLRQV j WRXV HW j FKDFXQ SDU VRQ QRP HW VRQ SUpQRP -H UHPHUFLH OHV
délégations iFL SUpVHQWHVYHQDQW GX6pQpJDO HW G¶DXWUHVSD\V3RXUWRXV FHX[-ci, je formule des
prières  TX¶LOV VRLHQWDFFRPSDJQpVSDU$//$+GXUDQW WRXWOHXUVpMRXUHW SXLVVHQW UHWRXUQHUHQ
SDL[0DSUpVHQFHGDQVFHVJHQUHVG¶pYqQHPHQWHQWDQWTXHFKHIGHO¶(WDWPH semble être une
QpFHVVLWpFDUOHVUHFKHUFKHVHWUpIOH[LRQVTXLV¶\GpURXOHQWVRQWXWLOHVSRXUODPDMRULWpPXVXOPDQH
GHQRWUHSD\V$FHODV¶DMRXWHGHVLGpHVTXLSURILWHQWDXPRQGHHQWLHUFDUSU{QDQWODFRKDELWDWLRQ
c'est-à-dire comment vivre dans une nation et plus spécifiquement la nation sénégalaise.

La question pour laquelle vous êtes ici présents est une question sur laquelle les savants ont
beaucoup discuté pendant longtemps et même des siècles. En effet, tous les musulmans partagent
des choses G¶DERUGOHIDLWG¶rWUHPXVXOPDQGHFURLUHHQ$//$+HWHQVRQ3URSKqWH ; ensuite
OHVGHYRLUVGXPXVXOPDQTXLVRQWDFFRPSOLVSDUWRXV(WVXUFHVFKRVHVM¶DLEHDXFRXSG¶LGpHV
&DURQQ¶DSDVSUHVFULWTXHWRXWOHPRQGHGRLWDYRLUOHVPrPHVLGpHV&HTX¶RQSDUWDJHF¶HVWFH
GRQWMHIDLVDLVDOOXVLRQWRXWjO¶KHXUHF¶HVW-à-GLUHTXHQRXVVRPPHVWRXVGHVPXVXOPDQVTX¶RQ
VRLW DUDEH RX KDELWDQW G¶XQH DXWUH FRQWUpH 0LHX[ LO H[LVWH PrPH GHV GRFXPHQWV FRPPH OHV
hadiths qui peuvent nous éclaircir sur la manière de conduire un pays. Mais, si on regarde les
SD\VPXVXOPDQVHQFHPRPHQWRQFRQVWDWHEHDXFRXSGHGLYHUJHQFHVHQWUHHX[PrPHV¶LOVVRQW
tous des musulmans.

(QFHTXLPHFRQFHUQHMHQHVXLVSDVXQLVODPRORJXHFDUMHQHO¶DLSDVDSSULVMHPHVXLVMXVWH
initié VXUODPDQLqUHGHSULHUG¶LQYRTXHU'LHXHWFPrPHVLM¶DLORQJWHPSVIDLWGHVUHFKHUFKHV
-¶DL HQWHQGX SDUOHU GX VRXILVPH M¶HQ DL PrPH DSSULV TXHOTXH FKRVH FRPPH SDU H[HPSOH OD
paternité du soufisme souvent attribué à Abdoul Khadre Djeylani. Quand je parle aussi je veux
rWUHFRUULJpFDUMHVXLVXQDSSUHQDQW HW FRPPHLOQ¶\DLFLTXHGHVSURIHVVHXUVM¶DFFHSWHG¶rWUH
FRUULJpHWG¶HQWHQGUHGLUHTXHFHTXHWXDVDSSULVQ¶HVWSDVH[DFWHWYRLFLODERQQHYHUVLRQ&¶HVW
ainsi que, quand je suis allé en Iraq, MH PH VXLV UHQGX MXVTX¶j OD PRVTXpH GH $EGRXO .KDGUH
'MH\ODQL (W DX 5HFWHXU GH OD PRVTXpH M¶DL SRVp GHV TXHVWLRQV TXL PH KDQWDLHQW GHSXLV IRUW
ORQJWHPSVHWLODUpSRQGXjFHVTXHVWLRQV6XUFHTXHM¶DLUHWHQXLO\DFHTX¶RQDSSHOOHHQ,VODP
« Ijdtihad », c'est-à-dire la réflexion ; cette attitude fait primer la réflexion sur soi-même,
DXWUHPHQW GLW FH TX¶RQ DSSHOOH OD J\PQDVWLTXH LQWHOOHFWXHOOH RQ GLW TX¶LO GRLW rWUH j OD EDVH GX
9  

 
6RXILVPH '¶DXWUHV DXVVL SU{QHQW O¶DFWLRQ ; si tu pris et que tu obéisses DX 6HLJQHXU F¶HVW GpMj
VXIILVDQW&HVRQWFHVGHX[pFROHVTX¶RQWURXYH

8QHIRLVM¶pWDLVHQYR\DJHDYHFXQDPL HWFRPPHRQDO¶KDELWXGHLFLDX6pQpJDOGHV¶DVVHRLUHW
de faire des invocations pendant un bon bout de temps après la prière, je me suis trouvé à ma
grande surprise dans un pays arabe où aussitôt après la prière tout le monde se levait. Et quand je
PHVXLVUHQVHLJQpLOVP¶RQWGLWTX¶LOVQHIDLVDLHQWTXHFHTX¶$//$+OHXUDUHFRPPDQGpF HVW-à-
GLUHMXVWHIDLUHODSULqUH(QHIIHW,OQ¶DSDVH[LJpTX¶RQUHVWHDSUqVODSULqUHG¶DXWDQWSOXVTX¶LOV
RQW pJDOHPHQW GX WUDYDLO j IDLUH /¶XQ PH GLW TX¶LO HVW RXYULHU HW WRXW UHWDUG GH VD SDUW HVW
synonyme de licenciement. Et beaucoup de pensées utilisées proviennent de cet Idjtihad. Je sais
que le Mouridisme tire ses origines du soufisme car il a beaucoup de similitudes avec ce dernier.

En islam aussi il y a une catégorisation- je ne parle pas de nos confréries-due à des contradictions
HQ LGpRORJLH (Q HIIHW GHSXLV O¶DSSDULWLRQ GX 3URSKqWH 36/  HW GH ses compagnons qui ont
EHDXFRXS IDLW SRXU O¶,VODP LO \ D WRXMRXUV HX GHV FRQWUDGLFWLRQV HW GHV WHQGDQFHV 1RXV TXL
sommes des profanes en la matière, ne pouvons que nous contenter de ce que disent les érudits. Je
QHP¶DYHQWXUHUDLVSDVjFLWHUOHVUDLVRQSRXUOHVTXHOOHVMHVXLVGHYHQXPRXULGHVRXVSHLQHG¶HQ
omettre certaines, mais je sais pourquoi je suis mouride. De même, nous sommes ici pour
UpIOpFKLU VXU OHV SUREOqPHV HW DSSRUWHU GHV VROXWLRQV FDU PrPH FHX[ TXL QH VRQW SDV GH O¶LVODP
émettent certaineV LGpHV VXU OH VRXILVPH O¶LVODP HW OHV FRQIUpULHV ,O HVW GH QRWUH GHYRLU GH OHXU
DSSRUWHUGHVUpSRQVHVSDVSRXUFDORPQLHUPDLVSOXW{WSRXUGLVFXWHU2QGLWTXHOHVVRXILVMHO¶DL
EHDXFRXSOXYHXOHQWTX¶RQFURLVHOHVEUDVHWVHOLPLWHjLQYRTXHUOH6HLgneur et je dis que quand
on le fait ce sera la fin du monde : qui va travailler, qui va cultiver la terre. Ce faisant, la pratique
du soufisme ne serait pas permis à tout le monde ; il devrait y avoir un groupe habilité à cette
pratique. Ce qui revient à dire, grosso modo, et comme il est prôné par certains, que le soufisme
QH ULPH SDV DYHF OH WUDYDLO (W MH YRLV TXH OH 0RXULGLVPH GDQV OHTXHO M¶DSSDUWLHQV FRQFLOLH
VRXILVPHHWWUDYDLOHWF¶HVWHQFHODTX¶LOHVWGLIIpUHQWGHVDXWUHVFRXUDQWVFDURQQRXVHQVeigne en
0RXULGLVPHTX¶LOIDXWFURLUHHQ'LHXDFFRPSOLUODSULqUHVXLYUHVRQ3URSKqWHJURVVRPRGRDOOLHU
jODIRLVODVFLHQFHODSULqUHHWOHWUDYDLO'DQVEHDXFRXSG¶DXWUHVGRFWULQHVUHOLJLHXVHVOHWUDYDLO
est relégué ou tout simplement omis ; ce qui fait que le Mouridisme a su relever le défit en alliant
ces concepts. Ainsi, on ne peut pas ne pas se dévouer au travail et se réclamer de la confrérie
mouride. Il semblerait même que les mourides sont beaucoup plus dévoués au travail, je dis bien
il sembOHUDLW« 4XH MH VDFKH PrPH VL WRXW OH PRQGH HVW PXVXOPDQ OHV PRXULGHV VH VRQW
GLVWLQJXpVSDUOHXUGpYRXHPHQWDXWUDYDLOHQFHVHQVTX¶LOVFRQVLGqUHQWOHWUDYDLOFRPPHIDLVDQW
SDUWLH LQWpJUDQWH GX GpYRXHPHQW j 'LHX 0LHX[ RQ GLUDLW PrPH TX¶LOV FRQVLGqUHQW le travail
comme une adoration de Dieu pouvant mener au Paradis. Le Mouridisme, pourrait-on dire, a
DLQVL IDLW XQH VXEOLPDWLRQ GX WUDYDLO 6¶LO IDOODLW rWUH WUDYDLOOHXU G¶DERUG SRXU rWUH PRXULGH
SHUVRQQHOOHPHQWMHSRXUUDLVrWUHVXUG¶rWUHPRXULGH&DUMH suis né dans le travail et je travaille
jusque là. Un jour, je suis allé rendre visite à Serigne Fallou Mbacké (deuxième khalife générale
GHV PRXULGHV  DFFRPSDJQp G¶XQ SURIHVVHXU DPpULFDLQ HW MH OXL DL GLW TX¶LO pWDLW PRQ DPL HW OH

10  

 
NKDOLIHP¶DGHPDQGpGHOXLGLUHTX¶LOpWDLWPRXULGH PRQDPLDPpULFDLQP¶DGLWGHOXLGHPDQGHU
pourquoi TXDQGMHPHVXLVH[pFXWpOHPDUDERXWP¶DGLWTXHOHVDPpULFDLQVpWDLHQWGpYRXpVDX
travail et toute personne dévouée au travail est mouride.

&RQFHUQDQWO¶HQVHLJQHPHQWLO SHXWrWUHVFLQGpHQGHX[GRPDLQHVFRQFRUGDQWDYHFO¶,VODP : il y a
O¶LQVWUXFWLRQRRQW¶HQVHLJQHSDUH[HPSOHOHVpOpPHQWVTXLFRPSRVHQWO¶HDXHWDXVVLO¶pGXFDWLRQ
TXLGpSDVVHO¶LQVWUXFWLRQFDUGHVSHUVRQQHVGHPrPHpGXFDWLRQSHXYHQWFRKDELWHUVDQVGLIILFultés
et chacun pourra percevoir les idées de son prochain. Ainsi, une fois dans certains pays, tu peux
te sentir mal du fait de la différence de nos éducations. Ici nous partageons des valeurs, du fait de
O¶pGXFDWLRQ TXL IDVVHQW TX¶RQ IRUPH XQH FRPPXQDXWé : la communauté musulmane. En cela
V¶DMRXWHODIRUPDWLRQF¶HVW-à-dire être formé pour devenir menuisier, professeur etc. Ce sont ces
trois éléments qui font le monde  O¶LQVWUXFWLRQ O¶pGXFDWLRQ HW OD IRUPDWLRQ -¶DL YX TXH OHV
mourides avaient ajouté la IRUPDWLRQ PrPH VL F¶HVW UpFHQW j WUDYHUV GHV XQLYHUVLWpV TXL
HQVHLJQHQW WRXV OHV GRPDLQHV GH FRQQDLVVDQFH WHOV TXH OH &RUDQ O¶DUDEH OHV VFLHQFHV HW OHV
PpWLHUV«FHTXLHVWWUqVLPSRUWDQW

Je voudrais aussi ajouter que des occasions comme celles-ci permettent aux oulémas de discuter ;
FHTXLQHSHXWrWUHTXHEpQpILTXHFDUVLFKDFXQpWDLWUHVWpGDQVVRQFRLQRQQ¶pYROXHUDLWJXqUH
mais si on échange entre nous, celui de la Jordanie, celui de la Syrie, du Sénégal, celui de
O¶(J\SWH HWFRQV¶DPpOLRUHUDLt mutuellement. Personnellement, je ne suis malheureusement pas
DVVH] RXWLOOp SRXU FRQQDLWUH OH PD[LPXP GH FH TXH &KHLNK $KPDGRX %DPED D ODLVVp HW M¶DL
entendu dire que ceux qui le maitrisent peuvent être comptés du bout des doigts MHO¶DLHQWHQGX
peut êWUHMHPHVXLVWURPSp(QWRXWpWDWGHFDXVHM¶DLHQWHQGXGLUHTXHVRQOqJXHHVWDVVLPLODEOHj
XQ IOHXYH TXL FRXOH HW GRQW RQ QH FRQQDLW OD VRXUFH RQ SHXW V¶\ DEUHXYHU PDLV RQ QH OH WDULUD
VXUHPHQWSDV2QP¶DDXVVLGLWTXHFHUWDLQVpFULWVTX¶LODODLVVpVQ¶RQWSDVpWpYLVLWpVMXVTX jFH
TX¶LOVVRLHQWDPHQpVjODJUDQGHELEOLRWKqTXHGH7RXEDSDUOHNKDOLIH6HULJQH$EGRX/DKDG

3RXUILQLUMHGLUDLVTX¶RQGHYUDLWpULJHUGHVpFROHVjFHWHIIHWFDUOHOqJXHGHNKDGLP5DVVRXOOH
0RXULGLVPH HQ O¶RFFXUUHQFH Q¶HVW SDV DVVH] FRQQX  EHDXFRXS O¶LJQRUHQW F¶HVW SRXUTXRL LO IDXW
O¶HQVHLJQHU GDYDQWDJH (W GLUH TX¶RQ IRQGH XQ LQVWLWXW GX 0RXULGLVPH R O¶RQ HQVHLJQH OHV
VFLHQFHV PRGHUQHV O¶pFRQRPLH HWF -H WURXYH SOXW{W TX¶XQ LQVWLWXW VXU OH 0RXULGLVPH GRLW
enseigneU OD SHQVpH GH &KHLNK $KPDGRX %DPED &¶HVW VXU FHWWH SHQVpH TX¶RQ GRLW LQVLVWHU
G¶DERUGVLOHVFKHUFKHXUVOHIRQWELHQLOVGRLYHQWSDUODVXLWHODPHWWUHGDQVGHVOLYUHVTXHOHVQRQ
LQLWLpVSRXUURQWXWLOLVHU&DUrWUHSURIHVVHXUQ¶HVWULHQG¶DXWUHTXHIDLUHGHWHOOHVRUWHTX¶XQHFKRVH
difficile soit comprise par un tiers  FH TXL Q¶HVW SDV VDQV GLIILFXOWp 6L OHV VDYDQWV VH PHWWHQW
seulement à faire des échanges entre eux, cela ne nous intéresse guère car une fois parmi eux on
ne pourra rien émettre. Comme nous ne sommes pas des savants, des chercheurs peuvent nous
faciliter la tâche et nous éclaircir ce chemin. Un professeur peut être ainsi considéré comme un
JXLGHTXLLQVqUHHQWRLGHODFRQQDLVVDQFHHWOH6pQpJDOQ¶HVWSDVHQUHVWHGDQVFHGRPDLQH-HVais
TX¶LPSODQWHUFHJHQUHG¶pFROHQ¶HVWSDVGLIILFLOHLOGHPDQGHGHVKRPPHVGpYRXpVHQVHPEOH(Q
FH VHQV LOV SRXUURQW H[SOLTXHU DX[ JHQV OH YUDL VHQV GX VRXILVPH TXL V¶LQVFULW j FRQWUH-pied de
11  

 
FHUWDLQHV°XYUHVTXLOHUpGXLWjODFRQWHPSODWLRQGX6HLJQHXU, c'est-à-dire croiser les bras et prier
Dieu FHTXLHVWXQHDEHUUDWLRQGXPRLQVFHQ¶HVWSDVOHFDVGX0RXULGLVPH-HVDLVGHSXLVTX¶RQ
UHFRQQDLW OH 0RXULGLVPH DX WUDYDLO DSUqV O¶DFFRPSOLVVHPHQW GHV FLQT SLOLHUV GH O¶LVODP (W FHFL
manque à beaucoup de UHOLJLRQV HW GH FRQIUpULHV IDLVDQWDLQVLVRQRULJLQDOLWp&¶HVW SRXUTXRL MH
disais que les trois piliers du Mouridisme sont la science, la prière (adorer le seigneur) et le
WUDYDLO/H0RXULGLVPHDGRQFLQQRYpHQFHVHQVGDQVOHVRXILVPHHQWRXWFDVF¶HVt ainsi que je le
YRLVFDUMHQ¶DLMDPDLVYXGDQVOHPRQGHXQHGRFWULQHTXLSUrFKHOHWUDYDLOMXVTX¶jHQIDLUHXQH
YRL[G¶DFFqVDX3DUDGLV

-H VXLV XQ SHX HQ UHWDUG j XQ PHHWLQJ R MH VXLV DWWHQGX MH UHPHUFLH WRXW OH PRQGH -¶LQVLVWH
encore sur la nécessiWpGHFHWWHpFROHGRQWMHSDUODLVDILQGHIDFLOLWHUO¶DFFqVHWODUHFKHUFKHVXUOH
lègue de Cheikh Ahmadou Bamba. Je termine par remercier le khalife général des Mourides,
Serigne Cheikh Sidy Moukhtar Mbacké. Et je te demande, Serigne Bassirou Abdoul Khadre, de
OXLWUDQVPHWWUHPHVVDOXWDWLRQVHWGHOXLGLUHTXHM¶LPSORUHVHVSULqUHV

12  

 
A L L O C U T I O N D E B I E N V E N U E D E SE R I G N E K H A D I M M O UST A PH A
ABDOURA H M AN L O AU NO M DE RA WDU RA Y A HIN

Louange à Allah le Seigneur des univers ; Paix et Salut Sur Son Messager

Son Excellence Monsieur le Président de la République

Honorables chouyoukh et oulémas

Chers invités

Assalamou alaykoum wa rahmatoullah

&¶HVW XQ JUDQG SODLVLU SRXU PRL GH VRXKDLWHU OD ELHQYHQXH DX[ KRQRUDEOHV LQYLWpV TXL RQW EUDYp OD
fatigue et les difficultés pour assister à cette rencontre de culture et de pensée.

Nous exprimons à l µHQVHPEOHGHVSDUWLFLSDQWVQRVSURIRQGVUHPHUFLHPHQWVHQOHXUGLVDQW : vous êtes


OHVELHQYHQXVDX6pQpJDOOHSD\VGHO¶KRVSLWDOLWp

Chers frères

Nous vivions dans une époque dominée par les passions, le matérialisme débordant, les violences, où
le suicide et la drogue constituent des refuges pour beaucoup.

Afin de remédier à ces maladies mortelles, il ne suffit pas de recourir à des simples théories, mais il
faut offrir DX[ LQGLYLGXV XQH YpULWDEOH pGXFDWLRQ VSLULWXHOOH G¶R OD QpFHVVLWp G¶pFRXWHU OD YRLH GH
O¶,VODP

Le soufisme basé sur le Coran et la tradition prophétique et dépourvu de toutes les impuretés et des
déviations est le seul à même de construire un homme cDSDEOH G¶DGRUHU 'LHX G¶rWUH JpQpUHX[ HW
G¶HQWUHWHQLUGHERQQHVUHODWLRQVDYHFOHVDXWUHV

Chers Participants

Le soufisme a longtemps subi des attaques de la part de ses puissants adversaires, et nous voici dans
XQPRPHQWFULWLTXHROHVHVSRLUVV¶RULHQWHQW vers les sources soufies après la faillite des idéologies et
O¶pFKHFGHVV\VWqPHVTXLRQWGXUHQWGHVVLqFOHVGRPLQpOHPRQGH

Toutefois, la question principale est : si nous ± les soufis contemporains- pouvons assumer cette
responsabilité historique ?

Les espoirs portés à cette rencontre pour répondre à la question sont énormes.

En fin, je reviens souhaiter la bienvenue à nos honorables invités, tout en priant le Seigneur pour
TX¶,OJXLGHOHXUVSDVHWFRXURQQHOHXUVHIIRUWVGHVXFFqVHWGHUpXVVLWH

Was-salamou alaykoum wa rahmatoullahi wa baraka touhou


13  

 
A L L O CUTION INTRODUC T IV E DE C H EI K H ABDOUL A H AD MBA C K E
G A Ï N D E F A T M A , Président de la Commission Culture et Communication du Comité
G¶2UJDQLVDWLRQGX*UDQG0DJDO

$XQRPG¶$//$+OH&OpPHQWOH0LVpULFRUGLeux,

Chers Marabouts et Guides Religieux,

&KHUVLQYLWpVIUqUHVGDQVODYRLHGHO¶,VODP

/DIRUPXODWLRQGHQRWUHWKqPHSRXUUDLWLQVSLUHUXQHLPSUHVVLRQGHYDFXLWpG¶LPSUpFLVLRQGXIDLW
GHO¶DEVHQFHGHTXDOLILFDWLIjODQRWLRQGHFULVH

Je ne doute pas cependant, que dans notre assemblée ici présente, constituée exclusivement de
UpIpUHQFHVLQWHOOHFWXHOOHVPRQGLDOHPHQWUHFRQQXHVODKDXWHXUG¶HVSULWHWODSHUVSLFDFLWpGHVXQVHW
des autres, excluent toute possibilité de confusion.

Notre monde est en crise, et cette crise est générale, totale.

2QSDUOHEHDXFRXSGHODFULVHpFRQRPLTXHHW ILQDQFLqUHLQWHUQDWLRQDOH3DUFHTXHF¶HVW HOOHTXL


IDLWSODQHUODPHQDFHODSOXVSUHVVDQWHVXUO¶RUGUHpWDEOL

Les avis des spécialistes divergent aussi bien sur les facteurs profonds de cette crise économique
HWILQDQFLqUHTXHVXUVRQpYROXWLRQGDQVO¶DYHQLU0DLVHQWRXVOHVFDVHOOHHVWOjHOOHpSURXYH
GXUHPHQWXQV\VWqPHTXLDYDLWILQLSDUFURLUHTX¶LOLQFDUQHFHTX¶LO\DGHPLHX[HWGHSOXVSDUIDLW
pouvant exister dans ce domaine.

(OOHVHPDQLIHVWHSDUODSUpGRPLQDQFHGHO¶pFRQRPLHYLUWXHOOHHWVSpFXODWLYHVXUO¶DFWLYLWpUpHOOH
HWSURGXFWLYHO¶DFFDSDUHPHQWGHVULFKHVVHVSDUXQHPLQRULWpODGRPLQDWLRQHWO¶H[SORLWDWLRQGHV
SD\V GX 6XG SDU FHX[ SOXV GpYHORSSpV O¶RUGUH mondial injuste porteur de dangers pour
O¶KXPDQLWp

Cette crise-OjQRXVLQWHUSHOOHWRXVSDUFHTX¶HOOHSODFHO¶DYHQLUGHO¶KXPDQLWpVRXVK\SRWKqTXH

0HVVLHXUVOHVUHSUpVHQWDQWVGHVIDPLOOHVUHOLJLHXVHVFKHUVLQYLWpVIUqUHVGDQVODYRLHGHO¶,VODP

La crLVHGDQVOHPRQGHF¶HVWDXVVLOHVFRQIOLWVHWODYLROHQFH

,O \ D XQH YLQJWDLQH G¶DQQpHV DYHF OD ILQ GH OD JXHUUH IURLGH RQ DYDLW SHQVp TXH OD YLROHQFH
SROLWLTXH DOODLW rWUH EDQQLH GH O¶KXPDQLWp HW TX¶XQH qUH QRXYHOOH G¶HQWHQWH GH SDL[ HW GH
cordialitpV¶RXYUDLWGHYDQWQRXV

14  

 
$XFRQVWDWRQUpDOLVHTXHUDUHPHQWO¶KXPDQLWpDpWpDXWDQWWUDYHUVpHGHOLJQHVWHQVLRQVDXVHLQ
GHV (WDWV HQWUH OHV (WDWV RX HQFRUH HQWUH GHV (WDWV RX GHV FRDOLWLRQV G¶(WDWV HW GHV JURXSHV
humains parfois non localisés géographiquement.

/D JXHUUH WXH HQFRUH PDVVLYHPHQW SDUIRLV PrPH SOXV TX¶HQ FHV WHPSV-Oj R OHV P°XUV
KXPDLQHVQ¶pWDLHQWSDVMXJpHVVXIILVDPPHQWDGRXFLHVSDVVXIILVDPPHQWDIILQpHV

,GHQWLWDULVPH UHIXV GH OD GLYHUVLWp LQWROpUDQFH H[DFHUEDWLRQ GH O¶LQVWLQFW GH domination,
recherche démesurée du gain et de la prospérité sont parmi les fertilisants les plus en vue du
terreau où germe, pousse et se développe cette violence.

Cette situation également nous interpelle.

Messieurs les représentants des familles religieXVHVFKHUVLQYLWpVIUqUHVGDQVODYRLHGHO¶,VODP

,O\DSOXVG¶XQVLqFOHGHIRUPLGDEOHVDYDQFpHVGDQVOHGRPDLQHGHODVFLHQFHHWGHODWHFKQLTXH
DYDLHQWSHUPLVjO¶KXPDQLWpGHIDLUHGHVGpFRXYHUWHVHWLQYHQWLRQVTXLODLVVDLHQWHQWUHYRLUGDQVOH
moyen WHUPHODSHUVSHFWLYHG¶XQPRQGHVDQVpSLGpPLHVDQVHQGpPLHVDQVIDPLQHXQPRQGHR
O¶HVSqFH KXPDLQH VH QRXUULUDLW FRQYHQDEOHPHQW HW VHUDLW VXIILVDPPHQW SURWpJpH FRQWUH OHV
maladies.

$XMRXUG¶KXLQRXVYRLOjFRQIURQWpVjODIDPLQHGDQVGLIIpUHQWHVUpJLRns du globe, et aussi à de


QRXYHOOHV IRUPHV GH PDODGLHV GRQW OHV UDYDJHV GpSDVVHQW WRXW FH TX¶RQ DXUDLW SX LPDJLQHU HW
GHYDQWOHVTXHOOHVO¶KXPDQLWpVHPEOHTXDVLPHQWGpVDUPpH

0rPH OD QDWXUH PLOLHX G¶H[LVWHQFH GH O¶HVSqFH KXPDLQH Q¶HVW SDV pSDUJQpH 2Q V¶LQTXLqWH GH
plus en plus des équilibres environnementaux, et de leur préservation.

$ HQWHQGUH OHV H[SHUWV OH PRQGH HVW GpMj HQ SOHLQH FULVH pFRORJLTXH HW j PRLQV G¶RSpUHU XQ
sursaut de lucidité et de rationalité salutaire, il vogue tranquillement vers une catastrophe que
G¶DXFXQVSUpYRLHQWFDUUpPHQWFDWDFO\VPLTXH

/D FULVH HOOH HVW DXVVL GDQV O¶HIIRQGUHPHQW GHV YDOHXUV HQWUDvQDQW O¶KXPDQLWp YHUV GHV GpULYHV
inquiétantes ; elle est dans les revers des acquis scientifiques et technologiques, exposant
O¶KXmanité à des catastrophes particulièrement meurtrières ; elle est dans la déshumanisation de
O¶KXPDQLWpRO¶HVSULWKXPDQLVWHHWOHOLHQVROLGDLUHVRQWHQSHUSpWXHOOHpURVLRQ

/H PRQGH HVW GRQF HQ FULVH XQH FULVH WRXFKDQW OHV GLIIpUHQWHV GLPHQVLRQV GH O¶humanité ; une
crise existentielle face à laquelle les initiatives de solution ont jusque-OjUpYpOpSHXG¶HIILFDFLWp
Parce que, à bien des égards, elle est corollaire du système lui-PrPH HW O¶HQ H[WLUSHU VDQV
mutilation de ce système, est difficilement envisageable.

15  

 
Messieurs les représentants des familles religieuses, chers invités, frères dans la voie de
O¶,VODP

&HWWHVLWXDWLRQGHFULVHJOREDOHQRXVLQWHUSHOOHHWQRXVPHWHQGHPHXUHG¶DSSRUWHUGHVUpSRQVHV
ici et maintenant. Il y va de notre avenir HQWDQWTX¶KXPDQLWp

&¶HVW GDQV FH VHQV TX¶LO IDXGUDLW FRPSUHQGUH QRV DVVLVHV G¶DXMRXUG¶KXL HQ WDQW TX¶DFWLYLWp GH
ODERUDWRLUHPHQpHVSDUXQHFRPSRVDQWHGHO¶KXPDQLWpSDUWDJHDQWGHVUpIpUHQFHVFRPPXQHVDX[
valeurs islamiques.

Ces valeurs de Tawakoul, dH IRL GH SLpWp G¶DEDQGRQ GH VLQFpULWp GH SDUGRQ GH UHVSHFW GH
GLVFLSOLQH GH QRQ YLROHQFH PDLV DXVVL GH WUDYDLO GH UHFKHUFKH GX OLFLWH GH VROLGDULWp G¶XQLRQ
G¶DPRXU G¶pGXFDWLRQ HW GH O¶LQVWUXFWLRQ pPDQFLSDWULFH VRQW IRQGDWULFHV G¶XQH VRFLpWp SOXV juste,
plus harmonieuse, plus équilibrée, plus épanouie.

Dans cet univers islamique, nous, nous avons choisi la voie du soufisme, dont les ressources et
OHV ELHQIDLWV VDQV QXO GRXWH UHFqOHQW OHV pOpPHQWV G¶XQH VROXWLRQ DSSURSULpH j OD FULVH SRXU OH
salXWGHO¶KXPDQLWp

1RWUH PDvWUH HW LQVSLUDWHXU OH 9pQpUp &KHLNK $KPDGRX %DPED SDU VRQ °XYUH LPPHQVH
H[KDXVWLYH D pODERUp FHV UHVVRXUFHV GX VRXILVPH HW HQ D pWp O¶LQFDUQDWLRQ SDUIDLWH WRXWH VD YLH
GXUDQW'HUHWRXUG¶H[LOVRQSUHPLHUJHVWHQ¶D-t-il pas été de pardonner à ceux-là qui lui ont fait
subir tant de misères ?

« -¶DLSDUGRQQpjPHVHQQHPLVSRXUO¶DPRXUGH'LHXTXLOHVDGLULJpVYHUVDXWUHTXHPRLMH
ne riposte jamais. Ô détenteur du royaume, Toi qui es au dessus de toute vengeance, sois
miséricRUGLHX[HQYHUVWRXWHO¶KXPDQLWp7RLTXLJXLGHOHPDXYDLV ». F in de citation.

1¶D-t-LO SDV LQFXOTXp OH FXOWH GX WUDYDLO j OD FRPPXQDXWp PRXULGH HW OXL D DSSULV O¶HQJDJHPHQW
désintéressé au profit des grandes causes?

Il a magnifié par sa plume le principe dH.KLGPDHWGRQQHVRQLPSRUWDQFHGDQVO¶,VODP :

« 5HQGVGRQFWHVSUpFLHX[VHUYLFHVjWRXVSRXUO¶DPRXUG¶$OODKH[FOXVLYHPHQWVDQVUHOkFKH
ni mot déplaisant. Q uiconque te rend visite pour solliciter tes biens, comble-le de faveurs et
de bonté si tu le peux 1H WKpVDXULVH MDPDLV WD IRUWXQH SDU FUDLQWH GH SDXYUHWp FDU F¶HVW
$OODKTXLW¶DRIIHUWFHWWHULFKHVVH ». F in de citation.

(Q FHV WHPSV G¶LQFHUWLWXGHV GH TXHVWLRQQHPHQW HW G¶DQJRLVVH OD FRPPXQDXWp PRXULGH VRXV
O¶pJLGH GH VRQ JXLGH 6HULJQH 7RXED 6HULJQH 6LG\ 0RXNKWDU 0EDFNp D SULV O¶LQLWLDWLYH GH
favoriser des retrouvailles entre les éminents experts que vous êtes, guides religieux, enseignants,
FKHUFKHXUV«DYHFFKDFXQHQFHTXLOHFRQFHUQHVXIILVDPPHQWGHPR\HQVHQOXLSRXUSURGXLUH

16  

 
une contribution dHYDOHXUjO¶H[HUFLFHG¶DSSURSULDWLRQGXOHJVGH&KHLNK$KPDGRX%DPEDHQ
YXHGHODILQDOLVDWLRQG¶XQHUpSRQVHVRXILHjODFULVH

1RXVQHGRXWRQVSDVXQVHXOLQVWDQWTX¶jO¶LVVXHGHFH&ROORTXHO¶KXPDQLWpSRXUUDLWGLVSRVHUGH
perspectives rassurantes pour son avenir, pour son souci de vivre dans une monde de durabilité,
de paix, de stabilité, de solidarité et de prospérité.

1RXVYRXVIpOLFLWRQVGHYRWUHHQJDJHPHQWVHXOOHYLHUjODEDVHGHYRWUHSUpVHQFHLFLDXMRXUG¶KXL
VRXYHQW DX SUL[ G¶LPPHQVHV VDFULILces consentis chacun à son niveau, et vous remercie de
O¶LQWpUrWHIIHFWLITXHYRXVDFFRUGH]jQRWUHLQYLWDWLRQ ; et je souhaite plein succès à nos travaux.

Je vous remercie de votre attention.

17  

 
A L L O C U T I O N D E SE R I G N E M A O D O SY D A B A K H , PR O N O N C E E A U N O M
D ES F A M I L L ES E T ASSO C I A T I O NS R E L I G I E USES D U SE N E G A L

Louange à ALLAH Qui accorde son assistance aux vertueux, et Qui dit dans Son livre révélé, ce
qui signifie : ©&HUWHVOHVVDLQWV DZOL\k G¶$OODKQ¶RQWQXOOHFUDLQWHQXOOHDQJRLVVH ».

4XH O¶KRQQHXU HW O¶pOpYDtion en grade les plus complets et les plus parfaits soient accordés au
PHLOOHXUGHV0HVVDJHUVHWO¶LPDPGHVSLHX[SURFKHVGHO¶DJUpPHQWGH'LHXQRWUHPDLWUHQRWUH
FKHI 0RXKDPPDG O¶KRQQrWH  DLQVL TX¶j VD IDPLOOH VHV FRPSDJQRQV HW VHV &DOLIHV TXL O¶RQW
DFFXHLOOLO¶RQWJORULILpO¶RQWGpIHQGXHWTXLRQWVXLYLODYRLHGHGURLWXUHTXLDpWpUpYpOpHDYHFOXL
et ce sont eux les heureux.

4XH O¶DJUpPHQW GH 'LHX OH SOXV GXUDEOH VRLW VXU WRXV FHV VDLQWV XQ DJUpPHQW TXL HQJOREH OHXU
famille, leur compagnons et OHXUVV\PSDWKLVDQWVMXVTX¶DXMRXUGHODUpWULEXWLRQ

ƒ Son Eminence, Cheikh Mouhammad Al Moukhtar MBacké Calife général des mourides
(Que Allah le protège).

ƒ Honorables savants et cheikhs présidant les délégations venues de différents pays du


monde arabo-islamique pour participer à cette rencontre islamique soufie.

ƒ Honorables autorités, califes des confréries soufies présentes dans cette assemblée
inaugurale de ces journées soufies bénies.

ƒ Son Excellence Maitre Abdoulaye Wade président de la République du Sénégal.

ƒ Messieurs les ministres

ƒ Messieurs les responsables de partis politiques et de syndicats.

ƒ Messieurs les responsables des associations islamiques.

ƒ &KHUVIUqUHVHWV°XUV

ƒ Chers invités

Assalamou^aleykoum wa rahmatoul Lahi wa barakaatouhu.

Je viens, à mon QRPSHUVRQQHOHWDXQRPGHVRQH[FHOOHQFHO¶KRQRUDEOH&KHLNK0RXKDPPDG$O


0DQVRXU6\&DOLIHJpQpUDOGHV7LMDQHV 4XH$OODKOHSURWqJH DLQVLTX¶DXQRPGHQRWUHIUqUHOH
&KHLNK $EGRXO $]L] 6\ SRUWH SDUROH GH OD IDPLOOH G¶(O +DGM 0DOLFN  6\ YRXV H[SULPHU
O¶LPPHQVHMRLHTXHM¶pSURXYHSRXUO¶RSSRUWXQLWpTXLQRXVHVWGRQQpHGHSDUWLFLSHUDX[DFWLYLWpV
GHFHWWHUHQFRQWUHVRXILHLQWHUQDWLRQDOHTX¶DEULWH'DNDUODFDSLWDOH6pQpJDODLVHHWTXLUHJURXSHHQ
son sein ces visages resplendissants de sommités du savoir et de la pensée islamiques qui ont bien
YRXOXUpSRQGUHjO¶DSSHOGHVRQH[FHOOHQFHO¶KRQRUDEOH&KHLNK6LG\0RXKDPPDG$O0RXNKWDU
18  

 
0%DFNp 4XH$OODKOHSURWqJH DLQVLTXHO¶HQVHPEOHGHVHVIUqUHVSDUPLOHVFDOLIHVOHVpUXGLWVHW
les savants du monde musulman.

&KHUV LQYLWpV F¶HVW SRXU PRL XQ KRQQHXU GH SURQRQFHU FHWWH DOORFXWLRQ DX QRP GHV IDPLOOHV
religieuses du pays.

-H WLHQV WRXW G¶DERUG j PDJQLILHU FHWWH LQLWLDWLYH GH KDXWH SRUWpH GH  O¶KRQRUDEOH &KHLNK 6LG\
Mouhammad Al Moukhtar MBacké qui, depuis son avènement à la tête du califat, ne cesse de
SRVHUGHVMDORQVSRXUO¶XQLWpHWODFRQFRUGHHQWUHOHVPXVXOPDQVGDQVOHXUGLYHUVLWpTXHOTXHVRLW
leur origine ou leur appartenance confrérique. En application de la parole de Dieu qui
signifie : « Certes vous constituez une seule communauté et je suis votre Seigneur, adorez-Moi »

Chers participants au colloque :

Certes ces journées culturelles soufies qui se tiennent dans notre capitale Dakar en terre
VpQpJDODLVH FRQVWLWXHQW XQH JUDQGH RSSRUWXQLWp G¶pWXGLHU OHV Sanoplies de questions qui
interpellent la RXPPD LVODPLTXH HQ SDUWLFXOLHU &HWWH UHQFRQWUH HVW G¶DXWDQW SOXV LPSRUWDQWH
TX¶HOOH VH WLHQW DX 6pQpJDO TXL UHVWH XQH WHUUH VRXILH HW TXL D FRQQX O¶DYqQHPHQW G¶pPLQHQWHV
figures soufies qui ont marqués leur temps HWTXLFRQWLQXHQWG¶LQVSLUHUGHVJpQpUDWLRQVjVXLYUH
O¶pGXFDWLRQOpJXpH

On peut dire sans risque de se tromper que cette initiative vient à son heure et offre aux
SDUWLFLSDQWV O¶RFFDVLRQ KHXUHXVH GH VFUXWHU OHV GLIILFXOWpV DX[TXHOOHV OH PRQGH HVW FRQIURQté
notamment avec la recrudescence des crises et autres querelles sur les plans religieux politique
social et racial qui résultent des métamorphoses profondes qui caractérisent les sociétés
PRGHUQHVHWO¶H[LJHQFHGHYLYUHHQVHPEOH

Le mélange entre les civilisations et les cultures a rendu ce monde tel un village planétaire avec
VRQFRURODLUHG¶DIIURQWHPHQWVYHUEDX[YLROHQWVGHFULVHVVSLULWXHOOHVHWPRUDOHVSURIRQGHV&HTXL
IDLWTX¶DXMRXUG¶KXLRQDVVLVWHjXQUHJDLQGHYLROHQFHSROLWLTXHHWXQWHUURULVPH organisé et une
perte des valeurs morales, bref une véritable décadence et une tergiversation sur les fondements
GHO¶XQLWpGHVPXVXOPDQV&DUDXMRXUG¶KXLOHPRQGHPXVXOPDQVHWURXYHPHQDFpSDUVDSURSUH
identité religieuse, son existence identitaire et culturelle, et même accusé par la conception
RFFLGHQWDOHG¶rWUHXQHUHOLJLRQGHYLROHQFHGHWHUURULVPHGHGHVWUXFWLRQHWGHUHFXOHWLQFDSDEOH
GHV¶DGDSWHUjODPDUFKHGHVJUDQGVSD\VGpYHORSSpV

Oui chers frères participants à ce colloque :

&¶HVWjWUDYHrs de telles rencontres de haute facture au regard du niveau élevé de ses participants
HWGHODYDOHXUGHVLGpHVTX¶RQSHXWHVSpUHUGHVVROXWLRQVSURPHWWHXVHVDX[QRPEUHX[GpILVTXL
DWWHQGHQW OH PRQGH PXVXOPDQ $ WUDYHUV OD UpIOH[LRQ DSSURIRQGLH HW O¶LQVSiration de
O¶HQVHLJQHPHQWVRXILHLOHVWVDOXWDLUHGHSURSRVHUjO¶RSLQLRQGHVDOWHUQDWLYHVjWRXWHVOHVFULVHV
qui assaillent notre village planétaire.
19  

 
&HTXLIDLWODSDUWLFXODULWpGHO¶LVODPHQWDQWTXHOpJLVODWLRQGLYLQHPDOJUpODSOXUDOLWpGHVpFROHV
GH MXULVSUXGHQFHV HW G¶LGpRORJLHV HW YRLHV VRXILHV F¶HVW TX¶LO HVW YHQX SRXU JUDYHU OH VLJQH GH
O¶XQLFLWpGDQVOHVF°XUVSRXUDVVHRLUXQHFUR\DQFHIHUPHTXLDOOLHOHYHUEHHWO¶DFWLRQ&HFLSRXU
TXH O¶KRPPH PpULWH YpULWDEOHPHQW VRQ VWDWXW GH OLHXWHQDQW FDlife) sur terre et valorise son
H[LVWHQFH HQ PHWWDQW HQ SURILO VRQ VpMRXU WHUUHVWUH SDU O¶pGLILFDWLRQ  HQ VH EDVDQW VXU OD IRL HQ
$OODKO¶DGRUDWLRQG¶$OODK6HXOHWODSXULILFDWLRQGHVRQkPHODSHUIHFWLRQGHVRQFRPSRUWHPHQW
HWO¶pORLJQHPHQWGHVPDODGLHV GXF°XUHWGHVHQWUDYHVGHO¶pJRHQVXLYDQWXQPRGqOHUHOLJLHX[
pGXFDWLIVDQVSDUHLOFDSDEOHGHGRQQHUjO¶LQGLYLGXXQHFXOWXUHIRXUQLHXQHSHQVpHSURGXFWLYHXQH
sagesse profonde puisée de la lumière abondante du message prophétique.

Nous voyons clairHPHQW TXH VH WUpVRU SUpFLHX[ TX¶RQ UHWURXYH GDQV OHV HQVHLJQHPHQWV GH
&KHLNKRXO$O.KDGLP&KHLNK$KPDG%DPED 4XH$OODK/¶DJUpH DLQVLTXHFKH]VHVFRQIUqUHV
soufis (Que Allah les agrée tous) reste le remède spirituel à tous les maux auxquels on est
confroQWp DXMRXUG¶KXL $ WUDYHUV FHV HQVHLJQHPHQWV OH YLGH VSLULWXHO VHUDLW FRPEOp HW O¶RQ VH
VHUUDLW SURSXOVp GH OD SURIRQGHXU GH OD UXSWXUH DX JUDGH pOHYp HW GH O¶REVFXULWp GX SpFKp j OD
OXPLqUHGHO¶REpLVVDQFHFRQIRUPpPHQWjODSDUROHG¶$OODKWDADOD : « Ceux qui croient et dont les
F°XUV V¶DSDLVHQW SDU O¶pYRFDWLRQ G¶$OODK FHUWHV SDU O¶pYRFDWLRQ G¶$OODK OHV F°XUV VH
tranquillisent » Et sa parole ta^ala « Et ceux qui font des efforts par recherche de Notre agrément,
Nous les guideront sur nos chemins et certes Allah accorde Son soutien aux vertueux. »

(WFHFLQ¶HVWSDVpWRQQDQWpWDQWGRQQpTXHOHVRXILVPHHVWXQPRGqOHG¶pGXFDWLRQVSLULWXHOOHTXL
YLVH HVVHQWLHOOHPHQW j SUpVHUYHU OD SHUVRQQH GH V¶HQIRQFHU GDQV OHV WpQqEUHV GHV SODLVLUV HW
réjouissances (blâmableV HWGHVFRPSRUWHPHQWVEHVWLDX[YLOVTXLGpWUXLVHQWO¶rWUHKXPDLQTXLOH
UHQGUDLHQW WHO XQ DQLPDO RX SLUH 6XUWRXW GDQV QRWUH pSRTXH PDUTXpH SDU O¶K\SRFULVLH
JUDQGLVVDQWH OH PHQVRQJH OD FRUUXSWLRQ O¶DOWpUDWLRQ Oj WUDKLVRQ OD FRQVRPPDWLRQ GX ELHQ GHV
genVLQMXVWHPHQWO¶DWWHLQWHDX[GURLWVGHVDXWUHVGDQVOHVHXOEXWGHVDWLVIDLUHVHVGpVLUVPrPHVL
F¶HVWDXQRPGHODUHOLJLRQHWGHVYDOHXUVPRUDOHV

Le croyant qui fait face aux tentatives du bas monde et que Satan tente de dévier à tout instant se
doit dHV¶DUPHUG¶XQHIRL VROLGHHW DQFUp HW G¶XQHVLQFpULWpVDQV IDLOOHSRXUFRQWUDLQGUHVRQ pJR
DILQ G¶KXPLOLHU VRQ F°XU HW DWWLVHU VD FUDLQWH $LQVL FH EDV PRQGH VHUDLW UpGXLW j VHV \HX[ HW
O¶LPDJHGHO¶DX-delà sera présente devant lui il se sera bien abreuvé des réalités de la parole de
Allah ta^ala qui signifie : « Sachez que ce bas monde (est comparable) à un jeu, une réjouissance
éphémère, un embellissement, une vantardise mutuelle, une concurrence par les biens et les
enfants. »

Chers participants :

Le soXILVPHUHIOqWHOHVHQWLPHQWTXHO¶RQpSURXYHGDQVO¶REpLVVDQFHj$OODKjWUDYHUVODGpYRWLRQ
TXHO¶RQYRXHTXRWLGLHQQHPHQWHWTXLOLHOHFUR\DQWSDUVDIRLjO¶REpLVVDQFHjVRQ6HLJQHXU/H

20  

 
fidele reste constant dans la dévotion et la présence spirituelle. Comme si il voyait son Seigneur
VDFKDQWTXHQHOHYR\DQWSDV/XL 6HLJQHXU OHYRLWHWVDLWSDUIDLWHPHQWFHTX¶LOFDFKHRXGpYRLOH

2XLOHVRXILVPHFRQVLVWHjV¶DSSURSULHUWRXWFRPSRUWHPHQWORXDEOHHWVHGpSDUWLUGHWRXWFHTXLHVW
ODLGHQYXHG¶HVFDODGHUOHVKDXWVJUDGHVHWDWWHLQGUHOHVGHJUpVpOHYpVGHO¶DJUpPHQW/HVRXILVPH
YLVHjIDoRQQHUO¶KRPPHHWjOHGLULJHUYHUVO¶DJUpPHQWGHVRQ6HLJQHXUjWUDYHUVVDSHQVpHVD
parole ses actions, ses intentions et dans tous les domaines de la vie individuelle et collective.

(WF¶HVWFHWWHDSSURFKHTXHO¶RQUHWURXYHGDQVOHVHQVHLJQHPHQWVGHOD0RXULGL\\DHWGDQVWRXWHV
les autres voies soufies qui ont joué des rôles prépondérants dans la consolidation des principes
LVODPLTXHVHWGHO¶HQVHLJQHPHQWGXOLYUH KRQRUpG¶$OODK(OOHVQ¶RQWpWpHQUHVWHpJDOHPHQWSDU
leur participation efficace et continuelle dans la recherche de solutions adéquates aux problèmes
de la société sénégalaise en particulier et de la communauté musulmane en générale en vue de
palier aux GLIILFXOWpV TXRWLGLHQQHV TXH WUDYHUVHQW OHV SRSXODWLRQV &¶HVW j WUDYHUV OD ERQQH
RULHQWDWLRQ O¶pYHLO GHV FRQVFLHQFHV OD UpVROXWLRQ GHV FRQIOLWV O¶DVVLVWDQFH DX[ QpFHVVLWHX[ HW OH
soutien aux éprouvés que se reflètent les initiatives des milieux soufis pour répondre aux
exigences de la vie sociale des populations. En effet les voies soufies constituent un cadre de
UHQFRQWUH LVODPLTXH SRXU OD IDPLOLDULWp OD VROLGDULWp  OD IUDWHUQLWp HW O¶HQWUH-aide à la crainte
G¶$OODK(OOHVRQWDLQVLUpXVVLjVHIUD\er une place privilégiée au sein des milieux populaires et
reflètent à cet effet la voix des peuples, la conscience vivante et le miroir clair qui reflète les
réalités et les événements.

Ces voies soufies ne sont pas comme le prétendent certains ennemis de la vérité, des sources de
divisions des rangs des musulmans ; au contraire, car parmi les caractères des vertueux, aimer
leur prochain musulman un amour fraternel, islamique et sincère, sachant que Allah a ordonné
aux croyants de faire preuve de fraternité mutuelle et a mis en garde contre celui qui agit
contrairement à cet ordre.

2QVHUHQGFRPSWHDORUVTXHOHVRXILTXLV¶HVWDEUHXYpDX[VRXUFHVGHVUpDOLWpVVSLULWXHOOHVHWGHV
LQVSLUDWLRQVGLYLQHVQHSHXW rWUHTXHFHOXLTXL DQQRQFHOHELHQODMRLHO¶Dmour, la fraternité, la
paix la familiarité, étant convaincu que la fraternité est le socle de toute réussite. Cheikh Al
.KDGLP 4XH$OODKO¶DJUpH DWUDGXLWFHODHQFHVWHUPHV :

« &KDTXH:LUG OLWDQLHVjUpFLWHU IDLWSDUYHQLUO¶DVSLUDQWjO¶DJUpPHQWGH Dieu et il ne sera point


dévoyé.

4X¶LOVHUpFODPHG¶$O-H\ODQLRXG¶$KPDG$W- Tijjanî

2XG¶XQDXWUHSDUPLOHVS{OHV VDLQWV FDUFKDFXQG¶HX[VXLYDLWUpVROXPHQWODYRLHMXVWH »

Dans cette même ordre idée son frère Cheikh Al Hadj Malick Sy dit : « les voies soufies mènent
WRXWHVYHUVO¶DJUpPHQWGX0LVpULFRUGLHX[ »

21  

 
(W F¶HVW FH TX¶RQ WURXYH GDQV OHV pFULWV GHV GLIIpUHQWV pUXGLWV VRXILV WHOV TXH &KHLNK $O +DGM
Oumar Al Foutiyou Tall, et le Cheikh Saad Abihi, le Cheikh Al Hadj Abdoul-lahi Niasse, le
Cheikh BounDPD .XQWD OH &KHLNK $KPDG 1GDFN 6HFN OH &KHLNK /LPDPRX /D\H HW G¶DXWUHV
VDYDQWVHWpUXGLWVGHYRLHVVRXILHVGRQWO¶REMHFWLISULPRUGLDOHVWGHSUpVHUYHUFHVWUpVRUVSUpFLHX[
HWFHVSHUOHVUDUHVTXLFRQVWLWXHQWOHSOXVLPSRUWDQWHQMHXSRXUODYLHGHO¶KRPPe.

En conclusion je réitère à mon nom personnel et au nom de toutes les familles religieuses nos
souhaits de bienvenue à ces éminents savants et surtout à ceux là qui ont bravé les difficultés du
voyage pour participer à ces journées soufies bénies organisées par la confrérie mouride, en leur
GLVDQW ELHQYHQXH SDUPL YRV VLHQV (W QRXV GHPDQGRQV j $OODK 4X¶,O HVW H[HPSW GH WRXWH
LPSHUIHFWLRQ  GH OHXUV DFFRUGHU OD UpXVVLWH OD YLFWRLUH HW OD ERQQH JXLGpH DLQVL TX¶j OD
communauté islamique et au monde entier. -H/XLGHPDQGHG¶DVVLVWHUO¶LQLWLDWHXUGHFHVMRXUQpHV
bénies le Cheikh Sidy Al Moukhtar Mbacké le Calife général des mourides et les frères qui
participent de prés ou de loin pour la tenue de cette opportunité bénie qui réunit des fidèles qui
proclament qX¶LO Q¶HVW GH 'LHX TXH 'LHX HW TXL VRQW GDQV OH EHVRLQ SUHVVDQW GH UDIIHUPLU OHXUV
relations communes pour hisser plus haut cette devise « ,OQ¶HVWGH'LHXTXH'LHX » et la propager
G¶(67HQ28(67

Enfin nous souhaitons à tous les participants aux travaux du colloque un agréable séjour en terre
Sénégalaise leur deuxième patrie, et un retour fructueux auprès des leurs aux termes de cette
UHQFRQWUHSDUO¶DLGHGH$OODKHWGHVRQVRXWLHQ ; certes Allah entend et exhausse les invocations.

Was salaamou aleykoum wa rahlatoul-lahi Ta ala wa barakaatuhu

22  

 
A llocution du Professeur M auritanien Moukhtar O uld Bah, au nom des
Délégations étrangères

Au nom de tous les participants étrangers, il a exprimé ses remerciements et sa gratitude aux
organisateurs de la rencontre de Dakar.

Le soufisme peut être la solution aux crises multiformes at-LO GLW j WUDYHUV O¶DSSOLFDWLRQ GHV
UHFRPPDQGDWLRQVG¶$OODK6:7HWO¶DEVWHQWLRQGH6HVLQWHUGLWV

Il a souligné la fraternité très solide entre le Sénégal et la Mauritanie, ainsi que le statut acquis par
Cheikh Ahmadou Bamba dans ce pays où il compte de nombreux disciples et sympathisants.

23  

 
L A C O N F E R E N C E I N A U G U R A L E PR ESE N T E E PA R SE R I G N E K H A D I M
MBAC K E CHEIK HOU

« L e Mouridisme : Pensée et méthodologie »1

Bismillah errahman errahim

Gloire à Allah le Seigneur des mondes et salutations sur son envoyé Mohammad (psl) ainsi que
sur sa famille les nobles vertueux, ses compagnons valeureux et tous les pieux qui ont suivi leurs
HQVHLJQHPHQWVMXVTX¶jODILQGHVWHPSV

Illustres Cheikhs, vénérables savants, honorables professeurs et chers invités et auditeurs :

Je vous présente mes meilleures salutations au nom de tous les mourides, et je vous souhaite la
bienvenue.

Par cet exposé, la commission scientifique du colloque sur le soufisme apporte sa contribution
DX[ pWXGHV HW FRQIpUHQFHV SUpVHQWpHV GDQV FHWWH DVVHPEOpH GDQV O¶HVSRLU  TXH FHOD DLGHUD j OD
recherche des solutions aux problématiques contemporaines du monde islamique.

Nous pensons que le Soufisme peut être une réponse aux préoccupations de nos sociétés qui sont
confrontées à des défis et des challenges multiples dans le contexte mondial actuel ; et nous
sommes honorés de vous présenter par cet exposé sommaire, la pensée et la méthodologie du
Mouridisme.

De même que les spécificités de cette voie, son apport pour les musulmans en général et pour les
africains en particulier, notamment les sénégalais.

En conclusion, on proposera des solutions pratiques pour la résolution de certains maux et crises
affectant la nation islamique.

2Q YD G¶DERUG LQWURGXLUH SDU XQ DSHUoX KLVWRULTXH GX 0RXULGLVPH GHSXLV VD JHQqVH 6RQ
fondateur Cheikh Ahmadou Bamba affronta des épreuves et défis divers tant sur le plan national
TX¶LQWHUQDWLRQDO  MXVTX¶j OD UpXVVLWH HW O¶pPHUJHQFH GH VD voie spirituelle pour le triomphe de
O¶,VODP

4X¶$OODKQRXVDVVLVWHGDQVFHWWHKHXUHXVHHQWUHSULVHHWTX¶LOQRXVEpQLVVH$PLQ

                                                                                                                     
1    KŶƚƉĂƌƚŝĐŝƉĠăů͛ĠůĂďŽƌĂƚŝŽŶĚĞĐĞƚĞdžƚĞ^ĞƌŝŐŶĞDŽƵŶƚĂŬŚĂŝĂƚƚĂƌĂ,  Serigne  Affé  Niang,  Serigne  Moustapha  
Diop  Koky,  tous  membres  de  la  dahira  Rawdu  Rayaîn  

24  

 
A PE R Ç U SU R L A V I E D E C H E I K H A H M A D O U B A M B A

&¶HVW $KPHG ,EQ 0RKDPPDG ,EQ +DELERXOODK ,EQ 0RKDPPDG DO .KD\U  SOXV FRQQX VRXV
O¶appellation de Cheikh Ahmadou Bamba ou Cheikh Al Khadim ou Khadimou Rassoul (sur lui la
paix et le salut).

Il naquit en (1270 h), vers 1854, dans un village du Sénégal nommé Mbacké Baol. Son père
Mohammad Ibn Habiboullah était surnommé Mame Mor Anta Sally, et fut un savant noble et
respecté par les Rois de son époque pour sa science et sa probité. Il officiait en tant que Cadi et
,PDPHWWHQDLWXQHpFROHWUqVUpSXWpH4XDQGjODPqUHGH&KHLNK$PDGRX%DPEDHOOHV¶DSSHODLW
Meriem Bousso, plus connu par DiarDWRX$OODK ODSURWpJpHG¶$OODK (OOHpWDLWXQHVDLQWHGRQW
la réputation imposait le respect de tous.

La personnalité de cette femme et son éducation ont apporté un bénéfice certain à son fils qui
GHSXLVVDWHQGUHHQIDQFHQ¶DFHVVpGHPDQLIHVWHUGHVVLJQHVGHVDLQWHWp(QHIIHWO¶HQIDQWDYDLW
une prédilection pour les lieux de culte.

/D0RVTXpHO¶DXWHOHWOHWDSLVGHSULqUHO¶DVVHPEOpHGHVVDYDQWVGHODUHOLJLRQH[HUoDLHQWVXUOXL
XQ DWWUDLW FHUWDLQ ,O Q¶pWDLW SRLQW DWWLUp SDU OHV MHX[ FRPPH OD Slupart des enfants. Il fuyait les
IrWHVOHVPDULDJHVHWOHVEDSWrPHVTXLpWDLHQWVRXYHQWO¶RFFDVLRQGHGLVWUDFWLRQGDQVODPXVLTXH
et la danse comme de coutume dans le pays. Il aimait la solitude, et aimait entendre les récits de
ODVDLQWHWpHWjO¶LQVWDUGHVVDLQWVpWDLWSRUWpVXUO¶DVFpWLVPH

Son cursus pédagogique

Cheikh Ahmadou Bamba apprit le coran et le mémorisa intégralement puis se préoccupa de


O¶H[pJqVH ,O DYDLW FRPPH SURIHVVHXU VRQ RQFOH PDWHUQHO OH &DGL 0RKDPPDG %RXVVR TXL pWDLW
considéré comme le plus grand savant du Sénégal dans les sciences islamiques. Il eut aussi un
autre oncle maternel comme professeur, Cheikh Tafsir Mbacké Ndoumbé qui était un
commentateur du Coran. Il excella dans le Fiqh ainsi que dans le Hadith, la grammaire et les
GLIIpUHQWHV GLVFLSOLQHV GH OD ODQJXH DUDEH ,O FRQWLQXD VHV pWXGHV GDQV O¶pFROH GH VRQ SqUH HW
fréquenta les cours de Cheikh Samba Toucouleur Ka et plus tard du Cadi Madiakaté Kala qui
était un linguiste grammairien. Puis, il suivit les cours du savant mauritanien Cheikh Mohammad
,EQ0RKDPPDG'H\PDQLTXLO¶LQLWLDjODORJLTXHHWjODUKpWRULTXH

4XDQGLOILQLWVRQFXUVXVLOHQVHLJQDGDQVO¶pFROHGHVRQSqUHHWPDQLIHVWDGHVGRQVWHOVTXHOHV
élèves accouraient vers lui au point que son père fut surpris et OXLODLVVDODGLUHFWLRQGHO¶pFROH

Son parcours spirituel dans la voie soufie

&KHLNK$KPDGRX%DPEDV¶LQWpUHVVDLWEHDXFRXSDX[HQVHLJQHPHQWVGHV0DvWUHVVRXILV,ODYDLW
XQHSUpGLOHFWLRQSRXUO¶DVFpWLVPHHWOHVSpUpJULQDWLRQV,OHXWjHQWUHSUHQGUHSOXVieurs voyages à

25  

 
O¶LQWpULHXU GX 6pQpJDO 3XLV HQ 0DXULWDQLH R LO YLVLWD OHV VDYDQWV HW OHV VDLQWV UpSXWpV SRXU
EpQpILFLHUGHOHXUVDJHVVHDLQVLTXHOHVWRPEHDX[GHVDLQWVGLVSDUXVDILQG¶\UHFXHLOOLUODEDUDND

Il collecta dans ses voyages beaucoup de manuscrits et des livres rares. Il étudia les classiques
WHOV ,K\DRX KROXPH GGLQH GH *KD]DOL HW 4XW DO 4ROXE G¶$ERX WDOLE DO 0HNNL  /D 5LVDOD GH
4XVKDLULHW-DZDKLUDO0D¶DQLGH6LGL$OLKDUD]DP%DUUDGDHWG¶DXWUHVRXYUDJHVTXLFRQWULEXqUHQW
à sa formation intellectuelle. Il prit le Wird Qadiri de son père qui était une autorité de la
4DGLUL\D HW  DXVVLOHZLUG7LMDQHHW OH:LUG6KDGLOL ,O XWLOLVHUDOHVWURLV ZLUGVMXVTX¶j FHTX¶LO
UHoXW VRQ SURSUH :LUG GLUHFWHPHQW G¶$OODK SDU O¶LQWHUPpGLDLUH GH 5DVVRXO $Olah sallaAllahu
DOD\KL ZDVDOODPD j 6DUVDUD HQ 0DXULWDQLH j O¶pWDW GH YHLOOH HW QRQ SRLQW HQ VRQJH $O 0DKIRX]
Mina ALLAHI.

Ses O uvrages

Cheikh Ahmadou Bamba composa ses premiers ouvrages très tôt, quand il enseignait dans
O¶pFROH GH VRQ SqUH ,O YHUVLILD les écrits de Cheikh Abou Abdallah Senoussi dans le Tawhid
QRWDPPHQW2PDO %DUDKLQ TX¶LOLQWLWXOD ©0DZDKLE DO 4RGGRXV ª'DQV OH7DVDZXILOYHUVLILD
ELGD\DWDO+LGD\DGH*KD]DOLTX¶LOLQWLWXOD©0XOD\LQRXVRXGRXUªSXLVODUHSULWHQYHUVLRQSOXV
ésotérique intitulé

©0XQDZLURXVRXGRXUª,OFRPSRVDG¶DXWUHVRXYUDJHVGLGDFWLTXHVGDQVOH7DZKLGOH)LTKOH
Tasawuf, et aussi dans la grammaire arabe. Parmi ses écrits, les plus connus : « Tazawudou
sighar », « Tazawudou chobbane », « Al jawharu nafis » « Maghaliqu niran » et « Masalik al
-LQDQª'HPrPHTX¶LOFRPSRVDGHVRGHVHWGHVSDQpJ\ULTXHVH[FOXVLYHPHQWGpGLps à Allah et
son prophète (Psl).

&HVRQWGHVPRQXPHQWVLQFRPSDUDEOHVGHODOLWWpUDWXUHDUDEHWHOVTXH©$OIROTDOPDVK¶XQDO
PDVQRX¶PLQD GKLNULDOPDVRXQªHW©'LZDQVD¶DGDWDOPXULGLQILDPGDKNKD\ULDOPXUVDOLQªHW
G¶DXWUHVHQFRUH

Contexte social et religieux

2QDGpMjPHQWLRQQpTXH&KHLNK$KPDGRX%DPEDUHSULWODGLUHFWLRQGHO¶pFROHGXYLYDQWGHVRQ
père. Il continuera à enseigner après le décès de ce dernier, pendant une année ou plus. Puis en
  LORSWDSRXUXQHQRXYHOOHIRUPHG¶pGXFDWLRQVSLULWXHOOHTXLVXUOHSODQSpGDJRJLTXH
MRLQW ODSUDWLTXH jO¶HQVHLJQHPHQWWKpRULTXH ,O FRQYRTXDDORUVOHVpOqYHVSRXUOHXUDQQRQFHU la
QRXYHOOHRULHQWDWLRQHWGLWFHOXLTXLHVWHQTXrWHGHO¶HQVHLJQHPHQWWKpRULTXHVHXOHPHQWSRXUUD
trouver satisfaction dans toutes les écoles du pays ; quand à celui qui aspire au même but que
nous, il doit prêter serment et obéir.

%HDXFRXS G¶pOqYHV SDUWLUHQW WDQGLV TX¶XQ SHWLW QRPEUH FKRLVLW GH UHVWHU ,OV GHYLHQGURQW OHV
SUHPLHUVGLVFLSOHVGHODQRXYHOOHYRLHVSLULWXHOOHFHOOHGHVPRXULGRXO¶$OODK

26  

 
/HSD\VpWDLWFRQIURQWpjSOXVLHXUVGpILVTXLPHQDoDLHQWO¶LVODP/DQRXYHOOHYRLHGHYDLWDIIURQWHU
le colonialisme et les usurpateurs qui se servaient de la religion à des fins personnelles.
Beaucoup de savants et de chefs religieux étaient assujettis aux princes. Ils leur fabriquaient des
talismans de protection, et leur trouvaient des licences et des subterfuges qui les dispenseraient
des contraintes de la religion.

Cheikh Ahmadou Bamba mentionna cet état de fait dans Masalik Al Jinan :

-HGLVFHOXLTXLYHXWSDUIDLUHVHVDFWLRQVGRLWVHPHWWUHVRXVODGLUHFWLRQG¶XQVDLQWSDUIDLW

Car, il est évident que la majorité des cheikhs contemporains sont des usurpateurs

Certains mettent des turbans et se voilent la face pour ressembler aux pieux bienfaiteurs

4XLQ¶RQWFRPPHSUpRFFXSDWLRQTXHO¶DJUpPHQWGX6HLJQHXU

Ils mentionnent constamment Allah par la lDQJXH PDLV OHXU F°XU HVW SOXV FRUURPSX TXH FHOXL
G¶XQPDOIUDW

,OVVHIRQWSDVVHUSRXUGHVDVFqWHVGDQVO¶XQLTXHEXWGHVHIDLUHXQHUpSXWDWLRQ

Méfie-toi de tels scélérats

,OIDXWDXVVLVRXOLJQHUTXHO¶DQDOSKDEpWLVPHpWDLWJpQpUDOHWIDYRULVDLWOHVLQQRvations blâmables
et les fabulations.

Cheikh Ahmadou Bamba dit en cela :

/DYRLHGXSURSKqWHpOXpWDLWGHYHQXHHVFDPRWpHSDUO¶DQDOSKDEpWLVPHUpJQDQW

La Sunna de notre fidele envoyé, sur lui les plus pures prières, n était plus que les vestiges d une
demeure abandonnée

$FDXVHGHO¶DEVHQFHGHVVDYDQWVYHUWXHX[HWGHV&KHLNKVYpQpUDEOHVTXLSDUODOXPLqUHGHODIRL
et de la connaissance guident les croyants

Nos contemporains ne cheminent plus sur les traces des premières générations mais suivent les
innovations blâmables

L e contexte colonial

/D GRPLQDWLRQ FRORQLDOH HW FXOWXUHOOH RFFLGHQWDOLVDLHQW OHV P°XUV TXL HW FRQWUHFDUUDLHQW
O¶LVODPLVDWLRQ GX 6pQpJDO  /H 0RXULGLVPH VH WURXYD G¶HPEOpH HQ FRQIURQWDWLRQ DYHF OH
colonialisme français qui en plus de sa suprématie militaire, véhiculait sa culture et sa religion
TX¶LOYRXODLWLPSRVHUSDUWRXW

27  

 
Khadim Rassoul dénonça cela :

Les mazdéens et les chrétiens sont devenus les captifs de satan le maudit

,OVVRQWFRPPHGHVGURJXpVTXLV¶DXWRGpWUXLVHQWLQFRQVFLHPPHQW

Ibliss les entraine vers les transgressions et la vanité qui feront leur malheur demain

,OOHVDEXVHSDUODIRUFHPLOLWDLUHMXVTX¶jOHXUIDLUHFURLUHTX¶LOVYRQWGRPLQHUOHPRQGHHQWLHU

Les ignorants et les passionnés les considèrent comme des êtres invincibles tandis que les
pervers les prennent en exemple et leur témoignent la plus haute estime

4XDQGDX[LGLRWVLOVVHIRQWDEXVHUSDUOHXUFLYLOLWpHWSHQVHQWTX¶LOVVRQWGHVSURWHFWHXUV

Or, ceux qui penchent vers eux sont enclins à la fornication au vol et à la corruption.

&¶HVW  GDQV FH FRQWH[WH VRFLDO HW SROLWLTXH TXH &KHLNK $KPDGRX %DPED D HQJDJp VRQ FRPEDW
pour la restructuration sociale et la rénovation religieuse

L a définition de la voie mouride


Originellement cela signifie la sincérité danVODTXrWHGHO¶DJUpPHQWGLYLQFDUWHOOHHVWODYRFDWLRQ
GHO¶DVSLUDQW 0RXULGH$OODK 

En désignant ses disciples par le terme Mouridoullah, Cheikh Ahmadou Bamba semble opérer
XQFKRL[VWUDWpJLTXHSRXUODFRKpVLRQ GHO¶,VODPFDUOHV7DULTDVVRXYHQW VH déchirent dans des
rivalités qui parfois entamaient l¶unité de l islam. Cheikh Ahmadou Bamba préférait la voie des
FRPSDJQRQVGXSURSKqWH SVO G¶RVDYRLHQ¶HVWTX¶XQHLOOXVWUDWLRQGHFHOOHGHFHVGHUQLHUVª. Il
DPLVO¶DFFHQWSOXW{WVXUO¶DFWLRQUpQRvatrice. Son but était de réunir les aspirants dans un projet
commun, loin des rivalités confrériques.

Les chercheurs ont toujours eu à diverger sur ce point, car les uns considèrent le Mouridisme
comme une Tariqa et les autres comme un mouvement rénovateur avec une orientation soufie ; ce
qui est plus conforme à la vérité de notre point de vue.

Il disait dans Masalik al Jinan :

7RXW:LUGSHXWIDLUHDFFpGHUO¶DVSLUDQWjODSUR[LPLWpGLYLQHVDQVFRQWHVWDWLRQ

4XHFHVRLWOHZLUGGH-LODQLRXG¶$KPHG7LMDQLRXFHOXLG¶XQDXWUH4RWE

Ils sont tous incontestablement dans la bonne direction.

Ils appellent à la rectitude et incitent les aspirants à se soumettre aux obligations.

Ne les dénigre jamais et ne sois pas irrespectueux envers leur voie.


28  

 
'¶DLOOHXUVCheikh Ahmadou Bamba ELHQTX¶LODLWUHoXVRQZLUGSDUO¶LQWHUPpGLDLUHGHO¶HQYR\p
G¶$OODK ZLUG PDNRXWK PLQD $OODK ELZDVLWDWL 5DVVRXO $OODK  IDLVDLW DXWRULWp GDQV OHV ZLUGV
Qadiri, Chadili et Tijane. Ils les revivifiaient pour ceux qui les pratiquaient dpMjDYDQWGHV¶DIILOLHU
à sa voie.

Et dans beaucoup de ses écrits, il parlait de la revivification :

(QGHKRUVGHO¶LVODPDXFXQHUHOLJLRQQ¶HVWDJUppHSDU$OODK.

-¶DLpWpFKRLVLSRXUUHYLYLILHUODUHOLJLRQ.

3RXUO¶DPRXUGXSURSKqWHMHP¶HQJDJHjUHYLYLILHr la Sunna pure, et je suis Ahmed.

3RXU OD WKpRORJLH OH &KHLNK D RSWp SRXU O¶pFROH DVK¶DULWH TXL HVW PDMRULWDLUH GDQV OH PRQGH
sunnite. Ses ouvrages dans le Tawhid sont explicites en cela : tel (Mawahib al Qoddous) qui est
une versification commentée et eQULFKLHGH 2PDOEDUDKLQ GHO¶LPDP6HQRXVVL

Cheikh Ahmadou Bamba expliqua que le véritable Tawhid introduit à la connaissance divine. Il
QH SHXW rWUH O¶REMHW G¶XQ HQVHLJQHPHQW H[FOXVLYHPHQW WKpRULTXH PDLV OH IUXLW G¶XQH pratique
spirituelle assidue. /¶DVSLUDQW GRLW V¶HQJDJHU GDQV OD YRLH GHV PDLWUHV VRXILV SDU O¶DVFpWLVPH OH
FRPEDWFKDUQHOODFRQFHQWUDWLRQVFUXSXOHXVHO¶H[DPHQGHFRQVFLHQFHHWODPpGLWDWLRQDLQVLTXH
O¶pYRFDWLRQ ]LNU 

Il y aussi, la contemplation et la méditation sur les merveilOHVGHODFUpDWLRQFRPPHO¶DHQVHLJQp


OH&RUDQ©&RQWHPSOH]OHVFLHX[HWODWHUUHHWFHTX¶LOVFRQWLHQQHQW'HWHOVVLJQHVVuscitent la
foi, mais pas pour les impies ». younes 101

« Est-FHTX¶LOVQHFRQWHPSOHQWSDVOHUR\DXPHGHVFLHX[HWGHODWHUUHet WRXWFHTX¶$OODKDFUppª
D¶UDI

« Est- ce TX¶LOVQHFRQWHPSOHQWSDVOHVFDPpOLGpVFRPPHQWLOVRQWpWpFUppVHWOHFLHOFRPPHQWLO
a été élevé, et les montagnes comment ils ont été posées, et la terre comment elle a été aplatie »
DOJKD¶FKLD/20

'DQV0DVDOLNDO-LQDQOH&KHLNKPHQWLRQQDOHVYHUWXVGX=LNUSDUO¶DWWHVWDWLRQGHIRL/D,ODKD,OD
Allah :

/DGLYXOJDWLRQGHVVHFUHWVGHFHWWHIRUPXOHQ¶HVWSDVSHUPLVHFDULOV¶DJLWG¶XQRFpDQVDQVILQ.

Celui qui veut découvrir ces secrets doit divorcer définitivement avec ce bas monde.

Ce sont des secrets qui ne peuvent pas être exposés dans les écrits, mais strictement transmis par
initiation orale en toute confidentialité.

29  

 
Ce ne sont point des sujets de polémique, et il faut les accueillir en toute soumission après avoir
dompté ses passions.

6XUWRXWSRLQWG¶REMHFWLRQQLGHGpILDQFHPDLVKXPLOLWpHWLQGLJHQFHSRXUEpQpILFLHUGHODJUkFH
du tout puissant

Il ne faut point sous estimer nos nobles prédécesseurs qui ont transmis ces secrets.

Ils nous font bénéficier de la quintessence de leurs expériences.

&KHLNK$KPDGRX%DPEDDIILUPDTXHOH7DZKLGVHGLYLVHHQGHX[SDUWLHVO¶XQHH[RWpULTXHSRXU
OHVWKpRORJLHQVHWO¶DXWUHpVRWpULTXHSRXUOHVJQRVWLTXHV,OGLWGDQV0DVDOLNDO-LQDQ

Le Tawhid se coPSRVH GH GHX[ VFLHQFHV  O¶XQH GLDOHFWLTXH HW O¶DXtre gnostique. Ne réfute pas
mes explications.

/DSUHPLqUHHVWODGLVFLSOLQHGXFRPPXQDORUVTXHODVHFRQGHHVWFHOOHGHO¶pOLWH

L a portée cultuelle et juridique


La jurisprudence (Fiqh) occupe une place prpSRQGpUDQWH GDQV O¶°XYUH GH Cheikh Ahmadou
%DPEDHWVRQHQVHLJQHPHQWUHSRVHVXUODVFLHQFHHWO¶DFWLRQ

Le Cheikh a exhorté ses disciples à apprendre prioritairement le Fiqh. Du moins ce qui est
nécessaire pour tout croyant responsable concernant les obligations individuelles. Il insista sur la
connaissance du Fiqh qui doit être maitrisé avant O¶HQJDJHPHQWGDQVODYRLH6RXILe.

,ODFRPSRVpXQHVpULHG¶RXYUDJHVMXULGLTXHVHQFRQIRUPLWpWRWDOHDYHFO¶pFROHPDOpNLWHDILQGH
faciliter aux disciples le Fiqh et leur permettre de le maitriser très rapidement.

Il rédigea plusieurs lettres aux disciples pour les inciter au respect total de la Charia. Il les somma
G¶DSSUHQGUHà parfaire le culte pour plaire au Seigneur.

« Pour exemple, il dit : ô mes disciples, écoutez- moi et acceptez mes conseils, conformez-vous à
la Charia pure tout en vous préoccupant de la Haqiqa éblouissante à la mesure de votre
compétence. La Charia pure LPSOLTXH/¶,PDQSDUOH7DZKLGHWO¶,VODPSDUOH)LTKSXLVO¶,KVDQ
par la sincérité.

DanVO¶DSSOLcation des obligations ou dans O¶DEVWHQWLRQGHVLQWHUGLWVLOIDXWFKHUFKHUDEVROXPHQW


O¶DJUpPHQWGLYLQ

%LHQTXHOH&KHLNKVHFRQIRUPHDX)LTKGHO¶,PDP0DOLNTX¶LOHQVHLJQDLWHWUHFRPPDQGDLWjses
disciples, il avait un total respect pour les autres Imams et une pareille compétence dans la
jurisprudence des autres écoles. Il disait :

0HVPDLWUHVGDQVOH)LTKVRQW0DOLNHW&KDIL¶DLQVLTXH$ERX+DQLIDHW,EQ+DQEDO
30  

 
/¶DVSHFWMXULGLTXHHVWIRQGDPHQWDOSRXUODIRUPDWLRQVSLULWXHOOHHQ,VODPHWOH Cheikh Ahmadou
Bamba en donna la meilleure illustration.

L a portée initiatique
Le Mouridisme étant plutôt une voie rénovatrice comme nous le soutenons, elle a vocation à
UHYLYLILHU OD YRLH GHV SLHX[ SUpGpFHVVHXUV 6DODI  TXL HVW FHOOH GH O¶DVFpWLVPH HW des exercices
VSLULWXHOV &¶HVW XQH YRLH TXL D FRPPH UpIpUHQFH OH &RUDQ HW OD 6XQQD SXLV O¶H[HPSOH GHV
6DKDEDV &H Q¶HVW SRLQW XQH TXrWH SKLORVRSKLTXH RX LQWHOOHFWXHOOH ORLQ GHV SUpRFFXSDWLRQV
essentielles de la communauté islamique comme certains Soufis influencés par les traditions
RULHQWDOHV O¶RQW SUpVHQWpV &¶HVW XQ UHWRXU j OD VLPSOLFLWp RULJLQHOOH GH O¶,VODP ORLQ GH WRXW
fanatisme et de toute extravagance.

La voie mouride repose sur la spiritualité Soufie qui est la sincérité et la pureté dans
O¶HQgagement spirituel. Elle contribue à rectifier les lacunes qui entachèrent la voie Soufie à
WUDYHUVO¶KLVWRLUH

Ces vers de Cheikh Ahmadou Bamba sont explicites :

Il est impératif de pleurer la mort des maitres

La terre ainsi que les cieux les pleurent

Je les pleure et M¶HVSqUHO¶DJUpPHQWGX6HLJQHXUjTXLLOVRQWGpGLpVOHXUYLH

0RQkPHHVWSHUSOH[HGHYDQWODSHUWHGHVLOOXVWUHVTXLQRXVRQWTXLWWpVSRXUUpSRQGUHjO¶DSSHOGX
Seigneur qui les a honorés

Ah ! Quelle émotion devant la perte de ces maitres

Dont la voie est celle du prophète élu, le meilleur des êtres

Ah ! Quel trouble pour la disparition de ces maitres qui ont obtenu des dons surprenants.

L es caractéristiques du Mouridisme

La globalité et la juste mesure sont des aspects importants qui caractérisent le Mouridisme. Ainsi,
ODYLHPDWpULHOOHFRPPHVSLULWXHOOHVRQWFRPSOpPHQWDLUHVGDQVO¶LGpRORJLH0RXULGHGHPrPHTXH
tous les aspects de la religion et de la société.

Quand à la globalité, le Cheikh dit concernant la Haqiqa et la Charia:

Celui qui s¶HQJDJH GDQV O¶RFpDQ GH OD +DTLTD VDQV O¶HPEDUFDWLRQ GH OD &KDULD HVW
incontestablement inintelligent

Seul celui qui réunit entre le Fiqh et le Tasawuf HVWGLJQHG¶rWUHXQPDLWUHGHODYRLH

31  

 
Il dit concernant la pratique et la théorie (Ilm wa Amal):

Le savoLUHWO¶DFWLRQVRQWGHVMR\DX[SUpFLHX[TXLSHUPHWWHQWG¶REWHQLUOHVELHQVGHFHPRQGHHW
GHO¶DX-delà

Sache que la théorie et la pratique sont assurément les moyens de la félicité

Et concernant le monde terrestre et le monde céleste (Dunia wa Akhira):

¯uvre pour ce monde terrestre autant que tu y demeures, Ô intelligent

¯XYUHSRXUODYLHFpOHVWHDXWDQWTXHWX\GHPHXUHUDV

Celui qui néglige ces propos sera dans les regrets demain

Sur la remise confiante et la quête de la subsistance (Tawakul wa Takassub) :

6DFKHTXHODTXrWHGHODVXEVLVWDQFHQ¶HVW SDVDQWLQRPLTXHGHODUHPLVHFRQILDQWHHQ$OODKQH
W¶pJDUHSDV

Physiquement, il faut que tu gagnes ta vie en travaillant par conformité aux prescriptions

Et spirituellement, il faut que tu remettes ton sort entre les mains de ton Seigneur en toute
confiance

Mon être adore intégralement le Seigneur des mondes et sert le prophète notre fidèle guide

-DLpWpXQDGRUDWHXUDXVHUYLFHGXSURSKqWHGHSXLVHWMHOHVHUDLVMXVTX¶jFHTXHMHTXLWWHUDL
ce monde

Quand à la juste mesure, le Cheikh dit :

1¶H[WUDSROHSRLQWHWQHVRLVSDVQpJOLJHQWPDLVVRLVSOXW{WELHQVpDQWHWFRQIRUPH-toi à la Sunna
en toute intégrité

L a K hidma

Ce concept est très usuel dans la littérature Soufi, mais a un rôle fondamental dans le
0RXULGLVPH/¶XQHGHVHVDFFHSWDWLons est : servir utilement les PXVXOPDQVSRXUODIDFHG¶$OODK

Dans sa portée philosophique, elle signifie : toute action efficace qui a une valeur morale ou
symbolique destinée j OD V\PELRVH GH O¶KRPPH GDQV OD VRFLpté et qui a pour motivation la
satisfaction divine.

&¶HVW XQH YHUWX LQWULQVqTXH GX &KHLNK TX¶LO PHWWDLW HQ DSSOLFDWLRQ DYDQW GH O¶HQVHLJQHU ,O pWDLW
connu comme le serviteur du prophète (SVO WHOTX¶LOPHQWLRQQDGDQVbeaucoup de ses écrits :

32  

 
7XP¶DVVXUQommé indéniablement ton esclave serviteur

Ô toi qui me gratifie par les bonnes nouvelles perpétuelles

/H6HLJQHXUJpQpUHX[P¶DDJUppen tant que compagnon aimé et serviteur

Le Cheikh était dévoué dans le service du prophète élu, comme son fils et biographe Cheikh
0RKDPPDG%DFKLUO¶DH[SOLTXpGDQV©0LQDQDOEDTLª,OpWDLWFRQVWDQWGDQVOD6XQQDTXLpWDLW
sa priorité après les obligations, puis il mentionnait inlassablement le prophète (psl) et rappelait
ses vertus et chantait ses louanges et composait des panégyriques en son honneur.

Quand à son service pour les musulmans, cela faisait partie de son quotidien comme Cheikh Sidia
O¶DPHQWLRQQp

,OQ¶DTX¶XQHVHXOHSUpRFFXSDWLRQHQGHKRUVGHO¶DGRUDWLRQGHVRQ6HLJQHXU

&¶HVWG¶rWUHXWLOHDX[PXVXOPDQVPDtin et soir

Comme il était constamment au service du prophète (psl), il recommanda à ses disciples de servir
toujours les musulmans, et surtout ceux qui sont dignes de tous les égards. Il dit aux disciples :

Règle les besoins de ton maitre, tant que tu es avec lui, en le servant fidèlement

Il dit aussi :

Quand tu voyages en compagnie de tes coreligionnaires, sois à leur service et aide les dans leurs
besoins.

Parmi, les services que le Mouride fait dans la communauté, il y a le fait de contribuer
matériellement aux dépenses publiques, car la solidarité est une valeur fondamentale en Islam.
7RXWDSSDUWLHQWj$OODKHWO¶DUJHQWHVWXQGépôt que nous devons restituer à qui de droit. Allah dit
dans le Coran : «Dépensez ce que nous vous avons légués ». Donc, il est de notre devoir de
GpSHQVHUGDQVOHV°XYUHVSLHXVHV

&¶HVWDLQVLTXHEHDXFRXSGHSURMHWVLPSRUWDQWVRQWpWpUpDOLVpVGDQV O¶LVODPJUkFHDX[GRQVGHV
fidèOHV HW 6H\\LGQD 2WKPDQ ,EQ $IIDQ D REWHQX XQ VWDWXW H[FHSWLRQQHO JUkFH DX[ GRQV TX¶LO
faisait dans lD YRLH G¶$OODK /H SURSKqWH SVO  D WpPRLJQp SRXU OXL HQ GLVDQW ORUV G¶XQ GRQ
important : Rien ne peut désormais nuire à Othman après son action présente.

Le Mouride qui obéit aux recommandations de son Cheikh, et qui gagne licitement sa vie, doit
après avoir satisfait les besoins de sa famille dépenser pour nourrir les nécessiteux. De même,
TX¶LO GRLW FRQWULEXHU DX[ SURMHWV G¶XWLOLWp SXEOLTXH WHOOHV OHV FRQVWUXFWLRQV GHV PRVTXpHV GHV
hôpitaux, des écoles et autres travaux.

Le Cheikh dit :
33  

 
Dépensez constaPPHQWGDQVO¶°XYUHGXPDLWUHGHODFUpDWLRQ

Et il expliqua que ceux qui se vouent à la Khidma auront un sort heureux :

2QOHXUGLUD(QWUH]DXSDUDGLVVDQVFUDLQWHQLpSUHXYHHWVR\H]jO¶DEUL

Les recommandations du Cheikh Ahmadou Bamba ont été accueillies favorablement par toutes
les générations qui ont donné sans compter pour réaliser les projets sans nulle aide extérieure. La
PRVTXpHGH7RXEDODPRVTXpHGH'LRXUEHOODELEOLRWKqTXH'DUDO.DPLOO¶XQLYHUVLWpGH7RXED
les maisons de Khadim Rassoul et tous les grands projets ont été réalisés dans un temps record
exclusivement par les mourides. Ainsi, ils sont indépendants de toute tutelle nationale ou
internationale.

Dans le contexte mouride, le travail est un concept qui signifie : tout labeur qui permet de gagner
honnêtement sa vie, et il est considéré comme condition pour une adoration agréé. Dans les
principes du fiqh : tout ce qui est nécessaire pour remplir les obligations est obligatoire. Pour cela
le Cheikh dit :

Gagner honnêtement sa vie est une obligation pour tout musulman.

1LODVFLHQFHQLO¶DGRUDWLRQQHVRQWXWLOHVSRXUFHOXLTXLQHJDJQHSDVOLFLWHPHQWVDYLH

- /H WUDYDLO DVVXUH O¶LQGpSHQGDQFH GX FUR\DQW FDU FHOXL TXL GpSHQG G¶DXWUXL SRXU VH QRXUULU QH
contrôle plus sa vie.

- Le travail est le moyen efficace de combattre le chômage et la paresse. Le Cheikh avertit en


disant :

Le chômage et la perte du temps dans les futilités sont un mal pernicieux

-Le travail permet de corriger un malentendu persistant qui a corrompu la voie Soufi, qui pour
beaucoup semble une retraite dans les cavernes ou les mosquées. Le Cheikh a fait du travail un
impératif :

6DFKHTXHODTXrWHGHODVXEVLVWDQFHQ¶HVWSRLQWDQWLQRPLTXHjODUHPLVHFRQILDQWHHQ'LHX

,OWHVXIILWGHQHYRLUTX¶$OODKGDQVWRXWFHTXLWH parvient

Apparemment, quête ta subsistance pour être en conformité avec la légalité

Et intimement sois confiant en ton Seigneur qui pourvoit aux besoins de toute la création

Se détourner des moyens de gagner sa vie en prétendant se confier à Dieu

Tout en quémandant auprès des gens est le fait des inconscients

34  

 
Malheureusement, cette mauvaise habitude de chômer est répandue parmi les prétendants Soufis.
Or, le travail aide le mouride dans sa vie cultuelle et familiale et ne doit point être une entrave à
O¶DFcomplissement des devoirs religieux et sociaux.

L a méthodologie du C heikh A hmadou Bamba

Nous voulons exposer certains moyens utilisés par le Cheikh dans sa mission de revivification.

Le savoir était pour le Cheikh une lumière divine pour discerner le bien du mal, et le meilleur
moyen pour accéder au Divin. Il a enseigné et composé des ouvrages didactiques afin de diffuser
le savoir. Très peu de savants sénégalais avaient composé GHV pFULWV j O¶pSRTXH HW OHV OLYUHV
étaient rares. Les étudiants manquaient de motivation pour acquérir les ouvrages littéraires.
Cheikh Ahmadou Bamba combla ce vide et revivifia les sciences islamiques par sa production
abondante dans le Tawhid, dans le Fiqh, dans le Tasawuf et la grammaire. Il versifia les ouvrages
volumineux tout en les explicitant pour les étudiants. Ainsi Masalik al jinan est une synthèse
G¶,K\DROXPHGGLQHGH*hazali et de Jannat al Mouride de Sidi Mukhtar al Kunti et surtout de
Khatimat al Tasawuf GH0RKDPPDG<DGDOLHWG¶DXWUHV

,OVLJQDODGDQVO¶LQWURGXFWLon de Masalik :

Les savants avaient déjà composé des ouvrages merveilleux pleins de secrets

Mais ils furent délaissés par la majorité des contemporains à cause de leur voluminosité.

Et il manifesta son objectif dans la composition de son ouvrage :

$ILQTX¶LOVRLWXQFKHIG¶°XYUHSRXUFHX[TXLYHXOHQWHQEpQpILFLHUSDUPLOHVFRQWHPSRUDLQV

/¶(16(,*1(0(17(7/¶A D O R A T I O N

Le Cheikh avait commencé par enseigner théoriquement le Fiqh et le Tawhid, puis annonça une
QRXYHOOHRULHQWDWLRQDLQVLTXHQRXVO¶DYRQVH[SOLqué précédemment.

/DFUpDWLRQGHO¶KXPDLQ DSRXUREMHFWLIO¶DGRUDWLRQG¶$OODKWHOTX¶H[SOLTXpSDUOH&RUDQ ©-H


Q¶DL FUpH OHV KXPDLQV HW OHV JpQLHV TXH SRXU PRQ DGRUDWLRQ ª 'RQF LO HVW ELHQ pYLGHQW TXH OH
&KHLNK D IDLW GH O¶DGRUDWLRQ VD YRFDWLRQ ,O sermonnait incessamment ses disciples hommes et
femmes concernant les obligations et les recommandations. Il disait :

La victoire et la joie de celui qui apprend sa religion et accomplit les adorations seront
continuelles ;

Seul celui qui remplit ses devoirs obtiendra ses aspirations

35  

 
/¶DGRUDWLRQGHO¶KRPPHGHIRLDVVXUHODVpFXULWpGHPDLQ

3HUVpYqUHVXUO¶DGRUDWLRQGX6HLJneur en toute piété et sois fidèle jusqu'à ta mort

Il exhortait tous les disciples et composait des ouvrages en ce sens :

La formule La¶LODKDLOOD$OODK0RKDPPDGHVWO¶HQYR\pG¶$OODK

Est le meilleur énoncé, celui qui le réfute sera perdu

Pour les prières obligatoires, il dit :

Soyez assidus sur les cinq prières, vous aurez une lumière analogue au soleil

6DFKH]TXHO¶REpLVVDQFHFDSLWDOHHVt celle de faire les prières dans leurs horaires

Pour le jeune de Ramadan :

Quand au jeune, il est le meilleur appui pour tes requêtes auprès du Seigneur

&DUDX3DUDGLVLO\DXQHSRUWHSDUODTXHOOHQ¶HQWUHTXHFHX[TXLIRQWOHMHXQH

Pour la dîme (Zakat) :

Quand à la dîme, elle a quatre conditions de validité, il faut les respecter

Pour le pèlerinage :

Le pèlerinage efface les péchés en totalité et supprime les défectuosités

Un pèlerinage agrée a pour récompense le paradis sans défaut

/H&KHLNKQHV¶HVWSDVFRQWHQWpG¶H[KRUWHUPDLVDFRPSRVpOHVPHLOOHXUVRXYUDJHVSRXUHQVHLJQHU
la religion, et fut un exemple parfait pour tous les musulmans.

Il insista tout autant sur les actes surérogatoires :

Exécute les obligations avec les recommandations conformément à la voie du prophète élu

Meuble ton temps par les actes surérogatoires après les actes obligatoires

3XLVSDUOHMHXQHOHVOLWDQLHVO¶pYRFDWLRQHWODPpGLWDWLRQ

(WDXVVLSDUODFKDULWpHWO¶DLGHDX[QpFHVVLWHX[DILQGHVDWLVIDLUH'LHX

36  

 
/¶('8&$7,2163,5,T U E L L E (T A R B I Y A)

Le Mouridisme fut un mouvement de réIRUPHGDQVO¶HQVHLJQHPHQWHWO¶pGXFDWLRQFDUDX6pQpJDO


RQ QH FRQQDLVVDLW HQFRUH TXH OH VLPSOH HQVHLJQHPHQW SpGDJRJLTXH VDQV VRXFL SRXU O¶pGXFDWLRQ
VSLULWXHOOH &KHLNK $KPDGRX %DPED LQWURGXLW O¶pGXFDtion par la volonté spirituelle (tarbiya bil
Himma), en conformité totale avec le Coran TXL GLW  © &¶HVW /XL TXL HQYR\D DX[ LOOHWWUpV XQ
(QYR\p LVVX G¶HX[  DILQ TX¶LO OHXU UpFLWH OHV YHUVHWV HW OHV SXULILH HW OHXU DSSUHQG OH /LYUH HW OD
sagesse ».

Cheikh $KPDGRX%DPEDXWLOLVDGHVPR\HQVGLYHUVGDQVO¶pGXFDWLRQ spirituelle de ses disciples.


Nous essayerons de définir les grandes lignes de son mouvement de sa réforme religieuse et
culturelle.

/¶pGXFDWLRQ VSLULWXHOOH QH SHXW SDV VH IDLUH GDQV XQ HQYLURQQHPHQW PDOVDLQ R OHV P°XUV VRQW
FRUURPSXHV/¶LQGLYLGXIDLVDQWSDUWLHLQWpJUDQWHGHODVRFLpWpGDQVODTXHOOHLOYLW/¶LQIOXHQFHGH
O¶HQYLURQQHPHQWMRXHXQU{OHLPSRUWDQW3RXUFHODLOHVWQpFHVVDLUHG¶LVROHUOHVDVSLUDQWVDXGpEXW
de leur initiation afin de les débarrasser des vices et des mauvaises habitudes acquises dans leur
milieu originel, avant de les préparer moralement et physiquement à acquérir les vertus. Ce
WUDYDLOV¶DSSDUHQWHjOD©7DNKOLDªHWOD©7DKOLDª

Pour le succès de cette entreprise, il faut généralement réunir deux conditions : choisir un endroit
LVROp ORLQ GH O¶XUEDQLVDWLRQ HW XQ HQYLURQQHPHQW VDLQ TXL SHUPHW O¶pSDQRXLVVHPHQW HW OD
méditation.

Le Cheikh Ahmadou Bamba a commencé par choisir des endroits isolés dont le premier fut Dar
Salam, à 2 km de Mbacke Baol, puis Touba à 5 km de Dar Salam. Puis Dar Mannan et Dar al
$OLPDO.KDELUTXLVRQWHQWUH7RXEDHW'DU6DODP'¶DXWUHVIR\HUVVSLULWXHOVIXUHQWIRQGpVSDUVHV
disciples sous son instruction.

&¶HVW GDQV FHW HQYLURQQHPHQW TXH OH &heikh vivait avec ses disciples, loin des complications
XUEDLQHVHWGHO¶K\SRFULVLHJpQpUDOLVpHGHO¶pSRTXHFRORQLDOH

/¶(16(,*1(0(1775$',T I O N N E L ISL A M I Q U E

La tradition voulait que les élèves commencent par apprendre la lecture du Coran et sa
mémorisationSXLVO¶pFULWXUHDUDEHSRXUpFULUHGHPpPRLUHOHOLYUHVDFUpDYDQWGHFRPPHQFHUj
apprendre les sciences religieuses et la grammaire arabe.

