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Management international
Gestiòn Internacional
International Management

Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou


nouveau champ issu d’un double croisement ?
Alain Fayolle et Lucie Bégin

Volume 14, numéro 1, automne 2009

L’entrepreneuriat familial, un champ en devenir


Family entrepreneurship: a constantly evolving field
El empresariado familiar, un campo en desarrollo

URI : https://id.erudit.org/iderudit/039136ar
DOI : https://doi.org/10.7202/039136ar

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Éditeur(s)
HEC Montréal et Université Paris Dauphine

ISSN
1206-1697 (imprimé)
1918-9222 (numérique)

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Citer cet article


Fayolle, A. & Bégin, L. (2009). Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux
champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? Management
international / Gestiòn Internacional / International Management, 14(1), 11–23.
https://doi.org/10.7202/039136ar

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Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux
champs ou nouveau champ issu d’un double
croisement ?
Alain Fayolle Lucie Bégin
EM Lyon Business School École de Management de Normandie
Lyon, France Le Havre, France

D e nombreuses entreprises familiales agissent régulière-


ment depuis des décennies, dans la plupart des régions
du Monde, d’une manière entrepreneuriale et démontrent
des recherches au croisement de ces domaines pour suggé-
rer les premières balises d’un champ de recherche encore à
développer.
une persistance dans des comportements basés principale-
Pour ce faire, nous présentons d’abord, notre modélisa-
ment sur la poursuite d’opportunités (Stevenson et Jarillo,
1990), la prise de risque, la pro-activité, la capacité d’inno- tion des croisements entre domaines qui donnent naissance
vation, l’autonomie et l’agressivité compétitive (Lumpkin à l’entrepreneuriat familial et nous définissons les prin-
et Dess, 1996). La liste de ces entreprises serait vraisembla- cipaux concepts qui le fondent: famille, entrepreneuriat,
blement longue, mais simplement pour illustrer notre pro- entreprise familiale. Par la suite, nous développons la rela-
pos, nous pourrions évoquer les cas de SEMCO au Brésil et tion famille – entrepreneuriat alors que dans la troisième
CASCADES au Canada. section nous nous penchons sur les liens entre entreprise
familiale et entrepreneuriat. Nous terminons en introdui-
Par ailleurs, de nombreuses familles engagées dans des sant chacune des contributions de ce numéro thématique,
affaires témoignent d’un esprit d’entreprendre qui se trans- avant de conclure sur les pistes de recherche que cette pre-
met de génération en génération et diffuse très largement mière réflexion permet de dégager.
au sein de la famille qui joue alors le rôle d’un incubateur
de culture entrepreneuriale (Steier, 2009). Cet état d’esprit
qui encourage et facilite les initiatives et les comportements Famille, Entrepreneuriat, Entreprise familiale :
innovants des membres de la famille a pour conséquences,
clarification des concepts et modélisation
notamment, la création et la reprise d’entreprises. Pour ne
donner qu’un seul exemple d’une telle famille, nous pour-
des liens
rions évoquer la famille Mulliez1 et ses innombrables créa- Nous proposons d’étudier l’entrepreneuriat familial dans
tions d’entreprises ou d’associations, dans de multiples la perspective d’une double fertilisation croisée, à l’inter-
secteurs d’activités : Auchan, Décathlon, Phildar, Pimkie, section des champs de l’entrepreneuriat et de l’entreprise
Saint-Maclou, Kiloutou, Réseau Entreprendre, etc. familiale (cf. Figure 1). Ceci nous amène à considérer
A l’évidence, le croisement du domaine de l’entrepre- comme premier croisement celui de la famille et de l’entre-
neuriat avec celui de l’entreprise familiale offre des oppor- preneuriat; on s’intéresse alors à l’étude des familles entre-
tunités de recherches susceptibles d’éclairer des situations preneuriales (ou familles en affaires) et à la manière dont
et des pratiques, tant familiales qu’entrepreneuriales, elles influencent la destinée de leurs membres. Le second
encore méconnues mais que nous considérons au cœur de croisement met en lien l’entreprise familiale et l’entrepre-
la dynamique de l’entrepreneuriat familial (Aldrich et Cliff, neuriat et conduit à considérer les entreprises familiales
2003; Brockhaus, 1994; Dyer et Handler, 1994; Rogoff et entrepreneuriales, celles qui se montrent capables de se
Heck, 2003; Chrisman et al., 2007). Or, comme l’ont fait régénérer dans le temps, par l’innovation et la recherche
apparaître les quelques numéros spéciaux parus sur le sujet d’opportunités notamment. En situant ainsi notre l’objet
(Poutziouris et al., 2004; Heck et Mishra, 2008), les tra- à partir de ce double croisement, deux aspects essentiels
vaux sont encore assez peu nombreux à adresser directe- de l’entrepreneuriat familial apparaissent : 1) les rôles et
ment cette thématique et encore plus rares sont les auteurs l’impact des familles entrepreneuriales sur les individus, les
qui en ont donné une définition ou tenté d’en cerner les organisations et le développement économique; 2) les pra-
contours ou la portée. En conséquence, l’objectif de notre tiques d’entrepreneuriat organisationnel dans le contexte
travail est de montrer tout l’intérêt qu’il y aurait à réaliser des entreprises familiales. Ceci étant posé, il nous faut

1. Un article du Nouvel Economiste (no. 905, 30/07/93) estimait, au


début des années 1990, la taille de cette « famille » à 750 parents et
alliés.
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FIGURE 1
Modélisation des liens entre les concepts

