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RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Février à septembre 2023


Perspectives sur la sécurité alimentaire
Production agricole des saisons en baisses consécutives dans les zones de conflits actifs
MESSAGES CLÉS
• La faible participation des ménages à la saison agricole A Résultats actuels de la sécurité alimentaire, février 2023.
du fait des déplacements intempestifs des populations a
conduit à des récoltes de la saison A moins performantes
particulièrement dans le nord-est et le centre-est du pays.
Une pluviométrie excessive dans les hauts-plateaux du
Sud-Kivu et les inondations en moyenne terre ont
occasionné des glissements de terres et perte des
cultures, notamment autour de Minembwe donnant lieu
à une production en dessous de la moyenne et à des
difficultés d’accès alimentaire dans cette zone.

• L’offensive de la rébellion du M23 et les opérations


conjointes des armées loyalistes contre les ADF dans le
Nord-Kivu et l’Ituri ont sensiblement augmenté le
nombre des déplacés d’environ 49 pour cent durant le
deuxième et troisième trimestre de l’année 2022, passant
de 270 000 à 542 000 personnes. Depuis janvier 2023, ces
conflits s’amplifient avec des mouvements des
populations. Cette situation présage des perturbations
des activités agricoles liées aux mouvements des
populations dans ces zones jadis, considérées comme Source: FEWS NET
grenier de la région est, avec à terme, des disponibilités La manière de classification que FEWS NET utilise est compatible avec l’IPC. Une
analyse qui est compatible avec l’IPC suit les principaux protocoles de l’IPC mais
alimentaires réduites. ne reflète pas nécessairement le consensus des partenaires nationaux en matière
de sécurité alimentaire.
• Les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, en
situation de conflits continus, vont creuser leurs déficits de consommation alimentaire et resteront en Crise (Phase 3 de
l’IPC) avec une augmentation de populations en Urgence (Phase 4 de l’IPC) dans certaines zones de santé des territoires
de Rutshuru et Djugu, dans un contexte d’extrême violence. Les zones plus stables du nord, notamment Bas-Uele, Haut-
Uele et Tshopo auront des saisons agricoles normales et seront en Minimale (Phase 1 de l’IPC). En revanche, le Maniema,
le Lualaba, Haut-Katanga, la plupart des provinces des Kasaïs, et la Lomami restent en Stress (Phase 2 de l’IPC).

CONTEXTE NATIONAL
Situation actuelle

Contexte politique général : La prochaine saison des élections présidentielles a commencé à travers le pays. Le calendrier
électoral a été publié et l'inscription des électeurs a commencé bien qu'avec des difficultés importantes. Les observateurs
électoraux ont critiqué les nombreux défis techniques dans le processus d'inscription des électeurs, le fait que le calendrier
électoral semble irréaliste et le manque d'investissement financier dans les élections.

L’activité du FEWS NET est financée par l’USAID. Les points de vue exprimés
FEWS NET RDC
par les auteurs de la présente publication ne reflètent pas forcément le point de
drc@fews.net
vue de l’Agence américaine pour le développement international ou du
www.fews.net/fr/drc
gouvernement des Etats-Unis d’Amérique.
RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à septembre 2023

Situation sécuritaire et mouvements des populations : Des Résultats estimés les plus probables de la sécurité alimentaire,
millions de Congolais continuent de subir les effets des conflits février à mai 2023
multiformes qui sévissent dans la partie est du pays. Malgré la
prolongation de l'état de siège, mis en vigueur pour la
première fois en mai 2021 en réponse à l'augmentation des
violences dans les provinces de l'Ituri et du Nord-Kivu, les
attaques des groupes armés se sont poursuivies dans tous les
territoires de l'Ituri et du Nord-Kivu. Alors que la Coopérative
pour le Développement du Congo (CODECO) continue
d'opérer principalement dans la province de l'Ituri, les Forces
Démocratiques Alliées (ADF) ont de plus en plus démontré leur
capacité à opérer dans des localités en dehors de leurs zones
d'opération traditionnelles dans les territoires de Beni et
Irumu en province du nord Kivu et de l’Ituri. En plus, la
rébellion du M23 continue ses attaques pour élargir ses zones
d’influence dans les territoires de Rutshuru, Masisi, et
Nyiragongo et son contrôle des principaux axes commerciaux
et routiers.

Au Sud-Kivu, malgré la présence des militaires réguliers de


l’armée Burundaise qui sont venus appuyer les FARDC, la
situation continue de se dégrader. On signale le renforcement Source: FEWS NET
de l’activisme des combattants Twirwaneho-Gumino-Androïd Résultats estimés les plus probables de la sécurité alimentaire,
et alliés, rebelles burundais dans les hauts plateaux de juin à septembre 2023
Mwenga, Uvira et Fizi. Aussi, les groupes des rebelles locaux—
Maï-Maï, Biloze, Bishambuke et Yakutumba—continuent de
renforcer leurs positions.

Face à cette situation, la population continue à se déplacer ;


OCHA estime à plus de 1.5 millions des personnes déplacées
internes dans la province de l’Ituri en fin décembre 2022.
Environ 1.36 millions de personnes ont été déplacés dans le
Sud-Kivu, alors que 2.2 millions personnes ont été en situation
de déplacement dans le Nord-Kivu voisin, dont près de
264,000 personnes vivent sur des sites aménagés/camps dans
le périmètre péri-urbain de Goma (Figure 1).

Conditions agro climatologiques et production agricole :


Entre octobre 2022 et février 2023, campagne de la saison A
dans les zones bimodales de la RDC, les précipitations reçues
étaient légèrement en dessous de la moyenne des 30
dernières années. Toutefois, compte tenu des cumuls
pluviométriques que ces zones reçoivent, la baisse n’as pas eu
d’impact significative pour avoir des effets sur la conduite d’un
Source: FEWS NET
cycle cultural normal. En revanche, une pluviométrie excessive
dans les hauts-plateaux du Sud-Kivu et les inondations en La manière de classification que FEWS NET utilise est compatible avec l’IPC. Une
analyse qui est compatible avec l’IPC suit les principaux protocoles de l’IPC mais
moyenne terre ont occasionné des glissements de terres et ne reflète pas nécessairement le consensus des partenaires nationaux en matière
perte des cultures, notamment autour de Minembwe. Dans de sécurité alimentaire.

l’est du pays, notamment dans l’Ituri, Nord-Kivu et Sud-Kivu, la production est significativement impactée par les conflits qui
limite l’accès aux champs et perturbe la conduite des activités agricoles, donnant lieu à une production en dessous de la
moyenne.