Le Cheikh a axé cet enseignement théorique sur les enfants, car ils ont une aptitude à la
PpPRULVDWLRQ HW j O¶DVVLPilation. Ils leur offraient DXVVL O¶HQYLURQQHPHQW DGpTXDW DILQ TX¶LOV
SXLVVHQW GHYHQLU PDWXUHV UDSLGHPHQW HW VH UpDOLVHU VSLULWXHOOHPHQW HQ YXH G¶DEorder la phase
adulte en toute confiance et en toute compétence. Il a composé des ouvrages merveilleux pour
FHWWHSDUWLHGHO¶HQVHLJQHPHQWTX¶LODYRXOXFRQIRUPHjO¶KpUitage des pieux prédécesseurs.
37  

 
/¶(16(,*1(0(173$5/A M N E M O T E C H N I Q U E

Le Cheikh a utilisé aussi des méthodes nouvelles conformes à la réalité de son peuple à certaines
catégories de ses disciples,OV¶DJLWGHO¶HQVHLJQHPHQWSUDWLTXH qui ne se fait pas par les livres,
mais par le symbolisme tel que les tracés schématiques et thématiques ou les figures
géométriques : points, lignes et cercles. Et aussi, par des anecdotes et récits tirés de la sagesse
africaine ou des notices des compagnons du prophète (psl) ou des saints. Cette forme
G¶HQVHLJQHPHQW pWDLW SOXW{W GHVWLQpH DX[ SHUVRQQHV kJpHV TXL QH SRXYDLHQW SOXV V¶LQVFULUH DX[
cours pédagogiques.

/HSURSKqWH SVO DXVVLUHFRXUDLWjFHWWHIRUPHG¶HQVHignement que le Cheikh a revivifié dans son


HQYLURQQHPHQW $ WLWUH G¶H[HPSOH QRXV PHQWLRQQRQV O¶H[SOLFDWLRQ GX &KHLNK GDQV OD SDUROH
&RUDQLTXH © (W $GRUH WRQ 6HLJQHXU ª  $OODK HQ V¶DGUHVVDQW j VRQ SURSKqWH SVO  SDU FHWWH
LQMRQFWLRQ OXL IDLW VDYRLU TX¶HQ VH GpWRXUQDQW GH O¶DGRUDWLRQ GH O¶(JR GH 6DWDQ GX PRQGH
SKpQRPpQDOHWGHODSDVVLRQLODREWHQXOHYR\DJHQRFWXUQHHWO¶DVFHQVLRQFpOHVWH ,VUDZD0L¶UDM 
ou il a voyagé physiquement sur les coursiers célestes.

Le Cheikh traça un point en précisant que cet épisode manifeste les possibilités divines. Puis, il
GLWTX¶LOQHVLHGSDVGHIDLUHXQHFRXUVHDYHFXQPXOHWTXLHVWGHVWLQpDXODEHXURXjODvente et
traça un autre point. Puis il expliqua que les coursiers célestes signifient les actes obligatoires et
recommandés et les mulets sont les actes détestables ou prohibés ou éventuellement les actes
permis mais futiles. Il faut utiliser ce qui est permis pour accéder au recommandé et à
O¶REOLJDWRLUH,ODVVLPLODDXVVLOHVIXWLOLWpVjXQFKHYDOVDXYDJHTXLFDEUHHWSLpWLQHFHX[TXLV¶HQ
approchent. Ce sont des allégories tirées de la réalité rurale du pays et qui sont comprises par les
disciples.

Des fois, le Cheikh, répondait à une question ou à une interpellation par un enseignement ou une
maxime. Un jRXUTXHOTX¶XQOXLGHPDQGDVLWRXWYDELHQHWV¶LOHVWHQSDL[,OUpSRQGLWODSDL[
HVWGDQVO¶DX-delà, pas ici-bas.

8QDXWUHGHPDQGDTXHOOHHVWWDVLWXDWLRQDFWXHOOH",OUpSRQGLWF¶HVWGHQHSRLQWP¶RFFXSHUGH
ce qui ne me concerne pas.

Il enseLJQDLWDYHFVXEWLOLWpGHIDoRQjFHTXHOHVGLVFLSOHVQ¶DLHQWSDVEHDXFRXSGHFRQWUDLQWHVHW
SHXYHQWV¶RFFXSHUGHOHXUYLHIDPLOLDOHHWSURIHVVLRQQHOOH,OFKRLVLVVDLWOHVKRUDLUHVVXFFpGDQWDX[
SULqUHVG¶$VURX,VKDRX)DMUSRXUH[KRUWHUHWHQVHLJQHUGe façon à ne pas lasser ses auditeurs. Il
imitait le prophète (psl) en cela.

/¶('8&$7,213$5/(7R A V A I L C O RPO R E L

La relation corps ±HVSULW HVW DPELJH FDU OHXUV EHVRLQV VRQW GLIIpUHQWV 6L O¶KXPDLQ DUULYH j VH
séparer des tentations et des passions, son esprit devient translucide, et capte les lumières

38  

 
GLYLQHV0DLVVLOHFRUSVV¶DGRQQHDXUHSRVHWVHODLVVHFDSWLYHUSDUOHVSDVVLRQVO¶HVSULWGHYLHQW
opaque et ne capte plus la lumière.

/HWUDYDLOFRUSRUHOHVWEpQpILTXHSRXUO¶DVSLUDQWFDULOSHUPHWGHVe détourner de la paresse et des


SDVVLRQV FKDUQHOOHV  (W VXUWRXW LO SHUPHW G¶DFTXpULU O¶KXPLOLWp TXL HVW XQH FDUDFWpULVWLTXH GHV
mourides.

/HV WUDYDX[ pWDLHQW YDULpV G¶DSUqV OHV GLVSRVLWLRQV GHV DVSLUDQWV ,O \ DYDLW OHV FRQVWUXFWLRQV
O¶DJULFXOWXUH OD FXLVLQH O¶LQWHQGDQFH OHV WUDYDX[ GRPHVWLTXHV HW DXWUHV &KHLNK 0RKDPPDG
Bachir a mentionné dans son excellent livre « minan al Baqi » : le Cheikh tenait compte de son
contexte. Il accomplissait sa mission parmi un peuple illettré, qui ignorait les principHVGHO¶,VODP
jO¶H[FHSWLRQG¶XQHSHWLWHPLQRULWp/¶LQDFWLYLWpHWODSDUHVVHLQFLWHQWjWRXVOHVYLFHVHWEHDXFRXS
GH GLVFLSOHV IXUHQW GHV JXHUULHUV TXL UpSXJQDLHQW DX[ WUDYDX[ PDQXHOV /HV P°XUV pWDLHQW
corrompues et il fallait occuper les nouveaux convertis par les travaux manuels après leur avoir
inculqués les préceptes de la religion afin de changer les mentalités des guerriers (ceddos).

/¶('8&$7,213$5/¶(;E R C I C E SPI R I T U E L (M UJ A H A D A)

&¶HVWOHFRPEDWFKDUQHOGHO¶kPH 1DIV). Elle doit être domptée afLQTXHO¶HVSULW 5XK SXLVVHla


guider. Les Soufis ont prôné comme moyen : La faim par le jeune, le silence par la méditation, la
veillée nocturne par la prière, la solitude par la contemplation, l¶REVHUYDWLRQVFUXSXOHXVHSDU/D
crainte divine, le service SDUO¶DPRXUGLYLQDLQVLTXHODJpQpURVLWpGDQVOHV°XYUHVSLHVOHVDYRLU
SDUODSUDWLTXHOHFXOWHGDQVO¶KXPLOLWpHWOHFRPSDJQRQQDJHGDQVODERQQHJXLGDQFH

&KHLNK$KPDGRX%DPEDGLWGDQV©+XTDDO%XND¶Xª

/HVDUFDQHVGHO¶pGLILFHGHODFRPPXQDXWp GHs saints) sont au nombre de quatre

Ils sont les piliers sur lesquels repose la Sainteté

Silence, faim, veillée et solitude

Le tout en suivant les indications des vénérables

&HVSULQFLSHVpWDLHQWUHVSHFWpVSDUOHVSUHPLHUVGLVFLSOHVGX&KHLNKG¶DXWDQWSOXV que le mode de


vie favorisait ces pratiques. Ils vivaient dans un milieu rural éloigné de tout centre urbain, et les
moyens de subsistance étaient rares, La faim, la solitude et la veillée étaient une nécessité et non
point une option. Quand au compagnonnage avec la bonne guidance, il était personnifié par le
&KHLNK$KPDGRX%DPEDTXLSDUVHVDFWHVHWVDSUpVHQFHIXWOHPHLOOHXULQVSLUDWHXUHWO¶H[HPSOH
le plus parfait.

/H &RUDQ  HQVHLJQH DX[ FUR\DQWV O¶LPSRUWDQFH GH O¶H[HPSODULWp SDU OH YHUVHW  ©Vous avez, en
O¶HQYR\pG¶$OODKO¶H[HPSOHOHSOXVSDUIDLWª$OODKHQVHLJQHDXSURSKqWH SVO SDUO¶H[HPSOHGHV
prophètes antérieurs : « &HVRQWFHX[TX¶$OODKDJXLGpVXLVOHXUJXLGDQFHª
39  

 
/DERQQHJXLGDQFHVHPDQLIHVWHGDQVODFRQVFLHQFHGHO¶DVSLUDQWSDUO¶pYHil spLULWXHO/¶kPHHVW
UpYHLOOpHGHVDWRUSHXUSDUO¶LQWHUPpGLDLUHGXUHVSRQVDEOH GLHZULQJ FKRLVLSDUOHFKHLNKDILQGH
préparer HW G¶RULHQWHU les disciples. Les recommandations du guide sont relayées par ces
UHVSRQVDEOHV /H FKHLNK HQ SHUVRQQH V¶RFFXSH des plus avancés qui vivent dans sa proximité.
&HWWHGHUQLqUHpWDSHHVWFHOOHGHOD WDUTL\D RXpOpYDWLRQVSLULWXHOOHTXLHVWDWWHVWpHSDUO¶pWDWGH
O¶kPHDSDLVpHHt satisfaite. En langue Wolof cela est désignée par « ngeureum».

/¶('8&$7,213$5/¶(9O C A T I O N (Z I K R)

/¶pYRFDWLRQ HVW XQH DGRUDWLRQ TXL VH IDLW SDU OD ODQJXH HW SDU OH F°XU GDQV OH EXW G¶REWHQLU
O¶DJUpPHQWGLYLQ/HVPpWKRGHVGHO¶pYRFDWLRQpWDLHQWOH&RUDQOHVNKDVVLGDVHWOH:LUG

La lecture quotidienne du Coran était fixée à un minima dHWURLVVHFWLRQV KL]E &¶pWDLWXQHGHV


conditions pour ceux qui pratiquaient son Wird.

Persévère sur la lecture de trois Hizb du Coran

Les bienfaits de la lecture du Coran sont évidents, et les paroles de menaces et de prévention
DJLVVHQW VXU OHV F°XUV PDODGHV PLHX[ TXH WRXW PpGLFDPHQW 0rPH OHV PRQWDJQHV V¶DIIDLVVHQW
VRXVOHSRLGVGX&RUDQDIRUWLRULOHVF°XUVGHVKXPDLQV$OODKGLW©6LRQDYDLWUpYpOpFH&RUDQ
aux montagnes, tu les aurais vu assujettis par crainte du courroux divin ».

Le prophète (pVO  GHPDQGDLW GHV IRLV j O¶XQ GH VHV FRPSDJQRQV GH OXL UpFLWHU GHV YHUVHWV GX
&RUDQ,OGLVDLWHQUpSRQVHjFHOXLTXLGLWFRPPHQWWHOHUpFLWHUDORUVTXHF¶HVWjWRLTX¶LODpWp
révélé ?

-¶DLPHO¶HQWHQGUHG¶XQDXWUH3XLVHQpFRXWDQWLOSOHXUHMXVTX¶jFHTX¶LOIDLWVLJQHG¶DUUrWHU3DUPL
OHVFRPSDJQRQVFHUWDLQVFULDLHQWRXV¶pYDQRXLVVDLHQWRXWRPEDLHQWUDLGHVPRUWVHQpFRXWDQWOH
Coran. Cette attitude est même louée par le texte sacré : « Les vrais croyants sont ceux qui ont le
F°XUDIIOLJpHW TXDQG LOVpFRXWHQWOHVYHUVHWV GX&RUDQOHXUIRLV¶DPSOLILHHW VHFRQILHQW jOHXU
Seigneur ».

40  

 
L A L E C T U R E D ES K H ASSA I DS

&HVRQWGHVSVDXPHVG¶pYRFDWLRQG¶LQYRFDWLRQTXLFRQWLHQQHQWGHVLPSORUDWLRQVGHVSULqUHVVXU
le prophète (psl) et des panégyriques. Certains les chantent en groupe, ou en solo. `

L E WIRD

/H &KHLNK DYDLW VRQ SURSUH :LUG TX¶LO D UHoX G¶$OODK SDU O¶LQWHUPpGLDLUH GH O¶HQYR\p G¶$OODK
(psl), mais autorisait aussi les Wirds Qadiri, Shadili et Tijani. Certains utilisaient en plus du Wird
de leur voie, G¶DXWUHV:LUGVTX¶LOVDIIHFWLRQQDLHQW

Il disait dans Masalik al jinan :

Tout ZLUGSHXWIDLUHDFFpGHUO¶DVSLUDQWjODSUR[LPLWpGLYLQHVDQVFRQWHVWDWLRQ

4XHFHVRLWOHZLUGGH-LODQLRXG¶$KPHGWLMDQLRXFHOXLG¶XQDXWUH4RWE

Ils sont tous incontestablement dans la bonne direction

L ES PA R T I C U L A R I T ES D E L A V O I E

/HVPR\HQVPLVHQ°XYUHSDUOH&KHLNKVRQWYDULpVHWRQWODSDUWLFXODULWpGHPHWWUHHQV\PELRVH
ODYLHVSLULWXHOOHHWVRFLDOH,OLQFXOTXDLWOHVYHUWXVGHODSDWLHQFHGHO¶KXPLOLWpGXVDFULILFHde la
VLQFpULWp HW G¶DXWUHV YHUWXV 0DLV DXVVL LO KDUPRQLVDLW OD YLH pFRQRPLTXH GH OD FRPPXQDXWp HW
incitait les individus à être productifs. On peut dire que sa voie stimule la spiritualité,
O¶LQWHOOHFWXDOLWpHWODWHPSRUDOLWp,OWHQDLWFRPSWHGHVGLIIprentes aptitudes des uns et des autres, et
V¶DGUHVVDLWjFKDFXQG¶DSUqVVHVGLVSRVLWLRQVLe contexte dans lequel vivait le Cheikh était certes
GLIIpUHQW GX QRWUH PDLV OHV PR\HQV TX¶LO XWLOLVDLW SHXYHQW WRXMRXUV rWUH YDODEOHV DYHF GHV
aménagements si nécessaires.

/¶,03$&7'(/¶¯895(D U C H E I K H SU R N O T R E E PO Q U E

/¶KpULWDJH GX &KHLNK D pWp DVVXPp SDU VHV NKDOLIHV HW QRXV HQ EpQpILFLRQV DXMRXUG¶KXL SDU VHV
pFULWVPDLVDXVVLSDUODFRPPXQDXWpTX¶LODIRQGpH

Il a revivifié les sciences islamiques en les synthétisant dans un mode très accessible. Et il a
permis à ses disciples de bénéficier de tous les avantages de la spiritualité par des modalités
DFFHVVLEOHVjFKDFXQG¶DSUqVVHVGLVSRVLWLRQVHWVHVFRPSpWHQFHV3DUH[HPSOHSDUOHFKDQWGHVHV
khassaids, les dLVFLSOHVREWLHQQHQWOHVYHUWXVGX=LNUGHVLQYRFDWLRQVHWGHO¶pYRFDWLRQ'¶DXWUHV
SDUOD.KLGPDREWLHQQHQW GHVGRQVSURGLJLHX[WDQGLVTXHG¶DXWUHVSDUOD +DGL\DREWLHQQHQW FH
TX¶LOVHVSqUHQWGDQVFHWWHYLHHWGDQVO¶DX-delà.

41  

 
Les disciples formes et conditionnes par le Cheikh ont à leur tour formes des générations de
GLVFLSOHV TXL FRQWLQXHQW O¶°XYUH UpQRYDWULFH  HQ IDLVDQW IDFH DX[ GpILV HW FKDOOHQJHV GH OHXU
époque.

Les inégalités sociales et culturelles ont été absorbées par le Cheikh en son époque,
conformément aux enseignements coraniques et prophétiques. Il a divisé le travail entre ses
disciples en octroyant à chacun des tâches culturelles ou manuelles. Si bien que la communauté
EpQpILFLDLWG¶XQHFRPSOpPHQWDULWpTXLOXLDVVXUDLWXQHLQGpSHQGDQFHWRWDOH'¶DLOOHXUVVRQSRqPH
« Matlabou al fawzein » annonçait la cite idéale.

L ES V E R T US D U B I E N C O M M U N A U T A I R E

/¶HVSULW GH VDFULILFH HW GX VHUYLFH SXEOLF D IDLW O¶H[HPSODULWp GX 0RXULGLVPH /HV KDGL\DV HW OH
volontariat ont permis de prendre en charge touWH O¶LQIUDVWUXFWXUH SpGDJRJLTXH HW LQLWLDWLTXH GH
Touba et des différentes villes et daaras du Mouridisme. Ainsi, des compétences diverses existent
GDQVODFRPPXQDXWp0RXULGHJUkFHjO¶DEQpJDWLRQHWjODJpQpURVLWpGHVGLVFLSOHV

5LHQTXHGDQVO¶DJULFXOWXUe, le Sénégal a bénéficié du dynamisme des mourides au point que la


production a augmenté considérablement. Toutes les études économiques mettent en valeur
O¶DSSRUWGX0RXULGLVPH

/DWHQGDQFHjIRQGHUGHVIR\HUVFXOWXUHOVHWVSLULWXHOVDSHUPLVG¶XUEDQLVHU des terres stériles et


les exploiter pour en faire des villes ou des champs agricoles au bénéfice des populations et du
Sénégal.

&HOD D SHUPLV DXVVL GH IRXUQLU GHV PR\HQV GH VXEVLVWDQFH j GHV SRSXODWLRQV GpV°XYUpHV HW GH
changer la configuration rurale HW GpPRJUDSKLTXH GX SD\V  WRXW HQ VWLPXODQW O¶pFRQRPLH HW
O¶XUEDQLVDWLRQ&HUWDLQV YLOODJHVVRQWGHYHQXVGHVYLOOHVHW FHUWDLQV KDPHDX[GHVYLOODJHV DORUV
que Touba est devenue la deuxième ville du Sénégal et Darul Muhty une grande ville.

C O N C L USI O N

'¶après cette brève présentation du Mouridisme et de sa dynamique, ainsi que de ses méthodes
rénovatrices, nous pouvons ambitionner à présenter des solutions islamo-africaines aux
problèmes sociétaux contemporains. Nous invitons les chercheurs à programmer des études
concernant le Mouridisme et ses réalisations afin de dégager les points positifs et les solutions
DGpTXDWHVGRQWRQWEHVRLQOHVVRFLpWpVFRQWHPSRUDLQHV$QRWHUTXHO¶DEVHQFHGHVSLULWXDOLWpHVW
jQRWUHDYLVO¶XQHGHVFDXVHVPDMHXUHVGHQRVFULses actuelles.

Bien que le Mouridisme ait vu le jour dans un contexte colonial, il a pu non seulement affronter
les problèmes de son époque, mais peut également apporter des solutions aux problèmes
contemporains.

42  

 
L ES C O M M U N I C A T I O NS

43  

 
I I± L ES C O M M U N I C A T I O NS
2.1± Session I : Réalités et Principes du Soufisme
Le modérateur de cette session est Cheikh Amdan Wuld Attah, Secrétaire Général de la Ligue
des Oulémas en Mauritanie.

,OV¶DJLWGDQVFHWWHVHVVLRQGHIDLUHXQDSHUoXVXUOH6RXILVPHHWGHPHWWUH ainsi en évidence son


véritable sens, les pratiques y afférentes ainsi que sa portée. Les développements relatifs à cette
session bousculent les idées reçues qui tendent à considérer négativement le soufisme. En effet, il
a été question de démontrer que cette « Voie ª HVW ELHQDQFUpHGDQVO¶RUWKRGR[LHHW ODWUDGLWLRQ
islamiques.

'DQVFHWWHSHUVSHFWLYHWURLV&RPPXQLFDWLRQVRQWpWpIDLWHVDLQVLTX¶LOVXLW :

¾ 2. 1.1 - Communication 1 : L e T asawuf : Moyens et


finalités, par D r C heikh Mouhamed Souhayb Mouhamed Achami, Chercheur
membre de la Commission de Recherches et des Etudes Islamiques de la Syrie.

*ORLUH j$OODK ,O D FUpp O¶KXPDLQ HW OXL D HQVHLJQp O¶pORTXHQFH 3ULqUHV HW VDOXWDWLRQV VXU
QRWUHSURSKqWHGRQWODPRUDOLWpIXWO¶H[SUHVVLRQGX&RUDQ

Il fut une miséricorde offerte aux humains, un bienfait divin pour les croyants et un témoin
pour les générations. IL est le soleil des secrets célestes, le centre de gravité de la Majesté et
le pôle de la sphère de la beauté. Il a fait triompher la vérité par le vrai et guide vers la voie
appropriée. Seigneur agrée ses compagnons et leurs disciples, ainsi que tous ceux qui ont
FKHPLQpVXUOHXUVWUDFHVMXVTX¶jODILQGHVWHPSV

INTRODUC TION

/HV FKHUFKHXUV VRQW FRQVFLHQWV GH O¶LPSRUWDQFH GH OD WHUPLQRORJLH GDQV Oa définition des
FRQFHSWV2QGLWG¶DLOOHXUVTXHODFRQWURYHUVHGDQVODWHUPLQRORJLHHVWVHFRQGDLUH3RXUWDQW
la polémique sur le terme « Tasawuf » est toujours actuelle, idéologiquement et
culturellement, surtout dans le monde arabo-islamique.

/¶LJQRUDQFHGHO¶RULJLQHGX7DVDZXIHWGHVHVILQDOLWpVHVWFHUWDLQHPHQWO¶XQHGHVFDXVHVGH
ODFRQWURYHUVH&HUWDLQVFRQVLGqUHQWOH7DVDZXIFRPPHXQHLQQRYDWLRQUHOHYDQWGHO¶RUGUH
GHODSKLORVRSKLHRXGHVWUDGLWLRQVDQWpULHXUHVjO¶LVODP/DFDXVHGHFHPDOHQWHQdu réside
GDQV O¶LJQRUDQFH HQ PDWLqUH GH 7DVDZXI TXL IDLW SDUWLH LQWpJUDQWH GH OD UHOLJLRQ
PXVXOPDQH1RWUH UHOLJLRQ HQJOREH OD WKpRORJLH OD OpJLVODWLRQ HW O¶pWKLTXH /D WKpRORJLH
définit et corrige nos croyances, tandis que la législation définit et corrige nos pratiques ;
44  

 
DORUVTXHO¶pWKLTXHQRXVSHUPHWGHFXOWLYHUOHVYHUWXVTXLVRQWOHVIUXLWV/H7DVDZXIpWDQW
OHVYHUWXVLOHVWODSLHUUHGHWRXFKHTXL YpULILHO¶DXWKHQWLFLWpGHQRWUHIRLHW ODYpUDFLWpGH
nos actions.

Dans le hadith transmis par Hakem et Bayhaqi rapporté par Abou Horeira, le prophète (psl)
GLW  © -¶DL pWp HQYR\p SRXU SDUIDLUH OHV P°XUV ª 'DQV OH KDGLWK UDSSRUWp SDU -DELU OH
prophète (psl) dit : « Voulez vous que je vous informe sur les croyants parfaits : ce sont les
plus nobles de caractère, les plus utiles aux croyants, les plus abordables et les plus
serviables».

D E F I N I T I O N D U TASAW U F

Le Tasawuf est la somme des vertus. Mohammad ibn ali al Kassab demanda à Junaid de lui
définir le Tasawuf. Il lui répondit : ce sont des vertus nobles qui sont apparus à une époque
IDYRUDEOHSDUOHELDLVG¶KRPPHVQREOHVGDQVXQHQREOHFRPPXQDXWp

Le sultan des gnostiques Mohieddine Ibn Arabi dit : le Taswuf est la somme des vertus. Le
plus vertueux est le plus avancé en la matière. Abou Beckr Kattani a dit la même la chose.

'¶DXFXQV GLVHQW OH 7DVDZXI HVW XQH SXUHWp GX F°XU TXL UHIOqWH OD QREOHVVH GX FDUDFWqUH
'¶DSUqVOHVYHUWXHX[OH7DVDZXIVHUDLWOHIUXLWHWODILQDOLWpGHODUHOLJLRQ

1RWUHUHOLJLRQUHSRVHVXUWURLVSLOLHUV/¶,PDQO¶,VODPHWO¶,KVDQFRPPH O¶$QJH*DEULHOO¶D
enseigné dans le hadith rapporté par Omar Ibn al Khattab.

/¶,VODPFRQFHUQHODSUDWLTXHH[WHUQHO¶,PDQHVWXQHGLVSRVLWLRQLQWHUQHWDQGLVTXHO¶,KVDQ
en est la résultante.

Le croyant qui parfait son Iman et son Islam, accéGHUDDXGHJUpGHO¶,KVDQTXLHVWFHOXLGH


ODFRQWHPSODWLRQ 0XVKDKDGD /HSURSKqWHO¶DDWWHVWpSDUOHKDGLWK©$GRUH$OODKFRPPH
si tu le vois, car même si tu le vois pas Il te voit ». Le Tasawuf est la discipline concernant
O¶,KVDQ (OOH SHUPHW G¶DVSLUHU j OD SUpVHQFH GLYLQH j O¶REVHUYDWLRQ VFUXSXOHXVH HW j OD
contemplation (hodhour, muraqaba,mushahada), qui sont les plus hauts degrés de la
certitude.

6LRQpWXGLHODILQDOLWpGX7DVZXIRQFRQVWDWHUDTXHF¶HVWODYRLHGHVSLHX[SUpGpFHVVHXUV
depuis les FRPSDJQRQVMXVTX¶DX[JpQpUDWLRQVSRVWpULHXUHV0DLVFHOXLTXHQHVHSUpRFFXSH
TXHGHODWHUPLQRORJLHVHUUDIUXVWUpGHQHSDVWURXYHUG¶DQWpFpGHQWSDUPLOHVFRPSDJQRQVHW
OHV SUHPLqUHV JpQpUDWLRQV FDU LO Q \ DYDLW SDV HQFRUH O¶DSSHOODWLRQ 6RXIL 'H PrPH LO ne
WURXYHUDSDVGHJUDPPDLULHQVGHWUDGLWLRQQLVWHG¶KLVWRULHQVGHMXULVFRQVXOWHVRXG¶DXWUHV
VSpFLDOLVWHV FDU OHV GLVFLSOLQHV QH V¶pWDLHQW SDV HQFRUH VWUXFWXUpHV /H7DVZXI QH V¶HVW

45  

 
GLVWLQJXpFRPPHXQHGLVFLSOLQHjSDUWHQWLqUHTX¶DSUqVTXHVHVSULQFLSHs et ses sujets furent
définis. La réalité du Tasawuf précéda son appellation puisque les vertus qui en sont le sujet
furent exprimées par les compagnons du prophète (psl), leurs disciples et les Imams de
QRWUH UHOLJLRQ '¶DLOOHXUV WRXWHV OHV YRLHV soufies remontent aux compagnons et
particulièrement à Ali Ibn Abi talib.

L A PE R F E C T I O N H U M A IN E

La problématique soulevée par les détracteurs du Tasawuf concernant la terminologie ou les


dérives de certains prétendants Soufis ou usurpateurs qui se font passer pour des autorités
HQODPDWLqUHHVWSDUHLOOHjODSUREOpPDWLTXHVRXOHYpHSDUOHVGpWUDFWHXUVGHO¶,VODP'¶ROD
QpFHVVLWpG¶D[HUOHGLVFRXUVVXUOHIDFWHXUKXPDLQFDUO¶KRPPHHVWOHVXMHWGHODUHOLJLRQHW
GX 7DVZXI ,/ HVW OD FLEOH GH OD UpYpODWLRQ HW O¶objectif final de la réalisation spirituelle.
Allah dit dans le Coran : « Quand Allah dit aux anges, je vais mettre sur terre un lieu-tenant
Ils disent : tu vas mettre celui qui sèmera la corruption et répandra le sang, alors que nous te
glorifions, te louangeons et te sanctifions. IL dit : je sais ce que vous ne savez pas ! »
baqara 30. Et il dit dans sourate Sad : « Quand ton Seigneur dit aux anges :je vais créer un
KXPDLQGHO¶DUJLOHGHERXHIpWLGH4XDQGMHO¶DXUDLVKDUPRQLVpHWLQVXIIOpGHPRQHVSULt,
prosternez-vous devant lui » Sad 28/29.

/¶KXPDLQpWDQWOHEXWGHO¶LPSpUDWLIGLYLQLOHVWOHOLHX-tenant (Khalife) préparé pour cette


fonction. Il est originellement apte à porter ce dépôt GLYLQ SXLVTX¶$OODK O¶D FUpp j VRQ
image. Ahmad Ibn Hanbal, Boukhari et Muslim ont validé le hadith : « Allah a créé
O¶KXPDLQjVRQLPDJHª

&¶HVW-à-GLUHjO¶LPDJHGHVHVDWWULEXWV4RUWRELGLWGDQVVRQFRPPHQWDLUHGXYHUVHW©2QD
FUppO¶KXPDLQGDQVOHVPHLOOHXUHVSURSRUWLRQVª&¶HVWH[SOLFLWpSDUOHKDGLWK$OODh a créé
$GDP j VRQ LPDJH &H TXL YHXW GLUH j O¶LPDJH GH VHV DWWULEXWV 7HO HVW OH VHFUHW GH
O¶2PQLSRWHQFH GLYLQH TXL D SUpGLVSRVp O¶KXPDLQ DX GpS{W GX .KDOLIDW HQ OH IDLVDQW
SDUWLFLSHUDX[DWWULEXWVGLYLQVGHODYROLWLRQO¶RPQLVFLHQFHO¶RPQLSRWHQFHOD YLHO¶RXwHOD
vue, la parole, et la sagesse et autres .

7RXWHVOHVUHOLJLRQVIXUHQWUpYpOpHVSRXURULHQWHUO¶KXPDLQHWOHSDUIDLUH

Le volet de la perfection spirituelle étant la substance de la religion, il aura des appellations


distinctes à travers les révélations successives.

'DQV O¶,VODP LO VHUD DSSHOp 7DVDZXI HW VHUD XQ IDFWHXU G¶KDUPRQLVDWLRQ des différentes
révélations qui ont un unique Seigneur. Allah nous interpelle pour nous guider et nous
SDUIDLUH©,OVQ¶RQWpWpLQWHUSHOOpVTXHSRXUDGRUHr Allah sincèrement par la religion en tant
que monothéiste ».

'DQVFKDTXHFRPPXQDXWpLO\DGHVSLRQQLHUVSURPSWVj°XYUHUSRXUOHELHQHWGHVSUREHV
46  

 
ainsi que des injustes. Les soufis seraient les pionniers de toute communauté.

/¶KRPPH .KDOLIH G¶$OODK /D UHOLJLRQ SHUPHW j O¶KRPPH GH SUHQGUH FRQVFLHQFH GH VD
UpDOLWpHQWDQWTXHPHPEUHGHO¶KXPDQLWpHWUHVSRQVDEOH(WTX¶LOSHXWV¶pOHYHUHQGHJUpGH
réalisation jusqu'à atteindre son statut originel de Khalife pour lequel il a fait prosterner les
anges. MDLVVLO¶KXPDLQVHGpWRXUQHGHVRQ6HLJQHXUHWQpJOLJHVRQVWDWXWSULYLOpJLpSRXU
se rabaisser, il sera dans les plus viles conditions. Allah dit : « On a réservé pour la
JpKHQQH XQH IRXOH GH JpQLHV HW G¶KXPDLQV GRQW OHV F°XUV VRQW LPSHUPpDEOHV OHV \HXx
aveugles, les oreilles sourdes. Ils sont comme les animaux, ou plus inconscients, ce sont les
fourvoyés ».

/¶KXPDLQTXDQGLOHVWLQFRQVFLHQWHWUHEHOOHGpSpULWWRXWHQGHYHQDQWLQGLJQHGXGpS{WTXH
les cieux, la terre et les montagnes refusèrent de portHUSDUFUDLQWHGHQHSDVO¶DVVXPHU3DU
FRQWUHV¶LOVHSDUIDLWHWVHPRQWUHGLJQHGHO¶KRQQHXUTX¶$OODKOXLDIDLWLOVHUDOH.KDOLIH
G¶$OODKVXUWHUUH3OXVOHFUR\DQWUHQIRUFHVDIRLSOXVLOV¶pOqYHGDQVO¶pFKHOOHGHO¶KXPDQLWp
et le plus élevé des humDLQV HVW OH SOXV FUR\DQW /¶DEVHQFH G¶KXPDQLVPH HVW XQ VLJQH GH
GpIDLOODQFHGDQVODIRL/¶KRPPHSDUIDLWHVWOHFUR\DQWSDUIDLW$LQVLOHVSURSKqWHV SDL[HW
salut sur eux tous) sont les plus parfaits des humains.

/¶KRPPH SDUIDLW SDU H[FHOOHQFH HVW OH SURSKqWH 0RKDPPDG SVO  TXL HVW O¶H[HPSOH HW OH
JXLGHGHWRXVDLQVLTXHOH&RUDQO¶DSUpFLVp©9RXVDYH]HQOHSURSKqWHG¶$OODKOHPHLOOHXU
exemple si vous aspirez à Allah et à la vie céleste » al ahzab 21

Dans son essence le tasawuf est une aspiration à la perfection humaine, et le soufi a pour
H[HPSOHOHSURSKqWH SVO TXLHVWO¶KRPPHSDUIDLW/HFRQVHQVXVHVWpWDEOLSDUPLOHVPDLWUHV
VRXILVVXUO¶DFFRUGWRWDOGHODVFLHQFHVRXILHDYHFOH&RUDQHWOD6XQQD/¶LPDP-XQDLGDGLW
: toute voie est sans issue pour les humains sauf celle qui avance sur les traces du prophète
(psl). Sahl Tustari dit : les principes de notre voie sont six : le Coran, la Sunna, la
consommation exclusive du licite, ne pas nuire à son prochain, ne pas commettre
G¶LQIUDFWLRQVHWGHrespecter les droits de chacun.

Abou Suleiman Darani a dit : Dans notre voie, je ne peux valider certains points subtils que
-¶DSSURXYHTX¶DSUqVO¶DWWHVWDWLRQGHGHX[WpPRLQVLQIDLOOLEOHVOH&RUDQHWOD6XQQD

/¶KXPDLQ HVW XQH SK\VLRQRPLH HW XQ FDUDFWqre, et aussi forme et matière, corps et esprit,
kPH HW F°XU /H 7DVDZXI SHUPHW j O¶kPH GH VH SXULILHU GH VHV YLFHV HW j O¶HVSULW GH VHV
imperfections et au caractère de ses abjections. La forme humaine est identifiable par la
vision (basar), mais la réaliWpKXPDLQHQ¶HVWSHUFHSWLEOHTXHSDUO¶LQWXLWLRQ EDVLUD 

Abou Fath al bisti disait:

« Ô serviteur de ton corps, jusqu'à quand tu restes malheureux

47  

 
Tu demande des bénéfices, là ou il n y a que déficit

Occupe-WRLG¶DFTXpULUOHVYHUWXVHWWDFKHVGHSDUIDLUe ton âme

Tu es un humain par ton essence, et non point par ton apparence »

,QFRQWHVWDEOHPHQWOH7DVDZXI HVW ODVXEVWDQFHGHQRWUHUHOLJLRQ HWLOHVWO¶LPSOLFDWLRQGH


O¶HQVHLJQHPHQWFRUDQLTXHHWSURSKpWLTXHHWQRQSRLQWXQHLQQRYDWLRQ,/IDLWSDUWLHGXvolet
GHO¶,KVDQTXLHVWODSHUIHFWLRQVSLULWXHOOH

L ES M E T H O D ES D ES SO U F IS

&RPPHRQDH[SOLTXpSUpFpGHPPHQWODUpDOLWpGHO¶KXPDLQHVWO¶kPHHW O¶HVSULWHWQRQOD
IRUPHHWODPDWLqUH3RXUFHODOHWUDYDLOVSLULWXHOGRLWVHIDLUHVXUO¶kPHDILQGHODSurifier
MXVTX¶j O¶pOHYHU DX QLYHDX GH OD SHUIHFWLRQ KXPDLQH /HV SURSKqWHV VXU HX[ OD SDL[ HW OH
VDOXWRQWLQVWLWXpVFHWWHYRLHGHODSXULILFDWLRQTXLGHYLQWO¶KpULWDJHGHVJQRVWLTXHV

- Le Coran a exprimé cela : «Seigneur, envoie leur un prophète issu d¶HX[TXLOHXUUpFLWHWHV


SDUROHV \DWORXDO\KLP$¶\DWLTD OHXUDSSUHQGOHOLYUH VDFUp HWODVDJHVVH \RX¶DOOLPXKXP
DO .LWDED ZDO +LNPDWD  HW OHV SXULILH ZD \X]DNLKLP  &¶HVW WRL OH 6DJH WRXW SXLVVDQW ª
baqara 129

© $OODK D JUDWLILp OHV FUR\DQWV G¶XQ SURSKqWH LVVX G¶HX[ TXL OHXU UpFLWH 6HV 3DUROHV OHV
SXULILHHWOHXUDSSUHQGOHOLYUH VDFUp HWODVDJHVVHDORUVTX¶DXSDUDYDQWLOVpWDLHQWGDQVXQ
égarement certain ». al umran 164

© &¶HVW /XL TXL D HQYR\p SRXU OHV FUR\DQWV XQ SURSKqWH LVVX G¶HX[ TXL Oeur récite ses
SDUROHV OHV SXULILH HW OHXU DSSUHQG OH OLYUH VDFUp  HW OD VDJHVVH DORUV TX¶DXSDUDYDQW LOV
étaient dans un égarement certain ».

AOMXPX¶D&HVYHUVHWVPDQLIHVWHQWFODLUHPHQWODIRQFWLRQHVVHQWLHOOHGXSURSKqWH SVO 

- Il leur récite les SDUROHVGLYLQHV \DWORXDO\KLP$¶\DWLKL

- /HXUDSSUHQGOHOLYUH \RX¶DOOLPXKXPDO.LWDE

- /HXUDSSUHQGODVDJHVVH \RX¶DOOLPXKXPDO+LNPDWD

- Les purifie. (yuzakihim)

Les versets cités signifient que la mission fondamentale des prophètes est la purification
des âmes humaines. Ces versets ont des tonalités différentes, car la première était
O¶LQYRFDWLRQGHQRWUHSqUH$EUDKDP SVO DORUVTXHOHVDXWUHVpWDLHQWXQUDSSHOGHODJUkFH
48  

 
divine faite aux croyants.

La purification est mentionnée en dernier danVO¶LQYRFDWLRQG¶$EUDKDP SVO DORUVTXHGDQV


OH UDSSHO GLYLQ HOOH YLHQW DYDQW O¶HQVHLJQHPHQW GX OLYUH HW GH OD VDJHVVH 1RXV IHURQV GHV
UHPDUTXHV VXU FH SRLQW '¶DERUG RQ SHXW GLUH TXH FHOD DQQRQFH O¶LPSRUWDQFH GH OD
purification (spirituelle) et ses implications. Cela peut être aussi, une allusion au fait que le
VDYRLU VDQV SXULILFDWLRQ HVW XQ SpULO '¶DLOOHXUV OH SURSKqWH SVO  GHPDQGDLW j$OODK GH OH
SUpVHUYHUG¶XQVDYRLUIXWLOH ,OPOD<DQID¶ 

L E SAV O I R E T L A SA G ESSE

Un savoir sans éthique peut êtUH QpIDVWH HW VXVFLWHU GHV PDOKHXUV 8Q VDYDQW GRQW O¶kPH
SDVVLRQQHOOHHWW\UDQQLTXHQ¶DSDVpWppGXTXpHSHXWVXVFLWHUOHVSLUHVFDWDVWURSKHVHQXVDQW
et abusant du don divin du savoir. Le savoir doit être couplé par la sagesse, tel que les
versets cités O¶RQWSUpFLVp©,OOHXUDSSUHQGOHOLYUHHWODVDJHVVHª2UODVDJHVVH(hikma)
ne peut être réalisée que par la purification (Tazkia). Comment une âme souillée impure
peut acquérir la sagesse ?

,EQ$WD$OODKGLWGDQV+LNDP&RPPHQWXQF°XUDFFDSDUpSDr les choses matérielles peut


il être illuminé ? Comment celui qui est prisonnier de ses vices, peut accéder à son
6HLJQHXU" &RPPHQW FHOXL TXL QH V¶HVW SDV SXULILp GH VHV VRXLOOXUHV SHXW- il espérer la
proximité divine? Comment celui qui ne se repent pas de ses désobéissances, peut
FRPSUHQGUHOHVVHFUHWVVXEWLOV GHO¶LPPDQHQFHHWGHODWUDQVFHQGDQFH "

/¶,PDP$KPHG,EQ+DQEDOGLW6LOHVkPHVVHGpWRXUQHQWGHVSpFKpVHOOHVSHXYHQWpYROXHU
dans les dimensions terrestres et célestes, et recevoir des communications spirituelles sans
recours à un initiateur humain.

/H VDYRLU D LQGXELWDEOHPHQW EHVRLQ GH OD VDJHVVH TXL QH SHXW rWUH DFTXLVH TX¶DSUqV OD
SXULILFDWLRQ 7D]NLD  /¶pW\PRORJLH GX PRW 7D]NLD  D HQ DUDEH OH VHQV GH  FURLVVDQFH
augmentation, élévation, purification, relèvement.

Ibn Mandhour dit dans son dictionnaire (Lisan al arab) dans le verbe (Zakka) : restaure et
purifie. (Zakat l P¶DO est la purification de O¶DUJHQW TXL OH UHOqYH HW O¶DFFURLW =DNDWRXO
ardh) est la purification de la terre, qui en se desséchant se purifie des impuretés.

On peut donner une définition double :

- croissance, augmentation et élévation.

-Restauration, dépouillement et purification.

49  

 
/H&RUDQDYHFVRQPLUDFOHOLQJXLVWLTXHGRQQHjODSXULILFDWLRQGHO¶kPHXQVHQVSDUWiculier :

©3DUO¶kPHHWFHOXLTXLO¶DSURSRUWLRQQp,OO¶DSRXUYXGHVDFRUUXSWLRQHWGHVDYHUWX&HOXL
qui la purifie est un bienheureux et celui qui la laisse se corrompre est un malheureux ».
Chams 7 -8- 9 -10

/DSXULILFDWLRQGHO¶kPHFRQFHUQHOHFDUactère. Ghazali dit dans Ihya al -olum : le caractère


HVW LQWULQVqTXH j O¶kPH /HV DFWHV GH O¶KXPDLQ VRQW OD FRQVpTXHQFH GH VRQ FDUDFWqUH 6HV
actes en découlent spontanément. Si ce sont des actes nobles conformes à la religion et à
O¶pWKLTXHF¶HVWXQFDUDFWqUHQREOH(WVLF¶HVWOHFRQWUDLUHLOV¶DJLWG¶XQFDUDFWqUHLJQREOH

$LQVL OH JpQpUHX[ O¶HVW SDU VD QDWXUH HW O¶DYDUH SDUHLOOHPHQW /D VFLHQFH PRGHUQH HQ
GpFRXYUDQWOHU{OHGHVJqQHVHWGHO¶$'1VXSSRVHTXHFHOXLTXLDOHVJqQHVGXFRXUDJHHVW
courageux de nature, et celui qui a les gènes de la lâcheté est lâche de nature.

8QH IRLV GH SOXV OH PLUDFOH FRUDQLTXH V¶LPSRVH FDU GDQV OH WHUPH 7D]NLD  UHQYRLH j OD
GXDOLWp GHV FDUDFWqUHV FRPPH OD JpQpURVLWp HW O¶DYDULFH OH FRXUDJH HW OD OkFKHWp OD
bienfaisance et la malfaisance. Les caractères ignobles sont corrigés par le dépouillement et
OD SXULILFDWLRQ $ORUV TXH OHV FDUDFWqUHV QREOHV VRQW SDUIDLWV SDU O¶DFKqYHPHQW HW OD
constance.

Celui qui est vertueux et dont le caractère est noble, ne doit pas se sentir garanti, ni être fier
des dons divins, mais doit rendre grâce et faire tous les efforts pour rester constant. Tout en
GHPDQGDQWj$OODKG¶DFFURLWUHVHVELHQIDLWV

Par contre, celui qui est vicieux et dont le caractère est ignoble, ne doit pas désespérer et se
GLUHTXHWHOOHHVWODYRORQWpG¶$OODKHQVHGpFKDUJHDQWVXUODIDWDOLWpFDULOHVWUHVSRQVDEOH
GHYDQW OD ORL GLYLQH HW GRLW REpLU DX[ FRPPDQGHPHQWV HW V¶DEVWHQLU GHV LQWHUGLWV7RXW HQ
combattant les penchants de son âme afin de se libérer de sa tyrannie. Puis, progresser dans
OHVpWDSHVGHODUpDOLVDWLRQVSLULWXHOOHGHO¶kPHEOkPDEOHjO¶kPHVDWLVIDLWHMXVTX¶jO¶kPH
agréé. Ainsi, il passe de la responsabilité à la considération, et verra son état transformé.
Allah dit dans le Coran :

« Celui qui se repent, et fait le bien verra ses manquements transformés en bienfaits. Allah
est clément miséricordieux » al furqan 70

L A PU R I F I C AT I O N E T L A F E L I C I T E (FALAH)

/D UHODWLRQ HQWUH OD SXULILFDWLRQ HW OD IpOLFLWp HVW pYLGHQWH GDQV O¶HQVHLJQHPHQW GLYin. Les
FRPPDQGHPHQWV V¶DGUHVVHQW j WRXV LQGLVWLQFWHPHQW DX YHUWXHX[ FRPPH DX YLFLHX[7RXV
sont responsables devant la loi divine et sont obligés de faire des efforts dans la purification

50  

 
GHOHXUkPHDILQG¶REWHQLUODIpOLFLWp

Allah dit : « Celui qui se SXULILHHVWGDQVODIpOLFLWpªDOD¶OD

©&HOXLTXLODSXULILH O¶kPH HVWXQELHQKHXUHX[ªFKDPV

La purification est une éducation spirituelle qui requiert un éducateur, qui est le gnostique
DULI ,OGRLWFRQQDLWUHOHVpWDWVGLYHUVGHO¶kPHHWVHs ruses, comme il doit être fidele envers
le Seigneur, conforme aux positions et enseignements du prophète (psl).

Abdelkarim Jili dit :

« 6L OH GpFUHW WH IDYRULVH RX OH GHVWLQ WH FRQGXLW DXSUqV G¶XQ DXWKHQWLTXH PDLWUH GH OD
Haqiqa.

Quêtes sa satisfaction et conforme-toi à sa volonté

Et ne te préoccupe plus de tes antécédents ».

Les gnostiques ont deux itinéraires dans la purification :

- /DYRLHGXFRPEDWVSLULWXHO 0XMDKDGD ,OV¶DJLWGHFRPEDWWUH OHVSHQFKDQWVGHO¶kPHHW


de la contrecarrer afin de la dompter.

Bousairi a dit :

« Contrarie ton âme ainsi que satan

Et désobéit à leurs suggestions

6¶LOVSUpWHQGHQWWHFRQVHLOOHULQFULPLQH-les

1¶REpLVQLjO¶DGYHUVDLUHQLjO¶DUELWUH

7XFRQQDLVELHQOHVUXVHVGHO¶XQHWGHO¶DXWUH »

/¶DVSLUDQW QH GRLW SRLQW chercher les licences, mais doit être studieux dans les pratiques
VXUpURJDWRLUHV HW GDQV OD PpPRUDWLRQ ,O GRLW SUpIpUHU OD VROLWXGH HW V¶pORLJQHU GHV
IUpTXHQWDWLRQVHWIDLUHO¶H[DPHQGHFRQVFLHQFHMXVTX¶jH[DPLQHUVHVSHQVpHVHQSOXVGHVHV
péchés graves et mineurs.

Finalement, il doit substituer à sa volonté et ses désirs, la volonté et les désirs de son
Seigneur.

« Tu peux éprouver ma sincérité par tout ce que tu veux

Ma satisfaction est dépendante de ta satisfaction »


51  

 
Ainsi il réalise la sentence prophétique : « nul ne sera un vrai croyant si ses aspirations ne
sont pas dépendantes de la révélation ».

&HWpWDWQHSHXWrWUHUpDOLVpTXHVRXVODGLUHFWLRQG¶XQ&KHLNKDXWKHQWLTXHGRQWODSUpVHQFH
impose la vénération, et incite au dévouement. Le disciple sera comme un cadavre dans les
mains de celui qui le lave et servira sans objection afin de bénéficier pleinement de son
éducation.

- /DYRLHGHO¶DPRXUTXLDSRXUSLOLHUVOHFRPSDJQRQQDJHHWO¶DOOpJHDQFH2QQHVHUpDOLVH
que par le compagnonnage de ceux qui sont déjà réalisés. On obtient la félicité grâce à ceux
TXLO¶RQWGpMjREWHQX

Allah dit : « Ô vous qui croyez, craignez Allah et soyez avec les véridiques». tawba 119

L E C O M PA G N O N N A G E D ES V E RT U E U X

Le compagnonnage des parfaits (salihin) est un fondement de la voie. Il n y a pas meilleur


SRXUO¶DVSLUDQWFDUOHVSV\FKRORJXHVGLVHQWOHVDIILQLWpVVRQWFRQWDJLHXVHV

Ibn Ata Allah dit dans Hikam : Accompagne celui qui, par sa spiritualité te stimule et par
son éloquence te guide vers Allah.

Le compagnonnDJHIDYRULVHODFRQQDLVVDQFHTXLIDYRULVHO¶DPRXUGLYLQ(WF¶HVW O¶DPRXU
qui incite au compagnonnage. Allah dit à son prophète (psl):

« Dis, si vous aimez Allah, accompagnez-moi, Allah vous aimera et vous pardonnera vos
péchés. Allah est clément et miséricordieux ».

Comment peut-on bénéficier du rattachement et rester ignorant ? Le compagnonnage, qui


QH IDYRULVH SDV OD FRQQDLVVDQFH HVW LQXWLOH /D FRQQDLVVDQFH IDYRULVH O¶DPRXU TXL HVW OH
PR\HQOHSOXVHIILFDFHSRXUWUDQVIRUPHUOHVFDUDFWqUHV6LO¶DVSLUDQWV¶DWWDFKHjXQ&KHLNK
DXWKHQWLTXHHWO¶DLPHVRQF°XUVHUDDWWLUpSDUOHVSHUIHFWLRQVGX&KHLNKHWWHQWHUDGHVHOHV
DSSURSULHUDILQTX¶LOVGHYLHQQHQWLQKpUHQWHjVRQrWUH

Le poète a dit :

« Ne pensez pas que mon amour est simulé

Mon amour pour vous est spontané »

/DYRLHG¶$OODKSDUO¶DPRXUHVWFHOOHGHVJQRVWLTXHV&HOXLTXLDLPHHVVD\HUGHUHVVHPEOHU
QDWXUHOOHPHQW j VRQ DPRXUHX[ ,O HVVD\H G¶DFTXpULU VHV SHUIHFWLRQV GDQV WRXW FH TX¶LO
entreprend.

Le sultan des amoureux Omar Ibn al Faridh dit :


52  

 
« Tu nHP¶DLPHSRLQWWDQWTXHWXQ¶DSDVIDLWO¶H[WLQFWLRQHQPRL

(WSRLQWG¶H[WLQFWLRQVDQVTXHPDUpDOLWpQHVHPDQLIHVWHHQWRL

3RXU FHOD RQ GLW  /¶DVSLUDQW SDU OH FRPEDW VSLULWXHO FKHPLQH VXU OD YRLH DORUV TXH
/¶DVSLUDQWSDUODYRLHGHO¶DPRXUYROHGDQV les airs. Entre les deux, il y a des distinctions
manifestes.

Le poète dit :

« Tu périras assassiné par ce que tu aimes

$WRLGHFKRLVLUO¶REMHWRXOHVXMHWGHWRQDPRXU »

L ES O BJ E C T I FS E T L ES F I N A L I T ES

'¶HPEOpH LO HVW pWDEOL TXH OH 7DVDZXI HVW LQKpUHQW à la religion, et TX¶HVW XQH TXrWH
spirituelle dont la finalité est la réalisation du statut de la servitude absolue pour Allah
XEXGL\DNKDOLVDOL¶ODK &HODQHSHXWrWUHTXHSDUODWUDQVIRUPDWLRQGXVHUYLWHXUTXLSDVVH
ainsi du service obligatoire au service volontaire, en toute conscience et connaissance.

/DFRQQDLVVDQFHHVWODILQDOLWpGHODYRLH$OODKGLW©-HQ¶DLFUppOHVMLQQVHWOHVKXPDLQV
TXH SRXU TX¶LOV P¶DGRUHQW ª ,EQ $EEDV FRPPHQWD O¶DGRUDWLRQ GDQV FH YHUVHW SDU  OD
connaissance. Il dit SRXUTX¶LOVPHFRQQDLVVHQW

/D SHUIHFWLRQ GH O¶KXPDLQ HVW GDQV OD FRQQDLVVDQFH /D FRPSOpWXGH GH OD IRL HVW GDQV OD
complétude de la connaissance. Ainsi, le prophète (psl), était le plus parfait des humains par
la foi et la connaissance. Il a dit (psl)

-HVXLVOHSOXVFRQQDLVVDQWG¶$OODKHWOHSOXVSLHX[

/D FRQQDLVVDQFH G¶$OODK FRPPHQFH SDU OD FRQQDLVVDQFH GH 6RL &RQQDLWUH VRQ 6RL HVW OD
YpULWDEOHFRQQDLVVDQFH&¶HVWPrPHOHVHFUHWGXERQKHXUpWHUQHO

Un hadith célèbre stipule :

Celui qui connait son 6RLFRQQDLWVRQ6HLJQHXU2QSHQVHTX¶LOpPDQHGH<DK\DLEQPD¶DGK


al razi. Mais, son contenu est absolument vrai, et même a des significations multiples dont :

« &HOXLTXLUpDOLVHODFRQWLQJHQFHGHVRQ6RLUpDOLVHO¶LPPXDELOLWpGHVRQ6HLJQHXU

Celui qui réalise la déficience de son Soi, réalise la puissance de son Seigneur.

&HOXLTXLUpDOLVHO¶LJQRUDQFHGHVRQ6RLO¶2PQLVFLHQFHGHVRQVHLJQHXU
53  

 
&HOXLTXLFRQQDLWO¶LQGLJHQFHGHVRQ6RLFRQQDLWODGLOLJHQFHGHVRQ6HLJQHXU

&HOXLTXLFRQQDLWO¶LPSXLVVDQFH GHVRQ6RLFRQQDLWO¶2PQLSRWHQFHGHVRQ6HLJQHXU

Celui qui connait sa réalité et ses attributs, connait que ce sont des aptitudes qui se
manifestent par lui et que son existence est pareille à un mirage dont la réalité est
illusoire. »

Ainsi, il peut aSSUpFLHUOHKDGLWK$OODKpWDLWHWULHQQ¶pWDLWDYHF/XL

Ainsi que son complément : Et Il est toujours comme il était.

/¶,PDP -XQDLG GLW  MH PDUFKDLV GDQV XQ TXDUWLHU GH %DVUD TXDQG  M¶HQWHQGLV XQH YRLH
féminine chanter :

Quand je dis : la séparation P¶DRIIHUWHO¶KDELWGHO¶pSUHXYH

7XPHUpSRQGVVDQVODVpSDUDWLRQO¶DPRXUQ¶DSRLQWGHVDYHXU

(WVLMHGLVOHF°XUHVWHQIODPPpSDUO¶DUGHXU

7XGLVOHF°XUV¶DQREOLWSDUOHVIODPPHVGHO¶DUGHXU

Quand je dis : quelle est ma faute en cela ?

Tu me répRQGVO¶LOOXVLRQGHWRQ0RLHVWOHSLUHGHVGpOLWV

&HOXL TXL DEROLW VRQ 0RL UpDOLVH VRQ 6HLJQHXU 6¶LO DLPH RX GpWHVWH V¶LO GRQQH RX VDLVLW
F¶HVWSRXU/XL

Le fruit du Tasawuf se manifeste dans le caractère. Le Soufi remplit ses devoirs et fait don
de ses avoirs.

/¶,PDP&KDIL¶DGLW

&HOXLTXLPHIDLWGXWRUWRP¶HVWUHGHYDEOH

-HOXLSDUGRQQHSRXUODIDFHG¶$OODKGRQWM¶HVSqUHWRXWELHQIDLW

Le Tasawuf est la noblesse de caractère. Le prophète (psl) a dit : les meilleurs vertus sont
trois. oqba ibn DPLU GLW M¶DL UHQFRQWUp OH 3URSKqWH SVO  HW LO P¶D GLW  Ð RTED LEQ DPLU
affermis ta relation avec celui qui te tourne le dos, donne à celui qui te prive, et pardonne à
celui qui est injuste envers toi.

Mon père, le Arif billah Mohammad Ibn Abdallah Chami Huseini sur lui la miséricorde
divine, disait : le musulman est constamment entre un début et une fin. Le début est de

54  

 
V¶DEVWHQLU GH IDLUH GX PDO j VRQ SURFKDLQ OD ILQ HVW GH VXSSRUWHU OD PDOYHLOODQFH GHV
humains.

Je conclus par un passage de Junaid à propos de son oncle Sari Saqti :

-HGRUPDLVFKH]6DUL6DTWLTXDQGLOPHUpYHLOODHWPHGLW&¶HVWFRPPHVLM¶pWDLVGHYDQW
Allah exalté soit-LOTXLPHGLWÐVDULM¶DLFUppOHVFUpDWXUHVHWWRXVSUpWHQGLUHQWP¶DLPHU
-¶DLFUppOHPRQGHHWOHVQHXI GL[LqPHVV¶HQIXLUHQWYHUVOHPRQGH8QGL[LqPHVHXOHPHQW
UHVWDDYHFPRL-¶DLFUppOHSDUDGLVHWQHXIGL[LqPHVGHFHX[TXLpWDLHQWUHVWpHVDYHFPRL
V¶HQIXLUHQWYHUVOHSDUDGLV-¶DLFUppO¶HQIHUHWOHVpSUHXYHVDORUVQHXIGL[LqPHVGHFHX[TXL
sont restéHVV¶HQIXLUHQW8QGL[LqPHVHXOHPHQWUHVWD

Je leur dis : vous ne voulez ni le monde, ni le paradis ; vous ne craignez ni les épreuves, ni
O¶HQIHU4XHYRXOH]- vous ? Ils répondirent : Seigneur, tu sais ce que nous voulons !

Je dis : Je vous testerais par des épreuves qui branleraient les montagnes, serais- vous
endurants ? Ils répondirent : Que ta volonté soit faite !

E PI L O G U E

Telle est la voie des Soufis : acquisition des attributs divins, miséricorde pour les humains,
et conformité à la Sunna. Ils ont oEWHQX OD FRQQDLVVDQFH HW O¶RQW DSSOLTXpH /H SURSKqWH
(psl) a dit à Haritha Ibn malik : « Ô haritha, dans quel état es-WXDXMRXUG¶KXL"

,OUpSRQGLW$XMRXUG¶KXLMHVXLVXQFUR\DQWYpULWDEOH

Le prophète (psl) dit : Attention à ce que tu dis, toute affirmation doit être prouvée.

Quelle est ta preuve ?

,OGLW-HPHVXLVGpWRXUQpGHFHPRQGHM¶DLXQHSUpGLOHFWLRQSRXUODIDLPHWODVRLIHWSRXU
ODYHLOOpHGDQVOHVDGRUDWLRQV&¶HVWFRPPHVLMHFRQWHPSODLVOHWU{QHGXVHLJQHXULQVWDOOpHW
les gens du parDGLVTXLVHUHQGHQWYLVLWHQWHWOHVJHQVGHO¶HQIHUTXLKXUOHQW

Le prophète (psl) dit : Ô haritha, tu as obtenu la connaissance. Sois constant ! Il le répéta


trois fois.

Traduction par Abdallah Fahmi

55  

 
2.1.2 - Communication 2 : L a H ij ra : une Sunna divine dans la mission des
élus/ L a vivification de la Sunna du H ij ra par le C heikh al K hadim ,
Par Ajir Achiouk Directeur du département de la recherche et du développement pour la
UHYXH+DU¶D ± Istanbul/Turquie

Gloire à ALLAH qui nous a imposé la (Hijra) par nos corps, notre esprit et notre intellect. Il en a
fiat une tradition (Sunna) perpétuelle.
,O D DXVVL GpFUpWp O¶HQYRL FRQWLQXHO G¶XQ UpIRUPDWHXU FKDTXH GpEXW GH VLqFOH DILQ GH YLYLILHU OD
religion. Prières et salutations sur son aimé Le prophète Mohammad (psl), sur sa famille et ses
compagnons.
&KHUVFRQIUqUHVHWFKHUVDXGLWHXUVWRXWG¶DERUGMHYRXVWUDQVPHWVOHVVDOXWDWLRQVFKDOHXUHXVHVGH
vos frères Turcs et surtout les élèves du professeur Fath Allah Koln qui ont pour vous le plus
profRQG UHVSHFW HW OHV PHLOOHXUV VHQWLPHQWV -¶HVSqUH TX¶$OODK YRXV SDUGRQQH DLQVL TX¶D QRXV
grâce aux bénédictions de cette assemble.
4XDQWjPDFRQWULEXWLRQjFHEDQTXHWLQWHOOHFWXHOHWVSLULWXHOM¶HVSqUHTXHFHVHUDFRPPHOHVHO
dans la nourriture. Un exemple turc dit : Tu veux être comme le sel dans la table.
-H QH SRXYDLV SDV rWUH DEVHQW GDQV XQH RFFDVLRQ SDUHLOOH HQ O¶KRQQHXU GX YpQpUDEOH &KHLNK $O
.KDGLP TX¶$OODK VDQFWLILH VRQ kPH HW TX¶LO QRXV IDVVH EpQpILFLHU GH VHV EpQpGLFWLRQV -H VXLV
venu pour me rassasier de votre nourriture spirituelle et je contribue modestement en espérant
que mon exposé soit profitable.

INTRODUC TION

-¶DLFKRLVLFHWLWUH(la Hijra) car le parcours spirituel GXYpQpUDEOH&KHLNK$KPDGRX%DPEDP¶D


LQWHUSHOOp HW P¶D IDLW Ppditer le Hadith : les savants (Ulémas) sont les héritiers des prophètes
$QEL\DV 4XLVRQWFHV8OpPDVHWF¶HVWTXRLO¶KpULWDJHGHV$QEL\DV ?
Pour y répondre, il nous faut examiner ce que nos savants et nos pieux prédécesseurs (salaf salih)
nous ont transmLVVXUOHVFDUDFWpULVWLTXHVGHVSURSKqWHV7RXWHIRLVM¶LQVLVWHUDLVVXUOHWKqPHGHOD
+LMUDTXLHVWXQH[LO%HQLTX¶$OODKDSUHVFULWSRXUVHVpOXV
/HVH[LOVFRPPHOHVYR\DJHVVRQWWUqVGLIIpUHQWVG¶XQHpSRTXHjXQHDXWUHHWG¶XQFDVjXQDXWUH
/¶H[LOSHXWrWUHYRORQWDLUHRXIRUFp,OSHXWrWUHGDQVOHEXWG¶DFTXpULUOHVDYRLUGDQVOHFDVGHV
pWXGLDQWVHWGHVVDYDQWVRXSRXUODSXULILFDWLRQGHO¶kPHGDQVOHFDVGHV Soufis. Le pèlerinage de
la MecquH pWDLW DXVVL XQ YR\DJH VSLULWXHO SpULOOHX[ TX¶HQWUHSUHQaient les Soufis dans des
conditions de remise confiante en Allah afin de se purifier et non seulement pour la récompense.
&HUWDLQV IDLVDLHQW XQ H[LO YRORQWDLUH SRXU IXLU OD VRFLpWp FRUURPSXH HW YLYUH O¶,VODP HQ SDL[ RX
diffuser la religion dans les contrées favorables à la spiritualité.
/H GpQRPLQDWHXU FRPPXQ j WRXWHV FHV IRUPHV GH YR\DJH RX G¶H[LO HVW OH IDLW G¶DEDQGRQQHU OH
confort et de sacrifier la famille, les enfants, et les biens.

56  

 
La plus importante (Hijra) de tous les temps fut celle du prophète Mohammad (psl) décrété par
Allah et qui devint pour nous une Sunna qui conduit à la félicité. Le prophète (psl) nous a instruit
que la Hijra vers Allah est ouverte jusqu'à la fin des temps.

L A R E L A T I O N D E L A H I-5$(7'(/¶(;,/

Pour certains, le fait G¶rWUH FRQGDPQp j O¶H[LO SHXW QH SDV rWUH DVVLPLOp j XQH +LMUD FDU
FRQYHQWLRQQHOOHPHQWF¶HVWXQHVHQWHQFHSROLWLTXHRXMXULGLTXH/D+LMUDVHUDLWSOXW{WXQHPHVXUH
individuelle ou collective SULVHYRORQWDLUHPHQWDILQGHIXLUO¶LQMXVWLFHRXGHSURWpJHU O¶LQWpJULWp
GHVDIRLRXGHVDSHUVRQQH0DLVHQYpULWpOD+LMUDSHXWDYRLUGHVIRUPHVGLIIpUHQWHVGRQWO¶H[LO
ou la déportation ou le bannissement. Allah a nommé la Hijra du prophète (psl) Bannissement
(Ikhraj) : « Si vous ne pouvez pas lui assurer la victoire, Allah lui a assuré la victoire quand les
PpFUpDQWVO¶RQWEDQQLV » sourate Tawba 40
« 2QDDQQRQFpDX[FRPEDWWDQWVTXLRQWVXELVO¶LQMXVWLFHTX¶$OODKSHXWOHXUDVVXUHODYLFWRLUH »
« &HX[ TXL RQW pWp EDQQLV GH FKH] HX[ HQ WRXWH LQMXVWLFH SDUFH TX¶Lls disent Allah est notre
Seigneur » sourate al Hajj 39/40
« La réponse du peuple fut : bannissez Lot de votre cité » 56
« Les pauvres migrants qui furent bannis de chez eux et dont les biens furent confisqués
Q¶HVSqUHQW TXH OD JUkFH G¶$OODK ,OV FRmbattent pour Allah et son prophète, ce sont des
véridiques » Nahl 52
« Ceux qui habitent la demeure de la foi et aiment ceux qui émigrent vers eux » hachr 8/9
« Leur Seigneur répondit MHQHQpJOLJHUDLVSDVO¶°XYUHGHVKRPPHVRXGHVIHPPHVLOVVHURQW
tous récompensés. Ceux qui ont émigrés HWRQWpWpEDQQLVGHFKH]HX[HWRQWVXELVO¶LQMXVWLFHj
FDXVHGHOHXU IRLHQ0RLHW TXL FRPEDWWHQWMXVTX¶jPRXULUSRXU0RL-HOHXUSDUGRQQHUDLV WRXV
leurs péchés et je les ferais entrer le paradis ou coulent les fleuves célestes. Ce sera leur
UpFRPSHQVHDXSUqVG¶$OODKHW$OODKjOHVPHLOOHXUHVUpFRPSHQVHV » Al umran 195
Le prophète (psl) a aussi homologué la Hijra au bannissement (Ikhraj). Il regarda la Mekke en lui
faisant ses adieux quand il fit la hijra et dit : Tu es une cité PHUYHLOOHXVH HW MH W¶DLPH 6L PRQ
SHXSOHQHP¶DYDLWSDVEDQQLMHQ¶KDELWHUDLVQXOOHSDUWDLOOHXUV (tarmadhi)
Dans le récit rapporté par Aicha : Khadija emmena le prophète (psl) chez Waraqa Ibn Nawfal et
dit : ô cousin, écoute les propos de ton neveu. /HSURSKqWH SVO OXLUDFRQWDFHTX¶LODYX
Waraqa dit  F¶HVW DLQVL OD UpYpODWLRQ GRQW D HWH JUDWLILp 0RLVH Si je serais vivant quand ton
peuple te bannira (yukhrijuka qawmuqa). Le prophète (psl) dit : Ils me banniront (awa mukhriji
hum). Il dit : certes, il Q¶\ a pas un homme qui a rapporté ce que tu apportes et ne fut pas
combattu.
Ainsi, le fait de bannir équivaut à la hijra conformément aux explications du prophète (psl).
Nous pouvons GpVORUV DYDQFHUTX¶$OODKDUHYLYLILpOD6XQQD de la hijra du prophète élu en la
personne de notre illustre maître Cheikh Ahmadou Bamba WRXW HQ VDFKDQW TX¶HOOH HVW OD SOXV
importante méthode de la réalisation spirituelle. ,O Q¶HVW SRLQW QpFHVVDLUH GH FRQILQHU OD +LMUD
GDQVO¶pSLVRGHKLVWRULTXHGHODmigration des premiers musulmans de la Mekke vers Médine.
57  

 
Khadim Rassoul a été banni par les colons et fut dans cet exil façonné par Allah. Ses épreuves
furent planifies par Allah comme le furent celles de Moise (psl). Dans sourate Taha Allah dit à la
mère de Moise : « Mets-le dans le panier et jettes-le dans le fleuve, il échouera sur le rivage ou le
prendra son ennemi et le mien ». Et il dit à moise : « -HW¶DL FRXYHUWGH PRQ DPRXUDILQTXHWX
sois façonné comme je veux ».
Youssef (psl) aussi fut façonné SDU$OODKHWIXWDVVLVWpGDQVOHVpSUHXYHVSRXUODILQDOLWpTX¶$OODK
a planifiée.
'HPrPHTXDQGRQOLWOHVpFULWVGH.KDGLP5DVVRXOHWVDSRpVLHRQUpDOLVHTX¶LOpFULYDLWGDQVXQ
état spirituel H[FHSWLRQQHO HW QRQ SRLQW GDQV O¶pWDW G¶XQ SULVRQQLHU H[LOp 4XH O¶RQ DSSHOOH FHOD
H[LORXEDQQLVVHPHQW ,NKUDM RX+LMUDLOV¶DJLWGHODPrPHUpDOLWpFDUOH&KHLN$KPDGRX%DPED
GpIHQGDLWVD)RLHWO¶LQWpJULWpGHO¶,VODPSDUVDSHUVRQQHHQVDFULILDQWVDIDPLOOHVHVHQIDQWVHWVHV
ELHQV&¶HVWH[DFWHPHQWOHEXt de la Hijra des prophètes sur eux tous le salut et la paix.
Les soufis ont un vocabulaire spécifique à la spiritualité tel que (sayr ila allah) (Sayr bi Allah)
(Sayr fi Allah) qui signifient respectivement la marche vers Allah par Allah en Allah. Ainsi que
(suluk) itinéraire (Salik) itinérant (Tariqa) voie (Adab Tariqa) règles de bienséance de la voie
(Zad) provisions (Uruj) ascension (Nozul) descente. Le grand et illustre Soufi Ibrahim Ibn
Adham disait :
J'ai abandonné toutes les créatures par amour pour toi
J'ai laissé ma famille et les enfants orphelins pour te contempler
Si tu me découpes en morceaux
0RQF°XUQHVHSHQFKHUDSDVYHUVXQDXWUHTXH7RL

L A H IJR A

'DQVODODQJXHDUDEH+LMUDVLJQLILHG¶DSUqV ,EQ)DUHV : abandonner une demeure pour une autre


tel les musulmans qui ont abandonné la Mekke pour Médine.
Conventionnellement la Hijra signifie l'abandon de la cité ou la ville ou le pays du Kufr pour le
pays de l'islam.
Le grand traditionniste Ibn Hajar l'a expliqué plus pertinemment : la Hijra dans la Charia est le
fait d'abandonner tout ce qu'Allah a interdit. Ce qui est une explication plus spirituelle.
/D +LMUD HVW DXVVL ELHQ SK\VLTXH TXH VSLULWXHOOH FDU OH IDLW G DEDQGRQQHU WRXW FH TXH O¶kPH
charnelle désire et ce que satan suggère est le but même de la hijra physique ou corporelle.
Sans nul doute la Hijra la plus bénéfique et la plus importante de l'humanité est celle du prophète
Mohammed (psl) et ses compagnons. Toutefois, l'histoire de l'humanité est faite de Hijra comme
celles des prophètes paix et salut sur tous. Ils ont laissé leur empreinte dans tout peuple et toute
civilisation par les lumières de la foi qu'ils ont allumés partout et en chaque époque. Toute
religion ou reforme ont eu des détracteurs et des ennemis comme des croyants et sympathisants.
Généralement, les idées nouvelles trouvent des adhérents dans les lieux autres que celles de
O¶LQLWLDWHXU,O\DXQHFRPPXQDXWpGHYXHVHWGHGHVWLQHQWUHOHVSURSKqWHVHWOHVUpIRUPDWHXUVRX
vivificateurs car il s'agit du même combat pour la vérité (jihad pour Allah). C'est un combat
58  

 
FRQWUH O¶LJQRUDQFH O¶pJDUHPHQW HW OD FRUUXSWLRQ GDQV OHV VRFLpWpV KXPDLQHV HW FHOD DERXWLW
généralement aux épreuves de la Hijra . Le Jihad et la Hijra sont deux éléments fondamentaux
dans le service divin pur (ubudiya khalisa). Le jihad doit être d'abord interne afin de se purifier et
VHSDUIDLUH,OHVWOHFRPEDWVXSUrPH -LKDG$NEDU SXLVYLHQWO¶pWDSHGHODGLIIXVLRQGHODOXPLqUH
de la foi.
Le Jihad et la Hijra sont souvent complémentaires et on peut même dire qu'ils sont inclus l'un
dans l'autre. A chaque étape du Jihad, il y a une Hijra depuis un état (Hal) vers un autre et depuis
XQH VWDWLRQ 0DTDP  YHUV XQH DXWUH MXVTX¶j OD ILQDOLWp TXL HVW OD SHUIHFWLRQ KXPDLQH ,O IDXW
réussir la hijra depuis OH FRUSV YHUV O HVSULW HW GHSXLV O¶kPH YHUV OH F°XU afin de couper les
attaches terrestres éphémères et s'envoler vers les hauteurs célestes car telle est la Hijra véritable.
Celui qui ne réussit pas une telle Hijra ne pourra pas bénéficier pleinement de la hijra physique.

L ES V E R T US D E L A H IJR A
Les versets coraniques et les hadiths prophétiques sur la Hijra sont nombreux :
- « Ceux qui croient et font fait la Hijra et le Jihad dans la voie d'Allah espèrent la miséricorde
divine. Allah est tout pardon et clément ». baqara 218
- « Ceux qui ont fait la Hijra et ont été bannis de leurs demeures et ont subis des torts à cause de
leur foi en Moi, ainsi que ceux qui combattent et ceux qui sont morts dans le combat tous je leur
pardonnerais » A'l Umran 195
- « Ceux qui ont fait la Hijra et le Jihad par leur bien et leur personne et ceux qui les ont hébergés
et assistés dans le combat sont pareillement solidaires en tout. Et ceux qui ont cru et n'ont pas fait
la Hijra ne sont point pareils tant qu'ils n'auront pas fait la Hijra ». anfal 72
- « Ceux qui ont cru et ont fat la Hijra et le Jihad dans la voie d'Allah et ceux qui les ont
abrités et assistés sont les véritables croyants, ils auront le pardon et des récompenses
immenses » anfal 75/78
- « Ceux qui croient et ont fait la Hijra et le Jihad dans la voie d'Allah par leurs biens et leurs
personnes ont plus de considération auprès d'Allah ; ce sont eux les véridiques. Le Seigneur leur
annonce sa miséricorde et son agrément et un paradis où ils auront une demeure éternelle »
Tawba 20/22
-« &HX[ TXL RQW IDLW OD +LMUD DSUqV DYRLU VXEL O¶LQMXVWLFH QRXV OHXU DFFRUGHURQV XQ ELHQIDLW
LPPHQVHGDQVFHWWHYLHHWHQFRUHSOXVGDQVO¶DXGHOj ». nahl 41
-« Ton Seigneur est bienveillant envers ceux qui ont fait la Hijra pour Lui et ont combattus et
sont tues Allah leur accordera des biens immenses. Allah est le meilleur Donateur al Hajj 58
-« Celui qui fait la Hijra pour Allah trouvera partout sur terre des biens immenses et une aisance.
Celui qui abandonne sa demeure pour Allah et son prophète et meurt en chemin, sa récompense
HVWJDUDQWLHDXSUqVG¶$OODK ªQLVD¶

59  

 
H A D I T HS SU R L A H IJR A

Le prophète (psl) a dit à Amr ibn al Ass : sais-WXTXHO¶LVODPVXSSULPHWRXWFHTXLDpWpFRPPLV


avant ! Que la Hijra supprime toXW FH TXL O¶D SUpFpGp ! Que le hajj supprime tous les péchés
commis ! (Hadith rapporté par muslim)
Il dit aussi àAbi fatima dhimri WXGRLVIDLUHOD+LMUDULHQQHSHXWO¶pJDOHU ! (Hadith rapporté par
1LVD¶L
Il dit aussi O¶LPDPGDQVXQJURXSHGRLWrWre celui qui apprend le Coran plus que les autres et si
OHVFRPSpWHQFHVVRQWSDUHLOOHVFHOXLTXLDXUDIDLWOD+LMUDHQSUHPLHUHWV¶LO\DpTXLYDOHQFHOHSOXV
âgé ». (muslim)
Il dit : celui qui a fait la Hijra et le Jihad puis meurt Allah lui a accordé le SDUDGLVGHGURLW6¶LOHVW
assassiné, ou noyé ou tué par un animal quelconque il aura le paradis ». Ahmed ibn hanbal et
1LVD¶L
Il dit aussi : je suis garant et chaque guide est garant. Celui qui croit en moi et devient musulman
et fait la Hijra aura une demeure au paradis ». Ahmed ibn hanbal
Il dit aussi  MH YRXV RUGRQQHV FLQT FKRVHV TX¶$OODK P¶D RUGRQQp OD VROLGDULWp GX JURXSH
O¶REpLVVDQFHDX[RUGUHVODGLVFLSOLQHOD+LMUDHWOH-LKDG ». Ahmed ibn hanbal et tarmadhi
Il dit à Abdallah ibn amrou : sais-tu qui sera le premier groupe de musulmans qui entrera au
paradis ? Il répondit : Allah et son prophète savent.
Il dit : les muhajirins viendront au paradis et tapent à la porte. Les gardiens diront : vous êtes déjà
passés au jugement ? Ils diront : nous serons jugés sur quoi ? Nous avions les épées toujours
GpJDLQpHVGDQVODYRLHG¶$OODKHWQRXVVRPPHVPRUWVDLQVL !
2Q OHXU RXYUH OD SRUWH HW LOV V¶\ LQVWDOOHQW TXDUDQWH DQV DYDQW TXH OHV SUHPLHUV PXVXOPDQV
entrent ». Hakim
Jabir ibn tufail ibn Amr Doussi était venu voir le prophète (psl) SRXUO¶LQYLWHUjIDLUHODKLMUDFKH]
Daws qui avait un fort imprenable. Il dit  Ð SURSKqWH G¶$OODK YHX[-tu un fort imprenable. Le
SURSKqWH SVO GpFOLQDO¶RIIUHFDU$OODKDYDLWFKRLVLSRXUOHV$QVDUVGH0pGLQH3OXVWDUG quand
le prophète (psl) migra à Médine, Tufail ibn amrou le rejoignit avec un homme de sa tribu qui
tomba malade et souffrit au point de couper ses veines pour atténuer la douleur. Il mourut ainsi et
Tufail le vit dans le rêve et lui demanda TX¶DIDLW$llah de toi ?
Il lui répondit $OODKP¶DSDUGRQQpjFDXVHGHOD+LMUDTXHM¶DLIDLWHSRXUVRQHQYR\pª0XVOLP
La Hijra est sacrée sans controverse et elle est la meilleure caractéristique car elle implique
O¶DEDQGRQGHWRXWSRXUODIRL3RXUFHODOHVPXVulmans ont choisi la date de la Hijra pour initier le
calendrier musulman.
A mon humble avis, mes frères mourides ont vu juste en célébrant leur plus grand événement à
la date de la Hijra de Cheikh Ahmadou Bamba khadim Rassoul. Nous avons relevé dans les écrits
du Cheikh et dans sa poésie que cette Hijra fut une nouvelle naissance et un nouveau cycle où il
HXWGHVLOOXPLQDWLRQVHWGHVJUkFHVTX¶RQQHSHXWSDVREWHQLUGDQVG¶DXWUHVFRQGLWLRQV,O\DGHV
grâces qui sont obtenus dans la mosquée ou dans le pèlerinage ou pendant la journée ou la nuit ou
dans des circonstances ou événements particuliers, comme il y a ceux qui sont spécifiques à la
60  

 
+LMUD/¶LPDQOD+LMUDHWOH-LKDGVRQWOHVDUFDQHVG¶XQHVHXOHHWPrPHUpDOLWpHQVHLJQpHSDUOH
Coran. Les conditions de chaque époque et de chaque pays définissent les contours de cette
réalité qui est la source de vie. Les saints (Awliyas) et les rénovateurs (mujaddid) de chaque
époque boivent à cette source de vie pour vivifier la religion. La Hijra est une Sunna d¶$OODKSRXU
OHV SURSKqWHV /HV SUHPLqUHV HW OHV SOXV LPSRUWDQWHV IXUHQW FHOOH G¶$GDP 1Rp $EUDKDP /RW
Moise, Jésus et Mohammad paix et salut sur tous. Le prophète Mohammad (psl) scella la
prophétie mais a laissé la porte de la Hijra ouverte jusqu'à la fin des temps.
$GDPDIDLWOD+LMUDGXSDUDGLVYHUVODWHUUHDILQG¶HQJHQGUHUO¶KXPDQLWpHWG¶RXYULUOHF\FOHGHOD
+LMUDYHUV$OODK1RpDIDLWOD+LMUDSDUODPHUDILQGHSXULILHUO¶KXPDQLWp$EUDKDP DIDLWXQH
Hijra continue de Babylonie, en Syrie, Egypte, Palestine, et Arabie afin de diffuser le
0RQRWKpLVPH 7DZKLG -RVHSKILWOD+LMUDGHSXLVTXHVHVIUqUHVO¶RQWMHWpGDQVOHSXLWVHQIDQWLO
IXWYHQGXHQWDQWTX¶HVFODYHHWYpFXWGDQVXQSDODLVSXLVMHWpHQSULVRQ et enfin devint premier
PLQLVWUHGHO¶Egypte. Il pardonna ses frères et les installa avec leurs familles en Egypte.
Moise fit la Hijra toute sa vie depuis sa naissance MXVTX¶jVDPRUW

L A H IJR A D U PR O PH E T E M O H A M M A D (PSL)

Ce fut la Hijra qui changea la face du monde définitivement. Yathrib devint Médine ou la ville de
O¶LVODP DSUqV TXH OH SURSKqWH 0RKDPPDG SVO  V¶\ LQVWDOOD /HV KDELWDQWV GH 0pGLQH VRQW GHV
pOXVTX¶$OODKDFKRLVLSRXUDVVLVWHUVRQHQYR\pHWLOVVRQWOHVDX[LOLDLUHV $QVDUV ,OVDIIURQWqUHQW
les épreuves les plus dangereuses avec comme devise : Allah nous suffit comme protecteur
(+DVEXQD $OODK ZD 1L¶PD¶O :DNLO . Les Ansars comme les Muhajirins ont obtenus des
récompenses inaccessibles aux autres musulmans grâce au Jihad et la Hijra. Au début six de
<DWKULEHPEUDVVqUHQWO¶Lslam, puis dix autres et ils seront plus de soixante dix à faire allégeance
au prophète SVO DILQTX¶LOIDLWOD+LMUDSRXUOHXUYLOOHRLOVOHGpIHQGURQWFRQWUHVHVHQQHPLVDX
détriment de leurs personnes, leurs enfants et leurs biens. Le prophète (psl) HXW O¶DXWRULVDWLRQ
divine pour la Hijra et partit en dernier après avoir fait partir les musulmans de la Mecque. Quand
il arriva avec son fidèle compagnon Abou beckr, les médinois chantaient de bonheur :
La pleine lune est apparue et nous illuminera
On dRLWUHQGUHJUkFHWDQWTXHO¶DSSHODX6HLJQHXUGXUHUD

L A H IJR A P E RP E T U E L L E

Dans son aspect historique et prophétique la Hijra est close depuis la conquête de la Mecque
(Fath mekka). Ibn Abbas rapporta que le prophete (psl) dit : point de Hijra après la conquête de la
MecquePDLVLO \ DO¶LQWHQWLRQ (Niya) et le Jihad. Quand on vous appelle pour le Jihad, il faut
répondre. (Boukhari et Muslim)
0XVKDMD¶LEQPDV¶RXG apporta son frère au prophete (psl) après la conquete de la Mekke, et dit :
Il veut faire allégeance pour la Hijra. Le prophete (psl) dit : Point de Hijra après (le Fath) la
conquete de la MecquHPDLVLOIDLWDOOpJHDQFHSRXUO¶LVODP %RXNKDULHW0XVOLP
61  

 
Ainsi la Hijra dans ce sens particulier est close, mais la Hijra dans le sens général est perpétuelle
car le prophète (psl) a dit : ODKLMUDQ¶HVWMDPDLVFDGXTXHHWUHVWHUDSHUSpWXHOOHMXVTX¶jFHTXHOH
VROHLOVHOqYHSDUO¶RFFLGHQW $KPHG,EQ+DQEDO'DULPLHW$ERX'DRXG
Il dit aussi : OD +LMUD Q¶HVW MDPDLV LQWHUURPSXH WDQW TXH OH -LKDG HVW G¶DFWXDOLWp $KPHG ,EQ
Hanbal)
La Hijra est le pendant du Jihad et le prophète SVO DGLWTXHOH-LKDGUHVWHDFWXHOMXVTX¶jODILQ
des temps. Ainsi, celui qui quitte ses parents, ses enfants et ses biens pour affirmer sa religion est
dans le Jihad et la Hijra.
/HV VDYDQWV RQW WHQXV FRPSWH GHV FRQWUDGLFWLRQV GHV KDGLWKV TXL GpFODUHQW TX¶LO Q \ D plus de
Hijra après la conquête de la Mecque et que la hijra est perpétuelle, et conclurent que la Hijra
historique de la Mekke à Médine est finie mais que la Hijra spirituelle qui est le fait de se
détourner définitivement des interdits HVW WRXMRXUV G¶DFWXDOLWp 7DKDZL H[SOLTXD FHFL SDU OH
Hadith de fudaik qui dit ÐSURSKqWHG¶$OODKRQSUpWHQGTXHFHOXLTXLQ¶DSDVIDLWOD+LMUDHVW
perdu. Alors le prophète (psl) dit : Ô fudaik, fais les prières, donne la Zakat, abstiens ±toi des
interdits et élis domicile où tu veux, tu seras dans la Hijra. (Tahawi, Tabari, Bayhaqi et Ibn
Habban)
Khattabi a expliqué que la Hijra qui est caduque est celle qui est une obligation et la Hijra
perpétuelle est celle qui est recommandée.
La hijra de la Mecque vers Médine pour rejoindre le prophète (psl) et combattre avec lui est
ILQLH0DLVOD+LMUDGX.XIUYHUV/¶LVODPHVWSHUSpWXHOOHHWOHXUVWDWXWHVWFHUWHVGLIIpUHQW,OIaut
IDLUHOD+LMUDG¶XQSD\VRXG¶XQHYLOOHGX.XIU 'DUNXIU YHUVOHSD\VRXODYLOOHGHOD)RL 'DU
Iman). Baghawi affirma cela en mentionnant le Hadith ou le prophète (psl) dit : je suis innocent
de tout musulman qui habite avec les mécréants.
Sumra ibn jundub rapporta que le prophète (psl) dit : FHOXLTXLV¶DVVHPEOHDYHFOHVPpFUpDQWVRX
habite avec eux est parle à eux.( sharh muslim)
Nawawi expliqua que la vile de la MecquHHQHPEUDVVDQWO¶LVODPDSUqVODFRQTXrWHLOQ\DYDLW
plus de raison pour faire la Hijra de la Mecque vers Médine. Ibn Arabi avait dit la même chose.
Ibn Hajar Askalani dit WRXWHYLOOHTXLGHYLHQWXQHGHPHXUHGHO¶LVODP GDULVODP HQWUHGDQVOH
sens du Hadith b « ODKLMUDED¶GDO)DWK » (point de hijra après la conquête). Or, avant la conquête
G¶XQHYLOOHOHVPXVXOPDQVTXL \UpVLGDLHQW DYDLHQW O¶REOLJDWLRQGHIDLUHOD+LMUDSRXUXQHDXWUH
ville dominée par les musulmans, dans le cas où ils ne pouvaient pas pratiquer librement leur
religion. Dans le cas, où ils pouvaient pratiquHUOLEUHPHQWOHXUUHOLJLRQFHQ¶HVWSDVXQHREOLJDWLRQ
PDLVF¶HVWXQGHYRLUGHIDLUHOD+LMUDFDUFHODOHXUSHUPHWGHFRRSpUHUDYHFOHVPXVXOPDQVHWGH
renforcer leur rang. Quant à ceux qui étaient malades ou impuissants à faire la Hijra pour des
motifs valables, il n y a point de contrainte mais si toutefois ils font la Hijra ils auront plus de
récompense et de mérite.
'RQFOD+LMUDGDQVVRQVHQVJpQpUDOOD+LMUDVHUDLWSOXW{WO¶DEDQGRQGHVLQWHUGLWVFRQIRUPpPHQW
au Hadith du prophète élu (psl) : « le musulman est celui qui préserve les musulmans de sa
ODQJXH HW GH VHV PDLQV DORUV TXH OH 0XKDMLU HVW FHOXL TXL DEDQGRQQH OHV LQWHUGLWV TX¶$OODK D
prohibé ».
62  

 
Ibn Habban rapporta le même Hadith avec une expression similaire : « le Muhajir est celui qui a
abandonné les péchés et le musulman est celui dont les musulmans sont préservés de sa langue et
des mains ».
'RQFOD+LMUDUHTXLVHGHQRVMRXUVHVWVSLULWXHOOHFDUHOOHSHUPHWjO¶kPHGHPLJUHUG¶XQpWDWjXQ
DXWUHGHSXLVO¶kPHW\UDQQLTXH DPPDUDEL¶VRX jO¶kPHEOkPDEOH QDIVODZDPD jO¶kPHSDFLILpH
QDIVPXWPD¶LQD TX¶$OODKLQWHUSHOOHGDQVOH&RUDQ : « Ô âme pacifiée, retourne à ton Seigneur
agrée en toute approbation entre dans mes serviteurs entre au paradis ».
&¶HVW FH VHQV JpQpUDO TXL GRLW rWUH DGPLV et compris par nos contemporains car il est toujours
DFWXHOHWUHVWHUDSHUSpWXHOWDQWTXHO¶KXPDQLWpH[LVWH&KDTXHFUR\DQWGRLWPpGLWHUOH+DGLWKGX
prophète (psl) : « Point de HIjra après la conquête » dans son intégralité car son complément est :
« maiVSOXW{WOH-LKDGHWO¶LQWHQWLRQ ». /DKLMUDEDG¶DO)DWKEDO-LKDGXQZDQL\D

L ES F R U I TS D E L A H IJR A

Tout croyant qui a eu a faire une Hijra pour un motif quelconque connaît les épreuves du voyage
HW OD UHVSRQVDELOLWp GH O¶pPLJUDWLRQ 7RXWHIRLV O¶DQRQymat de sa nouvelle condition peut être
salutaire dans le cas où il lui permet de se faire une nouvelle virginité et même lui faire bénéficier
GH OD ERQQH RSLQLRQ GH VRQ SURFKDLQ VL VD FRQGXLWH HVW LUUpSURFKDEOH 'DQV O¶KLVWRLUH GH
O¶KXPDQLWp OD +LMUD IXW toujours le lot de ceux qui ont eu une influence sur les humains tel les
prophètes, les bâtisseurs des civilisations, les conquérants et autres.
Les sociologues et les anthropologues affirment TXHOHVFLYLOLVDWLRQVIXUHQWWRXMRXUVO¶°XYUHGH
migrants. Le célèbre historien Toynbee étudia 27 civilisations toutes fondées par des immigrants.
/DSXLVVDQFHGHODYRORQWpHVWXQIDFWHXULPSRUWDQWTXLDYDQWDJHO¶LPPLJUpTXLDFKRLVLGHYLYUH
O¶DYHQWXUHDXOLHXGXFRQIRUPLVPH/HIDLWG¶rWUHFDSDEOHGHWRXWDEDQGRQQHUHWWRXWUHIDLUHQ¶HVW
pas donné à chacun. Il y a des preuves qui nécessitent du courage, de la volonté et de la foi. Nous
avons en les prophètes paix et saluts sur eux tous le meilleur exemple, ainsi que leurs
compagnons. Si on éduque les générations actuelles dans des conditions difficiles, ils seront plus
aptes à affronter les défis et challenges de leur époque. Par les voyages et les épreuves ils seront
SOXVSRUWpVVXUODVSLULWXDOLWpDXOLHXG¶rWUHDWWLUpYHUVODVRFLpWpGHFRQVRPPDWLRQHWVHVGpULves.

K H A D I M R ASSO U L C O M M E E X E M PL E

/DYLHGHFHWKRPPHH[FHSWLRQQHOTX¶HVW&KHLNK$KPDGRX%DPED.KDGLP5DVVRXOQRXVGRQQH
un enseignement merveilleux et personnifie la Hijra dans son expression la plus singulière pour
notre époque. Il manifesta la puissance de la volonté spirituelle, de la Foi et du courage dans les
pSUHXYHV OHV SOXV GLIILFLOHV HW GDQV OHV FRQGLWLRQV H[WUrPHV GH OD GpSRUWDWLRQ HW O¶H[LO /H
FRORQLDOLVPHTXLDSXGRPLQHUOHVSD\VGHO¶LVODPGDQVOHXUTXDVL-totalité a échoué devant la foi
G¶XQ KRPPH SXU FDU OH FRPEDW GHV FRORQV DYHF OHV PXVXOPDQV QH IXW SDV VHXOHPHQW PLOLWDLUH
PDLVDXVVLVSLULWXHO&HFRPEDWSHXWrWUHXQIDFWHXUG¶pOpYDWLRQVSLULWXHOOHSRXUOHFUR\DQWSXUHW
sincère.
63  

 
Je pense que même le nom de Touba que le Cheikh a choLVLSRXUVDYLOOHQ¶HVWSDVIRUWXLWHWSRUWH
GHV VLJQLILFDWLRQV PXOWLSOHV GRQW OD SOXV pYLGHQWH HVW O¶DUEUH 7RXED GRQW OHV UDFLQHV VRQW
SURIRQGpPHQWDQFUpHVGDQVOHPRQGHSK\VLTXHHWVHVUDFLQHVVRQWG¶RUGUHPpWDSK\VLTXH
-¶DLOXGHVRXYUDJHVGX&KHLNKDinsi que des témoignages sur ses qualités exceptionnelles et des
récits de son épopée, et je suis certain que ceux qui sont présents connaissent mais je peux dire
TXHOHVPLUDFOHVHWOHV.DUDPDWVIRQWSDUWLHGHVDFWHVGHO¶2PQLSRWHQFHGLYLQHHWVRQWGHVSreuves
TX¶$OODK PDQLIHVWH SRXU OHV KXPDLQV &KHLNK $KPDGRX %DPED IXW FRXUDJHX[ GDQV WRXW HW QH
IDLEOLWMDPDLVHWVDQVDUPHVQLPXQLWLRQVQHIDLOOLWSDVjVDPLVVLRQPrPHGDQVO¶H[LOORLQGHVD
famille, de ses amis et de ses disciples.
Il représente la boQQHJUDLQHTX¶$OODKSODQWHVXUWHUUHSRXUGRQQHUOHVIUXLWVEpQLVG¶XQHKXPDQLWp
saine qui de génération en génération continue à produire les fruits de la foi dont nous
EpQpILFLRQVDXMRXUG¶KXL
/HV pFULWVGX&KHLNKVRQWHPSUHLQWVGH)RLG¶HVSRLUG¶DPRXU divin et de confiance en Allah à
O¶LQVWDUGHVLOOXVWUHVPDvWUHVGHODYRLHOHVYUDLVKpULWLHUVGHVSURSKqWHV
/DYLHHWO¶°XYUHGH.KDGLP5DVVRXOHVWXQHYUDLIHXLOOHGHURXWHSRXUOHVFUR\DQWVHWSHXWOHXU
permettre de gagner les honneurs de cette vie eW GH O¶DX GHOj &¶HVW O¶LQWHUSUpWDWLRQ GH
O¶HQVHLJQHPHQWSURSKpWLTXHG¶DSUqVOHVUpDOLWpVGHO¶pSRTXHHWOHVH[SUHVVLRQVFRQWHPSRUDLQHV
Les maîtres de la voie disent : celui qui marche dans la voie arrivera à destination. La Hijra pour
eux est un processus qui actualise les possibilités latentes dans le croyant et lui permet les
conquêtes spirituelles. Pour eux, la Hijra de la Mecque vers Yathrib (Médine) est le prototype de
OD +LMUD VSLULWXHOOH HW LO IDXW PpGLWHU O¶HQVHLJQHPHQW HW QRQ SRLQW OH FRQVLGpUHU comme un fait
KLVWRULTXHVHXOHPHQW,O\HXWDXVVLOHVFRQTXrWHVGHO¶,UDNGHO¶,UDQGHOD6\ULHGHO¶(J\SWHHW
GHVDXWUHVSD\VTXLGHYLQUHQWGHVSD\VG¶LVODP3DUOD+LMUD0pGLQHGHYLQWODFDSLWDOHGHO¶HPSLUH
LVODPLTXHDORUVTX¶HOOHpWDLWXQHRDVLVdans les déserts.
/D +LMUD GH .KDGLP 5DVVRXO ILW DXVVL GH 7RXED OD FDSLWDOH GH O¶LVODP HQ $IULTXH GH O¶RXHVW HW
changea définitivement la configuration du Sénégal qui devint le foyer de la spiritualité et diffuse
la Baraka et la foi tout autour. Rien que par sa personne Khadim Rassoul peut influencer tout
croyant car ses actes sont aussi éloquents que ses propos. Il refusa le Jihad militaire mais ne
V¶LVRODSDVSRXUDGRUHU$OODKHQSDL[ELHQTXHFHODHVWFRQVHLOOpSDUIRLVPDLVLODHQJDJpXQDXWUH
combat SOXVGLIILFLOHHWSOXVEpQpILTXHHWLOO¶DIDLWHQVROLWDLUH
3DUVDSHUVRQQHLOLQIOXHQoDWRXWXQSHXSOHTX¶LOpGXTXDGDQVODYUDLHIRL
Dans la tariqa Naqshbandi, le Cheikh Ali Ramtani suivit le même processus avec lequel il guida
des foules entières à Boukhara, où on dit de lui :
6LO¶pWDWVSLULWXHOG¶XQHSHUVRQQHQ¶HVWSDVSOXVFRQYDLQFDQWTXHVDSDUROH
7XQ¶DXUDLVSDVYXO¶pOLWHGH%RXNKDUDGHYHQLUOHVVHUYLWHXUVGH&KHLNK$OL
Ainsi, les compagnons du prophète (psl) leurs disciples se sont dissémines dans le monde pour
GLIIXVHUO¶LVODPGDQVGHVSRSXODWLRQVTXLQHSDUODLHQWSDVO¶DUDEH&HIXWSDUOHXUFRPSRUWHPHQWHW
OHVTXDOLWpVTX¶LOVYpKLFXODLHQWTX¶LOVRQWFRQTXLVOHVF°XUVGHVSRSXODWLRQVDXSRLQWTXHO¶LVODP
se répandit inexplicablement.

