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Logique mathématique

S. AZZI
Chapitre 2

1 Logique des propositions


Toute la logique mathématique est basée sur un principe fondamental des mathématiques :  le
principe du tiers exclu  : une propriété est soit vraie, soit fausse.
Alors, si une propriété est vraie, sa négation est fausse et réciproquement.

2 Propositions
Définition 1 un énoncé mathématique (vrai ou faux) est appelé proposition ou assertion.

Exemple 2 1. Pour tout x ∈ R, x2 > 0 est une proposition vraie.


2. Tout triangle est rectangle est une proposition fausse.
3. Une équation n’est pas une proposition

En mathématiques, les théorèmes sont des propriétés très importantes. Ils s’écrivent le plus
souvent à l’aide de liens logiques liant entre elles des propositions.

Exemple 3 Si x ≥ 0 et y ≥ 0 alors xy ≥ 0 est un théorème.


Si ... alors est le lien logique principal. Il relie deux propositions :
xy ≥ 0 est la deuxième proposition.
x ≥ 0 et y ≥ 0 est la première proposition, elle même issue de deux propositions : x ≥ 0 suivie de
y ≥ 0 et séparée par le lien logique ”et”.

3 Les connecteurs logiques


On parle de lien logique ou de connecteur logique pour désigner un terme venant se placer entre
deux propositions pour en former une troisième qui a alors un sens propre.
Ci-dessous, une liste de termes mathématiques avec leur description en langage courant.

3.1 Négation
La négation d’une proposition  P  est la proposition contraire  non P , notée par voir P.
Si l’une est vraie, l’autre est fausse et réciproquement.
Exemple 4 Soit la proposition vraie : ∀x ∈ R, x2 > 0.
La proposition contraire (fausse) est : ∃x ∈ R, x2 < 0.

Exemple 5 La négation de j’ai 18 ans est je n’ai pas 18 ans.

Règles relatives à la négation :


Une assertion P est vraie si et seulement si non P est fausse. On peut donc voir la négation
comme une ”porte logique” qui échange vrai et faux. On peut le représenter par la petite table

1
P V F
.
non P F V

Exemple 6 Si A est la proposition  le triangle est rectangle  alors sa négation non(A) est la
proposition  le triangle n’est pas rectangle .
Soit A est vraie et non(A) est fausse, soit c’est l’inverse : A est fausse et non(A) est vraie.

Exemple 7 Compléter le tableau suivant :

Proposition A non(A)
 x ≥ 0 

 x > 0 

 D1 et D2 sont deux droites parallèles disjointes 

 D1 et D2 sont deux droites distinctes 

 n est un entier pair 

3.2 Conjonction
Conjonction servant à marquer l’addition entre deux propositions. En mathématiques, si P et
Q sont des assertions, (P et Q) est l’assertion qui est vraie lorsque P et Q sont toutes les deux vraies.

Règles relatives à la conjonction :


On peut le voir le et comme la ”porte logique” qui retourne vrai exactement lorsque P et Q
sont vraies. Cela donne la table
V F
P et Q : V V F .
F F F

3.3 Disjonction
Disjonction servant à marquer l’union de deux propositions. En mathématiques, si P et Q sont
des assertions, (P ou Q) est l’assertion qui est fausse sauf si P et Q sont toutes les deux fausses.
C’est donc un ou au sens large, non exclusif.
Règles relatives à la disjonction :
On peut le voir le ou comme la ”porte logique” qui retourne vrai exactement lorsque l’une des
assertions P et Q est vraie, ou lorsque les deux sont vraies. Cela donne la table
V F
P ou Q : V V V .
F V F

3.4 Implication
Relation entre deux propositions telle que l’exactitude de la première entraı̂ne celle de la se-
conde. Le symbole se note ⇒.
 A ⇒ B  se traduit en français par  Si A alors B 

Autrement dit : Si P et Q sont des assertions, l’assertion P ⇒ Q exprime l’idée que si P est vraie,
alors Q doit être vraie aussi, sans qu’il y ait pour autant une relation de cause à effet. Par exemple,
j’ai mon permis de conduire implique j’ai plus de 18 ans, même si ce n’est pas d’obtenir le permis
de conduire qui m’a fait vieillir.

2
Exemple 8  Si x et y sont de même signe alors xy ≥ 0 
 Si x ≥ 0 et y ≥ 0 alors xy ≥ 0  peut s’écrire  (x ≥ 0 et y ≥ 0) ⇒ xy ≥ 0 

Règles relatives à l’implication :


L’implication peut être vue comme la porte logique qui retourne faux exactement quand P est
vraie mais Q fausse.
Cela correspond à la table
V F
P⇒Q: V V V .
F F V

Attention, en mathématiques le OU n’implique pas forcément un choix exclusif !

