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Mars 2017
1. UN PA RCOURS D’A RTISTE------------------------------------------------------------------------------- 1
1.1. Expérience chilienne : un engagement artistique comme évidence politique ------------------------------------------ 1
REMERCIEMENTS-------------------------------------------------------------------------------------------------- 43
Introduction
Ceci est mon parcours d'artiste.
De nationalité artiste, j'ai émigré vers le territoire de l'animation et de la coordination.
Comme souvent, les migrations sont faites de tâtonnements pour tenter de comprendre.
Comprendre les nouveaux codes, les nouveaux mondes, comprendre les mutations aussi,
comprendre enfin ce qui permet une identité nouvelle, faite de racines, déracinements et ré
enracinements.
Je ferai d'abord un retour sur mon expérience d'engagement artistique et le passage vers une
insertion professionnelle lors de ma venue en Belgique parce que c'est cette confrontation qui
a fait émerger ma question sur le rôle particulier d'Animateur artistique au sein des CEC.
Pour explorer la question, je ferai une relecture du décret et les conséquences qu'on peut en
dégager par rapport au profil attendu.
J'en retirerai ainsi deux compétences et une finalité : compétences artistique et pédagogique
imbibés d'engagement et de visée politiques.
Je prendrai ensuite de la hauteur avec quelques auteurs – acteurs qui me semblent être dans le
droit fil des définitions du métier : Paulo Freire pour le rapport entre la pédagogie et la
conscience politique, Paul Ardenne et son « Art contextuel » et Augusto Boal, pour le rapport
entre l'art et la politique. Je prendrai appui également sur les travaux de la philosophe Elise
Derroitte pour aborder les différentes postures possibles et le choix qui me semble adapté à
l'objectif des CEC.
J'en viendrai ensuite à reprendre pied dans la réalité du travail par l'analyse de deux de mes
pratiques d'animation et de coordination au sein de la Maison de l'Amérique latine.
Je suis chilienne, née sous la dictature en 1975, j’ai grandi dans une famille engagée, de
gauche. Au Chili, les années 70 et 80 étaient des années de révolte, ainsi que dans de
nombreux pays d’Amérique latine.
J'ai vécu dans ma chair la violence politique, la répression, les militaires dans la rue, les
violentes différences sociales que le nouveau système économique imposait à la majorité.
Cela m’a marquée à vie.
Puis, j’ai décidé d'étudier le théâtre, j’avais besoin de le faire, je ne peux pas expliquer
pourquoi. Par défi certainement, parce que je pouvais m’exprimer autrement,
paradoxalement, sur scène je pouvais être moi-même.
J’ai étudié à Santiago dans une école « différente », il s'agissait plutôt d'une communauté
artistique. Un atelier. Nous étions 9 élèves. Un « maestro » et deux ou trois professeurs.
Le maestro nous donnait la majorité des cours. Nous étions une famille. Presque sans
vacances, nous travaillions toujours, nous avions une relation directe, personnalisée. Le
« maestro » était brillant intellectuellement, il était professeur d’esthétique de l’art à
l’Université Catholique de Santiago, avocat, journaliste, dramaturge, pédagogue,
comédien, metteur en scène. Il avait mis en place chez lui dans sa maison son propre
atelier, à la façon maitre-disciple. Un atelier peu connu en dehors du milieu artistique, une
sorte de laboratoire de création et de formation des comédiens. Il était considéré comme
un transgresseur dans le milieu artistique conventionnel. Un homme de gauche, marxiste,
athée et homosexuel. Un passionné et un chercheur du théâtre. Il m’a fait découvrir le
théâtre avec un autre regard. Le théâtre pur, son essence, sa valeur, son importance dans
notre société, la beauté de la discipline et sa profondeur ; c'est ainsi que je devins une
passionnée de mon métier.
Durant la première étape de notre formation, nous avons été formés à la psychologie, par
l’initiation et l’apprentissage de soi, et en parallèle, l’histoire de l’art et la théorie (la
philosophie, anthropologie, etc) où il nous apprend l’importance du bagage culturel du
comédien. L'enseignement était autant pratique que théorique. Il se revendiquait du
courant Brechtien, sans refuser l’influence de la méthodologie de tous les autres
hommes et femmes du théâtre du XX siècle principalement.
Pour lui, l’intellect était primordial. Il fallait le développer au maximum pour pouvoir
mieux réagir sur scène, soit dans la technique, soit dans la création des personnages et de
leur contexte sociopolitique. Notre discipline était sacrée. Notre métier était vu comme
un outil, un outil de travail, de lutte, de conscience, de réflexion, de remise en question,
un travail de vie, un style diffèrent ou particulier de vie. Nous avions une mission. Nous
pouvions provoquer une réflexion.
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Le théâtre n’est pas que beauté ou poésie, il n’est pas que « l’art pour l’art », il a aussi une
mission sociale. Mon pays a une histoire, et nous faisions partie de cette histoire. En tant
que personnes de théâtre nous n’étions pas en dehors. Nous ne pouvions pas. Notre
histoire et nos vécus sont attachés, sont inscrits dans notre corps et forcément dans
notre création.
En tant que chilienne, mon travail artistique est engagé au niveau sociopolitique. Nous
sommes influencés par un courant artistique qui vient des années 1960 : « L’art de
l’engagement » (El arte del compromiso) qui répond au monde idéologique de l’Amérique
latine de ces années. Il est demandé à l’artiste de mettre sa créativité au service du
peuple et de la révolution.
« L’artiste ne doit pas seulement lutter contre les formes d’aliénation bourgeoises de l’art
et la mercantilisation de l’œuvre. Il doit, en plus, aider au processus de transformation
sociale ‘en représentant’ (parler pour et à la place de) les intérêts de classe du sujet
privilégié de la révolution : le peuple. Dans les années Allende, l’artiste devient un
« travailleur de la culture », l’idée était de créer ‘un art pour le peuple et du peuple’. Puis,
sous la dictature, l’art et les artistes en général étaient persécutés, exilés, torturés ou
tués. L’art qui arrive quand même à se développer est ‘La escena de avanzada’, force
artistique d’opposition et de résistance à la dictature »1.
1 Aguiló Osvaldo. 1983. Plastica neovanguardista, antecedentes y contextos. Santiago. Citation fait par Richard. 1997 Lo político en el
arte: arte, política e instituciones.
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Le Poète d’Atahualpa Yupanqui2
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J’ai commencé à travailler dans des écoles publiques à Santiago avant de terminer l’école
de théâtre, à 21 ans. J’ai commencé à travailler comme animatrice de théâtre pour enfants
défavorisés. Des enfants des écoles publiques. Avec des réalités que parfois je n’arrivais
même pas à comprendre. Je voyais que certains n’avaient aucun soutien à la maison, il y
avait incontestablement un manque à ce niveau.
Instinctivement, j’ai mis en pratique la manière de travailler enseignée par mon maestro à
l’école de théâtre. Je commençais à prendre conscience de mon potentiel. Je voulais que
mes élèves découvrent aussi ce potentiel chez eux. Après cela, tout était permis.
La première année, l’atelier de théâtre a gagné le premier prix de « Meilleure pièce de
théâtre » dans le cadre du Festival de théâtre des écoles communales. La petite
comédienne protagoniste a gagné le prix de « Meilleure interprétation du Festival »,
Sueli, une petite fille qui m’avait avoué avoir été abusée par son beau-père quand elle
avait 7 ans.
Dans les ateliers, il y avait des enfants violents et violentés, abandonnés, enfants de
parents drogués ou emprisonnés. Ils commençaient à me dévoiler des choses de leur vie.
Je commençais à me rendre compte de l'impact que l'atelier avait sur les enfants, du
regard sur leur propre réalité, je commençais à me rendre compte de l’importance du
travail que je faisais.
J’ai travaillé dans différentes écoles de Santiago sur le même paradigme, pendant 10 ans.
Une fois, j’ai été engagée par le MOP (Ministère d’Ouvres Publiques) pour donner des
ateliers aux enfants de travailleurs durant la garderie les après-midis. C’étaient des
enfants bourgeois. Ce n’était pas la même chose, je gagnais deux ou trois fois plus, mais
j’ai démissionné. Je trouvais que mon travail était moins utile. Ils ne percevaient pas les
ateliers de la même façon. Ils avaient besoin d’autre chose pour lequel je n’avais pas
d’intérêt à travailler à ce moment-là. Je voulais mes enfants de ‘la población’3.
3
Favela chilienne
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J'ai vu comment le théâtre provoque chez ces enfants l’envie de travailler, de créer, de
croire ! Ils sortaient de leurs histoires quotidiennes, de la violence, de la routine sans
affection, de l’abandon, de la misère. Ils utilisaient les outils que je leur donnais et ils
commençaient à les transformer, à inventer par eux même. Ils appréciaient l’activité,
s’engageaient de manière incroyable. Je me sentais utile, cela servait à quelque chose,
j’étais en train de donner des outils importants.
À côté de ce travail d’animatrice théâtrale, une fois sortie de l’école de théâtre, j’ai
toujours continué à développer mon travail personnel, professionnel, comme
comédienne. Je me nourrissais de mon travail comme guide d’enfants à l’atelier de
théâtre (maintenant animatrice artistique des adultes) et comme comédienne. Des
activités complémentaires à mon développement professionnel.
Pendant ma vie professionnelle au Chili (1996-2006), j’ai travaillé aussi comme productrice
et représentante de mes propres travaux comme comédienne. La coordination culturelle
en puissance.