FAMILLE

ENTREPRENEURIAT
ENTREPRENEURIAT
FAMILIAL

ENTREPRISE FAMILIALE

maintenant préciser ce que nous entendons par : ‘famille’, s’étendent souvent au-delà de la famille conjugale, dès lors
‘entrepreneuriat’ et ‘entreprise familiale’. qu’on tient compte des devoirs de soutien et d’entraide qui
relient les générations et les personnes apparentées. C’est
dire que la famille étendue peut influencer les membres de
La famille la famille nucléaire et vice versa. Il en va de même dans
les entreprises familiales où la parenté peut exercer de l’in-
Bien que la famille soit considérée comme l’essence même
fluence sans être actionnaire, ni directement impliquée dans
de l’entreprise familiale et le foyer de l’entrepreneuriat
le management de l’entreprise (Anderson et al., 2005).
(Rogoff et Heck, 2003), très peu d’auteurs prennent la peine
de préciser ce que recouvre le concept de famille (Aldrich Plus ou moins inclusive, la notion de famille est fon-
et Cliff, 2003; Clark, 2008). La plupart du temps, on ne dée culturellement et historiquement. Les obligations de
sait rien de sa composition, l’âge de ses membres ou leur ses membres les uns envers les autres et leurs rôles respec-
nombre, de sa structure et des rôles de chacun, des obli- tifs varient selon les cultures, voire entre les groupes eth-
gations qui régissent les relations de dépendance et d’en- niques (Puryear et al. 2008), ce qui influence notamment
traide entre ses membres et entre les générations (Bertrand les valeurs, les buts et les modes de gestion des entreprises
et Shoar, 2006). familiales dans le monde (Gupta et al. 2008; Sharma et al.
2007). De même, la notion de famille évolue dans le temps,
Dans le langage courant, la famille renvoie implici-
la famille du siècle dernier ne ressemble pas à celle d’au-
tement à un groupe de personnes reliées entre elles par
jourd’hui (Quéniart et Hurtubise, 1998). C’est pourquoi,
des liens de sang, de mariage ou d’adoption (Rothausen,
bien que commode, la définition de la famille nucléaire ou
1999). Si ces personnes vivent sous le même toit (critère
conjugale n’est pas adaptée aux configurations familiales
de résidence), cette définition de la famille se superpose à
contemporaines, avec les unions libres, les familles recom-
celle de ménage, utilisée dans les études démographiques
posées, la monoparentalité, l’homoparentalité ou encore, la
et les statistiques nationales (Bonvalet et Lelièvre, 1995;
polygamie (Rothausen, 1999; Martin, 2001).
Steier, 2009). Elle renvoie à la famille nucléaire ou ‘famille
conjugale’ constituée de deux parents de sexes différents et En somme, l’emploi du terme ‘famille’ est à géométrie
de leurs enfants vivant avec eux, conception de la famille variable et « la définition de la famille dépend du contexte
américaine blanche définie par Talcott Parsons qui la carac- culturel du chercheur comme de ses objectifs de recherche »
térise par son individualisme et son isolement par rapport (Pieper et Klein, 2007, p. 306). Par conséquent, pour évi-
au réseau de la parenté (Déchaux, 2003). Mais, la famille ter les écueils d’une vision ethnocentrée de la famille, il
n’est pas une île (Martin, 2001; Nordqvist et Goel, 2008). devient impératif de préciser le type de famille sous-ten-
Ses frontières sont perméables. Les obligations familiales dant les recherches en entrepreneuriat comme en entreprise
Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? 13

familiale, afin ne pas amalgamer dans des conclusions EO include a propensity to act autonomously, a willingness
générales des réalités diverses et donc incommensurables. to innovate and take risks, and a tendency to be aggressive
toward competitors and proactive relatively to marketplace
opportunities”. La nouvelle ‘entrée’ désigne n’importe
L’entrepreneuriat quelle ‘entrée’ qui est ‘entreprise’, pour la première fois,
par un individu, une firme ou une petite unité (Lumpkin et
Il n’est pas facile de définir l’entrepreneuriat ni de clarifier
Dess, 1996, p. 606). Cet évènement désigne le comporte-
ce concept, tant la littérature est abondante et offre de mul-
ment entrepreneurial, et selon les auteurs, il précise le « pro-
tiples points de vue (Fayolle, 2007). Notre modèle renvoie
cessus de recherche d’opportunités » (Stevenson et Jarillo,
vers deux dimensions de l’entrepreneuriat. Dans la relation
1990) et s’échappe de la définition, trop étroite, de « créa-
famille – entrepreneuriat, c’est la dimension individuelle de
tion de nouvelles organisations » (Gartner, 1988).
l’entrepreneuriat qui est, avant tout, privilégiée. Ce qui nous
intéresse ici, principalement, est la création d’entreprise (ou
la création d’activité) par des individus avec le concours,
L’entreprise familiale
au sens large, de leurs familles. Dans la relation, entre-
preneuriat – entreprise familiale, c’est la dimension orga- Malgré quelques décennies de recherches sur l’entreprise
nisationnelle de l’entrepreneuriat qui est prise en compte. familiale, à ce jour, il n’y a toujours pas de consensus sur
L’entrepreneuriat organisationnel (Basso et Fayolle, 2009), la manière de la définir (Poulain-Rehm, 2006; Ibrahim et
sous ses diverses expressions (intrapreneuriat, intrapre- al. 2008; Phan et Butler, 2008) ce qui n’est guère étonnant
neuring, corporate venturing, corporate entrepreneurship, quand on considère, d’une part, la difficulté de définir la
entrepreneurial orientation, entrepreneurial firm, strategic famille qui la sous-tend et, d’autre part, quand on prend
renewal, etc.), fait également l’objet d’une documentation la mesure de l’hétérogénéité des entreprises familiales
foisonnante. Nous en retenons deux approches complé- (Corbetta et al., 2004; Sten, 2007). A la limite, il y aurait
mentaires (Brown et al., 2001) : le management entrepre- presque autant de définitions qu’il y a d’auteurs 2, ce qui
neurial et l’orientation entrepreneuriale. Le management laisse penser que certaines définitions découlent des carac-
entrepreneurial privilégie une conceptualisation managé- téristiques de l’échantillon d’entreprises familiales étudiées
riale de l’entrepreneuriat, qui apparaît comme la poursuite et non l’inverse. S’il est largement admis que les entreprises
et l’exploitation des opportunités d’affaires en dehors des familiales se distinguent d’abord par la dualité famille-
ressources directement contrôlées (Stevenson et Gumpert, entreprise (Lansberg, 1983; Rosenblatt et al. 1985), plu-
1985; Stevenson et Jarillo, 1986, 1990). Cette concep- sieurs questions ont été abordées autour de leur définition.
tualisation intègre les deux dimensions, individuelle et Comment distinguer les entreprises familiales des entre-
organisationnelle, et s’inscrit dans le paradigme de l’oppor- prises non-familiales ? Est-ce que leur différence en est une
tunité (Shane et Venkataraman, 2000) qu’elle a, sans doute, de nature ou de degré ? Est-ce que ces entreprises naissent
contribué à faire émerger. L’orientation entrepreneuriale est familiales ou le deviennent-elles ? Quelles formes peuvent
très souvent présentée dans la littérature comme un héritage prendre les entreprises familiales ?
des travaux de Miller (1983) sur la firme entrepreneuriale,
De nombreux travaux ont cherché à identifier les carac-
même si la formation de ce concept est sujette à discus-
téristiques distinctives des entreprises familiales (EF) par
sion, voire à controverse (Basso et al., 2009). De nombreux
rapport à celles qui ne le sont pas. Les nombreuses défini-
chercheurs ont contribué à forger ses lettres de noblesse, au
tions qui en ont découlé s’appuient toutes sur l’un des trois
premier rang desquels il convient de citer Covin et Selvin
critères suivants ou sur une combinaison de ceux-ci : (a)
(1991) ainsi que Lumpkin et Dess (1996).
l’actionnariat familial (le contrôle), (b) l’implication de la
L’intérêt des travaux de Lumpkin et Dess (1996), que famille dans le management de l’entreprise et (c) le désir de
nous privilégions dans cet article, est d’établir une distinc- transmettre aux générations suivantes (Litz, 2008). D’après
tion entre le « comment » (processus qui conduit à l’acte Chua et al. (1999), pour saisir ce qu’est une EF, il ne suffit
entrepreneurial) et le « quoi » (résultat, c’est-à-dire l’acte pas de tenir compte des critères de propriété ou de manage-
entrepreneurial lui-même). Ils différencient donc l’entre- ment familial, il faut aussi prendre en compte les intentions
preneuriat des processus qui y conduisent et le définissent de la coalition dominante contrôlée par la famille et leur
comme une « new entry », c’est-à-dire « l’acte de lancer une vision de l’entreprise par rapport aux générations suivantes.
nouvelle activité ». Pour Lumpkin et Dess (1996, p. 137), Cependant, la prolifération de définitions témoigne de la
l’orientation entrepreneuriale “refers to the processes, prac- difficulté de se représenter les EF et les non-EF comme
tices and decision-making activities that lead to new entry. des catégories discrètes. Par conséquent, certains auteurs
(…) It involves the intentions and actions of key players proposent plutôt de les envisager sur un continuum dont
functioning in a dynamic generative process aimed at new les extrémités iraient de l’EF pure (où le système fami-
venture creation. The key dimensions that characterize an lial se superpose complètement à celui de l’entreprise) à