64  

 
-¶DL noté aussi que les ennemis de Cheikh Ahmadou Bamba furent surpris de sa résistance, de sa
VFLHQFH HW GH VHV GRQV HW FRQVWDWqUHQW TX¶LO pWDLW DVVLVWp SDU $OODK HW VRQ HQYR\p SVO  HW PrPH
DXMRXUG¶KXLRQSHXWFRQVWDWHUFHOD-HSHX[GRQQHUXQH[HPSOHpGLILDnt qui nous vient du Japon.
/H UHVSRQVDEOH GH OD 0RVTXpH GH 7RN\R P¶D LQIRUPp TXH OHV GLVFLSOHV GH &KHLNK $KPDGRX
Bamba se réunissent régulièrement pour des séances de Zikr ou chant des panégyriques sur le
SURSKqWH SVO  HW FHOD VXVFLWH O¶DGPLUDWLRQ GHV Dutres musulmans et permet aussi de vivre des
instants de spiritualité.
-¶DLDXVVLQRWpTXHO¶DSSHOODWLRQGH.KDGLPTXHOH&KHLNKUHYHQGLTXDLWHQGHKRUVGHWRXWHDXWUH
DYDLW GHV VLJQLILFDWLRQV SURIRQGHV 1RWUH PDvWUH %DGL¶=DPDQ 1RXUVL TXL HVW O¶DUWLVDQ de la
QRXYHOOH FRQVFLHQFH LVODPLTXH WXUTXH PHQWLRQQH VRXYHQW GDQV VHV pFULWV TX¶LO SUpIpUDLW OH WLWUH
de « Khadim al Qoran ª VXU WRXWH DXWUH 1RWUH PDvWUH )DWK $OODK .ROQ SUpVHQWH VRQ °XYUH
G¶pGXFDWLRQVSLULWXHOOHGRQWGHVJpQpUDWLRQVHQWLqUHVEpQpILFLHQWFRPme « Khidma ». Ces réalités
nous interpellent directement, chers auditeurs.
9RXV FKHUV PRXULGHV EpQpILFLH] G¶XQ SDWULPRLQH H[FHSWLRQQHO GRQW OHV LQYRFDWLRQV H[DXFpHV
GX¶DPXVWDMDE GX&KHLNK$KPDGRX%DPEDHWGHVHV°XYUHV&H TXLUpYqOHTXHO¶$IULTXHQRire
Q¶D SDV VHXOHPHQW GHV PDWLqUHV SUHPLHUV PDLV DXVVL XQ FDSLWDO KXPDLQ HW XQ SDWULPRLQH
intellectuel et VSLULWXHO LPPHQVH HW M¶LQYLWH OHV PXVXOPDQV j HQ EpQpILFLHU 1RWUH PDvWUH %DGL¶
Zaman Noursi disait : si les musulmans vivent des épreuves et des crises, ce sont des gifles
VSLULWXHOOHVDGPLQLVWUpHVSDU$OODKSRXUTX¶RQVHUpYHLOOHGHQRWUHLQFRQVFLHQFH
Mon pays, la Turquie IXWSHQGDQWGHVVLqFOHVO¶HPSLUHRWWRPDQTXLKLVVDWUqVKDXWO¶pWHQGDUGGH
O¶LVODP SXLV YpFXW GHV pSUHXYHV WHUULEOHV TXL RQW IDLOOL pUDGLTXHU O¶LVODP GX SD\V $OODK QRXV D
HQYR\pGHVYLYLILFDWHXUVjO¶LPDJHGH.KDGLP5DVVRXOTXLSDUOHVVDFULILFHVHWO¶°XYUHpGXFDWLYH
RQWSHUPLVOHUHGUHVVHPHQWGRQWOHVIUXLWVFRQWLQXHQWjSRXVVHUMXVTX¶jQRVMRXUV
Chaque époque a ses réalités et le Cheikh Ahmadou Bamba donna le meilleur exemple de son
époque surtout que le Jihad changea de forme, puisque du combat militaire il devint un combat
spirituel dont les implications et les résultats sont plus bénéfiques.
Aussi, je voudrais finir mon iQWHUYHQWLRQSDUODWUDGXFWLRQG¶XQDUWLFOHpFULWHQODQJXHWXUTXHSDU
mon maître et guide spirituel le vénérable Fath Allah Koln concernant les voies spirituelles.

L ES V O I ES (T U R U Q)

/HVYRLHVFRQGXLVHQWYHUVO¶pWHUQLWpPDLVLO\DGHVFRQWRXUVHW des pièges. Ceux qui cheminent


VXUODYRLHVRQWFRPPHO¶HDXTXLGDQVVRQLWLQpUDLUHYHUVO¶RFpDQUHQFRQWUHGHVpFXHLOV/HVYRLHV
sont aussi variées que les âmes humaines. Chacun doit suivre la voie adéquate à sa nature. En
YpULWp O¶KXPDLQ HVW YHQX DX PRQde avec son destin et sa voie est toute tracée. De tout temps
FHUWDLQVRQWGHVDPELWLRQVPRQGDLQHVWDQGLVTXHG¶DXWUHVRQWGHVDPELWLRQVVSLULWXHOOHV/DYRLH
VSLULWXHOOHHVWUpVHUYpHSRXUFHX[TXLVHSOLHQWDX[UqJOHVGHELHQVpDQFH $GDE HWV¶\HQJDJHQW
avec sérieux et sincérité pour accéder en toute sécurité au but recherché.

65  

 
Il faut avoir un guide et le suivre fidèlement avec amour et foi pour éviter les pièges de la voie
qui est longue et dont les étapes sont nombreuses. En ayant de telles dispositions, les aspirants
SHXYHQWWUDYHUVHUODPHUDJLWpHHWOHVPRQWDJQHVVDQVGLIILFXOWpHWPrPHV¶LOVWUDYHUVHQWO¶HQIHULOV
SHXYHQW pWHLQGUH O¶DUGHXU GH VHV IODPPHV SDU OHXU YRORQWp ,OV QH WUpEXFKHURQW pas et ne
rebrousseront pas chemin mais quitteront les créatures pour le créateur et prendront leur envol
pour survoler les méandres de la voie sans se faire piquer par les épines du chemin. Ils peuvent
même contempler la mort comme un être aimé sans nulle crainte car le jour de leur enterrement
sera une joie puisque la porte de la miséricorde sera ouverte pour eux et ils iront rejoindre ceux
TX¶LOVDLPHQW
3DUFRQWUHG¶DXWUHVQHSHXYHQW SDVDFFpGHUj FHVUpDOLWpVHW PrPHV¶LOV V¶HQJDJHQW GDQVODYRLH
WUpEXFKHURQW HW UHEURXVVHURQW FKHPLQ RX V¶pJDUHURQW HQ SOHLQ Mour et se feront piquer par les
pSLQHV GX FKHPLQ ,OV VHURQW GpFRXUDJpV HW GpSULPpV HW Q¶DSSUpFLHURQW SDV OHV GpOLFHV GH OD
spiritualité car ils préfèrent les délices de la mondanité pensant que cela est plus tangible. Or, le
ERQKHXU pWHUQHO QH V¶REWLHQW SDV JUDWXLWHPHQW HW OHV GRQV GLYLQV QH V¶DPDVVHQW SDV FRPPH GHV
FDLOORX[VXUOHFKHPLQ/¶pWHUQLWpV¶REWLHQWSDUOHVpSUHXYHVHWOHVGLIILFXOWpVGHODYLHWHUUHVWUH
4XDQGDX[GRQVGLYLQVLOVQHV¶REWLHQQHQWTX¶HQILQGHSDUFRXUVSDVjVRQGpEXW
Seyidna Youssef a obtenu le pouvoir en Egypte après avoir été jeté dans le puits et ensuite en
SULVRQ&RPPHQWHVSpUHUREWHQLUGHVKRQQHXUVVDQVrWUHFDSDEOHG¶DIIURQWHUOHVSpULOV ? Qui ose
penser que la sagesse divine changera de programme pour lui ? Je vous prie de méditer sur la
femme qui enfante dans la douleur SRXU VRQ ERQKHXU (W O¶RLVHDX TXL VXUYLW VDQV HIIRUW DXFXQ
DORUVTXHO¶DUDLJQpHGpSORLHGHVHIIRUWVpQRUPHVSRXUH[LVWHU/¶HVSULW 5XK GHSXLVTX¶LODpFKRXp
dans la matière ne cesse de faire des efIRUWVHWGHSDVVHUG¶XQpWDWjXQDXWUHSRXUUHWRXUQHUjVHV
RULJLQHVFpOHVWHV,OHQUHJLVWUHWRXWFHTX¶LOYRLWHQWHQGHWVHQWFDUWHOHVWOHGHVVLQGLYLQ/¶KXPDLQ
a été crée dans la peine et il est un perpétuel voyageur qui doit affronter les périls et surmonter les
difficultés. Si, on pouvait communique avec notre esprit (Ruh) et coopérer en toute conscience,
on évitera les écueils de la voie sans difficulté, mais la voie des amoureux et des nostalgiques est
DLQVLIDLWH&HX[TXLYHXOHQW°XYUHUSRXUOHbien de leur communauté ou leur nation doivent être
prêts à tous les sacrifices et sont conscients de ces réalités. Celui qui ne peut pas affronter les
épreuves VHUDWRXMRXUVLPSXLVVDQWHWQ¶HVWSDVIDLWSRXUFHWWHYRLH

66  

 
2.2± Session I I : Soufisme et V aleurs humanistes
Le Modérateur de cette session est le Docteur Khadim MBACKE, Chercheur à l'IFAN Cheikh
Anta Diop de Dakar. Les communications suivantes ont été prononcées :

2. 2.1 - Communication 1 : A l-A mn (sécurité, quiétude) et al-iman (la foi)


dans l'expérience soufie de C heikh A hmad Bamba par Dr Mouhamed Shaqroun,
Professeur de Civilisation islamique, Université de Tunis/Tunisie

Introduction

Dans le Coran ALLAH dit : «Allah promet à ceux qui croient parmi vous, et qui font le bien de
OHXU DFFRUGHU OD UpJHQFH VXU WHUUH FRPPH ,O O¶DYDLW DFFRUGp j FHX[ TXL YRXV RQW SUpFpGpV ,O
raffermira votre religion et VXEVWLWXHUD j YRWUH FUDLQWH XQH VpFXULWp ,OV P¶DGRUHURQW VDQV
association. Ceux qui renient après cela, sont assurément des incroyants ». Nour 55
Il dit aussi : « Ceux qui croient et ne souillent pas leur foi par la transgression, auront la sécurité
(a mn), ce sont eux les bien guidés ª$Q¶DP

La sécurité (amn) et la foi (Iman), sont deux mots arabes qui ont une étymologie commune et un
même champ sémantique ; ils sont en corrélation conceptuelle. Dans les dictionnaires arabes, le
VHQVGHO¶XQHVW : assentiment (tasdiq), qui est aussi (iman). On dit -HFURLVHQ$OODKRXM¶DLIRLHQ
Allah. Je crois en ce que le prophète (psl) a transmis. Je crois en ce que dit un tel. Le sens est :
O¶DVVHQWLPHQWLUUpYRFDEOH

7DQGLVTXHOHVHQVGHO¶DXWUHHVW : la sécurité qui est le contraire de la peur ou la crainte. On dit :


M¶DLVpFXULVpVDSHUVRQQH-HOXL DLGRQQpODVpFXULWpRXO¶DVVXUDQFH

Allah dit : « &HX[TX¶,OJDUDQWLWFRQWUHODIDLPHWTX¶,ODVVXUHFRQWUHODSHXU ». Qoraich 4

&KDTXHIRLVTX¶LOHVWIDLWPHQWLRQGHODIRL LPDQ GDQVOH&RUDQLO\DPHQWLRQGHODVpFXULWpHW


de la paix. Allah dit : « &HX[ TXL RQW OD IRL HW GRQW OHV F°XUV VRQW SDFLILpV SDU OD PpPRUDWLRQ
G¶$OODK&¶HVWSDUODPpPRUDWLRQ'¶$OODKTXHOHVF°XUVVRQWHQSDL[ ª5D¶G

/D IRL ,PDQ  HVW XQ DVVHQWLPHQW YpULGLTXH TXL FRQGXLW j OD SDL[ GX F°XU DORUV TXH OD VpFXULWp
(Amn) esWXQpWDWG¶HVSULWTXLUpVXOWHGHODIRL Le croyant est sécurisé par rapport à sa personne
GDQV FHWWHYLHHW GDQVO¶DX-delà. Il a pleine confiance en son Seigneur auquel il croit, et qui le
SUHQG HQ FKDUJH HW O¶DVVXUH FRQWUH VRQ FRXUURX[ /D FRPPXQDXWp des croyants est sécurisée
par O¶LQWpJULWpGHVHVPHPEUHV6LODIRLHVWXQHODVpFXULWpTXLHQUpVXOWHHVWSOXULHOOHDYHFGHV
LPSOLFDWLRQVGLYHUVHV/HFUR\DQWEpQpILFLHGHVGLVSRVLWLRQVGRQW$OODKO¶DJUDWLILpSRXUTXpULUOH
bonheur terrestre et célesWH,OGRLW°XYUHUDILQG¶REWHQLUOHERQKHXUWRXWHQpWDQWFRQILDQWHQVRQ

67  

 
Seigneur, conscient de son Omnipotence, et de son Omniprésence, assuré de sa bienveillance.
4XDQGOHVFUR\DQWVRQWXQREMHFWLIFRPPXQHWXQGHVVLQXQLTXHTXLpPDQHG¶XQHIRLLQWpJrale, ils
REWLHQGURQW OD SDL[ HW OD VpFXULWp SRXU WRXWH OD FRPPXQDXWp ,O Q \ DXUD SDV G¶LQMXVWLFH QL GH
criminalité et ils seront rassurés pour leur fin. La foi et ses vertus doivent être mises en
application pour obtenir les résultats qui assurent la paix. Les versets coraniques qui explicitent le
sujet sont nombreuses, telles : Baqara 82, 277  $O XPUDQ  DO QLVD¶    DO P¶DLGD
«

Partout dans le Coran, on parle des bonnes actions (Amal salih), qui signifie : ce qui est utile ou
bénéfique et dont la collectivité en bénéficie. Aimer le bien pour son prochain est la substance de
ODIRLTXLDVVXUHODSDL[SRXUWRXV$LQVLRQGpFRXYULUDGDQVODYLHGH.KDGLP5DVVRXOO¶H[HPSOH
SDUIDLWGXFUR\DQWTXL°XYUHSDUODIRLSRXUODVpFXULWpHWODSDLx dans toute situation. Il a enraciné
ODIRLHWOHFRXUDJHGDQVOHF°XUGHVHVGLVFLSOHVTX¶LODH[KRUWpj°XYUHUSRXUOHELHQ6RQEXW
IXWODVDWLVIDFWLRQG¶$OODKHWODSDL[GHWRXV,OUpXVVLWPHUYHLOOHXVHPHQWSXLVTX¶LDVVXUDODSDL[j
sa communauté et SDUGHOjjVRQSD\V,OSHUPLWjVHVPRXULGHVG¶REWHQLUODSDL[GHO¶kPHHWj
son pays la paix sociale et culturelle, et même politique. Son action était exemplaire pour la
cohabitation pacifique et la tolérance entre les différentes tendances religieuses ou confrériques.

Le Cheikh et la paix

/DIRLDGRQQpDX&KHLNKODSDL[WRWDOHTXHFHVRLWGDQVFHPRQGHRXGDQVO¶DXWUHFDULODYDLWXQH
confiance absolue en Allah et en son prophète (psl). Il ignorait superbement la peur et ne
craignait personne en dHKRUV GH VRQ 6HLJQHXU 7HOOH IXW WRXMRXUV O¶DWWLWXGH GHV VDLQWV YHUWXHX[
Abou Talib al Makki dit /¶DSSUpKHQVLRQHVWXQpWDWVSLULWXHOGHOD crainte révérencielle qui est
un aspect de la véritable piété. Cheikh Ahmadou Bamba a fait don de sa vie à Allah pour servir
son prophète (psl). Il orienta ses disciples sur la même voie. Il exprima sa satisfaction et son
contentement qui manifestaient la paix de son âme, en des vers significatifs :

2QP¶DGLWIUpTXHQWHVOHVFRXUVGHVSULQFHV

Tu obtiendras en toute occasion des récompenses profitables

Je répondis : Mon Seigneur me suffit, il est mon garant

(WMHQ¶DLGHSDVVLRQTXHSRXUODVFLHQFHHWODUHOLJLRQ

-HQ¶HVSqUHHW ne crains que mon Seigneur Transcendant

Il pourvoit à mes besoins et Il est ma protection

/DVpFXULWpHVWMXVWHPHQWOHVHQWLPHQWTXLSHUPHWjO¶KXPDLQG¶rWUHOLEUH et indépendant, et qui


OXLSHUPHWGHQHSRLQWV¶KXPLOLHUGDQVODTXrWHGHVEHVRLQVPDWpULHOV Etre satisfait de ce que le
Seigneur a décrété permet au croyant de vivre utilement en propageant la bonne

68  

 
guidance. Affranchi de toute tentation et sans crainte, le Cheikh va réussir ce que les vertueux
de toute époque voulaient réaliser. Il installa la paix et la sécurité dans sa société et affirma la foi
de ses contemporains.

Il dit :

Je suis satisfait de mon Seigneur Transcendant qui a instruit mon être

,OP¶DVXIILWHQWRXW4XHOPHUYHLOOHX[ Seigneur !

'DQV FHV YHUV LO V\QWKpWLVD O¶HQVHLJQHPHQW GH $ERX 7DOLE DO 0HNNL GDQV 4XW DO 4ROXE
FRQFHUQDQW O¶pWDW GH FRQWHQWHPHQW 5LGKD  /H FRQWHQWHPHQW HVW OD MRLH GX F°XU HQ FH TXL
FRQFHUQHWRXWFHTX¶$OODKDGpFUpWp/¶kPHHVWVDWLVIDLWHGDQVWRXVOHVpWDWV/HF°XUHVWSDFLILp
détaché des aléas de la vie. Le croyant est comblé dans tout besoin par la providence de son
Seigneur, et il est ravi de sa bienveillance.

Cet état permet au soufi de vivre le bonheur qui est la quête de tout bienheureux. Tout homme
LQWHOOLJHQWGRLWFKHUFKHUFHWpWDWTXHOTXHVRLWOHFKHPLQHPSUXQWp&¶HVWODVpFXULWpTXLSHUPHWGH
FRQVDFUHUVHVpQHUJLHVj°XYUHUGDQVODYRLHG¶$OODKHWGHVHUYLUO¶KXPDQLWpSDUODVDJHVVHHWOD
bonne guidance.

Cheikh Mohammad Bachir dans la biographie de son père Minan al Baqi al qadim dit : Il
UHYLYLILDODVHUYLWXGHSDUO¶DPRXUTXLOXLSHUPLWGHWUDQVFHQGHUODODVVLWXGHRXOD fatigue dans le
service de son Seigneur. La servitude devint son plaisir et sa joie. il n y avait point de
G¶DFFDEOHPHQW RXGHSUHVVHQWLPHQWRXG¶HVSpUDQFHGDQVVHVDFWLRQVPDLVWRXWHQOXLLQVSLUDLWOD
YpQpUDWLRQHWOHERQKHXUG¶rWUHOH6HUYLWHXU

AinsL &KHLNK $KPDGRX %DPED IXW O¶DS{WUH GH OD SDL[ HW GH OD FRQFRUGH ORLQ GH WRXWH
violence. 6RQDPRXUSRXUOHVKXPDLQVOXLSHUPLWGHVXSSRUWHUWRXWHVOHVLQMXVWLFHVHWG¶°XYUHU
pour la conversion des mécréants et la repentance des pécheurs.

Le Cheikh et la sécurité

Bien que le Cheikh Ahmadou Bamba peut être considéré un Soufi, il opéra un saut qualitatif dans
Tasawuf, car il ne se contenta pas de théoriser mais éduqua ses disciples par O¶HQJDJHPHQW
social et professionnel. Parfois, le Tasawuf était perçu comme une fuite et un abandon des
charges sociales. Le soufi semblait avoir de la compassion pour les pauvres croyants qui peinent
GHYDQW OHV DOpDV GH OD YLH DORUV TX¶LO HVW GpFKDUJp GHV FRQWUDLQWHV VRFLDOHV HW GHV FKDUJHV
matérielles par sa vocation. Pour certains soufis, le salut personnel primait et dans des cas, le
VDOXWGHVFRQIUqUHVpWDLWUHTXLV-XUMDQLGDQV.LWDEDW¶DULIDW dit : Le Tasawuf est la conformité aux
UqJOHV GH ELHQVpDQFH &¶HVW OH IDLW GH FRQQDLWUH OHV UqJOHV UHOLJLHXVHV H[RWpULTXHPHnt et
pVRWpULTXHPHQW DILQ GH OHV PHWWUH HQ DSSOLFDWLRQ FRPSOpPHQWDLUHPHQW HW G¶REWHQLU DLQVL OD
perfection. On dit aussi &¶HVWXQHYRLHGHODUHFWLWXGHRXLOQ\DSRLQWG¶LQDGYHUWDQFH&¶HVWXQH
69  

 
YRLH GH SXULILFDWLRQ GX F°XU TXL pORLJQH GHV LPSHUIHFWLRns humaines et qui permet le
GpWDFKHPHQW GHV FKRVHV WHUUHVWUHV &¶HVW DXVVL XQH SXULILFDWLRQ GH O¶kPH HW XQH DFTXLVLWLRQ GHV
vertus spirituelles. Une initiation aux sciences ésotériques et une réalisation des états
métaphysiques. Donner le bon conseil aux croyants et être sincère dans la réalisation tout en se
FRQIRUPDQWjO¶HQVHLJQHPHQWFRUDQLTXHHWOD tradition prophétique.

On dit aussi  F¶HVW G¶DEDQGRQQHU VHV SURSUHV FKRL[ HW VH FRQIRUPHU j OD YRORQWp GX GLYLQ 'H
surveiller ses instincts et ne pDVJkFKHUVRQGHVWLQ'HQHSRLQWV¶RSSRVHUDX[GHVVHLQVGXPDLWUH
GXGHVWLQ'¶rWUHSXUGDQVVDUHODWLRQDYHFOH6HLJQHXU

Initialement le Taswuf était perçu ainsi, puis les Soufis sortirent de leur isolement et
considérèrent la vie terrestre comme une monture pour la vie céleste. Des ouvrages soufis furent
FRPSRVpVGDQVXQHRSWLTXHTXLHQFRXUDJHO¶LPSOLFDWLRQGDQVODVRFLpWpKXPDLQH ; ce qui opéra un
renouveau dans la voie. Cheikh Ahmad Zarrouk dit dans les règles du tasawuf /HVRXILQ¶DSDVj
être caractérisé par la pauvreté ou par la richesse, mais par la sincérité dans sa quête en ne
FKHUFKDQW TXH OD IDFH G¶$OODK ,O FRQILUPD FHOD SDU OHV SURSRV GH VHV SUpGpFHVVHXUV VRXILV TXL
H[SOLTXqUHQWOH =XKG O¶DVFpWLVPHSDUOHGpWDFKHPHQWGHVFKRVHVWHUUHVWUHV WRXWHQ°XYUDQWSRXU
XQH YLH SOHLQH 0rPH VL OH VRXIL HV HQ SRVVHVVLRQ GH ELHQV PDWpULHOV VRQ F°XU GRLW HQ rWUH
détaché. Les soufis donnent un exemple : le principal Q¶HVW SDV GH WXHU OH VHUSHQW PDLV GH
O¶DWWUDSHU YLYDQW &KHLNK 2PDU 7DOO )RXWL\RX disait  O¶DVFpWLVPH GHV SDUIDLWV Q¶HVW SDV GDQV OD
YDFXLWpGHVPDLQVGHVELHQVWHUUHVWUHVPDLVGDQVODYDFXLWpGXF°XU&HOXLTXLDSSHOOHOHVJHQVj
la religion ne peut pas vivre dans le dénuement.

Le Jihad spirituel

Dans certaines contrées, les soufis ont SRXUWUDGLWLRQG¶H[KRUWHUOHVGLVFLSOHVjO¶LPSOLFDWLRQGDQV


les choses terrestres. Il y avait la voie du Jihad militaire pour O¶LQVWDXUDWLRQGHO¶pWDWLVODPLTXHHW
ODYRLHGXMLKDGVSLULWXHOSRXUO¶pGXFDWLRQGHVkPHV Cette voie était considérée meilleure et plus
exemplaire car elle symbolisait le jihad suprême pour les maitres de la voie. Cheikh Ahmadou
Bamba fit de ses plumes des armes et composa des livres qui furent plus véridiques et plus
efficients que les épées des conquérants. La communauté fondée par le Cheikh fut capable de
faire face au colonialisme et ses desseins avoués et inavoués. Les valeurs prônées par le colon
pWDLHQW XQH PHQDFH H[LVWHQWLHOOH SRXU OD VRFLpWp LVODPLTXH GH O¶pSRTXH FDU WRXW pWDLW UHPLV HQ
FDXVH'HSXLVO¶HQVHLJQHPHQWVFRODLUHLPSRVpSDUOHVIUDQoDLVMXVTX¶DXPRGHGHYLHEDVpVXUOD
consommation des produits importés. Mohammad lamine diop dans son livre « Irwa al Nadim
expliqua que Cheikh Ahmadou Bamba déroula son programme depuis le début en déclarant aux
disciples : celui TXL HVW YHQX SRXU O¶HQVHLJQHPHQW SpGDJRJLTXH XQLTXHPHQW GRLW VDYRLU TX¶LO
SRXUUDWURXYHUFHTX¶LOFKHUFKHSDUWRXWGDQVOHVpFROHVLVODPLTXHVGHFHSD\V Quant à celui qui
veut ce que nous voulons doit obéir aux injonctions et suivre la voie que nous traçons.

70  

 
/HFKHLNKYRXODLWIRQGHUXQHVRFLpWpEDVpVXUODIRLHWODVpFXULWpVXUOHVDYRLUHWO¶DFWLRQ,OPLW
en avant les valeurs de la piété et de la volonté spirituelle. Il haussa le travail au niveau de
O¶DGRUDWLRQ j O¶LQVWDU GHV FRPSDJQRQV GX SURSKqWe (psl) qui travaillaient et adoraient leur
Seigneur. Le Cheikh avait conscience que la sécurité était dans la foi, et que le plus important
pWDLWGHYLYLILHUOHVYDOHXUVLVODPLTXHVHQOHVHQUDFLQDQWGDQVOHF°XUGHVGLVFLSOHV8QHVRFLpWp
islamique doit reposer sur les valeurs exprimées quotidiennement par la collectivité humaine dans
tous les domaines, sociologiques, économiques et théologiques.

Il dit dans Masalik al Jinan :

6DFKHVTXHOHVDYRLUHWO¶DFWLRQVRQWOHVPR\HQVGHODIpOLFLWpDEVROXPHQW

Et il dit aussi FRQFHUQDQWO¶DFWLRQ DPDO HWODUHPLVHFRQILDQWHHQ$OODK WDZDNNXO :

6DFKHVTXHODTXrWHGHODVXEVLVWDQFHQ¶HVWSRLQWFRQWUDGLFWRLUHDYHFODUHPLVHFRQILDQWH ; Ne sois
pas prodigue.

,OWHVXIILWG¶rWUHFRQVFLHQWTXHWRXWFHTXLWHSDUYLent est ta fortune octroyé par le Seigneur des


créatures

La sagesse veut que tu réunis entre O¶DFWLRQHWODUHPLVHUFRQILDQWHPrPHVLWRXVOHVDYLVVXUFH


sujet sont admissibles

3K\VLTXHPHQWWXGRLVDJLUSRXUJDJQHUWDYLHDILQG¶rWUHHQFRQIRUPLWpDYHc la tradition

Mais, spirituellement tu dois te remettre en toute confiance à ton Seigneur qui pourvoie aux
besoins de toutes ses créatures sans exception

Il est le créateur des causes et des choses, aie confiance en sa providence et sois éternellement
vigilant

Toutes les théories politiques, philosophiques ou économiques contemporaines ont soulignés que
OH GpYHORSSHPHQW HW O¶pPDQFLSDWLRQ GH O¶KRPPH QH SHXYHQW VH IDLUH TXH GDQV XQH VRFLpWp TXL
assure à ses membres la sécurité et le travail. Les maux actuels de toutes les sociétés humaines
RQWSRXUFDXVHO¶LQVpFXULWpHWOHFK{PDJHRXO¶DEVHQFHGHVSLULWXDOLWp

La société occidentale a prôné le savoir et la production de la richesse comme moyens de la


félicité. /DVpFXULWpHVWSROLFLqUHHWO¶pWDWGHGURLW protège les intérêts des nantis tout en assurant
le minimum pour les dépourvus. Il manque le partage équitable des richesses nationales et
O¶LQWpUrW LQGLYLGXHO SULPH /D QRWLRQ GH IUDWHUQLWp Q¶D SDV VD SODFH HW FH V\VWqPH DYDQWDJH XQH
minorité qui dispose de tous les pouvoirs au détriment de la majorité absolue des citoyens.
/¶LQMXVWLFHVRFLDOHHWpFRQRPLTXHIDLWGHVIUXVWUpVSDUWRXWHWWUDQVIRUPH la société occidentale et
ses émules en des états capitalistes ou la sécurité est imposée par la police qui lutte contre la
délinquance et le terrorisme. Même, les élites économiques sont dans un désarroi spirituel car
71  

 
OHXU YLH HVW UHPSOLH SDU OHV DUWLILFHV GX OX[H HW GH OD GpEDXFKH /HV ERXUVHV O¶DUPHPHQW OHV
loisirs, le tourisme, la criminalité et la débauche dans les sociétés contemporaines sont les
LQGLFDWHXUVGHODWHQGDQFHDFWXHOOHGHO¶KXPDQLWpTXLV¶pORLJQHGHSOXVHQSOXVGHODIpOLFLWpWDQW
recherchée.

2UO¶KRPPHIXWFUppSRXUUpJLUODWHUUHHWQRQSRXUODFRUURPSUHHWLOGRLWUHQGUHFRPSWHjVRQ
Seigneur. Pour cela, on ne doit pas être surpris par le retour en force du facteur religieux qui doit
être accompagné SDU OHV YHUWXV GH OD FRQQDLVVDQFH DILQ G¶DSSRUWHU j O¶KXPDQLWp OHV VROXWLRQV
LGRLQHV GHYDQW O¶pFKHF GHV VRFLpWpV RFFLGHQWDOHV j DVVXUHU la paix des âmes et la félicité. Le
JRXIIUH pFRQRPLTXH HW VRFLDO HQWUH OHV ULFKHV HW OHV SDXYUHV HVW HQ WUDLQ GH V¶pODUJLU HW OHV
mouvements de révoltes sociales et politiques se généralisent, tandis que la violence et les
conflits se multiplient. Il y a VXUWRXWOHSUREOqPHGHO¶LJQRUDQFHTXLHVWFUXFLDOHWMHQ¶DVVRFLHSDV
O¶LJQRUDQFH j O¶LOOHWWULVPH FDU QH SDV VDYRLU OLUH HW pFULUH V¶LO HVW SUpMXGLFLDEOH G¶XQH IDoRQ RX
G¶XQHDXWUHQHSHXWO¶rWUHTXHSRXUO¶LQGLYLGX2UO¶LJQRUDQFHSUpMXGLFLDEOHjO¶KXPDQLWpHVWFHOOH
TXLGpWRXUQHO¶KXPDLQGHVDYRFDWLRQRULJLQHOOHFHOOHGHUpJLUODWHUUH HWG¶\LQVWDXUHUODSDL[HWOD
félicité. 3XLVGHUpDOLVHUFHTXLDGYLHQWDSUqVFHWWHYLHWHUUHVWUHHWFHTXLQRXVDWWHQGGDQVO¶DX-
delà. La science est impuissaQWHGHYDQWFHVSHUVSHFWLYHVHWVHXOODIRLSHXWDLGHUO¶KXPDLQGDQV
ces sujets trop importants pour être négligés.

Les causes de la réussite de la mission pacificatrice de Khadim Rassoul

(QLQVLVWDQWVXUO¶LQVWUXFWLRQ&KHLNK$KPDGRX%DPED.KDGLP5DVVRXO FRQILUPDO¶LPSRUWDQFH
GXVDYRLUGDQVODIRUPDWLRQHWO¶DFFRPSOLVVHPHQWGXFUR\DQW8QPXVXOPDQVDYDQWHVWPHLOOHXU
TX¶XQ PXVXOPDQ LJQRUDQW HW VXUWRXW SOXV EpQpILTXH SRXU OD FRPPXQDXWp 4XDQG OH PXVXOPDQ
VDLWTXHO¶DFFRPSOLVVHPHQWVHUpDOLVHSDUODSDL[Ll aura intégré le hadith : le musulman est celui
qui préserve les musulmans du mal de ses mains et de sa langue. Le prophète (psl) a dit M¶DLpWp
HQYR\pSRXUDFFRPSOLUOHVP°XUVHWOHVFDUDFWqUHV,OpWDLWO¶H[HPSOHSDUIDLWSRXUOHVKXPDLQVHW
le Cheikh a réalisé cela en se conformant à son modèle en tout point. Il a aussi fait face aux défis
GHVRQ pSRTXHHW DSUpVHUYpVDFRPPXQDXWpGHVGDQJHUVGHO¶RFFLGHQWDOLVDWLRQ ,O LQVLVWDVXUOD
mise en pratique du savoir religieux.

I l dit dans Magalik al niran wa mafatih al jinan :

Tout savant qui ne met pas en application les enseignements

Son savoir est semblable à la poussière dispersée par le vent

Il dit aussi :

Celui qui vous dissuade du savoir

Son avertissement est un égarement certain

72  

 
Dans notre époquHWRXWGpWUDFWHXUGHO¶HQVHLJQHPHQW

Est certainement un imposteur

&DUO¶DFWLRQVDQVFRQQDLVVDQFHHVWUDUHPHQWGpSRXUYXHG¶LPSHUIHFWLRQV

Les résultats de cette orientation sont évidentes dans la culture mouride qui un modèle de la
résistance pacifique au colonialisme et ses desseins. Les mourides ne se laissèrent pas contaminer
SDUO¶RFFLGHQWHWVDVRFLpWpGHFRQVRPPDWLRQ,OV V¶DWWDFKqUHQWjOHXUVYDOHXUVHWIXUHQWMDORX[GH
leur religion et leur tradition. La production littéraire arabe du Cheikh Ahmadou Bamba combla
un vide intellectuel énorme surtout que le colonialisme combattait la langue arabe à laquelle il
voulait substituer la langue française. La prose et la poésie monumentale du Cheikh est
incontestablement un trésor culturel et spirituel inestimable. Les écrits sur le Cheikh composés
par les savants sénégalais et maures sont aussi un patrimoine exceptionnel, tel Minan al Baqi al
Qadim de son fils Cheikh Mohammad Bachir, Irwa al Nadim de Cheikh Mohammaad lamine
Diop, que nous avons SXEOLpVHWFRPPHQWpV,O\DG¶DXWUHVOLYUHVGH&KHLNK0RKDPPDGODPLQH
Diop, de Mustafa Ann, de Cheikh Mahmoud Niang. 'HV SRqPHV G¶,EUDKLP 'LRS 0DFK¶DUL
Cheikh Mbacké Bousso, de Matar MRPRULKDPHGLEQRVPDQIRXWL\RXHWWDQWG¶DXWUHV/HUHFXHLO
des poètes sénégalais dans les éloges du Cheikh al Khadim, et le recueil des poètes mauritaniens
dans les éloges de Khadim Rassoul sont des monuments de la littérature arabe. Il est même
impératif de publier ces ouvrages afin de les étudier dans les universités du monde arabo-
LVODPLTXHHWG¶HQIDLUHSURILWHUOHVpWXGLDQWV7UqVSHXGHSHUVRQQHVFRQQDLVVHQWFHVWUpVRUVGHOD
langue arabe.

L e développement économique du Mouridisme

Le travail dans la foi, quand il est orienté par le savoir assure la sécurité dans la société islamique
et contribue à la paix sociale et spirituelle. Le croyant sera ainsi satisfait de vivre sa foi et
FRQWULEXHjO¶KDUPRQLHJpQpUDOH,OSRXUUDVDWLVIDLUHVHVEHVRLQVHWFHX[GHVDIDPLOOHVDQVSHQFKHU
vers les futilités. Le déséquilibre des sociétés a pour cause les excès en tout genre et les
perversions qui poussent au gaspillage GRQW UpVXOWH O¶LQMXVWLFH VRFLDOH 6HXOH OD IRL DVWUHLQW OHV
humains à être humbles et justes pour accepter la providence divine et ne pas compatir dans les
vanités et futilités. Allah dit : « Ne sois pas orgueilleux dans ta démarche, tu ne pourras pas
fendre la terre, ni rivaliser avec les montagnes ». isra 37. Celui qui médite ce verset sera porté à
user du surplus de ses besoins pour le bien-être de son prochain.

/HVPRXULGHVRQWSXDVVXUHUO¶DXWR-VXIILVDQFHHQWRXVOHVGRPDLQHVG¶DERUGSDUOHODEHXU par la
tempérance et surtout par la solidarité. Ils ont assimilé les enseignements de leur guide qui
refusa tout compromis avec le colonialisme et la société de consommation.

/D GpSHQGDQFH pFRQRPLTXH SRXVVH OHV VRFLpWpV DX[ FRPSURPLV HW DOLqQH O¶LQGpSHQGDQFH
culturelle et politique. La prospérité de la société islamique doit être soumise aux

73  

 
commandements de la religion, qui interdisent les excès. La préservation des richesses naturelles
GRLWLPSpUDWLYHPHQWrWUHUHVSHFWpHFHTXLQ¶HVWSDVOHFDVGHVVRFLpWpVRFFLGHQWDOHVEDVpHVVXUOH
profit DXGpWULPHQWGXERQVHQVHWGHO¶pTXLOLEUHpFRORJLTXHHWVRFLRORJLTXH

L e développement sociologique du Mouridisme

/¶HQF\FORSpGLHGHVVFLHQFHVVRFLDOHVGpILQLW OHGpYHORSSHPHQW DLQVL : Les efforts déployés dans


une société pour les changements fonctionnels et structurels nécessaires au développement social.
&¶HVW DXVVL OD FDSDFLWp GHV LQGLYLGXV j H[SORLWHU DX PD[LPXP les ressources nationales afin
G¶DVVXUHUOHELHQ-être individuel.

1RXVSHQVRQVSOXW{WTXHOHVUHVVRXUFHVG¶XQSHXSOHVRQWQDWXUHOOHVHWVSLULWXHOOHV/HVUHVVRXUFHV
naturelles sont exploitables par le labeur et la technologie, alors que les ressources spirituelles
VRQWH[SORLWDEOHVSDUOHVDYRLUHWODIRLDILQG¶RULHQWHUODVRFLpWpYHUVODIpOLFLWHGHFHPRQGHHWGH
O¶DX-delà.

Le Cheikh al Khadim dit dans Magalik al Niran

,OIDXWDYRLUHQYXHTXDWUHSULQFLSHVORUVGHO¶LQLWLDWLRQ

$ILQG¶REWHQLUODERQQHguidance et la félicité,

'¶DERUGVRUWLUGHO¶pJDUHPHQWSXLVrWUHXWLOHDX[FUpDWXUHV ;

Ensuite revivifier les sciences et mettre en pratique sa connaissance

Etre utile aux créatures, est nécessaire pour une société saine dont les membres sont solidaires.
&¶HVW PrPH OH VHFUHW GX GpYHORSSHPHQW VRFLDO harmonieux, ou pauvre et riche, faible et fort
cohabite en toute concordance. Une justice sociale et une distribution équitable des richesses
nationales permettent la symbiose et prémunissent contre les révoltes.

/H&KHLNKQ¶pWDLWSDVXQH[SHUWGDQVO¶pFRQRPLHRXODSROLWRORJLHQLXQSHQVHXUVWUDWqJHPDLVXQ
Soufi accompli et un saint parfait qui vivait en communion avec son Seigneur et son prophète
(psl). Il était conscient de la faiblesse humaine et de la toute puissance divine et de la véracité de
O¶HQVHLJQHPHQWFRUDQLTXHHWSURSKpWLTXHTX¶LOPHWWDLWHQDSSOLFDWLRQGDQVWRXVOHVDVSHFWVGHOD
YLH,OUHYLYLILDOHVVFLHQFHVLVODPLTXHVHWRUGRQQDOHVERQQHVP°XUVHWODQREOHVVHGXFDUDFWqUH

Le poète Ahmad Chawqi dit :

/HVFLYLOLVDWLRQVVRQWpGLILpHVVXUOHVP°XUVHWOHFDUDFWqUH

Quant la perversion se généralise, la civilisation disparait

$LQVLO¶H[SpULHQFHVRXILHGX&KHLNK Ahmadou Bamba et ses enseignements fut et demeure un


modèle idéal pour une société exemplaire capable de faire face aux défis de son époque. Son
74  

 
combat pacifique assura la paix et la sécurité à son peuple et permit le développement du pays à
tous les niveaux.

6RQSRqWH,EUDKLP0DFK¶DULGLW :

,OUHYLYLILDOHVQREOHVP°XUVDSUqs leur mort

Tous les êtres bénéficièrent de son apport.

2. 2.2 - Communication 2 : Le Soufisme et le « moi », Par le Professeur


Souleymane Bachir Diagne, Philosophe, Université Columbia, New York

Cette contribution examinera la signification du moi humain dans le soufisme. Elle


considérera la voie contemplative qui mène à l'extinction du moi dans l'objet infini de sa
poursuite pour l'opposer à la voie active de l'affirmation du moi dans l'action et le travail. Tout en
soulignant que cette affirmation du moi n'est pas la même chose que l'exaltation de soi et
l'orgueil."

(Q O¶DQ  GH QRWUH qUH V¶HVW SURGXLW HQ %DJGDG TXL pWDLW DORUV OD FDSLWDOH GHV
$EEDVVLGHVXQpYqQHPHQW GRQW OHUHWHQWLVVHPHQWVHUDFRQVLGpUDEOHGDQVO¶KLVWRLUHGXVRXILVPH
&HW pYqQHPHQW pYLGHPPHQW YRXV YRXV HQ GRXWH] F¶HVW OD FRQGDPQDWLRQ j PRUW G¶+XVVHLQ
0DQVRXU $O +DOODM SRXU KpUpVLH &RQGDPQDWLRQ TXL D pWp VXLYLH GH VRQ H[pFXWLRQ HW G¶XQH
H[pFXWLRQSDUWLFXOLqUHPHQWDWURFH3XLVTXHFRPPHYRXVOHVDYH]LOIXWG¶DERUGcrucifié, réduit en
cendres qui furent jetées dans le fleuve Tigre. Ce ne sont pas seulement les circonstances de cette
PRUWDWURFHTXLIRQWOHUHWHQWLVVHPHQWKLVWRULTXHGHODFRQGDPQDWLRQjPRUWG¶$O+DOODMFHTXLHVW
plus important, à méditer dans une rencontre comme la notre où nous réfléchissions sur la
VLJQLILFDWLRQ GX VRXILVPH F¶HVW OD SDUROH OD VLJQLILFDWLRQ GH OD SDUROH TXL O¶D IDLW FRQGDPQHU
&RPPHQRXVOHVDYRQVpJDOHPHQWSDUFHTXHF¶HVWXQSRLQWKLVWRULTXHELHQFRQQXLODYDLWGpFODUp
« anal Haqq » « je suis la Vérité créatrice ª'DQVFHPRWLOQHV¶DJLWVHXOHPHQWGHOXL : au fond
on pourrait dire que cette parole qui est apparue comme une parole paradoxale, comme une
SDUROHGHVFDQGDOHQ¶pWDLWSDVXQLTXHHQVRQJHQUHSXLVTXHG¶DXWUHVVRXILVFHUWDLQVG¶$O+DOODM
DYDLHQW GLW GHV FKRVHV TXL UHYHQDLHQW DX PrPH TXL UHVVHPEODLHQW H[DFWHPHQW j FH TX¶LO DYDLW
déclaré.

Un des ses contemporains particulièrement célèbre Abu Yazid Al Boustami aimait à se


frapper la poitrine en déclarant « Soubhanî » au lieu de « Soubhanallah ». On a dit que la raison
SRXU ODTXHOOH $O +DOODM OXL D pWp FRQGDPQp j PRUW j OD GLIIpUHQFH GHV DXWUHV F¶HVW TX¶LO DYDLW
URPSXODGLVFLSOLQHGHO¶DUFDQHTXLGpILQLVVDLWODPDQLqUHGHYLYUHHWGHSHQVHUGHVVRXILV2QDGLW
éJDOHPHQWTX¶jODGLIIpUHQFHGHVDXWUHVLOQHV¶pWDLWSDVFDFKpGHUULqUHVOHVLYUHVVHVP\VWLTXHVHW
TX¶LODYDLWSURIpUpFHWWHSDUROHHQpWDWGHVREULpWp7RXMRXUVHVW-LOTX¶DSUqVFHWWHGDWHIDWLGLTXHGH
922, ceux qui ont essayé de penser la métaphysique du soufisme, la philosophie qui se révélait
75  

 
GHUULqUHO¶H[SpULHQFHGXVRXILRQWHXjF°XUGHPpGLWHUODVLJQLILFDWLRQGHFHWWHSDUROHFHTXLD
GRQQp OLHX j GHV LQWHUSUpWDWLRQV H[WUrPHPHQW GLYHUVHV 6L QRXV O¶DQDO\VRQV G¶DERUG DYDQW GH
regarder ces interprétations, nous voyons ce qui constitue son caractère paradoxal et scandaleux.
&¶HVWTXHFHWWHSDUROHHVWXQHDIILUPDWLRQTXLFRQMRLQWGDQVXQVHXOHWPrPHJHVWHOHILQLG¶XQH
SDUWHWO¶LQILQLGHO¶DXWUH/H0RLKXPDLQHWO¶(JRGLYLQODFUpDWXUHHWOHFUpDWHur. Comment peut-
on combiner des réalités aussi contradictoires dans une seule et même affirmation? Et bien cette
UHODWLRQHQWUHOH0RLKXPDLQO¶pJRILQLHWO¶LQILQLHVWO¶REMHWGHPDUpIOH[LRQ

,O\DGHX[PDQLqUHVGLIIpUHQWHVG¶HQWHQGUHODSDUROHG¶$O+allaj : « anal haqq ». Il y a une


première manière qui consiste à éliminer le paradoxe. Puisque le paradoxe consiste à dire que
vous ne pouvez pas dans un seul et même souffle, dans une seule et même affirmation
FRQMRLQGUHOHILQLHWO¶LQILQLYRXVDOOH]DORUVGLUHTXHILQDOHPHQWF¶HVWO¶LQILQLWRXWVHXOTXLHVWLFL
SUpVHQW /H ILQL KXPDLQ HVW DEVHQW GDQV FHWWH SDUROH DXWUHPHQW GLW F¶HVW O¶LQILQL OXL-même qui
témoigne de lui-même, qui déclare simplement sa propre infinité. La phrase « annal haqq »
reviendrait alors à dire « Moi Dieu, la vérité créatrice, je suis la Vérité créatrice ». Pour essayer
de comprendre cela, reportons nous à ce passage coranique de la sourate « TA HA », le moment
où le prophète Moïse rencontre Dieu pour la première fois et le perçoit dans le buisson-ardent.
&RPPHQRXVQRXVHQVRXYHQRQVGDQVOH&RUDQF¶HVWO¶XQHGHVIRLVRODFKDKDGDTXLGpILQLWOD
profession de foi des Musulmans est prononcée à la première personne, par Dieu lui-même,
lorsque se présentant à Moïse, Il dit : « ana allah la ilaha ila ana fah boudni » « -HVXLV'LHXLOQ¶\
DSDVG¶DXWUHGLHXTXH0RLDGRUH0RLGRQF ».

&HOD YHXW GLUH TXH VL QRXV SHQVRQV OD SDUROH G¶$O +DOODM VXU OH PRGqOH de cette auto-
présentation de Dieu dans la rencontre avec Moïse, elles diraieQWG¶XQHFHUWDLQHIDoRQODPrPH
chose  'LHX QH IDLVDQW TX¶XWLOLVHU OH YpKLFXOH GX ILQL SRXU GpFODUHU VD SURSUH QDWXUH GH YpULWp
FUpDWULFH (W QRXV DYRQV O¶pTXLYDOHQW GH FHOD GDQV OD ELEOH GH QRV IUqUHV HW V°XUV FKUpWLHQV
puisque comme vous le savez dans la bible Exode 3 : 14, lorsque Moïse rencontre Dieu dans le
buisson-DUGHQW HW TXH 'LHX O¶HQYRLH HQ (J\SWH SRXU HQ IDLUH VRUWLU OH SHXSOH G¶,VUDsO 0RwVH
V¶LQTXLqWHGHVDYRLU : « qui est cet interlocuteur qui lui parle ? » à quoi Dieu lui répond selon la
parole biblique: « Je suis Celui qui suis ». Une phrase extrêmement bizarre, difficile à construire
grammaticalement, puisque Dieu y affirme Lui-même à la première personne son propre être :
« -HVXLV&HOXLTXLVXLVHWORUVTXHOHVHQIDQWVG¶,VUDsOWHGHPDQderont qui Je suis dis leur : « µ-H
VXLV¶P¶HQYRLH ª&¶HVWO¶pTXLYDOHQWGHFHWWHUHQFRQWUHVSLULWXHOOHTXLV¶HIIHFWXHHQWUHOHSURSKqWH
Moïse et Dieu dans la sourate « Ta Ha ªTXHMHYLHQVG¶pYRTXHU3RXUTXRLHVW-ce que je convoque
ces deux scènes, la coranique et la biblique ? Pour mieux revenir à cette chahada et à la
VLJQLILFDWLRQjFHWWHSUHPLqUHPDQLqUHG¶HQWHQGUHODSDUROHG¶$O+DOODMFRPPHpWDQWVLPSOHPHQW
une chahada à la première personne prononcée par Dieu Lui-même.

On trouve parfois chez les sRXILVSRXUPLHX[H[SOLTXHUO¶H[SpULHQFHG¶RVRUWFHWWHSDUROH


OjO¶LGpHVHORQODTXHOOHLOVHUDLWSUHVTXHLPSLHGHSURQRQFHUODFKDKDGD(YLGHPPHQWQRXVDYRQV
O¶KDELWXGHTXHOHVVRXILVWLHQQHQWGHVSURSRVDXVVLSDUDGR[DX[LOVQHYHXOHQWSDVELHQV€UGire
76  

 
TX¶LO QHIDXW SDVSURQRQFHUODFKDKDGDSXLVTXHF¶HVW oDTXL QRXVGpILQLW FRPPHPXVXOPDQ&H
TX¶LOVODLVVHQWHQWHQGUHF¶HVWTXHVLMHGLV : « PRL6RXOH\PDQH%DFKLU'LDJQHM¶DWWHVWHTX¶LOQ¶\D
G¶DXWUHGLHXTXH'LHX ªM¶DLG¶DERUGDWWHVWpPDSURSUHSHUsonne et ma propre existence comme
pWDQWWpPRLQGHO¶XQLFLWpGH'LHX(WTXHVLFHWWHDWWHVWDWLRQpWDLWYpULGLTXHMHQHGHYUDLVPrPH
SDV SRVHU PRQ SURSUH rWUH j F{Wp GH O¶(WUH GRQW M¶DWWHVWH O¶XQLWp HW O¶LQILQLWp  &H VHUDLW XQH
première manière de compreQGUH OD SDUROH G¶$O +DOODM FHOOH TXL FRQVLVWH j GLUH TX¶LO Q¶\ D DX
ERXWGXFRPSWHTX¶XQ6HXO(WUHO¶(WUHLQILQLHWTXHOXLVHXOHVWHQPHVXUHG¶DWWHVWHUGHVDSURSUH
XQLFLWp&HWWHGRFWULQHGXVRXILVPHHVWFHTX¶RQDSSHOOHO¶XQLFLWpGHO¶rWUHPDLVDXVVi le monisme
GH O¶rWUH : « wahdat al woudjoud ». Une expression qui est en général associée à la pensée de
&KHLNK DO DNEDU 0RXK\LGLQH LEQ $UDEL ,O \ DXUDLW XQH GHX[LqPH PDQLqUH G¶HQWHQGUH OD SDUROH
G¶$O+DOODMTXHMHYDLVDERUGHUPDLQWHQDQW

Une deuxième façon de comprendre la même expérience et la même parole « annal haqq », serait
GH GLUH TX¶HQ IDLW OH ILQL Q¶\ HVW SDV QLp FRPPH WHO ,O Q¶\ D SDV XQH QpJDWLRQ GX ILQL TXL QH
ODLVVHUDLW VXEVLVWHU TXH O¶LQILQL $X FRQWUDLUH SOXW{W TXH GH GpFODUHU TXH OH ILni est absorbé dans
O¶RFpDQGHO¶LQILQLWpF¶HVWOHILQLOXL-PrPHTXLHVWHQPHVXUHG¶DEVRUEHUHQOXLHWGHV¶DSSURSULHU
pour ainsi dire, les attributs seigneuriaux : « les siffat rabaniya » seraient, de ce fait, absorbés
dans le Moi fini lui-même. EvidemPHQW F¶HVW XQH LGpH ELHQ SOXV GLIILFLOH SUREDEOHPHQW j
FRQFHYRLUTXHODSUHPLqUHPDQLqUHGHFRPSUHQGUHODSDUROHG¶$O+DOODM4X¶HVW-ce qui rend un tel
paradoxe possible, cette idée selon laquelle un être fini, une créature finie et mortelle pourrait
absorber en elle-PrPHO¶pWHUQLWpHWO¶LQILQLWpGLYLQH(KELHQOHSDUDGR[HHWOHVFDQGDOHV¶HIIDFHQW
si on comprend cela à la lumière de ce que Dieu lui-PrPHQRXVGLWGXVWDWXWHWGXUDQJGHO¶rWUH
KXPDLQTX¶,O DFUpp2QSHXW DORUVFRPSUHQGUHFHWWHFDSDFLWp que le fini peut avoir de recevoir
O¶LQILQLHWGHO¶DEVRUEHUHQTXHOTXHVRUWHHQOXL-même, lorsque nous donnons à toute sa valeur à
O¶LGpHVHORQ ODTXHOOHO¶KRPPHHVW OHOLHXWHQDQW GH'LHXRXOHYLFH-gérant de Dieu, « khalifatoul
lah ». Si nous donnons la meilleure traduction française de « khalifat » qui est le mot
« lieutenant », - QRXVDYRQVWHOOHPHQWO¶KDELWXGHGHSHQVHUODOLHXWHQDQFHGDQVOHFDGUHPLOLWDLUH
TXHQRXVRXEOLRQVO¶pW\PRORJLHGHFHPRW-VLQRXVOHGpFRPSRVRQVGRQFQRXVYR\RQVTX¶LOHVW
composé de deux mots, « lieu » et « tenant ». Le lieutenant est donc « celui qui tient lieu de... »

&¶HVW H[DFWHPHQW FH VHQV TXH O¶RQ WURXYH GDQV © khalifa » qui est traduit comme
« successeur » ou « représentant ». Alors si nous donnons toute sa force à cette notion
de « khilafa ª GH O¶KXPDLQ SDU UDSSRUW j O¶pWHUQLWp HW j O¶LQILQLWp GLYLQH QRXV SRXYRQV GqV ORUV
comprendre comme non scandaleuse et totalement explicable une parole, une locution jaculatoire
comme celle prononcée par Al Hallaj qui semblerait imSOLTXHU OD SRVVLELOLWp SRXU O¶rWUH ILQL HW
PRUWHO G¶DEVRUEHU HQ VRL O¶(WUH LQILQL HW LPPRUWHO (OOH VHUDLW GRQF O¶DIILUPDWLRQ SXUH HW VLPSOH
TXHO¶KRPPHHQWDQWTXHWHOSDVVHLQILQLPHQWO¶KRPPH/¶KRPPHHVWWRXMRXUVGDYDQWDJHTXHOXL-
même. Et ce matin, danVO¶H[FHOOHQWHHWODOXPLQHXVHSUpVHQWDWLRQTX¶LODIDLWHOHGRFWHXU&KHLNK
0RXKDPPDG$FKDRXULDUDSSHOpTXHF¶HVWoDODVLJQLILFDWLRQGHODQRWLRQGH© insan kamil ». Elle
HVW FHWWH LGpH TXH O¶KXPDLQ D j GHYHQLU WRWDO j rWUH SDUDFKHYp HW TXH GqV ORUV TX¶LO HVW XQ rWUH

77  

 
humain parachevé, cet être est capable de Dieu et capable de recevoir ce dépôt dont le coran nous
HQVHLJQH TX¶DXFXQ rWUH DX PRQGH QH SHXW OH SRUWHU 3XLVTXH FH © amana », le dépôt qui a été
FRQILp j O¶KXPDLQ VLJQLILH OD FDSDFLWp GH UHFHYRLr le texte coranique. Nous seuls sommes en
mesure de recevoir le message coranique puisque comme il est dit: «Si Nous avions fait
descendre ce Coran sur une montagne, tu l'aurais vu s'humilier et se fendre par crainte d'Allah. Et
ces paraboles Nous les citons aux gens afin qu'ils réfléchissent. » (Sourate 59 verset 21). La
PRQWDJQH VHUDLW SXOYpULVpH DORUV TXH QRWUH F°XU KXPDLQ IUDJLOH FRPPH LO HVW SRXUWDQW HVW HQ
mesure de devenir « hafisoul quran » de recevoir le Coran et de le garder en lui. Est-ce donc, si
MH VXLV FHWWH GHX[LqPH OHFWXUH GH OD VLJQLILFDWLRQ GH OD SDUROH HW GH OD ORFXWLRQ MDFXODWRLUH G¶$O
+DOODM TX¶LO HVW GDQV OD QDWXUH GX VRXILVPH G¶DIILUPHU OH ILQL G¶DIILUPHU O¶pJR KXPDLQ FRPPH
pWDQW HQ PHVXUH GH UHFHYRLU O¶LQILQLWp GLYLQH ? Je voudrais répondre RXL F¶HVW OD WKqVH TXH MH
VRXWLHQVDYHFEHDXFRXSHWHQSDUWLFXOLHUDYHF0RXKDPPDG,TEDODYHFTXLM¶DLDSSULVjSHQVHUPD
propre religion.

0DLVXQHIRLVTXHM¶DLGLWFHODMHYRXGUDLVDXVVLRSSRVHUjPDSURSUHWKqVHHWjPDSURSUH
affirmation, cette objection que le soufisme, au contraire, consiste non pas à affirmer le soi, le
PRL O¶pJR KXPDLQ PDLV j SDUWLU HQ JXHUUH  FRQWUH OXL 3XLVTXH QRXV DYRQV WRXV j O¶HVSULW FHWWH
parole du Prophète SURQRQFpHGHYDQWVHVFRPSDJQRQVORUVTXHUHYHQXVG¶une expédition militaire,
il leur avait dit : « vous êtes revenus de la petite guerre sainte maintenant il vous faut engager la
grande guerre sainte ; et cette grande guerre est la guerre que vous allez mener contre votre
propre moi, le « jihadou nafs ». Est-FH GRQF j GLUH TX¶LO \ D XQH FRQWUDGLFWLRQ HQWUH G¶XQH SDUW
O¶LGpHTX¶LO IDXWDIILUPHUOHPRLKXPDLQSDUFHTX¶LOHVWNKDOLIGH'LHXSDUFHTX¶LOHVWFDSDEOHGH
UHFHYRLU OH GpS{W GX GLYLQ HW HQ SDUWLFXOLHU OH GpS{W GH OD SDUROH LQILQLH GH 'LHX HW G¶DXWUH part
celle qui consisterait à dire, au contraire: le moi est haïssable, comme a dit Montaigne, le moi est
O¶HQQHPLLOV¶DJLWGHOXLPHQHUODJXHUUH1RXVVDYRQVTXHQRVPDLWUHVVRXILVELHQDLPpVFHX[
que nous aimons à lire et ceux dont nous espérons recevoir la grâce de pouvoir les imiter autant
que nous le pouvons avec nos faibles forces, ont indiqué dans des nomenclatures extrêmement
précises, le chemin que parcourt le moi humain dans la trajectoire qui doit le mener à la rencontre
avec Dieu. Cela été bien balisé et si nous nous reportons non pas à leurs nomenclatures mais à la
QRPHQFODWXUH pWDEOLHSDUOH&RUDQQRXVVDYRQV TX¶LOWURLV GLIIpUHQWHVUpJLRQV GHO¶kPHRXWURLV
GLIIpUHQWV DVSHFWV GH O¶kPH RX WURLV GLIIpUHQWHV PDQLqUHV GH O¶kPH TXL QRXV GpILQissent en tant
TX¶rWUH KXPDLQ/HSUHPLHUHVWFHWDVSHFWGHO¶kPHTXHQRXVWURXYRQVGDQVODVRXUDWH<RXVVRXI
ORUVTXH=RXOD\NDFRQIHVVHVDIDXWHTXDQGHOOHDYRXOXVpGXLUHOH3URSKqWH<RXVRXIHWTX¶HOOHPHW
ce qui lui est arrivé sur le compte du moi « nafs al ammara bi soui ». D

/HGHX[LqPHDVSHFWGHO¶kPHF¶HVWOH© nafs lawama » (Je jure par l'âme qui ne cesse de se


EOkPHU  VRXUDWHYHUVHW (WOHWURLVLqPHDVSHFWHVWO¶kPHDSDLVpH© nafs al moutmaina » qui
a reçu cette adresse :

½ÐWRLkPHDSaisée,

78  

 
28. retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée;

29. entre donc parmi Mes serviteurs,

HWHQWUHGDQV0RQ3DUDGLV¾6RXUDWH

&HWWHkPHGRQFTX¶LOV¶DJLWGHQLHUTXHOOHHVW-elle ? Nous pouvons dire que la manière de


réconcilier les deux aIILUPDWLRQV TXL RQW pWp SRVpHV F¶HVW GH GLUH TXH FH VRQW OHV UpJLRQV
LQIpULHXUHVGXPRLTX¶LOV¶DJLWGHQLHUPDLVTXHODUpJLRQVXSpULHXUHGXPRLHVWH[DOWpHGDQVVD
FDSDFLWpGHGHYHQLUOHGpS{WGX'LYLQ2QDGLWGHFHWWHkPHTX¶HOOHHVWFHOOHTXLVDLWV¶RIIULUjOD
lumière et devenir lumière : « nouroun ala nouri », « lumière sur lumière ». Eh bien cette âme,
F¶HVW FHOOH-OjTX¶LOV¶DJLWG¶DIILUPHUGDQVOHVRXILVPH(WFHWWHkPHQ¶HVW SDVDUURJDQWHHOOHVDLW
G¶DLOOHXUV GHYHQLU HQ TXHOTXH VRUWH XQ SULQFLSH IpPLQLQ 'H FHWWH kPH RQ GLUD TX¶HOOH HVW
IpPLQLQHTX¶HOOHVHGpILQLWFRPPHIpPLQLQHGDQVVDGLVSRQLELOLWpjUHFHYRLUOH'LYLQ3HXW-être
ELHQ TXH OD GLPHQVLRQ GH QRWUH UHOLJLRQ O¶,VODP TXL H[DOWH OH PLHX[ OD IHPPH HW TXL SRVH OH
PLHX[ O¶pJDOLWp RQWRORJLTXH UDGLFDOH HQWUH O¶KRPPH HW OD IHPPH HVW-elle cette dimension
LQWpULHXUH GH O¶,VODP TXL HVW OH VRXILVPH %HDXFRXS WDTXLQDLHQW PpFKDPPHQW 5DELD  $O
Adawiyya, en lui rappelant TX¶RQQ¶DYDLW jamais vu une femme devenir prophète ou faqih etc. A
quoi eOOHUpWRUTXDLWVRXYHQWDYHFODVDJDFLWpHWO¶KXPRXUTXLODFDUDFWpULVDLHQW TX¶RQDYDLWMDPDLV
entendu une femme déclarer « je suis votre seigneur élevé », en citant là la parole coranique
SUrWpH j 3KDUDRQ ORUVTX¶LO D GLW : « anna raboukoumoul ahla ». Ce qX¶HQWHQGDLW 5DELD SDU FHWWH
UpSDUWLHF¶HVWTXHFHWWHDUURJDQFHSURSUHjO¶kPHHVWXQHDUURJDQFHTXLDSSDUWLHQWDXPkOHjFHOXL
qui est fier de sa propre virilité parce que cette parole de Pharaon est la parole par excellence par
ODTXHOOH OH 0DO V¶HVW LQWURGXLW GDQV OH PRQGH SXLVTXH F¶HVW pJDOHPHQW OD SDUROH GH 6DWDQ /HV
FKRVHVDXUDLHQWpWpGLIIpUHQWHVVLFHGHUQLHUV¶pWDLWFRQWHQWpVLPSOHPHQWGHGpVREpLUj'LHXSDUFH
TX¶LO DLPDLW WURS VRQ6HLJQHXU SRXU VH SURVWHUQHU GHYDQW XQ rWUH KXPDLQ  PDLV FH TX¶D Dffirmé
6DWDQ FH QµHVW SDV VRQ DPRXU SRXU 'LHX PDLV F¶HVW SRXU VRQ SURSUH PRL ORUVTX¶LO D GLW VH
comparant à Adam : « MHVXLVPHLOOHXUTXHOXLWXP¶DVFUppjSDUWLUGXIHXHWWXO¶DVFUpHjSDUWLUGH
la terre battue »

&¶HVWGRQFHWFHVHUDPDFRQFOXVLRQDXVRXILVPHGHO¶DQQLKLODWLRQGHVRLDXVRXILVPHGH
OD SHUWH GH VRL DX VRXILVPH GH OD QpJDWLRQ GH O¶pJR KXPDLQ RQ SHXW SDUIDLWHPHQW RSSRVHU XQ
VRXILVPHGHO¶DIILUPDWLRQGHO¶pJRKXPDLQFHVRXILVPHGH0RXKDPPDG,TEDOWRXWHQQ¶pWDQWSDV
en contradLFWLRQDYHFO¶LGpHTX¶LOIDXWPHQHUODJXHUUHjVRQkPHSDUFHTXHO¶kPHHWOHPRLTX¶LO
V¶DJLWG¶DIILUPHUF¶HVWOHPRLTXLVHVDLVLWQRQSDVGDQVXQHVRUWHGHFRQWHPSODWLRQSDVVLYHPDLV
qui se construit, qui toujours est occupé au processus infini de se construire et de se construire
FRPPHXQHYLHVLWXpH KRUVG¶DWWHLQWHGHODPRUW /RUVTXHODPRUWDUULYHHOOHQHYLHQWFKHUFKHU
TXHFHTXLOXLUHVVHPEOH6LOHVRXILHVWHQPHVXUHGHFRQVWUXLUHXQHYLHTXLHVWKRUVG¶DWWHLQWHGH
la mort, eh bien il est déjà immortel en ce monde-FL&¶HVWSRXUFHODTXHOHVVRXILVRQWGLW : « nous
ne mourons pas parce que nous avons une vie qui est au-delà de la mort ». Cette parole exprime
O¶LGpHGHODWUDQVIRUPDWLRQHWUpDOLVDWLRQGHVRLSRXUODFUpDWLRQG¶XQHJRKXPDLQTXL puisse être
79  

 
en face à Dieu comme un miroir et refléter la lumière même du Divin. Devenir « nouroun ala
nour ªF¶HVWGDQVFHWWHWkFKHTXHVHVRQWHQJDJpVGHVPDvWUHVTXHQRXVDLPRQVFRPPHOH&KHLNK
Ahmadou Bamba. Et puisse Dieu nous accorder la grâce de pouvoir être les reflets les plus purs
possibles de cette lumière.

Que la Paix et la Grâce de Dieu soient sur vous.

2. 2.3 - Communication 3 /H7DVDZXIRXO¶DUWGHODVDJHVVH $W¶WDVDZXIZD


VLQD¶DW DO 5XVKG  SDU 'U $EGHOKDPLG DFKDN, Par Professeur à O¶LQVWLWXW GX +DGLWK
hassanien, Rabat/Maroc.

-H YHX[ WRXW G¶DERUG H[SULPHU PD JUDWLWXGH HW PHV UHPHUFLHPHQWV j OD WDULTD 0RXUGL\D HQ OD
SHUVRQQHGHVRQ.KDOLIH6LGL0RNKWDU0EDFNpTX¶$OODKOHSURWqJHHWO¶DVVLVWHHWTX¶,OQRXVIDVVH
bénéficier de son apport et ses bénédictions. Ce colloque unique en son genre auquel j ai
O¶KRQQHXU GH SDUWLFLSHU HW GRQW O¶REMHW WRXUQH DXWRXU GH OD PLVVLRQ SURSKpWLTXH HW GH OD
UHVSRQVDELOLWp GH OD FRPPXQDXWp LVODPLTXH HQYHUV O¶KXPDQLWp Le musulman doit diffuser la
paix, la justice et la miséricorde dans le monde.

Notre thème est : Que peut apporter le Tasawuf pour les musulmans en particulier et pour
O¶KXPDQLWp HQ JpQpUDO ? Surtout dans cette période cruciale où les crises de toute nature se
généralisent et compromettent la paix et la sécurité dans le monde.

Si ma réponse doit être sommaire, je dirais que le programme de Sagesse et de bonne guidance
TXHOH7DVDZXIFKHUFKHjDSSOLTXHUGDQVODVRFLpWpPXVXOPDQHHWGDQVOHVP°XUV individuelles
peut apporter la paix et la sécurité aussi bien dans les relations du croyant avec son Seigneur, que
dans sa relation avec la société et avec la nature.

Je vais approfondir cette approche par des éclaircissements :

- Les règles de bienséance (adab) avec Allah sont le fondement du Tasawuf. La science
Soufi étant entièrement basée sur les règles de bienséance.
- /DVLQFpULWpGDQVODGpPDUFKHHWGDQVO¶DSSOLFDWLRQFDUWKpRULVHUVXUOHVYDOHXUVHVWFKRVH
DLVpHDORUVTXHO¶DSSOLFDWLRQHVWEHDXFRXSSOXVGLIILFLOH
- /¶LQWURGXFWLRQ GHV ERQQHV P°XUV GDQV O¶pGXFDWLRQ VRFLDOH HW UHOLJLHXVH FDU OH 7DVDZXI
SU{QHOHVERQQHVP°XUVHWLQVLVWHDXVVLELHQVXUODUHODWLRQGXFUR\DQWDYHFVRQ6HLJQHXU comme
avec son prochain.
- /¶pFKDQJHFXOWXUHOHWVSLULWuel avec les autres civilisations pour la bonne entente et pour la
paix car les relations humaines se construisent sur OHUHVSHFWGHO¶DXWUH
- La bonne gestion des ressources de la communauté et du pays en créant des projets
viables et durables.
80  

 
- 7RXWHO¶KXPDQLWpGRLWSUHQGUHFRQVFLHQFHTXHOHVUHVVRXUFHVQDWXUHOOHVVRQWXQGpS{WGLYLQ
GDQVOHVPDLQVGHVKXPDLQV&HGpS{WQHGRLWSDVrWUHGLODSLGpSRXUO¶LQWpUrWSHUVRQQHOHWOXFUDWLI
des individus au nom de la société de consommation et du profit.

Ces UHPDUTXHVVRQWWUqVLPSRUWDQWHVHWMHYDLVOHVFODULILHUSDUO¶DVVLVWDQFHG¶$OODK :

/D6DJHVVHHVWOHVRPPHWGHODPDWXULWpLQWHOOHFWXHOOHGHO¶KXPDLQHWHOOHHVWDXVVLOHJDUDQWGHOD
paix et de la sécurité, et protège la société de la FRUUXSWLRQGHVP°XUVHWGHODGpJpQpUHVFHQFH
/¶KRPPHEpQpILTXH HVWXQ6DJHTXL°XYUHSRXUOHELHQ-être de son prochain. . La société idéale
doit avoir des Sages qui orientent les gouvernants dans la gestion du patrimoine public pour le
bien-être des populations. La Sagesse LPSOLTXHGHUHFKHUFKHUWRXMRXUVO¶XWLOLWpSXEOLTXHHWDXVVL
GHVHSHUIHFWLRQQHULQGLYLGXHOOHPHQWDILQG¶rWUHVDJHGDQVVHVGpFLVLRQVHWVHVSULVHVGHSRVLWLRQ

Présentation du tasawuf, de ses méthodes et de ses finalités

Le Taswuf est un programme complet pour une société qui favorise les vertus, car il incite à la
SHUIHFWLRQ GHV P°XUV j O¶pGXFDWLRQ VSLULWXHOOH HW DX UHVSHFW GH OD UHOLJLRQ HW GH OD VRFLpWp
KXPDLQH /¶pGXFDWLRQ VSLULWXHOOH HVW OD GLVFLSOLQH TXL SHUPHW G¶pOHYHU O¶kPH humaine jusqu'à la
sagesse, puis soumet la volonté du serviteur à la volonté du Seigneur.

'DQV FHWWH SpULRGH GH FULVH GHV YDOHXUV QRXV DYRQV EHVRLQ GH O¶HQVHLJQHPHQW 6RXIL FDU
O¶RFFLGHQWDOLVDWLRQGHVP°XUVHW de la culture créent la FRQIXVLRQGDQVO¶LQWellect musulman.

Les principes islamiques et la réalité quotidienne du musulman sont en disharmonie, ce qui


suscite des incompréhensions et met certains en opposition avec leur religion et leur culture. Or,
pour faire la symbiose entre la conscience religieuse et les réalités du monde contemporain, il
IDXWQpFHVVDLUHPHQWDFTXpULUODVDJHVVH&¶HVWMXVWHPHQWODSURSRVLWLRQGXTasawuf.

,O V¶DJLW G¶pWDEOLU XQH UHODWLRQ VDLQH HQWUH OD UHOLJLRQ HW OD YLH VRFLDOH HQWUH O¶pWKLTXH HW OD
politique, et entre les valeurs spirituelles et les réalités économiques. IL faut aussi distinguer la
religiosité ou le formalisme religieux de la spiritualité ou des valeurs religieux. Allah dit dans le
Coran : « Ô vous qui croyez, beaucoup de rabbins et de prêtres abusent de leur condition et
profitent du bien des croyants en toute impunité, et détournent ainsi les gens de la voie divine.
&HX[ TXL WKpVDXULVHQW O¶RU HW O¶DUJHQW HW QH OHV XWLOLVHQW SDV GDQV OH VHUYLFH GLYLQ DXURQW XQ
châtiment terrible ».

Le Coran a prévenu contre deux vices qui ont souvent corrompus les civilisations antérieures.

- /¶XWLOLVDWLRQGXVDFUpSRXUOHSURILWSHUVRQQHOHWDLQVLVRXVWUDLUHO¶DUJHQWGHVFUR\DQWV
- /¶LQQRYDWLRQGDQVOHVSULQFLSHVGHODUHOLJLRQDILQGHGpWRXUQHUOHVFUR\ants des objectifs
tracés par Allah et son prophète (psl).

81  

 
/DUHYLYLILFDWLRQGHODUHOLJLRQHVWQpFHVVDLUHjFKDTXHSpULRGHFRPPH$ERXKDPLG*KD]DOLO¶D
IDLWHQVRQpSRTXHDYHFVRQFKHIG¶°XYUH ,K\DROXPHGGLQH 

Le projet de sagesse du Tasawuf a pour DPELWLRQ GH SHUIHFWLRQQHU OHV P°XUV GDQV XQ EXW
individuel, social et aussi universel.

- /¶HIIRUWVSLULWXHOHWLQWHOOHFWXHOSHUPHWGHV¶pORLJQHU des vices et des tentations DILQG¶rWUH


DSWH j SRUWHU OH GpS{W SURSKpWLTXH GH O¶LVODP HW OH FRPPXQLTXHU j WRXWH O¶KXPDQLWp &HWWH
SHUIHFWLRQVSLULWXHOOHHVWIRQGDPHQWDOHGDQVO¶HVSULWGHODUHOLJLRQ/¶,PDP&KDWLELO¶DGpYHORSSp
GDQV VRQ H[FHOOHQW RXYUDJH VXU OHV ILQDOLWpV GH OD MXULVSUXGHQFH 0DTDVLG DO &KDUL¶D : « La
finalité de la législation islamiqXHHVWGHVRXVWUDLUHOHFUR\DQWUHVSRQVDEOH PXNDOODI jO¶HPSULVH
des passions et de le mettre dans les dispositions de soumission à la volonté de Son Seigneur
YRORQWDLUHPHQWELHQTX¶LOO¶HVWQpFHVVDLUHPHQWSDUODORL
- En travaillant sur la spiritualité du croyant on aboutit au redressement de la société qui
DLQVLREWLHQWO¶KDUPRQLHJUkFHDX[YDOHXUVSDUWDJpHVGHVHVPHPEUHVTXLUHIXVHURQWGpVORUVWRXWH
IRUPHG¶LQMXVWLFHHWG¶LQLTXLWpSUDWLTXpHVSDUOHVJRXYHUQDQWVFRUURPSXV

Le Tasawuf a deV PR\HQV HW GHV PpWKRGHV VSpFLILTXHV TXL IRQW SDUWLH G¶XQ SURJUDPPH JOREDO
GRQWO¶REMHWHVWODSDL[GHO¶kPHLQGLYLGXHOOHHWODSDL[GHODVRFLpWpKXPDLQHFDUHQ°XYUDQWVXUOD
SHUIHFWLRQLQGLYLGXHOOHGXFUR\DQWRQUpSDUHO¶pWDWGHWRXWHODVRFLpWp

Je développe cela en deux points :

-La sagesse et son importance

- /¶DSSRUWGX7DVDZXIGDQVO¶pGXFDWLRQVSLULWXHOOH HWOHVUDSSRUWVGHO¶KXPDLQDYHFOH'LYLQDYHF
VRQSURFKDLQHWDYHFO¶XQLYHUV

L e terme Rushd en lexicographie

Dans la langue arabe La sagesse (Rushd) est synonyme avec bonne guidance, rectitude. Elle a
SRXUFRQWUDLUHO¶pJDUHPHQWHWO¶HUUHXU

Ibn mandhour dit &¶HVWOHIDLWGHWURXYHUODVROXWLRQDGpTXDWHHWODYRLHMXVWH

Ibn Fares dit &¶HVWOHFRQWUDLUHGHO¶pJDUHPHQW

Raghib Isfahani dit &¶HVWODERQQHGLUHFWLRQRXODERQQHJXLGDQFHGDQVOHVDIIDLUHVGHFHPRQGH


HWGHO¶DXGHOj

)LQDOHPHQW LO V¶DJLW GH WRXW FH TXL FRQGXLW DX ELHQ HW j OD ERQQH JXLGDQFH /¶KRPPH HVW VDJH
quand il se conforme à la vérité. Il peut ainsi guider son prochain car il est lui-même bien guidé.

82  

 
L e terme rushd dans le Coran

Dans le Coran, le terme (Rushd) fut employé 19 fois. Il a pour significations : la foi (Iman) et
O¶XQLFLWpGLYLQH 7DZKLG 

« 3RLQWGHFRQWUDLQWHGDQVODUHOLJLRQODYpULWp 5XVKG V¶HVWGLVWLQJXpGHO¶HUUHXU » sourate baqara


50

La vérité ici signifie la foi (Iman) HW O¶XQLFLWp GLYLQH 7DZKLG  © On a écouté un Coran
PLUDFXOHX[TXLFRQGXLWjODIRLHWjO¶XQLFLWpGLYLQH 5XVKG » sourate Jinn 10

&¶HVWDLQVLTXHO¶DH[SOLTXp=DPDNKFKDUi dans son commentaire (Al Khuchaf)

Dans sourate Baqara 183 : « 4X¶LOV UpSRQGHQW j PRQ DSSHO HW TX¶LOV FURLHQW HQ PRL DILQ TX¶LOV
soient vertueux et bien guidés ».

Dans sourate al Kahf 10 : « Quand les jeunes se refugièrent dans la grotte, ils dirent Ô Seigneur
accorde nous par ta grâce une miséricorde et fais de nous des vertueux bien guidés »

,O\DDXVVLOHVHQVGHO¶XWLOLWpHWGXELHQ :

Dans sourate Jinn 56 : « On ne sait pas si ceux qui sont sur terre sont punis, où si leur Seigneur a
voulu leur bien »

Il y a aussi le sens de Vérité dans sourate Ghafir 57 : « Celui qui croit a dit : suivez-moi, je vous
conduirais à la vérité »

Dans sourate Hud 58 : « Pharaon n a point choisi la bonne guidance ».

La vérité et la bonne décision comme dans le Coran sourate jin 57, 58 : « celui qui a la foi dit : Ô
mon peuple suivez-moi je vous conduirais ver la voie de la vérité » « et la décision de pharaon
ne fuit point sage ».

Il y a aussi le sens de la bonne gestion comme dont sourate Nissa 59 « éprouvez les orphelins
MXVTX¶jFHTX¶LOVDWWHLJQHQWO¶kJHGHODSXEHUWpHWVLYRXVYR\H]TX¶LOVVRQWPDWXUHVGRQQH] leur
leurs bien. ª/HVHQVLFLHVWFHOXLGHVMXULVWHVLOVLJQLILHOHFRQWUDLUHGHO¶LUUHVSRQVDELOLWp

Tous ces sens utilisés dans le Coran signifient la rectitude, la bonne guidance et la bonne
décision.

4XDQGjO¶XVDJHFRPPXQGHFHPRWLOVLJQLILHODSOpQLWXGHGHODUDLVRQRXODSHUIHFWLRQVSLULWXHOOH
de façon à ce que le croyant connaisse le bien et le mal par lui-même.

Les maitres de la sagesse et de la SKLORVRSKLHH[SOLTXHQWTXHODSOpQLWXGHGHO¶LQWHOOHFWKXPDLQHVW


dans la raison critique qui suscite une connaissance sans cesse renouvelée. En G¶DXWUHV termes,
83  

 
F¶HVW O¶XWLOLVDWLRQ RSWLPDOH GH OD raison afin de ne point laisser place au doute dans les sujets
G¶pWXGHV en écartant les absurdités et les hypothèses non fondées.

/D VDJHVVH FRQFHUQH WRXV OHV DVSHFWV GH OD YLH HW PrPH O¶DWWLWXGH LQWHUQH HW H[WHUQH GH O¶rWUH
KXPDLQ LO V¶DJLW DXVVL bien de la théorie que de la pratique. Le croyant doit être bien guidé et
vertueux dans tous les aspects de sa vie car celui qui est dépourvu de sagesse ne fait que
FRPPHWWUHGHVHUUHXUVHWV¶pJDUH

Allah mentionne cela dans le Coran «sourate araf 146 : « je vais éloigner de mes signes ceux qui
sont orgueilleux et TXLVDQVUDLVRQVHJORULILHQWHWPrPHV¶LOVYRLHQWPHVVLJQHV Q¶\FURLHQWSDVHW
V¶LOV YRLHQW la voie de la sagesse ne V¶\ engagent pas et V¶LOV YRLHQW OD YRLH GH O¶HUUHXU LOs V¶\
engagent FHFLSDUFHTX¶LOVVRQWLQFUpGXOHVVHGpWRXUQHQWGHPHVVLJQHV »

Ces versets font une description éloquente de ceux qui sont GpSRXUYXHVGHVDJHVVHTX¶LOVVRLHQW
des individus ou des collectivités. Mais quelle est la vérité de la sagesse,

&HVYHUVHWVROHVMLQQVpWDLHQWSHUSOH[HVVXUOHFDVGHVKXPDLQVV¶DSSOLTXHQW-ils sur les croyants :


« On ne sait pas si ceux qui sont sur terre sont punis, où si leur Seigneur a voulu leur bien ».

Je me suis toujours demandé pourquoi les jinns sont préoccupés par la sagesse car Allah nous a
instruit sur le cas de ceux qui ont répondu à son appel : « On a écouté un Coran miraculeux qui
FRQGXLWjODIRLHWjO¶XQLFLWpGLYLQH 5XVKG » sourate Jinn 10.

Les Jinns en écoutant le Coran pour la première fois ont été sensibilises dans le fond de leurs
F°XUVDXSRLQWGHGLUH : »Quand on a écouté la bonne nouvelle, on a cru. Celui qui croit en son
Seigneur Q¶DSDVFUDLQGUHO¶pJDUHPHQWRXODSHUGLWLRQ3DUPLQRXVLO\DGHVPXVXOPDQV VRXPLV
jODYRORQWpGX6HLJQHXU HWG¶DXWUHVTXLVRQWUHEHOOHV&HX[TXLVHVRQWVRXPLVRQWRSWpVSRXUOD
sagesse (la bonne direction) ».

Le Coran dans ces finalités ne conduit il pas a la sagesse "(W/¶LVODPGDQVVDVXEVWDQFHQHVHUDLW-


il pas le choix de la sagesse ?

6XLYUHODYRLHMXVWHHWYpULGLTXHHVWILQDOHPHQWOHIDLWGHVHVRXPHWWUHjODYRORQWpG¶$OODKHWF¶HVW
FHOD OD ERQQH GLUHFWLRQ HW OD VDJHVVH 3RXU FHOD OH PHLOOHXU PR\HQ HVW FHOXL G¶DFTXpULU OD
FRQQDLVVDQFHHWOHVYHUWXVDILQG¶REWHQLUODVDJHVVH

Des fois, les interrogations sont plus éloquentes que les réponses, comme le fait de réfléchir sur la
sagesse, ses préliminaires et ses conditions "$LQVL$OODKQRXVGRQQHO¶H[HPSOHGHVRQSURSKqWH
Ibrahim (Abraham) psl, qui dit dans sourate Al Anbiya 51 : « On a accordé à Abraham la
plénitude de sa conscience (rushdahu) et on était informé de son cas ».

,E$WDµ$OODKDGLW O¶LQWHOOHFWLRQHVWOHIODPEHDXGXF°XU Si la réflexion cesse la clarté disparait.

84  

 
4XDQW RQ HVW LPSXLVVDQW GHYDQW XQ SUREOqPH HW RQ Q¶DUULYH SDV j OD UpVRXGUH nous constatons
notre incompétence ou notre maque de maitrise du sujet. Francis Bacon disait : la cause de la
GpJpQpUHVFHQFHHWGHO¶pJDUHPHQWGHVKXPDLQVUpVLGH GDQVOHIDLWGHV¶LPSOLTXHUGDQVGHVVXMHWV
et des croyances erronées.

Dans sourate al araf 146 : « « je vais éloigner de mes signes ceux qui sont orgueilleux et qui sans
raison VHJORULILHQWHWPrPHV¶LOVYRLHQWPHVVLJQHV Q¶\FURLHQWSDVHWV¶LOYRLHQW la voie de la
VDJHVVHQHV¶ \HQJDJHQWSDVLOV¶LOYRLHQW ODYRLHGHO¶HUUHXULOV¶\HQJDJHQW  FHFLSDUFHTX¶LOV
sont incrédules se détournent de mes signes », LO\DXQHLQGLFDWLRQVXUOHIDLWTXHO¶RUJXHLOHVWOD
SULQFLSDOHFDXVHGHO¶pJDUHPHQW &HYLFHHVW IDWDO FDUO¶KXPDLQ VHIDLWRUJXHLOOHX[VDQVUDLVRQ
SDULJQRUDQFHRXSDULQFRQVFLHQFH(WV¶LOYRLWOHVVLJQHVGLYLQVHWOHVUHMHWWHF¶HVWSDUFHTX¶LOQ¶D
pas été assisté par la bienveillance divine. Le prophète psl disait : Seigneur, je te demande de
P¶DVVLVWHUDILQTXHMHVRLVFRQVWDQWGDQVPDIRLHWLPPXDEOHGDQVODERQQHGLUHFWLRQ

'H OD RQ DIILUPH TXH OH IDLW G¶rWUH FRQVWDQW HW LPPXDEOH dans la voie de la sagesse est aussi
LPSRUWDQW TXH GH FRQQDLWUH OD ERQQH GLUHFWLRQ ,O V¶DJLW G¶XQ FKDOOHQJH GDQJHUHX[ SRXU
O¶KXPDLQ surtout pour les contemporains qui doivent méditer ces indications qui sont en
contradiction flagrante avec la culture dominante qui prône des valeurs totalement différentes
EDVpHVVXUO¶DUJHQWOHSRXYRLUO¶DVFHQVLRQVRFLDOHOHOX[HODGpSUDYDWLRQODYLROHQFHHWWRXWHV
les formes de O¶LQGLYLGXDOLVPH0DOKHXUHXVHPHQWO¶KXPDQLWpPDOJUpOHVSURJUqVGHODVFLHQFHHW
de la WHFKQRORJLHQHFHVVHGHV¶HQIRQFHUGDQVOHVWULYLDOLWpV Les réalités matérielles priment dans
les sociétés contemporaines DXSRLQWTXHO¶DXWHXU américain du livre « la folie du pouvoir » dit :
Nous avons pu marcher sur le sol de la lune, mais nos piedV V¶HQIRQFHQW G¶DYDQWDJH GDQV OHV
marécages de la terre.

6LRQYHXWTXHOH7DVDZXIUHPSOLVVHVRQU{OHGDQVO¶pGXFDWLRQGHVkPHVHWODERQQHRULHQWDWLRQ
RQ GRLW VH OLEpUHU GH O¶DWWUDFWLRQ GH OD FXOWXUH RFFLGHQWDOH HW GHV YDOHXUV TX¶HOOH SU{QH /¶rWUH
humain est devenu faible, incapable de résister devant les tentations et les suggestions, et surtout
QHFKHUFKHSOXVjVHSDUIDLUHPDLVVXUWRXWSUpIqUHOHFRQIRUPLVPHjO¶HIIRUW

-HFRQFOXVHWH[SRVpSDUGHX[YHUVHWVTXLVRQWO¶DQQRQFHGXSURJUDPPHGH la bonne guidance.

Sourate al baqara 186 « 6LPHVVHUYLWHXUVW¶LQWHUURJHQWjPRQSURSRVMHVXLVSURFKHHWMHUpSRQGV


j OD VROOLFLWDWLRQ GH FHOXL TXL P¶LQYRTXH 4X¶LOV UpSRQGHQW j PRQ DSSHO et croient en Moi afin
TX¶LOVREWLHQQHQWODVDJHVVH ».

Sourate al Hujurat 7 : « VDFKH]TXHSDUPLYRXVLO\DOHSURSKqWHG¶$OODKTXLV¶LOYRXVREpLWGDQV


certaines choses, vous serez fatigués. Mais Allah D RUQp YRV F°XUV DYHF OD IRL HW YRXV D IDLW
GpWHVWHUODPpFUpDQFHOHOLEHUWLQDJHHWODGpVREpLVVDQFHF¶HVWDLQVLTXe sont les sages ».

Le projet de la bonne guidance et la sagesse doit reposer sur deux piliers :


85  

 
-5pSRQGUHjO¶DSSHOGLYLQ : ceci est le lien indéfectible et la porte de toutes les vertus et valeurs,
Allah dit : « 4X¶LOV UpSRQGHQW j PRQ DSSHO HW TX¶LOV FURient en Moi DILQ TX¶LOV REWLHQQHQW OD
sagesse». ,OQ\DSRLQWGHVDOXWSRXUFHX[TXLQHUpSRQGHQWHWV¶HQRUJXHLOOLVVHQWVDQVUDLVRQ

- Se conformer à la Sunna WRXWHODVDJHVVHHVWGDQVOD6XQQDG¶RODQpFHVVLWpGHODFRQIRUPLWp


Allah dit : « Sachez TX¶LO \ D SDUPL YRXV OH SURSKqWH G¶$OODK » qui vous instruit et vous guide
vers le salut et la sagesse.

Ainsi nous voyons que dans ces versets, il y a le programme de la bonne guidance et de la
VDJHVVHjODTXHOOHO¶KXPDLQGRLWDVSLUHUSRXUVRQERQKHXUWHUrestre et céleste.

86  

 
2.3± Session I I I : Soufisme et Politique
Le Modérateur de cette session est Sidy Lamine NIASS, Islamologue et Directeur Général
Groupe Walfadji,

6SpFLILTXHPHQWSRXUFHWWHVHVVLRQLO \DHXXQSUpDPEXOHSURQRQFpSDUOH0RGpUDWHXUTXHO¶on
relate ci-dessous :

Louange à Dieu, pour ses bienfaits éternels, qui dit dans le saint Coran : «Parmi les croyants,
des hommes qui ont rempli pleinement leurs engagements envers L ui, parmi ceux qui sont
GpMj pWHLQWV HW G¶DXWUHV TXL VRQW DFWLIV GDQV XQH DWWHQWH SHUPDQHQWH HW TXL Q¶RQW MDPDLV
travesti.»

Prière et salut soient sur celui qui a été donné comme un don divin et comme une clémence pour
O¶XQLYHUVDILQG¶DSSRUWHUODERQQHQRXYHOOHHWG¶DOHUWHUWRXWHQLQYLWDQWDXFKHPLQGXVDOXWDYHFOD
permissioQGLYLQHHWWRXWHQpFODLUDQWVXUOHGURLWFKHPLQOHPHVVDJHUG¶$OODKTXLGLVDLWTXH©les
érudits sont les héritiers des prophètes».

&¶HVWXQJUDQGKRQQHXUHWXQSODLVLULQFRPPHQVXUDEOHSRXUPRLGHPRGpUHUFHWWHVHFWLRQVRXVOH
thème du soufisme et la politique, à ce colloque qui prépare le Magal 2012 consacré à la
FRPPpPRUDWLRQGHO¶DQQLYHUVDLUHGHO¶H[LOSOHLQG¶HQVHLJQHPHQWVHIIHFWXpSDUOHVDLQWKRPPHOH
pôle, le serviteur du prophète (PSL), le Cheikh Ahmad, fils de Mohammed fils de Habibullah
MBACKE, Que Dieu le tout puissant le comble de sa grâce et nous gratifie de ses bienfaits.

1RXVQHSRXYRQVTXHQRXVUpMRXLUG¶XQHWHOOHLQLWLDWLYHFDUXQVXMHWHVWG¶DXWDQWLPSRUWDQWSRXUOD
vie active de la communauté, que ce colloque intervient à son heure. Il se tient, en effet, à un
moment de perte de valeurs et de repère où politique et soufisme sont considérés comme
antagonistes. Cela mériterait une réflexion approfondie et des études avérées dans le seul but
G¶DSSRUWHUGHVUpSRQVHVFRQFUqWHVHWSHUWLQHQtes qui permettront de rassembler deux concepts liés
pour toujours.

Vous avez mesuré la portée de ce colloque en invitant ces éminents professeurs connus de par le
monde pour leur savoir intarissable par lequel ils nous éclaireront durant leurs exposés sous le
thème Soufisme et crise mondiale contemporaine. Je voudrais, au passage, introduire cette
VHFWLRQSDUXQPRGHVWHSUpDPEXOHGRQWOHEXWHVWG¶RXYULUO¶DSSpWLWGHVXQVHWGHVDXWUHVSDUPLOHV
DVVLVWDQWV(WYXOHFRQWH[WHQRXVQRXVH[FXVRQVG¶DYDQFHSRur la longueur de notre introduction
qui ne se justifie que par notre ambition de répondre aux exigences et soucis suscités par le sujet
qui mérite des explications. Aussi commencerons-nous par dire que lHPRQGHG¶DXMRXUG¶KXL HVW
un monde où le désespoir, OHVHUUHPHQWVHWODSHUGLWLRQU\WKPHQWODYLH/¶KRPPHQHYLWTXHSRXU
PDQJHU HW VDWLVIDLUH VHV GpVLUV OH PDWpULHO HVW GHYHQX XQ YHDX G¶RU TX¶RQ DGRUH OHV PR\HQV
constituent une fin en soi. Dans ce monde, la religion est devenue politique et la politique élevée

87  

 
DXUDQJGHUHOLJLRQ/¶H[WUpPLVPHHWO¶LQWROpUDQFHVRQWGHYHQXVEDQDOHVDXSRLQWTXHVHUpSDQGOH
WHUURULVPH&RUUpODWLYHPHQWVHGpYHORSSHO¶REVFXUDQWLVPHTXLOHVRXV-tend.

'DQVFHPRQGHODUHOLJLRQQ¶HVWSOXVFHOOHFRQQXHGHQRVUHSqUHVHWGHQRs références. Elle est


GHYHQXH XQH HQYHORSSH VDQV FRQVLVWDQFH 6RQQH DORUV O¶KHXUH GH O¶LPSpUDWLI UHWRXU j OD FDVH GH
départ, au monde des valeurs et au droit chemin, aux valeurs sûres que nul ne saurait négliger.
7HO HVW OH FUL TXL V¶pOqYH GDQV FHWWH YDOOée du silence. Avec le soufisme authentique naîtra une
YRLHTXLUHQIHUPHOHVVROXWLRQVDX[TXHVWLRQQHPHQWVGHO¶KXPDQLWp'DQVFHWWHYRLHOHVLGROHV
GLVSDUDLVVHQWO¶pTXLOLEUHGXPRQGHVHUpWDEOLWHWODFUpDWXUHVHMHWWHHQWUHOHVPDLQVGX&UpDWHXU
PendDQW TXHO¶DLUVHSXULILHODYLHGHYLHQW DJUpDEOHHW OHVP\WKHVV¶HIIRQGUHQW $LQVLO¶KRPPH
trouve toute sa plénitude et peut alors se tenir debout sur ses deux pieds et voir avec ses deux
yeux.

A travers ce rapide survol, nous cherchons à dégager un guide pratique pour un message clair. Un
message de valeur qui apportera un éclairage à la jeunesse et aux hommes de pensée. Un message
qui sera une voix des peuples opprimés de toute notre planète. Le soufisme est, en fait, la vie dans
sa globalité et va rassembler ce qui a été séparé, faire en sorte que la mondialisation et la
FRPPXQLFDWLRQ VRLHQW SRUWHXVHV G¶XQ HVSDFH REMHFWLI ,O VHUD RXYHUW SRXU LQWpJUHU HW DVVRFLHU
O¶HVSULWHWODPDWLqUHHWSHXWIRUPHUOHVKRPPHVjXQGHJUpWUqVpOHYpGHVYDOHXUVGHODIoi, de la
VLQFpULWpGHO¶KRQQrWHWpGHODFOpPHQFHGHODMXVWLFHGHODOLEHUWpGHO¶HIILFDFLWpGDQVOHWUDYDLO
Dès lors, le rêve de tous les hommes sur terre devient réalité vivante.