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1.2. Expérience belge : l’art comme insertion professionnelle
Une fois en Belgique, il m'a semblé important de connaitre le réseau culturel, les codes de
communication dans ce milieu et l’artistique spécifiquement. Il m’a semblé très
intéressant de suivre une formation de Coordination culturelle. Je suis arrivée au BAGIC. Il
fallait connaitre ou travailler déjà dans une asbl. Je connaissais la Maison de l’Amérique
latine, où je travaille comme artiste animatrice du CEC depuis 2007. Je devais faire un
stage et j’ai choisi la coordination CEC parce que c’est mon endroit, où je peux intervenir
de la meilleure manière, la plus proche, la plus connue. Il y a, en plus, une charge énorme
de travail. Je savais que j’étais la bienvenue. J'étais motivée.
Le CEC est mon milieu naturel. Je comprends son essence car ma formation de
comédienne et le milieu scolaire où je suis intervenue, m’ont fait réaliser une des
propriétés de l’art fondamental : l’art a la capacité de faire réagir face à une réalité que
parfois il nous semble impossible de changer.
Je me positionne dans mon rôle et décide de mettre en place une équipe de travail. En
même temps je me rends compte des obstacles, je connais le travail des artistes
animateurs à la MAL parce que je fais partie de l’équipe d’animateurs depuis presque dix
ans. Quand pour le BAGIC on me demande de développer un projet de co-construction au
sein d’une équipe, le CEC qui n’a rien d’inconnu pour moi m’apparaît comme une
évidence.
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D’abord, j’ai imaginé une équipe, parce qu’à ce moment-là, il n’y en avait pas. Nous les
animateurs, nous nous connaissions à peine. Mais, en tant que stagiaire de coordination,
je me suis rendue compte que nous avions des choses en commun. Au départ, nous
étions tous des artistes, c'était notre profession principale et nous étions tous externes à
la Maison, chacun donnant des ateliers artistiques différents, hebdomadaires, depuis
longtemps et travaillant de manière très isolée. Très vite, je suis confrontée à d'autres
obstacles : un manque de conscience de la part des artistes animateurs pour le nouveau
paradigme du décret, le manque de budget, le manque de soutien dans la coordination et
les hautes exigences du décret et ses consignes.
Une fois ma formation BAGIC et mon stage dans la coordination CEC terminés, après deux
années de travail, j’ai commencé à réfléchir à mon travail de fin d’étude (TFE).
J’ai réalisé des interviews avec différentes personnes du secteur, des gens très proches
du décret, dans sa partie idéologique, dans sa construction. Puis, je me suis adressée aux
personnes sur le terrain, aux directeurs, aux coordinateurs et bien sûr, aux artistes
animateurs.
Je n’ai pas commencé le TFE avec une question précise. J’avais plein de questions dans
ma tête. Au départ, lorsque j’ai fait l’interview de Patricia Gerimont, je ne savais pas sur
quoi je voulais travailler. A la fin de l’interview, je demeurais dans le flou.
Et enfin j’arrive à une question concrète : Quel est le rôle et la place de l’artiste animateur
dans le Centre d’expression et créativité ?
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2. L’animateur artistique « officiel »
En Belgique, en 1971, les considérants4 de l’arrêté des centres de jeunes. Il y est dit que
"les loisirs sont des occasions de prendre des responsabilités en vue de devenir des
citoyens responsables au sein de la société".
L'ensemble des représentants des maisons de jeunes demandent qu'on ajoute le mot
"critique" et le conseiller du Ministre en charge de la jeunesse approuve immédiatement.
Dès ce moment, la politique d’éducation permanente de la jeunesse entrouvre une porte
à la tradition de l’éducation populaire, à la perspective de l’émancipation des différents
groupes sociaux. Certes, par la suite, le décret de 1976 qui vise les organisations
d’éducation permanente des adultes en affinera la définition.5
Ce paradigme est la base de la « Circulaire » relative aux CEC, qui voit le jour en 1976,
comme une base expérimentale de développement artistico-culturel. Tous les Centres
d’Expression et de Créativité ont travaillé avec cette Circulaire jusqu’en avril 2009, au
moment où le grand décret du CEC voit le jour. Tous les CEC se préparent pour cadrer au
nouveau décret, en vue d'obtenir une nouvelle reconnaissance.
Jusque-là, les CEC travaillaient de manière assez libre, indépendante, sans règlement
établi de manière précise. Les CEC se développaient par rapport à leurs besoins
contextuels, sans avoir forcement une thématique spécifique encadrée. Ils travaillaient
avec une Circulaire qui était nécessaire et cohérente pour les dernières décennies du
XXème siècle en Europe.
Les postulats de ce nouveau décret sont clairs : Article 1e § 1'. Le présent décret a pour
objet la reconnaissance des associations qui mènent des actions favorisant le
développement culturel des individus et des groupes par l'expression et/ou la créativité, par
la mise en œuvre de pratiques artistiques telles que définies à l'article 3, afin qu'ils puissent
se projeter, inventer et participer à la vie sociale et culturelle.
4
Partie d'un jugement de Tribunal administratif ou d'un arrêt de Cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat constituant l'exposé
des motifs de fait et de droit qui justifient la solution adoptée par les juges.
5
Nossent Jean-Pierre. L'histoire récente de l’éducation permanente : Une relecture possible. Vers un retour aux sources de l’éducation
populaire ?
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§ 2. La démarche des associations visées par le présent décret s'inscrit dans une perspective
d'émancipation sociale et culturelle et favorise l'expression citoyenne.
Essentiellement les CEC ont pour mission « de stimuler la créativité par l'organisation
d'ateliers et/ou de projets socio-artistiques ayant pour objectifs :
« Expression citoyenne
• Quel est le sujet, la question abordée ?
• En quoi l’expression dit-elle quelque chose sur le monde, sur le juste et l’injuste, sur des
enjeux sociaux et/ou sociétaux ?
• Comment l’expression se met-elle en débat dans l’espace public ? Pourquoi avoir fait le
choix de cet espace public ?
• Effets, résultats et impacts : - Sur les participants (augmentation de la capacitation,
changement de rôle, élargissement des mentalités, processus émancipatoire,…) - Sur le
groupe : repositionnement du groupe, actions collectives; - Sur la société: prise de
conscience, changement des représentations, évolution des mentalités, débat,… »6
Nous devons développer clairement des sujets qui concernent notre réalité. Nous devons,
d’une manière consciente, mettre en place un atelier artistique qui a pour objectif (entre
autres) :
Dans le décret il y a aussi des projets à développer avec des objectifs spécifiques c-à-d
avec un public spécifique.
« Public spécifique : personnes vivant dans des situations de grande précarité ou personnes
dont il est établi médicalement qu’elles présentent un handicap mental, une maladie
mentale grave ou un handicap physique. »7
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A partir de maintenant le décret exige aussi, de décrire et d'évaluer avec précision les
différentes démarches créatives concrètes mises en œuvre dans l’atelier, l’orientation
pédagogique générale qui fonde l’action du CEC. Il exige de chaque coordinateur-
coordinatrice d'évaluer des objectifs artistiques, pédagogiques et citoyens pour chaque
démarche de l’animateur dans l’atelier.
Ce dernier paragraphe est essentiel dans mon questionnement. Ces objectifs sont
développés sur la base de démarches créatives, ces démarches doivent être portées par
une personne qui possède une expertise bien définie.
- Transmettre
- Susciter la recherche
- Concevoir des démarches créatives
- Réaliser une présentation annuelle du travail développé avec les participants à un
public.
- Mener un projet socio artistique déterminé.
Pour mieux développer mon travail, j’ai interviewé Patricia Gerimont, responsable du
service de la Créativité et des Pratiques artistiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles
depuis 1998. Elle a laissé entendre clairement que la reconnaissance des CEC passe aussi,
par la constatation que le CEC en analyse doit avoir minimum 80% d'artistes
professionnels dans son équipe d’animation.
8
Vadémécum
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D’après Patricia Gerimont, le projet CEC avant même la circulaire de 1976, est conçu
comme une alternative à l’éducation classique, la formule hiérarchisée de l’éducation
traditionnelle était mise en question. On part du fait que l’éducation traditionnelle
restreint la créativité de l’enfant plutôt que de la développer. La circulaire devient une
manière de proposer d'autres chemins. « Nous avons besoin d’une autre forme
d’apprentissage, d'une autre méthode, avec d'autres objectifs ».
Patricia Gerimont dit encore : « Le Décret devient une nécessité. La Circulaire donnait un
cadre trop général : il manquait une philosophie, il y avait un cadre quantitatif mais pas
qualitatif. A l’époque, le concept de ‘socio-artistique’ ou ‘socio-politique’, n'existait pas. Il y a
avait peu d'artistes qui travaillaient sur ces questions il y a 40 ans. Le contexte était propice
à ce moment-là, pour ce type de proposition expérimentale, maintenant c’est important de
se professionnaliser, il faudrait de la ‘qualité’ à tout niveau ».
Ce sont des personnes qui doivent concevoir des ateliers d’une discipline artistique en
particulier avec tous types de public, une thématique spécifique sur l’actualité, sur une
problématique sociale réelle. Les animations et le changement régulier de public exigent
forcément que l’artiste se forme de manière autodidacte en pédagogie. Il apprend sur le
terrain.
Nous sommes face à un décret qui impose donc deux expertises bien précises. Artistique
(formelle) et pédagogique (informelle, de l’expérience).
Nous constatons, que l'artiste - animateur est un personnage clef du projet. Il est en
première ligne, celui qui enclenche le travail des participants.
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Pour professionnaliser le projet, nous avons donc besoin :
Pour travailler sur des enjeux de société, nous avons besoin d’une personne
‘engagée socialement et politiquement’. Pas forcément un/e militant/e politique,
mais une personne consciente et intéressée par son contexte social, avec le besoin
de le remettre en question de manière artistique.