2. En 1999, Chua et al. recensent 21 définitions de l’entreprise fami- moins de 30 différentes, ce qui illustre bien l’absence de consensus à ce
liale dans la littérature. Plus récemment, Litz (2008) n’en trouve pas niveau.
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l’entreprise managériale (où les deux systèmes sont totale- La famille : lieu de culture et d’expériences
ment disjoints) (Astrachan et al., 2002; Klein et al., 2005; entrepreneuriales

Sundaramurthy et Kreiner, 2008). Mais le principal pro- La famille transmet l’esprit d’entreprendre et offre des
blème demeure d’établir à partir de quel seuil une entreprise terrains d’acculturation et d’apprentissage à ses membres
sera considérée familiale ou non (Poulain-Rehm, 2006). (Saporta, 2002). Très tôt, au sein d’une famille dans laquelle
œuvre(nt) un ou des entrepreneur(s), l’exposition à des
On le voit, les définitions par la nature ou le degré d’in-
valeurs, à des situations, à des problèmes, peut conduire des
fluence familiale ne permettent pas de résoudre la question
individus d’autres générations à développer une intention
de manière satisfaisante d’autant plus que les EF ne forment d’entreprendre (création de leur propre entreprise, reprise
pas un ensemble homogène d’organisations : elles varient de l’entreprise familiale, etc.) et à renforcer leurs percep-
par leur taille, leur âge, leur cycle de vie, la génération en tions d’auto-efficacité entrepreneuriale.
charge, la composition de la famille, etc. (Gersick et al.,
L’immersion au sein d’une famille, les expériences
1997).
familiales, contribuent à influencer les valeurs, les atti-
Par ailleurs, on peut aussi se demander si une entreprise tudes et les comportements des individus tout au long de
nouvellement créée par un entrepreneur peut être considé- leurs vies. Les orientations et les comportements des indi-
rée familiale. Sinon, à partir de quel moment, le devient- vidus sont influencés par un certain nombre de facteurs
elle ? Pour Chua et al. (2004), une EF serait fondée comme personnels et environnementaux. Les chercheurs en entre-
preneuriat ont ainsi montré l’importance du statut social
telle par contre, pour Litz (2008), ce ne serait pas nécessai-
des activités et des situations entrepreneuriales dans l’en-
rement le cas, le caractère familial pourrait n’être qu’un état
vironnement proche des individus (Begley et al., 1997;
provisoire dans la vie d’une entreprise. Ainsi, dans le cycle Schmitt-Rodermund, 2004). En particulier, il a été démon-
de vie des entreprises, certaines entreprises sont créées à tré empiriquement une corrélation entre le rôle des proches
titre individuel, puis deviennent des EF avec l’implication comme modèles à émuler, et la préférence pour une carrière
croissante du conjoint ou de la famille et seraient éventuel- centrée sur le travail autonome (Matthews et Moser, 1995;
lement cédées à l’externe, cessant alors d’être considérées Scott et Twomey, 1988). En outre, Shapero et Sokol (1982)
comme des EF sauf si c’est une nouvelle famille qui l’ac- ont avancé que la famille, en particulier le père ou la mère,
quière et la dirige, amorçant un nouveau cycle familial. joue un rôle très puissant en développant la désirabilité et
la faisabilité des actions entrepreneuriales. Scott et Twomey
On le voit, la question de la définition des EF reste (1988) ont constaté que les individus dont les parents pos-
ouverte et se heurte à la diversité des dimensions en cause. sèdent (ou ont possédé) une petite entreprise exprimaient la
A cela s’ajoute la prise en compte du contexte socio-cultu- préférence la plus élevée pour le travail autonome et à l’in-
rel et institutionnel dans lequel s’insèrent les EF car cela verse, la moins importante pour des situations de salariés
va affecter la conception de la famille aussi bien que son dans de grandes entreprises. Matthews et Moser (1995) ont
influence sur l’EF (Leaptrott, 2005; Phan et Butler, 2008; quant à eux identifié un lien significatif entre la présence
Smith, 2008). Par conséquent, divers auteurs suggèrent de de modèles de référence parentaux entrepreneuriaux et le
niveau des intentions entrepreneuriales.
recourir à des définitions multicritères qui permettent une
finesse plus grande des résultats et de préciser clairement la Les expériences entrepreneuriales antérieures appa-
définition utilisée afin de disposer de résultats comparables raissent également comme des facteurs qui peuvent agir
parce que fondés sur des critères échantillonnaux homo- sur les intentions et les comportements entrepreneuriaux
gènes (Brockhaus, 1994; Westhead et Cowling, 1998; Sten, (Hills et Welsch, 1986; Kent et al., 1982). Ces expériences
entrepreneuriales peuvent correspondre à quatre sources
2007).
d’exposition possibles pour un individu donné (Krueger,
1993) : une présence concrète de l’entrepreneuriat dans
sa propre famille, un autre parent ou un ami qui a entre-
Famille et Entrepreneuriat : rôle et impact pris, un emploi passé ou présent dans une petite entreprise
de la famille sur le processus entrepreneurial (qui peut être familiale), et enfin, le fait d’avoir démarré sa
Pour certains auteurs, la famille est une source d’oxygène propre entreprise. Cette délimitation inclut donc les phé-
nomènes d’émulation des proches. Krueger (1993) tient
qui alimente la flamme entrepreneuriale (Rogoff et Heck,
compte, dans sa recherche, de l’importance quantitative
2003). La famille est présente tout au long du processus
(« ampleur ») et qualitative (« positivité ») des expériences
entrepreneurial : les parents influencent les enfants, les ins- et trouve des liens significatifs entre des expositions entre-
pirent, leur transmettent des valeurs, façonnent des attitudes preneuriales antérieures positives et les antécédents de
favorables au comportement entrepreneurial et les soutien- l’intention d’entreprendre. Ses résultats sont largement
nent lorsqu’ils créent des entreprises (Dyer et Handler, confirmés par la recherche de Peterman et Kennedy (2003)
1994; Saporta, 2002). réalisée à partir d’un échantillon de lycéens australiens ou
Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? 15