Dévaluation de la monnaie locale : La monnaie locale, le franc congolais (CDF), continue sa dépréciation par rapport au dollar
américain (USD) sur le marché des changes de la RDC. Cependant, la monnaie est restée stable au cours de l'année écoulée.

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L'une des raisons de la stabilité du franc congolais est Figure 1. Carte des mouvements des populations
l'augmentation des revenus miniers (cuivre et cobalt). Cette
stabilité a également contribué à stabiliser les prix des
aliments importés (huile végétale, riz) et du carburant.

Malgré la stabilité relative du taux de change, l'inflation a


continué d'augmenter tout au long de 2022 et jusqu'en 2023.
Les niveaux d'inflation correspondent actuellement aux taux
de 2020, l'un des plus grands chocs de marché pour
l'économie. Les sous-indices clés de l'inflation sont
l'alimentation et les transports.

Fonctionnement des marchés et prix des denrées


alimentaires : Les effets conjugués de la dévaluation de la
monnaie locale et de la hausse généralisée des prix mondiaux
des denrées alimentaires et du carburant maintiennent les
prix des denrées de base nettement supérieure à la
moyenne. En dépit des baisses saisonnières liées aux récoltes
de la saison A, l'insécurité et les coûts de transport élevés
Source: UNOCHA/UNHCR/FEWS NET
perturbent le fonctionnement des marchés et maintiennent
les prix des aliments de base au-dessus de la moyenne. En janvier 2023, le prix de denrées alimentaires de base (haricot,
farine de maïs, huile végétale et le riz) était environ 51 pour cent au-dessus de celui de l’année dernière et 101 pour cent au-
dessus du moyen quinquennal. L'insécurité perturbe également les flux commerciaux traditionnels, obligeant les
commerçants à emprunter des voies détournées pour commercialiser les marchandises. Par exemple, les denrées en
provenance de Rutshuru passent par l’Ouganda ensuite le Rwanda pour se retrouver sur les marchés de Goma.

Résurgence des épidémies : Les épidémies de choléra et de rougeole se propagent de plus en plus par rapport aux années
précédentes. Selon le cluster santé, 33 zones de santé se trouvant dans cinq provinces (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Tanganyika, Haut
-Katanga et Haut-Lomami) sont touchées par l’épidémie de choléra en ce début de l’année 2023. Le mois de janvier 2023 a
connu une augmentation de 15 pour cent de cas comparativement au mois de janvier 2022 et de 76 pour cent
comparativement à janvier 2021. Quant à la rougeole, toutes les 26 provinces de la RDC ont connu cette épidémie, laquelle
se poursuit en 2023, avec une augmentation de 62 pour cent de cas comparé à l’année 2021.

Assistance humanitaire : La réponse humanitaire est en cours, mais ne couvre qu’une faible proportion de la population
totale des territoires affectés, du fait des contraintes logistiques et financières. A titre d’exemple, pour le plan de réponse
d’urgence de la crise M23 à Rutshuru et Nyiragongo, l’assistance humanitaire n’a couvert que 9,9 pour cent de la population
totale de ces deux territoires en 3 mois.

Résultats actuels de la sécurité alimentaire

En cette période de récolte de la saison A dans le nord-est et le centre-est, on observe globalement une amélioration
saisonnière de la consommation alimentaire des ménages à partir de janvier, notamment ceux qui ont eu la chance de
cultiver. Cependant, dans les zones de conflits où une bonne proportion des champs a été abandonnée avec l’intensification
des conflits, les ménages qui se sont déplacés ne s’attendent pas à une récolte régulière, voire à aucune récolte. Certains qui
sont réinstallés pas trop loin de leurs champs, et qui ont conduit leurs cultures aux trois quarts du cycle, tentent de faire des
mouvements pendulaires pour des récoltes potentielles. C’est le cas dans les provinces de Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri, où
des nombreux ménages agricoles n’ont pas eu accès à leurs récoltes. Certains qui courraient les risques de franchir leurs
champs malgré l’insécurité ont réussi à obtenir des très faibles récoltes, dans la mesure où une bonne partie fût récoltée par
les groupes armés. Les ménages qui n’ont pas récolté font recours aux stratégies d’adaptation en lien avec des nouvelles
opportunités économiques à leurs lieux de déplacement à la recherche des nouvelles sources de revenu. Pour certains
ménages, il y a du travail journalier agricole et non agricole, la vente de bois de chauffe et charbon de bois et le vente des
fruits, et pour d’autres, la vente du petit bétail pour ceux qui ont eu à se déplacer avec leurs animaux. A ces stratégies
s’ajoutent la réduction du nombre de repas et des portions alimentaires, la consommation des aliments moins chers et moins
préférés. De ce fait, les populations des zones de conflits qui connaissent des déficits de consommation alimentaire, à savoir
les provinces de l’Ituri, Nord-Kivu, Sud-Kivu, Kasaï, Maniema et Tanganyika, sont en Crise (Phase 3 de l’IPC). Dans les zones

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de santé de Mugwalu et Drodro de Djugu et Rwanguba, Bambo, et Mweso à Rutshuru, les plus impactées par les conflits et
où une grande proportion des PDIs n’ont pas pu cultiver, une augmentation de la population en Urgence (Phase 4 de l’IPC)
est signalée, caractérisée par une augmentation de signes visibles de malnutrition et l’usage des stratégies d’urgence
notamment la mendicité et passer des jours entiers sans rien manger.

Les zones avec une consommation alimentaire minimalement adéquate et qui ont conduit une campagne agricole quasi
complète (Maniema, Haut-Katanga, région du Kasaï et Lwalaba) restent en Stress (Phase 2 de l’IPC). Ces zones pour la plupart
sont en situation post-conflit et ont connu une bonne reprise des activités agricoles, avec une dépendance à leur propre
production. Les provinces du nord (Bas-Uele, Haut-Uele et Tshopo) restent en Minimale (Phase 1 de l’IPC).