Je voudrais m’arrêter sur l’hypothèse que l’artiste animateur doit posséder trois
compétences pour réussir sa mission au sein du CEC. Pour ma part, les dimensions
artistiques et pédagogiques sont liées à la dimension politique qui apparaît comme une
finalité transversale aux deux compétences indiquées.
Mais pour l’instant, la face politique de l’artiste - animateur est juste une intention car il
n’y a aucun élément dans sa description de fonction qui précise que cette personne soit
prête à travailler sur cette dimension et ce, de manière transversale.
Mon interprétation par rapport à l’expression citoyenne dans le CEC, c’est que l’artiste -
animateur doit être engagé dans une société qui n’est pas étrangère à sa création. En tant
qu’artiste, il est d’office très sensible à l’entourage, il est constamment en train de
participer à la recréation et représentation de soi-même et de la société, de la nature
forcément. L’artiste - animateur, est aussi un individu qui sème la graine de la réflexion
dans la société à travers l’art. Je mets au centre l’artiste comme tel, parce qu’il est au
cœur des besoins de la démarche pédagogique – artistique – citoyenne.
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3. Quelques regards théoriques pour articuler compétences et
intention
Il ne faut pas oublier que les artistes animateurs du CEC sont en face d’un public très
diversifié. Par exemple au niveau de différences sociales : nous devons parfois travailler
avec un public très précarisé et d'autres très favorisés, le travail se développe donc de
manière tout à fait différente. Idéalement, les ateliers devraient être mixtes socialement
mais dans la réalité ce n’est pas toujours le cas. Chaque CEC est fort déterminé par
certains éléments : le quartier, les subventions dont il dépend, ressources humaines,
partenaires, etc.
Avec un public favorisé (ex : capable de payer sans problème 200€/trimestre ou plus pour
un atelier), c’est différent car ils sont dans un autre paradigme. Ils sont dans la recherche
de l’apprentissage d'un savoir-faire. Leurs besoins basiques étant déjà satisfaits, ils sont à
la recherche de compléments de formation dans une discipline artistique qu’ils ont envie
de maitriser. Ils participent aux ateliers pour « s’amuser, pas pour souffrir avec la douleur
du monde» (dixit une participante d'un de mes ateliers), pour eux il s'agit plutôt d'un
‘hobby’. Chez eux, le déclenchement créatif d’une problématique sociale n’est donc pas
forcement automatique, il faut pousser plus loin, il faut activer d'autres outils pour y
arriver. L'artiste - animateur doit donc être absolument convaincu que le travail à faire ou
en voie de réalisation est vital pour changer une certaine situation injuste. Cette
conviction ne peut pas être artificielle ou hypocrite, elle doit être vraie. Ensuite, les
participants suivront.
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3.1 Articulation entre Pédagogie et politique : Paulo Freire
Dans cet énoncé, je suis attentive aux mots que j'utilise. Il ne faut pas confondre politique
pédagogique et pédagogie politisée.
« La pédagogie de Paulo Freire est, par excellence, une pédagogie de l’opprimé, qui ne
postule pas des modèles d’adaptation ni de transition de nos sociétés, sinon que des
modèles de ruptures, de changement et de transformation totale».9
Pour lui, l’alphabétisation, donc l’éducation, est automatiquement humaniste car elle
prône l’intégration de l’individu à sa réalité sociale, avec la peur de perdre sa liberté et le
besoin de susciter chez l’élève un processus de recréation, de recherche, d’independance
et en même temps de solidarité.
Il nous dit que la véritable éducation est « praxis, réflexion et action des hommes et des
femmes sur le monde pour le transformer ».10
Il voudrait que ses compatriotes cassent leur propre passivité et silence, qu’ils
reconnaissent la force de leur unité transformatrice, qu’ils acquièrent la capacité critique
pour s’impliquer et s’approcher de la société, qu’ils se libèrent de leurs chaines, seule
possibilité de changement de la société. Il se réfère aux idées révolutionnaires novatrices
en vigueur en Amérique Latine durant les années 60, imprégnées du langage de libération
qui a émergé des courants les plus avancés du catholicisme et qui ont provoqué la
Théologie de la libération, en utilisant des éléments de la dialectique marxiste pour la
vision et la compréhension de l’histoire.
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La personne en situation d'apprentissage (terme générique utilisé dans sa méthode
d’alphabétisation), prend conscience de sa propre réalité, elle est capable de mieux la
comprendre et d’agir concrètement face à des situations injustes.
Pour Paulo Freire il faut être critique par rapport aux idéologies qui vont à l'encontre de la
nature humaine, nous ne pouvons pas tomber dans le piège de croire que les choses ne
peuvent pas changer car ‘elles sont comme ça’ parce que c’est un besoin du système
capitaliste. Ou que ‘les blancs sont supérieurs aux noirs’, ou que ‘les chômeurs sont une
peste qu’il faut éradiquer parce qu’ils ne font rien de leur vie’… etc etc. Il propose d’être
critique face à ce type d'idéologies car il croit que la seule manière de mieux vivre est de
se reconnaître dans l’autre au travers du dialogue, avec respect et compréhension de
l'autre et de sa réalité, pour pouvoir agir et transformer la société. Il pense que le fait
d’enseigner est la reconnaissance que l’éducation est idéologique et qu’elle doit être
forcément éthique. Il dit que l’enseignant ne transmet pas des connaissances, la
connaissance ne se transmet pas, « elle est en train de se construire », elle est la
construction heureuse d’un monde commun.
Un des éléments qui me semble très intéressant dans sa pensée, est la vision spécifique et
précise de l’enseignant, il développe ces idées surtout dans sa « Pédagogie de
l’autonomie » (2004) où il développe et parle aux enseignants de son idée d’éducation à
la liberté. Des compétences que l’enseignant doit avoir, de l’éthique, de la non-
discrimination, du respect pour l’élève, de l’apprentissage qui émerge de l’acte
d’enseigner, de l’engagement, de la générosité, de l’autorité, de l’exemple, de la
disposition pour le dialogue, de la compréhension que l’éducation est une manière
d’intervenir sur le monde..., des idées justes qui nous aident à mieux comprendre de
quelle manière nous pouvons agir positivement sur notre communauté.
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Tous les artistes travaillant dans les CEC sont-ils conscients de ce modèle d’éducation ?
La question qui revient alors est la relation entre l'art et la politique pour chercher les
relations entre art-artiste-spectateur et œuvre, questions toutes présentes dans le travail
au sein des CEC.
Comme le propose Elise Derroite, « on ne peut pas penser la création hors de tout cadre
institutionnel », nous ne pouvons pas concevoir l’artiste et sa création comme des entités
séparées de leur contexte, la base politique dans l’art est donc déjà établie.
Elle analyse trois manières de relier la production artistique à l’engagement citoyen ou
politique11 :
11
Elise Derroite, docteure en philosophie, chercheuse de l’UCL et plasticienne Créer (dans) l’espace public ? L’Esperluette n°75. 2013
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Le tableau ci-dessous montre les lieux où se concentre la décision, il met en évidence
l’acteur qui a le plus de pouvoir dans la relation entre l’œuvre d’art et l’engagement
politique.
Evidemment, ce schéma résumé n’a de sens que s’il est envisagé de manière dynamique.
Il n’y a pas une seule manière de faire une œuvre et de la présenter à son public. Ce
processus est un processus historique au sens où il évolue au fur et à mesure de sa
réalisation. De cette manière un acteur mobilisé par sa rencontre avec une œuvre d’art va
se mettre en position de décider par rapport à ses homologues. Il peut alors prendre une
des trois modalités de compréhension de la relation de l’art à la politique : tenter de
convaincre son interlocuteur, le diriger ou lui proposer une expérience. Le passage d’un
lieu à un autre se fait donc différemment en fonction de la manière dont ces relations
sont envisagées.12
Selon cette typologie, il paraît évident que nous utiliserons donc la Co-construction dans
le travail artistique en CEC.
L’artiste qui s’inscrit dans cette démarche est une personne avec une sensibilité qui
l’amène à communiquer, à exprimer ses connaissances, une personne qui a besoin de
changer ce qui est établi, de réagir face aux injustices, de chercher l’essentiel, la vérité.
Par son travail tant dans le fond que dans la forme,il transgresse l’ordre établi ? Il est une
personne qui croit et qui est convaincue de la puissance de l'Homme. Un humaniste.
T.W. Adorno, héritier de la pensée de Marx, conclut que « sans le social l'art ne peut pas
exister ».13
« Le théâtre est une activité de contestation sociale. » « Le grand artiste, forcément, est un
rebelle.14 »
Pour l’artiste - animateur, l’éducation et l’art sont des outils, des armes pour améliorer
l’humanité, il croit à l’évolution et à la perfectibilité de l’être à travers la pratique de l’art.
C'est quelqu'un qui est capable de mettre en valeur une part fondamentale de l’individu :
les émotions, les sens, dans une société où ces derniers sont presque oubliés, invisibles,
inutiles. Un chercheur de l’équilibre, de l’harmonie parce que il/elle devra gérer un groupe
de personnes, parfois très fragilisées, parfois porteurs de handicaps, des personnes de
différentes cultures et niveaux économiques, différents âges et genres, etc. Le public de
CEC est un public très diversifié !
12
Elise Derroite. L’Esperluette n°75. 2013
13
Wikipédia
14
Claude Stratz, Directeur du Conservatoire supérieur d’art dramatique de Paris.
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Dans l’art, la transmission de sens est intrinsèque à la création.
15
John Ruskin.
16
Marcel Duchamp.
17
Peintres mexicains du XX siècle
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Une approche particulière : l'Art Contextuel.