encore celle de Tkachev et Kolvereid (1999) qui concerne La famille peut apporter d’autres types d’appuis et de
des étudiants russes. Plus spécifiquement dans le champ ressources à ses membres créateurs de leur propre entre-
de l’entreprise familiale, une étude de Carr et Sequeira prise. Par exemple, l’étude de Au et Kwan (2009) montre
(2007), utilisant la théorie du comportement planifié de que les entrepreneurs chinois recherchent au sein de leur
Ajzen (1991, 2002), démontre les effets directs et indirects famille les ressources financières initiales plutôt qu’auprès
de l’exposition antérieure à des affaires familiales sur l’in- de financeurs externes et ce d’autant plus qu’ils attendent
tention d’entreprendre. de ce comportement des coûts de transaction plus faibles.
L’argent est certes important pour créer une entreprise, mais
Mais ces travaux montrent que la relation n’est pas le capital humain, en général, l’est bien davantage. Le capi-
toujours positive et Krueger (1993), entre autres, met en tal humain spécifique développé dans un contexte familial,
évidence le fait que des expositions entrepreneuriales anté- à travers notamment des expériences professionnelles réa-
rieures perçues négativement par des individus, peuvent les lisées au sein des entreprises familiales, apparaît être d’une
détourner de l’entrepreneuriat et donc, vraisemblablement, grande utilité quand les générations descendantes décident
de l’entreprise familiale. de se mettre à leur compte (Fairlie et Robb, 2007; White et
al., 2007).
Enfin, la famille, inextricablement liée à la PME, contri-
La famille : lieu d’accompagnement et de soutien de
bue à la dynamique de l’entrepreneuriat local et au déve-
la dynamique entrepreneuriale
loppement économique des territoires. Pour n’en donner
La famille constitue un contexte particulier pour l’entre- qu’un exemple, l’étude de Poutziouris et al. (1997) discute
preneuriat. Elle génère un ensemble idiosyncratique de de l’impact des entreprises familiales dans les Balkans pour
ressources et de capacités qui va s’avérer très utile lors de montrer que leur dynamisme entrepreneurial contribue à
la création d’entreprise (Habbershon, 2006). La famille régénérer des marchés locaux et à stimuler l’économie de
soutient et accompagne le démarrage des entreprises, par marché. Traditionnellement, la famille fournit les fonds, le
des fonds, du temps, des conseils et des encouragements travail et la gestion qui permettent de mettre sur pied des
(Saporta, 2002). De ce fait, elle contribue à fertiliser et PME, donc, de ce point de vue, elle soutient activement
nourrir des dynamiques essentiellement individuelles, qui l’entrepreneuriat. Mais les revenus de la famille provien-
concernent certains de ses membres, mais aussi elle peut nent directement de l’activité de ces entreprises familiales.
jouer un rôle non négligeable dans le développement éco- C’est donc le capital familial qui permet le développement
d’une économie post-socialiste, avec le retour à une société
nomique du territoire où elle se situe (Poutziouris et al.,
plus entrepreneuriale. Ce travail montre bien que la relation
1997).
entre famille et entrepreneuriat peut être aussi étudiée au
Pistrui et al. (2001), dans leur recherche, s’intéressent niveau macroéconomique. On ne traite pas, ici, du fonction-
aux entrepreneurs chinois, aux entreprises qu’ils créent et nement interne de l’entreprise familiale, ni de l’articulation
développent, ainsi qu’aux forces liées aux familles, qui entre le système familial et le système d’affaires, mais du
façonnent le développement des PME en Chine. Les résul- lien entre dynamique entrepreneuriale familiale et dévelop-
tats de l’étude suggèrent que les motivations des entrepre- pement économique3.
neurs privilégient le besoin d’accomplissement dans une
recherche d’indépendance et le besoin d’apprentissage
autour d’un centrage familial. Satisfaire de tels besoins Entrepreneuriat et Entreprise Familiale :
n’est envisageable qu’avec un soutien, quasi inconditionnel déterminants et impact de l’Entrepreneuriat
des conjoints. Selon Van Auken et Werbel (2006), le sou- sur l’Entreprise Familiale
tien et l’engagement des épouses semblent bien constituer Les recherches aux Etats-Unis et en Europe montrent que
un des facteurs clés de renforcement des motivations et de les entreprises familiales contribuent à la création d’emplois
bon achèvement du processus entrepreneurial; la décision et donc, comme nous venons de le voir, au développement
de créer une entreprise pourrait dépendre aussi du degré de économique et qu’il existe des liens positifs entre ces der-
partage d’une vision commune entre l’entrepreneur nais- nières et les notions de pérennité, performance, profitabilité
sant et son épouse sur les buts, les risques et les bénéfices, et entrepreneuriat (Dale et al., 2008; Dyer et Mortensen,
au sens large, de la nouvelle activité. Dans le même registre, 2005; Kellermanns et al., 2008; Poutziouris et al., 2002;
Klyver (2007) montre que l’implication des membres de Puig et Pérez, 2009). Tout cela souligne à la fois l’intérêt et
la famille évolue au cours de la phase de pré-démarrage la nécessité qui résident dans l’exploration des liens entre
et démarrage lors de la création d’une entreprise, qu’elle entrepreneuriat et entreprise familiale. Mieux comprendre
devienne ou non une EF. pourquoi des entreprises familiales ont conservé leur pro-