/H VRXILVPH V¶pWDLW GpILQL XQ GRPDLQH GH SOpQLWXGH IDFH DX SKpQRPqQH GH O¶LOOXVLRQ TXL  DYDLW
droit de cité et où, dans les mosquées, les églises, les synagogues, les bois sacrés, il se passait
EHDXFRXS GH IDLWV FRQWUDLUHV j OD UHOLJLRQ HW R O¶REVFXUDQWLVPH V¶pWDLW ODUJHPHQW UpSDQGX GH
même que le charlatanisme. Chacun SUpWHQGDQWrWUHOHPHLOOHXUMXVTX¶jFHTXHODOXPLqUHMDLOOLVVH
de cet obscurantisme. Le soufisme est ainsi devenu la voie des hommes, sur laquelle se sont
précipités de grands hommes de connaissance et de piété. La volonté divine viendra renforcer
cette longue marche de millions de personnes, du Sahara vers la Savane. Son symbole fut le
FKDSHOHW HW O¶pSpH ,O HVW GHYHQX OD FUXH TXL YD ILQL SDU HPEUDVVHU WRXWH OD WHUUH FRPPH OH
FRQILUPH O¶pFULYDLQ (O +DGML 0RKDPHG .KDOLID 1LDVVH GH .DRODFN 6pQpJDO  GDQV Von livre
intitulé Souffre rouge :

«La cru de notre maître a embrassé toute la terre, les citadins comme les villageois.
«En Chine comme en Inde, on trouve les secrets de cette voie mystique avec des hommes de
valeur qui font la fierté de tout être.
«En OULHQWFRPPHHQ2FFLGHQWGDQVOHQRXYHDXPRQGHjWUDYHUVO¶KRUL]RQFRPPHODOXPLqUH
du soleil et celle de la lune qui éclaire tout sur son passage,

88  

 
«Ces hommes ne se distinguent guère par leur accoutrement mais plutôt par leur humilité. Et
F¶HVWDLQVLTX¶LOVSDVVHQWLQDSHUoXV
©/HSRXYRLUWHUUHVWUHFRPPHOHSRXYRLUFpOHVWHRQWGpIHUOpVXUFHWWHYRLHHWODWHUUHV¶HVWUHPSOLH
de son cru parfumé.
©(W TXLFRQTXHHPEUDVVHFHFUX \ JDJQHHQGURLWXUHWHOTX¶XQF°XUVHSXULILHDSUqVXQPRPHQW
G¶DYHXJOHPHQW Le sHLJQHXUDUHYLYLILpOHVF°XUVVDQVYLHDXSRLQWTX¶LOQ¶\HQDLWSOXVª
Le soufisme compte de grands hommes de valeur ainsi que des villes de référence. Ce qui lui
FRQIqUHXQFDUDFWqUHXQLYHUVHO4XHOOHUHVVHPEODQFHHQWUHODQXLWG¶KLHUHWFHOOHG¶DXMRXUG¶hui ?
/¶KLVWRLUHVHUpSqWHGDQVXQSUHPLHUWHPSVVRXVIRUPHGHWUDJpGLHHWGDQVXQVHFRQGWHPSVVRXV
forme de comédie.

8QHWHPSrWHGDQVXQYHUUHG¶HDX

/H PRQGH G¶DXMRXUG¶KXL HQ GpSHUGLWLRQ FKHUFKH XQH ERXpH GH VDXYHWDJH GDQV XQH PHU DJLWpH
Certains RQWFUXSHQGDQWXQWHPSVjODVROXWLRQPDWpULDOLVWHFRQYDLQFXVTX¶LOVRQWpWpTXHOHXU
DQJRLVVH D SRXU RULJLQH OD SDXYUHWp $LQVL OHV SKLORVRSKHV VH VRQW OLYUpV j XQ MHX G¶HQIDQWV HW
GHUULqUHHX[O¶KXPDQLWpVHSHUG/HVGLVFRXUVVXUOHPDWpULDOLVPHGialectique et le matérialisme
historique avec les thèses de Karl Marx ont pris de la place : on parle alors de société primitive,
GHIpRGDOLWpG¶LPSpULDOLVPHVWDGHVXSUrPHGXFDSLWDOLVPHRXGHVRFLDOLVPHSUHPLqUHpWDSHYHUV
le communisme. On répandra de telles thèses à travers la presse et La Pravda sera leur fer de
ODQFH'HVLPDJHVHWGHVYRL[RQWIDLWOHWRXUGHODSODQqWHG¶(VWHQ2XHVWMXVTX¶jFHTXHFHUWDLQV
DLHQWFUXDSHUFHYRLUGHO¶HDXOjRLOQ¶\DYDLWTXHPLUDJH(WO¶RQV¶HQHVWWUqVYLWH, rendu compte
TXDQG OH PXU GH %HUOLQ V¶HVW pFURXOp /H SXLVVDQW HPSLUH VRYLpWLTXH V¶HIIRQGUD DLQVL TXH OD
muraille de Chine, tout comme les forêts de Cuba.

2Q SDUOHUD DORUV GH OD ILQ GH O¶KLVWRLUH FDU OH PRQGH Q¶HVW SOXV ELSRODLUH /H FDSLWDOLVPH
triomphant de se vanter devant toutes les civilisations, comme étant la brique avec laquelle la
FRQVWUXFWLRQ GX WHPSOH VHUD DFFRPSOLH $LQVL V¶HVW UpSDQGXH OD FKDQVRQ GH OD GpPRFUDWLH GX
libéralisme ainsi que des antivaleurs et autres pratiques immorales afin que le monde devienne un
PRQGHVDQVYDOHXUROHVPR\HQVHWODILQHQVRLFRPSWHQWSOXVTXHWRXWHWRLOQ¶H[LVWHGHORLV
TXHFHOOHGHO¶RIIUHHWGHODGHPDQGH/HPDWpULDOLVPHUHYLHQWDORUVVRXVXQHDXWUHIRUPHDYHFOH
SKpQRPqQH G¶XQH QRXYHOOH SUHVVH et des moyens de communication, à travers le satellite qui a
WUDQVIRUPp O¶XQLYHUV HQ XQ YLOODJH SODQpWDLUH GDQV OHTXHO OHV YRL[ OHV LPDJHV HW OHV pFULWV
voguent à travers le net, le «sat» et le «cel». Alors, une presse de propagande va chercher à
tranVIRUPHU O¶KRPPH HQ XQ DQLPDO DYLGH GH SURLH HW OD PDWLqUH HQ XQH EDQGH GHVVLQpH
attractive. 6HXOHPHQWO¶$PpULTXHTXLSUpWHQGDLWPDvWULVHUODVpFXULWpHWOHELHQrWUHHWTXLV¶pWDLW
érigée en un gendarme capable de sécuriser le monde, a vu les murs de MaQKDWWDQV¶HIIRQGUHU
VRXVVHVSLHGVDLQVLTXHFHX[GX3HQWDJRQHHWGHOD0DLVRQEODQFKH'HSXLVORUVO¶2FFLGHQWD
peur !

89  

 
/¶LUUpYHUVLELOLWpGHO¶DXURUH

)DFHjWRXWFHODXQIORXV¶HVWLQFUXVWpHQWUHWHQXSDUOHIDLWTXHODVROXWLRQHVWWURSYLVLEOH&¶Hst
ce qui reste des valeurs et du bien qui constitue le secret sublime et le trésor caché.

$XGpEXWGHODFUpDWXUHODYLHWRXUQDLWDXWRXUGHODUHFKHUFKHGHVYDOHXUVFDFKpHV(WF¶HVWDLQVL
TXHGpEXWDODWUDJpGLHGHO¶KLVWRLUH$FHWWHpSRTXHOHGLDEOH avait cru au matérialisme et avait
DGRUpOHIHXTX¶LOFRQVLGpUDLWFRPPHXQHILQHQVRL(WO¶HVSULWIXWQpJOLJpDXSURILWGXFRUSVHWGX
physique. Le mal eut droit de cité sur terre, la gabegie se répandit et le sang coula à flots. A
O¶RSSRVp GH OD VXEOLPDtion et de la sainteté, le diable avait trouvé refuge dans cette pratique
MXVTX¶jREWHQLUOHUDQJG¶DQJHTXLHVWSOXVSURFKHGH'LHXTXLDYDLWGpFLGpGHFHTX¶LODYDLWYRXOX
GpFLGHU(WLOVHFKRLVLUDXQYLFDLUH6RQFKRL[DXUDVXUSULVSOXVG¶XQFDUpWDQW SRUWpVXUO¶DUJLOH
QRLUHTXLYDEpQpILFLHUGHO¶HVSULWTX¶LOOXLLQVXIIODHQSOXVGXFKRL[GHGLULJHU$LQVLFRPPHQoD
la confrontation entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal. Ce qui sortira de cette
confrontation sera le savoir : «Nous avons fait savoir à Adam tous les noms.»

&HIXWO¶DQQRQFHG¶XQHYLHGLIILFLOHVXUWHUUHHWG¶XQHVFqQHUXGHPDLVH[DOWDQWH6XUYLQWDORUVOH
U{OHGHVPHVVDJHUVGHVSURSKqWHVHWGHVVDLQWVTXLVHVXFFpGqUHQWMXVTX¶jFHTX¶LOVFRQQDLVVHQWOH
salut. Le temps de O¶REVHUYDWLRQHWGHO¶DWWHQWHFRPPHQoDHWO¶RQVHFUDPSRQQDjODYRLHGURLWH
TXLDYXFKHPLQHU©GHJUDQGVKRPPHVGRQWFHUWDLQVVRQWGpMjSDVVpVDORUVTXHG¶DXWUHVDWWHQGHQW
HQFRUHPDLVQHV¶HQVRQWMDPDLVGpWRXUQpVª

Cette histoire se conjugue avec ses trois phases : celle des messagers, celle de la prophétie et celle
GHVVDLQWVTXLWDQW{WV¶DVVRFLHQWWDQW{WVHGLVVRFLHQW&DUFKDTXHPHVVDJHUHVWSURSKqWHHWVDLQW
en même temps, chaque prophète est aussi saint et chaque saint reste saint ; et fort demeure le
FRUGRQRPELOLFDO UHOLDQW OHGRQQHXUHW OHUHFHYHXU /¶KRPPHVHORJHDLQVL GDQVXQpWDWG¶HVSULW
très élevé comme étant le serviteur : «Sublime soit-il, celui qui a fait voyager son serviteur !»

$ O¶RSSRVp LO \ D O¶KLVWRLUH GH OD GLDOHFWLTXH DYHF ses hauts et ses bas, des mannes qui se
transforment en catastrophes sur tous les échelons, de la crise vivrière à la crise financière, en
passant par celles économique et politique. Dès lors, où trouver refuge ?

/DVLWXDWLRQGHO¶KXPDQLWpV¶pFODLUFLWFKDTXHIRLVTXHO¶DXURUHVHUDSSURFKHHWTXHOHILOEODQFVH
GLVWLQJXHGXILOQRLUGDQVO¶XOWLPHSKDVHGHODQXLW/DPDWLqUHTXLHVWDFFLGHQWHOOHHWpSKpPqUHQH
peut pas être une fin en soi, comme la créature ne peut pas être créatrice en même temps. Les
pURSDJDQGLVWHV Q¶RQW SDV UDLVRQ TXHOOH TXH VRLW OD JUDQGHXU GH OHXU FDLVVH GH UpVRQQDQFH TXH
OHXUV pFROHV GH SURSDJDQGH VH PXOWLSOLHQW RX TX¶HOOHV VH IRQGHQW VXU GHV ODERUDWRLUHV TXL
H[SpULPHQWHQWGHVDQLPDX[FRPPHODWKqVHGH3DYORY/¶pFULWXUHHWOHGLVFours ont pris une vaste
SODFHGDQVOHXUSURSDJDQGHHWO¶pORTXHQFHUHVVHPEOHjELHQGHVpJDUGVjODPDJLH&HSHQGDQWOD
monotonie et la répétition font perdre à la magie son pouvoir.
90  

 
2U SRXU TXH O¶rWUH KXPDLQ SXLVVH FRQVHUYHU VD GLPHQVLRQ KXPDLQH LO Iaut que la demande se
UHQRXYHOOH /D VRLI G¶XQH DOWHUQDWLYH TXL IDLW UHYLYUH OH F°XU HW TXL pOqYH O¶HVSULW HVW XQ
dénominateur commun, et la religion est devenue ce musée authentique dont tout un chacun
devient le gardien. Ce qui nous fait reprendre le verset coranique : «Nous avons trouvé nos
ancêtres dans cette tradition, et nous les y suivons.»

L e soufisme, couronnement de la politique

,OIXWXQPRPHQWROHVFRQQDLVVDQFHVGHYHQDLHQWGHO¶HQFUHYHUVpVXUGXSDSLHUHWGHVYLOOHVGH
O¶2ULHQW pWDLHQW Srises dans des embouteillages. Bagdad secouée, les sites de connaissances
UpSDQGXVSDUWRXWODYDQLWpGDQVO¶DUWHWOHVDYRLUGHYHQXHOHFKHPLQPHQDQWjODFpOpEULWpHWj

la richesse, des hommes se bousculaient vers ce phénomène qui avait fini par couvrir tous les
KRUL]RQV&¶HVWGDQVFHWHQYLURQQHPHQWTX¶XQKRPPHV¶pWDLWGLVWLQJXpSDUVRQVDYRLULQWDULVVDEOH
HWSDUVRQDUWpOHYpO¶,PDP*KD]DOL,OSDUWLWSRXUXQHUHWUDLWHVSLULWXHOOHHWV¶HQIHUPDSHQGDQW
XQH GL]DLQH G¶DQQpHV DYDQW GH VRUWLU DYHF O¶DLGe divine pour annoncer la «revivification des
sciences religieuses».

/H FUL GH O¶,PDP *KD]DOL D UpYHLOOp GHV GRUPHXUV EUXVTXHPHQW VRUWLV G¶XQ ORXUG VRPPHLO ,O
SUpFpGD O¶2FFLGHQW TXL V¶LQVSLUHUD SOXV WDUG GH VD SHQVpH F HVW-à-dire de sa démarche vers le
GRXWH PpWKRGLTXH 'H PrPH O¶2FFLGHQW SODJLD +DODGM TXL IXW OH SUHPLHU j pYRTXHU OH PRL HW
O¶pJRTXLSRVHODUHVSRQVDELOLWpHWTXLIXWOHSRLQWGHGpSDUWSRXU'HVFDUWHVHWVRQFDUWpVLDQLVPH
GHYHQXXQPRGqOHjVXLYUHSRXUODUDWLRQDOLWpHWO¶REMHFWLYLWp&e modèle est notre produit et les
empreintes que nous y avons laissées le démontrent.

/¶KLVWRLUHGHO¶,VODPHQ2FFLGHQWDGpPRQWUpODYLWDOLWpGHFHWWHUHOLJLRQGRQWOHVVRXILVTXLRQW
associé la foi et la raison, ont légué un patrimoine inestimable, pleLQGHELHQIDLWVSRXUO¶KXPDQLWp
-DELU,EQ+D\DQHLQYHQWHXUGHO¶DOJqEUHHW,EQ6LQDDOLDV$YLFHQVVRQWGHVVRXILVTXLRQWMXVWLILp
la vivacité de cette voie mystique. Celle-FL HVW V\QRQ\PH G¶KXPLOLWp HW GH YLH HW FRQVWLWXH XQ
catalyseur qui transforme le fer en or et la pierre en diamant. Le message des soufis est venu pour
couronner le mysticisme : ce qui était difficile, est devenu facile et ce qui était rare est devenu
abondant.

,OIDLWMRXUOHVVHUUXUHVRQWVDXWpGHYDQWO¶2XYUDQWHWOH6FHDXGHYDQt le Victorieux et le Guide.


2QpOHYDGHVKRPPHVVDQVTX¶LOVDLHQWEHVRLQG¶REVHUYHUXQHUHWUDLWH/DYRORQWpG¶HIIDFHPHQWHW
G¶DIILUPDWLRQ VH PDQLIHVWH j QRXYHDX ©(W RQ YHUUD OHV KRPPHV TXL HPEUDVVHQW OD UHOLJLRQ
G¶$OODKHQYDJXHª

91  

 
Le cri des opprimés a UHYLYLILpOHVF°XUVHWpOHYpOHVHVSULWV&DUF¶HVWODERQQHSDUROHGRQWOHV
racines sont profondes et immuables. Si le contenant est en place - la terre est préparée à cela ± et
si la sagesse et les modèles font le tour de la terre, il ne reste alors plus que la perle pour qui tout
FHFLDpWpSUpSDUp&DUOHUDSSRUWGHFDXVDOLWpO¶H[LJH

/HGpYHORSSHPHQWWHFKQRORJLTXHTXLWUDQVIRUPHOHPRQGHHQXQWRXUGHPDLQQ¶HVWSDVOHIDLW
du hasard, ni une fin en soi, mais plutôt quelque chose que le prophète Jacob avait pressenti. Et
M¶DERQGH GDQV OH PrPH VHQV TXH O¶pFULYDLQ (O +DGML 0RKDPHG .KDOLID 1LDVVH GH .DRODFN
6pQpJDO TXLGLVDLWjSURSRVGHODSULqUHG¶2XYUDQWGDQVVRQRXYUDJHDXWLWUHpYRFDWHXUG¶$UPH
G¶pFODLUHXU  ©2Q WURXYH GHV VHQWHQFHV j O¶DWWHQWH G¶XQH FDXVH HW TXL VH UHWDUGHQW j
O¶DIIHUPLVVHPHQWGHFHWWHPrPHFDXVHª

Retour à la case départ

/HVpFODLUHXUVSDUPLQRVDQFLHQVTXLRQWWUDYDLOOpDYHFLQWXLWLRQSRXUDVVRFLHUODORLHWO¶HVSULW
ODIRLHWODVFLHQFHRQWWUDQVIRUPpO¶$QGDORXVLHGDQV la péninsule ibérique, en un paradis au-
dessus duquel des fleuves coulaient en abondance. Les fruits étaient à portée de bouche, la
VFLHQFHHWO¶DUWjO¶DSRJpHSRXUGHVKRPPHVDPRXUHX[HWSDVVLRQQpVSDUFHTX¶LOVIDLVDLHQWPDLV
qui ont laissé libre cours à leurs âmes. Ces hommes avaient changé, leurs attitudes aussi. Ils
pWDLHQWGHYHQXVLQWROpUDQWVDSUqVDYRLUpWpWUqVIOH[LEOHV/DVLWXDWLRQV¶pWDLWUHQYHUVpHFRPPHVL
elle allait marcher sur la tête et le discours des interdits et des bannis est devenu monnaie
courante. Le bâton était resté suspendu au-dessus de toutes les têtes, et la terre devenue petite
PDOJUpVRQpWHQGXHMXVTX¶DXMRXURO¶KHXUHDVRQQpHWTXHODWHUUHHVWGHYHQXHWUHPEODQWHjXQ
PRPHQWRWRXWO¶2FFLGHQWpWDLWHQUHQGH]-vous avec le ciel. Ce même ciel tomba et ne laissa sur
SODFHTXHGHVUXLQHV/HVpSORUpVFRPPHOHVSOHXUHXUVIXUHQWPpODQJpVHWLOQ¶HQUHVWDSOXVTXH
les souvenirs.

La religion est retournée à son état étrange, comme à son commencement. Et le désert est devenu
le seXOHQGURLWSRXUFRQWHQLUO¶,VODP&HWWHJUDQGHFLYLOLVDWLRQHVWDOOpHGRUPLUVRXVOHVGXQHVGX
VDEOH DWWHQGDQW VRQ MRXU HW VRQ KHXUH /¶pWUDQJHU HVW GHYHQX pWUDQJHU PrPH FKH] OXL /D
polémique et les discussions tournent autour des évidences. Ainsi, certains insistent sur le fait que
le ciel se trouve au-GHVVXVGHQRVWrWHV HW G¶DXWUHVTXHODWHUUHVHWURXYHVRXV QRVSLHGV3DUOHU
G¶LQQRYDWLRQ HVW PRQQDLH FRXUDQWH &¶HVW FRPPH VL O¶RQ pWDLW GHYDQW $ERXO +DVVDQ $QQDGDZL
TXDQGLOV¶HVWpFULp ©ÐDGRUDQWGHV palais, aie pitié des adorants des tombeaux.» Un appel qui
DXUDLWG€UpYHLOOHUFHX[TXLGRUPDLHQWSURIRQGpPHQWPDLVPDOKHXUHXVHPHQWFHWDSSHOG¶RXWUH-
tombe fut sans écho.

3HQGDQW FH WHPSV HQ ,UDQ TXHOTXH FKRVH G¶pWRQQDQW V¶HVW SDVVp ,O V¶DJLW GH O¶KLVWRLUH G¶XQ
YLHLOODUGGHDQVVHYUpG¶DPRXUSDWHUQHOHWYHQXDUURVHUODWHUUHDYHFOHFULGXJUDQGP\VWLTXH
Ibn Al Harabi Al Hatimi.
92  

 
'¶DXWUHV SDJHV VH VRQW RXYHUWHV VXU OD WHUUH GHV 6DLQWV HW GHV 3URSKqWHV GDQV OD 0pVRSRWDPLH
cette riche bande de terre entre deux fleuves se trouvant désormais entre deux feux. Et, comme
VRQQRPO¶LQGLTXH.DVLPDJDUGHVRQPDOHQSDWLHQFH3DUFHTX¶RQQ¶DSDVHQFRUHVRXIIOpVXUOHV
FRUQHV (W OH FKDSHOHW HVW HQFRUH HQWUH OHV GRLJWV TXL O¶pJUDWLJQHQW 3HXW-rWUH TX¶XQ MRur, il
UDFRQWHUD VD EHOOH KLVWRLUH /¶kPH DYHF VHV WURLV GLPHQVLRQV HW VHV VHSW SKDVHV QH SHXW rWUH
UpYHLOOpHTXHSDUTXHOTX¶XQTXLO¶DGpMjF{WR\pHLOV¶DJLWGHO¶kPHEHVWLDOHHWGHO¶kPHGRXWHXVH
GHO¶kPHLQIpULHXUHGHO¶kPHIDWDOLVWH TXLDFFHSWHOHGHVWLQ GHO¶kPHVDFULILpHGHO¶kPHDJUppH
WRXWHVUHQYR\pHVjO¶KLVWRLUHSDUODSRXVVLqUH

Des recherches se sont multipliées pour décortiquer la devinette, enlever le voile et éradiquer le
PDO$LQVLRQV¶LQWHUURJHDVXUO¶DUFKHVXUO¶HQIDQWVXUle mur, sur le trésor qui se cache en deçà
GHFHPXUPDLVOHSRLVVRQVpFKpDpWpRXEOLpOjRV¶HPEUDVVHQWOHIOHXYHDYHFVRQHDXGRXFHHW
ODPHUDYHFVRQHDXVDOpH&¶HVWOjTXHVHWURXYHQWO¶HPERXFKXUHFDFKpHHWOHVFHDXVXEOLPH

La revivification de lDUHOLJLRQDWWHQGO¶kPHDSDLVpH0DLV\D-t-il encore des hommes réfléchis ?


&DUV¶LO\DXQFRQWHQDQWTX¶HVWODSUHVVHHWODPRQGLDOLVDWLRQOHFRQWHQXQHSHXWrWUHTXHO¶kPH
DJUppH 3DUFH TXH OD IRUPH D EHVRLQ G¶XQ IRQG HW OH VHFUHW D EHVRLQ G¶XQH DXWRUisation pour le
SpQpWUHU6L OHVPR\HQV VRQWUHQGXVGRFLOHVSRXUVHUYLUODILQO¶RIIUH HW ODGHPDQGHQHVHUDLHQW
DXWUHTXHGHX[IDFHVG¶XQHVHXOHPRQQDLH

/HPRQGHG¶DXMRXUG¶KXLHVWFRPPHXQWHPSOHTXLDpWpFRQVWUXLWHWGRQWLOQHUHVWHTX¶XQHEULTXH
pour que la construction soit achevée, pour que la purification soit intégrale, pour que la dignité
VRLW SUpVHUYpH SRXU TXH O¶HVSRLU VRLW WRXW SUqV SRXU TXH OD FRQQDLVVDQFH VRLW GLVSRQLEOH HW TXH
O¶XWLOLWpVRLWUpSDQGXH7HOHVWOHPHVVDJHGHVRSSULPpVTXL VHWURXYHDXF°XUGHVFRQQDLVVDQFHV
HWGHVHVSULWVVDLQWV/DFRPPXQLFDWLRQDEHVRLQGXVRXILVPHSRXUEpQpILFLHUG¶XQHVSULWHWDYRLU
un goût, pour sortir de la pyramide renversée. La communication a besoin que la graine ne soit
plus transformée en couvenWHWTX¶RQQHVHIRFDOLVHSOXVVXUOHWUDLQTXLQ¶DUULYHSDVjO¶KHXUHHW
VXUO¶KRPPHTXLPRUGOHFKLHQ$LQVLO¶H[DJpUDWLRQYDGLVSDUDvWUHHWOHVHQVGHODPHVXUHYDOD
précéder.

3RXUUHWRXUQHU DXVROHLO OHYDQW MHGLUDL DYHFO¶pFULYDLQ (O+DGML0RKDPHG Khalifa Niasse dans


VRQOLYUH6RXIIUHURXJH©/HVROHLOV¶HVWOHYpDXSHWLWPDWLQHWOHVKRUL]RQVVHVRQWpFODLUpV8QH
QXLW SURIRQGH V¶HVW pFODLUpH HW OHV OXHXUV VH VRQW HQWDVVpHV SRXU MDLOOLU SDUWRXW MXVTX¶j FH TXH OH
monde entier observe ces lumières TXLHIIDFHQWWRXWFHTXLpWDLWREVWDFOH(WGHVJHQVTXLQ¶pWDLHQW
SDVLQWpUHVVpVYHQDLHQWFKDQWHUFHWWHOXPLqUHHWFHX[TXLO¶DWWHQGDLHQWSRXUO¶pWXGLHUQ¶RQWJXqUH
été surpris.»

93  

 
2. 3.1 - Communication 1 : /¶pWKLTXHGH la subjectivité politique en islam : la
révélation du sujet dans la philosophie de M uhammad Iqbal (1877-1938). Par
D r. Blondin C ISSE , CSPRP (Université Paris Diderot Paris 7), I ris (E H ESS) .

/D UHQFRQWUH j ODTXHOOH QRXV FRQYLH DXMRXUG¶KXL OH &RPLWp G¶organisation du grand Magal de
Touba pour réfléchir ensemble sur les réponses du soufisme à la crise notamment à travers la
FRQWULEXWLRQGX&KHLNK$KPDGRX%DPEDHVWLQpGLWH/¶LQpGLWGHODUHQFRQWUHQHVHVLWXHSDVGDQV
la démarche car au Sénégal et partRXW GDQV OH PRQGH G¶LQQRPEUDEOHV FROORTXHV VpPLQDLUHV
FRQIpUHQFHVHWFVRQWWRXMRXUVRUJDQLVpVSRXUFRPPpPRUHUHW LQWHUURJHU O¶KpULWDJHGXIRQGDWHXU
GH OD 0RXULGL\\D PDLV UpVLGH GDQV OH IDLW TX¶HOOH VH SRVH j XQ PRPHQW FUXFLDO GH O¶KLVWRLUH
humaine où ses fondements politiques, économiques et socioculturels sont menacés. Et
O¶KXPDQLWp DX ERUG GX JRXIIUH V¶LQWHUURJH WRXMRXUV XQH LQWHUURJDWLRQ YLWDOH SRXU QRXV ± qui
appartenons en grande partie à ce pourtour baptisé tiers-monde ± dans la mesure où il s¶DJLWGH
sortir des schémas proposés ou imposés afin de penser un développement endogène. Et tout
GpYHORSSHPHQW VXSSRVH FRPPH OH GLW OH SURIHVVHXU 0DPRXVVp 'LDJQH O¶HQGRJpQpLWp GH OD
UpIOH[LRQTXLO¶pODERUH

Si donc, pour Aimé Césaire, une civilisation quLV¶DYqUHLQFDSDEOHGHUpVRXGUHOHVSUREOqPHV


TXHVXVFLWHVRQIRQFWLRQQHPHQWHVWXQHFLYLOLVDWLRQGpFDGHQWHTX¶XQHFLYLOLVDWLRQTXLFKRLVLW
GH IHUPHU OHV \HX[ j VHV SUREOqPHV OHV SOXV FUXFLDX[ HVW XQH FLYLOLVDWLRQ DWWHLQWH TX¶XQH
civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde, le sens, la pertinence de
notre rencontre doit aussi se situer au-delà de tout esprit commémoratif ± ce qui est une manière,
peut-être plus éloquente de commémorer - '¶R OD  SHUVSHFWLYH GH  PD FRPPXQLFDWLRn où il
V¶DJLUD G¶LQWHUURJHU OHV FRQGLWLRQV G¶LQVWDXUDWLRQ HW GH SHUSpWXDWLRQ G¶XQ YpULWDEOH HVSDFH
politique démocratique Oj R SUpGRPLQHQW GHV IRUPHV G¶RUJDQLVDWLRQ FRPPXQDXWDLUHV j EDVH
FRQIHVVLRQQHOOHVjODOXPLqUHGHODSHQVpHGH0RKDPPDG,TEDO'¶Rces questionnements :

&RPPHQW FRQFHYRLU XQ HVSDFH SXEOLF G¶DFWLRQ SROLWLTXH j O¶LQWpULHXU G¶XQ FKDPS R GHV
subjectivités sont en même temps ancrées dans une logique de conjonction entretenant de façon
continue la confusion entre leur identité privée et leurs actions politiques ?
6RXV TXHOOHV FRQGLWLRQV O¶LQVFULSWLRQ G¶XQ LQGLYLGX GDQV XQH FRPPXQDXWp G¶DSSDUWHQDQFH SHXW-
HOOH IDYRULVHU O¶pPHUJHQFH G¶XQ HVSDFH SROLWLTXH F¶HVW-à-dire permettre des processus de
subjectivation par lesquels ce sujet identitaire DFFqGHjVDGLJQLWpG¶DFWHXUSROLWLTXH ?

Dit autrement, est-ce que les différents modes à travers lesquels se manifeste le politique, en
SDUWLFXOLHU O¶LQVFULSWLRQ GHV © acteurs » dans certaines représentations du religieux, peuvent
contribuer à favoriser O¶LQVWLWXWLRQG¶XQHVSDFHSXEOLFSROLWLTXHRXDXFRQWUDLUHO¶LQKLEHQW

Ces interrogations menées à partir de la réalité confrérie au Sénégal dans son rapport avec les
SURFHVVXVSROLWLTXHVTXLSDUWLFLSHQWjVDVWUXFWXUDWLRQjO¶RULHQWDWLRQGHVRQpYROXWLRQ interne et à
VRQ SRVLWLRQQHPHQW VXU O¶pFKLTXLHU VRFLDO ± FH IXW O¶REMHW G¶XQH WKqVH GH GRFWRUDW HQ 6FLHQFH
94  

 
SROLWLTXH SXEOLpH FKH] O¶KDUPDWWDQ- H[FpGHQW FH FDGUH JpRJUDSKLTXH HW V¶DPSOLILHQW HQ XQH
problématique de la re - découverte du sujet politique dDQVO¶XQLYHUVDUDER-musulman.

Position du problème
/D TXHVWLRQ GH OD VXEMHFWLYDWLRQ SROLWLTXH HVW VRXYHQW HQYLVDJpH j SDUWLU GH FH TX¶LO FRQYLHQW
G¶DSSHOHU © les lieux communs de la subjectivité », régentés par quelques théories occidentales.
Parmi celles-ci, la pensée de Hannah Arendt, par exemple, fonctionne comme un paradigme
GRPLQDQW  HQ FH TX¶HOOH DQDO\VH OHV FRQGLWLRQV GH O¶rWUH-au-monde-GH O¶KRPPH j WUDYHUV O¶DJLU
SROLWLTXH HQ VH VLWXDQW j OD IRLV GDQV OD WUDGLWLRQ G¶$ULVWRWH HW GH 0DFKLDYHO GRQW Hst issue la
SKLORVRSKLH SROLWLTXH FRQWHPSRUDLQH  0DLV j O¶RSSRVp GH FHV OLHX[ FODVVLTXHV H[LVWH G¶DXWUHV
champs où la problématique de la subjectivité politique, si elle est soupçonnée, réside encore
dans une quasi-invisibilité.

Mon ambition, dans cette FRPPXQLFDWLRQ LVVXH HQ SDUWLH GH PD WKqVH HVW G¶HVVD\HU G¶pODUJLU
FHWWH SUREOpPDWLTXH j O¶XQLYHUV LVODPLTXH R OD VXEMHFWLYLWp SROLWLTXH VHPEOH VH FRQFHYRLU j
O¶LQWpULHXU G¶XQH pWKLTXH GH O¶DIILUPDWLRQ GX VXMHW WHOOH TX¶RQ OD UHWURXYH GDQV OD SHQVpH GH
Muhammad Iqbal (1877-1938), philosophe -SRqWHWKpRULFLHQGqVGHO¶(WDWLQGpSHQGDQWGX
Pakistan2dont la philosophie se déploie en un projet de reconstruction de la pensée religieuse de
O¶,VODP GpILJXUpH SDU OH VRXILVPH SDQWKpLVWH FRQWHPSODWLI HW OH Fonservatisme des Ulémas
(Docteurs de la foi). Aux expériences corruptrices de la pensée philosophique, politique et
UHOLJLHXVHGHO¶LVODP,TEDOFKHUFKHjOHXUVXEVWLWXHUG¶DXWUHVH[SpULHQFHVVXVFHSWLEOHVGHIRQGHU
OHVFRQGLWLRQVG¶XQQRXYHDXFRPPHQFHPHQW TXLjODIRLVV¶DSSXLHVXUODWUDGLWLRQHWODUHSRXVVHHW
HQ PHWWDQW HQ H[HUJXH O¶LQpGLW GH QRWUH PRGHUQLWp TXL H[LJH XQ TXHVWLRQQHPHQW FRQVWDPPHQW
UHQRXYHOp j OD SRUWpH G¶XQ KRPPH TXL KpULWH PpGLWH TXHVWLRQQH HW VH VRXYLHQW DLQVL TXH OH
remarque Arendt dans Crise de la culture GDQV OD SHUVSHFWLYH G¶XQ PRQGH FRPPXQ &HWWH
QpFHVVLWp SHUFHSWLEOH FKH] G¶DXWUHV UpIRUPDWHXUV GX èmeVLqFOH TXL FKHUFKH j V¶DIIUDQFKLU GHV
lectures orthodoxes et littéralistes du Coran historiquement situées introduit une rupture dont le
PDQLIHVWHSURJUDPPDWLTXHV¶pFODLUHjWUDYHUVFHVSURSRVG¶$EGRX)LODOL-ansary :

«  LO QH V¶DJLW SDV GH UHYHQLU j OD IRLV GHV DQFrWUHV YHUWXHX[ 6DODI VDOLK  F¶HVW-à-dire aux
élaborations produites par les premières générations de « docteurs de la foi » et reprises et puis
figées par la tradition ultérieure. Il est question plutôt de contourner ces élaborations pour trouver
OHVRXIIOHRXO¶LQVSLUDWLRQGHVRULJLQHV »3

Désidentification et révélation politique du sujet communautaire

                                                                                                                     
2    Indépendance  acquise  en  1947.  

3    Abdou  Filali-­‐ansary,  ZĠĨŽƌŵĞƌů͛/ƐůĂŵ  ?  Une  introduction  aux  débats  contemporains,  Paris,  La  découverte,  2003.  

95  

 
Sous quellHV FRQGLWLRQV XQH VXEMHFWLYLWp SROLWLTXH SHXW VH UpYpOHU HQ LVODP GDQV OH FDGUH G¶XQ
vivre-HQVHPEOH IRQGp VXU O¶H[LVWHQFH G¶XQ VXMHW déterritorialisé F¶HVW-à-dire affranchi de tout
ancrage privatif qui le confinerait dans un espace clos aux antipodes de l¶DJLUSROLWLTXH ?

Laissons parler Iqbal Ecoutons parler Iqbal dans OH/LYUHGHO¶pWHUQLWp SUpWH[WDQWO¶DSSDULWLRQGH


O¶HVSULWGHVRQPDvWUH5€Pv4 dans le prologue sur la terre :
/DYLHVLJQLILHRUQHUVRQ0RLF¶HVWOHGpVLUGHWpPRLJQHUGHVDSURSUHH[LVWHQFH «
Es-tu vivant, es-tu mort, ou agonisant ? Il te faut demander le témoignage de trois témoins pour
te rendre compte de ta station :
Le premier témoin est ta propre conscience-
Regarde-toi donc avec ta propre conscience.
Le deuxième témoin est la coQVFLHQFHG¶XQDXWUHHJR-
Regarde-WRLGRQFjODOXPLqUHG¶XQHJRDXWUHTXHWRL
Le troisième témoin est la conscience de Dieu-
Regarde-toi donc à la lumière de Dieu.
Si tu te tiens sans trouble en face de cette lumière,
Considère-toi aussi vivant et éternel que Lui !
Seul cet homme est réel qui ose Qui ose voir Dieu face à face5.
Dès lors, selon Iqbal, en constituant la « suprême extase » qui est également une « suprême
épreuve »ODFRQIURQWDWLRQGHO¶HJRKXPDLQDYHFOD5pDOLWpXOWLPHORLQG¶DQQLKLOHUOH0oi doit lui
SHUPHWWUHG¶pSURXYHUVD SURSUHFRQVLVWDQFHSDUHLOOHjODJRXWWHTXL DIDLWGHVRQH[LVWHQFHVDQV
YDOHXUXQHSHUOHSDUFHTX¶HOOHDDSSULVSDUF°XUODOHoRQGXVRLjODYDJXHTXLUHVWHXQHYDJXH
GDQV OH VHLQ GH OD PHU SDUFH TX¶HOOH V¶HVW IDLW Fhevalier qui chevauche la Mer6, j O¶LQVWDU GH
O¶DWWLWXGH GX 3URSKqWH GH O¶,VODP TXL D VX ORUV GH VRQ Ascension, sans vaciller, regarder la
/XPLqUHGHO¶(JR,QILQL7&¶HVWDLQVLTX¶jODTXHVWLRQ TX¶HVW-FHTXHO¶$VFHQVLRQ ? 5€PvTX¶,TEDO
a rencontré dans son voyage céleste8, répond en éclairant sa véritable signification :
                                                                                                                     
4    &ŽŶĚĂƚĞƵƌĚĞů͛Krdre  des  Derviches  tourneurs  (Mawlavî),  Djalâl-­‐od-­‐Dîn  Rûmî  (1204  ʹ  1273)  est  un  mystique  
ƉĞƌƐĂŶƋƵ͛/ƋďĂůƌĞǀĞŶĚŝƋƵĞĐŽŵŵĞƐŽŶŵĂŠƚƌĞ͘  

5    Iqbal  M.,  >ĞůŝǀƌĞĚĞů͛ĠƚĞƌŶŝƚĠ;ũąǀŝĚ-­‐Nâma),  trad.  Eva  Meyerovitch  et  Dr  Mohammad  Mokri,  Paris,  Albin  
Michel,  1962,  p.  29  

6    Cf.  Iqbal,  Les  Secrets  du  soi  

7    Cf.  note  67  

8    >ĞůŝǀƌĞĚĞů͛ĠƚĞƌŶŝƚĠ  est  souvent  appelé  la  Divine  Comédie  ĚĞů͛/ƐůĂŵ͘  


96  

 
6HXOHPHQWODUHFKHUFKHG¶XQWpPRLQODFRQILUPDWLRQSDUXQWpPRLQIDFHjIDFHXQWpPRLQMXVWH
VDQV OD FRQILUPDWLRQ GXTXHO QRWUH H[LVWHQFH QH VHUDLW TXH FH TXH OD FRXOHXU HW O¶RGHXU VRQW à la
fleur.
(Q HQYLVDJHDQW DORUV O¶DIILUPDWLRQ GH VRL GDQV FHWWH GLUHFWLRQ ; en admettant que la réalité
individuelle peut tenir ferme face à la réalité divine, acquérant, de ce fait, la qualité de la perle qui
ne se laisse pas engloutir par la mer, Iqbal, comme le montre Bachir Diagne, opère un
UHQYHUVHPHQW SULQFLSLHO GDQV OD VLJQLILFDWLRQ GH O¶H[SpULHQFH P\VWLTXH TXL GHYLHQW GqV ORUV OD
possible GpFRXYHUWH GH O¶HJR HQ WDQW TX¶LQGLYLGX SOXV SURIRQG TXH VD SHUVRQQDOLWp KDELWXHOOH
« 9. &¶HVW DLQVL TXH +XVD\Q 0DQV€U $O +DOOkM OH VRXIL PDUW\U GH O¶,VODP10 TX¶,TEDO =LQGD-
Rûd) va rencontrer dans le Ciel de Jupiter, lors de sa pérégrination céleste, lui parle de la doctrine
GHO¶H[WLQFWLRQGXVRLHQFHVWHUPHV :
/¶LYUHVVH GHV DPLV YLHQW GX YLGH GH OHXU FRXSH ; O¶DQpDQWLVVHPHQW VLJQLILH rWUH pWUDQJHU j OD
YpULWDEOH FRQQDLVVDQFH 2 WRL TXL FKHUFKH GDQV O¶DQpDQWLVVHPHQW WRQ EXW VDFKH TXH MDPDLV OH
QpDQWQHSHXWVDLVLUOHVHQVGHO¶rWUH11.
6HORQFHPrPHSURFHVVXVG¶DIILUPDWLRQGHODSHUPDQHQFHGHO¶HJRKXPDLQGDQVune personnalité
plus profonde12, ,TEDOHQYLVDJHDXVVLODOHFWXUHGHODGHVWLQpHGHO¶DQJHGpFKXGDQVODSHUVSHFWLYH
GHO¶DIILUPDWLRQGX© Je ª(QHIIHWjO¶RUGUHGHVHSURVWHUQHUGHYDQWO¶KRPPHQRXYHOOHFUpDWXUH
de la divinité, Satan considéré comme le plus fervent dévot de la Divinité, passé maître dans
O¶DPRXU GH VRQ 6HLJQHXU YD UHIXVHU GH VH SURVWHUQHU GHYDQW O¶KRPPH TXL D UHoX OH VRXIIOH
divin13DUJXDQWODVXSpULRULWpGHODQDWXUHGHVRQrWUHIDLWHGHIHXVXUFHOOHGHO¶KRPPHVRUWLHGH
O¶DUJLOHDLQsi que le rapporte le Coran :
Je suis meilleur que lui 7XP¶DVFUpHGHIHXHW7XO¶DVFUppG¶DUJLOH14

                                                                                                                     
9    Iqbal,  R.P.R.I.,  p.  184.  

  ͛ĂŝůůĞƵƌƐ͕ Đ͛ĞƐƚ ĚĂŶƐ ĐĞƚƚĞ ƉĞƌƐƉĞĐƚŝǀĞ ƋƵ͛ŝů ĐŽŶǀŝĞŶĚƌĂŝƚ Ě͛ĞŶǀŝƐĂŐĞƌ ůĂ ƉŽƐŝƚŝŽŶ ĚĞ ů͛ĂƵƚĞƵƌ ƐƵr   la   Religion  ;  
ƋƵĞƐƚŝŽŶƋƵĞŶŽƵƐŶŽƵƐƉƌŽƉŽƐĞƌŽŶƐĚ͛ĞdžĂŵŝŶĞƌƉůƵƐĂŵƉůĞŵĞŶƚĚĂŶƐůĂƉĂƌƚŝĞ «  YƵĞůůĞƌĞůŝŐŝŽŶƉŽƵƌů͛ĞƐƉĂĐĞ
public  »  

10    Décapité  en  922  à  Bagdad,  rappelons-­‐le,  pour  avoir  dit  «  Je  suis  la  Vérité  Créatrice  »    

11    Iqbal,  >ĞůŝǀƌĞĚĞů͛ĠƚĞƌŶŝƚé,  p.  107.  

12    Iqbal,  R.P.R.I.,  pp.  96-­‐97.  

13    «  ĠƐƋƵĞ:ĞůƵŝĂƵƌĂŝĚŽŶŶĠƐĂĨŽƌŵĞƉĂƌĨĂŝƚĞĞƚƋƵĞũ͛LJĂƵƌĂŝƐŽƵĨĨůĠĚĞDŽŶąŵĞ͕ƚŽŵďĞnjĞŶƉƌŽƐƚĞƌŶĂƚŝŽŶă
ses  pieds  »,  Coran,  Sourate  15,  Verset  29.  

14    Coran,  Sourate  38,  Verset  76.  

97  

 
6LG¶DSUqVXQHFHUWDLQHWUDGLWLRQVRXILHOHUHIXVGH6DWDQGHV¶LQFOLQHUGHYDQWO¶KRPPHWpPRLJQH
G¶XQ DPRXU H[FOXVLI SRXU OD 'LYLQLWp ± La seule prosternation vénérable est celle qui interdit
toutes les autres !15 - LO Q¶HQ GHPHXUH SDV PRLQV TX¶XQH WHOOH GpVREpLVVDQFH DX OLHX G¶rWUH
O¶H[SUHVVLRQG¶XQHYpULWDEOHDIILUPDWLRQGXVRLH[SULPHXQpJRwVPHQpJDWLIXQHSRVWXUHUpDFWLYH
ODTXHOOHORLQG¶rWUHXQ témoignage personnaliste se perd dans le ressentiment. Néanmoins, pour
Iqbal, la posture du « rebelle divin ªRIIUHjO¶KRPPHO¶RFFDVLRQGHGpFRXYULUOHVSRVVLELOLWpVTXL
SHXYHQW V¶RXYULUHQW j OXL SDU OD YHUWX GH VD FRQVLVWDQFH FRUUpODWLYHPHQW j VRQ DFWLRn
transformatrice. Tel est le sens, par exemple, de la plainte que Satan adresse à Dieu, affecté de la
IDLEOHVVHGHO¶HJRKXPDLQTXLGHSDUVRQLQFDSDFLWpG¶DFTXpULUODFRQVLVWDQFHHWODVROLGLWpG¶XQ
« je ª «  G¶XQH SHUVRQQDOLWp GXUH FRPPH XQ GLDPDQW à opposer au feu dont lui-même fut
créé16 :

&H UHMHWRQ G¶$GDP TX¶HVW-il ? Une poignée de brindilles ; et pour une poignée de brindilles, il
VXIILWG¶XQHpWLQFHOOHYHQDQWGHPRL6LGDQVFHPRQGHQ¶H[LVWHQWTXHGHVEULQGLOOHVjTXRLERQ
P¶DYRLUGRQQpWDQW de feu "&¶HVWSHXGHFKRVHTXHGHIRQGUHGXYHUUHPDLVIRQGUHODSLHUUHF¶HVW
quelque chose qui compte  « -HGpVLUHXQHFUpDWXUHTXLPHWRUGHOHFRXGRQWOHUHJDUGPHIDLW
trembler. Un homme qui me dirait :
« Eloigne-toi de ma présence. » Un homme devant qui je ne vaudrais plus rien.
Ô Dieu ! Un homme vivant et qui aime la vérité ! Peut-être trouverais-je alors du plaisir à la
défaite17
5HOHYDQW DLQVL G¶XQH YpULWDEOH SpGDJRJLH pPLQHPPHQW LQVWUXLWH HW LQVWUXPHQWDOH HQ FH VHQV
TX¶HOOH H[KRUWH O¶KRPPH à se lancer à la conquête de sa personnalité, la complainte de Satan
RXYUHjO¶HJRILQLODSRVVLELOLWpGHGpSDVVHUOHJRXIIUHGHO¶DOLpQDWLRQP\VWLILDQWHHWP\VWLILFDWULFH
donc de la contemplation pure ± TXL D FRQWULEXp j RFFXOWHU OH YpULWDEOH VHQV GH O¶être, à savoir,
TX¶LO HVW WHQVLRQ FUpDWULFH SHUPDQHQWH ± afin de renouer avec les exigences du processus- de-
devenir- individu TXLGpSRUWHOHVXMHWGDQVOHFKDPSGHO¶DFWLRQWUDQVIRUPDWULFHFRQWLQXH

&¶HVW DLQVL TXH OD SKLORVRSKLH SROLWLTXH GH 0XKDPPDG Iqbal va se déployer dans deux
directions intrinsèquement liées :

1. /D GpFRQVWUXFWLRQ GH OD PpWDSK\VLTXH SDQWKpLVWH G¶XQH FHUWDLQH pFROH GX VRXILVPH  TXL
HQYLVDJHODUpDOLVDWLRQGHO¶HJRILQLGDQVVDIXVLRQYRLUHVRQDQpDQWLVVHPHQW IDQD GDQVOD
lumière de la Réalité Ultime, partant du principe que « tout sentiment de séparation est

                                                                                                                     
15    Iqbal,  >͛ŝůĞĚĞ'Ăďƌŝel,  trad.  Saïd-­‐Uz-­‐Zafar  Chagtaï  et  Suzanne  Bussac,  Paris,  Albin  Michel,  1977,  p.  107.  

16    S.  Bachir  Diagne,  Ibid.,  p.  31  

17    Iqbal,  DĞƐƐĂŐĞĚĞů͛KƌŝĞŶƚ,  trad.  Eva  Meyerovitch  et  Mohammad  Achena,  Paris,  Les  Belles  lettres,  1956,  p.  122.  

98  

 
ignorance ; et tout ce qui est « autre » est une simple apparence, un rêve, une ombre
« ».

2. /¶DIILUPDWLRQ GX VXMHW HW OD FRQTXrWH GH VD SHUVRQQDOLWp GpEDUUDVVpH GH WRXWH LPLWDWion
VHUYLOHHWGHODP\VWLTXHGHO¶H[LORX© O¶DEDQGRQj'LHX ªGDQVOHEXWG¶RUQHUVRQPRLSDU
O¶DFWLRQFRQIRUPpPHQWjO¶HVSULWYpULWDEOHGHO¶,VODP

La rupture métaphysique et politique du projet iqbalien, comme le montre Souleymane Bachir


'LDJQHYDV¶HQFOHQFKHUjSDUWLUG¶XQHSUpPLVVHFHQWUDOH ODILQDOLWpGHO¶HJRKXPDLQQ¶HVWSDVGH
V¶DEVRUEHU HW GH VH GLVVRXGUH GDQV OD FRQWHPSODWLRQ  GH UHJDUGHU TXHOTXH FKRVH PDLV G¶rWUH
TXHOTXH FKRVH &HWWH SRVWXUH SKLORVRSKLTXH TX¶DGRSWH ,TEDO V¶pWDEOLW GHSXLV OH GLDJQRVWLF TX¶LO
SRVHVXUODGpFDGHQFHGHO¶2ULHQWG€HHQJUDQGHSDUWLHjO¶DGRSWLRQGHV\VWqPHVSKLORVRSKLTXHV
SRVWXODQW OH UHQRQFHPHQW j VRL OD QpJDWLRQ GH OD SHUVRQQDOLWp O¶LQGLIIpUHQFH HW OH GpWDFKHPHQW
vis-à-vis des biens de ce monde. Ce projet éminemment politique aura pour conséquence majeure
O¶H[DOWDWLRQ GHV GHYRLUV GH O¶LQGLYLGX LQYLWp j VH GpWRXUQHU G¶XQH pWKLTXH FRQWHPSODWLYH HW
IXVLRQQHOOH GDQV OD OXPLqUH GX 7RXW SRXU XQH pWKLTXH GH O¶DFWLRQ j WUDYHUV ODTXHOOH O¶LQGLYLGX
émerge en tant que personnalité capable, non seulement de se manifester, mais surtout de se tenir
jSUR[LPLWpGHODOXPLqUHGHO¶HJR,QILQLVDQVV¶DQQLKLOHUHQHOOH/¶HQMHXGHODFULWLTXHLTEDOLHQQH
FRQWUHOHVRXILVPHSDQWKpLVWHHVWGDQVODWHQVLRQSHUPDQHQWHGHO¶HJRKXPain vers la recherche et
OD FUpDWLRQ G¶LGpDX[ GpFRXYUDQW G¶XQH SDUW WRXWH O¶LQWHOOLJHQFH GH  VRQ DFWLYLWp FUpDWULFH HW
G¶DXWUHSDUWO¶H[SUHVVLRQWRWDOHGHVDOLEHUWpODTXHOOHORLQGH FRQVWLWXHUXQVLPSOHLGpDO DEVWUDLW
qui ne tiendrait pas de la réaliWpV¶LQFDUQHHQXQHpWKLTXHSUDWLTXHGRQWODILQDOLWpHVWGHUpYpOHUj
O¶KRPPH VHV SRVVLELOLWpV LQILQLHV 6L FRPPH OH UHPDUTXH 6RXOH\PDQH %DFKLU 'LDJQH OD
SKLORVRSKLHLTEDOLHQQHVHWUDGXLWSDUXQHpWKLTXHUHSRVDQWVXUODGLVWLQFWLRQHQWUHG¶XQHSDUWce
TXL IRUWLILH O¶HJR F¶HVW-à-GLUH DXJPHQWH VD SXLVVDQFH G¶LQGLYLGXDWLRQ HW FH TXL G¶DXWUH SDUW OD
GLPLQXH HW GRQF GpWUXLW O¶HJR 6 %DFKLU 'LDJQH   OD UpYpODWLRQ GH OD QDWXUH YpULWDEOH GX
VXMHW HVW GRQF  LQVFULWH DX SURJUDPPH G¶XQH pWKLTXH GH O¶DIILUPDWLRQ F¶HVW-à-dire dans une
GpPDUFKHUDWLRQQHOOHHWFULWLTXHVXUODVLJQLILFDWLRQG¶XQHH[SpULHQFHUHOLJLHXVHLVODPLTXHDSWHj
réintroduire O¶,MWLKkG18 dans la cité musulmane. Mais cette réouverture GHV SRUWHV GH O¶,MWLKkG
V¶DFFRPSOLWHOOH-même, à l¶LQWpULHXUG¶XQHSKLORVRSKLHSUDWLTXHTXLHQFRQFHYDQWO¶LGHQWLWpKRUV
GXFKDPSORFDOHWFXOWXUHOFRQIqUHHQFRUHDXVRLXQHSHUVRQQDOLWpDXVHQVG¶XQPRXYHPHQWOLEUH
G¶autocréation FRQWLQXH$XVVLjODFULWLTXHGXP\VWLFLVPHGHODFRQWHPSODWLRQHWGHO¶Hxtinction
se greffe celle de O¶© H[DOWDWLRQGHO¶DSSDUWHQDQFH » qui, selon Iqbal, enferme le sujet dans une
YpULWDEOH VHUYLWXGH TXL SHXW GLPLQXHU VD SXLVVDQFH G¶DJLU SXLVTXH substituant au mouvement
G¶LQYHQWLRQGHVRLDXSURFqVGH© devenir-personne », qXLHVWO¶LGHQWLWpKXPDLQHPrPH « GHV
PDQLqUHVSUppWDEOLHVGHYLYUHHWGHSHQVHU « 19. Cette exaltation et cette servitude sont pour le
                                                                                                                     
18    Démarche   critique   eƚ ƌĂƚŝŽŶŶĞůůĞ ĚĠƐŝŐŶĂŶƚ ů͛ĞĨĨŽƌƚ ƉĞƌƐŽŶŶĞů ;Ě͛ŝŶƚĞƌƉƌĠƚĂƚŝŽŶͿ ĚĂŶƐ ůĂ ƋƵġƚĞ ĚĞ ůĂ ǀĠƌŝƚĠ͕
ů͛Ijtihâd  ƌĞŶǀŽŝĞăůĂŶĠĐĞƐƐŝƚĠĚ͛ġƚƌĞĞŶƉŚĂƐĞĂǀĞĐƐŽŶĠƉŽƋƵĞ͙  

19      S.  B.  Diagne,  Ibid.,  p.  67  

99  

 
philosophe-SRqWH FRPPH OH SpFKp VXSUrPH GH O¶LGROkWULH G¶R OD VLJQLILFDWLRQ GH FHV SURSRV
G¶,TEDO :

Brise toute les idoles de la tribu et de la caste


Brise les antiques coutumes qui enchaînent les hommes20
La tension-vers-le-dehors devient alors la condition de la révélation du je qui découvre sa
plénitude dans sa rencontre avec autrui ou, pour parler comme Lévinas, dans son exposition à
O¶$XWUH /HYLQDV   OD UpYpODWLRQ GX VXMHW SROLWLTXH HQ ,VODP V¶pQRQFH FRPPH XQH
FRVPRSROLWLTXH HW  O¶H[DOWDWLRQ GH O¶DSSDUWHQDQFH FRPPH OH SOXV JUDQG SpFKp GH O¶,VODP DLQVL
TX¶LODSSDUDvWGDQVFHWWHH[KRUWDWLRQTXLV¶pQRQFHHQLPSératif catégorique :

Libère-WRLG¶XQHVSDFHWURSpWURLW

Celui qui a échappé aux liens de toutes les dimensions

6¶pWHQGFRPPHOHFLHOGDQVWRXWHVOHVGLUHFWLRQV «

Toi, resté paralysé dans un coin de la prairie,

&RPPHOHURVVLJQROWXWHFRQWHQWHVG¶XQHseule rose.

Pareil à la brise, rejette de tes épaules le fardeau de la satisfaction21.

'DQV FHWWH SHUVSHFWLYH XQH pWKLTXH DXWKHQWLTXH QH V¶HIIHFWXHUDLW-elle pas, dès lors, que sur un
PRGHGpDPEXODWRLUHYRLUHG¶XQYDJDERQGDJHTXLSHUPHWDXVXMHWG¶pSURXYHr au fur et à mesure
de ses pérégrinations sa condition de citoyen du monde "'¶RFHWWHTXHVWLRQ :

/¶DFFRPSOLVVHPHQW G¶XQH pWKLTXH GH OD UpYpODWLRQ GX VXMHW WHOOH TX¶HOOH V¶pQRQFH GDQV OD
SKLORVRSKLH GH 0XKDPPDG ,TEDO Q¶LQFDUQH-t-elle pas de façon effective et performative la
maxime kantienne - $JLVG¶DSUqVXQHPD[LPHTXLSXLVVHYDORLUHQPrPHWHPSVFRPPHXQHORL
universelle !

Mais aussi cette éthique de la révélation du sujet musulman dans sa tension-vers le dehors
V¶DFFRPSOLW HQ IRQFWLRQ GH VD FDSDFLWp à briller comme la luciole pour éclairer son chemin et
éventuellement être chemin ainsi que le résume Souleymane Bachir Diagne dans Islam et société
ouverte : la fidélité et le mouvement dans la pensée de Muhammad Iqbal :

'HO¶pWKLTXHGH0XKDPPDG,TEDO « RQSHXWGLUHTX¶HOOHHVWIRQGpHVXUFHWWHRQWRORJLHSRpWLTXH
de la luminescence : les êtres sont plus ou moins luminescents selon le degré de consistance de

                                                                                                                     
20    Cf.  note  16    

21    M.  Iqbal,  Les  Secrets  du  Soi,  les  mystères  du  non-­‐moi,  Paris,  Albin  Michel,  p.  181,  1989.  

100  

 
O¶HJRGRQFVHORQO¶LQWHQVLWpGHOHXUFRQVXPDWLRQRXHQFRUH± ce qui revient au même dans cette
pKLORVRSKLH GH O¶DFWLRQ R OD UpDOLWp HVW LQDFKqYHPHQW HW FKDQJHPHQW ± selon leur puissance
G¶DJLU22

Conclusion 4XHOOHFRPPXQDXWpSRXUO¶HVSDFHSXEOLF ?

/¶HIIHFWXDWLRQ GX SURMHW LTEDOLHQ VXU OH PRGH G¶XQH GRXEOH UXSWXUH PpWDSK\VLTXH HW SROLWLTXH
dont la ILQDOLWpHQGpFRQVWUXLVDQWO¶XQHGHVFDUDFWpULVWLTXHVGHO¶pFROHSDQWKpLVWHVRXILHO¶éthique
de la consumation23, dévoile une conséquence majeure  O¶DIILUPDWLRQ GH OD vita contemplativa
sur la vita activa. La dénonciation de cette dernière tendance du soufisme qui, selon Iqbal, a
corrompu le principe dynamique, trouve un écho favorable dans le champ des communautés
FRQIUpULTXHV DX 6pQpJDO TXL PDOJUp OH IDLW TX¶HOOHV DLHQW FRQVWLWXp FRPPH O¶D LQGLTXp
Souleymane B. Diagne, des espaces de reterritorialisation SRXU OXWWHU FRQWUH O¶DFFXOWXUDWLRQ
coloniale et postcoloniale, remplissent en même temps une fonction de déterritorialisation dans
leur capacité à épouser les mutations politiques, économiques, sociales et culturelles de la
PRGHUQLWpVpQpJDODLVH&¶HVW FHTXLDSSDUDvWGDQVFHVSURSRVGH6RXOH\PDQH%'LDJQHORUVTX¶LO
écrit :

La reterritorialisation confrérique a également une réalité spirituelle qui tient à la capacité de


O¶LVODP VRXIL P\VWLTXH  j DFFHSWHU OH FRPSURPLV DYHF OHV VWUXFWXUHV LGpRORJLTXHs, les attitudes
PHQWDOHV HW FXOWXUHOOHV SURYHQDQW GHV WHUURLUV '¶XQH PDQLqUH JpQpUDOH HW HQ WHQDQW FRPSWH
WRXWHIRLVGHGLIIpUHQFHV GDQVOHGHJUpGXSKpQRPqQHG¶XQHFRQIUpULH j XQHDXWUHO¶RUJDQLVDWLRQ
confrérique, surtout dans les chants religieux et les pèlerinages périodiques où elle renouvelle sa
FRQVFLHQFH G¶HOOH-même, recentre les énergies spirituelles sur de véritables terroirs religieux et
                                                                                                                     
22    P.  57  (Cf.  >͛ŝůĞĚĞ'ĂďƌŝĞůŝĂůŽŐƵĞ  entre  luciole  et  phalène  :  

  La  phalène  :  

  -­‐>ĂůƵĐŝŽůĞĞƐƚƚƌğƐůŽŝŶĚ͛ĠŐĂůĞƌůĂƉŚĂůğŶĞ͘ŶƋƵŽŝƉĞƵƚ-­‐ĞůůĞƐ͛ĞŶŽƌŐƵĞŝůůŝƌĚ͛ƵŶĨĞƵƐĂŶƐ  chaleur  ?  

  La  luciole  :  

  -­‐  :ĞƌĞŵĞƌĐŝĞŵŝůůĞĨŽŝƐŝĞƵĚĞŶ͛ġƚƌĞƉĂƐƉŚĂůğŶĞ͘DŽŝũĞŶĞŵĞŶĚŝĞƉĂƐůĞĨĞƵĚ͛ĂƵƚƌƵŝ͘  

  ŝŶƐŝ ĐŚĞnj /ƋďĂů ůĂ ƉƵŝƐƐĂŶĐĞ Ě͛ŝŶĚŝǀŝĚƵĂƚŝŽŶ Ɛ͛ĂĐĐŽŵƉůŝƚ ă ƚƌĂǀĞƌƐ ůĞƐ ĂĐƚĞƐ ƋƵŝ ĨŽƌƚŝĨŝĞŶƚ ů͛ĞŐŽ Ğƚ ůĞ ŵĂů ĞƐƚ ůĂ
ĚŝŵŝŶƵƚŝŽŶĚƵƐŽŝ͛͘Žù  le  verset  coranique  que  cite  Iqbal  dans  «  ZĞĐŽŶƐƚƌƵŝƌĞůĂƉĞŶƐĠĞƌĞůŝŐŝĞƵƐĞĚĞů͛/ƐůĂŵ  »  

  KƶŝĞƵũƵŐĞƉĂƌů͛ąŵĞ  :  «  ƉĂƌů͛ąŵĞĞƚĞůƵŝƋƵŝů͛ĂĠƋƵŝůŝďƌĠĞ͕ĞƚůƵŝĂŵŽŶƚƌĠůĞƐǀŽŝĞƐĚƵŵĂůĞƚĚĞůĂƉŝĠƚĠ͕
ďĠŶŝƐŽŝƚĐĞůƵŝƋƵŝů͛ĂĨĂŝƚŐƌĂŶĚŝƌĞƚƐŽŝƚĚĠƚƌƵŝƚĐĞůƵŝƋƵŝů͛ĂĐŽƌƌŽŵƉƵĞ  »  (91  :7-­‐10).  P.  130.  

23    Souleymane  B.  Diagne,  Islam  et  société  ouverte,  la  fidélité  et  le  mouvement  et  le  mouvement  dans  la  pensée  de  
Muhammad  Iqbal,  Paris,  Maisonneuve  et  Larose,  2001,  p.54  

101  

 
GHV FDSLWDOHV ORFDOHV &HWWH GLDOHFWLTXH Q¶HVW SDV VDQV HIIHW VXU VRQ © autre » dialectique :
O¶H[LVWHQFHG¶XQ PRXYHPHQWG¶RSSRVLWLRQjFHWWHUpDOLWpFRQIUpULTXHG¶XQ,VODPOHWWUpTXLVHYHXW
plus ouvert sur la Umma universelle24.

Engagé dans ce processus permanent, que Souleymane B. Diane appelle une « dialectique de
O¶RXYHUWHWGXIHUPp »25O¶XQLYHUVD[LRORJLTue du sujet confrérique est en permanence réévalué,
HW UpDSSURSULp GDQV OHV WHUPHV G¶XQ GLVFRXUV FULWLTXH TXL H[FqGH HW UpDPpQDJH OD ORJLTXH
WHUULWRULDOHFRQIUpULTXHDILQTX¶HOOHV¶LQVFULYHGDQVXQHSHUVSHFWLYHG¶RXYHUWXUHFHOOHSDUH[HPSOH
G¶XQHKXPDQLWp QRLUHjODUHFKHUFKHG¶XQ RXSOXVLHXUV SRUWUDLWVTXLVLHGjVDSDUWG¶KXPDLQHWGH
SDUWLFLSDWLRQ j O¶XQLYHUVHO26 &¶HVW FH GRXEOH PRXYHPHQW TXL HVW FRQWHQX GDQV OH VRXV-titre de
O¶RXYUDJH27 que Bachir a consacré à la pensée de Muhammad Iqbal : la fidélité et le mouvement.

1¶HVW-FHSDVOjDIILUPHUOHVFRQGLWLRQVGXUHQRXYHDXG¶XQKXPDQLVPHLVODPLTXHFRVPRSROLWLTXH
DOWHUQDWLYH KHXUHXVH DX[ IRQGDPHQWDOLVPHV DFWXHOV GDQV OHV WHUPHV GH OD UHFRQTXrWH G¶XQ DJLU
politique défiguré par des expériences de négatioQ GH OD SOXUDOLWp FRQVWLWXWLYH GH O¶KXPDQLWp
G¶pWDOHPHQW GH O¶LGHQWLWp GDQV XQ HVSDFH GRQW OD VHXOH YDOHXU GRLW V¶H[SULPHU GDQV OD
manifestation de la multiplicité, dans la lexis et la praxis ?

Dans le sillage de ce paradigme fissionnel qui souscrit au pURJUDPPH G¶XQH SKLORVRSKLH GH
O¶DFWLRQHWGHODSURVSHFWLYHOHSURMHWFRVPRSROLWLTXHQHSHXWV¶HQFOHQFKHUTX¶jO¶LQWpULHXUG¶XQH
FXOWXUHGRQWO¶HIILFDFHGpSHQGGHVDcapacité à se construire, à se réinventer, à se déployer en une
LGpHpOHYpHGHO¶KXPDLQ28. '¶RO¶LQWpUrWGHODPLVHHQJDUGHGXPDU[LVWH5HPR&DXWRQLFRQWUH
OHVPpIDLWVGHO¶HQIHUPHPHQWLGHQWLWDLUH :

                                                                                                                     
24    Souleymane  Bachir  Diagne,  «    >͛Ăǀenir  de  la  tradition  »,  in  >Ğ^ĠŶĠŐĂů͕ƚƌĂũĞĐƚŽŝƌĞƐĚ͛ƵŶƚĂƚ,  Paris,  Karthala,  
1992,  pp.289-­‐290  

25    «  >͛ĂǀĞŶŝƌĚĞůĂƚƌĂĚŝƚŝŽŶ  »,  Op.  cité,  p.86  

26    Mamadou  Diouf,  Histoire  du  Sénégal,  Op.  cité,  p.10  

27    S.  Bachir  Diagne,  Islam  et  société  ouverte,  la  fidélité  et  le  mouvement  dans  la  pensée  de  Muhammad  Iqbal,  Op.  
cité.    

28    Souleymane  B.  Diagne,  La  leçon  de  Gaston  Berger,  in  Gaston  Berger,  Une  introduction  à  une  philosophie  de  
ů͛ĂǀĞŶŝƌ,  Dakar,  Nouvelles  Editions  Africaines  du  Sénégal,  1997,  p.16  

102  

 
Une culture qui ne veut ni modifier le monde, ni ses rapports extérieurs, ni les conditions de vie,
HVWXQHFXOWXUHGHPXVpHTXLFUDLQWO¶DLUIUDLVGHO¶DFWLRQ29

9RLOjXQSRVWXODWTXLVHIRQGHVXUOHUHIXVGHWRXWGLVFRXUVSDVVpLVWHHQV¶LGHQWLILDQWSOXW{WjXQ
GLVFRXUV YLYDQW TXL Q¶HVW SDV OD GLVTXDOLILFDWLRQ V\VWpPDWLTXH GX SDVVp PDLV VRQ DFWXDOLVDWLRQ
GDQV OH SUpVHQW DLQVL TX¶LO DSSDUDvW GDQV le concept de « Tradition vivante » TX¶pQRQFH OH
philosophe franco-sénégalais, Gaston Berger, en ces termes :

(OOHQ¶HVWSRLQWODVWpULOHpYRFDWLRQGHVFKRVHVPRUWHVPDLVODUHGpFRXYHUWHG¶XQpODQFUpDWHXUTXL
se transmet à travers les générations et qui, à la fois réchauffe et éclaire30
/¶XQH GHV FRQGLWLRQV GH FHWWH VRUWLH FULWLTXH GH O¶HQIHUPHPHQW LGHQWLWDLUH DSWH j IDYRULVHU XQH
VXEMHFWLYDWLRQ SROLWLTXH SRUWpH SDU O¶H[SpULHQFH GX UHOLJLHX[ FRQVLVWH GRQF G¶XQH SDUW j Up-
impulser une pratique vivante de la déliaison en restituant les controverses et les tensions
GRFWULQDOHV WUqV W{W SUpVHQWHV GDQV OH FKDPS LVODPLTXH HW G¶DXWUH SDUW j OLEpUHU O LVODP GH FHV
lectures orthodoxes, qui souvent en privilégiant les interprétations littéralistes et légalitaristes du
&RUDQ IDYRULVHQW O¶H[WUpPLVPH UDGLFDO  $XVVL OH GpSORLHPHQW HIIHFWLI GX SROLWLTXH GDQV OHV
champs traversés par des expériences communautaires est toujours fonction de la mémoire du
SROLWLTXH(QG¶DXWUHVWHUPHVTXHOOHPpPRLUHIDXW-il restituer pour construire ou reconstruire en
islam un espace public politique phagocyté et défiguré par des pesanteurs obscurantistes et
aliénantes issues de lectures extrémistes du Coran plus apte à instituer un mode de production
d'un lien conjonctif qu'à favoriser réellement une pratique vivante, liante et instituante de la
déliaison?

$LQVL ,TEDO H[KRUWH O¶homo islamicus à briser les clôtures géographiques et dogmatiques de la
race, de la couleur ou de la culture - TX¶,TEDOFRQVLGqUHQWFRPPHGHYpULWDEOHVLGROHV- car la terre
entière est (pour lui) un lieu de prière, selon le fameux précepte attribué au Prophète Muhammad.
,O QHV¶DJLWSDVGHYRLU GDQVFHWWH DIILUPDWLRQO¶H[SUHVVLRQVXEWLOHG¶XQLPSpULDOLVPHLVODPLTXH
DLQVLTX¶LOSHXWUpVXOWHUG¶XQHOHFWXUHDXSUHmier degré, mais plutôt la manifestation du message
GH O¶,VODP j WUDYHUV OH UHIXV GH FRQILQHU OH FUR\DQW GDQV XQ HVSDFH SDUWLFXOLHU31. Il apparaît

                                                                                                                     
29    Cité  par  Senghor  in  «  Liberté  I  »,  Paris,  Seuil,  1964,  pp.95-­‐96  

30    Gaston  Berger,  «  >͛ŚŽŵŵĞŵŽĚĞƌŶĞĞƚƐŽŶĠĚƵĐĂƚŝŽŶ  »,  Paris,  PUF,  1962,  p.125  

31    ĂŶƐ ĐĞƚƚĞ ƉĞƌƐƉĞĐƚŝǀĞ͕ ,Ăďŝď ŚĂƚƚLJ͕ ĚŝƉůŽŵĂƚĞ ƚƵŶŝƐŝĞŶ ƋƵŝ ĨƵƚ ă ůĂ ƚġƚĞ ĚĞ ů͛Organisation   de   la   Conférence  
Islamique  (K/ͿĞŶϭϵϳϵƚƌĂĚƵŝƐĂŝƚĐĞƚƚĞĞdžŝŐĞŶĐĞĐŽƐŵŽƉŽůŝƚŝƋƵĞĚĞů͛/ƐůĂŵĞŶĐĞƐƚĞƌŵĞƐ  :  «  Le  musulman  est  
ĂƉƉĞůĠăŶĞƉĂƐƚƌŽƉƐ͛ĂƚƚĂĐŚĞƌăƵŶƚĞƌƌŝƚŽŝƌĞƉĂƌƚŝĐƵůŝĞƌ͘>ĂƚĞƌƌĞĞŶƚŝğƌĞĞƐƚƐĂƉĂƚƌŝĞ͘dŽƵƚĞƐůĞƐĚŝƌĞĐƚŝŽŶƐƐŽŶƚ
bonnes.   Il   a   les   connaître   et  à   les   explorer,   soit   pour   y   apporter   un   bien   inattendu,   soit   pour   y   trouver   refuge.  
WĂƌƚŽƵƚ ŽƶŝůǀĂ͕ůĞ ŵƵƐƵůŵĂŶĞƐƚ ƚŽƵũŽƵƌƐĐŚĞnj ůƵŝ͘ /ůĞƐƚ ůĞĐŝƚŽLJĞŶĚƵŵŽŶĚĞƉĂƌĞdžĐĞůůĞŶĐĞ;͙ͿŶĞĨĨĞƚ͕ƌŝĞŶ
Ŷ͛ĞƐƚ ƉůƵƐ ǀĂƐƚĞ ƋƵĞ ůĂ ͨ  ĚĞŵĞƵƌĞ ĚĞ ů͛/ƐůĂŵ  ͩ͘ >͛ƵŶŝǀĞƌƐĂůŝƚĠ ĐŽŶĐĞƉƚƵĞůůĞ Ğƚ ů͛ƵŶŝǀĞƌƐŝƚĠ ŐĠŽŐƌĂƉŚŝƋƵĞ ǀŽŶƚ ĚĞ
103  

 
clairement que le « processus-de-devenir-personne » QH SHXW V¶HQFOHQFKHU TX¶DX UHJDUG G¶XQH
instance dont la cDUDFWpULVWLTXHIRQGDPHQWDOHHVWODPLVHjGLVWDQFHTX¶HOOHHIIHFWXHSDUUDSSRUWj
WRXWHORJLTXHG¶HPEULJDGHPHQWRXGHUHYHQGLFDWLRQLGHQWLWDLUHTXLULVTXHUDLWG¶RFFXOWHUODGRXEOH
ambition de sa nécessaire dé-FRPPXQDXWDULVDWLRQ j VDYRLU O¶DFKqYHPHQW G¶XQ monde dans une
SHUVSHFWLYHFRVPRSROLWHHWO¶LQYHQWLRQSHUPDQHQWHGXVRL&HSURFHVVXVHVWLQVFULWDXSURJUDPPH
GHFHTX¶RQDDSSHOpXQHSKLORVRSKLHGXYDJDERQGDJHTXHO¶DXWHXUGX0HVVDJHGHO¶2ULHQW laisse
transparaître dans ces vers de son poème :

Tu n¶HVSDVHQFRUHOLEpUpGHVOLHQVGHO¶HDXHWGHO¶DUJLOH «
/HF°XUYDJDERQGQHVXSSRUWHSDVGHGHPHXUHUVXUSODFH
(WQHVHFRQWHQWHSDVGHO¶HDXGXIHXGHO¶DUJLOH
1HW¶LPDJLQHSDVTX¶LOUHSRVHGDQVOHFRUSV :
&¶HVWXQHPHUTXLQHVHODLVVHFDSWLYHUSDr aucun rivage32

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
pair  ͖ ů͛ŝĚĠĞ Ɛ͛ŝŶĐĂƌŶĞ Ğƚ ƐĞ ƉƌŽůŽŶŐĞ ĚĂŶƐ ůĞ ƌĠĞů  »,   Une   mission   universelle,   in   >Ğ ŽƵƌƌŝĞƌ ĚĞ ů͛hŶĞƐĐŽ,   Paris,  
Unesco,  Août-­‐Septembre  1981,  p.  15.  

32    Iqbal,  DĞƐƐĂŐĞĚĞů͛KƌŝĞŶƚ͕/ďŝĚ.,  Vers  161  et  104,  p.  81  et  64  

104  

 
2.4± Session I V : C R ISE E C O N O M I Q U E : L E SO U F ISM E C O M M E
P A R A D I G M E SA L V A T E U R
Cette session a eu deux Modérateurs : Cheikh Ibrahim Mahmoud Diop, Secrétaire Général de
Ligue des Oulémas du Maroc et du Sénégal et Dr Thierno KA, Al Habib Professeur à
O¶8QLYHUVLWp&KHLNK$QWD'LRSGH'DNDU

¾ 2.4.1 Communication 1 : Soufisme et questions contemporaines : les


voie d'une éthique de développement , par Pr Abdou Aziz Kébé, Département
Arabe U C A D Dakar

'HSXLV VRQ LQWURGXFWLRQHQ $IULTXH O¶LVODP D FRQWULEXp G¶XQH IDoRQ VLJQLILFDWLYH j GRQQHU XQ
VHQV j OD YLH GHV SRSXODWLRQV DX[ PRPHQWV GHV UXSWXUHV GHV PXWDWLRQV HW GHV UrYHV &HOD V¶HVW
vérifié, avec les marabouts qui ont lutté contre les esclavagistes entre le 16e et le 17e siècle33. Cela
V¶HVWDXssi vérifié, avec la plateforme gouvernementale des Almamis au 18e siècle34 et la nouvelle
culture islamique instaurée par les fondateurs de pôle spirituel, El Hadj Malick Sy et Cheikh
Ahmadou Bamba entre autres.
2Q SHXW GLUH TX¶j OD ILQ GX e siècle, les marabouts ont offert aux populations cette
nouvelle culture fondée sur un islam soufi et confrérique bien ancré dans une territorialité
DIULFDLQHHWWRXUQpYHUVO¶DFFHSWDWLRQGHµ¶O¶DXWUH¶¶GDQVWRXWFHTX¶LODSSRUWHGHIpFRQGDQW
Par leurs enseignements, Tijâniya et la Muridiyya ont exhorté les populations à
V¶LPSUpJQHU GH O¶pWKLTXH ORUVTXH  OHV FRQGLWLRQV pFRQRPLTXHV VH VRQW WUDQVIRUPpHV HW TXH OH
FDSLWDOLVPHDSULVOHSDVVXUO¶pFRQRPLHGHVXEVLVWDQFH

                                                                                                                     
33  
  Ԥ
 sŽŝƌăĐĞŶŝǀĞĂƵů͛ĠǀŽůƵƚŝŽŶĚƵŵŽƵǀĞŵĞŶƚdƵƵďŶĂĂŶĞƚůĞƌƀůĞĚĞEąĕŝƌŠŶ͘ŽŶƐƵůƚĞƌ
ů͛ŽƵǀƌĂŐĞĚĞZZz;Ϳ  ;  la  Sénégambie  du  15e  au  19e  siècle,  Paris,  Harmattan  1998.  Voir  aussi,  Mamadou  
Diouf  :  Le  Kajoor  au  19e  siècle.  Pouvoir  ceddo  et  conquête  coloniale,    Paris  Karthala,  1990.  

34  
Ԥ
 Consulter  SAMB  (A)  :  ĐŽŶƚƌŝďƵƚŝŽŶĚƵ^ĠŶĠŐĂůăůĂůŝƚƚĠƌĂƚƵƌĞĚ͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶĂƌĂďĞ͕  

  Consulter  KEBE  (A.A)  :  Les  tribunaux  musulmans  du  Sénégal  dans  la  politique  coloniale  depuis  la  
e
promulgation  du  code  civil  ũƵƐƋƵ͛ăůĂƉƌĞŵŝğƌĞŐƵĞƌƌĞŵŽŶĚŝĂůĞ͘Thèse  de  doctorat  de  3  cycle,  UCAD,  FLSH,  
1998/1999.  

105  

 
$XMRXUG¶KXL SOXV TXH MDPDLV OD FULVH TXH YLW OH monde à cause des effets du
QpROLEpUDOLVPHHWGHO¶pOHFWLRQGHODUHQWDELOLWpDXGpWULPHQWGHO¶pTXLWpQRXVHQWUDvQHjUHYLVLWHU
OHXUSHQVpHSRXUHQWLUHUGHVOLJQHVTXLUHSODFHQWO¶KRPPHGDQVWRXWHVVHVGLPHQVLRQVDXFHQWUH
du développement.
Pour mieu[DSSUpKHQGHUFHWWHFRQWULEXWLRQGXVRXILVPHjODSURPRWLRQGHO¶pWKLTXHSRXU
pULJHUXQHVRFLpWpRO¶KRPPHHVWDXGpEXWHWjODILQGHVSURMHWVGHGpYHORSSHPHQWMHYRXVLQYLWH
à scruter les postulats de base de la nouvelle spiritualité à caractère social. Aussi, cette
FRQWULEXWLRQ V¶DUWLFXOH DXWRXU GH GHX[ SRLQWV : la base spirituelle de la nouvelle culture de
FRKDELWDWLRQHWGHSOXUDOLWpGDQVXQSUHPLHUWHPSV'DQVXQGHX[LqPHSRLQWRQWUDLWHUDGHO¶RIIUH
éthique dans la construction sociale à travers les enseignements des maîtres soufis.
1- Nouvelle culture spirituelle et éthique de la différence
Les soufis ont vite compris que pour construire une société positive, il faut en avoir les
compétences, c'est-à-dire être capable de positivisme en paroles et en actes. Cette compétence est
au-GHVVXVGHODVWULFWHUHGRQGDQFHGHVDFWHVULWXHOOHVSXLVTX¶rWUHSRVLWLIF¶HVWDFFRPSOLUWRXVOHV
actes dans la perspective de la relation avec Dieu. Le Hadith du Prophète Psl qui résume la
qualité du musulman dans cette positivité en atteste : le musulman est celui dont ni les actes ni les
propos ne sont causes de nuisance.
35

&HKDGLWKLOOXVWUHELHQODFRQFHSWLRQVRXILHGHO¶H[LVWHQFHIRQGpHVXUO¶DEVWHQWion de tout
FHTXLQ¶HVWSDVSRVLWLIQLSRXUVRLQLSRXUOHVDXWUHV&¶HVWODUDLVRQSRXUODTXHOOHLOVRQWHQVHLJQp
la Hijra comme une capacité à être là tout en étant différent par le comportement. En outre, le
Coran rappelle le pacte scellé avec les enfDQWVG¶,VUDsODXWRXUGHFHUWDLQVSULQFLSHVWKpRORJLTXHV
IDPLOLDX[ HW VRFLDX[ FRXURQQpV SDU O¶REOLJDWLRQ GH SRVLWLYLVPH j O¶HQGURLW GHV JHQV &¶HVW
seulement après cette exigence de positivisme que le rituel de la prière et de la zakat sont cités36.
&¶HVWLci, que les soufis ont compris que tout ritualisme qui ne repose pas sur le positivisme au
EpQpILFH GHV JHQV HVW XQ ULWXDOLVPH VHF SRXU QH SDV GLUH VWpULOH $X GHPHXUDQW F¶HVW FH
positivisme qui est la finalité de la spiritualité dans le soufisme dont la PDWULFHUHVWHO¶pWKLTXHGH
comportement social inscrite dans le fameux hadith :
                                                                                                                     
35  
  Ԥ
 Ce  hadith  est  rapporté  par  Ahmad  et  authentifié  sur  la  base  des  normes  de  Bukhârî  et  Muslim.  

36  
  Ԥ
 Sourate  Baqara,  verset  83  

106  

 
« adorer Allah comme si tu Le vois sachant que même si tu ne Le vois
pas, Lui te voit»
""
Cette éthique du comportement social à travers la spiritualité du rituel permet de forger un
KRPPHRXXQHIHPPHGRQWO¶DWWHVWDWLRQGHIRLQ¶HVWSDVXQHVLPSOHSURIHVVLRQGHYRL[3XLVTXHOD
YRL[TXLV¶pOqve dans la prière exprime un discours traductible en actions bénéfiques capables de
la propulser, comme dit le Coran :
/HVSDUROHVVXEOLPHV/XLVRQWGHVWLQpHVPDLVF¶HVWO¶DFWLRQJpQpUDWULFH
de bienfaits qui leur servent de véhicules.
37

/D VSLULWXDOLWp GDQV OH ULWXHO HW O¶H[WLQFWLRQ GH WRXWHV OHV DFWLRQV GH O¶H[LVWHQFH GDQV OD
TXrWH GH O¶DJUpPHQW G¶$OODK VRQW GH SXLVVDQWV PRWLIV SRXU WHQGUH YHUV O¶H[FHOOHQFH 3RXU OHV
maîtres soufis, la vie et la mort, la prière HWOHVVDFULILFHVEUHIWRXWHO¶H[LVWHQFHHVWWHQGXHYHUVFH
EXWXOWLPHTXLHVWG¶DUULYHUj$OODKDYHFGHVYDOHXUVDMRXWpHV
38

&¶HVWSRXUFHWWHUDLVRQTX¶LOVWURXYHQWTXHWRXWDFWHTXLQHVRLWSDVDXVVLVSLrituellement et
positivement gorgé que la prière, est en soi un déni de prière comme dit le poète :
µ¶ µ¶
Les maitres soufis, une fois cette nouvelle spiritualité bien comprise, élaborée et mise en
°XYUHGDQVOHFDGUHGHVpFROHVVSLULWXHOOHVTX¶RQDSSHOOHOHVFRQIUpULHVVHVRQWévertuées à faire
GHVRUWHTX¶HOOHHPEUDVVHFHTXLGDQVODYLHHQVRFLpWpVWUXFWXUHOHVGHYHQLUVHWOHVH[LVWHQFHV,OV
VHVRQWHIIRUFpVGHFUpHUOHVFRQGLWLRQVG¶XQHH[LVWHQFHROHVidentités remarquables, qui ne sont
que des accidents, ne puissent être les déterminants discriminants. Les ethnies, les races et les
couleurs, les langues et les caractéristiques anthropologiques sont à leurs yeux secondaires devant
les valeurs universellHV GHGLJQLWpKXPDLQHGHMXVWLFHVRFLDOHG¶pWKLTXH GHODGLIIpUHQFH&¶HVW
O¶+RPPHTXLHVWODFLEOHHWQRQOHVDFFLGHQWVTXLOXLVRQWUDWWDFKpV
                                                                                                                     
37  
  Ԥ
 Sourate  Fâtir,  verset  10  

38  
  Ԥ
 Sourate  Anâm,  verset  162  

107  

 
Leur lecture du verset 13 de la sourate Hujurât qui établit la pluralité ethnique et
anthropologique comme un accident à vocation de coopération et de reconnaissance, les a
entraînés à promouvoir une fraternité humaine dans le respect des différences tant que celles-ci
QHYLROHQWSDVO¶pWKLTXHHWOHVXQLYHUVDX[39.
&¶HVWjFHQLYHDXTXHOHPRQGHG¶DXMRXUG¶KXLDEHVoin de leurs lumières car, notre siècle
HVWPDUTXpSDUXQHPDXYDLVHJHVWLRQGHODSOXUDOLWpjFDXVHGHVYHOOpLWpVG¶KpJpPRQLHIRQGpHVVXU
un complexe de supériorité, le plus souvent de la culture occidentale sur les autres. Pour les
tenants de ce complexe de supériorité, le développement se réduit à une application de leur
PRGqOHFXOWXUHOHWpFRQRPLTXH,OVUpIXWHQWjO¶LVODPODFDSDFLWpGHFRQGXLUHOHGpYHORSSHPHQWHW
de respecter les droits humains.
'¶XQDXWUHF{WpLO\DOHVSDUWLVDQVG¶XQLVODPFRQTXpUDQWTXLGRLWµ¶KpULWHU¶¶GHODWHUUH
XQLVODPSXULWDLQHWµ¶PpPRULDOLVWH¶¶TXLYRLWG¶XQ°LOFULWLTXHWRXWFHTXLOXLHVWGLIIpUHQW&HWWH
FDWpJRULH GH PXVXOPDQV FURLW IHUPHPHQW TX¶LO IDLOOH RSSRVHU DX PRGqOH RFFLGHQWDO XQ UHIXV
catégorique fût-FH SDU O¶Xtilisation de la violence au nom du Jihâd. On voit même, un refus de
scolarisation des enfants (garçons et filles) dans les écoles publiques par réaction identitaire et
LGpRORJLTXH /HV FDV OHV SOXV H[WUrPHV VRQW QRWpV HQ $IULTXH GH O¶2XHVW DYHF OD VHFWH %oku
Haram.
&HWWH FRQFHSWLRQ GH OD GLIIpUHQFH G¶XQ F{Wp FRPPH GH O¶DXWUH XQH GLIIpUHQFH H[FOXVLYH
SRXUQHSDVGLUHLUUpGXFWLEOHHWKRVWLOHHVWXQIDFWHXUGHFRQIOLWVHWG¶DQWDJRQLVPHHWQHIDYRULVH
aucune construction positive ni aucune coopération. Or, qX¶HVW-FHTX¶XQGpYHORSSHPHQWGDQVXQ
HQYLURQQHPHQWG¶KRVWLOLWpHWG¶H[FOXVLYLWp ?
Pour construire un monde fraternel et pluriel, une autre conception de la différence, est
promue par les maîtres soufis qui pensent que la vérité du Coran nous renseigne que Le Seigneur
connaît mieux que quiconque celui qui est égaré de son chemin et celui qui est bien guidé40&¶HVW
cela que les soufis ont proposé aux musulmans et aux humains de façon globale en replaçant
O¶pWKLTXHDXFHQWUHGHVTXrWHVDXVVLELHQGHVSLULWXDOité que de richesses matérielles.
Ainsi, on retrouve dans cet enseignement diffusé par les maîtres soufis, les fondements
G¶XQH VRFLpWp SOXULHOOH R FKDFXQ GDQV VD GLIIpUHQFH HW GDQV VHV FRPSpWHQFHV HVW FDSDEOH GH
                                                                                                                     
39  
  Ԥ
 Voir  KEBE  (A.A)  :  Serigne  Abdoul  Aziz  Sy  Dabbâkh  ͗ŝƚŝŶĠƌĂŝƌĞĞƚĞŶƐĞŝŐŶĞŵĞŶƚƐ͕>͛,ĂƌŵĂƚƚĂŶϮϬϭϬ͕Ɖϲϱ  

40  
  Ԥ
 Sourate  Najm,  verset  30  

108  

 
procéder à la production de biens matériels ou immatériels dans un parfait esprit de partage et de
coopération.
2- Nouvelle spiritualité et construction sociale : E thique, avoir et être
/HVVRFLpWpVGDQVOHVTXHOOHVQRXVYLYRQVVRQWVRXYHQWDSSUpFLpHVVXUODEDVHGHFHTX¶RQ
appelle le développemenW 6L OHGpYHORSSHPHQW HVW VHXOHPHQW DUWLFXOp DXWRXUGHO¶DFFXPXODWLRQ
GH ULFKHVVHV TXHOOH TX¶HQ VRLW OD SURYHQDQFH GH O¶pUHFWLRQ G¶LPPHXEOHV HW GH WRXUV RX GH
FRQVWUXFWLRQG¶LQIUDVWUXFWXUHVDXVVLLPSUHVVLRQQDQWHVVRLHQW-elles, cela ne suffit pas, aux yeux du
soufisme pour être accepté.
3RXUOHVVRXILVF¶HVWO¶rWUHKXPDLQTXLHVWODFLEOHHWQRQOHVLQIUDVWUXFWXUHVQLO¶DYRLU,OV
VHIRQGHQWVXUO¶pWKLTXHGHO¶DYRLUTX¶HQVHLJQHOH&RUDQHWTX¶LOLQVWDOOHGDQVO¶RUGUHpFRQRPLTXH
HW ILQDQFLHU &¶HVW SDUFH TXH O¶LVODP pWDEOLW XQH MRQFWLRQ HQWUH O¶HQYLURQQHPHQW PDWpULHO j
construire et la vie psycho-VSLULWXHOOH GH O¶rWUH KXPDLQ 6DQV FHWWH GLDOHFWLTXH RQ DFFRUGH OD
SULRULWpDXPDWpULHODXGpWULPHQWGHO¶KXPDLQHWGXGLYLQ
&¶HVWSRXUFHODTXHOHVPDvWUHVVRXfis ont mis en garde contre la confusion des priorités
GDQV OD FRQVWUXFWLRQ VRFLDOH &DU HQ PHWWDQW O¶DYRLU DX-GHVVXV GH O¶rWUH RQ UHQG O¶KRPPH
PDUJLQDOHWPrPHpWUDQJHUDXGpYHORSSHPHQW3RXUOHVVRXILVOHGpYHORSSHPHQWVDQVO¶rWUHQ¶HVW
que leurre et illusion pour ne pas dire perdition comme le dit le Coran dans la sourate Takâthur.
&¶HVWSRXUFHODTXHGDQVO¶LVODPOHVMXULVWHVFRPPHOHVVRXILVRQWpULJpGHVSULQFLSHVSRXUTXHOH
SURGXFWLIQ¶pFUDVHSDVO¶KXPDLQHWTXHO¶DFFXPXODWLRQQHVHIDVVHSDVDX détriment des valeurs.
µ¶(QHIIHWO¶LVODPUHSRVHVRQV\VWqPHpFRQRPLTXHVXUXQHpWKLTXHTXL
YRXGUDLWTXHWRXWUHSRVHVXUXQDFWHGHIRLHWG¶DGRUDWLRQXQHTXrWHG¶DJUpPHQW
GH 'LHX SDU O¶pOpJDQFH GHV DFWHV HW O¶DEVHQFH GH WRXWH QXLVDQFH $LQVL OHV
Fuqahâ ont enseigné que la production économique ne saurait être dégagée de
sa fonction sociale qui, comme toute autre fonction sociale, doit être empreinte
GH O¶LGpH GH 'LHX /¶DFWLYLWp pFRQRPLTXH D XQ GRXEOH VHQV : productif et
éthique. Cela se perçoit dans les réflexions des penseurs comme al-Ghazâli
dans Kitâb adab al-.DVEZDO0D¶kVK41¶¶
2Q FRQVWDWH TXH GDQV FHUWDLQHV VRFLpWpV GLWHV GpYHORSSpHV O¶KRPPH VH UHWURXYH PDOJUp
tout comme dans une jungle, perdue et angoissé, proie de tous les prédateurs de marché et de

                                                                                                                     
41  
  Ԥ
  KEBE   (A.A)  :   Ethique   islamique,   finances   et   développement   économique  :   contribution   à   la   réflexion.  
ŽŵŵƵŶŝĐĂƚŝŽŶăůĂŽŶĨĠƌĞŶĐĞĚĞƐKƵůĠŵĂƐĚĞƐKƵůĠŵĂƐĚ͛ĨƌŝƋƵĞ-­‐  Dakar,  Juin  2010  

109  

 
VSpFXODWLRQ&HVHQWLPHQWG¶rWUHXQpWUDQJHUGDQVXQHQYLURQQHPHQWRXO¶XUEDQLVPHHVWQRWRLUHj
WUDYHUVOHVLPPHXEOHVHWOHVLQIUDVWUXFWXUHVPDLVRO¶KRPPHHVWPDOKHXUHX[SDUFHTXHGpQXpGH
valeurs, est le sentiment le mieux partagé au sein des maîtres soufis du Sénégal. El Hadj Malick
6\V¶HQSODLQW :
Ô 0HVVDJHUG¶$OODKWRLTXLUHSUpVHQWHVWRXWSRXUPRL
Je suis, dans cette période, totalement perdu !
«
Un siècle où les gens, de la guidance de la sunna se détournent
Et dire le savoir y est aussi un handicap !
«
-HFRQVWDWHTXHWRXWOHPRQGHEODQFVHWQRLUVV¶LQYLWHQW
Les uns les autres à négliger la science, quelle perte !

........