Pour donner une définition plus claire de l’identité de l’artiste au sein du CEC, je voudrais
parler de « L’Art contextuel 18». Un concept ou une manière de concevoir l’Art développé
par Paul Ardenne19 et de son lien avec l’espace. Je voudrais utiliser ses principes pour
signifier que l’artiste du CEC ne peut pas être n’importe quel artiste. Il doit proposer une
vision spécifique de l’art dans ces ateliers. Il devrait avoir un positionnement clair de son
travail artistique et politique, en tant que créateur et animateur.
Même si Ardenne part de la base des Arts Plastiques, il universalise sa pensée de l’art en
l’amenant à toutes les autres disciplines. Ardenne emmène l’art dans la rue. Avant, on
était invité à contempler l’art dans des espaces identifiés, emblèmes du pouvoir
économique ou symbolique (musées, galeries, théâtre, etc). Plusieurs artistes, à partir des
années 60 vont abandonner ces périmètres sacrés de la médiation artistique pour
présenter leurs œuvres dans la rue, espaces publics, la campagne, ou n’importe quel
endroit qui permet d’échapper aux structures institutionnelles.
L’Art contextuel est un art qui s’approprie différentes formes de l’espace urbain et
d'autres paysages, un art qui travaille dans un espace et un temps concrets, particuliers
(art spécifique). Il y a différents types d’art contextuel, c’est une catégorie ouverte à
n’importe quel type d’œuvre.
Pour l’Art contextuel, l’art n’est plus pure contemplation, l’art est Action. Les artistes
contextuels refusent l’art pour l’art ou le principe d’autonomie. Ils revendiquent la mise
en valeur de la réalité brute.
Pour eux l’art doit être lié aux choses de tous les jours, il doit se produire en lien étroit
avec le « contexte ». L’art contextuel est l’art d’intervention et l’art engagé de manière
active.
Paul Ardenne dit, « pour l’artiste, la priorité est que la création se rende compte de la réalité
avant de travailler sur le simulacre, la description figurative ou jouer avec le phénomène des
apparences ». L’art contextuel donc, choisit une relation directe, sans intermédiaires,
entre l’œuvre et la réalité.
Cette perspective de la réalité n’est jamais neutre, elle est polémique et critique, l’œuvre
s’approprie l’espace public pour souligner les questions que la société laisse dans ces
recoins les plus obscurs, questions que la société est incapable de nommer qui restent
intraduisibles sauf pour l’art.
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Car on parle d’un art polémique qui présente la réalité selon ses perspectives inédites
dans les différentes formes d’espaces, ce qui nécessite l'implication du public à différents
niveaux. L’idée est de s’approprier la réalité, de la découvrir ensemble, et l’œuvre
s’adapte à elle. L’univers de prédilection du travail de l’artiste se transforme en un univers
en soi, soit social, politique, et économique.
La première qualité de l’Art contextuel est donc l’indéfectible relation avec la réalité.
Le système de l’art a toujours instauré une politique de la contemplation passive. L’art
contextuel veut aller contre ces principes et propose comme guides la participation
directe et de nouvelles voies sensorielles, pas seulement pour un ‘nouvel art’ mais aussi
pour une nouvelle vie en société. L’artiste contextuel vit la double situation de faire partie
de plein droit de la société alors que sa position d’artiste revendicatif l’amène à refuser
cette société, dont il souligne les imperfections et les perfectibilités.
L’artiste « tricote » avec le monde qui l’entoure. Ce positionnement de l’artiste est décidé
et volontaire. Les espaces traditionnels de l’art sont devenus trop étroits pour la création,
donc il sort pour créer avec les autres, pour que le lien entre artiste et public soit le plus
court possible.
Ce sont les problèmes que rencontre l’art contextuel mais aussi l’artiste du CEC. La
somme de circonstances réelles avec lesquelles l’artiste travaille, sont-elles critiques,
sont-elles polémiques, sont-elles intéressantes, est-il d’accord avec celles-ci ? Existe-t-il
une esthétisation possible et pertinente de la vie matérielle ?
Pour Champfleury20, l’art doit travailler dans la « réconciliation » entre les hommes et la
société, ceci est sa mission suprême.
William Morris21 dit : « Tout type d’art, même le plus grand, est influencé par les conditions
de travail de la masse de l’humanité, c’est ridicule et banal de prétendre que l’art, même le
plus intellectuel, est indépendant de ces conditions générales »
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L’individu se transforme en artiste, parfois guidé par les instructions de l’artiste, parfois
laissé libre de proposer sa propre vision, mais toujours indispensable à la réalisation
pratique du fait artistique.
Une forte vocation politique est nécessaire dans ce type d’art. Le public, les participants,
l'utilisateur, le spectateur, qui créent l’œuvre et lui donne ses caractéristiques
d’expérimentation. La création collective est une extension de la démocratie.
Dans ce concept, le processus de création devient fondamental car les participants
constituent l’élément déclencheur du dispositif créatif et de son innovation continuée,
l’œuvre d’art n’est pas le fait mais plutôt le processus, elle est ouverte, comme dans la
société.
Un autre exemple de la dimension d’art politique dont j’ai parlé dans l’introduction de ce
chapitre est le théâtre - action, et plus concrètement « Le théâtre de l’opprimé »
d’Augusto Boal.22
Influencé par Bertolt Brecht, Boal propose de rendre accessible le langage théâtral en
tant que méthode pédagogique pour la transformation de la réalité sociale.
Montrer au théâtre les différentes formes d’oppressions dont l’être humain est victime et
faire monter le spectateur sur scène avec les comédiens.
« Offrir à chacun, selon sa propre problématique, une méthode esthétique pour analyser son
passé dans le contexte de son présent, pour inventer son futur sans attendre qu’il arrive ».23
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Le théâtre de l’opprimé est une répétition de la réalité, un système esthétique qui permet
aux gens de jouer dans la fiction du théâtre, de devenir protagonistes, des individus
acteurs de leur propre vie.
C’est une vision qui ressemble à la vision de Paulo Freire mais en l’amenant au contexte
de l’art. En fait, Paulo Freire et Augusto Boal sont contemporains.
Aujourd’hui la méthode de Boal est pratiquée dans 70 pays, ces principaux utilisateurs
sont des paysans, des enseignants, des étudiants, des travailleurs, des assistants sociaux
et des psychothérapeutes. Elle est utilisée dans des programmes d’alphabétisation, au
sein des prisons, également lors de discussions dans la rue sur des problèmes ou lois
touchant au citoyen commun.
Cette méthode est un exemple très représentatif de comment une activité artistique
devient politique dès que les artistes s'unissent pour concevoir l’art.
L’artiste animateur du CEC n’est pas un artiste qui voit et qui développe « l’art pour l’art ».
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4. Réalités de métier
« Metteur en scène et éclairagiste, musicien techno et organisateur de raves, écrivain et
directeur de collection, danseur hip-hop et animateur, comédien et serveur dans un fast-
food, chorégraphe et enseignant, clarinettiste et sociologue : la pluriactivité dans le champ
artistique présent aujourd’hui d’innombrable facettes. Face au défi que les professions
artistiques posent à l’analyse sociologique, Eliot Freidson (1986) proposait de distinguer
l’activité libre, reposant sur un engagement personnel, à l’activité exercée pour le marché. Si
cette distinction est à retenir, elle n’épuise pas l’éventail des situations rencontrées :
aujourd’hui « vivre de son art » implique souvent de vivre aussi « grâce à l’art » en tant
qu’enseignant, administrateur, technicien, animateur d’atelier, médiateur, critique,
chercheur… « Et à part ça, vous faites quoi ? »25
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Les associations se sont tellement développées qu’il a fallu engager des animateurs
spécifiques en externe.
J’ai interviewé 7 personnes travaillant, soit comme coordinateur ou directeur, soit comme
artiste - animateur, dans 7 CEE différents, ainsi que Matteo Segers, directeur de
l'Association des Centres culturels de la Communauté française.
Même si au Chili il n’existe pas de projet de CEC comme tel, une partie importante des
ateliers artistiques se développent dans l’école publique en tant qu’activité extrascolaire.
Ces ateliers sont gratuits pour les enfants, les artistes-animateurs étant engagés par la
commune. La situation sociale dans ces écoles, exige de la part des artistes - animateurs
une intervention très active (qui se donne de manière naturelle à cause du contexte) au
niveau de la réflexion et des actions à mettre en place face à la réalité. La communauté
d’enseignants et d’artistes - animateurs est obligée d’assumer des actions concrètes dans
leur méthodologie de travail, car le système éducatif est d’une telle ségrégation, que les
écoles communales concentrent une majorité d’étudiants avec les plus bas niveaux
économiques, sociaux et culturels.28
Depuis mes débuts comme artiste - animatrice, j’ai été obligée de développer des outils
pour travailler avec un public infantile défavorisé dans un contexte socio-culturel très
précaire (le Chili dépense pour l'enseignement 4.6% de son PIB contre 6.6% en Belgique29).
Sans le savoir, j’étais en train de développer et d’apprendre le mécanisme d’animation
d’éducation populaire, de toute façon, bien enracinée déjà à l’Amérique latine.
Il est ressorti des interviews des idées semblables quant à la façon dont chaque CEC
traitait ses professionnels. Gestion d’équipe, nombre d’animateurs, subsides, nouvelles
exigences et problématique pour arriver à réaliser les objectifs, engagement de types,
professionnel et administratif. J’ai constaté un fort déséquilibre à ce sujet par rapport aux
nouvelles exigences et possibilités de chaque CEC, à savoir, la reconnaissance de l’artiste -
animateur comme professionnel.