3. Nous pourrions évoquer également, dans cette perspective, le rôle


et les contributions de certaines familles entrepreneuriales, comme la
famille Mulliez que nous avons déjà mentionnée en introduction.
16 Management international / International Management / Gestión Internacional, 14 (1)

pension à entreprendre alors que d’autres se sont repliées modèle dans cette perspective par lequel il est avancé que,
vers des positions beaucoup plus conservatrices constitue dans un contexte d’entreprise familiale, certains schémas
une première famille de questions. Mieux cerner la notion culturels tendent à préserver une voie traditionnelle de faire
d’entreprise familiale entrepreneuriale, à travers le prisme des affaires alors que d’autres ont pour effet de faciliter le
de l’orientation entrepreneuriale (Lumpkin et Dess, 1996) changement entrepreneurial. Sur cette dualité entrepreneu-
ou du management entrepreneurial (Stevenson et Jarillo, riat vs conservatisme, Le Breton-Miller et Miller (2008)
1991) en représente une deuxième. tentent de réconcilier deux visions opposées des stratégies
et des conduites au sein des entreprises indépendantes: celle
de ‘l’entrepreneuriat’ qui cherche à maximiser la valeur à
Déterminants de l’entrepreneuriat dans les travers la croissance et celle de ‘l’entreprise familiale’ qui
entreprises familiales poursuit des stratégies conservatrices. Ils montrent que le
premier type d’entreprise est plutôt dirigé par un proprié-
La croissance des entreprises familiales et donc, d’une
taire unique, un créateur qui agit et décide sans aucune
certaine façon, leur dynamique entrepreneuriale dépend
dépendance familiale alors que le second est gouverné par
de nombreux facteurs. Pour Kellermanns et al. (2008), le
de multiples propriétaires et/ou dirigeants appartenant à la
comportement entrepreneurial du dirigeant est essentiel.
même famille. Ces constats corroborent d’autres résultats
Ce comportement est influencé par des caractéristiques de recherche qui soulignent l’intérêt d’étudier des configu-
personnelles telles que l’âge et l’ancienneté dans la firme, rations ou des types d’entreprises plus homogènes (Miller,
ainsi que par le degré d’influence de la famille évalué par 1983).
le nombre de générations impliquées dans les affaires.
L’importance du rôle du dirigeant propriétaire est égale- D’autres travaux, enfin, peuvent privilégier la relation
ment soulevée par White et al. (2007) dans leur recherche entre origine ethnique et comportement entrepreneurial
sur la continuité de l’engagement des dirigeants proprié- dans des entreprises familiales (Rodriguez et al., 2009).
taires dans leurs affaires et sur la continuité de ces affaires. L’étude de Basu (2004) s’efforce d’évaluer l’impact de cinq
Des études s’intéressent également au rôle des femmes diri- communautés ethniques sur les aspirations ‘entrepreneu-
geantes dans des entreprises familiales et à la façon dont riales’ de dirigeants propriétaires immigrés d’entreprises
elles peuvent développer des comportements entrepreneu- familiales au Royaume-Uni. Les résultats de la recherche
riaux susceptibles d’influencer leurs entreprises (Barrett et montrent que l’éducation, l’antériorité familiale et la posi-
Moores, 2009; Hamilton, 2006; Sonfield et Lussier, 2009). tion dans le cycle de vie de la famille affectent les aspira-
Ces travaux rejoignent les résultats des recherches de Miller tions lesquelles, à leur tour, influencent les comportements
(1983), par lesquels, entre autres, il est montré que la per- et les pratiques managériales ainsi que la performance
sonnalité des dirigeants est un des moteurs du comporte- entrepreneuriale.
ment entrepreneurial de leurs firmes. Si, pour certains auteurs, la capacité entrepreneuriale
Parfois, ce sont les successeurs et les membres de la repose sur une hypothèse individualiste implicite qui tend
famille, appartenant à la deuxième ou à la troisième géné- à assimiler l’entrepreneuriat organisationnel à celui du pro-
ration, qui vont reprendre le flambeau de l’entrepreneu- priétaire-dirigeant, pour d’autres, (Yan et Sorenson, 2003,
riat et remettre l’entreprise sur les rails de la croissance par exemple), il peut y avoir aussi de l’entrepreneuriat col-
et du développement (Fletcher, 2004; Hoy, 2007). Ces lectif dans les firmes familiales.
successeurs qui agissent comme des entrepreneurs dans
leur entreprise familiale sont qualifiés d’interpreneurs par
Poza (1988), terme qui fait écho aux travaux de Pinchot L’entreprise familiale entrepreneuriale
(1985) dans le champ de l’entrepreneuriat organisationnel L’entreprise familiale est, d’une certaine façon, confrontée
(intrapreneuring). aux mêmes défis que la grande entreprise non familiale. En
Le rôle de la culture et plus particulièrement de la particulier, elle se doit d’instiller le comportement entrepre-
culture organisationnelle est également exploré. Zahra neurial pour développer des nouveaux produits et services
et al. (2004) étudient empiriquement l’impact de quatre dans des marchés existants ou nouveaux. Pour y parvenir,
elle doit s’appuyer sur des compétences techniques appro-
dimensions de la culture organisationnelle sur le com-
priées et mettre en place de nouveaux dispositifs (règles
portement entrepreneurial, défini et mesuré à l’aide du
organisationnelles, ressources dédiées, etc.). Mais elle
construit de Miller (1983), auprès d’un échantillon d’en-
doit aussi et surtout changer ses orientations politiques et
treprises familiales et non-familiales. Les résultats de leur
faire évoluer sa culture organisationnelle pour la rendre
travail montrent des différences significatives entre les
plus favorable à la création d’activités et à l’innovation
deux types d’entreprises. La culture organisationnelle des
(Brockhaus, 1994).
entreprises familiales (centralité du fondateur, emphase
sur le contrôle social) influence et renforce beaucoup plus Rien n’empêche a priori une jeune entreprise familiale
fortement leur comportement entrepreneurial que dans des d’entretenir sa flamme entrepreneuriale et de maintenir
entreprises non-familiales. Hall et al. (2001) proposent un une forte orientation entrepreneuriale. Cependant, avec le
Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? 17