........
42

On constate ici que pour redresser la situation, il préconise le renversement de la tendance


HQDFFRUGDQWODSULRULWpDXVDYRLUHWQRQjO¶DYRLU&HWWHGpPDUFKHVHMXVWLILHGXIDLWTXHF¶HVWOH
savoir qui permet de créer une valeur ajoutée fondée sur une compétence et une éthique
conjointes. Sinon, la quête de richesse est tributaire du seul critère de rentabilité, et dans ce cas,
O¶pWKLTXHQ¶HVWSDVGHPLVHHWO¶KRPPHFRXUWGHJUDQGVULVTXHV
&¶HVWSRXUTXHO¶pGXFDWLRQSRXUYR\HXVHG¶pWKLTXHUHWURXYHVDSODFHGDQVOHPRXODJHGHV
PHQWDOLWpVHWPrPHGDQVO¶DFWXDOLVDWLRQGXULWXHOTX¶LOODQFHFHFULGHF°XUTXLWHUPLQHVRQDSSHO :
O vous, enfants de ce siècle je vous invite
A vivifier la religion par la science, Répondez à mon appel !
43

                                                                                                                     
42  
  Ԥ
 ĐƚĞƐĚƵŽůůŽƋƵĞŝŶƚĞƌŶĂƚŝŽŶĂůƐƵƌůĂǀŝĞĞƚů͛ƈƵǀƌĞĚ͛ů,͘DĂůŝĐŬ^z͕  Dakar,  2002,  p  271  

110  

 
En écho à cet appel de Maodo44 &KHLNK $KPDGRX %DPED V¶GUHVVH DX[ JHQV HQ OHXU
PRQWUDQWO¶LPSpULHXVHQpFHVVLWpGHFRQMXJXHUOHVDYRLUjO¶pWKLTXHDILQTXHODVFLHQFHQHVRLWSDV
génitrice de démons ni de monstres :
Je vous conseille, à vous tous, étudiants
de chercher le savoir avec la bonne éducation
Efforcez-YRXVGDQVODVFLHQFHHWO¶pGXFDWLRQ
$LQVLTXHOHWUDYDLOF¶HVWOjFHTXLSURFXUHFHTXHYRXVGpVLUH]

45

Il ajoute ailleurs :
La science et le travail sont deux joyaux
Pour le bien des deux mondes, ils sont les pourvoyeurs
46

Ailleurs, il reprend :
Hâtez-vous, tous, vers la science

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
43  
  Ԥ
 KEBE  (A.A)  :  Serigne  Abdoul  Aziz,  op.cit,  p  95  

44  
  Ԥ
 ͛ĞƐƚůĞƐƵƌŶŽŵĚ͛ů,ĂĚũDĂůŝĐŬ^LJ͕ƋƵŝĂƵŶĞƐŝŐŶŝĨŝĐĂƚŝŽŶĚĞƌĞƐƉĞĐƚĞƚĚĞĚĠĨĠƌĞŶĐĞ͘  

45  
  Ԥ
   Dâhira  Rawd  ar-­‐Rayâhîn  :  Dirâsât  Hawlal-­‐Murîdiyya,  Touba-­‐  Sénégal  2010,  p  56  

46  
  Ԥ
 Idem,  p  61  

111  

 
3RXUO¶DJUpPHQWGX7UqV0DMHVWXHX[ !
47

2QFRQVWDWHGDQVFHVGLIIpUHQWVFRQVHLOVGHVPDvWUHVVRXILVTX¶LO\DXQSDUL sur la science


HWVXUOHVYDOHXUV&DUSRXUHX[VHXOHODVFLHQFHHVWFDSDEOHGHWUDQVIRUPHUO¶HQYLURQQHPHQWHWGH
FUpHUOHVFRQGLWLRQVG¶XQPLHX[-rWUHVXUOHSODQPDWpULHO0DLVXQHVFLHQFHTXLQ¶HVWSDVDUWLFXOpH
DX[YDOHXUVjO¶pWKLTXHHVWJURVVHGH risques et de dangers pour la société. Cela est perceptible
GDQVOHUDSSHOIDLWDX3URSKqWHTXHF¶HVWSDUODVFLHQFHTX¶$GDPDpWppOX :
48

3DU FRQWUH OXL OH 3URSKqWH GRLW VH UHPpPRUHU FHWWH VFLHQFH SDU O¶DFTXLVLWLRQ GX VDYRLU
DUWLFXOpjO¶pWKLTXH :
49

6L OHVHVSDFHVG¶DFTXLVLWLRQGHFRQQDLVVDQFHQHVRQWSDVQRXUULV GHO¶HVSULW G¶pWKLTXHOD


transformation des valeurs de savoir en valeurs économiques et sociales risque de ne prendre en
FRQVLGpUDWLRQTXHODUHQWDELOLWpGXPDUFKpODIUXFWLILFDWLRQGHO¶LQYHVWLVVHPHQWHWQRQODILQDOLWp
GHO¶être.
La nouvelle spiritualité à caractère social, proposée par les soufis, prend en contre pied
cette conception qui fait la confusion entre développement et urbanisation ou modernisation des
équipements et des villes. La compétition pour les symboles de O¶DYRLUHWGXSRXYRLUHQWUDvQHXQH
acquisition non vertueuse de biens, une corruption généralisée et un accaparement de ce qui
DSSDUWLHQW j WRXW OH SHXSOH 7RXW FH TXH O¶RQ FRQQDvW DXMRXUG¶KXL VRXV OH YRFDEOH GH PDO
gouvernance et qui sévit dans nos pays. 'DQV XQH VRFLpWp SDUHLOOH O¶pOLWH SRUWHXVH GH VDYRLU HW

                                                                                                                     
47  
  Ԥ
 Idem,  p  68  

48  
  Ԥ
 Baqara,  30-­‐31  

49  
  Ԥ
 Al-­‐͚ůĂƋ͕ϭ  

112  

 
G¶pWKLTXH HVW QpJOLJpH DX SURILW GHV H[KLELWLRQQLVWHV GH O¶DYRLU PDO DFTXLV HW GHV VSpFXODWHXUV
KDELOHV&¶HVWFHTXHGpQRQFH(O+DGM0DOLFN6\TXDQGLOLQYLWHjXQUpDMXVWHPHQWVSLULWXHO :
On est cRQWHPSRUDLQG¶XQHpSRTXHODYHUWX\HVWSHXFRQVLGpUpH
/HXUSUpRFFXSDWLRQQ¶HVWTXHGDQVO¶pOpYDWLRQGHVLPPHXEOHV
8QHpSRTXHROHVGpVLUVQ¶RQWSRLQWGHOLPLWHV
/HXUUHOLJLRQHVWVHXOHPHQWO¶DFFXPXODWLRQGHULFKHVVH

(....)
50

&HVOLJQHVVRQWXQHFULWLTXHG¶XQHFHUWDLQHLGpHGXGpYHORSSHPHQWTXLVHUDLWSHUFHSWLEOH
dans les tourV TXL V¶pOqYHQW OHV LQIUDVWUXFWXUHV TXL pPHUYHLOOHQW OHV V\PEROHV GH ULFKHVVHV TXL
sont exhibés alors que les populations sont dégénérées. Ce modèle de développement est plutôt
pour les soufis comme El H. Malick et Cheikh A. Bamba une illusion puis que l¶KRPPH\SHUG
de son humanité.
'HYDQWXQHWHOOHFRPSpWLWLRQSRXUO¶DFFDSDUHPHQWHWO¶DFFXPXODWLRQOHVVRXILVSURSRVHQW
XQHVRFLpWpRODFRPSpWLWLRQVHIDLWGDQVOHEXWGHFUpHUOHVFRQGLWLRQVGHO¶H[FHOOHQFHHWQRQGH
ODPpGLRFULWpHWGHO¶LQWULJXH&DUXQHVRFLpWpSDUHLOOHQ¶HVWSDVYLDEOHHWQ¶HVWSDVVXUOHVUDPSHV
du développement intégral qui articule savoir, éthique, compétence et production de richesse. El
H. Malick le rappelle :
Ah ! Les enfants de ce siècle font la compétition
Pour les lambris de ce monde et la quête de prestige
«
Dans la quête des biens, ô mon peule, soyez élégants !
&RPPHLOQRXVHVWYHQXGX*XLGHGHO¶KXPDQLWp

                                                                                                                     
50  
  Ԥ
 KEBE  (A.A)  :  Serigne  Abdoul  Aziz,  op.cit,  p  96  

113  

 
(....)

2Q UHWURXYH OHV PrPHV SUpRFFXSDWLRQV FKH] &KHLNK %DPED TXL YRLW GDQV O¶DEVHQFH
G¶pWKLTXHGDQVODTXrWHGHULFKHVVHXQHYoie sans issue, une simple illusion:
Chercher ce qui est licite est une obligation
Pour tout musulman sans aucun doute
Evitez ce qui est illicite ô mon peuple
Il détourne de la droiture et conduit aux fers

51

Conclusion :
La crise du monde occidental doit inviter les peuples à scruter les ressorts culturels et
porter un regard critique sur le développement. Le modèle de développement hérité du
capitalisme occidental est-il le seul modèle à promouvoir ? Les travers de ce modèle et le
complexe de supériorité qui le caractérisent ne sont-ils pas à corriger ? Existe-t-il dans les
enseignements islamiques et en particulier dans les expériences des maîtres soufis, des éléments
qui pourraient contribuer à redresser ce modèle ?
Ce sont ces questions qui nous ont motivés à tenter de voir dans les enseignements du
VRXILVPH HW VXUWRXW GHV PDvWUHV GX 6pQpJDO OHV FRQWRXUV G¶XQ DMXVWHPHQW j O¶pWKLTXH (W LO HVW
apparu que le développent, compris dans son seul cadre financier et économique, sans les repères
pWKLTXHVQ¶HVWSDVDFFHSWDEOH
Ainsi, les maîtres soufis comme Cheikh A. Bamba et El H. Malick Sy nous procurent
DVVH] G¶pOpPHQWV SRXU LQMHFWHU GDQV OD SHQVpH GX GpYHORSSHPHQW GHV pOpPHQWV G¶pWKLTXH TXL
SRXUUDLHQWUpFRQFLOLHUO¶pFRQRPLHjODYHUWXHWOH GpYHORSSHPHQWjO¶KXPDLQ

                                                                                                                     
51  
  Ԥ
 Dâhira  Rawd  ar-­‐Rayâhîn,  op.cit,  p  91-­‐92  

114  

 
2.4.2 - Communication 2 : Le Tasawuf véritable et sa contribution à la
réforme par le Dr Ahmad Mahmoud Karima Professeur de Scie QFHVUHOLJLHXVHVjO¶8QLYHUVLWp
Al Azhar Le Caire/ Egypte

/D VXEVWDQFH GH O¶HQVHLJQHPHQW 6RXIL HVW GDQV OHV pWDWV VSLULWXHOV DKZDO  HW OHV VWDWLRQV GH OD
réalisation (maqamats). /HVVWDWLRQVVRQWOHVpWDSHVGXSDUFRXUVGHO¶DVSLUDQW dans son voyage
verV VRQ 6HLJQHXU $ FKDTXH pWDSH LO V¶DUUrWH SRXU FRPEDWWUH VRQ kPH HW SHLQH MXVTX j FH
TX¶$OODKOXLDXWRULVHRXOXLIDYRULVHOHSDVVDJHjXQHDXWUHpWDSH$LQVLLOSDVVHG¶XQQLYHDXjXQ
autre et continue son ascension.

Les états, sont les effluves divinV TXL VRXIIOHQW VXU O¶DVSLUDQW HW IRQW YLYUH j O¶kPH XQ pWDW
spirituel passager dont elle reste nostalgique.

1RWUH PDLWUH OH JDUDQW GH OD UHOLJLRQ O¶LPDP *KD]DOL GLW : la voie pour accéder à ces réalités
commence par le combat spirituel. Il faut se dépouiller des imperfections et des vices, et couper
OHVDWWDFKHVWHUUHVWUHVSXLVV¶RULHQWHUHQWRWDOLWpYHUV$OODK8QHIRLVFHWpWDWDWWHLQW$OODKSUHQG
HQ FKDUJH VRQ VHUYLWHXU HW V¶HPSDUH GH VRQ F°XU TX¶,O LOOXPLQH SDU OHV OXPLqUHV GH OD
connaissance. La FRPSDVVLRQHPEUDVVHOHVHUYLWHXUHWODIRLLOOXPLQHO¶HVSULWHWGLODWHODSRLWULQH
/HV VHFUHWV GX PRQGH DQJpOLTXH PDODNRXW  WUDQVSDUDLVVHQW HW OHV YRLOHV GH O¶LQFRQVFLHQFH
tombent pour découvrir les mystères de la miséricorde qui embrasse toute chose. Les vérités
sapientielles se révèlent au serviteur mis dans les dispositions adéquates. Il doit se purifier et se
concentrer tout en étant sincère, pour étancher sa soif de connaissance par le flux divin.

$LQVLOHWDVDZXIYpULWDEOHHVWO¶LQWXLWLRQVSLULWXHOOHGRQWO¶RUJDQHHVWOHF°XUTXLUpJLWOHVDFWHV,O
V¶DJLWG¶RSpUHUXQHFRQMRQFWLRQHQWUHOD&KDULDHWOD+DTLTDHQWRXWHV\PELRVHVDQVQpJOLJHUO¶XQH
HQ IDYHXU GH O¶DXWUH /¶HIIRUW VSLULWXHO PXMDKDGD  HVW OH PR\HQ SRXU OD FRQWHPSODWLRQ
(Mushahada).

Allah dit dans sourate Chams : Celui qui purifie son âme aura la félicité. Le prophète (psl) dit :
/¶,KVDQHVWG¶DGRUHU$OODKFRPPHVLWXOHYRLVFDUPrPHVLWXQHOHYRLVSDV/XLWHYRLW

La réforme requise est celle qui commence par la purification de VRLFDUO¶KXPDLQDpWpFUppSRXU


XQ EXW SUpFLV $OODK GLW GDQV VRXUDWH GKDUL¶DW : « -H Q¶DL FUpp OHV -LQQV HW OHV KXPDLQV TXH SRXU
P¶DGRUHU ». Il dit dans sourate baqara : « Et quand ton Seigneur dit aux anges, je vais mettre sur
terre un régent (khalifa) ». Ensuite, la réforme de la société qui doit permettre à ses membres de
vivre pleinement la spiritualité.

/H7DVDZXIHVWODSDUWLHVSLULWXHOOHGHODUHOLJLRQ&¶HVWDXVVLODPpGHFLQHGHVkPHVTXLVRLJQHOHV
YLFHV HW OHV PDODGLHV GX F°XU Elle fait passHU OH FUR\DQW GX GHJUp GH O¶DGRUDWLRQ UpYpUHQFLHOOH
(maqam ijlal) : « les croyants GRQWOHVF°XUVVRQWDIIOLJpVSDUODPHQWLRQG¶$OODK ªjO¶DGRUDWLRQ
VHUHLQH PDTDPLWPL¶QDQ : « 3DUODPHQWLRQG¶$OODKOHVF°XUVVRQWDSDLVpV ».
115  

 
Nos contemporains vivent dans un déséquilibre psychique et sociologique qui met le monde dans
une crise plurielle, qui menace la paix mondiale. Les besoins matériels démesurés et les futilités
pORLJQHQWOHVJHQVGHODVSLULWXDOLWp6HXOHODPpGHFLQHGHVkPHVHQVRLJQDQWOHVF°XUV malades
peut opérer une réforme dans les sociétés. Notre prophète (psl) a dit : Il y a dans les corps un
RUJDQH TXL HQ pWDQW VDLQ HQWUHWLHQW WRXW OH FRUSV PDLV V¶LO HVW FRUURPSX LO DOWqUH WRXW OH FRUSV
&¶HVWOHF°XU (Hadith rapporté par boukhari)

Un autre hadith dit $OODKQHFRQWHPSOHYRVIRUPHVHWYRVFRUSVPDLVLOFRQWHPSOHYRVF°XUV

Celui qui étudie les écritures avec intelligence et perspicacité, saisira que certains ont préféré
V¶DWWDFKHUjODOHWWUHGHVWH[WHVHWV¶RFFXSHUGHVDSSDUHQFHV. Ils ont donné la primauté aux tenus
vestimentaires, aux cheveux et barbes, et se préoccupent des affaires matérielles plus que des
choses spirituelles. Généralement, ils remplissent leurs devoirs religieux mécaniquement sans
jouir de la saveur spirituelle. Beaucoup de croyants qui se préoccupent de leur barbe, et de leur
vêtement se montrent offensifs et durs envers leur prochain. Ils ne connaissent que la version
TX¶LOV RQW DGRSWp GH O¶LVODP HW GpQLJUHQW OHV DXWUHV pFROHV MXULGLTXHV RX WKpRORJLTXHV DOOant
MXVTX¶j DFFXVHU FHX[ TXL QH SDUWDJHQW SDV OHXU RSWLRQ /H SURSKqWH SVO  D DYHUWL : à la fin des
temps, des jeunes embrigadés tiendront des discours éloquents et dévieront de la religion. Ils
sont de notre race et parlent notre langue. (Hadith rapporté par Muslim)

/¶HQVHLJQHPHQWPDWpULDOLVWHHWO¶HVWKHWLTXHHQKRQQHXUFKH]OHVQRQPXVXOPDQV conduit à une


vie de luxure, où le suicide et les maladies psychiques sont fréquents. Or, Le Tasawuf V¶LOHVW
bien exposé et bien assimilé peut aider nos contemporains à faire face aux problèmes sociaux et
psychologiques.

'¶R OD UHVSRQVDELOLWp GHV pFROHV VRXILHV TXL GRLYHQW V¶DSSOLTXHU j HQVHLJQHU HW SUDWLTXHU OHV
vertus, et à dénoncer les affabulateurs et les imposteurs qui déforment leur doctrine. Il y a aussi
certains qui ont fait du Tasawuf un gagne pain. Quand aux détracteurs des soufis, ils ne font
point de distinction entre les vrais saints et les faux dévots.

Allah a fait que les musulmans aient des vocations différentes, et Il dit dans le Coran : Ceux qui
FRPEDWWHQWGDQVODYRLHG¶$OODKDORUVTXHG¶DXWUHVSDUFRXUHQWOHSD\VjODUHFKHUFKHGHVPR\HQV
de subsistance.

1RXVSURSRVRQVjO¶RFFDVLRQ de ce colloque mondial, que le Sénégal abrite :

- une autorité intellectuelle qui régule et diffuse les SXEOLFDWLRQV VRXILHV DILQ G¶DFWXDOLVHU OH
Soufisme et ainsi faire la symbiose entre les réalités spirituelles antérieures et
contemporaines. 8QHFRPPLVVLRQG¶DXWHXUVFRQWHPSRUDLQVSRXUUDGDQVXQWHOFDGUHH[HUFHUXQH
influence pour plus de concertation entre les Soufis.

-Des publications scientifiques qui corrigent les aberrations et qui vulgarise la pensée soufie.

116  

 
-Organiser des symposiums et des débats avec les détracteurs du Tasawuf afin de mieux éclairer
le public.

-Organiser des colloques cycliques GDQVOHVGLIIpUHQWVSD\VGHO¶LVODPHWDLQVLGLIIXVHUODSHQVpH


soufie et lui donner un caractère académique.

-0HWWUHXQHSDUWLHGHVGRQDWLRQVLVODPLTXHVGDQVO¶HQVHLJQHPHQWVRXILFRQWHPSRUDLQ

)LQDOHPHQW MH YRXV UHPHUFLH DX QRP GH O¶LOOXVWUH XQLYHUVLWp G¶DO $]KDU SRXU FH FROORTXH HW MH
remercie son excellence le président Abdoulaye Wade, son gouvernement et tout le peuple
VpQpJDODLVMHUHPHUFLHSDUWLFXOLqUHPHQWODFRPPLVVLRQG¶RUJDQLVDWLRQHWODFRPPXQDXWpPRXULGH

Mes salutations distinguées

2.4.3 - Communication 3 : les Mourides surfent sur la vague de la


mondialisation par la conquête ter ritoriale , Par Cheikh Gueye, Docteur en Géographie,
Chercheur à E nda Tiers Monde.

/HV 0RXULGHV VRQW OHV PHPEUHV G¶XQH FRQIUpULH PXVXOPDQH QpH DX 6pQpJDO j OD ILn du XIXe
VLqFOH SURMHW UHOLJLHX[ IRQGp DXWRXU GX GRJPH HW GH O¶DFWLRQ G¶XQ KRPPH &KHLNK $KPDGRX
%DPED  TXL V¶HVW LPSRVp FRPPH XQH ILJXUH GH SURXH XQ QRXYHDX UHSqUH SRXU XQH SDUWLH
importante de la société sénégalaise. Ils représentent désormais plus du 1/3 de la population du
pays.

&RQQXV SRXU OHXU LPSODQWDWLRQ UXUDOH OHV PRXULGHV RQW GpPRQWUp XQH FDSDFLWp G¶DGDSWDWLRQ
FHUWDLQHHQV¶LPSRVDQWGDQVOHVPLOLHX[XUEDLQVWRXWHQFRQVWUXLVDQWOHXUSURSUHFDSLWDOHGHYHQXH
depuis quelques années la deuxième ville du Sénégal. Les territoires économiques des Mourides
VH VRQW GLYHUVLILpV DYHF O¶LQVHUWLRQ GDQV OHV ILOLqUHV FRPPHUFLDOHV VRXV-régionales, la migration
LQWHUQDWLRQDOH GH WUDYDLO O¶LPSRUW-export. Mais au-GHOj GH O¶pFRQRPLTXH OHV 0RXULGHV
conquièrent GH SOXV HQ SOXV G¶DXWUHV VSKqUHV  OD SROLWLTXH OHV WHUULWRLUHV YLUWXHOV G¶,QWHUQHW OD
diplomatie, etc. (Guèye, 2002, 2003 ; Guèye, Gervasoni, 2005)

/¶LPDJH GH UpXVVLWH PRXULGH FRQVWDPPHQW FRQVWUXLWH DLQVL TXH O¶HVSULW GH FRQTXrWH SDUWLFLSHQW
pleinement GHO¶LQYHQWLRQGHODFRQIUpULHTXLVHGRQQHDLQVLOHVPR\HQVGHVDFUpGLELOLWpHWFHX[
GHFRQIURQWHUODUHSUpVHQWDWLRQLGpDOLVpHG¶HOOH-même à la réalité. Cette invention continue se fait
par emprunts, innovations, interprétations nouvelles tout autant qXH SDU O¶DSSHO j OD PpPRLUH
(OOH SURFqGH G DFFXPXODWLRQV VXFFHVVLYHV HW G HPERvWHPHQW G¶DFWLYLWpV GLIIpUHQWHV (OOH DSSHOOH
DYHFLQVLVWDQFHOHFRQFHSWGHIURQWLqUHFHWWHIUDQJHPRXYDQWHRV¶LQYHQWHODVRFLpWp

Ainsi, la construction territoriale des MoXULGHVDFRPPHFDSLWDOH7RXEDPDLVFRPSRUWHG¶DXWUHV


points forts au Sénégal et dans le monde (Bava, Guèye 2002). Cependant, la confrérie ne peut
117  

 
plus se satisfaire de consacrer son énergie à construire seulement une capitale de référence. Elle
tente de rHSURGXLUH DX ORLQ OH V\PEROLTXH HW OH VDFUp &¶HVW OH VHQV TX¶LO IDXW GRQQHU j OD
multiplication de « lieux moments ªRUJDQLVpVHQWUHWHQXVTXLV¶LPSRVHQWGDQVO¶DJHQGDQDWLRQDO
et international de la confrérie. Saint-Louis, Dakar, Diéwol, Louga, Pisa, Brescia, New York,
/LEUHYLOOH .KRXURX 0EDFNp RQW SOXV RX PRLQV DFTXLV GDQV O¶LPDJLQDLUH PRXULGH XQH
VLJQLILFDWLRQSDUWLFXOLqUHDYHFO¶RUJDQLVDWLRQGHFpOpEUDWLRQVOLpHVDXVRXYHQLURXjODYLVLWHG¶XQ
grand cheikh de la confrérie.

Cette recherche interroge le sens de ces célébrations qui « grandissent » très vite, devenant des
« lieux moments » incontournables, couverts par tous les médias et qui redéfinissent les
IURQWLqUHV V\PEROLTXHV HW VSDWLDOHV G¶XQH FRQIUpULH HQ LQYHQWLRQ SHUSpWXHOOH &¶HVW OH FDV GX
magal des deux rakaa de Saint-Louis pour se souvenir des péripéties du passage de Cheikh
$KPDGRX %DPED GHYDQW OH &RQVHLO 3ULYp GH OD &RORQLH GX 6pQpJDO GH OD SULqUH VXU O¶RFpDQ
célébrée aux parcelles assainies de Dakar, du magal de Diéwol organisé sur le lieu même de
O¶DUUHVWDWLRQ GH &KHLNK $KPDGRX %DPED HWF 4XL HQ VRQW OHV LQLWLDWHXUV de ce type de
manifestations ? Les décisions relèvent-elles du centre ou de la périphérie de la confrérie ? Ses
« lieux-moments ª GH UDVVHPEOHPHQW HW G¶pPRWLRQ FROOHFWLYH Dboutissent parfois à des
revendications « nationalistes » ou des expressions de positions politiques comme il est de
tradition  OHVPRXULGHVRQW GpERXORQQpO¶DQQpH GHUQLqUHODVWDWXHGH)DLGKHUEHTXL WU{QHVXUOD
place de Saint-/RXLV HW O¶RQW UHPSODFp SDU celle de Cheikh Ahmadou Bamba. Comment ces
manifestations sont préparées, organisées, vécues ? Que représentent-elles dans la vie de la
confrérie ? Ne deviennent-elles pas de nouveaux lieux de production et de valorisation du
charisme ? Les Mourides vont MXVTX¶jDFKHWHUOHVOLHX[V\PEROLTXHVGHFHVPDQLIHVWDWLRQVSRXU
une appropriation plus affirmée et pour pouvoir passer du lieu commun toubien à des espaces
signifiants pour eux mais à négocier.

Une invention au contact de nouvelles frontières

Le premier WHUULWRLUHGHODFRQIUpULHIXWUXUDO&¶HVWGDQVFHPLOLHXTX¶HOOHDFRQoXVHVSUHPLqUHV
VWUXFWXUHVG¶HQFDGUHPHQWHWTX¶HOOHV¶HVWIRUJpHXQHVSULWGHFRQTXrWHHWXQHUHODWLYHFRKpVLRQTXL
se sont traduits par un dynamisme agricole auquel on les a souvent identifiés (Copans, 1988).
0DLVO¶XUEDQLVDWLRQDFFpOpUpHGRQWO¶XQHGHVFDXVHVpWDLWODFULVHGHODSD\VDQQHULHDOODLWUpYpOHU
une autre facette des Mourides  OHXU FDSDFLWp G¶DSSURSULDWLRQ G¶DXWUHV WHUULWRLUHV HW G¶DXWUHV
UpDOLWpV(QHIIHWLOVQ¶pWDLent nullement préparés à la complexité des activités urbaines dont ils
FRQWU{OHQW j SUpVHQW O¶HVVHQWLHO GDQV WRXWHV OHV YLOOHV VpQpJDODLVHV : le commerce, le transport,
O¶DUWLVDQDWODPLFURILQDQFHHWF

118  

 
&HWWH UHODWLYH UpXVVLWH pFRQRPLTXH PRXULGH HW O¶HVprit de conquête qui leur est attribué,
SDUWLFLSHQW SOHLQHPHQW GH O¶LQYHQWLRQ GH OD FRQIUpULH TXL VH GRQQH DLQVL OHV PR\HQV GH VD
FUpGLELOLWp HW FHX[ GH FRQIURQWHU OD UHSUpVHQWDWLRQ LGpDOLVpH G¶HOOH-même à la réalité. Cette
invention continue se fait par emprunts, innovations, interprétations nouvelles tout autant que par
O¶DSSHO j OD PpPRLUH (OOH SURFqGH G DFFXPXODWLRQV VXFFHVVLYHV HW G HPERvWHPHQW G¶DFWLYLWpV
différentes. Entre décisions individuelles et action collective, imaginaire commun et modes
particuliers de subjectivation, les Mourides développent une culture de la frontière, à la charnière
du religieux et du profane, de la production et de la consommation de biens religieux, du local et
du global.

La frontière est une interface privilégiée entre des systèmes différents, où fonctionnent les effets
GHV\QDSVH UXSWXUHSDVVDJHUHODLV G¶DXWDQWSOXVIRUWVTXHOHJUDGLHQWHQWUHOHVGHX[V\VWqPHV
séparés est le plus fort. On est alors tout près du sens que Turner avait donné à « frontier », cette
frange mouvante où se forgeait une nouvelle société. « Frontier » évoque des ouvertures, des
HVSDFHVGHFUpDWLYLWpHWQRQODIHUPHWXUHTXLHVWDVVRFLpHKDELWXHOOHPHQWjO¶LGpHGHIURQWLqUHHQ
IUDQoDLV &¶HVW GRQF OH VHQV DQJODLV GX WHUPH TXH QRXV FRQVLGpURns comme une clef
PpWKRGRORJLTXH SHUWLQHQWH TXL SHUPHW G¶DSSUpKHQGHU HW G¶DQDO\VHU OH UDSSRUW GH WRXWH VRFLpWp
DYHFOXLPrPHHWVHVSULQFLSHVDLQVLTX¶DYHFOHPRQGHJOREDOTXLVHFRQVWUXLW

La société locale comme internationale ainsi que leurs interactioQVVRQWFRQIURQWpHVDXMRXUG¶KXLj


différents types de frontières qui structurent leur fonctionnement et changent leur représentation
GX PRQGH /H PRQGH GH O¶DXWUH VD YLVLRQ VHV YDOHXUV VHV UHVVRXUFHV GHYLHQQHQW VRXYHQW
indispensables au vécu de chacun. /¶RXYHUWXUHHWOHSDUWDJHVRQWGpVRUPDLVODUqJOHGHYLHGDQV
beaucoup de domaines même s'ils ne se font souvent pas sans conflits. La différence ne se décline
SOXV HQFORLVRQQHPHQWHW OHVSURFHVVXV V¶RULHQWHQW SOXV YHUVO¶K\EULGDWLRQ /DIURQWLqUHpWDQWXn
lien entre des univers de pensée, des espaces et des processus différents, elle devient structurante
de la société en réseau (Castells, 1999) que deviennent les organisations religieuses, notamment
OHV FRQIUpULHV VRXILHV (Q OHXU VHLQ O¶DQFUDJH GH UpIpUence, le territoire auquel on est
YLVFpUDOHPHQWDWWDFKpQ¶HVWSOXVFHWHVSDFHVWDWLTXHIHUPp,OHVWVRXPLVjGHVIOX[HWGHVUHIOX[
DYHFGHVUDPLILFDWLRQVH[WHUQHVGHSOXVHQSOXVpORLJQpHV/DGLVWDQFHQ¶HVWSOXVXQREVWDFOH(OOH
enrichit les réseaux confrériques et leur donne des opportunités prosélytiques, sociales,
économiques, illimitées.

/¶LQYHQWLRQ GHV VRFLpWpV HW GHV JURXSHV GDQV OH QRXYHDX FDGUH GH OD VRFLpWp HQ UpVHDX DSSHOOH
avec insistance le concept de frontière, celle qui protège et en même temps permet le contact et
REOLJHjMRXHUjVHFRQIURQWHUjV¶LQYHQWHUHQSHUPDQHQFHHWPXWXHOOHPHQW/HFKDQJHPHQWGHOD
VRFLpWpQHVHSURGXLWMDPDLVjO¶LQWpULHXUG¶XQSUpFDUUpQLex nihilo$XMRXUG¶KXLSOXVTXHGDQVOH
passé, il se fait au contact du monde. Ainsi, la construction territoriale des Mourides a comme
FDSLWDOH7RXED PDLV FRPSRUWH G¶DXWUHV SRLQWV IRUWV DX 6pQpJDO HW GDQV OH PRQGH /D FRQIUpULH
mouride est devenue un mouvement socio-religieux migrant qui a désormais une envergure
119  

 
internationale affirmée avec ses implantations de plus en plus fortes en dehors du Sénégal. Elle
forme à Brescia, à Milan, à Naples, à New York, à Washington, à Madrid, à Libreville, à Abidjan,
j -RKDQQHVEXUJ HW GDQV EHDXFRXS G¶DXWUHV YLOOHV HXURSpHQQHV DPpULFDLnes et africaines, une
communauté très attachée à son identité, ses valeurs, et qui se retrouve régulièrement à travers
des manifestations religieuses, des visites de marabouts, des revendications syndicales, etc. Dans
cette optique, elle a besoin de retroXYHU GDQV WRXV OHV OLHX[ G¶LPSODQWDWLRQ GHV VXSSRUWV
V\PEROLTXHVTXLVWUXFWXUHQWO¶LGHQWLWp/DUHODWLRQj7RXEDV¶HQWURXYHWUDQVIRUPpHHWODYLOOHMRXH
un rôle de plus en plus prégnant dans ce réseau de villes où les communautés mourides
prospèrent. Cette évolution est loin d'être propre à la confrérie mouride. Désormais, toutes les
autres confréries sénégalaises (les tijanes, les khadres et les layènes notamment) fonctionnent en
s'appuyant sur leur multiterritorialité se référant à l'histoire étrangère de leur fondation, la
circulation initiatique ou prosélytique des fondateurs ou de leurs successeurs, ou encore le
caractère transnational de la dispersion des disciples d'aujourd'hui.

Ce qui a fait pendant longtemps, la particularité des Mourides, c'est également leur faculté à se
recentrer symboliquement et concrètement sur le lieu saint de Touba, à jouer dans ces entre-deux
pour valoriser et légitimer une certaine pratique nomade du religieux. La construction dispersive
du territoire en milieu rural puis en milieu urbain est allée de pair avec la concentration dans la
capitale. Celle-FLHVWGHYHQXHODGHX[LqPHYLOOHGX6pQpJDODYHFSUqVG¶XQPLOOLRQG¶KDELWDQWVHW
VDFURLVVDQFHFRQWLQXHjV¶DFFpOpUHU(OOHFRQVWLWXHXQHPpPRLUHV\PEROLTXHIDEULTXpHDXMRXr le
MRXUWRXWHQpWDQWXQOLHXGHYLH0DLVODFRPELQDLVRQHQWUHOHUHOLJLHX[HWOHSURIDQHQ¶HVWMDPDLV
une chose aisée dans une ville qui fait dans le gigantisme qui lui-même constitue un élément de
valorisation du lieu. Les stratégies pour faire survivre le sacré dans ce contexte sont nombreuses
dans la ville sainte. Elles rendent compte d'une prise de conscience de l'importance de la
nécessité de rappeler la sainteté de Touba par les lieux. Même si les penc et autres mausolées,
mosquées, arbres sacrés risquent d'être mis à mal par l'urbanisation, le projet de ville religieuse
implique leur protection et leur entretien qui deviennent sous le règne du khalife actuel des
priorités parmi les plus importantes. La reproduction ou la création en périphérie de lieux sacrés
est l'un des piliers de la nouvelle politique de lotissement d'anticipation et des stratégies de
JHVWLRQYHUWXHXVHGXIRQFLHU0DLVHQRXWUHSOXVLHXUVTXDUWLHUVVRQWQpVGXFKRL[GHV¶LPSODQWHU
sur des lieux où des événements importants dans O¶LWLQpUDLUHGH&KHLNK$KPDGRX%DPEDVHVRQW
déroulés : Sékhawga, Gouye Ndawène, Nguélémou, etc. Ces quartiers démontrent une vraie
volonté de la confrérie d'amener les habitants de ces quartiers à s'approprier ces lieux et leurs
souvenirs puis à les valoriser. L'adressage de Touba qui constitue un nouveau chantier plein
d'enjeux et de questionnements interroge le sens du souvenir et de l'appartenance dans chaque
espace de la ville. En effet, en mettant des numéros et des lettres de l'alphabet en français, on
« insulte » l'identité de la ville et on en neutralise les lieux. Mais donner une nomenclature locale
dans laquelle se confrontent une logique arabisante ou coranique et une logique habitante est
plein de risques. Les quartiers de Touba qui ont pendant longtemps constitué des espaces de
regroupement des disciples d'un même lignage expriment souvent le dévouement et l'engagement
120  

 
aux côtés de celui-ci. Tout le monde n'a pas la même interprétation de l'histoire de chaque
quartier ou espace et il n'est pas certain que l'effacement des appartenances à tel ou tel lignage ne
se traduise pas par des confrontations politiques. Chaque mouride au Sénégal et à l'étranger
« appartient » à un lignage de la confrérie et démontre cette appartenance à travers divers
mécanismes : le port de la photo du marabout khalife du lignage, sur son taxi, son lieu de travail,
pendant les pélerinages, etc.

Cette force de l'appartenance aux projets partiels ou totaux de la confrérie est proportionnelle à
l'engagement du fondateur et de ses descendants à construire Touba comme un symbole de leur
puissance réelle ou supposée. Touba constitue le lieu d'unicité symbolique et sacré, sans lequel la
conquête du profane périphérique, de zones vides d'hommes comme d'espaces d'autres sociétés,
ne pouvait se faire. Touba et le reste du territoire mouride sont deux éléments d'un même
mouvement qui se veut à la fois porté par la mystique et épousant le monde matériel. La
FRQVWUXFWLRQ GX WHUULWRLUH PRXULGH D OD SDUWLFXODULWp GH V¶DSSX\HU VXU GHV GpWHUminants
idéologiques et économiques, et comporte un versant sacralisant qui semble remis en question au
IXUHWjPHVXUHTXHO¶RQV¶pORLJQHGXEHUFHDXGHODFRQIUpULH& HVWFHTX H[SULPHQWOHVQRPEUHX[
investissements réalisés par la confrérie pour valoriser le sacré ou le protéger.

/DGLVSHUVLRQDWRXMRXUVpWpXQpOpPHQWPRWHXUGHODFRQIUpULHGHV0RXULGHV&¶HVWSDUHOOHTXHOD
configuration des liens entre les disciples de la confrérie et les marabouts a été inventée, testée,
FRQVROLGpH&¶HVWXQHUHODWLRQWUqVIRUWHPDLVGRQWODIRUFHGHYDLWMXVWHPHQWrWUHPHVXUpHjO¶DXQH
GH OD GLVWDQFH SRXU PHWWUH j O¶pSUHXYH OD IRL 'DQV OH PrPH WHPSV O¶,VODP HVW XQH UHOLJLRQ GX
PLPpWLVPHLQLWLpHHWHQVHLJQpHSDUO¶H[HPSOH,OV¶DJLVVDLWSRXUOHV0RXULGHVSDUFHWWHdispersion
de suivre les traces de Cheikh Ahmadou Bamba afin de rendre compte de la profondeur de son
°XYUHHW GHSRXYRLUPHWWUHHQOXPLqUHOHVWUDFHVGHVHVSDVVDJHV&HSHQGDQW LOHVW GLIILFLOHGH
considérer que le mimétisme est un facteur déterminant de la migration internationale des
mourides. Tout au moins, il joue un moteur psychologique dans le comportement du mouride
migrant face aux contraintes et à l'anonymat.

Mais étant de plus en plus loin de leur référence symbolique et identitaire, les mourides ont été
tentés depuis les années 80 de réinventer les manifestations religieuses propres à la confrérie en
les nomadisant (Bava, Guèye, 2002) et en renforçant celles qui font référence aux principaux
hauts-faits de l'itinéraire de Cheikh Ahmadou Bamba : arrestation, jugement, péripéties des exils
HW UpVLGHQFHV VXUYHLOOpHV HWF &¶HVW OH VHQV TX¶LO IDXW GRQQHU j OD PXOWLSOLFDWLRQ GH magal
RUJDQLVpVHQWUHWHQXVTXLV¶LPSRVHQWGDQVO¶DJHQGDQDWLRQDOHWLQWHUQDWLRQDOGHODFRQIUpULH6DLQW-
Louis, Dakar, Diéwol, Louga, Pisa, Brescia, New York, Libreville, Khourou Mbacké ont plus ou
PRLQV DFTXLV GDQV O¶LPDJLQDLUH PRXULGH XQH VLJQLILFDWLRQ SDUWLFXOLqUH DYHF O¶RUJDQLVDWLRQ GH
FpOpEUDWLRQVOLpHVDXVRXYHQLURXjODYLVLWHG¶XQJUDQGFKHLNKGHODFRQIUpULH

121  

 
L a « magalomania », une tendance liée à l'évolution multiforme de la confrérie

La territorialisation religieuse est une appropriation spatiale qui ne peut fonctionner, perdurer et
V¶DXWRQRPLVHU TX¶j WUDYHUV XQ HQVHPEOH GH SUDWLTXHV TXRWLGLHQQHV RX SRQFWXHOOHV TXL rendent
FRPSWHGHO¶KLVWRULFLWpGXSDVVDJHGHO¶HVSULWWXWpODLUHjWUDYHUVO¶pYRFDWLRQLWpUDWLYHGHVKDXWV-
faits de sa vie religieuse, de son message, de son action. Ces célébrations continues constituent le
EDWWHPHQW GH F°XU G¶XQH FRQIUpULH PRXULGH TXL V¶HVW GLVVpPLQpH j WUDYHUV OH PRQGH HW TXL
développe le besoin, aussi loin soit-HOOH G¶HQWUHWHQLU OD IRL GH SRUWHU OH PHVVDJH YHUV G¶DXWUHV
&¶HVW WRXW OH VHQV TX¶LO IDXW GRQQHU j OD PXOWLSOLFDWLRQ GHV magal TXL V¶DSSXLHQW GpVRUPDLV VXU
tous les prétextes possibles.

&HWWH UHFKHUFKH D SHUPLV G¶LQWHUURJHU OHV PpFDQLVPHV SDU OHVTXHOV FHV FpOpEUDWLRQV HW
PDQLIHVWDWLRQVYRLHQWOHMRXUVRXVO¶LQIOXHQFHGHJURXSHVRXGHSHUVRQQDOLWpVGHODFRQIUpULHTXL
cherchent à répondre à un besoin inextinguible de faire vivre la foi par le souvenir des actions,
GHV KRPPHV HW SDU OD PRELOLVDWLRQ GHV ILGqOHV DXWRXU GH FKDQWLHUV FRQIUpULTXHV 0DLV HOOH V¶HVW
également intéressée à toutes les autres célébrations des personnalités et événements du
Mouridisme et a permis de comprHQGUHOHU{OHTX¶HOOHVMRXHQWGDQVODFRQVROLGDWLRQGHO¶8QLWpGH
la confrérie, dans son insertion sur la sphère publique nationale et internationale.

2.4.4 - Communication 4 : L es magal, instrument confrérique de culture du


charisme

Q uand la confrérie s'approprie le calendrier des agendas islamiques

Le Leylatoul khadry est la Nuit de la Détermination qui a vu « la descente du Coran ». Il est très
important dans le calendrier cultuel musulman. C'est une nuit du mois de Ramadan (la 27ème
pour la plupart des exégètes) « qui vaut plus que mille mois » selon la sourate y faisant référence.
Elle est célébrée par les musulmans à travers des prières nocturnes qui ont une grande valeur
liturgique et d'énormes profits spirituels. Il correspond à une tradition musulmane remontant au
prophète Mohamed. Au Sénégal où l'Islam confrérique prospère, chaque groupe selon son
interprétation de la date célèbre le Leylatoul Khadry à sa manière. Dans la confrérie mouride, une
personnalité est rattachée à cette célébration. Il s'agit de Sokhna Maï Mbacké, fille cadette de
Cheikh Ahmadou Bamba. L'organisation remonte à une bonne quarantaine d'années. Cet
pYpQHPHQW FpOpEUp SDU O¶HQVHPEOH GHV PRXULGHV SDUWRXW GDQV OH PRQGH V HVW LPSRVp FRPPH XQ
agenda important sous sa férule. Tout au long de sa vie, elle s'est consacrée à cette
commémoration qu'elle préparait toute l'année en mobilisant ses ressources financières et
matérielles propres ainsi que celles de ses disciples et de ses nombreuses relations dans le pays.
Cette nuit qui était dédiée au Coran voyait les disciples et autres spécialistes réciter le livre saint
des centaines de fois comptabilisées comme autant de performances spirituelles. Mais la
célébration était également l'occasion de faire l'événement à Touba avec la venue des
122  

 
représentants du gouvernement et la démonstration forte de son prestige personnel et lignager.
Sous ce rapport, son amitié légendaire avec la femme de l'ex-Président de la république du
Sénégal de l'époque était magnifiée à l'extrême.

Mais comme souvent, le magal prend une autre dimension avec la disparition de l'initiateur qui
devient un mythe auquel le souvenir est dû par tout son lignage descendant. Le souvenir de la
personnalité est associé à la continuation de son °XYUH qui devient une institution immuable, une
obligation pour ses fils et petits fils. A cette occasion, s'ajoute à la manifestation un culte du
souvenir et de la personnalité qui met en exergue et exagère l'°XYUH de l'initiateur. Souvent, son
fils le plus âgé qui porte la responsabilité de la continuité est mis lui aussi au devant de la scène.
Il est jugé sur sa capacité à perpétuer l'événement, à maintenir les relations qui permettaient à sa
mère de le réaliser et à développer par la même son propre charisme. En l'occurrence, Serigne
Modou Mahfouz devient une nouvelle figure dont on loue les qualités et la sainteté héritée. Il
donne son empreinte propre à la manifestation en y apportant des innovations, notamment la
prêche que ne faisait pas sa défunte mère. Un journaliste raconte : {« V¶DSSX\DQW VXU OHV WH[WHV
sacrés, il a relevé les bienfaits que tire la communauté de son unité, de la solidarité entre
FUR\DQWV GH O¶DPRXU GH VRQ SURFKDLQ HWF (Q pWD\DQW VRQ SURSRV LO D PLV O¶DFFHQW VXU FHWWH
injonction du Tout-Puissant : « Accrochez-YRXV j OD FRUGH G¶$OODK HW QH vous divisez pas  ´
'DQVODPrPHRSWLTXHOHNKDOLIHGH6RNKQD0DwIDLWREVHUYHUTXHOH7UqV+DXWTX¶,OVRLWORXp
magnifié et exalté, nous fait cette obligation ³DLGH]-vous les uns les autres sur la voie de Dieu et
OHELHQIDLWHWQRQSRXUOHPDO´. Aussi rappelle-t-il cette hadith du Sceau des Prophètes, Seydina
Muhammad (Saws)  ³ /D IRL G¶DXFXQ GH YRXV QH SHXW rWUH VLQFqUH TXH V¶LO QRXUULW OHV PrPHV
ELHQIDLWVSRXUO¶DXWUHTXHFHX[GpVLUpVSRXUVDSURSUHSHUVRQQH´6¶DJLVVDQWGHVHQVHLJQHPHQWVGH
Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, Serigne Mouhamadou Mahfouz en tire cette
recommandation  ³ &XOWLYH] O¶DPRXU SRXU DXWUXL VXU OD YRLH GH 'LHX HW YRXV EpQpILFLHUH] GH
ELHQIDLWV ´6¶\ DMRXWH VHORQ 6HULJQH 0RGRX TXH OH 3URSKqWH 0XKDPPDG 6DZV  TXL HVW OH
prototype de la pratique cultuelle musulmane nous dit  ³ /H PXVXOPDQ HVW OH IUqUH GH VRQ
FRUHOLJLRQQDLUH,OGRLWO¶pSDUJQHUGHVPpIDLWVGHVDODQJXH FDORPQLHSDUROHVREVFqQHVHWF HWGH
VHVPDLQV FRXSVGHSRLQJV ´$XVVLO¶(OXGH'LHXLQGLTXHTXH ³Qui aide son prochain verra
'LHX VROXWLRQQHU VHV SUpRFFXSDWLRQV ´ 7RXW FRPPH ,O QRXV DSSUHQG TXH ³ UpFRQFLOLHU GHX[
PXVXOPDQVHVWPLHX[UpWULEXpTXHEHDXFRXSGHSUDWLTXHVUHOLJLHXVHV´ »}}.

Cet exemple démontre que les célébrations sont des inventions permanentes liées à la
personnalité, au charisme, aux qualités intellectuelles, aux ressources financières, aux relations
politiques et sociales de celui qui les a initiés ou qui en a hérité.

Une autre célébration correspond également à une appropriation du calendrier événementiel


musulman : il s'agit du Kazzu Rajab. Ce magal s'organise autour de la coïncidence entre
l'anniversaire de la naissance du deuxième khalife de la confrérie et du fameux voyage céleste (Al
Isrâ) du Prophète Mohamed sur Al bourakh, son cheval mythique. Dans la tradition islamique,
123  

 
cette ascension (mihraj) qui s'est faite à partir de Jérusalem en une nuit est une étape importante
dans la consolidation de la vocation prophétique. Cette coïncidence est perçue comme une
miséricorde divine lourde de signification et de bienfaits.

La célébration a été entreprise depuis 1963 et a lieu la vingt septième nuit du septième mois
lunaire (rajab). Elle est devenue un des magal les plus importants de la confrérie ayant la
particularité d'avoir été initiée par celui qui est l'objet de la manifestation. Elle n'est pas une
vulgaire fête à l'occasion d'un anniversaire mais un acte religieux et spirituel. « Cette année-là,
son anniversaire venu, Serigne Fallou quitta Touba quelques temps avant le coucher du soleil
SRXU VH UHQGUH j 'DURX 6DODP VRQ OLHX GH QDLVVDQFH DILQ G¶\ SDVVHU OD QXLW HQ SULqUHV /H
lendemain, au sortir de sa retraite, il se rendit au domicile de Serigne Affia Niang. /¶DFFXHLOIXW
chaleureux et empreint de piété. On peut considérer, pouUO¶KLVWRLUHTXHOHSUHPLHUUHSDV TXL D
DORUV pWp VHUYL j O¶RFFDVLRQ G¶XQH FpOpEUDWLRQ GX .D]]X 5DMDE D pWp SUpSDUp SDU 6RNKQD $VWD
:kOR1LDQJODPqUHGH6HULJQH$EGRXUDKPDQH%RXVVR3RXUGRQQHUjO¶pYpQHPHQWXQFDUDFWqUH
IHVWLIjODGLPHQVLRQGHO¶LPmense honneur que Serigne Fallou venait de faire à Serigne Affia
Niang, on servit du thé, des biscuits et autres friandises ». Cette « semence » de la manifestation a
lieu au moment où Serigne Fallou, le deuxième khalife de la confrérie avait terminé son grand
projet d'achèvement de la grande mosquée de Touba commencée une trentaine d'années
auparavant et avait fini de planter le décor de la ville moderne que Touba allait devenir. Pour ce
qui peut être considéré comme une première édition, tout se passa dans l'intimité familiale et
lignagère. Durant les trois années qui suivirent, la formule de la célébration se met en place. Elle
prend le sens d'une réception d'un hôte de marque (« ngan gui ») avec une ambiance festive mais
encore interne aux proches du khalife.

Lorsque Serigne Affia fut rappelé à Dieu après avoir vécu trois éditions du Kazzu Rajab, Serigne
)DOORXPDLQWLQWODWUDGLWLRQGHVHUHQGUHGDQVVDIDPLOOHFKDTXHIRLVTX¶LOVRUWDLWGHVDUHWUDLWHj
Darou Salam. Cette année là, on dressa une tente, richement pavoisée de drapeaux, devant le
GRPLFLOH GH OD IDPLOOH GH 6HULJQH $IILD /¶pYpQHPHQW DYDLW SULV XQH DPSOHXU HW XQH VROHQQLWp
WHOOHV TX¶RQ GpURXOD VRXV OHV SDV GH 6HULJQH )DOORX XQ WDSLV G¶KRQQHXU IDLW GH SDJQHV
traditionnels, depuis la Route " 2MXVTX¶jODUpVLGHQFHGHODIDPLOOH1,$1*

Cette année, marque une véritable rupture dans le cérémonial de la célébration. Les autres
autorités du mouridisme commencent à participer aux festivités. A cette occasion, Serigne Fallou
IXWDFFRPSDJQpG¶XQHdélégation de dignitaires religieux avec au moins quelques 28 voitures. Il y
avait également quelques membres de sa propre famille comme ses fils feu Serigne Modou
%RXVVR'LHQJHW6HULJQH0RXKDPDGRX/DPLQH0EDFNpGLW(O+DGML%DUDO¶DFWXHO.KDOLIHGH
Serigne Fallou. Il y avait également beaucoup de disciples. El Hadji Modou Mamoune Niang, fils
de Serigne Affia Niang prononça à cette occasion une brillante allocution.

124  

 
&¶HVWDLQVLTXHGHjODPDQLIHVWDWLRQDSULVWHOOHPHQWG DPSOHXUTXH5DGLo Sénégal
SULW O¶KDELWXGH GH OXL FRQVDFUHU GHV UHSRUWDJHV WUqV pODERUpV OHXU GRQQDQW DLQVL XQH GLPHQVLRQ
QDWLRQDOHGHSOXVHQSOXVDIILUPpH¬O¶pYLGHQFHOD© discrétion » de la célébration ne pouvait pas
SHUGXUHU FDU O¶pYpQHPHQW FRPPHQoDLW j DYRLU XQ FHrtain retentissement parmi les disciples,
Serigne Fallou étant le khalife d'une confrérie qui était en plein essaimage au sein des villes
sénégalaises comme Dakar, Kaolack, Thiès, etc. Cette dispersion suscitait de plus en plus le
besoin de se retrouver dans des cadres nouveaux pour lutter contre l'anonymat urbain,
reconstruire les liens de solidarités et de sociabilité dans un contexte très hétérogène.

6HULJQH )DOORX YpFXW VD GHUQLqUH FpOpEUDWLRQ HQ  &¶pWDLW XQ YHQGUHGL 6HULJQH 0RGRX
Mamoune Niang, fils de Serigne Affia, prononça comme à son habitude une allocution très
fouillée. Il eut à dire à Serigne Fallou : « Nous savons que la visite que vous nous accordez, à
QRWUHGRPLFLOHHVW XQHIDYHXULPPpULWpH9RLOjSRXUTXRL jO¶RFFDVLRQ QRXVPRELOLVons tout ce
dont nous disposons en plus de nos familles, de nos condisciples, de nos parents, et nous serions
allés bien au-GHOjGHWRXWFHODVLF¶pWDLWSRVVLEOHSRXUHVVD\HUG¶rWUHjODKDXWHXUGHFHWWHPDUTXH
G¶KRQQHXU ». En réponse à cette allocution, Serigne Fallou expliqua ce jour là, le sens et les
motivations de la célébration du Kazzu Rajab, MRXU TXL D YX O¶DFFRPSOLVVHPHQW GH GHX[
pYpQHPHQWVPDMHXUVGDQVO¶KLVWRLUHGHO ,VODPLO\DHXG¶DERUG$O,VUk /HYR\DJHQRFWXUQH 
par lequel Seydina Mouhamed (P.S.L.) a été transporté à Jérusalem. Ensuite "Al Micraj "
/¶$VFHQVLRQ RXODWUDYHUVpHGHV6HSW&LHX[SRXUDUULYHUjODSUR[LPLWpGX7U{QHGX0DvWUHGHV
Mondes afin de recevoir des recommandations divines concernant les dogmes et bases de sa
ReOLJLRQ7RXVFHVpYpQHPHQWVRQW HXOLHXFHWWHQXLWOD'DQV6DJUDQGH PLVpULFRUGH'LHXP¶D
accordé une grâce infinie ; Il a fait coïncider ma naissance avec la date anniversaire de ces
événements miraculeux. En effet il a plu à notre Seigneur que je sois né un vendredi, 27ème jour
GXPRLVOXQDLUHGH5DMDEGHO¶DQGHO¶+pJLUH  . Ce jour est donc pour moi un prétexte
de rendre grâce j'LHXHWG¶H[SULPHUPDUHFRQQDLVVDQFHjO¶HQGURLWGH&KHLNKRXO.KDGLPSRXU
O¶DJUpPHQW TXH GHV 'HX[ M¶DL REWHQX 'HSXLV M¶DL SULV O¶KDELWXGH FKDTXH IRLV TX¶DUULYH PRQ
DQQLYHUVDLUH GH PH UHQGUH j 'DURX 6DODP R MH VXLV Qp DILQ GH P¶\ FRQVDFUHU WRXWH OD QXLW
durant, à la lecture du Coran et des Panégyriques du Prophète (P.S.L.), en guise de témoignage de
grâces au Cheikh Pourquoi est-ce que dès ma sortie de ma retraite je viens ici, chez Serigne
Affia " &¶HVW SRXU UpDIILUPHU HW UDIIHUPLU OHV OLHQV GH IUDWHUQLWp TXL PH OLHQW j FHWWH PDLVRQ R
vécut ma mère Sokhna Awa Bousso »

Suite à cette déclaration du khalife de la confrérie, Serigne Modou Mamoune Niang, au nom de
WRXWHODIDPLOOH1LDQJSULWO¶HQJDJHPHQWGHSHUSpWXHUFHWWHFpOpEUDWLRQWDQWTX¶LOUHVWHUDHQYLH
Serigne Fallou disparut cette même année 1968 mais pendant les deux ans qui suivirent, fidèle à
sa parROH6HULJQH0RGRX0DPRXQH1LDQJV¶HPSOR\DjGRQQHUjODFpOpEUDWLRQGX.D]]X5DMDE
O¶pFODWTXLOXLFRQYLHQW(WjFKDTXHIRLV6HULJQH0RGRX%RXVVR'LHQJVRQILOVDvQpOXLDDSSRUWp
soutien et assistance par sa présence effective en compagnie de nombreux WDOLEpVHW G¶DXWRULWpV
religieuses.
125  

 
Ces échanges contiennent les prémisses et la justification d'une célébration de grande envergure
prise en charge par une confrérie. D'abord le début de prise en charge de son vivant par des
membres de sa famille directe et élargie d'une manifestation religieuse à la fois islamique et
confrérique. Ensuite, l'appel direct et par l'exemple d'un khalife d'une aura exceptionnelle, connu
pour ses relations très rapprochées avec le Poète-Président Léopold Sédar Senghor, sa sainteté
prouvée selon les mourides par la baraka qui l'a accompagnée (fin de la deuxième guerre
mondiale, reprise et achèvement de la grande mosquée, période de vaches grasses dans
l'économie avec l'appropriation des villes sénégalaises, etc.).

Enfin la mort qui donne toujours une autre dimension à la célébration comme l'exemple de
Sokhna Maï pour le Leylatoul Khadry l'a montré. La disparition consacre la sanctification de la
personnalité ou l'accentuation de celle-ci. Le prestige de Serigne Fallou comme des autres saints
s'exprime dans la confrérie par le nombre de « toureundoo », homonymes qui sont autant de
manifestation de l'amour, de la dévotion des disciples. Le fait de donner le nom de son fils ou de
sa fille à un parent ou un ami est un acte de grande portée sociale et symbolique. Chaque
marabout a des milliers de toureundoo qui constituent des dahira au profit de la perpétuation de
son °XYUH et de la réalisation de ses projets. Ils jouent un rôle important dans l'organisation des
magal et de toutes les manifestations qui concernent le lignage de leur homonyme saint. Pour
beaucoup d'entre eux, le fait d'être homonyme d'un saint les rend redevable du fait d'une
transmission indirecte de la baraka. Ceci est un élément supplémentaire qui fonde le culte de la
personnalité du Saint en question. Voici quelques considérations parmi celles évoquées pour
rendre compte de la place de Serigne Fallou au sein de la confrérie, lors du kazzu rajab :
« d'abord, la réaction du Cheikh quand il fut informé de cette naissance. Il aurait alors vivement
H[SULPpVDJUDWLWXGHj'LHXHQFRQFOXDQWTXHVLFHQRXYHDXQ¶pWDLWSDVDSSDUXGDQVVDIDPLOOHLO
VHVHUDLWPLVjVDUHFKHUFKHSRXUDOOHUOHUHWURXYHURTX¶LOSXLVVHrWUH(QILQOHSqOHULQDJHTX¶LO
accomplit à La Mecque. Les ciUFRQVWDQFHV GH FH VpMRXU HQ WHUUH DUDEH IXUHQW WHOOHV TX¶LO HXW
beaucoup de peine à rentrer à TOUBA  OHVJHQVGH /D0HFTXHQHYRXODLHQWSOXV V¶HQVpSDUHU
ayant découvert en lui une érudition et une sainteté exceptionnelles. Déjà, tout enfant, Serigne
FalORX DYDLW FRPPHQFp j VH VLJQDOHU FRPPH XQ rWUH G¶H[FHSWLRQ 6D PqUH 6R[QD$ZD %RXVVR
DSSDUWLHQWjXQHIDPLOOHG¶pUXGLWVTXLDGRQQpSOXVLHXUVLPDPVj7RXED&¶HVWDYHFXQHDLVDQFH
VXUSUHQDQWH TXH GqV O¶kJH GH KXLW DQV LO VH PLW j O¶DSSUHQWLVVDJH GX &RUDQ sous la férule de.
Serigne Ndame Abdourahmane Lo au daara dénommé Aalimun Xabiir, à environ cinq kilomètres
GH7RXED6RQRQFOHSDWHUQHO6HULJQH0DPH0RU'LDUUDOXLVHUYLWGHSURIHVVHXUGDQVO¶pWXGHGHOD
Théologie. Sa formation dans les Sciences Religieuses fut complétée par le Cheikh lui-même, à
VRQ UHWRXU G¶H[LO 3UpFLVRQV TX¶XQH ERQQH SDUWLH GH FHWWH IRUPDWLRQ HXW OLHX HQ 0DXULWDQLH j
Saout El Maa (Khomack), où le Cheikh avait été déporté et où le rejoignit Serigne Fallou en
compagnie de Serigne Mamadou Moustapha et de Serigne Mor Rokhaya Bousso. Aujourd'hui
encore la vaste érudition de Serigne Fallou en arabe est évoquée avec admiration de même que
ses talents de poète et de calligraphe hors pair ».

126  

 
Serigne Fallou est le symbole de la baraka au Sénégal. Son nom est invoqué par les mourides
dans la difficulté ou pour réussir leurs entreprises. Au sein de la communauté émigrée mouride,
sa puissance symbolique et spirituelle est plus forte que tous les autres marabouts de la confrérie.
Il n'a pas d'égal dans le nombre de personnes qui portent sa photo à leurs cous. Kazzu radiab est
le moment de manifestation de son attachement à son souvenir et de magnifier ses qualités de
saint. Il est désormais fêté comme la plupart des magal de la confrérie au sein des communautés
émigrées d'Italie et des Etats Unis notamment. La célébration de Serigne Fallou s'y fait dans le
respect de la tradition première de l'initiateur lui même, c'est à dire par la récitation du Saint-
Coran, des poèmes de Cheikh Ahmadou Bamba, la préparation des « berndé », repas festifs
mourides réputés.

Leylatoul Khadry et Kazzu Radiab relèvent du calendrier musulman mais deviennent des
manifestations majeures dans la confrérie qui mobilise des milliers de disciples pour le souvenir
de personnalités dont la vie est liée à ces dates. Ils ont pour caractéristique de se dérouler en
priorité à Touba. Mais d'autres magal non liés à la personnalité de Cheikh Ahmadou Bamba ou
aux événements de sa vie se sont beaucoup développés depuis quelques années en rapport avec le
besoin de multiplier les célébrations. C'est le cas du magal de Porokhane consacré à sa mère.

Porokhane ou un magal autour de M ame Diar ra Bousso, référence de la femme vertueuse

Porokhane est devenu depuis quelques années l'un des magal majeurs de la confrérie. C'est le
village où a vécu la mère de Cheikh Ahmadou Bamba. Il se situe dans la région de Kaolack, non
loin de la frontière gambienne. La particularité essentielle de ce lieu-moment est qu'il regroupe
une grande majorité de femmes.

Porokhane est devenu une bourgade toute construite autour de cette vocation d'accueil du
pèlerinage qui permet aux mourides de rendre hommage à Mame Diarra Bousso qui selon leur
perception est à l'origine de tout.

Porokhane est le magal des femmes dans la confrérie mouride. Il célèbre la personnalité de la
mère du fondateur de la confrérie. Dans la tradition wolofo-mouride, une mère endurante et
soumise dans le ménage est susceptible d'avoir des enfants de grande qualité. Cette croyance
fonde le culte plus ou moins important qui est consacré aux mères des saints des confréries soufi
au Sénégal.

Originaire de la famille des Bousso, connus depuis toujours pour être d'illustres lettrés, Mame
Diarra Bousso suivit très tôt la voie des anciens et sa dévotion sans faille lui valut le nom de
« Jâratul- Lâh » (la voisine de Dieu).

127  

 
On raconte qu'à très bas âge, elle mémorisa et écrivit le Saint-coran et en fit son exercice favori
pendant les trente trois années de sa vie. A côté de ses intenses activités de piété, elle était
O pSRXVHPRGqOHGDQVO¶DFFRPSOLVVHPHQWGHVWUDYDX[GRPHVWLTXHVHWDXVHUYLFHGHVRQPDUL

Plusieurs anecdotes participent de l'entreprise de sanctification :

Comme il est de tradition au Sénégal, quand une femme s'apprête à rejoindre pour la première
fois le domicile conjugal, elle reçoit lors d'un cérémonial empreint d'émotion et de gravité les
FRQVHLOV GHV DvQpHV 2Q GLW TXH EUXVTXHPHQW HOOH VH ODVVDLW G¶pFRXWHU OHV FRQVHLOV HW
recommandations des femmes auxquelles elle répondit en ouvrant le Saint Coran et en tombant
sur ce verset « 0RXKDPPDGQ¶DMDPDLVpWpOHSqUHGHO¶XQGHYRVKRPPHVPDLVOHPHVVDJHUGH
DIEU et le sceau des Prophètes. DIEU est parfaitement sachant de toute chose » S 33 (les
coalisés Al ¶DK]kE V40.

« 6L FHQ¶pWDLW FHVSDURles immuables de DIEU, je peux garantir par serment que je compterais
parmi ma progéniture un Prophète », déclarait-elle.

C'est selon les croyances, cette détermination qui a été couronnée par un descendant qui même
s'il n'est pas considéré comme un prophqWH HVW SRXU OHV PRXULGHV O¶LQWHUFHVVHXU GHV FUR\DQWV
auprès de Dieu.

Selon Hizbut Tarkhiyya, Dahira des Etudiants Mourides, « elle allia travail et piété et du coup,
elle surpassa les qualités exemplaires reconnues de vertueuses femmes telles que Marie mère de
Jésus, Khadija et Aïcha épouses du Prophète ou Fatima fille du meilleure des envoyés.

Une autre anecdote fait la célébrité du puits de Porokhane devenu un site mémorable, visitée par
les milliers de pèlerins pendant le magal. « En effet, un jour sur demande de son mari qui voulait
GH O¶HDX SRXU IDLre ses ablutions, elle saisit la bouilloire et accourut au puits où elle ne trouva
DXFXQPR\HQSRXUSXLVHU(WSUHVVpHGHUHQGUHVHUYLFHjVRQpSRX[HOOHVHSUpFLSLWDjO¶LQWpULHXU
du puits. Chose étrangHVHVVHFRXUVYHQXVO¶HQVRUWLUOHWURXYqUHQWQRQVHXOHPHQWLQGHPQHPDLV
avec la bouilloire à la main remplie G¶HDX ».

Une autre anecdote est donnée en exemple aux femmes mourides : un jour, son mari occupé, lui
demande d'aller relever la palissade de la concession arrachée par le vent. Elle s'exécuta
immédiatement. Mais n'y arrivant pas, elle tint la palissade pendant toute la nuit sous une pluie
battante et un vent violent. Cette scène est racontée à tour de bras, dessinée, jouée au théâtre pour
magnifier cet acte de soumission extrême.

Un autre jour, ne trouvant pas de bois mort pour chauffer le café de son mari, elle fendit sa propre
malle pour satisfaire ce besoin.

128  

 
Toutes ces anecdotes sur sa personnalité relève de la sanctification et de la construction du
charisme qui sont une composante essentielle de l'invention de l'événement.

Le magal de Porokhane est l'initiative de la descendance de Serigne Bassirou Mbacké qui a


renoncé à célébrer la naissance ou la disparition de cet illustre fils de Cheikh Ahmadou Bamba
pour mieux se consacrer à cette manifestation. Elle est également l'auteur des nombreux
investissements qui ont été réalisés dans la localité pour mettre en valeur les hiérophanies,
notamment le mausolée de la sainte, le fameux puits et quelques autres lieux, témoins de
l'histoire. Chaque année, au moins 200 000 personnes affluent vers Porokhane qui compte
habituellement moins de 15 000 habitants.

Mame Diarra Bousso est la vertueuse dont l'exemple est à suivre et l'inspiratrice de millions de
femmes au Sénégal et en dehors. Des centaines de dahira Mame Diarra existent au Sénégal et
dans les pays d'émigration et la plupart d'entre elles lui vouent un culte exclusif. Le pèlerinage est
un moment qu'elles préparent presque toute l'année même si d'autres manifestations autour de la
personnalité de Mame Diarra existent, notamment celle organisée par Aïda Ndiaye Bada Lô, une
femme d'affaires rendue célèbre par sa bravoure et son amour pour Mame Diarra Bousso.

L es célébrations du souvenir d'événements liés à la vie de C heikh A hmadou Bamba

L e magal des deux rakas de Saint-Louis : vocation nationaliste et par rainiste

Ce magal célébre les deux prosternations du fondateur de la confrérie mouride dans le bureau du
gouverneur colonial, en plein jugement le 05 septembre 1895. Il regroupe à chaque anniversaire,
plusieurs milliers de fidèles du Sénégal et de l'étranger qui viennent commémorer cette prière
hautement significative pour les mourides mais également pour certains sénégalais. L'affluence
grandissante fait de ce magal un événement national qui marque de plus en plus tous les espaces
de la ville, autant les plus symboliques de la ville coloniale que les nouveaux quartiers nord et
sud ainsi que le faubourg de Sor. C'est le magal qui permet le mieux d'interroger les fonctions
multiformes des manifestations initiées sur les traces du passage de Cheikh Ahmadou Bamba et
de ses hauts faits.

Le choix de la célébration à une date fixe du calendrier laic n'est pas fortuit. Ce magal célèbre un
geste de refus, de manifestation d'une foi inébranlable et d'une constance dans les positions que
Cheikh Ahmadou Bamba était prêt à payer de sa vie. Il s'agit avant tout d'un magal anticolonial
qui rappelle les injustices de cette époque dans une ville qui a été l'ancienne capitale de l'Afrique
Occidentale Française et le symbole de la domination. « C'est sur la base de simples soupçons
que Cheikh Ahmadou Bamba a été jugé et condamné sans avocats pour assurer sa défense »
explique Serigne Ameth Fall qui préside l'association qui organise le magal, le « Kourel des deux
raaka ». Toutes les brimades, tous les exils, bannissements qui ont suivi ce procès sont

129  

 
réinterprétés comme le prix du pacte d'allégeance que le fondateur de la confrérie a noué avec
Dieu et son Prophète. Cet aspect est central comme fondement des magal liés directement à la
personne du fondateur de la confrérie des mourides. En effet, pendant que certains dénoncent
arrestations, procès et exils, d'autres ou parfois les mêmes, considèrent cela comme des épreuves
qui ont donné au Saint sa stature et son charisme. Ceci est un paradoxe qui s'explique par la
complexification des matériaux utilisés dans l'invention, chacun devant trouver dans les
ingrédients des éléments d'appropriation et de reconnaissance.

Selon Madické Wade, ancien Président du « Kourel », structure chargée de l'organisation de la


manifestation, « l'idée proprement dite vient d'un groupe de jeunes qui ont voulu célébrer (le
souvenir) par des chants religieux pour se souvenir de la prière de cheikh Ahmadou Bamba dans
le palais du gouverneur ». A ces chants désormais traditionnels, s'ajoutent à présent des
expositions sur la vie et l'oeuvre de Cheikh Ahmadou Bamba et du parrain, mais surtout la
perpétuation de la prière dans l'après-midi du 05 septembre.

Le magal des deux raaka de Saint-Louis en est à sa trentième édition en 2005. Organisé pour la
première fois en 1975, il correspond aux premières initiatives prises à la périphérie d'une
confrérie de plus en plus disséminée dans le Sénégal et en dehors, dans la même série que la
création du Dahira des Etudiants Mourides, de l'organisation des premières journées culturelles
Cheikh Ahmadou Bamba au siège de l'UNESCO à Paris, de la création du journal Ndigël. Ces
initiatives sont pour la plupart le fait d'élites intellectuelles issues des écoles laiques qui ont
compris l'enjeu de ces célébrations dans un sens prosélytique mais également pour donner la
possibilité aux membres de renouveler leur sentiment d'appartenance au projet et de magnifier les
valeurs d'unité, de solidarité qu'ils souhaitent qu'on leur attache.

Ce magal est également un moment intense de culte des saints de la confrérie et son invention
continue a conduit à la pratique du parrainage qui permet chaque année de mettre en valeur et de
mieux faire connaître l'un d'eux. Le choix du parrain fait, sa famille et les organisations de
disciples qui lui sont attachées sont associées à l'organisation et au financement de la
manifestation.

Mais le magal des deux rakaa célèbre également pour beaucoup la liberté retrouvée symbolisée
par Cheikh Ahmadou Bamba dont la figure de résistant sénégalais est largement acquis dans les
livres d'histoire et les curricula des écoles. Cet aspect donne au magal une dimension nationale
certaine. Chaque année, une nouvelle étape y est franchie dans la mise en perspective de la
libération nationale. En 2003, c'est le changement de dénomination de la place Faidherbe
remplacée par Cheikh Ahmadou Bamba qui a marqué l'événement et en 2004, c'est le
déboulonnage de la statue de Faidherbe. En 2005 et de manière tout à fait officielle, s'est déroulée
ODGpEDSWLVDWLRQGHO¶DYHQXH$OIUHG'RGGVGXTXDUWLHU6DQWKLDEDGH6DLQW-/RXLV/¶DYHQXHSRUWH
désormais le nom de Serigne Mourtada Mbacké. C'est le Conseil municipal de Saint-Louis qui,
130  

 
cette fois-ci dans sa session du 13 août 2005, a pris la décision de débaptiser cette artère
LPSRUWDQWH TXL SDUW GH O¶LQWHUVHFWLRQ GX 0RQXPHQW DX[ PRUWV HQ IDFH GH *XHW-1GDU MXVTX¶DX
quartier populeux de Goxu-Mbacc. Selon le président Ahmet Fall du « Kurel », cette marque de
reconnaissance témoigne de l'appropriation par la ville des agendas de la manifestation alors
qu'une polémique est pendant cette année en toile de fond du magal, certains dénonçant le peu de
soutien de la ville et d'autres des volontés de « récupération ».

Par ailleurs, devant la densité des activités lors des magal de Saint-Louis, le Kourel tente de
l'étaler sur plusieurs jours avec une partie à Dakar et une journée du parrain organisée le 04
septembre. Cela a été le cas pour le magal 2004 qui avait pour parrain Serigne Cheikh Awa Balla
Mbacké, fils de Mame Thierno Birahim Mbacké, frère cadet et bras droit de Khadimou Rassoul.
A cette occasion, le vernissage d'une exposition de photos et une conférence animée sur la vie et
l'°XYUH du parrain ont eu lieu à l'Institut Islamique de la grande mosquée de Dakar le dimanche
29 août 2004, sous la présence effective de Serigne Mame Thierno Mbacké, fils du parrain et
toute la famille de Serigne Cheikh Awa Balla. Une manifestation identique aura lieu à Saint-
Louis à partir du dimanche 29 août.

En 2005, le « Kourel » est allé plus loin. Une journée du patrimoine historique mouride est
désormais célébrée le 30 août, une journée Mame Diarra (la mère du fondateur) le 1er septembre,
la journée du Coran le 02 septembre, la journée d'hommage à Cheikh Ibra Fall, principal
lieutenant du Cheikh et fondateur de la sous-confrérie des « baye fall », le 03 septembre. Le
magal devient ainsi une semaine qui veut contrebalancer l'emprise sur la ville du festival de jazz
qui est l'autre événement majeur de Saint-Louis.

De plus en plus, le magal essaie de correspondre à l'esprit et à la personnalité du parrain. En


2005, un an après le décès de Serigne Mourtada Mbacké, fils cadet du fondateur de la confrérie,
la manifestation lui est dédiée. Le « Kurel ªFKHUFKHDORUVjPHWWUHO DFFHQWVXUO¶H[LJHQFHG¶XQLWp
HWGHVROLGDULWpDXVHLQGHOD8PPDLVODPLTXHHQGpPRQWUDQWODGLYHUVLWpFRQIUpULTXHGHO¶,VODP
au Sénégal par l'invitation des membres des autres confréries.

Le Magal de Saint-Louis rend compte également des dimensions politiques de ce type de


manifestations qui occupent non seulement des villes entières pendant plusieurs jours mais
alimentent également la rubrique politique et faits divers des journaux. En effet, un tel événement
est un défi énorme en termes d'organisation et la main de l'Etat et de ses démembrements est
toujours décisive contrairement à ce qu'on pourrait penser. Des tonnages importants de riz et des
centaines de millions de francs CFA leur sont consacrés chaque année par le Ministère de la
solidarité nationale, par la présidence de la république et par les hommes politiques sénégalais
qui contribuent très fortement à leur financement. Les magal sont des tribunes pour ces derniers
qui en profitent pour raffermir les relations avec les groupes, lignages, familles « entrepreneurs »

131  

 
de ces événements, espérant entrer dans leurs bonnes grâces lors des élections ou bénéficier des
prières des saints considérées par certains comme pouvant assurer le succès.

Ces aides matérielles et financières font parfois l'objet de conflits entre différents groupes
s'accusant mutuellement de détournements. Ces conflits sont souvent révélateurs de déviances de
la part de groupes de plus en plus nombreux, aux motivations sans doute peu orthodoxes,
cherchant surtout à enrichir leurs initiateurs.

Les magal étant des regroupements humains considérables, ils sont un défi sanitaire et sécuritaire
énorme qui participe de l'invention de la manifestation. Près de 2000 personnes assurent la
sécurité du grand magal de Touba et à Saint-Louis, ils sont également très nombreux pour
FRQWHQLUOHVGpERUGHPHQWV'HO¶HQWUpHGHODYLOOHMXVTX¶jOD3ODFH)DLGKHUEHHQSDVVDQWSDU6RUHW
la Langue de Barbarie, toute la ville est quadrillée et des consignes strictes appliquées. Avec
l'épidémie de choléra qui a sévi au Sénégal en 2004 et en 2005, la prévention de la maladie a été
le maître mot pour toutes les manifestations populaires dans le pays. Saint-Louis n'a pas été en
reste lors du mDJDO GH  /HV VHUYLFHV G¶K\JLqQH DYHF j OHXU F{Wp OD Croix-Rouge et les
différents services de Santé ont assuré la mobilisation des grands jours. Dans les sites
G¶KpEHUJHPHQWV FRPPH VXU O H[ 3ODFH )DLGKHUEH GHV DIILFKHV GHV VpDQFHV G¶H[SOLFDWLRQV GHs
démonstrations ont été mises en place pour prévenir les risques de propagation du choléra. Les
FRQVLJQHVRQWpWpVWULFWHVPDOJUpODIRUWHFDQLFXOHTXLV¶HVWDEDWWXHVXUODYLOOH/HVYHQGHXUVG¶HDX
en sachets ont été purement et simplement interdits de commerce. Du côté du Faubourg de Sor,
on a même assisté à des saisies opérées chez des marchands de café Touba. Chaque année, un
plan de circulation est défini et appliqué dans toutes les villes de pèlerinage pour rendre fluide la
circulation. Ce fut le cas cette année entre l'Ile et la sortie de la ville pour protéger le pont qui
risque de s'effondrer.

Sur les abords de la capitainerie du port, une patrouille des Sapeurs Pompiers à bord d'un bateau-
hôpital était là pour prévenir toute noyade. Les quelques pirogues, qui se sont évertuées à faire
traverser les retardataires à la fermeture du pont, à 15 heures, ont été obligés de faire porter le
gilet de sauvetage aux passagers.

Toute cette batterie de mesures démontre que l'invention des magal est aussi le fait de l'Etat dont
la participation est multidimensionnelle. C'est ainsi un Comité Régional de Développement
(organe de coordination de l'action gouvernementale dans chaque région) qui est réuni à
l'occasion de chacune de ses manifestations religieuses avec la participation des confréries pour
WURXYHU GHV VROXWLRQV DX[ pSLQHXVHV GLIILFXOWpV G¶KpEHUJHPHQW GH VpFXULWp GH FLUFXODWLRQ GH
ORJLVWLTXH G¶K\JLqQH GH VDOXEULWp HW GH VDQWp & HVW j FHWWH RFFDVLRQ TXH OHV EHVRLQV GH OD
confrérie sont exprimés sur ODFRXYHUWXUHVDQLWDLUHVXUO¶DOLPHQWDWLRQHQHDXHWHQpOHFWULFLWpOD
restauration, la communication et la sécurité des pèlerins. L'invention ne se fait ainsi pas en
cercle fermé. Elle se fait au contact de la frontière avec l'Etat comme avec d'autres cultures et
132  

 
d'autres pays comme l'ont montré Sophie Bava et Cheikh Guèye. D'autres exemples peuvent être
convoqués comme aux USA où Washington vibre chaque année avec la célébration devenue
traditionnelle de la Journée Serigne Touba initiée par Cheikh Mourtada Mbacké, fils cadet de
Cheikh Ahmadou Bamba et désormais perpétuée par son fils Serigne Mame Mor Mbacké.
Consacré dans l'agenda culturel de leur ville, les autorités font une déclaration depuis 1993 (le
23 juillet par Sharon Pratt Kelly pour la première) et le programme s'enrichit chaque année
davantage avec des conférences publiques, des marches, des chants religieux, des expositions,
etc.

Par ailleurs, Dakar veut ses magal et les conçoit progressivement à l'instar des autres foyers
d'émigration mouride. Le plus important est celui de la prière sur l'océan. Il s'agit de célébrer une
prière faite sur l'eau par Cheikh Ahmadou Bamba pendant son exil au Gabon. Devant le refus de
ses gardes de le laisser prier à sa guise, il aurait jeté son tapis de prière sur les flots et l'aurait
rejoint. Le tapis avec Cheikh Ahmadou Bamba aurait suivi le bateau pendant la prière et il serait
remonté à la fin. Cette prière miraculeuse fait l'objet d'une célébration sur la plage de Yoff
Diamalaye à Dakar qui attire à l'occasion plusieurs milliers de mourides de Dakar et des autres
régions. Cette manifestation devient depuis quelques années la manifestation mouride la plus
importante dans la ville de Dakar. Plusieurs dizaines de tentes sur la plage emplie par les chants
religieux. A cette occasion, les marabouts et les conférenciers rappellent le sens de cette prière.
Selon l'Imam qui dirige cette prière depuis le décès de Serigne Mourtada, elle « témoigne de son
DWWDFKHPHQW DX[ SULQFLSHV GH O¶,VODP 3DU FHWWH SULqUH LO D PRQWUp TXH VD YLH Q¶pWDLW SDV SOXV
importante que la prière ». Durant la célébration de 2005, Il a appelé tous les fidèles à suivre les
WUDFHV GX &KHLNK HW j SHUSpWXHU VHV °XYUHV © Tous ceux qui adorent Cheikh Ahmadou Bamba
GRLYHQWDLPHUFHTX¶LODIDLW5DLVon pour laquelle nous nous acquittons de la prière et des autres
SULQFLSHV GH O¶,VODP », a dit Serigne Fallou Abdoul Khadre. Plusieurs intervenants ont abondé
dans le même sens. Mais ils ont surtout appelé les fidèles à perpétuer tout ce que le guide a laissé
à la postérité.

$XILOGHVDQQpHVFHWWHPDQLIHVWDWLRQUHOLJLHXVHQHFHVVHGHSUHQGUHGHO¶DPSOHXU8QHLPPHQVH
foule prend d'assaut désormais chaque année le terrain de Diamalaye. Chaque grande ville du
Sénégal ayant un représentant du khalife de la confrérie, c'est cette personne qui s'associe avec les
initiateurs pour mettre en place un comité d'organisation du magal. Au delà de la plage, les
maisons mourides attenantes deviennent des lieux d'accueil des hôtes dans lesquelles des repas
gargantuesques sont préparés.

La célébration de ce magal démontre comme celle de la porte du port la volonté de l'influente


communauté mouride de Dakar d'avoir ses moments de rassemblement dans un lieu où elle a
besoin d'afficher son unité, sa puissance, sa solidarité face aux autres confréries et à l'anonymat
urbain. Elle se fait en s'appuyant sur le passage du Saint dans la ville même si cette idée est

133  

 
démentie par le magal des deux rakaas qui lui, célèbre un événement qui a eu lieu dans l'océan
mais dont le lieu précis est discuté.

'HO¶DQDO\VHGHODJHQqVHGHVmagal et des dynamiques qui les portent, ressortent des stratégies


politiques internes à la confrérie, des enjeux politiques nationaux, des dessous économiques
complexes que nous avons essayé de décrypter. En effet, la fragmentation des relations Etat-
confrérie mouride et la volonté de plus en plus affirmée des marabouts de la nouvelle génération
de renforcer leur position symbolico-religieuse à partir des positions économiques et politiques
sont devenues le nouveau paradigme. Celui-ci se traduit par la promotion de charismes
FRPSOH[HV V¶H[SULPDQW LQGLYLGXHOOHPHQW RX j WUDYHUV GHV JURXSHV GRQW OD YRFDWLRQ HVW G¶rWUH
hyper-active pour gagner une légitimité synonyme de reconnaissance de la confrérie. Le projet
reOLJLHX[ PRXULGH V¶HVW WRXMRXUV QRXUUL GH FHWWH UHFKHUFKH GX FKDULVPH /HV magal dont les
prétextes se sont largement diversifiés constituent les moments forts de construction et de
démonstration des charismes. Mais ils représentent également des espaces de socialisation et de
UHQRXYHOOHPHQW GX GLVFRXUV HW GHV SUDWLTXHV DLQVL TXH GHV OLHX[ G¶H[SUHVVLRQ GX VHQWLPHQW
national comme le magal de Saint-/RXLVO¶HVWGHYHQXDXILOGHVDQVDYHFOHUHPSODFHPHQWGHOD
statue de Faidherbe (grand héros français de la guerre coloniale au Sénégal) par celle de Cheikh
Ahmadou Bamba et la rebaptisation des rues de cette ancienne place forte de la colonisation.

Cette recherche a été menée sur le magal des deux rakaa de Saint-Louis et sur les magal de la
SULqUHVXUO¶RFpDQHt de la porte du port qui représentent des espaces-événements marquants de
O¶LWLQpUDLUH GH &KHLNK $KPDGRX %DPED IRQGDWHXU GH OD FRQIUpULH PRXULGH YHUV O¶H[LO TXL D
FRQVWLWXp SRXU OXL HW SRXU OD FRQIUpULH O¶RFFDVLRQ GH © semer » ses hiérophanies qui fondent les
FpOpEUDWLRQVG¶DXMRXUG¶KXL 1RXV \DYRQVDMRXWp OH kazzu radiab TXLFRPPpPRUHO¶DQQLYHUVDLUH
de la naissance du deuxième khalife de la confrérie, coïncidant avec celui du Mihraj, voyage
céleste du Prophète Mohamed à partir de Jérusalem.

Mais au-delà de Touba, Dakar et Saint-Louis, ce sont les magal GH O¶pWUDQJHU TXL FRQVWLWXHQW
O¶DXWUHSHQGDQWGHODmagalomania devenue une partie importante de la vie confrérique. En effet,
ODSOXSDUWG¶HQWUHHX[VRQWGHVVFqQHVG¶H[SRVLWLRQLQWHQVHjHOOH-même mais DXVVLjO¶H[WpULHXU
Ils sont devenus une vitrine importante de la confrérie dans des espaces de concentration mouride
FRPPHOHV86$ &KHLNK$KPDGRX%DPEDGD\ O¶,WDOLH YLVLWHGH6HULJQH0RXUWDGDHW magal).
Tous les espaces apportent ainsi des éclairages sur les déterminants de ces célébrations, sur leur
aboutissement et leur impact sur la confrérie des Mourides.

134  

 
2.4.5 - Communication 5 : C heikh A hmadou Bamba à Diourbel : L a
FRQVWUXFWLRQG¶XQHVSDFHDXWRQRPHSRXU/¶,VODPGDQVOH%DRO2ULHQWDO3-
1927, par le Professeur Cheikh Anta Babou, Université de Pennsylvanie,
Ce colloque invite à une réflexion sur le rôle que le soufisme pourrait jouer pour la résolution
GHVFULVHVPXOWLSOHVHWPXOWLIRUPHVTXLDVVDLOOHQWO¶KXPDQLWp,OVLHGGHVRXOLJQHUque le soufisme,
du moins dans sa forme institutionnalisée, a apparu come une réponse à la crise morale qui
affligeait le Khalifa sous les régimes dynastiques qui se sont succédé après le règne des
FRPSDJQRQVGX3URSKqWH0XKDPPDG&RPPHDXMRXUG¶KXLOHVVRXILVGpSORUDLHQWOµDEDQGRQGHOD
YRLHWUDFpHSDUOH3URSKqWHO¶REVHVVLRQSRXUOHSRXYRLUHWOHVELHQVPDWpULHOVOHVH[FqVGHWRXWHV
VRUWHV HW OD QpJOLJHQFH GH O¶pGXFDWLRQ VSLULWXHOOH ,OV FKHUFKDLHQW XQ PR\HQ SRXU pFKDSSHU DX[
tentations du monde matérLHOSRXUGpFRXYULUODYRLHTXLPqQHjODUHQFRQWUHDYHF'LHX&¶HVWj
WUDYHUVFHWWHUHFKHUFKHTX¶LOVRQWGpYHORSSpXQPRGHGHSHQVpHGHVLQVWUXPHQWVHWGHVDWWLWXGHV
qui ont permis à des générations de soufi de trouver les réponses adéquates aux défis de leur
temps. Cheikh Ahmadou Bamba fait partie de ces soufis qui ont puisé dans le patrimoine
D[LRORJLTXH HW H[SpULHQWLHOOH GX P\VWLFLVPH PXVXOPDQ SRXU IDLUH IDFH j O¶RSSUHVVLRQ FRORQLDOH
&¶HVW FHWWH SKLORVRSKLH HW SUD[LV IRUWHPHQW HPSUHLQWV GH OD VDJHsse soufie, qui a guidé ses
UHODWLRQVDYHFOHVURLVZRORIVHWSOXVWDUGO¶DGPLQLVWUDWLRQFRORQLDOHIUDQoDLVHDX6pQpJDO3RXUFHW
auteur, le séjour du Cheikh à Diourbel, et spécialement la période entre 1913 et 1927, offre un
exemple unique pour comprendre le rôle joué par les valeurs et éthiques du mysticisme
PXVXOPDQGDQVVRQ°XYUHG¶HQUDFLQHPHQWGHO¶,VODPGDQVOH%DRO

Le déménagement de Cheikh Ahmadou Bamba vers la ville coloniale de Diourbel en 1912


marque une étape importante dans les relations entrHOD0RXULGL\\DHWO¶DGPLQLVWUDWLRQFRORQLDOH
Pour la première fois depuis 1895 le chef des mourides était autorisé à revenir définitivement au
Baol. Il était toujours assigné à résidence, mais sa présence dans son pays natal était moralement
très encourageante pour les cheikhs et les disciples mourides. Ahmadou Bamba comprit aussi que
son installation à Diourbel inaugurait une nouvelle ère dans ses relations avec les Français. Il
GHPDQGDHWREWLQWO¶DXWRULVDWLRQGHFRQVWUXLUHXQHPDLVRQ/DSOXSDUWGHVHV fils et de ses filles
allaient naître durant son séjour à Diourbel. Pour lui, la ville faisait cependant partie de la dâr al-
harb (ou dâr al-kufr), la terre des infidèles, et il aurait préféré retourner dans son cher village de
Touba.

Pour Ahmadou Bamba OHVFRQWUDLQWHVOLpHVjO¶DEVHQFHGHOLEHUWpGHPRXYHPHQW pWDLHQW


DWWpQXpHVSDUOHIDLWTX¶LOVDYDLWGpVRUPDLVOD0RXULGL\\DFDSDEOHGHVXUYLYUHjO¶RSSUHVVLRQHWj
O¶RVWUDFLVPHLQIOLJpVSDUOHV)UDQoDLVHWTX¶LOFUR\DLWHQODSRVVLELOLWpGHWUDQVPHWWUHHW perpétuer
XQ KpULWDJH HQ WDQW TXH FKHLNK HW HQ WDQW TXH JXLGH IRQGDWHXU G¶XQH tarîqa prospère. Dans un
célèbre poème écrit juste après que les français aient pris la décision du transfert, le cheikh des
PRXULGHV SUpGLVDLW O¶pFKHF GHV PDFKLQDWLRQV GX FRORnisateur et affirmait que son séjour à
Diourbel marquera le triomphe de sa cause sacrée. Son installation dans le Baol oriental était en
135  

 
RXWUH XQ ERQ GpEXW SRXU O¶DQFUDJH IXWXU GH OD FRQIUpULH PRXULGH GDQV VD UpJLRQ QDWDOH
/¶DWPRVSKqUH GH FRQILDQFH TXL FDUDFWpULVDLW GH SOXV HQ SOXV VHV UHODWLRQV DYHF O¶DGPLQLVWUDWLRQ
FRORQLDOHOXLSHUPHWWDLWG¶HQYLVDJHUODWUDQVIRUPDWLRQSURJUHVVLYHGHFHWWHUpJLRQGX6pQpJDOHQ
un espace sacré mouride, une dâr al-murid. Ce processus allait se développer en trois phases, qui
VHFKHYDXFKHQWHQSDUWLHVLO¶RQV¶HQWLHQWjXQSRLQWGHYXHHPSLULTXHPDLVTXLVRQWGLVWLQFWHV
G¶XQSRLQWGHYXHDQDO\WLTXH SUHPLqUHPHQWO¶RFFXSDWLRQSK\VLTXHGXSD\VSDUOHVPRXULGHV 
GHX[LqPHPHQWODVDWXUDWLRQGHO¶HVSDFHJpRJUDSKLTXHDYHFGes signes religieux et culturels ; et
WURLVLqPHPHQWOHPDLQWLHQjGLVWDQFHGHO¶LQIOXHQFHIUDQoDLVH/HXUFDSDFLWpjV¶DSSURSULHUjOHXU
WRXUOHSD\VDJHFXOWXUHOGX%DRODWWpQXDOHVFUDLQWHVTX¶pSURXYDLHQWOHVPRXULGHVG¶rWUHSROOXpV
par la culture des FraQoDLVHWOHXUSHUPLWGHPLHX[V¶DGDSWHUjO¶DXWRULWpFRORQLDOH/HSURMHWGH
construction de la dâr al-murid, que les autorités françaises jugeaient au départ très suspect, leur
SDUXWGHSOXVHQSOXVDFFHSWDEOHDXIXUHWjPHVXUHTXHV¶LQVWDXUDLWXQHSROLWique de conciliation.

F aire face à la dâr al-kufr

Le projet de créer un espace mouride dans le Baol oriental devint particulièrement urgent lorsque
&KHLNK $KPDGRX %DPED IXW REOLJp HQ  GH FRKDELWHU DYHF OHV )UDQoDLV j O¶© HVFDOH ª GH
Diourbel. Le mot HVFDOHGpVLJQHXQHQGURLWVLWXpSUqVG¶XQHJDUHGHFKHPLQGHIHUG¶XQHULYLqUH
RXG¶XQHURXWHSULQFLSDOHHW TXL IRQFWLRQQHGDQVOHV]RQHVUXUDOHVHW VHPL-urbaines, comme un
FDUUHIRXUGHWUDQVDFWLRQVpFRQRPLTXHV'DQVOHFDVTXLQRXVLQWpUHVVHLOV¶DJLVVDLWDXVVLG¶XQOLHX
j SDUWLU GXTXHO O¶LQIOXHQFH FXOWXUHOOH IUDQoDLVH UD\RQQDLW HW SpQpWUDLW DX VHLQ GHV FRPPXQDXWpV
environnantes. Le dilemme auquel Bamba et ses disciples étaient confrontés était de devoir vivre
une vie de musulmans vertueux dans une région et un environnement empoisonnés par la
SUpVHQFHHWO¶DXWRULWpIUDQoDLVHeWDLW-il possible de faire de la place pour la dâr al-islam au sein de
la dâr al-kufr ? Cette situation fâcheuse ressemblait beaucoup à celle des musulmans du Sokoto
après la conquête du pays par les Anglais, telle que la décrit Murray Last dans Colonial Caliphate
52. /D UpDFWLRQ GHV PRXULGHV IXW DVVH] VHPEODEOH LO V¶DJLVVDLW GH FRQVHUYHU DYDQW WRXW XQH
LQGpSHQGDQFH JpRJUDSKLTXH HW FXOWXUHOOH /HV PRXULGHV DGKpUqUHQW G¶DXWDQW SOXV Iacilement à
FHWWH LGpH TXH O¶LGHQWLWp GH OD dâr al-islam dans les États wolofs avait toujours été définie en
WHUPHVG¶DXWRQRPLHVSDWLDOHSRXUOHVPXVXOPDQVSOXW{WTXHGHFRQWU{OHLGpRORJLTXHHWSROLWLTXH
G¶XQWHUULWRLUHHWGHVHVKDELWDQWVFRPPHF¶pWDLWle cas dans le Nord-Nigeria 53 .

                                                                                                                     
52    DƵƌƌĂLJ>ĂƐƚ͕͞ŽůŽŶŝĂůĂůŝƉŚĂƚĞ͕͟ĚĂŶƐĂǀŝĚZŽďŝŶƐŽŶĞƚ:ĞĂŶ>ŽƵŝƐdƌŝĂƵĚ;Ěŝƌ͘ͿLe  temps  des  marabouts  :  
itinéraires  et  stratégies  islamiques  en  Afrique  occidentale  française  v.  1880-­‐1960  (Paris,  Karthala,  1997),  67-­‐85.  

53    ^Ƶƌů͛ĠĐŚĞĐĚƵũŝŚĂĚĚĂŶƐůĞƐƌŽLJĂƵŵĞƐǁŽůŽĨƐƉƌĠĐŽůŽŶŝĂƵdž͕ůŝƌĞ>ƵĐLJŽůǀŝŶ͕͞/ƐůĂŵĂŶĚƚŚĞ^ƚĂƚĞŽĨ<ĂLJŽƌ  :  A  
ĐĂƐĞŽĨƐƵĐĐĞƐƐĨƵůZĞƐŝƐƚĂŶĐĞƚŽ:ŝŚĂĚ͕͟JAH  15  (1974),  587-­‐607.  Sur  les  relations  entre  les  religieux  musulmans  
et  le  pouvoi  r  temporel  dans  les  Etats  Wolofs  précoloniaux,  voir  Boubacar  Barry,  Le  royaume  du  Walo:  le  Sénégal  
avant  la  conquête    (Paris,  Karthala,  1985);  Mamadou  Diouf,  Le  Kayor  au  xixème  siècle  (Paris:  Karthala,  1990).    
WŽƵƌĐĞƋƵŝĞƐƚĚƵŶŽƌĚEŝŐĠƌŝĂ͕ůŝƌĞůĂƉƌŽĐůĂŵĂƚŝŽŶĚ͛KƵƐŵĂŶĂŶ&ŽĚŝŽƚƌĂĚƵŝƚĞĞŶĂŶŐůĂŝƐƉĂƌ͘͘ŝǀĂƌ͕ͨ  A  
Manifesto  of  the  Fulani  Jihad  »,  JAH  2(1961),  235-­‐243,  en  particulier  le  principe  no  11  :  «  >ĞƐƚĂƚƵƚĚ͛ƵŶĞǀŝůůĞĞƐƚ
136  

 
/HV PRXULGHV FUXUHQW G¶DERUG TXH OD GpWHQWLRQ GH %DPED j 'LRXUEHO IDLVDLW SDUWLH G¶XQ
plan destiné à saper les fondements de leur confrérie. Pour les disciples, Diourbel était le F°XU de
la dâr al-kufr. La ville abritait le siège du nouveau district du Baol et se trouvait sur la terre des
6pUqUHVTXLFRQWLQXDLHQWjUpVLVWHUjO¶LVODPLVDWLRQ/HFKHPLQGHIHUUHOLDQW'DNDUj%DPDNR DX
6RXGDQIUDQoDLV DYDLWDWWHLQWODYLOOHHQHWHQOHTXDUWLHUHXURSpHQ O¶HVFDOH avait fait
O¶REMHW G¶XQH pWXGH SUpDODEOH j OD FUpDWLRQ G¶LQIUDVWUXFWXUHV PRGHUQHV 8Q SRVWH GH SROLFH XQH
JDUHHWXQHpFROHGHYDLHQWrWUHFRQVWUXLWVGDQVOHEXWG¶HQFRXUDJHUOHVDIIDLUHV$YHFODOLJQHGH
FKHPLQGHIHUODFXOWXUHGHO¶DUDFKLGHFRPPHQoDLt à se développer et Diourbel allait rapidement
GHYHQLU O¶XQ GHV SOXV JUDQGV FHQWUHV pFRQRPLTXHV GX 6pQpJDO 'H  j  OD SRSXODWLRQ
allait passer de 2 200 à 11 300 habitants.54 'HVVRFLpWpVG¶LPSRUW-export libanaises, syriennes et
françaises allaient PRQRSROLVHU O¶pFRQRPLH ERXLOORQQDQWH GH OD YLOOH VWLPXOpH SDU O¶HVVRU GH OD
production de cacahuètes et par une population de plus en plus dense de fonctionnaires français et
africains.