CALENDRIER SAISONNIER POUR UNE ANNÉE TYPIQUE

Source : FEWS NET

Suppositions
Le scénario le plus probable de la sécurité alimentaire de févier à septembre 2023 se base sur des suppositions fondamentales
suivantes, par rapport à l’évolution du contexte national :

• Conflits et mouvements des populations dans l’Ituri, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu : En dépit de la légère baisse des
attaques en Ituri en ce début 2023, le niveau des violences et décès resteront à leur plus haut niveau depuis 2019, et une
baisse significative en 2023 est peu probable.
Au Nord-Kivu, malgré l’intention déclarée du M23 de se retirer des territoires conquis, il est probable qu’il continuera à
tenter de consolider les gains territoriaux pendant toute période de scénario. Les incidents pourront augmenter en
nombre et en intensité, érodant la confiance entre les autorités de la RDC et le Rwanda, ce qui compliquerait davantage
le processus de recherche de solution de paix. La poursuite des opérations du M23 devrait entraîner de nouveaux
déplacements de population. Toutefois, avec l’arrivée des forces de l’EEAC en mi-2023, M23 aura probablement des
difficultés pour continuer sa progression sur d’autres territoires.

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Dans le Sud-Kivu, les tendances actuelles de la crise de Figure 2. National Multi-Model Ensemble Forecast (NMME)
Banyamulenge dans les hauts plateaux de Minembwe à pour mars-mai 2023
Fizi font qu’il est fort probable que le nombre d'incidents
et de décès associés continue d’augmenter au fil de
l'année, à l'instar de ceux observées au second semestre
2022. Ce niveau de conflit restera inchangé jusqu'en mai
2023.
Dans les provinces du Tanganyika, du Kasaï, du Kasaï-
Central et du Maniema, les conflits intercommunautaires
en cours se poursuivront de manière sporadique avec une
intensité qui devrait rester similaire à celle des derniers
mois. Aussi, le conflit entre les autochtones Teke et les
non-autochtones Yaka dans le territoire de Kwamouth
(province du Mai-Ndombe) pourrait continuer à impacter
la reprise de la saison agricole et perturber les moyens de
subsistance.
• Les violences pré-électorales : Face à la tâche d'organiser
des élections dans un pays qui compte plus de 100
millions d’habitants, une histoire nationale d'élections
retardées, l'absence de consensus entre les parties Source: USGS/FEWS NET
prenantes et un système de partis fragilisé à la suite de la
réorganisation de la majorité parlementaire, il est probable que les élections soient retardées. Les tensions politiques
seront probablement fortes, engendrant des manifestations toute au long du période d’analyse.
• Conditions agro climatologiques : Une grande partie de l'Afrique australe, y compris la partie sud de la RDC, devrait
connaître des accumulations de précipitations proches de la normale jusqu'en mai selon les prévisions dynamiques à ce
jour (Figure 2). Cela soutiendra la production agricole pendant le cycle culturale. Des inondations soudaines dans
certaines zones puissent se produire, et en cas de pluies torrentielles, on s’attend à des inondations régionalisées en
Uvira, Fizi et Kalemie.
Par ailleurs, dans la partie ouest du pays, malgré les prévisions inferieures à la normale, le fleuve Congo dans sa partie
ouest pourrait s’attendre à des inondations en aval.
• Conjoncture économique : Avec les données de la Banque Centrale Congolaise (BCC), l’inflation du Franc congolais de
près de 4,46 pour cent sur le marché parallèle observée en 2022 constituera un risque susceptible d’influencer la
conjoncture économique actuelle. Les fluctuations de l'inflation en RDC sont liées au fonctionnement du marché
mondial. Par conséquent, le mouvement des tendances mondiales aura probablement des impacts parallèles en RDC.
• Fonctionnement des marchés et prix des denrées alimentaires : Selon les analyses marché de FEWS NET faites en janvier
2023, les prix de principaux produits alimentaires locaux suivront leurs tendances saisonnières, mais resteront au-dessus
de leurs moyennes quinquennales. Par ailleurs, les prix des principales denrées alimentaires importées, comme le riz et
l'huile végétale, resteront stables sur les trois prochains mois, mais élevés (11 pour cent) comparativement à l’année
2022 et à la moyenne des cinq dernières années.
• Main d’œuvre temporaires et salariés : La stabilité de prix des matières premières sur le marché international devra
favoriser la stabilité de l’économie nationale qui dépend à plus de 65 pour cent des exportations de ses matières
premières. Dans cette situation, les ménages pauvres pourraient s’orienter vers ces nouvelles opportunités économiques
dans les exploitations minières artisanales et dans les travaux domestiques.
• Travaux temporaires agricoles : Sur la base des tendances récentes sur les mouvements des populations dans les zones
de conflits qui font plusieurs déplacés en cette période de reprise de production agricole, les ménages pauvres dans les
provinces de l’Ituri, Nord-Kivu et Sud-Kivu, offriront une main d’œuvre bon marché à la portée des moyens et nantis,
surtout pendant cette période de faibles récoltes et pendant la prochaine saison culturale saison B.

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• Assistance humanitaire : La couverture de l’assistance humanitaire restera probablement faible dans la plupart des zones
ciblées. Compte tenu la volatilité des affrontements dans l’est du pays, l’accès humanitaire restera un défi et pourra
réduire de façon sporadique.
• Restrictions transfrontalières : Au 5 janvier 2023, le gouvernement Burundais vient de mettre fin à l’exigence du test
rapide COVID-19 pour entrer au Burundi, alors que les frontières avec l’Angola ont été réouvertes depuis le mois de juillet
2022. Ces mesures permettront aux petits commerçants de continuer de reprendre de leurs activités. On pourrait
s’attendre à une hausse du niveau des flux transfrontaliers informels qui vont se traduire par des volumes d’échanges de
plus en plus importants. En outre ; la déclaration de la fin de l’épidémie d’Ebola en Ouganda rassure sur la fluidité des
trafics avec la RDC.
Résultats les plus probables de la sécurité alimentaire
De février à mai 2023 : Cette première période de scenario sera marquée par une période post-récoltes de deux mois (février
et mars) et la période de la petite soudure de la saison B (avril et mai) dans le nord-est et centre-est du pays. Entre février et
mars, les ménages procèderont à la vente des produits agricoles pour recréer leurs revenus et dépendront plus de leur propre
production pour se procurer les aliments. Toutefois, avec les productions en dessous de la moyenne, et le manque d’accès
aux récoltes de saison A dans les zones de conflit de l’Ituri, Nord-Kivu et Sud-Kivu, les ménages ne seront pas capables de
faire face à leurs besoins alimentaires. En plus, les déplacements de populations et l’accessibilité limitée aux champs pourront
réduire la participation des ménages à la saison agricole B de mars à juin. Certaines zones vont rester en Crise (Phase 3 de
l’IPC), notamment Ituri, Nord-Kivu, Sud-Kivu et Tanganyika. Dans quelques zones de santé des territoires de Djugu et
Rutshuru, les plus impactées par les conflits et où une grande proportion des PDIs n’ont pas pu cultiver, une augmentation
de la population en Urgence (Phase 4 de l’IPC) est anticipé au cours de la période de projection, caractérisée par une
augmentation de signes visibles de malnutrition et l’usage des stratégies d’urgence notamment la mendicité et le vol des
récoltes dans les champs. Le centre-sud et le sud-est, principalement Maniema, Sud-Kivu, et ex-Katanga, qui arrivent à couvrir
leurs besoins alimentaires minimaux et qui ont connu des saisons agricoles complètes évolueraient en Stress (Phase 2 de
l’IPC). Les provinces de Haut-Uele, Bas-Uélé, Tshopo et une partie du Maniema qui évoluent dans un contexte de paix, sans
accuser des déficits alimentaires, resteront en Minimale (Phase 1 de l’IPC).