temps, de nombreuses entreprises familiales deviennent opportunités technologiques sur l’entrepreneuriat dans des
conservatrices et de moins en moins disposées à assumer entreprises familiales. De plus, ils font l’hypothèse que
les risques associées aux activités entrepreneuriales (Zahra, la planification stratégique peut modérer ces relations.
2005). Il apparaît donc important de mieux identifier les Les résultats qu’ils obtiennent montrent que la volonté de
facteurs corrélés à la prise de risque dans ce contexte d’en- changement et la ‘reconnaissance’ d’opportunités techno-
treprise familiale. Les résultats d’une étude réalisée sur un logiques sont positivement reliées à l’entrepreneuriat, alors
échantillon de 209 entreprises familiales manufacturières que la planification stratégique modère, d’une manière
américaines, montrent que l’engagement de la famille pro- significative, les relations entre l’implication génération-
priétaire facilite la prise de risque entrepreneuriale, alors nelle, la reconnaissance des opportunités technologiques,
qu’un long exercice du pouvoir de direction par les fonda- d’une part et l’entrepreneuriat, d’autre part. Le fait que,
teurs produit des effets inverses (Zahra, 2005). dans leur étude, il n’y ait pas d’impact de l’implication
L’entreprise entrepreneuriale familiale est celle qui générationnelle sur le comportement entrepreneurial, alors
prend des décisions liées à la poursuite d’opportunités et que dans d’autres recherches une relation positive a été
qui agit pour exploiter ces opportunités. Craig et Lindsay observée (Fletcher, 2004; Hoy, 2007; Poza, 1988; Zahra,
(2002) proposent un modèle de l’entreprise familiale entre- 2005), peut être expliqué par leur échantillonnage qui ne
preneuriale dérivé de celui de Timmons (1999) dans lequel tient pas compte du facteur d’hétérogénéité, lié à l’éven-
les notions d’opportunité, de ressource et d’entrepreneur tuelle présence dans l’échantillon final de différents types
(ou d’équipe entrepreneuriale) apparaissent fortement d’entreprise familiale (Salvato, 2004).
reliées. Ces auteurs complètent le modèle de Timmons en
postulant que la famille et le comité de direction, surtout
s’il contient des membres externes, conditionnent le pro- Contribution du numéro thématique
cessus entrepreneurial mû par des interactions entre oppor- à l’Entrepreneuriat Familial
tunité, ressources et équipe entrepreneuriale. Avec le thème des Journées Doriot 2008 et l’appel à com-
Plutôt que l’approche de Timmons (1999), privilégiée munications pour ce numéro thématique de Management
par Craig et Lindsay (2002), la perspective de l’orienta- International, notre objectif était d’identifier des travaux
tion entrepreneuriale semble s’imposer dans la littérature au croisement des domaines de l’entrepreneuriat et de l’en-
(Brockhaus, 1994; Kellermanns et Eddleston, 2006; Salvato, treprise familiale et de stimuler le développement d’une
2004). Le terme ‘imposer’ est certainement trop fort pour recherche interdisciplinaire originale sur l’entrepreneuriat
signifier que quelques articles seulement s’ancrent, la plu- familial. Nous devons admettre aujourd’hui que l’idée était
part du temps d’une manière indirecte, dans la littérature sans doute trop ambitieuse ou prématurée car très peu d’au-
sur l’orientation entrepreneuriale. Privilégiant la définition teurs abordent directement la question de l’entrepreneuriat
de l’entrepreneuriat de Miller (1983, p. 771) : « a multi- familial, privilégiant à la place un ancrage fort dans l’un
dimensional concept encompassing the firm’s actions rela- ou l’autre champ de l’entrepreneuriat ou de l’entreprise
ting to product-market and technological innovation, risk familiale, là où les communautés scientifiques sont mieux
taking and proactiveness » et s’intéressant à trois types de établies et les assises conceptuelles plus solides. Pourtant,
firmes entrepreneuriales (founder-centered, sibling-cousin comme le présent article introductif l’a montré, le double
consortium, open family firms), selon la typologie proposée croisement de ces domaines de recherche semble des plus
par Gersick et al. (1997), Salvato (2004) s’efforce de déter- prometteurs tant par les éclairages qu’il peut apporter à des
miner les facteurs susceptibles de jouer un rôle majeur dans phénomènes jusqu’ici peu étudiés que par les questions
l’orientation entrepreneuriale des entreprises familiales. À nouvelles qu’il soulève.
travers ses résultats, Salvato (2004) montre que l’entrepre- Les trois articles qui suivent ont donc été sélectionnés
neuriat dans des PME familiales est intrinsèquement relié non pas en tant que « meilleurs papiers » issus des Journées
aux caractéristiques individuelles du dirigeant propriétaire, Doriot, mais sur la base des pistes originales que les auteurs
à certains aspects de la relation entre la famille et l’entre-
empruntent et pour leur contribution au développement de
prise, à des facteurs de gouvernance et d’organisation et à
ce nouveau champ de recherche.
la structure de propriété. De plus, ces relations varient d’un
type de firme à un autre, ce qui confirme, quelques vingt L’article de Jouini et Mignon (2009, ce numéro) aborde
années plus tard, le bien-fondé de l’approche de Miller le lien entre la pérennité des entreprises familiales et l’en-
(1983) basée sur la notion de configuration et de variabilité trepreneuriat par le biais des stratégies d’innovation grâce
du comportement entrepreneurial et des facteurs le déter- auxquelles ces entreprises peuvent se renouveler et persis-
minant en fonction des différents types de configuration ter dans la durée. S’inscrivant dans la continuité des travaux
organisationnelle. Kellermanns et Eddleston (2006) adop- sur les ressources et capacités dynamiques des entreprises
tent également la définition que Miller (1983) donne de familiales, ces auteures se demandent : Comment les entre-
l’entrepreneuriat et s’appuient sur la recherche de Salvato prises familiales développent-elles une culture de prise de
(2004) pour étudier le rôle de trois variables, volonté de risque entrepreneurial calculé conduisant à des innovations
changement, implication générationnelle et perception des spécifiques ? Pour répondre à cette question, elles présen-
18 Management international / International Management / Gestión Internacional, 14 (1)