Exemple 9 Dans un jeu de 52 cartes, on tire une carte. A =  la carte tirée est un coeur  et
B =  la carte tirée est un as .

Si on tire un as de coeur alors A est Vraie et B est Vraie. Donc la proposition  A et B  est
Vraie. La proposition  A ou B  est Vraie.

Si on tire un roi de coeur alors A est Vraie et B est Fausse. Donc la proposition  A et B  est
Fausse. La proposition  A ou B  est Vraie.

4 Réciproque d’une implication, équivalence entre proposi-


tions
À l’aide de ce qui précède, on peut définir deux notions importantes en logique : Réciproque et
Équivalence.

4.1 Réciproque
Définition 10 (Proposition réciproque d’une implication)
Proposition qui se déduit d’une proposition initiale lorsqu’on permute l’hypothèse et la conclu-
sion.
La réciproque de A ⇒ B est B ⇒ A.

Exemple 11 La réciproque de  Si ABC est rectangle en A alors BC 2 = AB 2 + AC 2  est la


proposition  Si BC 2 = AB 2 + AC 2 alors ABC est rectangle en A 

Exemple 12 Écrire la proposition réciproque de :


 Si x et y sont de même signe alors xy ≥ 0  :

 Si x ≥ 0 et y ≥ 0 alors xy ≥ 0  :

Attention, la réciproque d’un théorème vrai ne l’est pas nécessairement !

3
4.2 Équivalence
Définition 13 (Équivalence ⇐⇒ )
Relation entre deux propositions telle que l’exactitude de la première entraı̂ne celle de la seconde
et que réciproquement l’exactitude de la seconde entraı̂ne celle de la première. C’est à dire que
l’équivalence est une double implication. Le symbole se note ⇐⇒ .
 A ⇐⇒ B  se traduit en français par  A si et seulement si B  ou  A équivaut à B 

Autrement dit : Si P et Q sont des assertions, l’assertion P ⇔ Q exprime l’idée que P et Q sont
vraies simultanément. Autrement dit,
(P ⇔ Q) signifie ((P ⇒ Q) et (Q ⇒ P)).
Par conséquent, démontrer une équivalence, c’est démontrer deux implications. Sauf dans des
situations très simples d’application immédiate de règles, on a en général intérêt à les démontrer
séparément.
Exemple 14 Pour A =  x et y sont de même signe  et B =  xy ≥ 0  , on a A ⇐⇒ B.
Pour A =  x ≥ 0 et y ≥ 0  et B =  xy ≥ 0  , on n’a pas A ⇐⇒ B car A ⇒ B ; mais B 6⇒ A.

On peut définir aussi une autre notion importante en logique : Contraposée.


Définition 15 (Proposition contraposée d’une implication)
Soient P et Q sont des assertions. On appelle l’assertion non Q ⇒ non P la contraposée de
P ⇒ Q.
Proposition 16 Soient P et Q des assertions. L’assertion (non Q) ⇒ (non P) est synonyme de
P ⇒ Q.
Preuve 17 à laisser au soin du lecteur.
Remarque 18 Les symboles ∀, ∃, ⇒, ⇔ ne sont pas des abbréviations à insérer dans un texte.
Ils n’ont leur place que dans des formules mathématiques.
Proposition 19 Quelques soient les assertions P et Q, l’assertion P ⇒ Q est équivalente à
l’assertion (non P ) ou Q. Par conséquent, sa négation est
non (P ⇒ Q) ⇔ (P et (non Q)).

5 De l’usage d’exemples et de contre-exemples


La méthode du contre-exemple est une méthode utilisée en mathématiques pour prouver que
certaines affirmations, prétendant à un certain caractère de généralité, sont fausses :
Un exemple sert à illustrer une proposition, qui n’est à priori ni vraie ni fausse.
Un contre-exemple sert à montrer qu’une proposition est fausse.

Si A est la proposition  x ≥ 0 et y ≥ 0  , alors  x = 2 et y = 3  est un exemple illustrant


cette proposition. Cette proposition A n’est à priori ni vraie ni fausse. Elle énonce une propriété.

Si B est la proposition  Si xy ≥ 0 alors x ≥ 0 et y ≥ 0  , alors cette propriété est fausse car


 x = −1 et y = −2  est un contre-exemple.

Trouver un contre-exemple à la proprosition A revient à trouver un exemple niant la proposition A.