28
Portrait de l’inégalité au Chili » Senat de la République du Chili. Chapitre : desigualdad escolar en Chile(en espagnol).
29
Banque mondial/ Eurostat, statistics explained.
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Pour éclairer ces tensions voire paradoxes et déséquilibres entre des attentes à l'égard
d'un rôle professionnel et sa reconnaissance effective et légale, je reprends ici les
différents types de contrats ou conventions qui encadrent le travail des artistes -
animateurs.
Les artistes - animateurs engagés à la prestation travaillent sous des contrats ou des
conventions artistiques : comme SMART, Art 17, contrat direct avec une ASBL ou CCs ou
encore la fameuse convention RPI : Régime de petite indemnité, très utilisé par les
associations.
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4.2. Quel statut avec quelle reconnaissance ?
Enseignant ?
Malgré les compétences pédagogiques attendues, le CEC ne demande pas de formation
spécifique d’enseignant. Les artistes-animateurs du CEC ne sont pas des enseignants. Ce
ne sont pas les professionnels avec lesquelles nous allons nous trouver dans le secteur.
Alors, je ne trouve pas les arguments pour que l’artiste - animateur soit reconnu en tant
qu’enseignant, s’il ne l’est pas.
Animateur socioculturel ?
Etre reconnu comme animateur socioculturel est, à mon avis, curieux. Une animatrice ou
animateur socioculturel pourrait parfaitement travailler dans les CEC. Selon la définition
de l'animation socio-culturelle, c’est la personne parfaite pour occuper ce « poste ».
Cependant, et logiquement, le décret demande des artistes, il promeut l’interaction
entre artistes et communauté. Le métier d’artiste - animateur n’est pas reconnu, ni
comme un travail artistique ni comme un travail d’enseignant et le statut d’animateur
socioculturel n’existe pas non plus.
Le fait que l’artiste - animateur travaille moins de trois heures par jour favorise les
conventions RPI. Une convention qui ne protège pas du tout les droits du travailleur car
ce n’est même pas un contrat.
Comment font les syndicats pour protéger les droits de ces travailleurs si la dynamique va
à l'encontre de la loi établie ? Apparemment pour l’instant, il n'y a pas de solution. On
accuse les artistes d’être tellement individualistes qu’ils ne sont pas capables de
s’organiser pour améliorer leur condition de travail. Pour moi, ayant connu l’expérience
syndicale chilienne des comédiens « Sidarte »31, l’erreur est de vouloir mettre dans le
même sac tous les artistes. Or, une discipline artistique n'est pas l'autre.
31
La présidente chilienne du syndicat « Sidarte » Andrea Gutierrez, a été élue en 2016 présidente de la Fédération Internationale de
comédiens pour l’Amérique latine. (http://www.sidarte.cl/directorio/)
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Une autre incohérence que je constate dans les interviews et dans la recherche
informelle, c’est que tous les contrats à la ‘prestation’ des artistes - animateurs sont des
contrats artistiques, très peu d’entre eux sont engagés à temps partiel. Ils sont engagés
pour un projet ponctuel ou pour des activités régulières (ateliers hebdomadaires), parfois
pendant des années avec le même employeur. Donc on pourrait dire que les artistes -
animateurs, les associations, les coordinateurs (CCS inclus et Zinneke Parade, par
exemple) trichent, car le statut d’artiste conçu par l’ONEM ne permet pas une prestation
d’animateur ou d’animatrice (même si cet animateur ou animatrice développe l’art),
comme « artistique ». Apparemment, il y a un degré d’ignorance de la part de l’ONEM
assez important par rapport au métier et « les professionnels qui travaillent sur le terrain
dans le secteur ne se soucient pas de cette interdiction » - Mathéo Zegers.
De l’interview avec Aline Moens, coordinatrice de l’atelier Graphoui, j’ai retenu que pour
eux les subsides de l’Etat sont juste « une petite aide », ils doivent toujours en chercher
d'autres, ponctuels ou pas, pour continuer à vivre en tant que CEC. La coordination se
charge aussi de la recherche de subsides, de l’élaboration de projets et de le vendre.
Par ailleurs, selon Patricia Gerimont, il ne faut pas espérer une amélioration des subsides à
l’emploi pour l'engagement d'animateurs. Au contraire, le budget continuera à diminuer.
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Pourquoi le travail de l’artiste - animateur n’est-il pas reconnu comme un travail d’artiste ?
Les participants aux ateliers du CEC ne sont-ils pas un public « valable » créativement
parlant pour l’ONEM ?
On apprend notre métier, on l’applique, on l’enseigne, on le pratique, puis, on l’expose.
On apprend à créer, à se lâcher dans sa propre imagination, ensuite on l’exprime. Un
artiste - animateur en charge d'un atelier d’art (théâtre, dessin, musique) reste toujours
un artiste à la base. Le métier d’artiste - animateur est complémentaire à ses études et à
son expérience, c’est un plus dans sa construction.
«…Les Etats membres devraient s’efforcer de prendre les mesures utiles pour que les
artistes bénéficient des droits conférés à un catégorie comparable de la population active
par la législation nationale et internationale en matière d’emploi, de conditions de vie et de
travail, et veiller à ce que l’artiste dit indépendant bénéficie dans des limites raisonnables
d’une protection en matière de revenu et de sécurité sociale…»32
Le Statut d’artiste belge, c’est la dénomination que l’ONEM donne aux personnes qui
travaillent dans le milieu artistique de manière régulière, dont c'est l’activité principale.
Statut de travailleur salarié : le travailleur est lié à son employeur par un contrat de
travail. Il existe une relation d’autorité.
Statut de fonctionnaire : les personnes qui travaillent dans le secteur public et sont
nommées à titre définitif (ou qui ont un statut assimilé au statut de fonctionnaire).
Le statut d’artiste n’est pas un statut de sécurité sociale à part, avec des cotisations séparées
et/ou une protection séparée. Un artiste est intégré dans les statuts existants.
Le statut social des artistes a été réformé et renforcé depuis le 1er janvier 2014. La principale
nouveauté réside dans le fait que désormais c'est la Commission Artistes qui est compétente
pour délivrer un visa artiste. Le visa de la Commission atteste du caractère artistique des
prestations et des œuvres du demandeur. Elle a également pour mission de délivrer la carte
artiste qui permet aux artistes de bénéficier du régime des petites indemnités. Pas de
32
Recommandation de l’UNESCO relative à la condition de l’artiste adoptée le 27 octobre 1980, p.27
Page 28
changement par contre au niveau de la délivrance des déclarations d’activité
indépendante.33 L’artiste qui bénéficie de ce statut est considéré comme travailleur
salarié. Il a le « permis » de travailler à la prestation (au cachet ou à la durée). Quand la
personne ne peut pas prouver qu'il/elle travaille avec des contrats formels, elle a droit aux
allocations de chômage.
Les contrats artistiques peuvent avoir une durée d’un jour, d'une semaine, d'un mois,
mais sans excéder les trois mois consécutifs, sinon la personne perd son statut d'artiste.
Celui-ci doit être renouvelé tous les ans, l’artiste doit prouver à l’ONEM qu’il a eu au moins
trois contrats artistiques pendant l’année. Le seul avantage du statut d’artiste est la non-
dégressivité des allocations de chômage.
L’artiste a un profil particulier et atypique: ses conditions de travail sont souvent précaires
et fluctuantes, il exerce différentes activités artistiques, il a de multiples employeurs ou
commanditaires, des revenus irréguliers et aléatoires, le lien de subordination est absent
ou ténu .... Du fait de sa situation souvent hybride, l’artiste a du mal à s’insérer dans la
structure légale existante.
Je reviens donc à la première question, pourquoi parler du statut d’artiste dans ce TFE ?
Des interviews, il ressort que presque la totalité des Artistes Animateurs déclarent cette
activité comme une prestation artistique. En majorité, ce sont des artistes. Coordinateurs
et artistes animateurs considèrent que l’animation artistique est un métier absolument
artistique.
Dans la pratique, Les artistes considèrent que leur démarche, surtout dans les arts de la
scène, est une création qui part de leurs compétences en tant qu’artistes. Les artistes -
animateurs qui mettent en scène un spectacle avec tout ce que cela signifie créent une
œuvre artistique. Que les participants soient ou pas des comédiens ou danseurs
professionnels ne devrait pas faire de différence auquel cas, les réalisations de théâtre-
action ne devraient pas non plus être considérées comme des créations artistiques.
Le vide juridique concernant ce statut met aussi les artistes - animateurs et donc les CEC
qui les engagent dans une situation au moins difficile.
33
Service public fédéral. Sécurité sociale.
34
Guichet des arts.
Page 29
Après avoir abordé la question du rôle et du statut de l'artiste - animateur de CEC, il faut
que j'aborde ce métier dans sa pratique.
Je vais donc ici parcourir deux expériences personnelles relatives aux fonctions d’artistes
animatrice et de coordinatrice en CEC
La Maison de l’Amérique Latine – Casa de América Latina, S.E.U.L. est une ASBL dont le
siège se situe Rue du Collège 27 – 1er étage, à 1050 Ixelles.
La Maison de l'Amérique Latine SEUL asbl développe alors des actions de solidarité au
sens politique et social. Elle devient aussi, petit à petit, un lieu de référence pour les
comités de solidarité et un espace culturel. C'est à ce titre qu'elle sera reconnue en 1980
par l'AGCD comme lieu d'accueil pour étudiants latino-américains. Par la suite,
l'augmentation des projets, leur spécificité et leur originalité ont valu à la Maison de
l'Amérique Latine d'être reconnue par le Ministère de la Communauté française de
Belgique, comme Organisation Régionale d'Education Permanente (SEP) et comme
Centre d'Expression et de créativité (CEC). Et encore une reconnaissance du travail de
cohésion sociale, régionale et locale.