tent une recherche originale couplant d’une part, l’analyse genre de recherche est important car il interpelle les insti-
de contenu de 15 entretiens de dirigeants d’entreprises tutions d’enseignement et fournit des pistes sur le type de
hénokiennes sur les liens entre les valeurs familiales et les programmes académiques à mettre en place pour favoriser
stratégies d’innovation et, d’autre part, l’analyse en pro- le développement d’attitudes favorables à l’entrepreneuriat
fondeur d’un cas d’entreprise pérenne innovante. Leurs familial.
résultats illustrent l’arbitrage constant que les entreprises
A ces quatre contributions originales, s’ajoute une entre-
familiales pérennes doivent faire entre tradition et renouvel-
vue menée par Alain Bloch et Luis Cisneros avec Danny
lement, d’où l’adoption d’une approche prudentielle de la
Miller, chercheur de réputation internationale tant dans les
gestion des risques liés à l’innovation. L’originalité de leur
champs de l’entrepreneuriat, de la stratégie que des entre-
contribution tient dans la mise en lumière des processus
prises familiales où ses travaux avec Isabelle Le Breton-
sous-jacents au développement des stratégies d’innovation,
Miller ont permis des percées conceptuelles majeures. Au
illustrant ainsi comment l’entrepreneuriat familial s’exerce
cours de cette entrevue, il retrace le cheminement qui l’a
avec prudence dans les entreprises familiales pérennes.
conduit à s’intéresser aux entreprises familiales et s’ex-
Par ailleurs, elles illustrent le lien entre entreprise fami-
prime sur la notion d’entrepreneuriat familial. En complé-
liale et entrepreneuriat en portant leur regard sur les
ment de cette entrevue, nous avons inséré la traduction de
entreprises familiales pérennes qui s’avèrent être aussi
l’article « Filling the institutional void : the social behavior
entrepreneuriales.
and performance of family vs non-family technology firms
Par la suite, l’article de Constantinidis et Nelson (2009, in emerging markets » de Miller et al., paru en 2009 dans le
ce numéro) introduit la dimension du genre dans l’entre- Journal of International Business Studies. Cet article offre
preneuriat familial, en interrogeant les conditions sous les- un complément pertinent en ce qu’il éclaire le rôle que peu-
quelles les filles vont considérer de rejoindre l’entreprise vent jouer les entreprises familiales entrepreneuriales dans
familiale de leurs parents et la perception qu’elles ont de les économies émergentes lorsque les autres institutions
leurs possibilités de carrière dans ou en-dehors de celle- sont déficientes.
ci. Comparant les résultats de deux études exploratoires
Olivier Germain nous offre ensuite un compte-rendu
menées respectivement en Belgique et aux Etats-Unis, les
critique de l’ouvrage Entrepreneurial Family Firms, récem-
auteures montrent que les filles font face à différents défis
ment publié par Frank Hoy et Pramodita Sharma (2010)
lorsqu’elles envisagent de reprendre l’entreprise familiale
lequel, bien qu’il s’adresse surtout à des professionnels et
même s’il y a une acceptation de plus en plus grande des
praticiens en les enjoignant à agir de manière entrepreneu-
femmes en tant qu’entrepreneures ou chefs d’entreprise,
riale, permet de prendre la mesure des ramifications qui
dans la société. Ici, le point d’entrée est le lien entre la
découlent du croisement entre les entreprises familiales et
famille et l’entrepreneuriat car on traite de l’influence du
l’entrepreneuriat. Le dossier thématique se clôt sur « Les
contexte familial dans le développement des attitudes et
notes de lecture de la rédaction », réalisées par Louise
représentations que les filles développent envers l’entrepre-
Cadieux.
neuriat familial. Ce papier est intéressant à plus d’un titre.
D’abord, il montre qu’il est possible de mobiliser simulta-
nément la littérature sur la succession et le genre dans les
Conclusion
entreprises familiales et celle sur l’entrepreneuriat fémi-
nin ce qui illustre la fertilisation croisée des deux champs. Les domaines de recherche de l’entrepreneuriat et de l’en-
Ensuite, il fournit un exemple de dialogue fécond entre des treprise familiale entretiennent, en théorie, des liens étroits
chercheurs travaillant dans deux contextes nationaux diffé- qui ne demandent qu’à être renforcés (Dyer et Handler,
rents. Enfin, l’article propose un agenda de recherche très 1994; Rogoff et Heck, 2003; Poutziouris et al., 2004;
riche qui invite à creuser l’influence du genre sur l’entre- Stewart, 2008). Mais force est de constater que l’entre-
preneuriat familial. preneuriat familial en tant que domaine de recherche est
largement encore une terre inconnue. Si le thème de « l’en-
Pour leur part, Kansikas et Laakkonen (2009, ce numéro)
trepreneuriat familial » interpelle et semble faire sens pour
s’intéressent à la perception que des étudiants Finlandais
un nombre croissant de chercheurs, force est de constater
ont de l’entrepreneuriat familial et de l’idée d’être éven-
que, malgré l’intérêt qu’il suscite, peu d’efforts ont été
tuellement propriétaire d’une entreprise familiale. En ana-
accomplis pour tenter de conceptualiser, définir ou borner
lysant le contenu des essais rédigés par les étudiants inscrits
ce domaine.
dans un cours d’« Introduction à l’entrepreneuriat et aux
affaires », ces auteurs mettent en lumière les représentations Dans cet article, nous avons proposé une première
que les jeunes entretiennent à l’égard de l’entrepreneuriat conceptualisation de l’entrepreneuriat familial, en tant que
et présentent une cartographie de celles-ci. Là aussi, c’est champ de recherches original, résultant du double croise-
le lien entre la famille et l’entrepreneuriat qui est scruté ment de domaines jusqu’ici cloisonnés, famille et entrepre-
car, sous-jacent aux perceptions des jeunes envers l’entre- neuriat, d’une part, entrepreneuriat et entreprise familiale,
preneuriat familial, c’est la capacité du système familial d’autre part. Les travaux s’inscrivant dans le premier axe
à insuffler l’esprit d’entreprendre qui est questionnée. Ce privilégient la dimension individuelle de l’entrepreneuriat,
Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? 19