Autrement dit :

Une proposition A est soit vraie soit fausse, et si elle est fausse c’est qu’on peut trouver un contre-exemple.

4
6 Quantificateurs

Il y en a deux :

6.1 Le Quantificateur universel


, noté ∀ (= A à l’envers, A étant l’initiale de l’allemand Alle)
Dans la proposition
∗ n(n + 1)
 Pour tout n ∈ N , 1 + 2 + · · · + n = , la locution  Pour tout  est appelée quantifi-
2
cateur universel, noté ∀.
n(n + 1)
On écrirait : ∀n ∈ N∗ , 1 + 2 + · · · + n = . la proposition :  la propriété P (x) est vraie
2
pour toutes les valeurs de x prises dans un ensemble E  se note  ∀x ∈ E P (x) 

∀x ∈ E P (x) se lit : ”pour tout x appartenant à E, P (x) ”, ou ”quel que soit x appartenant à E, P (x) ”

Exercice 20 Écrire à l’aide de ce quantificateur la proposition : le carré de tout nombre réel est
positif ou nul.

6.2 Le Quantificateur existentiel


, noté ∃ (= E retourné, E étant l’initiale de l’allemand Existieren)
Dans la proposition mathématique
1
 Il existe (au moins) un réel x tel que > 0, l’expression  il existe au moins . . .tel que  est
x
appelé quantificateur existentiel ; on utilise alors le symbole mathématique ∃.
1
On écrit alors : ∃x ∈ R, > 1.
x
la proposition :  il existe (au moins) un élément x, prises dans un ensemble E, tel que la propriété
P (x) est vraie  se note  ∃x ∈ E P (x) 

∃x ∈ E / P (x) se lit : ”il existe (au moins) un x appartenant à E tel que P (x) ”,
ou ”pour au moins un x appartenant à E, P (x) ”

Exercice :Écrire à l’aide de ce quantificateur la proposition :  il existe un entier naturel n tel


que n2 soit supérieur à 23. 

Exemple 21 La propriété A =  ∀x ∈ R, x2 ≥ 0  est vraie. Elle se lit : ”Pour tout x réel, x2


est positif ou nul.”
La propriété B =  ∃x ∈ R, x2 = 1  est vraie. Elle se lit : ”Il existe (au moins) un réel x, tel
que x2 = 1”. En effet, x = 1 convient, et x = −1 aussi.

Exercice 22 Écrire la négation des propositions suivantes et préciser laquelle est vraie.
1. ∀x ∈ R, x + 1 > x
1
2. ∀x ∈ R, 2 <1
x +1
3. Tout triangle est rectangle.
4. Tout carré est un losange.

5
5. Tout nombre premier est impair.
6. Il existe un réel x tel que x2 + x + 1 = 0

La négation d’un quantificateur universel est un quantificateur existentiel, et réciproquement :

Autrement dit :

la négation de  ∀x ∈ E, P (x)  est  ∃x ∈ E, non(P (x)) 

la négation de  ∃x ∈ E, P (x)  est  ∀x ∈ E, non(P (x)) .

Exemple 23 La propriété A =  ∀x ∈ R, x2 ≥ 0  est vraie. Sa négation non(A) =  ∃x ∈ R,


x2 < 0  est fausse. Elle se lit : ”Il existe x réel, tel que x2 est strictement négatif.”
La propriété B =  ∃x ∈ R, x2 = 1  est vraie. Sa négation non(B) =  ∀x ∈ R, x2 6= 1  est
fausse. Elle se lit : ”Pour tout x réel, x2 est différent de 1.”

La propriété C désigne :  il a plu tous les jours .


Sa négation non(C) désigne :  il existe (au moins) un jour où il n’a pas plu , et non pas ”il
n’a jamais plu” comme le pensent certains...

6.3 Interversion des quantificateurs

TRÈS IMPORTANT :

LE SEUL CAS où deux quantifications peuvent être échangées est lorsqu’elles sont DE MÊME
TYPE ET SUCCESSIVES. MAIS ON NE PEUT PAS INTERVERTIR ∀ et ∃

Règle : si ”∃y / ∀x” est vrai alors ”∀x ∃y” est vrai aussi, mais la réciproque est fausse.

7 A retenir/à savoir faire


A retenir
– On s’efforce de n’écrire que des assertions complètes.
– Changer la nature ou l’ordre des quantificateurs change le sens de l’assertion.
– En mathématiques, le mot si a un sens précis.
– Attention à la traduction mathématique du mot pour.
– Les termes il faut et il suffit ne sont pas interchangeables.
– Si et seulement si recouvre deux énoncés, et requiert deux démonstrations, une implication
et sa réciproque.
A savoir faire
– Déchiffrer une assertion mathématique présentant des quantificateurs.
– Traduire une phrase du langage courant en assertion mathématique.
– Ecrire la négation, la contraposée et la réciproque d’une assertion, sans les confondre.
– Rédiger un raisonnement par l’absurde, un raisonnement par récurrence.