Pour Cheikh Ahmadou Bamba, Diourbel était un parfait exemple de dâr al-kufr. Elle était
O¶RSSRVp GH OD FLWp PXVXOPDQH LGpDOH TX¶LO DYDLW GpFULWH GDQV VRQ OLYUH Matlab ul Fawzayni et
TX¶LO YRXODLW FRQVWUXLUH j O¶HPSODFHPHQW GH VRQ YLOODJH GH 7RXED /D FRKDELWDWLRQ DYHF OHV
)UDQoDLV SURPHWWDLW G¶rWUH WXPXOWXHXVH /HV GLVFLSles mourides étaient régulièrement arrêtés et
MHWpVHQSULVRQVRXVSUpWH[WHTX¶LOVWURXEODLHQWODSDL[GHV habitants par leurs chants bruyants55.
Le manque de place pour enseigner et pour loger les disciples représentait une autre contrainte.
Diourbel offrait peut-être le bonheur ici-bas mais, du point de vue des mourides, ceux qui
DGRSWDLHQWODFXOWXUHPDWpULDOLVWHHWOHVW\OHGHYLHIUDQoDLVGHODYLOOHQHSRXYDLHQWV¶DWWHQGUHTX¶j
GHVFKkWLPHQWVGDQVO¶DXWUHPRQGH

Selon Ahmadou Bamba, la dâr al-islam étaLW SULQFLSDOHPHQW GpILQLH SDU O¶DSWLWXGH GHV
musulmans à façonner leur espace social et géographique ± autrement dit, selon Eric Ross, leur
aptitude à construire une « configuration spatiale spécifique exprimant des fonctions spirituelles
et sociales56. » CHV GLIIpUHQWHV IRQFWLRQV pWDLHQW O¶pGXFDWLRQ OD SULqUH HW OHV WUDYDX[ DJULFROHV
$KPDGRX %DPED Q¶D MDPDLV FHVVp GH UpSpWHU j O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH TXH OH U{OH GH FKHI
SROLWLTXHQHO¶LQWpUHVVDLWSDV/HEXWGHVDYLHpWDLWGHWURXYHUXQHQGURLWRLO pourrait faire vivre
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
conforme  a  celui  qui  la  dirige  ͗Ɛ͛ŝůĞƐƚŵƵƐƵůŵĂŶ͕ůĂǀŝůůĞĂƉƉĂƌƚŝĞŶƚăů͛ŝƐůĂŵ  ͖Ɛ͛ŝůĞƐƚƵŶŵĠĐƌĠĂŶƚ͕ůĂǀŝůůĞĞƐƚ
ƵŶĞǀŝůůĞĚĞŵĠĐƌĠĂŶĐĞĞƚů͛ŽŶĚŽŝƚŽďůŝŐĂƚŽŝƌĞŵĞŶƚůĂĨƵŝƌ͘  »  

54    sŽŝƌƌĐŚŝǀĞƐEĂƚŝŽŶĂůĞƐ^ĠŶĠŐĂůĂŝƐĞƐ;E^Ϳ͕ϭϬϱ͕ϴ͕͞DŽŶŽŐƌĂƉŚŝĞĚƵĐĞƌĐůĞĚĞŝŽƵƌďĞů͕͟  février  1911.  

55    Entretien  avec    Gallo  Mbaye,    Touba,  14  févier  2000  et  Abdou  Samat  Sylla,  à  Diourbel,  le  28  juin  2000.  

56    ƌŝĐZŽƐƐ͕͞DĂƌĂďŽƵƚƐZĞƉƵďůŝĐƐ͕dŚĞŶĂŶĚEŽǁ͗ŽŶĨŝŐƵƌŝŶŐDƵƐůŝŵdŽǁŶƐŝŶ^ĞŶĞŐĂů͕͟Islam  et  Sociétés  au  


Sud  du  Sahara  16  (2002),  38.  

137  

 
sa famille, éduquer ses disciples et travailler la terre. Au moment de son arrestation en 1895, il
DYDLW UHSURFKp DX[ )UDQoDLV GH OH IRUFHU j TXLWWHU OD PDLVRQ TX¶LO DYDLW FRQVWUXLWH HW GpGLpH j
O¶pGXFDWLRQHWjODprière57. Selon CheiNK0EDFNp%RXVVRO¶DWWLWXGHGH&KHLNK$KPDGRX%DPED
V¶LQVFULWHQFHVHQVGDQVXQHORQJXHWUDGLWLRQDQFHVWUDOH/HVPHPEUHVGXFODQ0EDFNpORUVTX¶LOV
avaient affaire aux hommes de pouvoir, limitaient toujours leurs demandes à deux choses :
premièrement un terrain suffisant pour y construire une maison, une mosquée, une école et une
ferme et deuxièmement la sécurité dont ils avaient besoin pour mener à bien leurs activités 58.

'DQV OD VRFLpWp ZRORI FH VRXFL G¶DXWRQRPLH HW GH VpFXULWp VH WURXYDLW DX F°XU des
relations entre les religieux musulmans et le pouvoir temporel. La réalisation de la dâr al-islam
QpFHVVLWDLW GRQF EHDXFRXS G¶DXWRQRPLH DGPLQLVWUDWLYH HW FXOWXUHOOH SDU UDSSRUW j O¶eWDW /D
IRQGDWLRQ GH 'DURX 6DODP HW GH 7RXED V¶pWDLW LQVSLUpH GH FHWWH TXrWH G¶DXWRQRPLH $KPDGRX
Bamba disait que ces deux villages étaient les plus chers à son coeur, car il ne les avait pas hérités
GHVHVDQFrWUHVLOGLVDLWDXVVLTXHV¶LOV¶pWDLWLQVWDOOpGDQVFHVGHX[HQGURLWVFHQ¶pWDLWSDVSDUFH
que la terre y était ERQQHSRXUO¶DJULFXOWXUHHWO¶pOHYDJHPDLVSDUFHTX¶LOYRXODLWV¶\FRQVDFUHUj
O¶HQVHLJQHPHQWGHO¶LVODPHWjO¶DGRUDWLRQGHDieu59.

La dâr al-kufr DX FRQWUDLUH VH FDUDFWpULVDLW SDU O¶KpJpPRQLH SROLWLTXH HW FXOWXUHOOH GX
SRXYRLUFRORQLDOVXUO¶HVSDFHHWODSRSXODWLRQ'DQVOHVWH[WHVTX¶LOpFULYLWDSUqVVRQH[LO%DPED
parle souvent du Gabon comme du F°XU de la dâr al-kufr ,O VH SODLQW G¶\ DYRLU pWp HQWRXUp
G¶LQFUR\DQWVGDQVXQSD\VR©SHUVRQQHQHVHVRXFLDLWGXQRPG¶$OODK60».

/DFUpDWLRQG¶XQHVSDFe mouride au F°XU de la dâr al-kufr :

A l-M ubaraka

$XVVLW{W TXH &KHLNK $KPDGRX %DPED IXW DVVLJQp j UpVLGHQFH j O¶HVFDOH HQ MDQYLHU  OHV
principaux cheikhs mourides (Ibra Fati, Cheikh Anta et Cheikh Ibra Fal) se mirent à user de leur
influence pour obtenir son déménagement en dehors du quartier administratif. À la mi-février
OHVDXWRULWpVFRORQLDOHVGpFLGqUHQWG¶RFWUR\HUDXFKHLNK XQORSLQGHWHUUHjO¶H[WpULHXUGX

                                                                                                                     
57    Ahmadou  Bamba  Mbacké,  Jazâu  shakûr,  ͞>ĞƐŽŶƐĚƵŝŐŶĞĚĞZĞĐŽŶŶĂŝƐƐĂŶĐĞͿ͕ƚƌĂĚƵŝƚĞŶĨƌĂŶĕĂŝƐĞƚƉƵďůŝĠ
ƉĂƌů͛ĂƐƐŽĐŝĂƚŝŽŶĚĞƐĠƚƵĚŝĂŶƚƐŵŽƵƌŝĚĞƐĚĞů͛hŶŝǀĞƌƐŝƚĠĚĞĂŬĂƌ;ĂŬĂƌ͕ƐĚͿ͘  

58    sŽŝƌ͞>ĞƚƚƌĞăDŽŶƐŝĞƵƌƌĠǀŝĠ͕͟ĚĂŶƐ͞ĞƵdžƚƌĂŝƚĠƐĚ͛ƵŶůĞƚƚƌé  religieux  sénégalais  (1864-­‐ϭϵϰϱͿ͕͟ƉĂƌ^ĞƌŝŐŶĞ


DďĂĐŬĠŽƵƐƐŽ͕ƚƌĂĚƵŝƚĚĞů͛ĂƌĂďĞƉĂƌ<ŚĂĚŝŵDďĂĐŬĠ;ƉĂƉŝĞƌ͕ϭϵϵϰͿ͘  

59    ͛ĞƐƚĐĞƋƵĞƌĂƉƉŽƌƚĞĂĐŚŝƌDďĂĐŬĠĚĂŶƐ>ĞƐďŝĞŶĨĂŝƚƐĚĞů͛ƚĞƌŶĞů,  traduit  en  français  et  publié  par  Khadim  


Mbacké  (Dakar  1995),  44-­‐45.  

60    Ahmadou  Bamba  Mbacke,  Jazâu  shakûr,31.  

138  

 
TXDUWLHU HXURSpHQ HW OXL GRQQqUHQW O¶DXWRULVDWLRQ G¶\ FRQVWUXLUH XQH PDLVRQ 2Q Oe laissa
V¶LQVWDOOHUGDQVODSDUWLHHVWGHODYLOOHVXUXQHGXQHTXLVXUSORPEDLWOHOLWjVHFGHODULYLqUH6LQH

&KHLNK $KPDGRX %DPED GRQQD j VD QRXYHOOH FRQFHVVLRQ OH QRP G¶albuqahat al
mubarakati (emplacement béni) ou Al-Mubaraka. Le choix du mot buqahat ± à la place de dâr
(maison) ou madîna YLOOH  TX¶LO DYDLW XWLOLVpV SRXU QRPPHU FHUWDLQV YLOODJHV GDQV G¶DXWUHV
contextes ± HVWWUqVVLJQLILFDWLI/HIDLWGHUHEDSWLVHUOHTXDUWLHUpWDLWXQSUHPLHUSDVLOV¶DJLVVDLW
G¶LQYHVWLUODWHUUHG¶XQHVLJQLILcation qui la libèrerait du pouvoir français sur le plan idéologique
et culturel. Mubarakati EpQL UHQIRUoDLWFHWWHLGpHG¶DSSURSULDWLRQGHODWHUUHSDUOHVPRXULGHVHW
H[SULPDLWOHXUYRORQWpGHVHGpEDUUDVVHUGHO¶LQIOXHQFHQpIDVWHGHV)UDQoDLVHWG¶DVVRFLHUO¶HQGURLW
à la dâr al-islam. Buqahat DMRXWDLWXQVHQVG¶LQVXODULWpHWGHSUpFDULWp$KPDGRX%DPEDVHYR\DLW
comme un intrus dans la dâr al kufr.

/H VHQWLPHQW G¶LQVXODULWp UHOLJLHXVH HW FXOWXUHOOH GLVSDUXW DX IXU HW j PHVXUH TXH OHV
mourides parvenaieQW j WUDFHU OHV FRQWRXUV G¶$O-0XEDUDND HW j VH O¶DSSURSULHU HQ HQ IDLVDQW XQ
espace spécifique et sacré. La distinction spatiale est en fait la principale caractéristique de la «
VDLQWHWp ª(QPrPHWHPSVTX¶XQHVSDFHGHYLHQWVDFUpLOV¶LVROHGHVRQ environnement61. Mais
O¶REMHFWLYDWLRQ GH O¶HVSDFH UHOLJLHX[ QH VH IDLW SDV IRUFpPHQW HQ WHUPHV TXDQWLWDWLIV HW OD
VpSDUDWLRQ G¶DYHF OH SURIDQH Q¶HVW SDV WRXMRXUV SK\VLTXH  HOOH SHXW V¶H[SULPHU GH PDQLqUH
qualitative par des rituels et par une utilisation spécifiTXH GH O¶HVSDFH &¶pWDLW OH FDV G¶$O-
0XEDUDND TXL WRXW HQ pWDQW VLWXpH HQ OLVLqUH Q¶HQ pWDLW SDV PRLQV FRQWLJXs j O¶HVFDOH /HV
mourides luttèrent pour faire de leur quartier un espace VDFUp DSUqV O¶LQVWDOODWLRQ GH &KHLNK
Ahmadou Bamba en février 1913.

%DPED V¶LQVWDOOD DYHF TXHOTXHV GL]DLQHV GH GLVFLSOHV GDQV OD QRXYHOOH FRQFHVVLRQ TXL
GHYLQW YLWH XQ YLOODJH GH SOXVLHXUV FHQWDLQHV G¶KDELWDQWV $YDQW OD ILQ GH O¶DQQpH  OHXU
nombre avait déjà atteint 200 ; une année plus tard, le commandant du Baol note que 576
personnes vivent en permanence dans le quartier de Cheikh Ahmadou Bamba, sans compter 56
résidents temporaires ; à la fin de 1915, la population avait atteint 1.000 habitants 62 . À en juger
SDU OD IDoRQ G¶RUJDQLVHU VD YLH j $O- Mubaraka, AhmaGRX %DPED DYDLW DFFHSWp O¶LGpH G¶XQ
accommodement de la dâr al-islam au sein de la dâr al-kufr. M. L. Diop, son disciple et
biographe, explique que la seule différence entre la vie privée de Bamba à Diourbel et sa vie dans
un pays musulman était que la chaULDQ¶pWDLWSDVDSSOLTXpHjFDXVHGXFRQWH[WHSROLWLTXH¬$O-

                                                                                                                     
61    Yi-­‐&ƵdƵĂŶ͕͞^ĂĐƌĞĚ^ƉĂĐĞ͗džƉůŽƌĂƚŝŽŶŽĨĂŶ/ĚĞĂ͕͟ĚĂŶƐ<Ăƌůt͘ƵƚnjĞƌ;Ěŝƌ͘Ϳ͕Dimensions  of  Human  Geography:  
Essays  on  Some  Familiar  and  Neglected  Themes,  Département  de  recherche  en  géographie,  papier  186  (Chicago,  
University  of  Chicago,  1978),  84-­‐85.  

62    E^ŽƐƐŝĞƌ͕ŚŵĂĚŽƵĂŵďĂ͕ZĂƉƉŽƌƚƐƵƌůĞƐŵŽƵƌŝĚĞƐĚ͛ŚŵĂĚŽƵĂŵďĂĚĂŶƐůĞĐĞƌĐůĞĚƵĂŽů͕ŵĂƌƐ͕Ăǀƌŝů͕
mai  et  juin  1915.    Voir  aussi  Paul  Marty,  "ƚƵĚĞƐƐƵƌů͛ŝƐůĂŵĞƚůĞƐƚƌŝďƵƚƐŵĂƵƌĞƐ  :  les  Brakna  (Paris,  E  Leroux,  
1921),  234.  

139  

 
Mubaraka, Ahmadou Bamba menait sa vie sur le modèle de celle du Prophète Muhammad à
0pGLQHLOSDUWDJHDLWVRQWHPSVHQWUHO¶pWXGHO¶HQVHLJQHPHQWOHFXOWHHWVDFKDUJHGHJXLGHGHOD
communautp,ODYDLWOHPrPHQRPEUHGHVHUYLWHXUVHWGHVFULEHVTXHOH3URSKqWHHWDOODLWMXVTX¶j
UHVSHFWHUODSURSRUWLRQG¶KRPPHVHWGHIHPPHVSDUPLVHVDX[LOLDLUHV2QSHXWSHQVHUTXH'LRS
FRPPH WRXV OHV KDJLRJUDSKHV PXVXOPDQV D LQWpJUp DX UpFLW GH OD YLH G¶$KPadou Bamba les
épisodes archétypaux de la vie du Prophète à Médine ; mais les sources externes renseignent,
HOOHVDXVVLVXUOHVHIIRUWVGHVPRXULGHVSRXUIDLUHG¶$O-Mubaraka un espace sacré 63 .

La volonté de recréer la dâr al-islam à Diourbel se reflétait GDQV O¶DPpQDJHPHQW de


O¶HVSDFH /HVIHPPHV HW OHVKRPPHV DYDLHQWGHVTXDUWLHUVVpSDUpV8QHPRVTXpH masjid) pour
les cinq prières quotidiennes et une bibliothèque furent construites sur la place principale (pencc)
jO¶HVWGXYLOODJH/HVLPDJHVGHFHWWHbibliothèque contenant des dizaines de malles remplies de
livres nous sont parvenues grâce à une photo prise par une chercheuse française en 1931. Al-
0XEDUDNDGHYLQWSHXjSHXXQFHQWUHG¶HQVHLJQHPHQWHWG¶pWXGHGHO¶LVODPOHVGLVFLSOHVHWOHV
maîtres mDXUHV HW ZRORIV DIIOXDLHQW GDQV FH TXDUWLHU SRXU OLUH HW UHFRSLHU OH &RUDQ RX G¶DXWUHV
OLYUHVUHOLJLHX[GHVWLQpVDX[pOqYHVGDQVOHVpFROHVTXLYHQDLHQWG¶rWUHRXYHUWHV/¶DGPLQLVWUDWHXU
Lasselves a donné une description détaillée de la concession après son passage en 1914: Rien ne
P¶D pWp FDFKp  M¶DL SX REVHUYHU OD YLH GH FHWWH DJJORPpUDWLRQ M¶DL SX YRLU OD GLVWULEXWLRQ GHV
quartiers, les groupements : ici des talibés autorisés à venir auprès du maître, là des talibés qui
enseignent, plus loin des copistes qui font des manuscrits ou pour le serigne ou les personnes de
VD IDPLOOH HQILQ OH TXDUWLHU G¶$PDGRX %DPED HQWRXUp GH WDSDGHV GH W{OH HW qui renferme une
foule de baraques de bois, des cases en paille qui contiennent a peu près uniformément un lit de
fer et des cantines de métal contenant des livres arabes, de plus grandes baraques servant de
mosquées64.

/HSURFHVVXVGHWUDQVIRUPDWLRQG¶$O-Mubaraka en dâr al-islam QHV¶DUUrWDLWSDVjO¶XWLOLVDWLRQ


GHO¶HVSDFHLOFRPSUHQDLWDXVVLO¶REVHUYDQFHGHVIrWHV religieuses musulmanes, la construction
G¶XQHPRVTXpHFRPPXQDXWDLUHHWOHSHXSOHPHQWGXTXDUWLHUSDUGHVGLVFLSOHVPRXULGHV3HXGH
WHPSV DSUqV V¶rWUH LQVWDOOp GDQV VD QRXYHOOH FRQFHVVLRQ &KHLNK $KPDGRX %DPED LQYLWD VHV
disciples à Al-Mubaraka pour célébrHUODILQGXUDPDGDQO¶$wGHO-Fitr ; trois mille disciples de
tous les districts de la colonie répondirent à son invitation65. En janvier 1914, il appela les
adeptes à se joindre à lui pour le gamou (commémoration du mawlud, anniversaire de la

                                                                                                                     
63    ĂŶƐƐĂďŝŽŐƌĂƉŚŝĞĚ͛ŚŵĂĚŽƵĂŵďĂ͕Irwâ-­‐ƵŶŶĂĚŠŵŵŝŶ͛ĂĚŚďŝŚƵďďĂůŬŚĂĚŝŵ  trad.    et  éd.  Khadim  Mbacké  :  
ů͛ĂďƌĞƵǀĞŵĞŶƚĚƵĐŽŵŵĞŶƐĂůĚĂŶƐůĂĚŽƵĐĞƐŽƵƌĐĞĚ͛ĂŵŽƵƌĚƵŚĞŝŬĂů-­‐khadim  ou  la  biographie  de  Cheikh  
Ahmadou  Bamba,  DakĂƌ͕/&E͕ĚĠƉĂƌƚĞŵĞŶƚĚ͛/ƐůĂŵŽůŽŐŝĞ͕ƐĚ͕͘ŝŽƉĂŝŶĐůƵƐƵŶƉŽğŵĞĞŶů͛ŚŽŶŶĞƵƌĚĞĐĞƐ
auxiliaires.  Voir  pages,  102-­‐110.  

64    ANS,  Dossier  Ahmadou  Bamba,  Rapports  sur  les  mourides,  mars,  avril,  mai,  juin1914.  

65    ANS,  2G13,  54.  Rapport  sur  les  mourides,  septembre  1913.  

140  

 
naissance du Prophète Muhammad). Les sources françaises estiment à quatre mille le nombre des
disciples qui participèrent à cette célébration66. En 1917, vingt mille mourides se rassemblèrent à
Al-

Mubaraka pour le gamou 67. Ahmadou Bamba recommandait aussi à tous les mourides de
FpOpEUHU O¶DQQLYHUVDLUH GH VRQ DUUHVWDWLRQ HW GH VRQ H[LO DX *DERQ &HWWH FRPPpPRUDWLRQ OH
magalHVWDXMRXUG¶KXLODIrWHUHOLJLHXVHODSOXVLPSRUWDQWHGHOD0RXULGL\\D(OOHDWWLUHSOXVGH
deux millions de disciples dans la ville sainte de Touba.

Depuis la fondation de la Mouridiyya dans les années 1880, Cheikh Ahmadou Bamba
Q¶DYDLWMDPDLVDSSHOpVHVGLVFLSOHVjODFpOpEUDWLRQFROOHFWLYHG¶pYpQHPHQWVUHOLJLHX[/HIDLWTX¶LO
DLW GpFLGp GH OH IDLUH DSUqV  DORUV TX¶LO pWDLW REOLJp GH FRKDELWHU DYHF OHV )UDQoDLV HW TX¶LO
FRPSUHQDLWTX¶LOQ¶DOODLWSUREDEOHPHQW MDPDLV UHFRXYUHUVDOLEHUWpGHPRXYHPHQWHVW ODSUHXYH
TX¶LO DYDLW O¶DPELWLRQ G¶LQVFULUH OHV PDUTXHV FXOWXUHOOHV GH OD 0RXULGL\\D GDQV OH WHUULWRLUH GX
Baol sous domination française. L¶RUJDQLVDWLRQ GH FRPPpPRUDWLRQV UHOLJLHXVHV j $O-Mubaraka
faisait partie du projet de mettre cette terre à part, de la couper de la dâr al-kufr&RPPHO¶LQGLTXH
Yi Fu Tuan, dans son exploration du royaume du sacré, « lorsque les limites physiques sont
indiscernables ou absentes, les processions [on pourrait ajouter les fêtes, les pèlerinages, les
rituels] servent à marquer la mise à part » ± autrement dit à délimiter le domaine du sacré68. Les
FKHUFKHXUV VSpFLDOLVWHV GH O¶LVODP LQVLVWHQW VXU O¶LPSRUWDQFH GHV « rituels et des pratiques
FXOWXHOOHVªGDQVODIRUPDWLRQGHO¶HVSDFHJpRJUDSKLTXHPXVXOPDQ/HVUDVVHPEOHPHQWVSRXUGHV
IrWHV UHOLJLHXVHV Q¶pWDLHQW SDV VHXOHPHQW XQH IDoRQ GH GpOLPLWHU OH VDFUp  LOV pWDLHQW DXVVL OH
moyen de construire une conscience cROOHFWLYH HW GH UHQIRUFHU O¶LGHQWLWp UHOLJLHXVH
communautaire.

/D GpOLPLWDWLRQ G¶XQ HVSDFH VDFUp PRXULGH VH ILW HQ PrPH WHPSV TXH O¶RFFXSDWLRQ
physique du quartier. Peu après la fondation de la concession, Ahmadou Bamba ordonna à
quelques-uns des plus anciens cheikhs de se construire des résidences secondaires à Al-
Mubaraka. Ceux qui étaient aisés bâtirent des maisons de briques agrémentées de vastes cours et
de nombreuses chambres permettant de loger les disciples et les visiteurs durant les pèlerinages et
les fêtes religieuses. Les moins riches construisirent de grandes cases à toit de chaume, sur le
modèle de celles du pays mouride dans le Baol et le Cayor. Certains cheikhs étaient mandés à Al-
Mubaraka pour certaines tâches spécifiques, qui pouvaient parIRLVOHVRFFXSHUSOXVG¶XQDQXQ
HQVHLJQHPHQWGHVFRQVHLOVODFRQGXLWHG¶XQSURMHW

                                                                                                                     
66    E^͕ŽƐƐŝĞƌŚŵĂĚŽƵĂŵďĂ͕ƌĂƉƉŽƌƚĚĞů͛ĂĚŵŝŶŝƐƚƌĂƚĞƵƌ͕ĨĠǀƌŝĞƌϭϵϭϰ͘  

67    E^͕Ϯ'ϭϳ͕ϱ͘ZĂƉƉŽƌƚƉŽůŝƚŝƋƵĞĚ͛ĞŶƐĞŵďůĞƐƵƌůĞ^ĠŶĠŐĂů͕ĂŶŶĠĞϭϵϭϳ͘  

68    Voir  Yi-­‐&ƵdƵĂŶ͕͞^ĂĐƌĞĚ^ƉĂĐĞ͕͟ϴϱ͘  

141  

 
Al-Mubaraka devint rapidement le second lieu saint des mourides, après Touba. La
concession de Cheikh Ahmadou Bamba se trouvait au centre du village; elle était entourée, au
QRUGDXVXGHWjO¶HVWSDUOHVPDLVRQVGHVFKHLNKV/HVGHPHXUHVGHVHVpSRXVHVpWDLHQWGLVSRVpHV
au centre de la concession, dans un endroit clôturé, gardé par les disciples; il était interdit aux
KRPPHVG¶\HQWUHU(QDSUqVEHDXFRXSG¶KpVLWDWLRQO¶DGPLQLVWUDWLRQFRORQLDOHDXWRULVDOHV
mourides à construire une mosquée du vendredi pour les prières collectives69. Cette mosquée,
TXL pWDLW DVVH] YDVWH SRXU O¶pSRTXH IXW OD SUHPLqUH JUDQGH UpDOLVDWLRQ GH OD 0RXULGL\\D HW VRQ
achèvement en deux ans fut la démonstration de la puissance de la confrérie. Les porteurs de
WUDGLWLRQV RUDOHV PRXULGHV GLVHQW TX¶$KPDGRX %DPED pWDLW SDUWLFXOLqUHPHQW ILHU GH FHWWH
mosquée. On lui adressa, même depuis la Mauritanie, des messages de félicitation et des poèmes
vaQWDQW OD EHDXWp GH O¶pGLILFH70 /D ILHUWp GH %DPED V¶H[SOLTXH SHXW-être aussi par la valeur
symbolique du bâtiment dont la silhouette, dans le paysage du Baol sous domination française,
était comme la matérialisation de la puissance de la Mouridiyya. Les monuments architecturaux
IRQFWLRQQHQW VRXYHQW FRPPH GHV PDQLIHVWDWLRQV H[WHUQHV GH O¶LQWHQVLWp HW GH O¶LQIOXHQFH GHV
croyances religieuses.

$KPDGRX%DPEDV¶HIIRUoDLWGHYLYUHGDQVOHVOLPLWHVG¶$O-0XEDUDNDHWG¶DYRLUOHPRLQV
de contacts possibles avec la dâr al-kufr. Cette attitude fut la source de conflits avec les agents de
O¶DGPLQLVWUDWLRQFHVGHUQLHUVVHSODLJQDLHQWVDQVFHVVHGHFHTXHOHFKHLNKUHFKLJQDLWjUpSRQGUH
à leurs convocations et avait tendance à les faire poireauter à la porte de sa maison ORUVTX¶LOV
YHQDLHQWOXL UHQGUHYLVLWH /HV IRQFWLRQQDLUHVFRORQLDX[DFFXVDLHQWDXVVLOHVPRXULGHVG¶HQOHYHU
GHVHQIDQWVHWGHOHVFDFKHUGDQVODFRQFHVVLRQ/¶DGPLQLVWUDWLRQGpFLGDPrPHjXQPRPHQWTXH
la clôture en tôle ondulée de trois mètres de haut représentait un danger, car elle soustrayait les
activités des habitants au regard des agents français. Ces tensions montrent le malaise et
O¶LQTXLpWXGH GH O¶DGPLQLVWUDWLRQ IDFH j O¶DXWRQRPLH VSDWLDOH GH SOXV HQ SOXV JUDQGH GX TXDUWLHU
mouride.

/¶H[SDQVLRQPouride dans le Baol oriental

2XWUHODFUpDWLRQG¶XQH dâr al-islam au coeur de la dâr al-kufrOHVPRXULGHVV¶HIIRUFqUHQW DXVVL


G¶pODUJLUO¶HVSDFHVDFUpTXHUHSUpVHQWDLW$O- Mubaraka en étendant leur territoire à travers le Baol

                                                                                                                     
69    ANS,  2G  18,  Sénégal,  situation  politique,  rapports  trimestriels,  1-­‐2-­‐3;  Sénégal,  rapport  politique,  premier  
trimestre  1918.  

70    Sur  la  construction  de  la  mosquée  de  Diourbel  voir  ANS  2G  18,  cercle  de  Diourbel,  rapports  mensuels  
Ě͛ĞŶƐĞŵďůĞ͕ϭϵϭϴ͖ǀŽŝƌĂƵƐƐŝIrwâ,  99-­‐ϭϬϬĞƚďĚŽƵůŚĂĚDďĂĐŬĠ;ƐŽƵƐů͛ĂƵƚŽƌŝƚĠĚĞͿ͕  Cheikh  Ahmadou  Bamba,  
fondateur  de  la  confrérie  des  mourides͕ϮǀŽů͘;WĂƌŝƐ͕Ě͘Ě͛ĂƌƚĚĞƐ,ĞƵƌĞƐůĂŝƌĞƐ͕ϭϵϴϰͿ͘  

142  

 
oriental. Les premiers mouriGHV j V¶rWUH MRLQWV DX PRXYHPHQW PLJUDWRLUH HQ GLUHFWLRQ GX %DRO
oriental parlaient de cette entreprise comme de leur gaddaay.71

(Terme wolof traduisant le mot hijra qui désigne le déplacement du Prophète Muhammad de La
Mecque à Médine), ce qui est très révpODWHXU,OVLQVLVWDLHQWVXUOHIDLWTX¶LOpWDLWLPSRUWDQWTXHOH
SD\VDLWXQHLGHQWLWpPRXULGH3RXUODSOXSDUWGHVPRXULGHVFHSHQGDQWFHWWHPLJUDWLRQQ¶HVWSDV
XQHIXLWHGHYDQWO¶RSSUHVVLRQFRPPHF¶HVWVRXYHQWOHFDVGDQVODWUDGLWLRQLVODPLTXHPDLVSlutôt
un exil volontaire en quête de baraka. Le processus migratoire avait débuté plus tôt, sans que
&KHLNK$KPDGRX%DPEDQHO¶DLWQLSURYRTXpQLHQFRXUDJp(QIDLWGDQVOHVSUHPLHUVWHPSVGX
développement de la Mouridiyya, il essayait même de dissuader les disciples de se rassembler
DXWRXUGHOXL8QHWHOOHDWWLWXGHQ¶HVWSDVH[WUDRUGLQDLUHGHODSDUWG¶XQFKHLNKVRXILHQTXrWHGH
SHUIHFWLRQVSLULWXHOOHHWSDVHQFRUHWRXWjIDLWV€UG¶rWUHVXIILVDPPHQWVROLGHSRXUIRQGHUHWGLULJHU
une communauté de disciples. Cette répugnance à se laisser entourer par un grand nombre de
personnes explique peut-rWUHSRXUTXRLDYDQWG¶rWUHDVVLJQpjUpVLGHQFHj'LRXUEHO%DPEDDYDLW
pYLWp GH V¶LQVWDOOHU WURS ORQJWHPSV GDQV XQ PrPH OLHX HW SRXUTXRL LO Q¶DYDLW MDPDLV LQYLWp Ves
disciples à des célébrations collectives de fêtes musulmanes.

$SUqVVRQHPPpQDJHPHQWj'LRXUEHO%DPEDFKDQJHDG¶DWWLWXGHFRPPHQRXVO¶DYRQVYX
SOXVKDXWHWVHPLWjSRXVVHUOHVFKHLNKVHWOHVGLVFLSOHVPRXULGHVjV¶LQVWDOOHUj$O-Mubaraka,
puis dans WRXW OH %DRO RULHQWDO /D FRQMRQFWLRQ GHV GHX[ pYpQHPHQWV Q¶HVW SDV XQH SXUH
FRwQFLGHQFH/¶LQIOXHQFHJUDQGLVVDQWHGHV)UDQoDLVVXUVDWHUUHQDWDOHQpFHVVLWDLWODUpDIILUPDWLRQ
G¶XQH LGHQWLWp PXVXOPDQH GDQV OD UpJLRQ HW O¶RFFXSDWLRQ SK\VLTXH GH O¶HVSDFH était un moyen
G¶DWWHLQGUH FHW REMHFWLI &RPPH OHV )UDQoDLV DYDLHQW DEDQGRQQp OD SROLWLTXH GX JRXYHUQHXU
général Ernest Roume, qui consistait à empêcher la formation de centres de prosélytisme
PXVXOPDQ O¶HQWUHSULVH pWDLW PRLQV OLWLJLHXVH 5pSRQGDQW j O¶DSpel de leur chef, les cheikhs
mourides fondèrent une série de nouveaux villages et réoccupèrent ceux qui avaient été autrefois
abandonnés, afin de structurer et canaliser le foisonnement des disciples. Certains de ces villages
étaient associés au souvenir G¶pYpQHPHQWVLPSRUWDQWVGHODYLHGH&KHLNK$KPDGRX%DPEDHWGH
la fondation de la Mouridiyya.

3HXDSUqVODIRQGDWLRQG¶$O-Mubaraka, Bamba chargea son disciple Mbaye Diakhaté de


IDLUHUHYLYUH.KRXURX0EDFNpOHYLOODJHGHVDQDLVVDQFH'LDNKDWpV¶\LQVWDOOa et ouvrit une école
coranique. Ahmadou Bamba fit aussi de ce village son lieu de sépulture préféré, car il refusait
TX¶DXFXQPHPEUHGHVDIDPLOOHQHI€WHQWHUUpGDQVODWHUUHVRXLOOpHGH'LRXUEHO8QHGL]DLQHGH
ses fils et filles sont enterrés dans ce cimetière.72

                                                                                                                     
71    Entretiens  avec  Cheikh  Mame  Balla  Mbacké,    à  Mbacké,  le  5  mai  1991  et  le  29  mai  2000,  et  avec  Mor  Talla  
Mbacké,    à    Gowane,  le  24  avril  2000.    

72    Entretien  avec  Sadikh  Kan  et  Modou  Diakhaté  a  Khourou  Mbacké,  le  29  juin  200.  

143  

 
Après la réhabilitation de Khourou Mbacké, Amsatou Diakhaté, autre cheikh mouride
UHQRPPp IXW HQYR\p j 7RXED SDU $KPDGRX %DPED TXL OXL GHPDQGD G¶\ RXYULU XQH pFROH
&KHLNK$KPDG1GRXPEpIRQGDOHYLOODJHGH6DPjNLORPqWUHVjO¶HVWGH'LRXUEel, et Cheikh
Ibra Fall celui de Darou Khafor entre Sam et Mbacké Baol. En 1912, Cheikh Ibra Fati fonda le
village de Darou Mouhti, sur la frontière entre Cayor et Baol.

Ces initiatives provoquèrent une vague migratoire qui porta les cheikhs et les disciples
PRXULGHVYHUVO¶HVWGX%DRO2QSHXWOLUHGDQVXQUDSSRUWUpGLJpHQSDUXQDGPLQLVWUDWHXU
colonial, que « les mourides ont conquis toute la province du Baol » 73. Les migrants étaient sans
doute attirés par la disponibilité de la terre et la sécurité offerte par les villages mourides; mais ils
se disaient surtout en quête de baraka. Les archives et la tradition orale ne laissent aucun doute à
FH VXMHW GHV PRXULGHV GX 6DORXP HW G¶DXWUHV UpJLRQV GX 6pQpJDO R OHV WHUUHV FXOWLYDEOHV QH
manquaient pas, se joignirent eux aussi à ce mouvement.

/DPLJUDWLRQPRXULGHV¶pWHQGLWSOXVWDUGDX6pQpJDOGX&HQWUH-(VWHWGHO¶(VWHWSULWXQH
IRUPH QRXYHOOH VRXV OD GLUHFWLRQ GH FKHLNKV HQJDJpV GDQV OD FXOWXUH GH O¶DUDFKLGH /H SUHPLHU
G¶HQWUH HX[ IXW 0DPDGRX 0RXVWapha, fils aîné et successeur de Cheikh Ahmadou Bamba, qui
IRQGDXQHVpULHGHYLOODJHVGDQVO¶DQFLHQQHSURYLQFHGX/DjO¶HVWGHO¶DQFLHQUR\DXPHGX%DRO
Ce mouvement migratoire fut le départ de ce que les chercheurs ont appelé le « front pionnier
mouridH ª $KPDGRX %DPED Q¶HQ IXW SDV O¶LQVWLJDWHXU PrPH V¶LO GRQQD VD EpQpGLFWLRQ j OD
FUpDWLRQGHQRXYHOOHVLQVWDOODWLRQVOHVHPSODFHPHQWVFKRLVLVpWDLHQWHQOLVLqUHGXSD\VG¶RULJLQH
des Mbacké et pour la plupart le long de la voie ferrée. Les villages fonctionnaient plutôt comme
des daaras laxasaay GHV pFROHV GH WUDYDLO   OD FXOWXUH GH O¶DUDFKLGH HW GX PLO RFFXSDLW SOXV GH
SODFH TXH O¶pWXGH GX &RUDQ GDQV OD YLH GHV FRPPXQDXWpV TXL Q¶pWDLHQW SDV GLULJpHV SDU GHV
cheikhs lettrés comme lors de la première phase décrite plus haut, mais par de simples disciples à
qui leurs guides religieux avaient confié cette mission.

Ces villages et ces daaras portaient cependant des noms typiquement mourides et étaient
construits selon la même architecture et la même organiVDWLRQ GH O¶HVSDFH TXH OHV SUHPLHUV
villages mourides. Dans la société wolof, on donne traditionnellement aux agglomérations les
QRPV GH OHXUV IRQGDWHXUV RX GH SHUVRQQHV FpOqEUHV  FHUWDLQHV SRUWHQW OH QRP G¶XQ DUEUH G¶XQ
puits ou de tout autre élément toSRJUDSKLTXHG¶DXWUHVFHOXLG¶XQpYpQHPHQWLPSRUWDQW FRPPH
une migration). Les villages mourides, en revanche, portent souvent les noms de villages fondés
SDU&KHLNK$KPDGRX%DPEDDXGpEXWGHVDFDUULqUHFHVQRPVIRQWG¶DXWUHSDUWUpIpUHQFHjGHV
attribXWV G¶$OODK j GHV FRQFHSWV FRUDQLTXHV RX j GHV YLOOHV DVVRFLpHV j O¶KLVWRLUH GH O¶LVODP DX
Moyen-2ULHQW FRPPH 0pGLQH 6DP GH O¶DUDEH sham 6\ULH  RX 0LVVLUD GH O¶DUDEH misr,
Égypte).

                                                                                                                     
73    ANs  2G26,  10.  Rapport  politique  annuel,  1926  

144  

 
Les villages mourides sont construits autour du penc, place centrale délimitée par la
FRQFHVVLRQGXFKHLNKORFDOjO¶RXHVWHWODPRVTXpHjO¶HVW$XFHQWUHGHODSODFHVHGUHVVHVRXYHQW
XQJUDQGDUEUH DLQVLTX¶XQ mbar VRUWHG¶DEUL VSDFLHX[ HW XQSXLWVRXXQUpVHUYRLUG¶HDX /HV
ateliers des artisans se trouvent aussi à cHW HQGURLW /¶pFROH FRUDQLTXH HVW VRXYHQW LQVWDOOpH j
O¶LQWpULHXU GH OD FRQFHVVLRQ GX FKHLNK /¶DUEUH HW OH mbar sont les endroits où se réunissent les
JHQV/HVKDELWDWLRQVVRQWDOLJQpHVGHSDUWHWG¶DXWUHVGHODUJHVDOOpHVTXLSDUWHQWGXpenc et sont
perpendiculaires les unes aux autres ce qui délimitent des quartiers. Les maisons sont des cases
carrées et vastes, très différentes des huttes traditionnelles des Wolofs qui sont rondes et plus
petites. La concession du cheikh est composée de petites maisons appelées kees (boîtes), qui sont
séparées par des tapades pourvues de portes de communication. Chaque petite maison abrite une
pSRXVH HW VD IDPLOOH  FHUWDLQHV VHUYHQW j ORJHU OHV K{WHV GH SDVVDJH /¶HVSDFH SULYp GX FKHLNK
occupe le centre ou le côté est GHODFRQFHVVLRQ/¶HQVHPEOHHVWHQWRXUpG¶XQHFO{WXUHGHW{OHRX
GH SDLOOH RXYHUWH HQ XQ VHXO HQGURLW /D SRUWH G¶HQWUpH RXYUH VXU XQ YDVWH HVSDFH YLGH VRXYHQW
occupé par un mbar par lequel la maison est reliée au penc.. Le mbar sert en quelque sorte de
passerelle entre la sphère privée, représentée ici par les différentes kees et la sphère publique
matérialisée par le penc. Ce modèle est différent de celui des habitations wolofs traditionnelles,
mais appartient à une tradition architecturale que partagent G¶DXWUHV FRPPXQDXWpV PXVXOPDQHV
G¶$IULTXHGHO¶2XHVW74

/DGHVFULSWLRQTXLSUpFqGHPRQWUHTXHO¶RFFXSDWLRQGHO¶HVSDFHSDUOHVPRXULGHVVXLYDLW
XQVFKpPDSUpFLV/¶XQHGHVSULQFLSDOHVFDUDFWpULVWLTXHVGHFHVFKpPDHVWO¶XWLOLVDWLRQGHODOLJQH
droite et du FDUUp FRPPH O¶RQW UHPDUTXp OHV DGPLQLVWUDWHXUV IUDQoDLV SXLV OHV chercheurs75.
/¶pWXGHGHO¶DUFKLWHFWXUHLVODPLTXHUpYqOHODFDSDFLWpGHVIRUPHVJpRPpWULTXHVjGRWHUXQOLHXGH
FHUWDLQHV YDOHXUV 6HORQ 6H\\HG + 1DVU © O¶HVSDFH GDQV O¶DUFKLWHFWXUH LVODPLTXH Q¶HVW MDPDLV
séparé de la forme. [...] Ce sont les formes contenues dans un espace qui lui donnent tout son sens
76». Outre leurs fonctions architecturales, le carré et la ligne droite ont une signification
V\PEROLTXH HW VSLULWXHOOH /¶REMHW OH SOXV VDFUp GH O¶LVODP OD kaaba (construction sacrée, dans
O¶HQFHLQWHGHODPRVTXpHGH/D0HFTXH HVWXQFXEH± forme géométrique parfaite qui, pour les
                                                                                                                     
74    ĞƚƚĞĂƌĐŚŝƚĞĐƚƵƌĞƐ͛ŝŶƐƉŝƌĞăůĂĨŽŝƐĚĞƐƚƌĂĚŝƚŝŽŶƐŝƐůĂŵŝƋƵĞƐƉŽƵƌůĂŐĞƐƚŝŽŶĚĞů͛ĞƐƉĂĐĞĞƚĚĞůĂĐƵůƚƵƌĞǁŽůŽĨ
et  de  se  cours  royales.  La  division  de  la  concession  du  cheikh  en  petites  maisons  reliées  par  des  portes  reflète  
ƵŶĞƌĠĂůŝƚĠƐŽĐŝĂůĞƋƵŝƉĞƵƚġƚƌĞĂƐƐŽĐŝĠĞăƵŶĞĐŽŶĐĞƉƚŝŽŶŵƵƐƵůŵĂŶĞĚĞů͛ĞƐƉĂĐĞ͘Voir,  par  example,  Alexandre  
Guerin,  «  Some  Features  of  a  Village:  Architecture  in  Transition  from  Antiquity  to  Islam  »,  Al-­‐͚hƐƵƌĂů-­‐Wusta  
2(1995),  51.    >͛ĞƐƉĂĐĞůĂŝƐƐĠůŝďƌĞăů͛ĞŶƚƌĠĞĚĞůĂŵĂŝƐŽŶƌĂƉƉĞůůĞůĞďƵůŽ͕ƐŽƌƚĞĚĞǀĞƐƚŝďƵůĞĚĞƐĐŽŶĐĞƐƐŝŽŶƐ
royales  traditionnelles  mandingues  et  wolofs.  Voir  Abbe  D.  Boilat,  Esquisses  sénégalaises  (Paris,  1984).  

75    sŽŝƌůĞƌĂƉƉŽƌƚĚĞ>ĂƐƐĞůǀĞƐ͕ĐŽŵŵĂŶĚĂŶƚĚĞŝŽƵƌďĞů͕ƋƵŝƐ͛ĞdžƚĂƐŝĂŝƚăƉƌŽƉŽƐĚĞůĂƉƌŽƉƌĞƚĠĚĞƐǀŝůůĂŐĞƐ
mourides  et  de  leur  usage  de  la  ligne  droite.  ANS,  Dossier  Ahmadou  Bamba,  Rapport  sur  Ahmadou  Bamba  et  les  
mourides  à  Diourbel,  1913  et  aussi  rapport  sur  Ahmadou  Bamba  et  ses  mourides,  1915.  

76    Seyyed  Hossein  Nasr,  introduction  à  The  Sense  of  Unity:  the  Sufi  Tradition  in  Persan  Architecture,  dir.,  Nader  
Ardalan  et  Laleh  Bakhtiar  (Chicago,  University  of  Chicago  Press,  1973),  XII.  

145  

 
musulmans, symbolise la stabilité et la perfection de la création divine. La maison du Prophète
Muhammad à Médine a été construite sur le modèle de la kaaba, de mêmeque tous les lieux de
FXOWHGHO¶LVODP/DPpGHFLQHHWODP\VWLTXHPXVXOPDQHSUrWHQWDXFDUUpG¶LPPHQVHVSRXYRLUV
$X 6pQpJDO FRPPH GDQV GH QRPEUHXVHV FRPPXQDXWpV G¶$IULTXH GX 1RUG HW GH O¶2XHVW cette
FUR\DQFHV¶H[SULPHSDUOH khatem (sceau), ou « carré mystique », dans lequel chiffres et lettres
sont mélangés pour produire une force extraordinaire utilisée pour guérir ou pour punir. Comme
le carré, la ligne droite revêt aussi des significations s\PEROLTXHV /¶LVODP HVW VRXYHQW GpVLJQp
GDQV OH &RUDQ SDU O¶H[SUHVVLRQ sirât al-mustaqîm, la voie droite. Pour la prière, les musulmans
GRLYHQW VH UDQJHU HQ OLJQHV GHUULqUH O¶LPDP HW SDUDOOqOHPHQW DX PXU TXL LQGLTXH OD qibla (la
direction de la kaaba vers laquelle on doit se tourner pour prier). Cette géométrie sacrée de
O¶LVODPHVWWUqVYLVLEOHGDQVO¶HQYLURQQHPHQWEkWLGHO¶$IULTXHGHO¶2XHVW

L a protection de la dâr al-murid

Le projet de transformation du Baol oriental en espace mouride ne se limitait pas au remodelage


FXOWXUHOHWjO¶RFFXSDWLRQSK\VLTXHGXSD\V,OV¶DJLVVDLWHQRXWUHG¶HPSrFKHUO¶LQIOXHQFHGHODdâr
al-kufr de déborder sur la dâr al-murid/¶XQGHVGpILVOHVSOXVLPSRUWDQWVDX[TXHOVOHVPRXULGHV
HXUHQWjIDLUHIDFHIXWFHOXLG¶HPSrFKHUOHVpFROHVIUDQoDLVHVG¶HQYDKLUO¶HVSDFHVDFUp(Q
les chefs mourides, qui tentaient probablement de négocier le déménagement de Cheikh
$KPDGRX %DPED KRUV GH O¶HVFDOH GH 'LRXUEHO SURPLUHQW j UHJUHW GH VRXWHQLU OH SODQ GH
O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH G¶RXYULU XQH pFROH IUDQoDLVH j 0EDFNp %DRO ,OV FRPSUHQDLHQW
certainement pourquoi les Français tenaient tant à ouvrir une école à Mbacké et à voir leurs
enfants fréquenter cette institution. Ils comprenaient aussi pourquoi cette initiative avait été prise
DORUVTX¶$KPDGRX%DPEDpWDLWGHUHWRXUDX%DROHWTXHOHVPRXULGHVHVVD\DLHQWGHUHPRGHOHUOH
SD\VDJH VXU OH SODQ FXOWXUHO FRPPH VXU OH SODQ GpPRJUDSKLTXH ,OV Q¶DXUDLHQW SDV FRQWUHGLW OH
commandant de district du Baol qui écrivait dans son rapport de 1915 :

/HPDLQWLHQG¶XQHpFROHj0EDFNpVHPEOHSUpVHQWH sic) un grand avantage au point de


vue de la propagande anti-PRXULGHPDLVSRXUTX¶HOOHSXLVVHVHPDLQWHQLULOIDXGUDLWWURXYHUXQ
instituteur sérieux, capable, tranquille, assez habile et politique pour se faire accepter de tous. Cet
instituteur est impossible à trouver77.

Le premier maître qui fut nommé fut renvoyé quelques semaines après son arrivée à cause
GH VRQ KXPHXU HW GH VRQ FRPSRUWHPHQW GpVDJUpDEOHV 6RQ UHPSODoDQW GLSO{Pp GH O¶eFROH GHV
Fils de Chefs de Saint-/RXLVDUULYDj0EDFNpDXFRXUVGHO¶DQQpHVFRODLUHPDLVDYDQWODILQ
GH O¶DQQpH LO DYDLW SHUGX OD PRLWLp GH VHV pOqYHV ¬ OD ILQ GH O¶DQQpH VFRODLUH -1915, il
démissionna, prétextant que son père avait besoin de lui en Mauritanie 3RXU O¶DGPLQLVWUDWLRQ
FHWWH GpPLVVLRQ pWDLW GXH DX[ SUHVVLRQV TX¶LO DYDLW VXELHV  LO V¶pWDLW SUREDEOHPHQW FRQYHUWL j OD
Mouridiyya et ne voulait pas offenser Ahmadou Bamba et les dignitaires de Mbacké dont les
                                                                                                                     
77    ANS,  Dossier  Ahmadou  Bamba,  rapport  sur  Ahmadou  Bamba  et  ses  mourides,  1915.  

146  

 
SURWHVWDWLRQV FRQWUH O¶pFROH pWDLHQW GH SOus en plus véhémentes. Cheikh Ahmadou Bamba, qui
Q¶H[SULPDLW TXH UDUHPHQW VRQ RSSRVLWLRQ j O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH V¶DGUHVVD XQ MRXU DX
commandant de Diourbel et le mit au défi de justifier une politique qui consistait à forcer les gens
à apprendre le IUDQoDLV  DX FRPEOH GH O¶H[DVSpUDWLRQ LO OXL GHPDQGD FH TX¶LO SHQVHUDLW VL RQ
O¶REOLJHDLWjDSSUHQGUHOHwolof78'HYDQWWDQWG¶REVWLQDWLRQO¶DGPLQLVWUDWLRQILQLWSDUUHQRQFHU
DXSURMHWHWDYHFO¶DYDOGHVQRWDEOHVPRXULGHVILWWUDQVIpUHUOHVGRX]HpOqYes concernés dans une
pFROH GH 'LRXUEHO /H IDLW TXH OHV PRXULGHV DFFHSWqUHQW OH WUDQVIHUW GHV pOqYHV TX¶LOV SD\qUHQW
PrPHSRXUOHXUORJHPHQWHWSRXUWRXWFHGRQWLOVDYDLHQWEHVRLQPRQWUHTX¶LOVQHVHPpILDLHQW
SDVWRWDOHPHQWGHO¶pGXFDWLRQIUDQoDLVHils étaient en revanche totalement opposés à la présence
G¶XQHpFROHVXUOD © WHUUHVDFUpH ª GHOHXU FRQIUpULH /DUpDFWLRQGHODSRSXODWLRQ GH0EDFNp j
FHWWHpFROHpWDLWHQDFFRUGDYHFO¶DWWLWXGHJpQpUDOHGHVPRXULGHVHQYHUVO¶DGPLQLVWUDWLRQFRORQLDOH
LeXU SRVLWLRQ Q¶pWDLW SDV DJUHVVLYH /HV JHQV SD\DLHQW OHXUV LPS{WV REpLVVDLHQW DX[
administrateurs et contribuaient à la conscription militaire, mais ils voulaient tout de même
FRQVHUYHUXQHKpJpPRQLHFXOWXUHOOHVXUFHTX¶LOVFRQVLGpUDLHQWFRPPHOHXUHVSDFe sacré.

Le souci de créer et de préserver un espace sacré mouride ne disparut pas, même lorsque
le pouvoir colonial fut bien installé et que la postérité de la tarîqa, et sa légitimité, furent
apparemment assurées. Après la mort de Cheikh Ahmadou Bamba, cependant, le rapprochement
HQWUH VRQ VXFFHVVHXU 0DPDGRX 0RXVWDSKD 0EDFNp HW O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH HIIDoD OHV
VRXSoRQVTXLDYDLHQWSXVXEVLVWHUGHVGHX[F{WpVTXDQWjODTXrWHG¶DXWRQRPLHVSDWLDOH'DQVOHV
années 1930, après que la ligne de chemin de fer Diourbel-Touba fut achevée, Mamadou
0RXVWDSKDPDQLIHVWDVRQLQTXLpWXGHORUVTXHO¶DGPLQLVWUDWLRQFRORQLDOHDQQRQoDOHSURMHWGHFUpHU
XQH©HVFDOHªGDQVOHVHQYLURQVGH7RXED,OLQVLVWDSRXUTXHFHWWHHVFDOHTXLIDLVDLWSDUWLHG¶XQ
plan censé stimulHUO¶pFRQRPLHGHO¶DUDFKLGHGDQVO¶HVWGX%DROVRLWVpSDUpHGXYLOODJHVDFUpSDU
un large boulevard ou un jardin.79 Quelque temps auparavant, en 1928, un an après la mort de
VRQ SqUH LO DYDLW REWHQX OD VLJQDWXUH G¶XQ EDLO FRQFHUQDQW O¶HPSODFHPHQW GH OD Vppulture de ce
dernier, où les mourides envisageaient de construire une grande mosquée. Il craignait que
O¶LQVWDOODWLRQGHO¶DGPLQLVWUDWLRQORFDOHHWO¶DUULYpHGHIRQFWLRQQDLUHVHWG¶KRPPHVG¶DIIDLUHVQRQ
mourides empiètent sur le sol sacré de Touba. Le commandant du Baol finit par renoncer à la
FUpDWLRQ G¶XQH HVFDOH HW VH FRQWHQWD G¶pOHYHU 0EDFNp %DRO DX UDQJ GH FHQWUH DGPLQLVWUDWLI HW
économique de cette partie du Baol.

Mbacké est peu à peu devenue une ville coloniale dynamique, administrée par les
FrançaiV PDLV VRXV O¶DXWRULWp PRUDOH GH OD IDPLOOH 0EDFNp /D GpWHUPLQDWLRQ GH 0RXVWDSKD j
VpSDUHU 7RXED GH O¶HVFDOH GH 0EDFNp WpPRLJQH GH VRQ DSSUpKHQVLRQ TXDQW j OD SRURVLWp GHV
EDUULqUHVHQWUHO¶HVSDFHVDFUpPRXULGHHWO¶HVSDFHODwFIUDQoDLV,OVRXKDLWDLWLQstaller une sorte de

                                                                                                                     
78    E^͕ŽƐƐŝĞƌŚŵĂĚŽƵĂŵďĂ͕ƌĂƉƉŽƌƚĐŽŶĨŝĚĞŶƚŝĞůƐƵƌůĞƐŵŽƵƌŝĚĞƐĚ͛ŚŵĂĚŽƵĂŵďĂ͕ũĂŶǀŝĞƌϭϵϭϰ͘  

79    ANS,  11D1,  0049,  Affaires  politiques  et  religieuses.  

147  

 
haramTXLJDUDQWLUDLWO¶LQWpJULWpGXOLHXVDLQWHWGXFLPHWLqUHGHOD0RXULGL\\D,OQHV¶DJLVVDLWSDV
G¶XQH HQFODYH VDFUpH GHVWLQpH j PHWWUH j O¶DEUL OHV SHUVRQQHV SK\VLTXHV HW OHV ULFKHVVHV GHV
musulmans, comme à La Mecque et à MédiQHPDLVSOXW{WG¶XQVDQFWXDLUHSRXUODFRQVHUYDWLRQHW
la diffusion de la baraka de Cheikh Ahmadou Bamba.

Cette préoccupation était également partagée par ses frères qui lui ont succédé à la tête de
la Mouridiyya. Dans les 1980, face à la détérioration continue de la situation économique et les
PHQDFHV VXU OHV YDOHXUV FXOWXUHOOHV HW UHOLJLHXVHV DX 6pQpJDO FDXVpH SDU O¶LPSRVLWLRQ GH
O¶DMXVWHPHQW VWUXFWXUHO OD JOREDOLVDWLRQ GHV YDOHXUV FLYLOLVDWLRQHOOHV RFFLGHQWDOHV HW OD PLJUDWLRQ
internationale, Cheikh A. Ahad Mbacké lança un appel pour faire de Touba un sanctuaire contre
les maux qui assaillent le monde. Il prit des initiatives pour assainir moralement la ville sainte et
IDFLOLWHU O¶DFFqV DX IRQFLHU SRXU OHV GLVFLSOHV TXL OH VRXKDLWDLHQW ,O FRQVWUXLVit également une
ELEOLRWKqTXH j 7RXED pTXLSpH G¶XQH LPSULPHULH SRXU XQH GLIIXVLRQ j ODUJH pFKHOOH GHV
enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba. Les mourides répondirent de façon massive a cet
DSSHOWUDQVIRUPDQW7RXEDTXLQ¶pWDLWTX¶XQJURVYLOODJHGHTXHOTXHVPLOOLHUVG¶KDELWDQWVGDQVOHV
DQQpHV  HQ XQH PpWURSROH PRGHUQH GH SUqV G¶XQ PLOOLRQ G¶KDELWDQWV O¶pULJHDQW DX UDQJ GH
GHX[LqPHYLOOHGX6pQpJDOHWGHO¶XQHGHVYLOOHVUHOLJLHXVHVOHVSOXVLPSRUWDQWHVGXPRQGH80 Cet
effort de sanctification a été poursuivi par Cheikh Saliou Mbacké, le dernier fils vivant de Cheikh
A Bamba. Khalife Saliou est retourné au model architectural originel de Mubaraka aux premières
KHXUHVGHO¶H[SDQVLRQGHO¶HVSDFHUHOLJLHX[PRXULGHGDQVOH%DRORULHQWDO,ODFUppXQHPXOWLtude
GHSHQFGDQVOHVIDXERXUJVGH7RXEDFKDFXQGHFHVSHQFV¶RUJDQLVHDXWRXUG¶XQHPRVTXpH,OD
FRQWLQXp j DPpQDJHU O¶HVSDFH HW j IDFLOLWHU O¶DFFqV GHV GLVFLSOHV j OD WHUUH ,O D HQ ILQ UHYLJRUp
O¶RUJDQLVDWLRQGX0DRXORXGUHGHYHQXXQpYpQHPHQWUHOLJLHX[ important qui, à côté des Magals,
scandent le rythme de la vie religieuse à Touba et à travers le pays mouride.

Conclusion

/H WUDQVIHUW G¶$KPDGRX %DPED j 'LRXUEHO HQ  SODoD OD 0RXULGL\\D GHYDQW XQH QRXYHOOH
sorte de défi. Depuis la fondation de la tarîqa dans les années 1880, les déménagements,
YRORQWDLUHV RX LPSRVpV SDU O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH HW O¶DJJUDYDWLRQ GHV WHQVLRQV SROLWLTXHV
avaient empêché le chef des mourides de se concentrer sur des stratégies de conservation ou
G¶H[SDQVLRQ GH VD FRQIUpULH /¶DVVLJQDWLRQ SHUPDQHQWH j UpVLGHQFH GDQV OH %DRO RULHQWDO IXW OH
VLJQH G¶XQH VWDELOLVDWLRQ GHV UHODWLRQV DYHF O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH PDLV OD YLH GDQV O¶HVFDOH
IUDQoDLVH ILW QDvWUH G¶DXWUHV LQTXLpWXGHV OLpHV DX GDQJHU TXH UHSUpVHQWDLW OD FRORQLsation sur le
plan culturel. Les musulmans considéraient souvent la colonisation européenne comme une
GRPLQDWLRQ GH OD WHUUH G¶LVODP SDU OD FKUpWLHQWp HW XQH PHQDFH SRXU O¶LQWpJULWp GH OHXU UHOLJLRQ
/RUVTX¶LOVpWDLHQWDVVXMHWWLVjXQSRXYRLUFRORQLDOFHUtains adoptaient le concept chiite de taqiyya
GLVVLPXODWLRQ  G¶DXWUHV FHOXL GH hijra (migration). Mais pour la plupart de ceux qui voulaient

                                                                                                                     
80    Sur  Touba,  voir  le  travail  de  Cheikh  Guèye,  Touba:  la  capitale  des  mourides  (Paris,  Karthala,  2002).  

148  

 
pratiquer ouvertement leur religion, comme Cheikh Ahmadou Bamba, le défi principal était de
trouver un moyen de réconcilier leur désir de vivre une vie de musulmans vertueux et le besoin
de se soumettre à un pouvoir non musulman.

/DUpSRQVHPRXULGHjFHGpILIXWODFUpDWLRQGDQVO¶HVWGX%DROG¶XQHVSDFHVDFUpDXWRQRPHVXUOH
plan culturel, une dâr al-murid, au sein de la dâr al-kufr TX¶pWDLWGHYHQXOH6pQpJDO/DVpSDUDWLRQ
VSDWLDOHHWFXOWXUHOOHHQWUHHX[HWOHV)UDQoDLVTX¶HOOHI€WSK\VLTXHRXV\PEROLTXHpWDLWFUXFLDOH
SRXU OD FRQVWUXFWLRQ GH O¶HVSDFH PRXULGH /D IRQGDWLRQ G¶XQH dâr al-murid fut décidée et
entreprise par Cheikh Ahmadou Bamba et mise en oeuvre par les cheikhs et les disciples. Il
V¶DJLVVDLWG¶DWWHLQGUHGHX[REMHFWLIVLQVFULUHODtarîqa dans la terre des ancêtres du fondateur et
assurer la perpétuation de son legs. Le processus de transformation GHO¶(VW GX%DRO HQ dâr al-
murid LPSOLTXDLW O¶RFFXSDWLRQ SK\VLTXH GH OD WHUUH SDU OHV GLVFLSOHV PRXULGHV OH UHPRGHODJH
FXOWXUHOGXSD\VDJHJUkFHjO¶DUFKLWHFWXUHVDFUpHPXVXOPDQHODJpRPpWULHHWOHVULWHVUHOLJLHX[HW
O¶HQGLJXHPHQWGHO¶LQIOXHQFHIUDQoDise. La dâr al-murid ne contestait pas la domination politique
HW DGPLQLVWUDWLYH GHV )UDQoDLV  HOOH V¶HIIRUoDLW HQ UHYDQFKH GH SDUYHQLU j XQH DXWRQRPLH
symbolique, culturelle, et si possible géographique par rapport au pouvoir colonial. En
débarrassant la dâr al-islam GHVRQFRQWHQXSROLWLTXH jVDYRLUO¶LPSRVLWLRQGHODFKDULDjXQSD\V
HW j XQ SHXSOH  HW HQ O¶LPSUpJQDQW GH VLJQLILFDWLRQV FXOWXUHOOHV D[pHV VXU OD JpRPpWULH VDFUpH
O¶DXWRQRPLH FXOWXUHOOH HW OHV ULWHV  OHV PRXULGHV FUpqUHQW OHV FRQGLWLRQV nécessaires à sa
SUpVHUYDWLRQPDOJUpOHSRXYRLUFRORQLDO/¶KRVWLOLWpGHV DGPLQLVWUDWHXUVIUDQoDLVjODFUpDWLRQG¶XQ
HVSDFH VDFUp PRXULGH DX %DRO V¶DWWpQXD HQ PrPH WHPSV TX¶LOV DEDQGRQQDLHQW OHV PpWKRGHV
coercitives et adoptaient une politique de contrôlHHWGHFRRSpUDWLRQjO¶pJDUGGHOD0RXULGL\\D
,OV DYDLHQW FRPSULV TXH V¶RSSRVHU j O¶H[SDQVLRQ GH O¶HVSDFH PRXULGH OHXU FR€WHUDLW WUqV FKHU HW
TX¶LOVHQWLUHUDLHQWSHXGHEpQpILFH

$XMRXUG¶KXLjWUDYHUVOHPRQGHRFFLGHQWDOO¶,VODPIDLWIDFHjFHUWDLQV des mêmes défis


auxquels Cheikh Ahmadou Bamba était confronté au début du vingtième siècle. La présence de
O¶,VODPHWGHVPXVXOPDQVVXUO¶HVSDFHSXEOLFFRQWLQXHGHVXVFLWHUGHVWHQVLRQVVXUWRXWHQ(XURSH
ou les minarets sont bannis dans certains pays aORUVTXHGDQVG¶DXWUHVOHSRUWGXYRLOHLVODPLTXH
RXODSULqUHGDQVOHVUXHVVRQWLQWHUGLWV/¶H[HPSOHGHO¶DGDSWDWLRQUpXVVLHGHOD0RXULGL\\DGDQV
le Baol colonial offre une leçon importante à méditer pour notre temps et démontre que la guerre
des civilLVDWLRQV Q¶HVW SDV XQH IDWDOLWp %DPED D VX WURXYHU XQH YRLH SDFLILTXH SRXU UpDOLVHU
O¶DXWRQRPLH FXOWXUHOOH GHV PXVXOPDQV HW OD SUpVHUYDWLRQ GH O¶LQWpJULWp GH OHXU UHOLJLRQ WRXW HQ
PpQDJHDQWO¶HQYLURQQHPHQWSROLWLTXHKRVWLOHFUppHSDUODGRPLQDWLRQFRORQLDle.

149  

 
2.4.6 - Communication 6 : Touba, le soufisme, et la modernité
urbanistique par E ric Ross, Université Al Akhawayn, Maroc

7RXEDQ¶HVWSDVXQHYLOOHRUGLQDLUH(OOHHVWH[FHSWLRQQHOOHDPDLQWHVpJDUHV9LOOHVDLQWHPRGHUQH
de facture assez récente, la « capitale ª GHV 0RXULGHV HVW XQH ]RQH DXWRQRPH DX VHLQ G¶XQ pWDW
autrement unitaire et laïc. Cette présentation vise d'abord à élucider les fondements spirituels de
7RXED GDQV O¶XQLYHUV GHV FRQFHSWV HW V\PEROHV LVODPLTXHV HW VSpFLILTXHPHQW VRXILHV HW j
exposer comment cette conception a guidé la configuration spatiale de la ville. Ensuite, je
propose de discuter de la construction de Touba en deux temps : 1) le temps de la fondation de la
ville par Cheikh Ahmadou Bamba et 2) le temps de sa construction par ses héritiers, c'est-à-dire
par tous les Mourides, et qui est aussi le moment actuel.

Touba est une ville moderne. Elle est le produit de processus sociaux modernes. Parmi
ceux-FL QRXVFRPSWRQVOHFRORQLDOLVPHODFRQVROLGDWLRQ GHO¶pWDWWHUULWRULDO SRVW-coloniale, et le
déploiement du capitalisme, y compris dans sa dimension actuelle « mondialisée ». Touba a
pJDOHPHQW pWp SURGXLWH SDU GHV SURFHVVXV G¶XUEDQLVDWLRQ PRGHUQHV  ILUPHV G¶DUFKLWHFWXUH HW GH
génie civil, agences de planification, entreprises de construction, circuits de financement.
&HSHQGDQWQRQREVWDQWFHWWHPRGHUQLWpVRFLpWDOHHWWHFKQRORJLTXH7RXEDDpWpFRQoXHVHORQO¶DUW
TXLPRGqOHO¶XQLYHUV « emanationistes » QpRSODWRQLFLHQWHOVTX¶pODERUpSDUGHVPDvWUHV-penseurs
soufis classiques tels SuKUDZDUGvHW,EQµ$UDEv&RPPHQWO¶HVVHQFHVSLULWXHOOHGHODYLOOHVDLQWHD
W¶HOOHJXLGpFHX[TXLO¶RQWSODQLILpHWEkWL"

/¶DUFKpW\SHGHO¶DUEUHGDQVODFRQFHSWLRQVRXILGHO¶XQLYHUV

'DQVODWKpRVRSKLHQpRSODWRQLFLHQQHO¶XQLYHUVFUppDGHPXOWLSOHVQLYHDX[ de réalité. Le monde


PDWpULHO FHOXLTXHQRXV PHVXURQVDYHFQRV IDFXOWpVVHQVXHOOHVQ¶HVW TX¶XQGHFHVQLYHDX[(Q
IDLWF¶HVWVRQQLYHDXOHSOXVEDVOHSOXVpORLJQpGH'LHXVRXUFHGHWRXWHUpDOLWp&HTX¶LO\DGH
plus réel dans la création est le nivHDXOHSOXVSURFKHGH'LHXVRQQLYHDXOHPRLQVPDWpULHO&¶HVW
le monde du malakût, le monde angélique (désigné parfois de µkODP DO-mithâl ou de µkODP DO-
khayâl), le monde des archétypes, le monde « imaginal » décrit si bien par Henry Corbin (1958).
Les archétypes (appelés al-Dµk\DQ DO-thâbitah SDU ,EQ $UDEv  VRQW G¶DERUG GHV IRUPHV
fondamentales ou primordiales. Ils sont « formels » (formes pures) mais non substantiels (sans
matière). Ils articulent la réalité des choses à mi-FKHPLQHQWUHOHVLGpHVjO¶ptat pure du monde
supérieur platonicien et les manifestations particulières et accidentelles de ses idées dans le
monde matériel.

Les archétypes fonctionnent également comme symboles. Nous pensons de suite à


O¶DUFKpW\SH du Livre, al-4XU¶kQDO-Karîm, assimilé au Lawh al-Mahfûz (la Tablette Préservée), la
SUHPLqUHWUDQVFULSWLRQGHOD3DUROHGLYLQHjO¶RULJLQHGHWRXVQRV&RUDQVGHSDSLHUHWGHFXLU,O\
DDXVVLOH&XEHGHOD.DµEDKOD0RQWDJQH4kIOD6RXUFHDO-Kawtar, etc. Ces entités, cités da la
Coran, communiquent les concepts « maîtres », c'est-à-GLUH TX¶HQ pPDQDQW GH 'LHX HOOHV
150  

 
articulent un sens à un niveau de réalité élevé au-dessus de ce que nous observons dans le monde
dit « sensible ». Les montagnes géomorphologiques et les fleuves hydrologiques que nous
mesurons sont autant de reflets alourdis, assombris, de ces archétypes toutes de lumière.
/¶HVVHQWLHO GH OHXU UpDOLWp H[LVWH GDQV OH malakût, au-dessus des contingences des leur
matérialisation spécifique.

Un des archétypes du malakûtFHOXLGHO¶$UEUHHVWHVVHQWLHOjODIRLVjO¶LGHQWLWpGH7RXED


et à sa topographie. La ville a été nommée par Ahmadou Bamba pour T€Ek GpVLJQDWLRQ G¶XQ
Arbre du paradis dans le « Musnad ªG¶,EQ+DQEDO :

« 8QKRPPHGLWjO¶(QYR\pG¶$OODK VXUOXLODJUkFHHWODSDL[ 2K(QYR\pG¶$OODK


Prospérité (t€Ek jFHOXLTXLW¶DYXHWjFHOXLTXLW¶DpWpILGqOH/H3URSKqWHUpSRQGLW :
3URVSpULWpjTXLP¶DYXHWjTXLP¶DpWpILGqOHSXLVSURVSpULWpHWHQFRUHSURVSpULWpHW
WRXMRXUV SURVSpULWp j TXL P¶D pWp ILGqOH VDQV P¶DYoir vu." Un homme lui demanda :
(WTX¶HVW-ce que tûbâ ?" Il répondit : "Un arbre dans le jardin. Le laps de temps pour
le franchir est de cent ans. Il constitue les vêtements des gens du jardin paradisiaque,
TXL DSSDUDLVVHQW GH O¶RULILFH GH VHV IUXLWV » (« Al-Musnad ª G¶,EQ +DQEDO FLWp SDU
Gloton 1990 : 130)

Cet arbre paradisiaque nommé Tûbâ dans les hDGvWKV Q¶HVW TX¶XQH GHV IDFHWWHV GH O¶$UEUH
archétypique dans un m alakût DQJpOLTXH TXL HQ FRPSWH G¶DXWUHV 1RXV FLWRQV : la Sidrat al-
0XQWDKk O¶$UEUH GH O¶H[WUpPLWp PHQWLRQQp GDQV OH &RUDQ   O¶ROLYLHU EpQL &RUDQ  
O¶$UEUHGHODYLHHWO¶$UEUHGHODFRQQDLVVDQFH'HVJUDQGVPDvWUHVHWSRqWHVVRXILVRQWGpYHORSSp
la portée mystique de ces arbres paradisiaques et cosmiques en citant les descriptions exquises
contenues dans la Coran ainsi que les nombreuses références à eux dans les hadîths.

'DQV OHXUV pFULWV F¶HVW VXUWRXW O¶LGHQWLWp HW OH VHQV GH O¶DUEUH QRPPp T€Ek TX¶LOV
développent :

« /HVKRPPHVREpLVVDQWRQWJDJQpG¶rWUHjO¶RPEUHGHTûbâ et G¶rWUHjSUR[LPLWpGH
leur Seigneur le Très-haut. » « Dûh-l-Nûn al-Misrî ª VHORQ ,EQ µ$UDEv FLWp GDQV
Deladrière 1988 : 284)

« >/¶RLVHDX@6LPRUJKDVRQQLGDXVRPPHWGHO¶DUEUHT€Ek$O¶DXURUHHOOHVRUWGHVRQ
nid et déploie ses ailes sur la terre. » « µAql-e Sorkh » de Suhrawardî (1976 : 207)

« 6DFKHTXHO¶$UEUHTûbâ est aux autres arbres du Paradis comme Adam par rapport à
VHVGHVFHQGDQWVTXLIXUHQWHQJHQGUpVjSDUWLUGHOXL>«@$OODKSODQWDO¶$UEUHTûbâ de
Sa propre Main, le façonna harmonieusement et LQVXIIODHQOXLGHVRQHVSULW>«@1H
sommes nous tous pas la Terre de cet Arbre ? » « Al-Futûhât al-Makkiyyah ª G¶,EQ
µ$UDEv FLWpGDQV*ORWRQ : 130-131)

151  

 
&KH] FHV PDvWUHV HW SRqWHV O¶$UEUH GX SDUDGLV OLH OHV KRPPHV j 'LHX &¶HVW OD SURPHVVH GX
Paradis pour ceux qui prennent le Droit Chemin. Il symbolise leurs destins dans ce monde
FRPPHGDQVO¶DXWUHTûbâ est également assimilé à la Sidrat al-0XQWDKkO¶DUEUHjO¶H[WUpPLWpGH
O¶XQLYHUV OLHX OH SOXV UDSSURFKp GH 'LHX '¶XQH GpVLJQDWLRQ G¶XQ DUEUH GH paradis dans les
hadîths, T€Ek YLHQW j GpVLJQHU O¶HQVHPEOH GHV DUEUHV SDUDGLVLDTXHV HW FRVPLTXHV SHXSODQW OHV
textes sacrés. Pour ces maîtres penseurs, l'Arbre T€EkHQJOREHWRXWHVOHVIDFHWWHVGHO¶DUFKpW\SH
GHO¶$UEUH

&¶HVW,EQµ$UDEvVXUWRXWTXLDOHSOus développé la conception de Tûbâ. Dans Shajarat al-


Kawn « O¶$UEUH GH O¶8QLYHUV ª GRQW O¶DWWULEXWLRQ j ,EQ µ$UDEv HVW FRQWHVWp $OLEKDL  
O¶$UEUH SDUDGLVLDTXH QRPPp T€Ek HVW OD PDQLIHVWDWLRQ SDUDGLVLDTXH G¶XQH HQWLWp XQLYHUVHOOH
O¶$UEUH-monde. Dans cette conception, cet Arbre est semé par la Volonté primordiale, « Soit! »,
HQ PrPH WHPSV TXH O¶XQLYHUV ,O V¶pWDQW GH O¶([WUpPLWp GX O¶XQLYHUV DX SOXV SURFKH GH 'LHX
MXVTX¶jDWWHLQGUHOHVEUDQFKHVGHVRQLQYHUVHO¶$UEUHGHO¶HQIHUT€EkHVWO¶$UEUHGH la Vie, et de
la Connaissance. Tûbâ est « inversé », enraciné dans la Connaissance-lumière émanant de Dieu et
distribuant ces fruits à portée de ceux qui la cherche. (Gloton 1990)

Je ne sais pas quelle connaissance Cheikh Ahmadou Bamba avait des constructions
WKpRVRSKLTXHVG¶,EQµ$UDEvUHODWLIjT€EkPDLVLOSDUWDJHDLWODFRQFHSWLRQVRXILHG¶XQDUEUHGH
lumière, un arbre inversé, lien entre les êtres et Dieu. Dans un traité nommé Silk al-jawâhir fî
akhbâr al-VDUk¶LU )LOH GH MR\HDX[ HQ PDWLqUH GH FRQVFLences) il compose avec les descriptions
coraniques pour définir Tûbâ :

« Les arbres de ce monde sont enracinés dans la terre avec les branches dans le ciel
SDUFH TX¶LOV VRQW SpULVVDEOHV 0DLV FH Q¶HVW SDV OH FDV GHV DUEUHV GX SDUDGLV /HXUV
racines sont daQVOHFLHOHWOHXUVIUXLWVVXUWHUUHWHOTX¶LOHVWGLW GDQVOH&RUDQ >«@/H
SOXV JUDQG GHV DUEUHV GX SDUDGLV HVW O¶DUEUH Tûbâ. Ses racines sont de perles, ses
EUDQFKHVGHFKU\VROLWHHWVHVIHXLOOHVGHEURFDUGHGHVRLH,OQ¶\DSDVXQMDUGLQXQH
parcellH RX XQ G{PH >GX SDUDGLV@ GDQV VD SODFH DSSURSULpH TXL Q¶HVW SDV j O¶RPEUH
G¶XQH GH VHV EUDQFKHV 'H WRXW SDUW \ SRXVVHQW GHV IUXLWV FRQYRLWpV SDU OHV kPHV
YLYDQWVHWTXLpEORXLVVHQWOHV\HX[&¶HVWFRPPHOHVROHLOGDQVFHPRQGHVHVUDFLQHV
sont au ciel et sa lumière irradie tous les endroits de la terre. » « Silk al-jawâhir fî
akhbâr al-VDUk¶LU ªG¶$KPDGRX%DPED0EDFNp WUDGXFWLRQGHO¶DXWHXU

En nommant sa ville Tûbâ, Cheikh Ahmadou Bamba inscrivait cette nouvelle entité du paysage
matériel dans unHFRQFHSWLRQVRXILHGHO¶$UEUHSDUDGLVLDTXHFRVPLTXHHWXQLYHUVHO

Si nous intégrons les traditions relatives à la fondation de Touba rapportées par Cheikh
Tidiane Sy (1969 : 110-111, 313-315) et Amar Samb (1969 : 743) aux conceptions des
théosophes décrites ci-haut, nous arrivons à situer la ville sur le plan cosmographique [figure 1].

152  

 
Figure 1. Touba et l'Arbre-monde dans la cosmographie soufie

Il faut préciser que le monde du malakût Q¶HVWSDVUpJLSDUODJpRPpWULHHXFOLGLHQQHGHFH


schéma à deux diPHQVLRQV/¶$UEUHDXFHQWUHGXSDUDGLVHVWpJDOHPHQWO¶$UEUHGHO¶H[WUpPLWpGH
O¶XQLYHUVHWO¶$UEUHGHO¶H[WUpPLWpHVWHQPrPHWHPSVOHSRLVVRQTXLVRXWLHQWOHPRQGH²les deux
H[WUpPLWpV GH O¶XQLYHUV VH UHMRLJQDQW 6HORQ FH VFKpPD OD YLOOH GH 7RXED SHXW rtre comprise
FRPPHXQHPDQLIHVWDWLRQGDQVOHPRQGHPDWpULHOGHO¶$UEUHDUFKpW\SLTXHGHVWKpRVRSKHV&HWWH
YLOOHUHSUpVHQWHXQHGHVGLPHQVLRQVG¶XQHHQWLWpFRVPLTXHWUDQVFHQGDQWHXQHHQWLWpTXLH[LVWHj
SOXVLHXUVQLYHDX[GHUpDOLWpHQPrPHWHPSV,OQ¶\D aucune discontinuité entre la ville dans le
PRQGH PDWpULHO HW O¶DUFKpW\SH GX malakût dont elle porte le nom. La ville de Touba constitue
ainsi un qutb, un axis mundi , un « pôle » fixe, un lieu de transcendance entre en endroit du monde
matériel et sa réalité spirituelle, celle qui est plus proche de Dieu.

Tout objet, lieu, personne, acte ou moment qui transcende les différents niveaux de réalité
peut constituer un qutb. (de Jong 2001) Le Saint Coran est qutb/D3DUROHGH'LHXH[LVWHG¶DERUG
et avant tout en Dieu, inaccessible et inconnaissable aux facultés humaines. Cette Parole prend
ensuite forme dans le malakût, avec le Lawh al-Mahfûz (la Tablette Bien Gardée, Coran 85:22).
&HSHQGDQWF¶HVWVDPDWpULDOLVDWLRQFRPPH© récit » dans le monde sensible qui rend cette Parole
153  

 
FRQQDLVVDEOH/H&RUDQH[LVWHjFHVWURLVQLYHDX[GHUpDOLWpVLPXOWDQpPHQWPDLVF¶HVWTXDQGLOHVW
UpFLWpjYRLHKXPDLQHRXLQGpOpELOHPHQWLQVFULWGDQVODPpPRLUHTXHODSXLVVDQFHTX¶LOUHSUpVHQWH
SHXWV¶H[HUFHUGDQVOHPRQGHVHQVLEOH/D.DµEDKDXVVLHVWXQqutb. Elle est la projection sur terre
GX7U{QHGH'LHX/D.DµEDKGDQVOH malakût est situé sous le Trône et les anges prient autour.
(Corbin 1980  0DLVF¶HVWTXDQGOHVKXPDLQVSULHQWYHUVOD.DµEDKGHFHPRQGHHWTXDQGLOV
font OHWRXUGHFHWpGLILFHFXELTXHTXHVRQLGHQWLWpDYHFO¶DUFKpW\SHGX malakût est activé et la
force de ce qutb V¶H[HUFHVXUHHX[,O H[LVWHG¶DXWUHVW\SHVGHPDQLIHVWDWLRQGH qutb. Un maître
VRXILTXLDWWHLQWO¶XOWLPHVWDGHGHODSHUFHSWLRQP\VWLTXHHVWDppelé un qutb'¶DLOOHXUVSDUPLOHV
qutb de leur ère nous retrouvons Cheikh Ahmadou Bamba. (Mbacké 1995 : 96) Un moment
G¶LOOXPLQDWLRQP\VWLTXHFRPPHFHOXLTXLDPDUTXpODIRQGDWLRQGH7RXEDSHXWDXVVLFRQVWLWXHU
un qutb. La ville de Touba est un qutb dDQVODPHVXUHRHOOHUHQYRLjO¶DUFKpW\SHGDQVOHmalakût
nommé Tûbâ et, au-delà, à une conception de la création et du destin humain.

L e temps de la fondation de Touba par C heikh A hmadou Bamba

Cheikh Ahmadou Bamba était un soufi engagé (voir contribution de Galaye Ndiaye dans ce
YROXPH %LHQTX¶LOI€WLQVSLUpSDUXQDUFKpW\SHLPPDWpULHOGXmalakût, Touba a été fondé par ses
actes dans un paysage bien physique, dans le monde matériel. La spiritualité du fondateur de la
YLOOHF¶HVWWUDGXLWHQDFWHVVXUXQWHUUDLQ6HORQO¶KLVWRULRJUDSKLHGHODYLOOHFHWHUUDLQpWDLWYLHUJH
GHWRXWFRQWHQXVRFLDORXFXOWXUHO DYDQW O¶°XYUHGX&KHLNK /¶HVSDFHpWDLWjO¶pWDWQDWXUHO 6RQ
RFFXSDWLRQFXOWXUHOOHLQLWLpHSDU&KHLNK$KPDGRX%DPEDDOODLWG¶DERUGrWUHRULHQWpSDUles actes
G¶LQVSLUDWLRQ VSLULWXHOOH GX IRQGDWHXU ,O V¶DJLW G¶DERUG G¶DFWHV GH GpYRWLRQ j 'LHX 'DQV XQ
premier temps (1887-  DYDQW VHV H[LOHV &KHLNK $KPDGRX %DPED DYDLW O¶KDELWXGH GH
V¶LVROHUGHVRQHQWRXUDJHSRXUVHFRQVDFUHUHQWLqUHPHQWjODSULqUH&¶pWDLWOHVHQVGHV khalwahs
TX¶LO D pWDEOL GDQV OD IRUrW DXWRXU GH 0EDFNp '¶DXWUHV DFWHV GH GpYRWLRQ FRQVLVWDLHQW HQ OD
UpGDFWLRQ G¶°XYUHV OLWWpUDLUHV OHV qask¶LG RGHV  VL ELHQ FRQQX DXMRXUG¶KXL /HV qask¶LG de
&KHLNK $KPDGRX %DPED WUDLWHQW G¶XQ JUDnd nombre de sujets, souvent lié à la préparation du
FUR\DQW SRXU O¶$X-GHOj 'XPRQW   3OXVLHXUV G¶HQWUH HOOHV © Matlab al-Fawzayn » (La
Poursuite des Deux Accomplissements) et « Tûbâ Dâr al-Salâm », traitent directement de ses
khalwahs/¶DXWHXUpOXFident la dimension spirituelle des ces lieux bénis. « Matlab al-Fawzayn »
en particulier peut être lu comme une charte fondatrice pour Touba. Dans ce qasîdah le Cheikh
explique le statut béni de la ville et énumère les grâces que Dieu accorde à tous ceux qui la
construise et qui y habitent. (Ross 2006 : 53-54, 114-116) Tant les individus que les institutions
mourides trouvent toujours inspiration dans Matlab al-)DZ]D\QTXDQGLOV¶DJLWG¶LQWHUYHQLUGDQV
la ville.

154  

 
)LJXUH7RXEDjO¶qUHGHVDIRQGDWLRQ : 1880-1927

Dans un deuxième temps, surtout suite à son installation sous résidence surveillé à
Diourbel (1912), Cheikh Ahmadou Bamba a ordonné à certains de ses fils et disciples de créer
des daaras (villages-pFROHV DX[DOHQWRXUVGH7RXEDDILQG¶\IL[HUVDFommunauté et de mettre le
WHUULWRLUHHQYDOHXU&HVRQWFHVDFWHVWRSRJUDSKLTXHVjVDYRLUO¶pWDEOLVVHPHQWGH khalwahs et de
daarasTXLRQWDVVLVOHVIRQGDWLRQVGHODYLOOHEpQLH>ILJXUH@HWLOVV¶LQVFULYDLHQWWRXVGDQVOHV

155  

 
conceptions spirituelles du fondateur. Tous ces lieux, khalwahs et daaras de la première heure,
sont maintenant des quartiers de la ville, des lieux habités et fréquentés par les Mourides.

Les traditions relatives à la fondation de Touba relaté par Amar Samb et Cheikh Tidiane
Sy, ainsi que les traditions populaires non attestées dans ces sources mais qui circulent quand-
PrPH ODUJHPHQW IRQW pWDW GX U{OH TX¶RQW MRXp FHUWDLQV DUEUHV ELHQ UpHOV GDQV OD IRQGDWLRQ GH
7RXED'¶DERUGLO\DHXOH mbéb 6WHUFXOLDWRPHQWRVD OLHXG¶LOOXPLQDWLon mystique auprès du
quel Cheikh Ahmadou Bamba aurait eu une expérience transcendantale, une vision du « poisson
qui soutient le monde ». (Samb 1969 : 743; Sy 1969 : 314) Ce grand arbre dans la forêt déserte a
servi à localiser Tûbâ, à fixer cette entité du malakût dans le paysage périssable de la matière. Ce
mbéb a ensuite laissait la place à la Grande Mosquée. Il y a eu aussi le baobab nommé Guy Texe
(le « Baobab de la félicité ª FKRLVLSDU&KHLNK$KPDGRX%DPEDFRPPHOLHXG¶HQWHUUHPHQWHQ
commençant par ceux de ses femmes, les « mères des Mourides ». Le Guy Texe a marqué le
FLPHWLqUHGH7RXEDMXVTX¶HQ

Figure 3. Le Guy Texe dans le cimetière de Touba, avant sa disparition.

'¶DXWUHV DUEUHV GH GLYHUVHV HVSqFHV EDREDEV ngigis, sexaw, tamariniers), distribués à
WUDYHUVO¶HVSDFHTX¶DOODLWGHYHQLUODYLOOHVRQWDVVRFLpVDX[ khalwahs et aux daaras GHO¶qUHGHOD
IRQGDWLRQ 3RXU OD SOXSDUW LOV VHUYHQW j IL[HU O¶°XYUH G¶$KPDGRX %DPED GDQV OD PpPRLUH
collective, et certains de ces arbres servent encore GHOLHXGHPpPRLUHDXMRXUG¶KXL$LQVLOHU{OH
GHO¶DUEUHHQWDQWTXHV\PEROHHWDUFKpW\SHQHV¶HVWSDVOLPLWpDXVHXOQRPTXH&KHLNK$KPDGRX
Bamba a donné à sa ville.

-RLQW j O¶°XYUH WRSRJUDSKLTXH GX &KHLNK pWDLW VRQ °XYUH WRSRQ\PLTXH /HV QRPV TXH
Cheikh Ahmadou Bamba a donnés à ses khalwahs et daaras, comme le nom de Touba donné à

156  

 
O¶HQVHPEOH FRQWULEXHQW HX[ DXVVL j VLWXHU OD YLOOH VDLQWH VXUH OH SODQ VSLULWXHO 'DQV XQ JUDQG
nombre de cas, ces toponymes dérivent de Noms Divins. Nous trouvons ainsi :

Darou Salam (de Dâr al-Salâm, « la Paix »),

Darou Marnane (de Dâr al-Mannân, « le Bienfaiteur »),

Darou Khoudoss (Dâr al-Quddûs, « le Sacré »),

Darou Alimoul Khabir (Dâr al-µ$OvP DO-Khabîr, « le Savant Bien-Informé », un


assemblage de deux Noms Divins),

Darou Mousty (Dâr al-0XµWv© le Donneur »),

Darou Karim (Dâr al-Karîm, « Le Magnanime »),

Darou Rahmane (« le Miséricordieux »),

Darou Rahim (« le Clément »),

Darou Khafor (Dâr al-Ghafûr, « le Pardonneur »).

Évoquer les 99 Noms Divins est une pratique très utilisée par les soufis. Chaque Nom
renferme en lui un attribut ou une qualité divine spécifique, une parcelle de Son Unicité. Évoquer
Ses Noms est une forme de dhikr, une manière de se « rappeler » Dieu, de se rapprocher de Lui et
de vivre Sa présence. En utilisant les Noms Divins pour désigner les lieux où les Mourides
DOODLHQWKDELWHU&KHLNK$KPDGRX%DPEDV¶HVWDVVXUpTX¶LOVDOODLHQWYLYUHFRQWLQXHOOHPHQWGDQV
la présence de Dieu. Dieu est ainsi inscrit dans le paysage des hommes et dans leur vie
quotidienne. En fait, à Touba tous les actes de la vie « ordinaire ª V¶LQVFULYHQW GDQV XQ dhikr
localisé permanent.

Une seconde catégorie de toponymes se réfère, comme Tûbâ elle-même, à des symboles
ou archétypes eschatologiques mentionnées dans le Coran. Nous trouvons ainsi :

Tawfekh (Tawfîq, « Prospérité »),

Jannatoul Naïm (Jannât al-1DµvP© les Jardins de Félicité »),

Darou Minam (« le Demeure de grâces »),

Housnoul Mahabine (de husn mâab, « lieux de repos excellent »).

Ces toponymes situent les habitants de Touba dans la perspective de la finalité de la vie mortelle
HW GH O¶pWHUQLWp GH OD YLH GDQV O¶$X-delà. Tout en vivant au quotidien dans le monde matériel,

157  

 
FKDFXQHVWDLQVLUDSSHOpGHODSURPHVVHG¶XQHYLHSOXV© réelle », une vie de félicité soXVO¶$UEUH
du paradis.

En établissant ses khalwahs HWHQRUGRQQDQWO¶pWDEOLVVHPHQWGH daaras, Cheikh Ahmadou


%DPED V¶HVW DVVXUp TXH OD YLOOH j YHQLU pWDLW HQWLqUHPHQW LQVpUpH GDQV O¶RSWLTXH 'LYLQH /D
WRSRQ\PLH GH O¶DJJORPpUDWLRQ LQVFULW OD SUpVHQFH GH 'Leu sur la surface de la terre, support de
QRWUHYLHGDQVOHPRQGHPDWpULHOHW6RQSODQSRXUO¶KXPDQLWpLFLHWGDQVO¶$X-delà, est rappelée
partout et à tout moment.

Figure 4. Le pays mouride. Les Noms Divins sont inscrit sur tout le territoire.

158  

 
L e temps de la construction de Touba par les Mourides

/HGpYHORSSHPHQWGH7RXEDHQWDQWTXHYLOOHQHGpEXWHTX¶DSUqVOHGpFqVGHVRQIRQGDWHXU&¶HVW
XQ°XYUHFROOHFWLITXLDVROOLFLWpO¶HQVHPEOHGHVDFWHXUVDXVHLQGHODFRQIUpULHGX&DOLIH-Général
MXVTX¶DX[ WDDOLEHV 1RQREVWDQW OH JUDQG QRPEUH GH FHV DFWHXUV HW OH IDLW TXH O¶XUEDQLVDWLRQ VH
SRXUVXLW DX ILO GHV GpFHQQLHV GDQV O¶HQVHPEOH OHV FRQFHSWV HW V\VWqPHV GH SHQVpHV VRXILV
continuent à guider le processus.

Le fait le plus marquant de la configuration de Touba en tant que ville est son plan
radioconcentrique, avec la Grande Mosquée au centre, des artères rayonnantes, et des rocades
G¶HQFHUFOHPHQW

Figure 5. Centre de la ville de Touba en 2010. Le plan radioconcentrique a été aménagé à la fin
des années 1950.

/HVHQVVSLULWXHOGHFHSODQG¶DPpQDJHPHQWXUEDLQHVWJpQpUDOHPHQWDGPLV :

« La ville de Touba est ordonnée de manière radioconcentrique par rapport


jOD*UDQGH0RVTXpHTXLVHSUpVHQWHFRPPHOHF°XUGHODYLOOH/HFHQWUH
de ce schéma circulaire préconçu par la Volonté de Dieu reste la principale
FRQVLGpUDWLRQUHOLJLHXVH>«@/D0RVTXpHDLPSULPpVD9RORQWpjODURFDGH
159  

 
qui est le repère circulaire principal. »
(http://www.htcom.sn/article40.html, site web de Hizbut Tarqiyyah)

/H VFKpPD UDGLRFRQFHQWULTXH GH 7RXED V¶HVW PDQLIHVWp XQH SUHPLqUH IRLV GDQV
O¶LQWHUYHQWLRQGH&KHLNK0EDFNpjODILQGHVDQQpHV(QIDLWF¶HVWOHILOVDvQpGXSUHPLHU
Calife qui a été mandaté par le Calif-Général Al-Hâjj FalliORX SRXU SURFpGp j O¶DOLJQHPHQW GHV
artères au centre de Touba. (Guèye 2002     $ O¶pSRTXH OD FRQVWUXFWLRQ GH OD *UDQGH
0RVTXpHV¶DFKHYDLW,OIDOODLWHQWDPHUODFRQVWUXFWLRQG XQHYLOOHDXWRXU/¶DPpQDJHPHQWGHYRLHV
rayonnantes à partir de la GrDQGH0RVTXpHIXWOHSUHPLHUJHVWHG¶XUEDQLVPHj7RXEDPDUTXDQW
VRQSDVVDJHGHYLOODJHjODYLOOH7RXEDDYDLWjSHLQHKDELWDQWVjO¶pSRTXH

Figure 6. Touba en 2010, cernée par la Rocade aménagé à la fin des années 1970.

160  

 
La construction de Lamp Fall, le minaret principal de la Grande Mosquée (87 mètres
G¶pOpYDWLRQ V¶DFKHYDLWpJDOHPHQWjO¶pSRTXH3OXVTXHWRXWDXWUHV\PEROHGHODYLOOHF¶HVW/DPS
Fall qui incarne sa qualité de qutb. Ce minaret, visible parfois à quinze kilomètres de distance,
V¶pOqYH DX FHQWUH DEVROX GH 7RXED ,O H[SULPH SDU O¶DUFKLWHFWXUH OD TXDOLWp WUDQVFHQGDQWH GH OD
ville sainte²VRQLGHQWLWpHVVHQWLHOOHDYHFO¶$UEUHGRQWHOOHSRUWHOHQRP

/D*UDQGH0RVTXpHG¶DERUGPDLVDXIDLWHWRXWHODYLOOHEpQLHHQHQWLHUVRQWFRQVLGpUpHs
comme un bienfait de Dieu, un don aux Mourides en reconnaissance des exiles de Cheikh
Ahmadou Bamba. Selon les paroles du Cheikh tels que relayées dans de nombreuses publications
mourides : « O¶eWHUQHO PD KRQRUp SRXU O¶pWHUQLWp G¶XQ édifice indestructible qui se dressera
MXVTX¶DX 3DUDGLV » (http://www.htcom.sn/article253.html, site web de Hizbut Tarqiyyah) Lamp
Fall couronne cet édifice et matérialise sur le terrain le « pacte » mystique entre Touba-ville dans
le monde sensible et Tûbâ-$UEUHGDQVO¶$X-delà.