même si certaines recherches peuvent adopter un niveau interroger ou très peu l’entourage et les autres membres
d’analyse macro-économique. D’une manière différente de la famille ou, plus généralement, les autres stakehol-
et complémentaire, les travaux du second axe se situent au ders (Sten, 2007; Casillas et Acedo, 2007). De fait, cela
niveau organisationnel et considèrent l’entrepreneuriat dans signifiera de s’intéresser à plusieurs types d’acteurs et de
une dimension plus collective. Les concepts d’entreprise répondants.
entrepreneuriale (Miller, 1983) et d’orientation entrepre-
Mais, compte tenu de la grande diversité de facteurs
neuriale (Covin et Selvin, 1991; Lumpkin et Dess, 1996;
intervenant dans l’entrepreneuriat familial du fait de l’en-
Naldi et al., 2007) peuvent alors constituer des cadres théo-
trecroisement des divers systèmes en présence et des rela-
riques pertinents.
tions entre les différents niveaux d’analyse, des approches
Diverses pistes de recherche ont été suggérées pour plus intégrées, holistes seront aussi requises (Olson et al.,
explorer et développer le champ de l’entrepreneuriat fami- 2003; Pieper et Klein, 2007; Basco et Rodriguez, 2009).
lial. Elles portent sur la relation entre famille, dynamique Cela signifie que des études de cas en profondeur et des
familiale et comportement entrepreneurial (Aldrich et Cliff, études longitudinales seront nécessaires pour découvrir les
2003; Heck et al, 2008). La famille joue un rôle essentiel, facettes encore inconnues du phénomène de l’entrepreneu-
exerce des influences multiples sur les individus et sur les riat familial, aux différents niveaux (micro et macro) où il
firmes (Rosenblatt et al., 1985; Chrisman et al., 2007). s’exprime (Chrisman et al., 2007). De fait, comme le rap-
Mais, peu nombreuses sont les recherches, dans le champ pelle Weick (2007), suivant la Loi de la variété requise,
qui nous intéresse, qui utilisent les résultats d’études sur la pour capter la richesse d’un phénomène, une pluralité
famille, dans différentes cultures, dans différents contextes d’approches est nécessaire. Le recours aux méthodes his-
et à travers une pluralité de prismes disciplinaires. D’autres toriques, anthropologiques et ethnographiques pourrait être
suggestions de recherche visent explicitement à l’identifi- ici pertinent afin de développer des théories enchâssées
cation des attributs et/ou des caractéristiques de la famille (grounded theory), embrassant la globalité du phénomène
entrepreneuriale (Heck et al., 2008). D’autres, enfin, dans son contexte. Dans cette veine, des équipes multidisci-
encouragent l’application de concepts et de modèles issus plinaires de recherche sont envisageables car elles sont por-
de l’entrepreneuriat organisationnel, pour étudier les com- teuses d’une pollinisation fructueuse (Sharma et al., 2007;
portements individuels et collectifs dans les entreprises Heck et al., 2008; Stewart, 2008).
familiales. L’agenda de recherche semble déjà très fourni et Des recherches comparant différents contextes cultu-
riche en suggestions, mais nous souhaitons néanmoins en rels et institutionnels sont appelés à prendre de l’ampleur
ajouter une, qui nous vient de la compréhension que nous si on veut comprendre comment les valeurs et croyances
avons des travaux de Miller (1983), repris, dans leur phi- des familles se transmettent dans l’esprit entrepreneurial
losophie, par Salvato (2004). Il nous semble, que si nous et comment celui-ci s’inscrit dans un système social plus
voulons réellement progresser, dans un champ très hété- large (Brice et Richardson, 2009). Les travaux comparant
rogène, comme peut l’être l’entrepreneuriat familial, il des contextes culturels et institutionnels nationaux diffé-
convient de rester toujours attentif à la manière dont nous rents ouvrent ici de nouvelles perspectives pour dépasser
pouvons travailler sur base d’échantillons d’entreprises (et/ la vision ethnocentrée et occidentale qui prévaut dans la
ou d’individus) plus homogènes. Ici se posent les difficultés recherche et enrichir nos modèles (Baker et al., 2005).
d’opérationnalisation des définitions utilisées pour décrire
les objets de recherche et de la nécessité d’opter pour une D’autres difficultés, de bornage et de délimitation sont
approche transparente. Miller (1983) montre que l’entre- également prégnantes. Dans la perspective de l’entrepre-
preneuriat s’exprime différemment dans des configurations neuriat, se pose la question de savoir si une entreprise qui
organisationnelles distinctes. Salvato (2004) observe, d’une démarre est ou non une entreprise familiale. Or, comme
manière comparable, des différences dans la façon dont un le soulignent de nombreux chercheurs en entrepreneuriat
ensemble de caractéristiques et d’attributs ‘expliquent’ le (Cooper et al, 1994; Saporta, 2002; Shapero et Sokol,
comportement entrepreneurial dans différents types d’en- 1982), les conjoints jouent souvent un rôle important lors
treprises familiales. du démarrage d’une entreprise, sans nécessairement deve-
nir co-dirigeant (Kirkwood, 2009). A partir de quel moment
Les recherches à venir sont importantes, car elles peut-on parler d’entreprise familiale ou d’entrepreneuriat
devraient servir de fondations, aussi apparaît-il primordial familial? Est-ce que les membres de la famille qui soutien-
de les concevoir avec la plus grande rigueur conceptuelle et nent l’initiative entrepreneuriale d’un membre sont néces-
méthodologique possible (Debicki et al., 2009). C’est dire sairement habités par l’esprit d’entreprendre ? Est-ce qu’ils
que des efforts devront être consentis pour valider les résul- considèrent que l’entreprise créée est familiale parce qu’ils
tats obtenus jusqu’à maintenant, en recourant par exemple à y donnent un peu de leur temps?
des échantillons de grande taille (Brockhaus, 1994).
Mais ces difficultés sont classiques, s’agissant d’un
Jusqu’à maintenant, la recherche en entrepreneuriat a champ émergent, et plutôt que de les voir comme des
pris surtout en compte le point de vue du propriétaire-fon- menaces, elles peuvent constituer des opportunités de
dateur ou dirigeant ou bien de la génération qui le suit, sans recherche et autant de possibilités supplémentaires de
20 Management international / International Management / Gestión Internacional, 14 (1)

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