6
8 Différents types de raisonnement utilisés en mathématiques
Un théorème n’est rien d’autre qu’une assertion complète, dont on affirme qu’elle est vraie, en
s’appuyant sur une démonstration.
Une démonstration de l’assertion P, c’est la mise en oeuvre d’une succession de définitions, de
règles ou de théorèmes connus permettant de déduire que P est vraie. On décrit différentes façons
typiques d’organiser une démonstration.

8.1 Raisonnement direct


Exercice 24 Pour tout rationnel strictement positif, il existe un entier strictement plus grand que
lui.

On aura besoin de l’écriture d’un rationnel sous forme de fraction irréductible.

Rappel 25 Un nombre rationnel est le quotient de deux entiers. L’ensemble des nombres ration-
p
nels est noté Q. Tout rationnel r ∈ Q s’écrit de manière unique r = avec q > 0 et p et q n’ont
q
pas de diviseur commun (autre que ±1).
p
Correction 26 Soit x ∈ Q. Il existe des entiers p et q avec q > 0 tels que x = q (propriété de
Q).
Comme q est entier strictement positif, q ≥ 1 (propriété de N).
Alors p = xq ≥ x (règle).
En particulier, p > 0 (règle).
D’où 2p > p (règle).
Il vient 2p > x (règle).
Comme 2p ≥ 0 (règle),
on remarque que 2p ∈ N (définition de Z).
On conclut que le double du numérateur n = 2p convient.

8.2 Disjonction de cas


Définition 27 Lors d’un raisonnement par disjonction des cas, on étudie tous les cas possibles en
faisant au préalable un tri pour restreindre le nombre de cas à étudier.

Exercice 28 En se ramenant au cas des rationnels positifs, montrer que pour tout rationnel, il
existe un entier plus grand que lui.

Correction 29 On distingue deux cas.


Ou bien x ≤ 0. Dans ce cas, l’entier n = 1 convient.
Ou bien x > 0. Dans ce cas, on applique l’exemple 24, qui fournit l’entier cherché.

8.3 Raisonnement par contraposée


Pour démontrer une assertion du type P ⇒ Q, il suffit de démontrer sa contraposée non Q ⇒
non P.
1 1
Exercice 30 Montrer que si x et y sont des réels distincts de 1, et si x 6= y, alors x−1 6= y−1 .

1
Correction 31 La contraposée de l’énoncé est si x et y sont des réels distincts de 1, et si x−1 =
1
y−1 , alors x = y. Et c’est vrai, car

1 1
= ⇒ x − 1 = y − 1 ⇒ x = y.
x−1 y−1

7
8.4 Raisonnement par l’absurde
Définition 32 Le raisonnement par l’absurde est une forme de raisonnement logique, consistant
soit à démontrer la vérité d’une proposition en prouvant l’absurdité de la proposition contraire, soit
à montrer la fausseté d’une proposition en déduisant logiquement des conséquences absurdes.

Exercice 33 Montrer que 2 n’est pas rationnel.

Correction 34 Par l’absurde. √ Supposons 2 rationnel. Alors il existe des entiers p et q sans
diviseurs communs tels que 2 = pq . On l’écrit p2 = 2q 2 . On remarque que si p est impair, p2 est
aussi impair. Donc forcément p est pair, p = 2p0 . Alors q 2 = 2p02 . Pour la même raison, q est pair,
q =√ 2q 0 . Cela signifie que p et q admettent 2 comme diviseur commun, contradiction. On conclut
que 2 est irrationnel.

8.5 Raisonnement par contre exemple


Pour démontrer une assertion du type (∃x ∈ E)P(x), il suffit de donner un exemple d’un x qui
convient. En passant à la négation, pour démontrer qu’une assertion du type (∀x ∈ E)P(x) est
fausse, il suffit de donner un exemple d’un x qui ne convient pas. On appelle cela un contre-exemple
à la propriété P.

Exercice 35 L’assertion tout entier positif est somme de trois carrés est-elle vraie ? fausse ?

Correction 36 Sachant qu’il n’y a que deux carrés non nuls inférieurs ou égaux à 7, à savoir 1
et 4, le nombre 7 n’est pas somme de trois carrés. Cela prouve que l’assertion est fausse.

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