Un peu d’histoire
En 1977, un groupe des parents, d’enseignants et des psychologues (tous exilés latino-
américains) décident d'ouvrir un atelier créatif pour les enfants, comme moyen de
préservation et de maintien de l’identité culturelle et comme mécanisme afin de faciliter l'
intégration des enfants au milieu belge. Rappelons que bon nombre d'entre eux ont été
des victimes, directes ou indirectes, de la répression qui a sévi dans leurs pays d’origine.
Leurs parents ont été torturés, ou étaient toujours prisonniers politiques, voire tués ou
disparus dans certains cas. Plus tard, la rencontre entre parents et enfants se révéla
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souvent difficile. D'où la création d'ateliers permettant aussi bien aux enfants qu'aux
adultes d’exprimer la tension accumulée à travers la création artistique. Il est clair que les
ateliers avaient parfois un rôle thérapeutique.
En 1978, quelques personnes, possédant déjà une expérience professionnelle, ont non
seulement créé un atelier de théâtre, mais aussi un atelier de sérigraphies afin d’élargir le
champ d’activités en matière de création artistique.
Historiquement, le CEC était localisé à St. Gilles, dans un quartier très populaire, à forte
concentration d'immigrés, parmi lesquels un grand nombre de latino-américains et une
présence importante d'espagnols et de grecs. La Maison de l’Amérique Latine siégeait rue
de Suède, et était très accessible grâce à la proximité de la Gare du Midi (300 m.). À
l’époque, on pouvait définir le quartier comme étant socio-culturellement défavorisé. La
MAL avait noué des relations étroites avec plusieurs organisations espagnoles du
quartier, qui participaient avec leurs publics à nos activités créatives. Les participants du
CEC provenaient à la fois des différents quartiers de Bruxelles et même de l'extérieur de
l’agglomération.
Trois tranches d'âges étaient visées (enfant, adolescents et adultes), avec une forte
diversification au niveau de l'origine sociale (enfants d'ouvriers, d'employés, chômeurs à
la recherche d'une formation, élèves en primaire ou secondaire, étudiants faisant des
études supérieures). Leurs objectifs : trouver un ensemble d’activités créatives et
socioculturelles, dans l'optique de recréer leur propre identité culturelle et de la faire
connaître, avec le souci de se tenir informés sur ce qui se passe dans le pays d’origine.
À cette époque, le CEC s'efforçait de procurer des réponses collectives et créatives à une
série des problèmes posés à l’ensemble de la diaspora latino-américaine, dont le trait le
plus caractéristique est qu’ils étaient pour la plupart des réfugiés politiques qui avaient fui
les dictatures militaires en Amérique latine (Brésil 1964, Chili 1973, Argentine 1976,
Uruguay 1975…)
Subsides
La Fédération Wallonie Bruxelles est l’entité subsidiante du CEC, avec 10000€ annuels
légales mais ils sont concrètement 8000€ Niveau II. De temps en temps des subsides
ponctuels.
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Localisation
Le CEC au sein de la MAL, est localisé à Bruxelles sur la commune d’Ixelles (1050).
L’équipe avec laquelle je travaille est une cellule de la Maison de l’Amérique latine SEUL
asbl, à Bruxelles
Il faut dire que le fait d’être latino-américaine en Europe est particulier car je viens d’un
pays colonisé où jusqu’à maintenant l’Europe gère énormément d’affaires. Nous avons
appris à l’école l’histoire européenne plutôt que précolombienne. Nous tentons toujours
de récupérer notre identité comme continent, et ce n’est pas évident. La vision de
l’Europe sur les latino-américains est toujours très paternaliste, nous sommes considérés
comme des immigrés plutôt que des Expats. Par contre, l’étrangère européenne en
Amérique latine est encore admirée. C’est une conséquence de la colonisation : la
discrimination et l’extermination totale, dans certains cas, des peuples originaux.
Le public de mon atelier est plutôt constitué d'Expats mais aussi de belges intéressés par
le théâtre et l’espagnol.
J’ai commencé avec une adaptation d’un monologue d’un écrivain chilien emprisonné et
torturé sous la dictature chilienne. Un monologue que j’ai adapté pour sept personnes.
Petit à petit nous sommes parvenus à développer un langage commun.
Cette année, nous avons monté un autre spectacle de poésie latino-américaine. La
majorité du groupe a été fidèle pendant 5 ans. Il y a eu peu de mouvement de personnes
et nous sommes arrivés à mettre en scène, des créations collectives et des pièces écrites,
deux ou trois fois par an. La thématique variait selon les intérêts et le processus
d’apprentissage. Nous avons travaillé, entre autres, le sujet de l’immigration, le système
de consommation capitaliste, la répression, la liberté, et le thème de ‘la femme’.
Page 32
Durant toute cette période, j’ai organisé et coordonné les activités, car à l'époque, il n’y
avait pas de coordination CEC claire. Même s’il y avait une personne responsable des
ateliers, il n’y avait pas encore d'encadrement très précis, en quelque sorte, notre atelier
a servi de cobaye pour la mise en place d'une coordination au sein du CEC. Après, d'autres
ateliers artistiques ont vu le jour, ils présentaient des spectacles et abordaient des
thématiques sociétales plus encadrées. Nous organisions des soirées dans différents
lieux (Eglise de la chapelle de Boondael, Espace Breughel, Théâtre Mercelis…), soirées de
musique, poésie et théâtre.
Ensuite, j’ai commencé à m'intéresser au travail de coordination. J’ai demandé à la
direction de la Maison, l’équipe technique et la logistique minimum pour développer le
travail de l’atelier. Je me suis rendue compte que cet endroit était fertile, malgré la
précarité des moyens, le manque de matériel et d’expérience. J’ai dû assumer la
responsabilité de nous organiser un véritable espace de travail. Progressivement, la
Direction a reconnu notre travail, je parle de « nous » car nous étions un groupe, les
participants fidèles et moi-même, nous étions un vrai groupe de création.
Après 2012, j’ai arrêté un temps car mon bébé est né deux semaines avant la première
d’ « Escarpin sous la brume ». L’année suivante, j’ai repris le travail avec un autre groupe.
J’ai dû réorganiser mon travail car les cinq dernières années, j’avais une plus grande
disponibilité, même des heures mal rémunérées, parfois pas payées. Ma situation
personnelle m’a obligée à demander une augmentation de ma rémunération mais cela
signifiait aussi, travailler moins d'heures. En réalité, je demandais une rémunération plus
juste par rapport à la loi et à mon rôle.
Désormais, le travail ne pouvait plus être développé de la même manière. Je n’arrive plus
à créer que deux petits spectacles par an (parfois un) et le travail théorique est moins
développé. Je travaille consciemment dans le cadre du décret CEC, deux heures et demi
par semaine. Avec ce temps réduit, c’est difficile d'aller en profondeur, avant, je donnais
six heures semaine, et parfois plus.
A l’époque, les relations qu'entretenait mon atelier et les autres ateliers avec la
coordination CEC, était assez difficile. Le processus pour établir une coordination CEC a
été lent. La coordination s’est développée à cause ou plutôt grâce aux demandes
d’animateurs artistiques d'une organisation plus concrète. Ces 10 dernières années, le CEC
a énormément évolué, a grandi. Forcément, la direction de la Maison a dû s’investir.
De cette expérience-là, vient ma question première par rapport au rôle de l’artiste dans le
CEC, mon expérience me montre que sans l’artiste – animateur, le travail ne marche pas.
La coordination avait un mi-temps pour gérer une grande charge de travail qui
augmentait avec le temps. A mon avis, ni la direction ni la coordination ne se rendaient
compte de la place que les ateliers artistiques occupaient dans la Maison. A partir du
décret 2009, la Maison a commencé à réfléchir à l’encadrement et à l’avenir de ce
secteur. Mais ce n'est qu'en 2013-14 que la Maison met en route un décret assez strict,
exigeant et précis.
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Le BAGIC
En 2013, j’ai décidé de me former comme coordinatrice culturelle. J’ai trouvé le BAGIC, et
pendant les deux ans de ma formation, j’ai travaillé comme stagiaire de la coordination
CEC à la Maison. C’est alors que j’ai découvert le décret 2009. Je l’ai étudié. J‘étais
fascinée par le contenu car je m’identifiais pleinement. En 2014, avec la coordinatrice,
nous avons commencé à discuter des démarches à entreprendre et commençons à
construire le dossier de reconnaissance pour le niveau III. Nous avons travaillé pendant
trois mois (très peu du temps pour un projet comme celui-là) et nous n’arrivons pas à
l’introduire … mais la Direction de la Maison refuse de l'introduire.
Puis nous avons travaillé dans la coordination, plus encadrés avec le décret, pour le
relancer. En février 2016, le formulaire est introduit. Réponse : Niveau II. La Maison a cinq
ans pour améliorer son travail, former les artistes animateurs et développer un projet
socio-artistique.
Mon stage s'est forcément terminé en même temps que ma formation BAGIC, en juin
2015.
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a un impact important du décret dans toute l’association. Le décret a renforcé la vision
que l’on a du CEC au sein de la Maison, une chose qui avant n’existait pas.
Un atelier à la MAL
C’est le premier jour de l’atelier de théâtre que j'anime à la Maison de l’Amérique latine et
l’idée est de le finaliser par une création théâtrale collective. L’atelier est ouvert à toute
personne entre 16 à 90 ans, hommes et femmes de toutes nationalités, intéressées à
développer la discipline théâtrale sur la base d’un travail d'une année, divisé en trois
trimestres, deux fois par semaine, durant 3 heures.