De juin à septembre 2023 : Comme pour la précédente période de scenario, les zones nord-est et centre-est connaitront
successivement une période post-récoltes de deux mois (juin et juillet). Les récoltes de juin permettront aux ménages
d’améliorer leur consommation alimentaire pour le temps que dureront leurs stocks alimentaires. Ces ménages qui auront
amélioré leurs revenus par la vente des produits de récolte dépendront de leur propre production. Les stocks des ménages
de la saison agricole B s’épuiseront tôt, dès le mois d’aout dans un contexte de faibles revenus. A partir du mois d’aout, et
avec un épuisement quasi total des réserves, la dépendance au marché sera le mode d’approvisionnement de la plupart des
ménages. Les zones de l’est qui connaissent les effets du conflit prolongé resteront en Crise (Phase 3 de l’IPC), notamment
l’Ituri (Irumu et Djugu), le Sud-Kivu (Uvira, Fizi) et le Nord-Kivu (Beni, Nyiragongo, Rutshuru et Masisi). Les provinces de
Lomami, Sankuru, Kasaï oriental, Kasaï, une partie du Maniema et l’ex-Katanga qui essayent de se stabiliser, et où les ménages
ont un meilleur accès à la nourriture, aux revenus et une consommation alimentaire minimalement adéquate, seront en
situation de Stress (Phase 2 de l’IPC). Les provinces de Haut-Uele, Bas-Uélé, Tshopo qui n’ont pas connu des chocs importants
et qui n’accusent pas de déficit de consommation alimentaire restera en Minimale (Phase 1 de l’IPC).

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Evènements qui pourraient changer le scenario


Événements possibles au cours des huit mois à venir qui pourraient changer le scénario le plus probable.
Zones Evénements Impact sur les conditions de la sécurité alimentaire
National Grandes perturbations des Ceci limiterait la production agricole normale et réduira les flux des
pluies dans les zones de l’est produits locaux dans le pays. Une augmentation de zones en Crise
et de l’ouest. (Phase 3 de l’IPC) sera probable, dans les zones de déficits
pluviométriques.

Détérioration de la situation On pourrait s’attendre à un embrasement général qui sera marqué par
politique du pays, à l’approche des manifestations publiques, qui pourront immobiliser les l'activités
des prochaines élections économiques dans les centres urbains, notamment les sources de
revenus liés au transport, petits commerces, etc. Cela pourra conduire à
l’augmentation probable de population en Stress (Phase 2 de l’IPC) et
Crise (Phase 3 de l’IPC) dans les centres urbains.

Hausse de prix de carburant Une hausse des coûts de transport entraînerait une augmentation des
prix des principales denrées alimentaires et la diminution de l’accès aux
aliments importés pour les ménages pauvres.

Ituri, Nord Kivu, Sud La baisse d’intensité des Reduction des mouvements des populations tout en augmentant la
Kivu, Tanganyika, conflits armées participation aux activités agricoles qui en fin de campagne
Maniema, Kasaï amélioreraient l’accès alimentaire et les sources de revenus des
ménages pauvres.

ZONE DE PREOCCUPATION
Nord-Kivu/Territoire de Rutshuru/CD11 (Figure 1)
Situation actuelle
Conflits et mouvement des populations : Il est signalé dans les Figure 3. Carte de référence pour la zone concernée :
territoires de Rutshuru et Nyiragongo, la poursuite Territoire de Rutshuru, CD11
d’affrontements armés, entrainant des mouvements des
populations. Actuellement, une stabilité sur l’axe Sud
(Nyiragongo) est observée avec la cristallisation des positions
vers Kibumba/Buhumba (prise de position des Forces de l’EAC),
l’annonce de retrait du M23 (Kibumba/Buhumba) en décembre
2022, et Camp de Rumangabo en janvier. On enregistre des
nouveaux déplacements des populations dans les zones de
conflits. Des destructions d'infrastructures sociales de base
(écoles, centres de santé, routes/ponts…) et plusieurs incidents
de protection (extorsions, pillages, viols, coups et blessures,
travaux forcés) dans la Chefferie de Bwisha sont également
enregistrées. Selon OCHA, le territoire compte 602,000
personnes déplacées et 154,593 personnes retournées
officiellement enregistrés dans cette zone depuis le mois de
février 2023. Plus de 7,000 personnes ont trouvé refuge en
Ouganda, selon le HCR. La majorité des personnes déplacées se
trouve dans le territoire de Nyiragongo (233,000 personnes)
dont plus de 97 pour cent sont logés dans des églises, écoles,
Source: FEWS NET

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stades et des sites improvisés tandis qu’une faible proportion Figure 4. Projection de prix de la farine de maïs à Goma
(15 pour cent) vit dans les familles d’accueil.
3,000
Conditions agro climatologiques : La zone de moyen
d’existence CD11 (Sols agricole volcaniques de Rutshuru) a
bénéficié des conditions agro climatiques favorables pour un
cycle cultural complet, sur un sol volcanique très riche en 2,000