/DYRLULHUDGLRFRQFHQWULTXHGH7RXEDIRFDOLVpHVXUOHSURILOGH/DPS)DOOjO¶KRUL]RQD
encadré les premiers développements de lotissements en série initiés par le Calife-Général Sëriñ
Abdoul Ahad. Ce schéma a été reconduit à plusieurs reprises, notamment avec la construction de
la première Rocade à la fin des années 1970 [figure 6]. Touba avait près de 30,000 habitants à
O¶pSRTXH &H ERXOHYDUG FLUFXODLUH DPpQDJp j HQYLURQV GHX[ NLORPqWUHV GH OD *UDQGe Mosquée
FHUQDLWODSUHPLqUHSKDVHG¶H[SDQVLRQ&¶HVW$KPDGRX1GLD\H&KHIGHVHUYLFHGX'pSDUWHPHQW
GXFDGDVWUHj'LRXUEHOTXLDFRQoXHOD5RFDGHDILQG¶DOOpJHUODFLUFXODWLRQGHVYpKLFXOHVORUVGHV
Grands Magals. Il a présenté son projet à son Calife-GpQpUDO TXL O¶D FDXWLRQQp *Xq\H  :
335)

/D5RFDGHPDUTXHXQHUXSWXUHTXDOLWDWLYHGDQVO¶HVSDFH1XOQHGRXWHTX¶LOWUDYHUVHXQ
seuil en franchissant la Rocade, même si ce boulevard ne marque plus depuis longtemps les
OLPLWHVGHO¶XUEDQLVDWLRQ&¶HVW OD5RFDGHTXLUHQGH[SOLFLWHWDQWVXUOHVFDUWHVTXHGDQVO¶HVSDFH
vécu, le schéma en khâti m de la ville.

161  

 
.

Figure 7. Le design urbain de Touba traduit en khâti m

Un khâti m est un principe de design qui conjoint les attributs du cercle et du carré. Dans
la pratique soufie, le khâti m (xaati m en wolof) est un outil de transcendance, rapprochant le
PLFURFRVPH G¶XQH VLWXDWLRQ SDUWLFXOLqUH j VRQ HVVHQFH GDQV OH PDFURFRVPH $UGDODQ 
Bakhtiar 1973 : 29-31; Dilley 2004 : 187- (QWDQWTX¶RXWLOGDQVODSUDWLTue des mystiques, un
khâtim peut constituer un qutbRXGXPRLQVVLJQDOHUODSUpVHQFHG¶XQDUFKpW\SH(Q6pQpJDPELH
QRXV WURXYRQV XQH GLYHUVLWp G¶XWLOLVDWLRQV GH khâti ms : calligraphié dans les manuscrits,
confectionnés HQELMRX[WLVVpEURGp« 3UXVVLQ986 : 74- /DIDEULFDWLRQG¶XQ khâti m dans
XQREMHWTXHO¶REMHWVRLWHQSDSLHUHQWLVVXHHQFXLUHQFXLYUHHQERLVRXHQPDoRQQHULHHVWXQH
IDoRQGHWUDQVFHQGHUODPDWpULDOLWpGHFHWREMHWHWGHSHUPHWWUHjVRQXWLOLVDWHXUG¶DFFpGHUjXQH
réalité ultime, au-delà de la matière du moment.

Plus peut-rWUH TX¶DLOOHXUV GDQV OH PRQGH PXVXOPDQ HQ 6pQpJDPELH RQW WURXYH GHV
khâtims PDWpULDOLVpVGDQVO¶DUFKLWHFWXUH /HVPRVTXpHVGLWHV © circulaires » des Peuls [figure 8]
sont bien documentées. (Bourdier & Minh-Ha 1996 : 70, 148) En fait, si le toit de ces mosquées
HVWXQF{QHO¶HVSDFHGHSULqUHTX¶HOOHDEULWHDXQSODQVWULFWHPHQWFDUUp

162  

 
Figure 8. Plan de la mosquée de Dingueraye, Guinée (construite en 1883), source: Prussin

Nous pouvons citer le cas de la mosquée de Bogué [figure 9] construite par les Tidianes
HQ  j O¶HPSODFHPHQW G¶XQ JUDQG DUEUH 'DQV FHWWH SHWLWH PRVTXpH j WRLW SODW XQH VDOOH
KH[DJRQDOHFHQWUDOHHVWHQWRXUpHG¶XQHJDOHULHRFWRJRQDOHLQVpUpHGDQVXQEkWLPHQWjGL[IDFHWWHV
(Ross 2006    '¶DXWUHV FDV GH ILJXUH GH khâti ms architecturaux sont la « FDVH GD¶LUD » des
soufis Qâdirs (Khadres) à Maka Coulibantang, et la concession du cheikh mouride Sëriñ Omar Sy
près de Diourbel. Les soufis de Maka Coulibantang se réunissent chaque jeudi soir (la nuit du
vendredi) dans la « FDVH GD¶LUD » pour une veillé de prières. La case, de forme circulaire, est
FRQILJXUpHHQTXDWUHJDOHULHVFRQFHQWULTXHV/¶HVSDFHFHQWUDOHFDFKpjODYXHSDUXQHYRLOHHVWOH
qutb du plan en khâtim. La disposition du dhikr TXLO¶HQWRXUHYDULHVHORQXQFDOHQGULHUOXLDXVVL
conçue en khâti m. (Van Hoven 2003). La concession de Sëriñ Omar Sy près de Diourbel, connue
sous le nom de Yaminoullah, est entièrement construite de roseaux. Elle actualise la Parole
Divine de manière à se que cette parole puisse être corporellement habité. En habitant cet espace
physique, une personne arrive à soigner en même temps les troubles psychiques, mentales et
physiologiques de son être. (Roberts & Nooter Roberts 2003 : 212-229)

163  

 
Figure 9. Plan de la mosquée de Bogué, Mauritanie (construite en 1922)

$7RXEDFHQ¶HVWSDVXQHPRVTXpHRXXQHFRQFHVVLRQTXLHVWFRQILJXUpHHQ khâti m mais


bien la ville toute entière. [Figure 7] Dans « Touba : Signs and Symbols ª O¶XUEDQLVWH HW
sémioticien mouride Cheikh Abdoullaye Dieye explique que la composante carré du plan de
Touba représente « la stabilité au sein de la création ª HQ UpIpUHQFH j OD .DµEDK DORUV TXH OD
composante circulaire représente le ciel. Réunies, les deux composantes actualisent « O¶Xnité de la
manifestation divine ». (Dieye, auto-publication non daté : 77) Le schéma en khâti m a été adopté
jFKDTXHSKDVHGHO¶H[SDQVLRQXUEDLQH6L OD5RFDGHPDUTXHELHQXQHWUDQVLWLRQ GDQVO¶HVSDFH
Touba-la-bénie étant la grâce de Dieu bien au-delà. La sacralité de la ville semble rayonner en
DQQHDX[ DXWRXU G¶HOOH ,O \ D G¶DXWUHV VHXLOV LQVFULWV SOXV ORLQ GDQV OH SD\VDJH /¶DPpQDJHPHQW
G¶XQH VHFRQGH URFDGH GH TXDWUH j VL[ NLORPqWUHV DX-delà de la première mais bien moins
FLUFXODLUH TX¶HOOH D pWp GpFLdé en 1999. (Ross 2006    /D SRSXODWLRQ GH 7RXED V¶DSSURFKDLW
DORUVGHVKDELWDQWV$XMRXUG¶KXLFHWWH© deuxième rocade » existe en tant que zone non-
ædificandi mais ne sert pas de voie de circulation. [Figure 10] Deux kilomètres au-GHOjG¶HOOHHt
on trouve les limites du titre foncier de Touba, émis en 2001. Elles représentent en quelque sorte
OHVOLPLWHVPXQLFLSDOHVTXRLTXHOHVWDWXWMXULGLTXHDXWRQRPHGH7RXEDV¶DSSOLTXHDXGHOjjWRXWH
sa « communauté rurale ». [Figure 4] Des soufis résidant j7RXEDRQWUDFRQWpjO¶DXWHXUTX¶LODXUD
un jour « sept rocades ª j 7RXED pJDO DX[ QRPEUH GH VSKqUHV FpOHVWHV GDQV O¶XQLYHUV QpR-
platonicien. (Ross 2006 : 96)

164  

 
Figure 10. L'agglomération de Touba-Mbacké en 2010

Le khâti m urbain, où artères rayonnantes eWURFDGHVG¶HQFHUFOHPHQWSURMqWHQWO¶XQLWpVXUOD


multiplicité de lotissements en damier, et place les citadins en permanence au confluant du
microcosme de la vie quotidienne et du macrocosme du Plan Divin. Les composantes « carrés »
du design, le damier de rues souvent orienté vers la qiblah, représentent le tissue de la vie
quotidienne dans le monde matériel, tissue cousue par tous ces « DFWHVG¶KDELWDWLRQ » qui permet à
XQHVSDFHG¶rWUHXUEDQLVp +DEUDNHQ : 16). Sur le plan horizontal, ce damier aligne ces actes
TXRWLGLHQV VXU OH 'URLW &KHPLQ VXU OD 6XQQDK YHUV OD .DµEDK TXL FRQFHQWUH OHV SULqUHV GH
O¶KXPDQLWp&HGDPLHUXUEDLQTX¶RQUHWURXYHGDQVODSOXSDUWGHVpWDEOLVVHPHQWVFRQIUpULTXHVGX
6pQpJDO 5RVV   HVW OD PDQLIHVWDWLRQ G¶XQH VLWXDWLon universelle, celle de tout croyant sur
FHWWHWHUUH$7RXEDODSOXSDUWGHVORWLVVHPHQWVHQGDPLHUpPDQHQWG¶XQH khalwa RXG¶XQH daara

165  

 
GXIRQGDWHXU&HVTXDUWLHUVRQWXQHIRUWHLGHQWLWpHWVRQWVRXVO¶DXWRULWpG¶XQFDOLIHRXG¶XQDXWUH
tous grands cheikhs mourides sinon petit-fils de Cheikh Ahmadou Bamba. Un grand quartier
central, Touba-Mosquée, est soustrait à la distribution lineagière. Elle est dans la juridiction du
Calife-Général. Les lotissements créés ex-nihilo, de plus en plus nombreux avec les extensions de
OD YLOOH VRQW VRXYHQW OHSURGXLW G¶XQH LQLWLDWLYH ORFDO GH YLDELOLVHU XQ VHFWHXU ORWLVVHPHQW HDX
pOHFWULFLWp  ,OV RQW WRXV HX[ DXVVL XQ SODQ HQ GDPLHU G¶XQ W\SH RX G¶XQ DXWUH &HV QRXYHDX[
quartiers, comme les anciens, sont administrés par un calife ou un grand cheikh Mbacké. Les
diverses initiatives de viabilisation de ses « marabouts urbanistes », souvent à la lisière du plan
G¶DPpQDJHPHQWV¶LQVFULYHQWWRXWHIRLVGDQVXQSODQFRQFHSWHXUSOXVJUDQGSOXVIRQGDPHQWDOXQ
projet-projection qui les guide dans leurs actes.

&¶HVW HQ SDUWL G€ j OD SXLVVDQFH GX VFKpPD HQ khâti m TXH O¶XQLWp GX SODQ GH 7RXED HVW
FUppH /¶DSSOLFDWLRQ G¶XQ WHO VFKpPD DX ILOV GHV GpFHQQLHV HW GH FDOLIDWV UHYLHQW DX JpQLH GH
« O¶LGpH-dessein » originelle. Une « idée-dessein » (« design-idea ªGH%DFRQ Q¶HVWQLSODQ
G¶DPpQDJHPHQWQLVFKpPDGLUHFWHXU&¶HVWXQHFRQFHSWLRQFROOHFWLIHGHOµHVSDFHTXLH[LVWHGDQV
OHV HVSULWV HW TXL V¶LQVFULW GDQV XQH FRPSUpKHQVLRQ JOREDOH RX © universelle ª GX OLHX /¶LGpH-
dessein Q¶HVWMDPDLVH[SRVpHGHPDQLqUHH[SOLFLWH3OXW{WHOOHV¶H[SULPHDXIXUGHVLQWHUYHQWLRQV
urbanistiques et des documents de planification (le premier à Touba date de 1974 et a été effectué
DYHF OH 'pSDUWHPHQW G¶XUEDQLVPH GH 'LRXUEHO  (Q SOXV G¶DYRLUH XQ même but, celui de
construire Touba, les Calife-Généraux qui disposent de ces outils de planifications, et leurs
WDDOLEHV SDUPL OHV LQJpQLHXUV HW IRQFWLRQQDLUHV GX 'pSDUWHPHQW G¶XUEDQLVPH VRXVFULYHQW DXVVL
chacun dans son domaine, à une même conception dHO¶HVSDFH

Les khalwas et les daaras GH O¶pSRTXH GH &KHLNK $KPDGRX %DPED RQW MDORQQpHV XQH
première idée-dessein VXUOHWHUUDLQjO¶DXEHGHVRQRFFXSDWLRQSDUODFRPPXQDXWpPRXULGH3DU
les actes de prière que le Cheikh y a accompli, par les poèmes mystiques avec lesquels il les a
FRQVDFUp SDU OHV 1RPV 'LYLQV HW HVFKDWRORJLTXHV TX¶LO OHV D GRQQp FH GHVVHLQ D LQVFULW XQH
SHQVpHVXUOHWHUUDLQ &HWWHSHQVpHDUWLFXOHOHVSUpFHSWHVGHEDVHGHO¶LVODP : le Droit Chemin à
suivre dans ce monde, le Jugement DernLHU HW OD YLH pWHUQHO GDQV O¶$X-GHOj DX VHLQ G¶XQH
FRQFHSWLRQ VRXILH G¶XQ XQLYHUV j PXOWLSOHV QLYHDX[ GH UpDOLWp 7RXED HVW qutb parce que son
identité ultime réside dans Tûbâ, un archétype dans le malakût. Ce qutb a été implanté sur le
terrain par Cheikh Ahmadou Bamba et continue à structurer son développement urbain depuis ce
temps.

Dans un deuxième temps, lors de la construction de la ville par les héritiers de Cheikh
Ahmadou Bamba, une deuxième idée-dessein apparaît, celui du khâti m. Les artères rayonnantes
GHOD*UDQGH0RVTXpHHWOHVURFDGHVG¶HQFHUFOHPHQWLQVFULYHQWXQHIRUWHFRKpUHQFHHWXQHJUDQGH
XQLWp j O¶DJJORPpUDWLRQ XUEDLQH TXL QH FHVVH GH FURvWUH ELHQW{W OH PLOOLRQ G¶KDELWDQWV  (Q
DSSDUHQFH FH GHVVHLQ V¶HVW UpDOLVp DYHF GHV PR\HQV PRLQV P\Vtiques que le premier :
lotissements en série, percés de voie de circulation, arrêtés administratifs, schémas
G¶DPpQDJHPHQWSODQVG¶XUEDQLVPHHWF8QIRQGHPHQWVSLULWXHOjFHVDFWHVG¶DPpQDJHPHQWHVW
166  

 
WRXWHIRLVGLVFHUQDEOH'¶DERUGOHV&DOLIH-Généraux ou G¶DXWUHVSDUPLO¶pOLWHVRXILHGHODYLOOHRQW
WRXMRXUVXQHYRLHGpFLVLYHGDQVO¶DGRSWLRQHWO¶LPSOpPHQWDWLRQVLQRQGDQVODFRQFHSWLRQGHFHV
politiques urbanistiques. Ensuite, les architectes, ingénieurs et fonctionnaires qui conçoivent les
SURMHWV G¶XUbanisme sont des taalibes PRXULGHV /¶H[HUFLFH GH OHXU DUW HW GH OHXU H[SHUWLVH
technique dans le monde matériel se fait en tenant compte des autres niveaux de réalité du terrain
sur le quel ils travail. Touba ne se construit pas uniquement sur le plan matériel.

Conclusion

3RXUFRPSUHQGUHO¶HVSDFHXUEDQLVpTX¶HVWGHYHQX7RXEDDXMRXUG¶KXLLOIDXWOHVLWXHUDXVHLQGH
O¶XQLYHUV GDQV OHTXHO LO V¶HVW GpYHORSSp /H WHUUDLQ XUEDQLVWLTXH HVW FHUWHV XQ GHV QLYHDX[ R
7RXEDVHUpDOLVHPDLVFHQ¶HVWSDVOHVHXOQLveau de sa réalisation. Touba est un qutb qui renvoie
FHOXL TXL O¶KDELWH j G¶DXWUHV QLYHDX[ GH VD UpDOLWp © Construire Touba » implique plus que
O¶DJHQFHPHQWGHORWLVVHPHQWVGHPDoRQQHULHHWGHV\VWqPHVORJLVWLTXHVHWDGPLQLVWUDWLIV&HX[
qui construisent Touba agissent à plusieurs niveaux, à des niveaux spirituels et moraux autant que
matériel. La valeur de Touba en tant que ville peut se mesurer en termes économiques (valeur
foncier et immobilier, emplois, production, consommation, contribution au PNB) et via les
indicateurs sociaux (éducation, santé). Cependant, pour les Toubawis et les Mourides la valeur de
Touba réside avant tout à un autre niveau de réalité, à un niveau mystique, dans le monde du
malakût/DPDWpULDOLWpGHODYLOOHQ¶HVWTXHOHUHIOet de son essence immatérielle, qui est sa vraie
valeur.

Pouvons-nous appliquer les résultats de cette analyse au thème de cette conférence : « la


réponse du soufisme aux crises ª" /RUV GH OD VHVVLRQ SOpQLqUH G¶RXYHUWXUH Sëriñ Abdou Lahad
Mbacké Gaïnde Fatma nous a présenté les trois niveaux de la crise mondiale actuelle. Il y a bien
sûr la crise financière et plus largement économique qui domine les manchettes depuis 2008.
&¶HVWXQHFULVHFRQMRQFWXUHOOHGXV\VWqPHG¶LQYHVWLVVHPHQWFDSLWDOLVWH&HSHQGDQWelle diffère des
FULVHVSUpFpGHQWHV ODJUDQGHFULVHGHVDQQpHVOHVQRPEUHXVHVµSDQLTXHV¶GXGL[-neuvième
VLqFOH  FDU GHUULqUH HOOH JURQGH XQH FULVH VWUXFWXUHOOH FHOOH GH O¶HQYLURQQHPHQW /HV UHVVRXUFHV
premières de la planète sont exploitées bien au-delà de leurs capacité de reproduction. Les
pFRV\VWqPHVGHYDVWHVUpJLRQVVRQWIUDJLOLVpVDXSRLQWTXHOHVVRFLpWpVKXPDLQHVQ¶DUULYHQWSOXVj
y vivre. Les espèces vivantes disparaissent à un rythme sans parallèle dans le temps géologique.
/¶DWPRVSKqUH Pême de notre planète change de composition chimique. Puis il y une troisième
FULVH XQH FULVH PRQGLDOH GHV YDOHXUV OD FULVH PRUDOH O¶LQGLYLGXDOLVPH DEVROXH O¶pJRwVPH
O¶DYLGLWp O¶DFFRPSOLVVHPHQW GX VRL GDQV OHV ELHQV PDWpULHOV GDQV OD FRQVRPPDWLRQ VDns égard
DX[DXWUHV&HVWURLVFULVHVVRQWOLpHV(QIDLWFHVRQWWURLVQLYHDX[G¶XQHPrPHFULVHXQHFULVH
TXLDWWHLQWOHVIRQGHPHQWVGHQRWUHKXPDQLWpGHQRWUHGHVWLQFROOHFWLI&HWWHFULVHGpFRXOHG¶XQH

167  

 
FRQFHSWLRQ GH O¶XQLYHUV R OD PDWLqUH FRQVWLWXH OD YDOHXU VXSUrPH OD VHXOH TX¶RQ FRPSWDELOLVH
/¶pJRwVPHHWO¶DFFRPSOLVVHPHQWGHO¶rWUHSDUODFRQVRPPDWLRQGHELHQVHWGHVHUYLFHVSDUFHX[
qui accèdent cette société de consommation, se mesurent dans la course effrénée et dévastatrice
vers les matières premières partout dans le monde. Les ressources de la planète sont pillées pour
le plus grand bénéfice à court terme du 1% mondiale. Conséquemment, dans tous les pays les
JHQVOHVSOXVSDXYUHVV¶DSSDXYULVVHQWWDQGLVTXHODPpWpRFRPPHQFHjGpUDSHUVpULHXsement.

Pour sortir de cette crise globale il nous faut des solutions globales elles aussi. Les
systèmes, structures et réseaux mondialisés nous insèrent à un tel point que les solutions
individuelles, locales, nationales ou même régionales ne suffiront pas à elles seuls. Il ne peut
avoir une « solution chinoise », une « solution américaine », une « solution islamique », etc. Il
faut trouver un nouveau consensus international. Le Consensus de Washington, imposé au globe
jFRXSGHSURJUDPPHVG¶DMXVWHPHQWVWructuraux et au nom de la libre circulation de la matière et
du capital, ne tient plus. Il faut forger un nouveau consensus, en consensus qui véhicule une autre
valorisation du monde.

/¶XQLYHUV QpR-Platonicien des soufis propose justement une autre hiérarchie de valeurs.
/HVHQVG¶XQREMHWGDQVOHPRQGHVHQVLEOHQHVHWURXYHSDVGDQVVDPDWpULDOLWpPDLVDLOOHXUVjXQ
niveau « supra-matériel » de sa réalité. Une communauté de soufis souscrivant à une conception
GHO¶XQLYHUVTXLYDORULVHOHVXSUD-matériel agit sur un terrain pour construire une cité bénie. Leurs
DFWHVG¶XUEDQLVDWLRQFHVPXOWLSOHV © DFWHVG¶KDELWDWLRQ ªjWRXV OHVQLYHDX[G¶LQWHUYHQWLRQVRQW
JXLGpVSDUXQHFRQFHSWLRQFRPSOH[HGHO¶HVSDFH,OQHV¶DJLWSDVGHUHQLHUODPDWLqUHORLQGHOj
mDLVGHODWUDQVIRUPHUGHODGLVWULEXHUGHO¶DFFXPXOHUVHORQXQHFRQFHSWLRQPXOWLGLPHQVLRQQHOOH
de sa valeur, de sa réalité. Le matériel et le spirituel ne sont pas disjoints. Derrière le physique il y
a la métaphysique.

Dans la tradition amérindienne du &DQDGD QRXV WURXYRQV XQH FRQFHSWLRQ GH O¶XQLYHUV
différente de celle des soufis, mais dans cette conception aussi le supra-matériel est valorisé. La
URFKHHVWXQrWUHVXSpULHXUjO¶KXPDLQ/DURFKHQ¶DSDVEHVRLQG¶DLUG¶HDXRXGHQRXUULWXUHSRXU
exister(OOHHVWSDUIDLWHSRXUO¶pWHUQLWp2QQ¶DWWHLQWSDVjVDSHUIHFWLRQVDQVSUHQGUHODPHVXUHGH
VDYUDLHYDOHXUH[LVWHQWLHOOH&¶HVWXQSHXSRXUFHODTX¶DXMRXUG¶KXLDX/DEUDGRURQDWWHQGTXHOD
mine de fer ferme pour que les caribous reviennent. Partout en Afrique, en Asie, en Europe, nous
DYRQVWRXVGHVWUDGLWLRQVTXLSURSRVHQWTX¶LO\DLWGHVYDOHXUVGDQVODPDWLqUHTXLQHVHPHVXUHQW
pas selon la géométrie euclidienne. Il est temps de chercher ce que nous avons en commun dans
nos conceptions de la supra-matière, afin de proposer une alternative au system global
G¶H[WUDFWLRQGHYDOHXU,OQRXVIDXWXQV\VWqPHTXLVRLWjODIRLVSOXVVSLULWXHOHWSOXVKXPDLQ

168  

 
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170  

 
2.5 ± Session V : R E P O NSE DU SO U F ISM E AUX C R ISES
SO C I O C U L T U R E L L ES
Le Modérateur de cette session a été Cheikh Amdan Wuld Attah, Secrétaire Général de la Ligue
des Oulémas en Mauritanie.

2.5.1 - Communication 1 : Le savoiU 0D¶ULID FRPPHle socle de la non


YLROHQFH GDQV O¶°XYUH 'X &KHLNK $KPHG %DPED, par Abdelouahid E l Alami
3URIHVVHXUjO¶$FDGpPLH(XURSpHQQHGHV6FLHQFHV,VODPLTXHVGH%UX[HOOHV%HOJLTXH
(Résumé)

La non violence dans la pensée du Cheikh Bamba ne se manifeste pas seulement comme
O¶RSSRVpGHODYLROHQFH'DQVEHDXFRXSGHSDVVDJHVGHVRQLPPHQVH°XYUH/HFKHLNKRSSRse la
0D¶ULID HW OH µ,OP FRPPH étant le socle de la non violence à la violence dans la mesure où
O¶DFTXLVLWLRQ GX VDYRLU QH SHXW rWUH PLVH HQ YDOHXU HW pODERUpH VDQV FHW pWDW G¶kPH SDFLILTXH HW
concilié avec son environnement.

Le savoir dans ce contexte prend deux dimensions :

-OD PD¶ULIDW GH 'LHX LQGLVSHQVDEOH GDQV OH FKHPLQHPHQW VSLULWXHO GX &KHLNK F¶HVW XQH UDLVRQ
G¶rWUHH[LVWHQWLHOOHVDQVODTXHOOHODµ,EDGDHVWinconcevable.

- ODPD¶ULIDFRPPHpOpPHQWQpFHVVDLUHSRXUWRXWHDFWLRQGDQVODVRFLpWpFHTXL OXLGRQQHXQH
GLPHQVLRQpWKLTXHTXL O¶LQWURGXLWDXFHQWUHGHO¶DJLUHW QXOOHPHQWFRPPHVDOXWLQGLYLGXHOYRLUH
LQGLYLGXDOLVWHFRPPHF¶pWDLWOHFDVFKH]FHUWDLQVsoufis.

'DQV OHV GHX[ GLPHQVLRQV GH OD 0D¶ULID OD QRQ YLROHQFH HVW XQH FRQGLWLRQ VLQH TXD QRQ SRXU
fonder une société libre dans son esprit 6DID¶RX$O.KDODG HWOLEpUpHde toute dépendance à une
IRUFHYLROHQWH 6DID¶RX$O%DODG).

Contrairement donc au sort parfois désastreux du Savoir dans la civilisation contemporaine cette
FRQFHSWLRQUpFRQFLOLHOD0D¶ULIDDYHFVDGLPHQVLRQVSLULWXHOOHHWpWKLTXHHQO¶pORLJQDQWDLQVLGX
revers faustienne et destructeurs de la science de notre époque.

171  

 
2.5.2 - Communication 2 : L e Corpus wolof de la littérature mouride : Un
RFpDQ GH VDJHVVH HW GH %DUDND SRXU O¶KXPDQLWp par Docteur F allou Ngom,
'pSDUWHPHQWG¶$QWKURSRORJLHHW&HQWUHG¶eWXGHV$IULFDLQHV8QLYHUVLWpGH%RVWRQ86$

La Mouridiyya HVW FHUWHV O¶XQ GHV RUGUHV soufis les plus étudiés en Afrique, mais la riche
littérature qui lui est propre et qui est écrite en A jami [non arabe] ²plus communément désignée
sous le vocable Wolofal²transcription en langue Wolof, demeure très peu exploitée. La
recherche en externe sur la Mouridiyya est généralement axée sur son histoire, sa résistance non-
violente à la colonisation française, et son éthique du travail. Par conséquent, les croyances
spirituelles mourides qui sont ancrées dans le Tasawwuuf (Soufisme) et documentées en Wolofal,
sRQW VRXYHQW QpJOLJpHV /DSDXFLWpG¶pWXGHVPHQpHVVXUOHFRUSXVOLWWpUDLUHPRXULGHHQ:RORIDO
est fondamentalement due au nombre limité de chercheurs formés dans les universités et autres
institutions occidentales et dotés des connaissances et aptitudes requises pour mettre a nu les
HQVHLJQHPHQWV G¶XQH YDOHXU LQHVWLPDEOH TXL \ VRQW YpKLFXOpV 1pDQPRLQV FHWWH GRFXPHQWDWLRQ
constitue une mine de connaissances qui incarnent la véritable perception et le veritable
entendement de la vie et de la mission de Cheikh Ahmadou Bamba (ca. 1853-1927), ses
enseignements soufis, ses idéaux, sa pédagogie, et les bénédictions en faveur de son peuple et de
WRXWHO¶KXPDQLWp'HJUDQGVGLVFLSOHVGH&KHLNK$KPDGRX%DPEDQRWDPPHQW6sULx0RRU.D\UH
(1869-1951), Sëriñ Samba Jaara Mbay (1870-1917), Sëriñ Muusaa Ka (1883-1967), et Sëriñ
Mbay Jaxate (1875-1954), entre autres, ont élaboré et développé une tradition littéraire en
Wolofal en signe de pieuse gratitude envers leur guide spiritual, et pour matérialiser une certain
générosité spirituelle visant à éduquer les masses populaires, dans leur propre langue, aux
EpQpGLFWLRQV TXL FRQVWLWXHQW O¶HVVHQFH GH OD YHQXH GH %RURRP 7XXEDD LFL-bas. La littérature
Wolofal de la Mouridiyya est une éloquente illustration de la diffusion de la spiritualité soufie
PRXULGH GH O¶pWKLTXH GX WUDYDLO HW GX V\VWqPH SHUWLQHQW GHV YDOHXUV DX[ PDVVHV HQ GRQQDQW j
chacun (sans considération aucune de leur appartenance racial, sociale et éthique) la chance
G¶rWUH © réhabilité » (traduit en Wolof à travers le concept de : defaru, de defar, réparer,
préparer ; defaru VH SUpSDUHU  G¶DFFpGHU j OD SHUIHFWLRQ VSLULWXHOOH ,KVDQ  HW GH © vivre au
SDUDGLV HQ FH EDV PRQGH HW GDQV O¶DX-delà ». Étudiée et diffusée de par le monde, la riche
littérature Wolofal de la Mouridiyya sera sans conteste une puissante contribution à la stabilité, à
ODWROpUDQFHHWjODPRGHUQLVDWLRQGDQVFHWWHqUHGH]RQHVGHWXUEXOHQFHO¶KLVWRLUHGHO¶KXPDQLWp

1. Introduction

/HP\WKHGHO¶DQDOSKDEpWLVPHHQ$IULTXHDpWpHQWUHWHQXSHQGDQWWUqV longtemps tout à la fois par


les étrangers et les Africains formés au moule de systèmes éducatifs exogènes dans leurs propres
WHUURLUV HW jO¶pWUDQJHU ,O \ DXQHGRFXPHQWDWLRQ DVVH]IRXUQLHpFULWHHQ$MDPL OHVFULSW DUDEH
PRGLILp HW DGDSWp j O¶pFULWXUH GHV ODQJXHV DIULFDLQHV  j WUDYHUV O¶$IULTXH LVODPLVpH GDQV GHV
UpJLRQVDOODQWGHOD6pQpJDPELHjOD&RUQHGHO¶$IULTXH$XQRPEUHGHFHVODQJXHVDIULFDLQHVLO
y a notamment le Wolof, les langues mandé, diverses variantes de Haal-Pulaar, le Haoussa, le
172  

 
SZDKLOL O¶$PKDULTXH OH +DUDUL OH .DQXUL HW OH <RUXED HQWUH DXWUHV /¶³2UDOLWp´ HQ WDQW TXH
seule source de connaissances en Afrique, est une considération simpliste, incomplète et sans
fondement scientifique. Cette hypothèse fait fi des vieilles traditions écrites en arabe et en Ajami,
UpSDQGXHVjWUDYHUVO¶$IULTXHLVODPLVpHHWGRQWFHUWDLQHVUHPRQWHQWDXème siècle de notre ère.

%LHQ TXH O¶DOSKDEpWLVDWLRQ HW O¶pGXFDWLRQ HQ ODQJXH DUDEH VRLHQW VRXYHQW UHFRQQXHV OHV
WUDGLWLRQV DMDPLHV RQW MXVTX¶j XQH date récente, été ignorées et considérées comme étant des
VRXUFHV LQVLJQLILDQWHV GH FRQQDLVVDQFHV (Q V¶LQVSLUDQW GH OD OLWWpUDWXUH HQ :RORIDO :RORIDO HQ
$MDPL  FHW DUWLFOH PHW O¶DFFHQW VXU OHV FRQQDLVVDQFHV HW OHV DYDQWDJHV j WLUHU GH FHV VRXUFHV
inexploitées de connaissances africaines endogènes. Il traite particulièrement des relations entre
le Tasawwuf et la philosophie morale wolof articulée autour des jikkos yu rafet, expression wolof
qui renvoie aux comportements vertueux et exemplaires, dans la littérature mouride en Wolofal.

2. Wolofal et localisation du T asawwuf

La littérature en Wolofal était instrumentalisée pour la diffusion des enseignements soufis


de Cheikh Ahmadou Bamba en direction des masses populaires wolof (paysans, éleveurs,
commerçants, ceddos²guerriers des cours royales²femmes et enfants, entre autres). Il y avait
une division du travail dans la vision pédagogique et scientifique de Cheikh Ahmadou Bamba.
Écrivant exclusivement en arabe classique pour (1) ses louanges du Prophète Mohamed (PSL),
VRQ PRGqOH DUDERSKRQH HW   SRXU V¶DGUHVVHU DX[ LQWHOOHFWXHOV PXVXOPDQV GH VRQ pSRTXH
pGXTXpVHQDUDEHLOV¶H[SULPDLWpJDOHPHQWRUDOHPHQWHQ:RORIHWHQFRXUDJHDLWODGLIIXVLRQGHVHV
enseignements auprès des masses qui étaient pour la plupart non instruites, dans leur langue
maternelle : le Wolof. Dans Jaar-Jaari Boroom Tuubaa, Sëriñ Mohammadou Mahmoud Niang
nous apprend que Cheikh Ahmadou Bamba était un Boroom may bu dul lore, une personne
pleine de bénédictions et exempte de toute forme mal. Dans la littérature mouride en Wolofal,
F¶HVW SUpFLVpPHQW SDUFH TX¶LO HVW YHQX DX PRQGH SRXU EpQLU O¶KXPDQLWp TXH VD SpGDJRJLH pWDLW
FRQoXHGHPDQLqUHKROLVWLTXHLQFOXVLYHHWYLVDQWj³UpKDELOLWHUWRXWOHPRQGH´ :RORIGHIDUQLW
ñi) indépendamment de toute considération ethnique, raciale, culturelle ou sociale. Le Wolofal a
joué un rôle de premier plan dans la diffusion de son message auprès des masses wolof en vue de
OHXULQFXOTXHUOHVYDOHXUVVRXILHVHWGHOHXUSHUPHWWUHG¶DFFpGHUDX[EpQpGLFWLRQV dans les deux
demeures de leur existence (ici-EDV HW GDQV O¶DX-delà). De nombreux concepts soufis ont été
repérés et vulgarisés à travers la littérature en Wolofal, et beaucoup de ces concepts sont devenus
partie intégrante des caractéristiques théolectaux (marqueurs linguistiques à motivation
religieuse) propres aux disciples de la Mouridiyya. Les structures suivantes illustrent certains des
traits théolectaux qui constituent le noyau de la théologie soufie des Mourides :

dëddu àdduna (se détourner du monde exotérique pour la vie contemplative),

VyyEX FL \RRQ ZL V¶HQJDJHU GDQV OD YRLH DYHF XQH FRQQRWDWLRQ G¶LPPHQVLWp RFpDQLTXH
GHVEpQpGLFWLRQVGHO¶RUGUH 

173  

 
àgg ci Yàlla (atteindre la perfection spirituelle : Ihsan),

màndi ci Yàlla (Intoxication soufie, iYUHVVHG¶DPRXUGLYLQRXIROLHVRXILH 

GHIDU[RO\L UpSDUDWLRQGHVF°XUVUHPpGLHUDX[LQVXIILVDQFHVKXPDLQHV 

murid Saadix vs. Marid (la notion du véritable Mouride par opposition au faux/mauvais
Mouride),

sol nit (remplissage des gens sans éducation préalable de connaissances, une possibilité
uniquement offerte par les voies ésotériques soufies),

ghaybu (Connaissances divinement transmises aux élus, y compris la faculté de


communiqué avec la faune et la flore : animaux, oiseaux, arbres, entre autres),

yawma Alastu (Jour du Pacte Primordial) au cours duquel les serviteurs de Dieu
professèrent le monothéisme dans le cadre dans le cadre du Pacte de la pré-existence
contenu dans le Saint Corani,

174  

 
al-Lawhal-Mahfuuz (La tablette Rangs spirituels : Khutb (pôle), Wali
conservée en toute sécurité et sur (ami de Dieu, saint), et Khawsu (élite
laquelle Dieu aurait inscrit toutes ses spirituelle), rijaal ou góór Yàlla en
décisions, y compris les archétypes de Wolof (hommes de Dieu) ;
toutes choses, passées, présentes et
futuresii, Les relations taalube et Sëriñ (disciple
et guide) et leurs caractéristiques à
O¶DXQH GH OD WUDGLWLRQ VRXILH
silsila/wasila (chaîne initiatique) ;

MpEEDOX DFWH G¶DOOpJHDQFH  MDD\DQWH


(veritable engagement/pacte) en tant
TX¶LQYHVWLVVHPHQW en vue du ngërëm
(appréciation divine) et de la baraka
(Wolof : Barké) ;

liggééy en tant que forme de piété et


G¶LQYHVWLVVHPHQW YHUV O¶LQGpSHQGDQFH
spirituelle, culturelle et matérielle,
VRXEDVVHPHQW GH O¶pWKLTXH DFWXHOOH GX
travail des disciples de la Mouriddiya ;

/¶XWLOLVDWLRQ G¶H[SUHVVLRQV WHOOHV TXH


jëf-jël (faire et prendre), ñaq jariñu
(suer et profiter), waar wi (section de
champ de culture agricole), tool bi (le
champ agricole), khidma (service
dévotionnel, sas (travail/service
requis), wàcc liggééy (mourir) illustre
ELHQ OD FHQWUDOLWp GH O¶HIIRUW SK\VLTXH
WUDYDLO  HQ WDQW TX¶XQH GHV IRUPHV OHV
plus accomplies de piété dans la
théologie de la Mouriddiya ;

Le dicton Yàlla du fey wax bàyyi jëf


(Dieu de rétribue pas la parole au
GpWULPHQWGHO¶DFWLRQ) dont la paternité
est attribuée à Mame Cheikh Ibra Fall,
VRXOLJQH GDYDQWDJH O¶LPSRUWDQFH GHV
faits/actions dans la théologie mouride.

175  

 
La mise en exergue de la notion de liggééy (travail) dans la théologie mouride paraît
comme une innovation pédagogique PDMHXUH GH O¶DSSURFKH SUDJPDWLTXH HW UpDOLVWH GH &KHLNK
$KPDGRX %DPED j O¶pGXFDWLRQ KROLVWLTXH YLVDQW j SHUPHWWUH j VHV GLVFLSOHV GH © vivre les
conditions du Paradis ici-EDVHWGDQVO¶DX-delà, tout à la fois ª7RXVFHVFRQFHSWVHWELHQG¶DXWUHV
encore qui sous-tendent la théologie soufie mouride, ont été vulgarisés auprès des masses
populaires à travers les écrits (et poèmes dérivés) de grands maîtres du Wolofal de la carrure de
Sëriñ Moor Kayré, Sëriñ Samba Jaara Mbay, Sëriñ Muusaa Ka, and Sëriñ Mbay Jaxate.

/HXUV °XYUHV VRQW j OD EDVH GH QRPEUHX[ PDWpULHOV GLGDFWLTXHV GDQV OHVTXHOV &KHLNK
Ahmadou Bamba est présenté comme (1) un maître soufi stellaire dont les bénédictions couvrent
tous les Murid Saadix, véritables et sincères Mourides (sans distinction G¶RULJLQH HWKQLTXH
raciale, culturelle ou sociale) et comme (2) un héros africain de grande valeur qui a réussi à
UpVLVWHU j O¶DUDELVDWLRQ HW j O¶RFFLGHQWDOLVDWLRQ DYHXJOHV HW WRXV D]LPXWV GH VRQ SHXSOH
Fondamentalement, dans la littérature locale mouride, Cheikh Ahmadou Bamba incarne
également le summum des idéaux moraux et spirituels de son peuple : jikko yu rafet
FRPSRUWHPHQWVYHUWXHX[HWH[HPSODLUHV /HVH[WUDLWVVXLYDQWVWLUpVGHO¶°XYUHGHVSLRQQLHUVGH
la tradition mouride du Wolofal, notamment Sëriñ Moor Kayre, Sëriñ Samba Jaara Mbay, Sëriñ
Muusaa Ka, et Sëriñ Mbay Jaxate illustrent éloquemment la localisation et la vulgarisation des
enseignements soufis de Cheikh Ahmadou Bamba auprès des masses populaires.

3. 4XHOTXHVH[WUDLWVGHO¶°XYUHGH6ëriñ Moor K ayré (1869-1951)

Saadix dafay nangoo xalam

Dëkkal lu baax ci am xelam

Tey rafetal yeeney xolam

Bu dee sikkar xolam xalam.

/H6DDGL[GRLWV¶DGRQQHUjODPpGLWDWLRQ

&XOWLYHUOHVERQQHV°XYUHVGDQVVRQF°XUHW

Enjoliver ses intentions intimes

Par OH=LNUVRQF°XUHQWUHHQPpGLWDWLRQ

Ces vers en Wolofal reflètent les qualités du véritable Mouride (Saadix) dont, entre autres,
O¶DGRQQHPHQW j OD PpGLWDWLRQ HW OD FXOWXUH GHV ERQQHV LQWHQWLRQV DX SOXV SURIRQG GH VRQ F°XU
/¶H[WUDLWVXLYDQWVRXOLJQHODSHQVpHSRVLWLYHO¶RSWLPLVPHHWO¶XQLYersalité de la théologie soufie
mouride :

Baatiin xalam nga koy xamee


176  

 
Yàlla xalam nga koy gëmee

Ku xalamul bu gëlëmee

Moo silmaxaal bëti xolam.

/¶pVRWpULTXHQHVHGpYRLOHTX¶jWUDYHUVODPpGLWDWLRQ

/DFUR\DQFHHQ'LHXQ¶HVWSRVVLEOHTX¶jWUDYHUVODPpGLWation

4XLFRQTXHQHV¶DGRQQHjODPpGLWDWLRQHQVLWXDWLRQGHGpVRULHQWDWLRQ

(VWFRPSWDEOHGHODFpFLWpGHV\HX[GHVRQF°XU

Sëriñ Moor Kayre souligne la responsabilité individuelle dans la méditation en vue


G¶pYLWHUO¶XQHGHVSLUHVHWLQFXUDEOHVSDWKRORJies de la théologie soufie mouride : silmaxa bëti xol
RXJXPED\[RO FpFLWpGHV\HX[GXF°XU 

Kuy seetlu doora wax du juum

Du dox di réccu ak di miim

Ab seetlukat du sanku moom

Dof mooy ku jiitalul xelam.

Quiconque réfléchit avant de parler ne saurait se tromper

Être au chapitre des regrets ou se dédire

Une personne réfléchie ne se perd jamais

/¶LQVHQVpHVWFHOXLTXLQHFRPPHQFHMDPDLVSDUODUpIOH[LRQ

6sULx0RRU.D\UHGRQQHTXHOTXHVFRQVHLOVFRXUDQWVVXUODQpFHVVLWpGHUHFRXULUjO¶HVSULWHQSOXV
GXF°XU6RQLQVLVWDQFHVXUO¶XWLOLVDWLRQGXPRWZRORI³[HO´ PLQG RX UDLVRQ UHPHWHQTXHVWLRQ
O¶K\SRWKqVH UDFLVWH DYDQFpH SDU FHUWDLQV 2FFLGHQWDX[ HW FHUWDLQV $UDEHV TXL GLVVRFLHQW
« O¶LQWHOOLJHQFHRXO¶XWLOLVDWLRQGHODUDLVRQ » de la « Race Noire ».iii

Muriid, deel taqoo seex bu mat te bu xam

Bu lay laaye biir te buy sellal jëfam

177  

 
Bu xam pééy ba xawsook rijaal yeey dajee

%XUDxxHHVKDULǥDDNKDTLTDDNMsPDP

Te xam kay Boroom pééy ba xam yonnenam.

Bi lee seex dawal leen ko màggal mbiram

Ku dul bii sëriñ daw ko yow miy Muriid

Nde kuy réér di rééral Mariid mooy turam

Muriid, ak Mariid, ak Muraad bokkewul

Muraad moo di seex bu jubam def alam

Muriid mooy ku gëm Yàlla jox koy mbiram

Mariid mooy ku seytaane wommat xolam.

Mouride, fais allégeance à un véritable cheikh plein de sagesse

Un cheikh généreux qui purifie ses actions

Un cheikh conscient de la place céleste des élites et des choisis

8QFKHLNKTXLGLVWLQJXHOD&KDUL¶DOD+DNKLKDHWVRQVWDWXWSURSUH

(WTXLUHFRQQDLWOH0DvWUHGHO¶8QLYHUVHW6RQ0HVVDJHU

&¶HVWFHFKHLNKTX¶LOIDXWVHUYLUHWGRQWLOIDXWPDJQLILHUO¶°XYUH

Disciple mouride, éloigne-toi de tout autre cheikh que celui-là

&DU0DULGHVWO¶DSSHOODWLRQGHVDEXVpVTXLWURPSHQWOHVSRSXODWLRQV

Mourid, Marid, et Mourad ne couvrent pas la même réalité

/H0RXUDGHVWOHFKHLNKG¶XQHGURLWXUHVDQVIDLOOH

OH 0RXULGH HVW FHOXL TXL FURLW HQ 'LHX HW V¶HQ UHPHW j /XL/H 0DULG HVW FHOXL GRQW OH F°XU HVW
commandé par Satan.

Sëriñ Moor Kayre souligne dans les vers ci-dessus les qualités du véritable cheikh,
QRWDPPHQW OD JpQpURVLWp OD SXUHWp GHV DFWLRQV OD FRQQDLVVDQFH GH O¶pVRWpULTXH OD &KDUL¶D /RL

178  

 
islamique) et la Hakhiha (réalité ésotérique/profonde/fondamentale). Il met également le Mouride
HQJDUGHFRQWUHOH³0DULG´VRXVO¶HPSULVHGH6DWDQ

4XHOTXHVH[WUDLWVGHO¶°XYUHGH6sULx6DPED-DDUD0ED\ -1971)

Ki lay digal te du la jéy

Ki lay dugal te di la jéy

Boo xeluwul defoo ku wày

Recooki joy feeñ sa kanam.

Ceux qui vous conseillent sans vous flatter

Ceux qui vous mènent dans des difficultés et vous flattent

6LYRXVQ¶rWHVSDVDVVH]LQWHOOLJHQWVRXDOHUtes

Vous finirez au chapitre des regrets et des pleurs.

Ces vers de Sëriñ Samba Jaara Mbay illustrent un conseil rationnel ancré dans
O¶pSLVWpPRORJLH ZRORI ORFDOH j OD SRUWpH GH WRXW OH PRQGH LQGpSHQGDPPHQW GH FRQVLGpUDWLRQV
religieuses, ethniques, cultXUHOOHVUDFLDOHVRXG¶RULJLQHJpRJUDSKLTXH

Won na ma lul dindi na sikk ci sama xol

Ba du ma ragal lu dul ki ma sàkk

Won na ma jamano na mu mel

Jàngal ma xel di ma bindal ci Alway Maxfuusi xol.

Booba la Bamba gañewoon

Booba la waayam faluwoon

Baax gi fi tey booba la woon

Baaxu keroog-ay law ba tey

Bonu keroog itam du moy

Li woon keroog-ay wéy di wéy


179  

 
Lu ne di teeri fa nu jëm.

,O>%DPED@P¶DPRQWUpFHTXLGpEDUUDVVpPRQF°XUGHWRXWGpIDXW

Au point de me rendre sans crainte aucune de tout sauf de mon Créateur

,OP¶DUpYpOpODUpDOLWpGXPRQGH

,O P¶D HQVHLJQp HW LQVSLUp PRQ F°XU j SDUWLU GX /LYUH SULPRUGLDO >/D
Tablette conservée en toute sécurité] -- al-Lawh-al-Mahfuuz.

&¶HVWGHSXLVORUV <DZPD$ODVWX--Jour du Pacte Primordial) que Bamba a


triomphé

&¶HVWGHSXLVORUVTXHVRQGLVFLSOHDpWppOX

/DERQWpG¶LFL-EDVDXMRXUG¶KXLDGpEXWpDORUV

/DERQWpG¶DORUVHVWFHOOHTXLIOHXULWHQFRUHDXMRXUG¶KXL

Le PDOG¶DORUVVHSRXUVXLWpJDOHPHQW

&HTXLV¶HVWSURGXLWDORUVHVWHQFRUHG¶DFWXDOLWp

Tout tendait vers notre destination commune actuelle.

Dans ces vers, le poète souligne un important élément caractéristique de la théologie


VRXILHPRXULGHO¶H[FHSWLRQQDOité et la prédestination de la mission de Cheikh Ahmadou Bamba
qui a démarré le Jour du Pacte Primordial (Yawma Alastu) et est inscrit sur la Tablette conservée
en toute sécurité (Al-Lawh-al-Mahfuuz)iv où son itinéraire et celui de ses véritables disciples,
ainsi que les prédispositions de toutes les âmes ont été décrétées par Dieu.

May na ma lul danaa ko wax

May na ma lul du ma ko wax

May na ma lul mënu ma ko wax.

,OP¶DJUDWLILpGHFKRVHVGRQWMHSDUOHUDL

,OP¶DJUDWLILpGHFKRVHVGRQWMHQHSDUOHUDLSDV

,OP¶DJUDWLILpGHFKRVHVGRQWMHQHSXLVSDUOHU
180  

 
$XWDQW %DPED HVW H[FHSWLRQQHO DXWDQW OHV EpQpGLFWLRQV TX¶LO UpSDQG VXU O¶HQVHPEOH GHV
veritable disciples mourides, tel que le fait remarquer Sëriñ Samba Jaara Mbay à travers son
expérience propre, sont H[FHSWLRQQHOOHV/¶LPPHQVLWpGHVFRQQDLVVDQFHVHWGHVEpQpGLFWLRQVTXH
le poète à reçues de Bamba est incommensurable, comme le suggèrent ses écrits. Ses écrits
VRXOLJQHQW pJDOHPHQW TXH OHV EpQpGLFWLRQV TX¶LO D UHoXHV QH VRQW SDV QpFHVVDLUHPHQW G¶RULJLQH
lLYUHVTXH (OOHV pPDQHQW SOXW{W GHV FDQDX[ pVRWpULTXHV GX 7DVDZZXI WUDQVPLVHV GH F°XU j
F°XU HWQHVRQWDFTXLVHVTX¶jWUDYHUVXQH7DUEL\\D IRUPDWLRQVSLULWXHOOH UpXVVLH

4XHOTXHVH[WUDLWVGHO¶°XYUHGH6sULx0XXVDD.D -1967)

Mu jàpp ceddo ya defi seex

Di fomp xol ya ba mu weex

Génne ca àddunaag bànneex.

Yàlla laram bu mu gërëm

Loo ko jëfal am ca ngërëm

Soo ko joxee bennub dërëm

Mu ful ko ay junni yu sax.

Il a fait de certans ceddos des guides religieux

Il a purifié leurs coeurs au point de les rendre immaculés

Il les a éloignés de l'adoration des plaisirs mondains.

A toute créature agréée de Dieu

Tout service rendu rencontre l'agrément divin

Pour chaque dërëm (plus petite dénomination monétaire) à Lui consacré

Dieu le multipliera par 1000 en guise de rétribution.

181  

 
Dans lignes, Sëriñ Muusaa Ka aborde la transition sociale positive que Cheikh Ahmadou
Bamba a apportée à la société wolof, en faisant des Ceddos (anciens soldats des cours royales)
des chefs spirituels soufis, garantissant ainsi la non exclusivité des avantages de la piété et de la
GURLWXUH j O¶pOLWH PXVXOPDQH WUDGLWLRQQHOOH GH O¶pSRTXH /D PRELOLWp VRFLDOH HW O¶DFTXLVLWLRQ GH
FDSLWDO VSLULWXHO LQGpSHQGDPPHQW GH O¶RULJLQH VRFLDOH VRXOLJQH GDYDQWDJH OD FHQWUDOLWp GH
O¶LQFOXVLRQ HW GH la diversité dans la théologie et la pédagogie soufies de Cheikh Bamba. La
seconde strophe met en exergue la croyance aux services rendus aux maîtres soufis et aux
KRPPHVGH'LHXHQJXLVHG¶LQYHVWLVVHPHQWGHVGLVFLSOHVHWGRQWOHVEpQpILFHVLURQWELHQDX-delà
de leurs attentes.

Les critiques qui prédisaient la disparition des Mourides et ont échoué, et ceux qui
continuent à dénigrer la prétendue « soumission aveugle » des disciples mourides « à leurs guides
spirituels », manquent de percevoir les motivations ésotériques des activités des Mourides,
SXLVTX¶LOV Q¶HQ YRLHQW TXH OHV GRQQpHV H[RWpULTXHV  /D SHUFHSWLRQ GH OD VRXPLVVLRQ HW GHV
services que les disciples mourides vouent généreusement à leurs guides et à leurs communautés
sont interprétées comme des formes d'investissements ésotériques avec la garantie de dividendes
ici-EDVHWGDQVO¶DX-delà. La réussite économique des Mourides, leur dynamisme, leur optimisme
HW OHXU pWKLTXH GX WUDYDLO IRQW G¶HX[ XQH IRUFH LPSRUWDQWH DYHF ODTXHOOH LO IDXW FRPSWHU au
Sénégal.

Te Yàlla kat xarit ba lay musibaal

Ngir darajaal ko mbaate muy ku ñuy baal

La Yàlla jox xarit ba ciy maqaama

Te mënu koo jëf nàttu lañu koy xayma

Te bala laa wóólu ba jox la mbir ya

Nga muñ yenam ba aw ca tànki mbër ya.

(source : Nàttoo di kerNHUDDQLODZOL\DD¶L

Et Dieu n'éprouve que ses amis

Afin de les promouvoir ou de leur pardonner

L'éminence que Dieu accorde à ses amis

Et qu'ils ne peuvent obtenir d'eux-mêmes se mesure à l'aune de diffultés

Et avant qu'Il ne vous fasse confiance pour vous élever en savoir et en rang
182  

 
Il vous faudra relever des défis en suivant la voie de ses saints adorateurs.

Ce poème met en exergue un thème central de la théologie soufie qui prévaut dans le
discours mouride. Dans les sources inteUQHV GH OD 0RXULGGL\D O¶H[FHSWLRQQDOLWp GH %DPED HVW
profondément ancrée dans ses performances et son endurance stellaire et pacifique tout au long
GHVpSUHXYHVGRQWLODIDLWO¶REMHW QRWDPPHQWOHVGpSRUWDWLRQVHWOHVPLVHVHQUpVLGHQFHVXUYHLOOpH
SDU O¶administration coloniale française, et la jalousie de certains musulmans hypocrites, entre
DXWUHV  /HV DYDQWDJHV GHV pSUHXYHV H[WUrPHV TX¶LO D HQGXUpHV VDQV VH SODLQGUH HW HQ WRXWH
confiance en Dieu, constituent nécessairement des bénédictions et une protection divines dans la
théologie mouride.

6. Q uelques extraits de O¶°XYUH de Sëriñ M bay Jaxate (1875-1954)

Defar nga gaa yi nga xam ne xamoo leen

Defar nga gaa yi nga xam ne nga xam leen

Defar nga say mbokk defar aw jambur

Ba ñepp jag nga jàpp nak sab njambur.

Vous avez réhabilité des inconnus

Vous avez réhabilité des connus

9RXVDYH]UpKDELOLWpGHVSDUHQWVHWG¶DXWUHVVDQVOLHQGHSDUHQWp

Au point de les rendre exempts de défauts, sans rien attendre en retour.

Dans ces vers, Sëriñ Mbay Jaxate relève deux importants traits de caractère qui font de Cheikh
Ahmadou un être exceptionnel dans la théologie soufie mouride : (1) sa capacité à « réhabiliter
les êtres humains » de manière désintéressée (Wolof : defar nit) et bénévole HW  O¶LQFOXVLYLWpHW
O¶Xniversalité de ses bénédictions. Cette universalité de son message est un thème central dans
O¶LPSRUWDQWFRUSXVGHODOLWWpUDWXUHPRXULGHHQ$MDPL

Ku fees ak ndox ak ñam di fo ak nelaw

Te naa maa di suufiyu ka soof

Ku dul moy banneex ak bàkkan benn bis du mbër

Mbaa bu dee mbër di muy mëq suuf

Tasuuf day sorig moy te saxoo ndigal


183  

 
Bariy moy aki wax du gennub tasuuf.

5HSXVHWUDVVDVLpV¶DGRQQHUDX[MHX[HWWRPEHUGDQVOHVEUDVGH0RUSKpe

(WVHUpFODPHUGX6RXILVPHF¶HVWPDQTXHUGHVpULHX[

6¶LOYRXVHVWLPSRVVLEOHGHYRXVDEVWHQLUXQHVHXOHMRXUQpHGHVSODLVLUVPRQGDLQV

9RXVQ¶rWHVSRLQWXQOXWWHXU

Ou si vous en êtes un, vous êtes « un lutteur perdant qui mord la poussière »

Un Soufi GRLWV¶pORLJQHUGHVLQWHUGLWVHWUHVSHFWHUOHVUHFRPPDQGDWLRQV

/¶DERQGDQFHGHSpFKpVHWODORTXDFLWpQHVRQWSRLQWGHVFDUDFWpULVWLTXHVVRXILHV

Dans ces vers, Sëriñ Mbay Jaxate se livre à une critique de la société et met en exergue les
qualités ascétiqXHVGXYpULWDEOH6RXILSDUUDSSRUWDXIDX[TXLV¶DWWDFKHDXOX[HGHFHEDV-monde à
O¶LQVWDU GH FHX[ TX¶LO SUpWHQG PHQHU VXU OD YRLH GX 6RXILVPH 6RQ XWLOLVDWLRQ GH O¶LPDJH GX
³PEsU´ OXWWHXU WUDGLWLRQQHOKpURV  UHFRXYUH XQH PpWDSKRUH ZRORI TXH O¶RQ UHWURXYe
abondamment dans la littérature mouride en Wolofal pour souligner la sainteté de Bamba, ses
aptitudes héroïques, son savoir et son pouvoir. Le « lutteur qui gagne » (Cheikh Ahmadou
%DPED HVWFRPSDUHDX³OXWWHXUSHUGDQWTXLPRUGODSRXVVLqUH´XQOXWWHXr terrassé violemment au
SRLQWG¶HQPRUGUHODSRXVVLqUHGHO¶DUqQH$WUDYHUVFHVPpWDSKRUHVHWG¶DXWUHVILJXUHVGHVW\OH
FDUDFWpULVWLTXHV GH O¶pSLVWpPRORJLH ZRORI FHV pUXGLWV V¶H[SULPDQW HQ $MDPL RQW UpXVVL j
transmettre les enseignements soufis (Tasawwuf) de leurs guides spirituels à la masse populaire
wolof analphabète, au point de les instruire progressivement pour en faire des disciples soufis
GDQV OHXUV SURSUHV ODQJXHV HW DLQVL pWHQGUH O¶,VODP DX[ WHUURLUV ZRORIV GX %DRO GX &D\RU GL
Ndiambour, du Djollof, entre autres.

7. Conclusion

En conclusion, bien que la documentation écrite soit rarement considérée comme partie
LQWpJUDQWH GH O¶KpULWDJH LQWHOOHFWXHO GH O¶$IULTXH VXE-VDKDULHQQH G¶LPSRUWDQWV FRUSXV GH
littérature en Ajami ont fait jour en Oromo, en Somali, en Tigrigna, en Kiswahili, en Amharique,
HWHQ0DOJDFKHHQ$IULTXHGHO¶(VWHWHQ%DPDQDNDQHQ0DQGLQJXHHQ.DQRXULHQ<RUXEDHQ
%HUEqUH HQ +DXVD HQ :RORI HW HQ )XOIXOGH HQ $IULTXH GH O¶2XHVW SHQGDQW GHV VLqFOHV (Q
Afrique du Sud, des esclaves musulmans malais ont produit les premiers documents écrits sur les
$IULNDDQV HQ$MDPL ,O HVW JUDQGWHPSVGHGpP\VWLILHUO¶DQDOSKDEpWLVPHDWWDFKpDX[XWLOLVDWHXUV
GHO¶$MDPLHWGHUHFRQQDvWUHODULFKHVVHGHVLQIRUPDWLRQVTX LOVSHXYHQWFRQWULEXHUà la stabilité et
au développement de l'Afrique. Il est en effet paradoxal que de nombreux intellectuels africains,
XQLYHUVLWDLUHVHWKpURVQHVRLHQWUHFRQQXVTX¶jWLWUHSRVWKXPH3RXUWDQWOHVLQWHOOHFWXHOVpWUDQJHUV
sans rapport aucun avec la vie des populations locales, notamment Voltaire, Camus, Hegel,

184  

 
'XUNKHLP 5LPEDXG =ROD HW G DXWUHV GHPHXUHQW DX F°XU GH QRPEUHX[ SURJUDPPHV
d'enseignement ; alors que les intellectuels, poètes, artistes, et héros tout aussi importants au plan
local, sont en grande partie exclus des programmes institutionnels. Par conséquent, les systèmes
éducatifs hérités de la colonisation et perpétués par de nombreux dirigeants africains
postcoloniaux « au nom du développement » engendrent des personnes instruites coupées des
réaliWpVGHOHXUVSHXSOHVGHOHXUVFXOWXUHVHWGHOHXUVWUDGLWLRQVG¶RULJLQH

8QHpGXFDWLRQTXLGpWDFKHGDYDQWDJHO¶LQGLYLGXGHVRQSURSUHSHXSOH :RORIfMjQJPRR
xam ne da lay gëna soril say ñoñ) n'a pas sa place dans le 21e siècle, si l'Afrique et les Africains
doivent être traités comme des partenaires égaux au rendez-vous universel du donner et du
UHFHYRLU DX OLHX GH UHVWHU G¶pWHUQHOV DVVLVWpV HW VDQV HVSRLU DXFXQ G¶rWUH OLEpUpV XQ MRXU /D
reconnaissance de ces importants écrits traditions africaines endogènes ainsi que d'autres sources
de connaissances locales dans d'autres régions et l'intégration des langues locales dans nos
systèmes d'éducation sont essentiels pour produire des intellectuels ancrés dans leurs propres
cultures, langues et systèmes de connaissances, tout en restant ouverts au reste du monde.

(Q YXH G¶XQ UHFRXYUHPHQW LQWpJUDO HW G¶XQH UHFRQQDLVVDQFH GH O¶RFpDQ GH VDJHVVH HW GH
SRVVLELOLWpV RIIHUWHV SDU OHV OLWWpUDWXUHV HQ $MDPL j WUDYHUV O¶$IULTXH LVODPLVpH O 8QLYHUVLWp GH
Boston, souVPDGLUHFWLRQHVWHQWDULQG¶pODERUHUXQSURJUDPPHGHODQJXHVDIULFDLQHVGDQVOHTXHO
OH:RORIHWOH+DRXVD HWG¶DXWUHVODQJXHVTXLVHURQWDMRXWpHVXOWpULHXUHPHQW VRQWHQVHLJQpVDX[
pWXGLDQWVDXWUDYHUVGHVFULSWVODWLQHWDMDPLHWG¶DXWUHVPDWpULHOVSédagogiques réalisés à travers
un mélange de scripts latin et ajami sont en cours de production pour assurer que les étudiants et
chercheurs du 21ème VLqFOHVRLHQWGRWpVG¶LQVWUXPHQWVOLQJXLVWLTXHVHWFXOWXUHOVOHXUSHUPHWWDQWGH
VHOLYUHUjO¶pWXGHGHV°Xvres de Sëriñ Moor Kayre, Sëriñ Samba Jaara Mbay, Sëriñ Muusaa Ka,
HW6sULx0ED\-D[DWHDLQVLTXHFHOOHVGHOHXUVKRPRORJXHVG¶DXWUHVJURXSHVUHOLJLHX[DX6pQpJDO
HWDLOOHXUVHQ$IULTXH1RWUHSURJUDPPHXWLOLVHOHVWHFKQRORJLHVQXPpULTXHVHWO¶LQWHUFRQQH[ion
GHV EDVHV GH GRQQpHV G¶HQVHLJQHPHQW HW GH UHFKHUFKp SRXU DVVXUHU TX¶j FKDTXH IRLV TXH OHV
°XYUHV GH9ROWDLUH&DPXV +HJHO 'XUNKHLP5LPEDXG5RXVVHDXHW =RODHWFVRQWDERUGpHV
celles de Sëriñ Moor Kayre, Sëriñ Samba Jaara Mbay, Sëriñ Muusaa Ka, et Sëriñ Mbay Jaxate, et
G¶DXWUHVHQFRUHVRQWpJDOHPHQWSULVHVHQFRPSWH$ILQGHPLHX[DVVXUHUODSUpVHQFHGHO °XYUH
de tels intellectuels en Ajami dans les échanges mondiaux des connaissances, nous sommes en
WUDLQ GH PHWWUH HQ SODFH O¶$MDPL $IULFDQ /LEUary (AAL) ²%LEOLRWKqTXH DIULFDLQH G¶°XYUHV HQ
Ajami, conçu comme une "Bibliothèque d'Alexandrie" numérique de l'Afrique islamisée, un
UpIpUHQWLHOFRQWLQHQWDODFFHVVLEOHHWRXYHUWDXSXEOLF/¶$$/YHLOOHUDjFHTXHODGRFXPHQWDWLRQ
en Ajami (biographies, hommages, généalogies, ressources thérapeutiques talismans, manuels,
revues médicales, journaux de famille, transactions commerciales, documents historiques,
discours, textes sur les questions administratives et diplomatiques écrites à Ajami dans de
nombreusHV ODQJXHV DIULFDLQHV  QH VRLHQW SOXV FRQVLGpUpV FRPPH G¶LQVLJQLILDQWV YHVWLJHV
historiques, mais plutôt comme de grandes sources de la sagesse africaine locale, sans laquelle

185  

 
une approche holistique et une compréhension en profondeur de l'Afrique islamisée demeureront
illusoires.

186  

 
2.5.4 - Communication 3 : Le soufisme est le salut , par Dr Ousmane Dia, Cadi
islamique à la haute instance de cassation de la République Gambie

Les chercheurs ont eu beaucoup de mal à cerner O¶RULJLQH GX PRW 7DVDZXI RX GX PRW 6oufi à
FDXVHGHVWKqVHVGLIIpUHQWHVHWFRQWUDGLFWRLUHV&HUWDLQVDYDQFHQWTX¶LOVGpULYHQWGHODSKLORVRSKLH
JUHFTXHRXG¶DXWUHVWUDGLWLRQVDQWpULHXUHVjO¶LVODP$YDQNUHPHUHW5%GR]\ soutiennent que
O¶KLQGRXLVPH LQIOXHQoD QHWWHPHQW OH 6RXILVPH 0 horten abonda dans le même sens. Hartman,
SHQVHTXHOHERXGGKLVPHWXUNPqQHRXOHFKDPDQLVPHHXW SOXV G¶LQIOXHQFHVXUOHVRXILVPHTXH
O¶KLQGRXLVPH

,OHVWSUREDEOHTXHOHVXMHWHWO¶REMHWGX7DVDZXI soient aussi controversés à cause des variétés


multiples dans les pratiques soufies, ainsi que dans les différents états spirituels qui en
découlent. Les états (ahwal) HWOHVVWDWLRQV PDTDPDW GHODVSLULWXDOLWpVRQWGLIIpUHQWVG¶DSUqVOHV
PR\HQVHWOHVPpWKRGHVHWDXVVLG¶DSUqVOHVH[SpULHQFHVVSLULWXHOOHVHt la diversité des soufis. Tout
FHODVXVFLWHGHVGLIILFXOWpVGDQVODGpILQLWLRQGXVRXILVPH$VDYRLUTXHO¶pWXGHGHODYLHHWGHV
°XYUHV G¶XQ 6RXIL SHXW FRQVRPPHU XQH YLH HQWLqUH G¶XQ FKHUFKHXU FH TXL MXVWLILH ELHQ OHV
paradoxes et les difficultés rencoQWUpHV SDU OHV FKHUFKHXUV HQ OD PDWLqUH '¶DLOOHXUV RQ QH SHXW
réellement dater le Tasawuf qui pour ses adeptes est la substance même de la religion islamique
WHOOHTXHYpFXHWHQVHLJQpSDUOHSURSKqWH0RKDPPDG SVO ,OV¶DJLWGHVYHUWXVGHO¶KXPLOLWpHW de
O¶DEQpJDWLRQTXLVRQWRSSRVpVjO¶LQIDWXDWLRQHWjO¶RUJXHLOTXHOH7DZKLGDEDQQLV Les premiers
Soufis vivaient les réalités du Tasawuf sans les théoriser, ils réalisaient des états spirituels élevés
sans les nommer. Le grand historien Ibn Khaldoun a dit  OH SULQFLSH GX 7DVDZXI HVW G¶rWUH
constant dans les adorations et de se consacrer à Allah entièrement en se détournant des vanités
mondaines et des futilités.

L es débuts de la théorisation dans le T asawuf

On a commença à mettre par écrit la science Soufie et à établir les relations avec le coran et la
VXQQD j SDUWLU GH O¶pSRTXH TXL VXFFpGD FHOOH GHV 6DKDEDV HW GH OHXUV GLVFLSOHV &HOD IXW XQH
nécessité dictée par certaines dérives pORLJQpHVGHO¶HVSULWHWGHODOHWWUHGHO¶LVODP&HWWHSpULRGH
de FRQVLJQDWLRQ VH GpURXOD HQ SOXVLHXUV SKDVHV '¶DERUG OH 7DVDZXI V¶HVW DIILUPp FRPPH XQH
discipline à part entière avec ses fondements et ses règles spirituelles dont O¶REMHWSULQFLSDOHVWOD
relation intime du croyant avec son Seigneur, mais aussi la coQQDLVVDQFHGHVYpULWpVGHO¶(WUHHW
GHO¶H[LVWHQFHSDUODVFLHQFHGHVOHWWUHVHWSDUODVFLHQFHLQIXVH Dr Mohammad Kahlawi auteur
de « la pensée Soufie en Afrique et en Occident islamique », dit : les premiers écrits Soufis
traitèrent des secrets divins, GHV P\VWqUHV GH O¶H[LVWHQFH DLQVL TXH GH OD FRQQDLVVDQFH
métaphysique telle que dans les lettres de Jabir Ibn hayyan.

L a première phase

187  

 
-Jabir Ibn Hayyan 198h /813 : dans ces lettres, il distingua entre les sciences exotériques de la
religion islamique et entre les sciences ésotériques de la tradition universelle. Il dévoila la science
des lettres TXLHVWG¶DSUqVOXLODVFLHQFHVSLULWXHOOH

_Dhu Nun al Misri 243h/859 : il fut le premier qui distingua le savoir (Ilm) de la connaissance
RX JQRVH 0D¶ULID  suivi en cela par Ibn Arabi qui rédigea un ouvrage hagiographique et
initiatique sur Dhu Nun.

-Abou Yazid Bistami 261h/874

-Hakim Tarmadhi 286h/898 : il composa deux livres majeurs sur la sainteté « la science des
Awliyas » et « le sceau des saints ». Seul Ibn Arbi a pu lui apporter la réplique et expliquer la
réalité de la Wilaya et ses implications dans la religion islamique, comme il expliqua la science
infuse (Ilm ladunni) et la science prophétique (ilm nabawi), et la fonction du sceau des saints
et la fonction du Qotb la station ultime de la wilaya. Le titulaire de cette station a achevé les
GHJUpV GH OD FRQQDLVVDQFH HW V¶HVW FRQQHFWp GLUHFWHPHQW j VRQ 6HLJQHXU TXL O¶LQVWUXLW VXU OHV
P\VWqUHVGHO¶XQLYHUVSDUGpYRLOHPHQWHWFRQWHPSODWLRQ

-/¶LPDm Junayd 297h/909 GDQV³OHVOHWWUHVGH-XQDLG´+DVVHQ$OL$EGHONDGHUPHQWLRQQDTXH


Junaid fut le premier à traiter des significations de lettres isolées du Coran et de la science des
lettres. On considère chez les Soufis que cette science est le préliminaire aux connaissances
pVRWpULTXHVHWPpWDSK\VLTXHVTXLSHUPHWWHQWG¶DFFpGHUjODVFLHQFHJOREDOHFHOOHGHODGLYLQLWp
GHO¶(WUHGHODUpYpODWLRQHWGHODSURSKpWLH

-Hussein Ibn Mansour al Hallaj VXUQRPPpOHPDUW\UGHO¶DPRXUGLYLQ.DKODZLDIILUme que la


SDVVLRQGH+DOODMHVWOHSURWRW\SHGHO¶DPRXUGLYLQFRQVRPPpTXLHVWOHIUXLWGHODFRQQDLVVDQFH
globale. Cette passion a apporté aux successeurs de Hallaj des indications précieuses sur les
VHFUHWVGHO¶(WUHHWOHVVHFUHWVGHVOHWWUHV&HWWHFRQnaissance se transmet en mode symbolique et
poétique et ne peut y accéder que celui qui reçoit directement de son Seigneur la science infuse.
Dans le chapitre « les textes de la Wilaya » du livre de Kahloun, on cite des propos de Hallaj qui
dit : le point HVW O¶RULJLQH GH WRXWH OHWWUH HW WRXWH OHWWUH HVW XQ DVVHPEODJH GH SRLQWV /H PRW HVW
composé de lettres et ne peut jamais être indépendant du point, comme le point ne peut jamais
avoir de signification sans les lettres. Toute lettre est une expression du point. Tout est dans le
SRLQW HW WRXW FH TXH QRXV SHUFHYRQV YLVXHOOHPHQW RX PHQWDOHPHQW Q¶HVW TXH O¶H[SUHVVLRQ
théophanique de notre seigneur qui nous interpelle dans toute chose et par toute chose. Pour cela,
M¶DIILUPHTXHQHYRLVSDVTXHOTXHFKRVHVDQVTX¶$OODKVHWKpRSKDQLVHjPRLSDUFHWWHFKRVH

&HV SDUROHV DPELJHV HW WDQW G¶DXWUHV ORFXWLRQV WKpRSKDQLTXHV VKDWDKDW  H[SULPHQW XQH YLVLRQ
synthétique GHO¶(WUHSULPRUGLDO$EVROX FUpDWHXUHWGHO¶H[LVWHQFHFRQWLQJHQWHTXLHVWOHFRVPRV

Anne marie Schimmel voyait en cette approche, de la philosophie. Mais, cette pensée est celle
TXL IXWUHSULVH HW GpYHORSSpHSDU ,EQ$UDEL GDQVO¶XQLFLWpGHO¶H[LVWHQFH :DKGDW DO :RMXG RX

188  

 
8QLFLWp :DKLGL\D $OODKWRXWHQpWDQWWUDQVFHQGDQWHVWO¶(WUHQpFHVVDLUHSDUTui tout est venu à
O¶H[LVWHQFH :RMRXGNXOOL:RMRXG,OHVWO¶$EVROXDORUVTXHWRXWHVWUHODWLI,EQ$UDELGDQVGHV
IRUPHVG¶H[SUHVVLRQPXOWLSOHVH[SOLTXDTXHO¶HVVHQFHGLYLQH 'KDW LQILQLH transcende le temps
HWO¶HVSDFHHOOHHVWDEVROXHGRQFHOOHHst la seule et unique réalité puisque tout est contingent. Le
FRVPRVRXO¶XQLYHUVHVWILQLHWWLUHVRQH[LVWHQFHGHODUpDOLWpLQILQLHGH'LHX2UOHVSKLORVRSKHV
LQVLVWHQW VXU O¶XQLWp GH WRXW HW DIILUPHQW TXH WRXW HVW LVVX GH O¶XQLWp TXL HVW OD VRXUFH GH toute
H[LVWHQFH/HXUDSSURFKHQHIDLWSDVGHGLIIpUHQFHHQWUHO¶H[LVWHQFHDEVROXHGH'LHXHWO¶H[LVWHQFH
contingente.

3RXU FHOD O¶DSSURFKH G¶,EQ $UDEL FRPPH VHV H[SUHVVLRQV VRQW HQ SDUIDLWH FRQFRUGDQFH DYHF OD
révélation. /¶pWXGHREMHFWLYHGHVHVpFULWs éclaire les esprits dans la connaissance métaphysique.

(Q G¶DXWUHV WHUPHV LO GLW  $OODK HVW OH VXEVLVWDQW SDU TXL WRXW VXEVLVWH 4D\\XP  DORUV TX¶,O
subsiste par Soi-PrPH7RXWHFKRVHH[LVWHSDU/XLHWVXEVLVWHSDU/XLSXLVTX¶,OHVW3ULPRUGLDOHW
Eternel alors que toute chose est accidentelle. Dans ces affirmations, il n y a nulle allusion à un
quelconque panthéisme ou incarnationisme (hulul) comme le soutiennent à tort certains. Allah
HVWWRXMRXUVDEVROXPHQWWUDQVFHQGDQWHWVDUHODWLRQDYHFO¶XQLYers et les êtres est celle du Créateur
avec ses créatures. Il pourvoie à leur existence et leur subsistance, et ils dépendent absolument
GH/XLDORUVTX¶,OHVWLQGpSHQGDQWGHWRXW&HWWHFRQQDLVVDQFHSHUPHWjVRQWLWXODLUHG¶DWWHLQGUHOD
servitude absolue XEXGL\DPXWODTD SRXUODTXHOOH$OODKDFUpHO¶KXPDLQ

Evidemment, les propos des philosophes sont réfutables rationnellement et théologiquement


SXLVTX¶LOV XQLILHQW O¶(WHUQHO $EVROX HW OH FRQWLQJHQW UHODWLI 2U OH ILQL GHYDQW O¶,QILQL HVW QXO
&¶HVWXQH HUUHXUG¶DVVLPLOHUOHVPpWDSK\VLFLHQVGHO¶LVODPDX[SKLORVRSKHV

'HSXLV VK MXVTX¶j + FHUWDLQV 6RXILV RQW WKpRULVpV OHXU FRQQDLVVDQFH G¶DSUqV OHXU
expérience propre et le bagage intellectuel à leur portée, ce qui donna parfois des paradoxes que
les aspirants amplifiaient et que des théologiens et juristes dénonçaient. Des Soufis furent
accusés G¶KpUpVLH HW FHUWDLQV IXUHQW FRQGDPQpV j PRUW 8Q VDYDQW +DQEDOLWH *KXODP .KDOLO
accusa tous les Soufis et suscita une discorde qui mit le Tasawuf sur la déIHQVLYH '¶R OD
prédilection des Soufis pour le langage allusif et pour le symbolisme. Mais, les maitres de la voie
Soufie se mirent à rédiger des ouvrages en forme de lettres aux disciples (mutasawuf) ou de
manuels afin de réglementer leur discipline et ainsi écarter les innovateurs et les prétendants
soufis (mustaswuf). Malheureusement, il y eut et il y a toujours des prétentions dans les voies
VRXILHV HW FHUWDLQV XVXUSDWHXUV DEXVHQW GH OHXU IRQFWLRQ TX¶LOV RFFXSHQW SDU WUDGLWLRQ HW QRQ SDU
réalisation pRXUV¶HQULFKLUHQDFFRUGDQWDX[GLVFLSOHVGHVOLFHQFHVHWGpURJDWLRQVLOOpJLWLPHVWRXW
en faisant valoir des faux privilèges.

L a seconde phase

Cette phase fut celle de la légitimisation du Soufisme et de sa relation avec la


jurisprudence islamique. Des auteurs Soufis établirent la conformité des exercices
189  

 
spirituels soufis avec la sunna du prophète (psl). Le Tasawuf se mit ainsi à puiser se arguments
dans le Coran et la Sunna surtout après les attaques du hanbalite Ahmed Ibn Mohammad Ibn
Ghalib surnommé Ghulam Khalil (M.262 h) que nous avons mentionné précédemment. Ainsi, les
Soufis harmonisèrent leur connaissance en établissant les connections avec les données de la
révélation et des hadiths.

-Abou Nasr Sarraj toussi 378H/988 : auteur du « OXPD¶ ª ,O IXW O¶XQ GHV SLRQQLHUV GH FHWWH
nouvelle phase par sa méthode qui consista à définir les caractéristiques et les exercices soufis
FRPPH O¶DVFpWLVPH =XKG  O¶DGRUDWLRQ 7D¶DEXG  O¶pYRFDWLRQ =LNU  HW OD UHWUDLWH VSLULWXHOOH
NKDOZD ,OGpPRQWUDTX¶LOVVRQWUHFRPPDQGDEOHVSDUOD&KDUL¶DHWIRQWSDUWLHGHVDFWHVYHUWXHX[
IDGDLOVDOD¶PDO '¶DLOOHXUVOHSURSKqWH SVO HQSHUVRQQHOHVSUDWLTXDLW

-Mohammad Khalabadi 380h/990 : dans son livre « DW µDUXI OL¶PDGKKDE DKO D¶ WDVDZXI », il
expliqua les réalités de la foi (Haqaiq al Iman) dans la perspective Soufie basée sur la pratique
des vertus.

-Abou Talib al Makki 386h/996 : dans « Qut al Qolub », il détailla les pratiques soufies tels la
OLWDQLH ZLUG O¶pYRFDWLRQ ]LNU OHVDYRLUHWODFRQQDLVVDQFH LOPZDPD¶ULID 

Ces efforts intellectuels permirent aux auteurs ultérieurs de composer des écrits merveilleux qui
sont des classiques de la littérature soufie comme :

-La lettre (Risala) de Qushairi 465h/1072

-Le dévoilement de ce qui est occulté (Kashf al mahjoub) de Hujwari 465h/1072

/¶DXWHXU GH OD SHQVpH VRXILH GLW : ces deux ouvrages établirent les règles théologiques et
MXULGLTXHV GX 7DVDZXI HQ FRQIRUPLWp WRWDOH DYHF O¶HVSULW GH O¶LVODP FRPPH LOV FULWLTXqUHQW HW
dénoncèrent les déviations imputées à tort aux Tasawuf. Ils ont aussi confirmés les relations de la
+DTLTDHWGHOD&KDULDHWDIILUPpVTXHOD&KDULDVDQVOD+DTLTDFRQGXLWjO¶RVWHQWDWLRQHWTXHOD
Haqiqa sans la Charia conduit au libertinage.

Cette méthodologie fut aussi celle de Abou Hamid Ghazali 505h/1111 dans Ihya olum eddine, et
GH$ERX+DIV2PDU6XKUXZDUGLKGDQV$ZDULIDO0D¶ULI

L e Soufisme islamique

/¶XVDJHYHXWTXHWRXWHQRWLRQVRLW analysée étymologiquement afin de la cerner linguistiquement


et conventionnellement. Toutefois, le Tasawuf ne se laissa pas enfermer dans une définition et
les linguistes comme les savants Soufis présentèrent des définitions multiples qui tournent
ILQDOHPHQW DXWRXU GH SXUHWp VDID  GH SUHPLHU UDQJ VDI DZ¶DO  SRW GX IRF GH ODLQH VXI), les
FRPSDJQRQVGX%DQF DKOD¶VXID ,O y a plusieurs autres interprétations qui peuvent être retenus,
PDLVLOHVWLQIUXFWXHX[GHFKHUFKHUGDQVO¶pW\PRORJLHODGpILQLWLRQDGpTXDWH On ne peut dire que

190  

 
ce que les savants disent à propos des lettres isolés dans le Coran : Seul Allah connait
certainement le sens.

Qushairi a dit OHVPRWVWDVDZXIVRXILPXWDVDZXIQ¶RQWSRLQWGHUDFLQHpW\PRORJLTXHHQODQJXH


DUDEH$SSDUHPPHQWF¶HVWXQHGpQRPLQDWLRQ 3XLVLOFRQVWDWDO¶LPSXLVVDQFHGHVOLQJXLVWHV j
pWDEOLUO¶pW\PRORJLHGXPRWHW dit HQWRXWFDVFHWWHFRUSRUDWLRQHVWG¶XQHWHOOHQRWRULpWp TX¶LOV
SHXYHQWVHGLVSHQVHUG¶XQUDWWDFKHPHQWpW\PRORJLTXH

/¶pUXGLW6LGL,GULVV ibn Mohammad ibn al Abed al Iraki al Tijani mentionna les propos multiples
deVVDYDQWVVXUO¶pW\PRORJLHGX7DVDZXI dans son livre La lettre suffisante (Risala kafia), puis
dit : on constate dés lors que le débat est toujours actuel, et tous ceux qui veulent prouver une
étymologie font peu de cas des règles de la grammaire et de la conjugaison.

Quand au Docteur Abdelhalim Mahmoud, il mentionna les avis des anciens et des contemporains
puis abonda dans le sens du froc de laine et argumenta avec pertinence. Il dit : mon avis est celui
de la majorité des contemporains car le mot Tasawuf est en relation avec la laine, car on dit de
celui qui porte une chemise (taqammasa) comme on dit de celui qui porte le froc de laine
7DVDZDID  ,O DIILUPD TXH WHO pWDLW O¶DYLV GH 0XVWDID DEGHUUD]DN GH ]DNL PRXEDUDN HW GH
O¶RULHQWDOLVWHPDUJROLRXth .

L e Soufisme conventionnellement

La définition conventionnelle est difficile comme la définition linguistique car Le tasawuf est
une somme de valeurs et de vertus qui sont rarement réunis en une seule personne. Et même, si
elles sont présentes en puissance dans une personne, certaines seulement sont actualisées ou plus
évidentes, ce qui donne à qualifier le Soufi par telle ou telle caractéristique. Il est évident pour
QRXV TXH OD GpILQLWLRQ GX 7DVDZXI Q¶HVW SDV DXVVL DLVpH TXH FHOOH G¶XQH DXWUH GLscipline
intellectuelle ou scientifique car les approches et les expériences des soufis sont très variées. Il
est même rare que deux soufis aient la même expérience, et chacun pourra décrire son itinéraire
et ses conclusions sans entrer en opposition avec O¶DXWUH Ceux qui vont en pèlerinage à la mekke
peuvent emprunter la voie des airs ou de la mer ou de la terre et chacun donnera une description
véridique de son itinéraire. Leur finalité est toutefois la même, bien que leurs expériences sont
différentes.

Pour une meilleure clarification je citerais deux exemples :

-la définition de Abou Beckr kattani 322h : le Tasawuf est pureté et contemplation (safa wa
mushahada). Cette définition porte sur des les finalités du Tasawuf, or il y a aussi les moyens qui
sont nécessaires pour accéder aux finalités. Mais, on peut aussi considérer la pureté comme le
PR\HQ HW OD FRQWHPSODWLRQ FRPPH OD ILQ 7RXWHIRLV RQ DXUD QpJOLJp O¶DVFpWLVPH ]XKG  HW OHV
DGRUDWLRQV WD µDEXG  FDU O¶pWKLTXH VHXOH QH VXIILW SDV SRXr accéder aux finalités du

191  

 
Tasawuf. Ainsi, nous pouvons toujours être critique devant une définition qui se veut
synthétique.

-ODGpILQLWLRQG¶,EQ.KDOGRXQ OHSULQFLSHGX7DVDZXIHVWG¶rWUHFRQVWDQWGDQVOHVDGRUDWLRQVHW
de se consacrer à Allah entièrement en se détournant des vanités mondaines et des futilités. On
en déduit que le Soufi doit réunir ces trois aptitudes. La constance dans les adorations implique
ODFRQIRUPLWpDX[SULQFLSHVGHO¶LPDQGHO¶,VODPHWGHO¶LKVDQ6HFRQVDFUHUHQWLqUHPHQW à Allah
LPSOLTXHODVLQFpULWp ,NKODV 8QH°XYUHQ¶HVWTXDOLILpHG¶DGRUDWLRQTXHTXDQGHOOHHVWWRWDOHPHQW
GpGLpHj$OODK/¶DVFpWLVPHIDLWSDUWLHGHVIRQGHPHQWVGX7DVDZXIFDUOH6RXILGRLWVHGpWRXUQHU
GHWRXWFHTXLSHXWV¶LQWHUSRVHUHQWUHOXLHWVRQSeigneur. Qushairi a dit O¶DVFpWLVPHHVWOHIDLWGH
se détourner spontanément des attaches terrestres sans effort particulier.

$LQVLODGpILQLWLRQG¶,EQ.KDOGRXQVHPEOH la plus exacte car ses éléments sont nécessaires dans


la voie Soufi. Dans tous les FDVQRXVGLVRQVTX¶$OODKVDLWPLHX[FHTX¶LOHQHVW

7RXWHIRLVOH7DVDZXIHVWXQHGLVFLSOLQHjSDUWHWFHQ¶HVWSDVVDGpILQLWLRQTXLOHIHUDFRQQDLWUH
mais ce sont ses résultats. Il faut aussi tenir en compte que les ouvrages Soufis sont apparus
tardivement par rapport à la discipline qui était basée sur la pratique et non sur la théorie.

/¶DSSURFKHGH.KDGLP5DVVRXO&KHLNK$KPDGRX%DPED

On peut dire en toute objectivité que de tous les auteurs qui traitèrent du tasawuf, Khadim
Rassoul fut le plus pertinent et le plus éloquent. Nous avons constaté le dilemme des savants
FRQFHUQDQWOHVGpILQLWLRQVGX7DVDZXI&HUWDLQVIDLVDLHQWSUpYDORLUO¶pWKLTXHG¶DXWUHVODGpYRWLRQ
HW G¶DXWUHV OD PpWDSK\VLTXH &H TXL ODLVVH OHV FKHUFKHXUV SHUSOH[HV HW LQVDWLVIDLWs. Or, Khadim
Rassoul avec sa puissance linguistique et le sérieux qui caractérise ses écrits fournit une nouvelle
YLVLRQV\QWKpWLTXHGX7DVDZXITXLOHSUpVHQWHFRPPHO¶LQWpJUDOLWpGHODUHOLJLRQLVODPLTXH&HWWH
approche synthétique HVWG¶DSUqVPDFRQQDLVVDQFHXQLTXHHWQ¶DSDVGHSUpFpGHQW

3RXUDQDO\VHUDFDGpPLTXHPHQWFHWWHQRXYHOOHDSSURFKHGX7DVDZXILOVXIILWG¶pWXGLHU0DVDOLNDO
Jinan81, ou le Cheikh Ahmadou bamba dit :

En toute certitude, le soufi véritable est un savant qui met en pratique sa science en toute sincérité
sans jamais faillir.

                                                                                                                     
81    Masalik  al  jinan  fi  ma  farraqahuu  al  deyman  :  ouvrage  de  notre  maitre  Cheikh  Ahmadou  bamba  qui  traite  du  
dĂƐĂǁƵĨ͘>͛ĠƚLJŵŽůŽŐŝĞĚƵŵŽƚƚĂƐĂǁƵĨĞƐƚŝŶĐĞrtaine  et  les  avis  divergent.  On  dit  «  sufa  »  (banc)  et  «  saf  »  (rang)  ;  
«  souf  »  (laine)  et  même  «  safw  »  (pureté).  Cependant,  toutes  ces  concordances  sont  valables,  comme  d'autres  
explications  sont  aussi  retenues  ;  chaque  affirmation  repose  sur  des  arguments  acceptables.  Les  avis  sur  le  sujet  
dépassent  mille  hypothèses  et  leur  énumération  ne  nous  avance  à  rien.  Il  dit  à  la  fin  :  il  contient  tout  ce  qui  
ƉƵƌŝĨŝĞůĞƐĐƈƵƌƐĚĞƐŝŵƉĞƌĨĞĐƚŝŽŶƐĞƚůĂƐĂŐĞƐƐĞƐŽƵĨŝĞƋƵ͛ŝůƌĞĐğůĞĚŝƐƉĞŶƐĞůĞůĞĐƚĞƵƌĚĞƚŽƵƚĂƵƚƌĞŽƵǀƌĂŐĞĞŶ
la  matière.  

192  

 
Pur et exempt de toute imperfection. /HF°XULOOXPLQpSDUOHVVHFUHWV

&RQFHQWUpVXUVRQ6HLJQHXUQHIDLVDQWQXOOHGLVWLQFWLRQHQWUHGHVSLHUUHVRXGHVSLqFHVG¶DUJHQW

En trois vers, khadim Rassoul a pu trancher dans ce sujet qui a rendu perplexes des générations
de chercheurs, il réunit ainsi entre les moyens et les finalités du Tasawuf dans les plus éloquentes
expressions. Il exposa les divergences des savants en la matière puis il insista subtilement non
seulement sur la concordance de la Charia et de la Haqiqa mais aussi sur leur complétude. Ainsi
il dit : Le soufi véritable est celui qui met en pratique sa science (religieuse).

La religion islamique dans son intégralité est : Iman, Islam et Ihsan comme le hadith de seyyidna
-LEULOOHGpPRQWUH/¶LPDP 0XVOLPGDQVVRQVDKLKUDSSRUWHG¶,EQ2PDUGHVRQSqUH2PDULEQ
.KDWWDETX¶$OODKOHVDJUpH  XQMRXUQRXVpWLRQVFKH]OHSURSKqWH 3VO  HW YRLFLTX¶XQKRPPH
aux habits blancs, aux cheveux très noirs, qui ne manifeste nulle trace de voyage et que personne
QHFRQQDLWYLHQWV¶DVVHRLUHQIDFHGXSURSKqWH SVO VHVSLHGVFRQWUHVHVSLHGVHWPLWVHVPDLVVXU
ses cuisses, puis dit : Ô Mohammad LQIRUPHV PRL VXU O¶LVODP /H SURSKqWH SVO  UpSRQGLW :
L'islam est G¶DWWHVWHU TX¶LOQ\DQXOOHGLYLQLWpHQGHKRUVG¶$OODKHWTXH0RKDPPDGHVWO¶HQYR\p
G¶$OODKG¶HIIHFWXHUODSULqUH de donner la dime, de jeuner Ramadan et de faire le pèlerinage si
tu en as les moyens.

Il dit : tu dis vrai. On était surpris car il interrogeait et confirmait. Puis, il dit : informes moi sur
O¶LPDQ/HSURSKqWH SVO UpSRQGLW /¶LPDQHVWGHFURLUHHQ$OODKHQVHVDQJHVHQVHVOLYUHVHQ
ses prophètes, en le jour du jugement et en le décret et le destin en bien ou en mal. Il dit : tu dis
vrai. Puis dit : informes moi sur O¶LKVDQLe prophète (psl) dit O¶LKVDQHVWG¶DGRUHU$OODKFRPPH
VL WX OHYRLV FDUVL WX QHOHYRLV SDV /XL WHYRLW ,OGLWLQIRUPHVPRLVXUO¶KHXUHLPPLQHQWH Le
prophète (psl) dit : ni celui qui est interrogé, ni cHOXLTXLLQWHUURJHQHVDYHQWG¶DYDQWDJH,OGLW :
informes moi sur ses signes.

Le prophète (psl) dit : quand la servante enfantera sa maitresse et quand les nus pieds pasteurs
feront la compétition dans les bâtiments. Puis il est parti et je restais pensif. Le prophète (psl)
me dit : Ô Omar, sais- WXTXLpWDLWO¶LQWHUURJDWHXU ? Je dis : Allah et son prophète savent ! Il dit :
&¶pWDLW-LEULOTXLpWDLWYHQXYRXVHQVHLJQHUYRWUHUHOLJLRQ

/¶LPDP1DZDZLHQFRPPHQWDQWFHKDGLWKGLW : le cadi iyadh expliqua que ce hadith englobe tous


les aspects exotériques et ésotériques de la religion. Toutes les sciences religieuses sont en,
synthèse dans ce hadith. Dans les paroles du prophète (psl)  F¶HVW -LEULO TXL HVW YHQX YRXV
HQVHLJQHUYRWUHUHOLJLRQLO\DO¶LPDQO¶LVODPHWO¶LKVDQ'RQFQRWUHUHOLJLRQHVWO¶HQVHPEOHGHV
trois. Ce hadith englobe le savoir et la connaissance, il est le fondement de notre religion

,EQ +DMDU GLW GDQV VRQ FRPPHQWDLUH GX KDGLWK j SURSRV G¶DGRUHU $OODK FRPPH VL WX OH YRLV :
Nawawi a dit ce passage est fondamental dans la théologie et il est le trésor des véridiques et des
gnostiques.

193  

 
&HV HQVHLJQHPHQWV VRQW OD EDVH GH O¶HQVHLJQHPHQW GH .KDGLP 5DVVRXO TXL GLW : le soufi est un
savant qui met en application sa science religieuse. Puis ajoute : en toute véracité sans jamais
faillir. Ce qui signifie adorer $OODK MXVTX¶j OD PRUW FRQIRUPpPHQW DX YHUVHW © Adores ton
6HLJQHXUMXVTX¶jFHTXHODPRUW te surprend » sourate hajr 99.

/¶HQVHLJQHPHQW de Cheikh Amadou Bamba exposé dans ces écrits théologiques ou sur le
tasawuf insiste sur les trois volets de notre religion. /¶LPDQHVWOHIRQGHPHQWO¶LVODPOHVUqJOHVHW
O¶LKVDQ le tasawuf qui embellit les deux par la pureté du croyant et sa sincérité. Un hadith Qodsi
rapporté par Abou Horeira nous instruit que le prophète (psl) a dit : Allah dit « celui qui combat
XQGHPHVpOXVMHOXLGpFODUHODJXHUUH0RQVHUYLWHXUQHSHXWSDVP¶DSSURFKHUSDUPHLOOHXUTXH
PHVSUHVFULSWLRQVHWSOXVLOV¶DSSURFKHGHPRLSDUOHVDFWHVVXUpURJDWRLUHVSOXVMHO¶DLPH(t quand
MH O¶DLPH MH GHYLHQV VRQ ouïe par laquelle il entend, sa vue par laquelle il voit, sa main par
ODTXHOOHLODJLWVRQSLHGSDUOHTXHOLOVHGpSODFH4XDQGLOPHGHPDQGHMHO¶H[DXFH et quand il se
UHIXJLHHQPRLMHOHSURWqJH-HQ¶KpVLWHHQULHQFRPPHM¶KpVLWHj{WHUODYLHGXFUR\DQWTXLGpWHVWH
la mort car je déteste le faire souffrir.