La première chose importante pour moi, c’est de connaître le groupe, qui sont les
participants, leur âge, quelles sont leurs attentes, quelles sont leurs motivations, d’où ils
viennent, quelle est leur expérience en matière théâtrale, ... . Grosso modo, connaître le
groupe le mieux possible, tester son aura, sa température.
Au début, je rassure le groupe en leur disant que le travail théâtral est un processus qui
ressemble à une grossesse, le résultat, nous ne le verrons pas d’un jour à l’autre, ils
verront les avancées petit à petit, ils ne vont pas monter sur scène tout de suite. Il faut
que le ventre grandisse tous les jours. D’abord, j’ai besoin qu’ils se sentent en confiance,
qu’ils commencent à perdre leurs appréhensions. Normalement, les gens qui arrivent à
mes ateliers viennent avec une peur intrinsèque de la scène, participer à ce genre d’atelier
est déjà un défi pour eux. Je dois les rassurer à travers des consignes précises et
confirmer que nous construirons cet atelier ensemble, que tout est valide, rien n’est
mauvais ni ridicule. J'ai besoin qu'ils me fassent confiance à 100% pour qu'ils puissent
exprimer leur créativité. Je me présente, je leur raconte mon parcours. La première
séance est très importante pour rassurer les participants et fidéliser le groupe. Cette
fidélisation peut prendre quelques semaines, mais à la fin du premier mois, je sais déjà
avec qui je travaillerai.
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La première partie de la séance est consacrée à de la dynamique de groupe, des jeux
sympathiques, du travail corporel. Je veux qu’ils s’amusent, qu’ils commencent à tomber
amoureux de la discipline théâtrale. Le but est que le groupe prenne confiance et que
chacun commence à se voir (lui-même) comme une image vers les autres, à développer sa
conscience corporelle, sa cadence, son contour. Après quelques jours, nous commençons
la pratique de la relaxation, la respiration, la posture. Je développe la psychophysique
(libération d’émotions à travers le mouvement), un exercice que j’utilise pour commencer
la séance et que, plus tard, je développerai avec le travail des émotions. Après un temps,
les participants demandent eux-mêmes à pratiquer cet exercice car cela devient une
nécessité pour relâcher le corps et commencer le travail, même quotidiennement.
Nous nous connaissons à travers des jeux théâtraux, nous commençons à nous regarder
dans les yeux, en jouant. De plus en plus et sans qu’ils s’en rendent compte, je leur
propose des exercices plus complexes : exercices de coordination voix-corps, texte-
mouvement. En groupe d’abord puis je diminue le nombre de participants par exercice,
un exercice commencé avec tout le groupe sera finalisé par un exercice à deux ou un
monologue. Ils se sentent chaque fois plus à l’aise et ils commencent à profiter de la
bonne sensation de la scène. Ils commencent à développer eux même de petites
créations, ce processus passe surtout par l’improvisation. Progressivement, ils se rendent
compte qu'ils sont des créateurs ! Après chaque séance nous évaluons le travail réalisé,
les choses positives, négatives, le plus intéressant, le moins intéressant, ... une discussion
qui me guide pour la préparation de la suite du programme.
Le but principal de ce premier trimestre est de jouer, d’avoir l’envie de partager avec le
groupe en mettant en risque notre propre corps et de connaitre nos propres limites.
A la fin de cette première étape, le groupe est généralement constitué. Cette fois-ci, ne
sont restées que des femmes de différentes nationalités. Particulier. J’ai réfléchi à la
thématique, au fait que nous soyons issues de différents coins du monde et que cela nous
donne beaucoup de possibilités de développer différents aspects de la multi culturalité.
Le fait que nous ne soyons que des femmes me donne aussi des pistes.
Au deuxième trimestre, nous commençons par discuter entre filles, nous nous
rapprochons comme telles. Résultat : écrire des textes sur notre vie, des choses que nous
avons besoin de partager ou dont nous avons envie de parler. Nous commençons le
travail de créativité, pure. J’adore cette partie du travail !
Les participantes apportent des textes qu'elles ont écrits. Différents sujets, situations,
conflits. Des textes plus longs, plus courts, peu importe, le principal est de ne pas rester
inactive, « je réfléchis, je participe, je travaille avec ma volonté ». Chaque premier moment
de lecture est un moment presque sacré. Nous savons que nous écoutons des histoires
possiblement vraies, et que le respect est primordial. Il y a quelque chose de particulier
dans cette étape : le respect que j'évoquais au départ de l’atelier, où j’expliquais son
importance dans un atelier créatif, où le fait de travailler avec nos propres corps et
émotions, maintenant, devient visible. Nous appliquons déjà quelque chose de très
important. Nous commençons à travailler ces textes de manière individuelle, de
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différentes manières, selon différentes techniques : musique, corps, poésie, parole, cris,
émotions etc. Nous dévoilons les textes, nous les démêlons. A un moment donné et je ne
sais pas bien comment -je dois l’avouer-, je commence à envisager des personnages. Le
travail créatif commence à prendre forme.
Mon travail se base principalement sur les intérêts et besoins du groupe. Cette étape,
comme toutes les autres, n’est pas exempte d’obstacles. En vrai, je n’ai jamais quelque
chose de très prédéfini car il est possible que certains programmes ne fonctionnent pas à
cause d'imprévus ou de questionnements par rapport à un exercice ou une intervention.
Ou alors, parce que la consigne n’est pas claire. Ici, c’est intéressant car, le travail de
conscience de soi et de créativité doit être le plus libre possible, je ne peux pas imposer ni
restreindre la liberté d’expression ni montrer de doute. Par exemple quand les
participants mettent en question des exercices proposés ou des moments où le
participantes se bloquent, je dois intervenir et improviser, soit pour rediriger le travail en
clarifiant les choses, soit pour porter plus d’attention à une personne, (par exemple,
quelqu’un qui n’arriverait pas à faire un exercice à cause de la peur que provoque une
émotion spécifique). A ce moment-là, je dois faire une pause et laisser de la place pour la
discussion, pour le partage, pour que la personne puisse s’exprimer en face du groupe et
trouver le fil du conflit afin de continuer le travail. Nous avons déjà développé la
confiance du groupe, donc les possibilités concrètes de pouvoir s’exprimer existent et la
plupart du temps, nous trouvons des solutions.
Nous commençons à écrire des scènes sur le prisme d’une histoire choisie à l’avance. Par
exemple, on se pose des questions sur le personnage de Marie France (elles ont déjà des
prénoms), qui est-elle, d’où vient-elle, quelle est son histoire… ? Nous mettons les
personnages dans des situations particulières, les scènes commencent à prendre forme.
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Nous avons développé aussi, l’envie ou pas, de maternité et ses questionnements quand
on arrive à 40 ans, la famille idéale et le besoin d’ « apparaître » en face des autres, le rôle
du père dans la famille, l’homosexualité chez la femme, la soumission, l’abus sexuel et
ses conséquences. La pièce est conçue en plusieurs langues, nous l'avons travaillée dans
la langue de chaque participante.
Tous ces sujets sont sortis de nos discussions, des textes, de notre rôle social. Il faut dire
que j’étais enceinte pendant ce processus, donc au niveau personnel, c’était un travail
très intense aussi.
L’histoire et les scènes, nous les travaillons ensemble, collectivement. Comme cette
période est la période de la technique et de la créativité, je suis toujours en train de
donner de l’information, soit sur le travail sur scène, soit sur le travail de table (texte).
C’est un travail très spécifique. Il faut dire que le jeu se transforme. Nous travaillons avec
du matériel plus complexe, donc le jeu devient moins automatique. Il est plus élaboré.
A ce moment, la confiance que les participantes ont placée en moi est vitale pour le
travail. Sans exagération, je travaille avec les fils les plus délicats de la personne. Je dois
avoir la tête claire et ouverte pour pouvoir comprendre toutes les propositions et ne pas
rester enfermée dans mes propres valeurs et croyances. Si je ne suis pas d’accord avec
quelque chose, on discute mais si je ne vois pas de consensus, je dois objectiver et essayer
que les participantes arrivent le plus loin possible et qu’elles puissent s’exprimer de
manière juste, claire et vraie. Il y a eu des moments de désaccord quant aux différentes
manières de voir la vie. Évidemment, le conflit arrivait quand nous devions solutionner un
problème à un niveau dramatique. Ce n’est pas un atelier pour enfants, je suis avec des
adultes, et dans le cas de mon atelier, les participantes ont un haut niveau culturel, elles
sont toujours en train d’analyser leur propre travail et d’évaluer aussi le mien. Donc, j’ose
dire que mon rôle dans l’atelier n’est pas toujours évident, je dois toujours être prête à
détruire tous les concepts pour en construire d’autres.
Pour arriver à ce travail, il y a un processus dont je n’ai pas parlé avant. C’est le travail de
déstructuration de la pensée. Nous avons besoin de penser autrement pour laisser
l’imaginaire et la créativité s'exprimer ! Ils ou elles sont toute la journée encadrés dans
des boulots structurés, ils ont l’habitude de réfléchir de manière très rationnelle et
organisée. Dans mon atelier, durant tout le processus je dois développer la conscience de
leur propre sensibilité, c’est un processus long et à vie. Je ne sais pas très bien comment
ce mécanisme fonctionne mais j’ai eu des enfants dans mon atelier qui maintenant sont
des comédiens, des enfants défavorisés qui ont découvert le théâtre à l’atelier. Un jour,
j'ai trouvé un message sur mon compte Facebook d’une personne qui me remerciait de
lui avoir fait découvrir le théâtre alors qu’il était petit et qui en avait fait son métier et sa
vocation. Je suis restée en contact avec des participants européens qui n’avaient jamais
fait de théâtre et qui ont participé à l’atelier pendant des années, plusieurs d’entre eux
continuent à développer la discipline dans leur pays d’origine. Le théâtre est devenu une
nécessité d’expression, de jeu, de communication pour certains d’entre eux. C'est la
preuve qu’au travers de ce travail, nous arrivons à développer une communication très
forte. L'implication est telle que ce n’est pas difficile pour moi de voir à quel point le
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théâtre peut être un outil tellement important et utile pour provoquer des choses en
nous.