CDF/kg
minéraux. Les vivriers comme le haricot, le maïs, le manioc, la
pomme de terre et le sorgho sont les principales cultures
pratiquées au cours de la saison agricole A. Sur certains
1,000
endroits du territoire, notamment dans la partie nord-ouest, on
a observé une pluviométrie excessive depuis le démarrage de
la saison agricole A, laquelle a provoqué des inondations et
pertes des sols et cultures pratiquées sur les flancs des 0

mars…
août…

févr
janv

août
avr
mai
sept

nov

nov
déc

sept

déc
oct

juin
juil

oct
montagnes.
5-year average 2021/22
Progrès saisonnier : Le territoire de Rutshuru dans la CD11 2022/23 observed 2022/23 projection
(Sols agricoles volcaniques de Rutshuru) est en fin de récolte de Source : FEWS NET
la saison A qui a débuté en mi-décembre 2022 et qui va s’étendre jusqu’en fin février 2023. Cette saison agricole qui a démarré
en période de conflits a connu une faible participation des ménages agricoles du fait des déplacements massifs et continus
observés depuis le début de la saison en septembre 2022. Pour les ménages qui ont eu la chance de cultiver, les récoltes ont
été perdus avec la reprise des affrontements dans la zone à la suite des déplacements et à l’abandon des cultures. Certains
ménages qui ont pu récolter disposent des faibles stocks en lien avec la faible production. Dans les parties occupées par les
rebelles, on observe les pillages des cultures caractérisés par des récoltes précoces.

Etant donné la présence des déplacés et des retournés dans la zone, à la suite des conflits entre FARDC et Mouvement du 23
mars (M23), les populations des plusieurs localités occupées se sont déplacées alors qu’elles avaient déjà procédé au semis
des vivriers. Ainsi, la plupart de déplacée dans cette zone (OCHA janvier 2023) n’ont donc pas eu accès à leurs récoltes.
Globalement les récoltes en cours sont nettement inférieures à la saison précédente, avec une baisse estimée à 50 pour cent,
et à la moyenne des cinq dernières années.

Moyens d’existence et accès à la terre : En territoire de Rutshuru, l’accès aux terres agricoles restent l’apanage des grands
concessionnaires terriens (Chefferies). Les paysans n’ont pas assez de terre pour cultiver du fait des difficultés pour son
acquisition. Les conflits fonciers se terminent souvent par des violents affrontements. Ceci reste une grande préoccupation
dans le secteur agricole au niveau de Rutshuru. A ce jour, l’accès à la terre se fait sous le principe de location auprès des
grands propriétaires de terre à raison de 400 dollars par hectare et par saison culturale.

Fonctionnement des marchés et prix alimentaires : Le marché local de Rutshuru se voit perturbé avec la forte demande issue
de la présence des déplacés dans le territoire et également à Nyiragongo territoire dans un contexte des faibles disponibilités
alimentaires face à une demande croissante.

Cette perturbation des marchés locaux est occasionnée par l’instabilité due à l’insécurité que connaît ce territoire depuis la
résurgence du M23 en mars 2022, au mauvais état des routes de desserte agricole, aux pillages des cultures dans les zones
occupées, à l’abandon des champs à cause des conflits et à la fermeture des axes routiers Goma-Rutshuru et Rutshuru-Lubero.
Les producteurs passent par l’Ouganda puis par le Rwanda pour faire arriver leur production à Goma.

FEWS NET ne dispose pas de donnees sur des prix a Rutshuru, du faite de l’inaccessibilite de la zone. Toutefois, les prix de la
plupart des produits de base sont au-dessus de la moyenne sur le marche de Goma, qui approvisionne celui de Rutshuru.
Compte tenu des hausses du cout de transport, ainsi que la volatilite de la situation, il est probable que les prix des aliments
a Rutshuru soient au-dessus de celles de Goma (Figure 4).

Disponibilité de la main d’œuvre agricole : En cette période des conflits, l'offre et la demande de la main-d'œuvre est en
déséquilibre dans le territoire de Rutshuru. Le coût de la main d’œuvre/travail journalier agricole qui était à environ 5 000
CDF avant la crise, revient actuellement à 2 500FC, pour une matinée de travail, soit une baisse de moitié. Cette baisse du
taux journalier se justifie également par la grande disponibilité de la main d’œuvre fournie par les déplacés qui continuent

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d’arriver. L’offre reste donc grande face à une demande en baisse, malgré la période de récolte. La main d’œuvre journalière
reste la principale source des revenus pour les déplacés vivant sur les sites.

Elevage : Le conflit actuel du M23 dans le Rutshuru a occasionné une baisse sensible de la production animale. Les populations
en fuite des exactions faites par les belligérants se sont parfois déplacées avec leurs bétails dans les zones de déplacement
notamment dans les camps. Cela étant, les bétails ne reçoivent pas les soins vétérinaires, vivent en promiscuité avec les êtres
humains, sont abattus dans les camps de déplacés sans aucune inspection vétérinaire.

Situation nutritionnelle : La situation nutritionnelle dans cette zone n’est pas bien connue car aucune enquête n’a été
effectuée récemment. Les dernières enquêtes nutritionnelles SMART datent de juillet 2020 dans la zone de santé de Rutshuru
et Mbinza. Cependant, l’évolution des données sur les admissions des cas de malnutrition dans les structures de santé montre
une augmentation importante des cas de 244 pour cent dans le seul territoire de Rutshuru, dans la période de janvier à
octobre 2022 période qui coïncide avec la reprise des hostilités.

L’épidémie de Choléra : Le cholera qui sévit actuellement dans les sites de déplacement pourrait aggraver cette situation
nutritionnelle déjà précaire. Selon OCHA, environs 600 cas de nouvelle contamination sont enregistrés chaque jour malgré la
prise en charge effectuée par les humanitaires sur terrain. En date du 15 janvier dernière, plus de 1193 cas été déjà notifiés.
La ville de Goma voisine des sites de déplacés connait déjà des cas de choléra.

Assistance Humanitaire : L’assistance humanitaire reste globalement inferieure aux besoins sur terrain. A titre d’exemple,
sur les 77 Millions de dollars attendus en 2022, seulement 27 millions ont été mobilisés (soit 35%) pour la réponse
humanitaire aux personnes en situation de déplacement, à la suite de la crise de la rébellion du M23. La réponse à la crise se
concentre actuellement dans la zone de santé de Nyiragongo, Kayna et Karisimbi. Toutefois, cette assistance délivrée couvre
moins de 10 pour cent de la population totale des territoires de Rutshuru et Nyiragongo, qui a reçu un nombre important des
déplacés.