Ainsi, nous avons trouvé ces merveilleux enseignements impliqués dans les vers de Khadim
Rassoul qui sont réellement incomparables.

Le second vers explique la finalité ultime du soufi : Pur et exempt de toute imperfection. Le
F°XULOOXPLQpSDUOHVVHFUHWV&¶HVWOHVHQVGDQVOHTXHODDERQGp$ERXEHFNUNDWWDQLHQH[SOLTXDQW
le tasawuf par : pureté et contemplation. La pureté étant le moyen et la contemplation la finalité.
Or, Cheikh Ahmadou Bamba en fait un aspect et non une synthèse, puisque le soufi en
V¶pOHYDQW passe par cette étape. Ibn Khaldoun aussi dit OHVRXILHQV¶pOHYDQWGHVWDWLRQHQVWDWLRQ
arrive au but requis qui est le tawhid et la connaissance.

Conclusion

La différence entre les définitions des savants et celle du Cheikh Ahmadou Bamba est dans le fait
que celle du Cheikh est plus complète car elle traite de tous les aspects mais aussi unifie la Charia
et la Haqiqa pour en faire une seule et unLTXH UpDOLWp ,O GLW SRXU GpQRQFHU O¶LQFRPSpWHQFH GHV
savants contemporains :

Je dis : la majorité de nos contemporains ignorent la science du Tasawuf et ont négligés ainsi un
bienfait évident

,OVLJQRUHQWTXHF¶HVWODYRLHTXLFRQGXLWjODSUpVHQFHGLYLQHG¶ROHXUGpILFLHQFHHQODPDWLqUH

,OVLJQRUHQWTXHF¶HVWODPHLOOHXUHSURYLVLRQOHMRXUIDWLGLTXHGXMXJHPHQW

,OVLJQRUHQWTXHF¶HVWODYRLHGHODUHFWLWXGHTXLSURWqJHOHFUR\DQWGHVEOkPHVGHPDLQ

194  

 
En affirmant cela, le Cheikh ne fait aucune distinction entre le Tasawuf et le Tawhid qui sont les
sciences islamiques par excellence82 car le jour du jugement le croyant aura crucialement besoin
des deux.

L a relation de la C haria avec la H aqiqa

La connaissance de soi est la meilleure préoccupation GH O¶humain qui veut se réaliser
spirituellement et REWHQLU OH VXFFqV LFL EDV HW GDQV O¶DX-delà. Bien que notre
réalité soit tangible on ne peut pas SRXUDXWDQWVHFRQQDLWUHVDQVO¶H[SORUHUGHO¶LQWpULHXU Ce
qui est plus subtil encore et on ne peut en connaitre que des aspects. Déjà, la science est très
difficile à définir globalement et chaque discipline a ses matières qui a ses propres règles et le
chercheur aura tendance à se spécialiser dans une discipline particulière pour acquérir sa part de
connaissance.

Au temps du prophète (psl), les sciences de la religion étaient toutes dans le Coran qui synthétise
le Tawhid et ses implications, le Fiqh et ses principes, le culte et ses règles, le droit et les
UHODWLRQV KXPDLQHV O¶pWKLTXH HW OD SXULILFDWLRQ des âmes,. De même, que des éléments de
O¶KLVWRLUHGHO¶KXPDQLWpGHODJpRJUDSKLHGHODFRVPRORJLHHWGHODPpGHFLQHpWDLHQWHQV\QWKqVH
dans la révélation. Le prophète (psl) était le Coran personnifié et il révélait les secrets et les
implications du texte sacré. Or, après sa mort (psl) la révélation est interrompue et les
musulmans consignèrent ses propos, ses avis et ses gestes. Une science nouvelle apparut et très
vite se divisa en plusieurs disciplines : le Hadith (dits), la sunna (tradition) et la sira
(biographie). Chacune avait ses normes et se autorités. Les croyants sont de diverses tendances
HWFKDTXHJURXSHFKRLVLWGDQVO¶HQVHLJQHPHQWSURSKpWLTXHFHTXLHVWOHSOXVFRQIRUPHjVDQDWXUH
$LQVL FHUWDLQV V¶RFFXSqUHQW GH OD MXULVSUXGHQFH )LTK  HW GH OD VFLHQFH GX OLFLWH HW GH O¶LOOLFLWH
G¶DXWUHV GL &RUDQ HW VD OH[LFRJUDSKLH G¶DXWUHV GX +DGLWK G¶DXWUHV GX 7DZKLG G¶DXWUHV GH OD
ELRJUDSKLHGXSURSKqWH SVO G¶DXWUHVGHO¶KLVWRLUHHWDLQVLOHVVFLHQFHVHWOHVGLVFLSOLQHV virent le
jour. /HV6RXILVV¶RFFXSqUHQWGHO¶kPHKXPDLQHHWVHVPDODGLHVDILQGHWURXYHUOHVUHPqGHVHWOD
SXULILHU SRXU OD UHQGUH DSWH j FRPPXQLTXHU DYHF VRQ 6HLJQHXU ,OV V¶HQJDJHDLHQW GDQV OD YRLH
spirituelle pour se débarrasser des vices et acquérir les vertus en forçDQWO¶kPHjVHGpWRXUQHUGHV
SDVVLRQVHWGHVWHQWDWLRQVF¶HVWXQHJXHUUHVDLQWH contre sa propre âme (Jihad nafs). La victoire

                                                                                                                     
82        [2] 'DQVO¶LQWURGXFWLRQGH0DVDOLNDOMLQDQLOGLW :

En vérité, le tawhid se divise en deux disciplines, ce qui en fait deux sciences O¶XQHHVWGLDOHFWLTXH
WDNDOXP HWO¶DXWUHHVWJQRVWLTXH WD¶DUUXI QHQpJOLJHSDVPHVSUpFLVLRQV

/HSUHPLHUFRQFHUQHOHFRPPXQGHVFUR\DQWVWDQGLVTXHOHVHFRQGHVWUpVHUYpjO¶pOLWH

Pour ce qui concerne le tawhid scolastique, nous avons versifié la prose du Cheikh Senoussi, le descendant
de notre prophète bien-DLPpVXUOXLODSDL[OHVDOXWHWO¶DJUpPHQWGX6HLJQHXUWUDQVFHQGDQW
0DLVSRXUFHTXLFRQFHUQHO¶pOLWHM¶DLFRPSRVpFHWRXYUDJHHQYHUVULPpV

195  

 
HVWFRXURQQpHSDUO¶DJUpPHQWGLYLQHWGHVGRQVFKDULVPDWLTXHVGRQWODVDJHVVHHWODVFLHQFHLQIXVH
(ilm ladunni).

Toutes les disciplines que nous avons mentionné sont en puissance dans le Coran et ne se
GLVWLQJXHQWO¶XQHGHO¶DXWUHTXHSDUODVSpFLDOLVDWLRQGHFHUWDLQVVDYDQWVPDLVHOOHVVRQWWRXWHIRLV
interdépendantes et se complètent. Lai classification des sciences en disciplines exotériques et
ésotériques ont des raisons pratiques car la valeur de chaque science est dans son sujet. Le
WDVDZXI D\DQW SRXU VXMHW O¶kPH KXPDLQH TXL HVW GH O¶RUGUH pVRWpULTXH SXLVTX¶HOOH Q¶HVW SRLQW
accessible par les sens mais par la conscience, il a une valeur plus importante que les sciences
exotériques dont le sujet est la personne physique.

L a position du A rif Sidi Seyyid Idriss al I raki

Dans la « 5LVDOFKDIL¶D », il dit : la Charia confirme la Haqiqa et la Haqiqa confirme la Charia et


le tout est soit Charia soit Haqiqa car chaque chose a un aspect externe et un aspect interne et la
GLVWLQFWLRQ QH VH IDLW TXH SDU UDSSRUW j O¶DVSHFW TXH QRXV pWXGLRQV /¶°XI D XQH FRTXLOOH HW XQ
LQWpULHXUTXLHVWVDVXEVWDQFHPDLVVDQVODFRTXLOOHO¶°XIQHSHXWSDVH[LVWHU

On peut dire que la Charia est la science commune à tous les croyants et que la Haqiqa est
UpVHUYpHjO¶pOLWH$XFXQFUR\DQWQHSHXWVHGLVSHQVHUGHOD&KDULDFDULOVHUDDFFXVpHWVRQVWDWXW
de musulman compromis par contre il SHXWVHGLVSHQVHUGHOD+DTLTDV¶LOQ¶DSDVOHVDSWLWXGHVHW
QH VHUD SRLQW DFFXVp HW VD IRL VRQ VWDWXW GH PXVXOPDQ QH VHUD SDV FRPSURPLV 2U O¶DVSLUDQW QH
peut pas se dispenser de la Haqiqa car il cherche le statut de la wilaya car il a réalisé les autres
VWDWXWVGHO¶LVODPHWGHO¶LPDQ HWLOpYROXHGDQVOHVVWDWXWVGHO¶LKVDQ2QQHSHXWSDVrWUH6RXIL
VDQVOHVWDWXWGHO¶LPDQHWGHO¶LVODP

L a position du A rif billah D r A bdel H alim M ahmoud

Le Dr Abdel +DOLP0DKPRXGHVWO¶XQGHVDXWHXUVOHVSOXVSUROLIpUant et les plus pertinents en


matière de Tasawuf, et sa terminologie est très claire. Pour un étudiant tel que moi, ses analyses
sont pédagogiques et bénéfiques. Il dit GDQV VRQ LQWURGXFWLRQ GX JXLGH GHV pJDUpV GH O¶LPDP
Ghazali : La tradition islamique se distingue parmi toutes les traditions par sa clarté en dissociant
sa partie exotérique de sa partie ésotérique qui sont deux aspects complémentaires de son unité.
-HYHX[DLQVLSDUOHUGHOD&KDULDTXLHVWODSRUWHG¶DFFqVGHWRXVOHVFUR\DQWVHWOD+DTLTa la porte
SDUODTXHOOHQ¶DFFqGHQWTXHOHVpOXVTXDOLILpV &HWWHGLVWLQFWLRQQ¶HVWSRLQWDUELWUDLUHPDLVHOOHHVW
dictée par la nature des choses. La Charia concerne la croyance et la législation, alors que la
Haqiqa est une connaissance pure, qui toutefois donne à la Charia ses titres de noblesse et la
valorise.

Il dit aussi  OD &KDULD HVW O¶LPSpUDWLI GH OD VHUYLWXGH HW OD +DTLTD HVW OD FRQWHPSODWLRQ GH OD
6HLJQHXULH7RXWH&KDULDTXLQ¶HVWSRLQWFRQILUPpSDUOD+DTLTDHVWLQDFFHSWDEOHHWWRXWH+DTLTD
qXL Q¶HVW SRLQW FRQGLWLRQQpH SDU OD &KDULD HVW LQDGPLVVLEOH (Q SOXV GH FHV FODULILFDWLRQV LO

196  

 
expliqua les nuances entre ésotérisme (batin) et Haqiqa et entre la voie spirituelle (Tariqa) et la
Haqiqa et développa le rapport du Tasawuf avec toutes ces notions. Il dit  O¶pVRWpULVPH QH
signifie pas pleinement la Haqiqa mais plutôt les moyens pour y accéder qui sont en fait les
sentiers de la Charia qui conduisent à la Haqiqa. La voie spirituelle (Tariqa) et la vérité doctrinale
(Haqiqa) ensemble sont le Tasawuf TXLQ¶HVWSRLQWXQHGRFWULQHPDLVSOXW{WODYHULWpSULQFLSLHOOH
(Haqiqa mutlaqa).

Ainsi, la relation entre la Charia et la Haqiqa est en toute évidence une complémentarité, comme
FHOXLTXL KDELWHO¶pWDJHVXSpULHXUGRLWQpFHVVDLUHPHQWSDVVHUSDUOHs autres étages pour accéder
chez lui. 7RXWHIRLVLOQ¶HVWSDVQpFHVVDLUHG¶KDELWHUO¶pWDJHVXSpULHXUGRQWOHOR\HUHVWSOXVFKHU
SRXUOHVFRPPRGLWpV3RXUOHVORFDWDLUHVO¶HVVHQWLHOHVWG¶KDELWHUO¶LPPHXEOHPDLVSRXUFHX[TXRL
sont prêt à payer le prix, ils choisissent le meilleur appartement qui leur convient. Cet immeuble
V\PEROLVH OD &KDULD HW OD +DTLTD HW LO QH SHXW SDV rWUH XQ pGLILFH HQ O¶DEVHQFH G¶XQH GHV GHX[
parties car chaque partie est nécessaire bien que leur fonctionnalité diffère. Le locataire de
O¶pWDJHLQIHULHXUSHXWQHSDVDFFRUGHUG¶LPSRUWDQFHjVDVLWXDWLRQRXLOVHSODLWHWQHUpDOLVHPrPH
SDV OHV DYDQWDJHV GH O¶pWDJH VXSpULHXU RX LO \ D SOXV GH WUDQTXLOOLWp HW PRLQV GH EUXLWV HW GH
nuisance. Il n y a nul blâme en cela car les stations des uns et des autres dépendent de la volonté
GH FKDFXQ 0rPH GDQV OH SDUDGLV LO \ D TXL FHX[ VH FRQWHQWHQW G¶\ HQWUHU HW G¶DXWUHV TXL \
cherchent les hautes stations tel les awliyas, les martyrs et les vertueux (Salihins).

/DSRVLWLRQGHO¶LPDP-XQayd

Junayd a dit sur le Tasawuf : notre voie est conditionnée par les principes du Coran et de la
sunna.

L a position de notre maitre O¶pUXGLW$ULIELOODK6LGL0RKDPPDGDOKDIL]7LMDQL

Il a dit : Celui qui étudie objectivement le Tasawuf et les Tariqas SoXILHVFRQVWDWHUDTX¶LOVVRQW


GHVpFROHVGHO¶pWKLTXHHWGHO¶pGXFDWLRQGHVkPHVTXLFRQGXLVHQWOHVDVSLUDQWVDX[KDXWHVVSKqUHV
GH OD FRQQDLVVDQFH 0D¶ULID  /H FRPPHQFHPHQW HVW OH UHSHQWLU SXLV LO \ D O¶DVFHQVLRQ SDU OHV
marches de la Charia en se faisant OD FRPSpWLWLRQ GDQV OHV ERQQHV DFWLRQV DILQ G¶DFFpGHU j OD
FRQWHPSODWLRQ 0XVKDKDGD FRQIRUPpPHQWjO¶HQVHLJQHPHQWGHODUHOLJLRQ

Il énuméra les voies Soufies et insista que malgré leur diversité dans les moyens et les méthodes,
ils ont tous la même finalité qui est la même que celle de tous les musulmans sunnites qui ont le
Coran et la Sunna pour référence. Ils ont seulement leur propre méthode de réalisation spirituelle,
PDLVODPrPHQRPHQFODWXUHGXOLFLWHHWGHO¶LOOLFLWHTXHWRXWPXVXOPDQ

L a position du C heikh A hmadou Bamba K hadim Rassoul

/H&KHLNKDH[SULPpDYHFFODLUYR\DQFHO¶XQLFLWpGHV7DULTDVHWO¶XQLWpGHOHXUREMHFWLITXLHVWHQ
conformité avec le verset coranique : « Ceux qui combattent pour nous, on les guidera dans notre
voie. Allah est avec les bienfaiteurs ».
197  

 
Il dit dans Masalik :

&KDTXHZLUGSHUPHWjO¶DVSLUDQWG¶DUULYHUjODSUpVHQFHGLYLQHVDQVFRQIXVLRQ4XHFHVRLWOHZLUG
GH -LODQL RX GH $KPHG WLMDQL RX FHOXL G¶XQ DXWUH SDUPL OHV TRWEV WRXV VRQW GDQV OH YUDL SRLQW
G¶pTXLYRTXHHQcela.

&KDFXQG¶HX[LQYLWHOHVDVSLUDQWVjO¶REpLVVDQFHjODVRXPLVVLRQHWjODUHFWLWXGH

Il les aide à vivre en conformité avec la volonté du Seigneur maître du trône.

,OQHIDXWMDPDLVPDQTXHUGHUHVSHFWjO¶XQG¶HX[RXOHXUODQFHUGHVDFFXVDWLRQV

Le Dr Abdelhalim Mahmoud abonda dans ce sens : Les voies spirituelles (Tariqats) ne différent
que parce que les humains sont différents (dans leur nature et leur coutume). Pour cela : « les
voies vers Allah sont aussi multiples que les âmes humaines.

La corporation des gnostiques (Arifoun billah) est homogène dans son mode de vie et vivent
FRQIRUPpPHQWjODYRORQWpGLYLQHTXLQ¶HVWSRLQWFRQGLWLRQQpHSDUODUDLVRQRXOHVORLVQDWXUHOOHV
RXVRFLDOHV$OODKWUDQVFHQGHO¶HVSDFHHWOHWHPSVHWVDPLVpULFRUGHFRPPHsa grâce est dispensée
sans condition à qui Il veut parmi ses serviteurs. Sa subtilité miséricordieuse embrasse ses saints
DZOL\DV TXLVHVRQWHQJDJpVGDQVODVSLULWXDOLWpTXDQGG¶DXWUHVRQWFKRLVLVODVFLHQFHMXULGLTXH
ou politique. Allah les a honorés en leur dévoilant ses secrets et leur a fait goûter les délices de
VDSUR[LPLWp/HXUpWDWVHPEOHSDUDGR[DODXFRPPXQTXLQHFRQQDLWTXHO¶DVSHFWOpJLVODWLIGHOD
UHOLJLRQSRXUWDQWWRXVOHVPDLWUHVDIILUPHQWTXHO¶DVSLUDQWGRLWV¶pOHYHUVXUOHVEDVHVGH la Charia
pour atteindre les hauteurs de la haqiqa.

L e T aswuf et ses réponses aux crises contemporaines

Si on accepte la conception des maitres de la spiritualité que le Tasawuf est la religion islamique
dans son intégralité et que les actes des croyants sont valorisés par la purification des âmes, et
TXH OD VFLHQFH GH O¶kPH HVW OD FRPSpWHQFH GHV 6RXILV QRXV SRXYRQV DYDQFHU TXH OHV FULVHV GX
PRQGHPRGHUQHVRQWHQSDUWLHOLpHVjO¶DIIDLEOLVVHPHQW des relations spirituelles entre les peuples
et surtout HQWUH O¶LQGLYLGX HW VRQ 6HLJQHXU /HV FULVHV GH WRXWH QDWXUH TX¶HOOHV soient
personnelles, familiales, sociales, politiques, économiques ou internationales ont chacune des
conséquences particulières qui influent tant sur les individus que sur les sociétés. Le problème de
O¶pJRFHQWULVPH HVW XQ IDFWHXU LPSRUWDQW GHV FULVHV que nous traversons, pourtant le prophète
Mohammad (psl) a prévenu les croyants par le hadith : « nul QH SHXW VH SUpYDORLU G¶rWUH XQ
FUR\DQW V¶LO Q¶DLPH SDV SRXU VRQ SURFKDLQ FH TX¶il aime pour soi-même»83. La négligence des
devoirs familiaux conduit à sacrifier la famille, pour cela Allah dit : « Protégez-vous ainsi que

                                                                                                                     
83    Rapporté par Malik ibn anas dans musnad Abou Awana

198  

 
YRWUHIDPLOOHGHO¶HQIHU »84. Les conflits tribaux, ethniques ou raciaux ont été dénoncés par Allah :
« ô humains, on vous a crée par mâle et femelle et on vous a fait des peuples et des tribus afin
que vous vous connaissez85», et prophète (psl) a dit 9RXHrWHVWRXVG¶$GDPHW$GDPHWGHOD
terre »86. La connaissance suscite la reconnaissance, qui crée la solidarité.

Quant aux problèmes politiques et économiques, elles sont catastrophiques car elles suscitent les
conflits et les guerres HWIDYRULVHQWOHVSXLVVDQWVDXGpWULPHQWGHVSDXYUHVSRXUSOXVG¶LQpJDOLWpHW
G¶LQMXVWLFHSRXUFHODO¶LVODPQRXVH[KRUWHjQHSRLQWporter préjudice à son prochain que ce soit
de manière directe ou indirecte (la dhara wa la dhirar). Les problèmes du racisme sont toutefois
OHVSOXVSHUQLFLHX[FDULOVGpVLQWqJUHQWODFRPPXQDXWpTXLQ¶DUULYHSDVjSUpVHQWHUXQSURMHWGH
société islamique YLDEOH RX O¶pFRQRPLH HW OD SROLWLTXH VRQW HQ KDUPRQLH DYHF OD UHOLJLRQ HW OD
spiritualité. Il faut être en phase avec les croyants qui adorent Allah et se désolidariser des
mécréants ; Allah dit dans le Coran : « 0RKDPPDGO¶HQYR\pG¶$OODKHWFHX[TXL VRQW avec Lui
sont durs envers les ennemis et miséricordieux entre eux »87 et aussi « Ô vous qui croyez, ne
prenez pas les mécréants comme allies au détriment des croyants. Vous serez ainsi en infraction
devant Allah »88 et aussi « O vous qui croyez, ne prenez pas ceux qui se moquent de votre
religion parmi ceux qui ont reçu la révélation avant vous et les mécréants comme des protecteurs
et craignez Allah si vous êtes des croyants »89.

Ces versets doivent être la base commune des musulmans dans leurs relations queOOHV TX¶HOOHV
soient.

Beaucoup de versets traitant du Tawhid insistent sur la nature des relations entre les croyants ou
avec les mécréants. &HSHQGDQWOHVFUR\DQWVQ¶HQIRQWSDVJUDQGFDV7RXWHIRLV$OODKGLW : « Allah
QHYRXVLQWHUGLWSDVG¶DYRLUGHERQnes relations avec ceux qui ne vous combattent pas et ne vous
FRQWUDLJQHQW SDV j O¶H[LO j FDXVH GH YRWUH UHOLJLRQ ; Allah aime que vous soyez justes et
vertueux ».

                                                                                                                     
84    Sourate  tahrim  6  

85    Sourate  hujurat  

86    DƵƐŶĂĚZĂďŝ͛ŝďŶŚĂďŝď  

87    Sourate  al  fath  29  

88    ^ŽƵƌĂƚĞĂůŶŝƐĂ͛ϭϰϰ  

89    Sourante  Mumtahina  8  

199  

 
6LODFRPPXQDXWpLVODPLTXHQ¶DUULYHSDVjVRLJQHUVHVPDX[HWjpODERUHUXQSURMHWGHVRFLpWé,
elle risque de se désintégrer et deviendra une proie facile pour les autres comme le Prophète
36/ O¶DYDLWDQQRQFpGDQVVHVSURSKpWLHV

&¶HVWLFLTXHOHU{OHGX7DVDZXIHVWpPLQHPPHQWLPSRUWDQW FDULOHVWODPpGHFLQHGHVF°XUVHW
des esprits.

/HV F°urs, une fois soignés deviennent aptes à recevoir la lumière divine et la guidance qui va
conduire la communauté au projet initial voulu par Allah et son Prophète (PSL) : « /¶H[HPSOH
GHVFUR\DQWVGDQVOHXUIUDWHUQLWpHWOHXUDIIHFWLRQHVWFRPPHO¶H[HPSOHGu corps. Si un membre
est malade, tout le corps est atteint par la fièvre et ne peut plus se reposer »90. Allah dit dans le
Coran : « $OODKQHFKDQJHSDVOHVRUWG¶XQSHXSOHDYDQWTX¶LOQHVHFKDQJHOXL-même »91.

Notre Maître Cheikh Amadou Bamba Khadimou RasVRXODWULRPSKpGHVHQQHPLVGHO¶,VODPTXL


DYDLHQWSODQLILpO¶pUDGLFDWLRQGH O¶,VODPHQ$IULTXHGHO¶RXHVWSDUODVHXOHIRUFHGHODIRLHWSDU
VRQDPRXUG¶$OODKGX3URSKqWH 36/ GHO¶,VODPHWGHVPXVXOPDQV,OV¶pWDLWGpWRXUQpGHVELHQV
terrestres et rLHQQHSRXYDLWOHFRUURPSUHHWF¶HVWSRXUFHODTXHOHVFRORQVRQWpFKRXpGDQVOHXU
projet susmentionné. Le Cheikh a pu bâtir un royaume spirituel pour ses disciples dont les
IRQGDWLRQVUHSRVHQWVXUOH&RUDQHWOD6XQQDHWGRQWODFRQVWLWXWLRQHVWO¶,PDQO¶,VODPHWO¶,KVDQ

&HUR\DXPHHVW LQVWDOOpGDQVOHF°XUGHVGLVFLSOHVTXL VHQRPPHQW OHV0RXULGRXOODK FHX[TXL


aspirent à Allah).

&HWWHYRLHVSLULWXHOOHTXLHVWOD0RXULGL\DKSU{QHO¶KXPLOLWpHQYHUVOHVFUR\DQWVHWODILHUWpGHYDQW
les mécréants. Il s ont intégré le verset coranique : « Ne vous humiliez pas et ne soyez point
tristes alors que vous êtes des élus car vous êtes des croyants ».

6L O¶,VODP D IDLW OD V\PELRVH HQWUH PD UHOLJLRQ HW O¶(WDW HW VL OHV PXVXOPDQV DSSOLTXDLHQW
YpULWDEOHPHQW O¶,VODP LOV pourraient non seulement fonder la société idéale, mais aussi aider
O¶KXPDQLWp&HWWHYLVLRQVSLULWXHOOHEDVpHVXUODFRQQDLVVDQFHODNKLGPD VHUYLFHGHVPXVXOPDQV 
et sur la planification fut celle de Cheikh Ahmadou Bamba qui nous a donné ainsi un exemple
YLDEOHG¶XQSURMHWGHVRFLpWp

                                                                                                                     
90    Sahih  Muslim  

91    ^ŽƵƌĂƚĞZĂ͛Ě͕ϭϭ  

200  

 
LA CEREMONIE DE CLOTURE
A TOUBA

201  

 
Le lundi 26 les participants se sont rendus à Touba auprès du Khalif Général des Mourides afin
de visiter la ville sainte et procéder à la cérémonie de clôture, en présence des chefs religieux de
la ville.

A llocution de Serigne Mouhamadou Mountakha M backé

Au nom de Dieu le Miséricordieux Louange à Dieu, paix et salut sur Son Messager, sur sa
famille et ses alliés.
Messieurs les participants au premier colloque international sur le soufisme, organisé sous
O¶RUGUH © ndiguel » de Cheikh Sidy Al Moukhtar Mbacke khalif général des mourides, nous
prions pour que : «La paix, la miséricorde de Dieu et Ses bénédictions soient sur vous."
&¶HVW DYHF XQ JUDQG SODLVLU TXH QRXV YRXV VRXKDitons la bienvenue et vous exprimons nos
sincères remerciements pour les efforts déployés, les difficultés supportées et les longues
distances parcourues afin de participer à cette rencontre et visiter la ville sainte de Touba.
Chers honorables invités, votre présence ici démontre une prise de conscience de votre
responsabilité ainsi qu'un désir de faire la connaissance et coopérer avec les frères musulmans où
qu'ils se trouvent. Dans le contexte actuel de crise, le monde a besoin des telles attitudes, il a
besoin des enseignements du soufisme et de ses méthodes qui s'intéressent au perfectionnement
de l'âme humaine et sa protection contre les parasites de la vie matérialiste. La pratique du
soufisme peut restaurer les valeurs et la morale qui manquent aujourd'hui à l'humanité.
Enfin nous transmettons les remerciements de Son Éminence, le Khalif au Comité
G¶2UJDQLVDWLRQHWjWRXVFHX[TXLRQWFRQWULEXpDXVXFFqVGXFROORTXHGHSUqVRXGHORLQHWMHSULH
Dieu le Tout-Puissant pour que cette rencontre aboutisse à des réalisations concrètes et pour qu'Il
vous accorde une réussite dans vos services rendus à l'humanité.
Je ne saurais terminer sans invoquer la prière de Cheikh Ahmadoul Khadim dans l'un de ses
poèmes :
Ô Seigneur accordez nous une affection renforcez nous, soyez à notre faveur et donnez nous une
bonne conclusion dans nos actes.
Accordez la paix et le salut au Prophète, et la satisfaction de besoins à tous les musulmans.

Que la paix et la miséricorde de Dieu et ses bénédictions soient sur vous!.

Serigne Mountakha Mbacke inb Serigne Bassirou Mbacke

202  

 
Discours de Bienvenue à Touba

Par C heikh A hmed al-Badawi M backé

Coordonnateur de la dahira Rawdu r-Rayâhîn

Bismillaherrarmanerrahim

*ORLUHj$OODKO¶XQLTXHHWSULqUHVHWVDOXWDWLRQVVXUOHSOXVQREOHSrophète et envoyé ainsi que su


sa famille et ses compagnons

Honorables Ulémas et Cheikhs, respectables professeurs et chercheurs, considérables invites;

Je vous présente mes meiOOHXUHV VDOXWDWLRQV HW M¶HVSqUH TXH OD miséricorde divine ainsi que la
bénédiction nous embrassent dans cette assemblée.

Vous accueillir dans cette ville bénie est un immense honneur, nous sommes à Touba la capitale
des mourides qui fut fondée par KhadimRassoul sur les piliers du savoir et de la piété. En
IRQGDQW FHWWH YLOOH &KHLNK $KPDGRX %DPED V¶DGUHVVD j VRQ 6HLJQHXU HQ FHV WHUPHV ©
6HLJQHXU7XP¶DVFRQGXLWLFLVXUFHWWHWHUUHTXH7XDVFKRLVLSRXUPRL-¶\DLFRQVWUXLWGHX[
GHPHXUHVSRXU7¶DGRUHU VXU la base de O¶,PDQ, O¶,VODP et O¶,KVDQ. Je les ai nommés Dar es-
6DODPHW7RXEDSRXUODEDUDNDGHOHXUFRUUHVSRQGDQFHFpOHVWH)DLV6HLJQHXUTX¶HOOHVVRLHQW
VpFXULVpHVHWYLFWRULHXVHVSDUWDJUkFHHWFHOOHGHPRQ:DVLODYHUVWRLOHSURSKqWH SVO ´,OGLW
aussi dans Matlabu al-fawzein :

³)DLV6HLJQHXUTX¶HOOHVRLWODPHLOOHXUHGHPHXUHSRXU7RLHWSRXUQRWUHSURSKqWHPHUYHLOOHX[GDQV
FHSD\V´

Fais Seigneur que ma demeure Touba soit perpétuellement bénie comme son nom le signifie par
la grâce du meilleur adorateur le Prophète élu (psl)

Maintenant, très chers invités permettez ±moi en cette occasion de vous présenter quelques
DVSHFWVGHFHWWHYLOOHEpQLHTXLDO¶KRQQHXUGHYRXVDFFXHLOOLU-HSDUOHUDLVGHVRQKLVWRLUHHWGHV
circonstances de sa fondation et surtout des motivations du fondateur et enfin des moyens mis
HQ°XYUHSRXUVRQGpYHORSSHPHQW

&HWWHYLOOHGRQWO¶XUEDQLVDWLRQVHGpYHORSSHGDQVWRXWHVOHVGLUHFWLRQVQHGDWHSDVGHSOXVLHXUV
siècles, mais seulement de plusieurs décennies. Elle était tout récemment une forêt habitée par
des fauves et des animaux sauvages quand Cheikh Ahmadou Bamba lors de ses pérégrinations
O¶D FKRLVL SRXU \ IRQGHU XQH YLOOH FRQVDFUpH j O¶DGRUDWLRQ GX 6HLJQHXU 8QLTXH &¶pWDLW HQ
1303h (1887), et il n y avait QLFRXUVG¶HDXQLVRXUFHRXDXWUHFRQGLWLRQG¶KDELWDW/H&KHLN
WUDQVIRUPD O¶HQGURLW SDU VD foi inébranlable et sa volonté et en fit un centre spirituel
203  

 
H[FHSWLRQQHOHWXQHYLOOHGHVDYRLUHWG¶pGXFDWLRQTXLUD\RQQHVXUO¶$IULTXHSDUWLFXOLqUHPHQWHW
sur le monde généralement. Dans la Qasida « Matlabu al Fawzein » qui signifie la requête du
WULRPSKHGDQVFHWWHYLHHWGDQVO¶DXGHOjLOGLW

)DLVTXHPDGHPHXUHVRLWFHOOHGXSDUGRQGHODVDJHVVHGHODFRQQDLVVDQFHHWGHO¶DJUpPHQW

Une demeure de sincérité, de véracité, et de piété

Une demeure de la Sunna et un refuge contre les innovations

Le Cheikh a tenu à édifier ce centre spirituel dans une terre vierge qui ne fut pas souillé par les
actes des humains et choisit cet endroit qui ne fut jamais habité pour revivifier la religion dans
VDWULSOHGLPHQVLRQGHO¶,PDQO¶,VODPHWO¶,KVDQ,ODLPDLW7RXEDHWGLVDLWORUVGHVDIRQGDWLRQ
&HWWH YLOOH TXH MH IRQGH P¶HVW WURS SUpFLHXVH FDU MH Q¶DL FRPPH PRWLYDWLRQ TXH OD )DFH
G¶$OODKMHQHFRSLHSDVO¶H[HPSOHG¶XQHDXWUHYLOOe, je ne cherche pas de terres fertiles pour
O¶DJULFXOWXUHRXGHVSkWXUDJHVSRXUOHVWURXSHDX[PDLVMHQHFKHUFKHTXHO¶DGRUDWLRQG¶$OODK
conformément à sa volonté et son choix.

Dans « Matlabu al Fawzein » le Cheikh déclina son projet de société sous forPHVG¶LQYRFDWLRQV
adressés à son Seigneur afLQTX¶LOOXLUpDOLVHVHVY°X[KhadimRassoul fonda plusieurs centres
jO¶LPDJHGH7RXEDSRXUGLIIXVHUO¶HQVHLJQHPHQWUHOLJLHX[HWpGXTXHUOHVDVSLUDQWVFRPPHLO
ordonnait à ses disciples investis dans la fonction GH &KHLNK G¶pGLILHU SDUWRXW R LOV
V¶LQVWDOODLHQW GHV FHQWUHV SDUHLOV 'H QRV MRXUV RQ SHXW FRPSWHU XQ PLOOLHU GH FHQWUHV TXL
éduquent chacun des centaines de garçons et de filles annuellement. Les plus grands savants
GX SD\V V¶pWDLHQW UDWWDFKpV j KhadimRassoul et enseignaient dans ses centres et leurs fils
comme leurs petits fils continuent à la faire. KhadimRassoul insista sur les adorations
FXOWXHOOHVFDUWHOOHHVWODYRFDWLRQGHO¶KXPDLQTX¶$OODKDFUppSRXUVRQDGRUDWLRQ,OGLWGDQV©
Matlabu al fawzein»:

Seigneur fais que dans ma ville les cinq prières soient perpétuellement exécutées collectivement

Ô Omniscient, Fais que ma ville sois une demeure de conformité à la Sunna et non un lieu
G¶LQQRYDWLRQ

/H&KHLNKQHVHFRQWHQWDSDVG¶LQYRTXHUPDLV°XYra en construisant une mosquée fabuleuse en


PRELOLVDQW VHV GLVFLSOHV SRXU FHOD ,O TXLWWD QRWUH PRQGH WHUUHVWUH VDQV TX¶HOOH VRLW VRUWLH GH
WHUUHELHQTX¶LODQQRQoDVRQDFKqYHPHQWHWGRQQDOHSODQHWWRXVOHVGpWDLOVGHVRQH[pFXWLRQ
Ce sont ses fils prestigieux qui en assumant la Khilafat concrétiseront tout ce que le Cheikh a
planifié. /DPRVTXpHGH7RXEDIDLWDXMRXUG¶KXLODILHUWpGHO¶,VODPHQ$IULTXH/HVPRXULGHV
FRQWLQXHQWj°XYUHUGDQVFHVHQVHQFRQVWUXLVDQWLQFHVVDPPHQWGHVPRVTXpHVHWGHVpFROHV où
on enseigne le Coran et les sciences islamiques. Il y a à Touba 514 mosquées et dans toutes les
villes du Sénégal les mourides ont construit et continuent à construire des mosquées et des
pFROHVLVODPLTXHV'HPrPHTX¶HQ$IULTXHHQ(XURSHHQ$VLHHW en Amérique les mourides
204  

 
°XYUHQWGDQVFHVHQVFDUGDQVODORJLTXHGH&KHLNK$KPDGRX%DPEDOHVDYRLUHWOHWUDYDLO
sont la dynamique qui anime la vie spirituelle du mouride. « LaKhidma » est aussi du culte car
dans la logique islamique le culte (ibada) déVLJQH WRXW FH TX¶$OODK DJUpH GH QRV LQWHQWLRQV
DFWHVRXSDUROH /HV°XYUHVSLHXVHVVRQWFRQVLGpUpHVGXFXOWH /H JDLQ OLFLWH NDVEKDODO  HQ
fait partie et le Cheikh a insisté sur ce point. Il dit :

La quête du gain licite est une obligation pour tout musulman sans contestation

Le savoir et le culte ne sont point bénéfiques quand on ne se nourrit pas du licite

&KHUFKH]OHOLFLWHWRXWOHWHPSVDLQVLODJXLGDQFHHWO¶REpLVVDQFHVXLYUD

Pour cela, les mourides accordent une importance extrême à ce principe quLSHUPHWjO¶KXPDLQGH
vivre dignement sur terre, et grâce auquel ils ont investis tous les domaines économiques du
SD\VHWV¶LQYHVWLVVHQWGDQVWRXVFKDPSVG¶DFWLYLWpOLFLWH

Chers invites, je souligne aussi que Cheikh Ahmadou Bamba a surtout insisté sur les valeurs
spirituelles et les vertus soufies sans lesquels le croyant ne peut pas vivre en paix. Il dit dans
Matlabu al fawzein :

-HW¶LPSORUHG¶HQIDLUHXQHGHPHXUHGHSLpWpGHVDYRLUUHOLJLHX[DLQVLTX¶XQFHQWUHG¶pOpYDWLRQ

Un paradis pour tout aspirant itinérant et un refuge contre tout démon

Un lieu de bienfaisance pour tout musulman et un lieu de protection contre tout ennemi
malveillant

La sacralité de Touba fut préservée par les khalifes successifs qui interdirent tout ce qui est
prohibé ou détestable par la Charia au point que la ville devint immaculée puisque même le
WDEDF\HVWLQWHUGLWDXPrPHWLWUHTXHO¶DOFRROHWWRXWHVRUWHGHMHX[/DNKLGPDTXLFDUDFWpULVH
les mourides est en fait le travail spirituel au bénéfice de la communauté. Cheikh Ahmadou
%DPEDGRQQDOHPHLOOHXUH[HPSOHGHOD.KLGPDSDUVRQVHUYLFHSRXUOHSURSKqWH SVO G¶R
son titre de KHADIM RASSOUL. Il revivifia sa Sunna et les sciences religieuses et expliqua
que la Khidma est le fait de faire le bien pour notre prochain et pour tousut les humains.

/¶LOOXVWUH&KHLNK6LGLD%DEDDGLWjVRQSURSRV

,OQ¶DSRLQWGHGpIDXWVVDXITX¶LOHVWHQFRQVWDQWHDGRUDWLRQGHVRQ6HLJQHXU

(WTX¶LO°XYUHLQFHVVDPPHQWSRXUDLGHUOHVKXPDLQV

Le principe de la Khidma est fondamental dans la YRLH VRXILH HW OHV PRXULGHV O¶RQW DSSOLTXp
dans tous les aspects de la vie sociale, professionnelle et spirituelle. Ainsi, ils ont construit les
PRVTXpHV OHV pFROHV OHV K{SLWDX[ HW DXVVL OHV LQIUDVWUXFWXUHV WHOOHV O¶pFODLUDJH SXEOLF

205  

 
O¶K\GUDXOLTXHHWO¶Dssainissement au point que Touba est devenu la deuxième ville du Sénégal
par la superficie comme par la population. Il y aura aussi des activités industrielles et
technologiques dans des zones aménagées à cet effet afin de faire face aux défis de notre
époque. Tout cela est le fruit du principe de la Khidma.

Ainsi, dans ce bref exposé je vous présente quelques aspects de notre ville bénie et les
réalisations de notre communauté, et vous trouverez certainement dans les documents et les
enregistrements vidéo et audio qui vous seront remis dans ce colloque des informations plus
exhaustives.

Nous vous renouvelons nos sentiments les meilleurs et nos remerciements les plus sincères pour
votre venue et pour vos efforts précieux pour la réussite de ce colloque. Tout Touba vous rend
JUkFH SRXU YRWUH SDUWLFLSDWLRQ HW j VD WqWH OH .KDOLIH 6LGL 0XNKWDU 0EDFNp TX¶$OODK OXL
DFFRUGH ORQJXH YLH HW XQH ERQQH VDQWp HW TX¶,O QRXV IDVVH EpQpILFLHU GH VHV SULqUHV HW GH VD
SUpVHQFHEpQLHSRXUOHERQKHXUGHO¶,VODPHWGHVPXVXOPDns.

Finalement, nous souhaitons que vous passiez un agréable séjour dans cette ville bénie qui vous
souhaite la bienvenue et nous espérons que vous repartirez avec les meilleures appréciations et
les bénédictions de son fondateur.

Salutations respectueuses

206  

 
D ISC O U RS D E M E M A D I C K E N I A N G M I N IST R E D ES A F FA I R ES E T R A N G E R ES

-HYRXGUDLV GqVO¶HQWDPHGHPRQ SURSRVUHQGUHJUkFH j'LHXSULH]VXU OH3URSKqWH0RKDPHG


(PSL), priez pour que la paix et le salut soient sur Cheikh Ahmadou Bamba et toute sa
descendance.

Je suis ici pour représenter le Président de la République qui a eu, lors de la cérémonie
G¶RXYHUWXUH j YRXV HQWUHWHQLU GH O¶LPSRUWDQFH TX¶LO DFFRUGH j FHWWH FpUpPRQLH FH FROORTXH
LQWHUQDWLRQDO VXU OH VRXILVPH ,O D HX G¶HPEOHU j FRQVLGpUHU TXH le soufisme et Serigne Touba
constituent un même corps. Toute la vie de Serigne Touba a été dédiée à Allah (SWT), le
&UpDWHXUHWGDQVWRXWHVDYLHWRXWHVOHVDFWLRQVTX¶LODDFFRPSOLHVQRXVRQWPHQpVYHUVOD)RL
nous ont menés vers ce Dieu Unique et une foi forte en son Prophète (PSL).

Je voudrais une foi de plus rappeler cette spécificité que le Président de la République a eu à
UHWHQLUF¶HVWjGLUHDVVRFLHUFHWWHIRLIRUWHHWSURIRQGHHQ'LHXDYHFOHWUDYDLO&¶HVWXQHGRQQpH
très importante qui a peUPLVGDQVFHSD\VGHSRUWHUOHWUDYDLOjXQQLYHDXWUqVpOHYp,OO¶DpOHYp
au rang de culte, ce qui a permis de développer ce pays.

Je voudrais, une fois de plus, vous transmettre les salutations du Président Abdoulaye WADE
mais surtout ses félicitatioQVSRXUFHFROORTXHG¶XQHVLJUDQGHLPSRUWDQFHSRXUO¶2UJDQLVDWLRQGH
la Conférence Islamique mais aussi pour le Sénégal, pour toute la UMA islamique mais aussi
SRXUWRXWHO¶$IULTXH

Je vous remercie.

207  

 
D E C L A R AT I O N F I N A L D U C O L L O Q U E

Declaration lue par Dr Cheikh Mouhamed Souhayb Mouhamed Achami Syrie

République du Sénégal

Califat Général de la Mouridiyya

&RPLWpG¶2UJDQLVDWLRQGX0DJDO

Premier Colloque International surle Soufisme

Dakar, Méridien

27-29 Mouharram 1433H (23-25 décembre 2011)

Le premier colloquH LQWHUQDWLRQDO VXU OH 6RXILVPH GDQV OH FDGUH GH O¶RUJDQLVDWLRQ GX *UDQG
0DJDOGH7RXED 6DIDU V¶HVWWHQXj'DNDUGXDX0RXKDUUDP+ -25 décembre
2011) sur le thème :

« L a réponse du Soufisme aux C rises ».

Les travaux ont débuté avec la FpUpPRQLHG¶RXYHUWXUHOHYHQGUHGL0XKDUUDP GpFHPEUH j


16H avec les allocutions suivantes :

Message du khalife général des Mourides lu par Cheikh Mouhamad Al Bachir Ibn cheikh
$EGRXONKDGUH3UpVLGHQWGX&RPLWpG¶2UJDQLVDWLRQGX0DJDO

Discours du Président de la République du Sénégal, Son Excellence Me Abdoulaye


WADE.

0RW GH ELHQYHQXH GH OD &RPPLVVLRQ G¶2UJDQLVDWLRQ GX &ROORTXH SURQRQFpV SDU OH
Professeur Khadim Moustapha Lo.

Présentation du Colloque par Cheikh Abdoul Ahad Mbacké, Président du Comite


G¶RUJDQLVDWLRQ

Mot du Représentant des Confréries soufies du Sénégal prononcé par Cheikh El Hadj
Malick SY Mawdo ibn El Hadj Abdoul Aziz Sy.

Mot du Représentant des participants étrangers prononcé par le Professeur moukhtar Ould
Abah de la République islamique de Mauritanie.

Tous les intervenants ont magnifié cette initiative, la première du genre.

208  

 
Les allocutions ont été suivies de la conférence inaugurale de Cheikh Khadim Mbacké
Cheikhou sur le thème: «Mouridisme: pensée et Méthode» en prélude aux travaux du
Colloque qui se sont déroulés les 28 et 29 Muharram (24 et 25 décembre) autour de six
sessions avec dix-QHXI   FRPPXQLFDWLRQV SUpVHQWpHV SDU G¶pPLQHQWV SURIHVVHXUV HW
FKHUFKHXUVYHQDQWGHOD*DPELHGHOD0DXULWDQLHGX0DURFGHOD7XQLVLHG¶(gypte, de la
6\ULHGHOD7XUTXLHGH)UDQFHGHOD%HOJLTXHGHV(WDWV8QLVG¶$PpULTXHHWGX6HQHJDO

Ces communications ont été suivies de débats enrichissants.

Les sessions se sont articulées autour des thématiques suivantes :

1. Réalités et Principes du Soufisme.

2. Soufisme et Valeurs humanistes.

3. Soufisme et politique.

4. Crise économique : Le Soufisme comme paradigme salvateur (A).

5. Crise économique : Le Soufisme comme paradigme salvateur (B).

6. Réponse du Soufisme aux crises socioculturelles.

Le lundi matin, premier jour du mois de Safar (26 décembre), les participants se sont rendus à
Touba, la sainte, pour la cérémonie de clôture présidée par le Khalif général des Mourides,
Cheikh Sidy Moukhtar Mbacké.

Au terme du Colloque les constats suivants ont été faits :

/¶XQDQLPLWpVXUO¶H[LVWHQFHGHFULVHVPXOWLSOHVTXHWUDYHUVHOHPRQGHPRGHUQH

Les causes principales de ces crises reposent sur la prédominance du matériel sur les
GLPHQVLRQVVSLULWXHOOHHWPRUDOHGHO¶KRPPH

Le Soufisme peut apporter dHVVROXWLRQVVDOYDWULFHVDX[FULVHVDFWXHOOHVGXIDLWTX¶LOSUHQG


HQFRPSWHOHVGLPHQVLRQVVSLULWXHOOHHWPRUDOHGHO¶KRPPH

Par ailleurs, les participants ont fait les recommandations suivantes :

V¶LQWpUHVVHUjO¶pGXFDWLRQHWjODSXULILFDWLRQGHO¶kPH.

ODFUpDWLRQG¶XQLQVWLWXW G¶pWXGHVHWGHUHFKHUFKHVVXUla pensée de Cheikh al Khadim, en


particulier, et la pensée soufie en général. Cette recommandation a été faite par le Président
GH OD 5pSXEOLTXH GX 6pQpJDO 3UpVLGHQW HQ H[HUFLFH GH O¶2rganisation de la Coopération
LVODPLTXH QRXYHOOHDSSHOODWLRQGHO¶2&, ORUVGHVRQGLVFRXUVjODFUpPRQiHG¶RXYHUWXUHHW
reconfirmée durant les travaux dans le cadre d'un entretien téléphonique.
209  

 
,QWpJUDWLRQGHO¶pWXGHGX6RXILVPHGDQVOHVSURJUDPPHVXQLYHUVLWDLres.

4. Publier les Actes du colloque en arabe, en français et en anglais.

5. Mettre en exergue les valeurs soufies telles que: le juste milieu, le volontarisme, la quête du
OLFLWHODWROpUDQFHO¶H[FHOOHQFHGDQVOHFRPSRUWHPHQWHWF

&UpDWLRQG¶XQUpSertoire des grandes figures contemporaines du Soufisme.

7. Publication de bulletins et magazines sur le Soufisme afin de rectifier certaines erreurs


IDLWHVVXUO¶DSSURFKHVRXILH

8. Tenir des échanges et discussions scientifiques avec les différents courants et écoles de
O¶,VODP

9. Organisation de rencontres périodiques soufies dans les différents pays.

 /¶LQLWLDWLRQ SDU OHV VRXILV GLVSRVDQW GH PR\HQV GH SURMHWV pFRQRPLTXHV HQ IDYHXU GHV
populations.

$GRSWHUOHVWHFKQRORJLHVGHO¶LQIRUPDWLRQHWGHla communication (TIC) pour la diffusion


de la pensée soufie.

12. Traduire les écrits des érudits soufis du monde en général et du Sénégal en particulier.

13 &UpDWLRQG¶XQFRPLWpGHVXLYLGHVUHFRPPDQGDWLRQVGX&ROORTXH

En conclusion, les participants remercient vivement le Khalif général des mourides Cheikh
6LG\0RXNKWDU0EDFNpHWOHFRPLWpG¶RUJDQLVDWLRQGX&ROORTXHHWSULHQW$//$+GHEpQLUOHV
efforts du califat de la Mouridiyyah.

Touba le 1er Safar 1433H ( 26 décembre 2011G).

210  

 
A N N E X ES

211  

 
212  

 
213  

 
214  

 
A perçu de la vie et des enseignements de K hadim Rassoul

Par A bdallah F ahmi, T unisie

6DYLHIXWXQHpSRSpHVDQVSDUHLOOHGDQVO¶KLVWRLUHFDULOIXWFRQVWDPPHQWHQFRQIURQWDWLRQDYHFOH
colonialisme français, et fut exilé dans des conditions extrêmes en Afrique équatoriale, puis dans
le désert mauritanien.

7RXWHQpFULYDQWHWHQVHLJQDQWLOYLYDLWGDQVODSLpWpHWO¶DXVWpULWpDLQVLTXHGDQVODGpYRWLRQHWLO
PHWWDLW HQ SUDWLTXH WRXW HQVHLJQHPHQW SURSKpWLTXH 6XQQD  FH TXL OXL SHUPHWWDLW G¶rWUH HQ
permanence avec OH3URSKqWHHWYLYUHDLQVLOHVpWDWVVSLULWXHOVGHV6DKDEDV6RQVW\OHG¶pFULWXUH
lui permettait de synthétiser en quelques aphorismes ce que les plus grands savants ont réussis à
produire au cours de leur vie. Sa maîtrise du savoir islamique : Tawhid, Fiqh et Tasawuf et des
sources de la révélation : Coran et hadith était sans commune mesure avec ses contemporains. Le
&KHLNK H[SOLTXD TX¶LO DYDLW REWHQX GHV IDYHXUV HW GHV SULYLOqJHV TXH QXO QH SHXW FRPSUHQGUH
UpHOOHPHQW ,O GLW  © -¶DL REWHQX GHV GRQV GLYLns au-delà de tout entendement par la grâce du
SURSKqWHpOXTXLP¶DFRQVWDPPHQWDVVLVWp-¶DLFRPSRVpGHVSRpVLHVLQLPLWDEOHVTXLP¶RQWYDOX
O¶LQH[SULPDEOHª

/HV H[SORLWV GX FKHLNK IXUHQW FRQVLJQpV GDQV OHV UDSSRUWV GH O¶DGPLQLVWUDWLRQ FRORQLDOH HW
immortalisés par les récits des témoins oculaires et par les hagiographes. Plusieurs tentatives
G¶DVVDVVLQDW D\DQW pFKRXp PLUDFXOHXVHPHQW OHV FRORQV ILQLUHQW SDU FKDQJHU G¶DWWLWXGH HQYHUV
Cheikh Ahmadou Bamba. Ni la fosse aux lions, ni le bûcher, ni le peloton G¶H[pFXWLRQ QL OH
SRLVRQQLOHGpSRUWHPHQWGDQVXQHLOHGpVHUWHDXODUJHGHO¶DWODQWLTXHQ¶RQWSXYHQLUjERXWGX
serviteur du prophète élu (psl).

3HQGDQW FHW H[LO OH FKHLNK REWLQW GHV GRQV HW GHV SULYLOqJHV KRUV QRUPH ,O GLW GDQV  © MD]D¶X
chakur el atuf » :

©-HVXLVUHVWpFLQTDQVGDQVO¶LOHGH0D\XPEDH[LOpORLQGHPDSDWULHHWGHVPLHQV-HPHQDLVXQ
FRPEDWFRQWUHPRQkPHHWFRQWUHOHVHQQHPLVGHO¶LVODP

SHQGDQW FHV DQQpHV MH P¶DGUHVVDLV j $OODK SDU GHV SVDXPHV TX¶LO QH P¶HVW SDV SHUPLV GH
divulJXHUFDULOV¶DJLWGHVVHFUHWVGHODVHLJQHXULHHWGHODSURSKpWLH

'DQVO¶LOHM¶DLDXVVLFRPSRVpGHX[pFULWVSDQpJ\ULTXHVSRXUOHSURSKqWH SVO  /¶XQHVWXQHSURVH


TXLV¶LQWLWXOH©PXTDGDPDWHQQDWKUIL¶OVDODWDODPDQMDGDOLELONXWKUªO¶DXWUHHVWune poésie qui
V¶LQWLWXOH©PXTDGDPDWHQQDGKPILOVDODWDODPDQDPDUDQLELONKDGPªHWFKDFXQHG¶HOOHVXUSDVVH
©GDOD¶LOHONKD\UDWª92.

                                                                                                                     
92   ͛ĞƐƚů͛ŽƵǀƌĂŐĞƉĂŶĠŐLJƌŝƋƵĞůĞƉůƵƐŵĠĚŝƚĠĚĂŶƐůĞŵŽŶĚĞŵƵƐƵůŵĂŶ͘/ůĂĠƚĠĐŽŵƉŽƐĠƉĂƌ>͛/ŵĂŵ:ĂnjƵůŝƋƵŝĨƵƚ
le  Qotb  de  la    tariqa  Chadiliya.  

215  

 
-HGHPHXUDLV GDQVO¶LQWLPLWpG¶DOODKGHPXKDUUDP MXVTX jODILQGHGKXHO KLMMDHWPHVSVDXPHV
(munajat) sont le plus tUDQFKDQW DUJXPHQW FRQWUH G¶pYHQWXHOV GpWUDFWHXUV FDU LOV SURYLHQQHQW GX
flux de celui qui dit à la chose :

« Sois » et elle « est » (kun fa yakun). Dans cette ile, mon seigneur me purifia de toute
imperfection et fit de moi le serviteur du prophète (psl) aSUqVP¶DYRLUIDLWVRQHVFODYHILGqOH3RXU
rendre hommage au seigneur, je clame :
93
©&HOXLTXLGRXWHTXHO¶pOXHVWPRQPpGLDWHXU ZDVLOD DYHFOHVHLJQHXUTXLP¶DLPPDFXOp

Je lui annonce que le prophète Mohammad, sur lui la paix et le salut, a glorifié mon service et
P¶DKRQRUp

3DUOXLMHVXLVGHYHQXO¶HVFODYHG¶$OODKHWOHVHUYLWHXUGXPHLOOHXUGHVrWUHV

Celui qui doute de mon statut ignore les réalités cachées de mon exil béni.

Mes actes et mes pensées sont le reflet des versets coraniques et des hadiWKVGHO¶pOXVXUOXLOHV
grâces du seigneur, qui en a fait mon médiateur (wasila) vers lui ».

3HQGDQWOHVFLQTDQQpHVSDVVpHVj0D\XPEDMHVXLVGHYHQXXQVROHLOVSLULWXHOHWM¶DLREWHQXGHV
dons divins par la grâce du prophète (psl) qui a dit :

© /HV °Xvres ne valent que par l¶LQWHQWLRQ GH OHXUV DXWHXUV ª -¶DL FRPSRVp XQ OLYUH XQLTXH
incomparable dans sa puissance spirituelle et dans les bénédictions qui lui sont rattachées. Dans
cet écrit, il y a des prodiges extraordinaires qui feront taire tout détraFWHXU  -¶DL XWLOLVp GHV
PpWKRGHV SURVRGLTXHVLQFRQQXHVGHVOLQJXLVWHVTXL P¶RQWYDOX O¶DJUpPHQW HW OHVUHPHUFLHPHQWV
GXVHLJQHXU HW M¶DL FRPSRVpGHVRGHV HW GHVSDQpJ\ULTXHVLQFRPSDUDEOHVVXUOHSURSKqWH SVO 
TXLP¶RQWIDLWREWHQLUGHVUpFRPSHQVHVLQDFcessibles à qui que ce soit et qui seront enviés par tout
FRQQDLVVDQW-¶DLXWLOLVpGHVVXEWLOLWpVOLQJXLVWLTXHVTXLQHSHXYHQWrWUHVDLVLHVTXHSDUFHX[TXL
RQWpWpVHYUpVSDUGHVPqUHVDUDEHV&HFLQ¶HVWTX¶XQHSDUWLHGHVGRQVTX¶$OODKDFFRUGHjFHX[
qXLVHFRQVDFUHQWDXVHUYLFHGXSURSKqWH SV 3HQGDQWFHWWHSpULRGHPRQF°XUpWDLWFRQVWDPPHQW
avec Allah et son prophète bien-aimé alors que mon corps était prisonnier des ennemis.

-¶DLFRPSRVpFHVYHUVHQKRPPDJHjFHWLQFRPSDUDEOHpFULW
                                                                                                                     
93   Wasila    est  une  expression  coranique  qui  signifie  Médiateur.    Allah  dit  dans  le  Coran      

  «  Ô  vous  qui  croyez,  craignez  Allah  et  cherchez  entre  vous  et  Lui  un  médiateur  ».  

  >ĞƉƌŽƉŚğƚĞ;WƐůͿĞƐƚůĞtĂƐŝůĂĚĞƚŽƵƚĞƐůĞƐĐƌĠĂƚƵƌĞƐĞƚŝůĞƐƚů͛ŝŶƚĞƌĐĞƐƐĞƵƌ;ŚĂĨŝLJͿ͘  

  Certains  savants  salafis  considèrent  que  ce  sont  les  actes  pieux  qui  sont  le  (Wasila),  mais  leur  avis  est  rejeté  par  
les  théologiens  qui  estiment  que  ůĞĐƌŽLJĂŶƚŶ͛ĂƉĂƐůĂƉĂƚĞƌŶŝƚĠĚĞƐĞƐĂĐƚĞƐƋƵŝŶĞƐŽŶƚƋƵĞů͛ĞdžƉƌĞƐƐŝŽŶĚĞůĂ
volonté  divine.  

216  

 
« Les louangeVGXSURSKqWHpOXP¶RQWSHUPLVG¶REWHQLUWRXWOHELHQHWP¶RQWSUpVHUYpGHWRXWPDO
HWGHVUXVHVGHO¶HQQHPL

3DUFHVORXDQJHVM¶DLREWHQXO¶H[FHOOHQFHDXSUqVGXVHLJQHXUTXLO¶DpOX

&HOXLTXLGRXWHGHPDVXSUpPDWLHQ¶DTX¶jULYDOLVHUDYHFPRLHWFHOXLTui a une telle prétention


Q¶DTX¶jSDUWLUSRXUO¶H[LOFRPPHMHO¶DLIDLW

&HX[TXLV¶RSSRVHQWjPRLVRXIIULURQWLFLHWGDQVO¶DX-delà.

/HSURSKqWHG¶$OODKHVWELHQVXSpULHXUDX[KXPDLQVDX[DQJHVHWDX[GMLQQVHWF¶HVWOXLTXLD
immortalisé mes acquis.

3DUVDJUkFH$OODKP¶DDFFRUGpGHVELHQIDLWVpWHUQHOVHWXQVWDWXWH[FHSWLRQQHOª

'DQVXQDXWUHSDVVDJHGHVRQFDUQHWGHO¶H[LOLOGLW

©(QTXLWWDQWO¶LOHRXM¶DLFRPSRVpOHVpFULWVHQTXHVWLRQMHIXVWUDQVIpUpGDQVXQHDXWUHLOHDORUV
TXH M¶pWDLV GDQV XQ pWDW GH IDWLJXH H[WUrPH TXH ULHQ QH SRXYDLW rWUH SLUH TXH OD VRUWLH GH O¶kPH
quand elle se sépare du corps. Je demeurais dans ma nouvelle résidence un peu moins de trois ans
HWMHQHP¶RFFXSDLVTXHGHVDGRUDWLRQVHWGHODFRPSRVLWLRQGHVRGHVHWGHs panégyriques sur le
SURSKqWH SV $OODKP¶DUpFRPSHQVpHQP¶DFFRUGDQWWRXWFHTXHM¶DLHVSpUpGHOXL,OPHPRQWUD
ainsi le secret du verset : « en vérité, les patients auront des récompenses incalculables ».

/DILQGHO¶H[LOPDULWLPHDX*DERQHWOHsecond exil en M auritanie

De retour au Sénégal, le cheikh fut accueilli en héros par la population en liesse au grand dam
GHVDXWRULWpVTXLV¶pWDLHQWSODLQWVDXSUqVGHODPpWURSROHTXHO¶DXUDGX&KHLNKJUDQGLVVDLWHWVRQ
FRPSRUWHPHQW SOHLQ G¶DVVXUDQFH HW G¶LQGpSHQGDQFH ULVTXDLW GH FUpHU GHV LQVXERUGLQDWLRQV GH OD
part de ses talibés.

/HVIRXOHVDIIOXDLHQWHQPDVVHHWOHVSOXVJUDQGVVDLQWVGXSD\VV¶pWDLHQWUDWWDFKpVjOXLGRQWOH
cheikh Ahmad sakhir mbaye et le cheikh Jili wadan.

Les savants les plus réputés avaient accourus vers lui dont cheikh ibrahim baghdadi, el hadj
GUDPpFKHLNKLEUDKLPHOPD¶FKDULPRKDPDGNDQHDKPDGGqPHHWWDQWG¶DXWUHV

Après huit mois de répit, le gouvernement colonial décida de faire venir le cheikh une nouvelle
fois à st louLVHWHQYR\DSOXVLHXUVFRQYRFDWLRQV0DLVFRPPHWRXMRXUV.KDGLP5DVVRXOV¶DEVWLQW
de répondre, ce qui déclencha la colère du gouverneur général qui envoya des bataillons de
soldats français assistés par les auxiliaires indigènes dont les rois du Cayor, du Sine et des autres
UpJLRQV)LQDOHPHQWO¶DIIDLUHILQLWSDUXQVHFRQGH[LOHQ0DXULWDQLH

217  

 
0DLV FHWWH IRLV LO QH V¶DJLW SOXV G¶pSUHXYHV PDLV GH FRQVpFUDWLRQ FDU OHV PDXUHV TXL SDVVDLHQW
SRXU OHV SOXV JUDQGV OLQJXLVWHV G¶DSUqV OHV WpPRLJQDJHV GHV VDYDQWs du monde arabe, et qui
avaient une pléiade de saints très réputés en Afrique et dans le monde islamique furent tous
unanimes à considérer khadim rassoul comme une singularité, un saint exceptionnel dont le statut
hors norme est indiscutable. Ils écriront même des témoignages en prose et en poésie sur les
dons exceptionnels et les privilèges dont il avait été gratifié : « diwan al bayadhin fi mazaya
FKHLNKDONKDGLPVH\\LGDOED\DGKLQZDVRXGDQL\LQIL¶OPDJKULEª OHUHFXHLOGHVPDXUHVVXUOHV
dons du cheikh al khadim le maitre des blancs et des noirs en occident)94 .

Q uelques enseignements de K hadim Rassoul

/¶,PDQO¶,VODPHWO¶,KVDQVRQWODUHOLJLRQGX3URSKqWH0RKDPPHG SVO HWGHVHVFRPSDJQRQV


Nul ne peut suivre leur trace sans la baraka du ProphqWH SVO HWVDSHUPLVVLRQ$//$+TXLQ¶D
QL FRPPHQFHPHQW QL ILQ D FUpH OH SDUDGLV HW D GpFUpWp TXH OD 9RLH GX SDUDGLV HVW O¶,VODP /D
UHOLJLRQ YUDLH HVW O¶,VODP  &HWWH UHOLJLRQ HVW XQ GpS{W VDFUp GRQW OH 3URSKqWH SVO  HQ HVW OH
dépositaire et nul ne SHXWDFFpGHUDXGpS{WVDQVO¶DXWRULVDWLRQGXGpSRVLWDLUH

Le Prophète (PSL) a dit : « un peu de pratiques conforme à la Sunna est meilleures que beaucoup
de pratiques innovatrices ». Et il a dit : « Le meilleur propos est le livre de ALLAH, la meilleure
JXLGDQFH HVW FHOOH GH 0RKDPPHG /D SLUH GHV DFWLRQV HVW FHOOH TXH O¶RQ LQQRYH FDU WRXWH
LQQRYDWLRQSHXWrWUHXQHGpYLDWLRQª2QDUDMRXWp©7RXWHGpYLDWLRQFRQGXLWjO¶HQIHUª

Il faut également faire la différence entre innovation blâmable et innovatiRQ ORXDEOH ELG¶j
PXVWDKMLQD HW ELG¶D PXVWDKVLQD  3DUPL OHV LQQRYDWLRQV ORXDEOHV  /D FROOHFWLRQ GX &RUDQ VD
voyellisation et sa notation. De même que la grammaire qui est nécessaire pour connaître la
langue arabe sans laquelle on ne peut pas étudier le Coran et le hadith. Aussi le Zikr pratiqué dans
les assemblées et autres techniques initiatiques que ne récusent que les prétentieux

4XDQWDX[LQQRYDWLRQVEOkPDEOHV&¶HVWFHTXLHVWHQFRQWUDGLFWLRQDYHFODFKDULDHWTXLFRUURPSW
la croyance ou déforme la religion.. Tel est le cas de beaucoup de sectes qui surchargent les
HQVHLJQHPHQWV GH O¶,VODP SDU GHV FUR\DQFHV GRXWHXVHV HW SDU GHV H[WUDSRODWLRQV RX GHV
interpolations.

Le Prophète (PSL) a dit : « A la fin des temps il y aura des adorateurs ignorants et des savants
libertins ».

$LQVL SDU pJDUG DX[ KDGLWKV GH O¶pOX VXU OXL HW VXU VD IDPLOOH OD SDL[ HW OH VDOXW MH PH VXLV
consacré au savoir théologique et aux sciences religieuses. Une partie de mon temps est consacré

                                                                                                                     
94   ĞƚŽƵǀƌĂŐĞĂĠƚĠƌĠĠĚŝƚĠƌĠĐĞŵŵĞŶƚĞŶĂƌĂďĞĂǀĞĐƵŶĞƉƌĠĨĂĐĞĚĞ^ĞƌŝŐŶĞ^ĂůŝŽƵDďĂĐŬĠ͕ƋƵŝŵ͛ĂǀĂŝƚŝŶŝƚŝĠ
ƉĞŶĚĂŶƚĚĞƐĂŶŶĠĞƐăů͛ƈƵǀƌĞŝŶĐŽŵƉĂƌĂďůĞĚĞƐŽŶillustre  père  Khadim  Rassoul.  

218  

 
DXVDYRLUWKpRORJLTXHDLQVLTX¶jODconnaissance initiatique. Mais mon tout est constamment au
service (khidma) du Prophète (PSL) et sur sa famille et ses compagnons.

4X¶$//$+QRXVFRQVLGqUHSDUPLOHVKRPPHVGHODSDL[HWGXVDOXWGHODEpQpGLFWLRQHWGHOD
pureté. Amin

Le Prophète (PSL) a dit :

© /H VDYRLU TXL Q¶HVW SDV PLV HQ SUDWLTXH HVW FRPPH OH WUpVRU GRQW OH GpWHQWHXU Q¶XVH SDV ,O D
épuisé sa vie à le collecter sans avoir à en bénéficier ». Il a dit aussi : « Parmi ceux qui ont le
châtiment le plus sévère le jour du jugement : le savaQWTXLQ¶DWLUpDXFXQEpQpILFHVSLULWXHOGH
son savoir.»

$//$+DGLW©&HTXHYRXVDLQVWLWXpOH3URSKqWHLQWpJUH]OHHWFHTX¶LOYRXVLQWHUGLWDEVWHQH]-
vous ».

L e savoir véritable

/D SUHPLqUH FKRVH TXH OH FUR\DQW GRLW FRQQDvWUH HVW O¶REMHW GH VD IRL. Il doit connaître son
6HLJQHXUTX¶LODGRUH HW jTXL LODGpGLpVRQFXOWH&RPPHQW SHXW-il adorer ce dont il ignore les
noms et les attributs essentiels ? Ce qui est nécessaire pour la divinité et ce qui est impossible.

Une telle ignorance peut créer les FRQIXVLRQV HW O¶DGRUDWHXU SHXW FURLUH j GHV DUWLFOHV GH IRL
erronés en contradiction avec la vérité, son culte sera alors vain et ses oeuvres réduites à néant,
TX¶$//$+QRXV3UpVHUYHGHO¶LJQRUDQFH

Saches, ô disciple que tu dois connaître aussi tes devoiUV FXOWXHOV HW WH FRQIRUPHU j O¶LPSpUDWLI
divin. Ainsi que ce que tu dois éviter conformément aux interdits

Comment peux-WXREpLUjO¶LPSpUDWLIGLYLQHQWRXWHFRQIRUPLWpVLWXQHFRQQDLVSDVOHVUqJOHVHW
les conditions ? Comment peux-tu éviter les interdits quand tu ne connais pas les actes prohibés
et déconseillés ?

Enfin, il te faut savoir que les connaissances dont je te parle sont une obligation pour tout
croyant, ils sont de trois ordres : la science du Tawhid, la science de la Charia et la science du
Tasawuf.

Tu dois aussi préserver tes sept membres : la langue, le sexe, le ventre, les pieds, les mains, les
yeux et les oreilles.

/H VDYRLU HVW GH GHX[ RUGUHV  HQVHLJQHPHQW HW FRPSRVLWLRQ G¶RXYUDJHV /H SOXV EpQpILTXH HVW
FHUWDLQHPHQWODFRPSRVLWLRQG¶Ruvrages car cela est utile pour plusieurs générations. Celui qui a
OHV DSWLWXGHV SRXU FHOD HW TXL EpQpILFLH GH OD %DUDND G¶$//$+ GDQV VRQ pFULWXUH WHO TXH OHV
HQVHLJQDQWVHWOHVpOqYHVV¶RULHQWHQWYHUVVHVpFULWVSRXU\SXLVHUGRLWQpFHVVDLUHPHQWVHFRQVacrer
219  

 
j FHWWH PLVVLRQ &HOXL TXL HQVHLJQH HW EpQpILFLH GH OD %DUDND G¶$//$+ WHO TXH VHV pOqYHV VH
réalisent en se conformant à la Sunna prophétique, doit nécessairement se consacrer à cette
PLVVLRQ3HXWrWUHTX¶$//$+DFFRUGpOH©IDWKªRXYHUWXUHVSLULWuelle pour un de ses serviteurs
GDQV WHOOH GLVFLSOLQH RX GDQV WHOOH YRLH HW QH OXL O¶DFFRUGH SDV GDQV G¶DXWUHV GLVFLSOLQHV RX
G¶DXWUHVYRLHV

L a particularité de K hadim Rassoul

Cheikh Ahmadou Bamba Khadim Rassoul expliqua aussi que parmi les humains, il y a ceux qui
attestent la grâce et la justice divine, et ceux qui les nient. Chacun est libre de croire ou de ne pas
croire. Mais, il faut être conscient que parmi les causes du malheur qui entraînent vers la
mécréance, il y a la mauvaise opinion sur les élus qui ont été gratifiés par Allah de certains dons.
%HDXFRXSSHQVHQWjWRUWTX¶$OODKDUpVHUYpVHVJUkFHVHQH[FOXVLYLWpjFHUWDLQHVSHUVRQQHVRXj
FHUWDLQVSHXSOHV4X¶$OODKQRXVSUpVHUYHGHWHOOHVFUR\DQFHVHWPHLOOHXUHVVDOXWDWLRQVSRXUFHX[
qui sont en quête de guidance.

Dans un de ses poèmes il dit :

« $//$+P¶DKRQRUpSDUOH7DZKLGHWMHQHPHVpSDUHUDLVMDPDLVGHVRQDJUpPHQW

,OP¶DGRQQpO¶LQWHOOLJHQFHHWP¶DDSSULVODMXULVSUXGHQFH

3DUOH7DVDZXILOP¶DDSSULVjSDUIDLUHOHVDGRUDWLRQV

,OP¶DIRUWLILpHWMHQ¶DLMDPDLVHXSHXUGHVHQQHPLV

Le livre sacré fut intégré en mon être

(WPDUpDOLWpDpWpPRGHOpHSDUOHVKDGLWKVGHO¶pOX

/HFRPPHQWDLUHO¶LQWHUSUpWDWLRQDLQVLTXHO¶KHUPpQHXWLTXHGX&RUDQ

Sont devenus mes armes et mes munitions.

La grammaire, la poésie, la prosodie ont élus domicile dans ma pensée.

/DOLQJXLVWLTXHODUKpWRULTXHHWODORJLTXHP¶RQWpWpDFFRUGpHVSDUOHSURSKqWHpOX

Ma langue ne prononce que ce que le Seigneur lui dicte

(WMHQHIDLVTX¶H[pFXWHUVDYRORQWp

La sagesse et la connaissance sont devenues ma propriété,

Les clés de la compréhension sont avec moi.

220  

 
3HQGDQWPRQH[LO$OODKP¶DIDLWUpDOLVHUVRQXQLFLWp

,OQ¶\DTXHOXLHWOHSURSKqWHpOXTXLFRQQDLVVHQWHIIHFWLYHPHQWPDUpDOLWp

L es principes du T A W H I D exposés par K hadim Rassoul dans sa lettre aux disciples lors de
son départ vers le G abon

Ce sont soixante-six articles qui sont toutes incluses dans la formule : « La ilaha Illa Allah
MOHAMMAD Rassoul Allah ». Sur lui le salut et la paix.

Le véritable sens de « /$,//$+$,//$$//$+ªHVWTX¶LOQ¶\DULHQTXLVRLW6XIILVDQWSDUVRL


HQGHKRUVG¶$//$+ ,VWLJKQDELQDIVLKL HWLOQ¶\DULHQTXL

ne dépende pas de LUI (iftiqar ilayhi). Sous la notion de suffisance en soi

(Istighna bi nafsihi), il y a les attributs de :

/¶H[LVWHQFH :XMXG

La primordialité (Qidam)

Permanence (Baqa)

Dissemblance des êtres (Mukhalafa)

Subsistance par soi (Qiyam bi nafs)

/¶RXLH 6DPD¶

La vue (Basar)

La parole (Kalam)

&HTXLLPSOLTXHTX¶LOHVW

$XGLWDQW 6DPL¶

Voyant (Basir)

Parlant (Mutakallim)

De même, il faut exclure toute motivation dans ses actes ; et toute nécessité dans son activité. Et
aussi exclure toute notion de puissance naturelle qui agit indépendamment de la volonté divine.

Pareillement il faut rejeter les attributs contraires à ceux mentionnés car ils sont impropres à la
divinité, ce sont :

221  

 
1pDQW $¶GDP

Adventisme (Huduth)

([WLQFWLRQ )DQD¶

Semblance (Mumathala)

Indigence (Iftiqar)

De même que la :

6XUGLWp 6DPDP OD&pFLWp $PD¶ HWOD0XWLWp %DNDP 

Notre seigneur ne peut être : ni sourd, ni aveugle ni muet.

Il faut aussi nier catégoriquement toute notion de panthéisme.

Nous avons ainsi énuméré vingt huit attributs.

Il y a sous la notion de dépendance envers lui (Iftiqar ilayhi) les attributs de :

/¶RPQLSRWHQFH>WRXWe-puissance] (Qudra)

La volition [volonté] (Irada)

/¶RPQLVFLHQFH ,OP

La vie (Hayat)

&HTXLLPSOLTXHTX¶LOHVW

Omnipotent [tout puissant] (Qadir)

Doué de volition (Murid)

Omniscient (Alim)

Vivifiant (Hayy)

'HPrPHTX¶LOIDXWDIILUPHU

/DQRWLRQG¶XQLFLWp :DKGDQL\D HWODQRWLRQG¶DGYHQWLVPHGXPRQGH +XGXWKHOD¶ODP

Les attributs contraires sont impossibles dans la Seigneurie (Rububiya) :

,PSXLVVDQFH $M¶] &RQWUDLQWH .DUDKD ,JQRUDQFH -DKO 0RUW 0DZW

222  

 
'¶RO¶LPSRVVLELOLWpTXHQRWUH6HLJQHXr soit : impuissant, contraint, ignorant ou mort.

'HPrPHTX¶LOIDXWH[FOXUHOHVQRWLRQVG¶H[WLQFWLRQ )$1$ TXLHVWODILQ dans le temps du


créateur, de la primordialité du monde (Qidam el $¶ODP  HW GH GpWHUPLQLVPH GDQV OHV ORLV GH
FDXVDOLWp 7D¶7KLUEL7DE¶ 

Vingt-deux attributs ont été énumérés.

/¶HQVHPEOHFRQVWLWXHFLQTXDQWHDUWLFOHVGHODIRL

Quand à la formule « MOHAMMAD Rassoul ALLAH » sur lui la paix et le salut.

Elle inclut : La véracité (Sidq), la fidélité (Amana), et la transmission

(Tabligh).

'H PrPH TX¶HOOH LQFOXW O¶KXPDQLWp GHV SURSKqWHV TXL VRQW VRXPLV DX[ FRQWLQJHQFHV GH OD
FRQGLWLRQKXPDLQHHWLPSOLTXHODIRLHQWRXVOHVSURSKqWHVDLQVLTX¶HQOHVDQJHVOHVOLYUHVUpYpOpV
et le jour ultime du jugement.

Les contraires de ces articOHV VRQW  /H PHQVRQJH .DGKL¶E  OD WUDKLVRQ .KL¶\DQD  HW
O¶RFFXOWDWLRQ .LWPDQ 4XLVRQWLQFRPSDWLEOHVDYHFODIRQFWLRQ prophétique. Quant à la condition
KXPDLQH DYHF VHV FRQWLQJHQFHV HOOH Q¶HVW HQ ULHQ LQFRPSDWLEOH DYHF OD IRQFWLRQ SURSKpWLTXH
Alors que le fait de ne pas croire en tous les prophètes ou en les anges ou en les livres révélés ou
en le jour du jugement est incompatible avec la profession de foi islamique.

Seize articles sont ainsi énumérés dans la formule « MOHAMMAD Rassoul

ALLAH ». En les additionnant aux articles de « La Ila ha Illa ALLAH » nous avons les soixante-
six articles de foi mentionnés.

La connaissance de ces articles permet le discernement (Tamyiz). Leur assimilation est une
obligation pour tout croyant responsable mâle ou femelle, homme libre ou esclave, croyant ou
infidèle, humain ou djinn. Point de doute en cela. Celui qui se conforme en toute pureté
G¶LQWHQWLRQjFHTX¶$//$+DSUHVFULWpYLWHUDO¶HQIHUHWHQWUHUDDXSDUDGLVSDUODJUkFHG¶$//$+
et sa miséricorde ainsi que sa promesse.

Celui qui néglige les prescriptions sciemment en réfutant son caractère obligatoire sera un
SHUGDQWHWHQWUHUDHQHQIHUSDUODMXVWLFHGLYLQHSDUODFROqUHG¶$//$+HWVHVPHQDFHV

9LVLRQjO¶pWDWGHYHLOOHGXSURSKqWH 36/ HWGHVDQJHV

Certains savants émettent des réserves sur la valeur des témoignages des contemplatifs surtout
VXUODYLVLRQGXSURSKqWH 36/ HWGHO¶DUFKDQJH*DEULHO VH\LGQD-LEULO VXUOXLOHVDOXWFDUVHORQ
leur entendement cela peut mettre en cause deux principes théologiques fondamentaux.
223  

 
'¶DERUGOHIDLWTXHODUpYpODWLRQQ¶HVWSDVVFHOOpHHWTX¶LOSHXW\DYRLUGHQRXYHDX[pOpPHQWVTXL
DEURJHQW FHUWDLQHV GLVSRVLWLRQV GH OD ORL LVODPLTXH &KDUL¶D  (QVXLWH OH IDLW TXH OH SURSKqWH D
occulté certains enseignements pour les communiquer plus tard a des élus. Chaque affirmation
TXLSHXWDYRLUSRXULPSOLFDWLRQO¶XQRXO¶DXWUHGHFHVSRLQWVHVWSDVVLEOHG¶XQHFRQGDPQDWLRQVDQV
pTXLYRTXH G¶DSUqV OH FRQVHQVXV HW YDXW j VRQ DXWHXU XQH H[FOXVLRQ GH OD FRPPXQDXWp
musulmane.

KhaGLP 5DVVRXO H[SOLTXD TXH FHV UpDOLWpV VSLULWXHOOHV VRQW G¶XQ RUGUH WRWDOHPHQW SDUWLFXOLHU HW
QRQJpQpUDO&HVRQWGHVJUkFHVTX¶$OODKDFFRUGHDTXLLOYHXWHWQHSHXWHQEpQpILFLHUTXHFHX[
TXLRQWIRLHQOHEpQpILFLDLUH,OQ¶\DQXOOHREOLJDWLRQG¶\FURLre, ce qui place ces réalités hors du
champ de compétence de la loi. Celui qui a atteint le stade de la contemplation (Mushahada) peut
contempler les vérités spirituelles directement sans les arguments logiques et les instruments
empiriques. Les soufis appellent ces moyens : le kashf et la Mushahada.

/H&KHLNKUpSRQGLWjXQJURXSHGHVDYDQWVPDXULWDQLHQVYHQXVOHFRQVXOWHUVXUODYLVLRQjO¶pWDW
GH YHLOOH GX SURSKqWH SVO  HW O¶DSSDULWLRQ GH O¶DQJH *DEULHO  © &HOD Q¶HVW SDV XQ VXMHW GH
spéculation, mais plutôt de contemplation « Mushahada ». Ceux qui ne sont pas des contemplatifs
doivent croire ceux qui ont eu le privilège de la contemplation. Beaucoup de Qotb ont affirmé
DYRLU YX OH SURSKqWH 36/  D O¶pWDW GH YHLOOH HW RQW UHoXV OHXU :LUG HW FHUWDLQV HQseignements
initiatiques. Leur affirmation ne saurait être rejeté car leur probité et leur valeur spirituelle et
intellectuelle est consensuelle, tel le cas de Cheikh Abdelkader Jilani, Aboul Hasan Chadili,
,PDP6R\RXWL,PDP&KD¶UDQL3OXVUpFHPPHQW&KHLkh Ahmad Tijani et Cheikh Ahmad Idris et
WDQW G¶DXWUHV GDQV FKDTXH JpQpUDWLRQ 7RXV VHV pPLQHQWV VDYDQWV HW 7KpRORJLHQV QH VDXUDLHQW
DIILUPHU XQ PHQVRQJH QL OH FDXWLRQQHU ,O \¶D DXVVL OH SULQFLSH MXULGLTXH © /H WpPRLJQDJH GH
celui qui affirme est supérieur à celui qui nie ».

Quant à Seyidna Jibril, il leur cite les vers suivant :

« Certains disent que Jibril se présente à la mort du croyant

'¶DXWUHVGLVHQWTX¶LOQHYLHQWSOXVGHSXLVODPRUWGXSURSKqWHpOX

En vérité, je dis que ses apparitions sont persistantes et je le certifie ».

Il composa un poème improvisé :

Jibril est descendu sur le père des humains (Adam), dix fois avec une révélation

Sept fois sur Sheth son fils, quatre fois sur Idris

Trente fois sur Nuh à qui Allah a accordé une longue vie

Quarante huit fois sur Abraham le compagnon de notre seigneur maître des dons

224  

 
Quatre fois sur Youssef, quatre cent trente fois sur Moussa le purifié

Six fois sur Dawud et deux fois sur son fils Suleyman

Trente deux fois sur Issa ibn Maryam sans en tout certitude

Et cent dix mille fois sur notre prophète généreux au noble caractère

&HW pSLVRGH HXW OLHX FKH] OHV %HQL 'H\PDQ TXL VRQW O¶pOLWH LQWHOOHFWXHOOH HW VSLULWXHOOH GH OD
Mauritanie. Toute la tribu fit allégeance au Cheikh Ahmadou Bamba et lui fournit ses auxiliaires
$QVDU jO¶LQVWDUGHV0HGLQRLV

Le Cheikh composa en leur honneur :

©0HVKRPPDJHVHWPHVORXDQJHVSRXUFHOXLjTXLM¶DLGpGLpPRQWRXWª

©,OP¶DVDWLVIDLWHWFRPEOpLFLj6DUVDUª

« En me donnant les Beni deymen comme Ansar »

«Je lui dédie mes actions de grâce et mes remerciements»

W ird de K hadim Rassoul

Khadim Rassoul écrit aux disciples et à tous ceux qui se rattachent à lui:

©-HYRXV GRQQHFH:LUGSRXUODIDFHG¶$OODKOHJpQpUHX[SUHQH] ±le pour sa face sublime et


prenez-le avec fermeté et constance. Celui qui avait un Wird et peut réunir entre les deux, réunit
OXPLqUHVXUOXPLqUH6¶LOQHSHXWSDVLOVHFRQWHQWHGHFH:LUGQREOHTXLGLVSHQVHGHWRXWDXWUHHW
que nul autre ne saurait en dispenser.

« Bism Allah Errahman Errahim wa salla Allah Ala seyyidina Mohammad wa Ala Alihi Wa
Sahbihi Wa Sallama Tasliman : Que tous ceux qui liront ces lignes écrites après la réception du
:LUGVDFKHQWTXHO¶DXWHXU$+0(',%1+$%,%28//$+(/%(.., originaire de la Mecque)
et citoyen du Baol, D GRQQp OD SHUPLVVLRQ D VRQ IUqUH HQ $OODK WDEDUDND ZD WD¶DOD  OH 6H\\LG
0XVWDSKD2WKPDQ+DODEL RULJLQDLUHGH+DODE HWFLWR\HQGH0pGLQHG¶°XYUHUDYHF:LUGEpQLHW
GHOHWUDQVPHWWUHjTXLLOYHXWGHVIUqUHVHWV°XUV

/¶DXWHXUDSULVFH:LUGG¶$OODKG¶$OODK WDEDUDNDZDWD¶DOD SDUO¶LQWHUPpGLDLUHGH5DVVRXO$OODK


VDOOD $OODK DOD\KL ZD VDOODP  j O¶pWDW GH YHLOOH HW QRQ j O¶pWDW GH VRPPHLO \DTDGKDWDQ OD
PDQDPDQ HQO¶DQKGDQVOHOLHXQRPPp6DUVDUSHQGDQWOHPRLVGH5DPDGDQTXLHVWOHPRLV
de la révélation du Coran, qui guide les humains et leur apprend le discernement . Allah est
garant de ce que je dis ».
225  

 
6XEKDQDUDEELNDUDEEXOL]]DWLDPPD\DVLIXQZDVDODPDODµOPXUVDOLQZD¶OKDPGXOL¶/ODKUDEELDO
alamin.

K hadim Rassoul et les habitants des lieux saints

Sous la nouvelle doctrine wahhabite, la soixantaine de Zawiya Soufi des lieux saints furent
fermés. Les notables du Hedjaz composée des Chérifs et des Cheikhs de la Naqshbandiya, de la
Khalwatiya et de la Sammaniya et de la Chadiliya envoyèrent des émissaires au Sénégal pour
trouver Khadim Rassoul à Diourbel en 1926 et lui remettre la lettre et les doléances des habitants
du Hedjaz.

Un poème composé par le grand maître Cheikh Omar Kurdi est joint à la lettre.

« La lumière de la sainteté est une preuve évidente

0DLVQHSHXWODGLVWLQJXHUTXHFHOXLGRQWO¶LQWHOOHFWHVWLOOXPLQp

Regardez cette lumière bien apparente sur le visage de celui

4XLDGLVVLSpO¶LJQRUDQFHGDQVO¶$IULTXHQRLUH

&¶HVWOH&KHLNK$KPHGTXLV¶HVWGLVWLQJXp

Par les louanges et les actionsde grâce

&¶HVWOH&KHLNKGHOD+DTLTDGHOD7DUvTDHWGHODJXLGDQFH

Il conduit les créatures vers leur seigneur en toute vérité

,OHVWO¶DVWUHGHVFRQQDLVVDQFHVTXLUD\RQQHVXUOHVLQWHOOLJHQFHV

,OHVWO¶RFpDQGXVDYRLUTXLGpERUGHGHELHQIDLVDnce

Ô serviteur du prophète ! Toi dont les secrets sont au-delà de la compréhension

Vos grâces nous sont parvenues jusqu'à Médine

Et vos chants ont enchantés notre atmosphère

Nous voici au nom des Médinois pour te présenter

Les hommages et les remerciements dus à ton illustre rang

Tu es notre protecteur et notre sauveur

Nous le clamons haut et fort

226  

 
Afin que les contemporains et les générations futures

Trouvent la voie du salut

Daigne Ô Cheikh poser sur nous ton regard sanctissime

Afin de purifier nos Ames et nous apaiser

Sois magnanime avec les habitants de Médine

Et satisfais leur requête en égard au prophète élu

Sur lui la paix et le salut Tant que dureront les terres et les cieux

Khadim Rassoul dans sa réponse, dit que la venue de la délégation du Hedjaz HVWO¶XQGHVSOXV
KHXUHX[PRPHQWVGHO¶KLVWRLUHGXSD\VHWO¶XQGHVSOXVEpQLV,OVDWLVIDLWOHV0pGLQRLVDX-delà de
leur espérance et leur composa des Qasaids chargés de puissantes influences spirituelles et aussi
leur rédigea une profession de foi qui synthétisait la pensée soufi et la pensée Salafi en une
SDUIDLWH V\PELRVH ,O OHXU FRQVHLOOD GH FKHUFKHU O¶XQLWp HW G¶°XYUHU SRXU O¶pYHLO GH OD QDWLRQ
LVODPLTXHHWOHXUSUpGLWXQIXWXUPHUYHLOOHX[HWXQHDERQGDQFHLQGHVFULSWLEOH2UjO¶pSRTXHOHV
habitants GX+HGMD]Q¶DYDLHQWDXFXQHUHVVRXUFHHQGHKRUVGHO¶DSSRUWGXSqOHULQDJHHWGHFHTXH
le Khalife Ottoman donnait annuellement en sa qualité de gardien des lieux saints. Depuis
O¶DEROLWLRQGX.KDOLIDWHQFHIXW.KDGLP5DVVRXOTXLSULWHQFKDUJHOHVOieux saints et ses
habitants pendant ces années cruciales, où les razzias et les guerres tribales faisaient rage depuis
le début de la réforme Wahhabite.

Même Khizr Ibn Mayaba le Faqih traditionniste mauritanien qui fut le plus implacable critique de
la Tijaniya et qui devint le Cadi Malékite de Médine envoya au Cheikh Ahmadou Bamba un
OLYUHTX¶LODYDLWFRPSRVpVXUODWUDGLWLRQSURSKpWLTXHHWOHGpGLFDoD©$XSOXVJUDQGGHV&KHLNK
GHWRXVOHVWHPSVOH&KHLNK$KPDGRX%DPEDTXLQ¶DSRLQWG¶pJDOGDQVOHVKorizons ». Il assura
TX¶LOQ¶HVWSRLQWXQHQQHPLGX7DVDZXIHWGHV6RXILPDLVTXHVDGpPDUFKHWHQGDLWjUHFWLILHUOHV
propos inconsidérés introduites par les disciples qui par excès de zèle déformaient
O¶HQVHLJQHPHQWGHVPDvWUHVVRXILV

MDUWKL¶DGHVKDELWDQWVGH0pGLQH

© /¶REMHW GH FHWWH OHWWUH HVW  QRXV OHV KDELWDQWV GH 0pGLQH DYRQV DSSULV XQH QRXYHOOH TXL D
ébranlé nos membres et brouillés nos sens. Nous avons failli perdre la raison et devenir des
irresponsables. Nos poitrines se sRQWFRPSUHVVpHVHWQRVF°XUVRQWpWpFRPSULPpVSDUODQRXYHOOH
GHODGLVSDULWLRQGHQRWUHSqUHjTXLQRXVDYRQVGpGLpO¶LQWpJUDOLWpGHQRWUHDPRXUGDQVFHPRQGH
Sa réalité est immortelle, sa bonté et sa générosité sont perpétuelles. Il est le Cheikh des Cheikh
et la référence de tous les maîtres confirmés dans la connaissance. Il est le serviteur de la cour
SURSKpWLTXH HW O¶,PDP GH OD FRPPXQDXWp GHV ILGqOHV HW GHV SXUV ,O QRXV D DVVLVWpV TXDQG OD

227  

 
providence nous a défavorisés et il nous a secourus quand tous les pays nous ont délaissés. Notre
6HLJQHXU O¶D DFFXHLOOL DYHF DJUpPHQW HW VDWLVIDFWLRQ ,O D FRQTXLV OD SULPDXWp GDQV OHV UpDOLWpV
intelligibles et a réalisé la parole divine : « Tout ce qui est sur terre est voué à disparaître et ne
subsiste que la IDFHGHWRQ6HLJQHXUO¶(WHUQHOª

Un poème est joint à la lettre avec une note pour le Khalife Serigne Modou Mustapha : « Nous
HVSpURQVGHYRWUHH[FHOOHQFHTX¶HOOHVHUDUpFLWpHQSUpVHQFHGHQRVIUqUHVOHVGLVFLSOHVGX&KHLNK
afin que la participation de 0pGLQHODOXPLQHXVHVRLWDWWHVWpHHWTXHO¶HVSULWLPPDFXOpGX&KHLNK
plane sur tous les auditeurs pendant la récitation »

Pour le Cheikh Imam notre maître Ahmad Ibn Seyidna Mohammad Ibn Seyidna Habiboullah sur
OXLO¶DJUpPHQWG¶$OODK UDEL¶DODZZDO6).

©8Q&KHLNKTXLQRXVSHUPHWWDLWGHVHJORULILHUSDUO¶DPRXUGHO¶pOLWHVSLULWXHOOHOHVPDLWUHVGHFH
monde.

Un Cheikh qui nous permettait de défier les ennemis car il était notre sécurité perpétuelle

8Q&KHLNKTXLQRXVSHUPHWWDLWGHUHSRXVVHUO¶LQGLJHnce loin de nos enfants

Dans une époque où le pauvre est misérable

Un Cheikh en qui nous nous réfugions

3RXUMRXLUGHO¶LPPXQLWpHWGHWRXWHVOHVDVVXUDQFHV

Combien de fois nous nous sommes adressés à lui

Pour obtenir nos besoins et dissiper nos chagrins

6LFHQ¶pWDLWSDVVRQDSSRUWJpQpUHX[

Nous aurions été dans le dénuement total

Et nous aurions failli à notre mission

&HOOHG¶DFFXHLOOLUOHVSqOHULQVKRQRUDEOHVª

Abdallah Fahmi [3]

                                                                                                                     
 

228  

 
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
 

&20,7('¶25*$1,6$7,21 D U C O L L O Q U E

Cheikh Abdoul Ahad Mbacké Gaïndé Fatma (Président)

El Hadji Mouhamadou Lamine Mbacké (Commission Organisation)

Mr Abdoukhadar Mbacké et Mr Ahmed Saloum Dieng (Commission Relations Extérieures)

C O M I T E SC I E N T I F I Q U E

Same BOUSSO Abdourahman, Commission Culturelle, Rawdu Rayâhîn (Coordonnateur)

Dr Khadim SYLL, islamologue

Dr Cheikh GUEYE, ENDA Tiers monde

S. Mame Thierno LO Cheikhouna, Sociologue


229  

 
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
Pr Djiby DIAKHATE, Université Cheikh Anta Diop de Dakar

Pr Masoud SY, Université Gaston Bergé de St Louis

Pr Mouhamed Galaye NDIAYE, Académie des Sciences Religieuses Bruxelles

S. Moustapha Diatara, Bibliothèque Cheikhoul khadim Touba

Serigne Cheikhouna MBACKE A. Wdoud, Institut Al Azhar Touba

Pr Cheikh DIENG, Université Cheikh Anta Diop de Dakar

Pr Saliou SALAM

SO M M A I R E

I N T R O D U C T I O N ««««««««««««««««««...««««««««««.« 2

I ± L A -2851(('¶289(5785(««««««««««««...««««««««««.6

Allocution de Serigne Bassirou Abdou Khadre, Porte Parole du Khalif Général des
Mourides ««««««««««««««««««««««««««««««««6

Allocution du Président de la République Me Abdoulaye Wade««««««««««...9

Allocution de bienvenue de Serigne Khadim Moustapha Abdourahman Lô au nom de


rawdu rayahin««««««««««««««««««««««««««««««13

230  

 
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
Allocution introductive de Cheikh Abdoul Ahad Mbacké Gaïndé Fatma, Président de la
&RPPLVVLRQ&XOWXUHHW&RPPXQLFDWLRQGX&RPLWpG¶2UJDQLVDWLRQGX*UDQG0DJDO «...14

Allocution de Serigne Maodo Sy Dabakh, prononcée au nom des familles et associations


religieuses du Sénégal««««««««««««««««««««««««««...18

Allocution du Professeur Mauritanien Moukhtar Ould Bah, au nom des Délégations


étrangères«««««««««««««««««««««««««««««««..23

La conférence inaugurale présentée par Serigne Khadim Mbacké Cheikhou«««««..24

« Le Mouridisme : Pensée et méthodologie »

I I ± L ES C O M M U N I C A T I O NS««.««««««««««««««««««««««43

2.1± Session I : Réalités et Principes du Soufisme««««««««««««««44

2.2± Session I I : Soufisme et Valeurs humanistes««««««««««««««.67

2.3± Session I I I : Soufisme et Politique modéré«««««««««««««...«.87

2.4±Session I V: Crise économique : le soufisme comme paradigme salvateur««...105

2.4±Session V : Réponse du Soufisme aux crises socioculturelles«««««««...171


C E R E M O N I E D E C L O T U R E««.««««««««««««. «««««««««...201

A N N E X ES««««««««...««««««««««««««««««««««««211

231  

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