Dès lors, je deviens metteuse en scène. Je dois utiliser tous mes outils artistiques pour
arriver à montrer notre travail. J’organise, je décide, le temps est contre nous, l’anxiété
monte, il n’y pas assez de temps pour décider ensemble, c’est le moment des décisions
artistiques et, dans l’atelier de théâtre, ces décisions incombent à l’animateur. Avec le
matériel que j’ai, je cherche la beauté, l’esthétique est vitale dans l’art aussi. Le contenu
est déjà décidé, notre travail social de création est terminé. Maintenant, il faut trouver la
forme la meilleure, la plus juste. Je ne peux pas m’abstraire de la qualité. En tant que
comédienne, je mets toute ma passion dans cette création. Je n’oublie pas non plus qu’il
ne s’agit pas de théâtre professionnel, en fait je ne peux jamais l’oublier car le théâtre
amateur a ses limites, que ce soit la technique qu’on n'arrive jamais à terminer, ou, entre
autres, le risque que le participant prend sur scène. Il faut quand même travailler avec ces
limites. Dans le CEC, le but recherché n’est pas la qualité artistique mais, en tant que
comédienne de base, je ne peux pas me contenter d'un résultat médiocre, je mets donc
toutes mes compétences et toute ma sensibilité au service du meilleur résultat possible. A
la fin, je travaille presque comme si j’étais avec des professionnels, et ça marche. Sans
discipline, l’art ne se développe pas.
« Escarpin sous la brume »est le titre de notre pièce. Suivi d’un débat avec le public à la
fin, que l’Espace de genre de la Maison de l’Amérique latine gère. Moi, j’étais heureuse et
soulagée lors de «la première » au théâtre 140, avec mon bébé de 20 jours.
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Conclusion réflexives
Après plusieurs années d'existence, le Centre d’expression et de créativité de la MAL, est
en train de renaitre.
Un projet ambitieux, humain, qui cherche la convivialité, le partage, qui veut revenir à
l’essentiel de l’être. Un projet très important. Un projet qui veut travailler avec des
artistes, mais pas avec n’importe lesquels, des artistes engagés, solidaires, avec les yeux
bien ouverts pour reconnaitre leur société ; conscients aussi de leur vision artistique-
politique-pédagogique. Des artistes préparés et conscients de leur travail, pour que leur
contribution soit vraie et effective.
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coordinateurs-animateurs. Pour moi c'était très enrichissant de participer à ces réunions.
Je suis sûre qu’il y aurait un grand intérêt pour les artistes - animateurs de participer aux
séances d’information ou d'échange avec les autorités. Etant donné qu'ils sont sur le
terrain, ils pourraient poser des questions, raconter leur expérience, ...
Cette analyse me fait réfléchir à la nécessité d’une reformulation d’un statut pour l’artiste,
un statut qui ne soit pas conçu par une entité (ONEM) qui nie le travail artistique. Le
statut d’artiste actuel régule « le non travail » de l’artiste. Mais, comment réguler un
travail qui ne soit pas reconnu dans tous ses aspects ? Par exemple : les répétitions. Il est
donc évident qu’elle va essayer d’écarter le plus possible de personnes pour les insérer
dans d'autres secteurs afin qu’ils travaillent selon le système conventionnel.
Un vrai statut pour l’artiste devrait partir de la base des différentes manières de travailler
de l’artiste : artiste pluridisciplinaire qui travaille dans des métiers complémentaires à ses
études artistiques.
Un statut d’artiste pourrait être conçu par une commission artistique, qui proposerait une
régulation plus concrète pour un métier complexe dans sa diversité et sa différence par
rapport aux métiers conventionnels. Tout d’abord, en définissant le concept « d’artiste ».
Pour ça, il faudrait rechercher et identifier qui sont les artistes et de quelle manière ils
travaillent, chaque discipline séparément. Pour enfin, reconnaitre ce métier de manière
administrative, et pas seulement de manière philosophique ou idéologique.
J’affirme par exemple, que la loi devrait exiger des employeurs du secteur « non
marchand », où travaillent la majorité des artistes, de les engager comme travailleurs
salariés, soit des artistes créateurs, soit des artistes - animateurs. Si un artiste travaille
moins d’un mi-temps, mais plus de six mois dans la même association ou institution de
manière hebdomadaire, l’employeur serait obligé de l'engager à temps partiel comme
artiste et de payer la prime patronale correspondant, ainsi que les cotisations sociales
exigées par la loi. Protéger ces personnes pour que la production de l’association
corresponde en quantité et en qualité aux exigences du décret.
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Lorsque les directives de travail de l’artiste animateur ne sont pas claires, voire même
ambiguës, et quand les responsables du secteur ne se posent pas de questions par
rapport à ses méthodes, sujets, implications, matière de base, il se produit ‘une tension’
comme Patricia Gerimont l'a constaté au cour d'une réunion où j’étais présente. Dès le
moment où nous ne reconnaissons pas l’investissement qu’exige un travail, nous pouvons
difficilement accomplir la mission finale du projet géré justement et en grand partie pour
ce travail spécifique.
Je ne veux pas dire que la non-reconnaissance soit un fait exprès, je dis que le travail
artistique en général n’est pas reconnu comme un vrai « job » dans notre société actuelle.
Donc, le rôle de l’artiste animateur est plutôt invisible, mis de côté. C’est peut-être
comme cela que naissent des préjugés sur le monde artistique. Et, à mon avis, le CEC
développe un projet où le rôle de l’artiste - animateur ne peut pas être invisible,
heureusement.
Lorsque j’ai eu la possibilité de pratiquer la coordination, j'ai pris conscience que l’équipe
est fondamentale pour le travail. La coordination doit renforcer et équilibrer toute
carence, il est indispensable de travailler ensemble pour progresser.
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Remerciements
Je voudrais remercier évidement et absolument, tous les impliqués de cette formation,
pour m’avoir donné un espace de parole sur ce phénomène qui est assez invisible.
J’espère vraiment que ce TFE servira à semer une graine de réflexion sur notre travail et
permettra de reformuler certaines priorités de ce beau projet qu’est le CEC.
Je dois avouer aussi que pour moi c’était un grand effort de réaliser ce type de travail.
C’est la première fois que je le fais et malgré que je suis consciente de tous les manques
que ce TFE contient, je termine avec le sentiment d’avoir appris énormément.
Merci
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BIBLIOGRAPHIE
Art contextuel. Paul Ardenne.2002
Décret du 30 avril 2009 relatif à l'encadrement et au subventionnement des
fédérations de pratiques artistiques en amateur, des Fédérations représentatives de
Centres d'expression et de créativité et des centres d'expression et de créativité.
Exposition peinture à paris janvier 2017 : Rivera – Siqueiros - Orozco
Jeu pour acteur et non-acteurs. Augusto Boal. 1997.
La culture des indiens, partisans de la démocratie culturelle. Travail présenté par
Fabrice Vandermissen pour l’obtention du BAGIC CESEP 2011-2013.
L’éducation comme pratique de la liberté. 1969. Paulo Freire.
L’Esperluette n°75. 2013.
Nossent Jean-Pierre. L'histoire récente de l’éducation permanente : Une relecture
possible. Vers un retour aux sources de l’éducation populaire ?
Pédagogie de l’autonomie. 2004 Paulo Freire.
Pédagogie de l’opprimé. 1968. Freire Paulo.
Richard Nelly. Lo político en el Arte. Université Arcis. Santiago.Chili. 1997
Théâtre de l’opprimé. Journal électronique « La Jornada ». 4 mai 2009.
Une pédagogie de l’espoir. 1994. Freire Paulo.
Vadémécum CEC 2017
Interviews
Adrian Diaz. Artiste animateur du « Terre Franche » CEC, est une cellule du Centre
Culturel d’Eghezée.
Aline Moens. Coordinatrice de l’Atelier Graphoui .
Armando Merino. Directeur Centre Placet. Louvain la Neuve.
Fabrice Vandermissen, coordinateur du CEC à La Vénerie.
Gabriel Tapia. Artiste animateurs du Centre d’Expression et de Créativité « Atelier
Sorcier » Gembloux.
Gea Hernandez. Artiste animatrice de la Maison de l’Amérique latine.
Hadi El Gammal. Coordinateur du CEC du THEATRE MAAT asbl.
Matteo Segers. Directeur de l'Association des Centres culturels (ACC).
Patricia Gerimont. Responsable du service de la Créativité et des Pratiques artistiques
de la Fédération Wallonie- Bruxelles depuis 1998.
Exposition et rencontres
Mexique 1900-1950. Diego rivera, Frida Kahlo, Jose Cemente Orozco et les avant-
gardes. Grand Palais. Paris, janvier 2017.
Différents réunions de coordinateurs CEC entre 2013 et 2016.
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Films
http://www.jornada.unam.mx/2009/05/04/index.php?section=cultura&article=a12n1cul
http://www.personimages.org/
http://www.guichetdesarts.be/
http://www.onem.be/fr. Office National de l’emploi. ONEM.
https://www.legrainasbl.org/index.php?view=article&id=419&option=com_content&Itemi
d=115 L’intervention du théâtre action. Le Grain asbl.
Wikipédia
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