Consommation alimentaire : Tenant compte du contexte humanitaire actuel, et des campagnes agricoles successives moins
performantes, les ménages éprouvent des difficultés pour se nourrir. En effet, les récoltes de la saison agricole A, quasi
inexistante, du fait des déplacements des ménages agricoles en plein cycle cultural, n’a pas permis aux ménages de compter
sur leur propre production. La baisse des stocks, la hausse de prix des denrées, et la baisse des revenus sont des contraintes
à l’accès a l’alimentation alors que les ménages sont plus dépendants des marchés dans un contexte de faible pouvoir d'achat
et des difficultés d’accès à la terre. L’assistance humanitaire est restée déterminante pour les ménages qui n’ont pas pu
cultiver, avec un important déficit de consommation, souvent comblé par l’apport alimentaire des humanitaires. On note
également l’usage des stratégies d’épargne (consommer les aliments moins préférés et moins chers) auprès de certains
ménages de la zone et surtout la dépendance aux familles d’accueil et l’assistance alimentaire reçue des partenaires
humanitaires.

Changement dans les moyens d’existence : Habituellement, les ménages du territoire sont essentiellement agriculteurs.
Etant donné les conflits qui sévissent dans la zone, l’accès des ménages aux sources de revenu typiques reste un défi majeur.
L’accès à la terre, déjà difficile dans le passé, devient encore plus compliqué avec les mouvements des populations. Les
revenus actuels des ménages pauvres et déplacés proviennent essentiellement de la vente de produits de cueillettes (bois et
charbon de bois), mais aussi de la main d’œuvre journalière auprès des ménages moyens et nantis. Ils procèdent aussi aux
ventes précoces de leurs animaux pour accéder aux aliments.

Suppositions
Le scénario le plus probable dans le territoire de Rutshuru, de février à septembre 2023 est basé sur les hypothèses
suivantes:
• Production agricole : Bien que la pluviométrie ait été favorable dans ce territoire pour cette saison agricole A 2022/2023,
la résurgence généralisée des violences dans le territoire de Rutshuru a conduit à une faible participation des ménages
aux activités de récoltes de la saison A. L’accès aux semences pour les ménages agricoles restera un défi notamment
pour la prochaine saison agricole B, du fait des très faibles récoltes de la saison précédente. Cette zone pourra de façon
consécutive, connaitre des récoltes inférieures à la normale toute au long du période de scenario.
• Fonctionnement des marchés et prix des denrées : Compte tenu de la production agricole inférieure à la moyenne qui
pourra subvenir dans la zone CD11 (Sols agricoles volcaniques de Rutshuru) du fait de l’insécurité persistante, au

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RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à septembre 2023

déplacement massif des populations, et à la fermeture des axes routiers Goma-Rutshuru et Rutshuru -Lubero, les prix
des denrées de base seront en hausse tout au long de la période de projection et resteront supérieurs à la moyenne
quinquennale avec des fluctuations atypiques comparées à l’année précédente, en dépit des courtes périodes de baisses
temporaires à observer lors des premières récoltes de la saison B en juin 2023.
• Petit commerce : Etant donné le contrôle des frontières de Bunagana, les menaces de contrôle des autres postes
frontaliers comme Ishasha, Kasindi par le M23, les activités informelles liées au petit commerce transfrontalier se verront
fortement réduites avec une baisse drastique du niveau des revenus des ménages riverains et bien d’autres vivant dans
cette activité, qui seront profondément affectés, ne pouvant accéder à leurs moyens d’existence.
• Assistance humanitaire : Le plan de réponse humanitaire de la crise Rutshuru - Nyiragongo - Lubero - Goma de OCHA
n’avait reçu que 37 pour cent des fonds requis (soit 27 millions sur plus de 77 millions de dollars américains attendus)
pour assister les personnes dans le besoin alors que le conflit continue ainsi que les mouvements des populations. Dans
ce contexte de manque de fonds, les acteurs humanitaires ne seront pas en mesure d’apporter une assistance suffisante
aux ménages en déplacement et aux familles d’accueil. Ceci conduirait à des situations de plus en plus sévères
d’insécurité alimentaire dans les zones en crise.
Résultats les plus probables de la sécurité alimentaire
Février à mai 2023 : Cette période connaitra le semis (mars, avril) et le début de récoltes vertes de la saison agricole B en fin
mai 2021. Cependant, vu qu’une part importante de la population agricole déplacée ne sera pas de retour, on assistera à une
production inférieure à la normale pour les cultures vivrières. D’autres ménages ne pourront pas avoir accès aux semences
après avoir perdu la saison agricole précédente à la suite des déplacements. L’état des infrastructures routières et l’activisme
des groupes armés ne pourra plus favoriser les flux commerciaux. Ainsi donc, le territoire restera en phase de Crise (Phase 3
de l’IPC). Cependant, on pourra connaitre une augmentation de populations qui connaissent d'importants déficits de
consommation alimentaire et se retrouveront en phase d’Urgence (Phase 4 de l’IPC) dans les zones de santé de Rwanguba,
Bambo du fait de la liquidation totale de moyens d’existences dans ces zones qui connaissent les violences depuis déjà plus
de 8 mois.

Juin à septembre 2023 : C’est la période post- récoltes de deux mois (juin et juillet) et le début de la grande de soudure dans
le territoire de Rutshuru. La situation des ménages sur l’ensemble de la zone sera de plus en plus difficile avec un accès limité
à la nourriture du fait de l’épuisement précoce des stocks prévu en juillet. La disponibilité alimentaire dans le territoire sera
moindre vu l’état des infrastructures routières et des attaques des groupes armés qui pourraient éventuellement continuer.
De ce fait, la consommation alimentaire pourra se détériorer et les ménages pourront se rabattre aux aliments moins coûteux
et moins préférés voire dépendre de la solidarité des autres ménages. Ainsi donc, la situation de la sécurité alimentaire dans
ce territoire restera en Crise (Phase 3 de l’IPC) avec une frange importante des personnes en phase d’Urgence (phase 4 de
l’IPC).

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RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à septembre 2023

ZONE DE PREOCCUPATION
Sud Kivu/Territoire de Fizi/CD03
Situation actuelle
Situation sécuritaire et mouvements des populations : Le Figure 5. Carte de référence pour la zone concernée :
territoire de Fizi est particulièrement touché par des conflits Territoire de Fizi, CD03
inter ethniques soutenus par les intérêts des puissances
régionales voisines. Plusieurs groupes armés d’auto-défense
communautaire Gumino, Twigwaneho de l’ethnie
Banyamulenge combattent les autres groupes de l’ethnie
Bembe, Rega, Fuliru et Nyindu. L’activisme de ces groupes
armés qui se battent entre eux d’une part et contre les FARDC
d’autres part a créé plusieurs vagues de déplacés. Hormis le
mouvement de la population, on assiste aussi à l’incendie des
maisons et destruction des champs, vol et pillages des bétails,
assassinats ciblés et bien d’autres différents incidents de
protection. OCHA estime à plus de 100,000 personnes
nouvellement déplacées dans le territoire de Fizi en décembre
2022. En outre, le territoire héberge plus de 50,000 réfugiés
Burundais. Ces refugies partagent les mêmes ressources avec
les populations autochtones.

Progrès saisonnier : Les hauts plateaux du Sud-Kivu est une


zone agropastorale qui appartient au bloc centre-est, et est
Source: FEWS NET
actuellement en pleine récolte de la saison agricole A.
Toutefois, une faible participation des ménages agricoles est
observée au cours de la saison A du fait du contexte actuel de conflit qui a limité l’accès aux champs et des glissements de
terres emblavées dans certaines localités autour de Minembwe. La production agricole, notamment celle des vivriers
comme le maïs et le haricot, reste donc en dessous de la moyenne. Les conditions agro climatiques sont restées favorables
pour un cycle cultural normal avec des précipitations excédentaires dans certaines localités. Ces pluies avaient détruit près
de 500 hectares de cultures maraîchères et vivrières dans cette zone.

Moyens d’existence et accès à la terre : Normalement, la vente des récoltes (haricot, manioc, mais, sorgho) constitut la
principale source de revenus des ménages, leur permettant un accès à la nourriture. Cette source est suivie par la vente des
produits d’élevage. Actuellement, les déplacés exécutent des travaux agricoles journaliers rémunérateurs, soit en espèce (ex:
0,5 ares pour 5,000 CDF ou 3 gobelets de « Guigoz », environ 2,5 kg de farine de manioc) alors qu’avant le conflit, le prix du
travail agricole journalier était de 10,000 CDF. L’accès à la terre payante reste un défi pour la plupart des petits producteurs,
qui doivent payer 10,000 CDF à 15,000 DCF pour une surface de 6,25 ares pour une saison culturale. La surpopulation dans
les villages entraîne la hausse de prix de location de la terre. L’accès des déplacés à la terre est difficile car il faut louer les
terres à exploiter alors que les ménages déplacés n’ont pas des moyens pour louer la terre.

Disponibilité de la main d’œuvre agricole : La densité de population (environ 100 hab/km²) dans la zone accessible à la suite
de l’insécurité constitue une contrainte limitant la superficie des terres cultivées et crée également un surplus de main-
d'œuvre. Toutefois, la demande en main d’œuvre reste limitée du fait de la baisse de superficies emblavées.

Fonctionnement des marchés et prix alimentaires : Dans un contexte de faible production, le territoire poursuit sa
dépendance aux importations à partir de la Tanzanie via le lac Tanganyika pour approvisionner les marchés locaux en produits
de base. Cette situation facilite aussi la disponibilité des vivres aux marchés, notamment pour les produits importés de
certains pays voisins comme le Burundi, la Tanzanie et la Zambie. Les prix de denrées de base se situent au-dessus de la
moyenne en raison de pression constante de la demande consécutive à une faible production, a la dépendance aux
importations ainsi qu’au mouvement de la population (Figure 6). Par exemple, bien que le prix de la farine de maïs à Uvira,
principale marché d’approvisionnement des marchés secondaires de la zone, connaitra des variations saisonnières typiques,
l’offre restera inferieure à la demande pendant la période de scenario, maintenant les prix au-dessus de leur niveau typique.

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RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à septembre 2023

Elevage : Les hauts plateaux du Sud-Kivu est une zone pastorale Figure 6. Projection de prix de la farine de maïs à Uvira.
où les ménages vivent de l'élevage notamment les gros bétails,
les petits bétails et la volaille. Cependant, les exactions des
milices armées occasionnent des vols de bétail surtout lors des
affrontements intercommunautaires. Les autres contraintes de
cette activité sont notamment le manque des produits
vétérinaires pour les animaux. A cela s’ajoute des épizooties
comme, PPCB (péri pneumonie contagieuse bovine), PPR (peste
des petits ruminants), PPA (peste porcine africaine) et la peste
bovine. Notons aussi que la zone manque des moyens de
transformation des produits d’élevage.

Assistance Humanitaire : A la suite des problèmes d’accès


physique et sécuritaires, les interventions en sécurité Source : FEWS NET
alimentaire, ne sont organisées que vers les zones de santé
accessibles de Fizi et Nundu et qui sont considérés comme zones d’accueil des déplacés en provenance de hauts plateaux.
Selon le profil humanitaire de OCHA, de janvier à décembre 2022, les réalisations n’ont permis de couvrir jusqu’à 60 pour
cent des besoins humanitaires dans le territoire de Fizi.

Sécurité alimentaire : Elle reste préoccupante dans ce territoire. Les disponibilités alimentaires baissent d’année en année
depuis le début des conflits en 2020. Les principales sources de revenus pour les ménages pauvres de la zone sont la vente
des récoltes, la main d'œuvre auprès des nantis, la vente de bois, le petit commerce. Actuellement, toutes ces sources de
revenus sont perturbées avec les conflits en cours qui font baisser leurs revenus et réduisent l’accès des ménages aux aliments
provenant jadis de leur propre production. Les productions agropastorales restent faibles. Dans les zones de provenance, des
champs ont été abandonnés par les déplacés et des dizaines de bétails emportés par les groupes armés. Les déplacés
dépendent essentiellement de la solidarité des familles d’accueils, et de la rémittence et d’autres formes d’entraide, à travers
les humanitaires.

Consommation alimentaire : Les facteurs cités ci-hauts ne permettent pas aux ménages pour se procurer la nourriture. En
effet, les stocks de la saison agricole A en cours, quasi inexistante, la hausse des prix et l’insécurité, ne permettent pas aux
ménages de faire face à leurs besoins alimentaires. Selon les observations sur le terrain, le nombre de repas par jour est de
un ou zéro. Ce repas est essentiellement constitué de la pâte de la farine de manioc (fufu) et des feuilles. Les ménages sont
obligés de faire recours à quelques stratégies d’adaptation pour accéder à la nourriture, notamment les travaux temporaires
auprès des autochtones, à des prix dérisoires et inférieurs au prix d’avant la crise.

Changement dans les moyens d’existence : Essentiellement agriculteurs (65 pour cent) et éleveurs (35 pour cent) les
ménages des hauts-plateaux, face aux chocs subits, connaissent des limitations d’accès voire des pertes de leurs sources de
revenus. Ceux des éleveurs qui ont perdu la totalité des bêtes se sont convertis en agriculteurs.

Stratégies d’adaptation des ménages : Pour combler le déficit de consommation, les ménages font recours à quelques
stratégies d’adaptation comme « Travailler contre de l'argent / de la nourriture, Diminuer le nombre de repas par jour / les
quantités, Emprunter de l'argent ou de la nourriture, Consommer les aliments les moins préférés ». Les autres ménages
procèdent à la récolte précoce des cultures et la vente de bétails à bas prix.

Suppositions
Le scénario le plus probable dans le territoire de Fizi, de février à septembre 2023 est basé sur les hypothèses suivantes :
• Production agricole : Tenant compte des anomalies dans les années antérieures marquées par une mauvaise répartition
des pluies avec des séquences des précipitations excessives causant des inondations dans le territoire de Fizi, on
s’attendrait à une situation similaire qui conduirait à une production agricole inferieure à la moyenne. Cette situation qui
se produit dans une région déficitaire et subissant une forte pression de la part des personnes déplacées et retournées
de toutes catégories, présage des difficultés d’accès à la nourriture dans le court terme, notamment pour les ménages
pauvres.

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RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à septembre 2023

• Conflits et mouvements des populations : Selon les informations de la récente mission interagence dans le territoire de
Fizi en janvier 2023, l’arrivée massive en plusieurs vagues des personnes déplacées dans certaines localités de zone de
la santé de Fizi est enregistrée. La plupart de ces ménages ont dû abandonner leurs récoltes, et dépendent du marché et
de l’assistance humanitaire pour la plupart de leur alimentation. La poursuite des affrontements entre différents groupes
armés d’une part et d’autre part entre les groupes armés et la coalition FARDC- armé Burundaise sur les hauts plateaux
de Minembwe, pourrait créer des mouvements des populations supplémentaires et encore réduire l’accès des ménages
aux champs.
• Fonctionnement des marchés et prix des denrées : Tenant compte de l’intégration des marchés dans le territoire de Fizi
et ceux marchés d’Uvira, les échanges inter frontaliers se portent bien, et vont se poursuivre sans restriction
administrative qui bloquerait le commerce régional. Ainsi, la zone connaitra une évolution typique des prix pendant la
période de la petite soudure prochaine. A partir de mois d’aout jusqu’en novembre 2023, les prix subiront une allure
ascendante allant jusqu’à une moyenne de 10 pour cent de hausse et pourront se stabiliser voire baisser à partir de la
deuxième quinzaine du mois de décembre 2023 à cause des récoltes vertes prévues en cette période du cycle cultural.
Toutefois, les prix resteront significativement au-dessus de leur moyenne quinquennale.
• Moyens d’existence des populations : Au cours de cette période, dans la mesure où beaucoup des ménages en
déplacement n’ont pas pu cultiver leurs champs, les ménages pauvres s’adonneront plus aux travaux temporaires tant
agricoles que domestiques. La priorité sera donnée aux dépenses alimentaires. L’aide alimentaire sera déterminante et
les ménages pourront rencontrer des difficultés pour faire face aux dépenses scolaires et de santé.
• Disponibilité de la main d’œuvre agricole et non agricole : Etant donné la présence des déplacés n’ayant pas accéder
aux terres au cours de la dernière saison agricole et la présence des refugies Burundais se trouvant dans les camps, la
main d’œuvre agricole devra être bon marché pour les moyens et les nantis de la zone, dans les travaux de récolte de la
saison A et de la préparation de la prochaine saison B en mars 2022.
• Assistance Humanitaire : La couverture de ces interventions humanitaires dans le territoire de Fizi devra continuer à
rester faible. Cette situation pourra exacerber la situation des ménages en déplacement et des ménages retournés qui
comptent beaucoup sur l’assistance humanitaire pour améliorer leur sécurité alimentaire et conditions de vie.
Résultats les plus probables de la sécurité alimentaire
Février à mai 2023 : Cette période connaitra le semis en mars- avril et le début des récoltes vertes de la saison agricole B en
fin mai 2022. Cependant, vu qu’une partie importante de la population agricole déplacée ne sera pas de retour, on assistera
à une production inférieure à la normale pour les cultures vivrières. Etant donné la petite soudure de la saison B précoce qui
est attendue fin mars dans la zone, on pourra s’attendre à une détérioration de la consommation alimentaire des ménages
en cette période qui sera marquée par un déficit modéré. Les ménages pauvres et déplacées de la zone subiront une
dépendance accrue au marché pour leur consommation alimentaire. Compte tenu des activités de moyens d’existence qui
sont également perturbés par ces conflits, leur accès au marché sera réduit, et en l’absence d’assistance alimentaire, ils
devront faire recours à des stratégies négatives, telles que la vente d’actifs ou la diminution du nombre de repas pour accéder
à la nourriture et ces ménages seront en Crise (Phase 3 de l’IPC).

Juin à septembre 2023 : Durant la deuxième période du scénario, les ménages seront dans la période de production agricole
notamment en juin. Toutefois, la production agricole devra rester inférieure à la normale au vu de la situation sécuritaire sur
terrain. Durant la période d’aout-septembre, les ménages pourront assister aux effets de la période de soudure précoce vu
le niveau de leurs stocks qui seront inférieurs à la normale. Certaines stratégies de survie de d’urgence pourront être utilisées.
Ainsi, cette zone restera en situation d’insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC).

Citation recommandée : FEWS NET. RDC Perspectives sur la sécurité alimentaire Février à Septembre 2023 : Production
agricole des saisons en baisses consécutives dans les zones de conflits actifs, 2023.

A PROPOS DE L’ÉLABORATION DE SCENARIOS


Afin d’estimer les résultats de la sécurité alimentaire pour les prochains huit mois, FEWS NET développe les suppositions de base
concernant les événements possible, leurs effets, et les réponses probables des divers acteurs. FEWS NET fait ses analyses basées sur
ces suppositions dans le contexte des conditions actuelles et les moyens d’existence locaux pour développer des scénarios estimant les
résultats de la sécurité alimentaire. D’habitude, FEWS NET prévient du scénario le plus probable. Pour en savoir plus cliquez ici.

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